Med K4691 * ALBUM DES ORCHIDEES des Orchidée? de de l’Europe centrale et- septentrionale par H- CORREVON Propriétaire du Jardin alpin d’acclimatation à Genève. Directeur du Jardin botanique de « La Linnæa » (Valais) et de celui des Rochers de Naye. Membre de la Société helvétique des Sciences naturelles. Membre d’honneur de la Société Pvoyale d’agriculture et de botanique de Gand. Membre correspondant de la Société Royale de botanique de Londres, de la Société botanique des Deux-Sèvres, de la Société Royale d’horticulture de Londres, de la Société Royale d’horticulture de Toscane, de la Société Pioy ale d’horticulture et d’ Agriculture d’Anvers, de la Société nationale d’horticulture de France, de la Société d’horticulture du Nord de la France, du Cercle horticole du Nord, de la Société régicnale d'horticulture de Vincennes, de la Société d’horticulture d’Orléans et du Loiret, de la Société d’horticulture d’Armentières, de la Société horticole dauphinoise, delà Société d’horticulture du Val-de-Travers, de la Société d’horticulture du Canton de Vaud, Président d honneur de la Société Rostania, à Pignerol, membre d’honneur de la Société italienne Pro montibus, etc., etc. 6o Planches coloriées GENÈVE LIBRAIRIE GEORG &Cle 10, Corraterie, 10. PARIS LIBRAIRIE O . D O I N 8, Place de I’Odéon, 8. 1899; Tous droits réservés. GENÈVE IMPRIMERIE W. KÜNDIG & FILS WELLCOME INST1TUTE LIBRARY Coll. welMOmec Ccll No. A Son A/ fesse Royale te Prince Ferdinand de Bulgarie cet Album de nos Orchis est dédié en sincère hommage et en respectueux souvenir par l'auteur. Digitized by the Internet Archive in 2016 https://archive.org/details/b28128187 PREFACE Il y a six ans que l’auteur de ces lignes présentait au public un modeste volume traitant le sujet si intéressant bien qu’encore peu connu des Orchidées qui peuvent vivre sous notre climat et résister à nos hivers. Ce petit livre qui s'oc- cupait à la fois des phénomènes de la fécondation par les in- sectes— -phénomènes plus suprenants ici que chez beaucoup d’autres plantes — des procédés de culture et d’acclimatation et de la description de toutes les espèces, européennes ou exotiques, rustiques chez nous, a obtenu un succès auquel ses éditeurs étaient loin de s’attendre. Il a mis l'auteur en relations avec beaucoup d’amateurs d orchidées rustiques et avec les rares « jardineurs » qui s'occupent de leur ac- climatation. C'est un monde peu nombreux, peu bruyant, composé en majeure partie d'artistes, de gens de lettres, de poètes aussi. Entre amateurs de ces bijoux, méconnus du gros public, on fraternise plus volontiers que dans d’autres domaines. 11 me souvient que le Comte de Paris, dans une visite qu’il lit au jardin alpin d'acclimatation, nous parla avec une grande joie des cultures d’Orchis et d’Ophrys qu’il avait introduits dans sa villa du Midi. Il décrivait élogieuse- ment les plaisirs qu i! y a de s’occuper soi-même de ces cultures, de les surveiller, de s’y attacher comme on s'attache à des amis et de les traiter comme on traite des êtres (pii vivent et sentent. 11 appartenait à son neveu, le Prince éclairé qui a bien voulu accepter la dédicace de ces pages et avec lequel X PREFACE l'auteur a eu, sur le même sujet, des conversations du plus palpitant intérêt, de continuer la tradition dans l’auguste famille et de cultiver dans ses rares heures de loisir, les jolis Ophrys et les Orchis du Midi de l’Europe. Il n’est point le seul d’ailleurs qui, parmi les hommes en vue, s’adonne à ces cultures si spéciales. Dans notre époque très civilisée, où le culte du Beau est un peu par- tout à l’ordre du jour, nombreux sont les amateurs de nos Orchidées indigènes. Ils se rencontrent surtout — je dirai presque exclusivement — dans le monde des esprits cul- tivés, des lettres, des amis des arts et de la poésie. L’auteur des « Orchidées rustiques » a éprouvé de très vives jouis- sances — il tient à le dire — du commerce qui s’est natu- rellement produit entre beaucoup de ses lecteurs et lui, de leur fréquentation et de l’amitié qui en est résultée. On de- vient rapidement frères dans un domaine aussi spécial et l’on s’y comprend facilement. Ces jouissances là, le gros public ne les conçoit ni ne les connaît; il méprise les humbles fleurettes que Dieu a placées sur le bord de notre sentier, semant ainsi, le long du chemin, des Ilots de poésie, des heures de joie par le pèlerin que tant de circonstances contribuent à ramener aux satisfactions bestiales et vulgaires. La contemplation d’un épi d’Orchis, visité par l’insecte qui, inconsciemment mais infailliblement sera l’agent de sa fé- condation, est une de ces satisfactions qu’il n'est pas donné à tout le monde de saisir et d’éprouver. Il faut déjà une cer- taine dose d’intellectualité, de délicatesse de sentiments pour comprendre la beauté de la chose. La forme délicate d’un labelle ; l'étude de sa construction, dont le but est d’attirer l'insecte, de le retenir un certain temps afin d’assurer la fécondation croisée de l’espèce; les teintes admirables que la palette céleste a déposé sur les différentes organes de la fleur; les parfums délicats qu’exhalent les corolles, PREFACE XI tout cela a clés voix charmantes que n’entend et ne comprend que l'esprit hanté par l’amour du vrai, par le culte des beautés naturelles que le génie merveilleux du Créateur a réparties partout sur notre planète. C’est donc à un public spécial que s’adresse cet album ; ce n’est ni aux botanistes, dans le sens étroit du terme, ni aux cultivateurs proprement dits. C’est aux amis du beau, du vrai, aux âmes qui recherchent les jouissances pures du commerce avec la nature, à ceux qui, se plaçant au-dessus des vulgarités de la vie, recherchent dans ce commerce même des satisfactions saines et pures, des joies que ne peuvent offrir les plus beaux spectacles organisés par notre civilisation. Il renferme la collection à peu près complète des es- pèces d’Orchidées qui croissent chez nous, c’est-à-dire dans l’Europe centrale et même dans le Nord, à l’état sauvage. Il n’est, d’ailleurs, qu'une première tentative d 'icono- graphie que notre jardin alpin d acclimatation d’une part et notre artiste, M. Walther Müller à Géra, d’autre part, comp- tent publier. C’est à ce dernier que nous devons l’exécution de ces planches si exactement faites et si artistiquement exécutées. C’est lui qui d’ailleurs en a eu la première pensée et nous avait déjà proposé ces illustrations pour notre volume de 1893. Ce premier album sera suivi d’autres séries représen- tant les fleurs et les plantes des montagnes d'Europe et plus particulièrement les plantes alpines. Une belle collection de peintures déjà exécutées par M. Müller d’après les échan- tillons que nous lui avons adressés de Genève, n’attend qu’une occasion pour voir le jour. Nous préparons la chose et nous espérons bien que les souscripteurs de cet album- ci nous encourageront pour ce grand ouvrage que nous publierons dès que nous aurons terminé aAec celui des Orchidées. XII PREFACE A vous lecteurs, à vous amis et collègues dans l’amour des fleurs, à encourager Fauteur si vous estimez que son œuvre offre quelque intérêt. Puissiez-vous, en lisant ces quelques pages et en sa- vourant les joies que procurent les Orchidées indigènes, éprouver quelque chose des jouissances dont Fauteur a vécu pendant qu’il préparait pour vous la présenter avec le soleil du printemps, cette gerbe de fleurs de nos bois et de nos monts, cueillie avec amour et avec sollicitude. Pâques 1899. TABLE DES MATIERES Pages Chapitre I. — Caractères généraux 1 Chapitre II. — Fécondation 7 Chapitre III. — Classification 15 Chapitre IY. — Nos Orchidées. — Leur mode végétatif et leur distribution géographique. — Leur variation 21 Chapitre V. — Culture et emploi. — Comment on élève nos Orchidées Procédés d’acclimatation 27 Chapitre VI. — Description des espèces figurées 51 Table des Planches ... 91 LES OBCHIDÉES LES ORCHIDEES CHAPITRE PREMIER CARACTÈRES GÉNÉRAUX La famille des Orchidées est une des plus distinguées du règne végétal et la seconde en importance numérique; elle est également une des plus naturelles et des mieux déli- mitées. Actuellement le nombre des espèces décrites ap- proche de 10,000. Ce sont des plantes herbacées, parfois sous-frutescentes, toujours vivaces et souvent d’une durée très longue. Elles appartiennent au groupe des Monocotylédonées, c’est-à-dire des plantes dont l'embryon ne porte qu’un seul cotylédon. Racines fibreuses, fasciculées, accompagnées souvent, chez les espèces terrestres, de tubercules appelés bulbes, ovoïdes ou palmés. Tige nulle ou annuelle chez les espèces en question, souvent vivace ou ligneuse, en forme de rhi- zome ou de branche articulée chez les Epiphytes. Feuilles planes, généralement épaisses, toutes ou en partie engai- nantes (quelquefois réduites à de simples gaines comme chez le Limodorum). Fleurs hermaphrodites, rarement uni- 2 CARACTÈRES GÉNÉRAUX sexuées ou polygames, de forme très variable, généralement disposées en grappe ou en épi terminal et accompagnées de bractées; rarement uniques (comme chez certains Cypri- pedium, le Calypso). — Périgone l, formé de six segments ordinairement colorés, dont trois externes (correspondant aux sépales des Dicotylédonées) assez semblables entre eux, le dorsal généralement un peu plus développé que les deux latéraux, et trois internes (les pétales des Dicotylédonées) dont deux sont égaux entre eux et le troisième, nommé labelle, est d’ordinaire plus grand et plus brillant que les autres. Cet organe est presque toujours la partie la plus remarquable de la fleur des Orchidées ; il affecte des formes extrêmement diverses et il est parfois replié sur lui-même en forme de sabot. Etamines et style soudés ensemble en une seule masse ou colonne cylindrique, centrale et dressée, nommée gynostème, de telle sorte que le style est opposé au labelle tandis que les étamines sont opposées au sépale dorsal. Etamines au nombre de trois dont une seule, celle du cen- tre, est fertile — excepté chez les Cypripédiées, où l’étamine centrale est avortée et les deux latérales fertiles. L’anthère ou Clinandre, placée au-dessus de la colonne, est composée de 2 à 4 loges, parfois d’une seule, et sur- montée d’un bec cjui est le prolongement du connectif. Pollen, de consistance gra- nuleuse, pulvérulente ou cireuse, agglutiné en masses nommées pollinies, au nombre de 2, 4 ou 8, et affectant des formes diffé- rentes selon les espèces. Généralertient les corpuscules de pollen sont réunis en gra- nules agglutinés par une matière AÙsqueuse et reliés entr’eux par des fils minces et élastiques (fig. 1) : ces fds se soudent 1 Ou donne le nom de Périgone on Périanthe à l’enveloppe florale qui, connue c’esl le cas chez les Monocotylédonées, n’offre pas des caractères tranchés permettant de distinguer le calice de la corolle, les sépales des pétales. Fig. 1. — Groupes de grains de pollen; les dis élastiques qui les unissent sont distendus. (D’après Darwin.) CARACTERES GENERAUX 3 Fig. 2. — Pollinie de l’ Orchis masaula, avec son caudicule et son rétinacle. (D’après Darwin.) p. pol- linie; c. caudicule; d. dis- que visqueux ou rétinacle. Fig. 3. — Rostellum avec ses deux pollinies et leurs ré- tinacles. (D'après Darwin.) La membrane entourant le rostel- lum a été abaissée pour per- mettre de distinguer les deux rétmacles dans le rostellum. c. caudicules ; d. disques vis- queux ; z. rostellum. en un prolongement ou pédicelle nommé caudicule, qui se fixe au style par le moyen d’une masse visqueuse en forme de disque placée à sa base et qu’on nomme rétinacle ou dis- que visqueux (fîg. 2). Cet organe, libre ou soudé avec celui de la pollinie voisine, est souvent en- fermé dans une petite poche nommée rostellum, qui surmonte le stigmate (fig. 3). Stigmate peu appa- rent, situé au-dessous du sommet de la co- lonne et sur le côté an- térieur, dans une fos- sette si peu accessible au pollen que la visite des insectes est abso- lu ment nécessaire pour assurer la fécondation de la grande majorité d’entre les Orchidées. Ovaire à 3 car- pelles, infère, uniloculaire, devenant à sa maturité une cap- sule allongée, rarement charnue, en forme de gousse et s’ouvrant par trois valves qui restent soudées à la base et au som- met (fig. 4) ; graines très nombreuses et extrêmement fines; on en a compté 200,000 dans une capsule de Maxillaria. La ger- mination de ces graines est souvent très longue. Au point de vue végétatif les Orchidées se divisent en trois groupes : les Sapro- phytes, les Terrestres et les Epiphytes. Les Orchidées saprophytes sont des espèces qu’on a longtemps tenues, à tort, pour parasites. Ce sont des plantes dépourvues de feuilles et de chlorophylle, et Fig. 4. — Capsule d'or- chidée à l’état de déhis- cence. (D’après Ptitzer.) 4 CARACTERES GENERAUX qui se nourrissent clés substances organiques contenues dans l’humus. Leur système radiculaire est : ou bien un curieux rhizome ou rameau souterrain, en forme de corail ou de bois de cerf ou d’élan, n’émettant pas de vraies racines, mais dont la surface entière est organisée de manière à absorber l’eau et les matières nutritives de la même manière que les racines ( Epipogon , Corallorrhiza) ; ou bien une agglomération de nombreuses racines entrelacées en une souche compacte (Neottia). Tiges simples, dressées, rousses ou rougeâtres, garnies de gaines et portant un épi de fleurs de couleur fauve ou pâle. Les Orchidées terrestres, proprement dites, sont des plantes dont les racines et les feuilles absorbent dans le sol et l’atmosphère l’eau et les éléments minéraux qu elles transfor- ment en matières organiques. Leur système radiculaire est formé, soit d’un rhizome (Goodyera), soit de simples racines fasciculées (Listera), ou, enfin, de tubercules qui sont des réservoirs dans lesquels s’emmagasinent les matières nutri- tives, toute vie se concentrant, pendant l’époque de repos, dans ce seul organe ; en ce dernier cas, il y a aussi des racines étalées au-dessus du tubercule et indépendantes de lui. Les Orchidées êpiphytes croissent sur les branches des arbres ou dans les anfractuosités de rochers, dans les pays chauds, et introduisent leurs nombreuses racines aériennes dans tous les interstices qu elles rencontrent. Ici les racines ne sont plus de même nature que celles qui s’enfoncent dans le sol, car leurs fonctions sont différentes. Mais, les plantes de ce groupe ne rentrant pas dans le cadre de ce travail, nous les laisserons de côté. Les Orchidées sont généralement dotées de fleurs bril- lantes, aux formes les plus gracieuses, aux parfums les plus exquis. C’est surtout le cas pour les espèces êpiphytes, que leurs racines-ventouses attachent au plus haut des arbres, sur l'écorce des branches, dans les forêts des régions tropicales. CARACTERES GENERAUX 5 Parées des couleurs les plus vives, revêtues des formes les plus gracieuses, exhalant les senteurs les plus délicieu- ses, ces plantes sont, depuis un certain nombre d’années, les favorites des classes privilégiées. En Angleterre, il n’est pas de maison respectable qui n’ait son « Orchid-bouse, » et il n’est pas de banquet solennel qui n’ait ses corbeilles d’orchidées alternant avec les plus délicates frondes de fou- gères et les fruits les plus exquis. Les Orchidées terrestres, celles de nos bois, de nos marécages, bien que très élégantes et souvent fort jolies, sont loin d’avoir les charmes enchan- teurs de leurs sœurs tropicales. Elles sont pour la plupart d’un air assez modeste bien que certaines d’entre elles aient le mérite d’une incontestable beauté. Il arrive, en cela, comme en toute chose, que si la nature a décoré les Orchi- dées épiphytes des plus séduisantes qualités, elle leur a, par contre, refusé des propriétés qui puissent les rendre utiles à l’homme. A l'exception de la vanille, qu’on retire du Vanilla planifolia, Andi\, elles n’offrent rien qui puisse être utilisé soit comme aliment soit comme condiment, ni même rien d’officinal ou de pharmaceutique. Le salep, matière nutritive formée d’une fécule analeptique, est extrait des tubercules de nos Orchis communs. Ce qu’on ignore très généralement c’est la propriété qu’ont les feuilles de plu- sieurs de nos espèces les plus communes, de parfumer un appartement pendant plusieurs années si l’on a soin de les dessécher à l’ombre. M. le f)r Planchon, de Montpellier, a consigné cette fort intéressante découverte dans le Mont- pellier médical de 1892, t. I. Il s'agit de la présence, dans ces feuilles, de la Coumarine, principe odorant contenu dans la Lève de Tonka et dans plusieurs de nos plantes indigè- nes, telles que la Flouve odorante, les Mélilots jaune et blanc, l'Aspérule odorante, et qui a beaucoup d’analogie avec celui de la vanille. Il existe dans les feuilles de X Orchis militaris et surtout de X Acer as anthropophora, mais son 6 CARACTÈRES GENERAUX parfum délicieux ne s’y manifeste que quand elles sont à 1 état sec. Les Arabes ont depuis longtemps, paraît-il, décou- vert ce principe odorant chez l’Aceras. Les feuilles sèches de cette plante ont le goût d'un bâton de vanille en partie épuisé ; leur amertume est très légère ; le parfum en est doux et très délicat. « Après la récolte, dit le Dr Planchon, on entasse les « feuilles pour leur faire subir une légère fermentation ; « puis on les sèche à l’air et l’on a soin de les mettre en « boîtes bien fermées ou en flacons bien bouchés et bien « secs, sous peine de perdre une partie de l’arome; j’ai « pourtant, dit-il, de ces feuilles qui depuis cinq ans ont « conservé un parfum très suave. » Chez 10. militaris, cette odeur est moins agréable et surtout moins forte. Avis aux gourmets et aux amateurs de crèmes et de plats fins. Ce que je puis affirmer, parce que j’en ait fait l’ex- périence, c’est que nul parfum, nul aromate n est plus ex- quis, plus pénétrant et plus durable que les feuilles de l’Aceras et celles de l’Orchis militaire, conservées dans le tiroir d’une armoire ou d’une table. Il y a là, semble-t-il, une indication que les parfumeurs devraient prendre au sérieux. CHAPITRE II FÉCONDATION Le sujet de la fécondation des Orchidées par le moyen des insectes a été étudié à fond par l’illustre Charles Darwin, qui a publié dans un volume spécial et du plus haut intérêt, les observations et les découvertes qu'il a faites1. Il n’y a rien au monde de plus remarquable que cette organisation qui permet aux fleurs de s’adapter aux formes des insectes; qui les pare de brillants atours dans le but unique d’attirer l’auxiliaire ailé qui doit assurer la reproduction de l'espèce ; qui place, au fond de la gorge d’une fleur, la provision de miel dont l’appàt excite l’ardeur d’une certaine espèce d’in- secte et le porte à s’attarder juste assez longtemps pour per- mettre à la pollinie dont il est forcé d’attoucher la base, de se lixer sur sa trompe et d’y rester jusqu’à ce que le pollen qu elle contient s’épande au contact du stigmate d’une fleur voisine. Les fleurs des Orchidées, surtout chez les exotiques, sont d’une longue durée et se maintiennent à l’état frais, beaucoup plus longtemps que celles des autres plantes en général. On en a vu conserver leur fraîcheur l’espace de 70 à 80 jours à condition de n’avoir pas subi l’acte de la féconda- tion. Mais dès qu’une fleur d orchidée est fécondée, elle se fane et son éclat, désormais inutile, disparaît. En général, les insectes sont attirés par la beauté des fleurs, la vivacité 1 La fécondation des Orchidées par les insectes ; trad. française par M. L. Rérolle. Paris 1870. 8 FÉCONDATION des couleurs et le parfum de leur corolle, mais il arrive aussi cpie, chez certaines espèces, c’est l’odeur fétide et nauséa- bonde de la viande gâtée qui attire des insectes spéciaux chargés de provoquer la fécondation. C’est le cas chez le Bolbophyllum Beccarii Reich., dont la puanteur dépasse tout ce qu’on peut imaginer. Il est impossible, dans un tra- vail du genre de celui-ci, de traiter à fond cette question si palpitante d’intérêt ; mais nous devons pourtant étudier ensemble la manière dont les choses se passent chez nos Orchidées indigènes. Les insectes (et les oiseaux-mouches chez plusieurs es- pèces brésiliennes) sont donc les grands auxiliaires de la nature pour la fécondation des Orchidées, car il est très peu d’espèces sujettes à l’autofécon- dation. Il importe par conséquent que la fleur soit constituée de telle manière qu’une mouche, une abeille ou tout autre insecte puisse s’y reposer un instant, tout en suçant le nectar. C’est pour cela que nous trouvons pres- que toujours sur le bas de la fleur et comme formant une plateforme devant les organes de la fécon- dation, un pétale élargi, souvent bosselé de manière à offrir de la prise aux pattes d’un insecte, ou muni de poils, ou bien encore replié et offrant des sinuosités « de terrain, » des replats. Ce pétale, soit le labelle, est aussi la partie la plus saillante de la lleur et celle qui frappe le plus les yeux, de sorte que de loin déjà, l’insecte aperçoit la plateforme vers laquelle, sans hésiter, il dirige son vol. Le nectar est sécrété tantôt dans un éperon plus ou moins long, tantôt Fig. 4. — Fleur d’O. mascula dont on a enlevé les divisions périgonales à l’ excep- tion du labelle. a. Anthère ; l. labelle ; t. rostellum ; s. Stigmates. (D’après Darwin.) FECONDATION 9 par des glandes placées dans diverses situations, mais toujours dans la meilleure place permettant 1 enlèvement des masses polliniques par 1 insecte. Avant d aller plus loin, examinons une fleur, celle de 1 Orc/ns mascula, par exemple (fig. 4). Les organes de la fécondation sont pro- tégés par les trois sépales ou segments extérieurs du péri- gone, qui sont conni vents et forment une sorte de casque au-dessus d eux. A droite et à gauche, deux autres segments, les intérieurs ou pétales, sont dressés et forment un rempart contre les vents ou les chocs qui pourraient se produire; ils guident, en outre, linsecteen lui permettant de voird’emblée où se trouve le centre de la fleur. Le nectaire est recourbé en dessous et forme un long éperon, qui sécrète du miel en abondance entre la double paroi dont il est formé et dont l’entrée est rétrécie par le fait du prolongement en avant de la colonne (gynostème), que termine le rostellum (fig. 5). Nous avons vu que celui-ci (fig. d) est une poche contenant soit un, soit deux disques visqueux ou rétinacles; il forme une saillie suspendue au-dessus des deux stigmates soudés dont on aperçoit le profil dans la fig. 5 s. Au-dessus du rostellum et plongeant dans son sein au moyen des réti- nacles, s’élève l’anthère de l’étamine fertile, composée de deux loges distinctes (fig. 5 a ), s’ouvrant en avant par une fente longitudinale et reliées entre elles dans leur partie supérieure. Dans chacune de ces loges se trouve une polli- nie (fig. 2), et leurs rétinacles jouent un rôle important dans l’acte de la fécondation ; ils sont arrondis, convexes en deS- mettre la vue de l'intérieur. a. Anthère ; l. labelle ; s. stigmate ; n. éperon ou nectaire ; r. rostellum. (D’après Darwin.) 10 FECONDATION sous et libres entre eux, baignant dans le fluide dont est revêtu intérieurement le rostellum et ne sont maintenus en position que par une petite membrane qui les attache au rostellum sur leur face postérieure. La membrane, qui forme la poche du rostellum, est d’abord continue; mais dès que la fleur est ouverte, au plus léger contact, elle se rompt transversalement. Cette rupture fait de la partie antérieure du rostellum une lèvre qui s’abaisse avec la plus extrême facilité, en mettant ainsi à découvert les deux rétinacles (fig. 3). Comme cette rupture de la membrane n’a pu se faire spon- tanément et que c’est, ou bien la présence d’un insecte, ou toute autre cause mécanique qui l’a provoquée, les deux rétinacles, tout chargés de fluide visqueux et portant chacun une pollinie en- core faiblement retenue dans la loge ouverte de l’anthère, se trou- vent immédiatement en contact avec la trompe ou la tête de l insecte. La viscosité qui les maintenait dans le ros- tellum les attache alors à l’insecte; puis, cette matière durcissant très rapidement comme un ciment, dès qu elle est mise en contact avec l’air, l adhérence devient si forte au bout de 20 à 30 secondes, que l'insecte, en retirant sa tête et en s’envolant, emporte la ou les pollinies solidement fixées sur son avant-train. Il se passe alors un phénomène singulier et qui montre bien quelle sagesse admirable a présidé à l'organisation de toute vie. La pollinie qu’em- porte l’insecte est, en effet, stérile sur son côté postérieur (qui devient antérieur sur la tête du petit animal puisqu’il l’a enlevée par devant) et ne pourrait jamais, d’ailleurs, dans cette position-là, fertiliser un stigmate attendu qu'en Fig. 6. — • A. Pollinie placé sur un bout de crayon au moment de son extraction. B. La même 30 secondes après l’extrac- tion. FECONDATION li restant dans la position dressée qu elle avait au moment d’être enlevée, elle serait tout simplement, chez une nou- velle lleur, poussée contre les loges de l’anthère cl’où elle est sortie. Or, le stigmate se trouvant au-dessous du ro- stellum, il faudrait que la pollinie pût s’abaisser en avant sur la trompe de l’insecte pour arriver à le toucher et à y dépo- ser le pollen. C’est précisément ce qui a lieu grâce à un mécanisme merveilleux. Bien que la surface visqueuse reste adhérente et immobile, le rétinacle auquel est fixé le cau- dicule est doué d’un remarquable pouvoir de contraction, qui fait que la pollinie s’abaisse (fîg. 6) en décrivant un arc d’environ 90°, toujours dans la direction de la pointe de la trompe. Ce mouvement, dit Darwin, a lieu en moyenne dans l’espace de 30 se- condes. Il favorise évi- demment la féconda- tion croisée, puisque la pollinie ne peut ferti- liser la même fleur et ne s’abaisse qu’une fois que l’insecte l’a quit- tée. Une pollinie ainsi transportée par un insecte peut fertiliser plusieurs stigmates, car ceux-ci ne sont pas assez visqueux pour détacher la pol- linie entière de la tête de l insecte et ce n'est que petit à petit que celui-ci est déchargé de sou fardeau, en fécondant ainsi plusieurs fleurs avec une seule et même pollinie. Chez beaucoup de nos Orchidées terrestres l’acte de la fécondation s’effectue à peu près comme chez Y O. mascula. Mais il y a pourtant à cet égard certaines particularités et des phénomènes spéciaux chez tel ou tel genre. Chez V Anacamp- tis pyramidalis , par exemple, la position respective des or- ganes diffère considérablement de ce qu elle est chez YO. mascula. Les deux pollinies sont attachées à un rétinacle Fig. 7. Fig. 8. Pollinies de l’Anacamptis pyramidalis sondées par leur base au moyen d’un rétinacle commun qui s'enroule (üg. 8) autour d’une soie de porc (d’après Darwin). 12 FECONDATION commun qui, mis en contact avec la trompe d’un insecte, s’enroule autour d’elle et s’y grippe d’une manière remar- quable (fîg. 7 et 8). Il est nécessaire qu’il en soit ainsi, car, comme on le voit (fîg. 9), les deux stigmates se trouvent éloignés l’un de l’autre et placés de chaque côté du rostellum. Chez le genre Ophrys, le rostellum est divisé ou plutôt remplacé par deux petites pochettes dites bursicules pla- cées, l’une à droite et l’autre à gauche de la colonne et juste au-dessus du stigmate. Le caudicule des pollinies chez Y Ophrys mouche est naturelle- ment recourbé deux fois et presque à angle droit, comme une sorte de porte- manteau. Ce double pli du caudicule remplace le mouvement d’abaissement qui se produit chez les Orchis. Chez l’ Ophrys -abeille les choses se passent tout différemment et la fleur est soumise à l’autofécondation. Ici la pollinie est naturellement recourbée sur le stigmate et le féconde sans Fig. 9. — Fleur à’Anaeamptis pyramidalis à laquelle on a en- levé les divisions périgonales à l’exception du labelle. a. Anthère. s. Stygmates. t. Rostellum. I. Labelle. (D’après Darwin.) le secours des insectes. Nous étudierons plus loin les phénomènes les plus ca- ractéristiques de la fécondation. Qu’il suffise ici d’ajouter en- core deux mots sur la remarquable adaptation des nectaires à la fécondation de la fleur. Chez certaines espèces, où le liquide visqueux est plus long à se dessécher et à se souder à la trompe de l’insecte, l’appareil est organisé de façon à ce que l’animal est forcé, par suite de la sécrétion cachée du nectar, de rester plus longtemps sur la même fleur, ce qui permet à la soudure de se faire plus complètement. C’est ainsi que, chez certains Orchis, le nectar n’est pas sécrété directement dans l’éperon, mais se trouve enfermé FECONDATION 13 entre les parois externe et interne de celui-ci ; 1 insecte doit alors percer la paroi externe afin d'arriver au nectar, et, tout cela prenant un certain temps, il est obligé de faire des mouvements qui permettent à la pollinie de se fixer à sa trompe. Les lecteurs trouveront, dans les pages qui suivent et en regard des différentes planches coloriées, la description des différents modes de fécondation — divers suivant les genres — dont la nature a doué ces plantes remarquables. CHAPITRE III CLASSIFICATION La classification d'une famille aussi riche en espèces, aussi hétéromorphe et aussi compliquée que celle des Or- chidées, n’est point une chose aisée. Elle a été essayée par plusieurs botanistes tels que Swartz, Richard et d’autres, mais les systèmes qui ont été le plus en honneur jusqu’à ce jour sont celui de Lindley et celui de Reichenbach. Mal- heureusement, tout ingénieux qu’ils sont, ils présentent de graves lacunes et il appartenait au professeur Plitzer, de proposer un système plus pratique et surtout plus naturel, système que nous avons appliqué au Jardin alpin d’acclima- tation. ORCHIDACEÆ (Orchidées). Périgone à six divisions; l’une des intérieures (labelle) plus développée que les autres, ordinairement tournée en bas, affectant des formes diverses et très particulières. Trois étamines opposées aux trois divisions extérieures et jamais (sauf chez le curieux genre exotique Newiedia) toutes fertiles. Deux grands groupes généraux: I. Dianclræ : Deux étamines fertiles. II. Monandræ : Une seule étamine fertile, les deux la- térales avortées ( stami/iodes ). 16 CLASSIFICATION I. DIANDRÆ 1 Cypripedil inæ . 11. MONANDRÆ Comprend les sous-groupes suivants: a. Basitonæ : Pollinies munies de caudicules (fig. 2 c) qui les relient au rétinacle. Anthère fortement adhérente dans une loge courte, large et solidement construite. b. Acrotonæ : Pollinies dépourvues de caudicules ou portant ceux-ci dans leur partie supérieure et non rattachées au rostellum; loges peu résistantes, d’où Panthère s’échappe avec facilité. Aa Monandræ-Basitonæ : comprennent les seules Ophry- dinæ qui se subdivisent en : 1. Serapiadeæ. Rétinacles enfermés dans des bursicu- les faisant partie du rostellum. 2. Gymnadenieæ. Rétinacles nus ou enveloppés dans le prolongement de Panthère. A* Monandiiæ-Acrotonæ : 1. Cephalanthereæ. Anthère obtuse, dressée et dépas- sant le rostellum qui est presque avorté; labelle éperonné ou muni d’un éperon rudimentairç. 2. Spirantheæ. Anthère dressée, de la longeur du ro- stellum, appuyée et pressée contre sa partie posté- rieure; masses de pollen réunies en une pollinie in- divise. 1 Cette classification est restreinte aux seuls genres mentionnés dans cet ouvrage. CLASSIFICATION 17 3. Physureæ. Pollinies séparées en niasse distinctes et divisibles. 4. Cœlogyninæ. 4 pollinies eau diculées. 5. Lipariclinæ. 4 pollinies non caudiculées ; feuilles faiblement nervées. Ces différentes sous-sections renferment les genres suivants qui rentrent dans le cadre de ce travail : I. DIANDRÆ-CYPRIPED1LINÆ : Cypripedilum ou Cypripedium. ii. monÆdræ-rasitonæ-ophrydinæ 1. Serapiadeæ. A. Deux bursicules séparées ; la- belle ordinairement convexe et pubes- cent, velouté. Oplirys. B. Une seule bursicule contenant deux rétinacles distincts. a. Segments externes entiers. Orchis. C. Un seul rétinacle. «. Connectif 1 de Panthère pro- longé; apophyses du rostellum compri- mées; labelle à lobe médian entier et très développé. Serapias. (3. Connectif de Panthère non pro- longé : 1. Lobe médian du labelle (à peine 1 Le connectif est la bandelette, de consistance variable, qui sépare les deux loges de l’anthère el les relie l’une à l’autre ; il peut être considéré comme le prolongement du filet de l’étamine que parfois il dépasse. (Mél astomacées, Orchidées.) 2 18 CLASSIFICATION éperonné) plus ou moins pro- fondément incisé. 2. Labelle à éperon très court, à lobe médian prolongé en une longue et mince lanière enrou- lée en spirale. 3. Les trois lobes du labelle de mêmes forme et grandeur. II. Gymnadenieæ. A. Rétinacles entourés d’une lé- gère membrane protectrice disparais- sant avec eux. a. Labelle non éperonné, rétina- cles juxtaposés. (3. Labelle à éperon court. 1 . Caudicules extrêmement courts; rétinacles très développés. 2. Caudicules plutôt longs; rétina- cles petits, à peine plus larges que le caudicule. 13. Rétinacles nus. a- Apophyses du rostelium for- mant une étroite fissure entre les lo- ges de l’anthère ; rétinacles regardant le labelle. 1. Labelle entier, placé dans le haut de la fleur. 2. Labelle trilobé, placé dans le bas de la Heur. / 3 . Rostelium large et écrasé, sans apophyses. Aceras. Himantoglossum. Anacamptis. Chamæorchis. Herminium. Cœloglossum. Nigritella. Gymnadcnia. Platanthera. CLASSIFICATION 19 III. Monandkyæ-achotonæ. 1° Cephalan th ereæ . A. Epi floral pourvu de bractées foliacées; labelle sans véritable épe- ron. a. Ovaire sessile et tordu ; labelle allô ngé, presque entièrement couvert par les divisions périgonales. Cephalanthera. /3. Ovaire pédicellé, à pédicelle tordu; labelle arrondi, dépassant les divisions périgonales. Epipactis. B. Epi floral écailleux, dépourvu de vraies bractées ; labelle éperonné. a. Labelle placé dans le bas de la Heur; colonne allongée. Limodorum. [3. Labelle placé dans le haut de la Heur; colonne courte. Epipogon. 2° Spiranthcæ. A. Les deux divisions périgonales intérieures et la moyenne extérieure rapprochées, dressées et formant cas- que ; les deux extérieures latérales, li- bres et retombantes. Spiranthes. B. Toutes les divisions périgona- les séparées et libres. a. Tige portant deux feuilles op- posées. Listera. 20 CLASSIFICATION /3. Tige sans feuilles et sans chlo- rophylle. 3° Physureæ. 4° Cœlogyninæ. 5° Liparidinæ. A. Tige garnie de feuilles; co- lonne sessile. a. Labelle étalé, non relevé en sa- bot. Anthère dressée; colonne courte ; labelle placé dans le haut de la fleur. I . Anthère solidement attachée par les rides de ses parois et exposant librement les polli- nies. /3. Labelle relevé en forme de sa- bot. B. Tige nue, dépourvue de chlo- rophylle. Neottia. Goodyera. Liparis. Malaxis. Calypso. Coralliorrhiza. CHAPITRE IV NOS ORCHIDÉES; LEUR MODE VÉGÉTATIF ET LEUR DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE; LEUR VARIATION. Nous avons vu que les Orchidées affectent trois modes différents de végétation, et que d’après cela, on les divise en trois classes au point de vue végétatif. La lre classe est celle des Saprophytes dont le système radiculaire est spécialement conformé pour absorber les substances organiques de l’humus dans lequel elles plon- gent. La 2me classe comprend les espèces terrestres ; elles sont de beaucoup les plus nombreuses. Dans la 3me classe enfin nous avons les Epiphytes, ap- partenant aux contrées chaudes, et dont aucune espèce n’est sauvage en Europe sauf le Malaxis qui croît sur le Sphagnum et le Liparia sur les Joncs. Les espèces terrestres nous intéressent donc ici plus spécialement. Elles sont généralement caractérisées par la présence, sur leur souche, de plusieurs tubercules ou sortes de bulbes qui constituent pour la plante des réservoirs, de vrais greniers d’abondance pour les jours de disette. On sait que les plantes bulbeuses appartiennent à des contrées où elles ont à souffrir de la sécheresse pendant une partie de l’année et qu elles sont munies d’un réservoir bulbeux, dans lequel toute la vie de la plante se retire et reste à l’état latent pendant la saison sèche, qui est celle du repos pour elle. 22 MODE VEGETATIF VARIATION Lorsqu’une plante d’Orchis a fleuri, et au moment de la maturation de ses graines, ses feuilles et sa tige jaunis- sent et se dessèchent, pendant que la sève superflue emma- gasine dans ce pseudo-bulbe souterrain des provisions de fécule et de vitalité pour la saison prochaine. Ensuite tout rentre dans le repos ; le tubercule, dans lequel ne cesse de se produire un lent mouvement moléculaire, renferme tout l’avenir de la plante et garde précieusement tous les carac- tères de celle-ci dans ses cellules diversement conformées suivant l'espèce. Pendant l’automne ou la saison des pluies il se produit alors dans cet organe un mouvement plus intense qui provoque dans sa partie supérieure la formation d’un bourgeon, autour duquel se dessinent les racines qui vont avoir la fonction d’alimenter le très rapide développement des feuilles, de la tige et des fleurs. Après qu’il a livré toute la vie qu’il contenait, le tubercule épuisé se ride, noircit et meurt, tandis qu’un nouvel organe, en tous points sembla- ble à lui, prend naissance et se développe à son côté. C’est ce qui nous explique la présence, lorsque nous déracinons un Orchis pendant l’époque de sa floraison, de deux tuber- cules dont l’un est blanc-grisâtre, plein, gorgé de nourri- ture, frais, tandis que l’autre est vide, ridé et noir. Ces or- ganes sont des bourgeons nés à l’aisselle des feuilles ou des écailles les plus inférieures de la tige. En mai 1897, on m’a apporté un gros exemplaire d’Orchis mascula arraché en pleine sève. Au lieu de le dessécher pour mon herbier je le plantai en jauge et, le 12 juin, en le retirant pour,soigner le bulbe mûri, j’ai trouvé à côté des deux bulbes réglemen- taires, une forte bulbille en plein développement. La sève, contrariée dans sa circulation par le fait de l’arrachage intem- pestif et de la destruction de plusieurs racines, avait formé un nouvel amoncellement de fécule sous forme de tuber- cule. Dans le groupe des Monandræ-Basitonæ-Ophrydinæ MODE VEGETATIF — - VARIATION 23 les plantes sont toutes munies de tubercules, entiers ou pal- més. Ces espèces représentent le type le plus parlait des Orchidées terrestres. Chez d’autres genres, les Listera par exemple et les Cephalantereæ, l’absence de tubercules est compensée par l’épaisseur et le grand nombre des racines, qui sont charnues, gonflées, et conservent la vie en elles- mêmes pendant le temps de repos; cette période, du reste, est de peu de durée, attendu que ces plantes appartiennent toujours à la llore des bois, où la fraîcheur et l’humidité sont constantes, ou bien à celles des marécages toujours humides. Il existe encore une troisième catégorie d’orchi- dées terrestres ( Calypso , Liparis, etc.) chez lesquelles les réservoirs de nourriture, au lieu de se trouver dans les ra- cines, sont placés au bas de la tige qui forme alors un ren- flement ou pseudo-bulbe aérien et qui est très fréquent chez les espèces épiphytes. Enfin, en ce qui concerne la souche de ces plantes il est une 4me catégorie, dont le genre le plus caractéristique est le Goodyera, où la tige est souterraine et constitue un rhizome dans lequel une partie de la sève se retire pendant l’époque de repos. Chez les Orchidées, comme chez la plupart des Mono- cotylédonées, la distribution géographique répond à celle des genres. Il est peu de familles de plantes dont le grou- pement des espèces soit aussi localisé qu’il l’est ici et où la dispersion dans la nature dépende tellement de la situation géographique. L’aire du genre Ophrys par exemple, c’est- à-dire d’un genre comprenant plus de trente espèces et un grand nombre de formes et variétés, est rigoureusement limitée au bassin méditerranéen et à l’Europe centrale. En- core faut-il admettre que les Ophrys de notre centre euro- péen ne sont que des irradiations de la flore méditerra- néenne que des causes diverses ont poussées vers le Nord. En dehors des pays entourant la Méditerranée, soit en Eu- rope, soit en Asie, soit en Afrique, il n'existe pas d’Ophrys 24 MODE VEGETATIF VARIATION et ceux qu’on rencontre en Angleterre, en Allemagne, en Belgique, appartiennent tous à des espèces méditerra- néennes. Le genre Orchis, dont le nombre d’espèces atteint presque la centaine x, est strictement confiné en dehors du même bassin méditerranéen, dans l’Europe (surtout cen- trale et méridionale) et dans l’Asie occidentale et septen- trionale, sauf deux espèces nord-américaines, qui semblent avoir passé dans ce continent à l’époque reculée où il était relié à notre Vieux-Monde. Les Serapias sont tous exclusive- ment méditerranéens, car les géographes ne m’en voudront pas si je rattache les Açores où croît un Serapias particu- lier à la région méditerranéenne. En dehors de deux espèces européennes, le genre Plcitanthera, qui compte plus de 70 espèces, est essentiellement américain ; et, tandis que les dix Gijmnadenia que nous connaissons appartiennent tous à l’Europe et à la Sibérie, le genre très voisin des Habenaria, qui comprend plus de 300 espèces, n’a pas un seul représen- tant dans ces deux territoires. Il est donc bien certain que, contrairement à ce qui se passe chez les Fougères, dont les espèces ont une disper- sion si vaste, les Orchidées sont soumises à une localisa- tion rigoureusement limitée. Chez les Fougères, les anthé- rozoïdes, qui constituent l’élément fécondant1 2 et s’en vont à travers les airs fertiliser un prothalle, fùt-il placé à une grande distance, ou bien encore les spores si ténues que les vents transportent à travers les Océans, sont des agents d’expansion que ne possèdent pas les Orchidées. 4 Mais nous retrouvons ici les phénomènes de variabilité qui caractérisent les Fougères, car le nombre des formes qui dévient du cadre ordinaire de l’espèce est relativement considérable chez les Orchidées. Ces variations, si fréquen- 1 M. Th. Durand, dans son Index generum phanerogamoruni. n’en recon- naît que 80. 2 Les Fougères rustiques, par H. Correvon, p. 88-40. MODE VEGETATIF VARIATION 25 tes dans le monde organique, prouvent bien que l’ancienne conception de l’espèce doit être abandonnée et que les limites tracées par le grand Linné n’ont plus qu’une valeur historique. La nature, nous le savons aujourd’hui sûrement, est régie par deux lois opposées entre lesquelles l’espèce poursuit son développement. Ces lois sont celles de l’héré- dité d’une part et de la variabilité d’autre part. Or, il est bien démontré que la seconde l’emporte trop fréquemment sur la première pour qu’il soit permis de douter de son im- portance et du rôle qu’il lui appartient de jouer dans l’évo- lution des êtres du règne végétal. Le nombre des variétés d’Orchidées observées, surtout dans le groupe des Ophrydi- nées, qui est le mieux étudié, est considérable. M. M. Schulze, de Jena, a publié en 1894 une fort belle collection de planches chromolithographiées accompagnées de la description d’un très grand nombre de variétés et d’hybrides *, car de nombreuses hybridations naturelles se produisent aussi dans cette famille comme dans beaucoup d’autres. L’horticulture utilise largement, d’ailleurs, surtout pour les Epiphytes et les Cypripèdes, ce mode de dévelop- pement des formes. 1 Die Orchidaceen Deutsclilands. Deutscli-Oesterreichs und dev Scluveiz , Jena, 1894. CHAPITRE V CULTURE ET EMPLOI. COMMENT ON ELEVE NOS ORCHIDEES. PROCÉDÉS D’ACCLIMATATION. Ce que j’ai dit un jour des Fougères 1 est aussi vrai poul- ies Orchidées; c’est que, dans ce domaine-là, les Anglais sont nos maîtres. Il n’y a qu’en Angleterre qu’on puisse admirer les Orchidées de plein air réellement acclimatées et jouant un rôle dans l’ornementation des jardins. Grâce à une évolution du goût artistique due en grande partie à M. William Robinson, rédacteur du Garden, auteur de plu- sieurs ouvrages sur la matière, l’art des jardins dans ce pays-là a pris une direction différente de celle qu il suivait depuis le siècle dernier; il a progressé dans le sens du na- turel, du pittoresque et du sauvage. Le Jardin, sous l'in- fluence de ce mouvement artistique, est devenu ce qu il doit être, la représentation de ce que nous voyons de mieux, déplus poétique, de plus noble dans la nature; il offre à nos yeux une sorte de quintessence des plus belles valeurs naturelles et parle à Pâme comme à l’esprit et au cœur. Ce n’est plus un style de convention, c’est la Nature. Dans un livre, que je recommande à l’attention des amateurs2, lini- tiateur de ce mouvement démontre que le véritable Jardin doit être une imitation aussi fidèle que possible de ce que 1 Les Fougères rustiques ; Chap. IX. * W. Robinson: The Wild garden, Londres 1 8 J 4 . 28 CULTURE ET EMPLOI la nature nous présente de plus beau et de plus poétique. Au lieu de la corbeille de Heurs ou du massif bien dessiné, il conseille des groupements naturellement disposés çàet là dans les gazons, les masses produisant leur effet par les contrastes ou par leur élégance et la vivacité des couleurs. Mais M. Robinson ne s’est pas contenté de nous donner sa théorie du Jardin sauvage: il la appliquée et mise en pra- tique dans le superbe Parc qui entoure l’antique manoir de Gravetye, qu’il possède à quelques heures de Londres. Nous y trouvons un tableau des plus remarquables de la nature dans ce qu’elle a de plus pittoresque et de vraiment beau. Ici ce sont des tapis de gentianes alpines, émaillant le lin gazon qu’il ne fauche jamais ; là, de grandes Ombelli- fères qu’on dirait n’avoir jamais eu d’autre demeure ; ailleurs nous trouvons des marécages tout remplis des espèces qui caractérisent les Sphaignes et les tourbes, et plus loin des champs d’Orchis, de Cypripèdes, des rochers garnis de plantes alpines les plus diverses. C’est la nature sauvage, aimable et poétique. L’un des plus célèbres jardins naturels de l’Angleterre est le Parc d’Oakwood, dans le comté de Surrey. Il appar- tient à M. G. -F. Wilson, de Weybridge, l’un des amateurs de jardins les plus notables de ce pays. Il y a là un grand bois de chênes, une pièce d’eau, des marais, des rocailles, des champs de lys et d’iris, bref, des millions de plantes exotiques, rustiques sous ce beau climat du Surrey et s’y reproduisant d’une manière naturelle. Le tout est pittores- quement et artistiquement groupé et distribué, en sorte qu’on est là dans un véritable Jardin botanique, dans un musée vivant, tout en conservant l’impression de fraîcheur et de poésie qu’on éprouve dans la présence immédiate de la puissante richesse de la nature. J’ai vu là des fouillis de plantes rares qui transportent l’esprit dans les régions mon- tagneuses du Japon, de la Chine, de la Sibérie, ou de l’Afri- CULTURE ET EMPLOI 29 que et du Cap, dans l’Himalaya et dans les Montagnes Ro- cheuses h Les Orchidées rustiques jouent dans le jardin Wilson un rôle important. Les Cypripèdes de l'Amérique du nord, ceux du Japon et de la Sibérie, semblent y vivre à l’état na- turel et forment des touffes et des massifs superbes; le C. acaule y est presque naturalisé. Rien de plus beau que les Orc/iis foliosci émergeant au-dessus des « bog plants » et que les beaux Epipactis des bois anglais se reproduisant à l'infini sous les mystérieuses voûtes d’Oakwood. Les es- pèces ordinaires s’y multiplient naturellement sans que M. Wilson s’en occupe. Nos Jardins bien peignés, aux corbeilles unies ou mul- ticolores, aux lignes soigneusement tracées et maintenues, aux effets combinés d’après des lois conventionnelles, me font l’effet de tout autre chose que d’une image de la nature. Ils en sont trop souvent une grossière parodie et une con- trefaçon. Mon vieil ami Alphonse Karr a bien souvent stig- matisé cette façon de comprendre l’art des jardins. Lors- que nous avons fondé notre jardin de la Linnæa et cpie nous l’avons perché sur le granit du monticule qui domine le vil- lage de Bourg-St-Pierre, dans les Alpes du Valais, l’aimable humoriste m’écrivait; « N’en faites pas un Jardin botanique comme il est entendu entre savants qu’un semblable jardin doit être, mais laissez faire la nature et arrangez cela d'après vos goûts personnels. » Dans un petit livre qu'il a intitulé Les Fleurs et publié en 1861, il écrivait ; « Mon Jardin n’est pas grand mais il est cultivé d’une « façon particulière. La culture n’y est pas apparente; les « gazons émaillés de crocus et de violettes au printemps, « de safrans et de colchiques à l’automne, ont l’air de gazons « sauvages et venus d’eux-mêmes. Les magnolias y sont 1 Voir les articles sur ce sujet dans T.e Jardin , n° 239, 1897. 30 CULTURE ET EMPLOI « traités sans plus de façons que les ormes. Les ronces à « fleurs doubles, blanches et roses, y croissent comme crois- « sent les ronces sauvages dans les haies. Le muguet, les « primevères, les cyclamens fleurissent sous les arbres sans « demander aucun soin, si bien qu’on les oublie et qu’on les « trouve chaque année. » Et de fait, rien n’est moins naturel que ces plantes qu'il faut replanter à chaque printemps, entourer de soins continus, hiverner en serres ou sous bâches, attacher à des tuteurs, qui vous parlent des soins du jardinier plus que de l’Auteur de leurs formes élégantes et de leurs brillantes couleurs. Non, le jardin n’est pas un amoncellement de ri- chesses exotiques; il doit être avant tout un lieu de repos pour l’esprit, de délices pour le cœur et de recueillement pour l’âme. Son rôle n’est pas de nous prouver la richesse de son propriétaire et de reproduire au grand air les mul- ticolores tapis ou les tentures de nos salons, mais bien de mettre notre âme, énervée par les bruits de la vie et les complications d’une existence menée à la vapeur, en con- tact avec les œuvres de Dieu, qui sont toujours belles et re- posent nos sens. La Muse ne hante pas volontiers le jardin moderne, où rien d’imprévu, rien de fortuit, rien de naturel ne frappe les regards, où il n’est pas admis qu’un brin d’herbe puisse dépasser ses voisins, où les tons et les con- trastes sont rigoureusement maintenus dans des limites tracées et selon un ordre établi. Ce qui l’attire, c’est le pit- toresque, le naturel, les vieux troncs recouverts de mousse et contre lesquels grimpe le gracieux petit lierre des bois; ce sont les bancs de pervenches, les colonies de fleurs pous- sant comme à l’état naturel dans les gazons, entre les pierres, sur les bords des chemins, à la lisièredes bosquets. Du reste, l’art des jardins, tel qu’on le comprend au- jourd’hui, a déjà modifié ses lois; il évolue dans le sens du pittoresque et du naturel. Nous assistons à une évolution CULTURE ET EMPLOI 31 lente mais profonde dans le sens indiqué, et il est bien certain qu’après avoir été pendant de longues années en butte à la risée du grand public, nous, les disciples de ce bon génie qui nous pousse dans la voie où nous sommes engagé depuis notre plus tendre enfance, nous finirons par l’emporter et par voir le jardin actuel remplacé par le pittoresque et naturel groupement des végétaux rustiques, dans un cadre mieux en harmonie avec ce besoin que nous éprouvons du contact avec la nature. Voilà pourquoi j'aime les plantes rustiques; elles offrent à mon esprit ce senti- ment de stabilité dont nous avons tant besoin dans notre époque nerveuse et agitée, filles sont là et restent; et nous, nous passons. . . Les hommes qui se sont adonnés d’une manière spé- ciale à la culture des Orchidées de plein air sont peu nom- breux; mais ici la qualité rachète la quantité. Le comte de Paris en a cultivé dans sa villa du midi de la France une riche collection et, dans une visite qu’il rendait à notre Jar- din alpin à une époque très défavorable de l’année, il a bien vite reconnu les quelques mauvais échantillons que nous avions à ce moment-là. « Le comte de Paris, m’écrit le Re- « verend Wolley Dod, fut autrefois le meilleur cultivateur « d’Orchidées rustiques que j’aie jamais connu. Il avait il y a « 30 ans, à Twickenham, près de Richmond (Surrey), la plus « belle et la plus riche collection dont j’aie jamais ouï parlé.» Le Prince Ferdinand de Bulgarie, lorsqu’il n’était encore que duc de Saxe-Cobourg, cultivait à Vienne, dans son jar- din, une collection très complète de ces plantes. Il conti- nue de temps à autre, et malgré toutes les préoccupations qui l’assaillent, à vouer un culte aux Orchis et aux humbles Ophrys. Ses connaissances, en botanique, sont loin d’être superficielles et il a formé de beaux projets pour les études botaniques dans le jeune Etat qu’il gouverne. Dans les quel- ques heures qu il m’a été donné de passer en la compagnie 32 CULTURE ET EMPLOI de ce Prince éclairé, j’ai eu l’occasion d’apprendre plusieurs choses dans le domaine de l’acclimatation des Orchis. C’est avec un amour spécial qu’il m’a parlé d’un semis d’Ophrys Ferrum Aequinum qu’il avait réussi à faire fleurir à Corfou. M. Georges Mantin, à Olivet près d’Orléans, est de tous les amateurs que je connais celui qui a le mieux étudié la nature de Ces plantes et qui en a acclimaté le plus grand nombre. Possesseur d’une riche collection d’Orchidées exo- tiques et tropicales, il a eu l’idée d’établir devant ses serres les espèces rustiques, afin, m’écrivait-il alors, de constituer à celles-là comme la préface d’un beau livre. Il existe près de Montmorency, dans la charmante contrée de Soisy, un jardin qui est réputé à juste titre comme pos- sédant l’une des plus belles collections de plantes alpines de France ; il appartient à M. et Mme Daigremont, deux alpi- nistes qui parcourent les montagnes de toute l’Europe dans le but d’en étudier et d’en importer la flore dans leurjardin. J’ai vu là, à deux pas de la grande capitale enfiévrée, des sites alpins aussi naturels qu’à la montagne et des fleurs que j’avais peine à ne pas croire miraculeusement transpor- tées de nos sommets glacés dans cet air étouffant. L’Epi- pactis palustris, les Orchis incarnata, militaris, Simia, les Ophrys, les Cœloglossum, vivent là comme dans nos mon- tagnes, et c’est merveille que de les y voir fleurir. Le comte F. du Buysson, bien connu par ses travaux sur les Orchidées1, a, lui aussi, cultivé et acclimaté un bon nombre d’espèces indigènes et contribué à augmenter nos connaissances en la matière. En Hollande, le chevalier Quarles d’Ufford, qui est l’un des plus ardents et des plus enthousiastes cultivateurs de plantes dans ce pays de l’hor- ticulture, a acclimaté et cultive chez lui, à la Haye, beau- coup d’Orchidées rustiques. En Portugal, c’est le professeur Comte F. du Buysson : V Orchidophile. CULTURE ET EMPLOI 33 Henriquez, l’aimable et zélé directeur du Jardin botanique de Coïmbre qui a, je crois, le premier cultivé dans un jardin les brillants Orchis de son pays. Enfin, en Amérique (Etats- Unis et Canada), la culture de nombreuses et brillantes Orchidées indigènes se propage partout. Les races anglo-saxonnes (nous avons vu combien les plantes rustiques sont en honneur en Angleterre) semblent particulièrement portées à l’admiration de la nature pitto- resque et à la culture des plantes sauvages. Les catalogues horticoles de l’Amérique du Nord consacrent presque tous quelques pages aux Orchidées rustiques, ce qui ne se voit que chez trop peu d horticulteurs européens continentaux. Pour être juste, pourtant, il faut reconnaître que nous com- mençons aussi à nous tourner de ce côté-là. Sans parler du Jardin alpin d’acclimatation de Genève, qui élève toutes les plantes sauvages et montagnardes pour la vente et qui pos- sède une belle collection d’Orchidées rustiques dont chacun peut se procurer le catalogue gratis, il y a de sérieux et grands établissements qui offrent presque toutes les espèces introduites dans les jardins. Le plus important est certaine- ment celui de M. Van Tubergen, à Haarlem, où l’on cultive avec le plus grand soin des espèces exotiques et rustiques sous le climat de la Hollande1. Cette maison-là m’a fourni plusieurs espèces rarissimes, entre autres le Calypso borea- lis, presque introuvable dans les cultures, et qu autrefois nous faisions venir de très loin. A Naples, la maison Herb et Wulle publie une liste très complète des espèces méri- dionales et mérite d’être recommandée. Enfin, en Allema- gne, MM. Haage et Schmidt, d’Lrfurt, dont les cultures sont considérables, offrent également des Orchidées de plein air. Le semis. — Dans mon livre des Fougères rustiques, j’ai pu donner au sujet du semis les renseignements prove- 1 Catalogue de M. Van Tubergen, Jr, Zwanenburg, Haarlem. 3 34 CULTURE ET EMPLOI nant de mon expérience personnelle. Ici, pour les Orchi- dées, je dois avouer que ce sont les expériences d’autrui cj u i me guideront, attendu qu'au Jardin alpin nous n’avons fait jusqu’à présent sur ces plantes-là que d’insignifiants essais d’acclimatation par voie de semis. Dans un très intéressant travail écrit en norwégien sur l’acclimatation des plantes glaciales, alpines et arctiques h M. Moë, chef des cultures du Jardin de l’Université à Chris- tiania, donne les renseignements les plus précieux au sujet de ces cultures. Il déclare élever presque toutes les Orchidées sauvages d’après la méthode suivante : « On fait un mélange d’une partie de terre de bruyère, « d’une seconde de terre de forêts et d’une troisième de bois « de sapin ou de pin décomposé, mais pas trop émietté, et « l’on y ajoute un peu de mousse sèche brisée en menus mor- « ceaux (de préférence un Hijpnunï), un peu de terre maré- « cageuse concassée et enfin une faible quantité d’aiguilles « de sapin. On presse un peu ce mélange dans les pots où « l’on veut semer et l’on y plante trois ou quatre mousses « vivantes (de préférence de petites espèces, telles que les « Dicranum, les Mnium, le Bryum argenteum, etc.). On « sème alors ses graines sur et entre ces plantes de mousses « et I on place les pots dans une caisse contenant un peu « d’eau, afin que la terre des pots en soit bien imprégnée. « Puis on tient toujours humide, en évitant toutefois que le « sol ne soit mouillé. On place ensuite la caisse dans une « couche d’une température moyenne, sans ventilafion pen- « dant quinze jours, un peu à l’abri du soleil. » M. Moë a obtenu de cette manière presque toutes les Orchidées indi- gènes en Scandinavie, y compris les Epipactis. C’est là un 1 Veiledning til Dyrkning af glaciale, alpinske or- arctiske Planter, af N. Moë. Jardin botanique de Chrisliana, 1862. Je dois la traduction en français de cette brochure à l’extrême obligeance de messieurs Eric et Henning de Rettig, à Abo, Finlande. CULTURE ET EMPLOI 35 moyen compliqué, mais sûr, et que nous comptons bien met- tre en pratique un jour au Jardin alpin. Le comte du Buysson procède d’une façon plus simple, en imitant tout bonnement la nature. Voici ce qu i 1 m’écrit à ce sujet : « La manière que j'avais employée pour introduire ces « Orchidées chez moi est fort simple. Outre les tubercules « que j’y transplantais au moment où leurs feuilles com- « mençaient à jaunir (époque indispensable qui indique « leur maturité), je mouillais les tiges garnies de leurs « graines, avant leur diffusion ; je les plantais dans ma « serre, dans des pots remplis de sable, et à mesure que je « les croyais mûres et près d’éclater, je les répandais, en « secouant la tige, sur mes gazons, dans mes massifs d’ar- « bres, choisissant autant que possible un sol et des condi- « tions semblables à l’endroit où je les avais récoltées. « Quant à faire des semis en pots, terrines, etc., je ne l’ai « jamais essayé, ayant eu un résultat suffisant en semant les « espèces sur les places où je désirais les avoir. » Non s avons affaire ici à l’expérience d’un orchidophilebien connu et des plus sérieux ; j’ai tenu à citer ses propres paroles. Chez M. Mantin, un grand nombre d’Orchis et d’Ophrys qu’il a acclimatés dans le parc du château de Bel-Air, se sont si bien naturalisés qu’ils ont produit une grande quan- tité de semis. « Il est certain, m’écrit-il, que dans quelques années, grâce à ces innombrables semis, les Orchidées indi- gènes pulluleront chez moi. » Ajoutons que l’heureux pro- priétaire de ces belles choses a cherché à provoquer des hybridations entre les différentes espèces et en a croisé un bon nombre, en sorte que l’avenir lui réserve certainement de curieuses surprises. M. Mantin élève également, dans ses serres et suivant le procédé recommandé par le comte du Buysson pour les Orchidées exotiques, les Orchidées rusti- ques par le semis. 36 CULTURE ET EMPLOI Enfin, il me reste à mentionner les expériences faites à Munich et sur lesquelles le chevalier Quarles d’Ufford, de La Haye, a bien voulu attirer mon attention. M. Alexandre Würtenberger, dans une petite brochure très récente sur la matière x, traite du semis des Orchidées bavaroises et dit ceci : « Quoique les divers genres des Orchidées montrent « généralement des exigences différentes sous le rapport du « sol, on peut semer toutes les espèces dans une même « composition, soit dans un mélange d’une partie de ter- « reau de feuilles, d’une de sable et de deux de terre fran- « che (Lehm). Il faut le faire au premier printemps, dans de « petites caisses bien drainées, qui sont remplies de ce « compost préalablement égalisé et tamisé. On presse alors « la terre avec une planchette, puis on recouvre le tout « d’une couche de 5 cm. de neige et c’est sur celle-ci qu'on « répand la graine d’Orchidées ; puis on transporte les cais- « ses dans un emplacement où la neige fonde rapidement ; « après quoi on répand sur la surface du sol une légère « couche de mousse hachée et l’on place sur la caisse une «plaque de verre; enfin on transporte le semis sur couche « chaude. Au bout de quelques semaines apparaissent les «plantules; on enlève alors avec précaution la couche de « mousse et l’on ombrage régulièrement. Si l’on procède à « froid et qu’on laisse la semence lever comme elle le fait « dans la nature, cela prendra un temps très long. Dès qu’on « pourra saisir les plantules avec les brucelles, il faudra les « repiquer dans d’autres caissettes et dans un mélange de « terre semblable au premier, en y ajoutant cependant un « peu de calcaire. On accélère alors la croissance et le dé- « veloppement des plantules en replaçant les caisses de re- « piquage dans la couche chaude et, au bout de quelques 1 Unsere heimischen Orchideen, Munich, 1892. CULTURE ET EMPLOI 37 « semaines, on pourra les transplanter dans des plates- « bandes spécialement préparées à les recevoir. 11 faut alors « les retirer de la caisse où elles ont été repiquées, en ayant « soin de leur conserver une petite motte de terre, et les pla- ce cer assez près les unes des autres pour qu elles se protè- « gent mutuellement. » « La terre dans laquelle on plante les Orchidées ne doit «pas être grasse et doit contenir le moins possible de ma- te tières organiques; si le sol du jardin est trop léger, il faut « y ajouter de bonne terre franche. En tous cas, il importe « d’éviter que la terre ait reçu du fumier ou tout autre en- « grais, car les Orchidées le redoutent beaucoup. On a cons- « taté que les plantes d’Orchis ainsi élevées par semis sont « beaucoup plus saines et réussissent mieux que celles qu’on « transplante de leurs stations naturelles. La voie du semis « offre en outre l’avantage de permettre l’obtention de nou- « velles formes et variétés. » Outre le procédé du semis, on multiplie certaines Or- chidées (les espèces à rhizomes) par le moyen de la division et en coupant, pendant b époque du repos, l’extrémité bour- geonnante des rhizomes latéraux. Les Cypripèdes, Epipac- tis, Cephalanthera, Goodyera, sont dans ce cas. Culture. — Si l’on veut transporter des Orchidées de la nature chez soi, il faut agir avec précaution et d’une ma- nière raisonnée. Il n’est que trop certain que l’arrachage immodéré auquel on s’est livré, presque toujours inutile- ment, depuis quelques années, a eu pour conséquente l'ap- pauvrissement de la flore orchidéenne dans notre Europe. A l’époque de leur floraison, on s’abat sur les champs d’Or- chis, on fouille les taillis pour y trouver 1 Orchis f'usca ou le Sabot cle Vénus, on les arrache pour les transplanter dans son jardin, bien content si, sur dix pieds qu’on a réussi à obtenir entiers après en avoir sacrifié plus du double, on réussit avec un seul; car il faut pour cela avoir saisi le non- 38 CULTURE ET EMPLOI veau tubercule, celui de l’année, qui contient les éléments devant former la plante future. Admettez qu’une cinquantaine d’amateurs se ruent ainsi sur une station connue, et vous comprendrez comment il se fait que nos plus brillantes Or- chidées soient en voie de disparition; comment le Sabot de Vénus, autrefois assez abondant dans toute la région mon- tagneuse et boisée de la Suisse, n’y soit plus représenté qu’à l’état de plante rarissime et qu'une Société se soit for- mée pour protéger ce qui nous reste de ces trésors végétaux. Avant sa fondation nous assistions, dans le canton de Ge- nève, à un véritable dépeuplement de la flore, surtout en fait d’Orchidées. Des individus, originaires de la Savoie, ap- portaient sur notre marché de vrais monceaux d Orchis fusca, militaris, coriophora, etc., des paniers de Cypripè- des et des corbeilles d 'Ophrys. A l’heure qu’il est, cet odieux vandalisme a beaucoup diminué et, comme le public intelligent n’achète plus, l’offre s’est également restreinte dans une notable proportion. Cependant le danger est loin d’avoir disparu dans nos campagnes genevoises. Il n’est que trop vrai que partout, dans nos pays civilisés, l’homme s’at- taque impunément aux plus belles Orchidées et en détruit un grand nombre de stations. Qu’on médite le cas cité au chapitre VI, p. 89, à propos du fameux Spiranthes Roman- zoffmna ! Ce n’est pas que nous prétendions empêcher les amateurs de cultiver chez eux les plantes que nous admirons tous. Ce que nous voulons chercher à obtenir en protégeant les plantes rares c’est une manière de procéder plus intelligente, plus digne des amants de la belle nature. Nous prêchons l’arrachage modéré, pratiqué seulement sur les espèces les moins rares ou dans les endroits où la plante est assez abondante pour que l enlèvement de quelques pieds ne porte aucun préjudice à la conservation de l’espèce. Et puis surtout, c’est l’arrachage en temps opportun, permettant de n’emporter que peu de CULTURE ET EMPLOI 39 pieds tout en étant sûr de leur reprise. C’est ce dont on peut être certain si l'on a soin de ne s’attaquer à la plante qu’à l’époque de son repos et lorsqu'elle a mûri ses tubercules ou ses rhizomes. Sans doute il est alors difficile de la recon- naître si I on n’a pas eu soin d’en marquer la place à l épo- que de sa floraison ou si l’on n’a pas l’œil assez exercé pour diagnostiquer une espèce d’après les feuilles mortes. Mais c'est, je le répète, le seul moyen d’arriver à transplanter les orchidées de la nature chez soi, avec la certitude d’obtenir un succès. A cette époque, c’est-à-dire après la maturité des graines, les espèces du groupe des Sérapiadées n’offrent qu’un seul tubercule dans lequel s'est concentré toute la vie de la plante. Les tubercules, à cet état-là, que m’ont adressés différents fournisseurs ont toujours admirablement réussi et ont tous fleuri dès l’année suivante. La plupart des Orchidées européennes, et un grand nombre d’espèces nord-américaines, sont introduites dans nos cultures et parfaitement acclimatées. Mais il en est en- core un bien grand nombre qui ne nous sont connues que par les échantillons des herbiers. Toutefois, le vent qui souffle de ce côté-là nous apporte chaque année de nouvel- les introductions et il faut espérer que dans peu de temps la collection des Orchidées rustiques sera fortement aug- mentée. Toute personne qui veut se livrer à la culture des Or- chidées rustiques devra se souvenir qu elles ont horreur des sols trop gras et fumés, qu elles recherchent un terrain plutôt lourd que trop léger et qu’en troisième lieu l'humi- dité de l’atmosphère, c’est-à-dire la proximité des arbres, des cours d’eau ou des rochers (qui sont d’excellents réser- voirs de l’humidité) leur est très avantageuse. Le comte du Buysson m’écrit à ce sujet: « La localité que j’habite était, « il y a une dizaine d’années, très riche en Orchidées indi- ce gènes; mais depuis qu’on a eu la sotte idée de défricher 40 CULTURE ET EMPLOI « plus de six mille hectares de bois autour de chez moi, qui « rapportaient de 90 à 100 francs l'hectare et qui, cultivés, « n’en donnent pas la moitié, les pluies ont disparu et nous « sommes désolés par une telle sécheresse qu’on sera forcé, « dans quelques années, de ressemer ou replanter les bois « défrichés. Par suite de cet état atmosphérique ces Orchi- « dées si abondantes partout, ont entièrement disparu dans « bien des endroits et même dans mon parc il en reste fort « peu. » La culture en pleine terre est celle qui convient le mieux à toutes les espèces: on peut cependant les avoir en pots et les y faire fleurir. C’est ainsi que nous les cultivons au Jardin alpin. M. Mantin, par ses expériences sur l’accli- matation des Orchidées de plein air, a largement contribué à augmenter nos connaissances en la matière. 11 a mené de front et parallèlement trois systèmes de culture adaptés aux mêmes espèces, afin de connaître les exigences de chacune d’elles. Une première série a été plantée en pleine terre, dans une pelouse légèrement ombragée et inclinée, à une distance d’un mètre les unes des autres et dans le sol même de la pelouse. Une seconde série, comprenant les mêmes plantes, a été également mise en pleine terre, mais dans un sol amendé et composé de : 1 partie de terreau de feuilles pur, de deux ans, l partie de sable fin, 72 partie de terre ordinaire tamisée. Elles ont été placées à 20 cm. les unes des autres. Une troisième série, enfin, comprend les pieds qui ont été plantés en pots et placés sous châssis ou en serre froide. La série des plantes cultivées en pleine terre est celle qui a le mieux réussi. «Je n’ai essuyé d’insuccès» dit M. Mantin, que lorsque j’ai eu affaire à des espèces à racines charnues, c’est-à-dire à celles qu’on tient pour parasites et qui ne semblent pas l'être, et encore ces insuccès sont- ils dûs, très probablement, à une négligence dans la cul- ture. » CULTURE ET EMPLOI 41 Un fait curieux à constater c’est que les espèces pla- cées clans la serre froide ont émi des fleurs en février, c’est-à-dire près de trois mois plus tôt que dans la nature. Ce sont donc des plantes «bonnes à forcer» selon le lan- gage du jour. Du reste, dans sa brochure dont j’ai déjà parlé, M. A. Würtenberger consacre un chapitre spécial à ce sujet et recommande certaines espèces plus particulière- ment propres à être forcées, à la manière des jacinthes et des tulipes. Pauvres petites Orchidées de nos bois! est-ce que nous allons assister chez vous à ce forçage contre na- ture qu’on a poussé de nos jours jusqu’au paroxysme de l’antinaturel ? Est-ce que nos fabricants de lilas étiolé, de muguets hors saison, de chétives et malheureuses tulipes avortées vont finir par battre monnaie avec des Orcbis étouffés en serre chaude ? Le plus grand nombre des Orchidées rustiques, du moins de celles appartenant à la section des Sérapiadées, réussira dans les conditions suivantes : $ I. — En pleine terre ; sol plutôt compact, vierge d’en- grais, si possible dans le gazon qui tient leurs racines fasei- culées au frais. On peut les planter également dans les ni- ches d’une rocaille ou dans une plate-bande, mais il est alors bon de recouvrir le sol d'une couche de mousse ou de petits cailloux, afin de lui conserver sa fraîcheur. Un compost de J/3 de terreau de feuilles et de 2/3 de bonne terre franche est ce qui leur convient le mieux. Comme la plupart recher- chent le calcaire, on pourra ajouter à cette composition un peu de chaux sous forme de détritus de vieilles murailles. Pour l’hiver on n’a rien à faire qu’à les laisser dormir sous la neige. Les espèces suivantes rentrent dans cette catégo- rie : Aceras (veut le calcaire), Anacamptis, Cœloglossum viride, Gymnadenia conopea, Himantoglossum bircinum, Listera ovata, Orcbis coriophora, fusca, globosa, mascula, militaris, morio, sambucina, simia, tridentata, ustulata. 42 CULTURE ET EMPLOI §11. — Une seconde série des Sérapiadées, qui com- prend surtout les espèces du midi et des sols légers, exige un tout autre traitement. Il leur faut un sol plus léger, com- posé de ‘/3 terreau de feuilles, '/s sable, V3 terre franche. Ces espèces exigent généralement le plein soleil et souvent une couverture pour l’hiver. Comme les plantes de la catégorie précédente, celles-ci préfèrent, quand elles sont placées en pleine terre, un sol gazonné ou légèrement re- couvert de mousse ou de cailloux brisés. Ici sont compris tous les Ophrys, Orchis papilionacea, Serapias. § III. — Cette division comprend les espèces des bois ou celles qui vivent habituellement à l’ombre. Ici l’humus est plus nécessaire et la proportion de terreau de feuilles de- vra être de 2 contre I de terre franche. Leur place est dans les bosquets, sur les bords des taillis ou des massifs d’ar- bres, dans les pentes ombragées et herbeuses ou bien en- core sur la face nord d’une rocaille. Il faut, ici encore, évi- ter le fumier ou les sols trop gras et, autant que possible, planter les tubercules dans un sol compact et profond, re- couvert de gazon ou de mousse. Sont compris ici : Les Ce- phalanthera, les Epipactis, Orchis maculata, pallens, Spitzelii et les Platanthera. § IV. — Les espèces des marécages rentrent dans cette catégorie-ci. Il leur faut un sol profond, poreux, une situa- tion humide et le plein soleil. On peut les planter au bord d’un étang ou d’une mare d’eau, ou bien encore d’un ruis- seau et dans le sol qui s’y trouve ; mais si l’on peut leur donner de la tourbe, elles prospéreront mieux. Ce sont : Epipactis palustris, Orchis incarnata, latifolia, laxillora, pa- lustris et les Spiranthes. § V. — Nous plaçons sous cette rubrique les espèces alpines et délicates, croissant sur les hauteurs, dans les pâ- turages élevés des montagnes, parmi l’herbe line et serrée qui en protège les racines et bulbes contre les rayons brû- CULTURE ET EMPLOI 43 lants du soleil. Ici la terre dite «de bruyère» a un rôle à jouer. En principe je suis peu partisan de son emploi, mais je ne trouve rien, sauf la tourbe ou la terre de châtaigniers additionnée de sable, qui puisse mieux convenir à ces peti- tes espèces. Cette terre de bruyère est un composé de sa- ble siliceux et des détritus végétaux combinés dans des proportions diverses; pour être bonne il faut que le sable soit au terreau végétal comme 57 est à 16 et qu elle ne con- tienne pas plus de 20 parties de racines ou détritus non con- sommés. Elle renferme généralement très peu de chaux, à peine 8 parties sur 100, et une partie de matières solubles dans l’eau. Cette terre a surtout l’avantage d’être très lé- gère, très perméable et très favorable à l’émission des peti- tes racines. Elle est fort peu nutritive et ne convient qu’aux végétaux qui prennent un faible développement ou à ceux dont la croissance est lente. Pour la culture des Orchis il importe d’ajouter de la chaux et un peu de terre franche. Les Orchidées de cette section se cultiveront plus aisément dans une rocaille dont les niches sont bien drainées et à une exposition plutôt ensoleillée quoique pas en plein midi. 11 est bon, après la maturité des tubercules, de recouvrir la niche d’une lame de verre ou d’un pot retourné, jusqu’aux pluies d'automne (septembre-octobre), époque où la vie re- prend de plus belle et où le tubercule émet ses feuilles pour l'année suivante. Nous plaçons ici : Chamæorchis alpina, Goodyera repens, Gymnadenia albida, cucullata, odoratis- sima, Herminium Monorchis, Listera cordata et les Nigritella. Toutes les espèces du groupe des Sérapiadées peuvent se cultiver en pots. On leur donnera la même composition que pour la pleine terre, en y ajoutant du sable, et I on aura grand soin d’établir un bon drainage. Il faut enterrer les pots dans la couche froide ou dans une planche sablée et les tenir à mi-ombre. Une fois la floraison passée et les feuilles jaunies, il est bon de les mettre à l’abri des pluies 44 CULTURE ET EMPLOI et de cesser tout arrosement jusqu’à la fin de septembre. On les dépote tous les deux ou trois ans, à l’époque où ils vont reprendre leur activité automnale, c’est-à-dire dans le cou- rant de septembre. Les Orchis demandent à être plantés profond au lieu que les Ophrys et les Serapias veulent avoir leurs tubercules peu enfoncés dans le sol. M. V an Tubergen, qui a bien voulu me communiquer toutes ses observations sur la culture des Orchidées rusti- ques, élève la plupart des siennes, même les Sérapiadées, dans un sol qui est un pur terreau de feuilles bien décom- posé et sans aucun engrais. Il les plante dans une planche qu’il ombrage légèrement au moyen d’une paroi de lattes étroites, mesurant 2 1 2 m. de haut. Mais je remarque que, de cette manière, il réussit surtout avec les espèces des ma- récages et des lieux couverts et plus particulièrement les Orchidées de l’Amérique septentrionale. $ VI. — Le groupe des Cypripèdes exige un mode de cul- ture spécial. Ici nous avons affaire à des plantes dépourvues de tubercules, stolonifères, munies de grosses racines fas- ciculées et charnues. Elles se cultivent en pots ou en pleine terre et exigent un sol poreux, profond et perméable. Pen- dant plusieurs années nous les cultivions, au Jardin alpin, dans la terre de bruyère pure, mais sans avoir jamais pu réussir. M. E. Boissier, dans son richissime jardin botani- que de Valleyres-sous-Bances, dans le canton de Vaud, m’avait autrefois montré des Cypripèdes américaines d’une grande beauté, venant tout simplement dans les niches de ses rocailles et auxquels il donnait un bon terreau de feuil- les additionné de terre franche et de terre de bruyère. J’es- sayai encore de cette manière sans réussir beaucoup mieux, car nous sommes, à Genève, dans des conditions moins fa- vorables qu’à Valleyres. Enfin, depuis quelques années, nous cultivons nos Cypripèdes dans un compost fait de '/* de sphagnum, ’/3 de terreau de feuilles bien décomposé et CULTURE ET EMPLOI Vs de bonne terre franche. Les résultats sont excellents pour la culture en pots; en pleine terre nous supprimons le sphagnum et le remplaçons par de la tourbe. Les Cypripèdes aiment l'ombre diffuse, les positions fraîches et plutôt humides; j’en ai vu de superbes collec- tions cultivées dans les marais artificiels et comme plantes paludéennes. M. Otto Ballif, orc-hidographe bien connu et rédacteur du Moniteur cV horticulture, écrit à ce sujet 1 : « L’époque la plus favorable pour l’empotement ou la « plantation des rhizomes est le mois de mars ; on peut « aussi opérer en automne après la fanaison des tiges. Les « plantes en pots sont hivernées sous châssis à froid, ou « bien on les recouvre simplement d’une épaisse couche de « feuilles, afin de les préserver des fortes gelées. « Nous en cultivons de cette manière, depuis quelques « années, plusieurs centaines d’exemplaires, qui fleurissent « admirablement dès le mois d’avril à fin juin. » Dans les rochers artificiels, les pelouses, à l’ombre des arbres à feuilles caduques, sous les bosquets, sur les pentes tournées au nord, ces plantes réussissent à merveille. $ VII. — Certaines espèces délicates exigent un trai- tement un peu différent. I! leur faut un sol très bien drainé, composé de terre de bruyère concassée en morceaux, de Sphagnum, d’un peu de terre franche avec addition de sa- ble de rivière ou de petits débris de cailloux. La culture en pots, sous châssis froid ou en serre froide, ou bien en plein air, à mi-ombre, leur convient particulièrement. Ici ren- trent le Calypso, le Malaxis, les Liparis, etc. En général les Orchidées aiment à n’être pas tracas- sées et veulent vivre tranquille. Si vous les mettez quelque part dans votre jardin, ne le faites point à la légère, afin de n’avoir pas à les changer de lieu l’année qui suit. Cherchez 1 Bulletin de l' Association pour la protection des plantes. n° X. Genève 1892. 46 CULTURE ET EMPLOI à ce que vos [liantes restent en place le plus longtemps possible, et vous vous en trouverez bien. Distribution dans les jardins. — Dans le jardin naturel, la place des Orchidées rustiques est un peu partout. Les Cypri- pèdes formeront ici et là de vrais massifs, artistiquement groupés autour de quelques vieux troncs d’arbres garnis de lianes ou de lierre, ou ils garniront une rocaille pittores- quement placée près d’un bosquet, ou bien encore ils for- meront des touffes sous bois ou dans les gazons. Les Or- chis maculata et fusca et X Acer as anthropophora seront semés dans les emplacements voisins des bouquets d’ar- bres ou tournés au nord tandis que Y Anacamptis pyra- midalis brillera au plein soleil dans la pelouse ou la ro- caille. Les nombreux Orchis des prés ont leur place toute trouvée dans les gazons qu’ils émailleront dès qu’auront passé les charmes des Crocus et des Narcisses, et les Sera- pias auront leur place entre les rochers tournés au midi ou sur les pentes regardant le soleil. Dans les places humides ou fraîches, sur le bord des pièces d’eau, se montreront les Orchis des marécages, les Platanthera américains, 1 Epi- pactis palustris. Les Ophrys seront placés dans les lieux secs et gazonnés, tandis que les espèces montagnardes grimperont dans les niches de rocailles naturellement et artistiquement construites. On cherchera à grouper tout ce monde d’après ses exigences, son mode de vivre et l’effet qu’il produit. Mais, dans le jardin peigné et dessiné architecturale- ment, la place des Orchis de plein air sera dans les ro- chers ou sur le bord des pièces d’eau, ou bien encore dans les plates-bandes, ou sous les massifs d arbres ou d’arbus- tes. On les placera sur les talus que I on ne fauche pas souvent, sur les bords des sentiers, dans de petits rochers établis ad hoc. De petits groupes de Cephalantera, d 'Or- chis fusca, d’ Hiniantoglossum, à' Ophrys, de Serapias, font CULTURE ET EMPLOI 47 un fort bel effet. Et comme leur floraison dure en général très longtemps, on a là une source de joie qui se prolonge pendant plusieurs mois. Mais c’est dans la Fougeraie surtout, et comme com- plément, comme ornement des groupes de filices que les Orchidées rustiques font merveille. On a reproché aux Fou- gères leur teinte unicolore, leur manque de fleurs brillan- tes. Or les Orchidées rustiques, dont la plupart s’accommo- dent des mêmes conditions que les Fougères, ont là un rôle considérable à jouer. Elles relèvent ainsi la verdure des plus distingués d’entre les végétaux herbacés et ma- rient leurs vives couleurs aux élégantes formes des frondes cryptogames, tandis ([ue celles-ci font ressortir l’éclat et la beauté des fleurs d’Orchidées privées, elles, de la grâce du feuillage. Puis, dans les massifs de plantes vivaces et dans les plates-bandes, les Orchidées rustiques ont aussi leur rôle à jouer; et enfin, on peut leur constituer un cadre spécial et établir un Orchideum comme on a fait la Fougeraie poul- ies Filices. Dans ce cas, on procède comme pour les Fou- gères, avec cette différence qu’il faut avoir grand soin d exposer la bonne moitié de l’emplacement en plein so- leil, un grand nombre des Orchidées exigeant le midi. Il faut aussi chercher à avoir un petit marécage pour les es- pèces paludéennes et une partie « alpine » pour celles des hautes régions. Un Orchideum conçu de la sorte est l une des plus belles créations du Jardin naturel et offre des jouissances autrement plus vives et plus variées que les mosaïcultures les mieux ouvragées et que les corbeilles de fleurs plus splendides mais dont la vie est éphémère. .Nos Orchidées restent et demeurent; elles sont des êtres vivant et se développant chaque nouveau printemps au lieu que les brillants Géraniums, Bégonias ou Coléus de nos parter- res ne sont que des objets décoratifs qui sont utilisés pour CULTURE ET EMPLOI 48 l’agrément et disposés de manière à produire un effet sou- vent trop passager. Sans vouloir en critiquer l’usage, car ils ont leur importance et leur valeur, qu il me soit permis, en terminant, d’en condamner l’abus et de recommander l’emploi plus fréquent des végétaux vivaces et rustiques à tous ceux qui recherchent les beautés naturelles dans le Jardin et le vrai dans l’Art. - fcV LES ORCHIS Régnez, vous les Orchis de nos vallons sauvages. Soyez de nos gazons le suprême décor ; Elevez vers le ciel vos aimables visages Et sécrétez le miel pour les papillons d'or. J’aime à vous voir semés dans la verte prairie, f Emailler les gazons de vos airs gracieux; J’aime à voir, sous nos bois, votre gerbe fleurie Dont l’encens pénétrant se répand autour d’eux. Modestes, vous cachez vos grâces dans les herbes, Ou sous l’épais taillis, parmi les autres fleurs ; Et dans votre retraite on ne voit point, superbes, Vos épis s’élever pour dominer vos sœurs. Mais, dans le fond obscur de votre humble corolle, Vous cachez vos parfums et votre miel si doux ; Et la nymphe des bois, ceinte d’une auréole, Aime à rêver le soir, assise auprès de vous. Venez, vous les Orchis de nos bois, de nos plaines, Régner dans nos jardins, animer nos bosquets ; Rendez plus doux nos jours, moins amères nos peines, Et bercez nos esprits par vos parfums discrets. H. C. CHAPITRE VI DESCRIPTION DES ESPÈCES FIGUREES ACERAS, R. Br. Caractères généraux : Bulbes entiers; segments externes du périgone connivents en forme de casque, ou étalés, les in- ternes plus étroits et dressés; labelle étroit, trilide, à lobe médian plus ou moins incisé, retombant; éperon très court ou nul. 11 diffère du genre Orchis , auquel il est rattaché par beau- coup de naturalistes, comme Darwin, par son éperon réduit à deux petites dépressions arrondies, son stigmate allongé trans- versalement, son caudicule plus court, enfin par le fait que les deux disques visqueux de la base des pollinies sont si rappro- chés que leurs bords empiètent l’un sur l’autre et forment ainsi presque une seule masse; c’est un pas vers la soudure com- plète des disques dont V Anacamptis pyramidalis et Y Himanto- glossum nous donnent un exemple. La fécondation des Aceras a lieu par le même procédé que chez Y Orchis mascula. PI. I. — A. anthropophora, R. Br. — (Orchis anthropophora, Ail., Ophrys anthropophora, L.) Orchis Homme pendu. Bulbe globuleux; tige dressée de 20 à 40 cm., nue supérieurement, garnie à la base de feuilles oblongues-lancéolées. Fleurs en épi long et lâche, à périgone d’un vert jaunâtre, strié de pourpre, à labelle pendant et divisé en quatre lobes linéaires, figurant quelque peu les bras et les jambes d’un homme pendu. Mai- juin. 52 DESCRIPTION DES ESPECES Cette plante croît dans les pâturages et sur les collines calcaires de la région montagneuse de l’Europe centrale et méridionale, de l’Angleterre jusqu’à la Grèce. C’est l’espèce qui, de toutes nos Orchidées indigènes, contient le plus de coumarine et répand, à l’état sec, le plus de parfum (voir page 5). ANACAMPTIS, Rich. Segments externes latéraux du périgone rejetés en arrière, le supérieur et les deux internes rapprochés à leur sommet; labelle trilobé et éperon étroit. Ici, l’appareil de la fécondation est des plus remarquables et l’ensemble de ces organes et de leurs fonctions a été décrit à la page 10. C’est un des genres les mieux organisés et chez lequel l’acte de la fécondation est le plus intéressant à étudier. PI. II. — A. pyramidalis, Rich. — (Orchis pyramidatis. L.) Orch is pyramidal. Bulbe entier; tige dressée et épaisse ; feuilles lancéolées-linéaires ; fleurs en épi conique, court et serré, d’un beau rose vif, à éperon long et grêle, à labelle trifide jusqu’au milieu, à lobes presque égaux. Fleurit en mai-juin. Europe centrale et méridionale, de l’Angleterre à l’Orient, dans les prairies, les pentes gazonnées et les clairières ensoleillées et sèches. CALYPSO, Salisb. Genre comprenant deux espèces qui appartiennent aux régions boréales. Segments du périgone assez semblables entre eux, étroits, séparés; labelle en forme de sabot; colonne courte, largement ailée, presque pétaloïde; anthère pendante; 4 pollinies. PI. III. — C. borealis, Salisb. — (Orchidium arcticum, Sw., Cymbidium boreale, Sw., Limodorum boreale, Sw., Norna borealis, Wahl.) Petite plante à bulbe de la grosseur d’une noisette, enfoncé à moitié dans le sol moussu ou la Sphaigne et portant une feuille unique, d’un vert foncé, plissée et nervée, presque sessile, ovale, arrondie et en forme de cœur; fleur DESCRIPTION DES ESPECES 53 solitaire, grande, à segments du périgone sensiblement égaux, d’un beau rose- lilas, à labelle très grand, rappelant un peu par sa forme le sabot des Cypripè- des, d’un beau rose mélangé de jaune et velouté à l’intérieur. Fleurit en mai. Indigène dans les marais froids et les bois humides de l’Amérique septentrionale et boréale ainsi que de la Norwège. de la Laponie et du Nord de la Russie. On la trouvait autrefois dans le Nord de l’Ecosse, mais elle en a disparu. Cette plante superbe est rarissime dans les cultures. Le Jardin alpin d’ac- climatation en a reçu quelques bulbes provenant de Finlande et du Canada, qui ont très bien fleuri. Nous en avons planté à Bourg-St-Pierre qui ont admirable- ment résisté à 1700 m. dans les rochers de la Linnæa et y ont bien fleuri. M. Van Tubergen, de Haarlem, offre cette belle plante à bon marché tandis que notre Jardin ne peut l’élever et doit recourir à l’importation. Notre planche est faite d’après des pieds provenant de la maison Van Tubergen. 'fl/! ■ CALYPSO BOREALIS A mes amis H. et E. de Rettig, à Abo, Finlande. D’où te vient, Calypso, la suprême élégance De ta fleur de salin ? Où donc as-tu conquis l’ineffable nuance De ton sabot divin ? Dieu semble avoir sur toi concentré tous les charmes, La grâce et la beauté, Et les brillants atours faits pour tarir les larmes De cette humanité. Ton merveilleux calice expose en sa palette Les tons les plus riants, Et quand le voyageur te rencontre, seulette, Il croit voir des brillants. Ta fleur est l’astre pur qui brille sur la terre Aux lieux sombres du Nord Et Dieu te planta là, pure et vive lumière, Pour éclairer le bord. H. C. DESCRIPTION DES ESPECES 55 CEPHALANTHERA, Rich. Divisions périgonales assez semblables entre elles, formant un casque peu ouvert, rattaché à la colonne par une sorte de hanche; labelle concave à la base, brusquement rétréci au mi- lieu, à partie terminale indivise. Ce genre se distingue en outre des Epipactis par l’absence d’un rostellum ; l’anthère, semblable à celle de l’Epipactis, est située plus haut par rapport au stig- mate. Darwin a fait sur les Céphalanthères des observations fort curieuses. Elles ne produisent pas de nectar et sont pourtant visitées par les insectes qui, très probablement, comme cela a lieu chez les fleurs de Valida, rongent les crêtes dont est ornée la base du labelle. Le fond même de la fleur et les organes reproducteurs, sont fermés avant la maturité par une sorte de porte triangulaire que forme l’extrémité du labelle ; à l’époque où la fleur doit être fécondée, cette petite porte s’abaisse et laisse le passage libre ; alors les insectes pénètrent dans la fleur, provoquent la fécondation croisée et dès qu’elle a eu lieu la partie terminale du labelle se relève et ferme de nouveau hermétiquement la porte triangulaire qui recouvre entière- ment les organes de la fructification. Le savant anglais a, en outre, observé que les Cephalanthera sont susceptibles d’auto- fécondation dans le cas où l’insecte ferait défaut. PI. IV. — C. ensifolia, Rich. — (C. Xjphophyllum, Reich., E. ensifolia Schmidt, E. xyphophylla, Sw., Epipactis longifolia, Wetts.) Céphalanthère à feuilles ensiformes. Feuilles linéaires lancéolées, étroites; bractées courtes; fleurs blanches, à segments extérieurs ovales-aigus. Juin-juillet. Le C. ensifolia croit dans les taillis et les bois, sur les coteaux boisés de la région montagneuse de l’Europe centrale, méridionale et orientale. PI. V. — C. pallens, Rich. — (Cephalanthera grandiflora, Bab., Cymbidium pallens, Sw.. Epipactis lancifolia, Schmidt, E. pallens, Willd., E. alba, Crantz.) Céphalanthère à grandes fleurs. Feuilles ovales-lancéolées ; bractées grandes, dépassant parfois les fleurs; fleurs grandes et blanches. Juin-juillet. 56 DESCRIPTION DES ESPECES Croit dans les forêts et les bois ombreux de l’Europe centrale, méridionale et orientale. PI. VI. — C. rubra, Rich. — (Cymbidium rubrum, L. , Epipactis purpurea. Crantz, E. rubra, Schmidt, Serapias rubra, L.) Céphalanthère rouge. Feuilles lancéolées-aiguës ; bractées linéaires; ovaire pubescent ; tleurs grandes, d’un beau rose, à segments extérieurs ovales-laucéolés ; labelle ovale, acuminé. Juin-juillet. Le C. rubra appartient à l’Europe centrale, méridionale et orientale où il habite les collines boisées sèches et les bois de pins. CHAMÆORCHIS, Rich. Divisions périgonales conniventes en casque ; labelle re- tombant, court, dépourvu d’éperon (chez l’Herminium, genre très voisin, le labelle est légèrement éperonné). Le Docteur Hermann Millier 1 a fait d’intéressantes observa- tions sur la fécondation du Chamæorchis. Ses fleurs, très peu voyantes, n’attirent que la classe inférieure du monde des in- sectes ; elles sécrètent leur nectar dans de petites poches pla- cées à la base du labelle, c’est-à-dire au centre de la fleur et situées de telle façon que le mouvement le plus subtil du plus petit insecte portant sa trompe sur le miel, déchire la très lé- gère membrane du rostellum et lui permet d’emporter les pol- linies sur une fleur voisine. PI. VII. — C. alpina, Rich. — (Ch;imærepes alpina, Sprgl., Aceras alpiuum, Pers., Arachnites alpina, Schmidt, Herminium alpinum, Sw., Epipactis alpina Schmidt, Ophrys alpina, L.) Orchis faux Orcliis. Bulbe entier, ovale-oblong, petit ; tige de 5-8 cm. , nue ; feuilles linéaires, très étroites, radicales et dressées, égalant la tige ou la dépassant ; fleurs en épi court et ovoïde d’un vert jaunâtre, petites, dépourvues d’éperon, à segments ovales-oblus, à labelle jaune, lancéolé, portant deux dents à sa base. Juillet- août. Cette jolie plante, une miniature d’orchis, se rencontre dans les pâturages de la région alpine de la chaîne des Alpes, sur les Carpalhes, sur les Alpes de la Scandinavie et dans les régions boréales de l’Europe. 1 Alpenblumcn und ihre Befruclitung, p. 73. DESC R1PTION DES ESPECES 57 CŒLOGLOSSUM, Hartm. Divisions périgonales conniventes en casque; labelle briè- vement éperonné, tombant et allongé, trilobé; anthère ob- tuse ; pollinies rapprochées au sommet et divergentes en bas ; stigmate placé au centre de la fleur et formant une seule masse. Le nectar est sécrété dans des poches placées à la base du labelle 1 et vers lesquelles l’insecte est conduit naturellement au moyen des vallonnements creusés dans le labelle lui-même. Les pollinies n’ayant pas, comme chez toutes les autres Orchi- dées, la faculté de se mouvoir par le moyen du caudicule, la disposition des organes est ici telle que l’insecte pourvoit lui- même à cette défectuosité ; il est obligé de faire deux mouve- ments différents au centre de la fleur s’il veut prendre le nec- tar déposé dans trois glandes, dont deux sont sur les bords et l’autre au centre même de la base du labelle. En procédant ainsi, il arrive très naturellement à transporter les pollinies d’une fleur sur le stigmate d’une autre. Darwin croit que l’in- secte doit puiser d’abord son nectar à la source plus riche des nectaires latéraux et qu’il ne vient qu’en second lieu boire les gouttes qui sont au centre ; les pollinies ne s’attachent donc à sa tête qu’à ce moment-là, et alors, volant à une autre fleur, il réalise l’union de deux fleurs différentes en y puisant le nectar de nouveau sur les glandes latérales qui se trouvent au-des- sous des stigmates. S’il devait en être autrement et que l’in- secte dût aller d’abord sur la gouttelette centrale, la féconda- tion croisée n’aurait pas lieu et nous serions ici en présence d’un cas possible mais peu probable d’auto-fécondation. Au reste, Sprengel a découvert que chez d’autres Orchidées, les Listera , l'insecte, troublé par l’adhérence des pollinies à son corps, ne continue pas immédiatement à s’abreuver de nectar, mais s’envole vers une autre fleur, en produisant ainsi la fécon- 1 Darwin. Fécondation des Orchidées, p. 75 et Hermann Müller. Alpen- hlumen. p. 72. 58 DESCRIPTION DES ESPECES dation croisée. Hermann Millier pense que la fécondation a lieu par le moyen de petits papillons nocturnes attirés par un par- fum léger que les fleurs n’émettraient que de nuit. PI. VIII. — C. viride, Hartm. — (Orchis viridis, Crantz, Perislylus viridis, Lindl., Plalanthera viridis, Lindl., Gymnadenia viridis, Ricli . . Habenaria viri- dis, R. Br.) Orchis grenouille. Bulbe palmé ; lige de 8-20 cm.; feuilles inférieures ovales-obluses, les su- périeures lancéolées, aiguës; épi cylindrique, un peu lâche, verdâtre; bractées herbacées, les inférieures plus longues que les (leurs ; périgone d’un vert jau- nâtre, à segments externes ovales-oblus, les externes linéaires, tous connivents en casque; labelle linéaire, retombant, tridenté et dont les deux dents latérales dépassent la médiane, qui manque quelquefois: éperon très court, obtus, quatre ou cinq fois moins long que l’ovaire. Juin-juillet. Europe centrale et septentrionale. C0RALI0RRHIZA, Hall. Ce genre renferme de véritables Orchidées saprophytes qui se nourrissent exclusivement des matières organiques qu’elles rencontrent dans l’iiumus des forêts ou des marais. Elles n’ont pas de feuilles, pas plus que de chlorophylle et elles revêtent des couleurs plus ou moins fauves et sombres. Leur souche consiste en un rhyzome ayant l’aspect d’une branche de corail ou d’un bois de renne ou d’élan, et sa surface absorbe l’eau et les matières nutritives. PI. IX — C. innata, R. Br. — (C. Halleri, Rieh., C. Neottia, Scop., Cymbi- dium coralliorrhiza, Sw., Helleborine coralliorrhiza, Schmidt.) Coralline. Petite plante à tige dressée, haute de 15-20 cm, et portant une grappe lâche de 5-10 fleurs d’un jaune rougeâtre. Juin-juillet. Elle croît dans la mousse des bois de sapins de l’Europe centrale et septen- trionale. * CYPRIPEDIUM, L. Ce genre, qu’il serait plus correct de nommer Cypripedi- lum, a été depuis Linné, révisé par Reichenbach et Pfitzer. C’est l’un des plus importants de la famille des Orchidées et le DESCRIPTION DES ESPECES 59 plus beau de celles d’Europe, il ne comprend que les espèces à feuilles caduques, c’est-à-dire celles qui appartiennent à la zone froide et perdent leurs tiges aériennes à l’automne. Tou- tes les autres Orchidées qu’on voit figurer sous ce nom dans les catalogues horticoles sont des Selenipedilum ou des Pci- phiopedilum. Le genre Gypripède est d’un cachet si particulier et telle- ment différent de toutes les autres Orchidées, non seulement par l’aspect de sa fleur, mais surtout par la structure de celle- ci, que Darwin1 estime qu’une multitude de formes intermédiai- res ont dû s’éteindre et que ce seid genre, aujourd’hui très disséminé, a survécu comme souvenir d’un état primitif et plus simple de la grande famille des Orchidées. Le Cypripedium n’a pas de rostellum et ses trois stigmates sont soudés ensemble en un seul corps; l’anthère centrale, généralement parfaite chez les Orchidées, est ici avortée, aplatie et stérile, et n’est représentée que par une singulière proémi- nence en forme de bouclier ; les véritables anthères, au nom- bre de deux, sont cachées derrière elle, tandis que chez les autres Orchidées elles sont avortées. En outre, nous ne trou- vons pas chez le Cypripède la pollinie, c’est-à-dire une masse de grains de pollen agglomérés, mais ces grains sont libres et entourés d’une matière très visqueuse. Le labelle est recourbé autour de la colonne (très courte) et forme comme un sabot qui protège les organes intérieurs de la fleur, ceux-ci étant placés de façon à ce qu’il soit impossible que la fécondation ait lieu sans une intervention mécanique. C’est aux insectes qu’il appartient de provoquer cette fécondation et Darwin, II. Millier, Delpinoet Asa Gray ont fait à cet égard, chez les Gypripédiées, de fort intéressantes découvertes. A l’intérieur du sabot pro- tecteur il se trouve, ou bien du nectar sur certaines espèces, ou bien, comme c’est le cas chez les espèces des zones froides, des poils abondants sécrétant un fluide visqueux qui s’amasse en globules à leurs extrémités. Les insectes, attirés par le par- fum de la fleur ou ses couleurs vives, cherchent à pénétrer La fécondation des Orchidées, p. 257. 60 DESCRIPTION DES ESPECES dans le sabot mais ils n’ont pour arriver au centre de la fleur que deux chemins praticables, à cause de la forme recourbée du labelle et du bouclier que forme l’anthère avortée. L’insecte est obligé de passer directement au-dessus ou immédiatement en dehors des deux anthères latérales ; sa trompe entre alors forcément en contact avec les grains de pollen qui s’y attachent très facilement, grâce à leur enduit visqueux, puis, s’il entre dans une autre fleur et qu’il introduise sa trompe directement au-dessus du stigmate, il dépose à la surface de celui-ci le pol- len qu’il a emporté d’une fleur voisine. On voit maintenant, dit Darwin, de quelle importance, ou plutôt de quelle nécessité, est pour la fertilisation de la plante cette singulière forme de sabot qu'affecte le labelle, en conduisant les insectes à engager leur trompe dans les passages latéraux adjacents aux anthè- res ; l’anthère supérieure rudimentaire est également néces- saire, et pour la même raison. Le naturaliste anglais prit un jour une sorte d’abeille de l’espèce Andrena parvula (celle qui fertilise le Cypripedium Calceolus) et l’introduisit dans la cavité du labelle par la grande ouverture de la face supérieure, celle où il semble que, naturellement, tout insecte doive pas- ser. L’insecte tenta vainement d’en ressortir et retomba tou- jours au fond, empêché qu’il était par le plissement du bord du labelle, qui est une des particularités de la fleur. Il était pris dans une trappe, un peu comme c’est le cas chez les Aristolo- ches ; à la fin, il se fraya un chemin jusqu’à l’un des petits ori- fices, près de l’une des anthères latérales et ressortit tout re- couvert de pollen. Darwin répéta l’expérience cinq fois de suite dans la même fleur et l'abeille en sortait toujours par le même orifice. Après cela, il examina l’intérieur de la fleur et trouva le stigmate tout enduit de pollen. Il avait donc opéré ici, par le moyen de l’insecte introduit cinq fois par un orifice qui semble de prime abord être l’entrée naturelle, l’autofécon- dation ou fécondation directe d’une fleur par son propre pol- len. Une chose curieuse encore à constater, c’est la sagesse avec laquelle agit la nature. Chez les autres Orchidées, celles qui ont des pollinies, le stigmate plus ou moins concave, est DESCRIPTION DES ESPECES 61 assez visqueux pour retenir le pollen sec. Chez les Cypripèdes les choses se passent tout autrement, car c’est le pollen ici qui est visqueux pendant que le stigmate ne l’est pas et devient même légèrement convexe, afin que, par le frottement, il déta- che mieux le pollen glutineux qui adhère à la trompe de l'in- secte. C’est, ainsi qu’on le voit, tout un momie à part que cette brillante tribu des Cypripèdes. Il y a chez eux un charme tout à fait particulier qui rappelle les fictions de la mythologie, qui transporte l’esprit aux âges antérieurs, aux époques les plus reculées de l’histoire de notre tapis végétal. C’est comme un mystère qui plane sur ces belles plantes aux formes antiques et qui semble se cacher au fond de leurs délicats mocassins. — Est-ce parce que tu portes le nom de la déesse qui incarna la beauté et qui, sans doute, t’a légué une part de son charme divin que ta fleur me séduit ainsi, élégante dryade des bois ombreux? Est-ce l’antiquité de ta race, le fait de ta rareté, du malheur qui te poursuit alors que l’homme te recherche non point pour t’admirer mais pour te posséder. Est-ce le fin tissu de ta robe ou sont-ce les teintes gracieuses île ton vêtement ? Je l’i- gnore ; tout cela sans doute concourt à t’élever sur le piédes- tal où mon cœur t’a placé. Mais j’avoue que tu m’es sacrée, fleur charmante des bocages mystérieux de la montagne ; je n’ai jamais porté sur toi une main sacrilège et, faut-il le dire, je n’ai jamais eu le courage de couper la tige et d’emporter une seule de tes fleurs. C'est que, aimable enfant des bois, ta beauté, que tu sais si bien cacher dans l’ombre des taillis, a éveillé des amours coupables; on t’a sacrifiée à ce besoin de possession qui, hélas, règne si fort dans la nature humaine et l’on a détruit un peu partout les ravissantes colonies que tu avais établies. Oh ! qui te choisira donc une retraite inaccessi- ble pour y finir tes jours en paix, loin des convoitises humai- nes, loin du bruit, sous l’œil de Dieu, dont tu racontes la gloire ? LE SABOT DE VÉNUS. Vénus, un soir d’éié, par l’orage surprise, Egara dans les bois son riche brodequin, Chamarré d’ambre et d’or, et dont la forme exquise Semblait l'œuvre de choix du plus adroit lutin. Un mortel le trouva qui crut avoir affaire A quelque précieux et magique trésor ; Mais, dès qu'il l’eut louché de sa main téméraire, Il vit s’évanouir le petit sabot d’or. Et voici qu’aussitôt une fleur gracieuse Poussa, fraîche et brillante au milieu du gazon; Et les dieux de chanter la grâce merveilleuse Que ce sabot divin prit en sa floraison. H. C. DESCRIPTION DES ESPECES 63 PL X. — C. Calceolus, L. — (Calceolus alternifolius, St-Lager, Calceolus Marianus, Crautz.) Sabot de Vénus. — Tige dressée, de 20-30 cm., avec des feuilles orbicu- laires-aiguës, nervées, plissées, ondulées sur les bords, rappelant celles des Céphalanthères, et portant une ou deux fleurs, grandes, à divisions externes longues et étroites, d’un brun foncé ; labelle d’un beau jaune, maculé de pourpre à l’intérieur. Sa fleur exhale une douce odeur de fleur d’oranger et apparaît en avril-mai. Le Sabot de Vénus est une plante essentiellement européenne, qui habite les bois et les clairières de la région montageuse de l’Europe centrale et méri- dionale. C’est une des plus belles espèces de notre flore indigène ; malheureu- sement sa beauté lui est préjudiciable car la plante a été extirpée dans beau- coup de pays. En Suisse, où elle abondait autrefois, nous ne l’avons plus qu’à l’état de rareté et l'on prévoit le moment où cette belle Orchidée aura disparu tout à fait. C’est pourquoi l’on ne saurait trop engager les horticulteurs à l’élever de semis et à la multiplier abondamment dans leurs jardins *. EPIPACTIS, Rich. Segments externes du périgone sensiblement égaux, éta- lés ; labelle long, concave à la base et contracté au milieu de sa longueur; colonne courte ; rostellum large. Ce genre diffère des Cephalanthera, dont il est très voisin, par son périgone ouvert, presque campanulé, et par ses fleurs pédonculées et pendantes. La fécondation croisée des Epi paetis a été décrite avec beau- coup de soin par Darwin2. Les fleurs sécrètent un nectar abondant et sont très fréquemment visitées par les insectes. Le labelle est curieusement conformé et divisé en deux parties, 1 On la trouve, dans les catalogues hollandais el particulièrement dans celui de la maison Van Tubergen, de Haarlem, à des prix si abordables qu’il est criminel de l’arracher dans ses stations naturelles quand on peut s'en procurer de très beaux pieds élevés pour la culture. 2 Fécondation des Orchidées , pp. 94 à 106. 64 DESCRIPTION DES ESPECES dont la terminale, qui s’avance au-delà des autres divisions, constitue un excellent pied-à-terre pour les insectes butinants. Cette partie-là est reliée à l’inférieure par une sorte de char- nière, flexible et très élastique, en sorte qu’elle s’abaisse par le poids d’une seule mouche et permet à celle-ci d’introduire sa tête dans le fond de la fleur, barré d’ordinaire par les crêtes dont est garni le labelle. mais qui devient abordable quand cet organe est abaissé. La moitié basilaire du labelle est une coupe qui, en temps opportun, se remplit de nectar. L’insecte entre, puise le miel et pendant qu’il est sur cette partie centrale de la fleur, la partie terminale du labelle, qu’il ne touche plus, se relève et l’enferme ; pour partir il est obligé de faire un mou- vement de bas en haut dans lequel il effleure de sa tête le ros- tellum, qu’il déchire, et dont il emporte ainsi les pollinies au dehors. PI. XI. — E. atrorubens, Schult. — (Serapias atrorubens, Hoffm., E. rubi- ginosa, Crantz.) Epipactis pourpre. Rhizome horizontal ou descendant ; tige grêle, dressée, de 20-30 cm., garnie de feuilles nervées, ovales-lancéolées ; fleurs petites, retombantes, d’un rouge- brun foncé, à légère odeur de vanille. Mai-juin. PI. XII. — E. latifolia, Ail. — (E. Helleborine, Crantz, E. uliginosa, Vest, Cymbidium latifolium, Swartz.) E. à larges feuilles. Cette espèce se distingue de la précédente par les bosses lisses de la base de son labelle qui sont plissées chez E. atrorubens, et par ses fleurs verdâtres, légèrement teintées de rouge. Répandue dans les régions boisées. PI. XIII. — E. microphylla, Sw. — E. à petites feuilles. Cette plante, se distingue de l’E. latifolia par ses feuilles courtes, petites et glabres et par son port plus grêle. Fleurs d’un rouge brunâtre, petites et retombantes. Juin-juillet. Région montagneuse de l’Europe centrale et orientale. Dans les bois riches en humus. Très disséminé. PI. XIV. — E. palustris, Crtz. — (E. longifolia, Ail. Cymbidium palustre, Sw., Helleborine latifolia, Mœnch, Serapias palustris, Scop.) E. des marais. Souche stolonifère ; tige dressée, de 30 — 40 cm., pubescente, garnie de feuilles lancéolées et nervées; fleurs d’un blanc jaunâtre, maculées de pourpre et réunies en épi lâche, tout garni de bractées. Juin-août. DESCRIPTION DES ESPECES 65 Espèce propre à la flore des marais et des lieux humides ; elle habile prin- cipalement les régions montagneuses de l'Europe centrale et septentrionale. PI. XV. — E. sessilifolia, Peterm. — (E. latifolia. var. violacea, Dur., E. purpurata, Sw., E. violacea, Reich, f . , E. microphylla, Ferchl.) E. à feuilles ses- siles. Cette espèce diffère de E. latifolia, par ses feuilles plus petites, lancéolées, souvent plus courtes que les entrenœuds, par ses fleurs violacées, relativement grandes, nombreuses, pédonculées et pendantes après la floraison. Juillet-août. Europe centrale, dans les bois ombreux. EPIPOGON, Gmel. Ce genre (Epipogium, Lindley) est saprophyte et ne ren- ferme qu’une seule espèce, qui appartient à l’Europe et à l’Asie. Les organes reproducteurs sont conformés et placés de telle sorte (pie la fécondation exige une intervention mécanique. Le Dr P. Rohrbach, dans un travail sur ce sujet a montré que les Heurs de l’Epipogon sont fécondées par croisement, au moyen du « Bombas lucorum. » PI. XVI. — E. aphyllum, Sw. — (E pipogium Gmclini, Rich., Epipactis Epipogium, Crantz, Orchis apbylla, Schmidt, Satyrium Epipogium, L.| Epipoge sans feuilles. — Rhizome rameux, horizontal, denté ; lige de 15 — 20 cm., roussàlre, portant une grappe courte et lâche, de 3 — \ fleurs pen- dantes, jaunâtres, à divisions linéaires-lancéolées, à grand labelle ovale, concave et blanchâtre, à éperon court et renflé, d’un rose pâle, relevé. Juillet-août. Cette espèce curieuse croit dans la mousse des bois de sapins ou de hêtres et passe pour être parasite, ce qui n’est pas prouvé. Régions montagneuses et boisées de l’Europe septentrionale et centrale. G00DYERA, R. Br. Ce genre diffère des Spiranthes, dont il est voisin, par sa racine grêle et rampante, non tuberculeuse, son labelle con- cave à la base et ses pollinies formées de granules. Darwin et Hermann Millier ont publié, au sujet de la fé- 5 66 DESCRIPTION DES ESPECES condation des Goodyera, de fort intéressantes observations. L’entrée de la fleur, très étroite avant l’anthère, s’élargit au moment de la maturité du pollen et livre passage à certains insectes qui recherchent le nectar sécrété dans un godet formé par la hase même du labelle, au-dessous du rostellum. Les insectes d’ordre inférieur sont empêchés d’y parvenir par une abondance de poils placés à l’extérieur de la fleur et qui sont pour eux des barrières infranchissables. Certaines abeilles sont seules admises à l’intérieur de la fleur, qui est constituée de telle façon qu’elles emportent nécessairement le pollen sur d’autres fleurs et favorisent ainsi la fécondation croisée. PI. XVII. — G. repens, R. Br. — (Epi pactis repens, Crautz, Neoltia repens, Sw.. Satyrium repens, L.) Goodyère rampante. Rhizome rameux et traçant; tige de 10-15 cm. avec des feuilles pétiolées, épaisses, d’un vert clair, réticulées et veinées de blanc ; fleurs petites, blanches, réunies en épi unilatéral. Juillet-août. Celle jolie plante croît dans la mousse des bois de la région montagneuse du centre et du nord de l’Europe, de l’Ecosse à la Mer Noire. GYMNADENIA, R. Br. Ce genre se distingue de Y Orchis par son labelle trifide et par des pollinies dont les rétinacles sont libres au lieu d’être réunis dans un seul rostellum et qui, en outre, sont nus ou dépourvus de bursicules et ont des disques visqueux étroits et allongés. Le labelle est longuement éperonné et les divi- sions supérieures du périgone sont fortement conniventes. L’acte de la fécondation s’opère, ici encore, par le moyen des insectes et Hermann Millier nous donne les noms ^de trente espèces différentes qu’il a observées fréquentant les fleurs du Gymnadenia conopea tandis qu’il n’en a aperçu que trois sur le G. odoratissina, dont le parfum plus pénétrant attire surtout de petits papillons nocturnes. Chez les Gymnadenia l’insecte, en plongeant sa trompe dans la gorge de la fleur 1 H. Muller, Alpenblumen , pp. 63, 64 el 65. DESCRIPTION DES ESPECES 67 pour atteindre le nectar qui se trouve au fond de l’éperon, la met forcément en contact avec les deux disques visqueux al- longés qui sont à la base des pollinies, et celles-ci étant nues, comme nous l’avons remarqué plus haut, s’attachent facilement à l’insecte. Il les emporte alors dès qu’il a trouvé sa pâture, dans une autre fleur, et comme, dans ce genre, les fils élasti- ques qui relient les paquets de pollen sont d’une extrême fai- blesse, un papillon ou tout autre insecte portant une pollinie ainsi attachée à sa trompe, peut visiter plusieurs fleurs sans que toute la provision de poussière fécondante soit enlevée à la fois par le premier stigmate qu’il frappe. PI. XVIII. — G. albida, Rich. — (Peristylus albidus, Lindl., Habenaria albida, R. Br, Orchis albida, Sw., Plalanthera albida, Lindl., Satyrium albidum, L. Cœloglossum albidum, Hartm.) Gymnadène blanchâtre. Bulbes divisés jusqu’à la base en un fascicule de grosses libres napiformes, et palmés; tige de 15 à 30 cm., garnie de feuilles ovales, oblongues, obtuses ; fleurs petites, d’un blanc jaunâtre, â Libelle profondément trifide, avec un éperon épais, atteignant le tiers de l’ovaire et disposées en un épi cylindrique. Elles répandent une odeur de miel très caractéristique. Juin-Juillet. PI. XIX G. conopea, R. Br. — (Orchis conopea, L., Satyrium conopeum Wahl.) Gymnadène à long éperon. Bulbes comprimés, palmés; tige de 30-50 cm.; feuilles lancéolées-linéaires ; fleurs odorantes, en épi cylindrique allongé et plutôt lâche, d’un pourpre lilas, à segments externes étroits, les intérieurs larges, à Libelle plus large que long et divisé en trois lobes ovales et crénelés ; éperon très grêle, arqué, presque deux fois aussi long que l'ovaire. Fleurit de juin à la lin d’août. Cette espèce croit dans les clairières, aux lisières des taillis des régions montagneuses de toute l’Europe dans les sols compacts et humides. PI. XX. — G. cucullata, Rich. — (Himanloglossum cucullalum. Rclib., Or- chis cucullata, L.) — Gymnadène à capuchon. Bulbes divisés; feuilles radicales au nombre de deux, membraneuses, les caulinaires Lancéolées-linéaires ; fleurs rose pourpre, à divisions externes conni- ventes en casque, à Libelle horizontal tripartite ; éperon obtus et arqué, plus court que le Libelle. Juillet-août. Europe oriento-septentrionale, dans les bois moussus. PI. XXL — G. odoratissima, Rich. — (G. suaveolens, Rchb., Orchis odo- ratissima, L.) — Gymnadène suave. Bulbes comprimés, palmés; tige de 30 à 40 cm., à feuilles linéaires, étroi- tes, pliées en carène : fleurs en épi cylindrique, long et grêle, d’un rose lilas 68 DESCRIPTION DES ESPÈCES parfois très clair, petites, à odeur rie vanille, à segments latéraux linéaires-oblongs, étalés, beaucoup plus étroits que ceux de G. conopea : labelle à trois lobes obtus ; éperon grêle et long, non arqué mais cylindrique. On le trouve parfois à fleurs d’un blanc très pur. Juin-juillet. Pentes humides de la région boisée et montagneuse. HERMINIUM, L. Périgone campanulé; labelle trilobé, dressé, concave à la base; disques visqueux soudés chacun à un rétinacle distinct, comme chez les Gymnadenici, avec cette différence qu’ils ne sont pas nus mais entourés d’une légère membrane que l’in- secte fécondateur déchire et emporte avec lui. Ces organes sont d’une grandeur extraordinaire, presque du volume de la masse pollinique et distants l’un de l’autre. Les fleurs sont très pe- tites et peu apparentes; elles exhalent, surtout de nuit, une forte odeur de miel très propre à attirer les insectes. Ici, la fécondation diffère de celle de toutes les autres Or- chidées et Darwin y a consacré la très intéressante note sui- vante : « Mon fils, M. Georges Darwin, a vu différents petits in- sectes entrer dans les fleurs du H. Monorchis et, après de nombreuses visites, il n’a pas rapporté moins de 27 d’entr’eux, portant généralement une pollinie, quelquefois deux. Ces insec- tes étaient de petit Hyménoptères, Diptères et Coléoptères. Il paraît seulement indispensable que les insectes soient de taille très minime, car le plus grand n’avait qu’un 20me de pouce de long. Il est extraordinaire que chez tous, les pollinies soient attachées à la même place, au côté externe de l’une des pattes antérieures, sur la saillie formée par l’articulation du fémur avec l’os coxal. La cause de ce mode spécial d’attachement est assez claire ; la partie moyenne du labelle est si rapprochée de l’anthère et du stigmate que les insectes entrent toujours dans la fleur par le même point, entre le labelle et l’un des pétales supérieurs: de cette façon ils s’avancent avec leur dos tourné, DESCIUPTION DES ESPECES G9 directement ou obliquement, du côté du labelie. Mon fils en a vu quelques-uns qui, s'étant engagés dans la fleur d'une ma- nière différente, en sortirent et changèrent de position. Se te- nant ainsi dans un des coins de la fleur, avec le dos tourné vers le labelie, ils insèrent leur tète et leurs pattes antérieures dans le court nectaire qui se trouve dans le vaste espace situé entre les disques : j’en ai eu la preuve en trouvant dans des (leurs trois insectes morts (pii étaient restés attachés aux dis- ques. Pendant qu’ainsi placés ils aspirent le nectar, ce qui leur demande deux à trois minutes, le renflement articulaire du fé- mur se trouve, de chaque côté, sous le gros disque en forme de casque ; et quand l’insecte se retire, ce disque s’adapte bien et s’attache à la jointure. Le mouvement d’abaissement du cau- dicule se produit alors et la masse pollinique tombe juste en dehors du tibia ; de sorte que l’insecte, lorsqu’il entre dans une autre fleur, ne peut guère manquer d’en fertiliser le stig- mate, qui se trouve de chaque côté, au-dessous du disque. » PI. XXII. — H. Monorchis, R. Br. (Arachnites Monorchis, Hffm., Ophrys Monorcliis, L., Orcliis Monorchis, Scop.) Orchis Musc. — Rhizome traçant, portant un bulbe entier et allongé à la base de la plante et un autre à l’extrémité d’un court stolon, d’où le nom Mo- norchis ; liges de 10-15 cm. avec 2 ou 3 feuilles à leur base ; fleurs en épi long, grêle et étroit, d’un vert jaunâtre, nombreuses, petites, à odeur de miel ou de fourmis, à segments dressés, étroits ; labelie court, ascendant, divisé en trois lobes étroits et linéaires ; éperon très court. Juin-juillet. Celte jolie petite Orchidée appartient aux régions montagneuses de l’Eu- rope, depuis les Apennins jusqu’à la zone arctique. HIMANTOGLOSSUM, Sprgl. Tiré du genre Orchis, celui-ci en diffère par les deux dis- ques visqueux des pollinies soudés ensemble ; il se distingue en outre des Anacamptis et des Aceras, qui sont dans ce cas, par son labelie replié sur lui-même et enroulé en spirale avant l’époque de l’épanouissement. Colonne courte ; pollinies conte- nues dans une seule bursicule. 70 DESCRIPTION DES ESPECES PI. XXIII. — H. hircinum, Sprgl. — (Satyrium hircinum, L., Aceras hircina, Lindl., Loroglossum hircinum, Rich., Orcliis hircina, Sw.) Orchis Bouc. — Lizard Orchis, des Anglais — (lig. 22). Bulbes entiers, ovoïdes ; tige robuste, de 40-60 cm. ; feuilles oblongues-lancéolées, larges, engainantes; fleurs d’un blanc verdâtre ou jaunâtre, striées de pourpre, exhalant une forte odeur de bouc, à segments resserrés en forme de casque, les externes ovales, les internes linéaires; labelle divisé entrois lanières linéaires dont la moyenne, très longue, s’enroule en spirale et dépasse les latérales de quatre ou cinq fois; éperon très court. L’épi très allongé, cylindrique, dressé, passable- ment lâche, porte 15-40 fleurs. Mai-juin. Cette plante curieuse et intéressante, mais que son odeur fétide rend désagréable, se rencontre sur les coteaux chauds et secs de l’Europe centrale et méridionale, de l'Angleterre â la Grèce. Disséminé. LIM0D0RUM, Sw. Genre très caractérisé ; périgone peu ouvert, à segments tous dressés et connivents; labelle éperonné, à limbe indivis, dressé, ascendant; pollinies presque sessiles, à caudicules très courts et disques visqueux soudés ensemble. La fécondation, suivant Darwin, ne peut avoir lieu sans le concours des insectes. PI. XXIV. — L. abortivum, Sw. (Epipaclis aborliva, Ail., Orchis abortiva, L., Serapias abortiva, Scop.l Limodore violet. — Souche â libres épaisses, très fragile; plante entière- ment violette, à tige de 50 à 80 cm., robuste, garnie de gaines qui l’entourent et tiennent lieu de feuilles ; grandes fleurs en épi lâche, allongé, à périgone peu ouvert, à segments ovales-lancéolés, â labelle ovale, connivent avec les autres segments ; éperon cylindrique égalant l’ovaire, grêle et descendant. Mai-juin. Lisière des bois, surtout au voisinage des Pins sylvestres ; taillis secs et chauds dans l’Europe centrale et orientale. □ PARIS, Rich. Genre caractérisé par un périgone ouvert, formé de divi- sions étroites, rejetées en arrière ; labelle entier, cavé à la base, DESCRIPTION DES ESPECES 71 dressé ; masses polliniques compactes, bipartites, à lobes col- latéraux et parallèles, attachées chacune à un rétinacle distinct. PI. XXV. — L. Loeselii, Rich. — (Cymbidium I.oeselii, L. , Malaxis Loeselii, Sw. , L., Sturmia Loeselii. Rchb.) Liparis. — Bulbes très durs, réticulés, ovoïdes, donnant naissance à deux feuilles elliptiques lancéolées, d’entre lesquelles s’élève une tige nue de 10 à 15 cm. Fleurs petites, d’un vert jaunâtre, à segments linéaires, à labelle ovale, obtus, aussi long que les autres divisions du périgone. Juin-juillet. Cette curieuse et rare Orchidée se rencontre dans les marécages tourbeux de l’Europe centrale et septentrionale. LISTERA, R. Br. Segments du périgone assez semblables entre eux et réflé- chis ; labelle long, étroit et concave à la base, dépourvu d’épe- ron: gynostème court et épais, à rostellum dressé et suppor- tant l’anthère. Racines fibreuses; feuilles opposées, toujours caulinaires et seulement au nombre de deux. Le docteur Hooker, dans les Philosophiez l Transactions (1854) et surtout Darwin, dans la Fécondation des Orchidées , ont minutieusement décrit l’une des plus admirables organisa- tions de la nature dans le phénomène de la fécondation du Lis- tera ovata. Ici les pollinies sont dépourvues de caudicule et de disques visqueux ; leurs granules de pollen sont agglomérés et reliés par de légères membranes qui se déchirent au plus lé- ger attouchement. Elles sont sèches et n’adhèrent pas naturel- lement à l’insecte ; mais au moment où celui-ci, attiré par le nec- tar qui est sécrété sur les bords d’un sillon médian et qu’on distingue parfaitement dans la partie supérieure du labelle, pénètre dans la fleur, le rostellum s’abaisse, projette entre les deux extrémités des pollinies une goutelettede fluide visqueux, qui les unit l'une à l'autre et les attache aux moucherons. « De petits insectes » ajoute Darwin, « s’abattent sur la large extré- « mité inférieure du labelle, attirés par le nectar qu elle sé- « crête en abondance; en s’abreuvant de ce nectar, ils s’élè- 7 2 DESCRIPTION DES ESPECES « vent lentement le long de cette lame de plus en plus étroite, « jusqu’au point où leur tête se trouve directement au-dessous « de la voûte du rostellum; en élevant leur tète ils atteignent « cette voûte, la goutelette visqueuse en jaillit et les pollinies « se trouvent solidement attachées à eux. L’insecte s envole en « emportant les pollinies, aborde une autre fleur, et laisse sur <( le stigmate visqueux de cette fleur quelques parcelles du lra- « gile pollen. » Et plus loin encore: «j’observai, » dit-il, « un groupe de « plantes deux ou trois fois par heure, et je vis chaque jour de « nombreux insectes appartenant à deux petites espèces d’Hymé- « noptères, voler autour des plantes et aspirer leur nectar; plu- « sieurs fleurs, qui furent visitées un grand nombre de fois, « avaient déjà été dépouillées de leurs pollinies; mais à la fin « je vis des insectes de ces deux espèces se glisser sur le la- « belle de fleurs plus jeunes, puis soudain se retirer avec une « paire de pollinies d’un jaune brillant attachées au devant de « leur tète; je les pris, et je vis que le point oû les pollinies se « fixaient était le bord interne de l’œil; sur l’autre œil d’un « de ces insectes, il y avait une goutte de matière visqueuse « durcie, attestant qu'il avait déjà enlevé une paire de pollinies, « et qu’ensuite, selon tonte probabilité, il l’avait laissée sur le « stigmate de l’une de mes fleurs »... « Le grand nombre de « toiles que les araignées tissent autour de ces plantes, prouve- « rai t à lui seul combien les i n sectes abondent autour des Listera. » Enfin Darwin rapporte encore, — pour montrer que le con- tact le plus délicat suffit pour déterminer l'explosion du rostel- lum — qu’il trouva un jour un hyménoptère extrêmement petit, faisant de vains efforts pour dégager sa tête, ensevelie 4toute en- tière dans une goutte durcie de matière visqueuse, et par suite collée à la crête du rostellum et aux extrémités des pollinies, que, à cause de sa faiblesse et de sa petite taille, il ne pouvait emporter. Il fut puni d'avoir entrepris une tâche au-dessus de ses forces, et périt misérablement. PI. XXVI. — L. cordata, R. Br. — (Neotlia cordata, Ricli . , Epipactis cor- data, S\v., Helleborine cordata, Schmidt.) DESCRIPTION DES ESPECES 73 Lisière à feuilles en cœur. — Racine fibreuse: lige de 5 à 10 cm., très grêle, légèrement pubescenle, portant à mi-hauteur deux feuilles opposées, presque sessiles, jmtites, ovales-delloïdes, faiblement échancrées en cœur a la base; fleurs très petites, réunies par 6-10 en un épi grêle et lâche, à périgone d’un vert brunâtre, à Libelle allongé, divisé en trois lobes dont le moyen est bifide. Juin-août. Celte espèce se rencontre dans les bois moussus des montagnes de l’Eu- rope centrale et septentrionale et dans toute la région arctique. PI. XXVII. — L. ovata, R. Br. — (Epipactis ovala, Sw , Helleborine ovata, Schmidt, Neoltia ovata, Rich.) Listère â feuilles ovales. — Souche à longues libres fasciculées; tige de 40 à 50 cm., légèrement pubescenle; deux feuilles opposées, grandes, ovales, veinées, placées à mi-hauteur de la tige; fleurs verdâtres, petites, à Libelle allongé, divisé en deux lobes linéaires-oblongs, obtus, réunies en une grappe dressée, lâche, longue et grêle. Mai-juillet. Commune dans les prés et les clairières de la région montagneuse et boisée de l’Europe. MALAXIS, Sw. Segments du périgone rejetés en arrière; labelle situé au haut de la fleur et protégeant les organes de la fécondation, par suite, dit Darwin, d’une double contorsion de l’ovaire. Le labelle est concave et entoure le gynostèine dans sa [tins grande partie. Le Malaxis est très voisin du genre Liparis, dont il se distingue, outre la position du labelle, par son anthère dressée et sa colonne très courte. Le rostellum est une longue série membraneuse et blanchâtre, recouverte d’une légère couche de viscosité et les pollinies sont bifides et placées sur le dos du rostellum, à peu près comme chez le Listera. Ici, le rostel- lum ne projette pas de liquide sur leurs extrémités au mo- ment de la visite de l’insecte, mais la matière visqueuse qui recouvre cet organe se dépose naturellement sur l’extrémité supérieure des pollinies et les rend propres à se coller à la trompe de l’insecte qui viendra puiser le nectar de la fleur. Celui-ci, en s’envolant, les emportera sur une autre fleur, dont il fécondera le stigmate tout en absorbant une nouvelle dose de miel. DESCRIPTION DES ESPECES 74 PI. XXVIII. — M. monophyllos, Sw. — (Microstylis monophyllos, Lindl.) Malaxide à une feuille. — Cette espèce se distingue de la suivante par la feuille unique de sa tige et par les divisions internes du périgone qui sont linéaires au lieu d’être ovales-oblongues. Juin-août. Orchidée rare et intéressante, qui appartient à la flore des marécages et prairies humides de la région montagneuse de l’Europe centrale et septen- trionale. « Cette espèce, dit le Dr H. Christ1, est disséminée de la Scandinavie jusqu'aux Alpes, et ne croît jamais qu’en très petit nombre d’individus. La plante paraît en voie de disparition. » PI. XXIX. — M. paludosa, Sw. — (Ophrys paludosa, L.) Malaxide des marais. — Souche stolonifère, donnant naissance à des pseudo-bulbes d’un vert clair, ressemblant à ceux des Liparis , et émettant à leur tour 3 ou 4 feuilles elliptiques, petites, et une tige grêle, dressée, haute de 10 cm. au plus et portant une grappe de fleurs verdâtres, petites, à Libelle aigu, plus court que les divisions du périgone. Juillet-août. Plante rare, appartenant à la flore des marécages, dans les terrains siliceux de l’Europe centrale et septentrionale. Eu Suisse, où elle était signalée en plusieurs endroits autrefois, elle n’existe probablement plus, car sa dernière station connue, à Einsiedeln, était très menacée il y a une dizaine d’années. Gremli dit, dans sa Flore de la Suisse2 « Près d’Einsiedeln, mais s’y trouve-t-il encore ? » La Société suisse de Botanique s’était proposé d’acheter le sol, marécageux et incultivable, sur lequel croit cette rarissime espèce, mais les religieux de l’abbaye en demandèrent un prix tellement exagéré qu’il a fallu renoncer à cette patriotique intention. NEOTTIA, L. Genre très voisin des Listera, mais qui s’en distingue à première vue par sa tige brun clair, dépourvue de chlorophylle et par l’absence de feuilles. La fécondation s’y opère à peu près comme chez les Listera, et n’a lieu que grâce à l’intervention des insectes et à l’explo- sion du rostellum. Pl. XXX. — N. Nidus Avis, Rich. — (Epipactis Nidus Avis, Sw. , Helleborine Nidus Avis, Schmidt.) 1 La Flore de la Suisse et ses origines, p. 279. 2 Flore analytique de la Suisse, p. 487. DESCRIPTION DES ESPECES 75 Orchis nid d’oiseau. — Souche fasciculée, à fibres nombreuses et entrelacées, rappelant un peu par sa forme un nid d’oiseau : plante saprophyte entièrement brune, à tige robuste, droite, de 30-50 cm., garnie de gaines longues et appli- quées, et terminée par un épi de fleurs d'un brun clair et roux, à segments ovales, concaves, rabattus, à labelle allongé et étalé, bifide ; odeur désagréable. Mai-juin. Le Deutsche botanische Monatssckrift de juillet 1890 en mentionne une forme de couleur blanc pur, trouvée le 31 mai près de Freienwalde sur 1 Oder, par un M. Lindemuth. Le cas d’albinisme chez des saprophytes étant extrême- ment rare, le fait mérite d’être signalé. Cette plante, à l’aspect très étrange, d’un port curieux, de formes raides et de couleur terne, est fort intéressante. On la rencontre sous l’ombrage des forêts de conifères ou des bois épais, ce qui explique l’absence complète de chlorophylle dans ses tissus. Elle appartient à la flore de la région montagneuse et boisée de l’Europe. NIGRITELLA, Rich. Genre très voisin du Gymnaclenia dont il se distingue par un labelleentièreinent dressé et non retombant. Il diffère d’autre part du genre Orchis, dans lequel il était compris par Linné, en ce que ses disques visqueux sont nus et non réunis dans une bursicule. La fécondation s’opère par le moyen de très nombreuses es- pèces d’insectes 1 qu’attirent le parfum vanillé si délicieux pro- pre à ces plantes et leur couleur absolument tranchée. Ici nous retrouvons le cas, très rare chez les Orchidées, d’un labelle protecteur, qui, par suite de la contorsion de l’ovaire, se trouve placé au-dessus des organes de la fécondation. Le court éperon est rempli de miel et l’entrée qui conduit au nectaire est si étroite que la trompe de l’insecte entre nécessairement en con- tact avec, les deux disques visqueux qui sont nus, comme chez les Gymnaclenia. Ces organes se fixent à lui et il les emporte sur le stigmate d’autres fleurs. Pl. XXXI. — N. angustifolia, Rich. — (H;i benuria nigra, R. Br., Orchis nigra, Scop.) 1 Dans Alpenblumen. H. Muller donne la liste de 53 espèces différentes d’insectes qu’il a surpris sur les fleurs du N. angustifolia. 76 DESCRIPTION DES ESPECES Orchis Vanille, Brunetle. — Bulbes comprimés palmés; feuilles linéaires, étroites, dressées, canaliculées ; tige de 10-20 cm., terminé par un court épi, très dense et pyramidal ; fleurs petites d’un pourpre noirâtre ou d’un brun grenat foncé, à segments lancéolés-linéaires aigus, à labelle un peu plus long, ovale, entier, à éperon 4-6 fois plus court que l’ovaire. Répand un délicieux et pénétrant parfum de vanille. Mai-Juillet. Cette espèce a donné naissance à plusieurs hybrides par son croisement avec des orchidées voisines. Quelques-uns ont été décrits et sont Axés dans les manuels de botanique; on en cultive plusieurs, car ce sont en général de jolies plantes et d’une odeur fort agréable 1. Cette aimable plante appartient aux régions alpines et alpestres des Pyré- nées, Alpes, Apennins, Carpathes, Balkans, ainsi que des montagnes de la Scandinavie. PI. XXXII. — N. suaveolens, Koch. — (N. fragrans, Rchb.. Orchis suaveo- lens, Vill.) Nigrilelle à odeur suave. — Bulbes palmés; feuilles linéaires-lancéolées, moins étroites que celle du N. angustifolia; tige de 10-30 cm., portant un épi compact, d’abord pyramidal, puis ovoïde-oblong ; fleurs petites, très odorantes et d’un parfum plus délicat encore que chez le N. angustifolia ; à périgone pourpre, dressé, ouvert, à segments ovales-ellipliqués, obtus ou un peu aigus; éperon cylindrique, plus long que celui de l’anguslifolia et atteignant la moitié de l’ovaire. Juillet-août. Plante rare qui n’est certainement qu’un hybride ; elle appartient en propre à la chaîne des Alpes et s’y rencontre dans la zone alpestre, entre 1500 et 2700 mètres, parmi les lins gazons des pâturages. Celle qui nous a servi de modèle croît spontanément dans notre Jardin botanique de la Linnæa, à Bourg-St-Pierre. ' 0PHRYS, L. Les caractères principaux qui caractérisent les Ophrys et les distinguent des Orchis sont l’absence d’éperon, l’ovaire non contourné, le labelle épais, pubescent-velouté et le fait que les rétinacles des pollinies sont renfermés dans deux bursicules distinctes; colonne courte et anthère dressée. 1 Consulter : A. Kerner, Hybride Orchideen der Oesterreichisclien Flora in Verhandl. der Zool. bot. Gesell. Wien. XV ; et Schulze, Die Orchidaceen Deutsclilands. DESCRIPTION DES ESPECES 77 Moins brillants que les Orchis, les Ophrys n’en forment pas moins un des genres les plus dignes de notre attention, grâce à la singularité de leur labelle qui affecte généralement l’appa- rence d’insectes. Les segments extérieurs de la fleur, au nom- bre de trois, sont assez semblables entre eux et ordinairement très étalés, tandis que les deux internes sont plus petits et sou- vent veloutés comme le label le ; tielui-ci est dépourvu d’éperon, plus ou moins convexe, parfois muni de bosses à sa base, sou- vent terminé par un appendice glabre, recourbé en dessus ou en dessous. Le labelle des Ophrys est, en outre, généralement plus ou moins poilu ou velouté à sa lace supérieure et d’ordi- naire marqué de lignes ou de taches glabres dont la forme varie suivant l’espèce. Chez les Ophrys, les bulbes sont peu en- foncés dans le sol, à peine de 4 ou 5 cm., ce qui n’est pas le cas chez les Orchis. La synonymie des Ophrys est très compliquée; Pfitzer di- vise ce genre en trois sections qui sont : A. Musciferæ, à labelle allongé, trilobé, sans appendice terminal ; B. Fucifloræ, à labelle voûté, aplati sur les bords et muni d’une pointe terminale gla- bre ; C. Araniferæ, à labelle voûté et plissé sur les bords. Quelques espèces d’Ophrys sont soumises à l'autoféconda- tion, mais la plupart ne sont fertilisées que par le moyen des insectes. Darwin consacre à la fécondation des Ophrys l’un de ses chapitres les plus intéressants. Le but de mon livre étant surtout pratique, les détails très longs dans lesquels il faudrait entrer pour donner, ne fût-ce qu’un aperçu des différents mo- des cl e fertilisation des diverses espèces, ne me permettent pas de traiter le sujet à fond. Je renvoie donc le lecteur que ces phénomènes intéressent à l’excellent ouvrage de Darwin « La Fécondation des Orchidées, » déjà plusieurs fois cité et auquel sont empruntées un bon nombre de nos observations précéden- tes sur ce sujet. PI. XXXIII. — 0. apifera, Huds. — Ophrys Abeille. Bulbes entiers, subglobuleux; lige de 20-30 cm., portant un épi pauciflore : feuilles oblongues. d’un vert glaucescenl ; périgone à segments externes lancéo- lés, obtus, roses, nervés de vert, les internes ovales-triangulaires, courts et 78 DESCRIPTION DES ESPECES verdâtres, retroussés sur les bords ; labelle ovale, convexe, velouté, très régu- lièrement maculé de brun foncé et de vert jaunâtre, portant 5 lobes dont deux à la base, triangulaires et veloutés, relevés par une gibbosité et trpis terminaux qui sont glabres ; appendice recourbé en dessous. Mai-juillet. Cette espèce habite les collines sèches de l’Europe méridionale, orientale et centrale. PI. XXXIV. — 0. Arachnites, Murr. — (O. bombyliflora, Spreng., O. fuci- flora. Reich.) Ophrys Frelon. Bulbes subglobuleux ; tige de 20-30 cm. ; feuilles oblongues ; périgone à segments externes oblongs, obtus, d’un rose clair; labelle obovale, ample, très obtus, entier, convexe, velouté, d’un pourpre noirâtre, ou brun foncé, marqué à la base de stries et de points jaunâtres, terminé par un appendice glabre, vert jaunâtre et recourbé en dessous. Mai-juin. Cette espèce habite les prés et les collines sèches de l'Europe centrale, méridionale et orientale. PI. XXXV. — 0. aranifera, Huds. — Ophrys-Araignée. Bulbes subglobuleux; lige de 20-30 cm., portant un épi lâche; feuilles oblongues-lancéolées, d’un vert pâle ; périgone â segments externes oblongs, obtus, d'un jaune verdâtre, les internes oblongs lancéolés, jaune clair et parfois lavés de brun ; labelle ample, convexe, velouté, d’un brun noirâtre, jaunâtre sur les bords, marqué au centre d'une tache bilobée, lisse et luisante, entier ou faiblement échancré au sommet, dépourvu d’appendice. Mai-juin. Collines ensoleillées et sèches de la région inférieure et montagneuse dans 1 Europe centrale et méridionale ; plutôt sur le calcaire. PI. XXXVI. — 0. muscifera, Huds. — 10. myodes. Jacq., Orchis myodes, L.) Ophrys mouche. Bulbes subglobuleux ; tige grêle de 20-30 cm. ; feuilles oblongues-lancéo- lées, glaucescentes ; épi lâche et très allongé, portant 10-20 fleurs très distantes les unes des autres ; divisions externes du périgone oblongues-lancéolées, obtuses, verdâtres ; les deux internes filiformes, d'un peurpre noir, de même nature que le labelle et plus courtes que les externes ; labelle oblong, descen- dant, presque plan, d’un beau brun velouté noirâtre, marqué dans son centre d’une tache quadrangulaire d’un gris bleuâtre et glabre, divisé en trois lobes dont le médian est plus grand, oblong et échancré en deux lobules arrondis et courts. Le tout a la forme d’une petite mouche. Mai-juin. Cette plante qui n’est abondante nulle part, mais existe un peu partout en petites colonies, habite les collines calcaires de l’Europe centrale et méridio- nale. DESCRIPTION DES ESPECES 79 ORCHIS, L. Ce genre, le plus nombreux et le plus anciennement connu de la famille des Orchidées, enest aussi le plus important parmi les espèces qui nous occupent. 11 se distingue du genre Ophrvs par ses bursicules soudées en une seule, par la présence d’un éperon et par la contorsion de l'ovaire. Le genre Orcbis comprend des plantes à bulbes entiers ou divisés; à fleurs réunies en épis plus ou moins fournis ; à ovaire tordu ; à divisions périgonales externes généralement conni- ventes, plus rarement étalées, les internes le plus souvent un peu plus petites et entières; à labelle éperonné, ordinaire- ment trilobé, avec un lobe moyen entier ou plus fréquemment divisé; à rétinacles libres et renfermés dans une seule bursicule. Il y a près de cent espèces d’Orchis avec un nombre très grand de formes ou de variétés; c’est donc un groupe considérable et qui tient sa bonne place dans le monde des plantes. Pfitzer divise ce genre en deux sections, les Herorchis Lincll. à divisions externes du périgone conniventes en casque, et les Androi'chis Lindl. à divisions externes étalées ou réfléchies. La fécondation des Orchis ne peut avoir lieu sans le se- cours des insectes parce que leurs pollinies sont si bien enfer- mées dans les loges de l’anthère, qu elles ne peuvent sortir naturellement. Comme ici l’éperon ne contient pas de nectar dans sa « corne d'abondance » Darwin a cherché quel pouvait être l’appât offert aux insectes par ces fleurs qui paraissent trompeuses. Or, en examinant de près la chose, il a trouvé que cet éperon est formé d’une paroi double qui porte, dans ses flancs, la liqueur propre à attirer les indispensables petits auxi- liaires. Ceux-ci percent sans difliculté la cloison intérieure et les mouvements que l’insecte est ogligé de faire pour mener à bien son travail, provoquent l’expansion et la distribution des masses polliniques. Ce sont les bulbes d’orchis qui, séchés, donnent le célèbre Salep des pharmaciens (voir chap. I, page 1). 80 DESCRIPTION DES ESPECES PI. XXXVII. — 0. coriophora, L. — O. punaise. Bulbes entiers, ovales-globuleux ; feuilles lancéolées, aiguës, étroites ; épi oblong, court et dense ; bractées membraneuses, de la longueur de l’ovaire ; fleurs à odeur de punaise, à segments externes ovales, d'un pourpre brun, veinés de vert, connivents en casque aigu, les internes linéaires; labelle trilobé, d’un pour- pre livide, ponctué de rouge, à lobes latéraux de forme rhomboïdale, crénelés, le médian oblong, entier, dépassant les latéraux ; éperon conique, descendant, de moitié plus court que l’ovaire. Mai-juillet. I/Orchis coriophora, L. croît dans les prés humides de l’Europe centrale et méridionale. Il est plutôt rare et disséminé et, en Suisse, il n’est commun nulle part. PI. XXXVIII. — 0. fusca, Jacq. — (O. purpurea, Huds.) Orchis à casque brun. — Bulbes entiers, ovales, gros ; tige dressée, robuste, de 40-70 cm.; feuilles amples et oblongues ; épi conique-oblong, d’un brun très foncé avant la floraison ; bractées petites et membraneuses, 4-6 fois plus courtes que l’ovaire ; segments externes du périgone connivents, en casque, d’un brun foncé, les deux internes linéaires, très étroits, petits, d’un blanc rosé, tachetés ; labelle trilobé, blanc et pointillé de pourpre ; éperon cylindrique, courbé, des- cendant. Mai-juin. C’est la plus belle et la plus grande de nos espèces indigènes ; il croît dans les lieux ombragés de la région boisée de l’Europe centrale et méridionale, de l’Angleterre à la Grèce. PI. XXXIX. — 0. globosa, L. — O. globuleux. Bulbes petits, entiers ; tige de 40-60 cm. ; feuilles aiguës, glaucescentes, les inférieures lancéolées-oblongues, les supérieures plus étroites ; épi court et serré, hémisphérique ou en forme de cône ; bractées de la longueur de l’ovaire : péri- gone rose lilas, campanulé, à segments semblables entre eux ; labelle trilobé as- cendant, ponctué ; éperon grêle et arqué, descandanl, 2-3 fois plus court que l’ovaire. Juin-juillet. C’est, par excellence, Torchis de la région subalpine et alpine car il habile les pâturages au-dessus de la zone des forêts, entre 1200 et 2000 mètres dans les Alpes, le Jura, les Vosges, les montagnes de l’Auvergne, les Sudètes, le Harz, les Carpalhes, les Pyrénées, l’Apennin et les montagnes de 1 Europe orientale. PI. XL. — 0. incarnata, L. — O. incarnat. Bulbes aplatis, palmés; tige élevée et pleine (lîsluleuse chez son congénère très voisin l’O. latifolia) ; feuilles immaculées, dressées, lancéolées; épi dense, oblong-cylindrique ; bractées herbacées, dépassant les fleurs dans la partie in- férieure de l’épi ; fleurs d’un rose carné, à segments oblougs ; labelle trilobé, d’un rose maculé de pourpre ; éperon cylindrique-conique, plus court que l’ovaire. Mai-j uillet. Il se rencontre dans les prairies humides et les marécages de toute l’Europe. DESCRIPTION DES ESPECES 81 PI. XLI. — 0. latifolia, L. — O. à larges feuilles. Bulbes palmés; tige fistuleuse, de 30-40 cm. , feui liée jusqu’au sommet ; feuilles souvent maculées de brun noir, les inférieures oblongues-lancéolées, presque horizontales, les supérieures lancéolées ; épi oblong-cylindrique ; bractées tri- nervées, dépassant souvent les fleurs ; périgone d’un rose pourpre, à divisions externes ovales-lancéolées, les internes dressées et réfléchies ; labelle large, strié de pourpre plus ou moins foncé, à trois lobes peu profonds; éperon descendant, cylindro-conique, plus court que l’ovaire. Mai-juin. PI. XLII. — 0. laxiflora, Lam. — Orchis à fleurs lâches. Bulbes entiers, oblongs ; tige de 30-40 cm. ; feuilles lancéolées, étroites, canaliculées ; épi oblong, très lâche ; bractées de la longueur de l’ovaire ; fleurs d’un beau rose pourpre ; segments externes ovales-lancéolés, les internes oblongs ; labelle très large, à lobes latéraux, grands, le médian court et presque nul; épe- ron cylindrique, horizontal ou descendant, atteignant au moins la moitié de la longueur de l’ovaire. Mai-juin. Marais et prés humides de l’Europe centrale et méridionale. PI. XLIII. — 0. maculata, L. — O. à feuilles tachetées. Bulbes palmés ; tige grêle, de 40-60 cm. : feuilles ordinairement macu- lées d’un brun noirâtre, les inférieures oblongues-lancéolées, les supérieures étroites ; épi compact, d’abord conique, puis oblong à l’anthèse ; bractées infé- rieures dépassant l’ovaire ; fleurs d’un rose lilas, ou d’un lilas clair, ou encore d’un blanc pur, â segments lancéolés, étalés ; labelle large, veiné ou ponctué de pourpre foncé, â trois lobes dont le médian plus étroit que les latéraux ; éperon cylindrique descendant, plus court que l’ovaire. Mai-juillet. Celte espèce habite les bois et les lieux ombreux de l’Europe entière. PL XLIV. — 0. mascula, L. — O. mâle. Bulbes entiers; tige dressée, de teinte purpurine dans le haut, de 40-50 cm. : feuilles oblongues lancéolées; épi oblong et allongé, lâche: bractées pur- purines, à peu près de la longueur de l’ovaire ; fleurs pourpres, à segments externes ovales-lancéolés, les internes aigus et étalés, puis défléchis ; labelle large, ponctué de pourpre foncé, à trois lobes courts et larges, le médian échan- cré ; éperon cylindrique, horizontal ou relevé, de la longueur de l’ovaire. Mai- juin. Clairières des bois, haies, prairies ombragées ou fraîches de toute l’Europe. PI. XLV. — 0. militaris, L. — O. militaire. Bulbes entiers, gros et ovales ; lige de 40-50 cm. : feuilles largement oblon- gues ; épi ovoïde, puis oblong à l’anthèse ; bractées membraneuses, de 3-5 fois plus courtes que l’ovaire: segments du périgone rose clair à l’extérieur et ta- chetés de pourpre â l’intérieur, connivents en casque aigu, les externes ovales- lancéolés, acuminés, les internes linéaires ; labelle large, d’un beau pourpre foncé, trilobé; éperon courbé, obtus, descendant et atteignant la moitié de la longueur de l’ovaire. Mai-juin. 6 82 DESCRIPTION DES ESPECES Il diffère de 1 ’Orchis Simia surtout en ce que ses fleurs s’épanouissent de la base de l’épi au sommet tandis que chez celui-là la floraison a lieu en sens con- traire ; en outre, chez 1 ' O . Simia, le labelle est beaucoup plus finement divisé. L Orchis militaire habite les prés frais et humides de toute l'Europe. PL XLVI. — 0. Morio, L. — O. Bouffon. Bulbes entiers, presque ronds; lige de 10-30 cm. ; feuilles lancéolées, étroi- tes, ordinairement mucronées ; épi cylindrique, pauciflore, de longueur variable ; bractées membraneuses, purpurines, lancéolées-étroites, de la longueur de l’ovaire ; périgone d’un pourpre foncé, à segments externes obtus, veinés, conni- vents en casque, toujours de teinte plus foncée que le labelle, les internes de forme ovale, plus étroites et plus courtes que les externes ; labelle large, plus ou moins dentelé ou trilobé, obtus, moucheté au centre, à lobes latéraux crénelés, ordinairement réfléchis ; éperon cylindrique, obtus, ascendant ou horizontal, attei- gnant au moins la moitié de la longueur de l’ovaire. Avril-mai. Cette plante est polymorphe et se rencontre sous plusieurs formes ; quant au coloris de sa fleur, il varie entre le blanc pur, le blanc strié de vert (sur le casque), le rose plus ou moins clair et le pourpre le plus foncé. L’Orchis Bouffon abonde dans les prés argileux ou calcaires de toute l’Europe, PL XLV1I. — 0. pallens, L. — O. pâle. Bulbes ovales, entiers ; tige de 20-30 cm. ; feuilles larges et oblongues ; épi ovoïde, peu dense ; bractées de la longueur de l’ovaire ; fleurs d’un beau jaune soufre, à odeur de sureau ; segments externes ovales-oblongs, obtus, les internes réfléchis; labelle arrondi, faiblement trilobé; éperon cylindrique, horizontal ou ascendant, à peu près de la longueur de l’ovaire. Mai-juin. Cette belle orchidée est plutôt rare et ne se rencontre que dans les bois ou les taillis de la région montagneuse calcaire ; elle abonde dans certains massifs des Alpes dauphinoises mais elle est rare en Suisse ; on la retrouve dans quel- ques contrées de l’Allemagne et de l’Autriche, dans f Apennin, les Carpathes, les Balkans, enfin sur les montagnes de la Grèce et de l’Asie Mineure. Pl. XLVIII. — 0. palustris, Jacq. — O. des marais. Bulbes oblongs ou globuleux ; tige droite, de 30-40 cm. ; feuilles élroiles- lancéolées, canaliculées ; épi allongé, très lâche, portant 6-10 fleurs d’un beau rose vif ou purpurin ; bractées de la longueur de l’ovaire ou le dépassant ; seg- ments externes du périgone ovales-lancéolés, obtus, les latéraux réfléchis, les internes oblongs. obtus ; labelle cunéiforme, à base largement dilatée, trilobé, à lobes latéraux arrondis, le médian indivis ou échancré, égal aux latéraux ou les dépassant; éperon cylindrique et droit, horizontal ou descendant, de moitié plus court que l’ovaire. Juin-juillet. L’Orchis des marais croît dans les lieux tourbeux ou sablonneux humides de l’Europe centrale et méridionale. DESCRIPTION DES ESPECES 83 PI. XLIX. — 0. papilionacea, L. — O. papillon. Bulbes globuleux ; tige de 15-30 cm. ; feuilles coudes et lancéolées ; épi lâ- che et pauciflore, de forme ovale ; bractées membraneuses, lancéoléés-aiguës, dépassant l’ovaire ; fleurs grandes, d’un rose écarlate, à segments externes pur- purins, connivents, ovales-lancéolés, aigus, les internes plus étroits et plus courts; labelle grand, presque orbiculaire, entier ou denté; éperon pendant, plus court que l’ovaire. Avril-mai. Europe méridionale et orientale, sur les pentes sèches et ensoleillées. PI. L. — 0. sambucina, L. — O. sureau. Bulbes ordinairement bilobés ; tige de 10-20 cm.; feuilles inférieures lan- céolées-oblongues ; épi ovoïde, court et peu serré; bractées inférieures plus longues que les fleurs, qui en dépit du nom de l’espèce, sont inodores ; périgone jaune pâle, à segments externes étalés ou réfléchis ; labelle orbiculaire, crénelé sur les bords, faiblement ponctué de rose ; éperon cylindro-conique. descendant, égalant l’ovaire. Avril-juillet. Celte espèce habite les pâturages des régions montagneuses de l’Europe. PI. LI. — 0. Simia, Lam. — Orchis Singe. Bulbes entiers, ovales ; lige de 30-40 cm. ; feuilles oblongues ; épi ovoïde, compacte; fleurs s’épanouissant du sommet à la base de l’épi (chez l’O. militaris c’est le contraire qui a lieu) ; bractées membraneuses, 3-4 fois plus courtes que l’ovaire ; segments du périgone d’un blanc rosé, finement mouchetés de rose, con- nivenls en casque ovoïde, les externes ovales-lancéolés, les internes linéaires; tablier ponctué de taches roses pourpre, à quatres lobes linéaires étroits, pour- prés, assez semblables entre eux ; éperon cylindrique-obtus, échancré, descen- dant, atteignant la moitié de la longueur de l'ovaire. Mai-juin. L'Orehis singe habite les collines calcaires de la région montagneuse de l’Europe centrale et méridionale. PI. LU. — 0. Spitzelii, Saut. — Orchis de Spitzel. Bulbes entiers; tige de 20-25 cm. ; feuilles dressées, ovales-lancéolées ; épi pauciflore lâche, de forme conique; bractées élroites-laneéolées, de la longueur des fleurs et d'un vert brun ; segments du périgone connivents en casque, d’un pourpre foncé taché de vert; labelle grand, d’un beau rose pourpre vif, trilobé, à lobes latéraux plus ou moins incurvés ; éperon gros et cylindrique, dirigé en bas et un peu plus court que l’ovaire. Juin-juillet. Plante rare des Dolomites et des montagnes calcaires du Tyrol, entre 700 et 1600 mètres d’altitude. PI. LUI. — 0. tridentata, Scop. — (O. variegata, Jacq.) Orchis dentelé. Bulbes entiers, oblongs ; feuilles oblongucs-lancéolées ; épi dense et court ; bractées lancéolées membraneuses, égalant l’ovaire; divisions du périgone ovales-lancéolées, aiguës, eonniventes en casque, d’un rose purpurin ; labelle 84 DESCRIPTION DES ESPECES défléchi, d’un lilas rouge, trifide et lacinié, le médian bilobé ; éperon cylindrique, beaucoup plus court que l'ovaire. Février-Mai. Il habite les collines gazonnées de la région inférieure et montagneuse dans l’Europe centrale et méridionale. PI. LIV. — 0. ustulata, L. — Orchis brûlé. Bulbes entiers, petits, ovale-oblongs ; tige de 20-30 cm. ; feuilles oblongues- lancéolées ; épi oblong et cylindrique, noirâtre avant la floraison; bractées pur- purines, moins longues que l’ovaire ; fleurs petites, nombreuses ; segments du pé- rigone d’un pourpre foncé, connivents en casque, les externes ovales, les internes liuéaires-oblongs ; labelle blanc tout pointillé de pourpre brun trilobé, à lobe médian bifide ; éperon blanc, 3 ou 4 fois plus court que l’ovaire. Mai-juin. Cette jolie espèce habite les pentes sèches et gazonnées de toute l’Europe. PLATANTHERA, Rich. Ce genre diffère des Gymnadenia, dont il est très voisin, en ce que les loges de l’anthère sont séparées par une large membrane connective. Les pollinies sont inclinées en arrière et les disques visqueux, déjetés en avant sur la surface du stigmate, se font lace l’un à l’autre. La fertilisation se fait ici également par les insectes. Darwin s'étend longuement sur le remarquable système adopté par la Nature pour la ferti- lisation croisée des PI. bifolia et chlorantha et le Dr H. Muller dans ses Alpen-Blumen confirme ses observations. Enfin le botaniste américain Asa Gray, décrit1 la structure de dix espèces américaines du genre Platanthera. Les lecteurs que ces questions intéressent trouveront l’exposé de ces différentes observations dans les écrits de ces trois auteurs. PI. LV. — P. bifolia, Rchb. — (O. bifolia, L., Habenaria bifolia, R. Br., Sa- tyrium bifolium, Wahl.) Orchis Papillon. — Bulbes entiers; tige de 40-50 cm., anguleuse; feuilles inférieures au nombre de deux ou trois, oblongues et larges ; épi bâche et allongé; bractées inférieures atteignant la longueur de l’ovaire, les supérieures plus courtes ; fleurs très odorantes, à périgone blanc ou jaune verdâtre, à segments inégaux; labelle linéaire, entier, descendant; éperon filiforme-subulé, arqué, presque deux fois aussi long que l’ovaire. Juin-juillet. L’Orchis Papillon croît dans les bois, les taillis et les prés ombragés de toute l’Europe. 1 American journal of Science, vol. XXXIV, 1892 et vol. XXXVI, 1863. DESCRIPTION DES ESPECES 85 PI. LVI. — P. chlorantha, Cust. — |P. montana, Rchb. f., Orchis virescens, Gaud.) Orchis verdâtre. — Bulbes entiers; lige anguleuse, de 40-50 cm.; feuilles ovales, largement étalées ; épi allongé et lâche ; fleurs inodores, a périgone verdâtre, à segments externes plus larges que chez le P. bifolia, auquel du reste il ressemble beaucoup, les internes ovales-lancéolés, le supérieur ovale-trian- gulaire, cordiforme â la base (ovale-dressé chez le bifolia) ; labelle étroit, entier et descendant ; éperon long et plus renflé que celui du P. bifolia ; loges de 1 an- thère insensiblement divergentes du sommet â la base (parallèles chez le bifolia). Mai-juillet. Celte plante croît dans les lieux ombragés des régions calcaires monta- gneuses de l’Europe. SERAPIAS, L. Ce genre se distingue des Orchis en ce que les deux polli- nies sont reliées par un rétinacle commun (comme chez l’Ana- camptis) et un seul rostellum, et du genre Aceras, qui est dans ce cas, par le prolongement en forme cl’épêe , des loges de l’an- thère et par le lobe médian du labelle, qui est entier et très développé (étroit et bifide chez l’Aceras). Fleurs grandes, à divisions externes eonniventes en casque, les deux latérales un peu plus étroites et courtes, le plus souvent brusquement contractées en pointe sur une grande partie de leur longueur. Labelle dépourvu d’éperon, les lobes latéraux dressés et épais, formant, des deux côtés des organes de la fécondation, une paroi protectrice , le médian très grand, entier, pendant, en forme de langue aiguë et présentant une ou deux petites cal- losités à sa base, dont le but est de fournir un point d’appui aux insectes. L’acte de la fécondation étudié chez le S. cordigera par Moggridge est fort intéressant1. C’est l’abeille Caratina albi- labris qui en est chargée. PI. LVII. — S. longipetala, Poil. — Sérapie à lnbelle allongé. Bulbes ovales; tige élevée de 20-40 cm.; épi ovoïde portant 1-8 fleurs dis- tantes ; bractées oblongues-lancéolées, aiguës, purpurescentes ou d’un brun 1 Journal ofthe Linnean Society, vol. III, fiotany. 1865, p. 256. DESCRIPTION DES ESPECES 86 foncé, égalant on dépassant les fleurs ; périgone d'un pourpre clair, à divisions extérieures lancéolées-aiguës, les extérieures Ovales et brusquement contrac- tées sur un tiers de leur longueur; labelle trilobé, d’un rouge foncé, à lobe médian lancéolé et beaucoup plus long que large, tout recouvert de poils et muni de deux callosités à sa base. Avril-juin. Prairies de l’Europe méridionale. Ce genre comprend une quarantaine d’espèces, réparties dans les contrées tropicales, chaudes, tempérées et froides. Il est caractérisé par des fleurs petites et horizontales, un épi flo- ral contourné en spirale, par un rostellum plus ou moins allongé et une anthère dressée, à pollen granulé. Souche à 2-4 fibres radicales épaisses, napiformes. Darwin et Asa Gray ont publié les remarquables observa- tions qu’ils ont faites sur la fécondation des différents Spiran- thes. Prenons Vautumualis, par exemple, chez lequel l’étroite ouverture de la gorge semble empêcher toute fécondation par le moyen des insectes; mais, en regardant les choses tle plus près, voici ce qu’on trouve : Le rostellum est une lame saillante et aplatie, penchée au-dessus du stigmate dont elle semble dé- fendre l’accès, et abaissée en avant. Il est terminé par une sorte de bec ouvert ou de fourche, dans lequel est contenu le disque visqueux qui est en forme de nacelle. Celle-ci, dressée vertica- lement sur sa poupe, est pleine d’un fluide visqueux, laiteux, extrêmement adhésif, qui, exposé à l’air, durcit et se coagule au bout de quelques secondes. Le tout est, avant l’anthèse, re- couvert d’une membrane très fine, qui conserve le fluide vis- queux à l’abri de l’air. Cette membrane est extrêmement fra- gile et douée delà remarquable propriété de se fendre sur toute sa longueur sous le coup du plus léger attouchement, pendant qu’une gouttelette du fluide adhésif et laiteux exsude au dehors. Le disque se trouve alors tout à fait libre, mais retenu entre les deux parois du bec fourchu ; il s’attache immédiatement à l’objet qui a provoqué la rupture de la membrane extérieure (soie de porc, cheveu ou, à l’état naturel, la trompe d’un in- secte). Darwin, afin de s’assurer de la nécessité d’une interven- tion extérieure pour provoquer cette rupture, séquestra une fois sous un filet une plante dont aucune fleur n’était encore DESCRIPTION DES ESPECES 87 ouverte; or, alors même que cinq de ses fleurs restèrent épa- nouies pendant toute une semaine sous le filet, chez aucune la membrane recouvrant lerostellum ne se fendit, tandis que chez les fleurs laissées à l’air libre tous les rostellums étaient dé- couverts. L’anthère se trouve juste au-dessus du rostellum et, long- temps avant l’éclosion de sa fleur, ses loges s’ouvrent et laissent échapper les pollinies, qui s’abattent sur le dos du rostellum et sont ainsi, au moment de l’épanouissement, presque entière- ment libres. Elles sont reliées au disque visqueux par des fils qui sortent de la masse pollinique et se collent à cet organe. Tel est l’état des choses au moment où la fleur s’ouvre. Celle- ci est tubulaire ; son labelle est creusé d’un sillon et bordé d’une lèvre frangée, au bord de laquelle une abeille peut aisé- ment trouver un point d’appui. Le nectar s’amasse dans un petit réservoir placé juste au-dessous du stigmate et l’insecte ne peut l’atteindre qu’au moment de l’éclosion de la fleur; il doit se contenter d’abord des gouttelettes sécrétées dans les saillies globuleuses de la partie inférieure du labelle et qu’une merveilleuse organisation a établies là pour faciliter le premier acte de la fécondation croisée, celui de l’enlèvement des polli- nies. En effet, chez les Spiranthes, comme chez la plupart des plantes dont les fleurs sont disposées en épis, l’insecte com- mence sa visite par le bas de l’inflorescence et termine par le haut. Ici nous voyons l’abeille emporter d’abord les pollinies qui se fixent parallèlement à sa trompe, grâce au liquide vis- queux du disque en forme de nacelle dont il a été question plus haut, et féconder les vieilles fleurs parle pollen des jeunes. C'est pour cette raison que chez les vieilles fleurs le stig- mate est beaucoup plus visqueux que chez les jeunes. En mon- tant le long de l’épi, l’insecte ne trouve île pollen que dans ces dernières, dont la gorge est encore très étroitement serrée; puis il vole à un autre épi et recommence sa manœuvre ascen- dante. Il trouve alors les fleurs du bas, les plus anciennes, beaucoup plus largement ouvertes que celles du sommet de l’épi qu’il vient de quitter et peut, grâce à un mouvement très 88 DESCRIPTION DES ESPECES curieux d’écartement qui s’est produit entre le labelle et le ros- tellum, pénétrer jusqu’au grand réservoir nectarifère, ce qui amène le contact des pollinies qu’il porte sur sa trompe avec le stigmate, cet organe, comme nous l’avons noté, se trouvant placé sous le rostellum et juste au-dessus de ce réservoir. « De grand matin, » dit Darwin, « l’abeille va faire sa « ronde ; supposons qu’elle s’abatte au sommet de l’épi. Sûre- « ment elle dépouillera de leurs pollinies les fleurs supérieures, « les plus récemment écloses; mais ensuite, qu’elle visite la « fleur voisine dont le labelle, selon toute probabilité, ne sera « pas écarté de la colonne (car ce mouvement s’effectue lente- « ment et par degrés), et les masses polliniques seront souvent « balayées hors de sa trompe et perdues. La nature ne saurait « souffrir une telle prodigalité. L’abeille va d’abord à la fleur « la plus basse, puis s’élève en spirale le long de l’épi, ne fait « rien sur le premier épi qu’elle visite avant d'atteindre ses « fleurs supérieures, et enlève à ces dernières leurs pollinies; « puis elle vole sur une autre plante et, s'abattant sur les « fleurs les plus basses et les plus avancées, dans lesquelles, « grâce à la réflexion du labelle, elle trouve un large passage, « elle fait frapper ses pollinies contre la saillie du stigmate : si « maintenant le stigmate de la plus basse fleur a été déjà bien « fécondé, sa surface desséchée ne retient que peu ou point le « pollen; mais sur la fleur qui suit immédiatement celle-ci, le « stigmate étant visqueux, l’insecte dépose de large feuilles de « pollen. Puis, dès que l’abeille approche du sommet de l’épi, « elle fait une nouvelle moisson de pollinies fraîches; elle vole « alors sur les fleurs inférieures d’une autre plante et les fer- « tilise; tandis qu’elle fait sa ronde et augmente sa provision « de miel, sans cesse elle féconde de nouvelles fleurs et per- « pétue la race de notre spiranthe d’automne, qui, à son tour, « donnera du miel aux futures générations d’abeilles h » PI. LVIII. — S. æstivalis, Rich. — Spiranthe d’été. Fibres radicales fusiformes, allongées ; tige de 20-30 cm. ; feuilles étroites, dressées, les inférieures lancéolées, engainant la tige par leur base, les supé- 1 Fécondation des Orchidées, traduction française, p. 128. DESCRIPTION DES ESPECES 89 rieures linéaires et très réduites; épi grêle, étroit, tordu en spirale, pubescent ; Heurs blanches, très petites, rapprochées; labelle ovale, crénelé. Juillet-septembre. Marais et prés humides de l’Europe centrale et méridionale. PI. LIX. — S. autumnalis, Rich. — Spiranthe d’automne. Fibres radicales épaisses, ovoïdes-oblongues ; tige de 15-20 cm.; feuilles ovales, disposées en un ou deux fascicules, les caulinaires engainantes, à limbe lancéolé-acuminé, très court; épi tordu en spirale, étroit, grêle, pubescent-glan- duleux ; fleurs blanches, très petites, à labelle ovale et échancré. Août-octobre. Pâturages argileux et secs de l’Europe centrale et méridionale. PI. LX. — S. Romanzoffiana, Cham, Fibres radicales tubuleuses; feuilles étroites-lancéolées , nervées et entou- rant la hampe, persistant lors de la floraison, les supérieures se confondant avec les bractées qui sont glabres, larges et atteignant le tiers de la longueur du péri- gone ; fleurs assez grandes, d’un blanc pur, à parfum délicat, disposées sur trois rangs et à périgone recourbé, à divisions ramassées en un capuchon protecteur et proéminent; labelle en forme de langue, recourbé à son extrémité et crénelé sur ses bords, plus grand que chez les autres Spiranthes. Une des particularités de cette plante consiste en ce qu’elle forme ses bour- geons pour l’année suivante avant la disparition des feuilles de l’année, ce qui a fait supposer à quelques botanistes qu'il se formait des bulbilles à l’aisselle de quelques feuilles comme chez le Lilium hulbiferum. Elle fleurit en juillet-août. Cette plante est encore plus intéressante par sa rareté que curieuse par sa nature; son nom éveille même dans l’esprit des phytophiles une sympathie toute spéciale et fait naître un sentiment de mélancolie. C’est une espèce qui va s’étei- gnant et qui, en tous cas, n’existe plus dans la seule station européenne connue, une prairie autour de la baie de Bantry, près de Caslletovvn, au sud de l’Irlande. Nyman, dans son Conspectus (1878), l’indique encore en cet endroit, mais il n’est malheureusement que trop certain cpie la Spiranthe de Romanzow a disparu du territoire européen. D’aucuns prétendent qu’on la retrouvera un jour ou l’autre en Irlande et qu’il ne faut pas désespérer; espérons-le. Une note parue à son sujet dans notre Bulletin phytophile 1 et due au botaniste anglais Webbsler, l’auteur de « British Orchids, » craint que l’espèce ne soit éteinte avec cette station irlandaise. Il ajoute : « en 1844, M. Babinglon écrivait déjà qu’il appréhendait de voir cette espèce disparaître, et dans le Colin Clout’s Calender M. Grant Allen disait que l’ardeur des botanistes modernes finirait certainement par en détruire le dernier échantillon. Le Dr Asa Gray considérait ce Spiranthe comme une plante autrefois très répandue, ayant appartenu à l’antique végétation du continent qui, à une épo- que très reculée reliait l’Europe occidento-septentrionale à l’Amérique. Le fait est que cette espèce appartient à un groupe spécial dont on ne retrouve des repré- sentants que dans les parties occidentales de l’Amérique septentrionale. L’espèce 1 Bulletin de V Association pour la protection des plantes, V, 1887 , p. 24. 90 DESCRIPTION DES ESPECES dont nous regrettons si tort la disparition en Europe paraît exister encore au nord des Etats-Unis, et le Report of geological Exploration 1 l’indique dans les marais de l’Etat de New-York, les environs du Lac Supérieur, l’Amérique boréale jusque dans la presqu’île d’Alaska et sur les Humboldl Mountains entre 2000 et 2800 m. d’altitude. Cependant Lindley considérait la plante irlandaise comme différente de celle du continent américain, ce qui avait été primitivement admis par Bentham lui-même. » En assurant que le Sp. Romanzoffiana a disparu totalement de l'Europe, j’ai trop dit, car il existe encore dans un ou deux jardins botaniques anglais, entre autres dans celui de Glnsnevin près de Dublin. Il se rapproche du reste beaucoup du Sp. cernua que nous avons cultivé facilement au Jardin alpin de Genève. 1 Lire le Report of the Geological Exploration of tlie kOth Parallel. TABLE DES PLANCHES PI. I. — Aeeras anthropophora. » II. — Anacamptis pyramidalis. )) III. — Calypso borealis, Salisb. » IV. — Cephalanthera ensifolia. )) V. — » pallens. )) VI. — » rubra. » VII. — Chamæorchis alpina. » VIII. — Cœloglossum viride. )) IX. — Coraliorrhiza innata. » X. — Cypripedium calceolus. )) XI. — Epipactis atrorubens. » XII. — » 1 a t i f o I i a . » XIII. » micropliylla. » XIV. — » palustris. » XV. — » sessilit'olia. )) XVI. — Epipogon aphyllum. )) XVII. — Goodyera repens. » XVIII. — Gymnadenia albida. )) XIX. — » conopea. )) XX. » cucullata. » XXI. — » odoratissima. )) XXII. — Herminium monorchis. )> XXIII. — Himantoglossum hireinum » XXIV. — Limodorum abortivum. » XXV. — Liparis Lœselii. )) XXVI. — Listera cordata. » XXVII. » ovata. 92 PLANCHES PL XXVIII. — Malaxis monophyllos. )) XXIX. Vrÿ. )) paludosa. )) XXX. — Neottia nid us avis. )) XXXI. — Nigritella angustifolia. )) XXXII. )) suaveolens. )) XXXIII. — Ophrys a pi fera. )) XXXIV. — )) arachnites. )) XXXV. — )) a ra ni fera. )) XXXVI. — )) muscifera. )) XXXVII. — Orchis coriophora. V) XXXVIII. — )) fnsea. )) XXXIX. — )) globosa. )) XL. — » incarnata. )) XLI. — )) latifolia. )) XLll. — )) laxiflora. )) XLIII. H )) maculata. )) XLIV. — )) mascula. )) XLV. — )) militaris. )) XLVI. )) Morio. » XLVJl. — )) pallens. )) XLVI II. — ■ » palustris. )) XLIX. — )) papilionacea. )) L. — )) sambuci na. )) LI. — » Simia. )) LII. — tt Spitzelli. )) LUI. — )) tridentata. )) LIV. — )) ustulata. )) LV. — Platanthera bifolia. )) LVI. — )) chlorantha » LVII. Serapias longipetala. )) LVIII. — )) æstivalis. )) LIX. — )) autumnalis. » LX. — . )) Romanzoffiana. PI. I Acefas anthropophora, R. Br. Orchi.s Homme pendu. Man Orchid. Me use h en Ira gendes Olin ho en Europe ecntriilc et méridionale, dans les ga/.ons des pentes sèches et calcaires. Mai-juin. PI. II Anacamptis pyramidalis, Rich. Orchis pyramidal. Pyramidal Orchis. Pyramidenfùrmige Hundswurz. Europe centrale cl méridionale, dans les prairies, les pentes gazonnées et les clairières sèches et ensoleillées. Mai-juin. PI. III Calypso borealis, Salisb. Calypso. Calypso Europe septentrionale et boréale, dans les lieux marécageux, les tourbières et les sphaignes froides. Avril-mai. * ■Cl— WMj. PL IV Cephalanthera ensifolia, Rich. Céphalanthère à feuilles ensi formes. Narrow Cephalanthera . Schwert-Orant. Europe centrale, méridionale et orientale, dans les taillis et les lieux boisés de la région montagneuse. Juin-juillet. PL V Cephalanthera pallens, Rich. Céplialanllière à grandes fleurs White Ilelleborinc. Il eisser Kopfbeutel. Europe centrale, méridionale el orientale, dans les bois ombreux. J u i il- j uillet. PI VI Cephalanthera rubra, Rich. Céphalanthère rouge. Rothes Waldvôglein. Red Cephalanthera . Europe centrale, méridionale et orientale, surtout dans les bois de Pins et les pentes boisées sèches. Juin-juillet. PI. VII Chamæorchis alpina, Rich. Orc/tts t'a n.v-Orrlus . .iljnnr /'(t/sr-Orrlus . . ll/trnl urlr . Régions alpines el boréales de l’Europe , dans les gazons ras et les pentes ensoleillées. Juillet-août. PI. VIII Cœloglossum viride, Hartm. Orchis grenouille. Frog Orchis. (i rii ne Hohlzunge. hurope centrale et septentrionale, dans les gazons de la région montagneuse' Juin-juillet. PI. IX et Snurless Coralroot. Korallenwurz. septentrionale, dans les bois moussus et dans les vieux troncs de sapins. Juin-juillet. Coralline. Europe centrale PI. X Cypripedium Calceolus, L. Sabot de Vénus. Lady' s Slipper. Frauenschuh . Europe centrale et méridionale, dans les taillis de la région montagneuse. (Disséminé.) Avril-mai. PI. XI Epipactis atrorubens, Schulz. Epipactis pourpre. Darhred Epipactis. Dunkelrother Dingel. Régions boisées cl montagneuses de toute l’Europe. Mai-juin. PI. XII Epipactis latifolia, Ail. Ep!pttC,i‘ * *».,< Il ilde IVie.ssH’iirs. Régions boisées de toute l'Europe. Juin-juillet. PI. XIII Epipactis microphylla, Sw. Epipactis à petites feuilles. Smallleaved Epipactis. Kleinblcittriger Di n gel. Lui ope centrale et orientale, dans les bois à sol riche de la région montagneuse. Très disséminé. Juin-août. Epipactis palustris, Crantz. Epipactis des marais. Marsh Epipactis . Sumpf-Dingel. Europe centrale.' septentrionale et orientale, dans les marais. Juin-août. I * * PI. XV Epipactis sessilifolia, Peterm. Epipactis h feuilles sessiles. Stemlessleaved Epipactis. Violette r Dingel. Europe centrale dans les bois humides. Très disséminé. Juillet-septembre. PI. XVI Epipogium aphyllum, Sw. Epipogon . Leafless Epipogium. Bl a tt louer Widebbart. Europe centrale, septentrionale et orientale, dans les bois moussus et ombragés Juillet-août. PI. XVII Goodyera repens, R. Br. Godière rampante. Creeping Goodyera. Kriecliende Goodiera. Europe centrale et septentrionale, de l’Angleterre à la Mer Noire dans les bois des régions montagneuses. Juillet-août. Gymnadenia conopea, R. Br. Cvmnadène à Ion g éperon. Flagrant Orcliis. Mücken-Hùswurz. Régions boisées ou montagneuses de toute l’Europe, dans les sols lourds et humides. Juin-août. PL XX Gymnadenia cucullata, Rich. Gymnadène à capuchon Monkshood Orchis. Kapuzenfôrmige ffi'i s w urz. Europe orienlo-septentrionale, dans les Pins et les hois moussus. Juillet-août. PI. XXI Gymnadenia odoratissima, Rich. Gymnadène suave. Very f rageant Gymnadenia . II 'ohlrienhende II Os wurz. Pentes humides de la région boisée el montagneuse. Juin-juillet. 4 PL XXII Herminium Monorchis, R. Br. Orchis musc. Musk Orchis. Heubirle Régions montagneuses de toute l’Europe, de l’Italie à la zone arctique, dans les prairies fraîches. Juin-juillet. PI. XXIII Himantoglossum hircinum, Sprgl. Orchis l/ouc. l.izard Orchis. Hocks-Hiemenzunge . Europe centrale el méridionale, de l'Angleterre à la Grèce, sur les coteaux herbeux el chauds. Disséminé. Mai-juin. PI. XXIV f.imodore violet. f À inodore Orchis. Unecliter Dingel. Lut ope < eu Ira le cl orien I a le, dans les Lois de pins et les pentes légère ni eu t 1 toisées. Mai -juin. PL XXV /.i pu ri. s de l.vsel. Liparis Lœselii, Rich. /. u' sel s (ildiizlriftll . Twoleaecd t.ipa ris . Europe centrale el septentrionale, dans les marécages tourbeux. Juin-juillet . PL XXVI Listera cordata, R. Br. f.islère cordce. lleart -leured f.istera. flrrzbléittrigcs Zweiblatt. Europe centrale et septentrionale, dans les bois moussus de la région montagneuse. Juin-août. PI. XXVII Listera ovata, R. Br. I.istère ovale. Tway-Blade. E ihlatl rige.s Zweihlatt. \ 1 . Régions boisées de I Europe, d;uis les clairières el les prés Irais. Mai-juillet . I • PI. XXVIII Malaxis monophyllos, Sw. Malaxide à une feuille. One leafed Malaxis. Einblattriger Kleingriffel. Europe centrale et septentrionale, dans les sphaignes et les marécages. Juin-août. PL XXIX Malaxis paludosa, Sw. Malaxide des marais. Bog Malaxis. Sumpf W-'eich/craut. Europe centrale et septentrionale, dans les marécages siliceux Juillet-août. PI. XXX Neottia Nidus Avis, Rich. Orchis nid d'oiseau. Bird's nest Orchis. Geineine Nestwurz. Forêts rl arbres a feuilles caduques, dans les lieux très ombragés et les sols riches en humus, dans toute l’Europe. Mai-juin. PI. XXXI Nigritella angustifolia, Rich. Orchis vanillé. Vanille Orchis. Vanillen Blu me. / Régions alpines el alpestres de l’Europe, des Pyrénées à la Scandinavie. Mai-juillet . V PL XXXII Nigritella suaveolens, Koch. (Nigritella angiistii'olia X Gvmnadenia odoratissima.) Nigritelle suave. Suave alpine Orchis. Bastard Hôswurz. Prairies de la région alpine dans les Alpes, ici et là. Juillet-août. PI. XXXIII Ophrys apifera, Huds. Ophry, abeille. Ree 0rchig Bienentragende Ragwurz . Europe centrale, méridionale et orientale, dans les pentes sèches et gazonnées. Mai-juillet. PI. XXXIV Ophrys arachnites, Mun. Or dns Frelon. Hornet Orchis. Hu iii nielhhi tige Ragwurz. Europe centrale, méridionale et orientale, dans les prés secs et les pentes ensoleillées des collines gazonnées. Mai-juin. PI. XXXV Ophrys aranifera, Huds. Ophrys araignée. Spider Orchis. S p in lient rage n d e /ta g nui rz . Europe centrale et méridionale, de l'Angleterre à l’Orient, sur les collines uèrhes de la région inférieure et montagneuse. Mai-juin, PL XXXVI Ophrys muscifera, Huds. Orckis mouche. Fl y Orchis. FUegentragen.de Rttgwurz. Europe centrale et méridionale, de F Angleterre à l’Orient, sur les collines sèches et calcaires. Mai-juin. PI. XXXVII Orchis coriophora, L. Orchis punaise. ,iu„ 0rc/lis_ II (inzen-Kiuibenliaut . urope centrale et méridionale, de la Belgique à la Mer Noire, dans les prés marécageux : disséminé. Mai-juillet. PI. XXXVIII Orchis fusca, Jacq. Orchis à casque brun. Dark winged Orchis. P urpurrothes Knabenkraut. ope* centrale, de I Angleterre a 1 Orient, dans les tailhs et les clairières des régions montagneuses. Mai-juin. .v/^Or'V PI XXXIX Orchis globosa, L. Orchis globuleux. Globular spiked Orchis. K a gel form iges Ku a b cuira ut. Régions alpines et alpestres de l’Europe, dans les pâturages. Juin-juillet. Orchis incarnai . Orchis incarnata, L. Fl e isch far b iges Kn a ben Iraut. M arécages dans imite l’Europe. Mai-juillet. Marsh Orchis. PI. XLI Orchis latifolia, L. Orchis à larges feuilles. Broad leaved Orchis. Breitblattriges Knahenhraut. Marécages et tourbes dans toute l’Kurope. Mai-juin. PI. XLII Orchi.s à épis biches. Aoo.se Orchis. I.ückerhlütiges Knahcnkvaut. hurope centrale cl méridionale, dans les marécages et les prés humides. M ai -juin. PI. XLIII Orchis maculata, L. Orcliis tacheté. Spotted Orchis. Geflecktes Knahenkraut. Régions boisées el montagneuses de toute l’Europe. Mai-juillet. » PI. XLIV Orchis mascula, L. ürchis m ile. /ht rl v Orchis. M Orchis Simia, Lam. Orchis singe. Mnnkey Orchis. A ffen-Knabcnkraut . EurojSÇ co ni fille cl méridionale, suc los collines calcaires do la zone montagneuse Mai-juin. I 1 r r PI. LU Orchis Spitzelii, Saut. Or c his de Spizel. S/jizel’s Orchis. Spizel s knahenkraut. Dolomites el montagnes calcaires d Autriche, dans les prairies de la région montagneuse et sous-alpine. Juin-juillet PI. LUI % Orchis tridentata, Scop. Orehis dentelé. Toothed Orchis. Dre izrïli n iges Kn a ben kra u l . Lui- po centrale et méridionale, dans les pentes gazouuées de la région inférieure et montagneuse. Février-mai. PL LIV Orchis brûlé. Orchis ustulata, L. I)ark winged Orchis. Kleinbliitiges Knabenkraut. Pentes sèches et gazounées de l’Europe. Mai-juin. PL LVI Platanthera chloranta, Reich. Orchis verdâtre. (ireen Orchis. firiinlic li e Ku chu As h hune. Régions montagneuses calcaires de I Europe, dans les lieux boisés. Mai-juillet. PI. LVII Serapias longipetala, Poil. Sérapie à long lubelle. Longlabelled Serapias. Bàrtige Stendelwurz. Prairies de l’Europe méridionale. Avril -juin. PL LVIII | 1 i* ' Spiranthes æstivalis, Rich. Spiranthe d’été. Summer Spiranthes . Sommer- Wendelorchis. Europe centrale et. méridionale, dans les prés marécageux. Disséminé. Juillet-septembre. PI. LIX Spiranthes autumnalis, Rich. Spiranthe d'automne. Ladies tresses. Ilerbst- Il endrlorchis. l'.urope centrale cl méridionale, dans les pâturages argileux et secs. Août-octobre. PI. LX Spiranthes Romanzoffiania, Cham. Spiranthe d’Irlande. Irisk I.adies tresses. Romanzoffs Wendelorchis. Existait, autrefois dans les marécages du sud de l’Irlande. Elle en a, dit-on, disparu. 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