> r *s HARVARD UNIVERSITY LIBRARY OF THE Museum of Comparative Zoology ■^•:- DEPOSITED.IN THE LIBRARY^OF THE .iOLOGICAL LABORATORIES I ( (. r, /; n ARCHIVES DE BIOLOGIE. .^^ ^ ^ ARCHIVES DE BIOLOGIE PIBLIEES PAR Edouard VAN BENEDEN , PROFESSEUR A LLMVERSITÉ DE LIEGE, et Charles VAN BAMBEKE, PROFESSEUR A l'uMVERSITÉ DE GAND. TOME I. 6ÂND & LEIPZIG, Librairie GLEMM, H. ENGELCKE, Suc^ PARIS, G MASSOJN", éditeur. 120, Boulevard S'- Germain. 1880 TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES. Premier fascicule. Pages. Physiologie des muscles et des nerfs du Homard, par Fredericq et G. Vandevelde 1 ERRATA. Fascicule I. — Travail de M. Julin. Pages 75-136. Partout dans le texte (pi. I) se rapporte à la (pi. II). - — (pi. Il) - (pi. III). Fascicule II. -- Travail de M. Mac Leod. Page 275. Au lieu de : Planche I, lisez : Planche VIII. — 276. — Planche II, lisez: Planche IX. Travail de M. Alex. Fœttinger. Page 302. Au lieu de : Explication de la planche VI , lisez : Explication de la planche X. Nouvelles reclicrcties sur i cmoryoïogie ues uanacicua. — *. j^,.*,,.- loppes ovulaires et transformations embryonnaires externes des Ufodèles (Tritons et Axolotl). — II. Fractionnement de l'œuf des Batraciens, par Ch. Van Bambeke (pi. XI, XII, XIII et XIV) . . Recherches sur le système nerveux des Arthropodes. — Constitution de l'anneau œsophagien, l^^^ partie, par Valére Liénard (pi. XV). 38d 305 TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES. Premier fascicule. Pages. Physiologie des muscles et des nerfs du Homard, par Fredericq et G. Vandevelde 1 Premières phases du développement du placenta maternel chez le Lapin, par Masqueltn et A. Swaen 25 Sur la structure de la Glande de Harder du Canard domestique, par Jules Mac Leod (pi. I) 54 Note sur le Squelette cartilagineux de la Glande de Harder du Mou- ton, par le Même 57 Un mot sur rirradiation, par J. Plateau 61 Nouvelles communications sur la cellule cartilagineuse vivante, par W. Schleicher 65 Recherches sur Tossification du Maxillaire inférieur et sur la consti- tution du système dentaire chez le Fœtus de la Balœnoptera ros- trata, par Charles JuLiN (pi. H et \\\) 75 Recherches sur l'embryologie des mammifères. — La formation des feuillets chez le Lapin, par Edouard Van Beneden (pi. IV, V et VI). 156 Bacillus Leprae. — Étude sur la Bactérie de la Lèpre, par Armauer Hansen (pi. VII) 225 Deuxiê»ie fascicule. Contribution à l'étude de la structure de l'ovaire des mammifères, par Jules Mac Leod (pL VIII et IX) 241 Sur les terminaisons des nerfs dans les ..muscles des insectes, par Alex. Foettinger (pi. X) 279 Nouvelles recherches sur l'embryologie des Batraciens. — I. Enve- loppes ovulaires et transformations embryonnaires externes des Urodèles (Tritons et Axolotl). — II. Fractionnement de l'œuf des Batraciens, par Ch. Van Bambeke (pi. XI, XII, XIII et XIV) . . 305 Recherches sur le système nerveux des Arthropodes. — Constitution de l'anneau œsophagien, l^"* partie, par Valére Liénard (pL XV). 384 Troisième fascicule. Pages. Note sur les noyaux des cellules végétales, par Melcfiior Treub (pi. XVI) 593 Sur Texistencc de l'Hémoglobine chez les Échinodermes, par Alex. FOETTINGER (pi. XVII) ^05 Recherches sur l'appareil excréteur des Trémalodes et des Cestoïdes, par Julien Fraipont (pi. XVIII et XIX) 4-15 Recherches sur les substances albuminoïdes du sérum sanguin, par Léon Fredericq 457 Contribution à la connaissance de Tovaire des mammifères, par Edouard Van Beneden (pi. XX et XXI) i75 Observations sur la maturation, la fécondation et la segmentation de l'œuf chez les Chéiroptères, par Edouard Van Beneden et Charles JuLiN (pi. XXII et XXIII) 554 I Quatrième fascicule. Notice de l'appareil venimeux des Aranéides, par Jules Mac Eeod (pi. XXIV) 573 Sur la glande gastrique du Nandou d'Amérique {Rhea americana), par Ed. Remouchamps (pi. XXV) 585 Recherches physiologiques sur le cœur des Crustacés décapodes, par Félix Plateau (pi. XXVI et XXVII) 595 De la régénération de la moelle épinière, par Masius (pi. XXVIII). . 696 Recherches sur le mode de disparition de la corde dorsale chez les Vertébrés supérieurs, par H. Leboucq (pi. XXIX) 718 Bruxelles — F. Hayez, imp. de l'Acad. royale A P.J. VAN BENEDEN, dont Leo decouçetteo d too haçaux dam ie doniamo dea ócienceó "L^ootoqimieó ont òi Lat- qeineni contribue' aux ptoqt&ó de La Jdioloqw. LES RÉDACTEURS INTRODUCTION. S'il fallait une preuve de l'importance croissante des études biologiques , on la trouverait dans le nombre considérable des ouvrages spéciaux.^ des revues et des journaux périodiques, où sont consignés les résultats obtenus dans cette branche des sciences naturelles. Parmi ces ouvrages, les uns embrassent la biologie dans son ensemble; les autres, poussant plus loin la division du travail, se limitent à une partie de son domaine. Partout, en Allemagne, en France, en Angleterre, en Hollande, en Suède et même en Norwége et en Suisse, de semblables recueils ont vu le jour, et partout leur apparition , répondant à un besoin réel, a été accueillie avec une faveur marquée. Jusqu'à présent, la Belgique n'a pas suivi l'exemple donné par les nations voisines. Rien pourtant ne justi- fie cette abstention. Aujourd'hui surtout que l'instal- lation de laboratoires dans nos Universités est venue donner une forte impulsion aux études pratiques, les matériaux nécessaires pour alimenter un journal de Biologie ne manquent pas; mais ils se trouvent épar- pillés dans divers recueils, notamment dans ceux de nos Sociétés savantes; là, perdus en quelque sorte au milieu d'une foule de publications hétérogènes, ils passeraient le plus souvent inaperçus, n'étaient les tirés à part dont II disposent les auteurs. Aussi la nécessité de réunir en un recueil spécial ces données éparses est-elle reconnue par tous ceux qui, dans notre pays, s'occupent de sciences biolo endiich asymplolisch der Abscisstnlinie anschliessen. » Archiv f, Anat. und Physiologie. 1850. — 8 — Ces expériences de secousses musculaires ont été répétées sur le muscle fléchisseur du doigt mobile de la pince. Le doigt muni d'un style écrivant servait lui-même de levier enregistreur; il clait maintenu tendu par un ressort à boudin, la pince étant solidement fixée à l'aide de liens sur la plaque du myographe. Le muscle élait excité, soit directement par des électrodes de platine passant à travers deux petits trous de la coque chitineusc de la pince, soit par l'intermédiaire du nerf. Les secousses obte- nues ainsi sont remarquables par la longue durée de la période d'énergie décroissante comparée à la brièveté de la période d'énergie croissante. La période d'énergie latente est la même que pour les muscles longs extraits du corps, c'est-à-dire un et demi centième de seconde, davantage si le muscle est fatigué. Les graphiques, figure % ont été obtenus en excitant le muscle fléchisseur de la pince par l'intermédiaire du nerf. L'intervalle ZB qui sépare le moment de la contraction du moment de l'exci- tation électrique représente donc ici la somme de deux temps : AT3 période d'énergie latente (cette longueur AB a été obtenue dans d'autres expériences. Le trait A est ajouté à la main dans la fig. 2) et AZ temps nécessaire à l'excitation pour se propager le long du nerf jusqu'au muscle. Tétanos musculaire. — Nous n'intercalons plus le cylindre dans le circuit électrique. Les fils de la pile se rendent directe- ment (avec clef intercalée) à la bobine inductrice du chariot de du Bois-Beymond. Nous les disposons de façon à ne pas employer l'interrupteur (marteau de Wagner). Les fils de la bobine induite Fig. 5. Secousses fusionnées. Myographe à ressort. Vitesse moyenne du, cylindre enregisirenr [vn tour en 7 V- secondes.) AB première secousse. BC deuxième secousse. Le graphique du temps offrait des traits trop fins et trop serres pour pouvoir être reproduits ici. Chaque centimètre de longueur du tracé représenté^ n à 18 centièmes de seconde. sont reliés aux excitateurs. Pour le reste, le muscle est disposé dans le myograplie comme pour l'étude des secousses. Si nous excitons le muscle par deux chocs d'induction successifs (en fermant et ouvrant à court intervalle le circuit primaire) espacés de façon que le second choc vienne atteindre le muscle avant qu'il ait terminé sa première secousse, les deux secousses se fusionneront et nous obtiendrons les graphiques de la figure 3. Si nous soumettons le muscle à une série de chocs conve- nablement espacés, dix en une seconde, par exemple, le style inscrira ces dix secousses, mais combinées de façon à donner une ligne ondulée. Augmentons le nombre des secousses; employons à cet effet, non la fermeture et l'ouverture à l'aide de la clef, mais le trembleur de Wagner du chariot de du Bois-Reymond, les secousses se fusionneront plus intimement, la plume tracera une ligne où l'on ne discernera plus les secousses isolées, le muscle sera en tétanos parfait. Le minimum de chocs d'induction que notre appareil nous donnait était voisin de vingt par seconde (dix ruptures h- dix fermetures du courant), comme nous nous en sommes assurés en les inscrivant à l'aide du signal Marcel Desprèz. Le nombre minimum de chocs d'induction nécessaire pour provoquer un tétanos complet est donc inférieur à vingt et supérieur à dix par seconde. La figure 4 représente un graphique de tétanos (myographe à ressort). On a inscrit également les chocs d'induction. Fig. 4. Graphique de lelanos. Vitesse moijcnne du cylindce. Le tracé inférieur correspond aux chocs d'induction. Chaque centimètre de longueur du tracé représente 17 à 18 centièmes de seconde. Onde musculaire. — Sur les muscles d'articulés examinés vivants au microscope, la contraction affecte ordinairement la forme d'une onde parcourant la fibre suivant sa longueur. La — 10 — vitesse (le cette onde dans certaines conditions doit être fort minime, puisqu'il est possible de l'étudier à de forts grossisse- ments. Nous avons étudié par la méthode graphique la vitesse de propagation de l'onde musculaire sur le premier muscle exten- seur de la queue (curarisé ou non curarisé) par la méthode classique des doubles leviers reposant sur deux endroits diffé- rents du muscle (Aeby, Marey). L'appareil enregistreur dont nous nous servons n'offre un mouvement bien uniforme que lorsqu'il est disposé horizontalement. Nous avons dû, par con- séquent, placer nos leviers horizontalement, le muscle étant tendu verticalement. Deux petits ressorts à boudin maintenaient les leviers appliqués sur le corps charnu du muscle. On excite le muscle à l'une de ses extrémités par une seule secousse d'induc- tion : l'onde de contraction qui, de ce point, parcourt le muscle, soulève successivement les deux leviers, ceux-ci écrivent leurs courbes sur deux abscisses parallèles. Fig. 5. Graphique de la propagalion de l'onde musculaire par la méthode des doubles leciers. Dislnnce des points d'appui des deux leviers — IS millimètres, DC Graphique du style rapproché des électrodes BE Graphique du style éloigné des électrodes. Les traits verticaux C et A indiquent les positions respectives des deux styles, le cylindre étaììt au repos. Centièmes de seconde. Nous trouvons de celte façon des vitesses voisines d'un mètre par seconde. Les muscles de grenouille placés dans les mêmes conditions nous avaient fourni des valeurs analogues. Changement de volume. — On peut se demander si le volume — Il — du muscle varie pendant la contraction ou si l'augmentation d'épaisseur compense exactement la diminution de longueur. Nous avons, à l'exemple d'Erman, placé dans un vase rempli d'eau et terminé à sa partie supérieure par un tube capillaire vertical un abdomen entier de homard. Nous provoquions des conlraclions dans l'abdomen par l'intermédiaire de deux élec- trodes plongés dans l'épaisseur des muscles. L'expérience nous a montré que pendant la contraction, le niveau du liquide dans le tube n'éprouvait pas de variation notable, ce qui prouve que le volume d'un muscle de homard qui se contracte est très-peu différent de ce qu'il est à l'état de repos. Notre appareil était d'ailleurs assez peu sensible. Nous n'avons pu jusqu'ici faire d'expériences sur l'énergie développée pendant la contraction par les muscles d'articulés. Nous comptons expérimenter sur les nmscles de la pince dès que nous en aurons l'occasion. § il. — Phénomènes thermiques de la contraction. Nous étions fort mal outillés pour étudier la chaleur qui se développe pendant la contraction. Nous nous sommes contentés d'introduire la boule d'un petit ihermomèlre à mercure (mar- quant les doubles dixièmes de degré) dans l'intérieur du muscle fléchisseur du doigt de la pince. Nous n'avons pu constater d'élé- vation de température en tétanisant le muscle par l'intermé- diaire du nerf. Au contraire, en excitant le muscle par appli- cation directe des électrodes, nous avons noté une augmentation de plusieurs dixièmes de degré. Peut-être réchauffement était-il (au moins en partie) dû au passage du courant électrique. § IV. — Phénomènes chimiques de la contraction. Le tissu musculaire vivant du homard est franchement alcalin, il bleuit le tournesol rouge et brunit le curcuma. La contraction a pour effet de neutraliser l'alcali et même de produire une — 12 — réaction acide. Un muscle télanisé pendant quelques instants rougit le tournesol bleu. Nous n'avons pas fait d'expériences sur les quantités de glyco- gène contenues dans les muscles pendant les périodes de repos et de contraction. § V. — Phénomènes électriques de la contraction. Une première question à résoudre était évidemment celle-ci : les muscles du homard non contractés sont-ils le siège de phé- nomènes électriques de quelque importance? Nous décrirons donc d'abord les résultats fournis par l'étude de la distribution des tensions électriques dans le muscle de homard au repos et les moyens dont nous disposions pour cette recherche. L'organisation du local dans lequel nous avons travaillé ne nous a pas permis de faire usage de la boussole à nn'roir (boussole des tangentes). Nous ne donnerons donc aucune mesure absolue de la force des courants électriques que nous avons observés. Toutes nos recherches ont été faites avec un multi[)licaleur de Ruhmkorff. Le système astatique des aiguilles se trouve en équilibre dans la direction du méridien magnétique, mais en est dévié sous l'influence d'un courant électrique très-faible. La figure suivante (fig. 6) indiquera mieux qu'une longue explication la disposition fondamentale des appareils qui ont servi à nos expériences. Les tissus animaux supportés par une plaque de verre (pied de du Bois-Reymond) sont en contact avec les électrodes impo- larisables (Thonstiefel de du Bois-Reymond) EE'. L'argile plas- tique de ces électrodes était imbibée d'une solution de NaCl à 1 p. 7o- Les fils qui partent des électrodes EE' vont au multi- plicateur M placé sur un support massif. Ces fils sont maintenus en place par des i)itons de cuivre vissés dans ce sup[)ort. Sur leur trajet est intercalée une clef Cl destinée à fermer et à ouvrir le circuit et un rhéocorde improvisé RR' permettant de chasser 15 — dans le circuit du galvanomètre une portion variable du courant de la pile Grenel P. Fig. 6. Appareil pour l'étude da courant musculaire. E, E' Electrodes impolariscihles, M mulliplicaienr, Cl clef. RK' Rhéocorde, Co commutateur de Pohl, P pile Grenel. Ce rhéocorde se compose d'un long fi! de laiton RR' tendu sur une planchette entre les deux bornes RR'. Les fils qui relient ces bornes à la pile P passent par le commutateur Co (Pohlsche Wippe), ce qui permet de renverser le courant de la pile. Le fil de laiton du rhéocorde est relié au circuit dn galvanomètre de la façon suivante : le fil qui vient de l'un des électrodes impola- risables E aboutit à l'une des extrémités R' du rhéocorde où il est vissé à demeure. L'autre fil venant de l'électrode E' après avoir traversé le multiplicateur et la clef Cl, aboutit à une petite spirale de laiton G qui glisse à frottement sur le fil du rhéocorde et qui peut occuper toutes les positions intermédiaires entre R etR'. Il est clair que lorsque la pile fonctionne, la plus grande partie du courant passe directement par le fil du rhéocorde, mais qu'une petite portion du courant dérive dans le circuit du galvanomètre et des électrodes. Cette portion varie nécessaire- ment suivant la position que l'on donne à G sur le fil RR'. Elle est à son maximum quand G occupe la position R, elle est à son minimum (= 0) quand G touche à R'. Le commutateur Co sert — 14 — à donner à ce courant de compensation une direction inverse du courant électrique développé dans le circuit des électrodes et du galvanomètre et permet ainsi de ramener à volonté l'ai- guille du galvanomètre au zéro, ce qui est fort avantageux dans l'étude de la variation négative. On peut d'ailleurs exclure à volonté la pile du circuit. Au début de chaque expérience nous nous assurons que les électrodes mis en contact l'un avec l'autre ou reliés au moyen d'un fragment d'argile ne donnent pas de déviation de l'aiguille, ou tout au moins que cette déviation est peu marquée. Elle peut d'ailleurs être compensée au préalable à l'aide de l'appareil décrit précédemment, l'aiguille du multiplicateur étant ramenée au zéro. Plaçons le premier muscle extenseur de la queue du homard sur les électrodes de façon que l'un d'eux corresponde à un point quelconque de la surface longitudinale du muscle, l'autre à un point de la coupe tranversale. Nous obtenons une forte déviation de l'aiguille du galvanomètre, au moins aussi forte qu'avec un muscle de grenouille. Le courant le plus intense (l'aiguille allant presque jusqu'à buter contre l'arrêt qui linn'te sa course) s'obtient en reliant un point de l'équateur du muscle avec le centre d'une des coupes transversales. Ce courant va de la surface longitudinale (-1-) vers la surface transversale ( — ) comme il est facile de s'en assurer en remplaçant l'électrode en contact avec la première par le fil venant du charbon d'une pile et le second par le fil venant du zinc. L'aiguille du galvanomètre dévie dans le même sens. On obtient un courant faible en réunissant deux points de la surface longitudinale inégalement distants de l'équateur. Le plus rapproché de l'équateur est dans ce cas le plus positif. Il est possible de trouver des points situés symétriquement à cet èqua- teur dont la tension s'équilibre exactement et qui ne fournissent pas de courant. De même en réunissant deux coupes transver- sales, on n'obtient pas de déviation de l'aiguille aimantée si les électrodes sont convenablement placés. La disposition des tensions est donc des plus simples et cor- — 15 — respond entièrement à ce que Ton sait pour le muscle de grenouille. Chaque point de l'équateur possède une tension posi- tive plus forte que tout autre point de la surface longitudinale ou de la coupe. Les tensions positives diminuent graduellement à mesure qu'on s'éloigne de l'équateur, pour devenir nulles à la limite qui sépare la surface longitudinale de la surface trans- versale. La tension est partout négative sur la coupe trans- versale. Variation négative du courant musculaire. — Le muscle fléchisseur du doigt mobile de la pince qu'on tétanise facilement par l'excitation de son nerf, convient malheureusement fort mal pour l'étude de la variation négative du courant musculaire, à cause de la disposition spéciale de ses fibres et de leur peu de longueur. Nous avons opéré sur le premier muscle extenseur de la queue que nous excitions directement à l'aide du chariot de du Bois-Reymond, en prenant les précautions nécessaires pour éviter une action directe des courants d'induction sur le circuit du galvanomètre. Les électrodes impolarisables reliés au galvano- mètre sont placés à l'une des extrémités du muscle (surface longitudinale et coupe tranversale). Les électrodes de platine qui amènent l'excitation électrique sont placés à l'autre extrémité très-près l'un de l'autre. Nous avons obtenu une diminution très-notable du courant propre du muscle pendant la contraction. Les muscles du homard présentent donc le phénomène de la variation négative du courant propre pendant la contraction. Comme ils présentent également l'inversion du strié pendant la contraction (examen microscopique), il est permis de chercher à établir une corré- lation entre ces deux phénomènes. Les données fournies par l'étude microscopique du muscle au repos s'accordent le mieux avec la théorie des molécules péripolairesde du Bois-Reymond, en admettant que dans chaque segment musculaire il y a une zone moyenne, la substance obscure, ou disque anisotrope où la tension positive est à son — 16 — maximum, tandis que les deux zones limites, les deux portions de substance claire, isotrope présentent une tension négative. L'examen microscopique de muscles se contractant ou fixés à l'état de contraction, a montré que le raccourcissement du segment musculaire sopère aux dépens de la substance claire isotrope ( — ) qui est absorbée par la substance obscure aniso- Irope (-1- ). II arrive même un moment où la substance claire (— ) disparaît complètement (inversion). Pendant la contraction une portion de la substance claire , isotrope oil la tension est négative, se trouve donc absorbée par la zone obscure (anisotrope) où la tension est positive. La con- séquence logique de ce fait c'est que la ditîérence des tensions négatives et positives offertes par les portions isotropes et aniso- tropes du muscle doit diminuer pendant la contraction. Ainsi s'explique d'une façon naturelle la variation négative du courant propre du muscle pendant la contraction. SECONDE PARTIE. 'Kerta. § VI. — Excitants des nerfs. Toutes nos expériences ont été faites sur le nerf de la pince et sur le muscle fléchisseur du pouce auquel il se rend. Nous avons obtenu des résultats identiques à ceux que nous ont fournis le nerf sciatique et le gastrocnémien de grenouille placés dans les mêmes conditions. Ainsi le courant constant ne constitue un excitant du nerf qu'au moment de sa rupture ou de sa fermeture à condition qu'il soit d'intensité moyenne. Avec un courant fort on obtient des contractions seulement à la rupture ou seulement à la fer- meture suivant la direction du courant (ascendant on descen- dant). Nous n'avions pas assez de sujets d'expérience à notre disposition pour vérifler tous les cas de la loi des secousses de Pfliiger. Le nerf est très-sensible aux secousses d'induction. Les vio- lences mécaniques constituent également un excitant puissant. Nous n'avons pas expérimenté l'action des excitants chimiques. Le curare empêche l'excitation du nerf de se transmettre au muscle. L'excitabilité propre du muscle paraît accrue dans ce cas. Les nerfs du homard séparés de l'animal perdent très-rapi- dement leur excitabilité. Cela rend ces expériences assez labo- rieuses, la préparation du nerf demandant du temps et des soins. Dans un nerf coupé, l'excitabilité disparaît progressive- ment, tranche par tranche, en allant de la surface de section à l'extrémité périphérique. Ainsi, sur une pince séparée du corps de l'animal, il arrive un moment où l'excitation électrique du nerf près de la surface de section ne produit plus de contraction musculaire, alors que la même excitation appliquée sur un point plus rapproché du muscle y provoque de violentes secousses. 2 — 18 — § VII. — Courant nerveux. Pour faire nos expériences sur le courant électrique des nerfs du homard nous avons employé l'appareil décrit pour le courant musculaire. Si l'on place le nerf supporté par une plaque de \evrCj en contact avec les électrodes impolarisables, de façon que la section transversale corresponde à l'un des électrodes et la surface longitudinale à l'autre électrode, la déviation de l'aiguille du galvanomètre indique Texistence d'un courant qui va de la surface à la coupe transversale. La plus forte déviation que nous obtenions correspond à l'union du milieu de la surface longitudi- nale avec la surface transversale. La déviation est, au con- traire, très-faible quand on réunit deux points inégalement dis- tants du milieu de la surface longitudinale. Si les points sont également distants ou si l'on réunit les centres de deux surfaces opposées, la déviation peut être nulle. Variation négative. Nous plaçons en contact avec les deux électrodes impolarisables un point de la surface longitudinale et une surface transversale. Nous excitons le nerf aussi loin que possible du circuit galvanométrique par une série de chocs d'in- duction (chariot de du Bois-Reymond). L'aiguille revient alors sur ses pas. Les nerfs du homard présentent donc la même distribution des tensions électriques et la même variation négative que les nerfs de grenouille. Nos expériences sur l'électrotonus ne sont pas assez complètes pour être publiées. Il serait du plus haut intérêt de vérifier si chez les nerfs de homard la vitesse de propagation de l'oscillation négative est la même que la vitesse de propagation de l'influx nerveux dont nous allons nous occuper. - 19 — § Vili.— Vitesse de propagation de l'influx nerveux moteur DANS le nerf qui SE REND AU MUSCLE FLÉCHISSEUR DU DOIGT mobile. Nous avons eu recours pour cette détermination à la seconde des deux méthodes (la méthode graphique) employées par Helmhollz dans ses recherches sur la propagation de l'influx nerveux moteur chez la grenouille. On excite le nerf en un point rapproché du muscle, on inscrit le moment de l'excitation et le moment de la contraction, on connaît ainsi le temps qui s'écoule entre ces deux phénomènes : on répète la même expérience pour un point du nerf plus éloigné du muscle. La différence de temps observée dans les deux expé- riences, c'est-à-dire le retard de la seconde contraction sur la première, donne le temps employé par l'excitation motrice à parcourir la distance qui sépare les deux points excités. On con- naît cette distance, on en déduit la vitesse de la transmission. Nous dénudons sur un homard vivant le nerf qui se rend à la pince en deux endroits de son parcours, au niveau du deuxième et du quatrième article de la patte. Un levier inscripteurde Marey est attaché au doigt mobile et la patte tout entière fixée solide- ment à l'aide de liens sur la plaque horizontale du myographe, puis d'un coup de ciseaux nous tranchons la patte au niveau de son premier article. Le doigt mobile est ensuite tendu à l'aide d'un ressort à boudin horizontal qui l'écarté de la pince. Une paire d'électrodes en pla- tine est appliquée sur chacune des deux portions de nerf. Les quatre fils qui en partent sont reliés aux fils de la bobine induite du chariot de du Bois-Reymond par un système de clefs qui permet de chasser à volonté le choc d'induction dans l'une ou l'autre des paires d'électrodes et d'exciter le nerf dans son point rapproché ou dans son point éloigné. Le choc d'induction ou plutôt les deux chocs d'induction très-rapprochés sont obtenus à — 20 — l'aide du mécanisme qui nous a servi à étudier les phases de la ■^-@^-^ Fig. 7. Jppareil pour l'élude de la transmission de l'excitalion motrice dans le nerf de la pince. M mxjographe portant la pince de homard, s sttjle attaché au doigt mobile, r ressort qui tend le doigt mobile, a paire d'électrodes rapprochés, b paire d'électrodes éloignés. C clef double permettant de chasser la secousse fournie par la bobine induite B' dans les fils allant à a ou dans ceux allant à b. P pile. E cylindre enregistreur. B, B' les deux bobines du chariot de du Bois-Reijmond. A aiguilles d'acier fermant le circuit à chaque tour du cylindre. secousse musculaire, c'est-à-dire que dans le circuit primaire de la pile (celui qui va à la bobine inductrice du chariot à glis- sière) se trouve intercalé le cylindre enregistreur qui ferme pen- dant un temps très-court le courant de la pile et cela à nue phase toujours identique de sa révolution (1). (1) Cette disposition de Vappareil est loin d'être parfaite. Nous nous y sommes arrêtés parce que c'était la seule que nous fussions capables d'exécuter nous-mêmes. Le laboratoire de physiologie de Gand ne possède pas d'iiistru- ment permettant d'ouvrir et de fermer un courant électrique à un moment déterminé de larotation du cylindre enregistreur. — 21 — Le schéma ci-contre fera aisément comprendre la disposition de Texpérience (ûg. 7). Voici comment nous opérons. Après nous être assurés au préalable que le muscle réagit suffisamment à Texcilation du nerf et que la pointe du style écrit convenablement sur le papier enfumé du cylindre enregistreur, nous disposons d'abord les deux clefs de manière que la secousse d'induction ne puisse agir sur le nerf et nous laissons le cylindre tourner jusqu'à ce qu'il ait atteint sa vitesse normale. La pointe du style écrivant trace sur le papier une ligne horizontale, une abscisse dont les tours se recouvrent exactement. Le cylindre tournant toujours, nous fermons les clefs de façon à exciter le point le plus éloigné (b) du nerf au moment où les deux pointes d'aiguilles qui ferment le circuit frotteront l'une sur l'autre. Le muscle se contracte, le style donne un graphique de la contraction. Nous arrêtons immédiatement la rotation du cylindre jusqu'à ce que la pointe du style soit exactement revenue sur la ligne de l'abscisse. Au besoin nous l'y ramenons à la main. Nous interceptons de nouveau l'arrivée du choc d'induction à l'aide de la clef et nous laissons tourner le cylindre. Dès qu'il a acquis sa vitesse, nous fermons la clef, mais cette fois de façon à exciter le point (a) le plus rapproché du nerf; ceci nous donne un second graphique situé un peu en avant du premier. La dis- tance du début des deux courbes comparée à la longueur du nerf nous permet de déterminer la vitesse avec laquelle l'excitation s'est propagée. Eniin nous marquons sur le cylindre le moment où le nerf est excité. A cet effet, la clef étant fermée de manière à permettre l'excitation, nousamenonslentementle contact entre les deux pointes d'aiguilles. A ce moment, il se produit une contraction qui cette fois s'inscrit comme une ligne simple s'élevant de l'abscisse, puisque le cylindre est au repos. Nous nous sommes assurés au préalable que notre cylindre a une vitesse de rotation très-uniforme en inscrivant à l'aide du signal Marcel Desprèz les interruptions d'un courant électrique pro- duites par un diapason de 100 vibrations à la seconde. Nous — 22 — nous sommes assurés également que le contact entre les deux pointes d'acier a toujours lieu au même instant de la rotation du cylindre. A cet effet nous avons inscrit sans interruption des séries de 2, 4, 6, etc., secousses musculaires d'un gastrocnémien de grenouille. Les lignes ascendantes représentant les débuts de la période d'énergie croissante se superposent exactement dans ce cas et apparaissent comme un trait simple. Les premières expériences ont été faites par nous au labo- ratoire de l'Université de Gand (en février 1879); en voici le détail : Première série. — Homard $ de S59 gr. (sans le sang). Pince droite. Température du laboratoire -+- 11° C. Longueur du nerf 59 millimètres. La distance séparant les deux courbes de con- traction dans une série de graphiques correspondait respective- ment à 0,9; 0,8; 1,0 et 0.8 centième de seconde, ce qui donne des vitesses respectives de 6™49; 6™80; 5'"9 et G'^SO par seconde. Seconde série. — Homard ô de 487 gr. (sans le sang). Pince gauche; même température. Longueur du nerf 56 millimètres. L'intervalle entre les deux courbes correspond à 1.1 ; 1.1 ; 1.0 et 0.9 centièmes de seconde, soit 5™04; 5°'04; 5™6 et ô'^lO par seconde. La moyenne entre ces huit valeurs est de 6 mètres par seconde en chiffres ronds (5""95). Malheureusement les courbes obtenues dans ces expériences ne se correspondaient pas exactement, n'étaient pas tout à fait congruentes, et la valeur des conclusions s'en ressentait. Nous avons été plus heureux dans une série d'expériences analogues exécutées depuis au laboratoire de zoologie expéri- mentale de Roscoff (Bretagne) en août 1879 à l'aide d'un myographe enregistreur analogue au Federmyographion de du Bois-Reymond et cette fois nous avons obtenu des graphiques parfaitement congruents. 25 — La figure 8 en montre un exemple Fig. 8. Graphiques pour la délermiiiation de la vitesse de transmission de l'excitation motrice. A moment de l'excitation du nerf. CD graphique de contraction obtenu par l'excitation du point rapproché du nerf. EF graphique de contraction par excitation du point éloigné du nerf. Centièmes de seconde. Nous avons trouvé les chiffres suivants dans les différentes expériences : Homard n" 1 Homard n° 2 Homard n» 3 Homard n" 4 Homard n» 3 3™8o par seconde (courbes non congruentes). 8^25 (moyenne de plusieurs expériences). 11 à 12 mètres. iO'^^Qo en moyenne. 13 mètres. La température a varié de + 18° à 4- 20° pendant le cours de ces expériences. Ces chiffres sont notablement plus élevés que ceux obtenus dans les expériences d'hiver. La température exerce ici la même influence que pour les nerfs de grenouille. L'excitation nerveuse motrice se propage donc avec infiniment plus de lenteur chez le homard que chez la grenouille ou chez l'homme. L'élude des graphiques obtenus ainsi et dont la figure 8 repré- sente un exemple, nous fournit encore une autre donnée inté- ressante. La dislance AC qui sépare le début de la courbe CD (contrac- tion du muscle par excitation du point rapproché du nerf) du point A (moment de l'excitation du nerf) correspond environ à 5 centièmes de seconde. Cette durée représente la somme de deux temps : 1° le temps qu'il a fallu à l'excitation produite au — 24 — .é point (a) pour cheminer le long du nerf jusqu'à sa terminaison dans le muscle el 2° le temps de l'excitation latente du muscle. Ce dernier temps nous est connu et peut se déterminer sur le même muscle. II suflil d'inscrire un graphique de secousse musculaire en plaçant directement les électrodes excitateurs sur le muscle fléchisseur du doigt mohile. A cet eff'et nous enlevons à l'aide d'un très-petit trépan deux rondelles de la coque chiti- neuse de la pince et nous introduisons les électrodes de platine par ces ouvertures. Nous trouvons que ce temps est de 1.5 centième de seconde, qu'il ne dépasse pas 2 centièmes de seconde. 11 reste donc 1 à 2 centièmes de seconde pour représenter le temps nécessaire à l'excitation motrice pour se rendre du point (a) le long du nerf jusque dans l'intérieur du muscle. La longueur de cette portion de nerf ne peut être déterminée exactement; mais est certainement inférieure à S centimètres dans les expériences qui nous occupent. Nous sommes donc conduits à admettre que la propagation de l'influx nerveux moteur dans son passage du nerf au muscle éprouve dans les dernières ramifications nerveuses un retard considérable. CONCLUSION. 1** Il paraît y avoir identité complète de propriétés entre les muscles du homard et ceux de la grenouille ; 2" Les nerfs moteurs du homard présentent au point de vue physiologique de grands points de ressemblance avec ceux de la grenouille. La diff'érence la plus caractéristique consiste dans la lenteur avec laquelle l'excitation motrice chemine le long des nerfs moteurs chez le homard (6 à 12 m. par seconde chez le homard; 27 m. chez la grenouille). La propagation de l'excitation motrice éprouve chez le homard un ralentissement considérable dans les terminaisons musculaires du nerf moteur. PREMIERES PHASES DU DÉVELOPPEMENT DU PLACENTA MATERNEL CHEZ I.E LAPIN; PAR MM. H. MASaUELIN et A. SWAEN. Travail du laboratoire d'anatomie normale de TUniversité de Liège. COiMMUNICATION PRELIMINAIRE. C'est le huitième jour après la fécondation que les ovules se fixent sur la paroi de l'ulérus. Ils s'y disposent à une certaine distance les uns des autres et s'y développent de façon à amener des dilatations delà cavité utérine alternant assez régulièrement avec des parties de cette cavité restées normales et par consé- quent rétrécies par rapport aux dilatations. De là une confor- mation monililbrme de l'utérus, les grains devenant de plus en plus volumineux au fur et à mesure que le développement des germes est plus avancé. Si l'on étudie la façon dont les ovules se trouvent situés dans ces parties dilatées de l'utérus, on constate assez facilement qu'ils ne sont pas enveloppés d'une caduque réfléchie, qu'ils se trouvent tout simplement logés dans une partie dilatée de la cavité. On voit de plus que le germe est tixé à la panie de la paroi utérine correspondant à l'insertion du mésopéritonéal et par conséquent au hile de l'organe. 3 — 26 — Celle partie de la paroi forme le placenta maternel , le restant de la paroi utérine est, au contraire, aminci et appliqué sim- plement sur le restant des enveloppes de l'embryon. Dans les parties de l'utérus qui ne servent pas à loger l'ovule, qui ne sont donc pas dilatées, on constate que la muqueuse épaissie est plissée dans le sens longitudinal. Il y a donc dans l'utérus gravide du lapin trois parties bien distinctes à étudier : En premier lieu, la partie formant le placenta maternel. En second lieu, le restant de la paroi utérine dilatée et amincie qui, sans y adhérer, enveloppe le germe à l'exception du placenta fœtal. En troisième lieu, la paroi utérine intermédiaire aux portions dilatées. Ces trois parties présentent des caractères très-différents. Dans ce travail, nous ne nous occuperons que delà première et particulièrement des premières phases du développement du placenta maternel. Dans un travail ultérieur nous nous proposons d'étudier les deux autres parties. PLACENTA MATERNEL. Examen macroscopique. — Au huitième jour après la con- ception, l'adhérence des enveloppes fœtales au placenta maternel est très-peu accusée et, comme nous allons le voir, est consti- tuée par un simple accolement, une adhésion des deux mem- branes. Le placenta maternel est représenté à cette époque par deux saillies allongées dans l'axe de l'utérus, séparées l'une de l'autre par un sillon peu profond. Ces deux saillies se continuent à leurs extrémités dans deux replis delà muqueuse, replis beaucoup plus minces et flexueux qui parcourent la paroi de l'utérus dans les parties non dilatées. Ces deux saillies oblongues constituent par leur réunion une saillie ovalaire, allongée dans l'axe de l'utérus, et circonscrite — 27 — par un sillon assez profond. Ce sillon n'est interrompu sur une très-petite étendue qu'au niveau des extrémités des deux replis précités. Le placenta maternel est donc bien délimité déjà à cette époque et on peut lui considérer une surface qui est en rapport avec les enveloppes fœtales et une circonférence. Cette dernière peut à son tour être subdivisée en deux bords, un antérieur et un pos- térieur, et deux extrémités, une interne et une externe. Dans des périodes plus avancées, le placenta maternel va conserver cette conformation avec quelques particularités cepen- dant : le sillon, divisant le placenta en deux saillies, va devenir très-super(iciel. Quelquefois un second sillon parallèle apparaît; eniin, on peut constater l'apparition d'un sillon perpendiculaire aux précédents et divisant ainsi la surface de placenta en quatre ou six mamelons. En même temps le placenta entier devient plus épais, plus étendu en tous sens. La surface, légèrement convexe, est unie plus intimement au placenta fœtal; sa cir- conférence épaisse, mousse, arrondie, est bien entièrement cir- conscrite par un sillon profond, qui s'engage même au-dessous d'elle, de façon que le placenta semble relié par un large pédi- cule au restant de la paroi utérine. De cette conformation, il résulte que le placenta, une fois formé, s'accroît par son développement même; ce ne sont pas les parties voisines de la muqueuse utérine qui entrent peu à peu dans sa composition : c'est lui-même qui se développe et dans sa masse et à sa périphérie. Examen microscopique. Pour étudier le développement du placenta maternel sur des lapins arrivés à différentes périodes de la gestation, nous ouvrons l'abdomen et nous enlevons l'utérus; puis, chacune des parties dilatées étant isolée, est ouverte dans une solution d'acide osmique à '/lo p.%. On incise longitudinalement la paroi opposée au placenta et les parties voisines non dilatées de l'utérus, puis on étale toute la paroi sur un anneau de liège de façon à la maintenir bien plane. L'embryon est laissé en place et le tout est mis dans l'acide osmique à 1 p. 7o et y est laissé pendant 12 à 24 heures. Sur certains placentas volumineux, nous avons poussé des injections — 28 — intersticielles de cet acide. Dans ces conditions, les placentas jeunes sont bien imprégnés et noircis par l'acide osmique dans toute leur épaisseur. Quand ils sont plus volumineux, au bout de 1 à 2 heures, on les coupe en quatre de façon à faciliter leur imprégnation. Ainsi traités, les placentas sont alors durcis dans l'alcool absolu; on détache les embryons en ayant soin de ne pas toucher au placenta fœtal et on fait des coupes successives, sur les uns, parallèles à l'axe de la matrice , sur les autres, perpen- diculaires à cet axe. Les coupes sont alors traitées par l'héma- toxyline, la solution alcoolique d'éosine précipitée et montées dans la glycérine éosinée. Quelques placentas ont aussi été colorés en entier dans le picrocarmin , puis éclaircis dans l'es- sence de girofle et débités en coupes que l'on monte dans la résine de Dammar. < Voici quels sont les résultats auxquels nous a conduits celte méthode : PLACENTA DE HUIT JOURS. Les deux saillies longitudinales qui forment le placenta sont dues à un développement considérable du tissu conjonctif for- mant le derme de la muqueuse à ce niveau. Ce lissu a pris quelques-uns des caractères du tissu con- jonctif embryonnaire; les faisceaux de fibrilles sont très-fins, une substance amorphe ou finement granulée abondante est interposée entre eux. Accolées aux faisceaux conjonctifs, on constate la présence de cellules volumineuses, dont les corps épais, fusiformes et formés d'un protoplasme finement granulé, sont mis en continuité entre eux par l'intermédiaire de prolon- gements bien développés. Vers la surface de la muqueuse, entre les glandes qui y sont engagées, le lissu conjonctif a pris tous les caractères du tissu muqueux. Le derme ainsi modifié est parcouru par de nombreux vais- seaux capillaires sanguins. La paroi endolhéliale de ces derniers est entourée d'une gaine de cellules spéciales, destinées à prendre plus tard un énorme développement. A cause de son importance, nous la désignerons sous le nom de « gaine et de — 29 — lissu périvasciilairc. » Sur les placentas que nous éludions, celle gaîne est encore peu épaisse. Elle est formée de deux, quelque- fois de trois rangées de cellules globuleuses, rendues polyé- driques par leur compression réciproque. Le corps de ces cellules est très-clair, transparent, homogène et coniient un noyau sphé- rique ou ovalaire, logé vers le milieu de la cellule et entouré d'une couche de protoplasme finement granulée plus ou moins épaisse qui envoie de fins prolongements ramifiés et anastomosés entre eux vers la périphérie de la cellule. Ces corps cellulaires sont limités et sont séparés les uns des autres par des cloisons d'une substance intercellulaire plus sombre, colorée en brun par l'éosine. Ces cloisons, minces entre les faces de contact, s'épaississent dans les espaces stellaires limités par plusieurs cellules; souvent dans ces points on découvre un noyau aplati et fusiforme. Nous reviendrons plus tard sur les caractères de ces cellules; nous ajouterons seulement ici qu'on peut aisément constater qu'elles proviennent des cellules du tissu conjonclif qui se mo- difient à la surface de la gaîne périvasculaire et prennent peu à peu les caractères des cellules globuleuses de ce tissu. Enfin, vers la surface, les gaines périvasculaires sont peu développées et beaucoup de capillaires sont réduits à leur paroi endothéliale. Epithelium et glandes. — En même temps que le derme de la muqueuse s'est ainsi modifié, les glandes se sont aussi déve- loppées, élargies, allongées. Cependant, leurs extrémités pro- fondes sont fort écartées de la couche musculaire et plongent dans le tissu conjonctif précédemment décrit. I^'épilhélium, qui revêt la surface de la muqueuse et constitue les glandes lubu- leuses, présente de son côté une modification excessivement intéressante. Les cellules qui le constituent, à la surface de la muqueuse, à l'embouchure des glandes et dans le corps de ces dernières, sont devenues beaucoup plus volumineuses, tout en restant cylindriques ou prismatiques; elles se sont épaissies, allongées et contiennent chacune plusieurs noyaux ovalaires bien développés. Les plus petites de ces cellules en contiennent trois à — 50 — quatre; les plus volumineuses en possèdent jusque six, huit et même dix, quelquefois empilés et moulés les uns sur les autres. Toutes ces cellules sont garnies de cils très-développés et l'on peut constater que de petites cellules situées entre les extrémités profondes des cellules prismatiques se développent peu à peu, s'engagent entre ces dernières et, d'abord minces et très-lon- gues, s'épaississent peu à peu pour finir par ressembler aux cellules prismatiques entre lesquelles elles se sont logées. Vers le fond des glandes, ce processus s'accentue beaucoup moins et au fond du cul-de-sac, les cellules sont restées petites, prisma- tiques, uninucléaires. PLACENTA DE NEUF JOURS. Il est déjà beaucoup plus développé que le précédent; les villosilés du placenta fœtal ne s'y trouvent cependant que très- peu engagées, mais de grandes modifications se sont produites dans le revêtement superficiel et dans celui des glandes. C'est au centre du placenta que le processus est le plus avancé; à la circonférence il en est toujours à la période qui vient d'être décrite. De cette circonférence vers le centre on passe donc par toutes les périodes du développement que nous allons étudier. Derme. — Dans le derme de la muqueuse, par suite des modi- fications que présente le tissu conjonctif au voisinage du tissu périvasculaire, on voit les gaines des vaisseaux capillaires se développer de plus en plus et être formées de couches de plus en plus nombreuses des cellules précédemment décrites. Cet épaississement n'est pas seulement du à l'apposition de nouveaux éléments à la surface de ces gaines, il est dû aussi à leur déve- loppement propre, car on peut constater que les cellules qui les composent se multiplient par division. Cet épaississement des gaines périvasculaires a pour résultat de diminuer d'autant le tissu conjonctif ordinaire interposé entre — si- ces gaines et cela à tel point que le tissu périvasculaire forme bientôt la masse principale du derme. Il en est ainsi du moins dans les parties qui se trouvent au-dessous des glandes. Au niveau des glandes nous verrons plus tard comment il se comporte. Epithelium et glandes. — A la périphérie du placenta, l'épi- thélium a gardé les caractères précédemment décrits; seulement dans les cavités glandulaires, on constate la présence d'un pro- duit de sécrétion particulier, peu abondant, que nous décrirons plus tard, attendu qu'il apparaît bien mieux sur le placenta de dix jours. En se rapprochant du centre, on voit alors les cellules épi- théliales superficielles se fusionner en une couche continue de protoplasme contenant une énorme quantité de noyaux. Cette couche protoplasmatique est encore garnie de cils à la surface; elle est granuleuse et se distingue immédiatement par sa teinte sombre et par la couleur d'un rouge vineux qu'elle prend après avoir été traitée par l'hématoxyline et l'éosine. C'est dans sa partie profonde que se trouvent accumulés les innombrables noyaux provenant des cellules épithéliales primitives. Vers l'embouchure des glandes, cette fusion de l'épithélium existe également, mais, en s'engageantdans le corps de la glande, le processus ne se présente pas toujours avec la même régularité. Quelquefois, dans le cas le plus simple, il s'y poursuit jusque vers le fond, sans l'atteindre cependant. Les corps des glandes sont alors constitués par un tube de protoplasme multi- nucléé, garni de cils vers la lumière, puis les cils se fusionnent et le tube est remplacé par un cylindre plein. D'autres fois, la fusion se produit par groupes de cellules épithéliales. L'un d'eux se développe considérablement, fait saillie dans la cavité glandulaire, la dilate en tous sens, aplatit le restant des parois épithéliales et forme bientôt une masse pro- toplasmatique volumineuse, irrégulière, parsemée de noyaux et accolée de toute part à d'autres groupes de cellules fusionnées : le tout étant encore garni de cils. D'autres fois, la fusion cellulaire est moins régulière encore; — 52 — des cellules épilhéliales peuvent ne pas se fusionner et garder leurs caractères ordinaires, d'autres, fusionnées, forment une masse protoplasmalique saillante à l'intérieur de la cavité dilatée, se fusionnent dans différenls sens avec des cellules ou des groupes de cellules déjà fusionnées entre elles. Dans ce cas, la masse proloplasmalique niullinucléée présente des contours irréguliers, est creusée sur ses bords de cavités dans lesquelles se trouvent logées des cellules épilhéliales uni- ou polynucléées qui apparaissent nettement parce que leur corps est resté clair et est beaucoup moins coloré. Cette disposition se présente surtout au voisinage du cul-de-sac terminal des glandes. Quel que soit le mode de fusion des cellules épithéliales, il résulte de ce processus que les glandes sont considérablement épaissies, renflées vers leur partie moyenne et arrivent ainsi fré- quemment en contact les unes avec les autres. Plus vers le centre du placenta, là oii le processus est plus avancé, le corps des glandes est constitué par une masse pro- toplasmalique parsemée d'innombrables noyaux ovalaires. De ces noyaux les uns occupent assez régulièrement la périphérie de ces masses protoplasmatiques, les autres sont disséminés dans toute leur étendue. Par-ci, par-là, on aperçoit encore, occu- pant la paroi de la glande, vers la surface de la muqueuse, une grande cellule épithéliale claire contenant trois ou quatre noyaux, dans le corps des glandes de petites cellules claires également et ne contenant qu'un seul noyau ovalaire. La cavité glandulaire a disparu dans la plus grande partie de son étendue. Elle ne persiste plus que par places, tantôt vers l'embouchure, tantôt dans le corps de la glande; on la reconnaît à ce que le proto- plasme qui la limite est garni de cils. En même lemps, on peut quelquefois constater à son intérieur une petite quantité du produit de sécrétion que nous étudierons plus tard. Dans le fond de la glande, la cavité persiste et dans cette cavité plonge l'extrémité profonde de la masse protoplasmalique qui provient de l'épilhélium glandulaire fusionné. Par ses bords celte masse se continue de plus avec l'épilhélium du cul-de-sac glandulaire. Ce dernier est formé de cellules prismatiques claires, uni- ou binucléaires qui ont perdu leurs cils. Ces cellules sont — 35 — le plus souvent en voie de multiplicalion, et, à l'intérieur de la cavité, on aperçoit de petites cellules sphériques, formées d'un protoplasme clair, finement granulé et contenant un noyau sphérique, quelquefois deux noyaux plus petits. Quels sont maintenant les rapports des glandes ainsi modi- fiées avec le tissu conjonctif interglandulaire? ce dernier est évidemment fort réduit en certains points. Le tissu conjonctif ne persiste guère que vers le col des glandes qui est moins élargi, puis entre le fond des glandes et enfin dans les espaces stellaires compris entre les parties moyennes de trois ou quatre de ces masses protoplasmatiques épaisses qui correspondent aux corps de ces glandes et qui arrivent à se toucher. Là où il y a de la place, le tissu conjonctif est représenté par un capillaire entouré de sa gaîue plus ou moins épaisse suivant l'endroit; dans certains points, le capillaire est réduit à l'endo- ihélium entouré de toute part par les masses protoplasmatiques» dans d'autres, une couche de cellules périvasculaires le garnit sur une face seulement et ainsi de suite. C'est surtout entre le fond des glandes qu'apparaît à côté des vaisseaux et des gaines périvasculaires le tissu conjonctif ordinaire du derme de la mu- queuse. De cette disposition il résulte aussi que le tissu des gaines périvasculaires arrive par places directement en rapport avec les différentes parties des glandes modifiées. Au voisinage des culs-de-sac glandulaires, ces gaines péri- vasculaires arrivent fréquemment en contact avec eux et surtout avec le point d'union de ces culs-de-sac et des masses proto- plasmatiques des corps glandulaires. Le voisinage de ces cellules épithéliales et des cellules du tissu périvasculaire rend souvent l'élude de ces parties fort difficile à cause de la similitude très- grande de ces éléments. Plus haut, entre les masses protoplasmatiques, provenant du corps des glandes, les gaines périvasculaires s'amincissent, mais, ici encore, les cellules de gaines vasculaires arrivant en rapport sur certains points avec les cellules épithéliales glandu- laires non fusionnées, il semhle, au premier abord, qu'elles — 34 — s'engagent dans les masses protoplasmatiqiies et les dépriment à leur niveau, et cela, parce que les cellules épithéliales ne se distinguent guère des cellules périvasculaires que par leur posi- tion. Cet aspect est surtout fréquent vers le fond des glandes au voisinage des culs-de-sac. Enfin entre les cols des glandes, sous la masse protoplasma- tiquc multinucléée superficielle, les gaines périvasculaires sont généralement peu développées. En se rapprochant encore du centre, on voit la surface du placenta maternel immédiatement au contact des villosilés du placenta fœtal se transformer en grandes cellules, auxquelles nous réserverons le nom de « cellules sérotines», cellules entre lesquelles on distingue par-ci, par-là, la coupe de capillaires réduits à leurs parois endolbéliales. Ces cellules sérolines sont d'énormes éléments cellulaires polyédriques renfermant trois à quatre et cinq noyaux ovalaires nucléoles et volumineux. Le corps de ces cellules est constitué pour la plus grande partie par une substance claire, homogène, transparente, ne se colorant pas dans les réactifs; les noyaux sont logés vers leur centre au milieu d'une masse de protoplasme finement granulée, colorée en rose par l'éosine; ce protoplasme envoie dans toutes les directions de fins prolongements très- délicats, se divisant, s'anasiomosant entre eux et gagnant la périphérie de la cellule en se raréfiant de plus en plus. Ces cellules sont limitées et séparées les unes des autres par une substance intercellulaire granulée, colorée en brun par l'éosine; cette substance forme de minces cloisons entre les cellules séro- tines et au voisinage des masses protoplasmatiques se continue avec leur protoplasme. En étudiant le développement de ces cellules, on peut constater que très-probablement un grand nombre d'entre elles se produisent aux dépens de la masse proloplasmalique super- ficielle sous-jacente au placenta fœtal et aux dépens des parties des masses protoplasmatiques glandulaires qui se trouvent au voisinage de cette surface. Les noyaux de ces parties deviennent plus grands, plus clairs, se disposent par groupes; le proto- plasme, sombre au début, s'éclaircit autour d'eux, et bientôt, par — 55 — différenciation de ce protoplasme, de grandes cellules claires sont formées et sont séparées par le restant du protoplasme primitif non modifié qui constitue des cloisons plus ou moins épaisses entre elles. Ce n'est cependant pas de cette façon que se produit la majorité des cellules sérotines. Nous avons vu tout à l'heure qu'entre les cols des glandes se trouvaient des capillaires entourés quelquefois d'une gaîiie péri- vasculaire plus ou moins complète, plus ou moins épaisse. Les cellules de ces gaines grandissent, les noyaux y deviennent plus nombreux et l'on trouve toutes les transitions entre elles et les cellules sérotines précédemment décrites. Enfin probablement aussi certaines cellules épilhéliales multinucléées des glandes qui ne se sont pas fusionnées perdent leurs cils et prennent les caractères des cellules sérotines. Il est positif que la plus grande masse des cellules sérotines qui formeront plus tard la couche superficielle du placenta ma- ternel, ne sont que les cellules agrandies et modifiées des gaines périvasculaires. Mais d'autre part, nous croyons qu'il est infini- ment problable qu'une partie de ces cellules, celles qui se for- ment en premier lieu vers la surface du placenta maternel, ont une origine épithéliale. Nous verrons plus loin d'ailleurs quelles relations étroites existent entre l'épithélium et le tissu périvas- culaire du placenta maternel. Ces cellules sérotines, en se développant, amènent un épaississement notable du placenta à leur niveau. Elles font disparaître les embouchures des glandes et forment au-dessus des masses protoplasmatiques provenant du corps de ces dernières une couche complète qui va en s'épais- sissant de plus en plus dans les phases ultérieures du dévelop- pement. Ces masses ont d'ailleurs subi elles-mêmes de grandes modi- fications; elles sont mieux délimitées, la pins grande partie des noyaux a gagné leur périphérie et le protoplasme central com- mence à devenir plus clair; on le voit môme par places devenir homogène et se colorer plus ou moins vivement en rouge dans l'éosine. Le volume de ces masses est encore augmenté et les culs-de- — 36 -. sac glandulaires, beaucoup plus étroits, semblent souvent comme appendus à l'un des côtés de leurs extrémités profondes. Enfin , dans la zone centrale du placenta la couche des cellules sérotines est plus épaisse. Ces cellules s'engagent entre les extrémités des villosités du placenta fœtal et amènent ainsi une union plus intime de ces dernières avec le placenta maternel. Les masses protoplasmaliques multinucléées sous-jacentes sont devenues de vastes cavités ampullaires qui, par leurs faces superticielles, se trouvent en rapport avec les cellules sérotines profondes. Ces cavités sont limitées, dans le restant de leur étendue, par une couche protoplasmalique d'épaisseur très- inégale. Cette dernière a conservé les caractères déjà décrits et contient les noyaux. Où elle est épaisse, les noyaux sont accu- mulés en très-grand nombre et quelquefois sont accolés les uns aux autres; où elle est mince, les noyaux sont situés à quelque dislance les uns des autres dans la paroi; dans les points les plus réduits, on n'en trouve même plus. Pour rendre la descrip- tion plus facile, nous désignerons ces espaces sous le nom de cavités hé matoblas tiques. Ces cavités sont remplies d'une substance qui varie beaucoup de l'une à l'autre, mais ces variétés sont dues à des périodes différentes du processus qui s'y passe. Dans les cas les plus simples, la cavité est remplie d'une masse homogène transpa- rente, probablement demi-liquide, colorée en rouge clair par l'éosine. On constate facilement qu'elle provient d'une modifi- cation du protoplasme qui formait primitivement la masse entière. Dans une autre cavité, cette substance homogène est parcourue d'un reticulum de filaments très-fins qui partent d'une des parois et parcourent la cavité dans une plus ou moins grande étendue. II rappelle tout à fait le reticulum fibrineux. Souvent dans ce cas, des travées du protoplasme primitif avec ou sans noyaux restent engagées dans la cavité et s'y continuent avec le reticulum; souvent aussi il semble que la paroi soit garnie de prolongements ciliaires assez longs qui se trouvent en continuité avec ces filaments. D'autres fois encore, qu'il y ait ou non un reticulum fibrineux , on aperçoit à l'intérieur de la substance homogène qui remplit — 37 — la cavité une énorme quantité de corpuscules arrondis qui ont tout à fait le volume de corpuscules rouges du sang, mais parmi eux les uns sont complètement imprégnés d'hémoglobine et sont de véritables corpuscules rouges, les autres sont de moins en moins riches en hémoglobine, se colorent de moins en moins dans l'éosine et ont tout à fait la teinte de la substance homogène au milieu de laquelle ils se trouvent. Enfin dans certaines cavités moins nombreuses que celles-ci, la substance fondamentale qui les remplit contient une quantité énorme de granulations chargées d'hémoglobine. Ces dernières, fortement colorées par l'éosine, présentent toutes les transi- lions, depuis les granulations les plus fines, à peine visibles, jusqu'aux corpuscules rouges du sang. Il s'en trouve aussi quel- quefois de plus volumineuses et même de beaucoup plus volu- mineuses que ces derniers. Ce ne sont d'ailleurs pas encore les seules manières dont se produisent ces corpuscules. On constate souvent que du pro- toplasme de la paroi se détachent des globes plus ou moins volu- mineux ovalaires, d'abord pédicules, homogènes, réfringents, colorés en rouge par l'éosine. Ces corps ne sont que du proto- plasme modifié, chargé d'hémoglobine, qui tombe dans la cavité et s'y subdivise sans doute plus tard en une quantité de globules plus petits, probablement en corpuscules sanguins. En même temps que ce processus formateur de corpuscules hémoglobiques se passe dans ces cavités, on peut constater que de certains points de la paroi se détachent de petites cellules sphériques claires contenant un ou plusieurs noyaux également sphériques à leur intérieur. Ces cellules, formées dans le pro- toplasme pariétal (peut-être par génération endogène), se mêlent aux corpuscules hémoglobiques. Elles sont identiques à celles qui se produisent dans les cavités des culs-de-sac glandulaires, mais se distinguent par leur volume et les caractères de leur protoplasme des corpuscules blancs du sang. Nous devons encore ajouter que vers l'extrémité superficielle de ces cavités, on peut constater sur plusieurs d'entre elles que la substance qui les remplit se continue entre les cellules séro- tines ici avec de minces cloisons de substance intercellulaire, là, — 58 ~ avec (les espaces plus larges, ramifiés entre les cellules. Dans ces espaces, cette substance est souvent remplie de globules hémoglobiques en voie de développement, semblables à ceux que l'on rencontre dans les caviléshémaloblastiques. Ces espaces ou canaux qui circulent entre les cellules sérolines ne sont en effet que le protoplasme des masses glandulaires, qui a subi des modifications identiques à celles des cavités que nous venons de décrire. Aussi ces cavités sont-elles en communication avec ces conduits et peut-être par leur intermédiaire seront-elles mises plus tard en relation avec les vaisseaux sanguins. PLACENTAS DE DIX ET DE ONZE JOURS. A dix Jours. — A leur circonférence, les placentas présentent des glandes très-allongées, divisées, ramifiées dans leurs parties profondes, dilatées surtout vers leurs embouchures. Leurs cavités sont remplies d'un produit de sécrétion tout particulier. Il semble formé d'une quantité de petits grumeaux, mous, accolés et fusionnés entre eux, puis cette masse ainsi constituée semble par places avoir été comme étirée, laminée de façon à prendre un aspect lamellaire; ailleurs, elle a une apparence réticulée; ailleurs encore, elle est plus homogène ou finement granulée. Quel qu'en soit l'aspect, elle se colore en rose grisâtre dans les réactifs précités. On y distingue de plus des granulations, des globules, les uns petits, les autres volumineux, fortement colorés en rouge par l'éosine; ils sont brillants, réfringents, imprégnés d'hémoglobine; souvent, on y trouve des groupes de véritables corpuscules rouges du sang. Enfin, on rencontre dans ce pro- duit de sécrétion des débris de cellules, des noyaux isolés et aussi des cellules entières d'apparence épithéliale. Ce produit de sécrétion s'accumule à l'embouchure des glandes et se répand même quelquefois à la surface du placenta entre lui et les enve- loppes de Tembryon. Comment se forme-t-il? L'épithélium qui constitue les glandes et revêt la surface du placenta à ce niveau ne se présente pas dans toute cette étendue avec les mêmes caractères. Par places, on peut lui reconnaître — 39 — des cils, ailleurs il les a perdus; mais les cellules cylindriques qui le forment présentent toutes des signes manifestes de proli- fération. Dans certains points des groupes de ces cellules se détachent en entier et se mêlent au produit de sécrétion; ailleurs, les extrémités superficielles seules de ces cellules se séparent par étranglement et se mêlent au produit de sécrétion. Dans certains points , on peut alors constater que cette extrémité garnie de cils est formée d'une partie périphérique homogène, colorée en rose grisâtre comme la masse principale du produit sécrété, et d'une partie centrale, rouge, brillante, chargée d'hé- moglobine. Celte extrémité se sépare du reste de la cellule, se mêle au produit de sécrétion; ses cils s'épaississent, se fondent dans la couche périphérique; celle-ci se confond avec le produit sécrété et les granulations hémoglobiques s'y trouvent ainsi déposées. Enfin, dans d'autres points encore, dans le protoplasme de la cellule épilhéliale, une vacuole claire apparaît et dans cette vacuole, de fines granulations hémoglobiques. Ces vacuoles gran- dissent et s'ouvrent à la surface ou bien les cellules tombent, etc. En résumé , le produit de sécrétion est constitué par des parties de cellules modifiées et les globules chargés d'hémo- globine qui s'y trouvent ont été formés par les cellules épithé- Haies. En se rapprochant du centre du placenta, les cellules épithé- liales se fusionnent en une masse protoplasmalique multinucléée, comme sur le placenta de neuf jours; mais les cils disparais- sent, les cavités glandulaires persistent et l'on voit nettement les couches les plus superficielles de ces masses protoplasmati- ques se modifier de façon à se détacher et à former le produit de sécrétion qui, ici, est plus imprégné d'hémoglobine que vers la périphérie. Sur des placentas de onze jours, on voit même ces masses protoplasmatiques chargées de globules ayant le volume de cor- puscules sanguins, et l'embouchure des glandes remplies de ces corpuscules à différents degrés d'imprégnation hémoglobique. Enfin plus vers le centre encore du placenta de dix jours, on voit apparaître la couche des cellules sérotines. Cette couche - 40 - fait une saillie assez marquée à la surface de l'organe et au- dessous d'elle on Irouve de grandes cavités globuleuses semblables à celles qui ont été décrites sur les placentas de neuf jours; seulement, ici, ce sont les cavités glandulaires bouchées par les cellules sérotines qui se sont dilatées. Le produit de sécrétion qui les remplissait s'est modifié, les corpuscules imprégnés d'hémo- globine qui ont été formés par Tépithélium, s'y rencontrent, mais la masse principale du produit de sécrétion est devenue homogène, rouge-clair, et ne présente pas de traces du processus qui se manifestait dans les cavités hématoblastiques du placenta de neuf jours. Les parois protoplasmaliques seules de ces cavités forment encore de petites cellules et les globes hémoglobiques précé- demment décrits. La cavité glandulaire a été fermée par la prolifération des cellules sérotines voisines et probablement aussi par la forma- tion de ces cellules aux dépens de la masse protoplasmatique qui constitue la paroi de ces glandes au voisinage de Tembouchure. A part les corpuscules qui y étaient formés, le produit de sécrétion de la glande ne devient donc que la substance dans laquelle se trouvent logés les éléments y déposés par les parois. A son centre même, l'état du placenta doit être étudié dans trois zones distinctes : Au niveau des culs-de-sac glandulaires; Au niveau des cavités hématoblastiques; Au niveau de la couche des cellules sérotines. Au niveau des culs-de-sac glandulaires, le tissu périvasculaire qui a continué à se développer considérablement s'est insinué entre le fond des cavités hématoblastiques et les culs-de-sac y appendus; ces derniers se sont ainsi fermés à leurs extrémités superficielles. D'autre part ils s'accroissent vers la profondeur et constituent ainsi des tubes fermés aux deux bouts, onduleux, qui s'engagent profondément dans l'intérieur du tissu dermatique sous-jacenl. Ces tubes ont une très- petite cavité remplie d'un produit de sécré- tion imprégné d'hémoglobine et limité par des cellules épithé- liales prismatiques plus ou moins longues et dépourvues de cils. - 41 — Dans la zone des caviiés hématoblastiques nous retrouvons ici les cavités déjà développées le neuvième jour et que nous avons décrites, mais ces cavités se sont considérablement modiiiées. Les cellules sérotines, en se multipliant au-dessus d'elles, envahissent peu à peu ces cavités par leurs extrémités supé- rieures et réduisent ainsi notablement leur étendue. D'autre part, le tissu des gaines périvasculaires et le tissu conjonctif se développent entre elles en déprimant leurs parois, de telle façon qu'au lieu de rester globuleuses, ces cavités héma- toblastiques deviennent irrégulières et quelques-unes même ramifiées. Le protoplasme qui constitue leurs parois pousse des prolon- gements rameux dans le tissu conjonctif, entre les gaines péri- vasculaires. On en trouve même engagés entre les cellules du tissu périvasculaire en continuité avec la substance intercel- lulaire de ce tissu. En même temps ce protoplasme est fortement imprégné d'hémoglobine et se colore en rouge sombre dans l'éosine. Quant au tissu conjonctif qui lui aussi se rencontre ici au voisi- nage des cavités hématoblastiques, il présente une modification bien remarquable : ses cellules se sont développées de façon à constituer de grandes cellules sérotines et la substance intercel- lulaire, réduite par suite de ce développement des éléments cel- lulaires, est devenue homogène, d'apparence liquide ou demi- liquide, se colore en rouge clair dans l'éosine et ressemble tout à fait à la substance homogène qui remplit encore quelques-unes des cavités hématoblastiques. Le contenu de ces cavités varie, en effet, de l'une à l'autre : ici il est exclusivement formé de corpuscules rouges identiques à ceux du sang mêlés de quelques cellules sphériques claires à noyau sphérique également; là il est en grande partie homogène rouge clair et l'on peut encore assister à sa formation aux dépens des parois protoplasmaliques de la cavité. Au terme de ce processus les parois des cavités hématoblasti- ques d'épaisseur très-inégale, s'amincissent de plus en plus sur certains points et finissent par se diviser en un certain nombre de fragments : le contenu de ces cavités se trouve ainsi largement A — 42 -'- en communication avec la substance intercellulaire du tissu con- jonclif voisin. Bientôt les fragments des parois proloplasmatiques des cavités hémaloblastiques bourrés de corpuscules imprégnés d'hémoglobine se désagrègent complètement, leurs noyaux s'atro- phient, et les corpuscules rouges du sang y formés se répandent dans le contenu homogène de la cavité hématoblastique et dans la substance intercellulaire du tissu conjonctif. Si nous arrivons maintenant à la couche des cellules sérotines, nous voyons qu'elle s'est encore épaissie, qu'elle s'accroît surtout vers la surface de façon que ces cellules s'engagent au pourtour des extrémités des villosités du placenta fœtal; enfin on y re- marque de nouvelles particularités. Dans la substance interceî- lulaire, on peut constater la formation de globules imprégnés d'hémoglobine, de volume très-variable, les uns semblables aux corpuscules rouges du sang, les autres plus volumineux et sphé- riques. Dans les points où cette substance est abondante, elle apparaît souvent comme un réseau d'espaces bourrés de ces corpuscules et situés entre les cellules sérotines. Ces espaces sont fréquemment en continuité avec les masses de ces corpus- cules qui proviennent des cavités hématoblastiques. Y a-t-il une communication entre ces espaces et les vaisseaux sanguins? Cette communication s'établit-elle plus tard? Ce sont autant de questions qu'il nous reste à résoudre. Enfin, dans les cellules sérotines elles-mêmes, on trouve des corpuscules hémoglobiques semblables à ceux de la substance intercellulaire. Se sont-ils formés sur place, se sont-ils détachés de la paroi pour s'engager dans les corps des cellules? Ces deux hypothèses sont également admis sibles, la substance intercel- lulaire constitue les parois de ces cellules et le protoplasme de ces dernières se montre d'autre part parsemé de granulations hémoglobiques beaucoup plus fines que celles de ces parois. On y trouve toutes les transitions entre les plus fines à peine visibles et de gros globules sphériques qui sont destinés probablement à se diviser plus tard. Ces particularités de la couche des cellules sérotines com- mencent déjà à se manifester dans les placentas de neuf jours, 45 mais elles sont beauconp plus caractérisées plus tard. Nous en avons parlé seulement maintenant pour ne pas rendre Texposé trop long et trop confus. CONCLUSIONS. Dans le placenta maternel le tissu des gaines périvasculaires qui prend un développement de plus en plus considérable au fur et à mesure que le placenta se développe, provient des éléments du tissu conjonctif. Vers la surface du placenta ce tissu se modifie de façon à constituer la plus grande partie de la couche des cellules séro- tines. Cependant une partie de ces dernières au début de leur développement proviennent probablement des masses protoplas- maliques multinucléées d'origine épitliéliale. Les culs-de-sac des glandes utérines pénètrent dans la pro- fondeur du placenta sous forme de tubes glandulaires fermés aux deux extrémités. L'épilhélium superficiel de la muqueuse utérine et Tépilhélium de l'embouchure et du corps des glandes, après avoir subi dif- férentes modifications, finit par se transformer en globules imprégnés d'hémoglobine et identiques aux corpuscules rouges du sang. Cet epithelium constitue aussi de petites cellules sphé- riques claires contenant un ou plusieurs noyaux, différentes des corpuscules blancs du sang, mais cependant mêlées aux corpus- cules rouges. Enfin dans les cav.ités hématoblastiques il forme aussi un liquide dans lequel se trouvent logés ces corpuscules et ces cellules, liquide problablement de même nature que le plasma sanguin puisque Ton y distingue souvent un reticulum semblable au reticulum fibrineux. Cette transformation de l'épithélium est certes un phénomène auquel on croira avec peine. Cependant il faut noter qu'à la périphérie du placenta des globules, des granulations imprégnées _ 44 — d'hémoglobine se forment comme dans les cellules vasoforma- tives, aux dépens du protoplasme des cellules épithéliales ciliées et qu'ils sont ensuite déversés comme produit de sécrétion dans les cavités glandulaires et à la surlace du placenta. Entre cette véritable sécrétion de corpuscules imprégnés d'hémoglobine et le processus qui se passe dans les cavités héma- toblastiques, nous trouvons alors comme forme de transition cette zone des placentas de dix et onze jours oii les cellules épithéliales sont fusionnées en une masse protoplasmatique mul- tinucléée, et où les modifications de ce protoplasme constituent à leur tour le produit de sécrétion et les corpuscules imprégnés d'hémoglobine. Dans ces différents cas c'est le protoplasme des cellules épi- théliales qui se charge d'hémoglobine et se transforme plus ou moins directement en corpuscules isolés identiques aux corpus- cules rouges du sang. Ce processus paraîtra moins extraordinaire si l'on songe que répithélium de la cavité utérine dérive du feuillet moyen du blastoderme et surtout si l'on constate les rapports intimes qui existent entre les éléments épithéliaux et ceux du tissu con- jonctif. Sur les placentas dont nous avons parlé on voit en effet les prolongements des masses protoplasmatiques d'origine épithé- liale, s'engager entre les cellules des gaines périvasculaireset s'y continuer avec la substance intercellulaire de ce tissu. Sur les placentas de dix-huit jours nous avons de plus constaté que les cellules épithéliales ciliées isolées présentent les mêmes rapports avec le tissu sous-jacent de ces gaines par l'intermédiaire de leurs extrémités profondes. SUR LÀ STRUCTURE UK LA GLANDE DE HARDER DU CANARD DOMESTIQUE; PAR M. JULES MAC LEOD, Docleur en scicii'-es naturelles , préjiaraleur du cours d'Iiislnlogie normale à rCnivcrsitc de Gand. (Travail du laboratoire d'histologie de l'Université de Gand. La cavité orbilaire des oiseaux, comme celle des reptiles et de la plupart des mammifères, renferme deux glandes principales : l'une généralement pelile, située à l'angle externe (ou posté- rieur) ; l'autre, presque toujours bien plus grande, située à l'angle interne (ou antérieur). La première est la glande lacrymale; la seconde est la glande de Harder ou glande de la membrane nie- litanie (1). La glande de Harder, dont !a description histologique fait l'objet de la présente Notice, présente une structure fort inté- ressai) te, et diffère complètement de la glande homologue des mammifères. (1) SiEBOLD ET Staniyius, Anatomìe comparée (trad, franc. ), l II, p. 319. — 46 — Nous lie croyons [)as inutile de commencer par une descri[> lion macroscopique sommaire de Tolgane qui nous occupe. La glande de Harder du canard , que nous avons étudiée d'une manière spéciale, est très-volumineuse (elle mesure en moyenne j%5 de long sur l'6-8 de large, et 0%2-3 d'épaisseur), tandis que la glande lacrymale est fort réduite (1). Elle est aplatie entre le globe oculaire el la paroi osseuse de l'orbite. Elle est en quelque sorte moulée sur ces deux parties. Sa face interne que nous appellerons orbi taire est convexe; sa face externe ou bulbaire est concave. Sa forme générale est plus ou moins comparable à celle d'un croissant, dont le bord écbancré serait antérieur et le bord saillant postérieur. La face bulbaire (fig. i) présente vers le milieu de sa hauteur un sillon profond, transversal, légèrement oblique de haut en bas et d'avant en arrière. La face orbitaire (fig. 2) présente un sillon analogue, à peu près vertical, qui remonte vers le haut, en partant à peu près du point milieu du bord écbancré ou anté- rieur. La face bulbaire n'est point unie, mais présente un grand nombre de petits sillons disposés de manière à limiter des emi- nences polygonales. La face orbitaire présente des sillons ana- logues, mais beaucoup moins marqués. On pourrait supposer que cette face a perdu ses inégalités (dépendantes de la structure interne) parce qu'elle est pressée contre une surface dure, la paroi osseuse de l'orbite, dont elle n'est séparée que par le périoste. (1) Il existe entre les divers oiseaux des différences assez iiolables au point de vue du développenienl relatif des deux glandes de l'oibite (voir à ce sujet Siebold et Slannius, loc. cit.). Cependant la glande de Harder l'emporte presque toujours sur la glande lacrymale. Chez les mammifères, des différences semblables s'observent : tantôt c'est Tune des deux glandes, tantôt c'est l'autre qui l'emporte, el il arrive parfois que le développement exagéré de l'une des glandes soit accompagné de l'absence complète de l'autre. C'est ainsi que la glande lacrymale manque chez beaucoup de rongeurs ; c'est ainsi que la glande de Harder est absente chez l'homme (voir Weì\dt, Uberdie Harder" sciie Driise der Sclugethiere, Slrassburg, 1877.) _ 47 — Celte glande déverse son produit à l'angle interne de l'œil à la base de la membrane nictitante. Son canal excréteur est accompagné, jusque très-près de son emboucbure, d'éléments glandulaires. Comme nous l'avons déjà dit, cette glande diffère complète- ment, par sa structure, de la glande de Harder des mammifères : tandis que chez ces animaux, elle est, comme la glande lacry- male, une glande en grappe, une glande achieuse composée, chez les oiseaux (1), c'est une glande Uibuleuse composée, et chez le canard, elle présente cette structure d'une manière typique. Elle est en effet formée d'un grand nombre de petits tubes glandulaires (voir fig. o) débouchant par groupes dans des canaux excréteurs communs autour desquels ils sont disposés en vcrticilles, s'il est permis de se servir de ce terme. Nous nommerons tube primaire chacun de ces petits tubes simples; nous donnerons le nom de tube secondaire à chacun des systèmes, formés d'un canal excréteur commun autour duquel sont disposés un grand nombre de tubes primaires qui y déversent leur produit. Ces termes correspondent à ceux à'acinij lobule primaire, etc., usités dans la description des glandes en grappe. La glande tout entière est enveloppée par une membrane conjonctive parfois assez épaisse (fig. 5), qui envoie des septa entre les tubes secondaires; ces septa en envoient à leur tour d'autres de moindre épaisseur entre les tubes primaires. La disposition des tubes primaires et secondaires varie un peu suivant l'endroit de la glande considéré, de manière que l'on puisse distinguer dans l'organe deux régions, entre lesquelles il n'y a aucune limite nettement tranchée, mais qui passent gra- duellement de l'une à l'autre. . Nous ne nous sommes pas occupé de la distribution des vais- seaux et des nerfs dans la glande; ces deux espèces d'organes (1) Nous ne Tavoiis étudiée d'une manière approfondie que chez le canard; sa struclure est à peu près identiquement la même chez la corneille. — 48 — y sont cependant richement répandus, à en jnger par l'importance des nerfs qui s'y distribuent, et par le grand nombre de petits vaisseaux que Ton rencontre sur une cou[)e. Nous étudierons successivement les tubes primaires et les tubes secondaires. Nous terminerons par quelques considérations relatives aux rapports que cette glande présente avec d'autres organes ana- logues. Tubes jmmaires. Ces tubes, qui par leur réunion en nombre considérable (40 à 50 sur une section) constituent les tubes secondaires, sont dis- posés d'une manière rayonnante autour d'un canal excréteur commun dans lequel ils débouchent à angle droit ((ig. 5 et 4). La forme de ces tubes varie, suivant que l'on considère la portion su[)érieure de la glande ou la portion inférieure. Dans cette dernière, qui est la plus considérable, les tubes ont une direction rectiligne; quand ils se bifurquent les deux branches restent sensiblement parallèles; ils ne s'enchevêtrent guère, et ne décrivent guère de circonvolutions. Mais à mesure qu'on s'élève, qu'on se rapproche du point d'excrétion, les tubes per- dent ces caractères, ils deviennent de plus en plus sinueux, s'enchevêtrent de plus en plus. Il est facile de se faire une idée de ces différences en exami- nant comparativement les figures 5 et 4. Ces tubes, qui sont rendus prismatiques par pressions récipro- ques, mesurent en moyenne de 25 à oO (j. de diamètre; leur longueur varie trop pour qu'il soit intéressant d'en donner une mesm^e. Ils sont trcs-inlimemcnt unis entre eux, et leur paroi est constituée par une couche de nature conjonctive commune à deux tubes adjacent:^ la(juelle est tapissée par ré{)ilhélium glan- dulaire. Cetépithélium présente des caractères différents, d'après l'en- — 49 — droit du tube primaire que l'on considère. A ce point de vue, on peut diviser le tube primaire en deux régions: l'une correspon- dant à la partie profonde, l'autre à la partie voisine de l'embou- chure. Les différences des cellules glandulaires sont accompagnées de différences correspondantes dans les parties conjonctives de la paroi (J). Région profonde du tube primaire. La partie conjonctive delà paroi est ici fort réduite. (V. fig. 6.) Les cellules glandulaires sont cylindroïdes; leur extrémité libre, c'est-à-dire celle qui est tournée vers lumière du tube, est généralement un peu dilatée, de manière à rappeler un peu, quanta la forme extérieure, les cellules dites ccdicijformes. L'extrémité profonde de la cellule présente un prolongement grêle, presque toujours unique, fort rarement double (tig. 10), jamais ramifié, pouvant atteindre à peu près la longueur du corps de la cellule, et formant le plus souvent un angle avec celle-ci (fig. 12- Io). Ces prolongements se recouvrent les uns les autres comme les tuiles d'un toit. Il arrive même qu'ils s'enlrelacent, de ma- nière à donner aux cellules plus d'adhérence entre elles et à la paroi de solidité (2) (fig. ll-12-lo). Ces cellules sont insérées (1) Les deux formes de tube , les tubes droits elles lubes coiUouinés, pré- senlenl les mêmes caracières au point de vue des éléments qui entrent dans leur composition; nous les comprendrons donc dans une description commune. (2) Des formes de cellules analogues à celles que nous venons de décrire ont déjà été signalées dans d'autres organes. Ainsi Ranvier [Traité technique dliistolo^ie, p. 2o4) figure des cellules calyci- formes de Testomac de la grenouille qui ont beaucoup de rapport, pour la forme générale, avec les cellules de notre glande. Elles sont en effet couchées oblique- ment sur le derme sous-jacent, et s'effilent en pointe à leur extrémité profonde. Nous citerons encore les cellules sécréloires de la glande lacrymale des mammi- fères. Ces éléments présentent en effet à leur panic profonde un prolongement constant, qui peut alteiiidreen longueur le diamètre du corps cellulaire, et peut- élre accompagné par d'autres proloiigjments, partant d'autres points de la cellule (voir Slricker's Handbuch, rarlicleZ)/e ThranendrUse, par Frai>'z Boll, p. H61). ~ 50 — obliquement sur la paroi conjonctive; elles sont inclinées vers le point d'excrétion du tube (fig. 6.) Les limites des cellules sont bien marquées sur les parties latérales et profondes; sur leur face libre, au contraire, elles le sont beaucoup moins. Vu de face, répitbélium glandulaire se présente sous forme d'une mosaïque assez régulière. Eu abaissant graduellement le foyer du microscope, on voit d'abord les champs polygonaux qui correspondent aux limites des cellules (fîg. 7-14). Plus bas, ces limites disparaissent à peu près complètement pour l'observateur» et l'on trouve les noyaux placés au sein du contenu granuleux. Il arrivo parfois que ces noyaux sont si rapprochés les uns des autres, qu'ils se dépriment mutuellement, et que leur coupe optique est polygonale, hexagonale, par exemple. Cependant, le plus souvent, ces noyaux sont arrondis. Traité par l'acide chromique à 1 p. *'7oo) le contenu cellulaire présente un grand nombre de granulations assez volumineuses, réfrin- gentes, mélangés à d'autres granulations semblables, mais plus petites (fig. à 11.) Par l'alcool absolu, le contenu est très-fine- ment granuleux. Par l'action de l'acide osmique à 1 p.^o (fig- 1^)? le corps cellu- laire semble renfermer un réseau à très-larges mailles, dont la matière constituante est réfringente. Nous avouons cependant que l'interprétation que nous venons de donner n'est pas la seule possible. Il se pourrait en effet qu'il s'agit de corpuscules rendus polyédriques par pression réciproque, et placés, à une petite distance les uns des autres, au sein d'une masse réfrin- gente. Cependant l'expression de réseau rend parfaitement compte de l'apparence observée (1). (1) Wendt {Die Harder'sche Driise der Saugethiere. Slrassburg, 1877, p. 17, — pi. I, fig. 1) décril un reticulum analogue dans les cellules sécrétoires delà de Harder des mammi teres. D'après lui, les travées de ce reticulum seraient for- mées de proloplasma inalléré, entourant des corpuscules de protoplasma trans- formé en produit de séciélion. Suivant le même auteur, un réseau analogue se trouverait dans les cellules de la glande de Meibomius et de la glande mammaire, pendant la période de iaclalion. — 51 — Ce n'est pas seulement au contenu cellulaire que l'acide osmi- que donne un aspect caractéristique; il agit aussi sur les con- tours cellulaires. En elTet, les cellules qui ont passé par ce réactif paraissent crénelées sur leurs faces latérales; ces crénelures sont peu nom- breuses, et surtout marquées dans la partie profonde de la cel- lule; |)rès de son extrémité libre, elles disparaissent à peu près complètement (dg. 15 14). Le noijau est situé dans la partie la plus profonde de la cellule, qui est souvent un peu dilatée à son niveau. Il est arrondi, le plus souvent ovalaire, parfois très-étroit, et occupe dans cer- tains cas toute la largeur du corps cellulaire. Dans ce cas, les noyaux sont rendus eux-mêmes polyédriques par pressions réci- proques, ce qui explique l'image dont nous avons parlé plus baul (page 805, ligne 15). Tantôt le noyau est placé dans l'axe de la cellule, tantôt, le plus souvent même, il est oblique par rap- port à cet axe. Traité par l'alcool absolu, le noyau paraît finement granuleux; par l'acide chromique à 1 p. '"'/oo, il présente une ou plusieurs granulations plus grosses que les autres, auxquelles on pourrait donner le nom de nucléoles. Sous l'influence de l'acide osmique à 1 p. °/o, l'aspect des noyaux préseiUe la plus grande diversité; les iins sont complète- ment homogènes (tîg. 15, d), les autres sont finement granuleux, avec un ou plusieurs nucléoles arrondis et de forme bien détinie (tîg. 15, a et c), ou présentent des traînées obscures qui ressem- blent à plusieurs nucléoles qui seraient juxtaposés (fig. 15,ò), etc. H est possible que ces diversités dans la structure interne du noyau correspondent soit à diverses phases d'un processus de division, soit à l'état d'activité sécréloire plus ou moins grande des cellules, ou à leur âge. Région du tube primaire voisine du point d'excrétion. Ici la substance conjonctive est beaucoup plus épaisse que dans la région profonde du tube. Elle atteint son maximum d'épaisseur au niveau de l'embouchure. Les cellules qui se trouvent à ce niveau diffèrent de celles qui occupent la région profonde et que nous venons de décrire par les caractères suivants (fig. 6) : l"* Parce que leur diamètre transversal est un peu moindre. 2" Parce qu'elles sont insérées plus perpendiculairement sur la paroi conjonctive. o° Parce que leurs contours sont plus nettement délimités, surtout au niveau de la face libre de la cellule. 4° Parce qu'elles se colorent plus vivement par les agents colorants. Cette différence est très-marquée pour l'iiématoxyline, un peu moindre pour le picrocarium. En dehors de ces quelques différences, ces cellules sont en tout semblables à celles de la région profonde. Tubes secondaires. Dans la région inférieure de la glande, on trouve huit à dix de ces tubes sur une coupe; il sont disposés en deux couches (fig. 5). Ils sont séparés par des septa conjonclifs dépendants de l'enve- loppe externe de la glande; cette séparation est complète et fort bien marquée. Mais à la partie supérieure de l'organe, le nombre de ces tubes est considérablement réduit; en effet, ils se réunissent successivement à deux ou à trois (fig. 5), du sorte qu'à ce niveau il n'en reste plus qu'un petit nombre, formé de la réunion de tous les autres (fig. 4). En même temps, les septa conjonctifs sont devenus beaucoup moins importants, ils ne séparent plus complètement les divers tubes secondaires les uns des autres. Il résulte de ces différences, ainsi que de celles qui existent dans la forme des tubes primaires, qu'une coupe de la glande, faite au niveau de la partie supérieure, diffère complètement d'une autre qui traverserait ]a portion inférieure de l'organe, comme il est aisé de s'en convaincre par la comparaison des figures 5 et 4. — 53 — Les canaux excréteurs^ qui occupent ordinairement Taxe des tubes secondaires, méritent bien plutôt le nom de sinus ou de confluents que celui de canaux. En effet, ils n'ont pas de paroi propre différenciée comme telle, lis sont limités parles parois des tubes primaires, modifiées au niveau de leur embouchure, comme nous l'avons décrit plus haut. La section de ces canaux est fort irrégulière. Les cloisons qu'on y observe (fig- 5, aa) sont des prolongements des parois intertu- hulaires (1). Elles ont la même structure que les parois des tubes primaires au niveau de leur embouchure. Les divers canaux secondaires se réunissent à plusieurs en même temps que les tubes secondaires, au centre desquels ils sont situés (fig. 5), et finissent par aboutir au point d'excrétion de la glande, situé à la partie supérieure et antérieure (fig. 1, a). Considérations générales. La glande que nous venons de décrire peut être envisagée, croyons-nous, comme un fort beau type de glande tubuleuse composée. Ce genre de glande est infiniment moins répandu que les glandes acineuses ou les glandes tubuleuses simples. Parmi les glandes de cette catégorie, nous citerons : 1° La glande venimeuse de la Naja Haje (2). Cet organe pré- sente deux régions d'une structure assez différente; l'une d'elles, (1) Il importe de ne pas confondre un canal ainsi cloisonné avec l'image repré- sentée fig. o. d. Ici la section a passé par les lubes primaires avant leur réunion en un canal commun. On se trouve en présence d'une espèce de mosaïque formée de champs polygonaux qui ne soni autre cliose que la section des tubes primaires. Mais la régularité de cette image, ainsi que la structure (correspondant à celle de la partie profonde des tubes primaires), permettra toujours de la distinguer d'un canal excréteur cloisonné. (2) Emery, Ueber den feineren Bail der Giftdrûse der Naja Haje, Max Scholtze's Archi V, 1875, Bd. XI, Hft. IV. — u — celle qui est la plus rapprochée du point d'excrétion, est fornnee d'un canal excréteur central dans lequel viennent déboucher à angle droit des tubes glandulaires, ce qui a beaucoup de rapport avec notre glande. 2" La Gianduia labîalis superior de la couleuvre à collier (Tropidonolus natrix) et 5° La glande venimeuse de la Vipera Berus ., toutes les deux décrites par Leydig dans son travail sur la glande de la tête des ophidiens (I). Mais aucun de ces organes ne présente autant de régularité dans sa structure, n'est, en d'autres termes, aussi typique que la glande de Harder du canard. Plusieursglandes semblent former la transition entre la glande tubuleuse composée et les glandes tubuleuses simples, d'une part, les glandes en grappe, de l'autre. La glande de Meibomius (2) peut être considérée comme un passage vers la glande en grappe. En effet, cet organe est formé d'un canal excréteur autour duquel sont disposés en verticillo non pas des tubes primaires comme dans notre glande, mais de vrais acini. Dans la région la plus profonde de la glande venimeuse de la Naja Haje (voir plus haut), on trouve des tubes dont la surface interne présente des saillies et des dépressions nombreuses. La présence de ces dépressions nous semble être en quelque sorte un premier acheminement vers la formation de tubes secon- daires, qui viendraient déboucher dans le tube principal. Cette disposition exagérée conduirait à nos tubes primaires débou- chant dans nos canaux secondaires. Cette forme constitue donc un passage entre la glande tubuleuse composée et la glande tubuleuse simple. Comme nous l'avons déjà remarqué, la glande de Harder des oiseaux diffère profondément de celle des mammifères, qui est (1) Leydig, Ueberdie Kopfdriisen einhemischer Oplddier, Ancn. ueSchlltze, 1875, Bd. IX, Hft, m. (-2) S/ricker's Handbuch, p. 1 147. — 55 — une glande en grappe. Au contraire, elle se rapproche beau- coup de celle des reptiles (notamment du Tropidonatus nalrix), (Leydig, loc. cit.), qui appartient au même type de structure. Résumé. La glande de Harder du canard est une glande tubuleuse composée, formée de tubes glandulaires, disposés en verticilles autour des canaux communs, de manière à former des tubes secondaires. La forme des tubes primaires, la disposition des tubes secon- daires permet de distinguer dans l'organe deux régions : une supérieure, où les tubes primaires sont contournés, les secon- daires peu nombreux et incomplètement séparés; une inférieure, où les tubes primaires sont droits, les secondaires nombreux et complètement séparés par des septa conjonctifs. Dans le tube primaire on peut distinguer deux régions, diffé- rentes par les caractères des cellules glandulaires. La glande de Harder des oiseaux se rapproche par sa structure de celle des reptiles, mais diffère complètement de celle des mammifères qui est une glande en grappe. Certaines glandes constituent un état de passage entre celle que nous avons décrite, et la glande tubuleuse simple, d'une part, la glande en grappe, de l'autre. Nous ne pouvons mieux terminer cette notice qu'en adressant nos plus sincères remercîmenls à M. le professeur Van Bambeke, qui n'a cessé de nous prodiguer ses bienveillants conseils. — 56 — EXPLICATION DES FIGURES. Fig. 1 Glande de Harder du canard, vue par sa face bulbaire: a. Sillon tran- versal; les lettres A et P indiquent les bords antérieurs et postérieurs 9 5 de la glande. '^• Fig. 2. Id. face orbilaire. a. Sillon. A e\, P comme dans la ligure 1. h. [)oint de sortie du canal excréleur. -^, Fig. 5. Coupe de la glande au niveau de sa portion inférieure, a. Tube secon- daire, à canal cential cloisonné, b. Septum séparant les tubes secondaires les uns des autres, c. Canal central du tube secondaire, dans lequel viennent déboucher IfS lub?s primaires. Obj. 4. Hartnack. Fig 4. Id., id. au niveau de la région supérieure, a. Canal central des tubes secondaires. 6. Septum séparant incomplètement les tubes secondaires. Système 2, Hartnack. Fig. 5, Coupe faite au niveau de la légion inférieure, montrant la réunion de plusieurs tubes secondaires, ainsi que la manière dont les tubes primaires sont disposés par rapport au canal central des tubes secondaires. Hart- nack 2. Fig. 6. Tube primaire, a. Région voisine du point d'excrétion; les cellules sont plus vivement colorées, mieux délimitées, et implantées perpendiculaire- ment sur la membrane sous-jacente. 6. Région profonde; cellules moins colorées, moins bien délimitées, implantées obliquement sur la membrane sous-jacente, et inclinées vers le point d'excrétion. Hartnack 7. Fig. 7. Cellules glandulaires, vues deface (un peu obliquement), un peu désa- grégées par Faction de l'acide chromique à I p.°"/oo. Seibert VII, immersion. Fig. 8, 9, 11. Cellules glandulaires isolées après Faction de l'acide chromique à 1 p. °'7"o- Seibert VU, immersion. Fig. 10. Id., id. Prolongement ])asal double. Fig. 12. Cellules en place, vues de proQI, sur une coupe faite après l'action de l'alcool absolu a. iXoyau de la substance conjonctive. Seibert VII, immer- sion. Fig. 15. Cellules glandulaires, isolées après l'action de l'acide osmique àl p. "/,,. Ces éléments paraissent crénelés, et présentent un réseau dans leur inté- rieur. Seibert VU, immersion. Fig. 14. Cellules, vues de face, après Faction de l'acide osmique à 1 p. "/„. Bords crénelés. Les noyaux situés plus profondément ne sont pas visibles pour Fobservaleur. Seibert Vil, immersion. Fig. lo. Diverses formes de noyaux des cellules glandulaires, isolés après l'aclion de l'acide osnique. a. Noyau ovaia ire à deux nucléoles, b. Id., renfermant un corps qui semble formé de plusieurs nucléoles juxlapo.sés. c. Noyau déformé par pression contre ses voisins, d. Noyaj complètement mal. Seibert VII, immersion. NOTICE SCH LE SQUELETTE CARTILAGINEUX DE LA GLANDE DE HARDER DU MOUTON; PAR Jules MAC LEOD, Préparateur à l'Université de Gand, docteur en sciences naturelles. Beaucoup de mammifères présentent dans l'épaisseur de la membrane niclitanle, à la base de celle-ci, une lamelle cartila- gineuse (1). Il arrive souvent que ce petit cartilage se prolonge à l'intérieur de la glande de Harder, située à la base de celte membrane, de manière à constituer pour cet organe un véritable squelette. Cette disposition, que nous pensions avoir découverte le pre- mier, a déjà été signalée par Wendt (2). Voici comment ce auteur s'exprime à ce sujet : ....bei manchen Thieren setzt sich cler Nickhautknorpel cils màssig bfeite, finche, tief ini innern des Driisenparendiyms endigende Platte fort. Cependant nous ne croyons pas que cette particularité ait jamais été décrite en (1) Leydig, Traité d'histologie comparée. (-2) VVEJiorj Ueber die Harder'sche Druse der Saugetliiere. Sti^asboarg ,1877 il — 58 ~ détail ou figurée. C'est ce qui nous a déterminé à y consacrer ces quelques lignes. Voici comment ce cartilage se comporte chez le mouton : il a la forme d'une petite colonnette allongée, aplatie, s'élargissant à mesure qu'on s'approche de la partie profonde de la glande, et s'arrêtanl à deux ou trois millimètres de son extrémité (fig. 1). Il est formé de cartilage hyalin typique. Les capsules arron- dies, ovoïdes ou allongées, sont disposées sans aucune régularité. Elles mesurent en moyenne dans la partie centrale de 15 fx à 25 f/. On ne rencontre aucune trace de prolifération. A mesure qu'on se rapproche de la partie périphérique , les capsules s'aplatissent , se disposent par couches parallèles à la surface et les cellules qu'elles renferment passent par des modi- fications graduées, aux cellules plates du périchondre, absolu- ment comme dans les autres cartilages hyalins. Le périchondre ne présente rien de particulier dans sa struc- ture, mais de sa surface se détachent de nombreux septa, ayant la même structure que lui, et s'enfonçant dans l'épaisseur de la glande. Ces cloisons, qui se dirigent dans tous les sens, contribuent à diviser la glande en lobules, et vont rejoindre les septa ana- logues qui se détachent de la membrane externe de l'organe (fig-2). La disposition que nous venons de décrire est un exemple de remplacement du tissu conjonctif ordinaire par du tissu car- tilagineux. Au niveau du point de réunion de plusieurs des cloisons conjonctives qui parcourent notre glande, une portion de leur tissu a augmenté de volume et s'est transformée en une colonnette cartilagineuse, de manière à former pour la glande un véritable squelette solide. Quoiqu'un remplacement de ce genre n'ait jamais été observé, croyons-nous, à l'intérieur d'une glande (du moins normale- ment), il existe de nombreux organes qui sont formés tantôt de tissu conjonctif, tantôt de cartilage. Nous pouvons citer l'exemple de beaucoup de tendons, qui se transforment partiellement en cartilage chez certains individus, — so- de manière à former des nodules sésamoïdes , tandis qu'ils restent entièrement conjonctifs ehez d'autres de la même espèce. Des remplacements de ce genre s'observent fréquemment si Ton com- pare les diverses formes qu'un organe présente dans la série animale : citons la sclérotique, conjonctive chez les mammifères, en grande partie cartilagineuse chez les batraciens. L'anatomie pathologique nous offre encore de nombreux exem- ples de changements du tissu conjonctif en cartilage. Plusieurs glandes, notamment la parotide et le testicule (1), présentent souvent dans l'épaisseur de leur squelette conjonctif des pro- ductions cartilagineuses, des chondromes. Il importe de ne pas confondre le cartilage de la glande de Harder avec une pro- duction de ce genre. Sa constance et la régularité de sa forme suffisent seules à démontrer qu'il ne s'agit pas ici d'une forma- lion pathologique, comme on serait tenté de le croire au premier abord. Cependant cette disposition peut être envisagée comme repré- sentant d'une manière normale et régulière une formation patho- logique dont elle se rapproche par son siège (à l'intérieur d'une glande) et par sa texture (cartilagineuse). (1) CoRNiL et Ranvieu, Manuel d'histologie pathologique. Paris, 1869. RiNDFLEiscH, Lehvhuch der pathologischen Geivebelehre. Leipzig, 1871. — 60 — EXPLICATION DES FIGURES. Fig. i. Vue d'ensemble de la «lande de Harder du mouton, a) Colomielle cartilagineuse. (Vue longitudinale déduite de l'étude d'une série de coupes ) . I Fig. 2. Coupe transversale de la même glande vers la moitié de sa longueur. a) Colonnette cartilagineuse avec les septa conjonciifs qui se détachent de son périchondre. Harinack , obj. 2. UN MOT SUR L'IRRADIATION; PAR M. i. PLATEAU, PROFESSEUR A L'UNIVERSITÉ DE GAND. Les physiciens qui s'occupent des phénomènes subjectifs de la vision, savent que, dans un Mémoire Sur rirradiation (1) publié en 1839, j'ai défendu l'ancienne théorie qui attribue le phénomène à une propagation de l'impression sur la réline. Dans ma deuxième NoleSwr les couleurs accidentelles ou subjectives (^), publiée en 1876, après avoir discuté tous les écrits relatifs à l'irradiation qui ont paru depuis 1839, j'ai soumis à un nouvel examen la théorie que j'avais cherché à faire prévaloir, et j'ai présenté tous les arguments en sa faveur. J'ai tâché d'établir que la réaction de la rétine contre l'action de la lumière émanée de l'objet irradiant s'étend au delà du contour de l'image de cet objet, d'abord dans la bande d'impression propagée, dont elle (1 } Mémoire de f Académie royale de Belgique , t. XL {2i Bulletin de P Académie royale de Belgique, 2"« série, t. XLIL p. 535 et 684. — 62 — limite la largeur, puis au elà encore, en produisant la teinte de contraste. Or, depuis cette dernière publication, j'ai recueilli, à l'appui de la théorie dont il s'agit, de nouveaux arguments qui me paraissent très puissants. Avant de les exposer, qu'il me soit permis de reproduire ce que j'ai dit à la fin de ma Note Sur une loi de la persistance des impressions dans l'œil (i), à propos de l'expérience suivante de M. Exner : Un disque partagé en secteurs alternativement blancs et noirs tourne avec une vitesse modérée, de manière qu'on y voit encore du papillotage; si, pendant qu'on le regarde, on se comprime graduellement les yeux , le papillotage s'efface et le disque se montre d'un gris uniforme, qui s'assombrit peu à peu. « M. Exner paraît faire dépendre le phénomène de ce prin- cipe, que l'action de la lumière épuise continuellement une substance photochimique nécessaire à la fonction visuelle, sub- stance continuellement restituée aussi par un aftlux dû à la cir- culation. Dans ces idées, en effet, avant la compression des yeux, l'afflux libre de la substance visuelle tendait à ramener la rétine à son état normal pendant le passage de chaque secteur noir, et ainsi amoindrissait rapidemment la persistance de l'impression incomplète engendrée par le passage du secteur blanc précédent; mais la compression diminuant l'afïïux dont il s'agit et amoin- drissant ainsi la cause qui ramène la rétine à son élat normal , l'impression persistante du secteur blanc décroît d'une quantité trop petite pour que l'œil puisse s'en apercevoir, et par suite, la teinte grise lui semble uniforme. » En réfléchissant à cette expérience, je me suis dit que si la compression des yeux amoindrit la réaction de la rétine, cette réaction doit perdre son influence sur la largeur de la bande d'impression propagée, et qu'alors conséquemment l'irradiation doit s'étendre beaucoup plus loin. Comme M. Exner signale le danger de se comprimer ainsi les yeux, je n'ai pas osé soumettre à l'expérience les personnes qui observent pour moi; mais je trouve. (1) Ibid., Ibid., t. XLVI , 1878, p. 334. — 63 — dans deux notes de Brewster (1), des faits qui apportent une nouvelle preuve en faveur de la propagation de l'impression, et peuvent, en outre, permettre de se passer de la compression volontaire des yeux. Dans la première note, il s'agit de l'affection passagère signalée par plusieurs auteurs et consistant en ce que le patient ne voit qu'une portion des objets. Brewster, chez qui cette affec- tion s'est présentée plusieurs fois, a constaté que lorsque l'image de caractères d'impression ou d'autres petits traits sombres tom- bait sur la portion de la rétine ainsi affectée, ces petits objets disparaissaient complètement, sans que le fond sur lequel ils étaient tracés parût perdre de son éclat. Il en conclut que l'im- pression du fond était propagée par l'irradiation sur les images de ces mêmes petits objets, et il ajoute : « Les portions qui sont affectées dans ce cas, s'étendent irrégulièrement ûu foramen centrale au bord de la rétine, comme si elles étaient en relation avec la distribution des vaisseaux sanguins de cette membrane, et conséquemment il est probable que la paralysie des parties correspondantes de l'organe était pioduite par leur pression. Cette opinion aurait pu être consi- dérée pendant longtemps comme une explication simplement rationnelle de l'hémiopsie, s'il ne s'était présenté à moi un phéno- mène qui la met hors de doute. Pendant une attaque assez intense, j'allai accidentellement dans une chambre obscure, et je fus sur- pris d'observer que toutes les parties affectées de la rétine étaient légèrement lumineuses, effet qui est invariablement produit par une pression sur la membrane. » La seconde note commence ainsi : « Dans un écrit sur l'hémiopsie, j'ai mentionné le fait remarquable que les parties de la rétine qui sont insensibles aux impressions visuelles sont sensibles aux impressions lumineuses, (1) On Hemiopsy,or Haif -Vision (Transact, of the Roy. Soc. of Edinburgh, I. XXIV, 1865, volume publié en 1867, p. 15). On a new property of the retina (Ibid., IBID., 1866, p. 327). — 64 — la lumière étant due à une irradiation envoyée par les parties adjacentes de la rétine. » Et, plus loin , Brewster décrit une affection du même genre qu'il a constatée dans son œil droit, avec cette particularité, qu'elle était permanente, et constituait ainsi une sorte d amau- rose locale, et il dit: . 191. (2) Die h'norpelzelUheilhing im Arch. f. Anat., Bel XVf, Hft. 2. (3) Beobachtungen Uber die Entstehung der Zellkerns. Wiener. Acad. Sit- zungsberichle. 7 Juni. 1877. (4) L c. , p. 264. (5) Centralblatt f. d. med. Wiss. 1879, n" 5, p. 91 . — 67 — méthode que j'ai indiquée ailleurs (i); je ne me suis servi de l'épisternum des grenouilles adultes, l'objet de Prudden , où les cellules sont plus petites et présentent une moindre vitalité, que comme terme de comparaison. A. — Structure du noyau (2). L'intérieur du noyau de la cellule cartilagineuse vivante pré- sente un aspect différent suivant l'objet où on l'examine et suivant la région qu'il occupe dans un même objet. Il paraît assez homo- gène, c'est-à-dire, à éléments solides d'une structure fine, dans la plupart des cellules constituant les plaques crâniennes du têtard. L'acide chromiqueou l'acide picrique, le premier en faible concentration (5) ne fait que rendre celte structure plus claire, sans l'altérer visiblement. On peut, en effet, dessiner à la chambre claire un noyau à éléments solides de structure fine; si ensuite on fixe ces éléments par irrigation de l'acide chromique, l'image ne sera pas changée. Dans d'autres cas les éléments solides du contenu nucléaire sont plus épais et grossiers, comme en général dans les cartilages de la grenouille adulte et du triton, dans quel- ques noyaux à petites dimensions (noyaux embryonnaires) qu'on rencontre dans le cartilage du têtard, enfin dans la couche super- (icielle d'une préparation du même cartilage; je n'ajoute pas les noyaux ratatinés des cellules mortes, dont je ne m'occupe point ici. L'acide chromique ou picrique fixe également cette structure convenablement; mais comme ces gros éléments solides du noyau deviennent, sous l'influence de ces réactifs, encore plus (1) L. 6',i). 255. (2) Je me sens obligé de revenir encore une fois sur ceUe question parce que depuis qu'a paru l'excf llenl travail de Flemhing {Beitrcige ziir Kenìilìiiss der Zelle und Hirer Lehenserscheinungen im Arch. f. microsc. Anal., Bd. XVI Hft. 2) mes nouvelles études m'ont fait modifier quelques-unes de mes opinions antérieures. En me servant d'une lumière artificielle {lampe de Hartnack) j'ai trouvé des structures réticulaires, là où auparavant, à la lumière du jour, elles m'étaient restées invisibles. (3) Voir Flkmming, /. c, p. 529. - 68 - resplendissants qu'ils ne le sont déjà par eux-mêmes, Tceil est privé de l'impression que, dans d'autres conditions, lui ferait une distance minime séparant les éléments les uns des autres. Il suit de là que dans les noyaux où les élémenls solides sont plus tins et moins resplendissants, ces derniers apparaissent, au moins à certains endroits, comme plongés librement dans le liquide nucléaire, tandis qu'il n'en est pas de même pour les noyaux à éléments solides plus grossiers, où, en général, tous paraissent tenir ensemble et fournissent souvent un aspect réticulaire. Entre ces deux formes la transition , loin de manquer, n'est pas rare. D'autre part, l'existence de noyaux entièrement homo- gènes ne peut être niée d'une manière absolue. On rencontre, en effet, il est vrai, très-rarement, des noyaux cartilagineux, où, non-seulement la meilleure lumière, mais encore l'irrigation de l'acide chromique ne font rien apparaître que les granulations protoplasmatiques placées à sa superficie; on rencontre de plus des noyaux où les éléments solides sont peu nombreux et man- quent complètement dans quelques endroits de l'espace nucléaire. Il se peut que les éléments solides du noyau en subissant une division très fine cessent de pouvoir être reconnus dans la matière liquide du noyau. B. — Phénomènes de motilité du noyau. J. Le noyau peut exécuter des mouvements d'ensemble: il ballotte légèrement sans quitter beaucoup sa position; ce n'est qu'au bout d'un temps assez long qu'on constate quelquefois un léger changement de place. Ces mouvements se manifestent indépendamment de la position qu'occupe le noyau, soit qu'il se trouve librement plongé dans le liquide protoplasmatique, soit qu'il soit refoulé à la périphérie ou même dans un coin de la capsule cellulaire. Dans le premier cas les mouvements sont tout à fait irréguliers, ils s'effectuent sans faire reconnaître une direc- tion déterminée; par contre, si le noyau est tangent à la péri- phérie, on le voit souvent ballotter de droite à gauche et vice versa. On devine facilement la cause de ces phénomènes : les - 69 — éléments solides du protoplasme distribués autour du noyau lui communiquent leurs mouvements. Si Ton fixe le bord du noyau en observation ainsi que la surface de sa moitié placée superfi- ciellement, on y reconnaît Texislence de granulations (ou fila- ments courts) déployant leur conlractilité, et Ton s'assure direclement que la molilité d'ensemble du noyau n'est qu'em- pruntée à celle des éléments solides du protoplasme. Alors que dans mon travail intitulé : Die KnorpelzelU/ieiliing , je fis con- naître les mouvements des éléments réfringents du protoplasme, j'ai conclu de la facilité avec laquelle s'opèrent ces mouvements à une consistance liquide du protoplasme (1) : aujourd'hui l'exis- tence des ballottements du noyau occasionnés par la motilité des éléments réfringents du corps cellulaire vient confirmer cette supposition. Mais ces éléments ne se bornent point à produire ces mouve- ments d'ensemble que présente le noyau : ils sont encore la cause de légers changements de forme que montre la surface nucléaire. Ces changements sont minimes : ils consistent le plus souvent en de simples aplatissements qui disparaissent aussitôt que la cause agissante est suspendue. Une seule fois je vis des éléments solides du protoplasme déterminer une forme de biscuit en pro- duisant de légers enfoncements à deux faces opposées d'un noyau elliptique. Une autre observation où un seul bâtonnet protoplas- matique suffisait pour refouler la membrane nucléaire, de ma- nière que l'extrémité du bâtonnet apparût du côté interne de cette membrane, met encore plus en évidence la faible résistance de l'enveloppe nucléaire. 2. Les éléments solides contenus à l'intérieur du noyau ne sont pas moins contractiles que ceux du protoplasme. Mais cette contractilité, comme l'on devine ii priori, doit se manifester dilfi- cilement, vu que les éléments solides se trouvent assez serrés dans le petit espace circonscrit par la membrane nucléaire. On ne s'étonnera donc pas de ne point rencontrer ces mouvements dans (1) L. c, p. 2o9. — 70 — chaque noyau. Il peut arriver même qu'on fixe une série de noyaux d'une même région sans y constater le moindre changement. D'autre part, la circonstance que les deux nucléoles d'un noyau peuvent garder très longtemps leur position relative parle à priori contre l'existence de mouvements d'une intensité un peu notable. Néanmoins la contractilité est une propriété commune à tous les éléments solides de chaque noyau cartilagineux, soit que ces éléments présentent une structure fine ou qu'ils soient épais et grossiers, soit qu'ils se trouvent dans les couches superficielles ou profondes de la préparation. Cette propriété peut se mani- fester durant un temps assez long ; il m'est arrivé trois fois qu'une préparation faite le soir et examinée le lendemain (douze heures après) présentait, dans des cellules bien conservées, des mouve- ments tant des éléments solides du noyau que de ceux du protoplasme. Il n'y a pas de différence réelle entre les mouve- ments de ces deux catégories d'éléments solides. A la suite de cette motilité, les bâtonnets ou filaments viennent très souvent à se toucher et peuvent tenir ensemble, de même que des bac- téries tiennent ensemble; ils forment alors une ligne droite qui peut occuper tout un diamètre de la sphère nucléaire, ou bien ils se touchent en formant un angle (point nodal de la structure dite réticulaire). D'autre part, des soudures réelles doivent être admises pour donner une explication aux changements qui peu- vent survenir dans l'épaisseur des éléments solides du noyau, vu qu'on observe quelquefois un noyau à éléments solides fins pré- sentant après un certain temps une structure plus grossière, et inversement (1). Ces mouvements à l'intérieur du noyau sont accompagnés de légers changements de forme qui trouvent leur explication dans la motilité des éléments solides internes. En effet, outre les changements à peine appréciables déterminés par les éléments solides du protoplasme et qui ne consistent généralement qu'en (î) Un jour un noyau à structure fine que j'avais observé durant un temps assez long, finit par devenir lout à fait homogène, de Ielle sorte que Tirrigalion par r acide eliromique ne fil apparaître aucune structure nucléaire. des aplatissements soit d'un côté, soit de plusieurs côtés à la fois, le noyau cartilagineux effectue d'autres changements de forme d'un caractère très lent; c'est ainsi qu'un noyau , d'abord sphé- rique, peut présenter de légères tuberosi tés, prendre successive- ment une forme ovale, elliptique et allongée, mais, il est vrai, chaque fois au bout d'un intervalle de temps assez considérable. Peut-être la contractilité de la membrane intervient -elle aussi dans ces changements de forme. On peut augmenter l'intensité des mouvements internes et des changements de forme, en élevant le milieu où l'on observe à une température de 20-25°C. La contractilité des éléments solides du noyau se manifeste alors avec beaucoup plus d'inten- sité : on observe clairement que chaque élément solide exécute des mouvements libres et indépendants, et qu'il effectue de véri- tables locomotions dans le liquide nucléaire; d'autre part, les changements déterminés du côté de la membrane deviennent tout aussi marqués que ceux que l'on peut observer au bout de quelques minutes dans l'épithélium de la queue d'un têtard \'ivant, et le noyau cartilagineux peut présenter maintenant des formes tout aussi irrégulières que celles connues pour le noyau de certains endotheliums (1). Il n'est pas sans intérêt de constater que , sans une élévation notable de la température du milieu ambiant, les noyaux de la couche la plus superficielle d'une préparation de cartilage du têtard montrent quelquefois des phénomènes de vitalité tout aussi accentués que ceux que nous venons de décrire en dernier lieu. J'ai déjà remarqué que ces noyaux placés superficiellement pré- sentent ordinairement des éléments solides plus épais que les noyaux placés profondément. Ces noyaux sont donc loin d'être morts : l'action de l'air ou le contact du verre à couvrir n'a fait que stimuler en eux le travail physico-chimique. (1) Il n'est pas rare de rencontrer alors des noyaux étranglés unilatéralement ou bilatéralement J'ai vu un jour un noyau où la forme de biscuit était tellement accentuée qu'à chaque instant je croyais voir survenir une division de ce noyau. 11 n'en fut rien : la membrane gagna après quelque temps une forme plus régulière. — Ta- si Ton compare ces résultats fournis par le noyau cartilagineux aux mêmes phénomènes que présente le noyau du globule sanguin rouge, on constate une différence notable quant à l'intensité des mouvements internes accompagnés de changements de forme. Ce qu'on ne voit dans le cartilage qu'à une certaine élévation de température, apparaît dans le globule rouge à une température modérée. Dans les leucocytes étudiés à ce point de vue par Strieker, la vivacité des mouvements est telle , qu'on voit les bâtonnets se fusionner (1) partiellement, puis se séparer de nouveau. A la suite de ces mouvements violents la membrane nucléaire peut paraître tout à fait ratatinée et se dérober quelque temps à l'observation. Je n'ai pas lieu de croire avec Strieker qu'une communication puisse s'établir (2) entre la masse nucléaire et la masse protoplasmatique à la suite d'un déchirement de la mem- brane, quoique je ne conteste nullement le pouvoir contractile de cette dernière. Les réactifs font encore souvent reconnaître une membrane, là où par Texamen de l'objet vivant on ne dis- lingue plus de limite entre le noyau et le protoplasme. C. — Altérations du noyau et du protoplasme. Je décris dans ce chapitre des phénomènes qui ra'élaient déjà connus l'année dernière, mais qu'alors j'ai cru inutile de commu- niquer, vu le peu d'importance qu'ils présentent au point de vue de l'histologie normale. Maintenant que Prudden (5), en parlant (1) J'ai observé aussi des fusionnenienls dans le noyau du cartilage élevé à une cerlaine lempérature (environ 2ooC). Comme on ne s'explique pas bien des cliangemenls (Je forme considérables sans l'existence de pareils fusionnements, et comme sans élévation notable de lempérature des changements de forme accentués surviennent dans beaucoup d'épitheliums et d'endothtliuras, je suis disposé à regarder ces fusionnements partiels comme des accidents parfaitement physiologiques, sinon pour le cartilage, au moins pour d'autres tissus fixes; sinon il faut admettre que la conlractililé de la membrane nucléaire contribue à déterminer ces changements de forme. (2) En dehors de la division nucléaire, bien entendu. (3) L. c, p. 191. /D (le la formation des vacuoles et de la rétraction du proto[)lasme de la cellule cartilagineuse sous l'influence de certains réactifs, a émis des opinions peu concordantes avec ma manière d'envi- sager la formation de ces altérations, je me sens obligé d'en dire également quelques mots. Le noyau, en perdant sa vitalité, ou bien se ride et forme une masse à contour irrégulier et à aspect réticulé, ou bien il ne perd que peu de sa forme arrondie et constitue un globe homo- gène d'une grande réfringence. Voici comment s'eff'ectue ce second mode d'altération. Si l'on fixe longtemps un certain nombre de noyaux d'une préparation de cartilage de têtard , maintenue dans un milieu élevé à une certaine température, on constate quelquefois que les éléments solides d'un noyau, com- pris en plein mouvement, se fusionnent tout à coup en une masse homogène; celte masse peut se séparer encore une fois en ses éléments primitifs, mais finalement il reste une masse homogène d'une moindre réfringence que le liquide nucléaire dans lequel elle plonge; plus tard encore cette différence en pouvoir réfringent n'est plus reconnaissable, et l'on a devant soi une petite masse resplendissante, telle que la peuvent fournir certains réactifs, l'alcool , l'alun et d'autres encore. Les altérations du protoplasme sont plus compliquées. Celui-ci commence généralement à se contracter en s'éloignant de la capsule à un degré très variable. Puis on voit se former, d'abord à sa périphérie, de petits globules d'une consistance probable- ment solide. Ces globules en se fusionnant peuvent former des fdaments, lesquels grossissent, se multiplient et peuvent se combiner sous forme d'un réseau irrégulier semblable à celui d'un noyau ratatiné. Ou bien ces globules se fusionnent tous entre eux, forment des globes de plus en plus grands (« vacuoles» des auteurs) qui peuvent se fusionner finalement en une seule masse plus ou moins homogène et à contour ridé et irrégulier. Mais cette masse homogène, de même que les filaments rélicu- laires formés dans d'autres conditions, ne se compose pas unique- ment des produits de cette nouvelle coagulation, elle contient en outre les éléments solides du protoplasme décrits par Fiem- 6 _ 74 — niing et moi. Ces éléments sont très variables dans leur fré- quence : je les ai rarement trouvés si nombreux que Flemming les dessine pour la Salamandra maculala (1). L'acide chromique, quand il n'occasionne pas une rétraction du protoplasme, montre que ces éléments solides sont très peu nombreux dans la plupart des cellules du cartilage de têtards; on ne voit que quelques fila- ments placés entre le noyau et la capsule et quelques granulations (ou filaments courts) autour du noyau. Ce n'est qu'en élevant la température du milieu ambiant qu'on voit de longs filaments partir de la périphérie pour se diriger vers le noyau. D'autre part, ces éléments protoplasmatiques semblent être beaucoup plus nom- breux dans le protoplasme des cellules de la grenouille adulte. 11 est donc difficile de dire pour combien ces élémerfts protoplas- matiques entrent dans la formation des images d'altération ; cette part est très variable, mais toujours est-il qu'elle ne peut pas être négligée. D. — Conclusions. Les phénomènes décrits dans le chapitre B me semblent per- mettre les conclusions suivantes : 1° La dénomination de « structure réticulaire » pour l'en- semble des éléments réfringents du noyau manque d'exactitude. Car 2° de même que le protoplasme de la cellule cartilagineuse se compose de deux matières différentes, d'une substance presque liquide , homogène et d'éléments solides doués d'une contractilité qu'ils déploient librement; de même le noyau se compose d'un liquide nucléaire et d'éléments solides contractiles. La capsule, d'une part, la membrane nucléaire, d'autre part, délimitent les matières constituant le protoplasme et celles constituant le noyau. (1) L. c, planche XV, figure 2. RECHERCHES SUR L'OSSIFICATION DU MAXILLAIRE INFÉRIEUR ET SUR LA CONSTITUTION DU SYSTÈME DENTAIRE CHEZ LE FOETUS DE LA BAL.EÎVOPTERA ROSTRATA ; par Charles JULIN, Assistant du Cours d'embryologie à l'Université de Liège. L Configuration générale. (PI. I, fig. 1 et 2.) Le maxillaire inférieur du fœtus de Batœnoptera roslrata, qui m'a servi pour cette étude, a la forme d'un S italique allongé. Il présente par conséquent deux courbures. Le point de réunion des deux courbures est plus rapproché de l'extrémité postérieure que de l'extrémité antérieure de l'os;^ le rayon de courbure de la portion antérieure étant plus grand que celui de la portion pos- térieure. L'angle de la mâchoire n'existe pas; la partie de l'os repré- sentant la branche montante se continue en ligne droite avec la portion alvéolaire. La longueur du maxillaire, d'une extrémité à l'autre, est de 84 millimètres; sa largeur et sa hauteur mesurent en moyenne 6 millimètres dans toute retendue de la portion alvéolaire; elles atteignent en moyenne 9 millimètres, à la partie postérieure de l'os. Cette partie postérieure du maxillaire est donc un peu plus volumineuse que la portion alvéolaire. Ceci est d'ailleurs con- forme à la description qu'a faite Eschricht du maxillaire infé- rieur d'un fœtus de Pterobalœna minor (Balœnoptera rostrata) de 9 pouces de longueur (1). Il y a à considérer au maxillaire deux parties : 1° Une partie antérieure ou portion alvéolaire, étendue de la symphyse ou extrémité antérieure à Vapophyse coronoïde; 2° Une partie postérieure ou portion représentant la branche montante, étendue de l'apophyse coronoïde à l'extrémité posté- rieure ou condylienne. l*" Portion alvéolaire. Nous distinguons à la portion alvéolaire deux faces et deux bords : Une face interne, une face externe, un bord supérieur et un bord inférieur. La face interne, concave en avant, convexe en arrière dans le sens horizontal, présente une légère convexité dans le sens ver- tical. Vers la limite postérieure de la portion alvéolaire, le carti- lage de Meckel (2) sort du corps du maxillaire, et vient longer la face interne de la portion condylienne. La face externe, convexe en avant, concave en arrière, dans le sens horizontal, est aussi légèrement convexe dans le sens ver- tical. Le bord supérieur, plus mince dans sa partie antérieure, s'élargit vers le milieu de sa longueur pour se rétrécir de nou- veau vers l'apophyse coronoïde. Dans sa partie élargie, il n'est pas complètement plan, mais présente une légère excavation, limitée de chaque côté par une petite saillie. Le long de ce bord se trouve la gouttière dentaire ou gouttière alvéolaire (5), qui (1) Eschricht. Untersuchungen Uber die Nordischen Wallthiei^e. Ersler Band, p. 123. Leipzig, 1849. (2) MeckeVsche Strang ou Unterkieferknorpel ou encore Urunterkiefer de Eschricht. (ô) Sulcus alveolaris de Eschricht. — 77 -- loge les follicules ou germes dentaires (i) au nombre de 41, disposés dans la gouttière en une série continue depuis la sym- physe jusqu'à l'apophyse coronoïde. Quant au bord inférieur^ il est mousse et n'offre rien de par- ticulier. La symphyse de chaque moitié du maxillaire est réunie à celle de l'autre moitié par une bande de tissu conjonctif,de telle sorte que le grand axe du maxillaire forme avec la ligne médiane un angle d'environ 65°. 2° Portion représentant la branche montante. Cette portion nous offre à considérer l'apophyse coronoïde et le condyle. V apophyse coronoïde (2) a la forme d'un triangle rectangle à base inférieure, à sommet supérieur, dont i'hypolhéni;se est le prolongement du bord supérieur de la portion alvéolaire, et est constituée par la réunion des deux saillies latérales que nous avons signalées à la partie élargie du bord supérieur, de la por- tion alvéolaire. Ces deux petites saillies se rapprochent de plus en plus, au fur et à mesure qu'elles s'éloignent de l'extrémité antérieure de Fos, et finissent ainsi par se rejoindre pour consti- tuer le bord antérieur de l'apophyse coronoïde. Le condyle est assez volumineux et formé par deux tubéro- sités : une inférieure, représentant la véritable extrémité posté- rieure de l'os, et à laquelle Eschriclit donne à tort le nom de : angulus maxillœ; l'autre supérieure, constituant ce que ce savant appelle Vapophyse condylienne (3). Ces deux eminences mousses sont séparées l'une de l'autre par une légère échancrure, ce qui donne au condyle l'aspect d'une vraie poulie. Enfin à l'origine du condyle, on distingue à la face interne le trou dentaire, c'est-à-dire l'orifice du canal dentaire. Le condyle, tout comme l'apophyse coronoïde, est dirigé obli- (1) Zahnkeime de Eschricht. (2) Processus coronoicleus de Eschricht. (3) Processus condyloideus. — 78 ~ quomenl de bas en haut, d'avant en arrière et de dedans en dehors. Si nous examinons (pi. I, fig. 5.), une coupe pratiquée trans- vcrsalemenl, vers le milieu de la portion alvéolaire, nous trou- vons qu'il faut y considérer les différentes parties suivantes : i° A la surface : la peau en dehors, la muqueuse buccale en dedans; 2" La gouttière alvéolaire; 5" Le maxillaire osseux ; 4° Le cartilage de Meckel. La peau est en continuité avec la muqueuse buccale le long du bord supérieur du maxillaire ; c'est aussi le long de ce bord que se trouve insérée la lèvre inférieure. La gouuière alvéolaire est creusée dans le maxillaire osseux, et ses parois sont constituées par lui. Elle est remplie d'un tissu conjonctif, dans lequel sont logés les follicules dentaires vers le haut et le faisceau des vaisseaux et nerfs dentaires vers le bas, sous les follicules et dans le fond de la gouttière. Le maxillaire osseux est constitué par des travées osseuses s'anastomosant entre elles, ainsi que le montre la figure 3. Entre ces travées on observe des mailles, occupées par un tissu, dont les caractères varient suivant qu'on le considère dans l'axe du maxillaire, formant le fond de la gouttière alvéolaire, ou à la périphérie de l'os. Dans l'axe du maxillaire, ce tissu affecte l'aspect d'un tissu muqueux riche en vaisseaux sanguins; à la périphérie, au contraire, il présente des caractères particuliers que je définirai plus loin, en décrivant l'ossification du maxillaire osseux. Enfin, nous trouvons, vers la face interne du maxillaire, le cartilage de Meckel^ entouré des lamelles périchondrales. — 79 — II. Gouttière alvéolaire et follicules dentaires. (PI. I, ng. 4 et 5.) La gouttière alvéolaire ne présente ni la même forme, ni la même situation dans toute la longueur de son trajet. Je ferai d'abord remarquer que ce que j'entends par gouttière alvéolaire comprend en réalité : le canal dentaire^ c'est-à-dire le fond de la gouttière, renfermant le faisceau des vaisseaux et nerfs dentaires, et la gouttière alvéolaire proprement dite, c'est-à-dire la partie supérieure logeant les follicules dentaires. La gouttière alvéolaire proprement dite ne s'étend que de la symphyse jusqu'à l'origine de l'apophyse coronoïde, et le tissu conjonclif qui la remplit présente les caractères du tissu derma- tique de la peau; le canal dentaire s'étend de la symphyse jusqu'à l'orifice du canal, situé, comme nous l'avons vu plus haut, à l'ori- gine du condyle; le tissu conjonctif qui entoure les vaisseaux et les nerfs est moins dense que le tissu dermatique et présente la même texture que le tissu sous-dermatique. Peu large, mais assez profonde dans sa partie antérieure, oii elle occupe à peu près la moitié de la hauteur du maxillaire, la gouttière alvéolaire s'élargit progressivement, tout en diminuant de hauteur, au fur et à mesure qu'elle s'éloigne de la symphyse. Elle arrive ainsi à occuper en largeur, à très-peu de chose près, toute l'épaisseur du bord supérieur du maxillaire : cet élar- gissement de la gouttière alvéolaire correspond précisément à l'élargissement du bord supérieur que j'ai signalé (p. 72). Cepen- dant, vers son extrémité postérieure, elle se rétrécit de nouveau tout en s'approfondissant. Dans la plus grande partie de sDn étendue, la gouttière alvéo- laire est placée perpendiculairement au bord supérieur de l'os; cependant celte direction n'est pas bien rigoureuse et dans une partie de son trajet elle est dirigée de telle sorte que son fond regarde en dehors. Immédiatement en arrière du dernier follicule dentaire, le ^ 80 — tissu constituant le maxillaire osseux entoure progressivement la gouttière, en procédant de dehors en dedans, et la gouttière se transforme ainsi peu à peu en un canal. En réalité, la gout- tière alvéolaire proprement dite cesse d'exister et est remplacée par le tissu de Tapophyse coronoïde, de telle sorte que le canal dentaire qui, dans la portion alvéolaire, était limité en haut par la gouttière alvéolaire proprementdite,estici limité par l'apophyse coronoïde en haut, en bas el sur les côtés par le maxillaire osseux. Plus loin encore de la symphyse, le canal dentaire gagne pro- gressivement le centre du maxillaire osseux, qui en ce point l'entoure par conséquent de toutes parts. Enfin, il se rapproche peu à peu de la face interne de l'os, n'est bientôt plus limité par le maxillaire osseux, que dans sa moitié externe, sa moitié interne étant entourée par du tissu conjonctif, qui sert d'une part à l'unirà l'os, et d'autre parta le séparer de la partie supérieure de la face externe du cartilage de Meckel. Le canal dentaire continue à sortir de plus en plus du maxil- laire osseux, en passant au-dessus du cartilage de Meckel, et il est complètement dégagé de l'os, lorsque l'on ne trouve plus sur la coupe que du tissu constituant le condyle. La gouttière alvéolaire proprement dite renferme 41 follicules ou sacs dentaires, placés l'un à côté de l'autre en une série con- tinue (i). En 1807, Geoffroy Saint-Hilaire (2) signala, pour la première fois, dans le maxillaire inférieur d'un fœtus de Balœna mysii- cetus, la présence de « germes de dents » qui lui paraissaient distribués dans la gouttière alvéolaire a comme les dents elles- mêmes des cachalots. » Meckel en 1829 (5) et Carus en 1834 (4), confirmèrent cette découverte. (l) Eschricht en a compté 42 dans le ntiaxillaire inférieur d'un fœtus de 3o pouces de longueur {loc. cit.). (^) Annales du Muséum, vol. 10, p. 364. (3) Meckel. System, vergi. Anal. IV, 315. (4) Cììrus. Zootomi e , I,2o0. — 81 — Cuvier, dans la seconde édition de l'anatomie comparée (J), signala non-seulement au maxillaire inférieur, mais aussi au maxil- laire supérieur de fœtus de Baleines général calcifié, se résorbe, la substance propre de l'os vient f) prendre sa place. La calcification du cartilage n'est donc qu'une D transformation provisoire. » Les capsules osseuses radiées ne se forment ni par dépôt R de couches d'épaississement, qui par des inégalités de déve- » îoppement formeraient des pores en canalicules, étendus j> entre les parois calcifiées des capsules cartilagineuses, ni î> par rétrécissement progressif de ces capsules; mais elles » sont dentelées, étoilées, dès le début, comme le sont les cel- » Iules, qu'entoure la substance fondamentale nouvellement » formée. (1) H. Millier. Ueberdie Entiiicklung der Knochensubstanz, nebst Bemerkun- gen uberden Bau der raohitischen Knochen. (Zeischr. f. wiss. Zolog. Bd. IX, 1858, p. 145) (2) Loco citato, p. 149. - 96 - » Ces cellules doivcnl, en parlie tout au moins, être considé- D rces comme dérivant des cellules cartilagineuses du cartilage B primordial. » La formation de la substance propre de l'os provient en B partie de la face externe du cartilage, en partie de sa face » interne, notamment des canaux cartilagineux et des espaces T> médullaires de l'os développé. » La masse osseuse ne provient pas en partie d'un cartilage, B et en partie d'une masse ressemblant à du tissu conjonctif, » mais seulement de ce dernier tissu. » Bref, d'après H. Mùller, dans l'ossification, le noyau cartilagi- neux subit des transformations : prolifération des éléments car- tilagineux; bypertrophie de ces éléments; calcification de la substance fondamentale du cartilage, et enfin formation d'es- paces médullaires par résorption des cloisons de substance fon- damentale calcifiée, séparant les capsules cartilagineuses l'une de l'autre. Ces transformations amènent la formation des espaces médullaires, remplis d'un tissu particulier, d'apparence conjonc- tive, tissu qui provient en partie du cartilage (1), en partie du péricliondre, devenu périoste : c'est ce tissu qui donne naissance à la substance propre de l'os. Enfin, H. Muller admit jusqu'à un certain point avec Berg- mann (2) la distinction du squelette en squelette primaire, secon- daire et tertiaire. Tels sont, en quelques mots, les résultats, auxquels Heinricb Muller fut conduit, résultats qui renversaient complètement la transformation directe du cartilage en tissu osseux. Un grand pas était fait dans l'étude de l'ossification; mais cependant les recherches si remarquables de Muller laissaient (1) Bien que H. Muller admeUe comme hors de doute que les éléments du car- tilage se transforment en elements de la moelle foetale, cependant il déclare n'avoir jamais fait d'observation directe sur ce sujet. Il explique cette particularité par !a rapididé avec laquelle se fait cette transformation. (2) Ueber die Skelets'jsteme dei' Wirbellhiere. Gôttinger Studien, 1843, I Ablhl.S. 200. — 97 — une grande lacune. En effet, Millier considérait la substance fondamentale de l'os comme un produit de sécrétion; mais d'où provient celte sécrétion? provient-elle des cellules médullaires, des cellules osseuses étoilées ou des vaisseaux sanguins? Com- ment se forment les corpuscules osseux? d'où provient cette masse compacte qui constitue les lamelles osseuses? Ce sont là autant de questions que H. Millier n'avait pas réso- lues. Les recherches de Baur (1), tout en arrivant aux mêmes con- clusions que celles de H. Millier, ne donnèrent guère d'explica- tions plus satisfaisantes sui ces questions essentielles. Lieberkiihn (2) essaya encore de rétablir les anciennes ma- nières de voir sur lossificalion du cartilage hyalin; mais il ne rallia aucun auteur à son opinion. C'est alors que parurent presque en même temps les tra- vaux de Gegenbaur (5), de Landois (4) et de Waldeyer (5), qui vinrent confirmer les résultats de H. Millier, pour ce qui con- cerne la participation du cartilage dans le processus de l'ossifi- cation. Gegenbaur considéra deux couches de cellules dans les espaces médullaires primordiaux : une couche externe, qu'il appela « couche des ostéoblastes » constitue une couche continue de revêtement, tapissant la face interne de l'espace médullaire à la façon d'un epithelium; cette couche est en corrélation directe (1) Mùller's Archiv. 1557; p. 347. Zur Lehre von der Verknocherung des pri- mordialen h'norpels. ^ {2) Ueber die Ossifikation des hyalinen Â'norpe/s. (Reichert's und Du Bois Rey- moiid's Archiv. 1862; p. 702.) — Beitrage zur Lehre von der Ossifikation. Ibid. 1865; p. 1 H. — Ueber h'nochenwachsthum. Ibid 1864 ; p. "îOS. (5) Gegenbaur. Ueber die hildu7ig d^s Knochengewebes. (Jenaische Zeilsch. fur Medicin und Naturw. 1 Bd. 1864. Hft. ô, p. 345.) (i) Cenlralbîalt fur die Medic. Wissenschafl. Berlin, 1865. N^ 16, 8 April 1863 Ueber die Ossifikation der Geweihe. — N"- 18, 27 April 1865. Ueber den Ossi fikations process. — ^^ 32, 22 Juli 1865. Ueber die Ossifikation der Sehnin. (5) Berliner Cenlralbîalt fur die Medic. Wissenschafl, N"- 8 von 8 Februar, 1863. - 98 — avec la formation du tissu osseux; une couche interne, remplis- sant tout le reste de l'espace médullaire, sert surtout au déve- loppement de la moelle osseuse. f.es ostéoblastes avaient cependant été signalés avant Gegen- baur; mais il a le mérite d'avoir trouvé leur véritable valeur et de ravoir interprétée. C'est ainsi qu'Ollier les appelait les « cel- lules du périoste », que R. Maïer (1) les considérait comme un epithelium des canaux de Havers. Enfin, Bruckholz (2) dit : « J'ai » trouvé les cavités, limitées par ces travées osseuses, (cavités î) médullaires) remplies de cellules couchées les unes sur les D autres, le plus souvent inégales, et disposées en certains cas D d'une manière régulièrement radiée, contre la paroi externe » de ces cavités. Nulle part on ne voit ces noyaux, et ils se trou- î> vaient si serrés qu'il n'existait entre eux que peu ou point )> de substance intercellulaire. » Ce sont les ostéoblastes constitués comme l'a décrit Gegen- baur (3) qui fournissent une sécrétion dure, la substance fonda- mentale de l'os; eux-mêmes se trouvent çà et là renfermés dans cette substance fondamentale et deviennent alors des corpus- cules osseux étoiles. D'après Gegenbaur, toute formation osseuse procéderait de ces cellules. A peu près en même temps que Gegenbaur, Waldeyer (4) découvrait, dans ses recherches sur le développement des dents, une couche de cellules jouant identiquement le même rôle que les ostéoblastes de Gegenbaur; il leur donna le nom « de cellules de la dentine» puis d'odontoblastes. Ces cellules, d'après Wal- deyer, jouaient le même rôle dans la formation des dents, que les ostéoblastes dans la formation du tissu osseux. Mais, tandis que Gegenbaur et Landois (5) considéraient la (1) Das Wachsthum der h'nochen Freiburg, 1855. (2) Einige Versuche ilber kiinslliche Knochenbildung. (Virchow's Archiv. 26 Bd p 88.) (3) Loco citato, p 349. (4) KÔnigsbergor Medic. Jahrhiicher. Jahrg. 1864. — Zeilschritf. f. ration. Medic. 1SJ63. Bd.24. (5) Centralblatl fiir Medic, Wissensch. Berlin, 1865. N' 18. ^ 99 — substance fondamentale du tissu osseux comme un produit de sécrétion des ostéoblastes, ceux-ci prenant alors une forme éloilée pour devenir corpuscules osseux, Waldeyor admettait pour la formation de cette substance fondamentale un processus identique à celui décrit par Max Schuitze (1) et Beale (2) pour la formation de la substance intercellulaire du tissu conjonctif, et par Landois (5) lui-nième pour le tissu conjonctif des ten- dons. Pour Waldeyer, une partie des ostéoblastes se transforment complètement, protoplasme et noyaux, en la substance fonda- mentale d'un tissu conjonctif plus ou moins (îbreux, qui s'im- prègne de sels calcaires; les autres ostéoblastes ne subissent cette transformation qu'à leur périphérie, le reste du proto- plasme avec le noyau constituant les corpuscules osseux (4). Ces faits établis sur l'origine de la première couche de sub- stance osseuse, d'autres questions se présentaient aussitôt. D*où provient le tissu médullaire? Comment se forment les premiers ostéoblastes d'abord, puis ceux qui servente l'accrois- sèment ultérieur de l'os? j'ai déjà dit plus haut quelle était l'opinion de H. Millier sur cette question. (1) Obserimtiones de retinœ siructura penifiori. (Comment. Academ. Bonnae, Ì859; pp. 13, 14, 17. -- Ueber Muskelkorperschen, etc. (Reichert's iiud Du Bois Reymond's Aichiv. 1861 ; p. 12.) (2) Die Struciur der einfachen Geicehe des menschlichen Kbrpers, Uhersetzt von V.Carus. Leipzig, 186'2; pp. 96 et suiv. — Lectures on the structure and growth of the tissues of the human bodi/. (Archives of medicine. April 1861 , an. 1862.) (3) Berliner Medic Centraiblatt , 1865. N'32. (4) Ein Theil derselben (Ostéoblastes) gehl mil Scbwund des Kerns ganz die Umwandluiig in ieimgebendes mehr oder minder fasriges Gewebe ein, welches bei der normalen Verknocherung fast gleichzeilig die Kalksaize aufnimmt; von einem andern Theile thun das uur die penpheren Protopla.smaschiohlen der Rest bleibi als Kernhaliiges « Knochenkorperchen *. in seiner Intercellularsubslanz, der Knochensubsianz, zuriick, wie ein Bindegewebs korperchen in der Sehnen- subslanz. Ueber den Ossifikationsprocess. (Schultze's Archlv. fiir Mikroskop Anat. I Bd., p, 359. 1805. — 100 — Virchow (i) avait déjà, à celte époque, soutenu une opinion, émise par Reichert (2) et défendue ensuite par Brandt, d'après laquelle le tissu médullaire procéderait des cellules de cartilage. D'après ces auteurs les cellules de cartilage se multiplieraient, se transformant ainsi en les petites cellules de la moelle fœtale, et ensuite par la métamorphose de ces dernières, contribueraient à former les éléments ultérieurs de la moelle, c'est-à-dire les fibres, vaisseaux, nerfs et cellules adipeuses. Kôlliker (5), sans s'inscrire cependant complètement en faux contre cette manière de voir, déclara n'avoir jamais rencontré la moindre trace de formation endogène de cellules dans les cap- sules cartilagineuses en voie d'ossification, et admit que les cel- lules de la moelle procédaient d'une formation nouvelle. Ranvier (4) soutint l'opinion proposée d'abord par H. Mill- ier (o) que certaines cellules médullaires peuvent devenir cellules osseuses. « Dans la majorité des cas, dit Ranvier (6), l'ossifica- » tion du tissu cartilagineux n'est pas directe, c'est à-dire que » les cellules du cartilage ne concourent à la formation des cor- » puscules osseux qu'après avoir subi une première modifica- D tion, qui les prive de la faculté de former autour d'elles de la p substance cartilagineuse. Ces cellules qui peuvent êlre quali- » liées de cellules embryonnaires de la moelle, ou d'une façon » plus générale, de cellules indifférentes (Foerster) peuvent D prendre bientôt une propriété nouvelle, celle de former de la » substance osseuse, d H. Millier cependant n'admettait pas que toutes les cellules de (1) Vircljow. Der normale Knochennmchsthum , iind die rachitische Stôrung derselben. (Archiv. f. palh. Anatom. Dd. V,p. 4(19. 1852.) (2) Reichert. Dissertation sur le lissii conjonrtif. 1846. —Archives deMùIIer. 1850. (0) Kôlliker. Éléments d'histologie humaine. Paris 1856. (1) Quelques points rei i tifs à la préparation et aux propriétés des cellules de cartilage, p. 577. (Journal de Physiologie de Hrown-Retiuard , lome VI, 1855.) — Traité d'histologie, pp. 457 et suiv. (5) Loco citalo. (G) Loco citato. — 101 ~ la moelle provinssent des cellules cartilagineuses, ainsi que je Pai fait reniarquer plus haut. C'est alors que fut publié le travail de Gegenbaur. Pour cet auteur, les osléoblastes se forment aux dépens des cellules médullaires primitives, celles-ci dérivant en partie des cellules cartilagineuses. Ce fut Waldeyer {loc. cit.) qui étudia le plus complètement la transformation des cellules cartilagineuses en « tissu médullaire jeune », comme il appela la couche interne du tissu médullaire, et les modifications que subit ce tissu médullaire jeune pour devenir tissu ostéoblastique. « Das junge Markgewebe, dit-il (1), das man eben so passend Ossifikationsgev^ebe nennen kônnte, ist die Matrix der Osleoblasten, in der selben Weise wie die Zahn- beinpulpe Matrix der Dentinzellen ist. » Frey (2) croit aussi que les cellules de la moelle embryonnaire proviennent des cellules cartilagineuses et subissent des modifi- cations différentes : les unes donnant naissance aux éléments ultérieurs de la moelle (fibres, vaisseaux, nerfs, etc.), les autres pouvant se transformer en corpuscules osseux, en passant par la phase intermédiaire d'ostéoblastes. Malgré Taccord qui régnait, entre tous les observateurs que j'ai signalés, sur l'intervention des cellules du cartilage dans la formation du tissu médullaire, il se trouva cependant trois auteurs qui combattirent ces idées. Lovén, Stieda et Streizoff, contrairement à l'opinion générale soutinrent que dans le pro- cessus de l'ossification, le cartilage joqe un rôle purement passif. Pour eux les éléments cellulaires du cartilage, après avoir pro- liféré, s'hypertrophieraient, se ratatineraient et finiraient par disparaître, en subissant une destruction moléculaire. Lovèn (5) n'indique pas ce que deviennent les cellules du car- (1) Loco citato, p. 564. (2) Frey. Histologie und Histochimie. 3' Aufl Leipzig, 1870; p 354. (3) Studier och undersókningar ufver benvâfnadeti , fôrnamligast med afseendepd dess utweckling. Analysé dans Quain's Anatomy, p. ex, par Siiarpey, et dont un extrait a été publié en 1872 dans les « Comptes rendus de la Société physico-médicale » de Wurzbourg. — 102 — lilage; niais, d'après lui, ce seraient les vaisseaux sanguins des espaces médullaires, qui entraineraienl avec eux les cellules embryonnaires de la moelle, celles-ci provenant du périoste. D'après Stieda (1) ce seraient aussi les vaisseaux sanguins qui charieraient dans les espaces médullaires les cellules embryon- naires de la moelle, provenant du périoste, et ces cellules con- stitueraient à elles seules les cellules médullaires, c'est-à-dire la moelle fœtale. Une opinion analogue est soutenue par Strelzoff (!2) : |)Our lui aussi toute la moelle embryonnaire proviendrait du tissu sous périostal, qui après avoir proliféré, amènerait la destruction progressive des capsules cartilagineuses, servirait à la formation des ostéoblastes et se substituerait ainsi progressivement aux éléments du cartilage, lesquels se ralatineraient ainsi que je l'ai dit plus haut. Cette manière de voir fut admise également parSteudener (5), Thierfelder (4) et Wolff (5). Les études plus récentes de M. Leboucq (6) ont amené cet auteur à combattre cette opinion. Selon lui, les cellules cartila- gineuses prennent une part très-active dans la formation des os longs des mammifères. « A une période d'évolution, dit-il, on les retrouve dans les canaux médullaires primordiaux où elles remplissent un rôle analogue aux ostéoblastes. » Jl me reste encore à examiner les diverses opinions qui ont été soutenues sur la formation des espaces médullaires. (1) Siieàn. Die Bildung des Kììochengeicebcò. Leipzig 1872. (2) Stit'lzoff. Ueber die Imtogenese der Knochen. (Unters. uus 0. I^ath. Insl. ni Zurich.) 1,1873; p. i. (3) Steudener. Beilrdge zur Lehre von der Knocheuentwicklung und dem Knochenicachsthum. Halle, 1875. (4) Thierfelder. Ueber die Bedeutung der provisorischen h'norpelverkalkung. (Archiv. der Heilk., XVI, p. 441 , 1875, réf. in Hoirmanu und Schwalbe's Jahres- ber.) (5) Wolff. Ueber die Entaicklumj des nicht prœformirten Knochengeaebes. (CenU-alblall f. Med Wiss. 1875, m 20.) (6) Leboucq. Études sur l'ossification. (Bullet, de TAcad. royale des sciences de Belgique,! XLlV,ii" 11, 1877; p. 501.) — 103 — Pour la majeure parlie des hislologisles, qui se sont occupés de 4a question, pour H. Mûller, Kôlliker, Gegenbaur, Waldeyer, Frey, etc., etc., ces espaces médullaires seraient dus à la résorp- tion de la substance l'ondameniale calcifiée ou ossifiée, dans la- quelle, suivant l'expression de Koliiker (1), on verrait se former a des cavités limitées par des contours irrégnliers, comme » rongés. » Il y aurait un ramollissement d'abord, puis une disso- lution de la substance fondamentale. Mais aucun de ces auteurs n'a donné une explication du processus complet dans ce mode de formation des espaces médullaires. Toutefois H. iMûlIer (2), constatant la présence de vaisseaux sanguins dans les espaces médullaires en voie de formation, fit remarquer que ces vaisseaux pourraient bien jouer un certain rôle dans la résorption. Ranvierdit, dans son traité d'H^s^o/og'/e (pp. 457 etsuiv.), que la résorption de la substance fondamentale du cartilage calcifié est due aux vaisseaux sanguins, cette résorption ayant lieu dans la direction des vaisseaux. 11 a observé chez de très-jeunes em- bryons des espaces paraissant remplis de globules rouges de sang; c'étaient des dilatations énormes des anses capillaires, qui remplissaient tout l'espace médullaire, a Dans ces cavités, » ajoute-t-il, il y avait résorption du cartilage, quoiqu'il n'y eût » pas de cellules de la moelle. » Enfin, pour Strelzoff (3), les espaces médullaires ne naîtraient pas par résorption, niais par ce fait qu'il ne se formerait pas de tissu osseux, à la place occupée par eux. L'accroissement des espaces médullaires serait, d'après lui, produit par l'accroissement du cartilage, l'expansion et le dé- placement des travées osseuses. Je viens ainsi de passer en revue les principaux travaux que l'on a publiés sur l'ossification du cartilage : j'ai indiqué briève- ment les différences essentielles existant entre les différentes (i) Kôlliker. Éléments cV histologie humaine. Paris, 18oG; p. 276. {•Ij H. iM tiller. Loco citalo. Ç>) Loco citato, p. 87. — i04 — manières de voir des observateurs qui se sont occupés de celle question. Il me reste maintenant à examiner les opinions successives que l'on a émises sur la formation du tissu osseux aux dépens du tissu conjonclif proprement dit. H. Millier admit avec J. Mûller, Yirchow, Sharpey, Bruch et Kôlliker que du tissu osseux peut se former aux dépens d'un tissu conjonclif. Mais, contrairement à l'opinion soutenue par ces auteurs, qui prétendaient avoir constaté une ossification directe du tissu conjonclif, la substance fondamentale de ce tissu se transformant par imprégnation en substance fondamentale de l'os, et les cellules conjonctives en cellules osseuses, H. Mûller prétendit, au contraire, que le processus d'ossification était, dans son essence, identique à celui qu'il avait décrit pour l'ossification indirecte du cartilage. Gegenbaur partagea aussi celte manière de voir, et constata au périoste toute une couche complète d'os- léoblastes, comme dans les espaces médullaires des os formés aux dépens d'un noyau cartilagineux. Cependant Gegenbaur ne contesta pas d'une façon absolue la possibilité d'une transforma- tion directe du tissu conjonclif en tissu osseux. Celte dernière opinion fut d'ailleurs soutenue par Lieber kûhn (1) et Oilier (2) à peu près à la même époque. D'après H. Millier (3) et Landois (4) qui à cette même époque s'occupèrent encore de celle question, il se formerait aussi dans les tendons d'oiseaux en voie d'ossification, des espaces médul- laires tout comme dans le cartilage hyalin, et ici la nouvelle sub- stance osseuse proviendrait d'osléoblastes. Waldeyer déclara qu'il n'y a pas de différence entre la forma- tion du tissu osseux aux dépens du cartilage et la formation de ce tissu aux dépens du tissu conjonclif. (i) Liebeikiihn. (Reichert's und Du Bois Reymond Archiv., 1804, pp. 6I0et Gli.) (2) Oilier. (Brown Sequard. Journal de Physiologie, 1865, p. 2:27.) (ô) H. Millier. Wurzburger naturw. Zeilsch. 1863, pp. 43 etsuiv. (4) Landois, Berliner Med Cenlralblalt, 1863, n° ÔHr — lOo — Il soutint sur cette question la même opinion que celle que nous avons résumée plus haut, et qu'il avait émise au sujet de l'ossification d'un noyau cartilagineux. H ne nia cependant pas non plus que, dans certains cas, on ne puisse rencontrer une ossification directe du tissu conjonctif. Enfin, tout récemment M. Masquelin (Ì) signala la coexis- tence de l'ossification directe et de l'ossification indirecte tant du cartilage que de toute espèce de tissu conjonctif. M. Éd. Van Beneden, dans le rapport (2) qu'il présenta sur ce travail à l'Académie de Belgique, résume les idées de l'auteur de la façon suivante : « Le tissu ostéogène dans lequel se développe la lame primitive » et la plus grande partie du maxillaire, est formé de cellules » séparées entre elles par une substance fondamentale de compo- » silion variable : ici c'est de la substance fondamentale de carti- » lage hyalin, ailleurs elle est formée par des faisceaux de fibrilles » conjonctives ; au début elle est une substance qui, au point de » vue de ses caractères physiques et de sa composition histolo- » gique, est intermédiaire entre les deux précédentes; ailleurs » encore elle paraît être le résultat de leur combinaison; elle a » tous les caractères de la substance fondamentale du fibrocar- » tilage. » Dans le cartilage du condyle l'on peut observer, en des » points différents, l'ossification indirecte et l'ossification di- » recte, et celle-ci peut se faire suivant deux procédés différents » que Strelzoff a le premier distingués. » B. — Ossification du cartilage de meckel. J'ai maintenant à rendre compte de l'étude que j'ai faite de l'ossification des différentes parties du maxillaire inférieur, que j'ai examiné. J'exposerai d'abord l'ossification des deux noyaux (1) Bechet'ches sur le développement du maxillaire inférieur de Vhomme. (Bullet, de l'Acad. royale de Belgique, t. XLV, p. 430. 1878.) (2) Rapport sur le même travail. (Ibid., t. XLV, pp. 371 et suiv. 1878.) 8 ~ 106 — cartilagineux, du cartilage de Meckel et du cartilage du condyle, puis l'ossification des autres tissus de la substance conjonctive entrant dans la composition du restant du maxillaire : apophyse coronoïde et tissu sous-dermatique. Après avoir analysé com- plètement les différents résultats obtenus, j'exposerai les con- clusions auxquelles je suis arrivé au sujet de la formation du tissu osseux. Mais avant de commencer, je crois utile de dire quelques mots de la technique. Conservé pendant plusieurs années dans l'alcool, le maxil- laire fut ensuite décalcifié par l'acide picrique; puis il séjourna pendant quelques semaines dans Talcool fort. Malgré son séjour prolongé dans l'alcool, l'état de conservation de ses tissus était vraiment remarquable. , La partie antérieure a été coupée horizontalement sur une longueur d'un centimètre environ ; le reste de l'os a été coupé transversalement. Après avoir coloré parle picrocarminate d'ammoniaque, j'ai fait des coupes minces, qui étaient ensuite montées, soit dans la glycérine, soit dans le baume de Canada. Toutes ces coupes ont été conservées et numérotées avec soin. La question de savoir si le cartilage de Meckel intervient ou n'intervient pas dans la formation du maxillaire osseux a été longtemps controversée. Pour certains auteurs, il s'atrophierait progressivement, de telle sorte qu'à un moment donné du développement, on n'en trouverait plus de trace : le cartilage de Meckel ne prendrait par conséquent aucune part dans la formation du maxillaire osseux. C'est là l'opinion qu'ont soutenue Meckel, Robin etMagitot (1), (1) Robin et Magiiol. Mémoire sur un organe transiloire de la vie fœtale, désigné sous le nom de Cartilage de Meckel. (Annales des sciences naturelles, l. XVIll.) — 107 — Senimer (1), Gegenbaur (2), Stieda (3), Strelzoff (4) el Brock (5). Ce dernier auleur dit cependant (loco citato, p. 517) : « Ich » fand iiberall Zellengruppen , weiche ihre gemeinschaftliche » Abstanimungaus einer Mutterzelle deutlich zeigten, und nur & durch geringe Zwischensubstanz von einander getrennt » waren. » Tontefois il ajoute qu'il n'a jamais pu constater de cartilage de xMeckel en voie de calcification. Il en conclut que cet organe se résorbe dans le cours du développement. Pour les autres observateurs, au contraire, le cartilage de Meckel interviendrait pour une part dans la formation du maxil- laire. C'est l'opinion que soutient Kôlliker (6) dans son Traité d'embryologie, et M. Masquelin (7) dans un récent travail publié par l'Académie des sciences de Belgique. Reichert (8) avait aussi, il y a longtemps déjà, en 1837, con- staté que chez certains animaux le cartilage de Meckel s'atro- phie, tandis que chez d'autres il s'ossifie. J'ai pu constater que chez le fœtus de Balœnoptera rostrata, comme chez les fœtus humains examinés par M. Masquelin, le cartilage de Meckel prend part à la formation du maxillaire osseux, et de plus, pour me servir de l'expression employée par M. Éd. Van Beneden, dans son rapport sur ce travail (9), « je ne (1) Semmer. Untersuchungen iiber die Entwickelung des MeckeVschen Knor- pels und seiner Nachthargehilder. 1 872. (2) Gegenbaur. Grundriss der vergleichenden Anatomie. 1878. (3) Slieda. Ungleichmossiger Wachsthum aïs formbildendér Princip der Knochen. (Max Schuitze's Archiv. 12 Bd.) (4) Strelzoff. Ueber die Histogenèse des Knochens. (Unters. aus d. Path.-Inslit. zu Zurich. 1875.) (5) Brock. Ueber die Entwickelung des Unterkiefers der SaUgethiere. (Zeilsch. f. wissens. Zoologie, 27 Bd., p. 287. 1876.) (H) Kôlliker. Enticicklungsgeschichte des Menschen und der hoheren Thiere. 1861. (7) Masquelin. Recherches sur le développement du maxillaire inférieur de l'homme. (Bullet, de l'Acad. royale des sciences de Belgique, t. XLV, n" 4, p. 430. 1878.) (8) Reichert. Ueber die Visceralbogen der Wirbelthiere.i^xiWev's Archiv. 1837.) (9j Éd. Van Beneden. Rapport sur le travail de M. Masquelin. (Bullet, de l'Acad. royale des sciences de Belgique , t. XLV, n°4 , p. 373. 1878.) — 108 — » vois que des différences tout à fait secondaires entre la ma- i> nière dont le cartilage de Meckel intervient dans la formation j> de la portion alvéolaire du maxillaire osseux et Fossification » de la diaphyse d'un os long. » Bien que je ne me sois surtout attaché à étudier en détail que la formation des espaces médullaires, l'origine du tissu rem- plissant ces espaces, ainsi que la formation du tissu osseux, il faut cependant, aussi bien dans l'intérêt de la description que pour être plus complet, que je revienne sur les premières trans- formations du cartilage hyalin. J'exposerai donc tout le proces- sus du développement. Dans son renflement antérieur (pi. J, fig. 6), le cartilage de Meckel présente tous les caractères d'un cartilage hyalin, très- riche en cellules, dont la forme est arrondie ou irrégulière. Ces cellules ont de faibles dimensions : elles mesurent en moyenne 0,02 de millimètre ; leur contenu est très-finement granulé et se colore faiblement en rose par l'action du picrocarminate d'am- moniaque : ces cellules renferment un noyau nettement délimité, arrondi et se colorant en rose. Nous nous trouvons donc là en présence d'un tissu ayant tous les caractères des éléments de la zone de prolifération ou de mul- tiplication des cellules de la diaphyse d'un os long. Au fur et à mesure que l'on examine un point plus éloigné de la symphyse, on voit ces cellules cartilagineuses devenir de plus en plus grandes. Leur contenu, finement granulé, ne se colore que peu dans le picrocarminate et renferme un noyau, à contour bien arrondi et très-net, coloré en rose, mais moins fortement cependant que dans la zone précédente. Moins étendue que la zone de prolifération, cette zone est tout à fait identique à la zone hypertrophique du cartilage de la dia- physe d'un oslongenvoie d'ossification.Cependanl,dans le noyau cartilagineux qui nous occupe contrairement à ce qui a lieu dans les os longs, nous ne trouvons pas la disposition en colonne des éléments cellulaires (pi. I, (ig. 7). Sur une coupe plus éloignée de la symphyse, le cartilage pré- sente un aspect différent (pi. I, fig. 8). Hypertrophié du côté — 109 — externe, il se transforme insensiblement en cartilage calcifié, en se rapprochant du côté interne. Le contenu des cellules devient, en effet, plus granulé et ren- ferme un noyau très-granuleux et à contour très-imparfaite- ment délimité. Ce noyau se colore peu ou ne se colore point dans les réactifs. Quant à la substance fondamentale de ce tissu, elle prend dans le picrocarminate une coloration jaune-orangé, caractère impor- tant qui permet de la distinguer immédiatement de la substance fondamentale des autres zones. Enfin, dans cette zone de calcifi- cation du carfilage, la substance fondamentale est encore plus réduite que précédemment. Sur une coupe plus postérieure encore, la zone hypertrophique a disparu et l'on ne trouve plus que du cartilage calcifié. C'est au niveau de la zone de calcification que se trouvent, du côté interne seulement, les premières traces d'ossification de la gaine périchondrale, c'est-à-dire l'origine de la lamelle périchon- drale interne. Plus postérieurement encore (pi. lï, fig. 1), le cartilage calcifié n'occupe plus que la partie externe, tandis que du côté interne, entre ce tissu calcifié et la lamelle périchondrale, se trouve un tissu cartilagineux présentant un aspect particulier. Les cellules de ce tissu sont plus petites que celles de la zon€ de calcification, claires, homogènes, les unes globuleuses, les autres plus irrégu- lières dans leur forme. La substance fondamentale est fortement colorée en rouge et se continue insensiblement d'une part avec la substance fondamentale du cartilage calcifié et d'autre part avec la substance fondamentale ossifiée de la lamelle périchon- drale interne. Cependant cette dernière continuile n'a pas lieu dans toute l'étendue de la coupe : on trouve, en effet, par-ci, par-là, entre les travées ossifiées de substance fondamentale du cartilage et les minces travées osseuses de la lamelle périchon- drale, de petits espaces, paraissant formés par la réunion de quel- ques capsules cartilagineuses, dont les parois auraient disparu. Ces petits espaces, qui constituent des espaces médullaires, sont remplis d'un tissu que nous pouvons appeler « tissu médullaire — no — jeune. » Ce tissu, en effet, se rapproche par sa texture du tissu médullaire jeune de Waldeyer. Nous nous trouvons ainsi à la limite d'ossification. La dernière zone cartilagineuse que je viens de décrire, et dont la substance fondamentale est imprégnée de substance osseuse, doit être considérée comme la « zone d'ossification. » Ici, effecti- vement, a lieu la première apparition de « substance osseuse^ » et la formation des « premiers espaces médullaires. » Mais à ce niveau cette zone est encore fort restreinte, le car- tilage calcifié occupant la plus grande partie de la surface de la coupe; ce cartilage calcifié commence ici déjà à se résorber à la limite externe de l'organe de Meckel : j'exposerai plus loin la manière dont se fait cette résorption en étudiant la formation des espaces médullaires. Plus postérieurement, au fur et à mesure que la zone decalcifica- tion diminue d'étendue, la zone d'ossification prend un dévelop- pement plus considérable, du côté interne. Du côté externe appa- raissent les premières traces de la lamelle périchondrale externe. Immédiatement appliquée contre la face interne de cette lamelle osseuse,exisle une mince couche cartilagineuse, dont la substance fondamentale est imprégnée de substance osseuse et qui présente les mêmes caractères que la couche cartilagineuse ossifiée qui est appliquée contre la lamelle périchondrale interne. A ce niveau, la couche calcifiée fortement réduite est située entre les deux bandes ossifiées et continue à se résorber partiellement. C'est ici que l'on peut le mieux étudier la résorption du car- tilage et la formation des premiers espaces médullaires. A première vue, on croirait qu'il faille distinguer la résorption du cartilage ossifié de celle du cartilage calcifié. Mais il n'en est rien, le processus de la résorption étant le même, si l'on tient compte que d'une part la substance fondamentale du tissu est imprégnée de substance osseuse, tandis que, d'autre part, elle ne contient que des granulations calcaires. Occupons-nous d'abord de la résorption du tissu cartilagineux calcifié. Je crois utile de rappeler ici que les cellules du tissu calcifié — Ml — sont caractérisées par ce fait que leur contenu est granulé et qu'elles possèdent un noyau très-irrégulier dans sa forme, à con- tour très-peu net et fort grossièrement granulé. Les cellules de ce tissu les plus voisines du point de résorption se délimitent plus nettement; leur contour devient beaucoup plus régulier; il en est de même du noyau, dont le contour devient très-net et très-régulièrement sphérique; de plus, il se colore faiblement en rose dans le picrocarminate. En ce point nous voyons la substance fondamentale du carti- lage se fondre peu à peu en devenant moins granuleuse, et se continuer insensiblement avec la substance fondamentale du nouveau tissu formé. En même temps, l'activité cellulaire est très-grande ; on trouve un grand nombre de cellules cartilagineuses, dont les noyaux sont divisés ou en voie de division, et il n'est pas rare de consta- ter des restes de capsules cartilagineuses, ou même des capsules encore entières, renfermant plusieurs noyaux, petits, sphériques ou ovoïdes et colorés fortement en rose. De plus, ces noyaux entourés d'une très-mince couche de protoplasme sont plongés dans le contenu commun de la capsule cartilagineuse, lequel con- tenu, au point de résorption, se confond avec la substance fon- damentale du cartilage modifiée comme je l'ai indiqué plus haut. J'ajouterai que, dès l'origine de la résorption, on constate dans le nouveau tissu formé la présence de capillaires sanguins. Ce développement des capillaires paraît d'ailleurs être parallèle à la résorption. Mais il se produit aussi une résorption du cartilage dont la substance fondamentale est imprégnée de substance osseuse. Cette résorption est identique à celle du tissu calcifié. On constate en effet aussi, dans Ja partie de ce tissu qui avoi- sine le centre de résorption : 4° la transformation successive de la substance fondamentale ossifiée du cartilage, en substance fondamentale du tissu de nouvelle formation; 2° la multiplica- tion des noyaux de cellules; et 3° enfin la fusion d'une partie du contenu de la cellule avec la substance fondamentale du nouveau tissu formé. " M? — La résorption ne se pnsse jamais, pas plus dans le cas du car- tilage calcifié que dans celui du cartilage ossifié, dans toute l'éten- due du tissu. Certaines travées de substance fondamentale sont respectées et il en résulte la formation d'espaces plus ou moins nettement délimités, en communication l'un avec l'autre. Ces espaces, qui ne sont autres que des a espaces médullaires ^-b con- stituent les mailles d'un réseau, dont les travées sont formées par de la substance fondamentale du cartilage calcifiée ou ossi- fiée. Le tissu qui remplit les mailles de ce réseau, et qui pro- vient, pour la plus grande partie au moins, des cellules cartila- gineuses modifiées, constitue le « tissu médullaire jeune. » Sur une coupe pratiquée plus postérieurement encore, la résorp- tion ayant pris des proportions plus considérables, les espaces médullaires sont plus larges, et lestravéesqui les séparent, moins nombreuses, ont l'aspect de noyaux cartilagineux. Plus loin en- core ils semblent être, à la coupe transversale, de véritables îlots cartilagineux, constitués les uns par du tissu dont la substance fondamentale est ossifiée, les autres par du tissu calcifié, enfin d'autres encore sont formés en partie par l'un, en partie par l'autre de ces deux tissus. En même temps, on constate que dans le voisinage de ces îlots, ainsi que dans le voisinage des lamelles périchondrales, le tissu médullaire jeune subit aussi des modifications. Au centre de l'espace médullaire, le tissu est encore consti- tué comme précédemment; puis en se rapprochant des îlots, les noyaux de cellules qu'il renferme deviennent plus volumineux, plus faiblement colorés par le picrocarminate, et sont entourés d'une couche protoplasmique plus épaisse : nous avons ici de vraies cellules, de forme irrégulière, présentant souvent de fins prolongements, par lesquels elles sont mises en continuité avec de véritables ostéoblastes, tapissant à la façon d'un epithelium l'îlot cartilagineux ou la lamelle périchondrale. Sur certaines coupes, ces îlots cartilagineux, tapissés exté- rieurement par une couche continue d ostéoblastes, sont en con tinnite avec une des lamelles périchondrales, par l'intermédiaire de minces travées osseuses. - 113 — Sur des coupes plus postérieures encore, on ne trouve plus d'ilôts cartilagineux, mais de fortes travées (pi. H, fig. 2, A), qui laissent nettement distinguer une partie centrale et une partie périphérique. F^a partie centrale est constituée par une substance fondamentale plus faiblement colorée que la partie périphé- rique et par des cellules volumineuses rappelant encore les cellules cartilagineuses. Cet axe de la travée osseuse a en effet une origine cartilagineuse que Ton ne peut nullement mettre en doute : c'est ainsi, par exemple, que l'on trouve au centre de quelques-unes de ces travées, des capsules cartilagineuses encore calcifiées. La partie périphérique, au contraire, est constituée par une lamelle osseuse formée aux dépens d'ostéoblastes : sa substance fondamentale est fortement colorée en rouge et entoure des cellules éloilées,dont les prolongements sont en con- tinuité avec les prolongements des ostéoblastes. Enfin, je dois ajouter que la couche osseuse d'origine ostéoblastique de la plus récente formation, c'est-à-dire le bord de la travée, est toujours plus pâle que le reste de la lame osseuse formée et qu'en outre elle présente une fine striation perpendiculaire à la surface de la lame osseuse. Il reste maintenant à examiner comment se fait l'ossification. Il y a évidemment lieu ici de distinguer : i° l'ossification des noyaux cartilagineux, dont la substance fondamentale est cal- cifiée ou imprégnée de substance osseuse, et 2" l'ossification qui se fait aux dépens des ostéoblastes. Il résulte de l'étude que j'ai faite de ces différents modes d'ossification que dans le premier cas nous nous trouvons en présence de ce que l'on est convenu d'appeler une « ossification directe ou métaplaslique » d'un cartilage; dans le second cas, au contraire, nous avons affaire à une « ossification indirecte ou ostéoblastique. » On constate, aux points où un noyau cartilagineux calcifié se trouve en continuité avec du cartilage dont la substance fon- damentale est imprégnée de substance osseuse, que le contour des cellules, d'irrégulier qu'il est dans le tissu calcifié, se délimite plus nettement; il en est de même du noyau qui devient moins — 114 — granuleux et assez régulièrement spheroidal. Quant à la sub- stance fondamentale, elle devient moins granuleuse, plus homo- gène,et se continue insensiblement avec la substance fondamen- tale imprégnée de substance osseuse. Quand la substance fondamentale est ainsi complètement imprégnée de substance osseuse, la cellule cartilagineuse affecte encore d'autres caractères : la couche la plus externe de son pro- toplasme, très-fìnement granulée, se met en continuité avec la substance fondamentale ossifiée, et semble faire corps avec elle; elle prend elle-même insensiblement le même aspect que la substance fondamentale. La cellule cartilagineuse s'ossiiie donc à son tour, en procédant de la périphérie vers le centre; toute- fois, je n'ai pas rencontré d'exemple de cellule dont le proto- plasme était complètement ossifié : la partie du protoplasme cel- lulaire entourant immédiatement le noyau, ne s'ossifie pas et constitue avec le noyau une cellule osseuse. Il n'y a donc pas là de sécrétion; mais la cellule cartilagineuse joue ici le rôle d'ostéoblaste. Cette transformation de la cellule cartilagineuse en cellule osseuse se fait très-lentement dans le cartilage qui nous occupe, et quoiqu'elles soient en grande partie ossifiées, il est encore possible cependant de distinguer ces cellules des autres cellules osseuses provenant de la transformation des ostéoblastes. Celte dernière transformation se fait d'ailleurs tout à fait de la même manière, ainsi que Waldeyer l'a d'ailleurs très-claire- ment démontré, et je partage en tous points la manière de voir de cet auteur sur la formation du tissu osseux aux dépens des ostéoblastes. Nous sommes ainsi arrivés à peu près au milieu du trajet intraosseux du cartilage de Meckel. En examinant successivement toutes les coupes plus éloignées de la symphyse, nous repassons successivement par les diffé- rentes zones que nous avons signalées, mais en sens inverse. A l'extrémité postérieure de son trajet intraosseux, le cartilage de Meckel est de nouveau constitué par du cartilage hyalin; il en est de même de toute la portion extraosseuse de cet organe. Il nous reste maintenant, pour en finir avec cet organe, à con- — il5 — sidérer les modifications subies par son enveloppe, le péri- chondre. Au niveau des zones de prolifération et d'hypertrophie du car- tilage, le périchondre constitue une gaine de tissu conjonctif, riche en faisceaux de fibrilles et en petites cellules fusiformes (pi. 1, fig. 6 et 7). Plus loin, c'est-à-dire au niveau de la zone de calcification (pi. I, fig. 8), la substance fondamentale fibrillaire du péri- chondre, peu colorée par le picrocarminate, se continue insensi- blement avec de très-minces travées de substance fondamen- tale de tissu osseux. Ces travées sont fortement colorées en rouge, ce qui indique leur imprégnation par de la substance osseuse, et aux points où elles se continuent avec la substance fondamen- tale du périchondre, on distingue encore nettement leur texture fibrillaire. D'autre part, elles sont en continuité postérieurement avec des travées osseuses plus volumineuses. Pendant que la substance fondamentale subit ces modifications, des petites cel- lules fusiformes, les unes se trouvent entourées de toutes parts par ces minces travées osseuses , et deviennent ainsi cellules osseuses; les autres s'agrandissent, en même temps que la substance fondamentale qui les entoure devient moins fibrillaire, plus homogène ou finement granulée. Le périchondre, à sa face profonde, s'ossifie donc ainsi par voie directe, au début de son ossification, et donne naissance, de chaque côté, à ce que nous appellerons une lamelle périchon- drale. Plus loin, au niveau de la zone d'ossification, la lamelle péri- chondrale est plus épaisse. Elle se trouve en continuité avec la substance fondamentale ossifiée du cartilage de Meckel. De l'autre côté, elle est en rapport avec le reste du périchondre modifié comme nous l'avons vu plus haut, ainsi qu'avec le tissu sous-dermatique en voie d'ossification. Ce tissu conjonctif, ainsi que le périchondre modifié,lui fournit de ce côté des ostéoblastes, qui lui forment comme un revêtement epithelial complet. Ces ostéoblastes proviennent des cellules du périchondre et des cel- lules du tissu sous-dermatique modifiées. — H6 - Sur des coupes plus postérieures encore (pi. II, fig. i), nous trouvons entre la zone d'ossification et la lamelle périchondrale des espaces médullaires remplis de tissu médullaire jeune. Plus postérieurement encore sont appliqués à la face profonde de la lamelle des noyaux cartilagineux, dont les uns ont la substance fondamentale ossifiée, tandis que les autres sont sim- plement calcifiés, ou même déjà en partie résorbés. Mais parmi ces noyaux cartilagineux, il en est qui échappent à la résorption et qui se transforment en tissu osseux de la même façon que les autres noyaux restant du cartilage de Meckel. Enfin, plus loin encore, on constate, appliquée à la face interne du noyau cartilagineux, une couche plus ou moins complète d'ostéoblastes. En d'autres points, entre les ostéoblastes et le noyau cartilagineux, se trouve une mince lame osseuse, formée aux dépens des ostéoblastes, et constituant une couche de revê- lement plus ou moins complète à la surface du noyau cartilagi- neux (pi. Il, fig. 2). De sorte que cette partie de la lamelle périchondrale est formée d'un noyau cartilagineux central ossifié ou en voie d'ossi- fication, et de deux lamelles osseuses périphériques appliquées immédiatement contre le noyau central en dedans et en dehors, ces lamelles osseuses elles-mêmes étant revêtues sur leur face libre d'une couche continue d'ostéoblastes. On distingue alors très-nettement le noyau cartilagineux cen- tral, d'abord à la teinte plus pâle et même parfois jaunâtre (lorsque l'ossification est moins avancée) de sa substance fonda- mentale, et ensuite à la forme et aux dim^ usions de ses cellules. Ces lamelles périchondrales ainsi constituées sont en conti- nuité d'une part avec des travées osseuses plus ou moins déve- loppées, formées aux dépens du cartilage de Meckel, et d'autre part avec des travées osseuses formées aux dépens du tissu sous- dermatique. Enfin, là où la lamelle périchondrale est mieux développée encore, elle affecte un autre aspect. Le noyau cartilagineux étant complètement ossifié, les cellules cartilagineuses se sont trans- formées en cellules osseuses, et il n'est plus possible alors de — 117 ^ distinguer l'origine cartilagineuse de cette partie de la lamelle périchondrale. Cet état des lamelles périchondrales se rencontre précisément sur les coupes où les travées osseuses, formées aux dépens du cartilage de Meckel, ont atteint leur plus grand développement, c'est-à-dire à peu près vers le milieu du trajet intraosseux de cet organe. Plus loin, les lamelles périchondrales repassent par les diffé- rents états que j'ai signalés. C'est au point où le cartilage de Meckel est de nouveau con- stitué comme un cartilage hyalin hypertrophié que le périchondre a repris l'aspect d'une gaine conjonctive fibrillaire. Cette gaine enveloppe complètement le cartilage de Meckel jusqu'à son extrémité postérieure. C. — OsSlFICATlOiN DU CONDYLE. (PI. 11. fig. 3, 4, 5 et 6.) Le condyle est aussi constitué par un noyau cartilagineux en voie d'ossification. Ici l'ossification se fait plus lentement (1) encore qu'au cartilage de Meckel : aussi, bien que la transforma- tion de ces deux organes en tissu osseux soit la même, dans son essence, cependant nous trouvons au condyle quelques particu- larités qui méritent d'être signalées. Pour mieux nous rendre compte de la structure du condyle, il faut l'examiner en procédant d'arrière en avant , c'est-à-dire en allant de l'extrémité postérieure de l'os vers la symphyse. Ici encore on rencontre, tout comme dans le cartilage de Meckel, d'abord une zone de prolifération, puis une zone hyper- trophique, présentant l'une et l'autre les caractères des zones (1) Je dois ra'expllquer ici sur ce que jenlends par une ossification lente ou rapide, ce terme devant me servir plus loin encore. Je dis que l'ossification est lente ou rapide, selon que les différentes zones du tissu ostéogène sont plus ou moins étendues et qu'il est ainsi possible à l'observateur de suivre un nombre plus ou moins considérable de phases inlermédiaires. — 1 18 — correspondantes du cartilage de Meckel. Ce qu'il y a de particu- lier, c'est que, contrairement à ce qui existe dans le cartilage de Meckel, la zone hypertrophique est considérablement étendue. Le cartilage hypertrophié présente, par-ci pa là, de petits espaces médullaires, remplis par un tissu dont la texture est la même que celle du tissu médulaire jeune et qui renferme aussi de Irès-fms capillaires sanguins (pi. II, (ig. 3). En examinant de près les limites de ces espaces, on voit la substance fondamen- tale du cartilage hypertrophié se continuer insensiblement avec la substance fondamentale du tissu médullaire jeune. Les cap- sules cartilagineuses avoisinant ces espaces, plus ou moins ouvertes ou même complètement fermées, contiennent plusieurs petits noyaux, ovoïdes ou sphériques, bien délimités, et forte- ment colorés par le picrocarminate. Nous voyons donc par là que la résorption du cartilage suit le même processus, que ce cartilage soit hypertrophié, calcifié ou ossifié. Sur des coupes plus antérieures, les espaces médullaires sont plus étendus; les noyaux de cellules du tissu médullaire jeune ont pris des dimensions un peu plus considérables et sont entourés d'une couche protoplasmiqueun peu plus épaisse; enfin, les capillaires sanguins sont aussi plus nets et un peu plus dilatés. Il en résulte évidemment que les travées cartilagineuses, séparant les mailles de ce réseau, sont plus étroites. Plus en avant encore, on trouve des travées calcifiées ou ossi- tìées en voie de résorption, et celte résorption a lieu comme dans le cartilage de Meckel. A côté de ces travées, s'en trouvent d'autres, et ce sont les plus nombreuses (pi. II, fig. 4), qui pré- sentent au centre une bande de cartilage calcifié, facilement reconnaissable à la coloration jaune orangé que prend sa substance fondamentale par l'action du picrocarminate; en dehors de cette bande calcifiée, se trouve sur tout le pourtour de la travée un anneau de tissu cartilagineux dont la substance fonda- mentale, imprégnée de substance osseuse, se continue, d'une part, avec la substance fondamentale calcifiée de la bande cen- trale et, d'autre part, avec la substance fondamentale du tissu médullaire jeune. H en résulte tout naturellement que les bords — 119 — des espaces médullaires sont peu nettement marqués. A ce ni- veau le tissu médullaire jeune n'a pas subi de modification. Plus antérieurement encore, les travées, constituées comme nous venons de le voir, ont leurs bords très-nets, de sorte que les espaces médullaires sont très-nettement délimités (pi. II, fig. 5). Quant au tissu médullaire, il est aussi modifié : les capillaires sanguins ont pris un très-grand développement. Dans le voisi- nage des capillaires, le tissu médullaire jeune est encore constitué par une masse fondamentale finement granulée dans laquelle se trouvent placées de petites cellules ; mais plus près de la limite de l'espace, les cellules deviennent plus volumineuses, plus irré- gulières dans leur forme, et enfin, contre la paroi même de l'es- pace, et appliqués sur l'anneau cartilagineux dont la substance fondamentale est imprégnée de substance osseuse, se trouvent des ostéoblastes, disposés en une rangée plus ou moins continue. On trouve ainsi dans ces espaces toutes les transitions entre les cellules du tissu médullaire jeune et les ostéoblastes. Assez fréquemment, dans la partie centrale calcifiée des tra- vées limitant les espaces médullaires, se trouvent disséminées quelques capsules cartilagineuses isolées (fig. 6, G) qui s'ossifient d'une façon particulière : les unes s'ossifient de la manière que j'ai indiquée plus baut (pp. 109 et 110); chez les autres, au con- traire, l'ossification procède des cellules cartilagineuses et non pas de la substance fondamentale constituant la capsule (fig. 6,G). On voit donc des capsules cartilagineuses calcifiées renfermer une cellule dont le pourtour est imprégné de substance osseuse; cette imprégnation se fait en différents points à la fois du pour- tour de la cellule, de sorte que le reste du contenu cellulaire avec le noyau a une forme étoilée qui lui donne tout à fait l'as- pect d'une cellule osseuse. Sur des coupes plus antérieures encore, la texture des travées osseuses ainsi que celle du tissu médullaire ont encore subi des modifications (pi. II, fig. 5). Toute la partie centrale de la travée est constituée par du cartilage ossifié, entouré sur tout son pourtour d'une lame osseuse plus ou moins développée, formée aux dépens des ostéoblastes qui lui constituent un revêtement — 120 — continu. L'ossification du noyau cartilagineux, comme la forma- tion de la lame osseuse externe, ont lieu comme je l'ai décrit au sujet du cartilage de Meckel. Le tissu médullaire est ici constitué d'une couche périphérique formée d'ostéoblastes, et d'une cou- che centrale, dont les cellules présentent une forme étoilée, ou des prolongements plus ou moins nombreux s'anastomosant entre eux et avec les ostéoblastes. De plus, on trouve souvent de minces faisceaux de fibrilles dans la substance fondamentale de ce tissu médullaire. Enfin, plus antérieurement encore, on ne distingue plus dans les travées osseuses la moindre trace de capsule cartilagineuse, et ces travées se continuent avec celles qui se sont développées dans le tissu conjonctif, constituant la plus grande partie de la portion alvéolaire du maxillaire. Ces travées ont d'ailleurs une texture identique, et le tissu médullaire, qui remplit les espaces limités par elles, est constitué tout à fait de la même manière que le tissu médullaire décrit précédemment. Nous avons ainsi terminé l'étude de l'ossification des deux noyaux cartilagineux, dont on constate l'existence dans le maxil- laire inférieur du fœtus de la Balœnoptera rostrata. Il reste maintenant à examiner comment se fait l'ossiflcation des autres tissus de la substance conjonctive qui constituent le restant du maxillaire. D. — Ossification du tissu conjonctif constituant le reste DU MAXILLAIRE. Dans le maxillaire inférieur, dont l'étude fait le sujet de ce travail, contrairement à ce que M.Masquelin a décrit chez le fœtus humain, l'apophyse coronoïde ne se développe pas aux dépens d'un cartilage. Elle provient ici de l'ossification du tissu sous- dermalique, tout comme le reste du maxillaire. Aussi puis-je exposer en même temps l'ossification de l'apo- physe coronoïde et celle du reste du maxillaire : les différences — 121 — que l'on constate dans l'ossification de ces deux parties de la mâchoire inférieure n'ont d'ailleurs rien d'essentiel; néannioins je les indiquerai. Mais avant d'étudier cette ossification, il est bon de constater la différence qui existe entre la disposition des travées osseuses dans l'apophyse coronoïde et dans le restant du maxillaire. Tandis qu'ici les travées osseuses sont disposées sans aucun ordre, tout comme cela se remarque généralement dans tous les autres os, dans l'apophyse coronoïde, au contraire, les travées osseuses ont une disposition plus régulière et très-élégante. Tout au centre se trouve une grosse travée osseuse bien déve- loppée, qui va en s'effilant en se rapprochant du sommet de l'apophyse. De cette travée centrale partent alors en s'irradiant, comme les branches d'un arbre, une quantité de travées moins épaisses, qui vont aussi en s'effilant du centre vers la périphérie, et qui sont d'autant plus longues qu'elles se rapprochent davan- tage du canal dentaire. Ces dernières travées forment ainsi une paroi résistante à ce canal. Ces différentes travées radiées sont réunies l'une à l'autre par de petites branches osseuses, qui limi- tent ainsi les espaces médullaires. Enfin, vers la base de l'apo- physe, la grosse travée centrale est elle-même parcourue par plusieurs rangées de petits espaces médullaires. L'extrémité périphérique de l'une ou de l'autre de ces travées osseuses est très-effilée (pi. I, fig. 9) et se continue insensible- ment dans la substance fondamentale fibrillaire du tissu con- jonctif de la périphérie, en se divisant en une quantité de minces filets osseux qui entourent les petites cellules conjonctives fusi- formes que ce tissu renferme. Ces petites cellules, ainsi englo- blées dans le réseau de substance osseuse, jouent alors le rôle d'ostéoblastes et se transforment en cellules osseuses. Les minces aiguilles osseuses présentent une texture fibrillaire et se conti- nuent avec des faisceaux de fibrilles. Dans le voisinage des points oil se fait celte imprégnation de substance osseuse, les cellules conjonctives s'agrandissent et la substance fondamentale qui les entoure devient plus homogène. La travée osseuse est d'autant plus épaisse que l'on s'éloigne 9 \-2Çl davanlage (le la périphérie de l'os, el présente bientôt dans son épaisseur une ou deux rangées de cellules à contours irréguliers; sur ses bords on trouve un petit espace rempli d'un tissu parti- culier, formé d'une substance fondamentale finement granulée, colorée très-faiblement par le picrocarminate, et de petites cellules nucléées, arrondies. Ces cellules ressemblent aux cellules conjonc- tives agrandies que j'ai signalées plus haut : protoplasme tine- ment granulé un peu coloré par le picrocarminate; noyaux à contours nettement délimités, arrondis comme les cellules, et assez fortement colorés. Ce tissu est sous tous les rapports ana- logue au tissu médullaire jeune du cartilage et a la même signi- fication que lui. Les espaces qui sont remplis de ce tissu sont les espaces médullaires primordiaux ; leurs limites sont peu nette- ment marquées, la substance osseuse imprégnant là assez irré- gulièrement la substance fondamentale du tissu. Plus près encore du centre de l'os, la travée plus volumineuse encore présente les mêmes caractères que précédemment, mais ses bords sont très-nets, et l'on trouve appliqués contre ces bords des ostéoblastes disposés en une rangée continue. Les espaces médullaires sont plus volumineux et limités, d'une part par la travée bien développée dont je viens de parler, et d'autre part par d'autres petites travées osseuses émanant de la première et tapissées aussi par des ostéoblastes; ces travées secondaires vont elles-mêmes se continuer insensiblement avec la substance fon- damentale du tissu conjonctif périphérique. Ces espaces médul- laires présentent généralement vers leur centre un ou plusieurs petits capillaires sanguins, autour desquels le tissu médullaire affecte les caractères du tissu médullaire jeune que j'ai décrit. L'aspect de ce tissu se modifie vers la périphérie de l'espace, c'est-à-dire que dans le voisinage des travées osseuses les cel- lules du tissu médullaire sont plus volumineuses et en même temps plus irrégulières. Enfin ces cellules sont fréquemment en connexion avec les ostéoblastes. Nous voyons donc encore une fois ici que le tissu médullaire jeune donne naissance aux ostéoblastes, et de plus qu'il provient lui-même de modifications subies par les cellules du tissu con- — 125 — jonclìf, en voie d'ossification. Enfin je ferai aussi remarquer que la structure de ces espaces médullaires est tout à fait la même que celle des espaces médullaires d'un noyau cartilagineux qui s'ossifie. Plus en dedans encore, la travée osseuse encore épaissie est formée d'une partie axiale dans laquelle se trouvent des cellules osseuses irrégulières assez volumineuses, et qui se distinguent aisément des cellules de la partie périphérique plus aplaties et à prolongements en continuité avec les ostéoblastes. La partie axiale assez mince est la continuation de la partie de la travée plus rapprochée de la périphérie; l'autre partie de la lame osseuse provient de Fossification des ostéoblastes, ossification qui se fait ici aussi suivant le processus étudié par Waldeyer. Quant au tissu médullaire, à ce niveau il n'a pas subi de modi- fications nouvelles. Enfin, plus loin encore de la périphérie de l'os, la travée, encore mieux développée, ne laisse plus distinguer sa portion axiale de sa portion périphérique. Les cellules de la partie axiale ont pris tout à fait les mêmes caractères que les cellules osseuses formées aux dépens des ostéoblastes; on ne peut plus comme précédemment reconnaître leur origine différente. Le tissu médullaire à ce niveau est riche en capillaires san- guins, et on peut lui considérer, comme dans les espaces médul- laires complètement développés, formés aux dépens d'un noyau cartilagineux : une couche périphérique constituée par les ostéo- blastes, et une couche centrale à cellules éloilées, et dont la substance fondamentale présente, par-ci par-là, de minces fais- ceaux de fibrilles. Tel est le processus de l'ossification du tissu conjonctif étudié à l'apophyse coronoïde. Dans le reste du maxillaire, l'ossifica- tion du tissu conjonctif ne dilTère de celle que je viens d'indi- quer que par ce fait que les cellules de la partie axiale des travées osseuses prennent les caractères des cellules périphériques, d'origine ostéoblastique, beaucoup plus tôt que dans l'apophyse coronoïde, de sorte que c'est en un point plus rapproché de la périphérie de l'os que les travées osseuses sont complètement développées. — \u — De tous les fails que je viens d'énumérer au sujet de l'ossifi- tion tant du cartilage que du tissu conjonctif constituant le maxillaire inférieur chez le fœtus de la Bolœnoptera roslrata.ie puis tirer les conclusions suivantes relativement à la formation du tissu osseux. 1. Formation des espaces médiiUoires et du tissu médullaire jeune. Ainsi que la plupart des liistologistes Font admis, les espaces médullaires doivent leur origine à la résorption de la substance fondamentale du cartilage. J'ai pu étudier la manière dont se fait cette résorption, tant dans le cartilage hypertrophié que dans le cartilage calcifié ou ossifié, et j'ai reconnu que dans l'un comme l'autre cas le pro- cessus est toujours le même. Les phénomènes essentiels qui s'y passent sont :i" la transformation successive de la substance fon- damentale du cartilage en substance fondamentale du tissu de nouvelle formation; 2° la multiplication des éléments cellulaires du cartilage et leur transformalion en éléments cellulaires du nouveau tissu formé, et enfin 3° la fusion d'une partie du con- tenu de la cellule cartilagineuse avec la substance fondamentale du nouveau tissu. Bien que j'aie maintenu le terme « résorption », cette expres- sion est cependant tout à fait impropre; en effet, le tissu cartila- gineux ne disparaît pas en tant que tissu, il n'est pas « rongè-o^ comme disait Kôlliker, et comme mangé, dévoré par un autre tissu, qui se développerait aux dépens de sa substance et vien- drait prendre sa place; au contraire, il ne fait que subir des modifications successives, qui le transforment en un tissu de nouvelle formation, « le tissu médullaire jeune. » Le mot « résorption » est donc tout à fait impropre ici, et ne doit être pris qu'au figuré, pour représenter un état particulier des transformations subies parle tissu cartilagineux pour donner naissance aux « espaces ou cavités médullaires. » Je ne crois pas avec Ranvier que la résorption soit due aux vaisseaux sanguins que l'on y rencontre, ce dont d'ailleurs il n'a donné aucune explication. Je n'ai jamais comme lui trouvé d'es- pace entièrement rempli par un capillaire sanguin, et dans lequel — i23 — « // y avail résorption da cartilage, bien qu'il n'y eût pas de cellule de la moelle, d J'ai constaté une analogie complète entre la formation des espaces médullaires dans un tissu conjonctif proprement dit en voie d'ossification, et la formation de ces mêmes espaces dans le tissu cartilagineux. Là encore l'origine des espaces médullaires est due à des modifications que subit en certaines places le tissu conjonctif, pour se transformer en « tissu médullaire jeune. » Les caractères essentiels que présentent ces modifications sont encore : 1° la transformation successive de la substance fondamentale plus ou moins fibrillaire du tissu conjonctif en la substance fondamen- tale très-finement granulée ou homogène du nouveau tissu formé; 2Ma multiplication et le développement des éléments cellulaires du tissu conjonctif et leur transformation en éléments cellulaires du tissu de nouvelle formation, et enfin 3" la fusion de tous ces éléments pour constituer le tissu médullaire jeune. J'ai donné tous les détails concernant ces différentes modifica- tions. La formation du tissu médullaire est donc concomitante de celle des espaces médullaires, et, ainsi que l'a démontré l'étude que j'ai faite de l'origine de ce tissu, le tissu médullaire est le résultat de modifications subies par le tissu ostéogène primitif, que celui-ci soit du cartilage ou du tissu conjonctif proprement dit. Je ne veux cependant pas nier qu'une partie du tissu médul- laire jeune ne provienne du périchondre devenu périoste; mais comme le périoste lui-même est un tissu conjonctif ostéogène, l'assertion que je viens de faire est parfaitement exacte. Je ne puis admettre les conclusions de Lovèn, Stieda et Strei- zoff concernant la formation des espaces médullaires et de la moelle embryonnaire ; mes observations nie conduisent à des résultats tout à fait différents. Je n'ai jamais constaté comme eux une « destruction molécu- laire » des éléiiienls du tissu ostéogène; mais, au contraire, des modifications qui, en rajeunissant le tissu, lui donnent de nouvelles propriétés, notamment celle de se transformer en tissu osseux. — 126 — 2. Mes observations relatives à la formation des ostéoblastes m'a amené à admettre, avec Gegenbaur, Waldeyer et M. Le- boucq, que les ostéoblastes résultent de la transformation des cellules du tissu médullaire jeune. Waldeyer avait déjà fait cette étude. Je l'ai reprise et j'ai examiné en détail les modifica- tions, tant dans les noyaux cartilagineux de l'organe de Meckel et du condyle, que dans les tissus conjonctifs en voie d'ossifica- tion ; je suis arrivé aux mêmes conclusions que Waldeyer. 5. Fonnalion du tissu osseux. L'étude que j'ai faite de l'os- silication des différents tissus de la substance conjonctive, en- trant dans la constitution du maxillaire inférieur chez le foetus de Balœnoptera rostrata, me conduit à affirmer : i"" que le point de départ de i'ossiticalion eslune véritable « ossification directe ou métaptastique » du tissu ostéogène, c'est-à-dire une simple im- prégnation, par delà substance osseuse, d'une partie de la sub- stance fondamentale du cartilage ou du tissu conjonctif ostéo- gène, les éléments cellulaires de ces tissus devenant par là des cellules osseuses ; 2" qu'en même temps que cette modification se fait dans une partie du tissu ostéogène, l'autre partie subit d'autres modifications, que j'ai exposées plus haut, et qui amè- nent la formation des espaces médullaires et du tissu médullaire jeune; 5° que l'épaississemenl des travées osseuses formées par voie métaplastique a lieu par suite de l'ossification des ostéo- blastes, c'est-à-dire par « voie indirecte ou ostêoblastique »; 4*' que l'ossification métaplastique du noyau cartilagineux du condyle se fait suivant les deux modes exposés par StrelzofT [loco citato); 5° que la transformation des ostéoblastes en tissu osseux a lieu suivant le processus exposé par Waldeyer. J'ai fait remarquer que dans toutes les travées osseuses on peut, sur une certaine étendue, voisine de l'extrémité libre de la travée, distinguer nettement la partie centrale provenant de l'ossification métaplastique, de la partie périphérique provenant, au contraire, de l'ossification ostêoblastique. J'ai dit que la partie de la travée osseuse où l'on peut nette- ment faire cette distinction est plus ou moins étendue, qu'elle est très-étendue dans le cartilage du condyle, qu'elle l'est moins — 427 — dans le cartilage de Meckel, qu'elle est très-rcduite dans les lamelles périchondraleset surtout dans le tissu sous-dermatiquc, tandis qu'elle est bien développée à l'apophyse coroiiouie. Il résulte de là que l'ossification dite « directe » accompagne l'ossification dite « indirecte », non-seulement dans le même organe, mais dans la formation de la même travée osseuse. L'os- sification dite « indirecte » est, pour ainsi dire, la conséquence de l'ossification dite « directe »;car il est permis d'admettre que ce n'est que sous l'influence de la première imprégnation de la substance fondamentale du tissu ostéogène par de la substance osseuse, c'est-à-dire sous l'influence de l'ossification directe d'une partie du tissu ostéogène, qu'ont lieu dans le reste de ce tissu les modifications qui amènent la formation du tissu médul- laire, puis des ostéoblastes, et enfin de l'ossification dite « indi- recte. )> Selon que l'ossification dite a directe » se prolongera pendant une période plus ou moins longue, ou, en d'autres termes, selon que la formation du tissu médullaire jeune sera plus ou moins étendue et se fera plus ou moins lentement, le tissu ostéogène aura alors l'apparence d'un tissu ossifié par ans 1875. (3) Whitman, The Embryology of Clepsine, Quaterly Journal of micr. ncience. 1878. — 141 — cule germinative est le siège. Que le pronucleus femelle d'une part, les globules polaires de l'autre, ont avec elle des liens géné- tiques, c'est certain. Mais quels sont ces liens? Quelles sont les modiiications successives que subit son contenu avant de produire le pronucleus femelle et de donner naissance aux corps directeurs ? L'ignorance dans laquelle je me trouve encore à ce sujet m'a empêché de commencer l'exposé de mes recherches par les phénomènes de la maturation. J'eusse pu faire d'abord la publication de mes éludes sur la fécondation et la segmentation. Si je ne l'ai pas fait, c'est d'abord à cause de la difficulté de séparer la fécondation et ses consé- quences immédiates des phénomènes qui en sont le prélude. D'autre part, les nouvelles observations que j'ai pu faire sur le fractionnement du vitellus confirment en tous points les résul- tats que j'ai exposévS, avec assez de détails, dans ma Commu- nication préliminaire. J'ai préféré faire dans cette première notice l'exposé de la formation des feuillets. Ce qui m'a décidé à commencer par là, c'est l'appréciation que iM. Kôlliker a émise sur celle question dans la nouvelle édition de son a Ent¥vickcluiig;sgcscliicltte des llenselicu «sud der bohcren Thiere. » Parlant de l'opinion que j'ai exprimée sur l'origine des feuillets chez le Lapin, voici comment s'énonce le célèbre professeur de Wiirzburg : « In Betrcff der Bildung der Kcimbliitler der Saiigethiere » mcldet E. V. Beneden dass, das Mesoderma eine Abspallung » einer primiliven inneren Keiniscliicht sei, welclie letzlere, wie » im Texte angegeben wuide, ans den inneren Furchungs- » kugein, die ivir (!) die entodermatischen nennen wollen, her- » vorgeht. Dièse Beìiauplung des verchenslvolleii Forschers ist » ganz beslimmt îrn'g. — V. B. hai die entodermatischen Fur- « chimgskugeln nicht lange genug vcrfolgt, sonsl halte cr sich » iiberzeugt dass dieselben aus einer aufangs mehrzelligen » Schicht ganz allmâlig in eine einzellige ubcrgehen und dass » znr Zeit der Bildung des Embryonaltleckesdie Keimblase in » der Gegend desselben liberali doppelblâllerig und nirgends » dreiblâtterig ist... » — 142 — A mes observations sur la formation des feuillets, M. Kôlliker oppose une manière de voir bien différente. L'éminent embryo- logisle pense que chez le Lapin, pas plus que chez le Poulet, le feuillet moyen ne préexiste à la ligne primitive. Le Primitif- streif serait le lieu d'origine du mésoblaste et tout ce feuillet serait un dérivé del'ectoderme. On ne peut pas exiger de celui qui publie un manuel des recherches originales sur toutes les questions qui sont traitées dans son livre. Les problèmes que soulève la connaissance des premiers phénomènes du développement sont de ceux dont la solution exige de longues, de patientes et de minutieuses recherches. M. Kôlliker a fait à la hâte quelques observations pour s'orienter de visu dans l'histoire de la formation de la vésicule blastodermique. On doit lui en savoir gré; tous les auteurs qui publient des traités ne se donnent pas autant de peine. Mais il est dangereux, si l'on se borne à faire bien vite quelques recherches superficielles sur un sujet aussi délicat, de révoquer en doute les observations d'autrui sans se donner la peine de les contrôler. Cette manière de faire a mal réussi à l'illustre embryologiste. Avant de nier, il est toujours bon, fût- on la plus haute sommité scientiiique et s'appelàt-on Kôlliker, de vériiier les résultats annoncés en suivant les méthodes indi- quées pour les obtenir. Pour faire l'étude de la formation de la vésicule blastoder- mique et pour arriver à connaître le mode de formation des feuillets, j'ai sacrifié près de quatre-vingts Lapines. J'ai trouvé en moyenne sept vésicules dans une même femelle. Le nombre des œufs utérins que j'ai utilisés pour les recherches dont je vais rendre compte est donc approximativement de cinq cent qua- rante. Je ne puis songer à exposer, comme l'ont fait plusieurs de mes devanciers, les observations faites sur chacun des animaux que j'ai sacrifiés et des embryons que j'ai eus sous les yeux. J'ai à choisir entre deux modes pour faire connaître les résultats auxquels je suis arrivé : je pourrais faire un exposé synthétique du développement, tel que j'ai appris à le connaître et tel que je le comprends aujourd'hui. Cette méthode aurait l'avantage d'être — 143 — plus commode, plus brève, et la lecture de cette description serait certes moins pénible. Elle présente malheureusement l'inconvé- nient d'être plus dogmatique, plus schématique et de laisser au subjectif une part plus large et dont il serait difficile au lecteur d'apprécier l'importance, el'ai préféré suivre la méthode analy- tique, décrire une série d'embryons, tels que je les ai observés, soit vivants, soit après les avoir soumis à tel ou tel mode de préparation. J'ai cherché dans tout le cours de mes recherches à obtenir des préparations permanentes et j'ai perdu bien des vési- cules avant d'avoir trouvé des procédés satisfaisants. J'ai néan- moins fini par réussir, et j'ai choisi de préférence, pour la des- cription des divers stades de l'évolution, des embryons conservés. L'étude que j'ai faite de l'action des réactifs, la comparaison de l'embryon soumis à leur action avec le vivant, dont l'examen préalable n'a jamais été négligé, me permettront, dans chaque cas particulier, d'indiquer les altérations subies par les cellules et les couches ctllulaires sous l'influence du traitement. Les œufs que l'on trouve côte à côte dans une même Lapine, sont souvent de volumes fort différents. En voici deux exemples choisis entre un grand nombre d'autres que je pourrais citer. Dans une Lapine sacrifiée 4 jours 19 heures après le coït, j'ai trouvé six vésicules toutes parfaitement sphériques. Elles mesu- raient respectivement : 0.94 mm. jj O.Gomm. 0.84 » 1 0,61 )> 0.72 « il 0.53 » Leur diamètre variait donc à peu près du simple au double. La dimension moyenne était de 0.72 mm. Second exemple. Chez une Lapine sacrifiée 6 jours et 10 heures après la copulation, j'ai trouvé dix vésicules, toutes de forme ellipsoïdale. Les axes de l^ellipsoïde mesuraient : 4 sur 3.3 mm. 4 sur 3.8 » 4.3 sur 3.3 » 4.2 sur 3.6 9 3.7 sur 5.3 » 3.3 sur 2.8 mm. 3.2 sur 3.i » 5.5 sur 3.2 » 3.8 sur 3.5 » 3.2 sur 2.8 « — 144 Soit une moyenne de 5.7 mm. pour le grand axe, de 5.2 mm. pour le petit axe. En supposant, ce qui est approximativement vrai, que la forme de ces vésicules soit celle d'un ellipsoïde de révolution , on trouve pour cette série de vésicules les volumes que voici. Pour la l""* 172 mm. c. » 3«»« 184 » » 4ine 212 » » S"e J60 » G"" 96 mm. c. 7me 120 » 8me 140 » 9n»« 184 » lOrae 96 » Soit une moyenne de volume de 1 59 à 160 millimètres cubes. II arrive assez fréquemment que dans une Lapine sacrifiée après un laps de temps plus long, le volume moyen des œufs est moins considérable que dans une autre sacrifiée moins long- temps après le coït. Voici quelques chiflres qui établissent ce fait : Dans une Lapine sacrifiée 7 jours et 4 heures après la copula- tion, je trouve quatre œufs de forme ellipsoïdale. 1" œuf. Grand axe . . . 4.0 mm. Petit axe . . . 3.3 mm 2me » » . . 3,7 » "> . . . 5.2 » 3me » B , . . 2.8 » » . . . 2.2 » 4™* » « . , . 2.8 » » . . . 2.3 » Soit une moyenne de 5.5 mm. pour le grand axe, de 2.85 pour le petit axe. Une Lapine sacrifiée 6 jours 22 heures après le coït m'a donné six œufs. \^' œuf. Grand axe 2iDe r » 4mc „ „ Kcae 6nic 4.4 mm, 4.3 » 4.5 » 4.7 » 4.6 » 4.8 » Petit axe 4.2 mm 3.5 >> 3. S » 3.8 » 3.9 » 4.1 0 Soit une moyenne de 4.2 mm. pour le grand axe , de 5.8 mm pour le petit axe. — 145 — Le plus petit des œufs trouvés dans la Lapine de 6 jours 22 heures est donc plus volumineux que le plus gros de ceux que portait la Lapine de 7 jours 4 heures. Il est donc impossible de conclure à l'âge d'un œuf d'après son volume. 11 n'y a pas non plus de rapport constant entre le volume d'un œuf utérin et l'étendue de la tache embryonnaire. Voici quelques chiffres qui le prouvent. Dans une Lapine sacrifiée 6 jours 6 heures après le coït, j'ai trouvé onze œufs. Les dimen- sions respectives des œufs et des taches embryonnaires étaient : Grand axe. 1") 3.8mm. 2"; 2.8 » 3) 3.7 « 4°) 4.2 » 5") 5 7 » 6) 4.2 ). 7") 5.3 » 8") 2.9 « 9") 2.8 » 10") 3.6 » 11") 3.4 » POUR LES ŒUFS. Petit axe. 3.5 mm. 2.8 « 3.2 >^ 5. o » 5.3 » 3.3 « 3.5 » 2.6 » 2.7 » 3.2 » 3.0 » POUR LES AIRES EMBRYONNAIRES. Longueur. Largeur. 1 .4 mm 1.2 mm. 10 1.2 1.3 1.1 1.4 1.3 l.I 1.0 1.5 1.0 1,0 » 1.0 » 11 « 1.0 » 1.2 » 1 .0 » 0.8 » 0.8 » 1.0 » 0.9 « Les vésicules 1° et 6°, quoique de volumes différents, avaient des taches embryonnaires également étendues; d'autre part, les œufs 4° et 6", de mêmes volumes, avaient des aires embryonnaires assez différentes, Tune mesurant 1.5 mm. sur i.i mm. l'autre 1.4 sur 1.2 mm. Il arrive qu'un œuf moins volu- mineux présente une tache embryonnaire dans laquelle la ligne primitive est déjà bien manifeste, alors qu'à côté de lui s'en trouve un autre qui, quoique plus gros, montre une aire embryonnaire encore circulaire et dépourvue de toute trace de ligne primitive. Il n'existe donc pas de rapport constant entre le temps écoulé depuis le moment du coït et le développement d'un œuf utérin. — 146 — Aussi ai-je pris le parti de désigner chacun des embryons que je décrirai par un chiffre, suivant en cela ce qu'a fait Balfour dans l'exposé de ses belles recherches sur le développement des Élasmobranches. J'aurai soin de désigner chaque fois l'âge de l'œuf et aussi ses dimensions. Dans ma Note préliminaire, j'ai assigné aux œufs des carac- tères différents suivant leur âge : j'ai décrit des vésicules de lOo à 115 heures, des vésicules de S jours, etc. Ces détermi- nations sont approximatives. Quand, en exposant l'embryologie du Poulet, on dit que telle modification a lieu à telle heure ou à tel jour de l'incubation , il faut entendre cela en ce sens, que le fait se passe généralement à une époque voisine du moment indiqué. De même, si l'on prenait la moyenne d'âge d'un assez grand nombre de vésicules blaslodermiqnes du Lapin présentant la constitution et les caractères que j'assigne aux « œufs de 5 jours » , cette moyenne ne s'écarterait guère de ce chiffre. J'ai préféré néanmoins, pour être aussi exact que pos- sible, adopter le moyen inauguré par Balfour. Méthodes de recherche, d'examen et de préparation. Je n'ai sacrifié que des Lapines couvertes sous les yeux de mon domestique, de façon à connaître exaclement l'âge de tous mes embryons. Bischoff a souvent négligé d'indiquer l'âge des œufs qu'il décrit. Celte lacune constitue une véritable difïicullé dans la lecture de ses travaux. Généralement, les femelles ont été piquées plusieurs fois à de courts intervalles; le plus sou- vent deux, quelquefois trois fois. L'heure du premier coït a été toujours soigneusement notée, et l'âgo que j'attribue aux œufs est compté à partir du moment de la première copulation. Après avoir ouvert l'abdomen suivant la ligne blanche, je fais la ligature des vaisseaux qui se rendent au tube utérin que j'ex- cise en premier lieu. La cavité abdominale est ensuite rapide- ment refermée au moyen de quelques points de suture. Si l'opéra- — 147 — tion est faite avec quelque soin, l'animal la supporte fort bien. Le développement progresse normalement dans le tube utérin resté en place et l'on peut ne l'extirper que plusieurs heures après l'excision du premier. Aussitôt enlevé, l'utérus est ouvert à partir de son extrémité vaginale. L'incision est toujours faite suivant le milieu de la face opposée à l'insertion du méso-périlonéal. Les œufs assez volumineux pour pouvoir être facilement découverts à l'œil nu, ce qui est le cas à partir du cinquième jour, sont espacés, d'abord dans la partie supérieure, plus tard dans toute la longueur du tube utérin. Ils sont généralement d'autant plus écartés les uns des autres qu'ils sont plus gros. Ils sont enlevés l'un après l'autre au fur et à mesure qu'ils se présentent. Dans les premiers temps de leur séjour dans l'utérus, les œufs se tiennent, au contraire, tous dans le voisinage les uns des autres, près de la terminaison de l'oviducte. Ils sont alors fort petits: au moment de pénétrer dans la matrice, l'œuf a encore le même volume qu'au moment de la fécondation, et le diamètre de la zone pellucide au stade metagastrula est sensiblement le même que dans l'œuf ovarien. Aussi faut-il quelque habitude pour trouver les tout jeunes blastocystes; il est même plus diffi- cile de découvrir les ovules dans la partie supérieure de l'utérus que dans l'oviducte : l'utérus a un diamètre beaucoup plus con- sidérable que l'oviducte et des parois plus épaisses et tout à fait opaques. Enfin les plissements de la muqueuse utérine, en per- mettant aux ovules de se loger dans les sillons qui séparent entre elles les portions saillantes, les dérobent facilement à la vue. Mais l'on acquiert bien vite l'habitude de découvrir les ovules en se servant de la loupe et même de les voir à l'œil nu. Ce qui facilite la recherche, c'est l'existence autour de l'ovule proprement dit, au moment où il pénètre dans la matrice et durant les premiers temps de son séjour dans cet organe, d'une épaisse couche d'une substance albuminoïde. Celle-ci est formée d'un grand nombre de couches adjacentes, concentriquement déposées autour de la zone pellucide. Le dépôt, qui s'en fait progressivement autour de l'ovule du Lapin, pendant son passage à travers Tovi- — 148 — flucte, atteint son maximum de puissance au moment où l'œuf, Iransformé en une melagastrula, va passer dans l'utérus. L'épais- seur de celle couche est alors notablement supérieure au diamètre de l'ovule, de sorte que celui-ci se trouve logé au centre d'une petite perle transparente, qui mesure trois à quatre fois le dia- mètre de l'œuf proprement dit. Ce qui prouve que cet albumen est bien un produit de sécrétion des parois de l'oviducte et qu'il se dépose véritablement |)ar couches successives autour de l'ovule, c'est que l'on trou ve assez fréquemment dans l'oviducte des petits globes, formés de la même substance, déposée en couches con- centriques autour d'une granulation ayant servi de centre de formation, autour d'une cellule ou de quelques cellules, voire même autour d'un point. A partir du moment où l'œuf pénètre dans l'utérus, la couche albuminoïde diminue d'épaisseur; mais comme en même temps le diamètre de la vésicule blasloder- mique augmente, suivant une progression plus rapide que celle suivant laquelle décroît la couche albuminoïde, il devient d'au- tant plus facile de trouver les œufs qu'ils ont pendant plus long- temps séjourné dans l'utérus. Les petits œufs sont enlevés sur la pointe d'un scalpel et portés directement sur un porte-objet, soit dans l'humeur aqueuse, soit dans un autre liquide; les vésicules plus volumineuses sont saisies sur une palette en argent neuf et placées dans un verre à montre. Les vésicules les plus volumineuses que j'ai pu libérer complètement avaient environ 8 jours d'âge La zone pel- lucide plus ou moins complètement confondue avec la couche albumineuse fort réduite est alors exirêmement mince. Aussi devient-il nécessaire d'ouvrir l'utérus dans un liquide, ou bien, après avoir dégagé la vésicule à l'air libre, de la transporter dans un verre à montre en saisissant au moyen de deux pinces le lambeau de la paroi utérine sur laquelle il repose. Plus tard il devient impossible d'isoler les vésicules entières, à raison des adhérences qu'elles contractent avec l'épithelium de la mu- queuse. Je dirai dans le travail qui traitera des modifications qui se passent dans l'aire embryonnaire, à partir de l'apparition de la ligne primitive, comment j'ai opéré pour préparer ces embryons. — 149 — Beaucoup (l'œufs ont été examinés à l'état frais, dans une solu- tion d'alhuminc, dans l'eau salée ou dans l'humeur aqueuse, à la lumière incidente et à la lumière Iransmise. Quelques-uns ont été mesurés et dessinés avant d'avoir été soumis à l'action d'au- cun réactif. Les méthodes qui m*ont donné les meilleurs résultats pour la préparation des œufs utérins du quatrième au septième jour sont ; V le traitement par l'acide osmique et le liquide de MûUer; 2° le traitement par le nitrate d'argent. La première méthode est de toutes celles que j'ai essayées la plus convenable pour la préparation et la conservation des œufs, aux diverses phases de la segmentation, de la metagastrula et des jeunes blastocysles. Elle permet de conserver les premiers stades de la vésicule blastodermique et les diverses phases de la seg- mentation, sans qu'il se produise d'altération, ni dans la forme des cellules, ni dans leur transparence, ni dans leur aspect, ni dans les positions relatives des globes. Des œufs et de jeunes blastocystes, qui ont été montés il y a cinq ans dans la glycérine, après avoir été préparés par cette méthode, sont aujourd'hui aussi beaux et certainement plus faciles à étudier que quand ils étaient vivants. Le protoplasme prend seulement une légère teinte jaune ou brune, suivant qu'il s'agit de l'ectoderme ou de l'endoderme. La zone pellucide prend une couleur vert clair et les couches albuminoïdes restent à peu près incolores. L'œuf vivant est porté sur un porte-objet dans une goutte d'acide osmique à 1 °/o, puis enlevé sur la pointe d'un scalpel et placé dans le liquide de Millier. Après une heure le liquide est renouvelé et la préparation abandonnée pendant deux ou trois jours dans une chambre humide. On ajoute alors une gouttelette de glycérine très-diluée, puis de la glycérine plus pure; enlln l'ovule peut être monté dans la glycérine formique. J'ai obtenu aussi des résultats satisfaisants en remplaçant le liquide de Millier par le bichromate d'ammoniaque ou l'acide picrique préparé d'après la méthode de Kleinenberg. Mais le liquide de Millier, les chromâtes, l'acide picrique et l'acide chro- mique appliqués directement sur les œufs frais les altèrent pro- fondément. — 150 — On peut aussi, si l'on veut obtenir des préparations colorées, après avoir traité par l'acide osmique, placer Tœuf dans l'alcool au tiers, l'y laisser pendant 1 heure environ, le laver avec soin et le soumettre à l'action du carmin de Beale ou du picrocarmi- nate. 2" Préparations au nitrate d'argent. — L'œuf vivant est porté directement dans une solution de nitrate d'argent à VsVo- '^ y séjourne pendant ^U à 2 minutes, suivant l'âge de la vési- cule. Jl est ensuite immergé dans de l'eau pure et exposé à la lumière. L'examen du blastocyste resté entier permet de voir alors avec une parfaite netteté les limites des cellules de l'ecto- derme. La substance unissante des cellules de ce feuillet jouit à un très-haut degré de la faculté de réduire le nitrate d'argent. On peut, en faisant rouler l'œuf sur le porte-objet, examiner tous les points de la surface du blastocyste. Les préparations au nitrate d'argent des jeunes vésicules ne peuvent être conser- vées en préparations permanentes. L'excès de la solution saline qui a pénétré dans l'intérieur de l'œuf ne peut en être retiré par le lavage, et les préparations noircissent, quoi qu'on fasse, au point d'être entièrement perdues au bout de peu de jours. Il en est tout autrement des vésicules de 4 jours et au delà. Celles-ci, après avoir été préparées comme il a été dit plus haut, sont ouvertes au moyen d'aiguilles fines et les enve- loppes du blastocyste sont enlevées avec soin. Cette opération réussit très-bien. La vésicule blastodermique, qui pendant la vie est iniimement unie à la zone pellucide, dont elle tapisse la face interne s'en détache dès que le blastocyste soumis au préalable à l'action du nitrate d'argent est porté après cela dans l'eau. Dès que la vésicule cellulaire a été libérée, elle est incisée autant que possible, par des fentes pratiquées suivant des lignes méridiennes, à partir de son pôle inférieur. Ces fentes sont con- vergentes vers le centre du gastrodisque, et l'on peut rabattre la vésicule sphérique sur le plan du porte-objet. L'ensemble de la vésicule a alors la forme d'une étoile dont le centre correspond au milieu du gastrodisque (pi. V, tig. I). La préparation est ensuite traitée par le picrocaminate, le carmin, l'hématoxyline, l'éosine — io! — OU des solutions d'aniline, et montée soit dans la glycérine, soit dans le baume. Les préparations au picrocarmin montées dans la glycérine picrocarminatée et celles qui après avoir été colorées par l'hématoxyline ont été montées dans le baume sont les meil- leures que j'aie obtenues. 11 faut prendre garde de laisser trop longtemps dans l'eau les vésicules soumises au préalable à Tac- lion de l'argent. Si l'on ne prend pas la précaution de faire écouler le liquide du blastocyste, quand les contours des cellules sont suffisamment marqués pour donner de belles préparations, Texcès de la solution saline qui a pénétré dans la vésicule con- tinue à agir. Les corps cellulaires eux-mêmes sont attaqués alors par le nitrate d'argent; les cellules brunissent, puis noircissent et s'altèrent profondément. En même temps, la vésicule se con- tracte de plus en plus; elle se plisse, devient cassante, et après quelque temps il n'est plus possible de l'étaler. Quand les œufs ont atteint un certain volume, il est néces- saire, si l'on veut réussir à les étaler sur le porte-objet, de les diviser d'abord, en pratiquant une incision circulaire, suivant leur équateur, en deux calottes hémisphériques. On fait ensuite les incisions méridiennes convergentes vers le pôle des hémisphères. On obtient ainsi deux lamelles éloilées, dont l'une a pour centre le milieu du gastrodisque, l'autre le milieu de la région mono- dermique de la vésicule. J'ai obtenu aussi de bonnes préparations au moyen du chlorure d'or. Coupes. — Lorsque j'ai publié ma communication préliminaire, je n'avais pas encore réussi à faire des coupes convenables des jeunes taches. Depuis cette époque, j'ai obtenu de bonnes séries de coupes au moyen des deux méthodes que je vais décrire. i° Les vésicules sont traitées par l'acide chromique à i pour 400 et laissées dans ce liquide pendant 24 heures. Elles sont ensuite lavées avec soin et placées dans l'alcool faible d'abord, puis de plus en plus fort, enfin dans l'alcool absolu, dans lequel elles peuvent rester indéfiniment. L'acide chromique durcit la vésicule en maintenant une adhésion si parfaite des cellules ectodermiques contre la zone pellucide qu'il devient presque — 152 — presque impossible de les séparer. De semblables vésicules se prêtent très-bien à la confection de coupes. Voici comment il faut opérer. La tache embryonnaire est excisée avec la partie avoisinante de la région didermique du blastocyste. Il arrive sou- vent que le lambeau quadrilatère que l'on a ainsi isolé s'enroule sur lui-même, à cause de l'élasticité de la membrane d'enveloppe; il faut alors beaucoup de patience pour parvenir à l'étaler. Après que le lambeau a été bien étalé sur le porte-objet, les couches cellulaires de l'embryon étant tournées vers l'observa- teur, on enlève le liquide et on laisse évaporer l'eau jusqu'à demi-dessiccation. Les bords du lambeau adhèrent déjà légè- rement au verre, quand la partie centrale (la tache embryonnaire) restée humide est encore tout à fait libre. On peut alors, au moyen d'un scalpel à bord convexe et bien tranchant, pratiquer, sous le microscope simple , des coupes suffisamment minces de la lamelle. Dès qu'elles sont isolées, les coupes, grâce à l'élasticité de la membrane d'enveloppe s'incurvent, en formant un arc de cercle, et de celle façon elles se placent nalurellement dans la position requise pour l'examen. On peut alors colorer, recouvrir d'une lamelle et monter les coupes en préparations permanentes. 2" Mon ancien assistant, Alexandre Fôtiinger, m'a fait d'autre part un grand nombre de coupes au rasoir à travers des taches embryonnaires de 5 jours, de 6 jours et au delà. La vésicule aussitôt retirée de l'utérus est traitée, soit par l'acide chro- mique, soit par l'acide osmique, soit, ce qui vaut mieux, par Yacide picrique de Kleinenberg. C'est ce dernier mode de prépa- ration qui m'a donné les plus beaux résultais. Les œufs, après avoir été durcis au préalable dans ces acides, sont préparés par l'alcool , puis colorés par le picrocarmin ou l'hémaloxyline. La tache embryonnaire est alors excisée et soumise à l'inclusion dans le spermaceti (quatre parlies de blanc de Baleine pour une d'huile de ricin). La position de la tache qui a été étudiée, mesurée et dessinée à la chambre claire, avant l'inclusion, est notée avec soin. Les coupes sont faites au moyen du rasoir, plongé au préa- lable dans un mélange de térébenthine (quatre parties) et de creo- — ^53 — sole (une partie), puis montées dans le baume. Chaque coupe est montée seule sur un porte-objet et les préparations sont aussitôt numérotées. M. Fôtlinger m'a fait à main levée jusque quarante-huit coupes à travers une tache embryonnaire de 0,9 de millimètre. Il a coupé de cette manière un nombre assez considé- rable d'embryons de 7, de 8 et de 9 jours. Ce n'est qu'après s'être exercé pendant plus de 2 ans et avoir acquis une habileté con- sommée pour ce genre de préparations, qu'il a réussi à me faire de belles coupes à travers de jeunes taches de 5 et de 6 jours. STADE I. Metagastrula. (PI. IV, fig 1.) L'embryon que je vais décrire, je l'ai trouvé dans l'utérus d'une Lapine couverte le 18 février 1875, à 4 heures après-midi, et sacrifiée le 21 à midi, soit 70 heures après le coït. Je l'ai étudié vivant dans l'humeur aqueuse, après quoi je l'ai traité par l'acide osmique, placé durant 2 jours dans le liquide de Mùller et conservé dans la glycérine. L'utérus du côté droit renfermait, tout près de celui que je vais décrire, à proximité de l'embou- chure de l'oviducte, trois autres œufs de même volume, chez les- quels toute trace de blastopore avait disparu. Dans l'un des trois je pus constater une fente étroite entre l'ectoderme et la masse endodermique, c'est-à-dire un commencement de cavité blasto- dermique. Du côté gauche j'ai trouvé trois œufs. Dans l'un d'eux l'em- bryon avait encore un blastopore bien reconnaissable surie vivant. Dans les deux autres, la vésicule ectodermique semblait entière- ment close. Dimensions : Diamètre de la metagastrula : 0.09 mm. Épaisseur moyenne de l'ectoderme : 0 018 mm. Diamètre de la masse endodermique : 0,052 à 0.06 mm. Épaisseur de la zone pellucide: 0.015 a 0.016 mm. M — 154 — L'œuf est parfaitement sj3hérique. La cavité circonscrite par la zone pellucide n'est pas encore complètement remplie par la melagaslrula. Les cellules eclodermiques sont toutes convexes en dehors.En certains points, elles confinent à la zone pellucide; mais le contact ne se faisant que par un point de leur surface, il existe entre la zone d'une part, les cellules eclodermiques de l'autre, des espaces à section triangulaire remplis par un liquide hyalin sur le vivant, finement granuleux après l'action de l'acide osmique et du liquide de Millier. Dans ces espaces, et même entre les convexités externes des cellules d'une part, la zone pellucide de l'autre, se voient encore des spermatozoïdes. Au niveau du blastopore, il y a, entre les cellules et la membrane de l'œuf un espace un peu plus étendu : là aussi se voient des spermatozoïdes. J'ai en vain cherché les corps directeurs, je crois qu'ils n'existent plus à ce moment du développement. Ayant réussi à amener le blastopore dans la coupe optique de l'œuf, je compte à la coupe quatorze cellules ectodermiques. Leur forme parait cuboïde; en réalité elle est polyédrique : on peut s'en assurer en soulevant le tube du microscope, de façon à amener au foyer la surface de l'ectoderme. Ces cellules se tou- chent suivant des surfaces planes, et les lignes qui marquent leurs limites latérales sont difficiles à voir sur le vivant. Tout Tectoderme apparaît à première vue comme une zone plus claire et finement granulée, dans laquelle on ne pourrait avec certi- tude découvrir les limites des cellules, n'était leur convexité externe. La masse endodermique constitue un noyau plus foncé et plus granuleux; mais la limite entre les deux couches est très-nette, même sur le vivant. La face profonde de cha- cune des cellules de Tectoderme est également convexe; elles laissent entre elles de légers angles rentrants et les cellules de l'endoderme se moulent sur leur face profonde, de façon à rem- plir ces angles. Les cellules ectodermiques qui circonscrivent le blastopore ont à la coupe une forme triangulaire; elles ont d'ail- leurs tous les caractères des autres cellules du même feuillet. En élevant progressivement le foyer, on peut voir le pour- tour du blastopore marqué par une ligne régulière. — 155 — Les dimensions des cellules eclodermiques paraissent varier légèrement et l'épaisseur du feuillet n'est pas partout la mémo. J'ai observé plusieurs l'ois, ce qui était très-manifeste dans l'em- bryon dont je m'occupe, que la plus grande épaisseur de l'ecto- dermese trouve près du blastopore, mais d'un côté seulement. Là se voient les plus grandes cellules, comme si la multiplication des cellules de l'ectoderme progressait plus rapidement d'un côté que de l'autre, ce qui impliquerait une dissymétrie dans l'épibolie. Les cellules ectodermiques sont plus claires que celles de l'en- doderme. Elles sont plus finement granulées. On trouve néan- moins des granulations plus volumineuses autour du noyau qu'à la périphérie. La partie profonde de ces cellules est beaucoup plus claire que le reste de leur corps protoplasmique. Elle est pres- que complètement dépourvue de granulations. Comme cette par- ticularité se répète pour chacune de ces cellules, il en résulte l'existence d'une zone claire entre l'ectoderme et l'endoderme, zone que l'on est tenté de prendre pour la cavité blastodermique à son début. J'ai eu des doutes sur la nature de la cellule a (pi. IV, fig. 1). Je crois cependant qu'elle doit être rattachée à l'endoderme. La face profonde de la cellule 6, au contact de la cel- lule «, présentait la zone claire que l'on observe dans toutes les cellules ectodermiques, tandis que la cellule a était uniformément granuleuse, quoiqu'elle fût moins opaque que les cellules voisines. D'autre part, on voyait à la surface de l'embryon une ligne régu- lière se porter du sommet de la cellule c vers le sommet de 6. La dimension assez considérable du blastopore de l'embryon, si Ton rattache a à l'endoderme, m'a fait douter cependant de la nature endodermique de cette cellule. Il faut se rappeler que, parmi les autres embryons trouvés en même temps, cinq sur six avaient complètement perdu toute trace du blastopore. En outre, j'ai fréquemment trouvé dans l'oviducte des embryons chez lesquels le bouchon endodermique se trouvait réduit à une seule cellule. J'ai cherché à ramener l'embryon dans la position dans laquelle je l'avais étudié frais, après l'avoir traité par l'acide osmique et le liquide de Mûller. Les cellules endodermiques prennent sous — i5C — l'influence de ce réactif une teinlc plus brune qui les rend plus difl'éren les encore des cellules de Tendoderme. Mais je n'ai pu y parvenir. J'ai quelquefois observé dans les cellules eclodermiques de la gaslrula des bâtonnets réfringents analogues à ceux que j'ai trouvés fréquemment dans le vitellus des œufs, peu de temps après la fécondation, dans les sphères de segmentation, et tels qu'on les rencontre constamment dans le corps des cellules de l'ectoderme, quand les blastocystes ont atteint un certain volume. Je ne m'arrêterai pas à les décrire ici, d'autant plus que je ne les ai pas remarqués dans l'embryon dont je m'occupe en ce moment. Les noyaux des cellules ectodermiques sont clairs et à surface mamelonnée; ils renferment un nombre variable de corps nu- cléoliformes très-réfringents, de formes différentes. Les dimen- sions des noyaux ne sont pas non plus uniformes. Je n'ai pas observé dans l'embryon que je décris de noyaux en voie de division. Mais sur d'autres embryons du même âge, j'ai vu des cellules se multiplier au milieu d'autres qui ne mon- traient aucune particularité indiquant l'imminence d'une divi- sion. A ce stade toutes les cellules d'un même feuillet ne se divi- sent plus en même temps. Endoderme. — La masse endodermique a une forme à peu près ovoïde. Elle se moule exactement dans la cavité circon- scrite par l'ectoderme et la remplit complètement. Elle est plus foncée, plus opaque que le feuillet externe, et il est fort diffìcile de distinguer sur le vivant les limites des cellules. On y parvient, néanmoins par un examen attentif; mais ces limites deviennent beaucoup plus nettes après le traitement par l'acide osmique. Toute la masse prend sous l'influence de ce réactif une teinte brune qui la distingue nettement de l'ectoderme. Elle s'engage dans le blastopore par deux ou trois cellules formant ensemble ce que je considère comme l'homologue de ce que Ecker a désigné, chez la Grenouille, sous le nom de ou a bouchon vitellin. » Les cellules endodermiques sont polyédriques; elles se mou- — J57 — lent les unes sur les autres suivant des surfaces à peu près planes. Celles qui sont engagées clans le blastopore sont allongées dans le sens de l'axe de l'embryon et terminées par des surfaces arron- dies. Elles sont plus volumineuses et plus granuleuses que les cellules ectodermiques, et les granulations, quoique plus nom- breuses autour des noyaux, sont répandues dans le protoplasme delacellulejusqueprèsde leur surface. Les caractères des noyaux sont assez difficiles à définir sur l'embryon entier. Mais si l'on fait séjourner un embryon dans le liquide de Millier pendant une huitaine de jours, on parvient, après avoir rompu et écarté les enveloppes de l'œuf, à isoler au moyen d'aiguilles fines la masse endodermique. L'ectoderme se détache par fragments convexes en dehors, concaves en dedans de la masse endoder- mique qui, elle, reste entière. Les cellules qui la constituent adhèrent fortement entre elles. La masse endodermique ainsi isolée affecte la forme d'un ovoïde ou celle d'un carafon, dont le goulot est constitué par celles des cellules endodermiques qui bouchaient le blastopore. Quand on a ainsi isolé plus ou moins parfaitement la masse endodermique, il est plus facile de saisir les caractères des cel- lules qui la constituent. Les noyaux des cellules de l'endo- derme ne me paraissent pas différer de ceux de Tecloderme. Ce sont de grands noyaux clairs à surface bosselée et pourvus de plu- sieurs nucléoles brillants et assez volumineux. J'ai obtenu au moyen du nitrate d'argent de très-jolies pré- parations de la metagastrula. J'en ai figuré une vue à la surface (pi. IV, fig. 2). La figure 5 de la même planche représente une coupe optique du même embryon recueilli dans l'utérus d'une lapine fécondée le 7 mai 1877, à 10 '/a heures du matin, et sacri- fiée le 10, à 9 72 heures. J'ai trouvé six œufs du côté droit, trois à gauche. Ils avaient tous le même volume et approxima- tivement le même degré de développement. L'argent réduit par la substance unissante des cellules ecto- dermiques forme des lignes noires, qui se coupent de façon à délimiter des espaces polygonaux. Ces polygones n'ont ni la même forme, ni les mêmes dimensions. En un point de la sur- — 158 — face de Teclodermeje réseau est interrompu et des lignes noires très-netles, au nombre de cinq, convergent vers le milieu du lieu d'interruption. Cette région, plus granuleuse, correspond au blastopore; on peut s'en assurer en examinant la figure 5. A la coupe optique de Pembryon, les limites des cellules ecto- dermiques sont admirablement marquées par des lignes noires convergentes vers le centre de l'œuf. Au niveau du blastopore, les lignes noires radiées font défautentre une cellule qui se distingue au milieu de toutes les autres cellules superficielles par son opa- cité et son apparence granuleuse. Elle a, du reste, tous les carac- tères de la masse endodermique. J'ai traité par le nitrate d'argent un assez grand nombre d'œufs recueillis dans l'oviducte vers la fin de la segmentation ; j'ai obtenu plusieurs fois la même image, et l'on pourra se convaincre, si même l'on pratique pour l'étude de cette phase du développement cette seule méthode de préparation, qu'il existe dans la surface de l'œuf une région dans les limites de laquelle les contours des cellules se marquent incomplètement, ou même ne se marquent pas du tout par l'argent, alors que des figures polygonales très- nettes apparaissent sur tous les autres points de la surface de l'embryon. Ce fait trouve son explication dans l'existence du blasto- pore, et dans cette circonstance que la substance unissante qui unit les cellules ectodermiques aux cellules de l'endoderme, si toutefois cette substance existe, ne jouit pas de la propriété de réduire le nitrate d'argent. La zone pellucide présente encore à ce moment la même épaisseur, la même constitution et les mêmes caractères que durant la segmentation. Je la décrirai quand je ferai connaître mes recherches sur l'œuf ovarien et sur la segmentation. Quant à la membrane vitelline que j'ai pu isoler au début de la seg- mentation et plus récemment dans l'œuf ovarien arrivé à matu- rité, membrane dont je puis affirmer l'existence avant la fécon- dation et au commencement du fractionnement, je ne sais si elle existe encore à la fin du troisième jour. Je n'ai pas cherché à résoudre cette question. — 159 — La zone pellucide est entourée d'une couche albuminoïde extrêmement épaisse. Elle présente une strialion concentrique qui paraît indiquer l'existence de lamelles adjacentes. Les lignes qui marquent les limites de ces minces lamelles ne sont pas toutes également nettes. Les unes sont très-l'ortement indiquées, les autres si peu apparentes, qu'il faut la plus grande attention pour les distinguer. L'épaisseur des lamelles est toujours très- faible, mais pas constante. Le contour externe de la couche albu- minoïde est extrêmement difficile à saisir. La consistance des couches les plus extérieures paraît être très-molle: des poussières s'y accolent et même s'y empâtent avec la plus grande facilité. La consistance de cette couche albuminoïde est beaucoup plus con- sidérable que celle du blanc d'œuf. La substance qui la con- stitue, hyaline et homogène pendant la vie, devient finement gra- nuleuse après le traitement par Tacide osmique et le liquide de Mûller. Elle se teinte faiblement en rose par le carmin et le picrocarminale. Elle ne prend pas du tout l'hématoxyline. Quand je dis que ce dépôt albuminoïde est formé de lamelles, je n'entends affirmer par là que la diversité des propriétés des couches successives qui le composent. Je n'ai jamais réussi à décomposer mécaniquement la couche en feuillets distincts; mais la stratification parfaitement manifeste du dépôt entraîne ridée de couches différentes et par conséquent de lamelles suc- cessives, adjacentes entre elles et peut-être incomplètement séparées. La zone pellucide , aussi bien que la couche albuminoïde, renferme encore un assez grand nombre de spermatozoïdes, parfaitement conservés et dirigés dans tous les sens, les uns radiairement, les autres tangentiellement, d'autres enfin dans toutes les positions intermédiaires. Les uns sont plus ou moins rectilignes, d'autres incurvés, d'autres encore contournés et entor- tillés sur eux-mêmes. — 460 — STADE li. (PI. IV, fig. 4.) Ce stade, ircs-voisin du précédent, je l'ai trouvé un grand nombre de fois dans l'extrémité supérieure de l'utérus. II se dis- tingue d'une part de la melagastrula par la fermeture du blas- topore, d'autre part du blaslocyste à son début, en ce qu'il n'existe encore aucune trace de la fente blastodermique. L'em- bryon que j'ai figuré provient d'une Lapine fécondée le 5 mars 1876 à 7 ^2 heures du matin et sacrifiée le 6 à 8 ^4 heures, soit 72 à 75 heures après le coït. J'ai trouvé dans cette Lapine onze œufs. L'un d'eux montrait encore une trace du blastopore; six autres étaient arrivés au stade que je vais décrire; deux renfermaient un blastocyste à son début; deux enfin étaient anormaux : la cavité de l'œuf était incomplètement remplie par une masse granuleuse irrégulière dans laquelle je ne pus déchif- frer aucune structure régulière. C'étaient des œufs avortés. L'embryon figuré a été dessiné d'après une préparation perma- nente; avant d'être monté dans la glycérine, il a été traité par l'acide osmique, puis par le liquide de Miiller. On remarque tout d'abord que toute la cavité de Fœuf est parfaitement remplie par la masse cellulaire de l'embryon. 11 n'y a plus ni espaces entre les cellules de l'ectoderme et la zone pellucide, ni lacunes entre les cellules. Les cellules de l'ecto- derme sont à peu près planes suivant leur face externe (1) et la surface de l'embryon, considérée dans son ensemble, représente une sphère sur laquelle s'applique exactement la zone pellu- cide. A part cette particularité, les cellules ectodermiques pré- (1) Il serait plus exact de dire que la face externe des cellules de Tecloderma est une portion de surface sphérique, pui.sque ces cellules se moulent contre le fate inleine de la zone pellucide. Mais, comme chaque cellule représente une trè.s- petile portion de la sphère, on peut faire abstraction de cette légère courbure. ■^ i61 - sentent tous les caractères que j'ai décrits dans le stade précé- dent. Je n'ai plus trouvé, ni chez cet embryon, ni chez un grand nombre d'autres arrivés à ce stade du développement, aucune trace certaine du blastopore. En soumettant les œufs à l'action du nitrate d'argent, on obtient sur toute la surface de l'œuf un réseau de lignes noires circonscrivant des polygones de formes et de dimensions variables, et l'on peut constater, en faisant rouler l'œuf sur le porte-objet, que le reticulum s'étend uniformément et sans interruption aucune sur toute la surface de l'embryon. La vésicule eclodermique est complètement remplie par la masse cellulaire de l'endoderme, qui présente les mêmes carac- tères que dans le stade précédemment décrit. Les limites des cellules ectodermiques sont extrêmement dif- ficiles et même parfois impossibles à reconnaître sur le vivant; on peut en dire autant de celles qui forment l'endoderme. Ceci dépend, je pense, de ce que l'embryon remplit hermétiquement, à ce moment, la cavité de l'œuf; ses cellules sont pressées les unes contre les autres; elles se moulent exactement les unes sur les autres. Sur le vivant, on ne distingue qu'une masse granuleuse, plus foncée au centre, plus claire suivant une zone périphéri- que; celle-ci est nettement délimitée du côté de sa face pro- fonde par une bande claire et d'apparence homogène,qui marque la surface de contact des deux feuillets. Mais l'existence des cellules se reconnaît, même sur le vivant, par la présence des noyaux faciles à constater; elle devient très- évidente, si l'on traite par l'acide acétique faible ou même sim- plement par l'eau ; elle ne peut être méconnue après que l'on a soumis les embryons à l'action de l'acide osmique et du liquide de Millier; enfin, les résultats obtenus au moyen du nitrate d'ar- gent font disparaître les derniers doutes que Ton aurait pu con- server. — 162 — STADE III. Début de la cavité blastodermique. (PI. IV, fig 5 et 6.) L'embryon que je vais décrire a été trouvé en même temps que le précédent. J'ai rencontré ce stade un assez grand nombre de fois. Je l'ai observé 69 heures après la copulation et aussi chez une Lapine fécondée 78 heures avant d'être ouverte. 11 est im- possible de dire exactement combien de temps après la féconda- tion apparaissent les premières traces de la cavité blastoder- mique; mais tout me porte à croire que ce phénomène débute peu de temps après que l'œuf est arrivé dans la matrice. I Dimensions : Diamètre du blaslocyste : 0,12 mm. Épaisseur moyenne de Tecloderme : 0.016 mm. Diamètre moyen de la masse endodermique : 0.065 mm, La plus grande largeur de la cavile blastodermique : 0.018 mm. Zone pellucide : 0.015 mm. L'embryon III (pi. IV, fig. 5 et 6) a été d'abord étudié vivant, sans l'addition d'aucun réactif. Sur le frais, on peut voir très- distinctement qu'une fente existe entre l'ecloderme et la masse endodermique plus foncée et plus granuleuse; 2° que la fente n'est pas concentrique au centre de l'œuf, maisexcentriquement placée : la masse endodermique est adhérente d'un côté à la couche cellulaire périphérique; 3" que la fente ne s'étend pas tout autour de l'endoderme, mais qu'elle présente la forme d'un croissant à bords irréguliers, dont les cornes se terminent au point où les deux feuillets sont accolés l'un à l'autre; 4° que le diamètre de la cavité de l'œuf a augmenté. 11 mesurait chez l'em- bryon III , 0.09 mm. Il s'est donc accru de 0.03 mm. depuis le stade précédent. Le moment où l'œuf commence à augmenter de volume coïncide donc avec l'apparition de la fente blastoder- mique. — i65 — L'embryon III a été traité par l'acide osmique et le liquide de Millier, puis monté dans la glycérine. La figure que j'en donne a été faite à la chambre claire (obj. 8) d'après l'embryon conservé. L'ectoderme est intimement appliqué contre la zone pellucide; la face externe des cellules est plane; çà et là on distingue encore des spermatozoïdes entre ces cellules et la membrane de l'œuf. L'épaisseur de l'ectoderme est un peu moins considérable au point où se trouve accolé l'endoderme que sur le reste de son pourtour. Les cellules sont encore cuboïdes; elles ont la même forme que dans le stade précédent; mais elles proéminent très- inégalement dans la cavité blastodermique : l'étendue de leur face profonde, suivant laquelle elles sont très-convexes, est plus considérable, ce qui revient à dire que les angles rentrants qui existent entre elles sont plus profonds. Leur aspect est resté le même; elles sont granuleuses , sauf dans leur partie profonde, qui est marquée par une ligne très-foncée et qui paraît relativement homogène. Leurs limites latérales sont à peine visibles : elles sont marquées par des lignes très-fines dirigées suivant les rayons de la sphère. Les noyaux présentent encore les mêmes caractères que précédemment; les bosselures superficielles sont cependant moins marquées. Les dimensions des cellules sont très-inégales ; j'en compte une vingtaine à la coupe optique. Les unes sont irès-hautes et relati- vement étroites; les autres, au contraire, développées en largeur. Là où la masse endodermique se trouve accolée à l'ectoderme, les cellules de ce feuillet sont plus plates. La ligne qui limite extérieurement la cavité blastodermique est très-irrégulière, ce qui se voit déjà très-bien sur le vivant. La masse endodermique formée par des cellules, dont les caractères sont en tous points identiques à ceux que présentent ces cellules aux stades précé- dents, se distingue par sa coloration brune, son apparence très- granuleuse et son opacité. Elle est bosselée à sa surface, ce qui dépend de ce que les cellules périphériques font saillie indivi- duellement dans la cavité blastodermique etsont terminées pardes surfaces nettement convexes. A la coupe optique on reconnaît que l'adhérence de l'endoderme à l'ectoderme se fait par trois — 164 — cellules. La limite entre les deux feuillets est très-nette. La cavité blastodermique est occupée par un liquide incolore, trans- parent, hyalin, dépourvu de toute granulation. J'ai eu sous les yeux deux embryons chez lesquels, quoique la cavité blastodermique fût bien manifeste (chez l'un des deux elle était même plus étendue que chez celui que je viens de décrire), une cellule endodermique nettement caractérisée comme telle se trouvait engagée entre les cellules de l'ectoderme (pi. IV, fig. 7). Dans les deux cas la cellule se trouvait près du bord de la surface d'accolement des deux feuillets. On pourrait interpréter ce fait comme une preuve en faveur de l'ancienne manière de voir de Bischoff et de Remak qui pensaient que les cellules de la masse endodermique, appelée par eux Do^- terrest ou Dolterhaufen , sont destinées à se transformer en cellules plates. Ce reste vilellin n'aurait aucun rapport avec la tache embryonnaire {Fruchlhof^ Keimscheibe) qui apparaîtrait plus tard après la disparition du Dotterrest. Bischoff, dans son mémoire sur le Lapin, et après lui Remak ont pensé qu'à un moment de son évolution la vésicule blastodermique est formée, sur tousles points de sa surface, par une seule rangée decellules. Cette opinion est certainement erronée. Il n'existe pas pour la vésicule blastodermique de stade monodermique; le Dotterrest ne disparaît pas; c'est à ses dépens que se développent, comme je le montrerai plus loin, l'hypoblaste et lemésoblaste. Les cellules qui le constituent ne sont donc pas dans leur ensemble des globes de segmentation destinés à se transformer en cellules ecloder- miques. Mais l'observation que j'ai rapportée plus haut ne pour- rait-elle pas être interprétée en ce sens que quelques-unes au moins de ces cellules participeraient àia formation du feuillet externe? Je ne le pense pas. D'abord, dans tous les stades subsé- quents, l'ectoderme constitué par une seule rangée de cellules est nettement séparé des éléments qui constituent la masse en- dodermique primitive et qui subissent plus lard les modifications que je ferai connaître. D'autre part, j'ai montré que dans les stades précédents, la vésicule eclodermique est interrompue en un point et qu'en ce — i65 — point que j'ai appelé blaslopore, une ou plusieurs cellules de l'en- doderme arrivent à la surface de l'œuf, en bouchant le blastopore. Il est donc probable que dans les deux embryons dont il est ici question, la cellule engagée dans l'ecloderme était un reste du bouchon de Ecker; un dernier vestige du blaslopore, qui chez ces individus se serait fermé tardivement. Les caractères des cel- lules, leur forme, leur disposition et leur ressemblance avec ceux que j'ai décrits dans le stade précédent confirment encore celte manière de voir. La circonstance que dans ces deux cas la cellule endoder- mique engagée dans Tectoderme se trouvait non au centre, mais à la périphérie de la surface d'adhésion des deux feuillets, me paraît avoir une certaine importance en ce qu'elle semble indi- quer l'excentricité de la position du blastopore. J'ai traité par le nitrate d'argent plusieurs embryons arrivés au stade IlL Ces préparations sont très-instructives; elles montrent avec une grande netleté que l'ectoderme est continu sur toute la surface de l'embryon, et qu'il est partout constitué par les mêmes cellules polyédriques, dont les limites se marquent nette- ment par l'argent; mais jamais je n'ai vu de lignes noires appa- raître ni à la limite entre l'ectoderme et l'endoderme, ni enlre les cellules de la masse endodermique. J'ai observé un grand nombre de stades de transition entre l'embryon III et la phase IV que je vais décrire (fig. 8, 9 et 10). La fente blastodermique s'étend en même temps que le diamètre de la vésicule ectodermique augmente; la masse endodermique occupe une fraction de plus en plus faible de la vésicule sphé- rique que forme l'ectoderme. Sa forme change; la masse cellu- laire endodermique s'aplatit à la face profonde de l'ectoderme et la surface de contact entre les deux feuillets s'étend peu à peu. En même temps que la vésicule se distend, les cellules changent peu à peu de forme; elles deviennent hémisphériques d'abord, puis s'aplatissent de plus en plus. En même temps leur nombre augmente; elles se multiplient par division. On trouve çà et là une cellule en voie de division entre d'autres qui ne manifestent aucune tendance à la multiplication. A ces deux causes, change- — 166 - ment de forme et augmentation de nombre, est due l'expansion progressive de la vésicule. Au début la masse endodermique est terminée du côté de la cavité blastodermique par une surface convexe (tig. 8 et 9). Le rayon de courbure de celte surface augmente au fur et à mesure que la vésicule se distend, et que d'autre part la masse endodermique s'étale peu à peu. Bientôt sa face profonde devient plane; plus tard elle deviendra concave (fig. 10). En même temps elle s'amincit; mais celte diminution d'épaisseur intéresse surtout les bords de la masse endoder- mique, qui n'est bientôt plus formée sur ses bords que par une seule rangée de cellules arrondies, juxtaposées entre elles, alors que vers son milieu elle est encore constituée de plusieurs as- sises cellulaires (fig. 10). STADE IV. ' 94 HEURES. (PI, IV, fig. 11.) L'embryon que je vais décrire a été recueilli dans l'utérus d'une Lapine sacrifiée le 17 avril 1876, 94 heures après le coït. J'ai trouvé trois œufs à peu près également développés dans le lube utérin du côlé droit, cinq autres de volumes assez différents du côté gauche. Ces œufs étaient assez espacés; mais tous se trou- vaient dans le tiers supérieur de l'utérus. La plus volumineuse des vésicules trouvées dans le tube utérin gauche se trouvait être la plus rapprochée de l'extrémité supérieure de l'utérus, tandis que les deux plus petites étaient plus éloignées de ce point. J'ai trouvé des œufs de même volume et constitués comme celui que je vais décrire dans une autre Lapinesacrifiée 90 heures après la copulation, et aussi chez une autre qui fut ouverte 99 heures après le coït. Cette dernière renfermait en même temps des œufs beaucoup plus volumineux et malgré cela fort semblables à celui que je vais décrire. Le blastocyste de l'œuf représenté (pi. IV, fig. 11) mesurait 0.28 mm. Le diamètre a donc triplé dans les 24 heures qui se sont écoulées depuis l'entrée — 167 — (le l'œuf dans l'utérus. La couche albuminoïde a notablement diminué d'épaisseur. On peut en dire autant, quoique à un moindre degré, de la zone pellucide. L'œuf a l'apparence d'une petite perle sphérique transparente et hyaline. Examinée à la loupe, elle laisse apercevoir en un point de sa surface une petite tache blanche; si l'on examine l'œuf à la lumière incidente, elle tranche sur le fond transpa- rent de la vésicule; à la lumière transmise, elle est opaque. Cette tache n'est autre que le gastrodisque : elle est la région dans les limites de laquelle la masse endodermique étendue, amincie et développée en surface, est accolée à la face interne de l'ecto- derme. Le gaslrodisque est à ce moment didermique; le reste du blastocyste est monodermique. Si l'on examine le gastrodisque en se servant de l'objectif 4 de Hartnack, on remarque que la partie centrale de la tache est plus opaque; les cellules y sont accumulées en plus grand nombre qu'à la périphérie. Cette partie centrale différenciée est le premier indice de la tache embryonnaire, que l'on distingue de plus en plus nettement à partir de ce moment, soit vers la fin du quatrième jour. Si l'on amène au foyer la coupe optique du blastocyste ou si, après avoir pratiqué une déchirure dans la paroi, de façon à faire écouler le liquide qu'il renferme, on observe les plis qui se forment, on constate que la membrane du blastocyste est formée par une rangée unique de cellules aplaties fusiformes à la coupe, accolées à la zone pellucide et faisant légèrement saillie dans la cavité blastodermique. Dans les limites du gastrodisque on trouve, à la face interne de cette membrane, des cellules rondes, foncées, granuleuses, réu- nies en assez grand nombre et accolées les unes aux autres au centre du gaslrodisque, au contraire isolées et légèrement écar- tées les unes des autres à sa périphérie (pi. IV, fig. H). La tache blanche que l'on observe sur le frais et que l'on peut voir à la loupe est due à la présence de ces cellules. L'œuf, après avoir été étudié vivant, a été traité par l'acide osmique, puis placé dans le liquide de Millier et enfin monté dans la glycérine. — 468 — L'ectoderme est formé par des cellules polygonales, dont les limites sont très-bien marquées sur la préparation conservée; elles étaient, au contraire, très-difficiles à voir sur le vivant. Comme on peut s'en assurer en examinant la coupe optique de la vésicule, ces cellules planes extérieurement et intimement acco- lées à la zone pellucide sont convexes du côté de leur face in- terne. A la coupe elles présentent une apparence fusiforme ou naviculaire. Ces cellules sont très-claires, finement granuleuses; elles sont pourvues de gros noyaux aplatis, dans lesquels on dislingue plusieurs nucléoles très-réfringents. Les noyaux présentent dans cette préparation un aspect tout particulier que je retrouve plus ou moins nettement marqué sur toutes les préparations à l'acide osmique soumises à l'action du liquide de Mûller. Dans chaque noyau, il existe un corps clair, généralement sphérique, assez volumineux, occupant tantôt le centre du noyau, tantôt excentriquement placé. Ce corps est nettement délimité par une ligne continue et ponctuée. Sur cette ligne, ou immédiatement en dehors, s'observent, disposés en cercle, des corpuscules réfringents, de forme et de dimen- sions variables. La partie corticale du noyau est plus foncée et paraît finement ponctuée. On y trouve çà et là des corpuscules plus volumineux semblables à ceux qui forment le cercle autour du corps clair. Çà et là on voit aussi un ou quelquefois deux corpuscules réfringents, dans l'espace circulaire qui correspond au corps médullaire du noyau; mais il est difficile de dire avec certitude si ces corpuscules nucléoliformes se trouvent a son intérieur ou à sa surface. Souvent j'ai vu ces corpuscules réfrin- gents se prolonger en filaments réfringents, soit dans la couche corticale, soit dans le corps médullaire. Dans ce dernier cas ils figurent quelquefois une étoile à trois ou à quatre rayons. Dans la couche périphérique du noyau, ces filaments m'ont paru plus souvent radiairement dirigés. Je n'ai jamais observé un reti- culum nucléoplasmique continu; s'il existe, il doit être d'une extrême délicatesse. Les noyaux des cellules ectodermiques ne présentent pas, tant s'en faut, de volume constant. Les plus petits sont sphériques, — 169 — plus foncés, et le cercle de granulalions se trouve près de la surface nucléaire. Il semble que dans le cours du développe- ment du noyau, la couche corticale surtout gagne en épaisseur et que le corps médullaire augmente beaucoup moins de volume. Je trouve cette même constitution des noyaux clairement indi- quée dans les stades ultérieurs du développement sur des prépa- rations au chlorure d'or, sur des préparations à Tacide osmique, colorées par le picrocarmin (pi. VI, fig. 7) et sur d'autres traitées par l'acide picrique de Kleinenberg, et colorées soit par le car- min, soit par l'hématoxyline (pi. VI, fig. 8). Le corps clair est très-apparent; les corpuscules nucléoliformes sont moins nom- breux et plus volumineux que sur les préparations, au liquide de Millier, de blastocystes plus jeunes. Ils paraissent être identiques à ces éléments nucléoliformes que j'ai désignés, pour ne pas compliquer les descriptions sous le nom de nucléoles. Ils se char- gent fortement de matière colorante et ne se trouvent pas tou- jours disposés en cercle autour du corps clair, mais se voient çà et là dans toute l'épaisseur de la couche corticale. Je pense que ces corps médullaires ne sont autre chose que ce que Eimer a décrit depuis longtemps sous le nom de Hi/aloïde, et que le cercle de granulations correspond au Kônierkreis de cet histologiste. Çà et là on trouve une cellule en voie de division. J'en ai compté une vingtaine dans l'étendue du blastocyste. Sur la plus grande partie de son pourtour, la paroi cellulaire du blastocyste est constituée par une seule rangée de cellules. Elles forment la portion monodermique de la vésicule. Dans les limites du gas- trodisque, la zone pellucide est tapissée comme sur tous les autres points de la surface de l'œuf par la même couche de cellules claires et aplaties; mais cette couche est doublée de la masse cellulaire endodermique, étendue en une lame épaisse à son milieu, plus mince suivant ses bords. C'est cette lame que je vais décrire maintenant. Les cellules de l'endoderme sont arrondies ou polyédriques suivant le point où on les observe; elles se colorent en brun par l'acide osmique; elles sont pourvues de gros noyaux sphériques 12 — 170 — à plusieurs nucléoles; leur corps prolopiasmique est relativement peu étendu ; mais il est granuleux et assez opaque. Au centre du gaslrodisquc,ces cellules sont serrées les unes contre les autres; elles ne forment pas en ce point une rangée unique, mais un amas assez considérable, dans lequel les plus extérieures affec- tent, par pression réciproque, une apparence polyédrique, tandis que les plus profondes sont hémisphériques. A la périphérie de la plaque endodermique, les cellules sont arrondies; elles sont isolées et ne se touchent pas; mais elles sont néanmoins peu écartées les unes des autres. Des préparations au nitrate d'argent de vésicules de cet âge montrent beaucoup plus clairement encore l'uniformité de la constitution de l'ectoderme sur tout le pourtour de la vésicule blastodermique; on constate avec la dernière évidence l'existence d'une rangée unique de grandes cellules plates sous-jacentes à la zone pellucide, et ces cellules contrastent par leur forme, leurs dimensions, leur lranspar( nce et tous leurs caractères avec les cellules de la plaque endodermique. Les changements qui se sont accomplis depuis le stade III sont donc : 1° L'extension progressive de la cavile blastodermique. Celle-ci se remplit au fur et à mesure d'un liquide clair, transparent, hyalin, tenant en dissolution, une matière albuminoïde qui se coagule par l'alcool en formant un grumeau granuleux; 2° Le changement de forme des cellules ectodermiques et l'augmentation de leur nombre; 5^ L'étalement de la masse endodermique en une lame plus épaisse à son milieu , plus mince sur ses bords. L'épaississement médian est formé par un entassement de cellules adhérant for- tement entre elles. La partie périphérique est constituée par quelques cellules rondes plus ou moins complètement isolées. Les cellules de l'endoderme sont plus petites que dans les stades précédents; leur nombre est plus considérable; elles se sont mul- tipliées; cependant je n'en ai pas vu qui fussent en voie de division. i7i — STADE V. 102 HEURES, SOIT 4 JOURS ET 6 HEURES. (PI. IV, lig. 12, et pi. V, fig. 1 à 5.) L'œuf représenté pi. IV, fig. 12, a été retiré d'une Lapine sacrifiée 102 heures après Taccou piemen t. La vésicule blastodermiquc entière a un diamètre de 1.2o mm. Le blastocyste mesure 0.75 mm. La zone pellucide et la couche albuminoïde réunies ont une épaisseur de 0.25 mm. Le blas- tocyste a donc notablement augmenté de volume. La vésicule est parfaitement sphérique et transparente; le blastocyste a une paroi très-mince et presque parfaitement diaphane; i! présente cependant une région dans les limites de laquelle, si on l'exa- mine à la lumière transmise, il paraît moins transparent et plus granuleux. Cette tache opalescente apparaît plus distinctement si on examine la vésicule à la luniière réfléchie; elle affecte alors l'apparence d'un nuage blanchâtre plus foncé à son centre. Elle occupe environ le sixième de lasurface totale du blastocyste. Cette tache n'est autre que le gasirodisque étendu, et sa portion centrale plus foncée est la tache embryonnaire. Cette vésicule a été traitée par le nitrate d'argent; sans ce réactif, il serait extrê- mement difficile de se rendre un compte exact de la constitution du gastrodisque à ce stade de son développement. L'œuf, après avoir été traité par le nitrate d'argent, a été coloré par le picrocarminate. La vésicule a été incisée et développée sur un porte-objet comme il a été dit plus haut, puis montée dans la glycérine picrocarminatéè. Un premier fait à noter, c'est qu'après le traitement par le nitrate d'argent, surtout si l'action a été un peu prolongée, il devient très-facile de distinguer le gastrodisque de la partie monodermique du blastocyste. Partout où reclocierme est tapissé à sa face profonde par une seconde couche cellulaire, les cel- — 17^ — Iules ectodeniiiques , aussi bien que la substance qui les unit, réduisent beaucoup moins énergiquemenl le sel d'argent que là où la paroi du blastocysle est exclusivement constituée par l'ecloderme. Tandis que toute la partie monodermique du blastocyste prend une couleur brune, due à ce que les corps des cellules ectodermiques se colorent et que leurs limites se marquent par de fortes lignes noires, le gastrodisque reste clair et à peu près incolore; les cellules ectodermiques ne réduisent pas le nitrate d'argent et leurs limites se marquent par des lignes brunes beaucoup plus pâles (pi. V, tig. i). Cette obser- vation s'applique également aux stades subséquents, de sorte que le traitement par le sel d'argent constitue une excellente méthode pour faire apparaître le gastrodisque. Après que l'on a rabattu la vésicule dans un plan en l'incisant à partir du pôle inférieur, on reconnaît sans peine que le contour du gastro- disque n'est pas marqué par une ligne régulière, mais , au con- traire, par un contour sinueux. Les'^cellules de l'ectoderme affectent des formes polygonales très-variées et leurs dimensions sont aussi fort différentes. Leurs contours sont marqués par des lignes noires, tantôt droites, tantôt incurvées, d'autres fois par des lignes brisées ou ondu- lées. Dans chacun des champs polygonaux l'on trouve un beau noyau de forme généralement ovalaire, dont la dimension varie d'une cellule à l'autre. Ce noyau est coloré en rose; il renferme plusieurs nucléoles très-brillants qui se chargent fortement de matières colorantes; il y en a généralement de six à dix : j'en ai compté jusqu'à dix-huit et même vingt dans un même noyau. La forme des nucléoles est irrégulière; ces éléments paraissent dissé- minés sans ordre dans le corps du noyau; celui-ci est délimité par un contour très-net, mais pâle. Je ne pense pas qu'il existe une membrane nucléaire. Le corps de la cellule ne se teinle pas du tout par le carmin. Dans la région monodermique, le corps des cellules prend, sous l'influence du nitrate d'argent, si l'action du réactif a été suflisamment prolongée, un aspect tout particulier. Toute la partie périphérique se colore en brun, de façon à former une zone colorée — 175 — autour de la partie centrale de la cellule, qui reste parfaitement incolore et transparente (pi. V, flg. 2). Dans chaque cellule, on distingue alors trois zones concentriques, un disque central rose formé par le noyau, une zone intermédiaire incolore et granulée, une zone périphérique brune et pour ainsi dire marbrée. Cette dernière est nettement délimitée par une grosse ligne noire, due à la présence de la substance unissante. Si la solution d'argent a agi trop longtemps, ou si l'on a employé une solution trop forte, tout le corps protoplasmique iinit par se colorer. Mais même alors on distingue encore bien à chaque cellule une zone péri- phérique et une zone centrale. Comme je l'ai dit plus haut, les cellules eclodermiques dans les limites du gastrodisque ne réduisent pas le nitrate d'argent ; elles ne se colorent pas et ne présentent jamais l'aspect que je viens de décrire. Chaque cellule de l'ectoderme, on peut s'en assurer en exami- nant la coupe optique, a la forme d'une petite plaque plus mince sur ses bords, assez fortement épaissie à son milieu. L'épaissis- sement médian renferme le noyau de la cellule; il proemine dans la cavité blastodermique : la face externe de ces cellules est tout à fait plane. C'est la zone périphérique fortement amincie de la cellule ectodermique qui se colore par le nitrate d'argent, alors que la partie centrale plus épaisse reste incolore et trans- parente. Comme toutes les cellules de l'ectoderme ont la même forme, elles circonscrivent à leur face profonde, en se touchant par leurs bords, de petites gouttières délimitées latéralement par les parties saillantes des corps cellulaires. Celles-ci forment autant de monticules séparés entre eux par des vallées peu pro- fondes. Les cellules ectodermiques présentent dans les limites du gastrodisque la même forme et la même dimension moyenne que dans la région monodermique. Endoderme. — Nous devons distinguer dans le gastrodisque une partie centrale, formant la tache embryonnaire, et une zone périphérique. La tache embryonnaire a un diamètre de 0.23 mm.; la zone périphérique une largeur moyenne de 0.12 mm. L'endo- — i74 — derme forme au milieu du gastrodisque une couche cellulaire con- linne. Celte couche est constituée par deux assises de petites cel- lules arrondies ou polyédriques, serrées les unes contre les autres (pi. V, (îg 5). Leurs contours ne se marquent pas par le nitrate d'argent; chaque cellule est pourvue d'un gros noyau sphérique, qui se colore en rouge vif par le picrocarminate; il renferme plusieurs nucléoles brillants. Le corps protoplasmique de la cel- lule, quelquefois réduit à une mince couche déposée autour du noyau, prend dans le picrocarmin une teinte brune. Dans la partie périphérique du gastrodisque, l'endoderme est formé par les mêmes cellules rondes à gros noyaux; mais ces cellules, au lieu de former une couche continue, se trouvent disséminées isolément à la face interne de Tectoderme (pi. V, fig. 4 et 5). Quelques-unes ont des formes un peu irrégulières, mais je n'en ai pas vu qui fussent munies de prolongements. Ces cellules se trouvent toujours exclusivement dans les gouttières formées par les cellules ectodermiques. Ce qui prouve qu'il en est bien ainsi, c'est qu'elles sont invariablement coupées par les lignes noires qui marquent les limites des cellules ectodermiques (pi. V, fjg. 4 et 5). Si nous comparons cette vésicule à celle que nous avons décrite précédemment (stade IV), nous ne constatons entre elles que des différences peu importantes. La portion centrale du gastrodisque (tache embryonnaire), caractérisée par la présence d'une couche endodermique con- tinue et composée de plus d'une assise cellulaire, s'est étendue en surface; dans la partie périphérique du gastrodisque, les cellules endodermiques se sont écartées les unes des autres; elles forment maintenant une couche discontinue; le blaslocyste tout entier a notablement augmenté de volume et les cellules ectodermiques ont changé de forme. L'écartement des cellules endoderniiques à la périphérie du gastrodisque peut être attribué à deux causes : il peut être le résultat de l'extension en surface de Tectoderme, extension qui ne résulte pas seulement du changement de forme des cellules, mais aussi de l'accroissement de leur nombre. Si les cellules — i75 - endodermiquessont moins intimement unies entre elles qu'elles n'adhèrent à l'ectoderme, elles seront sollicitées par l'extension superficielle du feuillet externe à s'écarter les unes des autres. iMais il est possible aussi que cette dissémination soit le résultat de l'activité des cellules endodermiques elles-mêmes. Quoique je n'aie pas pu constater directement qu'elles changent de forme et de place, tout me porte à croire que ces cellules sont capa- bles de mouvements amœboïdes. S'il en est ainsi, il est facile d'expliquer l'extension du gnstrodisque et l'écartement des cel- lules endodermiques à sa périphérie : les cellules marginales de la masse endodermique primitive s'isolent les unes après les autres; elles s'éloignent du centre du gaslrodisque et suivent une direction centrifuge; elles se meuvent en longeant les vallées que laissent entre eux les monticules ectodermiques. Peut-être les deux causes interviennent-elles simultanément et l'extension progressive du feuillet interne est-elle le résultai de leur action combinée. STADE VI. 124 HEURES, SOIT 5 JOURS ET 4 HEURES. Le mardi 2 novembre 1878, à M '/o heures, j'ai sacrifié une Lapine fécondée le 28 octobre à 7 J/2 heures. Dans le tube utérin droit, j'ai trouvé cinq vésicules; dans celui du côté gauche, s'en trouvaient quatre. Toutes ces vésicules avaient à peu près le même volume; elles avaient l'apparence de petites perles transparentes comme du cristal. Toutes se trouvaient dans la moitié supérieure de l'utérus; à gauche elles étaient très- rapprochées les unes des autres près de l'embouchure de i'oviducte. A droite elles étaient espacées entre la terminaison de I'oviducte et le milieu de l'utérus. Je vais décrire une de ces vésicules qui mesurait 1.55 mm. de diamètre. Les membranes d'enveloppe de la vésicule blastodermique avaient une épaisseur de 0.12 mm. Le blastocyste avait donc un diamètre de 1 ,1 1 mm. environ. — 176 — Le gastrodisque est difficile à voir sur le frais ; il est beaucoup plus étendu que dans le stade précédent. A son centre se montre une tache embryonnaire assez irrégulière, mais facilement reconnaissable; tandis que la portion périphérique qui forme comme un anneau très-peu apparent autour de la tache se dis- tingue à peine de la région monodermique du blastocyste. Dès que l'on a traité par le nitrate d'argent, les diverses parties constitutives du blastocyste apparaissent avec une grande netteté. Les cellules de la région monodermique réduisent le nitrate d'argent et se colorent en brun ^ tandis que dans les limites du gastrodisque les cellules ectodermiques n'exercent aucune action sur le sel d'argent; elles restent incolores et leurs limites seules se marquent par des lignes brunes ou noires toujours bien nettes. Dans la région marginale du gastrodisque, il se montre cepen- dant çà et là des îlots colorés, irréguliers et d'étendue variable, qui ont la même apparence que la portion monodermique du blastocyste. Quelques-uns de ces îlots sont entourés de toutes parts par des cellules, dont les corps protoplasmiques ne rédui- sent pas le nitrate d'argent et qui par conséquent restent inco- lores. D'autres ne sont que des presqu'îles, en continuité par un point de leur périphérie avec la région colorée du blasto- cyste. De là, une apparence toute particulière du bord du gastro- disque, dont l'ensemble se détache en clair sur le fond coloré de la vésicule blastodermique. Le gastrodisque est très-irrégulier et sa zone périphérique paraît discontinue. Cette même apparence se reproduit sur des vésicules plus âgées : à la limite du gastrodisque se voit tou- jours une région tachetée ; les îlots monodermiques colorés en brun forment autant de taches plus fortement teintées sur le fond peu coloré de la région didermique. La limite du gastro- disque devient de plus en plus régulière. Examinons maintenant les caractères que présentent les diverses régions du blastocyste quand, après avoir été traitée par le nitrate d'argent, la vésicule a été soumise à l'action du picrocarmin et développée sur un porte-objet (pi. V, fig. 7). Tache embryonnaire. La tache embryonnaire plus claire et — i77 — moins fortement colorée par le picrocarmin que celle que nous avons précédemment décrite, laisse apercevoir, si on l'examine par transparence à de forts grossissements (obj. 8 de Hartnack), deux systèmes de lignes noires s'entre-croisant entre elles de façon à délimiter des espaces polygonaux de forme et de dimensions variables. Ces réseaux se trouvent dans deux plans différents, peu écartés l'un de l'autre. On peut les apercevoir simultanément; mais on n'en voit bien distinctement qu'un seul à la fois, et il faut souleverou descendre le tube pour voir distinctement l'autre. L'image que l'on obtient rappelle celle que présente un mésentère ou un feuillet d'epiploon, traité par l'argent et coloré par le carmin. Si l'on y regarde avec attention, l'on voit que vers le centre de chaque espace polygonal se trouve un noyau coloré; ces noyaux ont des caractères différents suivant qu'il s'agit des polygones du plan supérieur ou de ceux du plan inférieur; les noyaux de la couche supérieure sont beaucoup plus pâles, plus grands et géné- ralement ovalaires; ils sont teintés en rose: ceux de la couche inférieure sont moins clairs, ils se colorent en rouge plus vif, ils sont plus petits que ceux de la couche supérieure, enfin ils sont à peu près sphériques (pi. V, fig. 8). Il est clair que nous avons affaire ici à deux couches de cellules plates, qui existent dans toute l'étendue de la tache embryonnaire. Mais tous les noyaux colorés ne peuvent pas se rattacher aux cellules de ces deux couches. Il existe entre les deux epithelium pavimenteux simples une troisième couche de cellules, dont on aperçoit tout d'abord les noyaux. Chacun de ces noyaux est entouré d'une couche de protoplasme peu étendue. Ce proto- plasme est assez granuleux et se colore légèrement en brun par le picrocarminate. Ces cellules à noyaux proportionnellement très-volumimeux sont serrées les unes contre les autres et forment une couche continue (pi. V, fig. 8). Les limites de ces cellules ne se marquent pas du tout par le nitrate d'argent. Il est facile de voir que cette couche de petites cellules est intermé- diaire entre les deux couches de cellules plates et qu'il existe, par conséquent, dans la tache embryonnaire, trois plans de — US — cellules. L'externe, formé de cellules plates, est l'ectoderme du stade précédent. Le moyen constitué par des cellules plus petites, polyédriques et granuleuses est le mésoblaste; Tinterne, formé lui aussi d'une rangée unique de cellules plates, est Thypoblaste. Région diderinique. — Ln région didermique ne présente pas les mômes caractères dans le voisinage de la tache embryonnaire et près du bord du gastrodisque. 1° Près de la tache embryonnaire j on distingue les deux mêmes réseaux de lignes noires que l'on observe dans la tache (pi. V, (ig. 7 et 8). Là aussi il existe deux espèces de noyaux , les uns plus grands et plus faiblement colorés occupent les milieux des polygones du plan supérieur, les autres plus petits et plus fortement colorés se rapportent aux cellules plates du plan infé- rieur. Bref, il existe là aussi deux couches de cellules plates et l'on voit ces feuillets se continuer, l'externe avec l'épiblaste de la tache, l'interne avec l'hypoblaste. La partie de la région didermique qui avoisine la tache ne diffère donc de cette dernière que par l'absence du mésoblaste. 2° Près du bord externe du gastrodrique, l'on ne distingue pas aussi facilement les contours des cellules de l'hypoblaste (pi. V, fig. 9). Le nitrate d'argent ne les fait pas apparaître; mais la présence de ces cellules est rendue manifeste par la facilité avec laquelle on distingue leurs noyaux fortement colorés et en tous points semblables à ceux de l'hypoblaste des régions précédem- ment décrites. Rér/ion monodermique. — Toute la portion monodermique de la vésicule est constituée par l'épiblaste seul. Les cellules ont la même forme et les mêmes dimensions que dans les limites du gastrodisque. Elles présentent seulement de particulier leur colo- ration brune due à l'action du nitrate d'argent. Les îlots et les presqu'îles colorés du bord du gastrodisque sont également mo- nodermiques. Si nous comparons ce stade au précédent, nous constatons deux différences importantes : 1" Dans le stade V, il n'existait dans les limites du gasiro- — i79 -- disque que deux feuillets cellulaires; dans le slate VI, la lâche embryonnaire en présente trois. â"* Dans le slade V, les cellules endodermiqurs étaient des celluk's arrondies ou polyédriques, tontes granuleuses; elles étaient isolées dans la région marginale du gaslrodisque; elles for- maienl au contraire doux assises cellulaires dans la tache embryon- naire. Dans le stade Vf, la tache embryonnaire ne montre plus qu'une seule rangée de petites cellules granuleuses arrondies ou polyédriques et caractérisées par leurs gros noyaux. Dans la pro- fondeur, la tache est formée de cellules plates, et il en est de même de la portion didermique du gaslrodisqne. Ces différences sont déterminées par la transformation qu'ont subie les cellules profondes de l'endoderme : ces cellules se sont aplaties, étendues en surface, réunies par leurs bords là où elles se trouvaient iso- lées, et ont donné naissance à une couche de cellules plates for- mant rhypoblaste. Dans la tache, les cellules endodermiques, tout en se multipliant, ont conservé leurs caractères entre l'hypo- blaste d'une part, l'épibîasle de l'autre. Elles forment actuelle- ment le mésoblaste. L'hypoblaste et le mésoblaste résultent donc d'une différen- ciation de la plaque endodermique primitive en deux feuillets secondaires. J'ai employé dès à présent le nom d'épiblasle pour désigner l'ectoderme, afin de conserver la similitude des termes. Stade V. Slade Vî. Ectoderme = Epiblasie. \ Mésoblaste. Endoderme = j ( ■+- Hypoblasle. A la périphérie du gastrodisque on trouve encore çà et là des cellules endodermiques isolées , à peu près semblables à celles des stades précédents, et en outre une série de formes de tran- sition entre ces cellules et celles de l'hypoblaste (pi. V, fig. 9.) J'ai obtenu de bonnes coupes de deux embryons semblables à celui que je viens de décrire, quoiqu'ils fussent un peu plus volumineux. L'un d'eux a été durci par l'acide chromique et — 180 — l'alcool, puis coupé sur le porte-objet d'après la méthode indiquée plus haut; l'autre avait été traité par l'acide picrique de Klei- nenberg et enchâssé dans le mélange de blanc de Baleine et d'huile de ricin. J'ai représenté deux de ces coupes pi. VI, fig. i et 2. L'épiblaste est une mince lamelle claire et Irès-peu granu- leuse. Elle présente de distance en dislance des épaississements dans lesquels on observe des noyaux colorés en violet pâle par l'hématoxyline. L'hypoblaste, lui aussi, est constitué par une rangée unique de cellules plates, fusiformesà la coupe. Chaque cellule est une petite lamelle renflée à son milieu, et le noyau sphérique paraît occuper parfois toute l'épaisseur de la cellule. Les noyaux de Thypoblaste sont plus petits, foncés, et se colo- rent fortement en bleu par l'hématoxyline. Les corps cellulaires eux-mêmes ont des contours plus foncés et paraissent consti- tués par une substance plus réfringente. Entre les deux cou- ches de cellules plates, dans tonte l'étendue de la tache il existe une rangée unique de cellules granuleuses à formes variables, plus larges que hautes. Elles aussi ont des noyaux sphériques ou ovalaires, assez brillants, et semblables à ceux des cellules plates de l'hypoblaste. J'ai obtenu aussi de bonnes coupes de la région didermique de la vésicule (pi. VJ, fig. 1). A l'extérieur se voit la zone pellu- cide qui se colore fortement en violet par l'hématoxyline. Cette membrane est tapissée par une double couche cellulaire. Les cellules de la plus externe de ces couches présentent tous les caractères de l'épiblaste, celles de la couche interne sont iden- tiques aux cellules hypoblastiques de la tache embryonnaire. Rauber, professeur à Leipzig, est le seul auteur qui ait fait jusqu'ici des coupes à travers des embryons aussi jeunes. 11 a étu- dié par ce procédé un blastocyste de Lapin de 1 74 millimètre de diamètre (1). (1) Die erste Entwickelung des Kaninchens Sitzungsb. der Naturf. Gescll- schofl zu Leipzig, n° 10, 1875. — 181 — Rauber a trouvé la tache embryonnaire constituée par trois couches celhilaires : l'externe , formée de cellules plates, se continuait en dehors de la tache avec la couche superflcielle de la vésicule; Tinlerne, constituée par des cellules de même forme, se continuait avec la couche profonde de la vésicule ; la moyenne existait seulement dans la tache embryonnaire; elle était com- posée de grandes cellules cuboïdes. Les résultats de Rauber concordent pleinement avec ceux que je viens de faire connaître. Je n'insiste pas sur des diffé- rences de détail qui peuvent être mises sur le compte des méthodes employées pour durcir et enchâsser l'embryon. Je trouve que les cellules des deux feuillets externes ont à la coupe des caractères fort différents de ceux que Rauber leur assigne. Mais si cet observateur a trouvé dans l'embryon qu'il a décrit les trois feuillets que j'ai désignés sous les noms d'épiblaste, de mésoblaste et d'hypoblaste, sa manière de voir sur l'homologie et la valeur de ces couches est toute différente de la mienne. Rauber semble vouloir ressusciter les anciennes idées de Rei- chert. Pour lui la couche superficielle est destinée à disparaître; il l'appelle « Deckschichl »; Reichert aurait dit a Umhïdlungs^ haut. » f.a couche moyenne serait l'ectoderme futur; la couche profonde est pour lui l'endoderme. A l'étude d'une vésicule mesurant \ 74 millimètre de diamètre et constituée comme celle que j'ai décrite sous la dénomination de stade VI, se réduisent les recherches de M. Rauber. L'insuf- fisance de ses observations est la cause de l'erreur dans laquelle il est tombé, quand il a considéré le feuillet externe de la tache embryonnaire comme étant destiné à disparaître. Il ne connaît aucunement les stades antérieurs et ses études sur les stades subséquents sont aussi fort incomplètes. L'opinion qu'il exprime quant à la destinée du feuillet externe n'est pas du reste le résul- tat de l'observation directe; elle est une conclusion fondée, d'une part, sur une connaissance inexacte des taches embryon- naires plus âgées, auxquelles il attribue à tort une constitution didermique, d'autre part, sur la ressemblance qui s'établit entre — 18-2 ^ les cellules du niésoblaste primitif el les cellules épiblastiques, après que celles-ci soni devenues prismatiques, de pavimen- teuses qu'elles étaient d'abord. STADE VU. 5 JOURS ET 20 HEURES. Dans une Lapine couverte le mardi 7 novembre 1877 à midi et sacrifiée le 13 novembre à 8 heures du matin, j'ai trouvé dans l'utérus droit cinq vésicules. Elles avaient à peu près les mêmes dimensions et leur forme était approximative- ment celle d'une splière. Cette Lapine avait un vice de confor- mation des organes sexuels. L'oviducte et la matrice du côté gauche faisaient complètement défaut; le tube utérin uniqiie s'ouvrait directement dans le vagin et je n'ai trouvé à son extré- mité vaginale ni diverticule, ni orifice, à la place où aurait dû s'insérer l'utérus gauche. Mais sous l'ovaire gaucbe se trouvaient quelques franges recouvertes d'un epithelium cylindrique vibratil simulant une trompe mal conformée, et se prolongeant en une traînée épithéliale étroite sur une longueur de 3 à 4 centimètres. Cette monstruosité fort intéressante trouve son explication dans le mode de formation du canal de Mûller par invagination de l'epithelium pleuro-péritonéal primitif. Cet epithelium s'était conservé ici, quoique le canal de Mûller ne se fût pas fermé. Je vais décrire l'une des vésicules trouvées dans le tube utérin droit. La vésicule mesurait L7 mm. La tache embryonnaire et la zone didermique plus étendues que dans le siade précédent, étaient difliciles à voir sur le vivant; après le traitement par le nitrate d'argent et la coloration par le picrocarmin, les diverses parties du blastocyste se montraient avec une parfaite netteté. La tache embryonnaire à peu près circulaire, beaucoup plus nettement délimitée que dans le stade VI, mesurait en diamètre 0.7 mm. (pi. Vi, iìg. 3). La région didermique s'est étendue notablement; l'ensemble du gastrodisque constitue près de la moitié du blastocyste. On — -183 — peut diviser celui-ci par une incision equatoriale en deux calottes hémisphériques, l'une constituée par le gastrodisque et mon- trant près de son centre la tache embryonnaire , l'autre consti- tuée par la région monodermique. Celle-ci se colore en brun par le nitrate d'argent, alors que dans les limites du gastrodisque, seuls les contours des cellules se marquent par des lignes brunes ou noires, les cellules restant incolores et transparentes. A la limite du gastrodisque s'observe une zone tachetée ; des îlots colorés à la façon de la région monodermique s'y détachent sur le fond clair et incolore du gastrodisque. A part les différences dans le développement relatif des diverses parties du blastocyste, l'embryon du stade VU est entièrement constitué comme celui du stade précédent. La tache embryon- naire présente cependant quelques particularités que je dois signaler. Si l'on examine par transparence les diverses régions de cette vésicule après coloration par le picrocarmin, on distingue immé- diatement que dans la région monodermique il n'existe qu'une seule rangée de cellules; chaque noyau faiblement coloré occupe le milieu d'un polygone coloré et circonscrit par une ligne noire. Dans la région didermique, indépendamment des mêmes noyaux occupant chacun le milieu d'une ligure polygonale semblable à celles que forment les cellules de la région monodermique, on trouve une seconde espèce de noyaux : ceux-ci sont plus petits, sphériques, fortement colorés en rouge vif. Ils sont plus profon- dément situés. Ils sont disséminés à des distances égales les uns des autres, sans affecter de rapports constants avec les cellules du feuillet externe. Les limites des cellules profondes ne sont pas marquées, sauf en quelques points dans le voisinage de la tache embryonnaire. Les corps des cellules profondes sont même difficiles à voir «à travers l'épiblaste. Sur le pourtour de la tache embryonnaire, on voit l'épiblaste delà région didermique se continuer avec l'épiblaste delà tache et l'hypoblaste de la tache se continuer sans interruption avec celui de la région didermique. La tache embryonnaire se dislingue immédiatement par la — 184 — coloration rouge qu'elle prend dans le picrocarmin. Celte colo- ration est due à la présence dans les limites de la tache d'un grand nombre de noyaux de cellules, et parlant à l'existence d'un grand nombre de cellules (1). En baissant et en soulevant alternativement le tube du microscope, on remarque l'existence de deux réseaux de lignes noires, l'un superficiel beaucoup plus apparent, à mailles plus petites et à contours plus rectilignes; l'autre profond, moins marqué, à mailles plus larges et à con- tours plus irréguliers et plus sinueux. Le premier est le reticu- lum de l'épiblaste; le second celui del'hypoblasle. Entre les deux, existe une couche de petites cellules polygo- nales, dont le corps est très-granuleux et dont les gros noyaux se colorent assez fortement par le carmin. Elles sont légèrement écartées les unes des autres et leurs contours sont très-faible- ment indiqués. C'est là le mésoblaste, qui présente à peu près la même constitution qu'au stade précédent. Mais l'épiblaste présente des particularités très-remarquables. On trouve çà et là, entre de grandes cellules plates semblables à celles qui constituent tout le reste de la vésicule blastoder- mique, des groupes de quelques cellules beaucoup plus petites, plus riches en protoplasme, pourvues de jeunes noyaux et présen- tant une certaine épaisseur. Il existe, en outre, des formes de transition entre ces petites cellules granuleuses et les grandes cellules plates et claires; beaucoup de cellules de l'épiblaste ont des noyaux en voie de division. Si l'on compare l'épiblaste du stade VII à celui du stade VI et des stades précédents d'une part, à celui du stade VIII et des stades subséquents d'autre part, il devient clair que le stade VII constitue une forme de transition. L'épiblaste, jusqu'ici formé de cellules plates est en voie de se transformer en un epithelium prismatique ou cylindroïde; à cet effet, les cellules primitives changent de forme et en même temps se multiplient rapidement. (1) Afin de ne pas compliquer le dessin, je n'ai figuré ni les cellules del'hypo- blasle (pi. Vil, fig'. 3), ni les noyaux ecloderniiques. Les noyaux des petites cel- lules du mésoblasle sont seules colorés - 18Ò — Dans une antre vésicule trouvée en même temps et traitée de la même manière, tout l'épiblaste de la tache embryonnaire était déjà constitué par des cellules à petit diamètre, bien délimitées par le nitrate d'argent. STADE IX. EMBRYON DE 6 JOURS ET 1 '/s HEURE. I.e 27 décembre 1878, à 10 h. 50 m. du matin, je fis couvrir une Lapine qui fut sacrifiée le 2 janvier 1879, à raidi. L'animal portait six vésicules, trois du côté droit, trois autres du côté gauche. Deux d'entre elles étaient notablement plus petites que les autres. Elles étaient sphériques et leur tache embryonnaire ne portait aucune trace de ligne primitive. C'est l'une de ces deux vésicules que je vais décrire. Les quatre autres étaient de forme ellipsoïdale et beaucoup plus volumineuses. Leur tache embryonnaire était pyriforme; la ligne primitive était très-appa- rente et se terminait à l'extrémité postérieure de l'embryon par une partie élargie plus opaque que tout le reste de la vésicule. La ligne primitive se terminait en avant par le nœud de Hensen. Quatre vésicules ont été placées directement dans le liquide de Kleinenberg et aussitôt examinées, mesurées et dessinées. Il ne se produit sous l'influence de ce réactif aucune contrac- tion ; seulement, au bout de quelques instants, toute la vésicule perd de sa transparence ; elle devient blanchâtre, les diverses régions deviennent beaucoup plus distinctes; la tache embryon- naire apparaît comme une petite tache blanche et tous les détails se marquent admirablement. L'acide picrique de Kleinenberg n'altère ni la forme, ni les dimensions, ni l'aspect des cellules blastodermiques. La vésicule que je vais décrire était sphérique et mesurait 5.2 mm. de diamètre. La région monodermique du blastocyste se trouvait réduite à n'être plus qu'un tiers environ de la surface totale de la vésicule. La tache embryonnaire, d'apparence circu- laire, mesurait dans sa plus grande largeur 0,8 mm.; dans sa 13 — 186 — plus grande longueur 0.9 mm. On distinguait nettement dans la tache deux régions: 1" une région circulaire inscrite excen- triquement dans l'ensemble de la tache. L'étude des stades ulté- rieurs montre qu'elle correspond à l'extrémité antérieure de Tem- bryon. Elle est délimitée par un anneau plus sombre; celui-ci est surtout bien marqué en avant; là s'observe un arc du cercle plus foncé que tout le reste de la tache. Cette partie de l'aire embryon- naire, je l'appellerai la région circulaire, pour ne rien préjuger quant à sa signification; 2° une région postérieure, ayant la forme d'un croissant; elle est plus foncée que la partie médiane de la région circulaire et mal délimitée en arrière; elle est placée, de façon à embrasser dans sa concavité la région circulaire. Cette partie postérieure de la tache embryonnaire, je l'appellerai le croissant. L'examen le plus attentif ne permet pas de découvrir la moin- dre trace de la ligne primitive. Mais un peu en avant du centre de la région circulaire, se voit une petite tache plus claire, qui est le premier indice du nœud de Hensen. L'indice du nœud appa- raît donc avant la ligne primitive. J'ai trouvé à diverses époques des vésicules de même volume environ que celle dont je m'occupe, et chez lesquelles la tache embryonnaire avait la même apparence. Il arrive assez fréquem- ment que le bord postérieur du croissant, au lieu d'être délimité par une ligne assez régulière, comme c'est le cas dans l'em- bryon IX, est, au contraire, très-irrégulier, de sorte que la tache a presque une apparence lobulée à son extrémité postérieure. Il n'est pas possible, quel que soit le réactif employé, d'analy- ser encore, en l'examinant par transparence, la constitution de la tache embryonnaire. 11 faut recourir à l'étude de coupes trans- versales et longitudinales. L'embryon IX a été durci par l'alcool, après avoir été préparé par le liquide de Kleinenberg; puis coloré en totalité par le picrocarmin , enchâssé dans le blanc de Baleine et coupé au rasoir; les coupes ont été montées dans le baume. Le liquide de Kleinenberg doit être préféré à tout autre liquide pour la préparation de ces jeunes taches. J'ai essayé, — 187 — mais avec beaucoup moins de succès Tacide osmique, Tacide nitrique (méthode de His), l'acide chromique et le bichromate d'ammoniaque. Il est facile de s'assurer, en examinant des taches traitées par le nitrate d'argent, que les cellules de la couche superficielle de l'embryon ne sont plus comme précédemment de grandes cellules polygonales plates, mais au contraire de petites cellules serrées les unes contre les autres, dont le diamètre me- sure à peine un huitième des cellules plates des stades antérieurs. En réalité, comme le montrent les coupes, le feuillet externe de l'embryon est formé maintenant par un epithelium cuboidc ou prismatique, et le stade Vil nous a montré le passage de l'épi- Ihelium pavimenleux simple à l'epilhelium prismatique. f.es coupes à travers l'embryon IX ont été faites transversa- lement. La tache embryonnaire adonné quarante-huit coupes. La longueur de l'embryon étant de 0.9 mm, il en résulte que l'épais- seur moyenne des coupes obtenues est de ^, soit environ un cinquantième de millimètre. Pour pouvoir déterminer approxi- mativement la place de chaque coupe dans la tache embryon- naire, j'ai supposé les cuupes d'égale épaisseur. Les coupes représentées (pi. VI, fig. 11, 12 et 13), correspondent à peu près aux lignes pointilléesa, 6 et cdu dessin général de la tache (pi. VI, fig. 5). La coupe a, la 40'' de la série, intéresse exclusivement, dans toute sa largeur, la région circulaire de la tache. Elle est constituée de deux couches cellulaires (fig. 11) : l'externe, beau- coup plus épaisse, mesure environ à la coupe 0,01 mm. Elle est finement granulée, et très-riche en gros noyaux sphériques dis- posés en une rangée unique dans l'épaisseur de la couche ; mais les noyaux ne sont pas tous à la même distance de la surface. Ces noyaux bien délimités ont un volume un peu variable; ils se colorent faiblement en rose par le picrocarmin; on y distingue toujours plusieurs nucléoles assez réfringents. Les limites des cellules sont très-peu apparentes; on les distingue cependant plus ou moins nettement; leur surface externe est à peu près plane. Elles ne sont pas aussi larges que hautes, de sorte que leur forme est prismatique. Sur les bords de la tache embryon- naire, cette couche, qui n'est autre que l'épiblaste, se continue — 188 — assez brusquement avec les cellules plates qui forment Pépiblaste (le la région didermique du blastoderme. Le passage de l'un à l'autre se fait par une ou deux cellules un peu moins hautes que les autres et qui affectent une forme cuboidc plutôt que prisma- tique. Les cellules épiblasliques de la région didermique sont fusiformcs à la coupe. Elles sont en réalité des cellules polygo- nales, plates, semblables à celles que j'ai décrites dans les stades précédents. Elles présentent donc à considérer une sur- face externe et une surface interne. Le bord externe du fuseau est moins incurvé et plus régulier que le bord interne. Il est marqué par une ligne beaucoup plus nette. Dans la partie la plus large du fuseau se trouve le noyau. Il a une forme ovalaire et se colore faiblement en rose par le picrocarmin. Le feuillet interne ou hypoblaste est formé par une rangée unique de cellules plates, fusiformesà la coupe, dont les carac- tères sont les mêmes dans l'aire embryonnaire et en dehors de la tache. Ces cellules se caractérisent nettement et se distinguent des cellules plates de l'épiblaste par leurs noyaux. Ces noyaux sont petits, très-aplatis, à contours très-apparents, et ils se colorent fortement en rouge vifpar le picrocarmin. Le bord interne du fuseau cellulaire est marqué par une ligne plus foncée que le bord externe. Dans toute l'étendue de la coupe, le feuillet interne est appliqué coutre le feuillet externe; cependant on observe en plusieurs points un léger décollement qui s'est produit pendant les manipulations que l'on a dû faire subir à l'embryon avant de le réduire en coupes. Je n'ai trouvé entre les deux feuillets aucune trace d'une lamelle sans structure, ni de cellules intermédiaires. La coupe 6 est la 20' de la série (pi. VI, fig. 12). Elle inté- resse vers son milieu la région circulaire de l'embryon, sur les côtés les cornes du croissant, en dehors de la tache la région didermique du blastocyste. A son milieu la coupe est constituée par deux feuillets cellulaires accolés l'un à l'autre. Les cellules de ces feuillets présentent les mêmes caractères que les deux couches qui constituent la coupe précédente. La région circulaire de l'embryon est constituée dans toute son étendue par deux — 189 — feuillets, l'épiblaste et l'hypoblaste. L'opacité de la région circu- laire de l'embryon tient à l'épaisseur de l'épiblaste, et celle-ci est déterminée par la forme des cellules qui sont très-nombreuses et prismatiques. Aux deux côtés, à quelque distance de la ligne médiane, la coupe se montre constituée de trois rangées de cellules. L'ex- terne ou épiblaste est constituée de la même manière que l'épi- blaste de la région circulaire. Les deux feuillets sous-jacents sont formés l'un et l'autre de cellules fusiformes à la coupe. La couche profonde se continue avec le feuillet profond de la por- tion médiane de la coupe; il est formé par les mêmes cellules à noyaux aplatis, se colorant fortement en rouge. Ce feuillet n'est autre que Thypoblaste. Mais entre l'épiblaste et Fhypoblaste se trouve une couche intermédiaire, formée, elle aussi, par une rangée unique de cellules fusiformes à la coupe, mais cependant bien différentes des cellules hypoblastiques. Elles se distinguent surtout de ces dernières par leurs grands noyaux ovalaires, faiblement colorés; en outre, par leurs corps plus riches en pro- toplasme et par leurs contours très-pâles. Ces cellules se touchent par leurs bords et forment une couche continue. Si l'on examine les parties de la coupe qui correspondent à la limite latérale de la tache embryonnaire, on constate : 1° que l'épiblaste prisma- tique de la tache se constitue avec l'épiblaste pavimenteux de la région didermique;2° que l'hypoblaste présente les mêmes carac- tères dans les limites de l'aire embryonnaire et en dehors de l'em- bryon; 3° que le feuillet moyen s'arrête au bord de la tache. Coupe c (15^ de la série). Cette coupe intéresse exclusivement le croissant. Elle est constituée dans toute la largeur de l'embryon par trois feuillets cellulaires adjacents, mais partout nettement séparés : 1" un épiblaste prisaialique; 2° un mésoblaste à cel- lules fusiformes, pourvues de grands noyaux pâles; 5° un hypo- blaste formé de cellules à section fusiforme, présentant de petits noyaux plats qui se colorent vivement. Les cellules de chacune de ces couches présentent les mêmes caractères que dans les coupes a et 6. L'épiblaste est un peu moins épais que dans la coupe a. — i90 — En dehors de l'embryon , mais seulement dans son voisinage immédiat, on trouve entre l'épiblaste pavimenteux et Thypoblaste quelques cellules mésoblastiques. Une coupe faite immédiate- ment au delà de l'extrémité postérieure de l'embryon, montre les mêmes cellules entre Thypoblaste et l'épiblaste. Jl résulte de l'étude de ces coupes : 1° que l'embryon est con- stitué par l'accolement immédiat de l'épiblaste et de l'hypoblaste dans la région circulaire; 2° que dans les limites du croissant, un feuillet moyen bien diiTérencié et nettement caractérisé s'étend entre l'épiblaste et l'hypoblaste; 5" que le mésoblaste n'existe pas seulement dans les limites du croissant; on le trouve aussi en dehors de l'embryon, tout autour de l'extrémité postérieure de la tache embryonnaire, mais seulement dans son voisinage immédiat. L'opacité relative de la tache dépend sur- tout de ce que l'épiblaste est constitué par des cellules prisma- tiques très-nombreuses et serrées les unes contre les autres. Partout les trois feuillets sont nettement séparés l'un de l'autre. Je n'ai pas trouvé sur mes coupes l'indication du nœud de Hensen. Si nous comparons le stade IX aux stades précédents, nous constatons : 1° que dans les limites de la tache, l'épiblaste pavi- menteux s'est transformé en un epithelium prismatique; 2" que le mésoblaste, qui dans les stades précédents existait dans toute l'étendue de la tache, n'existe plus maintenant que dans les limites du croissant et sur le pourtour de cette partie de la tache; 5° que les cellules de ce feuillet ont changé de forme; 4" que l'hypoblaste n'a subi aucun changement important; 5° que le mésoblaste tend à envahir, autour de l'extrémité postérieure de l'embryon, la région didermique. Comment expliquer que le mésoblaste, qui au début existait entre l'épiblaste et l'hypoblaste dans toute la tache, fait mainte- nant défaut dans une grande partie de son étendue? Si, ce qui ne peut être douteux, la tache embryonnaire du stade IX s'est développée aux dépens de la tache des stades VI et VII, il faut admettre que, en même temps que l'épiblaste subit les modifications que Ton sait, le mésoblaste est refoulé dans la — 191 — partie postérieure et sur les côtés de la tache embryonnaire. Mais ce retrait est-il réel ou seulement apparent? se produit-il une véritable émigration des cellules du mésoblaste vers les bords et surtout vers l'extrémité postérieure de l'embryon; ou bien il s'opère-t-il une fusion entre le mésoblaste et l'iiypoblaste dans la région circulaire, cette fusion s'opérant de telle manière que les cellules du feuillet moyen viendraient individuellement s'interposer entre celles du feuillet interne? Ce fait n'aurait rien d'étonnant, si l'on se rappelle l'identité d'origine de ces deux couches cellulaires. Ou bien encore les deux phénomènes se pro- duisent-ils simultanément? Il m'est impossible pour le moment de trancher cette question. Mais ce que je puis affirmer, c'est que la différenciation de la région circulaire au milieu de la tache embryonnaire se fait progressivement, du centre vers la périphérie. J'ai observé une série de phases intermédiaires entre le stade V[I et le stade IX. J'en ai figuré une pi. VI, fig. A. La tache s'est éclaircie vers son milieu ou plutôt en un point excentriquement placé. Cette partie plus claire s'étend progres- sivement aux dépens de l'anneau marginal plus foncé, et la par- tie élargie de l'anneau correspond à l'extrémité postérieure de l'embryon. J'ai décrit la tache embryonnaire de notre vésicule de 6 jours et 1 72 heure; il me reste à faire connaître la constitution de la région didermique et celle de la portion monodermique de cette vésicule. Une partie de la région didermique étalée après traitement par le liquide de Kleinenberg et coloration par rhématoxyline, démontre immédiatement l'existence de deux couches cellulaires : les noyaux de la couche superficielle sont beaucoup plus grands; ils sont ovalaires, rarement circulaires, quelquefois irréguliers; ils se colorent faiblement en bleu vio- lacé. Les noyaux de l'hypoblast^ sont, au contraire, presque toujours circulaires; ils sont plus petits et se colorent beaucoup plus vite et beaucoup plus fortement par l'hematoxyline. J'ai dU plus haut comment se présentent à la coupe les cellules de ces deux feuillets. Dans la région monodermique, l'épiblaste existe seul et aflecte — 492 — la même apparence que dans les stades précédents. J'ai étudié avec soin les caractères des cellules de l'épiblaste et de l'hypo- blaste sur un grand nombre de vésicules de même constitution que celle que je viens de décrire, de blastocystes plus jeunes et d'autres plus volumineux. Les caractères de ces cellules restent sensiblement les mêmes depuis la fin du cinquième jusqu'au huitième jour. Il me reste à faire connaître les résultats de cette étude. Épiblasle. — Les cellules de l'épiblaste sont polygonales; mais les formes et les dimensions de ces polygones varient beaucoup. Sur le frais aussi bien qu'après le traitement par l'acide osmique les contours cellulaires sont difficiles à distinguer; les limites des polygones sont marquées par des lignes droites d'une extrême finesse. On juge beaucoup mieux de la forme et des dimensions de ces cellules par l'examen des préparations au nitrate d'argent. Ces cellules sont aplaties; plus minces dans leur région mar- ginale, elles sont épaissies au milieu, et c'est dans l'épaississe- ment médian que se trouve logé le noyau. L'épaississement se remarque exclusivement à la face profonde de la cellule; par sa face externe, la cellule est intimement appliquée contre la zone pellucide. Au contraire, au milieu de la face interne s'élève un monti- cule à pente douce qui fait saillie dans la cavité blastoder- mique. Examinée de face, la cellule paraît constituée de deux parties, d'une masse médullaire et d'une couche corticale; ceci n'est pas seulement une apparence due à la forme de la cellule; la partie du corps protoplasmique qui constitue le monticule médullaire n'a pas les mêmes caractères que celle qui constitue le plateau marginal. Le protoplasme médullaire est plus foncé et plus granuleux que la couche corticale. Au voisinage immédiat du noyau il est généralement plus clair. A quelque distance du noyau, se voient des globules réfringents, plus ou moins volumineux, générale- ment sphériques et disséminés soit isolément, soit par petits groupes dans la substance finement granulée. Chaque noyau est — \9Z — ainsi entouré d'un anneau très-apparent aperçu par von Baerei fort bien décrit par Bischoff chez le Lapin et surtout chez le Chien. Ces globules sont formés d'une matière grasse : ils sont solubles dans l'alcool et dans Télher; ils se colorent en noir par l'acide osmique. Çà et là on trouve un corps volumineux, formé d'une substance Irès-réfr in gente, à forme extrêmement irrégu- lière, et ressemblant quelquefois à un groupe de cristaux (pi. VI, fig. 6). Je ne sais ce que sont ces corps; mais comme ils se colo- rent en noir par l'acide osmique, et que, d'autre part. Ion voit quelquefois de petits amas irréguliers de globules graisseux, plus ou moins confondus entre eux, former ensemble une petite masse bosselée à sa surface, je suis tenté de considérer ceux-ci comme une phase de révolution de ceux-là. Il y a en outre dans cette partie de la cellule un nombre variable de bâtonnets réfringents droits, à bords parallèles, d'épaisseur peu variable et dirigés en divers sens. Ces ligelles ressemblent beaucoup à des bactéries; pour ce motif, je les appellerai corps bacilli for me s. La première fois que je les ai vus, c'était sur une préparation à l'acide osmi- que qui datait de plusieurs jours. Je crus que j'avais affaire à des Schizomycètes qui avaient envahi les cellules. Depuis lors je les ai trouvés sur toutes mes préparations , quand je les ai cherchés ; je les ai vus sur le vivant, sur les préparations à l'ar- gent, sur celles que l'on obtient en traitant par l'acide osmique et en colorant par le picrocarmin ou l'hématoxyline, sur les vési- cules durcies par l'acide picrique de Kleinenberg. Il est certain que ces éléments se irouvent normalement dans les cellules ectodermiques. Ils existent quelquefois en nombre très-considé- rable dans une cellule, s'entre-croisant en tous sens et distribués sans aucun ordre. Quelquefois il y en a en telle quantité que le corps de la cellule en paraît presque exclusivement constitué. La plupart sont rectilignes et ont la même largeur partout; ils sont généralement droits. D'autre part, leur diamètre et leur lon- gueur diffèrent. On en voit aussi qui sont légèrement flexueux , quelques-uns moniliformes, comme s'ils étaient formés de gra- nules alignés. J'en ai trouvé aussi qui étaient claviformes, étant un peu plus renflés à une extrémité qu'à l'autre. Parfois on n'en — 194 — trouve qu'un petit nombre. Cà et là se voit une cellule qui en est complètement dépourvue. Ces petits corps ne se colorent ni par le carmin, ni par le picrocarminate , ni par l'hématoxyline. La couche corticale de la cellule ectodermique examinée sur le vivant montre avec une parfaite netteté une constitution réticiilaire. De la surface de la masse médullaire, délimitée par une ligne très-nette, mais irrégulière, partent des filaments très- ténus , rappelant des pseudopodes, homogènes, au moins en appa- rence, qui se divisent dichotomiquement et s'anastomosent entre eux, de façon à former un réseau dont les mailles ont des dimen- sions variables. Ces mailles sont occupées par une substance hyaline et incolore. Ce reticulum s'étend sur toute la surface externe des cellules et intéresse toute l'épaisseur de leur portion marginale. Je ne sais s'il existe aussi à la face profonde de la masse médullaire. J'ai représenté pi. VI, fig. 7 quelques cellules ectodermiques traitées par l'acide osmique et le picrocarmin. Dans ces cellules, il est encore possible de distinguer le reticulum cortical. Mais les filaments réticulés sont moins apparents que sur le vivant et ont pris un aspect ponctué. On distingue çà et là quelques corps bacilliformes. On voit en outre dans ces préparations à l'acide osmique les globules de graisse et enfin de petits espaces clairs, arrondis, qui ressemblent à des vacuoles. Je ne les ai jamais observés sur le vivant. Le corps protoplasmique de la cellule ne se colore pas par le picrocarminate. 11 faut faire une restriction cependant pour les cellules en voie de division. Celles-là prennent une coloration brunâtre, qui les fait distinguer immédiatement au milieu de toutes les autres cellules de l'ectoderme. Le reticulum protoplasmique ne se voit plus sur les prépara- tions au nitrate d'argent, pas plus du reste que sur les prépara- lions faites à l'acide chromique, au liquide de Millier, aux chro- mâtes, à l'acide picrique ou au liquide de Kleinenberg. Par contre, les corps bacilliformes se montrent avec une parfaite évidence sur les préparations au nitrate d'argent; mais c'est dans les cellules traitées par le liquide de Kleinenberg qu'elles apparais- — 195 — sent dans toute leur netteté. J'ai des préparations dans les- quelles tout le corps de la cellule paraît constitué de bactéries juxtaposées et entre-croisées en tous sens. J'ai cherché à rendre cet aspect par la figure 8 de la planche VI. Les contours des cellules et du noyau ont été dessinés à la chambre claire (Immer- sion 10 de Hartnack). L'existence normale et physiologique de semblables éléments dans le protoplasme cellulaire présente un certain intérêt. La ressemblance de ces bâtonnets avec des Bacilles est telle, qu'un pathologiste quelque peu disposé à voir dans les bactéries et les microcoques les causes des maladies épidémiques et infec- tieuses, trouvant de semblables éléments dans les cellules d'un tissu, n'hésiterait guère à voir en eux des Schizomycètes. J'ai appris dernièrement que le D"" Koch a trouvé dans le violet de methyl un réactif excellent pour reconnaître les bactéries au milieu des tissus. Je n'ai pas pu essayer encore comment se comportent nos éléments bacilliformes vis-à-vis de cette matière colorante, mais je me propose de faire prochainement cette recherche. Les noyaux des cellules ectodermiques sont aplatis; vus de face, ils ont généralement une apparence ovalaire, rarement cir- culaire, quelquefois irrégulière. Leur contour nettement indiqué par une ligne très-fine est bien rarement régulier. Ils se colorent en rose par le carmin et le picromicarminate, en bleu violacé pâle par l'hématoxyline. Il se chargent beaucoup moins de matière colorante que les noyaux des autres feuillets. Examinés sur le vivant, ils paraissent homogènes et brillants; sur des prépara- tions à l'argent, aux chromâtes, à l'acide osmique età l'acide picrique, ils sont très-finement ponctués. Ils ont toujours plu- sieurs nucléoles; ceux-ci sont éparpillés sans ordre dans le corps nucléaire; ils ont des dimensions ^t une forme variables; ils sont tantôt arrondis, plus souvent allongés ou irréguliers. Quelque fois ils sont reliés entre eux par des filaments bien visibles. Cependant je ne suis pas parvenu à voir avec netteté un réseau nucléoplasmique continu. Ils prennent énergiquement les matières colorantes. Dans les préparations traitées directement -^ i96 - par le liquide de Miillerjes noyaux perdent complètement leurs nucléoles et deviennent parfaitement homogènes. Les dimen- sions de ces éléments nncléoliforme sont très-variables; généra- lement les plus grands s'observent dans les plus grandes cellules. De très-grands noyaux présentent souvent des bords échancrés. Ces écliancrures sont plus ou moins profondes. J'en ai trouvé qui paraissaient doubles, les deux moitiés n'étant plus réunies entre elles que par un mince pont de substance nucléaire (pi. V, tlg. 10). Enfin on trouve des cellules à deux noyaux (pi. V, fig. H). Ces noyaux ont alors tous les caractères des noyaux simples. Les cellules à deux noyaux ne manifestent aucune tendance à la division. Les cellules en voie de division ont des caractères tout particuliers, et leurs noyaux subissent une série de modi- fications successives que j'ai déjà en partie décrites. Je ferai de mes observations sur la division des cellules l'objet d'un travail spécial. Le nombre de ces cellules à deux noyaux augmente avec l'âge de la vésicule blastodermique. iMe fondant sur la diver- sité des formes qu'affectent les grands noyaux, j'ai exprimé l'opi- nion qu'il s'agit ici non d'une multiplication cellulaire, mais d'une fragmentation nucléaire. Je discuterai cette manière de voir quand je traiterai de la division des cellules. Je me bornerai à dire, pour le moment, que je n'ai pas vu un noyau de cellule ectodermique se fragmenter sous mes yeux, pas plus que je n'ai observé la fusion de ce que j'appelle deux fragments nucléaires. Ma manière de voir n'est donc pas basée sur l'observation directe. Il en est de même du reste des phénomènes de la division cellu- laire; je ne connais l'histoire de la multiplication cellulaire que par l'étude comparative des phases successives de ce phénomène observées dans des cellules différentes, et telles que je les ai rencontrées dans mes préparations, fixées par les réactifs. Si l'on examine avec soin et en se servant de grossissements suffisants les noyaux de l'ectoderme dans des préparations à l'acide osmique, au liquide de Kleinenberg ou au chlorure d'or, on constate l'existence dans l'immense majorité de ces éléments d'un corps plus clair, généralement sphérique, bien délimité par une ligne ponctuée et autour duquel les nucléoles paraissent — i97 — plus nombreux que dans le reste du corps nucléaire. J*ai parlé plus haut de cette particularité des noyaux ectodermiques aux- quels j'ai attribué une couche corticale et un corps médullaire. Hijpoblaste. — Les cellules de l'hypoblaste diffèrent beaucoup de celles du feuillet externe. Si l'on parvient à isoler des frag- ments de l'hypoblaste d'un blastocyste traité par l'acide osmique et l'alcool, ou par le nitrate d'argent, on reconnaît que cette couche est formée par un réseau de filaments circonscrivant des mailles de dimensions variables. Des noyaux de cellules, la plu- part sphériques, se colorant fortement par le carmin et l'héma- toxyline, notablement plus petits que les noyaux de l'ectoderme, se trouvent disséminés dans le reticulum à des distances à peu près égales les unes des autres (pi. Vl,fig. 9). Les noyaux se trou- vent au milieu d'une petite zone granuleuse, de forme variable, terminée par une ligne irrégulière, qui forme alternativement des angles sortants et des angles rentrants. Des sommets des angles saillanls partent les filaments qui se divisent el s'anastomosent de façon à délimiter des mailles, dont les formes et les dimen- sions varient beaucoup. On croirait voir une colonie de rhizo- podes réunis entre eux par leurs pseudopodes, tels que des Radiolaires sociaux, le Collozoïim inerme, par exemple, ou le Myxodyclium sociale. Le noyau, petit, généralement circulaire, plus rarement ova- laire, est pourvu de plusieurs nucléoles. Il ressemble aux noyaux des cellules de l'ectoderme, à part sa forme, ses dimensions et son affinité pour les matières colorantes. 11 se colore si vite et si fort, que souvent quand les noyaux des cellules de l'épiblaste commencent à peine à se teinter en rose ou en violet, les noyaux de l'hypoblaste sont déjà colorés à tel point qu'il n'est plus pos- sible d'y reconnaître la présence des nucléoles. A la coupe, les noyaux ont une apparence ovalaire ou circulaire. Ils sont donc tantôt sphériques, tantôt ovoïdes. Lors de la division, ces noyaux présentent les mêmes phénomènes complexes que ceux que l'on constate dans les cellules de l'épiblaste. Dans chaque cellule, nous pouvons distinguer une région granuleuse entourant immédiatement le noyau et une zone — J98 — réticulée qui se continue sans ligne de démarcation tranchée avec les reticulations périphériques des cellules voisines. La région périnucléaire est plus foncée au contact immédiat du noyau. Si on l'examine en se servant de forts grossissements, elle paraît formée d'une substance criblée de vacuoles, la plupart très-petites. La substance qui remplit les vacuoles est claire et homogène; celle qui les délimite est, au contraire, foncée et granuleuse par places. Bref, la partie médullaire de la cellule paraît avoir une structure réticulée aussi bien que la zone corti- cale; seulement dans celle-ci les mailles sont beaucoup plus grandes. Les filaments du reticulum cortical ont des contours très-nets; çà et là on voit de fines granulations. Aux points de convergence, on observe souvent une petite plaque plus ou moins étendue, homogène ou finement granulée. Ailleurs, au lieu d'une petite plaque, se voit un point plus apparent que les filaments qui s'y réunissent. Quant aux limites des cellules, il n'est pas possible de les distinguer. Existent-elles en réalité? Le reticu- lum est-il discontinu ou bien l'apparence est-elle l'expression de la réalité et les cellules forment-elles vraiment un syncytium? La solution de cette question se rattache intimement à une autre qui est relative à la constitution de la cellule hypoblastique. Qu'y a-t-il dans les mailles du réseau? L'hypoblaste est-il véritablement troué et les filaments sont-ils de véritables pseudopodes séparés les uns des autres par des lacunes qu'occupe le liquide de la cavité blastodermique? Ou bien chaque cellule hypoblastique est-elle une lamelle continue formée de deux substances, Tune réticulée, l'autre remplissant les mailles du réseau? En d'autres termes, les cellules sont-elles comparables à des rhizopodes pourvus de filaments pseudopodiques anastomosés entre eux et avec les pseudopodes des éléments voisins, ou bien l'apparence réticulée indique-t-elle une structure intracellulaire du protoplasme. Je crois que les cellules hypoblastiques ne sont pas des cellules à pseudopodes, mais que leur reticulum est intracellulaire. Je me base sur les faits suivants : i** sous l'influence du nitrate d'argent, les limites de ces cellules se marquent par des lignes noires continues ou discontinues, circonscrivant des polygones — 199 — de différenles formes, non-seulement dans dans la tache em- bryonnaire, mais aussi dans le voisinage immédiat de l'embryon proprement dit (pi. VI, fig. iO). L'existence de ces lignes dé- montre que l'hypoblaste est formé de cellules polygonales plates, se touchant par leurs bords. L'apparition de ces contours ne peut s'expliquer dans l'hypothèse de cellules à pseudopodes. 2" A la périphérie du gastrodisque, on trouve dans les stades VI et VH des cellules granuleuses aplaties, isolées ou réunies par leurs bords en petits groupes de deux, de trois ou de quatre cellules et formant de véritables lamelles protoplasmiques (pi. V, lig. 9). On trouve un grand nombre de formes de transition entre ces lamelles et les cellules endodermiqnes arrondies des stades IV et V. La structure réticulée paraît être une diiîérencia- tion secondaire de la substance protoplasmique granuleuse. 5" A la coupe, les cellules de l'hypoblaste se présentent sous forme de fuseaux. Chacune d'elles est une lamelle épaissie à son milieu, amincie suivant ses bords. A" Une structure réticulée semblable s'observe dans l'ecto- derme, et bien certainement cette apparence n'est pas due à ce que les cellules de ce feuillet seraient percées à jour à la façon d'une dentelle. Elle résulte, au contraire, de l'existence de va- cuoles remplies de substance homogène dans le corps protoplas- mique de la cellule. L'hypoblaste n'est donc pas un syncytium comparable à une colonie de rhizopodes; il est formé de cellules individualisées, se touchant par leurs bords, et ces cellules présentent une struc- ture réticulée très-apparente. Cette structure réticulée du protoplasme a été fréquemment signalée dans ces derniers temps, et quelques auteurs ont cru voir dans la découverte de ce reticulum un progrès considérable réalisé dans la connaissance du protoplasme. Mais l'on sait depuis longtemps que le protoplasme affecte une apparence réticulée dans l'immense majorité des cellules végétales, chez beaucoup de Protozoaires (Infusoires, Noctilu- qiies, Actinospherium, Radiolaires) , dans les cellules endoder- miques des Ilydroïdes, et plus particulièrement dans les cellules — 200 — axiales des tentacules; je l'ai fait connaître dans la cellule axiale et aussi dans les cellules ectodermiques des Dicyémides. Les mailles du reticulum sont occupées tantôt par un liquide aqueux, tantôt par une substance gélatineuse. Tout récemment, Heilzmann a signalé cette structure réti- culée dans le corps protoplasmique d'une foule de cellules animales : il l'a trouvée chez les Amibes, dans les globules du sang de l'Écrevisse, dans les globules du Colostrum, dans les cellules du cartilage, de la moelle des os, du cordon ombi- lical, des tendons, du tissu périostique, du tissu osseux, des vaisseaux, des muscles, des nerfs et des epithelium. Kuppfer a trouvé que le corps des cellules biliaires est formé chez la Grenouille d'un reticulum de filaments très-ténus et finement granuleux, dont les mailles sont occupées par une substance hyaline qu'il appelle paraplasma. Sur des cellules fraîches, il a vu les filaments proloplasmiques se contracter et le réseau changer de forme. Il a constaté les mêmes faits dans les odonto- blastes des vertébrés et dans les cellules salivaires de la Peripla- nela orientalis. Il pense que les bâtonnets décrits par Haiden- hain dans les cellules des canalicules urinifères témoignent d'une structure analogue. Fromman a confirmé la manière de voir de Heitzmann relativement au protoplasma des globules du sang de rÉcrevisse; Trinchese est arrivé à des résultais semblables par l'étude qu'il a faite de diverses espèces de cellules chez la Cali- phylla Mediterranea de Costa ; et tout récemment, Ray Lankester a observé un réseau protoplasmique dans le corps d'une Amibe. Il est donc certain dès à présent que la structure réticulaire du protoplasme si répandue dans le règne végétal est bien plus commune dans les cellules anin)ales qu'on ne l'avait supposé, et l'étude que j'ai faite des cellules qui constituent les feuillets embryonnaires du Lapin m'a permis d'ajouter un exemple de plus à ceux que l'on pouvait citer à l'appui de cette manière de voir. Nulle part peut-être cette reticulation du protoplasme n'est aussi manifeste que dans l'hypoblaste d'un blastocyste de Lapin de 6 à 7 jours. — 201 — HISTORIQUE. i/vsi à R. de Graaf que Ton doit la découverte de l'œuf utérin des mammifères; mais il identifia les vésicules transparentes que l'on trouve dans l'utérus, quelques jours après la copulation, aux vésicules ovariennes qui sont universellement connues aujour- d'hui sous le nom de follicules de de Graaf. Cruikshank paraît avoir été le premier qui remarqua l'exis- tence d'une tache dans les œufs ulérins, six jours pleins après le coït. Prévost et Dumas ont ensuite comparé cette tache à l'aire embryonnaire des oiseaux, et ils ont montré que chez les mammi- fères, comme chez les oiseaux, la première trace de l'embryon consiste dans l'apparition de la ligne primitive. De Graaf, aussi bien que ses successeurs, reconnurent que l'œuf utérin est constitué de deux vésicules concentriques, acco- lées l'une à l'autre, et qui se séparent l'une de l'autre dès que l'on met dans l'eau l'œuf retiré de l'utérus, von Baër a identifié la vésicule externe à la membrane pellucide de l'œuf ovarien découvert par lui : il l'appela membrana corticalis ou Chorion. La vésicule interne, il la compara au blastoderme des oiseaux, et la tache foncée qui est d'abord arrondie et plus tard allongée fut reconnue pour être le lieu de formation de l'embryon, von Baër dit même que le germe (Kelni) est formé , comme celui des oiseaux, de deux feuillets adjacents, d'un feuillet animal et d'un feuillet végétatif; il fonde sur cette donnée tout son exposé du développement ultérieur de l'embryon. Mais nulle part von Baër ne dit catégoriquement si cette manière de voir est basée sur l'observation directe ou si elle résulte de l'analogie complète qui existe, à ses yeux, entre le développement des mammifères et celui des oiseaux. Coste a ajouté peu de données nouvelles à ce que l'on connais- sait déjà en Allemagne de la constitution de la vésicule blasto- dcrmique. Comme von Baër, il considère la membrane externe de l'œuf utérin comme identique à la membrane de l'œuf ovarien; mais il lui donne un autre nom, il l'appelle membrane vitelline. 202 / La membrane interne, au contraire, est un produit du déve- loppement embryonnaire ; il l'appelle vésicule blaslodermique , membrane blaslodermique ou blastoderme, La tache qu'il fait apparaître au 7^ jour est nommée tache embryonnaire. Coste paraît avoir eu connaissance de Texisfence, au 7^ jour du déve- loppement, de deux feuillets distincts, tant dans la tache embryon- naire qu'en dehors de la tache. « A cette époque aussi, dit-il (au 7° jour), on peut, non sans beaucoup de difficultés toutefois, arriver à démontrer, ce qui tout à l'heure sera plus évident en- core, que la tache embryonnaire peut se décomposer en deux feuillets concentriques, qui peuvent se poursuivre jusque dans presque toute l'étendue du blastoderme, lequel est, par consé- quent, comme nous l'avons établi, formé lui-même de deux couches, comme la tache embryonnaire avec laquelle il se continue. » \ Martin Barry s'est occupé le premier de l'étude des modifica- tions que subit l'ovule pendant son passage à travers l'oviducte. L'honneur d'avoir découvert la segmentation chez les mammi- fères, il le partage avec Bischofï. Il a vu et figuré un grand nombre de phases du développement; mais les quelques obser- vations exactes qu'il a faites sont noyées au milieu d'une quan- tité de descriptions fantaisistes ; l'exposé des phénomènes les plus simples paraît avoir été compliqué à plaisir; tout y est embrouillé et confus; Barry fait apparaître dans des œufs d'un millimètre des organes dont les premiers rudiments ne se montrent que quand les vésicules ont atteint plusieurs millimètres de diamèlre; il annonce une foule de faits que personne n'a pu constater après lui. Mais malgré le peu de crédit que l'on doit accorder à ses observations et surtout à ses interprétations, Ton ne peut mécon- naître que Barry a vu et figuré les modifications que subit l'œuf dans son passage à travers l'oviducte et au moment de son entrée dans Tutérus. Ses recherches, il les a faites sans avoir connais- sance des études de Bischofî, dont les travaux classiques sur le développement du Lapin, du Chien, du Cochon d'Inde et du Chevreuil ont véritablement fondé l'embryologie des mammi- fères. _ -203 — En ce qui ooneerne la connaissance des phénomènes qui s'accomplissent dans l'ovule depuis le commencement du qua- trième jour jusqu'au début du septième, Bischoff a fait deux découvertes importantes ; 1** II a reconnu que la vésicule blastodermique est formée de cellules et que ces cellules se développent aux dépens des globes de segmentation. Celte observation n'avait pas seulement une valeur considé- rable pour la connaissance de l'embryologie des mammifères; elle avait une portée bien plus générale. La cellule était encore universellement considérée à cette époque comme étant essentiel- lement caractérisée par une membrane. Schwann avait professé cette notion erronée dans toute la partie descriptive de son livre, et quoique sa conception de la cellule se soit profondément modifiée au moment où il écrivit sa théorie des cellules, tous les biologistes continuèrent à définir la cellule par la membrane. L'erreur dans laquelle tombait Bischoff quand il niait le caractère cellulaire des globes de segmentation, était la conséquence néces- saire de l'exactitude de ses observations d'une part, d'autre part de la valeur qu'il accordait, avec tous les hommes de son époque, à la membrane cellulaire. Si Bischoff avait pu se dégager des idées courantes, ses obser- vations l'eussent conduit : 1"' à la conception exacte de la cellule; 2" à la découverte de la multiplication des cellules par voie de division. En tous cas, elles laissaient entrevoir l'explication du fractionnement du vitellus : Bischoff a montré, en effet, que les globes de segmentation deviennent les cellules du blastoderme. Il est vrai que plus tard il se prit a douter lui-même de l'exac- titude de cette manière de voir. A la suite de ses observations sur le Cochon d'Inde et le Chevreuil, il émit l'opinion que, chez tous les mammifères, une fusion des globes de segmentation en une masse granuleuse indivise précéderait immédiatement la forma- tion des cellules blastodermiques. La segmentation redevenait une énigme. Bischoff raconte dans son travail sur le développement du Chevreuil que pendant la période de quatre mois qui s'écoule entre — 204 — le moment où s'accomplissent les premiers phénomènes du déve- loppement embryonnaire (segmenlalion) et le moment où la vési- cule blastodermique commence à se former, il a trouvé deux fois les œufs dans l'utérus. Le vitellus n'était formé ni de globes ni de cellules, mais toute la cavité circonscrile par la zone pel- lucide était remplie par une masse granuleuse sans structure. « Aile Mùhe im ïnnern irgend Etwas zu entdecken war verge- bens, auch als ich eines derselbcn sorgfaltig zerdrukte. Offcnbar traten hier wie ich es auch bei dem Ei der Meerschweinchen gefunden habe, und wahrscheinlich ûberall bei Saûgethiereiern zu einer gewissen Zeit sich fbidet, nach Voriibergehen der Dotter- theilung die Dotterelemente jetzt wieder in eine Masse zusam- mengetreten, und in diesemZustande verharrte nun das Ei, ohne sich irgend wie weiter zu verandern. » Cette fusion des globes n'est qu'apparente, comme Bischoff Tavait très-bien reconnu dans ses premières recherches. 2° Bischoff a le grand mérite d'avoir démontré définitivement que dans des vésicules de i ^///'' (3,85 mm.) et au-dessus non- seulement la tache embryonnaire, mais aussi lazone avoisinantla tache, sont constituées de deux feuillets cellulaires, et que le feuillet interne s'étend au fur et à mesure que le volume de la vésicule augmente. Mais là se réduisent les titres de Bischoff en ce qui concerne la connaissance des phénomènes qui se passent chez le Lapin, du quatrième au septième jour. Pour toutes les questions relatives au développement de la tache embryonnaire, à sa constitution et à l'origine des feuillets, les recherches de Téminent embryolo- giste de Munich ont été insuffisantes. Nous sommes bien loin de lui reprocher ces lacunes : si l'on tient compte de 1 état de la science à l'époque où Bischoff entreprit ses mémorables travaux, si l'on se rappelle que l'embryologie des mammifères était pour ainsi dire à fonder, que les questions qui se posaient alors étaient bien différentes de celles dont nous nous préoccupons aujour- d'hui, que les méthodes que l'on employait étaient fort primi- tives en comparaison de celles dont nous disposons, l'on ne peut que s'étonner de l'importance des résultats qu'il a obtenus, — 205 — du nombre des questions qu'il a résolues, de la quantité d'obser- vations exactes qu'il a faiies et consignées dans ses mémoires. Je puis ajouter que, de tous ceux qui se sont occupés après Biscliolïde l'embryologie des mammifères, jusques et y compris M. Kôlliker, il n'en est qu'un qui ait fait faire un progrès réel à nos connaissances sur cette période du développement; ce seul observateur c'est Hensen. Je vais énumérer ici la série des questions dont Biscboff n'a pas donné la solution. Quelle est la constitution de l'embryon immédiatement avant Fapparilion de la cavité blastodermique et quelle est la significa- tion du reste vitellin? BischofF n'a pas remarqué, et l'on peut en dire autant de tous ceux qui se sont occupés après lui du développement du Lapin, qu'à la fin de la segmentation et avant l'apparition de la cavité blastodermique, les cellules qui sont à la surface de l'embryon diffèrent de celles qui constituent son noyau. J'ai montré que la cause de la constitution de l'embryon au stade que j'ai appelé metagastrula se trouve dans la segmentation inégale du vilellus, et d'autre part dans l'épibolie progressive de l'ectoderme autour de la masse endodermique pendant le frac- tionnement. La différenciation des deux feuillets primordiaux se. fait pendant la segmentation, et dès le moment où l'œuf pénètre dans l'utérus, avant même l'apparition de la cavité blastoder- mique, l'embryon est constitué par un feuillet superficiel formé par une seule rangée de cellules et une masse médullaire consti- tuée de cellules essentiellement différentes des premières. Ce sont ces cellules centrales qui deviennent le reste vitellin, le Dotterrest ou Dotter/iaufen des Allemands. Biscboff le considérait comme étant formé de globes de segmentation identiques dans leur essence à ceux qui ont subi antérieurement la transformation en cel- lules plates; il les croyait destinés à subir, eux aussi, cette méia- morphose. Il affirme, ce qui est inexact, que le reste vitellin diminue peu à peu et qu'il finit par disparaître complètement. Cette manière devoir a été adoptée par Remak; l'un et l'autre ont cru à l'existence d'un stade monodermique de la vésicule — 206 — blaslodermique, postérieurement à la disparition du reste vitellin et antérieurement à l'apparition de la tache embryonnaire. Vuoici les paroles mêmes de Bischoff : « Es umgeben sich aber offenbar nichl sogleich aile Doiter- kugeln mitZellmembranen, soridern nach und nach, und wie es st'heint, diyenigen zuersl, die mit der inneren Oberflâehc der Zona unmittelbar in Beriihrung stehen. Die ûbrigen bildenjenen nodi einige Zeit bemerkbnren Haufen, werden aber nach und nach, wàlirend das Ei wàchst, aile zur Zellenbildung verwendet, und kleiden cndlich am Ende dieses Stadiums die ganze innere Flâche des Eies in einer membranartigen Schiehte aus. Es entsteht auf diesar Weise ein zweites inneres BIàschen in dem Eie und es ist dasselbe also das erste Entwickelungspro- dukt, zu welchem das dem Eichen mitgegebene Material ver- wendet wurde und hinreichte. » (Page 90 du Mémoire sur le Lapin.) Ce dernier stade est atteint quand l'œuf mesure Vs "' soit 0.44 mm. Position du reste vitellin relativement à la vésicule ectoder- mique. Bischoff admet que le « Dotterrest » est intercalé dans la membrane cellulaire qui constitue au début le blastoderme. 11 n'a pas vu que les globes qui forment le reste vitellin se trou- vent accolés à la face interne d'une couche de cellules plates en tout semblables à celles qui constituent tout le reste de la vési- cule ectodermique. Reichert, se basant sur les observations qu'il avait faites cliez les Grenouilles, venait d'exprimer l'opinion que la couche de cellules qui se développe chez le Lapin aux dépens des globes de segmentation, et que Bischoff avait appelée Ze/z/^/mii^, était analogue à la membrane enveloppante (JUmhïdlimgshaut) des Batraciens. Bischoff combat cette appréciation et la manière dont il s'exprime montre clairement qu'il n'a pas vu que l'ectoderme formé de cellules plates existe dans les limites du gastrodisque. Je cite textuellement : « Es mûssle und wûrde hier leicht sein, sich davon zu iiberzcugen, ob der Fruchlhof eine unter der von — 207 — mir Keimblase genannlen Zellenlage auflretende Bildiing ist, also von derselben bedeckt wird , odor ob derselbe in der Ebene derselben begend, nur der Centralibcil derselben ist. Nun aber kann man sicli leicbt iiberzeugen, dass der Fruehlhof weder jetzi nocb spaier von einer solcben Lage polyedrischer Zellen bedeckt ist, sondern dass dieselben unmittelbar in seine Periplierie iiber- geben, iind die Elemenîe des Frucbtbofes (Zellen, Zellenkerne und Elementarkorncben) nach Enlfernung der Zona oder aiis- seren Eibaiit ganz unbedeckt zu Tage liegen (1). » Impossible d'etre plus catégorique, et cependant en cela Bischoff se trompait, si du moins l'on peut conclure du Lapin, où la coucbe dont il nie l'existence est facile à démontrer à tous les stades du développement du gastrodisque, au Cbien cbez lequel je n'ai pas fait d'observations. Origine du feuillet interne. — Biscboff n'a fait, ni chez le Lapin, ni cbez le Cbien, ni chez aucun autre Mammifère, aucune obser- vation qui permette de trancher cette question. C'est sur des œufs mesurant 1 "^j,^" (o.85 mm.) qu'il reconnaît pour la pre- mière fois l'existence des deux feuillets, non-seulement dans la tache embryonnaire, mais aussi en dehors de cette dernière. Il n'a pas constaté sa présence dans des vésicules plus jeunes. Dans des œufs de 5/4'" (1,05 mm.), il trouve la tache embryonnaire constituée par une accumulation de cellules et de noyaux et con- sistant en un épaississement de la membrane blastodermique. Dans l'opinion de Biscboff, le feuillet végétatif se développe- rait par dédoublement d'un épaississement cellulaire du blasto- derme d'abord dépourvu de toute stratification qui constituerait au début la tache embryonnaire. Pas plus dans son Mémoire sur le développement du Chien que dans ses recherches sur le Lapin, il n'a considéré le reste vitellin comme étant plutôt l'ori- gine du feuillet végétatif que <3elle du feuillet animal : chez le Lapin il croit avoir constaté la disparition complète du Dotter- rest; chez le Chien il fait dériver de cet amas de globes la tache (1) Bischoff, Entwickelungsgeschichte des Hundes , p. 68. — 208 — embryonnaire tout entière, et non pas seulement le feuillet végétatif. A ses yeux, la tache embryonnaire est d'abord monodermique; elle devient secondairement didermique. Mais tandis que chez le Lapin il croit avoir observé la disparition totale du Dotterrest, d où il résulterait que la tache serait primitivement un épaississe- ment du blastoderme (Keimhaiit), il croit avoir constaté que chez le Chien les globes de segmentation qui constituent le Dotter- haufeii ne se transforment jamais en cellules plates et qu'ils don- nent directement naissance aux éléments de la tache embryon- naire. Coste avait émis la même manière de voir quant aux liens qui unissent, chez le Chien, le reste vitellin à l'embryon propre- ment dit. Moment de l'apparition de la tache embryonnaire, — Bischoff voit apparaître la tache embryonnaire dans le courant du cin- quième jour sur des œufs de ^/4"' (1.65 mm.). Elle est très-peu apparente à son début et résulte d'un épaississement en un point de la vésicule blastodermique. Cruikshank la constata pour la première fois dans des vésicules ayant 6 jours d'ége, et Coste la fait naître au septième jour. J'ai démontré qu'elle se montre dès le moment où la masse endodermique s'est étendue en une plaque épaissie à son milieu, amincie suivant ses bords. Cette transfor- mation s'accomplit à la fin du quatrième jour ou au plus tard au commencement du cinquième. Bischoff a admis, et tous ses successeurs ont appuyé cette manière de voir, que le feuillet végétatif qui s'étend progressi- vement vers le pôle inférieur de l'œuf procède des bords de la tache embryonnaire. Cette manière de voir est inexacte. Je n'ai pas pu non plus confirmer l'observation de Bischoff, qui a cru constater une fusion des cellules de l'ectoderme du Lapin dans des œufs variant entre 1 '^j^^" et 3". Cette même fusion, il la signale chez le Chien, non-seulement dans le feuillet animal, mais aussi dans le feuillet végétatif. Chez le Lapin, ce phéno- mène ne s'accomplit à aucune phase du développement. — 209 — Constitution de la tache embryonnaire. — La cause pour laquelle la tache se distingue du reste de la vésicule blaslodermique varie- rait, si Ton en croit Bischoff, aux divers stades du développement. Au début, elle aurait sa raison d'èire dans un épaississcment de la membrane blaslodermique; plus tard, dans la stratification qui se montre dans la tache, qunnd elle devient didermique et qu'elle se constitue d'un feuillet animal épaissi et d'un feuillet végétatif; plus tard encore, les deux feuillets seraient épaissis dans les limites de la tache embryonnaire. Bischoff n'a pas étudié le mode de formation du feuillet moyen. L'éminent embryologiste admet, tant chez le Lapin que chez le Chien, une division de la tache embryonnaire en une aire trans- parente et une aire opaque. Ces deux régions sont comparées aux zones connues sous ces noms chez le Poulet. Hensen a montré combien pour toute cette période du développement les observa- tions de Bischoff sont insuffisantes et il a fait faire un progrès considérable à l'embryologie des mammifères en montrant qu'il n'existe chez le Lapin ni area pellucida , ni area opaca, dans le sens que Bisschoff attribue à ces termes. Toute la tache embryon- naire du Lapin se transforme en embryon. Sur ce point je suis arrivé aux mêmes conclusions que Hensen. Cependant, j'ai montré que dans les stades VIII et IX la partie médiane de la tache est plus claire que sa portion corticale. Celle-ci forme un anneau foncé autour d'une région plus transparente. C'est là probablement ce que Bischoff avait constaté chez le Lapin et ce qu'il a certai- nement bien observé chez le Chien. Cette parlicularité a échappé à Hensen. Mais, je le répèle, ce fait n'a pas du tout la portée que lui a attribuée Bischoff, et pas plus que Hensen, je ne m'ex- plique ni les figures 48 à 52 de l'embryologie du Lapin, ni les figures 52 , 35 et 54 du Mémoire sur le Chien. La ligne primitive que Bischoff fait apparaître au neuvième jour se montre très-netlemenl au commencement du septième. — 210 — Hensen est le seul embryologiste qui depuis Bischoff ait fait des recherches suivies sur le développement du Lapin. L'éminent professeur de Kiel est Tun de ceux qui ont le plus largement coniribué à faire progresser nos connaissances embryologiques durant ces vingt dernières années. C'est Hensen qui le premier a fait des coupes microscopiques à travers de jeunes embryons de Poulet ; c'est encore lui qui a introduit dans l'étude de l'embryo- génie du Lapin cette méthode précieuse à l'emploi de laquelle se ratlachent les principales découvertes récentes qui ont été faites en matière d'embryologie. Les recherches de Hensen ont été faites plusieurs années avant leur publication; son mémoire a paru en même temps que ma communication préliminaire. Confirmant en cela les observa- tions de Bischoff chez le Chien et celles de Coste, Hensen a reconnu que chez le Lapirt la tache embryonnaire se développe en un lieu de la vésicule blastodermique qui correspond au point où le reste vitcllin se maintient pendant quelque temps sous forme d'un amas de globes de segmentation faisant saillie dans la cavité blastodermique. Il donne à cet amas le nom d'émi- nence germinative (Keimhûgel). Il a vu, en outre, que ces globes du rrste vitellin donnent naissance au feuillet interne de l'embryon, et qu'ils sont accolés à la face interne d'une couche de cellules plates. Il décrit un œuf d'un demi-millimètre de dia- mètre, auquel il a reconnu une constitution identique à celle du blastocyste que j'ai fait connaître sous la désignation de Stade V. Hensen ajoute : Les cellules de l'éminence germinative d'abord disséminées se réunissent dans des phases plus avancées, de façon à donner naissance à une couche continue, qui est le feuillet interne de la tache embryonnaire. C'est là une erreur : dans le stade qui succède immédiatement à celui qui est caractérisé par « eine diffuse Verbreitimg des Keimhuqeh , » les cellules isolées de la périphérie du gastrodisque changent simplement de forme, elles s'aplatissent en même temps qu'elles deviennent plus trans- parentes, et elles donnent naissance in situ à l'hypoblaste de la région didermique. Hensen n'a pas vu davantage que les cellules profondes de la tache embryonnaire subissent en même temps — ail- la même (ransformation. Celte lacune dans ses observations doit éire atlribiiée à la difïiciiUé sinon à rimpossibililé de reconnaître ces faits par l'examen exclusif de vésicules fraîches. L'ignorance dans laquelle Teminent physiologiste est resté à cet égard a entraîné comme conséquences d'autres erreurs : i" Hensen, confirmant en cela la manière de j'oir de Bischoff, considère la tache embryonnaire comme le lieu d'origine de riiypoblaste. Il admet une extension progressive de ce feuillet à partir des bords de la tache embryonnaire (Keimscheibe). U existerait donc un moment où l'hypoblaste ne se trouverait que dans les limites de la tache. Ce stade n'existe pas. La tache em- bryonnaire et la région didermique de la vésicule ne sont que des parties du gastrodisque qui a été confondu par tous les em- bryologistes avec la tache embryonnaire. L'un et l'autre sont appelés indifféremment Fruchthof ou Keimscheibe. La Keim- scheibe n'est, au contraire, que la partie centrale de l'éminence germinative diffuse de Hensen si bien défini par ces mots : « die Zellen des Keimhugels liegen so vertheilt dass sie im Centrum dicht und z. Th. mehrschichtig lagern, nach der Peri- pherie zu dagegen mehr und mehr verstreut auflreten. » 2° Hensen n'a pas vu que les jeunes taches embryonnaires ont dès le début, quand elles sont encore irrégulières et à plus forte raison quand elles sont devenues circulaires, trois couches de cellules. Il fait apparaître le mésoderme simultanément avec la ligne primitive; il a constaté l'impossibilité de délimiter ces deux feuillets dans la ligne primitive et il admel suivant cette direction une fusion du feuillet interne avec les deux autres. Il conclut à la formation du mésoderme aux dépens des deux feuillets primor- diaux , le long de la ligne primitive et autour de son extrémité antérieure, que Hensen a appelée le nœud. Toute cette manière de voir est en opposition avec mes propres observations. Il est incontestable qu'à certain moment de l'évolution de la ligne pri- mitive le mésoblaste se continue le long de cet organe, avec le feuillet externe de l'embryon, et qu'il est alors impossible de les séparer. Mais quel est le caractère de cette continuité? Il résulte du fait de la préexistence du mésoblaste établie par toutes mes — 212 — recherches, que cette continuité n'a pas sa cause dans l'origine épihlastique du feuillet moyen le long de la ligne primitive. La fusion du feuillet externe et du feuillet moyen suivant la ligne primitive est secondaire. Pour savoir comment elle s'opère, il ne suffît pas de constater qu'à certain moment elle existe; il faut étudier les stades successifs de la ligne primitive depuis le moment de son apparition. C'est ce qui n'a été fait ni par Hensen ni par aucun des embryologisles qui se sont occupés jusqu'à présent du développe- ment des mammifères. Je publierai prochainement le résultat de l'étude approfondie que j'ai faite de celte question chez le Lapin. Quant à la fusion de Thypoblasle avec le feuillet moyen le long de la ligne primitive, fusion admise par Hensen, je ne l'ai obser- vée à aucune phase du développement; en cela je ne puis que confirmer les observations de M. Kolliker. Le seul point où le feuillet hypoblaslique ne peut être décollé du tissu de la ligne primitive, c'est l'extrémité antérieure de cette ligne. Au niveau du nœud découvert par Hensen, les trois feuil- lets sont réellement en continuité l'un avec l'autre. Le feuillet interne se continue directement en ce point avec l'épiblaste. Aux deux côtés de la ligne médiane, et en arrière du point où se fait ^inflexion de Vhypoblaste pour se mettre en coiitinuilé avec l'épi- blaste, il est impossible de 'marquer la limite entre le feuillet moyen et les deux autres feuillets. Sur la ligne médiane, en avant du nœud, l'hypoblaste forme une gouîtière, dont la voûte épaissie et formée par des cellules cylindriques constitue l'origine de la corde dorsale. Au niveau du nœud, la gouttière se ferme en un canal qui se relève aussitôt pour se mettre en continuité avec Tépiblasle. La notocorde vient se terminer en arrière dans la courbe que décrit ce tube, et à la paroi postérieure de ce tube vient se terminer la ligne primitive. Il n'y a donc pas de doute que chez les mammifères la nolo- corde ne soit au début un épaississement de l'hypoblaste, comme Hensen l'a découvert, et ici encore une fois M. Kolliker s'est complètement trompé, quand il soutient que cet organe se conti- — 215 — nue à son extrémité postérieure avec le tissu de la ligne primi- tive. M. Kolliker n'a pas vu cette extrémité de la notocorde, sinon il eût remarqué l'invagination en gouttière et plus en arrière en tube que forme là Tliypoblaste; il eût constaté la continuité qui s'établit en ce point entre l'bypoblaste et Tépiblaste et qui forme une cloison transversale séparant complètement la corde dorsale du tissu de la ligne primitive. Mais je ne veux pas insister sur ce sujet que je traiterai in extenso dans un procliain travail. Je veux ajouter encore cependant que, sans y attacher toute l'importance que ce fait mérite, sans l'avoir interprété dans son sens véri- table, Hensen a reconnu le premier que le nœud apparaît avant la ligne primitive, et cela an moment où la tache emhrijonnaire est encore circulaire. Seulement Hensen a pensé que c'était là le début de la ligne primitive, ce qui est inexact : le nœud est l'or- gane qui marque la limite antérieure de la ligne primitive , et celle-ci n'apparaît que plus tard en arrière du nœud. Quelques observations sur la constitution de la vésicule blas- lodermique et sur son développement ont été faites par Reichert, Weil, Schâfer, Lieberkiihn et Kolliker. D'après Reichert, aussitôt la segmentation terminée, il se for- merait chez le Lapin une vésicule formée par une rangée unique de cellules. A la face interne de cette vésicule s'appliquerait le reste vitellin et celui-ci serait l'origine de la tache embryonnaire. Weil admet avec Bischoff et Remak un stade monoder- mique de la vésicule blastodermique. Dans des œufs de cinq jours neuf heures, il ne put retrouver aucune trace du reste vitellin, pas plus qu'il ne put y découvrir de tache embryon- naire. Il fait apparaître la tache embryonnaire à la fin du sixième jour. Schâfer (1) a fait l'étude de quelques œufs utérins trouvés en même temps dans l'utérus d'une- Chatte. Il a publié le résultat de cette observation dans une note intitulée : « Description of a mammalian Ovum in an early condition of Development. » (1) ScHAEFER, E. A. Description of a mammalian Ovum in an early condition of Development. pROc. Royal Soc. 1876, — 21i — Celte note contient doux faits intéressants : le premier c'est que dans ces œufs, quoique tout jeunes, puisqu'il n'existait encore aucune trace de la ligne primitive, Phypoblaste formait une vési- cule complète inscrite dans la vésicule cpiblastique. Chez le Lapin, Phypoblaste ne gagne le pôle inférieur que Irès-tard, si même il s'étend jamais sur toute la surface de l'épiblaste. Au neuvième jour, une partie du blastocyste est encore monodermique. La seconde observation digne d'être signalée est relative à l'exis- tence d'une lamelle sans structure entre l'épiblaste et l'hypoblaste. Schàfer la considère comme étant une production cuticulaire du feuillet interne et l'appelle « Membrana limitans hypoblastka. » Hensen a trouvé une membrane semblable (pi. ÏX, fig. 19) dans une coupe longitudinale de la tache embryonnaire d'un blasto- cyste de Lapin de 7 jours et 7 heures; il l'appelle dans l'explica- tion des planches « membrana prima » . J'ai trouvé au début de mes recherches, sur des coupes assez épaisses d'un embryon mal conservé, une lamelle semblable; mais les nombreuses séries de coupes bien réussies que je possède d'aires embryonnaires, à partir de cinq jours, faites sur des embryons préparés au moyen du liquide de Kleinenberg, ne montrent rien de pareil. Je pense donc qu'il s'agit d'un produit artificiel et que la « fnembrana limitans hypoblaslica » de Schâfer est le résultat d'une coagula- lion se produisant dans certaines conditions accidentelles. Pour ce qui concerne la constitution des feuillets et de l'aire embryonnaire, les observations de Schâfer sont très-défec- lueuses : ses œufs ont été traités par le bichromate de potasse et ses coupes ont été faites après inclusion dans la gomme. Cette méthode est mauvaise : j'ai constaté que les solutions de bichro- mate de potasse et d'ammoniaque allèrent profondément les cel- lules; par contre, elles ont l'avantage de faciliter beaucoup le décollement des feuillets : si l'on veut isoler les feuillets, le trai- tement par ces réactifs est la meilleure méthode que l'on puisse employer. C'est à l'action du bichromate qu'est due, sans aucun doute, la formation de la cavité que M. Schâfer a observée entre Tépiblasle et l'hypoblaste. Mais quand il s'agit d'étudier la constitution des feuillets, de préparer les œufs pour en faire des — 215 — coupes, ce procédé doit être rejeté à cause des altéralions que les bichromates font subir aux cellules. Les figures de M. Scbàfer montrent clairement qu'il a eu à faire à des tissus profondément altérés. Je sais par expérience ce que vaut celte méthode et j'ai des préparations très-semblables à celles qui ont été représen- tées par M. Schâfcr, fîg. 2, fig. 3 et fig. 4; jamais dans des coupes faites à travers des embryons bien préparés, le feuillet externe pas plus que le feuillet interne ne montrent à cet âge aucune trace de stratification; jamais ils ne sont constitués par des cellules arrondies. Lieberkûhn (1) a étudié la constitution de la vésicule blasto- dermique de la Taupe. Dans un œuf de 2 millimètres, la tache embryonnaire serait constituée de deux feuillets, l'un externe formé de plusieurs assises de cellules arrondies, l'autre interne, d'une rangée unique de cellules plates. Celui-ci se continuerait aux bords de la tache avec la portion monodermique du blasto- eyste. Dans un œuf un peu plus âgé, dont l'aire embryonnaire mesurait environ un millimetre de longueur, Lieberkijhn dis- tingue en avant trois feuillets, tandis qu'en arrière le feuillet moyen se trouve confondu avec le feuillet externe. Le feuillet moyen se formerait donc par délamination aux dépens du feuillet externe primitif. Ces résultats sont en opposition formelle avec toutes mes observations. M. Kôlliker n'a rien ajouté aux données de Bischof et de Hensen, sur la formation de la vésicule blastodermique. Il fait apparaître la tache embryonnaire dans des vésicules mesurant de 1.65 à 2 mm. de diamètre. Il la trouve constituée alors de deux feuillets el comme ses prédécesseurs il considère la tache embryonnaire comme le lieu d'origine du feuillet interne. 11 décrit ensuite une vésicule âgée de sept jours, mesurant 3.47 mm. sur 2.85 mm., La tache embryonnaire de cet œuf, il la trouve constituée de deux feuillets. Tout cela est inexact : la tache embryonnaire est déjà parfaitement reconnaissable au milieu du (1) LiEBERKÎ'HN, Marburgev Silzungsberichte, n" o undo. 1875. — 216 — gaslrodisque, dans des blastocystes de 0.75 mm.; le feuillet interne ne procède pas de la tache embryonnaire, et dans les vésicules de 1.63 à 2 mm., aussi bien que dans celles de 7 jours, il existe dans Taire embryonnaire non pas deux, mais trois feuil- lets. La plus jeune vésicule dont M. Kôlliker ait obtenu des coupes avait 7 jours d'âge; elle mesurait 3.47 sur 2.8S mm. Elle correspond à peu près à mon stade IX. M. Kôlliker n'a pas remarqué que si l'on examine avec quelque attention, en se ser- vant d'un grossissement faible, l'aire embryonnaire d'une sem- blable vésicule, on y distingue deux régions d'opacités différentes, que j'ai désignées sous les noms de région circulaire et de crois- sant. La coupe que figure M. Kôlliker a été faite à travers la région circulaire, et l'éminent auteur du a Traité complet du développement de l'Homme et des Animaux supérieurs » n'a pas pris la peine de vérifier si la constitution de la tache reste la même dans toute son étendue. M. Kôlliker n'a pas fait de coupes de vésicules mesurant moins de 3.47 sur 2.85 mm. Il n'a fait aucune observation personnelle pour élucider la question de l'origine de l'endoderme. Il se fonde sur les données de Bischoff, de Coste, de Reicherl et de Hensen pour exprimer l'opinion formulée, du reste bien avant lui, d'après laquelle le feuillet végétatif dériverait du reste vitellin. « Ailes zusammensenommen scheint mir doch auch die Mehrzahl der vorliegenden anderen Beobachtungen dafiir zu sprechen dass der Rest der Furchungskugeln zur Anlage des Entoderma wird. » A mon avis les observations de Hensen ne laissent aucun doute sur ce point. Quant à la tache embryonnaire, elle puiserait son origine dans un épaississement local de l'ectodermc, résultant de l'accroisse- ment et de la transformation des cellules de ce feuillet. En cela encore, M. Kôlliker se trompe; la transformation des cellules ectodermiques plates en cellules prismatiques s'opère vers la fin du sixième jour et la tache est déjà bien apparente au début du cinquième. Cette transformation a pour résultat, en efl*et, de rendre la tache plus visible; mais pour être moins distincte, — 217 — elle n'en existe pas moins dès le début du cinquième jour. (Voir les stades V, VI et VII.) Une autre question sur laquelle M. Kôlliker a une opinion toute personnelle, c'est l'origine du feuillet moyen. D'après lui chez le Lapin, comme chez le Poulet, la ligne primitive consiste dans un épaississement de l'ectodcrme; elle est le résultat d'une prolifération des cellules de ce feuillet. Et cet épaississement n'est pas autre chose que la première trace du feuillet moyen. J'ai démontré par le présent travail que M. Kôlliker a complè- tement méconnu Torigine du mésoblaste et que ce feuillet pré- cède de deux jours au moins l'apparition de la ligne primitive. J'exposerai dans un prochain mémoire les observations que j'ai faites sur l'origine de la ligne primitive chez le Lapin. Il en résulte que l'apparition de cet organe n'a pas sa cause dans un épaississement de l'ectodcrme, mais bien dans une prolifération rapide des cellules du feuillet moyen. Le mésoblaste épaissi, primitivement distinct de l'épiblaste, se soude secondairement avec lui, suivant la ligne primitive. 45 218 — CONCLUSIONS. 1° A la fin de la segmentation, au moment où l'œuf pénètre dans l'utérus, l'embryon est constitué de deux couches cellulaires distinctes : l'une forme à sa surface le feuillet eclodcrmique , l'autre constitue la masse endoder- mique; S'* Il existe encore à ce moment une solution de conti- nuité dans l'ectoderme. C'est le blastopore. L'embryon est une gastrula qui se forme par épibolie dans le cours du fractionnement. Cette forme embryonnaire, je l'ai appelée Metagastrula ; 5° La fermeture du blastopore se fait généralement peu de temps après la pénétration de l'œuf dans l'utérus, avant l'apparition de la fente bJastodermique. Exceptionnelle- ment, on trouve encore le blastopore quand la cavité blas- todermique présente déjà un certain développement. La position de cet orifice paraît être excentrique relativement au futur gastrodisque. Après son occlusion, le blastopore ne laisse aucune trace dans l'ectoderme; 1° L'ectoderme constitue dès lors une vésicule close. Le reste vitellin qui n'est autre chose que la masse endo- dermique, n'est pas intercalé dans la vésicule, mais accolé à sa face interne. Les modifications successives que subis- sent les cellules du feuillet externe s'accomplissent simulta- nément sur tous les points de l'étendue de la vésicule; 5° La masse cndodermique s'étale à la face interne de l'ectoderme en une plaque épaissie à son milieu, plus mince suivant ses bords. La partie de la vésicule ectodermique, à — !2i9 — la face interne de laquelle s'applique la lame endodermique, forme avec elle le gastrodisque. L'épaississement médian du gastrodisque est le début de la tache embryonnaire. Elle apparaît nettement au milieu du gastrodisque dès le début du cinquième jour; 6° Les cellules marginales de la plaque endodermique s'éparpillent isolément à la face interne de l'ectoderme dans la zone périphérique du gastrodrisque , tandis qu'à son centre, ces cellules adhèrent les unes aux autres et forment plusieurs assises cellulaires; 7° Au commencement du sixième jour, les cellules de la zone périphérique du gastrodisque et les cellules {U'ofondes de la tache centrale se sont transformées en cellules plates, de façon à constituer ensemble un feuillet cellulaire continu, qui est l'hypoblaste. Les cellules de la tache centrale qui n'ont pas subi cette transformation constituent une couche intermédiaire entre l'ectoderme et Ihypoblaste; celte couche est le mésoblaste. L'hypoblaste et le mésoblaste dérivent donc de l'endoderme primitif. La tache embryonnaire est alors Iridcrmiquc; la zone périphérique du gaslrodisque est didermique ; le reste du blastocysle est monodermique. A ce moment, Tecloderme de la tache que nous appellerons dès à présent l'épiblaste est encore formé de grandes cel- lules pavimenteuses; S*' A la fin du sixième jour, l'épiblaste de la tache change de caractère; de pavimenteux qu'il était, il devient un epithelium prismatique ou cylindroïde par transformation et prolifération de ses cellules. <]'est k partir de ce moment que la tache embryonnaire devient très-apparente ; P 9° Les cellules ectodermiques plates, et surtout les cel- lules de l'hypoblaste, présentent une structure réticulée des plus manifestes. Le protoplasme des cellules de l'épiblaste — 220 — est toujours constitué en partie de bâtonnets bacilliformes qui ressemblent étonnamment à des Bactéries ; 10<* La tache embryonnaire, d'abord circulaire, devient ensuite ovalaire, puis pyriforme. Alors que la tache est encore circulaire, mais surtout au moment où elle prend la forme d'un ovale, la partie centrale de la tache est plus claire que sa périphérie. C'est probablement cette cir- constance qui a donné lieu à la méprise de Bischoff, qui a admis chez les mammifères une Area pellucida, et une Area opaca., il<» Le changement de forme de la tache est dû au développement de son extrémité postérieure. Le bord pos- térieur de la tache s'élargit et s'étend d'avant en arrière pour donner naissance au croissant. L'aire embryonnaire se constitue dès lors de deux parties distinctes ; 12» Primitivement, le mésoblaste s'étend dans toute la tache embryonnaire. Au début du septième jour , il ne se trouve plus que dans les limites du "croissant, c'est-à-dire à l'extrémité postérieure et sur les côtés de l'embryon. La région circulaire est devenue didermique. Ce retrait du mésoderme coïncide avec l'éclaircissement de la partie médiane de l'aire embryonnaire et avec la naissance du croissant; 13° La théorie de M. Kôlliker sur l'origine du méso- blaste est, en ce qui concerne le Lapin, en contradiction formelle avec les faits. Le feuillet moyen existe deux jours au moins avec la première trace de la ligne primitive. \i^ Le nœud de Hensen apparaît avant la ligne primi- live , au centre de la région circulaire. ~ 221 — EXPLICATION DES PLANCHES. Les figures 1,2,5,4, 6, 7 eli! delà planche TV, 2, 3,4,5, 6. 8, 9, IO et 11 de la planche V, 1, 2, 6, 11, 12 et 13 de la planche VI, sont faites au même grossis- sement (objectif 8 de Harlnack)et â l'aide de la chambre claire de Harinack. Les figures 5, 8, 9 et 10 de la planche IV, 1 et 7 de la planche V, 5 de la planche VI, présentent le même agrandissement. Elles ont été dessinées à la chambre claire et grossies par l'objeclif 4 de Hartnack. Les figures 4 el o de la planche VI ont élé dessinées à la chambre claire de Hartnack, appliquée au microscope simple. Les figures 7, 8, 9 et 10 de la planche VI ont été faites à l'aide de la chambre claire au 10 à immersion de Hartnack. Planche IV, Fig. 1. Stade I. La mélagaslrula dessinée d'après le vivant. Fig, 2. Idem, d'après une préparation au nitrate d'argent. Le dessin représente l'aspect de la surface, le blastopore étant tourné vers l'observateur. Fig. 3. Le même embryon vu à la coupe optique , le blastopore ayant élé amené dans cette coupe. Fig. 4 Stade II. La masse cellulaire de l'embryon remplit complètement la cavité circonscrite par la zone pellucide. Le blastopore n'existe plus. Préparation à l'acide osmique et au liquide de Mùller. Fig. 3 et 6. Stade III. Montrant le commencement de la cavité blastodeimique- La figure 5 représente l'œuf entouré de son épaisse couche albuminoide vu à un faible grossissement (obj. 4 de Harinack). La figure 6 représente le même embryon au 8 de Hartnack. Préparation au liquide de Mûller après l'action de l'acide osmique. Fig. 7. Portion d'une vésicule un peu plus volumineuse que celle qui a été repré- sentée fig. 6. On voit une cellule endodermique engagée enire les cellules eclodermiques. Cette disposition exceptionnelle je ne l'ai rencontrée que deux fois. Elle s'explique par une persistance anormale du blastopore. Pré- paration à l'acide osmique et au liquide de Mùller. Fig. 8, 9 et 10. Vésicules de plus en plus.volumineuses, montrant l'extension pro- gressive de la cavité blaslodermique et la transformation de la masse cel- lulaire endodermique en une plaque plus épaisse à son milieu, plus mince suivant ses bords. (Obj. A.) Fig. 11. Stade IV. L'hémisphère inférieur est représenté vu à sa surface ;rhémi- sphère supérieur à la coupe optique. Préparation à l'acide osmique el au liquide de Mùller. Fig. 12. Vésicule du stade V telle qu'elle se présentait vue à la loupe avant l'action d'aucun réactif. — 222 Planche V. Fig. I. Stade V. Vésicule blastodermique traitée par le nitrate d'argent et colorée par le picrocarminale ; incisée à partir du pôle inférieur suivant des lignes plus ou moins exactement méridiennes. La portion monodermique du blastocyste est teinte en brun ; les cellules ectodermiques de cette région réduisent le nitrate d'argent. Les cellules ectodermiques du gastro- disque n'exercent pas la même action sur le sel d'argent. Les noyaux des cellules ectodermiques, partout colorés en rose, n'ont pas été dessinés pour rendre la figure plus claire. Les cellules endodermiques sont repré- sentées par un oval, rose. Leurs grands noyaux qui se colorent fortement en rouge par le picrocarmin, ne se distinguent pas, au 4 de Hartnack du corps cellulaire, réduit à une mince couche de protoplasme qui se teinte légèrement en rouge brun. Ces cellules sont serrées les unes contre les autres et forment plusieurs assises au centre du gastrodisque, oii se mar- que nettement, grâce à cette circonstance, la tache embryonnaire. A la périphérie du gastrodisque, les cellules endodermiques sont isolées. (Por- tion didermique du blastocyste.) La forme et les dimensions de la tache embiyonnaire, celles du gastrodisque et les dimensions des cellules ecto- dermiques sont exactes, ayant été dessinées à la chambre claire. (Obj. 4 de Hartnack.) Fig 2. Cellules de l'ecloderme dans la région monodermiqiie après l'action du nitrate d'argent (Obj. 8 de Hartnack ; chambre claire de Hartnack ) Fig. 3. Petite partie de la tache embryonnaire de la préparation représentée fig. 1. La substance unissante de l'ectoderme forme des bandes étroites, colorées en brun sur la préparation et limitées par des contours irrégu- liers. Les noyaux des cellules ectodermiques ont une teinte d'un rose tirant un peu sur le jaune. Les noyaux des cellules endodermiques sont sphériques et colorés en rose. Ces cellules forment manifestement deux assises superposées. (Obj. 8 avec ch. cl. de Hartnack.) Fig 4. Portion de la région périphérique du gastrodisque. (Obj. 8 et ch. cl. de Hartnack ) Fig. 5. Idem, d'un autre vésicule. Les cellules endodermiques, assez nombreuses, sont pour la plupart coupées par les lignes noires qui marquent les limites des cellules ectodermiques. Le cercle représente la limite du champ du micioscope. (Dessiné exactement. Obj. 8 etch. cl. de Hai'inack.) Fig. 6. Quel(|ues cellules amaeboïdes de l'endoderme d'un autre blastocyste du même âge, d'après une préparation au nitrate d'argent colorée par le picrocarmin. Fig. 7. Stade VI. Portion d'un blastocyste incisé suivant des lignes méridiennes. Dessiné à la chambre claire, au même grossissement que fig. 1. La région monodermique et les presqu'îles et îlots monoderniiques sont indiqués par une teinte brune, pour les motifs indiqués plus haut Les cellules de cette région étaient parfaitement semblables à celles que j'ai représentées fig 2. — 223 — Dans !e gastrodisque irès-irrégulier on distingue au centre la lacbe em- bryonnaire qui est elle-même irrégulière. Les noyaux des cellules de l'hypo- blasle et du mésoblnsle sont colorés en rose. C'est l'abondance des noyaux colorés dans la tache embryonnaire qui la rend si distincte au milieu du gastrodisque. Dans l'aire embryonnaire et dans la portion avoisinanle de la région didermique du gastrodisque, les contours des cellules de l'hypo- blaste sont faiblement marqués par le nitrate d'argent. A la périphérie du gastrodisque ces contours n'étaient pas visibles. (Obj. 4 et ch. cl. de Hartnack.) Fig. 8. Portion de la tache embryonnaire et de la région didermique du même blastocyste plus fortement grossie. La taclie se distingue par l'existence d'une couche de petites cellules granuleuses, non délimitées par le nitrate d'argent, entre l'épiblaste et l'hypoblaste. Ces cellules manquent dans la région didermique. Fig. 9. Portion de la périphérie du gastrodisque, A la face interne de l'ectoderme se voient quelques cellules endodermiques aplaties et en partie isolées. Fig. 10 et 1 1. Cellules ectodermiques montrant dans la figure 10 un noyau étran- glé, dans la Ggure \ \ un noyau fragmenté. PL.4NCHE VI. Fig. 1. Coupe à travers la région didermique d'un blastocyste du stade VL (Obj. 8 et ch. cl.) Fig. 2. Coupe de l'aire embryonnaire du même blastocyste, semblable à celui que j'ai figuré pi. V, fig. 7. Préparation à l'acide chromique, coloré par l'héma- toxyline. A l'extérieur se voit la zone pellucide tapissée à sa face interne par trois rangées de cellules. (Obj. 8 et ch, cl.) Fig. 3, Aire embryonnaire du stade Vfl. L'hypoblaste n'a pas été du tout figuré. Seuls les contours des cellules ectodermiques ont été indiqués; leurs noyaux colorés en rose sur la préparation ont été négligés pour ne pas compliquer la figure. Dans l'épiblaste de l'aire embryonnaire on ne trouve plus seulement de grandes cellules plates, mais aussi de petites cellules disposées par groupes. Les unes et les autres sont délimitées par le nitrate d'argent. C'est là l'indication de la transformation des cellules pavimen - teuses en cellules prismatiques, le passage de l'épilhélium plat des stades précédents à l'épithélium prismatique des stades subséquents. Le méso- blasle a été entièrement représenté. Les noyaux des cellules de ce feuillet sont colorés en rose sur le dessin. (Obj. 4 et ch. cl. de Hartnack.) Fig. 4. Stade Vili. L'aire embryonnaire est encore circulaire; on dislingue au milieu une partie éclaircie, à la périphérie un anneau obscur, plus large en arrière, plus rétréci, mais plus foncé en avant. Autour de la tache j'ai représenté la région didermique. Les extrémités des lambeaux de l'étoile membraneuse sont des portions de la région monodermique du blastocyste. (Dessiné au microscope simple avec deux lentilles d'un triplet de Brucke et la chambre claire de Hartnack.) — 2i24 — Fig. 5. Slade IX. La lâche embryonnaire un peu plus longue que large se conslilue de deux parties : d'une région circulaire et d'un croissant. Le bord de la région circulaire est beaucoup plus foncé que son milieu, surtout à l'exlré- milé antérieure de l'embryon. (Dessiné à la chambre claire, au même gros- sissement que la figure 4.) Fig. 6. Cellules eclodermiques d'un embryon de même âge, dessinées d'après le vivant, pour montrer le reticulum proloplasmique : a) vu à la surface exlerne, b) à la coupe optique des cellules. Dans le protoplasme se voient quelques corps bacilliformes. Fig. 7. Idem, d'après une préparation à l'acide osmique colorée par le picrocar- min. Dans les noyaux on distingue une couche corticale plus foncée et plus colorée et un corps médullaire plus clair (Hyaloïde de Eimer). Dans le protoplasme se voient des corps bacilliformes. (Immersion 10 de Harlnack et ch cl.) Fig. 8. Idem, d'après une préparation faite au moyen d'un blaslocysle traité par le liquide de Kleinenberg et coloré par l'hémaloxyline. Dans le noyau on dislingue le corps médullaire clair. La couche corticale est très-tinement granulée et renferme des élémenls nucléoliformes, dont quelques-uns se prolongent en filamenls. Dans le protoplasme un nombre énorme de corps bacilliformes. Les contours des cellules sont irès-faiblement indiqués. (Immersion 10 etch. cl. de Harlnack.) Fig. 9. Cellules de l'endoderme de la région didermique. Les contours des cel- lules ne sont pas visibles. Le reticulum proloplasmique d'une cellule paraît se continuer directement avec celui des cellules voisines. Prépara- lion au nitrate d'argent, colorée par l'hémaloxyline. (Immersion 10 de Ilartnack et ch. cl.) Fig. 10. Idem, dans le voisinage de la tache embryonnaire. Les contours des cel- les sont marqués par le nitrate d'argent. (Immersion 10 et ch. cl.). Fig 11. Coupe transversale de l'aire embryonnaire représentée fig. 5, faite à peu près au niveau de la ligne poinlillée a. Elle intéresse seulement la région circulaire et est constituée de deux couches cellulaires : d'un épiblaste prismatique et d'un hypoblaste pavimenteux. (Obj. 8 el ch. cl.) L'embryon a été durci par le liquide de Kleinenberg, coloré par le picrocarmin, enchâssé dans le blanc de Baleine et les coupes sont moulées dans le baume. Fig 12. Idem. Coupe faite environ au niveau de la ligne b. Elle intéresse sur les côtés les cornes du croissant, au milieu la partie postérieure de la région circulaire. Les parties latérales de la coupe sont formées de trois feuillets cellulaires; au milieu il n'en existe que deux. Fig. 13. Idem. Coupe faite à peu près au niveau de la ligne c. Elle intéresse exclu- sivement le croissant j elle est iridermique dans toute sa largeur. BACILLUS LEPK^. ÉTUDES SUR LA BACTERIE DE LA LEPRE, PAR O. A.R,>IAUEFl HA.TVSEIV, Médecin en chef, inspecteur du service de la Lèpre à Bergen. Je n'eusse pas songé à publier dès à présent mes études sur la Bactérie de la Lèpre, si un médecin suédois, le D' Eklund, auquel je fis il y a un an la démonstration de mes préparations et auquel je communiquai ma manière de voir sur la nature parasitaire de la maladie, n'avait, dans une brochure qui vient de paraître : 0)n Spetelskan, fait connaître la véritable cause de la Lèpre comme ayant été découverte par lui, sous forme de microcoques. D'autre part le D"^ Neisser de Breslau, qui a séjourné quelque temps à Bergen l'été dernier pour étudier la maladie, vient de publier les résultats de ses recherches faites sur des préparations qu'il a emportées avec lui. Il annonce que toutes ses préparations sont remplies de Bactéries, que non-seulement lui-même, mais aussi iV. B. Ce Uavail doli paraluce simultanémeul en allemand, dans les Aixhives de Virchow , en anglais dans le Quarterly Journal de Ray Laiikester, et en fran- çais dans nos Archives. 10 — 226 — le professeur Cohn, dont on connaît la compétence toute spéciale en matière de Bactéries , considèrent comme une espèce particu- lière qui est à leurs yeux la cause de la Lèpre. Dans ces conditions, je me vois forcé de rendre compte des résultats auxquels je suis arrivé dans mes recherches sur le contagium de la Lèpre. Je veux, d'une part, revendiquer mes droits de priorité devant un public scientifique plus nombreux que le public Scandinave, et, d'autre part, faire connaître en détail les recherches que je crus ne pas devoir communiquer à cause de l'incertitude des résultats, lorsque j'envoyai, en 1874,3 la Société de médecine de Christiania, mon rapport et mes études sur l'étio- logie de la Lèpre. Dans ce rapport, j'ai annoncé brièvement que dans les tuber- cules des lépreux j'ai trouvé souvent, et même toujours quand je les cherchais, ^e petits corps ayant la forme de bâtonnets, tan- dis qu'au contraire il me fut toujours impossible de découvrir rien de semblable dans du sang fraîchement soustrait à un malade atteint de cette affection. C'est précisément dans le sang que le D"" Eklund aurait vu les microcoques décrits par lui. J'ai de nou- veau examiné dans ces derniers temps du sang de lépreux, et je dois considérer cette observation comme étant fort sujette à caution. Par contre, j'ai constaté très-souvent que si l'on conserve dans une chambre humide des préparations du sang de lépreux, il y apparaît, après quelques jours, des fdaments articulés que je dois considérer comme une formation développée aux dépens du champignon spécifique de la Lèpre, attendu qu'elle ne se montre jamais dans des préparations du sang de sujets sains ou d'indi- vidus syphilitiques. Après que je me fus occupé longtemps de ces recherches sur le sang, j'en vins à examiner soigneusement les tubercules, et l'on trouvera dans les pages qui suivent une partie des notes que j'ai prises dans le cours de mes recherches. N« 755. Jolis Gil. Tubercules magnifiques. Le 28 février 1873 un tubercule est enlevé au moyen de ciseaux de chacune des ailes du nez et déposé avec précaution dans un verre de montre bien propre. Une coupe est pratiquée à travers le tubercule; pas de ramolh'ssement. La surface de sec- — 227 — lion est raclée au moyen du scalpel et la matière recueillie sur la lame du couteau est déposée et étalée sur un porte-objet et exa- minée sous le couvre-objet, sans l'addition d'aucun liquide. Presque exclusivement des cellules arrondies : quelques-unes renferment des granulations graisseuses , beaucoup sont finement granulées (1), d'autres contiennent des corps en forme de bâton- nets, qui tantôt ont des bords parallèles , tantôt sont effilés à leurs extrémités , et, dans ce dernier cas, leur largeur, à leur milieu , est à peu près double de celle des autres. De semblables petits corps se trouvent aussi à l'état de liberté là où parla pression du couvre-objet se sont formés de petits lacs liquides entourés d'amas plus ou moins considérables de cellules. Dans le sérum qui forme ces petits lacs, ces bâtonnets se meuvent à la façon des Bactéries. D'autres préparations sont faites comme suit : sur un porte-objet, on dépose une goutte d'eau distillée, qui est examinée au préa- lable au moyen de l'immersion n'' 9 de Hartnack; elle ne montre aucune trace d'éléments organisés. Après cela, la surface de section du tubercule est raclée au moyen du couteau, comme il a été dit plus haut, et la matière recueillie est dilacérée dans l'eau. Dans de telles préparations, on observe un nombre incomparable- ment supérieur de ces petits corps qui se meuvent avec beau- coup plus de vivacité. La plupart des cellules gonflent dans l'eau, et dans ces cellules gonflées les petits corps bacilliformes sont beaucoup plus faciles à observer. Quelques-unes en sont vérita- blement bourrées; à première vue, il semble que les cellules sont lemplics de granulations assez volumineuses ; mais si l'on y regarde de près, on voit que ces points qui paraissaient être des granulations sont en réalité de petites tigelles allongées. Plusieurs préparations sont faites d'après chacune de ces méthodes; elles sont placées sur le fond d'un plat de verre, qui lui-même est retourné et déposé dans un vase plus grand, dont le fond est couvert de sable humide ; celui-ci est fermé au moyen d'une (1) J'entends désigner ici les éléments dégénérés, jaunes ou jaunes-bruns que j'ai décrits et figurés dans : « Forelobige Bidrag til Spedalskhedeus karakten- stik,» Nord. Med. Archiv. , Bd. I, n" 13. Les figures ont été reproduites dans « Leprous Diseases of the Eye, by 0. B. Bull and F. A Hansen, » Christiania, 1873. — 228 — plaque de verre. (Deux préparations avec de l'eau; trois autres sans addition de ce liquide.) Le 1*' mars. Pas examiné les préparations. Le 2 mars. L'aspect des préparations est le même que le 29 février. Le 3 mars. Dans l'une des préparations faites avec addition d'eau se voit en un endroit un amas de filaments enchevêtrés, qui sont tout à fait semblables à ceux que l'on trouve après cul- ture dans le sang de beaucoup de lépreux. Le 4 mars. Je trouve des filaments segmentés dans toutes les préparations. Dans l'une des préparations faites sans eau, il n'y a pas de longs filaments, mais seulement des séries de deux ou trois articles tenant ensemble et flottant en partie libre- ment dans le liquide. On les trouve aussi bien aux bords de la préparation que dans les lacs de sérum au milieu de la préparation entre les cellules pressées les unes contre les autres. Dans une préparation se voit en un point une quantité incommensurable de bâtonnets oscillants et un penicillum. Dans deux des prépa- rations faites sans addition d'eau , tout l'espace sous la lamelle à recouvrir n'est pas rempli. Les gouttelettes d'eau qui se sont pré- cipitées dans ces espaces ne montrent aucune trace de Bactéries ni de rien de semblable. Le 7 mars 1873. Kristian Lôtuft. Beaux tubercules qui ont cru dans la dernière année. Un tubercule est enlevé et coupé en deux; une moitié est portée directement dans l'acide osmique à 1 p. 7o; l'autre est utilisée pour préparations fraîches. Le sang qui s'écoule est recueilli dans un verre à montre. Préparation w" 1. Un fragment du tubercule est dilacéré dans du sérum tenant en suspension des globules du sang. Grand nombre de bâtonnets oscillants; de semblables petits corps se voient également dans les cellules. Préparation n" 2. Sérum renfermant des globules rouges; çà et là un globule blanc et quelques rares groupes de granules oscillants. Préparation n** 5. Serum avec de nombreux globules sanguins cl epithelium provenant du bord de la section. Grand nombre de Bactéries. Le tout est placé dans la chambre humide. — 229 — Préparation n° 4. Un fragment du tubercule est dilacéré dans une goutte d'eau distillée. Nombreuses Bactéries ; on en voit d'immobiles dans les cellules. La préparation est fermée au moyen d'iiuile déposée le long des bords du couvre-objet. Préparation n'' 5. Du sérum tenant en suspension des glo- bules sanguins est enfermé d'après le même procédé. Préparation n" 6. Du sérum dans lequel un fragment de tubercule a été dilacéré et dans lequel se voient de nombreuses Bactéries est enfermé au moyen d'buile. Le 8 mars. Rien à remarquer. Le 9 mars. N'' I, Leptothrix (filaments segmentés) en abon- dance; N°2, rien; N" 3, rien ; N° 4, çà et là un fdament segmenté isolé; N" 5, rien; N'' 6, comme n" 4. Le 10 mars. N° 1. Le nombre des filaments ou chaînes a encore augmenté ; N**' 2 et o, rien ; N** 4, comme hier; N®" 5 et 6, comme hier. Le 18 mars. N" 705. Un tubercule de la lèvre inférieure mon- trant un commencement de ramollissement est extirpé. Préparation n" i. Le tubercule est incisé et ensuite comprimé. Le tubercule est succulent; grand nombre d'éléments bruns (1). Nombreuses Bactéries. On parvient aussi à en distinguer dans les cellules qui ne sont pas trop fortement colorées en brun. Dans ces dernières, je crois avoir constaté quelquefois distincte- ment une striation ayant son siège dans la masse d'apparence granuleuse. Préparation tf 2. Idem. Préparation n" 3. Idem avec addition d'eau. Les cellules sont pour la plupart gonflées et montrent clairement de petits corps en forme de bâtonnets en grand nombre. Les grands éléments bruns (1) Voir la noie au bas de la page 227. — Î230 — ne sont pas fori atta(|ucs par Tean; cependant quelques-uns gon- flent légèremenl, et je vois alors, quelquefois assez distinctement, qu'au moins une grande partie de ces éléments qui paraissent être des granulations sont des éléments allongés en forme de bâtonnets. Toutes les préparations soiit portées dans une chambre humide. Malgré l'addition d'acide acétique, toutes les préparations deviennent opaques par coagulation. Par Tacélate de potasse, tous les bâtonnets oscillants sont instantanément tués, au fur et à mesure que le liquide pénètre sous le couvre-objet. Ils deviennent plus réfringents, se ratati- nent et se trouvent à l'état de cadavres dans toute l'étendue de la préparation. Les éléments bruns se contractent énormément et deviennent extraordinairement réfringents; ils prennent l'éclat de la cire. Tout leur contenu est comme pétri. On ne voit pas distincte- ment de bâtonnets, si ce n'est au moment où l'action du réactif commence à se faire sentir. Les petits corps en forme de bâtonnets se voient le plus distinctement dans les cellules après dilacération d'un fragment du tubercule dans l'acide osmique à 1 p. "/o. Le 20 mars. Dans les trois préparations se trouvent, en beaucoup d'endroits, des filaments articulés d'une plus ou moins grande étendue. Ici se voit un filament isolé qui est plu- sieurs fois contourné sur lui-même, ailleurs un tel enchevêtre- ment de filaments qu'il est impossible d'en poursuivre un en particulier. Du tubercule que j'ai placé dans l'acide osmique le 18 mars, après m'en être servi pour faire les préparations indiquées plus haut, j'ai fait aujourd'hui une préparation, qui me montra des corps en forme de bâtonnets dans la plus grande partie des cel- lules. Si je prends une goutte de l'acide réduit dans lequel se trouve le tubercule, je n'y trouve aucun bâtonnet mobile. Si dans cette goutte je dilacêre un petit fragment du tubercule, j'y trouve un grand nombre de bâtonnets mobiles mesurant de 0.0015 à 0.006 mm. ; et si j'appuie sur le couvre-objet jusqu'à ce que la préparation soit presque complètement détruite, elle fourmille de — 251 — bâtonnets mobiles, et il arrive que Ton voit sortir par la déchi- rure produite dans une cellule des bâtonnets isolés. Le 21 mars. La quantité des fdaments dans les diverses pré- parations est à peu près la même qu'hier. Le 1" avril. Oline Biôriiaug. Taches âgées de six semaines, en voie de régression. Une portion d'une tache de l'avant-bras est excisée. Deux coupes faites parallèlement à la surface sont dila- cérées, l'une dans l'eau ordinaire, l'autre dans l'eau salée. Les glomérules des glandes sudoripares sont grands et se laissent facilement isoler. Entre les circonvolutions du tube glandulaire il y a des cellules rondes ; on en trouve çà et là de semblables entre les faisceaux de tissu conjonctif; beaucoup de cellules de (issu conjonctif ont un protoplasme très-granuleux. Dans les deux préparations, se trouvent principalement le long des bords des tubes séparés des glandes sudoripares, des quantités de molé- cules, pâles, arrondies, anguleuses ou allongées animées de mouvements oscillatoires. Il est impossible de décider avec certi- tude si quelques-uns des éléments allongés sont ou non des Bactéries. Dans les cavités de quelques-unes des glandes sudo- ripares se voient de petits corps arrondis ou allongés très-réfrin- gents. La préparation est déposée dans la chambre humide. Je fais aussi une préparation du sang qui s'écoule de la plaie. Le morceau de peau excisé est placé dans l'acide osmique. 5 avril. Dans la préparation du sang, qui s'est en grande partie dessécliée, je trouve de nombreux filaments articulés. Dans les deux autres préparations se voient le long des bords de la lame à recouvrir de grandes Bactéries se mouvant active- ment; pas de filaments segmentés. 4 avril. La préparation du sang s'est complètement dessé- chée. Les deux autres comme hier; cependant les Bactéries sont moins actives. 7 avril. La préparation à l'eau est desséchée. Dans la prépara- tion à l'eau salée, le tissu conjonctif et les cellules sont restés inal- térés; pas de Bactéries à découvrir; par contre^, on trouve en grand nombre de petits bâtonnets segmentés très-réfringents, composés de deux à cinq articles ; ils sont immobiles. — 25iì — i7 avril. Krislian Lòtuft. Une préparation faite aux dépens d'un tubercule de la joue montre principalement du sang mêlé à quelques cellules du tubercule, les unes plus grandes, les autres plus petites; on ne peut découvrir aucune Bactérie libre. 18 avril. Les globules rouges sont un peu ratatinés; par contre les cellules restées à peu près normales ont seulement un peu pâli. 20 avril. Les cellules sont très-pàles et un peu rétractées ; çà et là une hydropique. Aucune ne montre de Bactéries; le contenu des cellules plus grandes et légèrement brunâtres n'a pas changé: on ne peut rien y distinguer de plus que le premier jour; on y voit des granules et peut-être des bâtonnets. 22 avril. Des chaînes en beaucoup d'endroits; mais la prépa- ration est sujette à caution : de l'eau a pénétré à un endroit sous le couvre-objet. Anne Sakingslad morte le 10 mars, Obd. 11 mars 1875. Quelques tubercules ratatinés de la face ont été examinés. Il s'y trouvait des éléments secs, bruns, de grande dimension, quelques- uns étaient cxtraordinairement grands, au point d'être visibles à l'œil nu. Dans des préparations microscopiques, on trouve partout des bâtonnets mobiles, et en ajoutant de la potasse, on parvient à voir dans plusieurs des grands éléments bruns, des traits allongés entre des particules, qui paraissent être des granulations. Les éléments bruns adhèrent fortement au verre. Si on soulève le couvre-objet pour le laisser retomber ensuite et le déplacer encore on observe en plusieurs endroits des fragments aplatis, des éléments bruns , qui restent accolés à la lamelle à recouvrir. Ces fragments se montrent constitués de petits corps en forme de bâtonnets, qui se croisent dans toutes les directions. 17 mars. Dans aucune des préparations conservées dans la chambre humide il ne s'est développé de filaments segmentés. 21 mars. Kristian Lòtuft. Eruption assez violente sur tout le corps. Dans deux tubercules nouvellement formés au bras , des piqûres sont faites au moyen d'aiguilles; par pression on déter- mine l'expulsion d'une goutte liquide qui a l'apparence du pus. — 255 — La goiUlelcttc iccueillic sur couvre-objet et développée sur porte- objet est continue, visqueuse, et si même on presse le liquide, ne sort pas le long des bords de la lamelle. Après addition d>au dislillée, quelques cellules seulement deviennent libres sur les bords de la préparation, même après que le couvre-objet a été à diverses reprises soulevé et remis en place; il ressort aussi de lexamen microscopique que la prépara- tion contient quelques vaisseaux sanguins. Après addition d'eau, rien de remarquable ne se produit tant que le couvre-objet n'a pas été déplacé; mais vient-on à faire glisser la lamelle de côté et d'autre, de façon à répandre età faire flotter dans l'eau la sub- '^ stance organique recueillie, aussitôt Ion voit apparaître un nombre considérable de bâtonnets mobiles de différentes dimen- sions. Deux préparations semblables, l'une avec de l'eau, l'autre sans eau, sont déposées dans la cbambre bumidcen même temps qu'une préparation du sang dans laquelle aucune Bactérie ne put être découverte à l'examen au n° 11 de Hartnack, et enfin deux autres préparations de tubercules, sans addition d'eau. Le 25 mars. Dans aucune des préparations on ne peut décou- vrir de filaments segmentés; les préparations faites sans addition d'eau ont tout à fait aujourd'hui l'aspect qu'elles avaient quand elle étaient fraîches. Le 24 mars. Idem. Le 25 mars. Idem. Le 28 mars. Pas encore de champignons. La préparation sans eau s'est remarquablement conservée; les cellules ont complète- ment l'aspect des préparations fraîches. La préparation contenant du sérum est desséchée le long des bords de la lamelle, de sorte que de l'eau ne peut pas s'introduire. Les 29, 50 et 51 mars. A cause d'autres occupations, je n'ai pu examiner les préparations. Le 1" avril. Dans la préparation du sang, en grande partie desséchée, rien. Dans les deux autres des champignons. La pré- paration sans eau mérite une attention spéciale. Au milieu de la préparation , où les cellules sont si bien conservées qu'elles paraissent absolument fraîches, se voient en quatre endroits dif- férents de grandes quantités de champignons dont les filaments — 254 — oui une apparence finement granuleuse; du bord de ces amas sortent des filaments segmentés très-fins, dont les articles mesu- rent 0.0006 à 0.0007 mm. La couleur ressemble, à s'y tromper, à celle des éléments bruns et il en est de même de l'apparence granuleuse (fig. 6). Le 4 avril. La préparation est toujours comme le i^^ avril. Les amas de cbampignons n'ont pas grandi. Un élément brun d'assez grande dimension, fendu d'un côté, est resté sans subir aucune modification pendant ces trois jours. Sa position est exac- tement notée, afin de pouvoir constater s'il en sortira des filaments segmentés. Au bord dessécbé de la préparation un cbampignon qui a pénétré de l'extérieur forme un riche réseau de filaments avec fructifications par division des extrémités. Le 7 avril. Les amas de champignons aux bords et au milieu de la préparation n'ont pas changé. Les bords du couvre-objel sont nettoyés; puis de l'alcool et de l'élher sont déposés sur le bord de la préparation ; ces liquides pénètrent lentement , grâce à des soulèvements répétés du couvre-objet. Par là les amas de champignons se divisent en portions globuleuses , et peu à peu celles-ci prennent sous l'influence de Téther le même aspect que les éléments bruns, c'est-à-dire que les granules et les bâtonnets sont comme pétris ensemble en une masse ayant l'éclat de la cire. Jobs Gil. Le 8 avril. Extirpation de deux tubercules du nez avec épi- derme intact. Préparation n° Ì . Une masse cellulaire enlevée en raclant la sur- face de section au moyen du couteau est placée dans le sérum sanguin; quelques Bactéries, sur la nature desquelles il ne peut y avoir de doutes, se meuvent lentement dans le liquide. N" 2. Une incision est faite dans un tubercule; au moyen d'un tube de verre nouvellement étiré, de petits fragments de la masse cellulaire sont détachés et aspirés. Il s'y trouve beaucoup de globules sanguins. Ici aussi il y a des Bactéries. N'' 3. Dans une seconde préparation faite d'après le même procédé indiqué au n° 2, il y a peu de globules sanguins. N" 4. Idem, mêlé à une quantité égale d'eau. Incomparable- ment plus de Bactéries. Dans les cellules gonflées, on trouve çà ~ 235 — et là de petits corps en forme de bâtonnets. Dans une masse cellulaire plusieurs éléments bnms; pas d éléments semblables en liberté. N" 5. Dans du sérum sanguinolent recueilli dans un verre de montre se voit cà et là un globule blanc. Une préparation faite par dilacé ration dans l'acide osmique montre beaucoup de cellules qui renferment des bâtonnets allongés. Le 10 avril. Les n*** 1, 2 et 3 ne manifestent aucun change- ment, si ce n'est que là où Ton peut découvrir des tigelles allon- gées, celles-ci sont immobiles. Dans le n" 4 se voient beaucoup de cellules gonflées par l'eau renfermant plus ou moins de granules, les uns plus gros, les autres plus petits, qui montrent des mouvements moléculaires oscillatoires (in tanzender Molecularbewegung) . Dans quelques cellules on découvre, entre les granulations en mouvement, un bâtonnet se mouvant lentement, et en apparence indépendam- ment des mouvements des granules. Dans d'autres cellules, il n'y a pas de granules; mais par contre on y voit plusieurs bâtonnets, parmi lesquels un ou deux se meuvent lentement. Dans le rf 5 aucun changement, si ce n'est que les corpus- cul.çs du sang sont plus contractés. Le 1 1 avril. Les préparations n'ont pas subi de change- ments. 12 avril. Idem; seulement les cellules n'ont plus nulle part l'as- pect de cellules inaltérées comme précédemment. Dans un grand nombre d'entre elles on voit maintenant les petits bâtonnets. 14 avril. Dans les n"' 1 et 3, les cellules sont encore bien con- servées; les noyaux se montrent plus brillants qu'auparavant; ils sont aussi plus homogènes. Dans les amas cellulaires on trouve à plusieurs endroits comme un voile répandu sur la préparation; ce voile parait être déterminé par une masse finement ponctuée et par de petits bâtonnets qui se croisent dans toutes les direc- tions. N** 2. Dans un grand îlot de sérum se voient deux petites chaînes de monades. N** 3. En un endroit, se trouve une grande niasse granuleuse, — 256 — bien délimitée, qui sur ses bords parait être constituée par un enchevêtrement de chaînes de monades. N*' 4. Quelques cellules seulement sont conservées. Le long d'un des bords de la préparation, quantité énorme de Bactéries. Au milieu de la préparation, en plusieurs cndioits, quantité de tigelles immobiles accumulées; il est difficile ici de décider ce que sont ces éléments, car en plusieurs points de la prépara- tion il y a de petits amas de cristaux formés par des acides gras. Cependant les autres ne sont pas de beaucoup aussi réfringents que ces derniers et ils ne sont pas non plus comme ces derniers régulièrement ordonnés en éventails ou en étoiles. 18 avril. N° 1 à 5. Les cellules en grande partie désagrégées sont le mieux conservées dans le n'' 3. L'amas finement granuleux formé de champignons n'a pas grandi; il se colore en brun noir par l'acide osmique comme les éléments bruns. Dans les n"' 1 et 2 il n'a pas paru de chaînes de monades. 20 avril. Dans 1 et 2 les cellules continuent à se désagréger et se confondent en une masse dans laquelle elles ne peuvent plus être distinguées. ]\° 2 s'est mieux conservé; toujours aucune chaîne. Dans le n'' 4, au bord de la préparation, de grands amas de Zooglae se sont développés aux dépens des Bactéries auxquelles se mêlent aussi quelques filaments de pénicillium, de sorte que les Bactâi'ies doivent être considérées comme ayant au moins en partie péné- tré de l'extérieur. Cependant la zone qui contient les Bactéries n'est pas plus étendue dans la préparation que précédemment. 21 avril. Dans 1 et 2 en plusieurs endroits, au milieu de la préparation, se voient des amas de Zooglœ. 24 mars 1873. Rakel Espeland. Éruption. Piqûre dans un tubercule ombiliqué qui pendant leruption est devenu doulou- reux. Du sang et un contenu blanchâtre sont éliminés et servent à faire deux préparations. Dans chacune d'elles se tiouvent des éléments bruns gigantesques, mais pas de Bactéries. De l'eau est ajoutée à Tune des préparations. Aussi longtemps que l'eau pénètre lentement sous le couvre-objet resié immobile, aucune Bactérie ne se montre; mais une grande partie des cellules gon- flent. Par soulèvements et abaissements alternatifs du couvre- — 237 — objet et par son déplacement en sens divers, un grand nombre de cellules sont déchirées et aussitôt des Bactéries assez nombreuses se montrent dans le liquide. Le 2o mars. Les préparations n'ont pas changé. Le 27 mars. Dans la préparation additionnée d'eau, grand nombre de filaments segmentés; l'un d'eux est surtout remar- quable en ce qu'il part d'un élément brun. La continuité est con- statée en faisant mouvoir le couvre-objet. L'élément brun et le fdament segmenté y attenant restent unis dans toutes les positions qu'ils prennent successivement l'un vis-à-vis de l'autre. Le 18 avril. Rakel Espeland. A la suite d'une piqûre pratiquée dans un tubercule frontal , le contenu du tubercule est expulsé par pression. Ce contenu assez compacte est dilacéré au moyen d'aiguilles. Une préparation est faite avec addition d'eau salée ; une autre avec de l'eau distillée. Dans toutes deux, grande quantité de Bactéries; toutes les cellules sont grandes. Dans la préparation à l'eau pure, des Bactéries se voient dans presque toutes les cellules. La plupart se meuvent activement. La position des Bactéries dans les cellules peut être démontrée de la façon la plus claire si Ton fait rouler les cellules dans le liquide delà préparation. Dans la plupart des cellules, on ne voit aucune granulation; mais là où il en existe, elles dansent avec une vitesse, notablement supérieure à celle des Bactéries, qui, elles, se meuvent d'un mouvement grave et lent. Le 20 avril. Dans la préparation aqueuse, beaucoup de Bacté- ries divisées en 5, 4 et jusqu'à 8 articles. Dans la préparation à l'eau salée les cellules sont assez ratatinées ; par addition d'eau un grand nombre d'entre elles se dissolvent; le protoplasme s'en écoule en fragments plus ou moins considérables mêlés à un grand nombre de petits bâtonnets. Le 22 avril. Dans les deux préparations, de grands amas de Zooglœ. Le 10 avril 1875. Ivar Sôreide. De la joue du malade, du sang est recueilli à (rois reprises dans des tubes capillaires recourbés en double V et fraîchement étirés. — 258 — Ceux-ci furent scellés à la lampe à une de leurs extrémités el suspendus dans la chambre sur une corde. Le 20 avril. Le sang examiné se montre coagulé dans les trois tubes. Il est difficile de l'enlever. Les globules du sang ont une très-bonne apparence; les corpuscules rouges sont pour la plu- part sphériques; les leucocytes sont réunis en amas. Dans l'un des tubes il se trouvait en un point un amas de Zooglae; dans les deux autres je ne pus rien trouver. Chacun admettra volontiers, en prenant connaissance de celles de mes recherches de 1875 dont je viens de donner communica- tion, que j'étais bien fondé à admettre que dans les produits lépreux se montrent des Bactéries; mais aussi que, me basant exclusivement sur ces recherches, je ne pouvais me hasarder à émettre qu'une présomption en cette matière. Je ne pouvais que présumer que ces Bactéries sont le véritable poison qui, introduit dans l'organisme, détermine la maladie. Dans l'espoir d'acquérir un point d'appui pour la solution de cette dernière question, j'ai essayé de produire la Lèpre chez des Lapins, en introduisant sous la peau de ces animaux des produits lépreux, particulièrement des tubercules. Aucun de ces essais ne réussit, ce qui, cela va de soi, ne démontre rien contre l'adoption de l'idée d'après laquelle les Bactéries seraient véritablement lecontagium. Je n'ai pas repris depuis ces recherches. J'ai seulement, en fai- sant çà et là l'examen de tubercules, conservé la conviction que mes observations concernant la présence des bâtonnets mobiles dans ces produits étaient exactes. Au printemps dernier, je pris coimaissance du travail du D' Koch intitulé : « Untersuchungen ùber die vEthiologie der Wund krankheiten » et j'eus l'occasion d'examiner quelques préparations faites par le D''Koch des Bacté- ridies du sang de rate et de juger de l'excellence de sa méthode pour déceler la présence des Bactéries. J'ai repris mes recher- ches cet été dans l'espoir de constater la nature bactéridienne des petits corps en forme de bâtonnets par l'emploi de l'excellente méthode du D' Koch et de vérifier s'ils se rencontrent partout où se présentent des manifestations de la lèpre. Jusqu'ici j'ai tenté en vain de faire des préparations bien — 239 — démonslratives; dans un cas seulement je crois avoir obtenu une préparation qui ne laisse rien à désirer. Conduit par les observations consignées plus haut, d où il résulte que les corps en forme de bàtonnels se montrent beaucoup plus clairement quand le tubercule a été traité par l'acide osmique, j'ai placé dans cet acide un tubercule que je venais d'extirper et j'ai obtenu de celui-ci des coupes que j'ai colorées au moyen du violet de methyl. Les éléments bruns qui ressortent clairement au milieu des tissus ambiants, lors même qu'on ne colore pas, apparaissent maintenant comme des masses teintes en violet qui, à un examen attentif au moyen de l'immersion homogène 7^2 de C. Zeiss, semblent en partie finement granulées, en partie formées de petits bâtonnets (i). Dans cette préparation, j'ai trouvé la confirmation de mes présomptions antérieures, d'après lesquelles les grands éléments bruns ne seraient en réalité autre chose que des amas de Zooglae ou des agglomérations de Bactéries renfermées dans des cellules. En examinant la figure 4, qui a été dessinée d'après les prépa- rations de 1873 et qui représente une cellule de tubercule traitée par l'acide osmique, on pourra se représenter facilement com- ment ces cellules, par suite d'un accroissement continu des petits bâtonnets, finissent par se remplir complètement de ces éléments et acquièrent alors l'apparence de la figure?. Elles paraîtront rem- plies d'une substance finement granuleuse si les bâtonnets isolés cessent d'être bien distincts à raison même de leur accumulation. Déjà dans ma première publication « Forelòbige Bicìrag til spe- dalskheclens Karasteristik » Nord. Med. Archiv., Bd. I, n" 13, j'ai avancé que j'étais disposé à considérer ces éléments bruns comme caractéristiques des productions lépreuses à cause de leur apparence toute particulière, et parce qu'on observe constamment (1) La cause pour laquelle les autres préparations n'ont pas réussi, je dois l'al- iribuer, si je m'en rapporte à une lettre du D»- Koch. auquel j'avais écrit pour lui demander conseil, ou bien à la mauvaise qualité de la matière colorante dont jai fait usage, ou bien à la circonstance que je n'ai pas coloré assez énergiquemeiit. Le D»- Koch me rapporte que le D»- Neisser a commis la même erreur , de sorte que, si plus tard celui-ci a été plus heureux, ft s'il a obt(^nu de meilleures prépa- rations, il doit son succès à l'expérience consommée et aux conseils du D»* Koch — 240 — ces éléments à tous les endroits atteints de la Lèpre. Si l'opinion que j'ai émise sur la véritable nature des éléments bruns se vérilie dans l'avenir, la spécificité de ces éléments serait dès lors com- plètement démontrée; il ne resterait plus qu'à connaître les condi- tions d'existence de ces Bactéries et d'établir par des recherches ultérieures leur transmissibilité, pour soulever les derniers doutes qui pourraient exister encore sur la véritable cause de la maladie. Contribuer à atteindre ce résultat, tel est le but de ce travail comme de ceux qui l'ont précédé. Bergen, octobre 1819: Ces pages étaient déjà écrites quand j'ai réussi, en suivant les conseils du D'" Koch et en colorant plus fortement, à obtenir des Bactéries bien colorées, même dans des coupes provenant de tubercules durcis dans l'alcool absolu. On les trouve partout dans les coupes, tantôt isolées, plus souvent réunies en amas, ce qui concorde avec le fait de leur présence dans les cellules. J'ai ajouté à ma planche deux figures d'amas semblables dessinés au moyen de l'immersion homogène '/^2 de Zeiss, uni à l'oculaire 4. EXPLICATION DES FIGURES. Fig. 1, 2 el 3. Cellules de tubercules cutanés avec des corpuscules en forme de bâtonnets, observées sur le frais et dessinées d'après l'objectif n" VIII de Gundlach. Fig. 4. Mêmes cellules traitées par l'acide osmique. Gundlach, n° Vili. Fig. 5. Un élément brun avec un filament segmenté y attenant, du 27 mars 1873 après trois jours de culture. Fig. 6. Bord de Tamas de champignons de la préparation du 1" avril 1873. Fig. 7. Deux amas de bâtonnets d'un tubercule traité par l'acide osmique et coloré au moyen du violet de methyl. Fig. 8. Deux groupes de bâtonnets trouvés dans une coupe faite à travers un tubercule traité par l'alcool absolu et coloré par le violet de methyl. TABLE DES MATIERES DU i*^^ FASCICULE. Paafs. Physiologie des muscles el des nerfs du Homard, par MM. Frkdericq et G. Vandevelde \ Premières phases du développement du placenta maternel chez le Lapin, par MM. Masqueltn et A. Swaen 25 Sur la structure de la Glande de Harder du Canard domestique , par M. Jules Mac Leod (pi. I}. 4-5 Note sur le Squelette cartilagineux de la Glande de Harder du Mou- ton, par le Même . 57 Un mot sur l'Irradiation , par M. J. Plateau (H Nouvelles communications sur la cellule cartilagineuse vivante, par M. W. Schleicher 65 Recherches sur Tossification du Maxillaire inférieur et sur la consti- tution du système dentaire chez le Fœtus de la Balœnoptera ros- trata, par M. Charles Julin (pi. H et HI) , 75 Recherches sur Tembryologie des mammifèises. — La formation des feuillets chez le Lapin, par M. Edouard Van Beneden (pi. IV, Vet VI). ^>So '^/ Bacillus Leprœ. — Étude sur la Bactérie de la Lèpre, par M. Ar- mauer Hansen (pi. VH) 225 liCS auteiirjii receyrout gratiiitemeut 40 tirés à part de leiirN travaux. CONDITIONS DE LA SOUSCRIPTION : Les Archives de Biolog^ie paraîtront par livraisons trimestrielles et formeront à la fin de l'année un vo- lume in-8^, d'environ 600 pages, accompagné de 20 à 25 planches. Le prix de la souscription d'un volume complet est fixé à 30 francs; les livraisons séparées se vendent » francs, affranchissement compris, dans tous les pays de l'Union postale. u ARCHIVES DE PUBLIEES PAU Edouard VAN BENEDEN , PhOFESSEl K A LL.MVi: USITÉ DE LIÈGE, et Charles VAN BAMBEKE, Tome ï. — Fascicule lï. 6AND à LEIPZIG, Librairie GLEMM H. ENCiKLCKE, Suev PARIS, G. MASSON, éditeur 120, lioulrvai'd S'-Ormuiu. 1880. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA STRUCTURE DE L'OVAIRE DES MAMMIFERES. (TAUPE, HERMINE, VESPERUGO PIPISTRELLA, ETC.), PAR M. Jules MAC LEOD, Docteur eo sciences naturelles, préparateur à rUoirersité de Gand. TRAVAIL DU LABORATOIRE D'HISTOLOGIE DE L'UNIVERSITÉ DE GAND. La structure et le développement des glandes génitales des vertébrés, et en particulier de l'ovaire, est certainement un des chapitres de l'histologie qui a fait l'objet du phis grand nombre de travaux. Cependant presque toutes les recherches faites jusqu'ici ont été exécutées chez un fort petit nombre d'animaux. C'est ainsi que l'ovaire a été étudié à plusieurs reprises chez l'homme, le chien, le chat, le lapin, la vache, le cochon d'Inde, moins souvent chez le mouton, le porc, le rat, une seule fois chez le cheval; au total chez peut-être dix ou douze espèces. Quant à l'ovaire des autres mammifères, on trouve par-ci par-là quelques indications incomplètes, quelques observations isolées. 47 — :2/i>i - Déjà, parmi les quelques formes étudiées jusqu'ici, on constate des différences assez notables. C'est ainsi qu'on observe des écarts de structure des plus marqués entre l'ovaire de la femme, de la jument, celui de la cbienne, de la lapine. Il résulte de là qu'on peut espérer à juste titre trouver plus d'une particularité intéres- sante en étudiant l'ovaire chez d'autres types. C'est ce que nous avons essayé de faire, mais nous nous sommes trouvé en présence de deux difficultés. La première est celle de se procurer les matériaux nécessaires; en effet, ce sont précisément les animaux les plus faciles à trouver qui ont été surtout étudiés sous le rapport qui nous occupe. Ensuite, pour l'interprétation de certaines particularités, telles que celles que présente l'ovaire de la Taupe, il est indispensable de recourir à l'étude embryogénique, et encore une fois, le man- que de matériaux nous a mis dans Timpossibilité d'accomplir cette élude. Quoi qu'il en soit, nous croyons pouvoir publier dès aujour- d'hui les résultats obtenus, quelque incomplets qu'ils soient. Nous n'en continuons pas moins notre travail, que nous espé- rons pouvoir compléter dans le courant de l'été prochain. Les mammifères chez qui nous avons pu étudier l'ovaire sont l'Hermine, une espèce de Chauve-Souris [Vesperugo pipis irella) et la Taupe (i). Quoique nos observations aient surtout porté sur la structure histologique de l'ovaire, nous nous sommes également occupé des rapports de cet organe avec les membranes séreuses et l'ovi- ducte. Technique, Voici quelles sont les principales méthodes que nous avons suivies pour faire l'étude de l'ovaire. La glande génitale, enlevée après une dissection sommaire, est placée avec tous les organes qui l'environnent (corne de l'utérus, oviducte, etc.) sur une lame, et humectée de quelques (1) Nous avons déjà publié, concernant les résultats obtenus chez ce dernier animal, une communication préliminaire dans les Bulletins de la Société de Mé- decine de Gand (novembre 1879). — 245 — gouttes (le liquide (liqueur de Mùller, alcool, etc.). La pièce ainsi préparée est disséquée d'une manière plus soigneuse sous le microscope simple (il s'agissait toujours d'objets relativement petits) et dessinée. Alors elle est durcie par un des procédés suivants : Liqueur de Miiller et alcool absolu; Bichromate de potassium (1 p. %) et alcool absolu; Acide osmique (0,5 p. 7") et alcool absolu; Alcool. La première de ces méthodes est celle qui nous a donné les meilleurs résultats. L'acide osmique nous a cependant semblé préférable pour l'étude de l'épithélium ovarique. La pièce durcie est fixée dans une masse encastrante, et le tout placé dans le tube d'un petit microtome à main. Pour les objets très petits, tel que l'ovaire de la Vesperugo pipistrella^ qui ne mesure guère que de 1,5 à 2 millimètres de diamètre, nous avons employé la méthode au collodion. Une goutte de collodion est déposée sur la face plane d'un morceau de moelle de sureau ; la pièce placée sur celte goutte de collodion est recouverte d'une deuxième goutte de liquide, et un deuxième fragment de moelle de sureau lui est superposé. Quand la masse encastrante est solidifiée, les deux fragments de moelle et la pièce qui leur est interposée sont sufîisamment assujetties. Les coupes se font encore une fois au microtome. Pendant le cours de ces recherches, nous n'avons cessé d'être guidé et encouragé par notre maître, M. le professeur Van Bam- beke; qu'il nous soit permis de lui adresser ici à ce sujet nos plus sincères remercîments. Qu'il nous soit permis de remercier également M. Ranvier, professeur au collège de France, qui a bien voulu nous permet- tre d'exécuter une partie de nos recherches à son laboratoire, où nous avons eu plus d'une fois l'occasion d'apprécier ses conseils éclairés. M. le professeur Plateau, ainsi que M. R. Moniez, préparateur à la faculté de Lille, ont eu l'obligeance de nous faire don de — 2i4 -- plusieurs pièces intéressantes : qu'ils veuillent bien agréer ici Texpression de notre plus vive reconnaissance. Sommaire. Chapitre premier : Étude des rapports de l'ovaire avec l'ovi- ducte et les membranes séreuses. Albuginée de Povaire. Chapitre II : Structure générale de l'ovaire a. Ovaire de la Taupe. b. Ovaire de l'Hermine. c. Ovaire de la Vesper tiigo pipistrella. Chapitre III. Structure intime des diverses parties de l'ovaire. a. Epithelium ovarique. 6. Follicules de Graaf. c. Stroma ovarique : cellules du stroma ou cellules intersti- tielles. cl. Cordons médullaires. CHAPITRE PREMIER. Les rapports de l'ovaire avec les organes voisins sont déjà connus d'une manière assez complète chez les diverses formes de mammifères. Cependant la plupart des travaux concernant celte partie de l'anatomie comparée, tels que ceux de Weber (') (1), de Meyer- stein (2), de Treviranus (3), de Waldeyer (4), et d'autres (que l'on trouve résumés dans le traité d'anatomie comparée de Owen (5) et dans l'ouvrage de Waldeyer) (4) n'ayant pas été exécutés par la méthode si avantageuse des coupes transparentes, C) Les numéros placés entre parenthèses à la suite des noms d'auteurs ren- voient à une liste placée à la fin du travail. — 245 — nous croyons pouvoir exposer ici les résultats que nous a donnés celte méthode. Chez la plupart des mammifères, les rapports entre Tovaire, Toviducte et le ligament large sont beaucoup plus étroits que chez rhomme. Tandis que chez ce dernier l'ovaire est simplement placé dans une très légère dépression du ligament large, chez un grand nombre d'animaux cette dépression devient beaucoup plus impor- tante : tel est, par exemple, le cas chez la vache (Waldeyer) ; la portion du ligament large située entre l'oviducte et l'ovaire se réfléchit partiellement au-dessus de ce dernier et en avant, de manière à constituer une capsule ovarique incomplète. Ailleurs, cette capsule se ferme presque entièrement: tel est, par exemple, le cas chez la chienne, où il ne se conserve qu'un petit orifice tourné du côté de l'utérus (Owen). Ici la réflexion est presque complète, et la portion réflé- chie s'est soudée par presque toute l'étendue de son bord au ligament large, en dessous de Tovaire. Chez d'autres animaux encore, tels que beaucoup de carnassiers [Phoca, Lutra, Mus- tela, Ursus, d'après Weber), (1) cette capsule est entièrement close, et l'orifice de l'oviducte débouche dans son intérieur. Ici la soudure de la portion réfléchie s'est complétée. Tel est aussi le cas chez les quatre formes que nous avons examinées: la Taupe, THermine, la Vesperiigo pipistrella^ et une espèce de musaraigne. Chez I'Hermine nous trouvons comme chez les carnassiers cités plus haut, une capsule ovarique complète, entièrement close, à l'intérieur de laquelle débouche l'orifice terminal de l'ovi- ducte. La figure 18 représente une coupe verticale, antéropos- térieure de cette capsule avec l'ovaire qui y est contenu. L'ovi- ducte contenu dans l'épaisseur de la capsule c décrit une circon- volution et demie autour de l'ovaire : on voit en b les sections de ses diverses branches. Remarquons qu'ici, comme c'est pres- que toujours le cas, le rapport entre le ligament large et l'ovaire se trouve restreint au bile de ce dernier, tout le reste de sa sur- face étant recouvert d'un epithelium à caractères propres, l'épi- — 246 — Ihélium ovariquc de Waldeyer. Chez les deux animaux suivants, le contact entre la membrane séreuse et l'ovaire est beaucoup plus étroit. Chez la Vesperugo pipistrellâ nous trouvons encore une fois une disposition semblable, mais cependant différente par un point important : en effet uneportiondu ligament large recouvre intimement une partie de la surface de l'ovaire (fig. 14-15). En comparant les deux figures citées, on voit que cette disposition varie suivant les individus; la position de la surface de l'ovaire tapissée par la séreuse est sujette à varier dans une certaine mesure; mais la partie médullaire de l'organe est toujours re- couverte de cette manière; la surface du reste de l'ovaire (portion parenchymateuse) possédant seul un epithelium ovarique. F^e pavillon de la trompe se trouve à l'intérieur de la capsule ovarique. La figure 15 représente une coupe faite au niveau du pavillon : on voit la section des franges, et l'on peut constater que l'une d'elles (correspondant à la fimbria ovarica de la femme) est en relation avec l'ovaire. Chez la Taupe nous trouvons encore une disposition semblable aux précédentes; mais ici (fig. 4-5-6) la majeure partie de la surface de l'ovaire est tapissée par le feuillet séreux ; une portion relativement restreinte est recouverte par l'épithélium ovarique. Cette dernière est encore une fois la partie parenchymateuse, la première la portion médullaire. Albuginée de l'ovaire. On a donné le nom d'albuginée de l'ovaire à la portion périphérique du stroma, qui est généralement condensée près de la surface. Chez la Chauve-Souris et la Taupe nous n'avons jamais rien trouvé de semblable. Chez l'Hermine, au contraire, nous trouvons celle couche excessivement développée. D'après certains auteurs, notamment Owen^ la capsule ova- rique représenterait autour de la glande génitale femelle l'albu- ginée du testicule. La particularité que nous avons signalée chez la Taupe et la Chauve-Souris, qui consiste en ce que la capsule est intimement appliquée à la surface de l'ovaire, rend l'analogie avec l'albugi- née du testicule plus évidente encore. Nous reviendrons d'ail- leurs sur ce point. — 247 — CHAPITRE DEUXIÈME. STRUCTURE GÉNÉRALE DE l'oVAIRE. La plupart des auteurs modernes décrivent l'ovaire des mam- mifères comme formé de deux parties principales plus ou moins nettement délimitées : 1° Une couche externe, relativement pauvre en vaisseaux sanguins, renfermant les follicules de Graaf, et recouverte exté- rieurement par l'épithélium ovarique : c'est la couche ou zone parenchymateiise ou corticale. 2° Une portion centrale, excessivement vasculaire, ne renfer- mant pas de follicules de Graaf : c'est la zone médullaire ou vasculaire. La limite entre ces deux zones n'est pas nettement marquée : souvent des follicules de Graaf, refoulés par leur propre accrois- sement ou celui de leurs voisins, pénètrent en partie dans la couche médullaire. Rappelons encore que généralement la zone parenchymateuse recouvre à peu près en entier la couche médullaire, sauf au niveau d'une portion restreinte, par où se font l'entrée et la sortie des vaisseaux et des nerfs. Chez les animaux que nous avons examinés, surtout chez la Chauve-Souris et la Taupe, l'ovaire s'écarte notablement sous divers rapports de cette structure générale. Les différences les plus dignes d'être signalées portent aussi bien sur la disposition relative des portions médullaire et paren- chymateuse que sur le revêtement de la surface. Nous ne par- lons pas ici des particularités de la structure intime, auxquelles nous consacrerons un chapitre spécial. Ovaire de la Taupe. — Chez cet animal, la limite entre les deux portions de l'ovaire est remarquablement distincte; mais la zone parenchymateuse, au lieu d'envelopper la portion médul- laire, lui est, au conivàire^ juxtaposée, comme le montrent les figures 4, 5, 6. Elle est tournée du côté de l'utérus, la portion médullaire étant tournée du côté opposé. Un très léger sillon — 248 — indique, à la surface de l'organe, la séparation de ces deux por- tions qui se distinguent en outre par une différence de teinte (fig. 1,2,3). L'ovaire de la Taupe a déjà été examiné par plusieurs auteurs. Treviranus et Leydig (7) ont décrit l'ovaire de cet animal comme formé de deux parties : l'une blanchâtre, interne, l'autre rosée, externe. Leydig ajoute que cette division en deux régions n'existe pas à toutes les époques de l'année; ainsi il ne l'aurait pas trouvée chez une Taupe sacrifiée au mois de juin. Nous verrons plus loin que l'ovaire de l'animal qui nous occupe, présente des différences d'aspect et de structure d'après les saisons; la disposition en question existe toujours, mais il est parfois très difficile de la constater sur un ovaire dans son entier. Wagner (8) considère l'une des deux régions de l'ovaire de la Taupe (l'externe) comme constituée par un corps jaune. L'exa- men extérieur pourrait faire croire à une semblable disposition, mais la structure histologique démontre clairement qu'il n'en est pas ainsi. L'ovaire de la Taupe présentant des variations de structure et d'aspect extérieur des plus notables suivant les diverses époques de l'année, nous décrirons successivement les trois états principaux que nous avons observés : i° Chez une Taupe prise le 18 juin 1879 (fig. 1), l'ovaire est ovoïde, un peu pyriforme, sa plus grosse extrémité étant tournée du côté extérieur; son grand axe est transversal, et mesure de 4 à 5 millimètres. A l'extérieur, on observe parfaitement la dis- position signalée par Leydig. La portion externe, qui est de beaucoup la plus considérable, est d'un rose pâle; l'interne, beaucoup plus petite, est blanche, très légèrement rosée; h limite entre ces deu xportions est très nette, marquée par un léger sillon (voir fig. 1). Une section montre que la portion interne blanche, renferme seule des follicules de Graaf (fig. 4) ; et (quoique l'individu qui a servi à cette observation semblât parfaitement adulte) ce sont presque tous des follicules primordiaux, c'est-à-dire formés d'un — Mi) — ovule entouré de quelques cellules épithéliales, placées sur une couche. Par-ci par-là on trouve cependant un follicule un peu plus avancé, fornié d'un ovule entouré d'une double couche de cellules épithéliales. Cet ovaire présente donc l'aspect général d'un ovaire de mammifère nouveau-né. La partie rose de l'ovaire ne renferme, au contraire, aucun ovule; il est formé d'un stroma très vasculaire, traversé en divers sens par des cloisons fibreuses. Ce stroma possède une structure des plus intéressantes; il est en effet formé d'un véri- table parenchyme, composé de cellules interstitielles [Plasma- zellen Waldeyer, Kornerzellen His., etc.), parcouru par des cor- dons cellulaires analogues aux cordons médullaires signalés chez la chienne, la chatte, etc. (voir ch. 5, d.). Ces cordons médullaires sont ici extraordinairement dévelop- pés. Nous en reparlerons au chapitre III avec plus de détails (4). Nous ne reviendrons pas ici sur la disposition des ligaments que nous avons déjà indiquée. 2^^ Chez une Taupe sacrifiée le 6 septembre (fig. 2), l'ovaire est un peu plus grand que chez l'individu cité plus haut; sa couleur est un peu plus foncée ; la forme générale est moins pyri- forrrie que dans le premier exemple, et la séparation en deux régions est encore la même. Sur une coupe (fig. 5) on reconnaît encore une fois que la portion blanche correspond à la zone parenchymateuse, renfer- mant les follicules de Graaf; la portion rose, qui est relative- ment un peu plus développée que dans l'exemple précédent, a conservé la même structure. En outre la limite entre les deux portions de l'organe est nettement marquée par un septum fibreux. La figure 5 représente la seule coupe d'ovaire de Taupe où nous ayons trouvé des follicules de Graaf dans la portion médul- (1) L'absence des follicules de Graaf dans la région que nous venons d'éludier, sa grande richesse en vaisseaux, la présence des cordons médullaires nous sem- blent justifier parfaitement le rapprochement que nous avons fait entre celle portion et la portion médullaire ou vasculaire de l'ovaire en général, — 250 — laiic de l'organe. C'est là un l'ait tout à fait exceptionnel, car nous ne Tavons rencontré qu'une seule fois, quoique nous ayons examiné plusieurs centaines de coupes d'ovaire. La portion parenchymateuse de l'organe présente un aspect assez différent de celui qu'elle offrait chez notre premier indi- vidu. En effet, nous trouvons ici, outre des follicules primitifs et secondaires, quelques follicules arrivés à peu près au dernier stade de leur évolution, avec une theca follicuU à peu près com- plètement développée. Ainsi que le montre la figure 5, il ne saurait être question ici de distinguer dans la zone parenchymateuse, comme l'ont fait quelques auteurs, notamment His (9), plusieurs couches d'après l'état de développement des follicules qu'elles contiennent. Les follicules des divers âges sont mélangés entre eux sans aucun or#re. La disposition des ligaments est identiquement la même que dans l'exemple cité en premier lieu. S** Chez une Taupe sacrifiée le 27 octobre, l'ovaire a subi des modifications profondes (fig. 3 et 6). Tout d'abord on remarque que le volume a notablement aug- menté, du quintuple au moins; la couleur de l'organe est deve- nue beaucoup plus foncée; elle est d'un rouge un peu brunâtre, (à peu près comme le rein) à part une petite tache un peu plus pâle, qui correspond à la partie parenchymateuse, et dans la- quelle on découvre déjà les follicules de Graaf par transpa- rence (1). L'ovaire a en outre subi un changement de position des plus remarquables: la portion parenchymateuse en effet, au lieu d'être placée intérieurement, se trouve en avant; la portion médullaire se trouve en arrière. En outre, l'extrémité de la corne de l'utérus s'est recourbée en arrière, et a accompagné l'ovaire dans son changement de posi- (1) Dans cet étal, l'ovaii-e présente, sous le rapport do la forme, de la couleur et des dimensions, une grande analogie avec le testicule du même animal. — 251 — tion, ce dont il est facile de s'assurer en comparant la figure 3 aux figures 1 et 3. Une coupe nous montre dans la texture intime des changements tout aussi profonds (fig. 6). En effet, la portion médullaire a subi un tel accroissement, qu'elle constitue à peu près à elle seule les neuf dixièmes de la masse totale de l'organe, tandis que la por- tion parenchymateuse est relativement fort réduite. On trouve dans celle-ci des follicules de Graaf aux divers stades de leur développement, et disposés sans aucun ordre; beaucoup d'ovules renfermés dans les follicules les plus avancés présentent une dégénérescence colloïde. La limite entre les deux régions de l'ovaire est encore très nette. Nous avons supposé que les modifications que nous venons de décrire sont en rapport avec l'époque de l'année. Cependant nous devons avouer que ce rapport est bien douteux. En effet, nous n'avons pu malheureusement examiner que peu d'indivi- dus; en outre, plusieurs taupes prises le 28 novembre présen- taient les unes l'état décrit au troisième exemple, les autres des états intermédiaires entre celui-ci et ceux décrits au premier et au deuxième exemple. Si ces modifications sont en rapport avec la saison, ce rappoii varie certainement d'après les individus. Nous ne connaissons malheureusement pas assez bien les mœurs de la Taupe, notam- ment les époques auxquelles s'effectue la reproduction, pour déterminer ce rapport d'une manière plus exacte. C'est d'ailleurs là un point que nous comptons poursuivre, en examinant un plus grand nombre d'individus. Ovaire de l'Hermine. L'ovaire de cet animal s'écarte aussi notablement de la structure ordinaire de cet organe chez les autres mammifères, mais d'une tout autre manière que celui de la Taupe. L'ovaire de l'Hermine ne présente à l'extérieur rien de parti- culier; il est ovoïde, blanchâtre, à surface parfaitement lisse. Mais une coupe (fig. 10) montre que l'organe est formé d'un squelette fibreux, constitué par des travées qui émanent d'une 259 — masse centrale très dense et vasculaire, également fibreuse, située au niveau du hile et comparable au stroma du hile d'un ganglion lymphatique. Les cloisons divisent l'organe en un certain nombre de lobules de dimension variée, et vont aboutir à la surface à une coque fibreuse assez épaisse, correspondant à ce que certains auteurs ont nommé albuginée de l'ovaire, recou- verte par quelques lambeanx d'épithélium ovarique. Les lobules délimités par les cloisons fibreuses sont remplis d'une masse de cellules interstitielles et parcourus par des cloi- sons lamineuses émanées des cloisons principales. C'est dans les lobules périphériques que se trouvent les folli- cules de Graaf à tous les degrés de développement, sauf les fol- licules primordiaux, placés immédiatement sous la tunique (ibreuse externe et d'ailleurs fort peu nombreux, au moins chez l'individu que nous avons examiné. L'inspection de la figure 18 montre que les follicules aux divers états de développement sont encore une fois mélangés sans être disposés en couches régulières d'après leur âge. La distinction entre la zone parenchymateuse et la zone vas- culaire est assez nette, contrairement à ce que nous allons ren- contrer chez l'animal suivant. Ovaire de la Vesperiigo pipistrella. L'ovaire de ce chéiro- ptère (1) est très petit (de 1 .5 à 2 millimètres de diamètre), sphé- rique ou un peu aplati et blanc. La masse fondamentale de lovaire est constituée, comme chez les formes que nous venons d'examiner, par des cellules interstitielles(Kòr/ier^e//e?i),His,etc.) Les éléments contenus au sein du parenchyme ainsi formé sont des follicules de Graaf et des cordons médullaires. La ma- jeure partie de l'organe (voir fig. 14- et 15) contient des follicules de Graaf à divers stades de développement, entremêlés sans ordre, sauf cependant les follicules primordiaux, qui sont dispo- sés en couches régulières immédiatement sous la surface. La portion de l'organe qui contient les cordons médullaires (1 ) tCxamiiié dans le courant du mois de décembre. — 255 — est très petite, e.t comme chez la Taupe, elle est recouverte par la séreuse. La structure du stroma est identique dans cette por- tion de l'organe au stroma interposé aux follicules de Graaf. On ne peut pas considérer la partie renfermant les cordons médul- laires comme correspondant seule à la portion vasculaire de l'or- gane; en effet, on trouve de gros vaisseaux sanguins entre les follicules. Au reste, la région des cordons médullaires est peu nettement délimitée; il arrive parfois qu'on trouve un ou deux cordons en dehors de cette région , mélangés aux follicules de Graaf. La structure de l'ovaire de la Vesperugo et de la Taupe montre que les deux parties de l'organe, zone parenchymateuse et zone médullaire, ne s'enveloppent pas toujours Tune l'autre, comme c'est le cas chez la plupart des mammifères. Chez ces deux espèces, les deux portions de l'ovaire sont juxtaposées; la portion médul lairc, au lieu d'être enveloppée par la portion parenchymateuse sur toute son étendue, sauf au niveau duhile, n'en est recouverte que sur une portion restreinte de sa surface. On voit en outre que la distinction entre les deux régions de l'ovaire est parfois très vague; chez la chauve-souris, par exemple, le stroma est identique dans les deux portions de l'organe; chez la Taupe, nous avons rencontré des follicules de Graaf (fig. 5) enfoncés profondément dans la portion médullaire. D'autre part, la distinction de la portion parenchymateuse en plusieurs couches,d'après l'état des follicules qu'elles renferment, établie par plusieurs auteurs, ne s'applique en aucune façon aux ovaires étudiés par nous. C'est ainsi que les couches corlicale^ subcorticale et des folli- cules décrites par His {loc. cit. p. 175) ne peuvent se retrouver chez les types étudiés ici, où les follicules de tout âge sont mé- langés sans ordre. — 254 — CHAPITRE IH. STRUCTURE INTIME DES DIVERSES PARTIES DE l'oVAIRE. § 1". — Epithelium ovarique. D'après Waldeyer, Romiti (10) el beaucoup d'autres auteurs, répithélium germinalif et l'épithélium ovarique qui en est issu, sont des tissus spécialement différenciés en vue des fonctions génitales, et distincts deTendothélium de la cavité pleuropérito- néale. Il y a une démarcation nette entre l'épithélium, à caractères propres recouvrant la surface de l'ovaire adulte, et l'endothélium du ligament large ; il y a, au contraire, un passage entre l'épillié- lium ovarique et celui de Toviducte (canal de Millier) par l'inter- médiaire de la fìmbria ovarica. D'après une autre manière de voir, défendue notamment par Kôlliker (11), l'épithélium germinatif ne serait qu'une partie de l'endothélium de la cavité pleuropérilonéale, ayant subi des modi- fications qui ne sont pas spécialement en rapport avec les fonc- tions génitales. En effet, l'endothélium pleuropéritonéal subit des modifications analogues dans d'autres régions, par exemple au voisinage de la rate, du pancréas, etc. D'autre part. Semper (12) a montré que dans la glande mâle de certains Élasmobran- ches, l'épithélium germinatif peut se transformer en un endothe- lium formé de cellules plates sans perdre pour cela la propriété de donner naissance à des produits sexuels. Chez la Taupe, l'épithélium ovarique se présente avec ses caractères ordinaires. Il est formé de cellules cuboïdes, à noyau volumineux; on y rencontre parfois çà et là une cellule un peu plus grande que les autres (fig. 12), qu'on pourrait prendre pour un ovule primordial ; cependant ce n'est qu'avec réserve que nous hasardons cette interprétation. Mais ici, comme nous l'avons déjà fait remarquer à plusieurs reprises, il n'y a qu'une partie de l'ovaire qui soit recouverte par un epithelium spécial; tout le reste de la surface est tapissé par — 255 — la séreuse. II en esl de même, mais à un moindre degré, chez la Chauve-Souris. Ces deux animaux constituent les seules exceptions connues jusqu'ici à la règle formulée par Waldeyer, d'après laquelle la séreuse ne se prolonge pas à la surface de l'ovaire pour lui con- stituer une enveloppe. Remarquons que malgré cela la règle posée par Waldeyer n'en conserve pas moins sa généralité, à un certain point de vue, puisque la portion de la glande génitale qui joue réellement le rôle d'ovaire, la portion parenchymateuse, a une surface libre de tout revêtement séreux. Nous avons toujours trouvé une démarcation parfaitement nette entre l'épithélium ovarique et l'endothélium de la séreuse. D'autre part, nous avons trouvé un passage graduel entre cet epithelium et celui du pavillon de la trompe chez la Chauve- Souris. La figure 14 représente une coupe d'un ovaire de cet animal faite au niveau du pavillon de la trompe; on voit une des franges de celui-ci se mettre en rapport avec l'ovaire, et l'épithélium passer de l'un de ces organes sur l'autre sans aucune interposi- tion d'endothélium. Nous n'avons pu observer la manière dont se comportent les cils vibratiles au niveau de ce passage ; d'ailleurs l'étude qui en a été faite par Waldeyer chez d'autres animaux démontre qu'il y a sous ce rapport des variations individuelles. Chez VHermine, l'épithélium ovarique est plutôt cylindrique que cuboidc. Il se détache aisément par lambeaux de la surface de l'ovaire. § 2. — Stroma de l'ovaire et spécialement les cellules conjonctives de ce stroma. Les éléments constituants du stroma de l'ovaire, dans la por- tion médullaire comme dans la portion parenchymateuse (abstrac- tion faite des follicules de Graaf etdes cordons médullaires), sont, d'après les données fournies par la plupart des auteurs : Des vaisseaux sanguins. Des fibres musculaires lisses (?). — â5C — Des fibres conjonctives. Des cellules conjonctives. On distingue dans l'ovaire deux espèces de .cellules conjonc- tives : des cellules plates et des éléments d'une nature spéciale, appartenant au groupe des Plasmazellen de Waldeyer (5). C'est sur les caractères et la distribution de ces derniers élé- ments que nos recherches ont surtout porté. Otto Schrôn (fig. 15) a appelé depuis longtemps l'attention sur ces éléments. Il figure ces cellules (/oc.a7.,pl. XXXlIl,fig.'l , 9) comme occupant chez une chatte de deux ans la plus grande par- tie de la zone parenchymaleuse, dans les espaces compris entre les follicules de Graaf, et les considère comme constituant le tissu clans lequel le jeune ovule subit ses premiers développe- ments. Schrôn désigne ces éléments sous le nom de Stroma- zellen. His (9) décrit et figure également ces éléments, auxquels il donne le nom de Kôrnerzellen. Il les observe chez la chatte et la vache, dans la couche parenchymateuse. D'après lui, ces cel- lules donneraient naissance à la couche interne de la t/ieca fol- liculi (tunica propìzia Wald.). Nous avons fait quelques observa- tions qui plaident en faveur de cette manière de voir. Waldeyer figure ces éléments chez un fœtus humain de trente-deux semaines. Il leur donne le nom de Parenchym- zellen. Born (14), dans son étude sur l'ovaire de la jument, décrit la portion centrale de l'ovaire du fœtus à terme et de l'animal nou- veau-né comme formée de cellules de ce genre. Cette description a été confirmée par Tourneux (15) qui a fait clairement ressor- tir l'identité qu'il y a entre ces éléments et les cellules intersti- tielles du testicule, et les a désignés sous le nom de cellules interstitielles de l'ovaire. Enfin Creighton (i6) a retrouvé les éléments en question dans la partie centrale de l'ovaire, chez de jeunes chiennes et de jeunes chattes. Ces éléments, désignés, comme nous venons de le voir, sous les noms les plus divers, se placent naturellement dans le groupe — 257 — des Plasmazellen de Waldeyer. (Voir à ce sujet Tourneux , loc. ciL) Ils présentent une grande analogie avec les cellules vaso-for- matives de Ranvier. Chez les animaux que nous avons étudiés (Taupe, Chauve- Souris, Hermine), ces cellules sont excessivement abondantes aussi bien dans la zone vasculaire que dans la zone parenchy- mateuse de l'organe. Par leur juxtaposition en masse, elles constituent un véritable parenchyme, parcouru par des travées conjonctives plus ou moins développées. Nous appelons l'atten- tion sur V abondance extrême de ces cellules, chez ces trois animaux, et cela chez des individus adultes, et non chez des fœtus on des animaux nouveau-nés. Comme il y a quelques différences spécitiques entre les cel- lules interstitielles de l'une forme à l'autre, nous en donnerons une description spéciale pour chaque espèce. Cellules interstitielles de la Taupe. Ces cellules mesurent de 14 à 28 (j^ de diamètre. Elles sont irrégulièrement polyédriques, tantôt cuboïdes, tantôt plus allongées. Leur surface présente des saillies et des dépressions (fig. 10), dans lesquelles viennent se placer les accidents de surface analogues des cellules voisines. Ces formations ne manquent pas de rappeler les crêtes d'em- preinte, décrites par Ranvier pour les cellules plates (17). Elles ont évidemment pour but de rendre l'union des cellules plus étroite. Malgré cela (et ceci s'observe surtout chez la Taupe), ces élé- ments se désagrègent très facilement; il est inutile de les dila- cérer pour en étudier les détails; sur toutes les coupes on trouve des masses de cellules désagrégées. Le contenu cellulaire pré- sente des granulations très fines, et d'autres un peu plus grosses, sphériques, brillantes, très probablement de nature graisseuse. Cette graisse nous a paru incolore. Le noyau est sphérique, relativement petit, et occupe une place variable à l'intérieur de la cellule. Action des réactifs colorants. C'est surtout par la manière dont elles se comportent vis-à-vis des réactifs colorants que les 18 — 258 — cellules interstitielles sont intéressantes. Voici les résultats que nous avons obtenus sous ce rapport chez la Taupe, oii nous avons étudié ces éléments d'une manière spéciale. Par le picrocarmin^ le corps de ces éléments se colore légè- rement en jaune orangé, tandis que leurs noyaux et tous les autres éléments se colorent en rouge. Cette réaction n'est pas neuve; elle a déjà été appliquée avec succès par Tourneux (15) à l'étude des cellules interstitielles du testicule. La figure 7 représente les cellules interstitielles de l'ovaire de la Taupe (portion médullaire), traitées par cette sub- stance. Celte réaction est certainement la plus commode pour déceler et étudier ces éléments. Par Véosine hématoxylique , préparée par la méthode de Renaut (18), on obtient également une double coloration des plus remarquables. Le corps des cellules interstitielles se colore en rose par l'éosine, tandis que leurs noyaux et tous les autres éléments (travées lamineuses, cordons médullaires, etc.), se colo- rent en violet par l'hématoxyline (fig. 8). Enfin, par Paction successive du picrocarmin et de Vhéma- toxyline, les cellules interstitielles se colorent en jaune, leurs noyaux, les travées conjonctives et les cordons médullaires en violet (fig. 9). Comme on le voit, nous nous trouvons ici en présence d'un tissu qui présente des phénomènes de double coloration variés et nombreux. S'agit-il ici réellement de phénomènes d'élection des matières colorantes? En d'autres termes, les cellules interstitielles pos- sèdent-elles des propriétés physiques ou chimiques telles, qu'elles absorbent plutôt l'acide picrique que le carmin, l'éosine que l'hématoxyline, etc., et vice versa pour les autres éléments, cel- lules conjonctives et cordons médullaires? Nous croyons pouvoir donner de ces phénomènes de tinction une autre explication beaucoup mieux en rapport avec les faits. On peut dire en effet que les cellules interstitielles sont tout simplement des éléments qui possèdent une très faible affinité pour les matières colorantes, et ne se laissent influencer que par — 259 — des substances possédant un pouvoir tinctorial excessivement fort. Voici quels sont les arguments qui plaident en faveur de cette manière de voir : 1° Remarquons que toutes les doubles colorations que nous avons obtenues résultent de l'emploi combiné ou successif de deux substances, dont Tune possède un pouvoir tinctorial beau- coup plus fort que l'autre. L'acide picrique plus fort que le carmin. L'acide picrique plus fort que l'hématoxyline. L'éosine plus fort que l'hématoxyline. C'est chaque fois la première des deux substances du mélange qui s'est portée sur le corps des cellules interstitielles. 2° Les éléments (cordons médullaires , etc.) qui absorbent les matières les moins colorantes commencent par prendre, tout comme les cellules interstitielles, la substance la plus colorante. Si, par exemple, on laisse séjourner une coupe de la portion médullaire de l'ovaire de la Taupe durant un temps très court dans le picrocarmin , tous les éléments ont pris une teinte jaune uniforme, qui n'est que bien peu rougeâtre pour les cordons médullaires. D'où l'on peut conclure que l'acide picrique com- mence par se porter également sur tous les éléments; que le carmin, à action plus lente, se porte ensuite sur les éléments qui possèdent pour les substances colorantes une affinité suffi- sante, et masque la teinte produite par l'acide picrique. Des expériences et des raisonnements semblables s'appliquent à l'éosine hématoxylique et au picrocarmin-hématoxyline. S" Si, au contraire, on prolonge trop longtemps l'action de la matière colorante, on constate qu'après un certain temps tous les éléments ont pris la même teinte. Ce résultat, parfaitement net pour l'éosine hématoxylique et le picrocarmin-hématoxyline, l'est un peu moins pour le picrocarmin employé seul. Ici les matières de nos mélanges qui sont le moins absorbables ont eu le temps de se porter sur des éléments qui ne s'étaient laissé influencer que par l'éosine ou l'acide picrique, et ont encore une fois masqué la teinte produite d'abord par ces derniers réactifs. — 260 — 4° L'expérience suivante pernoet d'étudier en détail l'action des réactifs à double coloration; une coupe d'ovaire est déposée sur la lame, entourée de quelques gouttes de matière colorante, d'éosine hématoxylique, par exemple, et couverte d'une lamelle. Sur les bords de la coupe, qui se trouvent en rapport direct avec la matière colorante, on constate d'abord une teinte rouge uni- forme, puis une élection parfaitement nette. Mais peu à peu la préparation prend à ce niveau une teinte violette uniforme. En même temps, la matière colorante s'avance par endosmose vers les parties centrales de la coupe; et la teinte rose, suivie de la double coloration, suivie à son tour de la coloration bleue uni- forme, s'avance peu à peu vers le centre de la coupe. Au bout d'un temps plus on moins long, toute la pièce a pris une teinte violette homogène, si l'on a eu soin de prendre une quantité de matière colorante suffisante. i La même expérience peut se répéter avec les autres réactifs dont nous avons parlé. 5"* Enfin, il arrive souvent que le picrocarmin du commerce est beaucoup trop riche en carmin. Alors une coupe prend la couleur rouge dans toutes ses parties: la teinte des cellules inter- stitielles est d'abord plus pâle (ce qui indique un pouvoir absor- bant moindre), mais devient au bout de peu de temps aussi fon- cée que celle des autres éléments. Comme on le voit, le succès à obtenir par une méthode de double coloration se trouve sous la dépendance d'une série de circonstances dont il est indispensable de tenir compte pour réussir. Il ressort de ces quelques faits que les phénomènes de double coloration résultent de ce que l'une des deux matières employées masque le résultat produit par Tautre sur certains éléments déter- minés. Il n'y a pas ainsi de véritable élection des réactifs colo- rants. Il n'en est pas moins indiscutable que l'emploi des doubles colorations, tout en exigeant des précautions, est de la plus grande utilité, et de nature à faciliter de beaucoup les travaux hislologiques. — 201 — Après ces quelques considérations techniques, nous en reve- nons à la description des cellules interstitielles. Chez la Taupe on trouve parfois (fig. 10') des cellules intersti- tielles renfermant une grande cavité sphérique, qui contient une substance qui semble être du mucus, et se colore très peu. Le noyau est en ce cas souvent refoulé vers la périphérie. Ce sont probablement des cellules en voie de dégénérescence. Cellules interstitielles de la Vesperugo pipistrella. Chez cet animal les cellules interstitielles constituent à peu près tout le stroma de Tovaire. Elles manifestent vis-à-vis des matières colo- rantes les mêmes propriétés que les mêmes éléments de la Taupe. Elles mesurent de 18 à 25 fx de diamètre; elles ont une grande tendance à affecter la forme bipolaire. Nous n'y avons remarqué ni les inégalités de surface que nous avons signalées chez la Taupe, ni la tendance à se dissocier que présentent ces éléments chez le même animal (fig. 10^). Leur contenu est finement gra- nuleux. Nous n'y avons pas trouvé de graisse. Cellules interstitielles de l'Hermine. Ces éléments contenus, comme nous l'avons déjà remarqué, dans les lobules délimités par les septa fibreux, affectent en général une forme irrégulière- ment quadrangulaire. Leurs bords sont irréguliers (fig. 10^) et leur noyau sphérique est presque toujours situé à l'une des extré- mités de la cellule. Leur contenu est finement granuleux et con- tient en outre de petites gouttelettes graisseuses sphériques. 11 nous reste à dire un mot concernant l'état de développe- ment diff'érent du parenchyme ovarique aux diverses époques de l'année. Nous avons déjà parlé des modifications notables que subit l'ovaire de la Taupe d'après les saisons, et notamment des modi- fications de volume que présente cet organe. Quand l'ovaire atteint son maximum de dimension (fig. 5), on trouve une très-grande abondance de cellules interstitielles; quand, au contraire, l'ovaire est petit (fig. 1 et 2), ces cellules sont moins nombreuses, et les cordons médullaires sont très serrés les uns contre les autres. — 262 Avec quelles phases ces modifications du tissu interstitiel sont- elles en rapport? c'est ce qu'il nous a été impossible de déter- miner jusqu'à présent d'une manière précise. Nous nous propo- sons d'ailleurs de poursuivre cette question dès que nous en au- rons l'occasion. § 3. — Follicule de Graaf. La paroi du follicule de Graaf est constituée, en allant de l'ex- térieur vers l'intérieur, des couches suivantes : la theca folliculi et la membrane granuleuse. La theca folliculi, portion conjonctive de la paroi du follicule, se divise à son tour en deux couches : la tunica fibrosa et la tunica propria. La tunica fibrosa, externe , dense, est constiluée par des couches fibreuses concentriques. La tunica propria est formée d'un tissu plus lâche, plus vas- culaire et plus riche en éléments cellulaires. D'après Waldeyer, les deux couches dérivent toutes deux du stroma ; elles représenteraient en petit les deux régions de l'ovaire: la région parenchymateuse correspondant à la tunica fibrosa la région médullaire à la tunica propria. D'après le même auteur, la formation de ces deux tuniques serait en rapport avec le développement vasculaire. Des vais- seaux, émanés de la tunica fibrosa^ accompagnés de tissu con- jonctif lâche et riche en cellules constitueraient la tunica propria folliculi. De plus, cet auteur pense qu'un grand nombre des cel- lules de cette tunique peuvent être envisagées comme des glo- bules blancs émigrés. D'après His, au contraire, les cellules delà tunica propria soni des cellules conjonctives ; il leur a donné le nom deKôrnerzellen. Robin partage également cette manière de voir, peut-être avec doute ; il a désigné ces éléments sous le nom de cellules de la paroi propre de l' ovisac. Comme Tourncux le fait remarquer, ces éléments sont ana- 1 — 263 — logues aux cellules interstitielles de la trame de l'ovaire, que nous venons de décrire. L'étude du développement des follicules de Graaf chez l'Her- mine nous a conduit à admettre que la paroi propre du follicule est constituée en majeure partie par des cellules interstitielles. Chez cet animal, en effet, la Umica propria prend un énorme développement, ce qui rend son élude plus facile que chez les autres mammifères. La première ébauche du follicule consiste chez l'Hermine (fig. 10) comme chez tous les autres mammifères, en un ovule entouré d'une couche de cellules épithéliales, la couche granu- leuse enveloppée à son tour d'une mince couche fibreuse, qui apparaît ici beaucoup plus tôt que chez les autres animaux. Le tout est placé près de la surface, et entouré de presque tous les côtés par les cellules interstitielles dont nous venons de donner la description. La couche fibreuse est en relation par plusieurs septa lamineux, avec le système de cloisons qui parcourt toute la masse de l'ovaire. Il faut encore remarquer que les follicules de ce genre sont peu nombreux, contrairement à ce qui a lieu en général chez les autres espèces. Le deuxième stade qu'il nous a été possible d'observer est ce- lui qui est représenté par la figure 20. On voit encore ici l'ovule entouré de sa membrane granuleuse et de sa petite enveloppe fibreuse. Mais autour de ces parties qui n^ont guère subi de développe- mentSj qui présentent à très peu près le même aspect que dans le stade précédent^ nous trouvons une épaisse couche de cellules in- terstitielles, enveloppée à son tour par une coque fibreuse, qui doit être envisagée comme faisant partie du système général de cloisons analogues parcourant le stroma de l'ovaire. La couche de cellules interstitielles est traversée par des septa fibreux peu développés, qui partent de la coque fibreuse interne (1), et se dirigent, en s'amincissant, vers la coque fibreuse externe. Ces (i) Directement appliquée sur la membrane granuleuse. — 204 — septa servent de support à des vaisseaux sanguins, qu'on aper- çoit facilement sans aucune injection, grâce aux globules sanguins encore contenus dans leur intérieur. Il faut évidemment assimiler la coque fibreuse externe du fol- licule arrivé à ce stade à la tunica fibrosa, la couche de cellules interstitielles à la tunica propria (1). Quant à la coque fibreuse interne, elle ne manque pas de pré- senter , sinon par sa structure, au moins par sa position, une certaine analogie avec la membrane décrite par Kôlliker entre la couche granuleuse et la tunica propria. Quelque grand que soit en apparence l'écart qui sépare les deux stades de développement que nous venons d'examiner, il est probable qu'ils se succèdent à peu près sans état intermé- diaire. En effet, l'ovule et la membrane granuleuse présentent dans les deux cas très sensiblement le même état d'avancement. Voici comment nous croyons pouvoir expliquer cette appari- tion rapide des deux couches de la theca folliculi : une portion du stroma de l'ovaire, formée de cellules interstitielles, s'est dis- posée autour du follicule primordial, de manière à former la tunica propria, et une portion du système cloisonnaire général sépare cette portion du stroma du tissu ambiant, de manière à constituer une tunica fibrosa. Cette dernière reste reliée au sys- tème de septa général. D'ailleurs, la theca folliculi formée par ces deux couches ne se distingue en rien du reste du stroma ovarique, sauf par ce fait de peu d'importance, que les septa fibreux qui parcourent la tunica propria sont disposés d'une manière manifestement rayonnante. Le troisième stade (fig. 21) est caractérisé par les modifica- tions suivantes. (1) Nous avons vu plus haut que Waldeyer compare les deux couches de la paroi du follicule de Graaf aux deux régions (parenchymateuseetvasculaire) de l'ovaire. Une comparaison du même genre se maintient parfaitement pour l'Hermine. iNous retrouvons en effet dans la tunica propria des cloisons conjonctives analogues à celles qui divisent le stroma de l'ovaire en lobules distincts. _ 26o — F.'ovule a subi un accroissement notable; il a souvent une forme polyédrique. Il se trouve entouré d'une zona pellucida très mince. La membrane granuleuse a été le siège d'une proli- fération active : elle est formée maintenant de deux couches de cellules, et l'on aperçoit déjà la première ébauche d'une cavité, Vanlrum folliculi. et le commencement de la formation du cumu- lus proliger. Quant à la petite couche fibreuse qui enveloppe immédiate- ment la membrane granuleuse, elle est restée stationnaire. Pendant que la couche granuleuse et l'ovule subissent un accroissement notable, la tunica propria subit une évolution en sens inverse; elle diminue d'épaisseur à mesure que les parties centrales augmentent. Il semble naturel de conclure de là que les cellules de la tunica propria constituent un véritable réservoir nutritif, qui est absorbé peu à peu par les parties centrales, qui fournit à celles-ci les matériaux nécessaires à leur accroissement. Le quatrième stade correspond au follicule mùr ou presque mûr (fig. 22). Ici la couche granuleuse est devenue très épaisse, sauf au niveau du point opposé à l'endroit d'insertion de l'ovule. Là, en effet, elle n'est formée que d'une seule couche de cellules. Le cumulus proliger est nettement dessiné, et contient l'ovule qui est devenu plus grand que dans les stades précédents, et se trouve entouré d'une zona pellucida assez épaisse. IJanlrum folliculi a acquis une capacité notable. La petite coque fibreuse qui enveloppe la couche granuleuse a encore la même épaisseur qu'au premier stade que nous avons étudié. Elle semble même avoir subi une très légère régression. La tunica propria a encore une fois beaucoup perdu en épais- seur. Ce fait vient parfaitement à l'appui de l'hypothèse que nous avons faite à propos du troisième stade, concernant le rôle nutri- tif des cellules interstitielles. La tunica propria a, en effet, continué à subir une évolution inverse de celle des parties centrales du follicule. — 266 — II nous reste encore à faire les observations suivantes : 1° Durant les trois derniers stades que nous venons d'étudier, la tunica fibrosa n'a guère subi de changements. 2" Le volume de l'ensemble du follicule n'a guère changé durant ces trois états. L'accroissement des parties centrales du follicule s'est fait exclusivement aux dépens de h tunica propria, qui s'est creusée d'une cavité centrale de plus en plus grande, fournissant ainsi la place nécessaire à leur augmentation de volume. Follicules de Graaf de la Vesperugo pipistrella. Le dévelop- pement des follicules chez cet animal ne présente rien de très remarquable, sauf en ce qui concerne l'origine de la theca fol- liculi. Nous avons vu plus haut le désaccord qui règne au sujet de l'origine de la couche interne de la theca. Ici le mode de formation de la theca est évidente. En effet, chez un follicule jeune, on voit directement autour de la mem- brane granuleuse les cellules interstitielles du stroma avec leurs caractères ordinaires. Chez un follicule plus avancé (fig. 16), on voit les cellules les plus voisines de la membrane granuleuse s'aplatir; il y a ainsi une ou deux couches aplaties, où les cel- hiles présentent une forme de passage vers les cellules plates. Plus tard encore, cet aplatissement devient plus marqué, et un plus grand nombre de couches y participent (fig. 17). La figure 17 représente la theca d'un follicule presque mûr; quelques couches de cellules interstitielles aplaties représentent seules la theca folliculi; il est impossible d'y trouver la moindre distinction entre une tunica fibrosa et une tunica propria. Cependant, l'origine de cette ^/ieca,qui se forme évidemment aux dépens des cellules interstitielles, vient encore corroborer la manière de voir de His que nous avons rappelée plus haut. Membrane granuleuse. Nous avons à signaler, à propos de la membrane granuleuse de la Chauve-Souris, les deux particula- rités suivantes : 1" Dans tous les follicules d'âge moyen, la membrane granu- — :267 — leuse présente la plus grande régularité. Elle est toujours formée (le deux couches de cellules. 2° Ces cellules, cylindro-coniquos, à noyau sphérique, plus souvent ovoïde, sont régulièrement placées en quinconce. L'ex- trémité d'une cellule vient se placer dans l'espace ménagé entre les extrémités de deux cellules de l'autre couche (tig. ÌT''). § 4. — Cordons médullaires. On rencontre, chez la Taupe et la Chauve-Souris {Vesperiigo pipislrella), placées au sein du stroma que nous avons décrit plus haut, un grand nombre de traînées cellulaires, de tubes sans lumière centrale, s'il est permis de s'exprimer ainsi. Nous adop- terons pour ces éléments, dont nous avons déjà plusieurs fois parlé, et que nous allons décrire dans le présent paragraphe, le nom de cordons médullaires. Ce nom, en effet, mérite la préfé- rence, car il a l'avantage de ne rien faire préjuger au sujet de la valeur de ces éléments. Les cordons médullaires ont été signalés pour la première fois, à notre connaissance, par Waldeyer dans la portion médul- laire de l'ovaire de la chienne, de la chatte et du veau. Voici comment il s'exprime à ce sujet : « Bei einer erwachsenen, jedoch noch jungen Hïmdin, die zahlreiche reife Follikel aufwies, zeigten sich in der Zona vas- culosa des Ovariums bis dicht an die Parenchymrinde heran zahlreiche, oft dichotomisch verzweigte, lange, schmale Epithel- schlauche, die fast das ganze Marklager des Eierstocks durch- setzen, langgestreckt zwischen den Gefàssen verlaufend Es unterliegt hier keinem Zweifel, dass wir hier in der That die Reste des Sexualtheils des Wolff schen Kôrpers, die Canale des Nebeneierstocks, vor uns haben, die sich auch beim weiblichen Thiere ausserordentlich weit in das Stroma der Keimdriise hindn entwickelt haben und vielleicht schon als Eomologa von Samen- kandlchen zu deuten sind. » C'est chez le chien que les canaux médullaires sont le plus développés; ils le sont moins chez le chat et le veau. — 2G8 — Schron paraît déjà avoir aperçu les cordons médullaires, mais il les considéra comme des vaisseaux sanguins. Romiti (10) a décrit les cordons médullaires chez le chien, le chat et le veau. Born (14) les a également décrits chez des fœtus et des jeunes de jument. Il les a désignés sous le nom de Keimlager. Egli (19) a également décrit ces éléments, mais il n'admet pas la lelation avec le corps de Wolff que Waldeyer leur attribue. Kôlliker (11) parle longuement de ces éléments chez la chienne; il croit que les cellules constituantes des cordons médullaires donnent naissance à la membrane granuleuse du follicule. Balbiani (20), dans ses leçons d'embryogénie comparée, dit également quelques mots de ces cordons. D'après lui, ce ne seraient pas les homologues des canalicules séminifères, comme le pense Waldeyer, mais bien des vasa recta et du rete testis du testicule. Balfour [^\] a suivi en détail le développement des éléments en question. D'après lui, les cordons médullaires dérivent de la paroi des corpuscules de Malpighi du corps de Wolff. Il se déclare d'accord avec Waldeyer quant à leur interprétation. Il les a rencontrés chez le chien, le chat, le lapin et le mouton. Balfour a trouvé près du point d'attache de l'ovaire un certain nombre de canaux à lumière large, qui doivent probablement être distingués des colonnettes épithéliales solides. Chez la chienne, des cordons solides se trouvent chez l'embryon, mais plus tard il arrive souvent qu'ils deviennent de vrais tubes avec lumière. Ce tissu présente sans doute de nombreuses variétés dans son dét^eloppement. Balfour l'a en effet trouvé plus développé chez la chatte que chez la chienne, contrairement aux observations faites par Waldeyer. Chez l'embryon de la chatte ces traînées ressemblent fort aux canalicules séminifères en voie de dévelop- pement. Il arrive aussi qu'elles sont très semblables aux tubes — 209 — de Pfliiger; cependant Balfour n'a vu aucune disposition qui fût de nature à contirmer l'opinion de Kôlliker. Rouget (22) a décrit les cordons médullaires comme des colon- nettes épithélioïdçs pleines, aboutissant au niveau du bile à de vrais tubes à lumière. Il rappelle leur analogie (voir Waldeyer) avec les canalicules séminifères. Cet auteur se déclare en outre partisan de l'opinion de Kôlliker que nous avons citée. Telles sont les principales indications bibliographiques que nous avons trouvées au sujet des cordons médullaires. Ces élé- ments ont une distribution très étendue dans la série des mam- mifères; on les a jusqu'ici signalés chez le chien (Waldeyer, Romiti, Balfour, Rouget); le chat (Waldeyer, Romiti, Balfour, Rouget); le lapin (Balfour, Rouget); le mouton (Balfour); le veau (Waldeyer, Romiti); la jument (Born); c'est-à-dire chez la majo- rité des mammifères dont l'ovaire a été étudié jusqu'ici au point de vue histologique (1). Nous avons trouvé les cordons médullaires chez la Vesperiigo pipîstrella (adulte) et chez la Taupe (adulte) où ils présentent un énorme développement. Nous les avons retrouvés chez un embryon de veau de 28 cen- timètres de long et chez une jeune chienne. Cordons médullaires de la Taupe. Chez cet animal, ces élé- ments occupent toute la portion médullaire de l'organe, depuis le hile jusqu'à la portion parenchymateuse, et ils pénètrent même dans cette dernière. Ils présentent un parcours extrêmement ondulé et tortueux, d'où il résulte que sur une coupe de l'organe, il est très rare d'en obtenir une section longitudinale; on obtient toujours des sections obliques ou transversales. ils ne présentent pas de lumière, ou si celle-ci existe, ce n'est qu'une simple fente à peine visible, dont l'existence réelle est toujours douteuse. Us ont un diamètre assez variable; tantôt ils ne présentent sur une coupe que 4-5 cellules (fîg. iO<^); d'autres (1) Pendant la correction des épreuves, nous avons trouvé des cordons médul- laires très développés chez le hérisson adulte. — 270 — fois, et ceci arrive le plus souvent quand on s'approche de la partie parenchymateuse de l'organe, ces cordons sont énormé- ment épaissis, et présentent sur une coupe jusqu'à 10 et 12 cel- lules. Ils mesurent de 18 à 40 |:a de diamètre. Nous avons à considérer, dans l'étude de ces cordons, deux parties constituantes: l'enveloppe conjonctive et les cellules propres (1). L'enveloppe conjonctive est formée de cellules plates (fig. Wj a.) appliquées à la surface du tube. Il arrive parfois qu'une cellule plate n'est appliquée que par une partie de son étendue àia surface du cordon, le reste du corps cellulaire se détachant de celui-ci, pour se placer an sein du stroma ambiant, et se rattacher aux travées conjonctives qui le parcourent. Ces cellules vues de face présentent un corps cellulaire à prolonge- ments multiples, et un noyau fusiforme. Ce noyau fait saillie quand il est vu latéralement, car il est plus épais que le corps de la cellule (fig. ÎO^ de profil, 10^ de face). Nous n'avons pas trouvé de membrane propre autour des cor- dons. Les cellules propres de ces cordons ont une forme cuboïde ou conoide; ils possèdent un noyau très grand, granuleux. Leurs contours sont peu distincts. Leur protoplasme absorbe avidement les matières colorantes. Nous avons déjà parlé incidemment des propriétés que ces cellules manifestent vis-à-vis des réactifs doublement colorants. C'est ainsi que les cellules propres des cordons médullaires se colorent en rouge par le picrocarmin, en violet par l'hématoxy- line, en violet par l'éosine hématoxylique(fig. 7-8-9). Les cellules de ces cordons sont si semblables aux cellules de la membrane granuleuse des folliculesque sur une coupe passant à travers la portion parenchymateuse (fig. 11) de l'organe, il est impossible de distinguer les coupes des jeunes follicules de la coupe des cordons, sauf par ce fait que les premiers contiennent au centre une cellule notablement plus grande que les autres, en voie de développement. (1) Cette structure rappelle celle des tubes glandulaires, notamment des cana- liculessémlnifères. — 271 — Cordons médullaires de la Vesperiigo pipistrella. Nous trouvons ici des cordons médullaires analogues à ceux de la Taupe, mais beaucoup moins développés, et à trajet plus rectiligne (fig. 15-14). Ils ont sensiblement la même structure que chez l'animal que nous venons d'étudier. Cordons médullaires du veau. Nous avons trouvé les cordons chez un embryon de 28 centimètres de long. Ils sont peu nom- breux (fig. 23). L'état qu'ils nous ont présenté diffère profondé- ment de celui que VValdeyer a décrit chez un veau de 4 se- maines (fig. 61 et fig. 62 de Waldeyer, loc.cit.). Chez notre exem- plaire, les cordons, distants les uns des autres, se trouvent dans presque toute la partie médullaire de l'ovaire; nous n'avons trouvé aucune anastomose, mais quelques cordons se dilatent brus- quement à leur extrémité. La différence qu'on remarque entre notre figure et celle de Waldeyer vient à l'appui de la remarque faite par Balfour, qu'il pourrait y avoir des différences de développement des cordons d'un individu à l'autre. Il se pourrait aussi que ces cordons su- bissent des modifications, même après que l'ovaire est entière- ment constitué. Pour déterminer les homologies de ces cordons médullaires, il faut évidemment avoir recours à l'étude de leur développe- ment. Le manque de matériaux nous a mis dans l'impossibilité d'entreprendre cet examen. Cependant nous croyons pouvoir baser sur l'étude de l'organe adulte quelques considérations qui ont au moins une certaine valeur. Nous nous trouvons en présence de trois manières de voir principales au sujet de la nature de ces cordons : 1° Celle de Kôlliker partagée par Rouget, d'après laquelle les cellules des cordons donneraient .naissance aux éléments de la membrane granuleuse. Quoique nous n'ayons jamais vu, comme Rouget et Kôlliker, un ovule primordial pénétrer dans ces cor- dons, nous avons trouvé d'une manière si constante une telle analogie entre la couche granuleuse des follicules et les coupes des cordons, analogie qui fait que telle formation déterminée ne — 272 — peut être rattachée avec certitude à telle ou telle de ces deux catégories d'éléments , que nous n'oserions nous prononcer con- tre l'opinion de Kolliker, bien que nous n'en ayons eu aucune preuve directe. D'autre part, nous n'avons jamais vu aucune trace de rapport entre Tépithélium ovarique et celui des follicules, et toutes nos préparations de l'ovaire de la Taupe, malheureusement toutes faites chez des adultes, s'expliquent bien plus facilement en adoptant l'idée de Kolliker qu'en admettant celle qui a généra- lement cours dans la science, et d'après laquelle la couche gra- nuleuse dériverait de l'épithélium germinatif. 2° D'après Balbiani (qui comme Waldeyer n'attribue aux cor- dons médullaires aucune fonction, mais les considère comme les restes du corps de Wolff), ces éléments seraient les homologues des vasa recta et du rete testis ; enfin 3" d'après Waldeyer et Balfour ce seraient les homologues des canalicules séminifères. D'après ces trois auteurs, les cordons médullaires représentent donc à l'état rudimentaire chez la femelle une portion du testicule. Il existe des analogies incontestables entre les canalicules séminifères et les cordons médullaires, comme l'a fait remarquer Balfour (voir plus haut). Ainsi si l'on compare notre figure 7 (i) àia figure de Tourneux qui représente une coupe d'un testicule d'embryon d'étalon, on sera frappé de l'analogie profonde qui existe entre ces deux or- ganes. De Pun côté comme de l'autre un parenchyme formé de cellules interstitielles, parcouru par de minces travées conjonc- tives; d'une part des canalicules séminifères, de l'autre des cor- dons médullaires ayant exactement le même aspect. Celte ana- logie n'est cependant, il faut bien le reconnaître, qu'une simple présomption en faveur de l'homologie des deux organes. Il nous reste encore une particularité de l'ovaire de la Taupe et de la Vesperugo pipistrella sur laquelle il convient d'appeler l'attention. (1) Coupe de la portion médullaire, de l'ovaire de la Taupe. — 273 — Chez ces animaux, en effet, la surface de la portion de l'ovaire qui renferme les cordons médullaires est recouverte intimement par la capsule ovarique, absolument comme Talbuginée recouvre la surface du testicule. Ce fait, qui n'a peut-être pas une grande importance par lui- même, rend l'analogie de cette portion de Tovaire avec le testi- cule encore plus frappante. On peut dire que chez les animaux cités, plus encore que chez les autres mammifères, on se trouve réellement en présence d'un ovaire en activité accolé à un testicule qui n'engendre pas de produits sexuels, le premier recouvert de son epithelium ova- rique, le second de son albuginée. Nous croyons que ces ovaires peuvent être envisagés comme de vraies glandes hermaphrodites dans le sens de Waldeyer (1) au même titre que les testicules de quelques Bufonidés (Balbiani loc. cit.) qui présentent, appliqué à une de leurs extrémités, un petit ovaire renfermant quelques follicules de Graaf arrêtés dans leur développement. (1) Balbiani admet également un hermaphrodisme de la glande femelle des vertébrés, mais d'une tout autre manière que Waldeyer. id — 274 — TABLEAU DES NOMS D'AUTEURS. 4. Weber, 1° Meckel's Archiv, 1826, p. 105. â'' J. Miiller's Archiv, 1846. 2. Meyerstein, Uber den Eileiter einiger Sàugethiere, Zeitschr, fur ration. Medicin. 1865. 3. Trevirànus. Zeitschrift fiir Physiologie, I, Heft2, p.l80. 4. Waldeyer, Eierstock und Ei. Leipzig, 1870. 5. Waldeyer, Ueber Bmdegewebsz., in Arch, f. Mikr. An. XI, Heft I. 6. OwEN, On the anatomy of Vertebrates. London, 1868, vol. IIL 7. Leydig, Traité d'histologie comparéey trad, française. 8. Wagner, il rc/ì/v fur Anat. (Reichert's Archiv.) 1878. 9. His. Beobachtungen ueber den Bau des Sdugethier Eierstockes — Arch, fiir Mikr. Anat, 1865. 10. Romiti, Ueber den Bau undder Entwickelung des Eierst. iind des Wolf.Ganges. Arch. f. Mik. An. Bd X. 11. KÔLL1KER, Entwickelungsgeschichte des Menschen und der hohe- ren Thiere^i. 12. Semper, Das Urogenital Syst, der Plagiostomen. Inst Wurz- burg, 1875, Arb. zool. zoot. 13. ScHRON, Beitrag zur Kentniss der Anat, und physiologie des Eierstocks der Sdugethiere. Zeitschr. fur Wissenssch. Zoologie Bd. 22,1862. 14. Born, Archiv. fiir Anatomie und Physiologie, 1874. 15. Tourneux, Des cellules interstitielles du testicule ; Journal de Robin, 1879, n° 4. 16. Creighton, On the formation of the placenta in the Guinea pig, Journ, of anat. and physiol., 1 878. 17. Ranvier, Traité technique d'histologie. 18. Renaud, Comptes rendus, 1879. 19. Egli, Beitràge zur Anat. u. Entwickl. der Gescìdechsorgane. Diss, inaug., Zurich, 1876. 20. Balbiani, Leçons d'embryogénie comparée. Paris, 1879. 21. Balfour, On the structure and development of the vertebrate ovar^/, Quart. Journ. of micr. science, 1878, p. 383-438. 22. Rouget, Recherches sur le développement des œufs et de l'ovaire chez les mammifères après la naissance, Combles rendus, 20jan- vier 1879, p. 128-131. — 275 -^ EXPLICATION DES FIGURES. Planche I. Fig. 1 . Ovaire de Taupe, vu dans son ensemble (18 juin 1879). a. come de l'uté- rus, b. oviducte; c. portion parenchymateuse de l'ovaire; d porlioa de l'ovaire renfermant les cordons médullaires. Fig. 2. Id. Id. (6 septembre), a, 6, c, d, comme dans la Ogure précédente. Fig. 3. Id. Id. (27 octobre), a, b, c, d, comme dans la figure 1. En c on voit quelques follicules de Graaf par transparence. En comparant cette figure aux précédentes on voit qu'ici : 1° l'ovaire est beaucoup plus grand; 2° il a une couleur plus foncée; 3° il occupe une position différente. Au lieu d'être en dehors de l'utérus, il est en arrière, et l'extrémité de la corne de l'utérus a subi un changement de position correspondant. Fig. 4. Coupe d'un ovaire de Taupe (18 juin), a. ligament large, recouvrant une partie de la surface de l'ovaire, se réfléchissant en b pour consti- tuer une coque autour de l'organe (cette coque, représentée ici sché- maliquement par la ligne pointillée c, est figurée fig. 6). La portion de l'ovaire la plus pâle est celle qui renferme les cordons médullaires; la plus foncée renferme les follicules de Graaf. La plupart de ceux-ci sont des follicules primordiaux; on y voit un groupe de follicules secon- daires un peu plus grands. Cette portion de l'ovaire est seule recou- verte par un epithelium ovarique. 2 Hartn. Fig. S. Coupe d'un ovaire de Taupe du 6 septembre, a, 6, c, comme dans la figure 4. Dans la portion la plus foncée, la portion parenchymateuse, qui est ici beaucoup plus nettement séparée de l'autre que dans la figure précédente, on voit beaucoup de follicules primordiaux, quelques follicules secondaires, et quelques autres arrivés à peu près à leur entier développement. Deux follicules de cette dernière catégorie se trouvent isolés dans la portion médullaire. 2 Hartn. Fig. 6. Coupe d'un ovaire de Taupe du 27 octobre, a, 6, c, comme dans la figure 4. d. Section d'une des circonvolutions de l'oviducle contenues dans l'épaisseur de la capsule séreuse qui enveloppe l'ovaire, e. portion parenchymateuse. f. portion médullaire. 2 Hartn. Fig. 7. Portion médullaire de l'ovaire de la Taupe, traité par le liquide de Millier, l'alcool absolu et le picrocarmin. a. cellules interstitielles colorées en jaune, b. cordons médullaires (section) colorés en rouge, c. travée conjonctive. 9 imm. Hartn. — 276 — Fig. 8. Id. colorée à l'éosine hématoxylique. a. cellules inlerstilielies en rose. h. cordon en bleu par Thémaloxyline. 9 imm. Hartn. Fig. 9. Id. colorée successivement par le picrocarmin et l'hématoxyline. a. cel- lules interstitielles, teintées en jaune par Tacide picrique. b. cordon médullaire, teinté en bleu par Thémaloxyline. 9 imm. Harln. Fig. 10. Quelques cellules interstitielles de Tovaire de la Taupe, colorées au picrocarmin. 12 imm. Harln. Fig. 10*. Cellule interstitielle de la Taupe présentant la dégénérescence muqueuse, 12 imm. Hartnack. Fig. 10^. Cellules interstitielles de l'ovaire de l'Hermine. 12 Hartn. Fig. 103. Cellules interstitielles de l'ovaire de la Fesperugo pipistrella. 12 Hartn. Fig. 10*. Passage des cellules interstitielles aux cellules plates. (Ovaire de la Taupe.) 9 Hartn. Fig. \0\ Cellule plate, vue de face. (Ovaire de la Taupe) 12 imm. Hartn. F'g. 10*. Cordon médullaire de l'ovaire de la Taupe, a. cellules de l'enveloppe conjonctive. 12 Harlnack. , Fig. 1 1 . Portion corticale de la région parenchymateuse de l'ovaire de la Taupe. Au sein d'un stroma très dense, formé de nombreuses cellules inter- stitielles on trouve : a. follicule primordial, b. follicule presque adulte. c. follicule secondaire, d. cordon médullaire, e. epithelium ovarique. 7 Hartn. Fig. 12. Portion corticale d'un ovaire de Taupe, a. cellule de l'épithélium ova- rique un peu plus grosse -^ les autres; ovule primordial? b. follicule primitif. VII Seibert. Planche II. Fig. 13. Ovaire de Musaraigne (Sorex Sp.?) vu dans son ensemble, a. corne de l'utérus, b. oviducte. b'. pavillon de l'oviducte. c. ovaire, d. follicules de Graaf, vus par transparence, e. vaisseaux sanguins encore à moitié remplis de sang. Fig. 14. Ovaire de la Vesperugo pipistrella (13 décembre), coupé en travers, coloré au picrocarmin. a. ligament large, intimmenl appliqué sur l'ovaire en b, se réfléchissant au-dessus de l'ovaire pour former la capsule c. — d. section de l'oviducte contenu dans l'épaisseur de la capsule c. — e. portion de l'ovaire, renfermant les cordons médullaires teintés en rose. f. stroma de l'ovaire, formé de cellules interstitielles, au sein duquel se trouvent des follicules de Graaf à divers stades de développement et des vaisseaux sanguins, g. epithelium ovarique, 4 Hartn. Fig. IS. Id. Id. d'un autre individu. Ici la coupe est tombée au niveau du pavil- — 277 ~ Ion, dont on voit la section en a. On voit que les franges sont disposées à l'intérieur de la capsule c, et que l'une d'elles b est en relation directe avec l'ovaire. 4 Hartn. Fig. 16. Follicule de Graaf du même animal, arrivé vers la moitié de son déve- loppement, traité par le picrocarmiu. Les cellules du stroma (jaunes), qui entourent immédiatement la couche granuleuse (c) sont aplaties, se rapprochent par leur forme des cellules conjonctives ordinaires. Elles constituent le premier état de différenciation de la theca folliculi. On remarque déjà une zona pellucida (a) assez épaisse entourant l'ovule dont le vitellus granuleux s'est coloré en jaune. 9 Hartn. Fig. 17. Id. Id. plus avancé. On voit ici a plusieurs couches de cellules plasma- tiques s'aplatir contre la couche granuleuse, e. centre du follicule 9 Hartn. Fig. 17^'^ Portion périphérique de id. id. c. cellules de la couche granuleuse dis- posées en quinconce, v. vitellus. s. cellules plasmatiques du stroma. 9 imm. Hartnack. Fig. 18. Coupe d'un ovaire d'Hermine, a. ligament large se réfléchissant autour de l'ovaire de manière à former la capsule c. — 66. sections des diverses circonvolutions de l'oviducte. — d. hile de l'ovaire. — ee. vaisseaux sanguins en travers et en long. — f. condensation du stroma périphé- rique (albuginée aul.) enveloppant l'ovaire et recouvert çà et là d'un lambeau d'épilhélium ovarique (non représenté). — g. follicules pri- mordiaux. — h, II' y h", follicules arrivés respectivement aux 2^, 3« et 4* stades de leur développement (ces mêmes follicules sont représentés figures 20, 21, 22). — k. corps jaune. Le stroma de l'ovaire est formé principalement de cellules interstitielles (/Va5ma:;e//e/i Waldeyer); il est parcouru par des travées fibreuses (/) partant généralement du hile pour aller rejoindre la couche externe f. C'est dans les lobules ainsi délimités que se trouvent les follicules et le corps jaune. 2 Hartn. Fig. 19. Follicule primordial d'Hermine, a. Surface libre de l'ovaire. 6. albuginée aut. c theca folliculi^ reliée en d aux autres septa fibreux de l'organe. e. couche granuleuse. 12 Hartn. Fig. 20. Follicule de Graaf d'Hermine à un stade plus avancé (picrocarmin). a. surface libre de l'ovaire. 6. albuginée aut. c. theca folliculi, reliée en d aux autres septa fibreux de l'organe. Au centre du follicule on voit l'ovule entouré de la membrane gra- nuleuse colorée en rose; autour de celle-ci la paroi propre du follicule, formée de cellules plasmatiques qui ont pris la couleur jaune; cette couche, remarquablement épaisse, est parcourue par de minces travées fibreuses (servant de support à des vaisseaux sanguins non représen- tés) qui partent de la theca folliculi, deviennent plus épaisses en s'ap- prochant du centre, et vont enfin se condenser en une petite coque fibreuse immédiatement autour de la membiane j^'ianulcuse. 7 Harln. — 278 — Fig. 21 et fig. 22. Ces figures, dessinées au même grossissement que la figure précédente, représentent deux stades ultérieurs du développement du follicule de Graaf chez l'Hermine. On remarque Taccroissement pro- gressif de l'ovule, la formation et l'accroissement considérable de la cavité du follicule, la formation du disque proligère, enfin la diminu- tion progressive de la paroi propre du follicule, aa. septa parcourant le stroma de l'ovaire. Fig. 23. Coupe d'un ovaire d'embryon de veau, montrant la disposilion des cor- dons médullaires. 6 Hartn. SUR LES TERMINAISONS DES NERFS DANS LES MUSCLES DES IINSECTES; PAR M. Alex. FŒTTINGER, Docteur en sciences naturelles, au Musée royal d'histoire naturelle de Bruxelles. Le présent travail a été commencé en 1876, au laboratoire de M. le professeur Edouard Van Beneden, à l'Université de Liège. C'est là que j'ai reconnu 1° que la contraction débute toujours sous les plaques terminales, qui portent chez les insectes le nom de cônes de Doyère; 2° que ces organes pré- sentent une striation transversale, comme si les disques mus- culaires se prolongeaient dans la terminaison du nerf. La plupart de mes recherches et la grande majorité de mes dessins sur le Passalus glaberriniis et la Chrysòmela cœridea ont été faites à ce laboratoire. L'été dernier, M. le professeur Th. W. Engelmann voulut bien me recevoir dans son laboratoire d'histologie à Utrecht; j'y ai complété mes études sur la structure de la fibre muscu- laire,et j'y ai découvert que, dans la plaque terminale, le cylindre- — 280 — axe se résout en fibrilles qui vont aboutir aux disques intermé- diaires. Je remercie sincèrement ces deux savants pour la direction qu'ils ont bien voulu me donner dans l'étude de ces questions, et pour les conseils qu'ils n'ont cessé de me prodiguer pendant mon séjour auprès d'eux. Mes recherches sur les plaques nerveuses terminales ont été faites exclusivement sur des insectes ; j'ai été conduit à exécuter ce travail en cherchant à m'éclairer sur la composition intime de la fibre musculaire striée; on sait que les muscles des Arthro- podes en général et ceux des insectes en particulier se prêtent mieux que tous les autres à l'étude de la striation transversale et des modifications qu'elle subit lors de la contraction. Les meilleures préparations m'ont été fournies par la Chry- somela cœrulea, coléoptère qui se trouve en été sur diverses plantes de la famille des labiées et notamment sur les menthes, par VHydropliilus piceus^h Lina tremulœ^ et le Passalus gla- berrinus. Si Ton place une Chr} somèle vivante dans de l'alcool fort (85 à 95" Gay-Lussac), qu'on l'y laisse quelques jours, puis, que l'on examine des fibres musculaires isolées, enlevées aux muscles des pattes, ou à ceux qui relient le prothorax au céphalothorax, on observe, même à un faible grossissement, que chaque fais- sceau primitif présente un certain nombre de plaques nerveuses terminales (fig. 1 et 2). Ces plaques affectent généralement la forme d'un cône; tantôt la hauteur de ce cône nerveux est assez considérable et la plaque terminale est volumineuse; tantôt cette hauteur est faible, et la plaque terminale s'étend en surface. Au sommet du cône plus ou moins élevé aboutit une fibre nerveuse. D'ordinaire, par suite des manipulations que l'on a fait subir aux faisceaux musculaires primitifs, afin de les isoler, les fibres nerveuses se brisent plus ou moins près de leur point d'entrée dans la plaque terminale; mais on réussit de temps à autre, surtout lorsque la dilacération n'a pas été poussée trop — 281 — loin, à obtenir des collines nerveuses munies de fibres nerveuses assez longues. Il arrive souvent, principalement lorsque Ton examine des fibres musculaires bien isolées, que certaines plaques terminales ont l'aspect d'une masse arrondie de substance granuleuse, à laquelle aboutit parfois une fibre nerveuse. Cette forme est due à ce que par la dilacération on a enlevé une partie de la plaque terminale, ou bien, ce qui est plus fré- quent, à ce que la fibre musculaire, au niveau de la terminaison nerveuse, est à l'état de contraction. Lorsque celle-ci se produit au niveau d'un cône nerveux, ce dernier est obligé de se rac- courcir; il se ramasse sur lui-même, il augmente de hauteur et prend une forme arrondie ou plutôt elliptique à la coupe optique. Si la contraction est très forte, il arrive même que les bords de la plaque, au lieu d'être plans ou concaves, présentent une courbe convexe, d'où résulte pour la plaque terminale l'aspect d'une masse elliptique, granuleuse, partiellement indépendante de la fibre musculaire et accolée à celle-ci. A un faible grossissement on distingue souvent dans la col- line de Doyère des noyaux en nombre plus ou moins considé- rable. Ces éléments sont sphériques ou ellipsoïdaux. On remarque parfois que la substance granuleuse, qui constitue la plaque terminale, semble fragmentée en un certain nombre de parties qui toutes, ou dont quelques-unes seulement, contiennent un noyau (fig. 5). Chez les insectes les plaques terminales sont généralement multiples pour une même fibre musculaire. Chez la CImjsomela cœrulea (fig. 1) on compte jusque neuf cônes nerveux sur une longueur de 1 millimètre. Ce nombre n'est pas toujours aussi considérable. Chez un autre coléoptère, le Passaliis f/laberrimis , on trouve quatre ou cinq plaques sur des portions de fibres de 1 72 millimètre de long. VHydrophilus piceiis montre jusque six plaques sur une même fibre. Les plaques terminales sont situées à la surface de la fibre musculaire, et recouvertes, du côté de leur face libre, par une membrane mince, anhiste, transparente, qui est en continuité, — 282 — d'une part, avec le sarcolemme, et d'autre part, avec la gaine de Schwann de la fibre nerveuse. Il sera utile, je pense, de donner quelques détails relatifs à la répartition des plaques terminales, sur une même fibre mus- culaire. Je n'ai pu trouver de règle qui puisse être appliquée à la distribution de ces terminaisons nerveuses. Tantôt, et c'est le cas le plus fréquent (fig. 1 et 2), les plaques terminales sont pour la plupart situées d'un même côté de la fibre musculaire, tantôt elles sont disséminées sans ordre sur toute la surface de la fibre, de telle sorte, qu'un tel faisceau primitif examiné par transpa- rence, montre ses plaques terminales situées les unes à sa droite, les autres à sa gauche, celles-ci à sa face supérieure, celles-là à sa face inférieure, d'autres enfin dans des positions intermédiaires. Le nombre des segments musculaires situés entre deux plaques voisines varie beaucoup : c'est ainsi que dans la figure 2, entre rt et 6 on en compte 23, entre b et c 13, entre c et cl 21, entre c? et e 14. Parfois l'on trouve deux plaques terminales Tune vis-à-vis de l'autre (fig. 20), aux extrémités opposées d'un même diamètre transversal. D'autres fois, situées du même côté, elles se tou- chent latéralement et ne forment en apparence qu'une seule plaque terminale. J'ai rencontré chez h Lina frewm/œ jusque quatre plaques ner- veuses juxtaposées, l'intervalle qui les séparait n'étant que de quelques segments musculaires. Souvent l'on trouve (fig. 8) deux plaques terminales tout près l'une de l'autre, séparées seulement par une ou deux cases musculaires. J'ai observé que de chacune d'elles part alors une fibre nerveuse qui, après un trajet très- court, se réunit à celle de la plaque voisine , pour former avec elle un tronc nerveux unique. La comparaison de ces prépara- tions avec d'autres, dont les plaques ne se continuent pas en une fibre nerveuse, montre que dans les dernières les nerfs ont été arrachés par suite de la dilacération. Quelquefois, les nerfs partant de deux plaques terminales contiguës, se réunissent si près de leur sortie des cônes nerveux, qu'il semble n'y avoir — 285 — qu'une plaque terminale unique (fig. 14), et dans ce cas , le nombre de cases musculaires situées entre les deux plaques est toujours réduit à un, deux ou trois. Ailleurs, les fibres ner- veuses se réunissent en un tronc unique à une certaine distance de la fibre nerveuse, et dans ce cas les plaques terminales sont séparées l'une de l'autre par un plus grand nombre de loges musculaires (fig. 18). Les recherches que j'ai faites sur un grand nombre d'insectes m'ont montré que la contraction commence toujours au niveau des plaques terminales et seulement en ces points. Je suis arrivé à cette conclusion en étudiant les insectes dont les noms suivent : Chrysomela cœrulea, Lina tremulœ^ Hydro- philus piceus, Passalus glaberrinus ^ Chrysomela spec, Peripla- neta orientalis, Cicindela hybrida, Cicindela viridis^ plus un grand nombre de Chenilles; tous m'ont conduit aux mêmes résultats. L'insecte est plongé vivant dans l'alcool, ou tué par injection d'acide osmique à 1 7o, puis transporté dans de l'alcool fort; de cette façon les muscles relâchés ou contractés, ou bien encore à l'un des états intermédiaires entre ces deux phases extrêmes sont fixés et durcis par les réactifs dans leur position naturelle. Quelques auteurs ont déjà fait entrevoir que la contraction commence dans le voisinage des terminaisons nerveuses, sans que cependant le fait ail été soigneusement analysé, et sans qu'il ait attiré toute l'attention qu'il mérite. R. Arndt dit à ce sujet (1) « Sehr erleichtert jedoch wird das Auffinden der Doyère'schen Hiigel durch das Contraktions- phânomen des Muskelbûndels. Denn dieses kommt immer zueist in der Nâhe derselben zu Stande, ja bleibt eine Zeit lang nach dem Tode nur auf dièse beschrânkt und bewirkt dadurch, dass man in ein und demselben Bûndel contrahirte dunkie Stellen mit relaxirten hellen abwechseln siehl. Wenn man nun in einer (1) Arndt, Untersuchungen uber die Endigung der Nerven in den querge- streiften Muskelfasern^ Arcuiv. fììr mikrosk. Anatomie, Bd IX, p. o04. — 284 — der contrahirten Stellen genau nachspaht, vielleicht dabei noch auf die verschiedenen Verhàltnisse besonders Acht giebt, wird man auch vvohl immer den Doyère'schen Hûgel und an ihm haftend ein freies Fadchen, den Nerven, finden. ;> M. R. Arndt a surtout vu cela chez les muscle^ de Geolrupes et (ÏYpono- menta. Léon Fredericq (I) dit en parlant de la fibre musculaire vivante examinée dans la chambre humide : « On voit alors, dans les circonstances favorables, un mouve- ment ondulatoire de contraction parcourir la fibre en longueur. Ce mouvement offrant la rapidité de l'éclair au commencement, se ralentit peu à peu de façon à permettre l'observation. Enfin, quand la fibre musculaire est sur le point de mourir, certaines parties deviennent immobiles, les contractions se limitent à un petit nombre de segments toujours situés dans le voisinage d'une terminaison nerveuse. Ces segments eux-mêmes ne se contrac- tent pas dans toute la largeur de la fibre : ce sont les parties im- médiatement contiguès à l'entrée du nerf moteur qui persistent les dernières dans leur mouvement. » Toutes mes observations sur les diverses phases de la con- traction , telles qu'on peut les constater sur des muscles d'in- sectes instantanément tués, m'ont conduit a cette conclusion que la contraction ne commence pas seulement au voisinage des plaques terminales, mais qu'elle débute immédiatement en des- sous de la plaque terminale. Ce sont ces points de la fibre mus- culaire striée, qui sont en contact immédiat et direct avec la plaque nerveuse, qui se contractent en premier lieu et qui con- servent les derniers leur conlractilité au moment de la mort du muscle. En admettant l'exactitude du fait qu'arrivera-t-il si l'on fixe, soit par l'alcool, soit par l'acide osmique, une fibre muscu- laire striée, au moment où elle est irritée par l'intermédiaire de ses plaques nerveuses terminales? 11 est clair que, si l'opération est suffisamment rapide, les (1) Léon Fredericç, Génération et structure du tissu musculaire. Bruxelles, 1875, p. 47. — 285 — parties musculaires situées sous la plaque terminale, devront se trouver dans un étal de contraction différent de celui des parties voisines, et que de plus, cet état de contraction devra être plus avancé, plus accentué que dans tout autre point. On pourrait croire que lorsque l'on opère sur des insectes entiers l'alcool et Facide osmique n'agiront pas assez vite pour flxer soit une onde de contraction , soit à plus forte raison le début même du phé- nomène. En dilacérant un muscle d'insecte tué de cette façon on trouve des faisceaux qui ne montrent aucune trace de con- traction, à côté d'autres sur lesquels on observe un ou plusieurs ventres de contraction extrêmement étendus; d'autres encore présentent des ondes très-différemment développées. L'observa- tion montre donc que ces réactifs fixent toutes les phases de la contraction, même celle que l'on a désignée sous le nom d'onde latérale (fig. 1 , 2, 5, 6, 18) et qui n'est que le début de la contraction, au niveau des plaques terminales. Plusieurs auteurs ont parlé de ces ondes latérales sans en reconnaître la vraie signification. Flôgel (1) a signalé en ces termes l'aspect particulier que pré- sente en certains points la striation musculaire : « Man sieht zuweilen, dass in der nàchslen Umgebung des Kerns die Quer- vvânde beinahe strahlig nach dem Kern gerichtet sind (fig. 4.) » Je suis très-tenté de croire que M. Flôgel n'a pas eu affaire ici à un noyau de la fibre musculaire, mais bien à une plaque ter- minale pourvue d'un élément nucléaire; la fibre nerveuse avait probablement été enlevée par la manipulation ; la description s'applique très bien à ce que j'appelle une onde latérale. Merkel (2) parle, lui aussi, des ondes de contraction partielles, et en donne un dessin exact. L. Ranvier (5) fait souvent mention de ces ondes latérales, et (1) J.H. L. Flôgel, Uebet' die quergestreiften Muskelnder Milben. — Archi v FUR MIKROSK. ANATOMIE, Bd VIII, p. 75, pi. Ill, fig. 4. (2) Fa. Merkel, Dei' quergestreifte Muskel. — Archiv fììr mikrosk. Anatomie, Bd IX, pi. XV, fig. IV. (3) Anatomie générale. Collège de France. Progrès médical^ 1876, page 853. — 286 — il les utilise pour l'étude de la contraction musculaire. 11 a repré- senté schéniatiquement une de ces ondes, mais le dessin qu'il donne est entièrement différent de ce que j'ai vu chez tous les insectes que j'ai examinés, il suffira de comparer le dessin dece savant avec celui que je donne (fig. 6) pour juger de l'écart consi- dérable qui existe entre notre manière de voir sur les phéno- mènes de la contraction. Mais je ne veux pas entrer ici dans la discussion des opinions si diverses qui ont été émises sur les modifications que subit le strié transversal du muscle au moment de la contraction. Je publierai prochainement mes études sur la structure de la fibre musculaire et sur les modifications qui se produisent dans le muscle lorsqu'il se contracte. M. le professeur Engelmann (1) parle de contractions à marche dissymétrique, et figure une onde latérale, observée à la lumière ordinaire et à la lumière polarisée. Ranvier (2) considère l'onde musculaire comme un phéno- mène anormal. Il dit à ce propos : « Il est maintenant nécessaire de se demander quel rapport existe entre les ondes que nous venons d'étudier et la contraction musculaire normale. Je dois vous avouer que ce rapport est difficile à déterminer; mais d'un autre côté, je puis vous dire que la comparaison qu'on a voulu l'aire entre l'onde spontanée ou provoquée qui parcourt la fibre musculaire et la contraction brusque et totale de celle-ci qui seule est la véritable contraction, n'avait aucune raison d'être. L'onde musculaire n'est en effet qu'un phénomène anormal. C'est un mode de réaction particulier de la substance musculaire. Quand un muscle se contracte, il le fait en un seul temps. J'ai pu vérifier ce fait nombre de fois, en observant le mode de con- traction des muscles des Cyclopes. Le travail accompli est lui- même très-peu considérable et son effet utile à peu près nul. (1) Ttt.W .EtiGELmxytfyNouvelles recherches sur les phénomènes microscopiques de la conlraclion musculaire. — Archives néerlandaises des sciences exactes et NATURELLES, lome XIII, p. 451 , pi. 7, fig. 6 a el 6. (2) Progrès médical^ 1876, p. 853. — 287 — Parlant, il n'existe ici rien de comparable au travail produit par la contraction totale, synchrone et synergique des diverses parties d'un même muscle volontaire, et les deux phénomènes doivent être et demeurent enlièrement séparés. i> A notre avis Tonde musculaire que l'on observe sur des fibres d'insectes fixées par l'alcool ou l'acide osmique, n'est que la manifestation permanente de la contraction normale du muscle. La présence d'une plaque terminale au niveau de chaque onde totale ou partielle indique déjà qu'il ne s'agit pas ici d'un accident. Si l'on observe une fibre (fig. 1 et 2) présentant un certain nombre de plaques terminales, on voit que la contraction est à peu près la même, qu'elle a pour ainsi dire la même intensité au niveau de chacune de ces terminaisons nerveuses. La fibre musculaire qui se contracte brusquement doit nécessairement se contracter d'abord aux plaques terminales; mais si à ce moment la fibre est tuée les portions intermédiaires seront à l'état de repos. C'est ce que montre parfaitement la figure 2. 11 arrive parfois que l'on peut observer deux ou plusieurs fibres réunies en un faisceau, encore fixées à leurs tendons, qui toutes sont con- tractées au même niveau et avec la même intensité (fig. 15). Flôgel (i) parle d'un cas de ce genre, et en donne un dessin. D'autres fois, l'on trouve deux fibres adjacentes, qui présentent chacune deux ondes latérales d'égal développement et situées à la même hauteur. De ces faits l'on peut déduire que fonde musculaire totale aussi bien que l'onde partielle sont la manifestation normale de la contraction musculaire; l'onde latérale n'est que le début de la contraction dont l'achèvement amène la production de l'onde totale. Je ne parle pas ici de fonde musculaire mobile qui parcourt la fibre dans le sens de sa longueur. Ce que j'ai en vue ici et ce que je désigne sous le nom d'ondes musculaires, ce sont ces ventres de contraction que l'on rencontre sur les fibres musculaires au (1) J. H. L. Flôgel, Archiv fììr mikrosk. Anat., Bd. VIII, p. 75, pi. III, fig. 7. — 288 — niveau des plaques nerveuses. L'onde musculaire qui se propage le long du faisceau musculaire primitif est peut-être un tout autre phénomène. Je dois dire que je n'ai pas suffisamment étudié cette onde mobile que l'on voit, dans certaines conditions expérimentales parcourir la fibre. Mais je n'ai jamais observé de partie contractée, c'est-à-dire d'onde totale ou partielle entre deux plaques terminales voisines; toujours j'ai obtenu, quand je m'adressais à des fibres bien préparées, des images semblables à celle que j'ai représentée par la figure 2. Et lorsque Ranvier dit que l'onde musculaire n'est qu'un phénomène anormal, il a peut-être raison pour ce qui regarde cette onde mobile dont je viens de parler. J'ai observé sur des insectes vivants que la contraction ne se produit pas en un seul temps, mais qu'elle se propage peu à peu dans toute la longueur du muscle ; malheureusement il ne m'a pas été permis de voir sur le vivant si, comme j'en suis con- vaincu, cette contraction partait de la plaque terminale. L'existence des ondes latérales (fig. 1) sur des fibres fixées par l'alcool, semble prouver qu'à l'état normal la contraction ne se fait pas d'une pièce, mais qu'elle part des plaques nerveuses, pour entreprendre ensuite toute la fibre. Cette propagation de la contraction doit évidemment se faire le long de la fibre entre deux plaques terminales, c'est-à-dire qu'entre ces deux points on doit pouvoir observer la contraction musculaire s'avançant peu à peu dans les parties intermédiaires. L'alcool peut fixer cette contraction qui se propage; de là la pré- sence de longues ondes de contraction, ou de parties contractées également dans une grande étendue de la fibre musculaire. Ranvier parle d'ondes de contraction qu'il a observées sur des fibres du couturier de la grenouille alors que ce muscle s'était contracté et rétracté sans l'influence de l'acide osmique. Je ne puis discuter cette observation , n'ayant pas opéré sur des verté- brés. Toutefois, je pense que ce que j'ai dit à propos des fibres des insectes peut se rapporter, au moins en partie , aux muscles des vertébrés. De l'abondance de ces ondes latérales chez les insectes, l'on pourrait conclure que chez ces animaux la contrae- — 289 ~ lion se propage avec lenteur. Ce qui tend encore à établir ce fait, c'est le grand nombre de plaques terminales qui se trouvent sur une même fibre musculaire : j'en ai compté jusque neuf sur une portion de fibre d'un millimètre de longueur. Si la contraction commence toujours et seulement au-dessous des plaques terminales, il faut 1" que partout où il y a une onde latérale, il existe une plaque terminale; 2° qu'entre deux plaques terminales l'on n'observe jamais d'onde de contraction commen- çante. Quant au premier point, remarquons que Ton ne doit pas, pour résoudre cette question, s'adresser aux fibres qui présentent des ondes de contraction totales, qui sont très larges et qui sont envahies par la contraction sur une assez grande partie de leur longueur. Pour se prêter à l'examen il faut que les fibres aient été isolées; il faut au moyen d'aiguilles séparer les fibres des diverses substances qui les entourent, c'est-à-dire des tra- chées, du tissu conjonctif, des troncs nerveux; il est clair que par ces manipulations l'on enlevé un certain nombre de plaques ner- veuses. Cependant dans l'immense majorité des cas de semblables ondes montrent une plaque terminale, qui toujours est située au niveau de la partie la plus ventrue de la fibre musculaire, c'est- à-dire là où la concentration est la plus accentuée. A côté des fibres, présentant de longues ondes de contraction , ondes qui montrent la fibre contractée avec la même énergie sur une grande partie de son trajet, on en rencontre d'autres, également con- tractées, qui présentent une indication de contraction latérale. Ces dernières fibres sont contractées sur une bonne partie de leur trajet; mais vers leur milieu ces ondes montrent des traces de contraction latérale, c'est-à-dire que, en un point du pourtour de la fibre, la contraction est plus forte que partout ailleurs. Cette onde latérale, qui souvent est à peine indiquée, peut passer inaperçue, surtout si elle est située à la face inférieure de la fibre, couchée sur le porte-objet. Pour découvrir cette onde latérale, il faut abaisser le tube du microscope jusqu'à ce que l'on aperçoive cette face inférieure du faisceau primitif, ou bien faire rouler ce dernier sur le porte-objet de façon a amener le 20 ~ 290 — renflement latéral dans la coupe optique de la fibre. S'il existe une plaque terminale au niveau de cette onde, on la trouvera tou- jours là où s'observe le maximum de contraction. Beaucoup plus décisives sont ces ondes latérales qui n'inté- ressent qu'une faible portion de la fibre musculaire, surtout si celle-ci est encore à l'état de repos du côté opposé à de cette onde partielle. Si à ce niveau se trouve une colline nerveuse (ce qui est le cas le plus habituel), celle-ci est toujours située au milieu de l'onde latérale (tig. 1 et 4). Je ferai remarquer que, comme l'a fort bien fait observer M. R. Arndt (i), la présence des trachées rend fort difficile la recherche et l'étude des plaques nerveuses terminales. Générale- ment au niveau du cône de Doyère arrive un gros tronc trachéen, qui se divise un grand nombre de fois, et dont les branches de divisions s'étalent dans toutes les directions à la surface de la libre musculaire et de la terminaison nerveuse. Or, il arrive fré- quemment, chez certains insectes, que lorsque l'on veut enlever ces trachées, l'on arrache en même temps les plaques terminales et l'on doit s'estimer heureux si çà et là un fragment de plaque reste adhérent à la hbre musculaire. Heureusement tous les insectes ne présentent pas cet inconvénient au même degré : la Chrysomelacœrulea, la Li?ia tremidœ et le Passahis glaberri- niis, sont d'excellents sujets d'étude sous ce rapport, et ce sont eux qui m'ont fourni mes meilleures préparations. S'il arrive parfois, même chez ces espèces, que l'on ne trouve pas de plaque terminale en contact avec une onde latérale, le nombre de ces cas est en réalité si restreint, que l'on est en droit de considérer les premiers comme des accidents de préparation. Abordons le second point. J'ai parlé précédemment de ces faisceaux musculaires, qui montrent deux plaques terminales contiguës ou à peu près, et dont les fibres nerveuses vont aboutir à un même tronc d'ori- gine. Ces cas sont on ne peut plus concluants pour prouver que la contraction ne commence qu'au contact de la plaque nerveuse. (i) Op. cî7,p. S04. — 291 — En effet Ton observe alors (fig. 8 et 18) entre les deux plaques terminales deux ou quelques cases musculaires. Généralement sous la plaque terminale tout le faisceau primitif est contracté, tandis que les loges intermédiaires sont à l'état de repos ou a peu près. Dans d'autres cas analogues, la contraction envahit une grande étendue de la fibre musculaire (fig. 14); mais un examen attentif montre que, entre les plaques terminales, la contraction est moins forte qu'au niveau même de ces organes. Je sais bien que Ton rencontre quelquefois entre deux plaques terminales assez distantes l'une de l'autre et au niveau desquelles existent des ondes latérales, des ventres de contraction qui ne montrent pas le plus petit indice de plaque nerveuse; mais me fondant d'une part sur la facilité avec laquelle les collines nerveuses se détachent pendant la dilacération, d'autre part sur le petit nom- bre de cas où les plaques font défaut au niveau des ondes laté- rales, je n'hésite pas à affirmer que dans ces cas la plaque ter- minale avait été arrachée. On peut encore citer, comme très-démonstratives sous ce rap- port, ces fibres qui montrent un grand nombre de plaques ter- minales (fig. 1) assez rapprochées l'une de l'autre, toutes pour- vues d'ondes latérales, et chez lesquelles il n'existe pas de trace de contraction, si ce n'est sous les collines nerveuses. Le fait que la contraction débute toujours au contact de la terminaison nerveuse ei jamais ailleurs, pourra peut-être donner la solution de l'une des question les plus importantes de la phy- siologie des muscles; je veux parler de l'irritabilité propre des muscles. Haller, se basant sur ce que le cœur, qu'il considérait comme constitué uniquement de substance musculaire, se contracte encore sous l'influence de certains agents, quand il est isolé, déclara que les muscles peuvent se contracter sans l'intermé- diaire des nerfs. Mais on a reconnu depuis que son expérience n'autorise aucunement cette conclusion : le cœur renferme un grand nombre de fibres et même des centres nerveux. On se fonde aujourd'hui, entre autres arguments, pour sou- tenir l'existence de la contractilité propre sur la conservation de — i29ì2 — l'irritabilité des muscles chez des animaux empoisonnés par le curare, et il semble que les faits expérimentaux que l'on constate dans ces conditions établissent que les seuls organes atteints par le poison sont les plaques nerveuses terminales. Cependant cette conclusion n'est pas, tant s'en faut, à l'abri de toute objec- tion. Le fait que chez les insectes la contraction d'une fibre mus- culaire débute au niveau des collines de Doyère, pourrait servir à élucider la question de savoir si vraiment le curare paralyse les plaques terminales. Car si chez un insecte curarisé et ultérieu- rement traité soit par l'acide osmique soit par l'alcool, on n'ob- serve plus les ondes latérales au niveau des plaques nerveuses, si les ondes totales ou partielles font défaut, ou si elles se pro- duisent indifféremment en un point quelconque du faisceau pri- mitif, on pourra conclure légitimement à l'altération de la colline de Doyère, puisqu'il est expérimentalement démontré que le curare n'agit pas directement sur les nerfs. Ceci étant une fois établi, si dans les muscles de l'insecte curarisé il se produit des ondes de contraction en un point quel- conque d'un faisceau primitif, ce fait sera un argument de plus en faveur de l'irritabilité propre du muscle. J'ai fait quelques expériences avec le curare. Elles ne m'ont pas donné de résultat. Je ne suis pas parvenu à immobiliser un insecte avec ce poison. Si le curare ne produit pas d'effet chez les insectes, un autre réactif réussira peut-être, et l'on peut espérer avec quelque raison que la conicine ou la nicotine fourniront de meilleurs résultats. Mes observations sur les insectes, établissant que la contraction commence toujours au niveau des plaques terminales, seront probablement un jour confirmées chez les vertébrés et ici l'emploi du curare ne se fera sans doute pas sans succès. Avant de décrire les plaques nerveuses terminales, telles qu'elles se présentent chez les insectes, lorsqu'on les observe à un fort grossissement, il sera utile, je pense, de dire d'une façon précise ce que j'entends par une onde de contraction commen- — 295 — çanle, et de résumer en peu de mots mes observations sur les changements que subit le strié transversal pendant la contraction. Ainsi que je l'ai dit précédemment, l'on rencontre souvent sur des fibres musculaires de Chrysomela cœriilea, de Passahis gla- berrinus et d'autres insectes, des places légèrement contractées. La contraction n'a pas envahi tout le pourtour de la fibre, mais seulement une partie de sa circonférence. Si l'on est assez heu- reux pour rencontrer une libre montrant une de ces ondes laté- rales tout au débuts on remarquera : l'' qu'il existe en ce point une légère dilatation unilatérale du faisceau ; S** que le strié a subi à ce niveau certaines modifications (fig. 6). Dans la description qui va suivre, la fibre est supposée placée de telle façon que l'onde latérale soit vue exactement de profil. La slriation n'est plus parfaitement transversale : les différents disques ne sont plus perpendiculaires à Taxe longitudinal de la fibre. La striation a un aspect plus ou moins rayonné, le centre d'où partent ces divers rayons étant le point le plus fortement contracté, c'est-à-dire le centre de l'onde latérale. On pourrait croire que la contraction, en amenant un raccour- cissement très-marqué de la fibre dans un des points de sa sur- face, doive produire une inclinaison plus ou moins brusque des disques dans toute la largeur du faisceau. Il n'en est rien, et ceci montre combien les éléments constitutifs delà fibre, c'est-à-dire les fibrilles, sont indépendantes l'une de l'autre. La contraction, ou plutôt l'irritation se propage radiairement dans tous les sens à partir de la plaque terminale. Si l'on observe successivement les divers points d'un diamètre transversal de la fibre en se rapprochant du centre d'une onde latérale, on verra se succéder toutes les phases de la contraction depuis l'état de repos jusqu'à l'étal de contraction complète. On voit alors les disques intermédiaires {Zivischenscheìben), et les disques accessoires (Nebenscheiben) devenir de moins en moins distincts, puis disparaître entièrement; les bords des disques transversaux (Querscheibsn) devenir de plus en plus obscurs et former deux raies noires {Contrac lionschciben de Nasse) qui limitent la substance isotrope; le disque médian {Mitfelscheibe) — 294 — clair disparaître petit à petit et être remplacé par une ligne obscure, qui, dans le stade de contraction complète s'évanouit à son tour. Les disques de contraction {Contractionscheiben) provenant de deux disques anisotropes primitifs, se rapprochent, se fondent en un seul disque sombre. Dans la portion complète- ment contractée on ne distingue plus que des disques sombres et des disques clairs alternant entre eux. Ces derniers corres- pondent par leur position aux disques anisotropes. Je ne puis entrer ici dans la description détaillée des diverses phases de la contraction. Je n'ai fait qu'esquisser à grands traits les changements que montre la fibre musculaire en passant de l'état de repos à l'état de contraction, tels qu'ils se montrent lorsque l'on observe une onde latérale. Comme l'avait vu Engel- mann, les ondes latérales permettent cV étudier sur un petit espace j tous les changements de la fibre depuis l'état de repos jusqu'à l'état de contraction. Cette circonstance est surtout pré- cieuse lorsque l'on examine les fibres musculaires au moyen de la lumière polarisée. Ces ondes latérales ou commençantes facilitent de beaucoup la recherche des plaques terminales, puisque c'est toujours au niveau de ces dernières que les ondes se produisent. Les plaques terminales, situées sous le sarcolemme, couvrent la fibre musculaire sur une plus ou moins grande partie de la surface. La colline nerveuse montre assez souvent dans son intérieur un certain nombre de noyaux. Elle est formée d'une substance granuleuse, et présente parfois des traces de division en plusieurs parties (fig. o.) Cette division se fait perpendiculaire- ment à l'axe longitudinal de la fibre musculaire, et les diverses portions de la plaque contiennent d'ordinaire un noyau. Cette division peut quelquefois être fortement accentuée, et la plaque terminale à laquelle aboutit une fibre nerveuse, et au niveau de laquelle se trouve généralement une onde latérale, semble for- mée par la réunion d'une série de petites cellules plus ou moins cuboïdes ou cylindroïdes, juxtaposées. Dans d'autres plaques il n'est pas possible de trouver la moindre trace de cette division. Mais les plaques terminales que j'ai étudiées présentent encore — 295 — d'autres particularités. J'ai obtenu de très-bonnes préparations de terminaisons nerveuses de l'hydrophile en employant la méthode suivante : J'ai injecté dans le corps de l'insecte vivant de l'acide osmique à 1 p. 7o; après avoir fixé les muscles par ce réactif, j'ai lavé l'animal en injectant de l'eau très-légèrement ammoniacale, puis de l'eau distillée, et enfin de l'alcool fort; j'ai injecté plusieurs fois de l'alcool, et enfin l'animal entier a été placé dans de l'alcool fort. Il y est resté huit à dix jours. J'en ai fait ensuite des préparations à la glycérine. J'ai conservé cet hydrophile pendant deux ans, et cette année j'ai pu en faire encore plusieurs bonnes préparations. L'acide osmique avait coloré les fibres musculaires. J'utilisai exclusivement les fibres qui avaient pris une teinte brunâtre relativement faible. Sur un grand nombre de plaques terminales j'ai remarqué des stries plus on inoins nettes, qui , partant du point d'entrée de la fibre nerveuse, vont aboutir aux disques intermédiaires (fig. 7-17). Les fibres sur lesquelles j'ai fait ces observations étaient les unes relâchées, les autres en état de contraction. Il n'est pas fréquent de trouver au niveau d'une plaque terminale l'état de repos, attendu que si la fibre est quelque peu contractée, et il est rare qu'elle ne le soit pas en l'un ou l'autre point, la con- traction siège toujours sous une plaque terminale. Il me sembla dès l'abord que cette striation était le résultat de la présence de fibrilles à l'intérieur du protoplasme de la plaque terminale et ces fibrilles paraissaient être en continuité avec le cylindre axe (fig. 7, 9, 15, 17). Déjà, lorsque j'étais au laboratoire de l'Université de Liège, Edouard Van Beneden m'avait fait remarquer que chez la Chrysomela cœrulea, plusieurs plaques terminales, partiellement détachées de la fibre muscu- laire, étaient cependant encore adhérentes à cette dernière au niveau de certains disques. Il me signala également une striation transversale dans quelques collines et il lui semblait que ces stries se continuaient avec des disques déterminés de la substance musculaire. Mais la striation dont j'ai parlé précédemment, est-elle bien due à des fibrilles situées à l'intérieur de la plaque? C'est ce — 296 — que je devais tout d'abord examiner; car celte striation pouvait appartenir à des trachées très lines de la surface de la colline, ou à des plis de la membrane qui limite la plaque. On sait en effet que les plaques terminales sont générale- ment accompagnées d'un nombre assez considérable de trachées, qui se divisent au niveau de la colline nerveuse en une infinité de branches enveloppant la plaque terminale et la fibre muscu- laire. Mais un examen attentif des dernières ramifications dé- montre que ces fibrilles n'ont rien de commun avec des tra- chées. Celles-ci n'ont jamais un (rajet recliligne; elles sont encore relativement volumineuses et on leur distingue une double paroi ; elles ont un aspect particulier et sont situées au-dessus ou au- dessous de la plaque; enfin on peut généralement les poursuivre jusqu'à une trachée bien reconnaissable. Mais la striation n'est-elle pas due à des plis de la membrane? Le sarcolemme est adhérent à la fibre musculaire au niveau des disques intermédiaires et au sarcolemme aboutit la gaine de Schwann; si donc l'on exerce une traction sur la plaque termi- nale, comme pour la détacher de la fibre musculaire , en tirail- lant la fibre nerveuse, ne pourra-t-il pas se produire des plis qui partiront des points d'attache du sarcolemme à la fibre muscu- laire, c'est-à-dire des disques intermédiaires, pour converger vers la fibre nerveuse? Évidemment oui. On ne peut nier qu'une telle traction ne doive produire très fréquemment cet effet: les libres musculaires sont reliées les unes aux autres par des nerfs, et lorsque l'on sépare ces faisceaux musculaires primitifs l'un de l'autre, on doit exercer sur les pla- ques terminales, par l'intermédiaire des fibres nerveuses une traction qui pourra produire les plis dont j'ai parlé. Mais la striation que j'ai signalée dans les plaques terminales est-elle due à de semblables plis? Je ne le crois pas. D'abord ce qui parle en faveur de l'existence de fibrilles nerveuses à l'inté- rieur de h plaque, c'est la grande régularité que présentent ces fibrilles dans leur disposition. Ensuite, il faut tenir compte du grand nombre de préparations que j'ai obtenues, sur lesquelles la striation siégeait manifestement non pas à la surface, mais dans — 297 — répaisseur (Je la plaque. Puis, s'il ne s'agissait de plis, on aurait quelque difilcullé à expliquer leur présence sur des plaques terminales brisées (fig. i\). Enfin j'ai trouvé (fig. 19) plusieurs plans de ces fibrilles dans une plaque terminale adjacente à une onde latérale. Les fibrilles nerveuses partent du cylindre-axe et vont en diver- geant aboutir aux disques intermédiaires. Sur certaines prépa- rations on voit ces fibrilles au nombre de cinq à six s'écarter l'une de l'autre en divergeant à partir de la terminaison du cylindre- axe. D'autres plaques montrent jusque sept fibrilles, (fig. iO) qui partent en rayonnant du point d'entrée du nerf dans la plaque terminale. Dans d'autres cas, il est vrai, l'on ne peut suivre ces fibrilles jusque dans le nerf; on voit seulement dans la plaque une slria- tion très-accentuée qui se prolonge dans la fibre musculaire. Parfois, au lieu de fibrilles bien nettes, j'ai observé, chez la Chrysomela cœridea des granulations alignées suivant certaines directions : les fibrilles semblent être remplacées par de fines trainees de granulations suivant le même trajet que les fibrilles que l'on rencontre sur les autres plaques. Ce fait montre que la striation des plaques n'est due ni à des plis de membrane ni à des trachées. Je citerai une dernière preuve à l'appui de cette manière de voir. La pré|)aration que j'ai représentée figure 7 montrait une fibrille nerveuse se rendant au disque intermédiaire (/; mais elle disparaissait sous le noyau que j'ai reproduit dans mon dessin de la plaque. S'il s'était agi d'un pli, ce dernier, situé au-dessus du noyau, fut resté par conséquent visible à la surface du noyau. Je m'explique les traînées granuleuses citées plus haut, en ad- mettant que les fibrilles du cylindre-axe ont été altérées et décom- posées par les réactifs employés lors de la préparation. Lorsque la contraction n'est pas trop accentuée, l'on peut encore pour- suivre les fibrilles depuis le cylindre-axe jusqu'aux disques d'in- version (fig. 10, 16, 19). Ici il n'y a plus de disques intermé- diaires. Il existe à la place qu'occupait le disque isotrope dans la fibre au repos une forte bande obscure qui s'élargit au fur et à — 298 — mesure que la contraction augmente, et qui (inil, par acquérir la même largeur que le disque clair de la fibre contractée; c'est à cette bande obscure (disque isotrope de l'état de contraction) qu'arrivent alors les fibrilles. Les plaques terminales ne présentent pas toujours à leur inté- rieur un nombre de fibrilles égal à celui des disques intermé- diaires couverts par la plaque nerveuse. 11 arrive fréquemment que le nombre des fibrilles est inférieur à celui des disques iso- tropes recouverts par le cône terminal, et cela aussi bien à l'état de repos qu'à l'état de contraction. Tantôt ces fibrilles sont indi- quées par des stries très-apparentes (fig. 7, 9), tantôt elles sont très-gréles (fig. 15). Sur des fibres fortement contractées ces fibrilles sont parfois tellement rapprochées l'une de l'autre, qu'il est impossible de dire d'une façon précise à quels disques elles aboutissent. Dans une grande plaque terminale j'ai vu le cylindre-axe se diviser en deux branches dont l'une allait directement du point de bifurcation jusqu'à l'une des extrémités de la plaque; de cette branche partaient de distance en distance des fibrilles qui se rendaient aux disques isotropes contractés (fig. 21). L'autre branche n'a pu être poursuivie, à raison du mauvais état de cette partie de la plaque dans laquelle elle se trouvait. Dans la fibre représentée à la figure 12 la plaque terminale appliquée contre une onde latérale avait été en partie arrachée de la fibre musculaire; la portion restée adhérente montrait à son intérieur des fibrilles aboutissant aux disques isotropes contractés, sous un angle aigu. Si les stries étaient dues à des plis, elles n'auraient pas dû s'arrêter aux extrémités des disques isotropes, au bord latéral de la fibre, mais croiser ces mêmes disques en même temps que le hord latéral du faisceau. Ces plis se seraient alors montrés comme des lignes croisant les disques isotropes et anisotropes. Or elles s'arrê- taient toutes au bord latéral de la fibre musculaire. Il est à peu près superflu d'ajouter qu'au niveau de ces plaques terminales à structure fibrillaire, j'ai presque toujours observé une onde latérale. — 299 — Chez les chenilles on rencontre d'ordinaire des plaques termi- nales colossales. J'eus un jour l'occasion de faire l'observation que voici : un de ces animaux vivant, fut ouvert rapidement, puis tendu sur une plaque de liège au moyen d'épingles. Après avoir enlevé les organes internes, j'ai versé sur la peau ainsi étalée de l'air osmique à 1 p. 7o; j'ai ensuite détaché un fragment de la couche musculaire et je l'ai dilacéré dans la même solution acide, j'ai obtenu de grandes plaques terminales. Dans une de ces pla- ques j'ai vu le cylindre-axe se bifurquer en deux branches abou- tissant à la fibre musculaire aux deux extrémités de la plaque. Ces deux branches étaient donc fortement divergentes; aux points où elles aboutissaient à la fibre musculaire, celle-ci était fortement contractée, tandis qu'entre ces deux endroits, c'est-à- dire sur une étendue de 10 à 12 loges musculaires, toujours sous la plaque nerveuse, la fibre musculaire était à peine contractée. Naturellement les loges musculaires les plus voisines de ces ondes de contraction latérales, étaient plus raccourcies que celles qui en étaient plus éloignées. J'avais une image analogue à celle de la figure 8, seulement la plaque nerveuse couvrait les deux ondes et les loges interposées entre elles. Ceci montre que la substance granuleuse de la plaque terminale n'est pas la termi- naison du nerf; elle n'est qu'un stroma que traversent les ter- minaisons du cylindre-axe avant de se mettre en continuité avec la substance musculaire. Je n'ai pu découvrir dans les plaques terminales des chenilles, malgré leurs dimensions co- lossales, aucune trace de striation transversale. Sous l'influence de divers réactifs, tels que potasse caus- tique, en solution très- faible, les solutions de chlorure sodique, de bichromate ammonique, l'eau distillée, etc., il arrive parfois que les plaques terminales se décolent plus^ou moins de leur fibre musculaire (fig. 22). Cet écartementne se fait pas sur tous les points : certaines parties du cône nerveux restent reliées à la fibre musculaire par des trainees granuleuses qui unissent les disques intermédiaires, à la face profonde de la plaque terminale. On rencontre quelquefois des cas semblables sur des prépara- tions alcooliques (fig. 5). — 300 -- Il semble donc y avoir une union plus intime entre le muscle et le nerf au niveau des disques intermédiaires; cela se conçoit si les divisions du cylindre-axe arrivent à ces points. M. Engelmann (1) avait déjà remarqué cette adhérence plus intime entre la plaque nerveuse et le muscle au niveau des disques isotropes; il dit à ce sujet : « An den Nervenhiigeln ver- schiedener Kâfermuskeln ist mir mehrmals die besonders innige Verbindung der Zwisclienscheibe mit der Sohiensubstanz des Hûgels aufgefallen: bei Einwirkung von Wasser traten Vakuolen zwischen Endplatte und quergestreifter Substanz auf, welclie erstere immer mehr von letzterer abhoben. Nur die Zwischen- scheiben blieben durch dïinne, hautartige Commissuren, welche spâter einrissen und dann zusammenschnurrten, mit der Unter- flâche der Endplatte in Verbindung. Solite hierin ein Fingerzeig fiir das Bestehen einer besonders innigen Beziehung der Nerven zur Zwischenscheibe gelegen sein? Jedenfalls verdient die Frage nach den Beziehungen des Axencylinders zu den einzelnen, jetzt in der quergestreiften Substanz erkannten Unlerabtheilungen im Augebehalten zu werden. » Ailleurs (2) ce même savant écrit : « In physiologischer Be- ziehung wiirde die isotrope Grundsubslanz der Muskeln nach alledem als eine, wenn auch etvvas modificirte Fortseizung des Achsencylinders der molorischen Nervenfaser betrachtet und als « Nervose * von der « Contractilen » oder « Motorischen » unterschieden werden diirfen. Wahrscheinlich ist sie es auch, die anatomisch mit dem Axencylinder am innigsten verbunden ist. Die Feststellung des letzteren Punktes ware von grossier Wichtigkeit, scheint mir aber mit unsern gegenwârligen Hiilfs- mitteln nicht wohi erreichbar zu sein. » C*est cette continuité anatomique que je crois avoir établie, en modifiant l'hypothèse d'Engelmann en ce sens que d'après mes (1) Th. W Kngelm*>n, PflUgefs Archiv, Bd. VII, 1873, p. 47. {2) PflUgefs Archir, Bd. XI, 1875, p. 463. — 30i — observations, c'est avec le disque intermédiaire que se continue réiément nerveux. r.e cylindre-axe des fibres nerveuses motrices, arrivé au sommet de la plaque terminale semble se diviser en un nombre plus ou moins considérable de fibrilles qui vont innerver directe- ment les disques intermédiaires; il y a continuité directe entre le muscle et le nerf. Sans doute lorsque l'on emploiera des méthodes plus parfaites que celles dont j'ai fait usage, Pon trouvera que tous les disques intermédiaires recouverts par une même plaque terminale, sont en continuité directe de substance avec le cylindre-axe. Un corollaire de mes observations c'est qu'il n'existe pas de réseau nerveux à l'intérieur de la fibre musculaire. Celle-ci reçoit son excitation du cylindre-axe par l'intermédiaire des fibrilles nerveuses qui aboutissent aux disques intermédiaires; l'excitation arrive directement à la substance musculaire. Ce sont les disques intermédiaires qui sont excités les premiers. Le mouvement moléculaire qui chemine à travers la plaque ter- minale le long des fibrilles se transmet immédiatement aux disques intermédiaires et de là se propage dans tous les sens, à partir des points excités pris comme centres. 11 est inutile de faire ressortir la portée de ces observations pour la physiologie du système neuro-musculaire, surtout si l'on en arrive un jour à les confirmer chez les vertébrés. Je ne puis m'empêcher de dire en terminant que, bien que j'aie vu ces fibrilles un grand nombre de fois et cela chez divers insectes, bien que M. le professeur Engelmann ait examiné une partie de mes préparations et ait été entièrement convaincu par elles, je serais très désireux de voir d'autres histologistes confirmer mes observations. 302 — EXPLICATION DE LA PLANCHE VI. Fig. 1. Fibre musculaire striée de Chrysomela cœrulea^ observée à un faible grossissement (obj.4; ocul. 1. Harnack), et montrant neuf ondes laté- rales et neuf plaques terminales. La distance entre les deux ondes ter- minales est de I millimètre. Alcool. Glycérine. Fig. 2. Fibre musculaire de Chrysomela cœrulea. Obj. 4. Ocul. 2. Hart, dessinée" à la chambre claire. Entre a et e 0,56 de millimètre. Alcool. Glycérine. Fig. 5. Fibre musculaire de Chrysomela cœrulea. Obj. 9. Ocul. 2. Hart. Onde latérale. Plaque terminale fragmentée. La ûbre nerveuse qui y arrive était incomplètement conservée. Alcool. Glycérine. Fig. 4. Fibre musculaire de Passalus giabdrrinus, Obj. 9. Ocul. 2. Hartn. Onde latérale commençante vue de face. a. Plaque terminale adjacente; il n'en reste qu'une partie. Alcool. Glycérine. Fig. 5. Fibre musculaire de Chrysomela cœrulea. Obj. F, Ocul. 5. Zeiss. Plaque terminale en partie détachée du faisceau musculaire primitif. Alcool Glycérine. Fig. 6. Fibre musculaire de Passalus glaberrinus. Obj. 9 Ocul. 2. Hartnack. Onde latérale vue de prolil. Alcool. Glycérine. Fig. 7. Fibre musculaire ù'Hydrophilus piseus. Obj. 9. Ocul. 3. Hartnack. Fibre en repos. Plaque terminale arrachée en partie du faisceau primitif, /■fibre nerveuse. Aux disques intermédiaires a, 6, et d arrivent des fibrilles; au disque c, il semble y en avoir une; mais elle est en partie cachée par le noyau. Injection d'acide osmique à 1 «/o. Alcool. Glycé- rine. Fig. 8. Fibre muscuhire de Chrysomela cœrulea. Obj. 9. Ocul. 2. Hartnack. Deux ondes latérales avec plaques terminales, tout près l'une de l'autre et séparées seulement par quelques cases musculaires. Alcool. Glycérine. Fig. 9. Fibre musculaire ô'Hydrophilus piceus. Obj. F. Ocul. 3. Zeiss, da disques anisotropes ;N disques accessoires. État de repos. Deux plaques termi- nales ; dans celles de gauche trois fibrilles, dont une est cachée par une fine traché; dans celle de droite une fibrille accompagnée d'une tra- chée. Cette dernière plaque est un peu claire. Injection d'acide osmique à 1 %. Alcool. Glycérine. Fig. 10. Fibre musculaire ù'Hydrophilus piceus. Obj. 8. Ocul. 3. Hartnack. Plaque terminale avec six fibrilles bien distinctes, dont trois se con- tinuent manifestement avec le cylindre-axe. Injection d'acide osmique. à 1"/,,. Alcool. Glycérine. — 503 — Fig. 11. Fibre musculaire de C/jr*/some/rt cœrulea. Ohj. F. Ocul. 3. Zeiss. Plaque terminale brisée: montre quatre fibrilles arrivant aux disques isotropes. Alcool. Glycérine. Fig. 12. Fibre musculaire de Hydrophilus piceus. Obj. 9. Ocul. 3. Harlnack. Onde latérale. Plaque terminale arrachée en partie de la ûbre muscu- laire; à son intérieur plusieurs fibrilles nerveuses. Injection d'acide osmiqueà 1 °'o. Alcool. Glycérine. Fig. 13. Faisceau de fibres musculaires de Chenille; chacune d'elles montre une onde totale au même niveau. 11 y a quelques indications de plaques terminales aux sommets de deux de ces ondes. Obj. 1 . Ocul. 2. Harlnack. Acide osmique 1 "/o. Alcool. Glycérine. Fig. 14. Fibre musculaire de Chrysomela cœrulea. Obj. 9, Ocul. 2. Harlnack. Chambre claire. Deux, plaques terminales contigues. Les fibres ner- veuses qui en parlent se réunissent après un court trajet. La contrac- tion est plus forte sous les plaques qu'entre celles-ci. Alcool Glycérine. Fig. lo. Fibre musculaire d' Hydrophilus piceus. Obj. 9. Ocul. 5. Harlnack. Fibre en repos. Disques inlerniédiaires indiqués. Plaque terminale avec fibrilles dont trois bien nettes. Un noyau (?). Injection d'acide os- mique à 1 7o- Alcool. Glycérine. Fig. 10. Fibre musculaire ù' Hydrophilus piceus. Obj. 9. Ocul. 5. Harlnack. Fibre contractée. Plaque terminale; cinq fibrilles bien nettes arrivant aux dis- ques obscurs de la fibre contractée. Plusieurs noyaux. Injection d'acide osmique à 1 "/o. Alcool. Glycérine. Fig. 17. Fibre musculaire d' Hydrophilus piceus. Obj. 9. Ocul. 3, Harlnack. Étal de repos. Deux plaques terminales adjacentes; dans l'une d'elles deux fibrilles nerveuses. Disque intermédiaire. Injection d'acide osmique à 1 "/o. Alcool. Glycérine. Fig. 18. Fibre musculaire de Lina tremulae. Obj. 9. Ocul. 2. Harlnack. deux ondes latérales munies de plaques terminales; elles sont réunies par deux fibres nerveuses qui se réunissent plus loin en un ironc unique. La contraction est moins forte entre les plaques que sous celles-ci Alcool. Glycérine. Fig. 19, Fibre musculaire de Chrysomela cœrulea. Obj. F. Ocul. 3. Zeiss. Onde latérale avec plaque terminale. Dans la plaque plusieurs fibrilles arri- vant aux disques obscurs de la fibre contractée. En changeant la posi- tion du foyer on aperçoit plusieurs plans de ces fibrilles. Fig. 20. Fibre musculaire d'^ydrop/iî/ws piceus. Obj. 9. Ocul i2. Harlnack. Deux plaques terminales aux extrémités d'un même diamètre transversal. Injection d'acide osmique à 1 «/o Alcool. Glycérine. Fig. 21. Fibre musculaire d' Hydrophilus piceus. Obj. 10. Ocul. 3. 1mm. Harl- nack. Plaque terminale avec onde latérale assez longue. Le cylindre-axe semble se diviser en deux faisceaux; de l'un d'eux part une série de — 504 — fibrilles qui se rendent aux disques obscurs; Taulre est peu visible; la plaque paraît altérée en ce point. Injection d'acide osmique à 1 "/o. Alcool. Glycérine. Fig. 22. Fibre musculaire de Telephorus spec. Obj. 8. Ocul. 3. Harlnack. Plaque terminale traitée par une solution de chlorure sodique. La plaque est écartée du faisceau musculaire primilif,elley adhère cepen- dant encore par des traînées granuleuses, partant des disques obscurs pour arriver à la face profonde de la plaque nerveuse. *■^^^^•i NOUVELLES RECHERCHES SUR L'EMBRYOLOGIE DES BATRACIENS I. ENVELOPPES OVULAIRES ET TRANSFORMATIONS EMBRYONNAIRES EXTERNES DES URODÈLES (tritons ET axolotl). II. FRACTIONNEMENT DE l'oEUF DES BATRACIENS ; PAR Comme l'indique le titre, ce travail comprend deux parties très distinctes : une première , dans laquelle je m'occupe suc- cessivement des enveloppes ovulaires et des transformations embryonnaires externes chez les Urodèles (Tritons et Axolotl), depuis le début de Tépibolie jusqu'au moment de la sortie de l'œuf; une deuxième partie exclusivement consacrée à l'étude du fractionnement de l'œuf des Batraciens. Cette dernière peut être considérée comme faisant suite à mes Recherches sur l'embryologie des Batraciens, où. il a été question de l'œuf non fécondé, puis des premières modifications qu'il éprouve après la fécondation (1). Je publierai prochainement les résultats de mes recherches sur la formation des feuillets embryonnaires et de la corde dorsale chez les Urodèles, question intéressante , qui , dans ces derniers temps, a fait l'objet d'un excellent mémoire de Scott et H. Osborn (2). (i) Bulletins de l'Académie royale de Belgique, 2^ sér., t. LXI , p. 97, pi. I et II. (2) On some points in the early development of the common Newt, Quarterlt JooRN. OF MicRosc. SCIENCE, N. S. noLXXYl. Oct. 1879, p. 449-473, pi. XX-XXI. 21 — 506 PREMIERE PARTIE. ENVELOPPES OVULAIRES ET TRANSFORMATIONS EMBRYONNAIRES EXTERNES DES URODÈLES (Tritons et Axolotl). Enveloppes de l'oeuf. (PI. XI, Gg. 1,26, pi. XI], fig. 1.) L'œuf, dans son ensemble et peu de temps après la ponte, a une forme sphérique chez l'Axolotl, elliptique chez lesTritons (1 ). Il permet de considérer l'œuf proprement dit (sphère vitelline, globe vitellin des auteurs) et les enveloppes ovulaires. J'ai décrit ailleurs (2) l'œuf proprement dit. Voici les résultats auxquels m'a conduit l'étude des enveloppes. Ces enveloppes sont mul- tiples; en allant de dedans en dehors, on rencontre : i° Une membrane vitelline. — J'ai pu l'enlever sur des œufs frais, sans le secours d'aucun réactif, et cela aussi bien sur l'hémisphère inférieur que sur l'hémisphère supérieur de la sphère vitelline. Elle est mince, homogène et amorphe, mais il est impossible de la débarrasser complètement des granules pig- mentaires et des plaques lécithiques qui adhèrent à sa face interne. Sous l'influence de l'alcool affaibli, elle acquiert plus de consistance; si, après un séjour de quelques heures dans ce liquide, on place l'œuf dans un verre de montre contenant de (1) On sait que ces derniers Urodèles, après avoir déposé leurs œufs sur des herbes, des feuilles, etc., replient ces supports de manière que les œufs sont plus ou moins cachés et comprimés entre les duplicatures ainsi produites; de là une forme souvent aplatie de l'ellipse dans son ensemble et même de Tœuf propre- ment dit. (2) Sur les trous vitellins que présentent les œufs fécondés des Amphibiens , Boll, de l'Acad. royale de Belgique, 2« série, t. XXX, n° 7, 1870. — Recherches sur r embryologie des Batraciens, Idem , Loc. cit. p. 97. — 307 — l'eau distillée, l'eau pénètre sous la membrane par endosmose et la détache du vitellus. On remarque alors de petites saillies ou bosselures formées par la membrane aux endroits qui corres- pondent aux trous vitellins; plus tard, après l'apparition du pre- mier sillon méridional, on voit aussi, sur les œufs traités par le procédé décrit plus haut, la membrane sortir du sillon, sans toutefois se déplisser complètement; il faut donc admettre qu'elle a pénétré dans ce sillon en même temps que la couche pigmen- taire corticale. 2° L'œuf, au moment de se détacher de l'ovaire, est déjà entouré d'une deuxième membrane (a), d'abord intimement appliquée à la surface de la membrane vitelline; mais, contrai- rement à cette dernière, elle ne prend aucune part au frac- tionnement, de sorte que, lors de la formation du premier sillon méridional , elle se trouve séparée, à ce niveau, de la sphère vitelline. Je n'ai pu m'assurer si elle est un produit de la membrane granuleuse ou si, de même que la membrane vitel- line, elle résulte d'une condensation ou d'une transformation de la partie périphérique de l'œuf. Quoi qu'il en soit, pour éviter toute confusion avec la membrane que j'appelle vitelline, je la désignerai sous le nom de chorion. Ce chorion est parfai- tement transparent, homogène, sans structure appréciable, même après imprégnation par le nitrate d'argent; après dur- cissement par l'alcool, on distingue parfois, sur les coupes, un fin strié parallèle à la surface et indiquant une sorte de strati- fication. Sa résistance est beaucoup plus grande chez le Tr. al- pestre que chez le Tr. ponctué, le Tr. palmipède et l'Axolotl; on verra plus loin quelles sont les conséquences qui en résultent au point de vue du développement embryonnaire du premier de ces Urodèles. Au chorion font suite trois autres couches enveloppantes, toutes formées dans l'oviducte. Ces couches, notamment les deux plus externes, se distinguent très bien quand on examine l'œuf devant la lumière ou sur un fond noir, au moyen de la loupe. 3° Je désignerai la première de ces trois couches (6) sous le nom de capsule interne. Elle limite une cavité remplie de liquide, — 508 — dans laquelle Tœuf entouré de ses deux membranes ovariques se meut librement (1) ; quand on observe l'œuf devant la lumière, la sphère vitelline occupe la partie la plus déclive de la cavité susdite et touche, en cet endroit, la capsule interne. Cette capsule, plus ou moins adhérente à la couche qui lui fait suite, est beaucoup plus mince dans l'œuf des Tritons que dans celui de l'Axolotl; chez cette dernière espèce, elle mesure 50 fx en moyenne et montre, lorsqu'on l'examine au microscope et sur les coupes optiques, un aspect fibreux (2). Le liquide contenu dans la capsule interne offre souvent une teinte bistrée chez les Tritons et renferme, chez l'Axolotl, des granulations brillantes et de petits grumeaux opaques qui disparaissent plus tard. 4® La deuxième des trois couches enveloppantes formées dans l'oviducte (c) se présente sous forme d'une sphère (Axolotl) ou d'une ellipse (Tritons), à transparence cristalline, à teinte bleuâtre lorsqu'on l'examine sur un fond noir; cette teinte est surtout prononcée chez l'Axolotl. L'alcool, un peu fort, enlève à l'enveloppe une partie de sa transparence, mais fait ressortir d'avantage le reflet bleuâtre. Dans l'œuf de l'Axolotl , son épais- seur est de 160 fjt.; le diamètre de la sphère qu'elle forme mesure 3 mm. environ. Elle est élastique et très résistante; quand on l'incise ou qu'on la coupe en morceaux, elle se comporte comme certaines membranes vitrées, c'est-à-dire que les parties isolées ne s'étalent pas, mais conservent leur forme et ressemblent par conséquent à des segments de sphère. Elle est homogène et amorphe ou présente tout au plus, dans certains cas, un faible strié parallèle à la surface. Je lui donnerai le nom de capsule externe. Les capsules interne et externe se forment rapidement; on les (1) Souvent, dans l'œuf des Triions encore renfermé dans l'oviducte, la sphère Yitelline présente une forme elliptique qui persiste après l'extraction de l'œuf de ce conduit (pi. XI, fig. 26); c'est qu'à celte époque l'espace compris [entre le chorion et la capsule interne n'est pas rempli par un liquide, mais par une masse assez consistanle, gélatiniforme. (2) Sur la figure i, planche XII, l'épaisseur de celte couche est trop forte. — 309 — trouve déjà, avec l'aspect qu'elles auront plus tard , dans la pre- mière moitié de l'oviducte (pi. Xï , fig. 26, 6 , c). 5° Vient enfin une dernière couche enveloppante {d) qui, elle aussi, commence à se former dans la première portion de l'ovi- ducte, du moins chez les Tritons, mais n'atteint son complet développement que dans la partie terminale de ce conduit. Elle sert à fixer l'œuf aux divers corps sur lesquelles la femelle le dépose; je la désigne, pour ce motif, sous le nom de couche agglutinante ou adhesive. Chez les Tritons, cette couche adhe- sive, relativement peu épaisse, se détache facilement de la cap- sule externe, de sorte qu'en enlevant l'œuf de la plante ou de l'objet sur lequel il est fixé, une partie de cette couche y reste généralement adhérente. Chez l'Axolotl, au contraire, la couche adhesive se détache difficilement de la capsule externe; elle est plus molle, se gonfle davantage au contact de l'eau, — l'œuf atteint alors un centimètre de diamètre et même au delà, — et ressemble à une masse filante. Ces caractères de la couche adhe- sive et la forme sphérique des diverses couches enveloppantes rapprochent l'œuf d'Axolotl, considéré dans son ensemble, de celui de la Grenouille plutôt que de celui du Triton. Cette matière glaireuse de l'œuf de l'Axolotl et la substance de la couche adhesive de celui des Tritons n'offrent aucune trace de structure. Sur la face externe de la couche adhesive de l'œuf des Tritons, on découvre souvent à un faible grossissement de petites dépressions qu'à un examen superficiel on pourrait prendre pour des trous (pi. XI, fig. 1); mais elles n'entament jamais qu'une partie de l'épaisseur de la couche. Elles son» arrondies, plus rarement ovalaires, assez régulièrement espacées, en quelques endroits, au lieu de ces dépressions, on trouve des diatomées, dont le diamètre correspond à celui des dépressions mêmes. Il est donc permis de supposer que celles-ci ne sont que des stigmates indiquant le siège de diatomées qui ont disparu. Débrouiller la synonymie des couches enveloppantes de l'œuf des Urodèles et des Batraciens en général n'est pas chose facile ; souvent les mêmes appellations servent à désigner des produc- — 510 — lions totalement différentes, souvent aussi certaines enveloppes sont entièrement passées sous silence. La plupart des auteurs qui se sont occupés de ces enveloppes n'ont pas vu la vraie membrane vitelline, « L'œuf, comme celui de tous les Batraciens observés jusqu'à ce jour, dit Duméril à propos de l'Axolotl, consiste d'abord en une sphère vitelline noire, placée au centre de la sphère qui forme la membrane vitelline, remarquable par sa transparence cristalline, et qui est logée elle-même au milieu de l'enveloppe albumineuse constituant une sphère extérieure plus considé- rable » (1). Duméril, on le voit, n'admet autour de l'œuf, à part l'enveloppe albumineuse qui correspond à notre couche adhesive, qu'une seule sphère, notre capsule externe, à laquelle il donne à tort le nom de membrane vitelline. Le professeur Joly figure un œuf d'Axolotl examiné quelques heures après la ponte. La sphère ovulaire ou vitelline est entou- rée de deux couches, une externe, l'enveloppe glaireuse ou albu- mineuse, c'est-à-dire la couche que j'appelle adhesive, et une interne, que l'auteur désigne sous le nom de membrane vitelline; c'est évidemment la capsule externe; mais jamais la sphère vitelline n'est en contact avec cette capsule, comme le repré- sente Joly (2). La membrane vitelline décrite et figurée par Robin (3) corres- pond, non à ma membrane vitelline, mais à celle que j'ai désignée sous le nom de chorion. Je crois qu'il en est de même du « Dot- terhaut » de vSlieda, Fauteur ne mentionnant, comme entourant immédiatement le vitellus, qu'une seule enveloppe (4). (1) Comptes-rendus de VAcad. des sciences, 17 avril 1865, t. LX, p. 7 66, (2) Études sur les métamorphoses des Axolotls du Mexique; développement et rotation de leur embryon dans l'œuf. — Revde des sciences naturelles, publiée sous la direction de MM. E. Dubreuil et E. Heckel, l. I,n° 1, juin, 1872, p. 7. V. pi. 1, (ig. 1 et suivantes. (3) Observations sur la fécondation des Urodèles, Journal de l'Anat. et de la Physiol., 1874, p. 382. PI. XV, fig. 3 et 4, v. (4) Zur Naturgeschichle der mexikanischen Kiemenmolche, Sitzungsb. der DoRPATiiK Naturforschercesellschaft. Vortrog m der 84 Sitzung, ani 20 Màrz, 1875, p. 8 du tiré à part que je dois à l'obligeance de Tauleur. — 311 — La membrane que j'ai appelée vitelline correspond à la mem- brane de l'œuf-cellule [Eizellemembran de Remak) de l'œuf de Grenouille. A ma connaissance, Newport seul, n'a pas confondu la vraie membrane vitelline avec le chorion. Il distingue, sur l'œuf des Anoures et sur celui des Urodèles, outre la membrane vitelline: 1° une enveloppe fibreuse immédiatement en contact avec cette dernière, et qu'on n'aperçoit distinctement qu'à cer- taines périodes de développement de l'œuf; il la regarde comme l'origine du chorion, et elle correspond à la sphère que je désigne sous ce nom ; 2° puis viennent deux autres couches, dont la plus interne laisse un espace, sorte de chambre, entre elle et la sphère vitelline entourée de sa membrane, plus le chorion. Newport distingue donc la vraie membrane vitelline, ou du moins la dernière formée, du chorion; seulement il se trompe quand il avance que ce dernier se formerait dans Toviducte et qu'il serait de nature cellulaire « formed of cells so closely aggregated together as to have contexed into a fibrous struc- ture » (i). C'est donc à tort que, d'après Bischoff, l'investigateur anglais aurait confondu la membrane vitelline avec le chorion. A en juger d'après le" texte de Bischoff, je crois qu'il n'a pas connu la vraie membrane vitelline et que l'enveloppe qu'il désigne sous ce nom est plutôt l'homologue de mon chorion; mais le savant embryologiste est dans le vrai quand il considère cette enveloppe comme entourant déjà l'œuf ovarique (2). De même qu'au chorion, Newport attribue à ses deux enve- loppes externes (capsule externe et couche adhesive), une nature cellulaire : « The two layers external to this (chorion) are also formed of cells, which their nuclei an distinckly visible in the envelope of Triton palusiris, in wich they alternate in regular series » (5). Les prétendus noyaux de l'enveloppe externe dont (1) On the Imprégnation of the ovum in the Amphibia. First series,p. 182-183. (2) Bestatigung des von D"" Newport bei den Batrachiern und D'^ Barry bei den Kaninchen behavpteten eindringens der Spermatozoiden in das Ei, 1854, p.4f-5. (Ô) Loc. cit., p. 185. — 312 — parle Newport ne sont probablement autre chose que les dépres- sions que j'ai signalées plus haut. Ce que Spallanzani désigne, dans Tœuf de Grenouille verte, sous le nom (ï amnios (1) est bien l'homologue du chorion de l'œuf des Urodèles.Wharton Jones aussi connaissait parfaitement cette membrane dans l'œuf des Triions; sa rupture, dans le cours du développement embryonnaire, n'avait pas échappé à cet observateur; il l'appelle membrane vitelline a vitellary membrane » (2). D'après Robin, la cavité remplie de liquide où flotte la sphère vitelline, liquide désigné par Duvernoy sous le nom û'albu- 7wew (5), serait limitée par une membrane auquel il donne le nom de chorion; cette membrane très mince, intimement appliquée et adhérente contre la face interne du mucus qui l'entoure et la protège, aurait souvent passé inaperçue; elle ne serait facile à distinguer que dans les cas, assez fréquents du reste, où plusieurs œufs (de deux à six), renfermés chacun dans un chorion spécial, sont réunis sous une enveloppe muqueuse commune. Robin, dans ce qu'il appelle les enveloppes muqueuses, distingue deux couches, une interne plus mince, une externe plus épaisse; son épaisseur est plus grande chez les Axolotls que chez les Tritons (4). En ce qui concerne l'œuf des Tritons, je ne puis voir dans le chorion de Robin que l'homologue de la capsule interne; c'est en efl'et une très mince membrane, intimement appliquée et , adhérente contre la face interne de la sphère qui la recouvre, et pouvant facilement passer inaperçue à un examen superficiel. Notre capsule externe serait ainsi l'homologue de la couche muqueuse interne de Robin. (1) Expériences pour servir à Vhisloire de ia génération des animaux et des plantes^ irad. par J. Senebier, Genève, 1785, p. 13 et 14., (2) On the first Changes in the ova of the Mammifera in consequence oÇ Impregnation, and on the Mode of Origin of the Chonon,PmL. transact ,1837, p. 341 , fig. 3. (3) CuviER ET DuvFRNOY, Lcçons d'anot. comparée, 2" édilion, I. Vili, p. 06. (4) Loc. cit., p. 384, 387, fig. 4 el 5, b, a. - 315 — Il en est autrement pour Tœuf de l'Axolotl; ici la capsule interne est relativement épaisse et l'on peut se demander si elle n'est pas tapissée, à sa face interne, par une membrane spéciale, le chorion de Robin. On a vu que l'opinion de ce savant est principalement basée sur la présence, dans des enveloppes muqueuses communes, d'un certain nombre de sphères vitel- lines, chacune contenue dans une enveloppe (chorion) propre. Mais on se trouve ici en présence d'une anomalie qui peut s'expliquer de la façon suivante : Vers la partie supérieure des oviductes, la capsule interne, après s'être déposée séparément autour de deux ou d'un plus grand nombre de sphères vitellines, donnant ainsi naissance à des enveloppes distinctes, engloberait, à un moment donné, les diverses sphères munies de ces enve- loppes, de manière à leur constituer un revêtement commun ; les enveloppes spéciales et le revêtement commun auraient en définitive une origine commune et une même signification. Abstraction faite des conditions qui précèdent, il m'a été impos- sible, même à l'aide de forts grossissements, d'apercevoir, sur l'œuf d'Axolotl, une membrane distincte de la capsule interne. J'en conclus que cette capsule correspond au chorion plus la couche muqueuse interne de Robin. Stieda, qui a observé des anomalies semblables à celles signalées par Robin, décrit, outre la membrane vitelline (pro- bablement notre chorion), une enveloppe primaire, « primâre Eihiille, » qu'il compare au chorion de Robin, et une enveloppe secondaire, « secundàre Eihiille oder Galierlhiille,» à laquelle la première adhère intimement (1). Je ne sais s'il faut considérer comme l'homologue de ma capsule interne l'enveloppe primaire seule ou cette enveloppe, plus une couche interne (couche muqueuse interne de Robin) de l'enveloppe secondaire, Stieda n'entrant pas dans plus de détaifs sur la constitution de cette dernière enveloppe. (1) Loc. dL,\\. 8. — 314 — Transformations embryonnaires externes des urodèles. (Tritons et Axolotl). J'ai étudié les transformations embryonnaires, tant internes qu'externes, de l'Axolotl et de trois de nos Tritons indigènes, l'Alpestre {Tr. alpestris, Laur.), le Palmipède (Tr. helveticiis, Razoumowsky) et le Ponctué (Tr. ^aenmms, Schneid.) Toutefois mes observations ont plus particulièrement porté sur l'œuf des deux premières de ces trois espèces de Tritons, et seulement d'une façon accessoire sur celui du Ponctué. C'est au contraire cette dernière espèce et en partie le Tr. cristatus, qui ont fait l'objet des recherches déjà citées de Scott et Osborn; c'est aussi de ces deux espèces, mais surtout du Triton crête, qu'il est question dans le travail de Rusconi, travail déjà ancien, mais remarquable pour Tépoque où il parut (1). Je ne m'occuperai, pour le moment, que des transformations embryonnaires externes. Je les décrirai en lâchant de mettre en relief les ressemblances et les dissemblances qui existent, sous ce rapport, entre les diverses espèces de Tritons et entre ceux-ci et l'Axolotl, et, au besoin, en établissant un parallèle entre le facies de l'embryon des Urodèles et celui des Anoures. Je dis- tinguerai, dans le développement externe des Urodèles, plusieurs stades que je désignerai par des chiffres, mettant entre paren- thèses, à côté de ces chiffres, les lettres qui, dans le travail de Scott et Osborn, indiquent les stades correspondants. Si l'on envisage, dans son ensemble et à partir de la féconda- tion, le développement embryonnaire externe des Urodèles, on peut distinguer comme premier stade celui qui s'écoule depuis la fécondation jusqu'au début du fractionnement: comme deuxième stade, les transformations survenues depuis le début du frac- tionnement jusqu'à celui de l'épibolie. Mais comme je me suis occupé de ce premier stade dans un précédent travail, et que (1) Amours des Salamandres aquatiques et développement des têtards de ces Salamandres depuis l'œuf jusqu'à l'animal parfait. Milan, 1821,4-5 planches. — 315 — le deuxième stade fait Tobjel de la seconde partie du travail actuel, je prendrai, pour point de départ de ma description, le troisième stade. STADE III. Tr. palmipède, pi. XI, fig. 2, 3; Tr. alpestre, pi. XI, fig. 28 ; Axolotl, pi. XII, fîg. 2, 5. On peut assigner comme limites à ce stade, d'une part le début de Tépibolie, de l'autre l'apparition du sillon dorsal. Quand l'invagination commence, on voit apparaître à son niveau une ligne foncée généralement en arc du cercle, mais quelquefois irrégulière et comme brisée (pi. XII, fig. 2, Axolotl) ; c'est le premier indice de l'anus de Rusconi ou blastopore. A mesure que l'épibolie fait des progrès, ce dernier se complète et finit par limiter un espace plus clair, le bouchon de Ecker ou bou- chon vitellin. Ces phénomènes sont identiques chez l'Axolotl et les Tritons; seulement chez l'Axolotl et l'Alpestre, l'œuf conserve sa forme sphérique, tandis que chez le Palmipède, il est devenu franche- ment pyriforme; cette dernière espèce offre aussi, à l'endroit du blastopore, une dépression plus forte limitée par une lèvre saillante (pi. XI, fig. 3). La conservation de la forme sphérique s'explique, du moins chez le Triton alpestre, par la grande résistance du chorion, résistance dont l'influence se fait égale- ment sentir dans les stades ultérieurs. STADE IV (A). Tr. Palm., pi. XI, fîg. 4, 5, 6 ; Tr. Alp., id., fig. 29, 30, 31 ; Axolotl, pi. XII, fig. 4-8. Limites de ce stade. — Depuis l'apparition de sillon dorsal jusqu'à celle des bourrelets médullaires. — Ce stade, très remar- quable au point de vue des résultats fournis par les coupes, correspond à celui figuré par Goette pour le Bombinator igneiis (I ), (l) Die Entwkkelunysgeschkhk der Unke, 1875, Taf. Ill, fig. 39. — 3i6 — et à celui que nous avons représenté pour le Pélobate brun (pi. I, fig. 5-5) (1). Le blastopore diminue, puis disparaît. Un trait pigmentaire, partant du blastopore ou de Tendroit oii se trouvait le blastopore maintenant généralement disparu, se dirige à une petite distance en avant; il correspond à un léger sillon, le sillon dorsal {Rûckenritme), aussi appelé sillon médul- laire (medullary groove). Comme le remarquent Scott et H. Os- born, les bourrelets médullaires n'ont pas encore apparu; mais il existe une saillie très manifeste, de forme triangulaire, à sommet correspondant au blastopore et tranchant par sa couleur plus pâle sur les parties qui l'entourent (pi. XI, iig. 4). Je l'appelerai aire ou éciisson médullaire. La saillie formée par l'écusson est toujours plus prononcée en arrière, c'est-à-dire dans le voisinage du blastopore, qu'en avant. Chez l'Axolotl, l'appa- rition de l'écusson médullaire offre quelques particularités qui méritent de fixer l'attention. A une époque où le blastopore est encore largement ouvert (pi. XII, fig. 4), la surface de l'œuf semble partagée en deux moitiés sensiblement égales par une zone foncée dont les extrémités aboutissent au blastopore; l'une moitié plus pâle est le premier indice de l'écusson médullaire, l'autre présente un ou deux traits foncés perpendiculaires à la zone, et allant comme elle aboutir au blastopore. Il importe de ne pas confondre ces traits avec le futur sillon dorsal. Il peut aussi arriver (pi. XII, fig. 5) que les traînées pigmentaires, au lieu de former une zone partageant la surface embryonnaire en deux hémisphères, se réunissent au blastopore sous un angle de 80° environ; la surface claire, située en dehors des traînées pigmentaires, correspond alors à la plus grande partie de la surface de l'œuf. Avec le petit trait pigmentaire aboutissant au sommet de Tangle, le plus petit espace limité par les traînées pigmentaires simule, dans ce cas, à s'y méprendre, l'écusson médullaire avec le sillon dorsal. Le premier indice de ce sillon (1) Recherches sur le développement du Pél. brun, t. XXXIV des Mémoires 111-4" de l'Académie royale de Belgique, 1868. — 317 — apparaît un peu plus tard, quand l'anus de Rusconi est entière- ment fermé (pi. XII, ûg. 7). Sur certains œufs de l'Alpestre, j'ai vu partir du blastopore déjà très réduit, outre le trait dirigé en avant et premier indice du sillon dorsal, un petit trait dirigé en arrière; l'image dans son ensemble, rappelle la disposition figurée par Goette pour le Bombinator (1). Chez TAIpeslre, l'écusson médullaire esten outre limité, avant l'apparition des bourrelets médullaires, par une zone pigmen taire (pi. XI, fig. 29-51). Le trait pigmentaire cor- respondant au sillon est plus faiblement indiqué en avant qu'en arrière et s'arrête à quelque distance de l'extrémité antérieure de l'aire médullaire. Pendant ce stade, les embryons d'Axolotl et de Tr. alpestre conservent encore leur forme sphérique. On a vu que, dès le stade précédent, l'embryon du Palmipède est devenu pyriforme; dans le stade actuel, l'extrémité postérieure de l'écusson médul- laire forme une saillie séparée des parties avoisinantes par une encoche; cette disposition se voit parfaitement sur l'œuf examiné de profil (pi. XI, fig. 5). STADE V (B). Tr. palm., pi. XI, fig. 7-tO. Tr. alp. id. fig. 32, 33. Axolotl, pi. XII, fig. 9. Limites de ce stade. — Depuis l'apparition des bourrelets médul- laires jusqu'à celle de l'étranglement nucal ou cervical. — Ce stade, surtout caractérisé par l'apparition des bourrelets médullaires, rappelle la disposition observée chez les Anoures (2). Tandis que la saillie formée par l'écusson médullaire débute en arrière, à l'endroit du blastopore, les bourrelets médullaires se montrent d'abord en avant, c'est-à-dire à la limite antérieure de l'écusson (v. pi. XI, fig. 32, pi. XH, fig. 9). Ce dernier, limité en avant par les bourrelets médullaires, conserve d'abord sa forme primitive; (1) Loc.cit., pi. III, fig. 39. (2) Voir Goette, Loc. cit., Taf. Ill, fig. 40-41 , et noire Mémoire sur le develop- pemenl du Pélobate brun, pi. I, fig. 10. — 548— puis, quand vers sa partie moyenne les bourrelets se rapprochent, formant ainsi le début de l'étranglement cervical, il présente une l'orme de lyre ou de guitare. C'est la partie de l'écusson médul- laire limitée par les bourrelets médullaires que Gœtte, et à son exemple Scott et Osborn, désignent sous le nom de plaque ou lame médullaire. Voici quelques particularités offertes par les trois espèces que j'ai surtout observées. Chez l'Axolotl, la lame ou plaque médul- laire, pâle dans sa partie centrale, est séparée des bourrelets médullaires par une ligne fortement pigmentée (pi. XII, fig. 9); tandis que les bourrelets sont surtout prononcés en avant de l'étranglement cervical, le sillon dorsal est notamment distinct dans la moitié postérieure de la lame médullaire. L'œuf conserve une forme sensiblement sphérique. Il en est de même chez le Tr. alpestre; cependant on voit qu'en certains points le chorion n'est plus en contact avec la surface embryonnaire (pi. XI , fig. 53). Il est permis de supposer que, débarrassé de cette enve- loppe, l'embryon prendrait une forme rappelant celle que pré- sentent, à ce stade, ceux du Palmipède (pi. XI, fig. 6-8) et du Ponctué. Chez le Palmipède, de même et plus que dans le stade précédent, la partie postérieure de l'écusson forme avec l'anté- rieure un angle à peu près droit (pi. XI, fig. 7). A cette époque, l'une des surfaces du jeune embryon, la surface dorsale ou plutôt l'extrémité antérieure de cette surface est aplatie, tandis que la face ventrale est plus ou moins convexe. Le sillon primitif est bien marqué. STADE VI (C). Tr. palm., pi. XI, fig. 11,12. Tr. alp.,pl. XI, fig. U. Axolotl, pi. Xll, fig. 10-12. Limites du VI"" stade. — Depuis l'apparition de l'étranglement nucal jusqu'à l'arrivée en contact des bourrelets médullaires dans la région du tronc. Les bourrelets se dessinent davantage et l'étranglement cervical, suite du rapprochement de ces bour- relets, augmente. Comme le remarquent Scott et Osborn, c'est — 319 — là que les bourrelets viennent d'abord à se toucher; la même disposition s'observe du reste chez les Batraciens anoures (1). A cette époque, il n'y a pas d'allongement sensible de l'embryon d'Axolotl; il est, au contraire, très manifeste chez celui de Palmipède; enfin le chorion très résistant qui entoure l'embryon du Triton alpestre empêche toute elongation. STADE VII (D). Axololt, pi. XII, fig. 13. Limites de ce stade. — Depuis l'arrivée en contact des bour- relets médullaires dans la région du tronc jusqu'à leur arrivée en contact dans la région encéphalique. — A l'exemple de Scott et Osborn, je range dans ce stade les embryons dont les bourrelets médullaires, encore plus ou moins écartés dans la région encé- phalique,se touchent dans la région du tronc. La figure i3,pl.XIJ, se rapportant à l'Axolotl, correspond sensiblement à l'embryon de Tr. tœniatus figuré par les auteurs que je viens de citer (2). Les figures 34 et 35, planche XI, d'après les œufs de Triton alpestre, représentent la première un stade plus précoce, la seconde un stade plus avancé. La figure 16 de Scott et Osborn correspond au ssi à un stade intermédiaire à celui des figures 11, 12, 13 et 14 qui se rapportent au Tr. palmipède (3). Scott et Osborn insistent sur deux particularités propres à ce stade et par lesquelles l'embryon des Urodèles se distingue de celui des Anoures. La première consiste dans l'écartement, à la région postérieure du tronc, des bourrelets médullaires, d'où résulte la formation d'un sinus rhomboïdal. Ce sinus se retrouve non seulement chez les diverses espèces de Tritons, mais aussi chez FAxoIotl (pi. XII, fig. 13). Les auteurs signalent d'autre part l'allongement manifeste, à ceite période, du jeune embryon (1) GoBTTE, Loc. cit., pi. III, fig. 42. — Développ. du Pél. brun, fig. 8. (2) Loc. cit., pi. XXI, fig. 13. (3) C'est au même slade qu'appartient Tembryon de Pélobate figuré, pi. V, fig. 12 demon mémoire. — 320 — et l'aplatissement d'une des faces embryonnaires; ici c'est la l'ace ventrale, tandis que, chez les Anoures (Bombinalor), l'apla- tissement porte sur la face dorsale. Sans attacher toutefois à cette différence une grande importance morphologique, les au- teurs Tattribuent à la présence d'une plus grande quantité de lécithe nutritif dans Tœuf des Urodèles. L'embryon du Tr. hel- velicus présente, quoique à un moindre degré que le Tr. taenia- tus, l'aplatissement ventral dont il s'agit. A ce stade, la différence de courbure entre les faces dorsale et ventrale est peu manifeste chez l'Axolotl; enfin chez l'Alpestre, l'embryon toujours enserré dans le chorion conserve une forme générale sphérique. STADE VIII (E). Tr. paim., pi. XI, 6g. 13, U. Tr. alp., pi. XI, fig. 35-37. Axolotl, pi. Xli, fig. 14,15. A partir de cette période, les limites entre les divers stades deviennent plus difficiles à tracer. Selon Scott et Osborn, le stade E est caractérisé comme suit : Rapprochement complet des bourrelets médullaires et vésicules cérébrales vaguement indiqués} inflexion céphalique déjà évidente ; embryon un peu incurvé sur lui-même, d'où résulte une excavation à la région ventrale, excepté en arrière où la masse du vitellus forme une saillie; persistance d'une trace du sinus rhomboïdal. D'après les auteurs , les embryons de ce stade sont probablement aussi avancés en développement que l'embryon de Bombinator figuré par Goette (pi. III, fig. 50 (i). Voici ce que je constate aussi bien chez l'Axolotl que chez les Tritons alpestre et palmipède : a) Les bourrelets médullaires arrivent partout en contact; chez l'Axolotl, un petit espace les sépare encore en avant (pi. XIÏ, fig. 14); comme l'affirment Scott et Osborn, un reste du sinus rhomboïdal persiste à l'extrémité postérieure de l'embryon. (1) Scott et Osboen, Loc. cit., p. 431 . — 3^21 — 6) La moitié celebrale antérieure {vordere Hirnhdlftc) et le cerveau postérieur {Einterhirn) ne sont pas vaguenfient indi- qués, mais très nettement dessinés. Chez l'Axolotl, ces deux dilatations cérébrales étaient déjà bien visibles sur un embryon où les bourrelets médullaires étaient encore assez largement écartés en avant de l'étranglement cervical. c) Sous l'extrémité cérébrale antérieure, existe une dilatation en forme de bourrelet; elle correspond à la paroi pharyngienne (Schhmdivand) figurée par Gœlte pour le Bombinator (i). Un sillon la sépare delà paroi abdominale (pi. XI, fig. 57, pi. XII fig. 15). d) L'inflexion céphalique et partant la saillie nucale {Nacken- hôcker) sont très manifestes. Chez l'Axolotl, le cerveau posté- rieur s'unit à la moelle épinière en formant un angle à peu près droit (pi. XII, fig. 13). e) A part le sillon susdit, je ne trouve pas, à cette époque, de véritable excavation de la surface ventrale; cette surface est plutôt légèrement convexe. Quant à la forme générale du corps, je constate quelques dif- férences entre les trois espèces observées. L'embryon d'Axolotl, vu par sa face céphalo-dorsale, — la saillie nucale occupant à peu près le milieu de la figure — présente une forme elliptique (pi. XII, fig. 14). Dans son ensemble, l'embryon n'est plus sphé- rique, mais aplati; la longueur du corps dépasse la hauteur (ligne tirée du milieu de la région dorsale jusqu'à la limite de l'abdomen) d'un tiers à peu près (pi. XIÎ, fig. 15). La forme générale de l'embryon de Palmipède s'est surtout modifiée en ce sens que l'aplatissement latéral est plus prononcé que dans le stade précédent. Aucun allongement ni aplatis- sement bien appréciable ne s'observe chez l'Alpestre; le motif en est sans doute le peu d'extensibilité de son enveloppe choriale. (1) Loc, cit , pi. III. lìg. oO, G. — 522 — STADE IX (F). Tr. palm., pi. XI, fig. 13, 16. Tr. alp., pi, XI, fig. 4. Axololl, pi. XII, fig. 16, 17, 18. Scott et Osborn signalent, pour ce stade, les particularités suivantes : a) L'incurvation abdominale et l'inflexion céphalique se pro- noncent davantage. L'incurvation se fait dans une direction opposée à celle observée chez le Bombinalor. h) Les vésicules cérébrales sont très distinctes; les vésicules oculaires, qui commencent à se montrer dans le stade précédent, sont maintenant très développées, bien qu'elles ne le soient pas chez le Bombinatordu même âge; au lieu de présenter comme celles de cette espèce, une forme ovale allongée, elles sont hémisphériques. c) Les rudiments des 5^ et 7*^ paires crâniennes apparaissent sous forme de saillies ou bourgeons, près de la partie dorsale du cerveau postérieur, plus haut que chez le Bombinator. d) Quelques protovertèbres sont formées. e) Jusqu'à cette époque, on ne constate guère d'accroissement total, les changements de forme résultant de l'allongement et de l'aplatissement de l'embryon (1). D'abord en ce qui concerne l'incurvation abdominale et l'in- flexion céphalique, je constate une différence assez notable entre les Tritons d'une part et TAxolotl de l'autre. Ainsi chez le Tr. helveticus (pi. XI, fig. 45), la ligne dorsale est convexe, la ligne abdominale concave; les extrémités céphalique et caudale sont également saillantes, de sorte que l'embryon vu de profil est reniforme. Si, chez l'Alpestre, l'incurvation dorsale est plus forte et que l'abdomen semble moins excavé, c'est encore une fois que l'embryon, ramassé sur lui-même, se trouve maintenu dans une position forcée par la membrane qui l'entoure. Chez l'Axolotl, la ligne dorsale est convexe (pi. XII, tig. 46, 48), mais on ne (i; Loc. cit., p. 451. — 323 — peut pas dire que la ligne abdominale est concave; elle est plutôt légèrement convexe, mais notablement dépassée, à la fin du stade (fig. i8), par la saillie céphalique; comme il n'existe pas encore de saillie caudale, l'embryon, vu de profil, n'est pas fran- chement reniforme comme celui du Palmipède. Chez l'Axolotl, le développement de l'extrémité céphalique précède donc celui de l'extrémité caudale. Toutefois chez l'Axolotl aussi bien que chez les Tritons, l'in- curvation générale de l'embryon est abdominale, c'est-à-dire, comme le remarquent Scott et Osborn, qu'elle se fait dans une direction opposée â celle qui a lieu chez le Bombinator (voir Gœtte, pi. m, fig. 52). Si les espèces du genre Rana présentent aussi l'incurvation dorsale, il ne faudrait pas en conclure qu'il en est de même chez tous les Anoures. Par exemple, chez le Pélc- bate, l'incurvation est plutôt abdominale que dorsale et , comme chez l'Axolotl, surtout prononcée du côté de l'extrémité cépha- lique (i). La même chose s'observe sur les embryons de Pélodyte ponctué (2). Sous ce rapport, les Pelobatidae de La taste (5) établiraient une transition entre les autres Anoures et les Urodèles. Chez l'Axolotl aussi bien que chez les Tritons, l'inflexion céphalique se prononce davantage. Ce que j'ai pu observer sur le développement et la forme des vésicules cérébrales et oculaires confirme les données de Scott et Osborn ; toutefois, à ce stade, les vésicules oculaires sont moins développées sur l'embryon d'Axolotl que sur celui du Triton; elles ont une forme ronde que je retrouve chez le Pélobate (4). Si je n'ai pas vu les rudi- ments des 5^ et 7^ paires crâniennes dont parlent les embryolo- gistes anglais, c'est sans doute parce que mon attention n'était pas fixée sur cet objet à l'opoque où je faisais mes observations (1) loc'. cit.j pi. III, fig. 9 et fig. 3 et 4 dans le texte. (2) Je dois ces embryons à l'obligeance bien connue du savant trésorier de la Société zoologique de France, M. Héron-Royer. (3) Division en familles naturelles des Balraciens anoures d'Europe, Revue nTERNATiONALE DE Lanessapî, l''«année, 1878, t. 11, p. 488. (4) Loc. cil , fig. 5 et 4 dans le texte. — 324 — (1868-1869), peut-être aussi à raison du grossissement trop faible à l'aide duquel j'ai examiné les embryons vivants. Les protovertèbres, qui commençaient à se montrer à la fin du stade précédent, deviennent plus distinctes et augmentent en nombre. La plaque branchiale est bien développée, surtout chez l'Axolotl. Chez le Tr. helveticus, la saillie du corps de Wolff est visible. L'accroissement total, quoique peu prononcé, existe, et comme le remarquent Scott et Osborn, les change- ments de forme résultent surtout de l'allongement et de l'apla- tissement de l'embryon. STADE X (G). Tr. palm,, pi XI, fig. 17, 18. Tr. alp., pi. XI, fig. 38. Axolotl, pi. XII, fig. 19-21. Scott et Osborn assignent à ce stade les caractères suivants : a) Inflexion crânienne plus prononcée; tête présentant, dans son ensemble, une forme sphérique, très différente de celle qu'offre la tête des Anoures. b) Apparition des premiers rudiments des arcs viscéraux. c) Queue devenant saillante sous forme d'une masse non seg- mentée du mésoblaste. d) Somites devenus plus nombreux (1). L'inflexion et la saillie crâniennes sont bien plus prononcées chez l'Axolotl que chez les Triions ; l'inflexion est telle que la saillie se réunit à l'abdomen à angle droit (pi. Xll, fig. 21). Une ligne partant de l'extrémité céphalique et allant aboutir au sommet de l'angle susdit mesure la moitié de la longueur de la ligne abdominale. 11 est assez difficile de définir la forme de la téle dans son ensemble. Celle des Tritons, vue de face, semble plutôt pyrami- dale que sphérique (pi. XI, fig. 16, 17), la base de la pyramide correspondant àia limite antérieure. Celle de l'Axolotl, par suite de la saillie beaucoup moins prononcée des vésicules oculaires, (1) I.oc. cil-,\). 451. — 52a — présente, vue de face, une forme ovalaire; vue de côté, elle res- semble à une saillie triangulaire très forte, dont le sommet cor- respond à l'extrémité céphalique antérieure (pi. XII, fig. 20-21). Un coup d'œil jeté sur les figures fera mieux comprendre qu'une longue description les différences qui existent, sous ce rapport, entre les Tritons et l'Axolotl. Une autre particularité offerte par l'Axolotl est la suivante : cliez beaucoup d'embryons de ce stade, Y extrémité céphalique subit une sorte de torsion sur son axe; en d'autres termes, elle s'incurve soit de droite à gauche, soit de gauche à droite, de manière que l'extrémité antérieure de la tête, au lieu de corres- pondre à la ligne médiane, est inclinée vers l'une ou l'autre de ces directions. Cette torsion, ainsi que le démontre l'observation des stades suivants, est le premier indice d'un changement de position de l'embryon dans l'œuf ; bientôt en effet, au lieu d'être incurvé d'arrière en avant [incurvation primaire)^ il le sera dans le sens d'un des plans latéraux, à gauche si la torsion céphalique a lieu de gauche à droite, à droite si elle se fait dans le sens opposé [incurvaiion secondaire ou latérale). Je reviendrai tout à l'heure sur la question de savoir si quelque chose de semblable se passe chez les Tritons. Sur quelques embryons de ce stade (Tritons et Axolotl), on commence à distinguer les saillies viscérales., La queue n'est guère apparente encore sur l'embryon vu de profil, mais elle se distingue assez nettement sur les embryons vus de face; dans ces conditions, aussi bien chez l'Axololt que chez le Tr. palmidède, l'espace qui sépare l'extrémité caudale de l'extrémité céphalique correspond sensiblement au tiers de la longueur totale de l'embryon (pi. XT, fig. 17, pi. XII, fig. 20). Il n'en est pas de même chez l'Alpestre où, par suite de la forte incurvation déterminée par le chorion, les extrémités caudale et céphalique viennent presque en contact (pi. XI, fig. 38). Mais il est à remarquer que l'inQexion se fait de telle sorte que l'extré- mité caudale, au lieu de correspondre à la ligne médiane, dévie — le plus souvent à droite — et vient s'appliquer sur un des côtés de la tête. Cette déviation, que je ne constate pas encore à — 526 — celte époque pour remhrvon du Palmipède, est comme la torsion céplialique de TAxoIotl, le premier indice de l'incurvation secon- daire ou latérale qu'on observe aussi chez les Tritons, mais à une époque plus tardive. Outre les somites devenus plus nombreux, je note encore, chez l'Alpestre, l'apparition des vésicules acoustiques^ chez l'Axolotl, celle des fossettes olfactives et de la dépression anale. STADE XI (H), Tr. palm , pi. XI, ûg. 19, 20. Tr. alp., pi. XI, tìg. 39, 40, 42. Axolotl, pi., XII, lig. 22, 23. Les caractères de ce stade, d'après Scott et Osborn, sont : a) L'allongement notable de l'embryon; b) L'apparition, sur le cerveau antérieur, des hémisphères cé- rébraux sous forme d'une saillie impaire rudimentaire; c) La distinction de quatre arcs viscéraux et trois fentes. d) L'allongement de la queue, qui n'est pas encore segmentée. Les auteurs ont vainement cherché la présence des suçoirs et des dents cornées qu'on trouve chez les Anoures (1). Allongement de l'embryon. 11 est manifeste chez le Palmipède. Dans le précédent stade, l'abdomen, dans son ensemble, avait la forme d'un ovoïde à gros bout postérieur, tronqué en avant (pi. XI, fig. 17). Dans le stade actuel, l'abdomen, au lieu d'être ovoïde, présente deux dilatations, l'une antérieure, l'autre posté- rieure, séparées par une dépression (pi. XI, fig. 19-20). Chez l'Alpestre, l'allongement existe à un degré moindre que chez le Palmipède; par suite de cet allongement, le croisement entre les extrémités céphalique et caudale augmente (pi. XI, (ig. 40). Débarrassé artificiellement de son chorion, l'embryon se redresse un peu (pi. XI, fig. 42), les extrémités céphalique et caudale ne sont plus en contact; mais, en somme, l'incurvation est encore très prononcée, ce qui donne à l'embryon de l'Alpestre un tout (1) Loc. cil , p. 4o2. — 327 — autre facies que celui des Tritons palmipède et ponctué du même âge. Chez l'Axolotl aussi, rallongement est relativement moindre et l'incurvation plus forte que chez les Tritons palmipède et ponctué (pi. XI, flg. 22). L'embryon est déjà gêné dans l'espace qu'il occupe, car il se redresse un peu quand on le débarrasse de ses enveloppes. La torsion céphalique se complète pour aboutir bientôt (stade suivant) à Tincurvation latérale (pi. XI, fig. 23). L'embryon a un facies particulier qui permet de le distinguer, à première vue, soit de celui de l'Alpestre, soit de ceux des Tr. palmipède et ponctué. La rotation de l'embryon que j'avais observée à partir du neuvième stade, mais seulement sur l'em- bryon débarassé de ses enveloppes, se voit maintenant à l'inté- rieur de l'œuf. D'après Joly, qui le premier l'a signalée chez l'Axolotl, elle s'opère ordinairement, mais non toujours, de gauche à droite et dans un plan horizontal. « Quelquefois même, ajoute l'auteur, il m'a semblé que l'embryon se meut en exécu- tant un mouvement de culbute dans l'intérieur de la coque membraneuse et délicate qui l'entoure » (i). C'est toujours ce mouvement de culbute, la tête se portant en avant, et jamais un mouvement autour du grand axe de l'embryon, que j'ai observé. D'après Robin, les mouvements de gyration suivent de près ce qu'il appelle la première éclosion et sur laquelle je reviendrai plus loin. Le savant anatomiste donne aussi des détails précis sur la distribution des cils vibratiles auxquels ces mouvements sont dus (2). Enfin Slieda s'est assuré que la gyration est loin d'être constante; sur les œufs provenant de deux pontes diffé- rentes, il n'a pu la constater que pour un nombre très restreint d'embryons (3). La saillie impaire, prem/ère ébauche des hémisphères cérébraux s observe chez l'Axolotl et les Tritons. (t) Loc r/7 , p. 25 el Comptes-rendus de l'Acad. des sciences, Paris, 1870, t. LXX, p.872. (2) Loc. cil, \). 385. (3) Loc. cit., p. 11. — 328 — Je compie trois arcs viscéraux et non quatre. Il est probable que Scott et Osborn auront confondu l'ébauche des crochets de Rusconi avec le premier arc -viscéral ; or, cette ébauche ne se forme pas aux dépens de la plaque branchiale, mais de la plaque pharyngienne. Les arcs viscéraux sont beaucoup plus prononcés sur les embryons d'Axolotl que sur ceux de Tritons; chez les premiers, la plaque branchiale, dans son ensemble, a un volume plus considérable (pi. XII, fig 22). J'ai déjà parlé de la position de Vextrémiié caudale par rapport à l'extrémité céphalique dans l'embryon d'Alpestre. Dans celui du Palmipède, l'inflexion de cet appendice, qui n'était guère apparente dans le stade précédent, est maintenant manifeste (pi. XI, fig. 20). Enfin, chez l'Axolotl, la saillie céphalique d'une part, la saillie caudale de l'autre, donnent à l'embryon, vu de profil, une forme de croissant. De même que Scott et Osborn, je ne rencontre, à aucune époque du développement, les dents cornées si caractéristiques pour les larves d'Anoures. Il en est autrement des suçoirs (Suckers) s'il faut considérer, comme je le crois, les crochets de Rusconi comme les homologues des suçoirs on organes adhésifs, de forme très variable suivant les espèces, que présentent les larves des Batraciens anoures. L'origine de ces crochets, encore vaguement indiquée dans le stade actuel (Tritons), devient très évidente dans le stade suivant. J'ajouterai encore que la saillie formée par le corps de Wolff se dessine davantage; que les protovertèbres ^ plus nombreuses, deviennent aussi plus apparentes.Ainsi dans l'embryon d'Alpestre, elles ont la forme de lames rectangulaires foncées encadrées par un bord plus pâle el montrant, dans leur centre, un point égale- ment pâle indice de la cavité centrale. Je dislingue également les fossettes olfactives (Tr. alpestre) et, en arrière de la vésicule oculaire, une petite saillie, qui correspond probablement au ganglion de Casser (Axolotl). — 529 — STADE XII (/). Tr. palm., pi. XI, (ig. 21. Tr. alp., pi. XI, fig. 43. D'après Scott et Osborn, on constate dans ce stade : a) Une augmentation du développement general; b) Une formation nouvelle : l'apparition de la dépression (in- YokUion) buccale; cette dépression, allongée transversalement, diffère de celle du Bombinator; c) Les dilatations correspondant, par leur siège, à celles dési- gnées par Gœtte sous les noms de dilatation rénale, nerf latéral, septième et cinquième nerfs, vésicule acoustique, ganglion de Casser ; mais par suite de l'incurvation opposée à celle du Bom- binator, ces organes sont séparés par de plus larges inter- valles (1). Développement général. Je le constate chez les trois espèces; chez toutes aussi, l'allongement général a augmenté. La torsion céphalique ou axiale de l'embryon d'Axolotl se complète et passe insensiblement à l'incurvation latérale du stade suivant. C'est à cette période que j'ai pu observer, pour l'Alpestre, ce que Robin a très heureusement désigné sous le nom de première éclo- sion (2). Le chorion, dans lequel l'embryon était emprisonné, pelotonné sur lui-même, se rompt enfin, toujours du côté de l'extrémité céphalique, et une partie de cette enveloppe reste appendue, sous forme de sac, à l'extrémité caudale (pi. XI, fig. 45). La larve, plus à Taise dans l'espace limité par la capsule interne, se défléchit, s'étend de plus en plus, en conservant, à son extrémité postérieure, l'enveloppe choriale rupturée. Chez l'Axolotl, la dépression buccale, indiquée dans le stade précédent par un petit trait transversal plus pâle, est limitée maintenant par deux bourrelets et présente une forme de cœur ou de triangle, plus manifeste encore dans le stade suivant. Sa (1) Loc. fit , p. ib2, pi. XXI, fig. 17. — La figure de Scoli et Osborn correspond plutôt aux embryons de mon sladeXI; par conlre ceux demon sladc XII sont comparables à la figure 54, pi. III de Gœlle, à laquelle renvoient les auteurs anglais. (-2) Loc. a'L, p. 384. — 330 — coloration blanchâtre tranche sur la teinte bistrée des parties qui l'entourent. — Les crochets de Rusconi des enabryons d'Alpestre et de Palmipède sont très apparents (pi. XI, tig. 21, 43). Parmi les dilatations ou saillies qua signalent Scott et Osborn, je trouve, chez l'Axolotl, celle du ganglion de Casser déjà indi- quée pour le stade précédent; la dilatation rénale, déjà visible dans les deux précédents stades, se dessine davantage. STADE XIII (K?). Tr. ponctué, pi. XI, fig. 24,25. Tr. alp., pi. XI, tig. 44, Axolotl, pi. XIJ, fig. 24-26. Uincurvation latérale se complète chez l'Axolotl et se pro- nonce davantage chez le Tr. alpestre. L'embryon d'Axolotl, débarrassé artificiellement de ses enveloppes, se redresse (pi. Xïl, lig. 25). Dans les embryons de ces deux Urodèles, les saillies branchiales se présentent maintenant sous forme de bourgeons; il y en a trois de chaque côté. Les crochets des embryons de Tritons sont plus développés. Sur la larve d'Axolotl existe une forte saillie située derrière l'endroit oii se forme le cœur; elle correspond à la saillie hépatique figurée par Gœlte pour le Bom- binator (fig. 55, laf. III); seulement elle n'est pas, comme chez cet anoure, séparée du reste de l'abdomen par un sillon, mais se continue insensiblement avec lui; la saillie est très pro- noncée; c'est à son niveau que l'embryon de ce stade offre la plus grande hauteur (pi. XH, fig. 25). Dans les embryons de Triions, la saillie hépatique, beaucoup moins apparente, se retrouve néanmoins et l'ont peut dire qu'ici, de même que chez le Bombinator, elle est séparée du reste de l'abdomen par un sillon (pi. XI, fig. 24, 25). C'est à elle aussi qu'il faut surtout attribuer les changements de forme de l'abdomen qu'on constate chez le Palmipède, à partir du stade IX. L'accroissement de Vextrémiié caudale est notable. Chez l'Axolotl, j'ai observé des mouvements de latéralité^ soit spontanés, soit surtout à la suite d'une stimulation. Les mouvements de rotation ou de giration continuent. — 531 — STADE XIV (L?). Ses principaux caractères sont : !*• Vaccroissemeiit général et celui des parties déjà existantes augmentent; 2" La crête caudale apparaît; Textrémité caudale s'aplatit latéralement; 3° Le cœur est visible à travers la peau (Axolotl, Tr. alpestre), mais je ne parviens pas encore à distinguer des contractions de cet organe ; Ât° Les fossettes olfactives, bien apparentes chez TAxolotl, se présentent sous forme de points foncés occupant le milieu de la saillie des lobes olfactifs; 5" Le cristallin est visible dans les embryons de Tritons, mais non encore dans ceux d'Axolotl; ici les yeux se présentent sous forme de saillies plus pâles que les parties limitrophes; 6° L'apparition de la vésicule acoustique. Chez l'Axolotl, elle se montre sous forme d'une tache foncée entourée d'un cercle clair (v. pi. XII, fig. 27, qui représente une larve un peu plus âgée); 7" Chez l'Axolotl, les mouvements de giration ont cessé ou, tout au moins, considérablement diminué. STADE XV. Tr. alp., pi. XI, Og. 4o-47. Axolotl, pi. Xlf, fig. 27-30. Pendant ce stade : i" Le développement général et celui des parties existantes augmente encore. Ainsi les bourgeons branchiaux s'allongent, mais restent encore indivis; les crochets de Rusconi (Tritons) sont plus développés; sur l'embryon d'Axolotl, se voit une petite saillie située en dessous en un peu en arrière de l'œil (pi. XII, fig. 28); elle est l'homologue de ce crochet, mais elle reste à l'état de vestige et ne se retrouve plus dans les stades suivants. Le cristallin est maintenant visible chez l'Axolotl. — 532 — 2° La crête dorsale a fait son apparition (pi. XI, fig. 45, pi. XÏI, fig. 27, 29); 3o Les embryons de tritons présentent des saillies qui corres- pondent aux futures extrémités antérieures (pi. XI, fig. 46, 47). 4° Les mouvements spontanés augmentent. La larve (Axolotl) encore renfermée dans Tœuf change de temps en temps de posi" tion, mais les mouvements qu'elle exécute sont toujours des mouvements de latéralité; ils sont très vifs chez la larve artifi- ciellement débarrassée de ses enveloppes. Dans ces conditions et vers la fin du stade, elles nagent avec vivacité quand on les touche. Enlevées de l'œuf et dans le repos, elles sont toujours couchées sur l'une des faces latérales. STADE XYL Tr. alp,, pi , XI, fig. 48-51. Axolotl, pi. XII, fig. 31. On peut considérer comme caractérisant ce stade : 1" Le début delà ramification des bourgeons branchiaux ; 2° Le grand développement des crochets de iii^scon/ (Tritons); 3° La saillie déterminée par le développement des extrémités antérieures augmente (Tritons) et est visible aussi chez FAxolotl; 4" L'apparition des contractions du cœur; elles sont très dis- tinctes sur l'embryon d'Axolotl; j'en compte 40 à la minute. La circulation branchiale devient également visible ; 5" La larve, artidciellement débarrassée de ses enveloppes, nage avec plus de vivacité que celle du stade précédent. Dans le repos, elle se place parfois le ventre en bas, le dos du côté de la lumière; 6° Les modifications survenues dans la coloration sont très remarquables. On s'en fera une idée par l'inspection de nos figures. 00-) STADE XVII. Tr. palm., pi. XI, Og. 22-23. Tr. alp., pi. XI, fig. 52. Axololl, pi. XII, fig. 33-33. Je comprendrai dans ce stade les modifications survenues jus- qu'à la sortie de l'œuf. Il est surtout caractérisé par le dévelop- pement des parties existantes, notamment de l'extrémité cépha- lique,des branchies, des crêtes dorsale et caudales, des crochets de Rusconi (Tritons), puis, à la fin du stade, par les modifications survenues dans l'appareil digestif. Voici du reste les principaux changements constatés jour par jour pour l'Axolotl, pendant ce stade : La ponte ayant eu lieu le 50 avril (1868), les embryons présentent déjà le id mai Taspect rendu par les figures 55-35, pi. Xlî. Ils sont encore renfermés dans l'œuf. Chaque branchie est généralement munie de deux appendices. Le cœur bat 48 fois à la minute. Le sang, vu par transparence à travers la peau, a une couleur orange. Un vaisseau ventral avec ramifications laté- rales est visible. Je ne découvre plus trace des saillies ou tuber- cules situés sous les yeux dans le stade XV, et les homologues des crochets de Rusconi des Tritons. Ceci permet de supposer que les Axolotls et les Tritons descendent d'un type ancestral commun muni de ces crochets qui, par un défaut d'usage, sont devenus chez les premiers de ces Urodèles des organes rudimen- tairesne faisant qu'une courte apparition dans le développement hémogénique. 15 inai. La larve est encore renfermée dans l'œuf, mais son incurvation latérale a singulièrement diminué; elle est presque nulle pour quelques-unes. Du reste, pas de modifications exté- térieures bien appréciables. 16 mai. Quelques larves sortent de l'œuf (éc/os/on définitive, Robin); elles tombent au fond du vase, dépourvues qu'elles sont de crochets de Rusconi. La fente buccale est parfaitement indi- quée, mais ne communique pas encore avec le reste du tube — 33i digestif. Je ne constate l'établissement de cette communication que le 18 mai ; à cette même date, je distingue plus nettement à traversia peau les divisions du tube digestif. Pour la coloration, je me contenterai de renvoyer à mes figures. — 335 — SECONDE PARTIE. FRACTIONNEMENT DE L ŒUF DES BATRACIENS. J*ai suivi les diverses phases du fractionnement chez trois espèces de Tritons : l'Alpestre, le Ponctué et le Palmipède ; l'Axolotl, et deux espèces d'Anoures : le Pélobate brun et le Crapaud commun. Par suite de sa forte pigmentation, l'œuf du Crapaud commun offre, au point de vue des phénomènes intimes du processus, certaines particularités intéressantes et dont la description trouvera mieux sa place dans une notice spéciale. Aussi ne parlerai-je ici de la segmentation de l'œuf de ce Batracien que d'une façon tout à fait accessoire, me réservant de publier plus lard les observations que j'ai pu recueillir à ce sujet. Si les phases externes du fractionnement de l'œuf des Batra- ciens sont facilement appréciables à l'œil nu ou à l'aide d'un faible grossissement, il en est tout autrement des phénomènes qui se passent à l'intérieur du vilellus; l'examen de coupes trans- parentes devient alors indispensable. 11 en résulte que l'observa- tion directe des transformations successives de la masse nucléaire est impossible, et que l'observateur est réduit à faire l'étude com- parative non-seulement des coupes de divers œufs, mais aussi de celles de chaque œuf en particulier. Il y a là, il faut le recon- naître, une sérieuse difficulté à vaincre, difficulté déjà signalée par Biitschli quand il disait : «....dass die genaue Untersuchung des Kerntheilungsprocesses in den Eiern der Batrachier ohne Zweifel eine hôchst schwierige ist, wie dies sich ja einmal aus der Ungunst des Objectes und dann auch der Beschwerlichkeit der Untersuchungsmethode ergibt p (1). Aussi n'ai-je pas la préten- (1) Studien Uber die ersten Enlwicklungsvorgange der Eizelle, etc., 1876. p. 199. — 530 — lion (le donner une solution complète du problème; bien des points, et des plus importants, restent à élucider. J'eusse, d'ailleurs, je le reconnais volontiers, obtenu sur certaines parti- cularités des résultats plus probants, en no négligeant pas, comme je l'ai fait, l'emploi de réactifs spéciaux, tel que l'acide acétique, et celui des matières colorantes. Toutefois je crois être arrivé dès à présent à établir par mes recherches que les phéno- mènes intimes du fractionnement et notamment les transforma- tions nucléaires de l'œuf des Batraciens ne diffèrent pas, quant au fond, de ceux observés chez presque tous les types du règne organique. A. Phénomènes externes du fractionnement. Dans l'œuf des Tritons et de l'Axolotl, la fovea germinativa (le Schultze reste généralement en dehors des sillons formés par les deux méridiens ; ainsi, après l'apparition du premier sillon, elle se voit en un point de l'hémisphère supérieur de l'un des deux globes (pi. XI, fig. 27) ; après la division en quatre globes, elle a pour siège l'hémisphère supérieur d'un de ces der- niers ; souvent alors on la trouve près du sommet de l'angle formé par la réunion de deux méridiens. Comme le plus souvent elle persiste encore après l'apparition de l'équateur, elle occupe alors l'un des quatre segments de l'hémisphère supérieur de l'œuf. Je dois ajouter que la fovea, tout en persistant, n'offre plus ses caractères primitifs. J'ai signalé ailleurs (1) les modifications qu'elle éprouve. Au moment de la segmentation, elle n'est représentée que par une simple tache, plus claire que la couche corticale qui l'en- vironne et offrant, chez l'Axolotl, la teinte de la zone externe primitive. La situation de la fossette germinative en dehors du point d'entre-croisement des deux méridiens est une preuve que, règle générale, elle ne correspond plus, à l'époque où le frac- tionnement commence, au pôle supérieur de Pœuf ; l'axe ovulaire (1) Recherches sur V embryologie des Z?a^racù'?JS, loc, cil. p. 106. — 537 — qui, avant la fécondation, allait aboutir à la partie centrale de la fovea^ a subi une inclinaison et passe maintenant à une certaine distance de cette dernière. Les derniers vestiges de la fossette persistent parfois très longtemps ; ainsi je trouve dans mes notes que, sur des œufs d'Axolotl pondus le 30 avril Ì868, on découvre encore le 2 mai, à la fin de la segmentation, la tache pâle sur le pôle supérieur. Les autres phénomènes extérieurs du fractionnement ne m'ont pas offert de particularités bien dignes de remarque. Je noterai seulement que, chez les Tritons, les sillons méridionaux débutent sous forme d'une gouttière relativement large et d'une teinte beaucoup plus claire que la couche corticale qui la limite. Dans le fond de la gouttière se voit le Faltenkranz qui persiste assez souvent alors que la gouttière est remplacée par un simple sillon (1). Ceci m'amène à revenir encore sur la membrane vitel- fine (Eizellemembran de Remak), dont il a déjà été question à propos des enveloppes. Cette membrane, que j'ai vainement cher- chée sur l'œuf du Pélobale (2), existe positivement sur les œufs de Tritons et d'Axolotl, aussi bien à la surface de l'hémis- phère inférieur qu'à celle de l'hémisphère supérieur. J'ai pu détacher cette membrane d'œufs parfaitement frais et qui n'a- vaient séjourné dans aucun liquide conservateur, la colorer par le carmin, et l'examiner au microscope. Comme je l'ai fait remarquer, cette membrane acquiert plus de consistance sous l'influence de l'alcool ; si un œuf, après avoir séjourné quelque temps dans ce liquide est ensuite placé dans l'eau, celle-ci pénètre sous la membrane par endosmose et la sépare du vitellus. Lorsque dans l'œuf examiné ainsi, la segmentation a commencé, on voit la membrane sortir du sillon et former, à ce niveau, de petites bosselures, sans toutefois se déplisser complètement. La membrane vitelline, très mince, il est vrai, mais nettement diffé- renciée de la sphère ovulaire qu'elle recouvre, prend donc part (1) Le Faltenkranz peut aussi s'observer dans des slades ultérieurs (pi. XIV, fig. 16). (2) Loc. cil , page 15 des tirés à part. 23 — 338 — au fractionnement. Sur les coupes, je n'ai pu constater sa pré- sence avec certitude , sans doute à raison de la délicatesse même de la membrane, qui ne lui permet pas de résister aux diverses manipulations que doit subir l'œuf destiné à être débité en tran- ches microscopiques. B. Examen des coupes transparentes. STADE I. (PI. XIII, fig. 11. Pélobate brun). Dans mes recherches sur l'embryologie des Batraciens (1), j'ai considéré le premier noyau embryonnaire comme formé uniquement par le pronucleus mâle ou périphérique {Sper- makern, 0. Hertwig). Depuis 0. Hertvvig, tout en confirmant ma manière de voir sur l'origine de la traînée pigmen- laire el de la ligure nucléiforme à laquelle elle aboutit, a admis l'existence, dans l'œuf des Batraciens, d'un pronucleus femelle (Eikern); d'après le savant embryologiste, la fusion des deux pronucleus donnerait naissance au premier noyau em- bryonnaire (2). Je suis loin de vouloir nier l'exactitude de ces observations d'où il résulterait que l'œuf des Batraciens rentre dans la règle commune, d'autant plus que, depuis l'apparition du mémoire de Hertwig, je n'ai pu vérifier par de nouvelles recherches les faits signalés par lui. Je ferai remarquer cepen- dant qu'en parcourant mes anciennes préparations, el elles sont nombreuses, j'ai vainement cherché une disposition venant à l'appui de l'opinion de l'auteur allemand. Je découvre bien sur certaines coupes, à côté d'un pronucleus périphérique aboutissant d'une traînée pigmentaire, une autre figure nucléiforme plus ou moins rapprochée du premier ; mais il est facile de se persuader (1) Loc. cit., pp. 117 et suivantes. (2) Beitrage zur Kenntniss der Bildung, Befruchtung und Theilung des thie- rischen Eies. Zweiler Theil, Morph. Jahrb , Bd. 111,1877, s. 44-53, Taf. IV, fig. 5, 11, 12; Taf. V, tig. 4-5. 359 par l'examen comparatif des coupes adjacentes du même œuf que cette seconde figure nucléiforme a la même signification que sa congénère, c'est-à-dire qu'elle aussi est l'aboutissant central d'une traînée pigmentaire ; l'isolement de la figure nucléiforme peut s'expliquer, soit par la direction suivant laquelle la coupe a été faite, soit par une déviation de la traînée susdite. Avant de parler de la situation et des caractères du premier noyau embryonnaire, je décrirai l'aspect que présente une coupe méridionale de l'œuf alors que ce noyau existe et par conséquent à l'époque où le fractionnement va commencer. Je prends pour exemple l'œuf d'Axolotl. La couche pigmentaire corticale a sa plus grande épaisseur au niveau du pôle supérieur, diminue à partir de ce point en allant vers l'équateur, puis disparaît insensiblement à mesure qu'on se rapproche du pôle inférieur de l'œuf. Sous la couche corticale pigmentaire, se trouvent plusieurs zones plus ou moins distinctes par leur aspect et leur constitution morphologique. Dans l'hémisphère supérieur, est une zone généralement séparée par un espace clair de la couche corticale, parallèle à cette couche, mais moins foncée et plus large ; je l'appellerai zone pigmentaire subcorticale. Une autre zone en forme de croissant dont la convexité correspond à la périphérie de l'œuf est en grande partie formée par des plaques lécithiques séparées par des granulations plus petites de nature protoplasmique; les pla- ques m'ont paru d'autant plus volumineuses qu'elles sont plus internes. Je désignerai cette zone sous le nom de croissant de l'hémisphère inférieur. Il a sa plus grande épaisseur au niveau de cet hémisphère, tandis que ses cornes s'engagent dans l'espace clair compris entre la couche corticale et la zone pig- mentaire subcorticale. Les plaques lécithiques renfermées dans cet espace ne diffèrent nullement par leur aspect, leur réfrin- gence, leurs dimensions, en un mot par tous leurs caractères, de celles de l'hémisphère inférieur avec lesquelles elles forment du reste une couche non interrompue. Ce ne sont donc pas des taches germinatives. Le reste de l'hémisphère supérieur et une zone centrale Mmiiée inférieurement par le croissant paraissent — 340 — homogènes ou très finemenl granuleuses, même à un assez fort grossissement. La zone centrale est pâle, tandis que Thémisphère supérieur est, pour ainsi dire, sablé de flnes granulations pigmentaires. Le premier noyau embryonnaire ou noyau de la première sphère est situé sous le pôle supérieur de l'œuf, à la limite de la zone pigmentaire subcorticale (1). Il est beaucoup plus rapproché du pôle supérieur chez les Urodèles que chez les Anoures. Ainsi, dans Fœuf du Crapaud commun, il se trouve situé à la réunion du tiers supérieur avec les deux tiers inférieurs d'une ligne cor- respondant à l'axe ovulaire; dans l'œuf de l'Axolotl et des Tri- tons, je le rencontre à la réunion du quart supérieur avec les trois quarts inférieurs, ou même du cinquième supérieur avec les quatre cinquièmes inférieurs de cette ligne. Sur les coupes, il se présente sous forme d'une petite masse fusiforme, plus claire que le vitellus ambiant, homogène ou finement granuleuse quand elle est exactement au point, limitée par de fines granula- tions pigmentaires; celles-ci s'accumulent en plus grand nombre aux deux pôles du fuseau sous forme de petites traînées coniques dont la base correspond au noyau et dont le sommet est dirigé en dehors. Dans son ensemble, la petite masse est perpendicu- lairement placée par rapport à l'axe de l'œuf. Chez l'Axolotl, la longueur de la partie claire est de 36 ^j-. environ, sa largeur de 10 p. Avec les traits pigmentaires qui le prolongent, le noyau mesure 75 fx. de longueur. Je cherche en vain une disposition rappelant le noyau vilellin [Dotterkern) de Goette, à moins de considérer comme correspondant à cette disposition la zone péri- nucléaire claire qui se rencontre chez le Pélobate (2), et celle formée de granulations pigmentaires que présente l'œuf du Crapaud. Un plan perpendiculaire à l'axe ovulaire, passant par le noyau et la limite inférieure de la zone pigmentaire subcorticale, par- tage l'œuf en deux segments d'inégale dimension : un supé- (1) Voir Recherches sur l'embryologie des Batraciens, loc. cil. ,pl. II, fig. 5 el 6. (2) Idem , pi 1 , fig. 0. — 541 — rieur plus petit, un inférieur plus volumineux. Ce plan fictif correspond sensiblement au futur plan equatorial qui sépare les globes eclodermiques delà masse endodermique. On peut donc désigner, dès à présent, le segment supérieur sous le nom d'extrémité ectodermique, et la partie sous-jacente sous le nom d'extrémité endodermique de la première sphère (i). C'est dans l'extrémité ectodermique, et plus tard dans les globes ectodermiques, que le processus de fractionnement concentre en quelque sorte toute son activité. Dans Tœuf des Urodèles comme dans celui des Anoures, les noyaux des globes de fractionnement, sans parler ici des noyaux en voie de division, offrent des caractères qui varient quelque peu suivant la direction de la coupe, Fendroit de Tœuf qu'elle entame, le degré d'évolution de l'œuf et l'animal auquel il appar- liont. D'après ces diverses circonstances, ils peuvent paraître arrondis, fusiformes ou représentés par une simple fente linéaire, plus ou moins entourés depigment. Ainsi dans l'œuf du Triton helvettcKs peu riche en pigment (pi. XIlî, fig. 18-21 et pi. XIV, fig. 14-15), le noyau a souvent un aspect particulier qui dépend surtout de ce qu'il n'est pas limité par des granules pigmentaires. Ce noyau, arrondi ou elliptique, frappe immédiatement par son éclat particulier; tout autour de l'élément et affectant une dis- position radiaire,on trouve souvent des granulations ayant abso- lument la même réfringence que le noyau même, comme si la substance de ce dernier s'était répandue dans le vitellus qui l'en- toure (2). L'absence de pigment autour du noyau est aussi la règle pour les globes endodermiques en général. Un caractère commun à tous les noyaux, caractère qu'ils partagent avec le premier noyau embryonnaire, c'est l'absence, dans leur intérieur, (1) Je dis extrémité et non segment pour éviter toute confusion, ce dernier terme étant souvent employé comme synonyme de globe ou de sphère de frac- tionnement. (2) La même chose se voit autour des champs clairs des asters chez celle espèc4i. Je n'ai pas étudié à ce point de vue l'œuf du Tr. punctatus, mais sa faible pigmentation permet de supposer que la même disposition se retrouve chez cet Urodèle. — 542 — de corpuscules ligures. Très rarement et presque toujours sur des œufs arrivés à un stade déjà avancé du fractionnement, j'ai pu distinguer, dans le noyau, un corpuscule nucléoliforme. Par exemple, dans un œuf d'Axolotl divisé en irente-deux globes, le noyau d'un des globes ectodermiques renfermait un corpuscule clair, mesurant 15 fx. environ dans son plus grand diamètre. Quelque chose d'analogue se voyait dans le noyau d'une sphère ectodermique d'un œuf de Pélobate. Vu la rareté de cette appa- rition, il est permis de mettre en doute la nature nucléolaire des éléments en question. Toutefois je ne voudrais pas affirmer que les noyaux, aussi bien celui de la première sphère que ceux des stades ultérieurs, sont véritablement dépourvus d'éléments figu- rés. En effet, l'aspect homogène sous lequel ils m'ont apparu peut s'expliquer par la nature des réactifs auxquels j'ai eu recours comme moyen durcissant, savoir, l'alcool et l'acide chromique; je n'ai employé ni l'acide acétique, ni les matières colorantes. Il se pourrait sans doute que, sous l'influence de ces agents, l'as- pect homogène de la masse nucléaire disparût. STADE îï. — Division en deux globes. PI. XIII, 6g. 1-4, Pél. brun., fig. 13-1 o, Tr. alp. PI. XIV, fig. 1-2, Tr. alp. fig. 8, Axolotl. a. Première phase de la transformation nucléaire. Je ne trouve le début de la transformation du premier noyau embryonnaire sur aucune de mes coupes. Sur celles que je puis considérer comme appartenant à des œufs où le |)rocessus est le moins avancé, je constate ce qui suit (voir pi. XIII, fig 13, représentant une coupe méridionale d'œuf de Tr. alpeslre, per- pendiculaire au premier méridien, et fig. i4 où la masse nucléaire est vue à un plus fort grossissement) : Le noyau de la première sphère a fait place à une masse sensiblement fusiforme dans son ensemble, occupant la partie inférieure de la zone pigmentaire subcorticale , et perpendiculairement située par rapport à l'axe ovulaire. Elle est d'ailleurs partagée en deux — 3i~ — moitiés par une ligne moins pigmentée que le reste et qui cor- respond à cet axe. Chaque moitié représente assez bien un triangle rectangle dont le plus petit côté regarde la ligne claire axiale et dont l'hypoténuse est située en haut et en dehors. A gauche le plus petit angle ou angle externe aboutit à une ûgure fusiforme, claire et homogène, prolongeant la direction de l'hypoténuse; cette figure manque à droite, mais on la retrouve sur une coupe adjacente avec tous les caractères de la figure de gauche. Les deux moitiés de la masse fusiforme sont donc symétriques. L'ensemble correspond à la figure karyoli- tique d'Auerbach, à l'amphiaster de fractionnement de Fol. Les deux triangles avec l'espace clair qui les sépare représentent le fuseau interpolaire et, sans aucun doute, la petite figure fusiforme claire est l'homologue du champ central (Bijtschli), du pronucleus engendré (Éd. Van Beneden), de l'amas sarcodique (Fol.). Les détails de structure de l'amphiaster peuvent être étudiés en se servant du Syst. IV ou mieux du Syst. V. Hrtn.(voir pi. XIH, fig. 14). On peut se convaincre alors que les filaments bipolaires sont formés par des granulations pigmentaires disposées en séries et convergent de chaque côté vers les pôles du fuseau; à droite, au niveau de l'extrémité polaire est une petite masse pigmentée de forme conique, qu'on dirait formée par la fusion des filaments qui y aboutissent. D'après Bobrelzky (1), les fila- menls bipolaires et unipolaires sont plutôt des rangées de gra- nules que des filaments véritables. Une semblable disposition se retrouve chez tous les Batraciens et, de même que le savant russe, je n'ai pas non plus constaté de différence, sous ce rapport, entre les filaments unipolaires et bipolaires. Fol, il est vrai, croit pouvoir attribuer l'aspect peu net des filaments dans les objets décrits par Bobretzky à la méthode de préparation, tels que le durcissement dans l'acide chromique et l'éclaircissement des coupes dans un milieu très réfringent (2). (1) Studien Uber die embryonale Entwickelung der Gasteropoden, Abchiv rrR MiKR. Anat, Bd. XITI.Hefl. 1 , 1876. (2) Hecherches sur la fécondation et le commeniement de l'hémogenie , ftc, Genève, 1879, p. 2.5i>. — 344 — Au contact de la ligne claire axiale, par conséquent à la hauteur du petit côté du triangle, les fllaments de chaque moitié du fuseau polaire forment une zone un peu plus foncée. Ces zones sont-elles formées par Técartement des grains de Biitschli ou de la plaque nucléaire de Strashurger, et correspondent-elles aux deux moitiés de celle plaque (disques nucléaires, Éd. Van Beneden) d'abord indivise? Cela est possible, probable même, d'autant plus que quelques fins et rares filaments pigmentaires qui traversent transversalement la ligne claire du plan de divi- sion semblent correspondre aux filaments inlerpolaires ou con- neclifs; mais les images que j'ai sous les yeux, sont trop peu nettes pour permettre de trancher la question. La figure fusiforme claire qui représente le champ central de Taster, est plus réfringente et plus homogène que le vilellus ambiant, sans aucune trace de corpuscules figurés dans son intérieur. Elle esl bordée par des granules pigmentaires accumulés en plus grand nombre à son extrémité libre ; par son extrémité interne, elle se confond avec la pointe du fuseau interpolaire qui y aboulil. Son plus grand diamètre est d'en- viron 28 (x. sa plus grande largeur de 15 p.. La position du champ central fusiforme mérite de fixer l'altention. J'ai déjà fait remar- quer que son grand axe prolonge l'hypoténuse du triangle repré- sentant une moitié du fuseau interpolaire; il en résulte que ce grand axe n'est pas perpendiculaire, mais oblique par rapport à l'axe ovulaire et parallèle à la surface de l'œuf. J'ai décrit le champ central comme étant homogène et dépourvu de corpus- cules figurés ; ce caractère, de même que sa réfringence, sa forme, ses dimensions lui donnent une certaine ressemblance avec un noyau de sphère de fractionnement. Mais ce que j'ai dit par rapport au noyau est applicable au champ clair, c'est-à-dire qu'il est possible et même probable que l'emploi de certains réactifs, telles que les matières colorantes, pourrait y déceler la présence d'éléments figurés. Ici les filaments unipolaires des asters ne sont que très vaguement indiqués ; mais ils se montrent avec toute la netteté — 345 — désirable sur des œufs de phase correspondante chez d'autres espèces, le Pélobate , par exemple, dont il sera question plus loin. La ligne claire qui sépare les deux moitiés du fuseau est le premier indice du plan de division des deux premiers globes. On la retrouve dans les stades suivants et généralement son appa- rition précède celle des sillons. Je lui donnerai le nom de lame de fractionnement. On peut la comparer à la plaque cellulaire (Strasburger) des cellules végétales, surtout depuis que Treub a démontré que cette plaque s'accroît par ses bords jusqu'à ce que de tous les côtés elle touche aux parois de la cellule (1). Seulement l'apparition de la plaque cellulaire semble être plus tardive que celle de la lame de fractionnement. (nférieurement, elle ne dépasse pas le fuseau et, par consé- quent la zone pigmentaire subcorticale ; supérieurement, elle se prolonge jusqu'à la périphérie de l'œuf où elle va aboutir à une dépression qui se trouve au niveau du pôle supérieur. Celte dépression correspond à la gouttière, première ébauche du sillon méridional et dont il a été question plus haut; on voit la couche corticale s'arrêter assez brusquement à la hauteur des bords de la dépression. Sur la coupe ici figurée et décrite, quelques petits traits pigmentaires traversent, dans son milieu et dans le sens de la longueur, la ligne claire axiale ; mais sur d'autres coupes du même œuf, ces traits interrompus sont remplacés par une forte traînée pigmentaire de longueur variable (fig. 15, pi. XIII); pour quelques coupes, on peut la poursuivre jusqu'au pôle supérieur. Son origine ne me semble pas douteuse; elle provient du pigment de la couche corticale qui a pénétré dans la ligne claire du plan de division. Toutefois, eu égard au dépla- cement incontestable du pigment de l'hémisphère supérieur, je (1) Quelques recherches sur le rôle du noyau dans la division des cellules végétales, 4 planches, Vkrhandeliptgen der ko>. Acad. vaw WETENScHAPPErt , 19 D. 1879. — 546 — n'oserais nier que des granules pigmentaires de la zone sub- corticale ne participent à celte formation (1). Rien encore, dans toute la partie de l'œuf située sous la zone subcorticale (extrémité endodermique), ne trahit l'existence d'un processus de division. Toute l'activité se concentre dans l'ex- trémité ectodermique, premier indice des futurs globes ectoder- miques. J'ai pris pour exemple de cette première phase de la division en deux globes l'œuf du Tr. alpestre. Sur un œuf d'Axolotl un peu plus avancé en développement — le premier méridien est complet — je retrouve une disposition en tout comparable à celle observée pour le Triton (pi. XIV, fig. 8), c'est-à-dire un amphiaster de fractionnement représenté par le fuseau bipolaire et les amas clairs centraux. Par ses dimensions et par sa forme, le fuseau bipolaire rappelle celui de l'œuf du Triton. En certains endroits, notamment au contact du plan de division, le strié du fuseau est nettement indiqué. De même que chez le Triton, les amas clairs des asters sont fusiformes et obliquement situés par rapport à l'axe ovulaire, mais parallèles suivant leur longueur à la surface de l'œuf. De même aussi, ils sont homogènes et limités par des granulations pigmentaires; la disposition radiaire (fda- ments unipolaires), quoique évidente sur quelques coupes, est peu prononcée. Les dimensions de l'amas clair central ne diffèrent pas notablement de celles de son homologue chez le Triton ; je trouve en effet comme plus grande longueur 37.5 fx. et comme diamètre transverse 10 p.. (1) La pénétration du pigment cortical dans les sillons en voie de formation peut surtout être observée sur l'œuf du Triton palmipède, où la couche corticale tranche sur la teinte beaucoup plus pâle du reste du vitellus. Tl résulterait d'une observation que j'ai pu faire chez celte espèce que la couche corticale, parvenue à rintérieur du vitellus, n'est pas entièrement employée à limiter les sphères de nouvelle formation; en effet, dans les œufs offrant déjà l'aspect muriforme; j'ai trouvé des amas de pigment dont je ne puis expliquer la présence qu'en les considérant comme des débris de la couche corticale ayant pénétré dans la sphère vitelline. Certaine particularité de la fig. 15, pi. XIV, quoique se rapportant à un ,siade plus précoce, semble aussi favorable à cette manière de voir. — 347 — J'ai déjà dit qu'ici la division en deux sphères est plus com- plète. Aussi la dépression polaire supérieure correspondant au sillon de fractionnement est beaucoup moins prononcée que dans l'œuf de l'Alpestre, et la couche corticale ne s'arrête pas à son niveau. Un trait pigmeniaire en continuité avec cette couche traverse le plan de division dans toute la hauteur de l'extrémité ectodermique ; dans l'extrémité endodermique, le plan de divi- sion est indiqué par une ligne pigmentaire beaucoup plus faible qui aboutit, au pôle inférieur de l'œuf, à une dépression laquelle correspond à cette partie du sillon méridional. La même disposition se constate chez le Pélobate brun. La figure 2 de la planche XIII représente un fragment de coupe méri- dionale perpendiculaire au premier méridien d'un œuf où la division en deux sphères est assez avancée. On distingue parfai- tement, dans l'hémisphère supérieur, le fuseau interpolaire et l'amas clair central d'un des asters (à droite sur la figure) Les particularités offertes par l'œuf du Pélobate arrivé à ce stade sont surtout les suivantes : De même que chez le Tr. alpestre et l'Axolotl, les stries ou filaments bipolaires sont formés par des granules pigmentaires rangés en séries; mais les granules sont plus volumineux et, par suite, les stries beaucoup plus apparentes. Ici encore le champ clair central des asters est homogène et dépourvu de corpuscules figurés; mais, contrairement à ce qui a lieu chez le Triton alpestre et l'Axolotl, il est circulaire ou ovalaire et non fusiforme. Les stries granulées (filaments uni- polaires) sont bien plus prononcées que dans l'œuf de ces deux Urodèles. Une disposition qui ne se rencontre pas chez ces espèces, c'est que la zone pigmentaire subcorticale s'incurve et entoure les asters de façon à circonscrire, autour du champ clair central, une zone vitelline faiblement pigmentée. Cette dispo- sition se voit mieux sur une autre coupe un peu plus excen- trique du même œuf (pi. XIII, fig. 1). Si le champ clair central de l'aster est remplacé ici par un point foncé, c'est que la coupe a traversé le cadre pigmentaire de l'amas sarcodique. La zone vitelline faiblement pigmentée qui entoure cet amas est plus prononcée encore sur des œufs appartenant à — 348 — d'autres stades (pi. XIII, fig. 5). Les rayons des asters (filaments unipolaires) ne dépassent pas la limite externe de la zone claire. Cette disposition est en tout comparable à celle trouvée par Fol chez Plerolracliaea. Voici comment s'exprime, en parlant de celte espèce, le savant professeur de Genève : « Au lieu d'un amas de substance sarcodique transparente, sans structure appréciable, mais possédant un petit amas central de grannies et entouré de stries radiaires dans le vitellus granuleux, comme nous le trouvons dans l'amphiaster du premier fractionnement des oursins, nous voyons ici un corpuscule central^ immédiate- ment entouré par la substance granuleuse avec des lignes radiaires Autour de celte substance granuleuse vient le vitellus de nutrition avec ses globules lécithiques. » Cette dispo- sition suggère à l'auteur les réflexions suivantes : « Les espaces qui entourent les centres des asters des Hétéropodes et qui sont occupés par un protoplasme granuleux correspondent peut-être aux amas sarcodiques qui occupent la même position chez les oursins. Les filaments vitellins de ces derniers répondraient alors aux traînées radiaires du protoplasme qui s'étendent entre les globules lécithiques des Pterotrachaea. » « Dans cette hypothèse l'on devrait admettre que les lignes radiaires qui entourent le centre de l'aster chez ces mollusques n'ont pas leur correspondant chez l'oursin ou sont invisibles à cause de la texture trop homogène des amas de sarcode chez ces derniers » (1). b. Deuxième phase de la transformation nucléaire. J'arrive à une phase plus avancée du premier fractionnement. Elle se distingue surtout de la précédente en ce sens que les centres des asters se présentent, sur les coupes méridionales perpendiculaires au premier plan de division, sous forme de petites masses plus ou moins nettement délimitées, plus ou moins (i) Loc. cit., p. 189, pi. IX, 6g. 8-12. — 549 — allongées, parallèles au plan de fractionnement, et parfois légè- rement recourbées en arca convexité externe. J*ai pu observer plus particulièrement cette disposition dans l'œuf du Pélobate (pL XllI, fig. 3-4.). Les coupes d'œufs de Tr. alpestre représen- tées pi. XIV, fig. 1 et 2 appartiennent sans doute à la même phase. Enfin, j'ai pu la constater d'une façon très évidente dans l'œuf du Crapaud commun. A part ces changements survenus dans les asters, aucune modification importante ne s'observe du côté des stries bipolaires. Je crois pouvoir considérer cette phase du processus comme correspondant à celle qu'ont observée 0. Hertwig (1) et Fol (2) chez l'Oursin, Withman chez la Clepsine (3), et caractérisée par l'aplatissement des parties terminales sphériques de l'amphias- ter. Je n'oserais, en me basant sur mes préparations, trancher la question de savoir si les sphères s'aplatissent et s'étalent paral- lèlement au plan de fractionnement comme le chapeau d'un champignon ou sous forme de ménisque, ainsi que le veulent 0. Hertwig et Withman, ou bien si « l'épanouissement de sub- stance claire ne s'étend que dans un plan comme un arc et non dans l'espace comme un chapeau de champignon », ainsi que le suppose Fol (4). c. Troisième phase de la transformation nucléaire. Enfin, dans une phase postérieure à la précédente, la masse nucléaire s'est notablement transformée, le fuseau a disparu; dans son ensemble, elle a l'aspect de haltère ou plutôt de bissac (pi. XIV, fig. 9 et 10 se rapportant à l'Axolotl) (5). Les amas clairs (t) Beitrcige zur Kenntniss der Bildung, Befruchtung undTheilung des thie^ rischen Eies, Morphol. Jahrb., T. I, pi XII, ììg. 18-19. (2) Loc. cil , p. 222. (3) The Embryology of Clepsine, The qdart. Journal of microsc. Scie.îce, N. S , vol. XVm, July, 1878, p. 243., pi. XIV, Bg. 73. (4) Loc. cit , p. 178, pi. VI, fig. 10. (5) Ces figures qui montrent la dernière phase de la iransformalion nucléaire apparili nnent à un œuf d'un stade plus avancé. — 350 - des asters sont plusoumoinspyriformes, à extrémité périphérique renflée, à extrémité centrale rétrécie. Laplus grande épaisseur de la traînée pigmentaire qui unit ces amas correspond maintenant à cette extrémité centrale. Les stries radiaires unipolaires sont plus prononcées que dans les phases précédentes; on les retrouve, plus accentuées encore, dans des phases homologues de la trans- formation nucléaire d'œufs plus avancés en développement (pi. XIV, fig. 13, Axolotl). La forme pyriforme, comme étirée, des deux moitiés de la masse nucléaire en voie de division ne prouve donc nullement que celte division se fait par un simple étranglement d'un noyau anté- rieur. Cette phase a été vue par Fol chez l'oursin, au moment où la séparation complète est sur le point de se produire. Voici comment s'exprime cet embryologiste : « Les amas sarcodiques des asters continuent à s'éloigner l'un de l'autre Ils ont du reste perdu leur forme ronde et sont devenus plus ou moins coniques ou pyriformes; on dirait qu'ils (rainent à leur suite, dans leur marche centrifuge, une sorte de queue, dernier reste de la traînée claire qui les reliait entre eux avant le fractionne- ment (5). » Je n'hésite pas à comparer la traînée pigmentaire de l'œuf des Batraciens à la traînée pâle observée entre les asters chez l'oursin par Fol; à l'exemple de cet auteur, je l'ap- pellerai trainee internucléaire (1); elle est identique aux fila- ments connectifs ou internucléaires. La traînée internucléaire de l'œuf des Batraciens correspond aussi au stade représenté pour la Clepsine par Withman (2). L'auteur fait remarquer d'ailleurs que ce stade rappelle celui décrit par Goette pour le Bombinator, et par 0. Hertwig pour Rana temporaria (3). (1) Loc. cit., p. 176. (2) Loc. cit., fig. 76. (3) Loc. cit., p. 243. — 351 — STADE III. — Division en quatre globes. PI. XIII, Og. 5-8, Pél. brun. PI. XIV, fig. 3-6, Tr. alp., fig. 9-10, Axolotl. Les phases par lesquelles passent les noyaux des deux pre- miers globes, quand ceux-ci se segnnentent à leur tour, sont en tout semblables à celles offertes par le premier noyau embryon- naire lors du premier fractionnement. Sur les figures 5 et 6 de la planche XIII, qui représentent des coupes équatoriales d'œuf de Pélobate où le deuxième méridien est en voie de formation, on dislingue des amphiaslers de fractionnement très nets, montrant les stries bipolaires disposées en fuseau, et des asters formés d'un champ clair central circulaire d'où partent en rayonnant les stries unipolaires. A l'aide d'un grossissement assez fort, (Syst. V ou Sysl.VlI, Hrln.), on découvre, dans un des amas sar- codiques, un point central plus clair, mesurant 2-5 p. Est-ce l'homologue du point central souvent signalé, chez d'autres espèces, dans le champ clair des asters? Comme je l'ai déjà dit, je n'ai constaté la présence des corpuscules figurés au sein de l'amas sarcodique que très exceptionnellement. On voit très bien sur la figure 5 que l'endroit occupé par les asters correspond à un champ peu pigmenté, abstraction faite des stries radiairesqui le traversent, mais plus foncé que les centres des asters; du côté externe il est limité par une zone pigmenlaire, dépendance de la zone pigmentaire subcorticale. Sur une coupe méridionale parallèle au premier plan de frac- tionnement d'un autre œuf de la même espèce (pi. XIII , fig. 8), la masse nucléaire se présente sous un aspect un peu différent. Les stries intrapolaires ne sont plus disposées en fuseau, mais parallèles entre elles; l'amphiaster, dans son ensemble, a plutôt une forme de haltère; il est coupé dans son milieu parune ligne claire, la lame de fractionnement, qui se prolonge supérieurement dans la zone pigmentaire sub-corticale et s'arrête à la limite de cette zone sans atteindre le pôle supérieur. La lame de fraction- nement est traversée, dans son milieu et sur toute sa longueur, par un fin trait pigmenlaire. — 35:ì — Une disposition analogue, moins les zones entourant les asters, se retrouve chez le Tr. alpestre (pi. XIV, fig. 3-6) Les champs clairs des asters, au lieu d'être circulaires commedans l'œuf du Pélobate, sont elliptiques ou fusiformes; les stries radiaires qui en partent sont peu prononcées. En examinant ces champs clairs, même à un fort grossissement (syst. IX Harln.), on peut s'assurer que leur substance, plus homogène que le vitellus ambiant, est dépourvue de corpuscules figurés. On constate pendant ce stade trois faits qui méritent de Oxer l'attention : i° Le fractionnement en quatre globes commence avant que la division en deux globes soit achevée. C'est la simplement une conséquence de cet autre fait connu depuis longtemps, à savoir l'activité plus grande du processus de fractionnement dans l'hé- misphère supérieur (extrémité ectodermique) que dans l'hémis- phère inférieur (extrémité endodermique) de l'œuf. 2° Un autre fait sur lequel j'avais déjà attiré l'attention dans mes Recherches sur le développement du Pélobate brun, concerne la marche que suivent les sillons ou plutôt les plans de fraction- nement méridionaux. Comme le premier fait, il est une consé- quence de l'activité plus grande dont l'extrémité ectodermique est le siège; il indique en outre que, dans l'extrémité endo- dermique, cette activité décroît d'autant plus qu'on se rapproche d'avantage de l'axe ovulaire. Je disais à ce propos : a D'après Remak, le premier méridien, après avoir paru sur l'hémisphère inférieur, formerait un étranglement circulaire autour d'une partie centrale non encore divisée (\); c'est ce qu'il appelle Einfurchung ; W donne le nom de Durchfurchung à la division subséquente de la partie centrale. Or, quand on divise l'œuf du Pélobate dans le sens du premier méridien et au moment où ce méridien est sur le point d'être complet, on voit que la partie non divisée, loin d'être centrale, est tout entière située dans l'hémisphère inférieur ; elle se présente sous forme de cône (2) (1) Remak, Unlersvchwigcn iiber die Entwickelung der Wirbelthiere, p 2, pi. IX. (â) Mieux vaudrait dire sous l'orme d^un segmeut d'ellipse. — 353 — dont la base correspond à la périphérie de l'œuf, par conséquent à l'endroit où le premier méridien n'est pas encore visible à l'ex- térieur, et dont le sommet ou la partie supérieure est nette- ment indiquée par la présence de la couche corticale ; sur les sections la partie déjà divisée forme, autour de celle qui doit l'être encore, une sorte de croissant qui l'entoure de toute part sauf à la base qu'il touche par ses cornes » (1). La figure H de la planche V qui accompagne cette description ne représente pas une coupe transparente, mais la face interne d'une des moitiés de l'œuf en voie de division. Une aiguille à cataracte, introduite dans le sillon jusque dans son fond, a tranché ensuite, dans toute sa hauteur, la masse conique correspondant au dernier point d'adhérence des deux sphères. Sur les coupes transpa- rentes parallèles au premier méridien et suffisamment rap- prochées du centre de l'œuf, on voit deux traits en arc forte- ment pigmentés et formant, par leur réunion, un segment d'ellipse. Ils correspondent au fond du sillon méridional et par conséquent au sommet de la petite masse vitelline non encore divisée. 11 devient évident, en examinant de telles coupes, que cette coiffe pigmentaire est formée par la couche corticale entraînée jusqu'à ce niveau. 3° Enfin on peut encore signaler, comme propre à ce stade, l'apparition d'une cavité à l'intérieur de l'œuf. En effet, là, où les quatre premiers globes sont entièrement séparés et indépendants les uns des autres, leur angle interne ou central s'arrondit de manière à limiter un petit espace qui, sur les coupes équalo- riales, a une forme losangique (fig. 9-10, pi. XIV). Cette cavité se rencontre naturellement à l'endroit où le processus de division est le plus complet, c'est-à-dire dans l'hémisphère supérieur. On peut donc, jusqu'à un certain point, la considérer comme la première ébauche de la cavité de segmentation, laquelle toutefois n'apparaît définitivement qu'après l'achèvement de la division equatoriale. (1) Loc. cit., p 21 des lires à part, pi. V, tig 1 1 . 24 — 354 STADE IV. —Division equatoriale (1). PI. XIII, fig. 9-10, Pél. brun. fig. 18-20 Tr. palmipède. PI . XIV, fig. 11, Axolotl, fig. 14-13, Tr. palmipède. J'aidéjà dit que, dans la première sphère et avant le début du fractionnement, on peut distinguer un segment supérieur plus petit ou extrémité ectodermique et un segment inférieur plus volumineux ou extrémité endodermique. Cette distinction persiste naturellement dans les deux sphères issues du premier fractionnement, puis dans les quatre sphères du stade suivant. L'apparition du plan de division equatoriale vient prouver la justesse de cette distinction ; c'est en effet à la limite de sépa- ration des deux segments que cette apparition a lieu. La formation du plan equatorial que j'ai pu suivre chez l'Axolotl est très remarquable. La figure H de la planche XIV représente une coupe méridionale perpendiculaire à l'un des méridiens d'un œuf divisé en quatre globes, de sorte que les segments méridionaux de deux de ces globes sont visibles. Dans leur hémisphère supérieur, sensiblement à la hauteur de la ligne de séparation entre les extrémités ectodermique et endoder- mique, on aperçoit une bandelette nettement délimitée, tran- chant sur le vitellus environnant par sa teinte plus pâle, et décrivant une courbe à concavité tournée vers le pôle supérieur; sa largeur partout uniforme est d'environ 10p. Elle est traversée dans son niilieu par le plan méridional perpendiculairement sectionné ; du côté interne elle aboutit à la périphérie de l'œuf où rien encore n'indique la présence du sillon equatorial. Dans l'un des segments (côté gauche de la figure) une masse nucléaire à la troisième phase de division est visible. Si sur des coupes un peu plus éloignées de l'axe ovulaire la masse nucléaire ne se (1) J'emploie l'expression equatoriale pour me conformer à un usage généra- lement reçu ; mieux vaudrait dire suséqualoriale, car le plan de division dont il s'agit est situé non à l'équateur, mais parallèlement à lui et plus prés du pôle animal. — 555 — voit plus, la bandelette persiste dans toute sa netteté et avec tous ses caractères. Cette bandelette est évidenoraent une lame de fractionnement constituant la première ébauche de la divi- sion equatoriale, et analogue à celles que nous avons rencontrées dans les stades précédents. Elle s'en distingue toutefois sous cer- tains rapports : d'abord elle s'étend en quelque sorte d'emblée dans toute l'étendue du futur plan de division; ensuite sa délimi- tation, ses contours, m'ont paru infiniment plus nets que ceux des lames de fractionnement méridionales. Jamais je n'ai vu les autres lames de fractionnement offrir cet aspect. 11 faut donc admettre qu'à une époque où aucun indice extérieur ne trahit la présence d'une division equatoriale, cette division existe en réalité à l'intérieur de l'œuf, la lame de fractionnement permet- tant de distinguer de la façon la plus nette les globes ectoder- miques des globes ou de la masse endodermique qu'ils recouvrent. J'ai rencontré chez le Pélobate une phase de la division equatoriale comparable à celle que je viens de décrire pour l'Axolotl. Seulement dans l'œuf du premier, la lame de fraction- nement est plus distante du pôle supérieur et, sur les coupes, les lames des deux segments de sphère adjacents ne sont pas situées au même niveau : l'une touche au plan méridional de division en un point plus rapproché du pôle que sa congénère. Une coupe d'un autre œuf de la même espèce montre une phase plus précoce que la précédente. Dans Tune des sphères (pi. XIIl, fîg. 9), on voit partir, de la partie moyenne et centrale d'une masse nucléaire en division, une bandelette claire obli- quement dirigée en bas et allant aboutir au plan de division méridionale. Ce n'est, à mon avis, que le premier indice de la lame equatoriale de fractionnement; on n'aperçoit encore aucune trace de cette lame entre le noyau et la périphérie de l'œuf. Les œufs des Tritons alpestre et palmipède ne m'ont pas donné des coupes montrant, avec autant de netteté que celles fournies par les œufs d'Axolotl et de Pélobate, l'apparition du plan de division equatoriale. Par contre, des coupes d'œufs de Palmipède, ap[)artenant à une phase plus avancée de celte divi- — 356 — Sion sont instructives à d'autres points de vue. Les figures 18, 19, 20, planche XIÏF, représentent des coupes parallèles à Tun des plans méridionaux d'un même œuf, prises à différents niveaux. Le sillon equatorial est visible. Dans le segment de gauche de la figure 18, on le voit se continuer avec la lame de fractionne- ment. Dans le segment de droite (fig. 19 et 20), une traînée pigmentaire correspondant à l'équateur part du sillon; mais, au lieu de se diriger perpendiculairement au plan de division méri- dionale, elle remonte vers le pôle supérieur en décrivant une courbe à convexité interne. En observant cette disposition — et les figures ne rendent que très imparfaitement les images four- nies par les préparations — on ne peut se défendre de l'idée que le processus de division s'accompagne de mouvements actifs du protoplasme ovulaire. Sous ce rapport, les figures 14 et 15 de la planche XIV, qui représentent des coupes d'un autre œuf de la même espèce, la division equatoriale étant achevée ou sur le point de l'être, sont plus démonstratives encore. Dans le seg- ment de gauche, la ligne equatoriale partant du sillon périphé- rique va rejoindre le plan méridional un peu au-dessus de sa partie moyenne; dans le segment de droite, la ligne equatoriale remonte vers le pôle supérieur et aboutit au méridien à une petite distance de son extrémité polaire. Entre les deux points de contact avec les lignes équatoriales, la ligne correspondant au plan méridional semble refoulée en haut et à gauche, entraî- nant les plans équatoriaux qui y aboutissent; dans la dépression qui résulte de ce refoulement, se sont accumulées des plaques vitellines de l'hémisphère inférieur. Sur la coupe représentée figure 15, et sur d'autres coupes du même œuf qui ne sont pas figurées ici, on constate en outre une abondante pénétration, à l'intérieur de l'œuf, du pigment cortical. J'ai rencontré, sur des coupes d'œufs d'autres espèces, des dis- positions analogues, trahissant elles aussi des déplacements, des mouvements du protoplasme. Ainsi un œuf de Tr. alpestre arrivé au deuxième stade de fractionnement montrait, à l'en- droit généralement occupé par le plan de division, une large bande présentant tous les caractères du vitellus de l'hémisphère — 357 ~ inférieur, c'est-à-dire en grande partie formée de plaques léci- Ihiques, qui traversait la zone pigmentaire subcorticale pour aller aboutir près de l'extrémité polaire supérieure. Ces mouvements du protoplasme et les courants qui semblent en être le résultat ont sans doute pour but de brasser en quelque sorte la masse vitelline et d'apporter, aux parties constituantes de l'extrémité ectodermique, principal siège de l'activité ovulaire, les matériaux nutritifs dont elles ont besoin. Lorsque les quatre premiers globes ectodermiquessont nette- ment séparés de la masse endodermique sous-jacente, la cavité de segmentation est généralement visible. Elle est située au niveau du point d'intersection des plans equatorial et méridio- naux. A cette époque et sur les coupes méridionales ou équato- riales, elle a une forme losangique ou rhomboïdale. STADE V. PI. XIII, fig. 16, Tr. alpestre, fig. 21, Tr. palmipède. PI. XIV, Ûg. 12-13, Axololl. Un caractère distinctif de ce stade, et qui se rencontre chez les Anoures (Pélobate, Crapaud, — Bombinator) (1) aussi bien que chez les Urodèles (Triton, Axolotl), consiste en ce que les globes issus du fractionnement des quatre premiers globes ectodermiques sont disposés en une seule rangée, formant voûte au-dessus de la cavité de segmentation (fig. 16, 21, pi. XIH, fig. 12, 13, pi. XIV). Les globes de segmentation présentent d'ail- leurs une forme rappelant celle des pierres d'une voûte: la plu- part sont coniques, la base du cône étant tournée vers la périphérie, le sommet, tronqué et arrondi, vers la cavité de segmentation. Sur les coupes représenlées figure 1 6, planche XIll et figure 13, planche XIV, et provenant Tune d'un œuf deTr. alpestre, l'autre d'un œuf d'Axolotl, se voit un globe ectodermique en voie de division et offrant sensiblement de part et d'autre les mêmes caractères. La masse nucléaire s'y présente sous forme d'am- (1) Voir GoETTE, /oc, cit , pi. II. fig. 26. — 558 — phiaster à champs clairs de forme plus ou moins elliptique (Tr. alpestre) ou pyriforme (Axolotl), reliés par un pédoncule pigmentaire d'autant plus mince qu'il s'éloigne davantage des asters; c'est la traînée interniidéaire (Fo\) dont il a été question à propos du premier stade, et que j'ai considérée, à l'exemple de Fol et de Withman, comme caractéristique des dernières transformations éprouvées par la masse nucléaire avant sa divi- sion complète. Des stries formées de granulations pigmentaires partent en rayonnant des champs clairs des asters. Cette dispo- sition est beaucoup plus prononcée dans l'œuf d'Axolotl que dans celui de Tr. alpestre. Je ne découvre dans les champs clairs aucun corpuscule flguré. Certaines coupes appartenant à des œufs du même stade mon- trent d'autres phases de la division nucléaire. Ainsi plusieurs globes de fractionnement (Pélobale, Tr. alpestre) renferment une figure en forme de haltère, rappelant le Hantelstadium d'O. Hertwig. Dans un globe eclodermique d'œuf d'Alpestre (pi. XIV, fig. 7), quelques stries pigmentaires parallèles entre elles vont aboutir à des champs clairs, entourés de granulations radiaires. Sur une coupe d'œuf de Pélobate, les champs clairs s'étalent parallèlement au plan de division; ces champs sont convexes en dehors, tandis qu'une ligne droite pigmentaire plus prononcée sur l'un des champs les limite du côté interne ou central. Peut-être faut-il considérer ces lignes pigmentaires comme résultant de l'écartement des grains de Biitschli ou de la division de la plaque nucléaire de Slrasburger; toutefois les données que j'ai pu recueillir sont trop incomplètes pour me permettre de résoudre la question. STADE Vf. — Aspect muriforme de l'œuf. PI. XIII, fig. 17, Tr. alp. fig. 12, Pél. brun. Je décris comme sixième stade du fractionnement de l'œuf des Batraciens celui qu'on peut considérer comme terminant le processus et auquel fera suite le début de l'épibolie. Tandis que, dans le stade précédent, la voûte de la cavité de — 359 — segmentation est représentée par une seule rangée de globes ectodermiques, dans le stade actuel elle est forniée par deux à trois rangées de cellules (pi. XIII, fig. 17). Celte disposition se retrouve aussi bien dans l'œuf des Urodèles (Tritons, Axolotl) que dans celui des Anoures (Pélobate, Crapaud, Bombina- tor, etc.). A ce stade, le fractionnement semble devenu plus actif dans la masse endodermique de Pœuf. De même que dans le stade précédent, les globes ectodermiques et les globes endodermiques offrent des caractères distincts. Les premiers sont plus riches en pigment, mais dépourvus de grosses plaques lécithiques, et partant plus finement granuleux; les globes endodermiques, en général dépourvus de pigment, sont remplis de plaques vitel- lines qui leur donnent un aspect et une réfringence toute spé- ciale. Toutefois, comme en dehors de la cavité de segmentation la limite de séparation entre les globes ectodermiques et les globes endodermiques est moins tranchée, on trouve à cette limite quelques formes intermédiaires. Dans les globes ectodermiques non en voie de division, le noyau, quand il est au foyer, paraît homogène ou finement gra- nuleux, sans trace de corpuscules figurés dans son intérieur; il est plus clair que le vitellus ambiant et de forme généralement circulaire (pi. XIII, fig. 12). Le contenu cellulaire, dépourvu de plaques lécithiques, renferme des granulations pigmentaires de volume variable, accumulées surtout dans le voisinage du noyau, autour duquel elles affectent souvent une disposition radiaire, plus ou moins évidente; lorsque celle-ci est très prononcée, les rayons arrivent jusqu'à la périphérie du segment qui est limité par une mince couche corticale pigmentaire. Rien ne dénote la présence d'une membrane. Plus les globes sont éloignés du pôle ectodermique, plus les granulations pigmentaires diminuent , plus les plaques léci- thiques augmentent et cachent en quelque sorte les vrais carac- tères du noyau; en effet, dans ces conditions et à un examen superficiel, elles peuvent faire croire à des corpuscules intranu- cléaires. 360 — HISTORIQUE. Le lecteur ne s'attendra pas à rencontrer ici une revue complète des nombreux travaux où il est question du fractionnement de l'œuf des Batraciens. Celui qui voudrait se faire une idée de l'ensemble de ces travaux en trouvera d'ailleurs l'énumération et l'analyse dans le grand ouvrage de Goette sur le développe- ment du Bombinator igneus (Ì). Je me bornerai donc à exami- ner, en les comparant aux miens, les résultats obtenus par ce dernier auteur, et les données plus récentes fournies par quel- ques autres embryologisles sur le même objet. Ici se rangent les contributions à l'histoire du fractionnement de l'œuf des Batraciens, renfermées dans les mémoires de Biitschli, d'Oscar Hertwig, de Scott et Osborn , de Benecke. A côté de ces travaux, je dois placer celui de Salensky sur le développement du Sterlet, dont l'œuf, au point de vue du frac- tionnement comme sous d'autres rapports, présente avec celui des Batraciens une analogie incontestable. J'ai démontré ailleurs (2) que la petite masse homogène dési- gnée par Goette sous le nom de premier germe vital [der erste Lebenskeim), et qu'il fait apparaître à l'intérieur de son noyau vitelUn (Dotterkern) , correspond au premier noyau embryon- naire. Goette admet un déplacement, vers la périphérie de l'œuf, du noyau vitellin et du germe vitellin qu'il renferme, déplacement qui s'accompagne très probablement de celui du pigment cortical; ce dernier disparaît au pôle inférieur pour former, autour de l'hémisphère supérieur, une sorte de coupole hémisphérique. L'auteur ajoute : « Nach alien diesen Erfahrungen wird es aber (1) Loc. cit,p. 38-49. (2) Becherches sur V embryologie des Batraciens, etc., p. 125-127. — 561 — sehr wahrscheinlich, dass der gegen die Peripherie vorriickende Dolterkern, oder vielleichl der in seinem Innern unlerdessen sich entwickelnde Lebenskeim , den Pol des befruchteten Eies bestimmt, eventuell verandert (1) ». Ce déplacement du pôle supérieur de Tœuf existe en réalité; dès l'apparition du premier noyau embryonnaire, l'axe ovulaire, qui primitivement allait aboutir à la fossette germinative, passe maintenant par ce noyau ; ainsi s'explique pourquoi la tache pâle, reste de la fovea, se trouve généralement en dehors des sillons méridionaux. Goette distingue, dans l'hémisphère supérieur et au début du fractionnement, trois zones concentriques : une externe, la couche corticale pigmentaire, une moyenne, incolore et fine- ment granuleuse, et une interne formée de petites spherules de grandeur variable , mais la plupart dépassant notablement en volume les plaques lécithiques, à aspect finement granuleux, comme si elles résultaient d'une agglomération de granulations vitellines. Ces trois couches offrent leur plus grande épaisseur au niveau du pôle supérieur, à partir duquel elles vont en s'amincissant. Elles forment, à I epoque ou le fractionnement commence, trois demi-sphères emboîtées, situées dans l'hé- misphère supérieur. C'est, à peu de chose près, la disposition que j'ai décrite en prenant pour exemple l'œuf de l'Axolotl. La zone interne de petites spherules de Goette correspond à ce que j'ai désigné sous le nom de couche pigmentaire subcorticale. Seulement je constate cette couche longtemps avant le début de la segmen- tation, et déjà limitée alors à l'hémisphère supérieur. A la même époque, je trouve chez l'Axolotl une disposition rappe- lant, jusqu'à un certain point, les spherules de Goette, et qu* consiste en ce que les granules pigmentaires forment par leur réunion des figures étoilées et anastomosées (2). Cette disposi- tion que je n'ai pas rencontrée chez d'autres espèces, a d'ailleurs (1) Loc. df., p. 32, pi. II, fig. 20. (2) Recherches sur V embryologie , etc., pi II , fig, 4,loc. cit., p. 103. Trovs vilellins, fig 8. — 362 — entièrement disparu quand apparaît le noyau de la première sphère; la zone subcorticale pigmen taire est devenue homogène et les granules qui la composent présentent sensiblement les mêmes dimensions. D'après Goette, avant l'apparition du premier méridien, le noyau vilellin disparaît et, comme fruit de son activité, le germe vital persiste. Ce germe arrivé près de la périphérie de l'œuf est homogène et mesure environ 30 fjt. Il conserve ce caractère après la première division, mais après le deuxième fractionnement (division en quatre globes), on y découvre, à l'aide de forts gros- sissements, un nombre variable de corpuscules arrondis et plus clairs : ce sont les germes nucléaires a Kernkeime (1). » A ce stade, chaque globe de fractionnement se compose : 1" d'une partie centrale, le germe vital, avec les germes nucléaires qu'il renferme; 2° d'une zone de substance vitelline finement granu- leuse, entourant intimement la partie centrale et faisant corps avec elle; 3° enfin, et pour la plus grande part, de la masse vitel- line en apparence encore non modifiée, représentée par les plaques vitellines et la substance intermédiaire granuleuse. Plus tard, les germes nucléaires se multiplient, absorbent la sub- stance du germe vital et forment alors, dans chaque segment, un amas occupant la place de l'ancien germe vital dont ils reprennent aussi les fonctions. Ce sont eux désormais qui pré- sident à la division du vilellus. Le germe vital et la zone qui l'entoure se fusionnent en une masse finement granuleuse. Vers la fin du fractionnement, les germes nucléaires se fusionnent à leur tour et deviennent devrais noyaux cellulaires (2). Je ne parlerai pas du noyau vilellin; j'ai dit ailleurs ce que j'en pensais (3). Quant au germe vital, je l'ai comparé au pre- mier noyau embryonnaire dont il présente absolument les (1) D'après Fol, « le noyau vilellin » correspond aux asters dont Goette n'a su voir que les contour-; externes {loc. cit.^ p. 221). Ceci s'applique plutôt à la zone finement granuleuse qui, d'après Goette, entoure le germe vital alors que le noyau vilellin a disparu. (2) Loc. cit.^ p. 61-63, pi. I, 6g. 17 c, fig. 19. (.5) Recherches sur V embryologie des Batraciens, loc. cit., p. 126. — 363 — caractères. Ces caractères se retrouvent, dans tous les stades ultérieurs du fractionnement, pour les noyaux des sphères non en voie de division, c'est-à-dire que, jusqu'à l'achèvement du processus, ces noyaux restent homogènes et dépourvus de tout élément figuré. Comme on l'a vu plus haut, je n'ai pu constater que de très rares exceptions à cette règle; encore les images que j'avais sous les yeux, et qui pouvaient faire croire à la présence d'un ou de plusieurs corpuscules nucléoliformes, n'étaient-elles pas suffisamment démonstratives. Ainsi que je l'ai dit en com- mençant, il se pourrait toutefois que l'emploi de certains réactifs m'eût conduit à d'autres résultats. J'ai comparé le germe vital de Goette à un noyau embryon- naire; mais il me paraît évident que ce n'est pas à cet élément seul que correspond ce que le savant embryologiste allemand a désigné sous ce nom. Les champs clairs des asters, souvent si semblables par leur aspect, leur forme, leurs dimensions, leur réfringence, aux noyaux mêmes, doivent avoir été confondus par lui sous une désignation commune. Quant à la zone finement granuleuse entourant le germe vital, je l'ai rencontrée tantôt autour des noyaux, tantôt, et le plus souvent, autour des champs centraux des asters. Cette zone claire est limitée par une zone pigmentaire. Cette disposition, assez évidente dans l'œuf du Pélobate, est remarquablement nette dans celui du crapaud commun. Goette décrit la division du noyau (germe vital) comme se faisant par étranglement de l'élément devenu au préalable cylindrique (division nucléaire directe, Flemming). Je renvoie pour la description du processus au travail de l'auteur (1). Cependant il a décrit et figuré, pour un stade déjà avancé du fractionnement, un segment en voie de division renfermant un véritable amphiaster. Un caractère important distingue cet amphiaster de ceux que j'ai pu observer : c'est la présence de germes nucléaires (grains de Biitschli , nucléoplastes de (\) Loc. cit., p. 55, pi. II, fig. 21-25. — 364 — Selenka), situés à la partie interne des champs clairs. Voici comment Goette s'exprime à ce sujet : « Wenn eins von ihnen eben vollendet war, so erschien die feinkôrnige Masse gegen die Kernkeimmasse hin radiar gestreift; und ebenso erschienen an Durschschnittsbildern in den hellen Grenzstreifen, welche die Trennungsb'nien der sich thei- lenden Doltersliickeenlhiellen, zartedunkle Linien, welche von der Trennungslinie aus nach beiden Seiten radiar gegen die Kernkeimmasse konvergirten. Die beiderlei radiàren Streifen oder Linien sehen aus wie die Fai ten eines auseinandergezoge- nen Gewebes (1). » Goette a donc vu une phase importante du processus de division nucléaire, et qui pouvait le mettre sur la trace du mode suivant lequel cette division s'effectue. Mais il n'a pas interprété à sa juste valeur l'image qu'il avait sous les yeux; il la considère d'ailleurs, non comme une phase qui se représente à chaque division, mais comme un trait caractéristique de certains stades. Or, comme Fol le remarque avec justesse, l'auteur verse ici dans une erreur profonde; « il n'y a pas deux modes de frac- tionnement, l'un pour les premiers stades, l'autre pour les stades suivants (2). » Les deux germes vitaux réunis par une tramée pigmen taire ne représentent pas, comme le dit Goette, la der- nière phase d'une simple division par étranglement (division nucléaire directe, Flemming) d'un germe antérieur, mais la phase ultime de la division indirecte du noyau; la traînée pigmen- taire intermédiaire aux deux germes est la traînée internu- cléaire (Fol) qui correspond aux filaments conneclifs. Il suffira, pour s'assurer de la justesse de cette interprétation, de compa- rer les figures de Goette (pi. II, fig. 22 et 24) avec celles de nos figures qui correspondent à la troisième phase de la transforma- tion nucléaire (pi. XIII, fig. 16, pi. XIV, fig. 9, 10, 15). J'ai déjà que Withman, qui représente une phase correspondante pour l'œuf de la Clepsine, la compare aussi aux figures en bissac décrites et figurées par Goette. (i) Loc. cit., p. 62, pi. I, 6g. 18. (2) Loc. cit., p. 221. — 565 — Je passe aux modifications qui ont pour siège ia masse vitel- line. Goette signale Tapparition, dans le plan de la future divi- sion, d'une strie claire, dépourvue de gros éléments vitellins et bientôt traversée, dans son milieu et dans le sens de sa longueur, par une ligne obscure; puis d'une dépression qui se montre, au pôle supérieur, dans la direction du plan de division. Le sillon est d'abord relativement large, mais court, de sorte que ses bords assez aigus se rejoignent aux extrémités en formant une ellipse; des pointes de l'ellipse le sillon, devenu plus élroil, se propage insensiblement vers le pôle inférieur, oii ses deux extré- mités viennent en contact. Au moment où le premier sillon se complète, la large dépression du pôle supérieur disparaît par suite du rapprochement de ses bords (1). Pour ces derniers points, mes résultats concordent en grande partie avec ceux du naturaliste allemand. La ligne claire appa- raissant dans le plan de division correspond à ce que j'ai désigné sous le nom de lame de fractionnement. Goette ne dit pas si, chez le Bombinator, la ligne claire du plan de division equato- riale est plus nette que celles des stades précédents, disposition dont l'œuf d'Axolotl nous a offert un remarquable exemple. Comme Goette, j'ai vu le premier sillon se montrer sous forme d'un espace large, et souvent aussi très long (Tr, helveticus), de manière à former, dans toute l'étendue de l'hémisphère supé- rieur, une gouttière à bords parallèles. J'ai pu constater aussi, qu'au moment où le premier sillon se complète, cette gouttière disparaît par suite du rapprochement de ses bords. Je dois ajouter que celte disposition n'est pas propre au premier sillon seulement; j'ai vu le deuxième sillon méridional présenter le même aspect (Tr. helveiicus). On distinguait alors, sur l'hémisphère supérieur, une simple ligne correspondant au pre- mier sillon, et provenant de Taffaissement l'un sur l'autre des deux premiersglobes, croisée perpendiculairementdans son milieu par une gouttière, premier indice du second sillon méridional; la (I) Loc. cil , p. 56-37, pi. H, fig. '23, pi. I, lig. 16. — 566 — gouttière elle-même, pâle dans son milieu, était limitée sur ses bords par deux stries pigmentaires. Parlant de la membrane décrite par quelques auteurs à la sur- lace de la couche corticale, Goettedit: « Ihre àusserste Lage (der Pigmentschicht) bat man, gesliitzt auf die Erscheinung des Faltenkranzes oder auf den Befund an erhârtelen Eiern, von deren Oberflàche sich ein Hâutchen abziehen lâsst, als eine Zellenmembran darzustellen gesucht. Dies beruht enlschieden auf einem Irrthum , wie es bereits M. Schullze ausgefiihrt bat (1). D Je suis entièrement de l'avis de Tauteur, lorsqu'il avance que la formation du Fallenkranz n'est pas liée à la présence d'une telle membrane , et s'explique parfaitement en son absence. J'ai vu le Faltenkranz sur l'œuf du Pélobale, quoique dépourvu de membrane ovulaire. Mais cette membrane n'en existe pas moins chez d'autres espèces, abstraction faite de l'action des réactifs ; son existence, à la surface de l'œuf vivant d'Axolotl, me paraît incontestable. Quant au Faltenkranz lui-même, Goette le con- sidère comme . des se. nat., 5« série, l. V, 1846), (4) Fr. Leydig, Vom Bau des thierischen KOrpers. Handbuch der vergi. Anat. — Tiibingen, 1864 (1. Hefl, 1. Band, pp. 188-190). (5) M. J. Dietl, Die Organisation des Arthropoden Gehirns (in Zeilschr. f. wiss. Zool., novembre 1876, p. 501). — 384 — basées uniquement sur ce qui était connu chez les Crustacés et les Tardigrades, et sur ce qu'il avait observé lui-même chez le Dytique. 11 conclut de la manière suivante : a Nach allem Diesem p will es mich eben bediinken, dass die besprochenen Quercom- D missuren wirklich eigenartiger Natur sind und nicht mit den » andern als gleichwerthig betrachtet werden kônnen. Môgen » sie deshalb auch bei ferneren Untersuchungen mehr ins Auge » gefasst werden, als bisher geschehen ist. » J'ai donc essayé de poursuivre cette étude en agrandissant, autant que possible, le cercle des observations. Mes recherches ont été faites au laboratoire d'anatomie comparée de l'Université de Gand, sur le conseil de M. le professeur F. Plateau, qui m'a constamment prêté l'appui de son expérience. Je suis heureux de l'en remercier, ainsi que M. van Bambeke, qui a bien voulu me communiquer différents ouvrages. Si la généralité de la disposition anatomique qui fait l'objet de celte notice n'a pas été démontrée depuis longtemps , on peut l'attribuer simplement aux difficultés mêmes de la dissection. Les formes animales chez lesquelles elle a été décrite sont, en effet, celles chez lesquelles il est le plus aisé de Tobserver. Et encore, on aurait peu de chances d'y réussir sans avoir recours à certaines précautions un peu spéciales. C'est que cette bande commissurale est d'une délicatesse souvent excessive (1). Elle peut également adhérer à l'œsophage par des éléments conjonctifs plus résistants qu'elle ne l'est elle- même, de sorte qu'elle se brise le plus souvent alors que l'on veut énucléer cette portion du tube digestif. D'autres fois, elle est tellement rapprochée du ganglion sous-œsophagien, comme j'aurai l'occasion de le faire voir, qu'il serait presque impossible de la découvrir si on ne la recherchait pas tout particulièrement. (1) Je dois faire observer que je n'ai pu la représenter sans en exagérer le diamètre. Elle est, en réalité, beaucoup plus lémie que dans le plus gi and nombre des figures. — 585 — f.a dissection des animaux frais est difficile : le lissu nerveux ne résiste pas suffisamment aux manipulations; les aulres tissus résistent trop. L'acide nitrique, dont remploi est bien connu, donne des résultats passables; il peut rendre des services pour l'étude des animaux dont les téguments calcifiés résistent trop aux instruments (Crustacés, Myriapodes cbilognatbes, etc.). iVlais les pièces qui ont séjourné quelque temps dans l'alcool un peu fort sont les meilleures pour ce genre de recherches. J'ai utilisé des insectes de Java , qui sont au laboratoire d'anatomie comparée depuis plusieurs années, et chez lesquels les parties les plus délicates du système nerveux, telles, par exemple, que les éléments du système viscéral, pouvaient être disséquées avec facilité. L'animal étant ouvert par la face dorsale, et après avoir con- venablement découvert les ganglions cérébroïdes, on coupe le tube digestif immédiatement en arrière de ceux-ci et de même en avant. On sectionne ensuite les iractus optiques, les nerfs des antennes et, en soulevant légèrement le cerveau en arrière, ceux des appendices buccaux; il faut user ici des plus grandes précau- tions. On rompt ensuite le pont chitineux qui recouvre toujours supérieurement le ganglion sous-œsophagien; on sectionne la chaîne ventrale postérieuremeni, et on transporte la préparation sur une lame de verre avec un peu d'eau, ou dans un verre de montre. Après l'avoir débarrassée des fragments de trachées et de muscles, ainsi que des autres débris qui l'accompagnent, il est souvent bon d'en prendre un dessin. Je ne la débarrasse qu'ensuite du tronçon d'œsophage qui est resté engagé dans l'anneau nerveux. C'est une opération quel- quefois facile, mais extrêmement chanceuse chez les espèces dont les ganglions sus- et sous-œsophagiens, presque entièrement fusionnés en une masse unique, enserrent étroitement un œso- phage extrêmement grêle. Ce sont précisément toutes celles dont la commissure n'est visible qu'après l'enlèvement du tube digestif; aussi, peut-on s'estimer heureux lorsque l'on réussit complètement après un petit nombre d'essais. Il est souvent aisé de conserver définitivement les prépara- 2G — 38 Bkneden, Bnll. Acad. de Belgique, t. XIX, ii" 4. (2) Van Beneden, Bull. Acad. de Belgique, t. XIX, n''4. (3) Leydy, Journal of the Acad. of nat. se. of Philadelphia. (4) P.-.I. Van Beneden, Vers intestinaux, Paris, 1838. (3) Leuckart, Parasiten, l. I, pp. 471 et suiv., 1863. (6) Von Siebold, Anat. comp., l. I, l^e part., p. 138. — 418 — paradoxum, Aspìdogaster conchicolay D. echinatiim^ etc. Tou- tefois, Ehrenberg (1) avait déjà signalé ces éléments chez Diplozoon. Van Beneden les a décrits chez différents Tréma- Iodes; Nordmann (2) aussi les a vus; Aubert (3) les a décrits dans les canaux lins de V Aspìdogaster. iMais, comment les dernières ramifications de l'appareil se terminent-elles dans le parenchyme du corps? Guido Wagener (4), en 1857, crut voir des orifices aux extré- mités des fins canalicules chez le Dactylogyrus ; mais il ne donna aucune indication quant à la constitution de ces pores. Il observa chez la larve de Distoma cygnoïdes des lobules vibra- tiles (Flimmerlàppc/ien). D'après sa description, on ne peut savoir s'il s'agit de paletles vibratiles situées à l'intérieur des canaux, ou à leurs extrémités : « Das Gefâssystem im Embryo durch die beiden seitlichen Flimmerlappchen markirt, zeigte bei den nur 5-mal grôsseren Ammen nicht allein die beiden flimmernden seitlichen Stellen, sondern war auch noch an mehreren, anderen Orten damit versehn (5); » — Waller (6) a vu les points d'origine des canalicules chez D. hepalkum et D. lanceolatum consistant chacun en une cellule vibratile; mais il assimila ces organes aux lamelles vibratiles que l'on rencontre dans les terniinaisons. Pour lui, les canaux se prolongeraient d'ailleurs dans un système de cellules étoilées, dont les branches tubulaires s'anastomoseraient en un réseau. Il considéra ce réseau comme origine de l'appareil excréteur. Nous discuterons plus loin cette manière de voir de Walter. Von Siebold (7) paraît, lui aussi, avoir observé ces organes terminaux, sans leur assigner une autre valeur qu'aux palettes (1) Ehreïnberg, Wiegmanii's Arch., t. I, pp. 471 et suiv, (2) ^0RDMAN^, Mikr. Beitr., Hefl I, p. G9. (5) Aubert, Zeit. f. iviss. Zool.^ vol. VI, 1854. (4) G. Wagener, Bielr. z. Entiv. d. Eingetceideivurmer. Haarlem, 1857, p. 63. (5) G. Wagener, loc. cit.^ p. 33, (6) Walter, WieymaniCs Arch., 1858, t. I, p. 287. (7) Vo\ SiiBJM), Wip'jDiaìiìi's Arch.., 1836, p. 218. — 419 — vibratiles. — Zeller (1) parle aussi de Flimmerlàppchen si Inés, chez le Distonia squamula, dans les culs-de-sac aveugles dos plus fines ramifications : « An verschiedenen Stellen finden sich D Flimmerlàppchen doch nie im Verlaufe der Gefâsse selbst, » sondern nur im peripherischen blinden Ende der feinsten » Zweige, vvie diess in gleicher Weise bei manchen anderen » Distomen wie auch bei Amphistomum subclavatum auf das » deullichste zu erkennen ist. » AJais il ne leur attribua aucune signification spéciale. Claparède (2) a reconnu, chez les Diplostomes (D. volvens el D. rachieiun), les relations existant entre les corpuscules cal- caires et les canaux. 11 a observé tpie ces éléments sont situés dans des dilatations terminales de canalicules dilatés en massue. Ce sont là, d'après lui, les points d'origine du système. En 1860, L. Thir}' (5) observa dans la paroi des sporocysles de !a Cercaria macrocerca, de petits entonnoirs ciliés bicornes, s'ou- vrant dans ia cavité générale du corps; mais il ne trouva pas ces terminaisons chez les jeunes individus ni chez les Cercaires. il pensa que ces éléments s'atrophient chez l'adulte, par suite de la disparition de la cavité générale du corps. Enfin, au mois de novembre dernier (1879), Biitchli (4) annonça la découverte, chez la Cercaria armata, de petits entonnoirs s'ouvrant dans des lentes et il les considéra comme points d'origine de l'appareil. 11 émit l'idée que ces organes pourraient se retrouver chez Tadulte. On n'a guère tenu compte des observations de Walter et de Thiry et l'opinion généralement admise, est que l'appareil excré- teur des Trématodes adultes ne communique pas à sa périphérie avec les tissus qui l'entourent, que les dernières ramifica- tions des canaux se terminent en cul-de-sac. L'appareil serait complètement clos. « L'état clos de l'appareil, dit Gegenbauer (o), (1) Zëlleb, Zeits f. vnss. Zoo!., 1867, p. 217. (2) Claparède, Zeits. f. iviss. ZooL, Bd. IX, 18o(3. (ô) L. TeiRY, Zeits. f. iviss. ZooL, 1860. (4) BÙTCHLi, Zoùl. Anzeiger, n» 42, nov, 1879. (5) GEGt.xBADEr., Aiial com})., p. 240, 1874. — 420 — » paraît dépendre d'un défaut de cavité générale du corps. » C'est ce qui résulte du fait que là où il existe une cavité » corporelle, le système canaliculaire présente des orifices » d'excrétion internes. » Quant à la fonction des canaux, P.-J. Van Beneden (1) consi- dère leur paroi comme étant de nature glandulaire ; Leukart (2) attribue exclusivement aux ramifications ultimes la fonction secrétoire. Les produits de la sécrétion se présentent sous la forme d'un liquide clair, transparent, hyalin et de corpuscules à volume fort variable. Ces éléments sont formés de couches concentriques d'une substance très refrangible. Leur composition chimique est actuellement bien connue : ils se constituent d'un stroma organique imprégné de matières minérales qui sont des sels calcaires. Lieberkiihn y a découvert la guanine. Le but principal de ce travail est de rechercher quelles sont les origines de l'appareil excréteur. J'ai fait une étude complète du système des canaux urinifères chez Distoma sqiiamula et chez Diploslonium volvens. DISTOMA SQCA11U1..%. Zeller (3), en i 867, découvrait un petit Distome qui vit enkysté dans la peau de la Rana temporaria et qui devient adulte dans le tube digestif de Mustela Pulorius. Nous l'avons retrouvé en grande abondance chez des Grenouilles, provenant des environs de Liège. Le kyste est formé d'une membrane externe, claire, transpa- rente, épaisse et élastique. On y remarque des couches concen- triques de substance. Sous cette première membrane s'en trouve une seconde également transparente, mais délicate et mince, enveloppant immédiatement le petit Distome. Autour du kyste, (1) P.-J. Van Beneden, Ces/ot(?es, p. 52, 1850. (2) Leuckart, Parasi ten^ 1. 1. (5) Zeller, Zeits. f. tciss. Zool., l. XVII, p. 213, 1867. — 421 — existe une couche de tissu conjonctif appartenant à la peau de la grenouille. Dans l'épaisseur de celte couche, se trouvent des vaisseaux sanguins capillaires et des plaques de cellules pigmen- laires. La forme du corps de cette larve varie avec l'âge. Le corj)s est toujours excessivement plat. Chez les individus les plus jeunes que nous ayons eus sous les yeux, la forme était ovalaire, le grand axe passant par les ventouses ventrale et huccale; chez des sujets plus âgés, le corps prend sensiblement la forme d'un quadrilatère; enfin chez les plus avancés en âge, les dimensions, dans le sens transversal, deviennent beaucoup plus considérables que suivant la longueur; d'où résulte la forme caractéristique du Dislome. La cuticule, qui recouvre le corps, contient dans son épaisseur de petits bâtonnets ou piquants disposés obliquement. Le tissu conjonctif, qui constitue le parenchyme, est formé par de grosses cellules globuleuses, le plus souvent claires, hyalines, pourvues d'un gros noyau sphérique nucléole, souvent pariétal. Entre ces cellules est creusé un système de petites lacunes et de canalicules plasmatiques, dans lesquels circulent les liquides nourriciers. Nous reviendrons plus loin sur ce sujet. La ventouse ventrale est située vers le milieu de la longueur du corps. La ventouse buccale est située à l'extrémité antérieure. Sa cavité s'ouvre dans un bulbe pharyngien auquel fait suite un œsophage assez court, à parois épaisses. Celles-ci sont formées. par un epithelium plat, reposant sur une couche de fibrilles musculaires circulaires. Le pharynx débouche dans deux culs-de-sac volu- mineux, plus ou moins contournés, qui peuvent s'étendre jusqu'à l'extrémité postérieure du corps. Leurs parois sont plus minces que celle du pharynx et leur constitution est la même. Le tube digestif est rempli de ()etits corpuscules, déjà décrits par Zeller. Ce sont de petits disques homogènes, réfringents, de forme circulaire, très aplatis et déprimés au milieu de leurs deux faces. Ils s'empilent les uns sur les autres, comme des pièces de monnaie, ce qui augmente encore leur ressemblance avec des globules rouges de mammifères. Détail intéressant : on trouve souvent, dans le kvste, tout autour de la larve, une — 422 — quantité plus ou moins grande de ces corpuscules. Que sont ces éléments, quelle est leur signification? C'est là un problème dont la solution nous est inconnue. Le système nerveux comprend deux masses de cellules nerveuses, situées au niveau du bulbe pha- ryngien et réunies par une bandelette transversale de fibrilles nerveuses. De ces ganglions partent deux cordons nerveux, striés longitudinalement et dirigés d'avant en arrière , à droite et à gauche de la ligne médiane. Ils diminuent progressivement de volume, en fournissant des branches collatérales qui se divisent dichotomiquement dans les tissus. Sur le trajet des cordons longitudinaux , on observe un amas de cellules ner- veuses, à la hauteur du point où l'œsophage se bifurque en deux branches, un autre amas au niveau de la ventouse ven- trale, un troisième au niveau des testicules. Nous n'avons pas fait une étude assez précise des branches collatérales, pour pouvoir décider si leur disposition chez notre Distome corres- pond à la description générale qu'en a faite Lang(1). Il existe deux gros testicules ovoïdes, placés en dedans du coude que forment les extrémités des culs-de-sac du tube digestif; le germigène est plus ou moins médian; rorifice ex terne des organes sexuels se trouve au-dessus de la ventouse ventrale. Actuelle- ment nous n'avons rien à ajouler à la description que Zellcr a faite de ces organes. Zeller (2) a décrit en quelques lignes, l'ensemble de l'appareil excréteur chez un individu avancé en âge. « DasExcretionsorgan » liegt zwischen den Hoden und bildet eineu Schiauch un- » gefâhr von der Form eines T. Seine beiden querlaufenden » Abschnitte sind unregelmâssig ausgebuchlet und verengern i) sich etvvas gegen die Mitte zu. Der senkrechte unpaare » Abschnitt erweitert sich wieder und gehl dann in einen » engen Ausfijbrungsgang iiber, welcher mit dem etwas einge- » zogenen Porus excretorius endigt. Der înhalt besteht aus (1) Lang, MiUheilungen aus dt-r zool. Station zu Neapel, 1880. (2) Zelleb, /oc. c«Y., p. 216. — 423 — » Kleinen geschiclueten , stark glanzenden Korperchen. Das » dem Excretionsorgan zugehorige Gefasssystem isl sebr sclion j> entwickelt. Die zwei Hauptslammeliegen im hiiUeren Korpor- D abschnitt. Sie sind elwas kiirz, heginnen da wo die Darm- D schenkel zicli nach einwarts umbiegen, and verlaufon von » Aussen nach Tnnen, auf der rechlen Seile oberhalb, auf dor » linken unterbalb des Hodens sich herumbiegend. Der » Hauplstamm jeder Seite setzt sich zusammen ans zwei Aestei), » von \Yelchen der eine den Darm an seiner unleren Seile » begleitet und mit dem entsprechenden Aste der anderen Seile » oberhalb des Bauchsaugnapfes zusammenhangt, der zweile D seinen Ziifluss hanptslichlich aus der reichlichen Gefassver- » zweigung der Periferie erbai I. » ]\ y a lieu de distinguer dans cet appareil trois parties : la vésicule terminale, un système de gros canaux qui en piartent o\ et un système de fins canicules qui débouchent dans ces canaux et qui prennent leurs points d'origine dans de petits entonnoirs ciliés. La vésicule terminale. — Elle est située à Textrémité posté- rieure du corps, sur la ligne médiane. Son volume, chez de très jeunes sujets, est considéiable; elle occupe alors le liers postérieur du corps (pi. XVIII, fig. 1 v.). Sa forme est celle d'un triangle à sommet dirigé en arrière; c'est par ce sommet qu'elle se met en communication avec l'extérieur. La cavité est alors fort restreinte et triangulaire; la paroi très épaisse est constituée par une couche de grosses cellules, qui sont polygonales., quand elles sont vues à la surface (fig. 1 r), et cuboïdes à la coupe optique (fig. 14 v.). Le protoplasme de ces cellules est foncé; leurs noyaux volumineux sont sphériqueset brillants. Chez des individus plus âgés, la vésicule a l'aspect d'un V dont les bran- ches forment un angle obtus, ouvert en avant et dont les contours sont j)lus ou moins sinueux. On peut y distinguer une [)Oi'tion médiane et deux ailes; la première s'ouvre à l'extrémité postérieure, par le foramen caudale ^ les deux ailes s'étendent, à droite et à gauche, d'arrière en avant et de dedans en dehors. — 424 — Les extrémités supérieures ne dépassent pas le niveau de la ventouse ventrale. La cavité est remplie de petits corpuscules sphériques, très réfringents et de nature calcaire; ce sont les produits de sécrétion de l'appareil. Sous l'action de l'acide acétique, ils font effervescence et laissent, comme résidu, une base organique. La paroi est beaucoup plus mince que celle des jeunes sujets; sur le vivant elle paraît finement granuleuse; sous l'action de l'acide acétique faible ou de l'acide osmique à 1 7oo, »vec traitement ultérieur par l'alcool à 40" (Gay Lussac) et coloration au picrocarminate d'ammoniaque (Ranvier), on remarque qu'elle est constituée par une rangée de cellules plates. La délimitation de ces cellules est difficile à voir; leur corps protoplasmique est finement granuleux et contient un gros noyau ovalaire nucléole. Ces noyaux sont placés de façon à ce que leur grand axe soit parallèle à la surface de la paroi; ils proéminent à l'intérieur de la cavité. Chez les individus les plus avancés en âge, la vésicule a pris une disposition déter- minée par la modification qu'a subie le corps dans sa forme : elle affecte l'aspect d'un T, dont la branche verticale représente la portion médiane et la branche horizontale, les ailes. C'est sous cette forme que Zeller l'a décrite. Les gros canaux. — Près de l'extrémité libre des ailes de la vésicule, naît, à droite et à gauche, un gros canal (troiu commun d'origine), qui ne tarde pas à se subdiviser en d(^ux branches : Tune externe, l'autre interne. Le canal interne (fig. 2 t. i.) se dirige de bas en haut et de dehors en dedans; il va rejoindre son correspondant, sur la ligne médiane, entre les ventouses buccale et ventrale, au-dessous de la bifurcation du tube digestif (fig. 2 s.). Le canal externe passe sous le cul-de«sac latéral du tube digestif; il chemine le long des faces latérales, depuis le tiers postérieur jusqu'à l'extrémité antérieure du corps, où il atteint la ventouse buccale. Il fournit, sur son trajet, cinq à six rameaux collatéraux, externes par rapport à lui. Ceux-ci se divisent dichotomique- ment et se terminent en cul-de-sac. L'extrémité aveugle de ces — 425 — rameaux est ordinairement surmontée d'un petit capuchon clair (peut-être une cellule). Les canaux externe et interne de chaque côté sont réunis par un canal anastomotique, qui passe sur le tube digestif et qui s'insère d'une part à l'anastomose médiane des canaux internes, de l'autre au canal externe, tout près de l'œsophage. La direction de ce canal de réunion est oblique d'arrière en avant et de dedans en dehors. Le nombre et la disposition des gros canaux sont à peu près les mêmes aux deux côtés de la ligne médiane. Il existe toujours deux diverti- cules secondaires, qui contournent la ventouse buccale. Au niveau du bulbe pharyngien, l'un des canaux externes passe sous cet organe et va se terminer en cul-de-sac de l'autre côté de la ligne médiane. Il y a anastomose à ce niveau entre les canaux externes (fig. 5) chez les sujets plus âgés. Chez ceux-ci un certain nombre de rameaux collatéraux des canaux externes s'anastomosent entre eux; il y a d'abord juxtaposition de leurs extrémités aveugles, ou de leurs faces latérales, puis accolement des parois et résorpton de celles-ci; de sorte que chez les Distomes les plus âgés, le système des gros canaux prend l'appa- rence d'un réseau vasculaire. On trouve de jeunes sujets, chez lesquels il n'y a pas encore d'anastomose médiane entre les deux canaux internes; chez d'autres, il existe entre eux un simple accolement (fig. 2 s). On peut voir dans ces conditions qu'à certains moments le contenu de l'un des tubes est expulsé tandis que l'autre reste gorgé de liquide; ce qui ne pourrait avoir lieu s'il y avait communication entre les lumières des deux branches. On peut voir que chez d'autres la communication existe déjà, alors que les parois accolées ne sont encore que partiellement résorbées et apparaissent sous la forme d'un diaphragme. Enfin chez d'autres il n'y a plus trace de cloison, au niveau de ce point anastomotique (fig. 3). Au point où a lieu la bifurcation du tronc commun d'origine (fig. 12), on remarque, chez les jeunes Distomes, une cloison ou un diaphragme, sur lequel nous ne pouvons insister, étant donnée notre ignorance du mode de développement de l'appareil. La paroi des gros canaux est mince, transparente et paraît 29 — 426 — sans slnicliire, sur le vivant. Après l'action des réactils cités plus haut , on dislingue, de distance en distance, un gros noyau de cellule dont la position est la même que celle des noyaux que l'on observe dans les cellules épilhéliales de la vésicule con- tractile; les noyaux proéminent l'orlement dans la cavité. Le pro- taplasme paraît complètement hyalin, sauf en certains points où l'on trouve quelques rares granulations fort réfringentes. Walter a observé la même structure dans les parois des canaux du D. hepalicum et D. lanceolatum. Le système de fins canalicules à entonnoirs ciliés. — Ce sys- tème débouche dans les gros canaux sans transition de calibre, en trois points déterminés et symétriques deux à deux. Les cana- licules sont disposés par groupes : un premier groupe s'ouvre par un petit tronc dans le système des gros canaux, en un point pi de la ligure 2; un second se jette dans le canal interne, à une petite distance de la bifurcation avec la branche externe; un troisième débouche dans le tronc commun d'origine, non loin du point d'insertion de ce dernier sur la vésicule terminale. Les deux premiers sont réunis entre eux par un canalicule anas- tomotique. Nous n'avons pas vu d'anastomose entre le troisième et les deux autres. On peut donc distinguer, à droite et à gauche de la ligne médiane, im groupe postérieur de canalicules, un groupe moyen et un groupe antérieur. 11 y a lieu d'examiner dans ce système d'un côté les canalicules, de l'autre leurs points d'origine : les entonnoirs ciliés. Les canalicules. — Ils forment entre eux dans chaque groupe des anastomoses variées. Chaque canalicule décrit des sinuosités plus ou moins considérables. Leur paroi est transparente et varie d'épaisseur d'un point à l'autre de son trajet. Cette variation se manifeste, non pas à la surface externe, mais à la face interne. Jl en résulte que la lumière du canal paraît serpenter dans un tube cylindrique (fig. 11). Aux points où la paroi est la plus épaisse, on trouve quelquefois une ou quelques granulations. N'ayant pas retrouvé ces éléments sur les préparations traitées par les réactifs, nous ne pouvons en déterminer la nature. On rencontre aussi dans la paroi quelques granulations de moindre — 427 — volume. Le liquide qui se trouve dans le canalicule a les mômes caractères que celui qui remplit les gros canaux. Les enloiinoirs ciliés. — Le sommet de l'entonnoir se con- tinue insensiblement avec la paroi du canalicule; mais on dis- tingue très bien la limite entre la cavité de cet organe et celle du petit canal. La base de l'entonnoir se constitue d'un petit chapeau convexe en dehors, concave en dedans, qui paraît gra- nuleux, chez le vivant. Ce chapeau est souvent pourvu d'un appendice ou éperon, qui s'étend sur la face latérale de l'enton- noir. La face concave du chapeau est formée par un petit plateau clair, sur lequel s'insère une flamme vibratile. Dans l'épaisseur de la paroi latérale de l'entonnoir est creusée une fenêtre ovale, qui met en communication l'intérieur de l'entonnoir avec le système des espaces lacunaires. La flamme vibratile remplit la plus grande partie de la cavité de l'entonnoir et son extrémité libre s'engage dans la lumière du canalicule. Les mouvements de la flamme sont quelquefois excessivement rapides, d'autres fois très lents; le plus souvent ils imitent ceux d'une flamme de bougie agitée par un léger courant d'air. Après traitement par l'acide acétique dilué ou l'acide osmique à l"/oo, alcool à 40° et coloration par picro-carmin, on observe que le chapeau est une cellule. On y distingue un gros noyau sphérique coloré en rouge carmin, après l'action de l'acide acétique, etc., en rouge brique, après traitement par l'acide osmique. Ce noyau est pourvu d'un gros nucléole. 11 est entouré par un corps protoplasmique, qui paraît homogène et qui souvent se prolonge, sur la face latérale de l'entonnoir, sous forme d'éperon. Une partie du protoplasme est différenciée en un petit disque, qui reste brillant et incolore, après l'action des réactifs. C'est, sur sa face libre un peu concave, que s'insère la flamme vibratile. Le système lacunaire inter cellulaire. — C'est ici la place de donner quelques détails sur le tissu conjonctif et les espaces intercellulaires. Leuckart (Ì) admet, chez les Trématodes, deux (1) Leuckaet, lOG. cit.y t. L — 428 — espèces de tissu conjonclif : Fun formé par des cellules cloilées anastomosées entre elles, l'autre constitué par des cellules glo- buleuses juxtaposées entre elles. Il nie l'existence d'espaces intercellulaires. Walter (1) avait cru reconnaître chez le D.Iiepa- ticîim et D. lanceolatum, l'existence de cellules étoilées anas- tomosées entre elles par des prolongements tubulaires qui formeraient ainsi un système de canalicules plasmatiques, sem- blable à celui que Virchow admettait, à cette époque, dans le tissu conjonctif. Chez notre Trématode les cellules sont globuleuses; leur corps protoplasmique clair, souvent hyalin, ou très peu gra- nuleux, est pourvu d'un noyau volumineux , sphérique, nucléole et pariétal. Entre les cellules est creusé un système de petites lacunes et de fins canalicules. Ces canalicules convergent en cer- tains points vers de petits espaces, qui affeclent une apparence étoilée. Parmi ces figures étoilées il s'en trouve de plus considé- rables qui ont à leur centre un entonnoir cilié. Dans les lacunes et dans les canalicules qui les relient entre elles se trouve un liquide clair et hyalin tenant en suspension de petites granu- lations très réfringentes. Dans les espaces qui entourent les entonnoirs (fig. 15), on peut voir quelquefois des granulations animées de mouvements de translation , indubitablement provo- qués par les vibrations de la flamme située à l'intérieur des entonnoirs. F^e système lacunaire devient très apparent, lorsque l'organisme par suite de la compression, commence à s'altérer. Alors les petits espaces de même que tout le système des canaux se remplissent d'un liquide, qui les distend considérablement au point de comprimer les cellules de tissu conjonctif qui les déli- mitent. Dans ces conditions les espaces lacunaires situés au voisinage des terminaisons aveugles des rameaux secondaires prennent des proportions tout à fait extraordinaires. De tous ces faits il ressort qu'il existe ici un véritable système lymphatique intercellulaire , en communication avec fappareil excréteur par l'intermédiaire des entonnoirs ciliés. Walter avait vu en partie ces dispositions; mais il interpréta (1) Walter, toc. cit., p. 287. — 429 — les faits d'une façon tout à fait erronée. Ce sont les lacunes et les canalicules, qu'il a décrits conome étant des cellules étoilées de tissu conjonctif, et les cellules il les a prises pour des lacunes. L'erreur était d'autant plus facile à commettre qu'à cette épo- que, la théorie de Virchow sur le tissu conjonctif était univer- sellement admise, que de plus les cellules sont pour la plupart claires et hyalines, que leurs noyaux proéminent souvent dans les canalicules et que ceux-ci contiennent des granules. C'est bien à tort que Leuckart nie l'existence de ce système lacunaire chez les Trématodes. Résumons les faits : V II existe chez le D. squamula un système lacunaire lym- pathique constitué par de petits espaces et de fins canalicules délimités par les cellules du tissu conjonctif; 2° Ce système lymphatique est en communication avec l'appareil excréteur, par l'intermédiaire de petits entonnoirs ciliés; 3° Ceux-ci se continuent dans de petits canaux disposés par groupes, qui débouchent en trois points symétriques deux à deux dans un système de gros canaux ; Â"" Le système de gros canaux d'abord constitué par des branches se terminant en culs-de-sac, se transforme secondai- rement en un réseau par suite de la formation d'anastomoses entre les troncs principaux et les rameaux collatéraux ; 5° Les gros canaux débouchent, par deux troncs dans la vési- cule terminale qui est le réservoir où s'accumulent les produits de sécrétion de l'appareil. D1SPI.OSTOMIJM TOI.VEIVS. Nordmann (1) a assez bien vu la répartition des gros troncs de l'appareil excréteur chez ce Diplostome, ainsi que leur distribu- lion générale; mais il s'est trompé, quand il a cherché à déter- miner leur fonction. Il considéra l'appareil comme un ovaire. (1) Nordmann, Mikrogr. Beitr.BevVmy 1832. H — 430 — Claparède (1), ainsi qu'il a été dit dans la partie historique de ce travail, a découvert les rapports exacts existant entre les cor- puscules calcaires et les canaux. Ce type de Trématode était des plus intéressants, au point de vue des recherches que nous avons entreprises. Nous avons trouvé le D. volvens non -seulement dans l'œil du Leuciscus rutilus, mais encore dans le cristallin du Chondrostoma nasus. A notre connaissance, il n'avait pas encore été renseigné chez ce Cyprin. Quoique l'appareil excréteur du Diploslome paraisse, à première vue, bien différent de celui du Distoma squamula, une étude approfondie de ses différentes parties constitutives fait ressortir, avec évidence, l'unité de type des deux systèmes. Ici encore, on peut distinguer trois parties : la vésicule termi- nale, un système de gros canaux avec ramifications collaléiales et un système de fins canalicules à entonnoirs ciliés. Toutes les parties de l'appareil sont placées du côté du dos. La vésicule terminale. — Elle est située à la face dorsale, dans l'appendice caudal caractéristique de ce Diplostome. Sa forme est celle d'un triangle, dont les angles sont mousses et le sommet dirigé en arrière. Celui-ci se continue dans un petit canal, qui débouche à l'extérieur par un pore, situé à l'extré- mité de l'appendice. On peut distinguer, à la vésicule, une face supérieure et une face inférieure ou ventrale. Elle est incom- plètement divisée en deux, par un septum longitudinal s'élevant de la face ventrale et qui s'arrête à une certaine distance de la face supérieure. Ce septum n'existe pas dans la partie posté- rieure de la vésicule. Si l'on examine la vésicule, à un certain niveau, elle paraît double; mais en changeant le foyer, on recon- naît que cette dualité n'est qu'apparente et qu'en réalité elle est unique, en ce sens que ses deux moitiés communiquent large- ment entre elles, d'une part à la voûte de la cavité, par-dessus le bord libre du septum, et d'autre part, en arrière. L'intérieur de la cavité est rempli par un liquide clair et hyalin. (1) Claparède, loc. cit., pp. 99 et suiv. — 451 — Le système de gros canaux. — Des angles de la hase du triangle vésiculaire part, à droite et à gauche de la ligne médiane, une grosse branche (tronc commun d'origine), qui se dirige, d'arrière en avant, en cheminant un peu en dehors de la grosse ventouse ventrale et en diminuant progressivement de volume. Le tronc d'origine^ arrivé vers le milieu de la longueur du corps, se divise en deux branches. L'une, interne, se porte transversalement vers la ligne médiane, où elle va s'anasto- moser avec sa correspondante de l'autre côté et constituer avec elle le canal transverse. L'autre, externe [canal externe)., plus volumineuse, se porte en avant et, arrivée à une certaine dis- tance du bord antérieur de l'organisme, elle se contourne brus- quem.ent en dedans et se porte obli(|uement vers la ligne mé- diane, où elle s'anastomose avec la branche correspondante de l'autre côlé, en formant un angle obtus ouvert en avant. Le sommet de cet angle se continue en une branche descendante (canal descendant médian), qui s'abouche dans le canal trans- verse. Le canal descendant se continue néanmoins au delà de cette anastomose et passe au-dessus de la petite ventouse ven- trale. Le canal externe, près de son origine, fournit une branche collatérale considrable (canal latéral descendant), qui chemine en ondulant d'avant en arrière. 11 est situé en dehors du tronc commun d'origine et lui reste à peu près parallèle, jusqu'au moment où il arrive au niveau de la vésicule contractile; là il s'épuise en fournissant de petites branches terminales. Tous les gros canaux fournissent latéralement un grand nombre de rameaux secondaires, qui se divisent dichotomique- ment ou qui restent simples. Le nombre de ces branches secon- daires semble varier d'un individu à l'autre. Ils renferment, tantôt sur leur trajet, le plus souvent à leur extrémité aveugle, de gros corpuscules calcaires. Quelquefois certains rameaux en sont dépourvus. Les corpuscules sont renfermés dans des dilatations de ces caraux; leur taille est variable, leur forme ordinairement sphé- rique. Quelquefois, ils sont bilobés (fig. 21). On en trouve qui sont brisés en deux, en quatre, en six et même en huit segments — 432 — de sphère. Ces cassures sont-elles exclusivement le résultat de la compression du couvre-objet, ou se produisent-elles naturel- lement? Nous l'ignorons. On trouve dans les gros troncs des corpuscules, à contours plus ou moins irréguliers, qui pourraient bien être des fragments de ces éléments calcaires. On observe aussi de petits granules sphériques, qui cheminent dans les gros canaux. Les corpuscules sont très réfringents et formés par des couches concentriques de substance. Sous l'action de l'acide acétique dilué, ils disparaissent en grande parties : ils laissent un résidu organique. Le système de fins canaliciiles à entonnoirs ciliés. — Indé- pendamment des gros troncs et des rameaux collatéraux, qui se terminent en massue autour des corpuscules calcaires et que Claparède considérait comme étant les points d'origine du sys- tème, il existe, chez ce Diplostome, un système de fins canalicules. Ceux-ci ont les caractères décrits chez le D. squamula. Chacun d'eux prend son origine dans un petit entonnoir qui affecie, avec le canalicule et avec le système lacunaire intercellulaire, les mêmes rapports que chez le D. squamula. Il n'y a donc pas lieu de s'y arrêter. Ils sont disposés par groupes; ceux-ci ont chacun leur point de convergence au voisinage duquel ils forment des anasto- moses. L'un des points de convergence se trouve au niveau de la ventouse buccale; un second entre l'anastomose des canaux externes et le canal transverse, un troisième un peu en avant de ce canal transverse, un quatrième au niveau de la grosse ventouse ventrale, un dernier sur les côtés de la vésicule terminale. Ces difTérents groupes sont réunis les uns aux autres par un cana- licule anastomotique, sur lequel sont insérées quelques branches isolées terminées par un entonnoir. Le système débouche dans les gros troncs, à droite et à gauche de la ligne médiane, en deux points déterminés : l'un vers le milieu de la longueur du canal externe, l'autre un peu au-dessus du point d'insertion du tronc commun d'origine sur la vésicule. Peut-être existe-t-il un troisième point de réunion au niveau de la bifurcation du canal externe et du canal latéral descendant. Nous avons observé cer- — 453 — lains entonnoirs ciliés, les uns le long des faces latérales, les autres vers le milieu du corps, dont nous n'avons pu suivre les canalicules. C'est au niveau de la grande ventouse ventrale et de la vésicule terminale que l'on rencontre le plus grand nombre de canalicules et d'entonnoirs. On peut ramener, dans son ensemble, tout l'appareil excré- teur du Diplostomum volvens à celui du Dis (orna sqiiamula. Comme chez ce dernier, il existe deux gros troncs latéraux [troncs communs d'origine) s'ouvrant, d'une part, dans la vési- cule terminale, et, de l'autre, se bifurquant en deux branches : Tune externe, l'autre interne. Ces canaux présentent, chez le Diplostome, plus de complication à cause du grand nombre de petits rameaux collatéraux et du volume considérable que prend l'une des branches secondaires, le canal latéral descendant. Comme chez le D. sqiiamida, il y a anastomose sur la ligne médiane, aussi bien entre les troncs externes [canaux externes) qu'entre les canaux internes [canal transverse). Mais, tandis que, chez le Distome, les canaux externes et internes sont réunis entre eux par une double anastomose, chez le Diplostome il n'existe qu'une branche anastomotique médiane [canal médian descen- dant). Quant au système de fins canalicules, même constitution et mêmes rapports des entonnoirs avec les canalicules et avec les espaces lymphatiques, même aspect des canalicules et même répartition par groupes. Si nous avions observé d'une façon cer- taine l'existence d'un troisième point de réunion entre ce sys- tème et les gros canaux, nous dirions que l'identité des appareils de ces deux Trématodes est complète. Nous avons constaté la présence des entonnoirs ciliés chez trois genres de Tréìnatodes ectoparasites : chez VOctobothrium lanceolatum, chez le Diplozoon paràdoxum et chez le Polys- tomum integerrimum. — 434 — CESTOIDES. Historique. — Rudolphi (1), Norrlmann (2), Plainer (3), Blanchard (4) ont considéré Tappareil excréteur des Cestodes comme représentant le tuhe digestif, von Siebold (5), tout en le regardant, lui aussi, comme un appareil digestif, était porté à croire qu'il faisait en même temps fonction d'appareil circula- toire. Creplin (6) et Laurer (7) ont considéré le foramen caudale comme anus. C'est P.-J. Van Beneden (8) qui, le premier, a reconnu la véritable nature des canaux qui se rencontrent chez les Cestodes. Il a montré qu'il n'existe pas d'appareil digestif et il a décrit, chez un certain nombre de types, la répartition, la constitution et les rapports de l'ensemble des canaux. Il a vu que l'appareil excréteur se termine par une vésicule pulsatile, située à l'extrémité supérieure du corps, vésicule à laquelle aboutissent les gros troncs longitudinaux. Dans ceux-ci se trouve un liquide chargé de globules qui cheminent d'avant en arrière. Il observa que l'appareil naît en avant, par de fines rami- fications. Il admit que les canaux sont de nature glanduleuse et que leur contenu est un produit destiné à être rejeté au dehors. C'est encore P.-J. Van Beneden qui, le premier, fit ressortir l'unité de type sur lequel sont bâtis les deux systèmes chez les Trématodes, d'une part, les Cestoïdes, de l'autre. G. Wagener (9) (1) ^\iï)o\.vm. Hist. des Enloz. (2) NoRDMANN, Lamarck : Animaux sans vertèbres, Tœnia, p. 598. (3) Plat.\er, Milller's Arch., 1838, l. XIII, (ig. 4 et 5. (4-) Blanchard, Recherches sur l'organisation des Vers. {Ann. se. rat., 1847- 1848, 3« série.) (5) V. Siebold, Zeits. f. iviss. Zool., t. IV. (6) Crepliiv, Obs. de finto:;., pp. 65-64. (7) Laurer, De Amphistomo conico^ pp. 11 et 12, 1830. (8) Van Beneden, Cestoïdes, p. 52, 1850. (9) Wagner, Enthelminthica. Diss, inaug , 1848, pp. 24 et 25. — MllUefs Arch., 1851, pp. 25 et 27. — Die Entvo. der Cesloden in Verh. d. K. L. C. Akad., Bd. XXIV, suppl. tiré à pari, p. 14. Breslau, 1854. — Die Enttvichlung der Cestoden. Haarlem, 1857. — 455 — a reconnu, de son côté, une partie des faits observés par Van Beneden en étudiant le Cysticercus tenuicoUis, les Tétrarhyn^ qnes, les Tœniadés et les Botriocéphalidés. Le systènie des gros canaux a été étudié depuis par von Siebold (1), Meissner (2), Leuckart (3), Sommer et Landois (4), Stieda (5), Steudener (6), Zograf (7), etc., etc. En résumé, presque tous les auteurs qui se sont occupés des Cestodes ont vu ces gros canaux longitudinaux. Mais, tandis que Van Beneden, Meissner, G. Wagener, Leuc- kart et d'autres ont décrit, indépendamment des gros canaux, un système capillaire de canalicules, pouvant affecter la forme d'un réseau, d'autres, tels que Steudener, ont nié Texislence de ce système chez les Tœniadés. Steudener (8) admet cependant chez les Botriocéphalidés et chez la Ligula simplissima ces vaisseaux capillaires. Knoch (9) et Eôttcher (10) ont vu aussi un réseau vasculaire excréteur. Sommerei Landois (11) ont décrit, chez Botriocephalus latus^ un système vasculaire plasmatique dont les dernières branches seraient en communication avec des cellules, ressemblant à des corpuscules de tissu conjonctif. Cette interprétation nous paraît avoir la même valeur que celle de Walter et nous semble basée sur les mêmes erreurs d'obser- vation. Tout dernièrement Kahane (12) a fait Télude du Tœnia (1) Von Siebold, Ueber den General, der Cesloden. (Zeit.s. f. wiss. ZooL.,Bd. II, p. 206.) (2) Meiss:veî\, Zur Entw. und- Anal. d. Bandwumer. (Zeits. f. wiss. Zool., Bd.V, p. 588.) (3) LzvcKM^T^Blasenbandwilrmer, p. 132, et Parasiten, t. I, p. 170. (4) SoMMtR et Landois, BeUrdge zur Anat. der PlatlwUrmer, 1872. (5) Stieda, Muller's Arch., 1864. (6) Steudener, Untersuchungen ilber d. feineren Bau der Cestoden^ 1877. Halle. (7) Zograf, Helminthologische Beitrage. {Mitteeîl. der Kaisrrl. Gesellschaft D. Freunde der Nat. bei Moskader Universitat, Bd. XXIII. (8) Steudener, Loc. cit. (9) Knoch, Naturgescli. des breit. Bandwurms u. s. lo. (Mém. Acad. Saint- Pétersb.) (10) Bôttcher, Ueber d. oberfl. Gefdssnetz von Bolhriocephalus laius (Vir- CHOw's Arch., 1869, 7<^ série, t. V, (H) Sommer et Landois, Loc. cit., p. 10. (12) Kahane, Zeits. f. wiss. Zool.^ 1880, p. 203. — 436 - per (oliata au moyen de coupes transversales et horizontales, faites sur des spécimens conservés dans l'alcool . Kahane n'est pas arrivé cà se persuader complètement de Texistence du réseau capillaire. L'élude de ses coupes l'amène cependant à supposer l'existence d'un reticulum, parcourant le parenchyme du corps dans toutes les directions. Nous comprenons parfaitement que Kahane ne soit pas arrivé à se faire une opinion précise à ce sujet. Il suffit d'avoir vu, sur le vivant, la délicatesse et l'exi- guïté extrême de certaines parties du système excréteur chez les Cestodes aussi bien que chez les Trématodes pour être con- vaincu de la défectuosité du mode d'observation par coupes, quand il n'est pas accompagné d'une étude préalable faite sur le vivant. A notre connaissance, on n'a jamais décrit chez les Cestodes de communication directe entre le système excréteur et les tissus qui l'entourent. On admet que l'appareil est clos à sa périphérie. Quant aux palettes vibratiles, on les a décrites chez un certain nombre de Cestoïdes. On connaissait depuis longtemps, dans le parenchyme du corps des Cestoïdes, des corpuscules calcaires. Pallas et Gœtze (1) les ont décrits les premiers. On a pris ces éléments pour des œufs, pour des globules sanguins, pour un squelette cutané (v. Siebold). Virchow considérait ces globules comme des cor- puscules de tissu conjonctif, imprégnés de sels calcaires. Leuc- kart (2) et Pagenstecher (3) ont confirmé chez un Echinobo- thryum de la raie la manière de voir de Claparède basée sur l'étude du Diplostome, au sujet des rapports qu'aff'ectent ces cor- puscules avec l'appareil excréteur; le premier a fait une observa- tion semblable chez de jeunes Tœnia cucumerina. Aujourd'hui la nature excrémentitielle de ces corpuscules est extrêmement pro- bable, étant donnée leur analogie avec les éléments produits par les reins d'autres animaux inférieurs; leur composition chimique (1) Pallas, GoETZE, voir Ledckart, Parasiten, t. I, p. 174. (2) Leuckart, Parasiten^ t. l, p, 175. (ô) Pagenstechpb, Parasiten, Leuckart, t. I, p. 175. — 437 — est du reste bien connue : ils sont formés de carbonates et renferment de la guanine. Nous avons fait une étude complète de l'appareil excréteur du Caryophyllœus miitabilis. CARYOPBYI.1.ŒUIS II1UTABII.1S. C'est P.-J. Van Beneden (I) qui a décrit le plus en détail et le plus exactement l'ensemble de cet appareil. 11 a annoncé l'exis- tence d'un réseau superficiel et d'un système de gros canaux longitudinaux débouchant dans une vésicule terminale; mais il n'a pas reconnu les rapports précis entre ces deux systèmes. Ici, il y a lieu, pour la facilité de la description, de distinguer quatre parties : la vésicule terminale, un système do gros troncs longitudinaux, un réseau superficiel et un système de fins cana- licules à entonnoirs ciliés. Nous croyons devoir prendre dans la description de l'appareil un ordre inverse de celui que nous avons suivi dans nos descriptions précédentes et cela pour la clarté de l'exposition. Le système de fins canalicules à entonnoirs. — Entre les gros troncs longitudinaux {canaux descendants) et le réseau superficiel, il existe un système de fins canalicules, à paroi propre. Ils sont disposés par groupes. Entre les canalicules d'un même groupe, il y a des anastomoses. Chaque groupe va s'ouvrir dans le réseau superficiel par un ou deux petits troncs. Quelquefois plusieurs groupes sont réunis par une petite branche anastomotique. ils sont répandus dans toute la longueur du corps, aussi bien à l'extrémité céphalique qu'à l'extrémité caudale. Il semble qu'aucune symétrie ne préside à leur distri- bution. Chaque canalicule paraît avoir la même structure et les mêmes caractères que ceux des Trématodes; il prend son origine dans un petit entonnoir cilié identique à celui des Trématodes. M. Schultze(2) paraît avoir vu ces entonnoirs vibratiles. En effet, (1) Van Beneden, Vers intestinaux, p. 115. (2) M. ScHULTZE, Zeits. f. wiss. Zool, vol. IV, p. 189. — 458 — il dit aVoir observé chez le Cnri/ophyllœiis des lobules vibratiles. Or en fait d'organes vibratiles nous n'avons trouvé chez le Caryophyllœus que les entonnoirs. Mais il confondit ces éléments avec ceux que l'on rencontre dans les canaux chez d'autres Cestodes. Ces entonnoirs nous ont paru situés à la limite entre la couche corticale et la couche médullaire du corps. // y a des espaces intercellulaires dans lesquels circulent les liquides nour- riciers. Les rapports entre les entonnoirs ciliés et les lacunes lympathiques sont les mêmes que ceux qui existent chez les Tré- matodes. Le réseau superficiel. — Il est situé dans la couche corticale, plus superficiellement placé que le système de fins canalicules. Il constitue un reticulum complet autour de la couche médul- laire, en formant des mailles polygonales de forme et de gran- deur très variables. A l'extrémité postérieure du corps, un peu au-dessous du niveau de l'orifice sexuel, qui est ventral, le réseau superficiel se prolonge en deux branches longitudinales ventrales et deux branches dorsales (canaux ascendants). Ces canaux placés dans un pian, un peu plus profond que celui du réseau, cheminent d'arrière en avant, en augmentant de volume et en décrivant des sinuosités plus ou moins prononcées. Ils communiquent entre eux (respectivement les deux ventraux et les deux dorsaux) par des anastomoses transversales de distance en distance et avec le réseau par de petites branches collatérales. Vers l'extrémité céphaliqne ces quatre canaux ascendants débouchent dans le système des gros troncs longitudinaux [canaux descendants). Les canaux descendants. — Ce système est situé à la surface de la couche médullaire. Dans la tète ces canaux décrivent un grand nombre de sinuosités et sont réunis entre eux par de nombreuses anastomoses et par des anses. De là, ils se dirigent d'avant en arrière, au nombre de cinq pour chaque face. Leur diamètre augmente sur une partie de leur trajet. Ils sont réunis entre eux par des anastomoses transversales et cheminent dans — 439 — toute la longueur (lu corps jusqu'à l'extrémité postérieure. Là, ces dix canaux descendants vont s'ouvrir dans la vésicule termi- nale, par dix orifices, situés sur un même plan, dans la paroi latérale de celte vésicule. Voici une (igure schématique repré- sentant une coupe transversale faite vers le milieu du corps du Caryophyllœus et qui montre les rapports et la position des différents systèmes de canaux : Fiffure 1 En a le système de fins canalicules, en b le réseau superficiel, en c les canaux ascendants, en d les canaux descendants, en e la limite entre la couche corticale et la couche médullaire du corps. La vésicule terminale. — Elle est située à l'extrémité posté- rieure du corps et possède une forme caractéristique. On peut lui distinguer deux parties, séparées par un étranglement. La portion antérieure est globuleuse ou ovoïde; la portion posté- rieure conoide, à sommet dirigé en arrière. A ce sommet, se trouve l'orifice qui met en communication la cavité de l'organe avec l'extérieur. Les parois sont très épaisses et la cavité relati- vement restreinte. La portion postérieure seule est contractile. Nous avons observé des entonnoirs ciliés formant les points d'origine de l'appareil excréteur, chez le cysticerque du Tœnia serrata^ chez le Tœnia serrata adulte et chez le Tœnia cucume- rina. — 440 — iMORPIlOLOGlE DE L'APPAREIL EXCRÉTEUR DEI^ VERS. Si Ton examine à un point de vue comparatif l'ensemble de l'appareil excréteur, chez les différents groupes de Vers, il semble que l'on soit autorisé à distinguer deux types d'organes urinaires. Chez les Rhabdocèles, les Dendrocèles, les Némerliens, les Cestodes, les Trématodes et les Rotifères, il existe un système de canaux de drainage, à parois probablement glandulaires, s'ou- vrant dans le cœlome par des entonnoirs ciliés toujours mul- tiples et débouchant à l'extérieur par l'intermédiaire d'une vésicule unique et médiane ou de deux vésicules latérales, le plus souvent à l'extrémité postérieure du corps, plus rarement en avant, quelquefois sur la face ventrale, plus ou moins près de la tête. Chez les Vers annelés, Hirudinées, Oligochètes et Chœtopodes on observe, au contraire, les vrais organes segmentaires, les Néphridies de Lankester toujours multiples et disposés par paires; ils sont l'expression de la composition métamérique de l'organisme. Chez les Géphyriens les deux genres d'organe paraissent coexister. Les vésicules anales nous semblent homologues des canaux urinaires des Rotifères et des Platodes proprement dits; mais la plupart de ces animaux ont en outre de vrais organes segmentaires disposés par paires près de l'extrémité antérieure du corps, et quoiqu'ils soient toujours en petit nombre, il nous paraît incontestable que ces tubes contournés sont homologues des vrais organes segmentaires des Annélides et des Hirudinées. Peut-être chez ces derniers, les reins primordiaux découverts par Leuckart (1), ne sont-ils qu'un reste modifié de l'appareil primitif des vers inférieurs. (1) Leuckart, Parasiten, 1. 1, p. 697, — 441 — Nous allons examiner jusqu'à quel point la manière de voir que nous venons d'exprimer peut se soutenir. Et d'abord le type que nous avons trouvé chez le D. squamula et chez le Diplostomiim volvens est-il réalisé chez les autres Trématodes. P.-J. Van Beneden (1) avait déjà ramené l'appareil excréteur de ces Vers à un seul et même type. D'accord avec lui, Au- bert (2), Leuckart (5), Gegenbauer (4) et d'autres sont arrivés à admettre la subdivision de l'appareil excréteur en trois parties, à savoir : une vésicule terminale, de gros canaux et de fins cana- licules. Nous pensons aussi que cette division est fondamentale et applicable à tous les Trématodes. Mais nous ne partageons pas l'opinion de nos prédécesseurs, en ce qui regarde les rap- ports entre les deux systèmes de canaux. Tandis que la plupart des auteurs décrivent les gros vaisseaux comme se continuant par des transitions insensibles dans les fins canalicules, nous n'avons jamais vu de canaux de transition entre les deux sys- tèmes : ils n'existent pas plus chez les Trématodes étudiés par nous que chez le Cartjopkyllœus. Il conviendrait donc de faire de nouvelles observations chez un certain nombre d'espèces pour voir jusqu'à quel point nos résultats se vérifieront dans l'en- semble du groupe. Quant au mode d'origine des petits canali- cules dans le parenchyme du corps par des entonnoirs ciliés, il avait échappé à nos prédécesseurs, sauf à Thiry (5) chez le sporo- cyste de la Cercaria macrocerca et à Biitchli (6) chez la Cercaria armata. Comme nous les avons trouvés dans cinq genres très diflérents, nous croyons pouvoir admettre qu'ils existent chez tous les Trématodes; la disposition que nous avons trouvée réalisée chez le Garyophyllée nous porte à croire qu'ils ne font (1) Van Benedepî, CestoïdeSf p. 49. (2) AuBERT, Zeits. f. wiss. Zool.y 1848. (3) Leuckart, Parasiten. (4) Gegeubauer, Anat. comp. (5) Thiry, Zeits. f. wiss. Zool, 1860. (6) BÛTscHLi, Zool. Anz.f n" 42, nov. 1879. 30 — 442 — pas même défaut chez ceux dont le système de lins canalicules a été décrit comme un reticulum (1) (Distomum dimorphum). Si les gros canaux paraissent identiques au point de vue de leur constitution et de leur fonction, il n'en est pas de même de leur distribution qui est fort variable. Le seul point constant c'est l'existence de deux gros troncs d'origine débouchant dans un réservoir terminal. Mais tantôt ils se bifurquent à une très petite distance de leur point d'insertion pour donner naissance à quatre troncs longitudinaux, comme l'a décrit Wagener chez le Gyrodaclijliis (2); ou bien ils se divisent à une distance un peu plus grande de leur point d'origine pour former une branche externe et une branche interne qui peuvent s'anastomoser entre elles, comme c'est le cas chez le D. squamula, et fournir ensuite d'autres rameaux secondaires dont quelques-uns peuvent être très importants, comme chez le Biplostomum volvens; ou bien encore les deux troncs d'origine peuvent cheminer dans toute la longueur du corps, à droite et à gauche de la ligne médiane, sans se subdiviser, pour se recourber ensuite brusquement, quand ils sont arrivés à l'extrémité antérieure du corps et rebrousser chemin jusqu'à l'extrémité postérieure (D. lalum). Mais ce sont là des variations d'une importance tout à fait secondaire. Pour ce qui regarde le mode de communication avec l'exté- rieur, il est aussi fort variable. Chez le plus grand nombre de Trématodes, les deux troncs communs d'origine débouchent dans un réservoir unique et médian, situé à l'extrémité posté- rieure du corps. Plus rarement les troncs communs s'ouvrent chacun séparément dans une ampoule vésiculaire ordinairement située à l'extrémité antérieure; c'est ce qui s'observe chez VEpibdella Science (P.-J. Van Beneden) (5) et chez Pseudocotyle Sqiiatinœ (Taschenberg) (4). On peut considérer ces deux vési- (1) G. Wagener, Arch. Anat. Phys., 1852. (2) G Wagener, Gyrodacttjlus. (Mùller's arch, 1860.) (3) P. J. Van Beneden, Vers intestinaux, p. 26, 1858. (4) Taschenberg, Ectoparasilen. Weitere Beitrage zur kenntniss ectoparasi- tischer mariner Trematoden, 1879. — 445 — cules comme les terminaisons renflées des troncs principaux; quand il n'y en a qu'une, elle représente les portions terminales de ces troncs renflés et soudés. La forme et le volume de la vésicule sont aussi fort variables. Elle est tantôt simple : c'est le cas le plus ordinaire; tantôt elle s'allonge en un long tube en forme de chapelet (D. terelicolle) (1); d'autres fois elle montre une tendance à la subdivision en deux : c'est le cas chez le D. sqiiamida et dans un autre sens chez le D. voivens; ou bien elle est simplement bilobée; ou bien encore les deux lobes s'al- longent en deux longs tubes {Aspidogaster), En résumé, nous basant sur les données bibliographiques et sur nos observations personnelles, nous croyons pouvoir carac- tériser l'appareil typique des Trématodes comme suit : 1° L'appareil débouche à l'extérieur par une vésicule termi- nale et postérieure ou par deux renflements vésiculaires ven- traux et antérieurs; 2° Il existe un système de gros canaux qui s'ouvrent par deux troncs d'origine dans la vésicule ou les vésicules termi- nales; 5" Ces canaux communiquent avec les espaces lympathiques creusés dans le tissu conjonctif, par des entonnoirs pourvus d'une flamme vibratile et reliés aux premiers par l'intermédiaire de canalicules très fins; 4^ Ces canalicules s'abouchent directement dans les gros canaux et il n'existe pas de transition entre ces deux catégories d'organes. Déjà en 1850 Van Beneden avait ramené le type de l'appareil excréteur des Cestoïdes à celui des Trématodes (2). Gegen- bauer (5), Huxley (4) et d'autres sont aussi arrivés à considérer (1) P.-J. Van Beneden, Sur l'appareil cire, des Trématodes. (Bdll, de l'Acad. DE Belgique, t. XIX ) (2) P.-J. Van Beneden, Cestoïdes^ 1830, p. 32. (5) Gegenbader, Anat. comp. (4) Hdxley, yinat. comp. des Invertébrés, — 444 — l'appareil comme constitué de la même manière dans les deux groupes. Ici il y a également lieu de distinguer trois parties, correspondant manifestement, chez les Cestodes non segmentés {Caryophyllœiis et Ligula), aux trois parties de l'appareil des Trématodes. L'appareil typique comprend : 1° Un réservoir terminal, de forme et de volume variables, désigné sous le nom de vésicule terminale ; 2° Un système de gros canaux longitudinaux auquel se rat- raltache, dans certains cas, un réseau vasculaire secondaire; 3° Un système de fins canalicules à entonnoirs ciliés, dont les rapports et la structure sont identiques à ceux des Tréma- todes. Chez les Cestodes segmentés une différence importante se montre : c'est le nombre des points de communications avec Textérieur. G. Wagener (1) a fait cette découverte remarquable que chez le Triœnopfiorus^ Dibothrium claviceps et Tœnia oscu- lata, il n'existe pas seulement une vésicule pulsatile terminale, mais que les troncs principaux émettent sur leur trajet des branches latérales s'ouvrant directement à l'extérieur. Cette dis- position en rapport avec la segmentation du corps permettrait de concevoir comment des organes multiples communiquant chacun avec l'extérieur par un orifice distinct, tels qu'ils existent chez les Vers annelés, ont pu se développer aux dépens d'un appareil simple communiquant primitivement avec l'extérieur par un orifice unique situé à l'extrémité du corps. Nous avons observé ces entonnoirs chez trois Cestodes adultes et chez le Cysticerque de l'un d'eux et nous nous croyons en droit d'admettre que cette partie de l'appareil existe chez tous les Cestoïdes. Les deux appareils ne diffèrent ici que par la disposition et le nombre des canaux; ces différences sont de même ordre que celles que l'on trouve réalisées entre les Tréma- todes. (1 j G. Wagereb, Entw. der Cestoden, p. 16. — 445 — Chez les Tseniadés l'appareil paraît moins compliqué que chez le CaryophyUœus : on ne leur décrit que deux canaux longitudi- naux ascendants et deux autres descendants reliés entre eux dans chaque proglottis par une branche anastomotique; ils s'abouchent dans un canal circulaire entourant le rostellum. Quant à l'exis- tence d'un réseau, les auteurs sont loin d'être d'accord. Wa- gener (1) considère les fins canalicules comme dépourvus de paroi propre. L'appareil excréteur des Turbellariés peut se ramener aussi, avec la plus grande facilité, à celui des Trématodes. 0. Schmidt {%) nous l'a fait connaître pour un grand nombre d'espèces de Rhabdocèles. Chez le Prostomiim lineare, bien étudié par Hallez (5), l'on observe de chaque côté du corps deux troncs s'abouchant en avant dans un canal court , qui s'ouvre directement à l'extérieur. L'un des canaux (correspon- dant aux gros canaux des Trématodes) s'amincit graduellement d'avant en arrière et donne des branches de plus en plus fines (fins canalicules), tandis que l'autre conserve son calibre jusqu'à l'extrémité caudale, où il se lermiiue en cul-de-sac. D'après l'auteur, cette dernière branche serait un cœcum dans lequel s'accumulent les produits sécrétés; ce serait la vésicule termi- nale. Je les compare aux longs tubes vésiculaires de YAspido- gaster; il y a seulement cette différence qu'ici les gros canaux s'abouchent à la base de la vésicule, au lieu de s'ouvrir à son sommet. Quant au mode de terminaison à l'extérieur, c'est celui de VEpibdella et du Pseiidocolyle. Les rapports qui existent entre les fins canalicules et les gros canaux sont très semblables à ceux qui ont été décrits pour le D. luteiim et d'autres Trématodes. La ressemblance dans la dis- tribution des vaisseaux est encore plus accentuée entre le Derostomiim imipunctatiim (0. Schmidt), d'une part, et le Disto- (1) G. Wagener, Entw. der Cestoden, p. 14. (2) Die Rhabdocœlen StrudelwUrmer des sUssen Wassers, 1848. (5) Hallez, Arch, de zooU exp. etgén., vol. II, pp. 569 et suiv. — 446 — mum liiteum, de l'autre. Ce qu'il y a de plus variable chez les Rhabdocèles c'est le mode de terminaison de l'appareil à l'exté- rieur : tantôt les deux canaux principaux s'ouvrent séparément à la surface du corps soit près de l'extrémité postérieure, soit près de l'extrémité antérieure; tantôt ils débouchent par un orifice commun qui se trouve alors près du milieu du corps, ou à son extrémité postérieure. La seule différence un peu importante que l'on trouve entre l'appareil des Trématodes et celui des Rhabdocèles, c'est que chez ces derniers il n'existe ordinaire- ment pas de vésicule contractile proprement dite. Toutefois on peut considérer la portion terminale des gros canaux comme représentant la vésicule terminale des Trématodes; dans certains cas elle peut acquérir des proportions considérables, comme nous venons de le voir. Jusque dans ces derniers temps, certains auteurs Hallez (1), par exemple, ont nié l'existence d'un appareil excréteur chez les Dendrocèles. Nous possédons cependant des descriptions de l'appareil, faites par des observateurs de premier ordre, dont il n'est pas permis de soupçonner la véracité. 0. Schmidt (2) s'exprime ainsi, au sujet de la Cercîra hastata : « Das Wassergefàsssystem » ist so klar wie bei keiner anderen Dendrocœle. Man sieht » nicht nur oft die seitlichen Stâmme und zahireiche Yerzwei- » gungen, sondern immer auch mit Leichtigkeit ganz nahe am » Hinterende die Oeffnung mit dem becherfôrmigen Eingangs- D stiick. Dasselbe verbal t sich ganz so, wie ich es von den » Rhabdocoelen beschrieben habe; es ist contractil und trâgt » bis zum Grunde, \vo die Seitenstâmme sich abzweigen, einen ï) Besatz langer Wimpern. » Et Max Schulze(3) : « Von Gefâs- T> sen besitzen unsere Planarien nur Wassergefâsse mit oft ì> uber weite Strecken sich ausdehnenden schwingenden Wim- (1) Hallez, Contrib. à lliist. nat. des Turbellariés, 1879, p. 23. (2) 0. Schmidt, Zeits.f. wiss. Zool, 1862, p. 17. (5) M. ScHULTZE, Zeits. f. iviss. Zool.^ voi. IV, p. 187. — 447 — » perlâppchen in reichem Maasse versehen. Die beiden schon » bekannten und leicht erkennbaren Hauptst'àmme miinden in j> der JNâhe des hinteren Korperendes mit einer einfachen, nicht » contractilen Oeffnungnach aussen. » Il y a un an, Kennel (1) écrivait : a Endlich noch die vielfach » ventilirte Frage der Wassergefâsse betrelTend, so Kann die » Existenz feiner Kanâle, die am lebenden Thiere beobachtet » werden kônnen sowie die in denselben stattfindende Wim- i) perung nicht beslritten werden Sehr deutlich kann man » bei Dendrocœlum und Planaria dièse Gefâsse in der Kopfge- » gend sehen, wo sie einige Schlingen bilden, um dann jeder- B seits nach hinten zu verlaufen. » Comme chez les Rhabdocèles la vésicule terminale est souvent très réduite et n'est pas contractile. Le reste de l'appareil rap- pelle celui de plusieurs Trématodes. Quant aux Némertiens, quelques-uns leur ont dénié un appareil excréteur. D'autres ont considéré les « fentes cépha- liques » comme orifices des vaisseaux latéraux du système excré- teur. Cependant dès I80I, Max Schultze (2) décrivait l'appareil chez le Tetrastemma. Hubrecht (o) a confirmé les observations de Schultze et a découvert le système chez Lineus et Meckelia. Semper l'a découvert le premier chez Malacobdella. Kennel (5) a trouvé cet appareil chez un certain nombre de Némertiens. C'est surtout chez Malacobdella qu'il en a fait une étude relati- vement appronfondie. Le système rappelle dans sa constitution celui de certains Rhabdocèles; il est construit sur le même type. Il consiste essentiellement en deux troncs principaux et longi- tudinaux qui s'ouvrent à l'extérieur à droite et à gauche de (1) Kennel, Arbeit, ans demzool. zoot. Institut i. WUrzburg, 1879, p. 158. (2) Schultze, Beitrcige zur Naturg. der Turbellarien. Greifvvald, 1831. (3) Hubrecht, Aanteekeningen over de Anatomie der Nemertinem, 1874. (4) Kennel, Beitrdge^zur Kenntniss der Nemertinem. Art. aus dem zool. zoot Inst. in WUrzburg, 1878, pp. 542 et suiv. la ligne médiane, dans le tiers antérieur du corps. Ces troncs donnent naissance à des branches de deuxième et de troisième grandeur. Quant aux plus fines ramifications, elles se termine- raient en cul-de-sac. Les entonnoirs ciliés n'ont jamais été décrits, ni chez les Den- drocèles ni chez les Némertiens. Schneider (1) a vu chez Mesos- tomum Erhenbergii que les plus fines ramifications du système aquifère sont munies é' appendices in fundibuli formes, dans les- quels se trouve inséré un long cil. Il ne lui a pas été possible de voir de communication entre ces appendices et les tissus ambiants. Je pense que Schneider a eu sous les yeux les homologues des entonnoirs ciliés des Trématodes et des Cestodes. Si l'on pou- vait généraliser ce fait, la ressemblance entre l'appareil excréteur des Turbellariés et celui des Trématodes deviendrait tout à fait complète. La ressemblance de l'appareil excréteur des Rotifères avec celui des Trématodes nous paraît évidente. On peut résumer comme suit, en ce qui concerne cet appareil, les travaux des- criptifs de Leydig, de Colin , de Metschnikotïet de Grenacker : l'appareil se constitue de trois parties il** d'une vésicule terminale simple ou double, placée ordinairement à l'extrémité postérieure du corps et homologue de la vésicule terminale des Trématodes; 2° de deux gros troncs latéraux; ils sont plus ou moins sinueux ou pelotonnés sur eux-mêmes et possèdent une paroi grandulaire. C'est la partie essentielle de l'appareil; elle correspond aux gros canaux des Plathyhelminthes ; 3° de petits canalicules qui dé- bouchent dans la cavité générale du corps, par un ou plusieurs entonnoirs ciliés, placés systématiquement aux deux côtés de la ligne médiane. Chez les uns, tels que le Notomata Sieboldii, on trouve deux longs canalicules à droite, deux autres à gauche de la ligne médiane, sur lesquels sont insérés un grand nombre d'en- tonnoirs; chez d'autres [Notomata centrura)^ quelques petits cana- licules naissent sur le parcours des gros canaux et se terminent (1) Schneider, Untersunchungen Uber Plathelminthen, pp. 29, 1873. — 449 — chacun par un entonnoir (1). Leydig (2) croyait pouvoir distinguer deux espèces d'entonnoirs ciliés; mais Colin (3) a prouvé que c'est là une erreur et que le même entonnoir affecte l'une ou l'autre des formes distinguées par Leydig suivant la position dans laquelle on le voit. Ces fins canalicules peuvent manquer; alors les entonnoirs s'insèrent directement sur les gros canaux [Noteus quadricornis) (4). Il ressort de ce fait que les canalicules ont une importance secondaire, tandis que les entonnoirs et les gros canaux semblent essentiels. Ceux-là font quelquefois défaut, ceux-ci ne manquent jamais. Il peut aussi se faire que les canaux de droite et ceux de gauche soient réunis par une anas- tomose, comme Huxley (5) l'a décrit chez Ladnularia. Ainsi donc, nous retrouvons le même appareil urinaire pri- mordial chez les Trématodes, Cestoi les, Turbellariés et Roti- fères, et nous croyons pouvoir conclure avec Gegenbauer et d'autres à l'unité morphologique de cet appareil chez ces différents groupes. Mais ne peut-on pas faire un pas de plus et rattacher les poches aììales desGéphyriensà l'appareil excréteur desRotifères? H. de Lacaze-Duthiers (6) a fait une étude très complète de ces organes chez la Bonellia viridis. Il les considère comme repré- sentant un appareil excréteur. Cet appareil se constitue de deux vésicules volumineuses, contractiles, débouchant dans le cloaque. En cela les Bonellies se rapprochent des Trématodes chez lesquels la dualité de la vésicule pulsatile est connue depuis longtemps; elle existe de même chez plusieurs Rotifères et notamment chez le Branchiopiis mililaris (7) : il existe ici une vésicule terminale énormément développée, subdivisée en deux (1) Leidig, Ueher den Bau und die systematische Slellung der Rdderthiere. (Zeits F. wiss. ZooL., 18bo.)— Ibid., Coen, p. 44a, 1836. (2) Leïdig, même ouvrage, p. 80, 1853. (5) CoHN, Zeits. f. wiss. ZooL, 1856, p. 445. (4) Leydig, Lac. cit., p. 34. (3) Huxley, A contribution to the Anatomy and Physiology of the Rotifera. (6) H de Lacaze Duthiers, Ann. sc. nat , t. X, 4^ série, pp. 89 et suiv. (7) CoHN, Zeits. f. wiss. Zool..> 1856, p. 477, vol. VII. — 450 — chambres, qui puisent alternativement et qui s'ouvrent dans le cloaque. Sur la vésicule de la Bonellia sont insérées des touffes de tubes glandulaires ramifiés, qui débouchent dans la cavité générale du corps par de nombreux entonnoirs ciliés. Tubes et entonnoirs correspondent, nous semble-t-il, aux gros canaux glandulaires et aux entonnoirs des Rotifères. Nous trouvons une tendance marquée à l'atrophie de l'appareil excréteur primordial, depuis les Bonellia et les Thalassema, où il est relativement très développé, les Échiures où il l'est un peu moins, jusqu'aux Sipiincidides où les entonnoirs et les tubes glandulaires ont disparu et où il ne reste que les rudiments des vésicules. Un fait non moins intéressant, c'est l'existence chez les Sipunculides d'une paire d'organes segmentaires proprement dits, tandis que chez les Bonellia, là où l'appareil excréteur primordial est très développé, il n'y a pas d'organes segmen- taires. Car il n'est nullement prouvé que l'utérus simple et médian de ces animaux représente un organe segmentaire (1); il n'en a ni les caractères ni la fonction et rien n'autorise à con- clure à son homologie avec ces organes. Chez les Thalasseina et les Échiures il existe deux ou trois paires d'organes segmentaires. Chez les Hirudinées l'appareil excréteur primordial semble aussi, tout au moins dans le développement embryonnaire, faire une dernière apparition pour disparaître complètement chez les Annélides. Rathke(2) a observé chez l'embryon de Neplielis, de minces conduits, qu'il considéra comme les premières traces du système vasculaire. Robin (5) a décrit chez les embryons de Nephelis deux minces tubes, très pâles, repliés en anses en avant et en arrière et situés sur les côtés de la ligne médio- dorsale. Robin, sans s'expliquer sur leur valeur, les considère comme représentant des organes tous différents des vaisseaux (1) Claus, Zoologie, p. 345. (2) Rathke, Hirudineen, pp. 51 et 65, 1862. (3) Robin, Dév, embry. des Hirudinées, pp. 200, 201, 227, 236, 257; 1873. — 451 — sanguins. Ils disparaissent chez l'adulte. Si nous en jugeons par les figures de Robin, ces canaux nous semblent avoir la plus grande analogie avec les gros canaux des Cestodes et des Tré- matodes. Ne seraient-ils pas les derniers vestiges de l'appareil urinaire primordial? Chez les Oligochètes et les Cha^topodes nous ne retrouvons plus aucun organe, ni permanent ni transitoire, qui, en dehors des organes segmenlaires proprement dits, rappelle l'appareil primordial des vers inférieurs. Peut-on considérer les organes segmentaires définitifs des Géphyriens, des Hirudinées et des Annélides comme homologues de l'appareil excréteur primordial des Platodes inférieurs, des Rotifères et des Géphyriens? Les organes segmentaires propre- ment dits débouchant dans le cœlome, d'une part, à l'extérieur, de l'autre, ne sont-ils qu'une complication de l'appareil excré- teur primitif ou constituent-ils des organes de nouvelle forma- tion? La découverte de G. Wagener (1) prouve que l'appareil primordial peut se modifier lorsque la segmentation du corps apparaît, au point d'aboutir à un type qui, à certains égards, est certainement intermédiaire entre l'appareil urinaire primor- dial des Vers et fappareil segmentaire proprement dit. Il pren- drait en efiPet ce caractère distinctif de l'appareil excréteur des Vers annelés, de s'ouvrir à l'extérieur par des orifices distincts dans chacun des segments du corps. S'il se produisait en même temps une interruption dans les canaux longitudinaux, l'organe primitif se trouverait subdivisé en uncertain nombre de Néphri- dies. Chacune de celles-ci, il est vrai, porterait plusieurs enton- noirs ciliés; mais les observations de Eisig (2) ont prouvé que la multiplicité de ces organes infundibuliformes se présente quelquefois dans de vrais organes segmentaires {Capitella). D'autre part ces organes seraient constitués, dans ces conditions, d'un système de fins canalicules, d'un ensemble de gros canaux anastomosés entre eux et d'un canal de communication avec (1) G. Wagener, E'nîto. d. Cestoden. (2) EisiG, Mitteillungen ausderzool. Stat. zu Neapel, 1879. — 452 — l'extérieur. Or ces trois parties existent dans les organes segmen- taires des Annélides et des Hirudinées. Les observations de Gegenbauer (1) ont montré que des anastomoses peuvent exister dans un même organe segmentaire entre les anses successives que forme le canal en lacet. D'autre part encore, les observations de Kennel (2), confirmées par Hubrecht (5), ont établi que l'ap- pareil primordial se trouve répandu dans toute l'étendue du corps chez des Vers qui présentent manifestement une compo- sition segmentaire (Némertiens). Enfin d'après les observations de Rathke (4) et de Robin (5), il en serait de même pour les premiers organes urinaires des Nephelis. Ces différents faits réunis permettent de concevoir comment un appareil segmen- taire proprement dit pourrait être dérivé d'un système de canaux semblable à celui qui existe chez les Vers inférieurs, et peut-être faut-il expliquer de cette façon l'origine des trois paires d'organes embryonnaires des Hiriido{6). Mais dans l'état actuel de nos connaissances, un fait capital s'oppose à ce que l'on accepte cette hypothèse pour rendre compte de l'apparitiou des Néphridies chez les Annelés, c'est l'indépendance des deux espèces d'organes chez les Géphyriens; c'est leur coexistence pendant toute la durée de la vie, c'est cette espèce d'antagonisme qui semble exister entre le développemeut des deux appareils chez quelques-uns d'entre eux. Chez les Hiru- dinées aussi les deux espèces d organes sont indépendantes : les uns apparaissant pendant la vie embryonnaire pour disparaître bientôt et faire place aux autres, sans leur avoir donné naissance. De ce que, chez un Lombricus ou quelque autre Ver annelé, on retrouve dans chaque organe segmentaire les mêmes parties que l'on renconte dans l'appareil uniraire d'un Rotifère ou d'un (1) Gegenbauer, Zeits. f. wiss. Zool, t. IV. (2) Kennel, Arb. aus dem zool. zoot. Inst. in WUrtzburg, 1878. (3) Hubrecht, Zoo/. Anz., n° 37, 1879. (4) Rathke, loc. ciL, pp. SI et 65. (5) Robin, loc. cit., pp. 200, 201, 227, 236, 237. (6) Ledckart, Parasîten, l. I, p. 697 — 455 — Trématode, il ne s'ensuit pas nécessairement que ces deux organes soient homologues. En résumé chez les Tréma todes, Cestodes, Turbellariés, Roti- fères et Géph} riens et peut-être chez les Hirudinées, il existe un appareil urinaire primordial. Quant à l'homologie entre cet appareil excréteur primordial et les organes segmentaires pro- prement dits des Géphyriens, des Hirudinées et des Annélides, nous croyons que dans l'état actuel de nos ce nnaissances elle n'est pas établie et même qu'un certain nombre de faits militent en faveur de l'indépendance des deux systèmes d'organes. liE coe:e.03Ii:. Hœckel (1) a divisé les Métazoaires en Cœlomates et Acœlo- mates. Parmi les Acœlomales il plaçait les Trématodes, Cestodes et Turbellariés. Bien des objections pourraient être laites à cette classification et l'on conçoit qu'elle n'ait pas été généralement admise. Il existe incontestablement chez les Trématodes entre les cellules du tissu conjonclif, un système d'espaces peu éten- dus, communiquant les uns avec les autres par des canalicules creusés entre les cellules du tissu conjonclif. Ces espaces, dont l'existence est démontrée par ce fait qu'un liquide tenant en suspension des granulations y circule véritablement, sous l'ac- tion des contractions du corps de l'animal, ces espaces consti- tuent, à notre avis, un véritable système lymphathique et le liquide qu'ils renferment est pour nous le liquide périenthé- rique, ou le sang proprement dit des autres Vers. La présence d'entonnoirs ciliés débouchant dans ces lacunes ne permet pas une autre interprétation et démontre que ce système de cavités représente virtuellement un cœlome. On trouve, du reste, dans le groupe des Platodes, des variations notables au point de vue de l'extension de ces lacunes. C'est ainsi que chez les Ces- todes la masse médullaire du corps est assez nettement séparée de la couche corticale pour que celle-ci se meuve, pour ainsi dire, (1) HjECKEL, Anlhropogénie^ p. 416, 1874. — 454 — indépendamment de celle-là. Chez les Planaires terrestres, Moseley a découvert des espaces longitudinaux aux deux côtés du corps, qui représentent incontestablement un cœlome incom- plètement développé. Et chez les Némertiens l'existence d'un cœlome entourant tout le tube digestif ressort des observations de Mac-lntosch et de Hubrecht (1). Il y a, à notre avis, entre les différents stades de développement de ce cœlome tel qu'on l'observe dans les différents groupes de Platodes, les mêmes rapports qu'entre un système de lacunes lympathiques et une cavité séreuse dans le type vertébré. Nous croyons avoir donné des arguments décisifs contre l'existence des Vers acœlomates. Nous prions M. le professeur Edouard Van Beneden, notre maître, de recevoir nos plus vifs remercîmenls pour les conseils éclairés et la direction qu'il a bien voulu nous donner dans ces recherches. C'est lui qui nous a engagé à entreprendre cette étude et qui nous a tracé la voie qu'il convenait de suivre pour la conduire à bonne fin. (1) Hubrecht, Zool. Anzeiger., n" 37, 1879. — 455 EXPLICATION DES PLANCHES. a = anastomose; c = canalicule ; d = disque; e = entonnoir; f = flamme vibratile; m = paroi du canalicule; n = noyau; o = orifice de l'entonnoir; p = corps protoplasmique ; s = soudure ; v = vésicule terminale ; c.p = cor- puscule ]t e =■ canal externe; ti =z canal interne ; pi = point d'insertion du système de canalicules sur le système de gros troncs ; le ■= lumière du canalicule. Pla\che XVIII. /^^A^rry^''^ Fig. \. Très-jeune individu, dessiné à la chambre claire. Obj. 4, oc. 2. Hartnnack. Fig. 2. Jeune individu. Les contours sont dessinés à la chambre claire (obj. 2, oc. 2) et un peu amplifiés. Les détails dessinés au 10 à immersion de Harlnack. Fig. û. Individu avancé en âge ayant pris sa forme caractéristique (chambre claire, obj 2, ocul. 2). Le système des fins canalicules est simplement indiqué (10 im. Hartn.). Fig. 4. Reproduction amplifiée d'une anastomose de deux canalicules, indiquée en a sur la fig. 2 (obj. 10 im., oc. 2). Fig. 5. Soudure des deux branches internes chez un jeune spécimen vue au 10 im., oc. 2 de Hartn. et amplifiée (voir fig. 2 en s). Fig. 6. Entonnoir vibratile (obj. 10 im ,oc. 2, amplifié) vu à la coup optique sur le vivant. Fig. 7. Un entonnoir dont la flamme vibratile est subdivisée en deux parties (même gross, que pour le précédent). Fig. 8. Entonnoir vibratile, vu de face, du côté opposé. à l'orifice, vu sur le vivant (même gross, que précédent). Fig. 9. Entonnoir vibratile, vu de face, après traitement par les réactifs (même gross, que précédent). Fig. 10. Entonnoir vibratile dont l'éperon est très développé (même gross, que précédent). Fig. 11. Une portion d'un canalicule (10 im., oc. 2 amplifié). Fig. 12. Tronc d'origine et ses deux bifurcations chez un jeune individu (gross. obj. 10 im. oc. 2 amplifié). ^ Fig. 13. Terminaison aveugle d'un canal secondaire avec son capuchon (gross. obj. 10 im. oc. 2 amplifié). Fig. 14. Le plus jeune individu observé (chambre claire, obj. 2, oc. 2). Fig. 15. Un entonnoir terminal constituant le centre d'une figure établie. Les lacunes sont remplies de corpuscules (gross. 10 im.,obj. 2, amplifié). Fig. 16. Epithelium de la vésicule terminale (gross, obj. 10 im., oc. 2, amplifié). Fig. 17. ÉpithéUum du système de gros canaux (gros tronc commun d'origine au niveau de sa bifurcation (gross, obj. 10 im., oc. 2, amplifié). — 456 — DIPIiOSTOmUM YOIiTEMS. Fig. 18. Individu doni les contours, les ventouses et la vésicule terminale, les gros troncs de Tappareil excréteur et les corpuscules ont été dessinés à la chambre claire (obj. 4, oc. 2). Les fins rameaux collatéraux et le système de canalicules à entonnoirs avec l'obj. 10 im.,oc, 2. Fig. 19. Une portion de rameau collatéral avec ses terminaisons. Fig. 20. Point de réunion antérieur entre le système de fins canalicules et le gros tronc (canal externe) (obj. 10 im., oc. 2, amplifié). Fig. 21. Corpuscules sphériques, bilobés, brisés en quatre et en six; petits cor- puscules (obj. 10 im., oc. 2, amplifié.) Planche XIX. CARYOPnYLE^OKVili IIUTABILIS. a = canaux descendants; 6 = canaux ascendants; c = réseau superficiel; c' = branches de réunion entre le réseau superficiel et les canaux ascendants; d=canalicules;/'=anastomoses transversales des descendants; gf = poinlsde réunion entre les canaux ascendants et descendants; h =. branches anaslomo- tiques entre les canaux ascendants ; i = branches anaslomoliques entre les canaux descendants; y = cavité de la vésicule terminale ; A; = ouverture des canaux descendants dans la vésicule terminale; / = mailles du réseau; m = point de départ des canaux ascendants; o = orifice sexuel; v = vési- cule; w = orifice externe de la vésicule. Fig. 1. Moitié de la tête, vue d'un côté. Le système des canaux descendants el deux des canaux ascendants y sont représentés. Fig. 2. Portion médiane du corps. Tous les systèmes de canaux appartenant à la face ventrale y sont représentés. Fig. 3. Portion postérieure du corps, vue du côté de la face ventrale. Le système des canaux descendants, ascendants, le réseau et la vésicule y sont représentés. Fig. 4. Portion terminale du corps, vue en coupe optique. RECHERCHES SUR LES SUBSTANCES ALBUMINOÏDES DU SÉRUIH SAKGUm ; PAR LÉON FREDERICQ TRAVAIL DU LABORATOIRE DE PHYSIOLOGIE DE L'UNIVERSITÉ DE LIÈGE. §1. Denis (1) admettait dans le sérum sanguin Fexislence de deux substances albuminoïdes : l'' la fibrine dissoute (paraglobuline) insoluble dans l'eau distillée et dans les solutions salines saturées, soluble dans les solutions salines diluées; 2° la serine ou albu- mine du sérum soluble dans l'eau et dans les solutions salines de toute concentration (NaC/^NaoSOi, M5'S04). Jl obtenait la première en saturant à froid le sérum de cblorure de sodium, de (1) Denis, Mémoire sur le sang, 18d9, p. 184 : « La fibrine dissoute (paraglo- buline) dans le sérum se précipite quand ou salure ce liquide avec du sulfate de magnésie. On la recueille aisément sur le Altre. » 51 — 458 — sulfate de sodium ou de magnésium. Le liquide lillré découlant du précipité de fibrine dissoute, saturé à chaud de sull'ale de sodium laissait précipiter la serine. Depuis l'époque où parurent les travaux de Denis, on (Panum, Alex. Schmidt, Kiihne, Heynsius, Eichwald) a décrit dans le sérum une série de substances albuminoïdes plus ou moins distinctes les unes des autres (substance fibrinoplas tique, para- globuline, caséine du sérum, albuminate alcalin), qui toutes, d'après les travaux de Hoppe-Seyler et de son élève Th. Weyl, présentent les mêmes propriétés que la globuline (fibrine dis- soute) obtenue par le procédé de Denis (1). Weyl propose de comprendre toutes ces substances sous le nom de globuline du sérum (a Serumglobulin »). Pour Hoppe-Seylcr,Weyl,Hammarsten et plusieurs autres physiologistes, le sérum sanguin présenterait donc la constitution que Denis lui avait assignée. Il contiendrait deux substances albuminoïdes, une albumine (Serine de Denis) et une globuline (Fibrine dissoute de Denis, pai'aglobuline). Jusque dans ces derniers temps, la première était considérée comme consti- tuant la presque totalité des albuminoïdes du sérum, la paraglobuline n'en formant qu'une faible partie. Les recherches récentes de Hammarsten ont ébranlé complètement cette doctrine (2). Hammarsten a montré que le sérum du sang de cheval, celui de bœuf, etc., peuvent fournir quand on les traite par le sulfate de magnésie un poids de paraglobuline presque double de la quantité d'albumine qui reste en solution. Chez d'autres espèces animales, le Lapin, par exemple, le sérum contient, au contraire, fort peu de paraglo- buline. Hammarsten s'est efforcé de prouver que la paraglobuline ainsi for- mée préexiste dans le sérum sanguin et que par conséquent ce que l'on a décrit jusqu'ici sous le nom d'albumine n'est en réalité qu'un mélange où la paraglobuline prédomine dans beaucoup de cas. (1) Hoppe-Seyler, Handbuch der pliysiologisch-und pathologisch cliemischen Analyse. Physiologische Chemie III. Th. Weyl, Beilràge zur Kenntniss thierischer und pflanzlicher Eiweiss- korper. Inaug. Dissert. Slrâsshur g, 1877, p. 77; aussi dans Zeitsclii ft. f. physio- logische Chemie. (2) Olof Hammarsten, Uebcr das Paraglobulin, pfldeger's Archiv. f. d. ges. Pbtsiologie, XVII, p. 413, et XVIII, pp. 38 et 97, 1878. — 459 — Corame on le verra plus loin, je suis arrivé aux mêmes conclusions par rétude de la déviation que le sérum sanguin imprime au plan de la lumière polarisée, méthode purement physique qui ne peut être passible des repro- ches que Ton serait tenté d'adresser aux réactions chimiques utilisées par Hammarsten. Peut-être faudrait-il ranger Thémoirlobine au nombre des constituants normaux du sérum. J'ai eu entre les mains bon nombre d'échantillons de sérum de bœuf, de lapin, de chien, etc., paraissant à la vue complètement exempts d'hémoglobine, offrant une teinte jaune clair nullement rosé. Cependant examinés sous une épaisseur suffisante (10 centimètres, par ex.) à l'aide d'un petit spectroscope de Browning, tous montraient plus ou moins nettement les deux bandes d'absorption de Toxyhémoglobine. Les précautions les plus minutieuses (recevoir le sang dans un vase absolument sec, chauffé à l'avance, le remplir exactement, l'abandonner ensuite au repos complet jusqu'au moment de recueillir le sérum, etc.) avaient naturellement présidé à la saignée et à la préparation du sérum. §11. GLOBULINES DU SÉRUM. Je mets globulines au pluriel : j'ai pu me convaincre, en effet, qu'à côté de la paraglobuline, le sérum de cheval contient d'ordinaire une petite quantité d'une globuline qui présente les caractères du fibrinogène en voie de se transformer en fibrine. Si l'on prépare la paraglobuline en précipitant par quelques gouttes d'acide acétique le liquide trouble obtenu en diluant le sérum avec quinze à vingt fois son volume d'eau, le précipité qui se dépose au fond du vase se montre le plus souvent com- posé de deux substances différentes : l'une, la plus abondante, est formée de fins granules de paraglobuline, l'autre est repré- sentée par un petit nombre de flocons translucides, glaireux, collant au vase, rappelant, à s'y méprendre, l'aspect du fibrino- gène précipité que Ton a conservé quelque temps sous l'eau. D'autres fois ces flocons ressemblent davantage à ceux de la fibrine. Si, après avoir lavé ce dépôt de globulines et décanté les — 4G0 — eaux de lavage, on le traite par une solution saline (NaC/, M(/S04) modérément concentrée, on verra se redissoudre assez facilement le précipité finement granuleux de paraglobuline, tandis que les flocons de fibrinogeno modifié se laisseront à peine entamer et ne se dissoudront qu'imparfaitement. La solu- tion obtenue est trouble, même après filtration répétée : il est donc difficile de constater si une température de -h 56" (tempé- rature critique de coagulation du fibrinogeno (1)) décèlerait la présence de traces de fibrinogeno. Dans la coagulation du sang, une partie du fibrinogeno échappe à la transformation en fibrine, le poids de cette der- nière n'atteignant jamais celui du fibrinogeno qui existait avant la coagulation. C'est sans doute cette partie de fibrinogeno altéré, mais non complètement transformé en fibrine que nous retrouvons ici (2). Quoi qu'il en soit, cette faible proportion de fibrinogeno altéré est insignifiante comparée à la grande masse du précipité de paraglobuline fourni par le sérum de cheval, de bœuf, de mouton, quand on les sature de sulfate de magnésie. On s'en débarrasse facilement en redissolvant le précipité de globulines dans l'eau (grâce à la petite quantité de saumure qui l'imbibe) et en repré- cipilant la paraglobuline par le sulfate de magnésium ou le chlo- rure de sodium. En répétant cette opération (précipitation et dissolution) quatre ou cinq fois on finit par obtenir une pâte (1) Olof U\myiknsT^îi,Undersokningaretc. Upsala Làkare forenings fdrhand- ligar. Bd. 11, 1876. Ueber das Fibrinogen, Pflueger's Archiv,, XIX, p. 565. 1879. LÉON Fredericq, De l'existence dans le plasma sanguin d'une substance albuminoïde se coagulant à ■+■ 56°, Bcll. Soc. med. Gand. Avril 1877. Recherches sur la coagulation du sang, Bull, de l'Acad. royale de Belgique, juillet 1877. T. LXIV, n» 7, 2^ série. Recherches sur la constitution du plasma sanguin, Gand 1878. (2) Pour Flammarslen le fibrinogène se transforme en grande partie en fibrine, le reste devient paraglobuline. Denis admeUait également un dédoublement de sa plasmine (librinogène impur mélangé de paraglobuline) en fibrine concrète (fibrine ordinaire) et fibrine dissoute (paraglobuline). ~ 461 — molle, d'une blancheur irréprochable qui, égoutlée et exprimée convenablement, se laisse très facilement enlever du ûltre. La paraglobnline ainsi préparée est, grâce au sel qui l'im- prègne, EXTRÊMEMENT SOLUBLE DANS l'eau. Lcs solutious Concen- trées (15 à 20 p. 7o, paï' exemple, proportion déterminée par circumpolarisalion) sont claires, mais fortement opalescentes, d'autant plus épaisses qu'elles sont plus concentrées (consistance de sirop épais de gomme) et peuvent se conserver assez longtemps sans s'altérer (1). Des solutions de paraglobuline saturées de NrtC/, préparées en février 1878, furent examinées au mois de mai 1880 : traitées par le sulfate de magnésium, elles fournirent un précipité de paraglobuline ne différant en rien de la substance fraîchement préparée. La pâte de paraglobuline précipitée et imprégnée de saumure conserve pareillement sa solubilité pendant fort longtemps, peut- être indéfiniment. Une partie de mes expériences, notamment la détermination du pouvoir rotatoire a (D), a été faite avec un pro- duit datant de trois mois. Il y a plus : une série de tubes de verre les uns ouverts, les autres scellés, renfermant un mélange de paraglobuline et de fibrinogeno précipités du plasma par le chlorure de sodium en poudre (plasmine de Denis) conservés dans leur saumure et portant la date du 6 mars 1878, furent examinés au mois de mai 1880. Le mélange de globulines divisé dans un peu d'eau ne s'y dissolvait pas intégralement, le fibrino- geno paraissant depuis longtemps devenu insoluble. Le liquide filtré était riche en substance albuminoïde présentant tous les caractères de la paraglobuline. Contrairement à l'opinion généralement reçue, la paraglo- buline EST DONC UNE SUBSTANCE PEU ALTÉRABLE, pOUVaut Se COU- server pendant des mois et des années. Elle se distingue complè- tement, sous ce rapport, des autres globulines : fibrinogeno, (1) C'est sans doute à la présence de la paraglobuline que le sérum de cheval , de bœuf, etc , dolt son opalescence. Les solutions d'albumine ne présentent qu'une opalescence faible. — 46^2 — myosine, vitelline dont les solutions doivent être préparées rapi- dement et autant que possible en hiver. La facilité avec laquelle j'ai obtenu des solutions concentrées et parfaitement limpides de paraglobuline, m'a permis de déter- miner son pouvoir rolatoire spécifique a (D) pour le plan de la lumière polarisée avec une assez grande exactitude. Je me suis servi à cet eflet du polaristrobom.èlre de Wild grand modèle. J'ai remplacé la lampe qui accompagne l'appareil par un chalumeau à gaz chauffant du chlorure de sodium fondu. J'obtiens de cette façon une lumière d'un fort bel éclat, permettant l'examen de solutions troubles ou colorées, là oii la lumière ordinaire de l'appareil serait insuffisante. Toutes les déterminations ont été faites en observant successivement la rotation de droite à gauche, puis de gauche à droite et en prenant également deux zéros, l'un en tournant de gauche à droite, l'autre en tournant de droite à gauche. Les déterminations sont considérées comme suffisam- ment exactes quand la différence entre les chiffres obtenus dans les deux sens exprime exactement la distance qui sépare les deux zéros (i). La distance entre les deux zéros, c'est-à-dire entre le point où les franges noires disparaissent et celui où elles apparaissent de nouveau, était de0.50°, c'est-à-dire de 18' dans le polaristrobomctre qui m'a servi dans toutes ces déterminations. Les dosages de paraglobuline dans les solutions en expérience ont été faits, tantôt par l'ébullition dans l'eau (sans ajouter d'acide), tantôt par l'ébullition en présence de cinq volumes d'alcool. J'ai employé également une modification du procédé à l'alcool. La solution de paraglobuline additionnée de cinq volumes d'alcool est bouillie, puis évaporée à sec au bain-marie, et épuisée par l'eau distillée. Le résidu, défalcation faite des cen- dres, est compté comme paraglobuline. (1) Sans avoirunegrandehabitude derappareil,on arrive à faire les détermina- tions à O.Oo» (3 minutes) près. Avec de l'exercice, même pour des yeux médiocres comme les miens, Terreurne doit pas excéder 1 à 2 minutes. Les derniers chiffres des tableaux qui suivent comportent seuls ce degré d'exactitude. Avec un bon Polarimèlre-Laurent, l'erreur moyenne peut être encore réduite. — 463 — •s 03 S? «s cr C/îC •• 3 CD 1= era 2 C« C ^ ^. s 2 fD -S S"- — as en PS -: M «S cr CAC ■• CD f 2. T3 as u ~i ■-3 SJ 0-. •■ 3 "^ ^3 tp* •l ft> n- R s n> a> -a ^ ~* o n^ T3 23 W £3 en — « 3 g 5' te 03 S ce s 3 ►^ .«=» oooo to o >^ N^ ■^»i- o B^ >^ 1.^ >i^ , Oï W >SiO -J iDb&*-Ìk5 CK OiZn-.t-ù OO o OO o op .^ w co ceco OO o o -1-4 00 C^ Ci *> *>• ce Ci = o 2 O 3 b£ OO -^o o o o ce 00 ce 00 00 co M a P S «to. ^* •« Ci, o Cb s: <3- -< 8 ^ c «o ^-> Cr, "tfi O ■^ S f^ a o' a. o ç^ S •r< a -^ ">i a «a a a o' Co — 464 — J'obtiens ainsi comme moyenne de a D pour la paraglobuline en solution dans NoC/ ou M9'S04, environ — 47.8° (1). 11 n'a pas été tenu compte de la densité des solutions. La nature et la quan- tité de sel présent dans la solution ne paraissent guère exercer d'influence sur le pouvoir rotatoire de la paraglobuline. Cepen- dant je n'ai pas dirigé spécialement mon attention sur ce point. La connaissance du pouvoir rotatoire delà paraglobuline, la facilité avec laquelle on peut l'extraire des liquides organiques par le sulfate de magnésie pour la redissoudre et en faire une solution propre à être examinée dans le polaristrobomètre ren- dent son dosage par circumpolarisation extrêmement facile et exact. Le dosage de la paraglobuline d'après Hammarsten (peser la paraglobuline précipitée par M.9SO4 , lavée avec une solution saturée de M5'S04, chauffée à -h 120% lavée à l'eau etc.) m'a toujours fourni des chiffres trop faibles, une partie de la para- globuline repassant en solution pendant les lavages à l'eau. Peut-être ne l'avais-je pas laissée assez longtemps dans l'étuve chauffée à -+- 120°? On trouvera plus loin les chiffres de quelques dosages de paraglobuline dans le sérum sanguin par circumpo- larisation. §111. ALBUMINE DU SÉRUM (sérifie). D'après les idées qui tendent à prévaloir aujourd'hui, le sérum complètement débarrassé de paraglobuline, c'est-à-dire le liquide saturé de sulfate de magnésium qui découle du précipité de paraglobuline, ne doit plus contenir qu'une seule substance albuminoïde, l'albumine du sérum. J'ai cherché à étudier ce liquide à l'aide de la méthode des coagulations successives par (1) Il n'est pas douteux qu'on n'arrive à une exactitude plus grande dans la détermina lion du pouvoir rolaloire spécifique de la paraglobuline en examinant un plus grand nombre de solutions concentrées. — 465 — la chaleur qui m'avait été si utile dans mes recherches sur le plasma sanguin (1). Si je chauffe graduellement au hain d'eau une portion de sérum de cheval saturé de sulfate de magnésium et filtré, une première coagulation fort abondante se montre à une température basse, généralement comprise entre 40° et 50°, mais assez variable, rarement inférieure à 40^, dépassant par- fois So". Le coagulum ne se forme pas en une fois, il faut con- tinuer à élever la température pendant plusieurs degrés pour séparer complètement la substance qui se précipite. Alors seu- lement le liquide liltré peut être replacé dans le bain et chauffé ultérieurement sans se troubler. On peut porter sa température jusqu'au delà de -f- 60% sans que sa limpidité subisse la moindre altération. Un peu au delà de -f- 60° il se trouble de nouveau et laisse déposer une minime quantilé de substance coagulée. On peut filtrer et obtenir, en continuant à chauffer, une troisième, parfois une quatrième coagulation, mais l'ensemble de ces der- niers précipités est peu important comparé à la masse de sub- stance qui s'est déposée à une basse température. La plus grande partie de l'albumine du sérum se sépare donc entre 40° et 50° dans une solution saturée de M^S04. J'ai voulu savoir quelle était l'importance relative des divers précipités obtenus par la chaleur aux différentes températures. Le premier coagulum, celui obtenu entre 40° et 50°, fut reçu sur un filtre taré et lavé d'abord à l'eau pour enlever le sulfate de magnésium et les autres substances étrangères. Quel ne fut pas mon étonnement de le voir se redissoudre intégralement et disparaître de dessus le filtre. En répétant l'expérience, j'acquis bientôt la conviction que la substance précipitée vers 45° n'était pas coagulée, mais simplement devenue insoluble dans le liquide magnésien. Elle se redissout immédiatement dans l'eau, un peu plus lentement dans un mélange à parties égales d'eau et de solution magné- sienne saturée. Dès qu'on augmente la proportion de M^S04, (1) Léon Fredericq, Recherches sur la coagulation du sang^ Bull, de l'Acad. ROYALE DE BELGIQUE, juillet 1877. — 466 — elle refuse de se dissoudre. Ce fait curieux que je croyais avoir découvert était connu de Denis comme le prouve le passage sui- vant (Denis, Mémoire sur le sang, p. 29) :... « Saturer à 50" D avec du sulfate de soude en poudre, soit le plasma dépouillé » de plasmine, soit le sérum dont on a enlevé la fibrine dissoute » à l'aide du sulfate de magnésie. Dès que le liquide a pris à 50" D tout ce qu'il peut dissoudre de sulfate, la serine se précipite... » Ainsi obtenue elle est soluble dans l'eau... » Heynsius et Hammarsten ont observé également des faits analogues (1). Denis avait appelé cette substance serine, dénomination que je proposerai de lui conserver. J'appellerai dorénavant serine la partie de ra/6î/m/>îe du sérum saturé de sels qui se précipite à une basse température sans perdre sa solubilité dans l'eau. La serine précipitée par la chaleur est insoluble dans les solu- tions saturées de sulfate de magnésium, mais ce sel ne la pré- cipite pas à froid de ses solutions quand on sature celles-ci. La solution saturée de sulfate de magnésium présente le même phé- nomène que le sérum: chauffée graduellement, elle se trouble vers 46" à 48" et fournit vers 50" un abondant précipité qui, recueilli sur ce filtre et redissous dans l'eau, régénère la solution primitive. On peut ainsi la précipiter et la dissoudre plusieurs fois pour la débarrasser des impuretés, notamment de la matière colorante. La serine appartient au groupe des albumines vraies, elle ne se précipite pas quand on soumet sa solution à une dia- lyse prolongée. La solution ainsi privée de sels, desséchée dans le vide sur de l'acide sulfurique, laisse un enduit jaunâtre, bril- lant, s'eolevant par écailles cassantes, translucides. La poudre de serine, desséchée dans le vide, se redissout faci- (1) Olof Hammarsten, (7e6er das Fiònnog'en, Pfldeger's Archiv. XIX, 1879, p. 602, und (lerjenige Paraglobuliniiiederschlag, welcherbei elwa -+- 56" à -4- 60° in einer salzreichén sogar mit Kochsalz f^esàltigien Lôsung entsteht, ist wenii nichl das Envarmen zu lange forlgeselzl wird eben Ivein geronnenes Paraglo- bulin. Die Geiiiinung isl niir scheiubar und bei Verdiinnung mil VVasser losl die Fàllung sich vollstàudig wieder aul". — 467 — lement dans Teau mais est complètement insoluble dans les solu- tions salines saturées (M17SO4). La solution neutre se coagule par la chaleur un peu avant -4- 50°, mais ce coagulum né dans un liquide pauvre en sels ne se redissout plus dans Teau. Les alcalis ou les acides élèvent ou abaissent notablement le point de coagulation de la serine. La proportion plus ou moins grande de sels a peu d'influence sur sa température de coagulation. La serine paraît se conserver indéfiniment quand sa solution est saturée de NaC/, M<7S04. J'ai pu l'extraire d'échantillons de sérum et de plasma de sang de cheval saturés de NaC/ et datant de plus de deux ans (mars Ì878 à mai 1880). Les précipitations successives auxquelles on soumet la serine pour la purifier, n'altèrent en aucune façon ses propriétés: il semble donc rationnel d'admettre que chaque fois qu'on la redis- sout, on régénère la substance qui se trouvait primitivement en dissolution dans le liquide d'où on l'a précipitée. Peut-on appli- quer le même raisonnement à la première précipitation, celle qui a pour effet de l'extraire du sérum sanguin? En d'autres termes, la serine précipitée du sérum, puis redissoute dans l'eau, s'y trouve-t-elle dans le même état que dans le sérum sanguin ? Divers faits semblent répondre affirmativement et indiquer que la serine préexiste dans le sérum sanguin.. Si l'on prend deux portions A et B du même sérum de cheval au sulfate de magnésium filtré, si l'on chauffe A vers 50" de façon à précipiter la serine, puis après avoir attendu que A soit refroidi, si l'on ajoute à toutes deux A et B une même quantité d'eau distillée, une ou deux fois leur volume, par exemple, le précipité formé dans A se redissoudra et l'on obtiendra deux liquides nouveaux A', B' entre lesquels on ne pourra établir aucune différence. Placés côte à côte dans un bain d'eau chaude, ils se coaguleront exactement à la même température, à 60 et quelques degrés, par exemple. Examinés successivement dans le polaristro- bomètre, les liquides de A' et de B' exerceront exactement le même degré de déviation sur le plan de la lumière polarisée. La serine^ comme le montre le tableau suivant, offre un pou- 468 — voir rotatoire spécifique notablement plus élevé que la paraglo- buline (57° 27 en moyenne). Tableau II. — Déterminaison de a. (D) pour la serine du sérum du cheval. Numéros Longueur Rotation Nombre POIDS du coagnlum obtenu POIDS de se'rine d'où observée. de c. c. par ébullilion cendres. dans d'ordre. du tube. (r. gauche). analysés. en présence de l'acide acétique. 400 ce. de liquide. a(D) l.OO" 1 56. oo" I. Précipitée 3 fois. 40 1 à < 4.60' f i.2o , 20 ) 0.559 0.004 2.79 57.30 56.070 II. Précipitée 4 fois. 40 1 a [ 4.2o° 0.800 ► 20 40 0.430 0.4534 0.004 i 2.44 58.44° f 57.040 III. Précipitée 3 fois. 40 à \ 0 ? 4.49 ) 0.87O 40 0.4446 \ ) 58.320 Je n'examinerai pas pour le moment la question de savoir si la petite quantité d'albumine qui reste en solution après la pré- cipitation de la serine, possède un pouvoir rolatoire différent de celle-ci. Dans tous les cas, cette quantité est si minime qu'elle ne peut influencer notablement le pouvoir rotatoire des albumi- noïdes du sérum. On peut négliger également les autres substances actives, glycose, cholestérine que contient le sérum. On ne commettra certainement pas d'erreur bien grande en pre- nant— 57, 3° comme nombre exprimant le pouvoir rotatoire de l'albumine du sérum privée de paraglobuline. La quantité de sels contenue dans les solutions de substances albuminoïdes ne paraît avoir qu'une influence bien peu marquée sur le pouvoir rotatoire de ces substances, si l'on considère les nombres du tableau suivant qui se rapportent à des échantillons — 4G9 — de sérum saturés de M^S04, par conséquent privés de paraglo- buline. Tableau III.— Détermination de a (D)powr l'albumine du sérum {liquides saturés de MgSO^). Numéros SÉRUM Longueur Rotation Nombre de c. c. POIDS du coagulum cendres. POIDS d'albiiraiue dans d'où d'ordre. de du tube. observée. analysés. obtenu par ebullition. 400 c. C. de^liquide. a(D). I. Bœuf .... 40 -4 .030 ' 40 40 0.48o8 0.4872 ! 0.003 4.80 -^5.670 II. Lapin .... 40 -4 830 j 40 1 40 / 40 O.32O0 0.328 0.4632 . 0.0043 0.0312 3.224 -o6.84o m. Bœuf .... sérum concentré par evaporation. 40 -2.320 5 40 ( 40 0.440 0.4264 . 0.004 4.32 -56.430 IV. Bœuf .... sérum dilué. 20 -0.970 ( 20 ( 20 0.470 0.482 ! 0.001 4.7o5 2 -33.270 § 4. CONSTITUTION DU SÉRUM SANGUIN. La paraglobuline et la serine paraissent donc être les deux seules substances que les métbodes cbimiques permettent d'ex- traire du sérum en quantité notable. Comme le pouvoir rota- toire d'un liquide est égal à la somme arithmétique des pouvoirs rotatoires des substances qui s'y trouvent dissoutes, nous pour- rons, connaissant les pouvoirs spéciliques de la serine et de la paraglobuline, vérifier par la détermination du pouvoir rotatoire global du sérum, si réellement ces substances y préexistent et ne sont pas des produits artificiels créés par l'action des réactifs employés pour les préparer. — 470 — Le pouvoir rolatoire de la paraglobuline est de — 47.8°; celui de lasérined'environ— 57.3", les espèces de sérum où la première substance prédomine (bœuf, clieval), devront avoir un pouvoir / • 47 s -4- ^fi "^ rotatoire supérieur à "^ = 52.5° pour l'ensemble des substances albuminoïdes coagulées par l'alcool ou la cbaleur. Ceux où la serine prédomine (lapin, cbien), dévieront moins le plan de la lumière polarisée qu'une solution d'égale concentra- tion dont le pouvoir spécilique serait — 52.5° (i). Tableau IV. — Détermination de a (D) pour les substances albuminoïdes {prise en bloc) du sérum de lapin, de bœuf, de cheval. Rotalioa POIDS QUANTITÉ Numéros SÉKUM observée dans du coaguluiri obtenu par l'alcool cendres. d' albumlDoïdes dans d'où d'ordre. de le tube de 10 c. dans 10) c. c. de liquide. 100 ce. de sérum. o:{\))- I. Lapin clair non filtré. - 3.48» ' 0.6349 1 0.6319 0.020 6.234 - 55.82" II. Lapin clair non filtré. - 3.53" 1 0.6194 0.6342 0.008 0010 6.242 -56.870 III. Lapin 3.02" 0.5453 ' 0.543 0.0185 5.33 - 56.4» clair non Oltre. IV. Bœuf clair non filtré. - 4 32° 0.8698 0.863 0.8633 ) 0.023 > \ 1 8.5776 - 50.36° V. Bœuf - 3.870 i 0.7523 0.753 Ì 0.020 7.4275 - 52.10 clair non filtré. f VI. Cheval dilué. - 0.78^ .... 1.546 - 50.4O J'ai trouvé dans un travail de Heynsius (2) une détermination (1) D'après Hammarsten le sérum de cheval contient en moyenne 4 563 de paraglobuline et 2.677 d'albumine pour 100 de sérum; celui de bœuf 4.169 de paraglobuline et 5.3299 d'albumine; celui de lapin 1.788 de paraglobuline et 4 456 d'albumine. Hammarsten, p. 459, Ueber das Paraglobulin. Pfllïger's Archiv.\S\\. (2) Heyì\sius, Over het soorlelijk draaijagsvermogen van eiwilverbindingen eene voorloopige mededeeling. Onderzoekingen, efc.,lll, Leiden, 1874, p. 217. — 471 — du pouvoir rotatoire des albuminoïdcs du sérum de cheval et une du sérum de bœuf dont voici les chiffres : Sérum de cheval 49.9° — de bœuf 51 .5° V. DOSAGE DES ALBUMINOÏDES DANS LE SÉRUM SANGUIN PAR CIRCUMPOLARISATION. Dans une série de travaux qui tirent époque dans l'histoire de la chimie des albuminoïdes, Hoppe-Seyler étu'îià avec soin Faction que ces substances exercent sur le plan de la lu- mière polarisée (1). Il assigna à l'albumine du sérum un pouvoir rotatoire spécifique de — 56% et proposa de doser ce tte substance par circumpolarisation au moyen du saccharimètre de Ventzke- Soleil modifié. La difïiculté d'observer avec cet instrument des solutions colorées et le peu de concordance des chiffres obtenus par différents expérimentateurs dans la vérification du pouvoir rotatoire de l'albumine (49° à 50° Heynsius, 56° Hoppe-Seyler, 56° et 62° Haas, 60° Béchamp) limitèrent singulièrement l'emploi de cette méthode (2). L'écart considérable des pouvoirs rotatoires de l'albumine et de la paraglobuline joint à l'impossibilité oii l'on était autrefois d'isoler et de caractériser ces substances, expliquent suffisamment ces divergences. Aujourd'hui que nous en connaissons la cause et qu'Hammarsten nous a appris à surmonter une partie de ces difficultés, la méthode imaginée par Hopper-Seyier ne mérite plus le discrédit où elle était tombée. (1) Hoppe-Seyler, Virciioiv''s Arcliiv. XI, p. 53^, 1837. — Zeitschrift fUr Chemie und Pharmacie, p. 737, 1864. — Hanibuch. d. physiolog. u. patholog.- chem. Analyse. (2) P. LiBOBius, Archiv f. klin. Med. X, p. 349. — 472 — Voici comment je propose de la modifier pour les liquides qui contiennent à la fois de l'albumine (serine) et de la paraglo- buline : On commence par déterminer à Paide du polarimètre (saccha- rimètre Laurent ou polaristrobomètre de Wild) le degré de rota- tion que le liquide (examiné dans le tube de 10 centimètres, par exemple) imprime au plan de la lumière polarisée (1). Une seconde opération analogue a pour but de déterminer la part qui revient à la paraglobuline dans cette rotation. A cet effet, on mesure 100 c. c. du liquide, on le dilue avec trois à cinq volumes d'une solution saturée de M(;S04, on acbève de saturer le mélange à l'aide de M(/S04 en substance. On recueille le précipité de paraglobuline sur un filtre, on l'égoutte, on l'ex- prime fortement pour en faire un gâteau que l'on puisse faci- lement détacher du filtre. On le délaie dans un peu d'eau qu'on dilue ensuite, de façon à parfaire le volume primitif, c'est-à- dire 100 c. c. On mélange convenablement et l'on filtre. Une partie du liquide filtré est examinée dans le tube de 10 c. (ou de 20). Le degré de rotation observé représente la part qui revient à la paraglobuline dans la déviation produite par le liquide naturel. 11 suffit de soustraire ce nombre du premier pour avoir la part qui revient à l'albumine. Chacun de ces nombres divisé par celui qui représente le pouvoir rotatoire spécifique de la substance à laquelle il se rapporte, indique la quantité de substance contenue dans 100 c. c. On obtient ainsi le poids de la paraglobuline et celui de l'albumine contenues dans 100 c. c. de sérum. Leur somme représente le poids des albuminoïdes contenus dans 100 c. c.de sérum. Les nombres obtenus par cette méthode présentent une concordance des plus satisfaisantes avec (1) Si le sérum est trop coloré (sérum de cheval), on doit le diluer avec une solution saline; s'il est trouble, on peut le passer à travers un filtre de papier chargé au préalable de sulfate de baryum fraîchement précipité et lavé. On peut également employer des tubes plus courts (5 cent ou moins), comme le conseille Hoppe-Seyier. — 475 — les résultats fournis par les pesées directes des coagulums par ebullition ou par Talcool, comme le montre le tableau suivant. Tableau V.— Dosages comparatifs des substances albuminoïdes du sérum par circumpolarisation et par coagulation {par l'alcool). SÉRUM de Rotation tube de 10 c. Rotation due ii la para- globuline tube deK'c. Rotation due à l'albumine par dififérence. d'où para- globuline dans 100 ce. de sérum. albumine dans 100 c c. de sérum. Somme des albominoïdes par circumpola- risation. par l'alcool. Bœuf Bœuf Lapin , 3 870 4.83« 2.040 3.579 3.828 7.407 4.3i2o 2.770 l.Soo 5.79 2.700 8.49 3.02O 0.60° 2 42" ■ 1.25o 4.223 6.478 7.4275 8.5776 5.35 32 CONTRIBUTION A LA CONNAISSANCE DE L'OVAIRE DES MAMMIFÈRES L'OVAIRE dn VESPERTILO MURINUS et h RHINOLOPHUS FEMUM-EJUINUM ; PAR EDOUARD VAN BENEDEN. (r»l. X.3L et :SL3LI,) Le présent travail a pour objet de faire connaître l'ovaire de deux Chéiroptères, dont l'un appartient à la famille des Vesperti- lionides (Vespertilio murinus ^ Schreb.), généralement connu en français sous le nom de Murin; l'autre fait partie de la famille des Rhinolophides (Rhinolop/ms ferrum eqiiimim, Schreb.). On le désigne communément sous le nom de grand Fer-à-Cheval. Les deux espèces sont communes dans les grottes de Maestricht. Cette étude est une introduction à nos recherches sur le déve- loppement embryonnaire des Chauves-Souris. Waldeyer commence son livre sur l'ovaire en disant: « Si Ton veut décrire exactement l'ovaire des mammifères, on doit tenir compte avant tout de l'âge de l'organe. » Rien n'est plus vrai : la forme, le volume, la couleur, la structure se modifient dans — 476 — le cours de la vie; mais les changements ne sont pas seulement le résultat d'une transformation progressive de l'organe amenée par l'âge; des modifications notables se produisent périodique- ment : elles sont vn rapport avec le rut et avec la gestation (G.Wagener)(l). Dans nos études sur l'ovaire des Chauves-Souris nous avons trouvé des différences Irès grandes non-seulement d'une espèce à l'autre, mais aussi, chez une même espèce, d'un individu à un autre. Les divergences que l'on constate entre ovaires de femelles recueillies à une même époque de l'année ont bien certainement leur raison d'être dans les différences d'âge des femelles exami- nées. Mais dans l'impossibilité où l'on se trouve de déterminer l'âge des animaux que l'on sacrifie, de distinguer les particularités qui sont le résultat de l'âge de celles qui sont amenées par les varia-- lions périodiques annuelles, l'on en est réduit à décrire les dif- férences que l'on constate. Il faudrait étudier un grand nombre d'ovaires d'espèces différentes pour pouvoir établir les limites des variations spécifiques, et distinguer un caractère propre à l'ovaire d'une espèce, d'une particularité déterminée par l'âge ou par l'époque. Enfin , pour pouvoir donner l'explication des caractères de l'organe, il faudrait avoir suivi tout son développement. Nous n'avons pas pu jusqu'ici entreprendre cette étude. Le présent travail, quoique commencé depuis plusieurs années, est donc encore fort incomplet. 11 porte exclusivement sur l'étude de l'ovaire de Chauves-Souris qui ont atteint tout leur accrois- sement et qui ont été recueillies en avril et en mai, soit immé- diatement avant, soit pendant la gestation. Diverses raisons nous déterminent à publier dès à présent les résultats de ces recher- ches ; nous nous proposons de les compléter plus tard par l'étude du développement de l'ovaire. Nous avons réussi à nous procurer le matériel nécessaire à ce travail complémentaire. Les ovaires qui ont servi à la confection des coupes ont été traités au préa- lable, soit par l'acide osmique à 1 7oo, soit par le liquide de Klei- nenberg (acide picro-sulfurique), soit successivement par ces — 477 — deux réactifs. Dans tous les cas, les ovaires ont été ultérieure- ment durcis par l'alcool, colorés soit par le picrocarmin,soit par rhématoxyline, imprégnés par la gomme et enchâssés dans le foie ou bien préparés par un mélange de paraffine et de graisse. Les coupes ont été montées soit dans la glycérine, soit dans le baume. Les coupes ont été faites soit à main levée, soit au moyen du microtome du D'" Long de Breslau, par mes assistants A. Fœtlinger et Ch. Julin. L — Caractères macroscopiques. Pour décrire l'ovaire dans ses rapports avec les organes voisins, tel qu'il se montre à l'ouverture de l'abdomen, nous choisissons le Murin. Les organes sexuels sont si petits qu'il est nécessaire de se servir d'une bonne loupe pour constater faci- lement les particularités que nous allons mentionner. L ovaire a la forme d'un ovoïde aplati, dont le grand axe est dirigé de haut en bas, d'arrière en avant et un peu de dehors en dedans. Son volume, aussi bien que les rapports entre les axes de lovoïde varient d'un individu à l'autre. Le grand axe mesure de 1,8 à 2,5 millimètres. La couleur oscille entre le jaune orangé clair et le brun foncé; très rarement elle est blanchâtre. Les ovaires sont situés en dehors du petit bassin proprement dit, mais tout près de son bord supérieur, à la limite entre le petit bassin et les fosses iliaques. Ils présentent à considérer deux faces et un bord. L'une des faces est dirigée en dedans, un peu en arrière et en haut, l'autre en dehors et légèrement en avant en bas; cette dernière regarde vers l'orifice postérieur du canal inguinal. Le bord présente une partie libre intéressant les deux tiers du pour- tour de l'organe et une partie adhérente dirigée en arrière. Le ligament large se divise supérieurement en deux lames : l'une, très mince, se dirige directement en dehors et renferme dans son bord libre le ligament rond qui forme une circonvolu- tion avant de pénétrer dans le canal inguinal; tout autour de ce cordon le péritoine est chargé de cellules pigmentaires étoilées; — 478 — l'autre lame monte à peu près verticalement et se dédouble en deux ailes qui contournent l'ovaire et l'enveloppent en lui formant une capsule ovarique complète. Mac Leod (2) a le pre- mier décrit chez les Chauves-Souris (Pipistrelle) cette particula- rité intéressante. La capacité de la capsule l'emporte de beau- coup sur le volume de l'ovaire; aussi la capsule est-elle plissée dans une partie de son étendue pour pouvoir s'appliquer sur la surface de l'ovaire. Le long du bord libre de l'organe la capsule est épaissie, par suite de l'accumulation de tissu adipeux entre ses deux feuillets, en un bourrelet qui se continue en arrière et en haut en un éperon graisseux de forme triangulaire. L'ensemble de cet organe formé de cellules adipeuses déposées entre les deux feuillets du péritoine rappelle assez bien la chenille d'un casque. L'oviducte s'ouvre à la face interne de cette capsule par un pavillon très étendu dont les franges nombreuses se trouvent exclusivement appliquées contre la face supérieure et interne de l'ovaire. L'oviducte rampe entre les deux feuillets de cette capsule en décrivant une courbe complexe en forme d'S. Le long de son bord postérieur, l'ovaire est accolé à un cordon qui part de la corne de l'utérus. Il ne pénètre pas dans la substance propre de l'ovaire, mais il lui est intimement uni; une partie du cordon vient mourir dans la capsule ovarique, où il se trouve recouvert par quelques franges [fimbria ovarica deHenle). C'est le ligament propre de l'ovaire formé ici, comme nous allons le voir, par un muscle puissant. Ce muscle n'est pas logé dans l'épaisseur du ligament large; il fait saillie dans la cavité du périioine et est immédiatement recouvert par un repli spécial de cette séreuse. La partie du ligament large qui donne insertion à lovaire et qui se dédouble supérieurement pour constituer la capsule ova- rique ne s'arrête pas à l'ovaire; elle se prolonge bien au delà, aux deux côtés de la colonne vertébale, en un organe membra- neux qui est probablement un reste du « cordon diaphragma- tique des reins primordiaux » [Zxoerchfdhband der Urnierc de Kôlliker) (5). — 479 — Enfin dans le ligamenl large rampent des artères nombreuses, qui ont un trajet sinueux et des veines volumineuses. De ces vaisseaux les uns se rendent à l'ovaire dans lequel ils pénètrent par la portion adhérente du bord de l'organe {Iule); les autres se dirigent vers l'utérus. Dans un fort intéressant travail sur l'ovaire du Cheval, Born (4) à démontré que chez cet animal la surface de l'ovaire présente a considérer deux régions: l'une, opposée au hile, seule recouverte par l'épithélium germinatif, produit seule des folli- cules; elle a reçu le nom de Plaque germinative (Keimplatte); l'autre, qui s'étend depuis le hile jusqu'à la plaque germinative, est recouverte par la séreuse peritoneale. Cette partie, dont l'étendue augmente avec l'âge, ne renferme pas de follicules. L'ovaire constitué de ces deux parties présente, chez le Cheval adulte, la forme d'un haricot dont la concavité correspond non au hile, mais au bord libre de l'ovaire des autres mammifères. C'est au niveau de cette dépression que se trouve la plaque ger- minative. L'ovaire se trouve renfermé dans une capsule ovarique incomplète, dont Born a fait connaître le développement tardif. Treviranus (5) avait déjà signalé dans l'ovaire de la Taupe un étranglement divisant l'organe en deux parties. Claparède, Ley- dig (6) et Mac Leod (2) ont confirmé cette observation, et ils ont montré que le développement relatif des deux portions de l'ovaire varie d'après les individus. L'une des deux parties est blanchâtre; généralement elle renferme seule des follicules (Mac Leod) ; l'autre rosée ne présente le plus souvent aucun ovule; elle est très vasculaire et se caractérise par l'abondance des cellules inter- stitielles; elle est parcourue par des cordons médullaires. Pour Mac Leod, la première représente la zone parenchymateuse, la seconde la zone médullaire des autres mammifères. Nous ne savons si cette disposition peut être rapprochée de celle que Born a fait connaître chez le Cheval; il faut remar- quer que chez le Cheval tout l'ovaire fait saillie dans la cavité circonscrite par la capsule ovarique, tandis que chez la Taupe la région parenchymateuse seule proemine dans la cavité de cette capsule qui s'insère à l'ovaire entre les deux parties qui le cons- — 480 — tituent. Mac Leod dit que la portion vasculaire de Tovaire de la Taupe est recouverte par la séreuse; je ne comprends pas bien cette partie de sa description. La capsule ovarique recou- vrant seulement la portion parenchymaleuse de l'ovaire, la partie vasculaire doit, ou bien se trouver engagée dans le tissu du ligament large, ou bien proéminer dans le péritoine, et, dans ce cas seulement, elle peut être immédiatement recouverte par la séreuse. Le même auteur signale une division analogue chez la Pipistrelle : « La partie de l'organe qui contient les cordon médullaires, dit-il, est très petite et comme chez la Taupe elle est recouverte par la séreuse. La structure du stroma est iden- tique dans cette portion de l'organe au stroma interposé aux fol- licules de de Graaf. On ne peut pas considérer la partie renfer- mant les cordons médullaires comme correspondant seule à la zone vasculaire de Waldeyer; en effet, on trouve de gros vais- seaux sanguins entre les follicules. Au reste, la région des cordons médullaires est peu nettement délimitée; il arrive parfois qu'on trouve un ou deux cordons en dehors de cette région, mélangés aux follicules de de Graaf. » Si nous en jugeons d'après les dessins de l'auteur, il existe en tous cas entre la Taupe et la Chauve-Souris une différence importante : tandis que chez la Taupe la région parenchyma- teuse seule proemine dans la cavité de la capsule ovarique, chez la Pipistrelle la portion homologue à la zone médullaire de la Taupe serait elle aussi tapissée par la séreuse de la capsule. En cela la disposition de la Pipistrelle se rapprocherait davantage de ce que Born a décrit chez le Cheval. En ce qui nous concerne, nous n'avons trouvé ni chez le Murin, ni chez le Fer-à-Cheval, aucune trace de la division que Mac Leod décrit chez la Pipis- trelle. Dans tous les ovaires des deux espèces qui ont servi à nos recherches, les cordons médullaires fort nombreux se voient dans toute l'étendue de l'ovaire, non-seulement au niveau du bile, mais aussi au centre de l'ovaire, entre les follicules en voie de développement et jusque contre la zone corticale où ne s'observent que des follicules primordiaux. — 481 IJ. — Capsule ovarique et séreuse propre de l'ovaire. La figure 1 de la planche XX représente à un faible grossis- sement une coupe de l'ovaire entouré de sa capsule, faite per- pendiculairement aux faces de l'organe. La coupe ne passant pas par le hile, l'ovaire paraît libre de toute adhérence, au milieu de la capsule ovarique close de toutes parts. En débitant en coupes tout un ovaire entouré des parties qui l'avoisinent, il est facile de s'assurer que la capsule est réellement fermée et que sa cavité ne communique nulle part avec le péritoine. La membrane qui constitue la capsule est formée dans la plus grande partie de son étendue par l'accolement de deux feuillets séreux. L'interne forme à l'ovaire une séreuse propre, dérivée, mais séparée du péritoine et comparable à la tunique vaginale propre du testicule. Weber (7) qui a constaté une disposition semblable dans les genres Luira, Phoca, Mustela et Ursus, Rouget (8) et Pflijger (9) ont déjà établi le même parallèle. Waldeyer (10) fait remarquer, et les observations de Born n'ont fait que confirmer celles de Waldeyer, que le mode de développement de la capsule est très différent de celui de la tunique vaginale propre. 11 en résulte clairement que la capsule ovarique n'est pas l'homologue de la séreuse du testicule. Mais il nous paraît incontestable, d'autre part, que le feuillet interne de la capsule forme avec le revête- ment superficiel de l'ovaire une séreuse propre de l'ovaire, qui affecte avec le péritoine les mêmes rapports que la séreuse vaginale. 11 est vrai que pour admettre cette séreuse ovarique il faut considérer la surface de l'ovaire comme formée par un feuillet viscéral de séreuse, ce qui est en opposition formelle avec les idées de Waldeyer. Mais remarquons que l'opinion que l'érninent anatomiste de Strasbourg s'est faite de l'ovaire, quand il lui a dénié tout revêlement séreux, repose, d'une part, sur la décou- verte faite' par Pfliiger de l'existence d'un epithelium cylindrique à la surface de l'ovaire, d'autre part, sur la démonstration fournie — 482 - en premier lieu par Koster et par Waldeyer lui-même (11) de l'origine épilhéliale des œufs et des cellules de la couche granu- leuse ; enfin, sur la distinction établie par His (12) entre les endotheliums et les epitheliums. La présence d'une couche de cellules cylindriques ou cuboïdes à la surface de l'ovaire a été confirmée non-seulement par Waldeyer, mais par tous ceux qui se sont occupés après lui de la structure de l'ovaire des mammi- fères. Cependant, comme nous le montrerons plus loin, il peut s'opérer chez certains mammifères et chez les Chauves-Souris en particulier, une transformation de l'épithélium en une couche de cellules plates qui ne diffèrent par aucun caractère important des cellules endothéliales. G. Wagener (1) affirme que l'ovaire des vieilles femelles chez la Vache, aussi bien que dans l'espèce humaine peut perdre son epithelium. Egli (15) a démontré que pendant le stade d'indifférence sexuelle le testicule est recouvert comme l'ovaire d'un epithelium germinatif qui se transforme peu à peu en une couche de cellules plates. Semper (14) a constaté que chez les Plagiostomes Tépilhélium germinatif peut se transformer en un endothelium sans perdre pour cela la faculté d'engendrer des éléments sexuels. Et les belles recherches de Neumann (15) sur l'épithélium vibratile de la cavité abdomi- nale de la Grenouille ne permettent plus de conclure de la présence d'un epithelium, même vibratile, à l'existence d'une muqueuse : on ne peut plus admettre aujourd'hui de différence principielle entre un endothelium et un epithelium. Il faut ou bien, fondant la notion de l'endothélium sui- son origine mésoblastique, admettre des endotheliums vibratiles, cylindriques, stratifiés et glandulaires à côté des endotheliums pavimenteux, et séparer les epitheliums génito-urinaires, sauf ceux de la vessie, de Turètre et du vagin, des epitheliums proprement dits pour les ranger dans une même catégorie avec les endotheliums des séreuses, ou bien considérer le mot endo- thelium comme synonyme d'épithélium pavimenteux simple. En présence de ce fait que chez beaucoup d'inverlébiés et même chez l'Amphioxus, l'épithélium pleuropéritonial n'est, par son origine, qu'un diverticule de l'hypoblaste, ce qui semble indiquer que le — 483 — cœlome a été primitivement en communication avec l'appareil digestif, comme c'est encore le cas chez beaucoup de Cœtentérés, i| paraît logique d'accepter la dernière solution et, à moins de faire disparaître le mot endothelium du vocabulaire histologique, il convient de l'employer comme synonyme d'épithélium pavi- menteux simple. Dès lors rien n'autorise a dénier à l'ovaire des insectivores et des carnassiers cités plus haut une séreuse ova ri que propre. La capsule ovarique est formée par deux feuillets conjonctifs accolés l'un à l'autre. Chacun d'eux se constitue d'une couche de faisceaux fibrillaires très ondulés, serjjentant à peu près paral- lèlement les uns aux autres et recouverts sur une de leurs faces d'une couche de cellules plates; entre les faisceaux se trouvent çà et là, dans une substance interfasciculaire homogène, quelques cellules fusiformes. En certains points les deux feuillets sont écartés l'un de l'autre par des cellules adipeuses ou par des vaisseaux : c'est le cas dans toute l'étendue du bourrelet marginal et dans l'éperon triangulaire que porte la capsule à son extrémité supérieure. Des lobules de cellules adipeuses se trouvent aussi dans le voisinage du bile. L'oviducte rampe entre les deux feuillets de la capsule, qui s'écartent Fun de l'autre pour s'accoler à la surface de ce conduit. L'endothélium du feuillet interne formant la séreuse ovarique propre se continue avec l'épithélium cylindrique vibratile qui recouvre les franges du pavillon et, d'autre part, avec l'épithélium superficiel de l'ovaire. III. — Muscle propre de l'ovaire. La figure 1 de la planche XX montre en m.p.o un organe volu- mineux qui se continue avec la capsule ovarique et supporte un certain nombre de franges à epithelium vibratile. Cet organe est formé par des fibres musculaires lisses, réunies entre elles de façon à constituer un muscle puissant : c'est la terminaison du ligament propre de l'ovaire, qui devrait être désigné ici sous le nom de muscle propre de Vovaire, La figure 2 de la même planche représente au même grossis- — . 484 — sèment une coupe voisine passant par le hile, intimement uni au cordon musculaire propre; mais le tissu musculaire ne pénètre pas dans le stroma ovarien. Nos préparations sont tout à fait démonstratives à cet égard. Si l'on place pendant quelque temps dans le liquide de Kleinenberg des ovaires traités au préalable par l'acide osmique, les fibres musculaires lisses prennent une coloration vert sombre qu'elles conservent malgré le traitement ultérieur par l'alcool, la thérébentine, le mélange de paraffine et de graisse et l'action du baume. Le tissu conjonclif prend dans ces mêmes conditions une teinte rosée et ce mode de préparation permet de distinguer tout élément musculaire d'une cellule con- jonctive. Il n'existe aucune fibre lisse dans fovaire proprement dit, si ce n'est dans les parois des vaisseaux. Mais le ligament propre de l'ovaire est constitué de cellules musculaires réunies en un organe volumineux par du tissu conjonctif interposé. La fonc- tion de ce muscle me paraît devoir être complexe. Lorsqu'il se contracte, il doit : 1° rapprocher l'ovaire de la corne de l'utérus; 2° exercer une traction sur la capsule au niveau du pavillon, ce qui doit avoir pour résultat de déterminer en ce point la production d'une poche, tandis que partout ailleurs la capsule s'applique étroitement sur la surface de l'ovaire. Si le muscle entre en action après la chute de l'œuf, celui-ci doit être aspiré vers le pavillon. Arrivé sur les franges, il est probablement poussé par les cils vibratiles vers l'entrée de l'oviducte; 3° il existe en un point du hile des rapports si intimes, entre le muscle du ligament propre et les veines ovariques, qu'il est difficile de distinguer la limite entre la paroi vasculaire et le muscle. N'y aurait-iî pas, lorsque le muscle se contracte, une action sur la circulation de l'ovaire, d'oij pourrait dépendre la rupture du follicule? C'est là une question qui mériterait d'être étudiée avec soin et dont la solution deman- derait tout d'abord une connaissance des dispositions anatomiques beaucoup plus complète que celle que nous possédons en ce moment. On a beaucoup discuté la (juestion de savoir jusqu'à quel point il existerait des libres musculaires dans le stroma de — 485 — l'ovaire. Purkinje connaissait déjà les fibres lisses du mésonié- Irium chez les oiseaux. Mais, pour ne parler que des auteurs récents, nous rappellerons que Rouget (8) signala en' 1856 des fibres musculaires dans le stroma ovarien. Aeby (16) conlirma ces observations et suivit les libres jusque dans la thèque des folli- cules, tout en faisant remarquer que leur nombre diminue avec Page. Pour (17) His, toutes les cellules fusiformes du stroma sont des fibres lisses ; il les rattache génétiquement à la tunique muscu- laire des vaisseaux de Tovaire. Au contraire, Henle, (18) Kôl- liker, (19) Grohe, (20) Pfluger (9) et Waîdeyer (10) n'admettent de fibres musculaires que dans les parois vasculaires de la couche médullaire. Grohe décrit en outre chez la femme un faisceau musculaire dans le ligament de Tovaire. D'autre part, Luschka a fait connaître sous le nom de M. allrahens tubœ un cordon muscu- laire qui longe la fimbria ovarica et se trouve dans le bord libre du ligament large. Ebstein a confirmé l'existence de ce muscle. V. Winiwarter (21) a en vain essayé d'obtenir des contractions du tissu propre de l'ovaire, soit qu'il ait fait usage d'excitants chimiques, soit qu'il ait eu recours à l'électricité. Par contre, il a vu des déplacements de l'organe se produire en irritant les liga- ments voisins. Les conclusions de nos études sur l'ovaire des Chauves-Souris sont tout à fait conformes à ces derniers résultats et en opposition avec ceux de G. Wagener qui, dans son récent travail sur l'ovaire du Chien (1), incline à considérer comme fibres lisses les cellules fusiformes de la périphérie de l'ovaire. Il les trouve très semblables aux éléments musculaires de l'intestin. Dans les unes comme dans les autres il décrit une composition fibrillaire et une striation transversale qui se maintient dans la lumière polarisée. Il y aurait chez elles, comme dans les fibres striées, alternance de couches isotropes et anisotropes. Il n'existe ni chez le Murin, ni chez le Fer-à-Cheval, pas plus dans la couche périphérique que dans le stroma médullaire, aucun élément présentant, lorsqu'on traite par la série des réactifs cités plus haut, les caractères des fibres lisses. Les cellules de la couche corticale ont, il est vrai, des noyaux allongés en forme de bâton- — 486 — nets; mais ces noyaux se colorent beaucoup plus vivement par le carmin que ceux des fibres lisses, et les contours de la cellule, si nettement marqués dans la fibre musculaire, sont toujours peu apparents pour les éléments conjonctifs fusiformes de la couche corticale de l'ovaire. IV. — Vaisseaux. Les vaisseaux artériels, veineux et lymphatiques qui chemi- nent dans le ligament large pour se rendre soit au hile de l'ovaire, soit à l'utérus, sont très nombreux et très volumineux. Le nom de bulbe ovarien proposé par Rouget conviendrait très bien pour désigner ce gros paquet de vaisseaux et de tissu musculaire que l'on trouve dans le voisinage du hile. Tous ces organes sont réunis par un tissu conjonctif très lâche, qui se condense vers la surface du ligament large pour former la membrane séreuse; ce tissu renferme çà et là des lobules graisseux d'étendue variable; il est traversé aussi par le muscle que nous considérons comme homo- logue du ligament propre de l'ovaire des autres mammifères. En ce qui concerne les vaisseaux, nous signalerons deux particula- rités intéressantes : 1° il se trouve chez les Chauves-Souris des branches artérielles volumineuses, pourvues d'une couche moyenne de fibres musculaires transversales dans toute l'éten- due de l'ovaire, entre les follicules en voie de développement et jusque dans la zone périphérique. En cela l'ovaire des Chauves- Souris paraît différer de celui d'autres mammifères et notamment de l'ovaire du Chien, si du moins l'on s'en rapporte aux observa- tions de G. Wagener : « Nach meinen Untersnchungen, dit cet auteur, sind starke Arterion nicht in der Rindenschicht zu finden. » 2" Dans la profondeur du ligament large, court une artère volumineuse qui sur son trajet fournit une ou j)lusieurs branches à l'ovaire, tandis qu'elle-même se rend à l'utérus. C'est l'artère utérine. La coupe transversale de cette artère se fait remar- quer par la petitesse relative et la forme de la lumière du — 487 — vaisseau. A la coupe celle lumière a la forme d'un pentagone doni les côtés seraient des lignes concaves vers le centre de la figure et dont les angles, au contraire, seraient étirés en dedans. Cette forme dépend de ce que la tunique interne est très épaisse suivant cinq côtes longitudinales, plus mince, au con- traire, suivant cinq lignes intermédiaires. Cet épaississement intéresse exclusivement l'endotliélium, qui est ici constitué par un superbe epithelium stratifié, comprenant, dans sa plus grande épaisseur, de huit à dix rangées de cellules. Celles qui délimitent immédiatement la lumière de l'artère ont un aspect tout parti- culier; elles sont très grandes, et assez régulièrement cuboïdes, sauf à leur face profonde, qui se moule sur les cellules sous- jacentes et se prolonge çà et là entre ces cellules. Elles ont pris, par le traitement à l'acide osmique, suivi du liquide de Kleinenberg, une couleur verdàtre très marquée, qui les diffé- rencie nettement des cellules sous-jacentes restés claires et incolores. Elles sont assez foncées; leur corps protoplasmique , ûnement ponctué, est très volumineux et renferme un beau noyau ovalaire rose pâle (action du picrocarmin). Toutes les cellules sous-jacentes, formont plusieurs couches, se moulent exactement les unes sur les autres; la plupart sont fusiformes à la coupe; elles sont très claires, incolores et pourvues d'un, quelques fois de deux noyaux sphériques ou ovalaires se teintant faiblement en rose. Les cellules les plus éloignées de la lumière du vaisseau sont plus petites et un peu plus foncées; elles renferment un noyau moins volumineux et se colorant plus fortement par le picrocarmin. Çà et là, mais surtout dans les couches les plus externes, on trouve quelques cellules à noyau allongé en forme de bâtonnet, se colorant en rouge vif. Cet epithelium repose sur une couche de tissu conjonctif; puis vient la tunique moyenne formée de fibres circulaires, puis l'adventice. 11 faudrait faire une étude suivie de ces vaisseaux pour pou- voir interpréter celte structure si particulière que nous avons trouvée à l'artère utérine. INous ne pouvons que supposer pour le moment que ce développement énorme de l'endothélium et sa transformation en un epithelium stratifié se produit consécuti- — 488 — vement à la gestation et qu'il a sa raison d'être dans la diminu- tion considérable du volume de l'organe à nourrir. La branche de l'artère qui se rend à l'ovaire ne présente pas cet epithelium stratifié. V. — Continuité entre l'épithélium du pavillon ET l'épithélium OVARIQUE. Une partie assez étendue de la capsule ovarique est tapissée à sa face interne par un epithelium cylindrique vibratile porté par les franges du pavillon. La face interne et supérieure de l'ovaire forme avec la capsule, au niveau du hile et tout le long du liga- ment propre, une gouttière suivant laquelle on peut observer la continuité directe entre l'épithélium cylindrique du pavillon et l'épithélium ovarique. Nous avons représenté, planche XX, figure 2, une coupe passant par la partie supérieure du hile où le ligament propre, dépassant l'ovaire, se prolonge dans la cap- sule et s'étend jusqu'au pavillon. Le muscle porte à sa face interne l'épithélium cylindrique vibratile de la muqueuse du pavillon et on peut le suivre parfaitement jusqu'à la surface de l'ovaire sur lequel il se continue en se modifiant assez brusque- ment. Cette continuité se voit sur un grand nombre de coupes successives. Waldeyer a le premier reconnu cette continuité entre l'épi- thélium germinatif et celui du pavillon. Il Ta observée dans quelques cas chez la Femme, mais surtout chez le Porc et chez le Lapin. Mac Leod l'a constatée chez la Pipistrelle. VL — Structure de l'ovaire. Si Ton fait une coupe passant par le hile d'un ovaire de Murin, traité au préalable par le picrocarmin, on remarque que toute la partie centrale de l'organe est constituée par un tissu qui prend, sous l'influence du réactif, une teinte jaune très manifeste; cette coloration se marque surtout si la matière tinctoriale n'a pas agi trop longtemps. — 489 — La périphérie est formée par une mince couche qui a pris, dans les mêmes circonstances, une couleur rose uniforme. Sui- vant toute la portion libre de l'ovaire, cette zone corticale est recouverte par l'épithélium ovarique; elle renferme dans son épaisseur les follicules primordiaux, tandis que les follicules en voie de développement sont tous logés dans le tissu jaune qui constitue la masse centrale de l'ovaire. De ces follicules quel- ques-uns sont libres au milieu de ce stroma, les autres, en grand nombre, paraissent fixés à la couche périphérique tout en étant plongés dans le tissu du noyau central (pi. XX , fig. i, 2, 5, 4- et5.) Au niveau de la portion adhérente de Tovaire (hile), la couche périphérique rosée se continue avec le tissu du ligament large, dans lequel cheminent les vaisseaux (mêmes figures). Elle ne renferme aucun follicule. 11 en est de même de tout le tissu qui occupe le centre de figure de l'ovaire, tissu qui se caractérise à première vue, nous l'avons dit plus haut, tout comme le stroma qui renferme les follicules en voie de développement, par la propriété qu'il possède de se colorer en jaune par le picrocarmin. On y voit des coupes de vaisseaux, d'espaces lymphatiques et de cordons médullaires; mais pas de follicules (mêmes figures). Depuis longtemps on a distingué dans l'ovaire de la femme et de quelques mammifères une couche corticale qui renferme les follicules de de Graafetune couche médullaire, formée du tissu conjonctif, par lequel pénètrent et dans lequel cheminent et se divisent les gros vaisseaux. Waideyer a cherché à démontrer que l'ovaire, au lieu d'être limité par une séreuse, comme l'avaient admis jusqu'alors tous les anatomistes, est, au contraire, recou- vert par une muqueuse. Il propose d'appeler zone parenchyma- teuse la couche corticale des auteurs, zone vasculaire la couche médullaire. La zone parenchymateuse est pour lui une muqueuse glandulaire, la zone vasculaire est une couche sous-dermatique; la couche musculaire des muqueuses il la trouve représentée par les fibres lisses qui accompagnent les vaisseaux. Nous avons exprimé plus haut notre opinion sur le parallèle établi par Waideyer. Mais que l'on accepte ou que l'on rejette ce rappro- 35 — 490 — chement entre l'ovaire et une muqueuse, la division en zone parenchymateuse et en zone vasculaire n'en est pas moins une réalité. Elle est fondée sur les différences que l'on constate chez la femme et chez beaucoup d'autres mammifères entre le tissu conjonclif, qui constitue le noyau de l'ovaire, et celui qui forme son écorce. Cette distinction apparaît dès que l'on examine, même à l'œil nu, une section transversale de l'ovaire. Mais cette apparence toute particulière de la couche corticale est moins due à ce que dans celle-ci existent des follicules, qui manquent dans le noyau médullaire, qu'aux différences que présente dans les deux zones le stroma conjonctif. Cela est si vrai, que la plu- part des anatomistes disent que les follicules, en se développant, peuvent s'engager dans la substance médullaire. On n'eût pas décrit l'ovaire comme formé de deux zones si le stroma était identique à la surface et dans la profondeur. Que faut-il appeler zone parenchymateuse et qu'est-ce qui est zone vasculaire dans l'ovaire d'un Murin? Born (4) a déjà fait observer que cette division de l'ovaire en une zone parenchymateuse et une zone vasculaire n'est pas applicable chez le Cheval. Mac Leod, tout en admettant chez la Taupe et chez la Pipistrelle une zone corticale et une zone médullaire, fait remarquer que la distinction entre les deux régions est parfois très vague : « Chez la Chauve-Souris, dit-il, le stroma est identique dans les deux portions de l'organe, d S'il admet une division en deux zones chez la Pipistrelle, c'est uni- quement parce que les follicules manquent dans une partie du stroma. Chez le Murin , comme chez la Pipistrelle , il n'existe aucune différence de structure entre le tissu qui occupe le centre de l'ovaire et celui qui se trouve entre les follicules en voie de développement. Mais, d'autre part, le tissu du bile fort différent du stroma de l'ovaire proprement dit, forme une plaque parfaitement délimitée qui livre passage aux vaisseaux. Cette plaque bien circonscrite du côté de l'ovaire a la forme d'une coupe engagée par sa con- vexité dans le tissu du ligament large et moulée par sa concavité sur l'ovaire proprement dit (pi. XX, fig. 3 et 4). A notre avis, — 491 — celte plaque fibreuse représente la zone vasculaire (couche mé- dullaire) de l'ovaire des autres mammifères, tandis que Tovaire proprement dit n'est qu'une zone parenchymateuse énormément développée. La partie centrale de l'ovaire du Murin, quoique dépourvue de follicules, doit être rattachée à la zone parenchy- mateuse et ne représente pas, comme le pense Mac Leod, la zone vasculaire. L'étude de l'ovaire du grand Fer-à-Cheval ne permet pas une autre interprétation de l'ovaire du Murin. Si l'on fait une coupe sagittale de l'ovaire du Rhinolophe, on constate à première vue une division très manifeste en deux zones : au niveau du hile l'ovaire est constitué par une plaque fibreuse qui se prolonge dans l'intérieur de l'organe en un noyau fibro-vasculaire peu étendu (pi. XX, fig. 6). il est entouré par une zone folliculeuse très épaisse , formant à elle seule les neuf dixièmes du volume total de l'ovaire et qui renferme des folli- cules dans toute son épaisseur. Dans la partie interne de cette zone périphérique le tissu con- jonctif se caractérise en ce qu'il est presque exclusivement con- stitué de grandes cellules qui se colorent en jaune dans le picro- carmin, tandis que ces cellules font complètement défaut dans le noyau fibro-vasculaire du hile. Comme la zone périphérique con- stitue les neuf dixièmes au moins de la masse totale de l'ovaire, l'on trouve des follicules en voie de développement jusque tout près du hile. La limite entre les deux parties est bien nette. La zone externe correspond évidemment à la zone paren- chymateuse des autres mammifères; le noyau fibro-vasculaire n'est que la zone vasculaire de Waldeyer. La zone parenchyma- teuse se divise elle-même en deux couches : la couche des folli- cules en voie de développement caractérisée par un stroma con- jonctif particulier; elle renferme des follicules jusque tout près du noyau vasculaire; et la couche des follicules primordiaux, à stroma fibreux, se colorant en rose par le picro-carmin. Mais si l'on examine une coupe de l'ovaire du Murin, on con- state que, chez cet animal , il n'existe pas dans l'ovaire de noyau fibro-vasculaire : on trouve seulement une couche de tissu fibreux suivant la surface adhérente de l'ovaire. Tout l'organe — 492 — proprement dit est constitué par le stroma à cellules intersti- tielles qui, chez le grand Fer-à-Cheval , se trouve exclusivement dans la zone parenchymateuse. Si l'on compare cet ovaire à celui du Fer-à-Cheval , l'on reconnaît clairement que le noyau fibro- vasculaire du Rhinolophe se trouve refoulé à la surface de l'ovaire chez le Murin et que, chez ce dernier, cet organe est dès lors formé exclusivement par une zone parenchymateuse plus étendue encore que chez le Fer-à-Cheval. 11 n'y a plus enveloppement de la couche médullaire par la zone parenchy- mateuse, mais juxtaposition d'une zone parenchymateuse énor- mément développée et d'une plaque médullaire considérablement réduite. Dans la partie qui constitue chez le Murin la zone parenchy- mateuse de l'ovaire nous avons à distinguer : i" Un epithelium ovarique; 2*" Une couche fibreuse superficielle (Algubinée des auteurs); 3° La couche des follicules primordiaux; 4° La couche des follicules en voie de développement; 5° Le noyau central de Tovaire dépourvu de follicules et qui s'étend jusqu'au hile. Des cordons médullaires présentant les uns une lumière très manifeste, les autres pleins traversent en tous sens le stroma de l'ovaire. Nous nous occuperons successivement : 1° De l'épithélium ovarique; 2** De la charpente conjonctive de l'ovaire; 3° Des follicules de de Graaf ; 4° Du système des cordons médullaires. A. — Epithelium ovarique. 11 se présente d'un ovaire à un autre des différences consi- dérables, au point de vue de la constitution de l'épithélium. Dans les ovaires du Fer-à-Cheval que nous avons étudiés, l'ovaire porte un epithelium simple à cellules cuboïdes ou cylin- driques, mesurant en moyenne 0,006 millimètres de hauteur sur 0,004 millimètres de largeur (pi. XXI, fig. 17). Ces cellules — 493 — ont des dimensions variables et Ton peut en dire autant de leurs noyaux. Partout ces cellules sont nettement séparées du tissu conjonctif sous-jacent. Nous avons trouvé çà et là quelques très rares cellules, plus grandes que les autres faisant saillie dans la cavité de la séreuse, et autour desquelles les cellules endolhé- liales étaient un peu allongées et incurvées sans cependant les recouvrir complètement. Sont-ce là des ovules primordiaux? Tout en reconnaissant une très grande analogie entre les images que nous avons eues sous les yeux et les figures bien connues de Ludwig (22), représentant la formation des follicules chez les Sélaciens adultes, nous ne pouvons nous prononcer sur celte question, n'ayant pas trouvé de stade de transition entre ces grandes cellules de l'épithélium et les follicules primordiaux qui siègent dans les couches sous-jacentes. Des caractères très semblables à ceux que nous venons de décrire ont été attribués à la couche superficielle de lovaire adulte de la plupart des mammifères, par tous ceux qui, depuis Waldeyer, se sont occupés de l'étude de cet organe et notam- ment par Mac-Leod, dans son travail récent sur l'ovaire de la Taupe, de l'Hermine et de la Pipistrelle. La plupart des ovaires de Murins que nous avons débités en coupes se faisaient remarquer par la difficulté de saisir la limite entre l'épithélium et les tissus sous-jacents. Si l'on examine avec soin, en se servant de grossissements snffisants (8 ou 10 à imm. de Hartnack), les coupes de ces ovaires, on constate que la sur- face est formée, dans la plus grande partie de son étendue, par un epithelium stratifié, dont l'épaisseur varie d'un point à l'autre et qui se constitue ici de deux , là de trois ou même de quatre rangées de cellules. Le trait caractéristique de cette couche c'est la diversité des éléments qui la constituent et l'irrégularité de leur arrangement. On y trouve en plus ou moins grand nombre : i° des cellules arrondies, à contours très nets, à contenu très clair et à noyau sphérique; 2° des cellules moulées sur ces dernières; elles affectent des formes diverses, sont plus foncées et plus petites que les précédentes, possèdent des noyaux moins volumineux et se colorent plus fortement par le carmin; 5° des — 494 — cellules superficielles, cuboïdes, prismatiques, quelquefois plus ou moins régulièrement disposées en palissade les unes à côté des autres, ou bien encore des cellules plates ou fusiformes à la coupe (pi. XXI, fig. Ì2). Les unes comme les autres s'engagent par des prolongements plus ou moins distincts, généralement foncés, entre les cellules plus profondes. Les cellules de la sur- face se distinguent quelquefois des cellules sous-jacentes par des noyaux plus volumineux, se colorant plus faiblement par le picrocarmin, aussi bien après l'action de l'acide osmique, qu'après le traitement par le liquide de Kleinenberg. Les petits noyaux des cellules profondes de l'épithélium sont tantôt arrondis, tantôt plus ou moins comprimés, allongés et plus ou moins en forme de bâtonnets; 4° Des cellules sphériques à plusieurs noyaux (pi. XXI, fig. 13 et 14). Elles sont notablement plus grandes que les autres cellules épithéliales, nettement délimitées, à protoplasme fine- ment granulé et pourvues de trois, de quatre ou d'un plus grand nombre de petits noyaux peu avides de matières colorantes. J'ai compté jusqu'à onze noyaux dans une même masse proto- plasmique. Ces masses mesurent de 0,008 à 0,015 millimètres. Nous les appellerons nodules épithéliaux. Tantôt ils font saillie à la surface de l'ovaire et proéminent dans la cavité du péritoine (pi. XXJ, fig. 14), tantôt ils s'observent dans l'épaisseur même de l'épithélium et plus souvent se trouvent à la limite du tissu conjonctif sous-jacent, déprimant celui-ci; ils sont alors plus ou moins engagés dans la couche conjonctive périphérique de l'ovaire (pi. XXI). Il en existe çà et là qui sont engagés dans le tissu conjonctif sous-jacent à l'épithélium et surtout en très grand nombre et de volume variable dans la couche des follicules primordiaux, entre ces derniers. Il est certain que de semblables nodules épithéliaux, tantôt réduits à la masse polynucléée, tantôt entourés de quelques cellules épithéliales plates, se développent aux dépens de Tépithélium ovarique et s'enfoncent dans le stroma aussi bien que les follicules. Que sont ces nodules? Que deviennent-ils? C'est là une question dont nous ne pouvons donner la solution; nous n'avons trouvé aucune forme de tran- — 495 — silion entre ces nodules et les follicules. Peut-être sont-ils des- tinés à se transformer en nids d'ovules, ou bien, par suite de l'accroissement de l'un des noyaux deviennent-ils directement des follicules primordiaux. Mais, nous le répétons, ce sont là de simples hypothèses. Nous devons nous borner pour le moment à signaler la présence de ces éléments et à indiquer leur origine. Ils ne sont pas sans une certaine analogie d'apparence avec les coupes des cordons médullaires de la périphérie de l'ovaire; mais, indépendamment qu'ils sont généralement plus petits, ils se distinguent par l'absence de toute délimitation de cellules, tandis que les cordons médullaires, formés de cellules conoïdes radiairement disposées, se font remarquer, lorsqu'on les coupe transversalement, par leur apparence radiée (pi. XXÏ, fig. 15). En certains points de Tépithélium, ces nodules épithéliaux sont très nombreux et comme ils constituent des centres autour des- quels les cellules voisines se disposent quelquefois concentri- quement, il en résulte, pour l'ensemble de l'épithélium, un aspect tout particulier. S*' Ovules primordiaux. — Quelques-uns ne se distinguent en rien des œufs que l'on trouve dans les follicules primordiaux : ils ont les mêmes dimensions, le même aspect du protoplasme, les mêmes noyaux sphériques et volumineux qui présentent, dans les préparations au liquide de Kleinenberg un magni- fique reticulum nucléoplasmique. On en trouve qui sont plus grands que les œufs renfermés dans les jeunes follicules (pi. XXI, fig. 14), d'autres plus petits. Les cellules voisines se disposent autour des ovules, de façon à leur former un revêtement plus ou moins nettement séparé des éléments voisins; il en résulte, dans l'épaisseur même de l'épithélium, de véritables follicules qui, s'ils se trouvaient dans le tissu conjonctif , au lieu d'être au milieu de l'épithélium, seraient tout à fait semblables à ceux des couches plus profondes. Quelques ovules primordiaux, libres de tout revêtement epithelial, font saillie à la surface de l'ovaire et proé- minent dans la cavité peritoneale. D'autres encore s'enfoncent dans le tissu conjonctif sous-jacent, entourés de quelques cellules épithéliales plates. On en voit à toute profondeur, sous l'épilhé- — 496 — lium et dans la couche des follicules primordiaux. ïl est clair, d'après cela que chez le Murin adulte, des follicules continuent à se former aux dépens de l'épithélium, d'après un procédé tout à fait semblable à celui que Ludwig (22) a décrit chez les Sélaciens, et Braun (23) chez les Reptiles. Koster a observé chez des femmes de 32 et de 37 ans, mortes peu après un accouchement et aussi chez des jeunes filles de 16 à 17 ans, des prolongements de l'épithélium engagés dans les tissus sous-jacenls. A l'extré- mité de ces formations épilhéliales se trouvaient des œufs pri- mordiaux , au milieu de cellules épilhéliales ordinaires et plus profondément, dans le stroma conjonclif de nombreux follicules primordiaux. Il est remarquable que trois fois cette production de follicules s'est montrée chez des femmes délivrées depuis peu de temps. G. Wagener a reconnu que chez le chien une formation de nouveaux follicules se fait régulièrement pendant la gesta- tion. Il a constaté en outre, chez le Chien adulte, un epithelium stratifié semblable à celui que nous venons de décrire; il a vu chez cet animal des ovules primordiaux continuer à se former, même à un âge avancé, aux dépens de l'épithélium ovarique. Nous avons trouvé , chez le Murin , des différences assez nota- bles dans les dimensions des ovules primordiaux de Tépilhé- lium. II existe des formes de transition entre les ovules et les grandes cellules dont nous avons parlé plus haut, au 1° de rénumération des éléments constitulifs de l'épithélium. Tandis que chez certaines femelles l'ovaire est recouvert d'un épiihélium stratifié, semblable à celui que nous venons de décrire, d'autres montrent en quelques points un epithelium strafié, ailleurs un epithelium simple, cuboïde, cylindrique ou même pavimenteux simple. Il semble alors qu'il existe des îlots épithé- liaux au milieu d'un endothelium; l'épaisseur de l'épithélium diminue vers les bords des îlots et passe insensiblement aux cellules plates. Enlin quelques ovaires sont recouverts sur toute leur surface par un epithelium pavimenteux simple, dont les éléments sont tout à fait semblables à des cellules endolhéliales typiques (pi. XXI, fig. 18). G. Wagener dit avoir cherché en vain un epithelium ovarique chez les vieilles femelles (Vaches, — 497 — Femmes) non-senlemeiil à la surface de Tovaire, mais aussi dans les trompes. Il serait très important de savoir positivement si, dans ce cas, l'épitliélium tombe, comme semble le croire G. Wagener, ou s'il se transforme comme nous le pensons. Chez le Murin, les ovaires qui portaient un endothelium se faisaient remarquer par la présence d'une membrane albuginée relativement épaisse en certains points, plus mince en d'autres. Nous n'hésiterions pas à les considérer comme de vieux ovaires, n'était la circonstance que l'abondance exceptionnelle des folli- cules primordiaux marche de pair avec les caractères que nous venons de signaler. Nous n'avons jamais trouvé dans des ovaires de Murin, pourvus d'un epithelium stratifié, un nombre de follicules approchant même de très loin de celui que l'on rencontre lorsqu'il existe, à la fois, un endothelium superficiel et une albuginée épaisse. Le contraire devrait exister si ces derniers ovaires provenaient de vieilles femelles. Chez le Lapin, l'on trouve aussi des ovaires à la surface des- quels on peut observer un passage insensible d'un epithelium cylindrique à un epithelium pavimenteux simple. Les faits que je viens de signaler viennent diminuer encore la valeur anatomique de la distinction établie par His entre epithelium et endothelium. Le beau travail de Neumann (15), en démontrant chez la Grenouille l'identité originelle des îlots cylindriques vibraliles et des cellules endothéliales du péritoine, en établissant qu'un epithelium cylindrique peut se transformer en un endothelium plat et vice versa, a enlevé toute importance principielle à la classification de His. Semper (i4), a prouvé que l'épithélium superficiel du testicule peut se transformer en un endothelium sans perdre ses vertus germinatives. Nous venons de montrer que l'épithélium ovariqXie de certains mammifères montre non-seulement d'individu à individu, mais même d'un point à un autre, chez le même individu, des variations analogues à celles qui distinguent la séreuse peritoneale des Amphibiens; que s'il est souvent pourvu d'un epithelium simple ou stratifié, il peut être aussi recouvert d'un endothelium. — 498 — Nous rappellerons encore que les mêmes faits sont aujour- d'hui bien établis en ce qui concerne le testicule qui, avant de porter un endothelium pavimenteux simple, est recouvert d'un epithelium germinalif stratifié. B, — Charpente conjonctive de l'ovaire. Les coupes d'un ovaire traité par le picrocarmin se font remar- quer, comme nous l'avons dit plus haut, en ce que le stroma est coloré en jaune, à l'exception d'une mince couche superficielle d'une teinte rose. Ces différences de coloration dépendent de différences de structure : la couche superficielle de l'ovaire est complètement dépourvue de cellules interstitielles, tandis que le reste du stroma est principalement formé par ces cellules. Nous distinguerons, d'après cela, dans la charpente conjonctive de l'ovaire, une couche fibreuse et un tissu interstitiel. a) Couche fibreuse. — Son épaisseur et sa constitution varient, non-seulement d'une espèce à l'autre, mais aussi d'une femelle à l'autre. On peut la diviser elle-même en une lame sous-épithéliale dépourvue de follicules et un stroma fibreux inlerfolliculaire. La lame sous-épithéliale correspond à l'albuginée des auteurs. Elle est formée d'un tissu conjonctif fibreux très riche en petites cellules fusiformes, nettement caractérisées par leur noyau allongé en forme de bâtonnet très grêle. Ces cellules et leurs noyaux sont allongés parallèlement à la surface. 11 en est de même des faisceaux fibrillaires très minces, qui courent entre les cellules et qui sont serrés les uns contre les autres, au point de ne laisser entre eux que de petites fentes occupées par les cellules. L'épaisseur de celte couche varie beaucoup : elle paraît être, jusqu'à un certain point, en raison inverse du nombre des follicules primordiaux: chez le grand Fer-à-Cheval, où la couche des follicules est énormément épaisse, l'albuginée est très réduite; mais même dans ce cas il existe manifestement sous l'épithélium une couche conjonctive caractérisée en ce que les noyaux allongés de ses cellules ont la forme de bâtonnets, tous disposés parallè- lement à la surface de l'ovaire. Dans l'ovaire d'un Murin qui se — 499 — distingait, en ce qu'au lieu d'un epithelium stratifié, il portait une rangée superficielle de cellules paviinenteuses (endothelium), cette même couche atteignait en quelque points une épaisseur de 0,011 millimètre. Çà et là l'albuginée est interrompue soit par un nodule epithelial, soit par un follicule en voie de formation. J'ai déjà dit plus haut que chez le Murin la limite entre Tépithé- lium ovarique et l'albuginée est très peu apparente. Le stroma fibreux interfolliculaire est constitué comme le tissu de l'albuginée, avec cette seule différence, que les faisceaux fibrillaires, au lieu de courir parallèlement les uns aux autres, s'entre-croisent en tous sens. De là une grande diversité dans la forme des cellules et dans l'aspect des noyaux. A côté des noyaux allongés on en voit d'arrondis, d'ovalaires et d'autres qui ont un contour irrégulier. Comme ceux de la couche sous-épithéliale, ils ont une grande affinité pour le carmin et pour l'hématoxyline. C'est dans les mailles de ce stroma que sont logés les follicules primordiaux et les nodules épithéliaux. b) Tissu interstitiel. — Le tissu qui forme la trame de la plus grande partie de l'ovaire se constitue de deux éléments : 1" d'un réseau de tissu conjonctif lamelleux ou fibreux; 2° de cellules interstitielles remplissant les mailles de ce reticulum. Les vaisseaux qui pénètrent dans l'ovaire, aussi bien que ceux qui en sortent, se divisent et se subdivisent dans ce stroma et leurs branches se portent plus ou moins radiairement, en se divisant en rameaux de plus en plus ténus, vers la périphérie de l'organe. Cette trame est en outre parcourue par des cordons médullaires; elle tient en suspension des follicules à divers états de développement. De l'enveloppe conjonctive de tous ces organes, vaisseaux, espaces lymphatiques, cordons médullaires, follicules, enfin de la face profonde de la couche fibreuse inter- folliculaire partent des prolongements lamelleux qui s'anasto- mosent entre eux de façon à circonscrire des loges de forme et de dimension variables. Près de la surface de l'ovaire, ces loges sont généralement alignées dans une direction perpendiculaire à la surface de l'or- gane, de telle sorte que les grandes cellules qu'elles renferment — 500 — sont disposées en colonnettes plus ou moins régulières, juxta- posées les unes aux autres. Les lames ou cloisons conjonctives sont très minces; çà et là, elles renferment une cellule fusiforme, ou bien elles sont recouvertes par une cellule plate; en quelques points on observe aussi des agrégations de petites cellules con- jonctives principalement autour des vaisseaux; elles sont traver- sées en tous sens par des capillaires. Les éléments conjonctifs qui constituent ces trabecules paraissent être les mêmes que ceux qui composent le tissu interfolliculaire de la couche des ovisacs primordiaux. Les cellules interstitielles remplissent les mailles de ce reti- culum; elles forment de petits groupes de trois, quatre ou un plus grand nombre de ces cellules. Elles sont irrégulières de forme, étant moulées d'une part sur la paroi de la loge, d'autre part serrées les unes contre les autres. Leur forme gravite autour de celle d'un cube; elles sont très rarement allongées. Elles sont claires, quoiques granuleuses et pourvues d'un grand noyau généralement sphérique et le plus souvent excentriquement placé. A rétat frais elles ont une teinte jaune ou brune et donnent à l'ovaire sa couleur propre. Elles ont un contenu demi-liquide, au point qu'il serait impossible de faire des coupes de l'ovaire non durci. Nous n'y avons jamais trouvé de granulations grais- seuses. Si on les examine après les avoir traités , soit par l'acide osmique, soit par le liquide de Kleinenberg, leur corps pro- toplasmique se montre clair et très finement grenu à la péri- phérie, au contraire, grossièrement granuleux vers son milieu. Cette dernière partie du corps protoplasmique se colore plus fortement par le carmin et a l'apparence d'un grumeau plus ou moins nettement circonscrit et suspendu dans le corps cellulaire à côté du noyau. Ces cellules, signalées tout d'abord dans l'ovaire des jeunes Chats par Schrôn (25), ont reçu de lui le nom de Cellules du stroma. His (17) lesa appelées Kòrner-Zellen et Waldeyer (25), qui en a fait une étude spéciale, les rapproche des cellules très riches en protoplasme que l'on trouve dans divers organes, prin- cipalement autour des vaisseaux. Il admet dans le tissu con- — 50i — jonclif d'une foule d'organes, indépendamment des cellules plates, des cellules qu'il appelle Plasmazellen; telles sont les cellules interstitielles que Kôlliker signala le premier dans le testicule (1854), et qui depuis ont été étudiées par beaucoup d'histologistes, les cellules que Mihalcovicz (2G)a observées dans la glande coxygienne et dans les glandes carolidiennes, les cel- lules des capsules surrénales, les grandes cellules des corps jaunes, les cellules granuleuses du stroma de l'ovaire; enfin, les cellules sérotines du placenta. Ehrlich (257), après avoir observé que parmi les Plasmazelleii de Waldeyer, il en est qui fixent avec avidité le violet de dalhia, tandis que les autres en prennent très peu, propose de désigner les premières sous le nom de cellules granulées (granulirte Zellen) et de réserver le nom de cellules plasmatiques pour les dernières. 11 con: erve donc cette dénomination pour les cellules interstitielles de l'ovaire et du testicule, les cellules des capsules surrénales, enfin des glandes coxygiennes et carotidiennes. Tourneux (28), qui a fait une étude approfondie de ces cellules du testicule, a démontré leur identité avec les cellules plasma- tiques de l'ovaire. On peut adopter pour elles, comme l'a fait Tourneux, le nom de cellules interstitielles. Le même auteur a trouvé dans le picrocarmin un excellent moyen de les distin- guer de tout autre élément cellulaire; enfin, Mac Leod (2) a étudié la manière dont elles se comportent vis^à-vis de diverses matières colorantes. C. — Follicules de de Graaf. Il y a lieu de distinguer dans la couche parenchymaleuse de l'ovaire, tant chez le Murin que chez le Fer-à-Cheval, deux zones caractérisées par la présence de follicules : l'' La zone des follicules primordiaux (WMeyer) ; c'est la zone corticale de His; 2° La zone des follicules en voie de développement (Waldeyer) correspondant à la zone subcorticale et à la zone des follicules de His. 502 1° Follicules primordiaux. Ils se constituent d'un ovule entouré de quelques cellules épithéliales plates; ils sont dépourvus de thèque conjonctive différenciée et se trouvent séparés les uns des autres par de minces cloisons conjonctives dépourvues de toute cellule inter- stitielle. Leur nombre est extrêmement variable : chez le Murin nous les avons toujours trouvés beaucoup moins nombreux que chez le Fer-à-Cheval; chez la première espèce ils existent en plus grande quantité chez les femelles qui ont un epithelium pavimenteux simple et une albuginée épaisse, que chez celles qui ont un epithelium stratifié et une couche fibreuse peu développée. L'épaisseur de la couche des follicules varie énormément. Dans un ovaire de Fer-à-Cheval elle représentait à peu près le sixième du diamètre total de l'ovaire. Il y avait là de quatre à cinq rangées adjacentes de follicules. Dans le Murin cette couche est toujourscelativement mince; nous avons trouvé au maximum deux rangées continues de follicules. Quand ils sont très nom- breux les follicules primordiaux forment une couche continue et ininterrompue, quoique la distance qui les sépare les uns des autres soit assez variable. Quand ils sont relativement rares, ils sont habituellement répartis par groupes, de sorte que la couche fibreuse à follicules varie d'épaisseur d'un point à l'autre. La question de savoir si les ovules des follicules primordiaux possèdent ou non une membrane est certes difficile à résoudre. Pfliiger et plus récemment Balfour (29) la tranchent affirmative- ment. En ce qui nous concerne, nous devons nous ranger plutôt à Pavis de Waldeyer. Nous n'avons pas réussi à nous convaincre de son existence. Tandis que les œufs dans les follicules en voie de développement, à partir du moment oii leur epithelium devient cuboidc, ont un contour très foncé, indice manifeste de la présence d'une membrane, que démontrent du reste les plis que l'on observe à la surface des œufs déformés, les ovules plus jeunes ont un contour très fin et très pâle, quoique toujours bien nettement marqué. — 503 — La constitution des follicules ne présente rien de bien parti- culier : l'ovule se fait principalement remarquer par le volume énorme de la vésicule germinative, surtout chez le Fer-à-Cheval; la couche protoplasmique relativement mince est toujours limitée par un contour très net. Dans les préparations au liquide de Kleinenberg le noyau montre un magnifique réseau nucléoplas- niique, tantôt répandu dans toute l'étendue du noyau, tantôt concentré vers son milieu; dans ce cas la périphérie du noyau est claire et incolore; son centre est occupé par une masse colorée en rose (picrocarmin); à première vue elle paraît formée de granulations; examinée avec de forts grossissements, elle se montre constituée par un réseau très-serré. On n'y distingue pas de nucléole; mais bien des nodosités aux points d'enlre-croisement des filaments nucléaires. Parmi ces nodosités il en est d'assez volumineuses que Ton prendrait à première vue pour des nucléoles. Les filaments se colorent eu rose par le carmin, ce qui démontre qu'ils sont formés d'une autre substance que les filaments réticulés du protoplasme ovu- laire. La membrane du noyau existe manifestement; elle est indiquée par un contour très net, parfaitement continu, à la face interne duquel existent toujours des inégalités qui ont l'appa- rence de granulations, soit que le reticulum nucléoplasmique s'étende dans toute l'étendue de la vésicule germinative, ou qu'il soit condensé en un amas granuleux central ou périphérique. Dans les préparations à l'acide osmique le noyau se colore uni- formément par le carmin et l'hématoxyline (pi. XXI, fig. 17); il paraît homogène; l'on y distingue toujours un assez gros nucléole, quelque fois deux, et en outre quelques corpuscules beaucoup plus petits disséminés dans le corps nucléaire (pseudo-nucléoles). Il n'y a pas moyen de distinguer aucune trace de reticulum. Nous n'avons vu aucun de ces ovules en^ voie de division. Mais chez le Fer-à-Cheval on trouve assez fréquemment deux et même trois noyaux semblables dans un même corps protoplasmique. Il existe aussi des follicules pourvus de deux ovules pressés l'un contre l'autre et la limite entre les deux éléments est alors marquée par une ligne droite. Kôlliker a figuré un ovule avec — 504 — deux vésicules germinati ves; il admet que c'est un ovule en voie de division. Nous doutons fort que cette manière de voir soit exacte : elle date d'une époque à laquelle toute cellule pourvue de deux noyaux était considérée comme cellule en voie de multi- plication. Balbiani (50) dit avoir trouvé quelquefois deux ovules pressés l'un contre l'autre dans un même ovisac. Autour de chaque ovule se voient quelques cellules plates, peu nombreuses, moulées par leur concavité sur la convexité de l'ovule (pi. XXJ, fig. 17). Elles adhèrent moins fortement à ce dernier qu'au tissu conjonctif ambiant. Sur certaines préparations l'ovule ayant subi un retrait, on observe une fente entre lui et les cellules épilhéliales; dans ces conditions, jamais les cellules ne restent appliquées sur l'ovule. Sur les coupes on ne distingue quelquefois autour d'un ovule qu'un seul noyau, plus souvent deux ou trois, rarement davantage. 11 est difficile de dire si l'épi- thélium enveloppe complètement l'ovule, ou s'il lui forme, dans certains cas au moins, un revêtement incomplet. Ces cellules épithéliales diffèrent peu des cellules conjonctives; à la coupe elles sont fusiformes les unes et les autres; leurs dimensions sont à peu près les mêmes. Seulement le corps protoplasmique des cellules qui avoisinent immédiatement l'ovule est plus clair et prend moins les matières colorantes que celui des cellules con- jonctives; de plus, leur noyau est un peu plus grand et moins coloré. Néanmoins, on conçoit très bien l'erreur dans laquelle sont tombés Schrôn, His et Foulis (51) quand ils ont dénié aux ovules primordiaux tout revêtement epithelial et quand ils ont soutenu l'origine conjonctive des cellules de la couche granuleuse. Que ces cellules proviennent de l'épithélium ovarique, cela est très évident chez le Murin où l'on voit non-seulement des ovules dans l'épithélium déjà entouré de quelques cellules plates, mais aussi des follicules immédiatement sous-jacents à cet epithelium et encore en continuité avec lui (pi. XXI, fig. 15). Les quelques cellules qui avoisinent ces ovules, moins aplatis que celles qui entourent les ovules dans la couche des follicules primordiaux, sont identiques aux cellules de la couche épithéliale de l'ovaire et souvent encore partiellement engagées dans cet epithelium, au — 505 ~ point qu'il est impossible de dire si la cellule doit être ou non rattachée au follicule. Dans ses études sur le développement de l'ovaire, Kolliker (3) a cru observer, que les ovules primordiaux s'engagent dans les cordons médullaires; il pense que ces cordons fournissent aux futurs follicules les cellules de la couche granuleuse. Rouget (52) est arrivé à la même manière de voir que Kolliker. Les belles recherches de Braun (23) sur la formation du testicule chez les Reptiles semblent devoir donner un certain crédit à celte opinion. Chez ces animaux, les œufs primordiaux de Tépithélium germi- natif pénètrent, chez le mâle, dans les cordons segmentaires, qui deviendront plus tard les canalicules séminifères. Balfour (29) certitìe l'exactitude de ces conclusions de Braun. Mais d'autre part Braun n'admet nullement que chez la femelle les cordons segmentaires interviennent en aucune manière dans la formation des follicules de de Graaf. Il pense, au contraire, que ces cordons s'atrophient progressivement et que les cellules épithéliales des follicules dérivent, aussi bien que les œufs, de l'épithélium germi- natif. 11 arrive donc aux mêmes conclusions que Waldeyer, en ce qui concerne la formation des follicules chez l'embryon. Le même mode de formation des follicules, Braun l'a observé chez l'adulte, confirmant en cela les belles recherches de Ludwig chez les Séla- ciens. Nos études sur la formation des follicules chez le Murin adulte, comme celles de G. Wagener chez le Chien, viennent apporter un nouvel appui à la théorie de Waldeyer. Il est vrai, pour pouvoir affirmer que chez l'embryon les choses se passent ou ne se passent pas comme le pense Kolliker, il faudrait instituer des recherches directes que nous n'avons pas encore entreprises; mais il est difficile d'admettre une origine différente pour les cellules de la couche granuleuse chez l'adulte, d'une part, chez Tembryon de l'autre, d'autant plus que chez le Murin, comme nous le verrons plus loin, les cordons médullaires persistent pendant toute la durée de la vie. Nous avons trouvé un grand nombre de follicules en voie de développement dans l'épithélium et sous l'épithélium, sans pouvoir trouver dans le voisinage aucune trace de cordon médullaire. Plus nulle part on ne voit de 54 — S06 — cordon médullaire dans la couche fibreuse superficielle de l'ovaire; on les rencontre seulement à partir de la limite entre cette couche et le tissu interstitiel. Comment donc les follicules en voie de formation chez l'adulte pourraient-ils tenir leur epithelium de ces cordons? L'erreur de Kolliker et de Rouget, si erreur il y a, s'expliquerait facilement, dans le cas où les observations de Braun se confirmeraient chez les mammifères, par une confusion des sexes. Ces auteurs ont probablement rapporté à l'ovaire un phénomène qui caractérise un stade de l'évolution du testicule. 2° Follicides en voie de formation. Ils se trouvent exclusivement dans le stroma interstitiel, les uns fixés par leur Ihèque conjonctive au stroma fibreux péri- phérique; les autres plus éloignés de la surface sont entourés de toutes parts par le tissu interstitiel. Aussi bien parmi les folli- cules adhérents à la zone fibreuse, que parmi ceux qui en sont plus ou moins écartés, on en trouve de toute dimension, de sorte qu'il est impossible de distinguer ici, comme l'a fait His dans d'autres ovaires, une couche subcorticale et une zone folli- culaire. Des ovisacs de toute grandeur sont ici répartis sans aucun ordre : grands et petits sont mélangés. Thèque conjonctive. Quand un follicule primordial s'accroît, se trouvant logea l'origine dans le stroma fibreux périphérique, il proemine dans le stroma interstitiel, sans entrer directement en contact avec lui. Il pousse devant lui une couche de tissu conjonctif fibreux ou lamelleux et, quel que soit son volume, il reste enveloppé par cette couche fibreuse, aux dépens de laquelle se déve- loppent toutes les tuniques de la thèque folliculaire. Tant que le follicule est petit, la couche fibreuse d'origine périphérique existe seule; mais elle s'épaissit progressivement. Dans des folli- cules de moyenne dimension il existe dans l'épaisseur de la — 507 — conche fibreuse une rangée de cellules inlerstitielles disposées par groupes dans des logettes délimitées par des lames conjonc- tives. Le nombre de ces cellules et leurs dimensions croissent au fur et à mesure que le follicule grandit. On trouve toutes les formes intermédiaires entre de simples cellules conjonctives et les cellules interstitielles les mieux caractérisées. Ces follicules présentent donc dans leur enveloppe conjonctive : d° une mince couche fibreuse interne; 2** une couche moyenne formée par des cellules interstitielles, séparées par des travées fibreuses; 5° une couche fibreuse externe. Les deux couches fibreuses, de même que les travées qui les relient entre elles, sont parcourues par des capillaires. Aussi bien les cellules de la couche intermé- diaire ont les caractères des cellules du stroma interstitiel, aussi bien les lames fibreuses ressemblent aux travées conjonctives de ce stroma, il en résulte que, n'était la disposition concentrique de ces couches, elles ne se distingueraient guère des tissus am- biants; la limite devient d'autant moins nette, que peu à peu le stroma voisin avec ses travées conjonctives et ses nids de cel- lules interstitielles se disposent en couches concentriques autour du follicule en voie de développement. Quand le follicule a atteint un certain volume, il n'y a plus moyen de distinguer la thèque folliculaire primitive du stroma interstitiel. La partie épithéliale du follicule reste néanmoins entourée par une mince lame conjonctive riche en capillaires; mais celle-ci ne se distingue en rien des travées du stroma interstitiel. En dehors se trouvent des couches concentriques multiples de tissu interstitiel. Il n'en est pas moins vrai que les éléments conjonctifs qui entourent immédiatement le follicule se sont développés aux dépens d'une couche fibreuse d'origine périphérique, par transformation pro- gressive des cellules ordinaires du tissu conjonctif en cellules interstitielles. On peut voir très bien, en étudiant convenablement la thèque conjonctive de follicules de plus en plus volumineux, cette transformation progressive de cellules fusiformes se colorant en rose par le picrocarminate en cellules riches en protoplasme, de forme plus ou moins cuboidc ou polyédrique et se colorant de plus en plus nettement en jaune. — 508 — La limite entre la couche granuleuse et le tissu conjonclif est marquée, dans les follicules de tout volume, par une ligne nette, foncée, parfaitement régulière, décrivant ou un cercle, ou un ovale régulier (pi. XXI, fig. 18). Cette ligne est l'indice d'une lamelle basilaire, d'une membrane très mince, interposée entre la thèque conjonctive et l'épithélium. Nous l'avons vue parfai- tement isolée dans plusieurs follicules, dans lesquels l'épithélium avait été accidentellement détaché de son enveloppe. Nous n'y avons vu aucune trace de noyaux ; elle nous a paru être dépourvue de toute structure. Slaviansky (33) a décrit sous la couche granuleuse une lamelle endothéliale. Notre membrane fondamentale est-elle composée de cellules plates? Rien ne nous autorise, ni à affirmer, ni à infirmer cette opinion. Mac Leod décrit et figure la thèque folliculaire de la Pipis- trelle comme constituée exclusivement, au contact de l'épithé- lium, de cellules interstitielles aplaties, fusiformesà la coupe, et d'autant plus nombreuses que le follicule est plus volumineux. Cette manière de voir est certainement inexacte en ce qui con- cerne le Murin. Toujours la couche granuleuse repose sur une mince couche fibreuse se colorant en rose par le picrocarmin; elle n'en est séparée que par cette membrane (endothéliale?) qui se marque à la coupe par un contour net et régulier. Cette couche fibreuse interne, assez résistante, rend très facile l'énucléation des follicules des Chauves-Souris. La couche moyenne, formée principalement de cellules interstitielles se déchire avec la plus grande facilité. Notre description de la thèque des Chauves-Souris rappelle, au contraire, celle que fait Mac Leod de l'enveloppe conjonctive de l'flerinine. [1 a trouvé chez cet animal, comme nous l'avons vu chez le Murin, une tunique fibreuse interne qui ne manque à aucune phase du développement. Il décrit au second stade, indépendamment de la couche dont il vient d'être ques- tion, une épaisse couche de cellules interstitielles, qui est pour lui la tunique propre des auteurs et plus en dehors, une coque fibreuse externe, qu'il assimile à la tunica fibrosa. Nous sommes d'autant plus convaincus de l'exactitude de cette description de Mac Leod qu'elle s'applique presque exactement à ce que nous — 509 — avons vu chez nos Chauves-Souris. Mais nous pensons que l'au- teur se trompe quand il fait dériver ces deux couches du stroma ambiant. Il est certain que chez le Murin les trois couches résultent de la différenciation progressive d'une couche fibreuse primitive, qu'il ne faut pas confondre avec la couche fibreuse interne des stades subséquents. L'opinion de Mac Leod est du reste purement hypothétique : il n'a pas observé les premières phases de la formation des deux couches externes. La plupart des auteurs ont décrit au follicule de de Graaf : une tunica fibrosa (Henle) et une tunica propria (Henle). Cette dernière formée par un tissu conjonclif plus lâche est riche en cellules, qui seraient des globules blancs d'après Waldeyer, des cellules conjonctives [Kornerzellen) d'après His. Robin (54) les a appelées cellules de la paroi propre de Povisac et Tourneux a démontré qu'elles sont identiques aux cellules interstitielles du stroma. Notre couche moyenne correspond donc à la tunica propria foUiculi ; notre couche externe est la tunica fibrosa des auteurs. Quant à notre tunique fibreuse interne, elle a été signalée par Kôlliker (3) (page 870) dans l'ovaire d'autres mammifères. Elle a chez les Chauves-Souris la même importance que la couche fibreuse externe. Il convient donc de lui donner un nom et de l'appeler conche fibreuse interne, tunica fibrosa interna. Membrane granuleuse. Les changements progressifs que subit la membrane granu- leuse, au fur et à mesure que croît le follicule, sont trop connus pour qu'il soit utile de les exposer ici. Nous nous bornerons à quelques remarques. Nous avons constaté, tant chez le Murin que chez le Fer-à- Cheval, qu'il n'existe aucun rapport constant entre l'épaisseur de celte membrane et l'état de développement de l'œuf. En général elle s'accroît très lentement surtout chez le Fer-à-Cheval, où nous avons trouvé des œufs volumineux, pourvus d'une zone pellucide épaisse dans des follicules, dont la membrane granu- — 510 -- leuse était constituée par line rangée unique de cellules cylin- driques (pi. XXI, fig. 21). Chez le Murin le follicule est toujours arrondi, sphérique ou ovalaire. Il en est souvent de même chez le Fer-à-Cheval; mais on trouve en outre chez cette espèce des follicules ayant la forme d'un carafon, ce qui dépend de ce que la membrane granu- leuse se prolonge, en un point de la surface du follicule, de façon à former un diverticule epithelial plein. A côté de ces follicules on observe des ovisacs biloculaires ou triloculaires; nous en avons même observé un qui montrait clairement quatre loges. Ces follicules multiloculaires sont allongés : les uns présentent des étranglements peu marqués séparant entre elles des parties renflées (pi. XXI, fig. 20); d'autres ne montrent aucune trace de cette apparence moniliforme (fig. 19). Ces follicules renferment autant d'ovules qu'ils ont de loges. Les œufs qu'ils contiennent sont tout à fait normaux; tout petits déjà ils possèdent une zone pellucide et celle-ci croît rapidement. Tantôt les œufs renfermés dans une même follicule ont tous le même volume, d'autres fois ils sont inégalement développés. Dans aucun des follicules mul- tiloculaires que nous avons observés, il n'y avait de cavité folli- culaire : tout l'espace entre les œufs et la thèque conjonctive était rempli par des cellules épithéliales; la couche granuleuse était même relativement peu épaisse (pi. XXI, fig. 19 et 20). Dans quelques follicules cette couche se prolonge entre les œufs en une cloison complète. Chaque œuf est alors entouré de toutes parts de cellules épithéliales plus ou moins régulièrement prismatiques ou cylindroïdes (pi. XXI, fig. 19). Des follicules à deux ovules pourvus chacun d'une zone pellu- cide bien développée ont été observés et figurés par plusienrs auteurs, notamment par Schrôn (24) et tout récemment encore par G. Wagener (1), Mais d'autres follicules multiloculaires du grand Fer-à-Cheval présentent une disposition qui n'a pas encore été décrite à notre connaissance. Deux ou même trois œufs pourvus chacun d'une zone pellucide épaisse et également épaisse partout, au lieu d'être séparés les uns des autres par une cloison épithéliale complète sont immédiatement accolées les uns aux — 511 — autres suivant une partie notable de leur surface ((ig, 20). La limite entre les zones pellucides des œufs voisins est marquée alors par une ligne droite très nette, les œufs se trouvant aplatis suivant la surface d'accolement. Ces œufs laissent alors entre eux, aux deux extrémités de cette surface d'accolement, un angle rentrant dans lequel s'engagent les cellules granuleuses en for- mant un coin. La couche granuleuse forme entre les deux œufs contigus une cloison incomplète ou, si l'on veut, un bourrelet annulaire à section triangulaire. Nous avons trouvé des œufs immédiatement accolés les uns aux auîres, non pas dans un, mais dans un assez grand nombre de follicules du grand Fer-à-Cheval, à tel point que nous pouvons signaler cette particularité comme fréquente chez cette Chauve-Souris. Elle nous paraît avoir une grande importance en ce qu'elle démontre l'origine ovulaire de la zone pellucide. Nous y reviendrons quand nous parlerons de cette membrane. Nous n'avons jamais trouvé de follicule multilo- culaire chez le Murin. En ce qui concerne le développement progressif de la couche granuleuse, nous nous bornerons à constater : l'' que les cel- lules de l'épithélium d'abord simple, en devenant de plus en plus nombreuses, changent progressivement de forme : de pavimen- teuses elles deviennent cuboïdes, puis prismatiques; 2° que géné- ralement l'épithélium à toutes les phases de son développement, sauf au moment où il est formé par une rangée unique de cellules prismatiques, est plus épais du côté qui regarde le centre de l'ovaire que du côté tourné vers sa surface. Dans tous les jeunes follicules, comme le remarquent Balfour (29) et Schafer (55), l'épithélium devient cuboidc et puis prismatique du côté de la face profonde, alors qu'il est encore pavimenteux au côté opposé. C'est aussi de ce côté que l'épithélium simple s'épaissit en premier lieu pour devenir bisérié et plus tarlaxiclxes XLXLII et XXLIII.) I. — Maturation de l'oeuf. Nos observations sur les phénomènes de la maturation de l'œuf sont Cori incomplètes. L'élude de cette question est une des plus délicates que soulève la connaissance du développement des animaux. L'impossibilité de suivre sur porte-objet les phases succes- sives de la transformation de la vésicule germinative, quand il s'agit de l'œuf des mammifères, vient augmenter encore les dif- ficultés. Chez le Lapin l'on peut, en se basant sur ce fait que les follicules ont atteint leur maturité complète au moment de la mise bas, déterminer, en un certain sens, l'âge des follicules en — 552 — voie de maturation et en sacrifiant, suivant un ordre métho- dique, des femelles pleines, retirer de l'ovaire des œufs mon- trant les phases successives de la maturation. Et malgré cela nous n'avons pas réussi jusqu'à présent à analyser la série des modifications que subit la vésicule germinative avant de dispa- raître. Néanmoins nous avons reconnu avec certitude que le pronucleus femelle dérive de la vésicule de Purkinje; qu'il en est de même, au moins en partie, des corps directeurs; que le retrait du vilellus commence toujours au pôle germinalif et que ce phénomène coïncide avec l'élimination d'un premier globule polaire; qu'une membrane vitelline se développe aux dépens de la couche externe du vitellus à la fin du séjour de l'œuf dans l'ovaire; que tous les phénomènes que nous venons d'énumérer s'accomplissent, avant la rupture du follicule et indépendamment de la fécondation; enfin que le retrait du vitellus s'achève après la chute de l'œuf et que l'expulsion du second corps directeur et de granules, en nombre plus ou moins considérable, s'accomplit dans l'oviducte. En ce qui concerne les Chauves-Souris, il est certain que l'on trouve à l'ovaire des follicules montrant les caractères apparents de la maturité non-seulement au printemps, mais déjà pendant l'hiver et même au début de la saison froide. Mais tantôt on distingue nettement dans le vitellus une vésicule germinative, claire et bien délimitée ; il est impossible qu'elle échappe à l'observation quand réellement elle existe; elle est toujours superficiellement placée. Mais dans d'autres cas on ne réussit pas à découvrir la vésicule; elle s'est profondément modifiée ou bien elle a disparu. Malheureusement il nous a été impossible d'analyser les modifications qu'elle subit avant de disparaître. Nous avons trouvé le 14 avril 1877, dans l'ovaire d'un Murin, un œuf d'une clarté remarquable que nous avons figuré pi. XXlî, fig. 5 et que nous allons décrire. Dans le vitellus on distingue nettement 1" une masse centrale claire et homogène, un peu excentriquementplacée;2°une couche intermédiaire plus épaisse à un pôle, plus mince et même interrompue à l'autre, et 5° une couche corticale présentant des traces d'une strialion radiée. — 535 — finement granniée mais dépourvue de ces gros globules vitellus qui caractérisent la couche sous-jacente. Dans la zone centrale se montre un corps nucléaire irrégulier, pourvu d'un gros nucléole très réfringent, de quelques granulations surtout nombreuses à la périphérie et délimité par une ligne bien nette. Par analogie avec ce que nous connaissons du Lapin, nous n'hésitons pas à considérer cet élément comme un dérivé de la vésicule germi- native; il est appelé à jouer un rôle important dans la fécon- dation : c'est le pronucleus femelle. Entre le vitellus légèrement rétracté au pôle germinatifet la face interne de la zone pullucide se trouvent deux corps assez réfringents et finement granuleux; ils sont homologues du premier corps directeur du Lapin, le seul qui soit éliminé avant la chute de l'œuf. Sous ces corps le vitellus est limité par une ligne concave parfaitement régulière, de sorte que l'espace périvitellin est à ce moment de forme lenticulaire: sa coupe optique est fusiforme. Les globules polaires remplissent presque complètement cet espace; ils paraissent comprimés entre le vitellus et les membranes de l'œuf. Sous les globules polaires expulsés, le vitellus est plus clair suivant un espace qui répond à ce que l'un de nojs a appelé chez le Lapin la lentille cicatriculaire (2). Le centre de cet espace était occupé par la vésicule germinative avant sa disparition. On y distingue vaguement un élément mal défini de forme arrondie, mais qui, se trouvant en partie recouvert par des glo- bules vitellins assez volumieux et très réfringents, se laisse très imparfaitement analyser. Par analogie avec ce que nous avons vu maintes fois chez le Lapin, nous supposons qu'il s'agit ici du second corps directeur, destiné à être expulsé plus tard. Nous ne pouvons rien alïirmer quant à l'existence d'une membrane vitelline sous-jacente àJa zone radiée, n'ayant pas cherché à l'isoler. Nous concluons : 1° Que la chute de l'ovule peut encore se faire, chez le Murin, au mois d'avril; qu'elle n'a pas toujours lieu plus tôt; 2" Que la disparition de la vésicule germinative, un commen- 37 — 554 — cement de retrait du vitellus, la formalion du pronucleus femelle, l'élimination d'un premier corps directeur, qui peut être se divise aussitôt, s'accomplissent à l'ovaire, avant la féconda- tion, et que ces phénomènes caractérisent la maturation de l'œuf; 3° Que l'œuf des Chauves-Souris aussi bien que celui du Lapin manifeste une polarité tout comme celui des autres Ver- tébrés. La couche intermédiaire où se trouvent surtout accumulés les éléments deutoplasmiques est interrompue au pôle animal et présente son maximum de développement au pôle végétatif. Au pôle animal se trouve une lentille cicatriculaire claire, qui apparaîtrait comme un trou, si l'œuf était volumineux et opa- que; elle correspond à la fovea centralis de l'œuf des Amphi- biens, au conduit spermatique (Spennagang de Calberla) des Pétromyzons. IL — Époque de l'ovulation et de la fécondation. Dans la communication préliminaire de ses recherches sur le développement du Lapin (publiées en décembre 1875) (2), l'un de nous a fait connaître quehjues observations relativement à l'époque de la copulation et de la fécondation chez les Chauves- Souris. 11 concluait de ces recherches que les Chéiroptères s'ac- couplent avant de tomber dans le sommeil hivernal; que les spermatozoïdes restent vivants dans la matrice jusqu'à la fin de l'hiver; que l'ovule arrive à maturité avant la saison froide, qu'il est fécondé pendant l'hiver, mais que le développement embryon- naire proprement dit ne commence qu'au printemps. On ne peut ouvrir une Chauve-Souris pendant l'hiver sans trouver son utérus gorgé de sperme; l'une des cornes est habituellement plus forte- ment tuméfiée que l'autre; l'organe présente tous les caractères apparents de la gravidi lé; mais c'est en vain que l'on y cherche des embryons. Des spermatozoïdes très-actifs se trouvent aussi dans l'oviducte et jusque sur la surface de l'ovaire. Les ovules que Ton rencontre dans l'oviducte pendant l'hiver se présentent toujours avec les — 55S — mêmes caractères : le vitellus est plus ou moins rétracté; dans l'espace périvitellin se montrent des globules polaires habituelle- ment au nombre de trois; à moins qu'il ne soit chargé d'éléments réfringents très-volumineux au point de perdre sa transparence, comme c'est habituellement le cas chez le V. Dasycnemns. Ton peut distinguer dans le vitellus deux corps nucléaires : ce sont les deux pronuclei dont la présence doit être considérée comme caractéristique de l'œuf fécondé. Avant le mois d'avril, on ne trouve ni œufs en segmentation f ) ni embryons. Il doit donc se produire chez les Chéiroptères un fait analogue à celui que Bischoff (3) a découvert en ce qui concerne le Chevreuil. Chez cet animal l'accouplement a lieu à la fin de juillet ou au com- mencement d'août; mais l'œuf fécondé, après avoir parcouru les phases successives de la segmentation, subit dans son évolution un arrêt qui se maintient jusqu'en décembre. Comme nous n'avons jamais trouvé d'œuf en segmentation pendant la période hivernale, nous avons exprimé l'opinion que chez les Chauves- Souris la pause se produit aussitôt après que les phénomènes de la fécondation se sont accomplis. Récemment trois embryologistes allemands se sont occupés de la même question : Benecke (4), Eimer(5) et Fries (6) ont confirmé nos conclusions en ce qui concerne la copulation préhivernale; mais n'ayant jamais trouvé d'ovules pendant l'hiver, ils doutent de l'existence d'un arrêt dans le développement. Benecke a fait ses observations chez F. pipistrellus et Plecotus auritiis. Voici quelles sont ses conclusions : 1° A partir du mois de décembre et durant tout l'hiver, tantôt un seul , tantôt les deux ovaires sont pourvus d'un follicule mûr: l'œuf qu'il renferme est dépourvu de vésicule germinative; 2° La rupture du follicule se fait aux premières chaleurs du pnn temps; 3° Ce phénomène coïncide, d'une part, avec la pénétration des (*) Nous avons trouvé un seul œuf segmenté à la tin du mois de mars, chez le Dasycnème. Voir plus loin. — 556 — ovules dans l'oviducte, de l'autre, avec l'expulsion d'une partie du sperme par le vagin; 4° L'œuf arrive dans l'oviducte entouré par les cellules du disque proligère; 5° Les œufs trouvés dans l'oviducte présentent tous les carac- tères que M. Edouard Van Beneden leur a reconnus; 6° Mais il ne se produit pas de pause dans le développement. Nous ferons remarquer que les espèces que Benecke a étudiées ne se trouvent pas dans les grottes de Maestricht et que nos conclusions étaient basées sur des observations faites chez V. murinus^ V. Dasycnemus , V. Daubentonii^ V. Mijstaciniis. Il est regrettable, d'ailleurs, que la communication de Benecke ne soit pas plus explicite, quant aux faits sur lesquels il fonde son opinion. 11 fixe aux premières chaleurs du printemps la rupture des follicules et le début du développement. Mais quelle est cette époque des premières chaleurs du printemps? Est-ce en mars, en avril ou en mai ? of the pericardial sinus. Otherwise, the heart is free, except in so far as » it is kept in place by the arteries uliich leave it and traverse the walls of the » pericardium. » Ainsi, d'après cette description, le cœur n'a que des allacbes latérales; il est libre partout ailleurs, et les attaches dorsales ainsi que les très nombreuses attaches inférieures s'insérant sur le plancher du sinus, celles sur lesquelles j'insiste précisément dans le texte, sont absolument méconnues. Je relève cette erreur du savant naturaliste anglais, non pour critiquer son ouvrage fort remarquable, du reste, mais pour m'opposer, comme je le puis, à ce que l'erreur signalée se propage précisément à la faveur du mérite général du livre où elle figure. (2) De la structure et des fonctions du cœur des Crustacés, op. cit. (5) Voyez, par exemple, Bordon-Saisderson, Handbook for the physiological laboratory, p. 231, London. 1873. 41 — 606 — ultérieurement son mode d'application dans chaque cas parti- culier. Un cadre en bois rectangulaire (ûg. 5, pi. XXVII, a, a, a', a') dont les dimensions varient nécessairement suivant l'animal à employer, est solidement fixé, dans une position horizontale, sur l'anneau d'un support en fer (6, b), tel que ceux qu'on utilise dans les laboratoires de chimie pour soutenir les capsules et les ballons. Le cadre peut donc être placé, à volonté, à des hauteurs variables. Les longs côtés du cadre sont constitués par des règles épaisses servant de guides; les petits côtés se composent de lattes plus minces. Une planchette (c, c, c, c) percée de nombreux trous de vrille et destinée à porter le Crustacé en expérience lié par les tours d'une ficelle passant par les trous en question, glisse à frotte- ment entre les bords épais du cadre. Elle peut, par conséquent, être placée, enlevée, reculée ou avancée au gré de l'expérimen- tateur. L'axe (d) du levier inscripteur est situé vers le milieu du bord (a, ci) du cadre; une disposition inutile à décrire et que la figure fait aisément comprendre, permet de l'élever à des hauteurs variables en rapport avec l'épaisseur du corps du Crustacé. Au bord opposé (a', a') de l'appareil, deux petites règles glissant à frottement doux dans des rainures, portent chacune une petite tige de verre verticale (e, é). Le levier inscripteur oscille entre ces deux tiges en glissant soit le long de Tune, soit le long de l'autre, suivant la direction dans laquelle on veut faire appuyer son extrémité sur le cylindre enregistreur. 11 en résulte de très légers frottements, mais qu'il est impossible d'éviter. Le levier inscripteur (/) est un fil de verre, obtenu par le pro- cédé ordinaire de l'étirage d'un tube de verre à la lampe. Tout en étant très léger, il doit naturellement être rigide. L'extrémité qui frotte sur le cylindre enfumé a été fondue de façon à se — 607 — terminer par une petite perle de 1 millimètre au plus de dia- mètre (1). Les rapports anatomiques du cœur des Crustacés ne permet- tant pas de faire reposer directement le levier sur l'organe, il a fallu employer un intermédiaire : un petit anneau de verre ou de fil de laiton très fin dans lequel passe le levier, porte une délicate tige verticale descendante de 1 centimètre de longueur, ou moins suivant les cas, se terminant par une très petite plaque de liège horizontale, de 3 ou 4 millimètres de largeur et d'environ 1 millimètre d'épaisseur (fig. 6, pi. XXVII). Dans les expériences telles que celles dont je vais donner les résultats, la petite plaque de liège repose sur un point choisi du cœur, s'il s'agit du cœur du Homard ou du Crabe tourteau, sur une assez grande partie de la face dorsale de l'organe, s'il s'agit d'un Cruslacé de moindres dimensions^ comme l'Écrevisse ou le Crabe commun. Les mouvements alternatifs d'élévation et d'abaissement de la face dorsale du cœur se transmettent au levier par l'intermé- diaire de la plaque et de sa tige. L'extrémité libre du levier inscrit ces mouvements, en les amplifiant, sur le papier enfumé d'un cylindre tournant de Marey (axe lent, un tour par minute). Il importe de remarquer que, par suite de la structure du support général en bois, toujours le même pour les animaux de même espèce, le rapport entre les longueurs des bras du levier ne peut guère varier d'une épreuve à l'autre. Dans les expériences déjà nombreuses effectuées en 1878 et dont j'ai publié un résumé sous le titre de Communication pré- liminaire, etc. (2) et dans la plupart des expériences que j'ai faites depuis, l'animal étant solidement lié, je me suis borné à mettre le cœur à nu en pratiquant une fenêtre rectangulaire à (1) L'idée première d'employer un fil de verre élire à la lampe comme levier à la fois rigide et très léger, paraît due au physiologiste anglais King (Marey, Physiologie médicale de la circulation du sang, page 174. Paris 1863). (2) Bulletin de VAcad. roy. de Belgique, 2^ série, t. XLVi, n° 8, août 1878. — 608 — la carapace et à faire reposer l'appendice mobile du levier à peu près au centre de la face dorsale de ce cœur. Je disais, dans ma Communication préliminaire (1) : « Au » bout de quelques minutes, si l'animal n'est pas soumis à des j> excitations étrangères, le cœur bat normalement et fournit un D tracé très régulier. » Il est en effet facile d'obtenir, dans ces conditions, des gra- phiques à peu près parfaits comme le prouvent la figure 1 et nombre d'autres que le lecteur rencontrera plus loin; mais, ainsi que je vais le montrer, si le cœur mis largement à nu bat régulièrement, il ne bat pas tout à fait normalement. FiG. i. — Graphique des mouvements de la face dorsale du cœur de l'Écrevisse, 34 pulsations par minute. Lecture de droite à gauche. Des Crustacés de grande taille sont nécessaires pour cette démonstration. Comme je l'ai exposé dans le paragraphe I, le cœur des Décapodes offre des attaches dorsales importantes. Or la perfo- ration de la carapace sans précautions convenables a inévita- blement pour effet de rompre les attaches susdites et de modi- fier les mouvements de haut en bas de la face supérieure du cœur en leur donnant une amplitude exagérée. L'exemple suivant fera nettement comprendre la différence qui existe entre un tracé obtenu en respectant les attaches dor- sales du cœur et celui oblenu par le procédé ordinaire : chez un Homard très vif, on fait à la carapace un orifice aussi petit que possible, de 4 millimètres de largeur seulement. Cet orifice est situé en arrière des principales attaches dorsales du cœur qui sont ainsi ménagées. Plusieurs graphiques pris successivement (1) Page 3 des tirés à part. — 609 — offrent tous ce caractère que les parties ascendantes et descen- dantes sont fort courtes; elles mesurent 1 millimètre, ce qui indique une dépression diastolique remarquablement faible. Ceci constaté, on prolonge, en avant, l'orifice de la carapace, en lui donnant une longueur double, et Ton coupe nécessaire- ment une partie des attaches dorsales du cœur. Immédiatement les descentes de la face supérieure de l'organe deviennent consi- dérablement plus profondes et, dans deux graphiques successifs, les parties ascendantes et descendantes ont 5 millimètres de hauteur; c'est-à-dire que l'amplitude des mouvements du cœur est cinq fois plus grande que précédemment. FiG. 2. — Graphiques des mouvements de la face dorsale du cœur du Homard. A avant la section des attaches dorsales du cœur, B après la section de ces attaches. Lecture de droite à gauche (*). (*] Légère altération dans la forme, probablement par suite d'un petit frottement. La même expérience, répétée sur le Crabe tourteau, conduit à très peu près à un résultat identique. Du reste, l'observation directe du cœur de l'animal vivant donne la même conviction. Chez un Homard robuste, on fait à la carapace, et au-dessus du cœur, quatre petits traits de scie limitant un carré, puis on soulève légèrement le bord antérieur de cette espèce de cou- vercle mobile, de façon à voir le. cœur sans rompre aucune de ses attaches. Les attaches dorsales sont nettement visibles, sous forme de brides verticales presque aussi transparentes que du verre; l'organe bat assez régulièrement; grâce à des bulles d'air mélangées au sang par suite de l'opération qui vient d'être pra- — 610 — liquée, on voit, à chaque diastole, le liquide sanguin du sinus péricardique se précipiter dans le cœur par ses orifices dor- saux. Après avoir bien constaté que le mouvement de dépression de la face supérieure du cœur (diastole) est faible, on coupe les attaches dorsales. La face supérieure du cœur s'affaisse brus- quement, puis, les pulsations continuant, on voit les mouve- ments diastoliques prendre le caractère d'abaissements profonds, la face dorsale du cœur devenant, chaque fois, nettement concave. Les graphiques obtenus en pratiquant à la carapace un ori- rifice assez large pour mettre le cœur en grande partie à nu pèchent donc par une amplitude exagérée. Ce n'est cependant nullement une raison pour les rejeter. En effet, les expériences multiples que j'ai effectuées depuis deux ans, me permettent d'affirmer que pour les animaux de même espèce, placés dans les mêmes conditions physiologiques, tous les graphiques obtenus par une même méthode sont sensi- blement identiques. Lors de conditions physiologiques diffé- rentes, les tracés répondant à une Jarge ouverture de la carapace sont donc tout aussi bien comparables entre eux que les tracés parfaitement normaux répondant à une ouverture étroite. Comme la méthode de l'ouverture large est la plus facile à employer, comme c'est la seule réellement pratique dans le cas de petits Crustacés (Écrevisse, Crabe), comme enfin c'est celle que j'ai mise le plus fréquemment en usage, le lecteur est donc averti, une fois pour toutes, que les graphiques reproduits dans ce travail représentent les mouvements de cœurs de Crustacés dont les attaches dorsales sont rompues; mais il se rappellera, en même temps, que ces graphiques traduisent clairement tous les troubles, toutes les modifications qui sont survenues dans la fréquence et la forme des pulsations des cœurs des Crustacés étudiés. Ces préliminaires posés, tâchons d'arriver à une interprétation nette du graphique que donne le levier lorsqu'il repose sur la face dorsale du cœur. — 611 — Dans ma première notice (1), je m'étais exprimé comme suit : a Ce tracé ne doit pas être interprété comme celui que donne un D cœur de vertébré. En effet, ici, les parties ascendantes de la D courbe répondent à la diastole et les parties descendantes » à la systole. C'est, comme on peut s'en assurer par la simple » observation, lorsque le cœur se dilate qu'il soulève le levier » et c'est lorsqu'il se contracte que le levier s'abaisse. j> Peu de temps après cette publication, notre maître à tous en fait de méthode graphique, M. le professeur Marey, me fit l'hon- neur de m'écrire. 11 émettait des doutes sérieux sur mon inter- prétation. « En opérant autrefois, disait-il dans sa lettre, sur de » gros Crabes, sur des Langoustes et des Homards, j'ai obtenu » des tracés que j'ai cru devoir interpréter comme ceux du » cœur ordinaire; c'est-à-dire que le soulèvement du levier m'a » paru produit par le durcissement systolique du cœur. Je crois » indispensable de vérifier ce fait. Il y a antagonisme entre » les changements de volume de l'organe et les changements » de consistance, d Dès que la chose me fut possible, je m'occupai activement d'expériences permettant de résoudre cette importante question et je ne tardai pas à m'assurer que M. Marey avait parfaitement raison. Comme la simple observation directe des mouvements du cœur pourrait encore induire en erreur d'autres que moi (2) et qu'il est nécessaire de faire disparaître tout doute à cet égard, j'exposerai brièvement comment je suis arrivé à la vérité. Il s'agissait d'abord de constater expérimentalement ce fait qui paraît toujours étrange a priori à un débutant, que la période d'élévation de la face dorsale, par conséquent de gonfle- ment apparent du cœur et d'ascension du levier, est la période de contraction ou de systole. (1) Communication préliminaire, etc., p. 5. (2) Celte erreur est très naturelle et il m'est arrivé plusieurs fois de voir soit des collègues, soit des élèves qui assistaient à l'une ou l'autre de mes expériences, commettre la même interprétation fausse et prendre la phase de soulèvement du levier pour la phase diastolique. — 61â — Le premier procédé employé consista à s'assurer si le sang était bien réellement chassé dans les artères au moment de l'élévation de la face supérieure du cœur. Chez une Écrevisse robuste , on enlève une grande portion de la carapace , de façon à mettre à nu le cœur et les artères (céphalique et anlennaires) qui naissent de la partie antérieure de cet organe. On pique ensuite le cœur à l'aide d'un petit tube de verre effilé renfermant un liquide coloré (solution très fluide de gomme arabique^additionnée de. bleu de Prusse); on intro- duit ainsi dans le cœur une petite quantité de matière colorante et l'on cherche à saisir la forme que prend l'organe pulsatile au moment où le liquide bleu pénètre dans les artères, moment qui doit évidemment répondre à la systole. J'ai toujours observé qu'à l'instant précis oii la première onde colorée entre dans les vaisseaux, la face supérieure du cœur est soulevée. A ma demande, M. le professeur Léon Fredericq, alors au laboratoire de zoologie expérimentale de Roscoff, voulut bien répéter cette expérience sur le Homard; il constata également que le liquide coloré (eau de mer et bleu de Prusse) pénètre dans les artères au moment du soulèvement de la face dorsale du cœur. Ce premier fait étant parfaitement élucidé, restait, comme confirmation, à s'assurer si c'est bien pendant la période d'afî"ais- sement de la face supérieure, période qui répondrait, d'après ce qui précède, à la diastole, que s'opère l'ouverture des orifices du cœur. Dans ce cas encore, la réponse fut affirmative. L'observation du cœur de l'Écrevisse à la loupe, celle du cœur des crustacés plus grands à l'œil nu, montrent que les orifices dorsaux (les seuls que l'on puisse bien voir directement) s'ouvrent au moment de l'affaissement de la face dorsale et se ferment pendant le relèvement de celle-ci. L'interprétation des graphiques devient donc fort simple; la ligne brisée qui figure le mouvement de la face supérieure du cœur se compose 1" d'une portion ascendante et d'une portion — 613 — presque horizontale, supérieure, représentant, à elles deux, la systole, puis 2" d'une portion brusquement descendante et d'une partie horizontale inférieure, représentant, à elles deux aussi, la diastole. Cependant les graphiques parfaitement normaux se prêtent mal, par leur faible amplitude, à une analyse complète; il est préférable d'examiner un tracé ample obtenu, comme d'ordi- naire, après rupture des attaches dorsales du cœur. FiG. 3. — Graphique des mouvements de la face dorsale du cœur du Homard. Lecture de droite à gauche s. systole, d. diastole. Un pareil tracé {(ig. 3) rappelle d'une manière frappante celui que donne la secousse d'un muscle, c'est-à-dire une ascension rapide, presque brusque, phase d'énergie croissante [systole), terminée par une courte phase moins rapide {plateau systoliqiie); puis une descente graduelle à vitesse variable, d'abord rapide, puis plus lente, phase d'énergie décroissante (diastole). Quoique les graphiques fournis par un cœur de Crustacé donnent la courbe d'un gonflement musculaire et non celle d'un raccourcissement, il est fort intéressant de comparerla figure ci-dessus avec celle du graphique de la secousse musculaire dans le muscle fléchisseur du doigt mobile de la pince du Homard publié par Léon Fredericq et Vandevelde dans leur notice intitulée : Physiologie des muscles et des nerfs du Homard (1). Dogiel était arrivé, pour la Langouste, à une conclusion ana- logue; Texcitation électrique d'un cœur de Langouste isolé lui ayant fourni des secousses tout à fait semblables à celles des autres muscles du corps irrités par l'électricité. (1) Archives de Biologie de Van Beneden et Van Bambeke, t. I, fascicule I, page 7, figure 2. — 614 — Cette grande ressemblance entre la courbe du mouvement du cœur d'unCrustacé et celle de la secousse de ses propres muscles est parfaitement en accord avec ce que Marey a constaté chez les Vertébrés. Pour Marey, la systole d'un cœur de Vertébré ne répond pas à la contraction d'un muscle, laquelle résulte de la fusion d'une série de secousses, mais à une secousse musculaire simple. Le graphique de la systole d'un cœur isolé et vide est presque identique à celui de la secousse musculaire; la fatigue, la chaleur, le froid, modifient ces deux courbes de façons sem- blables {Ì). Marey est revenu sur cette question importante dans son ouvrage: La méthode graphique dans les sciences experiment tales (2). 11 résulte donc des études du savant physiologiste et de celles qui ont été faites sur les Crustacés que, chez les Arthropodes, comme chez les Vertébrés, le cœur est nn muscle ne donnant jamais de contraction parfaite, mais seulement des secousses incomplètement fusionnées. § IIÏ. — Excitation directe du coeur par l'électricité. Il y a déjà longtemps que W^eber (3) excitant le cœur de l'Écrevisse par un courant d'induction observa que ce cœur se contracte et que la contraction persiste pendant toute la durée de Texcilation. A. Brandt (4) conclut plus tard de cette expé- rience à l'identité entre le tétanos du cœur des Crustacés et le tétanos musculaire. La conclusion était fort naturelle, mais elle (!) Travaux du laboratoire de M. Marey. Année 1875, pp. 43 à 50. (2) Page 256. (3) E. H. Weber, Ueber Ed. Weber's Entdeckungeninder Lehre, v. d. Mus- kelcontr action (Mùller 's Archiv. 1846, page 504). (4) A. Brawdt l^hysiologische Beobachtungen am Herzen des Flusskrebses (Bullet, acad. se. de S'-Pétersbourg, t. Vili, 1865, col. 422). — 615 — demandait une confirmation par les méthodes dont nous dis- posons aujourd'hui. Je viens de montrer dans le paragraphe précédent que l'on pouvait parfaitement comparer le cœur à un muscle ordinaire. La façon dont l'un et l'autre répondent à certaines excitations est, en effet, sensiblement la môme. On sait que si l'un fait agir sur un muscle de Vertébré une série d'excitations successives suffisamment rapprochées , le muscle reste en état de contraction permanente, de tétanos (1). Dans leurs expériences déjà citées, Fredericq et Vandevelde ont réobservé ce phénomène chez les Crustacés. En soumet- tant un muscle de Homard à des chocs d'induction espacés (10 par seconde), ils déterminaient dans le muscle une série de secousses déjà assez rapprochées pour se fusionner en partie et pour donner, comme graphique, une ligne ondulée. En employant des chocs plus rapides (20 par seconde) les secousses se fusionnaient complètement et le muscle en tétanos parfait donnait, comme graphique, une ligne droite (2). J'ai employé, pour le cœur des Crustacés l'appareil portatif de Gaifîe (pince électrique et chariot de Du Bois-Reymond, petit modèle) alimenté par un seul élément de pile au bichromate. La bobine était enfoncée tantôt jusqu'au n° 4 Ya^ tantôt jusqu'au n** 6 de la graduation. En appliquant les pointes de la pince électrique sur le cœur vivant, en place, j'ai obtenu constamment un arrêt en systole dont le graphique était ou bien une ligne droite (tétanos parfait (fig. 4-) Fig. 4. — Graphique du tétanos, cœur de l'Écrevisse. ou bien une ligne ondulée (fig. 5). (1) Voyez les traités de physiologie, entre autres: Nouveaux éléments de physiologie humaine de H. Beaunis, 2« édition, page 437. Paris 1880. (2) Archives de Biologie , déj^ citées, page 9. 616 — L'existence des ondulations accompagnant l'arrêt systolique du cœur dans certaines expé- riences (fig. 5) s'explique très facilement. Il est connu que plus les secousses d'un muscle sont allongées, plus le tétanos s'obtient aisément. En d'autres termes, il faut , dans le même temps, un nombre d'excitations plus grand pour téta- niser un muscle à secousses brèves que pour tétaniser un muscle à secousses lentes. Or comparons les deux graphiques des fig. 4 et 5. Le courant était sensiblement de même intensité; les chocs d'induction étaient à très peu près espacés de même; mais dans l'une des expériences faites sur l'Écrevisse (fig. 4) les con- tractions du cœur étaient relativement lentes, le tétanos s'est produit complètement; dans l'autre, faite sur le Homard, les contractions systoliques du cœur étaient très brèves (fig. 5a) et le tétanos a été accompagné d'ondulations indiquant une fusion incomplète. Dans toutes mes expériences , le phénomène général s'est produit avec les mêmes allures; toujours l'arrêt du cœur s'est fait en systole. Dogiel avait fait antérieurement des essais analogues. L'excitation électrique directe du cœur de la Langouste lui a donné, comme dans mes expériences, un arrêt systolique. Si j'en juge par ses tracés, les pulsations du cœur des ^_ animaux qu'il obser vait étaient lentes; aussi la tètani sation a-t-elle été complète (1). :3 I (1) On voit que j'insisle sur ce fait que l'excilation électrique du cœur déter- mine un arrêt en systole. Lemoine que je n'ai pas cité dans le texte parce qu'il paraît avoir fait usage de la pince zinc et cuivre à eau acidulée, par conséquent d'un courant continu, n'a obtenu par ce procédé, chez le Homard, que la con- 617 § IV. — Changements de forme du coeur pendant LES PULSATIONS. A. — Changements dans le sens vertical. On a vu, § II, que lors de la systole, la face dorsale du cœur se soulève et que, lors de la diastole, cette même face s'abaisse. Lemoine qui a observé directement les mouvements du cœur du Homard dit nettement que la face dorsale de Porgane est concave en diastole et convexe en systole (1). Ceci n'est pas tout à fait exact. Si l'on a fait à la carapace une ouverture assez large et si l'on se place de façon à voir le cœur de profil, on constate (fig. 9, pi. XXVIÏ) que la ligne médiane antéropostérieure de la face dorsale, concave dans la diastole, ne devient jamais convexe, dans le sens propre du mot, lors de la systole. Il y a tout simplement disparition de la concavité et rétablissement de la ligne droite ou à peu près. Si l'on regarde le cœur par-dessus (fig. 13, pi. XXVII), on observe pendant la diastole, la production de deux dépressions longitudinales latérales accupant les deux tiers postérieurs du cœur et séparées par une légère crête médiane; pendant la systole, ces deux dépressions sont remplacées par deux légers renflements et la crête s'efface tout à fait. Quels sont les phénomènes que présente, pendant ce temps, la face inférieure du cœur? Pour élucider ce point chez le Homard, j'ai employé deux leviers marchant simultanément et destinés à donner à la fois les tracés fournis par les deux faces. L'un de ces leviers est le levier ordinaire; son appendice re- pose sur la face dorsale du cœur. traction limitée et locale de la portion du cœur touchée par les pointes de la pince; mais, chez TÉcrevisse dont le cœur est beaucoup plus petit, il a observé la systole de l'organe entier. (Lemoine Recherches, op. cit., p. 171 ) Après tous ces faits, j'avoue ne pas comprendre plus que Lemoine qui signale lui-même le désaccord, comment Foster a pu obtenir, par l'excitation électrique directe, l'arrêt du cœur du Crabe en diastole. (1) Lemoine, Recherches, etc., op. cit., p. 133. — 618 — Le deuxième levier, plus court que le précédent de 15 milli- mètres, présente, comme appendice, une sorte d'étrier formé d'un fil de laiton replié de façon à contourner la paroi latérale de l'organe pulsatile et venant se terminer, sous ce dernier, par une petite plaque horizontale. Ainsi que l'indique la figure 7, planche XXVIf, un fil de caout- chouc opérant une légère traction vers le haut maintient la plaque de l'étrier en contact avec la face inférieure du cœur. L'appareil étant en action, on voit immédiatement qu'à cha- que systole, les extrémités inscrivantes des deux leviers se rap- prochent et qu'à chaque diastole elles s'écartent (1). FiG. 6. Homard. — V. Graphique des mouvements de la face ventrale. D. id. de la face dorsale. Lecture de droite à gauche. Le double graphique, figure 6, montre clairement en tenant (1) Malgré les apparences, il n'y a ici aucune contradiction entre les phéno- mènes décrits, la figure 6 et les conclusions que j'en ai déduites. A cause de la présence de Tétrier, le levier qui inscrit les mouvements de la face inférieure du cœur a son axe et son extrémité inscrivante situés plus haut que Taxe et Textrê- mité du levier reposant sur la face dorsale, de sorte que le graphique représentant les déplacements de la face inférieure est au dessus de l'autre. — 619 — compte de la différence de longueur des leviers, que les mouve- ments des deux faces du cœur sont parfaitement simultanés. La figure indique même en [a) qu'un léger trouble dans l'une des pulsations s'est traduit également pour les deux faces. L'amplitude plus faible que l'on remarque dans les courbes du tracé (F) de la face inférieure ne tient pas seulement à la longueur moindre du levier et au mécanisme un peu plus compliqué que cette face avait à déplacer; l'observation directe prouve, comme j'aurai l'occasion de le montrer plus loin, que les mouvements de la face inférieure du cœur sont réellement moins accusés que ceux de la face dorsale. Il résulte évidemment de l'expérience ci-dessus, que lors de la systole, le diamètre vertical du cœur augmente et que ce diamètre diminue dans la diastole. Or ce phénomène n'est évi- demment possible que s'il y a, en même temps, rétrécissement transversal au moment systolique et élargissement dans le même sens au moment diastolique. B. — Changements de forme dans le sens transversal. Ce changement de forme dans le sens transversal, évident a priori, se constate assez aisément dans son ensemble. En regar- dant battre un cœur d'Écrevisse, on voit que sa largeur diminue pendant l'ascension de la face dorsale (systole) et qu'elle aug- mente pendant la dépression de cette face (diastole). Si l'on s'adresse au cœur du Homard, l'étude des détails de- vient plus facile. Je m'occuperai d'abord de la face supérieure. L'examen de cette face, sur le cœur en mouvement, montre qu'à chaque systole, tous les angles rentrants compris entre les grandes attaches périphériques se creusent davantage et que le diamètre transversal de la face supérieure, pris à la hauteur des oriflces dorsaux (1), diminue d'une quantité qui, mesurée au compas, est sensiblement Vedu diamètre maximum en diastole (2). (1) Limite entre le tiers antérieur et les deux tiers postérieurs. (2) Trois millimètres pour un cœur de 18 millimètres de largeur en diastole. - 620 — Mais, en même temps, on perçoit le fait dont j'ai déjà parlé, page 617, d'un gonflement et, par suite, d'une légère augmenta- tion du diamètre transverse pris à la hauteur du tiers posté- rieur. Après quelques tâtonnements, j'ai réussi à obtenir des gra- phiques prouvant clairement qu'il n'y a pas là d'illusion. Deux leviers inscrivent simultanément, sur le cylindre, les mouve- ment de la force dorsale et de l'un de ses bords latéraux. Le levier qui donne le tracé de la face dorsale est nécessairement le levier ordinaire. L'autre, destiné au bord latéral, est une tige pliée à angle droit; l'une des branches est courte, descendante et s'appuie contre le bord droit du cœur; l'autre est longue et fait fonction de style inscrivant. Le point de suspension étant au sommet de l'angle, le poids de la longue branche suffit pour maintenir la petite en contact avec la paroi de l'organe pulsatile (fig. 8, pL XXVII). Un support mobile, inutile à décrire, permet de déplacer le système de manière à faire donner au levier des tracés répon- dant aux diverses régions des bords latéraux. FiG, 7. — Homard, double graphique donné par la face dorsale D et le bord latéral L, à la hauteur du tiers postérieur. Lecture de droite à gauche. Le graphique de la figure 8 prouve que, si la branche verticale du levier coudé s'appuie contre le bord latéral du cœur à la hauteur du premier tiers (ligne passant par les orifices dorsaux), — 621 — le tracé fourni par ce point du bord est effectivement antagoniste de celui que donne en même temps la face supérieure. FiG. 8. — Homard, double graphique donné par la face dorsale D et le bord latéral L à la hauteur du tiers antérieur (au niveau des orifices dorsaux). Si, au contraire, la branche verticale du levier coudé s'appuie contre le tiers postérieur du, bord latéral, les deux tracés de ce bord et de la face supérieure indiquent tous deux un renflement manifeste pendant la systole (fig. 7). Ainsi, quand un cœur de Crustacé décapode exécute le mou- mouvement systolique, sa face supérieure ne se rétrécit pas transversalement dans toute son étendue, mais présente une diminution du diamètre transversal dans son tiers antérieur seulement et une augmentation de ce diamètre dans ses deux tiers postérieurs. Passons maintenant à Tétude des changements de forme des faces latérales. La coupe verticale et transversale du cœur (fìg. iOa, pi. XXVII) est à peu près un trapèze, comprenant un grand côté horizontal supérieur, un petit côté horizontal inférieur et des côtés latéraux obliques. Les faces latérales du cœur sont donc inclinées de haut en bas et de dehors en dedans. Cette inclinaison et quelques autres difficultés résultant, par exemple, de la saillie des bords de la face supérieure ne m'ont pas permis de faire utilement usage d'un levier inscripteur. J'ai 42 — 622 — eu recours à Tobservation directe, en employant une méthode à la vérité brutale, mais dont les résultats sont d'une netteté telle qu'ils excuseront aux yeux des physiologistes la cruauté du procédé. Chez un Homard vif et vigoureux, solidement fixé sur la planchette à l'aide de deux liens indépendants, l'un pour l'abdo- men, l'autre pour le céphalothorax, on divise rapidement le corps en deux, immédiatement en arrière du cœur; on éloigne l'abdomen qui s'agite convulsivement et dont les fausses pattes exécutent des battements rapides, puis, mettant le support dans une position commode pour l'expérimentateur, on observe, à l'aide d'une large loupe à grossissement faible, la section ver- ticale et transversale du céphalothorax de l'animal vivant (1). Cette section est à peu près celle représentée figure 5, plan- che XXVI. Le cœur que l'on voit ainsi par l'arrière continue à battre pendant longtemps; ce qui permet d'analyser une foule de dé- tails intéressants; l'ascension de la face dorsale, lors de la systole, le déplacement moins accusé de la face ventrale, le creusement des angles rentrants entre les attaches, les change- ments d'aspect de ces mêmes attaches, cette fois aussi bien des inférieures que des latérales, ou des supérieures. Ces attaches s'effilent et deviennent transparentes, ou se raccourcissent et prennent de l'opacité. Quant aux faces latérales obliques, on les voit nettement se creuser, rentrer en systole et reprendre une forme plus voisine du plan en diastole. Leurs mouvements sont moins accusés que ceux de la face supérieure et plus profonds que ceux de la face inférieure. Le rétrécissement transversal du cœur pendant la systole est donc clairement constaté. (1) Le mot vivant exprime bien la réalité : les battements de la deuxième paire de mâchoires continuaient; le Crustacé cherchait à dégager ses pinces et les mou- vements étaient parfois si violents qu'ils obligeaient à interrompre les obser- vations. — 623 — C. — Changement dans le seìis longitudinal. Enfin, j'ai pu m'assurer, par la même occasion, d'un dernier fait indiqué comme probable mais qu'il eût été bien difficile d'ob- server autrement que par le procédé employé : le raccourcisse- ment systolique du cœur. On sait que de l'extrémité postérieure du cœur des Décapodes part une artère verticale descendante, l'artère sternale. Or, à cbaque systole, c'est-à-dire au moment du relèvement de la face supérieure du cœur, la racine de l'artère sternale exécute un mouvement très net d'arrière en avant. D. — Fausse onde du cœur. ïl me reste, pour terminer ce qui concerne les changements de forme du cœur pendant les pulsations, à revenir sur ce que j'ai appelé autrefois Vonde du cœur et à rectilier de précédentes conclusions inexactes. Dans ma Communication préliminaire (1) je m'exprimais de la façon suivante: « .... le cœur des Crustacés supérieurs, » malgré son peu de longueur, ne se comporte pas comme une » simple ampoule qui se gonfle et se dégonfle; la méthode gra- ft phique permet d'y constater une onde musculaire marchant » d'arrière en avant, comme chez les insectes, par exemple, et .9 prouvant qu'il s'agit ici d'un véritable vaisseau dorsal. » « Pour déceler ce fait, la petite plaque de liège qui repose sur » le cœur est modifiée; on lui donne la forme d'un rectangle » allongé, à peu près aussi long que le cœur, de sorte qu'à chaque » onde cardiaque, portée successivement par les diff'érents points » culminants, elle oscille sur le cœur comme une petite barque » sur les vagues. Le levier est disposé de façon à se mouvoir » horizontalement ; le cylindre tournant est horizontal. » « Le tracé montre non -seulement l'onde en question mais.... etc. » (1) Bulletin de l'Acad. roy. de Belgique, 2« série, t. XL VI, n» 8, août 1878. ~ 624 — Le graphique (fig. 9) fourni par l'Écrevisse, dans les conditions que je viens d'exposer, est un exemple des tracés que je pensais alors devoir interpréter comme l'indication évidente d'une onde cardiaque. J'ai cru utile de le reproduire pour faire mieux saisir la cause de mon erreur. FiG. 9. — Écrevisse, fausse onde du cœur; graphique des mouvements de la face dorsale; plaque de liège longue; levier se mouvant horizontalement; cylindre tour- nant horizontal. (Lecture de droite à gauche.) Dans ce cas encore, M. le professeur Marey me rendit le ser- vice de me mettre en garde contre une illusion et de m'engager à faire de nouveaux essais. Je recommençai donc, cette fois sur le Homard, en employant deux leviers ordinaires reposant tous deux sur la face supé- rieure du cœur; l'un sur la région antérieure de l'organe, l'autre surla région postérieure. Le cylindre tournant était vertical. Le levier postérieur était plus long que l'autre de 11 millimètres, FiG. 40. — Homard. Graphiques des mouvements de la partie antérieure et de la partie postérieure de la face dorsale du cœur. Deux leviers marchant simultanément. En reculant la graphique inférieur vers la gauche de la longueur a b, soit il millimètres ou la différence de longueur des leviers, les tracés sont très à peu près superposables. afin qu'ils fussent tous deux tangents à la fois à la surface enfumée et que les deux tracés fussent, par suite, simultanés. — 625 — Or, dans ces conditions, je vis les deux leviers marcher abso- lument en même temps et fournir deux tracés qui, en tenant compte de la différence de longueur des leviers, étaient presque exactement superposables (fig. 10). C'était la démonstration de mon erreur. L'onde cardiaque n'est pas sensible ; tout le cœur se contracte en systole en bloc. Quant aux oscillations de la plaque de liège dans mes anciennes expériences (fig. 9), elles s'expliquent très bien parla forme que prend la face dorsale pendant la systole, cette face offrant alors les deux renflements latéro-postérieurs indiqués fig. 15, pi. XXVII. E. — Résumé. L'observation directe et la méthode graphique nous ont fourni tous les éléments nécessaires pour décrire exactement les chan- gements qui surviennent dans la forme du cœur d'un Décapode pendant les pulsations. Je résume les faits dans le tableau ci-dessous : se soulève; son profil longitudinal se rap- proche de la ligne droite; deux renfle- ments latéraux s'observent dans ses deux tiers postérieurs; elle se rétrécit trans- versalement à la hauteur du tiers anté- rieur; son diamètre transversal augmente dans les deux tiers postérieurs, s'abaisse; son mouvement est moins pro- noncé que celui de la face supérieure. se creusent. augmente. diminue. diminue un peu. La face supérieure . SYSTOLE La face inférieure .... Les faces latérales .... Le diamètre vertical . . . — transversal . — longitudinal. Les angles rentrants entre les attaches conjonc- tives latérales Les attaches conjonctives latérales Les attachés verticales. . Les orifices du cœur . . . se creusent. [ se tendent, s'effilent, deviennent transpa- ( rentes. se raccourcissent et prennent de l'opacité. se ferment. — 626 — La face supérieure. DlitSTOIiE I s'affaisse; son profil devient concave; deux dépressions latérales se montrent dans les deux tiers postérieurs ; sur la ligne médiane apparaît une crêle plus ou moins prononcée; son diamètre trans- versal augmente à la hauteur du tiers antérieur. se soulève légèrement. se rapprochent de la forme plane. diminue. augmente. augmente un peu. La face inférieure Les faces latérales .... Le diamètre vertical . . . — transversal . — longitudinal. Les angles rentrants entre les attaches latérales. . Les attaches conjonctives ( 3, raccourcissent et deviennent opaques latérales ' ) deviennent moins profonds. Les attaches verticales . Les orifices du cœur . . s'effilent, s'ouvrent. § V. — RÔLE DU SINUS PÉRICARDIQUE. D'après ce que j'ai exposé § I, les parois du sinus péricardique comprennent une voûte et un plancher. La nature purement conjonctive de la voûte, son adhérence à la face interne de la carapace, indiquent que cette portion supé- rieure des parois est passive et immobile. En est-il de même du plancher? Son immobilité ne saurait être déduite, a priori, d'aucune considération anatomique et sa texture histologique ferait, au contraire, supposer des mouve- ments d'une certaine étendue puisque Brocchi, Dogiel et moi- même y avons constaté la présence d'une couche de fibres mus- culaires. Bien que le plancher péricardique soit très mince, l'existence d'éléments musculaires entrant dans sa composition rendait l'étude de sa fonction et, par suite, celle du rôle du sinus péri- cardique, dans la circulation, excessivement intéressante. Jusqu'à présent, en effet, on s'est trouvé, au sujet de ce rôle, en face de deux opinions opposées. — 627 — D'après la première qui est celle de la généralité des auteurs qui ont écrit sur les Crustacés (1), les parois du sinus, aussi bien le plancher que les autres, sont réduites à l'immobilité; le sinus est un sac passif; les déplacements du sang sont exclusivement dus au cœur proprement dit qui, à la façon d'une pompe aspi- rante et fonlante, aspire le sang du sinus lors de la diastole et le refoule, pendant la systole, avec une force suffisante non-seu- lement pour lui faire parcourir le réseau des artères à parois propres, mais de plus pour déterminer toute la circulation de retour par les sinus veineux, vaincre la résistance très grande des canaux du système branchial et ramener enfin le liquide au sinus péricardique. D'après la deuxième opinion, relativement récente, le plan- cher péricardique exercerait une action mécanique d'une cer- taine importance. Les naturalistes qui admettent cette action sont cependant loin de l'avoir conçue de la même manière. Brocchi qui, comme je le rappelais plus haul, a signalé le pre- mier des fibres musculaires dans le plancher péricardique, s'ex- prime ainsi: « la contractilité de la poche péricardique peut être » maintenant admise; & et plus loin: « je pense donc que, sans D vouloir assimiler à une oreillette le sinus péricardique, on peut » lui supposer un rôle dans la circulation, celui, par exemple, » d'aider au passage du sang provenant des branchies à travers i> les boutonnières du cœur. » Dogiel (2), se basant sur l'existence des nombreuses brides con- jonctives qui relient le cœur aux parois du sinus et sur le résultat d'expériences dont je reparlerai et dans lesquelles il obtenait l'arrêt du cœur en diastole par l'excitation électrique du péri- carde, voit, dans le plancher péricardique, l'agent principal ou du moins l'un des agents mécaniques principaux de la diastole: « La membrane péricardique, retenue aux téguments d'une part (1) Y compris Straus Durckheim, quoiqu'on ait voulu lui faire dire le con- traire. (Voyez sou Traité pratique et théorique d'anatomie comparative. T. II, Paris, 1843, p. 247.) (2) De la structure et des fonctions du cœur des Crustacés, o^. cit. p. 406. — 628 — » et raccourcie de l'autre par la contraction des fibres muscu- » laires qu'elle contient, exerce une traction sur les parois du » cœur par le moyen des ligaments qui l'y rattachent... Le cœur » se trouve ainsi distendu et maintenu en diastole. » Enfin, il est une troisième façon de concevoir l'effet de con- tractions régulières du plancher musculaire du sinus. Graber (i) a montré que le vaisseau dorsal des insectes ne constitue qu'une partie du système propulseur du sang; que les groupes triangulaires de fibres musculaires connus, depuis Lyonnet sous le nom d'ailes du cœur, n'avaient en aucune façon pour fonction de dilater ce dernier, mais qu'ils s'unissaient sur la ligne médiane, sous le vaisseau dcrsal, pour former un long diaphragme convexe vers le haut, et percé d'ouvertures latérales. Lorsque ce diaphragme se contracte et tend à se rapprocher de la forme plane, il comprime la masse des viscères situés au- dessous et oblige une partie du sang remplissant les sinus inter- stitiels à passer au-dessus du diaphragme dans l'espace qui entoure directement le cœur et qui, sauf des détails, répond à peu près au sinus péricardique des Crustacés. Les faits observés par Graber chez les insectes font immédia- tement songer au plancher du sinus des Décapodes. L'analogie paraît, au premier abord évidente et m'a séduit un instant ; même structure, même courbure , même disposition transversale des fibres musculaires, mêmes rapports avec le cœur et les autres organes. L'hypothèse d'après laquelle le plancher péricardique des Crustacés comprimerait lui aussi, à intervalles réguliers, les viscères sous-jacents, pour aider à la circulation de retour, vaut certainement les autres opinions émises. En résumé les théories concernant le rôle des parois du sinus sont les suivantes: l** ces parois sont absolument immobiles; 2° le plancher contractile peut exercer une pression sur le sang remplissant la poche et aider à la pénétration du liquide dans (1) Vorlàufiger Bericht Uber den propulsatorischen Apparat, der Insekten. (Sitz. Ber. de Vienne. 1872). — Die Insekten. 1. Theil, page 343, fig. 174 et 17S. Miinchen, 1877. — 629 — le cœur ; 3° le plancher en se contractant exerce une traction sur les attaches du cœur et facilite la diastole; 4" le plancher comprime les viscères sous-jacents et chasse le sang veineux vers les branchies et, par suite, vers le sinus. Des expériences et des observations étaient indispensables pour déterminer laquelle de ces manières de voir est l'expression de la vérité. Je suis d'abord parti de cette considération très simple que le cœur des Crustacés étant complètement baigné par le sang du sinus péricardique, se trouve dans les conditions d'une poche en caoutchouc offrant des ouvertures et plongée au sein d'un liquide contenu dans un vase. La quantité de matière de la poche ne variant pas, aucun de ses changements de forme, de ses états de distension ou de contraction n'aura d'influence sen- sible sur le niveau du liquide (1). En mettant, par conséquent, le sinus péricardique en com- munication avec un tube de verre vertical dans lequel le sang s'élèverait naturellement jusqu'à une certaine hauteur, je devais obtenir l'un ou l'autre des résultats suivants: ou bien le niveau dans le tube deviendrait stationnaire, ce qui prouverait l'immo- bilité des parois du sinus, ou bien ce niveau offrirait des oscil- lations plus ou moins régulières devant être attribuées aux parois du sinus et non au cœur. J'ai donc fait à la partie dorsale de la carapace d'un Homard (1) Comme il est bon de vérifier expérimentalement les choses en apparence les plus évidentes, j'ai fait une expérience que l'on peut, si l'on veut, qualifier de naïveté, mais qui lève tous les doutes possibles. Au fond d'une éprouvette étroite, graduée et contenant de l'eau, on met une, deux ou plusieurs petites balles creuses en caoutchouc, dans les parois desquelles on a pratiqué quelques orifices de '/, centimètre de largeur environ. Les balles ^ue j'ai employées avaient 3 centi- mètres de diamètre. Une tige métallique sert à les comprimer au fond de réprouvette. La légère différence de niveau produite par la descente de la tige étant déter- minée une fois pour toutes, et l'air contenu dans les balles ayant été chassé et remplacé par de l'eau, on constate que la compression de ces balles ou leur retour à la forme sphérique primitive ne modifie en rien le niveau de l'eau dans réprouvette. — 650 — vivant, un peu en dehors de la ligne médiane, dans la région répondant exactement à l'espace du sinus situé entre les attaches latérales principales et les attaches postérieures du cœur (1) une petite ouverture de dimensions déterminées , pratiquée de ma- nière à ne supprimer d'abord qu'un fragment des téguments pro- prement dits et à respecter la voûte sous-jacente du sinus. J'ai enlevé, en premier lieu, une petite lame de la couche tégumentaire calcifiée, puis la lamelle correspondante de la couche chitinogène qui se détachait avec quelque peine. L'orifice restait donc bouché par la voûte du sinus fortement pigmentée en rouge. Les précautions ayant été bien prises, l'animal n'avait pas perdu une goutte de sang. A la loupe et même à l'œil nu, on voyait distinctement la portion de la voûte du sinus limitée par les bords de l'orifice de la carapace, se déprimer d'une petite quantité à intervalles égaux. Ces mouvements, je me hâte de le dire, n'indiquent nullement que les parois du sinus présentent des contractions. Ils sont dus simplement à ce fait que, dans la petite étendue mise à nu et n'adhérant par conséquent plus à une surface solide, la voûte membraneuse cède à la traction de haut en bas d'une ou de quelques-unes des brides conjonctives qui la relient au cœur. Un petit tube de verre de 4 millimètres de diamètre inté- rieur, ouvert aux deux bouts, avait été préparé. Il pouvait s'engager à frottement dans l'ouverture de la carapace et était enveloppé, près d'une de ses extrémités, d'un manchon de mastic gras composé de mie de pain et de saindoux (2). Le tube de verre fut placé verticalement sur l'orifice, puis le mastic gras ayant été appliqué tout autour de sa base, j'enfonçai le tube de quelques millimètres. Cette action eut pour effet, en déchirant la voûte, de mettre le tube en communication large et directe avec le sinus péricardique. (1) Des mesures au compas, prises sur un autre individu de même taille, disséqué, permettent de déterminer ce point avec exactitude. (2) Ce mastic d'une efficacité parfaite, bien meilleur dans ces cas spéciaux que la cire molle, est indiqué par Yung {De la structure inlime et des fondions du système nerveux central des Crustacés décapodes, page 63. Paris, 1879. — 651 — Une colonne de sang s'éleva immédiatement dans le tube jusqu'à 16 millimètres de hauteur au-dessus de la carapace. Ce qui montrait, par parenthèse, que la tension du liquide dans le système lacunaire des Crustacés est faible. Mais ce que je constatai de plus important, c'est que la hau- teur de la colonne sanguine, une fois le maximum atteint, restait invariable. Il était impossible d'y découvrir la moindre oscil- lation (1). Le cœur du Homard battait cependant énergiquement et fournit même, quelques instants après, des tracés très convenables. J'ai répété cette expérience à un an d'intervalle, en plaçant le tube en un point un peu différent, mais sauf ce détail que la colonne de sang s'est élevée encore moins haut, le résultat a été le même. Du reste tous ceux qui ont ouvert (2) le sinus péricardique pour voir les battements du cœur, ont pu constater que le sang ne s'écoule pas de la blessure par ondes rhythmées, mais d'une façon continue et qu'il n'y a projection un peu abondante du liquide que si le Crustacé fait des mouvements généraux amenant des contractions des muscles extenseurs de Tabdomen. Deux faits résultent incontestablement de ces essais: 1° les parois du sinus n'exercent sur le sang aucune pression pouvant être considérée comme efficace; 2° ces parois n'offrent point de contractions et de relâchements alternatifs. L'hypothèse de Brocchi est donc fausse. Pour élucider ce qui concerne les autres , j'ai eu recours à la section verticale et transversale de l'animal vivant, procédé que (1) Il est bien entendu que celte constatation doit se faire immédiatement. Plus tard la coagulation qui arrive assez rapidement détermine la production d'un véritable bouchon. (2) U faut s'entendre sur les termes; je dis dans le texte: tous ceux qui ont ouvert le sinus péricardique, c'est-à-dire qui ont enlevé une grande partie de sa voûte. Il est évident que si Ton se borne à y faire une fente, la partie intacte de la voûte, cédant à la traction des attaches dorsales du cœur, sera déprimée à chaque diastole et que le sang s'échappera, dans ce cas, par ondes espacées. — 652 — j'ai décrit à propos de Tétude des changemeuts dans la forme du cœur (page 622). La section étant sous la grande loupe à grossissement faible, j'ai enlevé ce qui restait de la glande digestive ainsi que les organes génitaux, pour voir nettement le plancher péricardique sous toutes ses faces. Celui-ci se présentait alors comme une nappe transparente d'une excessive minceur , de couleur rosée, légèrement convexe vers le haut, la partie culminante étant située sous le cœur et traversée par l'artère sternale. Le cœur intact battait vigoureusement et régulièrement. On voyait ses brides d'attache s'étendre et se raccourcir alternati- vement, comme je l'ai déjà décrit (pages 625 et 626). Celles de ces brides qui se lixent au plancher entraînaient naturellement peu un celui-ci dans leur mouvement, mais si peu qu'il fallait de l'attention pour s'en apercevoir. Quant à la partie culminante du plancher courbe, celle qui aurait du se déplacer au maximum, elle exécutait, il est vrai, de petits mouvements d'ascension et de descente accompagnant les mouvements systoliques et diastoliques du cœur, mais ces mou- vements dos plus minimes ne comprenaient qu'une course d'en- viron 1 millimètre ! Afin de m'assurer si les fibres musculaires du plancher péri- cardique exerçaient une traction vers le bas, je coupai avec des ciseaux les attaches reliant le cœur à ce plancher; à l'instant celui-ci devint un plan horizontal. Il est donc impossible de nier une action musculaire; mais si l'on veut bien répéter mes observations, on sera frappé du con- traste existant entre une petite nappe musculaire, transparente, à peine plus épaisse qu'un mésentère de Grenouille et le robuste cœur du Crustacé à contractions énergiques, situé au-dessus, les viscères compactes et volumineux placés au-dessous. Ce contraste ne permet d'admettre, de la part du plancher péricardique, ni une action bien efficace sur le cœur, ni une compression de quelque valeur des viscères. Ce que j'exposerai plus loin quanta l'innervation de l'appareil — 633 — circulatoire ajoutera, du reste, à cette opinion une base de plus (1). Je crois n'avoir négligé aucun moyen d'investigation et pou- voir conclure de cette étude sur le rôle des parois du sinus péri- cardique que l'ancienne théorie de la passivité des parois est la seule exacte. Tout le transport du sang, dans la circulation artérielle comme dans la circulation de retour se fait exclusi- vement sous l'action des mouvements du cœur proprement dit. Quant au mince plancher musculaire du sinus, je pense, mais sans preuves directes, qu'il n'a que le modeste effet régulateur d'un ressort, en maintenant les attaches conjonctives inférieures du cœur dans un état de tension suffisant, même pendant la systole (2). § VI. — Influence de la température sur la fréquence et l'énergie des pulsations. On sait que si l'on soumet le cœur des Vertébrés à des tem- pératures de plus en plus élevées, on observe une accélération du rhythme des systoles et qu'on arrive même, pour des tempé- ratures variables suivant les espèces animales , à mettre cet organe en tétanos presque complet (3). Les observations qui ont eu pour objet l'influence de la tem- pérature sur le cœur des animaux articulés, quoique moins complètes, ont toutes, aussi, démontré l'action accélératrice de la chaleur. La première en date (1824) est celle de C.-G. Carus. Cet anatomiste a constaté une accélération dans les mouvements du cœur de l'Écrevisse lorsqu'il exposait l'animal au soleil (4) soit (1) Voyez § IX. (2) La disposition rayonnante des attaches du cœur amène ce résultat que la tension des attaches inférieures détermine la tension de toutes. (3) Mare Y, La méthode graphique, etc., op. cit., p 526. (4) Von den aiissern Lebensbedingungen der iveiss und kallblutigen Thiere. (Mém. couronné. Acad. de Copenhague). Leipzig, 1824, p. 84. — 654 — directement, soit en concentrant les rayons à l'aide d'une lentille. Newport que Ton rencontre toujours en faisant l'historique de la physiologie des Arthropodes a fait sur un Hyménoptère, VAnthopfiora retusa, une observation semblable à celle de Carus. Après une ou deux heures d'exposition de l'insecte au soleil, le nombre des pulsations du vaisseau dorsal était monté de 100 par minute à 440 (1). Yersin, lors de ses études sur la circulation chez les Blattes et les Grillons, a vu le nombre des pulsations du vaisseau dorsal différer, à peu près du double, suivant que le temps était froid ou chaud (2). A. Brandt s'est adressé au cœur de l'Écrevisse isolé du corps; il plongeait ce cœur dans de l'eau à des températures comprises entre 11'' et 50°. L'accroissement de température détermina une accélération sensible et, d'après l'auteur, une énergie plus grande dans les contractions (5). Dans ses intéressantes recherches anatomiques et physiolo- giques sur le cœur de la larve de Corethra plumicornis. Dogiel a mis des larves de Corethra dans de l'eau à diverses températures et noté le nombre de battements du vaisseau dorsal par minute. Il a pu constater ainsi, en expérimentant depuis 0" environ, jusqu'à + oS*" C, qu'une diminution de chaleur ralentit le rhythme des pulsations, tandis qu'un accroissement l'accélère. Il en a conclu, avec raison, que le cœur de la larve de Corethra se comporte, sous l'influence des variations de température, comme un cœur de Vertébré (4). (1) Article Insecta (Cyclopaedia of aDalomy and physiology de Todd., vol. VII, p. 981 . Londres, 1839. (2) Gilè par Maurice Girard, Traité élémentaire d'entomologie, 1. 1, page 21. Paris 1873. (5) Phtjsiologische Beobachtungen am Herzen des Flusskrebses j etc., op. cit. col. 422. (4) Anatomie und Physiologie des Herzens der Larve von Corethra plumi- cornis (Mém. Acad. de S^-Petersbourg, VII^ série, t. XXIV, n° 10, 1877), page 16 des tirés à part. — 635 — Enfin, Graber observant Taction de la température sur le vaisseau dorsal de l'Abeille, a vu que les pulsations de cet organe s'éteignent à peu près vers 0° et saclivent, au contraire, si la température s'élève. Mes expériences ont surtout été faites à l'aide de l'Écrevisse et du Crabe commun. Je parlerai plus loin d'un Coléoptère, VOnjcles nasicornis. Pour obtenir des graphiques des mouvements de la face dor- sale du cœur des crustacés à différentes températures, le cadre en bois qui porte l'axe du levier, ainsi que la planchette sur laquelle l'animal se trouve lié, est fixé au fond d'un baquet en zinc de 4 centimètres de profondeur. Le baquet contient assez d'eau pour couvrir à peu près le corps du Crustacé dont la région médiane de la carapace émerge seule. On ne peut songer à placer l'animal entièrement sous la sur- face du liquide, le contact direct de l'eau avec le cœur mis à nu constituant une cause de trouble dans les mouvements cardia- ques et, par suite, une cause d'erreurs dans les résultats. Le réservoir d'un thermomètre plonge dans l'eau qui entoure leCrustacé. Cet instrument est destiné adonner, à chaque instant, la température du liquide qu'une lampe à gaz placée sous le baquet permet d'échauffer d'une manière graduelle. Chaque fois qu'on prend un tracé, on éloigne la lampe. Comme la température change naturellement un peu pendant la minute que dure la rotation du cylindre enregistreur, on ne note la température qu'à l'instant qui répond à la fin du graphique. Voici les résultats que j'ai obtenus par cette méthode : les graphiques, nécessairement normaux à l'origine, se modifient successivement quant à la forme de la courbe et quant au nombre des battements dans un temps donné. Ces modifications n'ont pas lieu dans le même sens, dès le début. On observe ordinairement, lorsqu'on commence à échauffer l'eau, un certain ralentissement du cœur, puis, en général, à une température qui oscille autour de 30% le rhythme cardiaque — 636 — s'accélère et les pulsations deviennent de plus en plus brèves, la courbe diminuant en même temps de hauteur. FiG. a. — Graphiques des mouvements du cœur du Crabe à différentes températures. Les températures sont inscrites à droite, le nombres de pulsations par minute à gauche. L'accélération croît assez régulièrement jusqu'au moment où la tempéralure de l'eau du bain a alteint une limite supérieure, variable d'un individu à l'autre et que j'estime, en moyenne, à 46'' (1), Au delà de cette limite supérieure, le travail du cœur devient excessivement faible, le tracé, pour les Crabes, par exemple, ne consistant plus qu'en une ligne droite où l'on distingue à peine de toutes petites ondulations (fig. li, A). Tantôt on con- stale en cet instant que le nombre des pulsations par minute est redevenu moindre, tantôt on voit que l'accélération est main- tenue. (1 ) Il eût fallu, pour déterminer cette moyenne avec exactitude, eflfecluerun très grand nombre d'expériences. Je ne crois pas que le résultat cherché ait une assez grande importance pour que je consacre à cette étude plus de temps que je ne rai fait. - 637 - Les tableaux ci-dessous renferment les valeurs obtenues dans six séries d'expériences. Ces valeurs sont déduites de 38 gra- phiques. ECREVISSES. NOMBRE DE PULSATIONS par minute. DE PULSATIONS par minute. •^5 • NOHBRB DE PULSATIONS par mioute. 6^6 8« 130 22o 30O 4|o 48» 50» 44« 22» 34» 36» 41» 46» 48» 76 73 71,5 102,5 90 73 37 35 18» 22» 32» 42» 52» 34 40 40 48 34 8»5 > 19» 30» » 46» 50» OUASES (Oarclnixs xasenas). (lidiTÎdu rigoareoi.) 45 27 32 49 88 76 38 Lei der- nières i l'état de peti- tei ondulations basses. 16» 24» Ì) 36» 43» 47» 48° (lodiTida affaibli.) 8 14 20 45 54 Petites ondulations peu distinctes se con- fondant presque en une ligne droite. 17» 28» 34» 37» 42» 47» 48» 57 » 66 74 > 74 23 (IndiTÎda Tigonreux.) 40 36 69 60 87 89 Petites ondulations peu distinctes se con- fondant presque en oae ligne droite. Je n'ai janiais observé de tétanos du cœur et les tracés (tableau des Crabes, température 48, et fig. 11, A), constitués par une 45 — 658 — suite de toutes petites ondulations formant presque une ligne droite à l'œil nu, ne peuvent être considérés comme indiquant un état tétanique, puisque, en ce moment, le cœur est en relâ- chement ou diastole, comme le montre l'affaissement de sa face dorsale. Lorsqu'on détache le Crustacé, on constate qu'il est mort et raide, quoique la face supérieure du cœur offre encore de légers mouvements. Si l'on se base sur les expériences de Richet (1), il est probable que la mort des Écrevisses et des Crabes arrive lorsque la température de leur corps atteint de 30 à 40 degrés. Le cœur, qui continue cependant à battre, fonctionne alors comme organe indépendant. Du reste, tous les phénomènes que nous venons de décrire ne doivent être envisagés que dans leurs allures générales; en effet, le nombre absolu de pulsations par minute, même dans des con- ditions identiques, diffère souvent beaucoup d'un individu à l'autre et, de plus, les températures indiquées par le thermo- mètre ne sont que celles du bain et non celles du corps des animaux qui s'y trouvent partiellement plongés. Des réflexions analogues sont applicables aux expériences suivantes sur les larves d'Oryctes nasicornis. On sait que ces grosses larves ont les téguments assez trans- parents pour qu'il soit facile de compter les pulsations de leur vaisseau dorsal; tout le monde a pu voir aussi que leur corps est normalement courbé en arc de cercle. J'ai utilisé ces deux faits: La larve à étudier est disposée, courbée sur elle-même dans un plan horizontal, sur une petite couche d'ouate occupant le fond d'une éprouvette de verre; le dos de la larve s'appliquant contre la surface interne du vase, l'observation du vaisseau dorsal se fait aisément. Le réservoir d'un thermomètre occupe le centre (1) Ch. Richet, De IHnfluence de la chaleur sur les fonctions des centres nerveux de VÈcrevisse (,Comptes-rendus, t. 88, n» 19, 12 mai 1879, page 977). — 639 — de Panneau formé par l'insecle; un deuxième tampon d'ouate légèrement tassé par-dessus empêche les mouvements étendus. Enfin réprouvette elle-même plonge de quelques centimètres dans un bain d'eau graduellement chauffé par une lampe. Trois séries d'expériences ont été faites : I II III TEMPÉRATURE NOMBRE de TEMPÉRATURE NOMBRE de TEMPÉRATURE NOMBRE de de l'air pulsations de l'air pulsations de l'air pulsations de l'éprouvette. par minute. de l'éprouvette. par minute. de l'éprouvette. par minuit. 240 14 2S» 21 240 17 330 29 33» 34 340 29 390 31 390 38 440 40 L'élévation de température n'a pu être poussée plus loin, parce que , vers 40% les larves sont tellement agitées que l'obser- vation des pulsations devient très difficile. Le résultat général de ces essais sur l'Écrevisse, sur le Crabe et sur la larve d'Oryctes est donc une simple confirmation des quelques observations faites antérieurement. Chez les Arthro- podes, comme chez les Vertébrés, les accroissements de tempé- rature accélèrent le rhythme du cœur. § VIL — Innervation du coeur et du sinus péricardique. Faits anatomiques. Lemoine a signalé en 1868 une branche nerveuse impaire faisant partie du système nerveux viscéral de l'Écrevisse, nais- sant du ganglion stomatogastrique, longeant la face inférieure de l'artère céphaliqueet aboutissant au cœur entre les faisceaux — 640 — musculaires duquel elle se terminerait en se subdivisant. Lemoine lui donna le nom de nerf cardiaque (1). Dogiel, qui semble avoir ignoré l'existence du travail de Lemoine, décrit, chez la Langouste, des rameaux nerveux qui, prenant origine de la chaîne ganglionnaire, entre la deuxième et la troisième paire de pattes, iraient se terminer en partie dans les parois du sinus péricardique (2). Enfin Berger a figuré et décrit en 1876 des éléments histolo- giques disséminés entre les groupes de fibres musculaires de la partie postérieure du cœur de l'Écrevisse, éléments qu'il regarde comme des cellules nerveuses (5J. Dans ma communication préliminaire, j'avais accepté provi- soirement ces données anatomiques comme exactes, tout en me proposant de les vérifier lorsque les circonstances me le per- mettraient. L'existence du nerf cardiaque de Lemoine est incontestable, je l'ai vu et suivi moi-même chez l'Écrevisse et le Homard, et si je n'ai pu constater histologiquement la manière dont ses rami- fications se terminent, il reste hors de doute qu'elles se distri- buent au cœur. Quant au nerf de Dogiel, rappelons d'abord ce que cet auteur en dit lui-même : « Du ganglion situé chez la Langouste entre » la deuxième et la troisième paire de pattes, il part des fibres » nerveuses qui se dirigent en haut et en dehors, puis viennent se D diviser en partie dans les muscles voisins du péricarde et » s'unissent ensuite avec les muscles de celui-ci. » Topographiquement parlant, Dogiel est en grande partie dans le vrai; mais si, à la suite d'une dissection assez pénible, on réussit à suivre le nerf qu'il signale, on s'assure immédiatement que celui-ci est un des troncs nerveux animant le système mus- (1) Lemoine, Rec/jerc/tes, elc , op. cit., p. 121. (L'existence de ce nerf avait été soupçonnée par N. Warnek et par Haeckel.) {■2) Dogiel, De la structure, elc, op. cit., p. 403.) (3) Berger, Ueber das vorkommen van Ganglienzellen, etc., op. cit. — 644 — culaire général du Crustacé et non un nerf spécial au sinus péri- cardique ou au cœur. Recourons, en effet, au procédé des coupes verticales et trans- versales du corps. Une coupe de ce genre pratiquée chez le Homard iramédiateraent en arrière du cœur (ûg. 3, pi. XXVI) nous montre, en bas la section des muscles fléchisseurs de Tabdo- men, en haut celle des muscles extenseurs. N'oublions pas qu'à droite et à gauche du cœur ces derniers sont situés dans le sinus péricardique et par conséquent au-dessus de son plan- cher. La chaîne nerveuse des Décapodes macroures est traversée en un point par l'artère sternale; la paire de ganglions située immédiatement en avant de ce point est la troisième paire thora- cique. On en voit naître deux troncs nerveux sortant verticale- ment du canal qui loge la chaîne. Chacun de ces troncs se porte en dehors et se divise immé- diatement en deux branches inégales; la courte branche se jette dans le muscle fléchisseur de l'abdomen, la longue branche (nerf de Dogiel) remonte en suivant les parois de la cavité thoracique et aboutit, en traversant nécessairement le plancher péricardique, au muscle extenseur (fig. 5 D, pi. XXVJ). Je ne nie pas qu'en passant au travers du plancher péricar- dique le nerf en question ne distribue peut-être quelques rami- fications ténues à celui-ci; la chose est même probable; mais ce qui est non moins évident, c'est qu'il s'agit ici, avant tout, d'un nerf du système musculaire locomoteur général et non, je le répète, d'un nerf spécial de l'appareil circulatoire. On m'objectera les expériences de Dogiel , celles de Yung, les miennes, dans lesquelles nous avons tous trois obtenu soit le ralentissement, soit l'arrêt du cœur en diastole par l'excita- tion de la chaîne ganglionnaire thoracique. Lors de ces expé- riences nous ne pouvions constater ce qui se passait à l'intérieur du Crustacé et tous, nous avons attribué au nerf de Dogiel une action prépondérante sur le plancher péricardique, action qu'il ne possède pas. — 642 - Disposons les choses de façon à voir dans le corps de Tanimal en vie. Si l'on pratique, en arrière du cœur, la coupe verticale et transversale du Crustacé vivant, coupe déjà décrite plus haut, et si l'on excite mécaniquement la chaîne glanglionnaire au point de sortie des nerfs de Dogiel, on observe immédiatement une et souvent plusieurs secousses musculaires semblables à de fortes vibrations, simultanément dans les gros muscles fléchisseurs et extenseurs de l'abdomen ; mais rien, absolument rien ne se passe dans le plancher péricardique(l). Le cœur continue à battre et n'offre pas de phénomène particulier perceptible à la vue simple, encore moins un arrêt en diastole. L'expérience ci-dessus peut paraître grossière au premier abord; je crois cependant que ceux qui la répéteront trouveront, comme moi, qu'elle confirme suffisamment tous les faits anato- miques pour enlever au nerf de Dogiel la signification qui lui a été attribuée jusqu'à présent. La persistance des pulsations dans un cœur isolé démontre assez l'existence de petits centres nerveux automoteurs, pour ne conserver aucun doute sur la présence de centres de ce genre dans les parois du cœur des Crustacés. La discussion ne peut porter que sur ce point : les éléments décrits et figurés par Berger sont-ils bien les cellules nerveuses qu'il fallait trouver ? Considérée de cette façon, la question a peu d'importance pour le travail actuel. N'ayant pas eu le temps de l'aborder moi- même, je me bornerai à dire que Yung qui a fait des prépa- rations permanentes m'a exprimé des doutes sérieux sur la nature nerveuse des cellules de Berger (2) et que Bêla Dezsô (3) signale, dans la moitié postérieure de la région dorsale du cœur de l'Écrevisse et du Homard, des cellules ganglionnaires dififé- (1) Je ne parle pas des autres parois du sinus, on sait qu'elles sont forcément immobiles. (2) Dans une lettre du 22 mars 1879. (3) Ueber dos Herz, etc., op. cit., p. 127. — 643 — rentes de celles de Berger, ordinairement bipolaires et associées en petits groupes (i ). En résumé, les mouvements du cœur des Décapodes sont régis: i° par le nerf cardiaque^ nerf que nous démontrerons être accélérateur, naissant du plexus viscéral antérieur ; 2" par des cellules ganglionnaires intra-cardiaques automotrices ; 3° par des filets nerveux modérateurs dont l'existence est prouvée par les expériences physiologiques, mais dont le trajet réel est encore inconnu ; ces fibres ne sont pas comprises dans le nerf de Dogiel. (1) C. G. Carus, Lemoine, Berger, A. Brandt et d'autres ont vu le cœur de rÉcrevisse extrait du corps continuer à battre pendant un temps plus ou moins long (1 heure, Berger, Brandt). Je n'ai pas fait d'expériences sufiBsamment variées pour leur consacrer un paragraphe spécial. Je crois cependant ne pas devoir taire absolument les quelques résultats que j'ai obtenus. Le cœur isolé du Homard, placé dans une atmosphère humide, ofTre des pul- sations pendant près de 1 heure. Le cœur du Crabe commun, dans les mêmes conditions, bat pendant 1 heure 13 minutes. J'avais supposé qu'en déposant le cœur isolé dans une solution de sel marin à */,oo> je verrais le phénomène durer plus longtemps encore; mais les résultats n'ont pas répondu à mon attente. Les cœurs de trois Crabes placés dans des verres de montre, au sein du liquide salé, se sont respectivement arrêtés après W, 27' et 10'. Chez les Insectes aussi, on a constaté la présence de centres nerveux dans le vaisseau dorsal et ce fait que la contractilité a son principe dans l'organe lui même. En enlevant, chez un insecte, une bande tégumentaire lout le long de la région dorsale de l'abdomen, on emporte en même temps le vaisseau dorsal qui se trouve ainsi isolé du système nerveux général. En maintenant le vaisseau dorsal enlevé de celte manière dans une atmosphère humide, j'ai vu les pulsations de cet organe persister chez le Smerintlius tiliae pendant 2 heures et chez le Grotrupes sfercoranus pendant 17 heures! — 644 § Vili. — Expériences sur l'innervation du coeur. L'influence des lésions ou de l'excitation de diverses parties du système nerveux sur le cœur des Crustacés décapodes avait déjà été étudiée par C. G. Carus (i ), W Intosh (2), A. Brandt (3), Vulpian (4), Lemoine (5), Joiyet (6) et Dogiel (7), lorsque je publiai la communication préliminaire renfermant l'énoncé de mes premières observations personnelles. L'important travail de Yung (8) qui a paru peu de temps après, m'a beaucoup encouragé à poursuivre mes études. Les expériences de Yung, absolument indépendantes des miennes et effectuées à l'aide de méthodes assez différentes, ont donné des résultats souvent presque iden- tiques, démontrant ainsi l'exactitude de mes observations. A. — Excitation et section du nerf cardiaque. Newport (9) considérait le système viscéral antérieur des Articulés comme l'analogue du pneumogastrique des Vertébrés. (1) Carus, Von den ailssern Lebensbedingungen der weiss und kaltbltitigen Thiere (Ménti, couronné. Acad. de Copenhague). Leipzig 1824, page 82. (2) W. Carmichael M« Intosh, Observations and experiments on the Carcinus mœnas. (Prize thesis), Londres, 1861, page 30. (3) A. Brandt, Physiologische Beobachtungen am Herzen des Flusskrebses, op. cit., col. 419. (4) Vulpian, Leçons sur la physiologie générale et comparée du système nerveux. Paris, 1866, p. 795. (5) Lemoine, Recherches, etc., op. cit., pp. 172 et 173. (6) F. JoLYET, Notice sur ses travaux scientifiques, Paris, 1876, et Société de biologie, 1871. (7) Dogiel, De la structure et des fonctions du cœur des Crustacés, op. cit., p. 403. (8) YuNG, De la structure intime et des fonctions du système nerveux central des Crustacés décapodes. Thèse, Paris, 1879, pp. 119 et suiv. (9) Newport, Insecta dans Cyclopaedia of Anatomy and Physiology de Todd , vol. IL Londres, 1839, page 495. — 645 — Cette assimilation acceptée par Emile Blanchard (i)et repro- duite dans plusieurs de ses travaux est trop absolue. Les recherches expérimentales démontrent, en effet, que les filets de ce système qui se distribuent au cœur des Crustacés, loin d'être modérateurs ou suspenseurs, sont, au contraire, exci- tateurs ou accélérateurs. La découverte de ce fait physiologique important est due à Lemoine (2). Il avait constaté qu'il pouvait réveiller ou accélérer les battements d'un cœur d'Écrevisse devenu immobile ou dont les pulsations étaient très faibles, en électrisant soit la face inférieure de Tartère céphalique (trajet du nerf cardiaque), soit le ganglion stomatogastrique, soit enfin les origines inférieures du système nerveux viscéral antérieur (5). La conclusion était évidente, le nerf cardiaque est le nerf accélérateur du cœur des Décapodes. Dès mes premiers essais, je pus m'assurer de la parfaite exactitude des résultats de Lemoine; la méthode graphique leur donnait seulement une netteté qui les rendait indiscu- tables. Toutes les excitations mécaniques, chimiques ou élec- triques du nerf cardiaque accélèrent notablement le rhylhme du cœur. On se tromperait cependant étrangement si l'on croyait que l'expérience est facile à instituer. Désireux d'éviterdes mécomptes à ceux qui voudraient la répéter, j'indiquerai brièvement les précautions à prendre. En général, si l'on se borne à mettre brutalement le cœur à nu età pratiquer sans grande attention une deuxième fenêtre à la carapace sur le trajet de l'artère céphalique, on n'obtient rien. Chez le Homard, surtout, on peut être presque certain d'avoir rompu les connexions entre le nerf et le cœur. (1) E. Blanchard, Du grand sympathique chez les animaux articulés (Annales des se. nat., zoologie, 4» série, tome X, 18S8, p. iO). — Métamorphoses, mœurs et instinct des Insectes. Paris, 1868, p. 95. (2) Lemoine, op. cit., p. 172. (3) Origines pédonculaires de Lemoine. — 646 — 3 -a 11 faut, après avoir fait à la carapace les quatre traits de scie limitant la plaque, à enlever au-dessus du cœur, soulever cette plaque, glisser en dessous la lame d'un scalpel et décoller la voûte du sinus péricardique. A l'aide de ciseaux fins, on supprime les parties latérales de cette voûte et on laisse adhérer au cœur une petite bande longitudinale médiane de 4 à 5 millimètres de largeur. Cette bande renferme l'extrémité cardiaque du nerf accélérateur. Comme elle monte et descend avec la face dorsale du cœur, elle ne modifie en rien les graphiques. Enfin, en pratiquant à la carapace un deuxième orifice situé au-dessus du renflement stomacal, ou plus en arrière , il faut bien se garder d'enlever la couche pigmentée sous-cutanée; on y pratique seu- lement une petite fente latérale par laquelle on glissera, par exemple, les pointes de la pince élec- trique , pour aller atteindre le nerf cardiaque à sa face inférieure. Chez l'Écrevisse, j'ai produit l'excitation chi- mique par le dépôt d'une goutte de solution concen- trée de chlorure de sodium sur le nerf cardiaque ou plutôt sur l'artère céphalique indiquant le trajet du tronc nerveux. Quant à l'excitation électrique, je viens d'indi- quer, plus haut (§ IIÏ) , comment je fais usage de la pince excitatrice (appareil [de Gaifife, n° 4 de la gra- duation, bobine fermée au premier tiers). Le graphique ci-contre, fourni par le Crabe com- mun, avec levier oscillant horizontalement et cylin- dre horizontal (1) montre que l'accélération du cœur persiste pendant quelque temps après la cessation de l'excitation. Dans cet exemple, la persistance n'a (1) Voyez § IV, D. Fausse onde du cœur. — 647 — été que de quelques secondes; raais il m'est arrivé de voir Taccélération se maintenir pendant une minute et plus. Dans une série d'observations sur le Homard, j'ai vu, au moment de l'application de la pince électrique sur le nerf, la période d'accélération débuter par une sorte de systole tétanique plus ou moins énergique, composée de la fusion incomplète de plusieurs secousses (fig. 15). FiG. -13. — Homard, a graphique des mouvements de la face dorsale du cœur avant l'excitation; b débuts de l'accélération produite par l'excitation électrique du nerf cardiaque. Comme Lemoine, j'ai observé également l'accélération du cœur par l'excitation électrique du ganglion stomatogastrique ou des portions immédiatement voisines à la face supérieure du renflement de l'intestin buccal appelé généralement estomac (1). Yung, mettant la pince électrique en contact avec les ganglions d'origine du plexus viscéral, a vu, chez le Homard, le nombre des pulsations du cœur monter subitement de 40 di^^ par minute, pour redescendre à 18, deux minutes après que la pince fut éloignée. Le même auteur, appliquant l'excitateur sur l'estomac (lieu des filets du stomatogastrique et de l'origine du nerf cardiaque) a constaté la réapparition des pulsations dans le cœur d'un Crabe tourteau chez lequel cet organe était devenu tout à fait immobile. (1) Brandi, en excitant électriquement les différentes parties du système viscéral stomatogastrique, n'avait observé aucune modification dans les mouve- ments du cœur {Physiologische Beobachtungen, etc., col. 419). — 648 — J*ai fail une expérience du même ordre, mais qui me paraît encore plus intéressante. Ainsi qu'on le verra § XVII la digitaline a, chez les Crustacés, comme chez les Vertébrés, la propriété de ralentir les mouve- ments du cœur. Or, chez un Homard empoisonné par la digitaline et dont le cœur ne donnait plus, comme graphique, que de légères ondulations espacées (14 par minute), j'excite électriquement le nerf cardiaque. Immédiatement, les pulsations proprement dites réapparaissent, peu amples pour un Homard, mais très nettes, 27 par minute. FiG. i4. — Homard. Graphiques des mouvements de la face dorsale du cœur : a. sous l'influence de la digitaline: 44 pulsations par minute ; b. pendant l'excitation du nerf cardiaque: 27 pulsations par minute; c. sous l'influence de la digitaline: -14 pulsations presque insensibles par minute; d. pendant une nouvelle excitation du cardiaque: 33 pulsations par minute; e. l'excitation continue malgré l'action de la digitaline: 25 pulsations par minute. J'abandonne l'animal à lui-même. 15 minutes plus tard, sous l'action de la digitaline, les mouvements du cœur sont redevenus — 649 — à peu près insensibles (14 par minute), j'excite de nouveau le nerf cardiaque; nouvelle reprise des pulsations: 33 par minute. Cinq minutes après Tenlèvement de la pince électrique, l'exci- tation du nerf semble se prolonger encore; un graphique indique, par minute, 25 pulsations (fig. 14). L'excitation du nerf cardiaque a donc permis de vaincre momentanément les effets de la digitaline. L'irritabilité du nerf cardiaque est telle que le contact brusque de l'air suffit souvent pour produire une action marquée. Ainsi, chez un Homard de petite taille qui avait perdu beaucoup de sang par suite de l'ouverture de toute la région latérale du sinus péricardique et chez lequel le cœur s'était arrêté, je pratique, dans la carapace, une petite fenêtre carrée d'un demi-centimètre de côté au-dessus du bord postérieur de l'estomac. Au moment où je mets à nu le trajet du nerf cardiaque, les pulsations du cœur reprennent avec assez d'énergie pour faire marcher le levier régulièrement et pour fournir plusieurs bons graphiques. Si le nerf cardiaque est bien un nerf accélérateur, comme ce qui précède semble le montrer, il faut que sa destruction amène un ralentissement des mouvements du cœur. C'est ce qui arrive effectivement, mais les expériences deman- dent certaines précautions spéciales. J'ai dit que le nerf car- diaque estaccolé à la face inférieure de l'artère céphalique; cette disposition anatomique ella délicatesse du nerf ainsi que celle du vaisseau ne permettent guère de sectionner, chez l'animal vivant, le nerf seul; il faut couper à la fois l'artère et le nerf qui raccompagne. Afin d'éviter l'écoulement de sang par l'artère, écoulement auquel on pourrait, à la rigueur, attribuer le ralentissement du cœur, j'ai eu recours, après l'essai de divers moyens, à la section par le fer rouge qui produit à la fois la rupture du nerf et Toc- ciusion du vaisseau. Voici, comme exemple, les notes concernant une expérience sur l'Écrevisse. Le cœur est mis à nu, les pulsations prennent une allure normale. On enlève la portion de la carapace qui recouvre — 650 — l'estomac et Tartère céphalique. Les pulsations ne sont pas plus rapides; mais le tracé indique une excitation manifeste due soit à Faction de Fair, soit aux petits accidents mécaniques de l'opé- ration; la courbe devient brusquement plus haute du double. En cet instant, on tranche l'artère céphalique et le nerf car- diaque en les touchant avec la pointe d'un scalpel rougi à blanc. Presque au même moment, la courbe retombe à sa hauteur primitive, le cœur continue à battre et le tracé indique un ralentissement léger, mais évident. Une deuxième expérience effectuée le même jour sur un autre individu, donne le même résultat; le ralentissement qui suit la section est encore plus manifeste. B. — Excitation des ganglions cérébroïdes. Les ganglions cérébroïdes ou sus -œsophagiens, n'ont-ils aucune action sur les mouvements du cœur ? Vulpian (1) s'est posé la question un des premiers; il excita électriquement les ganglions sus-et sous-œsophagiens de l'Écre- visse. « Je n'ai, dit-il, jamais rien obtenu de net. » Lemoine (2) , dans le but de s'assurer si le nerf cardiaque naissait bien du plexus viscéral antérieur, électrisa successi- vement les différents centres ganglionnaires, entre autres les ganglions cérébroïdes et n'observa aucun retentissement du côté du cœur. Les expériences de Yung (3), faites avec tout le soin désirable, le conduisirent à la même conclusion : l'excitation électrique des ganglions cérébroïdes du Homard ne produit rien sur le cœur; le nombre des pulsations reste à très peu près invariable. Il y a cependant un quatrième observateur qui, d'après le peu (1) Leçons sur la physiologie générale et comparée du système nerveux. Paris, i 866, page 795. (2) Lemoine, Recherches, etc., op. cit., p. 172. (3) YuNG , De la structure intime et des fonctions du système nerveux^ etc., p. 122. — 651 — que je connais de ses recherches (1), aurait vu lout autre chose. PourJolyet, la galvanisation, par un courant moyen, des gan- glions cérébroïdes, chez le Crabe, détermine un arrêt en diastole. Les battements reprennent ensuite, malgré l'électrisation. L'observation de Jolyet m'a beaucoup préoccupé et m'a fait faire d'assez nombreuses expériences comparatives. Dans une première série d'essais sur l'Écrevisse, j'observai, au début de chaque excitation électrique, un grand trouble du côté du cœur, l'arrêt de l'organe, puis la reprise des battements, malgré l'élec- trisation; seulement l'arrêt du cœur avait lieu en systole mar- quée et non en diastole. Dans une deuxième série d'expériences , je constatai de nouveau le même trouble, mais, sans que je pusse me l'ex- pliquer, l'arrêt du cœur avait lieu, chez le même individu, tantôt en diastole, ce qui était d'accord avec l'observation de l'auteur cité plus haut, tantôt en systole. L'idée me vint heureusement que ma façon d'opérer était probablement fautive et, vérification faite, je trouvai que les orifices pratiqués à la région rostrale de mes Crustacés étaient situés trop en arrière. En croyant exciter les ganglions céré- broïdes, je n'excitais qu'une région voisine. C'est alors que je m'adressai au Homard dont la taille relati- vement considérable permet d'éviter des erreurs de ce genre. Les expériences furent conduites avec beaucoup de précautions. Le courant électrique était d'une force moyenne, insensible au doigt, piquant à la langue (bobine de l'appareil de Gaiffe enfoncée au premier tiers). Mon assistant touchait les ganglions céré- broïdes à l'aide de la pince électrique , tandis que j'observais attentivement le tracé qui se développait sur le cylindre tour- nant. Or il ne se produisit rien; pas le plus léger trouble dans les courbes que la pointe du levier traçait avec une régularité parfaite. Avec Lemoine et Yung, je crois donc pouvoir affirmer que les (1) Je ne connais le travail de Jolyet que par le court résumé qui figure dans la Notice sur ses travaux scientifiques, Paris, 1876. — 652 — ganglions cérébroïdes n'ont aucune action sur les mouvements du cœur. C'est là une des preuves multiples que les auteurs précités ont invoquée pour admettre que les origines du nerf cardiaque ne doivent être cherchées que dans le système stoma- togastrique ou viscéral antérieur. C. — Excitation et destruction de la chaîne nerveuse thoracique. C. G. Carus (1) paraît être le premier naturaliste qui ait cherché à se rendre compte de l'action de la chaîne ganglion- naire sur le cœur; mais ses observations sont fort incomplètes. Il dit qu'après avoir meurtri , à l'aide d'un instrument obtus, la partie antérieure de la chaîne de l'Écrevisse, il y eut une inter- ruption des pulsations, puis, pendant quelques minutes, reprise des battements avec un caractère irrégulier. W. C. M' Intosh (2) a fait une expérience plus nette. Après avoir enlevé, chez le Carciniis mœnas la masse ganglionnaire thoracique qui représente, chez les Brachyures, la chaîne entière condensée, il constata que le cœur qu'il voyait par l'orifice déterminé par cette ablation, continuait à battre, mais irrégu- lièrement et toujours avec une vigueur croissante lorsqu'on l'irritait. Les pulsations continuèrent ou purent être réveillées par excitation mécanique pendant 14 à 16 heures. A. Brandt (3), détruisant diverses parties de la chaîne de l'Écrevisse, ne vit qu'un arrêt très court dans les mouvements du cœur, suivi de la réapparition de battements normaux. Quant à l'excitation électrique de la chaîne ventrale , elle ne lui donna que des résultats négatifs. Lemoine n'obtint aucune accélération du rhythme cardiaque en excitant électriquement « les ganglions fournissant des filets nerveux à l'artère sternale ■ (4) (ganglions de la 4* paire thoracique). (1) Carus, Von den aiissern Lebensbedingungen der weiss und kallblutigen Thiere, op. cit., p. 82. (2) M<= Intosh, Observations and experiments, etc., op cil. (3) Brandt, Physiologische Beobachtungen, etc., op. cit., col. 419 et 420. (4) Leucine, Recherches, etc., op. cit., p. 172. — 053 — G ce 3 3 3 ■ÙQ S b Dogiel-(l), opérant par la méthode graphique, vit que « lorsque » chez la Langouste , le Homard ou d'autres Crustacés, l'on » excite le cordon ganglion- naire , on observe un ralentissement » du cœur, ou même son arrêt complet en diastole, d Tel était l'état en apparence assez vague de la question, lorsque j'entrepris mes propres recherches en 1878. On pouvait cependant admettre provisoi- rement, en se basant sur les essais de Dogiel et de M'^ Intosh qui seuls ont une valeur réelle, que l'excitation de la chaîne ganglionnaire thoracique détermine un ralentissement du cœur et que la destruction de ces centres soustrait l'organe à une influence modératrice. J'ai fait, à cette époque et plus tard , un certain nombre d'expériences spéciales; toutes ont été efl'ec- tuées sur des Écrevisses; elles m'ont donné des résultats d'une grande netteté. L'excitation électrique de la chaîne thoracique entre la deuxième et la troisième paire de pattes ou dans une région approximativement voisine donne constamment lieu à un arrêt du cœur en diastole, avec reprise des pulsations lors de la ces- sation de l'excitation (fig. 15). Bien conduite, l'expérience réussit toujours, même chez des individus affaiblis par d'autres essais antérieurs. L'excitation mécanique de la chaîne produit soit un arrêt en diastole, comme plus haut, soit un simple ralentissement; ainsi, par exemple, avant l'excitation 83 pulsations par minute, pendant l'exci- tation, 45 par minute. La destruction de la chaîne nerveuse thoracique demandant un travail de dissection assez laborieux et amenant une perte de sang considérable, déter- (1) Dogiel, De la structure et des fondions, etc., op. di. p. 404. 44 — 654 — mine un grand affaiblissement dont il faut tenir compte dans l'interprétation du résultat. On prend, chez une Écrevisse, un premier tracé des pulsations normales du cœur. On enlève ensuite Tensemble des pièces sternales et on pratique l'ablation d'une portion de la chaîne ner- veuse (ganglions % 3, 4, S). L'écoulement de sang est abondant. On remet l'animal sur l'appareil et Ton prend un deuxième tracé (fig. 16). Fig. de. — Écrevisse : a graphique avant la destruction de la chaîne nerveuse thora- cique; b après cette destruction. Les pulsations sont beaucoup plus espacées, ce qui s'explique par l'affaiblissement ; mais elles offrent une amplitude double, tandis que dans les circonstances ordinaires l'affaiblissement par hémorragie aurait déterminé de petites ondulations fort basses. Les expériences de Yung lui ont donné des résultats tout à fait comparables aux miens. Je les résumerai en quelques mots : Homard, 36 pulsations par minute. Excitation électrique du deuxième ganglion ihoracique, 16 pulsations par minute. Cessa- lion de l'excitation, 20 pulsations. Poriunus puher, 58 pulsations par minute. Excitation de la masse nerveuse Ihoracique, 24 pulsations par minute. Homard^ 42 pulsations par minute. Destruction de la chaîne thoracique à l'aide d'une forte aiguille. L'animal est pris de convul- sions à la fin desquelles le cœur marque encore 38 pulsations. Yung, ne faisant pas usage de la méthode graphique, n'a pu remar- quer le changement que j'ai observé dans l'amplitude des mouve- ments du cœur. - 655 — Il est donc hors de doute qu'il naît de la chaîne ganglionnaire des fliaments nerveux se rendant au cœur et renfermant des libres modératrices ou d'arrêt. Par conséquent aussi il existe, quant à l'action sur le cœur, un antagonisme remarquable entre le nerf cardiaque et la chaîne. Quoique cet antagonisme ressorte clairement de tous les essais déjà décrits, je citerai deux expériences intéressantes destinées à le faire ressortir encore davantage. J'ai publié la première, mais sans figure à l'appui, dans ma Communication préliminaire: « Chez » une Écrevisse, un premier tracé du cœur à l'état normal » accuse 61 pulsations régulières par minute. On excite méca- » niquement la chaîne nerveuse thoracique en y enfonçant une » aiguille entre les S'' et 5* paires de pattes; le nombre des » pulsations tombe à 36 et elles sont beaucoup moins amples. » A ce moment, on excite le nerf cardiaque par quelques gouttes » d'une solution concentrée de sel marin ; le nombre des pul- » sations remonte à 61, et elles affectent de nouveau, à très peu » près la forme normale » (fig. 17). Fig. i7. — Écrevisse : antagonisme entre le nerf cardiaque et la chaîne ; a. graphique du cœur à l'état normal : 64 pulsations par minute; b. ralentissement dû à l'excitation mécanique de la chaîne : 36 pulsations; c. excitation subséquente du nerf cardiaque et reprise du rhythme à peu près normal : 61 pulsations. Le deuxième exemple est dû à Yung qui l'a fait connaître en 1879. Chez un Portunus puber dont la masse glanglionnaire ihora- — 656 — cique est à nu, le cœur donne 58 pulsations par minute. L'exci- tation électrique de ces centres fait tomber le nombre des pulsa- tions à 24 et il ne se relève pas lorsqu'on éloigne la pince. Au contraire, le nombre des pulsations par minute remonte à 46 par l'application de la pince électrique sur l'estomac (lieu d'origine du nerf cardiaque), puis vient un arrêt brusque en systole « lors- » qu'on augmente la force du courant en rapprochant compléte- » ment la bobine induite de la bobine inductrice d (1). § IX. — Expériences pour la recherche des nerfs modéra- teurs ou d'arrêt. A. — Excitatioii du plancher du sinus péricardique. Le lecteur vient de voir, par les pages qui précèdent, que les filaments nerveux modérateurs du cœur naissent bien certaine- ment de la portion thoracique de la chaîne nerveuse. Dans l'état actuel de nos connaissances, il est impossible de dire quels sont les rapports anatomiques de ces filaments, quel est leur trajet. J'ai rappelé dans le § VII que Dogiel avait cru trouver le nerf modérateur dans un tronc nerveux naissant de la chaîne de la Langouste, entre les 2^ et 3^ paires de pattes et se rendant au plancher du sinus péricardique, et dans le § V que le même auteur voyait, dans ce plancher du sinus, l'un des agents méca- niques principaux de la diastole. J'ai déjà combattu cette manière de voir. L'opinion de Dogiel repose surtout sur les résultats d'expériences dans lesquelles il obtenait l'arrêt diastolique du cœur par V excitation électrique du péricarde, La notice de l'auteur en question est fort courte ; il a condensé en huit pages un grand nombre de faits et sa concision est telle (1) YuNG, De la structure intime et des fondions du système nerveux central des Crustacés décapodes, op. cit. p. 123. — 657 — qu'il n'est guère possible d'être absolument fixé sur ce qu'il entend par excitation électrique du péricarde. Si je rapproche les deux passages suivants (page 405) : « Quant à sa structure, cette » membrane est composée de tissu conjonctif, de fibres muscu- » laires et de nerfs. Dans sa partie médiane située immédiate- » ment sous le cœur, elle est constituée uniquement par du tissu » conjoFictif ; à sa périphérie seulement, elle présente des libres » musculaires » et (page 404) « On peut toujours provo- » quer un arrêt en diastole si on irrite, au moyen de l'électricité, » non-seulement la chaîne ganglionnaire. =.., mais encore les i> ailes du cœur (le péricarde) » ; il me paraît que les trois mots : péricarde, plancher pericardic^ue^ et ailes du cœur, sont synonymes pour Dogiel et que par excitation du péricarde, il entend Vexcitation du plancher péricardique. Alin de me mettre à Tabri des erreurs pouvant résulter des contractions des muscles extenseurs de l'abdomen, occupant, on lésait, les parties latérales du sinus (fig. % m, pi. XXVI), muscles très irritables et donnant des secousses pour la moindre excita- tion, j'enlève chez un Homard le tronçon musculaire occupant le côté droit du sinus; la portion correspondante du plancher du sinus péricardique est ainsi à découvert. Le courant ne passant pas, la pince électrique, soutenue par un support accessoire, est mise en contact avec la partie décou- verte du plancher, partie qui, étant périphérique, comprend une couche de fibres musculaires. Le cœur bat régulièrement, j'ai l'œil sur le graphique qui se développe. Mon assistant ferme le circuit; rien ne se passe; le graphique continue à se produire exactement avec les mêmes caractères jusqu'à la fin de la rotation complète du cylindre. L'expérience recommencée en tenant cette fois la pince à la main, n'amène non plus ni arrêt, ni diastole spéciale. La pince électrique est mise ensuite en contact avec les points d'insertion de plusieurs des attaches conjonctives inférieures du cœur; même résultat négatif. Une dissection ultérieure montre cepen- dant que le plancher péricardique est intact. Ces expériences nettes confirment mes vues antérieures — 658 — exposées § V; le plancher péricardiqae ne joue et ne peut jouer qu'un rôle des plus minimes dans les mouvements du cœur; il n'est pas l'agent principal de la diastole ; le nerf de Dogiel est un de ceux qui se distribuent aux muscles longitudinaux de l'abdo- men et, selon toute probabilité, il n'est pas le nerf modérateur. Dogiel est cependant un observateur trop sérieux pour qu'on puisse supposer de sa part des erreurs grossières. J'ai donc torturé le procédé opératoire dans tous les sens pour découvrir des conditions dans lesquelles on obtiendrait un arrêt diastolique autrement que par l'excitation directe de la chaîne thoracique. J'ai répété les expériences précédentes en laissant les muscles extenseurs de l'abdomen intacts; j'ai même excité ces muscles par le courant électrique, dans les limites du sinus; mais je n'ai obtenu ni arrêt en diastole, ni ralentissement. B. — Excitation des rameaux nerveux qui accompagnent l'artère sternale. Ainsi que je l'ai déjà rappelé, on doit à Lemoine la découverte de ramuscules nerveux naissant des ganglions thoraciques de la quatrième paire et se portant sur l'artère sternale. Une dissection spéciale m'ayant démontré, chez le Homard, l'existence réelle de ces nerfs, je me suis demandé s'ils ne remon- taient pas jusqu'au cœur et s'ils n'étaient pas les nerfs suspen- seurs cherchés. Lemoine n'avait, il est vrai, rien constaté de spécial du côté du cœur, lors de l'excitation des ganglions de la quatrième paire, mais comme il n'avait pas employé la méthode graphique, ses expériences demandaient confirmation. L'excitation électrique de l'artère sternale et des filaments nerveux qui l'accompagnent est fort difficile ; l'animal doit être gravement mutilé, perd par conséquent beaucoup de sang et s'affaiblit en proportion. Chez le Homard, je n'ai pu obtenir qu'un trouble momentané dans le rhythme du cœur; quelques pulsations pressées au mo- — 659 -> ment de la cessation de Texcitation. Ce résultat assez constant semble indiquer que les nerfs qui prennent origine de la chaîne et suivent l'artère sternale ne sont pas non plus les nerfs modé- rateurs. L'existence de nerfs modérateurs est démontrée par toute une série d'expériences; leur origine exacte et leur parcours restent encore à déterminer. Comme on l'a vu, je n'ai pu résoudre cette partie de la question. Mes essais auront du moins le mérite de faire suivre à mes successeurs d'autres voies que celles dans lesquelles je me suis engagé. § X. — INFLUENCE DE l'aSPHYXIE SUR LES MOUVEMENTS DU CCffiUR. Les faits observés chez les Vertébrés permettaient de supposer que, chez les Articulés, l'asphyxie déterminerait un ralentisse- ment des mouvements du cœur. Ce ralentissement existe réellement, mais il est très peu accusé. Voici comment je m'en suis assuré : le cœur d'une écrevisse est mis à nu; l'animal est fixé sur l'appareil ordinaire. Après quel- ques instants, on prend un premier tracé donnant la forme et la fréquence des pulsations chez l'individu normal. Ceci fait, on injecte de l'huile d'olive en excès dans les deux cavités branchiales; puis de cinq en cinq minutes on prend un tracé nouveau. Animal à l'état normal 45 pulsations par minute. 5 minutes après Tinjection d'huile 38 — 10 _ _ 34 — 15 — - 34 - Arrivé à ce chiffre de 34 battements à la minute, le cœur s'y maintient longtemps. En abandonnant l'animal à lui-même, on voit, comme chez les autres Écrevisses, le cœur continuer ses mouvements pendant plusieurs heures. Les graphiques n'indiquent que du ralentissement; il n'y a rien de modifié quant à l'amplitude ou à la forme des courbes. — 660 — En ouvrant les cavités branchiales, je me suis assuré que toutes les branchies étaient complètement imbibées d'huile. La faiblesse du ralentissement observé, le peu d'influence de la cessation de la respiration sur les mouvements du cœur des Crustacés n'a rien qui doive beaucoup nous étonner. Dans un travail antérieur (1) j'ai montré par de nombreuses expériences que la résistance des articulés à respiration aérienne à l'asphyxie était généralement très grande et on peut ajouter, avec Jolyel et Regnard (2) que les « animaux aquatiques, destinés à vivre dans » un milieu très pauvre en oxygène et ayant, d'autre part, un » fluide sanguin dont la capacité respiratoire est très faible, sont B de tous les êtres ceux dont la respiration offre l'activité la » moins considérable. » § XI. — ACTION DES POISONS. Parmi les nombreuses substances toxiques dont l'action sur le cœur des Crustacés eût été intéressante à observer, j'ai fait choix des huit corps caractéristiques suivants : chloroforme, curare, strychnine^ nicotine, atropine^ digitaline^ vératrine , sulfocyanate de potassium. Les effets de la plupart de ces substances sur les Articulés ont déjà été plus ou moins étudiés par les physiologistes ; mais aucun d'entre eux n'a employé la méthode graphique. Celle-ci m'a permis d'analyser en détail les phénomènes que présente le cœur chez les Crustacés empoisonnés et m'a fourni des bases exactes pour comparer ces mêmes phénomènes à ceux qui ont été con- statés chez les animaux supérieurs. Afin de faciliter au lecteur les rapprochements en question, j'ai résumé, dans chacun des paragraphes concernant un des poisons étudiés, ce que l'on sait de l'action de ce poison sur le (1) Recherches physicochimiques sur les Articulés aquatiques (2^ partie). Bullet, de l'Acad. roy. de Belgique, '2'' série, t. XXXIV, n«» 9 et 10, 1872. (2) Recherches sur la respiration des animaux aquatiques ^ page 69. Paris 1877. — 661 — cœur des Vertébrés. J*ai emprunté les matériaux de ces résumés à divers traités de toxicologie et principalement à celui de L. Hermann (1). § XIÏ. — CHLOROFORME. Dans la notice que j'ai communiquée en 1878 à V Association française pour Vavancement des sciences (2), j'ai exposé avec assez de détails le procédé employé et les résultats obtenus. Afin de conserver au travail actuel le caractère d'une étude d'ensemble, je rappellerai que je suis arrivé à cette conclusion que le chloroforme agit à très peu près sur les Articulés comme sur les Vertébrés. La première phase ou période d'excitation n'est pas caracté- risée par une plus grande rapidité des mouvements du cœur; mais les graphiques indiquent une plus grande amplitude et une cerlaine irrégularité. Dans la deuxième phase, on observe un ralentissement remar- quable; enfin les mouvements du cœur s'effacent à peu près complètement et les excitants ordinaires ne les réveillent plus (5). § XÏII. — CURARE. L'action du curare, ce type des poisons abolissant les pro- priétés des nerfs moteurs tout en respectant la contractilité mus- culaire, a déjà été essayée sur un grand nombre d'animaux invertébrés. Beaucoup de physiologistes semblent l'ignorer et plusieurs de ( 1 ) Lehrbuch der experimentellen Toxicologie , Berlin i 874. (!2) Les mouvements et l'innervation du cœur chez les Crustacés (Association française pour Tavancement des sciences; Congrès de Paris, 1878, page 731). (5) L'action du chloroforme sur le Carcinus mœnas a été étudiée par W. G. M*^ Intosh [Observations and experiments, etc., op. cit., page 36); mais Tauteur n'a observé que les faits généraux et ne s'est pas occupé du cœur. — 662 — ceux qui ont abandonné momentanément le Chien, le Lapin et la Grenouille classique, pour s'adresser à un Crustacé ou à un Mol- lusque, décrivent leurs expériences comme s'ils étaient les pre- miers à observer les effets du curare sur un organisme inférieur. J'estime donc qu'il n'est pas inutile de rappeler, en quelques lignes, jusqu'où s'est étendu le champ de l'observation. Pour plus de clarté je réunis les indications sous forme de tableau. A. — Action du curare sur les Invertébrés autres que les Articulés. ANIMAUX OBSERVÉS. AUTEURS. Méduses Romanes (1), J. Steiner (2), Kru- kenberg (5 et 4). Cténophores Krukenberg (4). Polypes d*eau douce (probablement Hydres) Vulplan (5), Actinies Krukenberg (3). Astéries Vulpian (5), J. Steiner (2). Synaptes Krukenberg (5). Planaires Vulpian (o). Nais Vulpian (3 et 6). Lombric • . . . Vulpian (3). Sangsues Claude Bernard (7) , Kruken- berg (3). Vulpian (6). Céphalopodes Paul Bert (8), Krukenberg (3). (1) Romanes, Preliminary observations on the locomotor system of Medusœ (Philos, trans, of the Royal Society. London 1876), p. 299. (2) J. Steiner, Ueber die Wirkung des Amerik. Pfeilgifles curare. (Archi v. P.Anat. und Physiol., 1873), p. 143. (3) Krukenberg, V ergleichend toxicologische Unters uchung en {Y erg], physiol. Studien an den Kiisten der Adria 1880.) (4) Id., Vergl-physioL studien zu Tunis , Mentone und Palermo, 1880. (5) Vulpian, Leçons sur la physiologie générale et comparée du système nerveux. Paris 1866, pp. 202 et 784. (6) Vulpian, Cours de pathologie expérimentale et comparée (Revue inter- nationale des sciences, 3*= année, 1880, page 201). (7) Claude Bernard, Leçons sur les effets des substances toxiques et médica- menteuses. Paris 1857, pp. 363 et 364. (8) Paul Bert, Mémoire sur la physiologie de la Seiche. Paris 1867, p. 68. — 663 — Gastéropodes Vulpian (5), J. Steiner (2). Kru- kenberg (9). Lamellibranches Bernstein (10) , Krukenberg (9). Vulpian (6). Mollusques marins (sans autre indication) Lacaze Duthiers (11). B. — Action du curare sur les Articulés. ANIMAUX OBSERVÉS. AUTEURS. Écrevisse Claude Bernard (7),Vulpian (5 et 6), Plateau (15). Homard, Langouste Yung (12). Crabes Jolyet(13),J.Steiner (2),Yuug(12). Larves d'Insectes aquatiques Vulpian (5 et 6). Lsœxe de Corethra plumicornis . . . . Dogiel (14). Chenilles de Sphinx Euphorbiae . . . Krukenberg (16). La plupart des auteurs qui ont expérimenté sur les Cœlen- térés, les Échinodermes, les Vers ou les Mollusques, ont constaté que, comme chez les Vertébrés, le curare paralyse les nerfs mo- teurs; mais ils ont, en outre, été frappés de la lenteur de cette action et de la quantité considérable de poison nécessaire pour la produire. Un seul exemple sufiQra : a Une Seiche, dit Paul Bert, a mis » plus de deux heures avant de succomber à l'introduction sous (9) Krukenberg, Der Mechanismus des Chromatopliorenspieles bei Eledone moscAató. (Vergi. physiolStudien an den Kùsten der Adria). 1880, pages 34 et 35. (10) Bek^steiìì, De animalium vertebratorum musculis nonnulla. Berlin 1862, p. 30 (cité par Krukenberg). (11) Lacaze Duthiers, cité par Yung. (Voir plus bas.) (12) Yung, De la structure intime et des fonctions du système nerveux centrai des Crustacés décapodes, op. cit., page 68. — De Vaction des principau x poisons sur les Crustacés (Comptes rendus Acad. se. de Paris, tome 89, 1879, p. 185). (13) ioLYET, Notice sur ses travaux scientifiques. Paris 1876. (14) Dogiel, Anatomie und Physiologie des Herzens der Larves von Corethra plumicornis (Mém. Acad. S'-Pétersbourg. VII^ série, t. XXIV. 1877). (15) F. Plateau, Les mouvements et IHnnervation du cœur chez les Crustacés, op. cit., p. 736. (16) Krukenberg, Die Curarewirkung an den Raupen von Sphinx Euphor- 6iœ (Vergi, physiol. Studien an den Kiisten der Adria). 1880 page 156. — 664 — D la peau d'une dose de curare qui aurait bien tué deux ou trois » Lapins. » En ce qui concerne plus spécialement les Crustacés, Claude Bernard, Vulpian, Steiner et Yung, tout en signalant chez ces animaux la production des phénomènes généraux de l'intoxica- tion curarique, varient assez quant au temps qui s'écoule entre l'injection et l'abolition plus ou moins complète de la motricité. Yung a particulièremeni insisté sur la lenteur avec laquelle le curare agirait sur les Décapodes. Mes expériences personnelles, dont un court résumé a été lu à l'Association française pour l'avancement des sciences, en Ì878, par conséquent avant l'apparition du travail de Yung, mais sans que ce savant pût en avoir connaissance (1), confir- ment encore une fois ce que l'on savait des allures générales de l'empoisonnement. Les résultats diffèrent cependant en un point de ceux de Yung, ils semblent indiquer une action assez rapide. Le curare dont j'ai fait usage était très actif; mais je l'ai employé en solution faible à Vaooo- L'injeclion del centimètre cube dans le sac lymphatique postérieur d'une Grenouille rousse de petite taille amenait l'abolition des mouvementsenl5minutes. Chez l'Écrevisse, l'injection de 1 centimètre cube de cette solution, par une petite fenêtre pratiquée dans la partie latérale de la région stomacale de la carapace, n'est d'abord suivie d'aucun phénomène apparent. Les Crustacés mis en liberté marchent, pincent et conservent à peu près toute l'intégrité de leurs mou- vements pendant environ une heure. Puis la molilité disparaît sans aucune rigidité; le corps est flasque; on peut toucher les yeux, tirer les antennes, sans rien déterminer. Chez le Crabe commun, j'ai vu l'injection de J centimètre cube de la solution de curare amener la cessation absolue des mouvements en 25 minutes. Il est vrai que c'est là un minimum et que d'autres individus ont résisté près de 2 heures. Le curare a donc produit ses effets sur mes Écrevisses et mes (1) Le volume des Comptes rendus de l'Association n'est généralement dis- tribué qu'un an après le Congrès. — 665 — Crabes après une ou deux heures, tandis que, dans les expé- riences de Yung, la mort apparente ou même un ralentissement notable des mouvements ne se produisait chez les Fortunes, les Crabes et les Homards que 4, 9 et même 10 heures après rinjection. Je ne saurais attribuer une pareille différence au fait que je conservais mes sujets d'expérience à sec, tandis que Yung les mettait la plupart du temps dans l'eau, car, dans les cas où Yung s'est départi de cette règle , l'action du poison n'a pas été plus rapide. Du reste, Vulpian que Yung cite à propos de la lenteur avec laquelle le curare agirait chez les Crustacés, a rectifié lui-même les résultats de ses premières observations sur l'Écrevisse. « Je dois, dit Vulpian (1), modifier un peu ce que j'ai dit de » l'action de la strychnine et du curare, car je me suis assuré » que ces deux substances toxiques ont une action assez éner- » gique sur ces animaux ; » puis après avoir signalé que le sulfate de strychnine lue les Crustacés en question en 10 ou 20 minutes, il ajoute (2) : « Le curare introduit de la même façon » en quantité suffisante détermine aussi promptement la mort, » moins rapidement toutefois que la strychnine. » Steiner dit seulement que la paralysie apparaît chez les Crabes relativement plus tard que chez les poissons. Je crois donc pouvoir admettre que l'action du curare sur les Crustacés, tout en étant plus lente que chez les Grenouilles et les poissons, est, en réalité, notablement plus rapide que ne le pense Yung. Les échantillons de curare diffèrent souvent par leur énergie toxique, et il est probable que celui que l'auteur précité a eu à sa disposition était, à cet égard, de qualité inférieure. (1) Vulpian, Leçons sur la physiologie générale et comparée du système ner- veux, page 784. (-2) lu., ibid., page 78d. Depuis la correction des épreuves de ce travail, la Revue internationale des sciences (IS septembre 1880) a publié une leçon de Vulpian sur le curare, il y est dit, page 201, que des Écrevisses dans l'abdomen desquelles l'auteur avait injecté de 06r,005 à 06r,01 de curare, remises dans l'eau courante, étaient encore très vives au bout de deux benres. — 666 — Mes recherches ayant pour but l'étude physiologique du cœur, je reviens à leur sujet spécial. En essayant les effets du curare, je voulais, avant tout, m'assurer s'il y avait un retentissement quelconque du côté du cœur des Crustacés. Rappelons d'abord, comme termes de comparaison, que les nombreuses observations faites sur les Vertébrés établissent les points suivants : 1° Si la dose de poison ne dépasse pas celle nécessaire pour amener l'abolition de la motricité générale, le cœur des Vertébrés à sang froid abandonnés à eux-mêmes et celui des Vertébrés à sang chaud soumis à la respiration artificielle, continue à battre sous l'influence seule de ses centres automoteurs; 2° Chez les Vertébrés à sang froid (Amphibiens), les pulsations persistent de nombreuses heures après la mort apparente; 5° Le rhythme et la force de contraction du cœur sont peu modifiés; 4° Si la dose de curare est très forte, les centres automoteurs du cœur de la Grenouille Unissent par être paralysés à leur tour. Chez les Crustacés décapodes, la persistance des battements du cœur après la mort apparente est assez remarquable. Jolyet et Yung doivent l'avoir observée; mais je ne connais les recher- ches du premier sur le Crabe que par un extrait et le texte du second n'attire pas spécialement l'attention du lecteur sur cette particularité. Chez des Écrevisses, j'ai constaté des pulsations régulières du cœur 5 heures après la paralysie générale du corps. Elles ont pu persister plus longtemps encore, mais la nuit m'a obligé de sus- pendre mes observations. Des expériences spéciales sur le Crabe commun m'ont fourni des résultats plus marqués encore; en prenant la précaution de conserver les individus empoisonnés dans une atmosphère saturée d'humidité, j'ai vu persister les pulsations 9 Va heures après la cessation des mouvements de locomotion. La méthode graphique m'a permis d'étudier l'influence de doses variables sur les mouvements cardiaques. Chez les Écrevisses, l'injection de 1 centimètre cube de la — 667 — solution à '/sooo ^^ paraît pas modifier le rhythme du cœur; 15 minutes après Tinjection, le graphique est sensiblement le même qu'à Tétat normal. Cependant, si Ton soumet des Crustacés à des doses fortes, et si l'on prolonge suffisamment l'expérience, on observe une para- lysie graduelle et lente des centres automoteurs : le cœur d'un Homard donne 28 pulsations par minute; on injecte, par un orifice de la carapace, 5 centimètres cubes de la solution de curare. On constate, après : 1 miijuie, 27 pulsations par nijnule. 50 - '2\ - — 6U - 2â - — L'amplitude diminue; après 60 minutes, la courbe est moins élevée d'un quart. § XIV. — Strychnine. Les observations faites sur les Vertébrés et surtout sur les Grenouilles, ont montré que, lors de l'empoisonnement par la strychnine, les battements du cœur de ces animaux se ralentis- sent (au point d'amener, avec de fortes doses, un arrêt en dias- tole). Bientôt, cependant, le ralentissement disparaît et le rhythme du cœur redevient à peu près normal. L'action générale de la strychnine sur les animaux du groupe des Articulés a été essayée successivement par Claude Bernard [Ëcrevisse) (1), M' Intosh {Crabe) (2), Hensen (Palémon) (3), (1) Claude Bernard, Leçons sur les effets des substances toœiquesy etc., op. cit. p. 364. (2) M<= Intosh, Observations and experiments, etc., op. cit. p. 50. (3) Hensen, Studien Uberdas Gehôrorgan der Decapoden (Zeitschr. f. Wiss. Zoologie, t. XIII. 1863). — 668 — Vulpian (Êcrevisse) (1), Dogiel (larves de Corethra) (2), Yung (Crabe , Por tune y Homard, Pale mon) (3) et Krukenberg (Êcre- visse) (4). Je crois inutile de discuter les résultats que ces auteurs ont obtenus, quant à l'existence ou à l'absence d'une phase de con- traction tétanique, quant à l'absorption possible par les bran- chies, etc., les désaccords pouvant s'expliquer, à la rigueur, par les doses de poison et les méthodes expérimentales. Je m'occu- perai exclusivement de l'action sur le cœur. Dogiel et Yung seuls ont porté leur attention sur cet organe. D'après Dogiel, la strychnine ne modifie guère le rhythme des pulsations chez la larve de Corethra plumicornis. Suivant les recherches de Yung, le cœur des Crustacés décapodes empoi- sonnés par cette substance convulsivante continue à battre après la mort (2 heures). Ces observations permettaient de prévoir que, dans des expé- riences bien conduites, on verrait, comme après l'action du curare et de la nicotine, le cœur des Crustacés devenir indépen- dant du système nerveux général et continuer à battre pendant de longues heures. C'est ce qui se vérihe parfaitement; j'ai fait usage d'une solu- tion de sulfate de strychnine à ^goo- On en injecte 5 centimètres cubes chez un Homard vigou- reux, par une petite ouverture pratiquée dans la partie latérale de la région stomacale de la carapace. L'animal ne présente pas de convulsions apparentes. Trente minutes après l'injection, il paraît mort. La traction sur les antennes, l'attouchement des yeux, ne déterminent rien; une seule fois, le choc d'un corps dur (t) Vulpian, Leçons sur la physiol gén. et comp. du syst. nerveux, etc., op. cit. p. 784. (2j Dogiel, Anat. und. Phys. des Herzens der Larve v. Corethra, op. cit., p. 26 des tirés à part. (3) YuNG, De la struct, intime et des fonctions du syst. nerveux des Crustacés décapodes, etc., op. cit., p. 73. (4) Krukenberg, Vergi, phys. Studien an den KUsten der ^dna,op. cit., p. 97. — 669 — sur le bord externe de la pince droite annène une brusque fer- meture de celle-ci. Les graphiques m'ont permis de constater, du côté du cœur, les faits suivants : Avant l'injection 29 pulsations par minute, à grande amplitude. Cette ampli- tude se maintient, preuve qu'elle n'est pas due à une excitation passagère. S minutes après l'injection, 23 pulsations à amplitude plus faible. 30 minutes après l'injection, 15 pulsations ; amplitude '/g de Tampliiude primi- tive, avec de légères ondulations secondaires pendant la systole. 1 heure après l'injection, 19 pulsations ; amplitude ^2 avec les mêmes troubles. 8 heures après l'injection, 33 pulsations; amplitudes 2/^. Il y a donc eu d'abord, comme chez les Grenouilles, ralentis- sement graduel, puis le cœur a repris un rhythme plus rapide, 8 heures après Pinjection. A ce moment, il battait encore avec énergie; la nuit m'a obligé d'interrompre l'expérience. § XV. — Nicotine. L'empoisonnement par la nicotine est suivi, chez les Vertébrés, de convulsions et de rigidité musculaire. Du côté du cœur, les effets du poison sont fort curieux : la nicotine, du moins à fai- bles doses, produit d'abord un ralentissement notable, en exci- tant les terminaisons intracardiaques du nerf vague; à cette excitation fait suite une paralysie de ces mêmes terminaisons; le cœur recommence à battre régulièrement, mais avec un rhythme accéléré. Enfin, à cette phase en succède une troisième caracté- risée par un nouveau ralentissement. L'action de la nicotine sur les Crustacés décapodes avait déjà été expérimentée par Yung, lorsque je fis mes essais personnels. D'après ce savant qui étudia, à cet égard, le Homard, le Crabe commun, le Tourteau et un Palémon, l'intoxication produit très rapidement ses effets : convulsions, puis immobilité et rigidité musculaire. Les mouvements du cœur persistent et présentent une accélération marquée, le nombre des pulsations par minute pouvant monter de 56 à 90, de 50 à 70 (Homard). Cette accélé- 45 — 670 — ration qui se maintient quelque temps est suivie d'un ralentisse- ment graduel. La description que Yung donne de l'échantillon de nicotine qu'il a utilisé (sirupeux, noirâtre, etc.) (1) montre que la sub- stance était en partie résinifiée. Sa solution était k^/^p^jpar conséquent très concentrée, ce qui expliquerait la violence des accidents convulsifs. J'ai employé successivement deux échantillons différents, Tun en partie résinifié, l'autre très pur et incolore. Premier échantillon (en partie résifinié), solution à Viooo • Êcrevisse. — Un premier graphique, à l'état normal, indique 47 pulsations par minute. On injecte 1 centimètre cube de la solution de nicotine par un petit orifice pratiqué à la partie latérale de la région stoma- cale de la carapace. Pas de convulsions. L'animal est bientôt immobilisé et flasque, comme après l'action du curare. La traction sur les antennes, l'attouchement des yeux n'amène aucun mouvement. L'action sur le cœur est rapide et très nette : État normal 47 pulsations par minule. 2 minutes après l'injection de nicotine 64 — 4 — — — 53 — 6 — — - 52 — 30 — — — 39 — Les pulsations sont régulières; leur amplitude n'augmente guère; celle-ci commence à diminuer après la 6"*' minute. En plaçant le Crustacé dans une atmosphère humide, on voit les pulsations persister pendant six heures. Crabe (Carcinus mœnas). — Même dose. Pas de convulsions, (1) YcNG, op. oit, p. 82. — 67i — même immobilité; membres flasques comme chez TÉcrevisse ; action accélératrice aussi rapide sur le cœur. Tracé à l'état normal 33 pulsations par minute. 2 minutes après l'injection de nicotine 43 — 3 — — 71 L'amplitude devient à peu près double, » — — 58 — 10 — _ 33 «. Dans une atmosphère humide, le cœur continue à battre pen- dant un peu moins de six heures. FiG. 48. — Homard. Graphiques des mouvements du cœur 80us l'influence de la nico- tine : a. animal normal : 45 pulsations par minute; b. trois minutes après l'injection : 75 pulsations par minute; c. cinq — — 77 d. dix — — 73 I l'amplitude décroît. Homard. — Vigoureux, mais un peu affaibli par des expé- riences antérieures. On l'emploie à dessein pour mieux constater Taction sur le cœur. Injection de 5 centimètres cubes de la solution à Viooo- — 672 — Pas de convulsions ; quelques tremblements dans les pattes- mâchoires. Immobilité du corps, comme plus haut; pas de rigi- dité musculaire. Effets sur le cœur très rapides et très accentués (fig. 18). Tracé à l'état normal. lo pulsations par minute. 3 minutes après l'injection de nicotine. 73 avec la même amplitude. S — — 77 \ .Q __ J L'amplitude décroît graduelle- gQ ^„ > ment jusqu'à moitié de la hau- 1 heure - - ^ ^g ] leur primitive. Deuxième échantillon (pur incolore), solution à ^/^qq, propor- tion de Yung : Homard. — Au moment de Tinjeclion du poison, les muscles extenseurs de Tabdomen manifestent des contractions tellement rapides qu'elles ressemblent à des vibrations. L'accélération des mouvements du cœur se manifeste après une minute environ. (Il n'est pas pris de graphique.) Les pulsations persistent longtemps après la mort du Crustacé. Je n'ai pu constater aucune rigidité musculaire. Actions successives du curare et de la nicotine. Chez un Homard curarisé depuis une heure par Tinjection de 5 centimetres cubes d'une solution de curare à V2000 ^^ ^^^^ lequel le cœur ralenti ne battait plus que 22 fois par minute, on injecte 5 centimètres cubes d'une solution de nicotine à 7ioo- Malgré le curare, la nicotine produit des phénomènes de trem- blements musculaires et une accélération terrible des mouve- ments du cœur; le nombre des pulsations s'élève de 22 à 74 par minute, sans augmentation d'amplitude. Quatre heures plus tard, le cœur battait encore assez énergi- quement pour utiliser sa force de contraction à injecter l'animal par un liquide coloré. — 673 — L'action de la nicotine sur l'organe central de la circulation des Crustacés est donc jusqu'à un certain point comparable à ce que l'on avait observé chez les Vertébrés. Seulement, la première phase, c'est-à-dire le ralentissement initial, n'a pas été constaté, soit que ce ralentissement n'ait lieu que pendant un temps très court, soit que les doses administrées fussent trop fortes, soit que ce premier phénomène fasse en réalité défaut. Quant à l'accé- lération caractéristique et au ralentissemeni qui y fait suite, on a vu qu'ils se manifestent avec toute la netteté possible. § XVI. — Atropine. Chez les mammifères, l'action de l'atropine sur le cœur res- semble à celle de la nicotine et peut se résumer ainsi : au début, diminution dans la fréquence des pulsations, par suite d'une excitation momentanée des terminaisons intracardiaques du nerf vague, puis paralysie de ces centres modérateurs et, par con- séquent, accélération. Plusieurs physiologistes se sont occupés des effets de l'atro- pine sur les Articulés: Schotten (Melolontha) (1) , Dogiel (larves de Corethra) (2), Jordan (Êcrevisse) (3), moi-même [Écrevisse) (4), Yung (Homard) (5), Krukenberg (Écrevisse) (6). A l'exception de Jordan, d'après lequel les injections d'atro- (1) Schotten, De effectu Atropii. Dissertano Marburg 1842. (Cité par Kru- kenberg.) (2) Dogiel, Anat. undPhys. des Herzens der Larve v. Corethra^ Pathol, op cit. p. 30. (3) J.RDAN, Beitrdge zur Kenntniss der pharmacologischen Gruppe des Muscarins (Pharmacol. Institut, zu Slrassburg), Arch. f. exper. Palhol. Vili. 1877. (Cité par Krukenberg.) (4) Plateau, Communication préliminaire, op. cit., p. 11 des tirés à part. (5) YuNG, De la structure intime et des fonctions du système nerveux central des Crustacés décapodes, op. cit., p. 78. (6) Krukenberg, FergL toxicologische (Inters, als experimenlelle Grundlage fur eine Nerven und Muskel Physiologie der Evertebraten. (Vergi, physiol. Studiali, p. 90.) — 674 — pine n'auraient aucune influence sur les pulsations du cœur de rÉcrevisse, ceux d'entre les observateurs cités plus haut qui ont pris soin de noter les phénomènes présentés par Porgane central de la circulation, signalent un ralentissement plus ou moins marqué. Voici , du reste , l'analyse des résultats obtenus jusqu'à présent. Les tableaux d'expériences de Dogiel indiquent , pour les larves de Corethra plongées dans une solution de sulfate d'atro- pine (concentration inconnue), une légère diminution du nombre de pulsations par minute. Chez rÉcrevisse, j'ai observé moi-même, dans mes essais antérieurs, un ralentissement considérable. Bien que résultant de l'administration d'une dose de poison très faible, le ralentis- sement fut de près de la moitié, mais avec une augmentation dans l'amplitude d'environ un tiers (i). Enfin, Krukenberg put constater un ralentissement manifeste des pulsations du cœur de l'Écrevisse, quelques secondes après l'application directe sur l'organe d'une solution de sulfate d'atropine à Vjoo- Il est vrai que cet auteur n'obtint aucun effet par une injection d'une solution à '/looo ^^^^ l'abdomen; mais il n'y a rien, dans cet insuccès apparent, qui doive beaucoup nous étonner, pas plus que dans le résultat négatif de Jordan rappelé au début de ce paragraphe. Les petites variations dans le nombre ou la forme des pulsations sont souvent insaisissables à l'œil ; un appa- reil enregistreur seul peut alors les rendre visibles et c'est, pour cela, que je me suis astreint, dans le cours de mes recherches, à prendre des graphiques multiples des mouvements du cœur dans presque toutes mes expériences. Avant d'exposer ce que de nouveaux essais m'ont donné, je citerai une observation parfaitement exacte de Yung qui explique certains côtés de mes propres résultats: quelle que soit la quan- (1) Ces derniers mots en ilalique ne figurent pas dans mes publications précé- dentes sur ce sujet. — 675 — tité d'atropine que Ton administre à un Homard, en une ou plu- sieurs fois, jamais on ne réussit à déterminer la mort du Crustacé(l). L'effet général se résume dans un abattement dont la durée varie avec l'intensité de la dose, quelques tremble- ments, etc. J'ai soumis un Homard de moyenne taille, mais vigoureux et vif, à la longue série d'essais suivants : Le cœur bat assez rapidement; on attend 10 minutes afin d'être certain qu'il ne s'agit pas d'une excitation passagère. Un graphique pris en ce moment indique 63 pulsations par minute ; leur amplitude, très ordinaire et qui doit servir de terme de com- paraison, sera prise comme unité; ainsi, dans l'exposé des résultats, amplitude 1 signifie amplitude égale à celle des pul- sations du cœur de l'animal non empoisonné. Les solutions de sulfate d'atropine, préparées au moment d'opérer, par conséquent parfaitement fraîches, sont respecti- vement à V|ooo> à Vioo ^^ ^ Vso- L^s injections sont toujours poussées par un petit orifice pratiqué à la partie latérale de la région stomacale de la carapace. Tous les résultats décrits résultent de l'interprétation de gra- phiques. 19 de ces tracés, comprenant chacun un tour entier du cylindre, ont été pris avec soin. A. ffomardsdLiQ 63 pulsations par minute, amplitude 1. B. Injection de 1 ceniimèlre cube de la solution à */iooo i Stupeur momentanée, puis mouvements des antennes. 1 minute après l'injection 46 pulsations; amplitude 2/4. 5 — — 48 — 5/4. 15 - - 51 - Vf C. Injection de 1 centimètre cube de la solution à Vioo- L'animal agite un instant ses pinces et ses antennules. 1 minute après l'injection 47 pulsations par minute, amplitude 1 */s- 5 - - 42 - - *ly 20 — - — 43 - - V»- (1) On sait que le Lapin, les Limaces peuvent manger des feuilles de belladone sans en ressentir d'accidents. — 676 — D. Injection de 5 centimètres cubes de la solution à '/loo- Agitation momentanée des pinces et des antennules. 5 minutes après Tinjection 48 pulsations par minute, amplitude 1 V^ 10 — — 28 — — 1 % 20 — — 26 — — 1 30 — — 28 — — 1 3h,30(l) ~ 46 — - V, V E. Injection de 5 centimètres cubes de la solution à '/loo- Agitation momentanée des pinces et des antennules. 10 minutes après l'injection 33 pulsations par minute, amplitude % 20 — - 40 — — «/j. F. Application directe sur le cœur de quelques gouttes de la solution à Vioo- Immédiatement 30 pulsations par minute, amplitude •/,. 5 minutes après .... 42 — — */,. G. Injection de S centimètres cubes de la solution à ^/j^. Grande agitation de l'animal, mouvements momentanés et exagérés des pinces. Le cœur devient immobile. 5 minutes après, le graphique n'accuse que 3 très légères ondulations par minute. 10 minutes après, le graphique est une ligne droite. L'animal n'est cependant pas mort; il effectue des mouvements très marqués des antennes, des antennules et des gnathiles; mais les mouvements volontaires, surtout les mouvements de loco- motion, sont abolis; le corps est flasque; on peut toucher les yeux sans déterminer leur rétraction. Les conclusions à déduire de ces expériences me paraissent être les suivantes : X" L'atropine, même à doses faibles, a une action manifeste sur le cœur des Crustacés décapodes ; 2" Cette action n'est pas mortelle ; 5** A moins de doses très fortes, elle est passagère ; ¥ A la suite de chaque injection, il y a, comme chez les Vertébrés, ralentissement des mouvements du cœur, ralentis- sement pouvant descendre jusqu'à la moitié environ (voyez plus (1) Pendant ces trois heures, l'orifice de la carapace a été recouvert d'un cou- vercle de papier à filtrer mouillé pour éviter la dessiccation du cœur. — 677 — haul D.) Puis, au bout de quelque temps , le nombre des pulsa- tions se relève. 5° I/agitation que manifeste l'animal peut se traduire, durant quelques minutps, par une amplitude plus grande dans les mouvements du cœur. En général, cependant, l'amplitude est décroissante. § XVIl. — Digitaline. Chez les Vertébrés, la digitaline en injection détermine une diminution de la fréquence des pulsations et, si la dose est suffi- sante, un arrêt définitif du cœur. Le ralentissement paraît résulter d'une excitation des centres modérateurs intracardiaques. La digitaline aurait, de plus, une action toxique sur le tissu musculaire du cœur. Son application directe sur le cœur de la Grenouille a donné, aux différents expérimentateurs, des résultats variables quant aux débuts de l'action. L'effet final a cependant toujours été l'arrêt de l'organe. L'action de la digitaline sur les Articulés a été étudiée par M*' Intosh (Crabe) (1), par Dogiel [larve de Corethra) (2), par moi-même (Écrevisse) (3) et par Yung (Homard) (A). W Intosh n'ayant pas examiné le cœur n'est cité ici que pour mémoire. Quant à Dogiel et àYung, bien qu'observant des animaux très différents, ils ont constaté tous deux le phénomène curieux d'une accélération initiale précédant le ralentissement. Ainsi, chez la larve de Corethra, plongée dans une solution de digi- taline, le cœur qui offrait, à l'état normal, 13 pulsations par minute, en donne bientôt 22, puis arrive le ralentissement qui (i) M« Intosh, Observations and experiments, etc., op c, p. 60. (2) Dogiel, Anat. und Phys. des Herzens der Larve von Corethra, op. cit., pp. 27 et 28. (3) Communication préliminaire^ op. cit., p. i l des tirés à part. (4) YuNG, De la structure intime et des fonctions du système nerveux central des Crustacés décapodes, op. ciu, p. 79, — 678 — atteint graduellement le chitfre excessivement bas de 2 ou 3 pul- sations par minute seulement. Les nombres indiqués par Yung sont aussi intéressants: Homard, normal 50 pulsations; deux minutes après l'intoxication, 58 pulsations, 8 minutes après, 30, puis diminution graduelle jusqu'à l'arrêt du cœur. Dans mes premières expériences sur l'Écrevisse, je n'ai rien vu de semblable. Après l'injection de 5 milligrammes de digi- taline, le graphique fut d'abord à peu près identique à celui de l'animal sain, puis, après une quarantaine de pulsations, se mani- festa un ralentissement évident, relativement brusque à ses débuts et s'accentuant ensuite de plus en plus. Le cœur s'arrêta finalement en diastole. Pendant la période du ralentissement, les pulsations étaient assez irrégulièrement espacées. Rappelant le désaccord existant entre ses résultats et les miens, Yung dit, dans son travail: « Nous attendons avec intérêt D le complément des recherches de M. Plateau et nous signalons » à son attention l'accélération notable des mouvements (du D cœur) immédiatement après l'injection, accélération que nous » avons constatée dans nos expériences ï et II et qui précède le j> ralentissement. » Dès que je l'ai pu, j'ai repris mes essais et je me suis adressé, cette fois, à la même espèce animale que celle employée par Yung , au Homard. Tenant compte de la différence de taille existant entre le Homard et l'Écrevisse, j'ai élevé la dose de digitaline à 25 milli- grammes. L'injection a été poussée, comme toujours, par un petit orifice pratiqué dans la partie latérale de la région stoma- cale de la carapace. Bien que prévenu, je n'ai pas observé de période d'excitation. Le tracé à l'état normal indique 28 pulsations par minute. Immédiatement après l'injection, il y a deux ou trois battements rapides, puis, tout de suite ^ le graphique, très régulier, montre un ralentissement: 20 pulsations par minute. 4 minutes après l'injection, le tracé indique de l'irrégu- larité; il y a des pulsations espacées et d'autres groupées en — 679 — faisceaux pressés de deux ou trois, l'amplitude est un peu plus grande. Le nombre total par minute est tombé à 19. Le tracé affectant ensuite une irrégularité encore plus grande et l'amplitude redevenant moindre, j'ai mis fin à Texpérience. Pour plus de certitude, je me suis procuré un nouvel échan- tillon frais de digitaline. L'expérience est effectuée devant quelques témoins. Un Homard assez vigoureux fournit, à l'état normal, un premier graphique indiquant 40 pulsations par minute. On injecte, toujours au même endroit du corps, 5 centi- mètres cubes d'une solution à */20o> soit 25 milligrammes. Le graphique pris immédiatement montre que la face supérieure du cœur se soulève d'abord en systole avec une ou deux oscillations secondaires. Il n'y a aucune période d'excitation; le graphique FiG. 19. — Homard : Action de la digilatine : a. graphique des pulsations à l'état normal; b. au moment de l'injection, systole exagérée, puis pulsations basses et lentes: ■17 par minute; c. cinq minutes après : 33 pulsations par minute; d. vingt minutes après : 28 pulsations par minute. devient ensuite à peu près régulier, tout en prouvant un grand ralentissement ; il n'y a plus que 17 pulsations basses par minute. Cinq minutes plus tard, 33 pulsations, 20 minutes après, 28 (tig. 19). — 680 — II m'est donc impossible d'admettre l'existence de la période d'excitation initiale décrite par Yung. En ce qui concerne les autres phénomènes généraux, mes résultats et ceux de l'auteur cité se confirment mutuellement; la digitaline en injection amène un ralentissement des mouve- ments du cœur. Si la dose est suffisante, l'organe finit par s'arrêter complètement et, dans ce cas, les excitants n'y réveillent plus de mouvements (1). La digitaline appliquée directement sur le cœur paraît agir sur les cellules ganglionnaires automotrices de celui-ci. Les résultats de l'expérience suivante semblent du moins le prouver: le cœur d'une Écrevisse est mis à nu ; on dépose sur l'organe une forte goutte de digitaline à 7,00 î '^^ mouvements du cœur s'aff'aiblissent rapidement, le levier ne trace bientôt plus que de toutes petites ondulations à peine distinctes; puis, 2 ou 3 minutes après, probablement lorsque les déplacements du sang ont eu transporté ailleurs la faible quantité de poison absorbée par le cœur, les pulsations redeviennent parfaitement normales; le graphique indique même une légère accélération. § XVIIL — Vératrine. La vératrine agit à la fois sur les éléments nerveux et sur les éléments musculaires de l'appareil circulatoire des Vertébrés. Son action peut se résumer comme suit : 1** augmentation momentanée de l'irritabilité des éléments nerveux et muscu- laires ; 2** abolition de cette irritabilité. Aussi de faibles doses déterminent-elles d'abord une augmen- (1) On a vu § 8. A, page 648, par une expérience curieuse sur le Homard que si, chez un Crustacé empoisonné par la digitaline, le cœur bat encore faiblement, l'excitation du nerf cardiaque ramène des pulsations plus rapides et plus éner- giques. Il y a là quelque chose d'analogue à ce qui se passe chez les Vertébrés (Grenouilles) dont le cœur a été soumis à une application directe du poison ; Dybkowsky et Pelikan ont constaté que l'excitation du vague produisait de l'effet tant que le cœur battait encore lentement. — 681 — talion passagère de la fréquence du pouls, tandis que des doses fortes, supprimant presque brusquement les propriétés du muscle cardiaque et de ses centres nerveux, amènent rapidement le ralentissement et l'arrêt du cœur. Si l'on sectionne tous les nerfs qui se rendent au cœur et si Ton rend ainsi ce dernier indépendant, la vératrine y produit les mêmes effets généraux. Le rhythme du cœur est accéléré au début; les contractions sont plus énergiques; puis cette activité décroît , l'organe devient immobile et ne répond plus aux excitations. Fort peu d'observations ont été faites jusqu'à présent, quant à l'action de la vératrine sur les Invertébrés. Je ne connais, à cet égard, que celles de Dogiel (larves de Corethra plumicornis) et celles de Krukenberg (Sangsue , Turris digitalis , JEquorea Forskalea) (\). Les expériences de Krukenberg ne concernant point l'appa- reil circulatoire, je ne parlerai que de celles de Dogiel (2). L'auteur cité a plongé des larves de Corethra plumicornis dans une solution de vératrine dont il n'a pas indiqué la concen- tration. Les chiffres qu'il a publiés prouvent une légère augmen- tation dans la fréquence des pulsations du vaisseau dorsal. Cette expérience très insuffisante étant la seule qui soit anté- rieure à mes essais personnels, les résultats que je vais exposer présentent un certain intérêt de nouveauté. Mes premières observations (5) ont été effectuées d'une façon trop superficielle pour les reproduire ici; je donnerai donc la description des expériences nouvelles que j'ai faites en 1880 sur le Carcimis mœnas. J'ai employé la vératrine à l'état de sulfate, en faisant usage de deux solutions différentes, l'une à V2000» l'autre à Vsoo- (1) Vergleichend toœicologische Untersuchungen, elc, op. cit., pp. 114 et 145. (2) Anat. und Phijs. des Herzens der Larve von Corethra, op. cit., p. 27 des tirés à part. (3) Communication préliminaire, page 12 des tirés à part. — 682 — y*' individu. — Le graphique indique des pulsations assez normales, un peu irrégulières, 70 par minute. On injecte 5 centimètres cubes de la solution à 72000 » P^** ^^ orifice pratiqué sur le côté, en dehors de la région stomacale de la carapace. Immédiatement : Exciialion évidente; le tracé parfaitement régulier accuse 85 pulsations par minute avec la même amplitude. 10 minutes après : 93 pulsations par minute. 20 — 71 — c'est-à-dire, retour à rétat normal. 2^ individu. — Graphique normal, régulier, 92 pulsations par minute. Injection de 3 centimètres cubes de la solution à */goo- La dose est forte; aussi, 2 minutes après l'injection, le tracé est-il une ligne tremblée indiquant un travail musculaire exces- sivement faible, 4 minutes après, le cœur est immobilisé en diastole (fig. 20). liu. iiO. — Crabe : a. graphique des mouvements du cœur à l'état normal : ^2 pulsa- tions par minute ; 6. graphique, 2 minutes seulement après l'injection. Ainsi que je l'avais déjà observé dans mes expériences anté- rieures, l'animal n'est cependant pas mort ; détaché, il marche et pince encore avec énergie. La mort ne survient que 20 minutes après la mise en liberté. 5* individu, — On dépose directement sur le cœur en mou- vement quelques gouttes de la solution à ^/boo* ^^ cœur s'arrête en diastole. Le graphique est une ligne tremblée comme dans la Ogure 20 ci-dessus. Deux minutes après, le cœur est absolu- — 683 — ment immobile. L'animal détaché ne meurt qu'après plus de i heure. 4' individu. — Le graphique des mouvements du cœur indique des pulsations régulières, assez énergiques : 96 par minute. On injecte 3 centimètres cubes de la solution faible à 72000* L'excitation initiale se manifeste presque immédiatement : H 3 pulsations par minute à amplitude plus forte. Cinq minutes après apparaît le ralentissement : 55 pulsations par minute, mais à amplitude aussi élevée (fig. 21, a, 6, c). On injecte, chez le même individu, une nouvelle dose deScen- timètres cubes de la même solution. Fig. 24. — Crabe : a. graphique des mouvements du cœur à l'état normal: 96 pulsation» par minute ; b. graphique après une première injection de sulfate de vératrine: 413 pulsations par minute ; c. ralentissement après cinq minutes : 53 pulsations par minute; d. nouvelle excitation après l'injection d'une deuxième dose : 86 pulsations par minute ; e. six minutes après : arrêt du cœur. Nouvelle excitation , plus faible : 86 pulsations par minute; puis 6 minutes après, le cœur s'arrête presque brusquement (fîg.21,d,e). — 684 — L'arrêt du cœur n'est cependant que momentané; en effet, l'animal ayant été détaché, le cœur recommence à battre. Au bout d'une demi-heure seulement, apparaît l'arrêt définitif; le Crustacé est mort. 5^ individu. — Tracé indiquant des pulsations normales assez lentes : 38 par minute. Injection d'un demi-centimètre cube de la solution à Vgoo- Ai)rès une minute, grande excitation avec augmentation d'ampli- tude. Après 2 minutes, l'excitation continue; 148 pulsations par minute, pressées, mais faibles, indiquant a la fois une excitation des centres moteurs intracardiaques et un affaiblissement des propriétés musculaires. Après 5 minutes, léger ralentissement. On injecte une nouvelle dose, cette fois de 5 centimètres cubes, delà même solution. Le ralentissement s'accuse encore davantage. Enfin, on dépose quelques gouttes du liquide sur le cœur. L'arrêt en diastole ne s'observe qu'après 1 minute environ, puis les battements reprennent, mais très faibles. Détaché, le Crabe n'effectue que des mouvements lents. En somme, les effets de la vératrine sur le cœur des Crustacés décapodes sont du même ordre que ceux que cette substance produit sur le cœur des Vertébrés. Quant au fait assez curieux et très constant que les individus empoisonnés effectuent encore des mouvements énergiques après la cessation des pulsations du cœur et peuvent même résister pendant plus d'une heure à des doses relativement fortes de poison, je ne vois d'autre moyen de l'expliquer qu'en admettant qu'il se passe ici ce que certains physiologistes ont cru observer chez les Vertébrés , c'est à dire que la vératrine abolirait les propriétés des fibres musculaires du cœur plus rapidement que celles des fibres des muscles de l'appareil locomoteur proprement dit. Sous l'influence de la vératrine, les Crustacés se trouveraient donc momentanément dans 1 état d'individus dont le cœur a été — 685 — extirpé. Or l'expérience prouve que les crabes peuvent effecti- vement vivre pendant quelque temps sans cœur. J'ai enlevé successivement cet organe à quatre Crabes; immé- diatement après l'opération, les individus cherchent à fuir; ils parviennent même à sortir d'un baquet en zinc dont les bords ont dix centimètres de hauteur.Plus tard, les mouvements s'affai- blissent et la mort arrive après les temps suivants : 35, 20, 18 et 45 minutes. § XIX. — SULFOCYANATE DE POTASSIUM. Le sulfocyanate de potassium abolit presque instantanément la contractilité musculaire, tout en respectant l'excitabilité ner- veuse. Les muscles des Vertébrés empoisonnés par cette substance ne se contractent plus sous l'influence des excitants (électri- cité, etc.); le cœur s'arrête. Dans le cas de doses faibles, Tarrét du cœur peut, chez les Vertébrés (Grenouille) précéder l'abolition complète des mouve- ments volontaires. Claude Bernard (1) seul, si je ne me trompe, a fait, à l'aide du poison en question, quelques expériences sur des Invertébrés. Ses essais ont porté sur la Sangsue et l'Écrevisse. L'illustre physiologiste s'est borné à constater, chez ces animaux, une mort très rapide et l'impossibilité d'obtenir des phénomènes de con- t?action musculaire par l'application de la pince électrique. Quoique les résultats de mes propres expériences fussent faciles à prévoir, le sujet était donc neuf. IN'ayant pas d'indications spéciales quant à la concentration de la liqueur à employer, j'ai fait usage d'une solution de sulfo- cyanate à 725« Le sel était très pur, m'avait été très obligeamment donné par M. le professeur Dubois et provenait de la collection du laboratoire de pharmacie de l'Université. (1) Claude Bernard, Leçons, etc., op. cil., p. 564. 46 — 686 - Une première injection de 1 centimètre cube, chez un Homard, m'a donné, d'après les tracés, les résultats ci-dessous : Animal non empoisonné. . . 23 puisa lions par minute. 1 minute après rinjeclion. . 25 - un peu irrégulières. 4 _ - 21 régulières. 9 — — 16 régulières, amplitude moitié moindre; le Homard agite encore ses antennules. 15 — - 25 à amplitude normale. La dose de 1 centimètre cube, soit 4 centigrammes de poison était donc beaucoup trop faible. Il y a eu un commencement d'action, mais celle-ci n'a pas persisté. Je fais, chez le même individu, une deuxième injection, cette fois de 5 centimètres cubes. L'effet est très marqué : s minutes après cette nouvelle injection, 3 pulsations par minute, séparées par de longs intervalles en diastole. 30 minutes après, 8 pulsations par minute; le sommet de la courbe est dentelé, montrant que chaque systole se compose de trois contractions fusionnées. Les pinces ne se ferment plus, les antennules sont immobiles, seules les mâchoires de la deuxième paire exécutent encore des mouvements oscillatoires spontanés. Quelques gouttes de la solution de sulfocyanate de potas- sium sont alors déposées sur le cœur lui-même; l'abdomen du Crustacé se soulève et se courbe légèrement vers le haut; l'ani- mal meurt brusquement; le cœur est immobilisé en diastole; l'application de la pince électrique ne produit plus, dans l'organe pulsatile, la moindre contraction. En résumé, à faible dose, le sulfocyanate de potassium amène un ralentissement du cœur des Crustacés, mais qui ne persiste pas. A doses plus fortes, il abolit à très peu près les mouvements de l'organe. Appliqué directement sur le cœur, il l'arrête. L'arrêt du cœur, même pour des doses faibles, ne précède pas la cessation complète des mouvements de l'animal. — 687 — § XX. — Conclusions. Sans m'exagérer la valeur de ce travail, je crois qu'il fait faire quelques pas à la physiologie comparée de la circulation chez les Crustacés. Dans les pages suivantes, je résume brièvement les différents résultats que j'ai obtenus; les uns sont très probablement nou- veaux, je les ai marqués du signe (*), les autres sont la confir- mation définitive d'observations faites par mes prédécesseurs et qui demandaient un nouvel examen par des méthodes sûres. A. — Faits anatomiques. Ì f). Les parois du sinus péricardique sont partout distinctes des téguments et des éléments squel'ettiques internes de l'animal. 2. Le plancher du sinus péricardique est une lame très mince; le milieu de cette lame est une bande longitudinale de nature conjonctive; les côtés seuls sont musculaires et comprennent une seule couche de fibres striées parallèles dirigées des bords laté- raux vers la bande médiane (confirmation des observations de Dogiel.) 3. Le sinus péricardique n'offre pas d'autres orifices naturels que ceux par lesquels le sang s'y déverse en revenant des branchies (confirmation de notions reçues, mais très importante pour la physiologie de la circulation des Crustacés décapodes). 4 (*). Injecté à la gomme et débarrassé de toutes ses brides conjonctives, le cœur des Décapodes macroures et un prisme horizontal à quatre faces ou pans, terminé par des bases anté- rieures et postérieures obliques. La face supérieure ou dorsale est la plus large de toutes; elle est un peu concave dans le sens longitudinal et est légèrement bombée transversalement. La face horizontale inférieure est moins large de moitié, de sorte que les faces latérales présentent une obliquité prononcée. Le cœur fermé, en avant, par un pan oblique, est terminé, en arrière, par une sorte de talon; c'est de ce talon que part l'artère sternale. — 688 — L'organe pulsatile offre donc une série d'angles saillants et d'arêtes et ne présente pas les contours arrondis qu'on lui attri- bue, même dans des ouvrages récents. 5. Le cœur des Décapodes est relié, dans tous les sens, aux parois du sinus péricardique, par des brides très nombreuses de nature exclusivement conjonctive (confirmation des observa- tions de Dogiel). Plusieurs de ces ligaments méritent le nom d'attaches dorsales et s'insèrent à la voûte du sinus péricardique (confirmation d'une observation de Lemoine). Ces attaches dor- sales ont une certaine importance au point de vue des mouve- ments du cœur à l'état normal. 6 ('). Le nerf cardiaque de Lemoine existe d'une façon incon- testable. Le nerf de Dogiel naissant de la chaîne nerveuse thoracique n'est probablement pas un nerf spécial au sinus péri- cardique ou au cœur; ce ne serait qu'un des troncs nerveux animant le système des muscles longitudinaux, extenseurs et fléchisseurs de l'abdomen du Crustacé décapode. B. — Faits physiologiques. 7 (*). La rupture des attaches dorsales (voyez n° 5), rupture qui a lieu chaque fois qu'on met le cœur à nu en pratiquant une fenêtre dans la région supérieure de la carapace, modifie les mouvements de la face supérieure du cœur en leur donnant une amplitude exagérée. 8. Les changements de forme du cœur des Crustacés doivent être interprétés comme ceux du cœur des Vertébrés : lorsque le levier inscripteur repose sur la face dorsale du cœur, la portion ascendante de la courbe tracée répond à la systole et la portion descendante à la diastole (confirmation d'observations de Marey). 9. Quoique le graphique des mouvements de la face dorsale du cœur d'un Crustacé donne la courbe du gonflement et non celle du raccourcissement musculaire, il rappelle d'une manière frappante celui que donne la secousse d'un muscle (la secousse du muscle fléchisseur du doigt mobile de la pince, par exemple) confirmation d'observations de Dogiel et fait en accord avec les expériences de Marey sur les Vertébrés). — 689 — 11 résulte donc des études faites sur les Crustacés, comme de celles effectuées chez les Vertébrés, que le cœur est un muscle ne donnant jamais de contraction parfaite, mais seulement des secousses incomplètement fusionnées. 10. Sous l'influence de chocs d'induction rapprochés, le cœur s'arrête en systole; le graphique est alors une ligne droite (tétanos complet), ou une ligne ondulée (tétanos incomplet) (confirmation par la méthode graphique d'anciennes expériences de Weber et de déductions de A. Brandt). il (*). Toutes choses égales d'ailleurs, le tétanos complet s'obtient plus facilement sur un cœur à pulsations lentes que sur un cœur à pulsations brèves et rapides. 12 (*). Changements dans la forme du cœur pendant la systole et la diastole. Tousles faits sont résumés § fV, E. 13 (*). Il n'y a pas d'onde cardiaque sensible, tout le cœur se contracte en systole en une fois (rectification d'une observation personnelle antérieure mal faite). 14 C). Le sinus péricardique est un sac passif; sa voûte est absolument immobile; son plancher musculaire mince a proba- blement pour seule fonction de maintenir lesattachesconjonctives du cœur dans un état de tension suffisant. 15 (*). Les parois du sinus péricardique n'exercent sur le sang aucune pression pouvant être considérée comme efficace; de plus, ces parois n'off*rent ni contractions ni relâchements alter- natifs. 16 (*). Tout le transport du sang, dans la circulation artérielle, comme dans la circulation de retour, se fait exclusivement sous l'action des mouvements du cœur proprement dit (confirmation d'anciennes idées reçues, mais qui n'avaient pas été vérifiées par l'expérience). 17 (*). La tension du sang dans le système lacunaire et le sinus péricardique des Crustacés décapodes est faible. 18. Chez les Arthropodes (Crustacés et Insectes), comme chez les Vertébrés, les accroissements de température accélèrent le rhylhme des mouvements du cœur (confirmation, par la méthode graphique, des observations de divers auteurs). — 690 — 19. Le nerf cardiaque est le nerf accélérateur du cœur des Crustacés ; toutes les excitations mécaniques, chimiques et élec- triques de ce nerf accélèrent notablement le rhythme des mou- vements du cœur (confirmations par la méthode graphique d'une découverte de Lemoine). 20 (*). La période d'accélération déterminée par l'excitation du nerf cardiaque débute parfois par une sorte de systole tétanique composée de plusieurs secousses fusionnées. L'accélé- ration des mouvements du cœur continue quelque temps après la cessation de l'excitation du nerf. 21 (*). La section du nerf cardiaque amène un ralentissement du cœur. 22. Les glanglions cérébroïdes n'ont aucune influence sur les mouvements du cœur (confirmations d'observations de Lemoine et^de Yung). 23. L'excitation électrique ou mécanique de la chaîne ner- veuse thoracique détermine soit un ralentissement du cœur, soit l'arrêt de l'organe en diastole. Cet effet cesse à peu près en même temps que l'excitation (confirmation d'expériences de Dogiel). 24 La destruction de la chaîne nerveuse thoracique suppri- mant un centre modérateur, amène, malgré la perle de sang, une augmentation notable de l'amplitude des pulsations (confir- mation par la méthode graphique d'observations incomplètes de M*' Intosh). 25 (*). Il existe, au point de vue de l'action sur le cœur, un véritable antagonisme entre le nerf cardiaque et la chaîne ner- veuse. 26 (*). L'excitation électrique du plancher péricardique ne modifiejpas les mouvements du cœur ; elle n'amène ni ralentisse- ment, ni arrêt diastolique. 27. L'excitation électrique des rameaux nerveux qui accom- pagnent l'artère sternale ne semble pas avoir d'action non plus (confirmation d'une observation de Lemoine). 28 (*). L'asphyxie ou du moins la suppression de l'accès de Tairaux branchies produit un léger ralentissement des mouve- ments cardiaques. — 691 — 29 (*). L'action du chloroforme se divise en deux périodes; dans la première ou période d'excilalion, l'amplilude seule des mouvements du cœur augmente. Dans la deuxième période, il y a ralentissement graduel allant jusqu'àTarrét définitif de l'organe. 30(*). L'action générale du curare sur le système moteur, quoique plus lente que chez les Grenouilles et les Poissons, est assez rapide si on compare les phénomènes à ceux qui se passent chez la plupart des autres animaux invertébrés. 51 (*). Chez les Crustacés curarisésjes mouvements du cœur persistent de longues heures après la mort apparente (o heures, 9 heures). 32 (*). De faibles doses de curare ne modifient ni la fréquence, ni l'amplitude des mouvements du cœur. Des doses fortes amènent du ralentissement et une diminution d'amplitude. 35 (*). La strychnine produit un ralentissement graduel des mouvements cardiaques avec diminution d'amplitude; puis au bout d'un temps assez long (plusieurs heures), le rhythme du cœur redevient normal, l'amplitude restant faible. (Ces faits sont d'accord avec ce qui s'observe chez les Vertébrés.) 54. Le cœur des Crustacés empoisonnés par la strychnine continue à battre longtemps après la mort de ces animaux (pen- dant 8 heures. Yung avait constaté la persistance de battements pendant 2 heures). 5d. Les effets de la nicotine ressemblent à ceux que l'on a observés chez les Vertébrés; seulement la première phase, c'est- à-dire le ralentissement initial, semble faire défaut. Les phases nettes sont : 1° une accélération très grande, parfois accompagnée d'augmentation d'amplitude; 2"* après quelques minutes, un ralentissement graduel (confirmation d'observations de Yung). 56 ('). Comme sous l'influence du curare et de la strychnine, le cœur des crustacés empoisonnée par la nicotine offre des pul- sations régulières de longues heures après la mort (6 heures). 57 (*). L'administration de la nicotine chez un Crustacé cura- risé amène l'accélération caractéristique comme chez un animal intact. 38. Quelle que soit la quantité d'atropine administrée à un — 692 — Décapode, en une ou plusieurs fois, jamais on ne réussit à déter- miner la mort de Fanimal (confirmation d'une observation de Yung). 39 L'action de l'atropine, à moins de doses très fortes, n'est que passagère. A la suite de chaque injection, il y a, comme chez les Vertébrés, ralentissement des mouvements du cœur, puis au bout de quelque temps, le nombre des pulsations se relève. L'amplitude est assez généralement décroissante (confirmation, quant au ralentissement, d'observations aniérieures de Dogiel et de Krukenberg). 40 (*). Contrairement aux assertions de Yung, je n'ai jamais vu que l'administration de la digitaline fût suivie d'une accélé- ration initiale des mouvements du cœur. Je n'ai constaté qu'un ralentissement. Si la dose est suffisante, le cœur finit par s'ar- rêter complètement et, dans ce cas, les excitants n'y réveillent plus de contractions. 41 ('). Si la dose de digitaline est faible, l'excitation du nerf cardiaque ramène, au contraire, des pulsations plus rapides et plus énergiques. 42 (*). L'application directe de la digitaline sur le cœur déter- mine un ralentissement très notable, mais passager. 45 (*). La vératrine, soit en injections, soit appliquée directe- ment sur le cœur, produit sensiblement les mêmes effets que chez les Vertébrés. De faibles doses amènent une accélération momentanée des mouvements du cœur. Des doses fortes sup- priment presque brusquement les propriétés du muscle cardiaque et de ses centres automoteurs et déterminent rapidement l'arrê* du cœur en diastole. 44 (*). Les individus dont le cœur est arrêté par la vératrine sont dans la situation de Crustacés dont le cœur a été extirpé. Comme ces derniers, ils vivent et exécutent encore des mouve- ments volontaires pendant quelque temps. Ce fait permettrait de supposer que la vératrine abolit les propriétés des fibres muscu- laires du cœur plus rapidement que celles des fibres des muscles de l'appareil locomoteur proprement dit. 45 (*). A doses faibles, le sulfocyanate de potassium produit — 695 — un ralentissement momentané du cœur. A fortes doses, soit en injections, soit en applications directes, le poison détermine Tarrêt du cœur en diastole. Cet arrêt ne précède pas la cessation complète des mouvements du Crustacé. En terminant, j'exprime toute ma reconnaissance à mon savant collègue M. le professeur R. Boddaert qui m'a autorisé à faire usage du cylindre enregistreur du laboratoire de physiologie placé sous sa direction, à M. le professeur Marey dont les pré- cieux conseils m'ont été si utiles, à mon ami M. le professeur Léon Fredericq qui a bien voulu faire pour moi quelques obser- vations intéressantes et à tous ceux qui m'ont facilité la tâche que j'avais entreprise. EXPLICATION DES PLANCHES. Planche XXVI. Fig. 1. Homard iujeclé à Ja gomme colorée : préparation durcie à l'alcool. Sinus péricai dique ouvert latéralement pour faire voir les attaches con- jonctives dorsales du cœur en place (grand, nat.). a. Attaches dorsales du cœur. 0. Un des orifices dorsaux. c. Région tergale de la carapace, c'. Région latérale de la même. h. Couche hypodermique des téguments. V. Voùie du sinus péricardique distincte de cet bypoderme. v'. Portion de la paroi du sinus péricardique déjetée latéralement. g. Tissu adipeux pigmenté en rouge. m. Muscle extenseur de l'abdomen occupant la région latérale du sinus péricardique. b. Branchies injectées. s. Premier somite abdominal. e. Épimères du céphalothorax. _ 694 — Fig 2. Écrerisse 9 injectée à la gomme colorée ; coupe verticale du corps à la hauteur du cœur (gross. 5). c. Cœur. V. Voûle du sinus péricardique. p. Plancher du sinus. a. Cavité du sinus. m, m', m", muscles extenseurs, muscles fléchisseurs de Tabdomen et muscles des membres. 0. Ovaire. t. Tube digestif. g. Glande digestive. s. Sinus veineux à la base des branchies. 6. Branchies. ep. È pi mères. Fig. 3. Esquisse de la coupe verticale du corps pratiquée immédiatement en arrière du cœur chez le Homard vivant (grand, nat.). c. Extrémité postérieure du cœur. V. Voûte du sinus péricardique. p. Plancher de ce sinus. m. Muscles extenseurs de l'abdomen. m\ Muscles fléchisseurs de l'abdomen. as. Artère sternale, n. Chaîne nerveuse. D. Nerf de Dogiel ajouté sur la figure après dissection d'un autre individu Fig 4. Crabe tourteau. Plancher du sinus péricardique. La carapace est enlevée ainsi que les pattes; les branchies, les viscères et la voiite du sinus sont sup- primés. La préparation est vue d'avant en arrière (gr. nat.). c. Cœur. p. Plancher du sinus péricardique. a. Artère sternale. 6. Pièces buccales. e. Épimères. /T". Flèches indiquant le cours du sang qui revient des branchies. Planche XXVIL Fig. 5. Levier et support pour l'étude graphique des mouvements du cœur des crustacés. a, a, a', a'. Cadre en bois soutenu par le pied en fer 66. c, c, c, c. Planchette glissant dans le cadre et sur laquelle est lié l'animal. d, Axe du levier. /. Levier inscripteur en verre. e, e. Petites tiges de verre portées par des règles mobiles et servant de guides au levier. r. Cylindre enregistreur enfumé. — 695 — Fig. 6. Petite lige munie d'un anneau dans lequel passe le levier de verre et plaque de liège reposant sur la face dorsale du cœur. Fig. 7. Élrier pour l'étude des mouvements de la face inférieure du cœur. e. Étrier métallique. /. Levier inscripleur en verre. ^ c. Fil de caoutchouc. f. Pièce fixe. Fig. 8. Levier coudé pour l'étude des mouvements des bords de la face supérieure du cœur. Fig. 9. Profils longitudinaux de la face supérieure du cœur du Homard vivant. d. Pendant la diastole. s. Pendant la systole. Fig. 10. Coupes transversales du cœur du Homard, injecté à la gomme et durci par l'alcool. « a. Coupe à la hauteur des orifices dorsaux (1»" tiers). h. Coupe à la hauteur des orifices laléro-posiérieurs, (2^ tiers). Fig. 11. Ensemble des principales attaches conjonctives du cœur du Homard (gross. 2). V, V. Attaches dorsales. a, a. Attaches antérieures. p. Attaches postérieures. ^, e. Attaches s'insérant sur la région épimérienne des parois du sinus. m. Attaches se fixant sur les muscles extenseurs de l'abdomen. pi. pi. Attaches nombreuses s'insérant sur le plancher péricardique. Fig. 12. Cœur du Homard injecté à la gomme, durci par l'alcool et débarrassé de la plupart de ses attaches conjonctives. a. Profil longitudinal. b. Face inférieure. Fig. 13. Changements d'aspect de la face supérieure du cœur du Homard vivant pendant les pulsations. d. Aspect diastolique. s. Aspect systolique. DE LA RÉGÉNÉRATION DE LA MOELLE ÉPINIÉRE; PAR M. MASIUS, PROFESSEUR À L'UNIVERSITÉ DE LIÈGE. Planche XXYIII. Ce travail comprend deux parties. Dans la première, nous rencontrons les objections qu'ont suscitées nos recherches sur la reproduction de la moelle épinière chez la grenouille. Dans la seconde partie, nous relatons les expériences entreprises par nous sur la régénération de la moelle épinière chez le chien. I En 1869 et en 1870, nous avons fait connaître, Vania ir et moi, les résultats de nos recherches sur la régénération de la moelle épinière (1). (1) Masius und Vanlair, Annlomische und functionelle Wiederherstellung des RUckenmarks beim Frosch (Centralblalt t'iir die Medicinischen Wissenschaflen, VII Jahrgang, 1869, N» 39). — Idem, Becherches expérimentales sur la régéné- ration anatomique et fonctionnelle de la moelle épinière. (Mémoires couron- nés, elc, publiés par TAcadémie royale de Belgique, 1870, t. XXI.) — 697 — Nous avons expérimenté sur des Grenouilles dont nous ouvrions le canal vertébral et dont nous enlevions un segment de moelle dans l'étendue de 1-2 millimètres. Lorsque la moelle était excisée à partir de l'union de la cinquième et de la sixième vertèbre et on arrière de cette articulation, on consta- tait, immédiatement après l'opération, non-seulement la perte de la sensibilité et de la motilité volontaire, mais aussi l'aboli- tion de toute excitabilité réflexe dans les membres postérieurs. Quand l'excision d'un segment médullaire était pratiquée plus en avant, vers l'union de la troisième et de la quatrième vertèbre, la sensibilité et la motilité volontaire étaient abolies, mais la réflexibililé était conservée dans le train postérieur tout entier. Dans les excisions faites à cette hauteur, nous laissions intact le centre générateur des racines du plexus sciatique. Sa limite antérieure ne dépasse pour ainsi dire jamais la hauteur de la quatrième vertèbre, tandis que l'union de la cinquième avec la sixième vertèbre, parfois même le milieu de cette dernière, marque la limite postérieure. C'est ce qui explique la persistance de l'excitabilité réflexe dans tout le train postérieur, lorsque la section était pratiquée au milieu du corps de la quatrième vertèbre, tandis qu'il fallait descendre au moins jusqu'au milieu de l'union de la cinquième et de la sixième vertèbre, parfois même plus bas, pour anéantir toute espèce de sensibilité et de motilité dans tout le membre postérieur (1) Nous relatons, dans le travail (2) publié en 1870, lout un groupe d'observations qui nous paraissent de nature à prouver la régé- nération fonctionnelle de la moelle épinière. Il est important de reproduire quelques-unes de ces observations qui ont été mal interprétées par quelques auteurs. (1) Masius et Vanlair, De la situation et de rétendue des centres réflexes de la moelle épinière chez la Grenouille. (Mémoires couronnés, etc., publiés par l'Acadéniie royale de Belgique, 1870, l. XXI.) (2) Masius el Vanlair, Recherches expérimentales sur la régénération ana- tomique, etc. — 698 — L'observation IV concerne une Grenouille qui a été opérée le 15 novembre 1867. Un segment a été enlevé dans une étendue de 1""" à partir de l'union de la cinquième et de la sixième vertèbre et en arrière de cette articulation. De cette façon, nous avons non-seulement soustrait les mem-, bres postérieurs à l'action cérébrale, mais nous avons de plus lésé la partie médullaire, dont la destruction entraîne la perte de tout acte réflexe dans le train postérieur. Aussi, après Topé- ration, constatons-nous la disparition des mouvements réflexes, ainsi que celle de la sensibilité consciente et de la motilité volontaire. Les membres postérieurs sont dans un état de flaccidité permanente. Quatre mois après, on ne constate encore aucune trace d'exci- tabilité ni de motilité réflexes pas plus que de sensibilité à la douleur dans le train postérieur, mais l'animal a recouvré en partie la motilité volontaire dans les parties primitivement para- lysées. Les cuisses, qui déjà deux mois auparavant présentaient de petites contractions librillaires toutes spontanées, se rap- prochent maintenant du tronc, et cela d'elles-mêmes. La jambe peut se fléchir aussi spontanément, mais pas au même degré que la cuisse. Le pied demeure toujours immobile. Les mouvements d'extension sont encore interdits à l'animal. Au mois de mai 1868, donc six mois après la récision du seg- ment médullaire, les mouvements volontaires et réflexes des membres postérieurs étaient complètement revenus, et la sensi' bilité cutanée était redevenue aussi vive que dans les conditions normales f à ce point que la Grenouille sautait aussi vigoureuse- ment que ses voisines. Dans l'observation V, la Grenouille est opérée de la même façon et à la même époque que la précédente. Toute sensibilité et toute motilité sont abolies dans les membres postérieurs. Le 14 mars 1868, environ quatre mois après l'opération, la sensibilité et la motilité réflexe n'ont pas encore reparu, mais on constate le retour de la motilité volontaire. Ce sont surtout des mouvements spontanés de flexion qu'efl'ectue la Grenouille, mais aussi parfois des mouvements d'extension. Le membre — 699 — gauche est moins avancé que le droit. On n'y observe encore que de faibles mouvements de flexion et seulement dans la cuisse et dans la jambe. Si Ton irrite vivement le train antérieur de la Grenouille, elle fait un effort pour sauter en avant, ramène, pour effectuer ce mouvement, le membre postérieur droit, mais ne peut imprimer à la cuisse gauche qu'un mouvement très limité. Deux mois plus tard, la Grenouille avait recouvré complète- ment Vusage des membres postérieurs, et se comportait comme si elle n^ eût jamais subi d'opération. Telles sont les observations qui nous ont fait admettre le réta- blissement de la fonction de la moelle épinière, la conductibilité centrifuge réapparaissant avant la conductibilité centripète. Schiefferdecker (1) ne considère pas nos expériences comme concluantes. Il nous reproche de ne pas avoir décrit avec plus de précision les symptômes que présentaient nos Grenouilles, de mentionner seulement olontaire et la sensibilité consciente avaient tout à fait reparu. L'animal, deux mois après qu'il avait subi l'excision du segment médullaire, commençait à se tenir sur ses pattes de derrière, la queue n'était plus inerte; au lieu d'être abaissée entre les jambes, elle était maintenant redressée à la base, de — 710 — sorte que celle-ci formait, avec le reste de l'appendice, un angle ouvert en bas. Au bout de quatre mois et demi environ, notre chienne faisait quelques pas sur les quatre pattes, puis elle retombait sur le train postérieur, se relevait pour avancer de nouveau, appuyée sur ses quatre membres. A cette époque, il n'existait pas de traces de sensibilité consciente, et les mouvements réflexes étaient provoqués avec plus de difficulté : l'excitation nerveuse devait être plus intense, et elle amenait des mouvements réflexes moins étendus. Ce n'est que sept ou huit mois après l'opération que notre animal a présenté des signes de sensibilité douloureuse dans le train postérieur. En enfonçant alors une aiguille rougie au feu dans la peau de la queue à sa racine et dans la peau de la partie interne de la cuisse, la chienne retournait brusquement la tête ou cherchait à fuir. A cette époque aussi elle se mettait souvent sur son séant, elle courait avec plus de facilité sur les quatre pattes; mais celles de derrière restaient toujours chancelantes; sa démarche avait quelque chose de particulier, difficile à décrire, elle rappelait celle de l'hyène. Quand on excitait la chienne à sauter, elle essayait de le faire, mais elle tombait presque aussitôt sur le flanc. La queue s'élevait maintenant jusqu'à la position horizontale. L'animal émettait volontairement les urines et les fèces; on n'était plus obligé, comme parfois dans le prin- cipe, de presser la vessie et de débarrasser le rectum ; il s'accrou- pissait pour la miction et la défécation comme avant la récision de la moelle. Mais ce n'est qu'après un an et demi que l'on n'apercevait plus rien d'anormal : notre opérée courait, sautait tout aussi bien qu'un chien très sain et très vigoureux. Nous n'oublierons pas de mentionner que quatre à cinq mois après la section de la moelle, notre chienne a mis bas deux jeunes : l'opération n'avait donc nullement entravé le développement des germes ni la parturition. Ce qui corrobore d'ailleurs ce que Goltz (1) a dit de l'influence de la moelle lombaire sur les phé- (1) Goltz, Ueber den EinflUss des Nevensy stems au f die Vorgànge wàhrend der Schwangerschaft, Pflùger's Archiv IX, S. 552. — 714 — nomènes de la grossesse. A noire grand regret, nous avons été dans l'impossibilité de faire l'examen anatomique de la moelle. La chienne, dès les premiers mois, pour être placée dans de bonnes conditions hygiéniques, était logée chez notre garçon de laboratoire qui habitait un des faubourgs de Liège. Un jour elle s'est perdue et toutes les recherches pour la retrouver ont été faites en vain. Cette observation paraît prouver que la régénération physio- logique de la moelle a été complète, et que, comme nous l'avions constaté chez les Grenouilles, la motilité a reparu avant la sensibilité. Au mois d'avril 1876, nous avons repris nos recher- ches sur la reproduction de la moelle. Nous avons pratiqué, sur des Chiens de deux à trois mois, la section de la moelle vers sa terminaison, nous avons enlevé le segment médullaire qui préside à la tonicité ainsi qu'à la contraction réflexe des sphincters de l'anus, de la vessie et de la queue, segment auquel arrivent des fibres empêchantes de la motilité réflexe, et par lequel passent des fibres qui conduisent aux sphincters et à la queue l'impulsion de la volonté (1). La récision de la moelle dans le tiers inférieur de la région lombaire présentait les avan- tages de laisser à peu près intactes la motilité et la sensibilité des membres postérieurs, d'entraîner la perte non-seulement des mouvements volontaires des sphincters ainsi que de l'ap- pendice caudal, mais aussi celle de leur tonicité et de leur motilité réflexe, et d'écarter ainsi toute cause de discussion provenant de la persistance et de l'exagération des mouvements réflexes, quand la moelle était coupée plus en avant. Le 21 août, 1876, sur un Chien de trois à quatre mois, préa- lablement chloroformisé, nous avons ouvert le canal vertébral dans l'étendue de la cinquième vertèbre lombaire,- la dure-mère {]) Masil's, Du centre ano- spinal. Bulletins de l'Académie royale de Belgique, 2"»esérie,t.XXIV, p. 312. Idem, Recherches expérimentales sur Vinnervation des sphincters de Vanus et de la vessie. Bulletins de l'Académie royale, etc., S-^^ série, t. XXV, 491. Idem, Contribution à Vhistoire de la moelle lombaire chez le Chien. Bulletins de l'Académie royale de médecine de Belgique, 3™« série, t. IX. — 712 — a été incisée longitudinalemenl, la moelle a été soulevée hors du canal; alors une première section a été pratiquée environ à Tunion du tiers inférieur et du tiers moyen de la cinquième ver- tèbre lombaire; une seconde section a été faite plus bas, de façon à limiter un segment médullaire de 4 millimètres environ, puis le segmenta été complètement enlevé. La coupe transverse de la moelle était complète et le segment excisé parfaitement cylindrique; il présentait la conliguration normale de la sub- stance giise et de la substance blanche de la moelle. Nous avons opéré le même jour, de la même façon, trois autres Chiens, âgés aussi de trois à quatre mois. Le lendemain, nous avons examiné nos Chiens. Ils se portaient très bien; ils mangeaient avec appétit ; on ne remarquait rien d'anormal dans les membres postérieurs; les animaux couraient avec facilité; mais l'urine s'écoulait sans cesse et mouillait les chiens. La vessie n'était pas distendue, elle n'était pas sentie dans Thypogastre. Les matières fécales se présentaient continuellement à l'orifice anal, et souillaient le fondement: elles s'échappaient à Tinsu de nos opérés. La queue était tout à fait paralysée, elle n'opposait pas la moindre résistance aux mouvements qu'on lui imprimait et ne présentait aucune sensibilité : on pouvait l'irriter à l'aide d'agents mécaniques, chimiques, thermiques, sans provoquer le plus petit mouvement de la queue ou d'une autre partie du corps. Quand on enlevait les fèces qui arrivaient à la terminaison du rectum, on voyait que le sphincter anal était relâché : l'orifice de l'anus était ouvert et il se laissait distendre avec la plus grande facilité. L'excitation de la muqueuse du sphincter ne faisait pas contracter ce muscle. En introduisant le doigt dans le rectum, le sphincter restait inerte; mais à 5 centimètres au moins au delà du sphincter, on sentait les contractions péristaltiques du rec- tum qui faisaient cheminer les matières fécales. Six semaines plus tard, des changements assez marqués déjà s'étaient produits. Nos animaux n'étaient plus mouillés d'une façon continue, l'urine s'écoulait moins et seulement quand on les soulevait; l'incontinence fécale diminuait, la queue n'était plus complètement abaissée, elle était moins flasque et résistait — 713 — quand on voulait la relever; Torifice anal était à peu près fermé, le sphincter opposait de la résistance à l'écartement des deux branches d'une pince; il se contractait légèrement par suite de rirrilalion mécanique de la muqueuse qui le recouvrait, mais il n'y avait pas encore d'apparence de sensibilité douloureuse : on irritait la queue et la muqueuse anale sans déterminer d'autres phénomènes que les mouvements réflexes rapportés pins haut. Les fonctions, que nous avions supprimées par l'excision, s'étaient reproduites de plus en plus complètement, puisque trois à quatre mois après l'opération l'orifice anal était entièrement fermé, le sphincter se contractait fortement sur le doigt introduit dans le rectum, la queue se relevait parfois jusque dans la position hori- zontale, d'autrefois elle était maintenue fortement abaissée, lors- qu'elle était irritée à sa base ou que la muqueuse anale était excitée mécaniquement, soit par un instrument piquant, soit par les fèces qui arrivaient à l'anus. Celles-ci étaient alors sou- vent repoussées par la contraction du sphincter dans le rectum ou bien expulsées au dehors. Huit mois s'étaient écoulés avant que nos Chiens eussent senti manifestement le besoin de miction et de défécation, car, alors seulement on les a vus s'accroupir,ou lever l'une des pattes de derrière pour accomplir ces actes. Les Chiens ont été tués au mois d'octobre 1877. Nous avons ouvert toute la partie inférieure du canal vertébral à partir de l'union de la région dorsale et de la région lombaire. Vers la partie inférieure de cette dernière, nous avons dû couper des adhérences qui s'étaient établies entre les enveloppes de la moelle et la paroi postérieure du canal; la moelle épinière a été ensuite enlevée; elle formait un tout continu et il n'existait plus aucune appa- rence de solution de continuité. Mais on remarquait, correspon- dant à la récision du segment médullaire, une partie saillante qui constituait une espèce de difformité et qui était formée par du tissu cicatriciel. Nous avons incisé longitudinalement les enveloppes : elles adhéraient entre elles au niveau du tissu cica- triciel. Les moelles ont été alors placées dans une solution de bichromate de potasse, à 2 p. "/o? puis dans de l'alcool fort. L'étude anatomique n'en a été faite que cette année, par suite — 714 — de circonstances indépendantes de nous. Nous adressons ici nos remercîraents à M. Masquelin, préparateur du cours d'histologie à l'Université de Liège, qui a bien voulu pratiquer les coupes pour l'examen microscopique et dessiner la planche annexée à notre travail. Les moelles durcies s'étaient infléchies au niveau de la cica- trice. Elles ont été divisées parallèlement à leur grand axe, et la surface de section a été examinée avec soin à la loupe. On pou- vait à peine distinguer le tissu cicatriciel du bout supérieur de la moelle. Celui-ci paraissait pourtant se terminer par une extré- mité arrondie dont la coloration était à peine différente de celle de la cicatrice. On reconnaissait difficilement le segment inférieur de la moelle, qui se présentait sous la forme d'une petite masse, un peu conique à son extrémité supérieure. Il se trouvait englobé dans le tissu cicatriciel, qui semblait le prolonger vers le bas. La pie-mère était fortement épaissie immédiatement au-dessus de la cicatrice, surtout à la face dorsale, et elle se continuait tout entière dans le tissu cicatriciel (voir fig. 1). Dans le but d'être examinées au microscope, la cicatrice et les parties immédiatement en rapport avec elle ont été isolées du restant de la moelle, portées dans l'eau, puis dans la gomme- glycérine, enfin durcies dans l'alcool et enchâssées dans des morceaux de foie. Des coupes assez minces ont été pratiquées, les unes dans le sens longitudinal, d'autres dans le sens transversal. Après colo- ration dans le picrocarmin, ces coupes ont été traitées par l'acide osmique, tantôt à 1 p. 7o, tantôt à 1 p. 7oo, puis déshydratées par l'alcool absolu, éclaircies par l'essence de girofle et montées dans le baume de Canada. Quelques-unes ont été soumises à l'action du picrocarmin ou de l'hématoxyline et éclaircies sans passer par l'acide osmique. En examinant d'abord au microscope simple les coupes longi- tudinales, nous voyions manifestement (fig. 2 et 3) des tractus partir du bout supérieur de la moelle, arriver à la cicatrice et la parcourir dans une certaine étendue. Ces tractus étaient la plu- part d'une coloration jaune brunâtre; d'autres, d'une couleur rosée, étaient interposées entre les premiers. — 715 — Ceux-ci, à un fort grossissement (460), se montraient formés par des fibres nerveuses dont beaucoup renfermaient de la myé- line coagulée et fragmentée, tandis que les tractus rosés étaient constitués par du tissu conjonctif fibrillaire. Nous n'avons pas constaté de gaine de Schwann ni de noyaux sur le trajet des fibres nerveuses. L'étude des coupes transversales confirmait et complétait les données précédentes. Ces coupes avaient été pratiquées à travers le tissu cicatriciel et la partie inférieure du segment supérieur de la moelle, successivement à diverses hauteurs, de façon à obtenir toute une série de coupes superposées. On voyait dans celles du tissu cicatriciel, à un faible grossissement, au milieu d'une masse striée, colorée plus ou moins en rouge par le picro- carmin ou en bleu violet par l'hématoxyline, des traînées assez nombreuses qui contrastaient par leur couleur grisâtre (rig.4 A) ou leur couleur brunâtre claire. Dans les mêmes coupes, on dis- tinguait assez fréquemment àia périphérie la section transverse d'une racine nerveuse (fig. 4. B), dont l'union était intime avec le tissu cicatriciel. Un grossissement de 460 environ (Seibert, objectif 7 à immerbion, oculaire 0) démontrait que ce tissu était formé par de très beaux faisceaux ondulés de tissu conjonclif, dont les noyaux apparaissaient souvent colorés avec une grande intensité par le picrocarmin et l'hématoxyline, et par des fibres nerveuses en grande quantité, la plupart à myéline, rarement isolées, le plus souvent réunies en groupe dans le stroma du tissu conjonctif. On reconnaissait parfaitement les cylindres-axes, qui avaient pris une teinte rouge ou bleuâtre, et qui étaient tantôt irréguliers, anguleux, plus ou moins étoiles, tantôt, au contraire, se présentaient sous forme de cercles réguliers (fig. 5 et 7). Les fibres nerveuses étaient toutes très petites : leur diamètre trans- verse mesurait 4 à 8 f;-. Dans la racine, les tubes nerveux étaient en général volumineux : ils avaient un diamètre transverse moyen de 20 fj^; on y trouvait pourtant des fibres qui n'avaient que 4 à 8 p. d'épaisseur. Les fibres nerveuses présentaient la plupart, dans la partie inférieure du bout supérieur de la moelle, les mêmes dimensions que les fibres nerveuses dans la cicatrice et les plus petites dans — 716 — la racine (fig. 8). Du tissu conjonciif fîbrillaire disposé en fais- ceaux, peu épais, séparait les tubes nerveux et se continuait directement dans celui de la cicatrice. Ce tissu conjonciif était très abondant dans le bout inférieur de la moelle, qui ren- fermait de nombreuses fibres nerveuses tout à fait semblables à celles que nous venons de décrire. Nous n'avons pas observé la reproduction de cellules nerveuses. Eichhorst, après avoir douté de la reproduction de la moelle épinière, abandonne aujourd'hui sa première manière de voir et admet la régénération de la moelle chez le Chien. Les faits que cet auteur a observés sont conformes aux noires. Il a constaté la réapparition de la motilité volontaire après la récision d'un petit segment médullaire, ainsi que la présence de fibres nerveuses dans le tissu cicatriciel qui réunissait les deux bouts de la moelle épinière. Le plus grand nombre avaient 5 fx et offraient de doubles contours. Elles étaient dépourvues dégaine de Schwann, mais la plupart présentaient des noyaux sur leur trajet (1). En résumé, nous croyons avoir rencontré toutes les objections qui ont été élevées contre nos recherches sur la régénération anatomique et fonclionnelle de la moelle épinière chez la Gre- nouille, et pouvoir formuler de plus les propositions suivantes : 1" La perte de substance opérée dans la moelle épinière chez le Chien est réparée par un tissu cicatriciel riche en fibres nerveuses qui se continuent directement dans la substance médullaire: 2° Comme chez la Grenouille, le retour de la mobilité reparaît d'abord, la sensibilité revient en dernier lieu; 5° La régénération des cellules nerveuses n'est pas démontrée jusqu'à présent chez le Chien; il faudrait donc admettre, pour expliquer le retour de la tonicité et de la motilité réflexe, sus- pendues par le fait de la lésion de la moelle épinière, que les cellules nerveuses peuvent se suppléer dans le mécanisme de ces fonctions. (1) II. EiciieoRST, Veber He generation und Degeneration des Riickenmarkes. Zeilschr. f. Klin. med. I, S. 284-518. — 717 — EXPLICATION DES FIGURES. Planche XXVIII. Fig. 1. Section longitudinale de la moelle ei du tissu cicatriciel (vue à la loupe). Le tissu cicatriciel se continue avec la pie-mère fortement épaissie. Il se prolonge dans le segment supérieur de la moelle, qui paraît se terminer en cône, et remplace presque complètement le segment inférieur. Le long du segment se trouve une racine nerveuse qui lui est accolée. Les faisceaux nerveux et les segments médullaires sont teintés en noir. Fig. 2. Coupe longitudinale de la moelle et du tissu cicatriciel vue au microscope simple. Le tissu conjonctif, qui est en continuité avec la pie-mère et que Ton voit se prolonger dans la moelle, est coloré en rouge, le tissu nerveux de la moelle et delà cicatrice en gris noirâtre. Fig. 3. Coupe longitudinale de la moelle épinière et de la cicatrice. Cette coupe est plus périphérique que la précédente. Les faisceaux nerveux de la moelle pénètrent dans le tissu cicatriciel. On voit aussi parfaitement que la névrogiie s'est épaissie dans la partie inférieure du segment supérieur delà moelle épinière. (Vue au microscope simple.) Fig. i. Coupe transversale passant à travers le tissu cicatriciel et une racine ner- veuse. Microscope simple. A. Tissu cicatriciel 1 substance nerveuse enblanc et substance conjonctive fî. Racine nerveuse ) en rouge. Fig. 5. Coupe transversale de la cicatrice : les 6bres nerveuses, dont le cylindre- axe est rendu très distinct par l'hémaloxyline, sont groupées dans un tissu conjonctif dont les noyaux sont très apparents. Fig. 6. Coupe transversale des fibres d'une racine nerveuse dessinée d'après la même préparation que la précédente. Grossissement : objectif 7 à im- mersion de Seibert. Fig. 7. Coupe transversale du tissu cicatriciel colorée par le picrocarmin. Les fibres nerveuses en forment la plus grande partie; le cylindre-axe appa- raît très nettement coloré par le picrocarmin. Grossissement : objectif 7 de Seibert. Fig. 8. Coupe transversale de la substance blanche du segment supérieur de la moelle épinière dans le voisinage immédiat de la cicatrice. Même grossis- sement que dans la figure précédente. 48 RECHERCHES SUR LE UODE DE DISPARITION DE LA CORDE DORSALE CHEZ _£_ _r LES VERTEBRES SUPERIEURS; Par H. LEBOUCQ, PROFESSEUR A L'UNrVERSITÉ DE GAND. (Planche iXIl.) La corde dorsale, premier rudiment de Taxe squelettique des Vertébrés est essentiellement un organe embryonnaire, dispa- raissant d'autant plus rapidement et d'une manière d'autant plus complète que l'on s'élève plus haut dans la série. Tandis que chez les Vertébrés inférieurs elle persiste pendant toute la vie, constituant même chez quelques-uns, d'une manière exclusive, la partie axiale du squelette, on voit son importance diminuer à mesure que l'organisation se complique, au point que chez les Vertébrés supérieurs, elle a cessé de se présenler comme organe distinct, à une période assez hâtive de l'évolution embryonnaire. Qu'est-elle devenue à cette époque? A-t-elle disparu simplement par résorption, ou bien persiste-t-il encore des parties dérivées — 719 — dans la colonne vertébrale développée? Telle est la question que j'ai tâché de résoudre. Il n'entrait pas dans mon plan d'étudier l'origine de la corde dorsale ni les premiers stades de son évolution ; je n'ai com- mencé son étude qu'à partir du moment où la colonne est défi- nitivement projetée sous forme de segments cartilagineux destinés à devenir les corps des vertèbres, séparés par des espaces de tissu conjonctif (espaces intervertébraux). Au stade de développement où commencent mes recherches, la corde existe encore, tant au niveau des corps de vertèbres que des espaces intervertébraux; mais, influencée par les modi- fications du voisinage, elle change d'aspect, suivant qu'elle tra- verse la vertèbre proprement dite ou le tissu intervertébral ; on peut donc considérer à la corde une portion vertébrale et une portion intervertébrale. Le segment vertébral de la corde a été peu étudié chez les mammifères. La plupart des auteurs se bornent à signaler sa rapide disparition précédant même, d'après quelques-uns, l'apparition du premier noyau d'ossification de la vertèbre (Gegenbaur (1), 0. Schmidt (2)). 11 est vrai que H. Millier (3) fit remarquer qu'aux deux extrémités de la colonne (base du crâne, odontoïde, coccyx) la corde persiste plus longtemps au niveau des corps vertébraux que dans le reste de la colonne; Dursy (4) étendit cette observation à toute la hauteur de la colonne. D'après lui, on peut, sur des coupes minces, voir pen- dant quelque temps la corde, sous forme de cordon cellulaire, traverser le noyau d'ossification (p. 17). Gegenbaur même, malgré la loi générale qu'il avait formulée concernant la dispa- rition précoce du segment vertébral de la corde chez les mammi- fères, signale exceptionnellement la persistance d'un cordon (1) Gegenbaur, Untersuch. zur vergi. Anatom. der Wirbelsàule. Leipzig, 1862, p. 67. (2) 0. Schmidt, Bandhuch der vergi. Anatomie, 6« Aufl. Jena. 1872 , p. 286. (3) H. MuLLER, Veher das Vorkommen von Beslen der Chorda dors, beim Menschen, etc. (Zeilschr. f. rat. Med. 5« R. Bd II; — 1838.) (4) E. DmsY^ Zur Enlwickelungsgescfi. des Kopfes, etc. Tùbiogeu, 1869. — 720 — fusiforme granuleux, au centre de la vertèbre déjà calcifiée chez deux embryons de Marsupiaux (Ì). Il explique ce fait parce que la corde se conserve mieux quand elle est entourée de tissu imprégné de sels calcaires, que lorsqu'elle se trouve plongée au sein du cartilage. Kôlliker, qui admet aussi la disparition rapide de la portion vertébrale de la corde, figure sur une coupe trans- versale de vertèbre de Chat, oii la substance fondamentale est déjà calcifiée, la section du segment vertébral de la corde (2). La partie intervertébrale de la corde chez les mammifères a fait l'objet de recherches plus approfondies. On sait que Luschka le premier a émis l'idée que le noyau pulpeux contenu dans le disque intervertébral chez l'homme était un reste de la corde dorsale (5). Cette opinion est encore généralement admise et se trouve dans le plus grand nombre des traités classiques. Elle fut combattue dans quelques travaux spéciaux, soit directement écrits en vue de déterminer la part qui revient à la corde dans la formation du disque intervertébral, tel est le travail de Heiberg (4); soit traitant la question incidemment, et arrivant aussi à conclure que la corde dorsale n'a aucune part dans la formation du noyau pulpeux du disque. A côté des travaux de H. Millier et Dursy cités plus haut, signalons ceux de J'àger (5), Mihalkovics (6), etc. (Voir la bibliographie dans le travail de L. Lowe :Ziir Kennhiiss der Sàuget/iierc/wrda; in Arch. f. mikr. Anat. Bd. XVI, 1879, p. 597.) La voie à suivre pour résoudre la question que je m'étais proposée était nettement tracée. Il s'agissait d'étudier le plus (1) Loc. cit.^ p. 67. — Note. (2) Entwickeliingsgeschichte, 2^ Aufl., fig. 234. (3) Luschka, Die AlUrsverdnd. der Zwischemvirbelknorpel (Virchow's Archiv, IX. p. 311, 1856.) Luschka, Die Halbgelenke, Berlin, 1858, p. 53. (4) Heiberg, Ueber die Zicischeiiwirbelgelenke und Knochenkcrne der Wirbelsciule, etc. (Scheiik's Millheilungen. 11^ Heft. — 1878, p. 110.) (5) JÀGER, Das Wirbelkôrpergelenk der Vdgel. (Wiener Akad. Silzungsber., Bd. XXXIII, 1858, p. 527.) (6) Mihalkovics, Wirbelsaiteund Hirnanliang, (Arch. f. mikr. Anat. Bd. Xi, p. 385, 1875) — 721 — grand nombre de types possible, et surtout d'étudier la naême espèce à divers stades de développement. J'ai examiné des séries d'embryons humains, d'embryons de Mouton, de Vache, de Lapin, et divers stades isolés de développement de la Taupe, Rat, Souris, Cochon d'Inde. J'avais primitivement limité mes recherches aux mammifères. Ayant eu ensuite l'occasion d'exa- miner quelques embryons de Poulet, j'ai signalé également les résultats auxquels je suis arrivé, les mettant en parallèle avec ceux fournis par les mammifères. Rien de particulier à mentionner au point de vue de la technique. J'ai employé généralement la méthode des coupes transparentes et surtout les séries de coupes successives pra- tiquées dans la même pièce. Aucun détail ne peut échapper de cette façon. Les pièces ont été traitées par les réactifs ordi- naires: décalcihées par l'acide picrique ou l'acide nitrique d'après le procédé indiqué par Busch (1). Je ne saurais assez recom- mander cette dernière méthode quand il s'agit de décalciûer des pièces osseuses d'un grand volume. Certaines parties ont été examinées à l'état frais; d'autres après l'action de l'iode ou de l'acide osmique, enfin les préparations décalcifiées par les méthodes ordinaires ont été soumises à l'action de diverses matières colorantes. §1- Les plus jeunes embryons de mammifères que nous ayons examinés au point de vue du sujet qui nous occupe, se trou- vaient au stade où une différenciation nette s'était établie entre les corps des vertèbres, encore cartilagineux, et le tissu inter- vertébral. Les figures 1 et 9 représentent des coupes de colonne à cette époque de développement respectivement chez l'homme (embryon de 2 72 centimètres [8™^ semaine]) et chez un rumi- nant (Vache 3 centimètres). (1) F. Busch, Zur Technik der mikrosk. Knochenuntersuch. (Arch. f. mikr. Anal., Bd XIV, p. 480 ) — 722 — La corde traverse sans interruptions la colonne, elle est rétrécie au niveau des corps de vertèbres, dilatée en fuseau au niveau de chaque segment intervertébral (1). Nous examinerons successivement les particularités que la corde et le tissu péri- chordal présentent dans ce stade. Sur des coupes parallèles ou perpendiculaires à l'axe de la colonne, la corde présente au niveau du segment intervertébral une couche périphérique formée de cellules serrées les unes contre les autres à la manière des epitheliums (surtout visible fig. 9; dans la figure 1, cette disposition est moins évidente probablement par suite d'altération). Les éléments du centre sont plus lâchement unis, des lacunes se sont formées entre eux. Les cellules de la corde sont granuleuses, renfermant un noyau, et ont assez d'affinité pour les matières colorantes. Au niveau du segment vertébral , on ne distingue plus deux espèces d'éléments, les cellules qui constituent l'organe à ce niveau ont de l'analogie avec celles qui occupent le centre de la partie renflée; elles sont séparées par des espaces, probablement remplis de liquide. Les cellules périphériques formant une couche continue au niveau de la dilatation intervertébrale, c'est à ce niveau seule- ment que, sur les sections transversales de ce stade, se remarque la différence d'aspect de la couche périphérique et centrale de la corde, déjà signalée par Schwann (2). H. Millier (5) explique cette différence d'aspect parce que les cellules du centre de la corde seraient plus claires. Je serais plutôt porté à en chercher (i) N'ayant pas examiné des embryons aussi jeunes que ceux de Dursy, je n'ai pu contrôler la disposition assez remarquable que cet auteur signale chez un embryon de Vache de 1, 2 centimètre où il a trouvé des étranglements interver- tébraux alternant avec des renflements vertébraux fusiformes {loc. cit.j p. 27, fig. XII, a.) La figure b {ibid.) est trop schématique pour pouvoir être mise en parallèle avec notre figure 9. Les deux proviennent d'embryons de taille à peu près égale. (2) Schwann, Mikrosk. Untersuch.y etc. Berlin, 1838, p. 11. (3) W. MOLLER, Ueber den Bau der Chorda dorsalis (Jenaische Zeitschr.Bd.VI, 1874, p. 337.) — 723 — la cause dans les lacunes quî se forment entre les cellules placées dans Taxe de l'organe. C'est dans ce sens que j'admets la lumière centrale que His (1) y signale. Le tissu péricliordal est déjà différencié en un segment carti- lagineux, ébauche de la future vertèbre, et une partie interver- tébrale. Le cartilage vertébral ne présente rien de particulier à l'élude. On y observe les transformations connues de ce tissu à mesure qu'on se rapproche du commencement de l'ossification. Lorsque la calcification de la substance fondamentale commence, on voit sur des coupes longitudinales les cellules de la partie moyenne augmentées de volume, et disposées régulièrement de chaque côté de la corde autour de laquelle le premier noyau d'ossifl- cation forme donc un anneau. Le tissu intervertébral se distinguée première vue, et même à un faible grossissement par une diminution de la substance intercellulaire, correspondant par conséquent à une augmen- tation du nombre des cellules. Celles-ci se différencient dans la direction des cellules conjonctives. Elles sont allongées, fusi- formes, leur grand axe se plaçant perpendiculairement à celui de la corde. La substance inlercellulaire aussi commence à se montrer fibrillaire. Il y a d'ailleurs une transition insensible entre le tissu vertébral et intervertébral. Un mot encore sur le tissu en contact immédiat avec la corde. Existe-t-il une gaîne proprement dite, comme l'admettaient Robin (2) et W. Millier (5), ou bien y a-t-il simplement une lacune dans le cartilage pour le passage de la corde dorsale [Dursy (4)]. Ici encore il importe de distinguer la partie verté- brale et intervertébrale. Au niveau du corps de la vertèbre, il existe toujours autour de la portion correspondante de la corde et limitant celle-ci, un espace clair, nettement tranché en dedans, (1) His, Anatomìe menschlicher Embryonen. Leipzig, 1880, p. 68. (2) Robin, Mémoire sur l'évolution de la notocorde, Paris 1868. (3) Loc. cit., p. 350. (4) Loc. cit^ p. 19. — 724 — se confondant en dehors avec la substance fondamentale du cartilage, mais ayant un aspect moins homogène que celle-ci, se montrant même finement striée dans le sens longitudinal. On pourrait donc ici admettre une espèce de gaîne en conti- nuité avec la substance intercellulaire du cartilage. A la hauteur de l'espace intervertébral, au contraire, il n'est jamais possible de distinguer une gaîne entourant la corde. Les éléments fusi- formes touchent immédiatement à la ligne représentant la coupe optique de la lumière du canal qui renferme la portion inter- vertébrale de la corde. Cette disposition se vérifie aussi bien sur les coupes transversales que longitudinales. Sur les dernières en outre (v. fig. 1 et 9) on aperçoit déjà à ce moment, une ten- dance des éléments du tissu intervertébral à envahir le tissu de la corde dorsale. C'est le commencement d'un processus que nous verrons plus prononcé dans le stade suivant. § n. Nous considérons comme un deuxième stade d'évolution, celui dans lequel la corde dorsale n'est plus continue dans tout son trajet, mais s'est fractionnée en segments correspondants aux subdivisions de la colonne. Ce sont les parties répondant aux espaces intervertébraux qui sont les plus développées. Il persiste toutefois encore, à ce degré de développement une partie vertébrale, beaucoup moins volumineuse, qui se soustrait à l'observation à mesure que le développement progresse. Le renflement intervertébral de la corde, comme on sait, a généralement la forme d'un fuseau court, ou de deux cônes adossés par leur base. Nous avons déjà fait remarquer dans le stade précédent, l'absence de gaîne et la tendance au fusion- nement du tissu inverlébral avec celui de la corde. Ici nous pouvons observer ce phénomène de la manière la plus complète. Chez les embryons humains, la masse bicone reste encore assez bien limitée , mais en plusieurs points et spécialement dans la portion la plus renflée, on voit des traînées des élé- ments conjonctifs du voisinage pénétrer dans le renflement de la — 725 — corde (fig. 6 et 8). Cesi à la suite de ce processus que le volume de celle parile de la corde augmenle d*une façon assez nolable. Chez les ruminants, nous avons toujours observé dans ce stade une dissociation complète de la corde qui ne présente plus son aspect de masse bicone, mais forme des réseaux pro- toplasmiques à noyaux multiples, séparés par les éléments du tissu intervertébral. La figure 11 montre un spécimen de ces réseaux qui ne sont pas sans analogie avec les cellules géantes (myéloplaxes) de la moelle osseuse. Le protoplasme est granu- leux les noyaux nettement distincts, elliptiques, ont de 8 à 10 u dans leur plus grand diamètre. Ils ont une grande affinité pour les matières colorantes. Les figures 10, 12 et 14 montrent ces éléments en place dans Tespace intervertébral. Il ne semble pas douteux que ces masses à noyaux multiples se trouvent en relation d'origine avec la corde; leur position, leur analogie avec les restes de la corde chez d'autres espèces (embryon humain, fig. 6;) — Chat[A'ò///A*e?\Entwickelungsgesch., fig. 233]. On peut observer d'autre part, sur des sections transversales au niveau de l'espace chez des ruminants, tous les stades de transition entre des cellules typiques du cartilage hyalin, des cellules conjonctives typiques (noyau elliptique, reste de protoplasme aux deux pôles, lamelles à prolongements secondaires et à crêtes d'empreinte produites par les faisceaux de substance fondamentale), et les masses mullinucléées que nous venons de décrire. La figure 15 montre la transformation des cellules conjonctives par prolifération de leurs noyaux, en cellules géantes. Entre celles-ci et celles représentées figure 11 occupant le centre de l'espace, il y a continuité immédiate. D'après cela, il y aurait une véritable assimilation des éléments de la corde et de ceux du tissu Voisin au niveau de l'espace qui sépare deux vertèbres successives. Les coupes sagittales 8 et 16 el la transversale 12 nous mon- trent en outre un détail dont je dirai un mot, bien qu'il ne paraisse être que d'une importance secondaire. Ces figures font voir en effet que l'irruption du tissu intervertébral dans la corde — 726 — se fait surtout par le côté dorsal (1). Chez Thomme, ce détail se vérifie dans les stades ultérieurs, le reste de la corde est refoulé vers la partie antérieure de l'espace. Disons un mot maintenant de la portion vertébrale de la corde. Bien que présentant des signes évidents de métamorphose régressive, on peut encore, quand Tossification de la vertèbre a déjà commencé, retrouver au centre de celle-ci un reste fusi- forme de la corde dorsale, sous forme de réticule à noyaux. Il persiste peu de chose du protoplasma primitif des éléments. La cavité qui contient cette partie de la corde est limitée par une gaine en continuité avec la substance fondamentale du cartilage; elle se montre finement striée dans le sens longitudinal; en dehors de cette couche se trouve le tissu osseux de nouvelle formation. Aux deux extrémités du fuseau que représente le reste de la corde, le cartilage de la vertèbre traverse le noyau d'ossification et se montre ainsi sur une section (frontale ou sagittale) comme une colonnette {Centralbalken deHeiberg). J'ai représenté, figure 10% la partie moyenne du segment vertébral de la corde et le tissu environnant, constitué dans le voisinage immédiat par une couche de substance fondamentale, finement striée dans le sens longitudinal, et formant une espèce de gaine. Plus en dehors se trouve une couche de cellules cartilagineuses contenues dans leurs capsules; viennent ensuite la couche de tissu osseux de nouvelle formation et le tissu embryonnaire aux dépens duquel il se forme. Heiberg (loc. cit., page 128) pense que le trabecule central s'ossifie par voie métaplaslique. Je n'ai vu en aucun point une transformation directe de cellules carti- lagineuses et de la substance fondamentale qui les entoure en tissu osseux. J'appellerai toutefois l'attention sur la marche inso- lite que suit le travail de l'ossification. Le trabecule central ne ressemble pas, en efTet, aux travées directrices du cartilage dans l'ossification endochondrale. Celles-ci sont constituées seulement par la substance fondamentale imprégnée de sels calcaires. Ici (1) Dans les figures 2S0 et 251 de l'embryologie de KoIIiker, le renflement intervertébral de la corde est excavé du côté ventral (embr. de Lapin). — 727 — une couche de cellules se trouve interposée entre l'os de nou- velle formation et la substance londamentale immédiatement en contact avec le reste de la corde dorsale. La description que je viens de faire correspond à ce que j'ai trouvé chez les embryons de ruminants qui m'ont fourni les préparations les plus claires, mais l'existence du renflement ver- tébral de la corde n'en est pas moins évidente chez d'autres mammifères, comme le montrent les figures 2, 10, 16 (1). Sur les coupes transversales, passant par le milieu du corps de la vertèbre, le reste vertébral de la corde se présente comme une masse fortement colorée (divisée quelquefois en 2 ou plu- sieurs masses secondaires) entourée d'un cercle clair (fìg. 13). A un examen superficiel, on pourrait la confondre avec un espace médullaire, mais on reconnaît assez facilement l'aspect différent et surtout la disposition rayonnante des espaces et des trabe- cules cartilagineux aulour de ce point central. Si l'on compare une série de coupes successives, on voit le cercle de section de la corde se rétrécir à mesure qu'on s'éloigne du centre du corps de la vertèbre. Entre le noyau d'ossification et le tissu intervertébral, la corde a disparu; le seul indice de son passage est la disposition rayonnante des cellules cartilagineuses aulour d'un point central dépourvu de cellules. La persistance, au centre du corps de la vertèbre d'un segment fusiforme isolé du renflement intervertébral de la corde, me semble contraire à l'hypothèse de Lowe (/oc. cit., p. 604) admise également par Kolliker (Entwick.^ p. 420), suivant laquelle les éléments de la corde seraient entraînés du centre de la vertèbre vers le renflement intervertébral : « die Zellen der Chorda staiien sich an den star ken rosenkranzf'òrmigen Verdickungen der Zwischenwirbelscheibe gegen einander î> [Lôwe]. Ce dépla- cement ne pourrait s'effectuer <\ue vers les pointes du fuseau intervertébral qui s'effacent de plus en plus par les progrès de la croissance, et par consequent paraissent rentrer dans la masse de ce renflement. (1) Dans la figure 16 toutefois, le segment vertébral est encore en continuité avec le segment intervertébral. 728 — § III. A mesure que l'ossification du corps de la vertèbre progresse, le segment vertébral de la corde diminue de volume. Bientôt il se soustrait complètement à l'observation et il ne reste plus de vestiges de l'organe que dans l'espace intervertébral. C'est ce que nous considérons comme un 5^ stade de l'évolution. Au niveau du corps de la vertèbre, le reste fusiforme de la corde a disparu sans laisser de trace. Au centre du corps de la vertèbre où l'ossification est déjà assez avancée, il se trouve régulièrement une cavité médullaire beaucoup plus considérable que les autres (fig. 5), cavité signalée également par Heiberg. Cette cavité me semble être l'indice de la résorption du reste de la corde et probablement aussi du tissu qui l'environnait.Sur des coupes sagittales, on voit que cette cavité médullaire est en large communication avec le tissu sous-périchondral , par la partie postérieure (dorsale) du corps de la vertèbre. 11 y a donc là une certaine analogie avec ce qui se passe au niveau de l'espace intervertébral. Par sa position, cette cavité représente le dernier vestige d'un espace inter-protovertébral. Des modifications notables se sont passées dans la portion intervertébrale de la corde. L'accroissement du tissu conjonctif séparant les deux vertèbres ayant porté surtout sur la partie comprise entre le renflement de la corde et la face dorsale de la vertèbre, il en résulte que le reste de la corde est tout à fait reporté vers la partie antérieure de l'espace. Il se présente là sous la forme de masses irrégulières, séparées les unes des autres par la substance conjonctive intervertébrale qui envoie entre elles des prolongements. Il y a donc dissociation complète du reste de la corde. Toutefois on distingue encore un espace bicone correspon- dant aux restes de l'organe. Des sommets des deux cônes par- tent des traînées de substance fondamentale qui s'enfoncent dans le cartilage, s'y ramifient et vont aboutir de part et d'autre au noyau d'ossification (fig. 5). Il n'y a pas d'éléments cellulaires dans ces traînées de substance fondamentale. — 729 — Chez les embryons humains, que nous avions surtout en vue dans la description qui précède, le disque intervertébral com- mence déjà à se présenter avec les caractères qu'on lui connaît plus tard (faisceaux conjonctifs entre-croisés, formant un feutrage serré, en continuité avec la masse fibreuse du périchondre).On y observe toujours la transition insensible entre les éléments con- jonctifs et les cellules cartilagineuses de la vertèbre. La partie moyenne du disque paraît plus compacte que celles qui sont en contact immédiat avec les vertèbres, d'où résulte l'aspect d'un véritable ménisque inséré entre les surfaces vertébrales en regard. On sait qu'il existe au centre du disque intervertébral com- plètement développé une masse gélatineuse (noyau pulpeux). Cette cavité ne provient pas exclusivement du développement de l'espace occu[)é par le renflement de la corde, mais elle résulte en majeure partie d'une modiiication spéciale que subit la sub- stance fondamentale de la portion moyenne du disque. A un cer- tain degré de l'évolution on peut voir, sur la même coupe sagittale, deux cavités, l'une dans la région antérieure correspon- dant à l'endroit où s'est trouvé le reste du renflement de la corde; l'autre postérieure, là où la portion moyenne du disque com- mence à subir sa modification spéciale (dg. 4). Celte transfor- mation, progressant elle aussi d'arrière en avant, finit par envahir toute la partie centrale du disque. La corde dorsale, tout en étant dissociée et refoulée dans la partie antérieure de l'espace intervertébral, ou du noyau pulpeux qui en occupe le centre, reste toutefois distincte, même après la naissance. La figure 5 représente une section sagittale de l'espace intervertébral (région lombaire) chez un enfant de 4 mois. On y voit très nettement la diff'érence entre les restes de la corde et les parties provenant de transformations du tissu intervertébral. Les premiers, refoulés à la partie antérieure du noyau pulpeux, et se prolongeant même encore vers le corps des vertèbres par de courts appendices dirigés en arrière, forment des masses réti- culées, à noyaux (fig. 5"), interrompues par les faisceaux de substance fondamentale du tissu intervertébral; les secondes, — 730 — constituant la masse principale du noyau pulpeux, permettent d'étudier toutes les métamorphoses par lesquelles passent les éléments du tissu intervertébral (fig. 5''). Nous avons déjà vu antérieurement que dans le tissu intervertébral on observe tous les types de transition entre les cellules cartilagineuses et con- jonctives. La couche de tissu, immédiatement en contact avec le noyaux pulpeux du disque, présente, au point de vue de la forme des éléments et de la substance intercellulaire, tous les carac- tères du tissu conjonclif, comme on le rencontre dans les tendons, par exemple. Vers la cavité centrale, la substance intercellulaire, au lieu de représenter un feutrage serré, se dissocie, en formant un réseau à mailles élargies de plus en plus, à mesure qu'on se rapproche du centre. Les cellules, au lieu d'être intercalées entre les faisceaux fibrillaires, et disposées en séries, se placent par groupes dans les mailles du reticulum. Elles y subissent bientôt une dégénérescence spéciale qui les transforme en vésicules ren- fermant un liquide clair, et à ce stade se colorent en brun par riode. Les noyaux y sont encore visibles. Par les progrès de cette métamorphose, les vésicules se rompent, et leur contenu libre constitue la masse centrale liquide du noyau pulpeux. Il est pro- bable que ce liquide visqueux est l'analogue de la synovie des cavités articulaires vraies. Nous voyons ainsi chez l'homme persister encore après la naissance des restes distincts du renflement de la corde. Dans les premiers stades de l'évolution (fig. 6 et 8), il y a une tendance à la fusion directe entre les éléments de la corde et du tissu intervertébral; chez les ruminants, ce processus continue au point que bientôt il est impossible de distinguer l'origine des parties résultant de la transformation. Chez l'homme, le renfle- ment de la corde est en fin de compte simplement dissocié, et il est probable que les fragments se résorbent sur place. L'assimi- lation des éléments des tissus en contact est donc incomplète chez l'homme, ce qui dépend peut-être de ce que l'activité for- mative des éléments de la corde est rapidement épuisée. Chez les rongeurs (Lapin, Rat, Souris), l'assimilation des élé- ments de la corde et du tissu intervertébral paraît également — 731 — complète. Si nous comparons les figures 16 el 17, appartenant à des espèces voisines, nous voyons sur la première, répondant à un stade de développement moins avancé, le renflement de la corde échancré du côté dorsal par l'irruption du tissu interver- tébral. Par suite du fusionnement, le tissu de la corde paraît désagrégé et la figure 17 montre le processus terminé, les élé- ments de la corde en continuité avec ceux du disque interverté- bral. L'aspect général est modifié par la formation de vacuoles entre les éléments, mais l'ensemble conserve parfaitement la forme ovoïde du renflement de la corde. Chez le Lapin (que nous n'avons pas représenté ici), le renflement de la corde passe par un stade dans lequel les éléments dissociés sont groupés en cor- dons rappelant la disposition que nous avons décrite chez les ruminants. La formation de vacuoles entre les cellules s'accen- tuant davantage, toute la masse prend un aspect identique à celui qui est représenté figure 17. § IV. Les recherches que j'ai faites sur l'évolution de la corde dor- sale chez les oiseaux méritent à peine de figurer dans un chapitre spécial. Je n'ai examiné qu'une seule espèce : le Poulet, et encore un nombre assez restreint d'échantillons. Il est vrai, d'autre part, qu'il y a une grande uniformité dans le plan de structure de toute cette classe de Vertébrés ; c'est par ce motif que j'ai résumé ici les résultats obtenus. Un stade de développement équivalent au premier que nous avons décrit chez les mammifères se rencontre chez l'embryon du Poulet au commencement de la deuxième semaine d'incuba- tion (8% 9' jour). A cette époque, les vertèbres sont préformées à l'état de cartilage et séparées l^es unes des autres par des traî- nées de subsiance intervertébrale formées par des éléments allongés, serrés les uns contre les autres, et indiquant par leur direction l'emplacement de la cavité articulaire qui n'existe pas encore. La corde dorsale est encore continue; elle présente un renfle- — 732 - ment fusiforme au niveau des corps des vertèbres. Il y a égale- ment une dilatation au niveau de l'espace intervertébral. La partie moyenne de cet espace correspondant à la future fente articu- laire présente une légère échancrure, surtout prononcée du côté dorsal. 11 est donc inexact de dire que chez les oiseaux la corde présente un étranglement intervertébral; il y a en réalité, comme chez les mammifères, une dilatation; toute la différence, c'est qu'ici la partie moyenne de la dilatation s'étrangle par la prolifération du tissu intervertébral au niveau de la fente arti- culaire. Kôlliker, dans son Traité d'embryologie, signale également une double dilatation de la corde se produisant immédiatement en avant et en arrière de l'étranglement intervertébral; ce qui, en somme, correspond à la disposition que je viens de signaler. Au niveau du corps de la vertèbre, la corde est limitée par une espèce de gaine formée par la substance fondamentale du carti- lage, dépourvue de cellules, mais sans limite nette du côté de la périphérie. On sait que l'ossification marche rapidement chez les oiseaux; la figure i9 représentant un point de la colonne identique à celui de la précédente, chez un Poulet du 1" jour après l'éclosion, montre le corps des vertèbres déjà complètement envahi par l'ossification; du noyau central partent des espèces de bourgeons rayonnant dans tous les sens. On peut encore y distinguer le trajet suivi par la corde, mais l'organe lui-même s'est soustrait à l'observation, ou du moins ne se présente plus dans son aspect primitif. Entre deux vertèbres successives, s'est formée une cavité articulaire, au centre de celle-ci persiste un pont établis- sant la continuité entre les deux surfaces, c'est le ligamentum suspensorium (Jàger) correspondant au passage de la corde dor- sale. Je n'y retrouve plus de restes de celle-ci. Au-dessus et au- dessous, on dislingue très nettement toutefois une traînée carti- lagineuse présentant un double renflement et dont les éléments ont une direction différente du reste du cartilage : ils sont allongés à grand diamètre parallèle à l'axe de la colonne. Ils résulteraient, d'après Gegenbaur (loc. cit., page S6), de la trans- formation des cellules de la corde. — 735 — Malgré les divergences apparentes, il y a au fond une parfaite analogie entre l'évolution de la corde chez les mammifères et les oiseaux et probablement chez tout le groupe des Sauropsides. Après la segmentation définitive de la colonne, la corde présente à considérer un segment vertébral et intervertébral. Les parties de la corde reliant ces segments entre eux se rétrécissent et dis- paraissent les premières. Quant aux parties persistant à la suite de ce processus, le segment vertébral disparaît d'abord, et cela d'autant plus rapidement que le sujet occupe un rang plus élevé dans la série. 11 n'en est pas moins vrai que, même chez l'homme, ce segment persiste encore quand l'ossification a déjà com- mencé. Les transformations du segment intervertébral de la corde sont plus compliquées; cette complication paraît surtout en rap- port avec les différences assez notables qui s'observent dans le mode d'articulation des corps de vertèbres. En thèse générale, on peut dire que le tissu intervertébral a delà tendance à enva- hir le tissu de la corde et à se fusionner avec lui; c'est donc l'évo- lution du premier tissu qui imprime la direction spéciale au processus. Chez les mammifères, où la forme générale d'articulat on est la symphyse, la différenciation du tissu intervertébral se fait sur un espace relativement étendu et par une transition insensible. Les restes de la corde se confondent avec le tissu intervertébral modifié, soit que celui-ci prédomine et dissocie simplement le renflement de la corde, soit qu'il y ait assimilation véritable des parties en contact. Nous avons fait remarquer, et nous rappelons ici, que le noyau pulpeux du disque chez l'homme est constitué en majeure partie par la transformation du tissu intervertébral. Quand les vertèbres se joignent par des articulations vraies» comme les oiseaux nous en fournissent des exemples, les trans- formations de la corde en sont naturellement influencées. Les coupes de la colonne cervicale d'embryons de Poulet nous mon- trent que la différenciation du tissu intervertébral ne porte que sur une mince couche de tissu correspondant à la cavité arlicu- 49 — 754 — laire future. Quand la formation de la fente articulaire est ache- vée, on peut considérer le tissu intervertébral comme s'étant réparti également entre les deux vertèbres adjacentes formant la tête de Tune et la cavité articulaire de l'autre. Le ménisque et le ligamenlum suspensorium sont les restes de la partie différen- ciée. Quant au renflement intervertébral de la corde, il s'est transformé en un trabecule cartilagineux encore distinct par la forme de ses éléments et la direction de la substance fondamen- tale, c'est-à-dire qu'ici encore, suivant la règle générale, il y a eu assimilation de cette partie avec le tissu du voisinage. Nous concluons en disant que chez les Vertébrés supérieurs, la corde, avant de disparaître, se fractionne en segments verté- braux et intervertébraux successifs. C'est dans les segments intervertébraux que semble se con- centrer le reste d'activité de l'organe. Le principal phénomène dont ils sont le siège est leur envahissement par le tissu inter- vertébral, d'oii résulte une assimilation plus ou moins complète avec les éléments en contact. Les segments vertébraux ne se fusionnent pas avec le tissu ambiant, mais disparaissent sur place pendant l'ossification de la vertèbre, à la suite de l'irruption du tissu médullaire embryon- naire. — 735 EXPLICATION DES FIGURES. Planche XXIX. Toutes les coupes sagittales sont disposées de telle manière que le côté dorsal de la vertèbre est placé à gauche du lecteur. — La longueur des embryons est mesurée, en ligne droite, du sommet de la tête à la base du coccyx. Fig. I. Embryon humain de On^jOSS. Section sagittale de vertèbre cervicale (Hartnack. s. 7, oc. 2). Fig. 2. Embryon humain de O^jOS, section frontale, de vertèbre lombaire (s. 3). Fig. 3. Embryon humain de 0°»,12, section sagittale de vertèbre lombaire (s. 4). Fig. 4. Embryon humain de 0™,t8, section sagittale de vertèbre lombaire (s. 2). Fig, 3. Enfant du 4™^ mois, section sagittale d'un disque intervertébral de la région lombaire (s. 2). Fig. 5* Partie de la figure précédente, correspondant à la région antérieure de la cavité du disque intervertébral, pour montrer le contact du reste de la corde avec le tissu du disque (s. 7). Fig. S** Grossissement (s. 7) d'une partie de la figure 5, destinée à montrer la trans- formation du tissu intervertébral en noyau pulpeux du disque. Fig 6. Embryon humain de 0™,08, section transversale parle milieu d'un espace intervertébral de la région dorsale; — fusion de la corde et du tissu intervertébral (s. 7). Fig. 7. Même embryon humain, section transversale par le milieu du noyau d'ossification de la vertèbre. On voit la section du segment vertébral de la corde au centre, entouré par le cartilage calcifié (s. 7). Fig. 8. Même embryon; — renflement intervertébral de la corde dorsale, section sagittale. — Invasion du tissu intervertébral se faisant par la partie dorsale (s. 7). Fig. 9. Embryon de Vache de 0™,03; — région lombaire de la colonne; section sagittale (s. 7). Fig. 10. Embryon de Vache de 0™,i2; — région lombaire, section sagittale (s. 4). Fig. 10«. Grossiss. (s. 9) d'une partie du segment vertébral de la corde et du tissu environnant dans la figure précédente. Fig. 11. Cellules multinucléées de la partie centrale du disque intervertébral chez un embryon de Vache de 0'",25. — Dilacération dans l'acide osmique à ^jioo- — (s. 9-) — 736 — Fig. 12. Section transversale par le milieu d'un espace intervertébral chez un embryon de Mouton de 0°>,20 (s. 7). Fig. 13. Embryon de Mouton de O"»,! 5; section transversale par le milieu d'un corps de vertèbre en voie d'ossification; — section du segment ver- tébral de la corde (s. 7). Fig. 14. Embryon de Mouton de 0™,20; région lombaire de la colonne; section frontale. — Les restes de la corde complètement dissociés par le tissu intervertébral (s. 7). Fig. 15. Éléments du disque intervertébral chez un embryon de Vache de 0™,24. Coupe du tissu durci par l'acide picrique. — Transformation des cel- lules conjonctives en cellules à noyaux multiples (s. 12 imm). Fig. 16. Embryon de Rat de 0™,022 ; région dorsale de la colonne; section sagittale (s. 4). Fig. 17. Souris nouveau-née; — région dorsale de la colonne; section sagittale par un espace intervertébral (s. 5). Fig. 18. Embryon de Poulet; S^ jour d'incubation; — région cervicale de la colonne; — section sagittale (s. 4). Fig. 19. Poulet, 1er jour après l'éclosion, région cervicale de la colonne; section sagittale par l'articulation entre deux vertèbres (s. 4). TABLE DES MATIERES DU 4"'^ FASCICULE. Pages. Notice de l'appareil venimeux des Aranéides, par Jules Mac Leod (pi. XXIV) 575 jSur la glande gastrique du Nandou d'Amérique [Rhea (imcricana), par Éd. Rëmolchamps (pi. XXV) o8r> Recherches physiologiques sur le cœur des Crustacés décapodes, par Félix Plateau (pi. XXVI et XXVII) 595 De la régénération de la moelle épinière, par Masius (pi. XXVIII). . 696 Recherches sur le mode de disparition de la corde dorsale chez les Vertébrés supérieurs, par H. Leboucq (pl. XXIX) 718 lieni auteurs recevront gratuitement 40 tiré» à part de leurs travau?^. CONDITIONS DE LA SOUSCRIPTION : Les Arcliives de Bioiog^ie paraîtront par livraisons trimestrielles et formeront à la fin de l'année un vo- lume in-8°, d'environ 600 pages, accompagné de 20 à 25 planches. Le prix de la souscription d'un volume complet est fixé à ào francs; les livraisons séparées se vendent o francs, affranchissement compris, dans tous les pays de l'Union postale. 3 2044 093 335 305 Return this book date stamped be on or before the last ow y Bureau jCat. no. II 74