A R R E S T S DU CONSEIL D’ÉTAT DU ROI, j Dont le premier cajfe & annulle , tant une Sentence des Officiers de ÏÊleéîiow de Saint-Lo, du i ÿ mars 1768 , qu’un arrêt de la Cour des Aides de Rouen , du 26 janvier 1770 : Et ordonne que cent quinze livres de faux Tabac pulvérifé , enfemble les deux chevaux qui en étoient chargés , & qui furent faifis fur les nommés François Legoupil & Gilles Eudes, le 20 févùer 1768 , demeureront acquis & conffqués au profit de Jean-Jacques Prevof , précédent Adjudicataire des fermes : Et condamne lefdits deux Particuliers en l’amende de mille livres , & aux dépens: JLe fécond , contradiéloire , déboute Legoupil & Eudes , de leur oppoftion à celui du 27 mars 1770 , ci-dejfus mentionné ; & ordonne qu’il fera exécuté félon fa forme & teneur. Du 27 Mars 1770. Extrait des RegiJIres du C on feil d’Etat. SUR fa requête préfentée au Roi, en fon Confeil, par Jean- Jacques Prévoit, ci-devant Adjudicataire général des fermes;; Contenant que, ie 20 février 1768, les Employés de la brigade de Saint-Lo, arrêtèrent fur la route qui conduit de cette ville' à Périeres, les nommés François Legoupil, dit Joli-cœur, de la paroiife de Septvaut ; & Gilles Eudes , de celle de Saint— Manvieu, avec deux chevaux, portant cent quinze livres de faux tabac en poudre : Que ces deux prévenus furent conduits au; bureau de Fentrepôt de Saint-Lo, où les Employés firent err leur préfence, la pefée & le dépôt du tabac fur eux faite.: Qu’ilst» 2 furent conftitués prifonniers , 6c leurs chevaux mis en fourrière ; après quoi les Employés rédigèrent leur procès-verbal, dont ils délivrèrent copie avec affignation , à ces fraudeurs , entre les deux guichets des prifons: Que, les chofes en cet état, la caufe fut portée à l’audience de l’Éleétion de Saint-Lo, où les Officiers rendirent, le 19 mars 1768, une fentence, qui prononça con- tradiéloirement la nullité du procès-verbal fufdaté , déchargea Legoupil 6c Eudes des conclufions prifes contr’eux, ordonna la reffitution des chofes faifies, ou de pareille valeur, 6c condamna le fuppliant aux dépens : Que les nullités qui ont fervi de bafe à cette fentence , étant abfolument imaginaires , le fuppliant en interjeta appel à la Cour des Aides de Rouen, où il eft intervenu, le 26 janvier 1770, un arrêt qui a mis l’appellation au néant, ordonné que ce dont étoit appel , fortiroit fon plein 6c entier effet, 6c condamné le fuppliant en douze livres d’amende, 6c aux dépens envers Legoupil & Eudes : Que cet arrêt , qui eft fondé fur les mêmes motifs que la fentence qu’il confirme, c’eft-à-dire, fur les nullités énoncées dans cette même fentence, eft irrégulier: Que , pour le démontrer , il fuffit d’expofer en quoi confiftent ces prétendues nullités ; que la première porte fur ce que les Employés n’ont pas rédigé des aétes féparés des diverfes opéra- tions contenues au procès-verbal ; 6c la fécondé , fur ce que les copies qui en ont été délivrées aux parties, n’ont pas été lignées de l’Entrepofeur dépofitaire des tabacs faifis, quoiqu’il y fut fait mention qu’elles dévoient l’être. Sur quoi le fuppliant obferve ; que le procès-verbal eft rédigé régulièrement & d’une manière claire 6c précife; qu’il conftate les faits de la faifie 6c fes fuites, jufqu’à la délivrance des copies après l’emprifonnement des pré- venus ; que tous les différens faits qui fe font fuccédés depuis huit heures 6c demie du foir jufqu’à onze heures 6c demie, font la matière d’un feul récit; qu’il n’y a eu aucun intervalle depuis le moment de la capture jufqu’à la lignification , qui n’ait été em- ployé par les faififfans, aux opérations relatives à cette faifie; 6c qu’ils ont conduit les fraudeurs au bureau, y ont fait la pefée 6c le dépôt du tabac, en leur préfence, ont mis les chevaux en fourrière, ont traduit les fraudeurs aux prifons, y ont rédigé leur procès - verbal , 6c le tout dans l’efpace de trois heures. Il ne fubfifte aucun règlement qui ordonne qu’il foit fait des aéles < 67 -2022 3 féparés, pour rapporter des faits qui fe font fuccédés les uns aux autres, 8c entre iefquels il n’y a' point eu d’interruption , ni de momens vides ; ce feroit exiger i’impoiïible , 8c le prétexte de cette prétendue nullité eft fi déraifonnable , que le fuppliant ne s'arrêtera pas plus long-temps à le difcuter: Quant au défaut de fignature de l’Entrepofeur , fur les copies fignifîées du procès- verbal , cette fignature n’étoit pas d’une néceiïlté abfoiue pour la validité du procès-verbal ; ce font les commis du fuppliant qui faififfent; il eft civilement refponfàble de leurs faits; c’eft à fon bureau que la fraude eft dépofée ; & dans tous les cas , c’eft contre lui que les parties ont leurs recours pour la repréfentation des chofes faifies, 8c conféquemment la fignature du Dépofitaire ne peut intérefler que le fuppliant feul : Mais il y a plus ; dans i’efpèce préfente, la fignature de l’Entrepofeur dépofitaire fe trouve fur l’original du procès-verbal; fi, comme les prévenus l’ont objeélé, il eft fait mention fur les copies qui leur ont été délivrées, que cette fignature devoit s'y trouver, cette mention ne peut être regardée que comme une faute d’attention de la part des rédacteurs de ces copies, puifqu’il y eft établi , qu’elles ont été délivrées entre les deux guichets des prifons, où l’Entrepofeur n’étoit pas, 8c ne pouvoit conféquemment y appofer là fignature, qui d’ailleurs n’y étoit à aucuns égards néceftaire: ÎI eft vrai que, pour donner quelque apparence de fondement à ce reproche, on a prétendu, à la tour des Aides, qu’il en réfultoit une contradiction mani- fefte qui attaquoit la foi due au procès-verbal ; mais dès que cette prétendue contradiction ne porte fur aucun des faits fervans à conftater la fraude, 8c n’a pour objet qu’une formalité qui n’eft pas néceftaire pour la validité du procès-verbal, & qui d’ailleurs fe trouve remplie par la fignature de l’Entrepofeur fur l’original de ce procès-verbal, les premiers Juges 8c la Cour des Aides n’ont pas dû s’y arrêter. Il eft donc évident, en conféquence , que la fentence des Élus de Saint-Lo du 19 mars 1768, 8c l’arrêt de la Cour des Aides du 26 janvier 1770, qui l’a confirmée, font irréguliers dans la forme; ils le font également au fond, en ce qu’ils ont jugé contre les difpofitions précifes des articles II des Déclarations des 6 décembre 1707 8c i.cr août 1721, dont le premier déclare faux tabac, celui qui n’eft pas revêtu de la marque ou cachet du Fermier; & le fécond défend à toutes perfonnes, de quelque qualité & condition qu’elles foient, de voiturer