t Digitized by the Internet Archive in 2015 https://archive.org/details/b21724817_0003 . E L É M E N S D’HISTOIRE NATURELLE . > E'.T . <• » V DE CHIMIE. TOME TROISI È M E. /* r' « r ÉLËMENS D’HISTOIRE NATURELLE E // l'C / DE CHIMIE, ■Cj; «R ATRIEME E A jr. M. F O u R cr O Y 3 D odeur en Mcfàcine de la Faculté de Paris , de V Académie Royale des Sciences , de la Société Royale de NLedecïne , de la Société Royale d Agriculture , ProfeJJeur de Chimie au Jardin des Plantes. TOME TROISIÈME. A PARIS , Chez CucheTj Libraire, rue & hôtel Serpente* M. D C C. X C I. f I craarac «jMWWiWI .-"M <-*" E L E M E N S ' D’HISTOIRE NA TURELLE E T D E CHIMIE. Suite de la troisième Section de LA E E RA L O G I E O U DE I ’ I S T G I R E des Substances combustibles . -• ; . S _ . ' CHAPITRE XII L D E LÀ NTIM01NE . L’Antimoine, flibium , eft un métal fragile, pefant, d’une couleur blanche brillante, affez femblable à celle de l’étain ou de l’argent. Il paroît compofé de lames appliquées les unes aux autres , & préfeme à fa furface une ■'Tome III, y A 2 É L É M E N S forte de criftallifation en étoiles ou feuilles de fougère. Il elt encore fufceptible de criftallifer en pyramides trièdres , formées par des efpèces de trémies implantées par leurs angles les unes fur les autres ; ces trémies parodient être elles- mêmes le réfultat de l’aggrégation de pyra- mides quadrangulaires , ou d’oétaëdres. Il perd dans l’eau un feptième de fon poids ; il fe réduit facilement en poudre ; il a une aétion très-fenfible fur l’eüomac , puisqu’il efi forte- ment émétique & purgatif. L’antimoine fe rencontre rarement natif -, il a été découvert par M. Antoine Shwab , à Sahlberg en Suède. M. Schreiber, directeur des mines d’Allemont en Dauphiné , en a trouvé dans ces mines. Cet antimoine natif eft en grandes lames & préfente toutes les proprié- tés de celui que Ton extrait de fa mine ; il contient feulement un ou deux centièmes d’ar- fenic. M. Mongèz le jeune a découvert un oxide d’antimoine natif en aiguilles fines & blanches mêlées avec de l’antimoine , ou grouppées à la manière de la zéolite. Il a trouvé cet oxide fur de l’antimoine natif des Chalanges en Dau- phiné. Ce métal elt le plus Couvent combiné avec le foufre , & il forme alors ce qu’on a appelé tj’HtsT. Nat. et de Chimie. £ improprement antimoine , & ce qu’on doit nommer mine ou fulfure d’antimoine. Ce mi- néral eft d’un gris noirâtre, en lames ou en aiguilles plus ou moins groffes , friables, dîf- perfées ou réunies fous différentes formes. Il eft quelquefois mêlé avec d’autres métaux , 8c particulièrement avec le plomb & le fer; il eff commun en Hongrie , en France , dans le Bour- bonnois , l’Auvergne , le Poitou. Les natura- liftes ont multiplié les variétés de cette mine, fuivant que fes filets font parallèles , étoilés , irréguliers 5 chatoyans , &c. lorfqu’elie eft mê- lée d’une portion d’arfenic , ou qu’elle a été altérée par des vapeurs alcalines ou combufti- bles , elle eft en aiguilles d’un rouge foncé y affez femblables aux belles fleurs de cobalt , mais un peu plus opaques. On peut, d’après ces détails , reconnoître plusieurs variétés de cette mine. Variétés. 1. Sulfure d’antimoine criftallifé en prîfmes à fix pans, terminés par des pyramides tétrae* dres obtufes , & ifolés. 2. Sulfure d’antimoine ftrié , ou formé de groffes aiguilles informes , appliquées & réu- nies en faifceaux irréguliers. 3. Sulfure d’antimoine à fines étoilées' A ij 4 É L Ê M E N S Variétés. , fes aiguilles vont en divergeant d’un centre commun. 4. Sulfure d’antimoine lamelleux ; il efl formé de lames plus ou moins étendues, qui imitent la mine de plomb nommée Galène . Quelquefois cette variété eft brillante, onia nomme alors antimoine, fpéculaire . y. Sulfure d’antimoine rouge. II efl en efflorefcence granuleufe à la fur face des aiguilles d'antimoine; quelquefois il efl crif- tallifé en aiguilles du prifmes d’un rouge plus ou moins brillant & foncé. Quelques naturalises le nomment en cet état kermès 8c fçufre doré natifs. On ne traite point le fulfure d’antimoine dans fes mines pour en féparer le métal pur ; on fe contente de fondre ce minéral pour le fépa- rer de fa gangue 8c des autres matières métal- liques auxquelles il peut être lié. A cet effet on prend deux pots de terre ? dont l’un efl percé de plufieurs trous dans fon fond , c’eft dans celui-là que l’on met la mine à fondre ; l’autre pot placé au-deffous du premier , & defliné à recevoir le fulfure d’antimoine à mefure qu’il fe fond , efl enfoncé dans la terre. On fait du feu autour du pot fupérieur ; on ne donne 1 d’H r s t. Nat. et de Chimie. 5) qu’une chaleur douce dans le commencement, parce que cette mine eft très-fufible ; mais fur la fin on augmente le feu , afin de retirer du minéral tout ce qu’il contient. Il pafe albrs une portion des autres métaux , & notamment du fer qui fe trouve dans la mine ; ces métaux forment une couche de fcories à la furfacp du fulfure d’antimoine. Quoique ce minéral tiré de la Hongrie pafie pour le plus pur , il efi cer- tain que tout fulfure d’antimoine fondu , lorf- qu’il efi bien aiguillé 8c fans mélange de fco- ries, efi cgalerhent parfait 8c propre à tous les ufages auxquels on a coutume d’employer ce minéral. Il faut feulement obferver que le ful- fure d’antimoine diffère fouvent par la quantité refpeélive de foufre & d’antimoine qu’il con- tient , 8c qu’il efi très-important de faire l’efiai de celui dont on fe fert pour préparer les mé- dicamens antimoniaux, dont il feroit fortà de- firer que la force fut toujours la même. Le fulfure d’antimoine efi très-fufibîe , ainfr qu’on peut le voir d’après le procédé employé pour le féparer de fa gangue ; fi on le pouffe au feu , lorfqu’il efi fondu dans des vai [féaux ouverts , il perd fon foufre qui fe diffi pe en vapeurs jaunes; la partie métallique s’oxicle au (fi très-facilement , & fe diffipe en vapeurs blan- ches. Mais à une chaleur douce 8c incapable. A iij 6 É L É M E N S de fondre le fulfure d’antimoine, le foufre de ce minéral fe diffipe lentement & par degrés; le métal s’unit peu à peu à l’oxigène attnofphé- rique, & forme l’oxide gris d’antimoine. Cette opération ne peut bien fe faire , qu’autant que le fulfure d’antimoine trcs-divifé préfente une grande furface à l’air. Pour cela, on le met en poudre 8< on l’expofe à un feu doux fur une terrine de terre vernilTée. Il faut aufTi procéder avec lenteur au commencement, parce que ce minéral eft très-fufible ; mais à mefure qu’on avance dans l’opération & que le foufre fe dif- lipe , l’antimoine devenant plus réfraétaire, on peut élever le feu jufqu’à faire rougir la tap- fuie qui contient ce minéral. On s’apperçoit qu’on opère bien , Iorfqu’on ne fent d’autre odeur que celle du foufre qui fe fublime pen- dant le grillage , & que la matière ne fe pelo« tonne pas ; mais lorfque le fulfure d’antimoine fe grumèle , & que le foufre fe décompofe en fe voiatilifant , ce qu’on fent par l’odeur fuffo- quante de l’acide fnlfiireux , alors la chaleur efl trop grande, 8c il faut la diminuer. Quoique le foufre paroifïe peu adhérent à l’antimoine dans fa mine, il n’efl cependant pas pofTîble de l’enlever tout entier par le grillage; & l’oxide gris d’antimoine préparé par ce pro- cédé, en retient toujours une allez grande quan- d’Hist. Nat. et de Chimie. 7 tité , malgré qu’il ait cré calciné au point d’ôter au métal Tes propriétés métalliques. L’oxide fulfuré & gris d’antimoine , pouffé au feu fans addition, fe fond en un verre d’un brun rouge ou couleur d’hyacinthe. Ce verre eft plus ou moins fufible , plus ou moins tranfparent, fuivant que le minéral qui a fervi à le former étoit plus ou moins calciné. Si cet oxide con- tient peu de foufre & beaucoup d’oxigène , le verre qu’il donne eft tranfparent & peu fufible, c’eft le verre mais on n’a point encore examiné ces alliages avec afTez de foin. Telles font les principales propriétés de ce métal. Il eft néceffaire maintenant de confidé- rer en particulier fa mine , à laquelle on a donné le nom impropre d’ antimoine. Comme c’efl de ce minéral que l’on fe fert le plus com- munément pour faire un grand nombre de pré- parations pharmaceutiques très-importantes, on conçoit que fes propriétés doivent être beau- coup mieux connues que celles du métal qu’il contient. Les alchimifles qui s’en font très- occupés , ont multiplié nos connoiflànces fur cette matière, & aucune fubllance n’a été le d’Hist. Nat. et de Chimie. 21! Fujet d’un plus grand nombre d’expériences que le fulfure d’antimoine. Nous avons déjà vu que l’on peut, à l’aide de la chaleur , en féparer une, portion du foufre , qu’il réfulte de cette opé- ration un oxide gris qui peut fe fondre en verre ou en foie d’antimoine , fuivant fa calcination plus ou moins avancée ; que le nitre en brûlant le foufre, oxide auffi la matière métallique. Mais le grillage & la combuflion par le nitre, ne font pas les feuls moyens d’enlever le foufre à l’antimoine : on y parvient encore en pré- sentant à ce minéral un corps qui ait plus d’af- finité avec le métal que n’en a le foufre , ou qui ait plus de rapport avec le foufre que n’eu a le régule. On a un exemple de la première décompo- sition, en appliquant les acides au fulfure d’an- timoine crud i ces fels & fur- tout l’acide ni- tro-muriatique , diffôlvent le métal , 8c en Sé- parent le foufre qui vient nager au-deffus de la difiolution ; le métal paroît même plus aifé à diffoudre complètement dans le fulfure d’an- timoine , que lorfqu’il efl pur , ainfî que nous l’avons déjà fait remarquer plus haut. Le fer 8c quelques autres fubflances métalliques enlèvent le foufre à l’antimoine. Le nitre efl employé avec Succès pour pré- parer avec le fulfure d’antimoine plufieurs mé- B iij 22 É T J M E N S dicamèns affez im portails. Nous avons déjà vu que lorfqu’on fait détoner une partie de cette mine avec trois parties de nitre, le foufre & le métal fe trouvent brûles , 8c il ne refie plus qu’un oxide d’antimoine pfèfque acidifié , uni à l’alcali. Si l’on fait détoner parties égales de nitre 8c de fulfure d’antimoine , cette détona- tion efi moins vive , parce qu’il y a moins de nitre ; auffi efl-on obligé de projetter ce mé- lange par cuillerées dans un creufet rougi, tan- dis que celui defiiné à former l’oxide blanc , ou V antimoine diaphorétique , n’a befoin que d’être allumé une fois, 8< détone enfuite tout feul , jufqu’à ce qu’il foit entièrement réduit en une maffe blanche. Lorfque la détonation du fulfure d’antimoine 8c du nitre à parties égales eü finie , on pouffe le tout à la fonte ; 8c au lieu d 'antimoine diaphorétique , on trouve dans le creufet une maffe brune-opaque , bril- lante, très-calfante , en un mot, un verre d'an- timoine brun N opaque, couvert de feories. On conçoit que dans cette opéra: ion , le nitre réa pas été en allez; grande quantité pour brûler tout le foufre. La portion de ce dernier , qui n’eft pas détruite , a entraîné l’oxide d’antimoine dans fa fufion. Lorfqu’on ne pouffe pas ce mé- lange à la fonte , on n’obtient qu’une feorie viueufe, à laquelle on donne le nom d ç faux d’Hist. Nat. et de Chimie. 23 foie d' antimoine de Rulland , Cette maticie re- duite en poudre 8c lavee dans l’eau , forme le fafran de métaux , qui n efl que de 1 oxidte d’amimoine vitreux , pulvérifé 8c féparé des ma- tières falines provenantes de la détonation du nitre. On fait encore deux préparations analogues à la précédente , 8c qui font de véritables verres d’antimoine fulfurés. L’une efl la rubine d’antimoine, ou magnejia opalin a , que l’on ob- tient en fondant dans un creufet parties égales de muriate de foude décrépité , de nitre 8c de ful- fure d’antimoine. Cette fonte , qui a lieu fans détonation , fournit une malle vitreuie, d’un brun peu foncé, très-brillante , 8c couverte de fcories blanches. L’autre appelée très-impro- prement régule médécinal , fe prépare en fon- dant un mélange de quinze onces de fuîfure d’antimoine , de douze onces de muriate de foude décrépité, & de trois onces de tartre. Il en réfulte un verre noir, Juifant, très-opaque, très-denfe , qui n’a nullement l’afpeét métal- lique. C es deux efpèces de compofés qui diffe- rent du vrai foie d'antimoine par quelques pro- priétés extérieures , doivent fans doute leurs différences au fel marin qui entre dans leur préparation , mais dont on n’a point encore apprécié les effets fur ce minéral. B iv 24 Élément Si l’on veut extraire l’antimoine de fa mine en petit dans les laboratoires, on doit n’em" ployer que ce qu’il faut de nitre pour brûler le foufre , & ajouter au mélange une matière capable de favorifer la réduction de la partie de métal qui efl réduite à l’état d’oxide dans cette expérience. Pour cela on prend huit on- ces de fulfure d’antimoine en poudre , fix onces de tartre , 8c trois onces de nitre ; on mêle exactement ces matières, on les projette par cuillerées dans un creufet rougi au feu -, le nitre détone avec le tartre 8c le fulfure d’antimoine, il fe forme du flux noir, 8c l’antimoine fe fond. Lorfque la matière efl bien fondue , on la verfe dans un cône de fer chauffé 8c graiffc , on frappe quelques coups fur Le cône pendant qu’on verfe le mélange ; on le laifie refroidir , & l’on trouve Je régule fous la forme pyramidale au fond de ce vaiffeau. Ce métal efl recouvert de fco- ries noires 8c rougeâtres , qui attirent facile- ment l’humidité de Pair. Le régule efl pur lorf- que fa furface fupérieure efl convexe, & qu’elle préfente une étoile régulière. Cette étoile qui avoit exalté l’imagination des aîchimifles , ne dépend que de la manière dont le métal crif- tallife en fe refroîdiffant. Ce refroidiffement commence par le bord , 8c la matière fluide étant rejetée du centre à la circonférence, pro- to’HisT. Nat. et r> e Chimie, âf iduit cette criftallifation qui n’a lieu que dans les petites maffes d’antimoine ; car dans les grands pains de ce métal , comme l’ondu- lation de la matière fluide part de plufieurs centres , au lieu d’une étoile on trouve des im- preffions en forme de feuilles de fougère, qui fe criflallifent fous différens angles. Réaumur a fait voir qu’un refroidiiïement fubit empêche cette forte de criflallifation en forme d’étoile, & que fi on refroidit brufquement un des cô- tés du cône , on n’obtient que la moitié de l’étoile ( i ). La quantité de métal qu’on retire par ce procédé , ne fait pas la moitié du ful- fure antimonié qu’on â employé , quoique ce minéral contienne fouvent plus de régule que de foufre , parce qu’une portion du métal efl; combinée avec les matières falines qui forment les fcories. Les fcories qui furnagent l’antimoine extrait de fa mine par ce procédé', font très-compofées. (i) Il y a fans doute un rapport entre la manière dont les culots métalliques criftallifènt à leur fùrface , & la forme qu'ils affeftent lorfque l’art parvient à les difpofer en criftaux ifolés par le refroidiffement bien ménagé, & par la féparation de la portion fluide d’avèc celle qui efl figée. M. l’abbé Mongèz s’eft occupé de ce rapport dans fes recherches fur la criflallilàtion des métaux. z6 E L É M E N S On y trouve l’alcali fixe du nitre & du tartre uni au foufre de l’antimoine , & dans l’état de fulfure alçalin ou éÜhépar, Ce fulfure tient en diffolution une portion d’oxide d’antimoine, & il efi mêlé d’un peu de fulfate de potafie formé par l'acide fulfurigue produit par la combuftion du foufre , & uni à une portion de l’alcali du nitre. Enfin ces fcories contiennent une matière charbonneufe fournie par le tartre. Si on les fait bouillir dans une grande quantité d’eau , & fi on filtre la liqueur bouillante , elle laide fur le filtre la portion charbonneufe. Cette difio- lution qui efi claire tant qu’elle efi chaude, fe trouble par le refroidifiement , 8c dépofe une matière rougeâtre qu’on a regardée jufqu’à pr«- fent comme un fulfure de potafie antimonié. Ce précipité efi nommé kermès minéral par la voie sèche. Lorfque la liqueur n’en précipite plus , on peut la faire évaporer , 8c on en ob- tient une matière moins colorée que le kermès ; 8c qui efi un véritable fulfure de potafie anti- ir.onié. Elle fournit aufii du fulfate de potafie. Si , au lieu d’evaporer cette liqueur , on y verfe un acide quelconque, il y produit un précipité jaune orangé d’oxide d’antimoine fulfure , au- quel on donne le nom de foufre doré d'anti- moine ; il paroît peu différent du kermès . Si l’on fait bouillir quelques infians du fuU to’Hisx. Nat. et de Chimie. 37 fure d’antimoine réduit en poudre , dans de l’eau chargée de carbonate de potalTe ou de foude, l’un ou l’autre de ces alcalis effervef- cens difïbut le foufre , & forme un fulfure alcalin qui tient en diiïolution une partie d’o- xide d’antimoine : on filtre la liqueur bouillante; elle laifle précipiter par le refroidi fie ment la portion d’oxide d’antimoine fulfuré rouge , ou de kermès , qu’elle contient. Cette liqueur étant refroidie & filtrée , on peut en précipiter de nouvel oxide d’antimoine fulfuré orangé , par le moyen des acides. Si on fait bouillir de nou- velle lellive alcaline fur le réfidu , on peut en- core tirer du kermès ; mais celui-ci efi plus pâle que le premier, & plus on réitère l’opération, moins on obtient de vrai kermès : il paroît que l’alcali diffout plus de foufre que d’oxide d’an- timoine , 6c qu’on ne devroit faire fubir au fulfure d’antimoine qu’une ou deux décodions dans l’alcali. Cette opération fe nomme en géné- ral préparation du kermès par la voie humide. Ce nom lui a été donné par le frère Simon, chartreux , fans doute à caufe de fa couleur femblable à celle de la coque animale appelée kermès (1), qu’on emploie dans la teinture. Le ( 1 ) Le Kermès animal ou la graine d’écarlate dont •n fe fert dans la teinture, n5eft autre choie que la peaa 28 ■ Élément kermès minéral a été auffi appelé poudre des Chartreux } parce qu’il a d’abord été préparé dans la pharmacie de ces religieux. La décou- verte de ce médicament paroît être due à Glauber, qui le préparoit avec le fulfure d’an- timoine & la liqueur de nitre fixé par les char- bons. Mais il a décrit Ton procédé d’une ma- nière inintelligible & prefque fous les emblèmes alchimiques. Lémery qui a beaucoup travaillé fur l’antimoine , & qui a donné fous un autre nom une préparation analogue au kermès , peut en être regardé comme le véritable inventeur. Cependant ce remède a été préfenté comme entièrement nouveau plufieurs années apres la publication de l’ouvrage de ce chimifle -, & il n’a dû en effet fa célébrité qu’aux cures fingu- licres qu’il paroît avoir opérées entre les mains du .frère Simon. Ce religieux tenoit cette coin* d’un infefte femelle , qui fe fixe (ur le chêne verd & s'é- tend peu à peu en fe foulevant en manière de calotte. II a perdu la forme des anneaux qui fait reconnoître ces animaux. C’eft fous cette calotte que font contenus les œufs qui y éclofent ; les inteftes fortis de ces œufs , per- cent cette coque , & les femelles fans ailes le fixent & meurent fur les feuilles de l’arbre , après avoir été fécon- dées par les mâles qui portent des ailes. La cochenille eft une autre efpèce d’infefte analogue à celui-ci, comme nous l’expoferons dans le régné animai. d’HiST. Nat. et dé Chimie. 29 pofiuon d’un chirurgien nommé la Ligerie , qui iv en étoit pas lui -même l’auteur. Ce dernier difoit l’avoir reçue de M. Chaflenaÿ, lieutenant de roi à Landau, à qui elle avoit , difoit-on , été communiquée par un apothicaire , prétendu élève de Glauber. Dodart , alors premier mé- decin du roi , s’adrelfa à la Ligerie pour faire publier la recette du kermès , 8c elle le fut en effet par ce chirurgien en 1720. Lémery le fils revendiqua la découverte pour fon père , dans les mémoires de l’académie , & avec d’autant plus de juflice que la plupart des pharma- ciens luivent encore le procédé indiqué par cet habile chimifte peur faire cette préparation. Le procédé décrit par la Ligerie , confiée à faire bouillir pendant deux heures une pinte d’eau de pluie avec quatre onces de liqueur de nitre fixé par les charbons , 8c une livre de fulfure d’antimoine caffé par petits morceaux; à filtrer J a liqueur bouillante; à faire bouillie la même mine avec trois onces de nouvelle li- queur de nitre fixé , étendue dans une pinte d’eau de pluie ; enfin , à faire fubir au fécond réfidu une troifème ébullition avec les leflives précédentes, en y ajoutant deux onces de li- queur de nitre fixé, 8c une pinte d’eau de pluie. On filtre 8c on laifîe dépofer le kermès , on le lave jufqu à ce qu’il foit intipide , on le fait $0 ' É L É MENS fccher , on fait brûler de l’eau de-vie defius , & on le pulvérife. Ce procédé efl long, il ne fournit que très-peu de kermès , puifqu’on n’en obtient tout au plus que deux ou trois gros d’une livre de fulfure d’antimoine. Il elt d’ail- leurs embarraflant à caufe de la longue ébul- lition & de l’évaporation de l’eau. Enfin il fait perdre plus de trois quarts de la mine d’an- timoine , en raifon de la petite quantité d’al- cali que l’on emploie relativement à celle, de ce minéral. M. Baumé, qui a adopté celui de Lémery, donne deux méthodes pour préparer facilement 8c en peu de tems , une grande quantité d’oxide d’antimoine fulfuré rouge, ou de kermès; l une par la voie sèche , 8c l’autre par la voie hu- mide. Suivant la première , on fait fondre dans lin creufet un mélange d’une livre de fulfure d’antimoine, de deux livres d’alcali du tartre bien pur & d’une once de foufre , le tout bien pulvérifé. On coule ce mélange fondu dans un mortier de fer , on le pulvérife grofîièrement quand il efl refroidi , on le fait bouillir dans une fufïifante quantité d’eau , on filtre la liqueur au papier gris, elle donne un kermès d’un rouge brun par fou refroidilfcment ; on le lave d’a- bord avec l’eau froide 8c enfuite avec l’eau bouillante , jufqu’à ce qu’il foit fufSfamment d’Hist. Nat. et de Chimte. 3* deffalé ; on le fait fécher , on le pulvérife & on le palTe au tamis de foie. Pour préparer e kermès par la voie humide îuivant le même chimifie , on fait bouillir une lefiive de cinq ou fix livres d’alcali fixe pur en liqueur, avec quinze ou vingt livres d’eau de rivière ; on jette dans cette liqueur bouillante quatre ou cinq onces de fulfure d’antimoine porphyrifé, on agite bien le mélange, & lors- qu’il a bouilli un inflant , on le filtre ; cette liqueur dépofe beaucoup de kermès par le re- froidifi'ement, on le lave de la même manière que celui qui efl fait par la fufion. Ce procédé fournit, Suivant M. Baume, douze à treize on- ces de kermès par livre d’antimoine. Ce chi- pifie allure que ces deux kermès font parfai- tement Semblables. La théorie de cette opération Sz la nature du kermès ne font pas encore parfaitement con- nues, malgré les travaux de plufieurs chimifies célèbres. On penfe généralement que l’alcali difibut le Soufre de la mine, 8c que le fulfure qui fe forme difibut aulfi l’antimoine. Ce métal n’eft cependant pas dilïous en totalité , puisque dans le procédé de Lémery par la voie humide, il fe précipite pendant l’ébullition une poudre grife qui fe fond fans addition en un véritable antimoine. L en Angleterre , à opérer cette congeliation du mercure à un froid moindre , 8c on a déterminé que 32 degrés au- défions de zéro du thermo- mètre de Réaumur, étoit le terme où elle avoir lieu : fi donc le mercure a defcendu plus bas dans les premières expériences , c’efi à un ref- ferrement ou à une condenfation fuccefiive qu’il faut attribuer ce phénomène. Ce métal efl donc le plus fufible de tous ceux que nous connoif- fons ; le plus grand froid connu dans les pays où il efi natif, ne peut pas le rendre folide. Il efi vraifemblable que fi dans les expériences précédentes le froid qui a gelé le mercure avoit été conduit par degrés infenfibles, cette matière métallique auroit pris une forme crifialline 8c régulière. La fluidité habituelle du mercure l’a Fait re- garder comme une eau métallique particulière, 8c on l’a appelé aqua non madefacïens manus : Veau qui ne mouille pas les mains. 11 efi vrai que le mercure ne mouille ni les mains , ni au- cuns des autres corps qui peuvent être mouillés d’Hist. Nat. et de Chimië, par l’eau , par les huiles ou les autres liqueurs ; mais ce phénomène ne dépend que du peu d’affinité qui exifle entre ce fluide métallique & ces corps. Car quand il efl en contaél avec quelques-unes des fubflances auxquelles il peut s’unir, comme l’or, l’argent, l’étain, &c. alors il s’applique intimement à ces corps , & les mouille au point qu’on ne peut les deffécher qu’en faifant évaporer au feu le mercure qui les enduit. Le mercure étant un métal fondu , aiTeéte toujours la forme de globules parfaits loif- qu’on le divife ; quand il efl renfermé dans un flacon , fa furfa.ee paroît convexe. Cet eiTet dépend & du peu d’affinité qu’a le mercure avec le verre , & de la grande attraction qui tend à rapprocher les parties de ce métal : car fi on met ce fluide dans un vafe de métal avec lequel il ait de l’affinité, alors fa furface paroît concave comme celle de tout autre fluide, parce qu’il fe combine avec les parois de ce vai fléau. Le mercure a une faveur que les nerfs du goût ne peuvent point percevoir , mais qui cependant produit un effet très - marqué dans l’effomae & les inteflins , auffi-bien qu’à la fur- face de la peau. Les inleétes & les vers font infiniment plus fenfîbles que les autres animaux 74 Ë L É M E N S à cette faveur ; c’eft pour cela que le mercure les tue très-vite , & que les médecins rem- ploient comme un excellent vermifuge. C’eft même en raifon de la propriété qu’il a de gué- ïir la galle & pîufieurs autres maladies de la peau , que quelques favans ont penfé que ces maladies étoient produites par la préfence de certains infectes qui pénétroient le tiffu de cet organe. Mais cette opinion n’a point été géné- ralement adoptée, quoique pîufieurs naturaliftes aient décrit le ciron de la galle, &c. Le mercure , frotté quelque tems entre les doigts , répand une légère odeur particulière. Lorfqu’il eft bien pur & qu’on l’agite , on ob- ferve quelquefois , & fur - tout dans les tems chauds , qu’il brille d’une petite lueur phof- phorique allez fenfible ; ce phénomène a été conftaté fur le mercure du baromètre par plu- fieurs phyficiens. Si l’on plonge la main dans ce fluide métallique , on éprouve une fenfation de froid qui fembleroit indiquer qu’il eft d’une température plus froide que l’air atmofphériquej cependant en y plongeant un thermomètre , on s’affure bien vite que le mercure eft à la tem- pérature de l’atmofphère. Cet effet qui nous trompe , doit être entièrement attribué à la for- tie rapide de la chaleur des mains qui eft enlevée par le mercure , dont la propriété conductrice pour ce corps eft très-énergique* d’Hist. Nat. et de Chimie. 75: Le mercure divifé à l’aide d’un mouvement rapide & continue! , comme celui d’une roue de moulin , fe change peu à peu en une poudre noire très-fine , qu’on a appelée Ethïops perfe , à caufe de fa couleur ; comme le mercure éprouve un commencement decombullion dans cette expérience . nous nommons cette poudre oxide de mercure hoir. On peut , en le chauf* fant légèrement ou en le triturant dans lin mor- tier chaud, le faire reparaître avec fa fluidité ordinaire 8c fon brillant métallique. Le mercure efl pêu abondant dans la nature, 8c il fe rencontre dans la terre ou dans l’état vierge 8c jôuiflant dé toutes fes propriétés , ou dans l’état d’oxide , ou combiné avec les aci- des , le foufre 8c quelques autres matières mé- talliques , il efl alors minéralifé par ces diverfes fub fiances. Le mercure coulant fe trouve en globules ou en plus grandes mafles , dans les terres 8c les pierres tendres , 8c le plus fouvent il efl interpofé dans fes mines. A Ydria, en Efpagne 8c en Amérique , on le ramafie dans les cavi- tés 8c les fentes des rochers ; on le trouve atifli quelquefois dans de l’argile à Almaden , & dans des lits de cr&ie en Sicile. Enfin on le rencontre dans des mines d’argent, de plomb, 8c mêlé à l’oxide d’arfenic blanc. Élément Aî. Sage a fait connoître une mine de mer- cure en oxide venant d’Ydria dans le Frioul> elle efl d’ un rouge brun , fort doux & grenue dans fa cahure ; on y trouve quelques globules de mercure coulant ; elle fe réduit fans addi- tion par la chaleur. M. Kirwan la regarde com- me une combinaifon d’oxide mercuriel & d’a- cide carbonique; elle donne 91 parties de mer- cure fur 100 de mine. M. Woulfe a trouvé en 1776, à Obermuf- chel dans le duché de Deux-Ponts, une mine de mercure crihallifée , pefante , fpathique, blanche, jaune & verdâtre, dans laquelle il ,a reconnu par les alcalis la préfence des acides fulfurique & muriatique ; c’ell un compofé de fulfate de mercure & de muriate mercuriel corrofif. M. Sage allure qu’elle tient 86 par- ties de mercure par quintal ; ce chimifle a décrit une mine de mercure corné brune de Carinthie. C’eh le plus communément avec le foufre que le mercure ell combiné dans la nature. Il forme alors un compofé connu fous le nom de Cinabre. Cette fubhance minérale eh rouge , & n’a en aucune manière l’afpeâ métallique , quoi- que le foufre s’y trouve en petite quantité , re- lativement au mercure, parce que la combinai- fon de ces deux corps eh très-exaéte. Le cinabre b’HrsT. Nat. et de 'Chimie. 77? Te rencontre dans le duché de Deux-Ponts, dans le Palatinat , en Hongrie , dans leFriouï,. en Efpagne.à Almaden , & dans l’Amérique méridionale , fur-tout à Guamanga au Pérou. Il cfl tantôt en maffe compaâe , dont la cou- leur varie depuis le rouge pâle jufqu’au rouge foncé & noirâtre , quelquefois enxriftaüx tranf- parens couleur de rubis , fouvent en efpèces d’écailles ou en lames feuilletées. On le nomme vermillon natif ou cinabre en fleurs , lorfqu’il efl fous la forme d’une poudre rouge très- brillante. Enfin on le trouve difperfé dans dif- férentes terres, dans le fulfate de chaux, mêlé au fer , aux pyrites & à l’argent. M. Cronfledt parle , dans fa minéralogie, d’une mine de mercure dans laquelle cette fubftance efl unie au foufre & au cuivre. Cette mine efl d’un gris noirâtre , fragile 8c pefante ; fa fraélure efl vitreufe , elle décrépite au feu y elle fe trouve à Mufchel-Landfberg. Le même minérâlogifle allure qu’on a quel- quefois trouvé dans la mine de Sahlberg en Suède , du mercure amalgamé avec de l’argent vierge. Romé de Lifle avoit dans fon ca- binet un morceau qu’il croyoit être de cette efpèce. M. Monnet parle , dans fon fyflême de mi- néralogie, d’une mine apportée en 17 68, du 7 8 E L Ü M E N S Dauphiné , par M. de Montigny , qui contient du mercure, du foufre, de larfenic, du co- balt , du fer & de l’argent ; elle eft grife , blan- châtre & friable. Il y a trouvé une livre de mercure , 8c trois à quatre onces d’argent par quintal. D’après ce court expofé , les différens états que prélènte le mercure dans l’intérieur de la terre , peuvent être réduits aux variétés fui- : vaut es. État 1. Mercure natif. DilTéminé dans des terres &' des pierres , 8c le plus fouvent dans fes mines mêmes. État IL Oxide de mercure natif. i État II L Sulfate 8c muriate de mercure, natifs. État 1 V. Mercure minéralifé par le foufre ; Cinabre. .Variétés, 3. Cinabre tranfparent, rouge 8c criftallifé en prifmes triangulaires très -courts , terminés par des pyramides triangulaires. 2. Cinabre tranfparent, rouge en crillaux oélaë- dres , formés de deux pyramides triangulai- res , réunies par leurs baies, & tronquées. ïy H i s t. Nat. et de Chimie, y# Variétés. 3. Cinabre folide , compare , d’un rouge brun9 ou d’un rouge clair. Il eft quelquefois formé de feuillets. Cinabre rouge , diflribué en fines fur une gangue pierreufe ou fur du cinabre folide. U eft quelquefois aiguillé comme le cobalt. 5. Cinabre en fleurs , vermillon natif ; c’eft un cinabre d’un rouge brillant fatiné , qui adhère à differentes gangues fous la forme d’une pouflière très-fine; il efl quelquefois criftal-* lifé en très-petites aiguilles , alors il reflem- bîe beaucoup au précédent. État V. Mercure combiné au foufre. & au cuivre ; mine de mercure noire & vitreufe de Cronftedt. État VI. Mercure allié au foufre, à l’arfenic, au cobalt , au fer & à l’argent. État VIL Mercure allié à l’argent , amalgame d’argent natif. Pour connoître une mine qui contient du mercure , on la pile , on la mêle avec de la chaux, des alcalis, &c. On en jette fur une brique chaude, on couvre le tout d’une clo- che , Je mercure fe réduit en vapeurs , & fe condenfe aux parois de la cloche. Si l’on veut Ë t È M E N £ connoitre la quantité de mercure qui y efl con-* tenue , après l’avoir pulvérifée & lavce , on la dillille avec des matières capables de s’emparer du foufre & d’en dégager le mercure. On a foin de mettre de l’eau dans le récipient afin de ratfembler le mercure au fond de ce fluide. En pefant exadement la mine avant de l’ef- fayer , & le mercure qu’on en obtient par la diflillation , on connoît ce qu’elle en peut fournir. Le mercure vierge fe fcpare facilement , en broyant les pierres avec lefqtielles il efl mélan- gé , & en les délayant dans de l’eau ; le mé- tal fe précipité & l’eau entraîne la terre ; c’eft ainfi qu’on le retire des mines d’Ydria dans le Fri oui. On ne grille point le cinabre , parce qu’étant volatil, il fe diffiperoit au feu ; mais comme la nature l’a prefque toujours mélangé avec une fubfiance calcaire ou martiale , cette fubflance devient un intermède propre à décompofer le- cinabre à l’aide du feu. Antoine de Jufiîeu a décrit dans les Mémoires de l’académie , en 171$/ , le travail qu’on fait à Almaden en Efpagne , pour retirer le mercure du cinabre. Cette mine contient du fer & un peu de pierre calcaire ; 011 la met dans des fours qui ont la forme de fourneaux de réverbère» ori chauffe d’Hist. Nat. et de Chimie. 8îl «chauffe ces fours, en mettant les matières combuftibles dans le cendrier. Le fourneau n’a d’ouvertures que huit trous pratiqués à fa partie poftérieure ; à chacun de ces trous on ajufle une file d’aludels ,dont le dernier aboutit à uit petit bâtiment a fiez éloigné du fourneau. Entre le fourneau & le bâtiment , où fe terminent les aludels , efi une petite terrafîe qui s’arafe avec les ouvertures du fourneau 8c celles du bâti- ment. Cette terrafîe forme deux plans inclinés, & foutient les aludels. Si quelque jointure mal bouchée laifîe échapper du mercure , il fe raf- femble dans la jonélion des plans inclinés de la terrafîe. Lorfque le feu efi appliqué au ci- nabre , le fer & la pierre calcaire abforbent le Coufre ; le mercure réduit en vapeurs pafie dans les aludels , & va gagner le petit bâtiment. Après la difliliation , on tranfporte tous les aludels dans une chambre quarrée , pour les vider & réunir le mercure dans une folle pra- tiquée au milieu de cette chambre , dont le fol efl incliné en talus vers cette fofîe moyenne. Antoine de Julîieu a obfervé que les mines de cinabre ne donnoient aucune exhalaifon funefie aux végétaux , & que les environs & le defius des mines d’Almaden étoient très* fertiles. Il a également obfervé que l’exploitation de cette mine n’étoit pas funefie aux ouvriers , comm» Tome III, F $£ Ë L È M ¥ N S on Tavoît cru ; que ceux qui travaillent danï l’intérieur de la mine , comme forçats , font les feuls qui foient fujets à des maux graves, parce que le feu qu’ils font obligés d’allumer , vola- tilifant une portion du mercure , ils fe trouvent continuellement plongés dans une vapeur mer- curielle. M. Sage a décrit dans les mémoires de l’aca- démie , année 1776, le procédé que l’on em- ploie potur extraire le mercure du cinabre dans le Palatinat. Le fourneau eff une galère char- gée de quarante -huit cornues de fonte , dont lepaiffeur efl d’un pouce , la longueur de trois pieds neuf pouces, & qui contiennent environ foixante livres de matières. Ces cornues font fixées à demeure fur le fourneau ; on y intro- duit , à l’aide de cuillers de fer , un mélange de trois parties de la mine bien bocardée , avec une partie de chaux éteinte • on chauffe avec du charbon de terre que l’on met par les deux extrémités du fourneau , dont les côtés font percés de piufieurs ouvertures qui établit lent des courans, & font brûler le charbon. Le mercure fe volatilife à l’aide de la réaétion de la chaux fur le foufre ; on le recueille dans des récipiens de terre adaptés aux cornues , & rem- plis d’eau jufqu’au tiers de leur capacité. Cette opération dure dix à onze heures. d’Hîst. Nat. et de Chimie. 8$ Le mercure retiré ou revivifié du cinabre , efl très- pur & ne contient aucune particule étran- gère ; on en trouve peu qui foit de cette pu- reté dans le commerce.. Prefque tout celui que vendent les marchands eff plus ou moins mêlé de matières métalliques étrangères ; il paroît un peu terne , & au lieu de fe divifer en globules lorfquil coule , il s’applatit & femble fe hérif- fer de pointes. Les marchands difent alors qu’il fait la queue . Le mercure ne paroît point éprouver d’alté- ration de la part de la lumière. C’efl une des matières fluides qui s’échauffe le plus vite & le plus régulièrement; c’efl à-dire, dont la marche de la dilatation eff la plus confiante , comme l’ont démontré MM. Bucquet & Lavoifier, par leurs recherches fur la ‘marche de la chaleur dans les différens fluides , lues à l’académie des fciences. Ce phénomène indique que le mer- cure efl le fluide le plus propre à marquer exac- tement les degrés de chaleur,. Si à former les thermomètres les plus exads. Ce fluide métallique expofé au feu dans les vaifteaux fermés , bout à la manière des liqui- des. Cette propriété ne lui efl point particu- lière ; il la partage avec l’argent, l’or Si la plu- part des autres métaux. Il efl vrai que comme fle mercure efl plus fuflble qu’aucun autre , iî Fij > $4 El£mïN! bout plus vite & long tems avant d’être rougtf* L’ébullition n’eft autre chofe que Ton paflage de l’état liquide à l'état de vapeur. Cette va- peur qui devient bientôt très* apparente fous la forme d’une fumée blanche , & qui trouble la tranfparence des vaifteaux dans Iefquels on la reçoit , fe condenfe par le froid en gouttelettes de mercure, qui n’ont éprouvé aucun déchet, ni aucune altération , lorfqu’on fait cette diflillation avec foin. Le mercure eh donc une fubflance très* volatile , qu’on peut difliller comme de l’eau, & qui fe rapproche par- là des demi- métaux ou métaux caffans. Boerhaave a diflillc cinq cens fois de fuite la meme quantité de mercure , il n’étoit altéré «n aucune manière ; il lui a feulement paru un peu plus brillant , plus pefant & plus fluide ; ce qui ne dépendoit fans doute que d’une purifi- cation très* exade. Il a obtenu dans cette dis- tillation une petite quantité de poudre grife $ qui ne lui a paru que du mercure très-divifé, & qui n’avoit befoin que d’être trituré dans un mortier , pour devenir fluide & brillant ; c'é- toit un peu d’oxide noir de mercure , dû à l’aîc contenu da is l’appareil. La diflillation efl un moyen de purifier le mercure , & de le féparer des métaux fixes qui l’altèrent ordinairement dans le commerce \ oq d*Hist. Nat. et de Chimie. Sfj ifetrouve dans la cornue le métal étranger ert une croûte brillante dans quelques endroits , & noirâtre dans d’autres. On connaît en pefanc ce réfidu , la quantité de matière qui altéroit le mercure. La pe fauteur extrême du mercure a fait croire aux chimilles que cette fubflance contient abon- damment le principe terreux pür , ou la terre vitrifiable. Mais d’un autre coté , ce principe , lorfqu’il domine dans les corps , leur donne de la folidité , & le mercure efl au contraire très- fufible; le principe terreux eft éminemment fixe , & le mercure eft très- volatil. Ces qualités qui paroiftent oppofées , ont engagé Beccher à ad- mettre dans ce fluide métallique une terre par- ticulière , qu’il nommoit , comme nous l’avons déjà dit , terre mercurielle y à laquelle il attri- buoit en même-tems la pefanteur & la volatilité. Le mercure était donc , fuivant ce chimifte , un compofé de ces trois terres , de la vitri- fiable, de l’inflammable & de la mercurielle. Perfonne n’a encore démontré l’exiflence de la dernière dans aucun corps , & on ne doit re- garder cette opinion que comme une aflertion dénuée de preuves. Le mercure nous paroît , comme toutes les autres fubftances métalliques , un corps eombuftible particulier dont on n’a point encore fépaté les principes. Quant à la Fiij Élémens terre vitrifiable dont nous avons examiné les propriétés dans le commencement de cet ou- vrage , nous ne croyons pas qu’on puiffe Pad- mettre plus dans Je mercure que dans les autres métaux , puifqu’on n’en a jamais extrait aucun principe femblable. Ce que Beccher & Stahl appeloient ainfi dans le mercure & dans les au- tres fubfiances métalliques , n’eft rien moins qu’un corps fimple 8c terreux , ainfi que nous l’avons dit en parlant des oxides des métaux en général. Le mercure réduit en vapeurs a une force expanfive confidérable , 8c eit fufceptible de produire des explofions vives lorf qu’il efl en- fermé. Hellot a rapporté à l’académie qu’un particulier ayant voulu fixer le mercure , en avoit mis une certaine quantité dans une boule de fer très-bien fondée ; on jetta cette boule au milieu d’un brafier ardent; mais à peine fut- elle rouge , que le mercure déchira fon enve- loppe avec un bruit confidérable , 8c s’élança à perte de vue. M. Baumé rapporte dans fa Chimie, expérimentale , un fait à-peu-près pa- reil , dont Geoffroy l’apothicaire avoit été témoin. Le mercure efi infiniment plus fufceptible de s’oxider par le contad de Pair 8c de beaucoup de corps, qu’on ne l’a cru jufqu’aduellement. d’Hist. Nat. et de Chimie. 8? Il fe forme fans ceffe à fa furface une pellicule grife noirâtre , qui efl un véritable oxide mer- curiel. Chauffé avec le concours de l’air, ce métal fe change au bout de quelques jours en une poudre terreufe , rouge brillante , difpofée en petites écailles. Cette poudre , qui n’a plus l’af- ped métallique , efl: un Vrai oxide de mercure. Les alchimifles qui ont cru que le mercure fe fixoit dans cette expérience , l’ont appelé im- proprement mercure précipité par lui- même 9 ou précipité per fe. Comme le mercure efl trcs- volatil, & que cependant il a befoin du con- cours de l’air pour fe brûler , on a imaginé pour cette opération un infiniment affez com- mode , nommé enfer de Boy le. C’efl un flacon de criflal très -large & très -plat ; on y renferme le mercure qui y forme «une couche mince , 8c préfente par conféquent une grande furface. Le bouchon qui s’ajufle exadement au goulot de ce flacon , efl un cylindre de criflal percé d’un, tuyau capillaire. On place le flacon fur un bain de fable ; on chauffe le mercure jufqu’à le faire bouillir. L’ouverture du cylindre efl telle, que l’air a de l’accès dans le flacon , fans que le mercure puiffe fe difliper. Au bout de plu fleurs mois de digéflion , on fépare l’oxide qui s’efl: formé à la furface du mercure. Pour cela on. F iy ÊLÉMEKS jette le tout fur une toile ferrée, le merdufé pafTe a l’aide de la preffion , & l’oxide rouge relie fur le linge. On peut fe fervir , avec tout autant de fuccès , d’un matras à fond plat , dans lequel on verfe allez de mercure pour y for- mer une couche mince } on tire à la lampe le col de ce matras en un tuyau capillaire , 8c on en cafte la pointe. Ce moyen indiqué par IVL Baume , fournit un vaifteau plus propre à 3’oxidation du mercure , parce qu’il contient plus d’air; il eft aufft plus aiféà chauffer, moins difpendieux, 8c moins fujetà cafter que l’enfer de Boyle. Pour que l’expérience réuftifte, il faut entretenir le mercure dans une chaleur capable de le faire bouillir légèrement nuit 8c jour pen- dant plufieurs mois ; en multipliant les matras fur le même bain de fable , on obtient une plus grande quantité de précipité, per fe , ou d’oxide de mercure rouge , 8c l’on peut même en pré- parer une certaine quantité en quinze ou vingt jours. Le précipité per fe eft un vrai oxide de mer- cure , ou une combinaifon de cette matière métallique avec l’oxigène, qu’elle enlève peu à peu à l’atmofphère. Ce qui le prouve d’une manière convaincante , c’eft que , i°. on ne peut jamais réduire le mercure en précipité per fe , fans le conta# de l’air. 2°. On ne peut for- d*Hist. Nat. et de Chimie. sa tner cette combinaifon qu’avec l’air vital, & elle n’a pas lieu dans les difTérens gaz qui ne font point de l’air. 30. Le mercure dans cette expérience augmente de poids. 4.°. En le chauf- fant dans des vaiffeaux fermés , on le réduit tout entier en mercure coulant , & il fe dégage en même tems une grande quantité de fluide élaflique , dans lequel: les corps combuflibles brûlent quatre fois plus rapidement que dans l’air de l’atmofphère ; c’eft ce fluide dont M. Prieflley a le premier reconnu l’exiflence , qu’il a déligné fous le nom d’air déphlogijliqué , Sc que nous appelons ga^ oxigène, ou air vital. Le mercure a perdu dans cette réduction le poids qu’il avoit acquis en fe brûlant. Ce dernier fait, joint aux phénomènes de la combuflion du mercure , à la néceflité & à la diminution de l’air dans cette opération, a porté M. Lavoifier à penfer d’après une analogie aufli bien fondée que toutes celles que l’on établit en phyfique, que les oxides métalliques ne font que des combinaifons des métaux avec l’oxi- gène de l’air. Comme le précipité per Je peut être très-bien analyfé par la chaleur , 8c comme il fe fép^ire en deux principes , l’air vital pur & le mercure coulant , on fent combien cette belle expérience répand de lumières fur la théorie pneumatique , & combien elle lui efl; Pû É L É M E N S ■favorable. On conçoit très -bien comment bafe de Pair vital ou l’oxigcne fixé dans Je mercure, fe dégage en reprenant de l’élaflicité à laide de la chaleur. Pour réduire ainfi l’oxide rouge de mercure, il faut le chauffer dans des vailfeaux exadement fermés ; s’il a le contad de 1 sir , il relie dans l’état d’oxide , parce qu’il trouve toujours dans l’atmofphcre , le corps avec lequel il peut s’unir , & qui a feul la pro- priété de l’oxider. C’elf pour cela que M. Baumé a foütenu que le précipité per fe n’étoit pas rédudible , qu’il fe Aiblimoit au contraire en criflaux rougeâtres, de la couleur du rubis; tandis que M. Cadet a prétendu que tous les précipités per fe pouvoiem également être ré- duits en mercure coulant. Macquera prouvé par une explication ingénieufe & bien d’accord avec les faits , que l’un & l’autre de ces chimifles avoit raifon , 8c que fi on chauffoit l’oxide de mercure avec le contad de l’air , il fe fu- blimoit en entier, 8c pouvoit même fe fondre en un verre de la plus belle couleur rouge , comme l’a dit M. Keir, favant chimifie écof- fois , dans fa tradudion du didionnairë de Chi- mie , tandis que le même oxide fufceptible de fe fublimer lorfqu’il a le contad de l’air , fe réduit en mercure coulant, 8c fournit de l’air vital Iorfqu’on le chauffe fortement dans des vai (féaux bien fermés, d’Hist. Nat. et de Chimie. Çt * Comme le brillant du mercure fe ternit par les molécules de pouffière que l’air entraîne f & qui fe dépofënt a fa furface , on lui a donne le nom d’aimant de la poujjière. Mais il paroît que tous les corps ont cette propriété, & qu’elle n’eft très-fenfible dans ce métal qu’en raifon de fon brillant. D’ailleurs il. n’eft nullement altéré , & il fuffit de le filtrer à travers une peau de chamois , pour le féparer des molécules étran- gères qui flottent à fa furface , & pour lui ren-^ dre tout fon -éclat. Le mêrcure ne paroît pas fe difloüdre dans l’eau ; cependant les médecins font dans l’ufagé de faire fufpendre un nouet plein de ce métal dans les ti fan nés vermifuges pendant leur ébul- lition. On affûte même que l’expérience a conf- laté les bons effets de cette pratique. Lemery a prouvé que le mercure ne perdoitrien de fon poids dans cette décoétion. Peut être semane- t-il de ce métal un principe analogue à celui de 1 odeur , fi fugace & fi tenu , qu’on ne peut en connoître la pefanteur, à caufe de fon ex- trême ténuité, Si qui communique à l’eau la vertu anthelmintique. Le mercure fie s’unit pas plus aux terres quê ine le font les autres fubftancés métalliques. Son oxide rouge, ou précipité per fe, poi#roit peut-être fe fixer dans les verres , Si les colo* È L è M B N S rer , comme on l’obferve pour l’oxide d’ar* fenic. On ne connoît point l’a&ion de la baryte t de la magnéfie, de la chaux & des alcalis fut le mercure. L’acide fulfurique n’agit fur cette fubflance métallique, que quand il efl très-concentré. Pour faire cette dilïolution , on met dans une cornue de verre une partie de mercure , & on verfe par-delTiis une partie & demie ou deux parties d’acide fulfurique concentré. On chauffe le mélange ; peu à peu il s’excite une effervefcence vive ; la furface du mercure devient blanche; il s’en fépare une poudre de la même cou!eurs qui trouble l’acide en s’y difperfant. Il fe dé- gage une grande quantité de gaz fulfureux , & on peut le recueillir au-deffus du mercure. C’efl, comme nous l’avons vu en parlant de l’acide fulfurique , le procédé qu’on met en ufage pour obtenir ce gaz. Il pâlie aufli une portion d’eau chargée de gaz acide fulfureux. Lorfqu’on poulfe cette diftillation jnfqu’à ce qu’il ne paffe plus d’acide fulfureux , on trouve dans le fond de la cornue une malfe blanche , opaque, rrcs- cauflique , qui pèfe un tiers de plus que le mer- cure qu’on a employé, 8c qui attire un peu l’humidité de l’air. La plus grande partie de cette malle efl un oxide de mercure uni à unç d'Hist. Nat. ET de Chimie; JJ petite portion d’acide fulfurique. Cette matière elt a (lez fixe, fuivant la remarque de Kitnckel* Macquer & Bucquet. Dans cette opération l’acide fulfurique elt décompofé par une double at- traction éledive ; le mercure, qui efl une fubf- tance combufiible , s’efi uni à l’oxigène contenu dans cet acide , tandis que là chaleur a dégagé le gaz fulfureux & l’eau. Le métal doit donc être dans l’état d’oxide , & conféquemment avoir beaucoup plus de fixité que le mercure coulant. Une portion de cette mafTe mercurielle ful- furique efl difloluble dans l’eau ; lorfqu’on y verfe ce fluide en grande quantité , il délaye cette malle , 5c laide précipiter une poudre blanche fi l’eau efl froide ; fi on emploie de l’eau bouillante , cette poudre prend une belle couleur jaune brillante , & d’autant plus vive qu’on y verfe plus d’eau & qu’elle efl plus chaude. On a donné très-anciennement le nom de turbith minéral ou de précipité jaune à cette matière , nous la nommons oxide mercuriel jaune. On décante l’eau qui a fervi à le laver; on verfe fur le turbith une nouvelle quantité de ce fluide bouillant , il devient d’un jaune plus éclatant ; on le lave encore à une troifième eau pour lui enlever tout l’acide fulfurique qu’il contient. Dans cet état il n’a plus de faveur , c’elî St É L i M E N £ un oxide mercuriel qui , pouffé au feu dans nrlê cornue , donne d’abord un peu d’acide ful- fureux , & fe réduit en mercure coulant en fourniffant une grande quantité d’air vital. Kunc- îcel annonce cette rédu&ion ; elle a réiifli à MM. Monnet , Bucquet & Lavoifier , qui l’ont fuivie dans tous fes détails. Je l’ai répétée plu- Heurs fois avec fuccès. Elle prouve , comme nous l’avons vu, que l’acide fulfurique eft formé de foufre , d’oxigène & d’eau ; mais il faut un feu afTez violent pour réduire Je turbith. C’eft yraifemblablement parce que M. Baumé ne' l’a pas chauffé fuffifamment, qu’il n’a pas obtenu de mercure , & qu’il annonce qu’il ne peut repa- roître lous fa forme métallique , que par l’ad- dition d’une matière combuflible. En continuant de chauffer la maffe fulfurique mercurielle dans la même cornue où on l’a diffoute, fans rien déluter & fans laver cette maffe pour en enle- ver la portion d’acide , on décompofe de même cet oxide ; il fe réduit en mercure coulant , à mefure que l’oxigcne qu’il avoit enlevé à l’acide fulfurique devient fluide élaflique , par fa com- binaifon avec la chaleur & la lumière. L’eau que l’on a verfée fur la maffe mercu- rielle fulfurique blanche, s’efl chargée de la portion d’acide non décompofé & encore con- tenue dans cette maffe. Mais comme l’oxidç b’HisT. Nat. et de Chimie. 9% 6e mercure efl: foluble dans l’acide fulfurique, cette fubflance faline en emporte toujours avec elle ; de forte que l’eau tient en dilfolution un vrai fulfate de mercure. En l’évaporant forte- ment , elle dépofe ce fei en petites aiguilles dont on ne -peut déterminer la forme, parce qu’elles font molles & très-déliquefcentes. En jettant de l’eau bouillante fur ces criflaux de fulfate de mercure , ils deviennent jaunes 8c dans l’état d’oxide mercuriel , parce que l’eau en fépare l’acide qui efl peu adhérent 8c laiffe cet oxide pur. La même chofe a 'lieu I01T- qu après avoir fortement évaporé la première lefîive de la mafTe mercurielle , on l’étend dans beaucoup d’eau bouillante au lieu de la faire criftallifer ; elle précipite une poudre jaune & dans l’état d’un vrai oxide. Si on fe fert d’eau froide, le précipité eft blanc, mais il fuffit de reverfer fur ce précipité blanc de l’eau bouillante pour lui faire reprendre la couleur jaune. Ou peut rendre ainfi à volonté la dilfolution d’oxide de mercure décompofable ou non par l’eau; il fuffit pour cela de l'évaporer fortement ou de charger l’acide de tout l’oxide mercuriel qu’il efl capable de diffioudre , alors l’union de ces deux corps efl facilement féparée par l’eau. Si 1 on y ajoute un peu d’acide , elle ne pré- cipite plus par ce fluide. Je me fuis convaincu £6 ÊtèivîENS de cette vérité, en difTolvant du turbith minerai bien lavé dans de l’acide fulfurique foible. Cette difTolution n’efl pas fur chargée d’oxide mer- curiel, elle ne précipite pas par l’eau. Mais fî on charge cet acide de tout ce qu’il en peut dilToudre à l’aide de la chaleur, ce qui fe fait en ajoutant cette matière jufqu’à ce qu’il re- fufe d’en diiïoudre, alors cette difTolution verfée dans de l’eau froide, forme un précipité blanc, ou une poudre jaune dans l’eau chaude ; fi on y ajoute dans cet état un peu d’acide fulfu- ïique , elle cefTe de précipiter. L’oxide mer- curiel blanc que le fulfate de mercure très- chargé dépofe lorfqu’on le verfe dans l’eau froide, efl: très-dilfoluble; on peut le faire dif- paroître en ajoutant de l’acide fulfurique dans ie mélange. Le fulfate de mercure peut être décompofé par la magnéfie & la chaux qui le précipitent en jaune. Les alcalis fixes en féparent un oxide de mercure à peu près de la même couleur ; ce précipité varie pour la couleur , fuivant l’état de la difTolution & fuivant la fubflance préci- pitante ; la quantité en efl auffi différente. Il eft très-abondant dans une difTolution chargée; fi l’on décompofé au contraire une difTolution qui n’eft point faturée de mercure , chaque flocon d’oxide qui s’en fépare par les premières gouttes t/Ê-îisTi N a IP* El* dé Chimie. gouttes de la matière précipitante, efl rediflous ô tnefure par l’acide excédent; quand cet excès d’acide efl faturé, le précipité efl permanent •Ces oxides de mercure , précipités par les alca- lis fixes , peuvent être réduits feuls dans les vaif- féaux Fermés. L’ammoniaque ne précipite point le fulfate de mercure quand il efl avec excès d’acide ; elle forme un Tel triple ou fulfate ammonîaeo- mercuriel. Quand le fulfate de mercure efl bien neutre & Tans excès d’acide , elle ne fépare qu’une petite portion d’oxide noir, quelle rend rédudible par le feul contaâ de la lumière, & elle forme un fel triple avec la plus grande partie du fulfate de mercure. L’acide nitrique efl: décompofé par le nier*» cure avec la plus grande rapidité. La diffolu-» tion fe fait à froid & avec plus ou moins d’ae- livité, fui vant l’état de l’acide. L’eau-forte or-: dinaire du commerce agit fur le mercure , fans répandre beaucoup de vapeurs rouges. Si l’on y ajoute un peu d’acide nitreux fumant, ou lî on chauffe le mélange , l’affion devient très- rapide, il fe dégage une très-grande quantité de gaz nitreux , & le mercure réduit en oxide refle en di Ablution. La liqueur efl d’abord ver* datre en raifon d’un peu de gaz nitreux qu’elle tient en dîflolution; mais elle perd cette couleur Tome ÎH , q - E r é M £ $ § au bout d’un certain tems. L’acide nitrique peut le charger par ce procédé d’une quantité de mercure égale à Ton poids. Bergman a fait ob* ferver dans fa Diiïertation fur Panalyfe des eaux-, que les difiolutions mercurielles nitriques dif- fèrent les unes des autres , fuivant la manière dont elles ont été préparées. Celle qui a été faite à froid & fans dégagement de beaucoup de vapeurs rouges , n’efl point décompofable par l’eau dillillée ; mais fi on a aidé la difiolution par la chaleur , fi elle a produit une grande quantité de gaz nitreux , elle précipitera par l’eau , & ne pourra plus être employée avec -fureté dans l’analyfe des eaux , comme nous le dirons en parlant des eaux minérales. Je penfe .que ce phénomène efl dû à la même caufe dans la difiolution nitreufe, que dans celle par l’acide fulfurique. L’acide nitrique peut à l’aide de la chaleur , fe furcharger d’oxide de mercure , 8c le tenir , pour ainfi dire , en fufpenfion. Cette forte de difiolution , avec excès de mercure, fera précipitée par l’eau difiillée , qui change la denfité de la liqueur & diminue l’adhérence de l’oxide mercuriel avec l’acide nitrique. Auffi le précipité efl - il du nitrate de mercure très- oxidé & très - jaune fi l’on verfe la difiolution dans de l’eau chaude, ou blanc fi on la verfe dans de l’eau froide. On peut lui donner fui^ tfîîisT. Nat. et de CürMi£. îe-champ de là couleur , en lé lavant à Pealt chaude, Comme , au contraire , la diffolutiofr faite à froid , ne contient que du nitrate de piercure fans excès, d’oxide , puifqu’ellê ne peut le charger doxide furabondànt à fa éombi* naifon qu'à Pàide de la chaleur , Peau diftilléé n’y occafionne pas de précipité. Je fois fondé è penrer aiiifi , d’après un fait dont je me tuîi affuré un grand nombre: de fois ; c’efl qiforî peut rendre à volonté la même diffolütion mer- curielle , décompofable ou non par Peau , en ajoutant ou du mercure , ou de Paride, & la faire paffer pîufieurs fois à 1 un ou Pau'trè état* Il füffit pour cela de difToudre à froid du mer* cure dans de l’acide nitrique, & de îaïfTer cet acide fe charger d’autant de mercure qu’il éft poO» fible ; -cette difTolution n’eft pas décompofable par Peau , quoiqu’elle ait laiffé échapper du gaz nitreux. En y ajoutant du mercure y & la laîf- fant fe charger de tout ce qu’elle en peut dit* loudre à l’aide de la chaleur , elle dévient ca- pable de précipiter avec Peau. On entend trèsl bien , par la même théorie, pourquoi une dif* folution nitrique qui ne précipite pas par Peau acquiert cette propriété fi on la chauffe ; Ja cha- leur en dégage en effet du gaz nitreux , & ce dégagement ne peut fe faire fans qu’une portion de 1 acide foit détruite; dès-lors la proportion de Ô0<5 £ L $ M E S 9 l’oxide mercuriel devient plus forte, relativement à l’acide ; elle n’eft plus combinée , mais adhé- rente au nitrate de mercure, & fufpendue de ma- nière que l’eau pourra la précipiter fort aifément* Je me fuis alluré que les diiïolutions mercu- rielles ne précipitent par l’eau qu'un oxide ex- cédent uni à très -peu d’acide nitrique, & qu’elles retiennent encore une portion de vrai nitrate de mercure , qu’on peut décompofer par les alcalis , comme cela a lieu pour la malle mercurielle fulfurique leffivée pour la pré- paration du turbïth minéral ; on peut même faire criüallifer cette portion de nitrate de mer- cure. L’excès d’oxide mercuriel , qui rend les dilîolutions nitriques fufceptibles d’être décom* pofées par l’eau , efl aulîi accompagné d’une circonflance qui favorife cette décompolition, C’eft que l’oxide y elï allez fortement oxigéné, pour n’avoir que peu d’adhérence avec l’acide nitrique. La dilfolution de mercure dans l’acide ni- trique eh d’une très-grande cauflicité ; elle peut ronger & détruire nos organes. Lorfqu’elle tombe fur la peau , elle y forme des taches d’un pourpre foncé , & qui paroiffent noires. Ces taches ne fe dilîipent que par la fépara- tion de l’épiderme qui tombe en écailles ou en efpèce d’efcarres. On s’en fert comme d'ui* fc’HisT. Nat. et de Chimie. ïô* puiflànt efcarrotique en chirurgie, & on Pap- peîle eau mercurielle . La diffolution. de mercure dans Pacide ni- trique eh fufceptible de fournir des crifiaux qui diffèrent dans leur forme , fuivant Pétat de la dilToIution , 8c fuivant les circonllances qui ac- compagnent la criflallifation. En obfervant avec Loin ces variétés, j’en ai reconnu quatre efpèces Lien diftindes , que je vais décrire. i°. Une diffolution faite à froid donne , pât une évaporation fpontanée de plufieurs mois , des criftaux tranfparens très -réguliers. M. Romé de Lille les a très -bien définis. Ce font des folides applatis à quatorze faces , formés par la réunion de deux pyramides tétraèdres , coupés très -près de leur bafe, 8c tronqués aux quatre angles qui réfultent de la jondion des pyra- mides. 2°. Si on évapore la même dillbltition faîte à froid, 8c qu’on la faille refroidir, il s’y dépofe au bout de vingt -quatre heures des efpèces de prifmes aigus 8c fltiés obliquement fur leur largeur , qui font formés par l’application fuc- cefiîve de petites lames pofées en recouvrement les unes fur les autres comme les tuiles , ce que les botaniltes nomment invbrïcaiim . En exa- minant de près les élémens de ces prifmes in- formes ? j’ai vu que les lames qui les confii- G iij 102 Eté mens tuent font des folides à quatorze facettes fettH blables aux crillaux qu’on obtient par l’évapo- ration fpomanée, mais , plus petits & plus irré- guliers. 5°. Si l’on fait une difTohition nitrique, à l’aide d’une chaleur douce & ménagée , elle fournit par le refroidiffement des crillaux en aiguilles plattes très longues & tics-aigues , fl liées fur leur longueur. Ce font ceux que l’on ob- tient le plus fouvent , & qui ont cté décrits par le plus grand nombre des chimiftes , fpé- çiaJemenc par MM. Macquer, Rouelle, Bail-» me , 4°. Enfin , fi l’on chauffe davantage cette difïblut.ion , 8c qu’elle devienne décompofable par l’eau , ordinairement elle fe prend en une malle blanche & informe , femblable à la mafFe fulfurique. Quelquefois j’ai eu dans cette cir- Confiance un amas confus de petites aiguilles très-longues, fatinées 8c flexibles, qui fuivoient le mouvement de la liqueur; elles étoient a(Tez femblables aux dendrites brillantes 8c argen- tées , que j’ai plufieurs fois obfervces -fur les parois des bouteilles où l’on conferve de Pa- cçtite de potaffe , ou terre foliée de tartre. K eil efibnfiei d’ajouter que cette dernière diffo- lution , qui ne fournit que des crillaux irrégu- liers & confus a ou des mafîes informes , parcs fc’HlST.NAT. ET DE CHIMIÏ. 10J Qu’elle contient beaucoup d’oxide de mercure furabondant , peut être rendue fufceptible de criflallifer plus régulièrement en y ajoutant de l’acide. Ces différens nitrates de mercure préfentent à peu près les mêmes phénomènes. Ils font très-caufliques & rongent la peau comme leurs diflolutions; ils détonnent lorfqu’on les met fut des charbons ardens. Il faut obferver , à l’égard de cette propriété , qu’elle eh beaucoup plus fenfible dans les criflaux très -réguliers à quatorze faces , que dans ceux qui font en petites ai- guilles, & qu’elle efl nulle dans la malle blanche précipitée de la diffolution fortement chauffée. La détonation du nitrate de mercure n’eft que très -peu apparente dans les criflaux nouvelle- ment formés ; il faut , pour bien l’obferver & la rendre très -fenfible, les laïffer égoutter quel- que tems fur du papier brouillard. Si on les met alors fur un charbon bien allumé , ils le fondent , noircifTent 6c éteignent l’endroit ou ils font pofés; mais leurs bords qui font def- ' féchés jettent de petits éclairs rougeâtres avec un bruit femblable à une décrépitation légère. Lorfqu’ils font fecs, il s’en échappe une flamme blanchâtre plus vive , qui celle très -vite. Le nitrate de mercure fe fond lorfqu’on le chauffe dans un creufet } il s’en exhale des vâ-s G iy 104 E L É M * N S peurs rouges très-épaiffes ; à mefure qu’il percfr fon eau & Ton gaz nitreux , il prend d’abord une couleur jaune foncée qui pâlie à l’orangé , & enfin au ronge brillant; on l’a nommé dans cet état précipité rouge. Nous le défignons par le nom d’ oxide de mercure rouge par Vacide ni- trique* Il doit être fait dans des matras 6c à une douce chaleur, fi on le delline à être em- ployé comme caufiique en chirurgie, afin qu’il retienne une portion d’acide à laquelle eft due îa vertu rongeante. Mais fi on le chauffe for- tement, ce n’efl plus qu’un oxide de mercure formé par ce métal uni à l’oxigcne de l’acide nitrique» Le nitrate de mercure difiillé dans une cornue , donne un phlegme acidulé 6< du gaz nitreux dans le premier tems ; il eft alors dans l’état de précipité rouge ; en le chauffant forte- ment , il s’cn dégage une grande quantité d’air vital mêlé d’un peu de gaz azote , & le mer- cure le fublime fous forme métallique. C’eft cette expérience qui, faite avec la plus grande prçcifion par M. Lavoifier , l’a conduit à dé- montrer la compofition de l’acide nitrique y comme nous l’avons dit en faifant l’hifloire de cet acide» Le nitrate de mercure devient jaunâtre à l’air y Sc s’y décompofe très* lentement. Il eft affez diffoluble dans l’eau diftillée 9 plus dan£ l’eau d'Hist. Nat. et de Chimie. loy bouillante que dans l’eau froide , & il cridallife par refroididement. Lorfqu’on dilîout ce fel dans l’eau , il y en a une portion qui fe préci- pite fans s’y dilfoudre , & qui ed jaunâtre. M. Monnet appelle cette matière turbith ni- treux ; 8c il obferve qu’on peut en obtenir beaucoup en lavant une ruade mercurielle ni- trique évaporée à ficcité comme celle que l’on fait pour préparer le précipité rouge . Si l’on veut didoudre entièrement le nitrate de mercure , il faut employer de l’eau diftillée , dans laquelle on doit verfer de l’eau -forte jufqu’à ce que le précipité difparoide. J’ai obfervé que lorfqu’ori verfe de l’eau bouillante fur le nitrate de mer- cure le plus pur , il jaunit fur le champ , 8c donne un oxide d’une couleur plus foncée , qui , expofé au feu , devient rouge beaucoup plus vite que celui qui elt fait par l’acide ful- fùi'ique. L’oxide de mercure jaune par l’acide nitrique , ed en général plus complètement oxidé que celui qui ed préparé par l’acide ful- furique ; ce qui vient , comme nous l’avons déjà fait obferver fur d’autres fubdances combudi- bles , de ce que l’acide nitrique laide plus faci- lement dégager fon oxigène que l’acide fulfuri- que. C’ed pour cela que l’acide nitrique ed plus décompofable que l’acide fuîfurique. La baryte, la magnéfie, la chaux 8c les alcalis. ÊlImen* décompofent le nitrate de mercure , & en pré- cipitent le métal dans l’état d’oxide. Ces pré- cipités varient par la couleur, la pefanteur & la quantité , fuivant l’état de la diffolution. Les alcalis fixes caufhques forment un précipité jaune, plus ou moins brun ou briqueté , fuivant leur cauflicité. L’ammoniaque précipite en gris ardoifé la diffolution mercurielle nitrique en bon état , c’efl - à - dire , que l’eau ne peut point décompofer , tandis que le même fel produit un dépôt blanc dans une diffolution faturée de mercure que l’eau eft fufceptible de précipiter ; ces différences ont été bien obfervées par Berg- man. Ces précipités ne font que des oxides de mercure plus ou moins oxigénés. Ils font tous rédu&ibles fans addition & par la chaleur dans des vaiffeaux fermés , & ils donnent de l’air pur* dans leur réduétion. Ceux qui ont été précipités par les carbonates alcalins, fourniffent une cer- taine quantité d’acide carbonique par l’aélion dè la chaleur. Ceux qui fans avoir été préci- pités par des carbonates , ont feulement été cxpofés au contaél de l’air atmofphérique , pré- Tentent le même phénomène , parce qu’ils ab- forbent cet acide de l’atmofphère , propriété commune à tous les oxides de mercure , & même à ceux de plufieurs autres métaux. Les oxides de mercure précipités de leurs , d’Hist. NaT. et de Chimie. 107 diflblutions acides par les intermèdes alcalins , préfentent une propriété découverte par M. Bayen, & que nous ne devons pas pafFer fous (ilence 3 c’ell de détonner comme la poudre a canon , lorfqu’on les expofe dans une cuiller de fer à un feu gradué , après en avoir triture un demi-gros avec fix grains de fleurs de foufre ; il relie après la détonnation une pouffiqre vio- lette fufceptible de fe fublimer en cinabre. L’acide fulfurique & les fels dans lefquels il entre, peuvent décomposer aufli le nitrate de mercure , parce que cet acide a plus d’affinité avec le mercure que n’en a l’acide nitrique. Si Ton verfe de l’acide fulfurique , ou une diflo- Iution des fulfates de potafle , de foude , &c. & de tous les fels fulfuriques en général, dans une difiolution mercurielle nitrique , il fe forme . un précipité blanchâtre f fi la difiolution ni- trique n’efl: pas faturée , & d’autant plus jaune que le nitrate de mercure contient moins d’a- cide 8c plus d’oxide mercuriel. Ce précipité eft du fulfate de mercure, neutre dans le premier cas & furchargé d’oxide dans le fécond. M. Bayen a reconnu qu’il retenoit toujours un peu d'acide nitrique. L’acide muriatique n’a pas d’aétion fenfible fur le mercure , quoique cet acide foit celui de tous qui a le plus d’affinité avec l’oxide de ce fro8>' Elément métal -■> mais il en a une très -marquée fur I’oxidé mercuriel , & il forme avec lui un fel neutre particulier. Cette combinaifon a lieu toutes les fois que l’acide muriatique fe trouve en conta# avec cet oxide très-divifé. Si l’on verfe un peu d’acide muriatique fur une dilfolution nitrique de mercure , cet acide s’empare de l’oxide du métal, & forme avec lui un fel qui fe précipite en une efpèce de coagulum blanchâtre qu’on tiômme précipité blanc . Les fels muriatiques à bafe d’alcalis ou de fubftances falino-terreufes , produifent abfolument le même effet , & ils forment de plus des fels nitriques différens fui- vant leur bafe. Mais il eft important d’obferver au fujet de cette précipitation , qu’elle n’a pas lieu ft l’on fe fert d’acide muriatique oxigéné t parce que quoique cet acide enlève l’oxide de mercure à l’acide nitrique, le fel qu’il forme avec lui ell très-foluble dans l’eau , tandis qita celui qui eft formé par l’acide muriatique ordi- naire ne l’eft pas du tout. Cet acide a auffi plus d’affinité avec l’oxide de mercure que n’en a l’acide fulfurique , 8c il occafionne dans les diffiolutions de ce métal par ce dernier , le même précipité qu’il forme dans les diffalutions par l’acide nitrique. Le compofé d’acide muriatique & d’oxide de mer- ’ cure peut être dans deux états , comme nous b’HrsT. Nat. et de Chimie* ïo# l’avons dit plus haut, fuivant la nature fimple ou oxigénée de cet acide; ce dernier conflitue le 'muriate oxigéné de mercure ou corrofif y 8c le premier le muriate mercuriel doux • Il y a plufieurs procédés pour préparer le fublimé corrofif ou muriate mercuriel cor- rofif. Le plus fouvent on mêle parties égales de nitrate mercuriel deffeché , de muriate de foude décrépité , 8c de fulfate de fer ou vitriol martial calciné au blanc ; on met ce mélange dans un matras dont les deux tiers de la capar cité doivent relier vides; on plonge ce vaif- feau dans un bain de fable , 8c on le chauffe par degrés , jufqu’à faire rougir obfcurément fon fond. L’acide fulfurique dégage l’acide mu- riatique de la foude. Ce dernier fépare du mer-* cure l’acide nitreux à qui il enlève une partie de fon oxigène , de manière qu’il devient acide muriatique oxigéné ; alors il fe combine avec l’oxide de mercure & forme du muriate mer- curiel corrofif, qui fe fublime fous la forme de criftaux applatis 8c pointus , à la partie fu- périeure du matras. L’acide nitrique fe diffipe en gaz nitreux ; le réfidu eff rougeâtre ou brun ; il contient de l’oxide de fer 8c du fulfate de foude formé par l’union de l'acide fulfurique avec la bafe du fel marin. En Hollande on prépare çe fel en grand, en triturant parties tîO E t îê M E N s égales de mercure * de muriate de foude Si de fulfate de fer , & en expofant ce mélange à un feu violent. Dans cette préparation , l’oxide de fer privé de l’acide fulfurique par la chaleur & très-oxigénë,paroît faire pafier l’acide muria- tique à l’état oxîgéné , ptlifqu’il n’y a que ce dernier qui puilTe dilToudre le mercure entier qu’on y emploie. On peut encore obtenir le muriate mercuriel corrofif, en fublimant des mélanges de Tulfate de fer , de muriate de foude, & de précipités mercuriels par les al- calis fixes , ou de toute efpèce d’oxides dé mercure. Boulduc a donné aufïi un très-bon procédé pour préparer le muriate mercuriel corrofif 5 mais Spielman remarque qu’il avoit été indiqué par Kunckel dans fon Laboratoire chimique. Il confifie à chauffer dans un matras une quantité égale de fulfate de mercure & de muriate dé foude décrépite. Le muriate de mercure fe vo- latilife , & le réfidti n’eff que du fulfate de fotide. Ce moyen fournit du muriate mercuriel cor- rofif très- pur, tandis que celui du commerce > 8c même celui que l’on prépare en petit avec le fulfate de fer , contiennent toujours un peu de ce métal. Il eff en même-tems plus facile 8c plus économique. Nous ferons obferver que cette operation prouve encore que l’acida t>*Hist. Nat. et de Chimie. ïi i K / Jülfürique a la propriété d’oxigéner l’acide mu- riatique. M. Monnet allure avoir également ob- tenu ce Tel en traitant à la cornue du muriate de fonde bien fec , & de l’oxide mercuriel pré- cipité de fa dilfolution nitreufe par l’alcali fixe. Dans toutes ces préparations du muriate mer- curiel corrofif 5 on doit: avoir foin de ne cafier le vaifieau fublimatoire que lorfqu’il eft entiè- rement refroidi , afin d 'éviter les vapeurs de ce fel. Enfin il y a une dernière manière de pré- parer plus promptement du muriate mercuriel corrofif, c’efi de verfer dans une difiolution de nitrate de mercure de l’acide muriatique oxi- géné , & d’évaporer lentement le mélange ; lorfque l’acide nitreux efi dégagé , la liqueur donne par le refroidiiïement des criflaux de muriate mercuriel corrofif. Il y a lieu de croire que lorfque l’acide muriatique oxigéné de Schéele fera mieux connu , on préparera le mu- ïiate mercuriel corrofif dans les pharmacies , ou par le dernier procédé indiqué, ou par la fimple difiolution. Le muriate mercuriel corrofif efi une fubf- tance faline neutre, qui mérite toute l’attention des chimifles & des médecins. Il jouit d’un grand nombre de propriétés qu’il efi impor- tant de bien connoître 8c dont nous allons faire rmioire. Ce fel a uue faveur trè-s^caufiique. Mis EtÏMïKi én très- petite quantité fur la langue 9 il ïaîlfty pendant Iong-tems une impreÏÏion ffiptique & métallique très-défagréable. Cette impreffion fa porte même jufqu’au larynx , qu’elle reflerre •fpafmodiquement , & elle dure quelquefois long tems, fur-tout chez les perfonnes fenfibles». L’adion de ce fel efl: encore beaucoup plus vive fur les tuniques de l’eftomac 8c des inteflins.. Lorfqu’il y reffe appliqué pendant quelque tems , il les corrode 8c les fait tomber en ef~ carres ; c’êfl aüffi un des plus violent poifona que l’on connoilTe. Cette cauflicité du muriate mercuriel corrofif p^roît dépendre de l’état du mercure dans ce fel , comme l’a très-ingénieu- fement expliqué Macquer. On ne peut l’attribuée à l’acide muriatique , comme quelques Auteurs l’ont penfé, puifque le mercure y eft en quan- tité plus que triple de celle de cet acide. Audi ce fel verdit-il le firop de violette plutôt que de le rougir , fuivant l’obfervation de Rouelle. D’ailleurs la faveur du muriate mercuriel cor- rofif efl bien au-delïiis de celle de l’acide mu-» riatique. En effet, on peut impunément prendre tin gros d’acide muriatique étendu d’eau , tandis que quelques grains de muriate mercuriel cor** rofif diffous dans la même quantité d’eau em- poifonneroient immanquablement. Bucquet pen- foit que cette extrême faveur dépendoit de la combinaifon b'îïràT. N A 'T. 3ET DÈ CsiMife-. ïf$ fcômbinaifon même des deux corps dé cé compofé 5 & il droit dé - là une des grandes preuves de la loi d’affiniré qui établit que les cotnpofés ont des propriétés nouvelles & très** différentes de celles de leurs compofans. Le miuiate mercuriel corrofif n’eff pas ferr-a fiblement altérable par la lumière. La chaleuÊ le volatilife & lui fait éprouver une demi-vi- tnfication. Si ôn le chauffe fortement 8c à l’air libre, il fe diffipe en une fumée blanche dent les effets fur Péconomie animale font très-adifs 6c très - dangereux» Chauffé lentement 8c par degrés , il fe fublime fous une forme criftal- line 8c régulière. Ses criftaux font des prifmeâ fi comprimés , qu’il eft impoffible de déter- miner le nombre de leurs pans. Ils font ter- minés par des fommets très-aigus; & on les â comparés avec raifon à des lamesde poignard jet* tées pêle-mêle les unés fur les autres. Le feu n’efî pas capable de décompofer ce fe 1. Il n’é- prouve aucune altération à Pair. Il fe diffout dans dix-neuf parties d’eau , 8c il criflallife par 1 evapoiation en piifmes applatis 8c très-ai^us à leurs extrémités , comme ceux que Pon obtient par la fublimation. L’évaporation fpontanée de fa diffolution m’a fourni plufieurs fois , ainfî qu’à Bucquet , des parallélipipèdes obliquât*» ghj>, dont les extrémités etoient tronquées Jome. 111 \ Ji ÏÏ4 Ê L i M E N ÿ biais. M. Thouvenel a obtenu des criflaux def ce Tel en prifmes hexaèdres un peu com- primés. La baryte , la magnéfie & la chaux décoin- polent le muriate mercuriel corrofif, & en pré- cipitent l’oxide de mercure. On prépare Veau pkagédénique dont Te fervent les chirurgiens pour ronger les chairs , en jettant un demi-gros de ce fel en poudre dans une livre d’eau de chaux ; il fe forme un précipité jaune qui trouble la liqueur, & on l’emploie fans en féparer ce dépôt. Les alcalis fixes féparent du muriate mercuriel corrofif un oxide orangé dont la cou- leur fe fonce par le repos. L’ammoniaque précipite ce fel en blanc ; mais ce précipité prend en peude.tems la couleur de l’ardoife. Les acides & les fels neutres alcalins n’al- tèrent en aucune manière le muriate mercuriel corrofif. Ce fel contrade une union intime avec le muriate ammoniacal & fans aucune dccompo- fition. Il forme , foit par la fublimation , foit par la criftallifation , un compofé falin très- lirigulier, dont les alchimifles font beaucoup de cas , & qu’ils ont nommé fel alembroth , fel de Vart, fel defageffe , &c. Le muriate ammoniacal rend le muriate mercuriel corrofif très-diffo- luble, puifque, fuivant M« Baume, trois ouce§ D’îîtsT. Nat, et de Chimie, nf ^’eau chargée de neuf gros du premier Tel dif- folvent cinq onces du fécond. Cette dernière diffolution fe fait avec chaleur , & elle fe prend en une malfe en refroidiffant. On fait avec ce îel une picpaiation qu on appelle mercure pré- cipité blatte . Pour cela on jette dans une di£> folution d’une livre de muriate ammoniacal, pareille defe de muriate mercuriel corrofif en Poudres lorfque ce fel efl bien diffous, on y Verfe Une diffolution de carbonate de potaffe qui y forme un précipité blanc; on lave ce précipité & on Je fait fécher à Pair après d’avoir mis en trochifques. Dans cette opération , la potaffe dégage l’ammoniaque, qui précipite à fon tour le mercure en oxide blanc. Ce pré- cipité jaunit lorfqu’il eü expofé à la chaleur & même à la lumière. Le muriate mercuriel corro fif efî altéré par îe gaz hydrogène. Le foufre ne le change point mais le fulfure alcalin le décompofe , comme les autres diffolutions de mercure; il y produit fur le champ ün précipité noir qui réfulte de la combinaîfon du foufre avec le mercure. La plupart des métaux que nous avons exami- nes , font capables dé décompofer ce fel; & chacune de ces décomposions préfentanc des phenomenes particuliers, mérite d’êire exa«' t minée avec foin, H il : Ê L 2 M fi N $ Si on diftille à une chaleur douce deux par-* ties de muriate mercuriel corrofif avec une partie d’arfenic , il paffe dans le récipient une matière de la confiflance de l’huile , tranfjpa- reme , dont une partie fe condenfe bientôt en une efpcce de gelée blanche , qu’on appelle improprement huile corrofive ou beurre ijon , le muriate mercuriel corrofif eff égale- ment décompofé par le borax , qui produit dans fa dilfolution un précipité couleur de bri- que; l’eau qu’on fait bouillir fur ce précipité* devient laiteufe par l’addition de l’alcali fixe * ce qui prouve qu’elle contient du borate mer- curiel. On ne connoît point l’a&ion de facide duo- rique fur le mercure. Celle de l’acide carbo- nique eft également très- peu connue. On fait feulement que 1 eau chargée de cet acide n’attaque point ce métal, quoique les diffo* îutions de mercure décompofées par les car- bonates alcalins , donnent des précipités très- différens de ceux produits par les mêmes fels purs & caufliques , & quoique les oxides de mercure abforbent avec afTez d’énergie l’acide carbonique contenu dans l’atmofphère. Les fels neutres n’ont que peu d’aéHon fur le mercure. Quoique cette affertion foit fur- tout applicable aux différens fels fulfuriques , j’aî remarqué que le vif- argent s’éteint fort promp- tement dans le fulfate de potalfe. r Le mercPre ne paroît pas fufceptîble d’aî- terer le muriate ammoniacal par la diflilîation. Bucquet qui a fait cette expérience , a obfervé que deux parties de mercure ne s’ eteignoient pas bien dans une partie de ce fel , & *qUe ce Home. III, t ' i É t £ at i » $ mélange ne donnoir point d’ammonîaque pâf la diflillation. Le comte de la Garaye avoit cependant préparé avec ces deux fubjftances, «n médicament auquel il avoit donné le nom de teinture de mercure. Macquer , qui a examiné fou procédé , l’a trouvé entièrement conforme à ce qu’il avoit avancé. Ce procédé confîfte à triturer dans un mortier de marbre une once de mercure coulant avec quatre onces de mu- riat-e ammoniacal , en hitmedant le mélange avec un peu d’eau , jufqu’à ce que le mercure foit bien éteint ; à lailîer cette matière expofée à Pair pendant cinq à fix femainës , en l’agitant de tems en tems. Alors on la triture de nou- veau , on l’expofe dans un matras , fur un bain de fable, avec de bon alcohol qui doit furna- ger là pondre d’environ deux doigts ; on fait légèrement bouillir ce mélange. L’alcohol fe colore en jaune, & il contient du mercure, puifqu’il blanchit une lame de cuivre. II paroît que dans cette expérience , l’ammoniaque eft dégagée peu à peu par le mercure , qu’il fe forme du muriate ammoniaco-mercuriel , dont une partie efl: diffoute par l’alcohol . 8c que la quantité differente de mercure , l’aélion lente produite pendant la macération , font les caufes qui font différer cette expérience de celle de Bucquet. îj’Hîst. NaIS. ët dë CiitMrË. î^ti On ne connoît point l’aâion du gaz hydro- gène fur le mercure,. Le mercure Te Combine très ‘-bien avec le foufre. Lorfqu’on triture une partie de Ce fluide métallique avec trois parties de foufre , le mer- cure s’éteint peu à peu , & il en réfulte une poudre noire , le fulfure de mercure noir , ou éthlops minéral , dont la couleur fe fonce par le Ample repos. Cette combinaifon fe fait avec plus de rapidité , lorfqu’on mêle le mercure avec le foufre fondu ; en agitant ce mélange , il devient noir & s’enflamme fort aifément. Pouc le çonferver noir, on doit le retirer du feu, éteindre la flamme des qu’elle fe manifefle , & remuer la matière jufqu a ce qu’elle foit folide & en grumeaux. Alors on la met en poudre & on la pafle au tamis de foie. Le fulfure de mer- cure noir n’eft pas la combinaifon la plus in- time que le foufre & le mercure font fufçepti- bles de former. Lorfqu’on expofe ce compofé à un grand degré de chaleur , jl s’enflammç , la plus grande partie du foufre fe brûle, 8c il relie après cette combuflion une matière qui prend une couleur viqlette lorfqu’on la pulvé- rife. On met cette poudre dans des matr^s qu on chauffe jufqu a ce que le fond foit rouge > on les dent dans cet état pendant plulieurs heyt- ïçs, jufqu’à ce qu’pn aperçoive que la jpa. i i j É L 2 M B N S tîère eft fublimée. On trouve dans le haut dit matras du cinabre artificiel , ou fulfure rouge de mercure criftallifé en aiguilles d’un rouge brun. Il eft d’une couleur moins foncée & plus vive , lorfqu’on le fublime dans des cornues. Les Hollandois préparent en grand le cinabre que l’on emploie dans les arts. Ce compofé n’eft que peu volatil , & il exige un feu très- fort pour fe fublimer. Lorfqu’il eft très-divifé fur le porphyre , il prend une couleur rouge brillante : on le nomme alors vermillon. Si on ïe chauffe dans des vaiffeaux ouverts, le foufre qui ne fait pas le quart de la totalité de ce compofé , fe brûle peu à peu , & le mercure fe volatilife. Beaucoup de fubftances font ca- pables de décompofer le fulfure rouge de mer- cure , en raifon de l’affinité qu’elles ont avec le foufre. La chaux & les alcalis ont cette pro- priété. Lorfqu’on les chauffe dans une cornue avec cette fubffance à la dofe de deux parties contre une de ces fels , on obtient du mercure coulant, & le réfidu eft du fulfure alcalin ou terreux. M. Baumé a même reconnu que cette décompofition avoit lieu par la voie humide , en faifant bouillir du fulfure rouge de mercure avec un alcali fixe en liqueur. Il faut remar- quer qu’il n’a employé que l’alcali effervefcent. Plu fleurs métaux fragiles , tels que le cobalt , le d’Hist. Nat., et de Cjïimiê. 133 bifmuth , I’ 'antimoine, ont àüffi la propriété d’en- îever le foufre au mercure. On verra que pref- que tous les métaux dudites , le plomb , l’étain , le fer , le cuivre & l’argent , ont auffi plus d’affi- nité avec le foufre que n’en a le mercure , & décompofent le cinabre : on peut donc les era-? ployer indiflindement pour féparer le mercure de ce compofé. Ce fluide métallique obtenu par ce procédé , efl parfaitement pur; on le diffingue fous le nom de mercure revivifié du, rinabre. Le mercure décompofe fur-Ie-champ les ful- ïures alcalins , mais il produit des phénomènes différens , fuivant la nature de ces compofés. Il forme avec les fulfures alcalins du fulfure noir de mercure , qui devient rouge au bout de plu- fieurs années. Avec le fulfure ammoniacal il fe convertit très- promptement en fulfure noir de mercure , qui prend en quelques heures ou tout au plus quelques jours, une couleur rouge écla- tante. Les oxides jaune 8c rouge de mercure faits par le feu ou par les acides , préfentent plus ou moins promptement le même phéno- mène avec le fulfure ammoniacal. On le fait naître encore en verfanc cette liqueur dans les di Ablutions de mercure, 8c en expofant le pré- cipité noir qui réfulte de ces mélanges à une nouvelle quantité de fulfure ammoniacal. I iij !Ï34 É L ï M E N ! J’ai découvert que le mercure coulant agite 'dans l’eau chargée de gaz hydrogène fuHtiré , foit par la nature , foît par l’art , la décompofe très- promptement & fe change en fulfure noir. On ne connoît point l’aâion du mercure fur l’arfenic. Le cobalt ne s’y unit point. Le mer- cure diffout très-aifément le bifmuth qui s’y combine en toutes proportions. Il réfulte de cette combinaifon une matière brillante , fria- ble , & plus ou moins folide fuivant la quantité de bifmuth. Cette amalgame eft fufceptible de criflallifer en pyramides à quatre pans, qui quel- quefois fe réunifient en odaëdres. Le plus fou- vent on la trouve criflallifée en lames minces , qui n’ont point de forme régulière. On obtiens cette criftallifation en faifant fondre cette com- binaifon i 8c en la laifTant refroidir lentement. Lorfqu’on la chauffe dans une cornue , elle ne donne que très -difficilement le me rente qui lui fert de cîiffolvant. Le mercure ne s’unît point au nickel ni à l’antimoine. Il le combine au zinc par la fufion. L’amalgame qu’il forme avec ce métal efl folide ; elle devient fluide par la trituration. Lorfqu’on la fond & qu’on la laiffe refroidir lentement , elle criftallife en lames qui paroif- fent quarrées & arrondies fur les bords. Le mercure ed d’un ufage très - étendu dans d’Hist. Nat.iB-t de Chimie. *»ï les arts , tels que la dorure , l’étamage des glac- ées , la conftruétion des inllrumens météorolo- giques , la métallurgie , &c. On fe fert en mé- decine de ce métal Tous toutes fortes de formes. i°. Le mercure crud étoit employé autrefois dans le volvulus. On le fait encore bouillir dans l’eau , à laquelle on croit qu’il communique la, propriété vermifuge. On le donne trituré avec la graille & fous la forme d’oxide noir de mer- cure , comme antivénérien. 2°. Le turbith minéral , ou oxide de mercure jaune par l’acide fulfurique , a étç aulîi recom- mandé dans les mêmes maladies, à la dofe de quelques grains. Ce médicament efl un émétique & un purgatif fouvent trop énergique. 3°. L’eau mercurielle ou fa dilTolution nitri- que fert aux chirurgiens, comme un efcarroti- que puiflant. Le précipité rouge ou oxide rouge par l’acide nitrique , remplit la même indica- tion. On prépare avec la graille de porc & la dilTolution mercurielle nitrique , l’onguent citria qui guérit très-bien la gale. 4°. Le muriate mercuriel corrofif a été re- commandé par Sanchès & Van • Swieten dans les maladies vénériennes. On en diffout quel- ques grains dans de Teau-de-vie , Sc on prend cette dilfolution par cuillerées étendue dans une I iy É L ÿ N S grande quantité de boilïons adouciflantes. Ort doit avoir égard à l’état de la poitrine , lorf- qu’on adminiflre ce remède , qui demande beaucoup de prudence. Le muriate mercuriel doux fe donne à la dofe de douze ou quinze grains, comme purgatif, & à celle de trois ou quatre grains , comme altérant. L’eau phagédé- nique eft d’ufage en chirurgie , pour ronger 8c détruire les chairs baveufes , &c. j°. Le borate mercuriel a été employé avec fuccès dans les maladies vénériennes, par M* Chauffer le jeune , de l’académie de Dijon. 6°. Le cinabre zélé fauflement regardé comme anti-fpa (modique & calmant; il fait partie de la poudre tempérante de Stahl , qui fe prépare fuivant la pharmacopée de Paris , en mêlant exaétement trois gros de fulfate de potafle & de nitre avec deux fcrupules de cinabre artifi- ciel. On fe fert encore de ce compofé, en cxpofant les malades à fa vapeur ; 8c il conflitue alors une méthode de traiter les maladies vé- nériennes par fumigation. Toutes les préparations de mercure qu’on donne à l’intérieur , conviennent dans beau- coup d’autres cas que les maladies vénérien- nes j tek que prefque toutes les maladies de 3a peau , le vice fcrophuîeux , les engorgemens lymphatiques 3 &e. Cependant nous ne pou- d’Hist. Nat. et de Csimie. 137 Vons nous empêcher de faire obfexver que ces médicamens , & fur-tout les préparations mercurielles falines , doivent être employées par des médecins fages & retenus , & qu’il ell dangereux pour la fanté & même pour la vie des hommes, que les remèdes mercuriaux foient entre les mains d’un aulîi grand nombre de perfonnes , qui manquent la plupart des con- noiffances néceffaires pour les adminiftrer, non- feulement avec fuccès, mais même fans crainte* Nous avons été plus d’une fois témoins des malheureux effets de ces préparations , caufés par l’impéritie deceuxqui les avoient employées avec la hardieffe qui accompagne ordinairement l’ignorance. Nous penfons même que cet objet eh d’une affez grande importance pour mériter l’attention d’un bon gouvernement. CHAPITRE XVI. De l'Étain . .L’Étain ou Jupiter des alchimifles , eh un métal imparfait , d’une couleur blanche plus brillante que celle du plomb , mais un peu moins que celle de l’argent. Il fe plie facile- ment , & fait entendre en fe pliant un petit bruit qu’on appelle cri de Vétain ; phénomène ^3$ Élément que nous avons déjà obfervé , quoique moins marqué dans le zinc , & qui a engagé Malouin à rapprocher ce dernier métal de l’étain. Ce bruit paroît dépendre de la féparatiop ou de l’écartement Jubit des parties de ce métal, & il femble indiquer nne caffure, quoique l’é- tain réfihe très - peu à l’effort qui tend à le courber , comme nous l’avons déjà dit. L’étain eh le plus léger des métaux. Il e£l a fiez mou pour qu’on puiffe le rayer avec l’ongle. Il perd dans l’eau environ un feptième de Ton poids. Il a une odeur très-marquée; lorfqu’on le frotte ou qu’on le chauffe, cette propriété devient plus fenfible. Il a auffi une faveur défagréable qui lui eh propre; elle eh même affez forte pour que quelques médecins aient attribué à ce métal une adion notable fur Y économie animale, & qu’ils l’aient recom- mandé dans plufieurs maladies. Sa molleffe ex- cefilve le rend trè^-peu fonore. L’étain eh le fécond des métaux dans l’ordre de leur dudi- lité -, on le réduit fous le marteau en lames plus minces que les feuilles de papier , & qui font d’un grand ufage dans plufieurs arts. Sa téna- cité eh telle qu’un fil d’étain d’un dixième de pouce de diamètre , peut fupporter un poids de quarante- neuf livres & demie fans fe rom- pre. M. l’abbé Mongèa n’a voit pas pu parvenir d’Hist. Nat. et de Chimie. i# à faire criftallifer l’étain ; mais M. de la Che- naye , l’un de mes élevés , a réuffi en faifant fondre de letain à plufietirs reprifés. Il a obtenu par ce moyen un afiemblage rhomboidal de prifmes ou d’aiguilles réunies longitudinalement les unes aux autres. La plupart des minéralogiftes doutent encore de l’exiftence de Pétain natif. Cependant quel- ques auteurs afturent qu’on en a trouvé en Saxe, en Bohême & à Malaca. II paroît même tres- avéré qu’il en édifie dans les mines de Cor- nouailles, & M. Sage a décrie un échantillon de cet étain , qui lui a été donné par M. Woulfe, chimifle de Londres. Ce morceau ell gris 8c brillant dans fa fraélure -, en le battant fur l’en- clume , il forme des lames d’étain brillantes 8c flexibles. Il eft plus ordinaire de rencontrer l’étain en oxide blanc, pefant, opaque, crif- talüfé en oétaè'dres ou en pyramides à quatre* faces. Cette mine a le tifîu lamelleux 8c fpa-* thique. Bucquet la regardoit comme un vrai carbonate d’étain. M. Sage penfe que ces crif- taux font miqé'ralifés par l’acide muriatique. Rappelons ici que la plupart des criftaux d’étain blanc des cabinets , font du tunflate de chaux natif, 8< qu'il ne faut point confondre ce fel avec l’oxide d’étain qui ne jaunit pas par le contaéf des acides. ^4 0 É L É M E N S On donne fpécialement le nom de mines d’étain à des matières d’une couleur très-foncée y rouge , violette ou noire , & d’une pefanteur plus conlidérable que celle de toutes les autres fubflances minérales. Ces mines font quelque- fois criilallifées en cubes irréguliers , & préfen- . tent des grouppes difperfés dans une gangue de quartz ou de fpath fufible. Souvent elles ne forment que des maffes fans aucune criilal- lifation. Prefque tous les naturaliües s’accordent à regarder les mines d’étain colorées, comme des combinaifons de ce métal avec l’arfenic , & ils attribuent leur pefanteur énorme à l’ab- fence du foufre. Cependant MM. Sage & Kir- iWan croient qu’elles ne contiennent point du tout d’arfenic , & le premier alTure qu’elles n’ont pas befoin d’être grillées , à moins qu’elles ne foient mêlées avec des pyrites arfenicales; ce qui eft fort commun. M. Kirwan dit que la mine d’étain noire contient^ d’étain & du fer. Bergman a reconnu l’exillence de l’étain O fulfureux dans la nature , parmi des minéraux de Sibérie; cette mine fulfureufe étoit dorée à l’extérieur comme de l’or muffif, & elle offroit à l’intérieur une malle en cridaux rayonnés , blanche , brillante , fragile Si prenant à l’air des couleurs changeantes. Il y a trouvé un peu de cuivre. b’HisT. Nat, et de Chimie. 14Ü On ne connoît point de mines d’étain en . France : cependant M. Baume foupçonne qu’on pourroit en trouver dans les environs d’Alen- çon & dans quelques cantons de la Bretagne, parce qu’on y rencontre des criftaux de roche qui paroilTent colorés par ce métal. Les pays où elles font abondantes & où on les exploite, foat les provinces de Cornouailles 8c de Devon- shire en Angleterre , l’Allemagne , la Bohême , la Saxe , l’ifle de Banca & la prefqu’ifle de Malaca dans les Indes orientales. Plusieurs na- turalises ont regardé les grenats comme des efpèces de mines d’étain , fans doute à caufe de leur couleur. Ils en diffèrent cependant par leur îranfparence 8c par leur pefanteur beaucoup moindre -, d’ailleurs MM. Bucquet 8c Sage n’y ont pas trouvé d’étain. Les différens états de l’étain dans la nature font donc peu nombreux, 8c on peut les ré- duire aux variétés fuivantes. .Variétés. 1. Etain natif en feuilles ou en lames. 2. Mine d’étain blanche , fpathique, en criflaux odaëdres. 3- Mine d’étain d’un blanc jaunâtre, fou vent colorée 8c demi - tranfparente comme des topazes. Ï42 Été MENS Variété?. t 4. Mine d’étain brune , rougeâtre , en prifmes à 4 pans redangles terminés par des pyra- mides quadrangul aires dont les faces font des triangles ifocèles. Ces criflaux s’engagent les uns dans les autres , ou fe macîent par l’une de leurs pyramides , de manière qu’il ne pa- joît plus à l’extérieur que deux petites por- tions triangulaires de deux des faces de cette pyramide qui forment des angles rentrans avec les portions correfpondantes de la py- ramide du fécond enflai. Cette réunion efl en parfaite analogie avec fa forme primitive qui paroît être un dodécaèdre à plans rhombes, mais qui n’a point encore été trouvée ifolée. y. Pierre d’étain, tinberg des Suédois. C’efl de la pierre ou du fable qui contient un mé- lange d’oxide d’étain ; il y en a de grife , de bleue, de brune & de noire. 6, Mine d’étain fulfureufe , de couleur bril- lante femblable à celle du zinc, ou dorée comme IV muffif. Pour faire l’eiïai d’une mine d’étain , il faut après l’avoir partagée en diffèrens lots, la piler groflièrement , la laver, & la griller dans une capfule de terre couverte, afin qu’il fe diflipe le moins d’étain poiïible, en ayant foin de d’Hist. Nat. et de Chimie. 14# la découvrir de tems en tems ; car fi on la grille à feu ouvert, il le perd beaucoup de ce métal , fuivant la remarque de Cramer. Il faut aufii la griller promptement , pour que Pé- tain ne foit pas trop oxidé. M. Baumé , pour obvier à ces deux inconvéniens , propofe de mêler de la poix-réfine , qui réduit une portion de l’oxide formé dans cette opération. La mine étant une fois grillée , on la fond promptement dans un creufet, avec trois parties de flux noir, & un peu de fel marin décrépité. Par les poids comparés de la mine lavée , grillée , & du culot métallique que l’on obtient, on juge combien elle contenoit de fubflance étrangère , & com- bien elle doit rendre d etam au quintal. Cramer propofe de faire cet eflai d’une manière plus expéditive , & peut-être avec moins de déchet» en fe fervant de deux gros charbons de tilleul ou de coudrier. L. un d’eux doit avoir une ca- vité qui fert de creufet & dans laquelle on met de la mine d’étain avec de la poix-réfine ; on perce l’autre d’un petit trou , pour donner ifiue aux vapeurs ; on l’applique fur le premier pour le recouvrir , & on les lie enfemble avec du fil de fer, après avoir lutté les jointures. On les allume devant la tuyère d’une forge /contre laquelle on les fait tenir à Laide de charbons places à 1 entour d’eux. Dès qu’on a donné un '*44 E L é M ENS bon coup de feu , & que l’étain peut avoir été fondu 3 on éteint avec de l’eau les charbons qui fervent à l’efîai , & on trouve l’étain en culot. • • « . « I . Bergman a propofé d’effayer les mines d’é- tain par la diflblution dans l’acide fulfurique, que l’on mêle enfuite avec l’acide muriatique , Sc de précipiter par l’alcali fixe. Si !' ‘étain eft pur, 13 1 grains de ce précipité équivalent à 206 grains d’étain ; s’il eft mêlé de cuivre & de fer , on enlève ces métaux étrangers par les acides nitrique Sc muriatique. Le travail en grand des mines d’étain , efl. femblable au précédent. Souvent on eft obligé de faire des feux de bois dans la mine , pour calciner Sc attendrir la gangue, qui eft très dure; ces feux dégagent des vapeurs trcs-dangereufes. On emploie ce procédé dans les montagnes de Geyer. D’autres fois ces mines fe trouvent dans du fable à peu de profondeur, comme à Ei- benflock. On lave la mine bocardée dans des cailles garnies de petites cloifons de drap , deflinées à retenir les parties métalliques. O11 la grille dans des fourneaux de réverbère , aux- quels efl jointe une cheminée horifontale pour recueillir le foufre & l’arfenic. On la fond enfuite dans le fourneau à manche , Sc on la coule dans des lingotières pour la réduire en faumons. En Allemagne tfHïST. Nat. et de Chimie. 14; Allemagne & en Angleterre , on travaille à peu près de même les mines d’étain. Dans ce der- nier pays , on allie ce métal avec du plomb & du cuivre, fuivant Geoffroy, & cm n’en exporte point de pur. II vient auffi d’Angleterre un étain en efpèce de ffalaâites, qu’on appelle étain en larmes , & que l’on croyait très-pur ; mais MM. Bayen 8c Charlard alîurent que quelquefois elles contiennent du cuivre. Le plus pur de tous eft celui qui vient de Malaca & de Banca. Le pre- mier a été coulé dans des moules qui lui don- nent la forme d’une pyramide quadrangulaire tronquée avec un rebord mince à fa bafe ; on l’appelle étain en chapeaux ou en écritoires. Chaque lingot pèfe environ une livre. Le fé- cond ert en lingots oblongs de quarante-cinq a cinquante livres. Ces deux efpèces d’étain font recouvertes d’une rouille grife , ou d’une cralTe plus ou moins épaiffe. L’étain qui vient d’Angleterre & qui efl beau- ' C0UP Plus employé que l’étain pur des Indes, à caufe de fa moindre valeur, efl en gros faul nions d environ trois cens livres. Il efl allié de cuivre , ou artificiellement , fuivant Geoffroy ou naturellement , fuivant M. Dietrich’ Pour en faciliter le débit , leî potjer! d>é.‘ tam le coulent en petits lingots ou baguettes Tome III, £ 1^6 Ë L E M E K * de neuf à dix lignes de circonférence , & d’en-1 viron un pied & demi de long. . L’étain expofé au feu dans des vaifTeaux fer- més , s’y fond très-vite. C’eff le plus fufible des métaux. Il refte fixe tant qu’on n’augmente pas le feu ; mais il paroît que cette fixité n’êff que relative , puifque fi on lui fait éprouver une chaleur confidérable , il fe voîatilife , comme nous allons le dire tout-à-l’heure. Si on le chauffe avec le contaét de l’air , fa furface fe couvre, dès qu’il eff fondu , dune pellicule gvife terne, & qui forme des rides. En l’enlevant, on ob- ferve que l’étain eff au-deffous avec tout fou brillant , 8c qu’il ne lui adhère point ; mais il perd bientôt fon état , 8< il Te forme une nou- velle pellicule. Tout l’étain peut ainfi fc réduire en pellicules , qui ne font autre chofe qu’un oxide métallique ou une combinnifon de ce inctal avec l’oxigène de l’atmofphcre. L’étain a acquis dans fon oxidation un dixième de fon poids. Si on chauffe ce métal jufqu’à le faire rougir , Geoffroy a obfervé que fon oxide eff foulevé peu à peu par une flamme blanchâtre très* vive, qu’il compare à celle du zinc. C’eff une vraie inflammation ou combuffion rapide de ce métal; en même-tems il s’élève une fumée légère d’étain volatilifé , qui fe condenfe fur les corps froids en un oxide blanchâtre & Eftïîsï. Nat. et de Chimie. 147 &ignil!é. L’oxiiie gris d’étain devient blanc Ci on l’expofe de nouveau à l’a dion du feu ; il s’unit à une nouvelle quantité d’oxigène , & s’oxide davantage 5 on le nomme dans cet état potée ■d'étain. Si on lui fait éprouver une chaleur très-forte , comme celle d’un four de porce- laine, il eft fufceptibl-e de fe fondre en verre0 MM. Macquer 8c Baumé ont obfervé , en trai- tant ainft de l’étain dans un creufet , qu’une partie fe changeoit en un oxide blanc & ai- guillé; qu’une autre placée au-defîbus de la pre- mière étoit dure , rougeâtre & à moitié fondue; qu’une troifième partie formoit un verre de la couleur de rubis ou de l’hyacinthe • 8c qu’enfin il reftoit au fond du creufet une partie de l’étain dans fou état métallique. Malgré cette expé- rience , l’oxide d’étain eft regardé comme in- fufible ; c eft au moins le plus réfraélaire» On peut décompofer cet oxide à l’aide des matières combuflibles animales ou végétales , qui s’emparent de l’oxigène, 8c font reparaî- tre ce métal avec fes propriétés. Il paraît cependant que la potée détain bien oxidée retient très- fortement la bafe de l’air qui lui eft unie , puifqu’on ne peut la réduire que très- difficilement 8c en employant une grande quan- tité de matières combuflibles. C’eft d’après cela que AI. Baumé 8c plufieurs autres chimiftes Kij X$8 E L é^M E N S croient que quand on a trop grillé les mines d’étain , il y en a une portion qui ne peut plus fe réduire en métal. L’étain ne s’altère pas beaucoup à l’air; il ne fe ternit même que difficilement lorfqu’il eft bien pur. Celui du commerce fe couvre à la longue d’une poulïière grife , mais qui , fui- vant Macquer, n’appartient jamais qu’à la fur- face la plus légère , & ne pénètre pas à l’in- térieur , comme cela a lieu pour le fer. L’eau ne dilïout point & n’oxide point l’é- tain ; cependant elle en ternit & paroît en oxider à la longue la furface. Les matières terreufes ne contractent aucune union avec ce métal. Son oxide qui efl trcs- infufible , ne forme point de verre tranfparent ni coloré , avec les fubflances capables de fe vitrifier. Mais comme il elt très-blanc , il peut s’interpofer entre les molécules du verre, & le rendre d’un blanc mat & très- opaque. Cette forte de fritte vitreufe porte le nom d 'émail, La potée d’étain, à caufe de fon infufjbilité, ôte la tranfparence à tous les verres poflibles ^ & en fait des émaux colorés. On ne connoît point l’adion de la chaux , de la magnéfie & des alcalis fur l’étain ; cepen- dant l’on ne peut douter que ces derniers fels aidés de l’adion de l’eau , ne foient capables d’Hist. Nat. et de Chimie. 142 d’altérer ce métal , pui (qu’ils lui font prendre en très -peu de tems les couleurs de l’iris. L’acide fulfuriqne concentré dilTout, fuivant Kunckel , la moitié de fon poids d’etain ; cette dilTolution fe fait bien à l’aide de la chaleur. 11 s’en dégage , fans mouvement ni effervef- cence bien fenfibles , du gaz fulfureux très- piquant. L’étain s’empare, dans cette expérience* de 1’ ’oxigène de l’acide fulfurique ; il eh promp- tement oxidé , & l’acide en contient a flez pour pouvoir précipiter par Peau. L’acide ful- furique étendu d’un peu d’eau, agit de même fur Pétain ; mais cette dilTolution elt plus per- manente & précipite moins par l’eau que la première. Lorfque cet acide eh très-foibîe , il ne le diffout pas. Dans cette combinaifon l’étain enlève tant d’oxigène à l’acide fulfurique , qu’il fe forme très-vite du foufre. C’eh ce dernier qui donne à la dilTolution une couleur brune tant quelle eh chaude ^ & qui Te précipite quand elle refroidit. MM. Macquer & Baume fe font ahuris de la préfence du foufre dans cette combinaifon. En chauffant davantage cette dilTolution , Pétain Te précipite en oxide blanc. Le même phénomène a lieu à la longue & Tans le fecours de la chaleur. La dilTolution fulfu- rîque d’étain eh très-cauhique. M. Mon-net en a obtenu par le refroidilTemeiitdescnhauxfem- %s° Ê L é M E N * blables au fulfate calcaire , ou en aiguilles fines 8c entrelacées les unes dans les autres. L’oxide d’étain précipité de cette diftoltuion par le re- pos 8c par la chaleur , eft foluble dans l’acide fulfurique. Si on évapore à ficcité la diiïblutîori fulfurique d’étain , l’oxide qu’on obtient alors eft gris, très-difficile à réduire , 8c ne peut plus fe di (Tondre dans cet acide. Les alcalis préci- pitent l’étain diftdus dans l’acide fulfurique , en un oxide de la plus grande blancheur. L’acide nitrique eft décompofé avec une ra- pidité fingulière par l’étain, 8c même à froid. C’eft une des diflolutions les plus rapides 8c les plus frappantes que la chimie préfente. Il parott que l’étain a une tendance très-forte pour s’unir à l’oxigène de l’acide nitrique ; 8c comme l’a- zote n’eft pas à beaucoup près auffi adhérent à l’oxigène dans cet acide , que l’eft le foufre dans î’acide fulfurique , il n’eft pas étonnant que la décompofition de l’acide nitrique par l’étain foit beaucoup plus prompte & beaucoup plus vive que celle de l’acide fulfurique par le même métal. M. de Morveau a obfervé que dans une difloîution d’étain par l’acide nitrique , il ne s’étoit dégagé aucun gaz, mais qu’il s’étoit formé de l’ammoniaque. On voit donc que l’étain avoit décompofé non-feulement l’acide nitri- que , mais encore l’eau , puifque ce ne peut / d*Hist. Nat. et de Chimie, xft être que l’hydrogène de l’eau uni à l’azote de l’acide du nitre , qui a formé l’ammoniaque produite dans cette opération. L’étain efl réduit en un oxide blanc 9 que Macquer a effayé en vain de réduire ; il paroît qu’alors ce métal elt furchargé d’oxigène. L’a- cide nitrique n’en retient que très- peu en dif- folution , & lorfqu’on l’évapore pour en obte- nir des criftaux de nitrate d’étain , ce qui étoit diflbus fe précipite bientôt , & l’acide refle prefque pur. Bucquet allure cependant que l’on peut retirer de cette difïolution un nitrate d’étain très-déliquefcent , dont il n’a pas déterminé la forme. Il allure auffi qu’en lavant la chaux d’é- tain produite par la décompofition de l’acide nitrique, l’eau diffout un peu de nitrate d’étain , qu’on obtient par évaporation. L’acide nitrique retient un peu plus d’étain en dilTolution , lorf- qu’on l’emploie très-étendu d’eau ; mais il laide précipiter cet oxide, foit par le repos, foit par la chaleur. MM. Bayen 8c Charlard ont dit , dans leurs belles recherches fur l’étain , que lorfqu’on charge l’acide nitrique de tout l’étain qu’il peut oxider , jufqu’à ce que cet acide foit épais 8c incapable d’agir fur de nou- veau métal, on obtient en lavant cette malle avec beaucoup d’eau didillée, & en évaporant cette ledive àficcité ? un fel Jlanno-tùtreux qui K iy ’iys E L i M E N S détonne feul dans un têt bien échauffé , & qui brûle avec une flamme blanche & épaiffe , comme celle du phofphore. Ce fel n’eft point du nitrate d’étain , mais une efpcce de fel triple, ou du nitrate d’ammoniaque 8c d’étain. Diftillé dans une cornue , il fe bourfouffle , bouillonne 8c remplit tout- à-coup le récipient d’une vapeur blanche 8c épaiffe , dont l’odeur eft nitreufe. L’acide muriatique fumant agit bien fur l’é- tain ; il le diffout à l’aide d’une douce chaleur, 8c même à froid ; il perd fur le champ fa cou- leur 8c fa propriété de fumer. L’effervefcence très-légcre qui a Heu dans cette combinaîfon, dégage du mélange un gaz fétide inflammable » mais qui ne reffemble point à l’odeur arfeni- cale , comme quelques chimifles l’ont annoncé. L’eau eft donc décompofée par l’étain, à l’aide de l’acide muriatique. Cet acide peut diftoudre par ce procédé plus de moitié de fon poids d’étain. La diffolution eft jaunâtre ; elle a une odeur très-fétide ; il ne s’y forme point de pré- cipité d’oxide d’étain , comme avec les deux acides précédens. Cette diffolution évaporée fournit des aiguilles brillantes 8c très -régulières, qui attirent un peu l’humidité de l’air. M. Mon- net dit que ces aiguilles , après être tombées en déliquefcence , fe cnftallifent 8c relient sè- d’Hïst. Nat. ït de Chimie. ches à l’air. M. Baume qui a préparé le mu- riate d’étain en grand , comme à la dofe de cent cinquante livres d acide fur vingt -cinq livres d’étain , pour les -manufactures de toiles peintes, en a déraillé avec foin quelques pro- priétés. Sur douze livres d’étain , diffous dans quarante-huit livres d’acide muriatique , il lui eft relié deux onces lix gros d’une poudre grife , qui n’a pas pu fe dilïoudre dans une livre de cet acide , avec lequel il l’a mile en diges- tion pendant plufieurs jours. Margraf croit que c eil de 1 arfenic. AT. Baume ne l’a point exa- minée. Il compare l’odeur de cette diiïolution concentrée à celle des terres noires qu'on re- lit e des vieilles latrines , & il fait remarquer que loifquil en tombe fur les doigts , rien ne peut enlever l’odeur métallique particulière à l’étain, qu’elle leur communique, & qu’elle ne fe dif- fipe qu’au bout de vingt-quatre heures. Il ob- ferve que , Suivant I état de l’acide, les cnflaux de muriate d’étain font différens. Tantôt ils for- ment de petites aiguilles blanches ; la même liiTolution lui en a donné de blanches & de couleur de rofe. Ce dernier , purifié par la dif- olution & l’évaporation, a fourni par le refroi- liffement de gros criüaux à peu près fembla- >Ies à ceux du fulfate de foude. D’autres fois, n employant de 1 acide muriatique ordinaire. *5*4 Élément il n’a eu ce Tel qu’en petites écailles d’un blanc de perle , femblables- à celles de l’acide bora- cique. Il n’a point parlé de l’adion du feu fur ce fel. M. Monnet , qui a difîillé la difTolution muriatique d’étain, aiïure en avoir obtenu une matière onétueufe très— fnfible ; enfin , un vrai beurre d'étain 8c une liqueur fumante femblable a celle de Libavius , dont nous parlerons plus bas. Ce fait s’accorde avec ce qu’a obfervé Macquer fur une dilïolntion d’étain dans l’acide muriatique , qui s’efl: prife prefque toute en criflaux pendant l’hiver , 8c qui efl redevenue fluide l’été; propriété qui fe rencontre dans le muriate d’étain fublimé. Cet illufire chimifle a obfervé qu’il s’étoit formé au bout de quelques années un dépôt blanc dans cette dilfolution. La combinaifon de l’acide muriatique 8c de l’oxide d’étain donne un précipité beaucoup plus abondant que les autres diffolutions, à l’aide des alcalis & de la chaux ; les alcalis redilfol- vent une partie de l’oxide précipité, 8c pren- nent une couleur d’un jaune brun. C’eft en dilfolvant l’étain d’Angleterre en gros faumons, 8c tous les étains impurs en général dans cet acide , que MM. Bayen & Charlard font par- venus à découvrir quelques atomes d’arfenic dans l’étain d’Angleterre. Lorfqu’en effet il en contient 3 à mefure que l’acide agit fur l’étain. d’Hist. Nat. et de Chimie, iyy ce métal prend une couleur noire, & Iorfqu’ii eff entièrement difl'ous , il refie une poudre noirâtre qui eft de l’arfenic pur ou uni à un peu de cuivre. On peut donc employer cet acide pour s’aüurer de la préfence 8c de la quantité d’arfenic contenu dans l’étain. L’acide muriatique oxigéné diflout l’étain très- promptement 8c fans effervefcence fenffble , parce que ce métal abforbe promptement l’o- xigène furabondant de cet acide , 8c n’opère point de décompofmon d’eau pour s’oxider. I Cette diffulution a enfuite tous les caraétères ide la précédente. L’acide mixte nitro-muriatique fait avec deux | parties d’acide nitrique 8c une d’acide muria- i tique, fe combine avec effervefcence à l’étain. II s’excite une chaleur vive qu’il eff important de diminuer en plongeant le mélange dans de l’eau froide. Pour faire une diflolution d’é- tain permanente dans cet acide mixte , il faut avoir la précaution de ne mettre le métal que peu à peu , d’attendre pour en ajouter iime fécondé portion que la première ait été (entièrement difloute ; fi on le mettoit tout- à- coup , une grande partie de ce métal feroit oxidée. Veau régale peut fe charger ainfi de la moitié de fon poids d’étain. Cette diffolu- ùon eft d’un brun rougeâtre j elle n’a que peu 11 Ë L É MENS de couleur ; elle forme fou vent en quelques milans une gelée tremblante , vifqueufe comme une réfine. Cette fubllance devient plus folide au bout de quelques jours , & elle peut fe cou- per comme une gelée animale bien prife. Quel- ques portions préfentent la demi-tranfparence 8c la blancheur de l’opale ; elle exhale une odeur piquante d’acide muriatique , mais qui n’a point la fétidité de celle de la diflblution muriatique. J’en ai confervé plufieurs années clans un bocal allez mal bouché ; elle n’a rien perdu de fa folidité 8c de fa tranfparence. Pour que la difToIution d’étain par Veau régale forme une gelée, il faut qu’elle foit chargée de beau- coup d’oxide métallique. Quelquefois en y ajou- tant moitié de fon poids d’eau , elle devient concrète, quoiqu’elle ne le fût nullement avant cette addition ; mais alors cette gelée , faite à l’aide de l’eau, ell couleur d’opale ; parce que, fuivant la remarque de Macquer, cette diffo- lution étant fufceptible d’être décompofée par l’eau , une portion de l’oxide d’étain précipité détruit la tranfparence de la gelée. Ce favant chimifte a encore obfervé que fi l’on chauffe une diffolution nitro-muriatique d’étain , il s’y excite une efîervefcence due à ce que l’acide mixte réagit fur le métal fur lequel il n’a pas épuifé fon aétion. Cette diffolution perd alors d’Hist. Nat. et de Chimie.1 ïjy toute fa couleur & fe fige en fe refroidilTant. La gelée qu’elle forme en ce cas , efl de la plus belle tranfparence. Il fe dépofe fouvent par le repos de cette difiolution liquide d’étain, des criftaux en petites aiguilles. On ne les a pas encore examinés , non plus que le gaz dé- gagé pendant l’a&ion de l’acide nitro- muria- tique fur l’étain. MM. Bayen & Charlard ont trouvé que ce diflTolvant pouvoit auffi faire con- noître lapréfence de l’arfenic dans l’étain , mais que comme il a une aétion affez fenfible fur l’ar- fenic , il n’indiquoit pas fa quantité avec autant de précifion que peut le faire l’acide muriati- que feul. On ne connoît point l’aétion des autres acides fur l’étain. Tous les fels neutres fulfuriques, & fur-tout les fulfates de potaffe 8c de foude , font dé- compofés par l’étain. En chauffant dans un < creufet partie égale de fulfate de potaffe 8c de ce métal , j’ai obtenu une maffe fondue verdâ- itre, qui ne contenoit plus rien de métallique, 8c qui étoit un véritable fulfure flannique. L’é- tain enlève l’oxigène à l’acide fulfurique ; le foufre mis à nud par cette décompcfition , fe combine avec la potaffe , 8c ce fulfure diffout une portion de l’oxide d’étain. C’efl la troifième Tubftance métallique dans laquelle nous recon- I Elémens noiffons cette propriété de décompofer les fuî- fates alcalins. On verra tout-à-l’heure que Glau- ber l’avoit remarqué relativement au fulfate ammoniacal. Ce métal fait détonner le nitre avec rapidité. Pour cela on le fait fondre & rougir obfcuré- ment dans un creufet ; on projette deffus du nitre bien fec en poudre. Il fe produit une flamme blanche & brillante. Lorfqu’en ajoutant du nitre il ne fe fait plus de détonation , letain efl entièrement oxidé. La poudre blanche qui refie contient de l’alcali rendu cauflique par l’oxide d’étain , 8c qui €ff même uni à une certaine quantité de cet oxide. En le leflivant, on peut en précipiter l’étain par un acide. Si l’oxide gris d’étain fufe avec le nitre, ainfi que l’a obfervé Geoffroy , c’efl qu'il contient encore de l’étain qui n’efl que divifé ; car en prenant un oxide parfait de ce métal , celui par exemple qui a été chauffé Iong-tems, 8c qui ell très- blanc , ou bien celui que forment les acides , ils ne préfentent point le même phénomène. L’étain décompofe très-bien le muriate am- moniacal ; il en dégage de l’ammoniaque très- cauflique, 8c dans l’état de gaz. Bucquet, qui a fait des recherches fuivies fur la décompofi- tion du fel ammoniacal par les matières métal- liques 8c par leurs oxides , obferve qu’il fe d’Hist. Nat. et de Chimie. iyp dégage beaucoup de gaz inflammable par la réaétion de l’étain fur le rnuriate ammoniacal. Suivant les expériences de ce favant chimiffe, les métaux décompofent ce Tel en raifon de l’adion que l’acide muriatique a fur eux. Com- ime nous avons vu que l’acide muriatique avoit beaucoup d’affinité avec l’étain, nous pouvons en conclure que la théorie donnée par Buc- quet, eff très-fatisfaifante & parfaitement d’ac- (cord avec les faits. Glauber avoit annoncé que ifon fel ammoniacal fecret, ou le fulfate ammo- niacal, étoit décompofé par l’étain; mais cette «décompofition n’eflpas complette, fuivantPott, qui a répété l’expérience de Glauber, fans doute parce que l’acide fulfurique a moins de tendance avec l’étairi que n’en a l’acide muriatique. Buc- quet obferve encore que l’étain étant très-fufible, fe raffemble en culot au fond de la cornue, Sc qu’en conféquence le rnuriate ammoniacal n’eff pas auffi complettement decompofe qu’il pour— roit 1 être par ce métal. Voilà pourquoi l’étain rne décompofé pas ce fel auffi parfaitement que les métaux peu fufibles. Le réfidu de cette dé- ccompofition eff un rnuriate d’étain folide , dé- co mpo fable par l’eau, & femblable à celui que 1 on forme avec le rnuriate corrofif de mercure 8c ce métal , dont nous parlerons plus bas. On combine aifément l’étain avec le foufre. I^° Ê L É M E N S €n jettant une ou deux parties de cette matière combullible en poudre , fur cinq à fix parties d’étain fondu dans une cuiller de fer ; le mê- lange agité avec une fpatule de fer , fe noircit & s enflamme. Si on le fond dans un creufet, on en obtient une mafle caftante , difpofée en aiguilles plattes réunies en faifeeatix. Cette com- binaifon eft beaucoup plus difficile à fondre que l’étain , comme toutes celles des métaux mous 6c fufibles avec le foufre. .Mais ce qu’il eft important de noter, c’eft que quoique l’étain s’allie facilement au foufre par la fuflon , la na- ture ne l’offre que très- rare ment dans cet état. C’eft abfolument l’inverfe du zinc qui fe trouve fréquemment combiné avec le foufre dans fes mines , & qui ne s’y unit que très-difficilement dans nos laboratoires, La nature eft fouvent très- différente de l’art dans fes opérations ; mais fi elle fait quelquefois des combinaifons que l’art ne peut pas imiter, il arrive auffi que ce der- nier opère des compofitions dont elle ne lui fournit point de modèles. L’arfenic ne s’unit que peu à l’étain par la fuflon, parce qu’il fe diffipe en grande partie, f» L arféniate de potaffe s’y combine mieux , 6c È M. Baume a obfervé qu’il réfulte de cette corn- p binaifon, dans laquelle l’acide arfenique quitte j en partie l’alcali pour s’unir à l’étain, auquel il !i cède .. d’H ist, Nat. £T de Chimie. j6j code une portion d’oxigène, un culot aig: très-brillant, difpofé à facettes comme Pan:', moine. Les expériences que Margr r a fuies fur l’union de l’étain avec l’oxide déu - par- la difiillation , nous ont appris qu’m - jv.rtie de cet oxide fe réduit en arfenic , : : üie portion de l’étain s’oxide ; que Pc ta in uni a Par- fenic ne peut plus en être féparé par l’aclion du feu le plus violent , & qu’il efi vrâifemb’able que ce métal en retient toujours quelque partie qui rend fon tifage dangereux dans la cuifine. En diftillant de l’oxide d’étain chargé d’arfenic, Margraf a obtenu un peu de liqueur qui avoit l’odeur du phofphore. Depuis le chinai fie de Berlin , MM. Bayen & Charlard ont examiné la combinaifon de l’arfenic & de Pétain. Ils ont obfervé que l’oxide d’arfenic , appelé fimple- naent arfenic blanc , ne peut fe combiner avec l’étain qu autant qu’il repajîe à l’état métallique, & que cette combinaifon fe fait beaucoup mieux en unifiant direétement l’arfenic en régule avec 1 étain. Si l’on met dans une cornue trois onces lixgros d’étain, avec deux gros de régule d’ar- fenic en poudre grofiière ; & fi après avoir adapte ma récipient, on chauffe la cornue juf- qu a la faire îougir, il séleve à peine deux giarns d arfenic dans le col de ce vaifieau , Sc l’on trouve dans le fond un culot métallique ■Tome III , p ^2 EtlMENS pefant quatre onces. Cet alliage qui contient un feizième d’arfenic , efl criftallifé en grandes facettes , comme le bifmuth ; il efl plus fragile que le zinc , & plus difficile à fondre que l’é- tain ; il fe ramollit d’abord , & fi on le touche dans cet état avec une baguette de fer , on entend un cri produit par le frottement de fes lames les unes contre les autres. Sa fonte efl pâteufe, & il fume en perdant peu à peu l’ar- fenic qui lui eh uni. Le cobalt s’unit par la fufion à l’étain , 8c Yonne un alliage à petits grains ferrés & d’une couleur légèrement violette. L’étain & le bifmuth donnent, fuivant Gel- îert , un alliage caftant Si à facettes cubiques. Les potiers allient quelquefois ce dernier métal à l’étain pour lui donner de la blancheur 8c de la dureté. Comme il lui communique beaucoup de roideur, 8c qu’il efl plus cher que le zinc, qui produit les mêmes effets fur l’étain , les ou- vriers ne peuvent pas l’employer à plus d’une livre ou d’une livre 8c demie par quintal & l’on n’a rien à craindre de fes effets fur l’éco- nomie animale, effets qu’une analogie marquée avec le plomb dans toutes les propriétés du bif- muth , pourroit faire foupçonner femblables à ceux de ce métal dangereux. On peut départir le bifmuth de l’étain à l'aide de l’acide muriatique îyHiST. Nat. et de Chimie. i&j qui difTout le dernier , & laide le premier fous la forme d’une poudre noire , pourvu qu’on l’emploie foible. L’acide niiro-muriatique pro- duit le même effet lorfqu’ii efl étendu d’eau. L’antimoine uni à ce métal donne , d’après Gellert, un métal blanc très aigre , & dont la pefanteur fpécifique eff moindre que celle de ces deux fubflances métalliques priées fépa- rément. Le zinc s’allie bien à l’étain, & il en réfulte un métal dur à petits grains ferrés , d’autant plus duétiîe que la proportion de l’étain efl plus grande. Cronffedt affiire que le nickel uni à l’étain, forme une maffe blanche & brillante , qui étant calcinée fous une mouffle , s’élève en forme de végétation. Le mercure dilïout l’étain avec beaucoup de facilité , & en toutes proportions. Pour faire cette combinaifon, on verfe le mercure chauffe dans de l’étain fondu. L’amalgame qui en ré- fuite diffère pour la folidité , fuivant les dofes relatives de ces deux fubflances métalliques; On faifoit autrefois avec quatre parties d’étain & une de mercure, une amalgame que l’on couloit en boules , qui prenoient de la folidité en fe refroidifîant. On fufpendoit ces boules dans l’eau pour la purifier. Comme on la faifoit Lij E £ ifi m e n s •en meme tems bouillir , c’étoit à l’ébullition •feule qu’étoit du: I;. précipitation des matières étrangères qui altéraient l’eau. L’amalgame d’é- tain efl fufceptible de criflallifer. Elle forme des petits criflaux carrés , comme M. Daubenton l’a obfervé fur l’amalgame d’étain qu’il employoic pour boucher les bocaux du jardin du roi. M. Sage dit que ces criflaux font gris, brillans, en lames feuilletées, amincies vers leurs bords, 6c qu’ils laiffent entr’éux des cavités polygones. Comme l’étain a plus d’affinité avec l’oxigène que n’en a le mercure, il décompofe le mu* riate mercuriel corrofif. Pour opérer cette dé- compofition , on divife l’étain , à l’aide d’une petite portion de mercure -, on triture parties égales de cette amalgame 8c de muriate mer- curiel corrofif, Sc on diflille ce mélange dans une cornue de verre à une très-douce chaleur. II paffie d’abord une liqueur fans couleur, Sc il s’élance enfuite avec une efpèce d’explofion , une vapeur blanche épaiffie, qui tapiffie les pa- rois du récipient d’une couche très-mince. Cette vapeur fe condenfe en une liqueur tranfparente , qui exhale une fumée épaiffie , blanche Sc très- abondante , Sc à laquelle on a donné le nom de liqueur fumante de Libavius. C’elt une com- binaifon d’acide muriatique Sc d’étain , dans la- quelle l’acide paroit être fur chargé d’oxigène, t>*H ist. Nat. etceChim ti: i6f Cette liqueur, renfermée dans un flocon, ne répand point de vapeurs yifibles. Il s’en dégage cependant une certaine quantité, qui depofe de l’oxide d’étain en criftaux aiguillés à la partie fu péri cure du flacon , de forte que l’extrémité du goulot fe trouve exactement bouchée an bout de quelques- mois» 11 fe précipite aufîi un- peu de cet oxide au fond de la liqueur , fou^ la forme de feuillets irréguliers. Elle a une odeur très -pénétrante , & qui excite la toux. Les va- peurs qu’elle répand ne font vifibles que lorf- qu’elles ont le contaél de l’air. Il fe.mble qu’el- les foient formées par un gaz d’une nature par- ticulière , qui efl décompofable par l’air , Sc qui, par fon contaél, laide précipiter l’oxide d’étain , comme le gaz acide fluorique laiile précipiter la terre filicée par le contaél de l’eau ^ & comme le gaz hydrogène fulfuré dépofe du foufre par le contaél de l’air. Seroit-ce une: combinaifon de gaz. acide muriatique oxigéné & d’oxide d’étain ? L’eau ne précipite pas fenflblement la lïqueut fumante de Libavius mais elle paroît y opérer une décompofltion qui n’a point encore été con- venablement examinée. Lorfqu’on verfe cette liqueur nouvellement préparée dans de beau difliliée, elle y occasionne un petit bruit comme celui que produit, l’acide fulfurique bien cou- L iij E L É MENS centré , en suniffant à l’eau. Elle paroît fe ré- parer en un grand nombre de petites molécu- les transparentes , irrégulières , qui Semblent n’avoir pas d’adhérence avec l’eau. En obfer- vant de pics ce qui fe paffe dans ce mélange , on voit s’échapper de ces molécules une bulle qui vient crever à la furface de l’eau , & s’y divifer en une vapeur qui blanchit par le con- tad de l’air. En agitant l’eau , c es molécules s’y düTolvent très- vite, & cette difiblnûon ne ré- pand plus de vapeurs. Macquer a dure qu’en étendant la liqueur fumante dans une grande quantité d’eau , elle précipite un oxide en pe- tits flocons blancs 8c légers. Le gaz de la liqueur fumante n’efl que peti diadique. Il ne fait jamais fauter le bouchon du flacon où elle efl renfermée, comme cela ar- , rive aux acides nitrique 8c muriatique , à l’am- moniaque , à l’éther , &c. M. Adet, qui a lu à l’académie un mémoire fur la liqueur fumante de Lib avilis , a vu i°. que 1-efFervefcençe qui a lieu toutes les fois qu’on l’unit à l’eau , dépend du dégagement d’un fluide diadique, qui a tomes les propriétés dü gaz azote ; 2°. que la liqueur fumante com- binée avec Feau dans le rapport de 7 à 22 a forme un corps folide qui fe fond par Paélion de la chaleur 2 fe congèle par celle du froid. tfHiST.N-AT. et de Chimie. î6j & fe comporte comme le muriaie oxigéné de- tain ou beurre d'étain -, 3°- clue la liclueiir fu; ruante étendue d’eau , dillout de 1 étain fans dé- gagement de gaz hydrogène , & donne un Tel femblable à celui qu’on obtient de la combi- nai fan dirêde de l’acide muriatique & de l’étain. Il conclut , d’après fes diverfes expériences , que la liqueur fumante n’eft autre chofe qu un compofé d’acide muriatique à l’état aeriforme 5 & d’oxide d’étain , dans lequel l’oxigène eft en excès ; & que ce fel efl au muriate détain or- dinaire , ce qu’eft le muriate oxigéné de mer- cure au muriate de mercure , ou mercure doux* Le réfidu de la diftillation de la liqueur fu- mante de Libavius préfente autant de phéno- mènes ir.téreffans que la liqueur elle-même. La voûte & le col de la cornue font enduits d’une légère couche blanche de grife , qui contient s d’après les expériences de Rouelle le Cadet ? lin peu de liqueur fumante } du muriate d’étain concret ou étain corné, du muriate mercuriel doux , de du mercure coulant. Le fond de ce vaiffeau offre une amalgame de mercure & d’étain , au-deffus de laquelle fe trouve un étain corné d’un gris blanc , folide 6c compacte, qui peut être volatilifé par une chaleur plus forte. Si on met dans une cornue cette fubf- tance j elle fe fond -><$<: fe fépare en deux cou* L iv V *00 E L é M E N S eues; l’une noire, placée au deffous de l’antre, qui efl blanche & femblable au premier étain corne. Rouelle paroît foupçonner que ces deux fubflances , qui different l’une, de l’autre, 8c qui ne Je mêlent pas , font dues à l’alliage contenu dans l’étain. Plus ce métal efl allié, moins il donne de liqueur fumante , fuivant cet habile chimille. Le muriate d’étain folide attire I humidité de l’air, & fe diffout très-bien dans Peau. JVÎ. Baume a donné fur la combinaifon de \ l’étain avec l’ande muriatique une théorie qui e(l à peu près femblable à celle de Schéele 8c Ber gman fur ce qu’ils ont appelé V acide marin d tpklogijliqué. fl penfe que cet acide perd fon phlogiflique dans cette opération , comme ces chimifles croyoient qu’il le perd en le diffillant fur l’oxide de manganèfe. Tl foupçonne qu’on obtiendroit cet acide parfaitement pur , en dif- tillant la liqueur fumante de Lib avilis ; ce qui fait voir qu'il regarde l’acide muriatique ordi- naire comme fiirchargé de phlogiflique. M. Bau- me a donc, d’après cette observation, l’anté-* riorité fur Schéele , pour la découverte des deux états de l’acide muriatique ; mais il n’a point décrit les propriétés fingulicres de cet acide oxigéné , cfomme l’a lait le célèbre chi- mifle fuedois. Les tifages de l’étain font très-multipliés. On d’Hist. Nat* et de Chimie. 169 s’en fert dans un grand, nombre d’arts. On en fait des doublures de beaucoup de vai 'beaux, des tuyaux d’orgue , &c. On en garnit les déco- rations, &c. Son amalgame eft employée pour étamer les glaces ou leur donner le tain. Les chaudronniers le coulent allié avec le plomb fur le cuivre pour l’étamer : on l’allie avec le cuivre pour faire le métal des cloches & des flatues. Les potiers-d’étain l’uniffent au biimuth, à l’antimoine, au plomb 8c au cuivre, pour faire des uftenfiles de toutes efpèces , qui font très-altérables à l’air. La potc'e d’étain fert à polir beaucoup de corps durs. On la fond avec de l’oxide de plomb & du fable pour faire l’é- mail , ainfi que la couverte de la faïence, &c. Le muriate d’étain criffallifé eft utile dans le travail des toiles peintes : fa dilTolution dans Veau régale ou acide nitro-muriaüque 9 exalte la teinture de cochenille , de gomme lacque, &c. de forte qu’elle la fait palier à la couleur du feu le plus vif. Les teinturiers fe fervent de cette diffclution, qu’ils nomment cornpoJitions pour faire l’écarlate. Lorfqu’on la mêle au bain de ces teintures, elle y forme un précipité qui entraîne la partie colorante, 8c la dépofe fur l’étoffe que l’on teint. Cette obfervation cil due à Macquer , dont les travaux ont rendu de grands fervices à cet art. I7° Elément L mage de l’étain dans la cuiffne a été regarde? comme très-dangereux par quelques chimiltes. Navier rapporte dans Ton Ouvrage fur les contre- poifons , &c. que des ragoûts dans lefqueîs on tîvoit laide des cuillers d’étain , ainff que du lucre contenu dans tin vaiffeau de ce métal , ont em- poi Tonné plufieurs perfonnes: on a attribué pref- que généralement ces fuu elles effets à l’aiTenic que Geoffroy avoit annoncé en 1738 dans l’é- tain , & que Margraf avoit cru trouver dans les étains les plus purs , & même à une dofe confidérable. Mais 1rs craintes élevées fur cet objet ont été diffpées par les travaux de MM. Bayen & Charlard que nous avons déjà eu l’occafion de citer dans l’hiftoire de ce métal. Ces chimiffes ont prouvé par les expériences les plus déci- sives , i°. que la quantité d’arfenic retiré par Margraf, de l’était) de Morlaix, & qui va à près de trente-lix grains par demi-once , feroit beau- coup plus que fuffi faute pour ôter à ce métal la moîleffe & la flexibilité qu’on lui connoit, & pour le rendre aufîî fragile que le zinc; 20. que les étains de Lança & de Malaca ne contien- nent pas un atome de ce dangereux métal ; 3e. que l’etain d’Angleterre en gros faumons, donne par Faction de l’acide muriatique une petite quantité de poudre noirâtre, fouvenî d’Hist.Naî. et de Chimie. 17* mêlée de cuivre & d’arfenic , dans laquelle ce dernier ne va jamais au-delà de trois quarts de grain par once d’étain , & fe trouve fouvent au- de flous ; 40. que le mélange fait par les po- tiers d’étain du gros faumon anglois avec les étains purs de Malaca ou de Banca , diminue encore cette dofe; y°. que l’arfenic uni à lé- tain, perd une partie de fes propriétés & de fon ndion corrofive; 6°. enfin, que la petite quantité d’etain allié qui peut entrer dans les a.limens par l’ufage journalier de la vaiflelle faite avec ce métal , ne peut influer fur l’éco- nomie animale ; puifque d’après le calcul fait fur ce qu’un plat d’étain avoit perdu pendant deux ans , on n’en prendrait tout au plus que trais grains par mois, & conféquemment la cinq mille fept cent foixantièmé partie d’un grain d’arfenic pa'* jour , en fuppofant encore que l’étain ouvragé de Paris contînt autant de ce métal vénéneux , que l’affiette de Londres mife en expérience par M. Bayen , en con- tenoit. Obfervons que fi les ctiimifles de Paris ne font pas du tout d’accord avec Margraf , cela vient peut-être de la différence qu’il y a entre l’étain de Saxe, fur lequel ce dernier a fait fes ex périences , 8c l’étain que l’on emploie en France, 8< qui yient des Indes 8c de l’Angle^ terre. *7^ E £ É M É K î Au refie , plu fi eu rs médecins qui fe font oc- cupés des fubftances métalliques , confidérées comme médicamens , av oient déjà reconnu Fin- nocuité de ce métal , & l’avoient même con- fei'lé en limaille dans les maladies du foie, de la matrice , & dans les affections vermineufes. Schuîz , dans fa DiiTertation fur Fufage des vaif- feaux de métal dans la préparation des alimens & des médicamens , a regardé l’étain bien pur comme très-falubre. La Poterie a fait entrer 1 oxide d’étain dans un médicament qu’il a dé- signé fous le nom d’an (i hectique , A qui n’efl qu’ une lelTive des oxides d’antimoine & d’étain, formés par la déformation du nitre. L’alcafi que l’eau difFout, retient toujou s une portion d’o° xide métallique. On a recommandé I’ufage de l’étain comme vermifuge. On l’a employé en grandes dofes &* fans fuccès à Edimbourg. Quelques gens de la campagne font dans Fufage de laiiTer infiifer à froid pendant vingt-quatre heures du vin fucré dans un vaifieau d’étain , & de donner un verre de cette liqueur à leurs enfans qui ont des vers. Navier a vu une fille de quinze à feize ans rendre ainfi , par les felles, trente vers ftrongles, avec des déjeébons abondantes^ quelques heu- res après avoir pris un pareil breuvage. Ce Miédicament agit donc comme purgatif violent. d’H i s t. Nat., et de Chimie. *7} trrrT^..r,.a^r : CHAPITRE XVII. Du Plomb. ]Le plomb eft un métal imparfait, d’un blanc fombre qui tire un peu fur le bleu. Les alchi- mifles lui ont donné le nom de Saturne , parce qu’il abforbe 8c dévore , pour ainfi dire tous les métaux imparfaits dans fa fcorilication 9 comme on le verra par la fuite. 11 ell le moins ductile a le moins élaftique & le moins fonore de tous les métaux. On peut le réduire en la- mes minces fous le marteau ; il ne s’écrouit que peu. Aucune matière métallique n’a moins de ténacité que lui, un fil de plomb d’un dixième de pouce/ de diamètre , ne fondent qu’un poids de vingt-neuf livres un quart fans fe rompre. II eft la troisième des fubftances métalliques dans l’ordre de la pefanteur. Un pied cube de plomb pèfe 8 2 S livres ; il perd dans l’eau entre un onzième & un douzième de fon poids ; il eft très-mou, 8c on le coupe très-facilement avec le couteau ; il a une odeur particulière très- marquée 8c qui devient bien plus fenfble par le frottement , fa faveur ell peu énergique fur le palais, mais elle le manifefte dans- l’eftomac '174 E l é m e N s & les inteftins , en irritant leurs nerfs & en pro- duifant d’abord des douleurs , des convulfions, enfuite la ftupeur & la paralyfie. Il eft fufcep- tible de prendre une forme régulière. M. l’aobc Mongèz l’a obtenu en pyramides quadrangu- laires couchées fur le côté , de façon que des quatre faces il y en a toujours une très-étendue Si dont la bafe va en s’élargiffant. Chaque pyramide eft compofée , pour ainfi dire , de couches ou zones d’autres petites pyramides, ou plutôt de petits oétaëdres. Le plomb fe trouve rarement natif. Wallé- ritis 8c Linneus l’admettent dans cet état. Son exiltence efl niée par MM. Cronlîcdt, Jufti, Monnet, &c. Le plus ordinairement il eil dans l’état d’oxide, de fel neutre, ou dansceluide mine unie au foufre & formant la galène . Les mi- nières de plomb font communément à d’afîez grandes profondeurs dans la terre ; elles font fltuées dans les montagnes ou dans les plaines. Les naturaliftes ont dillingué un grand nombre d’efpèces de mines de plomb. Les plus eflen- lielles à connoître font les fuivantes. i°. L’oxide de plomb natif. Il ne faut pas confondre avec cette mine les plombs fpathi - ques , qui contiennent de l’acide carbonique. L’oxide ne fait pas effefvefcence avec l’acide nitrique. Il eft ordinairement ou en malles blan- tfH i s t. N a t. e t d e C h t m i e. 17J elles, grifes, pefagtés , folides , on mêlé avec de l’argile , du fable oc de la craie • la couleur de l’argile plus ou moins ferrugineufe conflitue le majjicot & le minium natifs , ou les oxides jaune & rouge. On rencontre fouyent la cérufe du plomb native à la iurface des galènes. 2°. Le carbonate de plomb , ou la combi- naifoti d’oxide de plomb & d’acide carbonique. Cette mine varie beaucoup pour la couleur; elle efl blanche, noire, brune, jaune ou verte, fuivant l’état du fer qui l’altère. On la nomme en général plomb fpathique , parce qu’elle a le tifTu & la criftallifation de certains fpaths. Elle fait effervefcence avec l’acide nitrique , qui en dégage l’acide carbonique. On diffingue les ta-i riétés fuivantes dans cette forte. V ariéiés. A. Le plomb fpathique blanc. C’efl du carbonate de plomb dépofé lentement par les eaux 8c criflallifé. Ce plomb a quelquefois une demi- tranfparence , comme le fpath. Ses criftaux font ordinairement en prifmes hexaèdres tronqués , ou en colonnes cylindriques flriées & qui paroiiïent compofées d’un grand nom- bre de filets , ou en petites aiguilles très- fines. On en trouve qui ell d’un blanc bril- lant comme le gyps foyeux. D’autres échan- 176 Elément Variété?. I tillons font d’un blanc jaunâtre. Quelques- uns de Tes prifmes fort fouvent fïftuleux. Le plomb blanc fpathique eff très-abondant en Baffe Bretagne dans les mines d’Huelgoet 8c de Poullaouen. M. Sage avoit annoncé que le plomb blanc étoit minéralifé par l’acide muriatique. M. Laborie a afflirc que ce n’étoit qu’un pur oxide de plomb uni à V air fixe. ou acide carbonique, & criffallifé par Peau. L’académie des fciences de Paris ayant fait répéter les expériences de ces deux chimif- tes, a adopté l’opinion de M. Laborie, 8c Macquer Pa conllgnée dans fou Diélionnaire, à l’article Mines de plomb. Le plomb fpa- thique fe trouve toujours dans les mêmes endroits que la galène , & il paroît que ce jn’eff qu’une décompofition de cette mine, qui a perdu fon foufre 8c dont le plomb a été oxidé ; car il n’eft pas rare de trouver des galènes qui commencent à paffer à l’état de plomb blanc , comme M. Romé de Lille l’a très-bien obfervé. JS. Quelques naturaliffes ont admis une mine de plomb noire ; c’eff du plomb blanc altéré par une vapeur fulfureufe, 8c qui repaffe à l’état métallique j il peut être regardé comme unç d’Hist. Nat. et de Chimie. Variétés. une efpèce moyenne entre le plomb blanc & la galène. Il elt criftallifé en prifmes droits hexaèdres réguliers. C. Le plomb fpathique vert. Ce minéral eft d’nn vert plus ou moins tranfparent , le plus fou vent jaunâtre , toujours mêlé d'ochre 8c de fer limoneux. Il eft quelquefois fans aucune forme régulière , 8c repréfente une efpèce de moufle. Tels font la plupart des échantillons des mines d’Hoffsgrund , près de Fribourg en Brifgaw. Le plomb vert eft or- dinairement criftallifé en prifmes droits hexaè- dres réguliers aflez fouvent terminés par des pyramides hexaèdres entières ou nailîantes. On" en trouve beaucoup à Sainte - Marte- aux - Mines , à Tfchoppau en Saxe. II eft démontré que c’eft au mélange du fer que ce plomb doit fa couleur verte , puifqu’il fe rencontre toujours dans des mines de ca métal. D. Plomb fpathique rougeâtre, de la couleur de la fleur de pêcher. M. Mongès a trouvé cette variété criftallifée comme le plomb fpathique blanc dans les mines d’Huelgoet. F. Plomb fpathique jaune. Cette variété, crif- tallifée en lames hexaèdres tranfparentes , Tome III \ 1 M I78 Ê L É M E N S n’elt connue que depuis quelques années les lames ont depuis une demi-ligne jufqu’à quatre à cinq lignes de diamètre ; elles relïem- blent à du verre de plomb. 30. M. Monnet a découvert dans les mines du plomb combiné avec l’acide fulfurique. Il elt ordinairement en malfe blanche, foluble dans dix-huit parties d’eau ; quelquefois il eft noirâtre , criltallifé en Ihies fort alongces', ou en flalaélites friables ; cette dernière variété s’effietirit à l’air & fe change en un véritable fulfate de plomb. C’elt en raifon de cette ef- florefcence que M. Monnet l’appelle mine de plomb pyriteufe . M. Withering dit qu’il exilte dans Tille d’Anglefey une grande quantité de plomb & de fer minéralifés enfemble par l’a- cide fulfurique. q.0, Le plomb paroît être combiné avec l’a- cide arfenique dans la mine de plomb rouge de Sibérie, dont M. Lehman a le premier donné la defcription en 17 66 ; cette mine elt d’un très-beau rouge , & fa pouffière relfemble au carmin. Elle elt fouvent criltallifée en prifmes obliques rhomboïdaux. M. Mongez, qui penfe que l’arfenic elt à l’état d’acide dans toutes les mines rouges , a découvert une autre mine d’un jaune verdâtre , venant de Sibérie & w* e^Hîst, Nat» et de Chimie; 17^ contenant de l’arfenic comme la précédente* S0* M. Gahn a reconnu l’exiftence de l’acide phofphorique dans une mine de plomb ver- riâtre 5 il y en a auiïi de jaune & de rougeâtre, 8c en la diïFolvant dans l’acide nitrique , 8c pre% cipitant l’oxide de plomb par l’acide fulfurique, on obtient l’acide phofphorique par l’évapora- tion de la liqueur furnageante. MM. la Méthe- rie & Tenant ont confirmé à Paris l’analyfe de Gahn. M. de Lautnont a donné un Mémoire fur le phofphate de plomb natif, qui efl très- abondant en Bretagne. 6°. Le plomb fe trouve le plus fouvent com- biné avec le foufre, cette mine porte le nom de galène ; on l’appelle auiïi alquifoux dans le commerce ; ce îulfure de plomb efl compofé en général de lames qui ont à peu près la couleur 8< Pafpeél du plomb , mais il efl plus brillant 8c très- fragile. On a dillingué un grand nom- bre de variétés dans la galène : favoir -, V ariétés. A. La galène cubique. Ses cubes plus ou moins gros , fe trouvent ifolés ou grouppés. On en trouve auflî en oâaëdres réguliers, Il y en a une variété , nommée cube octaèdre par M» î abbé Haiiy ; fa furface efl compofée de 6 quarrés & de 8 triangles équilatéraux. Quei- iyi ij J8o . -r . É ü É M E N S Variétés. ques minéralogiftes l’ont definie un cube tron- qué dans fies angles. B. La galène maftive. C’efi celle qui efi en maiïe fans aucune configuration régulière ; cette efpèce efl très-fréquente à Sainte-Marie. C. La galène à grandes facettes. Elle ne paroît pas former des criflaux réguliers, mais elle efi toute compofée de grandes lames. T). La galène à petites facettes. Cette galène paroît formée , comme le mica , de petites écailles blanches & fort brillantes. On la nomme mine d’argent blanche, parce qu’elle tient une aflez grande quantité de ce métal. Telle efi celle des mines fe fait en coulant l’étain fondu dans une cavité hémifphérique , creufce fur une pierre de Ton- nerre , 8c terminée par une rigole. Les phéno- mènes que l’étain préfente en fe refroidi flan t , la couleur ,1a rondeur, la déprelhon de fa par- tie moyenne , le cri que fait entendre la queue de l’eflai pliée à diverfes reprifes , font autant de Agnes que faiflt l’ouvrier intelligent , 8c qui par l’habitude d’une longue obfervation , lui font connoîue afc exact e-tnent le titre du mé-ç £< 02 É E I M E H S tal qu’il examine. Quoi qu’il en foit , cet eflai employé par les maîtres de Paris , ne paroît pas être auffi exaét que celui qui efl pratique par les maîtres de Province , & rejeté avec dé- dain par les premiers. Ce fécond eflai efl ap- pelé à la balle, ou à la médaille * parce qu’il confilte à couler l’étain à eflayer , dans un moule qui lui donne la forme d’ime balle ou d’une malle applatie & femblable à une médaille. Ou compare enfuite la pefanteur de cet échantil- lon moulé à un pareil volume d’étain fin coulé dans le même moule. Plus l’étain qu’on exa- mine a de poids au-delîus de celui de l’étalon, plus il efl: allié de plomb. MM. Bayen & Char- lard donnent avec raifon la préférence à ce der- nier eflai, dont les principes font plus furs & beaucoup moins fujets à erreur , que ne le font les circonfiances qui établifïent le jugement de l’ouvrier dans l’eflai à la pierre. Le plomb a un très-grand nombre d’ufages. Il entre dans beaucoup d’alliages ; on en fait des tuyaux pour tranfporter l’eau. Ses oxides font employés dans la verrerie, & pour la pré- paration des émaux. On s’en fert pour imiter la couleur des pierres précieufes jaunes, & pour donner de la fufibilité aux couvertes des pote- ries. On fait avec ce métal des uflerifiles & des vaiiïeaux propres aux ufages économiques î>5Hi$t. Nat. et be Chimie, aô? mais il n’efl pas fans danger pour la fanté. On croit que les fontaines de plomb dans lefquelles on 1 aille féjourner l’eau , lui communiquent fou- vent une qualité nuifible. 5a vapeur efl dange- reufe pour les ouvriers qui le fondent , & fa pouiTière a encore plus de danger pour ceux qui le liment ou qui le grattent. Ce métal , cantonné dans quelques coins de l’eflomac & des inteflins , produit des coliques vives, fou- vent accompagnées de vomiffement d’une bile très-verte. 8c caractérifées par l’applatilTement du ventre & l’enfoncement du nombril. On a obfervé qu’aiors les émétiques 8c les purgatifs antimoniaux ont beaucoup de fuccès. Na vie r confeille les différens fulfures alcalins pour les empoifonnemens occafionnés par les prépara- tions de plomb , comme pour ceux qui font produits par l’arfenic 8c le muriate mercurioi corrofif. C’ell fur-tout dans la paralyfie & les tremblemens qui relient ordinairement aux ma- lades après la colique des peintres , que ce médecin vante les bons effets du fulfure alcalin 8c des eaux fulfureufes. On doit donc , d’après ces faits, renoncer à employer des préparations de plomb à l’intérieur , 8c ne s’en fervir que comme d’un médicament externe; encore faut- il ne l’adminiflrer à l’extérieur qu’avec toutes les précautions convenables dans l’emploi d’un répercufjïf violent. Ê L é M E N 5 'a 04 CHAPITRE XVIII. / D 1/ Fer . LE fer, appelé par les alchimifles , efî un métal imparfait d’une couleur blanche , li- vide & tirant fur le gris , difpofé en petites facettes. Il efl fufceptible de prendre un très- fceaupoli, & de devenir très-brillant. Sa dureté & fon clafiicité font telles , qu’il efl capable de détruire l’agrégation de tous les autres mé- taux. Le fer a de l’odeur , fur-tout lorfqu’on le frotte ou qu’on le chauffe. Il a aufïi une faveur fliptique très-marquée, qui agit fortement fur l’économie animale. Le fer efl , après l’étain , la plus légère des fubftances métalliques ; un pied cube de ce métal forgé pèfé cinq cent quatre-vingts livres. II s’étend fous le marteau ; mais comme il efl fort dur & comme il s’écrouit beaucoup , on ne peut pas en faire des feuilles laminées ; fa duélilité à la filière efl beaucoup plus marquée; on le tire en fils très-fins , dont on fait des eordes de clavecins, Cette propriété paroît dé- tfHisT. Nat» et de Chimie. 20$ pendre de fa ténacité ; le fer eff en effet le plus tenace de tous les métaux après l’or ; un fil de fer d’un dixième de pouce de diamètre , fou- tient un poids de quatre cent cinquante livras fans fe rompre. Le fer pur a une forme criffalline qui lui eff particulière. On a trouvé dans des fourneaux où ce métal s’étoit refroidi lentement , des pyra- mides quadrangulaires, articulées & branchues formées d’odaëdres implantés les uns fur les autres. C’eff à M. Grignon, maître de forges a Bayard en Champagne, qu’on doit cette obfer- vation. Enfin , outre toutes les propriétés que le fer partage avec les autres fubffances métal- liques , ce métal en préfente encore trois qui lui font tout- à fait particulières: l’une eft le ma- gnétifme ou la propriété d’être attirable à l’ai- mant , & de pouvoir devenir lui-même un très- bon aimant , foit lorfqu’il relie long-tems dans une pofition élevée , ou dans une diredion du fud au nord , foit lorfqu’il a fervi de conduc- teur au feu éledrîque du tonnerre , comme pîu- fieurs faits l'attellent, foit lorfqu’on frotte for- tement deux morceaux de fer l’un contre l’au- tre. La fécondé propriété , c’efl de s’enflammer & de fe fondre fubitement par le choc des cailloux , phénomène auquel les poètes attrî- (l>ueOii de concert la découverte du feu par les 206” E L i U E N È premiers hommes. La troisième propriété qui le diftingue , c’eh de fe trouver avec le manganèfe dans les plantes & dans les animaux , dont il colore une partie des humeurs. Il eh même vraifemblable que ces êtres organiques forment eux-mêmes ce métal ; car les plantes élevées dans l’eau pure contiennent du fer, qu’on peut retirer de leurs cendres. Le fer efl un métal très-abondant dans la nature , puifqu’indépendamment de celui que contiennent les plantes 8c les animaux , il fe trouve dans prefque toutes les pierres colorées, dans les bitumes 8c dans la plupart des mines métalliques. Mais il ne fera quehion ici que des matières minérales qui contiennent beaucoup de ce métal , 8c qu’on peut exploiter pour en tirer le fer. Dans ces mines , qui font en très- grand nombre , le fer efl , ou à l’état métalli- que, ou à l’état d’oxide , ou rninéralifé par dif- férentes fubflances. i°. Le fer natif fe reconnoît à fa couleur 8c. à fa malléabilité. Il eh fort rare , 8c ne fe trouve qu’accidentellement dans les mines de fer. Mar- graf en a trouvé en filons à Eibenhock en Saxe le doéteur Pallas en a découvert en Sibérie uae made de idoo livres, 8c M. Adanfon allure qu’il eh commun au Sénégal. Plufieurs miner ralogihes penfent que ces fers natifs font ’D'HisTo Nat. de Chimie. ^07 produits de Fart , 8c qiFiîs ont été enfouis dans îa terre par quelques circonftances. 20. Les mines de fer noir confédérées en général paroiflent appartenir toutes à un oxide' de fer noir plus ou moins pur. Le fer noir efl reconnoiffable par fa couleur* par la propriété qu’il a d’être plus ou moins atti- rable à l’aimant , & de n’être aucunement diffo- luble dans les acides. Ce fer efl quelquefois crif- tallifé en forme de polyèdres ou en lames arron- dies , & préfente différentes nuances de couleurs irifées très-brillantes, tel efl celui de Tille d’Elbe. Ce fer forme une montagne confidérable, qu’on exploite à ciel ouvert. La mine de Suède eft suffi du fer noir , mais il n’efl pas criflallifé ; il efl en maffes plus ou moins folides , mêlé à du quartz, du fpath, de Paibefle , &c. Il eft fouvent affez dur pour prendre le poli , & fa furface paroît comme miroitée. Audi lui a-t-on donné , ainfi qu’au précédent , le nom de fer fpéculaire ; on le trouve réuni en carrières confédérales. Ce fer varie pour le ton de far couleur ; il y en a de parfaitement noir qui eft très-attirable à l’aimant , de bleuâtre qui Pefl moins , 8c de gris qui l’efl fort peu. Le fer de Norwège efl auffi du fer noir ; mais il efl ordi- nairement en petites écailles comme le mica, ipuyent mêlé de grenat & de fchorl. Le fer ^0 S Ë L ë M E ÏT 3 noir prend quelquefois la forme de grains. Ii efl auffi criflallifé en cubes ; ce qui l’a fait nom- mer par quelques naturalises galène de fer ou eifen- glants , Lorfque la mine de fer micacée elt de couleur noire, on l’appelle eifen- mann , fur-tout fi les écailles font fort grandes ; quand ces écailles font rouges , & quand la pou (ficre qui la recouvre a la même couleur, elle porte le nom d ' eifen-ratn. La mine de fer en crif- taux oétaëdres noirs , trcs-réguliers .& difperlés dans une efpèce de fchifie ou de fiéatite dure, qui nous vient de Suède , de Corfe , &c. paroît appartenir à cette clafie de mines de fer. Elle efl attirable à l’aimant & très-cafîante. Le fer lamelleux & brillant de Framont , appartient encore à cette efpèce. Quoique les diverfes fortes de mines de fer, noires que j’ai réunies dans cet article, fem- blent avoir une analogie, marquée entr’elles, plufieurs minéralogifles les ont regardées comme fort différentes les unes des autres , & les ont langées diverfement. Cette variété d’opinions vient de ce qu’on n’a point encore de connoif- fances exaétes fur leur nature. Il paroît quea parmi ces mines , il en eft qui font plus ou moins voifines de l’état métallique , comme le fer oélaedre de Corfe , de Suède, que M. Mon- tés compare à de l’éthiops martial. Celui-là eft fort d*H î s t. Nat. Et EE Chimie, ûop Mt attirable ; d’autres au contraire fe rappro* client plus de l’état d’oxide , comme le fer de Me d’;Elbé , & fur-tout Xeifen-mann & Veifen- iam , qui n’obéiffent point à l’aimant. Les mines de Me d’Elbe fembîent n’être que des oxides de fer noirs provenant du carbonate dé fer réduit par le feu. M. Vauquçlin les a très- bien imitées par ce procédé. A ces détails fuc les fers hoirs je joindrai ici quelques faits ob- servés par M. l’abbé Haüy de l’académie des fcîencés. Il diflinguë deux formes primitives dans ces fers, qui fuivanï lui annoncent deux fubftances ferrugineufes de nature différente. L une efl 1 oélaëdre régulier qui appartient au fer de Corfe. Les criflaux de ce dernier font for- tement attirables par le barreau aimanté. Lu mine de fer lpéculaire du mont d’or en fegmens d’offaëdre efl une variété de cette forte. L’autre forme efi celle du cube , c’efl à celle-ci que fe rapporte particulièrement la mine de fer de Me d'Elbe dont il y a deux variétés principales , lavoir : i°. le fer en rhomboïdes très-obtus ; 2°. le fer à 6 pentagones Sc h iS triangles. Ces vaiictcs n attirent que foiblemenc le barreau aimanté; en ies limant, JVL Haiiy en a obtenu une poultiere rougeâtre onélueufe, femblable a celle du fer micacé rouge , ou dë Ÿeifen-ram des Allemands* .Tome lllx q 210 E L Ê M F, N S 3°. Le fer eft très-fouvent dans l’état dg touille, plus ou moins oxidée. Il forme alors les mines de fer ochracées Toutes les terres colorées en brun , en rouge , font de cette efpèce. 4°. Il ne faut pas confondre avec les ochres les mines de fer que l’on appelle limoneufes • ces mines contiennent à la vérité le fer oxidé , mais cet oxide y eft combiné avec l’acide carbo- nique & avec l’acide phofphorique , qui paroît provenir de la décompofition des végétaux. On diftingue les fers limoneux en fer riche & en fer pauvre , fer fufible & fer fec. Le fer riche n’eft qu’un fer peu rouillé 8c qui ne contient qu’une fort petite quantité de terre. Le fer fufible eft celui qui fe fond aifément 8c donne une fonte de bonne qualité; le métal n’y eft uni qu’à plu- fieurs pierres faciles à fondre. Le fer fec eft plus oxidé 8c mêlé avec des fubftances très-réfrac- taires. Tout le fer limoneux eft ordinairement difpofé par couches , à la manière des pierres , & il a été manifeftement dépofé par les eaux. Il eft fouvent formé en efpèces de galets ou de corps fphériques , applatis 8c irréguliers. Il n’eft pas rare d’y trouver des matières organiques, tels que du bois, des feuilles, des écorces, des coquilles, à l’état de mines de fer limoneufes* Cette efpèce de conyërfion ou de palfage fem** fc’HîST. Nat, et ce Chîmîe. ztï ble annoncer une forte d’analogie entre ce métal & les corps organiques. Une portion du phof- phate de fer contenu dans ces mines les plus abondantes de toutes , donne à ce métal la propriété d’être caffant à froid. Bergman qui connoiffoit cet état du fer fans en avoir déter- miné la nature , avoit appelé fidérite, ce phof» phate de fer ; quelques chimifles allemands i’avoient nommé depui s fer d'eau. Nous expo, ferons plus bas les moyens de féparer ce fel du fer caffant à froid. S • La pierre d’aigle ou actite efî une variété du fer limoneux. Ce font des corps de diffé- rentes formes, communément ovoïdes ou po- lygones , formes de couches concentriques, dépofés autour d un noyau , qui fouvent efî mobile au centre de la pierre. Le defféche- ment & la retraite de ces couches y a formé une cavité moyenne , dans laquelle flottent li- brement quelques fragmens plus ou moins con- fidérables. Cette pierre a reçu le nom qu’elle porte, parce qu’on a cru que les aigles en dë- pofent dans leurs nids , & qu’elle a la propriété de faciliter leur ponte. On en a conclu que cette pierre agiffoit fortement fur le fétus ren- ferme dans le fem de fa mère ; quelques auteurs ont même affûté qu’il étoit poffible d’accélérer le travail d’une femme en couche, en attachant O ij &I2 E t Ï'm E N S une pierre d’aigle à fa jambe, ou de le retarde* en l’attachant au bras. 6°. V hématite eft une forte de fer limoneux qui paroît formé à la manière des flaladites. Son nom lui vient de fa couleur , qui eft ordi- nairement rouge ou de couleur de fang , quoi- que cependant cette couleur varie. L’hématite eft ordinairement compofée de couches qui fe recouvrent les unes les autres , & qui font elles- mêmes formées d'aiguilles convergentes. L’ex- térieur de cette mine offre beaucoup de tuber- cules , ou de mammelons. On diflingue les hématites, non-feulement par la couleur, mais encore par la forme. Telles font l’hématite en aiguilles , qui fe trouve en Lorraine ; l’hématite mammelonnée , celle qui eft en grappes de raifins ou hématite botrite, &c. Ces mines fe rencontrent allez fouvent avec le fer limoneux, & elles font dépofées fur beaucoup de corps différens. 7°. L’ aimant n’efl qu’une mine de fer ochra-' cée , très-dure , très-réfradaire , que quelques perfonnes regardent cependant comme allez voifine de l’état métallique. On le reconnoît à fa propriété d’attirer la limaille d’acier. Il fe trouve, en Auvergne , en Efpagne , dans la Bifcaye, &c. On en diftingue les variétés par U couleur. WHisT. Nat. ET de Chimie. 21$ 8°. Uéméril , fmyrïs , eft une mine de fer grife ou rougeâtre , que plufieurs minéralogi'ftes regardent comme une forte d’hématite. Il eft très-dur & très- réfractaire ; il fe trouve abon- damment dans les ides de Jerley 8<. Guernefey. On le réduit en poudre dans des moulins , & on fe fert de cette poudre pour polir le verre & les métaux. ’KîST.NaT. t? Ofi CïïtMîEI 543^ îorfqu’tl'e en efl chargée , elle pareil troublée par une quantité plus ou moin» coufidv-able d 'oekre. On fépare cet oxfde de fer par la tiltra- tion ; 6c en lai ‘Tant refroidir la diflblution,oii ob- tient des enflaux rhombcï.iaüx, d’un vert pâle 6c tranfparent. La liqueur qui fumage étant foumife à l’évaporation, donne par le refroidif- fement une nouvelle quantité de ciiflaux ; & lorfqu’on a retiré tout ce qu’elle peut fournir par la crillallifation , il refie une eau mère dua vert noirâtre ou d’un jaune brun qui ne peut plus criflallifer. En l’évaporant à une chaleur forte, 6c en la laiiïant refroidir, elle forme une mafle molle, onâueufe, qui attire forte- ment l’humidité de l’air. Cette mafle entière-» ment deflechée , donne une poudre d’un jaune verdâtre. Suivant M. Monnet , l’eau mère du- fulfate de fer contient ce métal dans l’état d’un oxide parfait. Ce chimifle s’en efl convaincu en faifant immédiatement , 6c à l’aide de la chaleur, une diffolution de vrai oxide de fer dans cet acide -, cette diflolution efl brune 6c ne peut point criflallifer. L’oxide de fer peut être féparé de l’eau mère, 'non*feulement par la terre de l’alun * mais encore par le cuivre 6c par la limaille de fer, ce qui n’arrive pas au fulfate de fer par- fait. Une diflblutioii bien chargée de ce fel £4l Élément parfait expofée à Pair , Te change au bout de quelque tems en eau mère femblable aux pré- cédentes , en attirant Poxigène de Patmofphère. Le fulfate de fer peut ctre décompofé par la chaux & les alcalis. L’eau de chaux verfée dans une diffolution de ce fel , y forme un précipité en flocons d’un vert d’olive foncé ; une por- tion de ce précipité Te rediflout dans Peau de chaux , & lui communique une couleur rougeâ- tre. J’ai donné à l’académie en 1777 Sc 17783 deux Mémoires Pur les précipités de fer, ob- tenus par les alcalis caufliques ou non caufli- ques , dans lefquels j’ai décrit avec foin les phé- nomènes de ces précipitations, & l’état du fer dans ces différentes circonflances. Je vais en préfenter les principaux réfultats relatifs au ful- fate de fer. L’alcali fixe cauflique précipite la dif- folution fulfurique de fer en flocons d’un vert foncé , qui fe rediflolvent à mefure dans l’al- cali, Si forment une efpèce de teinture mar- tiale d’un très-beau rouge. Lorfqu’on met moins de cet alcali, on peut recueillir le précipité a & l’obtenir en éthiops noirâtre ou oxide de fer noir , fi on le fait deflecher rapidement & dans les vaifleaux clos. Sans ces deux précautions, le fer s’oxide très-vîte, parce qu’il efl divifé & humide. La potaffe Pâturée d’acide carbonique , pu le carbonate de potaffe , forme un précipité b’HisT. Nat. «f de ChimïSs. '$4t a’un blanc verdâtre qui ne Te diffout pas dans l’alcali ; cette différence ett due à la préfence de l’acide carbonique qui fe repose fur le fer à mefure que cet acide eft féparé de l’alcali par l’acide fulfurique. L’ammoniaque pure ou cauf- tique fépare du fulfate de fer diffous dans 1 eau nn précipité vert fi foncé quii paroit noir., Sc qui ne fe rediflout point dans le fel précipitant» on peut , en le féchant fubitement fans le coiw tad de l’air, l’obtenir noir & attirable à l’aimant* Le précipité formé par l’ammoniaque concrète ou par le carbonate ammoniacal , eff d’un gris verdâtre ; il fe rediffout en partie dans ce fel3» & il lui communique une couleur rouge ; c£ qui efl femblable à ce qui fe paffe dans ces pré- cipitations par l’alcali fixe , puifque ce dernier fel cauflique ne diffout que peu le fer précipité* tandis que le carbonate de potaffe bien faturé le diffout très-facilement. Les matières aflringentes végétales, comm# la noix de galle, le fumac , l’écorce de grenade, le brou de noix , le quinquina, les noix de cy- près, le bois de campêche , le thé, &c. ont la propriété de précipiter le fulfate de fer en noir. Ce précipité que l’on ne petit méconnoître pour du fer , eff fi extrêmement divifé , qu’il refle fufpendu dans la liqueur. Lorfqu’on ajouta de la gomme arabique à ce mélange , la fufperw fi «i 04-tf É l 1 m i n s fion du fer précipité efl permanente, & il en réfulte une liqueur noire, qu’on connoît fous le nom encre. On ne fait point encore au jufle ce qui le pâlie dans cette expérience. Manquer 9 3V1. Monret , & la plupart des chimifles regar- dent le précipité de l’encre comme uni à un principe de la ru ix de galle, qui le dégage de l’acide. Ils paroiTent portés à croire que ce principe efl dans l’état huileux. M. Gioanetti, médecin de Turin, a fait plufieurs expériences fur le fer précipité de fes diTolhtions par les aflringens. 11 réfulte de fes recherches confît gnées dans fon annlyfe des eaux de Saint-Vin- cent , que ce précipité n’efl point attirable à l’aimant ; qu’il le devient , lorfqu’on le chauffe dans un vaiffeau bien clos; qu’il fe di (Tout dans les acHes , mais fans effervefcence ; que ces dilfolmions ne noircirent plus par la noix de gaMe ; ce qui indique que le fer efl uni au prin- cipe aflringent, & qu’il efl dans l’état d’une forte de fel neutre. On trouve dans le troifième vo- lume des Élémens de Chimie de l’académie de Dijon , une fuite d’expériences fur le principe aflringent végétal, qui femblent afîimiler cette iubflar.ee aux acides. En effet, fui vaut ces chi- ïmfles,i! rougit les couleurs bleues végétales; il s’unit aux alcalis ; il dccompofe les fulfures al- calins ou terreux ; il dhlout & paroît neutralifer / fr’KiST. Nat. ET de Chimie. 247 les métaux; il décompofe toutes les diflblutions métalliques avec des phénomènes particuliers; il s’élève à la diflillaiion fans perdre Ton aétion fur les métaux , 8c il préfente un grand nombre d’autres propriétés , fur lefquelles 1 ordre que nous fuivons ne nous permet pas dinfîfter. Cet apperçu des académiciens de Dijon â été confirmé par les recherches de Schéele. Ce célèbre chimifte a découvert qu’une fimple in- fufion de la noix de galle dans 1 eau , en fépare un acide particulier criftallifable, qui enlève le fer à beaucoup d’autres acides & le colore en noir, parce qu’il le rapproche de l’état métal- lique. Nous nommons ce fel acide gallique * nous en ferons l’hiftoire dans le règne végétal. Un phénomène encore plus difficile a con- noitre que l’ aétion de la noix de galle fur le fulfate de fer, c’eft la décompolition de ce fel par un alcali calciné avec du fang de bœuf. On obtient alors un précipité d’une belle couleur bleue , indiffioluble dans les acides. Ce précipité fe nomme bleu de Prujfe ou de Berlin , parce qu’il a été découvert dans cette ville. Stahl rapporte qu’un chimifte , nommé Diefbach , ayant emprunté de Dippel de l’alcali fixe pour précipiter une diflblution de cochenille mêlée avec un peu d’alun 8c de fulfate de fer , ce dernier lui donna un alcali fur lequel il avoit <7 iy '24$ É L é M E N S diflillé Ton huile animale. Ce Tel précipita eh' bleu la diiïblution de Diefbach. Dippel cher- cha à quoi étoit dû ce précipité , & prépara par un procédé moins compliqué , le bleu de Prude qui fut annoncé en 1710 dans les mé- langes de l’académie de Berlin, mais fans aucun détail fur cette opération* Les chimifles tra- 'Vaillèrent à l’envi pour y réuiïir , & y parvinrent. Ce ne fut qu’en 1724, que Woodward publia dans les Tranfaétions Philofophiques , un pro- cédé pour préparer cette fubdance colorante. Pour faite le bleu de Prude, on mêle quatre onces de nitre fixé par le tartre , avec autant de fang de bœuf defieché ; on calcine ce mé- lange dans un creufet , jufqu’à ce qu’il foit en charbon , & ne produire plus de flamme ; on le lave avec la quantité d’eau fuffifante pour difloudre toute la matière faline, qu’on nomme alcali phlogifiiqué ou LeJJive colorante ; on con- centre cette lellive par l’évaporation. On fait difloudre enfuite deux onces de fulfate de fer & quatre onces de fulfate d’alumine dans une pinte d’eau ; on mêle la difiblmion de ces feb «tvec la leflive d’alcali ; il fe fait un dépôt ver- dâtre que l’on fépare par le filtre, & fur lequel ©n ver fie de l’acide muriatique. Le dépôt de- vient alors d’un bleu plus beau 6c plus foncé; .on le fait fécher à une chaleur douce ou à l'air. b’HisT. Nat. et de' Chimie. 20 Depuis Woodward, beaucoup de chimifles fe font occupés, & de la préparation & de la théorie du bleu de Pruffe. Quant à fa prépara- tion , on fait aujourd’hui qu’un grand nombre de fubflances font capables de communiquer à l’alcali la propriété de précipiter le fer. en bleu. Geoffroy , dans les Mémoires de l’académie de 172^ , dit avoir donné cette propriété à l’alcali avec tous les charbons de matières ani- males. M. Baumé allure qu’on peut aulfi pré- parer Y alcali phlogiftiqué avec les charbons des fubflances végétales à l’aide d’une chaleur plus vive. Spielman en a fait avec des bitumes ; Brandt avec de la fuie. Les manufactures de bleu de Pruffe fe font multipliées, & chacune d’elles emploie, à ce qu’il paroît, des matières différentes pour cette préparation. M. Baunach nous a appris qu’en Allemagne, on fe fert des ongles, des cornes 8c de la peau de bœuf. Tou- tes les matières animales ne paroiffent cepen- dant pas propres à faire la leffi ve pruffienne. J’ai effayé en vain d’en préparer avec la bile de bœuf, par un procédé femblable à celui qu’on exécute avec le fang. Je n’ai obtenu qu’un al- cali qui précipitoit le vitriol en blanc verdâtre, 8c ce précipité s’efl diffous en entier dans l’a- cide muriatique. 2f° E L é M E N S Les chimifles ont beaucoup varié fur la thc-o* rie du bleu de Prufle. Brown & Geoffroy le regardoient comme la partie phlogïftiqué du fer, développée par la leffive du fang, & tranfportée fur la terre de l’alun. L’abbé Menon penfoit que c’étoit le fer très-pur & débarraffé de toute fubftance étrangère par l’alcali phlogïftiqué. Mac- quer , dans un Mémoire qui a jullement mérité le nom de chef-d’œuvre de la part de tous les chimifles, & qui eft inféré dans le volume de l'académie pour l’année 175*2 , a réfuté les opi- nions de ces auteurs. Il penfe que le bleu de Prude n’efl: que du fer combiné avec un excès du principe inflammable, qui lui efl fourni par l’alcali phlogïftiqué , & que ce dernier a pris du fang cle bœuf. Il obferve , i°. que le bleu de Prufle expofé au feu , perd fa couleur & rede- vient fer Ample ; 2°. que ce bleu n’efl; en aucune manière dilloluble par les acides, même les plus forts ; f. que les alcalis peuvent dif- foudre la matière colorante du bleu de Prufle, & s’en charger jtifqu’au point de faturation. Il fuffit pour cela de faire chauffer une leflive al- caline fur du bleu, de Prufle , jufqu’à ce que l’alcali refufe de le décolorer. Cet alcali faturé de la matière colorante du bleu de Prufle, a perdu la plupart de fes propriétés. Il n’efl plus cauflique ; il ne fliit pas effervefcence avec le4 b’Hist. Nat. et T >t Chimie. acides; parmi les Tels terreux il ne décompofe que les barytiqites ; il précipite tous les Tels métalliques , & il paroît que cette décompofi- tinn fe fait en vertu d’une double affinité , celle de l’acide fur l’alcali , & celle de l’oxide 'mé- tallique fur la partie colorante unie à ce Tel. L’alcali peut décolorer ainfi le vingtième de Ton poids de bleu de P ru (Te ; alors il e£l fat viré de partie colorante. Les acides en dégagent une petiie quantité de fécule bleue ; & ii précipite fur-ie-champ le fulfate de fer en bleu de Prude parfait. A l’égard de l’alcali préparé par la voie or- dinaire , Macquer obferve qu’il n’eft pas à beau- coup près , entièrement faturé de partie colo- rante, &_que c’efi pour cela qu’il précipite d’abord en vert la diffolution de fulfate de fer. En effet, la poition d’alcali qui efl faturée, pré- cipite du bleu ; mais la portion qui ne l’eft pas précipite du fer à l’état d’ochre , qui verdit le précipité bleu par le mélange de cette dernière couleur avec le jaune. Suivant cette ingénieufe théorie, l’acide qu’on verfe fur le précipité, fert à dÜToudre la portion qui n’eil pas dans l’état de bleu de Prude, & à rendre la couleur de ce dernier plus vive. L’alun qu’on ajoute à la difïbluti'on du fulfate de fer , fature l’alcali qui n’ell point chargé de matière colorante 9 Ê L ï MENS & la terre de ce fel dépofée avec le bleu de PrufTe , en éclaircit la nuance. Comme il eft néceftaire de verfer l’acide fur le précipité du fulfate de fer, afin d’aviver le bleu de Prude, on peut ajouter cet acide à l’alcali avant de s’en fervir pour précipiter le fer ; parce que l’acide , en Pâturant la portion d’alcali pur , ne s’unit point à celle qui eft chargée de partie colo- rante, & qui peut fur-le-champ former de beau bleu de Prufte. On peut aufti faturer cet alcali pklogifliqué par le fang de bœuf, en le faifant digérer fur du bleu de Prufte, jufqu’à ce qu’il celle de le décolorer. Macquer avoit donné cet alcali faturé d’acide , comme une bonne liqueur d’épreuve, pour connoître la préfence du fer dans les eaux minérales ; mais M. Baumé a obfervé que cette liqueur contenoit elle-même une certaine quantité de bleu de Prufte ; ce qui pouvoit induire en erreur. Il propofe en con- féquence de la mettre quelque tems en digeftiotï avec un peu de vinaigre à une chaleur douce, pour qu’elle dépofe tout ce qu’elle contient de matière bleue. Tel étoit le beau travail de Mac- quer fur le bleu de Prufte ; mais ce célèbre chimifte fentoit bien lui-même ce qu’il y man- quoit , fur-tout relativement à la nature de la fubftance colorante. Il ne pouvoit pas être per* ftiadé quç cette dernière fût du phlogiftiquç d’Hist. Nat. et de Chimie. sjfj! pur, puifqu’on- ne concevroit pas, dans cettô hypothèfe , comment du fer, furçhargé de cer principe , perdroit tout-à-la-fois la propriété d’être attirable à l’aimant 8c celle d’être dilTo- luble dans les acides , qui font dues , fuivant Stahl , à la préfence du phlogiftiqué dans ce métal. M. Ivlorveau eft le premier qui , dans fon excellente Differtation fur le phlogiftiqué x a cherché à connoître la nature de la partie colorante du bleu de Pruffe. Il a retiré de la diftillation de deux gros de ce compofé, vingt-f deux grains d’une liqueur jaune empyreuma- tique , qui faifoit effervefcençe avec les carbo- nates alcalins , rougi doit fortement le papier bleu, & dont Geoffroy & Macquer , qui ont aufli diflillé le bleu de Pruffe , n’avoient fait aucune mention. M. Sage a envoyé en 1772 , à l’académie éleêforale de Mayence ,un Mémoire fur Y alcali phlogiftiqué , qu’il appelle fel animal. La leffive de l’alcali fixe traité avec le fang 8c faturé par Ta digeftkm fur le bleu de Pruffe, à la manière de Macquer , eft, fuivant M. Sage , un fel neu- tre formé par l’acide animal 8c l’alcali fixe. Elle donne, par l’évaporation infenfible, des çriflaux cubiques, odaëdres, ou en prifmes à quatre faces, terminés par des pyramides auiïi là quatre faces. Çc fel décrépite fur les char^ 25*4 E I é M E N s bons ; il fe fond à un feu violent en une mafia demi tranfparente , foluble dans l’eau , & pro- pre à faire du bleu de Prude. M. Sage croit que l’acide qui neutraüfe i’aîcali dans ce fel rentre, ell l’acide pholphorique , parce qu’en chauffant fortement le mélange d'alcali & de fang de bœuf, il fe fond, exhale une vapeur âcre , accompagnée d’étincelles blanches & bril- lantes, qui ne font, fuivant lui, que du phof- phore qui brûle. Cette opinion fur l’acide de l’alcali prulfien feroit démontrée. fi d’un côté, en le diflillant avec du charbon , on obtenoit du phofphore, ce qui auroit audi lieu pour le bleu de Prude ; & fi , d’une autre part , on formoit du bleu de Prude , en combinant le phofphate dp potaflè ou de fonde , avec une didolution de fer. Comme M. Sage n’a point configné d’expériences de cette nature dans fou Mémoire, on ne peut admettre fa théorie. MM. les chimifies de l’académie de Dijon ont adopté une partie de cette dernière doc- trine dans leurs Elémens. Ils regardent la leffive phlogifiiquée comme la didolution d’un fel neu- tre ; ils confeillent de la faire criflallifer par l’évaporation , au lieu de la purifier par le vinai- gre , comme l’avoit propofé M. Baumé. Ce fel eft très'pur, fuivant eux; projette fur le nitre en fufion, il le fait détoner. Ils ne nous ont # ■d’Hist. Nat. et de Chtmie. .*ién dit fur fes décompofitions & fur la nature de fes principes ; ils l’appellent alcali pruïïien ccriflallifé. Bucquet, ayant précipité par l’acide muria- ttique , & filtré une leffive préparée pour le fbleu de PrufTe , a obfervé que cet alcali, quoi- que très-clair 8c privé en apparence de tout le ibleu.de PruHe qu’il paroifïoit contenir, laiffioic ccependant dépofer une poudre bleue. Après ll’avoïr filtrée plus de vingt fois dans l’efpace cde deux ans , pour en féparer la portion de tbleu qui s’en précipitoit après chaque filtration, iil s’efl enfin trouvé que cette liqueur ne pou- rvoit plus fournir de bleu de Pruffe avec la d3i Ablution de fulfate de fer. J’ai confervé pen- cdant plus de huit ans une petite portion de ccette leffive préparée ; elle n’a rien Iaiffié pré- cipiter les deux dernières années , mais elle a édépofé un léger enduit bleuâtre fur les parois ddu flacon où elle étoit contenue , & elle a confervé une couleur pareille. J’ai eu occafion cd’obferver deux fois ce phénomène, depuis que jje 1 ai entendu annoncer par Bucquet dans ifes cours, 8c je crois qu’il efl confiant. M. fde Chaulnes a fait voir à Macqner une leffive colorante , qui ne donnoit point de bleu de ÎPrufTe , lorfqu’on la meloit auparavant avec, un ï acide. Ce chinülje penfe que cela eft dû à ce É l £ m i n 4 que cette lefTive a été préparée dans des vaif* féaux de métal. Bucquet croyoit, d’après l’ob- fervation rapportée plus haut , i*. que le bleu de PrufTe eft tout contenu dans l’alcali qui fert à le précipiter; 2°. que les acides fuffifent feuls pour le féparer de l’alcali *, 30. que lorfque cet alcali a dépofé au bout d’un tems plus ou moins long, toute la partie colorante qu’il contient, il n’efl plus propre à donner du bleu de Prude, Le Journal dePhyfique du mois d’avril 1778, offre des obfervations fur le bleu de Pruffe , par M. Baunach , apothicaire à Metz, qui favo- rifent beaucoup l’opinion de Bucquet. Après avoir décrit le procédé que l’on emploie dans les manufaétures d’Allemagne , pour préparer le bleu de Pruire , M. Baunach alïure que la leffive faite dans ces manufaélures par la hifion de l’alcali & du charbon d’ongles , de cornes & de peau de bœuf, précipite tous les métaux, & même la terre calcaire en bleu. Cet alcali diffout-les métaux , après les avoir précipités,' & on peut les en féparer , fous une très-belle couleur bleue par l’acide muriatique. Les faits fmguliers annoncés dans ce Mémoire, tels que la diflillation du bleu de Pruffe produit par cette îefîive, qui ne donne point d’huile ni d’ammo- niaque, la diffolubilité du précipité bleu formé par l’acidç muriatique yerfé fur cette Iefîive dans iyffhsT. Nat. et ht CftiMtE. flans 1 acide nitrique , la terre calcaire retrouvée èn diffolmion dans ce dernier acide qui a dé- coloré le bleu , une terre particulière & phlo- gifliquèe qu’il ffa pas pu diffoudre, fié fembleat- ils pas annoncer que ce bleu n’efl pas de là même nature que celui que l’on précipite de la leffive phlogiftiqtiée ordinaire ? dans laquelle Macquer a trouvé du ter qui ne peut provenir que du Tang ? Depuis ces diffère ns travaux fur le bleu de Pruffe, Schéele a fait de nouvelles recherches qui, réunies à quelques obfervations dont je n’ai point encore parlé, jettent un plus grand jour fur la nature de ce produit* ic. Le bleu de Pruffe du commerce diflille à feu nud , donne une très-grande quantité de gaz hydrogène , en même tems que de l’huile* du carbonate ammoniacal , & un peu de flegme acide. Ce gaz brûle en ffeu comme celui des marais * il a une odeur empyreumatique ; l’eau de chaux lui donne la propriété de brûler en rouge & de détoner avec l’air , parce qu’elle âbforbe une partie d’acide carbonique qui Ufl efl uni. Laffone a regardé le gaz du bleu de Pruffe comme un gaz inflammable particu- lier. Le bleu de Pruffe , apres cette analvfè , efl fous la forme d’une poudre noirâtre & atti- rais I e à 1 aimant» Avant de prendre cette corn Tome Jll, 25*$ fi. t' 8 M S N t leur , il en a une orangée , que M. Morveâta a obfervée. Ce dernier chimifle a même penfé que le bleu de Prulïe que la chaleur a fait palier à l’orangé , pourroit être utile dans 1a peinture. 2°. L’ammoniaque chauffée fur du bleu de Prufie, le décompofe en s’emparant de fa ma- tière colorante , & il hiÜe le fer dans l’état d’oxide brun. Macquer avoit annoncé ce fait en 1772. Meyer qui l’a fuivi , a donné le nom de liqueur teignante à cet alcali volatil faturé de la partie colorante du bleu , & i! l’a confeillé dans l’analyfe des eaux minérales. J’ai obfervé que lorfqu’on dillille l’ammoniaque cauflique fur du bleu de Prufle , la liqueur qui paffe n’a point la propriété de colorer en bleu les diflolutions de fer ; d’où il fuit que le principe colorant r’eh pas aufh volatil que l’efl fammoniaque* Lorfq u’on n’a extrait qu’une portion de ce fel par la diflillation , le réfidu eh d’un vert d’olive; en l’étendant d’eau dillillée & le filtrant , cette liqueur eh chargée de la partie colorante , 8c donne un bleu de PrulTe très-vif avec le fulfatei de fer. 50, J’ai découvert en 1780 que l’eau de chaux mife en digeflion fur le bleu de Prude, diflout la matière colorante à l’aide d’un peu de cha- leur. La combinaison eh très-rapide ; l’eau dç d^Hîst. Nat. st dè CfitMîÉ. diaux fe colore , le bleu de Prude prend la couleur de la rouille. L’eau de chaux filtrée efl d’une belle couleur jaune claire ; elle ne verdit plus le firop de violettes ; elle n’a plus de faveur alcaline , elle n’efl plus précipitée par l’acide carbonique ; elle ne s’unit point aux autres acides ; en un mot , elle efl neutralifée par la matière colorante pruflienne , & elle donne en la verfant fur une diffolution de fulfate de fer, un bleu fuperbe qui n’a pas befoin d’être avivé par un acide. Schéele a parlé de cette eau de chaux pruflienne, fans connoître mon travail fur cet objet, quoique j’en eufle inféré le réfultat dans mes Elémens de Chimie , im- primés en 1781. Il a regardé, ainfi que moi, cette combinaifon comme la meilleure de tou* tes celles qu’on a propofées pour reconnoître la préfence du fer , parce qu’elle ne contient point, ou au moins que très-peu de bleu de Prufle tout formé. f. Les alcalis fixes caufliques décolorent à froid 8c fur -le -champ le bleu de Prufle. J’ai obfervé qu’il fe produit une chaleur allez vive dans ces expériences; que les alcalis dans leur état de pureté décolorent une beaucoup plus giande quantité de bleu de Prufle, que ceux qui font fatures d acide çarbonïque, & qu’ils doo*» R ij £6° Élément nent avec les difïblmions de fer beaucôup plus de bleu que ces derniers. 6°. La magnéfie m’a également prcfenté la propriété de décolorer le bleu de Prude, mais beaucoup plus foiblement que l’eau de chaux. 70. Le bleu de Prude jette en poudre fur du nitre en fufion , produit quelques étincelles qui dénotent qu’il contient une matière com- bullible. 8°. Le bleu de Prude préparé fans alun, de- vient très-attirable à l’aimant par une légère calcination ; mais celui du commerce n’acquiert jamais cette propriété par l’adion du feu. p° . Le bleu de Prude décoloré par les ma- tières alcalines, & dans l’état d’oxide de fer, reprend une partie de fa couleur bleue, lorf- qu’on y verfe un acide. Il paroît que cela dé- pend de ce que toute la partie colorante n’ed pas enlevée par la première adion des alcalis, & qu’une portion ed défendue par l’oxide de fer qui l’enveloppe. Tous ces faits indiquent que la partie colo- rante du bleu de Prude agit comme un acide particulier qui fature les alcalis & en forme des fels neutres. Ç’ed l’opinion de beaucoup de chi milles -, & en particulier de Schéele dont il me rede à faire connoître les recherches fut cette matière. Ce célèbre chimide a fait voir to’HisT. Nat. et de Cîîtmte. 26t. par Tes expériences, i°. que la Ieiïive du fan g, eu l’alcali phlogifliqué , ed décompofée par l’acide carbonique de l’atmofphère , & que tous les autres acides en féparent la partie colorante; 2°. que cette partie colorante eft fixée & rete- nue dans la leüive par une petite quantité de fer ou de fulfate de fer pur; 30. que lorfqu’on la dégage par les acides au moyen de la diilil- lation , elle remplit les ballons d’une vapeur qui précipite en bleu les djfiblutions de fer ; q°- que le bleu de Prude entier diflillé, ainft que la lefiive du fang , donnent avec la ma- tière colorante des produits étrangers qui l’al- tèrent, comme du foufre , & qu’on ne peut point avoir cette matière pure par ce procédé ; J°. que les alcalis pruffiens difiillés avec l’acide iuîfu rique , précipitent beaucoup de bleu de Prude, & donnent une liqueur chargée de la partie colorante ; la portion de bleu précipité dans cette opération , dépend du fer didous dans ces Tels triples ou compofés d’alcalis, de partie colorante & de fer ; 6°. que l’oxide de mercure ou le précipité rouge enlève la matière colorante au bleu de Prude ou prufiiate de fer, par l’ébullition dans le double de leur poids d’eau , & qu’en didillant cette leffive pruf* Tienne mercurielle avec du fer & de l’acide ful- furique , le fer réduit le mercure , après que • Pv iij Ê L 1 M E N $ l’acide en a dégagé la partie colorante ; celle-cï difïoute dans l’eau du récipient à mefure qu’elle fe dégage 9 retient une portion d’acide fulfu- ïique ; pour l’en féparer, Schéele mêle un peu de craie avec cette liqueur , & difïille à un feu doux; alors la partie colorante pafle très-pure; & comme elle Te dégage dans l’état de fluide élaftique, ainfl que l’a reconnu M. Monge, on peut la recevoir 8c la difloudre dans l’eau à l’aide des tubes 8c de l’appareil qui ont déjà été décrits plufleurs fois. Après ces recherches fur les affinités de la matière colorante pruffienne , fur fon adhérence avec les alcalis , 8c fur la manière de l’obtenir parfaitement pure , Schéele s’occupe dans un fécond Mémoire de la nature de cette fubilance & de fes combinaifons avec les alcalis 8c les oxides métalliques. Quoique fes expériences foient multipliées 8c très-exaéles , Schéele ne prouve point dans ce fécond Mémoire , que la matière colorante pruffienne foit un acide par- ticulier ; il cherche au contraire à y démontrer la prcfence d’un gaz inflammable , de l’ammo- niaque , & d’un principe charbonneux ; cepen- dant il lui reconnoît la propriété de troubler le favon & de précipiter les hépars ou fulfures alcalins j 8c il l’appelle acide colorant dans une lettre à M. Crell. Nous donnons à cette fubf- Nat. et de Chimie. 26% tance le nom d’acide pruffique , & à fes com* binaifons falines, celui de pruffiates de potalfe * de fonde, d’ammoniaque , &C. Dans une note du traducteur de Schéele , on annonce que cet acide eft décompofé par celui du nître ; on donne un procédé de M. WellrumS, pour avoir le pruf- îiate de potaffe très-pur. Il confiüe à (attirer la potaffe caullique de partie colorante, à la faire digérer fur du blanc de plomb , pour lui enlever le^vz^ hépatique qu’elle peut contenir, à la mê- ler avec du vinaigre diilillé , à l’expofer au fo* leil, comme l’avoient confeillé M. Scopoli 8c îe père Bercia , pour en précipiter tout le fer, & à y ajourer deux parties d’alcohol reètifîé. Alors le prulHate de potaffe fe dépofe en floc- cons lamelleux & briîlans ; on le lave dans de nouvel efprit-de-vin ; on le fait fécher 8c on le diffout dans l’eau diflillée. M. Crell dit que Schéele lui a envoyé, trois mois après M. Wef- trumb, un procédé analogue, pour obtenir une liqueur d’épreuve fur la pureté de laquelle on pût compter pour reconnoître la préfence du fer. M. Berthollet a travaillé fur l’acide pruffique ou la matière colorante du bleu de Prude, de- puis tous ces chimiftes. Quoique fes recherches n’ayent point encore entièrement fatisfait ce lavant phyficien, elles contiennent cependant R iy fcfrf é L ë M E N S des faits adez neufs'. & des expériences afleà importantes 3 pour que nous croyions devoir donner ici l’extrait de fou Mémoire 3 qu’il a bien Voulu nous communiquer. M, Berthollet dillingue d’abord deux efpèces de p ru (Hâte de fer ; l’un qui ed le bleu de Prude ordinaire. Si l’autre qui ed le même bleu de Prude privé d’une portion de l’acide prudique. Il appelle celui-ci prujjlale de fer avec excès d'oxide. Le bleu de Prulfe ed dans ce dernier état apres avoir cté décoloré par un alçali. Pour féparer cet excès d’oxide, il fe fert de l’acide muriatique , qui le diflout Si laide le pruffiate de fer neutre ; il obferve avec M. Landriani , que lor.fqu’on fait digérer à chaud l’alcali fur le bleu de Prude , le pruffiate alcalin qui fe forme didout plus d’oxide de ce métal , que Iprfqu’on le fait digérer à froid. Ces çhimides penfent l’un Si l’autre qu’un acide ajouté à cette çombinaifon triple, s’unit à l’excès d’oxide de fer , Si fait dépofer du blçu de Prude, comme îprfqn’on met du pruffiate de potade pur avec Xtne didblution de fer. Us difent encore que la chaleur fait précipiter de cettç çombinaifon un pruffiate de fer jaune , c’ell-à-dire , avec excès, * d’oxide de fer. Suivant eux , l’acide qu’on ajoute s’empare de l’excès d’oxidç de fçr , Sc laide précipiter le bleu de Prulfe alors moins, difib- d'H ist. Nat. et de Chimie. 26$ lubie dans le pruffiate alcalin. Lorfque le pruf- fiate de potafle préparé par une douce chaleur a dépofé le pruljate de fer avec excès d’oxide de ce métal par l’ébullition , il peut êtie évaporé à ficcité , redilTotis dans l’eau Sc mêle avec les acides , fans qu’il dépofe de bleu oe iiulTL. M. Berthollet dit qu’on obtient par lévapoia- tion de la diffolution du prufliate de potaffe ainfi purifié , des criflaux oétaedres , dont deux pyramides font tronquées de manière à îepié- fenter des lames quarrées dont les bords font taillés en bifeau. Ce chimifle ayant mêlé une diffolution de ces criflaux avec de l’acide fulfurique , 8c expofé le tout dans un flacon aux rayons du foleil, il a vu que peu de tems après il s’efl développé une couleur bleue qui a formé un piécipité s jufqu’à fon entière déçompofiijon. Un pareil mélange confervé dans un endroit obfcur, n elt point devenu bleu 8c n’a point fait de précipité., même au bout de plufieurs mois y une chaleur forte produit abfolument le même effet. D après ces expériences , M. Berthollet fait voir fur combien peu de connoiffances exaétes étoient fondés les procédés recommandés pour puai fier les pruffates alcalins ; puifque , dit-il , on ne faifoit qu’en décompofer la plus grande partie, au lieu de les priver d’une portion de bleu de 266 Ê L ê M E N É PrufTe , que les chimiftes prétendoîent n’y être mêlée qu’accidentellement. Comme le prufïiate de potaffe eft un Tel triple , l’acide pruflîqUe n’a qu’une très-petite adhérence avec la potafTe, il en eh féparé par tous' les antres acides. A mefure que l’acide étranger s’unit à la potaffe, une partie de l’acide pruftique s’unit à l’oxide de fer, forme le bleu de PrufTe, & l’autre efl volatilifée en état d’acide ou réduite en Tes principes. Le fer qu’on précipite par les prufliates alca- lins, retient , fuivant M. Berthollet , une portion affez confidérable de ces Tels -, on peut l’en priver par des lavages réitérés ; ces leiïives con- tiennent les alcalis combinés avec une petite por- tion d’acide pruffîque , &les prufliates avec excès d’alcalis ne s’en détachent que lorfque l’excès d’acide de la difiolution de fer eh enlevé par les premiers lavages; puifque les derniers lava- ges précipitent le fer en bleu de fes diflolu- îions , au lieu que les premiers ne le font point. Il n’a pas trouvé de différence fenlible entre les prufliates de potalfe & de fonde, fi ce n’efl que ce dernier cl iflalli fe différemment : les acides minéraux en dégagent l’acide pruflique en partie fixé dans le bleu de PrufTe qui fe précipite; c’eft ce qui engagea Schéele à imaginer une autre combinaifon d’où il pût retirer plus faci- d’Hist. Nat. et de- Chimie. zSf îement cet acide pur , & fur laquelle M. Ber- thollet fait quelques oblervations. Ce procédé confide, comme nous l’avons déjà dit, à faire bouillir de l’oxide rouge de mercure avec du bleu de PrufTe 8c de l’eau diflilîée ; l’acide pruf- fique quitte l’oxide de fer pour s’unir à l’oxide de mercure avec lequel il a plus d’attraction , & forme un fel foîable qui cridallife en prifmes tétraèdres terminés par des pyramides quadran- gulaires , dont les plans répondent aux arêtes du prifme. On ajoute à la leffive filtrée du fer 8c de l’acide fulfurique concentré ; le fer s’unit à l’oxigène du mercure , & fe combine avec l’acide fulfurique; le mercure fe précipite avec fon brillant métallique. Schéele diüilloit enfuite ce mélange à une douce chaleur, afin de ne volatilifer que l’acide pruffique ; mais il vit , quelque petite que fût la chaleur qu’il employa , qu’il pa (Toit toujours mêlé d’un peu d’acide fulfu- rique. Pour obvier à cette difficulté , il ajouta au mélange une certaine quantité de craie pour fixer l’acide fulfurique. Sur cette addition, M. Berthollet fait obferver que , comme Schéele n’avoit pas fpécifié la dofe de cette fubfhmce, il étoit fort facile de manquer l’opération , pour peu que la craie furpafsât le point où l’acide fulfurique eft faturé ; car il fe forme du pruffiate calcaire, qui alors décompofe le fulfatc de fer par la loi des doubles affinités. £68 Ê L Û M E N S M. Berthollet a vu que l’acide fulfuriqne né dégageoit qu’une petite quantité d’acide du prudiate de mercure; qu’il s’uni (Toit à la plus grande partie de ce Tel fans le décompofer, & formoit un Tel triple criflallifant en petites aiguilles. D’après Tes expériences , l’acide mu- riatique dégage plus d’acide du prudiate de mercure que le précédent , & il forme égale- ment un Tel triple fufceptible de cridaîlifer en aiguilles , 8c beaucoup plus foluble que le mu* riate mercuriel corrodf. Les alcalis 8c la chaux précipitent en blanc ce fel triple. M. Berthollet prouve que les prudiates alcalins ne pré- cipitent point la baryte de fes didolutions, comme l’avoit penle Bergman, mais qu’ils for- ment des Tels triples ; il fait voir qu’ils préci- pitent l’alumine. Le précipité qu’ils forment avec cette fubdance , n’ed point altéré par l’a- cide fulfuriqne ; mais digéré avec le fulfate de fer , il forme du bleu de Prude. L’acide prudique décomp ofe l’acide muria- tique oxigéné , en abforbe l’oxigène 8c devient odorant. Dans cet état il ne paroît pas avoir line grande tendance avec les fubllances alca- lines; car à peine diminuent-elles fon odeur. Il ne précipite plus le fer en bleu, mais en vert ; ce précipité vert elt didoluble dans les acides. Il redevient bleu par le conta# des WHist. Nat. «t ï>e Cflitaïg. atfÿ l'ayons du foleil , aînfi que par l’addition de l’acide fulfuretix & du fer. Les mêmes phéno- mènes arrivent , lorfqu’on mêle enfemble de l’acide muriatique oxigéné , du fulfate de fer & du pruffiate de potalîe. M. Berthollet penfe9 d’après cela , que le bleu de Pruiïe n’efl: pas altérable par la lumière & par l’acide fuifureux, & que c’elt à l’abforption de l’oxigène qu’il doit fa couleur verte , fa diffolubilité dans les acides, &c. Si l’on furcharge l’acide prufTique d’acide muriatique oxigéné , & fi on l’expofe enfuite aux rayons lumineux , il prend des caraélères nouveaux; il ne fe combine plus avec l’oxide de fer , ni avec l’eau , au fond de laquelle il fe précipite fous la forme d’huile 8c avec une odeur aromatique. Si dans cet état on ajoute encore de l’oxigène 8< qu’on le laifTe au foleil, il fe crillallife en petites aiguilles blanches. Cet acide ainfi oxigéné fe réduit en vapeurs à une douce température ; ces vapeurs ne fe dilïol vent point dans l’eau , 8c cependant ne font point com-i buftibles. M. Berthollet n’a pas encore pu dé** terminer ce qui fe palfe dans cette opération. L’acide pruflique s’unit-il frmplement à l’oxigène fans altération , ou quelqu’un de fes principes çfl-il brûlé ? Nous adoptons plus volontiers avec lui cette dernière idée ; car quoique l’oxigène 27$ E L è K K N i ne paroifie que peu adhérent à l’acide prufîique , on ne peut plus le rétablir lorfqu’il a été traité ainfi avec l’acide muriatique oxigéné. Lorfque l’acide pruffique a été mis en état de former un précipité vert avec le fer, par le moyen de l’acide muriatique oxigéné , il s’y forme de l’ammoniaque fitôt qu’on y mêle un alcali ou de la chaux. Un acide verfé dans ce dernier mélange, ne rétablit plus l’odeur pro- pre à l’açide pruffique ; M, Berthollet en con- clut qu’il efl détruit. Quoiqu’on ait employé la potafïe parfaitement pure , un acide verfé après fon aâion produit une eflervefcence , & dégage de l’acide carbonique qui a été formé de toutes pièces. M. Berthollet conclut de toutes ces expé- riences, que l’azote, l’hydrogène 8c le carbone unis dans des proportions & une condenfation qu’il ne connoît pas , forment ce qu’on appelle Y acide pruffique. Cette compofition éclaircit l’hifi toire de fa formation dans les matières anima- les , dans certaines fubllances végétales & dans le muriate ammoniacal fouillé de charbons. Elle explique encore pourquoi cet acide eh fi comH buflible , détonne fi fortement avec les divers nitrates , pourquoi il donne du carbonate d’am- moniaque par la difiillation, 8c pourquoi ce fel s’y forme par l’addition de l’acide muriatique tfHrST. Nat. et de Cïtimië. 271 oxigéné. M. Berthollet doute que cette fingu- îière combinaifon contienne de l’oxigène ; au moins , dit- il , fi l’acide pruffique en contient, 1 n’en a pas allez pour que le charbon foit en- tièrement réduit en acide carbonique ; car la difiillation du bleu de Prude fournit beaucoup de gaz hydrogène carboné. Tels font les faits découverts par M. Ber-' thollet; en déterminant la nature de la matière colorante du bleu de Prude, il a prouvé qu’elle n’étoit point un véritable acide , quoiqu’elle eu fit les fondions dans toutes fes combinaifons; M. Vedrumb & M. Haflenfratz ont trouvé un peu d’acide phofphorique dans le bleu de Prude. Ce dernier chimifle a fait voir qu’il 11’efl pas efientielà fa nature. Nous avons découvert de- puis peu , M. Vauquelin & moi, qu’on obtient de l’acide pruffique de la difiillation du calcul de la veffie, 8c en traitant beaucoup de matières végétales 8c anima’es par l’acide nitrique. Le fulfate de fer décompofe très-facilement le nitre ; cette décompofition efi due en partie d > qui en s’unifiant à l’alcali du nitre , chade l’acide nitrique ; mais elle efl auffi occafionnée en grande partie par la réaétion du fer fur ce dernier acide. Si , pour décom- pofer le nitre , on prend du fulfate de fer peu ciefieché, on obtient une affez grande quantité 'èrja E L Ê M Ë N 5 d’acide nitreux bien rouge & bien fumant; I® réfidu leffivé fournit du fulfate de potafie, de l’alcali fixe, & il refie fur les filtres un oxide rouge de fer. Mais , fi on â employé un fulfate de fer fortement calciné & du nitre fondu , on retire très peu de produit. Ce produit efi formé de deux liqueurs , dont l’une , d’une couleur fombre & prefcjue noire , nage à la furface d’une autre qui efi rouge & pefante , comme le feroit une huile fur de l’eau. Audi M. Baume regarde-t-il cette liqueur comme une efpèce d’huile. Il pafie enfuite dans le col de la cornue & dans l’allonge , une mafie faline blanche, qui attire l’humidité de l’air , fe diflout avec chaleur & rapidité dans l’eau , en exhalant une forte odeur d’efprit de nitre & des vapeurs rou- ges très - épaiftes ; cette difiblution (attirée de potafie, donne du fulfate de potafie; la mafie blanche n’efi donc que de l’acide fulfurique rendu concret par une portion de gaz nitreux; La liqueur pefante du ballon ne paroît dif- férer en rien de l’efprit de nitre tiré par la méthode de Glauber ; mais la liqueur légère qui la fumage , étant mêlée avec l’acide fulfu- rique, produit une vive efiêrvefcence , & même line expiofion dangereufe ; prcfque tout l’acide nitreux fe diffipe & l’acide fulfurique prend une forme concrète & crifiaUine# Bucquet , qui a communiqué t>*HisT. Nat. et de Chimie. 2731 communiqué cette découverte à l’académie, avoit d’abord obfervé que ce dernier acide concret, obtenu dans cette ditîillation , exhale des vapeurs rouges nitreufes , Ibrfqu’oh le dif- fout dans l’eau. Il penfoit que cet acide devoir fa folidité à la préfence du gaz nitreux ; & pour s’en convaincre , il a effayé de mêler l’acide nitreux brun noirâtre , qui furnageoit le rouge avec de l’acide fulfurique très- concentré. Mais à l’inflant même du mélange de ces deux ma- tières , il s’eft fait un mouvement fi rapide , que 1’efprit de nitre verfé fur l’acide fulfurique, a été lancé avec bruit à une très-grande dift.ance j la perfonne qui faifoit le mélange , a été cou- verte de cet acide ; il s’eft élevé à l’inftant même fur fon vifage une grande quantité de boutons rouges & enflammés , qui ont fuppuré commé ceux de la petite vérole. L’acide fulfurique ell bientôt devenu concret & abfolument fembla- ble à celui qu’on obtient dans la diftillation- dont nous venons de faire i’hiftoîre. Il parole d’après ce fait , que cet acide peut devoir fou état concret au gaz nitreux, comme au gaz fui- fureux. Le réfldu de la diflillation. du nitre par le fulfate de fer calciné au rouge , n’eli qu’une forte de feorie de fer dont on ne peut tirée Tome lllt s 274 E l £ m ï n f que trcs- p eu de fulfate de potafîe par îe îs« vage. La diffolution de fulfate de fer n’eh pas al- térée par le gaz hydrogène ; mais quoique la bafe de ce fluide élaflique paroiffe avoir moins d’affinité avec l’oxigène que n’en a le fer , com- me on l’a vu dans l’hiftoire de la décompofition de l’eau , M. Monnet a obfervé que le gaz hydro- gène fulfuré donnoit à une eau mère fulfurique la propriété de fournir des ciiflaux ; & M. Priellley a réduit des oxides de fer brun par le c.ontad du gaz hydrogène. Ces expériences ne contra- rient point notre doétrine ; elles ne font au contraire que la confirmer. En effet , l’hydro- gène enlève toute la portion d’oxigène uni au fer, au delà de la quantité de 0,28. Cette der- nière dofe n’efl que celle que l’hydrogène ne peut pas féparer. V.oilà pourquoi dans ces ré- ductions on n’obtient qu’un oxide noir ou étkiops martial , & pourquoi l’eau n’oxide jamais le fer qu’en noir. Les fnlfures alcalins précipitent fous une cou- leur noirâtre le fulfate de fer.- Ce précipité efl une efpèce de pyrite martiale , ou fulfure de fer. L’acide nitrique eh rapidement décompofé par îe fer qui en dégage beaucoup de gaz ni- treux , fur-tout fi l’acide employé eh concentré. d’Hist. Nat. et de Chimie. 273? & fi le fer efl divifé. Ce métal ell prompte* ment oxidé par l’oxigéne qu’il enlève à l’acide du nitre : la didolution eft d’un rouge brun ; elle laide dépofer de l’oxide de fer au bout d’un certain tems , fur-tout par le conta# de l’air -, en y plongeant de nouveau fer , l’acide le didout comme l’a indiqué Stahl , & l’oxide de fer qu’il tenoit en didolution fe précipite fur- ie-champ. On peut cependant , en employant un acide nitrique foible & du fer en morceaux, obtenir une didolution plus permanente dans laquelle le métal eft plus adhérent à cet acide. Cette dernière combinaifon efl verdâtre & quelquefois d’un jaune clair ; l’une 8c l’autre de ces didolutions évaporées fe troublent 8c dépofent de l’ochre martiale d’un rouge brun. Si on la rapproche fortement, au lieu de four- nir des criüaux , elle fe prend en une gelée rougeâtre qui n’efl qu’en partie didoluble dans l’eau , 8c dont la plus grande portion s’y pré-* cipite. En continuant de chauffer le nitrate de fer, il s’en dégage beaucoup de vapeurs rou- ges , le magma fe defsèche 8c donne un oxide d’un rouge briqueté. Ce magma diflillé dans une cornue , fournit un peu d’acide nitreux fu- mant , beaucoup de gaz nitreux , 8c du gaz azote. On n’en peut point tirer d’air vital t parce que le fer retient tout l’oxigène de cei Sij 27<5 E t 'É M E N $ acide. L’oxide qui refle apres la diflillatiorr du nitrate de fer , efl d’un rouge vif & pourroit fournir une belle couleur à la peinture , & c. La diffolution nitrique de fér, quelque chargée qu’elle foit, ne m’a pas paru précipiter par l’eau diflillée. Les alcalis la décompofent avec des phénomènes différensq fuivant leur nature. La potaffe cauflique la précipite en brun clair ; le mélange paffe très-vite au brun noirâtre & beau- coup plus foncé que la couleur de la première diffolution. Ce phénomène eh du à ce qu’une portion du précipité efl dilïoute par l’alcali, quoique en très- petite quantité. Le carbonate de potaffe en fépare un oxide jaunâtre , qui devient très-vite d’un beau rouge orangé. Si on agite le mélange à mefure que l’effervef- çencealieu, le précipité fe rediffout beaucoup plus abondamment que celui qui efl produit par la potaffe cauflique. M. Monnet a bien noté çe phénomène , & il l’a attribué avec raifon au gaz qui fe dégage. Cette diffolution de fer par l’alcali fixe , porte le nom de teinture mar- tiale alcaline de Stahl. Elle efl d’un très- beau rouge. M. Baume recommande pour la préparer , de prendre une diffolution nitrique de fer qui ne foit que peu chargée. Stahl con- feilloit au contraire une diffolution très-faturée. M. Monnet a obfervé qu’une diffolution jaune d’Hist. Nat. et de Chimie. 277 donnoit beaucoup de précipité qui ne fe redif- fout prefque pas dans l’alcali , & qui ne le co- lore pas comme doit l’être la teinture martiale ; tandis qu’une diffolution bien rouge en fait une iur-Ie-champ avec le même alcali. La teinture martiale alcaline de Stahl fe décolore au bout d’un certain tetns , & lailTe dépofer l’oxide de fer qu’elle contient. On peut la décompofer a l’aide d’ un acide ; celui du nitre en fépare un oxide d’un rouge briqueté qui efl foluble dans les acides , & que l’on appelle fafran de mars apéritif de Stahl. L’ammoniaque pure ou caus- tique précipite la diffolution nitrique de fer en vert foncé & prefque noirâtre. Le carbonate ammoniacal redilTout le fer qu’il a féparé de l’acide , 8c prend une couleur d’un rouge en- core plus vif que la teinture de Stahl. Cette diffolution de fer par le carbonate ammonia- cal pourroit être d’un grand avantage dans les cas de pratique dans lefquels on a befoin d’un tonique puifîant joint à un fondant très- adif. La diffolution nitrique de fer chargée 8c rouge, ne m’a jamais donné que très-peu de vé- ritable bleu de Prufle , par l’alcali faturé de la matière colorante de ce compcfé ; je n’ai eu qu’un précipité noirâtre qui s’eff rediffbus par S ü) 278 Ê L é M E N ï l’acide muriatique ; la liqueur avoit alors un* couleur verte. M. Maret , fecrétaire de l’académie de Di- jon , a envoyé à la fociété royale de médecine un procédé pour faire très - vite de Véthiops martial ; il confifte à précipiter la dilïolutîon nitrique de fer par l’ammoniaque canftique, à laver & fécher rapidement ce précipité. M. d’Ar- cet , chargé par cette compagnie d’examiner le procédé de M. Maret , n’a pas obtenu conf- tamment le même réfultat que ce médecin. Dans mes Mémoies fur les précipités de fer, j’ai déterminé les cas où l’expérience de M. Maret ïéuiïit , & ceux où elle n’a pas de fuccès. Il faut pour obtenir cet éthiops, i°. que la diflfolution de fer (bit nouvelle , & qu’elle ait été faite à froid très-lentement , avec un acide nitrique foible, & du fer peu divifé ; 20, que l’ammo- niaque foit récemment préparée, très-caullique, & fur- tout privée par le repos , de la petite portion de terre calcaire & de matières com- buflibles noirâtres qu’elle a coutume d’enlever au fel ammoniac 8c à la chaux , li elle n’efl pas extraite dans l’appareil de Woulfe; 30. que le précipité foit féparé fur -le champ de la li- queur , 8c féché rapidement dans des vaiiïeaux fermés. Malgré toutes ces précautions , quel- quefois ce précipité n’efl pas très-noir , il a ttHist. Nat. et de Chimie. 279 ïilors une couleur brune légère; il s’enlève en écailles dont la furface inférieure ett noirâtre > ce qui prouve que c’efl le contact ne 1 air qui en rouille légèrement la furface fuperieuie. J ai obtenu un éthiops plus beau & plus confiant, en précipitant les difTolutions muriatique & acé- teufe du fer par les alcalis fixes & l’ammoniaque eau flique , & en faifant fécher rapidement dans des vaiffeaux fermés ces précipités bien lavés ; mais je penfe malgré cela, que ces éthiops , quelque purs qu’on les fuppofe , retiennent tou- jours une petite partie de leurs précipitans Sc de leurs premiers diflolvans , comme M. Bayen l’a obfervé fur les précipites de mercure ; & qu’on ne doit pas les employer en médecine avec autant de fureté que ceux dont j’ai parlé précédemment. M. d’Arcet , dans fan rap- port à la fociété de médecine , fur le procédé de M. Maret , en a communiqué un de M. Croharé pour faire X éthiops martial . Ce phar- macien , connu par plufieurs travaux chimiques bien faits , prépare ce médicament en faifant bouillir de l’eau aiguifée avec un peu d’acide nitrique fur de la limaille de fer. Ce métal eft fur-le-champ légèrement oxirlé,& donne beau- coup d’oxide noir ou d ''éthiops martial ; mais je crois qu’on doit préférer à tous ces procédés celui de M. JofTe , qui eft d’une exécution très- S iv 2$0 E L è M E N S facile & dont l’ufage ne peut infpirer aucune crainte. Comme on fe fert fouvent de fer pour ob- tenir le gaz nitreux , il efl important d’obferver ici que ce gaz n’eft jamais le même , & qu’il diffère beaucoup fuivant les différentes circonf- tances de la diffolution , la nature de l’acide plus ou moins chargé d’azote Sc d’oxigène, l’etat du fer plus ou moins avide d’oxigène , la diverfe température , &c. En général le gaz préparé par ce procédé contient toujours une quantité plus ou moins confidérable d’azote, parce que le fer elt un des corps qui ablorbe Je plus d’oxigène 8c qui en prend fur* tout des quantités différentes , fuivant fa nature Sc fon état métallique ; les effets du gaz nitreux dégagé par ce métal , font donc plus ou moins incer- tains dans des expériences eudiométriques. Cette vérité applicable à tous les corps. qui féparent Je gaz nitreux de l’acide du nitre , démontre le peu de confiance que l’on ((doit avoir dans les e fiais de l’air par les eudiomètres à gaz nitreux; auffi les épreuves par les fulfures alcalins font- elles beaucoup préférables. L’acide muriatique étendu d’eau , diffout le fer avec rapidité ; il fe dégage de cette diffolu- tion une grande quantité de gaz hydrogène pro- duit par la décompofidon de i eau, comme dans td’Hist. Nat. et dï Chimie. 2U la diflolütion de ce métal dans l’acide Sulfuri- que. On avoit cru autrefois que le gaz hydro gène produit par l’aftion du fer fur 1 acide nui riatique, étoit différent de cemi dont le dcga gement accompagne la diffolution lulfuiique. On peu Soit que ce fluid e élaflique étoit un des principes de l’acide muriatique ; mais depuis la découverte de la décompofition de 1 eau pai le fer j il efl prouvé que cet acide dont on ne connoît pas encore la nature , n’efl pas la caufe de la produdion du gaz hydrogéné , de que c’eft à l’eau qu’elle efl: due , puifque 1 acide refie entier de fans décompofition , de exige la même quantité d’alcali pour être faturé apiès la diffolution qu’avant. Cette diffolution du fer par l’acide muriatique , produit beaucoup de chaleur; elle continue avec la meme foice* jufqu’à ce que cet acide foit faturé ; une por- tion du fer fe précipite en véritable éthiops , comme dans toutes les autres diffolutions. Lorf- qu’on l’a filtrée, elle efl d’une couleur veite* tirant fur le jaune ; elle efl beaucoup plus fiable que les deux précédentes ; renfermée dans un flacon bien bouché , elle ne dépofe point d’o- xide de fer. J’en ai confervé pendant huit ans , qui n’a dépofé qu’une très-legcre pouffière d’un jaune pâle ; fi au contraire on la îaiffe à l’air , elle dépofe en quelques Semaines prefque tout É L é M E N S le fer qu’elle contient , & ce précipité efl d’une couleur d’autant plus claire que le contad de lair efl plus multiplié ; il efl démontré aujour- d’hui que cette précipitation qui a également lieu dans toutes les autres diflblutions de fer, efl due à l’oxigcne atmofphérique abforbé par le métal qui s’oxide de plus en plus, comme je l’avois foupçonné & annoncé en 1777. (Voyez mes Mémoires de Chimie. ) Stahl avoir annoncé que dans la combinaifon du fer avec l’acide muriatique ^ cet acide pre- noit les caraélères de celui du nitre ; mais ce fait n’a é:é obi ervc par aucun chimifie : il paroît que Stahl ne s’en étnit rapporté qu’à la couleur jaune de cette diflolution , Sc à l’odeur qu’elle répand ; odeur en effet un peu différente de celle de ficfprit de fel , & qui fe rapproche de celle de l’acide muriatique oxigéné. La diffolution de fer par l’acide muriatique évaporée , ne criflallife pas régulièrement. M. Monnet a obfervé que fi on la* lai fie refroidir Jorfqu’elle efl en coi ifi fiance fi ru peu fe , elle forme une efpècé de magma , dans lequel on entrevoit des crifiaux aiguillés & applatis qui font très-déliquefcens. Ce magma fe fond à un feu très doux ; en le chauffant davantage , il fe décompofe , mais moins facilement que le ni- trate de fer , & il prend une couleur de rouille d’Hist. Nat. et de Chimie. lorfqu’il eft fec. Il s’en dégage de l’acide mu- riatique , que l’on peut obtenir par la diflilla- tion , 8c qui , fuivant la remarque de Brandt , entraîne avec lui un peu d’oxide de leu M. d’Ayen , dans un des quatre excel- lens Mémoires qu’il a donnés a l’académie lut les combinaifons des acides avec les métaux., a examiné en détail ce qui Te paHTe dans cette décompohtion du mu date de 1er à la cornue. Cette opération lui a fourni des produits très- fînguliers ; d’abord un phlegme légèrement aci- dulé à une chaleur douce; l’acide muriatique s’ed donc concentré , 8< Ton gaz beaucoup plus volatil que l’eau , a été en partie fixé par le 1er. A une chaleur beaucoup plus forte , une partie de cet acide a été enlevée avec un peu de fer, 8c il s’eft formé quelques criflaux non déli- quefcens dans le ballon. Il s’elt fublime en même-tems à la voûte de la cornue des cri f— taux très-tranfparens & en forme de lames de rafoirs, qui décompofoient la lumière comme les meilleurs prîimes 5 8c offroient de fort belles nuances de rouge , de jaune , de vert 8c de bleu. Il reftoit au fond de la cornue un fel fliptique 8c déliquefcent , d’une couleurbrillante 8c d’une forme feuilletée , qui reffembloit parfaitement à l’efpèce de talc à grandes lames , qu’on ap- pelle improprement verre de Mofcoyie. Ce ^4 t r J M E N s dernier Tel expofé à un feu violent, dans unô c Jrnue de grès , s’efl décompofé & a fourni une Sublimation encore plus étonnante par fa nature que les premiers produits. C’étoit une matière opaque, vraiment métallique , qui exa- minée au microfcope , préfentoit des criftaux réguliers ou des tranches de prifmes hexa- gones , que M. d’Ayen compare aux car- reaux donfon garnit le plancher des chambres. Ces crillaux étoient auffi brillans que l’acier du poli le plus vif, & l’aimant les attirait affez for- tement : c’étoit du fer en partie réduit & fubli- mé (i) L’art paraît ici imiter la nature qui fu- blime l’oxide noir de fer par le feu des volcans > fous la forme de lames brillantes & polies , com- me de l’acier. Telle paraît être au moins l’origine du fer fpéculaire du mont d’Or , & de celui de Volvic, qui d’après les obfervations bien faites (i) J’ai dans mon cabinet une mine de fer noir, qui offre de petites lames très-brillantes , d’une demi-ligne de largeur , dont la forme approche beaucoup des criflaux obtenus par M. d’Ayen. Ce font de petites écailles fort minces , d’un . gris de fer très-éclatant , pofées de champ , qui s’entrecroifent en toutes fortes de fens , & qui font difperfées dans un quartz opaque rougeâtre , ou dans une efpèce de jafpe groffier. Ce joli morceau vient de Lorraine. Le fer de Frajnont eft de la même nature. îd'Hist. Nat. et de Chimie. n8f de M. de l’Arbre , médecin de Riom , fe trouve toujours dans des fentes de laves. On voit par ces détails combien la chimie eft riche en phénomènes finguliers , & com- bien celte belle fcience promet de découvertes à ceux qui voudroient faire des expériences avec toute l’exaditude & tome l’étendue que M. d’Ayen a mifes dans fes recherches. N’oublions pas d’obferver que cette rédudion du fer favorife la dodrine des gaz, & qu’on en obtiendroit peut-être de femblables de beau- coup d’autres didblutions métalliques traitées par le même procédé. La diiïblution muriatique de fer efl décom- pofée par la chaux 8c par les alcalis , comme toutes les difTolutions martiales ; mais ces pré- cipités font moins altérés, 8c peuvent fe réduire très facilement, fur-tout ceux qui font produits par les alcalis caufliques. J’ai déjà fait obfer- ver que cette combinaifon fourni (Toit Véthiops ou l’oxide noir de fer le plus pur par la préci- < pitation. Les fulfures alcalins, le gaz hydro- gène fulfuré 8c les aftringens la décompofent comme les deux autres; enfin, les alcalis pruf- fiens ou les pruffiates alcalins , en précipitent un bleu très-beau. L’eau chargée d’acide carbonique diflouc facilement le fer ; il fuffit pour opérer cette 285 E L ï M I N ! combinaifon , de mettre de la limaille dans cet acide liquide , & de laiffer le mélange en di- gellion pendant quelques heures. Cette liqueur filtrée a une faveur piquante & un peu flipti- que. MM. Lane & Rouelle ont reconnu cette propriété dans l’acide carbonique. Bergman , qui nommoit cette combinaifon fer aéré , dit qu’expofée à l’air , elle fe couvre d’une pelli- cule irifée ; qu’elle eft décompcfable par les alcalis purs ; mais que ces Tels faturés de cet acide , n’y opèrent pas le même effet. Cette diflôlution verdit Je firop de violettes , 8c donne du bleu de Pruffe très-brillant avec le pruffiate calcaire ; elle précipite de l’oxide de fer brun , lorfqu’on la laiffe expofée à l’air, ou lorfqu’on la chauffe. Nous donnons à cette combinaifon le nom de carbonate de fer. Le fer a beaucoup de tendance pour s’unir à l’a- cide carbonique. La nature nous le préfente très fréquemment dans cet état; les mines de fer limoneufes , le fer fpathique , paroiffent être en grande partie formés par cette combi- naifon. Les eaux minérales ferrugineufes con- tiennent fouvent le fer dans l’état de carbonate de fer. Ce fel , féparé de l’eau 8c fec , efl peu foluble dans ce fluide ; mais il fe diffout en grande quantité dans l’acide carbonique liquide, dont il fe précipite à mefure que l’acide fe d*Hist. Nat. et de Cuimtè. 2^7 Voîatilife. On ne connoît point l’adion de l’a- cide boracique & de l’acide fluorique fur le fer. Ce métal décompofe très-bien les fels fulfu- riques, & en particulier les fulfates de potalfe & de fonde. J’ai traité ces fels par le fer dans un creiifet , 8c je les ai trouvés enfuite dans l’état de fui fur es; la lefTîve de cette efpèce de ' fui fu re e(î d’un verd extrêmement foncé. Quel- ques gouttes d’acide font difparoître très-promp- tement la couleur de cette efpèce de teinture métallique. La plus grande partie du fer oxide par l’oxigène de l’acide fulfurique , refie fans fe di (Foudre dans l’eau de la leifive, 8c les aci- des dégagent de cet oxide une grande quantité de gaz hydrogène fulfuré. Le fer fait détoner le nitre. En projettant dans un cretifet bien rouge un mélange de parties égales de limaille de fer 8c de nitre bien fec » ils excite au bout de quelque tems un 1 mouvement très-rapide; il s’élève 'du creufet beaucoup d’étincelles très-éclatantes. Lorfque la détonation efl finie, le creufet contient un oxide de fer rougeâtre , dont une petite por- tion efl combinée avec l’alcali ; en lavant cette matière l’eau dilFout l’alcali , 8< l’oxide de fec relie fur le filtre. On appeloit autrefois cet oxide fafran de mars de Zwelfer. II efl d’un jaune rougeâtre, peu dififoluble dans les acides, ÊlÏMENÎ L’alcali qu’on en a féparé par le lavage , eft cauflique, fuivant la plupart des chimifles , qui penfent que les oxides métalliques agïflent com- me la chaux pure fur ce Tel chargé d’acide carbonique ( i ). Le fer décompofe très-bien le muriate am- moniacal. Deux gros de limaille de fer, triturés avec un gros de ce fel, ne laiflent point dégager de gaz ammoniac. Bucquet , qui a di Aillé ce mélange à l’appareil pneumato - chimique au mercure , en a obtenu cinquante-quatre pouces cubes d’un fluide aériforme , dont moitié étoit du gaz ammoniac , & l’autre moitié du gaz hydrogène. Quatre onces de la même limaille & deux onces de muriate ammoniacal, diflillés à la cornue avec un récipient ordinaire , four- ni fient environ deux gros d’ammoniaque liquide chargée d’un peu de fer , qu’elle lai (Te bientôt dépofer dans l’état d’oxide. Le réfldu de ces opérations efl du muriate de fer. La décom- pofition du muriate ammoniacal par le fers (i) Il faut obfèrver que depuis la théorie de Black fut la caufticité de la chaux & des alcalis , on n’a pas fait les expériences néceflaires pour aflurer cette parité d’adion entre la chaux proprement dite & les oxides métalliques. On ne peut dorfc rien dire d’exatt fur cet objet, avant que l’expérience ait prononcé. d’Hist. Nat. et de Chimie. 28$ g fl fondée fur ce que ce métal s’unit très - biert à l’acide muriatique ; ce qui eft prouvé par le dégagement du gaz hydrogène que l’on obferve dans cette expérience* On prépare en pharma- cie , avec le muriate ammoniacal & le fer, un médicament que l’on appelle fleurs de fel am- moniac martiales , ou Ens manis. On mêle en- fenible une livre de muriate ammoniacal en poudre , 8c une once dé limaille de fer ; on expofe ce mélange dans une terrine recouverte d’un pareil va i fléau , à un feu capable de faire rougir la partie inférieure de cet appareil. En cinq à fix heures il fe fublime une matière jaune que l’on Gonferve dans un flacon ; ce font les fleurs martiales. Cette fubftance efl formée en très-grande partie de muriate ammoniacal fu- bliiné avec un peu d’oxide de fer. Comme le métal décompofe très-bien ce fel , il faut n’en employer qu’une petite quantité, ahu que là plus grande partie du fel fe fublime en nature* La portion d’oxide de fer qui efl volatilifée a colore le muriate ammoniacal , qui fe fublime: en même-tems. L’oxide de fer décompofe ce fel mieu^ que le métal lui-même , puifqu’il en dégage l’am* moniaque à' froid. Celle qu’on en obtient par la diflillat.ion , eft très-fluide 8c allez cauftique* J’ai eu de l’ammoniaque qui faifoit une légers Tome 1IE T 2p0 E L t M E N S effervefcence avec les acides, en diflillant le muriate ammoniacal avec la moitié de Ton poids de fafran de mars apéritif , ou oxide de fer pré- paré par le contact de l'air, 8c qui contient de l’acide carbonique. Dans cette expérience l’a- cide carbonique dégagé du fer , s’eft uni à 'l’am- moniaque , qu’il a rendue efifervefcente. Le fer efl altéré dans fa couleur par le gaz hy- drogène ; mais cette altération n’a pas encore été allez examinée. L’oxide noir de fern’efl pas dé- 'compofé par ce gaz ; mais les oxides bruns ou rou* ges le font facilement & patient à l’état d’oxide noir , parce qu’ils cèdent à l’hydrogène la quan- tité* d’oxigène furabondante à celle qui met le fer dans l’état d’oxide noir. Le foufre fe combine rapidement avec le fer. Un mélange de limaille de fer 8c de foufre en poudre, humeété avec une petite quantité d’eau , s’échauffe au bout de quelques heures ; alors il fe gonfle , s’agglutine , àbforbe l’eau > fe fend avec un bruit ou pétillement fenfible, & exhale beaucoup de vapeurs aqueufes accom- pagnées d’une odeur fétide 8c qui efl très- femblable à celle du gaz hydrogène fulfuré. Si le mélange efl fait en grande maffe, il s’enflamme en vingt-quatre o;i trente heures , ‘ de dès que les vapeurs aqueufes ont celle. Sur la fin de J’aélion de ces fübflances l’une fur l'autre , la îMîst. NaT. IX DE CiirjvirË. chaleur va en augmentant avec beaucoup de rapidité, & ^inflammation a .bientôt. lieu. L’o- deur efl alors bien plus .exaltée; elle paroît être due à du gaa hydrogène- produit par la réaction du foufre & du fer 'fur J>’eau. Cette odeur eft mêlée- de celle-' des-fulfures alcalins & de celle du gaz hydrogène pur; c’éflfans doute à ce ga^ dégage en grande quantité-, qu’efl due l’inflam- mation qu’on obferveedaris cette expérience , puifqtté la flamme eftrbeauconp plus vive que celle du foufre. Elle s’élève à un pied , fui vaut le rapport •• de M. Bauméq qui a.obfervéxe phénomène fur lui -mélange de cent’-divres de limaille dëffèr & d’autant de- foufre en poudre ; elle n’à duré que deux ou trois minutes. Le mélange èftîrefté-embfâfé-& rouge pendant qua- rante heures. M. Baumé explique cette' inflam- mation pa? le dégagement du phlogifltque du foufre en feu libre. Lcmery le père a donné le nom de volcan artificiel à cette expérience , Sc îl a imaginé que les feux qui s’allument dans l’intérieur de notre globe Sc qui en foulevant fa fûtfaêc produifent les tremblemens de terre Sc les -volcans , et oient dus a une* conibuflion femblable des pyrites entaflees Sc humeâées. On peut imiter ces terribles eflets, fuivam la fivme chimifle , en enfouiflam dans la terre un iiiê+ange de foufre en poudre & de -limaille de rp • • 1 IJ 292 E L £ M t ST 4 fer, réduit en pâte avec l’eau, & en le recorw vrant de terre que l’on bat fortement. Cette expérience n’a pas réuffi à Bucquet , qui l’a répétée avec beaucoup d’exaditude ; les re- cherches de M. Prieflley fembloîent en indiquer la raifon. Ce phyficien a obfervé que le mé- lange de fer & de foufre humedé abforboit line certaine' quantité d’air , qui pou voit paroître néceffaire pour fon inflammation. Cependant cette inflammation peut avoir lieu fans le con- taét de l’air. En effet il paroît que le fer trcs- divifé réagit fur l’eau , s’empare de fon oxigène qui le brûle & laiffe dégager le gaz hydrogène qui prend la forme de fluide élaffique en rai- fon du calorique féparé de l’eau. Ce gaz dif- fout auffî une portion du foufre & forme du gaz hydrogène fulfuré. Il y a beaucoup d’analogie entre cette coin- binaifon du fer & du foufre par la voie hu- mide , 8c l’efflorefcence des pyrites , qui pro- duit du gaz hydrogène fulfuré, lorfqu’elles font humeélées d’ëau. Le foufre fe combine très-aifément au fer par la fuflon ; il en réfulte un fulfuré de fer ou une pyrite difpofée en aiguilles. Comme le foufre augmente beaucoup dans ce cas la fiifr- bilité du fer, on peut faire fondre fur-le-champ ce métal à l’aide de ce corps combuffible. Il d’Hist. Nat. et de Chimie. 293 faut pour cela faire palier une petite barre de fer rougi à blanc dans un canon de l'oufre , & recevoir dans de l’eau la matière fondue qui s’écoule. On retrouve dans ce fluide des glo- bules noirâtres ca flans , femblabîes à des py~ rîtes , & formes comme elles , de petites pyra- mides trcs-alongées & concentriques. Le fer donne avec- l’arfenic un alliage aigre caiïant & très - peu connu. Il paroît que ce métal exifle dans beaucoup de mines de fer, & qu’il efl la caufe du fer enflant à chaud. Avec le cobalt le fer conffitue un métal mixte à petits grains ferrés , dur & très-difficile è cafler. Il ne paroît pas fufceptibîe de s’unir au bifmuth. Combiné à l’antimoine , il préfente Un alliage dur, à petites facettes, que le marteau n’àp- platit que légèrement. Le fer a plus d’affinité avec le foufre que n’en a ce métal fragile; il efl conféquemment fufceptibîe de décompofer le fulfure d’antimoine. Pour opérer cette décom- pofition , on fait rougir dans un creufet cinq onces de pointes de clous de maréchal ; on y jette une livre de fulfure d’antimoine concaffé ; on donne promptement un bon coup de feu3 afin de faire fondre le mélange ; lorfqu’il efl bien fondu, on projette une once de nitre en .1 U j E L #'■ M f N S . poudre, pour faciliter par une bonne fufion la féparation des fcoiies d’avec l’antimoine ; on laide refroidir le mélange, & on trouve dans le creufet de l’antimoine qui ne contient pas de fer. Si l’on a employé une partie de fer fur deux de fulfure d’antimoine , celui - ci fera allié de fer. Les Icories que l’on trouve au-deffus de l’antimoine allié de fer 6c préparé avec le nitre 6c le tartre, ont une couleur jau- nâtre femblable à celle du fuccin , en raifon du . fer qu’elles contiennent; Stahl les a nom- mées , à caufe de cela , fco ries fuccindes. ÏI prefcrit de .les réduire en poudre, de les faire bouillir dans l’eau qui entraîne la partie la plus divifée de cette pouiïicre ; on la décante , on i la filtre , & on fait détoner trois fois avec le nitre Ja poudre qu’elle a laifïee fur le filtre. Ou la 1 ave , on la fait lécher; c’eÜ le fafran de mars atitimonid apéritif de Stahl.. Il eft encore incertain fi le zinc peut s’unir avec le fer. Malouin, dans fon mémoire fur le zinc ( Academie , zyap ) a . fait voir que ce métal pouvoit s’appliquer , comme l’étain , à la furface dit fer , 6c la défendre du contaél de l’air , ce qui indique que ces deux matières .‘Oîétalliquqs font fufceptibles de fe combiner. ïl paroît que' le nickel s’allie treà-intimément au fer, puifqu’on ne peut jamais fcparer ennè- d’Hist. Nat. et de Chimie. rement ces deux fubflances métalliques, comme l’a démontré Bergman. Le mercure ne contraâe aucune union avec le fer dans fon état métallique. On. a tenté en vain d'unir ces deux métaux immédiatement ; mais on y efl parvenu en .les préfentant l’un à l’autre dans l’état d’oxides. Navier a obfervé qu’on obtenoit un précipité neigeux blanchâ- tre , en mêlant une diffolution de fer & de mercure par l’acide fulfuriqne •, & en évapo- rant le' mélange , il le forme dans cette opéra- tion des petits criflaux plais très-légers 6c fem- blables à l’acide boracique ; Navier s’efl alluré que ces criflaux font une combinaifon de fer 6c de mercure. Le plomb ne peut contracter aucune union avec le fer. Le fer 6c l’étain parodient être fufceptibles de s’unir par- la fulion. L’art qui confiile à en- duire la furface du fer d’une couche d’étain* ou la préparation du fer-blanc , indique que cette combinaifon a lieu. Pour étamer le fer* il faut que la furface de ce métal foit très- propre 6c brillante ; pour cela on le décape 9 avec un acide , quelquefois on le lime , ou bien on l’enduit de fel ammoniac : on le plonge enfuite verticalement dans une chaudière pleine d’étain fondu j on le retourne afin de multiplier J iy / * 29# E I, t JVÎ E N s ïe contaél ; fk lorfqu’tl elt aiTez étamé , on le retire & on le frotte avec de la fciure de bois ou du ion , pour enlever le fuif ou la poix dont on avoit recouvert l’étain fondu , & qui s’efl appliqué à la furface du fer étamé. Si l’on étame le fer réduit- en lames minces comme !a tôle , l’étain 11e s’appliquera pas feulement à fa furface, mais il pénétrera dans fou inté- rieur , il fe combinera à toutes fes parties -, 8c. en le coupant, on obfervera la même couleur blanche dans fon milieu qu’à fa furface ; ce qui Indique que le fer-blanc bien fait eR une vraie combinaifoii chimique. D’ailleurs , il efl plus malléable que le fer , & l'on en fabrique des vaiffeaux d’une forme qu’il feroic impollible de faire prendre par le marteau à ce métal pur. î\ous avons vu au commencement de ce chapitre , que le fer abforbe facilement le char- bon par la chaleur , & qu’il forme la fonte 8c Vaçiçr par fon union avec ee corps combufli- ble, avec cette différence qu’il contient de l’oxi- gène dans le premier de ces compofés, & qu’il n’en contient pas dans le fécond. Dans l’un & fautre le fer eil en quantité beaucoup plus grande que le charbon. L’analyfe chimique qui doit tant aux travaux de Schéele, a prouvé à ce chimiffe que la plombagin.6 , efpcce de minéral dont la ïtëtiue & le rang qu’elle mérite parmi les mh / d’H i s t. N a t. et de Chimie. 297 ïiéraux, ont long-tems embarrafie les phyGciens, n’eft qu’une combinaifon naturelle de beaucoup de charbon & de très-peu de fer. Son hiffoire doit donc appartenir à celle de ce métal. . La plombagine a été long-tems confondue avec la molybdène (1). Pott efl. le premier qui ait prouvé que l’une 8c l’autre de ces fub (lances ne contient point de plomb , comme on 1 a- voit cru anciennement. Les noms que la mo- lybdène 8< la plombagine avoient reçus, etoient très-propres à perpétuer ces erreurs. On les nommoit l’une 8c l’autre 8c indiftinétement mine de plomb , crayon d' Angleterre , plomb de mer s cérufe noire , mica des peintres , crayon de plomb , faujfe galene , talc , blende , potelot. Le carbure de fer natif ( nom que nous avons fubflitué à celui de plombagine , 8c qui exprime la nature de ce compofé) exifle dans les mon- ta ânes , fouvent entre des lits de quartz , de feld-fpath , d’argile ou de craie , fous la forme de morceaux arrondis irréguliers, ou de rognons de differentes groffeurs, dont les plus volumi- neux pcfent depuis huit jufqUa dix 8c onze li- vres ; il y en a aufli de diffenmés en fragmens (t) Il efl reconnu que ce que l’on appeloit la molyb - dcne efl l’oxide d’un métal caftant particulier afcidifiablej pous en ayons fait J’hifloire à l'article des çaetaux caftans. • E L È M E N S beaucoup plus petits , & quelquefois même en couches ou en lits. Les habitans de Bleoux , hameau fîtué près de Curban dans la haute Provence, exploitent du carbure de fer natif y ou de la plombagine qui fe trouve en couches de quatre pieds d’épaiffeur* entre deux lits d’ar- jgile; cette matière fe vend à Marfeille. M. de la Peyrotife compte le carbure de fer dans les minéraux des Pyrénées; on en trouve en Efpa- gne 8c en Allemagne; il y en a une mine fort abondante dans le duché de Cumberland en Angleterre ; on en fabrique des crayons fort eflimés. L’Amérique feptentrionale 8c le Cap de Bonne- Efpérance en four ni (T'eut auffi quel- ques échantillons. On a trouvé depuis quelque tems de la plombagine criflallifée en oétaè'dres. Le carbure de fer efl. kiifant 8c d’un bleu noirâtre ; il eft gras au toucher 8c préfente Une caffure tuberculeufe tandis que le molybdène a une caffure lamelleufe ; fa qualité ondueufe 8c favoneufe l’a voit fait regarder comme une efpèce d’argile impure par quelques naturalifles. Ï1 tache les mains 8c laiffe fur le papier une trace noirâtre que tout le monde connoît dans je crayon noir . Le carbure de fer n’éprouve aucune altéra- tion pac la chaleur dans des vaiffeaux fermés. M» Pelletier qui a fait des recherches fur cette d’H i s t. Nat. et de Chimie. 2$)£ fubftance , après Schéele * 8c qui n’a obtenu aucun réfultat différent, en aexpofé 200 grains dans un creufet de porcelaine bien bouche au feu de la manufadure de Sèves ; ce minéral n’a perdu que 3 0 grains. Mais lorfqu on le chauffe avec le contad de 1 air , il biûle & s’oxide fans laiffer prefque de réfidu. MM. Qum, Gahn & Hielm avoient obfervé que 100 grains traités ainfi dans une cap fuie* fous la moufle, ne laiffoient que 10 grains d’oxide ferrugineux. Cette oxidation eff une combuiliôn. len«.e 8c très-difficile à opérer ; elle rie réuflit pas dans un creufet ordinaire , mais il faut pour cela expofer une couche mince de carbuie de fer dans un vailTeau plat a l’adion d un grand feu, & en renouveler fouventles furfaces. C eil ainfi que fe brûle peu à peu le carbure de fer dont on enduit les tuyaux de poêle, &c. L’air , l’eau & les fubflances terreufes n’ont aucune adion fur le carbure de fer. Les alcalis ont une grande adion fur cette fubüance. Si l’on chauffe dans une cornue avec l’appareil pneumato- chimique une partie de carbure de fer avec deux parties d’alcali fixe cauflique îec, ou de pierre à cautère , la petite quantité d eau contenue dans le fel fuffit pour favorifer la combuffion de cette fubflance ; on obtient du, gaz hydrogène carboné , l’alcali fe trouve 300 Elémens chargé d’acide carbonique , & il ne refie prefi^ que rien du carbure de fer. Cette expérience, ainfi que la détonation avec le nitre dont il fera queflion plus bas , ont fait penfer à Schéele que cette matière efi une efpèce de foufre formé diacide aérien ou carbonique , & de phlogifiique. Cette théorie fera difcutée, lorf- que nous aurons examiné les autres phénomè- nes que préfente ce corps combufiible avec les acides & les fels neutres. ' * L’acide fulfurique n’a aucune aétion fur le carbure de fer , fuivant Schéele. M. Pelletier a obfervé que ioo grains de cette fubfiance 8c 4 onces d’acide fulfurique concentré , digérés à froid pendant pîufieurs mois , ont donné à cet acide une couleur verte , & la propriété de fe congeler à un très-léger degré de froid. Difiillé fur le carbure de fer cet acide pafie à l'état fulfureux, en brûlant une partie de cette fubf- tance. L’acide nitrique ne l’altère en aucune ma- nière. L’acide muriatique en diffout l’alumine 8< le fer, 8c fert à la purifier, fuivant M. Ber- thollet. M. Pelletier a employé le même pro- cédé pour avoir du carbure de fer pur. Quant à l’alumine que l’acide muriatique enlève au carbure de fer , Schéele remarque que celle qu’il en a féparée dans fou analyfe , appajrtenoit / to’HîS'ï. N AT. ET CE GhiMîE. $0% ta creufet dans lequel il l’avoic traitée aupa«* ravant. Le carbure de fer fondu avec quatre parties de fulfate de potafe ou de fulfate de foude, donne des fulfures alcalins & eff entièrement décompofé. Le nitre détonne à l’aide de cette fubflance ; il faut dix parties de ce fel pour en brûler com- plètement une partie. L’alcali fixe qui refie après cette opération , fait une vive effervefcence avec les acides , & fe trouve mêlé d’une petite quan- tité d’oxide de fer. Le même effet a lieu avec le nitrate de foude & avec le nitrate ammonia- cal. M. Pelletier a obfervé que dans ce.tte der- nière opération l’ammoniaque fe dégage com- binée avec une portion d’acide carbonique. Le carbure de fer n’agit point fur le muriate de potaffe ni fur le muriate de foude. Quand on le diflille avec le muriate ammtx niacal, il donne des fleurs ammoniacales mar~ tiales. Chauffe avec du foufre dans une cornue, le foufre fe fublime feul & fans altérer en au- cune manière le carbure de fer. Tous ces faits prouvent que cette fubfianc® n’efi point une terre ni une mine de plomb , comme on l’avoit cru ; mais quant à la théorie de Schéele qui l’a regardée comme une cornbî- paifon d'acide carbonique & de phlogiffique; ■ Eûmens elle ne peut pas être admife ; i°. parce que ce chimifle n'a point déterminé exactement la quan- tité de cet acide qu’il en a obtenu; 20. parce qu’il n’a pas pu faire artificiellement de la plom- bagine , en combinant de l’acide carbonique avec une matière combuflible. D’ailleurs 5 les deux fubftances avec lefquelles Schcele a changé le carbure de fer en acide carbonique , opèrent ce changement en fourniflant de l’air vital qui fe combine avec la matière inflammable de cette . . . • *y fubflance , 8c qui donne nai fiance h\ cct acide par la fixation de l’pxigcné; car telle eft la ma- nière dont l’acide nitrique convertit le tungfiène, rarfenic'& le fucre en acides. Quant à l’alcali' fixe cauflique qui change auffi le carbure de fer en acide carbonique , c’çft manifëftement en rai- fon de l’eau que. cet alcali contient toujours , & qui brûle la matière combuflible, comme elfe fait le fer 8c le zinc ; cette opinion efl confir- mée par le gaz hydrogène que l’on obtient pendant l’aétion réciproque de l’alcali & du car- bure de fer. On pourroit la confirmer encore davantage, en 'fai faut palier de l’eali én vapeurs a travers cette fubflance roûeie dans un tube * O - # de cuivre ou de porcelaine , comme on le fart pour le fer 8c pour le zinc. Quoique cette ex- périence i^ait point encore été fiiite , je crois pouvoir avancer que tout le carbure de fer f d’Hist. Nat. et de Chimie. 303 fera détruit & converti en acide carbonique* & que le produit de cette opération fera du gaz hydrogène carboné, & mêlé d’une grande quan* tiré d’acide carbonique. Il paroîtroit donc na- turel d’en conclure que l’acide carbonique eft un compofé de plombagine & d’oxigène ; mais comme nous favons par beaucoup d’autres ex- périences , que l’on ne peut former cet acide qu’en combinant Je charbon avec l’oxigène , il en réfulte que la plombagine contient beaucoup' de charbon , & qu’elle eft même prefqu’entiè- rement formée par ce corps combuftible. Quel- ques traits raiïemblés ici fur les propriétés du. charbon comparées^ à celles du carbure de fer* confirmeront cette aftertion. Le charbon de plufieurs matières végétales eft- brillant & a un afpeét métallique comme le carbure de fer ; il tache les mains 8c. lai (Te des, traces fur le papier comme cette matière , & fon tiffu eft grenii 8c caftant comme le fien„ Les charbons les plus brillans , comme ceux de quelques fubftances animales, font auftî diffi- ciles- à brûler que le carbure de fer , qui de- mande beaucoup d’agitation, une grande cha- leur , 8c un conta# de l’air très-mültiplié pour fe confumer ; on trouve du fer dans l’un 8c dans l’autre ; enfin , ces deux fubftances font fufceptibles de fe changer en acide çarbonique 304 Ë l 5 K 5r -isr s par la Combuftion ; n’eft-il pas permis de re- garder d’après cela la plombagine comme du charbon formé dans l’intérieur du globe > ou enfoui dans la terre ? Ne pourroit-on pas même penfer que cette matière fe forme par la com~ binaifon de quelques principes minéraux, quoi-, que prefque tous les chimifles aient penfé qu’il n’y avoit que les matières organiques qui pou- voient fe convertir en charbon ? Cette dernière idée neferoit confirmée ou détruite que par une étude fuivie de l’état du carbure de fer dans la nature , des circonflances de fa formation 9 des altérations qu’il y éprouve. Depuis ces con- noiflances acquifes fur le carbure de fer , par les recherches de MM. Vandermonde , Monge & Berthollet fur les différens états de ce métal 3 ils ont découvert qu’il fe forme tons les jours dans la fufion de la fonte , une fubffance tout- à-fait femblable au carbure de fer natif; il efl a . rare que les cuillers avec lefquefles on puife la fonte pour la couler , n’en foient enduites. Les déblais des hauts fourneaux que l’on répare , eu offrent aufli en malles criftallifées; on peut ef- pérer qu’on en préparera quelque jour d'artifi- ciel pour le befoin des arts. Le carbure de fer eff d’un ufage a fiez étendu. On en fait des crayons ; les plus eflimés vien- nent d’Angleterre. Ç’efl à Refwick dans le du- çhé bTI'îst. Nat. et de Chimie. '30$ thé de Cumberland , qu'on tire celui qui efl employé pour faire les crayons. On fcie les ïognons de carbure de fer en petites tablettes minces, on les ajufle dans des cylindres de bois garnis de rainures , 5c on les coupe de manière que la cavité de ces cylindres foit rem- plie. La pouflière produite par le fciage & la coupure des tablettes de carbure de fer, fert à faire des crayons de qualité inférieure, 5c tels qu’on en débite beaucoup à Paris ; on la mêle avec une pâte de gomme , ou bien on la fond avec du foufre ; on reconnoît ces faux crayons 'd’Angleterre , foit parce qu’ils fe fondent 8c brûlent à la flamme d’une bougie, foit parce qu’ils fe fépareiit en fragmens 5c tombent même en poudre en les laifîant tremper dans l’eau. Le carbure de fer d’Allemagne efl aufli employé pour faire des crayons ; on y ajoute différées corps étrangers , comme du charbon , du fou- fre, 5cc. En Angleterre la pouflière très-fine de car-* bure de fer fert à enduire les rouages de quel- ques inflrumens , 5c elle facilite leurs mouye- mens par fa qualité grafle 5c onélueufe. Un des principaux ufages de cette fubflanceà e’eft de fervir d’enduit au fer qu’on veut dé- fendre de la rouille ; les tuyaux de poêle, les plaques de cheminée 5c autres ùflenfiles exjj.^ Xome III Y 30 6 É £ é MENS fés à l’aâion du feu & de l’air , font recouverts de carbure de fer en pouflière , que Ton appli- que à leur furface par le fimple frottement avec un pinceau. Homberg a décrit en 1699 un procédé pour donner la couleur plombée aux uflenfiles de fer. Il confifie à mêler à huit livres d’axonge fondue avec quatre onces de camphre , une quantité fuffifante de carbure de fer , 8c à enduire de cette compofition le fer chauffé , jufqu’à ce qu’on ait de la peine à le tenir ; on a foin d’effuyer les uflenfiles de fer avec un linge , après les avoir recouverts de cette efpèce de vernis. Les ouvriers qui fabriquent le plomb de chaffe , l’adouciffent 8c noircirent en même- tems fa furface, en le roulant dans du carbure de fer en poudre. Il fait auiïî partie de la com- pofition que l’on applique fur les cuirs à re- paffer les rafoirs. Enfin , il entre dans la fabri- cation de quelques poteries noires d’Angleterre, 8c dans celle des creufets que l’on fait à Faffaw. en Saxe. M. Pelletier qui a bien décrit les divers ufa- ges du carbure de fer, s’efl fervi avec avan- tage d’un lut qu’il a préparé d’après Pott , avec une partie de cette fubfiance , trois d’argile ordinaire, 8c un peu de bouze de vache cou- pée très-menue 5 ce lut foutient très-bien les d’Hist. Nat. et de Chimie. 307 cornues de verre qui fe fondent quelquefois, fans qu’il ait changé de forme. Les grands ufages du fer font fi étendus , & d’ailleurs fi connus, qu’il feroit inutile d’y in- fifter : il efi feulement important de favoir qu’au- cun art ne peut abfolument s’en pafier , & qu’il efi l’arae de tous les arts , comme le dit Mac- quer. Les différentes modifications qu’il efi; fufceptible de prendre , le rendent très-propre à la multiplicité des ufages divers auxquels on le defiine. La fonte fert à couler des ufienfiles plus ou moins folides , plus ou moins réfiftans fuivant le befoin. La dureté & la ténacité des différentes efpèces de fer forgé , s’accordent très-bien avec les ufages variés auxquels 011 l’applique. Il en efi de même des aciers ; la fïnefie du grain & la trempe en confirment de beaucoup d’efpèces , qui toutes trouvent leur application dans une infinité d’arts différens où elles conviennent. Les oxides de fer fervent à colorer en rouge ou en brun les porcelaines, les faïences , les émaux , &c. On les emploie auffi dans la préparation des pierres précieufes artificielles, & on les combine avec l’huile pour la peinture. Le fer fournit à la médecine un remède im- portant & auquel elle doit fouvent les plus grands fuccès, C’efi le feul métal qui n’ait rien v m Ê L ï MB N ? de nuifibîe, & dont on ne puiffe pas redoute! les effets. Il a même, comme nous l’avons vu, une telle analogie avec les matières organiques , qu’il femble en faire partie , 8c devoir fouveat fa production au travail de la vie , ou à celui de la végétation ; les effets du fer fur l’écono- mie animale font affez multipliés. Il ftimule les fibres des vifcères membraneux , 8c paroît agir fpécialement fur celles des mufcles dont il augmente le ton. Il fortifie les nerfs & donne à la machine affaiblie une force 8c une vigueur remarquables. Il excite plufieurs fécrétions , fur- tout celles des urines 8c celles qui fe font par une évacuation du fang. Il provoque les hémor- ragies naturelles, comme le flux menftruel & les hémorroïdes. Il augmente 8c multiplie les contrarions du cœur , 8c par conféquent la force 8c la vîteffe du pouls. Il n’agit pas avec moins d’énergie fur les fluides. Il paffe facile- ment dans les voies de la circulation, 8c va fe combiner au fang auquel il donne de la denfité , de la confifiance , de la couleur , & qu’il rend plus concrefcible ; il lui communique en même-tems une activité telle qu’il paffe facilement dans les plus petits vaiffeaux , qu’il ftimule lui-même les parois des canaux qui le renferment , 8c qu’il porte par-tout la force 8c la yie. Les belles expériences de Menghini brHisT. Nat. et de Chimie. 30$ publiées dans les mémoires de l’inflitut de Bo- logne, ont prouvé que le fang des perfbnnes qui font ufage du fer , ell plus coloré & con- tient une plus grande quantité de ce métal qu’il n’en contient naturellement. Lorry , qui a porté dans l’exercice de la médecine cette fînefle d’ob- fervation, & ces grands apperçus qui caraété-» rifent le favant profond 8c le médecin philo- fophe , a vu les urines d’un malade auquel il adminiflroit le fer trcs-divifé, fe colorer mani- feflement avec la noix de galle. Ce métal eff donc tonique , fortifiant, ffamachique , diuré- tique, altérant, incifif, & on trouve réunies dans fon aétion les propriétés d’un grand nom- bre de médicamens. Il refîerre les fibres comme les aflringens , il en augmente l’ofcillation , 8ç il a fur beaucoup d’autres remèdes qui jouif- fent de la même vertu, l’avantage d’être plus confiant & plus durable dans fes effets , parce qu’il fe combine aux organes eux-mêmes par le moyen des fluides qui fervent à leur nutri- tion. Il convient donc dans tous les cas où les fibres des vifcères , celles des mufcles & même celles des nerfs , n’ont qu’une adion très-foible ; dans la langueur de l’eflomac 8c l’inertie des. inteflins, dans les foibleffes produites par ces caufes -, enfin , toutes les fois que les fluides font peu confiflans, peu concrefcibies , trop délayés Vüj 3io Élémens comme dans les pâles couleurs , la propenfion à l’hydropifie , &c. On l’emploie fous beau- coup de formes differentes ; tels font la limaille porphyrifée , l’éthiops martial . ou l’oxide de fer noir préparé par l’eau , les fafrans de mars allon- gent 6c apéritif, ou les oxides de fer jaune & rouge , la teinture martiale alcaline de Stahl ; les fleurs de fel ammoniac martiales , &c. Peut- être pourroit-on ajouter à ces médicamens le fer précipité des acides 6c rediffous par l’am- moniaque, le pruffiate de fer eu bleu de Prufle propofé par MM. les chimiffes de l’académie de Dijon , 6tc. On fe fert à l’extérieur du ful- fate de fer , pour arrêter les hémorragies , 6cc. Le fer jouiffant de la propriété magnétique, ou l’aimant artificiel , a été compté parmi les corps qui produifent des effets trcs-fmguliers fur l’economie animale. Suivant plufieurs au- teurs modernes , appliqué fur la peau , il calme les douleuts, il appaife les convullions , il ex- cite de la rougeur, de la fueur , fouvent même line éruption de petits boutons ; il efl auffi ca- pable de rendre moins fréquens les accès épi- leptiques. On a même affiné que , laiffe dans de l’eau pendant douze heures , il communique à ce fluide la propriété purgative. Toutes ces aflertions qu’on dit appuyées fur des faits , an- noncent aflez aux phyficiens éclairés , quelle I d’Hist. Nat. et :de Chimie. 31 1 'difficulté préfenjtent les expériences de phyfique animale. L’inertie entière d’un corps aimanté ou armé de la puiffance magnétique , fur les autres corps qui ne font point fufceptibles d ad- mettre en eux la même puiffance , exclut véri- tablement l'influence de l’aimant fur 1 économie animale ; les médecins qui lui attribuent des effets auffi marqués , 8c conféquemment des propriétés médicamenteufes affez énergiques , ont été féduits 8c trompés par des changement plus ou moins fenfibles , qui ont eu lieu dans le tems de l’application de l’aimant , 8c. qui étoient dus aux forces propres des individus & aux efforts heureux de la nature. Cette opi- nion efl d’autant mieux fondée, que c’efl fuiv tout dans la ceffation ou le déplacement des douleurs 8c des convulfions, que la nature oflie le plus d’inconftance 8c d’irrégularité aux obfer- vateurs , 8c que c’efl fpécialement d après des fymptômes plus ou moins analogues à ceux- là, qu’on a jugé des prétendues qualités médi- camenteufes de l’aimant. ¥ 012 É L Û M E N S m , ||-j CHAPITRE XIX, Du Cuivre . JjE cuivre efl un métal duétile , d’une cou* leur rouge affe? brillante , auquel les alchi- jnifles ont donné le nom de Vénus , à caufe des nombreufes attrapions auxquelles il obéit , de de la facilité avec laquelle il fe laiffe altérée par un grand nombre de corps différens. 11 a une odeur défagréable qui fe manifefle , lorf- qn’on le frotte ou qu’on le chauffe ; fa faveur efl fliptique & nauféabonde , moins fenlible cependant que celle du fer, Ce métal eR dur * trcs-élaflique & très-fonoye. Il jouit d’un affez grand degré de ductilité; on le réduit en feuilles très-minces & en fils très-tenus. Il perd entre un huitième & un neuvième de fon poids à la balance hydroflatique. Sa ténacité efl telle j qu’un fil de cuivre d’un dixième de pouce de diamètre peut foutenir un' poids de deux cens quatrfMdngt-dix-nguf livres pn quart avant de fe rompre, Sa çaffure paroît compofée de pe~ ti{§ grains, Il efl fiifceptible de prendre une forme régulière. M. l’abbé Mongcz définit fes erifkux des pyramides quadrangulaires , tantôt tfHist. Nat. et de Chimie. 3*2 . folides , tantôt coœpofées d’autres petites py- ramides femblables implantées lateialement. Le cuivre fe trouve dans la terre en différens états. Ses mines font très-multipliees ; on peut les rapporter toutes aux fuivantes. t I. Le cuivre natif ayant la couleur rouge* la malléabilité & toutes les autres propriétés de ce métal. On le diftingue en deux efpèces; le cuivre de première formation , & le cui- vre de fécondé formation , ou de cémenta- lion. Le cuivre de première formation ed dif- perfé en lames ou en filets , dans une gangue prefque toujours quartzeufe. Il y en a dont les crifiaux oétaëdres implantés les uns fur les au- tres 3 imitent une efpèce de végétation ; d au- tres échantillons font en malle & en grains. Le cuivre de cementation efl ordinairement en grains ou en lames fuperficielles fur les pierres ou fur le fer ; ce dernier paroît avojr été dé- pofé dans des eaux chargées de fulfate de cui- vre , qui ont été précipitées par du fer. On trouve le cuivre natif en plufieurs endroits de l’Europe ; à Saint - Bel dans le Lyonnois , à Norgberg en Suède, à Newfol en Hongrie , dans la Sibérie où il paroît être abondamment répandu , & dans plufieurs contrées de l’ Amé- rique. II, Le cuivre oxidé 8c minéralifé par l’acide 3*4 E L É M E N S carbonique. On a pluGeurs variétés de ce car** bonate de cuivre natif. A. Le cuivre rouge ou la mine de cuivre hépatique. Cette mine eft reconnoiftable à fa couleur rouge, fombre, femblable à celle des écailles qui fe détachent du cuivre rougi ati feu, lorfqu’on le bat fous le marteau. M. Mon- net regarde cette mine comme un oxide de cui- vre naturel. Elle eft ordinairement mêlée de cuivre natif & de vert de montagne . Elle eft allez rare , quelquefois criftalliiée en odaëdres ou en libres foyeufes nommées fleurs de cuivre . B. Le cuivre terreux , le vert de montagne ou chryfocolle verte. Cette mine eft un véritable oxide de cuivre , d’un vert plus ou moins fom- bre , aftez léger, inégalement diftribué dans fa gangue. Il paroît être combiné avec l’acide carbonique , d’après l’analyfe que M. I’abbé Fontana a faite fur la malachite. Cette mine eft quelquefois fort pure : on peut la diftinguer dans trois états. i°. Le vert de montagne ftmple, terreux ou impur , appelé aufti chryfocolle verte . 2°. Le vert de montagne criftallifé ou cuivre foyeux de la Chine ; cette mine , qui eft aftez commune dans les Vofges 8c au Hartz, fe trouve aufîî en Chine ; elle eft très - pure 8c criftallifce en longs faifeeaux foyeux allez fo- lidcs. Celui de Sibérie eft très-beau, d’Hist. Nat. et de Chimie, 3lS 3°. Le vert de montagne en ftaladites, ou la malachite ; cette fubftance qu’on trouve très- abondamment en Sibérie , e£l compofée de cou- ches qui repréfer.tent des mammelons plus ou moins gros \ quelques échantillons iont foi mes d’aiguilles convergentes vers un centre commun. Les différentes couches n’ont pas les mêmes nuances de vert. La malachite eff affez dme pour recevoir un beau poli, auffi en fabrique- t-on différens bijoux ; mais comme elle eff lou- vent caverneufe 8c remplie de cavités inégales, les morceaux folides font toujours très-précieux, lorfqu’ils ont une certaine étendue. C. Le bleu de montagne ou chryfocolle bleue ÿ c’eff un oxide de cuivre d’une couleur bleue foncée ; il eff quelquefois fous forme régulière 8c en criffaux prifmatiques rhomboidaux , d un très-beau bleu. On lui donne alors le nom d’azur de cuivre ; d’autres fois il préfente des petits grains dépofés dans les cavités de diffé- rentes gangues', & fur-tout dans du quartz. Le plus fou vent il forme des couches fuperfirielles dans des cavités de mines de cuivre grifes & jaunes. Il paraît que tous res oxides de cuivre ont été précipites des diffolutions fulfurique's cuivreufes par l’intermède des terres calcaires à travers defquelles coulent ces eaux. M. Sage regarde ces mines de cuivre bleues, comme É L £ M ENS des combinaifons de cuivre avec I’ammoniâ** que ; & il dit qu’elles n’en different que par l’infolubilité. Il croit aufli que la malachite n’eft qu’une altération de ce bleu qu’il appelle mine de cuivre azurée tran (parente. Cette opinion n’efî pas celle de la plupart des minéralogiftes; M. Morveau penfe que l’oxide de cuivre bleu ne diffère de l’oxide vert , que parce qu’il *ne contient pas autant d’oxigène. L’oxide bleu de cuivre parcît colorer cer- taines pierres , & notamment la turquoife dans laquelle Réaumur a trouvé du cuivre ; 8c la pierre d’Arménie dont la bafe efl du carbonate calcaire ou du fulfate de chaux. M. Kirwan a fait une efpèce de mines de cuivre de ces pierres bleues. La turquoife n’eft formée que par des os d’animaux colorés par le cuivre. Celle de Perfe n’eft point attaquable par l’acide nitrique, fuivaiTt Réaumur; celle de Languedoc s’y dif- fout complètement. III. Le cuivre minéralifé par l’acide muriati-c que & uni à l’argile. M. Werner a parlé de cette mine dans fa traduction de Cronfîedt ; on l’a confondue avec le talc, & un nommé Dans l’a vendue à Paris en 1784 , fous le nom de mica vert. Elle eft en petits criftaux d’un très- beau vert, ou en petites écailles brillantes, Forfler en a trouvé dans les mines de Jehan-* d’Hist. Nat. et de Chimie.1 31$ Seorgenftadt ; c’eft à cette mine que paroît appartenir le fable vert cuivreux du Pérou, qui a été apporté par M. Dombey , & dans lequel Panalyfe nous a démontré la préfence d’un peu d’acide muriatique. IV. Le cuivre minéralifé par le foufre pref-j que fans fër. On l’appelle mine de cuivre vu ireufe , cette dénomination eft fort impropre,; Elle eft grife foncée, violette, brune , verdâtre * ou tout- à-fait brune 8c couleur de foie ; elle fe fond à une très-douce chaleur ; elle eft pe-t - fante, quelquefois flexible, 8c toujours fufcepK tible d’être coupée au couteau ; dans fa fracJ ture, elle paroît brillante comme de l’or. C’eft une des plus riches mines de cuivre , puifqu’elle peut donner jufqu’à 50 livres de ce métal par quintal. V. Le cuivre minéralifé par le foufre avett plus de fer que la précédente ; mine de cuivre azurée ; elle ne diffère de la précédente que par la quantité du fer qui va jufqu’à 30 livres par quintal ; elle ne donne que yo à 60 livres, de cuivre par quintal ; le refte eft du foufre»’ On effaie commodément ces deux mines par les acides, VI. Le cuivre minéralifé par le foufre avec beaucoup de fer ; pyrite brillante ou jaune- dorée. La qualité du foufre & du cuivre yanf 318 Elémens beaucoup dans cette mine , le fer y efl toujours très-abondant. Elle forme dans la terre des filons plus ou moins confidérables. Quelque- fois cette mine efl maflive & fombre ; fou vent elle paroît écailleufe 8c comme micacée. Telle efl la forme de celle du Dannemarck, de Nor- vège, de Suède , de Sainte-Marie-aux-Mines. D’autres fois cette mine eft difféminée dans fa gangue , comme le cuivre d’Alface ; on la nomme alors mine de cuivre tigrée. Cette va- rîété eft fouvent mêlée d’un peu d’azur ; fou- vent les pyrites de cuivre préfentent à leur fuperficie des couleurs très-brillantes , bleues ou violettes , qui font dues à la décompoiitioti de leurs principes. On les nomme alors mines de cuivre chatoyantes , ou mines à queue de paon ; elles contiennent ordinairement une grande quantité de foufre , un peu de fer , 8c ne font pas fort riches en cuivre. Lorfque ces fortes de mines ne font que fuperficiellement difféminées fur leur gangue, on les appelle plus fpécialement pyrites de cuivre ; telles font les mines du comté de Derbi en Angleterre , quel- ques-unes de celles de SaintéBel dans le Lyon- nois, 8c plufieurs mines d'Alface, comme celles de Caulenbach 8c de ,Feldens ; d’ailleurs elles fe trouvent adhérentes à toutes' fortes de gan- gues, ah enflai de roche, au quartz, au ipath, 311 fehifle, au mica, &c3 d’Hist. Nat. et de Chimie. 315? VIL Le cuivre uni au foufre, à Parfenic, au fer & à un peu d’argent. Cette mine appelée mine de cuivre arjenicale ou fahlert^, reffemble beaucoup à la mine d’argent gi'ife ; elle elt feu- lement un peu moins brillante , 8c n’en diffère réellement que parce qu’elle contient moins d’argent qu’elle. Romé de Lille diflingue en- core une mine de cuivre blanche , qui con- tient fuivant lui , un peu plus d’argent que la grife; mais c’elt une vraie mine d’argent. Le fahlertz donne 35” à 60 livres de cuivre par quintal. VIII. Le cuivre minéralifé par le foufre & l’arfenic , avec du zinc 8c du fer. Mine de cuivre^ hrune ou blendeufe. M. Monnet n’a trouvé cette mine qu’à Catharineberg en Botie* me; elle elt brune, grenue 8c très-dure. Elle contient depuis iS jufqu à 30 livres de cuivre par quintal. IX. Mine de cuivre fchilleufe. C’eft du cuivre vitreux très-intimément mêlé dans un fchilte brun ou noir. Elle donne depuis 6 jufqu’à 10 livres par quintal; il faut ajouter de la craie pour la fondre. X. Mine de cuivre bitumineufe. C’elt du cuivre mêlé dans une efpèce de charbon de terre de Suède. XI» Mine de cuivre noire ou couleur de Élément poix. M. Gel 1er l’appelle mine de cuivre eri fcories ; c’ell un réfidu de la décompolition des mines de cuivre jaunes & grifes , qui ne con- tient ni foufre ni arfenic , & qui fe rapproche de l’état de malachite ; elle ell d’un noir luifant comme de la poix. . XII. Cuivre uni au foufre 8c à l’arfenic con- tenant de l’antimoine. Mine de cuivre antimo- niale. M. Sage fait mention de cette mine dans fes Elémens de minéralogie. Elle ell grife 8c brillante dans fa fradure, comme l’antimoine; elle tient depuis 14 jufqu’à 20 livres de cuivre par quintal. Pour faire l’effai d’une mine de cuivre, iï faut apres l’avoir pilée 8c lavée , la foumettre à de longs 8c forts grillages , 8c la fondre avec quatre fois fon poids de flux noir 8c du fel marin. On prend le culot qui fouvent eft en- core noirci par un relie de foufre , on le fond avec quatre parties de plomb , 8c on le pâlie à la coupelle pour féparer l’argent 8c for qui pourroient s’y trouver, parce qu’il ell peu de cuivre qui ne contienne une certaine quan- tité de ces métaux précieux. Le flux de Ma Tillet qui ell un mélange de deux parties dé verre pilé, d’une partie de borax calciné, & d’un huitième de charbon, réulfit mieux pour les réductions, que le flux noir, parce que celui- - • • * * I ’Mîst. Nat. et de Chimie, 321 Ci forme un fulfure alcalin qui diffout une partie de î’oxide de cuivre» Bergman confeille l'acide fulfuriquc & îsacîde citrique , pour faire l’effai de ces minés par la voie humide. Lorfque le cuivre eft diflous par les acides, on le précipite par Je fçr. Dans les travaux en grand fur les mines de çuivre , on les pile & on les lave ; en fuite ôn les grille d abord a l’air , & prefque fans bois, parce que dcs-que le foufre qu’elles contiennent, eft allumé, i! continue de brûler de lui-même* Lorfqu’il s’eft éteint, on grille de nouveau, & même deux fois de fuite la mine fur du bois; ,on la fond à travers les charbons , pour avoir ce qu’on nomme matte de cuivre . G’eiî la mine qui n’a perdu encore qu’une portion du foufre 1 qu’elle contenoit. La.fufion qu’on lui fait fijbir ifert à faire préfemer au métal de nouvelles fur- lfaces , afin qu’il puifTe être grillé plus facile- iment. On lui fait éprouver fix ou fept grillages ilfuccefiifs, fui vaut la quantité de foufre que «contient la mine,. & on la fond enfuite pour :avoir le cuivre noir . Ce cuivre eft malléable; il eft cependant encore uni à un refte de fou* fre , qu on n en fépare -quîen retirant les mé- parfaits qu’il contient. On fond le cuivre inoir avec trois fois autant de plomb, ce qu’on ^appelle rafrakhijfement du cuivre 9 & ou moule 2 orne III, -v- ^22 Ê L é M E N S ce mélange fous la forme de pains , qu’on nomme pains de liquation. On les pofe de champ fur deux plaques de fer inclinées de manière qu’elles lailTent entr’elles une rigole. Ces plaques terminent le dcffirs du fourneau de liquation , dont le fol eil incliné vers le de- vant, Le feu mis au deffous des plaques échauffe les pains j le plomb fe fond St tombe fous les charbons , en entraînant l’argent St l’or avec lefquels il a plus d’affinité qu’avec le cuivre^ Après cette opération , qu’on nomme liquation, les pains fe trouvent confidérableinent dimi- nués St tout déformés. On les expofe à un feu plus fort , St tel que le cuivre commence à fondre pour en féparer exadement tout le plomb ; cette troifième opération s’appelle «/- Jiiage. Le plomb chargé des métaux parfaits , cft porté à la coupelle. A l’égard du cuivre, on le raffine en le faifant fondre dans un creu- fet , St on l’y laifïe un tems fuffifant pour qu’il puiffe rejeter fous la forme d’écume tout ce qu’il contenoit d’étranger. On l’effaie en y trem- pant des verges de fer qui fe recouvrent d’un peu de cuivre , & c’efi à la couleur rouge plus ou moins éclatante qu’on juge de fa pureté. Ou coule le cuivre raffiné en plaques , ou on la fépare en rofettes. Pour former unerofette, on enlève avec foin les feories qui couvrent le rrHtsT. N AT. ET DE Chimie. 323 cuivre en fufion ; on laitfe figer la furface du métal lorfqu’elle n’ett plus fluide, c i applique delTus un balai humide ; Pimprefîion du froid le fait re (Terrer ; la portion qui s’eft congelée fe détache non-feulement des bords du creufet, mais du relie du métal fondu , & on l’enlève avec des pinces. On continue de débiter ainlî en rofettes la plus grande partie du cuivre con- tenu dans le creufet. La portion qui relie au fond fe nomme le roi. Les pyrites de cuivre qui contiennent peu de métal , ne s’exploitent que pour en tirer du foufre & du vitriol . A Saint-Bel & dans plu- fieurs autres endroits , on les grille & on les diüille pour en féparer le foufre. Pendant le grillage , une portion d’acide fulfurique réagit fur le métal , le diflout & commence à former du fulfate de cuivre. Les pyrites grillées font enfuite expofées à l’air, 8c lorfque la vitriolï - féition eft achevée, on leffive les pyrites effleu- ries , on filtre la leffive, 8c on obtient par l’é- vaporation 8c la criflallifation un fel bleu rhom- boïdal, nommé vitriol de cuivre , vitriol bleu , couperofe bleue ou vitriol de Chypre. Nous en parlerons en examinant les combinaifons de ce métal , fous le nom de fulfate de cuivre. Le cuivre expofé au feu prend des couleurs à peu près comme l’acier i il devient blçuj X ij 524 Ê L i M 2 N s jaune, & enfin violet. I! ne Te fond que lorf- qu’il efi bien rouge. Quand il efi en belle fu- fion , il paraît recouvert d’une flamme verte ; il bout & peut fe volaiilifer , comme on l’ob-. ferve dans les cheminées des fondeurs. On trouve au ffi dans les creufets où on l’a fifit fonr dre , des fleurs de cuivre. Si l’on jette ce métal en limaille fine à travers les flammes , il leur donne une couleur bleue & verte • on s’en fert dans l’artifice, à caufe de cette propriété. Si oh laifle refrodir lentement ce métal fondu , & fi , lorfque fa furface fe fige, on décante la portion qui efi encore fluide, celle qui adhère aux parois du creufet ou du têt à rôtir employé dfins cette expérience , fe trouve criflallifée en pyramides d’autant plus régulières & volumi- neufes , que le métal a été en fufion plus com- plète, & que fort reffoidiflement a été plus mé- nagé. Ses pyramides font quadrangulaires , 8c elles paroiflent être formées par un grand nom- bre d’oélaëdres implantés les uns fur les autres. -Le cuivre chauffé avec le concours de l’air, brûle à fa furface & fe change en un oxide d%p rouge noirâtre, à mefure qu’il abforbe la baffe tdfe” l’air vital. On obtient aifément cet oxide -en «faïfant rougir une lame de cuivre, 8c en la frappant en fuite' avec un marteau • il fe fépave fous la forme, d’écailles. La même choie . A i v b’HisT. Nat. et de Chimie. ^ a lieu , fi apres avoir fait rougir une lame de cuivre , on la trempe dans l’eau froide ; le refierrement fubit des parties du métal facilite la réparation de la portion d oxide qui en couvre la furface. Cet oxide tombe au fond de l’eau ; on le' nomme écailles ou battitures de cuivre . Comme le cuivre n’eft pas complè- tement oxide , on peut le brûler de nouveau fous la mouffie d'un fourneau- de coupeue ; il prend alors une couleur rouge brune abez fon- cée; pouffe à un feu violent , il fe fond en un yerre noirâtre ou d’un brun marron. L oxide de cuivre peut être décompofé & prive de l’oxigène qui lui ôte fes propriétés métalliques, par les lmiles , les réfines , &c. Les battitures font réduélibles en partie par elles -mêmes, puifque les fondeurs qui les achètent des chau- dronniers , fe contentent de les jetter dans de grands creufets fur du cuivre fondu, avec lequel elles s’incorporent en entrant en fuffo'FP. Ils fui- vent le même procédé pour fondre la limaille. L’oxide de cuivre paroît pré Tenter quelques propriétés faiines , mais on n’en a point encore reconnu la nature. L’air attaque le cuivre d’autant plus facile- ment, que ce fluide efi plus chargé d’humidité & plus altéré; il le convertit en une rouille ou oxide vert qui paroît avoir quelques qualités X iij $25 È L é M E N 9 falines , car il a de la faveur , & il efl attaqué par l’eau; c’efl pour cela que les anciens chi- mifles admettoient un fel dans le cuivre. Cette rouille a cela de remarquable , qu’elle n’attaque jamais que la furface du cuivre, & qu’elle fem- ble même fervir à la confervation de l’intérieur des malles de ce métal ; comme on peut en juger par les médailles 8c par les flatues anti- ques , qui fe confervent très-bien fous l’enduit de rouille qui les couvre. Les antiquaires ap- pellent cette croûte patine , 8c ils en font beau- coup de cas , parce qu’elle attelle la vétuflé des pièces qui en font recouvertes. Plulieurs artilles , 8c en particulier les italiens , favent imiter cet enduit fur le cuivre , 8c contrefaire les bronzes antiques. L’oxidation du cuivre par Pair humide paroît être due à l’eau très-divifée. Cependant ce fluide ne paroît point attaquer le cuivre , qui ne le décompofe pas comme le fer à une haute tem- pérature ; il femble que ce métal foit plutôt oxide par l’eau froide , car on fait qu’il efl plus dangereux de laifler refroidir des liqueurs dans les vaifleaux de cuivre , que de les y faire bouil- lir , parce que tant que la liqueur efl bouillante 8c le vafe chaud , la vapeur aqueufe ne s’atta- che point à fa furface ; mais lorfque le vafe efl froid, les gomelettes d’eau qui adhèrent à I d’HisT. Nat. et de Chimie. 327, Tes parois , fembîent le réduire en oxide vert. C’ett à l’air & à l’acide carbonique qui y eft répandu , qu’il faut attribuer cette oxidation ; car en diflillant cette rouille de cuivre à l’ap- pareil pneumato - chimique , j’en ai retiié de l’acide carbonique. Le cuivre ne s’unit point aux matières ter- reufes; fon oxide facilite leur fufion 8c forme avec elles des verres bruns plus ou moins foncés. La baryte , la m’agnéfie 8c la chaux n ont point une adion marquée fur le cuivre , 8c on ne connoît point l’adion de ces fubflances fui l’oxide de ce métal. Les alcalis fixes caufliques mis en digeflion à froid avec la limaille de cuivre , prennent au bout de quelquè tems une couleur bleue très- légère; le cuivre fe couvre dune poufiière dô la même couleur. Ces diüblutions- sopctent mieux à froid qu’à chaud , fui vaut M. Monnet. 11 efl cependant efleritiël d’obferver que ce chimille a fait ces combinaifons avec le car- s bonate de potaflTe, 8c non avec 1 alcali fixe pur ; ce dernier paroît avoir beaucoup plus d’adion fur le cuivre; mais les uns & les autres de ces Tels ne font que favorifer & accélérer la précipitation de l’oxigène atmofphérique dans le cuivre , car fans le contad de l’air l’oxida-* tion de ce métal n’a pas lieu. X iv $28 Ê L Ê M B, ; N S Ce fait efl fur -tout très-remarquable dans l’adion de l’ammoniaque qui di (Tout a iïez rapi- dement le cuivre. Ce Ici mis en digefl-ion fur la limaille de cuivre avec- Je- contact de l’air, fe colore au bout de quelques heures en un bleu foncé de la plus grande beauté ; il; ne dif- fout cependant que tics peu de cuivre. J’ai Obfervé les phénomènes de cette di Ablution pendant un an. j’ai mis dans un petit flacon de l’ammoniaque caullique fur de la limaille de cuivre;, ce flacon a été. fou vent débouché; au bout de quelques mois . la fur face de ce métal ctoit couverte d’un oxide bleu, les pa- rois | du flacon ctoi-oqt enduites d’un oxide d’un bleu pâle,, Ja paptiedjilÿneure du flacon qui coiueuoit le cuivre, ofti-ità la furface du verre un oxide brun dont le haut étoit jau- nâtre. Cette liqueur perd, prefqu’entièrement fa couleur Jorfqu’el-le eÜ rei fermée ; il lufîit de déboucher le flacon pour la faire reparaî- tre ; elle ne pré fente ce phénomène, d’une manière bien marquée , que dans les commen- cemens , A lorfqu’e’le ell décantée. de deffus le cuivre»' Si la diffolution efl ancienne,, cV fl elle contient encore le cuivre , fa couleur efl d’un beau bleu, quoique dans des va idéaux fermés; cependant en l’expofai t à î’air, elle fe fonce davantage. On reconnoît bien roanifefle- ■* »■ b*Hist. Nat. ET de Chimie. 3 29 ment dans ces phénomènes l’influence de 1W gène atmofphérique. Lorfqu’on évapore lentement la diffolutipn de cuivre par l’ammoniaque,- la plus gi aride partie de ce fel fe diflrpe , une portion relie Fixée avec l’oxide de ce métal , & Fe depofe en criRaux mous , ainfrquel’a obfervé M. Monnet. M. Sage allure qu’on peut en obtenir de t res- beaux criRaux par une évaporation, lente, il les compare à l’azur de cuivre naturel. Cependant ce dernier ne donne pas d ammoniaque loi F qu’on le chauffe; il n’eff, pas di Rb lubie dans l’eau ; il ne s’effleurit point à l’air , comme celui qui eft préparé par l’art. M. Baume dit que ce compofé forme des criRaux t-.cs-biiRaus & d’un très-beau bleu. Cette diRolution expo- fée à l’air fe defsèche affez vite , & laide, une matière d’un vert de pré qui ifeR qu’un oxide vert de cuivre. M. Sage croit que c’eR-là l’ori- gine'de la malachite. Mais cet oxide ne donne pas à beaucoup près la même quantité d’acide carbonique. Si l’on verfe un acide dans la diOTo- lution du cuivre par l’ammoniaque liquide, il ne s’y forme que peu de précipité, mais la couleur bleue difparoît totalement & fe change en un vert pâle très-léger. Ce phénomène qui a été obfervé par MM. Pott & Monnet , indi- que qu’il n’y a que très-peu d’oxide de cuivre 530 É L É M E N S dans l’ammoniaque , & qu’il efl rediffous pâr l’acide ou par le Tel ammoniacal formé par l’ad- dition de l’acide. On peut cependant faire repa- roître la couleur bleue , en ajoutant de l’am- moniaque dans le mélange. L’oxide de cuivre fait par le feu , & tous les autres oxides de ce métal fe diffolvent fur -le-champ dans l’ammo- niaque pure , & ce fel peut fe charger par ce procédé d’une bonne quantité de ce métal. Il prend fur-le-çhamp la plus belle couleur bleue; c’efl pour cela qu’on l’a propofé comme une pierre de touche , pour reconnoître la plus petite portion de cuivre dans toutes les matières dans lefquelles on foupçonne fon exiffence. L’oxide de cuivre ammoniacal ou l’ammo- niaque unie à l’oxide de cuivre , fe décom- pofe dans fes deux compofans lorfqu’on le chauffe fortement ; l’oxigène quitte le cuivre pour s’unir à l’hydrogène de l’ammoniaque & pour former de 'l’eau , le cuivre repaffe à l’état métallique , & l’azote , autre principe de l’am- moniaque, fe dégage dans l’état de gaz. Cette expérience efl une de celles qui a fervi à M. Berthollet pour trouver la nature de l’ammo- niaque ; il paroît qu’il s’y forme auffi un peu d’acide nitiique, par l’union de l’azote de l’am- moniaque avec une portion de l’oxigène du cuivre. te'Hisr. Nat. et de Chimie. 31* L’acide fui torique n’agit fur le cuivré qu’nu-i tant qu’il eft concentré & bouillant ; il fe dé- gage beaucoup de gaz acide fulfureux pendant la diffolution.Lorfqu’elle eft achevée ,on trouve une matière brime en bouillie qui contient de l’oxide de cuivre , & une portion de cet oxice combihé avec l’acide fulfurique. En la leflivai t & en 'filtrant la lefîive , on a une diflolution bleue-, fi on la fait évaporer à un certain point, 8c fi on la laiffe refroidir , elle fournit des cru- taux rhomboïdaux alongés , d une belle couleur bleue ; c’eft du fulfate de cuivre. Si au lieu < e faire évaporer cette dilfolution , on la laiffe long-tems expofée à l’air , elle donne des crif- taux; mais il s’en précipite un oxide vert , cou- leur que prennent tous les oxides de cuivre formés ou féchés à l’air. Le fulfate de cuivre a une faveur ftiptique très-forte ; elle va même jufqu’à la cauflicité. Lorfqu’on l’expofe au feu, il fe fond très-vite; il perd fon eau de criflallifation , 8c devient d’un blanc bleuâtre. Il faut une chaleur très- forte pour en féparer l’acide fulfurique qui fem- ble adhérer beaucoup plus à l’oxide de cuivre qu’à celui de fer, quoique le fer décompofe les dilTolutions de cuivre à la vérité par une autre attra&ion , celle du fer pour l’oxigène. Le fulfate de cuivre eft décompolé par la 332 Élément magnéfie & par la chaux ; le précipité formé par ces deux fubüances , cil d’un blanc bleuâ- tre ; fi on le sèche à Pair , il devient vert : voilà pourquoi quelques chimiftes difent que les précipités de fulfate de cuivre font verts. Il en eil abfolument de même de ceux que l’on obtient par les alcalis fixes dans différens états ; ils font d’abord bleuâtres & prennent une couleur verte en fe féchant : peut-être eil - ce ainfi que fe forme le vert de mon- tagne. Il eil effentiel d’obferver que lorfqu’on précipite le fulfate de cuivre par la diifolution de^carbonate de potafle, il ne s’excite pas d’ef- fervc^ence; ce qui indique que l’acide carbo- nique s’unit très- bien aux oxides de cuivre -, phénomène que ne préfentent pas toutes les difiblutions métalliques. L’ammoniaque préci- pite de même en blanc bleuâtre la didolution de fulfate de cuivre ; mais le mélange prend bientôt une couleur bleue très-foncée , parce que l’ammoniaque diiTout à mefure le cuivre précipité , il 11e faut même que très-peu de ce fel pour redi (foudre tout l’oxidë de cuivre fé- paré de l’acide fulfuricjue. L’acide nitrique diTout le cuivre à froid avec rapidité. Il fe dégage de cette diffolution beau- coup de gaz nitreux très -rutilant. C’ellun moyen que M, Priellley a employé pour obtenir ce gaz 1 d’Hist. Nat. et de Chimie. 333 très-fort. Une portion de ce métal, réduite à l’état d’oxide , fe précipite en poudre brune ; on la fépare par le. filtre. La diffolution filtrée eft d’un bleu beaucoup plus foncé que celle par l’acide fulfurique ; ce qui indique que le cuivre y eft plus oxidé. Si on l’évapore avec précau- tion , elle criftallife par le refroidiflement. Mac- quer eft un des premiers chimiftes qui aient reconnu cette propriété , dans fon mémoire fur la diftolubilité des fels dans l’alcohol. Si fes criftaux fe forment très-lentement , ils oftrent des parallélogrammes allongés \ s ils fe dépo- nent plus vite , ils font en prifm.es hexaèdres dont la pointe eft obtufe , irrégulière , <8t qui imitent des faifceaux d’aiguilles divergentes . en- fin , fi on évapore trop fortement cette diffo- lution , elle ne donne qu’un magma fans forme régulière : c'eft rans doute ce qui a fait due a quelques chimiftcv que cette diffolution n étoit point fufceptible de criftallifer. Le nitrate de cuivre eft d’un bleu très- éclatant 5 il a une fa- veur tellement cauftique , qu'il pourroit être employé pour ronger les excroiffances qui vien- nent fur la peau. Il fe -fond , fuivant M. Sage a à une température de vingt degrés du thermo- mètre de Réaumur. Il détonne fur les charbons ardens; mais comme il contient beaucoup d eau, ce phénomène n’eft que peu fenlible. Lorfqu oh 334 E L £ M E N s le fond dans nn creufet , i! exhale beaucoup de vapeurs nitrenfes , qu’on peut recueillir en le diflillant ; quand il eft defleché , fa couleur eft verte; en le chauffant davantage il devient brun; ce n’efl plus alors qu’un pur oxide de cuivre* Je l’ai diÜillé à l’appareil pneumato-chimique , il m’a donné beaucoup de gaz nitreux , un peu d’acide carbonique , & un peu d’air vital ; il a été réduit par cette opération à l’état d’un oxide brun. Le nitrate de cuivre attire l’humidité de l’air. On peut cependant le conferver long-tems dans des vaifieaux fermés, fl fe couvre à l’air chaud & fec , d’une efHorefcence verte. Il eft très-dilToluble dans l’eau , & un peu plus dans l’eau chaude que dans l’eau froide. La diffolu- tion expofée à l’air dans des vaiffeaux plats , ou évaporée rapidement dans un tems fec 8c chaud , laide un oxide vert , comme le font les criflaux de ce fel dans les mêmes circonflan- ces. Elle efl. précipitée par la chaux en bleu pâle ; par les alcalis fixes en blanc bleuâtre ; par l’ammoniaque en floccons d’une même cou- leur, qui fe diffolvent très-vite, 8c donnent à la liqueur un bleu foncé trcs-brillant ; par les ful- fures alcalins en brun rougeâtre , fans odeur fétide *, par la teinture de noix de galle en vert olive. L’acide fulfurique décompofe auffi le ni- trate de cuivre , 8c ou obtient des criftaux de d’Hist. Nat. et de Chimie. S3Î jnlfate de cuivre , fi ou a employé cet acide très- concentré. Stahl avoit annoncé cette décompo- fition ; M. Monnet l’a confirmée depuis , & j’ai eu occafion de l’obferver plufieurs fois. On a dit que le fer a plus d’affinité avec la plupart des acides , que n’en a le cuivre -, parce qu’en plongeant une lame de ce métal dans une dif- folution de cuivre par les acides & en particulier par l’acide nitrique , le cuivre fe précipite fous fa forme métallique , & colore la furface du fer; mais cette précipitation dépend plutôt de ce que le fer a plus d’affinité avec l’oxigène que n’en a le cuivre ; alors celui-ci , privé de ce principe, ne peut plus refier uni à l’acide, tan- dis que le fer oxidé s’y combine facilement. Le fulfate de cuivre préfente le même phéno- mène, & c’efi un procédé que des charlatans ont employé pour faire croire aux perfonnes peu infimités, qu’iis changèoient le fer en cuivre. L’acide muriatique ne diiïout le cuivre que lorfqu’il efi concentré & bouillant ; il ne fe dégage que peu de gaz hydrogène pendant cette diflolution. L’acide muriatique prend une cou- leur verte très-foncée & prefque brune. Cette combinai fon forme un magma très-diiïoluble dans l’eau ; fi on le leffive , l’eau efi d’une belle couleur verte qui difiingue cette diflolution des deux précédentes. En l’évaporant lentement 6c 336 E L i M E N S en la îaiffant refroidir , elle dépofe des enflait* prifmatrques, & allez réguliers fi l’évaporation a été Faite avec précaution ; ils ne préfentent au contraire que des aiguilles très-petites 8c fort aigues , lorfqtie l’évaporation a été trop rapide & le refroidilfement trop fubit. Le nui- riate de cuivre efl d’un vert de pré fort agréa- ble; fa faveur efl cauflique 8c très-aftringente ; il fe fond à une chaleur fort douce , 8c il fe congèle en maffe lorfqu’on le laiffe refroidir. M. Monnet allure que l’acide muriatique y efl très-adhérent , & qu’on ne peut l’en volatilifer qu’à l’aide d'une chaleur très-confidérable; cefel attire fortement l’humidité de l’air ; il eh dé- compofable par les mêmes intermèdes que les fels de cuivre précédées. J’ai obfervé que l’am- moniaque ne diffblvoit point aulïi bien l’oxide de cuivre qu’il avoit féparé de l’acide muriati- que , que celui du fuîfate 8c du nitrate cuivreux. Le bleu qu’il forme alors n’efl pas aufli vif, 8c il relie une portion de cet oxide que l'ammo- niaque ne diiïbut pas entièrement, ce qui pa- roît tenir à l’état d’dxidation plus avancé dans cette diflolution que dans les autres. Les acides fulfnrique 8c nitrique ne décompofent point le muriate de cuivre. Les dillôlutions nitriques de mercure & d’argent le décompofent , & font elles - mêmes déccmpofées dans l’inftant du mélange Délits ï. Nat. et b e Chimié. 337 mélange il fe forme un précipité blanc par h tranfport de l’acide muriatique fur les oxides de mercure ou d’argent > & lo^ide de cuivre s’unit à l’acide nitrique. J’ai cependant obfervé que la liqueur ne prend pas la couleur bleue que doit avoir la diUolution de cuivre par l’a- cide du nitre, & qu’en général l’oxide de cuivre formé par l’acide muriatique ne prend que très- difficilement cette couleur * comme nous l’a- vons déjà vu à l’égard de l’ammoniaque. Il ma paru qu’en général les oxides de cuivre paffent très-facilement du bleu au vert, ét très-diffici- lement du vert au bleu. L’acide muriatique dilTout l’oxide de cuivre avec beaucoup plus de facilité qu’il ne fait le cuivre lui-même. Ce fait a été bien obfervé par Brandi. La dillolu- tion eft d’un beau vert , & elle criflaliife aulît facilement que la première ; ce qui prouve que dans les combinaifons falines métalliques, les métaux font toujours à l’état- d’oxides 4 comme nous l’avons déjà fait oblerver. Le nitre détonne difficilement à l’aide du cuivre. Il faut que ce fel foit fondu, & que le cuivre fou très-chaud, pour que la déflagration ait lieu; encore n’eft-elle que très-fdible. On fait cette opération en jettant le cuivre en li- maille fur du nitre en fufion dans un creufet large , afin que le contaél I oit plus multiplié» J'orne UL X Ê t i m e n î î_orfque le métal efl bien échauffé , on apper- çoit un léger mouvement accompagné d’éclairs peu rapides. Le réfidu eft un oxide d’un gris un peu brun, mêlé avec la potafl'e; on le lave, 1 eau s’empare de l’alcali qui retient un peu de cuivre , & l’oxide de ce métal refie pur. Ii fe fond tout feul en un verre d’un brun foncé & opaque *, il efl employé pour colorer les émaux; on croit que l’alcali efl rendu caullique; mais il n’y a point encore d’expériences exades fur cet objet. Le cuivre décorapofe très-bien le muriate ammoniacal. Bucquet , qui a examiné cette décompofition avec beaucoup de foin , a ob- tenu , en faifant l’expérience à l’appareil pneu- mato- chimique au mercure , fur deux gros de limaille de cuivre & un gros de muriate am- moniacal , cinquante -huit pouces de fluide élaf- tique> dont vingt- fix pouces étoient du gaz am- moniac très-pur , vingt - fix du gaz inflammable détonnant , & fix un gaz méphitique qui étei- gnoit les bougies fans être ablorbé par l’eau, & fans précipiter l’eau de chaux , conféquem- ment du gaz azote provenant de la décom- pofition d’une partie de l’ammoniaque. Il s’efl dégagé un peu d’ammoniaque liquide , d’une belle couleur bleue qui furnageoit le mer- cure. Le réfidu étoit une mafle d’un yert noi- Nàt. et de GîïîMîê. 339 ïâtre dont une moitié a été di(Toute par l’eau* & lui a communiqué une belle couleur verte* caraâère diftinélif du inüriate de cuivré; Pau-* tre moitié offroit une elpèce d’oxide de cuivre brun , formé par l’eau du muriate âmmôhiacal* En répétant cette décômpofition à la dofe de quatre onces de cuivre fur deux onces de mu- riate ammoniacal avec l’appareil ordinaire du ballon > Bucquet a obtenu deux gros dix-huie grains d’ammoniaque liquide bleue , qui faifoit un peu d’effervefcence avec les acides, & con- tenoit un pouce environ d’acide carbonique pac gros» Ce chimille ne favoit abfolument à quoi attribuer ce dernier gaz ; mais je crois qu’il pou- voit venir de quelques impuretés du fel ammo- niac , car ayant répété cette expérience avec du muriate ammoniacal purifié par la fublimation * j’ai eu de l’ammoniaque très-cauftique , & ne faifânt pas la plus légère effervefcence avec les acides» L’oxide de cuivre décompofe aufîi le muriate ammoniacal , & donne à l’ammoniaque qu’il en dégage , une portion d’acide carboni- que qui le rend effervefcent. Cet alcali efl tou- jours bleu , parce qu’il entraîne avec lui une petite portion d’oxide de cuivre auquel il doit cette couleur; Cependant les acides ne précipi- tent pas un atome de ce métal. On prépare en pharmacie deux médicamens avec le muriate y ij 3 40 E L I M E N S ammoniacal & le cuivre , dont le premier a reçu le nom de fleurs ammoniacales cuivreuses , ou d’ens veneris. Ce n’eft autre chofe que du muriate ammoniacal coloré par un peu d’oxide de cuivre. On fait lublirrler un mélange de huit onces de ce fcl avec un gros d’oxide de cuivre dans deux terrines pofées Tune fur l’autre. Tout le muriate ammoniacal fe volatilife fans être décompofé , & il entraîne un peu d’oxide de cuivre qui lui donne une couleur bleuâtre. Le fécond qu’on appelle eau célejle , fe prépare en laifîant féjourner pendant dix à douze heures une livre d’eau de chaux & une once de mu- riate ammoniacal dans une badine de cuivre. La chaux dégage l’ammoniaque qui dilfout un peu de cuivre de la baffine , & fe colore en bleu : on peut faire l’eau cclefie dans un vaif- feau de verre ou de terre V '"en ajoutant un ‘peu de limaille ou d’oxidc de cuivre à l'eau de chaux 8c au muriate ammoniacal. ' î! paroît que le cuivre décompofé le fulfate d’alumine ; car fi on fait bouillir une diffolution de ce fel dans un vailfeau de cuivre 9 il fe dépofe uil peu d’alumine ; 8: lorfqû’on préci- pite cet alun par l’ammoniaque , fa terre prend une petite couleur bleue qui décèle la prëfence du cuivre. On peut auffi attribuer cet effet à l’exccs d’acide que contient toujours le fulfate d’alumine, d’Hist. Nat. et de Chimie. 34r Le gaz hydrogène n’a pas daétion fur le cui- vre ; mais il réduit Tes oxides en leur enlevant l’oxigè.ne , avec lequel l’hydrogène a plus d’af- finité que le cuivre. Ce métal s’unit très-bien au foufre. Cette combinaifon peut fe faire par la voie humide, c’eft-à-dire , en fai Tant un mélange de fleurs de foufre & de limaille de cuivre qu on humecte avec de l’eau; mais elle réuffit beaucoup plus promptement par la voie sèche. On expofe au feu un mélange de parties égales de foutre en poudre 8c de limaille de cuivre dans un creu- fet, qu’on chauffe par degrés jufqu’à le faire rougir ; il réfulte de cette combinaifon une ma fie d’un gris noirâtre , une forte de mette de cuivre qui eft aigre , caftante & plus fufible que le cuivre -, on prépare ce compofé pour la tein- ture 8c pour la peinture fur les indiennes , en flratifiant dans un creufet des lames de cuivre 8c du foufre en poudre , & en chauffant ce creufet comme nous l’avons dit ; on pu! vérifie l’efpèce de matte qui en rémlte , 8c on lui. donne le nom dbe s veneris. Les fulfures. alca- lins une demi- tranfpa- fence ; elle elî molle, s’écrafe & fe coupe facilement ; elle fe fond à la flamme d’une bou- gie. On la trouve triftallifée en cubes , & le plus fôuvent en maffes informes. Elle contient fréquemment des portions d’argent natif. Ou croyoit autrefois qu’elle côntenoit du foufre & de l’arfenic ; mais les minéralogiftes font aujour- d’hui d’accord fur fa nature. MM. Gronftedt, Lehman & Sage , Woulf, Lommer , Berg- man , y ont reconnu la préfence de l’acide muriatique qui s’en dégage par la chaleur. M. Woulf y a reconnu de plus la préfence de l’acide fùlfurique. On la trouve en Saxe, à Sainte-Marie , à Guadal-Canal en Efpagne , & à AlVemont en Dauphiné. 90. La mine ar M. Monnet , qui a vu d’ailleurs que ces précipités font folubles dans les acides , & que les alcalis s'unifient à ces dernières difiolutions fans les précipiter. ^ MM. les académiciens de Dijon ont ajouté à ces faits les obfervations fuivantes. La diffblution d’arfenic n’eft point altérée par la noix de galle; celle du bifmuth donne un, précipité verdâtre ; celle du nickel efi précipitée en blanc V celle de l’antimoine en gris bleuâire ; celle du plomb forme un dépôt ardoifé , dont la furface fe couvre de pellicules mêlées de vert & de rouge ; enfin celle de 1‘étam devient d’un gris fale par le mélange de la noix de galle , & elle donne un précipité abondant, comme mueil agio eux. Nous reviendrons far plufieurs de cesses à l’article delact e B b iv ÊlImens doit pas et te oublie ; c’efl que ce précipité qui efl rougeâtre fe diiïbut très- bien dans î’acide nitrique , & lui donne une belle couleur bleue. L’ammoniaque précipite beaucoup plus abon- damment la difTolution d’or. Ce précipité qui eft d’un jaune brun, & quelquefois orangé, a la propriété de détoner avec un bruit confidé- râble , lorfqu’on le chauffe doucement -, on lui a donné le nom à' or fulminant. L’ammoniaque eft abfolument néceflfaire pour le produire; on peut le former, foie en précipitant par l’alcali fixe une difTolution d’or faite dans un acide niiro-muriatique compofé avec le muriate am- moniacal , ou bien en précipitant par l’ammo- niaque une difTolution d’or faite dans une eau régale compofce d’acide nitrique & d’acide mu- riatique purs. On obtient toujours un quart de plus d’or fulminant , qu’on n’avoit d’or difTous dans Veau régale. Il y a plufieurs précautions gallique, dans ’e règne végétal. N :us dévots obfervec îci que les expériences de IY1. Monnot & des Académi- ciens de Dijon ont été faites avec la décoéh’on de noix de galle , & que celles dont il fera mention dans le règne végétal appartiennent à l’aétion de facile gallique pur fur les difîblutions métalliques, ce qui explique les d'ffé- rences qu’on remarquera entre les refuitats des unes & des autres expériences» d’Hist. Nat. et de Chimie. 393: importantes à prendre , relativement aux ter- ribles effets de l’or fulminant. On doit d aboi re le faire fécher qu’avec précaution & à Uir , fans l’approcher du feu ", parce qui! nefl^pas néceffaire qu’il foit expofé à une forte chaieur pour fulminer. Comme le feul frottement fuffit pour lui faire produire fon explofion , iL faut ne boucher les vaiffeaux qui le contien- nent qu’avec des bouchons de liège. Une malheureufe expérience a appris que les bon chons de criftal expofent , par le frottement qu’ils produifent fur les goulots des flaccons, aux dangers de la fulmination de 1 or qui pent relier dans ces goulots, il efl ai rivé chez IV . Baumé un accident terrible, dont on tiouw le détail dans fa Chimie expérimentale & rai - fonnée. Les chimifl.es ont eu différentes opinions iur la canfe de la détonation de l’or fulminant. M. Baume peu foit qu’il fe formoit dans cette expérience un foufre nitreux , auquel il attri- buoit la propriété fulminante de ce compofe. Mais Bergman a prouvé que cette théorie ne peut être admit e , pmfqu’il efl parvenu a fane de l’or fulminant fans acide nitrique, en diffol- vant un précipité d’or dans de l’acide fulfuri- que , & en le précipitant de nouveau par 1 am- moniaque. Ce n’efl pas non plus du nitrate ÇP4 ÉtÊMENS ammoniacal que peut dépendre la fulmination de l’or , puifqn’en lavant de l’or fulminant avec beaucoup d'eau, qui enleveroit certainement ce fel s’il en contenoit , ce compofé n’a point perdu fa propriété fulminante. En examinant avec attention ce qui fe pafle dans la détona- tion de l’or fulminant, on obferve qu’il s’en- flamme dans l’inftant qu’il éclate. Si on le chauffe fur un feu doux de cendres chaudes , il s'en échappe avant fou explofion des aigrettes brillantes, femblables aux étincelles éleétriques; il détone lorfqu’on l’expofe à l’étincelle pro- duite par la bouteille de Leyde ; une (impie étincelle fans commotion ne rallume pas; enfin, lorfqu’il a fulminé , il laiffe l’or dans fon état métallique. Il paroît donc que c’ert à une ma- tière combtifîible contenue dans l’or fulminant, qu’efl due fa fulmination ; & comme le gaz am- moniacal eft nccefïaire pour la produ&ion de l’or fulminant, il eft reconnu aujourd’hui que c’efl à ce fel qu’il faut attribuer l’explbfion de cette fubflance. Cette théorie eft fondée fur les faits fui vans. i°. M. Berthollet a obtenu du gaz ammoniac, en chauffant doucement de l’or fulminant dans des tubes de cuivre, dont l’extrémité plongeoir, à l’aide d’un fyphon,dans un appareil pneumato- chimique au mercure. Après cette expérience b’Hist. Nat. et de Chimie. "59 î hardie, ior n’étoit plus du tout fulminant, & il étoit réduit en oxide. 2°. En expofant de l’or fulminant à un degré de chaleur qui n’étoit pas capable de le fane fulminer, Bergman lui a ôté cette propriété , en volatilifant peu-à-peu le gaz ammoniac. 30. Lorfqu’on fait détoner quelques grains d’or fulminant dans des tubes de cuivre dont l’extrémité plonge dans 1 appareil pneumato- chimique au mercure , on obtient du gaz azote, quelques gouttes d'eau, 8c l’or fe trouve réduit. M. Berthollet à qui eft due cette expé- rience, penfe que l’ammoniaque efl décompoféè, que fon hydrogène s'unifiant à Poxigène de l’oxide d’or , réduit cet oxide en formant de l’eau , & que le gaz azote devenu libre fe dégage ; c’efl donc à la combuflion de l’hydro- gène 8c au dégagement fubit du gaz azote qu’cft due la fulmination. 4°. L’acide fulfurique concentré , le foufre fondu , les huiles grafïes , l’éther enlèvent la pro- priété fulminante à ce précipité, en s’emparant de l’ammoniaque. Une fingulière propriété de l’or fulminant, 8c qui annonce combien fon adion efl forte, c’efl que lorfqu’on le fait fulminer fur une lame de métal , de plomb , d’étain Sc même d’argent , il fait une marque ou un trou fur cette lame 59Ô É L é M E N s enfin il nè paroît pas fufceptible de s’alltimef dans des vaifTeaux fermes & trop refterrés , puif- que renfermé dans une boule de fer & chauffe fortement , il n’a produit aucune explofion , au rapport de Lewis. Ce phénomène parok dé- pendre de ce qu3il faut un efpace pour permettre le dégagement du gaz azote. Bergman , qui ne connoîffbit pas bien la nature du gaz dé- gagé pendant la fulmination de ce précipité, & qui le regardent comme de l’air pur entraînant un peu d’ammoniaque , a donné une explication femblable des expériences faites fur eet objet, devant la Société Royale de Londres. Voyez la belle differtation de ce chimvfte , de calce auri fulminante , Opufcules , tom. II, Upf. 1780, pag. 133. M.Berthollei a découvert que l’oxide d’argent précipité de l’acide nitrique par la chaux & digéré avec de l’ammoniaque, qu’on en fépare quand cet oxide a pris une cou- leur noirâtre , acquiert la propriété de détoner non-feulement par une chaleur très -peu fupé- rieure à celle de l’eau bouillante , mais encore par le feul frottement même très- léger d’un corps quelconque. Voilà donc un argent ful- minant bien plus fingulier encore que l’or ainfi nommé , 8< dont la fulmination efi due à la même enufe. L’ammoniaque décantée de deffus cet oxide, dépofe par l’évaporation lente des d’ïÎtst. Nat. et de Chimie. 39? petits criftaux brillans , lamelléux , qui ont la propriété fulminante, même au fond de leau par le fimple frottement. La diflolimon d’or eff précipitée par les fui- Lires alcalins. Tandis que 1 alcali fixe s unit à l’acide , le foufre qui fe précipite le combine a l’oxide d’or ; mais cette combinai Ion ell peu durable ; il fuffît de chauffer l’or uni au foufre, pour volatilifer ce dernier , & obtenir le metaî parfait dans fon état de pureté. Obfervons ici que l’or précipité de fa diffolution par un in- termède quelconque & réduit , efl parfaitement pur, ôc qu’il l’ell meme plus que 1 or die depait , parce qu’il eü féparé de l’argent qu’il auroit pu con- tenir par la précipitation die ce dernier en muriate, qui a lieu pendant la diffolution même de l’or , comme nous l’avons fait remarquer plus haut. L’or n’efl pas le métal qui a le plus d’affinité avec l’acide nitro-muriatique ; prefque toutes les autres fubflances métalliques font au contraire capables de le féparer de fon diffolvant. Le bifmuth , le zinc & le mercure précipitent l’or. Une lame d’étain plongée dans une diffolution d’or fépare ce métal parfait en une poudre d’un violet foncé , qu’on appelle précipité pourpre de Caffius. On prépare ce précipité , qu’on em- ploie pour peindre fur les émaux & fur la por- celaine , en étendant- une difTohuion d’étain par E L é M E N s l’acide nitro- muriatique dans une grande quantité d’eau diflillée, & en y verfant quelques gouttes de diflolution d’or* Il fe forme furfle-champ > lorfque les difTolutions font bien chargées , un précipité d’un rouge cramoifî , qui devient pourpre au bout de quelques jours; ce préci- pité efl léger, & comme mucilagineux ; on filtre la liqueur, on lave le précipité, & on le fait fécher. Cette matière eil un compofé d’oxide d’étain & d’oxide d’or; fa préparation eft une des opérations les plus fingulières de la chimie, par la variété & l’inconflance des phénomènes qu’elle préfente. Tantôt elle fournit un précipité d’un beau rouge ; quelquefois fa couleur ifefl qu’un violet foncé ; & ce qu’il y a de plus étonnant , il arrive allez fouvent que le mélange des deux diflolutions n’occafionne aucun pré- cipité. Macquer , qui a très - bien connu ces variétés , obferve qu’elles dépendent prefque toujours de l’état de la diflolution d’étain que l’on emploie. Si cette diflolution a été faite trop rapidement, le métal y efl trop oxidé, & elle en contient trop peu pour que l’acide de la diflolution d’or puifle agir fur lui ; car c’ell à l’aélion de cette dernière fur l’étain qu’il attribue la formation du précipité pourpre de Cajjîus - On doit donc pour réuiïir, fuivant lui , dan» cette opération , n’employer qu’une diflolution d’Hist. Nat. et de Chimie. 399 faite très -lentement , 6c de forte quelle con- tienne le plus cl etain pofTible fans que ce métal y fait trop oxidé. Voici, d’après cela , comment il prefcrit de préparer le précipité pourpre» On di [fondra l’étain par parcelles dans un acide mixte fait avec deux parties d’acide nitrique Se une partie d’acide muriatique, affoibli avec poids égal d’eau diftillée; d’une autre part, 011 di (Tondra à l’aide de la chaleur de l’or très-pur dans un autre acide mixte compofé de trois parties d’acide nitrique , & d’une partie d’acide muriatique. On étendra la diiTolution d’étaia dans cent partiesjd’eau diflillée ; on la partagera en deux portions ; on ajoutera à l’une des deux une nouvelle quantité d’eau , 6c l’on eiïaiera l’une 6c l’autre avec une goutte de didblution d’or; on obfervera alors celle qui donnera le plus beau rouge, pour les traiter toutes deux de la même manière , alors on y verfera la diffolution d’or jufqu’à ce qu’elle ceffe d’y oc- cafionner de précipité. Le plomb , le fer, le cuivre 6c l’argent onr auiïi la propriété de féparer l’or de, fa diffblu- tion. Le plomb 6c l’argent le précipitent en un pourpre fale 6c foncé. Le cuivre 6c le fer le féparent avec fon brillant métallique; la diffo- lution nitrique d’argent 6c celle de fulfate de fer occalionnent aufii un précipité rouge ou brun dans la diffolution d’or* ^00 Ë t É M E N s Les feîs neutres n’ont pas cfa&ion bien mar- quée fur l’or. On obferve feulement que le borax fondu avec ce métal altère fa couleur & la pâlit fingulièrement, tandis que le nitre 6c le muriate de fonde la rétablirent. La didolu- Itônde borax verfée dans une diiTolution d’or, y forme un précipité d’acide boracique chargé de molécules de ce métal. Le foufre ne peut pas s’unir avec l’or, & on fe fert avec avantage de ce minéral pour féparer les métaux unis avec l’or, mais fpécia- lem’ent l’argent. On fait fondre cet alliage dans un creufet ; lorfqu’il eft fondu' , on jette des fleurs de foufre on du foufre en poudre à fa furface; cette fubftance fe fond & fe combine avec l’argent, & vient nager en fcorie noirâtre àu-deflus de l’or. Il faut obferver qu’on ne fé- pnre jamais exactement ces deux métaux par cette opération , qu’on appelle départ fec , 6c qu’on ne l’emploie que fur une maffe d’argent qui contient trop peu d’ôr pour pouvoir in- demnifer des frais du départ à l’eau-forte. Le fulfure alcalin dilfout l’or complètement. Stahl penfe même que c’efl par ce procédé que Moyfe a fait boire aux Ifraëlites le veau d’or qu’ils adoroient. Pour faire cette combinaifon, on fait fondre rapidement un, mélange de par- ties égales de foufre & de potafïe avec un hui- » tiè me syHisT. Nat. et de Chimie. 4011 tième du poids total d’or en feuille. On coule cette matière fur un porphyre; on la pulvérife, on y verfe de l’eau diftillée chaude; elle forme une diiTolution d’un vert; jaunâtre qui contient un fuîfure de potafté aurifère. On peut préci- piter ce métal par le moyen des acides, & le féparer du foufre qui fe dépofe avec lui , en le chauffant dans un vaifiTeau ouvert. L’or fe combine avec la plupart des matières métalliques, & préfente plu heurs phénomènes amportans dans ces combinai fons. Il s’unit à l’arfenic. Ce métal le rendaîgre, caftant , & il en pâlit beaucoup la cou» leur. On a de la peine à féparer par fanion du feu les dernières portions d’arfenic de cet alliage ; il femble que l’or lui donne de la fixité. On ne connoît point fon alliage avec le cobalt. Il s’unit au bifmitth , qui le blanchît en le rendant aigre & caffant. Il en eft de même dit nickel & de l’antimoine ; comme ces mé- taux font tous très - oxidables & la plupart fufibles, il efl très-aifé de les féparer d’avec î or par 1 aétion du feu combiné avec celle de l’air. Le fulfure d’antimoine a étc vântê par les alchimiffes pour purifier i’or; lorfqü’on le fond , Tome 111 . q q Élément avec ce métal allié de quelques fubflances me^ talliques étrangères , comme le cuivre , le fer ou l’argent , le foufre de l’antimoine s’unit à ces fubflances , & les fépare d’avec l’or que l’on retrouve au fond du vaifleau. Cet or eft allié d’antimoine on le purifie en le chauffant jufqu’aii rouge blanc. L’antimoine fe volatilife 5 les dernières portions demandent un feu très- violent pour être enlevées , & l’on obferve que le métal entraîne quelques portions d’or dans fa volatilifation. Ce procédé fi célèbre parmi les alchimifles , n’a donc point d’avan- tage fur celui dans lequel on n’emploie que le foufre. L’or s’allie facilement au zinc ; il en réfulte un métal mixte , d’autant plus caflant 8c d’au- tant plus blanc que le métal efl en plus grande proportion. Cet alliage fait à parties égales efl d’un grain très-fin , 8c il prend un fi beau poli qu’il a été recommandé par Hellot pour faire des miroirs de télefcopes qui 11e font point fu- jets à fe ternir. Lorfqu’on fépare le zinc de l’or par la calcination , l’oxide que donne ce métal efl rougeâtre , & il entraîne un peu d’or; comme l’a annoncé Stahl. L’or a plus d’affinité avec le mercure que les autres fubflances métalliques , 8c il efl fuf- cepuble de décompofer leurs amalgames. Il b’Hîst. Nat. et de Chimie. 403' s’unit au mercure dans toutes fortes de pro- portions , & il forme une amalgame d’autant plus colorée & d’autant plus folide , que l’or y eft en plus grande proportion. Cette amalgame fe liquéfie par la chaleur , & fe criflallife par ie refroidiflement , comme prefque tous les compofés de ce genre ; on ne connoît pas bien îa forme régulière quelle elt fufceptible de prendre. M. Sage dit que ces criffaux reffem- blent à l’argent en plume , & qu’à la loupe ils parodient être des prifmes quadranguîaires ; il affure auffi que le mercure acquiert de la fixité dans cette combinaifon. On emploie cette amal- game pour dorer en or moulu. Quoique for ne foit pas fufceptible de s’oxî- der par l’adion du feu de nos fourneaux jointe au contaél de l’air, il le devient cependant lorf- nn’on le chauffe conjointement avec le mercure. En mettant du mercure avec un quarante-hui- tième de fon poids d’or dans un matras a fond plat , dont on a tiré le col à la lampe d’émail- leur, pour n’y laifTer qu’une très petite ouver- ture , & en chauffant ce mélange dans un bain de fable , comme on le fait pour préparer l’o- xide de mercure nommé précipité per fe , ces deux matières métalliques s’oxident en méme- iems j elles fe changent en une poudre rouge foncée , & on obtient mênye ce double oxide Çc ij -404 E r i m e N s beaucoup plus promptement que celui de cure chauffé feul , fuivant M. Baum.é. Voilà donc un métal qui , quoique très-diffi- cile à oxider feul , hâte & facilite i’oxidation d’une autre matière métallique , qui par elle- même 11’éprouve que difficilement cette alté- ration. L’or s’allie très-bien à l’étain & au plomb ; ces deux métaux lui ôtent toute fa dudiiité. Son alliage avec le fer ell très-dur , 8c on peut l’em- ployer à former des inflrumens tranchans bien Supérieurs à ceux qui font faits avec l’acier pur. Ce métal mixte efl gris 8c attirable à l’aimant, Lewis propoie de le fervir d’or pour fouder proprement 8c très-folidernent les petites pièces ti’acier. L’or fe combine au cuivre qui lui donne une couleur rouge 8c beaucoup de roideur, & le rend plus fufibîe. Cet alliage efl fixé à différentes proportions pour les pièces de monnoie , la yaiffelle & les bijoux. Enfin l’or s’allie à l’argent , qui lui ôte fa couleur 8c le rend très pâle. Cet alliage ne fie fait cependant qu’avec une certaine difficulté, s caufe de la différente pefanteur de ces deux métaux , ainfi que l’a fait obferver Homberg, qui les a vu fe féparer pendant leur fufion. L’alliage de l’or & de l’argent forme l’or vendes bijoutiers* syH'is?. Nat. ët ï>e C'tiimt. Comme l’or eft d’un ufage très-étendu, com- me il eft devenu avec l’argent , par une conven- tion humaine , le prix de toutes les autres pro duétions de la nature & de lavt, il eh très- important de pouvoir connoitre le degré du pureté de ce métal précieux , aiin de ptevenir les excès auxquels la cupidité pounoit poiter, Sc de faire en forte que la valeur de toutes les malles ou pièces d’or répandues dans le com- merce, foit toujours la même. Des loix jultes & févères ont prefcrit les dofes des alliages- qu’il eft néceftarre d’employer pour donner de la dureté , de la roideur à l’or deftiné à former des uftenfiles dans lefquels ces propriétés font nécelTaires. La chimie a fourni des moyens de s’aftiirer de la quantité de métaux imparfaits introduits dans l’or. L’opération que 1 on fait pour cela s’appelle ejfai du titre de l or. Ou coupelle vingt-quatre grains de l’or que 1 on veut eftayer , avec quarante-huit grains d’argent & quatre gros de plomb pur. Ce dernier en- traîne dans fa vitrification les métaux oxida-- blés , tels que le cuivre , Sec, L’or refte com- biné avec l’argent après la coupellation*. On fépare ces deux métaux par une opération qui porte le nom de départ. Départir un alliage d’or & d’argent , c’eft féparer les deux métaux à i’aide d’un difiblvant qui agit fur l argent Ç c n\ V/ ^0<5 Ê L i M E N S fans toucher à l’or. On fe fert ordinairement de l’eau- forte. On a ajouté de l’argent à l’or, parce que l’expérience a appris qu’il étoit né- ceffaire que l’or contînt au moins le double de fon poids d’argent, pour que l’acide nitrique pût diffoudre entièrement ce dernier métal. Comme on ajoute fouvent trois parties d’ar- gent à l’or , on appelle cette opération inquart ou quartation , parce que l’or fait en effet le quart de l’alliage. Voici comment on fait le départ. Après avoir applati fous le marteau 8c paffé t&u laminoir le bouton de retour, c’eft-à-dire, l’alliage d’argent & d’or coüpellé, en ayant foin de le chauffer 8c de le remuer fouvent afin qu’il ne fe fendille pas, & qu’il ne s’en fépare pas quelques portions par lecrouiffement de la maffe , on le roule fur une plume , 8c on en forme une efpèce de cornet ; on le met dans un petit matras 8c on verfe deffiis cinq à fix gros d’eau-forte précipitée à 32 degrés, éten- due avec moitié de fon poids d’eau. On chauffe doucement le vaiffeau jufqua ce que l’effer- vefcence fort bien établie; alors l’argent fe dif- four, Je cornet prend une couleur brune. Lorf- que l’aélion de l’acide elî paffée , on décante ce liquide 8c on en remet environ une demi-once à 30 degrés qu’on fait bouillir fur le métal pour b’ï-îisT. N aï. t* de Chimie. '4°7 Enlever tout l'argent. Cette fécondé opération fe nomme la reprife. On décante 1 acide, on lave le cornet qui eft devenu très -mince & criblé d’un grand nombre de trous ; on le fait tomber avec l’eau dans un creufet, qp décante l’eau , on fait rougir le creufet , & 1 or recuit jouit alors de toutes fes propriétés. On le pèfe, & on juge par fon poids de l’alliage qnil con- îenoit , ou de fon titre. Pour connoître exacte- ment la quantité de métaux étrangers que 1 or peut contenir, on fuppole une mafre quelcon- que d’or compofée de vingt-quatre parties quoi! appelle karats, 8c pour plus de précifion , on divife chaque karar en trente-deux parties y qu’on nomme trente-deuxièmes de karat- Si l'or qu’on a e frayé a perdu un grain fur vingt- quatre , c'ctoit de 1 or a vingt-trois kaiats , s il a perdu un grain 3c demi , cétoit de lor à- vingt -deux karats feize trente - deuxièmes , & ainlr de fuite. Le poids que Ion emploie dans les e frais d’or ell nommé poids de femelle , & eft ordinairement de vingt-quatre grains, poids- de marc ; il eft divifé en vingt-quatre karats „ qui font eux-mêmes fubdivifés en trente-deux parties. On fe fert aufri de la demi-femelle» qui pèfe douze grains , mais divifée en vingt- quatre karats , & le karat en trente-deux trente- deuxièmes». C c îy #03 Ê L é M E N S Il y a deux obfervations importantes à faire fur l’opération du départ. 3°. Quelques éhimifles ont cru que l’acide nitrique dilfolvoit un peu d’or avec l’argent. M. Baume a obfervc (pag» z ij & 1 18 du tome III de Ja Chimie ) que l’argent de départ rete- noit une quantité allez notable d’or. Sur deux livres de grenaille fine employée par ce chi- mille pour faire la pierre infernale , il dit avoir féparé ordinairement près d’un demi-gros d’or €;i poudre noire. Cependant , en fai far. t le dé- part avec un acide qui ne foit pas trop con- centré , 8c en ne pouffant pas trop loin la dif- folution , l’or refie pur & intaél , & l’argent n’en retient pas. M VI. de la claie de chimie de l’aca- démie ont été chargés par l’adminiflration d’exa- miner fi , dans le procédé employé pour le dé- part , facile nitrique diifolvoit de l’or; ils ont fait une grande fuite d’expériences , d’après lef- quelles ils ont conclu « que dans le départ pra« » tiqué fuivant les règles & ftifage reçu, il ne » peut jamais y avoir le moindre déchet flic 33 l’or , & que cette opération doit être regar- 53 dée comme portée à fa perfection 33. Cette dccifion extraite du rapport publié par l’aca- démie, efi bien faite pour éclairer le public fur cet objet , & ralïltrer promptement le com- merce. dTÏjst. Nat. et de Chimîh. 40$ û®. Pîtifieüfs docimaftiques , & enu’autres Sehindler & Schlutter, ont penfé que le cornet d’or départi retenoit un peu d argent. Us ont donné à cette portion le nom de furcharge ou inter ‘h ait. MM. Heilot , Macquer & TiHet , chargés d’examiner l’opération des eflfayeurs de la monnoie , ont prouvé qu’il n’en contenoit pao- Cependant M. Sage a dure , dans Ton ouvrage, intitulé l'An d'effayer Vor & V argent , pcige , que l’or en cornet retient toujours un peq d ar- gent , & qu’on peut le démontrer en dilïolvant ce métal dans douze parties d’acide nitro- mu- riatique ; la dififolution refroidie dépofe au bout de quelque tems , 8c fouvent même douze heu- res apres avoir été faite , un peu de muriate d’argent fous la forme d’une poudre blanche. L’or efl employé à un grand nombre d ufages. Sa rareté 8c fon prix empêchent qu’on ne s’en ferve pour faire des uftenfiles 8c des v ai (Te aux comme on en fait avec l’argent ; mais comme fon brillant 8c fa couleur flattent agréablement la vue , on a trouvé l’art de l’appliquer à la furface d’un grand nombre de corps , qu’il dé- fend en même-tems des iirpreiïiuns de l’air. Cet art c-onflitue en général les dorures dont les efpèces font allez variées. On applique lou- vent à l’aide d’une colle des feuilles d’or lue le bois, L’or en chaux fe prépare en broyant £iô É L ë M E IM avec du miel des rognures de feuilles d’or, ert les lavant dans l’eau , & en faifant fécher les molécules d’or qui fe précipitent. L’or en co- quille eft de l’or en oxide délayé avec une eau mucilagineufe , ou une diftblution dégom- mé. On donne le nom d’or en drapeaux à la préparation fuivante. On trempe des linges dans une diftblution d’or : on les fait fécher , on les brûle. Lorfq u’on veut s’en fervir, on trempe lin bouchon mouillé dans ces cendres , & on en frotte l’argent fur lequel l’or très-divifé s’ap- plique facilement. Nous avons déjà parlé de la dorure en or moulu. Pour l’employer , on nettoie bien la pièce de cuivre que l’on veut dorer , à l’aide du fable & d’une eau-forte affaiblie , nommée eau fécondé par les ouvriers*, on la plonge dans une diftblution de mercure très étendue , le mercure qui fe précipite fait adhérer l’amalgame d’or qu’on étend fur la pièce , après l’avoir lavée dans l’eau pour em- porter l’acide. Lorfque l’amalgame eft étendue uniformément, on chauffe la pièce fur les char- bons , afin de volatiüfer le mercure : on ter- mine le travail en paftant fur l’or la cire à do- rer, qui eft compofée de bol rouge , de vert- de-gris j tfalun ou de vitriol martial incorporés avec de la cire jaune , & en chauffant une dernière fois la pièce dorée pour brûler la cire. i d’Hist. Nat. et de Chimie. 4^ Les autres ufages de l’or pour les bijoux*, les galons, font allez connus, Tans quil foit befoin d’y infîfler davantage. Quant aux vertus médicinales qu’on lui a attribuées , les bons médecins s’accordent aujourd hui a les lui re- fufer , & ils penfent que les effets des différens ors potables propofés par les alchimifles, ne font dus qu’aux matières dans lefquelles on mêloit ou Ion diffolvoit ce métal. CHAPITRE XXII. Du Platine. JjE platine, qui n’eff connu que depuis qua- rante ans pour un métal particulier , n a encore été trouvé que dans les minces d’or de l’Amé- rique , & fpccialement dans celle de Santa-fe , près Carthagêne , & du bailliage de Choco an Pérou. Les efpagnols lui ont donné ce nom d’après celui de plata , qui lignifie argent dans leur langue, en le comparant à ce métal dont en effet il a la couleur. Cependant le nom d or blanc paroît lui mieux convenir que celui de petit argent , parce qu’en effet il fe rapproche beaucoup plus de l’or que de l’argent , par la plupart de fes propriétés. Il e*iftoit avant l’époque que nous ayons Ê L i M E N Sf citée, quelques bijoux de platine ; maïs commè ce métal ne peut être fondu & travaillé tout feu] , il efï vraifemblable que les tabatières , les pommes de cannes Sc autres udenfiles de cette efpèce que l’on ven ioit fous le nom de platine, étoient des alliages de ce métal avec quelques fuhftances métalliques qui lui donnent de la fufibilité , comme nous le verrons dans l’hifloire de fes alliages. Le platine qui exifle dans les cabinets , eff fous la forme de petits grains ou de paillettes d’un blanc livide , & dont la couleur tient tout- à la-fois de celles de l’argent & du fer. Ces grains font mêlés de plufieurs fubllances étran- gères i on y trouve des paillettes d’or, du fable ferrugineux noirâtre, des grains qui à la loupe parodient fcorifiés comme le mâche -fer , 8c quelques molécules de mercure. En chauffant ce mélange, on en fépare le mercure; le la- vage enlève le fable 8i les grains de fer, que l’on peut encore féparer par le barreau aimanté; il ne refie plus enfuite que les molécules d’or 8c les grains de platine qu’il efl facile de trier féparément , comme l’a fait Margraf. Si l’on examine à la loupe les grains de platine , les uns paroiffent anguleux , d’autres arrondis 8c applatis comme des efpèces de gallets. En les battant fur un tas d’acier , la plupart s ’appla- d'Hist. Nat. eï de Chimie; qif fcîffent & parodient dudiles ; quelques-uns fe caftent en plufieurs morceaux. Ces derniers exa- minés de près , parodient être creux , & on a trouvé dans leur intérieur des parcelles de fer Sc une pouffière blanche. C’el 1 fans doute à ces atomes ferrugineux contenus dans quel- ques grains de platine , que l’on doit attribuer la propriété d’être artirables à l’aimant , qu’on trouve dans ces grains , quoique féparés exac- tement du fable ferrugineux qu’ils contiennent. La dureté de ce métal paroît fort voifîne de celle du fer. La pefanteur fpécifîque du platine mélangé de toutes les matières étrangères dont nous venons d'e parler, fe rapproche beaucoup de celle de l’or ; il perd dans l’eau depuis un feizième jufqu’à un dix-huitième de fon poids. MM. Buffon 8c Tillet , en 'comparant par le poids un égal volume de platine & d’or réduit en molécules femblables à celles du platine , ont trouvé que la pefanteur fpécifîque de ce dernier étoit moindre d’environ un douzième que celle de l’or. Il eft reconnu par de nouvelles expériences qu’elle excède cette dernière , lorf- que le platine a été purifié par une longue fufîon. Il eft vraifemblable que le platine ne fe trouve pas dans fcs mines tel qu’on nous l’apporte , 8c qu’il ne doit fa forme de grains ou de pail- lettes, qu’aux mouyemens des eaux par lef- 4*4 E L é M E N S quelles il a été entraîné des montagnes dans les plaines. On en a quelquefois trouvé des mor- ceaux affez confidérables , & la fociété de Bif- caye en pofsède un qui efl gros comme un oeuf de pigeon. Comme le platine eft voifin des mines d’or , on y rencontre toujours une cer- taine quantité de ce métal ; quant au mercure qui y efl mêlé , il provient de celui qu’on em- ploie pour extraire l’or. Quoiqu’on vendît depuis long-tems des bi- joux de platine , ce métal n’étoit point connu en particulier. Les ouvriers des mines n’y avoient meme pas fait une attention particulière, & avoient méprifé une matière dont l’afpe& n’avoit rien de flatteur, 8c qui d’ailleurs étoit lî difficile à traiter. C’efl à un mathématicien efpagnol dom Antonio de Ulloa , qui fut du fameux voyage des académiciens françois envoyés au Pérou pour déterminer la figure de la terre , qu’efl due la première connoiiïance qu’on a du platine. Ce lavant en a dit quelques mots dans la relation de Ton voyage publiée à Madrid eu 174S. Charles Wood, métallurgifle anglois, en avoit apporté de la Jamaïque en 1741. Il l’a enfuite examiné, & il a détaillé fes expériences dans les tranfadions philofophiques des années 1749 8c 1790. A cette époque , les plus grands chimifles de l’Europe s’occupèrent à l’enyi de Sd’Hxst. Nat. et de Chimie. 4î| ce nouveau métal qui promettoit tant d’avan- tages par Tes fingulières propriétés. Scheffer, chimifte fuédois , publia Tes recherches fur le platine dans les mémoires de l’académie de Stockholm en 175*2. Lewis , chimifte anglois, a fait un travail fuivi & prefque complet fur ce métal ; on le trouve dans les tranfaâions philofophiques pour l’année 175*4. Margraf a consigné dans les mémoires de l’académie de Berlin pour 175*7 , le détail de fes expériences fur ce nouveau métal. La plupart de ces Mé- moires particuliers ont été recueillis par M. Mo-* lin, dans un ouvrage intitulé, la P latine, V Or liane , ou le huitième métal , Paris , iy58. 3Da ns le même tems , MM. Macquer & Baumé firent en cofnmun un grand nombre d’expé- riences importantes fur le platine, qui ont été publiées dans les Mémoires de l’académie pour l’année 17^8. Buffon a rapporté dans le tome I du Supplément à fon Hiftoire Natu- relle, une fuite de recherches fur le platine faites par lui , M. Morveau & M. Milîy. M. le baron de Sickengen a aufTi entrepris des recherches fuivies fur le métal dont nous nous occupons ; l’ouvrage de ce favant n’a point encore été publié en françois ; Macquer en a donné un extrait dans le Diélionnaire de chimie. M. de Lille a préfenté à l’acadé- £7 6 Ë L É M EN? mie un travail fur le platine. La rareté de ce métal , & les difficultés qu’il avoit préfemces dans (on traitement, ont rallenti la marche des recherches ; mais depuis quelques années , on les a reprifes avec une nouvelle ardeur ; Berg- man , M. Achard , M. Morveau , fe font oc- cupés de plufieurs propriétés peu connues de ce métal. Le platine purifié & féparé par le lavage , le triage , & par l’acide muriatique, des divers corps étrangers qu’il contient, expofé au feu le plus violent des fourneaux , n’éprouve aucune alteration , feulement il s’agglutine un peu. Tous les chimin.es qui ont travaillé fur ce métal s’ac- cordent fur ce point. MM, Manquer & Baumé en ont tenu expofé pendant plufieurs jours au feu continuel dame verrerie, fans que fes grains aient fouffert d^utre altération que celle de fe lier légèrement les uns aux autres ; cette agglu- tination éroît même fi foibîe , qu’en les tou- chant on les féparoit facilement. ils ont ob- fevvé que dans ces expériences , la couleur du platine devenoit brillante lorfqu’il avoit rougi à blanc ; qu’il prenoit une couleur terne & grife quand il avoit été chauffé très-long- tems ; Sc enfin', qu’il augmentoit qonflamment de poids , comme favoit dit Margraf ; ce qui ne peut ve- nir que de l’oxidation qu’il paroît être fufcep- tible d’Hist. Nat. et dê Chimie. 417 tibïe d’éprouver. Ces chimiftes ont expofé du platine au foyer d’un grand miroir ardent ; il a commencé par fumer f il a donné des étincelles vives & très-ardentes 5 enfin les portions de ce métal expofées au centre du foyer , fe font fondues au bout d’une minute. Ces portions fondues étoient d’une couleur blanche , bril- lante, & préfentoient la forme d’un bouton* Elles fe laiflbient couper en lames avec le cou- teau. Frappée fur un tas d’acier , une de ces maffes s’efl applatie & s’eft réduite en une lame mince fans fe fendre ni fe gercer ; elle s’efl écrouie fous le marteau. Cette belle expérience apprend que le platine efl. fufïble à un feu de la dernière violence , qu’il eft auffi malléable que l’or & que l’argent , & qu’il n’eft que peu altérable par l’adion du feu ; car dans toutes ces expériences , dont la plupart om été faites eu plein air , le platine n’a offert aucune trace d’o- xidation. M. Morveau efl auflï parvenu à fondre le platine , en le chauffant dans le fourneau â vent décrit par Macquer , avec fon flux réduc- tif , compofé de huit parties de verre pilé , d’une partie de borax calciné, & d'une demi-partie de charbon en poudre. Aujourd’hui on en fond très-aifément des petites portions feules & fans addition , en les chauffant fur un charbon allumé par un jet d’air vital j mais ces petits globules Tome LIL B û E L É M E N S dudiles ne peuvent pas fervir à caufe de leur peu de volume. Le platine expofé à l’air ne s’altère en au- cune manière. Cependant on ne fait pas ce qu’il deviendroit li on le chaufloit pendant long- tems, jufqu’à le faire rougir, avec le conta# de l’air ; peut-être s’oxideroit-il comme Junc- ker affiire que le font l’or & l’argent traités de la même manière. Ce métal n’éprouve aucune altération de la part de l’eau , des matières terreufes , falino- terreufes & des alcalis. L’acide fulfurique le plus concentré, l’acide nitrique &: l’acide muriatique les plus forts & les plus fumans , n’agiflent point du tout fur le platine , même par le fecours de l’ébullition. La diflillation , moyen reconnu li efficace par tous les chimiftes pour favorifer l’aclion des acides fur les matières métalliques , ne préfente pas plus de diffiolution & d’altération dans ces mélanges. Seulement l’acide fulfurique ternit les grains de platine; fuivant MM. Lewis & Baumé. L’acide nitrique au contraire les rend brillans. Margraf dit avoir obtenu fur la fin de la dillib lation de cet acide avec le platine , quelque peu d’arfenic , phénomène que n’ont point obfervé les autres chimilles. L’acide muriatique n’a changé en aucune façon les grains de platine. d’Hist.NaT. et de Chimie. 419 Aîargraf a de même obtenu de cet acide dil- tille fur ce métal , un fublime blanc qui lui a paru être de Farfenic,& un fublimé rougeâ- tre dont il n’a pu examiner les propriétés s parce qu’il étoit en trop petite quantité. Tou- tes ces fubftances paroiiXent évidemment étran- gères au platine. Ce métal reftemble donc a l’or par le peu d’a&ion qu’ont fur lui les acides {impies ; mais cette analogie efl encore plus marquée par fa diffolubilité dans l’acide mu- riatique oxigéné , & dans l’acide nitro-muria- tique. Le premier diffout ce métal avec facilité 8t fans le fecours d’une forte chaleur. 15* à 20 degrés dans l’atmofphère fuffifent pour faciliter cette ditïolution , qui a lieu fans effervefcence bien fenfible , 8c qui a d’ailleurs toutes les pro- priétés de la fuivante. L’acide nitro-muriattque qui dilTout le mieux le platine , efl celui que l’on fait en mêlant parties égales d’acide nitrique 8c d’acide mu- riatique. Pour opérer cette diiïolution , qui eft en général moins facile que celle de l’or , il faut mettre dans une cornue une once de pk« tine, fur lequel on verfe une livre d’acide nitro- muriatique fait dans les proportions indiquées on met la cornue fur un bain de fable, & en y adapte un récipient. Dès que l’acide eft chaud* Dd ij J $20 E L i M E ^ * il s’élève quelques bulles de gaz nitreux , ce gaz efl peu abondant , l’aélion de l’acide mixte s'opère Tans violence & fans rapidité ; cepen- dant cet acide prend d’abord une couleur jaune qui pafle à l’orangé , & fe fonce peu à peu au point de devenir d’un rouge brun très-obfcur. Lorfque la difTolution efl achevée , on trouve au fond de la cornue des molécules de fable rougeâtre & noir qu’on fépare par décantation ; la liqueur faturée laifîe dépofer peu à peu des petits criflaux informes d’une couleur fauve, qui font une combînaifon d’acide & de platine. La diflolution de platine efl une des dififoîu- tions métalliques les plus colorées. Quoiqu’elle paroi fle d’un brun foncé , fi on l’étend d’eau , ce fluide prend une couleur d’abord orangée, qui devient bientôt jaune & très-femblable à la difTolution d’or; elle teint les matières ani- males en brun noirâtre, mais nullement pour- pre. M. Baumé dit que le platine fondu au foyer du miroir ardent , diffous dans l’eau ré- gale, ne prend jamais une couleur brune comme celle du platine en grains , & que cette diiTclu- non efl: d’un jaune, orangé foncé. Macquer afiiire qu’en faifant évaporer la dif- foîution de platine, & en la laiflant refroidir, on en obtient des criflaux beaucoup plus gros 8c beaucoup plus beaux que ceux qu elle lailTe / Nat. et di Chimie. 42 y dépoter d’elle -même lorfqu’elie efl faturee# Lewis ayant ïaifïe évaporer cette diffolution à l’air libre , a obtenu des crifiaux d’un rouge foncé , paffablement grands , de figure irrégu- lière & affez femblables à l’acide du benjoin 9 quoiqu’ils biffent plus épais. Bergman le décris fous une forme oétaè'dre. Ce fel efl âpre 8c perz cauflique , il fe fond au feu , laifie diiïiper fon acide , & donne pour réfidu un oxide d’un gris obfcur. L’acide fulfurique concentré y produis un précipité d’une couleur foncée, qui efl fans doute un fulfate de platine. L’acide muriatique y produit au fil au bout de quelque tems un dé- pôt jaunâtre, '• Les ■ alcalis 8c les matières falino - terreufes décompofent la diffolmion de platine , 8c pré- cipitent ce métal dans Tétât d’oxide. Le carbo- nate de potaffe produit dans la diffolution de platine on précipité orangé. Ce précipité n’efl pas l’oxide de platine pur. MM. Macquer & Baume ont obfervé qu’il devoit fa couleur à une certaine quantité d’acide qu’il contenoita On doit donc le regarder comme une mélange d’une portion d’oxide de platine avec une por- tion de muriate de potaffe , ou comme une efpèce de fel triple. Cette opinion efl démon- trée , parce qu’en lavant ce précipité avec l’eau chaude, ce fiuide fe colore en. é^olvont B d iij. 4 22 E t lî M E N S le Tel de platine, & le réfidu eft un pur oxide de ce métal, d’une couleur grife. L’alcali fixe bouilli fur ce précipité lui enlève promptement fa couleur , & laide un oxide de platine qui efl d’un blanc gris de perle , fuivant les expé- riences de M. Baumé. Ce chimifle s’eft con- vaincu que le précipité de platine eft diiïoluble dans l’alcali , puifqu’en verfant goutte à goutte la difïolution de ce métal dans une diflblution chaude de carbonate de potafle , il ne s’eft point fait de précipité ; c’eft pour cela que cette diflblution précipitée par l’alcali fixe retient toujours une couleur foncée , 8c qu’on en retire facilement du platine par l’évaporation à ficcité. Margraf a découvert que la foude ne précipite point la diflblution du platine ; mais Bergman a obfervé qu’en mettant une grande quantité de cet alcali , le précipité fe forme afîez promp- tement. Les prufliates alcalins forment un précipité bleu abondant , qui, fuivant M. Baume , eft dû au fer contenu dans l’alcali , puifque fi l’on fe fert du prufliate de potafle privé du fer qu’il contient , par le procédé indiqué par ce chi- mifte , il ne donne plus avec la diflblution de platine que quelques atomes de bleu , dus à la petite portion de fer que ce métal contient toujours. Bergman aflure qu’un prufliate alcalin e’Hist. Nat. et bi Chimie. 423 bien faturé & bien pur , ne précipite point la difTolution de platine , & que ce métal e(t le feul qui n’ett pas précipité par ce réadif, auffi le propofe-t-il pour féparer le fer qui lui eil toujours uni. L’ammoniaque cauftique précipite îe plaune. en jaune orangé. Ce précipité eft prefqu entiè- rement falin , puifque l’eau en difîout la plus grande partie , 8c fe colore comme une diffo- lution d’or. Il refte , après l’aélion de l’eau fur ce précipité j une fubfiance noiiâtre qui paioit être ferrugineufe. Une grande différence entie le précipité du platine & celui de For par l’am- moniaque, c’eft que le premier n’eff pas fulmi- nant comme le fécond. La noix de galle, ou plutôt l’acide gallique* précipite la diffolution de platine en un vert foncé qui pâlit peu à peu par le repos. Tous les précipités obtenus par les matières alcalines, de la diffolution de platine, ne font point fufceptibles de fe vitrifier & de colorer le verre par le feu des fourneaux. Dans les tentatives faites par MM. Lewis & Baumé fur cet objet, le platine s’eff confiammerjt réduit en grenailles , en ramifications on en efpèces de dentelles. On peut obtenir une efpèce de culot de platine , en expofant ces précipités avec quel- ques fondans rédudifs , comme le borax , la Ddiv m E L Û JH 1 N S crème de tartre, le verre, &c. MM. Macque* & Baumé font parvenus à fondre ainfi en trente- cinq minutes , à un feu de forge animé par deux forts foufflets , un précipité de platine mêlé avec des fondans. Ils ont obtenu fous un verre noirâtre dur, femblable à celui des bouteilles, un culot de platine brillant qui paroilïbit avoir été bien fondu. Ce culot n’étoit point duétilej il s’eft caîfé en deux morceaux , dont l’intérieur ctoit creux. Ce métal préfentoit un tiflu grenu & groiïier dans fa cafiiire ; il étoit d’une dureté à peu près femblable à celle du fer forgé , & il a rayé profondément for , le cuivre , & même le fer. Quoique nous ayons dit que les préci- pités de platine ne paroiiïoient pas fufceptibles de fe vitrifier ou de fe mêler ail verre , M, Baumé ell cependant parvenu à les fondre en une matière vitriforme par deux procédés dif- férens. Le précipité de platine mêlé avec du borax calciné & un verre blanc très-fufible , & expofé pendant trente fix heures dans l’endroit le plus chaud du four d’un faïencier , lui a donné un verre verdâtre tirant fur le jaune fans globules de métal réduit. Ce verre traité de nouveau par la crème de tartre , le gypfe & la potafie , s’eft bien fondu , & on y appercevoit des petits globules de platine qui y étaient dif- M. Baumé les fépara pat le lavage s Sk d?Hist. Nat. st de Chimie. 42/ les trouva duâiles. Ce chimihe a enfuite ex- pofé, conjointement avec M. Macquer, du pré- cipité de platine au foyer du même miroir ar- dent avec lequel ils avoient fondu ce métal. Ce précipité a exhalé une fumée très-épaiflTe & très-lu mineu fe qui fentoit vivement l’acide nitro- imiriatique; il a perdu fa couleur rouge & re- pris celle du platine , & il s’efl fondu en un bouton lifïe 8c brillant , qui n’étoit qu’une ma- tière vitrefcente opaque , de couleur d hyacin- the à fa furface , & noirâtre à l’intérieur , que l’on peut regarder comme un véritable verre de platine. Il eh cependant néceTaire d’ob- ferver que les matières falines dont il étoit imprégné , ont fans doute contribué à fa vitri- fication. Le précipité de platine ne paroît pas etre dilfoluble dans les acides fimples ; mais il fe dilTout bien dans l’acide nitro - muriatique , au- quel il ne donne qu’une couleur orangée , qui n’imite jamais le brun de celle de platine en grains. La difTolution de platine ri’eh point précipi- tée par les fels neutres alcalins ou parfaits ; mais le muriate ammoniacal y occafionne un précipité abondant. On ne fait pas encore bien ce qui fe pafle dans cette expérience. Il paroît que îe précipité orangé que l’on obtient en 42& EtlMINS veiTant une difTolution de muriate ammoniacal dans une difTolution de platine , efl une véri- table fubflance faline entièrement difToluble dans l’eau. Ce précipité préfente une propriété bien importante, qui a été découverte par M. de Lille ; c’eft qu’il ell fufible , feul & fans addi- tion , à un bon feu de fourneau , ou à un feu de forge ordinaire. Le platine fondu par ce pro- cédé , ell en un culot brillant affez denfe & affez ferré ; mais il manque de malléabilité , & ne devient duétile que lorfqu’on l’expofe à une chaleur allez forte. Macquer penfe qu’il eu efl de cette fufion , comme de celle des grains de platine expofés feuls à Tadion d’un feu vio- lent ; que ce n’efl qu’une agglutination des molécules ramollies, qui étant infiniment plus divifées & plus tenues que les grains de pla- tine , fe rapprochent mieux , fe touchent par beaucoup plus de points que ces derniers ; ce qui rend le tifTu de ce métal beaucoup plus ferré» quoiqu’il n’ait point éprouvé une véritable fu- fion. Cependant il paroît que fi le platine en grains efl fufceptible de fe fondre au miroir ardent , & d’acquérir une dtidiüté affez conf- dérable , le précipité de ce métal fait par le muriate ammoniacal, peut bien aulTi fe fondre, à caufe de fon extrême divifion ; & s’il n ell pas suffi dudile que le bouton de platine fondu d’Hist. Nat. et de Chimie. 427 par les rayons du foleil , cela dépend peut- être de ce qu’il retient encore quelque matière qu’il a entraînée dans fa précipitation , & dont il eit poffible de le priver par l’adion du feu. Margraf a diüous le platine dans une eau régale compofée avec feize parties d’acide ni- trique & une partie de muriate ammoniacal. En diüillant cette diffolution à ficcité & jufqu’à faire rougir la cornue , il s’efl fublimé un fel d’un rouge foncé , 8c le réfidu étoit lous la forme d’une poudre rougeâtre. On ne fait pas fi la diffolution de platine dans une eau régala fimple , c’effà-dire , faite avec les acides nitri- que 8c muriatique , donneroit le même fublimé par la diflillation. MM. Margraf, Baumé 8c Lewis ont mêlé la diffolution de platine avec les diffolutions de toutes les autres fubftances métalliques. Il ré- fulte de leurs expériences que prefque tous les métaux précipitent le platine fous la forme d’une poudre d’un rouge briqueté ou brun , & qu’au- cun de ces précipités ne jouit des propriétés métalliques , comme cela a lieu pour la plupart des autres métaux. C’efl. une analogie qui exille encore entre l’or 8c le platine , quoique ce der- nier ne donne point avec l’étain un précipité pourpre, comme le fait l’or, mais bien un pré- cipité brun tirant fur le rouge. Quant à l’effet 42S E £ é H E K î des differentes difTolutions métalliques fur celle de platine, il fuffira d’obferver que celles de bifmuth 6c de plomb par l’acide nitrique , de fe- 6c de cuivre par les différens acides , & d’or par l’eau régale , ne produifent aucun précipité dans celle de platine, fuivant Margraf, 6c qu’au contraire celles d’arfeniate de potaffe, de ni- trates de zinc 6c d’argent , la précipitent; la première , en une fubftance criffallifée , peu abondante, d’une belleconleur d’or-, la fécondé 3 en une matière rouge orangée , 6c la troifième,. en une matière de couleur jaune. On n’a pas encore bien examiné ces différens précipités, 8c on ne fait pas quelle eft la décompofition qui les occalionne. La plupart des fels neutres n’ompas d’aâion fur le platine. Margraf a chauffe à un feu vio- lent du platine avec les fulfates de potaffe 8c de foude ces fels. fe font, fondus, 6c le platine eft reffé en grains fans altération ; il a feulement donné une petite couleur rougeâtre aux ma*» tières falines , fans doute à caufe du fer qui eft mêlé avec luL Le nitre altère Te platine d’une manière îîn» gulière , fuivant les expériences de Lewis 8s. fV/argraff. Quoiqu’il ne fe faffe pas de détona- don lorfq.u’ou projette dans un creufet rouge un mélange de ces deux fubffances , cependant / d’Hîst.NaT.st de Chimie. 429 en chauffant fortement & pendant long tems, ainfi que Lewis Ta fait pendant trois jours & trois nuits de fuite , un mélange d’une partie de platine & de deux parties de nitre , ce métal acquiert une couleur de rouille. Si 1 on fait bouillir le mélange dans l’eau , ce fluide diflout l’alcali 3 qui entraîne avec lui une poudre bru- nâtre, & le platine féparé de ce lavage, fe trouve diminué de plus d’un tiers. On fépare la poudre brune enlevée par l’alcali à l’aide d’un filtre. Cette poudre paroît être une efpèce d’oxide de platine , mêlée d’un peu d’oxide de fer. Lewis eft parvenu à donner à cet oxide une couleur grife blanchâtre , en le diflillant un grand nombre de fois avec le muriate am- moniacal. Margraf, qui a répété cette belle expérience , y a ajouté deux faits importans; Fun , c’eff que le platine combiné avec l’alcali du nitre , & délayé dans une certaine quantité d’eau , forme une gelée ; & l’autre, qu’en chauf- fant la portion de ce métal féparée de cette gelée étendue d’eau 8c filtrée , elle a pris une couleur noire comme de la poix. Ce travail annonce certainement une grande altération du platine ; & il feroit bien important de le con- tinuer , pour favoir fi à force d’oxidations répétées avec le nitre , il feroit poffiule de ré- duire tout ce métal en poudre brune comme 430 E L É M E N S celle dont nous avons parlé, & fur-tout pou déterminer l’état du platine aiiili oxidé. Les muriates de potaffe & de fonde, le bo- rax, les fels terreux , ne font éprouver aucune altération au platine, & n’en facilitent point la fufion. Le muriate ammoniacal fublimé avec ce métal, donne un peu de fleurs' martiales , en raifon du fer que coqtiènt le platine. Les chimifles ne font point d’accord fur l’aétion réciproque de l’arfenic & du platine. SchefFer a dit le premier que l’arfenic fait fon- dre ce métal ; mais l’expérience n’a réufli qu’en partie à Lewis , & elle n’a pas réuffi du tout à Margraf , Macquer & à M. Baume- On a répété depuis quelque tems cette expérience 8< l’on efl convaincu que le platine eft en effet très-fufible par l’arfenic , mais qu’il refie très- aigre 8c très-caffant. A mefnre qu’on en enlève l’arfenic par le grillage, 8c qu’on continue de chauffer le métal parfait , il prend de la dtidi lité ; c’efl à l’aide de ce procédé que M. Achard 8c M. Morveau font parvenus à faire des creufets de platine, en le faifant fondre une fécondé fois dans des moules. x On n’a point effayé de combiner le cobalt le nickel 8c le manganèfe avec le p'atine. Ce métal parfait s’allie très - bien avec le bifmuih, qui le rend d’autant plus fufible que îd’Hist. Nat. et de Chimie. 431 ce dernier eft en plus grande quantité. Cet alliage eft aigre & caftant ; il devient jaune, pourpfe & noirâtre à l’air ; on ne peut cou- peler ce métal mixte qu’avec la plus grande difficulté, il ne forme jamais qu’une maffe peu dudile. Le platine fe fond facilement avec l’anti- moine ; il en réfuite un métal caftant à facet- tes , dont on peut féparer l’antimoine par l’ac- tion du feu j mais qui en retient toujours allez pour ôter au platine fa pefanteur & fa duélilité. Le zinc rend le platine très - fulible , 8c fe combine très-facilement avec lui ; cet alliage efl caftant, dur à la lime; il tire fur le bleu, lorfque le platine eft plus abondant que le zinc. On fépare ces deux matières métalliques par l’adion du feu qui volatilife le zinc ; ce- pendant le platine en retient toujours un peu. Le platine ne s’unit point au mercure , 8c il ne peut point former d’amalgame quoiqu’on le triture pendantrplufieurs heures avec ce fluide métallique. On fait d’ailleurs qu’on emploie le mercure en Amérique pour féparer l’or d’avec le platine. Plufieurs intermèdes , tels que l’eau dont fe font fervis MM. Lewis 8c Baume , 8c l’acide nitro - muriatique que M. Scheffer a employé, ne facilitent en aucune manière l’u- nion du platine avec le mercure \ cette pro- $32 E L Ê M E N i priété femble le rapprocher du fer , dont il a d’ailleurs la couleur & la dureté. Le platine s’allie très-bien avec l’étain. Cet alliage eft très-fufible & coule bien. Il eft aigre 8c caffe même par le choc , Jorfque ces deux métaux font unis à parties égales. Lorfque l’é- tain eü à la dofe de douze parties & même plus fur une de platine,, ce métal mixte eil allez dudile; mais il a le grain rude & groffier, 8c il jaunit à l’air. Le platine diminue fingulic- rement la dudilité de l’étain , 8c il ne paroît pas qu’on puifle tirer parti de cet alliage. Ce- pendant lorfqu’il e(l bien poli , il peut relier long-tems à l’air fans s’altérer. 11 paroît que Lewis, à qui font dues la plupart des connoif- fances qu’on a acquifes fur les alliages du pla- tine , eft parvenu à oxider ce métal & à le dilïbudre dans l’acide muriatique par le moyen de l’étain. Le plomb 8c le platine s’allient très-bien par la fufion ; mais ils demandent un feu plus fort pour être fondus, qu’il n’en faut pour fondre l’alliage précédent. Le platine détruit la dudilité du plomb ; il refaite de la combinaifon de cès deux métaux, un métal mixte tirant fur le pourpre , plus ou moins caiTant , fuivant les proportions du platine , ftrié 8c grenu dans fa calluie i & s’altère promptement à l’air. La csupeilaûon d’Hist. Nat. et de Chimie. 433 coupellation par le plomb , étoit une des expé- riences les plus importantes à faire fur le pla- tine ; en effet , cette opération étoit feule ca- pable de le purifier des métaux étrangers qu’il pouvoir contenir. Lewis & plufieurs autres chi- mifles ont tenté en vain de coupeler le platine dans les fourneaux de coupelle ordinaires , quelque chaleur qu’ils ayent employée dans ces fourneaux. La vitrification & l’abforption du plomb ont lieu dans le commencement de l’opération , à caufe de l’excès du plomb ; mais bientôt le platine fe fige , 8c l’opération s’ar- rête ; ce métal refie uni à une portion de plomb &n’a point de duétilité. MM. Maoquer 8c Baume font parvenus à coupeler entièrement le pla- tine , en expofant une once de ce métal 8c deux onces de plomb dans l’endroit le plus chaud du four qui cuit la porcelaine de Sèves* Le feu de bois qu’on y allume dure cinquante heures de fuite. Au bout de ce tems, le pla- tine étoit applati fur la coupelle ; fa furface fupérieure étoit fombre 8c ridée , elle s’efl dé- tachée facilement ; fa furface inférieure étoit brillante , 8c ce qui efl plus précieux , elle s’efl laiffée étendre très-bien fous le marteau. Ces chimifles fe font affurés par tous les moyens poiïibles, que ce platine ne contenoit pas de plomb , 8c qu’il étoit très-pur. M. Morveau Tome III% E e 434 Été M e g a également réuffi à coupeler un mélange d’un gros de platine & de deux gros de plomb, en fe fervant du fourneau à vent de Macquer. Cette opération faite en quatre reprises, a duré onze à douze heures. M. Morveau a obtenu un mouton de platine , non adhérent , uniforme , d’une couleur femblable à celle de l’étain, un peu raboteux , qui pefoit un gros jufte , & ne paroifToit nullement fenlible à l’aimant. Voilà donc un procédé convenable pour obtenir le platine -fondu en plaques, qui peuvent fe for- N ger , & être conféquemment employées pour faire diffère ns u Renfiles précieux par leur du- reté & leur inaltérabilité. M. Baumé lui a en- core reconnu une propriété fort utile, celle de fe lailTer fonder & forger comme le fer, fans le fecours d’aucun autre métal. Après avoir fait rougir à blanc deux morceaux de platine qui avoient é'é coupelés fous le four de Sèves, il les a pofés l’un fur l’autre, & frappés promp- tement d’un coup de marteau • ces deux mor- ceaux fe font fondés aufli bien & aufli fonde- ment que l’auroient fait deux morceaux de fer; il n’efl pas befoin d’infifier long- teins fur cette expérience , pour faire featir tous les avantages qui en réfulteront pour les arts. Lewis n’a pas pu obtenir d’alliage avec le fer forgé & le platine. Ce métal mixte auroit le b’Hist* Nat. et de Chimie. 43* grand avantage de réunir la dureté de l’acier trempé avec une forte ductilité ; au moins il ne feroit point aigre & caffant comme l’acier. Le chimifte anglois que nous venons de citer , lit fondre un mélange de fonte & de pla- tine. Cet alliage étoit fi dur que la lime ne put l’entamer ; il avoit un peu de dudilité, mais il fe cafïbit net lorfqu’il étoit ronge. Le platine donne de la dureté au cuivre, avetr lequel il fond a fiez facilement. Cet alliage a de la dudiiité, lorfque la dofe du cuivre eft trois ou quatre fois plus confidérabie que celle du platine. Il efi fufceptible de prendre un beau poli, & ne s’efi point terni à l’air dans l’efpace de dix ans. Le platine détruit en partie la dudiiité de l’argent , augmente fa dureté, 8c ternit fa cou- leur. Ce mélange efi fort difficile à fondre ; les deux métaux fe.fé parent par la fufion 8c le re- pos. Lewis a abfervc que l’argent que l’on fond avec le platine , eft lancé aux parois du çueufet avec une efpèce d’explofion. Ce phénomène paroît appartenir à l’argent feul , puifque M. d’Arcet a vu ce métal rompre des boules de porcelaine dans lefquelles il étoit renfermé , 8c être lancé au-dehors de ces vaiffeaux par l’adio», du feu. Le platine ne fe combine bien avec l’or qu’à Ee ij ^6 Élément l’aide d’un violent coup de feu. Il altère beau- coup la couleur de ce métal , à moins qu’il ne foit en très-petite quantité ; par exemple , un quarante-feptième de platine, & toutes les pro- portions au-defTous de celle-là ne changent pas beaucoup la couleur de l’or. Le platine n’al- tère que peu la dudilité de l’or ; c’eft même un des métaux qui la diminue le moins. La pefan- ieur du platine fupérieure à celle de l’or, pou- voir favorifer la fraude ; & c’efl pour cette rat- ion que le miniftère d’Efpagne a défendu l’ex- portation du platine. Cependant , depuis que la chimie a découvert des moyens de recon- moître de l’or allié de platine , & même du platine allié d’or , ces craintes ne peuvent plus lubrifier , & il efl fort à defirer que le platine Toit rendu au commerce , & que l’on puifFe jouir d’un nouveau métal qui promet tant d’a- vantages à la fociété. La difTolution de muriate ammoniacal a ,, comme nous l’avons fait obferver , la propriété de précipiter le platine. Si donc on foupçonne de l’or d’être allié de platine, on pourra eflayer fa difTolution dans Veau régale , avec une dif- folution de muriate ammoniacal , le peu de platine qu’elle contiendra occafionnera un pré- cipité orangé ou rougeâtre ; s’il ne s’y fait point de précipité , c’efl une preuve que l’or ne con- -/ ïd'HisT. N À T. E T DEC II I M I Ë. 437 tient pas de platiné. S’il arrivait que les belles propriétés du platine le rendaient quelque jour plus rare & plus recherché que l’or, la cupi- dité ne pourrait pas nous tromper davantage en alliant l’or à ce métal, puifquune »o u- tion de Calfate de fer qui a la propriété de précipiter la. dHTolution d’or, fans changer en aucune manière celle de platine , ferait recou uoître fur-le-champ la fraude. Une lame d e- tain plongée dans une diffolution de platine alité d’or , ferait suffi reconnoître la préfence de ce dernier, en fe couvrant d un précipité pom pre, tandis que le platine ne lui donne cjuui.e couleur brune fale tirant fur le rouge ? d ail leurs ce dernier précipité ne colore point le verre , tandis que le précipité d or lui donne une couleur pourpre. Toutes les propriétés du platine que nous avons examinées , prouvent que cette fubflance eil un métal particulier. Son peu de duéhlite & de fufibilité regardées par quelques per Confies comme deux fortes objections contre ce fen- timent , ne font pas capables de te détruire , puifqu’il y a peut-être moins loin de la fufibi-' lité du platine à celle du fer forgé , qu’il n’y a de celle de ce dernier métal à la fufibilité du plomb ; & puifqu’il n’a été fi peu ductile jnfqu’à préfent, que parce qu'on n’eft point encore Ee iij 43^ Ê L É M E N S parvenu à lui donner une fufion bien compïette» Quant à l’opinion des favans qui regardent le platine comme un alliage naturel d’or & de fer, quelqu’ingénieufe & quelque fatisfaifante qu’elle paroilfe , il efl impoffrble de l’admettre tant qu’on ne réparera pas ce métal en deux autres par une analyfe exaéle , & tant qu’on n’imi- tera pas mieux le platine qu’on ne Ta fait juf- qu’aujourd’hui par l’alliage artificiel de l’or 8c du fer. Enfin , Macquer a fait une très-forte objeélion contre ce dernier fentiment , en ob- fervant que plus on prive le platine du fer qu’il contient, & plus il s’éloigne des caractères ex- térieurs 8c des propriétés de l’or. On conçoit allez de quel important ufage feroit ce métal précieux introduit dans le com- merce, lorfqu’on fait qu’il réunit l’iiideflruéti- bilité de l’or à une dureté prefqu’égaîe à celle du fer, qu’il réfille à l’aétion du feu le plus vio- lent , 8c des acides les plus concentrés. Les arts 8c la chimie en retireraient fans doute les plus grands avantages. I d’Hist.Nat. et de Chimie. 439 CHAPITRE XXIII- Genre VU?** Bitumes en cênérAl(i)- " W " f ■ ' ; X, X) Les bitumes font des ftibftânces combuili- bles folides , molles ou fluides , dont 1 odeuL efl forte, âcre, aromatique, & qui paroi, en u être beaucoup plus compofées que les corps ou rètme minéral que nous avons déjà examines. On les trouve , ou formant des couches c ans l’intérieur de la terre , ou feintant à travers .es rochers , ou nageant à la furfece des eaux. Leur caradère efl de brûler le plus Couvent avec une flamme rapide , lorfqu’on les chauffe avec le contad de l’air , comme le font les matieies formées par les organes des végétaux & c es animaux, auxquelles on a donné le nom d 'huu les. Leur analyfe efl beaucoup moins exade cne celles des matières terreüfes , Calmes ou métalliques , parce que l’adion du feu les. al- tère {Singulièrement, & en extrait des principes « (!) On doit fe rappeler que nous avons cüvïfé les ma- tières combuflibles minérales en cinq genres , qui font ie diamant ,1e g» hydrogène, le foufre, les métaux & les bitumes. E e iv 44 O Ê L £ M E N ï qni réagirent les uns fur les autres, à meftire qu’ils fe voîatiîifent. C’efl une analogie que les bitumes ont avec les fubflances végétales & animales. On en retire par la diflillation , une eau ou flegme odorant plus ou moins coloré & falin , un fel acide fouvent concret, quel- quefois de l’ammoniaque , 8c des huiles qui de légères qu’elles font dans le commencement, deviennent d’autant pins épaifles 8c colorées , que la diflillaiion efl plus avancée , 8c que le feu efl plus aétif. Il refle après cette analyfe un charbon plus ou moins volumineux, épais, léger , rare , brillant ou compa&e , fuivant les différentes efpcces de bitumes. Cette analyfe indique que ces corps inflammables ont une origine végétale ou animale , comme nous le dirons avec plus de détail , iorfque nous au- rons fait fhifloire de leurs propriétés. Les bitumes éprouvent quelques altérations de la part de la lumière; lorfqu’ils font fluides, leur couleur fe fonce , 8c leur odeur fe modifie dans des vaifleaux tranfparens. L'air les épaiflit par l’évaporation fuccefîive de leur humidité, dont l’atmofphère fe charge d’autant plus promp- tement , que l’air efl plus fec. Leur principe reéfeur ou odorant fe diffipe en même propor- tion , 8c ils paflent peu à peu de l’état de flui- dité à la ténacité & à la folidité ; mais il faut d’Hist. Nat. et de Chimie. 44 ï. un grand nombre d’années pour leur faire éprou- ver cette dernière altération. L’eau dans laquelle on fait bouillir les bitu- mes ne les diffout pas , mais elle fe charge de leur principe aromatique, & elle exhale l’odeur qui leur efl propre ; il femble donc que l’eau a plus d’affinité avec leur principe odorant que la matière huileufe du bitume , 8c peut-être pourroit-on ôter ainfi à ces corps toute leur odeur. On n’a point efTayé l’aélion des matières falino-terreufes fur les bitumes. Cependant la chaux paroît capable, ainfi que les alcalis purs, de s’unir avec ces matières combuffibles , 8c de former avec elles des compofés folubles dans l’eau , auxquels on donne le nom de favons. On ne connoît pas la manière dont les aci- des minéraux font fufceptibles d’agir fur les bitumes il efl vraifemblable qu’ils les diffou- droient ou les bruleroient fuivant leur état de concentration , comme ils font à l’égard des huiles. Ou n’a pas plus examiné l’aélion des feîs neutres , du gaz hydrogène , du foufre 8c des métaux fur les bitumes ; 8c en général les pro- priétés chimiques de ces corps ne font que très-peu connues. Ce travail efl entièrement 442 É L é M E N si neuf, & il offrirait certainement des réfultats tuiles. Les Naturalises fe font beaucoup plus occu- pés de l’origine 6c de la formation des bitumes, que les chimifles ne l’ont fait de leur analyfe. Il y a eu plufieurs opinions fur cet objet. Les uns ont penfé que ces corps combullibles ap- partiennent en propre au règne minéral , & qu’ils font aux minéraux ce que les huiles & les réfi- nes font aux êtres organiques. Cette analogie , q"i a quelque chofe de féduifant pour l’imagi- nation , ne s’accorde pas avec les faits; car on lie connoît rien dans le règne minéral qui ait le caraâère huileux. Audi l’opinion de ceux qui -attribuent les bitumes à des fubftances végéta- les enfouies dans l’intérieur de la terre , 8c alté- rées par l’aéfion des acides minéraux , a-t-elle eu beaucoup plus de partifans que la première. En effet , tout attelle que les bitumes provien- nent des matières organiques. Il fe rencontre conflamment dans leur voifinage un grand nom- bre de ces matières dont la forme eft recon- noiffable ; d’ailleurs ils ont eux-mêmes les ca- ractères chimiques des fubflances formées par la vie, 8c l’on efl parvenu à les imiter jufqu’à un certain point , en combinant des huiles avec l’acide fulfurique concentré. Nous verrons dans l’hifioire chimique des matières végétales , que d’HiST. N AT. ET DE CHIMIE- 443 cet acide mis en conrad avec ies huiles vola- tiles les durcit , les noircit , leur donne une odeur forte & piquante fcmblable a cel e es bitumes. Mais ces corps font-ils uniquement formés par les végétaux enfouis , comme 1 ont avancé la plupart des naturalifles , & lcs am" maux n’v contribuent-ils point pour que que choie ? La grande quantité de bitumes qui exp- ient dans l’intérieur de la terre , comparée avec le peu de bois ou d’arbres qu’on rencontre dans leur voïfinage, & for -tout le peu d’abon- dance des matières huileufes que ces végétaux contiennent , femblent s’oppofer à ce qu on attribue entièrement l’origine des bitumes aux individus du règne végétal: d’un autre cote, l’abondance de ces corps combuftibles dans des ( endroits où l’on ne trouve que quelques traces de végétaux , & l’exiflence prefque confiante des dépouilles d’animaux entafieesaii-deflus des bitumes , doivent porter à croire que ces êtres organiques ont contribué pour beaucoup, & peut-être même plus que les végétaux , a la formation: de quelques-uns. Obfervons encore que les couches fuccelTives de quelques bitu- mes qui fe trouvent en malles continues dans l’intérieur du globe , annoncent que ces corps ont été dépofés lentement & par les eaux , 8z que leur formation correfpond à l’époque où 444 É L g M E N S des amas immenfes de coquilles & d’autres corps marins ont été formés par la mer. Ils ont donc été dans un état fluide, & ils fe font dur- cis par le laps de tems & par l’adion des corps falins ou d’autres agens que l’intérieur de la terre contient en grande quantité. Telle efl l’opinion que M. Parmentier , membre du col- lège de Pharmacie , a expofée fur l’origine du charbon de terre, dans un Mémoire qu’il a lu à l’ouverture des cours de cette compagnie. Les huiles & les grailles des animaux marins parodient donc être un des matériaux dont la nature fe fert pour former certains bitumes , tandis qu’il en efl d’autres dont l’origine efl manifeflement végétale, & qui font dits à des refînes ou à des huiles volatiles enfouies 8c altérées dans la terre. Les bitumes font en allez grand nombre. Les naturalifles en ont fait plufleurs genres. En le3 confidérant chimiquement, nous les regardons comme des efpèces ou des fortes , parce qu’ils ont en effet tous les mêmes caraéteres , relati- vement à leurs propriétés chimiques. Les uns font liquides , d’autres jouiffent d’une eonfif- tance molle ; il en efl qui font folides , 8c parmi ces derniers, les uns font durs 8c fufceptibles de poli , les autres font friables. Nous en con- noiffons cinq fortes bien diflinéles > qui com- I dTIist. Nat. tt de Chimie. 44;; prennent une grande quantité de variétés que nous indiquerons. Ces cinq fortes , dont nous allons faire l’hiftoire , font le fuccin , l’afphalte ou bitume de Judée, le jayet , le charbon de terre & le pétrole. Nous ne rangeons plus l’ambre gris parmi lqs bitumes , mais parmi les produits des animaux. CHAPITRE XX XV. Sorte I. Du Succin 8c de l’Acide succinique. XiE fuccin nommé ambre jaune ou karabé , efl le plus beau de tous les bitumes par fes caradères extérieurs ; il efl en morceaux irré- guliers d’une couleur jaune ou brune , tranf- parens ou opaques , formés par couches ou par écailles. Il efl fufceptible d’un très-beau poli. Lorfqu’on le frotte quelque tems , il devient éledrique 8c capable d’attirer des pailles. Les an- ciens qui connoifloient cette propriété avoient donné au fuccin le nom tfeleârum , d’où efl venu celui d’éledricité. Ce bitume efl d’une confiflance aflez dure, 8c qui approche de celle de certaines pierres ; ce qui a engagé quelques auteurs 8c en parti- culier Hartman 3 naturalifle qui vivoit fui la fin du dernier fiècle, à le ranger parmi les pierres précieufes. Cependant il elt friable & caflant. Lorfqn’on le pulvérife , il répand une odeur allez agréable* On rencontre fouvent dans fou intérieur des infectes très-bien confervés & trcs- reconnoihabîes , ce qui prouve qu’il a été li- quide , & que dans cet état , il a enveloppé les corps qu’on y trouve. I.e fuccin elt le plus fouvent enfoui à une plus ou moins grande prc- fondeur; il fc trouve fous des fables colorés, en petites malles incohérentes & difperfées fur des lits de terre pyriteufe ; on rencontre au- deffus de lui des bois chargés de matière bitu- mineufe noirâtre ; on croit d’après cela qu’il eft formé par une fubllance réfineufe , qui a été altérée par l’acide fulfurique des pyrites. Il nage encore fur les bords de la mer : on le ramaffe fur les bords de la mer Baltique dans la Pruffe ducale. Les montagnes de Provence près la ville de Sifleron , la Marche d’Ancône, & le duché de Spo’ette en Italie, la Sicile, la Pologne , la Suède 8c plufieurs autres pays en foutniflent aofïi. La couleur, la texture, la tragfparence ou l’opacité de ce bitume en ont fait reconnoîrre un allez grand nombre de va- riétés : on peut d’après Wallerius , les réduire aux fuiyantes. p’Hist. Nat. et de Chimie. 447 Variétés. 1. Succin tranfparent blanc. 2. Succin tranfparent d’un jaune paie. 3. Succin tranfparent d’un jaune de citron. 4. Succin tranfparent d’un jaune d or ; chry- Jeleclrtim des anciens. 7. Suçcin tranfparent d’un ronge foncé. 6. Succin opaque blanc, leucelectrum . 7. Succin opaque jaune. 8. Succin opaque brun. 9. Succin coloré en vert , en bleu , par des matières étrangères. 10. Succin veiné. On pourroit encore en diftinguer un plus grand nombre de variétés , d après les accidens qu’il offre fouvent dans fon intérieur. Mais on doit être prévenu relativement aux prix que l’on attache aux échantillons du fuccin , remarqua- bles par leur groffeur , leur tranfparence, & les infeéies bien confervés qu’ils offrent dans fou intérieur, qu’il eft poffible d’être trompé fur cet article , puifque pluheurs perfonnes pofsè- dent l’art de lui donner de la tranfparence, de le colorer à volonté, & de le ramollir affez pour pouvoir y introduire des corps étrangers. Wallenus avertit que le fuccin couleur d’or ne doit jamais fa tranfparence qu’à la nature, & I 41$ E L il E N'S que celui que l’art a rendu tranfparent eS tou- jours d’une couleur pale. Quoiqu’il Toit très - vraifemblable que ce bi- tume doit Ta naiflànce à des matières réflneufes végétales , plufieurs naturalises ont eu des opi- nions différentes fur fa formation. Quelques- uns l’ont regardé comme de l’urine durcie de certains quadrupèdes, d’autres comme un fuc de la terre que la mer a détaché, & qui, porté par les eaux fur le rivage , s’y eS deffcché & durci par les rayons du foleil. Cette clade de naturalif tes le défigne comme un fuc minéral particulier. Telle ctoit l’opinion d’un ancien naturalise nom- mé Philémon, & cité par Pline. George Agricola l’a en fuite fait revivre. Frédéric Hoffman croyoit qu’il étoit formé d’une huile légère, féparée du bois bitumineux par la chaleur , & épaiSie par l’acide des vitriols. On ne peut admettre cette opinion d’Hoffman , car on ne conçoit pas comment une huile féparée dans les entrailles de la terre , pourroit contenir des animaux qui ne vivent qu’à fa furface. On a cru jufqu’ici que le fuccin étoit dû à un fuc rélineux qui a coulé d’abord fluide de quelqif arbre ; que ce fuc en- foui plus ou moins profondément dans la terre, par des bouleverfemens que le globe a éprou- vés , s’étoit durci & imprégné des vapeurs mi- nérales &c falines qui circulent dans fon inté- rieur. d’HiSt. Nat. ït de Ghtmte. 4|p rîcnr. Il n’y a pas même d’apparence qu’i! aie été altéré par des a- i les concentré', car l’ex- périence nous apprend que l’adion de ces aci- des l’auroit noirci & mis dans un état charbon- neux. Pline penfoit que le fuccin n’étoit autre - chofe que la refine du pin durcie p r la fraî- cheur de l’automne. M. Girtanner croit que c’ell une huile végétale rendue concrète par l’acide de.-, fourmis. C’ell l efpcce appelée for* mica rufa par Linneus , qui le prépare fuivant cet auteur. Ces infedes habitent les anciennes forêts de fapirs , où l’on t ouve le fuccin fofl- file, qui efl dudiîe comme de la cire fondue Se qui fe scche- à l’air. Le fuccin ex pôle au feu ne fe liquéfie qu’à une chaleur allez forte ; il fe ramollit S< fe buur- foufile beaucoup. Lorfqu’on le chauffe avec le contad de l’air, il s’enflamme, & répand une fumée très-épaifife S< très-odorante. Sa flamme efl jaunâtre , variée de vert & de bleu. Il lailfe après fa combuflion, un charbon noir Juifant, qui donne par l’incinération une terre brune en très-petite quantité. Bourdelin t dans fon Mé- moire furie fuccin (Acad. n’a obtenu que dix-huit grairs de cette terre , en brtSlanc deux livres de fuccin dans un têt. Une den :- livre du même bitume , brûlé & calciné dans un creufet, lui a fourni dans une fécondé opé* Tome 1IL F f Ê L É M E N S ration douze grains de réfidu terreux, d’où il 3 retiré du fer à l’aide du barreau aimanté. Si l’on difiille le fuccin dans une cornue & par un feu gradué , on o.btient d’abord un phlegme qui fe colore en rouge , 8c qui eft manifefiement acide. Cette liqueur acide retient l’odeur forte du fuccin ; il pafTe enfuite un fel volatil acide qui fe crifialiife en petites aiguilles blanches ou jaunâtres dans le col de la cornue j à ce fel fucccde une huile blanche 8c légère, d’une odeur très-vive. Cette huile prend peu à peu de la couleur , à mefure que le feu devient plus fort, & elle finit par être brune, noirâtre, épaiffe , vifqueufe, comme les huiles empyreu* matiques. Il fe fublime pendant que ces deux huiles pafTent, une certaine quantité de fel vo- latil de plus en plus coloré. 11 refie dans la cornue, après cette opération, une mafie noire moulée fur le fond de ce vaifieau , cafiante 8c femblable au bitume de Judée ; George Agri- cola avoit déjà fait cette obfervation , il y a près de trois fiècles , fur le réfidu du fuccin difiillé. Si l’on conduit l’opération par un feu doux 8c bien ménagé , & lî l’on opère fur une grande quantité de fuccin , on peut obtenir féparëment tous ces produits en changeant de récipient. Ordinairement on les reçoit dans le même , 8c on les rectifie enfuite à une chaleur d’Hist.Nat. et de Chimie. 45'!, douce. L’acide fe décolore en partie par cette rectification. L’huile qui ne devient noire fur la fin de l’opération, que parce quelle entraîne une portion churbonneufe , & parce que l’acide a réagi fur fes principes peut être rendue très- blanche & très-légère par plufieurs diflillations fuccefiives. Rouelle l’aîné a donné un très- bon procédé pour l’obtenir dans cet état par une première opération. Il faut pour cela mettre cette huile avec de l’eau dans un alambic de verre , & la didiller à la chaleur de l’eau bouil- lante ; la portion la plus pure , la feule qui foie volatile à ce degré de chaleur , à caufe de fa légèreté , paffe avec l’eau au-deffus de laquelle elle fe rafiembîe. Si on veut la conlerver dans cet tirât , il faut laTenfermer dans des vailfeaux de grès ; car dans les vailfeaux de verre , le-s rayons lumineux qui traverfent cette matière , lui donnent au bout d’un certain tems une cou- leur jaune & même brune. Cette anaiyfe démontre que le fuccin eft formé d’une grande quantité d’huile rendue concrète par un acide. Il contient encore une très-petite quantité de terre, dont on n’a point examiné la nature , & quelques atomes de fer. L’huile de fuccin paroît fe rapprocher des huiles elfentielles ; elle a leur volatilité , leur odeur ; elle efl tics -inflammable , elle paroît F f ij '<¥>1 Élément fufceptible de former des favons avec les aîcalVd Le fel volatil de fuccin a été regardé pen- dant quelque tems comme un fel alcali. Gla- fer, Lefevre , Charas & Jean-Maurice Hoffman profeffeur à Altdorf, étoient de ce femiment. Barchufen & Boulduc le père font les deux premiers chimiftes qui , dans le dernier fiècle, ont reconnu la nature acide de ce fel. Depuis eux tous les chimiües ont adopté cette décou- verte, mais ils n’ont point été d’accord entr’eux fur la nature de cet acide. Frédéric Hoffman, fondé fur ce que le fuccin fe trouve en Pruffe fous des couches de matières remplies de py- rites , a imaginé que fon fel étoit formé d’acide fulfurique. Neuman paroît avoir eu le même fen- timent. Bourdelin, dans le mémoire que nous avons cité, rapporte plufieurs expériences qu’il a faites pour déterminer la nature de ce fel. Il obferve d’abord que le fel du fuccin obtenu par la diflilîation de ce bitume , quelque blanc Sc quelque pur qu’il foir, contient toujours une matière huileufe; c’eft fans doute à cette fubf- tance huileufe qu’ell due fon odeur & Pefpèce de combuflibilité dont il jouit , Sc qu’il préfente lorfq u’on le jette fur des charbons ardens. Il a tenté plufieurs moyens pour le débarraffer de cette fubllance. Nous verrons , lorfque nous examinerons la nature & les propriétés de ü’Hist. NaT. et de Chimie. 45'3 l’Mcool , que ce fluide n’a pas pu remplit fes vues. L’alcali fixe feul digéré fur le fuccin, dans le deflein de lui enlever fa partie grade & huileufe, & d’obtenir fon fel féparé , n’a pas eu plus de fuccès ; il a feulement diffous un peu de bitume , & il a pris une faveur lixi- vieüe & fâilée comme le fel marin. Enfin, B ou r- delin n’a pas trouvé de meilleur procédé pour unir l’acide du fuccin pur & privé de matières huil eu fes , avec l’alcali fixe , que de faire dé- toner un mélange de deux parties de nitie aveG une partie de ce bitume. 11 a lefiîvé le réfidu de cette détonation avec de l’eau diftillée. Cette leiïive étoit ambrée ; elle a précipité la diffo- lution d’argent en caillé blanc , celle du mer- cure avec la même couleur. Plufieurs auties didolutions métalliques ont été également dé- compofèes ; mais Bourdelin n’a regardé que les deux premières comme concluantes. Elles lui ont paru indiquer que l’acide du fuccin étoit le même que celui du fel marin , puifqu’il pré- fentoit les mêmes phénomènes que ce derniei , avec les diïïolutions nitriques de mercure & d’argent. La lefiive du réfidu de la détonation du fuccin avec le nitre , ayant été évaporée à l’air , a donné une matière mucilagineufe, au mi- lieu de laquelle fe font peu à peu dépofés des criftaux quarrés allongés, dont la forme, la fa- F f ii| 4^4 Élément veur Talée , la décrépitation fur les charbons ar* dens , & fur-tout l’effcrvefcence confidérable & l’odeur d’acide muriatique qu’ils exhalèrent par l’affufion de l’acide fulfuriqne concentré, indiquè- rent à l’auteur que cet acide muriatique y étoit uni à la bafe du nitre. Malgré cette analyfe qui ed fort exaéle pour le tems où Bourdelin travail- loit, les chimifies qui ont examiné depuis lui le fel de fuccin, ne l’ont point trouvé analogue à l’acide muriatique, & y ont découvert tous les caraélères d’un acide végétal huileux. Berg- man qui paroît avoir adopté cette opinion , donne les détails fuivans fur les propriétés & les affinités éleâiyes de ce fel. L’acide fuccinique retiré par la fublimaiion & purifié par des dif- folutions 8< des crifiallifations fucceiïives, forme avec la potafife 8c l’ammoniaque des fels neu- tres ciiflallifables & déliquefcens. Avec la foude il donne un fel qui n’attire point l’humidité de l’air. Uni à la chaux 8c à la baryte , il conÜitue des fels peu folubles; la magnéfie forme avec lui une matière épaifle comme une gomme. Il difïout les oxides métalliques, 8c les (uccinates produits par ces diffolutions , font la plupart criflallifables 8c permanens. La baryte, la chaux 8c la magnéfie enlèvent y fuivant lui , l’acide fuccinique aux alcalis. La baryte décompofe les fuccinates de chaux 8c de d’Hist. Nat. et de Chimie. 45*5* magnéfie , & Peau de chaux PrcclPlte la ma anéfie unie à cet acide. ° On n’a pas fuivi pins loin l’examen des pro- priétés chimiques de ce bitume. On ne connaît même pas la manière dont les acides font ful- ceptibles d’agir fur lui. Frédéric Hoffman afflue qu’on peut le düîbudre en entier dans la leffive d’alcali caudique & dans l’acide fulfurique. On fait encore que l’huile volatile de fuccin peut s’unir avec l’ammoniaque caudique , & former par le fimple mélange & l’agitation une forte de favon liquide , d’un blanc laiteux , d une odeur très-pénétrante , qu’on connoît en phar- macie fous le nom d 'eau de luce ; enfin , que cette même huile dilTout le fonde à l’aide de la chaleur d’un bain de fable, & conll.tue un médicament appelé baume de foufre Juc- ciné . Le fuccin eft d’ufage en médecine , comme anti-fpafmodique ; on l’a recommandé dans les affections hyflériques & hypocondriaques , la fuppreffion des règles , la gonorrhée , les fleurs blanches , &c. On l’emploie en nature apres l’avoir lavé avec de l’eau chaude , & réduit en poudre fine fur le porphyre. On s’en fert pour des fumigations fortifiantes & réfolutives , en jetant ce bitume en poudre fur une brique bien chaude , & en dirigeant la fumée qu’il exhale* Ff iv 4T^ É l à m e N s fur !a partie qu’on fe propofe de fonmettre S fon a dion. L’acide liquide & le Tel de fuccin font regardés comme béchiques, iucififs , cor- diaux & anti-feptiques ; on les administre aiiflî comme des pui.Tans diurétiques. L’huile de fuccin efl employée extérieurement & intérieu- re mer t aux mêmes ufages que le fuccin lui- même ; on la prefcrit à des dofes moins fortes a caufe de fon activité plus grande. Le baume de foufre (iicciné que l’on donne à la dofe de quelques gouttes dans des boitions appropriées, ou mêlé avec d’autres fubftances pour en for- mer des piîu ’ es , a du fuccès dans les affections humorales & pituiteu fes de la poitrine , des reins , &c. On fait avec l’acide liquide du fuccin Si l’opium un firop appelé Jlrop de karalé , que l’on emploie avec avantage comme calmant , anodin & anti fpafmodiqne. L’eau de luce que l’on prépare en verfint quelques gouttes d’huile de fuccin dans un flacon plein d’ammoniaque eaufliqne,& en agitant ce mélange jufqu’à ce qu’il ait p.is une couleur blanche laiteufè , cfl depuis long tems en ufage comme lin irritant très a&if, dans les afphixies ; on l’approche des narines , dont elle ilimute les nerfs, Si c’eft par les fécondés qu’elle excite, qu’elle ranime le mouvement des fluides , & lait revenir les malades. d’Ktst. Nat. TT DE Chimie. 457 “Les plus beaux morceaux de fuccin font taillés de tournes pour en faire des vafes , es pommes de cannes , des colliers, des brace ets, des tabatières , Sec. Ces fortes de bijoux ne font plus recherchés chez nous depuis que les diamans & les pierreries font connus ; mais on k s envoie en Perle, en Chine & chez plufieuis nations qui les éftiment encore comme de gram des raretés. Walleiius dit qu’on peut employer les morceaux les plus tranfparens poui faire microfcopes , des verres ardens , des pnfmes , $cc. On affure que le roi de Prude avoit un miroir ardent de fuccin d’un pied de diamètre, '& qu’il y a dans le cabinet du duc de Florence une colonne de fuccin de dix pieds de haut , & un In lire très-beau. On peut réunir deux morceaux de ce bitume en les enduifant de diflolutiori de potalïe , & en les rapprochant après ies avoir chauffés. CHAPITRE XXV. Sorte II. De l’Asphalte. X / r^sp halte ou bitume de Judée , nommé iiufli gomme des funérailles , karabé de Sodôme , poix de montagne , baume de momies , &c. eff un bitume noir, pefapt, folide, affez brillant», 478 E l é m e N s Il fe caiïe facilement , & fa calfure eft vitreufe. Une lame mince de ce bitume paroît rouge, lorfqu’on la place entre l’œil 8c la lumière. L’afphalte n’a pas d’odeur quand il eft froid. Lorfqu on le frotte il en acquiert uue légère. Il fe trouve fur les eaux du lac Afphaltide ou mer morte dans la Judée , près duquel étoient les anciennes villes de Sodomie & de Gomor- re. Les habitans incommodés par l’odeur que répand ce bitume a malle fur les eaux , 8c en* couragés par le profit qu’ils en retirent , le ra- maffent avec foin. Lémery dit dans fon Diétion- naire des Drogues, que l’afphalte fe dégorge comme une poix liquide, de la terre que cou- vre la mer morte, 8c qu’élevé fur fes eaux, il y efl condenfé par la chaleur du foleil 8c par l’adion du fel que ces eaux contiennent en grande quantité. Il s’en rencontre auffi fur plu- lîetirs lacs de la Chine. L’afphalte du commerce fe retire , fuivant M. Valmont de Bomare , des mines de Dau- nemore , & notamment dans la principauté de Neuchâtel 8c de Wallengin. Il y en a de deux couleurs , fuivant ce naturalifie , de noirâtre , de grisâtre ou fauve ; mais cet afphalte n’efi: pas à beaucoup près pur , 8c il paroît n’être qu’une terre endurcie 8c pénétrée par le bi- tume. d’Hist. Nat. bt de Chimie. 4)9 Les naturalifles font partagés fur l’origine de l’afphalte .comme fur celle de tons les bitumes. Les uns le croient un produit minéral , forme par un acide uni à une matière grade dans 1 in- térieur de la terre. D'autres le regardent comme une matière réfmeufe végétale , enfouie & alte- rée par les acides minéraux. Le fentiçpeiU le plus répandu & le plus vraisemblable , c’eft qu’il a la même origine que le fuccin , & qu’il ed formé par ce dernier bitume , qui a éprouve l’aétioi* d’un feu fou-terrain. Cette opinion ell fondée fur ce que le fuccin fondu & prive d’une partie de fon huile & de fon fel par l’adion du feu , devient noir , fec , caflant & parfaitement femblable à l’afphalte ; mais elle ne pourra être folidement établie que par une analyfe comparée de ce réfidu de fuccin & de i af- p h al te ; ce dernier bitume n’a point encore ete examiné avec l’exaditude néceffaire pour aflurer cette analogie. L’afphalte expofé au feu , fe liquéfie , fe bour- fouffle , & brille en répandant une flamme & une fumée épaiiïe , dont l’odeur ell loite , acre & défagréable. On en retire par la dilhllation une huile colorée comme le pétrole brun , & un phîegme acide. L’afphalte efl employé , comme le goudron , pour enduire les vaiffeaux , par les arabes & '4 6o É L £ ]\ï E N s les indiens. Il entre dans la compofition des vernis noirs de la Chine, & dans les feux d’ar- tifice qui brûlent fur l’eau. Les égyptiens s’en fervoient pour embaumer les corps ; mais il n’étoit employé à cet ufage que par les pau- vres qui ne pouvoient pas fe procurer des fubf- tances anti-feptiques plus précieufes. Wallerius affure que des marchands préparent une efpèce d’afphalte avec la poix épaiffie , ou en mêlant & faifant fondre cette dernière avec une cer- taine quantité de véritable baume de Judée, mais on peut reconnoître cette fraude par le moyen de l’alcool , qui difiout entièrement la poix, & qui ne prend qu’une couleur jaune pâle avec rafphalte. CHAPITRE XXVI, Sorte III. Du Jayet. T v F jais ou jayet, nommé par les latins gagas y appelé fuccin noir par Pline , Pangitis par Stra- bon , &c. efl un bitume noir , compaét , dur comme quelques pierres , brillant & vitreux dans fa calibre , & fufceptible de prendre un beau poli. Frotté quelque tems, il attire les corps légers , & paroît électrique comme la i d’Hist. Nat. et de Chimie. fuccin. Il n’a point d’odeur ; lorfqu’on le chauffe, îl en acquiert une à-peu-près femblable à celle du bitume de Judée. Le jayet fe trouve en France dans laProvence, dans le comté de Foix ; il y en a même une carrière qu’on exploite à Béleftat dans les Py- rénées. On le rencontre auffi en Suède , en Allemagne , en Irlande. Les carrières de jais font difpofées par couches ; elles contiennent des pyrites , ainfi que le charbon de terre , & comme la plupart des bitumes. Ce bitume fe ramollit & fe fond lorfqu on le chauffe fortement ; il brûle avec une odeur fétide. On en retire de l’huile par la dillillation « 6c une liqueur acide. Parmi les différentes opinions fur la forma- tion du jayet j la plus vraifemblable eh celle qui confifte à le regarder comme de Pafphalte en- durci par le laps des tems. Elle a ete adoptée par le favant Wallerius. Le jayet eft employé pour faire des bijoux de deuil. C’eft à Wirtemberg qu’on le travaille. On en fait des bracelets , des boutons , des boîtes , 6c c. ^ ËLÈMENi ^62 psss CHAPITRE XX VIL Sorte IV. Du Charbon de terre. O N donne le noiii de charbon fvfjile> chat- bon de terre, de pierre, üthantrax , houille , &c. à une matière bitumineufe, noire, feuille- tée , luifante ou terne , qui fe cahe facilement , 8c qui n’a pas la conhhance & la pureté des bitumes décrits jufqu’aéFuellement. Ce bitume a reçu le nom qu’il porte, en raifon de fa propriété combullible 8c de l’ufage qu’on en fait dans plutieurs pays. On le trouve dans l’intérieur de la terre , au-deffous de pierres plus ou moins dures 8c de fchihes alumineux 8c pyriteux. Ces derniers portent conhamment l'empreinte de plufieurs végétaux de la famille des fougères , qui pour la plupart font exoti- ques, fuivant l’obfervation de Bernard de Juf- fieu. Le charbon de terre efl placé plus ou moins profondément dans l’intérieur de la terre. Il efl toujours difpofé par couches horifontales ou inclinées ; cette dernière difpofition eh la plus fréquente. Les lits ou couches dont il eh compofé diffèrent par l’épaifieur , la conhhance , la couleur, la pefanteur ,&c. On obferve (ou- d’Hist. Nât. et de Chimie. 46S, Vent au- de (Tu s de ce bitume des lits plus ou moins étendus de coquilles 5c de madrépores fcflîles ; ce qui a fait penfer à quelques mo- dernes , 5c particulièrement à M. Parmentier, que le charbon de terre avoit été formé dans la mer , par le dépôt 5c l’altération des ma- tières huileufes ou graiflcufes des animaux ma- rins. La plupart des naturalises le regardent comme le produit d’un rèfidu des bois enfouis 5c altérés par les acides. On exploite les carrières de charbon foflile comme les mines, en creufant des puits 5c des galeries , 5c en détachant ce bitume à l’aide de pics ou efpèces de pioches. Les ouvriers qui le retirent font fouvent expofés au danger de perdre la vie par les fluides élafliques qui s en dégagent. Cette efpèce de mofette eft nommée pouffe ou touffe par les ouvriers ; elle éteint les lampes , 5c paraît être du gaz acide car- bonique. Il fe développe auflî dans ces mines une efpèce de gaz inflammable très-délétère qui produit quelquefois des explofions dange- reu fes. Le charbon foflile efl très-abondant dans la nature. On en trouve en Angleterre , en Ecoiïe, en Irlande , dans le Hainault , le pays de Liège, la Suède , la Bohême , la Saxe, 5c c. Plufieurs provinces de la France en fournifTent beaucoup Ê l é M E N s Si fpécialement la Bourgogne , le Lyonnoïs, Î& Forez, l’Auvergne, la Normandie, Ne. Le charbon foflile Te diftingue en charbon de pierre Si charbon de terre , fuivant fa dureté ou fa friabilité; mais la manière dont il brûle, & les phénomènes qu’il préfente dans fa cotn- buftion , foumillent des caradères bien plus im- portans pour en faire reconnoître les différentes fortes. Wallerius en diflingue trois efpèces fous ce point de vue : 1°. Le charbon de teire écail- leux, qui relie noir après fa co nbullion: 2°. Le charbon de terre compad N feuilleté , qui, après avoir été brûlé, donne une matière fpon- gieufe^femblable à des fendes : Le charbon de terre tibreux comme le bois , N qui fe ré- duit en cendres par la combtilbon. Ce bitume chauffé avec le cont.ad d’un co» ps en combuftion & de l’air , s’embrafe d’autant plus lentement N ciifficilement, qu’il eÜ.plus pefant N plus compad ; une hais embrafé , il répand une chaleur vive N durable , & il efl long-tems en ignîtion avant d’être confumé. On peut rpême l’éteindre N le faire fervir phi- fienrs fois de fuite à de nouvelles combullions. Sa matière inflammable paroît très-denfe, 8c comme fixée par une autre fubflance non co n- buflible qui en arrête la deflrudion. Il exhale en brûlant une odeur forte particulière , mais «pii < iÿHiST. Nat. et de Chimie. 46/ qui n’eft nullement Cul fur eu fe lorfque le char- bon de terre eft bien pur & ne contient pas de pyrites. La combuftion de ce bitume paroît être fort analogue à celle des matières organi- ques , en ce qu’elle efl fufceptible de s’arrêter 8c d’être partagée en deux tems. En effet 3 la partie combuftible huileüfe la plus volatile que contient le charbon de terre , fe difflpe & s’en- flamme par la première âdion du Feu; & fi, lorfque tout ce principe efl difGpé, on arrête la combuflion , le bitume ne retient que la portion la plus fixe 8c la moins inflammable de fon huile réduite dans un véritable état char- bonneux , 8c combinée avec une bafe terreufe. C’eft par Un procédé de cette nature que les anglois préparent leurs coaks qui n’eft que du charbon de terre privé de fa partie huileufe fluide par l’adion duvfeu. On voit très-bien ce qui fe paffe dans cette expérience, en chauffant ce bitume dans des vaifleaux fermés &c dans un appareil diftillatoire* On en obtient un phlegme alcalin , du car- bonate ammoniacal concret, une huile qui fe fonce en couleur , 8c devient plus pefante à mefure que la diftillation avance. Il paffe eu même tems une grande quantité de fluide élas- tique 8c inflammable, que l’on regarde comme une huile en vapeurs , mais qui eft du gaa hy~ Tome III» G g •Si ^66 E L É M E N S rîrogène mêlé de gaz azote, de carbone qui y eft difTous, & de gaz acide carbonique. Il relie dans la cornue une ipatière fcorifiée, char- bonneufe , qui efl encore fufceptible de brûler; c’eft le coaks des anglois. Si l’on obfcrve avec loin l’adion du feu fur le charbon de terre pur, on voit qu’il cprouve un ramolliftement évident , & qu’il femble palier à une demi- fufion ( i) : or on conçoit que cet état pouvant nuire à la fonte des mines, il eft effentiel de pri- ver le charbon de terre de cette propriété. On y réunit en lui enlevant le principe de ce ramol- Jiflement , c’efl à-dire , l’huile qu’il contient en grande abondance, & en le réduifant dans un état analogue à celui du charbon fait avec les végétaux. N’oublions pas de faire obferver que l’ammoniaque fournie en allez grande quantité (i) Il y a quelques efpèces de charbon de terre qui n’éprouvent point cette fufion , ou plutôt ce ramollif- fement par raélion du calorique 5 ces efpèces ne paroif- lènt pas contenir tant d’huile que celles qui fe ramol- liffent au feu ; mais les dernières l'ont les plus nom- breufes & les meilleures. La diüinâion des charbons de terre d’après leur nature intime n’eft pas encore à beau- coup près auffi exafte qu’elle pourra l’être quelque jour. M. Faujas a donné quelques lumières nouvelles à cet égard dans la diflertation qu’il a publiée , il y a quelques mois , fur le charbon de terre. d’Kîst. Nat.et de Chimie. 4 67 par le charbon de terre, favorife l’opinion que nous avons expofée fur Ton origine animale ; puifque , comme on le verra ailleurs, les corps qui appartiennent au régné, animal donnent tou- jours ce Tel dans leur dihillation. Cette analyfe eh faite en grand dans plufieurs parties de l’An- gleterre, & l*oii recueille dans un appareil dif- tillatoire particulier les differens produits du charbon de terre ; l’huile efl employée comme goudron, l'ammoniaque fert aux fabriques de muriate ammoniacal , & le réfidu eh un très- bon coaks. M. Faujas de Saint - Fond a tranfporté cet art utile en France , & les ex- périences qu’il a faites ait jardin des plantes, ont très- bien réufîî en petit ; malgré cela , il n’y a encore aucun établiffement de ce procédé en grand. Le charbon de terre eh fingulièrement utile dans les pays où il n’y a pas de bois. On i’em* ploie comme matière combuhible , & fans qu’on puihe craindre les dangers que quelques per- formes ont attribués à Ion ufage. La vapeur fui- fureufe que l’on croit qu’il répand dans fa com- buhion , ne doit pas être redoutée , puifque l’analyfe la plus exaéte a prouvé à tous les chi- mihes que lorfque le charbon de terre eh pur, il ne contient pas un atome de foufre. On voir, d’après cela, combien eh faufie & trompenfe g g n 4 68 E L i M E N ! Jn prétention de quelques hommes peu inftruits, qui annoncent' des procédés pour défoufrer ce bitume. Une autre confidération qui doit en- gager à tirer tout le parti poffible du charbon de terre, fur-tout en France, c’eft que les tra- vaux des minés confommant des quantités énor- mes de charbon de bois , il cil; à craindre que le bois ne manque quelque jour ; c’efl fpécia- lement dans ces fortes de travaux que l’induftrie doit chercher à employer le charbon de terre, comme le font depuis long-tems les anglois. Déjà l’ufage du charbon de terre commence à ' s’établir dans beaucoup d’atteliers , & les fa- meufes fonderies de fer du Creufot près Mont- cenis , en Bourgogne,’ en offrent un grand & utile exemple. Le charbon de terre épuré n’efl: autre chofe que celui qui a été privé de fon huile par fac- tion du feiij cette efpèce de charbon brûle fans fumée, fans ramolliiïeaaent , fans odeur forte, c’efl, en un mot, du véritable coaks , & i! ell préféré pour les cheminées des appartemens , en raifon de ces propriétés. Un des grands inconvéniehs du charbon de terre , outre la fumée très-abondante & très- épaifl'e qu’il exhale & qui noircit tous les meu- bles , c’eh que le courant d’air très-rapide & très-abondant qu’il exige pour fa combuflion , d’Hist.Nat. et de Chimie. <69 enlève & volatilife une partie de les cendres , qui s’attachent fur tous les corps enyironnans. Mais on remédiera en grande partie àces>deux inconvéniens par une confU-udion bien entendue des cheminées, & telle que le courant excite par fa combuftion foit tout entier entraîné au- dehors, 6c qu’il n’y en ait aucune portion re- foulée dans les chambres. La grande utilité que ce combufuble auia en France , elt plus relative encore aux arts & aux manufactures de toutes les efpèces ; on ména géra lingulièrement par fon ufage , les Dois pour le chauffage 6c pour la conflructiorn CHAPITRE XXVIII. Sorte V. Du Pétrole. (3 N a donné le nom de pétrole ou d’ huile de pierre , à une fubfiance bitumineufe liquide, qui coule entre les pierres fur les rochers , ou dans différens lieux de la furface de la. terre. Cette huile diffère par fa légèreté, ion odeur, fa co n fi flan ce & fon inflammabilité. Les auteurs en ont diftingué un allez grand nombre de variétés. Ils ont donné le nom de naphte au pétrole le plus léger, le plus tranfparent ce le 470 E. L Ê M E N S plus inflammable ; celui de pétrole proprement dit à un bitume liquide , un peu épais , 5c d’une couleur brune foncée ; enfin celui de poix mi- nérale à un bitume noir , épais , peu liquide » tenace 6c s’attachant aux doigts. Voici quelles en font les variétés décrites par Wallerius 6c par plufieurs autres naturalises. Variétés. 1. Naphte blanc. 2. Naphte rouge. 3. Naphte vert ou foncé. 4. Pétrole mêlé à de la terre. dans le Languedoc ; en Al» facej à Neufchatel en Soi fie j en Lcofie 3 d’Hist. Nat. êt de Chimie.' 47* Le piffafphalte & la poix minérale Te tir oient autrefois de Babylone , dont ils ont feivi a la conftruâion des murailles ; de Ragufe en Grèce, 6c de l’étang de Samo fa te , capitale de la Co- magène en Syrie. On les tire aujourd hui de la principauté de Neufchatel 8c de Wallengin, clu Puits de la Pège , à une lieue de Clermont- Ferrand en Auvergne , & de plufieurs autres endroits. Il faut obferver à l’égard des différentes va- riétés que nous avons indiquées , qu’elles pa- roiffent toutes avoir la même origine, & quelles ne diffèrent les unes des antres que par quelque modification particulière. La plupart des Natu- ralises 8c des ChimiRes attribuent la formation des pétroles à la décompofition des bitumes foiides par l’aétion des feux fouterrains. Ils ob- fervent que le naphte paroît être l’huile la plus légère, que le feu dégage la première, & que celle qui lui fucccde acquérant de la couleur 8c de la confiflance, forme les diverfes fortes de pétroles ; qu’enfin ces derniers unis à quel- ques fubflances terreufes ou altérées par les acides , prennent les caraélcres de la poix mi- nérale ou du piiîafphalte. Ils ont , pour étayer leur fentiment , une comparaifon fort exacle avec les phénomènes que préfente la diflillation du fuccin , qui fournit en effet une forte de 472 E L é M E N s naphte , & un pétrole plus ou moins brun iuivant îe degré de chaleur , & le temps de 1 opération. Enfin , ils obfervent qae la nature préfente fouvent dans le même lieu toutes les eipèces de pétrole, depuis le naphte le plus léger jufqu’à la poix minérale. Tels font les bitumes fluides que l’on retire du mont Feflin dans le duché de Modène. Quoique cette opi- nion foit très-yraifemblabîe , quelques auteurs penfent que le pétrole efi une combinaifon huileufe minérale formée par l’acide fulfurique Sc quelque matière grade ; mais cette combi- naifon meme appartiendroit encore à quelques êtres organiques , puifque les matières grades font toujours formées par ces êtres. On n’a point encore examiné les propriétés chimiques du pétrole. On fait feulement que le naphte efi très-volatil , & fi combuflible, qu’il s’enflamme par le voifînage de quelque matière en combuflion ; il femble même attirer la flam- me à caufede fa volatilité. On retire un phi gme acide du pétrole brun , & une huile qui d’abord efi femblable au naphte , & qui fe colore à mefure que la diflillation efi plus avancée. Il refie dans la 'cornue une matière épaifle comme le piflafphalte , qu’on peut rendre sèche 8c caf- fante comme l’afphalte , & réduire entièrement à l’état charbonneux par un feu plus vif. Ecs d’Hist. Naï. et de Chimie. 47^ alcalis n’ont que peu d’action fur le pétrole; l’acide fulfurique le colore & l’épaiffit, l’acide nitrique l’enflamme comme les huiles effentiel les; il diffout facilement le foufre ; il fe colore par les oxides métalliques , & il s’unit au fuccin dont il ramollit & difToiit une partie à l’aide de la chaleur. Les diverfes efpèces de pétrole font em- ployées à différens ufages dans les pays où elles font abondantes. Kempfer nous apprend qu’on s'en fert en Perfe pour s’éclairer , & qu’on en brûle dans des lampes à l’aide des mèches. On peut aufli les faire fervir au chauffage. Lehman dit que pour cet effet on verfe du «aphte fur quelques poignées de terre , 8c qu’on l’allume avec du papier; il s’enflamme tout-à- coup avec aélivité, mais il répand une fumée épaiffe très-abondante, qui s’attache à tous les corps , & dont l’odeur eft fort défagréahle. O11 croit auffi que le pétrole entre dans la compo- fition du feu grégeois. On emploie encore le pétrole épais pour faire un mortier très-folide & très-durable. On retire , par la décoéjtion du piffafphalte avec l’eau , une huile dont on fe fert pour goudronner les vaiffeaux. Enfin , quelques médecins fe font fervis avec fuccès du pétrole dans les maladies des mufcîes, la paralyfie , la foibieffe , 8c c. en frottant la / 474 E L É M E N S , Sec . peau , ou en l’expofam à fa fumée. Vanhelmont reu'ndok les frictions faites avec le pétrole com- rr.r un très -bon remède pour les membres gelés» Sc il les confeiiloit comme un excellent O préfervatif contre limpreffion du froid. i Fin du Tome troisième . ‘ ) « V. » ■ ) r * * * . . > . ‘ * v. ' ’ fV /-.'y