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ARCHIVES NÉERLANDAISES
DES
SCIENCES
EXACTES ET NATURELLES
PUBLIÉES PAR LA SOCIÉTÉ HOLLANDAISE DES SCIENCES à HARLEM,
ET RÉDIGÉES PAR
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Secrétaire de la Société, AVEC LA COLLABORATION DE
MM. D. Bierens de Haan, C. A, J. A. Oudemans, W. Koster, C. H. D. Buijs Ballot, C. K. Hoffmann et J. M. van Bemmelen.
TOME XXIII.
HAARLEM, LES HÉRITIERS LOOSJES. | 1889.
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TABLE DES MATIÈRES.
Programme de la Société Hollandaise des Sciences pour l’année 1888.
Programme de la Société Hollandaise des Sciences pour l’année 1889.
J. H, WakxkEr, Contributions à la pathologie végétale ...... *.sFdeo at.
V. A. Juzius, Sur le mouvement vibratoire d’une sphère liquide
D ne mme made dcr aa ame en < 2e En. NV" ENGELMANN, Le microspectromètre +. ......:,..,.:....... J. DE VRIES, Involutions quadruples sur courbes biquadratiques . H. A. LORENTZ, Sur la théorie des phénomènes thermo-électriques
TH. W. ENGELMANN, Les bactéries pourprées et leurs relations
avec la lumière
M. H. W. Bakuuis RoozEpoom, Étude expérimentale et théorique sur les conditions de l’équilibre entre les combinaisons solides et liquides de l’eau avec des sels, particulièrement avec le CRE RO ICI EN ne. houle nou nenvilen Liu ef ere ce
J. DE VRIES, Une distribution du champ ponctuel en groupes
RM TA A SD one ab ae jets eo de M. W. BeyErINCK, L’auxanographie, ou la méthode de l'Hydrodif- fusion dans la gélatine appliquée aux recherches microbiologiques
J. H. WaxkER, Contributions à la pathologie végétale . .........
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307. 973.
II TABLE DES MATIÈRES.
M. W. BEYERINOK, Le photobacterium luminosum, bactérie lumi-
neuse de la mer.du Nord...,.:.... "MORE CR PERRRREe .. Page 401.
M. W. BEvyerINoK, Les bactéries lumineuses dans leurs rapports
havec l'oxygène. 47.4: ..: 0 REP EC Rte n 16. M: W, BEyeriNck Sur!le Kéfir.£: NANTERRE Rs LR RD: H. ZWAARDEMAKER CZ., L'olfactomètre double et son emploi dans
les recherches physiologiques. ...... rein eiees ce RTS :
PROGRAMME
DE LA
Société hollandaise des sciences, à Harlem.
ANNEËÉ 1889.
La Société hollandaise des sciences a tenu, le 18 mai 1889, sa cent-trente-septième assemblée générale.
Dans l’allocution par laquelle la Directeur-Président, JR. J. W. M. ScHoRER, ouvre la séance, il rend hommage à la mémoire de M.M. Jhr. A. V. TEpiNG van BERKHOUT et J. VAN DER VLUGT, directeurs, C. H. van ANKkuM et F. C. DonNDERs, membres nationaux, R. J. KE. CLrausrus, J. H. DEpray et E. A. C. von DECHEN, membres étrangers, tous enlevés à la Société depuis sa dernière réunion générale, puis il souhaite la bienvenue à M. G. van DïEesEN, qui assiste pour la pre- mière fois à une séance de la Société. Le Président fait part ensuite de la nomination d’un nouveau Directeur, M. J. G. SILLEM, d'Amsterdam.
Dans l’année écoulée, la Société à publié :
Des Archives néerlandaises des sciences exactes et naturelles les livraisons 4 et 5 du Tome XXII et les livraisons 1 et 2 du Tome XXIII. De ce dernier Tome, les livraisons 8 et 4, qui paraîtront ensemble, sont sous presse.
La Tome second des Œuvres complètes de CHRISTIAAN Huy- GENS, dont l'impression vient d’être achevée, est déposé sur le bureau.
NT PROGRAMME 1889.
La période bidécennale, au cours de laquelle les médailles BoERHAVE et HUYGEXS, devaient être affectées successivement à dix branches différentes des sciences exactes et naturelles, ayant été close l’an passé par l’attribution de la médaille BoERHAVE aux sciences anthropologiques, la Société avait eu à se demander s’il convenait d’inaugurer une nouvelle série de semblables distinctions. L'examen de cette question fut
a
confié par M.M. les Directeurs à une Commission formée des membres qui, de 1879 à 1889, avaient fait l’office de rap- porteurs pour les médailles à décerner, et complétée, en raï- son des décès survenus depuis lors, par deux membres nou- veaux. Au cas où elle jugerait inopportune la continuation des récompenses susdites, la Commission était invitée à indiquer de quelle autre façon la Société pourrait utilement exercer son action.
La Commission était composée comme il suit: MM.J. BosscHA (physique), TH. H. BEHRENS (minéralogie et géologie), J. M. VAN BEMMELEN (chimie), C. K. HorrmManx (zoologie), J. A. C. OuDEMANS (météorologie), Th. Prace (physiologie), C. H. C. GRrINwis (mathématiques) et T. ZAAYER (anthropologie). D’un accord unanime, cette commission à exprimé le désir que les médailles HuyGExs et BoEkHAVE ne soient plus décernées. Elle à été d'avis, en outre, qu’une certaine somme, à fixer par les Directeurs, devrait périodiquement, suivant l’ordre des temps et des sciences adopté lors de l'institution des grandes médailles d’or, être appliquée au service d’une science déterminée, de la manière que la Société, conseillée chaque fois par une commission spéciale, estimerait la plus efficace.
Sur la proposition de MM. les Directeurs, et après quel- ques discussions, l’assemblée se rallie à cet avis, de sorte que; l’an prochain, il y aura lieu de décider quel emploi sera fait d’une subvention destinée à aider aux progrès de la physique.
Aucun mémoire n’a été reçu en réponse aux questions du concours dont le terme échéait le 1° janvier 1889. L’assem- bleé arrête quelques nouveaux sujets de prix, puis nomme
PROGRAMME 1889. TITI
membres nationaux de la Société : MM. Max WeBer, à Amsterdam, H. W. Barauis RoozEBooMm, à Leiden, et membres étrangers : S. P. LaxGrey, à Washington, Max FURBRINGER, à Jena.
QUESTIONS MISES AU CONCOURS.
Jusqu’au ler janvier 1890.
I. La Société demande une description anatomique exacte accompagnée des dessins nécessaires, des nerfs cérébraux des Serpents.
IT. On demande des recherches embryologiques compara- tives sur l’histoire du développement de l’allantoïde ; au texte du travail devront être jointes des figures, propres à en faci- liter l'intelligence.
III. Soumettre à une étude anatomique comparative l’in- nervation des muscles du larynx chez les Mammifères.
IV. Donner un aperçu critique, appuyé d’expériences détaillées, des espèces de Bactéries que l’eau potable contient avant et après sa filtration à travers le sable, et des méthodes par lesquelles ces espèces peuvent être reconnues.
V. Rechercher de quelle manière les différentes parties des ascospores naissent du protoplasma de l’asque.
VI. On demande une étude, expérimentale ou théorique, étendant sous quelque rapport notre connaissance des phé- nomènes de l’électrodynamique et de l'induction.
VII. Etudier expérimentalement et théoriquement la ré- flexion des ondes dans des tubes élastiques, en cas de chan- gement du diamètre du tube et de l’épaisseur ou de l’élas- ticité de ces parois On verrait volontiers que cette étude embrassât aussi l'influence, sur la réflexion, du changement de densité du liquide.
IV PROGRAMME 1889.
VIII. Déterminer expérimentalement, pour une ou plusieurs matières, l'influence que la compression, dans la direction de la force électromotrice et perpendiculairement à cette direction, exerce sur le pouvoir inducteur spécifique.
IX. Pour une nouvelle réduction des observations stellaires faites par LA Carre au Cap de Bonne-Espérance et publiées dans le Coelum stelliferum Australe, 1l est nécessaire de con- naître avec précision les quatre réticules micrométriques dont La CAILLE s’est servi. De l’un d’eux, le ,reticulus medius”, la forme a été déterminée par FABriTrus, dans sa thèse: Untersuchungen über La CaAILLE’s reficulus medius, Helsing- fors, 1873.
La Société demande une détermination aussi exacte que possible de la forme des trois autres réticules micrométriques et, en outre, une détermination précise de la position des quatre réticules les différents soirs d’observation, de manière qu’on puisse facilement en déduire des tables pour calculer, au moyen des observations, les valeurs apparentes de l’ascen- sion droite et de la déclinaison. Pour chacun des trois réti- cules on devra effectuer, à titre d'exemple, le calcul d’une pareille table de réduction.
L’attention des concurrents est attirée sur le travail de M. Powazxi, publié dans le Rapport of the United States Coast Survey, 1882.
Jusqu’au ler janvier 1891.
I. La Société demande des recherches sur la part prise par les bactéries à la décomposition et à la formation de combi- naisons azotées dans différentes espèces de terre.
IT. Etudier au microscope la manière dont différentes parties végétales peuvent s'unir l’une à l’autre, et en particulier les phénomènes qui accompagnent la guérison après les opérations de la greffe par scions, par œil et par approche.
IIT. Ecrire, pour une période dont la durée ne soit pas trop courte, une histoire des sciences mathématiques et phy-
PROGRAMME 1889. Y
siques aux Pays-Bas septentrionaux, dans le genre de l'ouvrage de Quetelet: Histoire des sciences mathématiques et physiques chez les Belges.
IV. Donner un aperçu critique des opinions régnant au sujet de l’isomorphisme, et chercher à dissiper, par quelques recherches propres, l'incertitude qui résulte de la divergence des vues actuelles.
V. Le sable des dunes et celui des bouches fluviales de la côte ouest de la Néerlande contiennent probablement, outre les grains de quartz, des détritus d’autres minéraux peu altérables. Rechercher la nature de ces minéraux, et faire connaître, autant que possible, la différence entre le sable de rivière et le sable des dunes, à la fois sous les rapports mi- néralogique et physique.
VI. Faire une étude anatomique comparative des glandes sexuelles accessoires chez les mammifères.
VII. Déterminer pour un ou plusieurs sels, hydratés et anhydres, la chaleur dégagée lors de leur dissolution dans l’eau, en étendant ces déterminations jusqu’à la plus forte concentration possible et à différentes températures.
VIII. On demande des recherches quantitatives sur la décomposition de l’eau ou d’autres liquides par des décharges électriques disruptives, opérées à l’intérieur ou à la surface du liquide.
La Société recommande aux concurrents d’abréger autant que possible leurs mémoires, en omettant tout ce qui n’a pas un rapport direct avec la question proposée. Elle désire que la clarté soit unie à la concision, et que les propositions bien établies soient nettement distinguées de celles qui reposent sur des fondements moins solides.
Elle rappelle, en outre, qu'aucun mémoire écrit de la main de l’auteur ne sera admis au concours, et que même, une médaille eût-elle été adjugée, la remise n’en pourrait avoir
VI PROGRAMME 1889.
lieu, si la main de l’auteur venait à être reconnue, entre- temps, dans le travail couronné. |
Les plis cachetés des mémoires non couronnés seront détruits sans avoir été ouverts, à moins que le travail présenté ne soit qu'une copie d'ouvrages imprimés, auquel cas le nom de l’auteur sera divulgué.
Tout Membre de la Société a le droit de prendre part au concours, à condition que son mémoire, ainsi que le pli, soient marquées de la lettre L.
Le prix offert pour une réponse satisfaisante à chacune des questions proposées, consiste, au choix de l’auteur, en une médaille d’or frappée au com ordinaire de la Société et portant le nom de l’auteur et le millésime, ou en une somme de cent-cinquante florins; une prime supplémentaire de cent-cin- quante florins pourra être accordée si le mémoire en est jugé digne.
Le concurrent qui remportera le prix ne pourra faire im- primer le mémoire couronné, soit séparément, soit dans quelque autre ouvrage, sans en avoir obtenu l’autorisation expresse de la Société.
Les mémoires, écrits lisiblement, en hollandais, français, latin, anglais, vtalien ou allemand (mais non en caractères allemands), doivent être accompagnés d’un pli cacheté ren- fermant le nom de l’auteur, et envoyés franco au Secrétaire de la Société, le professeur J. BosscxA, à Harlem.
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TOME XXIIL. É | re Livraison.
ARCHIVES NÉERLANDAISES
DES
SCIENCES
EXACTES ET NATURELLES
PUBLIÉES PAR \
LA SOCIÉTÉ HOLLANDAISE DES SCIENCES À HARLEM,
ET RÉDIGÉES PAR
J...B:0:S S CH A;
SECRÉTAIRE DE LA SOCIÉTÉ, AVEC LA COLLABORATION DE
MM. D. Bierens de Haan, C. A. J, A. Oudemans, W. Koster, CEE D: Buijs Ballot, C. K. Hoffmann et J. M. van Bemmelen.
HARLEM LES HÉRITIERS LOOSJES. 1888. PARIS LEIPSIG - GAUTHIER-VILLARS. G. E, SCHULZE,
ARCHIVES NÉERLANDAISES
Sciences exactes et naturelles,
CONTRIBUTIONS À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE,
PAR
J. H WAKKER,.
I.
La maladie du jaune, ou maladie nouvelle des jJacinthes, causée par le Bacterium Hyacinthi.
Bien que Schneevoogt 1), dans son mémoire sur la morve blanche des jacinthes, ait déjà fait mention de bulbes chez qui la sécrétion d’un liquide épais, jaune, visqueux, dénotait un état maladif, il n’est guère probable qu’il ait eu en vue la maladie du jaune actuelle. D'abord, en effet, sa commu- nication est bornée à la citation de ce seul fait, et, en second lieu, il énonce lui-même que le phénomène observé n’est sans doute qu’un état de la morve blanche, quoiqu'il propose pourtant de le désigner sous le nom de morve jaune. Si l’on considère, en outre, que d’après la plupart des horticulteurs l'apparition de la maladie appelée aujourd’hui le ,jaune’” ou la ,maladie nouvelle” ne date que des vingt dernières an- nées, on reconnaîtra qu'il y a de bonnes raisons pour ad- mettre qu’il s’agit d’un phénomène pathologique tout à fait nouveau.
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1) Ueber den weissen Rotz und die Ringelkrankheïit der Hyacinthen, dans: Verhandl. des K. Preuss. Gartenbau Vereins, Bd. X, p. 252, 1834.
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII.
2 j. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
De cette maladie nous allons donner une description aussi exacte que possible. Au préalable, toutefois, nous croyons devoir dire qu’elle est due à la présence de Bactéries dans le bulbe. Jusqu'au moment où commencèrent mes recherches, les Bactéries n’avaient encore été signalées qu’une seule fois, et cela très brièvement 1), comme cause de maladie chez les plantes, de sorte que le cas du jaune, outre son importance pour la pratique horticole, en présentait une non moins grande au point de vue de la science. Mais si, pour ce motif, l'étude de la maladie en question était incontestablement la plus intéressante de toutes celles dont nous aurons à nous occuper dans le présent travail, elle en était aussi la plus difficile,
A
parce que, en l'absence de communications relatives à ce
nS
sujet ou à un sujet analogue, elle ne pouvait s’appuyer que sur des recherches personnelles.
Phénomènes pathologiques.
En visitant les champs de jacinthes, on trouve sur quelques plantes des feuilles qui ont perdu au sommet leur couleur verte, et y ont pris une teinte brun foncé passant au noir, en même temps qu'un aspect mouillé et un éclat gras. Sou- vent le cas se présente que, à partir de cet endroit attaqué,
1) Ed. Prillieux, Bull. de la Soc. bot. de France, 1879, p. 31 et p.187; Ann. des Sc. Nat., Bot., T. VIII, 1878.
Plus tard, c’est-à-dire, postérieurement à 1880, d’autres cas ont été découverts. Voir:
O. Comes, Sulla malattia del pomodoro denominata Pellagro o Bolla nella Provincia di Napoli e sulle Crittogame che l'accompagnano (Atti del R. Istit. d'Incorragiamento di Napoli, Vol. IIT, 1884, N°. 11), et, du mème, La malattia della pellugra nel pomodoro (L’Agricoltura Meridi- onale, Napoli, 1884, N°. 16.
J. C. Arthur, History and Biology of Pear Blight. Extr. Proc. Phal. Acad. of Sc., Sept. 28, 1886. |
L, Savastano, Tuberculosi dell” Olivo. Estr. dell’ Ann. d. R. Sc. Sup. d'Agr. in Portici, Vol. V, fase. IV, 1887,
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 3
une bande foncée, de même aspect, s'étend vers le bas de la feuille et se laisse poursuivre jusqu'à une assez grande dis- tance; tout porte à croire que c’est là le premier stade de la maladie, Si l’on examine au microscope une de ces feuilles attaquées, en opérant sur une mince coupe trans- versale obtenue à l’aide d’un rasoir bien affilé, on constate que les taches foncées sont dues à la mortification du tissu et à la disparition simultanée de la matière colorante verte dans ces parties de la feuille ; çà et là se trouvent, à l’inté- rieur de ces parties, de très petites quantités d’un mucilage jaune, facile à reconnaître à sa couleur et à son aspect granuleux, Au microscope, les bandes foncées se laissent toujours poursuivre plus loin qu’à l'œil nu. On conçoit, d’après cela, comment les Bactéries se propagent de plus en plus vers le bas de la feuille et finissent par pénétrer dans le bulbe,
Les coupes transversales en question doivent être faites avec des soins extrêmes, à peu près inconnus dans la pra- tique ordinaire de l’anatomie végétale : non seulement le tissu affecté possède un degré de mollesse qui rend impossible de le couper, à l’état frais, en lamelles suffisamment minces, mnais le danger existe aussi que le mucilage soit entraîné par le couteau en des points de la feuille où primitivement il n'y en avait pas trace. Comme moyen de vaincre ces deux difficultés, l’agent ordinaire pour le durcissement des parties végétales molles, savoir l’alcool absolu, m'a rendu de fort bons services. Enlevant l’eau tant au tissu végétal qu’au mucilage qui y est contenu, ce liquide les durcit l’un et l'autre, de sorte que le second ne peut plus être entraîné par le couteau. Un autre avantage du traitement préalable. par l'alcool consiste en ce que l’organe ainsi traité (une feuille, par exemple) subit la décoloration, tandis que la couleur Jaune du mucilage persiste et apparaît donc d’une manière, beaucoup plus distincte, ce qui facilite naturellement l’obser- vation relative à l’état de maladie ou de santé. Conservées
1
4 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
toutefois, suivant l’usage ordinaire, dans la glycérine, les préparations cèdent la couleur jaune et perdent alors beaucoup de leur netteté. Pour cette raison, je décrirai une méthode qui à la vérité n'empêche pas cette action, mais dans laquelle la couleur naturelle est remplacée par une autre, que les agents de conservation ne dissolvent pas. Cette méthode m'a été depuis longtemps très utile non seulement pour conserver les préparations, mais aussi, dans les cas douteux, pour décider au sujet de la nature de la maladie; c’est surtout à cause de ce dernier avantage que je crois devoir la faire connaître.
Pour examiner un cas de maladie du jaune, je portais l’organe de la plante dans l’alcool concentré et attendais que ce liquide l’eût parfaitement imbibé dans toutes ses parties. Au besoin, l’alcool, après que la feuille ou l’écaille y avait séjourné quelque temps, était renouvelé, et c’est alors seulement que Jj'exécutais, de la manière habituelle, les préparations microscopiques. Celles-ci étaient immédiatement replongées dans de l'alcool fort, où l’on avait fait dissoudre du brun d’aniline en quantité telle que le liquide en fût saturé et eût pris une couleur rouge-brun foncé. En vue @’assurer la saturation, le mieux est d'ajouter toujours assez de matière colorante pour qu’il en reste distinctement quelques grains non dissous. Lorsque les préparations ont passé quelques minutes dans ce liquide, on les retire à l’aide d’une fine pince et on les introduit dans un autre verre, où se trouve également de l'alcool concentré, mais qui a été additionné d’une très petite quantité d’acide chlorhydrique. Au moment où elles sortent de la solution brune, les préparations en présentent assez uniformément la teinte ; dans l’alcool contenant de l’acide chlorhydrique, celle-ci disparaît promptement, surtout si l’on agite le liquide à l’aide d’une baguette de verre. Toutefois, au bout d’un temps très court, qui d’ailleurs n’est pas toujours le même dans des cas différents, on voit distinctement, quand on a affaire à la maladie du jaune, que certaines parties de la préparation .ont encore conservé la couleur, tandis que le
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 5
reste est déjà complètement décoloré. Il faut alors la retirer immédiatement de l’alcool et la porter dans un vase contenant de l’essence de térébenthine pure et anhydre, où on la laisse jusqu'à ce qu’elle soit bien pénétrée de ce liquide; cela étant, on peut la placer sur un porte-objet ordinaire, pour l’étudier directement au microscope, ou bien étendre d’abord sur elle une goutte de baume de Canada demi-liquide, puis la couvrir d’une lamelle de verre. Dans ce dernier cas on obtient, lorsque le dissolvant du baume s’est évaporé, de très belles préparations, qui peuvent indéfiniment se conserver et servir à la démonstration. Quand l’opération a bien réussi, la préparation n’est colorée en brun plus ou moins beau, suivant l’espèce de couleur d’aniline employée, que dans les parties où se trouvent les Bactéries, tandis que la portion non attaquée du corps végétal est complètement incolore. En résumé, on voit que la couleur jaune des préparations fraîches est remplacée, dans celles qui ont subi le traitement ci-dessus décrit, par une couleur brune, tout ce qui n’était pas jaune restant inaltéré.
Outre les matières aniliniques brunes (je me servais de préférence du brun de phénylène), on peut aussi employer les autres couleurs les plus répandues; mais ce sont les premières qui m'ont toujours donné les meilleurs résultats. Les jaunes d’aniline, et aussi l’acide picrique, conviennent également et ont même l’avantage spécial de rendre presque exactement à la préparation sa couleur naturelle.
Lorsqu'on a à se prononcer sur un cas de nature douteuse, il faut, pour acquérir une entière certitude, renouveler plus d'une fois l’essai de cette méthode de coloration; mais, à cette condition, on peut en retirer un notable secours, surtout quand il s’agit de découvrir de minimes quantités de Bactéries, qui sans cela échapperaient facilement à l’observation, de sorte qu’on risquerait de déclarer saine une plante malade.
Après cette digression, revenons à nos jacinthes malades. Tout d’abord, mentionnons qu’il a été constaté, 1l y a long-
6 J.‘H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
temps déjà, que lorsqu'on laisse fixées au bulbe les feuilles malades ci-dessus décrites, le bulbe lui-même est affecté au bout d’un temps variable 1). Aussi trouve-t-on, quand les bulbes ont été levés, que ceux dont les feuilles avaient pré- senté les symptômes du mal, sont attaqués, à un degré plus ou moins avancé, de la maladie du jaune, comme il est facile de s’en assurer lors de la visitation ?). Quand on coupe en travers l’un de ces bulbes, des points jaunes se voient çà et là dans les écailles, d’où l’on peut faire sortir le mucilage en gouttelettes, soit en les pinçant, soit simplement en lais- sant le bulbe exposé à l'air.
A l'examen, on reconnaît que les Bactéries se trouvent dans le xylème (PI. I, fig. 10). Ces Bactéries ne restent toute- fois pas incluses dans les vaisseaux aérifères ; elles en con- somment au contraire la paroi et arrivent ainsi entre les cellules ambiantes. Elles dissolvent la matière qui unit les cellules les unes aux autres, de sorte que celles-ci sont isolées et qu’à la place des faisceaux vasculaires il naît des cavités tubulaires continues, qui sont remplies d’un mucilage jaune,
1) Examiné en automne, chaque bulbe se montre composé d’un grand nombre d’écailles ou tuniques larges et minces, qui font presque tout le tour du bulbe et sont implantées sur la tige conique (appelée base ou platzau). Les écailles externes sont membraneuses, les autres, au contraire, sont charnues et remplies de matières nutritives de réserve. Au centre de toutes ces écailles on trouve le bourgeon, qui au printemps suivant fournira les feuilles et les fleurs. En été, de l’amidon s’accumule dans les bases de ces feuilles (les gaînes foliaires), qui forment ainsi, après que les limbes verts sont morts, une nouvelle couche d’écailles, d’où résulterait un accroisse- ment d'épaisseur du bulbe, si en même temps un nombre à peu près égal d’écailles externes ne s'étaient épuisées. Les restes des pédoncules des années antérieures se voient entre Jes écailles, sous la forme d’étroites membranes violettes. (On trouvera une description plus détaillée, avec planches, dans: Irmisch, Knollen- und Zwiebelgewächse, p.77, ainsi que dans l’ouvrage connu: Des Jacinthes, de leur anatomie, etc., Amst. 1768
>) Visiter, dans le langage des horticulteurs hollandais, c’est entamer au couteau les sommets des écailles, pour voir si loignon est sain.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 7
où se trouvent, outre les Bactéries, les cellules isolées et les restes des spirales (s) de la paroi vasculaire. En général, ces cellules montrent encore leur structure interne, maïs elles ont naturellement des paroïs très minces. Dans ce stade de la maladie, les vaisseaux cribreux ne sont ordinairement pas encore attaqués (PI. I, fig. 9). On comprend, toutefois, qu'eux aussi finissent par être détruits.
Pendant que, d’un côté, les Bactéries désorganisent ainsi les écailles, de l’autre-côté elles progressent de plus en plus par la voie des vaisseaux aérifères et parviennent finalement dans le plateau, où elles trouvent un terrain favorable à leur propagation ultérieure. Il arrive alors: ou bien 1°, qu’elles l’envahissent si vite que le bulbe, s’il est remis en terre en automne, s’y pourrit; ou bien 2°, et ce sera là sans doute le cas ordinaire, qu’elles s'étendent assez lentement pour que, au printemps suivant, l’oignon pousse et fleurisse de la manière habituelle. Mais, la période de la floraison passée, la maladie se manifeste par des signes non équivoques. Par- fois, alors, on remarque un phénomème très frappant: les feuilles se tournent toutes d’un même côté, qui, l'examen le démontre, correspond au côté attaqué du bulbe. Bien que ce fait n’ait été observé par moi-même qu’une seule fois, des personnes compétentes m'ont assuré qu'il se présente plus souvent. Le cause, d’ailleurs, n’en est pas difficile à trouver: les écailles, qui forment les bases des feuilles, sont insérées sur presque tout le pourtour du plateau; lors donc qu’une partie de ce plateau a dépéri, l'apport d’eau et de matières nutritives provenant de cette partie est arrêté, tandis que de l’autre côté il continue à se faire régulièrement; il en résulte que l'accroissement s’opère plus lentement au-dessus de la partie mortifiée qu'au-dessus de la partie saine, de sorte que les feuilles se courbent dans la direction de l’apport le plus faible. Il est clair d’ailleurs qu’une pareille incurvation se produira dans tous les cas de destruction partielle du plateau, quelle qu’en soit la cause,
8 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Aucun doute ne peut toutefois rester quant à la nature de la maladie, lorsqu'elle apparaît dans la période dont il va maintenant être question. J’ai en vue les exemplaires de la plante dans lesquels les Bactéries atteignent la partie foliifère et florifère juste au moment où celle-ci approche de son plein développement: elles trouvent alors les vaisseaux aérifères tout prêts à les laisser pénétrer dans ces parties. Aussi ne tardent- elles pas à remplir de mucilage jaune les vaisseaux des feuilles et du pédoncule, et de là elles passent promptement dans les espaces intercellulaires ; elles vont toutefois encore plus loin, finissent par rompre l’épiderme et, à travers les fentes longitudinales ainsi formées, se répandent au dehors, sous la forme de gros grumeaux de mucilage. Il va sans dire que les bulbes des plantes où les Bactéries ont fait de tels progrès, sont irrévocablement perdus.
Ce qui précède est la description de la marche de la ma- ladie sous sa forme la plus ordinaire et la plus générale; mais on comprend qu'il y a encore toutes sortes d’autres circonstances à considérer. En premier lieu, il convient de mentionner que les Bactéries peuvent non seulement péné- trer par le sommet des feuilles, mais en outre par leurs bords et plus bas, et surtout qu’elles peuvent s’introduire aussi dans la hampe si elles viennent à toucher la plaie qu’on produit en coupant la fleur. Cette plaie, en effet, n’est jamais fermée par une couche de liège, et elle ne guérit donc qu’en un certain sens, par la dessiccation des cellules extérieures. La même remarque s'applique aux plaies qui restent aux jeunes écailles lorsque les feuilles s’en détachent. Par celles-là également, les Bactéries peuvent s’insinuer dans la plante.
Je noterai, ensuite, que dans quelques bulbes les Bacté- ries, après être passées des vaisseaux aérifères dans le paren- chyme des écailles. se multiplient tellement que soit l’écaille tout entière, soit tout son côté externe ou interne, se trans- forme en mucilage jaune. Le processus morbide acquiert alors quelque analogie avec la maladie annulaire ou avec la mala-
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 9
die de la gomme, maïs il peut être distingué de ces deux affections par la couleur jaune des parties attaquées et à laide de la méthode de préparation ci-dessus décrite.
Pour pouvoir distinguer sûrement ,le jaune” de toutes les autres maladies des jacinthes, 1l est nécessaire de savoir aussi que dans aucun des divers cas il ne communique d’odeur sensible aux parties attaquées.
Dans les racines je n’ai jamais rencontré le jaune.
Finalement, je dirai encore quelques mots des méthodes de multiplication artificielle des jacinthes, considérées par rapport aux phénomènes pathologiques dont il vient d’être question.
Si, de sa nature même, l’évidement présente de grands avantages sur l’incision ') lorsque d’oignons déjà attaqués on veut encore obtenir des caïeux, parce que la première
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1) Voici, pour les lecteurs à qui les particularités de la culture des Jacinthes seraient moins bien connues, l'explication de ces deux termes techniques.
Par ,,évidement” on entend l’excision de la partie du bulbe sur laquelle sont implantées les écailles, la hampe. etc. Cette partie, vulgairement dite le plateau, n’est autre chose qu’une tige raccourcie. Il est clair que par cette opération, appelée aussi quelquefois section conique, on isole toutes les écailles: chacune de celles-ci produit alors, à la surface de sa plaie, une couche de cal, dans laquelle se forment les jeunes bulbes.
Dans lincision” ou section cruciale, au contraire, on fait à la face inférieure du plateau deux ou plusieurs incisions qui se croisent, de telle sorte que le centre soit atteint et le bourgeon détruit. Aucune partie de l'oignon n'est alors enlevée, et les jeunes bulbes naissent des bourgeons axillaires des écailles. Les caïeux qui se forment de cette manière sont plus forts que ceux obtenus par la section conique; ils portent des feuilles dès leur première année, ce que les autres ne font généralement pas. Ils sont toutefois moins nombreux.
Au plateau, enlevé lors de l’évidement, reste attachée la base de toutes les écailles, mais le bourgeon qui devait se développer l’année suivante à été tranché et tombe. Le bourgeon pour l’année d’après, toutefois, qui au moment de l'opération est encore très petit, reste uni au plateau et peut. lorsque celui-ci est replanté, se développer en un nouveau bulbe.
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de ces opérations coupe aux Bactéries le chemin menant des écailles malades aux écailles saines, ce qui n’est pas le cas pour la seconde, toutes les deux ont pourtant cet inconvénient qu'avec le couteau on porte le mucilage des parties attaquées aux parties indemnes, d’où peut aisément résulter l’infection de ces dernières. Plusieurs fois j’ai eu l’occasion d'examiner des caïeux qui tenaient encore à l’oignon- mère évidé, plus ou moins malade du jaune. D’ordinaire, ils n'étaient pas très nombreux, et le nombre des caïeux atteints était certainement moindre qu'on n'eut été disposé à le croire, ce qui toutefois n’excluait pas la possibilité qu’ils eussent hérité de la réceptivité pour la maladie. Si à de pareils oignons on ne trouve qu'un petit nombre de caïeux, c’est que les écailles attaquées à un certain degré ne sont plus capables de former de jeunes bulbes ; cette incapacité explique en même temps la rareté relative des caïeux malades. Lorsque ces derniers sont replantés, les signes de la maladie s’accusent, au bout d’un temps plus ou moins long, dans les jeunes plantes. Les feuilles jaunissent, deviennent flasques et pen- dantes, ou montrent les fentes longitudinales caractéristiques. Coupe-t-on alors les jeunes bulbes, on reconnaît fréquemment que le plateau seul était malade, fait qui serait inexplicable si l’on n’admet pas que le jaune a été transmis aux caieux par l’oignon mère. Il est clair que ces jeunes plantes malades doivent être arrachées, car, de même que les plantes plus âgées dont les feuilles laissent sortir les Bactéries, elles peuvent contribuer à la propagation de la maladie.
Le Parasite.
Les Bactéries que nous devons regarder comme la cause du jaune sont représentées Pl I, fig. 1—8; elles ont environ Omm 0025 de longueur et sont 2—4 fois plus longues que
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 11
larges; leur forme est donc plus ou moins celle d’un cylindre, mais à bords arrondis. Elles sont incolores (ou bien jaunes?) et se trouvent par myriades dans le mucilage jaune que nous montrent partout les bulbes attaqués.
Je les ai désignées sous le nom de Bacterium Hyacinthi.
Elles offrent toutes les propriétés caractéristiques que nous sommes habitués à rencontrer chez les Bactéries. Elles s’im- prègnent très facilement des couleurs d’aniline les plus diverses, peuvent être conservées longtemps à l’état sec sans mourir, et présentent les mouvements bien connus dès que le mucilage qui les contient est étendu d’une solution de sel de ?°/, ou d’un liquide nutritif approprié. Dans le mucilage lui-même, elles n’exécutent pas de mouvements.
Ce mucilage est un liquide jaune, épais, visqueux, qui, vu à un faible grossissement, montre une structure granuleuse, due, comme on le reconnaît à un grossissement très fort, à la présence des Bactéries. En se desséchant à l’air, il durcit et prend une couleur plus foncée; attaché à des objets légers, 1l peut donc facilement se disséminer, toujours prêt à être ramené par l’eau à son état ordinaire.
Nous avons maintenant à nous demander si le Bacterium Hyacinthi est du nombre des parasites facultatifs. À priori, cela était très probable, et l’expérience a effectivement fait voir que le microbe se laisse cultiver dans un liquide appro- prié. Comme tel, j'ai pris la solution la plus ordinairement employée, savoir, la solution de glucose, additionnée d’un peu d’extrait de viande. Dans ce milieu, la Bactérie de la Jjacinthe a parfaitement pu vivre et se multiplier, tout comme cela est le cas pour d’autres Bactéries, de sorte que, à son égard aussi, le parasitisme facultatif se trouve suffisamment établi. Il est inutile d’insister sur l'importance de ce résultat. On comprend, en effet, que si nos Bactéries, pour vivre, n'ont pas absolument besoin des jacinthes, elles pourront aussi se développer et se propager dans une foule d’autres matières organiques et se maintenir ainsi longtemps en des
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points déterminés, sans que rien trahisse leur présence. A partir de ces points, les jacinthes pourront plus tard être attaquées de nouveau. C’est une raison de plus pour redoubler de vigilance dans l’application des mesures de désinfection et de destruction des parasites, n'importe où ceux-ci appa- raissent.
Si de petites quantités du mucilage jaune d’un bulbe sont introduites dans des gouttelettes du liquide nutritif en ques- tion, et que ces gouttelettes soient disposés de manière à pouvoir être examinées continûment au microscope, voici ce qu’on observe:
Par l'effet du mélange du mucilage et du liquide, les Bac- téries se distribuent lentement et uniformément dans la masse entière de la goutte, et deviennent alors tout aussi visibles que lorsqu'on étend le mucilage de la solution saline indiquée plus haut. Au bout de peu de temps, tout est vie et mou- vement; on voit les Bactéries, sous la forme de bâtonnets droits mais très flexibles, de la longueur précitée, se balancer vivement; les individus au repos sont rares. Entre les Bac- téries indivises, il y en a beaucoup d’autres qui sont en train de se partager et montrent alors deux individus se mouvant ensemble, lesquels toutefois ne tardent pas à se désunir, pour continuer à vivre chacun séparément. Lorsque les Bactéries sont depuis quelque temps dans le liquide, on en remarque un certain nombre qui ont atteint une taille dépassant celle que nous avons indiquée, car on peut trouver des individus de 0"®004, tandis que la longueur ordinaire n’est que de 0%m0025. Plus tard, les matières nutritives contenues dans le liquide venant à s’épuiser, on voit les Bactéries diminuer de plus en plus de grandeur et se réunir en groupes immobiles, qui ont souvent des contours circulaires et s’agrandissent par l’accession de nouveaux individus, tan- dis que les Bactéries encore mobiles deviennent de moins en moins nombreuses. Une pareille préparation peut être conservée longtemps sans que d’autres changements s’y ma-
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 13
nifestent, et dans mes nombreuses cultures les Bactéries se sont toujours comportées de cette façon. !). |
Je mentionnerai spécialement une de ces cultures, où l'expérience avait commencé d’une manière un peu différente. Le mucilage, en effet, n’avait pas été pris directement d’un bulbe, mais d’une lame de verre, sur laquelle il avait été placé et desséché longtemps auparavant. Le mélange du mu- cilage et du liquide nutritif se fit de la même manière que ci-dessus, mais, au lieu de bâtonnets de 0"%,0025, on trouva maintenant des Bactéries plus ss Elles aussi furent d’abord répandues passivement à travers le liquide, ‘mais il se passa plus de temps que dans les autres cultures avant que le mouvement propre apparût. Au bout de quel- ques heures, toutefois, il commença, et d’abord sous la forme de simple rotation. On constata, en même temps, que les Bactéries desséchées étaient réduites à environ la moitié de la grandeur ordinaire. Mais dès le lendemain, elles avaient repris celle-ci, et alors elles montrèrent aussi le mouvement caractéristique en avant et en arrière. À partir de là, cette culture présenta les mêmes phénomènes qui ont été décrits plus haut. Si je l’ai citée en particulier, c’est qu’il en résulte la preuve qu’à l’état desséché les Bactéries du jaune peuvent se conserver pendant longtemps sans mourir, et que par la dessiccation elles sont réduites à des dimensions sensiblement égales à celles qu’elles affectent dans un liquide où les matières alimentaires s’épuisent,.
L'histoire de notre Bactérie serait restée incomplète si nous n'étions pas parvenu à en connaître les spores. Or, dans les cultures dont il a été question jusqu'ici, aucune formation de spores n'avait eu lieu ; 1l fallait donc chercher à obtenir celles-ci, de l’une ou de l’autre manière.
Le moyen auquel j’eus recours, savoir, la culture dans le
1) La manière dont ces cultures doivent être pratiquées se trouve décrite dans: Strassburger, Botanisches Practicum, p. 368.
14 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
liquide nutritif à une température supérieure à la température ordinaire de la chambre, fut trouvé suffisant. Je plaçai les gouttes, où vivaient les Bactéries, dans une enceinte main- tenue jour et nuit à 35° C, donc à une température dépassant d'environ 20° la température moyenne de l’appartement. Au bout de dix jours se montraient alors ordinairement des spores, et les agglomérations caractéristiques de petits individus 1m- mobiles ne se produisaient pas.
Plus tard, je reconnus que la température de 35° n’était pas absolument nécessaire pour la formation des spores. En effet, durant l'été, alors par conséquent qu’une température moyenne assez élevée régnait dans la chambre, quelques cul- tures y donnèrent naissance à des spores, qui toutefois n’é- taient jamais aussi nombreuses que celles formées à la tem- pérature, uniformément plus haute, de l’enceinte.
Les spores du PBacterium Hyacinthi (PI. I, fig. 1) présentent l'éclat vif, bleuâtre, occasionné par la forte réfraction de la lumière, qui est en général si caractéristique pour les spores des Bactéries. Elles sont toujours un peu plus longues que larges, et se forment à l’intérieur des bâtonnets les plus grands, vers le milieu, quoique ordinairement un peu plus près de l’une des extrémités. Par suite de leur forte réfringence, il est difficile de décider avec certitude si à leur niveau le bâtonnet est renflé, comme on l'indique pour quelques espèces analogues ; mais, la spore n'étant pas plus épaisse que la Bactérie elle-même, ce renflement, à supposer qu’il existe, doit en tout cas être très faible. Entre les bâtonnets à spores mûres, on en voit ordinairement un grand nombre qui sont occupés à former des spores, et ceux-ci se meuvent encore avec vivacité. Quand les spores ont atteint tout leur développement, au contraire, les bâtonnets qui les contiennent restent immobiles et leur paroi ne tarde par à disparaître, de sorte que les spores de- viennent complètement libres. Dans cet état, elles mesurent environ 0%%,001 en longueur, tandis que leur largeur ne s'élève qu'à la moitié ou aux deux tiers de cette quantité.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 15 . Chaque bâtonnet ne donne naissance qu'à une seule spore. Si on laisse dessécher ces spores sur le verre où elles se sont formées, on peut les conserver, elles aussi, pendant longtemps et en voir naître plus tard, en les plaçant dans un liquide nutritif, de nouvelles Bactéries.
Lors de la germination, qui de même que la sporogenèse est accelérée par une élévation de température, la spore com- mence par se gonfler et perd ainsi la forme cylindrique, qui fait place à une forme ellipsoïdale, Le grand pouvoir réfrin- gent se perd aussi, mais pas sur toute la longueur à la fois: alors, en effet, que le milieu de la spore offre déjà un aspect terne, le brillant éclat persiste encore, plus ou moins, aux deux extrémités (PI. I, fig. 2 et 3). Nous avons ici l’état qui doit être considéré comme le début de la germination: la paroi est fendue en deux imoitiés, qui restent toutefois unies en un point. La partie centrale, où l’éclat a entièrement dis- paru, est l’endroit où les deux moitiés s’écartent l’une de l’autre, et c’est de ce point que nous voyons sortir un corps baculiforme, de réfringence très faible (fig. 4 et 5). Durant la croissance de ce corps, l’éclat diminue aussi très forte- ment aux deux extrémités de la spore, et bientôt se constitue un état que nous ne pouvons mieux indiquer qu’en compa- rant la spore germante à un marteau, dont la tête serait re- présentée par les deux moitiés de la paroi, tandis que le manche serait formé par le bâtonnet issu de la spore (fig. 6). Souvent le bâtonnet, dont l’extrémité est serrée entre les deux moitiés de la paroi, prend au bout d’un temps plus ou moins long un mouvement oscillatoire, parvient ainsi à se dégager et se meut alors à travers le liquide, de la manière habi- tuelle aux Bactéries; la paroi vide (fig. 6 c) est abandonnée à elle-même. Dans d’autres cas, toutefois, la jeune Bactérie, après être sortie de la spore, reste encore longtemps immo- bile devant la paroi vide, avant de s’en éloigner en nageant; parfois, enfin, j'ai observé qu’elle traînait après elle cette dernière (fig. 8). Toujours, le bâtonnet qui a pris son essor
16 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
est une Bactérie ordinaire, laquelle bientôt se divise à son tour, de Ia facon précédemment décrite.
Nous devons encore faire remarquer que, à notre connais- sance, on ne trouve jamais de spores dans la jacinthe vivante !), ce qui est d'accord avec ce fait que, dans le liquide nu- tritif, la formation des spores commence seulement lorsque les substances alimentaires sont épuisées. Ceci, naturellement, n’est jamais le cas dans le bulbe vivant, mais il ne serait pas impossible, si un bulbe malade avait été entièrement tué et détruit, que dans la masse restante, à une température favorable, il se formât des spores.
La Bactérie fut aussi cultivée sur une substance nutritive solide, et ce sont les résultats de cet essai que je vais main- tenant faire connaître. Pour préparer une pareiïlle substance, j'ajoutai au liquide précédemment indiqué, — solution aqueuse de glucose et d’un peu d’extrait de viande, — en m'’aïdant de la chaleur, autant de gélatine qu’il en fallait pour que, à la température ordinaire, le liquide se prît en une masse ferme, jaune clair, parfaitement limpide. Après m'être assuré que cette substance ne contenait plus de ger- mes vivants, ce qu'il est facile d'obtenir en la chauffant de temps en temps à 100° C, je la versai à l’état de fusion dans des tubes à essai préalablement chauffés à environ 140° C, au moyen d’une pipette portée à la même température et dans l'embouchure de laquelle se trouvait un petit tampon de ouate; des tampons de la même matière, également chauffés à 140°, furent introduits dans les tubes, pour en mettre le contenu à l’abri des germes de l’air. Pour empêcher l'entrée de la poussière, un petit morceau de papier à filtre était encore tendu, par un anneau de caoutchouc, sur l’ouver- ture de chaque tube. Dans cet état, les tubes furent conservés
1) Le cas est le même, suivant de Bary, pour la maladie charbonneuse causée par le Bacillus Anthracis; jamais il n’a trouvé de spores dans l'animal vivant.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 17
quelque temps et chauffés journellement jusqu’à 100° C. Après ce traitement, on en déboucha quelques-uns et on les infecta, à l’aide d’une aiïguille de platine préalablement rougie, de Bactéries de jacinthes, prises dans un bulbe malade. Rapide- ment refermés, les tubes furent ensuite laissés, dans l’été de 1885, à la température ordinaire de la chambre.
Expérience du 12 juin 1885. Ce jour-là les opérations ci-dessus décrites avaient été faites, et déjà deux jours plus tard je vis dans tous les tubes la gélatine diffluer sous l’influence des Bactéries. L'examen montra que la partie non encore liquéfiée contenait également des Bactéries, de sorte que celles-ci pénètrent d’abord dans la gélatine, puis en déterminent la difluence. Ce qui rendait surtout ce fait bien apparent, c’est que dans la partie encore ferme il se formait des globules blancs, qui consistaient entièrement en Bactéries. Il s’y dé- veloppe continuellement aussi des bulles de gaz, qui ne peu- vent provenir que de l’action de ces organismes. Après peu de temps, la masse entière était liquéfiée, et les Bactéries se trouvaient au fond du tube, sous la forme d’une mince couche blanchâtre. Le liquide est alors brun clair, de teinte plus foncée que celle de la gélatine employée. Le contenu est presque inodore.
Cette expérience fut repétée très souvent, et toujours elle donna le même résultat; seulement, dans des expériences ultérieures, 1l arriva quelquefois que les globules blancs n’ap- paraissaient pas; il n’y avait pas lieu cependant d’en être surpris, vu que j'employais alors un mélange, glucose — extrait de viande — gélatine, de composition un peu différente et que la température non plus n’était pas toujours la même. On peut naturellement infecter aussi quelques tubes au moyen de Bactéries prises dans d’autres tubes; cela n’a jrs rien changé aux résultats.
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 2
18 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Expériences d'infection.
Voici quelques-unes des expériences qui établissent la con- tagiosité de la maladie du jaune.
Expérience IT. Pour abréger, les résultats de cette expérience sont donnés sous forme de tableau. Les noms des variétés employées occupent la colonne horizontale supérieure. La première colonne verticale contient les dates où furent me- surées les raies qui apparaissaient sur les feuilles, à la suite de l’infection. Dans les cases correspondantes on trouve la description de l’état des feuilles, à la date mentionnée au commencement de la même ligne horizontale, pour la plante nommée en tête de la colonne verticale.
Pour différentes raisons, les mesures ne furent pas continuées au-delà du 3 avril; mais, après cette date, toutes les feuilles furent examinées au microscope, de la même manière et avec le même résultat qu'il est dit, dans la note, pour la petite feuille de Latour d Auvergne. Il est à remarquer qu’une quantité de bulbes, en partie des mêmes variétés, qui avaient été infectés en même temps, mais plantés en terre et placés à l’air libre, ne présentaient pas encore de signes de maladie le 8 avril. Un peu plus tard, toutefois, ces signes apparurent chez la plupart de ces plantes.
L’astérisque indique que la plante fleurissait à la date mentionnée.
JACINTHES | 10Ple blanche. simple rouge. | PI blanche. Le Re | double blanche. SUR Le net da . CŒUR HÉRÉD. ANNA CARAFES. D'AU- NORMA. BLANC, |CHARLES DE| MARIA. VERGNE. s SUÉDE.
28 déc. 1885.
Les plantes sont placées dans un local frais .
Bactéries dans des plaies de deux sommets verts de feuil- les.
Bactéries dans une plaie de la partie jaune d’une feuille.
Bactéries dans des plaies de trois sommets verts de feuil- les.
Fragments de tissu malade dans des plaies de trois som- mets verts de feuilles.
partie jaune d’une feuille.
13 févr. 1886. On les trans-
* Deux petites
*
Feuille zne:
Une raie par- tant de la plaie
Une raie d’une des plai-
Ne montre encore rien.
porte dans|raies partant|rien; f. deux:|et dirigée vers es vers le bas, une chambre de la plaie et| une petite ta-| le bas, lon- longueur — régulièrement| dirigées vers|che de 2mm\|gueur—4mm. 10 mm. chauffée. le bas. au-dessus de la — plaie; f. /rois: Des deux
idem au-des- sous de la plaie
autres : rien.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE..
19
double blanche. A Dh double bleue. nie Mani Phones ou de.) simple blanche. "BEIC nche. SUR D'AU- NORMA CŒUR MES " ANNA CARAFES. VYERGNE. BLANC. nr MARIA. 20 février. La petite| Pas de chan- : Une raie ke feuille a été! gement. Pas de chan-! d’une desplai-! Longueur de cassée acci- gement. es vers le bas, | la plaie — 17 dentellement . longueur — |mm. 1) 37 mm. — — Des deux au- | De l’autre:|tres : rien. rien. 27 février. Pas de chan-| Longueur de! Longueur de é | gement. la raie — 15/la raie — 15| Longueur de mm. mm; de petites| la raie — 28 taches toutau-| mm. tour de la plaie — —— Des deux au- De lautre:| tres: rien. rien. 6 mars. Pas de chan-| Longueur de! L.delaraie| L. dela raie gement. laraie = 22|— 17 mm. — 35 mm, et mm. * 10 mm plus bas déjà de pe- tites taches. 13 mars. Pas de chan-| L. de la raie! L. de laraie| L. dela raie gement. = 25 mm, et| — 18 mm, et} — 45 mm. La 10 mm plus! 4 mm plus bas| raie et Le tissu | bas de petites] une petite ta-| ambiant sont taches. che. desséchés sur une longueur de 35 mm 20 mars. Feuille deux:| Longueur de! A peu près| L. de la raie
\
x
cassée; la feul- le érois pré- seute de peti- tes taches à 10 mm au-des- sous de Ja plaie
la raie = 27 mm, ef 22 mm plus bas de pe- tites taches.
Sont transportées à l’air extérieur.
sans change- ment.
Est placée sous une clo-
che sur un platcontenant de l’eau.
= DE nie. et 15 mm plus bas déjà de pe- tite taches. Desséchée sur une longueur de 50 mm. La feuille se courbe par le dessèchement d’une des cô- tes. Est transpor- tée au dehors.
1) Immédiatement après que la petite feuille eut été cassée, elle fut
27
20 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
double blanche. | ; double bleue. JACINTHES | : 4 mour | simplerouge. simple blanche. PRINCE double blanche. sur Ne DD CŒUR | HÉRÉD. | ANNA 6 | s : BLANC LES D IA. ARAFES VERGNE. EE | MAR 27 mars. Pas deehan-| L. delaraie| L. de laraie| L. dela raie gement. = 27 mm, et! = 22 mm. — 90 mm. 35 mm plus — ae bas de petites! La cloche est| Desséchéesur taches. enlevée, parce| une longueur que la feuille! de 55 mm. commence à | jaunir. 3 avril. | | Pas de chan-| L. delaraie| Pas de chan-| L. de la raie
gement . ls 67 mm. |gement. Z 94 mm.
|
Cette expérience nous apprend: 1° que la maladie du jaune peut être provoquée artificiellement, et 2° que les résultats de l’infection s’accusent longtemps après que l’opération a eu lieu. Ces deux conclusions furent confirmées par nombre
d’autres expériences, que je m’abstiens de communiquer ici. Sur un troisième fait, qui ressort également de cette série d'expériences, nous reviendrons plus loin.
Si dans le tableau ci-dessus sont décrits les phénomènes morbides qui furent observés lorsqu'on essaya d’imiter la marche naturelle de la maladie, dans les expériences sui- vantes la contagiosité du jaune fut démontrée de manière différente. |
Expérience II. Pendant l’automne 1882, j'introduisis des Bactéries dans un bulbe (Anna Maria, double blanche); coupé au printemps suivant, ce bulbe montra distinctement les signes de la maladie.
mise dans l’esprit-de-vin et, plus tard, durcie dans l'alcool absolu. Des préparations microscopiques en ayant été faites et colorées de la manière décrite plus haut, trois faisceaux vasculaires furent trouvés attaqués à des degrés très divers. Deux d’entre eux correspondaient évidemment aux deux petites raies observables à l'œil nu, et dans la troisième la maladie avait encore fait si peu de progrès que les symptômes ne s’en accusaient pas sur la feuille vivante.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 21
Expérience III. Cette expérience eut lieu avec les Bactéries d’une culture à la gélatine. Le 4 mars 1886, le liquide d’un des petits tubes servant à cette culture fut instillé sur la coupe fraîche du pédoncule de différentes variétés de jacinthes (Norma simple rouge, Arthur Schopenhauer simple blanche, Cœur blanc simple bleue, Panorama double rouge, Anna Maria double blanche, etc.).
Une semaine plus tard, tous les pédoncules commencèrent, en partant du sommet, à se dessécher et se ramollir, et quinze jours plus tard ils étaient, chez toutes les plantes, en majeure partie complètement desséchés, ou du moins mous et flasques.
Par l’examen microscopique et le traitement ci-dessus in- diqué, ‘il fut facile de constater l’éxistence du jaune. Il est à remarquer que tous les pédoncules étaient développés, et que par conséquent l'infection du bulbe par le: pédoncule ne se produira pas très facilement.
Ces expériences furent également répétées et variées, avec
des résultats en général concordants.
La réceptivité.
La réceptivité est un sujet de trop grande importance pour ne pas en dire quelques mots. Beaucoup de fleuristes ont observé, en effet, que dans une de leurs planches de jacinthes une foule de pieds étaient attaqués de la maladie, alors qu’une antre variété, qui se trouvait en nombreux exemplaires dans le voisinage immédiat, demeurait presque complètement in- demne. Sans doute, maintés variétés, que pendant longtemps on avait regardées comme réfractaires au jaune, n’ont pu ré- sister indéfiniment aux attaques des Bactéries ; mais pourtant il en reste quelques-unes qui n’ont encore nulle part été atteintes. Ce fait ne saurait être attribué au hasard; on ne peut l’expliquer qu’en admettant que la prédisposition, ou
29 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
«
l’aptitude à être attaqué par la maladie, joue ici un rôle important.
Pour obtenir quelques données positives à cet égard, j’adres- sai à différents horticulteurs la prière de me faire connaître les résultats de leur expérience concernant la réceptivité des variétés, presque innombrables, de jacinthes cultivées.
Des sept listes que je reçus, et qui ne sauraient être com- muniquées 1ci en détail, il ressort qu’on regarde généralement comme très susceptibles d'infection les variétés suivantes.
Simple blanche Snowball. Sr ADIOUS Grand Lilas. Double blanche La Tour d'Auvergne. Simple rouge Duchesse de Richmond. , rouge L’Ornement de la Nature. Li 1 "HIER Orondates. , bleue Decandolle. » blanche Princesse héréditaire des Pays-Bas. , blanche Grand Vainqueur. , bleue Mimosa. : blanche Alba maxima. , bleue John Bright. blanche Mirandolina.
Pour peu ou point susceptibles d’atteinte passent, au con-
traire :
Simple bleue Pieneman. , rouge Norma. , blanche Pucelle d'Orléans. , blanche Voltaire. ,- bleue Argus. , bleue Bleu mourant.
bleue Willem I.
rouge. Maria Cath. (Rob. Steiger).
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 23
ainsi que toutes les variétés doubles rouges et la plupart des autres doubles.
Il est très remarquable que dans le second groupe figure aussi la variété Simple rouge Norma, sur les feuilles de laquelle, dans l'expérience d'infection artificielle communiquée p. 18, le jaune n’avait fait presque aucun progrès.
Traitement.
La grande différence de réceptivité des diverses variétés nous fournit un moyen de combattre la maladie. Il faudra, pour l’obtention de nouvelles variétés, ne pas prendre comme point de départ celles qui sont connues pour très susceptibles de gagner le jaune. Le procédé consiste, on le sait, à planter l’une près de l’autre un certain nombre de jacinthes des variétés les pius dissemblables, à laisser aux insectes le soin de répandre le pollen sur les fleurs et à semer les graines provenant de cette fécondation. Or, comme il est extrêmement probable que de graines de plantes sensibles naîtront aussi des jeunes sensibles, on ne devra jamais, parmi les bulbes employés à l'opération, en planter qui appartiennent à des variétés facilement attaquables. De cette manière, toutefois, on à bien en son pouvoir d’exclure toute influence nuisible de la part du sexe femelle, mais il est impossible d’écarter entièrement le pollen des variétés sensibles; aussi dois-je faire remarquer que la fécondation artificielle pourra seule donner une sécurité complète.
Plus rigoureusement encore que dans la reproduction par graines, la loi d’hérédité se manifeste lors de la reproduction par voie asexuée, c’est-à-dire, dans le cas actuel, lors de l’évidement et de l’incision des bulbes. Par cette voie, en effet, on est beaucoup plus sûr, non seulement chez les ja- cinthes mais chez toutes les plantes cultivées, de retrouver dans la progéniture tous les caractères de la plante mère.
24 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Aussi est-ce toujours cette voie qu’on suit pour propager les variétés, en maintenir la descendance à l’état de pureté et la préserver du retour au type originel ou de variation dans une direction différente. De même que toutes les autres pro- priétés, l’aptitude à la maladie passera aux descendants, et il est donc à déconseiller de conserver les variétés sensibles: mieux vaut tâcher d’en obtenir de nouvelles, qui soient plus robustes. |
Employer à la multiplication artificielle des exemplaires déjà attaqués, serait, en tout cas, une insigne folie.
Lors de la ,,visitation””, on doit avoir grand soin de ne jamais entamer un bulbe sain avec un couteau ayant été en contact avec une plante malade, à moins de l’avoir préalablement nettoyé au moyen de quelque désinfectant.
Il y à encore un point sur lequel je veux attirer spécia- lement l'attention, savoir, la suppression des feuilles qui commencent à présenter à leur sommet les signes du jaune. De dix-sept pieds de jacinthes, les feuilles malades furent entièrement coupées, le 20 mai 1883, et les bulbes furent conservés. Le 26 septembre de la même année, visitant ces bulbes, je n’en trouvai qu’un seul qui fût totalement détruit, — il n'était plus possible de savoir par quelle cause, — tandis que les seize autres, bien que petits, étaient sains. Plantés en pots, ils fleurirent au mois d’avril 1884. Le 5 juin suivant, ils furent de nouveau levés et visités: à ce moment encore, ils étaient en parfait état.
Cette même expérience je l’ai faite sur beaucoup d’autres bulbes, et toujours avec le même succès; en outre, de quelques horticulteurs, qui avaient essayé dans leurs champs l’arrachage des feuilles malades, j’ai reçu des informations qui confir- maient entièrement mes propres résultats. Il est donc permis de regarder comme bien établi que, par la suppression judicieuse des feuilles attaquées du jaune, le bulbe lui-même peut être préservé.
Il va sans dire que les débris des jacinthes malades ne
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doivent pas être laissés sur le champ ou à proximité, comme on pourrait aisément être tenté de le faire en vertu de la théorie, du reste très exacte, que le meilleur engrais à donner à un sol est de lui restituer, autant que possible, ce qu’on en à enlevé. Il conviendra au contraire de jeter tous ces débris dans une fosse profonde et de les y désinfecter par la chaux vive. |
Au printemps de 1883 on a pu reconnaître que la sécheresse et la clarté continue du soleil sont des agents des plus efficaces contre les progrès du jaune; car si le fait, que cette année-là la maladie s’est montrée à un degré beaucoup moindre que l’année précédente, doit être attribué en partie aux mesures de précaution prises, il n’en est pas moins certain que les pluies fréquentes de 1882 n'avaient fait, sous ce rapport, que du tort aux plantes. Innombrables sont les cas où j'ai observé, en 1883, que la raie descendante des feuilles s'était desséchée et par suite arrêtée, de sorte que le bulbe n’avait subi aucune atteinte. De beaucoup d’autres maladies des plantes (la maladie des pommes de terre, par exemple) il est également connu que l’humidité en favorise le développement et la diffusion.
e
IL.
La morve noire des jacinthes et plantes analogues, produite par le Peziza bulborum.
Si le ,jaune” des jacinthes est un mal dont les ravages ne datent que d’une époque assez récente, la morve noire de ces plantes est au contraire déjà connue depuis long- temps. Schneevoogt !) rapporte que son père se rappelait très bien le temps où il n’était pas encore question de cette maladie aux environs de Harlem, et en conséquence
1) Ueber den weissen Rotz und die Ringelkrankheit der Hyacinthen, dans Verhandl. des K. Preuss. Gartenbau-Ver., Bd. X, p.252, Berlin, 1834.
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il en place la première apparition vers l’année 1770; il n’est done pas impossible que Saint-Simon !) l’ait également déjà eue en vue dans son chapitre ,des maladies”. Sauer ?) fut le premier, au moins en Allemagne, qui désigna la maladie sous son nom actuel, et Bouché *) émit pour la première fois la conjecture qu’elle serait occasionnée par une espèce de ce que l’on regardait alors comme un genre de cham- pignons, les Sclerotium. À ce point s’est arrêtée la connais- sance de la maladie; seulement, depuis lors, Frank ‘) a présumé qu’on avait ici affaire à un Peziza, parce que le Sclérote en question ne pouvait guère être qu'un état de développement d’un autre champignon, comme cela a été reconnu être le cas pour une foule d’autres Sclérotes. Cette opinion, on le verra plus loin, a été changée en certitude par mes observations. À l'espèce de Peziza qui occasionne la morve noire des jacinthes et plantes analogues, j’ai donné. le nom de Peziza (Sclerotinia) bulboruwm. |
Phénomènes pathologiques.
Peu de temps après la floraison des jacinthes, la maladie s'annonce d’une façon indubitable par l’altération des feuilles, qui jaunissent et se penchent vers la terre; on peut alors sans peine les arracher du bulbe et on trouve leur base entièrement détruite (PL. IT, fig. 1). Les écailles ont perdu leur couleur blanche ordinaire, qui est remplacée par le gris foncé; elles ne s'appliquent plus l’une contre l’autre, leur épaisseur ayant diminué. Souvent les extérieures sont entiè-
1) Des Jacinthes, de leur anatomie, reproduction et culture, Amster- dam, 1768.
2) Verh. des K. Preuss. Gartenbau-Ver Bd. VI, 1830, p. 45; cité dans Meyen, Pflanzen-Pathologie, Berlin, 1848, p. 168.
3) Dans une remarque sur le mémoire de Sauer, également citée par Meyeu.
3) Die Krankheiten der Pflanzen, Breslau, 1880, p. 545.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. o7
rement détruites et se laissent enlever par le frottement du doigt. S'il est tombé récemment de la pluie en quantité suffisante, il apparaît au col très mou du bulbe, et parfois même sur une grande partie de la surface tout entier, un duvet blanc, qu'à un fort grossissement on reconnaît formé par les extrémités de filaments fongiques ou hyphes. Ces filaments, toutefois, ne se trouvent pas seulement à l’extérieur du bulbe. Faït-on des coupes transversales ou longitudinales des parties molles des écailles, après les avoir préalablement durcies dans l’alcool absolu, on voit les mêmes filaments s'étendre droit au travers des cellules qui constituent l’'écaille; la fécule qui remplit les tuniques des jacinthes est alors disparue en grande partie; elle a été consommée par le champignon, pour son accroissement. Les cellules étant ainsi dépouillées de leur contenu, l’amincissement des écailles s'explique aisément. Aux endroits où celles-ci sont entière- ment détruites, ou entre deux écailles, on voit des filaments plus épais se ramifier très fortement et s’entrecroiser dans tous les sens; c’est là le commencement de la formation des Sclérotes, dont il a été question plus haut. De nouveaux hyphes s’introduisant sans cesse entre les anciens, les Sclérotes s’accroissent de plus en plus, et au mois de juin ils ont atteint toute leur taille. Les espaces restés entre les différents filaments, et qui étaient remplis d’air, disparaissent mainte- nant peu à peu, de nouveaux filaments venant les occuper; les jeunes Sclérotes se présentent alors sous la forme de corps blancs, dont la surface est hérissée des extrémités des filaments qui ont contribué à les former. Conservés dans le laboratoire, ils exsudent de grosses gouttes de liquide. De cette manière, le Sclérote se dessèche et devient de plus en plus dur; le revêtement blanc, hérissé, disparaît, pour faire place à un épiderme ordinaire, composé de cellules dont bientôt les parois s’épaississent et se colorent en noir (PI. II, fig. 3). C’est là, provisoirement, le terme de la série des changements que les Sclérotes subissent; ce sont alors des
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corps très irréguliers, de grandeur variable: ordinairement, à l'état sec, ils ne mesurent pas plus de 12 mm, quelquefois cependant ils dépassent ces dimensions, à cause des protubé- rances dont ils peuvent être garnis. Souvent, dans leur jeunesse, deux ou plusieurs Sclérotes se soudent entre eux, ce qui naturellement augmente l’irrégularité de la forme.
Tous les horticulteurs savent que rarement, dans un champ, il n'y a qu'une seule plante attaquée de cette manière; lorsque cela est le cas durant un certain temps, il arrive toujours un moment où les plantes voisines commencent à montrer à leur tour les signes de la maladie. Les filaments du champignon sont donc capables de s'étendre du bulbe malade dans le sol environnant et d’attaquer les plantes qu’ils rencontrent sur leur chemin. On sait d’ailleurs que cette reptation souterraine des filaments blancs est d’obser- vation courante. |
La morve noire n’est pas exclusivement propre aux jacin- thes; on la connaît aussi chez plusieurs autres plantes bulbeuses et tubéreuses. En premier lieu doit être nommé le genre Scilla. Dans les différentes variétés et espèces de ce genre que j'ai eu l’occasion d'examiner, la maladie se présente exactement sous le même aspect que chez les jacinthes. Un Peziza qu’on m'a envoyé de Harlem, et qui provenait d’un champ où l’année précédente le Scilla sibirica avait eu à souffrir de la morve noire, ressemblait aussi, assez bien, à celui de la jacinthe: — J’ai également reçu une couple de bulbes de Crocus, qui étaient traversés d’hyphes en tous sens; sous les tuniques d’un de ces bulbes je trouvai un jeune Sclerotium; l’autre fut planté, dans l'espoir d’en obtenir des Pezizes au printemps suivant.
Chez l’Anemone aussi, la morve noire est universellement connue et redoutée. Quand cette plante est attaquée, les feuilles brunissent et se recroquevillent longtemps avant le moment de la floraison, de sorte que les fleurs ne parviennent pas à se développer. La souche est ramollie et déjà passée,
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 29
en grande partie, du blanc au gris foncé. De la partie molle .et grise on peut poursuivre les filaments mycéliens jusque dans la partie encore ferme, où ils s’insinuent dans tous les sens entre les cellules, en se ramifiant çà et là.
En voyant des plantes si différentes présenter une telle analogie dans leurs phénomènes pathologiques, on est naturel- lement conduit à se demander si, chez toutes, une seule et même maladie donne lieu à ces phénomènes, ou bien s’il existe autant d’espèces de Pezizes qu’il y a de plantes bulbeuses et tubéreuses ayant à souffrir de la morve noire. La vérité se trouvera bien ici, comme en beaucoup d’autres cas, entre les deux hypothèses extrêmes.
En même temps qu’une grande analogie, la morve noire montre en effet, chez les différentes plantes qui en sont attaquées, de petites différences. Surtout par l’épaisseur des hyphes, le parasite de l’Anémone se distingue de celui des autres; on trouve:
Epaisseur des hyphes dans Anemone — 0"%,008 en moyenne » » » »” Hyacinthus — 077,002 » »” 7. » » ” Scilla _. 0,002 » » » » pi) 1» Crocus — 077,002 ” ”
À la vérité, là où les hyphes se disposent à former des sclérotes, ils sont ordinarement plus épais, par exemple, dans:
Hyacinthus — 02005 en moyenne. Scilla eng 0061, ; Crocus csr10mæ00503
» mais cela ne supprime par la grande différence qui existe,
sous ce rapport, entre le parasite de ces trois plantes, d’une part, et celui de l’Anémone, de l’autre.
Bien que cette différence puisse s’expliquer, peut-être, par l'influence de la plante dans laquelle les parasites croissent, il me paraît plus probable que nous avons affaire à deux espèces différentes, surtout parce que les parties du parasite des Anémones, Pezza tuberosa, sont toutes beaucoup plus grandes que les parties correspondantes du parasite des Jacinthes.
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C’est un fait connu, en outre, que la maladie ne passe pas plus des Jacinthes aux Anémones que de celles-ci aux pre- mières. Entre les Jacinthes, les Scilles et les Crocus, au con- traire, on verra, plus loin, que la transmission s'opère.
Par toutes sortes de circonstances fortuites, il m'a été im- posible d'étudier le Peziza tuberosa, de sorte que les détails suivants ont uniquement rapport au Peziza bulborum.
Le Parasite.
Pour étudier celui-ci, nous devons revenir aux Sclérotes. Bien qu’ils soient déjà mûrs en juin, leur développement ultérieur n’a lieu qu'au printemps suivant. En plein champ, ils restent sous terre et forment leurs cupules vers l’époque où les jacinthes commencent à pousser. J’ai observé leur ap- parition au mois de février 1883 dans des pots où avaient été plantées, l’été précédent, des jacinthes attaquées de la morve noire. Quoique les conditions plus ou moins anormales dans lesquelles le champignon avait été conservé pendant l'hiver eussent peut-être hâté le développement de la Pezize, je crois pouvoir affirmer qu’en plein champ celui-ci ne s’opère pas beaucoup plus tard. — Il importe de donner ici une des- cription exacte de notre Pézize, vu que la maladie ne saurait être combattue d’une manière rationnelle si l’on ne possède la connaissance complète des organes servant à la repro- duction de l’espèce qui détermine cette maladie.
Les champignons qui naissent des Sclérotes de la morve noire ont la forme de cupules longuement pédicellées (PI. IT, fig. 2). Le pédicelle à son origine dans le Sclérote (s), ce dont il est facile de se convaincre en déterrant celui-ci, qui, s’étant formé dans le bulbe, se trouve à quelque distance au-dessous de la surface du sol. Ce pédicelle est plein et souvent for- tement courbé et recourbé en divers sens; de bas en haut il s’épaissit successivement, pour s'ouvrir enfin en cupule.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 21
Celle-ci est la seule partie du champignon qui se montre au-dessus du sol. Il faut remarquer, toutefois, que beaucoup
LS
de Pézizes peuvent avoir à l’état adulte une configuration . un peu différente, à ce point même que la forme en coupe passe, par suite d’un accroissement énergique de la face su- périeure, à celle d’une ombrelle ouverte (PL IT, fig. 2 B); la partie supérieure, élargie, de la Pézize est ordinairement appelée le disque. Celui-ci, de même que le pédicelle, est de couleur brun clair, parfois à bord un peu plus foncé ou à stries foncées radiales. La largeur du disque varie naturel- lement un peu avec la forme, mais reste ordinairement com- prise entre 5 et 3 mm. La longueur du pédicelle est également très variable: en général, elle dépend de la profondeur sous terre à laquelle se trouvent les Sclérotes. Dans mes exemplaires, la longueur oscillait entre 13 et 19 mm., et, malgré cette diffé- rence, toutes les cupules reposaient à peu près sur le sol. On conçoit du reste, que lorsque les Sclérotes sont situés très profondément, les Pézizes ne peuvent pas se former. C'est au côté supérieur des cupules, le disque (PI. IF, fig. 4), que se trouvent les organes dans lesquels se forment les spores. Alors, en effet, que tout le reste du champignon consiste en filaments ordinaires entre-croisés, le disque (d) a une structure différente. Il est composé d’extrémités d'hyphes élargies en sac, appelées asques (a), et de filaments minces, peu renflés, qu’on désigne sous le nom de paraphyses (p) (PL IL, fig. 5). Les asques sont incolores, longs de 0m 14 et épais de 0", 009 ; es paraphyses ont à peu près la même longueur, maïs sont 3 à 4 fois plus minces; de celles-ci nous ne dirons rien de plus. Dans chaque asque on voit huit spores ovoïdes (PL II, fig. D s). Ces spores sont incolores, longues de 0%%,016 et larges de 0%%008; elles montrent assez régulièrement deux points bleuâtres, brillants, situés chacun à la même distance d’une des extrémités. Elles ont une paroi lisse, très mince, mais néanmoins encore composée de deux couches. Les spores occupent la partie supérieure de l’asque et, en examinant des
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états jeunes, on reconnaît que les plus rapprochées du som- met sont les plus âgées La partie inférieure de l’asque est remplie d’une matière offrant également un éclat bleuâtre (), dans laquelle se voient de grandes vacuoles (v). Cette matière se rencontre dans les asques de beaucoup de champignons; elle a été distinguée par de Bary 1), il y à déjà longtemps, sous le nom d’épiplasme. L’épiplasme n’est qu’un reste du protoplasme qui remplit toutes les jeunes cel- jules et par conséquent aussi les jeunes asques. Parfois on peut observer que l’épiplasme s'étend en couche très mince sur toute la paroi de l’asque et forme un petit épaississement au sommet, Juste au-dessus des spores. C’est précisément en ce point, au sommet de l’asque, que celui-ci s’ouvre pour laisser passer les spores; l’endroit est facile à distinguer du reste de la paroi, en ce qu'il prend une couleur bleu clair sous l’action de la solution d’iode (PI. IT, fig. 5 et 6, a). Voyons maintenant ce que deviennent les spores, lorsqu'elles sont sorties de l’asque par cette ouverture.
Placées dans l’eau, elles montrent déjà au bout de ving- quatre heures un changement (PI. IL, fig. 7). Leur paroi ex- terne est alors fendue et la paroi interne fait saillie sous forme de tube; cette évagination est le tube germinatif (4). Laisse. t-on les spores encore quelque temps dans l’eau, on voit bien- tôt se détacher du sommet du tube germinatif, lequel entre- temps s’est plus ou moins allongé, de petits corps globuleux, des sporidies (PI. II, fig. 8, s’}. Ces sporidies se forment aux dépens du contenu de la spore et du tube germinatif, qui tous les deux finissent par mourir; les sporidies elles-mêmes meurent également. Quelles que soient les circonstances, on ne parvient pas à en provoquer le développement ultérieur. Cela ne réussit pas non plus, comme nous le verons plus loin, quand on sème les spores sur des parties de jacinthes.
1) Morphologie und Physiologie der Pilze, Flechten und Myromyceten, p, 103.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 33
Pour obtenir la plante de ces spores, une autre voie doit donc être suivie.
Si, en effet, nous mettons les spores dans une goutte de liquide nutritif, soit, dans le cas actuel, une décoction de raisins secs, les phénomènes sont tout autres. Au lieu des singulières évaginations que les spores produisaient dans l’eau, nous les voyons émettre de longs filaments mycéliens, qui bientôt se ramifient, et il n’est plus question de formation de sporidies. En ayant soin de maintenir le liquide nutritif en quantité toujours suffisante, on peut laisser croître ces filaments de mycélium aussi longtemps qu’on le désire, par exemple sur un porte-objet ordinaire, et en étudier les pro- priétés au microscope; on a alors l’occasion d’observer la formation d’un organe dont il sera parlé plus loim. En ce moment, je veux spécialement faire remarquer que le parasite de la jacinthe, d’après ce qui vient d’être dit, peut tout aussi bien vivre sans jacinthe ou autre plante quelconque; en d’autres termes, que notre Peziza appartient à ces parasites dont l’existence n’est pas absolument liée à celle d’une plante vivante, mais qui peuvent se développer aussi sur une matière organique morte, c’est-à-dire, comme saprophytes. Nous avons donc ici un exemple de ce que de Bary a nommé, pour d’autres espèces de Peziza (Sclerotinia), parasitisme facultatif. L'importance de cette propriété a déjà été signalée dans l’ar- ticle I, et au cours du présent paragraphe il en sera encore plus d’une fois question. Nous verrons alors, en outre, qu’au moyen du mycélium l'infection peut être produite.
La manière d’obtenir le mycélium, qui vient d’être in- diquée, n’est pas la seule possible.
Pour différents Sclérotes, c’est un fait depuis longtemps connu que, si à l’aide d’un couteau on les décortique en tout ou en partie ou les coupe en morceaux et qu’ensuite on les conserve dans une enceinte humide, ils reconstituent, en un temps relativement court, l’écorce perdue; biologique- ment, ils se comportent donc exactement comme la pomme
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de terre, dont l'écorce, quand on l’enlève partiellement en hiver, est reformée par le tissu du tubercule. Dans les deux cas ia réparation se fait d’ailleurs par un processus tout différent, chose facile à comprendre eu égard à la différence de structure des tubercules et des Sclérotes. En suivant pas à pas, chez ces derniers, la manière dont les plaies se fer- ment, on voit la moelle du Sclérote émettre des filaments fongiques ordinaires, qui s’élèvent un peu dans l'air et don- nent ainsi à la surface de la plaie l’aspect de la surface d’un jeune Sclérote. Bientôt les filaments cessent de s’allonger, dans leur partie inférieure apparaissent des cloisons transversales, celles-c1 prennent une couleur de plus en plus foncée, fina- lement noire, et de cette manière il se produit une nouvelle écorce, qui ne se distingue de l’ancienne que par une struc- ture plus régulière et une surface plus unie. Les extrémités des filaments finissent aussi par se dessécher, tout comme cela est le cas lors de la formation des Sclérotes. Chacun de ces corps peut ainsi être divisé en autant de parties qu’on le désire.
De ces faits résulte immédiatement ie second moyen, an- noncé plus haut, de se procurer du mycélium, moyen souvent utile, parce qu'il n’est pas toujours possible d’avoir des spores en réserve. Il suffit, en effet, de placer les petits fragments de Sclérotes, non pas dans l’air humide, mais dans le liquide nutritif précédemment indiqué ; alors encore ils développent dans tous les sens des filaments fongiques, et ceux-c1 étant en contact avec le liquide nutritif, leur accroissement ne s'arrête pas plus que celui des tubes germinatifs des spores, dans les mêmes circonstances. Ils forment ainsi un très bon mycélium.
Au reste, ce n’est pas le Sclérote seul qui présente ces phénomènes; des fragments de la Pézize elle-même, si petits qu’ils soient, pourvu qu’ils contiennent encore des cellules intactes, se comportent exactement de la même manière dans le liquide nutritif.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 35
La propriété de pouvoir former directement du mycélium par son Sclérote est de grande importance pour notre cham- pignon. Cela ressort des observations et expériences suivantes, auxquelles me conduisit l’examen des Pézizes qu'avaient produites, au printemps, les Sclérotes des exemplaires, reçus l’année précédente, de Jacinthes et de Crocus attaqués de la morve noire. À l’époque où les spores sont mûres et se disséminent, des Sclérotes il ne reste plus guère que l'écorce, qu’on trouve parfois encore, à l’état de peau molle et noire, unie aux Pézizes. Or, à l’examen de mes exemplaires, je reconnus qu’en outre des cupules les Sclérotes avaient en- core produit autre chose, savoir, des flocons de filaments d'un blanc éclatant. Bien que ces filaments fussent très distinctement en connexion avec le Sclérote, la possibilité existait qu'ils provinssent d’un mycélium étranger, vivant aux dépens des Sclérotes mourants. Le microscope, toutefois, fit voir que tel n’était pas le cas: lés flocons s’y montraient composés de beaux filaments épais, irréguliers, çà et là ramifiés et parfois assez longs, semblables à ceux que nous sommes habitués à trouver chez les espèces parasites de Peziza et qui se distinguent nettement de beaucoup d’autres filaments mycéliens, surtout par leurs rangées parallèles et très caractéristiques de vacuoles, rangées dont deux ou trois peuvent être juxtaposées dans chaque cellule et qui donnent un aspect réticulé au protoplasme ambiant. D’après cela seul, il était déjà presque certain que nos flocons n'étaient que du mycélium issu des Sclérotes. Une preuve plus directe en sera donnée tout à l’heure.
Dans les flocons ou mycéliums floconneux, comme nous nommerons cette forme particulière du champignon, se voyaient d’assez nombreux petits corps blancs et durs, qui consistaient en pelotes compactes de filaments mycéliens entrelacés, et qui, sans être des Sclérotes proprement dits, ressemblaient tellement aux jeunes états de ceux-ci, que je tiens pour extrême- ment probable qu’ils pourraient se développer en Sclérotes.
3*
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Pour prouver catégoriquement que les flocons étaient du mycélium de Peziza, je fis les deux expériences suivantes. En premier lieu, une partie d’un flocon, provenant du pot où avaient été plantés les Crocus malades, fut portée dans une goutte de liquide nutritif et, après qu’elle y eut pris quelque accroissement, j'introduisis dans la même goutte une plantule de Scille en germination. Quatre jours plus tard la plantule était déjà tuée à moitié, et la partie morte fut trouvée pénétrée des filaments mycéliens caractéristiques. Au bout de très peu de temps ils avaient fait mourir la plante tout entière.
La seconde expérience fut instituée comme il suit: du même pot à fleur je pris les flocons restants et les appliquai, avec la terre, sur un oignon sain de jacinthe (double bleue Tubalcaïn), qui commençait à pousser; la plante fut ensuite recouverte de terre et abandonnée à elle-même. Environ un mois après, il devint inanifeste que le bulbe était malade; les feuilles de quelques-uns des caïeux — qui se développent ordinairement en très grand nombre chez les Jacinthes cul- tivées en pots — se laissaient arracher sans la moindre peine et montraient alors, à l’endroit de la rupture, les filaments mycéliens caractéristiques. Lors de l’examen postérieur, l’exis- tence de nombreux Selérotes fut constatée, tant dans les jeunes bulbes .que dans le bulbe-mère.
La production des mycéliums floconneux n’a rien qui puisse surprendre. Si l’on considère, en effet, que les Sclérotes blessés émettent des filaments, qui forment ou bien une nou- velle écorce, ou bien, dans un liquide nutritif, un nouveau mycélium, on concevra que quelque chose de semblable doit arriver au printemps, quand apparaissent les cupules, les Sclérotes n'étant alors pas simplement lésés, mais se désa- grégeant complètement. Pour achever l’explication, il n’y a plus qu’à tenir compte de la circonstance, très favorable à l’espèce, que toute la matière nutritive contenue dans le Sclérote, et non employée à la formation de cupules, est
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 37 encore utilisée pour l’accroissement des filaments qui naissent des débris.
Notre observation de mycéliums floconneux et de Sclérotes secondaires n’est pas isolée. Micheli ‘}), en parlant du Peziza Tuba, dit qu’au Sclérote portant les cupules en sont unis deux autres, dont l’un est mou et épuisé, tandis que l’autre, le plus petit des trois, est dur et destiné à fournir des cu- pules l’année suivante; le Sclérote mou aurait produit celles de l’année antérieure.
Brefeld ?) décrit, pour le Peziza Sclerotiorum, des cordons qui, dans des conditions défavorables, se développeraient à la place des cupules. Ces cordons sont cylindriques, scléro- tioïdes, et peuvent former à leur extrémité ou bien des cu- pules, ou bien un mycélium donnant de nouveau naissance à des Sclérotes.
On voit. que les Sclérotes secondaires du Peziza bulborum ont leurs analogues chez d’autres espèces.
Expériences d'infection.
Nous avons vu, au paragraphe précédent, que l'infection de plantes saines se fait très facilement par le mycélium du Periza, et nous avons aussi déjà émis l’opinion que la morve noire des espèces des genres Hyacinthus, Scilla et Crocus est occasionnée par un seul et même champignon. Il s’agit main- tenant de prouver cette proposition et de montrer, en outre, que lPinfection par les spores ne doit avoir lieu que dans des cas exceptionnels.
Vers la mi-février 1883, je fis quelques expériences avec les spores des Pézizes que j'avais obtenues: ces spores furent semées sur les parties les plus diverses d’un certain nombre de jacinthes. Chez l’une d’elles, une Tubalcaïn double bleue,
1) Nova plantarum genera, No. 5, p. 205. 2) Schimmelpilze, V.
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les feuilles devinrent flasques et jaunes plus tôt que chez les autres plantes; à la levée, le 7 juin, se révélèrent les alté- rations typiques de la morve noire: le bulbe était desséché et réduit à un petit corps dans l’intérieur duquel se trou- vaient de nombreux Scelérotes noirs. Chez cet exemplaire, les spores avaient été déposées sur les écailles. Les autres exemplaires, également ensemencés, ne présentaient pas trace de la maladie.
Une seule série d’expériences ne donnant jamais toute la certitude nécessaire pour la démonstration d’un fait, je re- commençai les essais au printemps de 1884. J'avais un assez grand nombre de Pézizes bien développées, qui fournissaient des spores en abondance. Pour recueillir celles-ci à l’état mûr, on n’a qu'à placer devant le disque une petite lame de verre (couvre-objet): les spores étant projetées hors des asques avec beaucoup de force, elles arrivent en contact avec le verre et y restent attacheés en vertu de leur viscosité. De brusques variations dans l'humidité de l’air ambiant ont une sgrande influence sur l’émission des spores; aussi, lorsqu'on a besoin de ces corps reproducteurs, suffit-il de soulever un instant la cloche de verre sous laquelle, dans {la plupart des cas, on laisse se former les Pézizes. D’ordinaire, on voit alors très nettement un nuage de spores sortir du disque et être lancé sur le couvre-objet. Ces spores sont immédiatement aptes à germer, mais elles peuvent aussi, à l’état sec, con- server leur pouvoir germinatif pendant plusieurs mois.
Des spores recueillies de cette manière furent portées, le 28 avril 1884, en grand nombre et aux points les plus dif- férents, sur quelques jacinthes, qu’on maiïntint ensuite dans un état continu d'humidité suffisante. En dépit de ce traite- ment, les bulbes, au moment de la levée, le 7 juin, étaient encore parfaitement sains. Un pareil accord avec les résul- tats obtenus antérieurement met clairement en évidence que l’infection par les spores ne saurait être regardée comme le mode habituel de communication de la maladie.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 39
Passons maintenant au procédé par lequel la contamina- tion de plantes saines est, au contraire, assurée. Au para- graphe précédent, on a vu que le mycélium de la Pézize peut être cultivé en tout temps, soit en partant des spores, soit au moyen du Sclérote. Or, avec ce mycélium, qu’il soit obtenu de l’une ou de l’autre façon, l’infection réussit sans la moindre peine. À son aide, j’ai tué aussi bien des bulbes isolés, placés sous une cloche sur ma table, que des plantes entières cultivées en pots; il y a seulement à remarquer que, dans le premier cas, la formation des Sclérotes ne paraît pas se faire facilement.
En apparence, la difficulté du problème de l'infection est donc complètement résolue. On conçoit, en effet, qu'il ne faut pas précisément une décoction de raisins secs pour que les tubes germinatifs des spores se développent en filaments, mais que toutes sortes d’autres matières organiques présentes dans le sol, telles que fumier, feuilles mortes, etc., peuvent jouer le même rôle; cela, d’ailleurs, je l’ai prouvé par des expé- riences directes. Reste, toutefois, la question de savoir si cette possibilité suffit pour expliquer l’apparition de la maladie sur une grande échelle, car, par une semblable voie, l'apparition dépendrait de bien des circonstances accidentelles. À mon avis, la probabilité en faveur de cette voie sont très faibles, et eela pour les deux raisons principales suivantes:
1° Dans les champs de jacinthes des environs de Harlem, qui sont tenus dans un état de propreté extrême, et où né- anmoins la maladie reparaît tous les ans, les spores ne peu- vent venir en contact avec de la matière organique, ni par conséquent former de mycélium. Les tuniques desséchées, qui enveloppent les bulbes, entreraient seules en considération ; mais ces tuniques se trouvent exclusivement sous terre, tandis que les spores se disséminent dans l'air.
2°. La Pézize elle-même était, dans nos champs de jacinthes, une appaiition inconnue, ce qui eût été impossible si l’infec- tion s’opérait tous les ans par le moyen des spores.
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Pour ces diverses raisons, il me paraît à peu près certain que la contamination se fait régulièrement par le mycélium directement issu du Sclérote, de même que cela était le cas dans l'expérience rapportée p. 36.
51 la chose ne souffre plus guère de doute pour le Peziza bulborum, elle est très probable aussi pour le P. sclerotiorum, qui suivant de Bary :) et Brefeld se comporte exactement comme notre espèce; on peut en dire autant du P. Trifoliorum, dont, morphologiquement aussi, la ressemblance avec notre Peziza est complète ?).
1) Ueber einige Sclerotinien, dans Bot. Zeit., 1886, Nos. 22—27.
2) Durant mon séjour à Strasbourg, j'ai eu, grâce à la-bienveillance de M de Bary, l’occasion d'étudier ce champignon et de constater que les spores se comportent tout à fait comme celles des deux autres espèces. Des plan- tules en germination de trèfle blanc (Trifolium repens), sur lesquelles avaient été déposées des spores, restèrent parfaitement saines, tandis que d’autres plantules semblables, introduites par l’une ou l’autre de leurs “parties dans du liquide nutritif où s'était développé le mycélium de la Pézize, furent entièrement consumées et donnèrent bientôt de petits Sclérotes. Avec des parties vieilles ou jeunes de plantes plus âgées, le résultat fut le même: le contact des spores, soit sur l’épiderme, soit dans une plaie de la tige, de la feuille ou de la racine, ne leur nuisit en rien. Cela s'applique tant au T. repens qu'au T. pratense (trèfle rouge). Très souvent on peut voir que les spores ont germé, puis sont mortes, sans avoir produit quoi que ce soit. Porte-t-on, au contraire, du mycélium de Peziza Trifoliorum sur la racine, par exemple, d’un pied de trèfle, ou même sur les feuilles, mais en ayant soin de maintenir l’air ambiant suffisamment humide pour que le mycélium ne se dessèche pas, alors la plante dépérit. Ce dépérissement est d’ailleurs très lent. Un pied de Trifolium repens, ainsi infecté à la racine le 8 novembre 1883, présentait, à la vérité, deux jours plus tard, les filaments mycéliens caractéristiques, mais ce n’est qu'au commencement de janvier 1884 que la plante mourut et fournit quelques Sclérotes, qui furent trouvés tant dans le sol que sur les feuilles.
Une expérience analogue fut faite, le 7 décembre 1883, sur une plante beaucoup plus petite. Cette fois. je déposai le mycélium sur une feuille vivante et plaçai la plante sous une cloche, dans une chambre chauffée. luste un mois plus tard, la plante était morte et il se forma quelques Sclérotes.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 41
Tout en admettant comme régle l’infection par des mycé- liums floconneux, on ne saurait nier que l'infection par les spores puisse et doive s’accomplir également. D'abord, cela est déjà prouvé par le résultat de mon expérience de février 1883; mais, en outre, il me semble que si les spores étaient complètement superflues pour la plante, ou bien elles ne se- raient plus formées, ou bien elles seraient au moins dépour- vues de pouvoir germinatif, puisqu'on regarde comme règle générale la régression des organes qui ne servent plus à aucune fin !).
Je vais maintenant rapporter les résultats de quelques expériences qui, outre qu’elles font de nouveau ressortir l’in- fection par les Sclérotes, servent à trancher la question de l'identité de la morve noire chez les différentes plantes qui en sont attaquées.
Il suit de là que, pour ce Peziza aussi, l’infectionu par les spores seules est impossible, et bien qu’on puisse admettre qu'elle a lieu indirectement, par le mycélium issu des spores dans le sol, il est extrêmement probable qu'ici encore les Sclérotes donnent immédiatement naissance à des mycé- liurñs floconneux.
1) Ce qui vient d'être dit des Pézizes fait involontairement songer à beaucoup de Tubéracés et de Gastéromycètes, ‘chez les spores desquels le pouvoir germinatif n'a pu être reconnu jusqu'ici, et où très probablement il n'existe pas, vu le grand nombre des expériences tentées, sans aucun succès, pour le mettre en évidence. Ces champignons auraient-ils d’autres organes propres à assurer leur reproduction, de même que notre Pézize en possede dans le mycélium directement issu des Sclérotes? De la plupart on sait trop peu de chose pour pouvoir répondre à cette question ; dans un cas toutefois, celui du Sphaerobolus stellatus, il a été montré par M. Fischer (Bot. Zeit., 1884, n° 28 et suiv.} que la plante forme de ces autres organes reproducteurs, tandis que les spores ne servent plus à la propa- gation. Or ces organes, appelés gemmes, ne sont guère que des portions d'hyphes.
Il conviendra, dans les recherches ultérieures, de porter son attention sur ces points, qui ne me paraissent pas dépourvus d'intérêt, — Chez les champignons, le mode de reproduction a subi phylogénétiquement des changements si fréquents et si variés, qu'il n’y aurait rien d’impossible à ce qu'il s’y fût produit aussi un changement plus ou moins général dans le sens indiqué ci-dessus.
A2 . J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Expérience I.
Le 21 octobre 1884, des Sclérotes provenant de jacinthes attaquées de la morve noire furent placés dans des pots avec es plantes dont les noms sont inscrits à la première colonne du tableau. suivant:
Développement de Pézizes Signes manifestes de
morve noire au
au mois de: | maig dec
Hyacinthus orientalis. Pas de Pézizes. Mars 1885.
» Mars 1885. Juillet 1885.
Crocus sp. Mars 1885. Avril 1885.
Scilla sp. Mars 1885. Avril 1885.
| | Re Les plant estent Allium Cepa. Mars 1885. | en el te S
Expérience Il.
Le 17 Septembre 1884, des boutures de trèfle blanc (Tri- folium repens) furent placées dans des pots avec des Sclérotes provenant des plantes dont les noms sont inscrits à la pre- mière colonne du tableau suivant:
Développement de Pézizes
au mois de:
Hyacinthus orientalis. (Peziza bulborum). Mars 1885. | Daucus Carota. NS Le Tous les pieds de trèfle (Peziza Sclerotiorum). à | EEE Helianthus annuus. , 5 (Peziza Tree Juin 1885.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 438
Expérience III.
Le 24 octobre 1884, des jacinthes saines furent plantées dans trois pots, en même temps que des Sclérotes appartenant au Peziza Sclerotiorum. En mai et juin 1885, de nombreuses Pézizes se montrèrent dans tous les pots, mais les jacinthes crûrent comme à l’ordinaire.
Voici les conclusions à tirer de ces trois séries d'expériences :
1° La morve noire de Hyacinthus, de Crocus et de Scilla est identique :
2° Elle diffère des maladies analogues de:
Allium Cepa (Exp. D. Trifolium spp. ( , Il), causée par P. Trifoliorum. Daucus Carota, etc. ( , IIT) à , P. Sclerotiorum.
3° Les maladies analogues de Daucus etc. et de Trifolium spp. sont différentes (Exp. Il).
De tous ces résultats, le seul qui puisse surprendre, c’est qu'il semble exister de la différence, quant à l'infection, entre P. Bulborum et P. Trifoliorum, qui pourtant, morphologique- ment aussi bien que biologiquement, sont tout à fait pareils. Je dis ,semble”, parce qu’un résultat négatif ne peut donner une entière certitude, la possibilité restant toujours que des expériences ultérieures auraient une issue différente. A l’appui de ma conclusion, je puis seulement ajouter que de Bary (L.c.) mentionne également n’avoir pas réussi à infecter des jacinthes par le mycélium du P. Trifoliorum.
En aucun cas, on ne pouvait s'attendre à trouver iden- tiques les maladies occasionnées par le P. bulborum et le P. Sclerotiorum, vu que ces deux espèces présentent des diffé- rences notables.
Receptivité. Entre les différentes variétés de jacinthes il ne paraît pas exister de différence de réceptivité pour la morve noire. Il en est autrement des trois genres de plantes sur lesquels vit
44 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
le Peziza bulborum. C’est parmi le genre Scilla qu’il exerce les ravages les plus grands; vient ensuite le genre Hyacinthus, tandis que les variétés de Crocus ne sont que rarement attaquées.
Traitement.
Il nous reste à dire quelques mots de la question la plus importante pour la pratique, celle qui concerne la manière de combattre la maladie. La méthode depuis lorgtemps en usage, consistant à lever et éloigner les plantes atta- quées, avec la terre qui entoure leurs racines, et à laisser le trou ouvert, cette méthode est sans contredit excellente pour s’opposer à la contamination des plantes voisines, mais mieux vaut encore chercher à prévenir l’apparition de la ma- ladie. Pour cela, il est absolument nécessaire que la terre et les bulbes extraits ne soient pas portés sur les tas de fumier ordinaires, ou, beaucoup moins encore, abandonnés dans les sentiers qui séparent les planches; autrement, en effet, on n’empêcherait pas la formation des Sclérotes, ni par consé- quent, au printemps suivant, celle de la Pézize. Les parasites contenus dans la terre enlevée doivent être mis complètement hors d'état de nuire; on y parviendra en jetant cette terre dans des fosses profondes, situées assez loin de toute planche de jacinthes (ou d’Anémones, etc.), et l’y traitant par la chaux vive; plus simplement encore, en la jetant dans l’eau, où mourront aussi bien les filaments que les Sclérotes. Lors de l’extraction de terre, on doit veiller surtout à ce qu'il ne reste aucun Sclérote dans le sol, ce qui peut facilement ar- river, vu que ces corps, en raison de leur couleur noire, surtout à l’état humide, se distinguent très mal de petites mottes de terre. Si l’on n’est pas parfaitement sûr d’avoir enlevé toutes les parties du champignon, le sol devra, l’année suivante,
«
être occupé par des plantes réfractaires à la maladie. Eu
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 45 égard aux Sclérotes secondaires, il sera même bon de laisser passer deux années avant de reprendre les anciennes cultures, si l’on veut avoir la chance d’extirper la morve noire d’un terrain déterminé.
III.
La morve blanche et la maladie de la gomme des jacinthes et plantes analogues.
La morve blanche des jacinthes.
Si mes communications sur les deux maladies précédentes ont été, au moins en ce qui concerne l’étiologie, assez com- plètes, il n’en pourra malheureusement être de même pour celle dont nous allons nous occuper. Cela tient à ce que la cause de la morve blanche n’est pas, comme celle de beau- coup d’autres maladies des plantes, directement accessible à l'œil, même armé du microscope. On verra, en effet, par la description détaillée des phénomènes pathologiques, que la maladie n’est pas due à un parasite. Avant d’en arriver là, toutefois, il convient de dire un mot de ce qui a été écrit à son sujet. Bien que très peu nombreuses, ces publications offrent largement l’occasion de relever toutes sortes d’inex- actitudes, sur lesquelles 1l importe d'attirer l’attention, parce qu'elles ne peuvent que mettre obstacle à la découverte de la vraie cause de l'affection.
Schneevoogt est le premier qui décrivit la morve blanche d’une manière exacte et suffisamment détaillée, eu égard à l’époque et aux ressources dont il disposait !). A son travail, sur lequel nous reviendrons plus loin, il ne rattache aucune considération sur la cause de la maladie, de sorte que les opinions de Bayer et de Meyen sont les seules que nous
1) Ueber den weissen Rotz und die Ringelkrankheit der Hyacinthen, dans: Verh. des Preuss. Gartenbau-Vereins, Bd. X, 1834, p. 252.
46 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
ayons à citer. Le premier de ces auteurs !) pense que les fumures trop abondantes font croître Les jacinthes avec tant de rapidité et de force, qu’au sommet du bulbe les écailles se disjoignent, de sorte que l’humidité etc. aurait l’occasion de pénétrer entre elles; ne connaissant aucun fait qui plaide en faveur de cette opinion, je ne m’en occuperai pas davantage. Meyen ?) dit que comme cause de la maladie on doit regarder une moisissure, qui s’introduit de haut en bas dans le bulbe, continue de croître dans les espaces intercellulaires et fina- lement fait dessécher et noircir le bulbe; cette dernière as- sertion surtout indique qu’il a simplement examiné, d’une manière peu exacte, un cas de morve noire. Plus loin, il parle d’un petit tas de bulbes qui étaient atteints de la morve blanche et sur lesquels iltrouva des Sclérotes; lui-même, toute- fois, reconnaît ne pas avoir vu si ces Sclérotes étaient en con- nexion avec les susdits filaments mycéliens, ce qui rend encore plus évidente l’absolue nécessité d'étudier la maladie au mi- croscope. Or, aucun des bulbes, attaqués de la morve blanche, que j'ai soumis à une pareille étude, ne m'a offert la moindre trace de filaments mycéliens; la cause de la maladie doit donc être cherchée ailleurs ?).
Sans plus nous attarder à des hypothèses qui, aussi long- temps qu’elles ne sont pas confirmées, ne peuvent avoir aucune valeur pour la pratique, nous allons, en renvoyant çà et là à l’article précité de Schneevoogt, décrire la maladie telle qu’elle se présente à l’observation.
1) Verh. des Hannüvrischen Gartenbau-Vereins, 1, 1833, p. 123 (cité par Meyen).
2) Pflanzen-Pathologie, Berlin, 1841, p. 164.
3) M. Frank, qui évidemment n’a pas eu l’occasion d’étudier lui-même la morve blanche, a reproduit l’assertion inexacte de Meyen. Voir: Krank- heiten der Pflanzen, p. 543.
4 ? LA À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 47
Phénomènes pathologiques.
On sait, et le fait a déjà été rapporté par Schneevoogt, que la morve blanche se montre principalement sur les bulbes de jacinthes déjà levés et qu'elle est surtout fréquente chez les bulbes mis en silos. Renoncer à l’ensilage n’est toutefois pas, comme il le remarque, un moyen infaillible contre la maladie. Il dit, en outre, qu’elle apparaît spécialement lors- que, durant le temps où les bulbes restent en silo, il pleut beaucoup et que, de plus, la terre est chaude. Ils prennent alors la consistance de bulbes cuits et se laissent facilement comprimer entre les doigts. C’est dans cet état surtout qu’on peut en exprimer la pulpe blanche à laquelle la maladie doit son nom.
Schneevoogt pense que le mucilage, propre aux jacinthes et à beaucoup d’autres bulbes dans l’état normal, change simplement de propriétés par l'effet de la maladie ; l'examen microscopique nous apprend, toutefois, qu’il en est un peu autrement. La masse blanche consiste essentiellement en cel- lules isolées, provenant des écailles, et dans lesquelles les grains de fécule sont très nombreux. La longueur de ces cel- lules ne dépasse que de peu leur largeur; on en voit toute- fois encore d’autres, qui sont très allongées et contiennent un faisceau de cristaux aciculaires d’oxalate de chaux. Ces cristaux, qu’on rencontre en abondance dans la plupart des plantes bulbeuses, se trouvent fréquemment aussi, dans la morve blanche, libres de toute enveloppe membraneuse, et il en est de même des grains de fécule ; entre ces divers éléments, enfin, des Bactéries sont répandues en foule. Il n’est d’ailleurs nullement nécessaire de supposer, comme on pourrait en être tenté, que ces Bactéries aient un rapport quelconque avec celles de la maladie du jaune; des Bactéries, en effet, exis- tent dans toutes les matières qui pourrissent, et même, sans elles, la putréfaction proprement dite est impossible.
Voilà, en général, tout ce que nous montre la masse pultacée.
L'attaque des bulbes peut avoir lieu de la manière la plus
48 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
diverse; tantôt les tuniques extérieures seules sont transfor- mées, totalement ou partiellement, en bouillie blanche ; d’autres fois, au contraire, c’est la partie centrale du bulbe qui seule a subi cette altération; dans des cas tout aussi nombreux, enfin, les tuniques attaquées sont précisément celles qui se trouvent à mi-distance du centre et de la périphérie. Examine- t-on, sur des écailles partiellement atteintes, la limite qui sépare la partie molle de la partie encore ferme, on ne dé- couvre, là non plus, rien qui puisse être regardé avec quel- que fondement comme la cause de l’altération.
Il faut encore mentionner, finalement, l’odeur bien connue des bulbes attaqués, odeur légèrement acidule, nauséabonde, signe de vraie putréfaction, par lequel la morve blanche se distingue facilement d’autres maladies.
Même lorsque les bulbes ont été triés avec soin en sortant du silo, plus tard, sur les tablettes, on découvre encore de temps en temps quelque exemplaire atteint de la morve blanche; celle-ci, naturellement, avait échappé au regard à cause de son peu de développement au moment du triage.
Disons maintenant un mot de quelques particularités qu’on a l’occasion de noter lors de l’examen des bulbes affectés de morve blanche, et qui, bien que peut-être purement acci- dentelles, pourraient avoir quelque intérêt pour des recher- ches ultérieures. En premier lieu, il faut mentionner la pré- sence, dans le bulbe, de différentes espèces d'animaux, par exemple d’un mille-pied (Julus terrestris), qu'on rencontre parfois dans des trous du plateau Ces animaux vivant essen- tiellement de substances végétales, ils sont fortement soup- connés de ne pas être étrangers à la production de ces ca- vités. Très fréquemment, ensuite, on trouve dans les bulbes attaqués de la morve blanche les larves d'une mouche; elles sont ordinairement rassemblées en grande quantité dans un même bulbe, mais parfois on n’en voit qu’une seule ou un petit nombre. Evidemment elles vivent de la substance du bulbe, car, 1à où ces larves sont un peu nombreuses, les
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 49 écailles présentent des trous bien distincts et ayant tout l'air d’être l’œuvre d’un insecte rongeur. Ni l’un ni l’autre de ces animaux ne saurait être considéré comme la cause de la morve blanche.
Pour donner une idée nette de cette affection, nous devons maintenant entrer dans quelques détails au sujet d’une autre maladie, qui a avec elle les rapports les plus intimes, savoir :
La maladie de la gomme des jacinthes.
En ce qui concerne les jacinthes romaines, la maladie de la gomme a été décrite très brièvement par M. W. G. Smith !); pour ces variétés, elle est mortelle. Chez les jacinthes hollan- daises et autres plantes bulbeuses, la maladie offre moins de danger, mais néanmoins elle n’est pas aussi inoffensive qu’elle le paraît, vu qu’il existe des relations, comme il a été dit plus haut, entre elle et la morve blanche, maladie également restée énigmatique jusqu'ici. Nous verrons bientôt quelle est la nature de ces relations ; préalablement, toutefois, il s’agit d’exa- miner avec soin tout ce qu’une jacinthe attaquée de la gomme donne à remarquer, un pareil examen étant nécessaire pour décider si la maladie doit être rangée, ou non, parmi les affections parasitaires. Cela nous fournira en même temps l’occasion de parler de la mite, ou plutôt du genre de mites, dont il a eté tant question dans les derniers temps et qui, surtout en Angleterre et en Amérique, est considérée comme la cause de toutes sortes de maladies imaginaires des jacinthes.
Voici donc les phénomènes que nous montre la maladie de la gomme, telle qu’il peut s’en présenter çà et là un cas isolé parmi les jacinthes de Harlem.
1) Disease of bulbs, dans The Gardeners Chronicle, Vol. XXIV, No. 605, 1885,
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIT. À
50 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Phénomènes pathologiques.
Personnellement, je n’ai observé la maladie qu’en été ; bien entendu, les conséquences pourront s’en faire sentir aussi après la fin de cette saison, et les causes qui la déterminent auront déjà été à l’œuvre plus tôt; mais, de cela, un mot ne sera dit que plus loin. Extérieurement, on ne voit d’or- dinaire, du moins au commencement de l'été, rien de parti- culier aux bulbes malades. Maïs si on les coupe transversale- ment dans leur partie supérieure, ou, mieux encore, qu’on enlève avec précaution les tuniques extérieures du bulbe, les signes de la maladie apparaissent distinctement. A l’état normal, les écailles des jacinthes ont, comme on sait, une couleur blanc de lait et ne présentent ni éminences ni dé- pressions. Il en est tout autrement chez les plantes attaquées: à certain endroits la couleur blanc de lait est remplacée par une teinte hyaline, et on remarque, en outre, que ces endroits font plus ou moins saillie. Ils sont de forme très irrégulière, en nombre plus ou moins grand, ordinairement contigus aux plaies résultant de la visitation ou de la chute des feuilles, distribués sans aucun ordre sur les écailles, mais exclusivement bornés aux écailles jeunes.
Quelquefois, en regardant le bulbe d’en haut, on peut voir les tuniques gommeuses s'étendre comme des anneaux hyalins entre les tuniques saines. Les particularités du phénomène se distinguent le mieux sur des coupes transversales d’écailles malades préalablement durcies dans l'alcool absolu. Voici ce qu’on observe alors: La teinte hyaline des parties attaquées est occasionnée par l’accumulation, à l’intérieur des écailles, d’une matière presque complètement incolore. Cette matière, la gomme, se trouve presque toujours à une place constante, savoir, entre l’épiderme et le reste du tissu. L’épiderme, normalement composé de cellules qui sur la coupe transversale affectent la forme de petits carrés, est devenu une membrane
À LA PATHOLOGIE VEGÉTALE. 51
presque dépourvue de structure, et des cellules qui le con- stituaient on ne reconnaît plus grand'chose. Ces cellules, évidemment, sont mortes par suite du processus morbide. Immédiatement sous l’épiderme ainsi altéré nous trouvons la gomme: elle a été convertie par l’alcool en une masse dure, parfaitement limpide et incolore, qui unit l’épiderme au tissu sous-jacent. Celui-ci a disparu en partie, et c’est vraisembla- blement aux dépens de cette partie qu'a été formée la gomme. Un peu plus bas toutefois, en se rapprochant du centre de l’écaille, toujours sur la coupe transversale, on voit des cel- lules encore indemnes. Les premières de celles-ci sont mani- festement gonflées, et souvent même des cellules entières sont complètement isolées au milieu de la gomme ; elles n’ont alors plus la moindre connexion avec la plante. De pareilles cellules ont ordinairement perdu toute leur fécule, ou n’en contiennent plus que quelques grains. Dans les cellules qui sont plus éloignées de la gomme, les grains de fécule sont déjà plus nombreux, et dans celles qui occupent le côté op- posé de l’écaille on en trouve souvent le nombre ordinaire. Bien entendu, tous les cas ne répondent pas exactement à cette description; mais on peut la considérer comme repré- sentant d’une manière satisfaisante l’état Le plus général. Un cas particulier, qui mérite d’être signalé, est celui-c1: quelque-. fois, les cellules épidermiques se sont fendues sous l’action de la maladie, et la membrane présente alors sur la coupe transversale la forme d’un peigne, dont les dents sont très espacées eu égard à leur longueur. Ces denticules proviennent des parois cellulaires perpendiculaires à la surface de l’écaille, parois dont l’une des moitiés est restée attachée du côté de cette surface, tandis que l’autre, lors de la rupture, est de- meurée adhérente au tissu cellulaire sous-jacent. Aussi peut-on parfois, aux bords de la tache gommeuse, retrouver encore cette dernière moitié. Dans tous les cas, c’est la formation et l'accumulation de la gomme, au-dessous de l’épiderme
totalement modifié, qui donne lieu à la production des plages A*
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hyalines et légèrement saillantes, dont l’aspect contraste si fort avec celui des parties de l’écaille restées blanc de lait et par conséquent saines.
Après avoir appris à connaître, par ce qui précède, la marche de la maladie, nous avons naturellement à nous de- mander de nouveau si cette maladie peut offrir du danger pour la culture des jacinthes, si elle est due à des parasites et si, en conséquence, elle est contagieuse ou non.
La réponse à toutes ces questions sera donnée plus loin. Voyons d’abord ce qu’en à dit M. W. G. Smith dans l’article précité, et commençons par la question du parasitisme éven- tuel. Dans la gomme des jacinthes romaines il trouve un mycélium, celui du Penicillium crustaceum, et, tout en avouant que ce mycélium ne saurait pénétrer dans le bulbe sain, il pense pourtant que sa croissance pourrait aggraver la maladie. Nous savons encore trop peu de chose de l’action exercée sur les organismes vivants par les moisissures non parasites, pour pouvoir en dire rien de certain. M. Smith n’apportant d’ailleurs aucun argument en faveur de son hypothèse, rien ne nous invite à l’y suivre et encore beaucoup moins à l’appliquer aux jacinthes hollandaises, puisque, n1 dans les bulbes ni dans la gomme de ces plantes, nous n’avons trouvé la moindre trace de moisissure. — Quelques lignes plus loin, M. Smith cherche la cause de l’affection gommeuse dans la présence d’une mite, et cela de nouveau sans citer une seule raison, simplement d’après l’autorité de M. A. D. Michael. J’ignore si cet animalcule se trouve dans les jacinthes romaines attaquées de la gomme, mais je puis assurer que chez les jacinthes examinées par moi la gomme n'était pas accompagnée de mites, bien que des animaux de ce genre se rencontrent parfois dans les bulbes atteints d’autres maladies !).
1) J'espère que ces derniers mots ne conduiront pas à mal interpréter ma pensée. Je sais très bien, en effet, que dans les jacinthes ordinaires,
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE,. 53
Pour moi, je suis convaincu qu'on doit voir, dans la ma- ladie de la gomme des jacinthes, un phénomène qui n’est pas occasionné par des parasites, mais par des causes in- internes, dont nous ne pouvons encore nous former, dans l’état actuel de la science; qu’une idée très impar- faite.
Comme non parasitaire, notre maladie de la gomme n’est d’ailleurs pas isolée dans la science. A titre d'exemple de quelque chose d’analogue, je citerai une maladie à laquelle le figuier est sujet en Italie et qui, depuis les recherches de M. Savastano !), est suffisamment connue pour qu’on puisse porter un jugement sur elle; un autre cas, que chacun peut observer très facilement, est celui de la racine du raifort sauvage (Cochlearia Armoracia), dont les vaisseaux sont souvent remplis d’une sorte de gomme, sans que rien indique l’action de parasites. Il ne sera probablement pas difficile de trouver encore d’autres exemples du même genre parmi les nom- breuses plantes qui ont à souffrir de la gommose ; mais, pour le but que nous avons en vue, le fait qu’il en existe quel- ques-uns est suffisant.
En continuant maintenant l’examen des questions ci-dessus posées, nous arrivons à celle qui a pour objet la possibilité
saines, telles que les bons horticulteurs les expédient en automne, il ny a ni mites, ni œufs de mites; aussi les mots en question visent-ils seule- ment des jacinthes très malades Tous ceux qui en été ont conservé quel- que temps à l’état sec, dans un espace fermé, par exemple dans un petit sac, des bulbes de jacinthes fortement attaqués de la maladie annulaire, savent qu'on peut alors y trouver, outre les anguillules, nombre d’autres animaux, parmi lesquels dominent de petits articulés, un peu semblables à des araignées. Ce sont là, si je ne me trompe, les mites dont il a été si souvent parlé dans le dernier temps. On les rencontre aussi parfois dans les bulbes affectés du jaune; ceux qui sont atteints de la morve noire ou blanche ne me les ont jamais offerts. Il est d’ailleurs impossible, à mon avis, d’y voir la cause d’une maladie des jacinthes.
1) Il Marciume del Fico. Estratto dall Annuario della R. Scuola Sup. d'Agric. in Portici, Vol. III, 1883, fase V (voir surtout p. 27 et suiv.).
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de l'infection. M. W. G. Smith croit que la gomme elle-même est capable de transmettre la maladie des bulbes attaqués aux bulbes sains, et il conseille, en conséquence, d’enlever et de brûler toutes les plantes malades. — En ce qui touche le premier point, je ne veux pas contredire l’auteur anglais, bien qu’il ne motive pas sa manière de voir; il est très pos- sible qu’à l’aide de soins convenables on puisse communi- quer la maladie à une jacinthe saine en introduisant une certaine quantité de gomme dans les écailles; maïs que Île hasard seul puisse amener ce résultat assez fréquemment pour qu’il soit nécessaire de brûler les bulbes malades ou de les rendre inoffensifs de quelque autre manière, voilà ce qui me paraît tout à fait improbable, Dans la plupart des cas, en effet, soit que les jacinthes gommeuses se trouvent encore sur pied dans les champs, soit qu’elles aient pris place sur les tablettes, — et c’est là que la gomme apparaît surtout, — il est impossible que les bulbes soient assez longtemps en con- tact mutuel par la tête pour que la maladie passe de l’une à l’autre, et l’infection par l’intermédiaire de la terre ou de l’air est évidemment inadmissible, puisqu'il n’y a pas de germes morbifiques vivants. Lorsque la maladie est très intense, de sorte que la gomme s’écoule de la tête d’un bulbe, ce qui arrive quelquefois par les temps humides, il peut naturelle- ment y avoir du danger pour les bulbes sous-jacents; mais on conçoit que le concours de ces divers circonstances doit être assez rare.
J’indiquerai, en peu de mots, ce qui me porte à penser que l’infection par la gomme n’est pas au nombre des choses impossibles.
Cette opinion repose principalement sur une assertion de M. Hartig !), qui, pour la maladie de la gomme des Amygda-
1) Lehrbuch der Baumkrankheiten, 1882. p. 37.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 55
lées, a été admise d’abord par M. Beyerinck !), puis adoptée aussi, comme point de départ, par M. Wiesner ?).
D’après M. Hartig, pour qu’une plante devienne malade, il faut une matière, désignée sous le nom de ferment, qui altère ou tue les tissus et qui, en cas de maladies dues à des moisis- sures, est sécrétée par le moisissure correspondante *). Or, soit qu’on admette avec M. Beyerinck que dans la gommose des arbres à fruits à noyau le ferment est le produit d’une de ces moisissures, ou avec M. Wiesner qu'il se forme dans les cellules de la plante même, par des actions d’autre nature, toujours est-il que les deux observateurs sont d’accord en ceci, que la gommose des arbres en question ne peut s’ex- pliquer que par l'hypothèse d’un pareil ferment. M. Wiesner communique différentes réactions chimiques et M. Beyerinck nombre de faits biologiques qui rendent extrêmement pro- bable l'existence de ce ferment. Ne pouvant rapporter ici leurs observations, ce qui nous mènerait trop loin, je me bornerai à dire que le ferment se laissait déceler aussi dans la gomme même des Amygdalées, d’où résulte évidemment la possibilité de l'infection, par cette gomme, de branches saines de cerisier ou de prunier. Or, en appliquant ces résul- tats à notre cas actuel, on comprend sans peine qu'un com- mencement de gommose pourrait aussi se produire dans des bulbes sains, s’ils étaient mis en contact avec la gomme pro- venant d’une plante malade. Pour la pratique, toutefois, cette question n’a pas d'intérêt, et c’est pourquoi nous ne nous en occuperons pas davantage.
1) Onderzoekingen over de besmettelijkheid der gomziekte bij planten, publ. par l’Acad. royale des sciences d'Amsterdam, 1883: voir aussi: Arch. néerl., T. XIX. p. 43.
2) Bot. Zeit. 4885, N°. 37.
3) Ceci était écrit depuis longtemps, lorsque parut un Mémoire de de Bary, dans lequel l’existence d’un semblable ferment se trouvait démontrée pour le Peziza Sclerotiorum (Bot. Zeit., 1886, N°. 2).
56 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Revenons plutôt à nos jacinthes malades elles-mêmes, que nous avons laissées au commencement de l'été, pour nous livrer un instant aux considérations théoriques ci-dessus, in- dispensables à l’intelligence de la chose.
Si les bulbes attaqués de la gomme sont levés en même temps que les autres, — ce qui sera bien toujours le cas, l'existence de la maladie ne pouvant être reconnue tant que les jacinthes sont encore sur pied, — et qu’on les conserve dans un endroit sec, ils se dessécheront de la manière ordi- naire, et au bout d’un temps plus ou moins long la maladie se révélera, même à l’œil d’un observateur ordinaire. En premier lieu, peut-être, elle s’accusera par le retrait des écailles externes et la pression qui en résulte sur les écailles internes; en second lieu, la gomme continuant à se produire dans les parties attaquées, on la verra s’exsuder par le haut du bulbe, sous la forme de grosses gouttes rondes et dures, qui restent fixées sur les bords du bulbe et lui donnent l’aspect parti- culier que M. W. G. Smith, dans l’article précité, a figuré à la p. 149 (fig. 32). C’est cette forme de la maladie qui est aussi la mieux connue à Harlem, où on lui donne le nom de ,boules de gomme”,
Ces boules se prêtent très bien à l’étude des propriétés de la gomme. Nous avons déjà vu que celle-ci est presque in- colore; mais maintenant nous pouvons constater qu’en cou- ches épaisses elle présente une légère teinte brunâtre, sans toutefois perdre sa transparence hyaline, et que dans les cas ordinaires on n'y trouve ni moisissures ni Bactéries. Aban- données à la dessiccation par l’air, les boules de gomme de- viennent de plus en plus dures et restent attachées jusqu’à l’automne, sans subir d’altération, au col du bulbe. La gomme nouvellement formée se dissout facilement dans l’eau, d’où elle est précipitée par l’alcool; maïs peu à peu la solubilité diminue, et la gomme d’écailles conservées dans l’alcool est devenue, au bout d’un certain temps, complètement insoluble dans l’eau. Nous passons sous silence les autres propriétés
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 57
physiques et chimiques de cette gomme, vu qu’elles sont de moindre importance dans la question qui nous occupe.
Voyons plutôt ce qui arrive lorsque de pareïls bulbes, après avoir été tenus bien secs durant l'été, sont plantés à l'automne. Au mois d’octobre 1884, je plantai dans deux pots quatre bulbes de jacinthes fortement atteints de la gomme et les conservai pendant tout l’hiver de la manière habituelle: au mois d'avril suivant, tous les quatre donnèrent des feuilles et des fleurs normales. Cette expérience me semble du plus haut intérêt, car il en résulte que non seulement les bulbes gommeux ne meurent pas quand durant l’été on les a main- tenus suffisamment secs, mais qu'ils conservent même leur valeur commerciale, puisque la maladie n’entrave pas le dé- veloppement de la fleur. Cela ne s'applique, bien entendu, qu'aux cas où la maladie ne s’est pas trop généralisée dans le bulbe et où, spécialement, elle n’a pas encore donné lieu à une décomposition du plateau.
D’après tout ce qui précède, les jacinthes hollandaises pa- raissent se distinguer à un haut degré des jacinthes romaines. Pour celles-ci, M. Smith nous apprend que la maladie de la gomme les fait ordinairement déjà périr avant l’époque de la plantation, et que, attaquées seulement dans une faible mesure, elles ne fleurissent pas. Il attribue cette absence de floraison à ce que le bourgeon ne pourrait pas traverser la gomme accumulée sur la tête du bulbe; mais cette explication me semble très improbable, d’abord parce que, en présence de l’eau dont le sol est pénétré en automne et en hiver, la gomme serait, sinon dissoute et entraînée, au moins ramollie ; ensuite, parce que les parties végétales en voie d’accroissement sont capables de vaincre des résistances beaucoup plus fortes que celles que pourraient leur offrir des masses de gomme tou- jours assez peu cohérentes. — Je n’ai guère d’expérience personnelle en ce qui concerne la maladie des jacinthes ro- maines. Une fois, seulement, j’ai examiné un petit lot de ces plantes, et cela au mois de décembre, qui, d’après tout ce
nn dre J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
qu’on a vu, est très peu favorable à l'étude des phénomènes de la maladie de la gomme. Indubitablement, toutefois, les plantes en question devaient être considérées comme perdues. On peut en dire autant des ÆHyacinthus (Galtonia) candicans, qui au printemps présentent parfois des phénomènes tout semblables à ceux que m'’avaient offerts, en décembre, les jacinthes romaines.
Une autre question, celle de savoir si la gommose n’aurait pas quelque rapport avec d’autres maladies des jacinthes, ap- pelle maintenant notre attention. On verra que, malgré les apparences contraires, un pareil rapport direct existe bien. réellement. Je commence par appuyer sur le mot ,direct”, parce qu'un rapport indirect, entre la gommose et les maladies parasitaires en général, ne saurait évidemment être nié. La formation de la gomme, en effet, dénote avec certitude que la plante se trouve sous l’une ou l’autre influence défavo- rable, qu’elle est faible, selon l'expression usuelle: or, c’est un fait connu que toute faiblesse implique nécessairement l’aptitude à devenir malade sous l’action d’un parasite. Nous ne dirons donc rien de plus à cet égard, mais nous nous occuperons seulement des rapports directs possibles, et en premier lieu de celui qui paraît lier la gommose à la maladie du jaune, avec laquelle elle offre indubitablement quelque analogie et a certainement été confondue plus d’une fois.
Il y a pourtant un moyen très facile de distinguer la ma- ladie de la gomme de celle du jaune. Quand la méthode de coloration ci-dessus décrite pour la maladie du jaune est appliquée à une préparation provenant d’un bulbe atteint de la gomme, la coloration caractéristique ne se produit pas. La matière colorante dissoute dans l'alcool ne pénètre pas la gomme, et par conséquent, lors du lavage dans l’alcool aeci- difié, aucune différence de couleur n’apparaît. Tout au plus, quelques grains de fécule, savoir ceux des cellules contiguës à la couche de gomme, restent-ils colorés en brun clair, ce qui semble indiquer qu’ils sont partiellement décomposés et
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE, 59
seront, eux aussi, transformés en gomme: Lorsque la gomme a éprouvé par l’alcool un retrait considérable, il peut en être résulté à son intérieur des cavités, où la solution de matière colorante pourra non seulement pénétrer, mais aussi se main- tenir lors du transport de la préparation dans l’essence de térébenthine, de sorte que des erreurs deviendront possibles. Dans la plupart des cas, toutefois, l'erreur sera facile à éviter, moyennant un examen un peu attentif. — Bien que cette méthode simple permette de distinguer entre elles les ma- ladies de la gomme et du jaune, la première de ces maladies n’en doit pas moins, conformément à la règle générale ci- dessus rappelée, augmenter l'aptitude à contracter la seconde, et je crois avoir eu de temps en temps des exemples de cette influence. Parfois, en effet, il arrive que dans un bulbe le jaune ne se présente pas partout de la manière ordinaire, mais que çà et là quelques écailles, vues sur une coupe trans- versale, se montrent attaquées uniformément, sur toute leur étendue. On peut alors ou bien admettre que le jaune, dans sa marche progressive, à rencontré une écaille atteinte de dégénérescence gommeuse et s’est propagé dans la gomme, ou bien se représenter que les Bactéries introduites dans les écailles venaient directement du dehors. Le choix entre ces deux hypothèses n’a pas grande importance; l’essentiel est qu'il s'opère une combinaison entre les deux phénomènes pathologiques.
Quant à la maladie annulaire !) et à la morve noire, dans leur rapport avec la gommose, je n’ai aucun fait à commu- niquer, mais il me paraît extrêmement probable que les endroits gommeux offrent, tant aux anguillules de la maladie annulatre qu'aux mycéliums floconneux du Peziza, des points très favorables pour s’introduire dans le bulbe. Quoi qu’il en soit, cette question aussi est assez peu importante, de sorte que nous allons passer à la seule maladie des jacinthes qu’il reste
1) Causée par le Tylenchus Hyacinthi Prill. (synonyme, suivant M. Ritzema Bos, de T. devastatrix Kühn).
60 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
à considérer et qui, à mon avis, est non seulement dans le rapport le plus intime avec la gommose, mais peut lui être dite identique. Pour bien faire saisir mon RER égard, j'établirai une
Comparaison entre la gommose et la morve blanche des Jacinthes.
Jusqu'ici, nous nous sommes surtout occupés des phéno- mèênes de la gommose tels qu’on les observe lorsque les bulbes sont tenus bien secs en été, et nous avons vu que les con- séquences n'en offrent alors, ni pour le bulbe attaqué ni pour la culture en général, aucun danger notable. Mais il faut se demander si les jacinthes ne sont pas ordinairement exposées à une humidité plus grande. Or, tel est effectivement le cas. Non seulement les bulbes doivent subir l’action des pluies, souvent si abondantes dans notre climat humide, maïs en outre, après avoir été levés, ils sont habituellement mis en silos et par conséquent soumis encore quelque temps à l’in- fluence de la terre humide et chaude. Si l’on se rappelle maintenant que d’après Schneevoogt la morve blanche appa- raît surtout lorsque durant l’ensilage il tombe beaucoup de. pluie et que, de plus, la terre est à une température sufi- samment élevée, on inclinera facilement à penser que la morve blanche n’est autre chose que la maladie de la gomme passée à l’état de putréfaction sous l'influence de la chaleur et de l’humidité.
J’exposerai successivement les différentes raisons qui plai- dent en faveur de cette manière de voir:
1. Les deux maladies apparaissent à la même époque, mais dans des circonstances tout à fait opposées. — Pour quiconque aura lu attentivement l’article de la gommose et de la morve blanche, cet argument n’a plus besoin d’être développé.
2. Ni l’une ni l’autre des deux maladies n’est causée par
à Æ ? à LA PATHOLOGIE VÉGÊTALE. 61
des parasites, ni par conséquent contagieuse, au sens ordi- naire du mot. — En ce qui concerne la présence de parasites, tout ce qui a été dit précédemment au sujet des deux phé- nomènes est assez concluant, et quant à la non-contagi- osité de la morve blanche, tout aussi bien que de la gomme, elle n’est plus un secret pour la plupart des cultivateurs.
Pour surcroît de preuve, j'ai ramolli dans l’eau, le 16 mai 1884, de la morve blanche desséchée, puis je l’ai introduite dans les gaînes d’un certain nombre de jacinthes cultivées en pots: aucun des bulbes n’a contracté la maladie.
Les larves de mouches qu’on trouve parfois dans les bulbes attaqués de la morve blanche ne peuvent pas non plus, vu leur fréquente absence, être considérés comme la cause de la maladie, d'autant moins que des larves analogues vivent dans toutes sortes de matières organiques en putréfaction.
3. Les deux maladies restent parfaitement localisées, c’est- à-dire, elles n’attaquent jamais le bulbe tout entier, mais effectuent seulement la désorganisation d’une partie déter- minée de la plante, savoir, dans les deux cas, des écailles.
4, Le 9 août 1884, je reçus un grand nombre de bulbes de jacinthes (Argus, simple bleue), qui étaient affectés, à des degrés très divers, de la morve blanche. Quelques-uns pré- sentaient les phénomènes typiques de la maladie: une odeur désagréable et, au sommet, une masse blanche, écumeuse, dans laquelle étaient irrégulièrement entremêlés des grains de fécule, des cellules, des cristaux et d’innombrables Bac- téries; d’autres bulbes, et c’étaient là les plus instructifs, dégageaient bien la mauvaise odeur, mais fournissaient, au lieu de la masse spumeuse, une matière épaisse, visqueuse, assez limpide, quoique colorée en brun, qui ressemblait beau- coup à de la gomme et découlait en gouttes. Dans cette matière ne se trouvaient ni grains de fécule, ni cellules, ni cristaux, mais on pouvait y constater la présence de Bactéries
62 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
relativement peu nombreuses. Nulle part il n’y avait trace de larves de mouches. Ces derniers cas ne se laissaient ex- pliquer, à mon avis, qu’en admettant que les gouttes décou- lant des bulbes consistaient en gomme qui commençait à se putréfier, tandis que les cellules situées au pourtour de la cavité à gomme n’en étaient pas encore arrivées à ce point. Dans les autres bulbes, où se montraient les phénomènes ordinaires de la morve blanche, le processus de la putréfac- tion était déjà assez avancé pour avoir envahi aussi les sus- dites cellules, ce qui naturellement avait mis fin‘ à la for-
mation de la gomme elle-même.
5. Mon dernier argument est emprunté à ce fait, que la jacinthe n’est pas la seule plante chez qui s’observent tant la maladie de la gomme que celle de la morve blanche. Chez les Narcisses, en effet, ces phénomènes se présentent exactement de la même manière que chez les jacinthes, tout en y produisant encore moins de dommages. C’est ce qui ressortira de la brève description qui va suivre.
La gommose et la morve blanche des Narcisses.
Dès le printemps de 1883, je connaissais une maladie des Narcisses à laquelle on peut hardiment appliquer le nom de morve blanche. Je n’en aurais toutefois pas fait mention, si, au mois d'août 1884, je n’avais rencontré des cas de Nar- cisses attaqués de la gomme, qui confirmaient mon idée, déjà conçue antérieurement, d’un rapport entre les deux maladies.
Voici ce que m’avaient présenté les bulbes reçus au prin- temps de 1883. Quelques écailles étaient désorganisées tout comme elles le sont dans la maladie analogue des jacinthes: çà et là elles montraient des plages où toutes les cellules
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 63 étaient devenues libres et se dérobaient dans une bouillie de Bactéries et de grains de fécule, tandis que l’épiderme, détaché en entier du reste du tissu, s’offrait à la vue comme une membrane sans structure et complètement isolée. La plupart des écailles malades présentaient aussi de grandes cavités, dans lesquelles s’étendaient, d’un côté à l’autre, des filaments de la même bouillie qui, dans d’autres squames, remplissait la cavité tout entière. Je n’ai pas observé l’écume caractéristique, telle qu’elle se produit en été chez les ja- cinthes; mais c’est là un point secondaire et qui tient peut- être à ce que je n’examinais pas les narcisses dans la saison convenable pour cette observation.
La gommose des narcisses est également, au fond, la même que celle des jacinthes. Au mois d’août 1884, je trouvai entre autres un cas où sur l’une des squames se voyait une grande ampoule, d'un brun assez foncé. L’épi- derme était altéré de la manière ordinaire et formait la membrane extérieure, très tendue, de l’ampoule; au-dessous se trouvait la masse de gomme, dans laquelle étaient inclus des cristaux, provenant des innombrables tubes cristallifères qui, déjà durant la vie normale, sont remplis, en outre des objets auxquels ils doivent leur nom, d’une matière gom- meuse. Pas plus que chez les jacinthes affectées de gommose, il n’était ici question de parasites, soit végétaux soit ani- maux, de sorte que les deux cas sont complètement identiques.
Ici encore, nous sommes donc autorisés à admettre, je crois, que durant les étés très secs la maladie se manifestera de préférence sous la forme de gommose et aura par suite, surtout chez les narcisses, un caractère bénin, tandis qu’une forte humidité, accompagnée d’une température élevée, fera apparaître la forme dite morve blanche.
64 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS Réceptivité.
Non seulement, d’après ce qui précède, la réceptivité, tant pour la gommose que pour la morve blanche, est beaucoup plus grande chez les jacinthes que chez les narcisses, mais il existe aussi des différences de sensibilité entre les variétés de jacinthes. A cet égard toutefois, par suite d’un concours insuffisant de la part des horticulteurs consultés, je ne puis communiquer que très peu de renseignements.
Pour très sujettes à la morve blanche passent les jacinthes de variétés suivantes :
Simple rouge, Norma. Simple blanche, Grande Vedette. Double rouge, Bouquet tendre. Pour très sujettes à la gomme sont tenues les variétés : Double rouge, Bouquet tendre. Double rouge, Lord Wellington. Double jaune, Bouquet d'Orange.
Le pénurie des données concernant la gomme et la morve blanche est doublement regrettable, surtout au point de vue du contrôle de l’opinion, ci-dessus émise que les deux maladies ne seraient que des manifestations différentes d’une même cause morbifique.
Traitement.
Après cette digression sur les cas particuliers, revenons à la maladie considérée en général, et demandons-nous ce qu’il y à à faire pour la combattre. Ne connaissant pas la cause déterminante de la formation de la gomme chez des plantes du reste saines, nous n'avons naturellement aucun moyen à proposer pour prévenir cette formation. Cela n’est pas très grave, heureusement, car nous savons qu’en elle-même la gomme offre peu de danger et nous sommes maintenant en mesure d’empêcher qu’elle ne passe à la morve blanche,
LS
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 65
beaucoup plus fâcheuse et plus redoutée. À cet effet, il faudra, à l’époque où les bulbes sont le plus susceptibles de contracter la maladie, éviter tout ce qui peut les mettre inutilement en contact avec l’humidité, et redoubler de soins, à cet égard, lorsque règnera une température élevée, condition de décom- position rapide. L'application rigoureuse de ce principe exi- gerait, en premier lieu, que, par les fins de printemps humides et pluvieuses, les bulbes fussent levés de bonne heure; en second lieu, dans de pareilles circonstances, l’ensilage devrait être entièrement omis, au moins pour les variétés connues comme très sujettes à la morve blanche. Une dessication artificiellement accélérée pourrait même être désirable, s’il s'agissait d’uné variété ou d’un lot dont la conservation payerait des peines et des dépenses exceptionnelles.
IV
Maladie des feuilles de PAmaryllis Hippeastrum, causée par le Thrips haemorrhoidalis Bouché.
Bouché à décrit un insecte qui peut être regardé comme l’un des hôtes les plus fâcheux des serres; il appartient au genre ZThrips, et Bouché lui à donné le nom spécifique »haemorrhoidalis”, d’après la coloration rouge qu’il occasionne aux plantes sur lesquelles il vit. Il est très probable que l'espèce dont il va être question est identique à celle de Bouché.
Les Thrips sont de petits insectes d'environ 12,7 de lon- gueur, qui, à cause de leurs tarses terminés par une membrane courbe, ont reçu le nom de physopodes. Notre espèce ne présente qu'une seule paire d'ailes, réduites à de petites lames étroites, dont les bords sont garnis de longues soies raides. Beaucoup d’autres espèces du même genre possèdent quatre ailes et ont, par suite, le vol assez facile; notre
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIL. 5
66 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS:
Thrips paraît se borner à sauter. Toutes les espèces cou- rent avec une extrême agilité, et les vésicules des tarses leur sont alors d’un grand secours pour se fixer. Ces insectes vivent réunis en grand nombre et, selon Bouché, sur des plantes de serre appartenant à différentes espèces; pour moi, je ne les ai observés jusqu'ici que sur les feuilles des variétés d’Amarylhs cultivées dans les serres, et c’est donc uniquement de leur influence sur ces plantes que je me propose de parler !) Préalablement, toutefois, il faut encore mentionner une des particularités de structure des femelles.
Celles-ci possèdent, caché à la partie postérieure du corps, au côté de dessous, un organe effilé en pointe aiguë, et composé de deux motiés qui peuvent se mouvoir parallèle- ment l’une à l’autre. Chacune de ces moitiés est dentelée en scie au bord tourné vers l’autre moitié. Le tout, y compris l'extrémité épaissie par laquelle l’organe est fixé dans Le corps de l'animal, a une longueur de 0#",26 et est très mince. — Les parties de la bouche sont entièrement conformées pour la succion; les lèvres supérieure et inférieure sont soudées en un tube, à l’intérieur duquel peuvent se mouvoir les mandi- bules, cornées et sétiformes. — Ces quelques détails de struc- ture suffiront, je pense, pour le but que nous avons en vue.
Les dommages que ces insectes causent aux feuilles de l’'Amarylilis sont de deux sortes. Parlons d’abord de celui qui a le plus d'importance. Il consiste en ce que les feuilles per- dent çà et là leur couleur verte, qui est remplacée par une coloration rouge. La matière colorante verte étant indispensable à la formation des matières nutritives, 1l est facile de com- prendre que les feuilles d’où elle a disparu n’ont plus aucune utilité pour la plante. Lorsque ces feuilles devenues impropres à leurs fonctions sont en grand nombre, le bulbe ne peut plus croître, il s’affaiblit et ne donnera que peu ou point de
1) Suivant Boisduval (Essai sur l’entomologie horticole, 1867), le genre Thrips vit dans les serres sur: Azalea, Eucharis, Pancratium, Ficus elas- tica, Orchidées, etc.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 67
fleurs. Ce sont les Thrips qui, par la succion exercée sur les feuilles, déterminent cette altération. Les cellules, et en premier lieu celles de l’épiderme, les seules qu’ils puissent atteindre, meurent, ce dont témoigne le suc cellulaire, qui, d’incolore qu’il était à l’état normal, devient rouge vif. Au début de l’'altération, les cellules situées au-dessous des cellules épi- dermiques de la feuille peuvent encore être tout à fait vertes ; mais cette couleur est alors complètement masquée par le rouge de l’épiderme !)}. Ces cellules sous-épidermiques ne restent pas toutefois dans cet état, elles meurent à leur tour et se dessèchent; alors apparaissent les taches d’un blanc argenté qui, sur une feuille attaquée, se voient ordinairement juxtaposées aux taches rouges. L’éclat argenté est dû à ce que les cellules mortes, en se desséchant, donnent à l’air l’occa- sion de pénétrer dans le tissu de la feuille, d’où résulte une réflexion particulière de la lumière. La preuve expérimentale de l’exactitude de cette explication s’obtient lorsque les feuilles en question sont conservées dans l’esprit-de-vin. Ce liquide, généralement employé pour chasser l’air des tissus végétaux, fait aussi disparaître Les taches blanches, au bout de quelque temps ?).
Sur les feuilles attaquées comme il vient d’être dit, on trouve partout des crasses noires, qui ne peuvent être que les excréments des nombreux insectes vivant à la surface de ces feuilles.
La seconde manière dont les Thrips nuisent aux feuilles d'Amaryllis est un peu plus compliquée. Sur les coupes trans- versales de ces feuilles on trouve souvent (PI. IT, fig. 1) une plaie très caractéristique, en forme de petit sac ayant son ouverture
1) Il en est de même, normalement, chez beauconp de plantes, telles que le hêtre pourpre, le noisetier pourpre, etc.
2) Chez quelques plantes (Begonia Rex), dont les feuilles présentent normalement des taches d’un blanc d’argent, celles-ci sont également dues à la présence de l’air dans le tissu.
5*
68 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
dans l’épiderme de la feuille. Ces petits sacs sont très nombreux et de configuration très différente: parfois ils sont placés obli- quement dans la feuille, d’autres fois perpendiculaires à sa surface. Leur longueur est d'environ 0,232, et l’épaisseur de la feuille s’élevant à 022,8, on voit qu’ils atteignent jusqu’à 1 ou + de l'épaisseur totale. Le diamètre des sacs varie beaucoup, non seulement dans un même sac à des hauteurs différentes, mais aussi d’un sac à l’autre (022,056 — Omm1).
Tous ces sacs sont remplis de petits corps globuleux, hyalins (0), offrant des ponctuations un peu plus foncées et des dimensions assez variables; les plus grands ont un dia- mètre de 0%%013. Dans quelques-uns des sacs, on trouve de ces corps qui ont pris une forme oblongue, mais ne pré- sentent d’ailleurs, guère d’autres différences.
Sur les mêmes feuilles on remarque encore d’autres ano- malies, savoir, de petites éminences, qui font une assez forte saillie au-dessus du reste de la surface; elles sont ordinai- rement incolores, parfois légèrement colorées en rouge. Sur les coupes transversales de la feuille (PI III, fig. 2), ces éminences apparaissent composées de cellules très grandes et très longues (c), à parois minces; en même temps, on con- state que l’épiderme (e), qui dans l’état normal s'étend sur toutes les parties de la plante, manque ici, ou du moins n’est formé que de cellules mortes, ratatinées. Dans les srandes cellules on reconnaît immédiatement le tissu dit calleux ou cicatriciel. Il en résulte que les éminences ne peuvent être que des plaies guéries, et il est tout naturel d'admettre que ces plaies sont les petits sacs décrits plus haut. La différence considérable entre les dimensions des éminences, dont le diamètre peut s'élever à plus de 2m, et celles des sacs, ne s’oppose par à l'identification; au pourtour des sacs, en effet, beaucoup de cellules mourront par suite des influences anormales auxquelles elles sont ex- posées, et souvent aussi, lors de la guérison, plusieurs petits sacs pourront se confondre en une saillie unique.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 69
_ Quant à l’origine de ces plaies, l’organisation des Thrips nous l'indique. À l’aide de la tarière ci-dessus mentionnée, dont la longueur surpasse un peu celle des plus grands sacs et qui avec ses bords dentelés est comme faite pour cet usage, la femelle scie des cavités dans la feuille. Les petits corps globuleux incolores sont les œufs de l’insecte, tandis que les formes plus allongées représentent les premiers états de développement. Sur les feuilles qui montrent des émi- nences et des sacs, on trouve toujours un grand nombre de jeunes Thrips. Ceux-ci sont encore dépourvus d’ailes, ont des téguments jaunes très mous et sont beaucoup plus petits que les individus adultes. Probablement, ils quittent donc de très bonne heure le nid, — si l’on peut donner ce nom aux petits sacs, — où les cellules lésées leur offrent une alimentation facile, tant qu’ils ne sont pas assez forts pour chercher leur nourriture à la manière des parents.
En ce qui concerne le remède à opposer au mal, nous n'avons naturellement pas grand’chose de nouveau à en dire. Là où les Thrips apparaissent en trop grand nombre pour qu'on puisse les prendre et les tuer, on a à essayer les différents moyens usités pour la destruction des insectes en général. J’ai conseillé l’emploi de la poudre insecticide de Perse ou du Blight-killer, bien connu en Angleterre. L’in- fusion de tabac n’a pas paru exercer d'influence nuisible sur les animaux, tandis que quelques essais avec une dissolution de savon pur ont donné des résultats encourageants. Les fumigations avec le tabac tuent les animaux, sans aucun doute; mais il est non moins certain que les œufs n’en souffrent nullement. Si donc on veut purifier les serres à fond, il faut répéter les fumigations pendant quelque temps, à des intervalles d’un certain nombre de jours, pour atteindre les animaux à mesure qu'ils sortent des œufs existants. On a recommandé aussi de brûler du soufre. Il va sans dire que toutes les feuilles fortement attaquées doivent être cou- pées ; l'exposition au grand air pendant des journées venteuses,
70 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
fraîches ou pluvieuses, si les plantes peuvent la supporter, chassera certainement les insectes.
En hiver, lorsque les plantes ont perdu leurs feuilles, le nettoyage minutieux de la serre infestée sera d’un excellent effet; simultanément, la tannée devra être renouvelée. |
Inutile d'ajouter que jamais des plantes malades ne doivent être introduites dans une serre encore préservée, ni récipro- quement.
EXPLICATION DES FIGURES.
PLANCHE I.
La maladie du jaune des jacinthes.
Fig. 1—8. D’après des cultures dans des gouttes suspendues; figures des- sinées à la main Zeiss 4. F.
Fig. 1. Spore mûre. |
Fig. 2 et 3. Premier stade de la germination des spores.
Fig. 4 et 5. Deuxième stade de la germination.
Fig. 6. À, Bet C. Trois stades successifs d’une spore en germination. C la membrane sporique vide.
Fig, 7. Comme ci-dessus.
Fig. 8 Une Bactérie errante, qui traînait dernière elle la membrane sporique vide.
Fig. 9. Coupe transversale d’une écaille du bulbe représenté fig. 10. Gross. #,
e. épiderme, s. spirales des vaisseaux ligneux, ph. phloème, z..fécule,
Fig. 10. Coupe transversale d’un bulbe malade. Grandeur naturelle.
PLANCHE II.
La morve noire des jacinthes et des plantes analogues.
Fig. 1. Une plante malade. Grandeur naturelle. Fig. 2—8. Peziza Bulborum. Fig. 2. Le champignon. +. s. Sclérotium, d. disque. . Fig. 3. Coupe transversale du Sclérotium. 42.
e. épiderme, m. moelle.
Fig. Fig.
Fig. Fig.
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 71
4. Coupe longitudinale du disque. #. 5. Thèque a et paraphyse p. 522.
s. spores, v. vacuoles de l’épiplasme.
6. Sommet d’une thèque dont les spores sont sorties (en a). 522,
7 et 8. Spores en germination dans l’eau. 52° . s. spores, k. tube germinatif, s’ sporidies.
PLANCHE III.
Maladie des feuilles de lAmaryllis Hippeastrum.
. 1. Coupe transversale d’une feuille montrant un petit sac z, dans
lequel se trouvent les œufs o du Thrips. 392,
e épiderme, / canal aérien.
. 2, Coupe transversale d’une feuille montrant une excroissance cal-
leuse. 22, c callus, p parenchyme normal.
SUR LE MOUVEMENT VIBRATOIRE
SPHÈRE LIQUIDE DÉFORMÉE,
PAR
V. A. JULIUS.
1. À la fin de son Mémoire sur les phénomènes capillaires des jets liquides !), M. Rayleigh donne la théorie du mou- vement vibratoire d’une sphère liquide qui, après avoir subi une déformation infiniment petite, est abandonnée à l’action des forces moléculaires ?). Il y suppose que la déformation soit symétrique par rapport à un diamètre, mais il ajoute que la solution du cas plus général conduirait exactement au même résultat. |
Cette assertion de M. Rayleigh m'avait surpris; pour beau- coup de cas nous savons que dans un système vibrant la présence ou l’absence de certaines vibrations partielles est en corrélation intime avec la déformation primitive. L'idée qu’une déformation symétrique provoquerait dans une sphère liquide des vibrations partielles entièrement semblables à celles ré- sultant d’une déformation quelconque, me paraissait, malgré
la haute autorité que tout le monde reconnaîtra à un avis de M. Rayleigh, demander confirmation.
1) Rayleigh, On the capillary phenomena of jets, dans Proc. Roy. Soc. 29, p. 71°(1879). 2) L.c., p. 95.
V. A. JULIUS. SUR LE MOUVEMENT VIBRATOIRE ETC, 19
- J'ai essayé, en conséquence, de résoudre le cas général.
2. Nous admettons que le liquide dont est formée la petite sphère soit incompressible et sans mouvement rotatoire; la vitesse a donc un potentiel U, qui satisfait à l'équation
Si nous introduisons comme coordonnées », @ et w, ou bien r, & et y, en posant pu = cos Ô, il suit de l’équation ci-dessus :
ne TX ie, ph Da rt Lau, ®) + 1. CR Dal a (a D} FAUe A UD SR ob pi (2)
OÙ Pos P,, ete. sont des quantités qui dépendent du temps, tandis que X% (u, y) représente une fonction sphérique de l’ordre n, indépendante du temps.
Que les fonctions À peuvent réellement être choisies de façon à ne pas dépendre du temps, c’est ce qui ressort des considérations suivantes.
On sait que U est une fonction de r, uw, w et {. Pour une valeur déterminée de chacune des variables r, u et g, on peut concevoir ÜU, comme fonction de {, développée en une série de la forme:
DR OR PO ÉD PU + + de Pn(O + te. sv (8)
où P,(t), P,(t), etc. sont des fonctions périodiques de #, tandis que les coefficients b sont des fonctions de r, u et œ. La seule hypothèse impliquée dans l’équation (3), c’est que les périodes soient les mêmes pour tous les points de la sphère liquide.
Pour une valeur déterminée de r, chacun des coefficients b peut être développé en une série de la forme
b—=c, + ce, Z, (u,) + 0, Z, (u, p) +... + Cn Zn (u, p) + ..(4)
OÙ Z» (u, y) est une fonction sphérique de l’ordre n, naturel-
74 V. A. JULIUS. SUR LE MOUVEMENT VIBRATOIRE
lement indépendante de é. En substituant ces valeurs de b dans (3), on obtient
U—e, +e, =i(u,p)+...+ en znu, y) + ete. . . . (5)
où les fonctions sphériques = sont indépendantes de t, tandis que les quantités e sont des fonctions de # et £.
Or, de la condition que U satisfait à (1), il résulte que e est proportionnel à »*; par suite, l'équation (5) passe à la forme (2).
3. Ces considérations font voir aussi que, pour un point de la surface de la petite sphère déformée, la valeur de r,
se laisse mettre sous la forme To—@o + @, 7, (u, œ) + da F4 (u, p) + + sg À (u, p)+ etc…..(6)
où les quantités a sont dépendantes du temps, les fonctions Z indépendantes de cet élément. Entre (2) et (6) il existe une certaine relation, puisque
dr, o U CR PR AO ; 7 di Gr, VE Or, on a — —_— s' 5 D — n 6C. 26: 4 8 t FRAME À QE pr FPE @)
n—1 ) — D: se + 2p, To 3, 6° He. +NPrTo Xn+etc.(9) 0
La valeur », de l'équation (6) doit être substituée dans l’expression de Gr) . Les quantités a,, a,, ete. sont d’ail- A
leurs supposées très petites en comparaison de à, ; en d’autres termes, nous admettons que la sphère n’éprouve qu’une dé-
formation infiniment petite. Dans l'expression de () 0
nous pouvons donc, au lieu de r,, écrire a, ou bien k, le rayon de la sphère non déformée.
D’UNE SPHÈRE LIQUIDE DÉFORMÉE. 75
Mais alors il ne peut être satisfait à l'équation (7) pour toutes les valeurs de w et de y, à moins que pour chaque valeur de n on n’ait:
Xn (u,p) = Zx (u, p) et simultanément
Il est facile de s’en assurer en mettant les fonctions sphé- riques sous la forme dans laquelle les variables et g sont séparées l’une de l’autre ‘). On peut remarquer aussi que, si Ÿ: est la fonction sphérique biaxe de l’ordre n, on à d’après (8) et (9), en remplaçant dans (9) r, par À,
+1 fr d NACRE —1 0 ler? x ri J AS Lu Zn — R Pr Rr—t x, | du d y.
En vertu de (7), cette dernière intégrale doit être zéro, ce qui entraine, comme conséquence nécessaire, que les fonc-
| d a tions sphériques nr Zn et n Pr R—1 X, sont identiques ?).
Au lieu de l’équation (2), nous obtenons donc: U=p, P: F2, (u, y) Fo en Pr in Zn (u, y) + etc .. FVÈE)
où les quantités p satisfont encore à la relation (10).
Il est évident que nous ne serions pas arrivés à ce résultat simple, si nous n'avions admis que la petite sphère ne s’é6- carte jamais beaucoup de la forme sphérique.
1) Voir Todhunter, Laplace’s functions, p. 155, Heine, Handbuch der Kugelfunctionen, T. I, p. 312. 2) Voir Todhunter, p. 159.
76 V. A. JULIUS. SUR LE MOUVEMENT VIBRATOIRE
4: Pour trouver l’expression de l’énergie potentielle de la sphère äéformée, cherchons l’agrandissement que la surface de la sphère subit en s’écartant de la forme sphérique. La variation de l’énergie potentielle, lors de la déformation, sera
proportionnelle à cet accroissement de la surface.
La surface entière est égale à:
TETE) ou
+l fèz j Or NN? | J dudylré +5 ur) (5e) |
— 1 res TT) =) Jos AR UA MERS (19)
si l’on néglige les puissances quatrième et supérieures de or. or
0 0 2 Om 0
Comme on à en général, lorsque m et n sont des nombres entiers différents,
1 r2n ra Zn Bmâudp=0, — 1)" 0
il est clair que, en vertu de (6),
+] px Î | r'dudy=4ra +a EAITIES
— i
an? [| 25 dE ER. NN (13)
On a ensuite:
D’UNE SPHÈRE LIQUIDE DÉFORMÉE. 74
fav fa +25)
VER ("22 1 die #3 dd | 1— SEL LR PR -| J u @ ( Res du du \
1 | 22 0 Zn . Ni a, d ; 148
1 -—— u°
5. Supposons que À, soit une fonction sphérique de l’ordre p, et qui par conséquent satisfasse à l'équation
A 1) X,—=0..(45 > +p(p +1) Xp = 0.. (15)
su d Xp L'el :88 1—u 09
mer me PE ER
En tirant de l’équation (15) la valeur de X, et substituant cette valeur dans 1 Î Xy Zn du dy, on trouve:
l fr? f” Xy 21 d'u dy — ] 0
1 +iférpa(, > d Xp) 1 22 CAE TERME (1-2) << LL | Zrdudy. 0) J Lo) AE PA RE PPT TT an
Par l’intégration partielle, et en observant que (1—w?) Z» Ars
disparaît pour wu——1 et pour u = +1, de même que Sr 0 et 27, il vient: cel Xp 1 0 Z» 90 Xp à [ ‘dnao [ae “5 lui 0 09 2x —p(p +1) Xp Zn du dy. LE Aout
Lorsque p et n diffèrent, on a donc:
78 V. A. JULIUS. SUR LE MOUVEMENT VIBRATOIRE
+1 22 0X MAL G'fde INt-u) SPCÉPIR ERP ED ETE Î fr u Al MAO der sel (16)
—]1 0
puis
+1 ff? )R& d X 1 70 74802
d d de ñn n "+ n
( u ef UE Lu 08 "|
—1] 0 +1 fèxr
= n (a+ 1) [ Î X» Zn du dy Sa de Die US L'ERTeNeTNR (17)
—1 0
Bien que les théorèmes compris dans les équations (16) et (17) soient probablement connus, je ne les ai rencontrés ni dans l’ouvrage de Todhunter, ni dans celui de Heïne. C’est pourquoi J'ai indiqué la manière de les établir, si simple qu’elle soit.
6. Appliquons maintenant les équations (16) et (17) à l'équation (14). Il vient alors: |
Perle (Gseos
—] 0 — 5 n(n +1)a n° [fat dud.
et
Donc, d’après (12) et (13)
NW = D 2 RE La Re Po FER +S an? [ midi de OUR n Æ1 7. Il reste à introduire la condition que la petite sphère liquide ne change pas de volume, le liquide étant incompressible.. En FER AS la volume par I, on a:
= à RE rédudo 1
1 +1 ra he dudp[aÿ +3a [a 2, +... +On Zn + | —1 0 + 345 |d 2, + … + An Zn + |? +{a, 2, ++ An Zn LU
D’UNE SPHÈRE LIQUIDE DÉFORMÉE. 79 À cause de
+1 fpèr +1 p2x ( PA 0 ct ( Re D, —1] 0 | —] 0
on trouve, moyennant les jan permises,
4 x +3 eff, 2 dudp + .….+ 3 ma ffz auto +. 18
Si À est le eye de la sphère non déformée, cette équation donne :
2 = 0
FARM [fa auap L .(19)
À j'rperer ve 2 AT GG n =]!
iQ
et par conséquent
ag =? — =. en Gn ? Î| Zn? dudoy,
ND 1 de sorte que (18) devient:
n = 2 CLR 9 Q=A4xR + > TT — ont [ [Zu du dy dur (30) ni = 1 8. Soient: C une constante, V l’énergie potentielle de la petite sphère déformée, 1 ÆH la constante moléculaire du liquide; on a alors:
= C+iHs OH ue ff Zn du dy. (21) n = 1 —] 0
L'énergie actuelle si 9 représente la densité du liquide, est égale à:
us TUN AA Te
Ne sefff; € s) (55) HÉ4E)
À cause de A? U—0, nous pouvons écrire pour cette ex- pression, en vertu du théorème de Green,
dx dyd2.
80 V. A. JULIUS. SUR LE MOUVEMENT VIBRATOIRE
ia DU Tee [ a
N désignant la normale élevée en quelque point de la sur- face de la petite sphère. Mais on a
6 D: Lee Er), Gr) rai 2e Go), V'i+ = Fr EL à
en CD me
de sorte que
1 +<lr2r oU ef J du D fre(5) — An?) EE =).
— (5 —). | HSE RC OST (22)
En introduisant maintenant la valeur de U donnée par (11) et la valeur de r, donnée par (6), il est facile de voir que, pour le degré d’exactitude dont nous nous contentons,
l'équation (22) devient:
Te = nRr+1p [ [2 au do,
expression que la valeur (10) transforme en
n = © + 1 TERRE at) J É 2: dudy . . (3) x. ne
9. Les équations générales de Lagrange sont, pour ce cas,
SNS + — =0,
d Aqua oV dt\ow/ Dwy 0
j À w ? 81 D UNE SPHÈRE LIQUIDE DEFORMEE.
y représentant l’une des coordonnées générales et w tenant
lieu de AS elles nous donnent: R° d?an 1 ee Je tol(n—1 (n pr2) da = 0.0 (24)
Les quantités a, sont donc indépendantes l’une de l’autre, tandis que
= ae |t]/ n@—1 m+D ppt B | Na LAS)
Chaque point de la surface de la petite sphère prend donc un mouvement vibratoire complexe, qui peut être décom- posé en une série de mouvements pendulaires; quant à la durée de la vibration, elle est: |
2 r 20h
To = ——_—_—_————l, ——— . .... (26) un Du E (n — Se n + 2)
10. Aïnsi se trouve démontrée l’exactitude de l’assertion de M. Rayleigh. Naturellement, l’intensité relative des vi- brations partielles dépendra de la déformation primitive; mais il n’en est pas moins vrai que, lors d’une déformation quelconque, il ne se produit pas d’autres vibrations partielles que celles qui sont possibles aussi après une déformation symétrique par rapport à un diamètre.
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIT. Ses
LE MICROSPECTROMÈTRE,
PAR Th. W. ENGELMANN.
(Avec la planche IV).
La découverte, que les êtres vivants sont composés d’élé- ments morphologiques d’une extrême petitesse, dont la structure et l’arrangement suivent des lois déterminées, a imposé à la physiologie la tâche d’expliquer la vie par les fonctions de ces derniers éléments organiques. Sur le fondement de l’ana- tomie microscopique s’est élevée la microphysiologie. L’une
et l’autre branches de la science sont obligées, par l’exiguité
des objets qu’elles considèrent, d'appliquer des méthodes de recherche spéciales. Là surtout où il s’agit de propriétés et de phénomènes qu'il ne suffit pas d'étudier qualitativement, mais qui doivent être mesurés, le besoin de pareilles mé. thodes se fait vivement sentir. Il n’est pas douteux que de leur invention dépendra, dans une assez forte mesure, le progrès ultérieur de la physiologie. On ne saurait dire, toute- fois, que beaucoup de pas importants aient déjà été faits dans cette direction.
Mettant à part les déterminations micrométriques des changements de nombre, de forme et de dimension que les
tn den un de rs dé à dans
TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE. 83
derniers éléments morphologiques subissent pendant leur ac- croissement, ou sous l'influence d’,excitants’” ou d’autres agents; les tentatives de mesure des coefficients de réfraction : les expériences osmotiques ayant pour objet la détermination des solutions isotoniques; l'application de la méthode des bactéries et de l’analyse spectrale quantitative au probième du dégagement de l’oxygène dans les cellules végétales sous l’action de la lumière: enfin les expériences de M. Pfeffer sur la chemotaxie, on trouve que partout ailleurs nous en Sommes encore réduits aux recherches purement qualitatives.
Au moyen de l'appareil qui sera décrit dans les pages suivantes, j'ai essayé de soumettre à l’étude quantitative la couleur des objets microscopiques. Primitivement imaginé et depuis lors principalement employé pour la détermination quantitative de l’absorption des rayons lumineux de différente longueur d’onde par des cellules végétales vivantes à chro- mophylle ), l'instrument se prête à l'analyse microspectrale quantitative prise dans toute son étendue, et il peut servir aussi avec fruit à la plupart des recherches macrospectro- métriques, au lieu des grands appareils usités. J’en ai déjà fait connaître succinctement, il y a plusieurs années, la con- struction et le mode d'emploi ?). Je vais maintenant donner la description plus détaillée promise dans ces premières com- munications, en l’accompagnant des figures nécessaires pour la parfaite intelligence de l’appareïl.
Le principe du microspectromètre est le même que celui,
1) Onderzoekingen gedaan in het Physiol. Laborat. der Utrechtsche Hoogeschoo!l, (3) IX, p.9, 1884. — Ibid. X, p.107, 1887. — Proc. verb. der K. Akad.v. Wetensch., Afd. Natuurk., Zitting van 24 Dec. 1887.
2) Proc. verb. d. K. Akad. v. Wetensch., Afd. Natuurk., Zitting van 24 Nov. 1883. — Onderzoekingen gedaan in het Physiol Laborat. Utrecht, (3), IX, p. 1, 1884. — Botan. Zeitung, 1884, N°. 6. — Arch. néerl., T. XIX, p. 186, 1884. — L'appareil a été construit par Carl Zeiss. à Jena. Prix 480 marcs. |
6*
84 TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE. |
bien connu, du spectrophotomètre de C. Vierordt. Les mesures s’obtiennent donc en faisant varier la largeur de fente d’un spectre de comparaison, de telle sorte que, successivement dans les diverses régions de ce spectre, la clarté soit rendue égale à celle des parties (couleurs) correspondantes du spectre de l’objet, observé avec une fente de largeur constante. Comme, en supposant les fentes éclairées uniformément dans toute leur étendue, les quantités de lumière transmise sont direc- tement proportionnelles aux largeurs de fente, le rapport
Se ar 1 MS SC ac à I
rouvé entre les largeurs de fente pour lesquelles les deux spectres avaient la même clarté donne immédiatement le rapport des intensités lumineuses de ces spectres, aux endroits
+
comparés. L'appareil complet, qui pour l’usage vient remplacer l’oculaire
TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE. 85
dans le tube du microscope, est représenté, en demi-grandeur réelle, dans la figure perspective ci-dessous. Il est composé de deux pièces, dont la disposition ressort clairement des coupes données PI. IV, fig. 1 et 2.
La pièce inférieure (fig. 1) contient le double mécanisme à fente et le dispositif servant à obtenir le spectre d’une source lumineuse, placée latéralement au microscope, dont on veut comparer la lumière, quantitativement, avec celle de l’objet coloré. La pièce supérieure (fig. 2) est Le spec- troscope proprement dit.
1. La pièce inférieure consiste en une petite boîte rectan- gulaire À, pourvue en dessus et en dessous d’une large ouverture cylindrique, et sur laquelle sont vissés: en dessous : le tube b, qui lors de l’emploi est glissé à la place de l’ocu- laire ordinaire dans le tube À du microscope, où on le fixe à l’aide de la vis D’; en dessus: ie tube c, qui lors de l’ajus- tement de l’objet reçoit le petit oculaire oc, tandis que plus tard, après l’enlèvement de oc, on adapte sur c le tube cy- lindrique a’ (fig. 2) qui termine inférieurement le spectroscope. Celui-ci repose alors par l'anneau r dans la rainure circulaire 8, Où un mécanisme simple, non visible sur les figures, le fixe dans la position voulue, constante par rapport aux fentes. La mise en place et l'enlèvement de la pièce supérieure s’opèrent avec la plus grande facilité, sans aucune secousse, de sorte que le risque de voir l’image de l’object se déplacer et sortir de la fente est beaucoup moindre qu'avec l’oculaire microspectral de Aner Zeiss: dont les deux parties, supé- rieure et inférieure, sont à joint mobile.
À droite, la boîte À porte, fixé à vis, le tube d {non visible dans la fig. 1) servant à laisser tomber la lumière d’une source latérale sur le petit prisme à réflexion totale pr (fig. 1), qui, à l’aide du Eee levier À faisant en }’ saillie en dehors de la boîte À, peut à volonté être mis à la portée ou hors de la portée de la fente de droite, celle qui fournit le spectre de comparaison.
86 TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE.
Sur le tube d est monté, mobile dans tous les sens, le petit miroir plan $, qui peut aussi être remplacé — lorsque pour source lumineuse latérale on prend une petite lampe à incandescence — par une lentille positive. A l’extémité extérieure de d se trouve le chassis n, dans lequel peuvent être introduits des diaphragmes de différentes largeurs, des verres dépolis ou colorés, etc. Afin de pouvoir obtenir dans tous les cas un éclairage uniforme — et aussi indépendant que possible de la position de l’œil de l’observateur — de la fente de comparaison, on a, d’après la proposition de M. Abbe, adapté à l’orifice intérieur du tube d une faible lentille positive, par laquelle une image virtuelle de l’orifice extérieur de d est formée dans le tube du microscope, environ à l’endroit où se trouve l’ouverture de l’objectif par lequel est éclairée la fente de l’objet.
La partie la plus importante de la pièce inférieure est le double mécanisme à fente. Il consiste essentiellement en deux fentes mobiles symétriquement et indépendamment l’une de l’autre dans le même plan horizontal, la fente de l’objet et la fente de comparaison, contiguës au milieu et situées dans le prolongement l’une de l’autre.
Le mouvement symétrique est obtenu par l’application du principe qui à déjà servi au même but, en 1881, dans la construction de mon objectif microspectral !), dans l’appareil à fente de M. Donders ?) et dernièrement, d’une manière plus générale, dans les spectrophotomètres de M. Krüss; c’est le principe du déplacement simultané, en sens opposé, des deux lèvres de la fente, au moyen d’un axe unique, muni de deux filets de vis égaux, mais enroulés en sens contraire.
La fig. 1 montre en coupe verticale l’un des deux appareils
1) Proc. verb. der Kon. Akad. v. Wetensch., Afd. Natuurk., Zitt. van 25 Febr. 1882. 2) Onderzoek gedaan in het Physiol. Lab. Utrecht, (3), VIT, p.18.1882.
TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE. 87
à fente juxtaposés dans la boîte À. Les deux petites lames _à bord taillé en biseau, p et p', qui limitent l’ouverture de la fente, sont vissées sur les petites pièces e et e’, lesquelles contiennent les écrous destinés aux filets de vis micrométriques de l’axe commun a.
Pour éviter le pas mort, un ressort en acier, non visible dans la figure, tend incessamment à éloigner les écrous l’un de l’autre. L’axe a, solidement arrêté dans la tringle métallique m (fig. 1), ne pouvant pas se mouvoir dans le sens de sa longueur, tandis que les écrous e et e’, avec les lames p et p' qui y sont fixées, sont susceptibles de ce mouvement (et exclusivement de celui-là), il faut bien, quand a tourne, que les deux bords de la fente se déplacent d’une même quantité par rapport au milieu invariable de la fente.
La grandeur du déplacement peut être lue sur le tambour gradué F (fig. 1) que porte l’axe a, et dont les 50 divisions, distantes l’une de l’autre d’environ 1"",57, correspondent chacune à un centième de millimètre '). Des différences de 0,001, dans la largeur de la fente, peuvent donc encore être estimées avec beaucoup d’exactitude. Le tambour gradué est fixé sur l'axe & à l’aide de l’écrou M, et il est donc facile en desserrant M puis faisant tourner le tambour, de
1) La marche et les indications de la vis micrométrique ont été controlées en fixant l'appareil à fente sur la platine d’un microscope et mesurant directement, à un grossissement de 500/1, avec un micromètre oculaire, les largeurs de fente correspondant à différentes positions. Entre 0 et Omm,95 de largeur de fente (les limites le plus fréquemment employées), on trouva qu'en moyenne une division de l’échelle répondait à Omm,(101 (au lieu de Omm (M). Quand on tournait la vis toujours'dans le même sens, les écarts de cette moyenne, en différents points de la vis, étaient assez petits pour pouvoir être négligés. Lorsqu'on ajustait alternativement en élargissant et en rétré- cissant la fente, il apparaissait une différence constante d’environ Omm,01 (pas mort), dont il fut tenu compte dans les expériences ; pour cela, on avait soin, lors des mésures d’atteindre toujours de la même manière (en rétré- cissant) le point zéro et les autres positions des plaques de la fente.
88 TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE.
corriger l’exactitude éventuelle du zéro de la graduation. Sur la tigure intercalée dans le texte (page 84) on voit encore un petit carton blanc p, qui sert à mieux éclairer l’échelle de la fente de comparaison.
Le second appareil à fente (fente de l’objet), dont on ne voit rien dans la fig. 1 de la PI. IV et seulement le tambour T" et la tête de vis M’ dans la figure du texte, est entièrement semblable au premier.
Au centre, ces deux appareils sont contigus, de sorte qu’il y à aussi contact direct entre les deux spectres, ce qui est favorable pour décider s’il y a entre eux, oui ou non, égalité d'intensité lumineuse.
Il est de première importance que le milieu de l’une des fentes se trouve exactement dans le prolongement de celui de l’autre. Quand cela n’est pas le cas, les deux spectres viennent s’af- fleurer par des couleurs différentes, défaut qui pourrait excercer, surtout dans les régions à succession rapide des teintes, donc tout particulièrement dans le jaune, un effet très perturbateur. S'il arrivait, en suite de quelque manœuvre imprudente, par exemple, d’un trop grand effort exercé sur l’une des vis micro- métriques, que le milieu de l’une des deux fentes eût été déplacé, il faudrait réparer la faute en ramenant à la bonne position la petite lame, p ou p', dérangée. À cet effet, chacune de ces lames est fixée par deux petites vis de rappel laissant quelque jeu sur l’une des plaques f et f” qui portent les écrous e et €”.
9. La pièce supérieure, que la fig. 2 représente en coupe longitudinale, sert à la production et à l’observation des deux spectres qu’il s’agit de comparer. Dans la figure du texte, on la voit fixée sur la pièce inférieure, telle qu’elle l’est durant les mesures.
Elle consiste en une boîte prismatique 4”, qui renferme le système analyseur P, composé de deux prismes de crown (indice de réfraction pour les rayons jaunes 1,511, angle ré- fringent 40° 20’) et d’un prisme de flint (indice 1,691, angle
TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE. 89
110° 42’). En dessous, la boîte porte le tube collimateur a’, servant, comme il a été dit plus haut, à fixer le spectroscope sur la pièce inférieure, et contenant en haut la lentille /, qui fait tomber parallèlement sur le système de prismes P les rayons venant des deux fentes. L’axe du tube col- limateur forme un angle de 30° avec l’axe longitudinal de la boîte À’. | SU
Les rayons, émergeant de P, sont réfractés dans la direction de la lunette B, dont l’axe a une inclinaison de 30° par rapport à celui de À” et par conséquent une inclinaison de 60° relativement à l’axe de a’, ou du microscope. Au moyen de l’objectif l’ est projeté dans le plan de à un spectre réel des deux fentes, que la loupe Z (mobile dans le tube PB”) permet d'observer à un grossissement d’environ 20/1. La dimension apparente des spectres est alors environ quatre fois plus grande que celle du spectre de l’oculaire micro- spectral de Abbe-Zeiss, et huit fois plus grande que celle du spectre de l’oculaire Sorby-Browning. Projeté à la distance de 250%, l'intervalle compris entre les raies a et & mesure 185%%, L'intensité lumineuse est suffisante pour que, même à la lumière du gaz, on puisse encore employer avec avantage, en beaucoup de cas, les systèmes à immersion les plus forts. Dans le rouge extrême et le violet seulement, à cause du peu de sensibilité de la rétine, des déterminations quantitatives exactes ne sont guère possibles, à moins de faire usage de sources lumineuses très énergiques et d’objectifs faibles. Pour cette raison, le champ visuel ne s’étend environ que de la longueur d’onde 04,75 à 0",42.
En ce qui concerne la netteté, je dirai que dans le spectre de la lumière solaire amortie par deux verres dépolis, avec une largeur de fente de 0,025 et au-dessous, la raie obscure D apparaît bien distincte et nettement double, la plus ré- frangible des deux composantes notablement plus foncée et plus large que l’autre, à peu près comme dans le dessin du spectre solaire donné sur la pl. 33 du Tome II, N° 6, des , Publi-
2
90 TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE.
cationen des astrophysikalischen Observatoriums zu Potsdam.” Le nombre des raies de Fraunhofer distinctement observa- bles est à peine inférieur à celui des raies marquées sur ce dessin.
En même temps que les deux spectres, on peut projeter
dans le plan une échelle Angstrômienne des longueurs
d'onde. À cela sert le tube C, qui contient en sc une petite plaque de verre portant l’échelle des longueurs d’onde (raies claires sur fond opaque), laquelle peut être éclairée au moyen du miroir $’. Quand on ne veut pas voir l’échelle, on amène devant l’ouverture de C un obturateur mobile autour de 0. Au moyen des lentiles /” et /””, les rayons partant de sc sont projetés parallèlement sur la dernière face réfringente du prisme P, d’où ils sont réfléchis dans la direction de l’axe de B et réunis par l’objectif !’ en une image réelle dans le plan i. Pour que l'échelle puisse toujours recevoir exactement la position nécessaire par rapport au spectre, le tube C est entre certaines limites mobile dans la boîte À, de telle sorte qu’on peut changer la position de son axe relativement à la dernière face réfringente de P et, par suite, la situation de l’échelle relativement au spectre. À cet effet, C est fixé au bras métallique m', qu’un solide ressort (v) presse contre la vis w. En tournant w, il est facile de donner à C la position convenable. On y parvient le mieux en fai- sant usage de la ligne du sodium, soit de la raie obscure du spectre solaire, soit de la raie claire d’une flamme de sodium. Lorsque cette ligne a été amenée en coïncidence avec la longueur d’onde 0,589 de l'échelle, il faut que toutes les autres longueurs d’onde, à contrôler par les raies de Fraunhofer, tombent également aux points précis qui leur correspondent sur l’échelle. Dans mon exemplaire de l’appa- reil, après une très insignifiante correction initiale de la position de P, la susdite condition s’est trouvée remplie de la manière la plus parfaite. De temps en temps, naturelle- ment, une vérification doit avoir lieu. En vue des petits dé-
TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE. 91
placements éventuels de P, il pourra être bon, dans la suite, d'ajouter à l’appareil un mécanisme spécial pour l’ajustement du système des prismes. De la façon dont P est fixé actuelle- ment dans 4’, toute correction est assez pénible et prend un certain temps.
Au tube B sont encore adaptées, dans le plan 2, deux paires de plaques glissantes, mobiles perpendiculairement l’une à l’autre. L'une de ces paires (appliquée à l’imitation de Vierordt) sert à cou- vrir les spectres, sauf le petit groupe de longueurs d’onde dont on veut déterminer les intensités relatives. Les vis # et t font mouvoir les deux plaques de cette paire, plaques dont les bords libres ne sont pas rectilignes, mais légère- ment courbes, parallèlement aux raies de Fraunhofer. Cette courbure est nécessaire pour que la bande lumineuse dé- coupée dans le spectre ait la même couleur sur toute son étendue latérale. |
L'autre paire de plaques glissantes, commandée par les vis u et w’ (voir la figure du texte), est destinée à couvrir les deux spectres dans le sens transversal, spécialement à rendre égales les largeurs du spectre de l’objet et du spectre de comparaison. Les objets microscopiques colorés sont souvent tellement menus que, même au plus fort grossissement, ils ne fournissent qu'un spectre très étroit. La lumière qui passe à côté de l’objet pourrait alors beaucoup gêner par contraste, et doit donc être interceptée. En outre, l'expérience enseigne qu’il importe pour l’exactitude des mesures que les deux champs lumineux à comparer possèdent la même forme et la même grandeur, plus généralement, qu’ils puissent être rendus complètement pareils sous tous les rapports. C’est à quoi il faut avoir égard aussi dans le choix de l’objet à étudier. On doit veiller surtout à ce que la partie de l’image de l’objet qui tombe dans la fente soit optiquement aussi homogène que possible, condition d'ordinaire plus facile à remplir pour les cristaux, les liquides colorés, les lamelles homogènes de gélatine imbibée de matière colorante, que pour les objets organisés colorés.
99 TH. W. ENGELMANN. LE MICROSPECTROMÈTRE.
Au sujet de l’exécution des expériences et des détails à y observer, je puis renvoyer à ce que j'en ai dit dans des communications antérieures !) et, de plus, aux indications et préceptes donnés par M. Vierordt et ses successeurs dans leurs mémoires bien connus sur la spectrophotométrie. |
1) Onderzoekingen etc., (3) IX, 1884, p. 1—9; X, 1887, p. 153—1061.
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Dans le Programme de la Société hollandaise des Sciences, _ Année 1888, la question III, mise au concours pour le 1er Janvier 1890, est à corriger comme il suit:
III. Soumettre à une étude anatomique comparative l'in-
nervation des muscles du larynx chez les Mammifères.
ARCHIVES NÉERLANDAISES
Sciences exactes et naturelles,
INVOLUTIONS QUADRUPLES SUR COURBES BIQUADRATIQUES,
PAR
J. DE VRIES.
SEE
1. Les coniques du faisceau (A,), dont la base est formée des points a, a, a;a,;, d’une courbe biquadratique générale K,, la coupent dans les groupes d’une involution quadruple TI,. Lorsque, par une transformation quadratique, K, est changée en une courbe K, à points doubles a, a, a,;, I, de- vient l’involution centrale, dont les groupes sont situés sur des rayons issus de a’, et dont les points de coïncidence sont indiqués par des tangentes partant de a',; I, a donc, de même que cette involution particulière, douze points de coïncidence.
Lorsque 0, b, b, b, sont des points d’intersection de X, et d’une conique B, qui contient le quadruple «, &, «3 &;, K, peut être engendrée par les faisceaux (4,) et (B,), si l’on fait se correspondre les coniques indiquées par les points «, 6,7, et qu'on choisisse y, de telle sorte qu’il n’appartienne .pas à la ‘base du faisceau de K, déterminé par les treize points & bi «i Bi; dans ce cas, en effet, la K, engendrée par (4,) et (B,) a avec la K, donnée quatorze points communs, par lesquels il ne peut passer qu’une seule courbe K,.
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXII. 7
94 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
Aux points de base a; peuvent donc être substituées les groupes d’une seconde involution quadruple J’,, corrésiduelle à I,, qui est caractérisée par le fait que chacun de ses groupes se trouve sur une conique avec chacun des groupes de l’involution J,. |
Puisque les droites «, &, et «; «,;, coupent le courbe K, aux points d’un quadruple de l’involution corrésiduelle, ‘les deux 1, ont la même courbe d’involution & (enveloppe des droites qui joignent entre eux les points d’un groupe). Les tangentes menées à R par un point y, —£, de K, vont aux points Y: Ya Lis En Es €: R est donc une courbe de la 6e classe. À
2. Au nombre des tangentes communes de K, et RS sont les droites déterminées par les 24 points de coïncidence de I, et l',. Chacune des autres tangentes communes coupe K, aux points y’ et £’ qui appartiennent, avec le point de con- tact y —Ë, à un groupe de 1, ou, respectivement, de ?',; dans cette droite sont donc confondues deux tangentes de fRsiret y —Ë£ est un point de contact des courbes K, et RS.
Outre ces + (12 x 6 — 24) — 48 : 2 — 24 points de contact, les courbes R6 et K, ont en commun les 2 x 24 points qui forment des quadruples avec les points de coïncidence, parce que, en chacun de ces points de ramification, coïncident deux tangentes à R65. La courbe RS est donc de l’ordre 24, de sorte qu’elle possède 3 tangentes doubles, qui coupent K, en 6 couples de points, communs aux deux irvolutions.
3. Les tangentes de R6 forment une involution de couples T,, dans laquelle chaque droite passant par deux points d’un quadruple est conjuguée de la droite qui joint les deux autres points. À chaque point qg de la droite À sont alors conju- gués les 6 points qg' où R est coupée par les tangentes de RS qui, dans I,, correspondent aux tangentes issues de q. » Chaque fois que q vient à coïncider avec l’un des points g', il n’y à plus que 4 points g' qui diffèrent de q, de sorte que les points de coïncidence du système symétrique du 6°
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 95
degré !), formé par q et q’. sont réunis 2 à 2 en un point d’intersection d’un couple de I,.
Les sommets accessoires ?) n, n, n,; des quadrangles com- plets dont les quadruples de Z, sont les sommets, se trouvent sur une courbe du 6e ordre, N,”’.
Il est évident que les intersections de N, et K, sont les : points de coïncidence des deux involutions corrésiduelles ?).
4, Pour deux involutions quadruples arbitrairement don- _ nées sur K,, les bases pi et qi (1 = 1, 2, 3, 4) des faisceaux de À, peuvent toujours être choisies de telle sorte qu’elles n'aient aucun point commun. Si à chaque P, (par p;:) on adjoint les courbes Q, qu’elle coupe sur K,, les faisceaux (P,) et (Q,) forment une correspondance (4, 4). Les ponctu- elles qu’ils déterminent sur une droite À sont en (8,8), de sorte que la courbe engendrée est du 16e ordre. Si À passe par un point de base, la correspondance (8, 8) dégénère en une (8, 4), et par conséquent p: et g;: sont des points qua- druples, Comme ÆX, fait partie de la courbe formée K,,, l’autre partie est une courbe L,, à 8 points triples.
Les 24 points communs à K, et L,,, en dehors de p; et de gi, ou bien forment des couples de points d’intersection de courbes homologues P,, Q,, ou bien ce sont des points t, dans lesquels une P, est touchée par une Q@,.
Sur chaque Q,, le faisceau (P,) détermine 6 points #, à savoir, les points de coïncidence de l’involution 7, marquée par (P,); par chaque point q passe une courbe P,, qui en ce point est touchée par une courbe Q, ; le lieu géométrique des points { est donc coupé par chaque Q, en 10 points, de
1) Sur une courbe rationnelle, un système symétrique du degré p a 2p points de coïncidence Voir Weyr: Principes d’une théorie des systèmes symétriques”, Mém. de la Soc. d. sc. ph. et nat., Bordeaux 1874, ou Bei- träge zur Curvenlehre, Wien, 1880.
2) Points d’intersection des côtés opposés.
3) N&ç forme avec K3 la courbe d’involution de la 74 en laquelle les tan-
gentes de R5 sont groupées par 14.
7
96 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUA DRUPLES
sorte que ce lieu est une courbe M,. Comme J, dégénère en une Î, sur la Q, menée par p, et que p réunit alors 2 points t en un point de contact de Q, et de M, la courbe M;,en dehors de pi et de qi, coupe K, en 12 points, qui appar- tiennent aussi à L,,. La courbe K, contient donc 6 couples de points d’intersection de courbes P, ©, ; en d’autres termes:
, Deux involutions quadruples, déterminées sur une quar-
tique par des faisceaux de coniques, ont six couples communs”. 5. Une involution Z, est complètement déterminée par un quadruple ; toute conique passant par le groupe donné marque sur À, quatre points, qui peuvent former la base du faisceau générateur (K,). Lorsque de 1, on connaît un triple a, a&, «a; et un couple
b, b,, les points B, $, où K, est coupée par la droite b, b,
appartiennent à l’involution corrésiduelle. Comme chacun des 3 points qui sont communs à À, et à la KX, passant par a, Go 43 BP, PF, peut être pris pour &,, les points donnés déter- minent 3 involutions.
Lorsque trois couples a, a,, b, b,, c, c, sont donnés, et que les points «, «, de K, sont placés sur la droite a, a,, de même que B, B, sur d, b,,les deux involutions déterminées par (œ, æ«, €, c,) et par (8, B,c, c,) ont 6 couples communs, dont chacun peut être considéré comme c,c,, de sorte qu’on a le choix entre 6 involutions quadruples. |
SF.
6. Lorsque K, a un point double à, la classe de la courbe K, en laquelle elle peut être convertie par une transformation quadratique diminue de deux unités; le nombre des points de coïncidence de l’involution 1, devient donc égal à dix.
Si y, et y, forment avec à un quadruple de J,, la courbe K, est coupée par dy, et Ôy, en des points £, et £,, qui constituent avec à un quadruple de l’involution 1, corrési- duelle; y, £, (42 £>) remplace deux tangentes menées à KR
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SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 97
par y,(#.) et deux des tangentes menées par &, (£,); l’une et l’autre droite sont donc des tangentes doubles de la courbe d’involution.
Des 60 tangentes qui sont communes à Æ, et à R6, 20 proviennent des points de coïncidence des deux involutions ; les autres sont confondues deux à deux en tangentes aux points de contact des deux courbes. La courbe RS étant cou- pée par K, aux 40 points de ramification, elle est du 20e ordre; outre les deux tangentes doubles qui convergent en d, elle en possède encore trois autres, qui contiennent les couples communs des deux involutions corrésiduelles.
Un raisonnement tout semblable conduit à conclure qu’une involution 1,, sur une courbe K, à 2(3) points doubles, présente 8 (6) points de coïncidence, et que sa courbe d’in- volution est de l’ordre 16{12); celle-ci possède donc 7 (9) tangentes doubles, dont il en passe deux par chaque point double, tandis que les autres sont déterminées par les 6 couples communs de 1, et l',. Les deux points réunis en un point double forment toujours un couple, qui appartient à toutes les involutions quadruples.
7. Lorsque, sur une courbe X, à point double à, tous les groupes d’une involution 1, ont le point à commun, l'in-. volution dégénère en une involution triple 1,, et chaque groupe de cette 1, se trouve, avec chaque triple de la cor- résiduelle J'; et avec d, sur une conique. Par une transfor- mation quadratique à points fondamentaux en à et en deux des points d’un triple de l',, I, est convertie en une involution centrale Z, sur une autre courbe Æ, à point double à, d’où il ressort qu’elle à 8 points de coïncidence. Des tangentes de R*, 16 touchent Æ, aux points de coïn- cidence des deux 1, ; les 24 autres appartiennent à 12 points de contact des deux courbes. Vu les 16 points de ramification, dont chacun forme un triple avec un des points de coïncidence, la courbe R# est du 10e ordre, et par conséquent du même genre que K,.
=
98 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
8. Si æ, —Ë, et y, — 7, sont les points d’intersection de K, et d’un rayon S passant par à, K, est coupée par les droites À, —#, x; et=, —Ë&,Ë£, aux points y; 73 €b Y: Y3: Les deux tangentes de $*, qui de cette manière correspon- dent à S, appartiennent à la seule involution de couples à laquelle les points (tangentes) d’une courbe du deuxième genre puissent être rapportés, de sorte que leur intersection s doit se trouver sur la tangente double À de R* 1).
Par les triples de I, et de l', les tangentes de $* sont groupées en deux involutions triples À, et %,, qui sont cor- résiduelles d’une manière réciproquement correspondante à la liaison existant entre 1, et l’,. En effet, les tangentes X,—=%,t,, X, —%,%,, =, —=E, E,, =, —=E;E, se rencon- trent en x, ——Ë&,, tandis que X, et =, tersection sur A; elles forment donc avec À les tangentes
ont leur point d’in-
communes de R* et d’une courbe de la seconde classe, dé-
générée en deux points. Evidemment, X, est la courbe d’in-
volution commune de à, et de 1’,, c’est-à-dire, le lieu géo- métrique des intersections de tangentes homologues. Si x, et x, sont réunis en un point de coïncidence de 1,, X, et ZX, forment un rayon de coïncidence, avec À, pour rayon de ramification.
9. Lorsque s=(X,:) coïncide avec un point de contact de la tangente double A, l’une des droites X, = se confond avec À. Si K, est coupée par À en b, b, b', b',, de manière que AB, —B",, on à 0—0b, —b',; si a, et a', sont les points tangentiels de d, les tangentes À, et 4’, de R* passent par ses points de contact avec A.
1) Une 7, sur K,, qui différerait de l’involution déterminée par des
rayons issus de d, serait projetée de 0 par un système symétrique du .
2e degré, avec les 6 tangentes pour rayons de ramification. Comme un. pareil système ne peut avoir plus de 4 éléments de ramification sans dé- générer en un système dont chaque élément correspond à lui-même, l’in- volution centrale JZ, est, sur ‘K1°, la seule Z, possible,
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SUR COURBES BIQUADRATIQUES, 99
Le lieu géométrique des sommets accessoires n, ——(dx,, Ti T3) —=(S, À,) coupe S en deux points, qui se confondent sur toute tangente menée de d à K,; sur une droite quel- conque, il détermine les points de coïncidence d’une corres- pondance (4, 2), dans laquelle q est conjugué, comme point d’une tangente À, à 4 points situés sur des rayons S, et comme point d’un rayon S, à 2 points situés sur des tan- gentes XŸ, :. Sur A, la correspondance (4, 2) dégénère en la (1, 1) des ponctuelles qui sont parcourues par s — (À, <) et (S, A); le lieu N,; à donc des points doubles aux points de coïncidence de cette (1,1), et puisqu'il possède en à un point quadruple, lui aussi est une courbe du genre deux !).
10. Avec l’involution triple centrale sur des rayons issus de p, I, à en commun les deux couples qui se trouvent sur les tangentes menées à R# par les points formant avec p un triple de J’,. Or, de deux involutions triples quelconques, l’une peut être convertie, par transformation quadratique de K,, en une J, centrale sur la nouvelle K,; par conséquent, deux 1, ont toujours 2 couples communs. Si les involutions sont corrésiduelles, ces deux couples sont situés sur la tangente double de leur R*.
D'une manière analogue, on reconnnaîtra que J;, et une TJ, collocale ont 4 couples communs.
11. Lorsque, sur une X, à points doubles à et 9’, les groupes d'une J, sont placés en coniques passant par d, les deux points confondus en 0’ forment un couple commun à J, et à l',. Les points a et «, qui constituent des triples avec 0”, sont alors reliés par une X, qui en à’ a quatre points com- muns avec X, et dégénère par conséquent en à d’ et un rayon passant par d'; ce rayon remplace, pour chacun des points a, «, deux tangentes de R*, et il est donc une seconde tangente double de la courbe d’involution.
1) Comme l'intersection s des deux tangentes de $# déterminées par
S se trouve toujours sur A, la courbe N& ne peut pas avoir de point double en dehors de’ A.
100 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
Comme on peut, par transformation quadratique, mettre en évidence 6 points de coïncidence de 1,, les courbes R4 et K, ont 10 tangentes communes et 12 points de ramifi- cation communs, de sorte que R# est du 8e ordre et, de même que X,, du 1‘ genre. Il est facile aussi de démontrer que chacune de ces deux courbes est la courbe d’involution de deux involutions corrésiduelles portées par l’autre. Vu que 00 remplace deux des 6 tangentes qui, partant de à, sont communes à Æ10 et à Ni, 9’ devient un troisième point double sur N,, et celle-ci aussi se transforme en une courbe du genre premier. |
Les involntions de couples, en lesquelles une J, dégénère lorsque à et à’ sont communs à tous les quadruples, ont été étudiées en détail par M. Ameseder, dans son Mémoire » Ueber Configurationen und Polygone (Wiener Sitzungsberichte, T. XCIII). La courbe d’involution est, dans ce cas, une R&?, qui touche 4 fois la courbe K ze
8 III.
12. Une involution JZ, étant complètement déterminée par un quadruple, deux J, corrésiduelles, qui ont un quadruple commun deviendront identiques. Dans ce cas, K, est touchée par une K, aux points de chaque groupe, et les points de contact de deux coniques appartenant au même système et touchant 4 fois sont situés sur une troisième X, ; les coni- ques dégénérées, déterminées par un quadruple, fournissent donc trois nouveaux quadruples de l’involution, qui peut être appelée involution fondamentale F,, parce que, comme on le verra tout à l’heure, elle est donnée en même temps que K,.
La courbe d’involution dégénère en une R#, qui coupe K, aux 24 points de ramification et a en commun avec elle les tangentes aux 12 points de coïncidence, tandis que les autres tangentes communes sont représentées par 12 tan-
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 101
gentes doubles de Æ,. Une F, peut donc être déterminée par un quadruple formé des points de contact de deux tan- gentes doubles; les 28 tangentes doubles pouvant être com- binées en 378 couples, et chaque F, contenant 6 de ces couples, il y a 63 systèmes de coniques 4 fois tangentes.
Les sommets accessoires des quadruples de F, sont reliés par une À, ; en effet, les côtés de tout quadrangle complet forment, comme tangentes d’une KR, trois couples d’une involution quadratique fondamentale de tangentes correspon- dantes, dont W, est la courbe d’involution; en même temps, elle est la Hessienne du réseau de coniques ((K,)), auquel appartiennent, outre les coniques 4 fois tangentes, ‘les K, qui comprennent deux groupes de points de contact pour lesquels R? est la courbe de Cayley. Le réseau ((K,)), qui correspond à chaque F,, contient 15 coniques reliant les points de contact de 4 tangentes doubles, et 12 coniques qui touchent deux fois X,, puis ont en commun avec elle 4 points successifs; ces 12 points d’ondulation sont situés sur NV, !).
13. Sur une Æ, à point double à, chaque F, contient un quadruple, composé de Ô et des points de contact #, f” de deux tangentes 7, 1” menées de d. Les coniques qui unissent les groupes de Æ, à à, t, {’ appartiennent alors à un fais- ceau (D,) à tangente fixe en Ô; les points encore communs à celle-ci et à K, forment donc un quadruple avec les deux points situés sur £{’. La courbe R$ touche K, en #, #', et la coupe en 20 points de ramification ; les tangentes communes aux deux courbes sont représentées par 10 tangentes en des points de coïncidence, par les tangentes T, T', qui comptent double, et par 8 tangentes doubles de la courbe K,.
Les 120 couples de tangentes doubles appartiennent, 4 à 4, à 30 systèmes de coniques 4 fois tangentes ; chaque système contenant deux tangentes issues de à, chaque couple T7, 1"
1) On trouve une démonstration analytique de ces propriétés dans l'ouvrage de Salmon-Fiedler, Hühere ebene Curven, 2te Auflage, p. 293.
102 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
appartient à 2 systèmes F,; par 0, t, {’ passent donc deux faisceaux (D,) !).
14. Par la tangente T, en combinaison avec une tangente double A, est déterminée une F, dont les groupes consistent en points de contact de coniques 8 fois tangentes, passant par d. Sa courbe d’involution est une R? passant par les 8 points de ramification, qui a en commun avec K, les tangentes des points de coïncidence ainsi que 6 tangentes doubles A, lesquelles forment avec les tangentes T’les coniques dégénérées de F,. En combinant une 7 successivement avec chacune des 16 A, on obtient les 16 systèmes F, que K, comporte.
R2 forme avec à la courbe de Cayley du réseau X, auquel appartiennent les X, 3 fois tangentes et les Æ, passant par deux triples; la Hessienne est une W, à point double d, ren- contrant Æ, en 8 points d’ondulation de coniques À, qui ailleurs sont tangentes, et coupant les tangentes Taux points que celles-ci ont en commun avec les A conjuguées.
15. Lorsque K, a un point de rebroussement », trois points d’intersection de K, et R° sont toujours réunis en #, (voir 13), de sorte que T et T” sont comptées chacune trois fois comme tangentes communes; outre les tangentes des 9 points de coïncidence de #,, les deux courbes ont donc en commun 6 tangentes doubles. Les 10 tangentes doubles appartiennent, 6 à 6, à 15 systèmes de coniques 4 fois tangentes, de sorte que chaque couple T, T'' ne figure que dans une seule F,.
Les deux triples, qui sur une ÆÀ, à point double appar- tiennent à une F,, se confondent en un seul lorsque à de- v at un point de rebroussement o, ce qui rend communes à K, et à R? deux tangentes issues de o. Des 6 tangentes T, il n'y en a donc que 4 qui forment, avec 4 tangentes
1) D’autres propriétés de FÆ, sont données par Bobek, Ueber Curven 4ter ©. vom Geschlechte 2 (T. LIII des Denkschrifte der K. Ak. d. Wiss. in Wien),
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 103
doubles, une À, dégénérée, 3 fois tangente; par conséquent» le nombre des systèmes F, est encore égal à 15 ?).
16. Sur une Æ, à points doubles d,, d,, une F, est formée par les points de contact des coniques d’involution apparte- nant aux différentes involutions Z,. En effet, puisqu'une J, est déterminée par un couple, un point y de chacune des deux /, corrésiduelles peut être conjugué à ses deux points tangentiels; y est alors un des points de contact entre KR? et Æ,. A cette F, appartiennent 4 couples de-tangentes doubles, dont les 4 points d’intersection sont les courbes d’involution $! des involutions .de couples fondamentales ?). La R de ladite F, a en commun avec K, 8 tangentes doubles plus les tangentes des 8 points de coïncidence, et elle la coupe en 16 points de ramification; les points d, et à, formant un quadruple, la droite 9, 0, est une tangente double de la courbe d’involution, de sorte que celle-ci est rationnelle et n’a avéc À, aucun autre point commun.
Toute autre F, contient deux quadruples, composés de à, (d,) et de deux points #, (#,) et #’, (t’,) pour lesquels à, (9,) est le point tangentiel. Sa R° touche ÆX, aux 4 points #, et a en commun avec elle, outre les tangentes des 8 points de coïn- cidence, encore 4 tangentes doubles. Des 28 couples de tan- gentes doubles, 4 appartiennent à la F#, dont il a été question plus haut; les 24 autres, prises 2 à 2, déterminent 12 invo- lutions F, ; chaque couple de tangentes issues de d, (d,) figure donc dans 2 de ces systèmes.
—_—_—_— —
1) Ces résultats ont été déduits analytiquement par Bobek, L.c.
2) Voir Ameseder, / e , $ 2. L’involution F,, considérée ci-dessus, n’a pas été remarquée par M. Ameseder, Une F,, dont il parle au K 3, pos- sède, suivant lui, 24 points de coïncidence: cela est en contradiction avec la propriété démontrée au $ V du présent Mémoire, laquelle propriété ne reconnait que 16 de ces points à une /, sur une courbe du 1er genre.
104 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
SE à à
17. Un faisceau de courbes (K,), dont (4 p — 4) points de base se trouvent sur K,, détermine une involution quadruple, qui en général ne peut être produite par un (Æ,). Lorsque (K,) et (K») projettent la même involution, les courbes des deux faisceaux se correspondent une à une et forment une Ây+2, qui est composée de K, et d’une K,-_2. La K', qui contient le quadruple déterminé par -K'» coupe K, en 4 points, qu’on peut considérer comme la base de de (K,). Par les (2 p — 4) autres intersections de K”, et K’}, et par ! (p—2)(p — 3) points de base de (K,) situés en dehors de Æ,, donc en tout par !(p —2)(p + 1) points, passe une K,-2, qui doit contenir aussi les autres points de base de (K») situés en dehors de K,, dès qu’on a p > 4. Si la cor- respondance de (K,) et de (K}») est réglée de telle sorte que deux autres À, coupent les À, conjuguées dans les points w et v de la X,-2, la K,+2 engendrée par les deux faisceaux aura en commun avec Â,-2, (p—2)? points de base et (2p — 4) points d’intersection de K', et X',, outre les points w et, en tout, (p — 2)p + 2 points. La quantité p? — 2 p + 2 n'étant supérieure à (p + 2)(p— 2) que pour p <3, Ky+2 ne fera pas partie de K, +2.
Lorsque p — 3, un point d’intersection de K”', et K”,, situé en dehors de Æ,, peut être uni par un rayon #, au 9e point de base de (K,), et on peut faire correspondre deux couples de courbes désignées par des points de XÀ, arbitrairement
?
choisis; en général, la K. ainsi formée ne dégénérera pas en K, + K,. De la même manière, on reconnaît que, pour p=4, la À, déterminée par 4 points de base de (Æ,) et un point d’intersection de K', et K', ne se séparera pas de la X, engendrée. 18. Les couples qui sont communs à l’involution J, déter- minée par (X,) et à l'I, centrale à centre o appartiennent à une courbe L, qui prend naissance lorsque aux rayons À, on
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 105
adjoint les courbes Æ, par lesquelles ils sont coupés sur K,. Sur la droite R les faisceaux (K,) et (K,) déterminent alors deux ponctuelles en correspondance (4, 4 p), d’où l’on conclut, en considérant que 4 points de coïncidence des deux ponc- tuelles appartiennent à K,, que ZL est de l’ordre 4p. Si R passe par un point de base $ situé sur K,, les ponctuelles forment une correspondance (4, 4p — 4); toutes les X, ont- elles des points doubles en un point d de Æ,, la correspon- dance devient une (4, 4 p — 8); L passe donc 3 fois par chaque point B et 7 fois par chaque point d. Si K, contient d points 6, donc (4p — 4— 2 4d) points B, les courbes K, et L ont, outre les points B, à, encore 16 p — 7d— 3(4p—4—2d)=49p + 12 — d autres points d’intersection.
L’adjonction de chaque ÆK, à sa polaire X,-1 par rapport à o donne naïissancce à une courbe M de l’ordre (2 p — 1), qui passe par les points de contact des tangentes menées de o à (4). Comme les ponctuelles que (X,) et (Ky_1) déterminent sur une droite passant par f ou par à forment une correspondance (p— 1, p—1) ou (p — 2,p — 2), M passe par tous les points - B et 3 fois par chaque point d; en dehors de ces points, elle coupe encore K, en 4(2p—1)—3d—(4p—4—2d)—=4p —d points, qui appartiennent aux (4 p + 12 — d) intersections de K, et L: les 12 autres forment 6 couples situés sur des rayons K,.
» Toutes les involutions quadruples, déterminées par des »faisceaux de courbes sur une quartique générale, ont une ,Courbe d’involution de la sixième classe.”
19. Chaque point p de K, est uni par 3 tangentes de la RS aux points qui forment un quadruple avec p; les 3 autres contiennent chacune un couple de l’Z,, ainsi qu’un point p' qui appartient avec p à un système symétrique (p,p'l;, où à chaque point p correspondent 3 points p', et où p est l’un des 3 points déterminés par p’.
Les rayons X issus de o, qui projettent Z,, forment un système symétrique (X, X'),,. Si le rayon À est tangent à
106 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
RS, il coïncide avec deux rayons X’ et représente donc 2 rayons de coïncidence du système; les 12 autres passent par les points de coïncidence de J,.
»Toute J,, déterminée sur une quartique générale par un faisceau de courbes, possède douze points'de coïncidence ; ,le faisceau comprend donc douze courbes qui touchent K,.”
Par la même voie on trouve que (p,p'),; a également 12 points de coïncidence.
20. Les tangentes de la R6 forment avec (p,p'), un sys-. téme (7, 1”),, dans lequel la tangente T, qui contient les points p et p', est conjuguée aux droites T” joignant chacun de ces points aux autres points qui leur correspondent dans (p, p')..
Le système (T7, T”), coupe une droite À en un système symétrique (g, g')::, dans lequel les points g’ sont situés sur les 4x6 tangentes 7” qui correspondent aux 6 droites T convergeant en q. Lorsque qg—p se trouve sur K,, les tan- gentes pp', pp’, pp" ne fournissent chacune que 2 tangentes T', qui ne passent pas par p, de sorte que q est réuni avec 6 points g' en un point de coïncidence sextuple. Les autres points de coïncidence de (q, q'),, proviennent de points de ramification de (p, p'),; en effet, quand pp", il ne passe plus par p qu'une seule 7” différente de T, tandis que p'en fournit deux; un point g' est confondu avec g; (p,p'); a donc 24 points de ramification.
21. Par 24 tangentes communes à R6 et à Æ, la seconde de ces courbes est touchée aux points de coïncidence des deux systèmes; sur les autres, le point de contact corres- pond dans la J, à l’un de ses points tangentiels, à l’autre dans (p, p');, de sorte que c’est un point de contact entre K, et R5. Comme les deux courbes, outre les 24 points de contact, ont encore en commun les 2 x 24 points de ramifi- cation, R° est de l’ordre 24.
,La courbe d’involution de la Z, que (K,) détermine sur ,une quartique générale est du 24e ordre; ses trois tangentes ,doubles contiennent chacune deux couples de 7,7.
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 107
23. Puisque toutes les courbes X, qui ont (4p — 3) points communs avec X, coupent celle-ci en 3 points fixes, l’invo- lution 7, déterminée par (K,) ne change pas lorsqu'un point de base situé en dehors de X, est remplacé par un autre; I, est donc entièrement déterminée par un réseau ((K;)), dont la base est composée des (4 p — 4) points de base du faisceau primitif qui sont situés sur K, et de ? (p — 4) (p — 1) points appartenant à une K »-4. |
Les rayons X issus du point o sont coupés par ((K;,)) en une involution de l’ordre p et du second rang, 1?,, qui con- tient 1 (p—1)(p —2) couples neutres (points de base de faisceaux compris dans le réseau) !).
Les ! (p —1)(p — 2) points qui appartiennent, avec 0, à la base d’un faisceau (K,), forment sur un même nombre de rayons X des couples neutres avec 0, de sorte que le lieu géométrique P de ces couples est de l’ordre À (p — 1) (p — 2). Si À passe par un point de la base de ((K;)), l?» dégénère en une 1,?, à +} (p—2)(p — 3) couples neutres; des couples qui manquent, un point se trouve au point de base: ils ap- partiennent à la base d’un (X,) dont les courbes possèdent, au point de base en question, une tangente commune. P a donc, dans la base de ((X;)), des points multiples de l’ordre p—2. En plus des (4 p — 4) points fixes, K, est encore coupée par P en 6 (p— 1) (p—2) —(&p —4) (p —2)—=2(p —1) (p — 2) points.
I, ne possédant que 6 couples sur des rayons issus de 0, les autres intersections de P et K, forment des couples neutres avec des points de X;,_4; leur nombre est égal à 2(p?—3p+2)—12=2(p" —3p — 4). P détermine donc sur Ky-4, outre les 1(p — 4) (p — 1) points de base et les 2(p+1)(p—4) points complémentaires, encore ? (p — 1) (p— 2) (p — 4) — 5 (p —4) (p —1)p —2) —2(p+1)(p—4)—
1) Des involutions de rang supérieur, sur courbes rationnelles, ont été traitées par Weyr, Beiträge zur Curvenlehre, Wien, 1880, p. 35.
108 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
p (p — 4) (p — 5) points, situés deux à deux sur des rayons X. La courbe d’involution de la Z:(s = 1 (p + 1) (p — 4)) déter- .minée sur Kp—4 est donc de la classe } p (p — 4) (p —5).
Pour le nombre des points de coïncidence de cette I, on trouve, en projetant du point o (voir 19), 2(p — 3) (p — 4), tandis que l’involution déterminée par ({Xz)) sur une XK, gé- nérale possède 2(p — 1)(p —2) points de coïncidence. Ces deux nombres diffèrent de (8 p — 20), tandis que J, n’a que 12 points de coïncidence. Chaque point double de la K, com- posée de X, et de KX,_4 représente donc (8 p — 32):(4p—16) ou 2 points de coïncidence. |
$ V.
23. Une courbe X, peut être coupée par un faisceau de courbes (X,) en les groupes d’une involution 1,, s’il y a sur elle (np —s) points de base.
Le rayon X issu du point o est rencontré par les courbes Kr, qu'il coupe sur X,, en n(p — 1) autres points, dont le lieu géométrique est de l’ordre (np — n +s), vu qu’il a en o un point multiple de l’ordre s; en effet, sur les rayons passant par les intersections de KX, avec la K, déterminée par o, l’un des n(p — 1) points tombe en 0. En chacun des points de base situés sur 47, L a un point de l’ordre (n — 1), où se trouvent réunis (n — 1) des n (p — 1) points.
Le lieu géométrique M des points de contact des tangentes menées de o à (X») peut être obtenu en faisant correspondre chaque X, avec sa polaire X,_1 par rapport à o; ce lieu est de l’ordre (2p —1) et a en commun avec X, les (np —s) points de base (voir 18), de sorte qu'il détermine sur X, n(2p—1)—(np—s)—=np—n+s points de contact d’une . Ky avec un X. Ces points appartenant aussi à Z, on voit que ninn—n+s)—{(np—s)(n —1)--(np—n+s)=(n —1)(2s—n) intersections de Z et de X, se trouvent par couples sur des
rayons issus de 0.
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 109
Comme M ne dépend pas de X», un point double à de Kn ne peut avoir d'influence que sur L. Or, par dil ne passe qu’une seule X,; chacun de ses autres points d’intersection avec où en remplace done deux, de sorte que le rayon À, tout comme lorsqu'il touche K,, est une tangente multiple, de l’ordre (» — 1), de L,
Si en à il y a un point de base, n — 2 points s’y réunis- sent, À savoir, un point de chacune des courbes désignées par 90; à devient done un point multiple de l’ordre (n—-2) de Z. Sur la base, L et K, ont alors 2 (n—2) + (np --s—2) (n—1)}={(np— s)(n—1)—72 points communs, c’est-à-dire, deux de moins que sur une X, générale.
Si la base de (X;) a en à un point double, o à contient outre 0, (n—2)(p—3)+2(p—2)=np—3n +2 points de L, de sorte que à est un point multiple de l’ordre (2n —2). : Dans les points de la base se trouvent alors réunis 2(2 n — 2) + (np—s—4)(n— 1) —=(np— s)(n —1) intersections, par conséquent le même nombre que sur la X» générale. Mais M a maintenant en à un point triple (voir 18), d’où 1l résulte que np—s +2 de ses intersections avec X, coïncident avec les points de la base, de sorte que le nombre des points communs à X, L et M devient plus petit de 2 unités, le nombre des couples sur des droites issues de o plus grand de 1 unité.
»La courbe d’involution $ d’une I, déterminée sur X% par sun faisceau (X,) qui a des points de base en d points doubles de K», est de la classe & = 1 (n — 1)(2s—n) + d.”
24. Lorsque sur une X, à D points doubles une J; est pro- duite par un (X,)} dont d points de base se trouvent en des points doubles de X,, les rayons X, par lesquels ses groupes sont projetés du point 0, forment un système symétrique du degré n(s — 1). Tous les rayons qui contiennent un couple de l’Z; — et de ceux-là font aussi partie les rayons dirigés vers les (D — d) points doubles qui ne coïncident pas avec des points de la base — remplacent deux rayons de coïn-
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIITI. 8
4
110 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES
cidence du système, parce qu'ils sont réunis à deux rayons X'; les autres passent par les points de coïncidence de l’in- volution. Ils sont au nombre dey = 2n(s—1)—2\1(n—1) @s—n)+d+(D—d)} =(n—1)(n—2)—2D +(2s—2) ou y; =2(g+s—1), si g représente le genre de K4.
,Toutes les involutions /; déterminées par des faisceaux ,Sur une courbe du genre g ont 2(g+s—1) points de coïncidence.”
Pour g—0 on obtient le nombre connu 2 (s— 1), tandis que l’expression trouvée pour # ne conduit au nombre connu (n—1)(s— 1) que si l’on écarte les couples situés aux points doubles.
25. Des #% tangentes de la courbe d’involution qui con- vergent en un point p de K», (s — 1) se rendent aux points qui forment avec p un groupe de J;: sur chacune des autres, (n — 3) points p’ appartiennent avec p à un système (p, p') du degré t —={(n —3)(k4 — s + 1), qui de o est projeté par un système symétrique (X, X”) ÿé degré n t.
Chaque rayon X tangent à À contient n — 2 points de (p, p') conjugués l’un à l’autre, qui déterminent chacun n — 3 rayons À’ tombant le long de À, d’où résulte un rayon de coïncidence multiple de l’ordre (n — 2) (n — 3). Les 2 nt — k(n—2)(n — 3) autres rayons passent par les points de coïn-
.
cidence de (p, p), dont le nombre est par conséquent:
c—{(n +1) (n—2) (n—3) s +(n+2) (n—3) d — ! n(n—2)(n?—9).
Par (p,p') les tangentes à R sont associées en un système _ (J,J”) du degré r = (n — 2) (& —s), dans lequel 2 droites J'
homologues à J contiennent les points de (p,p’) qui sont déterminés par les n —2 points situés sur J. Le système symétrique (q,q') indiqué par (J, J”) sur la droite R, est du degré kr; les points qg’ sont situés sur les droites J’ qui sont conjuguées aux droites J convergeant en g. Si qg se trouve sur K», les (4 — s + 1) tangentes convergeant en ce point, et qui contiennent les points conjugués de (p, p'), fournissent chacune (k—s) droites J' de moins que lorsque q est situé
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 111
en dehors de XK%, de sorte qu'il se forme un point de coïn- cidence multiple de l’ordre (&—s)(k—s+1). Les v = 2 kr — n(&—s) (k—s+1) autres points de coïncidence de (9, q') naissent de la réunion de deux tangentes J,J' convergeant en p, réunion qui peut se produire de deux manières: 1°. le couple de I; situé sur J' coïncide avec le couple situé sur J, de sorte que p est un point de la courbe d’involution ; 2°. J—J' contient deux couples de I; et est donc une tan- gente double de f. Dans le second de ces cas, les deux couples de J; fournissent 4(%— s) tangentes J', tandis que les (n — 4) autres points de J donnent chacun (%— s— 1) tangentes; au lieu de 2 (n—2)(&—s) droites J’, il n’y a plus que n(k—s)--—(n — 4) tangentes conjuguées à la tan- gente double, de sorte que qg devient un point de coïncidence de l’ordre (k— s + 1)(n— 4). Si A est le nombre des tan- gentes doubles de À, il y a donc v— (% — s + 1)(n — 4)A points de coïncidence de (9, q'), qui proviennent de l’inter- section des courbes & et K,.
26. Sur une tangente commune à & et K», le point de contact est un point de coïncidence de J; ou de (p,p'), ou bien il forme avec l’un de ses points tangentiels un couple de JZ, et est donc, à cause de la coïncidence de deux tan- gentes, un point de contact des deux courbes. Outre ces
w—= 1} fk(n—-n—2D) —(; +0)!
points de contact, À et K, ont en commun les y (s — 2) points de ramification de J,, ainsi que les susdits v — (£% — s + 1) (n — 4) A points p, pour lesquels J se confond avec une J”. Comme % (k — 1) — 2 A représente l’ordre de &, le nombre À _ peut être calculé au moyen de l’équation
n(k— k—2A)=2w + ;(s—2) +v—(k—s+1)(n—4)A, d’où l’on tire
A—=fnk(k-1)—2w—;(s—2) —v}:{2n—(k—s+1)(n—4){. S*
112 J. DE VRIES INVOLUTIONS QUADRUPLES
Pour n =idicet s—= 4 on alike 6h = re Be v—= 24, w—24 et A—3, ce qui est conforme au résultat obtenu dans le $ IV.
27. Les couples qui sont communs à deux involutions J;, I;, déterminées sur X,, sont situés sur la courbe Z, engendrée par les faisceaux (X») et (X;), lorsqu'on fait correspondre deux courbes qui se coupent sur X,. Les ponctuelles que ces faisceaux déterminent sur la droite À forment une corres- pondance (gs, pt), de sorte que Z, après séparation de K,, devient une courbe de l’ordre (gs+pt—n). De la dimi- nution que le nombre des points de coïncidence subit dans le cas où À passe par un point de base, il ressort que ceux des points de base de (X;) ou de (X,) qui sont situés sur K, forment pour Z des points multiples de l’ordre (é—1) ou (s — 1), tandis que chacun des À points de base communs est un point multiple de l’ordre (s + {— 1). En dehors des (np—s—h)+(ng—t—h) + h points des bases, Let X, ont donc encore n (g s + pt — n) — (n p —s—h)(t—1)— —(nq—ti—h)(s—1)—h(s+i-1)=n(p+qg—n)+2st-(s+t+h) points communs.
Les points de contact entre (KX,) et (KX,), situés sur X, et compris parmi les points communs dont il vient d’être question, appartiennent à une courbe M de l’ordre (2p+2q—3). En effet, l’involution à groupes de (p 9 — h) points, qui est produite par (X,) sur une X,, possède (9? —3q+2pq—2h) points de coïncidence, dont, sur une X, déterminée, un se trouve en chacun des points de la base de (X,j qui ne font pas partie de la base (X,). Pour trouver combien de fois cela a lieu en chacun des points, on peut faire correspondre un à un (X,) et (X,) en accouplant deux courbes qui se touchent au point de base commun. Il en résulte une KX,+, avec laquelle chaque Æ, à en commun (4—1) points doubles, (g? — h) points de la base de (X;) et (pq—h—1) intersections avec la X# correspondante, au total (pg+q?—3) points; cela montre que Æ»+4 possède un point triple, où trois courbes
SUR COURBES BIQUADRATIQUES. 113
Ky ont un point de coïncidence de l’involution déterminée sur elles. La courbe M à donc (9 —39+2pq—2h)+{(q?—h)+ 3h—=q(2p+2q—3) points communs avec chaque X,; comme elle contient aussi les points de la base de (X;), elle coupe K#,, en dehors des bases, en n(2p +2q9—3)—(np—s—h)— — (ng—i—h—3h=n(p+q—3)+(s+t—h) points Après soustraction de ces points appartenant à X,, à L et à M, on trouve pour les intersections de K% et L, situées par couples sur une K, et en même temps sur une K,,le nombre: [n(p + q—n)+2st—(s+i+h)]—[n(p+q—3)+(s+1t—-2)|—= 2 st—2s5—9%1—n + Sn —2(s—1)({ —1)—(n—1)(n —2).
,Sur une X» générale, deux involutions J; et J;, détermi- ,nées par deux faisceaux de courbes, ont toujours (s—1)({—1) ,— 4 (n —1){n — 2) couples communs.”
En faisant {—n, on trouve que le nombre des couples communs J, et à l’l, engendrée par un faisceau de droites est égal à ! (n—1)(2s —n). La comparaison de cette expres- sion avec celle obtenue en (23) montre que le nombre des couples augmente de d lorsque en d points doubles d’une courbe X, il y a des points de la base de (X}) ou de (X,); en outre, du fait que deux involutions triples sur une K, à point double 9 ont deux couples communs, il suit que la même correction doit être apportée aussi lorsque (X,) et (X,) ont des points de base communs en d points doubles.
Sur une X, rationnelle, Z, et 1, ont (s—1)(t— 1) couples communs !); cela s'accorde avec ce qui précède, s1 les points doubles sont considérés comme couples communs. Joint à ce qui à été dit plus haut, ce résultat montre que I: et F4, sur une X, à D points doubles parmi lesquels il y en à d où se trouvent des points de base, ont (s—1) (t—1}— :(n—1) (n — 2) + d + (D — d) couples communs.
,Sur une courbe du genre g, deux involutions J, et 1; pos- ,Sèdent toujours (s — 1) ({— 1) — 9 couples communs.”
1) Weyr, Beiträge zur Curvenlehre, p. 19.
114 J. DE VRIES. INVOLUTIONS QUADRUPLES ETC.
28. Un réseau de courbes K,, qui ont (x p — f) points com- muns sur K,, engendre une involution 1?;, dans laquelle chaque groupe contient { points, dont deux peuvent être pris arbitrairement. Tous les groupes de /?; dans lesquels entre le point & forment une /;__1, déterminée par le faisceau (Xy) dont un des points de la base est en a. Une seconde 1,1, produite par l'association des groupes qui contiennent le point d, a avec la première ({—2)?—g couples communs. Les {—2 points qui avec a et b appartiennent à un groupe de 1?; forment 1(t—2)({—3) couples. Ceux-ci étant retran- chés, il reste 1(#—1)(i—2)—g couples, qui constituent chacun deux points de la base d’un faisceau (X,) appartenant au réseau des courbes X,. En faisant usage de la dénomination adoptée pour les involutions sur courbes rationnelles, ce résultat s'exprime de la manière suivante:
»Une 1° engendrée par un réseau sur une courbe dé genre »9 den 1(i—1) ({—2)—9g couples neutres.”
SUR LA THÉORIE
DES
PHÉMOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES,
PAR
H. A. LORENTZ.
& 1. La théorie des phénomènes thermo-électriques que j'ai développée !) il y a quelques années a été le sujet d’une critique de la part de M. Budde ?), dans laquelle ce savant a avancé entre autres une objection qui me semble parfaite- ment fondée. J'avais considéré le cas où le transport d’une certaine quantité d'électricité entre deux conducteurs formés de métaux différents est provoqué par un changement des capacités électrostatiques et j'avais admis que le développe- ment de chaleur qui accompagne ce phénomène avait lieu tout entier à la surface de contact des deux métaux. Or, M. Budde fit remarquer qu’une partie de la chaleur se pour- rait dégager aux surfaces libres des conducteurs; selon lui, on pourrait s'attendre à un phénomène thermique toutes les fois que l'électricité quitte la surface d’un corps pour se rendre à l’intérieur, ou se déplace en sens inverse.
Ayant reconnu la possibilité d’un tel phénomène, je dus apporter à ma théorie quelques modifications, qu’il me soit permis d'indiquer dans les pages suivantes. En même temps, j'aurai l’occasion de m'expliquer sur les autres remarques de
1) Archives néerlandaises, T. XX, p. 129, 1885. 2) Wied. Ann., T. XXX, p. 664, 1887.
116 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
M. Budde et sur les travaux que quelques autres physiciens ont consacrés au même sujet.
$ 2. Pour faire ressortir la différence des états dans les- quels se trouvent une charge électrique superficielle et une quantité égale d'électricité située à l’intérieur d’un métal, M. Budde (p. 668) rappelle le fait bien connu qu’une charge communiquée à un carreau de Franklin se transporte à la surface du verre; il lui semble probable que dans tous les cas l’électricité que nous attribuons à un conducteur est logée dans la dernière couche de l’isolateur ambiant.
De mon côté, J'avais tacitement supposé que le diélectrique qui environne le conducteur ne reçoit aucune charge; toute- fois, dans ma théorie, on peut se passer de cette hypothèse et de toute autre supposition sur le lieu où se trouve l’élec- tricité. Il suffira d'admettre que l’état des choses à une sur- face conductrice est déterminé par la charge et la température et que, par conséquent, cet état se rétablit, si, après des changements quelconques, on revient à la charge et la tem- pérature primitives. En effet, dès que cette condition se trouve remplie, le conducteur pourra être assujetti à un cycle de changements réversibles dans lesquels la charge est augmen- tée et diminuée tour à tour.
Croit-on devoir rejeter dans tous les cas l’hypothèse que je viens d'indiquer, le principe de Carnot ne pourra être appliqué qu’au circuit thermo-électrique fermé. La théorie de ce circuit a reçu de nouveaux développements dans le Mémoire de M. Budde.
$ 3. Les paragraphes 7—21 de mon premier Mémoire ne contiennent rien qui puisse être atteint par la critique de M. Budde. Cependant, en réfléchissant sur ses objections, j’ai cru devoir attacher une signification légèrement modifiée aux signes g et y;. Je désignais ainsi les valeurs du potentiel à l’intérieur de mes ,transmetteurs” et je me figurais qu’on pourrait mesurer ces valeurs en opérant sur des métaux à surface parfaitement pure. Je reviendrai encore sur cette
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 417
question, mais je ferai remarquer dès à présent que la nature des couches superficielles à une influence très-marquée dans toutes les expériences sur l'électricité de contact”. Or, pour faire disparaître de mes raisonnements toute quantité qui échappe à l’observation, j'entendrai maintenant par le potentiel tel qu’il peut être mesuré pour un métal quel- conque. J’admettrai cependant: 1° que les couches superfi- cielles, tout en suhissant un changement par une variation de la température, reviennent au même état chaque fois que la même température se rétablit, 2° que la surface des trans- metteurs est de la même nature que celle des ,contacts” !) avec lesquels on les met en communication.
On verra sans peine que les équations auxquelles je par- vins dans le premier Mémoire ne cessent pas d’être vraies dans cette nouvelle interprétation.
$ 4 La première loi de la thermodynamique me donna le moyen de calculer la quantité de chaleur w dégagée par le transport d’une charge électrique infiniment petite e du transmetteur G; à G; au travers du contact (A, B), ce mou- vement d'électricité étant déterminé par un changement convenable des capacités éiectrostatiques. Le résultat fut exprimé par l’équation
W = € En > eo qe | ve PE — 5 FX — ) 14
formule que M. Budde reconnaît être exacte à la condition qu'on entende par U' l'énergie qu’un transmetteur pourvu d’une charge superficielle possède en dehors de l’énergie élec- trostatique ordinaire. |
Quant à la formule qui découle de la seconde loi de la thermodynamique, savoir
à .U' o U' du (FF : (>), pente (I)
M. Budde n’en fait aucune mention. Il est vrai que cette formule
1) Voir mon premier Mémoire, au paragraphe 8.
118 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
se trouve dans le paragraphe 19 de mon Mémoire et que M. Budde, à la page 679, déclare inexacts tous mes résultats, à partir du paragraphe 16, mais comme il ne parle nulle part de la manière dont j'ai appliqué la seconde loi de la thermo- dynamique, je ne crois pas qu’il veuille comprendre l’équa- tion (I) sous ce jugement général.
$ 5. Rappelons brièvement la conclusion à laquelle donne lieu cette dernière équation. Elle peut être énoncée de la manière suivante. Étant donnés deux conducteurs formés de métaux différents et dont les couches superficielles sont d’une nature quelconque, pour l’un de ces corps ou pour tous les
«
, à moins
, d U”
do E que la différence de potentiel qui s'établit par le contact ne soit une fonction linéaire de 7. Mais, au lieu de dire que
! ) | do U” TS Yarie avec la température, on peut affirmer que ST
et par conséquent la capacité calorifique est une fonction de la charge électrique. |
$ 6. Jusqu'à présent les observations ne nous apprennent rien sur la valeur que peut avoir . C’est pourquoi je cherchaïi la relation qui lie la quantité
(2). (7),
à l’effet-Peltier. En considérant la surface de contact comme le lieu où apparaît la chaleur représentée par la formule (1), je trouvai pour le développement de chaleur, dans le cas où
l’unité d'électricité positive se transporte du métal À au métal B, !)
ae). = (00
1) Je distinguerai par un accent attaché à leur numéro d'ordre les formules fautives de celles par lesquelles elles doivent être remplacées.
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 119
Ensuite, la combinaison de ce résultat avec la formule (I) me donna les équations
Emi D) — pu U' “: a) ET at 5 UD) d'nibee Tor (or )- 9)
d'y __ II aT— TR oi ide Pan se 2 (
et .
Pour introduire la correction que la remarque de M. Budde rend nécessaire, j'appellerai la quantité de chaleur qui est développée à la surface d’un conducteur quand l’unité d’électri- cité positive quitte cette surface pour se rendre à l’intérieur. La quantité représentée par la formule (1) devra alors être di- minuée de e(k4— k5) si l’on veut connaître le phénomène thermique à la surface de contact, et l’on trouve
o U’ d'Or I = — ER re ri Eee Fm a 1 >), : . (D) ce qui entraîne les nouvelles relations 2? U' 22 U' mp À FA (ka — ki) Gzs1). (os er les Tr T [mo d'y (ka — kg) TP NE ANS AE (IL;)
Il à été déjà dit que la différence de potentiel y dépend de la nature des couches superficielles, et il en est de même des quantités k. Les équations peuvent donc subsister quoique I soit indépendant de l’état que présentent les surfaces.
Si l’on suppose que deux métaux dont les couches super- ficielles se trouvent dans un état déterminé acquièrent par le contact une différence de potentiel indépendante de la forme des conducteurs et de la valeur absolue des potentiels, il devra en être de même des quantités 4 Les équations que je viens d'établir suffisent pour le démontrer.
Les quantités que j’ai nommées U’ et Æ sont les mêmes
120 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
Let à ai to Ur”; que celles que M. Budde désigne par U'u et an OU
$ 7. Si l’on veut calculer le développement de chaleur qui, dans un même métal, est produit par un courant élec- trique entre des parties de températures différentes, on est induit à rechercher d’abord si dans l’état d’équilibre ces parties se trouvent ou non au même potentiel.
La méthode suivie dans mon premier Mémoire ne peut conduire à aucun résultat positif sur ce sujet, et cela par le fait même qu’elle évite la considération du cas où deux corps de températures différentes se trouvent en contact. Cependant, je fis une observation ($ 24) qui me semblait plaider contre l'existence des différences de potentiel dont il s’agit. Je m'ex- primai ainsi: ,si, au contact d’une partie chaude et d’une partie froide d’un même métal, il se produisait une force
»
électromotrice, ainsi que cela est le cas au contact de deux métaux différents, on pourrait s'attendre à ce qu’un travail fût toujours nécessaire pour faire passer une quantité d’élec- tricité d’une masse de métal chaud à une masse froide lorsque celles-ci sont au même potentiel, tout comme, lorsqu'une pièce de zinc et une pièce de cuivre possèdent le même potentiel, un travail positif doit être dépensé pour faire passer de l’élec- tricité positive du zinc au cuivre.”
Je démontrai ensuite qu’en soumettant un transmetteur à un cycle de changements réversibles convenablement choisis on peut transporter une charge à un corps d’une température plus élevée, sans qu’un travail soit nécessaire.
La phrase que je viens de citer exprime plutôt une opinion vague qu’une idée claire et précise. En l’examinant de plus près, on verra que mon assertion renferme deux hypothèses, savoir 1°. que la quantité désignée au paragraphe précédent par k#, n’a pas de valeur appréciable, 2°. que le principe de Carnot peut être appliqué à un système où des corps de températures inégales se trouvent en contact.
Comme cette application sera donnée plus loin, au $ 15,
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 21
sous une forme meilleure, le paragraphe 24 de mon premier Mémoire peut être supprimé.
$ 8. Cependant, je crois devoir répondre à une remarque _ faite par M. Budde sur le calcul que contient ce paragraphe et par lequel je voulais démontrer que le travail dans le cycle auquel on assujettit le transmetteur est égal à 0. M. Budde, en abordant dans un autre but un calcul analogue, fait cette observation (1 c. p. 672): ,Die erste Hälfte der jetzt folgenden Untersuchung hat Lorentz in $ 24 der Archiv. néerl. bereits angebahnt, aber seine Rechnung ist aus doppeltem Grunde nicht correct: erstens ist der Unterschied zwischen U« und U'; nicht beachtet, zweitens sind Grôssen von der Ordnung ed T einfach vernachlässigt.”?
J’ai examiné de nouveau mes calculs, mais je n’y ai pu trouver une erreur. La distinction entre U4 et U'; aurait été superflue, parce que je ne considérais que le travail mécanique et ne m'occupais aucunement du lieu où se manifeste un phénomène calorifique. Quant aux quantités de l’orde e d T je ne crois pas les avoir négligées. M. Budde aurait-il voulu dire que j'avais omis des termes dépendant d’une différence de potentiel, qui elle-même est de l’ordre d T? C’est ce qui ne me semble guère probable, car j'avais précisément en vue le cas où une telle différence n’existe pas.
En réalité, le résultat auquel je parvins est d'accord avec celui de M. Budde, autant du moins qu’on peut le désirer en ayant égard aux buts différents que nous poursuivions
Aux pages 673—676 de son étude, M. Budde considère un système qui subit six changements successifs; ces opérations déterminent le passage d’une charge e d’un conducteur à un autre d’une température un peu plus élevée, les deux
corps montrant une différence de potentiel Gp à F.
Pour chacun des six changements, M. Budde évalue le travail æ des forces extérieures et l’accroissement ÿ de l'énergie du système; de cette manière, il obtient pour Z &« — 2 $, où les
199 H. À. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
sommes se rapportent à l’ensemble des changements, la valeur donnée par l’expression (6) de la page 676, savoir d y 0? U'w — 5 — 3 Z « | e (% VE 39 rs) a T À la fin des six changements l'énergie du système a repris sa valeur primitive; on a done Z$—0 et
ht! d œ d? U'é Zune (ir HAL SU
Cependant les changements ne constituent pas un cycle fermé. Pour compléter ce dernier, on doit donner au volume dela masse gazeuse dont le transmetteur est muni l’aceroissement
e d? U'o pOEOT ? que M. Budde indique lui-même. Or, ce dernier changement exige un travail Q 9 U'o DEOT
de sorte que le travail dans le cycle fermé est donné par
aT,
51 les potentiels sont supposés égaux entre eux, ce travail s’annule, comme je l’avais prétendu.
$ 9. Le résultat des calculs auxquels j'ai fait allusion est résumé par M. Budde en ces termes (p. 678):
, Wir erhalten also vorläufig nichts weiter als das anschei- nend unfruchtbare, in Wirklichkeit aber wichtige Resultat : »rDer Lorentz’sche Process lässt die Wärmecapacität der Elec- tricität vôllig unbestimmt.”” Man erhält übereinstimmende o U; d E
Gleichungen, wenn man die Differentialcoefficienten
/ (02)
ù und SE als ganz beliebige Functionen von 1' ansieht.”
Il me semble très naturel que les deux voies suivies par
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES,. 123
M. Budde le conduisent au même résultat ; en effet, ces voies
A
reviennent l’une et l’autre à une application de la première loi de la thermodynamique à la même question. Dans le premier raisonnement on pourrait se borner à la considé- ration du premier et du quatrième changement, les autres ayant lieu tandis que le transmetteur est séparé du ,contact”, de sorte que pour ceux-ci « est égal à B. Cette égalité est
exprimée par les équations Rd d'a Wi di=dW.. di du,
de M. Budde dans lesquelles on peut remplacer dW, et dW. par les accroissements correspondants d U, et d U.. Si toute- fois le premier procédé de M. Budde est débarrassé des deuxième, troisième, cinquième et sixième changements, il devient pluselair qu’au fond il est la même chose que le second raisonnement,
Du reste, on aurait pu prédire que la loi de l’équivalence de la chaleur et du travail ne saurait donner qu’une seule et même formule. Que cette prédiction se justifie ne peut être une raison pour que ma théorie laisse indéterminée la capacité calorifique de lélectricité.
$ 10. Revenons au problème dont il fut question au commencement du paragraphe 7. Soit À 4’ une pièce de métal dont les extrémités À et 4’ sont maintenues aux tem- pératures constantes 7 et T'+ d T au moyen de réservoirs de chaleur convenables. Supposons que l’équilibre électrique se soit établi et qu’il y ait alors une différence de potentiel, proportionnelle à d T, entre À et 4’. Soit le potentiel de À, p + y; d T celui de 4’, y étant une fonction inconnue de la rapainre.
Pour qu’une quantité d'électricité infiniment petite e traverse le conducteur dans la direction À’ À, il suffit de mettre les extrémités À et d'en communication avec deux transmetteurs G et G’ composés du même métal que le conducteur, et de faire accroître la capacité électrostatique de G tandis que celle de G’ diminue. Soient, au commencement, y et y + ydT
124 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
les potentiels de G et G’, T et T + d T les températures, C'et C' les capacités,
E= Co, et E'=C'(9+ydT) les charges. On atteindra le but proposé par les changements
e e 40 4. a C'="- TE 4 à qui n’entraînent aucune variation dans les potentiels et dans l’état de À 4”, Le travail qu’on doit dépenser dans cette opération est le même que dans le cas où les transmetteurs isolés subiraient
les mêmes changements de capacité; sa valeur est — Lp?d0—1(p+ydT)} dC'=Ley dT ... (2)
augmentée de la quantité
dE +i(p+ydaT)dE'=—ley;dT.... (3) et l’énergie non-électrostatique de » EZ h| E e Se LES NET ON TOR | [CS Fr “ee Te &
où la signification des suffixes G, 1, etc. sera assez claire. On peut déduire de l'équation (II) qu'à une température
!
do ÙU * donnée — a la même valeur pour tous les transmetteurs
dE qui sont composés du même métal. Il n’est donc pas néces- D. Hi: saire de distinguer Gr), et (5) ag de sorte que l’expression (4) peut être remplacée par celle-ci:
02 U:
Par la combinaison des expressions (2), (3) et (5) on obtient pour la chaleur totale qui a été dégagée, et qu’on retrouvera dans les réservoirs de chaleur,
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. | 125
Cependant, cette chaleur n’a pas été développée tout entière dans le métal À 4”, car, d’après le paragraphe 6, la chaleur
ek a disparu à la surface de Get une quantité € (2 - et r)
a été produite à la surface de G. Le phénomène thermique dans le condueteur À 4° est donc représenté par
EE e[r+ sEosT art?
et le coefficient 6 que Sir W. Thomson a introduit et que plusieurs expérimentateurs ont mesuré est donné par
GE NTI dk 0 — y + SET aT VOS ENTRE) en le (III) Dans mon premier Mémoire je donnai la formule o7 TE SE Spam lrnr nr ie (IIT")
en effet, je ne me doutais pas de l’existence du phénomène _auquel,se rapporte k et je considérais comme nulle la diffé- rence de potentiel y d T.
$11. La différence de potentiel qui existe entre les extré- mités d’une chaîne ouverte de conducteurs dont la tempé- rature varie d’une manière quelconque d’un point à l’autre peut être calculée au moyen des quantités y et y. À cet effet, on n’a qu’à prendre la somme algébrique des différences de potentiel que présentent entre elles les parties consécutives de la chaîne. Pour vérifier le résultat, on peut encore appliquer à la série des métaux le mode de raisonnement dont j'ai fait usage dans le paragraphe précédent et dans le paragraphe 17 de mon premier Mémoire. On en déduira le développe- ment de chaleur provoqué par le passage d’une quantité d'électricité et ce même développement peut être exprimé en fonction des quantités 77 et 0.
Si les extrémités de la chaîne sont formées du même métal et se trouvent à la même température, leur différence de potentiel n’est autre chose que la force électromotrice dans
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. Y
126 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
le circuit fermé qu’on obtient en joignant l’une à l’autre les extrémités. Pour un circuit formé de deux conducteurs A et B dont les soudures ont les températures T, et T, cette force électromotrice à la valeur
T, F= pr) (Tr) + [ (ya — 5) d T . . . (IV).
Dans cette formule j'ai considéré la force électromotrice comme positive lorsque le courant thermo-électrique traverse la soudure dont la température est 7 dans la direction de B vers A.
$ 12. Parmi les quantités que nous avons introduites, 17, F, 6a et 6, sont les seules qui aient été mesurées directement.
ni
Quant à w, y, k et me leurs valeurs sont liées à celles de
0E£’ 11, PF, 6a et 65 par les équations (1), (IT), (III) et (IV). Rem- plaçons dans ce système la formule (III) par cette autre qui
en découle:
DU 2 U' d | se PR RE HA n+(r). (sr), — ASS ES
alors les équations renferment les inconnues
0 U’ oU' ea (Gr) Gr tbe »
Remarquons cependant que des formules (I), (IT), (IL) et (IV) on peut déduire la relation
1 F=n(T,)=n(T,) + | (ce — 01) 47 MADECEN 12
qui ne contient aucune des inconnues, et que par conséquent £ | dU' oU l est impossible de déterminer y, — sh Mr pet + m0: G). CG
ka — kj et w. C’est ce qu’on aurait pu prévoir, ces quantités variant toutes avec la nature des couches superficielles, tandis que cette nature n’influe aucunement sur les valeurs de /; F, 64 et 64. |
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. | 127
A
On devra se borner à exprimer trois des inconnues en fonction de la quatrième, p. ex. de £, — k5, comme cela se fait au moyen des égalités (Il,;) et (Il;) et de la relation
La — {5 = 6a— 66 + as + qe — à OL EVE
$ 13. Ce que je viens d’exposer contient toutes les con-
séquences auxquelles on puisse arriver si, dans l’application
des lois de la thermodynamique, on s'impose la condition
que les corps qu’on met en contact auront toujours la même température.
Pour s'affranchir de cette condition on doit avoir recours à une hypothèse, savoir à celle-ci que les phénomènes consi- dérés sont entièrement indépendants de la conduction de la chaleur. Le raisonnement employé par M. Budde dans son paragraphe 3 (p. p.682—684) implique cette supposition, que toutefois un adhérent des vues de M. Kohlrausch ou d’une théorie analogue devrait rejeter, quoiqu'il dût reconnaître l'exactitude des formules auxquelles j'ai été conduit dans les paragraphes précédents.
Recherchons maintenant ce qu’on peut ajouter à ces formules si une différence de température n’est pas regardée comme un obstacle à l'application du principe de Carnot. Cela étant, nous possédons la formule de Sir W. Thomson :
serious PE GT TT: PUS nt Vila) par laquelle notre équation (VI) se transforme en celle-ci a— k Ya = {bo — £ T Ludo + emma. (6)
DS
On parvient à cette relation d’une manière plus directe en étudiant le cas dont j'ai traité dans le paragraphe 10. Pour simplifier, j'admettrai que les transmetteurs G et G (8 10) sont égaux l’un à l’autre, à part les valeurs diffé- rentes que peuvent présenter les quantités variables. Soient, dans l’état initial, T, v, +, £ | 9%
128 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
ces valeurs pour le transmetteur G et T+dT,v,p+yaT, E+e les valeurs correspondantes pour (7. Si, par la voie indiquée au paragraphe 10, nous faisons traverser le conducteur À 4° par la quantité d'électricité e, cela produira les développements de chaleur suivants:
nd surlacé lé, Gr Fe RNA À. 2er DIN (7) à celle de G’: +(r+irar)e sortie SCHICD POI AE etsdans lé Conducteur. 4,4 "26607." RS (9) En même temps G et G prendront les états déterminés par ; T,u,qg, E+e et
T+dT, v,p+yatT, E.
Par un changement adiabatique des capacités électrosta- tiques et des volumes v et v j'élèverai maintenant le poten- tiel de G de la quantité y d T, j'abaisserai d’une quantité égale celui de G” et j'échangerai les températures. Le nouvel état de G sera défini par:
1 Fo UV ao/e Fe T+dT, 0 Er AL ET + e.(10)
et celui de G par:
1°" Y:0 0e é SEM TEE 7 De. CIO RAA UE à Ce. AM 8 ete NET S 11 vtr), 4798 a)
À
Les facteurs et Le étant multipliés par dT, on peut, p
en indiquant leurs valeurs, négliger la différence des tempé- 1
ratures. On a donc p:p =v:. Soit pu—pv— - et œ
prenons pour vw la valeur suivante :
Tv U' } ee fe ei r |:
dt Re Ame Sn
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 129
alors 1l résulte des expressions (10) que l’état du transmet- teur G& est devenu identique à celui où se trouvait au com- mencement &. D’un autre côté, le volume de la masse gazeuse
dont G est muni est devenu v [+ (Or), aT|=vfi-( r) ar] x E+e
Es Ji 98: OUTRE UV x [14 « (© 7-)à HAE Vie » 5EortiT
Si donc on augmente ce volume à la quantité
NRA dT, p dE ER en maintenant constante la température T, l’état final de G' deviendra égal sous tous les rapports à l’état initial de G
et, les transmetteurs ayant échangé leurs états, tout reviendra
à la même chose que si le système eût subi un cycle fermé d'opérations. Or, pendant la dernière dilatation isothermique, il y aun développement de chaleur LEON EL ë OEÉOT il faudra en tenir compte tout aussi bien que des quantités (7), (8) et (9). La quantité de chaleur représentée par (7) s’est produite à la température T7, celle qui est donnée par l'expression (8) à la température T + d T. Quant à (9) et (12), évidemment on ne négligera que des termes de l’ordre (4 T)? si l’on écrit T pour la température à laquelle ces deux quantités de chaleur se sont dégagées. Par conséquent, la seconde loi de la thermodynamique nous fournit l'équation
dk o? U’ FN TER ES etui NT LEE
d’où l’on tire, en ayant égard à la relation (ID), Be: 90 vdi sh 4 Saint st (VIT)
130 H.-A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
C’est le résultat auquel j'ai déjà fait allusion dans le para- graphe 7. Si 4 était — 0, on aurait aussi y — 0, conformément à l’opinion émise dans mon premier Mémoire.
On pourrait remonter maintenant aux formules (6) et (VI), mais pour cette dernière on préférera la voie suivie par Sir W. Thomson.
$ 14. Dans les dernières années, M. Duhem s’est occupé à plusieurs reprises de la théorie des phénomènes thermo- électriques, d’abord dans son ouvrage intéressant: , Le poten- tiel thermodynamique et ses applications” et ensuite dans deux Mémoires intitulés : , Applications de la thermodynamique aux phénomènes thermo-électriques et pyro-électriques” !) et »Sur la relation qui lie l’effet Peltier à la différence de ni- veau potentiel de deux métaux en contact” ?). Je n'aurai qu’à parler de ce dernier travail. À la page 445 on y trouve une remarque à laquelle je semble avoir donné lieu ‘en ne m'exprimant pas assez clairement.
M. Duhem parle de ma formule
d'y — "+ "x S'Ave: où eL 2 "He een 10 11 F TT (13) — voir ci-dessus l’équation Il; — qu'il cite sous la forme Er dD (Ti) A) AT TIAR
et de deux autres qu’on rencontre dans les théories de Sir W. Thomson et de M. Budde et qu'on exprime ainsi dans la notation que j’ai employée:
TE 1} F= | SC AN EN (14) Ts et d F IT ES VD TU NET ÿ'; d T (15)
1) Ann. de l’École normale, 3e série, Il, p. 405, 1885. 2) Ann. de chim. et de phys., 6e série, XII, p. 433, 1887.
PHÉNOMÈNES THÉRMO-ÉLECTRIQUES. 131
La lettre F y désigne la force électromotrice dans un cir- cuit dont les soudures ont les températures T, et T..
Or, voici la remarque de M. Duhem: ') ,M. Lorentz arrive à la formule (13), qu'il regarde comme identique avec la formule (15) de Sir W. Thomson et de M. Budde, tandis que rien ne démontre, dans les idées de Sir W. Thomson, l’iden- tité des deux formules (13) et (15), et que ces deux formules sont incompatibles dans les idées de M. Budde. M. Lorentz a obtenu cette formule sans rien supposer sur l'existence ou la non-existence d’une différence de niveau potentiel entre des parties inégalement chaudes d’un même métal. Mais 1l regarde cette formule comme incompatible avec la formule (14) de Sir W. Thomson, si de semblables différences existent. La formule (14) et la formule (15) étant identiques, on peut à bon droit s'étonner de voir M. Lorentz regarder l’une comme identique à la sienne et l’autre comme incompatible avec la sienne.”
Plus loin (p. p. 455 et 456), après avoir de son côté démontré Ia formule (13), M. Duhem dit encore: ,C’est le résultat ob- tenu par M. Lorentz et confondu par lui avec la formule (15) de Sir W. Thomson.”
L'identité des équations (14) et (15) est manifeste; aussi ne les ai-je distinguées nulle part l’une de l’autre, comme si l’une ne pût coexister avec ma formule que dans un cas spécial, tandis que l’autre serait toujours en accord ayec mon résultat; qui plus est, je n’ai même pas cité la formule sous la forme (15).
Quant à la relation qui existe entre l'égalité (14) et ma formule (13), après avoir démontré cette dernière je fis cette observation :
,En supposant que dans un circuit de deux métaux des forces électromotrices agissent seulement aux points de con-
_
1) J'ai changé les numéros d'ordre des formules citées par M. Duhem de telle sorte qu'ils se rapportent aux équations de ce Mémoire.
122 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
tact, on déduira de cette équation, pour la force électromo- trice dans un tel arrangement
(Tv (n)=f" noie PRG ei (16) T
1 ce qui est de nouveau le résultat de M. Thomson.”
En tirant cette conclusion je renvoyai à un paragraphe antérieur où le résultat de Sir W. Thomson se trouve sous la forme |
“2 _ Er | T d'T: Fe
Comme Sir W. Thomson ne s’occupe pas des différences de potentiel et que par conséquent sa théorie ne donne pas une formule de la forme (16), j'aurais dû m'’exprimer ainsi:
»S1 l’on suppose que dans un circuit de deux métaux des forces électromotrices agissent seulement aux points de con- tact, on aura pour la force électromotrice dans un tel arrangement :
F=wy(T,)— vw (T), ou, d’après la formule que nous venons de trouver,
ce qui s'accorde avec la théorie de M. Thomson.”
$ 15. On a déjà vu que M. Duhem est arrivé, lui aussi, à la formule {13). En effet, sa théorie, aussi bien que la mienne, repose sur l’application des lois de la thermodynamique à une chaîne ouverte de conducteurs, et les hypothèses dontse sert M. Duhem sont analogues à celles que j'ai introduites. C’est principalement par la forme sous laquelle est présentée la seconde loi de la théorie de la chaleur que nos théories se distinguent l’une de l’autre. Tandis que je -considérais les quantités de chaleur mises en jeu dans un cycle d'opérations, M. Duhem a pris pour point de départ la théorie du poten-
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 133
tiel thermodynamique, théorie remarquable sans doute par la facilité avec laquelle elle se prête à des applications très- variées. Mais, tout en reconnaissant cet avantage, je me per- mettrai d'observer qu’au fond la théorie du potentiel thermo- dynamique n’est qu’une des formes sous lesquelles on peut mettre le principe de Carnot et de Clausius, et que par con- séquent elle ne pourra conduire à des résultats qu’on ne puisse trouver tout aussi bien en donnant au principe une forme différente. Tout au plus, à cause de la facilité avec laquelle elle peut être maniée, la théorie du potentiel thermodyna- mique peut attirer notre attention sur des résultats qui, sans elle, nous auraient échappé. :
Du reste, M. Duhem est tombé dans la même erreur que moi, en perdant de vue le phénomène thermique à la surface d’un conducteur, phénomène dont M. Budde a fait ressortir la possibilité. Remarquons encore que, dès le commencement, M. Duhem considère une chaîne de métaux dont la température varie d’un point à l’autre; cependant ce cas renferme celui où deux métaux de températures égales se trouvent en contact.
D’après ce qui précède, il est à présumer que si mes calculs sont exacts, les résultats de M. Duhem doivent être con- formes aux miens, dès que, dans ces derniers, on prend # = 0. M. Duhem aurait dû trouver: y — 0; ce résultat était même nécessaire afin que sa théorie, considérée en elle-même, ne renfermât aucune contradiction. En effet, M. Duhem arrive d’un côté à la formule de Sir W. Thomson pour la force électromotrice dans un circuit et d’un autre côté à la formule (13), c’est-à-dire qu’il trouve aux surfaces de contact des différences de potentiel qui suffisent à elles seules pour rendre compte de la force électromotrice du circuit. Par conséquent, d’après sa manière de voir, des forces électromotrices entre des parties inégalement chaudes d’un même métal ne pour- raient exister, ou du moins devraiert avoir les mêmes valeurs dans deux métaux quelconques.
Que M. Duhem est amené à une conclusion différente, cela me
/
134 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
semble causé par une erreur dans les signes algébriques. Dans la seconde équation de la page 455 et dans les formules (14) qui la suivent, les quantités d'Oa do
dE di le signe négatif. Or, de l'équation (17), page 459, on déduit
etc, doivent avoir
doD(T,,T,;,) dO(T,) dH(T);) ) Ale: es T ST, AT, ares Ni et en ayant égard à l’équation d 9 = hie = 148 til = DE PO ee a MAN
Lg EE 0
Cette formule, combinée avec la formule (10) de la page 453, démontre que la différence de potentiel D(T,,T;) est pour tous les métaux la même fonction des températures, ce qui n’est plus en contradiction avec ma théorie.
$ 16. Il y a un autre point sur lequel je ne puis partager l’opinion de M. Duhem. A la fin de son Mémoire, il étudie le cas où la structure des métaux subit un changement par un échauffement ou un refroidissement. À cet effet, il in- troduit deux variables nouvelles x et y, qui servent à déter- miner la structure et que, dans la suite du raisonnement, il regarde comme des fonctions de la température, exprimant ainsi que c’est de cette dernière que dépend la structure des conducteurs.
Naturellement, ceci revient à dire qu’à chaque température il y a une structure entièrement déterminée, et qu’on ne peut chauffer ou refroidir un métal sans qu’un changement de structure correspondant se produise. Mais, si tel est le cas, les formules (28) de M. Duhem (p. 466) doivent être rem- placées par celles-ci :
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 135
d H3(y, TD =—-T ar UV: F7}:
En effet, en élevant de d T la température d’un conduc- teur chargé, comme M. Duhem le suppose à la page 454, on modifie en même temps la structure ; par conséquent, dans la dernière équation de cette page et dans les formules (14), on doit écrire des différentielles totales et non des différen- tielles partielles.
La modification que je viens d’indiquer fait disparaître des formules (29) et (30) de M. Duhem les termes qui contiennent hits. d AT et LE Ë altérés en aucune façon par la variabilité de la structure.
C’est du reste ce qu’on aurait pu prévoir. Les raisonne- nements qui précèdent à la page 463 de M. Duhem sont uniquement fondés sur la variabilité avec la température des quantités © et H; il n’y est rien supposé sur le mécanisme par lequel un changement de la température entraîne une variation de ces quantités. Que la dépendance soit immédiate ou qu’elle doive en partie être attribuée à ce que © et H dépendent de la structure, qui est elle-même une fontion de la température, voilà ce qui ne peut avoir aucune influence.
$ 17. En introduisant dans la théorie de M. Duhem l’idée énoncée par M. Budde, on arrive à des résultats qui sont identiques avec ceux que j'ai exposés dans le présent travail. Pour le faire voir, je me servirai d’une méthode qui me semble réunir les avantages de celle que j’ai suivie jusqu’à présent et de celle dont M. Duhem a fait usage. Je continuerai d'employer les ,transmetteuré”, mais, au lieu de raisonner sur des cycles d'opérations, je m’appuyerai sur le théorème de l’entropie ou, ce qui revient au même, sur la théorie du potentiel thermodynamique.
Calculons d’abord l’entropie S d’un transmetteur. Laissons aux lettres ©, E,œ,v, T et U' la signification qui leur a été assignée auparavant et prenons pour variables indépendantes :
et
on en conclut que les résultats antérieurs ne sont
136 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
T, E, g et v. On trouve pour l'énergie d’un transmetteur U—1Ey+U", FIN URI TENE (17) pour le travail des forces extérieures dans le cas où les
quantités 7, et v subissent les changements d T, dy, dv, la charge Æ restant constante,
| 2 E d p—pdv,
et pour la quantité de chaleur que le système doit recevoir pour que le changement (d 7, d y, dv) s’accomplisse,
d U' UE d U’
AT + dy +
OT 5e TA
dQ—=pdv+—
ie a
expression -= doit être une différentielle exacte. Donc, en
supposant la pression p indépendante de la charge électrique,
on aura o triidégrgr
== 1) 0 v p
et AO RU Da A
de sorte que l’entropie est donnée par de 0e
AU dQ PR TL OU s=f=s rU(E)+ ELLE (18)
Dans cette formule, la valeur que it l’entropie pour des valeurs déterminées vw, et T°, du volume et de la température est dénotée par S,. Cette valeur peut être une fonction de E, maïs pour une charge déterminée elle doit être indépen- dante du potentiel .
Prenons maintenant les deux transmetteurs G, et G dans
un état qui pour le premier est défini par les valeurs
Pa ; Va Es, 1, Pa ;
et pour le second par
po, vw, E5, T, qu
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECOTRIQUES. 251:
et supposons qu’on les mette en communication avec le contact” À B, qui se trouve à la même température T.
Si l’on commence avec des valeurs des potentiels arbitrai- rement choisies, il se produira un transport irréversible d’é- lectricité, qui tendra à faire diminuer le potentiel thermo- dynamique du système (G+, G5, À B). Pour que l’équilibre existe, il faut que ce potentiel ne varie pas par un change- ment infiniment petit de la distribution de l'électricité.
Si l’on se borne au cas où les valeurs de w, w, Ca, C& et T restent constantes, il faut prendre pour le potentiel ther- modynamique l'expression !)
U—TS,
U et S étant l’énergie et l’entropie du système (G,, G5, À B). Or, on peut imaginer que le changement infiniment petit consiste dans le transport d’une charge infiniment petite e du transmetteur G,; à Gy, et qu'après ce transport le con- ducteur À B se trouve dans l’état initial. Alors la condition de l'équilibre devient
d Us + d'Uy5 —T(dSs + d'Si) = 0.
Supposons encore qu'avant et après le transport de la charge e Chaque transmetteur, considéré en lui-même, se trouve en équilibre électrique; on déduit alors des équations (17) et (18)
1) En effet, tant que les volumes v, et vs et les capacités Ca et Co de- meurent invariables, les forces extérieures n’exécutent aucun travail, mais pour maintenir la température T' il faut employer un réservoir de chaleur. Pour que l'énergie du système (Ga, G, À B) s’accroisse de d'U, le réser- voir doit céder une quantité de chaleur équivalente; par conséquent, l’en-
tropie du réservoir s’augmente de — = et celle du système entier, y
compris le réservoir de chaleur, de d S — . Cette quantité ne pou-
vant être positive, la fonction U— TS ne pourra que diminuer par un changement irréversible et devra rester constante pendant un changement réversible.
138 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
à U o U' d Ur + d Uy = + maire en MA: ed ie + d Ur =e(ys )+e[ (O3), 5), | = 46e) = Ga) Di pass\'uunpois, T1 /o?U' += [ (Gr), Gr), ]+ [Gr Ts RAT Qi D TJ FGnr). "|
et la condition de ve équilibre prend la forme suivante:
+ [Gr =). 0), -G).1- Li) rl rt]
L'expression (5 5), - (5 stétant indépendante de la
température, elle disparaîtra si, après avoir divisé l’équa- tion par 7, on la différentie par rapport à cette dernière variable. On retrouve ainsi l'équation (I).
$ 18. Dans l’étude du cas dont nous avons traité au para- graphe 13, il est plus commode de considérer l’entropie elle- même au lieu du potentiel thermodynamique. Soient, au moment où les transmetteurs G et G’ sont mis en commu- nication avec le conducteur À À,
T, v, p, E les valeurs qui déterminent l’état de G et T+dT,v,p+z%aT, E les valeurs correspondantes pour le second transmetteur. Supposons qu’à l’aide de réservoirs de chaleur convenables on maïintienne constantes les températures de G, de G’et de chaque point de À 4’, et cherchons la condition pour que
l’entropie du système entier, y compris ces réservoirs, ne soit pas altérée par le passage d’une quantité infiniment petite
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 139
d’é lectricité e de G’ à G. Si ce transport s’opère sous les con- ditions formulées au paragraphe précédent, l’entropie de la pièce À 4’ n’éprouvera aucune variation. Quant à celle des transmetteurs, remarquons que pour ces deux corps 5, a la même valeur, les transmetteurs étant identiques ($ 13), pos- sédant des charges initiales égales, et S, ne dépendant pas de la température.
La formule (18) donne pour l’accroissement de l’entropie des deux transmetteurs
vs, T 1 >°U' dr a+] TIEST |
et À SN 0 ETAT A2 IT pt HN sms"
A la somme de ces expressions, savoir
ed T9? UÙ . — Spa ec... (19)
il faut encore ajouter l’accroissement qu'éprouve l’entropie des réservoirs de chaleur, accroissement qu’on obtient en divisant par les températures correspondantes les quantités
de chaleur qui se sont dégagêes et que nous avons calculées au paragraphe 10. On trouve ainsi
dk 02 U' dk Prés a AE CEA TT up (20 ir ILE POLEP IT «
Pour que la somme des quantités (19) et (20) s’évanouisse, il faut que la condition | E = y Du
soit remplie. C’est la relation qui a déjà été démontrée.
$ 19. Une question qui présente un haut intérêt est celle de savoir où réside la force électromotrice d’un circuit ther- moélectrique, ou plutôt de quelle manière la force électro- motrice totale est répartie dans les conducteurs. Malheureu-
140 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
sement, sur ce sujet, la théorie ne peut rien affirmer avec certitude. Si l’on considère deux sections P et Q du circuit entre lesquelles se trouve soit une surface de contact, soit une suite de températures inégales, il me semble naturel de mesurer la ,force électromotrice dans la partie P Q”? par la différence de potentiel qui, à l’état d'équilibre, c’est-à-dire, dans la chaîne ouverte, existe entre deux points de P et de Q, pris à l’intérieur des conducteurs. Or, les faits observés ne suffisent pas pour la détermination de cette différence ; elle ne peut être déduite, ni des quantités de chaleur déve- loppées par un courant, ni des expériences sur l'électricité de contact. Quant au développement de chaleur, je fis déjà voir dans mon premier Mémoire qu’en traversant une surface de séparation l'électricité acquiert non seulement une autre énergie électrostatique, mais que son énergie non-électrosta- tique prendra tout aussi bien une nouvelle valeur; j’en dé- duisis la formule
DU fou’ IL = p— Ya + (5x), — Gr). VS ASS
Pour une raison analogue, le phénomène thermique qu’on désigne comme l’effet-Thomson ne peut être regardé comme une mesure directe de la différence de potentiel entre les extrémités d’un conducteur.
M. Budde est de mon avis en ce qui concerne la différence qui peut exister entre les quantités 71 et ps — y; seulement, il remarque avec raison que dans l’équation (21) on doit prendre d E d'électricité positive si elle se trouve non à la surface mais à l’intérieur d’un métal.
En posant
l’énergie non-électrostatique que possède une unité
pour
d U' p + DE — { » il arrive à la formule
I = Yb — Ya;
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLEUTRIQUES. 141
il démontre ensuite que toutes les formules qu’il avait don- nées dans un travail antérieur restent vraies, à condition que la fonction potentielle g y soit remplacée par la nouvelle fonction y. Pour cette dernière, M. Budde propose le noïn de fonction des forces thermoélectrique”? (thermoelectrische Kräf- tefunction), et pour la différence y; — y« celui de ,force élec- tromotrice au contact” (electromotorische Kraft des Contactes). Ces dénominations ne me semblent pas être dans l’intérêt de à U' dE être très différente de ce qu’en mécanique on appelle ,fonc- tion des forces”, et il me paraît préférable de réserver à la différence y — g+ le nom de ,force électromotrice” 4 — ya n'étant qu'une expression pour le développement de chaleur 17.
$ 20. En m’occupant du sujet pour la première fois, je ne me rendais pas suffisamment compte des difficultés qu’on rencontre lorsqu'on veut déterminer les différences de poten- tiel qui existent à l’intérieur des métaux; je me figurais qu’on pourrait réussir en opérant sur des conducteurs à surfaccs pures. Ce n’est qu’en y réfléchissant de nouveau, après que M. Budde eut publié sa critique, que je reconnus combien il est difficile, sinon impossible, d'atteindre des résultats certains.
Dans l'hypothèse des matières électriques, et d’après une idée qu’on doit à M. von Helmholtz, les différences de poten- tiel qui s’établissent au contact devraient être attribuées à des forces que les molécules métalliques exercent sur l’élec- tricité. Ce seraient là de vraies forces moléculaires”, qui seraient en jeu non seulement au contact de deux métaux, mails tout aussi bien dans le voisinage de la surface qui sépare un conducteur de l’isolateur ambiant; elles y produiraient un effet analogue à celui qui, dans la théorie de la capillarité, est causé par les forces moléculaires ordinaires qui agissent dans la couche superficielle d’un liquide.
Voilà déjà une raison pour laquelle le potentiel prendra
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIL. 10
la clarté. La quantité qui entre dans la fonction y peut
142 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
des valeurs différentes à l’intérieur d’un métal et à la surface, même si cette dernière était parfaitement pure. On pourrait essayer de tenir compte de cette différence dans le calcul des expériences, mais je ne crois pas qu'on arriverait ainsi à des résultats de quelque valeur; en effet, la plus légère modifica- tion de la couche superficielle influera sur la différence en question. Ajoutons que, en dehors des forces supposées par M. von Helmholtz, il doit exister d’autres forces, qui retiennent sur le conducteur une charge électrique. Tant que la nature de ces dernières forces nous est inconnue, la constitution intime d'une charge superficielle demeurera dans l’obseurité.
Ce n’est que le potentiel dans le sens indiqué au para- graphe 3 qui peut être mesuré, un travail déterminé étant nécessaire pour augmenter de l’unité la charge électrique d’un conducteur.
Si l’on veut exclure de la théorie tout ce qui échappe à l’observation et en même temps tout ce qui dépend de l’état des couches superficielles, on suivra l’exemple de Sir W. Thom- son, en ne considérant que la force électromotrice d’un circuit fermé et en laissant de côté les différences de potentiel.
$ 21. Dans tout ce qui précède, je me suis tenu aux hy- pothèses que j'ai introduites dans le premier Mémoire; j'ai continué d’admettre: 1° que les propriétés de la masse ga- zeuse dont on a muni le transmetteur sont indépendantes de l’électrisation . de ce dernier, 2° que la charge électrique d’un conducteur isolé n’est pas altérée par un changement de la température, 3° qu’à chaque température cette charge est distribuée selon les lois ordinaires de l’électrostatique et que ces lois suffisent aussi pour la détermination des attrac- tions ou répulsions qu’exercent entre eux deux conducteurs ou deux parties d’un même conducteur. Bien que je ne voie pas de raison pour abandonner ces hypothèses, il me semble intéressant d’indiquer comment la théorie peut être débarrassée de la troisième. La théorie du potentiel thermodynamique ou celle de l’entropie nous en fournira le moyen le plus simple.
? LS ? [a] PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 143
Je me bornerai au cas où la forme géométrique du trans- metteur peut être déterminée par une seule variable, que j'appellerai C. En admettant la troisième hypothèse, on pourrait prendre pour cette variable la capacité électrosta- tique, mais il va sans dire que dans le problème actuel cela n’est plus permis. En effet, dès qu’on évite l'introduction de cette hypothèse, 1l n'existe plus une capacité qui ne dépende que de la forme géométrique. Du reste, les raisonnements suivants n’exigent aucune hypothèse particulière sur la quantité C. |
La charge électrique Æ, la température T' et le volume de la masse gazeuse seront également considérés comme des variables indépendantes.
Pour maintenir le transmetteur dans un état déterminé il faut lui appliquer deux groupes de forces extérieures, savoir
1° une pression p = x (R étant une constante) qui agit
sur la masse gazeuse et 2° des forces qui s'opposent à un changement de la quantité C' par les actions électrostatiques. Pendant un changement infiniment petit du système ces dernières forces exécuteront un travail que je représenterai par &dC, « étant une fonction de Æ, de T et de C que les observations pourraient donner dans chaque cas particulier. Il est clair que d’après mes hypothèses cette fonction doit être indépendante du volume w; il en est de même de l’é- nergie totale [/ du système entier, y compris la masse gazeuse. Considérons un changement infiniment petit de l’état du transmetteur, déterminé par les accroissements d 7, d C, dv et s’opérant pendant que la charge £ demeure constante. Il faut donner au système une quantité de chaleur déterminée par l’équation dors grue t et, comme la seconde loi de la thermodynamique entraîne
dv,
dC + RTE ad, (l
(ep)
la relation 10
144 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
do U 2 5C — Œ — 4 5T sue se in lus ESA (22) on trouve pour l’accroissement de l’entropie d Q l'OU 0 & dv IS ST d T — sy 10 R —
On en déduit, en appelant S, la valeur que prend l’entropie pour des valeurs déterminées 7,, C, et vw, des variables:
7:61. 1, 0 U; d & V , pe 74 ÉETE cac] +ri(t)+se “PR ER Dans le cours de ce calcul une grandeur invariable a été donnée à la charge Æ. Je supposerai que, lorsqu'il s’agit de la valeur de S pour une autre charge, on prenne pour 7;, C,, et v, les mêmes valeurs. Naturellement, S, sera une fonction de E, Reprenons maintenant le problème du paragraphe 17. Pour que le système G+, G5, À B se trouve en équilibre, il faut, d’après les considérations de ce paragraphe, que l’expression
) 7 [U— TS]
ait la même valeur pour les deux thappmehieuse: Il doit en être de même de l’expression L'ONU" FOIS TO PHONE Dans le calcul des dérivées par rapport à Æ on devra regarder comme constantes les valeurs de v, de Cet de 7. Voici l’équation à laquelle on arrive:
Bof ds. 0 high End o fre PÉail des SE ne ÉPSL JO Te 0H 20 TRUC, RE > CES LR LA) ee ol. (23 IT 9 T SET D smor p \; 170) Du
Elle contient une condition à laquelle les quantités © et Co
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 145
doivent satisfaire si les charges ont des valeurs déterminées. Par conséquent, en adoptant la troisième des hypothèses men- tionnées au commencement de ce paragraphe, on reviendrait à une relation entre les capacités ou entre les potentiels.
Indépendamment de cette hypothèse, l'équation donne lieu à une conséquence générale. Le premier membre ne contient rien qui se rapporte au transmetteur Gy, et le second est également indépendant de l'état de G. Il s’ensuit qu’étant donnés trois transmetteurs G, G; et G,, qui sont formés de trois métaux différents et qui peuvent être mis en commu- nication l’un avec l’autre par l'intermédiaire des contacts” A B, BC et AC, tous les conducteurs ayant la même tem- pérature, il y aura équilibre entre G; et G;, dès que la con- dition exprimée par l'égalité (23) ou par une formule analogue est remplie tant par G; et Gy que par G, et Ge. C’est, sous une forme générale, la loi connu de l'électricité de contact.
L'influence de la température est donnée par l'équation (23) de la manière suivante. Soient C7 et C; deux valeurs qui satisfont à la formule à la température 7, Ca + d Ca, © + d Cy des valeurs ayant la même propriété à la température T + dT, les charges étant les mêmes dans les deux cas. Alors les deux membres de l'équation devront subir des changements égaux si l’on remplace 7, C, et C; par T'+dT, C; + d Cet C5 + d G. En se rappelant que 3 EE est indépendant de T7 on trouve la relation
1. a, U dd? D 9? œ “eh b: à | or Comic mr = he A à 1,» 92. Ù 2? & | =} on Et ragso + 5pare C\,?
qu'on peut transformer de la manière suivante au moyen de la formule (22): His ŒU Nu:
sn T+ nn. m0 = — Rd T4TSE dot (VIII)
146 H. A, LORENTY. SUR LA THÉORIE DES
C’est l’équation par laquelle la formule (1) doit être rem- placée. En effet, on est ramené à cette dernière si l’on re- vient à la troisième des hypothèses du commencement de ce paragraphe et à la notation des pages précédentes. Il suffira de substituer FACE cer P. Le problème du paragraphe 18 pourrait être étudié d’une manière analogue.
$ 22. Il me reste à parler de deux Mémoires qui ont été récemment publiés par M. Lorberg !) et M. Parker ?). Le premier de ces savants a comparé ma théorie avec celle de M. Duhem, ou plutôt avec la partie de cette dernière que contient l’ouvrage sur le potentiel thermodynamique, et il démontre que les deux théories reviennent à la même chose. C’est un point sur lequel je n'insisterai plus. Je ne m'é- tendrai non plus sur l’égalité ou la non-égalité des différences de potentiel qui existent à un contact de deux métaux dans
D — —
1 RITES NE
les cas où ce contact est traversé par un courant et où il y à équilibre électrique. J'avais tacitement admis légalité des différences en question en partant de ce principe que, pour entretenir un courant entre deux points d’un circuit, il suffit d'ajouter à la différence de potentiel qu’ils présentent à l’état d'équilibre celle qui est nécessaire pour vaincre la résis- tance du conducteur entre ces points. Or, on peut négliger cette dernière différence de potentiel lorsqu'il s’agit de deux points dans le voisinage immédiat d’une surface de contact. Par un raisonnement plus rigoureux, et dont M. Lorberg recon- naît l'exactitude, M. Duhem a démontré la même chose. Signalons encore que, selon M. Lorberg, la conduction de la chaleur qui existe dans un circuit thermo-électrique ne
s
pourrait donner lieu à aucune difficulté dans l’application de
1) Wied. Ann., Bd. 34, p. 662. 2) Phil, Mag. Ser. 5, Vol. 26, p. 353.
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 147
la seconde loi de la thermodynamique; les phénomènes ré- versibles obéiraient à cette loi qu'ils soient accompagnés ou non d’un phénomène non réversible, Cette assertion ne me semble vraie qu'autant qu’on puisse regarder comme tout à fait indépendants les uns des autres les phénomènes des deux ordres.
Du reste, on me permettra d’observer que je n’ai jamais voulu contester l’exactitude des résultats qu’on obtient par la méthode de Sir W. Thomson et de Clausius ; mon but était uniquement de faire connaître une méthode qui est à l’abri de toute objection fondée sur la non-réversibilité d’un phé- nomène accessoire.
Il y a deux points sur lesquels M. Lorberg n’est pas d’accord avec moi. Premièrement, il croit pouvoir démontrer que le phénomène thermique sur la possibilité duquel M. Budde à attiré l'attention et qui est représenté dans mes for- mules par la quantité 4, n’existe pas. M. Lorberg arrive à cette conclusion en partant des formules:
d II IT do our. 7 d qi Ge GE To» Tan SRE (24) ae Jo Tu ge EE LT
-
dans lesquelles il désigne par 71, y, qu et gi ce que j'ai nom- mé, dans ce Mémoire, — 71, w, (55) — ( Ë et d E /a
| dE) diD AU à U’ Ie in Gr (Fm
De ces équations on déduit, en effet, g: = gs, c’est-à-dire ka = kÿ, ce qui rendrait très probable qu’on eût toujours & = 0.
è 148 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE DES
Remarquons cependant que la formule (24) cesse d’être vraie, dès qu’une différence de potentiel s'établit entre des parties inégalement chaudes d’un même métal. La formule doit alors être remplacée par l’équation (III) que j'ai donnée ci-dessus au paragraphe 10, et on devra se borner à la con- clusion qui a été exprimée dans la formule (VII) du pa- ragraphe 15.
En second lieu, voici ce que dit M. Lorberg après avoir trouvé, pour la force électromotrice d’un circuit, une valeur qui est donnée par la formule:
F=w(T,)—y(T;), - 2006005" 4608
dans la notation que j’ai adoptée :
»Die Gleichung ist bekanntlich von Avenarius für solche Falle, wo F als eine quadratische Function von 7, und #, betrachtet werden kann, experimentell bestätigt worden. Aus dieser Gleichung aber zu schliessen, dass die electromo- torische Kraft des Thermostromes nur an den Contactstellen ihren Sitz habe, wie Lorentz es thut, scheint mir nicht vôllig gerechtfertigt; denn dieser Schluss beruht auf der unbewie- senen Annahme, dass der einer einzelnen Contactstelle ent- sprechende Theïl der electromotorischen Gesammtkraft gleich der daselbst herrschenden Potentialdifferenz sei.”
Si l’on ne veut laisser aucun doute sur le sens des mots employés, il me semble nécessaire de mesurer la force élec- tromotrice d’un contact par la différence de potentiel qu’elle peut causer entre deux points situés à l’intérieur des con- ducteurs. Or, tant que je regardais la quantité y de mes formules comme identique avec cette dernière différence, je devais tirer de la formule (25) la conclusion à laquelle M. Lorberg fait objection, conclusion, du reste, que je ne crois plus être légitime, la formule elle-même étant remplacée par une autre.
Peut-être ne jugera-t-on pas superflue l’observation queles
PHÉNOMÈNES THERMO-ÉLECTRIQUES. 149
expériences d’Avenarius n’ont aucunement démontré que la force électromotrice F d’un circuit est égale à la somme al- gébrique des différences de potentiel aux soudures. On ne saurait le prouver qu'en mesurant ces différences à des tem- pératures différentes, mais on verra aisément que la seule donnée que fournissent les expériences d’Avenarius outre les valeurs de F est la différence de potentiel pour une seule température, savoir pour celle qu’avaient les plateaux du condensateur. :
& 23. M. Parker s’est servi d’une méthode qui à quelque ressemblance avec celle que j’ai employée. Comme il ne parle pas d’un développement de chaleur à la surface d’un con- ducteur, on pourrait s'attendre à ce que ses résultats se dédui- sissent des miens, si dans ces derniers on prend Æ —0. Or, par cette substitution ma formule (VIT) devient:
dd, tandis que, selon M. Parker, deux parties inégalement échauf- fées d’un même métal présenteraient une différence de poten-
tiel obéissant à la formule 1 — kit, ou, si l’on introduit
ma notation, TE ie 2
La quantité C y serait une constante, que la théorie laisse indéterminée.
Voici la raison de ce désaccord. M. Parker considère un cycle d'opérations dans lequel une pièce de métal est tra- versée deux fois par une quantité d'électricité, savoir, dans un sens tandis que les températures des extrémités sont {et b+ Tr, et dans le sens inverse après que ces températures ont reçu toutes les deux un changement infiniment petit. De cette manière, 1l peut comparer entre elles les valeurs que l'expression Aus c'est-à-dire l'expression présente à des
tdt” 1 1 températures différentes. Au contraire, j’ai montré ci-dessus, au paragraphe 13, qu'après un transport d'électricité dans
150 H. A. LORENTZ. SUR LA THÉORIE ETC.
une seule direction on peut obtenir un état de choses qui ne se distingue de l’état initial que par l’échange de deux corps identiques; par ce moyen, il m'était possible d’obtenir la va- leur de la quantité y à une température déterminée.
LEYDE, Novembre 1888.
Note additionnelle. M. Parker !) vient de décrire un cycle fermé dans lequel une série de conducteurs est traversée dans une seule direction par une charge électrique et par l'étude duquel il trouve que la constante © de la formule (26) doit avoir pour tous les métaux la même valeur.
Janvier 1889,
1) Phil. Mag. Ser. 5, Vol. 27, p.72.
LES BACTÉRIES POURPRÉES ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE,
PAR
Th. W. ENGELMANN.
Il y a quelques années, j'ai décrit ') une Bactérie rouge, mobile, que sa faculté de distinguer nettement les radiations lumineuses d’intensité et de longueur d’onde différentes sé- parait de tous les autres Schizomycètes étudiés jusqu'alors dans leur réaction par rapport à la lumière; je lui avais donné, en conséquence, le nom de PBacterium photometricum. Dès cette époque, plusieurs faits tendaient à faire croire que l'influence de la lumière sur les mouvements s’exerçait essen- tiellement par l’intermédiaire de la matière colorante et, en même temps, que cette matière agissait comme assimilatrice, à la façon d’une vraie chromophylle. Le défaut de matériaux suffisants m'avait empêché, toutefois, de poursuivre cette étude. Mais, depuis le commencement de l'été de 1887, je dispose de grandes quantités de Bact. photometricum ; en outre, MM. Eugène Warming de Copenhague, Sergius Winogradsky de Stras- bourg et W. Zopf de Halle ont eu la bonté de m'envoyer des échantillons d’eau douce et d’eau de mer contenant beau- coup d’autres formes de Schizomycètes remarquables par la présence de la même matière colorante, et de M. F. Hueppe, de Wiesbaden, j'ai reçu des cultures pures de Spirillum rubrum
1) Onderzoekingen gedaan in het physiol. labor. der Utrechtsche Hoo- geschool, (3), VII, 1882, p. 252—290, PI. IV. Pflüger, Arch. f. d. ges. Physiologie etc. 30r Bd., 1883, S, 95—124, Taf I,
152 TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
Esmarch. Grâce à ces nouveaux matériaux, j’ai pu combler maintes lacunes de mes recherches antérieures. Des résultats obtenus les plus importants ont été communiqués à l’Aca- démie des sciences d'Amsterdam, séance du 24 décembre 1887, et publiés en extrait dans l’Archiv de Pflüger, T. 42, p. 183 !).
Les formes dont J'ai pu étudier les relations avec la lumière sont, en majeure partie, connues, figurées et décrites depuis longtemps, sous les noms de Bacterium photometricum Engelm., roseo-persicinum Cohn, rubescens Ray Lankaster, sulfuratum Warming, Peggiatoa roseo-persicina Zopf, Clathrocystis roseo- persicina Cohn, Monas Okeni Ehrenberg, vinosa Ehrenberg, Warmingi Cohn, Ophidomonas sanguinea Eb., Rhabdomonas
rosea Cohn, Spirillum rubrum Esmarch, violaceum Warming.
Aux descriptions des auteurs antérieurs je n’ai rien à ajouter d’important pour la question qui nous occupe, de sorte que, sous le rapport morphologique, je renvoie aux mémoires et figures déjà publiés, notamment à ceux de MM. Cohn ?) Ray Lankaster *), Eug. Warming ‘) et W. Zopf ‘). Je laisse de côté aussi le point de savoir si toutes les formes exami- nées rentrent dans le cercle d’une espèce unique ou d’un petit nombre d’espèces, ou si elles constituent autant d’espèces différentes. La plupart, sinon toutes, font partie des orga- nismes dont M. Winogradsky f) a récemment étudié de plus
1) Voir aussi: Biol. Centralblatt, 1888, N°. 2.
2) F. Cohn, Untersuchungen über Bacterien, dans Beitr. z. Biologie der Pflanzen, Bd. 1, Heft 3, Breslau, 1875. — The peach-coloured Bacterium, dans Quart. Journ. of microsc. Sc., Vol. XIV, 1874, p. 399.
3) Ray Lankaster, On a peach-coloured Bacterium, with plates XXII and XXIIL dans Quart. Journ. of micr. Sc., Vol. XIII, 1873. — Further observ. on à peach-colour. Bact. Ibid., Vol. XVI, 1876.
3) Eug. Warming, Om nogle ved Danmarks Kyster levende Bacterier. Med fire Tavler. Videnskabelige Meddelelser fra den naturhistorische Forening i Kjôbenhavn, 1875, Nr. 20—28.
5) W. Zopf, Zur Morphologie der Spaltpflanzen, Leipzig 1882.
6) S. Winogradsky, Die Schwefelbacterien, dans Botan. Zeitg., 1887, Nr. 31—37.
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 153
près ies phénomènes nutritifs et qu’il à réunis sous le nom de ,Bactéries sulfureuses””, organismes qui, d’après les obser- vations de cet auteur, confirmées par les miennes, se rem- plissent, en contact avec l’hydrogène sulfuré, de granules de soufre. Tous sont colorés d’une manière plus ou moins intense par une matière rouge pourpre diffuse dans le protoplasme, la bactériopurpurine, que M. Lankaster a le premier caracté- risée avec précision; tous aussi, vis-à-vis de la lumière, se comportent sous tous les rapports essentiels comme je l'ai décrit antérieurement pour ie Bacterium photometricum. Leur réaction spéciale vis-à-vis de la lumière n’est pas liée à la présence ou à l’absence du soufre ou de l’hydrogène sulfuré, mais dépend exclusivement, ainsi que je l'ai reconnu, de l’existence de la bactériopurpurine. Il convient done, semble- t-il, de les séparer, sous le nom de ,Bactéries pourprées” ou de Schizomycètes pourprés, des Bactéries sulfureuses dépour- vues de matière colorante et ne réagissant pas à la lumière. De celles-ci, j’ai pu examiner surtout, comme termes de com- paraison, les Beggiatoa alba et mirabilis.
Influence de la lumière sur les Bactéries pourprées.
Comme on le sait, la plupart des formes ci-dessus nom- mées se déplacent vivement, au moins pendant un certain temps. Les Beggiatoa filamenteuses rampent, à la façon des Oscillariées, sur un support solide; les formes globuleuses, en bâtonnet et en hélice, telles que Bact. photometriçum, Mo- nas Okeni, sulfuratum, Ophidomonas sanguinea, Spirillum rubrum, violaceum, nagent librement dans l’eau en tournant constam- ment sur elles-mêmes, au moyen d’un flagellum (rarement de plusieurs) naissant à l’extrémité antérieure ou, dans les stades de divisions, aux deux extrémités du corps. C’est dans ces derniers mouvements, ceux de natation çà et là, que
154 TH. W. ENGELMANN. LES PACTÉRIES POURPRÉES
l'influence caractéristique de la lumière se manifeste de la manière la plus frappante.
Cette influence, très diverse et compliquée, présente assez souvent, chez des formes différentes, des différences de plu- sieurs sortes, ordinairement quantitatives, et elle peut aussi, chez une même espèce, voire chez un même individu, varier avec les conditions extérieures. En gros, les effets de la lu- mière sont, chez toutes les espèces, semblables à ceux que j'ai jadis fait connaître en détail pour le Bacterium photometricum.
Cela s’applique, en premier lieu, à l'influence de la lumière sur la rapidité des mouvements.
En cas d'éclairage constant et un peu prolongé, pendant une minute au moins, le mouvement est en général, entre d'assez larges limites, d'autant plus rapide que l'intensité lumineuse est plus forte. Le fait devient frappant surtout lorsque la ventilation est défectueuse, par exemple, dans des gouttes hermétiquement emprisonnées, depuis quelque temps, sous le couvre-objet. Assez souvent on réussit alors à rendre la vitesse plusieurs fois plus grande ou plus petite. Neanmoïns, suivant l’espèce et l’individualité, de nombreuses gradations s’observent. À température égale et dans des gouttes toutes pareilles, certaines formes atteignent déjà le maximum de vitesse avec un éclairage beaucoup plus faible que celui qui est nécessaire pour d’autres. Cette vitesse maxima est en somme, comme il résulte de communications antérieures, assez grande: elle se mesure par centièmes de millimètre par seconde. Les Bactéries pourprées, dans l’état errant, sont au nombre des Schizomycètes à mouvements rapides.
Dans l’obscurité complète, à la température ordinaire, toutes les formes finissent généralement par tomber en repos (engourdissement par l'obscurité). Mais le temps que cela exige peut osciller, selon l’espèce, l’individualité et les con- ditions expérimentales particulières, entre quelques secondes et quelques jours. Aïnsi, par exemple, le B. photometricum abondamment pourvu d'oxygène arrivait ordinairement, dans
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 155
l'obscurité, plus lentement au repos que lorsqu'il y avait pénurie de ce gaz. Le fait était moins saillant pour Bact. sulfuratum, Okeni et Onhidomonas sanguinea. D'autre part, la présence d’un peu d'hydrogène sulfuré dans la goutte retar- dait fréquemment l’arrivée à l’engourdissement par l’obscurité (effet constaté chez B. photometricum, Okeni et sulfuratum).
L'accès de la lumière fait en général cesser l’engourdisse- ment dû à l'obscurité, lorsque celui-ci n’a pas duré trop longtemps, et ce résultat se produit, de nouveau suivant l’espèce, l’individualité et les autres conditions, tantôt en moins d’une seconde, tantôt au bout de plusieurs minutes seulement, où même encore plus tard. J’ai appelé ce temps le stade de l’induction photocinétique.
Lorsque l’engourdissement n’était survenu que depuis peu, depuis quelques minutes par exemple, il suffisait souvent, pour réveiller l’organisme, de l’action, durant un petit nombre de secondes, d’une lumière du jour diffuse et excessivement faible. C’est ce que j'ai vu, en particulier, chez le Monas Okeni, ét fréquemment aussi chez le Bacterium photometriçum. Les expériences de ce genre doivent donc se faire dans une chambre obscure, ou dans une caisse obscure. Pour l'éclairage, on peut recommander spécialement l'emploi de la lumière électrique par incandescence, dont mon petit rhéostat à vis (Lachischraube) permet de faire croître commodément l’inten- sité, à partir de zéro, par degrés insensibles. Pour des raisons qui seront mentionnées plus loin, il convient, lors des obser- vations sur la suppression de l’engourdissement dû à l’obscurité, d’intercaler entre la source lumineuse et l’objet un verre vert, afin d’affaiblir les rayons ultra-rouges !).
1) Die Widerstandschraube. Ein neuer Rheostat, dans Onderzoek, etc. (3), X, p. 169 (1888). — Zeitschr für Instrumentenkunde, NII, Jahrg., 10, Heft, p. 303 (1887). — Le rhéostat à vis, dans Archiv. néerl.T. XXI, p. 91.
La maison Greiner et Friedrichs, à Stützerbach, fournit de petites lampes à incandescence en verre vert, qui avec 2 ou 3 très petits éléments de Grove donnent une lumière suffisamment forte et constante.
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Lorsqu'un éclairage passager à mis fin à l’engourdissement par l'obscurité, les mouvements continuent encore quelque temps même après un nouvel obscurcissement: c’est le phé- nomèrne que J'ai décrit antérieurement comme action photo- cinétique résiduelle. Cette action résiduelle est, chez une même espèce, en général. d'autant plus prolongée que l'éclairage passager a eu une durée plus longue et une intensité plus grande. Les choses, on le voit, se passent comme si la lumière déterminait la production, en une certaine quantité, d’une substance nécessaire au mouvement et qui dans l’obscurité serait consommée peu à peu.
Les Bactéries pourprées peuvent toutefois être amenées aussi au repos par l'action longtemps continuée d’une lumière constante, et dans ce cas l’obscurcissement à souvent pour effet de les ranimer. C’est ce que j’ai constaté fréquemment sur- tout chez B. photometricum, B. Okeni, Ophidomonas sanguinea, et d’autres espèces. Parfois elles entrent en repos plus facilement ou même exclusivement sous l’influence d’une lumière très faible, mais le plus souvent c’est sous l’action d’un éclairage intense. Je n'ai pas réussi à découvrir les conditions particulières dans lesquelles l’un ou l’autre de ces cas se présente. La même espèce se comportait, à des moments différents, d’une manière différente.
L'une des actions les plus constantes, et en tout cas la plus frappante, est celle qui se manifeste par la réaction que j’ai dé- crite précédemment sous le nom de ,mouvement de frayeur.” Quand on fait décroîtresubitement l’intensité lumi- neuse (en couvrant en partie le miroir, en fermant le robinet de la conduite du gaz, en relâchant la vis du rhéostat, etc.), les formes qui nagent librement se rejettent tout à coup en arrière, en même temps que la rotation de leur corps se renverse, et le recul atteint souvent de dix à vingt fois leur longueur. Si l’affaiblissement de la lumière persiste, les Bac- téries reprennent ensuite le mouvement progressif habituel, avec une vitesse qui d'ordinaire, dans les premiers moments,
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 157
n’est que peu diminuée. Il va sans dire que leur mouve- ment se rétablit aussi dans le cas où on leur restitue plus de lumière.
La sensibilité au décroissement brusque de l’intensité lumi- neuse est, quant au degré, très variable chez le même individu, suivent les conditions où s'exécute l’expérience. Dans une goutte non couverte et par conséquent riche en oxygène, cette sensibilité paraît être, chez toutes les espèces, moindre qu'en cas de ventilation imparfaite, après un long séjour sous le couvre-objet. Dans ce dernier cas il suffit donc, pour pro- voquer le mouvement de frayeur, de variations lumineuses plus faibles et plus lentes que celles qui sont nécessaires dans le premier cas. Bien que n’ayant pas fait de mesures exactes — qui d’ailleurs n'offriraient aucune difficulté, — je puis dire avec certitude que, dans les cas favorables, un affaiblissement de l’intensité lumineuse égal seulement à quelques centièmes de la valeur primitive, pourvu qu'il s'achève en une petite fraction de seconde, produit une excitation très nette. En soulevant le couvre-objet, on déterminait chez toutes les espèces une diminution marquée de la sensibilité, sans toutefois l’abolir complètement.
Les différents individus de la même espèce, observés dans des conditions en apparence identiques, au sein d’une même goutte, dans le même lieu, au même instant, sont souvent à des degrés très divers susceptibles de s’effrayer. Encore que la plupart présentent d'ordinaire une réaction moyenne égale, se trouvent en quelque sorte à un diapason moyen, tempéré, il y à presque toujours, tout à côté, quelques exem- plaires ,apathiques” et quelques ,nerveux.” Bien plus, il semble que la susceptibilité d’un même individu soit soumise à des variations sans causes extérieures distinctement appré- ciables, de source purement interne. Ce qui est certain, c’est qu’elle peut être diminuée passagèrement par la frayeur elle- même, comme le montre une seconde excitation, égale à la première et la suivant de très près. Cette dépression transi-
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. toire pouvait, chez B. photometricum et Monas Okeni par exemple, persister pendant plusieurs secondes. Il va sans dire que l’espèce, l’individualité, la force de l’excitation, la pause de l’excitation et d’autres circonstances encore influent sur la durée absolue de cette , fatigue.” Je n’ai toutefois pas examiné le phénomène d’une manière assez systématique pour pouvoir donner ici plus que ces indications générales.
Aucun rapport simple et net n’a pu être saisi entre la facilité à s’effrayer et le degré de saturation du proto- plasme par la bactériopurpurine, bien que, en général, les formes et individus riches en matière colorante aient paru réagir plus fortement.
Un accroissement tout à fait remarquable de la suscepti- bilité était accusé par le Monas Okeni, lorsque, à la suite d’un séjour de vingt-quatre à quarante-huit heures sous le couvre- objet dans de l’eau exempte d'hydrogène sulfuré, les inclusions sulfureuses avaient disparu et que le protoplasme coloré était devenu entièrement transparent. Le fait s'explique peut-être par la simple considération que la lumière pouvait alors mieux pénétrer dans le protoplasme coloré et excitable. Il nous apprend d’ailleurs que l’excitabilité n’est pas liée, d’une façon appréciable, à la présence du soufre ou de l’hydrogène
sulfuré. Cette conclusion est confirmée par la circonstance
que certaines Spirilles de la forme du Spirillum undula, extrè- mement pauvres en purpurine, mais toujours, paraît-1l, exemp- tes de soufre, de même que le Spir. rubrum Esmarch et le Bact. photometricum, d’ordinaire complètement dépourvu de soufre, montraient un haut degré de sensibilité à tout affai- blissement brusque de la lumière.
L’accroissement subit de l’intensité lumineuse accélère en général le mouvement progressif normal, si celui-ci n’était pas encore à son maximum.
Des faits qui viennent d’être mentionnés il résulte qu’un espace nettement circonscrit et constamment éclairé, dans une goutte partout ailleurs complètement obscure, agit comme
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un piège sur les Bactéries pourprées. Elles peuvent bien y entrer, puisque l’augmentation brusque de l'intensité lumi- neuse, au moment où elles franchissent de dehors en dedans la limite de cet espace, n’a d’autre effet que de favoriser leur mouvement en avant. Mais elles ne peuvent pas en sortir, puisque le décroissement subit de clarté, lors du passage de dedans en dehors, provoque immédiatement un mouvement de frayeur, qui ramène les Bactéries dans le champ éclairé. Quand il s’agit de formes à dimensions assez grandes, telles que Monas Okeni, Ophidomonas sanguinea, la pénétration de la partie antérieure du corps dans l’espace obscur est souvent déjà suffisante pour déterminer le recul. Les organismes plus petits et à mouvements rapides ne rétrogradent ordinairement qu'après l’entrée complète. Au reste, des modifications variées peuvent se produire dans les caractères particuliers de la réaction, suivant la valeur de la différence de clarté, l’agilité et l’excitabilité des individus, leur forme et leur taille ; mais, eu égard au but essentiel du présent travail, il est inutile de décrire ces modifications secondaires. Chez ceux de ces organismes errants qui sont réunis en groupes, par exemple chez les formes ,morula” du Clathrocystis roseo-persicina, les- quelles nagent lentement çà et là en tournant sur leur axe, la réaction, bien que parfaitement distincte, est le moins prononcée; d’eux-mêmes, en effet, ces groupes chan- gent continuellement de direction, et, d’autre part, les indi- vidus qui les composent ne franchissent pas simultanément, mais l’un après l’autre, la limite de la lumière et de l’ob- securité. |
Pour ces expériences, le microscope doit être placé dans la caisse obscure ou dans une chambre obscure. Comme piège à lumière, je me suis servi soit de l’image, formée à l’aide du condenseur d’Abbe, de l’arc lumineux d’une petite lampe à incandescence (de préférence avec parois planes) mise à la place du miroir, soit de l’image, formée de lamême manière,
d’une ouverture pratiquée dans un écran opaque qu’on dis- 11*
160 TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
posait entre la source lumineuse et le miroir du microscope. L'écran consistait en un disque de verre recouvert de tain. Dans ce tain était découpée l’ouverture. Pour éviter les images mul- tiples, inégalement lumineuses et empiétant l’une sur l’autre, que produit le miroir en verre plan des microscopes, j’em- ployais souvent, au lieu d’un pareil miroir, un prisme à réflexion totale.
Quand le piège à lumière est laissé indéfiniment en place, il arrive fréquemment que les Bactéries pourprées, prises au piège, entrent en repos au bout d’un certain temps, — variable depuis quelques minutes jusqu'à quelques heures et quelques jours, — si la goutte est emprisonnée hermétiquement. L’éclairage doit toutefois rester constant pendant toute la durée de l’exposition. Souvent le repos s'établit plus facilement sous l’action d’un éclairage très intense, mais parfois aussi il était plus facile de l'obtenir avec une lumière faible. La tem- pérature était toujours à peu près la même, 12—16° C. Les Bactéries s’appliquent alors sur le fond de la goutte et à la face inférieure du couvre-objet. Plus longtemps elles sont restées ainsi immobiles, plus difficilement elles se remettent ensuite en mouvement, quand l'éclairage vient à changer. Parfois je trouvais encore des traces de leurs accumulations après un intervalle de plusieurs jours, pendant lequel le porte-objet, découvert, avait êté abandonné à la lumière diffuse du ciel ou à l’obscurité.
Les rassemblements de Bact. photometricum se maintenaient aisément, sans aucune modification, pendant quelques minutes au moins. Cela donnait la possibilité de les fixer. A cet effet, je les chauffais par une courte immersion dans une flamme de gaz. Ensuite, elles se laissaient encore teindre, en place, par différentes matières colorantes (violet de méthyle, éosine, safranine, etc.) On obtient ainsi des ,bactériogrammes” très démonstratifs, surtout si l’on donne au piège à lumière une forme caractéristique (par exemple, celle d’une lettre d’alpha- bet, d’un chiffre, d’une croix) et des dimensions macrosco-
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 161
piques. Dans la séance du 24 déc. 1887 de l’Académie d'Amsterdam, j'ai fait voir quelques lettres (B, W, 2), de la grandeur de caractères d'imprimerie ordinaires, ainsi écrites par des Bactéries.
Pouvoir de distinction des Bactéries pourprées pour la lumière de longueurs d'onde | différentes.
De même qu’agissent les différences et les variations de l’intensité lumineuse, ainsi agissent aussi les différences de la longueur d’onde de la lumière. Et, sous ce rapport encore, toutes les formes ci-dessus nommées, dont j'ai fait l'examen, se comportent comme je l'avais déjà trouvé et décrit en détail pour le Bact. photometricum. Chez elles aussi, la sensibilité aux différences de longueur d’onde dépend de l’espèce, de lin- dividualité et des circonstances extérieures, dans le même sens qu'en dépend la sensibilité aux différences d’intensité de la lumière monochromatique ou mélangée.
D’après cela, toutes les Bactéries pourprées distinguent de l'obscurité, non seulement l’ensemble des rayons que l’œil humain perçoit comme lumière, mais en outre, et même avec une netteté spéciale, certaines radiations ultra-rouges, invisibles pour nous. En effet, dans le microspectre !) de la lumière solaire, de la lumière du gaz et de la lumière électrique par incandes- cence, les formes mobiles s'accumulent avec une prédilection particulière dans l’ultrarouge allant environ de À 0,90 à 0,80. Elles se rassemblent en quantité moindre dans une zone étroite de l’orangé et du jaune, comprise entre 2 0,61 et 0,58; puis, à un degré rapidement décroissant, dans le vert, environ entre À 0,55 et 0,52, dans le bleu et le violet; enfin, le moins, dans le rouge,
1) Pour ce qui concerne la technique de ces expériences, je renvoie à ce que j'en ai dit, loco cit., à propos du Bact. photometricum.
162 TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
environ entre 0,75 et 0,64, dans l’ultra-rouge, environ au-delà de À 1,0, et dans l’ultra-violet. Cette distribution inégale se laisse aussi fixer de la manière ci-dessus indiquée, vu que, si l’in- tensité lumineuse et la pureté du spectre restent constantes, les formes mobiles finissent par entrer en repos à l’endroiït où elles se sont rassemblées. On obtient ainsi, sous le couvre- objet, un ,bactériospectrogramme”, c’est-à-dire, une image du spectre d’absorption dessinée par les Bactéries elles-mêmes. Examinée à la lumière transmise, cette image laisse voir une bande très obscure et nettement limitée (le lieu de l’accu- mulation la plus dense) dans l’ultra-rouge entre À 0,90 et À 0,80, une seconde bande moins foncée, dont la limite est plus tranchée du côté du rouge que du côté du vert, et, dans les cas favorables, l'indication d’une large bande estompée dans le vert, environ entre 0,55 et 0,52. Avec des cultures pures de Bact. photometricum, ces spectrogrammes pouvaient facilement être produits, en dimensions macroscopiques, dans l’espace de quelques minutes. Je me servais pour cela de l'appareil d’éclairage de Hartnack pour la lumière mono- chromatique, appareil dont le spectre, projeté par le conden- seur sur le porte-objet, avait environ 1 cm. de longueur dans la partie visible, sur 6 mm. de hauteur. Comme source lu- mineuse fonctionnait le brûleur à gaz de Sugg, déjà souvent mentionné dans mes travaux antérieurs, et dont la flamme était maintenue constante par un régulateur d’Elster. Un de ces spectrogrammes a été présenté, le 24 décembre 1887, à l’Académie d'Amsterdam. — Pour la détermination précise du lieu des accumulations macroscopiques j’employais des porte-objet à échelle gravée sur le verre.
On reconnaît immédiatement que l’image de ces spectro- grammes, pour la partie visible du spectre, concorde très exactement avec celle du spectre d'absorption de la bacté- riopurpurine, tel qu'il a été donné en premier lieu par M. Ray Lankaster, puis par M. Eug. Warming et par moi-même. Les maxima et minima de l’accumulation coïncident osten-
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 163
siblement avec les maxima et minima de l’absorption. On est donc naturellement conduit à conclure, comme je l'ai déjà fait antérieurement, qu'entre l’absorption de la lumière par la matière colorante pourpre du plasma vivant et la gran- deur de l’action lumineuse sur les mouvements des Bactéries pourprées il existe une proportionnalité directe.
Pour contrôler la justesse de cette conclusion, deux choses, toutefois, étaient encore nécessaires. D’abord, l'absorption aux divers points du spectre visible de la bactériopurpurine de- vait être ‘mesurée réellement, ce dont le microspectromètre !) offrait le moyen. Ensuite, il fallait s'assurer si la proportion- nalité entre l’absorption et l’action physiologique se mainte- nait aussi dans la partie invisible ultra-rouge, dans ce qu’on appelle le spectre calorifique obscur. Pour cette dernière vé- rification, le procédé bolométrique de Langley paraissait apte à fournir les données nécessaires.
Examen spectroscopique de la couleur des Bactéries pourprées.
La couleur des Bactéries pourprées vivantes présente, même abstraction faite d’inégalités de saturation, des différences assez notables, ainsi que l’ont déjà remarqué les observateurs an- térieurs. ?) Tantôt elle est d’un pourpre rougeâtre, tantôt d’un pourpre bleuâtre, d’autres fois encore elle tourne au brunâtre. On a donc indubitablement affaire, comme chez la chloro- phylle vivante, non pas à un seul corps chimique, mais à
1) On trouvera la description et la figure de cet instrument dans: Onderzoekingen etc. D. XI p.38 et PI. I; Arch. néerl.,T. XXIII, p. 82 et PI. IV. Voir aussi: Zeitschr. f. wiss. Mikrosk., V, 3 Lief., 1888. Pour la méthodique, comp. Onderz. ete. (3), IX, p. 1, et X, p. 153.
2) Voir surtout: E. Warming, Vidensk. Meddel. f. d. nat. For. i. Kjô- benhavn, 1875, No. 28; p.12 du tiré à part.
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un mélange variable de plusieurs matières colorantes, de deux au moins.
En général, le ton incline plus au pourpre bleuâtre dans les états de végétation vigoureuse, et plus au brunâtre en cas de végétation misérable. Toutefois, il y à aussi — de même que chez les plantes vertes — des différences spéci- fiques. C’est ainsi que je n’ai jamais vu le PBact. photometri- cum, même dans les conditions de végétation les plus favo- rables, devenir d’un pourpre aussi bleuâtre que les Monas vinosa et Okeni. La couleur restait toujours plus rougeûtre. Ce qui est certain, c’est que, lors de la mortification sous l’action de différents agents, la couleur pourpre fait fréquem- ment place à un ton rouge brunâtre passant au brunâtre pur. Tel est le résultat de l’addition de chloroforme, d'acide acé- tique ou d’acide chlorhydrique. En cas de dessiccation rapide sur le porte-objet à une chaleur modérée (50—70°), ou d’im- mersion dans la glycérine concentrée, la couleur se conser- vait sans altération; ces conditions sont les mêmes dans lesquelles, selon mes expériences !), la chlorophylle des Algues vertes n’éprouve non plus aucune modification sen- sible de sa couleur. Aussi ne se produisait-il pas dans ces cas — autre concordance avec ce qui a lieu pour la chlo- rophylle — de déplacement des bandes d’absorption, comme il arrive lors de la dissolution de la matière colorante ?).
1) Die Farben bunter Laubblätter etc , dans Bot. Ztg 1887, Nr.27,— Onderz. physiol. lab. Utrecht, (3), X, p.122, Aanm. 2. — Les couleurs non vertes des feuilles, dans Arch. néerl. d.s.ex. et nat. XXII, p.1.
2) Lorsque je continuais à chauffer les accumulations de Bact.-photo- metricum desséchées sur le porte-objet, la couleur passait insensiblement au brun pur, pour devenir, en cas de température encore plus élevée (au-dessus de 200° C), brun verdâtre et même vert sale. A l'œil nu, cette couleur verte se distinguait à peine de celle des accumulatious d’Algues vertes (Zoochlorella) desséchées et chauffées de la même manière. Mais le spectroscope révélait des différences très importantes. En parti- culier, la bande d’absorption entre B et C, caractéristique pour la chlo- rophylle et fortement accusée dans le second des deux cas ci-dessus,
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 165 .
Les accumulations de Pact.-photometricum, Monas vinosa, Clathrocystis roseo-persicina, etc., rapidement desséchées à une température d’environ 50°, conservèrent encore leur colora- tion normale, comme l’attestait le spectromètre, après qu’elles eurent été humectées d'huile d'olive pure ou immergées dans du baume de Canada pur, non étendu de chloroforme. Re- couvertes d’une lamelle de verre et abandonnées à la lumière, de pareilles préparations ont déjà passé plus d’une année, sans que leur couleur ait subi la moindre altération !). Le second des deux procédés indiqués a encore le grand avantage de réduire notablement les différences de réfraction, gênantes pour l'examen spectrométrique, entre le milieu am- biant et le corps des Bactéries, et de rendre l’intérieur de ce corps optiquement plus homogène.
Sur un assez grand nombre de ces préparations, faites à différentes époques avec le Bact. photometricum, j'ai déterminé l'allure de l'absorption, et toujours je l’ai trouvée la même, dans ses traits essentiels. Dans le Tableau suivant et dans la Fig 1, les nombres des colonnes I, IT, III et les ordon- nées correspondantes indiquent les intensités (J) des diffé- rentes longueurs d’onde transmises par la préparation, ces intensités étant exprimées en centièmes de l’intensité de la
faisait absolument défaut dans le premier. La couleur brune qui apparaît avant la couleur verte et qui, de même que celle-ci, persiste lors du re- froidissement et se conserve inaltérée après inclusion dans le baume pur, se comportait aussi, à l'examen spectroscopique et spectrométrique, tout autrement que la chlorophylle décomposée. Les bandes d'absorption carac- _téristiques y manquaient complètement Dans la colonne IV du Tableau I (voir p. 166), j'ai inscrit les résultats des mesures de l'absorption du vert obtenu par l’action de la chaleur sur la bactériopurpurine, et dans la colonne V sont donnés, comme termes de comparaison, les résultats fournis par la chlorophylle Zoochlorella desséchée) traitée de la même maniere. |
1) I en est de même, soit dit en passant, de préparations d’Aleues vertes (Palmellacées) qui avaient été faites de la même manière et au même moment.
. 166 TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
TABLEAU I. je ca gro gt ue tt = III IV ol au V en O0 O1 u
70 67.0 99.0 1.5 25.0 62.1 68 69.0 63.0 35 Mi 24.0 36.0 66 — — 60.0 28.0 20.0 65 69.0 66.0 | 2L ue | _ 64 67.0 65.0 59.0 39.0 48.5 63 64.5 62.0 — _— — 62 09.5 55.0 59.2 28.0 48.0 61 46.5 45.0 —— _ + 60 29.0 FR 26.0 26.0 57.0 09 24.5 23.0 13.9 29,0 60.5 D8 28.0 26.0 16.5 30.0 62.0 07 39.0 30.0 — 25.0 60,5 56 36.0 31.0 18.0 24 .0 56.7 32 39.0 26.5 — 19.5 52.5 54 23.3 18.0 12.9 19.0 51.0 D3 16.0 FT:9 — HS 47.7 “y 14.5 11.0 10.0 23.5 43.5 o1 15.0 9.0 — 25.0 32.0 50 11.5 7.0 9.0 22.5 30.5 49 9.9 6.0 — 20.5 27:5 48 k 12.5 6.5 9.0 24.0 25.0 A6 16.0 10.0 10.0 19.0 18.5 44 20.0 47.0 18:65 6.0 9,92 49 220 | 9277 1179 . _— 9.5
lumière incidente de même longueur d’onde. On voit que dans le rouge visible extrême l'intensité est très forte, et qu’elle s'élève encore du côté de l’orangé, pour atteindre environ entre À 0,68 u et 0,64 son maximum absolu. Ensuite elle s’abaisse avec une vitesse rapidement croissante, surtout à partir de 40,63 environ, pour atteindre vers À 0,59 un pre- mier maximum (bande d’absorption en D); puis elle se relève
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 167
jusqu'en 40,56, pour retomber bientôt encore plus bas que précédemment (bande d’absorption entre 0,55 et 0,52), et, après un léger et bref relèvement vers 0,51, atteindre le minimum absolu dans le vert bleuâtre, un peu avant F près de 0,49 (troisièmé bande d’absorption, extrêmement faible). À partir de ce point, vers l’extrémité violette du spectre, l'intensité croît de nouveau assez notablement,
Les différences observées dans l'allure de l’absorption de la bactériopurpurine ne concernent pas, comme il ressort le plus clairement de la Fig. 1, le sens dans lequel l’absorption
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varie d’une longueur d’onde à l’autre, mais seulement la valeur absolue et relative de ces changements.
En gros, les trois courbes marchent donc à peu près pa- rallèlement. Bien que très rapprochées, elles ne se coupent nulle part, sauf à leur extrémité dans le bleu. Néanmoins,
168 TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
en d’autres parties encore de leur parcours, les écarts sont assez grands pour qu’on ne puisse les attribuer qu’à des différences de composition du mélange de principes colorants. C’est ainsi que le n°. 3, avec à peu près autant de jaune orangé et à peine moins de vert bleuâtre que le n°. 2, con- tient notablement moins de vert jaunâtre et de rouge que celui-ci. L'accord est plus grand entre les n°. 1 et 2. Des écarts analogues se rencontraient dans tous les autres cas que j'ai examinés. Ils éxpliquent suffisamment pourquoi la couleur oscille, ainsi qu'il a été dit plus haut, entre le brun rougeûtre et le pourpre bleuâtre. Communiquer les résultats de toutes les mesures particulières serait inutile, au point de vue du présent travail. Je me bornerai à faire connaître encore (Tableau IT), pour quelques points caractéristiques du spectre d'absorption du Bacteriwm photometricum, les valeurs des con- stantes locales !), calculées au moyen des coefficients d’ex- tinction. Je ne donne que les valeurs moyennes (Z) de ces constantes locales, en y joignant l'écart moyen (A), par rapport à ces valeurs moyennes, des valeurs particulières, et, entre parenthèses, le nombre des objets examinés. Ceux-ci absor- baient, surtout à cause de leur épaisseur différente, avec une force très inégale; les coefficients d’extinction individuels avaient par suite, pour les mêmes longueurs d’onde, des valeurs très différentes.
TABLEAU Il. LE = 0,778 A—0,066 (8) 5 en D = — 2,872 , , 0,413 (12) L a — 0,777 , , 0,043 (11) L me 1939 0243 (10)
1) 3. Reinke, Photometrische Untersuchungen über die Absorption des Lichtles in den Assimilationsorganen, dans Bot. Ztg., 1888, No. 9.
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 169
Malgré les écarts assez notables à la moyenne, que les constantes locales présentent, comme on devait s’y attendre, dans les déterminations isolées, les valeurs ci-dessus semblent pourtant suffire à caractériser objectivement la bactériopur- purine.
En comparant maintenant les résultats de l’analyse chroma- tique quantitative avec ce que j'ai dit antérieurement, ainsi que ci-dessus, de l’influence de la partie visible du spectre sur les mouvements de nos organismes, on ne saurait mécon- naître qu'ils confirment en général la proportionnalité, pré- sumée d’après les premières apparences, entre l’absorption et l’action physiologique. Si l'on considère comme mesure de cette action physiologique la densité de l’accumulation des organismes mobiles dans un spectre suffisamment pur et brillant, telle que je l’ai décrite et figurée dans mon Mémoire sur le Pacterium photometricum (Onderzoek., (3), VII, PL IV, fig. 4 et 5, 1882), et si l’on tient compte de la distribution de l'énergie et de l'inégalité de la dispersion dans le spectre de l’appareil employé, distribution et inégalité que j’ai déter- minées lors d’une occasion antérieure, on peut au moins déclarer hardiment que les mesures prises ne sont sur aucun point en contradiction avec l’hypothèse dont il s’agit.
Aïnsi, il est tout naturel que dans la partie visible du spectre de la lumière du gaz l’accumulation de beaucoup la plus forte se produise dans le jaune orangé et le jaune près de D, environ entre 40,61 et 4 0,58 «, puisque non seulement l'absorption est ici très forte, mais que, en outre, l’énergie originelle des rayons lumineux y est encore grande. Eu égard au très rapide affaiblissement de l’énergie dans le spectre de la lumière du gaz, de l’extrémité rouge à l’extrémité bleue, affaiblissement au sujet duquel tous les physiciens sont una- nimes et que moi-même j'ai pu constater, non seulement par la méthode des Bactéries, mais aussi, récemment, d’aprês le procédé bolométrique de Langley (voir plus loin); eu égard ensuite à l'accroissement rapide de la dispersion du côté
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de l'extrémité violette, — il n’y a pas lieu d’être surpris que dans le vert bleuâtre, entre À 0,52 et 0,54 environ, l'accumulation soit beaucop moindre qu’en D, bien que l’absorption y atteigne son maximum absolu. La quantité d'énergie reçue par l’unité de surface de l’objet est ici telle- ment affaiblie, que le léger surcroît d'absorption ne suffit pas, à beaucoup près, pour compenser cette perte d'énergie. Les mêmes raisons expliquent pourquoi la délimitation du ras- semblement en D est, du côté du vert, relativement tranchée et frappante, bien que du jaune au vert la diminution de l'absorption, tout en étant parfaitement évidente, ne soit pas très considérable. La faiblesse de l’action du rouge, entre À 0,64 et 0,68 environ, trouve une explication satisfaisante dans la très faible valeur de l’absorption, qui à ici son mi- nimum; et ainsi de suite. : Quant à cet autre résultat, que dans le spectre de la lumière solaire la distribution des organismes mobiles (Loc. cit., fig. 5) est un peu différente, en ce sens que les accu- mulations décroissent moins rapidement du jaune au bleu et que par conséquent, à égalité d’accumulation dans le jaune, le bleu et le violet agissent très sensiblement plus que les mêmes couleurs dans la lumière du gaz, — ce résultat est lui-même en complet accord avec le fait, ressortant de toutes les recherches et facile à prévoir d’ailleurs par la simple comparaison de la couleur de la lumière du gaz avec celle de la lumière du jour, que dans le spectre du soleil l'énergie diminue beaucoup moins rapidement, du jaune au bleu, que dans le spectre de la lumière du gaz.
La plus belle confirmation de notre hypothèse, toutefois, est celle qui se tire de la
Mesure de absorption des rayons calorifiques obscurs dans les Bactéries pourprées.
L'action extrêmement vive des rayons ultra-rouges, entre 0,80 et 0,90 » environ, devait évidemment faire présumer, en
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 171
cet endroit du spectre obscur, l’existence d’une absorption particulièrement forte, d’une bande d'absorption particu- lièrement foncée, s’il est permis de s'exprimer ainsi. Le contrôle expérimental de cette présomption, qui m'avait été interdit précédemment, était maintenant devenu possible, vu que, d’une part, les quantités de Bactéries pourprées dont je disposais étaient assez grandes pour se prêter à des recherches macroscopiques, et que, d'autre part, à l’Institut physique de notre université se trouvaient fortuitement montés, de la manière la plus parfaite, tous les appareils nécessaires aux messures d'énergie de l’espèce dont il s'agissait. M. le Dr W. H. Julius, depuis longtemps occupé de recherches sur le spectre calorifique de divers gaz en combustion, avait appliqué à cette étude le procédé bolométrique, s1 sûr et si sensible, de M. $. P. Langley. Avec la plus grande obli- geance il me permit d'utiliser les dispositions expérimentales qu’il avait combinécs et éprouvées, et dans l’exécution des expériences il me prêta aussi des secours de toute sorte; je suis heureux de pouvoir l’en remercier ici publiquement, Le principe dela méthode de Langley peut être supposé connu. Quant au dispositif spécial, nécessairement assez compliqué, imaginé par M. Julius, à l’usage qu’il en a fait et aux résul- tats qu'il en a obtenus, on en trouvera la description dé- taillée dans l’intéressant et substantiel Mémoire qu’il a publié à ce sujet et auquel Je renvoie !). Le dispositif en question, suffisamment sensible pour les recherches que j'avais en vue, a pu y être employé sans avoir à subir de modifications de quelque importance. Comme source de lumière fonctionnait un brûleur ordinaire d’Argand, à gaz, placé à environ 30 cm. de la fente et au même niveau qu’elle. La hauteur de la fente était d'environ 8 mm., sa largeur, constante durant
1) W. H. Julius, Het warmte-spectrum et. Proefschrift etc., Utrecht, 1888. — Voir aussi: Recherches bolométriques dans le spectre infra- rouge, dans Arch. néerl. d. sc. ex. et nat., T. XXII, p. 310.
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les mesures, d'environ 0"%,3. La préparation de bactériopur- purine, dont l’absorption devait être mesurée, était une membrane zooglœæique de Bacterium photometricum, d’un rouge intense et uniforme, longue de 12 mm., large de 5 mm. et épaisse d'environ 0%%,01, qui avait été rapidement desséchée à 60° C. sur un verre blanc pur de 1 mm. d’épaisseur, puis occluse dans du baume de Canada sous une lamelle de verre, de telle sorte que l’une des moitiés de celle-ci était appli- quée sur la membrane rouge, tandis que l’autre ne couvrait que du baume incolore. Ce porte-objet fut disposé, à la dis- tance de 0,5 en avant de la fente, sur un traîneau, de façon qu'à l’aide d’un simple organe de traction on pouvait amener devant la fente de l’appareil soit la membrane rouge, soit la partie incolore de l’objet. En chaque point du spectre qu’on voulait examiner, on mesura alors l’action bolométrique, d’abord lorsque la lumière pénétrait dans la fente à travers la couche de bactériopurpurine, ensuite lorsqu'elle y arrivait après avoir passé exclusivement par la partie incolore de l’objet. Pour chaque point du spectre on alternait cinq fois. La gran- deur des déviations galvanométriques observées était le plus souvent comprise entre 5 et 50 divisions de l’échelle et ne tombait jamais au-dessous de 1 division, tandis que !/,, de division se laissait encore évaluer par estime. Les écarts des cinq valeurs isolées à la moyenne correspondante ne s’élevaient généralement qu’à un petit nombre de centièmes. Dans le Tableau suivant, les valeurs moyennes (Æ) — proportionnelles aux déviations — de l'énergie relative des rayons qui ont traversé la couche de bactériopurpurine sont données en cen- tièmes de l’énergie de la lumière de même longueur d’onde qui n’a traversé que la partie incolore de l’objet. La différence des deux valeurs doit être attribuée, vu que la réflexion ne saurait avoir ici d'influence sensible, à l’absorption par les Bactéries pourprées.
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12
Pour l'absorption des rayons visibles, déterminée sur le même objet au moyen du microspectomètre, il fut trouvé :
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII,
TT TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
Dans la fig. 2 est représentée graphiquenent la marche totale de l’absorption entre les longueurs d'onde 2 1,60 et 0,42. Pour abscisse on a pris, non pas comme dans la fig. 1 le spectre normal, mais le spectre prismatique, tel qu’il est donné par le microspectomètre. Ce choix s’imposait, parce qu’autrement le spectre calorifique obscur aurait eu une largeur exagérée et gênante; en outre, la comparaison avec les bactériospectrogrammes des fig. 4 et 5 de mon travail sur le Bact. photometricum est maintenant plus facile.
Comme résultat le plus saillant, maïs prévu, apparaît la très forte absorption des rayons ultra-rouges dans un espace limité, compris environ entre À 0,75 et 11,0 «, avec le maxi- mum entre 0,80 et 0,90. L’ascension extrêmement rapide et considérable de la courbe, aux deux côtés de ce maximum d'absorption, est en parfait accord avec la densité relative- ment extraordinaire et la netteté des limites latérales de l'accumulation bactérienne au point correspondant du mi- crospectre. Par les différences connues de la distribution de l’énergie dans les deux spectres s'explique aussi, de nouveau, la différence de la densité relative de ces accumulations dans les spectres de la lumière du soleil et de la lumière du gaz ; cette différence se manifeste notamment en ce que, dans la lumière solaire, l’action de l’ultra-rouge entre 2 0,75 et À 1,0 surpasse à peine, ou ne surpasse que de peu, celle des rayons jaunes et orangés voisins de D, tandis que dans la lumière du gaz, au contraire, la première de ces actions est beaucoup plus forte que la seconde.
L’inefficacité presque absolue de l’ultra-rouge extrême, d’une longueur d’onde dépassant 1,0 u, inefficacité qui existe aussi pour la lumière du gaz, s'explique d’une manière satisfaisante par la transparence presque complète des Bactéries pourprées pour ces rayons. Il faut remarquer, à ce sujet, que la légère perte de lumière que nos mesures indiquent encore dans ces régions (5—6 °/ seulement en 4 1,60 et en 1,40) provenait indubitablement, en grande partie, non
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 175 pas de l’absorption, mais de la réflexion à la surface du corps des Bactéries. D’après tout ce qui a été dit, on peut donc affirmer, avec le degré de certitude que comportent en général les expériences de ce genre, que l'effet photo- cinétique des rayons de longueur d’onde différente, si l’on regarde comme mesure de cet effet la densité de l’accumu- lation des Bactéries dans les différentes régions du spectre, est proportionnel à la quantité absorbée de l’énergie de la radiation. Cela reste encore vrai, d’ailleurs, lorsqu'on prend pour mesure l’accélération ou le réveil du mouvement, après qu'il à été affaibli ou arrêté par l’obscurité ou par le défaut de ventilation; à cet égard, on trouvera des détails plus circonstanciés dans mes publications antérieures sur le Bact. photometricum.
Ce résultat atteste clairement que l'effet primordial de la lumière, dont dérivent les actions photocinétiques en question, n’est pas un processus de dégagement, plus ou moins ana- logique à celui qui nous apparaît, au plus haut degré de perfection, dans les phénomènes de l’activité musculaire et nerveuse. Dans ceux-ci, en effet, n'existe pas cette propor- tionnalité simple entre la valeur de l’énergie du stimulant et celle de l'effet, ou du moins cette proportionnalité ne s’y trouve qu'entre de très étroites limites. Spécialement pour les actions dégagées par la lumière dans les éléments per- cepteurs de l’organe visuel, aucun rapport simple n’est recon- . naïssable entre l'absorption et l'effet physiologique. Il en est de même pour les actions photomécaniques dans les plantes supérieures !).
Il n'y a guère que la réaction des Bactéries pourprées aux oscillations négatives brusques de l’intensité lumineuse ou aux changements correspondants de la longueur d’onde, réaction désignée ci-dessus sous le nom de mouvement de. frayeur, qui fasse décidément l’impression d’un processus
1) Onderzoek. etc., (3), VII, 1882, p. 284, 12*
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de dégagement et rappelle spécialement, à plusieurs égards, les réactions compliquées du système nerveux des ani- maux supérieurs. Peut-être, la clef de ce phénomène est- elle fournie par le fait, trouvé précédemment chez le B. photometricum (loc. cùt., p. 248), qu’une élévation subite de la tension de l'acide carbonique agit de la même ma- nière qu’un obscurcissement subit. Il serait possible que l’obscurcissement donnât lieu à une brusque diminution des actions réductrices, laquelle, amenant l’accumulation, indé- pendante de la lumière, des produits de la décomposition par oxydation, donc en première ligne probablement l’accu- mulation de l’acide carbonique, agirait comme ,stimulant”, à peu près de la même façon que les choses se passent pour le centre respiratoire des animaux supérieurs. À ce point de vue, il n’y aurait rien de surprenant non plus au réveil des mouvements sous l'influence de l’obscurité, réveil observé chez des Bactéries pourprées que l’action pro- longée d’une lumière constante, ou une ventilation énergique avec de l’air riche en oxygène, avait plongées dans le repos, avait rendues, en quelque sorte, apnéiques.
Pour tout le reste, la proportionnalité reconnue indique franchement, comme effet lumineux primaire, des processus correspondant à la décomposition de l’acide carbonique dans les plantes à chromophylle.
Il est vrai que mes tentatives antérieures, pour mettre en évidence par la méthode des Bactéries le dégagement d'oxygène chez le Bact. photometricum sous l'influence de la lumière, n'avaient donné que des résultats négatifs (loc. cit., p. 264). Mais ces expériences avaient été faites avec des matériaux en quantité très faible et peut-être insuffisante ; elles devaient donc être répétées avec les ressources plus abondantes dont je disposais maintenant. Il n’y avait pas lieu non plus de se laisser détourner de ces nouvelles recherches par la circon- stance que, d’après mes expériences antérieures concernant l'influence de différentes tensions d’oxygène sur le B. photo-
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. LA
metricum, la mise en liberté d'oxygène à la lumière ne pouvait, en aucun cas, être la cause unique des actions photocinétiques. D'abord, en effet, les variations de la tension de l’oxygène influençaient les mouvements dans le même sens, mais seu- lement à un degré moindre, que le font des variations cor- respondantes de l'intensité lumineuse (loc. cit. p. 260). Ensuite, il était possible que, outre l’oxygène, d’autres produits fussent engendrés par la lumière dans les Bactéries et vinssent, par leur mélange, compliquer le phénomène. L'expérience ne tarda pas à justifier ces considérations, en fournissant la preuve péremptoire d’un
Dégagement d'oxygène dans les Bactéries pourprées sous l'influence de la lumière !).
La démonstration de ce fait fondamental me réussit pour des états de repos zooglœiques de Bact. photometricum, Monas vinosa, M. Warmingi, M. Okeni et Clathrocystis roseo-persicina, et aussi pour des individus et groupes mobiles de ces mêmes espèces. Comme réactifs, il fallait des Schizomycètes très sen- sibles à l’oxygène, c’est-à-dire ayant besoin de très peu d'oxygène pour leurs mouvements et tendant à s’accumuler en des lieux où ce gaz ne possède qu'une tension très faible. J'ai employé avec le plus de succès de petites Spirilles in- colores, de la forme, de la taille et de la mobilité des Spiril- hum tenue, undula et Rosenbergi, puis des Coques extrêmement petits. Mais le Polytoma uvella et des Infusoires assez grands, tels que Colpidium colpoda, Microthorax pusillus, Vorticella microstoma, qui tous sont habituellement adaptés à une tension d'oxygène excessivement minime, ont aussi fourni parfois de très bons réactifs. Comme tels purent même être utilisées
1) Pour abréger, je comprends ici et dans la suite, sous le nom de lumière, non *eulement les radiations visibles, mais aussi les radiations obscures,
178 TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
plusieurs des formes rouges mobiles elles-mêmes ainsi qu'il sera expliqué bientôt.
Les formes aérobies ordinaires des Schizomycètes ne se montrèrent, en général, pas suffisamment sensibles.
Voici les plus importants des phénomènes observés.
Autour d’amas zooglœiques rouges de 2 mm et plus de sur- face, exposés, sous un couvre-objet occlus par la vaseline, soit à la lumière solaire directe, soit à la lumière du gaz ou à la lumière par incandescence concentrées au moyen du con- denseur d’Abbe, il se formait, souvent en moins de deux ou trois minutes, de fortes accumulations de Spirilles ou d’In- fusoires, visibles à l’œ1l nu sous l’aspect d’une nébulosité ou aréole blanche; dans l’obscurité ces accumulations se dis- persaient en un temps variant de quelques secondes à quel- ques minutes, pour se reproduire bientôt, après une nouvelle exposition à la lumière.
Le même phénomène pouvait déjà être obtenu, à une échelle microscopique, avec de petits grumeaux zooglæiques et de petites grappes de Clathrocystis, ayant moins de 0" 03 de diamètre. Bien plus, autour d’individus isolés de la grosse Monas Okeni, d’un rouge intense et immobiles, j’ai souvent vu se rassembler, à la lumière, de dix à vingt Spirilles in- colores, ce qui donnait une figure très singulière, rappelant une tête de Méduse. Dans l’obscurité, les Spirilles ne tardaient pas à se dégager de leurs entrelacements et à se disperser dans la goutte; le retour de la lumière ramenaït prompte- ment la première apparence, et ainsi de suite.
Après avoir été chauffées à 75° C., température qui ne faisait subir aucune modification appréciable à la matière colorante, toutes les formes expérimentées étaient complète- ment inactives. Cela prouve que l’échauffement par la lumière absorbée n’était pas la cause qui attirait les organismes sensibles.
Dans la goutte non recouverte, ou aérée depuis peu, et par conséquent riche en oxygène, il ne se formait pas de ras-
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 179
semblements sous l’influence de la lumière. Tout au contraire, on observa alors plus d’une fois qu’à la lumière les zooglæes pourprées exerçaient une action nettement répulsive. Par contre, l’accumulation se produisait lorsque, sur la goutte non recouverte, suspendue dans la chambre humide, on faisait passer un courant continu d'hydrogène pur. Ces ex- périences ont une valeur particulière, en ce qu’elles démon- trent tout spécialement que la substance engendrée à la lumière, et qui attire les Spirilles etc., est bien l’oxygène.
D’après les expériences de M. Winogradsky, on aurait en- core pu songer, comme jouant le rôle d’appât, à des sulfates. Un nouvel argument contre cette hypothèse est toutefois fourni par l’inactivité de Bactéries sulfureuses ne contenant pas de matière colorante pourpre ( Beggiatoa mirabilis et alba, zooglæes incolores, même en couche très épaisse). Pour des raisons dont il sera parlé plus loin, je me suis donné beaucoup de peine, mais sans le moindre succès jusqu'ici, pour découvrir une action attractive chez ces formes incolores.
Le dégagement d'oxygène se trahissait d’une manière très expressive chez de petits grumeaux zooglæiques rouges de Monas vinosa, lorsque ceux-ci se trouvaient au voisinage de bulles d’air, dans une goutte riche en Spirilles sensibles et hermétiquement occluse sous une lame de verre. En pareil cas, ainsi que je l'ai décrit antérieurement, les Spirilles se rassemblent d’abord à quelque distance de la bulle d’air, dans une zone nettement délimitée et ordinairement très étroite. À mesure que la tension de l’oxygène diminue, cette zone se rapproche de plus en plus de la bulle d’air. Or, si entre la zone et la bulle il y a un grumeau de Bactéries pourprées, celui-ci, quand 1l est éclairé, repousse les Spirilles qui s’avan- cent, et les empêche, à tout son pourtour, de se rapprocher de la bulle d’air. Lorsque enfin, par suite de l’affaiblissement progressif de la tension de l’oxygène, la zone de Spirilles est parvenue entre la zooglæe et la bulle, la zooglæe commence à attirer les Spirilles, d’où il résulte que, entre elle et la
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bulle, il se fait une rupture de la zone partout ailleurs fermée. On a alors l’aspect reproduit dans la fig. 3, en A. Produit- on ensuite l'obscurité (ou le demi-jour), immédiatement la zone se referme entre la bulbe d’air et la zooglæe (fig. 3, B). 1).
Voici comment le déga- gagement d'oxygène des Bactéries pourprées put être mis en évidence par les mouvements propres de ces Bactéries.
Beaucoup des formes rou-
ges à mouvements libres re- cherchent, comme l’a déjà indiqué M. Winogradsky pour le Monas Okeni, les sources d'oxygène. Quel- ques-unes, telles que la grosse espèce qui vient d’être nom-
mée, préfèrent les endroits à haute tension d'oxygène, d’autres, tels que le Pact. photometricum, ceux à tensions très basse. En général, elles sont adaptées aux faibles pressions d'oxygène, raison pour laquelle, dans une goutte recouverte, non her- métiquement occluse, elles ne s’accumulent pas au bord ex- trême du couvre-objet, mais à quelque distance en dedans de ce bord (ordinairement à 0,5—2 mm). Cela même, toute- fois, elles ne le font que dans l'obscurité, ou du moins qu’à une lumière très faible. Eclairées (la faible lumière diffuse du jour était toujours suffisante), elles se dispersent immé- diatement, et, ce qui est décisif, jamais dans la direction du bord de la goutte, mais seulement dans la direction de l’in- térieur, par conséquent vers la partie où l’oxygène est plus rare. Le Monas Okeni surtout, à cause de sa grosseur et de la rapidité de ses mouvements, réagissait de la manière la
1) Zur Biologie der Schyzomyceten, dans Bot. Ztg., 1888, N° 2. — Pflügers Arch., T. 26, p. 542.
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 181
plus frappante; au reste, avec les autres espèces aussi, la réaction était très certaine.
Lorsqu'on veut faire des mesures, l’expérience peut utile- ment recevoir la forme suivante.
Un tube de verre capillaire, long d’environ 15 mm. et large de ! mm, est rempli jusqu’en son milieu du liquide contenant une culture, aussi pure que possible, de Bactéries pourprées mobiles; le bout occupé par l’air est alors scellé à la lampe, l’autre bout luté avec de la vaseline; puis le tube, immergé dans l’huile sur un porte-objet, est placé sous le microscope. Dans l'obscurité, les Bactéries rouges se dis- tribuent alors de manière à laisser libre la couche liquide touchant à la bulle d’air. La démarcation entre les couches libre et bactérifère est, si les organismes mobiles sont en nombre suffisant, très apparente et très nette, souvent déter- minable à moins de 0%%,01 près. Fait-on tomber sur cette limite une lumière intense, elle s'éloigne de la bulle d’air, pour s'en rapprocher de nouveau en cas d’obscurcissement. Aussi, en éclairant exclusivement, du côté de la limite, la couche dépourvue de Bactéries, ne réussit-on pas à attirer les organismes mobiles plus près de la bulle d’air, tandis que dans la direction opposée ils se portent volontiers vers la clarté supérieure.
Le déplacement de la limite, sous l'influence de la lumière et de l’obscurité, est facile à mesurer au moyen d’un micro- mètre oculaire. Ainsi, dans un cas où le Bact. photometricum était soumis alternativement à une demi-obscurité et à une pleine clarté (flamme de gaz, miroir plan, condenseur), le déplacement fut trouvé, à plusieurs reprises, exactement égal à 0%%,12; dans un autre cas, relatif à de petites grappes mobiles de la forme des Clathrocystis '), il s'élevait, dans les mêmes conditions, à plus de 0,3. Dans un laps de plusieurs
« .
heures, la limite s’avançait peu à peu jusque tout près de la
1) Elles répondaient à peu près à la fig. 10, PI. V, de la monographie de M. Zopf: Zur Morphologie der Spaltpilze.
182 TH. W. ENGELMANN. LES BACTÉRIES POURPRÉES
bulle d'air, et, si les Bactéries abondaient dans la goutte, la rapidité de cette progression était notablement plus grande lorsque le tube capillaire se trouvait dans l’obscurité que lorsqu'il était conservé à la lumière.
Avec le Bact. photometricum, ces mêmes phénomènes purent être démontrés macroscopiquement. Dans un petit flacon à large col, de 8 em. de haut et de 4 cm. de diamètre, rempli d’eau jusque près du bord et recouvert d’une plaque de verre, j'avais introduit des muscles de grenouille infectés de Bact, photometricum. Au bout de quelques mois, sous l’action de la lumière diffuse du jour, 1l s'était formé au fond du flacon une couche brun-pourpre, épaisse d'environ 3"*, Elle consis- tait presque exclusivement en individus mobiles de l’espèce représentée dans la fig. 1 de mon Mémoire sur le Bact. pho- tometricum.
Les organismes verts, ou de quelque autre couleur différente du rouge, y manquaient absolument ; on y trouvait seulement, à l’état isolé, quelques Bacilles incolores, la plupart au repos. À l'aide d’une pipette, environ ? centim. cube du liquide rouge fut aspiré et introduit dans un tube de verre, long de 5 cm. et large de 3 mm., fermé par le bas et maintenu dans une position verticale. Déjà au bout de 5 minutes, le liquide était devenu incolore depuis la surface jusqu’à 2 mm. de pro- fondeur. La limite était extrêmement tranchée et resta fixe à partir de ce moment. Si l’on enlevait la couche supérieure incolore, au moyen d’un petit tube étiré en pointe capillaire, la limite recommençait immédiatement à descendre, jusqu’à ce qu’elle fût de nouveau parvenue exactement à 2 mm. au- dessous de la surface, point où elle s’arrêtait. Cette opération ayant été répétée plusieurs fois, les Bactéries se laissèrent ainsi refouler dans un volume liquide de plus en plus petit 1).
Lorsque le tube était relié par un caoutchouc à un appareil à hydrogène, ce qui faisait baisser rapidement la tension de
1) Des échantillons de ce liquide concentré ont fourni les plus beaux bactériogrammes que j'aie obtenus jusqu'ici.
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 183
l’oxygène au-dessus du liquide, la limite, sans rien perdre de sa netteté, remontait; en pleine lumière, toutefois, elle n’avait pas encore atteint la surface au bout de 5 minutes. Mais si alors on obscurcissait le tube, en le recouvrant d’un capuchon opaque, immédiatement la limite s’effaçait et la couleur rouge s’étendait jusqu’à la surface. Sous l’influence de la lumière, la teinte rouge se retirait de nouveau au-dessous de la surface, et bientôt une limite nette reparaissait à environ 1 mm. de profondeur. Supprimait-on la communication avec l'appareil à hydrogène, la limite ne tardait pas à descendre de 1 mm. plus bas, et après reliement à un gazomètre rempli d'oxygène pur elle faisait une nouvelle chute de plus de 1 mm. L’éclairage et l’obscurcissement n’excerçaient alors plus d’action bien dis- tincte. Ces expériences aussi pouvaient être répétées pendant plusieurs heures sur le même objet, toujours avec un égal succès.
Si les phénomènes dont il vient d’être parlé n’admettent pas d’autre interprétation que celle qui leur à été donnée, celle-ci reçoit une nouvelle confirmation du fait que l’accrois- sement des Bactéries pourprées est dans la dépendance de la lumière.
Evidemment, on pouvait prévoir que, en opposition avec ce qui a lieu pour les Schizomycètes incolores, cet accrois- sement serait favorisé, et même entretenu exclusivement par la lumière — le mot ,lumière” étant de nouveau pris dans son sens le plus large. Effectivement, une influence favorable de la lumière sur le développement de nos organismes a été remarquée occasionnellement depuis longtemps et par un grand nombre d’observateurs (Ehrenberg, Ray Lankaster, Cohn, Zopf, etc.). Tous ont reconnu que les formes rouges se mul- tiplient de préférence au côté des récipients qui est tourné vers la lumière.
Pour étudier ce phénomène de plus près, J'ai fait les expé- riences suivantes.
Quatre vases en verre cylindriques, hauts de 20 em. et larges de 5 cm., furent presque entièrement remplis d’une solution de sel marin à 2 pour cent, puis on versa dans chacun d’eux,
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le 12 décembre, 30 centim. cubes du liquide riche en formes rouges (Bact. sulfuratum, B. Warmingi, Rhabdomonas rosea, Clathrocystis roseo-persicina) obtenu par M. Warming; le tout fut bien mêlé, par l'agitation modérée avec une baguette de verre. Le liquide paraissait alors presque incolore et presque limpide Sur le fond de chaque vase étaient déposés des fragments d'herbes marines en décomposition. Deux des vases restèrent sur la table de travail, exposés, à un pied de distance d’une grande fenêtre tournée vers le nord, à la clarté diffuse du jour; les deux autres furent soustraits à l’action de la lumière, dans une armoire obscure, qui se trouvait dans la même chambre. Au bout de quatre jours, les vases maintenus à la lumière présentaient déjà un aspect rougeâtre très pro- noncé: en beaucoup d’endroits, et surtout du côté faisant face à la fenêtre, leurs parois étaient couvertes, de la surface jusque dans la profondeur, d’un enduit plus ou moins pourpré. Les deux autres vases montraient seulement, au voisinage de la surface, quelques petites taches rose pâle, mal limitées. Trois Jours plus tard, la différence était encore beaucoup plus frap- pante: dans les vases à l’obscurité, parois complètement nettes, nulle part d’enduit coloré; sur le fond, pas d'augmentation du très faible dépôt; à la surface, à peine une trace de coloration et quelques flocons de Beggiatoa alba. Les vases à la lumière, entièrement tapissés de rouge en dedans, avec çà et là des accumulations rougeâtres épaisses de + — 1 mm.; sur le fond aussi, dépôt rougeâtre notablement plus considé- rable: à la surface, beaucoup de Beggiatoa alba et mirabilis, ainsi que des zooglæes pourprées.
Le 21 décembre, les vases furent changés de place, les rouges étant mis dans l’obscurité, les incolores à la lumière. Aujourd’hui, après cinq mois, les vases jadis rouges ne mon- trent plus à l’œil nu aucune trace distincte de coloration pourpre. Au microscope, toutefois, on parvient encore à décou- vrir çà et là, entre des restes zooglæiques incolores ou faible- ment brunâtres, quelques individus contenant de la purpurine.
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 185
Ceux-ci sont tous immobiles. Dans les vases portés de l’ob- securité à la lumière, il y avait déjà, 8 jours après, çà et là sur les paroïs un enduit rouge bien distinct, qui augmenta avec le temps. |
Sous le couvre-objet, avec occlusion hermétique par la vaseline ou la paraffine, ainsi que dans des tubes capillaires scellés (ayant moins de 1 mme. de capacité), j'ai toujours vu les Bact. photometricum, Monas vinosa, Clathrocystis roseo-persicina se multiplier notablement dans l’espace de quelques jours ou de quelques semaines, sans qu’il y eût eu parmi eux des organismes verts ou colorés par une autre chromophylle. Par contre, l’eau contenait des petits restes végétaux morts et des micro-organismes incolores, tels que Spirilles, Colpodes, Microthorax etc.; de ceux-ci, bien qu’ils ne pussent recevoir de l’oxygène du dehors, beaucoup furent encore trouvés vivants, et dans un état en apparence normal, au bout de plusieurs semaines. Comme l’eau contenait à l’origine des quantités considérables d'hydrogène sulfuré libre (reconnais- sable à l'odeur et par les sels de plomb), les Bactéries rouges devaient évidemment avoir préparé elles-mêmes, à la lumière, l’oxygène indispensable à leur vie et à celle des autres organismes,
Les Schizomycètes pourprés prennent donc place parmi les organismes qui assimilent à la façon des plantes vertes. La bactériopurpurine est une vraie chromophylle, puisque, après avoir absorbé l'énergie actuelle de la lumière, elle la transforme en énergie chimique potentielle.
L'accord avec la vraie chromophylle et, par suite, la justesse de la présomption que le processus servant de base aux réactions photocinétiques des Bactéries pourprées est de nature analogue à l’action chlorophyllienne, ressortent également de l’examen des
Rapports quantitatifs entre l’effet assimila-
toire et l'absorption des rayons de différentes longueurs d’onde par la bactériopurpurine.
J'ai reconnu, en effet, que la lumière de couleurs différentes
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dégage d’autant plus d'oxygène qu’elle est plus fortement absorbée par les Bactéries pourprées.
La preuve la plus frappante de ce fait a été fournie par les expériences avec les radiations ultra-rouges. La lumière du gaz, après avoir traversé une couche de 4 cm d'épaisseur d’une solution d’iode dans le sulfure de carbone, couche complètement imperméable aux rayons visibles, agissait à peine moins que la lumière non affaiblie. L'effet se laissait déjà constater macroscopiquement, de la manière la plus nette. Dans le microspectre de la lumière du gaz (brûleur de Sugg de la force de 50 bougies à 1 m de l’objectif microspectral, objectif À de Zeiss comme lentille de projection), de petites zooglæes rouges (Clathrocystis et autres formes) développaient toujours le maximum relatif d'action quand elles étaient pla- cées dans l’ultra-rouge intérieur. Même avec une fente large de 0"® 1 seulement, on obtenait dans cette zone, en peu de minutes, des accumulations bien distinctes de Spirilles inco- lores autour des zooglæes rouges. L’ultra-rouge extrême, au- delà d’une longueur d’onde de 1,04 environ, se montrait complètement inactif, et 1l en était presque de même pour le rouge visible, tant qu’on n'avait pas laissé s’y mêler (en élargissant la fente) de l’ultra-rouge intérieur. Le jaune et l’orangé donnaient, surtout dans le spectre solaire, une action très nette. Le vert en donnait une plus faible ; le violet et l’ultra-violet, peut-être à cause du trop peu d'énergie, n’en donnaient pas du tout.
Des déterminations encore plus précises seraient peut-être possibles par l’emploi des tubes capillaires ci-dessus décrits, dans lesquels, comme mesure de l’action, on observait le déplacement de la limite jusqu’à laquelle les Bactéries s’ap- prochent de la bulle d’air, réservoir d'oxygène. ‘4
Provisoirement, il ne m'a pas semblé nècessaire de pour- suivre les recherches dans cette direction. De nouvelles expériences n'auraient rien pu changer aux résultats fon- damentaux.
ET LEURS RELATIONS AVEU LA LUMIÈRE. 187
Les faits qui viennent d’être exposés sont encore très in- structifs sous plus d’un rapport.
En premier lieu, ils confirment, par une preuve nouvelle, que. le pouvoir de dégager de l'oxygène sous l’influence de la lumière n’est pas l'aptitude spécifique d’une matière colorante déter- minée. Si peut-être, à l’origine, on avait encore pu supposer que la bactériopurpurine devait son action assimilatrice à des traces de chlorophylle qu’elle contiendrait, cette suppo- sition n’est plus permise après nos déterminations quantita- tives. La chlorophylle est, d’après l’expérience universelle, complètement inactive dans la lumière ultra-rouge; précisé- ment là, au contraire, se trouve le maximum d’action de la bactériopurpurine. La relation est inverse quant à la manière dont les deux substances se comportent vis-à-vis de la lu- mière rouge comprise entre B et ©. Aussi le spectre de la bactériopurpurine ne présente-t-il, comme l’a déjà fait remar- quer M. F. Cohn, aucun vestige de la, première bande d’ab- sorption dans le rouge, qui est caractéristique pour la chlo- rophylle. Dans les nombreuses mesures exactes que j'ai effectuées sur l'absorption, chez différentes espèces de Schi- zomycètes pourprés et en opérant sur des couches d’épaisseur très diverse, jamais il ne s’est produit, entre B et C, d’indi- cation certaine d’une absorption plus forte. Un petit relève- ment entre À 0,68 u et À 0,66 «, que j'ai noté dans trois des quinze cas, tombait entièrement en dedans des limites des erreurs expérimentales.
Il est donc certain que l'effet assimilatoire de la bactério- purpurine ne dépend, à aucun degré appréciable, de la chloro- phylle ; il ne semble même pas probable que jamais des traces de chlorophylle soient mêlées à la matière colorante rouge.
Sous ce rapport, la bactériopurpurine se distingue donc très essentiellement des chromophylles étudiées jusqu'ici, lesquelles, comme on le sait, contiennent toutes le corps caractérisé par la forte absorption des rayons compris entre B et C
1) Beiträüge zur Biol: der Pflanzen, 1, 3. Heft, 1875, p. 180.
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(chlorophylline, Reinchlorophyll, ete. des auteurs). L'opinion ancienne, suivant laquelle c’est exclusivement à ce corps que serait due la faculté assimilatrice des chromophylles diffé- remment colorées, cette opinion, déjà rendue insoutenable par mes recherches antérieures sur des Algues vertes, jaunes, rouges et vert-bleuâtre, se trouve donc maintenant réfutée de la manière la plus frappante.
Mes expériences prouvent, en second lieu, la jausseté de la proposition, tenue jusqu'ici pour rigoureusement exacte, que le dégagement d'oxygène est, chez toutes les plantes, lié à l’action des rayons visibles.
On ne devrait voir, en tout cas, qu’un effet du hasard dans le fait que les limites de la durée de vibration, pour les rayons agissant comme ,lumière” sur l’œil humain, sont à peu près les mêmes que pour les rayons qui décomposent l'acide carbonique dans les plantes à chlorophylle. Aucune raison intrinsèque de cet accord, aucune raison tirée de la nature de la lumière ou de celle des processus chimico-phy- siologiques, ne pouvait, ni ne peut, être indiquée. Du moment qu'il eut été reconnu que chez les organismes à chlorophylle, même dans les limites des rayons visibles, la propriété de décomposer l'acide carbonique n’est pas spécifiquement in- hérente à certains groupes déterminés de longueurs d’onde, mais que chacune de ces vibrations semble pouvoir agir aussi bien que toute autre, à la seule condition qu’il y ait égalité entre les quantités d’énergie absorbées, — de ce moment, dis-je, il ne restait absolument plus de motif pour attribuer aux seuls rayons visibles l’aptitude à dégager de l’oxygène. Maintenant, grâce aux expériences sur les Bactéries pourprées, il est aussi établi en fait: que les rayons obscurs sont également capables de mettre l'oxygène en liberté, d'exercer l’action assimilatrice.
Dans notre cas, ce sont spécialement les rayons ultra- rouges intérieurs qui agissent, et cela, avec une énergie parti- culière, en vertu de l'absorption particulièrement forte qu'ils éprouvent. Mais on ne comprend guère pourquoi il n’y
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 189
aurait par aussi des organismes pouvant être incités à dé- composer CO, par d’autres rayons obscurs. En parlant ain- si, je n’ai pas seulement en vue les Bactéries, mais aussi, par exemple, les Oscillariées et leurs plus proches alliées: d’une part, parce qu’elles ont une organisation relativement très simple, ce qui fait supposer un développement moins spécifique de leurs fonctions, et, d’autre part, parce qu’elles présentent une extrême variété de coloration, telle qu’on ne la voit dans aucune autre famille de plantes. On trouve tous les intermédiaires entre l’absence de couleur et le noir presque pur, en passant par le gris, le jaune, le vert, le vert-bleuâtre et leurs tons mixtes; on a donc en quelque sorte devant soi, dans ces stades différents, tout le processus de la différen- ciation chromatique possible. En outre, la matière colorante paraît dans beaucoup de cas, de même que chez les Bactéries pourprées, ne pas être localisée dans certains éléments morpho- logiques (chromoplastes), mais se trouver à l’état diffus dans le plasma du corps tout entier.
Quoi qu'il en soit, il n’y aurait plus à s’étonner maintenant comme c'eût été le cas jadis, s’il se trouvait des formes inco- lores en état d’assimiler du carbone et dégager de l’oxygène dans l’obscurité.
L'expérience a appris que des substances organiques inco- lores, de même que l’eau, absorbent très bien les rayons calorifiques ,obscurs”, et 1] serait impossible peut-être d’exclure ces rayons obscurs, sans un abaissement de température qui paralyserait l’activité vitale.
Sans doute, il n’y aurait aucune difficulté à empêcher l’apport d'énergie du. dehors, sous la forme de chaleur rayonnante ; il suffirait que le milieu environnant l’objet expérimenté, et dont le rayonnement pourrait lui communiquer l’énergie du dehors, fût maintenu à une température un peu inférieure à celle de l’objet. Mais les organismes vivants recèlent en eux-mêmes, dans leurs molécules qui se divisent et s’oxydent, des sources de chaleur rayonnante. Or, on ne voit pas bien quelle diffé-
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rence pourrait faire, au point de vue de l’action chimique, le point de départ de la radiation calorifique. Tout ce qu’il faut, semble-t-il, c’est que la radiation représente une certaine énergie et que celle-ci, par l’absorption, puisse être rendue efficace.
Si chez les plantes la chaleur produite à l’intérieur des cellules, dans les molécules, est énormément inférieure en quantité à l’énergie qui, sous les conditions ordinaires d’éclai- rage, est apportée du dehors par voie de rayonnement, elle a par contre l’avantage, dû à ce que les sources de la chaleur ne se trouvent qu’à une distance moléculaire des particules qui doivent l’absorber dans le plasma, de pouvoir arriver avec toute sa concentration au point où elle doit agir.
En outre, il est facile de comprendre que les températures des molécules qui par leur dédoublement ou leur oxydation fonctionnent comme sources calorifiques internes peuvent être, et dans beaucoup de cellules doivent même être extrêmement élevées, si élevées, que l’exiguité et le petit nombre de ces sources calorifiques sont peut-être les seules causes qui nous empêchent de les voir briller. On s’en convainc le mieux en considérant ce qui se passe chez les animaux à sang chaud, homéothermes. Les prodigieuses quantités de chaleur néces- saires pour que la température d’un oiseau, par exemple, en dépit des pertes continues et très considérables dues à l’éva- poration, au rayonnement, etc., se maintienne, même par un froid sibérien, à la hauteur constante de 40 ° C. et plus, ces quantités de chaleur, dis-je, ne sont produites que dans une petite partie des organes corporels (muscles et glandes, prin- cipalement). Dans ceux-là mêmes, cette production est réservée à une partie des éléments morphologiques distincts, et puisque ces éléments consistent pour 70—80°/ en eau, et pour le reste en matières (albumine, etc.) dont la masse de beaucoup la plus considérable ne prend aucune part appréciable an phénomène calorifique, le nombre des molécules dont il y a à tenir compte, comme sources de chaleur, doit être relative- ment très petit. De celles-ci, enfin, il n’y en a à chaque
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instant que très peu qui fonctionnent; jamais elles ne travail- lant toutes ensemble d’une manière uniforme et continue. Ces quelques molécules doivent donc chauffer les puissantes assises des couches inactives et riches en eau qui les envelop- pent, et chauffer en outre tous les organes, tels que peau, nerfs, sang, plumes, etc., qui eux-mêmes ne développent point de chaleur où en développent beaucoup moins, et qui, de plus, possèdent en général une capacité thermique très élevée, se rapprochant de celle de l’eau.
Un pareil organisme peut donc être grossièrement comparé à une grande maison avec chambres très nombreuses, que des foyers extrêmement petits, placés dans quelques-unes de ces pièces seulement et chauffés temporairement, l’un après l’autre, maintiendraient à une température constante, qui dépasserait de 60°, et plus, celle du milieu ambiant. Il est clair que la température de ces foyers, pendant qu’ils fonc- tionnent, ne saurait être basse. Pourquoi donc la chaleur qu'ils émettent par rayonnement ne pourrait-elle être appliquée, dans l’intérieur des chambres, à des synthèses chimiques, à des synthèses de même nature que celles ordinairement effec- tuées par la radiation solaire? Et pourquoi ces synthèses ne pourraient-elles s’opérer à une assez grande échelle pour que leurs produits s’échappent au dehors et deviennent ainsi reconnaissables, ou pour qu’ils s'accumulent à l’intérieur en quantité susceptible d’être reconnue? Que dans les cellules vivantes, celles des plantes aussi bien que celles des animaux, des phénomèues d’oxydation et des phénomènes de synthèse se passent généralement les uns à côté des autres, c’est ce dont personne ne doute plus, depuis que la preuve matérielle en a été donnée pour des cas si nombreux et si divers. La plante, comme l’a dit Pflüger 1), est ,semblable à un animal qui aurait, supérieurement développés, des organes spéciaux de synthèse réductrice.”?
1) Archiv für die gesammte Physiologie, X, 1875, p. 105. 197
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En fait, M. F. Hueppe !) et M. Heraeus ont récemment montré que certaines Bactéries incolores sont capables de produire dans l’obscurité, aux dépens du carbonate d’ammo- niaque, un hydrate de carbone très voisin de la cellulose. À cette découverte des plus importantes, M. Hueppe a rattaché des considérations et inductions générales sur la différenciation phylétique de la ,fonction chlorophyllienne,”” considérations auxquelles on peut d’autant moins refuser son assentiment que nos Bactéries, colorées en pourpre, mais dépourvues de chlorophylle, et assimilant à la lumière et dans l’obscurité, constituent un passage direct des organismes incolores qui produisent de l’oxygène dans l’obscurité aux organismes à chlorophylle, qui n’en dégagent qu’à la lumière.
À un autre titre encore ces Bactéries forment un terme inter- médiaire, savoir, en ce que la quantité d'oxygène mise en liberté par elles, bien que très appréciable, est pourtant en général rela- tivement beaucoup moindre, que celle dégagée cœteris paribus par les plantes à chlorophylle, tandis que chez les Bactéries incolores de M. Hueppe, d’après lui, aucune partie d'oxygène libre n’est émise au dehors, le tout étant immédiatement employé à transformer l’ammoniaque en acide nitrique.
Il convient de remarquer, à cet égard, que chez les Bac- téries pourprées le pouvoir d’excréter de l'oxygène est, à conditions extérieures égales, sujet à varier dans de larges limites, et qu’en particulier il n’est pas rare de trouver des cas où, malgré des conditions en apparence favorables, au- cune émission d'oxygène n’est saisissable. II y a donc encore des transitions spéciales, tant vers le haut que vers le bas.
Pour l’explication de ces différences, il faut tenir compte, en premier lieu, de l’inégalité de la consommation d'oxygène à l’intérieur des cellules. D’après les intéressantes recherches
1) F. Hueppe, Die hygienische Beurtheilung des Trinkwassers vom biol. Standpunkte, dans Schilling, Journal für Gasbeleuchtung und Wasserver- sorgung, 1882, p. 75 du tiré à part. — Tageblatt der Naturforscherver- sammlung zu Wiesbaden, septembre 1887.
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de M. Winogradsky, il n’est pas douteux que, chez ceux des Schizomycètes pourprés qui font partie des Bactéries sulfu- reuses, il n'existe d’extraordinaires différences dans l'énergie des processus d’oxydation. M. Winogradsky a trouvé que parmi ces Schizomycètes,. qui oxydent et transforment en sulfates le soufre déposé dans leur tissu, plusieurs, tels que Monas Okeni, Ophidomonas sanguinea, le font très rapidement et en grande abondance, d’autres lentement et peu. En songeant qu’une Monas Okeni ou une Ophidomonas sanguinea, dont le corps tient emmagasinée une quantité de soufre pur égale à 80 pour cent et plus de la masse totale, peut, en cas d'apport insuffisant de SH, et de riche afflux d’oxygène, se débarrasser complè- tement de son soufre dans un espace de temps qui se mesure par heures, on comprend combien énorme doit être la consom- mation d'oxygène. Dans le cas où les organismes ne reçoivent l’oxygène du dehors qu’en quantité insuffisante, il est donc évident qu’une portion considérable, sinon la totalité de l'oxygène dégagé dans le protoplasme rouge, sous l'influence du rayonnement calorifique interne et externe, pourra et devra être appliquée à la combustion du soufre à l’intérieur de la cellule. Les formes dépourvues de soufre consommeront au contraire, selon toute prévision, beaucoup moins d'oxygène, et pourront donc, dans les mêmes conditions, en laisser échapper plus au dehors.
Néanmoins, à en juger par les résultats de mes expé- riences, les différences dans la combustion du soufre ne suf- fisent nullement pour expliquer l'inégalité de l'émission d'oxygène chez les Bactéries pourprées. De la valeur des autres processus d’oxydation, et de leurs variations probables, rien n’est connu. Incontestable, par contre, est l’importance des différences du plasma vivant quant à sa teneur spécifique en bactériopurpurine. Ces différences sont très considérables. En comparant un grand nombre d’espèces ou même d’exem- plaires d’une même espèce, il est facile de trouver des passages entre des cas où aucune coloration n’est encore visible dans
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des couches atteignant plus de ! de millimètre d'épaisseur, et d’autres cas où des individus isolés, à peine épais de Gun 005, se font remarquer par l'intensité de leur couleur fleur de pêcher ou rouge vineux. Chez plusieurs formes (B. photometri- cum, par exemple} la proportion de matière colorante ne. varie que peu. En général, 1l semble que — au moins chez la même espèce — les individus riches en matière colorante agissent plus fortement que les individus à teinte plus pâle. J’ai aussi observé que des exemplaires de Monas Okeni, devenus in- colores dans l’obscurité ou après être restés plusieurs jours sous le couvre-objet, ne réagissaient plus à la lumière. Mais, dans ce cas, les cellules paraissaient décidément mortes. Le protoplasme et la membrane n'étaient guère plus réfringents que l’eau, les flagella avaient disparu, de même que les in- clusions de soufre; à la place de celles-ci on voyait parfois, mais non toujours, une ou plusieurs vacuoles, à contours très indistincts. Nulle part des divisions ou du mouvement.
Une proportionnalité, ou même seulement une relation constante entre le degré de saturation du protoplasme par la bactériopurpurine et l’énergie des actions de la lumière, n’a pu être constatée. J’ai trouvé, dans l’eau douce et dans l’eau de mer, des formes de Bacilles et de Spirilles extrêmement
sensibles, réagissant comme les meilleures Bactéries pourprées,
L 1
et qui pourtant, même en couches de ; mm d’épaisseur, montraient à peine une légère teinte rougeñtre; pareillement, j'ai vu un dégagement très net d'oxygène chez des grumeaux de Clathrocystis qui au microscope, sous une épaisseur d’en- viron 0%®1, et avec le meilleur éclairage (lumière du jour, condenseur, pas de diaphragme), n’apparaissaient pas même distinctement colorés.
Les inégalités observées ne semblaient pas non plus s’ex- pliquer suffisamment par des différences concomitantes dans la proportion du soufre, Ce qu’on peut dire de plus probable, peut-être, c’est qu’il y a ici en jeu des différences dans la con- shitution spécifique du stroma protoplasmatique incolore, imprégné
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 195
de la matière colorante. Cette présomption est principalement fondée sur les résultats expérimentaux obtenus pour d’autres chromophylles et en particulier pour la chlorophylle, résultats qui nous apprennent que ce n’est pas par elle-même que la matière colorante effectue la décomposition de l'acide car-
DS
bonique à la lumière, mais seulement en tant qu’elle se trouve unie à du protoplasma vivant. Lorsque le stroma in- colore des corps chlorophylliens vient à mourir, l'aptitude au dégagement d'oxygène cesse, sans qu'il soit nécessaire qu'un changement appréciable quelconque se manifeste dans la matière colorante !).
1) Il n’est pas nécessaire non plus que la mortification s’étende, dans ce cas, au reste du protoplasma de la cellule, à celui qui n’est pas uni à de la matière colorante. Ainsi s’explique sans doute pourquoi, comme je lai déjà vu il y a 20 ans, le mouvement du protoplasma de cellules vertes (de Vallisneria, par exemple), lorsqu'il a été arrêté dans l'obscurité par l’action longtemps prolongée d’un courant d'hydrogène pur traversant la chambre humide, ne se rétablit pas sous l’influence de la lumière, mais bien sous celle d’un apport d'oxygène du dehors; ou pourquoi, malgré un éclairage continu, l’activité assimilatrice finit par s’éteindre dans l’hy- drogène pur, sans que pour cela soit détruite la possibilité du réveil, par l'oxygène, du courant protoplasmique. Quant à conclure de là que les cellules vertes n’excrètent pas de l’oxygène libre, mais une matière in- connue, qui ne dégagerait de l’oxygène qu'en dehors des cellules, on n’y peut songer: il suffit de remarquer, en effet, que cet oxygène dégagé au dehors (qui en tout cas, d’après mes expériences sur les Bactéries et l’hémoglobine, est déja libre immédiatement à la surface externe de la cellule et même à celle des grains chlorophylliens) devrait, tout aussi bien que l’oxygène amené du dehors, se diffuser dans les cellules et par conséquent ranimer le courant du plasma. L’explication est simple. Les corps chlorophylliens meurent, dans l'hydrogène, plus facilement que le protoplasma mobile incolore. Celui-ci, comme toute matière vivante destinée à consommer de l’oxygène, finit aussi par dépérir dans l’hydro- gène. S'il y meurt plus tard, cela pourrait être une circonstance acciden- telle, vu que sous ce rapport on rencontre les plus grandes différences entre les différentes espèces de protoplasma. Mais il n’est pas besoin de recourir au hasard. Les corps chlorophylliens, étant eux-mêmes de riches sources d'oxygène, doivent être adaptés à une plus forte tension de ce gaz, et par conséquent, selon toute probabilité, ils supporteront moins
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Le stroma incolore constitue proprement la partie active ; la matière colorante ne paraît être essentiellement, comme je l’avais déjà présumé il y a quelques années !), qu’un sensibilisateur, susceptible peut-être d’être remplacé par d’au- tres matières colorantes. Il serait extrêmement intéressant, sous ce rapport, de rechercher si, en faisant artificiellement absorber des matières colorantes à du plasma vivant incolore, — opération dont la possibilité a été établie, surtout par les importantes expériences de M. Pfeffer, — on ne pourrait provoquer dans ce plasma, jusque-là inactif, un dégagement d'oxygène appréciable; ou si des corps chlorophylliens, par l’imbibition de matières colorantes étrangères, peuvent être modifiés dars leur activité, de telle sorte que les longueurs d'onde plus fortement absorbées par la nouvelle matière co- lorante voient maintenant renforcée leur action assimilatrice. Au reste, un résultat négatif de pareilles expériences ne signifierait pas grand’chose. Car il est certain, en tout cas, que l’ampleur des processus de réduction photochimique peut être influencée, non seulement par des différences dans la proportion de matière colorante, mais aussi par des différences de structure du stroma incolore. On peut s’en assurer, plus facilement que par toute autre voie, au moyen de la méthode des Bactéries. C’est ainsi, par exemple, que, dans une même goutte, le petit Scenedesmus 4-caudatus d’une couleur verte très pâle, m'a souvent offert à la lumière une activité bien plus énergique que celle de Palmellacées beaucoup plus riches
facilement un abaissement prolongé de la tension de l’oxygène. Il doit donc paraître très douteux, à priori, que des corps chromophylliens, pla- cés dans un courant d'hydrogène mêlé ou non d'acide carbonique, soient . capables, même dans de bonnes conditions d'éclairage et de température, de produire et de maintenir la tension d'oxygène nécessaire à l’entretien de leur vie.
1) Farbe und Assimilation, dans Bot. Zeitg., 1883, p. 20. — Couleur et assimilation, dans Arch. néerl., 1883, T. XVIII, p.46. — Voir aussi: J. Reinke, Die Zerstorung der Chlorophyllüsungen durch das Licht etc., dans Bot. Zeitg., 1885, N° 9.
ET LEURS RELATIONS AVEC LA LUMIÈRE. 197
en matière colorante. Chez les Diatomées aussi, on trouve des différences considérables, à égalité de teneur en matière colorante, ou à inégalité dans un sens contraire à celui auquel on se serait attendu.
On ne voit aucune raison pour que de pareilles différences n’existeraient pas déjà chez des formes aussi simples que nos Bactéries pourprées, où ne se sont pas encore développés d'organes particuliers, microscopiquement discernables, pour servir de support à la matière colorante, maïs où cette ma- tière semble plutôt uniformément mêlée à la masse entière du plasma. Il est donc permis de se figurer des plasmas qui, en vertu de leur constitution spécifique, dans des conditions normales, assimilent énergiquement malgré leur faible pro- portion de matière colorante, bien qu’en général ces deux propriétés, développées corrélativement par la sélection, se trouveront au même degré de perfection. Il se peut que des différences de pouvoir absorbant pour les rayons calorifiques obscurs jouent ici un rôle important,
Peut être, enfin, réussira-t-on encore, au moyen des’ Bac- téries les plus sensibles, à constater l’émission de molécules d'oxygène même chez des espèces complètement dépourvues de matière colorante. Dans cette direction, les Beggiatoa in- colores, en dépit du résultat négatif des tentatives antérieures, semblent d'autant plus mériter un nouvel examen que, d’après les recherches de M. Winogradsky, elles n’ont besoin pour prospérer que de quantités extraordinairement petites de matières organiques. ,Il est même difficile de comprendre”, dit ce savant !), ,comment un organisme sans chlorophylle peut si bien croître dans des conditions telles que les pré- sentent les sources sulfureuses” {absence presque complète de substances organiques. Æ.) M. Winogradsky croit devoir expliquer ce fait en admettant que les Bactéries sulfureuses, dans leur respiration, ne transforment pas de carbone
1) S. Winogradsky, Ueber Schwefelbacterien, dans Bot. Zitg., 1887, N° 31—37; p. 34 du tiré à part,
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en acide carbonique, mais empruntent exclusivement au processus d’oxydation du soufre l’énergie dont elles ont besoin pour l’accomplissement de leurs fonctions. Il était certaine- ment autorisé à le croire, en ce sens que, d’après ses expé- riences, le susdit processus est évidemment, sous le rapport de la consommation d’oxygène de beaucoup le plus impor- tant. Toutefois, je dois faire remarquer que les Bactéries pourprées peuvent se mouvoir, croître et se multiplier, même quand elles n’ont pas de soufre à leur disposition, du moins pas en quantité susceptible d’être décelée. Ainsi, lorsque le Bac- ierium photometricum, en apparence complètement dépourvu de soufre, était conservé en grande quantité au sein d’une eau exempte de H,S, dans des tubes de verre ou sous le couvre- objet, je le voyais, au bout de plusieurs semaines encore, se mouvoir activement et se multiplier. Le Monas Okeni, après que toute trace de granules de soufre avait disparu de son in- térieur, restait également, dans les mêmes conditions, par- faitement mobile, souvent durant des semaines, et continuait, quoique plus lentement peut-être, à se scissipariser. Très généralement, à la vérité, l'hydrogène sulfuré paraît favoriser la croissance et le mouvement de ces formes, et même leur être indispensable à la longue. Mais il se peut que ce soit en vertu de relations indirectes.
Beaucoup plus acceptable me semblerait l'hypothèse qu’une partie de la force vive produite par la combustion du soufre est employée à décomposer de l’acide carbonique formé dans l'acte respiratoire (peut-être aussi de l’acide sulfurique ?). Eu égard aux minimes quantités d’énergie qui sont dépensées sous la forme de travail mécanique (locomotion, division), ce serait apparemment un luxe inoui de la nature si le mon- tant total, relativement énorme, de l’énergie actuelle fournie par la combustion précitée se perdait à l’extérieur, comme chaleur, et si une partie au moins n’en était utilisée au profit direct de l’organisme.
. K.
ARCHIVES NÉERLANDAISES
Sciences exactes et naturelles.
ETUDE EXPERIMENTALE ET THEORIQUE
SUR LES
CONDITIONS DE L'ÉQUILIBRE ENTRE LES COMBINAISONS SOLIDES ET LIQUIDES DE L'EAU AVEC DES SELS, PARTICULIÈREMENT AVEC LE CHLORURE DE CALCIUM.
PAR
M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM.
me
Introduction.
L'étude suivante, sur les équilibres entre les combinaisons solides et liquides de l’eau avec les sels, est tellement liée à mes recherches antérieures, qu’une exposition succincte de la portée de ces travaux et de leurs principaux résultats sera nécessaire pour la bonne interprétation du mémoire nouveau.
Dans le quart de siècle qui s’est écoulé de 1860 à 1885, il n’y a peut-être aucune branche de la chimie dont le déve- loppement ait été aussi rapide que celui de la branche qui embrasse les phénomènes de l’équilibre chimique.
Cependant, au moment où je commençai mes recherches (1883), cette partie de la science était non seulement encore fort incomplète, mais il manquait surtout un principe qui permit de se guider parmi la foule des observations déjà faites et de discerner ce qui restait encore à étudier. On distinguait les équilibres hétérogènes et homogènes, et cette distinction se faisait tant pour les phénomènes de la dissoci- ation proprement dite, que pour les phénomènes de décom-
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 14
200 M. H. W. BAKHUIS 'ROOZEBOOM. ÉTUDE
position partielle par l’action d’un dissolvant ou de double décomposition au sein d’un liquide. Mais ces différentes catégories elles-mêmes ne se trouvaient combinées par aucun lien, et la distinction entre équilibres homogènes et hétéro- gènes était loin d'indiquer toutes les différences entre les systèmes déjà étudiés. Pour plusieurs phénomènes de l’une ou de l’autre catégorie on avait déduit, soit de l’expérience, soit de la théorie des vitesses de réaction ou bien de la thermodynamique, des règles générales. Faute cependant de classification systématique, 1l était parfois très incertain si telle règle pouvait être appliquée à un cas spécial nouveau. Je ne rappelle que l’incertitude qui régnait sur les lois de la dissociation des composés liquides.
Ce qui manquait absolument, c'était l’étude des limites de température et de pression où finissait l’existence de telle ou telle forme d’équilibre, et un principe conducteur pour décider quels systèmes nouveaux pourraient prendre naissance au- delà de ces limites.
Mes recherches sur les hydrates des gaz et sur les combi- naisons de l’ammoniaque avec le bromure d’ammonium, recherches publiées à partir de 1884, fournirent des résultats qui permettaient de faire un pas en avant, vers la résolution des problèmes indiqués ‘|.
D'abord, elles ont contribué à étendre nos connaissances sur quelques formes d'équilibre presque entièrement négligées jusqu'ici. Ainsi, elles faisaient connaître les particularités de l'équilibre d’un système de deux substances formant ensemble un corps solide, un liquide et une vapeur. Le résultat le plus inattendu fut la découverte qu’un tel composé solide peut être en équilibre, aux températures au-dessous de son point
1) Voir: Recueil des travaux chimiques des Pays-Bas, Tome IIT, 1884, p. 28—104; T.IV, 1885, p. 65 —73, 102—124, 331—346, 395—383 ; LENS 1886 Pp. 323— M3: T. VI,. 1887, p. 262—355 et un résumé: Zeitschrift für Phys. Chemie, IT, 1888, p. 449—481 ..
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 201
de fusion, tant avec un liquide où l’un des corps constitu- ants entre en quantité supérieure à celle contenue dans le composé solide, .qu'avec un liquide où l’autre constituant est en proportion plus forte. Il en résulte que ce composé solide pourra exister, à certaines températures, sous deux pressions différentes exercées par le gaz émis.
M. van der Waals ayant développé une formule thermo- dynamique pour ces systèmes, il se trouva que toutes les particularités que peut présenter en ce cas la courbe des tensions se déduisent aisément de la formule et que, pour le système où le corps solide est l’hydrate de l’acide bromhy-. drique HBr.2H,0, il y a même accord numérique entre les tensions et les concentrations observées et celles qu’on tire de la relation théorique, en employant les chaleurs de trans- formation mesurées.
Cette nouvelle forme d'équilibre hétérogène a beaucoup d'importance, parce qu'elle renferme, pour ainsi dire, un nombre illimité de cas. Non seulement la classe étendue des hydrates de gaz peut fournir de tels systèmes, formés d’un corps solide, d’un liquide et,d’une vapeur; mais les combi- naisons de l’ammoniaque avec les sels ammoniacaux !), de l'acide sélénieux avec les acides chlorhydrique et bromhy- drique, et enfin — suivant le mémoire actuel — toute la catégorie des sels hydratés ou anhydres, en présence de leurs dissolutions saturées et de la vapeur d’eau, y appartiennent également. Ainsi cette forme d’équilibre n’est pas moins im- portante que la catégorie, jusqu’à présent la mieux connue, des équilibres de dissociation d’un corps solide qui se décom- pose en un autre corps solide et en un gaz, catégorie dont l'exemple classique est fourni par le carbonate de chaux.
En second lieu, ces recherches firent voir que la courbe exprimant les tensions d'équilibre des susdits systèmes ne
——
1) Le vrai caractère de ces systèmes n'avait pas été dévoilé par les recherches de M. Troost.
14*
202 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
peut être réalisée complètement qu’en bien peu de cas. D’or- dinaire une partie ne peut être obtenue, parce que le système est modifié à une certaine limite, par l’apparition soit d’un nouveau corps solide, soit d’un nouveau liquide, non miscible avec le premier. Par ces résultats l'attention fut fixée pour la première fois sur l’existence de deux nouvelles formes d'équilibre, entre un corps solide et deux liquides, ou bien entre deux corps solides et un liquide, en l’absence de va- peur. Les courbes qui représentaient les températures et pres- sions d'équilibre avaient beaucoup de ressemblance avec les courbes de fusion des corps simples.
On put déterminer aussi la première courbe de fusion d’un
corps dissociable (HBr 2H,0).
Les nouveaux points de vue, obtenus sur les différentes formes que peut prendre l'équilibre chimique hétérogène, permettaient d’établir une classification embrassant tant les phénomènes de dissociation proprement dite, que la décom- position par l’action d’un dissolvant et les nouvelles formes d'équilibre mentionnées.
Cette classification repose sur trois principes. D'abord elle distingue trois catégories, comparables aux trois formes d’équi- libre physique (volatilisation, vaporisation, fusion), d’après l’état physique des phases coexistantes. Le terme ,phase” est pris dans le sens de M. Gibbs, pour désigner les différents complexes hétérogènes, dans lesquels entrent un ou plusieurs des corps du système, soit à l’état de combinaison définie, soit en proportions variables. Les équilibres entre des phases solides et une phase gazeuse forment la première catégorie. La seconde catégorie est formée par les systèmes qui ren- ferment, outre la phase gazeuse, au moins une phase liquide ; la troisième ne renferme que des phases solides et liquides.
Chaque catégorie est sousdivisée d’après le nombre des corps constituants. De cette manière, on s’aperçoit que la plus grande partie des systèmes étudiés ne renferment que
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 203
deux corps. La revue systématique permet de prévoir une foule de cas nouveaux, lorsqu'on passe à la considération des systèmes formés de trois corps, ou plus.
Le troisième principe de classification est le degré d’hété- rogénéité — critère entièrement nouveau. L’hétérogénéité n’est complète que si les n corps constituants forment ensemble n + 1 phases. Cet état est entièrement défini, de sorte que la con- centration de la phase gazeuse et de chaque phase liquide est indépendante des quantités de ces corps. Si l’on supprime une phase, ou qu’elle disparaisse par changement de tempé- rature ou de pression, on obtient l’équilibre hétérogène in- complet. Plus il disparaît de phases, plus l'équilibre hétérogène devient incomplet, de sorte qu’on passe graduellement à l'équi- libre homogène.
Cette distinction rend des services importants, surtout dans la seconde catégorie, où se trouvent rangés les phénomènes de dissociation par l’action d’un dissolvant.
En dernier lieu, mes recherches attiraient l’attention sur la signification des points d’intersection des courbes qui figu- rent les pressions et températures d'équilibre des systèmes hétérogènes complets. De même que ces courbes représentent l'équilibre de n + 1 phases formées de n corps, ces points multiples” représentent la température et la pression uniques auxquelles peuvent coexister n + 2 phases, le plus grand nombre de phases qui puissent former ensemble un équilibre hétérogène. |
Ces points sont les points d’intersection de n + 1 courbes pour l'équilibre des n + 1 systèmes de n + 1 phases, qu’on peut former des n + 2 phases pEÉbARIeR dans le point mul- tiple. De ce point on ne parvient à l’une ou à l’autre de ces courbes, en fournissant ou enlevant de la chaleur, ou bien par changement de volume, qu'après disparition d’une des phases présentes.
En envisageant les différentes régions en Le le plan
204 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
(p, t) est divisé par les courbes mentionnées, on est mis en état d'indiquer, pour chacune des phases et pour chaque système de deux ou de plusieurs phases, les limites de p et de t auxquelles s’arrête leur existence autour du point mul- tiple. On en déduit aussi dans quel cas le point multiple est une température maximum ou minimum, C'est-à-dire un point de transition” pour telle ou telle phase.
Cet examen a été effectué pour quelques points triples (équi- libre de trois phases isomériques ou polymériques d’un seul corps) et quelques points quadruples (équilibre de quatre phases formées de deux corps). En outre, une discussion des agrégats de phases possibles dans des points triples ou qua- druples a fait prévoir encore toute une série de ces points remarquables, dont la connaissance sera du plus haut intérêt. Un seul point quintuple (pour l’équilibre de cinq phases eomposées de trois corps), a été étudié, et cette étude a per- mis des conclusions générales sur les limites de l’existence des sels doubles hydratés (en premier lieu de l’astrakanite Na, SO, . Mg SO, .4 H,0).
D’après ces nouvelles vues, la connaissance de l’équilibre entre deux ou plusieurs corps ne sera dorénavant accomplie, que si l’on est parvenu — par l'étude systématique des systèmes renfermant ces corps en toutes proportions, et dans un inter- valle assez étendu de températures et de pressions — à la découverte de la totalité des formes d’équilibre que ces corps peuvent contracter et des limites de leur existence, soit sépa- rément, soit ensemble.
Une telle étude, aussi complète que les moyens actuels le permettent, a été effectuée par moi-même pour les systèmes composés de H,0 et de HBr, et par M. Stortenbeker !) pour les systèmes composés de chlore et d’iode.
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1) Recueil etc. T. VII, 1888, 152—205.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 205
Une étude du même genre formera le contenu du mémoire présent !). Il s’agissait, pour les systèmes formés d’un sel et de l’eau:
1°. de vérifier les conclusions, qu'on peut tirer (quant à l'influence de la température sur les concentrations et les tensions des dissolutions saturées) des formules thermodyna- miques déduites par M. van der Waals, et que j'avais trouvées être d'accord avec les résultats de mes recherches sur les hy- drates de gaz et les combinaisons analogues ?);
29, de rechercher pour un seul sel toutes les combinaisons qu’il peut contracter avec l’eau, entre le point cryohydratique et le point de fusion du sel anhydre, et d’étudier ensuite les circonstances qui déterminent la déposition, au sein de la dissolution, de tel ou tel hydrate ou du sel anhydre;
3. d'étudier les conditions dans lesquelles deux ou plu- sieurs hydrates peuvent coexister ou se transformer l’un dans l’autre, en présence soit de vapeur, soit de dissolution, soit de ces deux phases réunies; afin d’obtenir
4% un aperçu complet de l’équilibre qui s'établit, quand on met en présence des quantités différentes du sel et de l’eau à différentes températures et pressions.
Une telle étude était nécessaire. L’immense travail consacré aux combinaisons entre les sels et l’eau dans les états solide et liquide n’avait pas abouti à des résultats généraux, faute d’un principe conducteur, et à cause des limites trop restreintes pour l'intervalle de température dans lequel on avait étudié ces combinaisons. Même les recherches les plus récentes, entre- prises dans le but de combler ces lacunes, ont failli à fournir des vues générales sur la conduite des sels envers l’eau et laissent plusieurs questions à résoudre, C’est pourquoi j’entre-
1) Les principaux résultats de cette étude ont déjà été communiqués sommairement dans les Actes du premier Congrès Néerlandais pour les sciences physiques et médicales, tenu à Amsterdam en 1887. — Harlem, Erven Bohn, Page 105.
2) Voir mes mémoires dans Rec. d. Trav. Chim. d. Pays-Bas, V,335—3992,
206 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
pris d'étudier sous tous les rapports, aussi complètement que possible, un sel unique. Je choisis le chlorure de calcium, parce qu'il était probable que ce sel donnerait plusieurs hy- drates, et qu'il y en aurait au moins un qu’on pourrait étudier jusqu’à son point de fusion.
Les expériences que je vais décrire ne fournissent pas toutes les données nécessaires pour la solution numérique de toutes les questions qu’on peut poser; mais elles suffisent pour faire connaître en général les limites de l’existence des différents hydrates, la possibilité de leur coexistence avec d’autres hy- drates, leurs transformations soit en d’autres hydrates, soit en solution, jusqu'aux limites où finit chaque combinaison entre le sel et l’eau.
La discussion des résultats obtenus, au point de vue de la Thermodynamique, établira une parfaite concordance entre les observations et la théorie, et permettra d’obtenir une représentation générale de la conduite des sels, moyennant l’adjonction de quelques cas particuliers, que le chlorure de calcium ne montre pas, mais qu’on peut observer dans d’autres sels.
Je diviserai mon sujet de la manière suivante:
Chapitre I. Les différents hydrates de CaC!, et leurs solu-.
bilités.
» Il. Remarques générales sur la solubilité des sels, le phénomène de la sursaturation et l’état des sels dans la dissolution saturée.
, III. Tensions de différents systèmes composés de
| CaCl, et de H,0.
», IV. Revue des conditions d'équilibre des différents systèmes formés de CaCl, et de H,0. Points quadruples.
JL V. Relations thermodynamiques pour les tensions … de vapeur des différents systèmes d’un sel et de l’eau. Application au cas du CaCl,. Revue générale des autres sels.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 207
Chapitre VI. Relations thermodynamiques pour la concentra- tion des dissolutions en équilibre avec sel solide et vapeur d’eau. Application au cas du CaC!, . Revue générale des autres sels.
mm
CHAPITRE LI.
Les différents hydrates du chlorure de calcium et leurs solubilités.
1. Outre le sel anhydre, il n’y a que l’hydrate à 6 H,0 qui soit suffisamment connu. Lefèbvre en 1870 !) et Hammerl en 1875 ?) découvrirent un hydrate à 44,0, auquel fut accordé peu d'attention : le Handbuch de Gmelin ne mentionne que le sel de Lefèbvre, le Lehrbuch de Michaëlis (Graham- Otto) celui de Hammerl, et le Handwôrterbuch de Fehling ne parle ni de l’un ni de l’autre. Il n’y a que le Diction- naire de Wurtz (Supplément I, 389) qui les mentionne tous les deux; il les envisage comme un même hydrate, ce qui n’est guère surprenant, M. Lefèbvre seul ayant décrit l’appa- rence des cristaux, et aucun des auteurs n’ayant déterminé la solubilité. Cependant, les deux hydrates sont différents. Je les ai nommés « et $; le premier, c’est l’hydrate de M. Hammerl; il est le plus stable,
Sur l’existence d’hydrates à moins de 4 molécules d’eau il y a grande incertitude. M. Lescoeur *) déduit de ses ex- périences sur les tensions l’existence des hydrates à 4 H,0, à 2 H,0 et. peut-être à 1 4,0; je démontrerai, dans le cha- pitre IIT, qu’il a donné à ses observations une interprétation entièrement fausse. M. Müller-Erzbach ‘} conclut également
1) Compt. Rend. T. 70, 684.
2) Wien. Sitzungsber., Il Abth. 72, 667. 3) Compt. Rend., 992, 1158.
4) Wiedem. Annal., 27, 624,
208 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM ÉTUDE.
à l'existence de ces hydrates. Les expériences de ces deux auteurs ne font pas connaître les circonstances dans lesquelles ces hydrates pourraient être isolés.
M. Ditte j'a obtenu des cristaux de CaC, .2 H,0 par l'addition d’une certaine quantité de ÆCI à la dissolution de CaCl, .6 H,0. D’après Mitscherlich (Gmelin’s Handbuch), ce même hydrate se produirait quand on chauffe une solution jusqu’à 200°; tandis que M M. Legrand et Gerlach ?) obtien- nent déjà une masse de cette composition à la température d'environ 175°, et que M. Weber :) ne trouve que 0,1 à0,25% d’eau dans la masse solide qui reste après dessiccation à 200°.
Les expériences suivantes feront connaître les conditions de l’existence des hydrates:
CaC1, .6 H,0, CaCl, .4H,Oax, CaCl, .4H,0B, CaCl, .2 H, 0, Coût... 130.
2. Hydrate à 6 H,0. C’est l’hydrate le mieux connu. On l’obtient toujours en refroidissant au-dessous de 30° une dis- solution contenant tout au plus 102,7 p. de CaCl, sur 100 p. d’eau. C’est le dernier hydrate qu’on rencontre, même en prolongeant l’abaissement de la température jusqu’au point cryohydratique, déterminé pour ce sel par M. Hammerl “). Les dissolutions peuvent cependant rester en surfusion de dix degrés et plus.
Les données sur la solubilité de ce sel présentent de grands écarts. Les valeurs de M. Mulder *) paraissent trop faibles pour les températures au-dessous de 20°. Les valeurs de M. Hammerl (1. c.) me paraissent mériter plus de confiance. Sa valeur pour 0° s’accorde en outre avec la détermination
© = ——————
1) Compt. Rend., 92, 242.
2) Zeits. Anal. Chem., 1887, 445.
3) Berl. Ber., 1882, 2316.
4) Wien. Sitzungsber., 1878, 78, 99.
5) Bijdrage tot de kennis van het scheikundig gebonden water.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 209
fort exacte de M. Engel !). Dans la table suivante, comme dans toute la suite de ce mémoire, j’exprimerai par S la quantité de sel anhydre contenu dans la solution sur 100 parties d’eau.
Solubilité de Cal, .6 H,0.
t S S S S S MULDER |HAMMERL| ENGEL MULDER | HAMMERL (1 49,6 59,39 60,3 14° 64,5 — Hs — 64,83 192935 — 19,91 Fi 98,0 — 219,89 — ONE 79,88 — 66,20 26° 82,9 — 139,86 — 69,49
On ne peut pousser l'exactitude que jusqu'à 0,2 ou 0,8% cause de la consistance sirupeuse des dissolutions. Les
A
près, à valeurs de MM. Mulder et Hammerl sont concordantes à partir de la température de 20°.
J'ai fait une série de déterminations qui s'étend de 20° jusqu’au point de fusion. Mulder donne pour ce point 33°: mais il déduit cette température de la courbe de solubilité, dont je vais démontrer que la partie au-dessus de 30° est fort inexacte. Hammerl a obtenu par observation directe 29°,53
Comme j'avais besoin de connaître aussi exactement que
JS
possible cette température et la solubilité à ses approches, j'ai purifié, par cristallisation réitérée, une grande quan- tité du sel à 6 H,0. J'ai pris un bon poids (soit 1 k°) de ces cristaux égouttés, je les ai fondus et j'en ai fait recristalli- ser environ les trois quarts. Après avoir séparé la partie liquide, j'ai répété la même opération sur le résidu solide. Le | chaque opération. À la fin, on obtient une masse qui fond ou se solidifie en entier à une température de 30°,2.
Avec ces cristaux j'ai fait les déterminations suivantes,
Se
point de fusion s'élève un peu à
1) Ann. Chim. Phys, [5], 13, 382.
210 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
en les agitant dans un flacon fermé, plongé dans un bain d’eau à température constante, avec une quantité d’eau telle, qu'après saturation 1l restât encore une fort grande quantité de sel non dissous,
Solubilité de CaCl, .6 H, 0.
SH GE. 209,4 57,1 980 9 99.05 950 05 81.67 990 5 96,07 980,0 88,8 309.2 109,7
Une partie de la dissolution surnageante, enlevée au moyen d’une pipette, fut pesée dans un petit flacon et la quantité de CaCl, déterminée par titrage avec une solution de AgAzO,.
La courbe BC, PI V, fig. 1, représente les valeurs de M. Hammerl et les miennes. Afin de faciliter la comparaison des courbes de solubilité avec celles des tensions (chapitre IIT) la figure fait croître la quantité de sel dans la direction descendante.
La fig. 2 est la reproduction d’une partie de la fig. 1, à plus grande échelle. La solubilité croît d'autant plus vite qu’on approche devantage du point de fusion 30°,2.
3. Cependant, le point de fusion ne termine pas la courbe de solubilité de CaCl, .6 H,0, car il existe des dissolutions saturées, contenant plus de CaCl, que l’hydrate lui-même.
J'avais présumé l’existance de telles dissolutions !), guidé par l’analogie entre les hydrates salins et les hydrates de gaz. Pour ces derniers, en effet, j'avais montré qu'ils peuvent exister en équilibre parfaitement stable, au-dessous du point de fusion, avec une dissolution qui contenait plus de gaz que l’hydrate, aussi bien qu'avec une dissolution contenant
1) Voir Recueil des travaux chimiques des Pays-Bus, T.V, 1886, 407.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. au
plus d’eau. Il me semblait donc fort probable qu’à des tem- pératures au-dessous du point de fusion d’un sel hydraté, l’hydrate pourrait être en équilibre avec des dissolutions contenant plus de sel anhydre, aussi bien qu'avec celles qui contiennent une plus grande quantité d’eau.
De telles dissolutions n'avaient pas encore été observées. Pour la plupart des sels hydratés le point de fusion ne peut pas même être atteint, parce qu'auparavant le sel se dédouble en un sel moins hydraté et une solution plus hydratée. Dans ce cas, on ne peut guère espérer que des dissolutions, con- tenant plus de sel anhydre que l’hydrate fondu, puissent exister. Pour les hydrates dont le point de fusion peut être atteint sans décomposition, la solubilité n’a pas été déterminée d'ordinaire avec assez de précision dans le voisinage de ce point; et parce qu’on ne s'attendait pas à rencontrer les dissolutions susdites, on n’avait pas l’idée de les rechercher.
L'hydrate CaCl, .6H,0 m’a permis maintenant de démon- trer leur existence. J'ai préparé des solutions contenant une plus grande quantité de CaCl, que l’hydrate à 6 4,0, en chauffant ces cristaux au-dessous de leur point de fusion jusqu’à ce qu’une quantité assez grande d’eau fût vaporisée. Si l’on refroidit de telles solutions et que leur concentration ne soit pas trop grande, on atteint un peu au-dessous de 30°,2 une température à laquelle un cristal de CaCl, .6 H,0, semé dans le liquide, ne disparaît pas, mais y produit une cris- tallisation de cet hydrate, en quantité d’autant plus grande qu’on abaisse davantage la température. La concentration du liquide augmente donc à mesure qu’on s'éloigne du point de fusion. J'ai pu en déterminer les valeurs pour trois tempé- ratures :
t | S Ÿ 290.8 | 107.5
212 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Ces valeurs sont représentées dans les fig. 1 et 2 (PI. V) par la courbe CD. Il y a donc pour l’hydrate à 6 4,0 une courbe de solubilité à deux branches, qui se rencontrent en son point de fusion, où elles ont une tangente verticale.
La branche nouvelle ne s'étend cependant que sur un inter- valle de 1°. Si l’on veut refroidir la dissolution qui contient des cristaux à 6 4,0 au-dessous de la température de 29°,2, on voit apparaître de nouveaux cristaux. C’est la combinaison à 4H,0 que j'ai désignée par 6. Le liquide, qui existe à 29°,2 et appartient à la nouvelle branche, ayant une composition qu'on peut exprimer par la formule CaCl, ::: 5,41 H,0, on voit qu'au-dessous de 29°,2 il se partagera en un mélange des sels à 64,0 et 4H,06.
10 (CaCt, == 5,41 H,0) = 7 (CaCl, .6 H,0) + 3 (CaCl, .4H,0)
La branche CD se termine donc nécessairement à 29°,2, et les dissolutions qui y appartiennent ont une concentration qui ne peut varier qu'entre 102,7 et 112,8 parties de CaCl, sur 100 parties d’eau.
Même quand on a préparé une telle dissolution, l’hydrate à 6H,0 n’y apparaît jamais de lui-même, pas plus que dans les dissolutions de la branche BC. Mais, tandis que ces dernières peuvent être refroidies sans danger jusqu’à ce que la sur- saturation cesse (parce qu’il ne peut jamais se former d'autre hydrate), ce n’est plus le cas avec les dissolutions qui con- tiennent plus de sel que l’hydrate à 6 H,0. Si l’onn'y pro- voque pas la cristallisation de celui-ci, elles ne peuvent être refroidies, sans qu'apparaisse l’hydrate à 4H,0$, que de quelques degrés au-dessous de la température qui correspond à la courbe CD.
4, Hydrate à 4H,08. La cristallisation de cet hydrate n’est jamais en retard d’une manière perceptible. On l’obtient donc toujours en refroidissant, à une température convenable, des dissolutions renfermant un peu moins de 6,0. La
| EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 213
courbe de solubilité connue, on peut prédire cette tempéra- ture à un degré près. C’est l’hydrate de M. Lefèbvre. Je le conclus de sa méthode de préparation et de la description des cristaux. M. Lefèbvre obtint son hydrate à environ 15”, d’une dissolution contenant 120 p. de CaCl,, en forme de grandes lames transparentes. Si l’on n’opère pas le refroidis- sement fort lentement, on les obtient en masse volumineuse, qui renferme une grande quantité de liquide. Les cristaux, pressés entre du papier buvard, contenaient 40,2% H,0; M. Lefèbvre trouva 40 à 41%. L’hydrate CaCl, . 4 H,0 exige 39,37, (154 de CaCl, sur 100 d’eau). L'équilibre avec la dissolution s'établit facilement; j'ai fait les déterminations suivantes :
Solubilité de CaCl, . 4 H,0 f.
D els Pr Li
189.4 103.3 399,0 122.74 259,0 108.8 38°.4 127.50 309.0 114.1
Les valeurs sont représentées par la courbe EDF, fig. 1 et 2. On voit qu'elle passe par le point D de la courbe CD, circonstance qui explique l’apparition des cristaux à 4 Æ, Of, dans la dissolution saturée de CaCl, .6 H,0, au-dessous de 29°. La courbe CD ne peut donc être prolongée au-dessous de son point de rencontre avec la courbe FD, parce que l’apparition des cristaux à 4 H,0B n’éprouve point de retard. Par contre, la courbe FD) peut être prolongée facilement au-dessous de 29°2, les cristaux à 6 H,0 n’apparaissant jamais d’eux mêmes. Quand on sème toutefois un cristal à 6H,0 dans une solution saturée de CaCl, .4H, OB au- dessous de 29°2, le liquide se solidifie en un mélange de CaCl, .6H,0 et CaCl,.4H,06. Si l’on provoque cette solidification à une température qui ne diffère que peu de
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celle du point d’intersection de CD et FD, le dégagement de chaleur qui l’accompagne fournit un moyen certain pour déterminer cette température avec une grande exactitude. En présence de la dissolution, on ne peut conserver l’hydrate à 4H,08 au-dessus de 38°,4. A cette température on voit disparaître les lamelles au sein du liquide, pour être rem- placées par d’autres cristaux en paillettes fort petites, dont la composition, suivant l’analyse, correspond à CaCl, .2 H,0. La dissolution renfermant 127,5 p. de CaCl,,ce qui équivaut à la composition CaCl, 74,83 H,0, ïil faut qu’une partie seulement des cristaux à 4 4,0 se transforme en l’hydrate nouveau, tandis qu’une autre partie va former une nouvelle quantité de dissolution avec les molécules d’eau qui se sont séparées : 34 (CaC1, .4H,0)—=10(CaCl, .2 H,0)+24(Ca0Cl, ::4.831T, 0)
ES
Conformément à cette équation, on voit la quantité des cristaux diminuer considérablement lors de la transformation à 38°,4; tandis que les cristaux secs éprouvent à cette tem- pérature une fusion partielle.
La courbe ne pouvait non plus être poursuivie au-dessous de 18° environ. S1 l’on veut refroidir au-dessous de cette température une dissolution saturée de l’hydrate à 4 H, OP, cet hydrate éprouve bientôt une autre transformation: il se change en une combinaison de même composition, mais plus stable, que j'ai nommée CaCl, .4 H,Ox. Cette transformation peut s'effectuer déjà dès la température de 38° (voyez p. sui- vante), parce que la solubilité du nouveau corps est à toute température beaucoup moins grande; elle est donc suivie d’un dépôt nouveau de l’hydrate «. La transformation spontanée ne se présente guère au-dessus de 20°. Sa probabilité devient de plus en plus grande avec l’abaissement de température, de sorte que je n’ai pu faire une détermination de solubilité à des températures inférieures à 18°. Un frottement avec quelque objet pointu provoque toujours la transformation en
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 215
très peu de temps et à toute température; un cristal d’hydrate « la provoque immédiatement.
Les cristaux B éprouvent encore la même transformation en dehors de la dissolution. D'’ordinaire, dans les cristaux secs, elle s'établit au cours d’une journée, ou bien instanta- nément par frottement ou par contact avec un cristal. On s’en convainc, soit par leur perte de transparence, soit en les semant dans une dissolution qui est un peu trop diluée pour pouvoir déposer les cristaux B; alors des cristaux « se dépo- seront si la transformation a eu lieu.
L'hydrate CaCl, .4 H,0$6 est donc aussi difficile à conser- ver, qu'il est facile à obtenir. Le courbe FDE fait voir qu'on ne manquera jamais de l’obtenir en refroidissant à une tem- pérature située entre 38° et 18° des dissolutions dont la con- centration peut varier entre 127,5 et 1083.
5. Hydrate à 47H, Ua.
La transformation de l’hydrate 5, à des températures au- dessous de 38°, fournit des cristaux grenus, se déposant très vite au fond de la dissolution; de sorte que, malgré la solu- bilité moindre des cristaux «, une bien plus grande quantité du liquide, qui restait auparavant enfermé entre les cristaux B, devient visible après leur transformation. Les cristaux « semblent appartenir au système rhombique. Pour leur solubi- lité j'obtins les valeurs suivantes :
Solubilité de Cat, .4 H,0 «.
LIN STAR PEN EE
990 0 99.67 350.95 107.91 9497 95,59 409,00 115,3 990 8 100,6 45,00 199.9
Ces valeurs sont représentées par la courbe GHK. M. Hammerl !) ayant obtenu son hydrate à 4 H,0 en
————————.——
1) Wien. Sitzungsber., 72, 677. Hammer] trouva dans ses cristaux 41,4—39,38 °/, H: 0. ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIT, 15
216 M. IH. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
fondant plusieurs fois des cristaux de CaCl, .6 H,0, c’est sans doute la combinaison «& qu’il avait produite. La disso- lution des cristaux $ devrait contenir, à 30°, 114 p. de CaCl,, tandis que l’hydrate fondu n’en contient que 102,7. La disso- lution des cristaux « au contraire, en contient à 30°, d’après la courbe, 101,5. Il se peut donc qu’une petite quantité des cristaux à 4 H,0 & se dépose de l’hydrate à 6 H,0 fondu.
La courbe KHG coupe la courbe de l’hydrate à 6 H,0 au point À, situé à 29°,8. À des températures inférieures, les dissolutions saturées de l’hydrate à 4 4,0 & sont plus concentrées que les dissolutions saturées de l’hydrate à 6 F7, 0. Si l’on y sème un cristal de ce dernier, il s’en dépose davan- tage ; tandis que les cristaux à 4 77, O & rentrent en dissolution, ou bien se transforment en CaCl, .6 H,0 en se combinant à une partie de la dissolution. Il dépendra donc des quantités de ces cristaux et de la dissolution, lequel des deux systèmes s’établira: CaCl, .6 H,0 + dissolution, ou CaCl, .6 H,0 + + CaCl, . 4 IH, 0 «. Ce dernier cas se présente si la composition de la masse entière correspond à moins de 6 molécules A, 0.
L'apparition spontanée des cristaux à 6 4,0 se fait d’or- dinaire au-dessous de 20°, de sorte qu’on ne peut déterminer la solubilité du sel à 4 1,0 « au-dessous de cette tempéra- ture.
De l’autre côté du point H le cas inverse se présente. Les dissolutions correspondant à la courbe HCD pour l'hydrate à 6H,0O ont une concentration plus grande que celles de la courbe pour l’hydrate à 4 H, 0 « aux mêmes températures. Les premières sont donc sursaturées par rapport à cet hydrate, et toute la courbe HCD, comprenant le point de fusion Cet la nouvelle courbe de dissolution pour l’hydrate à 6 H, 0, ne pourrait être obtenue, si la formation des cristaux à 4 4,0 & n'éprouvait point de retard.
Si on la provoque par un cristal, la transformation au point H s'effectue d’après la formule suivante :
21 (CaCl, .6 H,0) = CaCl, .4 H,0 + 20 (CaCl, = 6,1 H, 0)
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC, sin
Cette transformation ressemble beaucoup à une fusion com- plète, à cause de la différence fort minime entre la composition du liquide et celle des cristaux à 6 Æ7, O.
Les dissolutions contenant l’hydrate 4 H,0 «& sont stables, de 29°,8 à 45°,3. À cette dernière température, l’hydrate se transforme en les mêmes cristaux à 2 H,0 que l’hydrate à 4 H,0B avait déjà fournis à 38°,4. La dissolution à 45°,3 ayant une concentration de 130,2 parties de CaCl,, la trans- formation s'opère d’après le symbole:
6. Si nous comparons maintenant les courbes de solubilité pour les hydrates 4 H,0B et «, nous voyons qu’elles sont à peu près parallèles. La différence de concentration est sensi- blement égale pour toutes les températures. Compare-t-on au contraire la différence des températures pour des concentra- tions égales sur les deux courbes — cette différence s’accroit à température diminuante. Aïnsi la concentration 135 corres- pond aux températures de 39° et de 44°, la concentration 102,5 aux températures 18° et 31°. Peut-être l'accroissement de cette différence de température donne-t-elle l’explication de la plus grande instabilité du système: CaCl,. 4 H,06,+ dissolution, à des températures inférieures. Le phénomène de la transformation se rapprocherait de celui de la surfusion.
La transformation en système: CaCl, .4 H, 0 &« + dissolution: est la seule possible entre 38°,4 et 29°,8. Au-dessous de cette dernière température le système: CaCl,.4H,0$ + dissolution peut encore éprouver d’autres transformations, qui se laissent déduire de l'inspection des différentes courbes.
D'abord la transformation en 4 H,0% et dissolution ne représente que le premier pas vers l’équilibre stable, car ce système lui-même peut encore se transformer (voyez sous 5) dans le nouveau système des hydrates 4 1,0 « et 6 H, 0. (Le système : hydrate 6 H, 0 + dissolution ne peut naître, vu que le système original contient moins de 6 H,0).
RE
218 M. H. W. PAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Au-dessous de 29°,2 (voir sous 4) un autre cas peut se présenter. Le système CaCl, .4 H,0 $ + dissolution peut se transformer en CaCl, .4 H,0 5 + CaCl, .6 H, O, dont le premier corps, toutefois après un temps plus ou moins long (voir sous 4), se transformera à son tour en Call, .4H,0 &.
Au-dessous de 29°2 on peut donc aboutir au même état final et stable: CaCl, .4 H,0 & + CaCl, .6 H,0, en passant par l’un ou l’autre état intermédiaire: CaCl, .4 H,0 « + dis- solution, ou CaCl, .4 H,0 6 + CaCl, .6 H,0.
Si l’on pouvait encore conserver l’hydrate 4 H,0 6 à des températures inférieures à 18°, la solution contiendrait plus de 6 H,0, et il dépendrait de la quantité des cristaux 4 H, 0 6, si la composition du système entier correspondrait à plus ou à moins de 6 H,0. Dans le dernier cas, les mêmes transfor- mations resteraient possibles qu’au-dessus de 18°. Dans le premier cas, l’état final serait CaCl, .6 H,0 + dissolution, et la transformation en ce système pourrait arriver direc- tement, ou bien par l’intermédiaire de la transformation en CaCl, .4 H,0 «x + dissolution.
L'hydrate 4 H,0 5 peut se transformer en hydrate 4 H,0 & aussi en dehors de la dissolution, à toute température; il représente donc toujours la modification labile. Si le cas se présentait qu’on eût deux modifications d’un même hydrate, dont les courbes donneraient un point d’intersection, l’une serait labile au-dessous de ce point, l’autre au-dessus, tant dans la dissolution qu’en dehors.
Il est fort remarquable qu'on n'ait rencontré jusqu'ici aucun exemple d’hydrate à deux modifications, dont les courbes se coupent. Les exemples cornus sont les deux hydrates à 7 H,0 de Na, CO, et de MgSO,. Les courbes de solubilité sont encore ici à peu près parallèles, quoique leurs limites ne soient pas exactement connues. Ici comme dans le cas du CaCl, .4 H,0, l’un des hydrates est toujours le plus labile !).
1) Dans le Na,CO,.7H,0 les modifications sont en outre toutes deux Jlabiles à l'égard de l'hydrate à 10 H,0.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 219
Le cas est différent lorsque les deux courbes qui se cou- pent appartiennent à des hydrates différents. Ainsi, l’hydrate CaCl, .4 H,0 « est labile au-dessous de 29°,8 dans la disso- lution, mais pas en dehors d’elle, parce qu’alors il n’est pas possible qu’il se transforme en hydrate à 6 H,0. Au contraire, l'hydrate à 6 H,0 est labile aussi en dehors de la dissolution au-dessus de 29°,8, parce que sa décompositon en hydrate à 4 H,0 « et dissolution n’exige pas la présence de la dernière. Cette règle est générale. En dehors de la dissolution, l’hydrate qui contient la plus grande quantité d’eau est seui labile.
Je fais remarquer que les exemples d’un retard, dans une transformation qui absorbe de la chaleur, sont fort rares. L'exemple de CaCl, .6 H,0, dont le point de fusion ne sau- rait être observé sans un tel retard, est peut-être le seul qu’on puisse réaliser aisément, et cela grâce à la petite dif- férence entre les températures des points H et C. Les autres exemples connus sont ceux des hydrates Na, SO, . 10 H,0 et Na,CO,.10 H,0, dont Loewel !) et Tilden ont parfois observé une fusion sans apparition de l’hydrate inférieur.
Encore, le retard de la transformation ne s’observe ici que pour un fort petit intervalle de température.
7. Je n'ai pas trouvé de pareil retard dans les transforma- tions de CaCl, . 4 H,0$ et « en CaCl, . 2 H,0 à 38° 4et45°,3. On voit par là l'impossibilité d'observer jamais les points de fusion des deux hydrates à 4 H,0. Suivant leurs courbes de dissolution, on pourrait espérer atteindre leurs points de fusion à 44° et 50° environ, températures auxquelles les courbes prolongées correspondraient à une concentration de 154, soit CaCl, … 4 H,0. Les transformations en CaCl,.2 H,0 devraicnt donc éprouver un retard de 5 à 6 degrés, ce qui paraît tout à fait impossible.
Les transformations inverses, au contraire, présentent faci-
1) Ann. Ghim. Phys., [3] 49, 41.
220 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
lement ce retard. La transformation de CaCl, .2 H,0 en hy- drate à 4 H,0 & ne s’effectue jamais à 45°,3 d’elle-même, et l’on peut abaïsser la température jusqu’à 35° environ avant que la transformation en l’hydrate à 4 H,0$ s’accomplisse. La partie ÀF de la courbe pour CaCl, .2 H,0 représente donc de nouveau un état labile. |
Les anciens auteurs n'ayant fait aucune attention aux phénomènes remarquables qui peuvent se présenter surtout entre 30° et 45°, il n’est pas surprenant que leurs données pour la solubilité n’aient aucune valeur !).
Les courbes qui représentent des dissolutions stables sont donc: BH pour l’hydrate à 6 4,0, et HK pour l’hydrate à 4H,0x. Toutes les autres représentent des états plus ou moins labiles.
8. Hydrate a 2 H,0. La solubilité de ce nouvel hydrate
DS
a été déterminée à plusieurs températures : Solubilité de CaCl, .2 H,0.
t | S | t | S 40 198.1 1940 176.0 450 199.9 1370 187.6 500 132.3 1390 194.0 590.5 | 136.5 1550 214.3 800.5 | 145.3 1650 236.2 950.8 | 156.5 1740 975.7
1159 169.5
1) Pour cet intervalle, il y a quelques déterminations de M. Mulder et de M. Poggiale.
+: | io |pogausix fuit |. mvuoest [rose ; MULDER POGGIALE MULDER | POGGIALE 309 Sr 74.0 39° 107 qe 1 ane € 3) 30,5 _ 40° 41140:7 78,1 349 95 103,3 ‘ h 14,5 114,5 Le
Les valeurs de M. Mulder se rapprochent le mieux de la courbe pour CaCl, .4 H,0x. Je présume qu'il a préparé les dissolutions par l'addition de CaCl, anhydre à l’hydrate fondu à 6 H,0. De cette manière, un état d'équilibre défini est difficile à atteindre. Il n’a fait aucune attention à la composition de l’hydrate formé au sein de la dissolution.
»
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 21
Les dissolutions de concentration voulue furent toujours obtenues en faisant bouillir une dissolution CaCl, :& 6H,0 préparée par fusion de l’hydrate à 6 H,0, jusqu’à ce que la quantité nécessaire d’eau se fût vaporisée. Pour éviter la perte de traces de HCI, qui commence d’après M. Drggrrs vers 150”, je faisais bouillir le liquide sous pression réduite. Pour les con- centrations les plus fortes, cette méthode ne suffit plus, parce que le liquide commence à mousser lorsque la quantité de cristaux à 2 H,0 devient considérable. Je me suis servi alors d'un courant d’air.
Les déterminations jusqu’à 125° ont été faites de la manière suivante. Une partie du liquide saturé fut aspirée dans une petite pipette, qui pouvait être pesée, munie de deux petites capsules en verre pour empêcher l'attraction de l’eau pendant le refroidissement. La masse solide fut dissoute dans l’eau chaude, puis titrée. La préparation d’une dissolution saturée, par le procédé décrit précédemment, ne va plus bien au-dessus de 125°, parce que la tension de vapeur devient assez grande pour provoquer une condensation d’eau dans la partie froide du col du flacon, pendant que les cristaux se déposent. Je me suis donc servi, pour les températures plus élevées, de la méthode inverse: en plongeant l’appareil tout entier dans le bain de glycérine, j'ai déterminé avec soin la température à laquelle les derniers cristaux disparaissaient dans un liquide de composition « connue.
64,0 (dont us déterminé exactement la com- position) dans l’appareil ci-joint. Je le chauffais, en y faisant passer un courant d’air, jusqu’à ce que la température désirée fût atteinte et qu’il se fût déposé quelques cristaux à 2 4,0. La perte en eau (et par là la composition de la masse résultante) était donnée par la pesée. Après avoir fermé à la lampe los parties étirées a et b, je procédais à la détermination de la température de liquéfaction totale ; l'appareil immergé pouvait être agité au
299 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
moyen d’une baguette de verre adaptée à son extrémité supérieure par un tube en caoutchouc. Cette détermination fut répétée plusieurs fois, pour préciser la température finale. Dans ces expériences, j'observai plusieurs fois un retard de 5° dans l'apparition des cristaux par refroidissement.
9. Composition des cristaux. [l'aspect des cristaux s'accorde avec la description que M. Drrre !) a donnée de l’hydrate CaCl,.2 H,0, obtenu à la température ordinaire en ajoutant de l'acide chlorhydrique à la dissolution de l’hydrate à 6 H,0.
La séparation de la dissolution pure est bien moins facile, parce que les cristaux floconneux renferment une grande quantité du liquide, dont la concentration diffère beaucoup de celle de l’hydrate, et qui se solidifie au-dessous de 33°. Une analyse de cristaux pris d’une dissolution à 50° et pres- sés aussi vite que possible, me donna 256 parties de CaC1,. Une seconde analyse, faite sur des paillettes tirées d’une dissolution à 100”, où elles s’étaient formées par un refroi- dissement très lent, donna 263 parties de CaCl,. Or, CaCl,.2H,0 exige 308 parties sur 100 de H,0.
La preuve décisive que la composition des cristaux est CaCl, .2H,0 fut obtenue en me basant sur le fait, que la tension de la dissolution saturée devient égale à une atmos- phère à la température de 165° (voir Chap. II). Si l’on chauffe donc une dissolution à une température un peu plus élevée, le dissolvant se vaporisera entièrement, et les cristaux resteront à l’état sec. Cette opération fut exécutée dans l’ap- pareil ci-joint. Par le tube a j'introduisis une dissolution fort concentrée. Le tube a ayant alors été fermé à la lampe, l’ap- pareil fut chauffé dans Le bain de vapeur que je décrirai au cha- pitre III, de telle sorte que seulement une partie du tube étroit b se prolongeait au-dessus du bouchon du bain. J’élevai gra-
1) Ann. Chim. Phys. [5] 22, 559.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 225
duellement la température jusqu’à 170° et la maintins à ce point assez longtemps pour qu’il ne se montrât plus de con- densation d’eau dans la partie supérieure de 6. L'analyse de la masse solide restée dans la boule donna 298,6 p. de CaCl, sur 100 p. d’eau, ce qui diffère peu de 308 (calculé). La vaporisation lente des dernières parties de la disso- fig. 4.
iution explique la petite différence qu'il y a encore nb
avec la composition : |
CaCl, : p. HE O. j Œ
La forme recourbée du tube b fut choisie pour | empêcher la diffusion de la vapeur d’eau. Sans cette |
précaution, les cristaux secs auraient pu perdre à leur tour de l’eau et se transformer en l’hydrate suivant, à quantité moindre d’eau.
Un dernier argument pour la composition des cristaux se déduit de la forme de la courbe FKL, qui re- présente les valeurs de la table p. 220 !). D'abord, la courbe est continue, ce qui prouve que c’est un même hydrate qui existe depuis 38°. En second lieu, aux températures élevées, l’accroissement de la concentration devient si rapide, qu’une concentration de 308 serait atteinte à une température de 176°; mais la courbe étant en même temps devenue verticale, cette température donnera le point de fusion de la combi- naison solide, qui ne sera donc autre que CaCl, .2 IT, 0.
1) Les valeurs suivantes, obtenues par M. Mulder et M. Poggiale, s’écar- tent beaucoup de la courbe pour CaCl, .2 H,0:
t S S t S S -MULDER. Po. MULDER Po. 50° — 82,5 89° 144,5 — 60° — 88,4 90° dis 110,6 62° 432,0 _ 400° 154 119,1 70° 135,9 95,1 110° — 127,4 80° — 102,7 130° Te [at 454 140° | eus 149,6
224 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Ce point de fusion ne peut jamais être atteint. La con- centration de la dissolution s'étant beaucoup approchée de celle de l’hydrate, une nouvelle transformation s’accomplit : l’hydrate à 24,0 donne une petite quantité de l’hydrate nouveau CaCl,.H,0 et beaucoup de dissolution. La tempé- rature (déterminée dans mes expériences sur les tensions, chapitre III) ne diffère cependant que fort peu de 176°, et ainsi la conduite de l’hydrate à 2 H,0 ressemble beaucoup à celle de l’hydrate 6 4,0, qui se transforme, lui aussi, en un hydrate inférieur à une température très voisine de son point de fusion. L'observation du point de fusion de CaCl, .2 H,0 ne peut s'effectuer, parce que la transformation de cet hydrate n’éprouve point de retard, comme c'était le cas pour la transformation de CaCl, .6 H,0 et de CaCl, .4 H,0 &.
Toutes les dissolutions au-dessus de 165° et la transfor- mation de CaCl, .2H,0 en CaCl, . H,0 ne sont possibles que sous des pressions plus grandes qu’une atmosphère !). Pour
1) Cet énoncé paraît en contradiction avec les observations de MM. Legrand et Gerlach (Ann. Chim. Phys [2]59, 433 et Zeitschr. anal. Chemie 1887, 41), qui donnent encore des points d'ébullition de dissolutions au- dessus de 1659.
Legrand, ‘Gerlach. 1740 148 bsr1uf: S 170° 264 170° | 268 1789 19 :l; 15 292 17995 329 179° 305
Il se pourrait que par un retard dans la cristallisation de CaCl, .2H20 on obtint occasionnellement une dissolution un peu plus concentrée que la dissolution saturée à 1659, et qui aurait alors un point d’ébullition plus élevé (voyez Chap. III). Mais ce retard n’est jamais fort grand avec le sel à 2 H30, et j'explique plutôt les différences par la grande difficulté de bien déterminer la température d’ébullition pour des dissolutions saturées ou presque saturées. Dans les expériences de M. Gerlach, il y avait diffusion libre à la surface de la dissolution. On ne s'étonne guère que dans ces conditions une croûte de sel puisse se former p. e. à 1509, quoique à cette
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 295
la préparation de ces dissolutions dans lappareil de la page 223, on n'a qu'à vaporiser l’eau dans un bain de 165° (ou d’une température encore inférieure si l’on fait usage d’un courant d’air) jusqu'à ce qu’on ait obtenu une masse plus ou moins solide. Après avoir fermé l’appareil, et en le chauffant tout entier à des températures plus élevées que 165°, on voit l’hydrate à 2 H,0 se dissoudre de plus en plus.
10. Hydrate à 1H,0. La transformation de l’hydrate à 2H,0 en CaCl,.H,0 est facile à reconnaître. Les paillettes floconneuses sont remplacées par des cristaux en forme de baguettes, qui se déposent aisément au fond, et en second lieu par un brusque changement dans la solubilité. J’ai fait les deux déterminations suivantes:
température la dissolution bouillante ne soit pas encore saturée. Une telle croûte formée à la surface est très dure, et j’ai eu maintes fois l'occasion d'observer avec le CaCl:.2 H20O préparé par dessiccation, combien :l est difficile de la dissoudre de nouveau en une dissolution non encore saturée. Une autre inexactitude résulte du chauffage à la flamme libre, qui peut occasionner que la température observée soit à plusieurs degrés au-dessus de celle qui correspondrait à la tension d’une atmosphère. C’est particu- lièrement le cas avec des dissolutions sirupeuses, comme celle de CaCl2:., Même lorsqu'une dissolution dans laquelle se trouvait un dépôt de CaCl,.2H30 était chauffée dans un bain de vapeur dont la température pouvait être réglée, sa température d’ébullition restait incertaine de plusieurs degrés.
Pour ces hautes concentrations, la seule méthode efficace est la déter- mination des tensions à température constante, dont on peut déduire le point d’ébullition exact.
M. Gerlach n’a donc pas le moindre droit de conclure de ses observa- tions (p. 422), que la fin de la concentration ne serait pas atteinte au moment de la formation d’un dépôt cristallin.
Si cette objection avait de la valeur, l’état de saturation devrait dépendre de la quantité de sel non dissous en présence de la dissolution, opinion entièrement inadmissible, tant au point de vue théorique que pratique.
Toutes les différences que M. Gerlach a trouvées pour le CaCl, et plu- sieurs autres sels, ne doivent être attribuées qu’à l’arrangement fort défec- tueux des expériences.
Ici, comme dans plusieurs autres cas, la méthode statique est de beaucoup préférable à la méthode dynamique pour la détermination de l'équilibre.
226 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Solubilité de CuCI, .H,0
Le S 1910 306 2350 391
«
La ligne LM, qui lie ces deux valeurs, coupe à angle vif la courbe de l’hydrate à 2 4,0. La concentration au point de rencontre est 297, ce qui correspond à une dissolution CaCt, 77 2,074 H, 0,
Comme cette composition diffère fort peu de celle de l’hy- drate à 2 H,0, la décomposition de celui-ci ressemble beaucoup à une fusion. Il n’y a qu’une petite quantité du nouvel hydrate qui prenne naissance, pour une grande quantité de l’ancien qui disparaît :
14,5 (CaCl, .2 H,0) = CaCt, .H,0 + 13,5 (CaC, =: 2,074 H, 0).
Les déterminations de la solubilité ont été faites comme celles pour l’hydrate à 2 H,0 au-dessus de 165°. Seulement, avant de fermer le tube à boule, je prolongeaï la vaporisation jusqu’à ce que le résidu solide contînt moins de 2 4,0. En chauffant au-dessus de 176°, on obtenait une dissolution au sein de laquelle se trouvaient les nouveaux cristaux. Les ex- périences décrites dans le chapitre IIT feront voir que ces tensions de ces dissolutions s’accroissent rapidement.
Ce serait donc une tâche difficile que de vouloir isoler les cristaux de la dissolution, surtout de les en séparer à un état de pureté suffisante pour l’analyse ; la dissolution, en effet, a une concentration qui n’augmente que lentement avec la température.
J'ai donc déterminé la composition des cristaux d’une manière analogue à celle que j'avais suivie pour l’hydrate à 2 H,0. Si l’on prépare ce dernier par vaporisation de la dissolution à 165° (voyez p. 222), et qu’on continue le cou- rant d’air, le sel sec se déshydrate encore et produira natu-
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 227 rellement d’abord l’hydrate suivant (c'est-à-dire celui qui prend naissance dans la solution à 176° sous pression), puis, à la fin, le sel anhydre. Choisit-on au contraire une tempé- rature telle, que la tension de CaCl, .2 H,0 dans l’état sec soit égale à une atmosphère, la déshydratation par vaporisation libre ne progressera que jusqu’au nouvel hydrate, si l’on empêche la diffusion de la vapeur d’eau, de manière que ce nouvel hydrate reste exposé à la vapeur d’une tension d’une atmosphère, suffisante pour qu'il ne se déshydrate pas à son tour.
Les expériences du Chap. IIT ayant montré que la tension de CaCl, .2H,0 à l'état sec est d’une atmosphère à 174”, j'ai chauffé cet hydrate dans l'appareil décrit page 222, à une température de 180° à 185°, et chaque quart d'heure j'ai déterminé la perte d’eau par la pesée. En une demi-heure la composition s’abaïissa jusqu'à 1,22 H,0, en trois quarts d'heure jusqu’à à 1,01 H,0; ensuite, la quantité ne diminua plus que de 0,01 mol. (environ 5 miligr.). Cette dernière perte s’ex- plique facilement en considérant qu'à chaque nouvel échauf- fement une certaine quantité de vapeur s’échappait avec l’air qui était rentré dans l’appareil pendant le refroidissement précédent.
L'expérience prouve done d’une manière incontestable que le nouvel hydrate a la composition
CaCl, . H,0.
11. La proximité des températures 165° et 174° est sans doute la cause des résultats différents obtenus par divers auteurs (voyez p. 208) dans l’échauffement des combinaisons liquides ou solides de CaCl, avec l’eau.
Sans l'étude des tensions, il eût été fort difficile de pré- ciser les conditions sous lesquelles : 1°. l’hydrate CaCt, .2 H,0 résulte d’une dissolution; et 2°. l’hydrate à 1 7,0 résulte de celui à 2 4,0,
Si l’on opère à l'air libre, la diffusion rapide de la vapeur
298 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
d’eau développée est cause qu’on obtient, à toute température un peu élevée, d’abord l’hydrate à 2 H,0, ensuite celui à 1 4,0, enfin le sel anhydre, et aucune particularité n’indique le passage de l’un'à l’autre. Ce n’est qu’en tenant compte de leurs tensions qu’on peut arrêter la décomposition de l’une ou l’autre de ces combinaisons, en les environnant de vapeur d’eau et en ayant soin que pour l’hydrate à 2 H,0 la tem- pérature ne s'élève pas au-dessus de 174°. Pour l’hydrate à 1 41,0, la limite supérieure, — où sa tension deviendrait aussi une atmosphère et où la dernière molécule d’eau serait
DS
égale à expulsée, — n’est pas encore connue.
12. Sel anhydre. La solubilité du sel à 1 4,0 croissant lentement avec la température, on pourrait s'attendre à ce que son point de fnsion ne serait atteint qu’à une tempé- rature fort élévée, p.e. bien supérieure à 250°. Il est fort vraisemblable qu'auparavant le sel se dédouble en sel an- hydre et dissolution. Je déduis cette conclusion d’un fait que j'ai deux fois observé, à savoir: qu'une masse solide con- tenant moins d’une molécule d’eau, chauffée dans la vapeur de diphénylamine, devient partiellement liquide au-dessus de 260°. On ne peut trouver d’autre interprétation de ce fait que celle d’une transformation subie par les cristaux de CaCl, .H,0. En prolongeant la droite XL de 235° à 260°, on obtiendrait pour la concentration de la dissolution saturée à : cette température: environ 345 parties, soit Cal, = 1,8 4,0, . Je présume donc qu’à cette ne la ans suivante s’accomplit :
9 (CaCl, .H,0) = 4 Cat, + 5 (CaCl, = 1,8 H,0).
Au-dessus de 260° on n’aurait donc, comme seul sel solide possible au sein d’une solution, que le sel anhydre. Si cette supposition est vraie, la courbe de dissolution devrait éprouver à 260° un nouveau changement de direction, et on pourrait s’attendre à ce que l’accroissement des concentrations devienne encore plus faible que pour le dernier hydrate.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 2929
Je n'ai pu obtenir jusqu'ici des valeurs pour ces tempé- ratures élevées. Les pressions deviennent assez grandes pour que les tubes à boules, chauffés dans des bains de vapeur, aient plus d’une fois fait explosion. J’ai pu observer seulement que, même à 300°, une masse contenant 375 parties de Cal, n’est pas encore entièrement liquide.
Peut-être la solubilité du CaCl, anhydre s’accroîtra plus rapidement si l’on élève la température encore davantage, de sorte qu’on arriverait à la fin au point de fusion du sel anhydre, 755° d’après M. le Chatelier !), 720° d’après M. Carnelley.
Le chapitre IIT apprendra que dans ce cas les pressions des dissolutions saturées, après s'être accrues jusqu'à un maximum, doivent redescendre jusqu’au point de fusion.
Mais il est fort douteux que la température critique de l’eau, qui intervient, n'apporte pas des perturbations, dont la signification ne saurait encore être prévue; ou bien: que l’action décomposante de l’eau sur le sel ne se fasse sentir d’une manière sensible.
13. Glace. Si le point de fusion du sel anhydre est la limite supérieure pour l’existence d’une dissolution — parce que la teneur en eau devient nulle — une semblable limite existe à l’autre côté des courbes de dissolution, où la quantité de CaCl, dans la dissolution devient nulle.
Nous sommes partis, en considérant la courbe de solu- bilité de l’hydrate à 6 4,0, du point cryohydratique. En ce point se termine encore la courbe À B, qui donne les points de congélation des dissolutions de CaC?, depuis — 55° jusqu’à O°. Cette courbe a été déterminée par M. Hammerl ?).
On peut toutefois la considérer aussi comme représen- tant la courbe de solubilité de la glace dans les dissolutions de CaCl,. De cette manière, elle devient entièrement compa-
1) Bull. Soc. Chim. 1877, 301. 2) Wien. Sitzungsber, 78, 59.
230 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
rable à la courhe de solubilité de CaCl, anhydre. De même que, avec solubilité croissante de CaCl,,le phénomène de la dissolution change en celui de la fusion au moment où toute l’eau a disparu, de même la solubilité croissante de la glace, en partant de — 55°, fait diminuer la teneur en CaCl, du liquide, jusqu’à 0°, où elle devient nulle et où la dissolution de la glace change en fusion. |
La courbe AB, considérée à ce point de vue, ressemble à la nouvelle branche CD de la courbe des concentrations (branche dont l’existence pour l’hydrate CaCt, .6 H,0 a été démontrée ici pour la première fois), en ce que la quantité de sel dans la dissolution est plus grande que dans le corps solide qui s’y trouve en équilibre, et que cette quantité s’ac- croît à température diminuante.
14. Les recherches communiquées ont donc fait voir que CaCt, et H,0 peuvent former des complexes liquides dans chaque rapport possible, mais qu’au-dessous de certaines températures ces liquides déposent un des corps solides suivants :
H,0, CaCl,.6 H,0, CaCl,.4 H,0 a, CaCl,. 4 H,08, CaCl,.2 H,0, CaCl,.H,0, CacCl,.
Les conditions de formation de ces corps solides ont été précisées par l’étude systématique de leurs solubilités.
De cette manière, les deux hydrates à 4 4,0 ont pu être distingués l’un de l’autre. L’hydrate à 1 H,0 a été préparé pour la première fois, celui à 2 4,0 pour la première fois d’une dissolution pure.
Le nombre des hydrates obtenus s’accorde, à l’exclusion d’un des hydrates CaCl,.4H,0, avec celui qui a été déduit par M. Müller-Erzbach de ses études sur la vaporisation des sels secs. Néanmoins, cette méthode ne peut être un guide sur pour la découverte de tous les hydrates possibles. Elle ne peut mettre en évidence des modifications d’un même hydrate, telles que CaCT,. 4 H,0 & et 5, et l’on risque de ne
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 931
pas découvrir un ou plusieurs des hydrates les plus riches en eau, si l’on n’applique pas la méthode à de basses tem- pératures. Elle ne fait connaître non plus les limites de température pour l'existence des différents hydrates, n1 les conditions à réaliser pour les obtenir.
L'étude systématique des dissolutions, au contraire, est le moyen le plus sûr: 1°. de rencontrer les différents composés possibles, y compris les composés labiles, 2°. de faire connaître leurs conditions d’existence, et enfin 3°. d’obtenir un aperçu complet des phénomènes parfois très compliqués qui se présentent.
À la fin du Chap. IV je réunirai dans des tables les valeurs pour les concentrations des dissolutions saturées.
CHAPITRE II.
Remarques générales sur la solubilité des sels, l’état des sels dans les dissolutions saturées, et le phénomène de la sursaturation.
1. Les expériences précédentes permettent quelques con- clusions générales.
D'abord, elles contribuent à la solution du problème de la solubilité des sels aux températures élevées. L'étude de cette question est de date récente. En 1884, MM. Tilden et Shen- stone !) firent des recherches sur la solubilité de plusieurs sels anhydres jusqu’à des températures de 180° à 230°. Ils en tirèrent la conclusion que la solubilité croît d’autant plus vite que le sel est plus facilement fusible. La même année, cette conclusion fut confirmée par la découverte de M. Guthrie ?),
1) Philos. Trans. 175, 24 etc. 2) Phil. Magaz. 18, 114.
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 16
239 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
que la solubilité de K420, croît continuellement jusqu’à son point de fusion, de façon que la fusion per se n’est que le cas extrême de la dissolution.
Cette dernière règle s’est de nouveau vérifiée dans l’étude des hydrates CaCl,.6 H,0 et CaCl, .2 H,0. Elle ne peut être contrôlée pour les autres hydrates, parce qu’ils se trans- forment en des hydrates inférieurs, avant que leurs points de fusion ne soient atteints.
Quant au CaC!, anhydre, son point de fusion est encore trop éloigné du dernier point observé, pour qu’on puisse en tirer quelque conclusion. On conçoit cependant que, s'il n'intervient pas de cause perturbatrice, on pourra observer aussi dans le sel anhydre le passage graduel de la dissolution à la fusion. Ces causes perturbatrices se présenteront surtout dans les sels à point de fusion très élevé, soit que la continuité des dissolutions soit interrompue aux environs du point eri- tique de l’eau, soit que l’eau finisse par décomposer le sel.
Ces actions exclues, je ne doute pas un moment qu'il y aura solubilité croissante jusqu’au point de fusion.
Seulement, à des températures beaucoup plus basses que le point de fusion, il peut se rencontrer un intervalle de températures à solubilité décroissante. La catégorie des sels qui présentent cette particularité a même reçu une grande extension par les recherches récentes de M. Etard ‘), qui pour une multitude de sulfates anhydres, résultant de la décom- position de leurs hydrates, a trouvé la solubilité décroissant jusqu’à des valeurs insignifiantes à une température d’en-. _viron 180°. |
Pour l’un de ces sels (Na, SO,), toutefois, MM. Tilden et Shenstone ont démontré qu’à partir d’une température où la solubilité est devenue minimum (dans ce cas 130°), cette
1) Compt. rend. 98, 995, 1276, 1432; 104, 1614; 106, 209, 740. Je doute que l’on puisse se fier beaucoup aux données de l’auteur, celles pour le CaCI, étant tout à fait fautives.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 2383
solubilité augmente de nouveau. Il est done probable que les autres sels se comportent de la même manière.
Pour l’interprétation de la solubilité décroissante, précédant la solubilité croissante, chez les hydrates ou chez les sels anhydres, je renvoie aux conclusions du chapitre VI.
2. En second lieu, les recherches sur le chlorure de cal- cium nous permettent une revue générale des rapports entre les combinaisons liquides et solides d’un sel et de l’eau.
Des complexes liquides entre un sel et l’eau sont dans bien des cas possibles en toutes proportions, à des températures suffisamment élevées. Pour chaque proportion 1l existe une température minimum, au-dessous de laquelle l’existence du liquide de la même composition devient impossible, parce qu’il abandonne un corps solide (les états labiles étant exclus).
Si le sel ne forme pas d’hydrates, il ne peut se déposer que l’eau solide ou le sel solide. Les courbes de dissolution pour ces deux corps s'étendent de leurs points de fusion jusqu’au point cryohydratique, qui présente la température la plus basse, au-dessous de laquelle aucun complexe liquide ne peut exister.
Dans le cas où le sel fournit un ou plusieurs hydrates, les courbes pour la glace et pour le sel anhydre ne se ren- contrent plus au point cryohydratique, mais sont liées par une ou plusieurs courbes relatives aux hydrates intermédiaires.
La glace peut exister seulement en présence de dissolutions qui contiennent plus de sel qu’elle-même, le sel anhydre seulement en présence de dissolutions qui contiennent plus d’eau que lui-même; les hydrates, au contraire, pourront coexister avec des dissolutions tant plus riches en eau qu’en sel. D’ordinaire on ne rencontre que les dissolutions plus riches en eau. Il me semble que la différence notable dans la volatilité des deux composés (sel et eau) en est la cause.
Pour les combinaisons de deux corps dont la volatilité diffère moins, les deux courbes de solubilité sont faciles à
16
934 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM ÉTUDE
réaliser, comme pour les combinaisons CI, ICI, !), HCI.2 H, O, HBr.2 H,0, A:H, Br .3 A2, ?). Pour la plupart des hydrates de gaz c’est même la dissolution, qui est le moins riche en gaz, qui seule peut exister; cela correspond (voyez chap. IIT sous 9) pour les hydrates aux dissolutions renfermant moins d’eau que l’hydrate.
3. En troisième lieu, les courbes de solubilité des diffé- rents hydrates démontrent de la manière la plus décisive: que chaque hydrate d’un sel a une solubilité distincte; que la transformation d’un hydrate en un autre a lieu à une température déterminée, où la courbe de solubilité éprouve un changement brusque de direction. Un coup d’œil sur les courbes fig. 1 suffit pour le cas du chlorure de calcium. Neanmoins, ces vues sont encore bien loin d’être universel- lement admises.
Déjà M. Loewel #) avait prouvé pour les hydrates de Na, SO, que chacun d’eux présente une courbe de solubilité distincte, et M. de Coppet ‘) avait établi la même chose pour le bro- mure et l’iodure de sodium. M. Mulder également a relevé ce fait (p.e.p. 32 L.c.); mais ce savant ne fit aucune atten- tion aux hydrates nouveaux qui se formaient dès que la courbe de solubilité éprouvait un changement de direction, et il admit en outre pour quelques sels une variation con- tinue de direction des courbes. L'importance des observations sur les brusques changements de cette direction échappa aux chimistes de ces temps, à cause de l’opinion, alors gé- néralement reçue, que l’apparition d’un nouvel hydrate était due à un certain changement lent, produit par la chaleur, dans l’état du sel dissous. M. Loewel lui-même ne put
1) W. Stortenbeker, Rec. VII, 152.
2) Voir mes recherches antérieures,
3) Ann. de Chim et de Phys. [3] T. 29, 33, 43, 49, 4) 7 7 ’ Ce” ” [4] 49, p. 32.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 235
s'affranchir de cette opinion, et M. Mulder l’accepta pour les sels dont la solubilité change graduellement.
Plus tard, cette opinion sembla recevoir une interprétation rationnelle, sous l'influence des études sur la dissociation. C’est surtout M. Naumann !) qui développa l’idée d’une dis- sociation graduelle d’hydrates dissous, pour expliquer la so- lubilité décroissante de certains sels, spécialement du Na, SO ,. Fréquemment aussi on admit l'existence, dans la dissolution, d’un hydrate de la même composition qu'un hydrate solide connu; on invoquait les recherches de MM. Wüllner, De Coppet et Rüdorff sur les abaissements des points de con- gélation et de la tension dé vapeur des dissolutions sali- nes,—abaissements qui se montraient souvent proportionnels aux concentrations des dissolutions, si dans celles-ci l’on supposait la présence des mêmes hydrates qui, aux tempé- ratures d'observation, pouvaient exister à l’état solide.
On trouve encore ccs vues énoncées dans plusieurs des traités les plus récents ?).
Dans les derniers temps, cette théorie reçut même un nouvel appui des recherches de M. Etard (1. c.) sur plusieurs sulfates à différents degrés d’hydratation.
La plupart de ces sels montrent à des températures éle- vées une solubilité décroissante, comme le Na, SO,. L'auteur croit que le changement de la direction des courbes se fait graduellement, et, comme M. Naumann, il voit dans le nou- veau sel le résultat d’une décomposition graduelle dans la
1) Gmelin-Kraut, Handbuch I. 1., 477, 480 (1877).
Naumann, Lehrbuch der Thermochemie, p. 106, 163 (1889).
2) Michaëlis, Graham-Otto’s Lehrbuch : 1, 177 (1878), LIT, 48 et 330 (1883).
Horstmann, ” 2 4. II, 26 (1885).
On peut y lire, à propos du sulfate de soude: das wasserfreie Salz bildet sich auch bei dem Erhitzen des Glaubersalzes in wässeriger Lôsung bei 302. Je hôüher die Temperatur gesteigert wird, um so vollständiger geht das leicht lôsliche Glaubersalz in das schwerer lôsliche wasserfreie Natrium- sulfat über.” — »Bei Temperaturen über 339 ist nur ein Theil des Natrium- sulfates als wasserfreies Salz, der andere noch als Glauberzalz gelôst.
236 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
4
dissolution. Il va même un peu plus loin, en disant à l’occasion du sulfate de zinc): ,il se dépose donc sur les parois un sel blanc insoluble dans l’eau. Pour chaque température il y à manifestement un état d'équilibre entre la quantité du sel qui peut se former, et celles des autres hydrates solubles qui peuvent subsister.” Il ne regarde donc plus la dissolution comme étant saturée à l'égard du | sel déposé; et à ce point de vue on ne s'étonne guère qu'il s’attende à rencontrer pour tous ces sels une température à laquelle la quantité de sel dissous sera devenue nulle.
Cependant, toutes ces vues sont entièrement inadmissibles. L'hypothèse de la dissociation continue des hydrates en dissolution exigerait une variation graduelle de la courbe de solubilité.
M. Naumann l’énonce clairement. Et pourtant l'exemple qu'il a sous les yeux, le sulfate de soude, fournit deux courbes (pour Na, SO, .10 H,0 et pour Na,SO,) se coupant à angle vif, comme le prouvent les anciennes expériences de Loewel et les récentes de Tilden.
Le même cas se présente dans la plupart des sels étudiés par Mulder, et quant aux sels pour lesquels Mulder avait trouvé une courbe à variation progressive, il me semble fort probable que les observations n’ont pas été faites en nombre suffisant pour mettre en évidence les raccords anguleux des diverses parties de la courbe; en effet, pour le chlorure de calcium, qui était un de ces sels ?), mes expériences ont prouvé que les raccords anguleux se présentent de la ma- nière la plus concluante, au moment où il y a changement dans l’état d’hydratation. Je suis convaincu que, pour l’ab- sence de ces raccords anguleux dans les sels de M. Etard, la même explication peut être invoquée, ou bien le peu d’exaetitude de ses données.
1) Compt. Rend. 106, 206. 2) Les deux autres sont le phosphate de soude et le carbonate de potasse.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 287
En second lieu, l'hypothèse de M. Naumann n’explique que les cas où l’hydrate nouveau, ou le sel anhydre, qui résulte de la dissociation dans le liquide, a une solubilité décroissante. Or, déjà Mulder avait trouvé beaucoup d’exem- - ples du cas contraire, et le même résultat est obtenu avec tous les hydrates de CaCl.. |
En outre, l’explication de M. Naumann néglige le fait que la courbe de solubilité du Na,SO, anhydre peut être prolongée au-delà de son point d’intersection avec celle de Na;,SO, .10 7,0. Ce fait, démontré par Loewel, fut con- firmé plus tard par MM. de Coppet !) et Nicol ?).
L'opinion, qu’on peut admettre le même hydrate dans la dissolution que dans l’état solide, était contraire à d’autres observations de Loewel sur la possibilité de la formation d’un : ou de plusieurs hydrates inférieurs dans les dissolutions satu- ‘rées de Na, CO,.10H,0, Na,S0,.10H,0, M9S0,.7H,0. Loewel lui-même en tire la conclusion *), qu’on ne saurait regarder ces derniers hydrates comme existant dans leurs dissolutions saturées. Mulder (1 c., pages 28 et 34) est du même avis.
La valeur de ces arguments était cependant affaiblie, aussi longtemps qu’on envisageait les phénomènes de la sursatu- ration comme des anomalies, causées par la conservation, à - une température basse, d’un état de la dissolution acquis à une température élevée. Loewel et Mulder (1 c. page 337) acceptaient cette vue.
Elle doit être abandonnée maintenant. Les expériences de MM. de Coppet‘) et Nicol) ont prouvé, d’une manière satisfaisante, que des dissolutions sursaturées peuvent être préparées à la température ordinaire en partant des sels anhydres, et qu'il y a continuité dans les différentes propriétés
1) Compt. Rend. 73, 1324. 2) Philos. Mag. 20, 298. ..3) Ann. Chim. Phys. [3| 49, p. 55 et 56. 0 ANT ” ” [#1]. 26, 120. 5) Philos. Mag. 19, 453, et 23, 289,
238 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
physiques, tant pour les dissolutions de concentrations dif-
4
férentes à température constante, que pour celles à tempé- ratures différentes et à concentration constante, — lors du passage de l’état non saturé à l’état sursaturé La validité des arguments mentionnés, contre l’existence de molécules liquides au même degré d’hydratation que présente le sel solide, est donc rétablie.
Quant aux lois de Wüllner et de Rüdorff (Raoult), on sait depuis longtemps qu’elles ne sont applicables qu'aux dissolu- tions non saturées. Les expériences récentes de M. Tammann \) et les miennes (voir chapitre IIT) confirment que la loi de Wüllner n’a aucune valeur pour la détermination de l’état d’hydratation dans la dissolution. |
Toutes ces considérations sont corroborées par les résultats de l’étude des solubilités des hydrates de CaCl,. Il y a chan- gement brusque de direction des courbes de coupe à la température de transformation. |
Pour la plupart des hydrates qui prennent naissance à cette température, la courbe peut être prolongée au-dessous d'elle, et les parties des deux côtés de ce point forment un trait continu.
Le sel le plus hydraté se décompose à cette même tem- pérature, au dehors de la dissolution, en He inférieur : et dissolution.
Chaque hydrate est donc un corps nouveau, distincte ?).
La transformation de deux hydrates a lieu à la tempé- rature où leurs solubilités deviennent égales.
La transformation de l’hydrate solide est cause du chan- gement dans la direction de la courbe de solubilité, — et non le résultat d’une décomposition des molécules liquides.
Le changement de direction de la courbe de solubilité, à
LE
à solubilité
1) Mémoires de l'Acad. de Pétersbourg, XXXV, 9. 142. 2) Cette opinion a été récemment défendue au point de vue théorique par M. Ostwald, Lehrbuch Allgem. chemie, Il, 644,
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 239
la température de transformation, n’est qu’un cas spécial d’un phénomène général: chaque modification du corps solide produisant le même effet. Je rappelle
nS
à cet égard l’obser- vation de Mulder !}, que le nitrate de strontiane, quoique anhydre, se comporte de la même manière à 51°,8; à cette température, le sel anhydre éprouve un brusque changement dans sa courbe de solubilité.
4, La conduite des différents hydrates du CaCl, contribue, en dernier lieu, à donner une notion claire du phénomène de la sursaturation. On peut distinguer deux cas:
A. Dissolutions sans sel solide, qui peuvent ROSE un ou plusieurs hydrates ;
B. Dissolutions avec sel solide, qui peuvent déposer un ou plusieurs hydrates.
A. J'ai observé ce cas de sursaturation dans tous les hy- drates, quoique à différents degrés. Les hydrates à 4 H,0$
t à 1 H,0 éprouvent rarement un retard dans leur forma- tion; l’hydrate à 2 H,0 rarement au-dessous de 100°. Pour les hydrates à 6 H,0 et 4 H,0 & la limite est atteinte à en- viron 10 degrés au-dessous de la température pour laquelle la dissolution serait saturée.
La sursaturation s’est présentée aussi pour les dissolutions appartenant à la courbe nouvelle de l’hydrate CaCl, . 6 H,0.
Dans ce cas on ne peut plus dire: ,qu’une dissolution est sursaturée lorsqu'elle contient plus de sel que la disso- lution saturée à la même température”; mais ce cas rentre, comme les précédents, dans cette définition modifiée: une dissolution est sursaturée à l’égard d’un certain hydrate, à une température définie, si sa concentration est telle, qu’elle serait en équilibre avec cet hydrate à une température plus élevée.
Cette dernière définition embrasse aussi le cas de la glace dans les dissolutions salines, et fait ressortir l’analogie par- faite de la sursaturation avec la surfusion.
1) Mulder, p. 112.
240 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Quelques dissolutions de CaCl, peuvent être sursaturées à l’égard de deux sels. Telles sont les dissolutions de la concentration: 103—127,5, à l'égard des hydrates à 4 H,0 B et «; les concentrations 102,7—112,5, en outre à l’égard de CaCl, .6 H,0 (courbe AC); les concentrations 127,5—130 à l'égard des hydrates à 2 H,0 et à 4 H,0 «. Des exemples de sursaturation multiple ont d’ailleurs été observés déjà par M. Loewel dans les hydrates de Na, SO, , Na, CO,, M9S0,.
Dans tous ces cas,ilreste une partie de la dissolution après l'établissement de l’équilibre avec l’un ou l’autre hydrate.
B. Les phénomènes sont plus compliqués lorsqu'il existe déjà un sel solide dans la dissolution. On peut distinguer:
a. Sursaturation à l'égard d’une modification du même hydrate.
Je ne connais jusqu'ici que deux exemples, étudiés par par M. Loewel 1); les deux hydrates à 7 H,0 de Na,CO, et de MgS0,, dont l’un est le plus stable et le moins soluble. L’hydrate à 7 H,0 le plus stable de Na,CO, est encore in- stable à l’égard de Na, CO, . 10 H, 0.
L'exemple nouveau des deux hydrates CaCl, . 4 H,O montre cette même particularité au-dessous de 29°.8, lorsque la dissolution de l’hydrate « est encore sursaturée à l’égard de CaGl, .6 H, 0.
b. Sursaturation à l’égard d’un hydrate inférieur.
Un tel cas ne peut se présenter qu’à des températures plus élevées que la température de transformation.
J’ai déjà fait remarquer (voyez p. 219) que des exemples d’un pareil retard de transformation sont fort rares ?}. Le sel
a
CaCl, .6 H,0 est un nouvel exemple, facile à réaliser. Ici,
1) Ann. Chim. Phys. [3] 33, 334, et 43, 405.
2) Il semble qu’un tel retard ait lieu plus facilement si la transforma- tion s’accomplit entre deux modifications solides. Ainsi la température de fusion du soufre rhombique peut être observée facilement, bien qu’elle se trouve à 17° au-dessus de la température où la transformation en soufre monosymétrique aurait dû avoir lieu.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 241
comme dans le cas a, l’hydrate présent disparaît totalement lorsque la sursaturation cesse,
c. Sursaturation à l’égard d’un hydrate supérieur.
Dans cette catégorie se rangent la plupart des exemples connus. Ils se présentent à des températures inférieures à celle du point de transformation de l’hydrate inférieur en -hydrate supérieur. De tels retards dans une transformation, qui s’accomplit avec gain de chaleur, ne sont pas rares. Le chlorure de calcium en donne des exemples nouveaux. La transformation de CaCl, .2 H,0 au sein de la dissolution en CaCl, .4 H,0 « est retardée de 45° à environ 35°; celle de CaCl, .4 H,0 « en CaCl, .6 H,0, de 29,°8 à environ 20°.
Dans ce cas, l’hydrate présent ne disparaît pas toujours entièrement lorsque la sursaturation cesse. S'il y en à une quantité suffisante, ce n’est pas lui, mais la dissolution, qui disparaît totalement.
d. Sursaturation qui finit toujours en solidification totale.
C’est le cas avec les dissolutions contenant CaCl, .4 H,06 au-dessous de 29°.2, sursaturées à l'égard de CaCl, .6 H, 0,
De tels cas ne peuvent se présenter qu’au-dessous d’un point de rencontre pour les courbes de solubilité de deux hydrates, dont l’un contient plus d’eau, l’autre moins d’eau que la dissolution. Le phénomène est réciproque, si les courbes peuvent être toutes deux prolongées au-dessous du point de rencontre. On ne connaissait pas jusqu'ici d'exemples pour les hydrates salins, parce qu’on n'avait pas observé des dis- solutions plus concentrées que l’hydrate solide.
Si l’on considère la glace dans les dissolutions salines comme hydrate (p. 230), le même cas peut se présenter au-dessous du point cryohydratique; aussi y a-t-il quelques observations de liquides sursaturés de glace et d’hydrate salin au-dessous de ce point !).
Je puis recommander le chlorure de calcium comme un
1) De Coppet, Ann. Chim. Phys. [4] 23, 373.
249 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
sel fort propre à la démonstration de tous ces cas de sur- saturation. Les dissolutions de la concentration nécessaire sont faciles à préparer, et l’on voit rarement se présenter la cristallisation spontanée, parce que tous les hydrates sont déliquescents et disparaissent donc dans les parties des flacons exposées à l'air; tandis que, avec la plupart des sels en usage pour la démonstration de ces phénomènes, un ou plu- sieurs hydrates prennent naissance par dessiccation et four- nissent ainsi des germes actifs.
5. Les phénomènes de la sursaturation, surtout la sursa- turation multiple, et la possibilité de l’équilibre entre un hydrate et des dissolutions renfermant moins d’eau que celui-ci, fournissent encore un argument puissant contre la théorie qu’un hydrate se dissout comme tel.
Si l’on demande, toutefois, de quelle manière il faut se représenter l'équilibre du sel dans la dissolution, — la réponse reste encore incomplète.
Loewel, à la fin de ses recherches, parvint à la concep- tion que les sels abandonnent toute leur eau de cristalli- sation en se dissolvant, et qu'’ainsi la dissolution contient le sel anhydre. Nicol avait repris cette vue dans les derniers temps, mais il n’a pu la soutenir au cours d’une discussion fort intéressante sur la nature de la dissolution ‘), plusieurs faits indiquant l’existence de quelque lien entre les molécules du sel et celles du dissolvant, Il a donc modifié son opinion en ce sens, que la quantité entière de l’eau est occupée de la même manière par les molécules du sel dissous; opinion qui concorde avec celle de Mulder, lequel envisageait la dissolution en son entier comme combinaison.
Je crois cependant qu’en ce moment il n’est pas possible de décider si toutes les molécules du sel sont occupées de la même manière par les molécules d’eau, ou bien s’il existe
1) Chem. News, 54, 181, 191, et 56, 162, 191.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 243
des complexes différents, dont le nombre et la composition varient avec la concentration et la température. La dernière hypothèse me semble la plus plausible.
Nous ne pouvons aller plus loin que cet énoncé: la consti- tution du sel dissous diffère de celle du sel anhydre aussi bien que de celle de tous les hydrates qui peuvent s’y former
à une température quelconque !), — et la quantité entière de l’eau est occupée par le sel, de l’une ou de l’autre manière.
CHAPITRE TIT.
Tensions de différents systèmes composés de CaCl, et de H, 0.
On peut déterminer les tensions de vapeur de trois sortes de systèmes: dissolutions diluées, dissolutions saturées, hy- drates secs. Sur les tensions de dissolutions diluées de CaCl, nous possédons quelques observations de MM. Wüllner *?), Tammann *), v. Emden ‘), Bremer *).
Sur les tensions de dissolutions saturées 1l n’y à pas d’ob- servations, pas plus pour celles de CaCl, que pour celles de tout autre sel. Sur les tensions de CaCl, à différents degrés d’hydration à l’état sec, on possède les observations de MM. Müller-Erzbach ?‘) et Lescoeur 7), qui sont soit insuffisantes, soit mal interprétées, comme je montrerai à la fin de ce chapitre.
J'ai mesuré les tensions de la plupart des hydrates décrits
1) Une telle conception a été émise un moment par M. Loewel (Ann. Chim. Phys. [3] 49, 56); mais il n’a pas osé y persister.
2) Poggend. Annalen, 110, 574.
3) Wiedem. 24,593 et Mém. Acad. Pétersbourg, T .35, N°.9,107.
4) ” RAR)
5) Rec. des Trav. chim. etc, VI, 136.
6) Wiedem. Annalen, 27, 624.
7) Compt. rend., 92, 1158.
244 M. H. W. BARHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
au chapitre I, aussi bien à l’état sec que dans leurs disso- lutions saturées, dans l’intervalle de — 15° jusqu'à + 2052. En passant, j'ai pu faire quelques observations sur les tensions de dissolutions non saturées mais de concentration forte, à des températures élevées. Les circonstances variées de ces expériences ont exigé l’usage de différents appareils.
1. Une première série d’expériences a été faite avec l’ap- pareil représenté par la fig. 5 (PI. VI).
Il consiste en deux parties reliées par un tube de caout- chouc. Dans la boule a de la partie I on introduisit du CaCl, = 6 H,0, dont le poids, montant à 7 gr. environ, fut déterminé par la pesée de l’appareil I. Ensuite du mercure fut versé dans le tube b, en quantité telle que le tube en U était rempli jusqu'à la petite boule c. L'appareil fut alors chauffé dans un bain de glycérine et un courant d’air y fut entretenu pour vaporiser une partie de l’eau, jusqu’à ce que la concentration devint égale à environ 320 p. de CaCl, sur 100 p. d’eau.
La courbe LM fig. 1 (PI V) fait voir qu’une masse de cette composition pourra donner une dissolution saturée de CaCl, . H,0 jusqu'à 215° environ. La vaporisation accomplie, je fis descendre par d un petit thermomètre marquant 150°—215° et divisé en 0°,2. Alors le tube d fut étiré et fermé à la lampe, et le tube d également, après qu’on l’eut fait passer par le bouchon en caoutchouc B. Le bouchon fut adapté au manteau À, et l’appareil fut chauffé dans la vapeur du salicylate de méthyle jusqu’à fusion complète de la masse en a, pour rendre celle-ci homogène. Le thermomètre plongeait dans la boule.
En se refroidissant, la masse devint, au-dessous de 175°, un mélange solide de Call, . H,0 et de CaCl, . 2 H, 0, parce qu’elle contenait moins de 2 H, 0. |
Le manteau enlevé, les extrémités d et e furent de nouveau ouvertes et le tube b relié, au moyen d’un tube en caout- chouc, à un robinet à trois voies, qui le mettait en commu-
DS
nication avec un manomètre à réservoir mobile.
hé 1 cité
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 245
Ce tube permet d’agiter l'appareil I, circonstance favorable pour l'établissement de l’équilibre.
Il s’agit maintenant d'éliminer l’air de l’appareil I, tout en conservant la communication avec le manomètre. À cet effet, l’air est d’abord expulsé du tube manométrique à travers le robinet à trois voies. L’extrémité d est reliée à une pompe à mercure, et à mesure que l'air est aspiré de «a d on ouvre lentement le robinet pour faire communiquer b avec le vide du tube manométrique, de facon que la colonne de mercure au-dessous de c reste en équilibre. Aussitôt qu'un vide aussi complet que possible s’est établi en ad, on scelle d à la lampe et on ferme le robinet.
. L'appareil est maintenant prêt et les déterminations des tensions peuvent commencer. Pour cela, l'appareil I est chauffé, à l’intérieur du manteau, dans la vapeur d’un des liquides recommandés par M. Ramsay !), et avec lesquels on peut obtenir une série de températures entre 0° et 360°, en les faisant bouillir à différentes pressions. A cet effet, le tube C2) conduit à son tour à la pompe à mercure ou à eau. Toute la partie de l'appareil, dans laquelle peut se répandre la vapeur d’eau, ayant une température uniforme, il ne peut y avoir nulle part condensation. Cette précaution est nécessaire. Si une partie de l’appareil était exposée à l’air, la température de la boule ne pourrait s'élever que de peu de degrés au- dessus de la température ambiante, sans qu’il y eût conden- sation dans la partie supérieure. La tension qui s'exerce sur le mercure dans le tube en Ü est mesurée par la tension de l’air dans le manomètre, qu’on règle de sorte que les niveaux du mercurè dans les branches du tube en U soient égaux. A cet effet, il y a une échelle gravée sur glace derrière le manteau À et derrière le manomètre. J'ai lu les hauteurs du mercure avec une simple loupe, les tensions observées à
1) Zeitschr. Physik. Chemie I, 247, 1887.
2) L’extrémité inférieure de ce tube est recourbée, de sorte que les gouttes condensées s’écoulent le long de la paroi.
246 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
des températures élevées n'ayant pas une exactitude plus grande qu'à un millimètre près.
L'avantage spécial des bains de vapeur consiste dans la grande facilité de maintenir une température quelconque constante à 0°,2 près, aussi longtemps qu’on veut. Quant on emploie des liquides bouillant au-dessus de 100°, il n’est pas même nécessaire de pomper continuellement, si le réfrigérant fonctionne bien et qu’on maintienne une même hauteur de flamme !).
Un second avantage consiste dans la rapidité avec laquelle on peut opérer un changement de température, soit petit soit grand, en variant la pression. A cet effet, il est nécessaire d’avoir un réservoir vide, qu’on peut faire communiquer avec le manteau À au moyen d’un robinet, et un autre robinet, qui permet l'entrée de l'air. Les tensions des différents li- quides, données par Ramsay, indiquent suffisamment la pression qu'il faut établir pour obtenir la température voulue. On ne peut cependant pas s’y fier pour en déduire la tem- pérature de la boule, car celle-ci dépend un peu de la vitesse
de l’échauffement et de la place de la boule dans le manteau.
En outre, la plupart des liquides usités, en dissolvant peu à peu le caoutchouc, changent plus ou moins leurs tensions.
Si l’on a soin que la couche de condensation visible se trouve exactement au-dessous du bouchon, la différence de température entre les points & et d est insignifiante. Le ther- momètre en «a peut donc aisément être maintenu constant.
Le seul inconvénient des bains de vapeur consiste dans la nécessité de changer de liquide, et d'interrompre ainsi la serie d'expériences aux températures élevées. En passant à l'emploi d’un liquide à point d’ébullition élevé, il faut avoir soin de recommencer l’échauffement à pression fort réduite, afin que tout l’appareil I s’environne de vapeurs dès le com- mencement, et qu’il n’y ait pas condensation dans la partie
1) J’ai entouré la boule du manteau d’un petit étui en gaze de cuivre.
|
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 947
supérieure, ce qui causerait presque infailliblement la rupture, au moment où les vapeurs chaudes y arriveraient.
Si l’on fait d’abord les observations aux températures basses, on peut commencer avec une très petite quantité d’air dans le tube manométrique, et en introduire de temps à autre une nouvelle quantité au moyen du robinet à trois voies, à mesure que la tension dans l’appareil T s'élève. Ici encore, une diffi- culté se présente si l’on passe rapidement aux températures élevées — comme c’est le cas après changement de liquide dans A. Il faut alors établir dans le manomètre une pression quelconque, qu'on ne peut faire concorder avec la tension de vapeur dans l'appareil I que par piusieurs tâtonnements, en ouvrant un moment le robinet pour observer la marche du mercure dans le tube en Ü. La boule c sert à ce moment pour prévenir les changements de niveau trop rapides.
L'usage des liquides recommandés par M. Ramsay est le plus commode aux pressions médiocres, variant p. e, entre 20 et 60 centimètres.
Pour les observations ci-jointes j'ai employé, comme liquide, le salicylate de méthyle. É
Les colonnes de mercure ont été réduites à 0° et j'ai sous- trait la tension du mercure dans l'appareil I.
Composition du contenu de l’appareil: CaCl, .1,9 H,0
Série Ia. Série Ib. Equilibre entre CaCl,.H,0, Equilibre entre CaCl,.H,0, CaCl, = x H,0 et vapeur. CaCl,.2 H,0 et vapeur.
Le | | P. v. | D M4 ,5 842 mm. 1127 438 mm. 480° 910 1699 607: 1859 1006 4709 TER 490° 4114 » 119240 842 y» 195° 49307": 200° 4354 y» 205° 4491
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 17
248 M. H. W. BAKHUÏIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
A la température de 205° il y avait encore une quantité de cristaux de CaCl, . H,0 dans la dissolution. Les valeurs de la série Ia sont représentées par la courbe LM fig. 6 (PL VI); celles de le série Ib par la courbe PL, dont la partie infé- rieure est construite d’après les valeurs de M. Lescoeur (voir p. 260).
9. Pour la deuxième série d'observations l’appareil I fut ouvert; on y ajouta une quantité d’eau calculée de façon que la proportion totale différât fort peu de 2 H,0, étant pourtant un peu plus grande. Par échauffement préalable de l’appareil I fermé, cette quantité d’eau fut répartie unifor- mément, l’appareil vidé d’air et mis en communication avec le manomètre, comme Je l’ai décrit.
J’obtins maintenant un système de CaCl, . H,0 et d’une petite quantité de dissolution, de sorte que les cristaux ne disparurent qu'au voisinage de leur point de transformation. Après disparition, je déterminai encore les tensions du liquide non saturé. À cette occasion, ce liquide put être refroidi d'environ 15° au-dessous de sa température de saturation, sans cristalliser.
Composition du contenu de l’appareïil: CaCl, .2,2 H, 0,
Série Ila. Série IT. Equilibre entre CaCl,.2 H,0, Equilibre entre CaCl,:<:2,2 H,0 CaCl, «x x H,0 et vapeur. et vapeur. # t. P. t. P. 1749 841 m m. 190° 1310 m.m. 1798 840 180° 980 1709 834 » 470° 151228 165° 790 1659 651 1609 744 y» 1609 970 »
1559 680
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 249
Les premières valeurs sont représentées par une partie de la courbe XL; les valeurs de la seconde série par la courbe RS, dont la partie inférieure représente l’état labile de la dissolution sursaturée.
Cette courbe coupant la courbe KL à 174°,5, on déduit de la courbe de solubilité pour CaCl, .2 H,0 (fig.1, PI V) que la concentration du liquide a été d’environ 280 parties Abo Cl, A 2,2 H,0.
On déduit de la courbe RS que le point d’ébullition de ce liquide est 171°, température qui correspond encore à la partie sursaturée (voyez la note p. 224).
3. Pour la troisième série d’observations j'introduisis de nouveau une quantité d’eau, de sorte qu’alors les cristaux de CaCl, .2 H,0 disparurent déjà à 141°. Les tensions de la dissolution saturée furent déterminées de 90° à 140°; celles de la dissolution seule, de 150° à 135°. Au-dessous de cette dernière température, la cristallisation commença.
Le thermomètre de l’appareil fut remplacé par un autre pour l'intervalle de 80°—155°, Le liquide employé dans A était alors la benzine monobromée.
Composition du contenu de l’appareil: CaCl, . 3,2 H, 0.
Série [Ila. Série III. Equilibre entre CaCl,.2H,0 Equilibre entre CaCl, = 3,2 H,0 ac, <<æH,0'et vapéur: et vapeur.
t P LE p 140° 497 mm. 150° 682 mm 1359 435 » 140° 492 » 1959 326 4359 420 » 110° 204 y» 100° 145 »
90° 100 7
1 pi
250 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOUM. ÉTUDE
Les premières valeurs sont représentées de nouveau par une partie de la courbe XL; celles de la série IIIb par la courbe TU, qui coupe la première à 141°. On déduit de la courbe de solubilité, fig. 1, qu'à 141° la dissolution saturée contient 192,5 parties de CaCl,.
4. Pour la quatrième série d'observations j'ai de nouveau introduit de l’eau, jusqu’à ce que les cristaux de CaCl, .2 H,0 disparussent à 100° environ. J’ai remplacé le thermomètre par un autre pour l'intervalle de 40°—100°, et j'ai chauffé
dans la vapeur d’eau.
Les tensions s'étant abaissées jusqu’à 100 mm. environ, il devint possible de les mesurer directement par un manomètre clos. À cet effet, le tube à fut coupé au-dessous du bouchon B, et fermé à la lampe. Il avait alors une longueur de 20 cm. et fut rempli de mercure bouillant. L'air de l’appareil étant éloigné par la pompe, le tube d fut fermé et soudé à une baguette de verre, qui passait par le trou du bouchon. La position de l’appareil fut réglée de sorte que les deux branches du manomètre se trouvaient à petite distance de la paroi du manteau. La règle divisée fut placée de façon que les images des deux colonnes de mercure tombaient tout près l’une de l’autre. Le lecture horizontale au moyen de la loupe s’ob- tient aisément en utilisant les deux images fournies par les faces de devant et de derrière de la mesure verticale. La faute des deux lectures ne monte pas à 0,5 mm. de cette manière.
Il va sans dire, que les hauteurs ont été corrigées pour la température de 0°.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 251
Composition du contenu de l’appareil: CaCl, . 3,9 H, 0.
Série IVa. Série IVb. Equilibre entre CaCl,.2H,0, Equilibre entre CaCl, 3,9 H,0 CaCl, xx x H,0 et vapeur. et vapeur.
t. P. t. P:. 90e 100 mm. 100° 152 mm. 60° 82.5 » 95° 4114 80° 66.5 90° 90 799 D4 ” 70° 43 2 659 34 2 60° 26.5 550 20.5 »
309 HART 459 MLD 40° 8 . 5 "
Les valeurs de la série IVa sont représentées par une partie de la courbe XL; celles de la série IVB par la courbe VW. Les deux courbes se coupent à 97°,5, ce qui donne pour la concentration du liquide (voir fig. 1) 138 parties de CaCl, ou GaCl, =: 8,9 H, 0.
5. Les dernières expériences ayant fait connaître les ten- sions jusqu'à la fin de la courbe pour les dissolutions sa- turées de CaCl,.2H,0, ïl restait à déterminer plusieurs courbes de tensions pour les différents systèmes qui peuvent exister au-dessous de 45°. Pour augmenter l'exactitude de ces tensions, qui sont fort petites, j’ai remplacé le mercure du manomètre par un liquide plus léger, et je me suis servi
LE
d'un appareil analogue à celui de M. Frowein !).
Au lieu de l'huile d’olive je me suis servi de la naphtaline
1) Voyez: Zeits. Physik. Chemie 1, 10.
2592 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
monobromée, liquide bouillant à 280° !}), dont les tensions à des températures au-dessous de 40° sont négligeables, et qui, : comparé à l’huile, présente l’avantage qu’on peut facilement le priver d'air par l’ébullition dans le vide et qu’il ne se décompose pas. Les tensions étant plus petites que celles de l’eau pure à la température ambiante (environ 20°), il n’était plus nécessaire d'employer le bain de vapeur. Je mettais la boule et une partie de la tige dans un bain d’eau ?), tandis que le manomèêtre se trouvait au-dehors, à une température presque constante de 20°. |
À cette température la densité du bromure, comparée à celle du mercure à 0°, était de 0,108. La lecture se faisait tout comme pour la série IV. L’incertitude dans la colonne de bromure mesurée n’étant pas plus grande que de 0,5 mm. celle de la pression calculée en mm. de mercure ne monte qu'à 0,05 mm. Cependant les valeurs absolues des tensions observées sont beaucoup moins certaines. Même dans les systèmes qui contiennent une phase liquide, on peut observer des écarts de 1 à 2 mm. d’huile entre plusieurs observations. Pour les systèmes solides, ces écarts peuvent monter à 5 mm. et plus. Cela tient à ce qu’on ne peut préparer un mélange uniforme de deux hydrates de CaCl, qu’en refroidissant un système d’un hydrate et de sa dissolution au-dessous de son point de transformation. Même en agitant fortement pendant la solidification, on n’obtient alors qu’une surface relativement petite;, et 1l résulte des expériences de M. Frowein, qu’on n'arrive pour les tensions des sels secs à des valeurs un peu exactes, qu’en ayant soin d'introduire dans l’appareil un mélange intime des deux hydrates en forme de poudre. Or, on ne peut satisfaire à cette condition, à cause de la déli- quescence des hydrates de CaCl,. Les tensions des systèmes
1) C’est un des liquides de la série de M. Ramsay. 2) Le thermomètre dans la boule n'était plus nécessaire alors.
.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 253
solides dans les séries suivantes ne sont donc qu’approximatives.
L’incertitude dans les tensions des systèmes en partie liquides ne dépend que de la petite quantité d’air qui peut être restée dans l’appareïl. Pour en tenir compte, j'ai toujours, à la fin de l’expérience, refroidi la boule de l’appareil à une température de — 35°, à laquelle les tensions de la vapeur des différents systèmes peuvent être estimées à peu près nulles; et j'ai corrigé les hauteurs mesurées en prenant la
position du liquide à ce moment comme point de départ, correspondant à une pression nulle.
La série V des observations ayant pour but de déterminer les tensions du système de CaCl, .2 H,0 et de CaCl, .4 H,0 a, j'ai mis dans la boule un liquide qui à 110° renfermait encore des cristaux à 2 4, 0, et qui contenait donc moins de 4 Æ, 0; de sorte qu’à 45°,3 la transformation (p. 217):
Ca, .2H,0 + 9,74{CaCl, =: 4,78 H,0)=3,74(Ca01, .4H, Oa)
finit par la disparition du liquide, et non par celle des cristaux à 2 H,0.
La formation des cristaux à 4H,0& fut provoquée en jetant un cristal dans le liquide. Après l'élimination de l’air, je chauffai encore une fois à 45°,8, pour rendre la masse homogène, en ayant soin que les derniers cristaux à 4 H,0 & ne disparussent pas.
Pour la comparaison avec les valeurs de la série IV a, je déterminai à la fin encore quelques tensions pour les disso- lutions saturées de l’hydrate à 2 H,0 au-dessus de 45°. La température ayant ensuite été abaïssée, les cristaux à 4 H,0 « ne se reformèrent plus, et ainsi la valeur de la tension à 40° put être mesurée.
254 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Composition du contenu de l’appareil: CaCl, . 8,6 H, 0.
Equilibre entre CaCl, .2 H,0, CaCl, .4 H,0 « et vapeur.
t. P.
—15°| 0,108 X 1,5 mm. | 30° 0,108 X 43 mm. | 559 0,108 X 185 mm.
0° ” 00 dr lon ” ste CE EE ” 4144 » 10° AA Mot: 21400 2 19174 l4998 ” 109 » 20° " 23 ” 259 ")l) 81,9/114 ‘11459,3 » :409 » |409 ” 80 »
Les valeurs de Vb, réduites en mm. de mercure, sont con- cordantes avec les valeurs de la série IVa. L’échelle de la fig. 6 est cependant trop petite pour les tensions minimes aux températures inférieures à 50°. J’ai donc représenté les tensions non réduites de cette série et de toutes les suivantes dans la fig. 7 (PI VI). La courbe FK représente la série Vb, la courbe NK la série Va.
J’ai fait plusieurs tentatives pour déterminer les tensions du système: CaCl, .2 H,0 + CaCl, .4 H,0 6 + vapeur, en refroidissant au-dessous de 38°,4 le système: CaCl, .2 H,0 + Cal, = x H,0 + vapeur; mais l’hydrate $ se transfor- mant toujours en « avant que l’équilibre de la vapeur se soit établi, je n’y ai pas réussi.
6. L'appareil étant ouvert, une nouvelle quantité d’eau fut introduite, jusqu’à ce que les cristaux de CaCl, . 2 H, O dis- parurent à 50°, d’où l’on conclut que la composition de la masse était: CaCl, . 4,65 H,0. Le liquide fut alors refroidi au-dessous de 45°,3, et un cristal à 4 H,0 «x y fut semé.
La masse contenant plus de 4 H,0, les cristaux à 2 H,0 disparurent entièrement et il en résulta une dissolution sa- turée de CaCl, . 4 H,0 «. L'appareil fut privé d’air et fermé.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 259
ni
Par refroidissement à 15° environ, les cristaux à 6 H,0 se formaient, et la masse totale contenant 4,65 H,0, elle se solidifia entièrement en un mélange des cristaux à 6 H,0 et à 4 H,0Oc. Les tensions de ce mélange sec furent déter- minées jusqu'à 29°,8. A cette température, les cristaux à 6 H,0 disparurent. Les tensions de la dissolution saturée des cristaux à 4 H,0 « furent déterminées de 29°,8 à 45°,8.
Au-dessus de cette température, les cristaux « ayant dis- paru, ils ne se reformaient plus lors du refroidissement, mais à 38° apparaissaient les cristaux CaCl, . 4 H, 0 6. Les tensions de leurs dissolutions saturées furent déterminées de 38° à 20°. Au-dessous de cette température se présentaient les cristaux à 6H,0, et il y avait solidification entière en un mélange de CaCl, .6H,0 et de CaCl, .4 H,08$. Les tensions de ce mé- lange furent déterminées à partir de la plus haute température possible: 29°,2. Arrivé à — 15°, je pus, un quart d'heure après, observer dans la masse solide un commencement de transformation, sautant aux yeux par un changement dans la réflexion de la lumière. Elle se propagea lentement à tra- vers toute la masse. C’était la transformation des cristaux f en «&, Car, la transformation accomplie, la masse entra en fusion partielle à 45°,3.
Composition du contenu de l'appareil: CaCl, . 4,65 H, 0.
Série VIa. Série VIb. Equilibre entre CaC/,.6 H,0, Equilibre entre CaGl,.4 H,0 «, CaCl,.4 H,0 « et vapeur. CaCT, x ,0 et vapeur. {. p: {. P. —15° 0,108 X 2,5 mm. (ie ” 8,9, # 30° 0,108 x 65 mm. 10° 47,9 ” 309 2 80 200 [24 30 4 A0° [4 96 (4 259 n 47 2 499,3 ” 108 290,8 »” 63 ”
256 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Série VIc. Série VId. Equilibre entre CaCl!,.4 H,0 8. Equilibre entre CaCl, .6 H,0, Cat, 7 æ H,0'et vapeur: CaCl,.4 H,0 8 et vapeur. t. P. hi t. p:
380 4 0108 x 73 mm. 290 9 0,108 x 52,5 mm.
4 " 66 7 25° ” 40 y
0° ” 04 » 20° v 29 ”
207 ” 43 " 10° 2 15 7
20° ” 33 » 0° ” 7 ” —15° ” 2 "
Les valeurs de VIa sont représentées par la courbe 1H; celles de VIb par la partie HK de la courbe GHK; celles de VIc par la courbe FDE; celles de VId par la courbe JD.
7. Pour la septième série d'observations je remplis la boule à moitié de cristaux de CaCl, . 6 H, O avec une petite quantité d’eau, de sorte que ces cristaux pouvaient exister jusqu’au voisinage de leur point de fusion. Je les fis fondre et j'in- troduisis un cristal à 4 H,0 &; après quoi l’appareil fut privé d’air et fermé. Les cristaux à 4 4,0 « subsistaient jusqu’à 15°, de sorte que je pouvais déterminer les tensions de leur dissolution saturée au-dessous de 30° (équilibre labile).
À 15° il y avait cristallisation de CaCl, .6 H,0; les cristaux à 4 H,0 « disparurent totalement et il résulta une masse un peu humide du nouvel hydrate. Les tensions purent être déterminées jusqu’à 29°,5, la quantité de la dissolution aug- mentant continuellement. Au-delà de cette température, tout devint liquide.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 257
Composition du contenu de l'appareil: CaC!, .6,4 H,0. Série VIla. Série VII
Equilibre Equilibre entre CaCl, .6 H,0, entre CaCl,.4 H,0 «,
CaCl, it, O et vapeur.
t. P* | t. P. v. P.
29° 10,108 X 62,5 mm.| —-15°] 0,108 x 6 mm. 27° | 0,108 x 64 mm.
CaCl, 5 œ H,0 et vapeur.
25” Don qi no 7 LEA TL 289 ” 645 y» QU.» 48 n» 40° 2 SE re 280.0 2 65. » 199 ” 34 » 20° ” DA TUS IE AE ” 645
259 ” Gi 192995 ” 64 y»
Les valeurs de la série VITa sont représentées par la courbe HG; celles de VII par la courbe BH. Dans les figures 7 et 1 les courbes correspondantes ont été désignées par les mêmes lettres. J’ai joint dans la tig. 7 les points H et D par la courbe HCD, en tenant compte du fait que le point QC doit être situé à 30°,2. Il fut impossible de mesurer ces tensions, à cause de la petitesse de l'intervalle des tempéra- tures et des concentrations entre H et C. Dans la fig. 7 sont encore indiquées, par la courbe AB tracée sur la même échelle que les autres courbes, les tensions de la glace. Cette courbe AB représente aussi les tensions du système: glace, dissolution de CaCl, et vapeur; elle devrait rencontrer la courbe AB prolongée à — 55". La tension à ce point sera peu différente de zéro. On ne peut plus mesurer directement ces petites tensions.
Les courbes restées encore entièrement inconnues sont : celle pour l’équilibre de CaCl, .4 H,08, CaCt, .2 H,0 et vapeur, finissant au point F; celle pour l’équilibre de CaCt, . H,0, CaCl, et vapeur, finissant à 260° environ; et celle pour les dissolutions saturées de CaCl, anhydre, commençant à cette même température. L’étendue de ce travail m’a fait renoncer à l’étude des deux dernières, d'autant plus que la première de
celles-ci ne présente aucun intérêt spécial, et que les particu-
258 M. H. W. BAKHUIS ROGZEBOOM. ÉTUDE
larités de la dernière courbe se retrouveront dans d’autres sels anhydres, qui pourront être étudiés sous des conditions de
Ÿ
température et de pression plus faciles à réaliser.
8. Expériences de MM. Müller-Erzbach et Lescoeur.
M. Müller-Erzbach a déterminé à 16° les tensions relatives d’une dissolution saturée de CaCl, .6 H,0, et de plusieurs sels secs à différents degrés d’hydratation. Il trouve qu'il y a un changement brusque dans ces dernières tensions, après la perte de 2, 4,5 molécules d’eau. Il obtient pour ces tensions
relatives : L (x étant la tension de l’eau à 16°) = 0,34, 0,12,
0,08, 0,012.
De ces valeurs, la première seule s’accorde avec mes ex- périences ; la tension à 16° pour la dissolution saturée, em- pruntée à la courbe BH, étant de 0,108 x 43 mm., je trouve
4,644 LE — ere 0,844
Pour les systèmes secs contenant moins de 6 FH, 0, il reste
incertain si M. Müller-Erzbach a observé les tensions corres-
pondantes à la courbe ZH ou bien à la courbe JD de la fig. 7. Je déduis pour la température de 16°:2 — 0,22 ou TT
0,18, deux valeurs beaucoup plus élevées que 0,12. La valeur déduite de la courbe NK à 16° est égale à 0,14, contre 0,08 chez M. Müller-Erzbach. La courbe LP fig. 6 n’a pas été prolongée à des températures assez basses pour permettre une comparaison. Le chlorure de calcium est sans doute un des sels les moins propres à mesurer les tensions des hydrates solides, en raison de la petitesse des tensions et de la lenteur avec laquelle ces hydrates se mettent en équilibre avec la vapeur d’eau. Aussi je ne donne mes valeurs pour les tensions des systèmes secs que comme une première ap- proximation. Je ne veux donc par insister sur les écarts. La méthode de M. Müller-Erzbach n'a qu’une valeur
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 259
qualitative ‘) pour découvrir les différents degrés d’hydra- tion dans les hydrates solides. Encore suis-je disposé à croire qu’on réussit beaucoup plus vite en étudiant la conduite de la dissolution saturée, cette dernière méthode faisant égale- ment connaître les hydrates labiles et les limites de l'existence des différents hydrates (voir Chapitre IT).
Quant aux expériences de M. Lescoeur, elles ont reçu pour la plupart une interprétation fausse, faute d'attention à la nature du système dont la tension était mesurée. En opérant à 100° M. Lescoeur observa: 1°. que les tensions du système CaCl, .n H,0 diminuaient continuellement à mesure que diminuaient les valeurs de n, tant que ces tensions étaient émises par la dissolution; 2°. que la tension restait constante à 132 mm. pour les valeurs de n comprises entre 4 et 2, le système étant solide; 3°. que la tension restait constante à 60 mm. pour les valeurs de n entre 2 et 1 (système solide). T’auteur conclut à l’existence des hydrates à 4 H,0 et 2 H,0 à 106° ?).
Mais l’auteur a été dupe d’une coïncidence fortuite, savoir que la composition du liquide saturé de CaCl, .2 H,0 (courbe KL, fig. 1) est à 100° assez rapprochée de : CaCl, ©: 4 H,0. Aussitôt que la teneur en eau s’abaisse au-dessous de 4 molécules, la dissolution commence à déposer l’hydrate à 2 FH, O0. L'auteur aurait dû observer que c’est à partir de ce moment que s'établit la tension constante, qui ne peut diminuer avant que la dernière portion dela dissolution ait disparu, c’est-à-dire avant le moment où la composition est devenue exactement 2 H, 0. La tension constante de 132 mm. appartient donc à l’équilibre: CaCl, .2H,0, CaCl, = x H,0, vapeur; elle coïncide à peu près avec la valeur de la courbe KZ fig. 6 (145 mm.) Le système ne devient solide qu’au dernier moment où la tension
1) Voir la critique de M. Schulze: Wiedem. Annalen, 31, 204 et 32, 329.
2) Dans sa publication récente (Recherches sur la dissociation des hydrates salins, page 69), l’auteur n'admet plus l'hydrate à 4 1,0, et il rectifie ses observations en ce sens, que le système qui contenait de 2 à 4 mol. de H,0 était partiellement solide.
260 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
de 132 mm. est encore exercée, et cette tension n'appartient nullement à un hydrate à 4 H,0, qui ne peut exister au- dessus de 45°,35 en présence de vapeur.
La seconde tension observée (60 mm.) appartient à la courbe PL, fig. 6, pour l'équilibre des hydrates à 2 H,0 et à H,0 avec la vapeur, courbe dont j'ai déterminé la partie supéri- eure (page 248).
Les observations de l’auteur à 78° et 65° reçoivent la même interprétation. Elles ne peuvent appartenir qu'aux courbes KL ou PL. Aussi les premières ne diffèrent que peu des valeurs que j'ai obtenues pour les dissolutions saturées de Cat; 2H: 0;
78° 65° Léodaumi: LL 57 mm. 32 mm. RoozErboom 1:21 410461: 44, et NME
M. LescoEur aurait pu trouver qu'à ces températures les tensions deviennent déjà constantes pour les valeurs de n: 4,3 et 4,4. Quant à l’observation faite à 36°, 1l reste entière- ment incertain quel était le système qui a produit la tension. Selon la quantité de l’eau, on pourra observer une tension appartenant à HK, DF, NK ou PL. À 129° l’auteur n’observa des tensions constantes que pour des valeurs de » plus petites que 2. Cette observation ne peut pas être exacte. Le système de la dissolution saturée de CaCl, .2 H,0 existe encore à à cette température, et la composition du liquide étant CaCt, = 8,4 H,0, la tension devrait devenir constante déjà pour les valeurs de » entre 3,4 et 2 (courbe XL) et ensuite entre 2 et 1 (courbe PL).
Les conclusions de M. Lescoeur sont réfutées aisément par l'inspection des courbes de tension déduites de mes expériences
9. Forme de la courbe des dissolutions: saturées.
Parmi les courbes étudiées, la catégorie des courbes des tensions des dissolutions saturées présente un intérêt spécial.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 261
L'application d’une formule de M. v. d. Waals pour l’équi- libre d’un corps solide, d’un liquide et d’une vapeur, com- posés de deux matières différentes, m'avait conduit à ce résultat 1): que la courbe des tensions d'équilibre entre ces trois phases se compose de plusieurs branches, qui sont repré- sentées dans la figure 8 (PI. VI) par DC, CO et OB. C représente la tension au point de fusion de la phase solide; © le point de la plus grande tension. Les branches I et IT furent ren- contrées dans l'étude des hydrates de gaz, la branche III dans l’étude des combinaisons de 42H, Br avec A2H,.
Récemment, M Stortenbeker ?) retrouva ces trois branches dans l’étude des tensions des différents systèmes composés de chlore et d’iode; mais, jusqu’à présent, aucun système n’était connu qui fit voir les trois branches en même temps, et l’on n'avait pu vérifier encore la condition théorique qui déter- mine le maximum de tension au point 0.
Pour les systèmes composés d’un sel hydraté, de sa dis- solution aqueuse, et de la vapeur d’eau, j'avais indiqué déjà que ce serait d'ordinaire une partie de la troisième branche de la courbe générale, qu’on rencontrerait dans l’étude de leurs tensions *). On n’a, en effet, qu'à comparer les hydrates de gaz avec les sels hydratés.
Pour les hydrates de gaz, les courbes ab—cd, fig. 8, repré- sentent les tensions des liquides à concentration constante, dont la quantité de gaz s'accroît de ab à ed. La courbe qui finit en C est la courbe pour l’hydrate fondu; les courbes infé- rieures représentent des dissolutions moins riches en gaz, les courbes supérieures des liquides plus riches en gaz que l’hydrate. Or, pour les sels hydratés, l'élément gazeux dont la tension doit être mesurée est l’eau, et lorsque nous mettons en parallèle un hydrate de gaz tel que HBr.2 H,0 et un
1) Voir mon mémoire: Rec. des trav. chim., etc., V, 335—413. 1886, 2) Rec. etc., VII, 184—194. 1888. 3) Rec etc., V, 406.
262 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
sel hydraté tel que 6 H,0. CaCl,, il faut comparer : HBr avec H,0, et H,0 avec CaCl,. Si la courbe générale de l’équilibre d’un sel hydraté est exprimée aussi par DCOB, les branches CO et OB correspondent à des dissolutions saturées contenant plus d’eau que l’hydrate salin, et la quantité d’eau diminue (ou le sel s'accroît) de B à C. Ce sont les dissolutions con- nues jusqu'ici; et j'attendais que dans la plupart des cas il existerait seulement la troisième branche BO de la courbe générale, parce qu’on ne peut pas observer pour la plupart des hydrates le point de fusion C.
Examinons maintenant les formes des différentes courbes obtenues pour les hydrates de CaCl,.
Auparavant, toutefois, j'apporterai une légère modification à la nomenclature, en ne distinguant dans la courbe que deux branches, qui se rencontrent au point de fusion: la branche I pour les dissolutions qui contiennent plus de sel, la bran- che IT pour les dissolutions qui contiennent plus d’eau que l’hydrate.
À commencer du point de fusion, j'indiquerai les différen- tes parties de chaque branche par «, b, ete.; et cela à cause de la possibilité de nouveaux changements de direction dans les courbes nommées jusqu'ici [IT et I, quand la température est abaissée (voyez $ 6). Les branches II et III seront dési- gnées dorénavant par: Ila, Ib.
Maintenant la courbe BOCD (fig. 7) pour l’hydrate CaCl, . 6 H,0 nous indique pour la première fois une courbe à trois branches. À la vérité, si nous tenons compte aussi de la courbe BHCD (fig. 1) pour les concentrations des dissolutions saturées, et que nous exprimions ces compositions par la formule CaCl, :XxH,0, nous voyons que de B à CIla valeur de x diminue continuellement, pour devenir égale à 6 au point de fusion C. |
Mais, tandis que la quantité d’eau diminue continuellement, la tension (fig. 7) s'élève d’abord, pour atteindre à 28°,5 environ un maximum et s’abaisser ensuite jusqu’à C.
snata ne.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 263
BO est donc la branche Ilb, qui a les caractères:
dp dx ES = EL nl ed). OC est la branche Ila, aux caractères : dp pi H—= = BC
CD, correspondant à la nouvelle branche CD (fig. 1) de la courbe de solubilité, exprime l’équilibre entre CaCl, .6 H,0, la vapeur,. et les dissolutions contenant moins d’eau que l’hydrate. La teneur en sel de ces dissolutions s’accroît de C à D, sur la courbe fig. 7.
CD correspond donc à la branche I de la courbe générale, branche qui a les caractères:
d dx ee à
C'était pour ne pas perdre de vue la signification de ces
différentes branches, que, dans la fig. 1, j'ai fait accroître la
= + Le CG.
quantité de sel dans la direction descendante. Les courbes des solubilités et des tensions obtiennent de cette manière une position analogue.
La courbe pour l’hydrate à 6 À, O est la seule qui présente la branche I. On peut y comparer la courbe AB qui repré- sente les tensions de la glace, si l’on regarde ce corps solide comme hydrate de CaCl, (à «© H,0), en équilibre avec une dissolution qui contient moins d’eau que ce corps, et dont la quantité s'accroît de — 55° a 0° (voyez p. 230).
Pour les sels anhydres la branche I ne peut jamais exister.
Les hydrâtes à 4 H,0 x et 5 n’ont fourni que la branche ITb. Cependant, la forme convexe des courbes GK et EF ayant déjà changé en forme concave avant que ces hydrates disparaissent dans la dissolution, on en conclut que le sommet de la courbe serait bientôt atteint, si l’on pouvait poursuivre ces courbes.
La courbe de l’hydrate à 2 H,0 fait au contraire voir
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 18
264 M. Hi. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
encore nettement ce sommet et le commencement de la branche Ila, grâce à la circonstance que la température de transformation de cet hydrate se trouve au voisinage de son point de fusion.
Pour l’hydrate à 1 H,0, c’est de nouveau la branche ITb qu'on rencontre en Z, et qui se continue sans doute jusqu’à 260°, où apparaît le CaCl, anhydre. La courbe nouvelle pour les dissolutions de ce sel sera de nouveau la branche IT, parce que la température s’éloigne encore beaucoup du point de fusion.
J'aurai l’occasion au Chapitre V de considérer de plus près ces différentes courbes, en rapport avec les formules ther- modynamiques, et l’on verra une parfaite concordance entre la théorie et les observations, surtout pour la courbe BOC (fig. 7).
CHAPITRE IV.
Revue générale des conditions d'équilibre des différents systèmes formés de CaCl, et de H,0. Points quadruples.
Il me reste maintenant à donner un aperçu général des courbes obtenues et de leur signification pour les limites des différents systèmes qu’on peut former de CaCl, et de H,0.
J'ai réuni à cet effet dans la figure 9 (schématique) les courbes obtenues et prévues. Les courbes au-dessous de 45° y sont de beaucoup élargies. |
1. En premier lieu, je fixe l’attention sur les points de jonction des courbes. Il y a peu de temps, il était entière- ment incertain quel rapport existait entre la transformation d’un certain hydrate en un autre par perte de vapeur d’eau, et cette même transformation au sein de la dissolution.
A cet égard, M. Ostwald !) révoque même en doute si un
1) Allgemeine Chemie, IT. 672.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 265
hydrate salin inférieur peut se former par perte de vapeur, parce que sa formation au sein de la dissolution est liée à une température plus élevée.
J'étais cependant arrivé, dès la fin de l’année 1886 !), à la conclusion que, au point de transformation d’un sel hydraté en un sel moins hydraté au sein de la dissolution, se trou- verait le point de rencontre non seulement des deux courbes de tensions pour l’équilibre de chacun de ces hydrates avec sa dissolution et la vapeur d’eau, mais, en outre, d’une troi- sième courbe pour l'équilibre des deux hydrates et de la vapeur l’eau.
J'avais tiré cette conclusion de l’analogie entre les sels hydratés et les hydrates de gaz, pour lesquels j’avais démontré la rencontre de trois courbes analogues. |
Vers le même temps, M. van ’t Hoff démontra pour le sulfate de soude l'égalité des tensions de ces trois systèmes au point de transformation de Na,SO, . 10 H,0 en Na,SO, . ER 0),
Les recherches communiquées sur le chlorure de calcium donnent maintenant une confirmation plus complète de cette vue, en ce qu’elles ont fourni pour la première fois les trois courbes qui se rencontrent dans de tels points (B, H, D, F, K, L).
2. Considérons maintenant les courbes pour l’équilibre de: hydrate dissolution et vapeur, et voyons quelles branches de la courbe générale elles représentent, lorsqu'elles se ren- contrent. Dans un mémoire précédent *), j'avais démontré que l'intersection de deux de ces courbes pouvait avoir lieu entre les branches suivantes :
1) Rec. des trav. chim. etc., V, 407. 1886. 2) Maandblad Natuurwetenschappen, Janvier 1887, et plus tard: Zeitschr Phys. Chem., I, 180. 3) Rec. des trav. chim. etc., V, 400. 18*
966 \. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
a
SL)
Branches.
—_———
Système TII | Il Ila Ila IIb + III Ila ITb Ila ITb ITb
le système I renfermant le composé avec la plus grande quantité du corps gazeux, soit, dans le cas des sels, l’hy- drate supérieur.
Chez les hydrates de gaz, les combinaisons de 42H, Br avec AzH, et les combinaisons du chlore avec l’iode, les intersections observées ont lieu entre les branches I et Ila, ou I et IIb. Les courbes pour les hydrates de CaCl, don- nent alors des exemples de deux nouveaux cas: IÎla, IT et IIb, Ib. La fig. 9 fait voir les intersections suivantes dans les différents points de rencontre.
Points. | B. | H. D.
Corps s0- | lides dans | | |
y — H,0 |Call,.6H,0|CaCl, .6H,0 CaCl,.4H,O0u|CaCt, 6H, 0\CaCl, AH, OB|CaCt, AH, 08|CaCt, 2H, systèmes. |
+
«
Branches
des deux I. 114. II. | IT4. Z: IT6. II6. courbes. |
Points | k Louer nc x
Corps s0-
lides dans les deux systèmes.
\
CaCT,.4H,Ou|CaCl, . 2 H,O0|CaCl, .2 H,0| CaCl, .H,0 | CaCt,.H,0 | + “CaCt,
Branches
des deux TI4. II4. II4. ITS. ITI4. IIS. courbes.
Nous avons donc ici des exemples des intersections entre 2, +1, f Ila, I1b, II6. Le premier cas se présentera apparemment tou-
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC, 267
jours au point cryohydratique des sels; mais rarement si les corps solides sont deux hydrates, parce qu’alors la courbe I ne se rencontrera pas fréquemment.
Les cas Ila, IIb et IIb, IIb sont ceux auxquels on peut s'attendre le plus souvent chez les sels, surtout le dernier. Vu la petitesse de la branche Ila chez la plupart des sels (voyez $ V), il est fort douteux si l’on y rencontrera jamais une intersection Ila, Ila. Celle-ci et l’intersection I, I sont donc encore sans exemple.
3. On peut encore demander quelle relation il existe entre
les valeurs de PP pour les trois courbes qui se rencontrent. Je renvoie, à cet égard, aux observations que j'ai déjà faites dans une occasion antérieure !)}, où j'ai démontré que l’on peut déduire les rapports de ces valeurs, si l’on connaît les chaleurs de transformation des trois systèmes et la composi- tion des phases qui y entrent. En appliquant aux cas présents les conclusions alors obtenues, on verra qu’il existe une incer- titude sur la différence de direction des courbes pour les systèmes IT et IIT (IIT étant le système des deux hydrates et vapeur), ou bien pour les courbes des systèmes I et II si elles représentent toutes deux la branche ITb. Cette incer- titude ne peut être levée d’avance, mais seulement après détermination des chaleurs susdites. | Cependant, quant à la différence de direction des deux courbes pour les dissolutions saturées, les cas étudiés jus- qu'ici démontrent, sans aucune exception, que la courbe pour
lhydrate inférieur monte plus rapidement que celle pour
| | dp , ;
l’hydrate supérieur. La valeur F éprouve donc un accrois- sement brusque au point de transformation de l’hydrate supérieur en l’hydrate inférieur (circonstance qui se présente
nécessairement si les branches Ila et IIb se rencontrent).
1) Rec. etc., V, 399—408,
268 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Des deux côtés du point de rencontre le système:le plus stable est, dans tous les exemples connus, celui qui possède la plus grande tension. |
Je fixe l’attention sur cette particulariié, parce qu’elle est opposée à la conduite des systèmes qui ne renferment qu’un seul corps, dans plusieurs phases. Si l’on considère un point triple, soit le point triple de l’équilibre physique, soit les points triples de l'équilibre chimique !) entre trois phases d’un même corps, on observe toujours que, des deux systèmes qui renferment une phase gazeuse, le système qui a la plus petite tension est le plus stable d’un côté ou de l’autre du point triple. L'exemple le mieux connu est donné par la glace et l’eau. Si l’on prolonge les courbes de tensions cha- cune au-delà du point triple, c’est la courbe de l’eau qui présente les tensions les plus petites aux températures supérieures, et la courbe de la glace au contraire aux tem- pératures inférieures. Or, cette conduite résulte nécessaire- ment du fait que dans la transformation de la glace en eau, comme dans tous les autres cas cités de transformation allo- tropique, le corps qui existe aux températures au-dessus du point triple résulte de l’autre corps par absorption de cha- leur. La chaleur de vaporisation diminue, et avec elle la
dp valeur de ii
Le cas est plus compliqué dans les exemples étudiés des transformations d’hydrates salins. Si p. e. la courbe pour le système: CaCl, . 4 H,0 « dissolution et vapeur, a une tangente beaucoup moins verticale au point de transformation X que . la tangente à la courbe pour le système: CaCl, . 2 H, 0, dis- solution et vapeur, en ce même point, — on a le droit de con- clure que la chaleur de vaporisation d’une molécule de 4,0 du second système sera plus grande que la chaleur de va- porisation d’une molécule de H,0 du premier système. Pour-
1) Voir les exemples dans mon mémoire: Rec. etc., T. VI, 310,
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 269
tant la transformation du premier système en second absorbe de la chaleur, tout comme celle de la glace en eau. Mais il y a cette différence entre les deux exemples : que la formation d’une molécule de vapeur de 4,0 fait seulement disparaître une molécule de glace ou d’eau liquide; tandis que la va- porisation d’une molécule de Æ,0 des deux systèmes nom- més produit en outre un dépôt de CaCl,.2H,0 ou de CaCt.4 H,0 «, et cela en quantités fort différentes.
La règle chez les hydrates salins semble être que la chaleur de vaporisation s'accroît dans un point de transformation; mais cette règle ne peut avoir un caractère absolu. S'il se présente une fois le cas contraire, il en résultera une autre conséquence à l’égard de la solubilité des deux hydrates.
Si la courbe de l’hydrate inférieur a une tangente plus verticale, sa dissolution saturée à une tension plus grande que la dissolution de l’hydrate précédent, en supposant que celui-ci puisse un instant exister au-dessus de son point de transformation. Cela implique que la nouvelle dissolution soit la moins concentrée, et si l’on considère les courbes de so-
lubilité, la valeur de È (s — quantité de sel dissous dans
100 p. d’eau) éprouvera une diminution brusque au point de transformation de l’hydrate supérieur en l’hydrate inférieur. Cette conclusion s’accorde avec les observations; les hy- drates inférieurs qui se forment au-dessus d’une certaine température au sein de la dissolution, présentent à partir de ce point: soit un accroissement de solubilité moindre que celui de l’hydrate précédent, soit une diminution de solubilité. Au contraire, une brusque diminution de la valeur de
dn. EE. A correspondrait à un accroissement brusque dans la
: ds ; "a valeur de ge moment où l’hydrate supérieur se trans-
forme en hydrate inférieur. Il n’y a pas, jusqu'ici, d'exemple connu d’un tel cas.
270 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
4. Outre les trois courbes dont mention a été faite dans l'exposé précédent, il y a encore une quatrième courbe qui commence en chacun des points de rencontre: B, H, D, F, K, L, M. C’est la courbe d’équilibre pour le système des deux corps solides et de la dissolution. On obtiendra ces systèmes en soumettant le système de: deux hydrates, dissolution et vapeur d’eau, à une plus haute pression. Aussitôt que la vapeur est absorbée, la pression peut s'élever et provoquera une transformation entre les deux corps solides et le liquide, qu’on pourra empêcher par élévation ou abaïssement de tem- pérature. Les températures et pressions, auxquelles le système peut rester inaltéré, seront représentées par ces nouvelles courbes.
Je n’ai pas déterminé ces différentes courbes; j’ai seulement constaté la direction de quelques-unes d’entre elles, en mesurant le sens du changement de volume. En fait, les transformations qui s’accomplissent, quand on fournit de la chaleur aux sys- tèmes de deux phases solides et une liquide, consistent: soit dans la fusion simultanée des deux corps solides, soit dans la fusion partielle lorsqu'un de ces corps se transforme en l’autre et en une quantité de liquide. Le premier cas se présente avec la glace et CaCl, .6 H,0, et avec les hydrates: CaCl, .6H,0 et Call, .4H,06$. Le second cas se présente avec les autres systèmes d’hydrates qui peuvent coexister.
_ Ces transformations sont donc de nouveaux exemples de la troisième forme d’équilibre hétérogène, que j'ai comparée à l'équilibre physique de la fusion dans mon essai de classifi- cation des phénomènes de l’équilibre chimique ).
Comme pour l’équilibre physique de la fusion, la direction de la courbe (p, t) dépend seulement de la chaleur de trans- mation et du changement de volume qui l’accompagne. Si ces phénomènes de fusion compliquée sont accompagnés
1) Rec, etc., VI. 295.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 971
d \ d’une dilatation, la courbe sera ascendante + == +) , sil | dp y à contraction, la courbe sera descendante n=—):
La détermination !) de ces changements de volume à la pression d’une atmosphère montra une dilatation pour les transformations suivantes :
7 (CaCt,.6H, 0) + 3(CaCt,.4H, 0B) — 10 (CaCl, :<85,41H, 0) 21 (CaC1,.6H, 0) — CaCl, AH, Ox + 20(CaC1, :<6,1H, 0) 8,74 (CaCl, 4H, Ox) — CaCt,.2H, 0 + 2,74 (Cal, 4,738 H, 0),
tandis que la transformation 3,4 (CaCl, .4 H,0B) — CaCl,.2H, 0 + 2,4 (Cal, © 4,83 H, 0) a lieu avec une contraction notable ?).
Ce dernier cas se présentera sans doute aussi dans la fusion simultanée de glace et de CaCl, .6 H,0 *):
8,5 H,0 + CaCl, .6 H,0 — CaCi, = 14,5 H, 0.
Le changement de volume dans la transformation : 2(Ca0t, 2 10) = 2 (CaCt,:F,/0) + 27 (Cat, 2,07 H,0) n’a pas été mesuré, mais sera sans doute positif; parce qu’il consiste à peu près en fusion totale de CaCl, .2 H,0, corps
dont les cristaux sont plus denses que le liquide. Du changement de volume dans la transformation de
1) Une masse contenant CaCl: et H0 dans le rapport nécessaire pour observer la transformation désirée, fut introduite dans un flacon de 100 cc. environ, à col étroit. Sur cette masse fut versée une couche d’huile, qui s’élevait dans une partie du col. Le flacon fut fermé par un bouchon, soutenant un thermomètre dont la boule s’enfonçait dans la masse saline. Celle-ci ayant été chauffée, on observa le changement qui se produisait, à la température de transformation, dans le niveau de l’huile.
2) Il y a donc dilatation lors de la transformation en sens inverse. Cela explique pourquoi on risque de voir se casser le flacon où l’on abandonne au refroidissement un système concentré qui se solidifierait en un mélange de CaCl,.2 H:0 et de CaCl.4 H30 8. Si l'on veut prévenir cet accident, il faut introduire un cristal &« avant solidification complète,
3) Rec. etc., Tome VI 301,
272 M. H. W. BARHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
CaCl, . H,0 en CaCl, à 260° environ, rien n’est connu. En le supposant aussi positif, on obtient les directions des nouvelles courbes, telles qu’elles sont indiquées dans la figure sché- matique 9.
Les courbes BE et FR sont seules descendantes, les autres : DG, HO, KS, LT, MU sont ascendantes. On retrouve donc encore, dans ces courbes de fusion compliquée, les deux types des courbes de fusion simple.
5. Les points B, D, H, F, K, L, M sont donc des points de renconcontre de quatre courbes pour l'équilibre de trois phases. En ces points, quatre phases coexistent. Nous trou- vons ici toute une série de points quadruples, dont j'ai démontré, dans deux mémoires antérieurs !), la signification pour l’étude des équilibres chimiques.
Ce sont les seuls points dans lesquels peuvent coexister quatre phases. Ces phases et les températures et pressions de leur équilibre sont données dans la table suivante:
Parmi ces points quadruples, il y en à deux (D et F) qui
représentent un état d'équilibre labile.
1 Ph lid | Pise digéid : t
. ; S © SE ases solides ase liquide. = ù P: B H, 0 CaCls 6H30 CaCls SX14,5 H90 | H,0 |— 550. 0 mr D |CaCla.6H20 |CaCl, .4H,0B| CaCla x 541H20 | , |+ 290.2 5,67 3 HT | CaCto 6 Ho 0 |CaCls .4 H30n | CaCls 2 61 Ho 0 | -, PO ENNEE 6,80 , F |CaCla.4H208 |CaCls.2 H20 Call 2 4,88H9 O0 » + 389.4 7,88 ,. K |CaCl:.4 H30 « |CaCla .2 H20 CaCls 2 4,78H20 |! 5 "|+ 469,8 TT CANNES 0 Ne PA O0 EE ER CaCls 2 2,074 .0 |" MATOS CSSS M !CaCl:.H30 aCla env. CaCls HE 1,8 HO , env. 2609 ! plusieurs aff
Tous les points quadruples appartiennent à la même caté- gorie, parce qu'ils représentent l’équilibre entre deux phases
1) Rec. etc, V, 393—413 et VI, 316—331.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 272
solides, une liquide, et une gazeuse !). On ne part de ces points, pour suivre une des courbes à droite ou à gauche, qu'après qu’une des phases a disparu dans la transformation qui s’accomplit quand on fournit ou enlève de la chaleur. La nature de cette transformation entre les quatre phases se fait connaître, si l’on tient compte de la nature de la transformation qu'éprouvent les deux phases solides et le liquide, et en même temps du changement de volume, qui maintenant est compensé par l'augmentation ou la diminution de la phase gazeuse. En utilisant donc les données obtenues sous 4, et en désignant les phases par S,, S,, L, @, nous pouvons indiquer, de la façon suivante, les équations de transformation dans les différents points quadruples:
Point. Equation.
B S, + L2L+G
D S,+S +G TL
H S+<GS,+L
F S 2S, +L+G 1e LENT S,+GS, + L
Ces équations n’indiquent que les symboles des phases et la manière dont elles prennent part à la réaction. Leurs quantités ne peuvent être données qu'après mesure du susdit changement de volume. Il résulte de ces équations qu'il n’y a que les points D et F quisoient des points de transi- tion pour une seule phase; le point D étant une tempéra- ture minimum pour la phase L?), qui disparaît toujours en
ce point; le point F au contraire une température maximum
1) Outre les exemples mentionnés dans mon mémoire (Rec, etc, ,VI, 304) l'étude de M. Stortenbeker sur les chlorures d’iode en a fourni encore quelques-uns de cette même catégorie.
2) Avec cette restriction encore, que ce n’est le cas que pour les liquides qui contiennent moins de 6 H,0, les liquides à plus de 6 H,0 pouvant exister aussi au-dessous de cette température,
Re PE ee RE Rs es:
274 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
pour la phase S, (GaCl, .4 H,0$), qui ne pourra exister à une température plus élevée. C’est chaque fois la phase qui n'appartient pas à la seule courbe qui existe de l’autre côté du point quadruple.
Les équations des autres points montrent que ceux-ci ne sont des points de transition que pour deux systèmes de deux phases. Laquelle de ces phases disparaîtra, quand on fournit ou enlève de la chaleur, cela dépendra de leurs quan- tités. Aussi il y a dans ces cas deux courbes qui mènent du point quadruple aux températures plus élevées, et deux autres aux températures inférieures. Dans ces cas, chaque phase peut exister des deux côtés de ce point.
Si l’on voulait connaître les limites de l’existence de chaque phase en présence de chacune des autres phases avec les- quelles elle peut coexister, on n'aurait qu’à examiner de quelle manière chaque courbe divise le plan en une région pour deux, systèmes de deux phases et une autre pour le troisième système de deux phases, qu’on peut former des trois phases dont cette courbe exprime l’équilibre. La méthode de cette recherche ayant été indiquée suffisamment dans mes mémoires antérieurs et appliquée spécialement pour le cas d’un point quadruple (Rec. T. VI p. 324 et suivantes), je m'abstiens pour le moment de cette application au cas du CaCl,, malgré l’intérêt qu’elle présenterait à cause du grand nombre des points connus.
Le résultat, qui ne serait autre qu’une confirmation com- plète de toutes les conclusions tirées précédemment, pourrait se formuler succinctement de cette manière:
Plusieurs courbes d’équilibre pour trois phases sont entiè- rement limitées entre deux points quadruples.
Pour plusieurs systèmes de deux phases la région est partiellement limitée par deux, ou par trois courbes.
Parmi les différentes combinaisons solides de CaCl, et de H,0, ïl n’y à que l’hydrate à 4 4,0 $ pour lequel une limite de température puisse être indiquée, soit 88°,4 parce qu’au-
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 275
dessus de cette température cette phase ne peut coexister avec aucune autre.
Et en général: les points quadruples qu’on ren- contre dans l'étude ‘des sels hydratés ne sont des limites (supérieures) de températurequepour ceux de ces sels qui contiennent la plus grande quantité d’eau, et dont la décomposition en l’hy- drate inférieur et la dissolution est accompa- gnée d’une contraction.
Dans: le cas contraire, le point quadruple ne forme cette limite que sila phase gazeuse est présente en quantité suffisante pour ne pas dis- paraître dans la transformation. Le point qua- druple n’est jamais point de transition pour les hydrates inférieurs !).
6. Il reste maintenant à faire quelques observations sur les courbes pour l’équilibre de deux hydrates et vapeur, ou bien de deux hydrates et dissolution.
Quant à la première catégorie de ces courbes, l’expérience a fait voir qu'en allant des points quadruples — qui sont leurs limites supérieures — vers des températures plus basses, elles s’approchent de plus en plus l’une de l’autre, de sorte qu'il devient difficile de mesurer les différences de tension aux températures au-dessous de 0°. L'étude dans cette direc- tion n'étant qu’à peine commencée, il serait prématuré de vouloir généraliser ce résultat, — et cela d'autant plus qu'il ne découle pas nécessairement de l’équation thermodynamique.
Considérons deux courbes pour des systèmes qui contien- nent un même hydrate: p. e. IH et NK. Si nous désignons la chaleur de combinaison de Call, .2 H,0 avec 2 mol.
d’eau liquide (pour former CaCl, .4 H,0 &) par 2 Q,, la
1) Voir une conclusion analogue pour les points de transition des sels doubles hydratés: Rec. VI, 342.
276 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
chaleur de vaporisation d’une molécule d’eau par r, l’équa- tion thermodynamique de la courbe NK est (voir $ 5):
dlp, _Q;,+r Tu — 9m : cat D'ÉTÉ
De même, si 2 Q, représente la chaleur de combinaison de CaCl,.4 H,0 avec 2 mol. d’eau liquide (pour former CaCl,. 6 H,0), l'équation pour IH est:
Or, M. Thomsen a trouvé qu’en général la chaleur d’hy- dratation, calculée pour 1 mol. d’eau, diminue à mesure que le nombre de ces molécules s'accroît, c’est-à-dire Q, >. Q..
Si l’on compare donc les équations (1) et (2) pour une même température, on aura:
dp, dp, dlp, dlp , A |: dt RE ou bien de _ 124.0 ÉREE (3)
Dans le cas, maintenant, où les courbes HI et KN se rapprochent à mesure que la température s’abaisse, on aura dp dp: 18 AIT EI incompatible avec (3), parce que p, est toujours plus petit que
nécessairement : Or cette expression n’est pas
p,; mais l'inégalité (3) permet aussi bien “a > . et le fait
que les courbes HI et KN se rapprochent à de basses tem- pératures n’est donc pas une nécessité théorique.
Même dans ce cas, on peut déduire des équations (1) et (2) qu'un point de rencontre est impossible (toujours en ac- ceptant la règle de M. Thomsen). En effet, si l’on soustrait (2) de (1), on obtient:
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 277
dp Eu P: dt
Si donc Q, — Q, est positif, 1l faut que soit aussi
positif. Le rapport Pi Goit done diminuer quand la tempé- 2
rature s’abaisse. Une telle diminution s’observe en effet lorsque, pour les courbes indiquées, on compare les valeurs de p, et p, entre 25° et — 15°. Si les courbes se rencon-
traient, et que p, devint égale à p,, le rapport P1 devrait 2
au contraire croître, avec l’abaissement de la température,
jusqu’à Fa — 1. Un point de rencontre entre deux courbes 2
telles que HI et KN ne paraît donc possible que pour des hydrates qui feraient exception à la règle de Thomsen, c’est- à-dire pour lesquels Q, — Q, aurait une valeur négative, ou bien obtiendrait une telle valeur quand la température baisse, par suite des variations qu’éprouvent alors Q, et Q.. Nos connaissances sur ce sujet sont encore trop limitées pour qu'il soit possible de prévoir si un pareil point de ren- contre pourra se présenter dans l’étude d’autres sels !),
Si les courbes pour l’équilibre entre deux hydrates et vapeur ne se rencontrent pas, leur nombre augmente à mesure qu’on passe à des températures plus basses, et ces courbes devien- nent de plus en plus parallèles.
En choisissant donc une température assez basse (pour le CaCl, au-dessous de 30°) et en prenant l’hydrate le plus
1) Le fait serait pourtant fort intéressant, parce qu'il impliquerait la non-existence d’un des hydrates aux températures au-dessous du point de rencontre. S'il se présentait p. e. avec les courbes KN et HI, les seuls hydrates qui, au-dessous de ce point, pourraient exister en équilibre avec la vapeur, seraient les hydrates CaCl:.6 H30 et CaClo .2 H3 0. L'hydrate à 4 H0 disparaîtrait dans le nouveau point quadruple: la région de son existence, en présence de la vapeur, étant alors entièrement limitée par le triangle dont le nouveau point avec H et K formeraient les angles.
278 M. H. W. BAKHUIS ROOZEPOOM. ÉTUDE
riche en eau, on devra passer par toute la série d’hydrates, pour aboutir au sel anhydre, si la vapeur d’eau qui se développe est entraînée par un courant de gaz suffisamment sec, ou absorbée par une substance hygroscopique (méthode de Müller-Erzbach).
Pratiquement, 1l peut cependant arriver qu’il soit néces- saire d'opérer à des températures plus élevées pour obtenir les derniers hydrates et surtout le sel anhydre ; parce que les tensions des derniers hydrates aux basses températures pour- ront être si petites, qu’on ne puisse se procurer facilement un milieu plus sec. Il y a abondance d’exemples qui le prou- vent; mais on na pas fait assez d'attention jusqu'ici à ce que l’insuccès n’était dû qu'au manque de patience ou de substances hygroscopiques suffisamment puissantes. Ainsi M. Dibbits !} trouva, pour le CaCl, .6 I, 0, qu’à des températures au-dessous de 10° il perd facilement 4 4,0 dans un courant d'air sec; qu'il faut beaucoup de temps pour la perte de la ième molécule; mais qu'on ne peut parvenir au sel anhydre qu'à 80° environ. De même, pour prendre un autre exemple tout récent, M. Shenstone ?) a trouvé que les cristaux de CaSO, . 2 H,0 deviennent facilement anhydres à 70°, tandis qu’à 40° ils ne perdent que 0,01 mol, de H,0 en 10 heures. On ne peut donc indiquer une température spéciale à laquelle un hydrate salin perd telle ou telle quantité d’eau, car cette perte peut s'effectuer à toute température au-dessous d’un certain point quadruple, et cette température dépendra alors du degré d'humidité de l’atmosphère qui entoure le sel *).
Si toutefois l’on connaît les courbes de tensions des dif- férents hydrates secs, on peut s’en servir pour préparer tel
1) Archiv. Néerl. 13, 478.
2) Journ. Chem., 53, 544 (1888). 3) Comparez la différence entre la conduite des hydrates salins, et en général des cristalloïdes, et celle des hydrates colloïdaux, — dans le mé- J moire intéressant de M. van Bemmelen, Rec. etc., VIT, 55—63.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 279
hydrate à l’état sec et pur, en exposant une masse de com- position quelconque à un courant d’air d’un degré d’hu- midité tel, que la tension partielle de la vapeur d’eau en soit plus grande que celle de l’hydrate désiré en présence de l’hydrate inférieur suivant, et moins grande que celle de l’hydrate désiré en présence de sa dissolution ou de l’hydrate supérieur suivant. C’est cette méthode dont je me suis servi pour préparer les hydrates CaCl, .2 H,0 et CaCl, . H,0,
et qui peut servir dans maïints cas où les cristaux ne se laissent pas isoler nettement de la dissolution.
Une dernière remarque: la connaissance de la conduite des hydrates secs peut parfois permettre une conclusion à l’égard de l’état d’hydration d’un sel au sein de sa dissolution saturée, Le sulfate de chaux m'en a offert un exemple inté- ressant. Plusieurs auteurs ont déterminé la solubilité de CaSO, .2 H,0, et ils ont trouvé, en partant de la tempéra- ture ordinaire, que la solubilité atteint un maximum à 35° environ, puis diminue, Les auteurs ont négligé de déterminer la composition des cristaux au sein de la dissolution au-dessus de 35°. D’après beaucoup d’autres exemples, on serait tenté d'admettre à ce point la formation d’un hydrate inférieur.
Or, cela ne peut être le cas. Les expériences récentes de M. Shenstone ayant démontré que même à 70° les cristaux secs à 2 H,0 ne perdent que lentement leur eau et peuvent donc exister inaltérés sous des pressions de vapeur suffisam- ment élevées, l’hydrate qui se trouve au sein de la dis- solution à cette température ne saurait contenir moins de 2 H,0. Le sel à 2 H,0 étant pris pour point de départ, ce n’est donc pas un changement d’état d’hydratation qui pro- voque le changement dans la direction de la courbe de solubilité à 35°. (Voir pour la vraie signification de ce fait le chapitre VI).
7. Quelques conclusions, tirées de la considération des ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIL 19
280 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
courbes pour l’équilibre de deux hydrates et de la dissolu- tion, nous mettront enfin en état de répondre à la question : si la coexistence de deux hydrates non successifs, ou bien de deux modifications d’un même hydrate, serait possible,
Toutes les courbes BE, DG, HO etc. (fig. 9) diffèrent très peu de lignes droites et même de lignes perpendiculaires,
les valeurs de æ étant fort grandes, à cause de la petitesse du changement de volume lors de la transformation des deux corps solides en liquide, ou d’un de ces corps en liquide et en l’autre corps. Cependant les courbes BE et FR sont descendantes, les autres ascendantes. Une intersection entre plusieurs de ces courbes serait-elle possible ?
Une intersection entre une courbe ascendante et une autre descendante n’est possible, que si la première à pour origine un point quadruple à température plus basse que celle de l’origine de la seconde courbe. Deux courbes ascendantes ne
se rencontreront que si la valeur de est la plus petite
pour celle qui commence au point quadruple de la tempé-
rature la moins élevée. Et encore, si les origines de ces deux courbes ne sont pas assez près l’une de l’autre, il y a peu d'apparence que le point de rencontre se présente à | des pressions qui puissent être produites.
Cependant, parmi ces points de rencontre, ceux seulement qui résultent de l'intersection de deux courbes ayant un hydrate commun, ont une signification physique.
Dans le point quadruple où commence une de ces courbes, les solubilités de deux hydrates (soit À et B) sont devenues | égales, et cette solubilité égale existe sur toute la courbe. Si cette courbe en rencontre une autre pour l'équilibre des hydrates B et C avec la dissolution, on aura donc, à la température et à la pression représentées par le point de rencontre, une dissolution en équilibre également avec À et B et avec B et C, et qui, par conséquent, sera aussi en .
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 281
équilibre avec À et C. Le point lui-même sera un point quadruple pour les hydrates 4, B, Cet la dissolution. Les deux courbes considérées y finiront, et en ce point com- mencera une nouvelle courbe pour l’équilibre entre les hy- drates À et C avec la dissolution. La distance des courbes HO, KS, LT, MU est pourtant beaucoup trop grande pour qu’on puisse espérer trouver jamais un point de rencontre entre deux courbes successives. Un tel point ne paraît ad- missible que pour les courbes DG et FR, qui représentent des systèmes contenant chacun l’hydrate à 4 H,0$, l’un en présence de CaCl, .6 H,0, l’autre en présence de CaCl,.2 H,0. La différence des points d’origine D et F n’est que de 9°.2 et les courbes sont de direction contraire. A partir de leur point de rencontre, les hydrates à 6 H,0 et à 2 H,0 pour- raiént alors exister en équilibre avec la dissolution, et l’hy- drate à 4 H,0$ disparaîtrait.
L'exemple du CaCl, démontre donc que la coexistence de deux hydrates, entre lesquels en existerait un troisième, de composition intermédiaire, est peu vraisemblable !).
La possibilité de la coexistence des hydrates CaCl, 4 H,0 & et 5 peut être examinée de la même manière. Deux hydrates de la même composition peuvent être mis en présence par la rencontre de beaucoup plus de courbes, que deux hy- drates de composition différente et non successive. Les hy- drates æœ et $ existant chacun sur 5 courbes, ils pourraient se rencontrer par l'intersection de KH et FD, de HI et DJ, de XN et FZ, de HO et DG ou bien de ÆS et FR.
Le premier système de deux courbes ne présente pas de point d’intersection; les deux systèmes suivants, qui repré- sentent l’équilibre avec CaCt, .6 H,0O et vapeur, ou avec CaCl, .2 H,0 et vapeur, ne semblent pas offrir non plus de point de rencontre, car les cristaux 5 melangés à l’hydrate à 6 H,0 ou à 2 H,0 devraient alors être stables au-dessous
1) Comparez la conclusion déduite, sous 6, de considérations analogues,
19%
2892 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
d’un tel point, et cette stabilité n’a jamais été observée aux ‘basses températures.
Restent les intersections des deux derniers systèmes. Pour les courbes XS et FR elle est impossible (voyez fig. 9), l’une . étant ascendante et l’autre descendante. Pour les courbes DG et HO on pourrait s'attendre à la possibilité d’un point de rencontre, à cause de la petite différence de leurs origines: - 0°,6. Cependant, il me semble fort probable qu'il n’en est pas ainsi. La chaleur de transformation pour les systèmes des deux courbes différera fort peu, dans les deux cas, de la chaleur de fusion de CaCl, .6 H,0, parce que les dissolutions, aux points D et f, diffèrent toutes deux fort peu de la com- position CaCl, ©: 6 H,0.
Par contre, le changement de volume qui accompagne ces transformations est, d’après mes observations, beaucoup plus petit au point D qu’au point H; de sorte que la valeur de dp dt | . au commencement de la courbe) que cette même valeur pour F - la courbe A0, Ces courbes s’éloigneraient donc l’une de l’autre. Si cette allure n’était renversée plus tard par les variations » de la concentration de la dissolution, qui amène des variations dans la chaleur de transformation et dans le changement de
pour la courbe DG promet d’être plus grande (du moins »
volume, on n’aurait donc aucun point de rencontre où les hydra-. tes CaCl, . 4 H,0 a et CaCl, . 4 H, 0 f seraient mis en présence. Ces hydrates seraient, par suite, entièrement incompa-. tibles. | Cet exposé fait voir que les recherches doivent être pour-… suivies très loin, avant qu’on puisse déclarer que tel ou tel système est incompatible.
Dans les tables suivantes sont réunies toutes les valeurs. obtenues, et quelques valeurs déterminées par MM. Hammerl. et Lescoeur. ;
Les chiffres gras indiquent les points d’intersection des courbes
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 283
avec une autre et les points où les courbes changent de direction.
A. Equilibres entre quatre phases.
Points quadruples.
£: P. phases présentes.
—55° ljenv.0 mm. Glace, CaCl,.6H,0 , CaGl,=14,5H, 0,Vapeur. env.290,9 | 5.67 » |CaCl, 64,0 , CaCl,.4H,0B, CaCle 54 nn 29°,8| 6,80 » |CaCl,.6H,0 , CaCl,.4H,0n, CaCl, 2 60 » 2 38°,4| 7,88 » |CaCl,.4H,0f, CaCl, 2H,0 , CaCl, :: 483 » u 45°,8| 11,77 » |CaCl,.4H,Ow, CaCl, 2H,0 , CaCl, 4,73 » ” 195°,5| 842 » |CaCl,.2H:0 ,CaCl,.H,0, CaCl,x 2,07 » " env.260° | plusieurs |CaCl,.H,0, CaGts, CaCl.XCenv. 187) " atmo- sphères.
B. Equilibres entre trois phases.
LI. Glace, CaCT, x H,0, Vapeur. IT. CaCl,.6H,0, Cat, x H,0, Vapeur.
t P S x É. P L S x
0° 4,65 mm.) 0 O0 —55° env. O0 mm.) — | 42,5 | 14,5
M 09,5, " 10,5 | 58,7 —9259 — — | 50,0 | 123 | — 100203 » 17,0 | 36,3 —109: 0,972 .» | 0,452] 55,0 | 11,2 | —200| — 27,0 | 22,8 0° 1,944 » | 0,495] 59,5 | 10,37 — 309 | — 99,9 | 18,4 10° 3,456 » | 0,380] 65,0 | 9,49 | — 40°) — 38,9 | 16,0 20° 5,616 » |0,323| 745 | 8,28 | — 59° lenv.0 42,5 | 145 25° 6,696 0,285) 82,0 | 7,52 | 28,5 | 7,02 7» | 0,245) 90,5 | 6.81 2005 | 6,94 “Le 110,226!/95,5:17/6,46
30°,2 | 6,696 » | 0,210102,7 | 6,00 PO nl VOOR T 0,189109.0 | 5,70
299,2 | 5,62 ” |0,1881112,8 | 5,41
(MIE. CaCt..4H, 0x, CaCl, — xH,0, IV. CaCl,. 4H, 08, CaCl, :: «1H, 0, | Vapeur. Vapeur.
t P Ê S x t P: .. S x
TT : TT mm. | mm.
90° |4744| 0273| 91,0 6,78 209 | 3,564| 0.205 | 104,5! 5,90 .950 |57924| 0244) 96,0! 642 950 | 4644| 0497| 1088 5.66 | 29.8 | 6.80 | 0248 | 100,6 6.10 290,2 5.67 | 0188) 112.8! 5,41 | 350 | 864 | 0207! 107,3 5.75 300 | 583 | 0487| 114,0 5,40 40° 1037 | 0188| 115,3 5,34 350 | 7198) 0173 1925] 5.04 450,3 [11,77 | 0162| 1302 473 380,4 | 7803) 0155| 127,5) 4.83
284
M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOUM. ÉTUDE
V;LCaCRE2HO, CAGE HAE
VI. CaCl,.H,0, CaCl, = 2x0
Vapeur. Vapeur. ‘. P. + Le x t P. Lt 5 x T1 TL mm. Tee | 40° 85 |0,55 | 1281 | 4,81 FES x nue A | Fe 4e) i 16 ï c Ê 40 | 0, , 500 |198 | 0168 11523 | 466 185 |1006| 0119) 3025) 2.04 550 905 0174 1345 259 1490 1114! 0,118 | 305 2,02 60° |965 | 0178 | 1368 | 451 195° 1930| 0,117 | 308 | 2,00 65° 34 0 0181 1392 4.43 200° 1354| 0116! 311 | 1,98 70° 43,0 0184 141.7 237 205° 1491} 0,115 | 314 1,96 75° !540 | 0,186 | 144,3 | 4,31 2390 | Le ROBES 80° |665 | 0,188 | 147,0 | 494 env. 260°! — — ‘env.347env.1,8 85° |825 | 0190 | 1498 | 416 | 90° |400 |0191 | 452,7 | 4,08 100° |445 | 0191 | 159,0 | 3,90 1400 |904 | 0191 | 1655 | 3,72 1259 | 326 | 0,187 | 176,0 | 3,50 VII. CaClo.6H20, CaCl2 .4H 3 On, 1352 |435 | 0185 | 185,0 | 3,33 Va 440° | 497 | 0183 | 191.0 | 3,93 ARE 155° | 680 | 0,167 | 2445 | 2,88 160° |744 | 0,160 | 2925 | 9,77 - 165° |790 | 0150 | 236.0 | 2,61 p 170° |834 | 0140 | 2550 | 249 Pr pe 175°,5| 842 | 0,124 | 297 | 2,07 —159 0,27 mm. 0,190 0° 092 0,200 10° 419 7» 0,210 20° 3,78 0,242 9250 5,08 0,216 29,08
([X CacL. ÆH0Ox, CaCl,-.2H30;
Vapeur.
Fr P. #P,
| TT —15° 0,17 mm 0,117 0° 059 0,129 10° 1,25 ;\r 0,137 200 248 » 0,143 25° 3,40 0,145 309 464 0,147 350 626 y 0,450 40° 853 0,155 450,3 111,77 » | 0,162
VIII. CaCl,.6 H,0, CaCl, .4 H,08B,
Vapeur.
P
t. P. ce —159 0,22 mm 0,153 0° 0,76 » 0,165 10° 1,62 0,177 20° 3,19 0,182 25° 4,32 " 0,185 29,02 9,67 0,188
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 285
RerCdise HO CaCli: HO, .Napeur.
—— P L P r T 65° 13 mm 0,070 for 24 » 0,074 1000 60 0,080 4999 145: r 0,089 1559 438 n 0,107 1659 607 0,115 170° T5 » 0,120 175,5 | 842 , 0124
C. Equilibres entre deux phases:
CaClo En x H30 et vapeur.
Ki 2 | X— 9,2 X=9,9 x = 4,19
160°| 57010,193 | 135° | 420 10,178| 90°! 90 101711 45°] 11,5 |0,162 465° |. 651 10,1235| 140° | 492 10.181] 95°] 114 | 0,180 1700 | 751 10,1245| 150° | 682 |0,1901 1002 | 452 | 0,200 180°| 980 0,127 | 154°| 760 10,191! 146° | 760 | 0,236] 138° | 760
0,299 1900 | 1310 10,139 |
mm. mm. mm. 30° 6,6 0,209 | 18° 5,1 0,333 | —10° | 0,97 | 0,431 100° 349 ‘0,460 | 100° | 444 ! 0,584 AE 760 0,374 | 14200 760 0,510 | 1149 760 | 0,618
286 M. H. W. BAKHUIS ROGZEBU0OM. ÉTUDE
CHAPITRE V.
Relations thermodynamiques pour les tensions de vapeur des différents systèmes d’un sel et de l’eau. Application au cas de CaCl,. Revue générale des autres sels.
« Ps
Il est intéressant de considérer à présent les résultats ob- tenus soit pour la concentration de la vapeur, soit pour la concentration du liquide, du point de vue de la thermo- dynamique, afin d’en déduire si les variations de ces con- centrations avec la température, pour les différents systèmes dont l’équilibre a été étudié dans les trois premiers chapitres, sont en accord avec la quantité de chaleur absorbée dans la transformation de ces systèmes Cette étude permettra de tirer quelques conclusions générales pour la conduite de sels autres que le chlorure de calcium.
En laissant de côté les systèmes qui ne renferment pas la phase gazeuse, il y a à distinguer trois formes d’équilibre: 1°. deux hydrates et vapeur d’eau; 2°. dissolution non saturée et vapeur d’eau; 3°. dissolution saturée en pré- sence de sel non-dissous et de vapeur d’eau. Examinons successivement ces trois cas.
L Equilibre entre deux hydrates et la vapeur d’eau. Je n’ai que peu de mots à dire sur cette forme d'équilibre, parce que la mesure des tensions de tels systèmes, formés de CaCl, et de H,0, n'était pas le but principal de mon étude.
On sait que la mesure des tensions d’hydrates salins n’avait pas donné de résultats satisfaisants avant l’année dernière. Les recherches de M. Frowein !) ont alors démontré pour plusieurs sels, non seulement que l’on peut atteindre des valeurs concordantes pour ces tensions, mais surtout que
1) Zeits. Physik. Chemie, 1, 5 et 362.
ve Lys EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 287
la variation des tensions avec la température s'accorde en- tièrement avec la chaleur de combinaison de l’hydrate infé- rieur avec la quantité d’eau nécessaire pour former l’hydrate supérieur.
Soit Q cette quantité de chaleur, calculée pour 1 mol. d’eau liquide combinée ; r la chaleur interne de vaporisation d’une molécule d’eau, et p la tension des deux hydrates; la relation existe :
Qp 493 HT 498 ET D PORT
R étant la constante des gaz pour une quantité molécu- laire — 846. On en déduit :
dip _ Q+r 1: FL RÉ pr cet. (1
La tension de l’eau étant = x, on a également:
dirt FI£É d' r (2)
RS Sn 2 bn ou, par soustraction : da?
or 2 à Egaiop (9 T2 e e CULTUREL CRE LUR (3)
M. Frowein fixa l'attention sur le fait que, Q étant tou-
jours positif, il découle de la formule que le rapport LE doit é TT
s’accroître avec la température pour les systèmes envisagés, ceux de deux hydrates et de la vapeur d’eau.
Le désaccord des recherches antérieures avec cette règle s'explique aisément par l’influence énorme qu’exercent des inexactitudes, même petites, des valeurs de p.
J'ai déjà remarqué (p. 258) que les tensions mesurées des différents hydrates de CaCl, ne présentent pas non plus
une grande exactitude, surtout parce qu’il était impossible d'introduire dans l’appareil un mélange intime de poudre fine.
288 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
On ne peut donc espérer obtenir par le calcul, au moyen de ces tensions mesurées, la valeur, même approximative, de Q.
T’exactitude est toutefois assez grande pour que les valeurs
de Ê obéissent à la règle posée: elles s’accroissent avec la
température, comme on peut le voir dans les tables VII—X, p. 284 et 285, où ces valeurs sont insérées.
II. Tensions des dissolutions sans sel solide.
1. La première relation thermodynamique relative aux dissolutions salines date de 1858. M. Kirchhoff donna alors, pour la chaleur de dissolution d’un sel, une formule qui, si Q indique la chaleur développée par la formation d’une dissolution saturée de 1 mol. d’eau et de la quantité néces- saire du sel, prend la même forme que la formule (3) !).
En même temps, il donna une formule plus compliquée pour la chaleur de dilution d’une dissolution saline. Cette formule prend cependant la même forme, si l’on indique par Q la chaleur développée par l’addition d’une molécule d’eau liquide à une dissolution dont la quantité est assez grande pour que sa composition ne varie guère par cette addition.
Dans ce cas, la formule (3) donne donc un rapport entre
1) La formule de M. Kirchhoff (Pogg. Ann, 103, 200) est:
di Q = 1 RARES (4) Q=m De 111006 LIN CREER Q est ici la chaleur de dissolution à saturation d’une partie de sel en m" parties d’eau, R la constante des gaz, K = 423, « = 273, , = tension de la dissolution saturée, 7° = tension de l’eau pure. Si l’on change les R parties en molécules, R devient égal à 846, =.2108 = = chaleur de dissolution à saturation dans une molécule d’eau, soit = Q:; on obtient
donc:
di P_ PL
0. =32372 Moro Pen cteUPert (3)
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 289
DS
la variation de la tension d’une dissolution à concentration constante et la chaleur de dilution avec l’eau liquide.
La formule (3) ou (5) n’est exacte que si 1°. les lois de Boyle et de Gay-Lussac valent pour la vapeur d’eau, et 2°. si le changement de volume est pris égal au volume de la vapeur.
M. Kirchhoff tire la conclusion, que la valeur du rapport
P_ doit s’accroître avec la température, si la dilution déve- TT
loppe de la chaleur. Pour verifier sa formule, il a calculé les tensions de dissolutions de Æ,80, !), en se basant sur les chaleurs de dilution déterminées par M. Thomsen. Les tensions calculées ne s'accordent avec les valeurs mesurées par Regnault, que pour les dissolutions étendues.
2. Dans le cas des dissolutions salines, la formule fut bien- tôt révoquée en doute, parce qne Wüllner ?) trouva pour
le rapport - une valeur constante à toutes les températures
chez plusieurs sels, quoique la chaleur de dilution des dis- solutions employées ne fût pas nulle.
Dans les derniers temps *), M. Emden a publié une longue série d’observations sur les tensions de dissolutions non sa- turées; ces observations conduisent encore au résultat que
le rapport P veste constant entre 20° et 100° pour toutes les TT
dissolutions examinées.
M. Arons “‘) a tâché de faire disparaître ce désaccord avec la théorie, en substituant pour la formule pv = RT, dans le cas de la vapeur d’eau, la formule de Clausius. Le rapport p
— peut alors rester constant sans que la valeur de Q soit nulle. TT
1) Pogg. Ann., 104, 612. 2) ” 7 105, 89, 3) Wiedem. Ann., 31, 145. 4) " " 25, 408.
290 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Le résultat de son calcul pour les dissolutions de NaA4z:0, ne s'accorde cependant qu’assez mal avec les chaleurs de dilution empruntées à Thomsen.
M. Helmholtz !), toutefois, montra combien il est difficile d'obtenir des observations exactes des tensions de dissolu- tions salines à de basses températures, et comment une erreur constante, quoique petite, influe notablement sur le rapport
. : tandis qu’au contraire la déviation de la loi de Boyle-Gay
Lussac peut être entièrement négligée. M. Tammann ?), enfin, d’après ses observations récentes, conclut à la probabilité de la loi de Kirchhoff, sans en fournir cependant des preuves décisives.
Je pense avec M. Helmholtz, que le désaccord entre les expériences et la formule de Kirchhoff ne peut être attribué qu'à la défectuosité des expériences; et, comme cause nou- velle, j'indiquerai le fait, qu’on n’a pas assez varié la tempé- rature et surtout la concentration des dissolutions étudiées.
3. Pour le cas spécial des dissolutions de CaCl, la même incertitude régnait jusqu’à ce jour. Toutes les dissolutions connues de ce sel donnent une valeur positive pour la chaleur de dilution. Cependant les recherches de M. Emden *) ne montrent pas avec certitude un accroissement de la valeur
1) Wiedem. Ann , 27, 508. 2) Mémoires Acad. Pétersbourg, T. 35, No. 9, 157. Les premières expé- riences de ce savant étaient en partie en désaccord avec cette loir.
S } LC: Valeurs de À Parties de CaCl? 12,55 45,10 49,75 20,21 20° 0.935 0,910 0,880 0,877
950 0,932 0 991 0,884 0,881
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 291
de . avec la température entre 20° et 95°, pour les disso- lutions qui contiennent de de 12,5 à 20 parties de CaCl, sur .100 p. d’eau. Les expériences de M. Bremer '), entre 15° et 68°, sur les dissolutions contenant de 7 à 24 parties de CaCl,, montrent tantôt un accroissement, tantôt une diminution de cette valeur. Seules les premières expériences de M. Tammann ?) accusent un tel accroissement entre 37° et 100° pour les dissolutions contenant de 8 à 30 parties de CaCl,. Mais la valeur de ces expériences est rendue douteuse par l’auteur lui-même dans sa dernière publication *).
4. Mes observations sur les tensions, communiquées dans le Chapitre III, fournissent maintenant les données qui peu-
, . } vent démontrer l'accroissement de la valeur de 4 avec la JE
température pour plusieurs concentrations de la dissolution, plus fortes que celles qui ont été employées par les auteurs nominés. Les séries ITb, ITTIb, et IVb comprennent des ten- sions de dissolutions sans sel solide et à compositions con- stantes et connues; il n’y a plus qu’à calculer les valeurs de ta 1 HLA en employant ies tensions connues de l’eau. En outre, les courbes de tension des dissolutions saturées des différents 1) Rec. etc., VI, 136, tableau. 2) Wiedem. Ann. 24, p. 523
Valeurs de _ ; ee 0,945 0,900 0,888 0,782 qu ll 0,967 0,930 0,915 0,810 Parties de CaGlo | 8,04 14,34 16.81 30,19
3) Mémoires Pétersbourg, T. 35, No. 9, page 4.
299 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM ÉTUDE
hydrates fournissent encore plusieurs valeurs pour des dissolu- tions de composition connue, valeurs que j'ai comparées aux tensions déterminées par M. Tammann (second mémoire) à 100° pour la même concentration, et au point d’ébullition cherché (pour cette même concentration) dans les tables de M. Legrand et de M. Gerlach (qui ne diffèrent pas de plus de 2 degrés lorsque les concentrations ne sont pas trop fortes). P
J'ai réuni ces valeurs et les valeurs calculées de dans
les tables suivantes, où j'ai désigné les nombres empruntés à M. Tammann par 7, ceux de M. Legrand ou de M. Gerlach par LG.
Conc. = 280,1 | Conc. =1925| Conc. = 158 | Conc, =130 1 Conc = 102
P P P P P : 1 P. 11 -4 | BP P: GE 4 P- - Le P: FER | T P. rs 4602! 570/0423 1359 420 |0178| 90°! 90 10,171] 45°41,5 | 0,162! 30°! 6,6! 0,209 1652! 651/0,1235H 409 499 | 0,181] 959! 114 |0,18 470°| 751, 0,1245/150° 682 | 0,190H00°| 152 | 0,20 1809! 980,0,127 54° 760 |0,1911146° 760 | 0,236/138°, 760! 0,296] 302760 0,374 19021310 0,139 | LG LG LG LG . Conc. = 72 Conic'—= 5 + : v ’ 1 2: 180 5,4 0,333 —400 0,97 0,431 4002 T 349 0,460 400° T 44% | 0,584 120 LG 760 0,510 114 LG 760 0,618 |
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 293
Cec tables démontrent l'accroissement de la valeur de
JL avec la température, pour des dissolutions dont la concen- TT
tration varie de 55 à 280 parties de CaCl, sur 100 parties d’eau. Ce résultat est donc d'accord avec la valeur positive de la chaleur de dilution de tous ces liquides. comme l'exige la formule de M. Kirchhoff. Une vérification numérique n’est pas encore possible, parce que ces quantités de chaleur n’ont pas été mesurées jusqu'ici.
Il n’y a aucun doute que les dissolutions moins concen-
N
trées n’obéissent également à cette loi. La vaieur de? ne TT
peut être indépendante de la température que pour les disso- lutions tellement diluées, que la chaleur de dilution devient négligeable; c’est-à-dire, pour une partie fort petite de la série de concentrations possibles.
5. J'aurais pu ajouter dans les tables précédentes les diminutions relatives des tensions, produites par 1 partie ou 1 molécule de CaCl, sur 100 parties ou molécules de 4,0; valeurs qui selon M. Wüllner ') seraient constantes pour les dissolutions de concentrations entre 7,5 et 80, si l’on fait le calcul, non pour CaCl,, mais pour CaCl, .6 H,0. Il va sans dire qu’on ne pourrait faire ce calcul pour les disso- lutions qui contiennent moins de 6 H,0, c’est-à-dire, pour la plupart des dissolutions qui peuvent exister. Il serait éga- lement inutile de faire un tel calcul en admettant CaCl, . 4 H,0 ou tel autre hydrate, ou même pour CaCl, anhydre. Aussitôt qu'on ne se borne plus à envisager des liquides de concen- trations fort peu différentes, on obtient dans tous ces cas, pour la diminution relative et moléculaire des tensions, des valeurs qui changent continuellement avec la concentration, et qui démontrent de la manière la plus décisive la futi- Hté de l’opinion, qu’on pourrait de cette manière découvrir
‘) Poggend. Aunalen, 110, 574,
294 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM ÉTUDE
quels complexes moléculaires il faudrait admettre dans la dissolution. |
Les tensions des dissolutions très concentrées de CaCl., con- firment donc la conclusion, énoncée récemment par M. Tam- mann: que la loi de Wüllner n’est qu’une règle approxi- mative, entre des limites restreintes et pour des concentrations
fort petites.
IT. Tensions des dissolutions en présence de sel solide.
1. La formule de M. Kirchhoff (p. 288) pour les dissolu tions saturées n’a été appliquée qu’une seule fois. M. Mou- tier !) a calculé la chaleur de dissolution de ÆA420, à 0°, en employant les tensions déterminées par M. Wüllner. Il trouva pour @ une valeur s’accordant assez bien avec celle détermi- née par M. Person. Encore, la dissolution considérée n’était- elle pas entièrement saturée. k
M. Tamman, à la suite d’un grand nombre d’expériences,
compare le changement de la valeur de P avec la ten péra- TT
ture et la chaleur de dissolution à saturation du sel. D’après
la formule
dE px
RAR D dt 2 T?
le rapport P_ croît avec la température pour les sels qui se TT
dissolvent avec dégagement de chaleur; dans le cas contraire, il diminue lorsque la température s'élève. Dans son premier mémoire M. Tamman aboutit à la conclusion, que parmi les trente-huit sels étudiés, qui se dissolvent avec absorption de
chaleur, il n’y en a que onze pour lesquels le rapport P TT
1) Ann. Chim. Phys, 4], 28, 515.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 295
‘ diminue lorsque la température s’accroît, conformément à la formule. Dans son second mémoire !), l’auteur trouve une con- cordance beaucoup plus grande, en considérant les chaleurs de dissolution des sels anhydres, qui sont positives pour plu- sieurs de ces sels, tandis que les chaleurs de dissolution des hydrates employés étaient négatives.
Mais cette manière d’opérer est entièrement inadmissible, et les conclusions nouvelles sont sans aucune valeur; car il faut naturellement considérer la chaleur de dissolution de l’hydrate même qui se trouve au sein de la dissolution dont on veut étudier les tensions. C’est la faute trop souvent com- mise de ne pas faire attention à l’état d’hydratation du sel qui est en équilibre avec la dissolution.
Les premières conclusions n’ont cependant pas une valeur plus grande, car en réalité M. Tammann n’a déterminé pour aucun sel les tensions des dissolutions saturées, mais il a étendu à ces dissolutions saturées le résultat obtenu pour la
valeur de 2 chez les dissolutions concentrées. Or le postulat, TT
que la variation du rapport £ avec la température aura le TT
même signe pour les dissolutions concentrées que pour les
dissolutions saturées, n’est point du tout évident. Même si
lon part d’une dissolution saturée à une certaine température,
il y a cette différence fondamentale, que dans le premier cas on considère la variation du rapport Li la concentration res- TT
tant constante ; tandis que dans le cas où le sel non dissous se trouve au sein de la dissolution, on considère la variation de ? avec la température, la concentration du liquide chan- TE geant en même temps. Les tensions, communiquées au Chapitre ITT, des dissoluti- ons de CaCl, saturées d’un des hydrates nommés, forment
——
1) L.c., page 162. ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. . 20
296 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
la première série d'observations pour les dissolutions saturées : d’un sel. Nous verrons que pour toute la courbe de l’hydrate
CaCl, .6 H,0 le rapport 1° diminue quand la température TT
s'élève, en accord avec la valeur négative de la chaleur de dissolution de cet hydrate; tandis que sur les courbes de ten-
sions des dissolutions des autres hydrates le rapport P tantôt TT
diminue, tantôt s'accroît avec la température.
Les conclusions défavorables de M. Tammann ne peuvent donc être acceptées. Le premier sel étudié, CaCl, .6 H,0, donne, pour sa dissolution saturée, des tensions qui s’accor- dent — même numériquement — avec la formule théorique,
2. Récemment M. Duhem !), se fondant sur les énoncés erronés de M. Tammann, avait entrepris une révision de la formule employée par M. Moutier pour la chaleur de dis- solution des sels, formule que M. Duhem envisage comme étant déduite de la formule de M. Kirchhoff pour la chaleur de dilution des dissolutions. Or, tel n’est pas le cas. La formule qui à servi de point de départ à M. Moutier est la même que celle donnée par M. Kirchhoff, non pour la cha- leur de dilution, mais pour la chaleur de dissolution du sel solide. M. Duhem se trompe donc, s’il croit que sa cri- tique laisse intacte la formule originelle de M. Kirchhoff.
L'existence d’un désaccord de cette formule avec l’expérience ayant été réfutée ci-dessus, cette formule n'aurait besoin de rectification que pour le cas où les lois de Boyleet de Gay-Lussac n'auraient plus de valeur pour la vapeur d’eau. C’est cette cor- rection que M. Duhem a apportée dans la nouvelle formule, qu'il déduit de la théorie du potentiel thermodynamique. Elle a l’avantage d’être tout à fait générale, et de permettre, par de légères modifications, de calculer la chaleur de dis-
1) Ann. scient. Ecole Norm., (3) 4, 381, 1887, et Zeits. Phys. Chemie, II, 568, 1888.
? HUE 4 = ? 2. EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 297
solution dans des quantités d’eau plus grandes que celles nécessaires à la saturation, ou dans une dissolution pré- existante, et encore d’autres quantités de chaleur. Cependant, aussi longtemps que la relation qui existe entre la tempé- rature, la pression et le volume de la vapeur d’eau, n’est pas exactement connue, l’application de la nouvelle formule est impossible. En outre, elle contient la relation entre la température, la concentration et la tension d’une dissolu- tion quelconque, relation qui n’est pas connue dans la plupart des cas.
Pour les pressions qui ne sont pas trop grandes, et pour lesquelles l’écart de la vapeur d’eau, quant aux lois de Boyle et de Gay-Lussac, peut être négligé, la formule de Kirchhoff mérite donc encore la préférence, si l’on déduit
les valeurs de “ directement de la courbe des tensions sa-
turées, déterminées par l'expérience.
3. La formule de M. Kirchhoff à été reproduite sous deux formes différentes. D’abord, M. le Chatelier !) a donné une formule pour la tension de la dissolution d’un sel hydraté, en fonction de sa chaleur de dissolution, formule qui ne diffère de celle de M. Kirchhoff que par le fait, qu’il a introduit le nombre de molécules d’eau contenues dans l'hydrate sec. Comme 1l n'a employé cette formule que pour en déduire une autre, relative à la variation de la concentration des dissolutions saturées, je puis la laisser de côté, sauf à revenir
5
à cette dernière formule dans le chapitre dernier.
4, A peu près en même temps que M. le Chatelier, M. van der Waals ?) proposa sa formule générale pour l’équi- libre de trois phases de deux corps, une solide, une liquide et une gazeuse; cette formule embrasse, comme cas particu-
1) Compt. Rend. 100, 50, 1885. 2} Séance de l’acad. royale d'Amsterdam du 28Fevr. 1885, Rec, etc. IV,135. 20*
9298 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
lier, l’équilibre entre un sel, sa dissolution et la vapeur d’eau.
Le mérite spécial de cette formule est de conduire à la découverte de trois branches pour la courbe (p, t) des équi- libres mentionnés. Ce résultat a été atteint par l'introduction dans la formule des concentrations des phases solide et li- quide, et par une division propre de la quantité de chaleur qui entre en ligne de compte.
J'ai envisagé déjà en général, à la fin du Chapitre III, les courbes des tensions des différents hydrates de CaCl,, pour voir quelles branches de la courbe générale voyez fig. 8) étaient réalisées dans cette étude.
Il reste maintenant à établir à quel degré la direction de ces courbes se trouve en accord avec la formule thermo- dynamique. On pourrait, à cet effet, appliquer aux hydrates salins la formule employée antérieurement !) pour les hy- drates de gaz; mais je crois qu’il est préférable de la déduire de nouveau pour ce cas spécial.
Envisageons, par exemple, un hydrate CaCl, . c H, O au sein de sa dissolution saturée, de la composition CaCl, = H, 0. Supposons, comme c’est le cas ordinaire (voyez p. 262), x > e, c'est-à-dire, prenons des dissolutions appartenant à la branche IT (Ila ou IIb) de la courbe des tensions.
Soient p la tension et { la température. Nous admettons pour la vapeur d’eau les lois de Boyle et de Gay-Lussaec, soit: pv = RT, formule dans laquelle À — 846 pour une quantité moléculaire.
Soit Q,. la chaleur de fusion d’une molécule CaCl, .cH, 0;
soit Q° la chaleur nécessaire pour expulser, sous forme de
vapeur, 1 mol. de H,0 d’une dissolution CaCl, == c H, 0, de sorte que celle-ci change en CaCl, := x H, 0.
Alors la chaleur nécessaire pour transformer 1 mol. CaCl, x H,0 en 1 mol. CaCl, .c H,0 et (x — c) mol. de
1) Rec. etc. V, 339
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 299
vapeur d’eau est égale à: 493 x [(x — c) Q — Q,.] KGM. Or, d’après la relation thermodynamique r iQ
dt dd on obtient, en négligeant, comparativement au volume de (4—c) mol. de vapeur, le changement de volume de la dissolution :
dp, T6) = Qrus PÆ = 193 | PT aa Etes ; dt v (t — €) ou, en substituant pour le volume d’une molécule de vapeur: __846T ——— p ,
dlp ES (x x" e)Q, à Oius
Te RE Me |
Dans cette formule !}, le numérateur représente la chaleur nécessaire pour expulser (x —c) mol. de vapeur d’une dis- solution, qui dépose alors 1 mol. d’hydrate. Cette quantité est donc aussi égale à la chaleur développée par la dissolution d’une molécule d’hydrate au moyen de (x — ç) molécules de vapeur.
ed Gr
RE VENNErEE
L’ expression ( TT ins représente: la chaleur né-
cessaire pour la vaporisation d’une molécule d’eau de la dis- solution saturée, ou bien la chaleur développée par la for- mation d’une dissolution saturée au moyen d’une molécule de vapeur (de la tension p) et de la quantité de sel néces-
1 3 saire Mes molécules }).
1) La formule est ici plus exacte que dans le cas des hydrates de gaz, parce qu'elle néglige alors la vapeur d’eau dans le gaz, qui ne sera pas toujours très petite, tandis que la quantité de CaCl, dans la vapeur est sans doute entièrement négligeable,
300 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
On peut tirer de l’équation (6) les conclusions suivantes. Pour les températures peu éloignées du point de fusion de l’hydrate, la valeur de x différera peu de c et (x— c) sera fort petit. La chaleur de fusion sera alors plus grande que la chaleur d'absorption de (x—c) molécules de vapeur et le
numérateur sera donc négatif, La valeur de e est donc aus-
si négative. On a la branche Ila de la courbe générale (fig. 8).
À mesure qu’on s'éloigne du point de fusion et que la différence (x — c) augmente, le premier terme du numérateur devient de plus en plus grand, et la valeur négative du numé-
rateur et de = de plus en plus petite.
Elle deviendra zéro au moment où (x —c) Q —Q,. C’est
ce qui arrive au point © de la L:co pps; où celle-ci a une tangente horizontale.
À partir de ce point, la valeur de x croissant toujours à mesure qu'on s'avance vers des températures plus basses, le numérateur devient positif, ce qui donne une valeur positive
pour . . On passe sur la branche IIb, (O0B) de la courbe.
Si nous supposons au contraire ææçC, et que nous en- visagions donc les dissolutions saturées, qui contiennent moins d’eau que l’hydrate (comme elles se présentent chez CaCl, .6 H,0), la formule (6) se transforme en:
dip _(C—2)Q + 0.
LE pole, af HA ei NYC SRE dt 2 T'(c— x)
Le numérateur est ici toujours positif, représentant la cha- leur nécessaire pour la fusion de 1 mol. d’hydrate et l’ex- pulsion de (c— x) moi. de vapeur. C’est le cas sur la branche I (CD) de la courbe.
Je rappelle que la courbe des tensions pour la dissolution saturée de CaOl, .6 H,0 présente les branches I, Ila, Ib; les courbes pour les deux hydrates à 4 H,0 présentent seu-
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 301
lement la branche IIb; celle pour CaCl, .2 H,0, la branche ITb et une partie de Ila; celle pour CaCl, . H,0, seulement la branche ITb (voyez p. 263 et 264 et fig. 6 et 7).
5. Il convient maintenant de vérifier autant que possible les formules (6) et (6a). Commençons par (6).
Cette formule était fort commode pour l’application au cas des hydrates de gaz, la chaleur de fusion de l’hydrate et les chaleurs d'absorption du gaz dans l’eau jusqu’à la con- centration désirée pouvant être déterminées directement. Il n’en est pas de même pour le système d’un sel et de l’eau. La plupart des hydrates de CaCl, ne peuvent entrer en fusion sans décomposition, et la mesure de la chaleur d’ab- sorption de la vapeur d’eau dans une dissolution saline ne peut pas être effectuée facilement et n’a été faite pour aucun sel.
Il est donc préférable de diviser le numérateur des équa- tions en d’autres facteurs, qui soient plus faciles à déter- miner. On peut p. e. se représenter que la transformation de 1 mol. d’hydrate solide et (x —c) moléc. de vapeur en 1 mol. de dissolution s’accomplisse en deux phases: con- densation de (x — c) moléc. de vapeur d’eau, et dissolution de 1 mol. d'hydrate dans l’eau liquide. Or, la dernière opéra- tion n'étant pas réversible, on ne peut pas égaler la quantité de chaleur dans l'équation (6) à la somme de ces deux quantités, parce que le travail extérieur n’est pas égal dans ces deux cas. Il vaut mieux changer la formule (6), de telle sorte que le numérateur n’exprime que le changement
d'énergie interne. En employant les signes Qet O,. dans ce dernier sens, elle devra être transformée en: T dp Las (&— €) Qi — One dlp_1 (x —c) de (C7
ee
Om 0 TU RUUT
AUÛT)
La différence d'énergie interne entre (x — c) mol. de va- peur et 1 mol. d’hydrate, d’un côté, et 1 mol, de dissolution
302 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
de l’autre côté, étant indépendante de la manière dont on transforme un système dans l’autre, le numérateur de (7) peut maintenant être remplacé par la somme de la chaleur interne de dissolution de 1 mol. d’hydrate dans (x — c) mol. d’eau et de la chaleur de condensation de (4-— c) mol. de vapeur.
La chaleur interne de dissolution peut être égalée à la chaleur totale, que l’on détermine dans les expériences ther- mochimiques: le travail extérieur étant presque nul dans
cet acte. Nous la désignerons par Q.
Soit la chaleur totale de condensation d’une mol. de va- peur d’eau = q. Le travail extérieur gagné dans cet acte est
égal à pv—= AT KGM, ou ee calories = 2 T calories.
La chaleur de condensation interne pour 1 mol. d’eau est donc g9—2T, et le numérateur de l’équation (7) peut être remplacé par:
@œ@—c)(qg—2T)+@,
où q a la valeur 18 x (606.5 — 0.695 6). L’équation (7) devient donc, par substitution de la nou- velle valeur pour l’accroissement de l'énergie interne:
dlp
Œ +G—-)Gq—27+% _@—Jg+X 1
— 1 T 2, T2 (& —(c) 2 T?'(x — 6) Nous allons maintenant vérifier cette équation pour les hydrates de CaCl,, en nous servant des déterminations ther- mochimiques de M. Thomsen.
6. Application de la formule (8) à l’hydrate CaCl, .6 H,0. M. Thomsen (Thermoch. Unters. III, 109) donne les valeurs suivantes pour la chaleur de dilution des disso- lutions de CaC!, :
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 303
(CaClo SX æ& HO, y H2 0) — Q.
x \ Q 10 90 + 2355 cal. 20 80 Gr 50 50 190 07 50 150 290 »
En outre, on trouve, p. 159, la chaleur de dissolution de l’hydrate solide un peu humide : (CaCl, . 6,07 H, 0,194 H, O0) — — — 4340 cal. Toutes ces valeurs ont été déterminées à 18° C.
Nous allons calculer, au-moven de ces données, les chaleurs de dissolution de l’hydrate solide avec différentes quantités d’eau. D’abord, il est possible de corriger la dernière valeur. La dissolution saturée à 18° ayant la composition CaCl, :< 8,7H, 0, on à:
38 (CaCl, . 6,07 H, 0) = 37 (CaCl, .6 H,0)+ Call, =<8,7H, 0.
En admettant 2800 cal. pour la chaleur de dilution de cette dernière dissolution jusqu’à 200 H,0 (valeur qu’on déduit facilement, par une légère extrapolation, de la table I sui- vante ou plutôt de la courbe qui représente ces valeurs), on trouve pour la valeur de (CaCl, .6 H,0, 194 H,0): — 4530 calories. En admettant encore pour la chaleur de fusion de CaCt, .6 H,0 la valeur de M. Person: 40.7 cal. pour l’unité de poids, — 8913 cal. pour une molécule d’hydrate, on aurait donc pour la chaleur de dilution d’une molécule d’hydrate fondu :
(CaCt, + 6 H,0,194 H,0) = — 4530 + 8913 — + 4383.
En utilisant toutes ces données, on peut construire les deux tables suivantes: |
304 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Table I. Table II. Chaleurs de dilution: Chaleurs de dissolution : CaCls © & H30, (200 — x) H: 0. CaCls.6H30, (x—6)H3 0, x | Que 0 - | Qx 6 | 4383 6 — 8913 10 | 2519 10 — 7045 90 | 875 90 | 5405 90 290 20 | — 4890 100 | 160 100 | —24690 | 9200 | —_ 4530
La courbe AB (PI VII, fig. 10) représente les dernières valeurs, en prenant pour abscisses le nombre + des molécules d’eau dans la dissolution formée, pour ordonnées les chaleurs de dissolution de l’hydrate solide. L’axe des abscisses ne pou- vait être donné dans la figure, parce qu'il trouve sa place beaucoup au-dessus de la courbe.
La première valeur de la table IT n’est autre que la cha- leur de fusion de l’hydrate, qui doit être égale à la chaleur de dissolution dans O0 moléc. d’eau.
Les chaleurs de dilution de la table I, et en général toutes les chaleurs de dilution [ Cal, :::x H,0, (y—x) H, 0] peuvent être déduites également de cette courbe pour toutes les valeurs de x et y entre 6 et 200, en prenant la différence des or- données pour les abscisses x et y.
La courbe peut nous servir maintenant pour trouver la
DS
chaleur de dissolution à saturation. Prenons la température de 0°. La dissolution saturée à cette température a la com- position CaCT, 2: 10,37 H, 0. En prenant donc l’ordonnée pour x =10,37, on' trouve :
QT = (Call, .6 H,0,4,37 H,0)— — 6900 cal.
La courbe n'étant déterminée que pour la température de 18°, il faudrait appliquer encore une correction pour 18°. Je lai omise ici et dans la suite, parce que le nombre des don-
Le
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 305
nées sur lesquelles la courbe a été construite est si petit, que l'incertitude dans la grandeur des ordonnées intermédiaires est beaucoup plus grande que la valeur de cette correction. Appliquons maintenant l’équation (8):
(x — 0) = 10,37 — 6—4,37; q — 18 x 606,5; T — 273,
dip __ 4,37 x 18 x 606,5 — 6900 ire = 26. FERA 2 x 273: x 4,37 jo
? d , Pour comparer cette valeur calculée pour # avec l’obser-
vation, nous prenons les tensions telles qu’elles ont été mesurées
ap en mm. de bromure de naphtaline, la valeur de ee
étant indépendante de la mesure qu’on a employée.
La courbe BO, fig. 7, donne pour la température de 0° un accroissement de 1 millimètre de tension pour 1 degré, et la tension étant de 18 mm., He LE == 000.
(LME à
Dans la table suivante, je donne le résultat d’un tel calcul
pour différents points de la courbe BOC, fig. 7.
Q dip à EMI dt
calculé | observé 0° 148 | 59,5 |10,37 | 6900 + 47707, + 40807+9338 0,0626 | 0,055
| 400 139 | 65,0 | 9,49 7475) 37665! 30490| 8736 0,0545/0,047 \900 152 | 74,5 | 898 7575, 94390) 17145| 7520) 0,0438| 0,043 ns 62 | 820 | 7,52 7900! 16120 8220) 5408 0,0305/ 0,026 97° |64 | 86,5 | 7,3 —8100) 10580. 2480! 2200 0,0122| 0,012 |280 |645| 89,0 | 6,98 8950 9825) 1575) 1693. 0,0094| positif : 280,565 | 90,5 | 6,81 [—8340| 8550 + 210-+ 260 0,0014| + 0 29° |64,5| 92,5 | 6,67 8435) 7035, — 1400/- 2100/0042 | négatif Fi 64 | 95,5 | 6,46 |-8550| 4850 — 370080440045 | négatif
t p S x | Q% |(x—6)q
30° 61 102,7 | 6,00 |--8900 O |— 8900 00 ve
306 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Dans cette table, { désigne la température :
p la tension, en mm. de naphtaline bromée, du système CaCl, .6 H,0, dissolution et vapeur;
S la concentration de la dissolution saturée, en PATES de CaCl, sur 100 parties d’eau;
æ le nombre des Hotébules d’eau dans cette dissolution sur 1 mol. de CaCl,:
Q, la chaleur de dissolution à saturation d’une molécule CaCl, .6 H,0 en (x —6) mol. de H,0;
(x — 6) la chaleur de condensation de (7 — 6) mol. de vapeur d’eau ;
Q le numérateur de l'équation (8) = (x — 6) q + Q,;
Q x — 6 chaque molécule d’eau vaporisée.
la quantité de chaleur qui entre dans l’équation pour
L'accord des valeurs calculées et observées de = est fort
satisfaisant. Pour les températures au-dessus de 27°, je n'ai pas déduit cette valeur de la courbe expérimentale, parce que le changement de sa direction est alors trop rapide pour permettre d’en conclure avec quelque certitude le rapport
La température (28°.5) qui correspond au maximum de
tension, et qui indique le point de transition O entre les branches Ila et IIb de la courbe des tensions, coïncide ex- actement avec la température pour laquelle la chaleur de transformation du système devient nulle.
La formule de M. van der Waals se trouve donc com- plètement vérifiée, et le système de CaCl, .6 H,0 avec dis- solution saturée et vapeur d’eau fournit le premier exemple d’un système de deux corps en trois phases, qui montre en même temps les branches Ila et ITb !).
La branche Ila ne s'étend que jusqu’à deux degrés à peu près au-dessous du point de fusion. La cause en est évidente :
1) Voyez l'aperçu des exemples observés jusqu'ici p. 261.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 307 c’est la valeur considérable de la chaïeur de condensation de la vapeur d’eau, comparée à la chaleur de dissolution de l’hydrate. Une petite différence entre la composition du liquide et de l’hydrate suffit pour égaliser ces deux valeurs; et la quantité d’eau dans la dissolution croissant très vite au- dessous du point de fusion, la température est bientôt atteinte où la chaleur de transformation devient nulle.
Branche I de la courbe des tensions. Pour ap- pliquer la formule à la branche CD (fig. 7) de la courbe des tensions des dissolutions saturées de CaCt, .6 H,0, il faut transformer la formule (6a) d’une manière analogue à celle employée pour la transformation de (6) en (8).
Nous obtenons alors :
Ici (c—x)q est de nouveau la chaleur de condensation de (c — x) molécules de vapeur d’eau; mais Q, au lieu de la chaleur de dissolution de CaCl, .6 H,0 en (x — 6) mol. d’eau, désigne la chaleur de combinaison de (6—x) molécules d’eau avec CaCl, ::x H,0 + la chaleur de solidification du CaC1, 5:76 H,0 formé.
Si les chaleurs de dilution (table I) étaient connues pour des valeurs de x plus petites que 6, et qu’ainsi la courbe BA fig. 10 püût être poursuivie au-dessous du point 4, les ordonnées pour ces nouveaux points représenteraient la cha- leur de fusion de CaC1,.6 H,0+Ila chaleur d'expulsion de (x—6) H, 0 liquide. Cette ordonnée, prise positive, serait donc la valeur Q; pour les valeurs de x < 6, dont nous avons besoin. Cette valeur deviendra d’autant plus grande que x diffère plus de 6. Il en est de même pour le terme (c — x) g. Le numérateur
de (8a) est donc positif, et ainsi la valeur de “ et celle de
GP
Ti le sont également.
308 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
C’est le cas pour la courbe CD. La verification numérique, toutefois, est impossible, faute de connaissance des valeurs de Q; pour + <6. En outre, la courbe CD n’a été obtenue
qu’en liant les points C et D; elle n’est donc pas assez certaine.
7. Application à la courbe AB de la glace.
Comme 1l a été remarqué p. 263, la courbe pour la glace, en présence d’une dissolution de CaCl, et de la vapeur, peut être comparée, elle aussi, à la branche I de la courbe générale et par conséquent à la courbe CD pour CaCl, .6 H,0 !). Au point de vue théorique, on peut admettre l’existence de molécules CaCl, dans la vapeur; mais pratiquement cette quantité sera si minime, quon pourra dire que la trans- formation qui s’accomplit sous l’action de la chaleur n’est autre que la volatilisation de la glace pure. La courbe AB ne différera donc pas de la courbe des tensions de la glace seule, et la dissolution de CaCl, devra régler sa concentra- tion à chaque température d’après la tension de la glace.
La formule (8a), dans ce cas, ne peut donc trouver appli- cation pour le calcul.
8. Autre formule. La formule (8) peut être transformée dans la formule de M. Kirchhoff (p. 288), par la soustraction de la formule pour l’eau:
dr fl qi ARE
nm
1) Il va sans dire, que les branches [Ta et ITb ne peuvent exister dans ce cas, parce que le corps solide ne contient pas de CaCl,. La courbe de l’équilibre de la glace avec les dissolutions des gaz peut, au contraire, pré- senter ces deux branches, tandis qu’alors la branche I ne peut exister. J'ai déjà indiqué cette analogie entre la glace et un hydrate de gaz (Prec. des trav. chim., V, 380 etc.) Dans ces cas, on peut appliquer la même formule que pour les hydrates de gaz. Aussi la courbe d'équilibre est alors tout à fait différente de celle de la glace pure.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 309
: On obtient alors:
p a 2 | bu node A ADEE ARTE
NUS TPE
On aurait pu appliquer cette dernière formule, aussi bien que (8), aux dissolutions saturées de CaCl, .6 H,0. L’équa- tion (8) a toutefois l’avantage que le rapport entre p et t est déduit immédiatement de la courbe qui représente les tensions observées, et qu’elle fait voir ainsi les deux branches Ila et ITb.
La formule (9), par contre, a l'avantage de ne contenir dans le numérateur que la chaleur de dissolution à saturation. Sa valeur est négative pour tous les points de la courbe
BOC, et même la valeur négative de _. croît avec la
CURE. EE
température, comme on le voit aisément dans la table p. 305. Le rapport À doit donc diminuer aussi, et de plus en plus TT
à mesure qu'on s’avance d’une température basse vers le point de fusion.
Les rapports P ajoutés dans la table B IT des tensions, TT
page 283, le démontrent. Pour les dissolutions de CaCl,.6H, 0, ces rapports ont été représentés dans la fig. 11, en fonction de la température, par BH. On voit qu'ici il n’y a pas la différence des deux branches Il4 et IIb, qui se montrait dans la courbe (p, t)}, BOC fig. 7.
L'emploi de la formule originelle de M. Kïrchhoff n'aurait donc pas expliqué cette particularité, mise en lumière par mes expériences. C’est pour cette raison que je n’en ai pas fait usage pour la vérification théorique de la courbe des tensions.
L'application de la formule (9) démontre cependant, ce
310 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
que j'ai déjà relevé pg. 296, que la diminution de P_ avec TT
température croissante, sur la courbe BO, est en accord parfait avec la chaleur négative de dissolution de CaCt, .6
H,0; de même que l'accroissement du rapport P pour TT
les dissolutions sans sel solide (p.293) se trouva d’accord avec la chaleur positive de dilution de ces dissolutions. On a donc le droit de mettre de côté toutes les conclusions que M. Tammann avait tirées, d'observations relatives aux dissolutions sans sel solide, au sujet de la conduite des dis- solutions saturées.
Pour la branche I (CD) dela courbe (p, t) on déduit également :
P
dl SET x
FE bat LT ER : 4 1 : = (Ja) dt — 27T2(c—_x) |
D’après l’exposé pg. 307, il s’ensuit une valeur positive pour
Dre Pour la petite partie de la courbe qui est connue,
il y accord avec l'expérience, car on trouve dans les tables :
à29°,2, Z — 0,188 et à 30°,2, — 0,210.
) TT
9. Données thermiques pour les autres hydrates.
L'application des formules (8) et (9) aux autres hydrates de CaCl, ne peut pas aller aussi loin que pour l’hydrate à 6 H,0, faute des données thermiques nécessaires.
On ne possède que les valeurs suivantes de M. Thomsen (Unters. III, 160) pour les chaleurs de dissolution de quelques sels solides:
RÉ L'an nn CU
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 311
N° n |CaCl, nH20, (200—n)H20.
oo 17410 cal. II | 1.67 10800 III | 1.98 10036 IV | 2.75 6927 » V | 3.49 3752 y VI | 3.76 9971 y
Ainsi qu’il a été remarqué par plusieurs auteurs, M. Thomsen, en déterminant ces quantités de chaleur, à opéré avec des mélanges de deux hydrates, ou même (si la déshydratation n'avait pas été uniforme) de plus de deux. Il n’est donc pas permis de déduire les chaleurs de dissolution, pour les hydrates à nombres entiers de n, de la courbe qui représente les quantités de chaleur en fonction de n. En regardant les corps solides comme des mélanges de deux hydrates, deux . déterminations seraient suffisantes pour calculer ces valeurs pour deux hydrates définis. Ainsi, au moyen de IT et IT, on calcule :
Q — 12450. Q— 9990.
Si l’on considère IV, V, VI comme des mélanges de CaCl, .2 H,0 et de CaCl, . 4 H,0, et qu’on les combine deux à deux, on obtient des valeurs assez divergentes :
Q2% 10140, 9870, 8060. 1572, 12089 2979:
Il reste possible que la discordance provienne de ce que dans l’une des expériences le mélange a contenu CaCl, .4 H,Ox, dans l’autre CaCl, .4H,08$. On voit de nouveau quelle incertitude règne sur toutes ces expériences, lorsqu'elles n’ont pas été faites avec des hydrates déposés de la dissolution.
Si nous admettons pour Q° la valeur 9990, qui est assez
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXII. | 21
312 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
certaine, parce que l'expérience IIT a été faite avec un hydrate qui ne différait que peu de 2H, 0, on déduit deIV,V, VI:
D .= 1890, 16119 2016.
La chaleur de dissolution de CaCl, .4 H,0 «x ou f reste donc incertaine de plus de 200 calories. En admettant comme valeur approximative 2000, on obtient, au moyen de la table I, p. 304: |
Table IIT.
Chaleurs de dissolution CaCl 0) 4H 2 0, (x—4)H 2 0,
eee
x Qi 6 __ 9383 10 — 55 90 + 4194 50 + 1710 100 + 1840 200 + 9000
Pour représenter ces valeurs, la courbe AB, fig. 10, peut encore servir; on n’a qu'à prendre un nouvel axe des ab- scisses, à 6530 divisions plus bas que l’axe pour les chaleurs de dissolution de CaCl, .6 H,0. Cet axe est indiqué dans la figure 10. On y voit que la chaleur de dissolution devient nulle pour æ = 12 environ; donc:
(CaCl, .4 H,0, 8H,0)=0.
Pour les chaleurs de dissolution des hydrates à 2 4,0, à 1 H,0, et du sel anhydre, on calcule:
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. .. 96
Table IV. Table V. Table VI. Chaleurs de Chaleurs de Chaleurs de dissolution : dissolution : dissolution : CaCl,.2H20,(x—2)H,0. CaCls Ho 0x1) 0. CaCl:, xH20. x Q@ x Q x | Q 6 +- 5607 6 + 8067 6 + 13027 40 7475 40 9935 10 14885 20 9415 20 11575 20 16535 50 9700 50 191460 90 47120 100 9830 400 12290 400 47250 200 9990 200 142450 200 174140
Ces données, qui n’ont de valeur que pour la température de 18°, peuvent encore être représentées par la courbe AB, fig. 10, si l’on prend de nouveaux axes d’abscisses situés respectivement à 7990, 10450, et 15410 divisions plus bas que l’axe pour CaCl, . 4 H,0.
En comparant les valeurs des tables II— VIT on voit:
que la chaleur de dissolution de CaCl, .6 H, 0 a une valeur toujours négative, même pour la plus grande quantité d’eau ;
que la chaleur de dissolution de CaCl, . 4 H,0 est négative pour des quantités d’eau plus petites que 8 molécules, et devient positive pour les quantités d’eau plus grandes.
Pour les hydrates à 2 H,0 et à 1 H,0 et le sel anhydre, cette chaleur ne sera négative que pour des quantités d’eau fort petites et inconnues.
10. Application de la formule (9) aux | hydrates inférieurs.
L'hydrate CaCl,.4H,0u. — La dissolution saturée contient entre 29°,8 et 45°,3 : 6,1 à 4,73 H,0. Selon la table IT, la chaleur de dissolution est négative pour x = 6 et
p.21
314 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
sera beaucoup plus négative pour x — 4,73. Selon la formule
(9), la valeur du rapport doit done diminuer si la tempé- TT
rature s'élève. C’est le cas pour les dissolutions saturées de CaCl, .4 H,0 «, même à partir de 15°, la plus basse tempé- rature à laquelle la tension de cette dissolution ait été me- surée, (voir la table Brrr, p. 283). La concentration à 15° étant probablement (courbe HG, fig. 2) de 87 parties, la dis-
solution renferme environ 7,1 H,0. On déduit de la courbe
AB, fig, 10, que la chaleur de dissolution est encore négative :
D 170. Il y a donc concordance qualitative parfaite entre la for- mule (9) et les tensions observées.
Les valeurs de ? en fonction de la température sont re-
présentées par la EP Ube He; AL L’hydrate CaCl,.4H,06. — Les dissolutions contien- nent entre 20° et 38°,4:5,93 — 483 1,0. La chaleur de dissolution sera négative et croissante avec la température, ce qui est d'accord avec le décroissement de ? indiqué par la courbe DPF, fig. 11, construite d’après la ble Biv, p.283. L’hydrate CaCl, .2 H,0. — La valeur du rapport F,
calculée pour les tensions des dissolutions de cet hydrate, s'accroît de 0,155 à 0,191 entre 40° et 95° environ, pour diminuer ensuite continuellement (voir courbe KL, fig. 11, et table B v). Il faut donc nécessairement que la chaleur de dis- solution Q soit positive et diminuante de 40° à 95, environ nulle à 95°, et ensuite négative et croissante jusqu'à 175°. A 95° la dissolution saturée a la composition CaCl, :: 4 H,0 environ. Les chaleurs de dissolution @% seraient donc négatives pour les valeurs de x entre 2 et 4, et positives ensuite. Les expériences n’ont pas fait connaître encore ces quantités pour des valeurs de x au-dessous de 6; mais on voit la possibilité qu’elles deviennent négatives, si x est assez petit.
Et da: *
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 91
_L’hydrate CaCl, . H,0.— Les valeurs de - , calculées
pour la dissolution entre 175° et 205°, sont à peu près égales, quoique diminuant un peu (table B vi). On conclut donc que la chaleur de dissolution est négative, mais serait bientôt nulle, si l’on pouvait, à une température plus basse que 175°, obtenir des dissolutions contenant plus de 2,07 molécules H,0 — composition au point L. La chaleur de dissolution prendra une valeur négative plus grande, à mesure qu’on procède de ce point aux températures plus élevées. où la quantité d’eau dans la dissolution diminue.
Les chaleurs de dissolution de la table V sont toutes positives, parce qu'elles se rapportent à la formation de dissolutions plus diluées que celles qui correspondent à la courbe LM des tensions.
Le CaCl, anhydre. — Les tensions de ces dissolutions
ne sont pas connues. On peut cependant prévoir que le
rapport P_ sera (comme dans le cas de CaCl, . 2 H, O) à partir TT
a
de 260° (température à laquelle le sel anhydre apparaît) d’abord positif, ensuite négatif. En effet, le nombre de molécules d’eau, nécessaire pour donner une valeur positive à la chaleur de dissolution, est d'autant plus petit que l’hydrate lui-même contient moins d’eau. Pour l’hydrate à 4 4,0 ce nombre était d'environ 8 mol., pour l’hydrate à 2 H,0 d’environ 2 mol., pour l’hydrate à 1 H,0 d'environ 1 mol. Pour le sel anhydre, la chaleur de dissolution sera donc sans doute positive à partir d’une quantité d’eau ajoutée 1 mol. Or, à 260° la dissolution renfermant probablement 1,8 1,0, la chaleur de dissolution Q}\'# sera sans doute positive, et ainsi die
TT dt | En poursuivant la courbe des tensions pour les dissolu-
sera également positif.
tions du sel anhydre, cette valeur pourra devenir négative
316 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE à mesure qu'on s'approche du point de fusion de CaCl,.
11. Application de l’équation (8) aux hydrates inférieurs.
L'application de l'équation (8) aux hydrates autres que CaCl, .6 H,0 ne peut être que très superficielle, faute des données thermiques nécessaires.
L’hydrate CaCl, .4H,0&. — La courbe GHK, fig. 7, montre qu’on à affaire encore à la branche IIb. La valeur (x — c)q + Q% doit donc être positive encore à 45°, bien que 9% soit déjà fortement négatif. Or, la valeur de q à 45° est égale à 18 (606,5 — 0,695 x 45) — 10354 calories; (x — €) = = 4,73 — 4 — 0,73, et (x — c) à = + 7560 calories. D’après la table IIT, on ne s’attend pas encore à une valeur négative aussi grande pour @j"°. La chaleur totale sera donc encore positive au point K, et le sommet de la courbe n’y est pas encore atteint.
L’hydrate CaCl,.4H,06$.—Ta différence (x—c) est un peu plus grande à 38° que pour l’hydrate &« à 45°. La proba- bilité est donc d’autant plus grande que la chaleur de trans- formation sera encore positive. Aussi la courbe EDF fait partie de la branche ITb.
L’hydrate CaCl,.2 H,0. — Comme nous l’avons déjà remarqué, la courbe KL indique au voisinage de 173° un commencement de la branche Ila, qui serait toutefois (ici comme chez l’hydrate à 6 A, 0) fort petite. La composition du liquide à 173° est Call, :: 2,8 H,0. Si le sommet de la courbe se trouvait à ce point, il faudrait que la chaleur de condensation de 0,3 mol. de vapeur d’eau à 173° = 2625 cal. fût égale à la chaleur (négative) de dissolution de CaCl, .2 H,0. Or, les données sur cette chaleur de dissolu- tion sont trop incomplètes (table IV) pour permettre l’épreuve.
L’hydrate CaCl,.H,0. — La légère diminution du
rapport P rend probable que la chaleur de dissolution n’est TT
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 317
encore que fort peu négative au point Z de la courbe LI. La chaleur totale de l’équation (8) sera très-sensiblement positive, et il n’est donc pas vraisemblable qu’on atteindra le sommet de la courbe avant 260°, où apparaît le sel anhydre.
La courbe ne représente donc que la branche ITb.
Le CaCl? anhydre. — D’après ce que nous avons remarqué ci-dessus, la chaleur de dissolution sera sans doute positive au commencement de la courbe pour les dissolutions de CaCl, à 260°. La chaleur totale de l’équation (8) sera donc d’autant plus positive, .-et la première partie de la courbe représentera la branche IIb. Il reste incertain si l’on pourra parvenir au sommet de la courbe et réaliser une partie de la branche Ila de cette courbe, parce qu’on ne peut rien prédire sur la manière dont l’eau se comporte vis-à-vis de CaCl, aux températures plus élevées que le point critique.
12. Revue générale des autres sels. Si l’on veut connaître les résultats généraux, qu’on peut déduire de l'application des équations (9) et (8) aux autres sels, il est nécessaire avant tout d'examiner ce qu’on sait des chaleurs de dissolution à saturation.
Or, les recherches étendues de M. Thomsen, et récemment celles de M. Pickering ‘), ne fournissent point de données à cet égard. D’ordinaire, on n’a déterminé que la chaleur de dissolution d’un sel dans 100 à 260 H,0, et quelques cha- leurs de dilution de dissolutions plus concentrées, mais pas même saturées à de basses températures. Si l’on avait déter- miné ces chaleurs de dilution en prenant pour point de départ le sel anhydre liquide, et qu’ainsi toute la courbe des chaleurs de dilution eût été connue, une seule détermi- nation de la chaleur de dissolution du sel anhydre et de chaque hydrate suffirait pour faire connaître — sauf correc- tion pour la différence de température — les chaleurs de
1) Journ. Chem. Soc., 1886 et 1887,
318 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
dissolution à saturation de tous ces sels pour chaque tem- pérature à laquelle une dissolution saturée est possible.
Maintenant que les chaleurs de dilution ne sont pas con- nues pour les concentrations fortes, les deux conclusions auxquelles M. Thomsen est arrivé n’ont aucune valeur pour les chaleurs de dissolution à saturation, quantités dont nous avons besoin pour l’application des formules (9) et (8). Les conclusions de M. Thomsen !) sont les deux suivantes:
,les sels anhydres qui se dissolvent avec dégagement de chaleur forment des hydrates”;
,les sels qui ne forment pas d’hydrates se dissolvent avec absorption de chaleur’?
L’insuffisance de ces règles, pour les dissolutions satu- rées, suit de ce que la chaleur de dissolution d’un sel an- hydre ou d’un hydrate doit nécessairement être négative, si la dissolution a lieu dans une quantité assez minime d’eau, parce que la chaleur de dissolution devient égale à la chaleur de fusion au cas où cette quantité d’eau est nulle — comme je l’ai indiqué pour les différents hydrates de CaCl,.
Je crois cependant, qu’en faisant usage de ce point de vue et des recherches de M. Thomsen, on peut arriver à un aperçu de la valeur des chaleurs de dissolution à satura- tion, qui fera disparaître la séparation rigoureuse entre les deux catégories de M. Thomsen.
lière Catégorie: Sels qui forment des hydrates. — Comme résultat général des recherches, on peut dire que pour les dissolutions des sels de cette catégorie la chaleur de dilu- tion s'accroît de la plus grande concentration employée jusqu’à la plus petite. Il y a donc beaucoup de probabilité que, si l’on pouvait partir du sel anhydre liquide, le déve- loppement de chaleur serait continu pour des quantités crois- santes d’eau, et qu’ainsi la courbe de dilution, représentant ces quantités de chaleur en fonction du nombre æ des mo-
1) Thermoch. Unters. III, 29.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 319
lécules d’eau, aurait la forme indiquée dans la fig. 12 (PI. VID), commençant à l’origine. Quand on part d’une dissolution quelconque, les chaleurs de dilution sont trouvées, dans cette figure, en traçant un nouvel axe des abscisses par le point de la courbe qui correspond à la concentration du liquide. La figure indique que la courbe s'étend toujours au-dessus de ces axes, et qu’ainsi ces chaleurs sont toujours positives.
Il y a cependant quelques sels de cette catégorie (certains nitrates, comme Zn (4:z0,),, Cu (A20,),) dont la chaleur de dilution devient négative, si l’on part de dissolutions au-delà d’un certain degré de dilution. Dans ce cas, la forme de la courbe entière, en partant du sel anhydre liquide, sera celle de la fig. 13. Il me semble fort probable que c’est là la forme générale de la courbe, mais que pour certains sels la partie descendante ABC ne commence qu’à des dilutions si grandes, qu'on ne peut plus mesurer exactement les quantités de chaleur qui entrent en jeu. La figure indique qu’il y aura des dissolutions pour lesquelles la chaleur de dilution est toujours positive; d’autres (plus étendues) pour lesquelles cette chaleur devient négative, si la quantité d’eau ajoutée dépasse une certaine valeur; et encore d’autres (toutes celles dont la dilution est plus grande que celle qui correspond au som- met À de la courbe) pour lesquelles cette chaleur est tou- Jours négative.
Si l’on veut maintenant indiquer, par les figures 12 ou 13, les chaleurs de dissolution du sel anhydre ou de chacun de ces hydrates, on n’aura qu’à tracer pour chacun de ces Corps un nouvel axe des abscisses, à une hauteur au-dessus de OX telle, que pour le sel anhydre cette distance cor- responde à sa chaleur de fusion. Pour un certain hydrate, cette chaleur de fusion devra correspondre à la distance de son axe Jusqu'au point de OABC qui correspond au nombre des molécules d’eau dans cet hydrate. En général, ces axes nouveaux seront situés d'autant plus haut que le nombre des molécules d’eau dans l’hydrate est plus élevé. Il dépendra
320 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
donc entièrement de la position de ces axes, quelles parties de la courbe se trouveront au-dessus et au-dessous.
Pour le sel anhydre, aussi bien que pour tous les hydra- tes, une partie de la courbe sera nécessairement située au- dessous des axes correspondants, et ainsi la chaleur de dissolution, dans une quantité d’eau suffisamment petite, sera toujours négative; mais, du reste, bien des cas différents peu- vent se présenter.
Il se peut que ces chaleurs restent négatives même pour les dilutions les plus grandes, si la courbe entière se trouve au-dessous de l’axe. Il se peut que la chaleur de dissolution devienne positive, si l’eau de dissolution surpasse une cer- taine quantité; et il se peut encore (si la courbe fig. 13 représente les chaleurs de dilution) que cette valeur devienne de nouveau négative pour des quantités d’eau encore plus grandes.
La même diversité se rencontrera donc aussi pour les chaleurs de dissolution à saturation. On n'aura qu’à cher- cher la valeur de Q* pour le nombre de molécules présentes dans la dissolution saturée à telle ou telle température, et à appliquer la correction nécessaire à cause de la différence de cette température avec celle pour laquelle la courbe 0ABC a été déterminée. Si cette différence devient considérable, il se peut que les modifications que la courbe éprouve par suite de ces réductions ne soient plus négligeables; mais cela ne nuit pas à la généralité des conclusions tirées.
Si l’on accepte UABC comme la forme générale de la courbe des chaleurs de dilution, les chaleurs de dissolution à saturation d’un sel anhydre, ou de chacun de ses hydrates, peuvent être négatives pour toutes les dissolutions saturées possibles, ou d’abord négatives pour les concentrations fortes, et ensuite positives pour les dissolutions moins concentrées, ou encore négatives pour des concentrations encore moins grandes.
Il va sans dire que, vu la grande diversité dans les limites
At at amet : :
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 321
des concentrations qui peuvent exister pour les sels différents ou leurs hydrates, on rencontrera ces différents cas chez les différents sels, et il se présentera rarement un sel qui les fasse voir tous en même temps. En envisageant de cette manière générale les chaleurs de dissolution, on peut facilement ex- pliquer la conduite des quelques sels qui faisaient exception à la règle I de M. Thomsen.
Ainsi, pour les nitrates de Zn et de Cu, toutes les valeurs connues de la chaleur de dissolution du sel anhydre sont positives; tandis que les valeurs connues de la chaleur de dilution des dissolutions sont d’abord positives, puis négatives pour les quantités d’eau plus grandes. Le cas peut être re- présenté par la fig. 13 : seulement, la première partie de la courbe OA n’est pas encore connue, et l’axe pour les chaleurs de dissolution du sel anhydre se trouve situé de telle sorte que la partie supérieure de OA et ABC tombe au-dessus de cet axe.
Pour les sels X,CO,, Na,CO.,, Nal, Na,SO,, toutes les valeurs connues des chaleurs de dilution des dissolutions sont négatives, et toutes les chaleurs connues de dissolution du sel anhydre sont positives. Cela indique que toute la branche OA est inconnue, et que la partie connue de ABC se trouve au-dessus de l’axe pour le sel anhydre.
Pour le sel Sr(4:0,),, enfin, la chaleur de dissolution du sel anhydre est aussi négative, de sorte que dans ce cas la partie connue de la courbe AB est située au-dessous de l’axe pour le sel anhydre. Les chaleurs de dissolution de l’hydrate à 4 H,0 seront donc négatives, à plus forte raison.
ITième Catégorie. — Les sels de la seconde catégorie, qui ne forment pas d’hydrates, obéissent, en tant qu’ils ont été examinés, à la règle que toutes les chaleurs de dissolu- tion, comme toutes les chaleurs de dilution des dissolutions, sont négatives. Cependant il est fort douteux que cette règle ait encore de la valeur pour les dissolutions fort concentrées. L'exemple du nitrate de soude peut le démontrer.
322 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
C’est le seul sel anhydre, parmi ceux que M. Thomsen à étudiés, dont la chaleur de fusion soit connue. Pour une molécule, elle est égale à 5355 calories. La chaleur de dis- solution dans 6 à 200 mol. de 4,0 varie, d’après M. Thomsen, de — 2934 à — 5030. De ces valeurs, envisagées en rapport avec la chaleur de fusion, on déduit : que la chaleur de dilution du sel liquide avec 6 à 200 Æ, 0 serait positive et diminuerait de 2420 à 325 cal. Or, la chaleur de dilution avec 0 à 6 moléc. devrait nécessairement s’accroître de O0 à 2400 cal. ; et ainsi la courbe des chaleurs de dilution pour ce sel aurait la même forme que OABC, fig. 13.
Les chaleurs de dilution seraient positives ou négatives, selon la concentration d’où l’on part et la quantité d’eau que l’on ajoute.
Il serait prématuré de vouloir généraliser ce résultat pour tous les autres sels anhydres; peut-être y en a-t-1l pour lesquels la branche OA de la courbe des chaleurs de dilution n'existe pas, de sorte que la chaleur de dilution est toujours négative, dès le commencement. L'exemple du nitrate de soude démontre cependant la possibilité que, pour certains sels de la seconde catégorie, la courbe aura la même forme que pour les sels de la première catégorie. Dans ces cas, on
à
peut s'attendre à rencontrer aussi des exemples pour lesquels les chaleurs de dissolution ne seront pas négatives pour toutes les concentrations de la dissolution formée.
Pour le nitrate de soude, cette chaleur semble encore néga- tive même pour les concentrations fortes; mais pour d’autres sels l’axe des chaleurs de dissolution pourra couper la courbe OABP au-dessous du sommet À, et ainsi la chaleur de disso- lution serait positive dans des quantités d’eau plus grandes que celle qui correspond au point d’intersection.
Nous arrivons donc à cette conclusion:
qu'il n’y a pas de distinction rigoureuse entre les été qui forment des hydrates et ceux qui n’en forment pas. Il semble
seulement que la courbe figurative des chaleurs de dilution,
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 3923
SS
prises à partir du sel liquide, présente un sommet, qui correspond à des quantités d’eau plus petites pour les sels de la seconde catégorie que pour ceux de la première; de sorte que, si l’on n’étudie pas des dissolutions fort concentrées les chaleurs de dilution observées sont presque toujours positives dans le premier cas et négatives dans le second.
En second lieu, dans la plupart des cas de la première catégorie, l’axe pour les chaleurs de dissolution, même du sel anhydre, coupe ladite courbe au-dessous du sommet, de sorte que les chaleurs de dissolution sont négatives pour de petites quantités d’eau et positives pour des quantités d’eau plus grandes; tandis que dans certains cas cette valeur peut de nouveau devenir négative pour les dilutions fortes. Pour les hydrates d’un pareil sel, l’axe a une situation d'autant plus élevée que l’hydrate contient plus d’eau. La chaleur de dissolution reste donc de plus en plus négative pour la plupart des dissolutions, et, si l’hydrate est très riche en eau, toute la courbe est située au-dessous de l’axe et toutes les chaleurs de dissolution seront négatives.
Pour les sels qui ne forment pas d’hydrates, la chaleur de dissolution est d’ordinaire également négative pour toutes les concentrations possibles: mais l’examen établi donne le droit d'attendre une conduite différente chez quelques autres sels. |
Voyons maintenant quel usage on peut tirer de cette revue des chaleurs de dissolution des différents sels pour l’application des formules (9) et (8).
La variation du rapport LE avec la température dépend, TT
d’après la formule (9), directement du signe de la chaleur de dissolution à saturation. Cette variation sera donc positive ou négative selon que cette chaleur est positive ou négative. La connaissance de la courbe décrite, et des concentrations
de la dissolution saturée à différentes températures, mettra
3924 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
en état d'indiquer de quelle manière ce rapport variera avec la température.
Pour les sels anhydres, qui forment des hydrates, on peut s'attendre (si la solubilité s'accroît avec la température) à ce que
le rapport P° augmentera aussi longtemps que les dissolutions TE
ne sont pas trop concentrées, pour diminuer lorsqu'on s’avance vers le point de fusion. Pour les hydrates inférieurs, ces deux cas peuvent encore se
produire. Pour les hydrates supérieurs, le rapport P sera î TT
presque toujours diminuant le long de toute la courbe des tensions des dissolutions saturées, Ce même cas se présen- tera pour la plupart des sels qui ne forment pas d’hydrates.
Quant à la formule (8), elle peut servir principalement à découvrir l’existence ou la non-existence de la branche Ia. C’est dans ce but que nous allons l’employer ici.
L'étude des hydrates de CaCl, nous a fait conclure que d'ordinaire cette branche sera très petite pour les sels hy- dratés. Pour les sels anhydres qui, comme le CaC!,, forment des hydrates, la chaleur de dissolution ne sera d’ordinaire négative que pour de fort petites quantités d’eau ; de sorte que l'intervalle de températures pour la branche Ila sera probable- ment, lui aussi, petit. Au contraire, pour les sels anhydres qui ne forment pas d’hydrates, la chaleur de dissolution est presque toujours négative, et si l’on suppose un moment qu’elle est dans la plupart des cas croissante dès le point de fusion, à mesure que la quantité d’eau augmente, — on pourrait s'attendre à ce que cette quantité d’eau devrait être consi- dérable, avant que la chaleur négative de dissolution devînt égale à la chaleur de condensation de cette quantité d’eau. A mesure que la chaleur de fusion serait plus grande, et que l’accroissement de la teneur en eau de la dissolution au- dessous du point de fusion serait plus petit, la branche Ila s’étendrait sur un intervalle plus grand de températures,
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 325
Quant à l’intervalle de pressions pour la branche Ila, on peut s’attendre à ce qu’il sera considérabie pour tous les sels anhydres. La tension de vapeur du sel lui-même, en son point de fusion, est presque toujours insignifiante ; tandis qu’au contraire les tensions des dissolutions très concentrées, qui peuvent exister un peu au-dessous de ce point, seront fort considérables, parce que toutes ces températures sont assez élevées. Il est donc très probable que les tensions de la branche Ila s’abaisseront, dans un intervalle relativement petit de températures, d’une valeur de plusieurs atmosphères (au point de la tension maximum) jusqu’à zéro environ (au point de fusion du sel anhydre).
‘ La branche Ila de la courbe des tensions des dissolutions saturées pourra donc être réalisée le plus facilement chez les sels anhydres à point de fusion peu élevé.
Pour les sels anhydres à point de fusion élevé, plusieurs circonstances peuvent interrompre le cours normal de la courbe, savoir :
1°. le passage de la température critique pour l’eau;
2°. le commencement de vaporisation notable du sel lui-même ;
3°. le commencement de décomposition du sel par l’eau.
La poursuite de l’étude des dissolutions des sels, au-delà des températures qui indiquent le commencement de ces actions perturbatrices, présente beaucoup d'intérêt.
326 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
CHAPITRE VI.
Relations thermodynamiques pour les concentrations des dissolutions en équilibre avec un sel solide et la vapeur d’eau. Appli- cation au cas de CaCl, .6 H,0. Revue générale des autres sels.
1. M. le Chatelier, le premier :), a déduit une formule ther- modynamique pour la variation des concentrations d’une dissolution saturée avec la température. Dans ce but, ainsi que je l’ai déjà mentionné p. 297, il développe d’abord une formule pour les tensions de ces dissolutions, qui, sauf une notation différente, est égale à la formule (9) de la page 309:
dt À
où Q est la chaleur de dissolution à saturation d’un hydrate à c H,0 en (x —c) mol. d’eau. Dans cette équation, il rem- place le premier membre par une expression qui contient la concentration de la dissolution, en faisant usage de la loi de M. Wüllner, qui donne la relation entre p, x et la concentration de la dissolution, exprimée en parties ou molécules du sel sur une partie ou molécule d’eau, soit S?). Cette loi se formule comme il suit: S
T—p=aTrs, Où « est le coefficient d’abaissement de tension. On en déduit : ar d8 , ae: Rs TT 125 T & .
1) Compt. Rend, 100, 50, 1885. 2) Dans la formule de M. le Chatelier on a:
PPT | LE De | Æ — Mi = C 7 1ONEL “à Se 9
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 397
Par substitution dans (9) on obtient:
C.15 NE Hon 1—axsS
cb mir CL)
En substituant encore x = 2 , cette équation se change en:
Œ or 20e 5 1—&S OA EE TES) En négligeant +5 M. le Chatelier obtient la formule définitive : dat ba re en ele GRAN
La conséquence la plus importante qu’on peut en déduire est celle-ci, que la chaleur de dissolution et la variation de la solubilité sont de signes contraires: c’est-à-dire, que la solubilité croît avec la température pour les corps dont la dissolution absorbe de la chaleur, et décroît au contraire pour ceux qui en dégagent. M. le Chatelier a fixé l'attention sur bon nombre d'exemples qui confirment ces règles. Cependant, il va sans dire que l’exactitude de la formule (11) diminue beaucoup, si S ou c acquièrent des valeurs considérables. Aussi l’accord trouvé jusqu'ici n’est que qualitatif.
Antérieurement, M. Moutier !) avait déjà fait subir une opé- ration analogue à la formule originelle de M. Kirchhoff (p. 288), ds dt formule pour calculer la variation de concentration des dis- solutions du sulfate de soude, et trouva que la valeur de ds | dt Toutefois, cette formule est beaucoup trop compliquée pour l’usage.
en exprimant p en x et . M. Pauchon ?) se servit de cette
change de signe avec la chaleur de dissolution à 33°.
1) Ann. Chim. Phys... [4] 28, 515. 2) Compt. Rend., 97, 1556.
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIT. 22
3928 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
DS
La même remarque peut être faite à propos de la formule récente de M. Duhem (page 296).
2. M. van der Waals a développé, en même temps (voyez p. 297) que M. le Chatelier, une formule différente, mais plus exacte, pour la variation de concentration des dissolutions. Je l’ai communiquée ‘) déjà dans mon travail sur les hy- drates de gaz, et j'ai pu l’appliquer au cas de l’hydrate HBr.2 H,0.
Nous pourrions l’appliquer maintenant aux hydrates de CaCl,, mais je crois utile de la déduire de nouveau pour les dissolutions des sels, en partant de la formule (7), p. 301, pour les tensions:
dl 1 Q D — TÉSTESS 1 LION
Je rappelle que dans cette équation Q représente la dif- férence d'énergie interne entre (x—c) mol. de vapeur et 1 mol. d’hydrate CaCl, .cH,0, comparée à CaCl, = x H,0.
On peut également établir pour une dissolution de la con- centration x, mais sans sel solide, l’équation:
(Se) = TO 0
Q, représente ici la chaleur interne de vaporisation d’une molécule d’eau, dans le cas où la quantité de la dissolution prise est assez grande pour que sa composition puisse être considérée comme constante.
Nous allons maintenant diviser la valeur de Q dans la formule (7), de sorte qu’elle comprenne Q, de la formule (12). A cet effet, nous remarquons que la transformation de (x — c) mol. de vapeur d’eau et 1 mol. de Gal, .cH,0 en une dissolution saturée CaCl, >: x H, O peut être effectuée de plusieurs manières: entre autres, en dissolvant d’abord une molécule du sel dans une quantité de la dissolution CaCl, x H,0
1) Rec. etc., VI, 343 et 355. 1886.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 329
préexistante, et ensuite les (x — c) mol. de vapeur dans cette même dissolution. Or, si cette quantité de dissolution est de nouveau choisie assez grande pour que sa composition ne change pas par l’un ou par l’autre acte de solution, la chaleur interne développée dans le second acte sera égale à (x — c) Q,, et en indiquant par Q%° la chaleur interne de dissolution d’une molécule de CaCl, .c H, 0 dans une quantité mfiniment grande de dissolution saturée, on aura l'égalité :
Q=(x—0c)Q, + @” En substituant cette valeur de Q dans l'équation (7), eten - soustrayant (12) de (7), on obtient: CNET UP a Re AUS à cer NN, Maintenant, le premier membre peut être transformé de
: dx manière à fournir une valeur pour Fr. La tension de la dis-
solution saturée est fonction de x et de #, et l’on a donc:
dp ( TE) + (SE dlp x dt = _.
et par substitution en (13):
dx dx “6 — Lt creer DUC
C’est la formule appliquée auparavant pour les hydrates de gaz.
La chaleur de dissolution dans une quantité infinie de la dissolution saturée n’est toutefois pas un terme qu’on puisse observer directement. Pour l’application aux hydrates de gaz, je l’avais en conséquence divisé en: chaleur de fusion de l’hydrate et chaleur de dilution de l’hydrate fondu avec une quantité infinie de la dissolution saturée. Ce mode de par- tage n’est pas commode pour les hydrates salins. On obtient des valeurs faciles à observer ou à calculer, en divisant la valeur Q "en: chaleur de dissolution d’une molécule d’hydrate
22*
330 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
dans (æ— c) molécules d’eau, et chaleur nécessaire pour la séparation de ces (x — c) molécules d’eau mr d’une quantité infinie de la dissolution saturée.
La première, c’est la valeur désignée dans la formule (9) et les précédentes par @Œ. La seconde peut être déduite aisé- au moyen de la courbe qui représente les valeurs de @. Prenons p. e. le cas de CaCl, .6 H,0. Les chaleurs de disso- lutions @Q% sont négatives. La courbe qui les représente a la forme de AE, fig. 14. Soit OC—=6, OD = x, alors CA représente la chaleur de fusion de l’hydrate, DE la chaleur de dissolution en (4 — 6) H,0 = Q%4.
Prenons une valeur de + un peu plus grande que x, alors: 95 — 9% est la chaleur de dilution de la dissolution CaCl, :7 x H,0 à CaCl, © x' H,0. Cette chaleur est positive, parce que @% est moins négatif que @%. Cette chaleur de dilution est donc, pour une molécule d’eau, égale à:
Q6 — O6 gd —x
Si l’on passe maintenant à la limite, où la quantité de
la dissolution CaCl, - x H,0 est infiniment grande, la cha-
leur développée par l'addition d’une molécule d’eau à une
dissolution CaCl, x H,0, sans changement de concentration,
dQ6
sera :
(& — c) molécules d’eau liquide d’une telle dissolution sera
’ « d 2 « LA V4 7 C4 égale à: (&æ —c dQ. D'anrès l'énoncé précédent on aura dx P
donc l'égalité :
\
AG o
On peut donc écrire aussi au lieu de (14): x d@e duilgs ) $ ST Frot 4 dt \dip/r 2 T?(xæ —-c) Le premier terme du numérateur est égal à — DE. Le
.. (15)
* et la chaleur absorbée dans la séparation de |
di. dl. Tr _—
Ca]
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 331
second terme se trouve, si l’on trace une tangente à la courbe au point Æ£ et qu’on la prolonge jusqu’à ce qu’elle coupe l’ordonnée CA de la chaleur de fusion. £F, étant égal à CD),
correspond à (x — c), et BF—(x—c)tg BEF = (x — 0) > sie
donc : MR ODE FT DCE:
La chaleur de dissolution d’une molécule d’hydrate en une quantité infinie de la dissolution saturée, est donc égale au segment déterminé, sur l’ordonnée qui représente la chaleur de fusion de l’hydrate, par la tangente menée à la courbe des chaleurs de dissolution, au point qui correspond à la composition de la dissolution saturée.
Si la courbe des chaleurs de dissolution dans l’eau pure est connue, rien n’est plus facile que d’en déduire les valeurs de
6 . Avant d'appliquer la formule (14) au cas de CaCl,.6 H,0 nous allons la comparer avec celle de M. le Chatelier.
3. Comparaison de la formule (15) avec la | formule de M. le Chatelier.
Pour cette comparaison nous allons introduire aussi dans la formule (15) la loi de Wüllner:
T—D=axrsS.
Parce que S — a on peut, au lieu de E x (CE),
écrire : mx (Hs.
On a de la loi de Wüllner :
dS ___1—asS, dt œ Lu TE (eux
82 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
La seule différence avec la formule non simplifiée de M. le Chatelier (10) consiste dans le second terme du numé- rateur, qui manque dans la dernière équation.
Cette différence est facile à expliquer. M. le Chatelier s’est servi de la loi de Wüllner pour transformer l’expression
ES TT LU turées à différentes températures. Il regarde toutefois « comme constant et indépendant de la température. Dans la déduction que nous avons suivie, la même formule
n’a servi que pour calculer ia valeur à température con- stante. La formule (16) peut donc convenir pour toutes les températures si l’on inscrit la valeur correspondante de «. La formule (10) de M. le Chatelier n’est utilisable que si &
est indépendant de la température. Or on sait que ce n’est
, et ainsi il considère les tensions des dissolutions sa-
presque jamais le cas pour les dissolutions saturées dont 1l
s’agit 1C1
La formule (10) n’aura donc que peu de valeur pour l'application numérique, la formule approximative (11) n’en aura point du tout.
S1 l’on suppose cependant « constant pour toutes les tem-
pératures, P est aussi constant pour chaque valeur de S TT
à toutes températures, et ainsi la chaleur de dilution de la dissolution est nulle. Or, dans ce cas, le second terme du numérateur de l’équation (16) disparaît, et le désaccord entre (16) et (10) cesse.
M. le Chatelier aurait pu rendre exacte sa formule, tout en conservant la valeur de Q seule dans le numérateur !),
1) Dans une communication postérieure (Compt. Rend., 104, 682) M. le Chatelier remarque, incidemment, que le phénomène de la dissolution devrait dépendre de la chaleur de dissolution à saturation en partant d’une disso- lution presque saturée, et non en partant de l’eau pure. Cette correction,
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 338
s’il avait considéré « comme fonction de T; mais l’expression
ar À qui doit remplacer _ deviendrait alors beaucoup plus com-
pliquée. En outre, la formule suppose toujours l'exactitude de la loi de M. Wüllner, et celle-c1 n’a aucune valeur pour les dissolutions concentrées, et n’est même admissible pour les concentrations faibles que dans l’hypothèse d’un état défini d’'hydratation du sel dans la dissolution.
La formule (14) ou (15) ne présente aucun de ces incon- vénients. Elle conserve sa valeur pour toutes les températures et toutes les concentrations, même jusqu’au point de fusion de l’hydrate; et elle ne contient que des facteurs dont la signification est évidente.
La formule ne repose que sur deux suppositions: que les lois de Boyle et de Gay-Lussac soient valables pour la vapeur d’eau; et que la volatilité du sel anhydre puisse être négligée.
Pour la plupart des sels, la volatilité est si petite et les tensions des dissolutions saturées sont si éloignées des tensions des vapeurs saturées, que ces deux suppositions seront satis- faites entre de larges limites.
4 Conséquences de la formule (14).
Considérons maintenant les conséquences générales de la
DS
formule (14), quant à la concentration de la dissolution saturée. Comme on est plus accoutumé à exprimer la con- centration en parties ou molécules de sel sur 1 ou 100
toute vraie qu'elle est suivant le développement ci-dessus, ne découle point du tout de la formule que M. le Chatelier a établie. Aussi, dans un travail récent (Recherches expérimentales et théoriques sur les équilibres chimiques), que je reçus après l’achèvement de cette étude, l’auteur la déduit de la loi d'opposition de la réaction à l’action, p. 50.
334 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
dS
parties ou molécules d’eau, remplaçons par = La for-
x dt mule (14) prend alors (voyez sous 3) la forme: 8 — ) * ER À, dt dlp Jr 2T'(x—c)
d
(14a)
Dans cette équation le facteur (), est toujours négatif,
«
la tension à température constante diminuant si la concen- tration s'accroît. Le terme (x — c) peut être positif ou négatif (voyez Chapitre I).
S'il est positif, c'est-à-dire si l’on considère les dissolutions qui contiennent plus d’eau que l’hydrate, et qui étaient jus-
(Lue ds qu'ici les seules connues, le signe de 7 sera contraire au signe de Q@", et nous obtenons ainsi la même conclusion que M. le Chatelier avait déduite de sa formule, en remplaçant seulement la chaleur de dissolution dans l’eau par la chaleur de dissolution en une quantité infinie de la dissolution saturée,
Si au contraire æ <c, et que nous considérions donc les dissolutions qui contiennent moins d’eau que l’hydrate salin,
X C
les facteurs e et (x —c) sont tous deux négatifs, et ainsi P
le signe de = est le même qui celui de Q”.
Cette règle nouvelle se trouve confirmée chez les disso- lutions de CaCl, .6 H,0, appartenant à la branche I de la courbe des tensions (CD fig. 7).
5. Application au cas de CaCl, .6 H,0.
La solubilité de l’hydrate CaCl, .6 H,0 étant connue jus- qu'au point de fusion de l’hydrate, ce corps présente une bonne occasion d’appliquer la formule (14a).
Auparavant, une seule remarque est à faire.
Dans la déduction des formules thermodynamiques nous avons considéré l'équilibre entre sel solide, dissolution et vapeur d’eau. La solubilité, dont il s’agit dans la formule,
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 330
est celle sous la pression de la vapeur d’eau, el non celle sous la pression d'une atmosphère.
Or, dans les déterminations de solubilité décrites au Chapitre I, ce ne sont que les solubilités au-dessus de 165° qui ont été déterminées sous la pression de la vapeur seule (cette pression étant elle-même plus grande qu’une atmo- sphère). Toutes les autres valeurs ont été déterminées pour la pression d’une atmosphère — dont une partie seulement était exercée par la vapeur d’eau, et même une partie fort minime quand on opérait aux températures au-dessous de 30°. Il faudrait donc, en toute rigueur, corriger les valeurs pour les dissolutions de CaCl, .6 H, 0. Maïs on sait que l’influence de la pression sur la solubilité (comme sur la fusion) n’est que très petite pour une différence de pression d’une atmosphère. Je me servirai donc, pour les concentrations, des valeurs communiquées dans le Chapitre I.
Je vais calculer la valeur de _ pour les températures de 0°, 10°, 20° et 25°. Pour ces températures, on trouve dans la table p. 305 les pressions et les concentrations S, ex- primées en parties de CaCl, sur 100 parties de H,0, et la composition moléculaire de la dissolution CaCl, :: x H, 0.
2 Tr
Reste donc seulement à connaître les valeurs de Q” et de
ü) dip/ T°
Les premières peuvent être déduites de la courbe fig. 10, en traçant les tangentes aux points qui correspondent aux valeurs de x pour les différentes dissolutions saturées, et en prolongeant ces tangentes jusqu’à l’ordonnée de la chaleur de fusion (x — 6); comme cela à été développé p. 331. Les valeurs de Q%" sont toutes négatives et peu différentes de la chaleur de fusion, parce que la dissolution, même à (0°, est très concentrée. Elles n’ont pas été corrigées pour la différence des températures avec celle de 18°, pour laquelle la courbe a été déterminée.
336 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
La plus grande difficulté est celle que présente le calcul de ds’ r pour la température de 0°. Calculons d’abord ( 7) 0°
PF .J’indiquerai la méthode suivie, en donnant le calcul
cherche à 0° la variation de concentration, avec la tension, d’une dissolution qui contient 59,5 parties de CaCl, sur 100 parties d’eau (concentration de la dissolution saturée à 0°). Je choisis les dissolutions saturées à et à + à”, dont les concentrations (courbe BH, fig. 2) s’éloignent égale- ment peu de celle à 0°. Leurs tensions à — 5° et à + 5° sont empruntées à la courbe BO, fig. 7: 13,5 et 24 muilli- mètres de naphtaline monobromée, soit : 1,458 et 2,592 millim.
de mercure. Pour ces deux dissolutions, le calcul assigne au
rapport Les valeurs 0,461 et 0,400. D’après les remarques
p.290, ces rapports, quoique variables avec la température, peuvent être pris constants si l'intervalle de température n’excède pas 5°. Les tensions de ces deux dissolutions à 0° seraient donc (4,57 étant la tension de l’eau pure): pour S— 57: p, = 0,461 x 4,57 et pour S—62: p, = 0,400 x 4,57.
Leur différence monte à (0,461 — 0,400). 4,57 — 0,279 mm. de mercure. Cette différence correspond à une diminution de concentration de 5 parties de CaCl,, et les deux concentra- tions étant également éloignées de la concentration 59,5 de
la dissolution saturée à 0°, la valeur de (&) go Pour cette dissolution sera égale à — pee —= — 0.056.
La tension de la dissolution saturée à 0° étant de 1,944 mm., On à: Di 4}"a,044 (5 0 6.086 1) Le calcul de cette valeur au moyen de la loi de Wüllner n'était pas
permis, parce que cette loi cesse d’être admissible pour les concentrations fortes (voir p. 293).
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 331
D'une manière analogue j'ai calculé les valeurs de
pour 10°, 20° et 25°; en choisissant toujours deux dissolu- tions voisines, de l’un et de l’autre côté, de chacune de ces températures. La table suivante contient les données nêéces- saires pour ce calcul (P est la tension en mm. de bromure).
t P p x S TL
— 5° 13,5 1458 mm. 0,461 57
9° 24 2,592 » 0,400 62
150 41 4428 0,349 69
930 58,5 6,318 0,302 19
970 64 6912 » 0,261 86,5
d
Les valeurs obtenues pour JL et toutes les autres valeurs
nécessaires pour le calcul de Le selon la formule (144) sont
réunies, avec le résultat de ce calcul et avec les valeurs de = qui se déduisent de la courbe expérimentale BF, fig. 2, dans
la table suivante.
t P p (CE), (x—c)| Q°% Le PAPA AE calculé | observé 0° | 18mm.| 1,944 mm. | — 0,056 | 4,37 | — 8250 | 0,44 0,50 109 132 » | 3,456 #» | — 0,066 | 3,49 | — 8300 0,78 0,70 20° | 52 » 0,616 » |—0,083 | 2,28 | — 8450 | 1,46 1,50 25° 62 » | 6,696 » |—0,128 | 1,52 — 8650 | 1,68 1,70 |
338 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
L'accord entre l’observation et la formule thermodynamique est plus grand que je n’avais osé le supposer, vu l’incerti- tude régnant encore sur la forme exacte de la courbe qui a servi pour déduire les valeurs de Q.
Pour les dissolutions en équilibre avec CaCl, .6 H,0, et contenant plus de CaCl, que celui-ci (x < c), la formule (14a) ne peut être appliquée, faute de connaissance des valeurs Q6 * Il y a cependant accord qualitatif, car la valeur de Qf* est fortement négative pour les valeurs de x qui ne diffèrent
que peu de 6, et ainsi (voyez sous 4) la valeur de =
doit être négative, ce qui est conforme à l’observation.
Les valeurs des ‘chaleurs de dissolution des hydrates in- férieurs sont trop incertaines pour qu’on puisse baser sur elles un semblable calcul. Je vais donc finir par une étude des changements qui semblent possibles dans les valeurs de nr quand on s'éloigne du point de fusion des sels, pour com- parer ces résultats avec les particularités dans la conduite des sels étudiés jusqu'ici.
6. Changements possibles dans la valeur as SN és DE Branche I. Considérons d’abord les dissolutions appar- tenant à la branche I de la courbe des tensions. Je rappelle
que ces dissolutions n’ont été rencontrées jusqu'ici que chez l’hydrate CaCl, .6 1,0. Ainsi que je l’ai déduit déjà p. 334
(sous 4) pour ces dissolutions, la valeur de = a le même
signe que D: parce que les valeurs de dE et de (x—6) sont ici toutes deux négatives. Or, en commençant au point de fusion, la valeur de
Q”" est égale à la chaleur de fusion. Si nous regardons AE,
Rs
I 0 TE
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 839
fig. 14, comme indiquant la courbe des chaleurs de dissolu- tion d’un hydrate, et que nous supposions OC — 6, la chaleur de fusion est indiquée par CA. Si l’on va du point de fusion vers des températures plus basses, et que x devienne plus petit que c, on trouvera de nouveau la valeur de 9" en traçant d’un point de la courbe, inférieur à À et correspon- dant à une valeur de x <c, la tangente jusqu’à l’ordonnée CA. La courbe pour CaCl, .6 H,0 n'étant pas connue dans la partie située au-dessous du point À, les valeurs des seg- ments déterminés sur C'À par ces tangentes, pour différentes valeurs de x <c, ne pouvaient être déduites.
On voit, cependant, qu’en général les segments de l’or-
donnée CA deviendront d’autant plus petits que x sera plus
petit (du moins si la courbe s’abaisse de plus en plus, voyez p. 319). Dans la formule: |
OS me) + ES dent dp} r 2 Tr (c— x)
la valeur négative de 9.” diminuerait à mesure qu’on s’éloigne
du point de fusion et que (c — x) croît. La valeur 7 devien-
drait alors de plus en plus petite, jusqu’à ce que Q° s’an- nule au moment où la susdite tangente coupe l’axe au point C. Il dépendra entièrement de la forme de la courbe ÆA au-dessous de À et de sa distance de l’axe, si un tel cas sera jamais possible.
Dans ce cas, il y aurait pour æ une valeur à laquelle
correspondrait : 2 = 0.
La courbe de solubilité aurait alors la forme indiquée dans la fig. 151): ab est la concentration au point de fusion de l’hydrate. La concentration s'accroît de b à c, où elle est
1) Dans cette figure, comme dans les fig. 4 et 2, la concentration S s'accroît dans la direction descendante.
340 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
beaucoup plus grande que celle de l’hydrate. En c on a:
Si l’on descend maintenant à des températures encore plus basses, il n’est pas possible de prédire avec certitude ce qui arrivera. |
Si la concentration s'accroît de nouveau (courbe ce) et que la quantité x de H,0 diminue, la tangente à la courbe EA, fig. 14, couperait une partie positive de l’ordonnée CA. Mais,
au moment où la valeur de Q* deviendrait positive, Les
deviendrait positif aussi, ce qui serait indiqué par le pro- longement cd.
Cependant, si cd représente le prolongement de be, les valeurs de 9" pour les températures plus basses que le point où . — 0, devraient être déterminées en menant à la courbe AE, fig. 14, des tangentes pour les valeurs de x plus grandes, et ces tangentes couperaient de nouveau des parties négatives de l’ordonnée CA.
En déduisant donc les valeurs de Qx de la courbe EA, fig. 14, on devrait conclure que ni l’une ni l’autre des branches cd et ce ne put exister. Or cette courbe n’a de valeur que pour une seule température. C’est maintenant l’influence de la température sur les chaleurs de dissolution, qui décidera dans laquelle des deux directions la courbe bc pourra se prolonger à des températures inférieures. En tout cas, la courbure de ce prolongement sera très minime, parce qu’un changement trop rapide, soit dans l’une soit dans l’autre direction, amènerait toujours dans la valeur de Q£* un changement de signe, contraire à celui qui correspond à la direction admise pour la branche nouvelle.
Il serait fort intéressant de trouver un sel pour lequel les dissolutions de la branche I pourraient exister, au-dessous du point de fusion, dans un intervalle de températures si
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 341
grand, que la quantité du sel dans la dissolution, après avoir augmenté, irait de nouveau en diminuant, pour s'approcher de la composition de l’hydrate solide, à mesure que la tem- pérature s’abaisserait davantage.
Branche II. Considérons maintenant les dissolutions, mieux connues, qui appartiennent à la branche IT de la courbe des tensions, c’est-à-dire, qui contiennent plus d’eau que le sel hydraté ou anhydre.
L'équation dS 2 ( ds v QUx
dt lp /r 2T?(x—0c)
Ÿ
contient un terme, è dlp
, qui est toujours négatif; (x — c) est
maintenant positif et le signe de À est donc nécessairement
contraire à celui de QŸx.
Commençons de nouveau dans le point de fusion. Q° x est alors la chaleur de fusion et négatif; Ë est donc d’abord positif, et si l’on s'éloigne au-dessous du point de fusion, $ diminue ou bien x s’accroît.
S'il existait un sel anhydre pour lequel la courbe des chaleurs de dissolution eût la forme de la fig. 16 (OA étant la chaleur de fusion), la valeur négative de Qÿx deviendrait d'autant plus grande que + augmenterait davantage. Dans ce cas, on ne pourrait jamais attendre un changement de signe de Q6* et la valeur de 2 resterait toujours positive. La quantité de sel dans la dissolution diminuerait à mesure qu’on s’éloignerait du point de fusion.
Cependant j'ai fait voir, dans le chapitre précédent (p. 318—321), qu'il est incertain si un tel cas se rencontre jamais pour un sel anhydre ou hydraté; mais qu’au contraire, pour la plupart des sels, la courbe OABC (fig. 18) pourrait repré- senter le cours des chaleurs de dissolution Q% pour des quantités différentes de x. Si l’on veut en déduire les valeurs
349 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
de Q®x pour les valeurs de x >c, dont il s’agit ici, bien des cas peuvent se présenter.
Pour le sel CaCl?.6 H,0 (voyez fig. 14) la forme de la courbe est telle que, même pour les dissolutions les moins concentrées, la valeur de Q6*, coupée de CA par la tangente, restera toujours négative, quoique sa grandeur diminue
=
continuellement à mesure que x devient plus grand; F7
reste donc toujours positif, quoique sa valeur diminue vers les températures inférieures.
Pour les hydrates à 4 4,0 et à 2 H, 0, l’axe des chaleurs de dissolution coupe la courbe AE (voyez p. 313). Si l’on représente dans la fig. 17 par OX l’axe pour CaCl, .2 H,0, et qu'on prenne OC—2, CA représente la chaleur de fusion, et la chaleur de dissolution @ devient zéro pour x = OD. D’après la p. 314, c'est le cas, approximativement, pour x —=4, c’est-à-dire, pour la concentration de la dissolution saturée à 95° environ. Pour les valeurs de x > 4, Q> devient positif. Cependant, la concentration continue à diminuer pour les températures plus basses que 95°, parce que la valeur de
>" est encore négative — la tangente au point D coupant encore CA au-dessous de l’axe. Cette valeur ne devient nulle que pour une concentration x de la dissolution saturée = OF, parce que la tangente au point Æ£ coupe l’ordonnée AC dans l’axe. |
La valeur négative de Qÿx et par conséquent la valeur
positive de e diminuent à mesure que la température s’abaisse
et que x devient plus grand; mais les expériences sur la solubilité de CaCl, .2 H,0 démontrent que ces deux valeurs ne sont pas encore devenues zéro au moment où l’hydrate à 4 H,0 apparaît. Si l’hydrate à 2 H,0 pouvait exister à des températures encore plus basses, il eût été probable que ces deux valeurs auraient passé par zéro — pour une concen- tration encore moins forte.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 343
La valeur de Q®* peut encore devenir zéro, quoique toute la courbe des valeurs de Q% se trouve au-dessous de l’axe, pour les sels dont la courbe des chaleurs de dissolution est représentée par la forme de la fig. 18 (voyez p. 319), si la partie descendante correspond encore à des concentrations saturées à de basses températures.
Alors il est possible que pour un point B la tangente coupe l’axe exactement dans le point €, OC étant — c. Si la distance de la courbe à l’axe est trop grande, cela ne peut arriver; et pour les dissolutions encore plus diluées, pour lesquelles les chaleurs de dissolution Q% sont représentées par la partie de la courbe au-delà du point d’inflexion D, la direction des tangentes s’abaissera de nouveau. On conclut donc — qu’en descendant du point de fusion d’un hydrate ou d’un sel anhydre à des températures inférieures, — la concentration de la dissolution sur la branche IT diminuera toujours au com- mencement; mais la possibilité existe, — tant pour les sels dont la chaleur de dissolution à saturation dans l’eau (Qi) reste toujours négative que pour ceux dont cette quantité de chaleur devient positive pour des quantités plus grandes d’eau, — que la chaleur de dissolution dans la dissolution saturée (9) devienne zéro.
À partir de ce point, un changement de direction dans la courbe de solubilité doit survenir. On peut, de la même manière que pour la branche I, démontrer que le sens de ce change- ment dépendra beaucoup de l'influence de la température sur les chaleurs de dissolution @. Mais cette influence n’est pas connue pour les dissolutions saturées !'). Le changement de direction .sera en tout cas fort lent. Le changement le plus - probable est que Q®*x deviendra positif pour les températures
1) Les déterminations de Thomsen (T. I, 70) et de Pickering (Journ. Chem. Soc., 1887, 338) n'ont rapport qu'a des dissolutions non saturées; elles démontrent qu’on ne peut donner de règle générale pour l'influence de la température.
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 28
344 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
ds" 1h} encore plus basses, et qu’alors deviendra négatif. On aura
d alors, en partant du point de fusion, deux parties de la courbe de solubilité :
à dS dx Branche Q 71 ü Ila = + ec ITb + Le LS et pour le point où ces deux branches passent l’une à l’autre: + ds do ce Ù H— 0. Hi = 0.
Pour la plus grande partie des sels anhydres et hydratés c’est la branche Ila de la courbe de solubilité qui seule est connue, quoiqu'’elle n’ait presque jamais été poursuivie jusqu’au point de fusion, ou bien jusqu’au point dans lequel survient un hydrate inférieur. L’étude des chaleurs de dissolution à saturation est à peine commencée. Cependant, il n’y a pas d'exemples que les chaleurs connues soient en contradiction avec l’accroissement de solubilité avec la température; du moins si l’on a soin de considérer la chaleur de dissolution de l’hydrate solide qui peut exister au sein de la dissolution, à la température de l’expérience !).
Il n’y a que l’isobutyrate de chaux à 5 H,0 qui présente quelque incertitude. D’après MM. Chancel et Parmentier ?) la chaleur de dissolution Q*: serait positive. M. le Chatelier *) prétend avoir démontré que cette valeur est un peu négative, comme l’exigerait sa formule. M. Chancel {) n’a pas accepté cette rectification. Il se pourrait qu’on eût ici le cas où Q5 serait un peu positif et où pourtant Q5 serait négatif, comme l'exige la formule (14) pour la branche Ila. M. le Chatelier n'a pas considéré la grande différence qui peut exister entre ces deux valeurs.
1) On ne saurait trop insister sur cette condition, une confusion effroyable s'étant introduite, faute d'y avoir fait attention. 2) Compt. Rend., 104, 474. 3) ibid., p. 679. 1) ibid., p. 881.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 345
Le nombre des sels qui présentent les branches Ila et IIb est fort limité; il y en à peu d’entre eux dont la conduite soit exactement connue. Outre le NaSO, anhydre, mentionné p. 232, il y a quelques sels de chaux, comme le propionate !), le butyrate ?), le valérate *), le capronate ‘); le valérate *) et le capronate de baryte ‘), et le butyrate de zinc *). Pour tous, la solubilité, en partant des températures peu élevées, décroît d’abord, passe par un minimum, et augmente ensuite. Des valeurs de Q%° rien n’est connu. Quant aux valeurs de @, on sait que, pour les dissolutions de Na,SO, appartenant à la branche ITb, Q est positif; pour les dissolutions du buty- rate de chaux, cette valeur serait positive $) pour les tempéra- tures inférieures (branche ITb), négative 7) pour les tempéra- tures élevées (branche Ila). Il y aurait donc, selon toute apparence, concordance avec la formule thermodynamique.
Pour une multitude de sels la branche II seule est con- nue jusqu'ici. Tels sont, outre Les sels connus depuis longtemps (Na,CO,, SrSO,, CeSO,, ThS,0,), un grand nombre de sulfates anhydres ou contenant peu d’eau {Etard), et de plus le xylidinate ) et l’isobutyrate *) de zinc, l’isobutyrate de chaux à 1 H,0, f) (qui existe au-dessus de 80°) et les sels de chaux des acides acétique ?), dipropylacétique !°) et dié- thylacétique !!). Pour l’isobutyrate de chaux, M. le Chatelier a démontré que la valeur de Q° est positive. Pour une partie des autres, on sait seulement que cette valeur est positive pour les dissolutions non saturées.
La conduite du Na,SO, anhydre, qui appartenait aupara-
1) Monatsh. für ie 8, 603.
2) Lieb. Annal.: 213, 65, et Compt. Rend., 104, 474.
3) Monatsh. für Chemie, 9, 317. 4) Monatsh. für Chemie, 9, 592.
5) Berl. Ber., 1878, 1790. 6) Compt. Rend., 104, 474. 7) Compt. Rend., 104p. 679. 8) Berl. Ber., 1877, 860. 9) Monatsh. für Chemie, 8, 600.
l 0) ” 7 2 1 324.
11) ” ” u 9, 599,
23*
346 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
vant à cette même catégorie, mais dont M. Tilden a réalisé la première partie de la branche Ila, fait espérer que l’étude ultérieure pourra démontrer, pour les autres sels aussi, qu’un minimum de solubilité est suivi de nouveau par un accrois- sement, quand on s’avance vers des températures élevées.
La branche IIb se rencontre également chez le sulfate de chaux et quelques sels organiques de chaux et de baryte !). Pour ces sels aussi, la courbe de solubilité n’a pu être pour- suivie encore jusqu’au minimum, et la branche Ila est encore inconnue. Ces sels présentent cependant une autre particu- larité. Au-dessous d’une température relativement basse (35° pour CaSO, .2 H,0) la solubilité, qui d’abord avait augmenté à mesure que la température était abaissée, diminue par un abaissement de température plus prolongé, après avoir passé par un maximum. On s'attend à ce que la chaleur de dis- solution @”", qui est positive pour la branche IT, doive être négative pour cette branche nouvelle Ile, après avoir passé par zéro. D’après M. Berthelot ?), ce serait effectivement le cas pour le sulfate de chaux, quant à la chaleur de disso- lution ordinaire (@). Il ne faut pas confondre ce maximum de solubilité, qui se présente dans la courbe continue d’un sel, avec les maxima qui résultent de l’intersection de deux courbes pour deux hydrates d’un sel, lorsque l’une est ascendante et l’autre descendante. Dans ce dernier cas — je ne rappelle que les exemples du sulfate de soude, du carbonate de soude, du sulfate de thorium — il y a changement brusque de direction de la courbe, accompagné de changement brusque
l) Succinates et isosuccinates de chaux et de baryte. Monatsh., 7,266 ; Isovalérate et méthyléthylacétate de chaux, ” 8,966 ; Formiate et acétate de baryte, ” 8,999 ; Isoheptylate de chaux, Lieb. Ann.. 209, 336.
2) Mécan. Chim., TI, 131. Les quantités de chaleur sont fort minimes.
Elles ont peu d’exactitude, étant déterminées au moyen d’une réaction compliquée.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 347
dans la chaleur de dissolution. Dans le cas actuel, ces deux changements sont continus, parce que c’est toujours le même système, dont l'équilibre change graduellement !).
Il semble donc, que, grâce aux changements possibles dans la valeur de Q”, la courbe IT de la solubilité puisse présenter au moins trois branches. Elles sont représentées dans la figure 19 de la manière ordinaire, la concentration S aug- mentant dans la direction ascendante. Alors {, représente la température du maximum de solubilité, {, celle du miminum, t, le point de fusion du sel hydraté ou anhydre ?).
Si, pour les hydrates, nous voulons exprimer également les deux branches de la courbe I (relative aux dissolutions plus riches en sel que l’hydrate), il faudra recourir à la repré- sentation que j’ai suivie dans le Chapitre I, en vue de conserver la comparabilité avec les courbes des tensions, — c’est-à-dire, faire accroître la valeur de S dans la direction descendante. Les branches des dissolutions saturées, dont l’existence paraît possible à présent, se trouvent réunies dans la figure 20. La ligne AB indique la concentration de l’hydrate.
Peut-être n’y aura-t il aucun sel hydraté qui fournisse
1) Ainsi l’isobutyrate de chaux n'appartient pas à cette catégorie. Le maximum à 80° résulte du changement des cristaux à 5 HO en d’autres a 1 H,0: et M. le Chatelier prétend, à juste titre, que l’étude soigneuse devra démontrer ici un changement brusque dans la direction de la courbe de solubilité. Pour le sulfate de chaux, au contraire, j'ai donné (p. 279) une preuve qu'il n’y a pas changement dans l’état d'hydratation.
2) Pour un sel anhydre, cette représentation ne peut être faite qu'en désignant par $ la quantité du sel, non sur 100 parties d’eau dans la dis- solution, mais dans 100 parties de la dissolution elle-même. Autrement S serait æ pour le point de fusion.
d2s. Les branches Ila et Ilc ne diffèrent que dans le signe de en Il n’est
toutefois pas encore certain si cette différence existe pour toute leur étendue. Autrement, elle présenterait un critère commode dans les cas où la branche IIb n’est pas connue.
348 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
toutes ces branches. Pour les sels anhydres les branches Ia et Ib ne peuvent exister.
On pourrait se demander si les branches Ib et ITb ne seraient pas susceptibles de se rencontrer en un point de AB, de sorte qu’on obtiendrait une région fermée, autour de laquelle s’étendrait le champ des dissolutions non saturées. Alors la solution aurait au point de rencontre la même composition que l’hydrate, et le phénomène de dissolution se changerait de nouveau en fusion. Mais, aussilongtemps qu’on peut admettre que la fusion absorbe de la chaleur, le liquide existera au-dessus, le corps solide au-dessous du point de fusion; et comme cette condition ne serait pas satisfaite dans la figure, la rencontre des branches IIb et Ib ne peut être attendue.
Les nouvelles branches indiquées pour les courbes de solubilité rendent nécessaire, finalement, de considérer encore pour un moment les tensions. La figure 21 donne un aperçu des changements de direction que la courbe des tensions pourra éprouver en tenant compte des cas nouveaux.
Les branches Ila et IIb de cette courbe sont celles que nous avons étudiées amplement. Comme l’indiquent les courbes des tensions des dissolutions à concentration constante, elles représentent toutes deux des dissolutions saturées dont la teneur en eau augmente à mesure que la température s'abaisse. Elles correspondent donc ensemble à la courbe Ila de la solubilité (fig. 20).
S1 la concentration s'accroît de nouveau à partir du point À, il faut que la courbe des tensions des dissolutions saturées soit en ce point tangente à la courbe de la dissolution qui possède une concentration égale à celle existant au point du minimum de solubilité. La branche Ilc devra s’abaisser beaucoup plus fortement que IIb, pour s’avancer vers des dissolutions plus concentrées ([Ic fig. 21 correspond à ITIb fig. 20).
S'il se présente à une température plus basse un maximum de solubilité, la branche Ilc doit avoir au point B pour
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 349
tangente la courbe de tensions d’une dissolution ayant la . concentration du point maximum.
A partir du point B, la branche IId, qui sera analogue à ITc fig. 20, se tourne de nouveau vers les courbes des disso- lutions plus diluées. Cette branche pourrait être ascendante (comme Ila) ou descendante (comme Ib). Le dernier cas est le plus probable, parce que la courbe Ila ne se rencontre que si le changement de concentration est fort rapide, ce qui n’a pas lieu ici.
Quant à la courbe Ia, elle se dirige, en partant du point de fusion, vers des concentrations plus grandes. Si jamais un retour vers des dissolutions plus faibles devenait possible, la courbe aurait au point C pour tangente la courbe de la dissolution ayant la concentration du point maximum. La branche Ib qui commencerait en ce point serait descendante, parce que la chaleur de transformation de la formule 8a (voyez p. 307) est toujours positive lorsque c > x. La valeur de : est donc positive, aussi bien pour la branche Ib que pour Ia. Toutefois, la branche Ib descendra beaucoup moins vite que la branche Ia.
CÉNWCLUSTONES:
Le Chapitre I fait connaître toute la série des combi- naisons solides entre CaCl, et H,0 qui peuvent exister entre les températures de — 55° et + 260°. Ce sont: CaCl, .6 H,0, CaCl, .4H,0 a, CaCl, . 4 H,0 6, CaCl, .2 H,0, CaCl, . H, 0.
Les deux hydrates à 4H,0 ont été distingués pour la première fois, l’hydrate à 2 H,0 n'avait jamais été isoié de la dissolution pure, l’hydrate à 1 H,0 était inconnu.
Les solubilités de ces hydrates ont été déterminées jusqu’à leurs points de fusion, ou jusqu'aux températures de trans- formation en d’autres hydrates.
350 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Parmi ces hydrates, celui à 6 H,0 présente la particularité qu’il peut exister au sein de dissolutions contenant une plus petite quantité d’eau qu’il n’en contient lui-même. La courbe de solubilité pour cet hydrate présente deux branches, qui se rencontrent dans le point de fusion.
Cette observation vérifie les conclusions tirées d’une for- mule de M. van der Waals et établit l’analogie parfaite des hydrates salins avec les hydrates de gaz.
Le Chapitre II contient une revue générale du phéno- mène de la solubilité des sels. Elle conduit à ce résultat, que (s’il n'intervient pas de causes perturbatrices) des complexes liquides entre un sel et l’eau sont possibles en toutes pro- portions: chacun au-dessus d’une certaine température, à laquelle ce liquide déposera : soit la glace, soit le sel anhydre, soit tel hydrate solide.
Les courbes de solubilité de tous ces corps solides forment une série enchaînée, entre le point cryohydratique et le point de fusion du sel anhydre.
Chaque corps solide (hydrate, glace, ou sel anhydre) a une courbe de solubilité distincte. Ces courbes se coupent deux à deux à angle vif dans les points de rencontre, où les deux corps peuvent être en équilibre avec la même dissolution. Ces résultats sont entièrement opposés aux opinions, généra- lement adoptées, de l’existence d’un même hydrate dans l’état liquide que dans l’état solide, et de la transformation gra- duelle de l’état d’'hydratation du sel dans la dissolution, lors de la formation d’un autre hydrate.
Un aperçu historique et critique du développement de ces idées démontre qu’elles sont entièrement inacceptables, et qu'il faut admettre dans l’état liquide un équilibre spécial entre les molécules du sel et de l’eau, équilibre différant également de celui du sel anhydre et de celui de tous les hydrates possibles, et déterminé entièrement par la tempé- rature et la concentration.
L'étude des différents hydrates de CaCl, ayant présenté
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 851
bon nombre d'exemples d’équilibres instables, une revue systématique est donnée des phénomènes de sursaturation simple et multiple.
Le Chapitre III contient la description des méthodes suivies et des résultats obtenus dans la détermination des tensions de plusieurs systèmes contenant CaCl, et H,0 entre — 15° et + 205°, savoir:
mélanges de deux hydrates, dissolutions sans sel solide, dissolutions saturées en présence de différents hydrates.
Les courbes de tension pour les dissolutions ont été com- parées à la courbe générale déduite de la formule de M. van der Waals pour l’équilibre de deux corps en trois phases. Il en résulte que la courbe pour l’hydrate CaCl, . 6 I, O présente non seulement la branche I correspondant aux dissolutions qui contiennent plus de sel que l’hydrate, et la branche IT pour les dissolutions ordinaires qui contiennent plus d’eau que l’hydrate, — mais qu’en outre cette branche IT se compose de deux parties Ila et ITb, situées des deux côtés d’un point à tension maximum; la première descendant de ce point jusqu’au point de fusion, la deuxième descendant vers les tem- pératures, inférieures au point de tension maximum. Cet exemple réalise pour la première fois, chez un même hydrate, les trois branches prédites par la théorie. Les courbes des autres hydrates ne font voir que les branches ITb; celle de CaCl, .2 H,0 indique aussi le commencement de Ia.
Le Chapitre IV considère les points d’intersection des différentes courbes des tensions.
Dans ces points se rencontrent non seulement deux courbes pour les dissolutions saturées de deux hydrates, mais 3° la courbe de l'équilibre de ces deux hydrates avec la vapeur d’eau, et 4° la courbe pour l’équilibre de ces mêmes hydrates avec la dissolution seule. Les courbes de cette dernière caté- gorie sont toutes des courbes de fusion compliquée. Leurs directions ont été établies. |
3592 M. H. W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
Ces points de rencontre sonts des points quadruples, dans lesquels coexistent deux hydrates, la dissolution et la vapeur d’eau.
L'étude des transformations qui s’accomplissent entre ces quatre phases, quand on fournit ou enlève de la chaleur, permet d'établir les conditions nécessaires pour que ces points soient des points de transition pour tel ou tel hydrate ou pour le liquide. _ En considérant les équations thermodynamiques pour les courbes d'équilibre de deux hydrates avec la vapeur d’eau, ou bien avec la dissolution, on à examiné la possibilité d’une rencontre de deux courbes de la première ou de la seconde catégorie, et par conséquent la compatibilité ou l’incompati- bilité, soit de deux hydrates non successifs, soit de deux modifications d’un même hydrate.
Le Chapitre V contient une étude des tensions observées, au point de vue de la thermodynamique.
Pour les systèmes composés de deux hydrates de CaC!, et de la vapeur d’eau, la règle déduite par M. Frowein à savoir, que le rapport L de la tension du système à latension de l’eau pure doit s’accroître avec la température, a été confirmée.
Pour les tensions des dissolutions sans sel solide, la loi de M. Kirchhoff a été reconnue exacte pour toutes les dissolutions étu- diées ; les doutes énoncés à l’égard de sa validité ont été écartés.
Pour les concentrations fortes des dissolutions de CaC!, la loi de Wüllner n’a aucune valeur.
Un aperçu critique des désaccords qu’on avait cru observer entre la formule de M. Kirchhoff pour les tensions des dis- solutions saturées des sels et les expériences, fait voir que ces désaccords n'existent pas.
L'avantage de la formule modifiée de M. van der Waals sur la formule originelle de M. Kirchhoff est démontré, en ce qu’elle indique pour les dissolution des sels : les différentes branches de la courbe des tensions, qui se sont présentées ensemble dans le cas de l’hydrate CaC!, . 4,0.
EXPÉRIMENTALE ET THÉORIQUE ETC. 39
Au moyen des déterminations thermochimiques de M. Thomsen, la formule de M. van der Waals est vérifiée et trouvée d’accord avec les observations sur les dissolutions saturées de CaCl, .6 H,0. Un accord qualitatif a pu être établi pour les hydrates inférieurs.
Un examen des données sur les chaleurs de dissolution des différents sels, et à différents degrés d’hydratation, conduit à une représentation générale de ces chaleurs de dissolution en fonction de la quantité d’eau, en partant du sel anhydre ou de l’hydrate fondu. Cette courbe générale représente également les chaleurs de dissolution pour les deux catégories de sels de M. Thomsen, et pour les sels qui semblaient faire exception. Elle permet de tirer quelques conclusions, au moyen des équations de MM. Kiüirchhoff et van der Waals, tant à l’égard des changements de signe qu’on peut attendre dans la valeur
de ?_ sur la branche IIb de la courbe des tensions des dis- TT
solutions saturées, qu'à l’égard de la probabilité de l’existence ou de la non-existence de la branche Ila de cette courbe, et de son étendue dans le cas des sels anhydres ou hydratés.
Le Chapitre VI considère au point de vue de la ther- modynamique les variations de concentration des dissolutions saturées.
La formule originelle de M. van der Waals est modifiée pour la rendre applicable au cas des dissolutions salines. Les avantages qu’elle présente sur la formule approximative de M. le Chatelier sont démontrés. L'application numérique aux dissolutions saturées de CaCl, .6 H,0 donne un accord satisfaisant.
Pour les dissolutions ordinaires, qui contiennent plus d’eau que les hydrates solides ou les sels anhydres, on arrive à la conclusion générale que: la variation de la concentration avec la température est de signe contraire à celui de la chaleur de dissolution à saturation, ce qui s'accorde avec l’énoncé de M. le Chatelier. Pour les dissolutions qui con-
354 M. H, W. BAKHUIS ROOZEBOOM. ÉTUDE
tiennent moins d’eau que les hydrates, on parvient à la con- clusion inverse.
La courbe générale, déduite au Chap. V pour les chaleurs de dissolution dans l’eau, permet aussi de déduire les cha- leurs de dissolution dans une quantité infinie de la dissolution saturée, qui entrent dans la formule nouvelle.
Une étude des changements de signe que peuvent éprouver ces chaleurs de dissolution, en allant du point de fusion du sel anhydre ou hydraté vers des températures plus basses et des concentrations plus faibles ou plus fortes, rend intelli- gibles les rapports des différentes courbes de solubilité, as- cendantes ou descendantes, qu’on avait rencontrées jusqu'ici dans l’étude des sels anhydres ou hydratés, et en fait prévoir encore d’autres.
Enfin, il est démontré qu’une différence fondamentale existe entre ces changements graduels de la courbe de so- lubilité pour un même hydrate, et le changement brusque dans les points de transformation.
ERRATA.
page 203 ligne 27 au lieu de n + 1 courbes lisez: n + 2 courbes. : » » 28 y » n n+1lsystèmes |, n+ 72 systèmes.
UNE DISTRIBUTION DU CHAMP PONCTUEL EN GROUPES IN VOLUTIFS,
PAR
J. DE VRIES.
Dans un Mémoire: Sur la transformation conjuguée 1), M. P. H. Schoute a étudié la transformation involutive birationnelle qui, pour ur faisceau de courbes du troisième degré à sept points de base fixes, est déterminée par les deux points de base variables; il a montré, en outre, que cette correspon- dance peut s'établir aussi chez des faisceaux de courbes de degré plus élevé, si, dans la base fixe, on admet des points multiples. Les pages suivantes contiennent des considérations sur les groupes de points de base des faisceaux de courbes
planes, qui sont compris dans un réseau à Ln(n + 3) — 2 points fixes.
1. Toutes les courbes X, qui ont 1 n(n + 3) — 2 points b communs forment un réseau ((X,)); celles des courbes de ce réseau qui ont en outre un point f commun appartiennent à un faisceau (K,), dont la base est composée des points b, du point 8 et de 1(n — 1)(n — 2) points B, qui forment avec B un groupe en involution (5). Lorsque les ‘courbes X, déter- minées par un point 7 présentent en ce point une tangente commune, deux points $, f” y sont réunis en un ,point de
1 Association française pour l'avancement des sciences, Congrès de Montpellier, 1879.
356 J. DE VRIES. UNE DISTRIBUTION DU CHAMP
coïncidence”; un pareil ,groupe de coïncidence” (;) possède alors encore !n(n—3) ,points de ramification” +.
La courbe B, du réseau, qui possède en b, un point double, fait partie de tous les (X,) pour lesquels $, dans une direction déterminée, est venu coïncider avec b ; elle contient donc les points 5” qui avec bd, constituent des groupes (5). Par les tangentes au point double b, sont déterminés deux groupes de coïncidence; le lieu géométrique C des points de coïncidence 7 passe donc deux fois par b, et a en commun avec B, les tangentes au point double. Sur chaque K; du réseau les groupes (5) forment une involution J1;, où s=—!n(n— 3) + 2, involution produite par chacun des fais- ceaux de ((X,)) et possédant 2(g + s— 1) points de coïn- cidence 1). Outre ces 2(n — 1)(n — 2) points, la ,courbe de coïncidence” € a en chaque point bd deux points com- muns avec la X, dont il s’agit; elle est donc du degré [2 (n — 1)(n — 2) + (n — 1)(n + 4)]:2=3 (n — 1).
2. Lorsque entre les faisceaux (K,) et (K,)”', qui dans ((K»)) sont désignés par (5) et (5)”, il existe une correspon- dance (p, q), ils coupent la ligne arbitraire L suivant deux séries en correspondance (np, ng), dont les n (p + q) points de coïncidence sont des points d’intersection de courbes adjointes. Comme, sur une ligne menée par b,,la correspon- dance dégénère en une ((n —1)p,(n — 1)q), la courbe du degré n(p+q), qui est produite par les faisceaux, passe (p + qg) fois par chaque point bd. De même on reconnaît qu’elle passe respectivement g et p fois par les points (6)' et (8). Par la transformation qui adjoint à un point f les autres points du groupe (5), cette courbe se convertit en elle-même.
Si, pour le cas q —p, la K, commune aux deux faisceaux correspond p fois à elle-même, la courbe engendrée dégénère
PR
1} J. de Vries. Over kwadrupelinvoluties op bikwadratische kromrmen . (Versl. en Med., 3de reeks, deel IV, bl. 322): Involutions quadruples sur courbes biquadratiques (Arch. néerl., T. XXIII, p. 110). g représente ici le genre de la courbe-support.
PONCTUEL EN GROUPES INVOLUTIFS. 357
en une Kw», qui passe p fois par les points à et ne contient plus les groupes (5) et (3)”.
3. La correspondance de (K,) et (K,)”' est-elle réglée de telle sorte que des courbes adjointes se coupent sur la courbe \Cralors on à g—p=?21{(n
l)(n — 2), vu que, en dehors de la base fixe, C est coupée par chaque K, en 2 (n—1) (n—2) points. De la courbe engendrée se détachent la Ky commune aux deux faisceaux, qui doit être comptée 2(n — 1)(n — 2) fois, et la courbe C, qui compte double; il reste une courbe V du degré 4n(n — 1)(n — 2) —2n(n—1) (n—2)— 6(n—1)—=2(n— 1)(n — 3), que j'appelle ,,çcourbe de ramification”, parce qu’elle contient les points formant, avec les points ;, des groupes complets. Les trois courbes passant ensemble 4(n — 1)(n — 2) fois par b,, et C et K, fournissant ensemble 4 + 2 (n — 1) (n — 2) passages, la courbe V a, dans les points de base fixes, des points multiples de l’ordre 2 (n — 3).
Les 2n(n —3) points g confondus en b, appartiennent à un égal nombre d’intersections de B, avec C; ces deux courbes ayant, en chacun des autres ! n (n + 3) — 3 points b,(n°+3n — 6) points communs, il s’en trouve 6 en b,, ce qui montre de nouveau qu'aux points doubles B, et C ont des tangentes communes.
4. Si l’on adjoint l’une à l’autre deux courbes X,' et K,", qui se coupent sur la ligne L, les faisceaux forment une correspondance (n, n), dans laquelle leur courbe commune correspond n fois à elle-même. Les points de Z constituent donc des groupes (5) avec les points d’une courbe M du degré (n?— 1), qui passe n fois par les points b et, outre sa correspon- dance avec L, correspond encore 1! n(n — 3) fois à elle-même.
Des intersections de M et L il y en à 83 (n — 1) qui sont situées sur C; les (n—1l)(n—2) autres se correspondent deux à deux et sont les couples neutres de l’involution du degré n et du rang 2 produite par ((KX,)) sur L.
358 J. DE VRIES. UNE DISTRIBUTION DU CHAMP
Si L passe par b,, (K,)' et (K,)"”' sont en une (n — 1,n—1), tandis que leur ÆX, commune fait (n — 1) fois partie de la courbe du degré 2n(n — 1) engendrée par ces faisceaux; ZL est alors convertie en une courbe du degré (n? — n — 1), qui passe (n — 2) fois par b, et (n — 1) fois par chacun des autres points b.
Cet abaissement du degré de la courbe M provient du fait qu'à b, correspond la courbe B,, comme lieu géométrique des points ÿ’ qui forment avec db, des groupes (8).
On trouve, de la même manière, que la M, en laquelle est transformée la ZL menée par b, et b,, dégénère en B,, B, et une courbe du degré (n°— 2n — 1), qui passe (n — 3) fois par b, et par b,, (n — 2) fois par chacun des autres points b.
5. Des (n?— 1)? points d’intersection de M, et M,, en lesquelles Z, et L, sont transformées par les groupes (5), il y en an? en chacun des L(n —1)(n + 4) points de base fixes, tandis que 1 (n — 1)(n — 2) forment un groupe (6) avec l'intersection de L, et L,. Les ! n (n — 3) (n?— 1) autres points peuvent être rapportés à (n°— 1) groupes, dont chacun est complété en un (5) par un point d’intersection de L, avec M, et un point d’intersection de L, avec M,. Un faisceau de rayons n'est donc pas transformé en un faisceau de courbes; c’est là une conséquence du fait que M, correspond avec M, + L,, M, avec M, + L..
Par deux points & et G il passe } (n — 1)?(n — 2)? courbes M; celles-ci résultent par transformation des lignes Z qui relient les points du groupe déterminé par « aux points de (B). Si les deux points appartiennent à un groupe (5), chaque ligne menée par 2 points de (5) détermine une M, qui con- tient les points donnés; le nombre des courbes est alors: fs Lo.)
9 :
6. Les courbes de ((K,)) qui passent par le point o déter-
PONCTUEL EN GROUPES INVOLUTIFS. 359
minent sur la ligne Z une involution du degré n, avec 2(n—1) points de coïncidence; le lieu géométrique (0, L) des groupes de (n — 1) points en lesquels la courbe K,, qui touche ZL en p, coupe en outre le rayon op, passe donc 2(n—1) fois par o et est du degré 3 (n — 1). Chacune de ses intersections avec L est évidemment un point double sur une K» du réseau. L’involution /, dégénère, sur une droite menée par b,, en une J,-1, ce qui abaisse de deux unités le degré de (0, L): le lieu géométrique des points doubles de ((K)) passe done deux fois par chaque point b et est du degré 3 (n — 1). Comme chaque X, à point double d détermine un faisceau dont les courbes ont en d deux points communs, d est l’un des points 7: le lieu géométrique des points doubles est donc identique à la courbe de coïncidence.
7. En résumant ce qui précède, on peut donc dire: ,Lors- »qu’un point de base d’un faisceau de courbes planes géné- ,rales du degré n, à ! (n — 1)(n + 4) points de base fixes, »parcourt une droite, les autres points de base, variables, ,décrivent une courbe du degré (n° — 1), à points multiples ,de l’ordre n dans la base fixe; si la droite en question passe »par l’un des points de base fixes, la courbe K,, qui possède ,en ce point un point double, fait partie de la courbe cor- »respondante. Lorsqu'un point de base parcourt la courbe du degré 3 (n — 1) qui contient les points doubles de courbes »Kn et passe deux fois par la base fixe, les autres points de »base décrivent une courbe du degré 2(n°—1)(n — 3), à »points multiples de l’ordre 2 n(n — 3) dans la base fixe.”
8. Lorsque n points b sont situés sur une droite K, les 4 (n--1) (n + 2) — 1 autres points b forment, avec 4 (n—2)(n—3) points €, la base d’un (X%7-1). Tout point $ pris sur K, détermine un (X,), qui est composé de À, et de (K,-_1), de sorte que le groupe (5) indiqué par est composé des 1 (n-—2)(n— 3) points « et de (n — 2) points arbitraires de _ ARCHIVES N£erLaNpaises, T. XXIIL. 24
360 j. DE VRIES. UNE DISTRIBUTION DÙÜ CHAMP
K,. À chaque point c correspond donc la droite entière A, à chaque point de.X, correspondent les points c et en outre la droite X, elle-même. La courbe C dégénère alors en K, et en une courbe ©” du degré (3n — 4), tandis que M, après détachement de la droite K,, se trouve être une courbe du degré (n°— 2), qui passe (n — 1) fois par les points b situés sur À ,, n fois par les autres points d et une fois par les points c. Si L est menée par un point de base b, situé sur K,, M est du degré (n?— n —2) (vu que la courbe B, fait partie de la courbe correspondant à L), et possède au point db, un point multiple de l’ordre (n — 3), aux autres points D situés sur À, un point multiple de l’ordre (n — 2), aux points b placés en dehors de À, un point multiple de l’ordre (n—1). Si, au contraire, L passe par un point b non situé sur KX,, celui-ci est, de même que les points de base sur À,, un point multiple de l’ordre (n — 2) de la courbe M du degré (n?— n — 72), tandis que les autres points à sont des points multiples de l’ordre (n — 1).
Si np—1}(p—1)(p — 2) points de base de ((X,)) peuvent être reliés par une K,, les ! (n—p)(n—p+3)—1 autres points de base déterminent un (X,-,), à la base duquel appartiennent en- core + (n — p — 2) (n—p —1) points c. Un point $ sur K, forme alors un groupe (B) avec les points c et 1 p (2n — p -—3) points quelconques de X,; à chaque point c correspond la courbe K,. La ligne arbitraire Z est alors transformée en une courbe du degré (n?— p° — 1), vu que la À, correspondant à chaque point d’intersection de L et K, appartient p fois à M.
,Lorsque np—1(p—1)(p—2) points de la base d’un ,((Kx)) sont situés sur une XK,, une ligne Z est transformée ,»par les groupes (5) en une courbe du degré (n°? — p° — 1), laquelle passe (n — p) fois par les points de base situés sur ,Kp, n fois par les autres points de base et p fois par les ypoints c qui forment, avec les points de base placés en dehors de K», la base d’un (K,-,). Si L contient un point b, ,la courbe correspondante dégénère en la X, à point double à
PONCTUEL EN GROUPES INVOLUTIFS. 361
et en une courbe du degré (n°?-— p?— n — 1); si L passe par un »point c, K, fait partie de la courbe obtenue par transformation.”
9. Le lieu géométrique N des points $, G', situés en ligne droite avec un point o, est touché en o par les droites qui joignent ce point aux 1! (n — 1)(n — 2) points du groupe (f) auquel o appartient, et contient sur chaque rayon issu de ce point les couples neutres de la 7? produite par ((K,)), de sorte que N est du degré À (n — 1)(n — 2). Le rayon ob,, en dehors de o et des 1(n — 2) (n — 3) couples neutres de la 1°_, déterminée par ((X>)), est encore coupé par N dans les (n — 2) points qu'il à en commun avec B, et dont chacun, combiné avec b,, remplace l’un des couples de points qui manquent; V passe donc (n — 2) fois par chacun des 1{n+4) (n — 1) points de base du réseau.
Lorsque o parcourt une droite À, les différentes courbes N ont en commun les points multiples de l’ordre (n — 2) et en outre les couples neutres de la 1} produite sur À, done,
en tout,
1(n + 4)(n—1l)(n — 2)? +(n—1)(n — 2) —
= l(n—1)(n—2)(n? + 2n—6) points. Elles forment un système de courbes dont 1(n—1)(n—2) passent par le point arbitraire f, à savoir, celles correspon- dant aux points d’intersection de À avec les droites qui joignent B aux points de (5). Toutes les courbes N déter- minées par rapport à ((X;)) forment un système où deux points quelconques « et & déterminent ( LE Ve HT courbes; celles-ci correspondent aux points o situés sur un couple de droites joignant respectivement « à un point de (œ) et f à un point de (B). |
10. Sur une courbe Q du degré n (p + q), qui résulte d’une
correspondance (p, g) de deux faisceaux appartenant au 24*
362 j. DE VRIES. UNE DISTRIBUTION DU CHAMP
réseau, et qui est par conséquent transformée en elle-même par les groupes (5), ces groupes déterminent une involution Ts (où s = L(n?—3 n + 4)), dont respectivement p et q groupes sont produits par une X, de l’un des faisceaux ; cette invo- lution n’est donc pas de même espèce que celles que j’ai considérées /.c. En dehors de la base de (X,)), Q est encore coupée par la courbe de coïncidence C'en 3 (n — 1) n(p+gq)— —(n+4{n—1)(p +q = 2(n—1)(n—2)(p + q) points qui sont les points de coïncidence de l’involution J..
Avec une N, Q a encore en commun, outre les points b,
&(n— 1) (n —2)n(p + q) — 4 (n +4)(n—1)(n—2)(p+9)= (n—1)(n-—2)? (p + g) points, qui forment +(n —1)(n—2)? (p + q) couples de la JZ; situés dans l’alignement du point 0; la courbe d’involution R est donc de la classe 1(n — 1) (n — 2)? (p + 9).
Lorsque, dans deux faisceaux reliés par une (p, p), la K% commune correspond p fois à elle-même, ces faisceaux pro- duisent une courbe P du degré np, ayant en b des points multiples de l’ordre p, coupée par par C en ses 2 p(n—1) (n—2) points de coïncidence, et par une WN en !p(n — 1)(n — 2)? couples de la Z; que fournissent les tangentes de À menées par le point 0.
Pour p—=1, P devient une K, du réseau et 1; peut être produite par chacun des faisceaux de ((K,)) ; aussi les nombres ci-dessus trouvés donnent-ils, pour p — 1, les valeurs déduites antérieurement (Arch. néerl., XXIII, p. 109 et 110).
Une droite L et la courbe M, en laquelle cette droite est transformée par (5), peuvent être considérées ensemble comme une courbe dégénérée P du degré n°? ; l’involution déterminée sur elle est alors composée d’une ponctuelle et d’une I;(t= L(n—1)(n — 2) Des |
3(n—1)(n?—1)—n(n+4)(n—1)={(n--1)(n—1)(2n?—A4n—3)
intersections de M avec C, les 3 (n —- 1) points de coïncidence de (B) situés en même temps sur Z ne sont pas des points de
PONCTUEL EN GROUPES INVOLUTIFS. 363
coïncidence de 1,; pour celle-ci, le nombre des coïncidences est donc 2 (n?— 1) (n — 3).
Avec N, M a
Sin? —1)(n —1)(n—2) — in +4)(n—1l)n(n —2)—
= l(n—1l)(in—2)(2n? — 4n —3)
points communs; parmi ces points, il y en a ? (n—1)(n—2) qui forment des couples neutres avec les intersections de ZL et N; les autres forment les couples de J; qui sont situés en ligne droite avec 0: la courbe d’involution est donc de la classe L(n?— 1)(n — 2) (n — 3).
,L'involution des groupes (5), sur la courbe en laquelle ils transforment une droite, à 2 (n?— 1) (n — 3) points de coïn- »tidence, tandis que les côtés des polygones déterminés par Ces groupes enveloppent une courbe de la classe & (n°? — 1) ,(n — 2) (n — 3)”
11. Lorsque les courbes d’un ((K;)) ont en À un point multiple de l’ordre /, le degré de la courbe À, qui contient les points 5 formant avec À un groupe (5), peut être obtenu par les considérations suivantes. Si à chacune des courbes d’un (X4)' appartenant au réseau on adjoint les Z courbés de (K#)' qui en À ont avec elle une tangente commune, ces faisceaux en {/, |) produisent une courbe du degré 2 nl, qui passe 2 #1 fois par chaque point de base multiple de l’ordre #, mais (2 /? + 1) fois par 2; en effet, parmi les coïncidences des ponctuelles que les faisceaux déterminent sur un rayon issu de À, figure aussi À lui-même, Comme point de contact de deux courbes accouplées. Or, comme la courbe commune aux faisceaux appartient ! fois à leur produit, À est du degré nl, passe Æ! fois par un point de base multiple de l’ordre k et (12 + 1) fois par 1.
Une © produite par correspondance (p, q) de 2 faisceaux passe £(p + q) fois par un point de base multiple de l’ordre k; cela ressort de ce que la (np, nq) de deux ponctuelles col- locales dégénère en une ({(n — Æ)p, (n — k) q), dès que le
364 J. DE VRIES. UNE DISTRIBUTION DU CHAMP
support contient le point multiple de l’ordre Æ£. La courbe J, en laquelle une droite L est transformée par les groupes (5), a done un point multiple de l’ordre n£ dans chacun des points multiples de l’ordre Æ de la base. Si L passe par le point de base À, point multiple de l’ordre /, on ap—q=—n—l et le degré de M descend à (n? — nl--1); la courbe passe (n 1— 1? — 1) fois par À, et (n —1)k fois par un point d mul- tiple de l’ordre #. L’abaissement du degré, bien entendu, résulte encore du détachement de la courbe À, qui corres- pond à À; il en ressort de nouveau que cette courbe est du degré nl et à point multiple de l’ordre (!{? + 1) en 1.
12. La 1?_,, que ((X:)) détermine sur une L menée par À, possède !(n — l— 1) (n — 1 — 2) couples neutres situés aussi sur M; les autres points communs à ZL et à M en dehors de À (le nombre s’en élève à (n?—nl—1)—(nt— 1? — 1) — —(n—l—71)(n—1l—2)—=3(n — 1} —2) sont déterminés par la courbe de coïncidence; comme Cest du degré (3 n—3), elle a donc en À un point multiple de l’ordre (3 ! — 1).
Quand la base du réseau est composée de 4, points simples, i) points doubles, .:4.04 im points multiples de l’ordre m, C a avec chaque X,, en dehors de la base, p—=3n(n—1)—
mt — Zk(3k—1l)%x points communs. Si la correspondance de 1
2 des faisceaux compris dans ((K,)} est réglée de façon que des courbes conjuguées projettent le même point de C, la courbe du degré 2np, que ces faisceaux produisent, est com- posée de p fois la X, à compter dans chacun des deux fais- ceaux, de deux fois C et de la courbe de ramification V;
celle-ci est donc du degré 3(n — 1)(n?— 2)— n ZKk(3k—1jùx 1
et passe kp—2(3£— 1) fois par un point b multiple de l’ordre k.
13. Si la base de ((K»)) possède un point + multiple de
PONCTUEL EN GROUPES INVOLUTIFS. 365
l'ordre Æ et un point 4 multiple de l’ordre !, le (K,) déter- miné par un point de x dégénérera en cette droite et en un (Kn-1) à points multiples de l’ordre (£— 1) et (/— 1) en x et À, dès qu'on aura L(n?+3n—4)—{(%+1)=1(n—1)(n+2)—1 ou &+l—=n. Chaque point $ de x À forme alors avec quelques points arbitrairement choisis de cette droite, joints aux points, autres que b, de la base de (K:-1), un groupe (5), de sorte que #4 fait partie de la courbe M. Le genre de la K% étant
g=ti(n—2)(n—1)—Z=1K(k—1)iùà 2 ébcelur de la K, 7
Dm —3)—) À 3 RCE — Die 1)—G—1)—
—!(n— 1l)(n—2)—Z3#%(k— 1j, 2 :
on voit que ce nombre caractéristique est le même pour les deux courbes.
En étendant ce raisonnement, on arrive à la conclusion générale suivante :
,Lorsqu'à la base de ((K,)) appartiennent k = 1 p(p + 3) homes multiples des ordres / , 1,,:..:.. 1, et qu'on a
À
>2G=np—1(p—1)(p — 2), la K, qui unit ces À points 1
,est comprise p fois dans les courbes en lesquelles se trans- »forme la droite Z, de sorte que la courbe M proprement Phiesestalors du desré (n?=—p? — 1).
En effet, comme points multiples de l’ordre (1; — 1), les h points en question remplacent ! /; (1; — 1) points de la base de (K»-»), c’est-à-dire /; de moins que lorsqu'il sont des points multiples de l’ordre /; de ((K:}). Or, si l’on a
z Ur stp 152)
1
et par conséquent
366 J. DE VRIES. UNE DISTRIBUTION DU CHAMP ETC.
À 2 a aan re ere 2
les points b déterminent un faisceau de courbes du degré (n — p), qui passent une fois de moins par les points À que ne le font les courbes KX,. Le genre de la K,_> est
,
mn : k Lu p— 1) Gp D) 5 LEE) à 3 =
[Lu 1D@—D—2184— D]: (P—1 (9, 2
donc, inférieur de !(p—1)(p—2) unités au genre des
courbes K}.
L'AUXANOGRAPHIE,
OÙ LA
MÉTHODE DE L'HYDRODIFFUSION DANS LA GÉLATINE APPLIQUÉE AUX RECHERCHES MICROBIOLOGIQUES
PAR
M. W. BEYERINOCK.
Pour l’étude des phénomènes biologiques des microrga- nismes !), il importe évidemment, avant tout, d'acquérir des notions certaines concernant les matières qui peuvent servir à leur développement et à leur multiplication. A la vérité, quand on trouve des formes nouvelles, il est ordi- nairement facile de décider quel mélange de matières nutri- tives en a rendu, dans le cas donné, la découverte possible; l'établissement de cultures permanentes, dans des mélanges ahalogues, ne présente alors aucune difficulté. Mais lorsque, pour des espèces déterminées, on veut obtenir une connais- sance plus approfondie des matières assimilables, on se heurte à toute sorte d'obstacles. Jusqu'ici, on cherche habituellement à résoudre la question en introduisant les substances à étudier dans le liquide ou la gélatine employés pour la culture, et en déterminant ensuite, par la pesée ou le dénombrement des cellules, ou par l’estimation de l’étendue des colonies ou des lignes d’inoculation, la quantité de matière vivante nou- vellement formée. L'examen des publications spéciales montre
1) Conformément à l’usage actuellement établi, j'entends par rmicrorga- nismes” les formes qui peuvent être cultivées dans une gélatine nutritive.
308 M. W. BEYERINCK. L’AUXANOGRAPHIE.
combien sont rares les résultats avérés obtenus de cette ma- nière. À quelle pauvre moisson est-on réduit, par exemple, en étudiant les nombreux mémoires qui ont été écrits sur les phénomènes de la nutrition de la levûre de bière et du ferment du vin! A part les découvertes classiques de Pasteur et de Cohn sur les éléments inorganiques nécessaires et sur la nature des matières azotéees assimilables pour quel” ques espèces déterminées de levûres, de bactéries et de mélanges de bactéries, les nombreuses observations dissémi- nées des auteurs postérieurs, qui se sont occupés de ce sujet, ne donnent que très exceptionnellement une satisfaction complète. Souvent le mode opératoire était trop compliqué pour que l'expérience püût être facilement répétée; d’autres fois, le contrôle de la pureté durable des cultures n’offrait pas de garanties suffisantes; ou bien il restait des doutes quant au bon choix de la concentration employée pour les matières soumises à l’examen; ou bien, enfin, les conditions dans lesquelles se faisait la comparaison de matières différentes n'étaient pas identiques sous tous les autres rapports. L’ap- plication du procédé que je vais décrire et qui est fondé sur la connaissance de deux propriétés simples des ,terrains de culture solides” pour microrganismes, permet d'éviter quelques- unes de ces influences perturbatrices. Les deux propriétés en question sont les suivantes. Primo: La gélatine et la gélose (agar-agar purifiée) ne sont pas des matières nutritives pour la plupart des microbes. Secundo: dans les couches coagulées, solides, de gélatine et de gélose, l’hydrodiffusion des matières dissoutes se fait à peu près de la même ma- nière que dans l’eau. Voici maintenant le parti qui peut être tiré de ces deux principes.
Tous les bactériologues savent que la gélatine et la gélose pures, ou leurs dissolutions dans l’eau distillée, sont de très mauvais terrains de culture pour les bactéries et les levûres, et même pour les mucédinées. Cela tient non seulement à ce que la gélatine elle-même n’est pas assimilable pour la
M. W. BEYERINCK. L’AUXANOGRAPHIE. 309
plupart des espèces et à ce qu’elle est presque absolument pure du mélange de composés azotés assimilables, tels qu’a- mides et peptones, mais aussi à l'absence plus ou moins complète des éléments inorganiques nécessaires, notamment du phosphate de potassium, et des aliments non azotés, tels que lactates et hydrates de carbone. La gélatine ou la gélose, dissoute dans l’eau distillée, présente donc ce triple caractère : et les éléments des cendres, et l'azote assimilable, et les com- binaisons non azotées s’y trouvent en quantité insuffisante pour rendre possible, au-delà d’un premier degré presque insensible, l’accroissement de la plupart des microrganismes. Pris isolément, ou deux à deux, ces trois groupes de com- posés sont également impropres au développement des mi- crobes disséminés dans la gélatine. Pour qu’il y ait accrois- sement, les trois groupes de substances nutritives doivent, de toute nécessité, être représentés simultanément.
Si donc on sème une espèce déterminée de levûre ou de bactérie dans une gélatine à laquelle manquent les éléments des cendres, les mélanges nutritifs les plus favorables, mais dépourvus de ces éléments, resteront inactifs. Dépose-t-on toutefois, à la surface d’une couche de pareille gélatine, une petite quantité des sels reconnus indispensables, alors, au bout de peu temps, chacun des germes disséminés dans le champ de diffusion de ces sels commence à se développer en une colonie, et il se forme en conséquence, sur le fond trans- parent de la gélatine, une aire opaque circulaire, nettement circonscrite, que je veux appeler un auxanogramme. J'ai choisi le mot auxanographie pour marquer brièvement la méthode elle-mênre.
D'après ce qui a été dit plus haut, il est aisé de comprendre qu'au moyen de petites modifications on peut donner à cette expérience un caractère très général; c’est ce que fera encore mieux ressortir l'exemple particulier suivant,
Le ferment ordinaire du vin ne croît qu’en présence de quantités notables de phosphate de potassium, mêlé à l’ali-
370 M. W. BEYERINOK. L'AUXANOGRAPHIE.
ment organique. En dissolvant donc de la gélatine pure dans l’eau et y ajoutant un nombre modéré de cellules de ferment, ce qui ne fait nullement perdre à la gélatine sa parfaite trans- parence, on obtient, après coagulation, un sol qui satisfait à la condition ci-dessus posée, d'empêcher le développement des cellules du ferment, sans les faire mourir !). Place-t-on maintenant à la surface de cette gélatine une goutte d’une solution contenant de la glucose et de l’asparagine, puis à une certaine distance une goutte de phosphate de potassium, et abandonne-t-on le tout à lui-même pendant quelques jours, voici ce qu'on observe en général. Ni l’aliment organique à lui seul, ni le phosphate seul, n’a été capable de faire déve- lopper les cellules en colonies; maïs, là où le champ de dif- fusion du phosphate de potassium coïncidait avec celui de la glucose et de l’asparagine, toutes les conditions du dévelop- pement se trouvaient réunies, et par suite 1l apparaît en cet endroit, sur le fond gélatineux transparent, une figure len- ticulaire opaque, de couleur jaunâtre. Cette figure est com- posée des colonies du ferment, devenues maintenant bien distinctes.
Si à la surface d’une gélatine préparée comme ci-dessus, mais préalablement additionnée d’une quantité suffisante de phosphate de potassium, on dépose, à quelque distance l’une de l’autre, des gouttes de glucose seule et d’asparagine seule, une figure opaque se forme, au bout d’un certain temps, dans le champ diffusif commun de ces deux substances, qui, cha- cune à part, sont inactives.
Place-t-on, enfin, sur un substratum de gélatine contenant à la fois du phosphate de potassium et un hydrate de car- bone, des matières azotées dont il s’agit d'étudier l’assimi- labilité, alors on voit les colonies de ferment dessiner, sur le fond transparent, soit un champ opaque circulaire, soit
1) Après des lavages réitérés à l’eau distillée, la gélatine est, tout comme l’eau distillée elle-même, mortelle ou nuisible pour un très grand nombre de microrganismes; mais le ferment du vin résiste à son action.
M. W. BEYERINCK. L’AUXANOGRAPHIE. 371
une figure annulaire. Lorsque, au contraire, la matière es- sayée n’est pas assimilable, son champ de diffusion reste parfaitement clair.
Réciproquement, en ajoutant préalablement au sol les sub- stances azotées nécessaires, on peut déterminer, d’une manière analogue, quelles matières non azotées sont aptes à produire le développement. Ici encore, quand la matière en question est assimilable, les colonies ou bien se distribuent uniformément dans le champ de diffusion, ou bien s’y placent en anneau.
La disposition annulaire des colonies est la preuve qu’au centre des champs de diffusion la concentration des matières étudiées était trop forte, ce qui a empêché le développement ou occasionné la mort des germes. Dans ces anneaux on remarque d’ailleurs encore des accroissements et décroisse- ments du nombre des colonies dans la direction des rayons, variations qui doivent dépendre d’actions particulières des matières diffusées.
Quand on fait usage de gélatine renfermant, outre l’orga- nisme, tous les matériaux nutritifs nécessaires, de sorte que les colonies pourraient s’y développer partout uniformément, il est facile, par l’application de substances toxiques ou anti- septiques, d'obtenir de celles-ci des champs de diffusion clairs, sur un fond devenu trouble tout autour.
Si, l'expérience terminée, on traite le sol de culture par l’un ou l’autre dérivé de l’aniline, colorant bien les cellules, mais non la gélatine, il en résulte, après dessiccation, des préparations de valeur durable. La simple dessiccation peut même fournir ce résultat, lorsque les espèces étudiées ne sont pas trop transparentes. Il suffit d’humecter ces préparations pour les ramener à l’état originel.
Finalement, je ferai remarquer que le principe ici énoncé est encore susceptible d'une autre application, moins étendue, il est vrai. Il s’agit des cas où un organisme exécute, seulement sous l'influence de matières déterminées, une certaine fonc-
4
tion directement visible ou facile à mettre en évidence par
372 M. W. BEYERINCK. L'AUXANOGRAPHIE.
voie chimique; des cas, par exemple, où il excrète un acide ou un enzyme, forme un pigment ou émet de la lumière, toutes actions qui ne sont pas nécessairement liées à l’ac- croissement. Dans ces cas, on peut également, à l’aide d’un substratum de gélatine, où l’organisme est contenu en grande quantité sans y produire l’action en question, décider, par l'application des matières à étudier, si elles donnent lieu, oui ou non, à la manifestation du phénomène.
J'ai examiné de cette manière, non sans succès, l’influence de substances variées sur l'émission de lumière et la sécré- tion d’acide par le Photobacterium phosphorescens, ainsi que sur la sécrétion de pigment par le Vibrio cyanogenus, l'organisme du ïait bleu. Plus tard, j'espère pouvoir revenir sur ce sujet.
Comme on le voit, la méthode décrite fournit un moyen simple d'étudier les manifestations vitales des microbes sous l'influence de certaines matières, sans qu’on ait besoin de con- naître les degrés de concentration les plus favorables de ces matières, connaissance presque indispensable pour la réussite des cultures faites dans des liquides. T,orsque, par mon procédé, la concentration a été localement portée trop loin, la diffusion dans la gélatine travaille constamment à diminuer cette concen- tration et à produire quelque part un champ annulaire aux proportions les plus favorables ; on obtient alors, comme il a déjà été dit plus haut, une tache de cellules mortes ou arrêtées dans leur croissance ou dans leurs autres fonctions, tache entourée d'un anneau de colonies actives. En outre, la méthode de diffusion dans un sol solide laisse peu d’incertitude quant à la pureté des cultures, et si l’on emploie des plaques de gélatine de grandes dimensions, plusieurs matières différentes peuvent être portées simultanément sur le même sol, ce qui rend naturellement identiques, pour toutes ces matières, les autres influences, telles que variations de température, alternatives de lumière et d’obseurité, apport d'oxygène ou évaporation d’acide carbonique et d’eau.
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ARCHIVES NÉERLANDAISES
DES
SCIENCES
EXACTES ET NATURELLES
PUBLIÉES PAR
LA SOCIÉTÉ HOLLANDAISE DES SCIENCES À HARLEM, +
ET RÉDIGÉES PAR
BOSS CrHA
SECRÉTAIRE DE LA SOCIÉTÉ, AVEC LA COLLABORATION DE
MM. D. Bierens de Haan, C. A. J. A. Oudemans, W. Koster, C. H. D. Buijs Ballot, C. K. Hoffmann et J. M. van Bemmelen.
| HARLEM LES HÉRITIERS LOOSJES. 1889. PARIS . LEIPSIG
GAUTHIER-VILLARS. | G. E. SCHULZE,
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MAINS IS
ARCHIVES NÉERLANDAISES
Sciences exactes et naturelles,
CONTRIBUTIONS À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE.
PAR
IH WIAE.K.E KR :).
La
La morve noire des Anémones, produite par le Peziza tuberosa Bull.
Dans mes Contributions antérieures, j’ai eu plus d’une fois à parler de la maladie susnommée, sans toutefois avoir pu donner à son égard des détails très précis. Jusqu’alors, en effet, je n'avais eu à ma disposition que des plantes malades, parmi lesquelles il m'avait été impossible de trou- ver des Sclérotes dans un état permettant d'obtenir par la culture la forme sporifère, le Peziza. Aujourd’hui, grâce à un obligeant envoi, venu de Harlem, de beaux Sclérotes richement pourvus de cupules bien développées, je suis à même de cultiver le champignon et, par suite de com- pléter mes communications antérieures sur ce sujet. Je dois prévenir, toutefois, qu'on ne trouvera pas ici des séries de nouveaux faits intéressants: d’abord, parce que l’étude du P. tuberosa a confirmé mon opinion, déjà souvent ex- primée, concernant la grande ressemblance de ce parasite avec le P. bulborum, cause des maladies analogues des Jacin- thes et autres Liliacées voisines; et, en second lieu, parce que la première espèce avait déjà fait, elle aussi, l’objet de
1) Voir Arch. néerl., T. XXIII, p. 1—71. ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 25
374 J. H. WAKKEB. CONTRIBUTIONS
maintes recherches. C’est ce que montrera la suite de cet article. En l’écrivant, mon but principal a été de rassembler tout ce qui est connu du champignon en question, et de combler ainsi une lacune qui n’existait pas seulement dans mes Contributions, mais se faisait remarquer aussi dans toute la littérature pathologique.
Phénomènes pathologiques.
Le mycélium du Peziza tuberosa vit sur différentes espèces d’Anemone. Dans les cultures harlemoises, on le trouve prin- cipalement sur l’espèce la plus fréquemment plantée, savoir, l’A. Coronaria avec ses variétés et ses hybrides; mais il y attaque aussi d’autres espèces du sous-genre Anemone (au sens restreint). Ainsi, par exemple, les exemplaires du cham- pignon qui me furent envoyés de Harlem avaient été re- cueillis sur des planches d’Anemone ranunculoïdes et d'A. ne- morosa. À l’état sauvage, il n’a été trouvé jusqu'ici, à ma connaissance, que sur la dernière de ces espèces. J’ignore s’il attaque aussi les espèces des autres sous-genres, par ex- emple l’A. hepatica, très communément cultivée, et l’A. Pul- satilla, qui est indigène.
Chez toutes Les espèces, les symptômes de la maladie sont essentiellement les mêmes: les feuilles brunissent de bonne heure et se dessèchent; quand on essaie de les arracher, elles n'offrent pas la moindre résistance, surtout lorsque, dans les temps humides par exemple, la base des pétioles a également été attaquée et consumée par les filaments mycéliens. Dans les feuilles elles-mêmes, le mycélium ne pénètre pas plus qu’il ne le fait chez les jacinthes dans les cas pathologiques con- sidérés antérieurement. On le trouve de nouveau exclusive- ment dans les parties souterraines de la souche; celle-ci, qui à l’état sain montre la couleur blanche de lait, ordinaire du parenchyme amylifère, prend chez les plantes attaquées une teinte grise et, au lieu de rester dure, devient molle et bientôt
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 375 facile à écraser entre les doigts. En l’examinant au micros- cope, on voit les gros filaments mycéliens s'étendre partout et dans toutes les directions entre et à travers les cel- lules, comme je l’ai représenté antérieurement, PI. IL, fig. 14, de inmon Rapport à la Société d’'Horticulture de Harlem pour l’année 1883. Si l’on poursuit ces filaments aussi loin que possible, on reconnaît qu'ils ont aussi déjà pénétré dans le tissu encore dur des parties souterraines de la plante nour- ricière, et là leurs extrémités, qui sont très obtuses, se trou- vent exclusivement entre les cellules. De même que dans beaucoup d’autres cas, les filaments mycéliens croissent donc d’abord autour et entre les cellules, avant de déterminer la mort de celles-ci.
Lorsque les plantes malades sont laissées tranquillement en terre, le mycélium donne naissance aux Sclérotes, qui sont gigantesques comparativement à ceux des autres espèces, et qui, par la structure anatomique et la couleur, se rapprochent entièrement de ceux décrits et figurés précédemment !). Il est connu que, surtout à l’état humide, alors qu’ils sont recouverts de terre, de sable, etc., 1ls ressemblent beaucoup à des rhizomes d’A. Coronaria et peuvent facilement être pris pour tels, ce qui favorise singulièrement la propagation du champignon. Avec les rhizomes des autres espèces citées du genre Anemone, au sens restreint, une pareille confusion est moins à craindre, parce que chez ces espèces l’organe en question est beaucoup plus iong et plus mince que chez VA. Coronaria. De ces Sclérotes naissent au printemps suivant les cupules, l’état de Peziza proprement dit, dont nous allons : maintenant nous occuper.
Le parasite.
À la fin d'avril ou au commencement de mai, les cupules deviennent visibles; elles apparaissent au-dessus du sol sous la forme de boutons légèrement épaissis, prennent bientôt, en s’accroissant, la forme de cupules, et finissent par devenir
1) Arch. néerl., XXII, PI. IL, fig. 3.
25*
376 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
patelliformes. Je n’ai pu observer de changement ultérieur dans la forme de mes exemplaires, de sorte que très proba- blement la forme en ombrelle, figurée précédemment comme dernier état de développement du P. bulborum, manque chez le P. tuberosa. La couleur des cupules est le brun chocolat au lait, uniforme; c’est aussi celle des pédicules par lesquels elles sortent des Sclérotes noirs. D’admirables figures de cet état se trouvent dans le célèbre ouvrage des frères Tulasne: Selecta Fungorum Carpologia, 1865, P. III, Tab. 22, Fig. 1, 2, 3, 4 et 5. Les Sclérotes y sont représentés encore en rapport avec les souches d’Anemone nemorosa aux dépens desquelles ils se sont développés. Les cupules ont la structure ordinaire, connue, du genre Peziza. Leur face interne contient l’hymé- nium, formé d’une couche dense d’asques et de paraphyses. Chaque asque renferme huit spores unicellulaires incolores, aligneés à la suite l’une de l’autre !).
Comme la différence entre les deux espèces qui nous 1im- portent le plus repose principalement sur les dimensions, je fais suivre ici un tableau où les mesures des mêmes parties, prises chez les P. tuberosa et bulborum et exprimées en millimètres ou millièmes de millimètre, sont placées en face l’une de l’autre.
Organes. P. tuberosa. | P. Bulborum. Seléroteiul:109. aile 20 mm. 12 mm. Pédicule de la cupule 55 mm. de long. LOL,
L , til ulenv.8 mm: d’épaissilenv ai, Largeur du disque. 15 mm. HAUTS ASQUe- ao (LATE SU 190 x de.long. 140
RE RE RO 12 , d’épaiss. CRE Paraphyses "211. 190: ; tde: long. 140 20
SORTE 2 , d’épaiss. 2,01,
Sporeson. He #2NSun 16 , de long. doive, DUREE MONET ET Or 8 Jude larg. G: 148 Hyphes'#nc lent 8 , d’épaiss. AE
à LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 311
Les différences reviennent donc, en définitive, à un déve- loppement beaucoup plus vigoureux des Sclérotes du P. tu- berosa, ce qui frappe encore plus lorsqu'on considère que, chez le champignon des jacinthes, ces Sclérotes sont de forme très irrégulière et que les 12 mm. du tableau représentent leur dimension la plus grande. Il est certainement assez singulier, en présence de l'inégalité de tout le reste, que précisément les spores, c’est-à-dire les organes les plus im- portants, concordent dans leurs dimensions ; cette circonstance pourrait même faire douter de la différence spécifique des deux formes, n’était la conviction universelle chez les hor- ticulteurs, que la maladie ne passe jamais des Jacinthes aux Anémones, ni inversement.
Il est très remarquable que, dans la littérature comme dans la pratique, il soit si souvent fait mention de l’état ascogène qui vient d'être décrit, tandis que cela n’est nulle- ment le cas pour les autres espèces. Pour le champignon des jacinthes j'ai à peine besoin de le rappeler: tous ceux qui sont intéressés à la question savent que dans les champs ‘on trouve toujours des plantes atteintes de la morve noire, mais il faut des soins spéciaux pour que les cupules s’y développent. Cette vérité est encore bien plus frappante en ce qui concerne le P. Sclerotiorum, dont les Sclérotes étaient connus depuis nombre d’années et décrits comme espèce particulière, avant qu’on eût le moindre soupçon de l’exis- tence de la Pézire.
Pour le P. tuberosa il en est tout autrement. Je possède dans mon herbier des échantillons séchés, que j'ai reçus de - M. le professeur Oudemans, et qui avaient été récoltés en 1844 à Oud-Poelgeest près de Leiden, entre des souches d’'Anemone nemorosa. Une seconde indication concernant lexistence de ce Peziza dans notre pays a été fournie par M. van Eeden, dans son ouvrage: De Duinen en Bosschen van Kennemerland (Groningen, 1868); on y lit, p. 78, que la plante croît dans un petit bois près de Schalkwyk.
378 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Les communications de Tulasne (Se. Fung. Carp., p. 200) et de M. Brefeld (Schimmelpilze, IV, p. 122) sont également dues à des exemplaires trouvés à l’état sauvage.
Tout tend donc à prouver que le P. tuberosa est, dans l’Europe centrale, une vraie plante indigène, En réfléchissant à ce qui précède, on est invonlontairement conduit à l’hypo- thèse que les autres Sclérotes, agents de maladies de nos plan- tes cultivées, descendent peut-être, tous ou en majorité, de cette unique espèce sauvage authentique, laquelle, attaquant peu à peu d’autres plantes, aurait subi de petites modificati- ons et formé ainsi plusieurs espèces distinctes, quoique très voisines. Par la perte de la faculté de produire des sporidies (voir plus loin) et par de petites différences de dimension, etc., on pourrait se représenter la formation du P. Sclerotiorum, tandis que la dérivation éventuelle, de la même souche, du P. bulborum se laisserait concevoir encore plus facilement, vu qu'entre cette espèce et le P. fuberosa la différence est encore moindre. |
L'apparition et l'existence du P. bulborum dans les cultures de Harlem, et peut-être dans celles-là seules, s’expliqueraient alors tout naturellement, d’autant plus que l'introduction de la maladie des Anémones elle-même n’a guère besoin de com- mentaires, après ce qui à été dit plus haut concernant les exemplaires de Peziza trouvés, dans la zone des dunes ou à proximité, sur des espèces sauvages du genre.
L'étude ultérieure des propriétés de notre champignon a été effectuée sur des cultures artificielles, en dehors de la plante nourricière. Cette étude à encore mieux fait ressortir la grande analogie des différentes espèces.
Lorsque les spores germent dans la thèque ou dans l’eau, elles émettent des tubes germinatifs souvent très longs, mais qui finissent pourtant par mourir, non pas, toutefois, sans avoir produit des sporidies, ainsi que Tulasne l'avait déjà observé et figuré (1. c., Fig. 6 et 7). Dans mes cultures, les tubes germinatifs étaient développés au bout de 24 heures,
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 379
et après deux fois 24 heures commença la formation de spo- ridies; au bout d’une semaine, toutes les gouttes d’eau con- tenaient une innombrable quantité de ces corpuscules. Autant qu’on sache, ils sont dépourvus de signification, ne pouvant pas se développer en mycélium. Il est à remarquer que les sporidies se forment aussi, et alors en masses considérables (figurées par M. Brefeld, L.c., PLIX, fig. 16—19), dans les cul- tures anciennes, probablement lorsque les matières nutritives commencent à s’épuiser. Ce sont toujours de petits globules incolores, un peu plus réfringents que le mycélium. Selon toute apparence, il faut y voir des organes rudimentaires, peut-être le reste d’une formation de conidies chez la souche primitive (P. Fuckeliana ?)
Voyons maintenant ce qui se passe quand le tube germi- natif, lors de son développement, rencontre un aliment appro- prié et peut par suite donner naissance à un mycélium. Pour cette culture, j'ai employé exclusivement une décoction de raisins secs, qui, additionnée de gélatine, s'était coagulée en une masse brun clair, limpide, de consistance ferme à la température ordinaire. Sur ce sol, les parasites facultatifs mucédinéens, se développent parfaitement, et il est très facile à stériliser au moyen de quelques chauffages à 90° ou 100° C. Les spores furent semées sur des gouttes de cette gélatine déposées sur de différents porte-objet, et de là le mycélium formé fut transporté dans des boîtes en verre à couvercle rodé, sur le fond desquelles avait été versée une mince couche de la matière nutritive. Je décrirai avec quelques détails deux de ces cultures. Le 26 avril 1888, j'introduisis des spores dans la gélatine sur plusieurs porte-objet, et le 30 le mycélium était déjà assez développé pour que je pusse le transporter dans les boîtes en verre. Les deux boîtes étaient cylindriques et avaient respectivement un diamètre de 9,5 et de 5,5 cm., sur une hauteur de 4 et de 2,5 cm. Dans l’une comme dans l’autre, la couche de gélatine avait une épaisseur comprise entre 0,5 et 1 em. Dès
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le 7 mai, toute la gélatine s'était liquéfiée et sa surface en- tière était couverte de flocons d’une moisissure blanche. Ces touffes s’élevèrent de plus en plus haut dans l’air et Le long des parois en verre des boîtes, et au bout de quelques jours chacune de celles-ci s’en trouvait remplie jusqu’au couvercle, de sorte qu’elles semblaient contenir un tampon de ouate. Le 15 mai, j'enlevai les couvercles et les remplaçai par de hautes cloches de verre. Les filaments de moisissure recom- mencèrent alors à s'élever et retombèrent en épais flocons par-dessus le bord des boîtes, surtout de la plus petite, qui prit un peu l’aspect d’un verre de bière débordant d’écume. Les filaments s’attachèrent même à la paroi de la cloche, où ils développèrent des organes d’adhésion (Brefeld, . c., PL IX, fig. 15), qui toutefois, dans notre espèce, paraissent rester très petits et ne sont que rarement visibles à l’œil nu. Aussi ces organes se laissent-ils étudier beaucoup mieux dans les cultu- res faites sur des porte-objet.
Nonobstant la vigueur de la végétation, nulle trace de Jeunes Sclérotes ne pouvait encore être découverte le 9 juin. Il en était encore de même le 2 août, bien que le mycélium présentât déjà les signes indubitables d’un dépérissement prochain. Nous avons donc ici le cas singulier qu’un mycé- lium, à croissance des plus luxuriantes, meurt sans former de Sclérotes, et cela avec une matière nutritive sur laquelle d’autres champignons, par exemple celui qui est la cause probable de la maladie des Tulipes (voir mon Rapport de 1884, p. 22), produisent des Sclérotes en abondance.
L’infection.
De même que dans les cas analogues considérés antérieu- rement, l'infection n’est possible que par le mycélium. Le 7 mai, je portai des gouttes d’eau, contenant de nombreuses spores, sur les tranches fraîches de différents rhizomes d’Ane-
mone Coronaria, qui, avec le sable adhérent, furent tenus très . humides pendant quelque temps, dans un vase de verre
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 881
Lorsque les plantes moururent, aucun symptôme de morve noire m'était perceptible de sorte que la mort devait être . attribuée aux conditions anormales dans lesquelles les plantes avaient été placées.
Une couple d’autres rhizomes furent transportés, du même pot de fleurs, sur une assiette, puis recouverts d’une cloche. Une portion du mycélium développé dans l’une des boîtes fut mise en contact (également le 7 mai) avec un rhizome, et quatre jours plus tard les feuilles étaient déjà pendantes et montraient distinctement à leur base les filaments mycé- liens caractéristiques. Dans le courant de la semaine suivante moururent les autres feuilles, en présentant les mêmes phé- nomènes. La recherche des Sclérotes ne donna toutefois qu’un résultat négatif; pourtant, les rhizomes s'étaient transformés, de la manière typique, en une masse molle et noire (d’où le nom de la maladie). Le manque de plantes vivantes m'a empêché de faire d’autres expériences d’infection; cela, du reste, ne me paraissait pas strictement nécessaire, parce que, l’analogie étant prise en considération, une expérience unique suffisait dans le cas actuel. Nous pouvons donc affirmer, avec confiance, qu’en plein champ aussi la contamination des plantes saines par les spores du parasite sera un phénomène exceptionnel: en effet, les spores se disséminant exclusive- ment dans l’air, ne peuvent avoir du danger pour les jeunes feuilles, et autres parties analogues, que si elles viennent en contact avec quelque chose qui leur donne la force d’attaquer les tissus vivants.
Lorsque, toutefois, les spores pénètrent accidentellement dans la terre, elles ont une excellente occasion d’attaquer la plante. Les Anémones, en effet, se distinguent de toutes ou de presque toutes les plantes qu’on sait sujettes à la morve noire, par la possession d’un rhizome, c’est-à-dire d’une tige souterraine qui, à mesure que l’une de ses extrémités continue de croître, meurt progressivement à l’autre. De ce dernier côté, le tissu en voie de dépérissement est, on n’en peut
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guère douter, apte à faire développer les spores en un my- célilum vigoureux: raison pour laquelle l'infection par les spores se produit peut-être plus fréquemment chez les Ané- mones que chez aucune autre des plantes éprouvées par des maladies analogues.
Les hyphes directement émanés du Sclerotium, autrement dit, les mycéliums floconneux, que j'avais trouvés chez le P. bulborum, ne se voyaient pas chez mes exemplaires de la plante qui nous occupe maintenant; néanmoins, je crois pro- bable que, chez elle aussi, ils peuvent se développer.
La réceptivité.
Après les indications données plus haut concernant la croissance du P. tuberosa sur les sous-genres des Anémones et sur les espèces de ces sous-genres, 1l ne me reste rien à dire au sujet de la réceptivité. J’ignore si quelques-unes de ces espèces sont plus facilement attaquées que les autres; à cela, toutefois, il n’y a rien d’impossible.
Le traitement.
Comme il ressort, des détails dans lesquels nous sommes entrés, que la morve noire des Anémones présente des phé- nomènes tout à fait semblables à ceux de la maladie analogue des Jacinthes, je puis me dispenser de parler ici des mesures propres à la combattre. Elles sont les mêmes que celles exposées antérieurement !).
1) Arch, néerl., T, XXIIL p. 44.
RS
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VE
Nouvelles recherches sur la gommose des Jacinthes et plantes analogues.
Lorsque, pour l'étude d’un phénomène biologique qui se présente rarement, on ne possède qu'une petite quantité de matériaux, il arrive souvent, même quand ceux-ci sont utilisés le mieux possible, que maintes particularités plus ou moins importantes ne puissent être découvertes ou approfondies ; tantôt l’âge des organes ne permet plus d’en suivre le déve- loppement, tantôt le phénomène, quoique toujours le même au fond, offre tant de diversité dans les détails, que l'examen d’un grand nombre de cas peut seul faire connaître la vérité entière. Cette dernière remarque s'applique tout spécialement aux phénomènes pathologiques, et elle explique pourquoi je reviens ici sur un sujet dont je m'étais déjà occupé assez longuement dans ce Journal'). J'avais alors communiqué tout ce que laissaient voir le petit nombre de plantes malades dont je disposais, et je croyais avoir donné un tableau assez complet du processus pathologique; mais de nouveaux ma- tériaux, reçus l'été dernier, vinrent m'apprendre que même chez les Jacinthes, qui pourtant avaient été étudiées avec le plus de soin, il restait encore à observer différentes choses non mentionnées jusqu'ici. Ce qui va suivre sera donc, en premier lieu, un complément de mon article sur la gommose de l’Hyacinthus orientalis. En second lieu, je ferai connaître deux nouveaux cas de gommose, observés chez Tulipa Ges- ne‘iana et Tecophilea cyanocrocus, cas non encore décrits jusqu” ici, mais qui tous deux se rattachent naturellement, comme non parasitaires, à celui de l’Hyacinthus. Il en est de même, à en juger d’après la courte description donnée, de deux autres cas, dont je n’ai pas vu d’ CORRE moi-même, mails que je veux pourtant citer ici.
1) Arch. néerl., T. XXIII, p. 49.
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Sous le titre de , Zxia bulbs diseased,”? je lis dans le Gard. Chron., 13 Nov. 1886, p.628: ,He,” c’est-à-dire Mr. le Dr. Masters, »also showed specimens, received from Scilly, of bulbs pos- sessing channels filled with gumming matter. No trace of fungi or animal life could be detected. Mr. O’Brien said he was familiar with a similar condition in Crocuses and attri- buted it to wet.”
Le second des deux cas en question a été décrit par M. Prillieux (Taches produites sur de jeunes feuilles de Cyclamen, Bull. de la Soc. bot. de France, T. XXXIV, 1887, p. 160—I61) et analysé dans le Botan. Centralbl., T. XXXVI, N°1, p. 17. Ce naturaliste perspicace, auquel nous devons, entre autres, la découverte de la vraie cause de la maladie annulaire, ne fait pas, lui non plus, mention d’un parasite.
En dernier lieu, je donnerai dans cet article la preuve directe de mon assertion antérieure !), à savoir, que la gom- mose et la morve blanche sont des formes particulières d’une seule et même maladie,
Hyacinthus orientalis.
Ainsi qu'il a été dit plus haut, l’examen de bulbes reçus l'été dernier m’a encore fait connaître quelques nouvelles particularités de la gommose de cette plante et m’a mieux renseigné au sujet de quelques autres.
D'abord, les ampoules de gomme des bulbes en question n'étaient nullement limitées aux écailles les plus jeunes, mais avaient même envahi les tuniques les plus externes, c’est-à-dire celles qui sont partiellement épuisées et en con- séquence desséchées dans leur moitié supérieure; un examen superficiel suffit pour se convaincre du fait, parce qu’en pareil cas la gomme apparaît sous la forme connue de gouttelettes à mi-hauteur du bulbe (PI. VIIL fig. 1), où elle demeure ad- hérente après s’être desséchée.
1) l::02p 100,
!
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 885
Les ampoules se trouvaient exclusivement au côté extérieur des écailles et le plus souvent au voisinage immédiat du bord entamé lors de la ,visitation”. Des ampoules très petites, toutefois, et encore d’un blanc pur, se voyaient aussi sur les écailles internes, à une grande distance du bord en question (PLYMILE, g. 2,8 et. 7).
La paroi de ces ampoules, surtout celle des dernières, n’était pas encore devenue une membrane morte, sans structure, mais consistait distinctement en deux couches de cellules encore vi- vantes, comme je pus m'en assurer par la plasmolyse avec une solution de 10% de nitre dans de l’eau colorée par l’éo- sine. La couche externe (PI. IX, fig. 7} est l’épiderme, la couche interne est le parenchyme sous-jacent; l’une et l’autre n’ont qu’une cellule d'épaisseur. IL est à remarquer que celles des cellules de la dernière couche qui sont mortes contiennent encore des grains d’amidon, tandis que les cellules vivantes ne renferment plus rien de ce genre: preuve évidente, à mon avis, que la transformation de l’amidon ne peut avoir lieu que dans la cellule vivante.
Bien entendu, ces deux couches de cellules finissent par mourir; dans les cellules épidermiques encore vivantes, conti- guës aux mortes, ilse produit alors souvent une division cellulaire, rappelant celle du callus cicatriciel qui, après ,l’évidement” des jacinthes, donne lieu à la formation des bourgeons adventifs.
Quelque chose d’analogue s’observe parfois dans la couche de cellules parenchymateuses qui confine à la couche de gomme, Liaccroissement de ces cellules au milieu de la gomme et la disparition de leur amidon ont déjà été décrits antérieurement ; les exemplaires dont je disposais alors ne n'avaient pas permis d’en voir davantage. Maïs, chez quelques-uns des bulbes exa- minés en dernier lieu, il s’opérait aussi des divisions dans ces cellules, ce qui témoignait également de l’intégrité de leurs propriétés vitales (PI. IX, fig. 2, 8 et 4). Celle-ci ressortait encore, surabondamment, des résultats de la plasmolyse et de la considération du noyau et du réseau plasmatique très distinct,
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Je n’ai pas rencontré, chez les jacinthes à l’état vivant, des osrumeaux de gomme distincts, tels qu’on les voit dans les cellules des Amygdalées, attaqués de gommose; très souvent, toutefois, j'y ai trouvé un protoplasme à grains particulière- ment gros, ce qui devra probablement être attribué à la pré- sence de la gomme. Cependant il est très facile, de faire apparaître dans les cellules les susdits grumeaux de gomme. On n’a qu'à traiter de minces coupes de tissu vivant par l’alcool absolu; celui-ci enlève l’eau aux cellules, et la gomme, insoluble FRA l'alcool, se précipite dans chaque cellule en une petite masse assez irrégulière. Comme les préparations plongées dans l'alcool ne se laissent pas bien étudier au mi- croscope, J'ai fait cette observation sur des objets transportés dans l’essence de térébenthine (PI. IX, fig. 5).
De même qu’autrefois, la recherche d’une cause parasitaire est restée vaine. À la vérité, dans la plupart des gouttelettes de gomme, qui, comme on le sait, se rassemblent au sommet du bulbe, j'ai trouvé des filaments mucédinéens, mais jamais je n’en ai rencontré dans les ampoules, pas même dans celles qui, entourées de toutes parts par du tissu vivant, n'avaient pu excréter des gouttelettes.
Dans presque toutes les ampoules examinées, la couche de gomme appliquée aux parois cellulaires est beaucoup moins riche en eau (comme l’indique la couleur jaune) que la gomme du centre; cela prouve, manifestement, que la gomme est for- mée à l’intérieur des cellules et exsudée à travers leurs parois.
Enfin, J'ajouterai encore que, dans l’un des bulbes gommeux, une tache malade fut aussi découverte sur la jeune feuille la plus externe du bourgeon de l’année suivante. De cette feuille je fis, suivant la méthode de M. Moll !), une centaine de coupes transversales, que je colorai par la safranine et le violet de gentiane. L'examen montra que quelques cellules,
1) Maandblad voor Natuurwetenschappen, 1887, Nos. G et 7.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 387
tant de l’épiderme que du tissu sous-jacent, étaient mortes, tandis qu'entre les cellules contiguës il s'était déposé une matière présentant les caractères de la gomme. Pas plus que dans les écailles, il n’y avait dans cette jeune feuille la moindre trace d’une cause parasitaire (PI. IX, fig. 6).
D’après cette observation, malheureusement isolée, la gom- mose pourrait donc affecter aussi le limbe foliaire.
Tulipa Gesneriana.
Chez cette plante, la gommose était jusqu'ici totalement in- connue. J’ai reçu trois bulbes malades, sur deux desquels ont été faites les observations suivantes (PI VIIT, fig. 4).
A première vue, le phénomène se présente comme chez les bulbes de jacinthes: au sommet pointu du bulbe sont réunis quelques globules de gomme, de couleur brun clair, mais du reste parfaitement limpides; en les examinant de plus près, on reconnaît qu'ils se sont formés par exsudation au sommet des écailles. Çà et là, toutefois, on voit, sur les côtés, des filaments de gomme, d'épaisseur inégale, qui ont à peu près l’apparence des masses des spermaties émises par certains Cytispora sur l’écorce morte des arbres ; évidemment, ils se forment aussi de la même manière que celles-ci: par l’action d’une force interne, poussant une matière visqueuse à travers une étroite ouverture.
En enlevant la tunique extérieure, d’un brun rougeûtre, je pus facilement découvrir de semblables ouvertures. En même temps, Je constatai que les bulbes offraient encore de nombreuses taches brun jaunâtre sur la surface blanche de l’écaille externe; l’examen microscopique apprit qu’elles con- tenaient toutes de la gomme, mais qui n’était pas encore apparue au dehors. Une seule présenta des filaments mucédi- néens, qui appartenaient au Penicillium glauçum, ainsi qu’on le reconnut en les transportant dans de la gélatine nutritive.
Les coupes transversales du sommet des écailles gommeuses (PI. VIII, fig. 6) ne donnaient pas au microscope une image aussi
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régulière que celle fournie par les jacinthes. Les deux cas se distinguent, premièrement, en ce que chez Tulipa la cavité à gomme se trouve au côté interne de l’écaille, et, secondement, en ce qu’elle n’a pas des limites tranchées. Le parenchyme dépourvu d’amidon passe d’une manière très irrégulière, presque invisible, à la gomme; celle-ci est traversée en tout sens par des plaques de cellules affaissées sur elles-mêmes. Au côté interne, toutefois, 1l y a encore çà et là, comme chez les jacinthes, une couche de cellules parenchymateuses, qui sépare l’épiderme de la gomme. Au côté externe, le paren- chyme est aussi riche en amidon que dans les écailles saines.
Toutes ces irrégularités me paraissent être dues, en grande
…
partie, à des modifications secondaires; ce qui me porte sur- tout à le croire, c’est que sur un jeune bulbille, attaché à l’un des bulbes, j’ai trouvé une ampoule de gomme très ré- gulière (PI, IX, fig. 8, 9), qui concordait sous tous les rap- ports avec celles des jacinthes. Cette ampoule était entièrement enveloppée de tissu vivant et isolée de l’air extérieur; aussi ne montrait-elle aucune trace de filaments mucédinéens. Pas plus chez la fulipe que chez les jacinthes, il n’y avait donc
la moindre présomption de l’existence d’un parasite.
La gommose et la morve blanche sont identiques.
Je ne reproduirai pas ici les raisons diverses, et à mon avis très convaincantes, que j'ai apportées précédemment en faveur de l'identité de la gommose et de la morve blanche !). Faute de matériaux suffisants, je n’avais pu donner alors la preuve expérimentale de mon opinion. Aussi, lorsque j’eus en mains les bulbes dont il vient d’être question, ma pre- mière pensée fut-elle de fournir cette preuve. À cet effet, j'instituai deux expériences, toutes deux de la même manière simple.
1) L.c., p. 60,
PT
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 389
1ère Expérience. Le 28 septembre 1888, un bulbe de de tulipe et un bulbe de jacinthe, tous les deux atteints de gommose, furent plantés chacun dans un pot rempli de terre, puis ces pots furent placés dans une chambre sur des assiettes contenant de l’eau. Le 2 octobre suivant, je les mis dans une enceinte fermée, où la température fut maintenue constante à environ 85° C. Chaque jour les deux assiettes étaient vi- sitées, et lorsqu'elles étaient à sec, on y reversait de l’eau, préalablement chauffée. Tout resta en cet état jusqu’au 15 novembre, date où les deux pots furent vidés et leur contenu examiné. Le bulbe de tulipe présentait les signes les plus manifestes de la morve blanche, telle qu’elle a été décrite pour les jacinthes et les narcisses. Le bulbe ne s'était pas en- raciné, mais était presque entièrement converti en une pulpe blanc grisâtre, qui répandait l’odeur fétide bien connue et, au microscope, montrait aussi la composition ordinaire: ce n’était qu’un mélange de cellules isolées, de grains d’amidon et de bactéries (il n’y a pas d’aiguilles d’oxalate de chaux chez les tulipes). De la gomme elle-même, il ne restait pas trace. |
Si ce résultat était déjà remarquable, surtout parce que chez les tulipes la morve blanche n’était pas connue, plus singulière encore fut la découverte que la jacinthe, exactement traitée de la même manière, ne présentait nul symptôme de la morve blanche, mais s'était enracinée, faiblement il est vrai. En examinant le bulbe, on reconnut que la gommose avait été si légère que, — la gomme elle-même ayant natu- rellement disparu, — on ne pouvait plus la constater. Les résultats contradictoires de cette première expérience en rendaient la répétition nécessaire.
2e Expérience. Le 23 novembre 1888, un bulbe de jacinthe, qui à en juger par l'aspect était fortement attaqué de gommose, et un bulbe de éfulipe, acheté comme sain dans une boutique, furent plantés séparément dans des pots, qui furent traités exactement comme il a été dit ci-dessus, et
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 26
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par conséquent placés aussi dans l’étuve, où régnait une température constante d'environ 30° C. Dès le 8 décembre suivant, le résultat n’était plus douteux. La jacinthe, en effet, état si violemment atteinte de morve blanche, que l’odeur infecte, plus d’une fois mentionnée, se trahissait aussitôt qu’on ouvrait l’étuve. Le bulbe de tulipe, an contraire, s'était soli- dement enraciné, et une partie du bourgeon commençait déjà à sortir de terre.
La jacinthe de la première expérience n'avait évidemment pas été assez malade pour que le phénomène s’accomplit conformément à mon attente.
Réunies, je pense que les deux expériences ont suffisam- ment confirmé mon assertion; néanmoins, si l’occasion s’en ‘ présente, je ne négligerai pas de les répéter au printemps, dans des conditions aussi normales que possible.
Tecophilea cyanocrocus.
De cette plante encore peu connue je n’ai vu jusqu'ici qu'un seul spécimen malade, et cela exclusivement à l’état de repos. C’est un végétal d'acquisition assez récente et par suite encore assez cher, de sorte qu'il se prête médiocrement à une étude détaillée.
Au commencement de l’automne, la plante consiste en un tubereule et un bourgeon terminal, qui porte une couronne de racines (PL VIIL fig. 5); à l’exemplaire que j'ai examiné se trouvait de plus un bourgeon latéral, qui avait également produit quelques racines. Le tubercule est enveloppé d’une tunique fibreuse, de couleur claire. Ces caractères indiquent déjà que la plante n’appartient pas aux plus proches alliées des plantes bulbeuses ordinaires, sujettes à la gomme; auss; n'est-elle pas rangée parmi les ZLiliacées proprement dites. Dans toutes ses parties végétatives, sauf les racines issues des bourgeons, ainsi que par sa taille, elle se rapproche en- tièrement de nos variétés de Crocus (C. vernus, ete.); de là, probablement, le nom spécifique.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 391
En rapport avec la différence de structure, l'affection gom- meuse se présentait aussi, chez notre plante tuberculeuse, autrement que chez les ZLiliacées précédemment décrites. Le seul symptôme du mal était une grosse goutte de gomme, parfaitement incolore et limpide, qui se trouvait sur le côté du tubercule et provenait d’une petite plaie. Dépouillé de son enveloppe, le tubercule laissait voir encore quelques autres petites plaies, mais dont la plupart n'avaient pas donné issue à une de goutte de gomme.
L'examen anatomique montra que le tubercule était presque entièrement formé du parenchyme ordinaire riche en amidon, sauf immédiatement au-dessous de l’épiderme, où se trouvait une couche de cellules que ne renfermaient pas de fécule, mais dont la paroi et le contenu se gonflaient fortement dans l’eau (PL IX, fig. 11). Cette couche est évidemment la source de la gomme, qui, s’échappant par les plaies, donne lieu à la formation des gouttes. Les cellules dépourvues de fécule, dont ïil vient d’être question, sont un phénomène normal; un moyen efficace de prévenir la maladie, c’est-à-dire l’ap- parition de gouttes de gomme à la surface extérieure des tubercules, serait donc de traiter ceux-ci avec des précautions minutieuses, de manière à leur épargner toute blessure.
Sur la cause de la gommose chez les plantes bulbeuses.
Bien que, dans mes Rapports à la Société d’horticulture de Harlem, j'aie nettement indiqué les caractères de la ma- ladie annulaire et de la gommose, et que chez aucun des bulbes malades mis alors à ma disposition je n’eusse trouvé trace de parasites, M. J. Ritzema Bos !) identifie, au moins provisoirement, ces deux maladies, et regarde donc les An- guillules comme la cause de la maladie de la gomme, L’im-
——— _
1) L’anguillule de la tige, dans Arch. du Musée Teyler,; Sér. II, T. IT, Pur, 1888, .p. 159 et 165. 26*
399 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
possibilité d’admettre cette opinion résulte déjà de tout ce que J'ai communiqué sur la gommose; néanmoins, il m'a paru nécessaire de faire encore quelques nouvelles recherches à ce sujet.
Pour ces recherches spéciales, la méthode de M. Mall, dont il a déjà été question plus haut, m'a rendu de grands ser- vices. En effet, puisque, selon M. Ritzema Bos !), les An- guillules ne quittent pas le bulbe attaqué, et que, d’un autre côté, par la méthode de M. Mall, la partie à étudier, di- visée en coupes aussi minces qu'on le désire, peut tout entière être scrutée au microscope, ces animalcules, s’ils existent dans les bulbes malades, ne sauraient échapper à l’observation. J'ai donc traité de cette manière une des ampoules d’un bulbe gommeux, très petite, située vers le bas de l’écaille et, en outre, complètement entourée de tissu vivant. Deux cents coupes de cette ampoule, après avoir été colorées par le violet de gentiane ou la safranine (c’est l’amidon qui absorbe la matière colorante), furent examinées avec Zeiss. 2 A., beaucoup aussi avec Z. 2 D., sans qu’un seul 7y- lenchus ou un seul filament mucédinéen fût rencontré. La même chose peut être dite de plusieurs centaines de pré- parations provenant d’autres ampoules, prises sur différents bulbes.
Par cet ensemble de résultats négatifs il est suffisamment établi que le Tylenchus devastatrir ne saurait être la cause de la gommose des bulbes.
Pour trouver maintenant l'explication des faits observés par M. Ritzema Bos, je crois devoir renvoyer à la page 59 du T. XXIII de ce Journal, où il:a déjà été regardé comme extrêmement probable que les Anguillules du sol s’introdui- sent de préférence dans les ampoules de gomme, en d’autres termes, que les bulbes gommeux sont exposés, en première ligne, à contracter la maladie annulaire.
1) L.c., p. 166 et suiv.
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 393
Cette présomption est confirmée par un passage du Mémoire de M. Ritzema Bos (p. 169), disant que les caractères de la morve blanche apparaissent parfois dans les bulbes atteints de la maladie annulaire.
L’extrême irrégularité de l'apparition de la maladie annulaire, irrégularité connue de tous les cultivateurs de jacinthes, s’ex- pliquerait très naturellement par ma manière de voir, d’autant plus que, d’après les informations des derniers temps, la gommose s’observe avec une fréquence de plus en plus grande.
Bien entendu, il y a encore une autre possibilité, à savoir, celle de l’existence de deux espèces de gommose, dont l’une serait due à des causes internes, l’autre au Tylenchus; mais cette hypothèse me semble moins probable que l’explication donnée ci-dessus, surtout parce que, chez aucune des autres plantes que l’Anguillule de la tige peut envahir, on ne paraît avoir observé quelque trace de formation de gomme.
Stimulé par les résultats favorables des expériences de M. Beyerinck ') concernant la contagiosité de la gommose chez les Amygdalées, j'ai pensé qu'il y aurait intérêt à examiner aussi nos bulbes à ce point de vue.
Jusqu'ici, toutefois, je n’ai pas réussi à produire artificiel- lement la gommose chez les jacinthes. Pendant les mois de Janvier et de février 1889 j'ai fait des expériences variées, sans obtenir un seul résultat positif. De la gomme desséchée, mais ramollie dans l’eau, fut portée dans des plaies et sur la section fraîche d’écailles de bulbes plantés dans des pots, et ceux-ci furent maintenus pendant des semaines à une tempé- rature suffisante, dans une chambre régulièrement chauffée : Jamais je ne pus constater de changement dans la quantité de gomme, ni de dégénérescence gommeuse du tissu contigu à la plaie.
Le peu que nous savons aujourd’hui au sujet de la forma-
1) Recherches sur la contagiosité de la maladie de gomme dans Arch. néerl., T. XIX, p. 43.
394 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
tion de la gomme chez les plantes bulbeuses, peut être ré- sumé de la façon suivante:
1°, La gomme se trouve essentiellement, ou bien entre les cellules du parenchyme des écailles, ou bien entre l’épiderme et le parenchyme.
2°, Au voisinage d’une ampoule de gomme, l’amidon est disparu des cellules du parenchyme et remplacé par de la somme. |
3°. Ces cellules totalement dépouillées d’amidon, sont non seulement parfaitement vivantes, mais peuvent encore croître beaucoup en grandeur et même présenter des divisions tangentielles.
4°, Dans les cellules mortes de bonne heure, l’amidon reste inaltéré.
5°. Contre la plupart des parois cellulaires-qui entourent la cavité est appliquée une couche de gomme d’une densité plus grande — comme l’indique sa couleur jaune — que celle de la même matière occupant le centre de la cavité.
6. La gommose et la morve blanche sont une seule et même maladie. |
7° D'une cause parasitaire, 1l n’y à pas trace appréciable.
EXPLICATION DES FIGURES.
PLANCHE VII.
La maladie de la gomme. Dans toutes les figures la gomme est indiquée par la lettre g.
Fig. 1. Bulbe gommeux de jacinthe. Grandeur naturelle. 25 octobre 1888.
Fig. 2 et 3. Coupes transversale et longitudinale d’un mème bulbe gom- meux de jacinthe. La ligne qui traverse la Fig, 2 indique la direction de la coupe Fig. 3. Les parties gommeuses sont légèrement ombrées. Grand. nat. 25 oct. 1888.
Fig. 4. Bulbe gommeux de tulipe. Grand. nat. La tunique brune extérieure a été enlevée. 26 septembre 1888. L'écaille s, la troisième en comp- tant de dehors en dedans, doit à la gomme qui s’y trouve accumu- lée une teinte plus foncée,
Fig.
nS
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 395
. Tubercule gommeux de Tecophilea cyanocrocus. La tunique fibreuse
est enlevée. Grand. nat.
. Coupe transversale du sommet d’une écaille gommeuse de tulipe;
grossie environ six fois. La gomme g est indiquée par une ombre légère.
e = épiderme; b = parenchyme normal amylifère et faisceaux vasculaires; c = parenchyme dépourvu d’amidon.
. Coupe transversale d’une écaille gommeuse de jacinthe; grossie
environ six fois. La gomme g est indiquée par une ombre légère. a = parenchyme normal pauvre en amidon; les autres lettres comme ci-dessus. PLANCHE IX.
La maladie de la gomme.
Toutes les figures ont été dessinées à la chambre claire, sous le grossis- sement indiqué, puis réduites. ÿ = gomme, a = amidon, n = noyau.
Hyacinthus orientalis.
Fig. 1. Parenchyme de la paroi d’une ampoule. Les cellules mortes depuis
Fig.
Fig.
longtemps (ombrées) contiennent encore de l’amidon a; les cellules tuées par le traitement n’en renferment plus. Zeiss. 2. D.
. Id. Id. Ecaille. On voit le développement et la division des cellules
qui touchent à la cavité à gomme, Ces cellules ne contiennent plus d’amidon. Z. 2. D.
et 4. Cellules développées, vivantes: Fig. 4 de la couche de paren- chyme, Fig. 3 de la, paroi de l’ampoule. En # on voit une division nucléaire qui vient de s'achever. Z. 2 D.
. Trois cellules du parenchyme de la paroi d’une ampoule formée
sur une écaille, traitées par l’alcool absolu et observées dans l’es- sence de térébenthine; on voit les grumeaux de gomme dans les cellules fixées. Z. 2. D.
. Parenchyme d’une jeune feuille d’un bulbe gommeux. Coupé suivant
la méthode microtomique de M. Moll et coloré par le violet de gen- tiane. Z. 2, D.
. Epiderme d’une ampoule. On voit les divisions cellulaires calleuses
perpendiculaires aux parois normales. Les cellules de l'extrémité supérieure de la figure sont mortes et ont des parois peu distinc- tes, brunâtres. Z. 2. D.
Tulipa Gesneriana.
. Paroiï d’une ampoule de lécaille la plus externe d’un très petit
396 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
bulbille gommeux. La distribution et la densité de l’amidon sont indiquées par des points. 10 octobre 1888. Z. 2. A, Le carré pointillé marque le contour de la: Fig. 9, dessinée sous Z. 2. D. e = épiderme. La couche gommeuse jaune, plus dense, qui tapisse les cellules, est indiquée par des raies. Fig. 10, Une cellule de la paroi d’une ampoule, contiguë à la cavité à gomme. Dans l’alcool-glycerine. Z. 2. D.
Tecophilea cyanocrocus.
Fig. 11. Une cellule du tissu périphérique du tubercule; la paroi est lége- rement gonflée. Z. 2. D.
VIT.
Les renflements des branches de quelques espèces de Rides.
Sur les branches du Æibes alpinum (jardin botanique d’Am- sterdam) et du Æibes cynosbati (jardin botanique d’Utrecht) j'ai observé, en différents points, des renflements considérables. Jamais je ne les ai rencontrés chez quelque autre espèce du même genre.
Ce sont des épaississements globuleux ou cylindriques, mais d'ordinaire très irréguliers, dont le diamètre est beaucoup de fois plus grand que celui de la branche qui les porte. La surface en est noire ou brun foncé et très inégale; elle est formée par l’écorce, crevassée et déchirée de mille manières. Entre les lambeaux et les fragments de cette dernière on distingue parfois, même sur des renflements très vieux, des petits cônes d’un brun plus clair. Les tiges principales, les branches très vigoureuses et s’élevant verticalement et les rameaux de l’année ne présentent aucune trace de ces ren- flements.
Aux rameaux courts, âgés de plus d’un an, on peut toute- fois observer les premiers états de la tumeur : ce sont de petits
ni) ef
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À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. 397
épaississements coniques sous l’écorce brun clair, qui rappel- lent très fortement les productions analogues sur les branches des plantes chez qui l'émission de racines est si facile qu’on en trouve déjà des rudiments sur la tige croissant normale- ment (par ex. chez le Symphoricarpus racemosa). Un examen plus approfondi a montré que cette analogie n’est pas une simple apparence.
A cet effet, des branches coupées des différentes plantes sur lesquelles j'avais remarqué le phénomène ont été placées, au printemps, dans une enceinte obscure et humide, dont la température atteignait, autant que possible, un degré favo-
.rable à la croissance; or, cette expérience, plus d’une fois
répétée, a constamment donné pour résultat que chaque in- tumescence raméale produisait une ou plusieurs belles racines, qui présentaient une calyptre bien reconnaissable et étaient toujours abondamment pourvues de poils radicaux. Elles paraissaient, comme cela est ordinairement le cas pour les racines raméales (Salix, Populus, Sambucus), être peu ou point géotropiques ; le plus souvent, elles croissaient plus ou moins dans une direction perpendiculaire à la branche.
Il est clair qu’on pourrait bouturer de cette manière les Ribes dont il s’agit; effectivement, j'en ai obtenu ainsi de petites plantes, cultivées dans des pots.
En faisant l’expérience, on voit chaque petite tumeur pri- maire émettre une racine unique, tandis que des tumeurs les plus vieilles, et par conséquent les plus grosses, il sort souvent quatre racines, ou même davantage.
Après ce qui précède, le mode de développement des tu- meurs se laisse aisément concevoir. Il me paraît, en effet, que toutes les branches pas trop fortes, mais ayant dépassé l’âge d’un an, commencent, au voisinage des nœuds, à former des racines, qui percent ou non l'écorce, mais qui, dans les circonstances ordinaires, cessent pendant l’été de croître en lon- gueur et probablement se dessèchent alors à leur extrémité, au moins quand celle-ci à percé l’écorce.
398 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
Ce dernier phénomène, naturellement, se produit surtout par des temps humides. F
Le pouvoir rhizogène n’est toutefois pas épuisé par la production de la première racine en un point: au contraire, il se forme incessamment de nouvelles racines, qui d’ailleurs, elles aussi, ne vont pas plus loin que la première et, si elles percent l’écorce, finissent par mourir à leur sommet. En con- séquence, on voit d’abord apparaître de petites éminences à trois, quatre ou un plus grand nombre de pointes, et finale- ment les renflements irréguliers ci-dessus décrits, avec leur aspect crevassé et corrodé, sur lesquels les petites saïllies coni- ques d’un brun plus clair représentent les radicelles formées en dernier lieu et qui ont percé l’écorce.
Par analogie avec le nom spécifique, d’ailleurs pas tout à fait exact, du Begonia phyllomaniaca, on pourrait donner au phénomène le nom de rhizomanie.
Il est évident que, dans son premier stade, la rhizomanie offre de grands rapports avec la formation ordinaire de racines sur la tige, du moins lorsque cette tige trahit par une tumé- faction la présence de commencements de racines, par exem- ple chez Lycium, ou lorsque, ces percent tôt ou tard l’écorce, comme chez Symphoricarpus racemosa et Begonia phyllomaniaca. Les racines raméales des ARibes diffèrent toutefois de celles de beaucoup de ces exemples connus, en ce que leur disposition paraît être complètement indépendante de la pesanteur et de la direction de la lumière incidente; elles en diffèrent aussi, et même essentiellement, par ce qu’en un point déterminé elles ne restent pas uniques, mais que leur formation continue indéfiniment, d’où résultent les tumeurs, qui ne se rencon- trent pas chez les autres plantes ci-dessus nommées. Le cas du ÆÀibes se distingue donc de tous les cas ordinaires de pro- duction de racines sur la tige; aussi n’ai-je pu trouver dans la littérature aucune mention d’un fait analogue.
On ne saurait nier, toutefois, que la chose n’ait beaucoup de similitude avec les balais de sorcières” ou broussins des
À LA PATHOLOGIE VÉGÉTALE. " 899
arbres, à cela près, seulement, que dans ces cas bien connus il s’agit d’une surproduction de rameaux. En excluant quel- ques-uns de ces cas, de nature très particulière, tels que celui de |’ Abies pectinata, dû à l’Aecidiwm elatinum, je crois pouvoir dire que la cause de la plupart des broussins proprement dits est inconnue et ne devra donc probablement pas être cherchée dans la présence de champignons, généralement faciles à découvrir, ainsi que M. Magnus l’a récemment essayé pour l’un des broussins les plus communs, celui des bouleaux, qu’il attribue à l’Exoascus Betulae. |
- Dans le cas de nos rhizomanies, non plus, je n’ai pu dé- couvrir jusqu'ici la moindre trace d’un parasite. Ainsi, des fragments de tumeurs, qui avaient été introduits dans une gélatine de culture pour champignons, n’ont pas déve- loppé de filaments mucédinéens. Bien entendu, cela n’exclut pas la possibilité que les Acariens du genre Phytoptus, si souvent introuvables, soient la cause du phénomène. A ma connaissance, toutefois, ils ne déterminent, dans aucune des nombreuses formes de galles qui leur sont dues, une forma- tion anormale de racines.
Cette formation a lieu, par contre, dans les galles de la Cecidomyia Poae, et l’on pourrait donc être tenté, pour notre cas aussi, d’incriminer les Diptères; mais jamais je n'ai trouvé, dans les tumeurs, des larves de ces insectes. Je n’y ai jamais observé non plus des cavités qui pourraient être prises pour des loges de larves.
Ce sujet me conduit de lui-même à l’anatomie des tumeurs. Les branches où elles naissent présentent dans leurs parties normales, au commencement de l’été, une moelle à cellules arrondies, qui est très riche en amidon et en cristaux maclés et montre des espaces intercellulaires assez larges. Cette moelle est entourée d’un anneau ligneux à couches annuelles bien dis- tinctes et à différence très frappante entre le bois primaire et le bois secondaire; autour de ce dernier s'étend le cambium,
DS
qui passe presque insensiblement à l'écorce. Le tissu de
400 J. H. WAKKER. CONTRIBUTIONS
celle-ci renferme de nouveau de l’amidon et des cristaux maclés. L’écorce est séparée de l'air par l’enveloppe subé- reuse, partie déjà souvent représentée pour le Ribes.
Les changements que tous ces tissus éprouvent par suite de la rhizomanie sont les suivants: Le tégument subéreux et la moelle sont modifiés le moins; le premier, naturellement, a été traversé en différents points par les racines et a pris une forme très irrégulière, qui toutefois est entièrement do- minée par l’hypertrophie de l’écorce. — Celle-ci à incontes- tablement subi les changements les plus considérables. Tandis que les dimensions de la moelle n’ont pas été altérées par la rhizomanie, l'épaisseur de l’écorce est devenue plusieurs fois plus grande. Le tissu est calleux, mais contient encore de l’amidon et de l’oxalate de chaux, sous la forme cristalline déjà indiquée. Çà et là il est traversé par les fibres ligneuses des racines, mais, du reste, toutes les cellules se ressemblent.
Le bois aussi est changé, le moins dans les couches annu- elles internes; à mesure qu’on avance vers la périphérie, la dégénération devient de plus en plus apparente; le contour de la couche ligneuse la plus extérieure est très irrégulier et la direction des éléments s’y éloigne souvent de la direc- tion normale. Des parties entières ont manifestement été orientées sous l'influence des racines adventives. Autour du bois s’étend une épaisse couche de petites cellules, qui, sans nul doute, représentent le cambium.
Aux endroits où il ne s’est formé qu’une seule racine, on n’observe aucune altération pathologique du tissu.
LE PHOTOBACTERIUM LUMINOSUM, BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NORD,
PAR
M. W. BEYERINCK.
nS
Ayant à décrire une bactérie photogène non remarquée jusqu'ici, je crois nécessaire, vu l’état d’imperfection où se trouve la littérature à l'égard de ce groupe de formes !), d'exposer préalablement ce qui est connu quant à l’existence, d'espèces différentes de bactéries lumineuses. Comme il ne m’a pas été possible d'établir, entre les cinq (ou six) espèces que j'ai étudiées, de distinctions assez importantes pour autoriser quelque séparation générique, et comme, d’un autre côté, le besoin se fait sentir de pouvoir facilement désigner par un nom ces organismes si intéressants, Je me hasarde à les rapporter toutes au genre Photobacterium. En ce qui concerne les différentes espèces trouvées jusqu’à ce jour, ce sont les suivantes :
1. Photobacterium phosphorescens, la bactérie lumineuse ordi- naire, non liquéfiante, de poisson phosphorescent. Au sujet du droit d'auteur pour ce nom généralement employé, il règne des doutes (Cf. Pflüger, Archiv., T. 10 et 11, 1874 et 1875; Lassar, Pflüger’s Archiv, T. 21, 1880, Ludwig, Zeitschrift für Mikroskopie, T. 1, 1884; Tilanus;
1) Cf. Macé, Traité pratique de Bactériologie, p. 585, Paris 1889,
402 M. W. BEYERINUK. LE PHOTOBACTERIUM LUMINOSUM,
Tijdschr. v. Geneeskunde, T. 2, p. 169, 1887; Forster, Bacteriol. Centralblatt, T. 1, p. 337, 1887) !).
2. Ph. Indicum, bactérie lumineuse de la mer des Indes oc- cidentales; découverte et décrite par Fischer, Zeitschr. f. Hygiene, T. 2, p. 54, 1887, sous le nom de Bacillus phosphorescens. ,
3. Ph. Fischeri, bactérie lumineuse de la mer Baltique; dé- couverte et décrite par Fischer, Bacteriol. Centr. bl., T. 3, p. 105, 1888.
4. Ph. luminosum, nommée ici pour la première fois.
A ces quatre espèces doivent s'ajouter deux espèces non encore décrites de la Baltique, proches alliées du Ph. Fischeri, et dont l’une fait fondre légèrement la gélatine de culture, tandis que l’autre ne la liquéfie pas. Peut-être qu’à un examen approfondi elles seront reconnues pour des variétés de Ph. Fischeri.
Les raisons qui me portent à croire que toutes ?) les es- pèces ci-dessus nommées doivent être réunies en un même genre, sont les suivantes:
1. Toutes croissent le mieux, ou même exclusivement, lorsque l'aliment contient 3:°/ de sel marin ou des proportions iso- toniques d’autres sels minéraux. 2. Elles perdent leur pou- voir photogène par l'addition de 2°/ ou plus de glucose à l'aliment, et elles forment alors un acide, en prenant des figures très singulières. 3. La peptone est la source principale pour l'alimentation azotée; elles empruntent leur carbone à
1) Au point de vue de la priorité, il faudrait employer, pour la bactérie lumineuse ordinaire, le nom de Micrococcus phosphoreus Cohn (Verza- meling van stukken betreffende het Geneeskundig Staatstoezichtin Neder- land, 1878, p.126,) mais l’usage a décidé en faveur de Ph. phosphorescens.
2) J'ai étudié en détail et pendant longtemps les espèces 1, 2 et 4, mais d’une manière plus rapide l’espèce 3, pour laquelle des matériaux m’avaient été communiqués par M. le professeur Fischer, et que moi-mème j'ai, une fois, isolée d’un poisson de mer. Les deux autres formes, non décrites, ont également été en ma possession par la bonté de M. Fischer.
BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NORD. 403 des solutions très diluées de glucose, de lévulose, de maltose, de galactose, de lactate calcique et surtout de glycérine, et cette assimilation s'accompagne de production de lumière. 4. Elles se développent dans un sol neutre ou faiblement alcalin, et une trace d’acide est déjà suffisante pour éteindre la lumière. 5. Jamais elles ne forment de spores; toutes peur- vent être amenées par la culture à des états mobiles, qui nagent vers les sources d'oxygène, et prendre dans certaines conditions la forme de spirilles et de vibrions. 6. Aucune d'elles ne sécrète des enzymes diastasiques ou inversifs, de sorte que l’amidon soluble, le sucre de canne, le sucre de lait ne peuvent pas servir à leur nutrition ni à la production de lumière, attendu que ces corps, comme tels, ne sont pas oxydés. 7. Toutes donnent un spectre lumineux continu, qui est situé entre les raies D et G, et où se trouvent donc du jaune, du vert et du bleu.
À côté de ces points d’analogie, il existe toutefois quelques différences importantes entre le PA. phosphorescens et les autres espèces (j'ai ici plus particulièrement en vue les nos. 2et 4, n'ayant pas encore étudié assez complètement les autres). Ces différences consistent surtout en ce que, de toutes ces espèces, le Ph. phosphorescens seul peut à l’abri de l’air faire fermenter la glucose, la lévulose, la maltose et la galactose, et ensuite que le P. phosphorescens ne sécrète pas d’enzyme protéolytique, ce que font bien les autres (à l’exception de June des deux formes non encore décrites). Plus loin, il sera encore dit quelques mots des différences de forme de ces espèces. Je passe maintenant, après cette brève introduction, à mon sujet proprement dit, la description du Ph. luminosum.
À la fin de l'été de 1888 j'ai examiné itérativement, avec attention, la phosphorescence de la mer entre Katwijk et Scheveningen. J’ignore si, en d’autres années, le phénomène est toujours exactement le même qu’à l’époque dont je parle, mais je présume que, le long de la bande littorale en ques-
404 M. W. BEYERINCK. LE PHOTOBACTERIUM LUMINOSUM,
tion et probablement aussi plus au nord jusqu’au Nieuwe- Diep, on pourra toujours observer, dans une étendue plus ou moins grande, ce que j'ai vu l’année dernière et dont voici les points essentiels.
La cause proprement dite de la lumière dégagée par les brisants de la vague et par le sable du rivage doit être cherchée dans des animaux microscopiques et des bactéries. A la vérité, quelques cœlentérés phosphorescents de taille plus considérable, tels que Cydippe pileus, Phialidium variabile et certaines espèces de Sertularia et de Obelaria, se rencon- trent aussi très généralement le long de la côte de la Mer du Nord, et les Phialidies surtout, pendant les chaudes soi- rées d'été, se voient par milliers sur la plage; mais, à la lumière des brisants, uniformément répandue sur de larges espaces, toutes ces formes plus ou moins grandes ne contri- buent que très peu. Les animaux microscopiques que j'ai observés appartenaient pour la plupart à quelques espèces de Crustacés et de Dinoflagellés, dont la détermination ne m'a pas été possible; il s’y trouvait aussi, en petite quantité, le Noctiluca miliaris. C’est à ces animaux que doit être at- tribuée la projection caractéristique d'étincelles par les vagues qui se déroulent longuement sur le sable, ainsi que la bril- lante scintillation provoquée, dans les flaques d’eau de la plage, par une brusque agitation ou par la chute de gouttes de pluie. Mais l’éclairement dû à ces formes animales était, lui aussi, simplement local, et la lueur mate étendue sur l’écume des brisants devait, à en juger par un examen même superficiel, être rapportée à une cause différente, Comme telle je pus reconnaître, après quelques recherches, une espèce de bactérie, nouvelle pour la science 1). Avant de décrire
de
1) Des descriptions de témoins oculaires je dois inférer qu’à la Pointe méridionale de la Hollande, loin de la côte, jamais près du rivage, la phos- phorescence du Noctiluca miliaris s’observe dans toute sa splendeur: à Scheveningen, à Katwyk, à Zandvoort, ce spectacle — si j'ai bien compris
BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NORD. 405
cette espèce, à laquelle j'ai donné le nom de Photobacterium luminosum, je dois encore faire remarquér que non seulement l’eau de mer, maïs aussi le sable du rivage, en tant qu'il est soumis au jeu du flux et du reflux, est pour ainsi dire en- tièrement pénétré d’une culture, et que la singulière auréole lumineuse, formée autour de chaque empreinte de pied et bien connue de tous ceux qui se promènent le soir sur nos plages, est due à la présence du Photobacterium luminosum ! ). Au reste, il m'est aussi arrivé une fois d'isoler cette bactérie d'une plie achetée au marché de Delft et devenue lumineuse dans mon laboratoire; la possibilité de la rencontrer plus à l’intérieur du pays ne se trouve donc pas entièrement exclue,
La manière la plus facile d'obtenir le Photobacterium lumi- nosum en culture pure, est la suivante.
Dans l'obscurité du soir, après une chaude journée d’été, on cherchera une de ces flaques d’eau, que le retrait de la marée laisse sur la plage et qui ont été échauffées par les rayons du soleil, Au bord et au fond d’une pareille flaque, le sable est extrêmement riche en bactéries lumineuses et éminemment propre à l’ensemencement. Comme sol de cul- ture se recommande spécialement un mélange de cette com- position: décoction de poisson dans de l’eau de mer, addi- tionnée de 1% de peptone et coagulée par 7° de gélatine. Si l’on délaye le sable lumineux dans de l’eau de mer bouillie, et qu'avec une aiguille trempée dans ce mélange on trace des lignes sur la gélatine, ou si l’on verse sur celle-ci l’eau de mer qui surmonte le sable et qu’ensuite on laisse égoutter la gélatine jusqu’à ce que la surface soit devenue sèche, on
mes interlocuteurs — ne paraît jamais se présenter. Cela, serait-il en rapport avec la circonstance que, dans les localités indiquées, l’eau de la Mer du Nord est moins riche en sel?
1) La rapidité avec laquelle notre bactérie se multiplie dans le sable, rapidité évidemment plus grande que dans l’eau de mer, s'explique peut- être par l'accroissement de la proportion de sel dans le sable, suite né- cessaire de la dessiccation lors du reflux. R
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 27
406 M. w. BEYERINOK. LE PHOTOBACTERIUM LUMINOSUM,
verra, déjà au bout de 24 heures à une température d’été, soit dans les lignes soit dans la couche de colonies qui re- couvre la gélatine, çà et là des groupes vivement lumineux. En faisant avec ceux-ci, de la manière ordinaire, de nouvelles cultures sur le même sol, on pourra se trouver, après une seconde journée, en possession d’une multitude de colonies isolées.
Le Ph. luminosum est du nombre des bactéries qui font diffluer très fortement la gélatine (Fig. 4a, page 409). Lorsque cette fusion s’opère en présence de beaucoup de matière azotée, par exemple de 1% d’asparagine et 1% de peptone, il ne se développe pas de produits fétides; quand, au contraire, l’ali- mentation azotée est insuffisante, il s’établit un processus de putréfaction, évidemment aux dépens de la gélatine. On peut aisément démontrer, de la manière suivante, que la liquéfaction est due à la sécrétion d’une substance particulière. Le Ph. luminosum croît rapidement et luit faiblement sur un sol de culture semblable au précédent, mais où la gélatine est rem- placée par l’agar. Si dans ce sol d’agar, on a porté en outre un peu de blanc d’œuf coagulé, de fibrine réduite € : poudre fine, ou de sérum sanguin coagulé, et que sur cette plaque trouble on trace une large raie de Ph. luminosum, on voit, dans l’espace de quelques jours, se former un large champ hyalin autour et au-dessous de la culture de bactéries, par suite de la dissolution de l’albumine introduite dans l’agar. Creuse-t-on alors une petite cavité dans ce champ hyalin et remplace-t-on l’agar enlevé par de la gélatine, on ne tarde pas à voir celle-ci se liquéfier. L'examen microscopique apprend qu'aux endroits où ces actions se passent 1l n'existe pas trace de bactéries, de sorte qu’elles doivent tenir à la présence d’un enzyme facilement diffusible.
De même que les autres bactéries photogènes, le PA.
huminosum ne se développe que sur un sol neutre ou faiblement alcalin. Une très minime quantité d’acide suffit déjà à em- pêcher complètement la croissance et la production de lu-
a
BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NOR. 407
mière. Ce fait est remarquable, car, dans des conditions de culture peu favorables, par exemple en présence de glucose, notre bactérie sécrète elle-même de petites quantités d'acide, lesquelles mettent bientôt fin à l'émission lumineuse. Mais cette propriété est, elle aussi, commune aux autres bactéries photogènes que j'ai étudiées.
Sur la gélatine au bouillon de viande peptonisé et sur le sérum du sang, le Ph. luminosum ne se développe pas du tout. : Ajoute-t-on, toutefois, 3 ou 312% de sel marin, de chlorure de potassium ou de chlorure de magnésium, alors le susdit sol devient également propre à la culture et la lu- mière peut y prendre la même intensité que sur les décocti- ons de poisson. Il me paraît certain, d’après des expériences faites sur le Ph. phosphorescens, que tout dépend ici de la grandeur des tensions osmotiques. Pour cette espèce, en effet, J'ai trouvé que des dissolutions de sels inorganiques très diffé- rents pouvaient, à la seule condition d’être isosmotiques à une solution de chlorure de sodium à 8°/, entretenir le dé- gagement de lumière et même la croissance. Les matières organiques au contraire, telles que la glycérine et le sucre, se comportent tout autrement. De ces faits on doit conclure que la phosphorescence de la viande, des pommes de terre et d’autres substances organiques, sur laquelle la littérature fournit de nombreuses données, ne peut tenir à la présence du Ph. luminosum que lorsqu'il y a, dans ces substances, une proportion suffisante de sel. Ce raisonnement s’applique aussi aux autres bactéries lumineuses connues jusqu'ici (Ph. phos- phorescens, Ph. Indicum et les bactéries de la Baltique, Ph. Fischeri).
La forme du Ph. luminosum est très différente suivant la nature de l'aliment (Fig. 4b et d). Lorsque celui-ci contient peu d’azote et d’hydrates de carbone, notre bactérie est en général très petite et d’une forme qui ressemble à celle des vibrions du choléra. Çà et là on remarque entre les bâtonnets
des spirilles plus ou moins longs, et, en suivant attentivement "fi
408 M. W. BEYERINCK. LE PHOTOBACTERIUM LUMINOSUM,
ceux-ci dans le cours de leur existence, on les voit quelque- fois se fractionner en courts vibrions. La courbure particulière des spirilles est cause que les produits de leur fractionnement ne sont pas, eux non plus, parfaitement droits; c’est là, dans le cas analogue des spirilles du choléra, ce qui a donné lieu au nom de ,bacilles en virgule”, donné par Koch à ses vi- brions. Spirilles et vibrions se meuvent rapidement et cherchent l’oxygène libre au bord des préparations. Un développement sans oxygène libre est impossible, n'importe dans quelles conditions.
C’est ici le lieu d'indiquer en peu de mots les différences de forme existant entre les quatre espèces décrites jusqu’à ce jour. En présence de l’extrême polymorphie à laquelle toutes sont sujettes, il est impossible, toutefois, de citer des différences morphologiques constantes, reconnaissables dans toutes les circonstances. Dans les conditions ordinaires de cul- ture, c’est-à-dire, à une vive luminosité sur un sol qui ne soit pas trop riche, voici ce qu'on observe en général.
Formes des bactéries lumineuses et de leurs colonies.
Photobacterium phosphorescens, bactérie lumineuse ordinaire.
a. Colonie ordinaire sur gélatine de culture.
b. (800). Forme ordinaire des bactéries de la colonie a, vues dans l’eau de mer, Les flèches indiquent la mobilité.
BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NORD. 409
Ph Fischeri, bactérie lumineuse de Ph. Indicum, bactérie lumineuse la Baltique. de la mer des Indes occidentales.
a. Colonie, faisant diffluer la gélatine a. Colonie.
avec surface concave. b. (803). Forme dans l’eau de mer. b. (800). Forme ordinaire dans l’eau
de mer,
1/4 is A. F, A
Fig. 4.
Ph. luminosum, bactérie lumineuse de la mer du Nord.
a. Colonie ordinaire, diffluente.
b. (800). Forme des bactéries de la colonie a, vues dans l’eau de mer. c. Colonie non diffluente, sous l’influence de la glucose.
d. (800). Forme des bactéries de la colonie c, vues dans l’eau de mer.
Le Ph. phosphorescens ordinaire, non liquéfiant (Fig. 1a et b), possède alors la forme de vésicules arrondies ou un peu irré- gulières, contenant souvent une inclusion plus foncée, qui se
410 M. W. BEYERINCK. LE PHOTOBACTERIUM LUMINOSUM,
multiplie, par bipartition indépendante, en même temps que les bactéries; plus rarement, ce sont des bâtonnets plus ou moins longs, des bâtonnets doubles ou des diplocoques, dont quelques-uns, dans tous les cas, nagent lentement en divers sens. L’épaisseur des bâtonnets est d'environ 0,5 u, la longueur d'environ lu; les dimensions des cellules globuleuses sont très variables et oscillent entre 0,5 et 2u. En présence de la glucose, et surtout quand il y a présence simultanée de glucose et d’asparagine, les bâtonnets et globules se gonfilent fortement et, par suite de la formation interne d’un acide, perdent complètement leur faculté lumineuse. Quelques bâton- nets montrent dans ces circonstances une tendance à se rami- fier et prennent alors la forme de ,bactéroïdes”, propre au Bacillus Radicicola des tubercules des Papilionacées.
Le Ph. Indicum, la bactérie Ilumineuse fortement liquéfiante de la mer des Indes occidentales (Fig. 3 a et b), ressemble beaucoup au Ph. luminosum en ce qui concerne l’aspect extérieur des colonies, mais l’intensité lumineuse est plus grande, et la teinte du liquide des colonies, liquide à surface légèrement concave !), est d’un gris plus cendré. La forme de cette bactérie à mouvements rapides est celle d’un bâtonnet droit à extrémités légèrement arrondies; on n’y voit qu’excepti- onnellement des individus qui s’incurvent et se rapprochent de la forme des spirilles.
Le Ph. Indicum et le Ph. luminosum se comportent à peu près de la même manière vis-à-vis de l’oxygène; les états mobiles recherchent les sources de ce gaz; sans oxygène :1l n’y à pas ou presque pas de développement, le nitre n’est pas réduit, le bleu d’indigo l’est difficilement. L’optimum de température pour la croissance et la fonction lumineuse du Ph. luminosum se trouve vers 25 à 28° C, par conséquent, comme il était à présumer, plus bas que chez le Ph. Indicum,
1) L’excavation de la surface tient probablement à ce que de l’eau est soustraite à la colonie par la gélatine qui l'entoure.
BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NORD. 411
pour lequel cet optimum est situé, d’après mes expériences, vers 30 à 32°; aussi la rapidité du développement est-elle, chez le Ph. luminosum, notablement plus grande que chez le Ph. Indicum. Il n’est pas possible, toutefois, de donner à cet égard une règle générale, car les températures en question dépendent de la nature de l’aliment et de la proportion de sel.
Sur les changements de forme que ces deux bactéries su- bissent sous l'influence de la glucose mêlée à l’aliment, je reviendrai ci-dessous. Pour le moment, je dois encore dire un mot de la figure du bacille de la mer Baltique, Ph. Fischeri (Fig. 2 a et b).
Partageant le pouvoir protéolytique avec les deux espèces nommées en dernier lieu, le Ph. Fischeri s’en distingue aisé- ment par les très faibles dimensions des vibrions ou bâtonnets, qui nagent avec agilité; ces bâtonnets n’ont que de 0,1 à 0,8 u d’épaisseur sur environ 14 de longueur, et jamais je n'ai vu parmi eux des filaments plus longs ni des spirilles, qui sont si caractéristiques pour les Ph. Indicum et luminosum, au moins dans les cultures encore jeunes. L'aspect extérieur des colonies, dont le pouvoir lumineux égale celui du PA. Indicum, surpasse celui du Ph. luminosum et ne le cède qu’à celui du Ph. phosporescens, est très particulier, à raison de la profonde excavation (Fig. 2 a) que nous avons déjà appris à connaître plus haut. En outre, notre bactérie est bien recon- naissable par le fait que ses cultures continuent très long- temps, sans aucun renouvellement du sol, à produire de la lumière; sous ce rapport, elle dépasse de quatre à six se- maines les deux autres espèces liquéfiantes, qui au bout de 7 à 12 jours sont ordinairement tout à fait éteintes, et elle égale le - Ph. phosphorescens. La lumière ne possède pas la belle teinte vert bleuâtre si caractéristique pour les trois es- pèces nommées en dernier lieu, mais elle tire plus sur l’orangé et son éclat est moins vif; à cet égard, le Ph. Fischeri res- semble entièrement aux deux espèces non encore décrites dont il à été question plus haut, espèces qui présentent aussi
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une étroite affinité avec lui en ce qui touche la forme des bactéries elles-mêmes.
Cultures non lumineuses et non diffluentes. — De temps en temps, quoique en général rarement, les ensemencements faits avec d’anciennes cultures de Ph. Indicum, de Ph. lumi- nosum et de Ph. phosphorescens donnent naïssance à des colo- nies peu ou point lumineuses. Parfois, le pouvoir lumineux du semis tout entier est affaibli uniformément; dans d’autres cas, quelques individus seulement ont subi cette modification. Pratique-t-on, avec les colonies peu ou point lumineuses, de nouveaux ensemencements, la propriété nouvellement acquise se montre héréditaire; en répétant toutefois l’opération, on réussit assez souvent à voir se reproduire des colonies douées du pouvoir lumineux primitif. Dans quelques cas, savoir chez le Ph. phosphorescens, j'ai vu des lignes-d’inoculation, prove- nant de colonies non lumineuses, redevenir au bout de quelque temps, d’elles-mêmes, lumineuses sur toute leur longueur. Chez le Ph. Indicum et le Ph. luminosum, le phénomène d’affaiblissement, dont il vient d’être parlé, se présente beau- coup plus fréquemment que chez le Ph. phosphorescens; en faisant avec ces espèces des inoculations de tube à tube, on est donc constamment exposé à voir décliner le pouvoir lu- mineux des cultures; pour le maintenir au même niveau, il faut opérer de temps en temps une sélection dans un ensemencement de colonies. Que l'épuisement du sol de culture ou, plus exactement peut-être, l’action prolongée des produits de sé- crétion des bactéries, sans apport suffisant de matière nutritive, détermine de l’une ou de l’autre manière le changement en question, voilà qui est certain; mais, quant au pourquoi et au comment du phénomène, toute hypothèse manque en ce mo- ment. Le cas fait naturellement songer à la production de deux formes, bien caractérisées par leurs colonies, chez l’or- ganisme de la putréfaction, le Vibrio Proteus !), à la séparation
1) Gruber, Bacteriol, Centralblatt, T. V, p. 345, 1889,
BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NORD. 413
du Micrococcus prodigiosus en individus pigmentés et non pigmentés !), et peut-être à la perte de la virulence chez les contages. La chose est évidemment importante, comme ayant rapport au problème général de l’hérédité, et les bactéries lumineuses permettront peut-être, mieux que d’autres espèces, de scruter cette question.
Les lignes précédentes étaient déjà écrites lorsque M. le professeur Fischer, de Kiel, auquel j'avais envoyé il y a quelque temps mon Ph. luminosum, m’annonça que de mes cultures étaient nées deux formes très différentes de bactéries lumineuses. L’une d’elles est désignée par M. Fischer comme ,{orme en bacille du foin”, l’autre, plus semblable au , bacille du charbon”, comme ,forme en tête de Méduse” ; reproduites par inoculation, toutes les deux furent reconnues constantes, Comme je suis parfaitement sûr que les bactéries de mon envoi provenaient d’une seule colonie, et celle-ci d’un seul individu, il a dû se produire ici un phénomène analogue à celui du Waibrio Proteus. Très probablement, la nature de l'aliment y a joué un rôle, car chez moi il ne s’est pas opéré de changement pareil à celui dont il vient d'être question, et dans des laboratoires bactériologiques différents les mélanges nourriciers employés ne sont sans doute jamais complètement identiques.
En même temps que le Ph. luminosum, j'avais envoyé à M. Fischer des cultures faiblement lumineuses de Ph. Indicum et de Ph. phosphorescens; chez lui, toutefois, ces cultures ont récupéré leur plein pouvoir photogénique, sans qu’il lui ait même été possible d'observer l’affaiblissement, Au reste, j'ai constaté qu’il existe de grandes différences quant à la stabilité des formes peu lumineuses; je possède actuellement un état presque complètement obscur de Ph. Indicum, et cet état est très constant: transporté sur différents sols de culture, il est
1) Schottelius, Untersuchungen über den Microc. prodigiosus, dans »Festschrift für Külliker”, Leipzig, 1887.
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resté obscur, sans qu’une seule colonie ait montré quelque tendance de retour à l’état antérieur.
Outre la perte de pouvoir lumineux due à des influences héréditaires, il existe encore un effet du même genre, mais purement temporaire et pouvant être provoqué à volonté par certaines modifications de l'aliment. Cette forme d’affaiblisse- ment lumineux étant toujours accompagnée d’un prompt arrêt du développement, de la perte plus ou moins complète du pouvoir liquéfiant et de très singuliers changements de forme des bâtonnets et des vibrions, la cause en doit certainement être cherchée dans la pénétration, à l’intérieur de l’organisme, de matières particulières. Comme telles, j’ai reconnu certains sucres, en premier lieu la glucose, pris, dans une mesure moindre, la lévulose et la maltose; l’asparagine aussi exerçait une action analogue. Les quantités de ces matières, néces- saires pour faire cesser l’émission de lumière et la liquéfaction, sont minimes: l’addition de 1°/ de glucose, ou de 1°/ d’as- paragine, suffit amplement. La lumière des bactéries Ilumi- neuses liquéfiantes n’émanant nullement, comme on le dit quelquefois, d’une matière sécrétée, mais étant liée, de même que chez le Ph. phosporescens, à la substance vivante elle-même, tandis que le pouvoir liquéfiant dépend de la sécrétion d’un enzyme analogue à la trypsine !), il est évident que la péné- tration de la glucose ou de l’asparagine dans la substance du corps des bactéries doit occasionner une double perturbation : rien, en effet, n’autorise à supposer que l’enzyme, aussi long- temps qu’il est renfermé dans le corps des bactéries, fasse
1) La preuve que les bactéries douées d’une action peptonisante ne sécrètent pas, comme on le prétend ordinairement, une pepsine, mais une matière semblable à l’enzyme de l’albumine, sécrété par le pancréas, cette preuve, dis-je, résulte de la circonstance que la transformation n’a lieu qu’en cas de réaction neutre ou faiblement alcaline, tandis qu'avec la pepsine, au contraire, elle exige la présence d’un acide libre; la preuve résulte aussi de Ja nature des produits formés, parmi lesquels, en outre des peptones, on trouve de la tyrosine et de la leucine, qui manquent dans les vrais processus peptiques,
BACTÉRIE LUMINEUSE DE LA MER DU NORD. 415
l'office de combustible. Le pouvoir photogénique est, selon toute probabilité, une suite accidentelle de la respiration d'oxygène, l’énergie développée dans ce processus, et qui chez les organismes ordinaires se dégage comme chaleur, étant ici partiellement transformée en lumière. L'hypothèse que M. Radzizewsky ') a cherché à faire prévaloir, à savoir que J’émission de lumière dépendrait de la formation préalable de quelque matière particulière, cette hypothèse, admise en- suite par M. Bütschli ?), me paraît peu probable; il est cer- tain, tout au moins, que les aldéhydes dont j'ai fait l'épreuve, telles que la lophine, l’amarine, l’hydrobenzamide, l’essénce d'amandes amères, le triméthylenoxyde (CH?0)° et l’aldéhyde acétique *), donnent lieu, même en faible quantité, à l’ex- tinction de la lumière. Quant à la conclusion que la phos- phorescence dépend de l’oxygène libre, non de l’oxygène combiné, elle découle de la manière dont se comporte le Ph. phosphorescens. Chez cette espèce, en effet, le développe- ment et la division peuvent s’opérer par fermentation, même dans un milieu complètement privé d'oxygène, où le blanc d’indigo ne bleuit à aucun degré; mais alors on n’observe pas la moindre trace de lumière. Si le peroxyde d'hydrogène est capable d’entretenir la phosphorescence, cela s'explique par la décomposition tumulteuse de cette matière sous l’in- fluence des bactéries lumineuses.
—
1) Ueber die Phosphorescenz der organischen und organisirten Kürper, dans Liebig’s Ann., 203, 1880, p. 305.
2) Protozoen, p. 1094.
3) Toutes ces substances m'ont été données par M. le professeur van ‘t Hoff.
LES BACTÉRIES LUMINEUSES DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'OXYGENE.
PAR
M. W. BEYERINCK.
J'ai étudié trois espèces de Photobacterium, savoir les Ph. phosphorescens, Indicum et luminosum, au point de vue de leurs relations avec l’oxygène libre. Dans une pareille étude, trois fonctions différentes et, à ce qu’il paraît, indépendantes l’une de l’autre, doivent être considérées, tant en elles-mêmes que par rapport au développement. Ce sont: la combustion phy- siologique sous l'influence de l’oxygène libre, à laquelle est due la phosphorescence, la fonction réductrice et la fonction ferment; de ces trois fonctions, toutefois, la dernière ne s’observe que chez le Ph. phosphorescens, tandis que le PA. luminosum et le Ph. Indicum possèdent bien des propriétés réductrices énergiques, mais ne peuvent faire fermenter les sucres. En conséquence, les deux espèces nommées en dernier lieu doivent être rapportées aux microbes exclusivement aéro- bies, le Ph. phosphorescens aux anaérobies facultatifs. L’anaé- robiose de cette espèce est toutefois peu parfaite, c’est-à-dire la quantité d'oxygène lié, nécessaire pour l’anaérobiose, est relativement grande, beaucoup plus grande par exemple que pour celle des différentes espèces de levûres; cela ressort des très faibles dimensions qu'atteignent les colonies nées, dans un milieu privé d'oxygène, d'individus aérés.
Les phénomènes ferment et réducteur du Ph. phosphorescens étant mis en lumière par les mêmes expériences, 1l sera
M. W. BEYERINCK. LES PBACTÉRIES LUMINEUSES ETC. 417
convenable de parler simultanément des l’un et de l’autre.
Outre l'oxygène fixé nécessaire pour l’anaérobiose, et que nous appellerons l'oxygène excitateur”, il y a dans le pro- toplasma encore une seconde liaison entre l’oxygène et la substance vivante, celle de l’oxygène libre qui rend possible la fonction photogénique et qui se laisse indubitablement comparer à l’oxygène servant à la respiration ordinaire des cellules, tant lumineuses que non lumineuses.
Les expériences d’où découle l’existence de ces deux diffé- rentes formes de liaison seront décrites plus loin.
Dans plusieurs de mes expériences, je me suis servi de l’hydrosulfite de sodium comme moyen d’enlever tout leur oxygène aux milieux nourriciers ou aux liquides lumineux; quelques mots à propos de ce réactif ne seront donc pas déplacés.
L'hydrosulfite de sodium, découvert par M. Schützenberger !), employé plus tard par M. Pasteur et par d’autres pour déter- miner par titrage la proportion d'oxygène dans le moût de bière et dans d’autres liquides fermentés, se prépare comme il suit. ?)
Dans une dissolution de bisulfite de sodium du commerce on fait passer de l’acide sulfureux jusqu’à saturation, puis 100 cm. du liquide, introduits avec 30 gr. de zinc en poudre dans un flacon que le mélange remplit entièrement, sont for- tement secoués pendant À d’heure environ. Le contenu du petit flacon est alors jeté dans un grand flacon, déjà presque entièrement rempli par 2 litres de lait de chaux, fraîchement préparé en mêlant avec l’eau 100 gr. de chaux vive. Après avoir été secoué, le mélange s’éclaircit rapidement; le liquide limpide, au-dessus du dépôt, est l’hydrosulfite; on l’étend encore de 2 litres d’eau et on le conserve dans un flacon bouché. - Lorsqu'on veut étudier l’action de l’hydrosulfite sur le pouvoir lumineux et le développement des bactéries lumi-
1} Comptes rendus, T, 75, p. 880, 1873. 2) D’après M. Pasteur, Études sur la bière, p. 343, 1876
418 M. W. BEYERINCK. LES BACTÉRIES LUMINEUSES DANS
neuses, il est bon d’y ajouter 3% de sel marin et de neutra- liser par quelques gouttes d’acide lactique.
Le liquide ainsi préparé réduit l’indigo en grande quantité, ne se décompose pas à l’ébullition, est parfaitement incolore et transparent, n’est pas vénéneux pour les bactéries lumineuses ni pour beaucoup d’autres microbes, et se change par absorp- tion d'oxygène en sulfite neutre (S0? Na? devient S0® Na?) qui en dissolution étendue est également dépourvu d’action nocive. Dans des dissolutions acides on ne peut toutefois pas faire, avec ce réactif, des expériences relatives au développe- ment, vu que l'acide sulfureux mis en liberté entrave les fonctions vitales.
Les bactéries photogènes ne dégageant de lumière que dans des liquides faiblement alcalins ou neutres, et une propor- tion très minime d’acide étant déjà suffisante pour éteindre toute action de ce genre, les expériences de phosphorescence doivent, elles aussi, être exécutées dans des milieux neutres. Comme indicateur, dans ces expériences, on se sert du carmin d’in- digo, qui en cas de réaction neutre devient d’un jaune pur !), de sorte que l'instant où les dernières traces d’oxygène ont été enlevées se laisse fixer avec beaucoup de précision.
Après ces préliminaires, J'aborde mes expériences, en com- mençant par celles qui concernent le dégagement de lumière.
Action de l’hydrosulfite de sodium sur la fonction photogénique. — Si à de l’eau de mer rendue fortement phosphorescente par des bactéries lumineuses on ajoute, outre un peu de carmin d’indigo, un excès d’hydrosulfite de sodium, ce qui naturel- lement produit la réduction de tout l’indigo, le temps au bout duquel la phosphorescence cesse, puis reparaît quand l’indigo
1) En cas de réaction acide ou alcaline, les passages, au moment où la réduction devient complète, sont beaucoup plus difficiles ou même impos- sibles à saisir. Le sulfure d’ammonium et l’hydrogène sulfuré exercent une action décolorante sur l’indigo, c’est pourquoi il est bon d’ajouter aux cultures une trace d’un sel de fer.
LEURS RAPPORTS AVEC L'OXYGÈNE. 419
bleuit à la suite de l’agitation avec de l’air ou de l’addition de quelques gouttes de peroxyde d'hydrogène, ce temps, dis-je, n’est pas le même pour les différentes espèces. Le Ph. phosphorescens perd le pouvoir lumineux plus tôt et le récupère plus tard que les PA. luminosum et Indicum, de sorte que la tension de l’oxygène, nécessaire pour la phosphores- cence, est pour ces dernières espèces moindre que pour le Ph. phosphorescens. Compare-t-on ensuite exactement, en procédant avec lenteur à l’addition de l’hydrosulfite, les mo- ments de la perte de la lumière et de la décoloration de l’indigo, voici la différence qu’on observe entre les espèces dont il s’agit.
Pour toutes les trois, à la vérité, on voit, après la réduc- tion totale de l’indigo, la phosphorescence persister encore quelque temps; mais une fois l’extinction totale produite, les phénomènes du retour de la lumière, par l’accès de l’oxygène, sont légèrement différents. Alors, en effet, les Ph. Indicum et luminosum, même avant la formation de la moindre trace de bleu d’indigo, ont déjà acquis un pouvoir lumineux notable, tandis que le Ph. phosphorescens ne récupère ce pouvoir que peu de temps avant l’oxydation de l’indigo, ou simultané- ment avec elle. Nous apprenons ainsi ce fait remarquable, que des traces d'oxygène libre, en cas de présence simultanée de blanc d’indigo et de quelques espèces de bactéries lumi- neuses, sont absorbées plus tôt par ces organismes que par lindigo réduit, — et aussi plus tôt, comme il ressort de la description de l’expérience, que par l’hydrosulfite. Ces bac- téries lumineuses sont donc, pour des traces d'oxygène libre, un réactif plus sensible que l’hydrosulfite et que le blanc d’indigo. Connaissant cette propriété, nous ne sommes plus surpris qu'un liquide rendu phosphorescent par des bactéries lumineuses bien nourries puisse, après l’addition d’hydrosul- fite, continuer encore, pendant un temps relativement long, à émettre de la lumière; en effet, tant que l’oxygène libre retenu par les bactéries n’est pas consommé, il peut bien
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profiter à la fonction lumineuse, mais non être fixé par l’hy- drosulñte. Il suit donc de là que l’oxygène libre, — et il n’est ici nullement question de l’oxygène excitateur nécessaire aux fonctions réductrice et ferment, — une fois admis dans les cellules, ne peut plus en sortir par diffusion. Certes, c’est un phénomène intéressant que de voir un liquide, rendu lumi- neux par le Ph. phosphorescens ou mieux encore parle Ph. In- dicum ou le Ph. luminosum, et auquel on ajoute de l’indigo et de l’hydrosulfite en grand excès, continuer à briller pendant une demie heure et plus, malgré la.vrésence du blanc d’indigo et aux dépens de l’oxygène libre contenu dans les cellules. Jai remarqué que l’état de nutrition antérieur n’est pas sans influence sur ce phénomène, mais il n’est pas encore possible de communiquer à cet égard des résultats positifs.
En termes un peu différents, les observations qui viennent d’être décrites se laissent résumer ainsi: L’affinité du PA. lu- minosum et du Ph. Indicum pour les traces d'oxygène dis- soutes dans le liquide ambiant est notablement plus grande que celle du blanc d’indigo, tandis que celle du Ph. phospho- rescens diffère moins de cette dernière. Il convient de remar- quer ici, bien que plus loin nous devions revenir spécialement sur ce point, que le bieu d’indigo peut à la vérité être réduit par nos bactéries photogènes, mais que ce processus de réduction ne donne pas lieu à un dégagement de lumière.
Ces expériences tranchent, me semble-t-il, une question d’un certain intérêt théorique, dont voici l’énoncé :
Les bactéries lumineuses (et autres organismes analogues) enlèvent-elles complètement l’oxygène au milieu ambiant, ou bien l’absorption cesse-t-elle dès que ce gaz a atteint une certaine tension minima ?
En ce qui concerne nos bactéries, je crois que la première hypothèse est la bonne: elles privent absolument d'oxygène le milieu ambiant, et elles le font indépendamment de tout processus de réduction.
Cela résulte, si je ne me trompe, de ce qui a été dit plus
DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'OXYGÈNE. 491
haut, lorsqu'on en rapproche un autre fait, que personne, à ma connaissance, ne révoque en doute. Ce fait, c’est que le bleu d’indigo, placé, à l’état dissous, dans le vide absolu, pär conséquent sous une tension d'oxygène = 0, n’éprouve pas la moindre décomposition, de sorte qu’il n’y a aucune raison d'admettre l’existence d’une certaine tension d'oxygène minima, à laquelle le bleu d’indigo se changerait en blanc d’indigo. De là se déduit donc, inversement, que le blanc d’indigo peut enlever les dernières traces d'oxygène au milieu ambiant, en raison de l’incontestable attraction qui existe entre ces deux corps et qui n’est pas représentée par un équilibre mobile. Or, l'attraction exercée sur l’oxygène par nos bactéries lumineuses étant encore plus grande que celle du blanc d’indigo, elles aussi doivent pouvoir produire dans le milieu le vide absolu d'oxygène.
Plus loin, nous parlerons de la manière dont nos bactéries réduisent l’indigo; ici, il suffit de remarquer que, d’après ce qui précède, la réduction n’est pas due à ce que les bactéries abaïissent la tension de l’oxygène dans le liquide au-dessous d’un certain minimum, où le bleu d’indigo cesserait de pouvoir exister; car le bleu reste inaltéré, comme il à été dit, même à une tension = (.
L'état particulier de liaison, dans lequel doit se trouver à l’intérieur des cellules l’oxygène qui entretient la phospho- rescence, n’est évidemment pas comparable à celui d’une dissolution physique; mais il ne l’est pas non plus à celui de l’oxyhémoglobine, car ce dernier corps subit une dissoci- ation dans le vide. Le protoplasme vivant doit donc pouvoir s'unir d’une manière toute spéciale à l’oxygène, et en cela, précisément, 1il faut voir l’une des propriétés les plus carac- téristiques de la matière vivante.
Ce rapport, toutefois, n’est pas le seul que le protoplasme phosphorescent ait avec l’oxygène. Outre la forme de liaison dont il vient d’être parlé, il existe une seconde combinaison entre le corps bactérien et l’oxygène, savoir avec l’,oxygène
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXII. 28
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excitateur”, combinaison de laquelle la fonction photogénique est indépendante, mais qui rend possible la mise en train de la fermentation et de la réduction.
L'existence de cet oxygène excitateur est dévoilée par les phénomènes qu’on observe lorsque les bactéries se développent en présence du bleu d’indigo. À ce sujet, je communiquerai d’abord quelques remarques relatives à la réduction par les Ph. Indicum et luminosum; ensuite je considérerai le Ph. phos- phorescens, simultanément à ce même point de vue et à celui de la fermentation, parce que ces deux propriétés sont mises en évidence par les mêmes expériences.
Phénomènes de réduction lors du développement des Ph. lumi- nosum et Indicum. — Le fait, que les bactéries lumimeuses exercent une action fortement réductrice sur le milieu ambiant, se constate le plus facilement par la décoloration qu’éprou- vent, à l’abri du contact de l’air, certaines matières colorantes ajoutées à l’aliment. Des différentes matières recommandées à cet effet, telles que le tournesol, le bleu coupier et le carmin d’indigo, la dernière est celle qui mérite de beaucoup la préférence, tant à cause de sa grande sensibilité pour l’oxygène et de sa résistance à l’action d’autres réactifs, qu’en raison de son innocuité pour les bactéries, même quand elle est employée en grande quantité.
Pour mettre en évidence, à l’aide de cette matière, le pouvoir réducteur des bactéries photogènes en question, le mieux est d'exécuter en sa présence l’expérience de Liborius. Cette expérience consiste à cultiver les bactéries dans des tubes d’essai profonds, où l'air ne pénètre, dans le milieu de culture solide, que jusqu’à une faible distance de la surface.
Voici comment l’on procède:
La gélatine nourricière, composée d’une décoction di poisson dans de l’eau contenant 3% de sel marin et 1°/ de peptone, est colorée en bleu par l’addition de quelques gouttes de carmin d’indigo; on laisse refroidir lentement, en secouant
PE TS
DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'OXYGÈNE. 493
continuellement pour que la gélatine puisse se saturer d’air, puis on y mêle avant la coagulation une goutte d’une culture de la bactérie à étudier, et on verse le tout dans un long tube d’essai, où la gélatine se prend en une colonne lumineuse. Le dégagement de lumière ne dure toutefois qu’un ou deux jours, parce qu’au bout de quelque temps l’oxygène inclus dans les couches profondes de la gélatine est consommé, la diffusion ne pouvant pourvoir d’air frais que les bactéries voisines de la surface. Après 2 ou 3 jours, l’indigo peut deve- nir jaune clair dans le bas du tube, bien que le développe- ment y soit si faible que la gélatine reste transparente, ce qui était d’ailleurs à prévoir d’après le caractère aérobie de ces bactéries. La réduction commence près de la surface, laquelle reste bleue, et de là se propage dans la profondeur. Cela tient à ce que les bactéries se développent plus vigoureusement près de la surface, d’où résulte bientôt l'insuffisance de l'apport d'oxygène, et à ce que le pouvoir réducteur s’exalte sous l'influence de l’oxygène excitateur. Tandis que la surface restée bleue continue à émettre de la lumière, cette émission cesse complètement là où commence la réduction.
Si pour ces expériences on fait usage de gélatine nourri- cière exempte de sucre et pauvre en amide, on reconnaît que le pouvoir liquéfiant est indépendant de la présence ou de l'absence de l’oxygène. Par l’addition de 1°/ de glucose la sécrétion de l’enzyme liquéfiant peut être empêchée, mais alors le pouvoir lumineux se perd aussi, manifestement à cause de la formation d’un acide.
Un mot a déjà été dit, plus haut, du mécanisme sur lequel repose la réduction du bleu d’indigo. Nous avons vu qu’il n’y à pas de raisons pour expliquer ce processus par l’abais- sement, jusqu'à un certain minimum, de la tension de l’oxy- gène. Probablement, au contraire, il faut y voir une trans- formation opérée à l’intérieur du corps bactérien. D'une part, en effet, les cellules de la levûre ordinaire, qui dans tous leurs actes vitaux essentiels se rapprochent tant des bactéries lu-
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mineuses, et qui enlèvent très rapidement les dernières traces d'oxygène au milieu ambiant, n’ont pas la moindre action décolorante, et l’observation nous apprend qu’elles possèdent une grande impénétrabilité à toutes sortes de matières colo- rantes, même au bleu de méthylène et à la cyanine ; d’autre part, on voit l’énergique pouvoir réducteur des bactéries s'accompagner de la facile pénétration des matières colorantes dans le corps bactérien vivant; entre ces deux propriétés on est donc naturellement tenté d'établir an rapport de cause à effet.
Phénomènes de fermentation et de réduction chez le Ph. phospho- rescens. — J'ai déjà fait remarquer que les bactéries lumineuses ordinaires de poisson phosphorescent appartiennent aux or- ganismes-ferments. Elles possèdent le pouvoir, en l’absence de l'oxygène libre, ou, plus exactement peut-être, dès que la tension de ce gaz tombe à une certaine valeur, de décomposer la glucose, la lévulose, la maltose et la galactose, avec dégage- ment d'acide carbonique et d'hydrogène, en volumes à peu près égaux; ce que devient le reste du carbone est encore incertain. L'expérience suivante permet de se convaincre de l'existence de la fermentation. On prépare une gélatine nour- ricière convenable pour les bactéries lumineuses et on y ajoute 1° d’un des sucres précités; ensuite on l’ensemence, au moment où la coagulation va commencer, d’un nombre modéré des bactéries en question, ce qui s'obtient le plus facilement en raclant avec une spatule de platine un peu de mucus bactérien lumineux d’une culture ordinaire en tube, et le portant dans la gélatine nourricière; après distribution uniforme, on verse le mélange dans un tube d’essai. A la vérité, 1l y a alors au début encore un peu d'oxygène dissous dans la gélatine, mais il est bientôt consommé par les bac- téries, et comme l'oxygène ne se diffuse que lentement de haut en bas :), l’anaérobiose, et par suite la fermentation, ne
1) La vitesse de diffusion de l’oxygène dans la gélatine est faible, environ
DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'OXYGÈNE. 495
tardent pas à se produire dans la profondeur du tube; la fermentation est reconnaissable aux développement de bulles gazeuses, qui ne peuvent s'échapper de la gélatine.
La fermentation déterminée par le Ph. phosphorescens, en cas d'exclusion de l’oxygène, précède l’entrée en jeu de la fonction réductrice; cela ressort du fait que, si la gélatine saccharifère est mêlée de bleu d’indigo, cette matière n’est transformée en blanc d’indigo que lorsque les bulles de gaz n’augmentent plus guère, ni en nombre, ni en volume. En exécutant cette expérience, on a l’occasion d’observer encore un autre fait assez intéressant, à savoir, que l’addition d’un peu de sucre protège pendant quelque temps l’indigo contre l’action réductrice: si l’on prend deux tubes, dont l’un contienne le Ph. phosphorescens en présence d’indigo seul, autre en présence d’indigo et de 1% de glucose, on voit, toutes circonstances égales d’ailleurs, la décoloration appa- raître dans le second tube un couple de jours plus tard que dans le premier. On reçoit ainsi, au premier abord, l’impres- sion que la fermentation de la glucose pourrait être consi- dérée comme un phénomène de réduction de cette substance. Mais, en y réfléchissant, en reconnaît que cette interprétation ne saurait être admise. En effet, avec d’autres organismes- ferments, tels que les espèces ordinaires de levüûres, on n’ob- serve aucune réduction, et les manifestations les plus éner- giques de cette dernière fonction se présentent justement chez les espèces aérobies, par exemple chez les différentes formes du Pacillus subtilis et de ses analogues; rien n’autorise donc à penser qu'il existerait quelque rapport causal entre le pou- voir réducteur et le pouvoir ferment du Ph. phosphorescens.
1 cm. en 24 heures, et beaucoup plus petite que celle de l'acide chlorhy- drique, de l'acide lactique, etc. Des nombreuses matières que j'ai essayées, c'est l’'ammoniaque qui se diffuse le plus rapidement: les grandes différen- ces observées sont évidemment réglées en premier lieu par le degré de solubilité des matières dans l’eau, et en second lieu par les constantes de diffusion. |
4926 M. W. BEYERINCK. LES BACTÉRIES LUMINEUSES
Il est difficile de se faire une idée quelque peu précise de la quantité d'oxygène qui doit se trouver à l’état d'union lâche dans les cellules pour rendre possibles et maintenir en activité les phénomènes de la fermentation et de la réduction. Tout ce qu’on peut dire avec certitude à cet égard, c’est que cette quantité est moindre que celle de l’acide carbonique formé pendant la fermentation; en ef':t, si l’on calcule combien d’acide carbonique il pourrait approximativement se produire, en partant de la supposition que le poids entier des bactéries semées consistât en oxygène libre et en y ajoutant l’oxygène dissous dans la gélatine, on obtient un chiffre qui est un orand nombre de fois plus petit que celui de l’acide carbo- nique réellement dégagé. Au reste, le dégagement d’un vo- lume d’hydrogène égal à celui de l’acide carbonique nous apprend quil ne saurait être question ici d’un processus d’oxydation, mais qu’il faut attribuer à l’oxygène un rôle analogue à celui qu'il joue dans la fermentation alcoolique, c'est-à-dire, le rôle de stimulant. Tout ceci répond entière- ment à ce qu’on observe dans l’anaérobiose vraie, par exemple chez le Bacillus Amylobacter, avec cette seule différence que, dans ce dernier cas, la quantité d'oxygène qui agit comme stimulant est encore beaucoup plus faible et ne peut être mise en évidence que par des expériences faites avec soin.
Ainsi qu’il a été dit plus haut, cet oxygène excitateur ne se trouve pas à l’état libre dans le milieu nourricier des bactéries, mais à l’état d'union lâche — quoique sous forme solide — dans la substance des bactéries elles-mêmes. On sait que, lorsque la fermentation eut pour la première fois été expliquée comme ,la vie sans oxygène libre”, on crut que les organismes de la fermentation devaient posséder le pou- voir de soustraire de l’oxygène libre au sucre, et, bien que M. Pasteur ait été le premier à redresser cette erreur fonda- mentale et à exposer clairement, au moins pour la levûre de bière, comment les choses se passent en réalité, l’erreur en question est encore loin d’avoir disparu de la littérature phy-
DANS LEURS RAPPORTS AVEC L’'OXYGÈNE. 497
siologique. Cela n’a rien de surprenant d’ailleurs, car 1l semble incontestablement étrange d’entendre dire que ,pour la vie sans oxygène libre, de l’oxygène libre est nécessaire”. Telle est pourtant l’expression exacte, non seulement pour le rap- port de l’oxygène avec la fermentation, mais même pour la fonction réductrice des microbes: sans oxygène libre pas de réduction d’indigo bleu en indigo blanc, pas de formation de nitrites aux dépens des nitrates. Or, tous ces faits tiennent manifestement à un mode particulier d'association que l’oxy- gène contracte avec la matière vivante des organismes de la fermentation ou avec l’un de ses principes constituants.
En résumant tout ce qui vient d’être communiqué au sujet des bactéries lumineuses en général et du Ph. phosphorescens en particulier, nous arrivons donc à cette conclusion: L’oxy- gène excitateur fixé n’est pas en état d'entretenir la phos- phorescence, mais il est capable d’entretenir tant la fermen- tation, et comme suite de celle-ci la multiplication jusqu’à un certain dégré de l’organisme, que la fonction réductrice. Pour la phosphorescence, l'oxygène doit se trouver à un état plus libre; toutefois, cet oxygène n’est pas physiquement dissous dans la substance vivante des bactéries, mais il forme avec le protoplasme une combinaison pouvant se maintenir dans le vide. |
SUR LE KÉFIR,
PAR
M. W. BEYERINOCXK.
1. Provenance et usage.
Par kéfir ou hyppô !) on entend le ferment du lait des tribus montagnardes du Caucase ?), et aussi la boïsson ré- sultant de son action sur le lait. Le vrai nom de cette boiïs- son, toutefois, est ,sakwaska””. Pour la clarté du discours, on peut désigner le ferment sous le nom de ,grains de kéfir.”
Selon toute probabilité, le kéfir dérive du koumis *) et en est une forme améliorée. Comment cette dérivation s’est faite, c'est ce qu’on ne. sait pas d’une manière certaine, maïs la tradition suivante paraît digne de foi.
Les anciens peuples du Caucase apportèrent : un premier perfectionnement à la préparation du koumis en n’y em- ployant plus, comme le font encore aujourd’hui les nomades de l’Asie centrale, du lait de jument, mais du lait de vache ou de chèvre. Cette préparation se faisait d’abord dans des
1) Pour plus de détails, je renvoie à la traduction allemande de l’opus- cule russe de Podwyssotzki, Kefyr, Kaukasisches Gürungsferment und Getränk aus Kuhmilch, Petersburg, C. Ricker, 1884, où l’on trouvera aussi des indications sur la littérature russe relative à ce sujet. ;
2) Kern, Bull. d. la Soc. imp. d. natur. de Moscou, 1881, p. 141, parle des Ossètes et des communes situées près des plus hauts sommets du Caucase, l’Elbrouz, le Koschtan-Tau, le Dych-Tau et le Kosbek.
3) C’est ainsi que Kern (Z.c., p. 143), parlant du kéfir, dit: Par une fermentation plus prolongée, il se change en une boisson mousseuse, écu- meuse, fortement acide, semblable au koumis des steppes.”
M. W. BEYERINCK. SUR LE KÉFIR. 499
vaisseaux de bois de chêne, qui n'étaient jamais nettoyés: après la fin de la fermentation, établie spontanément, on ne les vidait qu’en partie, puis on ajoutait de nouveau du lait frais. Bien qu'il doive y avoir de grandes chances pour que, dans le liquide ainsi dilué, la fermentation primitive recom- mence et se continue de la même manière, 1l paraît pourtant s'être produit fréquemment des troubles, qui donnaient lieu à l’altération du produit et firent rechercher un procédé meil- leur et plus sûr. Celui-ci fut trouvé dans l’emploi de caillettes de veau ou de mouton, déposées sur le fond des récipients en chêne, et y restant dans un état de repos aussi parfait que possible. On vit alors se former çà et là, sur le bois des pa- rois, des grains de kéfir, qui ensuite furent reconnus capables de provoquer eux-mêmes dans le lait, sans accompagnement de caillettes, la fermentation voulue. On ne comprend pas très bien pourquoi il existe, semble-t-il, un rapport si intime entre les caïllettes et la production du kéfir; néanmoins, comme on sait que les ferments de l’acide lactique, qui constituent la partie principale des grains de kéfir, se rencontrent très gé- néralement à la surface des estomacs de veau et y trouvent donc selon toute apparence un milieu nutritif favorable, il n’est pas improbable que les choses se sont réellement pas- sées de la manière ci-dessus décrite,
Les grains de kéfir jouissent d’une vitalité très persistante : oubliés pendant des mois dans le lait aigri, ils peuvent, si on les remet dans du lait frais, déterminer promptement une nouvelle fermentation. En admettant que, comme boisson, le kéfir vaille le koumis, la préparation du premier offre évi- demment, par la sûreté que lui donne l’emploi du ferment, un grand avantage sur celle du second, de sorte que le mot »Kéfir”, qui signifie ,meilleure qualité”, est pleinement justifié.
Pour la préparation ordinaire du kéfir, telle qu’elle se pra- tique au Caucase, une grande quantité de ces grains de fer- ment est introduite dans des outres en cuir remplies de lait: à l’aide d’une agitation fréquente, — obtenue par exemple en
430 M. W: BEYERINCK. SUR LE KÉFIB.
plaçant les outres à portée des passants, qui ont coutume de les faire rouler en les poussant du pied, — le contenu est bientôt transformé en kéfir (sakwaska).
Pendant cette opération, les grumeaux de ferment eux- mêmes s’accroissent, quoique lentement, et au bout de quelque temps ils se séparent en fragments plus petits. La multipli- cation des grains exigeant le renouvellement répété du lait (à 20° C., toutes les 12 heures au moins), et par conséquent certains soins, le ferment avait, surtout autrefois, une valeur assez considérable.
Comme la fabrication du kéfir dans des outres est encore exposée parfois à échouer, parce qu’il est difficile d’y éviter complètement la présence d’organismes agents de corruption, beaucoup de Caucasiens préparent leur sakwaska dans des cruches de grès.
Les Caucasiens attachent au kéfir un très haut prix. Ils appellent les grains ,le millet du prophète” et leur attribuent des propriétés curatives énergiques, notamment dans les ma- ladies des poumons. Aux étrangers ils paraissent avoir toujours caché leur boisson, car autrement il serait à peine explicable que, même en Russie, les notions un peu précises à cet égard ne datent que de 1867. En Angleterre, toutefois, les grains de kéfir étaient déjà connus depuis la guerre de Crimée ; en 1855, les soldats revenus de l’expédition les avaient répandus dans le pays, sous le nom de ,gingerbeerplant”.
Lorsqu'on possède un nombre suffisant de grains de kéfir sains !), la boisson se laisse facilement préparer, dans une bouteille bouchée, de la manière suivante. La bouteille est remplie au quart de grains, auxquels on ajoute un volume double ou triple de lait. On bouche la bouteille, on la place dans une enceinte dont la température s'élève à environ 20° C. et on agite fréquemment, Au bout de 12 heures le
1) Ils sont mis dans le commerce par le Dépôt pharmaceutique de la Société sud-occidentale à Kieuw’’, duquel j'ai moi-même reçu mes maté- riaux; dans notre pays, on peut se les procurer chez M. Stoffel, à Deventer.
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lait est transformé en kéfir faible”, au bout de 24 en kéfir fort”. Une énergique fermentation alcoolique et une faible formation d’acide lactique sont les signes caractéristiques du processus. Quant on emploie une quantité moindre de grains de kéfir, il se passe beaucoup plus de temps avant que la boisson soit prête; la fermentation alcoolique est alors trop ralentie et il se forme un excès d’acide lactique; ce dernier effet se produit surtout sous l’influence des ferments lactiques spontanés partout répandus, lesquels ressemblent beaucoup à celui de kéfir, sans toutefois lui être complètement identiques,
2. Structure des grains. Saccharomyces Kefyr et Bacillus Caœucasicus. Lactase, un nouvel enzyme.
Les grains de kéfir (Fig. À) consistent en une association de deux êtres organisés très différents, savoir, une bactérie lactique (Fig. C) et une levûre '), dont l’ensemble affecte la forme d’une petite plaque. Cette plaque produit un grand nombre d’excroissances locales qui, en augmentant de volume, finissent par se souder entre elles près de leur origine et se présentent alors comme des tubercules sur le corps kéfirien primitif (Fig. À à droite). A l'exemple de M. Kern, on peut donner au ferment lactique le nom de Bacillus Caucasicus.
Quant à la levûre (Fig. BP), ce n’est pas, comme on le dit ha- bituellement, le Sacharomyces cerevisiae; c’est une espèce diffé- rente, pour laquelle le nom de Saccharomyces Kefyr est tout indi- qué. Le ferment lactique forme, de beaucoup, la masse principale des grains; dans les échantillons que j’ai examinés, la levûre se trouvait presque exclusivement à la surface et spécialement au côté convexe (gl Fig. À) ?) de la masse laminaire courbe ou enroulée qui constitue les grains; en quelques points seulement j'ai vu des chapelets ou de petites couches de cellules de levûre
1) Cette levüre a été déerite pour la première fois par E. Kern, Ueber ein neues Milchferment aus dem Kaukasus, dans Bullet. d. L. Soc. imp.
d. natural. de Moscou, T. 56, p. 141—177, 1881. Voir aussi Bot, Zeit., 1882, N°. 16.
2) Dans la figure ce côté est tourné en bas,
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disséminés à l’intérieur de la masse, entre les bâtonnets du ferment lactique. L'intérieur des plaques de kéfir consiste, comme l’apprend l’examen microscopique, en une masse co- hérente et tenace de très petites zooglæes (2m Fig. À) du ferment lactique, dans laquelle se distinguent nettement l’épaisse paroi
À (25). Coupe transversale d’un grain. On voit à droite deux excroissances, gl Couche et chapelets de levüre. zm Zoogloées de ferment lactique, th Cavités centrales, ml Moelle. se Écorce, st Structure en filaments parallèles. B (900). Saccharomyces Kefyr. C (1100). Bacillus Caucasicus.
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mucilagineuse et les bâtonnets et filaments. Sur des coupes transversales, on voit d’ailleurs une couche corticale (sc) et une moelle (ml), séparées par une limite assez tranchée; dans la moelle, la direction des filaments fortement courbés du ferment lactique est. indéterminée; dans l'écorce, au contraire, ces filaments sont parallèles entre eux et dirigés normalement à la surface (se à gauche). Dans les cavités (1h) des tubercules dont il a été question plus haut, on voit souvent un grand nombre de colonies de ferment entièrement isolées (2m), mais qui, en se multipliant, finissent par remplir complètement les cavités. 3
Le Saccharomyces Kefyr (Fig. B) est très facile à obtenir en culture pure par l’ensemencement, avec des grains de kéfir réduits en poudre fine ou avec du lait kéfiré, sur une gélatine lactée faiblement acide. Les colonies ressemblent beaucoup à celles de la levûre de bière, mais possèdent un bord légèrement crénelé et restent plus petites. Sur la gélatine lactée on voit les colonies s’affaisser promptement dans un creux profond, par suite de la disparition locale du sucre de lait. Les cel- lules de la leyvûre sont de forme oblongue et beaucoup plus petites (8 à 64) que les cellules de la levûre de bière (5 à 104). Jamais je n'ai vu, même en les conservant pendant longtemps dans l’eau distillée ou sur de petits blocs de plâtre, s’y former des ascospores.
En dehors de la taille et de la forme, le S. Kefyr se distingue encore du S. cerevisiae par la faculté de convertir le sucre de lait en alcool et acide carbonique, ce que ne peut faire la levûre de bière (ni la levûre du vin, S. ellipsoideus). Ce pou- voir tient à la sécrétion d’un enzyme inversif, qui du sucre de lait forme de la glucose et de la galactose. Cet enzyme ne saurait être identique à l’invertine, car celle-ci, on le sait, est dépourvue du pouvoir d’invertir le sucre de lait; par contre, le sucre de canne est inverti tout aussi facilement par l’en- zyme de la levûre de kéfir (et cela s'applique aussi à la seconde des deux espèces de levûres, découvertes par moi,
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qui invertissent la lactose, savoir au S. Tyrocola) que par l’invertine. Le nouvel enzyme pert être désigné sous le nom de ,lactase”. L’amidon n’est pas attaqué par la lactase.
Le fait que le S. Kefyr commence par invertir le sucre de lait et n'en détermine pas la fermentation directe, m’a été démontré au moyen du ,sol lumineux” que j'ai mis en usage pour les présentes recherches et pour toutes celles du même genre. J'entends par là une gélatine nourricière appropriée aux bactéries lumineuses ordinaires, et dans laquelle le Photobacterium phosphorescens est distribué en individus assez nombreux pour que ceux-ci, développés en colonies, for- ment avec la gélatine une couche très uniformément lumi- neuse. Ce sol lumineux s'obtient, par exemple, de la manière suivante.
À un bouillon de poisson, contenant 3° de sel marin et 7°/, de gélatine, on mêle, au moment de la solidification, une quantité pas trop faible de mucilage bactérien provenant d’une culture jeune ordinaire, en tube d’essai, de la bactérie lumineuse ci-dessus nommée; on verse ce mélange dans une boîte de verre bien stérilisée et on l’abandonne à lui-même, à la température d’appartement. Au bout d’une couple de jours, les innombrables germes isolés, partout répandus dans la gélatine, se sont développés en petites colonies vivement phosphorescentes: la couche entière brille alors d’une belle lumière vert-bleuâtre et est prête pour l’expérimentation ultérieure.
Lorsqu'il s’agit de mettre en évidence, avec une pareille gélatine, l’inversion du sucre de lait par le Saccharomyces Kefyr, voici comment on peut procéder.
Au moment de la préparation, avant de donner à la gé- latine le mucilage bactérien, on la mélange avec 2 ou 3% de sucre de lait !), lequel sucre n’est aucunement altéré par le
1) Comme la glucose, dès que le sol lumineux en contient 3% °/, ou plus, empêche, à cause de l’acide que les bactéries lumineuses produisent à ses dépens, le dégagement de lumière, possible seulement dans un sol neutre
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Photobacterium phosphorescens et n’exerce non plus la moindre influence sur cette bactérie lumineuse. Si l’on place toutefois, dès que l'émission de lumière commence à faiblir, un peu de culture de S. Kefyr sur la surface de la couche de géla- tine phosphorescente, on constate, après un ou deux Jours, un très notable changement dans le sol lumineux, au voisi- nage des cellules de levûre. Ce changement consiste d’abord en un renforcement local du pouvoir lumineux, puis en un accroissement plus vigoureux des colonies. La forte lumière est due à l’action du sucre de lait qui a subi l’inversion, lequel, en opposition avec le sucre de lait non inverti, est assimilé par le Ph. phosphorescens, avec accroissement de pou- voir lumineux; le processus respiratoire ainsi activé est suivi plus tard d’une augmentation dans le développement des colonies !).
Outre le S. Kefyr, j'ai encore appris à connaître, ainsi qu’il a été dit plus haut, une seconde espèce de levûre invertis- sant le sucre de lait et lui faisant subir la fermentation al- coolique. J’ai trouvé cette levûre, composée de petites cellules arrondies de 3 à 4u de diamètre, très généralement répandue dans le fromage d’Edam, d’où le nom de Saccharomyces Ty- rocola que je lui ai donné. Dans les publications les plus récentes 1l est d'ailleurs encore fait mention de deux formes de levûres, peut-être identiques au S. Kefyr (la seconde) et au S. Tyrocola (la première), qui possèdent le même pouvoir. La première de ces levûres a été trouvée par M. Duclaux ?)
dans le lait, la seconde, $S. Zactis, par M. Adametz ©), éga- lement dans ce liquide. |
ou faiblement alcalin, les expériences d’inversion doivent toujours être exécutées avec une faible proportion de sucre. Même alors il peut encore se former, tout autour des cellules de levüre déposées sur la gélatine, un champ obscur, lequel toutefois est lui-même entouré d’un anneau lumineux. 1) Dans certaines circonstances l’accroissement des bactéries peut faire défaut; c’est alors que l’on voit la respiration dans toute sa simplicité. 2) Ann. de l’Inst. Pasteur, T. I, p. 573, 1887. 3) Centralblatt f. Bactériologie, T. 5, p. 6, 1889.
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Lorsque le S. Kefyr est cultive pendant longtemps sur de la gélatine lactée neutre ou faiblement alcaline, on voit finale- ment la gélatine se liquéfier, de sorte que la levûre sécrète évidemment, au moins en petite quantité, un enzyme tryptique. On ne doit pas en conclure, toutefois, que dans le lait kéfiré il se produise une action protéolytique, car la réaction de ce liquide est fortement acide, et même dans un milieu fai- blement acide le S. Kefyr ne transforme pas la caséine. Pour cela, en effet, 1l faudrait la présence d’un enzyme peptique; or, un pareil enzyme n’est pas engendré par notre levüûre, comme on doit l’inférer de l’expérience suivante, qui donne le même résultat avec le ferment lactique.
Dans une gélose au sérum de lait, appropriée au dévelop- pement du ferment lactique et de la levûre de kéfr, on in- troduit une petite quantité d’une dissolution de caséine dans le carbonate de soude. Avant la solidification, on ajoute avec précaution de l’acide lactique libre, jusqu’à ce que la réaction soit devenue légèrement acide: une partie de la caséine est alors précipitée et on obtient, après la coagulation, un sol opaque, blanc d’albâtre, parfaitement homogène. En déposant sur ce sol quelques gouttes d’une dissolution de pancréatine et de pepsine, puis l’exposant à une température de 37° OC, on voit qu'au bout de 24 heures tout le champ de diffusion de la pepsine est devenu parfaitement limpide, par suite de la peptonisation de la caséine qui s’y trouvait; l’action de la trypsine a été contrariée par l’acide maïs non complète- ment empêchée. Or si, simultanément, on a porté sur la sélose un peu de levûre de kéfir et de ferment lactique de kéfir, aucun signe d’une action particulière ne s’observera au-dessous de ceux-ci, de sorte qu’il ne peut pas s’en être diffusé un enzyme peptique. Une autre preuve de l’absence de la pepsine dans le kéfir, c’est que des fragments anguleux de blanc d’œuf durci par la chaleur possèdent encore, après 24 heures de séjour dans le lait kéfiré, des bords aussi aigus que lorsqu'ils y furent plongés.
TE ST PT
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Le résultat final de ces expériences est donc que ni la levûre de kéfir ni le ferment lactique ne sécrétent de la pepsine et que le trypsine de la levûre de kéfir doit être
inactive dans le lait au kéfir. 3.
3. Culture sur gélatine du Bacillus Caucasicus.
S'il est facile de cultiver à l’état de pureté la levûre du kéfir, la chose est au contraire très malaisée en ce qui con- cerne le ferment lactique du kéfir, et il faut posséder un peu d’expérience bactériologique pour distinguer sûrement ce ferment de certaines impuretés. Je ferai remarquer que parmi celles-ci se rencontrent naturellement les espèces de bactéries qui peuvent vivre dans des liquides acides, telles que les différentes formes des ferments acétiques et les nom- breux ferments lactiques baculiformes. Il n’est pas possible de donner en peu de mots un aperçu de ces espèces; leur étude présente toutes sortes de difficultés et c’est à peine si elle à été commencée. D’autres impuretés ne causent aucun embarras quant à la distinction du Bacillus Cauca- sicus: de ce nombre sont les bacilles à acide carbonique et hydrogène, l’Oidium lactis, les levûres étrangères, le Mucor racemosus, les ferments lactiques du lait en forme de diploco- ques.
Pour notre ferment aussi, la gélatine au sérum de lait, neutre ou faiblement acidifiée par l'acide lactique, constitue un bon sol de culture. Si l’on verse sur ce sol de l’eau dans laquelle a été broyé un petit fragment d’un grain de kéfir, on voit, après 2 on 3 semaines ou même encore plus tard, apparaître çà et là, entre les colonies de levüre, les colonies très petites et extrêmement lentes à se développer du ferment lactique. Elles sont composées de minces bâtonnets (Fig. C), différents de lon- gueur et parfois aussi d'épaisseur. La grande lenteur du dévelop- pement de ces colonies ajoute beaucoup à la difficulté de les isoler. Jusqu'à un certain point, toutefois, on peut parer à
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIII. 29
438 M. W. BEYERIN_.21 SUR LE KÉFIR.
cet inconvénient en opérant à une température supérieure, ce qui rend nécessaire la culture sur gélose. On reconnaît alors que la température la plus favorable à l’accroissement est très élevée, de 45° C. environ, point où la levûre de kéfir ne se développe plus du tout. Le PBaccillus Caucasicus ne fait pas fondre la gélatine, ne forme n1 lactase n1invertine, mais transforme directement en acide lactique le sucre de lait, le sucre de canne, la maltose et la glucose. Pour ce processus aussi, la température optima est très haute, de 40 à 45° C. environ. Sur l’amidon ou la caséine je n’ai pas remarqué que le B. Caucasicus exerçàt quelque action particulière, non ex- plicable par l’acide lactique produit. En toutes circonstances le ferment conserve la forme de bâtonnets ou de filaments, qui souvent restent unis en chapelets pouvant devenir fort longs. Jamais on n’observe le moindre indice de formation de spores, ni de phénomènes de mouvement.
La fermentation et la production d’acide lactique se font également bien, qu'il y ait présence ou absence complète d'oxygène libre. Sous la plupart des autres rapports aussi, notre ferment se comporte comme les ferments lactiques spon- tanés, baculiformes, de l’industrie de la fermentation; provi- soirement, toutefois, on ne saurait affirmer qu'il leur soit identique.
Les essais auxquels je me suis livré pour faire naître d’un mélange de levûre de kéfir et de ferment lactique, au moyen de la culture sur gélatine lactée, des grains de kéfir, ont échoué jusqu'ici; peut-être la durée de ces expériences, une demi-année environ, était-elle trop courte. J’y ai toutefois observé une forte agglutination entre les cellules de levûre et les bactéries, de sorte qu’elles ne pouvaient être séparées les unes des autres, même par une agitation prolongée dans l’eau. Il n’est guère douteux qu’on ne parvienne tôt ou tard à opérér, de cette manière, la synthèse des grains.
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4, Signification de la symbiose.
Si l’on se demande quelle signification biologique peut être attribuée, avec un degré suffisant de probabilité, à l’associa- tion particulière que nous avons appris à connaître dans le orain de kéfir, la réponse semble pouvoir être donnée, comme dans beaucoup d’autres cas, par la considération de l’utilité que l’homme en retire. Celle-ci, nous l’avons déjà vu plus haut, tient sans doute essentiellement aux propriétés anti- septiques que le lait a acquises après avoir été changé en kéfir. Il est vrai que le sucre de lait est alors converti, tota- lement ou en majeure partie, en alcool, acide carbonique et acide laëtique; mais ce dernier acide est de grande utilité pour la digestion, et l’alcool et l’acide carbonique, dans les faibles proportions où ils se trouvent et qui répondent tout au plus à 4 de sucre de lait, ont également une action bien- faisante. Ce qui, toutefois, paraît être ici d’une importance spéciale pour l’existence et le développement de nos deux organismes eux-mêmes, c’est l’exclusion de la putréfaction et la diminution de la formation d’acide acétique dans leur aliment, si sujet à s’altérer. Si l’on réfléchit que l’acide acé- tique est très nuisible au développement de la levûre et doit même être considéré à ce point de vue comme un vrai poi- son, tandis que l’acide lactique en petite quantité favorise la croissance des cellules de levûre et même à l’état de forte concentration (demi-normal par exemple) ne les tue pas, et que précisément ce même acide lactique chasse les ferments acétiques, — on comprendra pourquoi les cellules de levûre doivent trouver avantage à vivre associées au ferment lac- tique, qui se développe avec une lenteur extrême et n’a donc presque par besoin d’aliment: elles y gagnent, en effet, de se trouver dans un milieu exempt d'acide acétique et, en outre, exempt de bactéries de la putréfaction.
D’après les considérations qui précèdent, il n’y à pas lieu d’être surpris que les grains de kéfir ne soient pas la seule
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substance où l’on rencontre, réunis, une levûre et un ferment lactique. Citons-en, à titre de preuve, quelques exemples.
Le fromage d’Edam est tellement riche en ferments lac- tiques baculiformes que, du moindre fragment, on peut en isoler des centaines. En exécutant ces cultures, je m’assurai bientôt qu’en tous les points de ce fromage se trouvent aussi des cellules de levûre, de l’espèce nouvelle !) dont il a été. question plus haut, qui invertit le sucre de lait et met l’alcool en fermentation, et à laquelle j’ai donné le nom de Saccha- romyces Tyrocola.
Les fourrages verts aigris, le maïs ensilé, par exemple, pré- sentent le même phénomène: partout, dans la masse aigrie, du ferment lactique, mais partout aussi du Saccharomyces Pastorianus.
La pâte à pain, qui à une si grande tendance à s’aigrir, comme le prouve le levain, connu dès l’antiquité, contient non seulement d'innombrables bâtonnets de ferment lac- tique, mais, conjointement avec eux, les Sacch. Pastorianus, S. minor et autres formes de levûre. D’importantes industries, celle de la distillerie entre autres, sont en partie fondées sur ce fait.
Non moins remarquable, à ce point de vue, est le contenu du canal intestinal chez les enfants à la mamelle. Leurs dé- jections, couleur jaune d’œuf, ne sont tout entières, comme on l’a déjà décrit maintes fois, qu’une masse de bactéries, pratiquement une culture pure de ferment lactique, qui ne disparaît qu'à la suite du sevrage et est alors remplacée par la bile et le suc pancréatique. En examinant cette masse, jy ai toujours trouvé en grande quantité une levûre sphérique, qui à la vérité ne fabrique que peu d’alcool et n’invertit pas le sucre de lait, mais qui, bien que probablement sans utilité pour la digestion, démontre l’ardeur avec laquelle les levûres se multiplient dans les cultures du ferment lactique.
1) Cfz. Centralblatt für Bactériologie. Bd. 6, pag. 44, 1889.
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Tous ces exemples et toutes ces considérations expliquent facilement pourquoi la levûre de kéfr se trouve dans les zooglæes du ferment lactique du kéfir. Ÿ a-t-il toutefois lieu de penser que la levûre, de son côté, apporte au ferment des conditions vitales plus favorables? À cette question aussi, la réponse doit indubitablement être affirmative, bien que la raison de l’action favorable soit moins évidente. Mon attention a pour la première fois été attirée sur cette action par le fait que, dans les cultures de, mélanges de levûres et de ferments lactiques sur couches de gélose à 87° C, les colonies de ferment lactique accidentellement formées près de colonies de levûre croissent beaucoup plus vite et prennent de plus grandes dimensions que celles qui en sont éloignées. L'expérience m'a appris que la lactase, la glycérine, l’acide succinique, l’alcool, l’acide carbonique et la diminution de concentration du sucre de lait sont sans influence sur le phé- nomène. Je crois, en conséquence, qu’il faut songer à la sécrétion de peptones, ou peut-être de phosphate de potasse, par les cellules de levûre.
0. Dhiférentes préparations de Kéfir.
La possibilité de cultiver séparément les deux éléments du grain de kéfir fournit le moyen d’obtenir des préparations de lait formées, soit sous la seule influence de la levûre de kéfir, soit par l’action isolée du ferment lactique du kéfir. Bien entendu, il faut alors faire usage de lait stérilisé ou bouilli. En exécutant ces expériences, on voit, comme il était à prévoir, que la levûre de kéfir, après avoir produit pas- sagèrement une légère coagulation de la caséine, probablement à cause de la formation d’acide succinique, détermine dans le lait une fermentation alcoolique. Le sucre de lait se trans- forme rapidement et complètement, et on obtient un liquide non acide, riche en alcool et fortement mousseux.
Le ferment lactique ne forme dans le lait que très peu
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d’acide carbonique; quand l’air est suffisamment renouvelé, rien ne dénote même cette formation, d’où il faut conclure que le sucre de lait peut être converti entièrement en acide lactique. J’ignore de quelle façon s’opère alors l’hydratation, nécessaire d’après la formule chimique. Ce n’est pas, ainsi que la remarque en a déjà été faite plus haut, au moyen d’un enzyme sécrété par le ferment lactique. L'expérience suivante le prouve.
Si l’on dépose une certaine quantité de ferment lac- tique sur une couche de gélatine ou de gélose, l’enzyme, à supposer qu'il y en eût, sortirait du ferment et se ré- pandrait par diffusion dans la gélatine ambiante, tout comme cela à réellement lieu pour l’invertine, quand on opère avec la levûre; on obtiendrait donc ainsi l’enzyme. entière- ment isolé de l’organisme qui l’aurait produit. Or, si de la gélatine ainsi traitée on enlève un petit fragment, et qu’on le place sur un sol lumineux contenant, comme dans l’expé- rience décrite à propos de la levûre de kéfir, du sucre de lait, on n’observe aucun phénomène lumineux spécial, de nature à indiquer la présence d’un enzyme inversif. Examiné de la même manière, le lait aigri par le Bacillus Caucasicus se montre également dépourvu de tout enzyme inversif, tan- dis que, dans le lait kéfiré ordinaire, la lactase est facile à déceler par ce procédé.
Que, dans ce qui précède, soient énumérées toutes les ac- tions auxquelles la levûre et le ferment lactique donnent lieu dans le lait, je ne le regarde pas comme démontré. C’est ainsi, par exemple, que la caséine paraît se cailler, sous l’influence des grains de kéfir, un peu autrement que lorsqu'on se borne à y ajouter de l’acide lactique. Aussi m’avait-il semblé probable, à l’origine, que le grain de kéfir pouvait contenir un ferment de présure particulier, grâce auquel serait conservé, en dépit de l'acide lactique, l’état de fluidité si frappant du lait kéfiré. Différentes expériences, entreprises à
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l’effet de démontrer dans le kéfir la présence de quelque enzyme de présure, ont complétement échoué.
Mais le maniement des agents de coagulation exige des précautions extrêmes, dont l'oubli peut avoir pour résultat que la présence de ces agents nous échappe, et, dans le cas donné, ces précautions me sont peut-être restées inconnues. Sous ce rapport, l’étude du kéfir n’est pas achevée !).
Que le faible pouvoir tryptique de la levûre de kéfr, si- gnalé plus haut, ait quelque importance, soit pour la nature du processus de coagulation, soit pour la dissolution d’une partie de la caséine, c’est ce qu'on ne saurait admettre. En effet, si à du lait qui a fermenté sous l’action de la levûre de kéfir seule, on ajoute de l’acide lactique libre, rien de spécial ne s’observe dans la marche de la coagulation.
Si l’on se demande à quoi peut bien être due l’action particulièrement favorable que le kéfir exercerait sur la santé et la digestion, il semble résulter, de tout ce qui précède, qu’il n’y à à tenir compte que de l'alcool, de l’acide lactique et de l’acide carbonique, par lesquels le lait kéfiré se distingue du lait ordinaire. En parcourant ce qui a été écrit à ce propos, je n’ai pu toutefois me convaincre que les données concer- nant l’influence salutaire du kéfir reposassent sur autre chose que sur la tradition, et des expériences décisives sont si difficiles à instituer en pareille matière, que le mieux est as- surément de prendre pour critérium le goût de l’homme. A supposer qu'une personne à l’estomac faiblé trouve le kéfir une boisson agréable et lui convenant mieux que le lait, la question serait de savoir si elle ne donnerait pas la préférence au lait ordinaire additionné d’un peu d’acide carbonique, d’acide lactique .et d'alcool. En prenant du lait bouilli, on dispose- rait ainsi d’une boisson stérilisée de composition connue. Il serait facile d’y ajouter aussi du phosphate de fer et de la
*) Depuis que ceci à été écrit, j'ai poursuivi l’examen du kéfir, mais sans rien découvrir Jusqu'ici au sujet de l’enzyme de présure,
A44 À M. W. BEYERINCK. SUR LE KÉFIR.
pepsine, comme on le fait déjà pour le kéfir dans certains établissements.
Dans le cas, toutefois, où l’on viendrait à reconnaître que les organismes du kéfir produisent sur l’estomac quelque action bienfaisante de nature encore obscure, ou déterminent dans le lait des changements encore autres que ceux dont nous avons parlé et capables d'augmenter la valeur nutritive du liquide, il y aurait intérêt à préparer, dans les fabriques de kéfir, les boissons modifiées dont il à été question ci- dessus. Le mieux serait d’opérer les cultures séparées du ferment lactique et de la levûre de kéfir dans du lait stérilisé à 70 ou 80° C., suivant la méthode de Tyndall. La première disjonction du ferment lactique et de la levûre devrait se faire par des cultures sur gélatine, mais plus tard on pourrait tou- jours se servir des liquides eux-mêmes pour provoquer dans du nouveau laït soit la fermentation soit l’acidification. En mélangeant les deux produits en certaines proportions, on obtiendrait les différentes qualités de la boisson kéfirée à mettre en vente. On se trouverait évidemment à l’abri de tous les organismes étrangers et en état de fournir une boïsson dont la richesse en alcool et en acide lactique serait connue et réglable à volonté.
Par rapport à la préparation elle-même, il y aurait cet avantage que la fermentation alcoolique du lait par la levûre de kéfir pourrait être effectuée à la température la plus favo- rable, de 28° C. environ, tandis que pour l’acidification, on choisirait la température de 40° C.; en opérant avec les grains de kéfir, au contraire, on est naturellement obligé de laisser agir la levûre et le ferment lactique à une seule et même température.
_ L'OLFACTOMÈTRE DOUBLE ET SON EMPLOI
RECHERCHES PHYSIOLOGIQUES,
PAR
H ZWAARDEMAKER Cz.
C’est un fait, connu depuis longtemps, que les odeurs peu- vent se mélanger. Dans les parfums composés, on croit souvent sentir, l’une à côté de l’autre, les différentes substances odo- riférantes. Il y a aussi des cas, toutefois, où l’on ne perçoit que l’odeur d’un seul des corps associés, cette odeur mas- quant toutes les autres. Ce dernier phénomène est spéciale- ment connu des médecins par l'application qui s’en fait en pharmacie. C’est ainsi qu’on a recours à l’odeur d'amandes amères pour dissimuler celle du musc, à l’odeur de certaines huiles essentielles pour chasser celle de l’iodoforme. Le profane aussi se sert avec pleine confiance de la racine d’iris (rhizoma iridis florentinae) contre la fétidité de l’haleine, ou de l’odeur du papier brûlé contre celle des déjections de chat, et réus- sit effectivement à faire disparaître ainsi, au moins pour quelques temps, cette insupportable puanteur.
Parmi les physiologistes, toutefois, le sujet n’a que peu attiré l'attention. Cela tient probablement à ce que ces phé- nomènes ont le plus souvent été considérés comme des actions chimiques. On se figurait que l’odeur du muse était fixée par les amandes amères, que l’émanation pénétrante de
446 H. ZWAARDEMAKER CZ. L'OLFACTOMÈTRE DOUBLE
l’iodoforme était détruite par l’essence de fenouil, que la désagréable odeur de graisse rance s’unissait chimiquement à l’arome, etc. Bien que le phénomène fût isolé et sans ana- logues, on se contentait, chose assez étrange, de l’explication donnée et on n’éprouvait pas le besoin d’analyser de plus près, de connaître exactement, le processus chimique qu’on se croyait en droit de supposer.
Des auteurs déjà un peu anciens, Valentin est le seul qui consacre quelques lignes à l’observation simultanée de deux odeurs. Les deux effluves odorantes, dont il voulait étudier le mélange, étaient conduites chacune dans l’une des deux narines. Il trouvait alors que l’impression la plus forte triom- phait de l’autre. Quand les odeurs étaient fortes toutes les deux, on pouvait avec une attention spéciale les percevoir l’une et l’autre, ou bien, sous l’influence de la volonté, sentir l’une d’elles séparément pendant un court instant. Ces ex- périences réussirent à Valentin avec l’éther sulfurique et le baume du Pérou. Il en conclut qu’il s'établit ici une lutte analogue à celle qui existe entre les deux organes latéraux de la vision !).
Dans les derniers temps, M. Aronsohn *) s’est occupé de de notre question. Lui aussi a observé plusieurs fois la lutte dont ïil vient d’être parlé, notamment entre le camphre et l’essence de citron. Par contre, le camphre fut vaincu par d’autres substances odorantes, même moins fortes, sans qu’il fût possible d’amener un état de lutte. C’est ainsi que l’odeur de camphre fut abolie par le pétrole *), l’eau de Cologne, l’essence de genièvre, et par l’odeur de l’oignon (A{lium sativum).
1) G. Valentin, Lehrbuch der Physiologie, T. IL p. 545, 1884.
2) Aronsohn, Experimentelle Untersuchungen zur Physiologie des Ge- ruches, dans Arch. f. Anat. u. Phys. 1886, p. 321.
3) Comp. l'ordonnance connue: R. OÙ. camphorati, OI. petrae Italici aa s. lininentum, mélange où le pétrole a perdu presque toute odeur désagréable.
SON EMPLOI DANS LES RECHERCHES PHYSIOLOGIQUES. 447
À part ces brèves remarques, on ne trouve rien sur ce sujet, à ma connaissance, dans la littérature médicale. Les écrits sur l’industrie des parfums, à la vérité, s’occupent in- cidemment du problème, mais, bien qu’il y ait là indubita- blement des faits intéressants à recueillir, la physiologie ne peut encore en profiter, parce qu’elle même n’est pas prête pour cette récolte.
Ayant fait récemment, avec l’olfactomètre, quelques expé- riences préliminaires sur le mélange des odeurs, j’ai obtenu des résultats que je crois devoir communiquer succinctement, malgré leur caractère provisoire, parce qu’ils mettent très nettement en lumière l’une des faces du problème.
Comme on le sait, l’olfactomètre (fig. 1) consiste en un
tube de verre dont l’une des extrémités, convenablement re- courbée, sert à l’olfaction, tandis que sur l’autre peut glisser un cylindre contenant la matière odorante. Ce cylindre a intérieurement un diamètre de 8 millimètres. Quand on le fait avancer de manière qu’il dépasse plus ou moins l’ouverture
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du tube, l’air qui traverse celui-ci vient en contact avec une partie de la matière odorante. Cette partie sera d’autant plus grande que le cylindre aura été retiré davantage: d’autant plus forte sera alors l’odeur qu’il communique.
On peut confectionner de pareils olfactomètres avec une grande variété de substances odorantes. J’en possède pour les suivantes : benjoin, baume de Tolu, cire jaune ordinaire, beurre de cacao, savon de glycérine, suif de mouton, bois de palis- sandre, bois de cèdre, cuir de Russie, paraffine, caoutchouc vulcanisé, mélange de gomme ammoniaque et de gutta-percha. Mais toute autre matière odorante peut également être em- ployée dans le petit appareil: il suffit de prendre un tube de verre des mêmes dimensions que le cylindre, c’est-à-dire de 3 mm. de diamètre intérieur, de le tapisser en dedans de papier brouillard, puis d’imbiber celui-ci d’une dissolution du corps odorant, De cette manière, on arrive facilement à dis- poser d’une longue série d’odeurs très différentes, les unes simples, les autres plus ou moins composées, qui se laissent amener à tout degré voulu d'intensité suivant qu’on porte l’ouverture du cylindre plus ou moins en avant de celle du tube d’olfaction.
Pour la commodité, et aussi en vue d’études théoriques ul- térieures, je propose de désigner par un nom particulier la quantité de matière odorante qui correspond au minimum perceptible. Nous supposons, bien entendu, que cette quantité soit amenée dans le nez par une inspiration unique, de la durée ordinaire, et que là elle produise l’exitation la plus faible susceptible d’être ressentie. Ce minimum n’a pas la même valeur pour toute personne et en toutes circonstances. Il est clair qu’un odorat très fin aura, pour les différentes matières odorantes, des minima perceptibles plus petits que ceux d’un sens olfactif émoussé. Si la nouvelle notion n’était donc pas précisée davantage, elle ne donnerait qu’une grandeur variable, inconstante, et non la mesure fixe que nous cherchons. Le minimum perceptible d’une matière odorante déterminée de-
SON EMPLOI DANS LES RECHERCHES PHYSIOLOGIQUES. 449
vient toutefois une pareille mesure constante si nous le cal- culons exclusivement pour le pouvoir olfactif normal. Un sens intact exigera en toutes circonstances, pour l'observation minimum, la même quantité de matière odorante !). Cette quantité normale peut être déterminée exactement, et pour des produits chimiques, invariables, elle peut même être ex- primée en valeurs absolues, en millimètres des longueurs de cylindre employées. Cette excitation minima, encore tout juste perceptible à un organe normal, constitue une mesure phy- siologique convenable pour toutes les autres excitations ol- factives de la même espèce, et c’est là ce qui rend désirable d’avoir pour elle une désignation spéciale. Je donnerai à l’unité en question le nom d’olfactie.
Grandeur d’une olfactie.
en millim. de l’olfactomètre.
4 10°C: 419220; nd cetirelL", 1 ji, , 38 20 Cine Etassie du itios Jin. . 20 10 MATRA CRANS US NU DR 2, 20 10 De OR A LS I... 15 10 DROUEMOMOM US A nus MA, 10 7 Boshdepalissandre :"... .: .. 3 CMAUDe A Lu SL, 4 2,5 Savon de glycérine .. 6 2 Beurre de cacao . . . .. 2 1 Pannes deMBgnns te. OL. ] 1
Du moment, toutefois, qu’on a un moyen de régler l’in- tensité des odeurs, il n’y a plus de difficulté à les mêler en
1) Feestbundel Donders-Jubileuin, p. 188.
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toutes sortes de proportions différentes. On n’a qu’à retirer Jusqu'à une certaine division le cylindre d’un olfactomètre et à tenir un autre cylindre dans son prolongement immédiat, de manière que l’air passe de l’un dans l’autre. En inspirant, on absorbe alors des quantités toutes mesurées de chaque matière odorante, quantités qui se mêlent dans l’appareil et dans les fosses nasales. Quelques essais préparatoires m’ont déjà appris que la plupart des odeurs ne peuvent pas être perçues simultanément. La prévision, qu’au mélange physique cor- respondrait un mélange des sensations, ne s’est pas réalisée, car presque aucune des combinaisons essayées ne donna une sensation composée. Suivant que l’un ou l’autre stimulant prédominait, on percevait l’une ou l’autre odeur, et lorsqu'on les compensait très exactement, toute sensation s’effaçait, ou bien l’on n'avait plus qu’une impression faible, indéterminée, qui ne devenait perceptible que par un effort d’attention, et ne répondait à aucune des composantes. Un pareil équilibre fut obtenu dans les cas suivant.
Compensation d’odeurs.
En centimètres de En olfacties. l’olfactomèetre.
Bois de cèdre et caoutchouc. . . 9310 23 : 14 Benjoin et caoutchouc !). .. «: SHARE ST LIU Paraffine et caoutchouc. . . . .. 81:10 81 : 14 Caduichouc Et. Cité. Set. 10:°7 14 : 28 Caoutchouc et baume de Tolu. . IUT 14 : 70 Cire et baume de Tolu. . ... J nt 40 : 90 Paraffine et cire . . . .. PART, IDT EN T2U0
1) Ce caoutchouc avait un pouvoir odorant plus faible que celui ordi- nairement empoyé, Pour en obtenir une olfactie, il fallait allonger l’ol- factomètre de 4 cm.
SON EMPLOI DANS LES RECHERCHES PHYSIOLOGIQUES. 451
Comme ce résultat aura nécessairement une grande influence sur toutes nos considérations ultérieures, je me crois obligé de donner ici un extrait de mon journal d'observations. Le lec- teur y trouvera mentionnés les chiffres bruts, desquels ont été tirés par le calcul, à l’aide du tableau de la page 449, Îles rapports ci-dessus.
Journal, 19 jévrier 1889. Observations faites avec l’organe olfactif droit, qui au début de l'expérience présentait, par rapport à l’olfactomètre à caoutchouc, le degré de sensibilité ordinaire. En plaçant l’un devant l’autre les deux tubes ol- factométriques, on trouva qu'il y avait compensation entre: a. 10 cm de cire et 9 cm de baume de Tolu (10 em de cire et 8 em de baume de Tolu donnaient combinés l’odeur de cire, 8 cm de cire et 10 em de b. de Tolu l’odeur de b. de Tolu). Donc, en olfacties, 40 : 90 — 1 : 21.
b, 10 cm de caoutchouc et 7 em de cire (10 cm de caout- chouc et 6 cm de cire donnaient ensemble l’odeur de caoutchouc, 10 cm de caoutchouc et 8 cm de cire l’odeur de cire). Donc, en olfacties, 14 : 28 — 1 : 2.
©. 10 cm de caoutchouc et 7 cm de baume de Tolu (10 em de caoutchouc et 6 cm de b. de Tolu donnaient ensemble l’odeur de caoutchouc, 10 cm de caoutchouc et 8 em. de b. de Tolu l’odeur de b. de Tolu). Donc, en olfacties, Ar, 40.43:
Journal, 14 février 1889. Observations faites avec l’organe olfactif droit, qui présentait par rapport à l’olfactomètre à caoutchouc le degré de sensibilité normal, savoir 0,7 de longueur de cylindre. En plaçant les tubes l’un devant l’autre, on trouva compensation entre:
a 8 cm de cire et 10 em de baume de Tolu (9 em de cire et 10 cm de b. de Tolu donnaient ensemble l’odeur de cire, 8 cm de cire et 10 cm de b. de Tolu l’odeur de b. de Tolu). Donc en olfacties, 32 : 100 = 1 : 3 environ.
452 H. ZWAARDEMAKER CZ. L’OLFACTOMÈTRE DOUBLE ET
b.
10 cm de caoutcouc et 7 cm de cire. Donc, en olfacties, TA DS "2:
10 cm de caoutchouc et 8 cm de baume de Tolu. Done, en olfactiés, FOUT
10 cm de caoutchouc et 8,5 cm de paraffine (10 em de
. caoutchouc et 8 cm de paraffine donnaient ensemble
l’odeur de caoutchouc, 10 cm de caoutchouc et 9 em de paraffine l'odeur de paraffine). Donc, en olfacties, FRE EN PARLE fe
10 cm de paraffine et 5 em de cire (10 cm de paraffine et 4 cm de cire donnaient ensemble l’odeur de paraffine, 10 cm de paraffine et 6 cm de cire l’odeur de cire) Donc, en olfacties, 10 : 20 = 1 : 2.
Journal 23 octobre 1888. Observations faites avec l’organe droit, qui se comportait normalement par rapport à l’olfac- tomètre à caoutchouc. Placés l’un devant l’autre, le tube à bois de cèdre et le tube à caoutchouc donnaient une odeur faible, sans senteur caractéristique. Il y avait compensation
entre :
Œ.
5,5 cm de bois de cèdre et 10 em de caoutchouc (6 em de bois de cèdre et 10 cm de caoutchouc donnaient en- semble l’odeur de cèdre, 5 cm de bois de cèdre et 10 em de caoutchouc l’odeur de caoutchouc). Donc, en olfacties, DID RARES PB!
4 cm de bois de cèdre et 10 cm d’une autre sorte de caoutchouc, à odeur plus faible; donc, en olfacties, de nouveau environ 2:10—=1:5, si nous supposons le mi- nimum perceptible du caoutchouc = 1 cm.
3,5 em de benjoin et 10 cm du caoutchouc à odeur faible; donc, en olfacties, 3,5 : 10 = 1 :3 environ.
Dans ces expériences, ainsi que nous l’avons déjà dit, les cylindres à matières odorantes étaient placés l’un devant l’autre, de sorte qu’il se faisait un mélange direct des odeurs. Par suite, les actions chimiques et physiques ne sont nullement
SON EMPLOI DANS LES RÉCHERCHES PHYSIOLOGIQUES. 453
exclues. Bien que la chose ne soit pas probable, il reste pourtant possible que les molécules s'unissent en combinai- sons osmotiquement indifférentes, ou qu'il s'opère une agglo- mération, entraînant peut-être la perte du pouvoir d’exciter des sensations olfactives. Presque rien ne nous étant connu au sujet des particularités chimiques et physiques des par- fums, l'hypothèse aicithibre jeu.
Ces incertitudes sont évitées dans l’emploi d’une autre méthode, celle de l’olfactomètre double (fig. 2).
L'olfactomètre double se compose de deux olfactomètres ordinaires, placés l’un à côté de l’autre. Le but est facilement atteint en fixant les deux olfactomètres dans une même plan- chette, comme le montre la figure ci-dessus. Les deux cylindres contiennent des matières odoriférantes différentes, qu’on peut amener en toutes concentrations dans les deux narines. Il
ARCHIVES NÉERLANDAISES, T. XXIIL 30
A54 H. ZWAARDEMAKER CZ. L'OLFACTOMÈTRE DOUBLE ET
convient de nouveau de déterminer d’abord le minimum per- ceptible de la matière qu'on veut employer, et cela pour la narine qui, dans l’expérience proprement dite, sera mise en rapport avec le cylindre en question. Plus tard, on peut expérimenter avec 1 fois, 2 fois, 3 fois, etc. cette excitation minima. En supposant l’organe normal des deux côtés, on opère alors avec des stimulants de 1, 2, 3 etc. olfacties. Ainsi préparés, nous avons à répéter avec l’olfactomètre double les mêmes expériences que nous avons faites précé- demment avec des cylindres tenus l’un devant l’autre. Quan- titativement, cela n’est pas très facile, vu qu’on a de la peine à découvrir un organe qui fonctionne, dans ses deux moïitiés latérales, d’une manière parfaitement égale et normale. Or, pour des expériences quantitatives, il semble préférable que cette condition soit remplie, car, dans ce domaine inconnu, nous ne savons pas quelles perturbations les modifications pathologiques de l’organe pourraient produire dans les rap- ports des odeurs qui se compensent. Qualitativement, au contraire, il est extrêmement simple de se convaincre que, dans l’olfactomètre double aussi, deux impressions peuvent s’annihiler l’une l’autre. C’est ainsi que l’odeur de caoutchouc, amenée en quantité convenable dans l’une des narines, fait complètement disparaître l’odeur de paraffine, de cire, de baume de Tolu, admise dans l’autre. On peut même appliquer des excitations assez fortes, sans que jamais 1l se produise une sensation mixte. C’est ou bien l’une, ou bien l’autre odeur qui ressort plus ou moins distinctement. Le rapport exact est-il enfin trouvé, alors on ne perçoit plus la moindre odeur. L’élimination des sensations est donc absolue. Il n’est pas douteux, toutefois, que les matières odoriférantes n'agis- sent de la manière ordinaire sur l’organe de l’odorat. D'abord, elles sont introduites séparément, et elles restent aussi séparées dans les fosses nasales, par la cloison. Ensuite chaque moitié du nez est, après l'expérience, manifestement émoussée pour l’odeur avec laquelle elle a été en contact, et dont elle aurait
SON EMPLOI DANS LES RECHERCHES PHYSIOLOGIQUES. 455
vivement ressenti l’impression, si cette odeur avait agi seule, au lieu d’être neutralisée par celle de l’autre côté.
Je n’ai pas examiné, dans leurs diverses combinaisons pos- sibles, toutes les matières odoriférantes dont je disposais. Outre que le temps me manquait, cet examen ne paraissait pas promettre, pour le moment, beaucoup plus que ce qui avait déjà été obtenu. Nombre de ces matières, en effet, sont elles-mêmes des mélanges. C’est ainsi qu'avec l’olfacto- mètre à base de savon de glycérine on peut nettement dis- tinguer deux odeurs, savoir, une odeur de graisse et une odeur éthérée. La distinction se fait le mieux en hiver, car alors l’odeur de graisse est sentie séparément lorsque le cylindre dépasse de 1 millimètre, tandis qu’on ne perçoit que l’odeur éthérée quand on est arrivé à 6 millimètres de longueur de cylindre, ou au-delà. Expérimenter dans des conditions si complexes, avant d’avoir exécuté des recherches préliminaires variées, ne présenterait guère d'utilité.
Une des plus belles expériences qu’on puisse faire avec l’ol- factomètre double, expérience qu’à titre d'exemple de cette sorte d'observations je communiquerai avec quelque détail, est celle où l’un des olfactomètres contient de l'acide acétique, l’autre de l’ammoniaque. Pour cette expérience j'ai pu, grâce au concours obligeant de M. Grundel, ingénieur de la fabrique de faiences de Delft de Joost Thooft et Labouchère, me servir de tubes en kaolin. Ces tubes poreux sont imbibés d’une dissolution des composés chimiques simples, puis adaptés comme cylindres sur l’olfactomètre. Un pareil tube a une lumière de 8 millimètres et une longueur de 10 centimètres. Il est vernissé aux deux extrémités, mais les parois extérieure et intérieure sont restées poreuses, de sorte que le liquide odorant pénètre aisément et peut plus tard être enlevé en laissant le tube immergé dans l’eau pendant quelque temps.
Qu'on se représente donc les olfactomètres imbibés l’un d'acide acétique à 2°, l’autre d’une solution d’ammoniaque à 1%, et les deux vapeurs odorantes conduites isolément
30*
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dans les deux narines. Suivant que l’un ou l’autre cylindre est retiré plus loin en avant et produit donc l'impression la plus forte, on sent, ou bien l’acide acétique, ou bien l’am- moniaque. Jamais on ne les sent tous les deux à la fois, au moins si chaque observation particulière ne se prolonge pas trop, car autrement 1l est possible qu'au commencement de l'inspiration on perçoive l’ammoniaque et vers la fin l’acide acétique. La même chose peut arriver lorsque l’observateur est affecté de sténose d’une moitié du nez, parce qu’en pareil cas l’aspiration se fait inégalement !). Sauf dans ces condi- tions particulières, une seule odeur se fait sentir. Parmi les diverses combinaisons il s’en rencontre toutefois où aucune des deux odeurs n’a une prédominance notable et où l’on perçoit tout au plus une faible trace de l’une d’elles ; on réussit même, finalement, à trouver des proportions telles que, — en flairant des deux narines, — on ne distingue plus rien, on n'éprouve absolument aucune sensation. Cela reste encore vrai même quand on combine des stimulants très énergiques, qui chacun pour soi auraient fait une très forte impression.
Nous avons donc constaté ce phénomène remarquable, que deux excitations sensitives intenses s’affaiblissent récipro- quement jusqu’à annihilation de l’une d'elles, et peuvent même se neutraliser complètement. Si le phénomène se pro- duisait à l’air libre, on ne s’en étonnerait pas, car on sup- poserait une union chimique. L'idée que l'acide acétique et l’ammoniaque se combinent et forment de l’acétate d’ammo- niaque, se présenterait alors d'elle-même. Maintenant, toutefois, que les deux odeurs arrivent dans des fosses nasales différentes et restent séparées pendant toute la durée du processus sen- sitif, cette explication chimiqne n’est plus possible. Le phé- nomène appartient à la catégorie des phénomènes physiolo-
1) L’observateur peut s’examiner lui-même à ce point de vue, en res- pirant sur un miroir métallique tenu horizontalemnt sous les narinés. En cas de rétrécissement d’une des fosses nasales, l’une des deux taches latérales, formées sur le miroir, sera plus petite.
SON EMPLOI DANS LES RECHERCIES PHYSIOLOGIQUES. 457
giques. Peut-être a-t-il quelque analogie avec la compensation, plus connue, des sensations gustatives.
Des observations qui viennent d’être décrites, il semble permis de tirer les conclusions suivantes : 1°. Certaines odeurs s’annulent l’une l’autre, lorsqu'elles sont observées simultanément. 2°. La compensation est d’ordre physiologique. 3. Le rapport d'intensité des odeurs qui se neutralisent est probablement constant.
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* Arch -Neerl.Tome ANNTTLE PI. VIII.
LA MALADIE DE LA GOMME.
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Arch .Neerl.Tome. XXI. P1.IX.
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LA MALADIE DE LA GOMME.
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