MDXV1II TEXS^l Bpa^Æ : Dtl «tJei/I»' Digitized by the Internet Archive in 2016 https://archive.org/details/b28037893_0003 V 1 ' • N > l * « ( . * J > / I \ w • 1 I I ». '1 < É L É M E N S D’HISTOIRE NATURELLE E T DE CHIMIE. TOME TROISIÈME. / X / É L E M E N S D’HISTOIRE NATUREL E T DE C H I M I TROISIÈME ÉDIT Par M. de Four croy , D odeur en Médecine de la Faculté de Paris , de l’Académie Royale des Sciences , de la Société Royale de Médecine , de la Société Royale dd Agriculture , ProfeJJeur de Chimie au Jardin du Roi . TOME TROISIÈME, Chez Cuchet, Libraire, rue & hôtel Serpente. M. D C C. L X X X I X. Sous le Privilège de l’Académie Royale des Sciences. ROYAL COLLEGE OF PHYSIC1ANS LIBRARY CLASS SU ACCN \m\ SOURCE DATE D’HIST OIRE NA TURELLE E T DE CHIMIE. Suite de la troisième Section de LA MlNERALOGl E OU DE L'HISTOIRE des Substances combustibles. CHAPITRE XIII. De l'Antimoine. L’Antimoine , Jîibium , elt un demi- métal. pelant , d’une couleur blanche brillante, affez femblable à celle de l’étain ou de l’ar- gent. Il paroît compofé de lames appliquées les unes aux autres , & préfente à fa furface Tome 111. A 2 É L è M É N S une forte de crifiallifation en étoiles ou feuilles de fougère. Il eft encore fufceptible de crif- tallifer en pyramides trièdres , formées par des efpèces de trémies implantées par leurs angles les unes fur les autres; ces trémies paroilfent être elles-mêmes le réfultat de l’aggrégation de pyramides quadrangulaires , ou d’oétaëdres. II perd dans l’eau un feptième de fon poids; il fe réduit facilement en poudre ; il a une aéfion très-fenfible fur l’eftomac } puifqu’il eft forte- ment émétique & purgatif. L’antimoine fe rencontre rarement natif; il a été découvert par M. Antoine Shwab , à Sahlberg en Suède. M. Schreiber , direéleur des mines d’Allemont en Dauphiné en a trouvé dans ces mines. Cet antimoine natif efl en grandes lames 8c préfente toutes les proprié- tés de celui que l’on extrait de fa mine ; il contient feulement un ou deux centièmes d’ar- fenic. M. Mongcz le jeune a découvert un oxide d’antimoine natif en aiguilles fines & blanches mêlées avec de l’antimoine , ou grouppées à la manière de la zéolite. Il a trouvé cet oxide fur de l’antimoine natif des Chalanges en Dau- phiné. Ce demi-métal eft le plus fouvent combiné avec le foufre , & il forme alors ce qu’on a d’HisT. Nat. et de Chimie. 3 appelé improprement antimoine , & ce qu’on doit nommer mine ou fulfure d’antimoine. Ce minéral eft d’un gris noirâtre , en lames ou en aiguilles plus ou moins grolïes , friables , dif- perfées ou réunies fous différentes formes. Il eff quelquefois mêlé avec d’autres métaux , & particulièrement avec le plomb & le fer; il eff commun en Hongrie , en France, dans le Bour- bonnois , l’Auvergne , le Poitou. Les natura- liftes ont multiplié les variétés de cette mine, fuivant que fes filets font parallèles , étoilés , irréguliers , chatoyans , &c. Lorfqu’elle eff mê- lée d’une portion d’arfenic , ou qu’elle a été altérée par des vapeurs alkalines ou combufti- bles , elle eft en aiguilles d’un rouge foncé , allez femblables aux belles fleurs de cobalt , mais un peu plus opaques. On peut, d’après ces détails , reconnoître plufieurs variétés de cette mine. Variétés. 1. Sulfure d’antimoine criffallifé en prifmes hexaèdres, terminés par des pyramides tétraè- dres obtufes, 8c ifolés. 2. Sulfure d’antimoine flrié , ou formé de groffes aiguilles informes, appliquées 8c réu- nies en faifceaux irréguliers. Sulfure d’antimoine à ftries étoilées Ai] * • É L É M E N S 4 .Variétés. fes aiguilles vont en divergeant d’un centre commun. 4. Sulfure d’antimoine lamelleux ; il eft formé de lames plus ou moins étendues, qui imitent la mine de plomb nommée Galène Quelquefois cette variété eft brillante on la nomme alors antimoine fpéculaire. 5-. Sulfure d’antimoine rouge. Il eft en ef- florefcence granuleufe à la furface des aiguilles d’antimoine ; quelquefois il eft criftallifé en aiguilles ou prifmes d’un rouge plus ou moins brillant St foncé. Quelques naturaliites le nomment en cet état kermès 8c foufre doré natifs . On ne traite point le fulfure d’antimoine dans fes mines pour en féparer ce demi-métal; on fe contente de fondre ce minéral pour le fépa- rer de fa gangue 8c des autres matières métal- liques auxquelles il peut être lié. A cet effet on prend deux pots de terre, dont l’un eft percé de plufieurs trous dans fon fond , c’eft dans celui-là que l’on met la mine à fondre ; l’autre pot placé au-deffous du premier , & deftiné à recevoir le fulfure d’antimoine à mefure qu’il fe fond, eft enfoncé dans la terre. On fait du feu autour du pot fupérieur ; on ne donne d’Hist. Nat. et de Chimie- f qu’une chaleur douce dans le commencement* parce que cette mine efl: très-fufible ; mais fur la fin on augmente le feu , afin de retirer du minéral tout ce qu’il contient. Il paffe alors une portion des autres métaux , & notamment dur fer qui fe trouve dans la mine ; ces métaux forment une couche de fcories à la furface du fulfur.e d’antimoine. Quoique ce minéral tiré de la Hongrie pafle pour le plus pur , il eft cer- tain que tour fulfure d’antimoine fondu , lorf- qu’il efl. bien aiguillé 8c fans mélange de fco- ries , efl également parfait 8c prSpre à tous les ufages auxquels on a coutume d’employer ce minéral. Il faut feulement obferver que le ful- fure d’antimoine diffère fouvent par la quantité refpeétive de foufre 8c d'antimoine qu’il con- tient , 8c qu’il efl très-important de faire l’effai de celui dont on fe fert pour préparer les mé- dicamens antimoniaux , dont il feroit fort à de- firer que la force fût toujours la même. Le fulfure d’antimoine efl très-fufible , ainfi qu’on peut le voir d’après le procédé employé pour le féparer de fa gangue ; fi on le pouffe au feu , lorfqu’il efl fondu dans des vaifleaux ouverts , il perd fon foufre qui fe diffipe eu fleurs jaunes; îa partie «métallique s’oxide autfr très-facilement , 8c fe diffipe en vapeurs blan- ches. Mais à une chaleur douce & incapable A iij 6 Élémens de fondre Je fulfure d’antimoine , le foufre de ce minéral fe diffipe lentement & par degrés ; le métal s’unit peu à peu à l’oxigène atmofphé- rique , & forme l’oxide gris d’antimoine. Cette opération ne peut bien fe faire , qu’autant que le fulfure d’antimoine très-divifé préfente une grande furface à l’air. Pour cela , on le met en poudre & on l’expofe à un feu doux fur une terrine de terre vemiflee. Il faut auffi procéder avec lenteur au commencement , parce que ce minéral efl très-fufible ; mais à mefure qu’on avance dans l’opération & que le foufre fe dif- fipe , l’antimoine devenant plus réfradaire, on peut élever le feu jufqu’à faire rougir la cap- fule qui contient ce minéral. On s’apperçoit qu’on opère bien , lorfqu’on ne fent d’autre odeur que celle du foufre qui fe fublime pen- dant le grillage , & que la matière ne fe pelo- tonne pas ; mais lorfque le fulfure d’antimoine fe grumèle , & que le foufre fe décompofe en fe volatilifant , ce qu’on fent par l’odeur fuffo- quante de l’acide fulfureux , alors la chaleur eft trop grande , & il faut la diminuer. Quoique le foufre parodie peu adhérent à l’antimoine dans fa mine , il n’ell cependant pas poffible de l’enlever tout entier par le grillage; 8c l’oxide gris d’antimoine préparé par ce pro- cédé, en retient toujours une alfez grande quan- d’Hist. Nat. et de Chimie. y tïté , malgré qu’il, ait cté calciné au point d’ôter au demi-métal Tes propriétés métalliques. L’oxide gris d’antimoine , pouffé au feu fans addition , fe fond en un verre d’un brun rouge ou couleur d’hyacinthe. Ce verre elt plus ou moins fufible, plus ou moins tranfparent, fui- vant que le minéral qui a fervi à le former étoit plus ou moins calciné. Si cet oxide contient peu de foufre & beaucoup d’oxigène , le verre qu’il donne elt tranfparent & peu fufible , c’eff le verre d antimoine proprement dit , ou l’oxide d’antimoine fulfuré vitreux. Si l’oxide contient beaucoup de foufre , & s’il fe rapproche en- core du caraétère métallique , il produit un verre plus fufible St plus opaque > on le nomme foie d'antimoine , à caufe de fa couleur rouge fom- bre , femblabîe à celle du foie des animaux. Lorfque l’oxide d’antimoine a été tellement calciné qu’il a de la peine à fondre , il n’y a qu’à jetter dans lé creufet où on le fond, un peu de foufre ou de fulfure d’antimoine , la matière entre en fufion dans l’inilant. L’oxide gris d’antimoine , St le même oxide vitreux , chauffés dans un creufet arec leur poids de flux noir St un peu de favon noir ou d’huile , fe réduifent & donnent de l’antimoine pur. Le flux noir dans cette opération fert à deux ufages ; l’alkali qu’il contient s’unit au foufre A iv 8 É L É ME NS que ces matières n’ont pu perdre par la feule adion du feu , & la matière charbonneufe fa- vorife la réduétion de l’oxide métallique. C’eft de cette manière que fe prépare l’antimoine en grand dans le commerce ; on l’appelle régule. On coule ce demi-métal en pains orbic.ulaires & applatis ; ces pains préfentent à leur fur- face une criüallifation en forme de feuilles de fougère. L’antimoine n’efl que peu altérable par le contad de la lumière. Il ne fe fond au feu que lorfqu’il eft rouge ; & fi on le chauffe fortement dans des vaiffeaux clos , il fe volatilife en en- tier fans être décompofé. Si on le laide refroi- dir lentement lorfqu’il .efl fondu , 6c qu’on dé- . cante la portion fluide lorfque fa furface eff figée , on trouve le refie criflallifé en pyrami- des ou en trémies , comme nous l’avons dit plus haut. Ce demi - métal fondu dans des vaiffeaux ouverts , s’oxide promptement ; il s’en élève des fumées blanches , épaiffes , qui fe précipi- tent à la furface du métal fondu , ou s’attachent au couvercle du creufet , fous la forme de pe- tites aiguilles blanches : c’eft un oxide métalli- O J que fublimé , auquel on a donné le nom im- propre de fleurs argentines du régule d'antimol* ne , ou celui de neige d'antimoine . Pour en pré- d’Hist. Nat. et de Chimie. 9 parer une certaine quantité , on place un creu- fet horifontalement dans un fourneau , de forte que fes bords s’ajuftent avec la porte du foyer, à laquelle on le lutte à l’aide de la terre à four. On met dans ce creufet de l’antimoine ; on fait affez de feu pour faire fondre & fumer ce demi- métal , on reçoit cette fumée dans un fécond creufet qu’on adapte au premier ; elle s’y con- denfe en aiguilles très- déliées , blanches & bril- lantes , qui parodient être des prifmes à quatre faces. L’oxide d’antimoine blanc 8c fublimé , n’efl: pas feulement fufceptible de fe volatilifer dans le tems de la déflagration du demi- métal; mais il fe fublime feul , lorfqu’on le pouffe au feu. Cet oxide peut auffi fe fondre en un verre de couleur orangée ; ce verre efl plus pâle 8c plus tranfparent que celui que l’on fait avec l’oxide gris &fulfuré d’antimoine ; mais auffi il efl beau- coup plus difficile à fondre. L’antimoine n’éprouve aucune altération de la part des matières combuflibles ; mais les oxides d’antimoine peuvent être décompofés par ces fubflances , & reprendre l’état de régule. Comme la plupart font très-oxidés ou charges de beaucoup d’oxigène , ils ne paffent que très- difficilement à l’état métallique , 8c comme ils font auffi tics- volatils } on ne peut faire cette 10 É t É M E M J réduétion que dans des vaifîeaux fermés. II pa- roîtque l’oxide blanc fublimé efl difloluble dans l’eau , & qu’il a pris quelques caradères falins. Rouelle efl le premier qui ait fait cette obfer- vation fur les fleurs d’antimoine. Comme quel- ques autres oxides métalliques, & en particu- lier ceux d’arfenic, de molybdène, de tungf- ten , paffent à l’état falin 8c acide , lorfqu’ils font faturés d’oxigène ; peut-être découvrira- t-on par la fuite la même propriété dans l’oxide d’antimoine. L’antimoine n’efl que fort peu altéré par l’air ; on obferve feulement que la ftrrface de ce demi-métal fe ternit. Il ne fe riiffout pas dans l’eau , cependant quelques médecins foup- çonnent qu’il communique à ce fluide une qua- lité émétique très-marquée. Les oxides blancs d’antimoine diflous dans l’eau , donnent à ce fluide une propriété émétique. Cette aétion , jointe à leur diffolubilité dans l’eau 8c à leur volatilité , préfente une forte d’analogie avec l’oxide d’arfenic. Plufieurs minéralogifles ont penfé que la mine d’antimoine n’étoit jamais exempte d’arfenic ; il efl certain que jettée en poudre fur les charbons , ainfi que le régule , elle exhale une odeur fenfiblement arfenicale , 8c que Torfqu’on s’expofe pendant quelques toms à cette vapeur , on efl purgé , 8c on éprouve- II d’Hist. Nat. et de Chimie. les effets d’un empoifonnement léger, comme je l’ai obfervé plufieurs fois dans mon laboratoire. Les fubllances terreufes n’ont point d’aétion fur l’antimoine; fon oxide entre facilement dans les verres , 8c leur donne des couleurs oran- gées plus ou moins femblables à celle de l’hya- cinthe. On ne connoît point l’adion des fubflances falino-terreufes & des alkalis fur l’antimoine ; on a mieux apprécié celle des acides fur ce demi-métal. L’acide fulfurique qu’on fait bouillir lente- ment fur ce régule , efl décompofé 8c en oxide une partie. 11 s’exhale une grande quan- tité de gaz fulfureu^, & fur la fin il fe fublime un peu de foufre. La maffe qui relie après la décompofition de l’acide , efl un compofé de beaucoup d’oxide métallique 8c d’une petite portion du demi* métal combiné à l’acide dans l’état de fulfate d’antimoine. On fépare la partie faline par le moyen de l’eau diflillée. Ce fel , fortement évaporé , efl très - déîiquefcent , de n’efl pas fufceptible *de criflallifation ; il fe dé- compofe facilement au feu. L’eau fmre , les fubflances falino-terreufes 8c les alkalis en fé- parent auffi les principes. L’oxide d’antimoine formé par l’acide fulfurique 8c précipité de cet acide , efl très-difficile à réduire. 12 É L É M E K ! * L’acide nitrique attaque avec vivacité l’anti- moine ; il eft fortement décompofé , il en oxi- de la plus grande partie , & en diftout une portion. Cette diffolution fe fait bien à froid; le fel qui en réfulte , féparé par la leffive de la portion oxidée , donne par l’évaporation un nitrate d’antimoine qui eft fort déliquefcent, qui fe décompofé au feu , & par les mêmes inter- mèdes que le fulfate de ce métal. L’oxide d’an- timoine formé par l’acide nitrique , eft très- blanc ; il eft en même-tems un des pins ré- fradaires 8c des plus difficiles à réduire de tous les oxides métalliques. L’acide muriatique paroît agir plus diffici- lement fur l’antimoine que les autres acides. Cependant il le diftout à l’aide d’une digeftion longue , 8c l’oxide moins que ne font les acides fulfurique 8c nitrique. J’ai obfervé qu’en laif- fant pendant long-tems cet acide fur de l’an- timoine en poudre , il agit lentement fur ce demi-métal 8c en diftout une bonne quantité. Le muriate d’antimoine qu’on obtient en peti- tes aiguilles par une forte évaporation , eft très- déliquefccnt. Il fe fond au feu ; il fe volatiîife, & il fe décompofé par l’eau diftillée , comme le muriate d’antimoine fublimé , nommé beurra d” antimoine , que nous connoîtroris par la fuite, 8c dont il ne diffère que très-peu. M. Monnet, d’Hist. Nat. et de Chimie. 13 qui a bien décrit cette combinaifon opérée par une chaleur affez forte , obferve que celle que l’on fait avec un oxide d’antimoine , diffère beaucoup de celle qui eft préparée avec le métal , par fa fixité & fa manière de crifiallifer en lames , comme le fulfate de chaux & l’a- cide boracique. D’ailleurs cette efpèce de fel eft décompofable par l’eau. Nous avons eu oc- cafion d’obferver que dans les diffolutions d’an- timoine par l’acide muriatique & au moyen de la difiillation , il y a toujours une portion faline qui ne fe volatilife pas par l’aétion du feu , & qui reffemble à celle dont M. Monnet fait men- tion. Cela dépend de ce qu’elle a été forte- ment oxidée par l’acide. Cette obfervation peut être également appliquée à prefque toutes les diffolutions métalliques qui fe trouvent dans plufieurs états différens , fuivant qu’elles con- tiennent le métal plus ou moins calciné ou oxigéné. M. Monnet a confiaté que douze grains d’oxide d’antimoine fufiifent pour faturer une demi-once d’acide muriatique ordinaire , dont il n’a pas déterminé la force. Bergman dit que l’acide muriatique a plus d’affinité avec l’anti- moine , que n’en ont les autres acides, L’acide muriatique oxigéné oxide l’antimoine avec la plus grande facilité. Ueau régale , ou l’acide nitro - muriatique , ÉtÊMENS diffout ce métal plus efficacement que chacun des acides qui le compofent ; parce que l’ac- tivité de l’acide muriatique eft augmentée en raifon de fon union avec l’oxigène féparé de l’acide nitrique. Le nitro-muriate d’antimoine eft fort déliquefcent , & peut être décompofé comme les autres combinaifons falines de ce demi-métal. Le fulfure d’antimoine , ou la combinaifon naturelle du foufre avec le demi-métal, fe dif- fout mieux en général 8c s’oxide moins par les acides , que le demi-métal. Il paroît que le foufre défend en partie l’antimoine de l’ac- tion de ces fubftances falines. L’acide nitro- muriatique agit doucement fur ce minéral ; c’eft un très-bon moyen d’en féparer le foufre, qui fe précipite fous la forme d’une poudre blan- che. M. Baumé confeille d’employer pour cette opération une eau régale compofée de quatre parties d’acide nitrique 8c d’une partie d’acide muriatique ; mais il n’a pas déterminé la force de ces acides. Lorfque l’aétion de cet acide mixte elt appaifée , on filtre la diffolution ; le foufre relie fur le filtre ; on le pèfe , 8c l’on fait ainfi quelle eft la quantité refpedive de foufre 8c d’antimoine contenus dans la mine qu’on analyfe • mais il faut obferver que le foufre ell toujours mêlé d’une petite quantité d’oxide d’HisT. Nat. et de Chimie. iy d’antimoine , de forte qu’on ne doit pas regar- der cette expérience comme d’une très-grande exa&itude , à moins qu’on n’ait féparé aupara- vant par les acides la portion d’oxide mêlée au foufre. On n’a point encore examiné l’adion des autres acides fur l’antimoine. Ce demi- métal décompofe plufieurè fels neu- tres. M. Monnet a décrit , dans fon Traité de la dillolution des métaux , une opération par laquelle il démontre que l’antimoine décompofe le fulfate de potafle. Il a fait fondre dans un creufet un mélange d’une once de ce fel & d’une demi - once du demi - métal dont nous ‘'nous occupons. Il en a réfulté une mafTe jaune, vitriforme , très-caulîique , qui n’étoit qu’un ful- fure de potalfe antimonié 5 cette malle délayée dans l’eau chaude , a donné par le refroidiffe- ment un oxide d’antimoine fuîfuré rougeâtre , ou du véritable kermès. On conçoit , fuivant la nouvelle dodrine, que le demi-métal s’eft em- paré de l’oxigène de l’acide fulfurique qui a paffé par-là à Tétât de foufre. Une fuite d’ex- périences que j’ai faites fur cet objet , m’a prouvé que plufieurs fubQances métalliques dé- compofent de même les fels fulfuriques , com- me je le ferai voir dans les chapitres fuivans. Le nitrate de potahè eft décompofé très- 1 6 Élémems rapidement par l’antimoine. En projetant dans un creufet rougi au feu , parties égales de ce demi-métal 8c de nitre en poudre , ce fel dé- tonne vivement , & brûle le métal à l’aide de l’oxigène qu’il fournit ; après cette opération , on trouve dans le creufet l’alkali fixe qui fer- voit de bafe au nitre , & l’antimoine dans l’état d’oxide blanc ; on a donné à cet oxide le nom d’antimoine diaphor étique. Nous le nom- mons oxide d’ antimoine par le nitre. Le plus ordinairement on n’emploie pas l’antimoine pour faire cette préparation ; mais on fe fert du ful- fure d’antimoine natif ou de fa mine. On ajoute feulement une plus grande quantité de nitre , comme trois parties contre une de ce minéral, afin de brûler non - feulement le métal , mais encore tout le foufre qui lui efl uni ; la raifon de la préférence qu’on donne ici à la mine fur le demi-métal , c’eft que le foufre rend la dé- tonation du nitre plus rapide 8c plus complette 8c facilite fin guliè rement la combuftion de l'an- timoine. La matière qui relie dans le creufet , après la détonation , ell compofée de l’oxide d’anti- moine , uni en partie à l’alkali fixe du nitre s 8c d’une portion du nitre qui a échappé à la détonation ; elle contient aufii un peu de ful- fate de potafie , formé par l’acide du foufre & • l’alkali d’Hist. Nat. et de Chimie. 17 Valkali fixe du nitre. Ce compofé a été nommé fondant de. Rotrou , ou antimoine diaphorétique non lavé; on jette cette matière dans de l’eau bien chaude ; elle s’y délaie , la partie faline s’y difTout , & l’oxide métallique y relie fuf- pendu ; on décante l’eau trouble ; on laifife dé- pofer cet oxide blanc 8c fixe ; c’eh ce qu’on appelle antimoine diaphorétique lavé ; on le sèche avec précaution , après l’avoir moulé en petits trochifques. L’eau qui fumage le dé- pôt, tient en dilTolution les matières faiines qui étoient dans le mélange , 8c une portion d’oxide métallique unie à la potafle du nitre. Si on verfe un acide fur cette liqueur , il s’unit à l’alkali , 8c l’oxide d’antimoine fe précipite. On nomme improprement cet oxide , cérufe d'antimoine , ou matière perlée de Kerkringius. La liqueur qui relie après la précipitation de la matière per- lée , contient un peu de nitre qui a échappé à la détonation , un peu de fulfate de potaïïe produit pendant la détonation , 8c le nouveau fel neutre formé par l’union de l’acide à l’alkali qui tenoit l’oxide métallique en dilTolution. Quoique ce dernier fel varie fuivant l’acide qu’on a employé , il porte le nom très-impro- pre de nitre antimonié de Stahl ; le plus fou- vent ce fel n’elt point du nitre , puifqu’on peut fe fervir des acides fulfuûque ou muriatique Tome III, B J 8 É L É M E N S pour précipiter l’oxide d’antimoine ; & loiTque la précipitation elt bien faite , il ne contient point du tout de cet oxide. Les oxides d’antimoine obtenus par le nitre , peuvent être fondus en verre comme tous les précédens ; mais comme ils font très- calcinés, on a bien de la peine à les fondre. Par la même raifon ils font difficiles à réduire en métal ; ils parodient même plus irréduétibles que l’oxide d’antimoine fait par le feu & fublimé. On ne fait pas encore s’ils font moins dilïblubles dans l’eau & dans les acides. L’antimoine paroît fufceptible de décompo- fer le muriate de foude ; puifque fi l’on chauffe dans une cornue un mélange de ces deux fubf- jtances , il palfe , fuivant la remarque de M. Monnet, du muriate d’antimoine fublimé dans le récipient. Ce chimifle ne décrit point le ré- fidu de cette opération. Ce demi -métal ne décompofe pas bien le muriate ammoniacal , fuivant Bucquet ; & l’on n’obtient point de beurre, ou muriate d’anti- moine fublimé de cette décompofition, comme l’avoit avancé Juncker. Toutes les matières combuftibles ont une adion plus ou moins marquée fur ce demi- métal. Le gaz hydrogène altère fa furface & la colore. 11 agit d’une manière plus énergique d’Hist. Nat. et d-e Chimie. ip fur fes dilTolutions. J’ai fait paffer ce gaz obtenu du fer & de l'acide fulfurique aqueux , dans une diffolution nitro-muriatique d’antimoine ; cette dernière s’efl troublée fur-le-champ , elle a dépofé une matière d’un jaune orangé, fembla- ble à du foufre doré , mais jamais femblable .à de vrai kermès. Les oxides d’antimoine blancs, expofés de même au gaz hydrogène , foit g. Xec , foit délayés dans l’eau } n’ont pas été altérés. Le foufre fe combine très-bien avec l’anti- moine , 8c forme une mine artificielle, qui imite parfaitement le fulfure d’antimoine natif. Pour obtenir cette combinaifon , on fond prompte- ment dans un creufet parties égales de foufre 8c d’antimoine , 8c il en réfulte un minéral aiguillé d’un gris fombre , qui ne contient jamais la moitié de fon poids de foufre , à moins qu’on iïi’en ait employé une partie & demie contre une partie du demi-métal. J’ai même obfervé qu’une once d’antimoine fondu dans une cornue avec une once de foufre , a donné dix gros de fulfure d’antimoine , qui ne contenait par con- séquent que deux gros de foufre , 8c que le refie de cette matière combufiible étoit parvenue , en fe bourfoufflant par la fufion , jufque dans Je récipient. Il ne faut donc qu’une partie de dbufre pour donner à quatre parties d’antimoine Eij 20 É L É M £ N S les caraétères de mine ; & l’on voit, d’après cela , combien il eft important de faire l’effai de celle dont on fe fert en pharmacie , afin d’apprécier l’effet des diverfes fubflances qu’on combine avec ce minéral. Les fulfures alkalins ou foies de foufre dif- folvent complètement l’antimoine , 8c forment une matière jaunâtre , d’où l’on peut précipiter le foufre antimonié , par un acide qui lui donne fur-le-champ une couleur orangée. Le gaz hé- patique ou hydrogène fulfuré, agit fur les dif- folutions de ce demi-métal , abfolument de la même manière que le gaz hydrogène. L’antimoine s’unit à l’arfenic , au bifmuth ; /niais on n’a point encore examiné ces alliages avec affez de foin. Telles font les principales propriétés de ce demi-métal. Il eft néceffaire maintenant decon- fidérer en particulier fa mine , à laquelle on a donné le nom impropre dJ antimoine. Comme c’eft de ce minéral que l’on fe fert le plus com- munément pour faire un grand nombre de pré- parations pharmaceutiques très-importantes, on conçoit que fes propriétés doivent être beau- coup mieux connues que celles du demi-métal qu’il contient. Les alchimifles qui s’en font très- occupés , ont multiplié nos connoiffances fur cette matière , & aucune fubflance n’a été le d’Hist. Nat. et de Chimie. zti fujetd’un plus grand nombre d’expériences que le fulfure d’antimoine. Nous avons déjà vu que l’on peut , à l’aide de la chaleur, en féparer une portion du foufre , qu’il réftilte de cette opé- ration un oxide gris qui peut fe fondre en verre ou en foie d’antimoine , fuivant fa * calcination plus ou moins avancée; que le nitre en brûlant le foufre , calcine aulïi la matière métallique. Mais le grillage & la combuflion par le nitre , ne font pas les feuls moyens d’enlever le foufre à l’antimoine : on y parvient encore en pré- fentant à ce minéral un corps qui ait plus d’af- finité avec le métal que n’en a le foufre , ou qui ait plus de rapport avec le foufre que n’err. a le régule. On a un exemple de la première décompo- fition , en appliquant les acides au fulfure d’an- timoine crud ; ces fels, & fur-tout l’acide nitro- muriatique, difTolvent le demi-métal, & en ré- parent le foufre qui vient nager au-defïus de la diffolution ; le métal paraît même plus aifé à diffoudre complètement dans le fulfure d’an- timoine, que lorfqu’il efl pur, ainfi que nous l’avons déjà fait remarquer plus haut. Le fer 8c quelques autres fubftances métalliques enlèvent le foufre au régule. Le nitre efl employé avec fuccès pour pré- parer avec le fulfure plufieurs médicamens allez. B üj 22 Élément importans. Nous avons déjà vu que Idrfqu’on fait détoner une partie de cette mine avec trois parties de nitre , le foufre & le métal fe trou- vent brûlés , & il ne relie plus qu’un oxide métallique blanc , mêlé avec l’alkaii. Si l’oti fait détoner parties égales de nitre & de fulfure d’antimoine, cette détonation ell moins vive, parce qu’il y a moins de nitre; àulfi efl-on obligé de projerter ce mélange par cuillerées dans un creufet rougi , tandis que celui defïiné à former l’oxide blanc , ou Y antimoine diapho- rétique , n’a befoin que d’être allumé une fois, 8c détonne enfuite tout feu! , jufqu’à ce qu’il foit entièrement réduit en une malfe blanche. Lorfque la détonation du fulfure d’antimoine & du nitre à parties égales efl finie , on poulie le tout à la fonte ; 8c au lieu d’ antimoine dia - phor étique , on trouve dans lé creufet une maffe brune-opaque , brillante , très-calfante , en un niot , un verre d’’ antimoine brun 8c opaque , couvert de fcories. On conçoit que dans cette opération , le nitre n’a pas été en affez grande quantité pour brûler tout le foufre. La portion de ce dernier, qui n’eft pas détruite, a entraîné l’oxide d’antimoine dans fa fulion. Lorfqu’on ne pouffe pas ce mélange à la fonte , on n’ob- tient qu’une fcorie vitreufe, à laquelle on donne le nom de faux foie d' antimoine de Rolland* / d’Hist. Nat. et de Chimie. 255 Cette matière réduite en poudre & lavée dans l’eau , forme le fafran des métaux , qui n’efl que de l’oxide d’antimoine vitreux , pulvérifé 8c féparé des matières falines provenantes de la détonation du nitre. On fait encore deux préparations analogues à la précédente , 8c qui font de véritables verres d’antimoine fulfurés. L’une eft la rubinq d’antimoine , ou magnefia opalina , que l’on ob- tient en fondant dans un creufet parties égales de muriate de foude décrépité de nitre & de ful- fure d’antimoine. Cette fonte , qui a lieu fans détonation , fournit une maffe vitreufe , d’un brun peu foncé, très-brillante, 8c couverte de fcories blanches. L’autre appelée très impro- prement régule médécinal , fe prépare en fon- dant un mélange de quinze onces de fulfure d'antimoine , de douze onces de muriate de foude décrépité , 8c de trois onces de tartre. Il en réfulte un verre noir , luifant , très-opaque, très-denfe , qui n’a nullement l’afpeft métalli- que. Ces deux efpèces de compofés, qui diffè- rent du vrai foie d'antimoine par quelques pro- priétés extérieures , doivent fans doute leurs différences au fel marin qui entre dans leu£ préparation , mais dont on n’a point encore apprécié les effets fur ce minéral. Si l’on veut extraire l’antimoine de fa mine B iv 24 . É-L Ê M E N S en petit dans les laboratoires , on doit n’em- ployer que ce qu’il faut de nitre pour brûler le foufre , & ajouter au mélange une matière capable de favorifer la réduélion de la partie de métal qui eft réduite à l’état d’oxide dans cette expérience. Pour cela on prend huit on- ces de fulfure d’antimoine en poudre, fix onces de tartre , & trois onces de nitre; on mêle exadement ces matières , on les projette par cuillerées dans un creufet rougi au feu ; le nitre détone avec le tartre & le fulfure d’antimoine , il fe forme du flux noir, & l’antimoine fe fond. Lorfque la matière efl bien fondue , on la verfe dans un cône de fer chauffe & graille , on frappe quelques coups fur le cône pendant qu’on verfe le mélange; on le laifïe refroidir, 8c Pon trouve le régule fous la forme pyramidale au fond de ce vaifleau. Ce demi -métal eff recouvert de fcories noires 8c rougeâtres , qui attirent facile- ment l’humidité de Pair. Le régule eff pur lorf- que fa furface fupérieure eft convexe , & qu’elle préfente une étoile régulière. Cette étoile qui avoit exalté l’imagination des alchimiftes , ne dépend que de la manière dont le demi métal criftallife en fe refroidiffant.' Ce refroidi (Te ment commence par les bords , 8c la matière fluide étant rejettée du centre à la circonférence , pro- duit cette criffallifation qui n’a lieu que dans d’Hist. N À T. et de Chimie. les -petites ma (Tes d’antimoine ; car dans les grands pains de ce demi-métal , comme l’on- dulation de la matière fluide part de plufieurs centres , au lieu d’une étoile on trouve des im- preflîons en forme de feuilles de fougère , qui fe criflallifent fous diîTérens angles. Réaumur a fait voir qu’un refroidi (Tement fubit empêche cette forte de criflallifation en forme d’étoile, & que fi on refroidit brufquement un des côtés du cône , on n’obtient que la moitié de l’étoi- le ( i ). La quantité de métal qu’on retire par ce procédé , ne fait pas la moitié du fulfure antimonié qu’on a employé, quoique ce minéral contienne fouvent plus de régule que de foufre, parce qu’une portion du dèmi- métal efl com- binée avec les matières falines qui forment les fcories. Les fcories qui furnagent l’antimoine extrait de fa mine par ce procédé, font trcs-compofées. On y trouve Palkali fixe du nitre &, du tartre (i ) Il y a tans doute un rapport entre la manière dont les culots métalliques critlallifènt à leur furfac-e , & la forme qu’ils affedent lorfque l’art parvient à les ditpotèr en criflaux ifolés par le refroidiiïement bien ménagé , & par la réparation de la portion fluide d’avec celle qui etî figee. M. l’abbé Mongèz. s’eft occupé de ce rapport dans fies recherches fur la criftallifiation des métaux. 2.6 É L é M E N S uni au foufre de l’antimoine , & dans l’état de fulfure alkalin ou d’hépar. Ce fulfure tient en diffolution une portion d’oxide d’antimoine , & il efi mêlé d’un peu de fulfate de potaffe formé par l’acidé fulfiirique produit parla combuflion du foufre , & uni à une portion de l’alkali du nitre. Enfin ces fcories contiennent une matière charbonneufe fournie par le tartre. Si on les fait bouillir dans une grande quantité d’eau , 8c li on filtre la liqueur bouillante , elle laiffe fin- ie filtre la portion charbonneufe. Cette diffo- lution qui efi claire tant qu’elle eft chaude , fe rrouble par le refroidiffemenc , & dépofe une matière rougeâtre qu’on a regardée jufqu’à pré- fent comme un fulfure de potaffe antimonié. Ce précipité fe nomme kermès minéral par la voie sèche. Lorfque la liqueur n’en précipite plus , on peut la faire évaporer , & on en ob- tient une matière moins colorée que le kermès, & qui efi un véritable fulfure de potaffe anti- monié. Elle fournit aufii du fulfate de potaffe» Si , au lieu d’évaporer cette liqueur , on y verfe un acide quelconque , il y produit un précipité jaune orange d’oxide d’antimoine fulfuré, au- quel on donne le nom de foufre doré d'anti- moine ; il paraît peu différent du kermès. Si l’on fait bouillir quelques infians du ful- fure d’antimoine réduit en poudre, dans de d’Hist. Nat. et dé Chimie. 27 l’éau chargée de carbonate de potaffe ou de fonde , l’un ou l’autre de ces alkalis eftervef- cens dilTbut le foufre , & forme un fulfure alkalin qui tient en dilTolufiqn une partie d’o- xide d’antimoine : on filtre la liqueur bouillante; elle laifie précipiter par le refroidififement la portion d’oxide d’antimoine fülfuré rouge, ou de kermès , qu’elle contient. Cette liqueur étant refroidie & filtrée , on peut en précipiter de nouvel oxide d’antimoine fulfuré orangé, par le moyen des acides. Si on fait bouillir de nou- velle lefiive alkaline fur le réfidu , on peut en- core tirer du kermès ; mais celui-ci efi plus pâle que le premier, & plus on réitère l’opération , moins on obtient de vrai kermès : il paroît que l’alkaîi difibuf plus de foufre que d’oxide d’an- timoine , & qu’on ne devroit faire fubir au fulfure d’antimoine qu’une ou deux décodions dans l’alkali. Cette opération fe nomme en général préparation du kermès par la voie hu- mide. Ce nom lui a été donné par le frère Simon , chartreux , fans doute à câufe de fa couleur femblable à celle de la coque animale appelée kermès ( i ) i qu’on emploie dans la teinture. Le ( I ) Lé kermès animal ou là graine d'écarlate dont on fe fèrt dans la teirltufe , autre chofe que la peau 28 É L É M E N S kermès minéral a été auffi appelé -poudre des Chartreux , parce qu’il a d’abord été préparé dans la pharmacie de ces religieux. La décou- verte de ce médicament paroît être due à Glauber , qui le préparait avec le fulfure d’an- timoine & la liqueur de nitre fixé par les char- bons. Mais il a décrit fon procédé d’une m:~ nière inintelligible 8c prefque fous les emblèmes alchimiques. Lémery qui a beaucoup travaillé fur l’antimoine , 8c qui a donné fous un autre nom une préparation analogue au kermès , peut en être regardé comme le véritable inventeur. Cependant ce remède a été préfenté comme entièrement nouveau plufieurs années après la publication de l’ouvrage de ce chimifie ; 8c il n’a dû en effet fa célébrité qu’aux cures fingu- lières qu’il paroît avoir opérées entre les mains du frère Simon. Ce religieux tenoit cette com- d’un infede femelle , qui fe fixe fur le chêne verd & s’é- tend peu à peu en fe foulevant en manière de calotte. I! a perdu la forme des anneaux qui fait reconnoître ces ariimaux. C’eft fous cette calotte que font contenus les œufs qui y éclofênt ; les infèdes fôrtis dè ces œufs , per- cent cette coque , & les femelles fans ailes Ce fixent & meurent fur les feuilles de l’arbre , après avoir été fécon- dées par les mâles qui portent des ailes. La cochenille eft une autre efpèce d’infède analogue à celui-ci , comme nous l’expofêrons dans le règne animal.- d’Hist. Nat. et de Chimie. 2$ pofition d’un chirurgieu nommé la Ligerie, qui n’en étoit pas lui-même Hauteur. Ce dernier difoit l’avoir reçue de M. Chaftenay , lieutenant de roi à Landau , à qui elle avoit , difoit-on , été communiquée par un apothicaire, prétendu élève de Glauber. Dodart , alors premier mé- decin du roi , s’adreffa à la Ligerie pour faire publier la recette du kermès , & elle le fut en effet par ce chirurgien en 1720. Lémery le fils revendiqua la découverte pour fon père , dans les mémoires de l’académie , & avec d’autant plus de jufiice que la plupart des pharma- ciens fuivent encore le procédé indiqué par cet habile chimifle pour faire cette préparation. Le procédé décrit par la Ligerie , confifie à faire bouillir pendant deux heures une pinte d’eau de pluie avec quatre onces de liqueur de nitre fixé par les charbons , & une livre de fulfure d’antimoine caffé par petits morceaux; à filtrer la liqueur bouillante ; à faire bouillir la même mine avec trois onces de nouvelle li- queur de nitre fixé, étendue dans une pinte d’eau de pluie ; enfin , à faire fiubir au fécond réfidu une troifième ébullition avec les leiïîves précédentes, en y ajoutant deux onces de li- queur de nitre fixé, & une pinte d’eau de pluie. On liltie & on laiffe dépofer le kermès , on le lave jufqu’à ce qu’il foit infipide , on le fait I É l i m e ir s fécher , on fait brûler de l’eau-de-vie deftus , & on le pulvérife. Ce procédé eft long , il ne fournit que très-peu de kermès , puifqu’on n’en obtient tout au plus que deux ou trois gros d’une livre de fuffure d’antiuioine. H eft tirail- leurs embard'affant à caufe de la longue ébul- lition & de l’évaporation de l’eau. Enfin il fait perdre plus des trois quarts de la mine d’an- timoine , en rai fou de la petite quantité d’aî- kali que l’on emploie relativement à celle de .ce minéral. M. 'Baume , qui a adopté celui de Lémery, donne deux méthodes pour préparer facilement & en peu de teins , une grande quantité d’oxide d’antimoine fulfuué rouge , ou de kermès; l’une par la voie sèche , & l’autre par la voie hu- mide. Suivant la première , on fait fondre dans un creu'fec un mélange d’une livre de fulfure d’antimoine , de* deux livres d’alkali du tartre bien pur & d’une once de foufre, le tout bien pulvérifé. Ou coule ce mélange fondu dans un mortier de fer , on le pulvérife grofïièrement quand il eft refroidi , on le fait bouillir dans une fuffifante quantité d’eau , on filtre la liqueur au papier gris , elle donne un kermès d’un rouge brun par fan refroidiftement ; on le lave d’a- bord avec l’eau froide & enfuite avec l’eau .bouillante , jufqu’à ce qu’il fôit fuffifamment d’Hist. Nat. et de Chimie. 31 deflalé; on le fait fécher , on le pulvérife & on le pa(Te au tamis de foie. Pour préparer le kermès par la voie humide fuivant le même chimifte , on fait bouillir une leflive de cinq ou fix livres d’alkali fixe pur en liqueur , avec quinze ou vingt livres d’eau de rivière ; on jette dans cette liqueur bouillante quatre ou cinq onces de fulfure d’antimoine porphyrifé , on agite bien le mélange , & lors- qu’il a bouilli un infant , on le filtre ; cette liqueur dépofe beaucoup de kermès par le re- froidiffement, on le lave de la même manière que celui qui eft fait par la fufion. Ce procédé fournit , fuivant M. Baume , douze à treize on- ces de kermès par livre d’antimoine. Ce chi- mifle afîiire que ces. deux kermès font parfai- tement Semblables. La théorie de cette opération & la nature du kermès ne font pas encore parfaitement con- nues , malgré les travaux de plufieurs chimiftes célèbres. On penfe généralement que l’alkali diiTout le foufre de la mine , & que le fulfure qui fe forme diiïbut aufli l’antimoine. Ce demi- métal n’efl cependant pas difTous en totalité , puifque dans le procédé de Lémery par la voie hümide , il fe précipite pendant l’ébullition une poudre grife qui fe fond fans addition en un véritable antimoine. La précipitation du kermès 32 É L É M E N S par le refroidiffiement de la leffive , qui eft d’a- bord rougeâtre & tranfparente , & qui perd fa couleur à raefure que le kermès fe dépofe, efl encore un phénomène fîngulier. On penfe que ce compofé ell une forte d’antimoine furchargé de foufre , & foluble à chaud dans l’alkali fixe. En effet , fi l’on fait chauffer une leffive qui contient du kermès dépofé, cette fubflance fe rediffout par la chaleur. La leffive qui a précipité du kermès par le refroidiffiement, con- tient encore du fulfure de potaffe antimonré ; lorfqu’on y verfe un acide , il s’en précipite une matière orangée, nommée foufre doré d'an- timoine, & qui ell beaucoup plus émétique que le kermès. On croit qu’il contient moins de foufre & plus d’oxide métallique que ce dernier. Geoffroy qui a donné à l’académie, en 173-f 8c 1735" , plufieurs mémoires fur le kermès, a procédé par beaucoup d’expériences à fon ana- lyfe. L’aélion des acides eft regardée comme le moyen le plus efficace qu’on puiffe employer pour cela; on croit que ces fels diffolvent le demi-métal & biffent le foufre à nu , & que l’on peut par ce moyen apprécier la quantité refpeéfive de ces deux fubflances. Un gros de kermès contient, fuivant Geoffroy , feize à dix- fept grains de métal , treize à -quatorze grains d’alkali fixe, 6c quarante à quarante-un grains de 33 d’Hist. Nat. et de Chimie; de foufre. Beaucoup de chimifles penfent au- jourd’hui que le kermès ne contient pas un atome d’alkali. M. Baumé dit que ce fel n’efî pas un de Tes principes confïituans , & qU’0n peut Je lui enlever par le feul lavage dans beau- coup d’eau bouillante. M. Deyeux , qui a fait des recherches fur cet objet , eh du même intiment. Dans des travaux fuivis fur le ker- mès , conjointement avec M. le duc de la Ro- chefoucauld, nous avons eu occafion de voir a même ch°re* Mais ce qu’il y a de plus im- portant fur cet objet, c’efi que le kermès Pa-' ion être très -différent de lui-même, fuivant plufieurs circonflances de fa préparation. Il contient plus ou moins de foufre & de métal, & l’on conçoit que fes effets doivent varier à infini , d’après ces différences. En général il paroît que l’état du fulfure d’antimoine , la va- lide des proportions de fes principes , fa plus ou moins grande divifion , l’état de I alkali plus ou moins cauflique, fa quantité, celle de beau, le tems de l’ébullition , & plufieurs autres cir- confiances analogues , font fingulièrement varier la nature du kermès. Pour l’avoir uniforme, il faut le préparer avec des fubflances toujours ega;es à elles-mêmes & dans des circonflances parfaitement femblables.' Sans entrer dans beau- coup de détails fur les phénomènes que nous Tome III, , r g 34 E L È M E N S a offerts le kermès traité par un grand nombre d’intermèdes différens , nous ajouterons feule- ment , i°. que les alkalis cauftiques l’altèrent fingulièrement & le diffolvent , même à froid; 2°. que les acides agiffent avec une énergie très- variée fur cette fubftance , & qu’il eft très- difficile de déterminer d’une manière exaâe par leur moyen , la quantité 8c l’état du demi-métal 8c du foufre qui entrent dans fa compofition, parce que le foufre qui en eft féparé retient toujours une certaine quantité d’oxide d’antir moine. Les alkalis cauffiques agiffent avec beaucoup plus d’énergie que les alkalis effervefcens fur le fulfure d’antimoine ; ils forment un kermès beaucoup plus abondant 8c beaucoup plus foncé en couleur. La chaux , l’eau de chaux , mife en digeffion fur l’antimoine en poudre , donne , même <'t froid au bout de quelques jours , une efpèce de kermès ou de foufre doré , d’une belle couleur rouge. L’ammoniaque l’altère de la même manière. En diffillant du muriate am- moniacal avec le fulfure d’antimoine , on ob- tient un fublimé pourpre pulvérulent , qui pa- roît être une forte de fulfure antimonié , à bafe d’ammoniaque. Enfin , pour terminer l’hifloire de la décom- pofition du fulfure d’antimoine, plufieurs fubf- d’Hist. Nat. et de Chimie. 35" tances métalliques ont la propriété de lui enle- ver Ton foufre, avec lequel elles ont plus d’af- finité que n’en a le métal. L’étain , le fer , le cuivre 8c l’argent peuvent opérer ces décom- pofitions. Il fuffit de chauffer ôc de faire fondre i’étain & l’argent avec cette mine ; ces deux métaux s’uniffent au foufre 8c laiffent l’anti- moine. Le fer & le cuivre produifent le même effet, lorfqu’après les avoir réduits en limaille, ôc les avoir fait rougir dans un creufet , on y ajoute le fulfure d’antimoine. Ce minéral accé- lère leur fufion , 3c le demi-métal s’en fépare. A la vérité, l’antimoine obtenu par ces procédés, n’eff pas pur ; il retient une partie des fubflan- ces métalliques qu’on a employées pour le fé- parer du foufre ; fa couleur & fa forme indi- quent conftamrnent cet alliage ; on l’a diftingué fous les noms de chaque métal avec lequel il eff allié. L’antimoine eff employé dans plufîeurs arts , 8c notamment pour la fonte des caradères d’im- primerie. On s’en fervoit autrefois pour purger. On lai ffoit féjourner de l’eau ou du vin dans des vafes de ce demi-métal, pendant une nuit; on prenoit le lendemain cette liqueur. Mais , comme la température du lieu où fe faifoit cette opération , l’état du vin plus ou moins aci- de , produifoient néceffairement des différences Cij 5 6 E L É M E N S pour la quantité de métal diffoute , .ce médi- cament a été abandonné avec raifon , comme très-infidèle. On a de même renoncé aux pilu- les perpétuelles , qui ffétoient que des petites boules de ce demi-métal , qu'on avaîoit pour fe purger. L’état des fucs digeflifs , la nature de la faburre des premières voies , la fenfîbilité des différens individus , rendoient leurs effets incertains & fouvent dangereux. On ne fe fert aujourd’hui que du fulfure d’antimoine cru , du fondant de Rotron , de l’oxide d’antimoine appelé diaphorétlque , du kermès minéral , & du foufre doré. Le fulfure d’antimoine eft employé comme fudorifiqüe dans les maladies de la peau. On îe fufpend dans un linge en forme de nouet , dans les vaifféaux où Fon prépare les tifannes appro- priées à ces maladies ; plufieurs médecins nient qu’il ait quelques vertus lorfqu’on î’ad minière de cette manière. On le fait prendre aufli en fubhance , exadement porphyrifé en pilules , pour remplir les mêmes indications. Le fondant de Rotrou , ou l’oxide d’anti- moine alkalin , eft fort recommandé dans les maladies de la lymphe , qui dépendent de i’é- paiffffement de cette liqueur , comme dans les affedions fcrophuleufes , & en général dans les engorEemens ^es gkndes. Plufieurs médecins d’H *5 T. Nat. et de Chimie. 37 n’ont pas de confiance dans les effets de l’an- timoine diaphonique lavé ; ils regardent ce médicament comme un pur oxide d’antimoine fans vertu. Cependant on ne doit point oublier que cet oxide , dans lequel Rouelle le jeune a trouvé une diffolubilité affez marquée , peut produire des effets , à raifon de cette propriété. II eft d’ailleurs certain que , comme on ne con- noît pas l’adion des fucs gaftrique & înteflinaî fur les oxides métalliques , on ne peut pas prononcer qu’une fubfiance infoluble & infipide en apparence , ne puiffe avoir aucune vertu. Cependant l’obfervation nous apprend que ce médicament ne produit que très-peu d’effets dans les éruptions dartreufes 8c dans les mala- dies de la peau les plus rebelles , quoiqu’on l’emploie pendant long-terns. On doit préférer l’antimoine diaphorétique non lavé , ou le fon- dant de Rotrou , qni eft beaucoup plus aétif que la préparation précédente , en raifon de l’alkali qu’il contient. On fe fert encore dans ces affeétions d’un médicament nommé poudre de la Chevalleray. C’eft de l’antimoine diapho- rétique calciné fept fois de fuite, pendant deux: heures r avec de nouveau nitre , & leftivé à chaque opération ; il ne diffère pas fenfîble- ment de l’antimoine diaphorétique lavé , parce que ce demi-métal une fois bien calciné , comme C iij 3^ É t é m e N s il l’eff Iorfqu’on l’a fait détoner avec trois fois fon poids de nitre, n’eff plus fufceptible de fe calciner davantage ; auffi dans cette préparation n’obferve-t-on plus de détonation. Ce médi- cament eff absolument fans effet , lorfqu’on lui a enlevé l’alkali. Le kermès minéral eff un des plus précieux médicamens antimoniaux que l’art pofsède. Il eff incifif , & s’emploie avec le plus grand fuc- cès dans les affections pituiteufes del’eflomac, des poumons , des inteffins , & même des voies urinaires. On s’en fert le plus fouvent dans les maladies de poitrine , pour aider l’expeétora- tion. On doit cependant ne l’adminiffrer que lorfque l’inflammation eff tombée. Il a auffi beaucoup de fuccès , donné à petites dofes ré- pétées, dans les catharres delà poitrine, l’afthme humide , les maladies de la peau , les engor- gemens glanduleux , &c. On ne l’emploie qu’à la dofe d’un demi-grain, jufqu’à celle de deux ou trois grains , dans des boitions appropriées ou des pilules. Il fait quelquefois vomir, fou- vent il excite la fueur , ou il fait couler les urines. Le foufre doré , comme émétique & purgatif violent , eff de peu d’ufage. On le donnoit autrefois dans les mêmes cas que le kermès , mais fes effets font beaucoup plus incertains. d'HisT. Nat. et de Chimie. 3^ IJ eft encore plufîeurs autres préparations d’antimoine , dont on fe fert avec beaucoup d’avantages en médecine ; mais comme elles font faites avec des matières végétales , nous en parlerons dans une autre circonftance. Cette fubflance métallique elt une des plus impor- tantes pour les médecins , & ils ne fauroient trop en étudier toutes les propriétés. C’eft une de celles fur lefquelles les alchimiftes & les chi- mides eux-mêmes fe font le plus exercés , 8c c’ed ce qui a donné naiffance aux préparations nombreufes que nous avons décrites. I CHAPITRE XIV. Du Zinc. Le zinc ed une fubflance demi-métallique T brillante , d’un blanc bleuâtre , cridallifé en la- mes étroites ; il n’a ni faveur, ni odeur parti- culière. Il ne peut pas fe réduire en poudre comme les autres demi-métanx , il s’applatit fous le marteau , 8c peut même être laminé afTez fortement , pourvu qu’on ne lui ait pas donné auparavant trop d’écrouilTement par le marteau. C’eft à M. Sage qu’eft due cette ex- périence. Lorfqu’on veut avoir du zinc très- C iv 4<3 É L É M E, N S divifé , il faut le grenadier 3 c’eft-à-dire , le cou- ler fondu dans de l’eau froide , ou le réduire en limaille. Il a l’inconvénient de graiffer les limes , & d’en remplir les dents. Macquer dit que lorfqu’on le fait chauffer le plus qu’il eft poffible fans le fondre , il devient très-caffant, 8c qu’on peut alors le pulvérifer dans un mor- tier. Cette propriété eft bien différente de celle des métaux qui deviennent plus dudiles par l’adion de la chaleur , & elle nous fournit un procédé avantageux pour avoir ce demi -métal très-divifé. On l’obtient encore tel en le tri- turant , lorfqu’il eft fondu , & en tenant les molécules écartées par le mouvement , avant qu’elles fe prennent en maffe par le refroidif- fement. Il ne faut point faire cette opération dans un mortier de fer , parce que le zinc dif- fout toujours une portion de ce métal ; on doit fe fervir d’un mortier 8c d’un pilon de marbre. Le zinc perd dans l’eau environ un feptième de fon poids. Les facettes brillantes 8c comme régulières que les faumons de zinc du com- merce préfentent dans leur fraéture , indiquoient que ce demi-métal avoit la propriété de crif- tallifer d’une manière particulière. M. l’abbé Mongèz a réufti parfaitement à obtenir cette criftaîlifation. Elle eft formée de faifceaux de d’Hist. Nat. et de Chimie. 4 r 4 petits prifmes quadrangulaires , difpofés en tons fens, & d’une couleur bleue changeante , fi on l’expofe à l’air , lorfque ce métal efi encore chaud. M. Sage regarde le zinc comme le plus com- mun-dés métaux , après le fer. 11 a ffure en avoir trouvé dans toutes les pyrites martiales; & M. Grignon avance que la cadmie de$ fourneaux où l’on traite les mines de fer terreufes , conr tient beaucoup de zinc. Le zinc natif efi très - rare ; la plupart des naturalilles doutent même de fon exifience. ' / Cependant M. Valmont de Bomare dit en avoir vu dans les mines de pierre calaminaire du du- ché de Limbourg , & dans les mines de Gofi- lard ; il étoit en petits filets plians , d’une cou- leur grifàtre , & s’enflammant facilement. Ce demi-métal efl le plus fouvent dans l’état d’oxide ; il conflitue alors la pierre calaminaire dont la forme varie beaucoup. Elle efi quel- quefois criflallifée en cubes , en prifmes , en feuillets ou en lames ; le plus fouvent elle efi en mafies irrégulières. Sa couleur varie aufli. Elle efi tantôt blanche , quelquefois grife ou jaune , d’autres fois rougeâtre. Quoique fort dure , elle ne l’efi jamais allez pour faire feu avec le briquet. Elle fe trouve en carrières aiïez confidérables dans le duché de Limbourg , les I 42 É L É M £ N S comtés de Namur , de Nottingham & de Som- merfet en Angleterre. On rencontre fouvent dans ces calamines des corps marins , du fpatb. calcaire , &c. ce qui prouve qu’elles ont été dépofées par l’eau. On nomme encore la pierre calaminaire , cadmie naturelle ou fojjile. Berg- man , qui a fait une analyfe très- détaillée des mines de zinc, a trouvé dans prefque toutes les calamines de la terre filicée , de l’alumine & de l’oxide de fer en différentes proportions; les cala- mines contiennent depuis-^ jufqu’à de métaL Le zinc uni au foufre , forme la blende ou faujje galène ; ce fulfure de zinc eft ordinaire- ment difpofé par écailles j quelquefois il paroît criflallifé en cubes plus ou moins tronqués ; il diffère pour la couleur ; tantôt il tire fur celle du plomb , le plus fouvent il eft noir ou rou- geâtre ; on en trouve aufti à Ronfberg en Nor- vège , à Goflard & à Sainte-Marie une efpèce qui eft jaune A tranfparente. Quelques blendes font phofphoriques , lorfqu’on les frotte dans l’obfcurité. Il en eft même qui le font à un tel point , qu’il fuffit de les frotter avec un cure- dent pour développer cette propriété. On a défigné la blende fous le nom de Stérile nigrum parce que lorfqu’on la fondoit pour en tirer le plomb qu’elle paroiffoit contenir , on n’en tiroir lien , à caufe que le zinc fe volatilifoit dans la <4 • d’Hist. Nat. et de Chimie. 4.3 fonte. Toutes les blendes exhalent , lorfqü’on les frotte ou qu’on les dilTout dans un acide , une odeur très - fenfible de foie de foufre. Cronlledt les regarde comme du zinc uni au foufre par l’intermède du fer. M. Sage croit qu’elles contiennent un fulfure ou foie de foufre terreux. Le zinc fe trouve encore dans l’état falin combiné à l’acide carbonique & à l’acide fulfu- rique ; le premier de ces compofés naturels efl connu fous le nom de mine de %inc vitreufe ou de fpatk de % inc ; cette mine efl blanche, grife ou bleuâtre , elle fait feu avec le briquet ; elle efl pefante , quelquefois criftallifée, en fialac- tites ou informe ; elle fe dilTout avec eflervef- cence dans les acides, 8c donne de l’acide car- bonique. Bergman y admet fur 100 grains , 65* d’oxide de zinc , 28 d’acide carbonique, 6 d’eau & 1 de fer. Le fulfate ou vitriol de zinc natif fe trouve en criftaux rhomboïdaux , ou en flalaélites blanches*, fouvent il efl crifiallifé en fines aiguilles & en filets foyeux, comme l’amiante; dans cet état on l’a quelquefois confondu avec Y alun de plume ; il fe rencontre en Italie 8c dans les mines de Goflard au Hartz. On peut , d’après ces différens détails , dif- pofer les mines de zinc de la manière fuivante, I; 44 ÊiéMENs félon l’état où ce demi - métal fe trouve, Etat I. Zinc natif. i. En filets plians grifâtres & inflammables. Etat IL Zinc en oxide; Calamine. Variétés. 1. Oxide de zinc, ou Calamine blanche en crif- taux prifmatiques tétraèdres, courts, groupés confufément. Elle tire quelquefois fur le vert» 2. Oxide de zinc, ou Calamine criflallifée en py- ramides femblables au fpath calcaire à dents de cochon , d’une couleur blanche , grife , verdâtre ou rougeâtre. MM. Sage & Romé de Lille croient que cette calamine provient du fpath calcaire décompofé. En effet, elle fe trouve fouvent en partie calcaire , 8c creufe dans l’intérieur. 3. Oxide de zinc , ou Calamine folide 8c comme vermoulue. Elle efl fillonnée , cellulaire 8c comme1 criflallifée en dendrites. 4. Oxide de zinc, ou Calamine folide & com- pare , pierre calaminaire. Celle qui nous vient du comté de Namur, efl toujours cal- cinée. Il efl défendu de l’exporter fans lui avoir fait fubir cette opération. y. Oxide de zinc , ou Calamine en Aalagmites verdâtres ou jaunâtres. d’Hist. Nat. et de Chimie. 45- Variété. 6. Oxide de zinc, ou Calamine zéolitiforme, connu fous le nom de zéolite de Fribourg. M. Pelletier a découvert que cette prétendue zéolite couleur de perle , contient fur ioo parties , 48 à y 2 de filice , 3 6 d’oxide de zinc & 8 ou 12 d’eau. Etat III. Zinc minéralifé par le foufre ; Sulfure de zinc , Blende. Variétés. 1. Sulfure de zinc, ou Blende grife bleuâtre , ayant l’afped métallique , criflallifée en cubes ou en rhombes. 2. Sulfure de zinc , ou Blende noire criflallifée ou informe. 3. Sulfure de zinc , ou Blende rouge ou brune rougeâtre. 4. Sulfure de zinc, ou Blende phofphorique , verte jaunâtre ou rouge. y. Sulfure de zinc, ou Blende jaune grifâtre, mêlée de galène 8c de pétrole. 6. Sulfure de zinc , ou Blende blanche. 7. Sulfure de zinc , ou Blende jaune de couleur de cire. 8. Sulfure de zinc , ou Blende en décompofi- tion , dont' les lames font écartées 8c le bril- É L É M E N S q.6 Variété. lant détruit; elle patte à l’état d’oxide de zinc ou de calamine. Etat IV. Zinc falin. Variétés, 1. Carbonate de zinc, zinc fpathique ou mine de zinc vitreufe. 2. Sulfate de zinc en crittaux rhomboïdaux , en ttaladites , ou en filets foyeux. Pour effayer la calamine en général, il fuffic d’en mettre en poudre , de la mêler avec du • charbon , & de la chauffer dans un creufet couvert d’une lame de cuivre rouge. Cette der- nière ne tarde pas à jaunir & à fe convertir en laiton. Bergman a fait une analyfe beaucoup plus exaéte des calamines par la voie humide y il s’ett fervi de l’acide fulfurique pour les ca- lamines pures 8c Je carbonate de zinc; la diffo- Iution contient du fulfate de zinc & du fulfate de fer ; il décompofe ce dernier par un poids connu de zinc , 8c il précipite enfuite par le' carbonate de foude ; il a déterminé que 193 grains de ce précipité équivalent à 100 grains de zinc -, il défalque de ce poids celui du zinc employé pour précipiter le fer. La plupart des calamines étant plus compo- fées que celles-ci , 8c. contenant de la filice* 1 , '■ d’HisT. Nat. et de Chimie. 4 7 de l’alumine & de la craie combinées avec des oxides de zinc , de fer , & même de plomb , Bergman traite d’abord ces mines trois fois de fuite avec deux parties d’acide nitrique à cha- que fois ; en Jes chauffant à ficcité , cet acide calcine le fer & le rend infoluble; il diffouc en fuite ce qui eft foluble dans de nouvel acide nitrique ; le fer , la filice & l’alumine relient à part. L’acide tient en diffolution de la chaux, 8c des oxides de zinc 8c de plomb. L’acide muriatique elt employé pour précipiter ce der- nier; l’acide fulfurique , pour féparer la chaux; quant au zinc , il le précipite par les prulîiates alkalins. Bergman prend le cinquième du poids de ce précipité pour l’oxide de zinc contenu dans la calamine. Il a auffi employé une fécondé méthode par l’acide fulfurique , en le dillillant fur la calamine jufqu’à ficcité ; il leffive enluite le réfidu dans l’eau chaude ; il précipite cette lelfive par l’ammoniaque cauflique qui fépare le fer 8c l’alumine , fans féparer l’oxide de zinc foluble dans le fulfate ammoniacal. Quant à l’effai des blendes , après les avoir grillées , on les traitoit autrefois de la même manière que les calamines. M. Monnet efl le premier qui ait affuré qu’on pouvoit effayer commodément ces mines , en les diffolvant dans l’eau-forte , qui s’unit à la fubflance mé- 4$ ' É L É M E N S \ tallique , & en fépare le foufre. On réduit en- fuite l’oxide de zinc , qu’on Répare de l’acide nitrique par la diüillation. Bergman a fait fur ces mines les mêmes expériences exaétes que fur les calamines , il a fort étendu l’idée de M. Monnet fur leur docimafie humide. Il en fépare d’abord par la diüillation l’eau, l’arfenic & une partie du foufre qu’elles contiennent; enfuite il les traite par differeus acides , fuivant qu’ils ont plus ou moins d’adion fur elles ; il précipite enfuite ces diflolutions par les diffé- rens réadifs. On n’exploite guère les mines de zinc pour en retirer ce demi-métal ; c’eü en fondant les mines de plomb mêlées de blende , que l’on retire du zinc fous la forme d’oxide , qui fe fublime dans les cheminées des fourneaux , & y produit des incruüations grifâtres , nommées tuthie ou cadmie des fourneaux. On en obtient une autre portion en métal ; pour cela on a foin de rafraîchir la partie antérieure du four- •< | neau , qu’on nomme la chemife. Le zinc réduit en vapeurs par l’adion du feu , vient fe con- denfer dans cet endroit , & retombe en gre- nailles dans la poudre de charbon , dont on a couvert une pierre placée au bas de la chemife dans le fourneau , 8c nommée ajjiecte du fine. Ce demi-métal eü préferyé de la calcination par d’Hist. Nat. et de Chimie. 49 par la poudre de charbon ; on le fond de nou-* veau dans un creufet , & on le coule en fau- mons. Tel efl le procédé par lequel on retire à Rammelfberg la plus grande partie du zinc qu’on a dans le commerce, foit en oxide, Toit en métal. Ce zinc eft toujours uni à une cer- taine quantité de plomb qui l’altère ; il paroît que celui qu’on prépare en Chine , & qui nous vient des Indes , fous le nom de toutenague , efl beaucoup plus pur ( 1 ) , on ne connoît pas la manière dont ce dernier efl préparé. M. SagO aiïure que les anglois retirent le zinc en grand de la pierre calaminaire par la voie de la dis- tillation , mais que leur appareil n’efl pas connu. Le zinc expofé au feu dans des vaiffeaux fermés , fe fond des qu'il rougit , & fe volatilife fans fe décompofer ; fi on le laiffe refroidir lentement , 8c dans un vaiffeau qui puifle faci- liter l’écoulement d’une portion de ce demi- métal fondu , le refte du zinc fe criflallife en prifmes aiguillés. M. Mongèz fe fert à cet effet, d’un têt à rôtir, percé au fond 8c fur fes côtés (1) M. Kirwan donne le nom de toutenague à une variété de calamine fragile de la Chine , dont M. En- gerftrom a préfenté l’analÿfè dans les Mémoires de Stoc- kolm , 1775. Cette mine eft très-riche & contient depuis ■fis jufqu’à g- de zinc. Tome III . D £0 É L Ê M E ff S de plusieurs trous -qu’il bouche avec de la terre des os. Quand le zinc fe refroidit à fa furface, on débouche peu à peu les trous , & on agite le métal avec un fer rouge introduit par ces ouvertures. Ce procédé fimple fait couler la portion de zinc fondu ; alors on agite le têt à rôtir , jufqu’à ce qu’il ne s’échappe plus de mé- tal fondu , & la portion refroidie criftaîlîfe. Si on la laiffe dans le varfleaü , elle a la couleur métallique ; fi on l’expofe à l’air , elle prend des nuances irifées. Lorfque le zinc fondu a îe contad de i’air , il fe couvre d’une pellicule grife , qui fe convertit affez vite en un oxide jaunâtre , peu réfraclaire , & facilement réduc- tible. Cet oxide pèfe plus que le zinc employé. Mais ii ce demi-métal eft fortement chauffé, il brûle avec une flamme blanche ou d’un jaune légèrement verdâtre , très-brillante , femblable à celle du phofphore. Le courant de cette flamme entraîne 8c volatilife l’oxide de zinc, qui fe condenfe à l’air fous la forme de fïoc- cons. blancs , très - légers , nommés fleurs de flinc , pompkolix 5 nïhil album , laine ou coton, philofopkique. C’efl un oxide de zinc très- calciné , qui a plus de pefanteur que le demi- métal qui a fervi à la former , puifque M. Baumé en a obtenu feize onces fix gros cinquante- quatre grains par livre de zinc. Il n’eft. point * d’H i s t. N a t. et de Chimie. y r volatil par lui-même , & fa fublimation n’efl due qu’à la rapidité avec laquelle brûle le zinc; car fi on expofe cet oxide au feu après qu’il a été volatilifé, il relie très-fixe; il conferve pendant quelque tems une lumière phofphorique , fen- fible dans l’obfcurité ; il peut fe fondre en verre ; mais il faut pour cela un feu de la plus grande violence. L’oxide de zinc vitrifié elt d’un beau jaune pur. L’oxide & le verre de zinc ne font autre chofe que la combinaifon du demi- métal avec la bafe de l’air vital ou l’oxigène. Le verre ne paroît différer de l’oxide blanc que par l’union plus intime de ces deux principes ; ce compofé efl du nombre des oxides métalliques que la chaleur ne peut point détruire , & il ne peut point fe réduire en métal fans addition. Il faut qu’on le mette en contaél avec des corps com- buflibles pour le décompofer. En chauffant fortement un mélange d’oxide de zinc blanc & de charbon , ou de toute autre matière com- buflible , on obtient du zinc , & le charbon fe trouve en partie brûlé à l’aide de l’oxigène qu’il a enlevé à l’oxide métallique. Le zinc a donc avec l’oxigène moins d’affinité que n’en a le charbon , quoiqu’il femble plus com- buffible que lui : cette opération ne réuffit bien que dans des vailleaux fermés ; auffi efl-ce par £2 É L É 1 E N S la diftillation que les anglois réduifent , dit-on , la pierre calaminaire. Le zinc n’eil que peu altérable par l’air ; fa fùrface fe ternit feulement un peu, & il paroît éprouver un commencement d’oxidation. L’eau a beaucoup d’adion fur le zinc, lorf- que ce demi-métal commence à rougir ; elle l’oxide facilement & donne beaucoup de gaz hydrogène , ce qui prouve qu’elle eft dé- compofée par le zinc qui lui enlève fon oxi- gène à l’aide d’une haute température. MM. La- voifier & Meufnier fe font allurés de ce fait dans leurs expériences fur la décompolition de l’eau. Le gaz hydrogène obtenu dans ce pro- cédé tient en diüolution un peu de charbon qui provient du zinc. Le zinc n’a point d’adion fur les terres filicée & alumineufe; mais fon oxide entre dans les compofés vitreux & colore les verres en jaune. La baryte , la magnéfîe & la chaux n’ont point d’adion fur le zinc. La potafle ou la foude caufliques en liqueur que l’on fait bouillir fur ce demi- métal, noir- ciffent fa furface , fe colorent en jaune fale, tiennent en dilTolution une certaine quantité d’oxide de zinc , que l’on peut en féparer par les’ acides , comme M. de Lalfonne l’a fait voir. L’ammoniaque agit moins bien à chaud d’Hist. NT at. et de Chimie. yj fur le zinc , fans doute à caufe de fa volati- lité ; ce fel mis en digeftion à froid avec le zinc , en difïout un peu ; il fe dégage dans les trois diffolutions du zinc par les atkalis une certaine quantité de gaz hydrogène , dont la produdion ell due à la décompofition de l’eau ; de forte que c’efl ce fluide qui agit fiir le demi- métal , qui en opère l’oxidation , & qui le rend en partie foluble dans les alkalis. L’acide fulfurique étendu d’eau , difïout le zinc à froid. A mefure que la diffolution s’o- père, ce demi -métal devient d’un gris noi- râtre ; il fe produit beaucoup de chaleur , & il fe précipite une poudre noire qui a été in- connue pendant long-temps , & qui efl du car- bure de fer ou de la plombagine ; il fe dégage beaucoup de gaz hydrogène , qui tient un peu de charbon en diffolution. Ce fluide élaflique dont l’odeur efl femblable à celle que pré- fente le gaz obtenu pendant la diffolution du fer par le meme acide , efl certainement dû à l’eau, puifque l’acide fulfurique concentré ne diffout point le zinc fans l’aide de la chaleur, 8c puifqu’il ne produit alors que du gaz fulfu- reux. L’eau commence donc par opérer l’oxi- dation du zinc , 8c l’acide dîffout enfuite l’oxide de te demi-métal -, IorJfqu’il ne fe dé- gage plus de gaz hydrogène , l’eflervefcenco 5*4 É L É M E N S s’arrête , l’odeur de cette dilfblution change , & elle reflemble parfaitement à celle d’une graifTe un peu rance ; la liqueur elt blanchâtre , un peu trouble ; elle devient tranfparente en l’étendant d’eau ; elle fournit par l’évaporation un fulfate de zinc blanc , un peu plus dilïoluble dans l’eau chaude que dans l’eau froide , & dont une portion criflallife par refroidiffement. On obtient afTez facilement des criflaux très- réguliers de ce fel, nommé dans les arts couperofe blanche , vitriol blanc , vitriol de Gojlard ; en expofant pendant quelques jours à l’air une dilîblution de ce Tel faite dans l’eau bouillante , 8c un peu évaporée , il s’y forme des prifmes / tétraèdres , terminés par des pyramides auffi à quatre faces. Les côtés de ces prifmes font liffes ; telle efl la forme indiquée par MM. Sage & Romé de Lille , & que j’ai obtenue moi- même. Bucquet a obfervé que ces prifmes étoient rhomboïdaux. M. Monnet allure cepen- dant que ce fel fe crillallife très-difficilement, 8c qu’il faut l’évaporer fortement , & l’expofer au refroidiiïement prompt , pour en obtenir des criflaux réguliers fans confiftance. L’oxide blanc de zinc fe diflout auffi dans l’acide ful- furique, & forme le fel dont nous parlons. Ce fel a une faveur fliptique allez forte ; il perd , fuivant Hellot , line partie de fon acide I d’Hist. Nat. et de Chimie. <;? par l’action du feu. Cet acide a les caractères de l’acide fulfureux ; il s’échauffe avec l’acide fulfurique concentré , fuivant la remarque de Macquer. Après l’aélion du feu , ce fulfate paroît être converti en fulfîte de zinc , dont on ne connoît pas bien les propriétés. Le fulfate de zinc ne s’altère que peu à l’air, lorfqu’il efl très-pur; à l’aide du temps fon oxide fe calcine plus qu’il n’efl en abforbant de l’oxi- gène ; il jaunit , & n’eü plus entièrement dif- foluble dans l’eau. Le fulfate de zinc efl décom- pofable par l’alumine, la baryte, la magné, fie, la chaux , & les trois alkalis. L’oxide de zinc , précipité par ces fubltances , peut fe redifToudre dans les acides , & même dans les alkalis. L’am- moniaque prend une couleur brune fale dans cette diffolution. Le fulfate de zinc décompofe îenitre, 8c efl décompofé par ce feul neutre; on obtient par la diflillation de ce mélange deux efpèces d’acides nitreux , qui ne fe con- fondent point , 8c de l’acide fulfurique glacial. Nous donnerons plus de détail fur cet objet , à l’anicîe du fulfate de fer ou vitriol martial. On trouve dans le commerce , fous le nom de couperofe blanche , un fulfate de zinc qui fe prépare en grand à Goflard, On fait griller la blende ; une portion du foufre brûle , 8c fournit de l’acide fulfurique , qui diffout l’oxide D iv y6 É L É M E N S de zinc ; on lave la mine grillée , & après avoir laide dépofer la leffive , on la décante , on la fait évaporer & criûallifer. On fond ce fel à une /douce chaleur , pour qu’il perde l’eau de fa crillallifation , de on le laide refroidir. Par ce procédé , il fe condenfe en maffes blanches , opaques & grenues comme le fucre. Le vitriol de Gojlard , dilïous dans l’eau bouillante , crif- tallife par refroidiffement ; fes crillaux font un peu rougeâtres. On attiibne cette couleur aux impuretés de ce fel , qu’on croit contenir un pen de plomb & de fer. Pour le purifier , on peut jetter du zinc dans fa diffolution : ce demi-métal précipite les oxides de fer & de plomb , parce qu’il a plus- d’affinité qu’eux avec l’acide fulfu- rique -, on filtre la liqueur , qui ne contient plus que du fulfate de zinc pur. On ed d’autant . plus porté à croire que ce qui altère le vitriol de Gojlard eil fouvent de l’oxide de fer , que quelquefois le zinc du commerce obéit à l’ai- mant , fans doute à caufe d’un peu de fer qui lui relie uni. Si donc on vouloit faire des ex- périences de recherche fur cè demi-métal, il feroit bon de n’opérer que fur du zinc qu’on auroit préparé foi même , en réduifant le pré- cipité du fulfate de zinc purifié comme nous venons de l’indiquer. Nous ferons cependant oblerver que le zinc n’obéit fouvent à l’aimant d’Hist. Nat. et de Chtmië. 57 que dans la portion de faumon qui a été coupée, parce que cette dernière opération Ce fait avec des cifeaux ou des coins de fer. L’acide nitrique foible & étendu d’eau , fe combine au zinc à froid , & avec beaucoup de rapidité. Il fe produit comme dans la diflolu- tion par l’acide fulfurique une chaleur confî-< dérable. L’efiervefcence vive qui accompagne cette combinaifon , donne lieu au dégagement d’une grande quantité de gaz nitreux, qui rougit fubitement avec l’air lorfqu’on fait l’opération dans un vaifTeau ouvert ; mais qui efl fans cou- leur par lui-même , 8c qu’on peut recueillir au-deflus de l’eau, en plongeant. fous ce fluide l’extrémité du vaifleau qui contient le mélange. Cette expérience prouve que le zinc décom- pofe l’acide nitrique , 8c qu’il lui enlève une portion de fon oxigène. Si le zinc efl mêlé d’un peu de fer , il fe couvre d’une poudre rougeâtre ochracée , qui n’efl que la portion de ce métaL fortement calcinée par l’acide ; s’il efl pur , il fe précipite quelques floccons d’une matière noire ou de carbure de fer , comme on l’obferve avec l’acide fulfurique. L’acide nitrique tient beaucoup plus d’oxide de zinc en diflolution que l’acide fulfurique. M. Baumé dit que fix onces de cet acide dif- folvent cinq gros 8c demi de zinc en moins de $$ Éléments deux heures. La diffolution nitrique de zinc eft d’un jaune verdâtre & un peu trouble quand elle vient d’être faîte ; elle perd cette couleur êc devient tranfparente par le repos. Elle efl très - cauffique , quoique faite avec un acide étendu d’eau , 8c elle ronge très- vite la peau. Elle m’a fourni par l’évaporation jointe au re~ frôMifiTement , des crîflaux en prifmes tétraèdres comptâmes & ftriés , terminés par des pyramides à quatre faces * aufîi fluiées ; ce nitrate de zinc suis fur les charbons, fond d’abord, & fufe en pétillant dans les portions qui fe defsèchent*- II répand en détonnant une petite flamme rou- geâtre. II ne préfente pas le même phénomène ïorfqu’on le fond dans un creufet ; on ne peur le delfécher , même à la chaleur la plus douce fans l’altérer. Il laihè échapper des vapeurs de gaz nitreux ; il devient d’un rouge brun 3 8c prend la confiffance d’une gelée. Si on le fait refroidir dans cet état , il conferve fa molleiïe pendant quelque tems ; fi on continue de le chauffer , il fe defsèche tout- à-fait, Sc lailfe un oxide jaunâtre. Heliot a retiré de la diflîlîafion du nitrate de zinc un acide nitreux très-fumant, & il a obfervé la couleur rouge qu’il prend en fe fondant. On conçoit que la chaleur déga- geant du gaz nitreux de ce fel , il paffe à l’état de nitrite de zinc. Ii donne aufîi une certaine d’Hist. Nat. et de Chimie. 5-9 quantité fie gaz oxigène ou d’air vital. Le nitrate de zinc attire promptement l’humidité de l’air & perd fa forme régulière. Il ne refle plus , après quelques jours d’expofition à l’air , que des prifmes flriés & pointus, fans ligure déter- minée. On ne fait point s’il peut être décom- pofé par les autres acides. MM. Pott & Monnet afliirent que l’oxide de zinc a beaucoup d’af- iinité avec tous ces fels , fans avoir de préfé- rence pour aucun d’eux en particulier. L’oxide blanc de zinc dilTous dans l’acide nitrique , forme le même fel fuivant Hellot. Si l’on prend pour opérer cette diffolution de l’acide nitreux, on a du nitrite de zinc qui n’ell pas encore exaêlement connu. L’acide muriatique agit fur le zinc avec une aufli grande rapidité que l’acide nitrique ; il fe dégage , pendant l’effervefcence vive qui ac- compagne cette combinaifon , beaucoup de gaz hydrogène , jouifîant des mêmes propriétés que celui que fournit l’acide fulfurique , & qui eh dû comme ce dernier à Peau décompofée par le zinc ; il fe dépofe peu à peu une matière en floccons noirâtres , qui n’efl qu’une combinaifon de carbone & de fer ou du carbure de fer. La diiïblution du zinc par l’acide muriatique eh fans couleur ; on ne peut point, en obtenir de crihaux par l’évaporation, Lorfqu’on la / 6o É L É M E N S chauffe, elle devient d’un brun noirâtre, répand des vapeurs âcres & piquantes d’acide muria- tique, 6c s’épaiffit beaucoup ; expofée à l’air pendant huit jours dans cet état, elle n’a point donné de criftaux. Elle fournit à la diftiîlation un peu d’acide très-fumant , 6c un muriate de zinc folide 6c fufible. MM. Hellot & Monnet ont très-bien décrit cette expérience ; je l’ai répétée plufieurs fois dans mes cours , 6c j’ai obtenu , après un peu d’acide jaunâtre , une matière congelée dans l’alonge 6c dans le bec de la cornue. Ce muriate de zinc étoit du plus beau blanc de lait, très-folide 8c formé de petites aiguilles rayonnées , comme une ftaladite; il fe fond par une chaleur douce. J’en ai con- fervé pendant plufieurs années dans des flacons de verre bien bouchés , il ne s’eft que légère- ment humeâé, 6c la partie qui touchoit au verre étoit un peu jaunâtre , le fond du flacon préfentoit les couleurs de l’iris. Cette altération dépend fans doute de la lumière. Il refle dan§ la cornue qui fert à cette diftiîlation , une matière noirâtre vitriforme 6c déliquefcente. Le muriate de zinc qu’Hellot a obtenu par la diftiîlation étoit jaunâtre ; il dit que l’acide fulfurique eu dégage l’acide muriatique. L’oxide de zinc fe comporte de même avec cet acide. On ne connoît pas le muriate oxigéné de zinc. / d’Hist. Nat. et de Chimie. 6 1 < * L’acide carbonique liquide, dans lequel on met du zinc ou de fon oxide en digeüion à froid , dillout au bout de vingt-quatre heures une afiez grande quantité de ce métal, luivant Bergman. Cette dilTolution expofée à l’air fe couvre d’une pellicule qui réfléchit diverfes couleurs, & qui n’efl autre chofe que du car- bonate de zinc , fuivant le célèbre chimifle que nous venons de citer. On ne connoît pas encore bien l’a&ion de l’acide fluorique de de l’acide boracique fur le zinc. Toutes les diiïblutions de zinc dans les acides font précipitées par l’eau de chaux , la magnéfîe, les alkalis Axes & l’ammoniaque. L’oxide de ce métal fe préfente alors fous la forme de floc- cons blancs ou jaunâtres , fuivant l’état de fa dilTolution ou la pureté du précipitant. On peut le réduire à l’aide des matières çombuflibles ; il efl difloluble dans les acides & dans les alkalis. En ajoutant plus de ces derniers qu’il n’en faut pour précipiter l’oxide de zinc de fes diiïblu- tions acides, le précipité difparoît peu à peu, & la liqueur prend une couleur jaunâtre fale, qui indique la dilTolution de cet oxide dans les alkalis. Lorfqu’au lieu d’employer les alkalis purs ou caufliques , pour féparer le zinc des acides , on prend les carbonates de potafle , C2 ' É L É M Ë N S de fonde & d’ammoniaque , il n’y â que peu d’effervefcence * le précipité eft plus blanc, & il paroîr que l’acide carbonique fe reporte fur l’oxide de zinc , de manière qu’il y a dans ce cas deux décompolitions & deux nouvelles com- binaifons. Le zinc a la propriété de détompofer plu— fîeurs fels neutres • en le traitant au feu avec du fulfate de potaffe dans un creufet , il dé- compofe ce fel & il forme du fulfure de potaffe comme le fait l’antimoine. Dans cette expé- rience, le zinc s’empare de l’oxigène de l’acide fulfurique; cet acide paffe à l’état de foufre, que la potaffe diffout. Le fulfure formé par cette combinaifon diffout une portion de l’oxide de zinc ; tous les fulfates font également décom- pofés par le zinc. Ce métal en limaille ou en poudre fait dé» tonner le nitre avec une rapidité fingulière. Ce mélange bien fec , projetté par cuillerées dans un creufet rouge , produit une flamme blanche & rouge. L’aélivité de cette inflammation eff telle, qu’il s’élance loin du creufet des jets de matière brûlante , & qu’elle demande beaucoup de précaution de la part de Partifte. Le zinc brûle à l’aide de l’oxigène fourni par le nitre décompofé , & il fe trouve enfuite en oxide plus ou moins parfait, fuivant la quantité' de d'Hist. Nat. et de Chimie. 6$ nitre qu’on emploie. Une partie de ce réfidu eli difloluble dans l’eau ; c’efi de la potafle combinée avec une portion d’oxide de 2incfl que l’on peut en précipiter à l’aide des acides. Refpour attribuait à cette di Ablution la pro- priété de diflbudre tous les métaux , fi l’on en croit Hellot , qui l’a donné comme Valkaëjl de cet alchimifle. Le zinc , d’après les travaux de Pott , parafa être capable de décompofer le muriate dfij foude. Il décompofe fur-tout très-bien le mm riate ammoniacal. M. Monnet allure qu’en tri- turant ce demi-métal avec ce fel , il fe dégage de Fammoniaque. Bucquet a obfervé qu’en dis- tillant ce fel avec le zinc , on obtient beaucoup de gaz ammoniaque & du gaz hydrogène pro- duit pendant la combinaifon de l’acide muria- tique avec ce demi métal. Il a vu que c’étoit en raifon de la réaélion vive que le zinc opère' fur l’acide muriatique, qu’il en dégage fi faci- lement l’ammoniaque. L’oxide de zinc le dé- gage auffi, fuivant Hellot. Le réfidu de cette décompofition eft du muriate de zinc que l’on peut fublimer. 1 Une diflblution de fulfate d’alumine que l’on fait bouillir avec de la limaille de zinc, fe dé- compofe & fournit du fulfate de ce métal. La ba/e de ce fel paroît donc fcvoir moins d’af* 64 É’ L É M E N S fînité avec l’acide fulfurique que n’en a le zinc. Ce fait eft dû à Pott ; nous aurons occafiôn de l’obferver fur plufieurs autres fubftances métalliques. On n’a point examiné les effets du gaz hy- drogène fur le zinc. J’ai feulement obfervé que ce demi-métal plongé dans ce gaz , prenoit au bout de quelque tems une couleur bleue 8c changeante très-brillante* mais je n’ai pas fuivi plus loin cette altération. Il n’eft pas fufcep- tible de réduire l’oxide de ce demi-métal, qui retient l’oxigène avec beaucoup de force , 8c qui décompofe l’eau. Le zinc ne paroît d’abord fe combiner au foufre qu’avec beaucoup de difficulté. En fondant ces deux fubftances enfemble , elles fe féparent fans contracter aucune efpèce d’union. Cepen- dant ,M. Dehne a obfervé que fi on les tient quelque tems fondues enfemble , le zinc fe cal- cine en partie, prend une couleur brune ou grife 8c augmente de poids. AL de Morveau a découvert, depuis la remarque de M. Dehne, que l’oxide de zinc s’unit facilement au foufre par la fufion , Sc qu’il en réfulte un minéral gris fort femblable à la blende d’Hùelgoët , d’où il s’élève quelquefois des aiguilles prifmatiques jaunes 8c brillantes qui s’attachent au couvercle du creufet. M. de Morveau obferve qu’il, eft d’autant fc’HisT. Nat. et de Chimie. 6$ d’autant plus vraifemblable que la blende Te forme dans la nature par la combinaifon de l’oxide de zinc & du foufre, que l’on ne trouve point de zinc natif. M. Maloüin n’a pas pu réuflir à combiner le iiinc avec le fulfure alkalin , foit par la voie humide , foit par la voie sèche , & en variant les dofes de ces deux corps. Le même chimilte a combiné le zinc avec îarfenic. Il a obfervé qu’il ne s’uniffoit pas fi bien qu’avec l’oxide d’arfenic. Cependant , dans line expérience où il a difiillé un mélange de èet oxide , de fuif 8c de zinc , il a obtenu une piaffe noirâtre, femblable à la blende & plus tendre que cette mine. Il paroît aufîi que le zinc énlève l’oxigène à l’arfenic , lorfqu’on le diflille enfemble avec l’oxide de ce dernier, & qu’une partie de ce demi-métal fe calcine, tandis qu’une portion de l’oxide d’arfenic paffe à l’état mé- tallique. Il feroit important de faire une fuite d’expériences fur cet objet , pour connoître quelle eîl l’adion réciproque des oxides mé- talliques & des métaux les uns fur les autres * & pour déterminer les attrapions éleétives de l’oxigène avec ces fubftances. On ne fait point fi le zinc eft fufceptible de Rallier au cobalt. Il ne fe combine point avec le bifmuth } 8c Tome HL E 66 Elémens lorfqu’on fond ces deux demi-métaux enfem- ble, le bifmuth fe précipite, comme le plus pefant , au*deffbus du zinc ; on les fépare d’un coup de marteau. Le zinc fondu avec l’antimoine , donne un alliage dur & caflant , que Malouin ne fait qu’indiquer. Le zinc eft d’un grand ufage dans les arts. On l’emploie dans plufieurs alliages , notam- ment dans celui qui constitue le tombac , le lîmilor ou le métal de prince. On mêle du zinc en limaille fine à la poudre à tirer , pour produire les ' étoiles blanches & brillantes de l’artifice. Quelques perfonnes ont propofé de fubflituer pour l’étamage ce demi-métal à l’étain , que l’on regardoit comme dangereux. Malouin , après avoir comparé ces fubflances métalli- ques , dans deux mémoires inférés parmi ceux de l’académie royale des fciences pour les an- nées 1743 & 1744» rend compte des expé- riences qu’il a faites fur l’étamage avec le zinc. Il réfulte de fes recherches , que cette efpèce d’étamage feroit plus exaélement étendu fur le cuivre , beaucoup plus dur & moins fufible que celui de l’étain , & conféquemment plus du- rable & moins fujet à laifler le cuivre à dé- couvert. Macquer, qui reconnoît ces avantages , fait cependant des obfervations bien impôt- d’Hist. Nat. et de Chimie. 67 tantes fur l’emploi du zinc pour les vaiffeaux fervans à la cuifine , & le croit dangereux , parce qu’il eft diffôluble par les acides végé- taux, comme le vinaigre, le verjus, &c. 8c parce qu’il a une propriété émétique affez forte* Il le prouve par le vitriol de zinc, qu’on em- ployoit autrefois comme vomitif, fous le nom de gilla vitriole, 8c par le témoignage de Gau- bius, qui reconnut un remède accrédité dans les maladies convulfives , 8c nommé luna fixata, Ludemanni , pour de l’oxide de zinc fublimé* Cette prétendue lune fixée étoit fort émétique, & à de trcs-peiites dofes. Mais ne feroit-il pas permis de préfumer que ces reproches , qui ne tombent que fur le fulfate 8c l’oxide de zinc, ne peuvent pas plus s’appliquer au demi-métal lui-même , qu’aux fels formés par fa combi- naifon avec les acides végétaux ? M. de la Planche , docteur en médecine de la faculté de Paris , a changé cette préfomption en certitude pat des expériences faites avec beaucoup de foin 8c fur lui-même. Il a pris des fels de zinc , formés par les acides végétaux, à beaucoup plus forte dofe que n’en pourroient contenir les alimens préparés dans du cuivre étamé de zinc , 8c il n’a éprouvé aucun effet dangereux de ces compofés. Cependant , comme les objets qui intéreffent la fanté 8c la vie de tous les hommes Eij I 68 É L É M E N 3 ne fauroient être traités avec trop de fageffe & de circonfpedion , il me paroît prudent & même néceiïaire de ne fe décider fur cet objet qu’après avoir bien reconnu, par une grande quantité d’expériences , quelle peut être l’adion du zinc en nature 8c des Tels qu’il forme avec les acides végétaux employés dans les alimens, fur l’économie animale. Les médecins allemands employent avec fuccès l’oxide de zinc fublimé , comme antifpaf- modique , dans les convulfions & les accès épi- leptiques. On n’en fait point en France un ufage étendu; il paroît cependant que ce remède pourroit être utile , adminiftré en pilules , à la dofe d’un demi-grain par jour. On m’a alluré qu’à Edimbourg on l’employoit à une dofe bien plus confidérable , 8c qu’on n’en obtenoit point d’effet fenfible. Ce fait eff contraire à ce que dit Gaubius de la propriété émétique de cet oxide de zinc. On fe fert du pompholix , de la tuthïe ou de divers oxides de zinc, &c. comme de très-bons defficatifs dans les maladies des yeux, &c. d’Hist. Nat. et de Chimie. \ CHAPITRE XV. Du Mercure . Le mercure ou vif argent a l’opacité & le brillant métalliques; c’eft après l’or & le platine la fubftance la plus pefante qu’on connoifle. Un pied cube de mercure bien pur pèfe neuf cents quarante-fept 1. il perd dans l’eau un treizième de fon poids. Comme il efl habituellement fluide , on ne çonnoît bien ni fa ténacité ni fa ducHlite , & l’on efl encore embarraiïe pour favoir quel rang lui afligner. En effet , il fe vo- îatilife comme les demi-métaux ; il a une efpèce de du&ilité comme les métaux. Cependant Ta pefanteur énorme , fa fluidité habituelle , fa volatilité extrême» &. les altérations fingulières qu’il efl fufceptible d’éprouver par beaucoup de combinaifons , le font regarder avec vraifem- blance comme une fubflance particulière , qui femble n’appartenir aux matières métalliques que par fon brillant , fa pefanteur & fa çom- buffibilité , & qui doit être rangée à part. Nous plaçons fon hiffoire entre celle des demi-mé- taux & des métaux. On a cru pendant long-tems a que le mercure Èiij 70 J Élémens ne pouvoit pas perdre fa fluidité. Mais les aca- démiciens de Péterfbourg ont prouvé le con- traire. Ces favans profitèrent du froid exceflif de 1775? , pour tenter plufieurs expériences im- portantes ; ils augmentèrent encore le froid na- turel à l’aide d’un mélange de neige & d’efprit de nitre fumant , & parvinrent par ce moyen à faire defcendre un thermomètre de mercure à 213 degrés, fuivaht la graduation de Delile, qui répond à 46 au-deiïbus de la glace, dans la graduation de Réaumur. Obfervant qu’à ce degré le mercure 11e defcendoit plus , ces Meilleurs cafsèrent la boule de verre , & trouvèrent ce fluide métallique gelé & formant un corps fo- lide qui fe îaifToit étendre fous le marteau. Cette expérience démontre que le mercure pouvoit devenir concret comme toutes les autres fubf- tances métalliques , & qu’il jouilToit alors d’un certain degré de duéfilité. Ils n’ont point dé- terminé jufqu’oîi pouvoit aller la duéfilité du mercure, parce que chaque coup de marteau refoulant la chaleur dans quelque point du mé- tal , le fondoit & lefaifoit couler dans ce point. M. Pallas , qui a réuffi à faire congeler du mercure en 1772 à Krafnejark , par un froid naturel de yy degrés & demi , a obfervé qu’il reffembloit alors à de l’étain mou , qu’on pou- voit le battre en lames , qu’il fe rompoit faci- d’Hist. Nat. et de Chimie. 71 îement , & que Tes morceaux rapprochés fe réuniffoient. En 177 y , M. Hudchius a obfervé le même phénomène à Albany-fort , & M. Bie- ker à Rotterdam en 1776 , au degré y 6 au- defious de zéro. Enfin on efi parvenu en 1783 , en Angleterre , à opérer cette congellatiôn du mercure à un froid moindre , & on a déterminé que 32 degrés au-deflous de zéro du thermo- mètre dé Réaumur , étoit le terme où elle avoit lieu : fi donc le mercure a defcendu plus bas dans les premières expériences , c’efi à un refi« ferrement ou à une condenfation fùcceflîve qu’il faut attribuer ce phénomène. Ce métal eft donc le plus fufible de tous ceux que nous connoif- fons ; le plus grand froid connu dans les pays où il efi natif , ne peut pas le rendre folide. Il efi vraifemblable que fi dans les expériences précédentes le froid qui a gelé le mercure avoit été conduit par degrés infenfibles, cette matière métallique auroit pris une forme criflalline & régulière. La fluidité habituelle du mercure l’a fait re- garder comme une eau métallique particulière, & On l’a appelé aqua non madefaciens tu anus : l’eau qui ne mouille pas les mains. Il efi vrai que le mercure ne mouille ni les mains , ni au- cuns des autres corps qui peuvent être mouillés par l’eau , par les huiles ou les autres liqueurs Eiv Ê i É M E N S mais ce phénomène ne dépend que du peu d’affinité qui exifté entre ce fluide métallique & ces corps. Car quand il eft en contaft avec quelques-unes des fubflances auxquelles il peut s’unir, comme l’or, l’argent, l’étain, &c. alors îl s’applique intimement' à ces corps , & les mouille au point qu’on ne peut les deffécher qu’en faifant évaporer au feu le mercure qui les enduit. Le mercure étant un métal fondu , affeéte toujours la forme de globules parfaits îorfqu’on le divife ; quand il eft renfermé dans un flacon , fa furface paroît convexe. Çet effet dépend & du peu d’affinité qu’a le mercure avec le verre, & de la grande att radio n qui tend à rapproche? les parties de ce métal : car fi on met ce fluide dans un vafe de métal avec lequel il ait de l’af- finité, alors fa furface paroît concave comme celle de tout autre fluide , parce qu’il fe com- bine avec les parois de ce vaiffeau. Le mercure a une faveur que les nerfs du goût ne peuvent point percevoir , mais qui cependant produit un effet très- marqué dans Lcftomac & les inteflins , auffi-bien qu’à la fur- face de la peau. Les infeétes & les vers font infiniment plus fenfibles que les autres ani piaux à cette faveur; c’efl pour cela que le mercure les. tue très-vite , & que les médecins' l’em- d’Hist. Nat. et de Chimie. 73 ploient comme un excellent vermifuge. C’elî même en raifon de la propriété qu’il a de gué- rir la galle & plufieurs autres maladies de la peau , que plufieurs favans ont penfé que ces maladies étoient produites par la préfence de certains infedes qui pénétraient le tiffu de cet organe. Mais cette opinion n’a point été géné- ralement adoptée , quoique plufieurs naturalises aient décrit le ciron de la galle , Ne. Le mercure , frotté quelque tems entre les doigts , répand une légère odeur particulière. Lorfqu’il efi bien pur & qu’on l’agite , on ob- ferve quelquefois , & fur -tout dans les tems chauds , qu’il brille d’une petite lueur phof- phorique affez fenfible j ce phénomène a été conftaté fur le mercure du baromètre par plu- fieurs phyficiens. Si l’on plonge la main dans ce fluide métallique , on éprouve une fenfation de froid qui fembleroit indiquer qu’il eft d’une température plus froide que l’air atmofphéri- que ; cependant en y plongeant un thermomè- tre , on s’affure bien vîtç que le mercure efi à la température de l’atmofphère. Cet effet qui nous trompe , doit être entièrement attribué à la fortie rapide de la chaleur des mains qui elt enlevée par le mercure , dont la propriété con- dudrice pour ce corps efi très-énergique. Le mercure divifé à l’aide d’un mouvement 74 É L é M E N s rapide & continuel , comme celui d’une roue de moulin , fe change peu à peu en une poudre noire très-fine, qu’on a appelée Ethlops perfe , à caule de fa couleur ; comme le mercure éprouve un commencement de calcination dans cette expérience , nous nommons cette poudre txïde de mercure noir. On peut, en le chauf- fant légèrement ou en le triturant dans un mor- tier chaud , le faire reparaître avec fa fluidité ordinaire 8c fou brillant métallique. Le mercure efl peu abondant dans la nature, 8c il fe rencontre dans la terre ou dans l’état vierge 8c jouifîant de toutes fes propriétés, ou dans l’état d’oxide , ou combiné avec les aci- des , le foufre 8c quelques autres matières mé- talliques , il efl alors minéralifé par ces diverfes fubflances. Le mercure coulant fe trouve en globules ou en plus grandes maiïes , dans les terres 8c les pierres tendres , 8c le plus fouvent il efl interpofé dans fes mines. A Ydria , en Efpagne 8c en Amérique , on le ramaiïe dans les cavi- tés 8c les fentes des rochers ; on le trouve aufli quelquefois dans de l’argile à Almaden , 8c dans des lits de craie en Sicile. Enfin on le rencontre dans des mines d’argent , de plomb, & mêlé à l’oxide d’arfenic blanc. M. Sage a fait connoître une mine de mer- d’Hist. Nat. et de Chimie. 77 cure en oxide venant d’Ydria dans le Frioul ; elle eft d’un rouge brun , fort doux & grenue dans fa caflure ; on y trouve quelques globules de mercure coulant ; elle fe réduit fans addi- tion par la chaleur. M. Kirwan la regarde com- me une combinaifon d’oxide mercuriel & d’a- cide carbonique ; elle donne 5)1 parties de mer- cure fur 100 de mine. M. Woulfe a trouvé en 177(5, à Obermuf- chel dans le duché de Deux-Ponts, une mine de mercure criftallifée , pefante, fpathique, blanche, jaune ou verdâtre , dans laquelle il a reconnu par les alkalis la préfence des acides fulfurique & muriatique ; c’eft un compofé de fulfate de mercure & de muriate mercuriel corrofif. M. Sage allure qu’elle tient 86 par- ties de mercure par quintal • ce chimifte a décrit une mine de mercure corné brune de Carinthie. C’eü le plus communément avec le foufre que le mercure eli combiné dans la nature. Il forme alors un compofé connu fous le nom de Cinabre. Cette fubftance minérale eft rouge , 8c n’a en aucune manière l’afped métallique, quoi- que le foufre s’y trouve en petite quantité, re- lativement au mercure , parce que la combinai- fon de ces deux corps eft trcs-exafte. Le cinabre fe rencontre dans le duché de Deux - Ponts 9 7Ü> Élémins dans le Palatinat, en Hongrie, dans le Frioul, en Efpagne à Almaden , & dans l’Amérique méridionale , fur-tout à Guamanga au Pérou* Il efl tantôt en malfe compaéte , dont la cou- leur varie depuis le rouge pâle jufqu’au rouge foncé 8c noirâtre, quelquefois en criilaux tranf- parens couleur de rubis , fouvent en efpèces d’écailles ou en lames feuilletées. On le nomme Vermillon natif ou cinabre en fleurs , lorfqifil efl fous la forme d’une poudre rouge très- brillante. Enfin on le trouve difperfé dans dif- férentes terres, dans le fulfate de chaux, mêlé au fer , aux pyrites 8c à l’argent, M. Cronfledt parle , dans fa minéralogie , d’une mine de mercure dans laquelle cette fubfiance efl unie au foufre 8c au cuivre. Cette mine efl d’un gris noirâtre, fragile 8c pefante; fa fraéture efl vitreufe , elle décrépite au feu ; elle fe trouve à Mufchel-Landfberg. Le même minéralogifte affure qu’on a quel- quefois trouvé dans la mine de Sahlberg en Suède , du mercure amalgamé avec de l’argent vierge. M» Romé de Lille pofsède dans fon cabinet un morceau qu’il croit être de cette efpèce. M. Monnet parle , dans fon fyflême de mi- néralogie , d’une mine apportée en 1768 , du Dauphiné , par M, de Montigny , qui contient d’Hist. Nat. et de Chimie. 77 du mercure , du foufre , de l’arfenic , du co- balt, du fer & de l’argent; elle eü grife, blan- châtre & friable. Il y a trouvé une livre de mercure , 8c trois à quatre onces d’argent pat quintal. D’après ce court expofé , les différens états que préfente le mercure dans l’intérieur de la terre , peuvent être réduits aux variétés fui* vantes. Etat L Mercure natif. Diiïeminé dans des terres & des pierres , 8c le plus fouvent dans f es mines mêmes. Etat 1 1. Oxide de mercure natif. Etat 111. Sulfate 8c muriate de mercure. \ 0 natifs. Etat 1 V. Mercure minéralifé par le foufre 5 Cinabre. Variétés. 1. Cinabre tranfparent , rouge & criftallifé en prifmes triangulaires très - courts , terminés par des pyramides triangulaires. 2. Cinabre tranfparent rouge en criftaux odaë- dres, formés de deux pyramides triangulai-; res, réunies par leurs bafes , 8c tronquées. 3. Cinabre folide, compade, d’un rouge brun. Elémens 78 ^Variétés. ou d’un rouge clair. Il ell quelquefois formé de feuillets. q. Cinabre rouge , diftribué en flries fur une gangue pierreufe ou fur du cinabre folide. Il efl quelquefois aiguillé comme le cobalt. 5. Cinabre en fleurs , vermillon natif ; c’efl un cinabre d’un rouge brillant fatiné , qui adhère à différentes gangues fous la forme d’une pouiïière très- fine; il efl quelquefois criftal- lifé en très-petites aiguilles , alors il reffem- ble beaucoup au précédent. Etat V. Mercure combiné au foufre & au cuivre ; mine de mercure noire & vitreufe de Cronfledt. \ v "T- Etat V I. Mercure allié au foufre, à l’arfenic, au cobalt , au fer & à l’argent. Etat VIL Mercure allié à l’argent , amalgame d’argent natif. Pour connoître une mine qui contient du mercure , on la pile , on la mêle avec de la chaux , des alkalis , &c. On en jette fur une brique chaude , on couvre le tout d’une clo- che , le mercure fe réduit en vapeurs , & fe condenfe aux parois de la cloche. Si l’on veut t -w • • • : * • * * d’Hist. Nat. et de Chimie. 79 connoître la quantité de mercure qui y efl con- tenue , après l’avoir pulvérifée & lavée , on la diflille avec des matières capables de s’emparer du foufre & d’en dégager le mercure. On a foin de mettre de l’eau dans le récipient , afin de raffembler le mercure au fond de ce fluide. En pefant exaétemqnt la mine avant de lef- fayer , & le mercure qu’on en obtient par la difti dation , on connoît ce qu’elle en peut fournir. Le mercure vierge fe fépare facilement, en broyant les pierres avec lefquelles il efl mélan- gé , & en les délayant dans de l’eau ; le mé- tal fe précipite & l’eau entraîne la terre; c’eft ainfi qu’on le retire des mines d’Ydria dans le Frioul. On ne grille point le cinabre , parce qu’étant volatil , il fe diffiperoit au feu ; mais comme la nature la prefque toujours mélangé avec une fubflance calcaire ou martiale , cette fubflance devient un intermède propre à décompofer le cinabre à l’aide du feu. Antoine de Juflîeu a décrit dans les Mémoires de l’académie, en 1719 , le travail qu’on fait à Aîmaden en Efpagne , pour retirer le mercure du cinabre. Cette mine contient du fer & un pca de pierre calcaire; on la met dans des fours qui ont la forme de fourneaux de réverbère, 0n c^attlfe ces fours, en mettant les matières Sq Élément eombuflibles dans le cendrier. Le fourneau n’a d’ouvertures que huit trous pratiqués à fà partie poflérieure; à chacun de ces trous on ajufle une file d’aludels * dont le dernier aboutit à, un petit bâtiment aflèz éloigné du fourneau. Entre le fourneau & le bâtiment , où fe terminent les aludels , ell une petite terraffe qui s’arafe avec les ouvertures du fourneau & celles du bâti- ment. Cette terrafle forrire deux plans inclinés * 8c foutient les aludels. Si quelque jointure mal. bouchée laiiïe échapper du mercure, il fe raf- femble dans la jondion des plans inclinés de la terrafle. Lorfque le feu efl appliqué au ci- nabre , le fer & la pierre calcaire abforbent le foufre ; le mercure réduit en vapeurs pafle dans les aludels , 8c va gagner le petit bâtiment* Après la diftillation , on tranfporte tous les aludels dans une chambre quarfée , pour les vider 8c réunir le mercure dans Une foffe pra- tiquée au milieu de cette chambre , dont le fol efl incliné en talus vers cette foffe moyenne. Antoine de Juffieu a obfervé que les mines de cinabre ne donnoient aucune exhalaifon funefle aux végétaux , 8c que les environs & le defllis des mines d’Almaden étoient très-fertiles. Il a également obfervé que l’exploitation de cette mine n’étoit pas funefle aux ouvriers , comme on l’avoit cruj que ceux qui travaillent dans l’intérieur I d’Hist. Nat. et de Chimie. 8r l’intérieur de la mine , comme forçats , font les feuls qui foient fujets à des maux graves, parce que le feu qu’ils font obligés d’allumer , vola- tiüfant une portion du mercure , ils fç trouvent continuellement plongés dans une vapeur mer- curielle. M. Sage a décrit dans les mémoires de faca- ciémie , année 177 6 , le procédé que l’on em- ploie pour extraire le mercure du cinabre dans le Palatinat. Le fourneau elt une galère char- gée de quarante-huit cornues de fonte , dont 1 épaiffeur eil d’un pouce , la longueur de trois pieds neuf pouces, & qui contiennent environ foixante livres de matières. Ces cornues font fixées à demeure fur le fourneau ; on y intro- duit , à 1 aide de cuillers de fer , un mélange de trois paities de la mine bien bocardee , avec une partie de chaux éteinte j on chauffe avec du charbon de terre que l’on met par les deux extrémités du fourneau , dont les côtés font percés de plufieurs ouvertures qui établif- fent des courans , & font brûler le 'charbon. Le met cure fe volatiüfe à l’aide de la réadion de la chaux fur le foufre ; on le recueille dans des réçipiens de terre adaptés aux cornues, & rem- plis d’eau jufqu’au tiers de leur capacité. Cette' opération dure dix à onze heures. Le mercure retiré ou revivifié du cinabre , eft Tome III, p I f 82 É L Ê M ENS très-pur & ne contient aucune particule étran- gère ; on en trouve peu qui foit de cette pu- reté dans le commerce. Prefque tout celui que vendent les marchands eft plus ou moins mêlé de matières métalliques étrangères; il paroît un peu terne, & au lieu de fe divifer en globules lorfqu’il coule , il s’applatit 8c femble fe hérif- fer de pointes. Les marchands difent alors qu’il fait la queue. Le mercure ne paroît point éprouver d’alté- ration de la part de la lumière. G’eft une des matières fluides qui s’échauffe le plus vite 8c le plus régulièrement , c’eft- à-dire , dont la marche de la dilatation eft la plus confiante , comme l’ont démontré MM. Bucquet 8c Lavoifier, par- leurs recherches fur la marche de la chaleur dans les différens fluides , lues à l’académie des fciences. Ce phénomène indique que le mer- cure eft le fluide le plus propre à marquer exac- tement les degrés de chaleur , 8c à former les thermomètres les plus exaéts. Ce fluide métallique expof'é au feu dans les vaifleaux fermés , bout à la manière des liqui- des. Cette propriété ne lui eft point particu- lière ; il la partage avec l’argent , l’or 8c la plu- part des autres métaux. Il eft vrai que comme le mercure eft plus fufible qu’aucun autre, il bout plus vîte 8c long-îtems avant d’être rouge. I d’Hist. Nat. et de Chimie. 83 L’ébullition n’eft autre chofe que Ton paffage de l’état liquide à l’état de vapeur. Cette va- peur qui devient bientôt très-apparente fous la forme d’une fumée blanche, & qui trouble la tranfparence des vaifTeaux dans lefquels on la reçoit, fe condenfe par le froid en gouttelettes de mercure, qui n’ont éprouvé aucun déchet, ni aucune altération , lorfqu’on fait cette diüillation avec foin. Le mercure efl donc une fubftance tres-volatile , qu’on peut difliller comme de l’eau , & qui fe rapproche par-là des demi- métaux. Boerhaave a diflillé cinq cens fois de fuite la même quantité de mercure, il n’étoit altéré en aucune manière • il lui a feulement paru un peu plus brillant , plus pefant & plus fluide • ce qui ne dépendoit fans doute que d’une purifi- cation tres-exade. Il a obtenu dans cette dif- tillation une petite quantité de poudre grife , qui ne lui a paru que dur mercure trcs-divifé & qui n’avoit befoin que d’être trituré dans un mortier , pour devenir fluide & brillant ; c’é- L01t Un Peu d’oxide noir de mercure, dû à l’air contenu dans l’appareil. La diflillation efl un moyen de purifier le mercure , & de le féparer des métaux fixes qui r altèrent ordinairement dans le commerce; on retrouve dans la cornue le métal étranger cn gq, Élêmens une croûte brillante dans quelques endroits, & noirâtre dans d’autres. On connoît en pefant ce réfidu , la quantité de matière qui alteroit le mercure. La pefanteur extrême du mercure a fait croire aux chimiftes que cette fubltance contient abon- damment le principe terreux pur , ou la terre vitrifiable. Mais d’un autre côté, ce principe, lorfqu’il domine dans les corps , leur donne de la folidité , & le mercure efl au contraire très- fufible; le principe terreux efl éminemment fixe, 8c le mercure elt très- volatil. Ces qualités qui paroifTent oppofées , ont engagé Beccher à ad- mettre dans ce fluide métallique une terre par- ticulière , qu’il nommoit , comme nous l’avons déjà dit , terre mercurielle , à laquelle il attri- buoit en même-tems la pefanteur 8c la volatilité. Le mercure étoit donc , fuivant ce chimifie , un compofé de ces trois terres , de la vitri- fiable , de l’inflammable & de la mercurielle. Perfonne n’a encore démontré l’exiftence de 1a. dernière dans aucun corps, 8c on ne doit re- garder cette opinion que comme une aflertion dénuée de preuves. Le mercure nous paroît , comme toutes les autres fubflances métalliques, un corps combuflible particulier dont on n’a point encore féparé les principes. Quant à la terre vitrifîable dont nous avons examiné les d’Hist. Nat. et de Chimie. 8£ propriétés dans le commencement de cet ou- vrage j nous ne croyons pas qu’on puiffe l’ad- mettre plus dans le mercure que dans les autres métaux, puifqu’on n’en a jamais extrait aucun principe femblable. Ce que Beccher & Stahl appeloient ainlî dans le mercure & dans les au- tres fubflances métalliques , n’efl rien moins qu’un corps fimple & terreux , ainfi que nous l’avons dit en parlant des oxides des métaux en général. Le mercure réduit en vapeurs a une force expanfive conlidérable , 8< ell fufceptible de produire des explofions vives lorfqu’il efl en- fermé. Hellot a rapporté à l’académie qu’un particulier ayant voulu fixer le mercure , en avoit mis une certaine quantité dans une boule de fer très-bien foudé ; on jetta cette boule au milieu d’un brafier ardent ; mais à peine fut- elle rouge , que le mercure déchira fon enve- loppe avec un bruit confidérable , & s’élança à perte de vue. M. Baumé rapporte dans fa Chimie expérimentale , un fait à-peu-près pareil,, dont Geoffroy l’apothicaire avoit été témoin. Le mercure efl infiniment plus fufceptible de fe calciner par le contacl de l’air & de beaucoup de corps , qu’on ne l’a cru jufqu’aéluellement. 11 fe forme fans ceffe à fa furface une pellicule grife noirâtre , qui efl un véritable oxide mer- curiel. F iij 86 Élêmens Chauffe avec le concours de l’air , ce métal fe change au bout de quelques jours en une poudre terreufe , rouge , brillante , difpofée en petites écailles. Cette poudre , qui n’a plus l’af- peét métallique , eff un vrai oxide de mercure. Les alchimiftes qui ont cru que le mercure fe fixoit dans cette expérience , l’ont appelée im- proprement mercure précipité par lui -même, ou précipité per fe. Comme le mercure eff très- volatil j & que cependant il a befoin du con- cours de l’air pour fe calciner , on a imaginé pour cette opération un infiniment aflez com- mode , nommé enfer de Bayle. C’efi un flacon de criflal très-large & très- plat ; on y renferme le mercure qui y forme une couche mince , & préfente par conféquent une grande furface» Le bouchon qui s’aiufte exaâement au goulot de ce flacon , eft un cylindre de enflai percé d’un tuyau capillaire. On place le flacon fur un bain de fable; on chauffe le mercure jufqu’à le faire bouillir. L’ouverture du cylindre eft telle , que l’air a de l’accès dans le flacon , fans que "le mercure puifle fe difliper. Au bout de plusieurs mois de digeftion , on fépare l’oxide qui s’eft formé à la furface du mercure. Pour cela on jette le tout fur une toile ferrée , le mercure pafle à l’aide de la preffion , & l’oxide rouge refie fur le linge. On peut fe fervir, avec tout d’Hist. Nat. et de Chimie. Sj autant de fuccès , d’unmatras à fond plat, dans lequel on verfe affez de mercure pour y for- mer une couche mince ; on tire à la lampe le col de ce matras en un tuyau capillaire , & on en caffe la pointe. Ce moyen indiqué par M. Baumé, fournit un vailTeau plus propre à l’oxidation du mercure , parce qu’il contient plus d’air ; il eft auffi plus aifé à chauffer , moins difpendieux , & moins fujet à caffer que l’enfer de Boyle. Pour que l’expérience réuffffe, il faut entretenir le mercure dans une chaleur capable de le faire bouillir légèrement nuit & jour pen- dant plufieurs mois; en multipliant les matras fur le même bain de fable , on obtient une plus grande quantité de précipité per fe , ou d’oxide de mercure rouge , 8c l’on peut même en pré- parer une certaine quantité en quinze ou vingt jours. Le précipité per fe eft un vrai oxide de mer- cure , ou une combinaifon de cette matière métallique avec l’oxigène , qu’elle enlève peu à peu à ratmofphère. Ce qui le prouve d’une manière convaincante , c’ell que , i°. on ne peut jamais réduire le mercure en précipité per Je , fans le contad de l’air. 2°. On ne peut for- mer cette combinaifon qu’avec l’air vital , & elle n’a pas lieu dans les différens gaz qui ne font point de l’air, 30. Le mercure dans cette Fiv 88 É L É M E N S expérience augmente de poids. 40. En le chauf- fant dans des vaiffeaux fermés , on Je réduit tout entier en mercure coulant , & il fe dégage en même tems une grande quantité de fluide élaflique , dans lequel les corps combuftibles brûlent quatre fois plus rapidement que dans l’air de l’atmofphère ; c’eft ce fluide dont M. Prieflley a le premier reconnu l’exiftence, qu’il a défigné fous le nom d’air déphlogijliqué , 8c que nous appelions ga ^ oxigêne , ou air vital; Le mercure a perdu dans cette réduéiion le poids qu’il avoit acquis en fe calcinant. Ce dernier fait, joint aux phénomènes delà calcination , relativement à la néceflité 8c à la diminution de l’air dans cette opération , a porté M. Lavoifier à penfer d’après une analogie auflx bien fondée que toutes celles que l’on établit en phyfique , que les oxides métalliques ne font que des combinaifons des métaux avec l’oxi- gène de l’air. Comme le précipité per fe peut être très-bien analyfé par la chaleur, 8c comme il fe fépare en deux principes , l’air vital pur & le mercure coulant , on fent combien cette belle expérience répand de lumières fur la théorie pneumatique, 8c combien elle lui eft favorable. On conçoit très -bien comment la bafe de l’air vital ou i’oxigène fixé dans le mercure , fe dégage en reprenant de l’élafticité D’HrsT. Nat. et de Chimie. 89 à l’aide de la chaleur. Pour réduire ainfi l’oxide rouge de mercure , il faut le chauffer dans des vaiffeaux exactement fermés ; s’il a le contaél de l’air , il refie dans l’état d’oxide , parce qu’il trouve toujours dans l’atmofphère , le corps avec lequel il peut s’unir , & qui a feul la pro- priété de le calciner. C’efl pour cela que M. Baumé a foutenu que le précipité per fe. n’étoit pas réduétible , qu’il fe fublimoit au contraire en criflaux rougeâtres , de la couleur du rubis; tandis que M. Cadet a prétendu que tous les précipités per fe pouvoient également être ré- duits en mercure coulant. Macquera prouvé par une explication ingénieufe &bien d’accord avec les faits , que l’un St l’autre de ces chimiftes a voit raifon , & que fi on chauffoit l’oxide de mercure avec le contaél de l’air , il fe fu- blimoit en entier , St pouvoit même fe fondre en un verre de la plus belle couleur rouge, comme l’a dit M. Keir , favant chimifle écof- fois , dans fa traduétion du diélionnaire de Chi- mie ; tandis que le même oxide fufceptible de fe fublimer lorfqu’il a le contaél de l’air , fe réduit en mercure coulant , St fournit de l’air vital lorfqu’on le chauffe fortement dans des vaiffeaux bien fermés. Comme le brillant du mercure fe ternit par les molécules de pouiïîcre que l’air entraîne. ço É L É MENS & qui fe dépofent à fa furface, on lui a donne le nom éi aimant de la pouffière. Mais il paroît que tous les corps ont cette propriété , & qu’elle n’efl très-fenfible dans ce métal qu’en raifon de fon brillant. D’ailleurs il n’efl: nullement altéré, & il fuffit de le filtrer à travers une peau de chamois , pour le féparer des molécules étran- gères qui flottent à fa furface, 8c pour lui ren- dre tout fon éclat. Le mercure ne paroît pas fe diflbudre dans l’eau; cependant les médecins font dans Tufage de faire fufpendre un nouet plein de ce métal dans les tifannes vermifuges pendant leur ébul- lition. On alfure même que l’expérience a conf- taté les bons effets de cette pratique. Lemery a prouvé que le mercure ne perdoit rien de fon poids dans cette décodion. Peut-être s’émane- t-il de ce métal un principe analogue à celui de l’odeur , fi fugace 8c fi tenu , qu’on ne peut en connoître la pefanteur , à caufe de fon ex- trême ténuité , & qui communique à l’eau la vertu anthelmintique. Le mercure ne s’unit pas plus aux terres que ne le font les autres fubftances métalliques. Son oxide rouge , ou précipité per fe , pourrait peut-être fe fixer dans les verres , & les colo- rer , comme on l’obferve pour l’oxide d’ar- fenic. d’Hist. Nat. et de Chimie. pi On ne connoît point l’adion de la baryte , de la magnéfie, de la chaux & des alkalis fur le mercure. L’acide fulfurique n’agit fur cette fubftance métallique, que quand il efl très-concentré. Pour faire cette diflolution , on met dans une cornue de verre une partie de mercure , & on verfe par-delTus une partie & demie ou deux parties d’acide fulfurique concentré. On chauffe le mélange ; peu à peu il s’excite une effervefcence vive; la furface du mercure devient blanche; il s’en fépare une poudre de la même couleur, qui trouble l’acide en s’y difperfant. Il fe dé- gage une grande quantité de gaz fulfureux, 8c on peut le recueillir au- deffus du mercure. C’efl , comme nous l’avons vu en parlant de l’acide fulfurique , le procédé qu’on met en ufage pour obtenir çe gaz. Il paffe audi une portion d’eau chargée de gaz acide fulfureux. Lorfqu’on pouffe cette diftillation jufqu’à ce qu’il ne paffe plus d’acide fulfureux , on trouve dans le fond de la cornue une maffe blanche , opaque , très- cauftique , qui pèfe un tiers de plus que le mer- cure qu’on a employé , 8c qui attire un peu l’humidité de l’air. La plus grande partie de cette maffe eft un oxide de mercure uni à une petite portion d’acide fulfurique. Cette matière elt affez fixe , fuivam la remarque de Kunckel, p 2 ÉLÉMENS Macquer& Bucquet. Dans cette opération l’acide fulfurique efl décompofé par une double at- traction élective ; le mercure , qui eft une fubf- tance combuflible , s’eft uni à l’oxigène contenu dans cet acide , tandis que la chaleur a dégagé le gaz fulfureux & l’eau. Le métal doit donc être dans l’état d’oxide , & conféquemment avoir beaucoup plus de fixité que le mercure coulant. Une portion de cette malle mercurielle ful- furique eft diffoluble dans l’eau ; lorfqu’on y verfe ce fluide en grande quantité , il délaye cette malle , & laifle précipiter une poudre blanche fi l’eau eft froide ; fi on emploie de l’eau bouillante , cette poudre prend une belle couleur jaune brillante , & d’autant plus vive qu’on y verfe plus d’eau & qu’elle eft plus chaude. On a donné très-anciennement le nom de turbith minéral ou de précipité jaune à cette matière : nous la nommons oxide mercuriel jaune. On décante l’eau qui a fervi à le laver; on verfe fur le turbith une nouvelle quantité de ce fluide bouillant, il devient d’un jaune plus éclatant; on le lave encore à une troifième eau pour lui enlever tout l’acide fulfurique qu’il contient. Dans cet état il n’a plus de faveur , c’eft un oxide mercuriel qui, pouflé au feu dans une cornue 3 devient d’abord d’une couleur plus d’Hist. Nat. et de Chimie. 93 foncée , & fe réduit en mercure coulant en fourniffant une grande quantité d’air vital. Kunc- kel annonce cette réduétion ; elle a réufîî à MM. Monnet, Bucquet & Lavoifier , qui l’ont fuivie dans tous fes détails. Je l’ai répétée plu- fieurs fois avec fuccès. Elle prouve , comme nous l’avons vu , que 1 acide fulfurique efl formé de foufre , d’oxigène & d’eau ; mais il faut un feu allez violent pour le réduire. C’eft peut- être parce que M. Baumé ne l’a pas chauffe fuffifamment , qu’il n’a pas obtenu de mercure, Sc qu’il annonce qu’il ne peut reparoître fous fa forme métallique , que par l’addition d’une matière combuffible. En continuant de chauffer la maffe fulfurique mercurielle dans la même cornue où on l’a diffoute , fans rien débiter Sc fans laver cette maffe pour en enlever la por- tion d’acide , on décompofe de même cet oxide; il fe réduit en mercure coulant , à mefure que l’oxigène qu’il avoit enlevé à l’acide fulfurique devient élaflique , 8c conféquemment air vital , par fa combinaifon avec la chaleur. L’eau que l’on a verfée fur la maffe mercu- rielle fulfurique blanche , s’eff chargée de la portion d’acide non décompofé Sc encore con- tenue dans cette maffe. Mais comme l’oxide de mercure eff foluble dans l’acide fulfurique^ cette fubftance faline en emporte toujours avec 94 Élémens elle ; de forte que l’eau tient en diflolution un vrai fulfate de mercure. En l’évaporant forte- ment , elle dépofe ce fel en petites aiguilles dont on ne peut déterminer la forme , parce qu’elles font molles & très-déliquefcentes. En jettant de l’eau bouillante fur ces ciihaux de fulfate de mercure , ils deviennent jaunes & dans l’état d’oxide mercuriel , parce que l’eau en fépare l’acide qui efl peu adhérent 8c laihe cet oxide pur. La même chofe a lieu lorf- qu’après avoir fortement évaporé la première leffive de la malle mercurielle , on l’étend dans beaucoup d’eau bouillante au lieu de la faire criflallifer ; elle précipite une poudre jaune 8c dans l’état d’un vrai oxide. Si on fe fert d’eau froide, le précipité efl blanc, mais il fuffit de reverfer fur ce précipité blanc de l’eau bouillante pour lui faire reprendre la couleur jaune. On peut rendre ainfi à volonté la diflolution d’oxide de mercure décompofable ou non par l’eau ; il fuffit pour cela de l’évaporer fortement ou de charger l’acide de tout l’oxide mercuriel qu’il efl capable de diffoudre , alors l’union de ces deux corps eh facilement féparée par l’eau. Si l’on y ajoute un peu d’acide , elle ne pré- cipite plus par ce fluide. Je me fuis convaincu de cette vérité , en diffolvant du turbith minéral bien lavé dans de l’acide fuifiirique foible. Cette d’Hisï*. Nat. et de Chimie. diffolution n’eft pas furchargée d’oxide mer- curiel , elle ne précipite pas par l’eau. Mais fi on charge cet acide de tout ce qu’il en peut diffoudre à l’aide de la chaleur , ce qui fe fait en ajoutant cette matière jufqu’à ce qu’il re- fufe d’en diftoudre , alors cette dilîolution verfée dans de l’eau froide , forme un précipité blanc, ou une poudre jaune dans l’eau chaude; fi on y ajoute dans cet état un peu d’acide fulfu- rique , elle ceffe de précipiter. L’oxide mer- curiel blanc que le fulfate de mercure très- chargé dépofe Iorfqu’on le verfe dans l’eau froide , efi très-diffoîuble ; on peut le faire dif- paroître en ajoutant de l’acide fulfurique dans le mélange. Le fulfate de mercure peut être décompofé par la magnéfie & la chaux qui le précipitent; en jaune. Les alkalis fixes en féparent un oxidg de mercure à peu près de la même couleur; l’ammoniaque ne précipite que très-peu & très- lentement le fulfate de mercure. Il faut ob- ferver que ces précipités de mercure varient pour la couleur , fuivant l’état de la diffolution & fuivant la fubfiance précipitante; la quantité en elt auffi différente. Ils font très-abondans dans une diffolution chargée; fi l’on décompofé au contraire une diffolution qui n’efi point fa- turée de mercure , chaque fioccon d’oxide qui 5)6 È L È M E N S s’en fcpare par les premières gouttes de la ma- tière précipitante , eil: redifïous à mefure par l’acide excédent ; quand cet excès d’acide elt faturé , le précipité elt permanent. Il paroît , d’après cela, que les alkalis agiffent fur l’acide combiné au mercure plutôt que fur l’acide libre. Ces différens oxides de mercure , précipités par les fubllances alkalines , peuvent fe réduire feuls dans les vailTeaux fermés. Pour les ob- tenir purs , il faut les laver à plufieurs reprifes avec de l’eau dillillée. L’acide nitrique elt décompofé par le mer- cure avec la plus grande rapidité. La diffolu- tion fe fait à froid & avec plus ou moins d’ac- tivité , fuivant l’état de l’acide. L’eau-forte or- dinaire du commerce agit fur le mercure, fans répandre beaucoup de vapeurs rouges. Si l’on y ajoute un peu d’acide nitreux fumant, ou fi on chauffe le mélange , l’action devient très- rapide , il fe dégage une très-grande quantité de gaz nitreux , & le mercure réduit en oxide relie en diffolut:on. La liqueur eft verdâtre , elle perd cette couleur au bout d’un certain tems. L’acide nitrique peut fe charger par ce procédé d’une quantité de mercure égale à fou poids. Bergman a fait obferver dans fa Differ- tation fur Panalyfe des eaux , que les diffolu-; lions mercurielles nitieufes diffèrent les unes des d'H i s t. Nat. et de Chimie. ^7 des autres , fuivant la manière dont elles ont été préparées. Celle qui a été faite a froid & fans dégagement de beaucoup de vapeurs rou- ges, n’eft point décompofable par l’eau diftillée; mais fi on a aidé la diffolution par la chaleur, fi elle a produit une grande quantité de gaz ni- treux , elle précipitera par l’eau , & ne pourra plus être employée avec sûreté dans l’analyfe des eaux, comme nous le dirons en parlant des eaux minérales. Je penfe que ce phéno- mène eft dû à la même caufe dans la diffolu- tion nitreufe , que dans celle par l’acide fulfu- rique. L’acide nitrique peut à l’aide de la cha- leur, fe furcharger d’oxide de mercure , & le tenir , pour ainft dire , en fufpenfîon. Cette forte de dilTolution , avec excès de mercure , fera précipitée par l’eau diftillée , qui change la denfité de la liqueur & diminue l’adhérence de loxide mercuriel à l’acide nitrique. Auiïi le pré- cipité ell-il un vrai oxide, qui eft très- jaune fi l’on verfe la diffolution furchargée dans de l’eau chaude , mais qui n’eft que blanc fi 011 la verfe dans de l’eau froide. On peut lui donner fur-r le-champ de la couleur , en le lavant à l’eau chaude. Comme, au contraire, la diffolution faite à froid , ne contient que du nitrate de mercure fans excès d’oxide, puifqu’elle ne peut fe charger d’oxide furabondant à fa combi- Torne III , G ^8 Élémens naifon qu’à l’aide dé la chaleur , l’eau diffillée n’y occafionne pas de précipité. Je fuis fondé à penfer ainfi , d’après un fait dont je me fuis affuré un grand nombre de fois ; c’elt qu’on peut rendre à volonté la même diffolution mer- curielle , décompofable ou non par l’eau , en ajoutant ou du mercure, ou de l’acide, & la faire paffer plufieurs fois à l’un ou l’autre état. Il fuffit pour cela de diffoudre à froid du mer- cure dans de l’acide nitrique , & de biffer cet acide fe charger d’autant de mercure qu’il elt pof- fible ; cette diffolution n’eft pas décompofable par l’eau , quoiqu’elle ait laide échapper du gaz nitreux. En y ajoutant du mercure, & la Iaif- fant fe charger de tout ce qu’elle en peut dif- foudre à l’aide de la chaleur, elle devient ca- pable de précipiter avec l’eau. On entend très- bien , par la même théorie, pourquoi une dif- folution nitreufe qui ne précipite pas par l’eau, acquiert cette propriété fi on la chauffe ; la cha- leur en dégage en effet du gaz nitreux , 8c ce dégagement ne peut fe faire fans qu’une portion de l’acide foit détruite; dès-lors la proportion de l’oxide mercuriel devient plus forte, relativement à l’acide ; elle n’eff plus combinée, mais adhé- rente au nitrate de mercure , 8c fufpendue de ma- nière que l’eau pourra la précipiter fort aifément. Je me fuis alTuré que les diflolutions mercurielles d’Hist. Nat. et de Chimie. pp ne précipitent par l’eau qu’un oxide excédent, & qu’elles retiennent encore une portion de vrai nitrate de mercure , qu’on peut décom- pofer par les alkalis , comme cela a lieu pour la maffe mercurielle fulfurique leftivée pour la préparation du turb'uh minéral ; on peut même faire criftallifer cette portion de nitrate de mer- / cure. L’excès d’oxide mercuriel , qui rend les diffolutions nitriques fufceptibles d’être décom- pofées par l’eau , eft au(Ti accompagné d’une circonflance qui favorife cette décompofition. C’eft que l’oxide y eft afîez fortement calciné ou oxigéné, pour n’avoir que peu d’adhérence avec l’acide nitrique. La diflolution de mercure dans l’acide ni- trique eft d’une très-grande caufticité ; elle peut ronger & détruire nos organes. Lorfqu’elle tombe fur la peau , elle y forme des taches d’un pourpre foncé , 8c qui paroiffent noires. Ces taches ne fe diftipent que par la fépara- tion de l’épiderme qui tombe en écailles ou en efpèce d’efcarres. On s’en fert comme d’un puiffant efcarrotique en chirurgie , 8c on l’ap- pelle eau mercurielle. La diftolution de mercure dans l’acide ni- trique eft fufceptible de fournir des criftaux qui diffèrent dans leur forme , fuivant l’état de la diftolution , 8c fuivant les circonflances qui ac- Gij 100 É L É M E K S compagnent la criftallifation. En obfervant avec foin ces variétés , j’en ai reconnu quatre efpèces bien diftin&es, que je vais décrire. i°. Une di Ablution faite à froid donne , par une évaporation fpontanée de plufieurs mois, des criftaux tranfparens très-réguliers. M. Rome de Lille les a très-bien définis. Ce font des folides applatis à quatorze faces, formés parla réunion de deux pyramides tétraèdres, coupés très-près de leur bafe , & tronqués aux quatre angles qui réfultent de la jonâion des pyra- mides. 2°. Si on évapore la même dilfolution faite à froid, & qu’on la laide refroidir, il s’y dépofe au bout de vingt-quatre heures des efpèces de prifmes aigus & [triés obliquement fur leur largeur , qui font formés par l’application fuc- ceffive de petites lames pofées en recouvrement les unes fur les autres comme les miles, ce que les botaniftes nomment irnbricadm. En exa- minant de près les élémens de ces prifmes in- formes , j’ai vu que les lames qui les confli- tuent font des folides à quatorze facettes fem- blables aux criftaux qu’on obtient par l’évapo- ration fpontanée, mais plus petits 6c plus irré- guliers. 3°. Si l’on fait une difiolution nitrique , à l’aide d’une chaleur douce 6c ménagée, elle d’Hist. Nat. et de Chimie, roi \ Fournit par le refroidiflement des criftaux en aiguilles plattes très-longues & très-aigues, fhiées fur leur longueur. Ce font ceux que l’on ob- tient le plus fouvent , & qui ont été décrits par le plus grand nombre des chimiftes , fpé- cialement par MM. Macquer , Rouelle , Bau- mé , &c. 40. Enfin , fi l’on chauffe davantage cette diffolution , 8c qu’elle devienne décompofable par l’eau, ordinairement elle fe prend en une maffe blanche & informe, femblable à la maffe fulfurique. Quelquefois j’ai eu dans cette cir- confiance un amas confus de petites aiguilles très-longues , fatinées & flexibles, qui Envoient le mouvement de la liqueur ; elles étoient tout- à-fait femblables aux dendrites brillantes 8c ar- gentées , que j’ai plufieurs fois obfervées fur les parois des bouteilles où J’on conferve de l’a- cétite de potalfe , ou terre foliée de tartre. Il eft eflentiel d’ajouter que cette dernière diflo- lution , qui ne fournit que des criflaux irrégu- liers 8c confus, ou des malfes informes, parce qu’elle contient beaucoup d’oxide de mercure furabondant , peut être rendue fufceptible de criflallifer plus régulièrement en y ajoutant de l’acide. Ces diflérens nitrates de mercure préfentent a peu près les mêmes phénomènes, fis font G «i 102 É L Ê M E N S très-caufliques & rongent la peau comme leurs diflolutions ; ils détonnent lorfqu’on les met fur des charbons ardens. Il faut obferver , à l’égard de cette propriété, qu’elle eft beaucoup plus fenfible dans les criftaux très- réguliers à quatorze faces, que dans ceux qui font en petites ai- guilles , & qu’elle ell nulle dans la maffe blanche précipitée de la diffolution fortement chauffée. La détonnation du nitrate de mercure n’elt que très-peu apparente dans les criftaux nouvelle- ment formés ; il faut , pour bien l’obferver & la rendre très-fenfible , les lailfer égoutter quel- que tems fur du papier brouillard. Si on les met alors fur un charbon bien allumé , ils fe fondent , noirciffent & éteignent l’endroit où fls font pofés j mais leurs bords qui font def- fechés jettent de petits éclairs rougeâtres avec un bruit femblable à une décrépitation légère. Lorfqu’ils font fecs , il s’en échappe une flamme blanchâtre plus vive , qui celle très-vite. Le nitrate de mercure fe fond lorfqu’on le chauffe dans un creufet; il s’en exhale des va- peurs rouges très-épaiffes ; à mefure qu’il perd fon eau & fon gaz nitreux , il prend d’abord une couleur jaune foncée qui paffe à l’orangé, 6c enfin au rouge brillant ; on l’a nommé dans cet état précipité rouge. Nous le défignons par le nom d '‘oxide de mercure rouge par V acide ni - \ d’Hisï. Nat. et de Chimie. 105 trique. Il doit être fait dans des matras & à une douce chaleur , fi on le defiine à être em- ployé comme cauftique en chirurgie , afin qu’il retienne une portion d’acide à laquelle eft due la vertu rongeante. Mais fi on le chauffe for- tement , ce n’eft plus qu’un oxide de mercure formé par ce métal uni a 1 oxigene de 1 acide nitrique. Le nitrate de mercure diflillé dans une cornue , donne un phlegme acidulé & du gaz nitreux dans le premier tems ; il eff alors dans l’état de précipité rouge ; en le chauffant forte- ment , il s’en dégage une grande quantité d air vital mêlé d’un peu de gaz azotique , & le mercure fe fublime fous forme métallique. C efl cette expérience qui , faite avec la plus grande précifion par M. Lavoifier , l’a conduit à dé- montrer la compofition de l’acide nitrique y comme nous l’avons dit en faifant l’hifioire de cet acide. Le nitrate de mercure devient jaunâtre à l’air, & s’y décompofe très-lentement. Il efl allez diffoluble dans l’eau dillillée , plus dans l’eau bouillante que dans l’eau froide, & il criflallile par refroidiffement. Lorfqu’on diffout ce fe! dans l’eau , il y en a une portion qui fe préci- pite fans s’y diffoudre , & qui efl jaunâtre. M. Monnet appelle cette matière turbith ni- treux ; & il obferve qu’on peut en obtenir G iv IO£ É L É M E N S beaucoup en lavant une maffe mercurielle ni- trique évaporée à ficcité , comme celle que l’on fait pour préparer le précipité rouge. Si l’on veut dilToudre entièrement le nitrate de mercure , il faut employer de l’eau diflillée , dans laquelle on doit verfer de l’eau-forte jufqu’à ce que le précipité difparoihe. J’ai obfervé que lorfqu’on verfe de l’eau bouillante fur le nitrate de mer- cure le plus pur , il jaunit fur le champ , & donne un oxide d’une couleur plus foncée , qui , expofé au feu , devient rouge beaucoup plus vite que celui qui eh fait par l’acide ful- furique. L’oxide de mercure jaune par l’acide nitrique , eh en général plus exadement calciné que celui qui eh préparé par l’acide fulfurique ; ce qui vient , comme nous l’avons déjà fait obferver fur d’autres fubhances combuhibles , de ce que l’acide nitrique laihe plus facilement dégager Ton oxigène que l’acide fulfurique. C’eh pour cela que l’acide nitrique eh plus décom- pofable que l’acide fulfurique. La baryte , la magnéfie , la chaux & les alkalis décompofent le nitrate de mercure, & en pré- cipitent le métal dans l’état d’oxide. Ces pré- cipités varient par la couleur , la pefanteur Sa la quantité , fuivant l’état de la diholution. Les alkalis fixes cauhiques forment un précipité jaune, plus ou moins brun ou briqueté, fuivant d’Hist. Nat. et de Chimie. 105* leur caufticité. L’ammoniaque précipite en gris ardoifé la difTolution mercurielle nitrique en bon état, c’eft-à-dire, que l’eau ne peut point décompofer , tandis que le même Tel produit un dépôt blanc dans une diflqjution faturée de mercure que l’eau eft fufceptible de précipiter; ces différences ont été bien obfervées par Berg- man. Ces précipités ne font que des oxides de mercure plus ou moins calcinés. Ils font tous réductibles fans addition & par la chaleur dans des vaifieaüx fermés , & ils donnent de l’air pur dans leur rédudion. Ceux qui ont été précipités par les carbonates alkalins , fournirent une cer- taine quantité d’acide carbonique par l’aétion de la chaleur. Ceux qui fans avoir été préci- pités par des carbonates , ont feulement été expofés au contad de l’air atmofphérique , pré- fentent le même phénomène , parce qu’ils ab- forbent cet acide de l’atmofphère/, propriété commune à tous les oxides de mercure , 8c même à ceux de plufieurs autres métaux. Les oxides de mercure précipités de leurs diffolutions acides par les intermèdes alkalins , préfentent une propriété découverte par M. Bayen , 8c que nous ne devons pas paffer fous filence; c’efl de détonner comme la poudre à canon , Iorfqu’on les expofë dans une cuiller de fer à un feu gradué , apres en avoir trituré 106 É L Ê M E N S un demi-gros avec fix grains de fleurs de foufre ; il refie après la détonnation une pouffière vio- lette fufceptible de fe fublimer en cinabre. L’acide fulfurique & les Tels dans lefquels il entre , peuvent décompofer aufli le nitrate de mercure , parce que cet acide a plus d’affinité avec le mercure que n’en a l’acide nitrique. Si l’on verfe de l’acide fulfurique , ou une diffo- lution des fulfates de poiafTe , de foude , &c. & de tous les fels fulfuriques en général , dans une diffolution mercurielle nitrique , il fe forme un précipité blanchâtre , fi la diffolution ni- trique n’eft pas faturée , & d’autant plus jaune que le nitrate de mercure contient moins d’a- cide & plus d’oxide mercuriel. Ce précipité eft ou du fulfate de mercure , ou de l’oxide jaune. M. Bayen a reconnu qu’il retenoit toujours un peu d’acide nitrique. L’acide muriatique n’a pas d’adion fenfible fur le mercure , quoique cet acide foit celui de tous qui a le plus d’affinité avec l’oxide de ce métal ; mais il en a une très-marquée fur l’oxide mercuriel , & il forme avec lui un fel neutre particulier. Cette combinaifon a lieu toutes les fois que l’acide muriatique fe trouve en contad avec cet oxide très-divifé. Si l’on verfe un peu d’acide muriatique fur une diffolution nitrique de mercure , cet acide s’empare de l’oxide du d’Hist. Nat. et de Chimie. 107 métal, & forme avec lui un fel qui fe précipite en une efpèce de coagulum blanchâtre qu’on nomme précipité blanc. Les fels muriatiques à bafe d’alkalis ou de fubltances falino-terreufes, produifent abfolument le même effet , & ils forment de plus des fels nitriques différens Sui- vant leur bafe. Mais il eft important d’obferver au Sujet de cette précipitation, qu’elle n’a pas lieu fi l’on fe fert d’acide muriatique oxigéné , parce que quoique cet acide enlève l’oxide de mercure à l’acide nitrique , le1 fel qu’il forme avec lui eft très-foluble dans l’eau , tandis que celui qui eft formé par l’acide muriatique ordi- naire ne l’eft pas du tout. Cet acide a auffi plus d’affinité avec l’oxide de mercur-e que n’en a l’acide fulfurique , 8c il occafionne dans les diftolutions de ce métal par ce dernier , le même précipité qu’il forme dans les diftolutions par l’acide nitrique. Le compofé d’acide muriatique &. d’oxide de mer- cure peut être dans deux états , comme nous l’avons dit plus haut , Suivant la nature fimple ou oxigénée de cet acide ; ce dernier conftitue le muriate mercuriel corrofif, & le premier le muriate mercuriel doux. Il y a plufieurs procédés pour préparer le fublimé corrojif ou muriate mercuriel cor- rofif, Le plus Souvent on mêle parties égales ;I08 É L Ê M E N S de nitrate mercuriel defleché , de muriate de fonde décrépité, & de fulfate de fer ou vitriol martial calciné au blanc ; on met ce mélange dans un matras dont les deux tiers de la ca- pacité doivent relier vides ; on plonge ce vaif- feau dans un bain de fable, & on le chauffe par degrés , jufqu’à faire rougir obfcurément fon fond. L’acide fulfurique dégage l’acide mu- riatique de la foude. Ce dernier fépare du mer- cure l’acide nitreux à qui il enlève une partie de fon oxigène , de manière qu’il devient acide muriatique oxigéné ; alors il fe combine avec l’oxide de mercure & forme du muriate mer- curiel corrofif , qui fe fublime fous la forme i de criflaux applatis & pointus , à la partie fu- pépeure du matras. L’acide nitrique fe diflipe en gaz nitreux ; le réfidu efl rougeâtre ou brun; il contient de l’oxide de fer & du fulfate de foude formé par l’union de l’acide fulfurique avec la bafe du fel marin. En Hollande on prépare ce fel en grand , en triturant parties égales de mercure , de muriate de foude & de fulfate de fer , 8c en expofant ce mélange à. un feu violent. Dans cette préparation , l’a- cide fulfurique , dégagé du fulfate de fer par la chaleur, paroît faire paffer’ l’acide muria- tique à l’état oxigéné, puifqu’il n’y a c-,p ce dernier qui puiffe difloudre. I: me es dHist. Nat. et de Chimie. 109 qu’on y emploie. On peut encore obtenir le muriate mercuriel corrofif , en fublimant des mélanges de fulfate de fer , de muriate de fonde , & de précipités mercuriels par les al- kalis fixes , ou de toute efpèce d’oxides de mercure. Boulduc a donné auffi un très-bon procédé pour préparer le muriate mercuriel corrofif ; mais Spielman remarque qu’il avoit été indiqué par Kunckel dans fon Laboratoire chimique. Il confifle à chauffer dans un matras une quantité égale de fulfate de mercure & de muriate de foude décrépité. Le muriate de mercure fe vo- latilife , & le réfidu n’efl. que du fulfate de foude. Ce moyen fournit du muriate mercuriel cor- rofif très-pur , tandis que celui du commerce, & même celui que l’on prépare en petit avec le fulfate de fer , contiennent toujours un peu de ce métal. Il eft en même-tems plus facile 8c plus économique. Nous ferons obferver que cette opération prouve encore que l’acide fulfurique* a la propriété d’oxigéner l’acide mu- riatique. M. Monnet affine avoir également ob- tenu ce fel en traitant à 4a cornue du muriate de foude bien fec , 8c de l’oxide mercuriel pré- cipité de fa diffolution nitreufe par l’alkali fixe. Dans toutes ces préparations du muriate mer- curiel corrofif , on doit avoir foin de ne caffer HO É L É M E N S le vaifieau fublimatoire que lorfqu’il efi entiè- rement refroidi , afin d’éviter les vapeurs de ce fel. Enfin il y a une dernière manière de pré- parer plus promptement du muriate mercuriel corrofif j c’efi de verfer dans une difiolution de nitrate de mercure de l’acide muriatique oxi- géné , & d’évaporer lentement le mélange ; lorfque l’acide nitreux eft dégagé , la liqueur donne par le refroidifiement des criftaux de muriate mercuriel corrofif. Il y a lieu de croire que lorfque l’acide muriatique oxigéné de Schéele fera mieux connu , on préparera le mu- riate mercuriel corrofif dans les pharmacies, ou par le dernier procédé indiqué , ou par la fimple difiolution. Le muriate mercuriel corrofif efl une fitbf- tance faline neutre , qui mérite toute l’attention des ichimifies & des médecins. Il jouit d’un grand nombre de propriétés qu’il efi impor- tant de bien connoître & dont nous allons faire l’hifioire. Ce fel a une faveur très-cauflique. Mis en très-petite quantité fur la langue , il laifie pendant long-tems une impreffion ftiptique 8c métallique très-défagréable. Cette imprefiion fe porte même jufqu’au larynx , quelle refierre fpafmodiquement , 8c elle dure quelquefois long-tems , fur-tout chez les perfonnes fenfibles. L’adion de ce fel efi encore beaucoup plus vive d’Hist. Nat. et de Chimie, iu fur les tuniques de l’eflomac 6c des inteftins. Lorfqu’il y reffe appliqué pendant quelque teins, il les corrode & les fait tomber en ef- carres ; c’eft auffi un des plus violens poifons que l’on connoifTe. Cette caufticité du muriate mercuriel corrofif paroît dépendre de l’état du mercure dans ce fel , comme la très-ingénieu- fement expliqué Macquer. On ne peut l’attribuer à l’acide muriatique , comme quelques Auteurs l’ont penfé , puifque le mercure y eff en quan* tité plus que triple de celle de cet acide. Auflî ce fel verdit-il le firop de violette plutôt que de le rougir, fuivant l’obfervation de Rouelle. D’ailleurs la faveur du muriate mercuriel cor- rofif eft bien au-defiTus de celle de l’acide mu- riatique. En effet , on peut impunément prendre un gros d’acide muriatique étendu d’eau, tandis que quelques grains de muriate mercuriel cor- rofif diffous dans la même quantité d’eau em- poifonneroient immanquablement. Bucquet pen* foit que cette extrême faveur dépendoit de la combimaifon même des deux corps de ce compofé ; 8c il tiroit de-là une des grandes preuves de la loi d’affinité qui établit que les compofés ont des propriétés nouvelles & très- differentes de celles de leurs compofans. Le muriate mercuriel corrofif n’eff pas fen- fiblement altérable par la lumière» La chaleur 1 12 \ / É L É M E NS le volatilife & lui fait éprouver une demi- vi- trification. Si on le chauffe fortement & à l’air F libre , il fe diflîpe en une fumée blanche dont les effets fur Y économie animale font très-aclifs 8c très - dangereux. Chauffé lentement & par degrés , il fe fublime fous une forme criflal- line 8c régulière. Ses criflaux font des prifmes fi comprimés , qu’il eft impoffible de déter- miner le nombre de leurs faces. Ils font ter- minés par des fommets très-aigus ; 8c on les a comparés avec raifon àdes lames de poignard jet- tées pêle-mêle les unes fur les autres. Le feu . n’efl pas capable de décompofer ce fel. Il n’é- prouve aucune altération à l’air. Il fe diffout dans dix-neuf parties d’eau , 8c il criflallife par l’évaporation en prifmes appîatis 8c très-aigus a leurs extrémités, comme ceux que Ton obtient par la fublimation. L’évaporation fpontanée de fa diffolution m’a fourni plufieurs fois, a in fi qu’à Bucquet , des parallélépipèdes obliquan- gles , dont les extrémités étoient tronquées de biais. M. Thouvenel a obtenu des criflaux de ce fel en prifmes hexaèdres un peu com- primés. La baryte , la magnéfie 8c la chaux décom- pofent le muriate mercuriel corrofif, & en pré- cipitent l’oxide de mercure. On prépare Veau phagédénique dont fe fervent les chirurgiens pour d’Hist.-Nat. et de Chimie. 113 pour ronger les chairs , en jettant un demi-gros de ce Tel en poudre dans une livre d’eau de chaux j il Te forme un précipité jaune qui trouble la liqueur, & on l’emploie Tans en Téparer ce dépôr. Les alkalis lixes féparent du muriate mercuriel corrofif un oxide orangé dont la cou- leur Te fonce par le repos. L’ammoniaque précipite ce Tel en blanc ; mais ce précipité prend en peu de tems la couleur de PardoiTe. Les acides & les Tels neutres alkalins n’al- tèrent en aucune manière le muriate mercuriel corrofif. t Ce Tel contracte une union intime avec le muriate ammoniacal & Tans aucune décompo- fition. Il forme, Toit par la fublimation, Toit par la criftallifation , un compoTé Talin très- fingulier , dont les alchimiftes font beaucoup de cas , & qu’ils ont nommé Tel alembroth , Tel de Van , Tel de fugejje, cuivre pour faire le métal des cloches & des flatues. Les potiers d’étain l’uniflent au bifmuth, à l’antimoine , au plomb & au cuivre , pour faire des uftenfiles'de toutes efpèces , qui font , très-altérables à- l’air. La potée d’étain fert à polir beaucoup de corps durs. On la fond avec de l’oxide de plomb & du fable pour faire l’é- mail , ainfî que la couverte de la faïence, &c. Le muriate d’étain criÜallifé e(t utile dans le travail des toiles peintes : fa diffolution dans l’eau régale ou acide nitro- muriatique , exalte la teinture de cochenille, de gomme lacque, &c, de forte qu’elle la fait paffer à la couleur du feu le plus vif. Les teinturiers fe fervent de cette di(folution , qu’ils nomment compofition 0 pour faire l’écarlate. Lorfqu’on la mêle au bain de ces teintures , elle y forme un précipité qui: / i6S Élêmens entraîne la partie colorante , 5c la dépofe fur l’étoffe que l’on teint. Cette obfervation efl due à Macquer , dont les travaux ont rendu de grands fervices à cet art. O L’ufage de l’étain dans la cuifine a été regardé comme très-dangereux par quelques chimifles. Navier rapporte dans fon Ouvrage fur les contre- poifons , 5cc. que des ragoûts dans lefquels on avoit laiffé des cuillers d’étain , ainfi que du fucre contenu dans un vaiffeau de ce métal , ont em- poifonné plufieurs perfonnes : on a attribué pref- qtie généralement ces funefles effets à l’arfenic que Geoffroy avoit annoncé en 1738 dans l’é- tain , 8c que Margraf avoit cru trouver dans les étains les plus purs , 8c même à une dofe confîdérable. Mais les craintes élevées fur cet objet ont été diffipées par les travaux de MM. Bayen 8c Charlard que nous avons déjà eu occafîon de citer dans l’hifloire de ce métal. Ces chimifles ont prouvé par les expériences les plus déci- fives , i°. que la quantité d’arfenic retiré par Margraf, de l’étain de Morlaix, 5c qui va à près de trente-fix grains par demi-once , feroit beau- coup plus que fuffifante pour ôter à ce métal la molleffe 5c la flexibilité qu’on lui connoît , & pour le rendre auffi fragile que le zinc; 20. que les étains de Banca 5c de Malaca ne contien- d’H i st. Nat. et de Chimie, i 69 nent pas un atome de ce dangereux demi-mé- tal ; 30. que l’étain d’Angleterre en gros fau- mons , donne par l’adion de l’acide muriatique une petite quantité de poudre noirâtre , fouvent mêlée de cuivre & d’arfenic , dans laquelle ce dernier ne va jamais au-delà de trois quarts de grain par once d’étain , & fe trouve fouvent au-delTous • 40. que le mélange fait par les po- tiers d’étain du gros faumon anglois avec les étains purs de Malaca ou de Banca , diminue encore cette dofe ; y°. que l’arfenic uni à l’é- tain , perd une partie de fes propriétés & de fon adion corrofive ; 6°. enfin , que la petite quantité d’étain allié qui peut entrer dans les alimens par Tufage journalier de la vaiffelle faite avec ce métal, ne peut influer fur l’éco- nomie animale ; puifque d’après le calcul fait fur ce qu’un plat d’étain avoit perdu pendant deux ans , on n’en avale tout au plus que trois grains par mois , & conféquemment la cinq mille fept cent foixantième partie d’un grain d’arfenic par jour , en fuppofant encore que l’étain ouvragé de Paris contînt autant de ce demi - métal vénéneux , que l’afliette de Lon- dres mife en expérience par M. Bayen , en contenoit. Obfervons que fi les chimifles de Paris ne font pas du tout d’accord avec Margraf, cela 170 É L É M E N S vient peut-être de la différence qu’il y a entre l’étain de Saxe y fur lequel ce dernier a fait fes expériences , & l’étain que l’on emploie en France , & qui vient des Indes & de l’Angle- terre. Au relie , -plufieurs médecins qui fe font oc- cupés des fubflances métalliques , confrdérées comme médicamens , avoient déjà "reconnu l’in- nocuité de ce métal , 8c Pavoient même con- feillé en limaille dans les maladies du foie, de la matrice , & dans les affeélions vermineufes. Schulz , dans fa Differtation fur l’ufage des vaif- feaux de métal dans la préparation des alimens 8c des médicamens , a regardé l’étain bien pur comme très-falubre. La Poterie a fait entrer l’oxide d’étain dans un médicament, qu’il a dé- figné fous le nom A! anti-hectique , 8c qui n’efl: qu’une leftïve des oxides d’antimoine & d’étain, formés par la détonation du nitre. L’alkali que l’eau diffout, retient toujours une portion d’o- xide métallique. On a recommandé l’ufage de l’étain comme vermifuge. On l’a employé en grandes dofes 8c fans fuccès à Edimbourg. Quelques gens de la campagne font dans l’ufage de laitier infnfer à froid pendant vingt-quatre heures du vin fucré dans un vaiffeau d’étain , 8c de donner un verre de cette liqueur à leurs enfans qui ont des vers. I d’Hist. Nat. et de Chimie. 171 Navier a vu une fille de quinze à feize ans rendre ainfi , par les Telles , trente vers llrongles , avec des déjedions abondantes , quelques heu- res apres avoir pris un pareil breuvage.' Ce médicament agit donc comme purgatif violent. CHAPITRE XVII. Du Plomb. Le plomb efi un métal imparfait , d’un blanc fombre qui tire un peu fur le bleu. Les alchi- mifies lui ont donné le nom de Saturne , parce qu’il abforbe & dévore, pour ainfi dire, tous les métaux imparfaits dans fa fcorilication , comme on le verra par la fuite. Il elt le moins dudile, le moins élaflique & le moins fonore de tous les métaux. On peut le réduire en la- mes minces fous le marteau ; il ne s’écrouit que peu. Aucune matière métallique n’a moins de ténacité que lui , un fil de plomb d’un dixième de pouce de diamètre , ne foutient qu’un poids ' de vingt-neuf livres un quart fâns fe rompre. Il efl la troifième des fubitances métalliques dans l’ordre de la pefanteur. Un pied cube de plomb pèfe 828 livres -} il perd dans l’eau entre un Ï72 Ê L È M E N S onzième & un douzième de fon poids ; il eft très-mou, & on le coupe très-facilement avec Je couteau ; il a une odeur particulière très- marquée Sc qui devient bien plus fenfible par le frottement , fa faveur eft peu énergique fur le palais, mais elle fe manifefte dans l’eftomac Sc les inteflins , en irritant leurs nerfs & en pro- duifant d’abord des douleurs, des convulfious, enfuite la flupeur Sc la paralyfîe. Il eft fufcep- tible de prendre une forme régulière. M. l’abbé Mongèz l’a obtenu en pyramides qtiadrangu- laires couchées fur le côté , de façon que des quatre faces il y en a toujours une très-étendue Sc dont la bafe va en s’élargiffant. Chaque pyramide eft compofée , pour ainfi dire , de couches ou zones d’autres petites pyramides couronnées ordinairement par une feule aigue. Le plomb fe trouve rarement natif. Wallé- rius Sc Linné l’admettent dans cet état. Son exiftence eft niée par MM. Cronftedt , Jufli , Monnet , &c. Le plus ordinairement il eft dans l’état terreux , falin , ou dans celui de mine unie au foufre Sc formant la galène. Les minières de plomb font communément à d’aiïez grandes profondeurs dans la terre ; elles font fituées dans les montagnes ou dans les plaines. Les naturaliftes ont diflingué un grand nombre d’efpèces de mines de plomb. Les plus i d’Hist. Nat. et de Chimie. 173 eflentielles à connoître font les fuivantes. i°. L’oxide de plomb natif. Il ne faut pas confondre avec cette mine les plombs J'pathi- ques , qui contiennent de l’acide carbonique. L’oxide ne fait pas effervefcence avec l’acide nitrique. Il eü ordinairement ou en malles blan- ches , grifes , pefantes , folides , ou mêlé avec de l’argile, du fable & de la craie* la couleur de l’argile plus ou moins ferrugineufe conftitue le mafficot 8c le minium natifs , ou les oxides jaune & rouge. O11 rencontre fouvent la cérufe du plomb native à la furface des galènes. 20. Le carbonate de plomb , ou la combi- naifon d’oxide de plomb 8c d’acide carbonique. Cette mine varie beaucoup pour la couleur ; elle efl blanche , noire , brune , jaune ou verte, fuivant l’état du fer qui l’altcre. On la nomme en général plomb fpathique , parce qu’elle a le tiffu & la criilallifation de certains fpaths. Elle fait effervefcence avec l’acide* nitrique , qui en dégage l’acide carbonique. On diflingue les va- riétés fuivantes dans cette forte. V ariétés. A. Le plomb fpathique blanc. C’efl du carbonate de plomb dépofé lentement par les eaux 8c. criüallifé. Ce plomb a quelquefois une demi- tranfparence , comme le fpath. Ses criftaux m Variétés. É L É M E N S font ordinairement en prifmes hexaè'dres tronqués, ou en colonnes cylindriques firiées & qui paroiffent compofées d’un grand nom- bre de filets , ou en petites aiguilles très- fines. On en trouve qui eft d’un blanc bril" lant comme 1 Qgyps foyeux. D’autres*échan- tillons font d’un blanc jaunâtre. Quelques- ’ uns de fes prifmes font fouvent fifiuleux. Le plomb blanc fpathique efi très-abondant en Baffe-Bretagne dans les mines d’Huelgoet 8c de Poullaouen. M. Sage avoit annoncé que le plomb blanc étoit minéralifé par l’acide muriatique. M. Laborie a affuré que ce n’étoit qu’un pur oxide de plomb uni à l’air fixe ou acide carbonique , & criflallifé par l’eau. L’académie des fciences de Paris ayant fait répéter les expériences de ces deux chimif- tes , a adopté l’opinion de M. Laborie , & Macquer l’a confignée dans fon Diélionnaire, à l’article Mines de plomb. Le plomb fpa- thique fe trouve toujours dans les mêmes endroits que la galène , 8c il çaroît que ce n’efi qu’une décompolition de cette mine , qui a perdu fon foufre & dont le plomb a été oxidé ; car il n’efi pas rare de trouver des galènes qui commencent à paffer à l’état \ d’Hist. Nat. et de Chimie. 175 Variétés. de plomb blanc , comme M. Rome de Lille l’a très-bien obfervé. B. Quelques naturalises ont admis une mine de plomb noire ; c’efl du plomb blanc altéré par une vapeur fulfureufe , & qui repalfe à l’état métallique; il peut être regardé comme une efpèce moyenne entre le plomb blanc & la galène. Il efl criflallifé ou en malles irrégulières. C. Le plomb fpathique vert. Ce minéral efl d’un vert plus ou moins tranfparent , le plus Souvent jaunâtre, toujours mêlé d’ochre Sc de fer limoneux. Il efl quelquefois fans au- cune forme régulière , & repréfente une ef- pèce de moulTe. Tels font la plupart des échantillons des mines d’Hoffsgrund , près de Fribourg en Brifgaw. Le plomb vert efl or- dinairement criflallifé en prifmes hexaèdres tronqués , ou terminés par des pyramides hexaèdres entières ou coupées près de leur bafe. On en trouve beaucoup à Sainte-.Marie- aux-Mines , à Tfchoppau en Saxe. Il efl démontré que c’efl au mélange du fer que ce plomb doit fa couleur verre, puisqu’il fe rencontre toujours dans des mines de ce métal/ É L É M E N S 17 6 Variétés. D. Plomb fpathique rougeâtre , de la couleur de la fleur de pêcher. M. Mongèz a trouvé cette variété criflallifée comme le plomb fpathique blanc dans les mines d’PIuelgoet. E. Plomb fpathique jaune. Cette variété, crif- tallifée en lames hexaèdres tranfparentes , n’efl connue que depuis quelques années ; les lames ont depuis une demi-ligne jufqu’à quatre à cinq lignes de diamètre ; elles reflem- blent à du verre de plomb. 3°. M. Monnet a découvert dans les mines du plomb combiné avec l’acide fulfurique. Il efl ordinairement en mafle blanche , foluble dans dix- huit parties d’eau ; quelquefois il efl noirâtre , criflallifé en flries fort allongées , ou en flaladites friables ; cette dernière variété s’effleurit à l’air & fe change en un véritable fulfate de plomb. C’efl en raifon de cette ef- florefcence que M. Monnet l’appelle mine de plomb pyriteufe. M. Withering dit qu’il exifle dans Tifle d’Anglefey une grande quantité de plomb & de fer minéralifés enfemble par l’a- cide fulfurique. 40. Le plomb paroît être combiné avec Ta- çide arfenique dans la mine de plomb rouge de Sibérie 3 d’Hist. Nat. et de Chimie. 177 Sibérie, dont M. Lehman a le premier donné la defcription en 17 66 ; cette mine eft d’un très-beau rouge , & fa pouiïière refTemble au carmin. Elle eft fouvent criftallifée en prifmes tétraèdres rhomboïdaux , courts & tronqués obliquement. M. Mongèz , qui penfe que Par- fenic eft à l’état d’acide dans toutes les mines rouges , a découvert une autre mine d’un jaune verdâtre , venant de Sibérie 8c contenant de l’arfenic comme la précédente. 50. M. Gahn a reconnu l’exiftence de l’acide phofphorique dans une mine de plomb ver- dâtre ; il y en a auiïi de jaune 8c de rougeâtre, 8c en la diiïolvant dans l’acide nitrique, 8c pré- cipitant l’oxide de plomb par l’acide fulfurique, on obtient l’acide phofphorique par l’évapora- tion de la liqueur furnageante. MM. la Méthe- rie 8c Tenant ont confirmé à Paris l’analyfe de Gahn. M. de Laumont a donné un Mémoire fur le phofphate de plomb natif, qui eft très- abondant en Bretagne. 6°. Le plomb fe trouve le plus fouvent com- biné avec le foufre ; cette mine porte Je nom de gal'ëne ; on l’appelle auiïi alquifoux dans le commerce -, ce fuifure de plomb eft compofé en général de lames qui ont à peu près la couleur 8c l’afpeét du plomb , mais il eft plus brillant 8c très - fragile. On a diftingué un grand nom-. Tome. 111, M 178 / É I é M E N S bre de variétés dans la galène : lavoir ; Variétés. A. La galène cubique. Ses cubes plus ou moins gros , fe trouvent ifolés ou grouppés. Ou en rencontre fouvent dont les angles font tron- qués; elle eft commune à Freyberg. B. La galène maiïive. C’eft celle qui eft en malle fans aucune configuration régulière ; cette efpèce eft très-fréqitente à Sainte-Marie. C. La galène à grandes facettes. Elle ne paroît pas former des criftaux réguliers , mais elle eft toute compofée de grandes lames. D. La galène à petites facettes. Cette galène paroît formée, comme le mica, de petites écailles blanches & fort brillantes. On la nomme mine d’argent blanche , parce qu’elle tient une aftez grande quantité de ce métal. Telle eft celle des mines de Pompéan en Bretagne. E. La galène à petits grains , ainfi nommée parce qu’elle ne préfente qu’un grain très- ferré ; elle eft auflî fort riche en argent, & fe trouve avec la précédente. En général , toutes Tes galènes tiennent de l’argent. On ne connoît guère que celle de Carinthie qui n’en contienne pas. Mais on a obfervé que la galène dont les facettes ou les grains étoient d’Hist. Nat. et de Chimie. 179 Variétés. les plus petits , en donnoient davantage. Il paroît que l’argent étant en quelque forte un corps étranger à la combinaifon de la galène, dérange la criflallifatiou régulière de cette mine. F. La galène cridallifée comme le plomb fpa- thique, en prifmes hexagones ou en colon- nes cylindriques. On la trouve , comme la précédente , dans les mines d’Huelgoet en Bade-Bretagne. Elle ed peu riche en argent, & paroît n’être que du plomb fpathique qui s’ed minéralifé fans avoir rien perdu de fa forme. En effet , on obferve quelquefois fur le même morceau des cridaux de plomb fpathique pur, entièrement recouverts d’une galène très-dne ; d’autres qui font abfolu- ment changés en galène jufque dans l’inté- rieur de Leurs prifmes. M. Romé de Lille en pofsède plufîeurs de cette efpèce. J’ai dans mon cabinet un échantillon de mine de plomb blanche , dont la bafe des prifmes ed abfo- lument à l’état de galène , & qui montre le changement dont je parle. La galène fe trouve fouvent placée entre deux libères de quartz noirâtre ochracc , qui contient beaucoup d’argent, quoique ce métal M ij 180 Élémens n’y Toit point apparent. M. le commandeur de Dolomieu , à qui eft due cette obfervation , préfume que le plomb étoit d’abord mêlé avec cet argent , mais que l’eau ayant entraîné ce métal imparfait , a laifte le métal fin dans la gangue. M. Monnet a découvert que plufieurs galènes s’effleurifTent comme la pyrite ; il dit avoir retiré du lavage d’une de ces mines dont la furface s’étoit blanchie 8c comme effleurie, un vrai fulfate de plomb. 70. Le plomb eft quelquefois uni dans la nature avec le foufre , l’antimoine 8c l’argent. Cette mine , qu’on appelle galène antimonïée , eft d’une ftruéture aiguillée 8c ftriée comme l’an- timoine ; on y reconnoît le demi- métal par le fublimé blanc qui s’en élève pendant la calcir nation. On en trouve à Salberg 8c à Sainte- Marie-aux-Mines. 8°. Il y a une autre forte de galène dans laquelle le plomb eft uni au foufre , à l’argent 8c au fer. Cette galène martiale eft plus dure 8c plus folide que les précédentes ; elle donne du plomb jaune dans fa fcorification. p°. Enfin , on rencontre fouvent le plomb en oxide , 8c la galène mêlés dtwis des terres 8c pierres fablonneufes ou calcaires. Comme prefque toutes les mines de plomb 8c fur-tout les galènes , contiennent une aftèz d’Hist. Nat. et de Chimie. i8r grande quantité d’argent , il eft important d’en faire l’eflai avec foin. A cet effet , après avoir pilé & lavé une certaine quantité de mine lotie , on la grille avec foin dans un têt couvert , de peur qu’elle ne fautille. La galène perd peu par le grillage. On la pèfe après qu’elle a fubi cette opération , & on la fond avec trois fois fon poids de flux noir & un peu de fel marin dé- crépité. L’alkali fixe du flux noir abforbe le foufre uni au plomb ; le charbon du tartre qui fait partie du même flux , fert à réduire la por- tion du métal qui eft à l’état d’oxide, & le fei marin s’oppofe à l’évaporation d’une partie de la matière contenue dans le creufet. Après la fonte , on trouve un culot de plomb qu’on pèfe avec foin. Enfuite on fait calciner & vi- trifier ce plomb fur une coupelle , pour féparer l’argent qu’il contient. Cet effai a l’inconvénient de n’êtrc pas très - fidèle , parce que l’alkali qu’on emploie comme fondant , forme avec le foufre de la galène , un fulfure ou foie de fou- fre qui diiïout une portion du plomb. D’ailleurs t on ne peut pas fe fervir dans les travaux en grand d’une matière fondante & réduâive auflî chère que le flux noir. Il convient donc de chercher à fondre la mine à travers les char- bons dans un fourneau de réverbère , ou feule, ou en y ajoutant , pour abforber le foufre » Müj 1 82 É L É M E N î quelques matières à vil prix , comme un peu de fer 8c de fiel de verre. Bergman propofe de faire l’eiïai des mine* de plomb par l’acide nitrique. Cet acide diffout le plomb 8c oxide le fer, il ne touche point au foufre. On précipite la diffolution par le carbonate de fonde, & 132 grains de précipité repréfentent 100 grains de plomb dans fon état métallique. Si ces mines contiennent de l’ar- gent , on fépare l’oxide de ce métal par l’am- moniaque qui le diffout. A Pompéan , pour exploiter la mine de plomb tenant argent , on la pile au bocard , on la lave av^c beaucoup de foin fur des tables, 8c on la porte au fourneau à manche , où on la grille d’abord à l’aide d’une douce chaleur ; on la fond enfuite en augmentant le feu. Le plomb fondu eft retiré du fourneau par un trou qui répond à un des côtés de fon aire , 8c qu’on a eu foin de boucher avee de la terre glaife. Le plomb fe moule en faumons , 8c fe nomme plomb d’oeuvre. Il contient de l’argent. Pour en féparer ce métal , on porte le plomb d’œu- vre dans un autre fourneau à manche , dont l’aire eft couverte de cendres bien Ieffivées , tamifées 8c battues. A un des côtés de l’aire de ce fourneau , font placés deux gros foufflets vis à-vis defquels font deux rigoles qu’on nomme d’Hist. Nat. et de Chimie. 185 voies de la litharge. Lorfque le fourneau s’é- chauffe , le plomb s’oxide ; une partie s’éva- pore & fe fublime dans de petites cheminées qui font au-deffus des voies de la litharge ; une autre portion de ce métal eft abforbée par le plancher du fourneau ; une troifième portion & c’efl la plus confidérable , s’oxide & même fe vitrifie en partie ; on lui donne le nom de litharge. Elle eft chaffée hors du fourneau , à l’aide des foufflets , qui facilitent aufîi l’oxida- tion & la vitrification du plomb par la quantité d’air qu’ils verfent fur ce métal en fufion. Lorf- que la litharge a été calcinée par un feu modé- ré , elle eff en poudre rouge écailleufe ; on la nomme litharge marchande , parce qu’on la vend en cet état , ou litharge d'or , à caufe de fa cou- leur. Si la litharge a éprouvé plus de chaleur, elle eft plus avancée vers la vitrification , 8c d’une couleur pâle ; on la nomme alors litharge d'argent. Enfin , quand le fourneau chauffe for- tement , la litharge fond plus complettement , & coule fous la forme de ftaladites irréguliè- res ; c’efl ce qu’on nomme litharge fraîche» Lorfque l’opération eft achevée , il refte dans le fourneau l’argent qui étoit contenu dans le plomb. Cet argent a befcin d’être raffiné , mais en plus petites maffes , pour qu’il puiffe fe dé - pouiller du plomb qu’il retient entre fes parties» Miy 184 Élémens Le plomb qui a été oxidé par l’affinage , eff enfuite fondu à travers les charbons , & il ne contient plus que quelques atomes d’argent. On le coule en faumons , & on l’envoie dans le commerce. Le plomb fpathique fe fond en- tre les charbons , de même que les oxides de Le plomb expofé au feu , fe fond bien avant d’être rouge. 11 ne lui faut même pour être tenu- en fufion, qu’une chaleur fi légère, qu’on peut y plonger la main Jorfqn’il vient de fe fondre , fans éprouver de douleur ; dans cet état , il ne peut pas brûler les fubflances végé- tales. Il n’eft que très-peu volatil ; cependant il l’eff à un degré de feu très-fort , 8c. il fume & fe réduit en vapeurs , comme les métaux les plus fixes. Si lorfqu’il a été fondu , on le laifle refroidir très-lentement ; 8c fi l’on décante la portion fondue de celle qui eff devenue folide , on le trouve criflallifé en pyramides quadran- gulaires , que nous avons déjà décrites. Le plomb fondu avec le contaél de l’air , fe couvre d’une pellicule grife 8c tèrne. On enlève cette pellicule avec foin , 8c on la ré- duit par l’agitation en un oxide d’un gris ver- dâtre , tirant un peu fur le jaune. Cet oxide féparé par le tamis des grenailles de plomb qui fe trouvent mêlées avec lui , 8c expofé enfuite d’HïsT. Nat. et de Chimie. i8y à un feu plus violent , & capable de le faire rougir, devient d’un jaune foncé ; dans cet état, on le nomme mafficot. Ce dernier, chauffé len- tement à un feu doux , prend une belle couleur rouge , & porte le nom de minium. Si on chauffe le mafficot trop fortement , il fe fond en verre fans donner de minium. Le plomb dans fon oxidation augmente de poids à peu près de dix livres par quintal. C’efl cette augmentation de poids du plomb oxidé, auffi-bien que. la néceffité de l’air pour cette opération , qui a fait foupçonner à Jean Rey, médecin du Périgord , que l’air fe fixoit dans ce métal pendant fa calcination. M. Prieflley a confirmé l’opinion de Jean Rey , en retirant de l’air vital du minium. L’oxide de plomb , quoique très-coloré , efl fufceptible de perdre entièrement cette^ couleur ; fi l’on chauffe un peu trop le minium , il pâlit ; fi on le pouffe feul au feu , il fe fond en un verre tranfpa- rent , fi fufible qu’il pénètre tous les creufets , 8c s’échappe fans qu’on puiffe le retenir. Mais en ajoutant une partie de fable à trois parties d’oxide de plomb , le fable fe fond à l’aide de cet oxide en un beau verre de la couleur du fuccin. La teinte de ce verre efl moins forte, & imite la couleur de la topaze , lorfqu’on fond enfemble deux parties d’oxide de plomb , 8c i8 6 É L É M E N S une partie de fable ou de caillou pulvérifé. Une plus petite quantité d’oxide de plomb ajoutée au verre commun , n’altère point fa tianfpa- rence, mais il lui donne plus de pefanteur, & fur-tout une forte d’ondnofité qui le rend fuf- ceptible d’être taillé 8c poli plus aifément fans fe brifer. Ce verre eft très-propre à faire des lunettes achromatiques, mais il eft fort fujet à avoir des ltries 8c un afped gélatineux. Les anglois le nomment jlinL-glaJJ. Nos marchands ont beaucoup de peine à en trouver des mor- ceaux un peu confîdérables exempts de ces fines dans celui qu’ils font venir d’Angleterre. Il paroît que cet inconvénient qui eft n és- grand, dépend, comme le croit Macquer, de ce que les principes de ce verre ne font pas combinés uniformément. Il faudroit pour cela qu’il fut tenu long-tems en fufion ; mais comme alors le plomb fe diftipe , le flint-glalT perd une par- tie de fa denftté 8c de cette onduofité qui en font le mérite. Quoique tous les phénomènes de l’oxidation 8c de la vitrification du plomb annoncent que ce métal s’unit avec beaucoup de facilité 8c de promptitude à la bafe de l’air pur ou à l’oxi- gène , il eft cependant une des matières métal- liques qui a le moins d’adhérence avec ce prin- cipe , puifqu’il s’en fépare par la feule adion d’Hist. Nat. et de Chimie. 187 du feu , comme l’a démontré M. Prieflley. Si l’on chauffe fortement du minium dans une cornue , on en tire de l’air vital , & on obferve qu’une portion fe réduit en plomb. Tous les oxides & même les verres de plomb , font très- décompofables par les matières combullibles ; il luffit de les mêler avec du charbon, du fuif, de la graiffe , de l’huile , de là réfine , ou enfin une fubflance inflammable végétale ou animale quelconque , & de les chauffer quelque tems pour obtenir un culot de plomb. Ce métal a donc avec l’oxigène moins d’affinité que beau- coup d’autres fubflances métalliques ; & quoi- qu’il ait quelques propriétés femblables^ à celles de l’érain , il fe comporte d’une manière abfo- lument inverfe dans fon oxidation & dans fa rédudion. Ces phénomènes prouvent de plus en plus ce que nous avons avancé comme une des loix de l’affinité de compofition ; favoir, qu’il ne faut pas juger du degré d’affinité que deux corps ont enfemble par la facilité avec laquelle ils fe combinent, mais bien plutôt par la difficulté qu’on éprouve à les défunir. Tous les oxides de plomb & fur-tout le mi- nium , ont la propriété de fe charger d’une certaine quantité d’acide carbonique , lorfqu’on les laiffe expofés à l’air. Si donc on veut avoir un oxide de plomb pur , il faut le défendre du 1 l88 É L É M E N S conta# de l’air , ou le chauffer légèrement avant de l’employer , pour en féparer l’acide carbo- nique qu’il peut avoir abforbé. Le plomb expofé à l’air , fe ternit d’autant plus facilement que l’air eft plus humide. Il contrade une rouille blanche que l’eau em- porte peu à peu ; cette pouffière blanche dont il fe couvre , n’eft pas un oxide de plomb pur , mais il eff combiné avec l’acide carbonique contenu dans l’atmofphèrei L’argent qu’on re- tire des vieux plombs qui ont relié expofés à l’air pendant un tems très-long , vient de ce que le plomb qui n’a pas été affiné dans le tems où on l’a employé , s’eff en partie oxidé par î’adion de l’air atmofphérique ; de forte que l’argent qui r£en a point été féparé , efl relié fans altération , & a augmenté peu à peu en railon de la quantité du métal imparfait qui a été détruit par le tems. Le plomb n’ell point altéré par l’eau pure , dont les principes ne font point féparés par ce métal. Cependant les parois des canaux de plomb dellinés à porter les eaux , font cou- verts d’une croûte blanchâtre , ou d’une efpèce de cérufe qui n’ell due fans doute qu’à l’adioîl des differentes matières contenues dans l’eau fur cette fubltance métallique. M. Luzuriaga a obfervé qu’en agitant du plomb en grenailles d’Hist. Nat. et de Chimië. 189 dans un peu d’eau avec le contaâ de l’air , le métal ell promptement oxide. Le plomb ne s’unit aux matières terreufes que dans Ton état d’oxide- il en accélère la vitrification. On ne connoît pas l’adion des fubfiances falino-terreufes , & des alkalis caufiiques fur le plomb ni fur les oxides. Ce métal efl difioluble dans tous les acides. L’acide fulfurique concentré ne l’attaque qu’au- tant qu’il efi bouillant , 8c que le plomb ell en lames minces. Il pafie du gaz acide ful- fureux. Lorfque l’acide efi en grande partie décompofé , le mélange efi blanc 8< fec ; en le lavant avec de l’eau difiillée , on le fépare en deux portions. La plus confidérable efi in-* difioluble dans l’eau ; c’eft un oxide de plomb formé par l’oxigène , que ce métal a enlevé à l’acide fulfurique , dont il a dégagé en même- tems beaucoup de gaz fulfureux ; cet oxide peut fe fondre ou fe réduire comme celui qui a été fait par l’aétion combinée du feu & de l’air. La portion que Team a difioute , efi une * combinaifon d’acide fulfurique 8c d’oxide de plomb ; en évaporant cette diflolution , elle donne de petites aiguilles de fulfate de plomb. M. Baumé 8c Bucquet n’ont défigné ce fel que fous celte forme. M. Monnet l’a quelquefçis É L É M E N S obtenu en colonnes prifmatiques & courtes. M. Sage fe rapproche de ce chimifte , puif- qu’il dit que le fulfate de plomb fournit des criftaux en prifmes tétraèdres. Ce fel eft très- cauftique , il faut au moins 18 parties d’eau pour le diffoudre ; il eft décompofé par le feu , la chaux 8c les alkalis. L’acide nitrique paroît agir très- fortement fur le plomb. Lorfque cet acide eft bien con- centré 8c peu abondant , le plomb eft promp- tement réduit en un oxide blanc , à l’aide de l’oxigène qui fe fépare de l’acide nitrique , en même-tems que le gaz nitreux s’en dégage. Mais fi l’acide eft plus foible 8c plus abon- dant, il s’en décompofé moins, 8c il en refle affez pour diftoudre l’oxide de plomb. Il fe précipite pendant cette diftolution une pou- dre grife, que Grofîe avoit regardée comme du mercure. Mais M. Baumé aflure que cette matière n’eft qu’une portion d’oxide de plomb ; 8c j’ai plufieurs fois eflayé en vain d’en ob- tenir du mercure par la fubliniation , & en. pouffant cette poudre à un feu capable :ide ; mais il eft difficile de le faturer complètement. Cette diffolution eft toujours avec excès d’acide ; elle peut cependant fournir par une forte évaporation , des criftaux en ai- guilles fines & brillantes , comme l’a obfervé M. Monnet. Le muriate de plomb n’eff que peu déliquefcent. La chaux & les alkalis le décompofent comme les fels précédens. On combine plus promptement & plus intimement ce métal avec l’acide muriatique , en verfant cet acide libre ou uni à une bafe alkaline ou teneufe dans une diffolution de nitrate de plomb 5 il s’y forme fur-le-champ un précipité blanc, beaucoup plus abondant que celui qui eft produit par l’acide fulfurique , & femblable à un coagulum. C’eft la combinaifon de l’oxide de plomb avec l’acide muriatique , qui a féparé l’oxide de ce métal de l’acide nitrique. Ce fel fe dépofe parce qu’il eft beaucoup moins dif- foluble dans l’eau que le nitrate de plopib. £i on 1 expofe au feu , il s’en dégage des vapeurs dont la faveur eft fucrée, & il fe fond en une mafte brune nommée plomb corné , parce qu’il a quelque refîemblance avec l’argent qui porte le même nom. On le diffout bien dans trente fois fon poids d’eau bouillante. La diffolution de ce fel évaporée, fe criftallife en petites ai- guilles fines & brillantes , qui forment des faif- ceaux, d’H i s t. Nat. et de C pi i m i e. 193 ceaux , ou qui s’unifient par une de leurs extré- mités fous un angle obtus. M. Sage dit que cette diflblution fournit par l’évaporation infen- fible , des criflaux en prifmes hexaèdres llriés. La diflblution de plomb corné efl décompofa- b!e par l’acide fulfurique , qui y occafionne un précipité blanc , comme dans la diflblution ni- trique. Cette découverte due à Groffe , a été confirmée par M. Baumé, & par tous les chi- milles qui ont répété l’expérience. Elle rend faufle la huitième colonne de la table des affi- nités de Geoffroy , qui préfente le plomb com- me ayant plus d’affinité avec l’acide muriatique, qu’avec les autres acides minéraux. Toutes les diffolutions de plomb font pré-' cipitées en noir ou en brun par les fulfures terreux ou alkalins , 8c il fe forme alors une forte de galène par le tranfport du foufre fur l’oxide de plomb ; ce qui femble indiquer que le plomb efl en état d’oxide dans cette mine. Dans ces expériences , il y a double décompo- fition fans attradion éleclive double , parce que la bafe alkaline du fulfure décompoferoit feule le fulfate , le nitrate de le muriate de plomb. Tous les oxides de plomb fe diffolvent dans les acides autfi facilement que le plomb même, & fouvent plus facilement que ce métal. Le minium perd fa couleur dans ces diffolutions. Tome III. N Ip4 E L Ê M E N S Le plomb n’agit point fur les fels neutres ful- furiques , & ne décompofe point par la cha- leur le fulfate de potaffe , comme le font l’é- tain , le zinc & l’antimoine. Le plomb ne produit pas de détonation fen- fible avec Je nitre. En projettant ce fel neutre en poudre fur ce métal fondu & un peu rouge , il ne s’excite que très-peu de mouvement & point de flamme apparente. Cependant le plomb efl oxidé & vitrifié par l’alkali du nitre , 8c on le retrouve en petits feuillets jaunâtres , fem- blables à la litharge. Le plomb décompofe très-bien le muriate ammoniacal à l’aide de la chaleur. Cette pro- priété lui efl commune avec beaucoup de mé- taux-. Les oxides de plomb triturés avec ce fel , en dégagent le gaz ammoniac à froid. Mais fi on chauffe ce mélange dans une cornue , la décompofition efl très -rapide. On retire une ammoniaque très-cauflique & très -pénétrante. Quelques chimifles ont avancé que l’alkali vo- latil extrait par le minium , faifoit eff'ervefcence avec les acides, 8c ils ont conclu de-là que cet oxide de plomb contient de l’acide carbonique. Bucquet obfervoit que cette eff'ervefcence n’é- toit due fouvent qu’à une portion de gaz am- moniac volatilifé par la chaleur qui réfulte de la combinaifon de l’alkali 8c de l’acide, & qu’elle dHist. Nat. et de Chimie. 195- n’avoit lieu alors qu’avec des acides concentrés. Il a fait fur cet objet une expérience ingénieufe 217 du fer. Les metallurgiftes ont eu beaucoup d’o- pinions fur la caiife de cette propriété de la fonte ; quelques-uns croyoient qu’elle étoit due à la préfence d’une portion de laitier. D’autres l’attribuoient à ce que Je fer n’étoit pas bien réduit , 6c contenoit une portion d’oxide. Brandt croyoit que c’étoit l’arfenic , 6c M. Sage penfe que c’eft du zinc qui rend la fonte caffante. Bucquet confidéroit la fonte comme un fer mal réduit , 6c contenant encore une portion d’oxide métallique interpofé entre fes parties. Bergman qui a beaucoup travaillé fur le fer , a cru que la fragilité de la fonte dépendoit d’une certaine quantité d’une matière étrangère qu’il croyoit être un métal particulier , 6c qu’il a appelé fy- dérite ; on a découvert que cette matière efl: un compofé de fer 6c d’acide phofphorique. La fydérite fe trouve auffi dans certains fers, comme nous l’expoferons plus bas. La vraie caufe de la fragilité, de la fufibilité, du tiffu grenu, & de toutes les propriétés de la fonte, a été mife hors de doute par les belles recher- ches de MM. Vandermonde , Monge 6c Ber- thollet. Ils ont démontré que le fer de fonte contient de Poxigène 6c du charbon ; ce der- nier a été abforbé pendant la fttfion dans les hauts fourneaux. C’eft à la quantité diverfe de ces deux corps étrangers , que la fonte doit fes qualités différentes. 2l8 É l é m e N S Lesmétallurgifles diftingüent plufieurs cfpèces de fontes; la blanche, la grife, la noire, &Ct Ils appellent fonte truirée , celle qui , fur un fond gris , a des taches noirâtres. La fonte blan- che efl la plus mauvaife ; elle fe rapproche du caradère des demi - métaux. La grife tient le milieu entre la première & la noire , qui eft la meilleure, & qui fournit plus facilement du fer d’une bonne qualité. Ces divers caradères dé- pendent de la quantité d’oxigène & fur-tout de charbon contenus dans la fonte. Lorfque le cnarbon efl très-abondant 8c bien uniformément mêlé, la fonte efl noire; un peu moins de ce corps forme la grife ; un mélange mal fait & trop tôt refroidi conflitue la fonte truitée ; la blanche côntient fe moins de charbon polîîble. Toutes ces qualités influent fur la nature & lufage de la fonte, & fur-tout fur fa conver- tibilité en fer. Les phyficiens cités ci-deffus, ont découvert que lorfqu’on refond de la fonte, il s’en fépare toujours une portion de charbon uni intimément à un peu de fer, ou de carbure de fer. Ce compofé appelé jufqu’ici plomba- gine , enduit les cuillers avec lelqtielles on puife & on coule la fonte. Pour convertir la fonte en fer , il faut lui enlever le charbon 8c l’oxigène. Un grand feu qui pénètre bien toute la maffe , efl néceflaire d’H ist. Nat. et de Chimie. 219 ; pour obtenir cette réduction. On conçoit qu’à une haute température , le charbon doit brûler en enlevant l’oxigène , & fe dégager fous forme de gaz acide carbonique, en excitant une effer- vefcence. Pour cela la fonte eft portée au four- neau d’affinage. C’eft une forge un peu creufe, dans iaquelle on met une maffe.de fonte , qu’on recouvre de beaucoup de charbon. Onfouffle le feu jufqu’à ce que la fonte foit fondue ; lorfqu’elle eft en cet état, on la pétrit, onia retourne à plufieurs reprifes. Cette agitation lui fait préfenter plus de furface , en forte que les portions de charbon enlèvent l’oxigène au fer , brûlent & fe dégagent en gaz acide car- bonique. Le métal paroît auffi fe féparer d’une portion de fy dérite ou phofphate de fer. On le porte enfuite fous le marteau pour le réduire en barres. Le martelage , en rapprochant les parties du fer , facilite la féparation de la fydé- rite & de la portion de carbure & d’oxide de fer que ce métal contenoit encore ; il achève en conféquence ce que la fufion n’avoit pu faire , faute d’être affez complète. On chauffe & on bâtie fer à plufieurs reprifes , jufqu’à ce qu’il foit au point de perfection qu’on veut lui donner. Le fer forgé fe diffingue en fer .^oux 8c fer rouvrain. Le fer doux eft très-dudile , & lorf- 220 É L É M E N S qu’on le caffe après l’avoir plié , il fe tiraille & paraît compofé de filets ou de fibres ; c’efl c’efl ce qu on nomme fer nerveux. Mais ce nerf n efl pioduit que par accident , car fî on cafTe net 8c d’un feul coup le fer le plus doux , il ne paraît pas nerveux ; tandis qu’en cafTant avec précaution le plus mauvais fer , on peut le faire paraître nerveux. Il convient plutôt de s’atta- cher au grain de ce métal, lorfqu’on veut pro- noncer fur fa qualité. Le fer rouvrain efl plus aigre ; fou grain efl gros 8c paraît formé de petites écailles ; on le diftingue en fer cafTant à chaud , 8c fer cafTant à froid ; la caufe de cette fragilité efl reconnue aujourd’hui; on fait que le fer cafTant à froid contient beaucoup plus de fydérite ou phofphate de fer, que tous les autres fers , 8c que la quantité de ce fel va toujouis en diminuant jufque dans le fer le plus doux qui n’en contient point. Pour féparer ce fel du fer , 8c pour en connoître la quantité , on diffout ce métal dans l’acide fuîfu tique étendu d eau , on JaiiTe repofer la difïolution dans la- quelle il fe forme peu à peu un précipité blanc que 1 on râmafle 8c que l’on pèfe; c’efl le phof- phate de fer. Lart convertit le fer en acier. Pour cela on piend des barres de fer de peu de longueur; on les enferme dans une boîte de terre , pleine d’Hist. Nat. et de Chimie. 22 tf d’un cément ordinairement compofé de matières très-combuüibles , comme de la fuie de che- minée, ou des charbons de matières animales; on y ajoute quelquefois des cendres , des os calcinés, du Tel marin ou du fel ammoniac; mais ces matières nuifent feu vent plus qu’elles ne font utiles. La boîte étant bien fermée , on la chauffe pendant dix ou douze heures, juf- qu’à ce que les barres foient bien blanches 8c commencent à fe ramollir. Dans cette opéra- tion le fer fe purifie 8< fe réduit complettement à l’aide des matières combuffibles qui l’entou- rent de toutes parts. Les portions qui n’étoient pas parfaitement dans l’état métallique , repren- nent cet état ; le phofphate de fer, s’il en refte encore , paroît être décompofé entièrement. Le fer ramolli de dilaté abforbe le charbon qui l’environne , 8c l’acier de cémentation n’eff qu’une combinaifon de fer pur 8c bien réduit avec du charbon. Il diffère du fer en ce qu’il contient du charbon , «Se de la fonte en ce que celle-ci contient , outre le charbon , une quan- tité plus ou moins grande d’oxigène. Si on enlève l’oxigène à la fonte fans en féparer le charbon , ou en lui en donnant de nouveau , on fera de l’acier , fans avoir affiné le fer. L’a- cier eft beaucoup plus fufible que le fer; auffi les barres que l’on convertit en acier par la 222, É I É M E K S cémentation , fe ramolliffent-elles au point que 1 acide carbonique qui s’en dégage en bulles pendant l’adion de la chaleur , forme à leur furface des petites bourfouffîures , ou des cavités bien fenfibles. L acier qui préfente ces bouil- lons, efl nommé acier poule. Les différences de l’acier dépendent de la rédudion plus ou moins complette du fer , de la quantité de charbon qui y efl contenu , 6c du refroidiffe- fement plus ou moins prompt ou lent qu’on lui fait épiouver. La trempe en rapproche for- tement les molécules , 6c le rend très-dur, très- fec 6c très-caffant. Il efl évident que toutes les préparations qu on fait fubir au fer , ne font néceffaires que parce que ce métal étant plus difficile à fondre que les autres, adhère beaucoup à l’oxigène, 6c a une giande tendance pour fe combiner. Il efl des mines de fer , 6c particulièrement le fer noir , comme celui de l’ifle d’Elbe , dans lequel ce métal efl fi abondant 6c fi peu altéré, qu on n a pas befoin de le convertir en fonte. On fe contente de le ramollir fous les char- bons dans le fourneau d’affinage , 6c on le paffe au marteau. C’efl ce qu’on nomme la méthode catalane ; elle ne peut ayoir lieu que pour des mines qui contiennent peu de matières étran- gères, fufceptibles de fe convertir en laitier. J d’Hist. Nat. et de Chimie. 223 Les mines de fer fpathiques donnent un fer fi pur & fi réductible , qu’elles fondent très- promptement & abforbent facilement du char- bon dans leur réduction. Auffi les nomme-t-on mines d'acier. Les propriétés chimiques du fer font très- étendues ; & pour les bien connoître , il faut les confidérer dans le fer le plus doux. Le fer ne fe fond qu’à une extrême chaleur. Si on le jette en limaille au milieu d’un bra- fier ardent , ou même à travers la flamme d’une bougie, il s’allume fubitement de produit des étincelles très-vives ; telles font auffi celles qui ont lieu dans la perçu ffion du briquet. Le fer ramafle fur un papier blanc , fe trouve fondu 8c femblable à une efpèce de feorie ou de mâche-fer. Expofé au foyer de la lentille de M. de Trudaine , ce métal jette fubitement des étincelles enflammées & brûlantes. Mac- quer , qui a fondu de l’acier & du fer à cette lentille , avoit obfervé que l’acier étoit plus fufible ; ce qui dépend de fa combinaifon avec le charbon.- Le fer fondu qui fe refroidit len- tement , prend une forme criflalline particu- lière , comme nous l’avons déjà obfen*é. M. Mongèz la définit une pyramide à trois ou quatre côtés. Le foufHet d’air vital porté fur du fer en 224 É L É M E N S limaille , le fait brûler auflî rapidement que le foyer de la lentille du jardin de l’infante. Si l’on plonge dans un bocal plein d’air vital, un fil de fer tourné en fpirale & terminé par un petit morceau d’amadou allumé, ce métal s’en- flamme fubitement 8c brûle avec une rapidité & une déflagration très-remarquables. Comme dans toutes ces fufions le fer devient caflant, & s’oxide en prenant une couleur noire, les ouvriers en fer & tous les hommes qui traitent ce métal, ne le regardent point comme fufible, & c’efl un axiome chez eux, que le fer efl ab- folument infufible. On conçoit cependant que cette opinion rigoureufement prife efl: une er- reur ; car à un très-grand feu & fans le contact de l’air, le fer fond fans prefque s’altérer. Dans nos expériences exactes , on obtient de petits culots de fer doux 8c duétile. Le fer , quoique très-dur & très-réfradaire , fe calcine ou s’oxide très- aifément ; dès qu’il commence à rougir, il fe combine avec l’oxi- gène , & il brûle fans flamme apparente. Une barre de fer tenue rouge pendant long-tems, offre a fa furface des écailles qu’on peut enle- ver avec ün marteau , & qu’on appelle batitures de fer ; le métal n’y. efl qu’en partie oxidé , puifque ces écailles font encore attirables à l’ai- mant. On peut faire un oxide de fer plus par- fait, d’Hist. Nat. et de Chimie. 225* . fait , en expofant fous une moulhe de la limaille d’acier, & plus promptement encore les écailles ou batitures de fer. Elles fe converiiffent en une poudre d’un brun rougeâtre non atlirable à l’aimant , qu'on nomme Jafran de mars ajlrin- gent. Nous le nommons oxide rouge de fer , 8c les batitures oxide noir Ce dernier contient de 20 à 2) pour loo d’oxigcne ; l’oxide rouge en contient jufqu’à 32 ou 34. Les oxides de feu varient entre les deux degiés d’oxidation. Il y en a d’un brun jaune, d’autres font couleur de marron ; d’autres enfin du plus beau rouge 8c femblables au carmin. Tous les oxides mêlés aux matières terreufes 5c expofés a une très- ' forte chaleur, fe fondent en un verre noirâtre & poreux. Ils fe réduifent en partie en les chauf- fant lentement dans des vailTeaux fermés ; pour peu qu’ils aient été expofés à l’air, ils donnent en fe réduifant une certaine quantité d’acide carbonique ; ce qui prouve qu’ils attirent cet acide de l’atmofphcre. Cet acide provient aufli du charbon que les fers contiennent , & qui devient acide en abforbant l’oxigène dégagé pendant leur réduélion. Les oxides de fer rouges fe réduifent très- facilement à l’aide des matières combultibles. En les mêlant avec un peu d’huile 8c les chauffant légèrement dans un creufet , ils de- Tome III. P 22.6 É L É M E N S viennent noirs & très-attirables à l’aimant; mais ils ne perdent pas tout l’oxigène qu’ils con- tiennent dans cette opération , ils ne paflent qu’à l’état d’oxide noir. Le fer le plus pur expofé à l’air humide, y perd bientôt fon brillant métallique ; il fe cou- vie dune cioute pulvérulente 8c d'un jaune brun. On donne à cette matière le nom de rouille. Le fer ordinaire y eü beaucoup plus fujet que l’acier. Plus ce métal efl divifé, plus fon altération a 1 air efl rapide. C’ell de cette manière qu’on prépare le médicament connu en pharmacie fous le nom de fafran de mars apéritif. On expofe de la limaille de fer à l’air, & on l’a.rrofe avec de l’eau; par ce moyen elle fe rouille très-vite. On en fait encore plus vite avec le fer en état d 'èthiops ou d’oxide noir, traité par le même procédé. Dans cette alté- ration ce métal s’agglutine, & forme des malles que l’on porphyrile pour l’employer en méde- cine. On croyoit que la rouille de fer étoit formée par l’air , mais il efl reconnu aujour- d’hui que c’ell l’eau qui a calciné ce métal. Des expériences qui me font particulières , me por- tent a regarder le fafran de mars apéritif , comme une combinaifon de l’oxide de fer avec \ acide carbonique. J’ai diflillé ce fafran de mars a l’appareil pneumato - chimique , 8c j’en ai \ d’Hist. Nat. et de Chimie. 227 obtenu une grande quantité de cet acide ; le fer étoit changé en poudre noire très-aitirable à l’aimant. M. Jofle, apothicaire de Paris, a com- muniqué à la Société Royale de Médecine un procédé pareil , pour obtenir promptement de Véthiops marnai. Il recommande de faire rougir le fafran de mars apéritif dans une cornue , à laquelle on adapte un ballon percé d’un petit trou fans le lutter ; par ce moyen la chaleur dégage l’acide carbonique, que M. Joffe laiffe échapper par le trou du ballon, & le fer refle à l’état d’oxide noir en poudre , ou d’éthiops martial. J’ai plufieurs fois fait criffallifer par ce moyen la potaffe & la foude caufliques , dont j’avois imprégné les parois du ballon adapté à la cornue ; il s’eff formé par le tranfport de l'a- cide carbonique du fer fur cet alkali , l’efpèce de fel neutre , qui a été nommé carbonate de potaffe ou de foude. J’ai fait fur la rouille de fer beaucoup d’autres expériences, que j’ai ex- pofées dans un Mémoire particulier; ( Mém. & Obferv. de Chimie, toutes m’ont con- vaincu que cette matière eff un vrai fel neutre formé par l’oxide de fer & l’acide carbonique. Il faut donc nommer la rouille carbonate de fer, pour la diffinguer des vrais oxides de ce métal. Ce fel eff abfolument le même que Bergman appelle fer aéré. Cette théorie a l’a- pij vantage d’avoir été adoptée par Macquer ; elle explique bien pourquoi le fer eft rouillé très- piomptement dans un air humide 8c impur ; pourquoi il s’altère fi vite 8c fi profondément dans un endroit dont l’air eft gâté par la ref- piration des animaux, par la combuftion, par les vapeurs des matières animales ; comme dans les écuries , les étables , les latrines , &c. Le fer eft le plus altérable de tous les métaux par le contad de l’air, & cette altération ne fe borne pas à fa furface ; fou vent des barres de fer allez épaiiïes fe trouvent rouillées jufque dans leur milieu. L’eau a beaucoup d’aétion fur le fer à froid ; elle le divife 8c en diiïout même une partie , fuivant les expériences de M. Monnet. Elle s’en charge d’autant plus, que le fer eft plus pur & qu’elle contient plus d’air. Lorfqu’on agite pen- dant quelque tems du fer dans l’eau , il paroît extrêmement divifé, & en décantant l’eau un peu trouble , elle laifte dépofer une poudre très- noire 8c très-tenue, à laquelle on a donné le nom d 'éthiops martial de Lémery. On a foin de faire fécher cette poudre à une chaleur douce 8c dans un vaifleau fermé, comme dans un alam- bic , de peur que le contaét de l’air ne la rouille. Cet éthiops martial eft très-attirable à l’aimant; c eft un oxide de fer noir fait par l’eau. Comme d’Hist. Nat. et de Chimie. 229 cette opération efl très-longue & très -délicate, plufieurs chimifl.es ont cherché à la Amplifier. Rouelle employoit pour cette préparation les mouffoirs de la Garaye , 8c obtenoit par ce moyen un éthiops très-beau , & en beaucoup moins de tems que le procédé de Lémery n’en exige. Je crois qu’on peut y fubflituer avec avantage celui de M. Jofle , qui efl beaucoup plus expéditif. On trouvera plus bas quelques autres procédés pour préparer l’ éthiops martiaU La préparation de Lémery efl due à une véri- table décompofition de l’eau ; il fe dégage du gaz hydrogène , & le fer s’oxide en abforhant 2y pour 100 d’ûxigène. Nous traiterons dans un inflant de cette oxidation du fer par l’eau 3 avec plus de détails. Nous avons déjà dit que l’acier en barres chauffé jufqu’à un certain degré , 8c plongé fu- bitement dans l’eau froide , acquiert une dureté très-confidérable 8c devient très - fragile. Ces qualités font d’autant plus fenfibles , que l’acier efl plus chaud , & que la liqueur dans laquelle on l’a plongé efl plus froide. Cette opération fe nomme la trempe . On peut varier les. degrés de dureté de l’acier à volonté ; on peut auffi le dé- tremper facilement, en le chauffant au même degré où il étoit avant la trempe , 8c en le laif- fant refroidir lentement. Il paroît que cet effet Piij 23O É L É M E N S de l'eau dépend de ce que le refroidifiement fubit de l’acier change la difpofition de fes parties & nuit à fa criilallifation. Tous les mé- taux font fufceptibles d’acquérir de la dureté par la trempe ; mais cette qualité efl d’autant plus fenfible , que le métal efl plus infufible • c’eh pour cela que le fer la pofsède dans un fi haut degré. On a découvert , il y a environ deux ans , une aâion beaucoup plus forte entre l’eau & Je fer. M. Lavoifier ayant expofé du fer avec de l’eau , dans une cloche au-deflus du mercure, obferva que le fer fe îouilîoit, 8c que l’eau diminuoit de volume à mefure qu’il fe dégageoit un fluide élaflique qui îemphlîoit la partie fiipérieure de 1 appaieil. Ce fluide etoit du gaz inflammable • le fer avoit augmenté de poids , & étoit oxidé. M. Lavoifier foupçonna que l’eau contenoit de l’oxigène , & que ce corps s’étant uni au fer , le gaz inflammable , autre principe de l’eau , s’é- toit dégagé en même proportion. Il fît enfuite avec M. Meuinier une autre expérience plus décifîve 1 en introduifant de l’eau en vapeurs dans un canon de fufîl rouge , il obtint une glande quantité de gaz inflammable ; l’intérieur du canon de fufîl augmenta de volume , devint noir , caflant , lamelleux & femblable à la mine de fer de l’île d’Elbe. Ce métal fe trouva aug- d’Hist. Nat. et de Chimie. 231 menté de poids , & cette addition réunie au poids du gaz inflammable répondit parfaitement à la quantité d’eau détruite. La portion de fer oxidée par cette expérience , fe trouva féparée de celle qui n’avoit point éprouvé cette alté- ration ; elle formoit un cylindre intérieur plus épais , & jouiffant d’un tilïu , d’une couleur , d’une confiftance, d’une forme très-différentes de celles du fer extérieur. La chaleur du fer bien rouge , efl néceffaire pour que cette expé- rience réuffiffe , parce qu’elle favorife finguliè- rement la réparation des principes de l’eau par le métal $ auffi lorfque le canon de fufil n’eft pas bien rouge , & que l’eau ne le traverfe pas dans un état fort élaflique , il ne fe dégage point de gaz inflammable , & beau n’eft pas décom- pofée ; c’ell ce qui efl arrivé à plufieurs phyfi- ciens qui , n’ayant point fait rougir affez le ca- non de fer , & y ayant introduit de l’eau liqui- de , n’ont point obtenu les réfultats précédens y 8c fe font crus en droit de nier la décompofî- tiori de l’eau , tandis que fon analyfe faite exac- tement par cette expérience , efl confirmée par la fynthèfe, comme l’ont démontré MM. Mon- gèz 8c Lavoifier. Il y a beaucoup d’autres cas- où l’eau fe fépare ainfi en fes principes , 8c con- tribue à la produdion de plufieurs phénomènes très- importans , comme on l’expofera par la Piv 232 Èlêmens fuire. Telle eft l’expérience qui a fait connoître que l'eau étoit un compofé de o,iq d’hydro- gène , & de o,86 d’oxigène. Le fer dans ion étal métallique ne s’unit point aux matières terreufes & pieneufes, mais les oxiues de feL facilitent la vit.ihcation de toutes les pierres 8c les colorent en vert ou en brun. Les couleurs que les oxides de fer communi- quent , font très-variées , fuivant leur ; lus ou moins grande oxidation. Ces oxides ont aufTi la propriété de prendre & de donner plus ou moins de confiance aux terres avec lefquelles la natuie ou lait les inele 8c les détrempe à l’aide de l’eau. La baiyte, la magnéfie 8c la chaux n’ont point une adion marquée fur le fer. Les alkalis fixes purs 8c l’ammoniaque difTous dans l’eau , agilfent fenfiblement fur ce métal. Au bout de quelques jours de digeflion , les liqueuis deviennent louches , & laiffent préci- piter un peu d’échiops ou oxide noir de fer ; & comme l’ont obfervé MM. les chimiftes de l’a- cadémie de Dijon , il fe dégage une certaine quantité de gaz hydrogène pendant cette aélion; ce qui prouve que î eau y contribue beaucoup, que c eft elle qui elt décompofée , qui fournit le gaz j 8c que fa décompofition eft favorifée par les alkalis. d’Hist. Nat. et de Chimie. 233 Le fer efl difloluble dans tous les acides. M. Monnet a obfervé que l’acide fulfurique concentré n’agit que bouillant fur ce métal ; en difliliant ce mélange à ficcité , on trouve dans Ja cornue des fleurs de foufre fublimées & une ma (Te blanche de fulfate de fer difloluble en partie dans l’eau, mais qui ne peut point four- nir des criflaux , parce que la chaleur l’a dé- compofé. Si l’on verfe fur de la limaille de fer cet acide étendu avec deux parties d’eau , il diflout très-bien ce métal à froid ; la diffolution efl accompagnée du dégagement d’une grande quantité de gaz hydrogène. On peut le faire détoner avec un grand bruit , en approchant une bougie allumée de l’ouverture du matras, après l’avoir bouchée avec la main pendant quelque tems. Ce gaz brûle avec une flamme rougeâtre , St préfente fouvent de très-petites étincelles femblabies à celles de la limaille de fer. Manquer , Bergman , M. Kirwan penfent que dans cette combinaifon l’acide fulfurique dégage une grande quantité de phlogiflique du fer , St que le gaz inflammable appartient entiè- rement à ce métal. Cette opinion paroifloit être fondée fur ce que l’on avoit cru que le gaz inflammable pouvoit être extrait du fer feul 8c fans intermède , par la feule adion du feu ; mais il efl bien prouvé aujourd’hui que le fer ne 234 É L É M E N S donne de gaz hydrogène parla chaleur, qu’en raifon de l’eau ou de l’humidité qu’il contient, & il efl également démontré que l’eau ajoutée 3. 1 acide fulfu tique , efl la feule matière qui produit du gaz hydrogène par fa decompofi- tion i î . parce que 1 acide fulfurique employé dans fon état de concentration ne donne que du gaz fulfu reux ; 2°. parce que dans cet état il n’attaque le fer que difficilement & à l’aide de la chaleur ; ^ . parce que dès qu’on ajoute de l’eau l’aétion devient beaucoup plus rapide , & la production du gaz hydrogène a lieu ; 3.0. en- fin parce que la quantité d’acide fulfurique con- centré qu on emploie , efl en partie décompofée par le fer lorfqu’on n’ajoute point d’eau • tandis que cet acide relie entier & fe combine à l’o- xide de fer , fans avoir éprouvé de décompo- fition , lorfque l’on ajoute de l’eau à la diffio- lutiôn. Ce fait efl prouvé , parce qu’il faut pour faturer cet acide après fon action fur le fer, autant d’alkaîi qu’il en auroit exigé auparavant. C efl donc l’eau qui oxide Je fer dans cette opé- ration , comme M. de la Place l’avoit foupçonné il y a déjà long tems, & comme l’ont démontré MM. Lavoilïer & Meufnier. A mefure que l’acide fulfurique étendu d’eau agit fur le fer , une portion de ce métal efl; pré- cipitée en une poudre noire , prife pour du d’Hist. Nat. et de Chimie. 235" foufre par Stahl , & que M. Monnet a trouvée être de Yéihiops martial. Cette portion d’oxide noir de fer produite par l’eau , paroït être fur- abondante à la faturation du fer, Des qu’une partie du fer ell combinée avec une partie de l’acide, quoique ce dernier ne foit pas, à beau- coup près, faturé, la diffolution s’arrête, & il n’agit plus fur le métal. M. Monnet, quia fait cette obfervation , remarque qu’en verfant de l’eau, fur le mélange , l’adion de l’acide recom- mence ; ce phénomène vient de ce que l’eau unie à l’acide fulfurique , eft abforbée par le fulfate de fer déjà formé , 8c que la portion d’a- cide qui n’eft pas faturée , n’agit fur le fer que lorfqu’une nouvelle quantité d’eau commence l’oxidation de ce métal. L’acide fulfurique dif- fout plus de la moitié de fon poids de fer ; cette diiïolution , filtrée 8c évaporée , fournit par le refroidiflement un fel tranfparent d’une belle couleur verte , criflallifé en rhombes ; c’eft le vitriol martial ou la couperofe verte du commerce. Nous le nommons fulfate de fer. On ne fe donne pas la peine de faire ce fel , parce que la nature le fournit abondamment, 8c que l’art l’extrait facilement des pyrites mar- tiales. Il fuffit de lailTer ces fulfures expofés à l’air pendant quelque tems ; l’humidité facilite leur décompofition ; ils fe couvrent d’une efflo- 2^6 É L É M E N S refcence blanche , qni n’a befoin qne d’être diffonte dans l’eau & crihallifée pour fournir le lulfate de fer. Cette décompohtion des pyri- tes dépend , fuivant Stahl, des doubles affinités. Le foufre eh compofé de phlogijlique & d’a- cide variolique ; ni l’eau , ni le fer feul ne peu- vent ledécompofer; mais en réunifiant ces deux fubitances , le fer s’empare du phlogiflique du foufre , fon acide s’unit à l’eau & diffiout le mé- tal; les pyrites qui font moins fufceptibles de s’effleurir , comme celles qui font brillantes , étant grillées, pour leur faire perdre une por- tion du foufre qu’elles contiennent, & expofées enfuite a l’air, s’effleurilîent promptement: on en fépare le vitriol par le lavage. La diffiolution de ce fel dépole d’abord une certaine quantité de fer dans l'état d’ochre; ce n’eit que Iorfque ce dépôt s’ell précipité , qu’on fait évaporer & crihailifer la liqueur. Les modernes croient que dans l’efflorefcence des pyrites , le foufre qui y eh divifé comme dans fes combinaifons avec les fubhances alkalines , fe combine avec une portion d’oxigène, & forme de l’acide ful- furique , qui étendu par l’eau de l’atmofphcre , s unit avec chaleur au fer & le diffiout. La né- ceffité du contach de l’air pour l’efflorefcence des pyrites , donne une très-grande force à cette opinion , & l’humidité qui favorife beaucoup la d’Hist. Nat. et de Chimie. 237 vitriolifation , agit ici comme dans la diffolution du fer j telle efl la caufe du gaz hydrogène qui fe dégage dans cette opération faite dans le vide. Le fulfate de fer a une couleur verte d’éme- raude , & une faveur ailringente très-forte. Il rougit quelquefois le firop de violettes ; cet effet n’efl pas confiant. Ses criftaux contiennent, d’après les recherches de Kunckel & de M. Monnet , plus de la moitié de leur poids d’eau. Si on le chauffe brufquement , ce fel fe liquéfie comme tous les fels plus diffolubles à chaud qu’à froid ; en fe féchant , il devient d’un gris blanchâtre. Si on le chauffe à un feu plus vio- lent , il laide échapper une portion de fon acide fous la forme de gaz fulfureux , & il prend une couleur rouge ; dans cet état , on le nomme colcoihar. Le fulfate de fer calciné au rouge, attire très-fenfiblement l’humidité de l’air , en raifon d’une portion d’acide fulfurique qu’il contient. Diflillé dans une cornue au fourneau de réverbère, ce fel donne d’abord de l’eau légèrement acide , nommée rofée de vitriol. On change de ballon pour obtenir féparément l’a- cide fulfurique concentré , qui , lorfque le feu efl violent , paffe noir & exhale une odeur fuffoquante d’acide fulfureux volatil. Ces carac- tères dépendent de ce qu’elle efl privée d’une 238 É L É il E N S partie d’oxigcne qui fe fixe dans le fer, fuivant la doctrine des gaz. Sur la fin de l’opération , l’acide qui diftille prend une forme concrète & criflalline ; on le nomme acide fulfurique gla- cial. Cette expérience décrite par Hellot, n’a pas réuffi à M. Baumé , mais elle paiïe pour conf- iante parmi les chi milles. En diflillant l’acide fulfurique glacial dans une petite cornue , il donne du gaz fulfureux, & paiïe blanc & fluide. Il doit fon état concret à la préfence de ce gaz. Il s’unit à l’eau avec bruit & chaleur , 8c en laiiïant dégager du gaz fulfureux. Telle efl 1 ’ huile de vitriol fumante de Northaaufen 8c Je fel concret qu’on en retire par une chaleur douce, dont j’ai donné l’analyfe dans un Mémoire pu- blié parmi ceux de l’académie , pour l’année 3787. Le réfidu du fulfate de fer diflillé efl rouge 8c femblable au colcothar ; en le lavant avec de 1 eau , on en fépare un fel blanc peu connu , nommé fel de colcothar ou fel fixe de vitriol ; il refle une terre rougè , infipide , qui efl un pur oxide de ter , 8c qu’on nomme terre douce de vitriol. Le fulfate de fer expofé à l’air , jaunit un peu , 8c fe couvre de rouille , en abforbant peu à peu l’oxigène. Le fer fe calcine de plus en plus par çette abforption , 8c ne peut plus refler d’Hist. Nat. et de Chimie. 239 uni à l’acide fulfurique. La difîolution de cefel préfenre le même phénomène par le contad de l’atmofphère ; & l’un ou l’autre pourroit fervir d’eudiomètre. L’eau froide difîout moitié de fon poids de ce fel ; l’eau chaude en dilïout davantage ; mais lorfqu’elle en eh chargée , elle paroît troublée par une quantité plus ou moins confidérable d’ochre. On fépare cette ochre par la filtration; 8c en lai (Tant refroidir cette dilîblution , on ob- tient des criflaux rhomboïdaux , d’un vert pâle & tranfparent. La liqueur qui fumage étant foumife à l’évaporation , donne par le refroidif- fement une nouvelle quantité de criflaux ; & lorfqu’on a retiré tout ce qu’elle peut fournir par la criftallifation , il refie une eau mère d’un vert noirâtre ou d’un jaune brun qui ne peut plus criflallifer. En l’évaporant à une chaleur forte , 8c en la lailTant refroidir , elle forme une mafTe molle , onétueufe , qui attire forte- ment l’humidité de l’air. Cette mafTe entière- ment defféchée , donne une poudre d’un jaune verdâtre. Suivant M. Monnet , l’eau mère du fulfate de fer , contient ce métal dans l’état d’un oxide parfait. Ce chimifte s’en eft convaincu en faifant immédiatement , 8c à l’aide de la chaleur , une difîolution de vrai oxide de fer dans cet acide ; cette difîolution efl brune & ne ( peut point criflallifer. 2^0 ÉtÉMÊNS L’oxide de fer peut être féparé de l’eau mère, non - feulement par la terre de lalun, mais encore par le cuivre & par la limaille de fer, ce qui n’arrive pas au fulfate de fer par- fait. Une difloliuion bien chargée de ce fel parfait expofée à l’air , fe change au bout de quelque tems en eau mère femblable aux pré- cédentes , en attirant l’oxigène de Patmofphère. Le fulfate de fer peut être décompofé par la chaux & les alkalis. L’eau de chaux verfée dans une diffolution de ce fel , y forme un précipité en floccons dun vert d’olive toncéj une oor- tion de ce précipité fe rediffout dans l’eau de chaux , Sc lui communique une couleur rougeâ— tie. J ai donne a 1 academie en l'j'j’j Sc i'jfSj deux Mémoires fur les précipités de fer , ob- tenus par les alkaüs caufliques ou non caufli- ques, dans lefqùels j’ai décrit avec foin les phé- nomènes de ces précipitations , Sc l’état du fer dans ces differentes circon fiances. Je vais en préfenter les principaux réfultats relatifs au ful- fate de fer. L alkali fixe cauffique précipite la dif» folution fui i urique de fer en floccons d’un vert foncé , qui fe rediflolvent à mefure dans l’ai— kali , Sc forment une efpèce de teinture mar- tiale d un très-beau rouge. Lorfqu’on met moins de cet alkali, on peut recueillir le précipité, Sc 1 obtenir en éthiops noirâtre on oxide de fer noir , J d’Hist. Nat. et de Chimie. 241 noir , fi on le fait deffécher rapidement & dans les vaiffeaux clos. Sans ces deux précautions , le fer s’oxide très-vite, parce qu’il eft divifé & humide. La potaffe faturée d’acide carbonique, ou le carbonate de potafle, forme un précipité d’un blanc verdâtre qui ne fe diflout pas dans l’alkali 3 cette différence efl due à la préfence de l’acide carbonique qui fe reporte fur le fer à mefure que cet acide efl féparé de l’alkali par l’acide fulfurique. L’ammoniaque pure ou cauf- tique fepare du fulfate de fer difl'ous dans l’eau un précipité vert fi foncé qu’il paroît noir, 8c qui ne fe rediffout point dans le fel précipitant: 011 peut , en le fléchant flubitement flans le con- ta On ti ouve dans le troifième vo- ulue des Elémens de Chimie de l’académie de Oijon, une fuite d’expériences fur le principe d’Hist. Nat. et de Chimie. 043 aflringent végétal , qui femblent affimiler cette fubftance aux acides. En effet, fuivant ces chi- mifles , il rougit les couleurs bleues végétales ; il s’unit aux alkalis ; il décompofe les foies de foufre ; il diffout & paroît neutralifer les mé- taux ; il décompofe toutes les diffolutions mé- talliques avec des phénomènes particuliers } il s’élève à la diftillation fans perdre fon adion fur les métaux , & il préfente un grand nombre d’autres propriétés , fur lefquelles l’ordre que nous f$ivaps ne nous permet pas d’infi.(ïerr Cet apperçu des académiciens de Dijon a été confirmé par les recherches de Schéele. Ce célèbre chimifie a découvert qu’une firnple in- fufion de la noix de galle dans l’eau , en fépare un acide particulier criflalîifabîe , qui enlève le fer à beaucoup d’autres acides & le colore en noir, parce qu’il le rapproche de l’état métal- lique. Nous nommons ce fel acide gallique ; nous en ferons l’hifloire dans le règne végétal. v Un phénomène encore plus difficile à con- noître que Padion de la noix de galle fur le fulfate de fer , c’eft la décompofition'de ce fel par un alkali calciné avec du fang de boeuf. On obtient alors un précipité d’une belle couleur bleue , indiffoluble dans les acides. Ce précipité fe nomme bleu de PruJJ'e ou de Berlin , parce qu’il a été découvert dans cette ville. Stahl É L É M E N S rapporte qu un chimifie , nommé Diefbach , ayant emprunté de Dippel de l’alkali fixe pou^ précipiter une difiblution de cochenille mêlée avec un peu d’alun & de fulfate de fer, ce dernier lui donna un alkali fur lequel il avoir difiillé fon huile animale. Ce fel précipita en bleu la difiblution de Diefbach. Dippel cher- cha à quoi étoit dû ce précipité, & prépara pai un piocédé moins compliqué, le bleu de" Pruiïe qui fut annoncé en 1710 dans les mé- langes de l’académie de Berlin , mais fans aucun détail fur cette opération. Les chimifles tra- vaillèrent à l’envi pour y réuffir, & y parvinrent. Ce ne fut qu’en 1724 , que Woodward publia dans les Tranfadions Philofophiques , un pro- cédé pour préparer cette fubfiance colorante. Pour faire le bleu de PrufTe, on mêle quatre onces de nitre fixé par le tartre , avec autant de fang de bœuf defleché ; on calcine ce mé- lange dans un creufet , jufqu’à ce qu’il foit en charbon, & ne produife plus de flamme; on le lave avec la quantité d’eau futfifante pour dmoudre toute la matière faline , qu’on nomme alkaÜ PhlogW fout dans l’eau. 11 penfoit que cet acide devoit fa folidité à la préfence du gaz nitreux ; 8c pour s’en convaincre , il a efïayé de mêler l’acide nitreux brun noirâtre , qui furnageoit le rouge avec de l’acide fulfurique très-concentré. Mais à l’inflant même du mélange de ces deux ma- tières , il s’efl fait un mouvement h rapide , que l’efprit de nitre verfé fur l’acide fulfurique , a été lancé avec bruit à une très-grande diflance ; la perfonne qui faifoit le mélange , a été cou- verte de cet acide ; il s’elt élevé à l’inftant même fur fon vifage une grande quantité de boutons rouges 8c enflammés, qui ont fuppuré comme ceux de la petite vérole. L’acide fulfurique eft bientôt devenu concret & abfolument fembla- ble à celui qu’on obtient dans la diflillation dont nous venons de faire l’hifloire. Il paroît d’après ce fait , que cet acide peut devoir fon état concret au gaz nitreux , comme au gaz ful- ftireux. Le réfidu de la diflillation du nitre par le fulfate de fer calciné au rouge , n’efl qu’une 270 Ë L é M E N S forte de fcorie de fer dont on ne peut tirer que très-peu de fulfate de potaiïe par le la- vage. La diffolution de fulfate de fer n’efl pas al- térée par le gaz hydrogène ; mais quoique la bafe de ce fluide élaflique paroifle avoir moins d’affinité avec l’oxigène que n’en a le fer, com- me on l’a vu dans l’hiftoire de la décompofition de l’eau, M. Monnet a obfervé que le gaz.hé- patique donnoit à une eau mere fulfurique la propriété de fournir des criftaux; & M. Prieflley a réduit des oxides de fer brun par le contad du gaz hydrogène. Ces expériences ne contra- rient point notre dodrine ; elles ne font au contraire que la confirmer. En effet , l’hydro- gène enlève toute la portion d’oxigène uni au fer , au-delà de la quantité de 0,28. Cette der- nière dofe n’eft que celle que l’hydrogène ne peut pas féparer. Voilà pourquoi dans ces ré- dudions on n’obtient qu’un oxide noir ou éthiops martial , & pourquoi l’eau n’oxide jamais le fer qu’en noir. Les fulfures alkalins précipitent fous une cou- leur noirâtre le fulfate de fer. Ce précipité eff une efpèce de pyrite martiale , ou fulfure de fer. L’acide nitrique eff rapidement décompofé par le fer qui en dégage beaucoup de gaz ni- d’Hist. Nat. et de Chimie. 271 treux, fur-tout fi l’acide employé efi concentré, & fi le fer efi: divifé. Ce métal efi prompte- ment calciné par I oxigcne qu’il enlève à l’acide du nitie . la dilTolution efi d’un rouge brun; elle lai fie dépofer de 1 oxide de fer au bout d’un certain tems , fur-tout par le contad de l’air ; en y plongeant de nouveau fer , l’acide le diffout comme l’a indiqué Stahl, & l’oxide de fet qu il tenoit en dilTolution le précipite fur- ie-champ. On peut cependant , en employant un acide nitrique foible & du fer en morceaux, obtenir une dilTolution plus permanente dans laquelle le métal efi plus adhérent à cet acide. Cette dernière combinaifon efi verdâtre , & quelquefois d’itn jaune clair; l’une & l’autre de ces diflolutions évaporées fe troublent 8c dépofent de 1 ochre martiale d’un rouge brun. Si on la rapproche fortement , au lieu de four- nir des crifiaux , elle fe prend en une gelée rougeâtre qui n’eft qu’en partie dilfoluble dans 1 eau , 8c dont la plus grande portion fe pré- cipite. En continuant de chauffer le nitrate de fer , il s en dégage beaucoup de vapeurs rou- ges , le magma fe defsèche 8c donne un oxide dun rouge bnqueté. Ce magma diflillé dans une cornue , fournit un peu d’acide nitreux fu- mant , beaucoup de gaz nitreux , & du gaz azotique. On n’en peut point tirer d’air vital , 272 É L É M E N S parce que le fer retient tout l’oxigène de cet acide. L’oxide qui relie après la diflillation du nitrate de fer , efl d’un rouge vif & pourroit fournir une belle couleur à la peinture, &c. La diffolution nitreufe de fer , quelque chargée qu’elle foit , ne m’a pas paru précipiter par l’eau diflillée. Les alkalis la décompofent avec des phénomènes différens , fuivant leur nature. La potaffe cauflique la précipite en brun clair ; le mélange paffe très-vite au brun noirâtre & beau- coup plus foncé que la couleur de la première diffolution. Ce phénomène efl dû à ce qu’une portion du précipité efl difîoute par l’alkali , quoique en très-petite quantité. Le carbonate de potaffe en fépare un oxide jaunâtre , qui devient très-vite d’un beau rouge orangé. Si on agite le mélange à mefure que l’effervef- cencea lieu, le précipité fe rediffout beaucoup plus abondamment que celui qui efl produit par la potaffe cauflique. M. Monnet a bien noté ce phénomène , & il l’a attribué avec raifon au gaz qui fe dégage. Cette diffolution de feL par l’alkali fixe , porte le nom de teinture mar- tiale alkaline de Stahl. Elle efl d’un très- beau rouge. M. Baume recommande pour la préparer , de prendre une diffolution nitreufe de fer qui ne foit que peu chargée. Stahl con- feilloit au contraire une diffolution très-faturée. M. d’Hist. Nat. et de Chimie. 275 M. Monnet a obfervé qu’une diffolution jaune donnoit beaucoup de précipité qui ne fe redit* fout prefque pas dans Falkali , & qui ne le co- lore pas comme doit l’être la teinture martiale; tandis qu’une diffolution bien rouge en fait une fur-le- champ avec le même alkali. La teinture martiale alkaline de Stahl fe décolore au bout d’un certain tems , & laiiîe dépofer l’oxide de fer qu elle contient. On peut la décompofer à l’aide d’un acide ; celui du nitre en fëpare un oxide d’un rouge briqueté qui eff foluble dans les acides, & que l’on appelle fafran de mars apéritif de Stahl. L’ammoniaque pure ou cauf- tique précipite la diffolution nitrique de fer en vert foncé & prefque noirâtre. Le carbonate ammoniacal redifîhut le fer qu’il a féparé de l’acide , & prend une couleur d’un rouge en- core plus vif que la teinture de Stahl. Cette diffolution de fer par le carbonate ammonia- cal , pourroit être d’un grand avantage dans les cas de pratique dans Iefquels on a befoin d’un tonique puiflant joint à un fondant très» adif. La diffolution nitrique de fer chargée & rou- ge , ne m’a jamais donné que très-peu de vé- ritable bleu de Pruffe , par I’alkali faturé de la matière colorante de ce compofé ; je n’ai eu qu’un précipité noirâtre qui s’eft rediflous par Tome III. S 274, É L É M E N S l’acide muriatique ; la liqueur avoit alors une couleur verte. M. Maret , fecrétaire de l’académie de Di- jon, a envoyé à la fociété royale de médecine un procédé pour faire très- vite de Yéthiops maniai ; il confifte à précipiter la difTolution nitrique de fer par l’ammoniaque cauflique , à laver & fécher rapidement ce précipité. M. d’Ar- cet , chargé par cette compagnie d’examiner le procédé de M. Maret , n’a pas obtenu conf- tamment le même réfultat que ce médecin. Dans mes Mémoires fur les précipités de fer , j’ai déterminé les cas où l’expérience de M. Maret réuffit , & ceux où elle n’a pas de fuccès. Il faut pour obtenir cetéthiops , i°. que la difTolution de fer foit nouvelle , & qu’elle ait été faite à froid très - lentement , avec un acide nitrique foible, & du fer peu divifé ; 2°. que l’ammo- iliaque foit récemment préparée, très-cauflique, & fur - tout privée par le repos , de la petite portion de terre calcaire & de matières corn- bnflibles noirâtres qu’elle a coutume d’enlever au fel ammoniac, 8c à la chaux, fi elle n’efi pas extraite dans l’appareil de Woulte ; 3°. que le précipité foit féparé fur-le-champ de la li- queur , 8c féché rapidement dans des vailleaux fermés. Malgré toutes ces précautions , quel- quefois ce précipité n’efi pas très -noir , il a d’Hist. Nat. et de Chimie. 275- alors une couleur brune légère ; il s’enlève en écailles dont la furface inférieure eft noirâtre; ce qui prouve que c’eil le conta# de l’air qui en rouille légèrement la furface fupérieure. J’ai obtenu un éthiops plus beau & plus confiant, en précipitant les dillblutions muriatique & acé- teufe du fer par les alkalis fixes & l’ammoniaque cauflique, & en faifant fécher rapidement dans des vaifTeaux fermés ces précipités bien lavés; mais je penfe , malgré cela, que ces éthiops , quelque purs qu’on les fuppofe , retiennent tou- jours une petite partie de leurs précipitans & de leurs premiers difîblvans , comme M. Bayen l’a obfervé fur les précipités de mercure ; & qu on ne doit pas les employer en médecine avec autant de fureté que ceux dont j’ai parlé précédemment M. d’Arcet , dans fon rapport à la fociété royale de médecine , fur le procédé de M. Maret , en a communiqué un de M« Croharé pour faire 1 ''éthiops martial. Ce phar- macien , connu par plufieurs travaux chimiques bien faits , prépare ce médicament en faifant bouillir de l’eau aiguifée avec un peu d’acide nitrique fur de la limaille de fer. Ce métal ell fur-le-champ légèrement oxidé, & donne beau- coup d’oxide noir ou d 'éthiops martial ; mais je crois qu’on doit préférer à tous ces procédés celui de M. JolTe, qui efl d’une exécution très- S ij 27 6 É L É M E N S facile & dont i’ufage ne peut infpirer aucune crainte. Comme on fe fert fouvent de fer pour ob- tenir le gaz nitreux , il eff important d’obferver ici que ce gaz n’elt jamais le même , & qu’il diffère beaucoup fuivant les différentes circonf- tances de la diffolution , la nature de l’acide plus ou moins chargé d’azote & d’oxigène , l’état du fer plus ou moins avide d’oxigène , la diverfe température , &c. £n général le gaz préparé par ce procédé contient toujours une quantité plus ou moins confîdérable d’azote , parce que le fer eff un des corps qui abforbe le plus d’oxigène 8c qui en prend fur-tout des quantités différentes , fuivant fa nature & fon état métallique ; les effets du gaz nitreux dégagé par ce métal , font donc plus ou moins incer- tains dans les expériences eudiométriques. CeLte vérité applicable à tous les corps qui féparent le gaz nitreux de l’acide du nitre , démontre le peu de confiance que l’on doit avoir dans les effais de l’airpar les eudiomètres à gaz nitreux; aufïi les épreuves par les fulfures alkalins font- elles beaucoup préférables. L’acide muriatique étendu d’eau , diffout le fer avec rapidité ; il fe dégage de cette diffolu- tion une grande quantité de gaz hydrogène pro- duit par la décompofition de l’eau , comme dans d’Hist. Nat. et de Chimie. 277 la diffolution de ce métal dans l’acide fulfuri- que. On avoit cm autrefois que le gaz hydro- gène produit par l’adion du fer fur l’acide mu- riatique , étoit different de celui dont le déga- gement accompagne la diffolution fulfurique. O11 penfoit que ce fluide élaflique étoit un des principes de l’acide muriatique ; mais depuis la découverte de la décompofition de l’eau par le fer , il eff prouvé que cet acide dont on ne connoît pas encore la nature , n’eff pas la caufe de la produdion du gaz hydrogène , & que c’ert à l’eau qu’elle eff due ; puifque l’acide relie entier & fans décompofition , & exige la même quantité d’alkali pour être faturé après la diffolution qu’avant. Cette diffolution du fer par l’acide muriatique , produit beaucoup de chaleur ; elle continue avec la même force , jufqu’à ce que cet acide foit faturé ; une por- tion du fer fe précipite en véritable éihiops , comme dans toutes les autres diflolutions. Lorf- qu’on l’a filtrée , elle eff d’une couleur verte , tirant fur le jaune; elle eff beaucoup plus ffable que les deux précédentes ; renfermée dans un flacon bien bouché , elle ne dépofe point d’o- xide de fer. J’en ai confervé pendant hyit ans* qui n’a'dépofé qu’une très-légère pouffière d’un jaune pâle; fi au contraire on la laiffe à l’air, elle dépofe en quelques femaines prefque tout S iij 2jS Élémen s le fer quelle contient , & ce précipite efl d’une couleur d’autant plus claire que le contact de l’air eft plus multiplié ; il elt démontré aujour- d’hui que cette précipitation qui a également lieu dans toutes les autres difTolutions de fer, ed due à l’oxigène atmofphérique abforbé par le métal qui s’oxide de plus en plus, comme je l’avois foupçonné 8c annoncé en Voyez mes Mémoires de Chimie. ) , Stahl avoit annoncé que dans la combinaifon du fer avec l’acide muriatique , cet acide pre- noit les caraétères de celui du nitre ; mais ce fait n’a été obfervé par aucun chimide : il paroît que Stahl ne s’en étoit rapporté qu’à la couleur jaune de cette didolution, & à l’odeur qu’elle répand ; odeur en effet un peu différente de celle de l’efprït de fel , & qui fe rapproche de celle de l’acide muriatique oxigéné. La didolution de fer par l’acide muriatique évaporée, ne cridallife pas régulièrement. M. Monnet a obfervé que fi on la laide refroidir lorfqu’elle eft en confidance firupeufe , elle forme une efpcce de magma , dans lequel on entrevoit des cridaux aiguillés 8c applatis qui font très-déliquefcelis. Ce magma fe fond à un feu très-doux ; en le chauffant davantage , il fe décompofe , mais moins facilement que le ni- trate de fer , 8c il prend une couleur de rouille d’H i st. Nat. et de Chimie. 279 lorfqu’il eft fec. Il s’en dégage de l’acide mu- riatique , que l’on peut obtenir par la diftilla- tion , & qui , fuivant la remarque de Brandt » entraîne avec lui un peu d’oxide de fer. M. le duc d’Ayen , dans un des quatre excel- lens Mémoires qu’il a donnés à l’académie fur les combinaifons des acides avec les métaux , a examiné en détail ce qui fe pafie dans cette décompofition du muriate de fer à la cornue. Cette opération lui a fourni des produits très- finguliers ; d’abord un phlegme légèrement aci- dulé à une chaleur douce; l’acide muriatique s’eft donc concentré, & fon gaz beaucoup plus volatil que l’eau , a été en partie fixé par le fer. A une chaleur beaucoup plus forte , une partie de cet acide a été enlevée avec un peu de fer, & il s’eft formé quelques criftaux non déli- quefcens dans le ballon. Il s’eft fublimé en même-tems à la voûte de la cornue des crif- taux très-tranfparens Sc en forme de lames de rafoirs , qui décompofoient la lumière comme les meilleurs prifmes , 8c offroient de fort celles nuances de rouge , de jaune , de veit & de bleu. Il reftoit au fond de la cornue un fel fliptique 8c déliquefcent, d’une couleur brillante d une forme feuilletée , qui reffembloit pai faitement à l’efpèce de talc à grandes lames , qu’on ap- pelle improprement verre de Mofcovie. Ce 2"° E L Ê M E N S deiniei Tel expofé à un feu violent , dans une cornue de grès, s’elt décompofé & a fourni une fublimation encore plus étonnante par fa nature que les premiers produits. C etoit une matière opaque, vraiment métallique, qui, exa- minée au microfcope, préfentoit des criftaux réguliers ou des tranches de prifmes hexago- nes , que M. le duc d’Ayen compare auxcar- îeaux dont on garnit le plancher des chambres. Ces cnflaux etoient aufîi brillans que l’acier du poli le plus vif, & l’aimant les attirait affez for- tement : c’étoit du fer en partie réduit & fubli- mé ( i )• L’art paraît ici imiter la nature qui fu- blime l’oxide noir de fer par le feu des volcans , fous la forme de lames brillantes & polies, com- me de l’acier. Telle paraît être au moins l’origine du fer fpéculaire du mont d’Or , & de celui de Volvic, qui d’après les obfervations bien faites ( i ) J ai dans mon cabinet une mine de fer noir , qui offre de petites lames très-brillantes , d’une demi-ligne de largeur , dont la forme approche beaucoup des criflaux obtenus par M. le duc d Ayen. Ce font de petites écailles très-minces , dun gris de fer très - éclatant , pofées de champ , qui s’entrecroifent en toutes fortes de fens , & qui font difperfees dans un quartz opaque rougeâtre , ou dans une efpece de jafpe groffier. Ce joli morceau vient de Lorraine, Le fer de Framont elï de la même nature. d’Hist. Nat. et,de Chimie. 281 cîe M. de l’Arbre , médecin de Riom , fe trouve toujours dans des fentes de laves. On voit par ces détails combien la chimie elî riche en phénomènes finguliers , & com- bien cette belle fcience promet de découvertes à ceux qui voudraient faire des expériences avec toute 1 exaditude & toute l’étendue que M. le duc d’Ayen a mifes dans fes recherches. N’oublions pas d’obferver que cette rédudion au fer favonfe la dodrine des gaz , & qu’on en obtiendroit peut-être de femblables de beau- coup d’autres diflblutions métalliques traitées par le même procédé. La didolution muriatique de fer ed décom- pofee par la chaux & par les alkalis , comme toutes les dilTolutions martiales ; mais ces pré- cipites font moins altérés , 8c peuvent fe réduire très-facilement , fur-tout ceux qui font produits par les alkalis caufliques. J’ai déjà fait obfer- ver que cette combinaifon fournifloit Yéthiops ou 1 oxide noir de fer le plus pur par la préci- pitation. Les fui fu res alkalins , le gaz hydro- gène fulfuré & les adringens la décompofent comme les deux autres ; enfin , les alkalis pruf- fiens ou les pruffiates alkalins , en précipitent un bleu très-beau. L eau chargée d’acide carbonique diflout facilement le fer ; il fuffit pour opérer cette 2%2 É L É M E N S combinaifon , de mettre de la limaille dans cet acide liquide , de de laiffer le mélange en di- geüion pendant quelques heures. Cette liqueur filtrée a une faveur piquante & un peu flipti- que. MM. Lane & Rouelle ont reconnu cette propriété dans l’acide carbonique. Beigman , qui nommoit cette combinaifon fer aere , dit qu’expofée à l’air, elle fe couvre dune pelli- cule irifée ; quelle eft décompofable par les alkalis purs ; mais que ces fels faturés de cet acide , n’y opèrent pas le même effet. Cette difiolution verdit le firop de violettes, & donne du bleu de Pruffe très-brillant' avec le pruffiate calcaire ; elle précipite de 1 oxide de fer brun , lorfqu’on la laifle expofée à 1 ait , ou lorfqu’on la chauffe. Nous donnons à cette combinaifon le nom de carbonate de fer. Le fer a beaucoup de tendance pour s unir 1 a- eide carbonique. La nature nous le piéfente très-fréquemment dans cet état ; les mines de fer limoneufes , le fer fpathique , paroiff nt être en grande partie formés par cette combi naifon. Les eaux minérales ferrugineufes con- tiennent fouvent le fer dans l’état de carbonate de fer. Ce fel , féparé de l’eau de fec, eft peu foluble dans ce fluide ; mais il fe diffout en grande quantité dans l’acide carbonique liquide , dont il fe précipite à meftire que 1 acide d’Hist. Nat. et de Chimie. 283 volatilife. On ne connoît point l’adion de l’a- cide boracique & de l’acide fluorique fur le fer. Ce métal décompofe très-bien les fels fulfu- riques , & en particulier les fulfates de potafle & de foude. J’ai traité ces fels par le fer dans un creufet , 8c je les ai trouvés enfuite dans l’état de fulfures ; la leffive de cette efpèce de fulfure efl d’un verd extrêmement foncé. Quel- ques gouttes d’acide font difparoître très-promp- tement la couleur de cette efpèce de teinture métallique. La plus grande partie du fer oxidé par J’oxigène de l’acide fuffurique , relie fans fe dilToudre dans l’eau de la leflive , & les aci- des dégagent de cet oxide une grande quantité de gaz hydrogène fulfuré. Le fer fait détoner le nitre. En projetant dans un creufet bien rouge un mélange de parties égales de limaille de fer & de nitre bien fec , il s excite au bout de quelque tems un mouvement tres-rapide ; il s’élève du creufet beaucoup d’étincelles très-éclatantes. Lorfque la détonation efl finie , le creufet contient un oxide de fer rougeâtre , dont une petite por- tion efl combinée avec l’alkali • en lavant cette matière l’eau difiout l’alkali , 8c l’oxide de fer refte fur le^ filtre. On appeloit autrefois cet oxide fafran de mars de Z; velfer. Il efl d’un jaune rougeâtre , peu diffoluble dans les acides. 284 É L É M E N S L’alkali qu’on en a féparé par le lavage , eft cauftique , fuivant la plupart des chimiftes, qui penfent que les oxides métalliques agi lient com- me la chaux pure fur ce Tel chargé d’acide carbonique ( 1 ). Le fer décompofe très-bien le muriate am- moniacal. Deux gros de limaille de fer, triturés avec un gros de ce fel , ne laiffent point dégager de gaz ammoniac. Bucquet , qui a diflillé ce mélange à l’appareil pneumato - chimique au mercure , en a obtenu cinquante-quatre pouces cubes d’un fluide aériforme , dont moitié étoit du gaz ammoniac , & l’autre moitié du gaz hydrogène. Quatre onces de la même limaille & deux onces de muriate ammoniacal , diftillés à la cornue avec un récipient ordinaire, four- niflent environ deux gros d’ammoniaque liquide chargée d’un peu de fer , qu’elle laide bientôt dépofer dans l’état d’oxide. Le réfidu de ces opérations eü du muriate de fer. La décom- pofition du muriate ammoniacal par le fer. ( 1 ) Il faut obferver que depuis la théorie de Black lur la caufticité de la chaux & des alkalis , on n a pas fait les expériences néceiïaires pour affurer cette parité d aftiort entre la chaux proprement dite & les oxides métalliques. On ne peut donc rien dire d’exaét fur cet objet , avant que l’expérience ait prononcé. d’H i s t. Nat. et de Chimie. 28 y efl fondée fur ce que ce métal s’unit très-bien à l’acide muriatique • ce qui efl prouvé par le dégagement du gaz hydrogène que l’on obferve dans cette expérience. On prépare en pharma- cie , avec le muriate ammoniacal & le fer, un médicament que l’on appelle fleurs de Jel am- moniac martiales , ou Ens mardis. On mêle en- femble une livre de muriate ammoniacal en poudre , & une once de limaille de fer ; on expofe ce mélange dans une terrine recouverte d’un pareil vaifleau , à un feu capable de faire rougir la partie inférieure de cet appareil. En cinq à fix heures il fe fublime une matière jaune que l’on conferve dans un flacon ; ce font les fleurs martiales. Cette fubflance efl formée en très-grande partie de muriate ammoniacal fu- blimé avec un peu d’oxide de fer. Comme le métal décompofe très-bien ce fel , il faut n’en employer qu’une petite quantité , afin que la plus grande partie du fel fe fublime en nature. La portion d’oxide de fer qui efl volatilifée, colore le muriate ammoniacal , qui fe fublime en même-tems. L’oxide de fer décompofe ce fel mieux que le métal lui-même , puifqu’il en dégage l’am- moniaque à froid. Celle qu’on en obtient par la diflillation , elt très-fluide & aflez cauflique. J’ai eu de l’ammoniaque qui faifoit une légère £ L É M E N s effervefcence avec les acides , en diflilknt le muriate ammoniacal avec la moitié de fon poids de fafran de mars apéritif , ou oxide de fer pré- paré par le contad de l’air, & qui contient de l’acide carbonique. Dans cette expérience l’a- cide carbonique dégagé du fei , s elt uni à 1 am- moniaque , qu’il a rendue effervefcente. Le fer eü altéré dans fa couleur par le gaz hy- drogène; mais cette altération n’a pas encore été affez examinée. L’oxide noir de fer n’eh pas dé- compofé par ce gaz; mais les oxides bruns ou rou- ges le font facilement & paffent à l’état d’oxide noir , parce qu’ils cèdent à l’hydrogène la quan- tité d’oxigène furabondante à celle qui met le fer dans l’état d’oxide noir. Le foufre fe combine rapidement avec le fer. Un mélange de limaille de fer & de foufre en poudre , humecté avec une petite quantité d’eau , s’échauffe au bout de quelques heures ; alors il fe gonfle , s’agglutine , abforbe l’eau , fe fend avec un bruit ou pétillement fenfible , 8c exhale beaucoup de vapeurs aqueufes accom- pagnées d’une odeur fétide 8c qui efl très- femblable à celle du gaz hydrogène fulfuré. Si le mélange eh fait en grande maiïe , il s’enflamme en vingt-quatre eu trente heures , 8c dès que les vapeurs aqueufes ont ceffé. Sur la fin de l’adion de ces fubllances l’une fur l’autre , la d’Hist. Nat. et de Chimie. 287 chaleur va en augmentant avec beaucoup de rapidité , & l’inflammation a bientôt lieu. L’o- deur efl alors bien plus exaltée • elle paroît être due à du gaz1' hydrogène produit parla réaéfion du foufre & du fer fur l’eau. Cette odeur efl mêlée de celle des fulfures alkalins 8c de celle du gaz hydrogène pur; c’efl fans doute à ce gaz dégagé en grande quantité , qu’efl due l’inflam- mation quon obfetve dans cette expérience 5 puifque la flamme efl beaucoup plus vive que celle du foufre. Elle s’élève à un pied , fuivant le rapport de M. Baumé , qui a obfervé ce phenomene fur un mélange de cent livres de limaille de fer 8c d autant de foufre en poudre j elle n’a duré que deux ou trois minutes. Le mélange refla embrafé 8c rouge pendant qua- rante heures. M. Baumé explique cette inflam- mation par le dégagement du phlogiftique du foufre en feu libre. Lémery Je père a donné le nom de volcan artificiel a cette expérience, 8c il a imaginé que les feux qui s’allument dans 1 intérieur de notre globe 8c qui en foulevant fa fui face produifent les tremblemens de terre & les volcans , étoient dus à une combuflion femblable des pyrites entaflées & humeétées. On peut imiter ces terribles effets , fuivant le même chimifle, en enfouiflant dans la terre un mélange de foufre en poudre 8c de limaille de 288 É L É M E N S fer , réduit en pâte avec l’eau , & en le recou- vrant de terre que l’on bat fortement. Cette expérience n’a pas réuffi à Bucquet , qui l’a répétée avec beaucoup d’exaditude ; les re- cherches de M. Prieflley fembloient en indiquer la raifon. Ce phyficien a obfervé que le mé- lange de fer & de foufre humedé abforboit une certaine quantité d’air, qui pouvoitparoître néced'aire pour fou inflammation. Cependant cette inflammation peut avoir lieu fans le con- tad de l’air. En effet il paroît que le fer très- divifé réagit fur ce fluide , s’empare de fon oxigène qui le calcine & laiffe dégager le gaz hydrogène qui prend la forme élaftique en rai- fon de la chaleur féparée de l’eau. Ce gaz dif- fout aufli une portion du foufre & forme du gaz hydrogène fulfuré. Il y a beaucoup d’analogie entre cette corn- binaifon du fer & du foufre par la voie hu- mide , 8c l’efflorefcence des pyrites , qui pro- . duit du gaz hydrogène fulfuré , lorfqu’elles font humedées d’eau. Le foufre fe combine très-aifément au fer par la fufion ; il en réfulte un fulfuré de fer ou une pyrite difpofée en aiguilles. Comme le foufre augmente beaucoup dans ce cas la fufî- bilité du fer, on peut faire fondre fur-le-champ ce métal à l’aide de ce corps combuflible. Il faut ’ I d’Htst. Nat. et de Chimie. 289 faut pour cela faire pafler une petite barre de fer rougi à blanc dans un canon de foufre , & recevoir dans de l’eau la matière fondue qui s’écoule. On retrouve dans ce fluide des glo- bules noirâtres cafjans , femblables à des py~ rites, & formés comme elles , de petites pyra- mides très-alongées & concentriques. Le fer donne avec l’arfenic un alliage aigre caffant & trcs-peu connu. II paroît que ce demi- métal exifle dans beaucoup de mines de fer, & qu il efl la caufe du fer caffant à, chaud. Avec le cobalt le fer conflitue un métal mixte à petits grains ferrés, dur & très-difficile à caffer. Il ne paroît pa.s fufceptible de s’unir au bifmuth. Combiné à l’antimoine, il préfente un alliage dur , à petites facettes , que le marteau n’ap- platit que légèrement. Le fer a plus d’affinité avec le foufre que n’en a ce demi- métal ; il efl conféquemment fufceptible de décompofer le fulfure d antimoine. Pour opérer cette décom- pofition , on fait rougir dans un creufet cinq onces de pointes de clous de maréchal; on y jette une livre de fulfure d’antimoine concafle; on donne promptement un bon coup de feu, afin de faire fondre le mélange ; lorfqu’il eft bien fondu , on projette une once de nitre en Tôt ne II L T apo É L È M E N S poudre , pour faciliter par une bonne fufion la réparation des fcories d’avec le demi-métal ; on laide refroidir le mélange , & on trouve dans le creufet de l’antimoine qui ne contient pas de fer. Si l’on a employé une partie de fer fur deux de fulfure d’antimoine , le demi - métal fera allié de fer. Les fcories que l’on trouve au-deffus de l’antimoine allié de fer & préparé avec le nitre & le tartre , ont une couleur jau- nâtre femblable à celle du fuccin , en raifon du fer qu’elles contiennent. Stahl les a nom- mées , à caufe de cela , fcories fuccinées. Il preferit de les réduire en poudre , de les faire bouillir dans l’eau qui entraîne la partie la plus divifée de cette pouflicre ; on la décante , on la filtre , & on fait détoner trois fois avec le nitre la poudre qu’elle a laifïee fur le filtre. On la lave , on la fait fécher ; c’eft le fafran de mars antinionié apéritif de Stahl. Il eft encore incertain fi le zinc peut s’unir avec le fer. Malouin , dans fon mémoire fur le zinc ( Académie , Jjqz ) a fair voir que ce demi- métal pouvoit s’appliquer , comme l’étain, à la furface du fer , & la défendre du contaft de l’air , ce qui indique que ces deux matières métalliques font fufceptibles de fe combiner. Il paroît que le nickel s’allie très-intimément au fer , puifqu’on ne peut jamais féparer entie- D5Hr$T. Nat. et de Chimie. 291 renient ces deux fubflanCes métalliques, comme l’a démontré Bergman. Le mercure ne contracte aucune union avec le fer dans fon état métallique. On a tenté en vain d’unir ces deux métaux immédiatement ; mais on y eft parvenu en les préfentant l’un à lautie dans 1 état d’oxides. Navier a obfervé qu on obtenoit un précipité neigeux blanchâ- tte , en mêlant une diflblution de fer & de mercure par l’acide fulfurique ; & en évapo- rant le mélange , il fe forme dans cette opéra- tion des petits c riüaux plats très légers & fem- blables a l’acide boracique ; Navier s’eft alTuré que ces ctillaux font une combinaifon de fer 8c de mercure; Le plomb ne peut contrarier aucune union avec le fer. Le fer & l’étain paroiffent erre fufceptibles de s’unir par la fufion. L’art qui confifle à en- duite la furface du fer d’une couche d’étain, ou la préparation du ftr-blanc , indique que cette combinaifon a lieu. Pour étamer le fer , il faut que la furface de ce métal foit très- propre & brillante; pour cela on le décape avec un acide , quelquefois on le lime, ou bien on l’enduit de lel ammoniac : on le plonge enfuit e verticalement dans une chaudière pleine d’étain fondu ; on le retourne afin de multiplier ' Tij op2 ÉlÉMENS le contact ; 8c lorfqu’il elt affez étamé , on le retire 8c on le frotte avec de la fciure de bois ou du fon , pour enlever le fuif ou la poix dont on avoit recouvert l’étain fondu , 8c qui / s’eft appliqué à la furface du fer étamé. Si l’on étame le fer réduit en lames minces comme la tôle , l’étain ne s’appliquera pas feulement à fa furface, mais il pénétrera dans fon inté- rieur , il fe combinera à routes fes parties ; & en le coupant , on obfervera la même couleur branche dans fon milieu qu’à fa furface ; ce qui indique que le fer-blanc bien fait elt une vraie combinai fon chimique. D’ailleurs , il elt plus malléable que le fer , & l’on en fabrique des vaiffeaux d’une forme qu’il feroit impolïible de faire prendre par le marteau à ce métal pur. Mous avons vu au commencement de ce chapitre , que le fer abforbe facilement le chai- bon par la chaleur, 8c qu’il forme la fonte 8c V acier par fon union avec ce corps combulh- ble , avec cette différence qu’il contient de l’oxi- gène dans le premier de ces compofés , 8c qu il n’en contient pas dans le fécond. Dans l’un 8c l’autre le fer elt en quantité beaucoup plus grande que le charbon. L’analyfe chimique qui doit tant aux travaux de Schéele , a prouvé a ce chimilte que la plombagine , efpèce de minéral dont la nature 8c le rang qu’elle mérite parmi les mi t d’Hist. Nat. et de Chimie. 293 néraux, ont Iong-tems embar rafle les phyficiens, n’efl qu’une combinaifon naturelle de beaucoup de charbon & de très -peu de fer. Son hilloire doit donc appartenir à celle de ce métal. La plombagine, a été Iong-tems confondue avec la molybdène (1). Pott efl le premier qui ait prouvé que l’une & l'autre de ces fubilances ne contient point de plomb , comme on l’a- voit cru anciennement. Les noms que la mo- lybdène & la plombagine avoient reçus , étoient très-propres à perpétuer ces erreurs. On les nommoit l’une Sc l’autre & indiflindertient mine de plomb , crayon £ Angleterre , plomb de mer , cérufe noire , mica des peintres , crayon de plomb , fauJfe g&lêne , talc , blende , potelot. Le carbure de fer natif ( nom que nous avons- fubflitué à celui de plombagine , & qui exprime la nature de ce compofé ) exifle dans l.es mon- tagnes , fouvent entre des lits de quartz , de feld-fpath , d’argile ou de craie , fous la forme de morceaux arrondis irréguliers, ou de'rognons de différentes grofleurs , dont les plus volumi- neux pèfent depuis huit jufqu’à dix & onze li- vres; il y en a aufli de difleminés en frasmens J O ( 1 ) Il efl reconnu que ce que Ton appellent la molyb- dène efl l’oxide d’un demi-métal particulier acidifiable nous en avons fait l'hiftoire à l’article des demi-métaux* 1]J I É L É M E N S beaucoup plus petits , & quelquefois même en couches ou en lits. Les habitans de Bleoux, hameau fi tué près de Curban dans la haute Provence, exploitent du carbure de fer natif , ou de la plombagine qui fe trouve en couches de quatre pieds d’épaifleur entre deux lits d’atv gileg cette matière fe vend à Marfeille. M. de la Peyroufe compte le carbure de fer dans les minéraux des Pyrénées -, on en trouve en Efpa- gne & en Allemagne; il y en a une mi e fort abondante dans le duché de Cumberland en Angleterre ; on en fabrique des crayons fort efiimés. L’Amérique feptentrionale & le Cap de Bonne Efpéranc.e en fourniflent aufij quel- ques échantillons. On a trouvé depuis quelque tems de la plombagine criflaüifée en odaëdres. Le carbure de fer efl luifant & d’un bleu noirâtre ; il efl: gras au toucher & préfente une cafTure tuberculeufe , tandis que le molybdène a une cafiure lamelleufe ; fa qualité onétueufe 8c favoneufe l’avoit fait regarder comme une efpèce d’argile impure par quelques naturalifles. Il tache les mains 8c laifle fur le papier une trace noirâtre que tout le monde connoît dans le crayon noir. ‘ Le carbure de fer n’éprouve aucune altéra- tion par la chaleur dans des v ai (féaux fermés. M. Pelletier qui a fait des recherches fur cette d’Hist. Nat. et de Chimie. 295* fubftance , après Schéele , & qui n’a obtenu aucun réfultat different , en a expofé-200 grains dans un creufet de porcelaine bien bouché au feu de la manufacture de Seves • ce minéral n’a perdu que 10 grains. Mais lorfqu’on le chauffe avec le contad de l’air , il brûle & s’oxide fans laitier prefque de réf du. MM.Quifl, Gahn & Hielm avoient obfervé que 100 grains traités ainfi dans une capfule fous la moufle , ne laiffoient que 10 grains d’oxide ferrugineux. Cette oxidation eft une combufiion lente Sc très- difficile à opérer ; elle ne réuffit pas dans un creufet ordinaire , mais il faut pour cela expofer une couche mince de carbure de fer dans un vaiffeau plat à l’aétion d’un grand feu & en renouveller fou vent les furfaces. L'air, l’eau & les fubftances terreufes n’ont aucune action fur le carbure de fer. Les alkalis ont une grande aétion fur cette fubftance. Si l’on chauffe dans une cornue avec l’appareil pneumato-chimique une partie de carbure de fer avec deux parties d’alkali fixe cauftique fec, ou de pierre à cautère , la petite quantité d’eau contenue dans le fel fuffit pour favorifer la combufiion de cette fubftance ; on obtient du gaz hydrogène carboné , l’alkali fe trouve chargé d’acide carbonique , & il ne relie pref- que rien du carbure de fer. Cette expérience } Tiv 296 É L É M E N S ainfï que la détonation «vec le nitre dont il fera quefiion plus bas , ont fait penfer à Schéele que cette matière elt une efpèce de foufre formé d^aude aérien ou carbonique , 8c de phlogillique. Cette théorie fera difcutée, lorf- que nous aurons examiné les autres phénomè- nes que préfente ce corps combuflible avec les acides & les fels neutres. L’acide fulfurique n’a aucune adion fur le carbure de fer, füivant Schéele. M. Pelletier a obfervé que 100 grains de cette fubftance 8c 4 onces d’acide fulfurique concentré, digérés à froid pendant plufieurs mois , ont donné à cet acide une couleur vert® , & la propriété de fe congeler à un très-léger degré de froid. Diftiflé fur le carbure de fer '’cet acide pâlie à l’état fulfureux , en brûlant jne partie de cette fubf- tance. L’acide nitrique ne l’altère en aucune ma- nière. L’acide muriatique en diiïbut l’alumine 8c le fer , & fert à la purifier , fuivant M. Eer- thollet. M. Pelletier a employé le même pro- cédé pour avoir du carbure de fer pur. Quant à l’alumine que l’acide muriatique enlève au carbure de fer , Schcele remarque que celle qu’il en a féparée dans fon analyfe , appartenoit: au creufet dans lequel il l’avoit traitée aupa- ravant. d’Hist. Nat. et de Chimie. 297 Le carbure de fer fondu avec quatre parties de fulfate de potaffe ou de fulfate de fonde , donne des fulfures alkalins & eü entièrement dëcompofé. Le nitre détonne à l’aide de cette fubflance ; il faut dix parties de ce fel pour en brûler com- plètement une partie. L’alkali fixe qui refie après cette opération , fait une vive effervefcence avec les acides , & fe trouve mêlé d’une petite quan- tité d’oxide de fer. Le même effet a lieu avec le nitrate de foude & avec le nitrate ammonia- cal. M. Pelletier a obfervé que dans cette der- nière opération l’ammoniaque fe dégage com- biné avec une portion d’acide carbonique. Le carbure de fer n’agit point fur le muriate de potaffe ni fur le muriate de foude. Quand on le diflille avec le muriate ammo- niacal , il donne des fleurs ammoniacales mar- tiales. Chauffé avec du foufre dans une cornue, le foufre fe fublime feul 8c fans altérer en au- cune manière le carbure de fer. Tous ces faits prouvent que cette fubflance n’efl point une terre ni une mine de plomb , comme on l’avoit cru ; mais quant à la théorie de Schéele qui la regarde comme une combi- naifon d’acide carbonique 8c de phlogiftique , elle ne peut pas être admife ; i°. parce que ce chimifte n’a point déterminé exaâement la quan- 2pS ft Élémens . tité de cet acide qu’il en a obtenu ; 2°. parce qu’il n’a pas pu faire artificiellement de la plom- bagine , en combinant de l’acide carbonique avec une matière combuflible. D’ailleurs, les deux fubflances avec lefquelles Schéele a changé le carbure de fer en acide carbonique , opèrent ce changement en fourni ffàrit de Pair vital qui fe combine avec la matière inflammable de cette fubftance , & qui donne naifiarice à cet acide par la fixation de Poxigène ; car telle efl la ma- nière dont l’acide nitrique convertit la tungftène , l’arfenic & le fucre en acides. Quant à l’alkali fixe cauflique qui change auffi le carbure de fer en acide carbonique , c’efl manifeftementen rai- fon de Peau que cet alkali contient toujours, 8c qui brûle la matière combuflible, comme elle fait le fer & le zinc ; cette opinion efl confir- mée par le gaz hydrogène que l’on obtient pendant l’adion réciproque de l’alkali 8c du car- bure de fer. On pourroit la confirmer encore davantage, en faifant paiïer de l’eau en vapeurs à travers cette fubflance rougie dans un tube de cuivre ou de porcelaine, comme on le fait pour le fer & pour le zinc. Quoique cette ex- périence n’ait point encore été faite , je crois pouvoir avancer que tout le carbure de fei^ fera détruit & converti en acide carbonique , & que le produit de cette opération fera du gaz d’Hist. Nat. et de Chimie. 299 hydrogène carboné, & mêlé d’une grande quan- tité d’acide carbonique. Il paroitroit donc na- turel d’en conclure que l’acide carbonique eft un compofé de plombagine &d’oxigène; mais comme nous favons par beaucoup d’autres ex- périences, que l’on ne peut former cet acide qu’en combinant le charbon avec l’oxigène,il en réfulte que fa plombagine contient beaucoup de charbon , & qu’elle ell même prefqu’entiè- rement formée par ce corps combuftible. Quel- ques traits raftemblés ici fur les propriétés du charbon comparées à celles du carbure de fer, conlirmeront certe afiertion. Le charbon de plufieurs matières végétales eft brillant & a un afped métallique comme le carbure de fer ; il tache les mains & laide des traces fur le papier comme cette matière , & fou tiflu eft grenu & caftant comme le lien. Les charbons les plus brillans , comme ceux de quelques fubftances animales , font aufti diffi- ciles à brûler que le carbure de fer , qui de- mande beaucoup d’agitation , une grande cha- leur , & un conta# de l’air très-multiplié pour fe cônfumer ; on trouve du fer dans l’un 8< dans l’autre ; enfin , ces deux fubftances font fufceptibles de fe changer en acide carbonique par la combuftion ; n’eft-il pas permis de re- garder d’après cela la plombagine comme du 300 E L É M E N1 S charbon formé dans l’intérieur du globe , ou enfoui dans la terre f Ne pourroit-on pas même penfer que cette matière fe forme par la com- binaifon de quelques principes minéraux , quoi- que prefque tous les chimiftes aient penfé qu’il n’y avoit que les matières organiques qui pou- voient fe convertir en charbon. Cette den ère idée ne feroit confirmée ou détruite que par une étude fuivie de l’état du carbure de fer dans la nature , des circonftances de fa formation , des altérations qu’il y éprouve. Depuis ces con- noiffances acquifes fur le carbure de fer, par les recherches de MM. Vandermonde , Monge 8c Berthollet fur les différens états de ce métal , ils ont découvert qu’il fe forme tous les jours dans la fuiion de la fonte , une fubflance tout- à-fait femblable au carbure de fer natif; il ell rare que les cuillers avec lefquelles on puife la fonte pour la couler, n’en foient enduites. Les déblais des hauts fourneaux que l’on répare , en offrent auffi en maffes criftallifées ; on peut ef- pérer qu’on en préparera quelque jour d’artifi- ciel pour le befoin des arts. Le carbure de fer eft d’un ufage affez étendu. On en fait des crayons ; les plus eftimes vien- nent d’Angleterre. C’efl à Refwick dans le du- ché de Cumberland , qu’on tire celui qui efl employé pour faire les crayons. On fcie les d’Hist. Nat. et de Chimie. 301 rognons de carbure de fer en petites tablettes minces, on les ajufle dans des cylindres de bois garnis de rainures , & on les coupe de manière que la cavité de ces cylindres foit rem- plie, La poufficre produite par le fciage & la coupure des tablettes de carbure de fer, fert à faire des crayons de qualité inférieure , 8c tels qu’on en débite beaucoup à Paris ; on la mêle avec une pâte de gomme , ou bien on la fond avec du foufre ; on reconnoît ces faux crayons d’Angleterre , foit parce qu’ils fe fondent 8c brûlent à la flamme d’une bougie , foit parce qu’ils fe féparent en fragmens 8c tombent même en poudre en les laifTant tremper dans l’eau. Le carbure de fer d’Allemagne efl aulTi emplojré pour faire des crayons ; on y ajoute différens corps étrangers , comme du charbon , du fou- fre , &c. En Angleterre la pouflière très-fine de car- bure de fer fert à enduire les rouages de quel- ques inflrumens , 8c elle facilite leurs mouve- mens par fa qualité grafTe 8c ondueufe. Un des principaux ufages de cette fubfîance, c’efl de fervir d’enduit au fer qu’on veut dé- fendre de la rouille; les tuyaux de poêle, les plaques dé cheminée 8c autres uflenfiles expo- fés à i’adion du feu 8c de l’air , font recouverts de carbure de fer en pouffière , que l’on appli- 302 É. L Ê M E N S que à leur furface par le (impie frottement avec un pinceau. Homberg a décrit en 16^9 un procédé pour donner la couleur plombée aux ultenfiles de fer. Il confiffeà mêlera huit livres d’axonge fondue avec quatre onces de camphre , une quantité fuffifante de carbure de fer , & à enduire de cette compofition le fer chauffe , jufqu’à ce qu’on ait de la peine à le tenir; on a foin d’efluyer les uffenfiles de fer avec un linge , après les avoir recouverts de cette efpèce de vernis. Les ouvriers qui fabriquent le plomb de chaffe , l’adoocifTent & noirciflent en même- tems fa furface , en le roulant dans du carbure de fer en poudre. Il fait auffi partie de la com- pofition que l’on applique fur les cuirs à re- pafler les rafoirs. Enfin , il entre dans la fabri- cation de quelques poteries noires d’Angleterre, & dans celle des creufets que l’on fait à Pafîaw en Saxe. M. Pelletier qui a bien décrit les divers ufa- ges du carbure de fer , s’eff fervLavec avan- tage d’un lut qu’il a préparé d’après Pott , avec une partie de cette fubftance , trois d’argile ordinaire , & un peu de bouze de vache cou- pée très-menue; ce lut foutient très -bien les cornues de verre qui fe fondent quelquefois, fans qu’il ait changé de forme. d!Hist. Nat. et de Chimie. 303 Les grands ufages du fer font fi étendus, & d’ailleurs fi connus , qu’il feroic inutile d’y in- iifiei . il efi feulement important de favoir qu’au- cun art. ne peut abfolument s’en paffer, & qu’il efi l’ame fie tous les arts , comme le dit Mac- quer. Les différentes modifications qu’il efi fufceptible de prendre , le rendent très-propre à la multiplicité des ufages divers auxquels on le defline. La fonte fert à couler des ufienfiles plus ou moins folides , plus ou moins réfîfians fuivant le befoin. La dureté 8c la ténacité des differentes efpèces de fer forgé, s’accordent très-bien avec les ufages variés auxquels on 1 applique. Il en efi de même des aciers ; la fineffe du grain 8c la trempe en conflituent de beaucoup d’efpèces , qui toutes trouvent leur application dans une infinité d’arts différens où elles conviennent. Les oxides de fer fervent à colorer en rouge ou en brun les porcelaines , les faïances , les émaux , &c. On les emploie auffi dans la préparation des pierres précieufes artificielles , & on les combine avec l’huile pour la peinture. Le fer fournit à la médecine un remède im- portant 8c auquel elle doit fouvent les plus grands fuccès. C’eff le feul métal qui n’ait rien de nuifible , & dont on ne puiffe pas redouter les effets. Il a même , comme nous l’avons vu , 304 É l É m e N s une telle analogie avec les matières organiques, qu’il femble en faire partie , & devoir fouvent fa production au travail de la vie , ou à celui de la végétation ; les effets du fer fur l’écono- mie animale , font allez multipliés. Il flimule les fibres des vifcères membraneux , & paroît agir fpécialement fur celles des mufcles dont il augmente le ton. Il fortifie les nerfs & donne à la machine affoiblie une force & une vigueur remarquables. Il excite plufieurs fécrétions , fur- tout celles des urines & celles qui fe font par une évacuation du fang. Il provoque les hémor- ragies naturelles , comme le flux menflruel 8c les hémorroïdes. Il augmente & multiplie les contradions du cœur , 8c par conféquent la force 8c la vîteffe du pouls. Il n’agit pas avec moins d’énergie fur les fluides. Il pafle facile- ment dans les voies de la circulation , 8c va fe combiner au fang auquel il donne de la denfité , de la conflftance , de la couleur, 8c /ju’il rend plus concrefcible ; il lui communique en même - tems une adivité telle qu’il pafle facilement dans les plus petits vaifleaux , qu’il flimule lui-même les parois des canaux qui le renferment, 8c qu’il porte par-tout la force 8c la vie. Les belles exoériences de M. Menghini, publiées dans les Mémoires de l’inflitut de Bo- logne , ont prouvé que le fang des perfonnes qui d’Hist. Nat. et de Chimie. 305- qui font ufage du fer , elt plus coloré & con- tient une plus grande quantité de ce métal qu’il n’en contient naturellement. Lorry , qui a porté dans l’exercice de la médecine cette finette d’ob- fervation , 8c ces grands appefçus qui caradc- rifent le favant profond & le médecin philo- sophe , a vu les urines d'un malade auquel il adminiftroit le fer très divifé , fe colorer mani- feftement avec la noix de galle. Ce métal eff donc tonique, fortifiant, ftomachique, diuré- tique, altérant , incifif, & on trouve réunies dans fon aélion les propriétés d’un grand nom- bre de médicamens. II reiïerre les fibres comme les affringeiis , il en augmente l’ofcillatiori , 8c il a fur beaucoup d’autres remèdes qui jouif- fent de la même vertu , l’avantage d’être plus confiant & plus durable dans fes effets , parce qu’il fe combine aux organes eux-mêmes par le moyen des fluides qui fervent à leur nutri- tion. Il convient donc dans tous les cas où les fibres des vifcères , celles des mufcles 8c même celles des nerfs , n’ont qu’une adion très-foible; dans la langueur de l’eflomac & l’inertie des intefiins , dans les foibleffes produites par ces caufes ; enfin , toutes les fois que les fluides font peuconfifians, peu concrefcibles, trop délayés, comme dans les pâles couleurs, la propenfion à Phydropifie, &;c. On l’emploie fous beau- Torne III. Y ^0(5 É l é m e n s coup de formes différentes ; tels fpnt la limaille porphyrifée , l’éthiops martial , les fafrans de mars allringent & apéritif, la teinture martiale alkaline de Stahl, les fleurs de fel ammoniac martiales, &c. Peut-être pourroit-on ajouter à ces médicamens le fer précipité des acides & rediffous par l’ammoniaque , le bleu de Pruffe propofé par MM. les chimiftes de l’académie de Dijon , &c. On fe fert à l’extérieur du ful- fate de fer , pour arrêter les hémorragies , &c. Le fer jouiffant de la propriété magnétique, ou l’aimant artificiel , a été compté parmi les corps qui produifent des effets très-finguliers fur l’économie animale. Suivant plufieurs au- teurs modernes, appliqué fur la peau, il calme les douleurs , il appaife les convulfions , il ex- cite de la rougeur , de la fueur , fouvent même une éruption de petits boutons ; il eft aufli ca- pable de rendre moins fréquens les accès épi- leptiques. On a même affuré que, laiffé dans de l’eau pendant douze heures , il communique à ce fluide la propriété purgative. Toutes ces affertions qu’on dit appuyées fur des faits , an- noncent affez aux phyficiens éclairés , quelle difficulté préfentent les expériences de phyfique animale. L’inertie entière d’un corps aimante ou armé de la puiffance magnétique , fur les autres corps qui ne font point fufceptibles d’ad- d’Hist. Nat. et de Chimie. 507 mettre en eux la même puiffance , exclut véri- tablement l’influence de l’aima ,t fur l’économie animale ; les médecins qui lui attribuent des effets aufli marqués , & conféquei muent des propriétés medicamenteures a fiez énergiques, ont été féduits & trompés par des changemens plus ou moins fenfibles , qui ont eu lieu dans le tems de l’application de l’aimant , & qui étoient dus aux forces propres des individus & aux effoits heuieux de la nature. Cette opi- nion efl d’autant mieux fondée , que c’eff fur- tout dans la ceffation ou le déplacement des douleurs & des convulfions , que la nature offre le plus d inconftance & d’irrégularité aux obfer- vateurs , & que c’eff fpécialement d’après des fymptômes plus ou moins analogues à ceux- là , qu’on a jugé des prétendues qualités médi- camenteufes de l’aimant. CHAPITRE XIX. $ Du Cuivre. jL E cuivre eff un métal imparfait, d’une cou- leur rouget fiez brillante, auquel les alchimif- tes ont donné le nom de Vénus, à caufe de la facilité avec laquelle i! s’unit & fe laiflfe altérer par un grand nombre de corps difiérens. il a Vij ^oS É L É M E N S une odeur défagréable qui fe manifefte , lorf- qu’on le frotte ou qu’on le chauffe; fa faveur efl: fliptique & nauféabonde , moins fenfible cependant que celle du fer. Ce métal eft dur, très-élaftique & très-fonore. 11 jouit d’un affez grand degré de ductilité ; on le réduit en feuilles très-minces & en fils très-tenus. Il perd entre un huitième Se un neuvième de fon poids à la balance hydroflatique. Sa ténacité eff telle , qu’un fil de cuivre d’un dixième de pouce de diamètre peut foutenir un poids de deux cens quatre-vingt-dix-neuf livres un quart avant de fe rompre. Sa caffure paroît compofée de pe- tits grains. Il eft fufceptible de prendre une forme régulière. M. l’abbé Mongèz définit fes criftaux des pyramides quadrangulaires , tantôt folides , tantôt compofées d’autres petites py- ramides femblables implantées latéralement. Le cuivre fe trouve dans la terre en diftérens états. Ses mines font très-multipliées ; on peut les rapporter toutes aux fuivantes. i°. Le cuivre natif ayant la couleur rouge, la malléabilité & toutes les autres propriétés de ce métal. On le diflingue en deux efpèces ; le cuivre de première formation , & le cui- vre de fécondé formation , ou de cémenta- tion. Le cuivre de première formation eft dif- perfé en lames ou en filets , dans une gangue d’Hist. Nat. et de Chimie. 309 prefque toujours quartzeufe. Il y en a dont les crifîaux odaëdres implantés les uns fur les au- tres , imitent une efpèce de végétation ; d’au- tres échantillons font en mafle & en grains. Le cuivre de cémentation efl ordinairement en grains ou en lames fuperficielles fur les pierres ou fur le fer ; ce dernier paroît avoir été dé- pofé dans des eaux chargées de fulfate de cui- vre , qui ont été précipitées par du fer. On- trouve le cuivre natif en plufieurs endroits de 1 Europe; a Saint -Bel dans le Lyonnois , à Norgberg en Suède, à Newfol en Hongrie 8c dans plufieurs contrées de l’Amérique. 2'. Le cuivre oxidé & minéraUfé par l’acide carbonique. On a plufieurs variétés de ce car- bonate de cuivre natif. A. Le cuivre rouge ou la mine de cuivre hépatique. Cette mine efl reconnoifTable à fa couleur rouge , fombre , femblable à celle des écailles qui fe détachent du cuivre rougi au feu , lorfqu’on le bat fous le marteau. M. Mon- net regarde cette mine comme un oxide de cui- vre naturel. Elle efl ordinairement mêlée de cuivre natif & de vert de montagne. Elle efl affez rare , quelquefois criflallifée en oélaë’dres ou en fibres foyeufes nommées fleurs de cuivre. B. Le cuivre terreux , le vert de montagne ou chiyfocolle verte. Cette mine efl un véritable Vüi 310 É L É M E N S oxide de cuivre , d’un vert plus ou moins (om- bre , affez lcgei , inégalement diftribué dans fa gangue. Il paroît être combiné avec l’acide carbonique , d’après l’anal) fe que M. l’abbé Fonrana a faite lut* la malachite. Cette mine eft quelquefois fort pure : on peut la diflinguer dans trois états. Le vert de montagne (impie , terreux ou im- pur , appelé auffi chryfocolle verte. Le vert de montagne crillallifé ou cuivre foyeux de la Chine ; cette mine , qui eft affez commune dans les Vofges & au Hartz , fe trouve au(Ti en Chine ; elle e(l très-pure & criflallifée en longs faifceaux foyeux allez fo- lides. Le vert de montagne en üalaâites , ou la malachite ; cette fubflance qu’on trouve affez fréquemment en Sibérie , ell compofée de cou- ches qui repréfentent des mammelons plus ou moins gros 5 quelques échantillons font formes d’aiguilles convergentes vers un centre commun. Les différentes couches n’ont pas les mêmes nuances de vert. La malachite ell affez dure pour recevoir un beau poli ; auffi en fabrique- t-on différens bijoux ; mais comme elle ell fou- vent caverneufe & remplie de cavités inégalés, les morceaux folides font toujours tres-precieux* lorfqu’ils ont une certaine étendue. d’Hist. Nat. et de Chimie. 311 C. Le bleu de montagne ou chryfocolle bleue ; c’eft un oxide de cuivre d’une couleur bleue foncée j il eft quelquefois fous forme régulière, & en criftaux prifmatiques rhomboïdaux, d’un très-beau bleu. On lui donne alors le nom d’azur de cuivre ; d’autres fois il préfente des petits grains dépofés dans les cavités de diffé- rentes gangues , & fur-tout dans du quartz. Le plus fouvent il forme des couches fuperlicielles dans des cavités de mines de cuivre grifes & jaunes. Il paroît que tous ces oxides de cuivre ont été précipités des diffolutions fulfuriques cuivreufes par l’intermède des terres calcaires à travers defquelles coulent ces eaux. M. Sage regarde ces mines de cuivre bleues , comme des combinaifons de cuivre avec l’ammonia- que ; 8c il dit qu’elles n’en diffèrent que par l’infolubilité. Il croit auffi que la malachite n’eft qu’une altération de ce bleu qu’il appelle mine de cuivre azurée tranfparente. Cette opinion n’efl pas celle de la plupart des minéralogiftes; M. de Morveau penfe que l’oxide de cuivre bleu ne diffère de l’oxide vert , que parce qu’il ne contient pas autant d’oxigène. L’oxide bleu de cuivre paroît colorer cer- taines pierres , & notamment la turquoife dans laquelle Réaumur a trouvé du cuivre ; 8c la pierre d’Arménie dont la bafe eft du carbonate Viv 312 É 1 É M E N S calcaire ou du fulfate de chaux. M. Kirvan a fait une efpèce de mines de cuivre de ces pierres bleues. La turquoife n’ell formée que par des os d’animaux colorés par le cuivre. Celle de Perfe n’efl point attaquable par l’acide nitrique, fuivant Réaumur ; celle de Languedoc s’y dif- fout complètement. 30. Le cuivre minéralifé par l’acide muriati- que & uni à l’argile. M. Werner a parlé de cette mine dans fa traduction de Cronfledt ; on l’a confondue avec le talc, & un nommé Dans l’a vendue à Paris en 1784 , fous le nom de mica vert. Elle eft en petits criftaux d’un très- beau vert , ou en petites écailles brillantes. M. Forfter en a trouvé dans les mines de Johan- Georgenlladt ; c’eft à cette mine que paroit appartenir le fable vert cuivreux du Pérou , qui a été apporté par M. Dombey , & dans lequel l’analyfe nous a démontré la préfence d’un peu d’acide muriatique. q.°. Le cuivre minéralifé par le foufre pref- que fans fer. On l’appelle mine de cuivre vi- treufe , cette dénomination eft fort impropre. Elle eft grife foncée, violette, brune, verdâtre, ou tout-à-fait brune & couleur de foie ; elle le fonda une trcs-douce chaleur; elle eft pe- lante, quelquefois flexible, 8c toujours fufcep- tible d’être coupée au couteau ; dans fa frac- d’Hist. Nat. et de Chimie. 313 ture , elle paroît brillante comme de l’or. C’efl une des pins riches mines de cuivre , puifqu’elle peut donner jufqu a po livres de ce métal par quintal. j°. Le cuivre minéralifé par le foufre avec plus de fer que la précédente; mine de cuivre azurée ; elle ne diffère de la précédente que par la quantité du fer qui va jufqu’à 30 livres par quintal ; elle ne donne que yo à 60 livres de cuivre par quintal; le refie efl du foufre. On efiaie commodément ces deux mines par les acides. 6°. Le cuivre minéralifé par le foufre avec beaucoup de fer ; pyrite brillante ou jaune doré. La quantité du foufre & du cuivre varie beaucoup dans cette mine , le fer y efl toujours très - abondant. Elle forme dans la terre des filons plus ou moins confidérables. Quelque- fois cette mine efl malTive & fombre ; fouvent elle paroît écailleufe & comme micacée. Telle efl la forme de celle du Dannemarck , de Nor- vège , de Suède, de Sainte-Marie-aux-Mines. D autres fois cette mine efl difféminée dans fa gangue , comme le cuivre d’Alface ; on la nomme alors mine de cuivre tigrée. Cette va- riété efl fouvent mêlée d’un peu d’azur; fou- vent les pyrites de cuivre préfehtent à leur fuperfkie des couleurs très brillantes , bleues 314 É L É M E N J ou violettes, qui font dues à la décompolîtion de leurs principes. On les nomme alors mines de cuivre chatoyantes , ou mines à queue de paon ; elles contiennent ordinairement une grande quantité de foufre, un peu de fer, & ne font pas fort riches en cuivre. Lorfque ces fortes de mines ne font que fuperhciellement dilfé minées fur leur gangue , on les appelle plus fpécialement pyrites de cuivre ; telles font les mines du comté de Derbi en Angleterre , quel- ques-unes de celles de Saint-Bel dans le Lyon- nois , Si plufieurs mines d’Alface , comme celles de Caulenbach Si de Feldens ; d’ailleurs elles fe trouvent adhérentes à toutes fortes de gan- gues , au criflal de roche , au quartz , au fpath, au fchille , au mica , Sec. 70. Le cuivre uni au foufre , a l’arfenic , au fer 8c à un peu d’argent. Cette mine appelée mine de cuivre arjenicale ou jahlertz^ , reflemble beaucoup à la mine d’argent grife ; elle eil feu- lement un peu moins brillante, & n’en diti ère réellement que parce qu’elle contient moins d’argent qu’elle. M. R'o.mé de Lille dihingue encore une mine de cuivre blanche , qui con- tient , fuivapt lui , un peu plus d’argent que la grife * mais c’efl une vraie mine d’argent. Le fahlertz donne de 33 à 60 livres de cuivre par quintal. D’ffrsT. Nat. et de Chimie. 319 8°. Le cuivre minéralifé par le foufre & l’ar- fenic, avec du zinc & du fer. Mine de cuivre brune ou blendeufe. M. Monnet n’a trouvé cette mine qu’à Catharineberg en Bohême; elle eft brune , grenue & très-dure. Elle contient depuis 18 jufqu’à 30 livres de cuivre par quintal. 90. Mine de cuivre fchifteufe. C’eft du cuivre vitreux très "intimement mêlé dans un fchifte brun ou noir. Elle donne depuis 6 jufqu’à 10 livres par quintal ; il faut ajouter de la craie pour la fondre. y ' io°. Mine de cuivre bitumineufe. C’eft du cuivre mêlé dans une efpèce de charbon de terre de Suède. ii°. Mine de cuivre noire ou couleur de poix. M. Geliert l’appelle mine de cuivre en fcories ; c’eft un réfidu de la décompofition des mines de cuivre jaunes & grifes , qui ne con- tient ni foufre ni arfenic , & qui fe rapproche de l’état de malachite • elle eft d’un noir luifant comme de la poix. • ■ 12°. Cuivre uni au foufre 8c à l’arfenic con- tenant de l’antimoine. Mine de cuivre antimo- niale. M. Sage fait mention de cette mine dans fes Elémens de minéralogie. Elle eft grife de brillante dans fa fradure , comme l’antimoine ; elle tient depuis 14 jufqu’à 20 livres de cuivre par quintal. " I 31 5 É L É M E N S Pour faire l’efïai d’une mine de cuivre , il faut après l’avoir pilée & lavée , la foumettre à de longs 6c forts grillages , 6c la fondre avec quatre fois fon poids de flux noir 8< du fel marin. On prend le culot qui fouvent et! en- core noirci par un relie de foufre , on le fond avec quatre parties de plomb , 8c on le pafle à la coupelle pour féparer l’argent 8c l’or qui pourroient s’y trouver , parce qu’il eft peu de cuivre qui ne contiennent une certaine quan- tité de ces métaux précieux. Le flux de M. Tillet qui efl un mélange de deux parties de verre pilé , d’une partie de borax calciné , 8c d’un huitième de charbon , réuflit mieux pour les rédudions que le flux noir, parce que celui- ci forme un fulfure alkalin qui dilïout une partie de l’oxide de cuivre. Bergman confeille l’acide fulfuriquë 6c l’acide nitrique , pour faire l’eflai de ces mines par la voie humide. Lorfque le cuivre efl diflous par les acides , on le précipite par le fer. Dans les travaux en grand fur les mines de cuivre , on les pile 6c on les lave ; enfuite on les grille d’abord à l’air , 6c prefque fans bois , parce que dès que le foufre qu’elles contiennent, efl allumé, il continue de brûlér de lui-même. Lorfqu’il s’efl éteint, on grille de nouveau, 6c même deux fois de fuite la mine fur du bois; d’Hist. Nat. et de Chimie. 317 on la fond à travers les charbons , pour avoir ce qu’on nomme matte de cuivre . C’eft la mine qui n’a perdu encore qu’une portion du foufre qu’elle contenoit. La fufion qu’on lui fait fubir fert à faire préfenter au métal de nouvelles fur- faces , afin qu’il puiffe être grillé plus facile- ment. On lui fait éprouver fix ou fept grillages fucceffifs , fuivant la quantité de foufre que contient la mine , 8c on la fond enfuite pour avoir le cuivre noir. Ce cuivre eft malléable ; il eft cependant encore uni à un refie de fou- fre , qu’on n’en fépare qu’en retirant les mé- taux parfaits qu’il contient. On fond le cuivre noir avec trois fois autant de plomb , ce qu’on appelle rafraîchijfement du cuivre , 8c on moule ce mélange fous la forme de pains , qu’on nomme pains de liquation . On les pofe de champ fur deux plaques de fer inclinées de manière qu’elles laiflent entr’elles une rigole. Ces plaques terminent le defïus du fourneau de liquation , dont le fol eft incliné vers le de- vant. Le feu mis au-deiïous des plaques échauffe les pains ; le plomb fe fond 8c tombe fous les charbons , en entraînant l’argent 8c l’or avec lefquels il a plus d’affinité qu’avec le cuivre. Après cette opération , qu’on nomme liquation , les pains fe trouvent confidérablement dimi- nués 8c tous déformés. On les expofe à un feu 45 1 8 É L É M E N S V I plus fort , & tel que le cuivre commence à fondre pour en féparer exa&ement tout le plomb ; cette troifième opération s’appelle ref- fuage. Le plomb chargé des métaux parfaits , elt porté à la coupelle. A l’égard du cuivre, on le raffine en le faifant fondre dans un creu- fet , & on l’y laiffie un tems fuffifant pour qu’il puiffe rejeter fous la forme d’écume tout ce qu’il contenoit d’etranger. On l’eflaie en y trem- pant des verges de fer qui fe recouvrent d’un peu de cuivre , & c’elt à la couleur rouge plus ou moins éclatante qu’on juge de fa pureté. On coule le cuivre raffiné en plaques , ou on le fépare en rofettes. Pour former une rofette , on enlève avec foin les fcories qui couvrent le cuivre en fulion ; on laiffie figer la furface du métal ; 'orfqu’elle n’efi plus fluide, on applique deffus un balai humide; l’impreffion du froid le fait refferrer ; la portion qui s’efl congelée fe détache non feulement des bords du creufet , mais du relie du métal fondu, & on l’enlève avec des pinces. On continue de déliter ainfi en rofettes la plus grande partie du cuivre con- tenu dans le creufet. La portion qui relie au fond fe nomme le roi. Les pyrites de cuivre qui contiennent peu de métal , ne s’exploitent que pour en tirer du foufre 8c. du vitriol. A Saint -Bel 8c dans plu- d’H r st. Nat. et de Chimie. 319 heurs autres endroits, on les grille & on les di Aille pour en féparer le foufre. Pendant le grillage, une portion d’acide fulfurique réagit Pur le métal , le difïbut & commence à former du fulfate de cuivre. Les pyrites grillées font en fuite expofées à l’air , & lorfque la vitrioli - fation efl achevée , on lellive les pyrites effleu- ries, on filtre la leiïive, & on obtient par l’é- vaporation & la criflallifation un fel bleu rhom- boidal, nommé vitriol de cuivre , vitriol bleu , couperofe bleue ou vitriol de Chypre. Nous en parlerons en examinant les combinaifons de ce métal , fous le nom de fulfate de cuivre. Le cuivre expofé au feu prend des couleurs à peu près comme l’acier ; il devient bleu , jaune , 8c enfin violet. Il ne fe fond que lorf- qu’il efl bien rouge. Quand il efl en belle fu- fion , il paroît recouvert d’une flamme verte; il bout Sc peut fe volatiliier, comme on l’ob- ferve dans les cheminées des fondeurs. On trouve aufîi dans les creufets où on l’a fait fon- dre, des fleurs de cuivre. Si l’on jette ce métal en limaille fine à travers les flammes , il leur donne une couleur bleue 8c verte ; on s’en fert dans l’artifice , à caufe de cette propriété. Si on laiffe refroidir lentement ce métal fondu , 8c fi, lorfque fa furface fe fige, on décante la portion qui efl encore fluide , celle qui adhère %20 É L É M E N S aux parois du creufet ou du têt à rôtir employé dans celte expérience , fe trouve criftallifée en pyramides d’autant plus régulières & volumi- neuses , que le métal a été en fufion plus com- plète j & que fon refrqidiffement a été plus mé- nagé. Ses pyramides font quadrangulaires , & elles paroiffent être formées par un grand nom- bre d’odaëdres implantés les uns fur les autres. Le cuivre chauffé avec le concours de l’air, brûle à fa furface & fe change en un oxide d’un rouge noirâtre , à mefure qu’il àbforbe la bafe de l’air vital. On obtient aifément cet oxide en faifant rougir une lame de cuivre, & en la frappant enfuite avec un marteau ; elle s’échappe fous la forme d’écailles. La même chofe a lieu, fi après avoir fait rougir une lame de cuivre , on la trempe dans l’eau froide ; le refferrement fubit des parties du métal facilite la réparation de la portion d’oxide qui en couvre la furface. Cet oxide tombe au fond de l’eau ; on le nomme écailles ou latutures de cuivre. Comme le cuivre n’efi pas complè- tement oxidé , on peut le brûler de nouveau fous la mouffle d’un fourneau de coupelle; il prend alors une couleur rouge brune affez fon- cée ; pouffé à un feu violent, il fe fond en un verre noirâtre ou d’un brun marron. L’oxide de cuivre peut être décpmpofé & privé de l’oxigène d’Hist. Nat. et de Chimie. 321 Poxigènequi lui ôte fes propriétés métalliques, par les huiles , les refînes , Sec. Les battitures font réductibles en partie par elles - mêmes , puifque les fondeurs qui les achètent des chau- dronniers , fe contentent de les jetter dans de grands creufets fur du cuivre fondu, avec lequel elles s’incorporent en entrant en fufion. Ils fui- vent le même procédé pour fondre la limaille. L’oxide de cuivre -paroît préfenter quelques propriétés falines > mais on n’en a point encore reconnu la nature. L’air attaque le cuivre d’autant plus facile- ment , que ce fluide eft plus chargé d’humidité & plus altéré ; il le convertit en une rouille ou oxide vert qui paroît avoir quelques qualités falines , car il u de la faveur , & il eft attaqué par l’eau ; c’eft pour cela que les anciens chi- mifles admettoient un fel dans le cuivre. Cette rouille a cela de remarquable , qu’elle n’attaque jamais que la furface du cuivre , & qu’elle fem- hle même fervir à la cqnfervation de l’intérieur des maffes de ce métal , Comme on peut en jug^r par les médailles 8e par les flatues anti- ques , qui fe confervent très-bien fous l’enduit de rouille qui les couvre. Les antiquaires ap- pellent cette croûte patine , 8c ils en font beau- coup de cas , parce qu’elle attelle la vétuflé des pièces qui en font recouvertes. Plufieurs Tome ITT. X 322 É I É M E N S artifles , & en particulier les italiens , favent imiter cet enduit fur le cuivre , 8c contrefaire les bronzes antiques. L’oxidation du cuivre par l’air humide paroît être due à l’eau très-divifée. Cependant ce fluide ne paroît point attaquer le cuivre, qui ne le décompofe pas comme le fer à une haute tem- pérature ; il femble que ce métal foit plutôt oxidé par l’eau froide , car on fait qu’il efl plus dangereux de laifler refroidir des liqueurs dans les vaiiïeaux de cuivre , que de les y faire bouil- lir , parce que tant que la liqueur efl bouillante 8c le vafe chaud , la vapeur aqueufe ne s’atta- che point à fa furface ; mais lorfque le vafe efl froid , les goutelettes d’eau qui adhèrent à fes parois , femblent le réduire en oxide vert. C’efl à l’air 8c à l’acide carbonique qui y efl répandu , qu’il faut attribuer cette oxidation ; car en diflillant cette rouille de cuivre à l’ap- pareil pneumato - chimique , j’en ai retiré de l’acide carbonique. Le cuivre ne s’unit point aux matières ter- reufes; fon oxide facilite leur fufion 8c forme avec elles des verres bruns plus ou moins foncés. La baryte , la magnéfie 8c la chaux n’ont point une aétion marquée fur le cuivre , 8c on ne connoît point l’aétion de c es fubflances fur l’oxide de ce métal. d’Hist. Nat. et de Chimie. 323 Les alkalis fixes caufiiques mis en digefiion à froid avec la limaille de cuivre , prennent au bout de quelque tems une couleur bleue très- légère ; le cuivre fe couvre d’une poufïîère de la même couleur. Ces difTolutions s’opèrent mieux à froid qu’à chaud , fuivant M. Monnet. Il efi cependant eiïentiel d’obferver que ce chimifie a fait ces combinaifons avec le car- bonate de potafie , & non avec l’alkali fixe pur ; ce dernier paroît avoir beaucoup plus d’adion fur le cuivre ; mais les uns & les autres de ces Tels ne font que favorifer & accéléré!' la précipitation de l’oxigèrie atmofphérique dans le cuivre , car fans le contad de l’air l’oxida- tion de ce métal n’a pas lieu. Ce fait efi fur-tout très - remarquable dans l’adion de l’ammoniaque qui diflout affez rapi- dement le cuivre. Ce fel mis en digefiion fur la limaille de cuivre avec le contad de l’air , fe colore au bout de quelques heures en un bleu foncé de la plus grande beauté ; il ne dif- fout cependant que très-peu de cuivre. J’ai obfervc les phénomènes de cette diffolution pendant un an. J’ai mis dans un petit flacon de l’ammoniaque caufiique fur. de la limaille de cuivre; ce flacon a été fouvent débouché; au bout de quelques mois , la furface de ce métal étoit couverte d’un oxide bleu , les pa- Xij 324 Élêmens rois du flacon étoient enduites d’un oxide d’un bleu pâle , & la partie inférieure du flacon qui contenoit le cuivre , ofïroit à la furface du verre un oxide brun dont le haut étoit jau- nâtre. Cette liqueur perd prefqu’entièrement fa couleur lorfqu’elle eft renfermée ; il fuffit de déboucher le flacon pour la faire reparaî- tre -, elle ne préfente ce phénomène , d’une manière bien marquée , que dans les commen- cemens, & lorfqu’elle efl décantée de deffus le cuivre. Si la difiolution eft ancienne , & fi elle contient encore le cuivre , fa couleur eft d’un beau bleu , quoique dans des vailfeaux fermés ; cependant en l’expofant à 1 air , elle fe fonce davantage. On reconnoît bien mamfefte- ment dans ces phénomènes l’influence de l’oxi- _ N gène atmofphérique. Lorfqu’on évapore lentement la diifolution de cuivre par l’ammoniaque , la plus grande partie de ce fel fe diflipe , une portion refte fixée avec l’oxide de ce métal , 8c fe dépofe en criftaux mous , ainfi que l’a obfervé M. Monnet. M. Sage allure qu’on peut en obtenir de très- beaux criftaux par une évaporation lente; il les compare à l’azur de cuivre naturel. Cependant ce dernier ne donne pas d’ammoniaque lorf- qu’on le chauffe ; il n’eft pas diffoluble dans l’eau; il ne s’effleurit point *à l’air , comme d’Hist. Nat. et de Chimie. 325: celui qui eft préparé par l’art. M. Baume dit que ce compofé forme des criftaux très-brillans & d’un très-beau bleu. Cette diüblution expo- fée à l’air fe defsèche aflez vite, & lailTe une matière d’un vert de pré qui n’eft qu’un oxide vert de cuivre. M. Sage croit que c’efl-là l’ori- gine de la malachite. Mais cet oxide ne donne pas à beaucoup près la même quantité d’acide carbonique. Si l’on verfe un acide dans la diiïo- lution du cuivre par l’ammoniaque liquide 9 il ne s’y forme que peu de précipité , mais la couleur Ipleue difparoît totalement 8c fe change en un vert pâle très-léger. Ce phénomène qui a été obfervé par MM. Pott 8c Monnet , indi- que qu’il n’y a que très-peu d’oxide de cuivre dans l’ammoniaque , 8c qu’il eft redilfous par l’acide ou par le fel ammoniacal formé par l’ad- dition de l’acide. On- peut cependant faire repa- roître la couleur bleue , en ajoutant de l’am- moniaque dans le mélange. L’oxide de cuivre fait par le feu , & tous les autres oxides de ce métal fe dilïolvent fur-le-champ dans l’ammo- niaque pure, Sc ce fel peut fe charger parce procédé d’une bonne quantité de ce métal. Il prend fur-le-champ la plus belle couleur bleue ; c’ell pour cela qu’on l’a propofé comme une pierre de touche , pour reconnoître la plus petite portion de cuivre dans toutes les matières- Xiij 32 6 E L i JVÏ E N s. dans lefquelles on foüpçonne fon exiflence. L’acide fulfurique n’agit fur le cuivre qu’au- tant qu’il efi concentré & bouillant; il fe dé- gage beaucoup de gaz acide fulfureux pendant la difiblution. Lorfqu’elle efi: achevée, on trouve une matière brune en bouillie qui contient de l’oxide de cuivre , & une portion de cet oxide combinée avec l’acide fulfurique. En la lefiivant & en filtrant la lefiive , on a une difiblution bleue ; fi on la fait évaporer à un certain point, & fi on la laifîe refroidir , elle fournit des crif- taux rhomboïdaux alongés, d’une belle couleur bleue ; c’efi du fulfate de cuivre. Si au lieu de faire évaporer cette difiblution , on la laifie Jong-tems expofée à l’air , elle donne des crif- taux ; mais il s’en précipite un oxide vert , cou- leur que prennent tous les oxides de cuivre formés ou féchés a l’air. Le fulfate de cuivre a une faveur fiiptique très-forte ; elle va même jufqu’à la caufiicité. Lorfqu’on l’expofe au feu , il fe fond très-vite ; il perd fon eau de criflallifation , & devient d’un blanc bleuâtre. Il faut une chaleur très- forte pour en féparer l’acide iulfurique qui ad- hère beaucoup plus à l’oxide de cuivre quà celui de fer. Le fulfate de cuivre efi décom- pofé par la magnéfie 8c par la chaux ; le pré- cipité formé par ces deux fubftances , efi d un d’Hist. Nat. et de Chimie. 327 blanc bleuâtre • fi on le sèche à l’air , il devient vert : voilà pourquoi Quelques chimiftes difent que les précipités de fulfate de cuivre font verts. Il en eft abfolument de même de ceux que l’on obtient par les alkalis fixes dans diffé- rens états ; ils font d’abord bleuâtres & pren- nent une couleur verte en fe léchant : peut- être efi-ce ainfi que fe forme le vert de mon - tagne. Il efl effentiel d’obferver que lorfqu’on précipite le fulfate de cuivre par la diffolutiorr de carbonate de potaffe, il ne s’excite pas d’ef- fervefcence ; ce qui indique que l’acide carbo- nique s’unit très- bien aux oxides de cuivre j phénomène que ne préfentent pas toutes les difiolutions métalliques. L’ammoniaque préci- pite de même en blanc bleuâtre la diffolutiorr de fulfate de cuivre ; mais le mélange prend bientôt une couleur bleue très-foncée , parce que l’ammoniaque diffout à mefure le cuivre précipité; il ne faut même que très-peu de ce fel pour rediffoudreWit l’oxide de cuivre ré- paré de l’acide fulfurique. L’acide nitrique diffout le cuivre à froid avec rapidité. Il fe dégage de cette diffolution beau- coup de gaz nitreux très-rutilant. C’eft un moyeu que M. Priefiley a employé pour obtenir cegazr très-fort. Une portion de ce métal , réduite à l’état d’oxide , fe précipite en poudre brune 5 Xiv 328 É L Ê M E N S on la fépare par le filtre. La dilToIution filtrée efl d’un bleu beaucoup plus foncé que celle par l’acide fulfurique ; ce qui indique que le cuivre y efl plus oxidé. Si on l’évapore avec précau- tion , elle criflallife par le refroidiffement. Mac- quer efl un des premiers chimifles qui aient reconnu cette propriété , dans fon mémoire fur la diffolubilité des fels dans l’alcohol. Si fes criftanx fe forment très-lentement, ils offrent des parallélogrammes allongés ; s’ils fe dépo- fent plus vite , ils font en prifmes hexaèdres dont la pointe efl obtufe , irrégulière , & qui imitent des faifceaux d’aiguilles divergentes: en- fin , fi on évapore trop fortement cette diffo- lution , elle ne donne qu’un magma fans forme régulière : c’eft fans doute ce qui a fait dire à quelques chimifles que cette diffolution n’étoit point fufceptibîe de criflallifer. Le nitrate de cuivre efl d’un bleu très-éclatant ; il a une fa- veur tellement cauftique , qu’il pourroit être employé pour ronger les excroiflances qui vien- nent fur la peau. Il fe fond , fuivant M. Sage 9 à une température de vingt degrés du thermo- mètre de Réaumur. Il détonne fur les charbons ardens; mais comme il contient beaucoup d eau f ce phénomène n’efl que peu fenfiblc. Lorfqu on le fond dans tin creufet , il exhale beaucoup de vapeurs nitreufes 3 qu’on peut recueillir en m d’Hist. Nat. et de Chimie. 329 diftillant ; quand il eft defîeché, fa couleur- eft verte; en le chauffant davantage il devient brun ; ce n’eft plus alors qu’un pur oxide de cuivre. Je l’ai diftillé à l’appareil pnem'nato-chîmique, il m’a donné beaucoup de gaz nitreux , un peu d’acide carbonique , & un peu d’air vital ; il a été réduit par cette opération à l’état d’un oxide brun. Le nitrate de cuivre attire l’humidité de l’air. On peut cependant le conferver long-tems dans des vaiffeaux fermés. Il fe couvre à l’air chaud & fec , d’une efflorefcence verte. Il eft très-diffoluble dans l’eau , 8c un peu plus dans l’eau chaude que dans l’eau froide. La diffolu- tion expofée à l’air dans des vaiffeaux plats , ou évaporée rapidement dans un tems fec & chaud , laifle un oxide vert , comme le font les criffaux de ce fel dans les mêmes circonftan- ces. Elle eft précipitée par la chaux en bleu pâle -, par les alkalis fixes en blanc bleuâtre ; par l’ammoniaque en floccons d’une même cou- leur, qui fe diffblvent très-vite, 8c donnent à la liqueur un bleu foncé très-brillant ; par les fui- fures alkalins en brun rougeâtre , fans odeur fétide ; par la teinture de noix de galle en vert olive. L’acide fulfurique décompofe auffi le ni- trate de cuivre , 8c on obtient des criffaux de fulfate de cuivre , fi on a employé cet acide très- concentré. Stahl avoit annoncé cette décompo- 330 É L É M E N S fition j M. Monnet l’a confirmée depuis, 6c j’ai eu occafion de Pobferver plufieurs fois. Le fer a plus d’affinité avec la plupart des acides, que n’en a le cuivre. En plongeant une lame de ce métal dans une diffolution de cuivre par l’acide nitrique , le cuivre fe précipite fous fa forme métallique , & colore la furface du fer ; cette précipitation dépend de ce que le fer a plus d’affinité avec l’oxigène que n’en a le cuivre. Le fulfate de cuivre préfente le même phéno- mène , & c’eft un procédé que des charlatans ont employé pour faire croire aux perfonnes peu inflruit es, qu’ils changeoient le fer en cuivre. L’acide muriatique ne difiout le cuivre que lorfqu’il efi concentré & bouillant ; il ne fe dégage que peu de gaz hydrogène pendant cette difiolution. L’acide muriatique prend une cou- leur verte très-foncée & prefque brune. Cette combinaifon forme un magma très - diffioluble dans l’eau ; fi on le leffive , l’eau efi d’une belle couleur verte qui diflingue cette diffolution des deux précédentes. En l’évaporant lentement 8c en la laiffant refroidir, elle dépofe des crifiaux prifmatiques , & affez réguliers fi l’évaporation a été faite avec précaution ; ils ne préfentent au contraire que des aiguilles très - petites 8c fort aigues , lorfque l’évaporation a été trop rapide 8c le refroidiffement trop fubit. Le mu- d’Hist. Nat. et de Chimie. 331 riate de cuivre elt d’un vert de pré fort agréa- ble; fa faveur elt caultique & très-aftringente; il fe fond à une chaleur fort douce , & il fe congèle en malfe lorfqu’on le laide refroidir. M. Monnet allure que l’acide muriatique y elt très-adhérent , & qu’on ne peut l’en volatilifer qu’à l’aide d’une chaleur très - confidérable ; il attire fortement l’humidité de l’air ; il elt dé- compofable par les mêmes intermèdes que les fels de cuivre précédens. J’ai obfervé que l’am- moniaque ne diffolvoit point aufli-bien l’oxide de cuivre qu’il avoit féparé de l’acide muriati- que , que celui du fulfate & du nitrate cuivreux. Le bleu qu’il forme alors n’elt pas auffi vif, 8c il reite une portion de cet oxide que l’ammo- niaque ne diffout pas entièrement. Les acides fulfurique & nitrique ne décompofent point le muriate de cuivre. Les dilTolutions nitriques de mercure & d’argent le décompofent , & font elles - mêmes décompofées dans l’inftant du mélange ; il fe forme un précipité blanc par le tranfport de l’acide muriatique fur les oxides de mercure ou d’argent , & l’oxide de cuivre s’unit à l’acide nitrique. J’ai cependant obfervé que la liqueur ne prend pas la couleur bleue que doit avoir la diflolution de cuivre par l’a- cide du nitre , 8c qu’en général l’ôxide de cuivre formé par l’acide muriatique ne prend que très- 332 E L É M E N S difficilement cette couleur , comme nous l’a- vons déjà vu à l’égard de l’ammoniaque. Il m’a paru qu’en général les oxides de cuivre paffent très-facilement du bleu au vert , & très-diffici- lement du vert au bleu. L’acide muriatique diffiout l’oxide de cuivre avec beaucoup plus de facilité qu’il ne fait le cuivre lui-même. Ce fait a été bien obfervé par Brandt. La diflolu- tion elt d’un beau vert, & elle criftallife auffi facilement que la première ; ce qui prouve que dans les combinaifons falines métalliques , les métaux font toujours à l’état d’oxides , comme .nous l’avons déjà fait obferver. Le nitre détonne difficilement à l’aide du cuivre. Il faut que ce fel foit fondu , & que le cuivre foit très-chaud , pour que la déflagration ait lieu ; encore n’eft-elle que très foible. On fait cette opération en jettant le cuivre en li- maille fur du nitre en fufion dans un creufet large , afin que le contad foit plus multiplié. Lorfque le métal efl bien échauffe , on apper- çoit un léger mouvement accompagné d’éclairs peu rapides. Le réfidu eft un oxide d’un gris un peu brun , mêlé avec la potaffe ; on le lave, l’eau s’empare de l’alkali qui retient un peu de cuivre , & l’oxide de ce métal rèffe pur. Il fe fond tout feu! en un verre d’un brun foncé 8c opaque ; il efl employé pour colorer les d’Hist. Nat. et de Chimie. 333 émaux ; on croit que l’alkali eft rendu caufti- que ; mais il n’y a point encore d’expériences exaâes fur cet objet. Le cuivre décompofe très-bien le muriate ammoniacal. Bucquet , qui a examiné cette décompofition avec beaucoup de foin , a ob- tenu , en faifant l’expérience à l’appareil pneu- mato-chimique au mercure , fur deux gros de limaille de cuivre & un gros de muriate am- moniacal , cinquante-huit pouces de fluide élaf- tïque , dont vingt-fîx pouces étoient du gaz am- moniac très-pur, vingt-fix du gaz inflammable détonnant , 8c fix un gaz méphitique qui étei— gnoit les bougies fans être abforbé par l’eau , 8c fans précipiter l’eau de chaux , conféquem- ment du gaz azotique provenant de la décom- pofition d’une partie de l’ammoniaque. Il s’efl: dégagé un peu d’ammoniaque liquide , d’une belle couleur bleue qui furnageoit le mer- cure. Le réfidu étoit une mafie d’un vert noi- râtre dont une moitié a^ été diffoute par l’eau, 8c lui a communiqué une belle couleur verte, caractère cliflin&if du muriate de cuivre ; l’au- tre moitié ofîroit une efpèce d’oxide de cuivre brun , formé par l’eau du muriate ammoniacal. En répétant cette décompofition à la dofe de quatre onces de cuivre fur deux onces de mu- riate ammoniacal avec l’appareil ordinaire du A V> 334 É L É M E N S ballon , Bucquet a obtenu deux gros dix-huit grains d’ammoniaque liquide bleue , qui faifoit un peu d’efîervefcence avec les acides , & con- tenoit un pouce environ d’acide carbonique par gros. Ce chimiüe ne favoit abfolument à quoi attribuer ce dernier gaz ; mais je crois qu’il pou- voit venir de quelques impuretés du Tel ammo- niac , car ayant répété cette expérience avec du muriate ammoniacal purifié par la fublimation, j’ai eu de l’ammoniaque très-cauftique , & ne faifant pas la plus légère effervefcence avec les acides. L’oxide de cuivre décompofe auffî le muriate ammoniacal , & donne à l’ammoniaque qu’il en dégage , une portion d’acide carboni- que qui le rend effervelcent. Cet alkali eft tou- jours bleu , parce qu’il entraîne avec lui une petite portion d’oxide de cuivre auquel il doit cette couleur ; cependant les acides ne précipi- tent pas un atome de ce métal. On prépare en pharmacie deux médicamens avec le muriate ammoniacal & le cuivre , dont le premier a reçu le nom de fleurs ammoniacales cuivreufles , ou d ’ens veneris. Ce n’eft autre chofe que dij muriate ammoniacal coloré par un peu d’oxide de cuivre. On fait fublimer un mélange de huit onces de ce fel avec un gros d’oxide de cuivre dan« deux terrines pofées l’une fur l’autre. Tout le muriate ammoniacal fe volatilife fans être d’Hist. Nat. et de Chimie. 335- décompofé, & il entraîne un peu d’oxide de cuivre qui lui donne une couleur bleuâtre. Le fécond qu’on appelle eau célejle , fe prépare en Îai/Tant féjourner pendant dix à douze heures une livre d eau de chaux 8c une once de mu- îiate ammoniacal dans une badine de cuivre. La chaux dégage l’ammoniaque qui diiïbut un peu de cuivre de la baffine , & fe colore en bleu : on peut faire l’eau célefle dans un vaif- feau de verre ou de terre , en ajoutant un peu de limaille ou d’oxide de cuivre à l’eau de chaux Sc au muriate ammoniacal. Il paroît que le cuivre décompofe le fulfate d’alumine ; car fi on fait bouillir une difTolution de ce fel dans un vaifleau de cuivre , il fe dépofe un peu d’alumine ; & lorfqu’on préci- pite cet alun par l’ammoniaque , fa terre prend une petite couleur bleue qui décèle la préfence du cuivre. On peut auffi attribuer cet effet à l’excès d’acide que contient toujours le fulfate d’alumine. Le gaz hydrogène n’a pas d’adion fur le cui- vre j mais il réduit fes oxides en leur enlevant l’oxigène , avec lequel l’hydrogène a plus d’af- finité que le cuivre. Ce métal s’unit très - bien au foufre. Cette combinaifon peut fe faire par la voie humide, c’efl-à-dire, en faifant un mélange de fleurs de 336 É L É M E N S foufre & de limaille de cuivre qu’on humede avec de l’eau ; mais elle réuflit beaucoup plus promptement par la voie sèche. On expofe au feu un mélange de parties égales de foufre en poudre & de limaille de cuivre dans un creu- fet , qu’on chauffe par degrés jufqu’à le faire rougir; il réfulte de cette combinaifon une maffe d’un gris noirâtre , une forte de matte de cuivre qui elt aigre , caffante & plus fufible que le cuivre ; on prépare ce compofé pour la tein- ture & pour la peinture fur les indiennes , en ffratifiant dans un creufet des lames de cuivre & du foufre en poudre , & en chauffant ce creufet , comme nous l’avons dit ; on pulvérife l’efpèce de matte qui en réfulte , & on lui donne le nom d '‘ces veneris. Les fulfures alka- lins 8c le gaz hydrogène fulfuré ont une action marquée fur le cuivre ; les premiers diffolvent ce métal par la voie sèche 8c par la voie humide ; le fécond en colore fortement lafurface, mais on n’a point encore examiné l’effet de ces fubf- tances les unes fur les autres. Le cuivre s’allie à plufieurs métaux : avec l’arfenic il devient blanc 8c caffant , Sc forme le tombac blanc. Il s’unit au bifmuth , 8c forme , fuivant Gel- lert , un alliage d’un blanc rougeâtre à facettes cubiques. Il d’Hist. Nat. et de Chimie. 337 Il s’allie très-bien avec l’antimoine , & donne le régule cuivreux qui Ce dillingue par une belle couleur violette. Il décompofe Je fulfure d’an- timoine & s’unit au foufre qu’il enlève au demi- métal. Il fe combine très - facilement au zinc. On peut faire cette combinaifon de deux maniè- res ; i°. par la Mon, on a un métal dont la , couleur imite celle de l’or, qui eft beaucoup moins fufceptible de Ja rouille que le cuivre pur, mais qui a moins de dudilité que lui. Plus fa couleur imite celle de l’or, plus le métal eft fragile : d’ailleurs il varie fuivant la propor- tion du mélange & les précautions qu’on a pri- fes en le fondant; fes variétés font le frmilor, le pinche-bec, le métal du Prince Robert, 8c l’or de Manheim. 20. En cémentant des lames de cuivre avec du carbonate de zinc natif ou pierre calaminaire réduite en poudre & mêlée avec du charbon , 8c en faifant rougir le creufet au feu , le cuivre s’unit au zinc 8c forme le laiton. Ce dernier fe rouille moins facilement que le cuivre ; il, eft auftî malléable 8c plus fufîble que lui ; mais pour peu qu’on le chauffe fortement , il perd le zinc qui lui. étoit allié , & redevient cuivre rouge. Le cuivre s’allie difficilement au mercure ; on parvient cependant à former une forte d’a- Tome III. Y, 33^ É L É M E N S malgame , en triturant du cuivre en feuilles très- minces avec du mercure. Une lame de ce mé- tal , plongée dans une diffolution de mercure par un acide , fe couvre d’une belle couleur d’argent , due au mercure réduit & précipité par le cuivre , qui a plus d’affinité avec l’oxi- gène que n’en a le demi-métal. Le cuivre & le plomb s’uniffent très -bien par la fufion , comme le prouve la formation des pains de liquation. On le combine à l’étain de deux manières, ou en appliquant de l’étain fondu fur du cui- vre , ou en fondant enfemble ces deux métaux. La première opération eft employée dans l’éta- mage du cuivre , la fécondé forme le bronze. Pour étamer des vaiffeaux de cuivre , on com- mence par les bien gratter , afin de rendre leur furface nette 8c brillante. On les frotte enfuite avec du muriate ammoniacal pour les nétoyer parfaitement ; on les fait chauffer , 8c on y jette de la réfine en poudre. Cette fubfiance , en recouvrant la furface du cuivre , empêche qu’il ne s’oxide ; enfin , on y verfe l’étain fondu , 8c on l’étend avec des étoupes. On fe plaint avec raifon , que l’étamage des vaiffeaux de cuivre n’efi pas fuffifant pour les défendre de l’adion de l’air , de l’humidité & des fels , parce qu’on voit fouvent ces vaiffeaux fe couvrir de [ d’Hist. Nat. et de Chimie. 33^ vert-de-gris. II feroit poflible de remédier à cet inconvénient , en mettant une couche d’é- tain plus épaifle , fi l’on n’avoit à craindre que le degré de chaleur fupèrieur à celui de l’eau bouillante , auquel font fouyent expofés ces vaifleaux , ne fondit l’étain , & ne mît la fur- face du cuivre à découvert. Pour prévenir ce dernier accident , on peut allier Pétain avec du fer , de l’argent , du platine , afin de le durcir, de diminuer fa fufibilité , & de pouvoir en appliquer des couches pins épaifles fur le cui- vre ; déjà l’on emploie des alliages analogues dans plulîeurs manufadures. On eft jullement étonné de la petite quantité d’étain néceflaire * Pour étamer le cuivre , puifque MM. Bayen & Charlard ont confiaté qu’une caflerole de neuf ' pouces de diamètre , 8c de trois pouces trois hgnes de profondeur , n’avoit acquis que vingt- un grains par l’étamage. Cependant cette pe- tite quantité fuffit pour prévenir les dangers que le cuivre peut faire naître , lorfqu’on a 1 attention de ne pas laifler féjourner trop long- tems dans des vaifTeaux etames des fubflances capables de diiïoudre l’étain , 8c fur-tout de renouveller fouvent l’étamage , que le frotte- ment , la chaleur 8c l’aétîon des cuillers avec lefquelles on agite les fubflances qu’on y fait cuire, détruifeut allez promptement. Il efl ;ce- Yij 3^0 É L Ê M E N S pendant une crainte qu’on ne peut s’empêcher d’avoir relativement à l’étain dont fe fervent les chaudronniers pour étamer les caiïeroles , &c. Il eft fouvent allié à un quart de fon poids de plomb , & l’on a alors à craindre les mau- vais effets de ce dernier , qui , comme on fait, etl fort diffoluble dans les acides & dans les grailles. Il feroit donc néceffaire que le gouver- nement prît des mefures pour que les chaudron- niers ne fuffent point trompés dans l’achat de l’étain , & qu’ils ne puffent employer que celui de Malaca ou de Banca , tel qu’il nous arrive des Indes , 8c fans qu’il ait été allié & refondu par les potiers d etain. M. delà Folie, citoyen de Rouen , recom- mandable par fes travaux chimiques relatifs aux arts, 8c par les découvertes utiles dont il a enrichi la teinture , la faïancerie , 8c un grand nombre de manufaétures de Rouen , a propofé pour éviter les inconvéniens 8c les dangers du cuivre étamé , des cafferoles de fer battu re- couvertes de zinc , qui , comme on l’a déjà Vu , n’a rien de dangereux. Plufieurs perfonnes en ont déjà fait un ufage avantageux, 8c il eff à defirer que ces vaiffeaux fe multiplient. Lorfqu’on fond l’étain avec le cuivre, on a un métal fpéciliquement plus pefant que les deux métaux employés , en raifon de leur péné- d’Hist. Nat. ET de Chimie. 341 tration réciproque. Cet alliage eft d’autant plus blanc, plus calTant & plus fonore , qu’on y a fait entrer plus d’étain; lorfqu’il eft très-blanc, on le nomme métal des cloches. Lorfqu’il contient plus de cuivre , il eft jaune , & porte le nom d ’ airain ou de bronze ; on s’en fert pour couler des ftatues, 8c pour faire des pièces d’ar- tillerie qui doivent être affez folides pour ne pas s’éclater au moindre effort , 8c cependant affez peu duétiles pour n’être pas déformées par le choc des boulets. Le cuivre 8c le fer font fufceptibles de s’unir par la fufion 8c par la foudure. Cependant cette combinaifon ne réuffit pas facilement. Lorf- qu’on fond dans un creufet un mélange de ces deux métaux , le fer fe trouve fouvent femé dans le cuivre , fans avoir contraélé une union parfaite. Le cuivre décompofe l’eau mcre du fulfate de fer , quoique le fer ait avec les acides une plus grande affinité que le cuivre. Les ufages du cuivre font très- multipliés 8c très-connus. On en fait une multitude d’uften- files très- variés. C’eft fur-tout le cuivre jaune, ou fon alliage avec le zinc , qui eft le plus em- ployé à caufe de fa grande dndilité 8c de fa beauté. Comme le cuivre eft un poifon très- violent , on ne doit jamais fe permettre de. l’ad- miniftrer en médecine. Les remèdes les plus Y iij / 542 , É L É M E N S appropriés dans le cas d’empoifonnement par le cuivre réduit eu oxide ou en vert-de-gris , font les émétiques, l’eau en abondance, les fulfiires alkalins , des alkalis , &c. CHAPITRE XX. De l'Argent. ILi’A'RGENT, nomme Lune ou Diane par les alchimiftes , ell un métal parfait, dune couleur blanche , & du brillant le plus vif. Il n’a ni faveur ni odeur. Sa pefanteur fpécifîque ell telle qu’il perd à la balance hydrodatique environ un onzième de fon poids. Un pied cube de ce métal pèfe fept cens vingt livres. L’argent ed d’une fi grande duélilité qu’on le bat en lames audi minces que le papier, & qu’on le réduit en fils plus fins que les cheveux. Un grain d’ar- gent peut former par fon extenfion un vaifleau capable de contenir une once d’eau. Il ed d’une ténacité adez conlidérable pour qu’un fil d’ar- gent d’un dixième de pouce de diamètre puide foutenir un poids de deux cens foixante - dix livres fans fe rompre. Sa dureté & fon éladi- cité font moindres que celles du cuivre. Il ed le plus fonore des métaux , après celui que nous d’Hist. Nat. et de Chimie. 343 venons de citer. Il s’écrouit fous le marteau, 8c il eli trcs-fufceptible de perdre l’écrouiflement par le recuit. MM. Tillet 8c Mongez ont fait criflallifer de l’argent. Us ont obtenu des pyra- mides quadrilatères , quelquefois ifolées comme celles qui fe trouvent aux bords du creufet où on a fondu ce métal , ou grouppées 8c pofées latéralement les unes fur les autres. L’argent fe trouve en plufieurs états dans la nature. Les principales mines de ce métal peu- vent être réduites aux fuivantes : i°. L’argent natif ou vierge. On le reconnoît à fon brillant & à fa duâilité. Il offre un grand nombre de variétés pour la forme. 11 efl fou vent en maffes irrégulières plus ou moins confidéra- blés. Quelquefois il eft en filets capillaire^ con- tournés , 8c il paroît alors devoir fa formation a une mine d’argent rouge décompofé , comme l’ont obfervé Henckel 8c M. Romé de Lille. On le rencontre aulTi en lames, en réfeaux qui imi- tent les toiles d’araignées , 8c que les Efpagnôls appellent à caufe de cela arané ; en végétation.» ou en rameaux formés par des oélaèdres im- plantés les uns fur les autres. Quelques-uns de ces échantillons offrent une feuille de fougère ; d’autres préfentent des cubes 8c des odaèdres ifolés, dont les angles font tronqués ; ccs der- niers font les plus rares. L’argent natif ell fou- Y iv 344 É L É M E N s vent difperfé dans une gangue quartzeufe ; quel- quefois on le rencontre dans des terres gralTes. Il fe trouve au Pérou, au Mexique, à Konf- berg en Norwege , à Johan-Georgenftadt & à Ehrenfriederfdorf en Saxe, à Sainte-Marie, à Allemont en Dauphiné , & c. On ne connoît point dans la nature ce métal en état d’oxide. 2°. L’argent natif uni à l’or , au cuivre , au fer , à l’arfenic , à l’antimoine , ou à l’or & au cuivre enfemble , ou à l’arfenic & au fer en même-tems. C’efl à Freyberg en Saxe» 8c dans les mines de Guadal-Canal en Efpa- gne qu’on trouve ces variétés d’argent natif allié. Mais il faut obferver que ces fubflances métalliques étrangères n’y font qu’en très-petite quantité. 3°. La mine argent vitreufe efl, fuivant la plupart des minéralogifles , formée d’argent 8c de foufre. Elle efl d’un gris noirâtre femblable au plomb ; il y en a de brune , de verdâtre , de jaunâtre , 8c c. on la coupe au couteau comme ce métal. Elle efl fouvent informe, quelquefois criflallifée en odaèdres , ou en prifmes hexaè- dres dont les angles font tronqués. M. Monnet en diflingue'une variété qui fe réduit en pou- dre au lieu de fe couper. Cette mine donne depuis foixante - douze jufqu’à quatre - vingt- quatre livres d’argent par quintal. Elle fe fond d’Hist. Nat. et de Chimie. très - facilement ; fi on lexpofe a une chaleur douce, fans la fondre, le foufre fe diffipe, & l’on obtient l’argent vierge en végétation ou en filets. 40. La mine d'argent rouge eft fouvent fon- cée en couleur , quelquefois tranfparente, crif- tallifée en cubes dont les bords font tronqués , ou en prifmes hexaèdres, terminés par des pyramides trièdres ; on la nomme roJJL-clero au Potofi. L’argent y eft combiné avec le foufre & l’arfenic. Lorfqu’on la cafTe, fa couleur elt plus claire en dedans 8c elle paroît formée de petites aiguilles ou de prifmes convergens comme les fialadites. Si on l’expofe à un feu bien ménagé, 8c capable de la faite rougii. , l’argent fe réduit , & forme des végétations ca- pillaires femblables à l’argent natif. Elle donne depuis cinquante - huit jufqu’à foixante - deux livres d’argent par quintal. Les variétés de cette forte font relatives à la couleur plus ou moins foncée , à la forme, à la pefanteur, Sec. ; on la trouve en général dans tous les lieux où exiftent les autres mines d’argent. j°. L’argent avec de l’arfenic , du cobalt & du fer minéralifé par le foufre. Bergman dit que l’argent patte quelquefois ^ dans cette mine. Cette mine efl quelquefois grife 8c brillante , fouvent fornbre & terne ; ou y reconnoît les 34 6 É L Ê M E N S efflorefcences de cobalt. La mine d’argent merde d'oie appartient à cette efpèce. 6°. La mine d’argent grife , qui ne différé de la mine de cuivre appelée Fahlert ^ , que parce qu’elle contient plus de ce métal précieux. Elle eft en maffes ou bien en criflaux- triangu- laires , dont les bords font taillés en bifeau. Les plus gros de ces criflaux font d’une couleur peu éclatante ; les plus petits difperfés fur une gangue platte forment un fpeétacle fort agréable à la lumière, à caufe de leur brillant très-vif. L’argent gris donne depuis deux jufqu’à cinq marcs d’argent par quintal. Quelquefois l’argent gris s’elt introduit dans des matières organiques dont il imite parfaitement la forme. On le nom- me alors mine d'argent figurée ; telle efl celle qui reffemble à des épis de blé, & que M. Romé de Lille a reconnue pour des cônes St des écailles de pin ; on a trouvé aufîi du bois mi- néralifé de cette efpèce. Cette mine contient de l’argent., du cuivre, du fer, de l’arfenic & du foufre. Lorfque le fer n’efl: que très - peu abondant , on la nomme mine (F argent blanche. Il ne faut point confondre cette dernière avec la galène tenant argent , que les ouvriers appel- lent quelquefois mine d’argent. 7°. La mine d’argent noire , appelée nigrillo par les Efpagnols, n’eft, fuiyant MM, Lehman d’Hist. Nat. et de Chimie. 347 & Rome de Lille , qu’une décompofition de la mine d’argent rouge ou de la grife , & une forte d’état moyen entre celui de ces mines & l’argent natif ; on y rencontre fouvent de ce dernier. Ce dernier minéralogifte obferve que celle qui efl folide , fpongieufe ou vermoulue , provient des mines rouges & vitreufes, 8c eft beaucoup plus riche que celle qui eft friable & de couleur de poix , dont l’origine eft due à l’altération des mines d’argent blanches ou grifes. Audi eft-elje fort fujette à varier pour le produit. Elle donne en général depuis fix à fept livres jufqu’à près de foixante livres d’ar- gent par quintal. 8°. La mine d'argent cornée ou la combinaifon naturelle d’argent avec l’acide muriatique & un peu d’acide fulfurique , eft d’un gris jaunâtre fale ; quelquefois elle tire fur le gris de lin ; elle a , quoique rarement , une demi-tranfpa- rence ; elle eft molle , s’écrafe 8c fe coupe facilement j elle fe fond a la flamme d une bou- gie. On la trouve criftallifée en cubes, 8c le plus fouvent en maiïes informes. Elle contient fréquemment des portions d’argent natif. On croyoit autrefois qu’elle contenoit du foufre 8c de l’arfenic ; mais les minéralogiftes font au- jourd’hui d’accord fur fa nature. MM. Cronf- tedt, Lehman 8c Sage , W oulf , Lommer , Berg- 348 É L É M E N S inan, y ont reconnu la préfence de l’acide muriatique qui s’en dégage par la chaleur. M. Woulf y a reconnu de plus la préfence de l’acide fulfurique. On la trouve en Saxe , à Sainte-Marie, à Guadal-Canal en Efpagne, & à Allemont en Dauphiné. p°. La mine d'argent molle de Wallerius , n’efl que l’argent natif ou minéra'Iifé femé en plus ou moins grande quantité dans des terres colorées. On trouve beaucoup de variétés de couleur dans les terres tenant argent , depuis le gris fale jufqu’au brun foncé. io°. Enfin , l’argent fe trouve fouvent combiné avec d’autres matières métalliques , dans des mines dont nous avons fait l’hiftoire. Tels font le mifpickel , la mine de cobalt grife , le kup fer- nickel ou mine de nickel , le fulfure d’antimoine qui offre fouvent la variété appelée mine d'argent en plumes , la blende, la galène, les pyrites mar- tiales 8c les mines de cuivre blanches ; ces der- nières ne font même que des mines d'argent grifes. Toutes ces fubflances contiennent fou- vent affez d’argent , pour qu’on puiffe en retirer avec profit ce métal précieux; mais il eh facile de concevoir qu’on ne doit point les décrire comme des mines d’argent particulières , & qu’il fuffit d’indiquer qu’elles font en partie compo- fées de ce métal. ' > d’Hist. Nat. et de Chimie. 349 L’eflài des mines d’argent doit varier fuivant leur nature. Celles qui contiennent l’argent natif ne demandent , à la rigueur , que d’être bocardées & lavées ; on peut , pour réparer exactement ce métal des fubftances étrangères qui l’altèrent, les triturer avec du mercure cou- lant. Ce dernier dilTbut l’argent , & on le vola- tilife enfuite à l’aide du feu , pour avoir le métal parfait. Les mines d’argent fulfureufes deman- dent à être grillées , enfuite fondues avec une plus ou moins grande quantité de flux. On ob- tient dans cette fonte l’argent , ordinairement allié avec du plomb, du cuivre, du fer, &c. On emploie pour le féparer , Sc pour favoir exactement la quantité de métal précieux que cet alliage contient, un procédé entièrement chimi- que , fondé fur les propriétés des métaux im- parfaits. Le plomb étant fufceptible de fe vitrifier 6c d’entraîner dans fa vitrification les métaux imparfaits, tels que le fer 6c le cuivre, fans toucher à l’argent , on fe fert de cette propriété pour féparer ce métal parfait d’avec ceux qui l’altèrent. On fond l’argent avec d’autant plus de plomb , qu’il contient plus de métaux étran- gers ; on met enfuite cet alliage dans des vaif- feaux plats 6c poreux, faits avec des os calcinés 6c de l’eau. Ces efpèces de têts, qu’on appelle coupelles t parce qu’ils ont la forme de petites oy0 Élémens coupes , font propres à abforber le verre de plomb qui fe forme dans 1 operation de la coupellation. L’argent relie pur après cette opération. Pour favoir combien il contenoit de. métaux imparfaits ou à quel titre il étoit , on fuppofe une ma (Te d’argent quelconque corn- p o fée de douze parties , qu’on appelle deniers , 8c chacun de ces deniers elt fermé de vingt- quatre grains. Si la malfe d’argent examinée a perdu un douzième de fon poids , c’elt de l’argent à onze deniers; fi elle n’a perdu qu’un vingt-quatrieme , l’argent efl a onze deniers douze grains de fin , 8c ainfi de fuite. La coupelle , après cette opération, a acquis beaucoup de poids; elle ell chargée d’oxide de plomb vitreux, 8c de celui des métaux imparfaits qui étoient alliés à l’argent, 8c que lé plomb en afépares. Comme le plomb contient prefque toujours un peu d’argent , il efl néceffaire de le coupellerd abord tout feul, afin de déterminer la quantité d’argent qu’il contient ; on doit enfuite défalquer du bouton de retour que l’on obtient en coupellant fon argent , la petite portion que l’on fait être contenue dans le plomb qu’on a employé 8c que l’on appelle le témoin. La coupellation préfente un phénomène qui avertit l’artifle de l’état de fon opération. A mefurè que l’argent devient pur par la vitrification Sc la fépa ration d’Hist. Nat. et de Chimie. 35*1 du plomb, il paroît beaucoup plus brillant que la portion qui ne l’ell pas encore. La partie brillante augmente peu -à-peu , & lorfque toute la furface de ce métal devient pure & éclatante de lumière, l’inflant où il pafTe à cet état préfente une forte d’éclair ou de fulguration qui annonce que l’opération efl finie. L’argent de coupelle eil très-pur, relativement aux métaux imparfaits qu’il contenoit auparavant, mais il peut con- tenir de l’or, 8c comme il en contient toujours une certaine quantité, il faut employer un autre procédé pour féparer ces deux métaux parfaits. Comme l’or efl beaucoup moins altérable que l’argent par la plupart des menitrues , on diffout l’argent par les acides nitrique ou muriatique 8c par le foufre -, 8c l’or fur lequel ces diffolvans n’ont que très-peu ou point d’adion , relie pur. Cette manière de féparer l’argent de l’or eil nommée départ. Nous parlerons des différentes fortes des départs , après avoir fait connoître l’aélion de chacun des diffolvans qu’on y met en ufage fur l’argent, & lorfque nous traiterons de l’alliage de ce métal avec l’or. Les travaux en grand , pour extraire l’argent de fes mines 8c pour l’obtenir pur, font à-peu- près femblables à ceux que nous avons décrits pour l’effai des mines de ce métal. ïl y a en général trois manières de traiter l’argent en É L t M Ë N S grand. La première confifle à triturer l’argent vierge avec du mercure ; on lave cette amal- game pour en féparer toute la terre; on l’ex- prime à travers des peaux de chamois , & on la diftille dans des cornues de fer ; on fond enfuite l’argent & on le coule en lingots. On ne peut pas fuivre ce procédé pour les mines d’argent qui contiennent du foufre ; alors on les grille & on les mêle avec du plomb pour affiner le métal précieux par la coupellation. Tel efl le procédé qu’on met en pratique pour les mines d’argent riches ; quant à celles qui font pauvres , on fuit une méthode différente des deux premières. On les fond fans grillage pré- liminaire, avec une certaine quantité de pyrites. Cette fufîon , appelée fonte crue , donne une matte de cuivre tenant argent , que l’on traite par la liquation avec le plomb ; ce dernier qui a entraîné l’argent pendant la fonte , eh fcorifié enfuite par la coupelle , 8c le métal parfait relie pur. La coupellation en grand différé de celle que l’on fait en petit , en ce que dans la première le plomb fcorifié efl chaffé de deffus la coupelle par l’adion des foufflets , tandis que dans les effais l’oxide de plomb vitrifié efl abforbé par la coupelle. L'argent , obtenu par les procédés que nous venons d’indiquer , efl en générai beaucoup moins d’Hist. Nat. et de Chimie. 353 moins altérable que tous les métaux dont nous avons jufqu’à préfent tait l’h.iltoire. Le contact de la lumière , quelque long - teins que ce métal y relie expofé , n’ui change en aucune manière les propriétés.' La chaleur le fond, le fait bouillir & le volatiiife , mais fans altération. Il faut pour le fondre , un feu capable de le faire rougir à blanc ; il ell plus fuüble que le cuivre. Lorfqu’il ell tenu en fulion pendant quelque tems , il fe bcurfouffie , & il exhale des vapeurs qui ilç font que de l’argent vola- til ifc. Ce fait ell prouvé par l’exiflence de ce métal dans le tuyau des cheminées où on en fond continuellement de grandes quantités. Il eR confirmé par ,1a belle expérience de MM. les Académiciens de Paris ; en expofant de l’argent très - pur au foyer de la , lentille de M. de Trudaine, ces favans ont vu ce métal fondu répandre une fumée épaiffe qui a blanchi une lame d’or fur laquelle elle avoit été reçue. L’argent en fe refroidiffartt lentement ell fuf- ceptible de prendre une forme régulière , ou de fe crifiallifer en pyramides quadrangulaires. M. Baume avoit déjà fait obferver que ce mé- tal prenoit en fe refroidi fiant une forme fym- métrique qui s’annonçoit à fa fu.rface par des filets femblables aux barbes d’une plume. J’avois remarqué que le bouton de fin que l’on obtient Tome III. Z Élémens r>ar la coupellation , oflfroit fouvent à fa fur- ^ , • r ' • r „ , l'ace des petits elpaces a cinq ou hx cotes, arrangés entr’eux comme les carreaux d’une chambre ; mais la criftallifation en pyramides tétraèdres n’a été bien obfervée que par MM. Tillet & l’abbé Mongez. On a cru pendant long-tems , & quelques chimiftes penfent encore , que l’argent eft in- deftrudible par l’adion combinée de la chaleur & de l’air. Il eft certain que ce métal , tenu en fufton avec le contad de l’air , ne paroît pas s’altérer fenfiblement. Cependant Juncker avoit avancé qu’en le traitant pendant long - tems par la réverbération, à la manière d’Ifaac le Hollandois , l’argent fe changeoit en un oxide vitrefeent. Cette expérience a été confirmée par Macquer, Ce favant chimifte a expofé de l’argent jufqu’à vingt fois de fuite dans un creu- fet de porcelaine au feu qui cuit celle de Sèves, & il a obtenu à la vingtième fufton , une matière vitriforme d’un vert d’olive qui paroît être un véritable oxide d’argent vitreux. Ce métal chauffe au foyer du verre ardent a toujours préfenté une matière blanche pulvérulente à fa furface , 8c un enduit vitreux verdâtre fur le fupport fur lequel il étoit placé. Ces deux faits ne peuvent laiffer de doute fur l’altération de l’argent ; quoi- qu’il foit beaucoup plus difficile à oxider que d’Hist. Nat. et de Chimie. 35-5“ Jes autres matières métalliques ; il efi: cepen- dant fufceptible de Te changer a la longue en un oxide blanc qui , traite à un feu violent , donne un verre couleur d’olive. Peut-être feroit- il poffible d’obtenir un oxide d’argent en chauffant pendant long-tcms ce métal réduit en lames très-fines ou en feuilles dans des marras , comme on le fait pour le mercure. La commotion éledrique paraît aufîi l’oxider. Quoi qu’il en foit, il eit certain que ce métal ne fe combine que difficilement avec la bafe de l’air vital, & que la chaleur qui ne favorife point cette combinaifon comme elle le fait pour pref- que tous les autres métaux , en dégage , au contraire, très - ai Cément ce principe; car les oxides d’argent font tohs très- faciles à réduire fans addition ; ce qui ^dépend du peu d’adhé- rence de l’oxigène qui fe dégage de ces oxides en air vital par la chaleur & la lumière. L’argent n’éprouve aucune altération de la part de l’air ; fa furface n’eft que très-peu ter- nie , & même au bout d’un tems très - long. L’eau n’a pas plus d’adion fur ce métal. Les matières terreufes ne fe combinent point avec lui ; il eft vraifembiable que fon oxide colore- toit en olive les verres avec lefquels on le ferait entrer en fulion. Les matières falino- terreufes & les alkalis Zij , ELÊMENS n’agifïent pas d’une manière fenfible fur l’ar- gent. L’acide fulfurique le dilTout lorfqu’il eft très - concentré & bouillant, & lorfqu’on lui préfente ce métal dans un grand état de divifion. Il fe dégage beaucoup de gaz acide fulfureux de cette diffolution ; l’argent eft réduit en une matière blanche fur laquelle il faut verfer de •nouvel acide fulfurique fi on veut l’avoir en diffolution. Eu faifant évaporer cette liqueur , on obtient de très-petites aiguilles de fulfate d’ar- gent. J’ai obtenu plufieurs fois ce fel en pla- nques formées par la réunion de ces aiguilles fur leur longueur. Ce fel fe fond au feu; il eff •très-fixe. Il eft décompofable par les alkalis, par le fer , le cuivre , le zinc le mercure , &c. Tous les précipités qu’ôn obtient par les alkalis , peuvent fe réduire fans addition & en aigent fin dans les vaiffeaux fermés. L’acide nitrique oxide & diffout l’argent avec rapidité, & même fans le fecours de la chaleur. Cette diffolution fe fait même quelquefois fi vivement, qu’on eft obligé pour prévenir les ' inconvéniens que cette rapidité fait naître, d~ n’cmployer que l’argent en ma (Te. Il fe dégage beaucoup de gaz nitreux, & il fe fait un pic- cipité blanc plus ou. moins abondant. Il 1 acide du nitre contient quelques portions d acide ful- furique ou d’acide muriatique. L’acide nitrique d’Hist.Nat. et de Chimie. 357 fe colore ordinairement en bleu ou en vert ; il perd cette couleur & devient tranfparent lorf- que la diiToîution ed finie, & fi l’on a employé de l’argent pur; il relie, au contraire, avec une nuance plus ou moins verdâtre lorfque l’argent contient du cuivre. Souvent l’argent le plus pur qu’on puiffe employer contient de l’or ; alors comme l’acide nitrique n’a que peu d’aétion fur ce métal parfait , a médité qu’il agit fur l’argent, il s’en fépare de petits floccons noirâtres qui fe raffemblent au fond du vaifleau , & qui ne font que de 1 or. C e £1 d’après cette adion diverfe de l’acide nitrique fur ces deux métaux , qu’on l’emploie avec fuc- cès pour les féparer l’un de l’antre dans l’opé- ration du départ à l’eau-forte. L’acide nitrique peut diffoudre plus de moitié de fon poids d’ar- gent. Cette diffolution ed d’une très - grande caudicité ; elle tache l’épiderme en noir , & elle le corrode entièrement. Lorfqu’elle ed tres- chargée, elle dépofe des cridaux minces bril- lant femb labiés à l’acide boracique; en l’évapo- rant à moitié , elle donne par le refrcidiffemeut des cridaux plats, qui font ou hexagones, ou triangulaires ou quarrés, & qui parodient formés d’un grand nombre de petites aiguilles pofées les unes à côté des autres. Ces lames fe pla- cent obliquement les unes fur les autres. Elles Z iij ^;S ÉUMENS font tranfparentes & très- cauftiques ; on les â nommés crifiaux de lune. C’ell du nitrate d’ar- gent. Ce fel efl! promptement altéré par le con- taét de la lumière', & floirèi par les vapeurs eombuflibles. Si pn le met fur un charbon ardent , il détonne bien , & il laiffe une poudre blanche qui efl: de l’argent pur: il efl très- fufible. Si on l’expofe au feu dans1 un creufet, il fe bourfouffie d’abord en perdant l’eau de fa crif- tallifation ; ènfuite il refle dans uné fonte tran- quille. Si on le laifle refroidir dans cet état , il - fe prend en une ma (Te grife légèrement aiguillée, & forme une préparation connue en pharmacie 8c en chirurgie fous le nom de pierre infernale. On n’a pas befoin pour l’obtenir de fe fervif du nitrate d’argent criflallifé qui efl très-long à faire 8c très - difpendieux. Il fuffit d’évaporer à ficcité une diflblution d’argent par l’acide nitrique; de mettre ce réfidu dans un creufet ou dans une timbale d’argent , comme le con- feille M. Baumé, 8c dé le chauffer lentement jufqu’à ce qu’il foit dans une fonte tranquille ; alors on le coule dans une lingotière pour lui donner la forme de petits cylindres. Si l’on caffé des crayons de pierre infernale , on ob- ferve qu’ils font formés d’aiguilles , qui partent én rayonnant du centre de chaque cylindre , 8c qui vont fe terminer à fa circonférence. Il ne faut d’Hist. Naî. ET de Chimie. 3;9 pas chauffer trop long-tems le nitrate d’argent pour en faire \a. pierre infernale ; fans cela une partie de ce fel fe décompofe, & l’on trouve nn culot d’argent dans le fond du creitfet. Pour voir ce qui fe paffe dans cejte opération , j ai diftillé ce fel dans un appareil pneumato-chimi- que. J’en ai obtenu du gaz nitreux Sc de l’air vital mêlé d’un peu de gaz azotique. J’ai retrouvé dans mon matras l’argent entièrement réduit ; le verre avoit pris l’opacité de l’émail , & il étoit coloré en un beau brun couleur de marron. C’eff fans doute à l’oxide de manganèfe ou à quelqu’autre fubftance contenue dans ce verre , qu’eft due la couleur brune qu’il a prife dans cette expérience , car celle du verre formé par l’oxide d’argent , tire fur le vert d’olive, comme nous l’avons déjà fait obferver. Le nitrate d’argent expofé à l’air, n’en attire pas l’humidité , il fe diffout très-bien dans 1 eau , & on peut le faire criftallifer par l’évaporation lente de ce fluide. La diflblution nitrique d’argent eff décom- pofée par les fubftances falino-terreufes Sc par les alkalis , mais avec des phénomènes ties- differens , fuivant l’état de ces matières. L eau dejchaux y forme un précipité couleur d olive très-abondant. Les alkalis fixes chargés d acide carbonique la précipitent en blâme; lammo- Ziv $6o É l é M E N* S ni:; jue 'eau Hi'. 'te, en un gris qui tire fur le vert de. loliv Grue dernière précipitation n’a lieu qu’à la longue. (pudique .‘aride nitrique km celui qui agiffe avec le plus d’éne-qie fur l’argent, ce n’efl pas celui qui a plu* Tadhérence 8< plus d’affinité avec l’oxide de ce métal ; l’acide fulfurique 8c l’acide muriatique font fuceptibles de lui enlever cet oxide. C’eit pour cela qu’en verfant quelques aouttes de ces acides dans une difTolution nitri- O que d’argent , il fe forme un précipité en une poudre blanche, lorfqii’on emploie l’acide ful- furique , & en floccons épais comme un coagu- lum , il l’on le fert d’acide muriatique. Dans le premier cas, il s’efl formé du fulfate d’argent; dans le fécond, du muriate d’argent: ces deux fels n’étant pas très folublés , fe précipitent. Il n’ell pas nécefiaire de fe fervir des acides ful- furique & muriatique libres, pour opérer ces décompolitions ; on peut auffi employer les fels neutres qui réfultent de leur union avec les alkalis & les matières terreufes ; alors il y a double dècompofition & double combinaifon , parce que l’acide nitrique, (épaté de l’argent, s’unit avec la bafe des Tels fulfuriques ou muriatiques. C’ek fur cette différence de rapport entre les acides & l’argent qu’efl fondé un procédé que l’on met en ufage pour fe procurer un d’Hist. Nat. et de Chimie. 361 acide nitrique bien’ pur & exempt du mélange des autres acides , tel en un mot , qu’il le faut pour plusieurs opérations de métallurgie, & pour la plupart des recherches chimiques. Comme en diftillant Tefprit de nitre , il eft rare que ce fluide ne Toit point mêlé avec une certaine quantité d’acide fu lf urique ou d’acide muriati- que , les chimifles ont cherché des moyens de féparer ces fluides étrangers , & ils fe fervent avec fuccès de la dilTolution nitrique d’argent , pour parvenir à ce but. On verfe dans l’acide nitrique impur , cette dilTolution jufqu’à ce qu’on s’apperçoive qu’elle n’y occafionne plus de précipité; on laide raffembler le dépôt formé de fulfate ou de muriate d’argent; on décante l’acide & on le diflille à une chaleur douce pour le féparer d’avec la petite portion de fels d’argent qu’il peut contenir. Le pro- duit que Ton obtient efl de l’acide nitrique très-pur ; on lui donne , dans les arts , le nom d’eau-forte précipitée. La plupart des matières métalliques font fuf- ceptibles de décompofer la dilTolution nitrique d’argent, parce qu’elles ont plus d affinité que ce métal avec l’acide nitrique. L’arfeniate de potaffe diffous dans l’eau , produit dans la diffo- lution nitrique un précipité rougeâtre formé par l’union de l’argent avec Tarfenic. Ce précipité 362 E l é m e n s imite la mine d’argent rouge. On peut obtenir l’argent précipité dans fon état métallique par la plupart des métaux & des demi-métaux; mais c’efi fur-tout la réparation de ce métal parfait opérée par le mercure 8c par le cuivre , qu’il nous importe de confîdérer ici , à caufe des phénomènes que préfente la première, & de Futilité de la fécondé. L’argent féparé de l’acide nitrique par le mer- cure, efl dans fon état métallique , & la lenteur de fa précipitation donne narffance à un arran- gement fy mm étriqué particulier connu fous le nom d 'arbre de Diane , ou arbre philofaphïqae. Il y a plufieurs procédés pour obtenir cette crif- tallifation. Lemery prefcrivoit de prendre une once d’argent fin , de le diffoudre dans de l’acide nitrique médiocrement fort , d’étendre^ette dif- folution avec environ vignt onces d’eau diftillée, 8c d’y ajouter deux onces de mercure. En qua- rante jours de tems , il s’y forme une végéta- tion très-belle. Homberg a donné un autie pio- 6édé beaucoup plus court. On fait , d’après ce chimifle , une amalgame à froid de quatre gros d’argent en feuilles avec deux gros de mercure ; on diiïout cette amalgame dans fuffifante quan- tité d’acide nitrique, on ajoute à cette diflblutiort Une livre 8c demie d’eau diftillée. On met dans Uhe once de cette liqueur une petite boule d une d’Hist. Nat. et de Chimie. 363 amalgame d’argent molle, & la précipitation de l’argent a lieu prefque fur le champ. L’argent précipité & uni à une portion de mercure fé dépofe en filets comme prifmatiques à la furfacé de l’amalgame. D’autres filets viennent s’implan- ter fur les premiers, de manière à offrir une vé- gétation en forme de buiffon. Enfin, M. Baümé a décrit un moyen d’obtenir l’arbre de Diane 9 qui différé un peu de celui de Homberg, & qui réuffit plus sûrement. Il confeille de mêler fix gros de diffolution d’argent , & quatre gros de diffolution de mercure par l’acide nitrique , 8c toutes deux bien faturées , d’ajouter à ces liqueurs cinq onces d’eau diflillée , 8c de les verfer dans un vafe de terre fur fix gros d’une amalgame faite avec fept parties de mercure 8c une partie d’argent. Ces deux méthodes réufîiffent avec beaucoup plus de promptitude que celle de Lé- mery, par l’adion réciproque & le rapport qui exifle entre les matières métalliques. En effet , le mercure contenu dans la diffolution , attire celui de l’amalgame ; l’argent contenu dans cette der- rière , agit audi fur celui qui efl ténu en diffô- lution , & il réfulte de ces attradions une pré- cipitation plus prompte de l’argent. Le mercure qui fait partie de l’amalgame étant plus abondant qu’il ne feroit riécelTaire pour précipiter l’argent de la diffolution , produit encore un troificme 364 Ë L -é M E N S effet bien important à confidérer : c’efl qu’il attire l’argent par l’affinité & la tendance qu’il a à fe combiner avec ce métal ; il s’y combine effec- tivement, puifque les végétations de l’arbre de Diane ne font qu’une véritable amalgame caf- fante & crillallifée. Cette criflallifation réuffit beaucoup mieux dans des vaiffeaux coniques, comme des verres , que dans des vaiffeaux ar- rondis ou évafés , tels que la cucurbite recom- mandée par M. Baumé. On conçoit auffi qu'il eff néceffaire de meure le vafe où fe fait l’ex- périence , à l’abri des fecouffes qui s’oppofe- roient h l’arrangement fymmétrique & régulier de l’amalgame. Le cuivre plongé., dans une diffolution d’ar- gent en précipite de même ce métal fous la forme brillante & métallique. On emploie ordi- nairement ce procédé pour féparer l’argent de fou diffolvant après avoir fait le départ. On trem- pe des lames de cuivre dans la diffolution, ou bien on met cette dernière dans un vaifleau de cuivre ; l’argent fe fépare furie champ en floccons d’un gris blanchâtre. On décante la liqueur lorf- qu’elle eh bleue & qu’il ne s’en précipiterons d’argent. On lave ce dernier à pîufieurs eaux • on le fond dans des creufets, & 011 le paile avec du plomb à la coupelle pour en féparer une portion de cuivre auquel il s’eh uni dans la d’Hist. Nat. et de Chimie. 3 6 $ précipitation. L’argent que fournit cette opéra- tion ell le plus pur de tous; il cil à douze deniers de fin. On voit , d’après ces deux précipitations de l’argent par le mercure & par le cuivre, que les métaux féparés de leurs diffolvàns par des matières métalliques, le précipitent avec toutes leurs propriétés; ce phénomène dépend comme nous l’avons indiqué dans l’hiftoire du cuivre, de ce que les métaux , plongés dans la dilfolution d’argent, enlèvent à ce dernier l’oxigène avec lequel ils ont plus d’affinité. L’acide muriatique ne diffout point immédia- tement l’argent , mais il diffout bien fon oxide. Lorfque cet acide eh furchargé d’oxigène , il oxide facilement le métal. Telle eft, fans doute, la raifon de ce qui fe paffe dans le départ con- centré. Cette opération confifle à expofer au feu des lames d’or allié d’argent , cémentées avec un mélange de fulfate de fer & de muriate de foude ; l’acide fulfurique dégage l’acide muria- tique , lui donne une portion de fon oxigène , & ce dernier fe porte fur l’argent qu’il diffout. On fuit un procédé beaucoup plus prompt & plus facile pour combiner l’acide muriatique avec l’argent en oxide. On verfe cet acide dans une diffolution nitrique de ce métal ; le précipité très-abondant qui fe forme fur le champ, eft la combinaifon de l’acide muriatique, avec l’ar- ^6$ . ÿtÉBENJ gent qui a plus d’affinité avec cet acide qu’avec celui du nitre, & qui conféquemment quitte ce dernier pour s’unir au premier. On obtient la même combinaifon en verfant de l’acide muria- tique dans une diffolution de fulfate d’argent *, parce que cet acide a plus d’affinité avec le métal que n’en a le fulfurique. On peut encore combiner l’acide muriatique à l’argent, en chauf- fant cet acide fur un oxide de ce métal précipité de l’acide nitrique par l’alkali fixe. Le muriate d’argent a plufieurs propriétés qu’il eft important de bien eonnoître. Il eft fingulièrement fufible. Lorfqu’on l’expofe dans une fiole à médecine à un feu doux, comme fur les cendres chaudes , il fe fond en une fubf- tance grife & demi -transparente affez femblable à de la corne ; c’eft pour cela qu’on l’a appelé lune cornée. Si on le coule fur un porphyre , il fe fige en une matière friable 8c comme criftallifée en belles aiguilles argentines. Si on le chauffe long-tems avec le contaét de l’air , il fe décompofe ; il paffe facilement à travers les creufets ; une partie fe volatilife 8c une autre fe réduit en métal , 8c donne des globules d’argent femés dans la portion de muriate d’ar- gent non décompofe. Ce fel expofé à la lu- mière perd fa couleur blanche 8c brunit affez promptement. Il fe diffout dans l’eau , mais en d’Hist. Nat. et de Chimie. 367 très-petite quantité , puifqu’une livre d’eau dif- tillée bouillante ne s’en charge que de trois ou quatre grains , fuivant l’expérience de M. Monnet. Les a kalis font fiifceptibles de dé- coinpofer le mu date d’argent diflous dans l’eau, ou traité au feu avec ces fels; c’efl un moyen qu’on peut employer pour obtenir l’argent le plus pur & le plus fin que l’on connoifle. On fait un mélange de quatre parties de potafle ou carbonate de potalTe , avec une partie de ma- riate d argent. On le met dans un creufet, 8c on le fait fondre • lorfqu’il efl en belle fufion, on le retire du feu, on le laifle refroidir & on le cafle ; on en fépare l’argent qui fe trouve au-deffous du muriate de potafle formé dans cette opération , 8c de la portion furabondante d’alkali employé. M. Baumé , à qui efl dû ce procédé , allure que la quantité d’alkali qu’il prefcrit, empêche le muriate d’argent de pafler à travers le creufet en agiflant fur toutes les parties qu’il décompofe à la fois. Margraf a donné un autre procédé pour réduire ce fel, & pour en obtenir l’argent parfaitement pur. On triture dans un mortier cinq gros feize grains de muriate d’argent avec une once & demie de carbonate ammoniacal , en ajoutant aflez d’eau diflillée pour faire une pâte ; on agite ce mélange jufqu’à ce que le gonflement ^58 É L É M E N S 8c l’effervefc.ence , qui s’y excitent , foient ap- paifés ; alors on y ajoute trois onces de mer- cure bien purifié , 8c on triture jufqu’à ce qu’on apperçoive une belle amalgame d’argent ; on la lave avec beaucoup d’eau , en continuant la trituration, 8c on renouvelle le lavage jufqu’à ce que l’eau forte très-claire , 8c que l’amal- game foit très-brillante ; à cette époque on defsèche cette dernière, 8c on la diftilie dans une cornue jufqu’à ce que ce vaifleau foit d’un rouge blanc ; le mercure paffe dans le récipient , & on trouve l’argent pur au fond de la cornue. De cette manière on obtient ce métal de la plus grande pureté & fans déchet fenfible. C’efl de cet argent qu’on doit fe fervir pour les ex- périences délicates de la chimie. L’eau em- ployée pour laver ce mélange , a emporté deux fubflances , une certaine quantité de nmriate ammoniacal qu’elle tient en diffolution , 8c une poudre blanche qui ne peut point s’y dilTou- dre. Lorfqu’on fublime cette dernière , on re- trouve une petite quantité d’argent au tond du vaiffeau fubrimatoire. Cette expérience prouve qu’on ne décoinpofe complètement le nmriate d’argent que par le fecours d’une double affi- nité. En effet , dans le procédé de Margraf , l’ammoniaque ne s’unit à l’acide muriatique que parce que l’argent fe combine de fou côté * ait d’Hist. Nat. et de Chimie. 3^ au mercure , qui l’attire & le follicite de quitter l’acide , ce que l’alkali feul ne peut faire. Mais l’on conçoit que cette opération longue & cou- teufe , ne peut convenir que dans les travaux en petit de nos laboratoires. Si l’on avoit à réduire le muriate d’argent en grande quan- tité , on employeroit ou les alkalis fixes , ou quelques fubftances métalliques , qui, la plupart ont plus d’affinité avec l’acide muriatique que' n en a 1 argent. Tels font entr’autres , l’anti- moine, le plomb, l’étain , le fer, &c. Si l’on fond dans un creufet une partie de muriate d’argent avec trois parties de l’une de ces ma- tières , on trouve l’argent réduit au fond du creufet, & le métal employé uni à l’acide mu- riatique. L’argent ainfi précipité eft fort impur; il contient toujours une portion du métal dont on s’eft fervi pour le réduire ; & comme on emploie le plus communément le plomb con- feillé par Kunckel , l’argent qu’il fournit a befoin d être coupelle , & il ne peut jamais être amené à l’état de pureté de celui qui eft réduit parles alkalis , ou par le procédé de Margraf. L’acide nitro-muriatique agit affez bien fur l’argent , & il le précipite à mefure qu’il le diffiout. Cet effet eft fort aifé à concevoir ; l’acide nitrique diffout d’abord ce métal , & l’a- cide muriatique s’enlève au premier, en formant Tome III. Xa 2~]0 É L É M E N s du muriate d’argent qui fe dépofe, à caufe de fon peu de folubilité ; c’eft un procédé qui peut fervir à féparer l’argent contenu dans l’or. On ne connoît pas bien l’aâion des autres acides fur l’argent; on fait feulement qu’une diflolution de borax produit un précipité blanc très - abondant dans la dilTolution nitrique de ce métal , 8c que ce précipité efi formé par l’acide boracique uni à une portion d’oxide d’argent. Ce métal ne paroît pas être altérable par les fels neutres ; au moins on a conftaté qu’il ne détonoit pas avec le nitre , & qu’il ne décom- pofoit pas le muriate ammoniacal. Cette inal- térabilité de l’argent par le nitre , fournit un bon moyen d’en féparer par la détonation les métaux imparfaits qui peuvent lui être unis ; tels que le cuivre , le plomb , &c. On fait fondre ce métal allié au - de (Tus du titre qu’il doit avoir , avec du nitre ; ce fel détonne & brûle la portion de métal imparfait étranger à l’argent , 8c ce dernier fe trouve au-deflous au fond du creufet ; il eft beaucoup plus pur qu’il n’étoit auparavant. Prefque toutes les matières combuflibles ont une action plus ou moins marquée fur 1 argent. Aucun métal n’efl plus vite terni 8c coloié par les matières inflammables, Le gaz hydrogène t»’H ist. Nat. et de Chimie. 371 fui fli ré , de quelque fubftance qu’il fe dégage, lui donne , dès qu’il le touche , une couleur bleue ou violette tirant fur le noir, & diminue beaucoup fa duélilité. On fait que les vapeurs animales fétides , telles que celles des latrines, de l’urine putréfiée , des œufs chauds , produb fent le même effet fur ce métal. On n’a point encore examiné l’adion réciproque de ces deux corps , & l’efpèce de combinaifon qui en ré- fuite. Le foufre fe combine très-bien avec l’argent; on fait ordinairement cette combinaifon en lira- uiiant dans un creufet des lames de ce métal avec de la fleur de foufre , & en fondant prompiement ce mélange ; il en réfulte une maffe d’un noir violet , beaucoup plus fufible que l’argent, caffante & difpofée en aiguilles; en un mot , une véritable mine artificielle, vœtte combinaifon fe décompofe facilement par 1 adion du feu , à caufe de la volatilité du foufre & de la fixité de l’argent ; le foufre fe confume & fe diflipe , & l’argent refie pur. Le fulfure alkalin diffout ce métal par la voie sè- che ; en faifant fondrè une partie d’argent avec trois parties de fulfure de potaffe , ce métal difparort & peut fe difToudre dans l’eau en même-terns que le fulfure* Si l’on verfe un acide dans cette diffolution, on obtient un A a ij 372 É L È M E N S précipite noir d’argent fulfuré. Des feuilles d’ar- gent mifes dans une diffiolution de fuifure de potaffe , prennent bientôt une couleur noire, & il paroît que le foufre quitte l’alkali pour s’unir au métal & le minéralifer , ainfi que nous l’avons vu pour le mercure. L’argent s’unit avec l’arfenic qui le rendcaf- fant, On ne connoît point encore l’adion de l’acide arfenique fur ce métal parfait. Il ne fe combine que difficilement avec le cobalt. Il s’allie très-bien au bifmuth & forme avec lui un métal mixte fragile , dont la pefanteur fpécifïque eft plus grande que celle des deux métaux pefés féparément. Suivant Cronfledt , l’argent ne s’unit point au nickel ; ces métaux fondus enfemble fe pla- cent à côté l’un de l’autre , comme fi leur pe- fanteur fpécifïque étoit parfaitement identique. Il fe fond avec l’antimoine , 8c donne avec ce demi-métal un alliage très-fragile. Il paroît fufceptible de décompofer le fuifure d’anti- moine , & de s’unir au foufre de ce minéral , avec lequel il a plus d’affinité que l’antimoine. L’argent fe combine facilement au zinc par la fufion. Il réfulte de cette combinaifon un alliage grenu à fa furface 8c trcs-caffiant. Iife diffout complètement , & même à froid. d’Hist. Nat. et de Chimie. 375 dans le mercure - pour opérer cette diîTolution,. il fuffit de malaxer avec ce fluide métallique des feuilles d argent • il en réfulte fur-le-champ une amalgame d’une confirtance variée , fuivant la quantité lefpedive des deux fübftances qui la forment. Cette amalgame eft firfceptible de prendre une figure régulière par la fufîon & le refroidifiement lent ; elle donne des criftaux Prismatiques tétraèdres , terminés par des py- ramides de la même forme. Le mercure prend une forte de fixité dans cette combinaifon • car il faut , pour le féparer de l’argent , un degré de chaleur plus confidérable que celui qui ell néceflaire pour le volatilifer feul. L’argent ell fufceptible de décompofer le muriate mercu- riel corrofif par la voie sèche & par la voie humide. II s’unit parfaitement avec l’étain • mais il peid, par la plus petite dofe de ce métal , toute fa dudilité. Il s’allie promptement avec le plomb , qui le'rend très-fufible, & qui lui ôte fon élafiieité & fa qualité fonore. Il s’allie au fer , 8c cet alliage peu examiné pourroit peut-être devenir d’une très -grande utilité dans les arts, Enfin, il fe fond 8c fepombineen toutes pro- portions avec le cuivre. Ce dernier ne lui ôte A a iij ■574 É L É M î K s peint fa dudilité ; il le rend pins dur & plus fonore , & il forme un alliage fouvent employé dans les arts. L’argent eff un métal fingulièrement utile , à caufe de fa dudilité , de fon indeffrudibilité par le feu & l’air. Son brillant le fait fervir d’or- nement ; on l’applique à la furface de différens corps 8c même du cuivre ; on le fait entrer dans le tifïu des étoffes dont il relève la beauté. Mais fon ufage le plus important eff celui de fournir une matière propre par fa dureté & par fa dudililité , à faire des vafes de toutes les formes. L’argent de vaiflelle eff ordinairement allié d’un vingt- quatrième de cuivre, qui lui donne plus de dureté 8c de cohérence , 8c qui ne l’expofe à aucun inconvénient pour la fanté, parce que les vingt-trois parties d’argent maf- quent 8c détruifent entièrement les propriétés délétères du cuivre. Enfin , l’argent eff employé pour exprimer la valeur de toutes les marchandifes , 8c on le fabrique en monnoie; mais dans ce cas on l’allie à un douzième de cuivre , 8c fon titre eff con- féquemment à onze deniers de fin. d’Htst. Nat. et de Ch-ïmie. 375" CHAPITRE XXL De l O r. L’OR ou le foleil des alchimiftes efl. le mé- tal le plus parfait & le moins altérable que l’on connoifle \ il efl d’une couleur jaune bril- lante. C’elt après le platine le corps le plus pefant de la nature ; il ne perd qu’entre un dix -neuvième & un vingtième de fon poids dans l’eau ; fa dureté n’eft pas très-confidéra- ble , ainfi que fon élaflicité. Son étonnante duc- tilité bien prouvée par l’art du tireur & du batteur dor , efl; telle , qu’une once de ce métal peut dorer un fil d’argent long de quatre cens, quarante-quatre lieues , 6c qu’on le réduit en lames fufceptibles d’être enlevées par le venu Un grain d’or peut , fuivant le calcul de Lewis , couvrir une aire de plus de quatorze cens pou- ces quarrés. C efl le plus tenace de tous les mé- taux , puifqu’un fil d’or d’un dixième de pouce de diamètre peut foutenir un poids de cinq cens livres avant que de fe rompre. L’or s écrouie facilement fous le marteau , mais le recuit lui rend toute fa dudilité. La couleur de l’or efl fufceptible d un allez A a iv i 574 t d’Hist. Nat. et de Chimie. 463 Un des grands inconvéniens du charbon de terre, outre la fumée très - abondante & très- épaiffe qu’il exhale 8c qui noircit tous les meu- bles , c’eff que le courant d’air très-rapide & très-abondant qu’il exige pour îa combuflion , enlève 8c volatilife une partie de fes cendres , qui s’attachent fur tous les corps environnans. Mais on remédiera en grande partie à ces deux inconvéniens par une conflruétion bien entendue des cheminées, 8c telLe que le courant excité par fa combuflion foit tout entier entraîné au- dehors , 8c qu’il n’y en ait aucune portion re- foulée dans les chambres. La grande utilité que ce combuflible aura en France, efl plus relative encore aux arts 8c aux manufactures de toutes les efpèces ; on ména- gera fingulièrement par fon ufage , les bois pour le chauffage 8c pour la conflruétion. CHAPITRE XXVIII. Sorte V. Du Pétrole. O N a donné le nom de pétrole ou d 'huile de pierre , à une fubflance bitumineufe liquide , qui coule entre les pierres fur les rochers , ou dans differens lieux de la furface de la terre* \ I 464 É L é M £ N § Cette huile diffère par fa légéreié , Ton odeur, fa confiff nce 8c Ton inflammabilité. Les auteurs en ont diflingué un affez grand nombre de variétés. Us ont donné le nom de naphte au pétrole le plus léger, le plus tranfparent & le plus inflammable ; celui de pétrole proprement dit à un bitume liquide , un peu épais , 8c d’une couleur brune foncée ; enfin celui de poix mi- nérale à un bitume noir , épais , peu liquide , tenace 8c s’attachant aux doigts. Voici quelles en font les variétés décrites par Wallerius Se par plufieurs autres naturalises. Variétés. r 1. Naphte blanc. 2. Naphte rouge. 3. Naphte vert ou foncé. 4. Pétrole mêlé à de la terre. 5. Pétrole fuintant à travers les pierres. 6. Pétrole nageant fur les eaux. 7. Poix minérale ou maltha. S. Piffafphalte. Il elt d’une confiflance moyen- ne entre celle du pétrole ordinaire , 8c de l’afphalte ou bitume de Judée. Les différens naphtes fe trouvent en Italie; dans le duché de Modène , 8c au mont Ciaro , à douze lieues de Plaifanoe. Kempfer rapporte dans fes Amœniiaus exoùcœ , qu’on le rama fie en d’Hist. Nat. et de Chimie. a.($ en grande quantité dans pîuficurs endroits de la Perfe. Le pétrole coule en Sicile & dans plu- lieurs autres lieux de l’Italie ; en France , au village de Gabian , dans le Languedoc; en Al- face ; à Neufchatel en Suiffe ; en Ecolfe, &c. Le piffafphalte 8c la poix minérale fe tiroient autrefois de Babylone , dont ils ont fervi à la conftrudion des murailles ; de Ragufe en Grèce, de de l’étang de Samofate, capitale de la Co- magène en Syrie. On les tire aujourd’hui de la principauté de Neufchatel Sc de Wallengin , du Puits de la Pège , à une lieue de Clermont- Ferrand en Auvergne , 8c de plulieurs autres endroits. Il faut ob fer ver à l’égard des différentes va- riétés que nous avons indiquées , qu’elles pa- roiffent toutes avoir la même origine, 8c qu’elles ne diffèrent les unes des autres que par quelque modification particulière. La plupart des Natu- raliftes 8c des Chimiftes attribuent la formation des pétroles à la décompofition des bitumes folides par l’action des feux fouterrains. Ils ob- fervent que le naphte paroît être l’huile la plus légère, que le feu dégage la première, 8c que celle qui lui fuccède acquérant de la couleur 8c de la connilance , forme les diverfes fortes de pétroles ; qu’enfin ces derniers unis à quel- ques fubûances terreufes ou altérées par les Tome III, G g O 4 66 Elémens acides, prennent les caradères de la poix mi- nérale ou du piffafphalte. Ils ont , pour étayer leur fentiment , une comparaifon fort exade avec les phénomènes que préfente la diftillation du fuccin , qui fournit en effet une forte de naphte , & un pétrole plus ou moins brun fui vaut le degré de chaleur , 8c le temps de l’opération. Enfin , ils obfervent que la nature préfente fouvent dans le même lieu toutes les efpcces de pétroles , depuis le naphte le plus léoer jufqu’à la poix minérale. Tels font les bitumes fluides que l’on retire du mont Feflin dans le duché de Modène. Quoique cette opi- nion foit très-vraifemblable , quelques auteurs penfent que le pétrole eft une combinaifon huileufe minérale formée par l’acide fulfurique 8c quelque matière grade; mais cette combi- naifon même appartiendroit encore à quelques êtres organiques , puifque les matières grades font toujours formées par ces êtres. On n’a point encore examiné les propriétés chimiques du pétrole. On fait feulement que le naphte efi très-volatil, 8c fi combuflible, qu’il s’enflamme par le voifinage de quelque matière en combufiion; il femble même attirer la flam- me à caufe de fa volatilité. On retire un phlegme acide du pétrole brun , & une huile qui d’abord e‘l femblable au naphte, 8c qui fe colore à d’H i s t\ Nat. et de CrîrMiE. 467 mefure que la diflillation elt plus avancée. Il relie dans la cornue une matière épaiffe comme le piflafphalte , qu’on peut rendre sèche & caf- fante comme l’afphalte , & réduire entièrement à l’état charbonneux par un feu plus vif. Les alkalis n’ont que peu d’aétion fur le pétrole ; l’acide fulfurique le coloie & l’cpaifTit , l’acide nitrique l’enflamme comme les huiles eiïentielîes; il dillbut facilement le foufre ; il fe colore par les oxides métalliques , N il s’unit au fuccin dont il ramollit & diflout une partie à l’aide de la chaleur. Les diverfes efpèces de pétrole font em- ployées à diffèrens ufages dans les pays où elles font abondantes. Kempfer nous apprend qu’on s’en fert en Perfe pour s’éclairer , & qu’on en brûle dans des lampes à l’aide des mèches. On peut aulfi les l'aire fervir au chauffage. Lehman dit que pour cet effet on verfe du naphte fur quelques poignées de terre , & qu’on l’allume avec du papier; il s’enflamme tout-à- coup avec activité , mais il répand une fumée épailfe très-abondante , qui s’attache à tous les corps , & dont l’odeur eff fort défagréable. On croit aulfi que le pétrole entre dans la compo- fnion du feu grégeois. On emploie encore le pétrole épais pour faire un mortier très-folide & très-durable. On retire , par la décoction du 468 È L Ë M Ë N S j &C. piffafphalte avec l’eau , une huile dont on fe fert pour goudronner les vaifleaux. Enfin , quelques médecins fe font fervis avec fuccès du pétrole dans les maladies des mufcles, la paralyiîe , la foiblefTe , &c. en en frottant la peau, ou en fexpofant à fa fumée. Vanhelmont regardoit les frictions faites avec le pétrole com- me un très-bon remède pour les membres gelés , & il les confeilloit comme un excellent préfervatif contre l’impreffion du froid. Fin du Tome troijième. Errata du Tome troijième. P âge , ligne 18 , fenl neutre life\ lel neutre 114, 15 , future Life\ fulfure 158, 17, jamais life\ que très-rarement 237, demie r e , elle eft privée Life\ il eft privé 288, 11, fur ce fluide lifé\ fur l’eau 316, 10, qui ne contiennent Ufe\ qui ne contienne 337, 18, du carbonate de zinc life\ de l’oxide de zinc natif 3 61? , dernière , s’enlève life\ l’enlève 386 , relativement à la note , il faut obferver que fi les précipités qui y font décrits différent de ceux dé- crits quatrième volume-, page 4 1 , ceux-ci font faits avec l’acide gal- lique pur , & les autres avec la noix de galle entière , ou avec la décoftion de cette fubfîance. 388, 2?; exploflon life 3 explofion 460, 5, coals life\ coaks 461 & fuiv. faites la meme correction. H # . N I » - / ê