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I ;

FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS.

THÈSE

POUR

LE DOCTORAT EN MÉDECINE,

Présentée et soutenue le 28 août 1846,

Par Louis ARCHEÏS,

à Terville (Moselle).

I. Du traitement de la fièvre jaune.

II. Du traitement à employer contre les fractures compliquées de la jambe.

III. Delà terminaison et des fonctions du nerf naso-palatin. Existe-t-il un ganglion nerveux particulier, comme le veut Hippolyte Cloquet, dans le conduit palatin antérieur du canal incisif?

IV. Caractères généraux des animaux carnassiers; leur division en sous-ordres et en familles , et l’indication des espèces intéressantes à connaître pour le médecin.

Le Candidat répondra aux questions qui lui seront faites sur les diverses parties

de renseignement médical.

PARIS.

P.1GNOUX, IMPRIMEUR DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE, rue Monsieur-le-Prince, 29 bit.

1846. Arc.hen ,

1846

t

FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS.

Professeurs.

M. ORFILA, doyen. MM.

Anatomie DENONVILL1ERS.

Physiologie BÉRARD aîné.

Chimie médicale ORFILA.

Physique médicale GAVARRET

Histoire naturelle médicale RICHARD.

Pharmacie et chimie organique DUMAS.

Hygiène ROYER-COLLARD.

, (MARJOLIN.

Pathologie chirurgicale ÎgERDY aîné.

p .1 i .... (DUMÉRIL.

Anatomie pathologique CRUVEILH1ER.

Pathologie et thérapeutique générales ANDRAL.

Opérations et appareils BLANDIN.

Thérapeutique et matière médicale TROUSSEAU.

Médecine légale ADELON.

Accouchements , maladies des femmes en

couches et des enfants nouveau-nés Clinique médicale

Clinique chirurgicale

Clinique d’accoucheraeûts

, MOREAU, Examinateur.

I FOUQUIER.

CHOMF.L , Président. BOUILLAUD.

ROSTAN.

1ROUX.

J. CLOQUET.

VELPEAU.

Auguste BÉRARD.

P. DUBOIS.

MM. BARTH.

BEAU.

BÉCLARD.

BEHIER.

BURGUIÈRES.

CAZEAUX.

DUMÉRIL fils.

FAVRE.

L. FLEURY. J.-V. GERDY. GIRALDÈS. GOSSELIN.

Agrégés en exercice.

MM. GRISOLLE.

M A1SSIAT .

MARCHAL.

MARTINS.

M1ALHE.

MONNERET.

NÉLATON.

NONAT.

SEST1ER, Examinateur.

A. TARDIEU.

VOILLEMIER, Examinateur.

P»r délibération du 9 décembre 1798, l’École a arrêté que les opinions émises dans les lni seront présentées doivent être considérées comme propres à leurs auteurs, et quelle n donner aucune approbation ui improbation.

A LA MÉMOIRE

DE MON PÈRE ET DE MA MÈRE.

A MON FRÈRE.

A MA SOEUR ET A MON BEAU-FRÈRE

M. LOISEAU.

A M. GUÉRARD,

Professeur afrréRé , Préfet des Études à Sainte-Barbe.

L. ARCHEN.

A M. CHOMEL,

Professeur de Clinique médicale à la Faculté de Médecine de Paris, Médecin consultant du Roi ,

Médecin de l’Hôtel-Dieu,

Membre de l’Académie royale de Médecine,

Officier de la Légion d’honneur, etc.

Je le remercie des bonnes leçons que j’ai recueillies dans sa clinique,

à l’Hôtel-Dieu.

L. ARCHEN.

QUESTIONS

SUR

DIVERSES BRANCHES DES SCIENCES MÉDICALES.

Qui bene judicat bene curât. (Baglivi.)

I.

Du traitement de la fièvre jaune.

Pour parler d’une question aussi sérieuse et d’une aussi grande im- portance, il serait nécessaire d’avoir une expérience plus avancée que la mienne; il faudrait surtout avoir vu des faits dont la conclusion pratique se résumât nécessairement dans le mode de traitement adopté. Cette défiance naturelle à celui qui aborde un sujet sur lequel il ne possède que des données très-restreintes, a été encore augmentée chez moi par la lecture suivante, empruntée à une brochure du docteur Chervin : Examen des principes de l'administration en matière sani- taire, in-8°, 1827, à la page 3; ce savant praticien rapporte dans les termes suivants un extrait du discours que M. Hyde de Neuville pro- nonça le 2 juin 1826 à la Chambre des députés.

«Nous avons d’autant plus d’intérêt à examiner cette question {fièvre jaune) que voici un fait que je puis citer avec exactitude. Le docteur Lefort, homme très-instruit , a remporté, il y a plusieurs années, un prix, à Paris, pour avoir soutenu que la fièvre jaune était con- tagieuse. Quelque temps après, il quitta la France, et reçut un em- ploi à la Martinique. Eh bien! il vient de publier deux ouvrages

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et probablement il en publiera un troisième pour combattre l’erreur qu’il avait contribué à propager. Dans ces ouvrages, il déclare, comme le docteur Rush l’avait déclaré avant lui , qu’il n’a fait que répan- dre l’erreur en soutenant que la fièvre jaune était contagieuse.»

Il est naturel de penser que le traitement doit différer selon que la maladie est de nature contagieuse ou non contagieuse. La connais- sance de sa nature doit conduire par la ligne la plus courte à l’adop- tion des règles les plus convenables et les plus rationnelles pour le traitement.

Peu de maladies ont eu le privilège heureux ou malheureux de faire éclore une plus grande quantité de travaux; écrits de toute nature, brochures de tout format, rien ne semble manquer à la solution de l’important problème qui m’occupe. Du reste, quelles que soient la ten- dance et la divergence des nombreux auteurs qui ont étudié la fièvre jaune, ils se rencontrent toujours à poser ou que cette affection est contagieuse, ou qu’elle n’est pas contagieuse. Comme je l’ai déjà dit, il y aurait pour moi de la témérité à adopter une opinion contre la- quelle on verrait inscrites des autorités très-importantes, soit que je penche d’un côté, soit que je suive les opinions du camp opposé. C’est sous la forme d’un doute philosophique longtemps médité, que je continuerai de parler sur une matière qui m’est si étrangère.

Dans le livre d’Hippocrate sur les airs, les eaux et les lieux, on trouve des principes de thérapeutique générale dont on peut faire l’applica- tion dans les différentes contrées la fièvre jaune se déclare. L’in- terprétation de ces sages maximes a été faite d’une manière assez sa- vante par d’habiles praticiens, et elle nous permet de ne point les rap- peler ici pour augmenter l’étendue d’un travail dans lequel je suis tout à fait borné au rôle de narrateur.

La fièvre jaune, caractérisée par une altération profonde de la mu- queuse digestive (vomissements noirs), par une altération grave du sang (hémorrhagies diverses), par une perversion totale des principales fonctions de l’organisme, appartient à l’ordre des fièvres et Replace- rait dans un cadre nosologique avant les fièvres intermittentes et ré- mittentes des pays chauds et après les fièvres continues.

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. Tout en laissant de côté la question de la contagion, il est cependant permis par des analogies pratiques de comprendre toute l’importance qu’il faut accorder à l’infection, comme cause de fièvre jaune. Il est donc de première nécessité d’avoir égard à l’application la plus rigou- reuse des principes de l’hygiène, la ventilation, la désinfection , le transport des malades dans des localités plus salubres. L’usage des boissons est un des points sur lesquels l’attention du médecin doit être constamment éveillée.

Comme dans toutes les épidémies, on a pu voir, pour la fièvre jaune, proposer tour à tour les moyens les plus disparates, les agents théra- peutiques les plus opposés. Mais au milieu de celle divergence géné- rale, on peut cependant saisir quelques indications sur l’opportunité desquelles beaucoup de praticiens se trouvent d’acord. La saignée, ce moyen si fondamental dans le traitement de beaucoup de maladies graves, a été souvent employée. Mais il serait bien long de relater toutes les circonstances qui se rattachent à sa pratique. En effet, les uns veulent saigner, au début de la maladie, un plus ou moins grand nombre de fois dans les premiers jours; d’autres, au contraire, n’hé- sitent pas à conseiller d’ouvrir encore la veine à la période d’état, et même à une époque plus avancée de l’affection. Si l’on veut savoir comment il faut limiter la quantité de l’émission sanguine, on ren- contre encore des opinions qui sont loin d’être unanimes. Car, si les uns trouvent qu’il est important de faire de petites saignées, d’autres tirent le sang copieusement. Généralement, les saignées locales, soit par les sangsues, soit par les ventouses, sont peu en honneur.

Au début encore, on a pu constater, nonobstant l’enduit de la lan- gue, I acidité de l’haleine, et l’embarras des premières voies diges- tives, que l’administration d’un émétique, loin d’apaiser l’intensité des symptômes, leur avait au contraire prêté une nouvelle gravité. Cependant, on trouve des praticiens qui, restreignant toutes les res- sources de la thérapeutique à l’emploi des purgatifs salins, donnent ainsi à cette maladie une analogie thérapeutique avec la fièvre typhoïde, telle que la comprennent plusieurs médecins de mérite.

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Selon que tel ou tel autre appareil d’organes se trouveront plu» ou . moins compromis dans le désordre général de l’organisme, il sera nécessaire de donner à la curation des symptômes une part plus ou moins large. C est ainsi que, dans les cas de réaction nerveuse vive, plu- sieurs praticiens conseillent l’application de vésicatoires sur la tête, le long de la colonne vertébrale et à l’épigastre, lorsque l’irritabilité se trouve limitée à celte région.

Les boissons acides minérales ou végétales sont en général mal supportées; les amers, les délayants, rencontrent plus de tolérance.

Plus tard, lorsque la jaunisse , les vomissements réitérés et la pro- stration indiquent l’empreinte profonde que la fièvre a laissée sur le sujet , l’insuffisance de la thérapeutique se traduit par les résultats négatifs de la plupart des agents quelle nous offre. C’est alors que le rôle du médecin se borne utilement à l’étude des indications à l’aide desquelles il est possible d’arriver au relèvement des forces. Le quinquina, le musc, lecasloréuin, l’esprit de Mindererus, offrent de précieuses ressources. 11 est bon d’avoir aussi recours aux rubéfiants, aux vésicants et aux autres moyens révulsifs de l’irritabilité, et par suite provocateurs des forces vitales. Les crises, les mouvements na- turels de l’organisme , devront être surveillés. Le médecin pourrait quelquefois, avec circonspection, en favoriser la marche ou en dé- terminer l’issue.

' Dans tous les cas, c’est en étudiant le génie de l’épidémie, la con- stitution médicale, l’idiosyncrasie du sujet, la nature de ses affections antécédentes, l’action plus ou moins générale des agents thérapeu- tiques sur les autres malades, en se rappelant les préceptes géné- raux renfermés dans le traité des Airs , etc., qu’il sera possible de comprendre une question à laquelle la pratique de la médecine, sur plusieurs points du globe, est si vivement intéressée.

a

il.

Du traitement à employer contre les fractures compliquées de la jambe.

On dit qu’une fracture est compliquée, quand à la solution de con- tinuité de l’os se trouve jointe dès le principe ou se joint consécutive- ment une circonstance dépendante de la fracture qui lui imprime un caractère plus grave , et qui présente des indications curatives parti- culières. (Nélaton.)

D’après la manière dont était posée ma question , j’ai pu rester un instant indécis. Sous le nom de fracture de la jambe on désigne or- dinairement une solution de continuité qui atteint à la fois les deux os; et on réserve le nom de fracture du tibia ou du péroné à celle qui n’en affecte qu'un seul ; mais les principales complications se ratta- chant exclusivement à la fracture du tibia, et ces complications étant pour la plupart les mêmes, lorsque le tibia seul est fracturé et lorsque les deux os le sont en même temps, j’ai cru ne devoir pas exclure de mon sujet les fractures compliquées d’un seul des os de la jambe.

Les complications peuvent :

Ou accompagner la production de la fracture, être le résultat même de la cause fracturante; ce sont : la contusion , les plaies, les hémorrhagies, les lésions des nerfs, des muscles, l’existence d’une luxation concomitante, la communication du foyer de la fracture avec une surface articulaire, la présence de corps étrangers, l’obli- quité extrême des fragments, peut être même leur direction tout à fait longitudinale, enfin l’existence d’un grand nombre de fragments, leur issue à travers les téguments ;

Ou commencer immédiatement apres la fracture : contraction spasmodique des muscles ;

Ou enfin se développer plus ou moins longtemps après la pro-

1846. Archen. .

10

duction de la fracture; ce sont les phlyctènes, les eschares, la sépa- ration des esquilles secondaires, les phlegmons, les abcès, la gan- grène.

On peut encore ranger au nombre des complications certains phé- nomènes généraux qui dépendent directement de la fracture; tels sont : une réaction fébrile trop intense, le délire, le tétanos, l'infec- tion purulente.

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Enfin , je ne pense pas qu’on doive étudier comme une complica- tion l’état général du sujet avant la fracture; par exemple, les scro-

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fuies, le scorbut, le rachitisme, la diathèse cancéreuse, etc... Ces cir- constances, en effet, ne dépendent pas de la fracture, quoique la fracture puisse quelquefois en dépendre, et par conséquent, elles ne rentrent pas dans la défi .ition que j’ai adoptée.

De ces diverses complications, la plupart ne présentent à la jambe rien de spécial; mais quelques-unes y revêtent une forme particu- lière, et cela résulte de la disposition anatomique des parties. A la

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jambe, en effet, nous trouvons un os très gros dont le bord antérieur et la face interne sont immédiatement subjacenls à la peau ; les masses

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musculaires les plus considérables, les vaisseaux et les nerfs les plus importants, se trouvent au contraire situés en arrière. Il en résulte : que les causes fracturantes qui agissent en avant atteignent pres- que immédiatement l’os, ce qui rend compte de la fréquence des frac- tures et de la violence des contusions de la peau qui se trouve compri- mée sur le tibia; que la contraction des muscles du mollet doit tendre à faire saillir en avant les fragments osseux; que les vais- seaux et les nerfs principaux du membre seront le plus souvent épar- gnés par les fragments déplacés.

Décrire en détail toutes les complications et développer le traite- ment qu’elles réclament , œ serait évidemment sortir de mon sujet. Je ne ferai qu’énumérer la plupart de ces complications, qui ne présentent à la jambe aucune indication particulière , et je m’appesantirai principa- lement sur celles qui revêtent dans cette partie un caractère spécial.

11

5 1. Accidents qui accompagnent immédiatement la production des

fractures.

La contusion des parties molles n’est grave que lorsqu’elle est considérable.

Si elle est légère, limitée à la peau, on se borne à recouvrir la

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partie contuse de quelques compresses résolutives, et on applique l’appareil ordinaire des fractures ou même l’appareil inamovible; mais si cette contusion est plus profonde, plus étendue, il sera bon de pouvoir visiter souvent la. partie blessée, afin de surveiller les acci- dents; à cet effet on pourra employer le bandage de Scultet ou les procédés hyponartbéciques. Quant à la contusion elle-même, on la traitera comme foutes les contusions : applications résolutives, sai- gnées locales ou générales, irrigations continues, etc.

Les plaies sont le plus souvent irrégulières et contuses; elles peu -

vent être produites par la cause fracturante , et alors leur gravité varie

d’après leur étendue, leur profondeur, selon que les os sont ou non

dénudés; selon qu’elles communiquent ou non avec le foyer de la

fracture. Lorsqu’une communication existe, le cas est toujours grave;

je dois à M. Vauthier, interne des hôpitaux, une observation recueillie

à Beaujon dans le service de M. Robert. Il existait une fracture des ( * * ; , deux os de la jambe au tiers inférieur; à la partie interne du membre,

une plaie large, un peu oblique, produite par la chute d’une pièce de

bois, communiquait en plein avec le foyer de la fracture du tibia.

M. Robert employa les irrigations ( c’était au mois de juillet)' Il y eut

pendant quarante-huit heures une réaction violente , puis les accidents

se calmèrent ; la plaie prit un bon aspect , et commença à se refermer.

Au bout de douze jours, on supprima l’irrigation ; l’appareil de Scultet

lui fut substitué, et le malade sortit le cinquante et unième jour nar-

1 alternent guéri.

Des plaies plus graves encore sont celles qui résultent du déplace- ment des fragments osseux et qui leur livrent passage; j’y reviendrai à

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propos de l’issue des fragments. Toutes ces plaies, du reste, peuvent à leur tour présenter les complications ordinaires des plaies : érysi- pèle, tétanos, infection purulente, etc. etc.

Il est rare que les hémorrhagies qui accompagnent les fractures de la jambe compromettent immédiatement les jours du blessé. Le plus souvent il ne s’écoule au dehors , par les plaies , qu’une quantilé peu considérable de sang. Cependant on a vu des artères importantes, ouvertes par des esquilles osseuses, donner lieu à une infiltration san- guine de tout le membre; cela arrive surtout dans les fractures com- minulives par armes à feu. En pareil cas, les anciens ne connaissaient d’autre ressource que l’amputation. J.-L. Petit, le premier , ayant reconnu, il ne dit pas comment, que l’artère tibiale antérieure était ouverte par une esquille , pratiqua heureusement la ligature de cette artère. Boyer propose d’inciser en arrière toutes les parties molles du jarret jusqu’à l’artère, de chercher la source du sang et de lier le vaisseau au-dessus et au-dessous de son ouverture. Ce moyen serait incontestablement le plus sur, mais dans bien des cas, d n est guère praticable, caron ignore le siège précis de la lésion artérielle. Sait-on toujours, par exemple, si c’est l’artère poplitée qui est ouverte, ou si c’est le tronc tibio péronier, ou une division de ce tronc, ou même la tibiale antérieure près de son origine? La pratique de Dupuytren qui liait la fémorale à sa partie inférieure, ou la poplitée à sa partie supérieure, me semble plus convenable dans les cas douteux.

Il arrive quelquefois qu’une hémorrhagie peu considérable a lieu à l’insu du chirurgien autour dyt foyer de la fracture; les deux frag- ments baignent alors dans le sang, et tant que cet état dure la conso- lidation ne s’opère pas. M. Broca m’a communiqué une observation de ce genre qu’il a recueillie, l’année dernière , dans le service de M. Lau- gier, dont il était l’interne : il s’agit d’un ancien soldat de la vieille garde, qui fut transporté à l’hôpital pour une fracture, en apparence fort simple, des deux os de la jambe. On appliqua pendant huit jours l’appareil classique des fractures de jambe. Au bout de ce temps, on lui substitua l’appareil inamovible en papier; trois semaines après, on

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enleva ce dernier pour le renouveler. Le malade ne souffrait pas du tout; seulement la mobilité était extrême, plus considérable même que les premiers jours , parce que le gonflement et les rétractions musculaires avaient disparu. En examinant avec soin le siège de la fracture. M. Laugier reconnut au niveaudu bord interne du tibia une très-légère coloration bleuâtre de la peau, et une fluctuation mani- feste. Il pratiqua une incision qui livra passage à une quantité consi- dérable d’un sang très-noir parfaitement liquide, extravasé sans doute depuis le jour de l’accident. On plaça une petite mèche dans l’ouver- ture, et le membre fut enveloppé d’un bandage de Scullet; bientôt les parois de la collection sanguine donnèrent une suppuration abon- dante, qui nécessita deux pansements par jour; puis la quantité de pus commença à diminuer, et la plaie enfin se referma. A cette époque, deux mois après la chute, la consolidation n’était pas encore opérée et les fragments étaient encore très-mobiles l’un sur l’autre. L’appareil ordinaire fut alors appliqué , et au bout d’un mois le malade put sortir de l’hôpital avec une bande roulée autour de la jambe. Dans ce cas, la consolidation n’a commencé qu’après l’évacuation du sang extravasé dans le foyer de la fracture.

Les nerfs peuvent être plus ou moins atteints , contus, déchirés par des .esquilles osseuses ou par la cause fracturante. Les auteurs ne disent rien de particulier sur cet accident lorsqu’il siège à la jambe; il n’y réclame, du reste, aucune indication spéciale.

Il en est de même des contusions et des déchirures musculaires. Le muscle poplité et le soléaire en arrière, le jambier antérieur en avant sont ceux qui y sont le plus exposés. Quand les désordres sont graves, c’est une complication fâcheuse, car il se produit le plus souvent de vastes abcès et des suppurations fort longues. En pareil cas, la planchette hyponarthéeique présente de grands avantages , car elle permet de maintenir la fracturtf réduite , sans comprimer les parties blessées.

L’existence d’une luxation concomitante vient souvent compliquer les fractures de la jambe, surtout à sa partie inférieure. Alors les frag-

M

tnents osseux font fréquemment saillie au dehors, et j’en ai vu deux cas l’année dernière dans le service de M. Velpeau. Après avoir réduit la luxation, ce qui n’est pas toujours facile, on tiendra le membre immobile à l’aide d’un appareil quelconque. La planchette de Mayor dans les premiers jours, et l'appareil inamovible plus tard , quand le gonflement est dissipé et que les plaies, s’il y en a , sont cicatrisées, me semblent mériter la préférence.

La communication du foyer de la fracture avec une surface articu- laire , complication grave sans doute, mais dont on a peut-être exa- géré les dangers, se présente surtout au niveau de l’articulation tibio- tarsienne, dans les fractures des malléoles par exemple. Lorsqu’une autre complication existe, la guérison s’opère par les appareils or- naires presque aussi rapidement que dans les fractures simples. Il n’en est plus de même lorsqu’il y a en même temps plaie aux tégu- ments, et que l’articulation est ouverte, ou lorsque, le pied étant luxé, les pointes osseuses font saillie à travers la peau; alors on ne saurait être trop circonspect dans le traitement.

Après avoir opéré la réduction, on devra employer un appareil qui permette de surveiller constamment la plaie et d’appliquer des topi- ques convenables. Les bons résultats que j’ai vu obtenir chez M. Lau- gier, au moyen de l’irrigation continue , dans une luxation de I avant- bras avec issue de l’épicondyle, et ouverture de la cavité articulaire , me font penser, par analogie , que celte même irrigation devrait avoir de bons résultats dansle cas dont je viens de parler.

Des corps étrangers , tels que balles , débris de cartouche , por- tions de vêtement , etc., peuvent exister dans le foyer de la fracture ; il faudra les extraire, s’il est possible, avant de procéder à la réduc- tion. Cette extraction, du reste , ne présente à la jambe rien de par- ticulier.

Je passe à une complication plus fréquente, surtout à la jambe, que celles qui précèdent; je veux parler de l’existence d’un grand nombre de fragments. La position très-superficielle de l’os explique pourquoi les fractures coraminutives sont si communes dans cette ré-

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gion. Lorsque les fragments sont volumineux et peu nombreux, on peut espérer la guérison par les procédés or dinaires , surtout si le péroné restant sain, le tibia seul est fracturé. L’appareil inamovible peut être appliqué au bout d’une semaine et la consolidation s’opérer en cin- quante à soixante jours. Mais si les fragments sont petits et nombreux, et qu’en outre il existe des plaies aux téguments , le pronostic est beau- coup plus fâcheux. Le plus souvent il y a déformation considé- rable; un grand nombre d’esquilles, situées entre les principaux fragments , produisent autour d’eux une inflammation et une sup- puration qui nuisent à la consolidation. S’il n’y a pas de plaies aux téguments, on pratiquera l’extension continue par un procédé quelconque, ou même on se contentera du double plan incliné. C’est ici surtout qu’il devient essentiel de surveiller attentivement le siège de la fracture. Il se produira, le plus souvent des abcès qu’on se hâtera d’ouvrir; puis , à l’aide d’un stylet , on ira à la recher- che des esquilles, dont on pratiquera l’extraction , après avoir fait les incisions nécessaires. S’il y a plaie au niveau de la fracture , on fera d’emblée l’extraction de toutes les parties çsseuses détachées et flot- tantes, après quoi on procédera à la réduction et on placera le mem- bre sur la planchette. La réduction ici est souvent difficile, surtout si elle ne peut être tentée que quelques heures après l’accident. C’est sui tout alors «que la contraction spasmodique des muscles vient en- traver le chirurgien. Il faut souvent recourir à une forte saignée gé- nérale , à l’administration des narcotiques, employer plusieurs aides \igoun ux pour 1 extension et la contre-extension. Enhn , quelquefois ces moyens échouent pour obtenir une réduction parfaite; il faut né- cessairement alors recourir à des appareils analogues au glossocome de Galien, dans lesquels l’extension et la contre-extension sont pratiquées en même temps par le mouvement d’une manivelle située au-dessous du pied. Les appareils dont je parle ont encore l’avantage de laisser à découvert la partie blessée et de permettre l’application des topiques. rk' ““ ' 'e désordre des parties est extrême, que les os sont broyés rande étendue par l’action d’une roue, d’une machine , etc.,

Quand dans une gra

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on doit perdre tout espoir de conserver le membre. Je n’agiterai pas ici la question des amputations immédiates ou tardives.

10° Parlons maintenant d’une circonstance malheureusement très- fréquente de l’obliquité extrême de la surface fracturée. Depuis long- temps cette complication fait le désespoir des chirurgiens. Quoi qu’on puisse faire, il est quelquefois impossible de remédier au déplace- ment; la consolidation ne s’opère qu’avec la plus grande difficulté; et, quand elle s’opère, c’est presque toujours d’une manière vicieuse. Ces fâcheux résultats, communs à toutes les fractures obliques, ne sont nulle paît aussi marqués qu’à la jambe, ce que la théorie expli- que parfaitement.

Supposons , en effet , une fracture des deux os de la jambe, le pé- roné est fracturé à une hauteur quelconque, le tibia est fracturé très- obliquement de haut en bas et d’avant en arrière, de telle sorte que le fragment supérieur, qui est en même temps postérieur, présente un biseau aigu dont le tranchant est en bas, tandis que le fragment inférieur, inversement situé, présente un bec tranchant, antérieur et dirigé en haut. Je suppose aussi le cas le plus simple, c’est-à-dire que la force fracturante ait été épuisée sur la fracture, et n’ait produit aucun autre déplacement.

On sait que tous les muscles, dès que la fracture est produite, en- trent en contraction. Cette contraction est-elle purement tonique, ou vient-il s’y joindre aussi une action spasmodique due à* la violence de l’excitation? Peu importe; nous savons que leurs fibres tendent à se raccourcir, et cela nous suffit.

Les muscles gastrocnémiens et plantaire grêle attirent en haut le fragment inférieur; celui-ci peut glisser simplement sur la surface oblique du fragment supérieur, et c’est le cas le plus heureux. Alors la pointe du fragment inférieur vient se placer sous la peau , et la comprime de dedans en dehors; le membre est plus ou moins rac- courci; mais une extension suffisante fait toujours disparaître la dif- formité. Dans un cas de ce genre, l’extension continue pure et simple maintient en contact les surfaces fracturées.

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Malheureusement les choses ne se passent pas toujours ainsi. Il ar- rive le plus souvent que la surface de la cassure n’est pas parfaitement lisse. Alors, comme l’action des gastrocnémiens n’est pas parallèle à la fracture, qu’ell<*est au contraire oblique de bas en haut, et d’avant en arrière, tandis que la fracture présente une obliquité inverse; comme, en outre, le fragment supérieur, tiré en avant par les mus- cles rotuliens, est convenablement disposé pour résister à une pres- sion d’avant en arrière , voici ce qui se passe : le bec du fragment supérieur devient un point d’appui sur lequel bascule le fragment in- férieur, comme un levier du premier genre ; le point fixe de ce levier est 1 extrémité inférieure et postérieure de la surface fracturée; la puissance est appliquée au talon sur un bras de levier variable dans sa longueur. Quant à l’autre extrémité du levier (c’est-à-dire le bec du fragment inférieur), elle est portée en avant, s’écarte par conséquent de la partie correspondante du fragment supérieur, et vient soulever la peau avec une force d’autant plus grande que la fracture est située plus haut. Du reste, quel que soit le siège de la lésion, l’avantage est toujours pour la puissance; car le bras du levier de la résistance est représenté seulement par le grand diamètre de la fracture.

Ainsi donc, dans les fractures très-obliques du tibia, tantôt le dé- placement s opère presque exclusivement, suivant la longueur du membre, et tantôt suivant sa direction. J’ai déjà dit que, dans le pre- mier cas, l’extension continue suffisait pour ramener les surfaces au

contact; mais il est clair qu’elle devra échouer complètement dans le second.

L indication, en effet, n est pas d allonger le membre, qui n’est pomt raccourci , mais réellement fléchi. Il faut donc le ramener à sa irection primitive , et par conséquent porter, d’une part, le talon en avant, et, de l’autre, le bec du fragment inférieur en arrière.

Le résultat semble facile à obtenir en couchant le malade dans une position horizontale , en soulevant le talon à l’aide de coussins ou de compresses graduées , afin de rendre les deux surfaces de la fracture

3

parallèles l’une à l’autre, et en pratiquant l’extension continue pour empêcher le chevauchement. Mais une fois le fragment inférieur fixé et mis à l'abri de l’action des gastrocnémiens , un déplacement identi- que se produit de nouveau par un mécanisme inverse. Les muscles rotu- liens continuent à se contracter ; le fragment supérieurde l’os est tiré ne avant , et son bec ou extrémité inférieure rencontre le point qui tout à l’heure servait de point fixe, c’est-à-dire l’angle postéro-inférieur de la surface fracturée du fragment inférieur; celui-ci est lui-même sou- levé par un mouvement de bascule; cette fois, c’est un levier du se- cond genre. Le talon, appuyé sur le lit, est devenu le point fixe; la puissance est appliquée d’arrière en avant sur l’angle inférieur de la surface fracturée, et l’angle supérieur de cette même surface, c’est- à-dire le bec du fragment inférieur, s’écarte de la partie correspon- dante du fragment supérieur, et vient faire saillie sous la peau.

H ne suffit donc pas de repousser en avant l’extrémité inférieure du fragment inférieur, il faut encore, si l’on veut remédier au déplace- ment d’une manière complète, repousser en arrière l’extrémité supé- rieure de ce même fragment , et la repousser avec assez de force pour contre-balancer l’action puissante des muscles extenseurs de la jambe.

Cette double indication n’a pas été saisie par tous les chirurgiens. Pott, qui n’admettait d’autre cause de déplacement que le poids du membre et l’action des muscles jumeaux, était fort étonné de ne pou- voir remédier à la difformité par la seule position ; et plus récemment, M. Laugier, marchant sur les traces de M. Meynier, d Ocnans , a prati- qué la section sous-cutanée du tendon d’Achille sans pouvoir obtenir une réduction complète. Disons en passant que cette opération, si légère en apparence , devint le point de départ de plusieurs fusées pu- rulentes qui finirent par emporter le malade.- Ajoutons cependant que la même opération a eu un plein succès entre les mains de M. le pro- fesseur A. Bérard.

Déjà, du temps de Pott, un chirurgien qu’il cite, mais dont il ne nous a pas transmis le nom , avait tenté de comprimer d’avant en ar- rière sur le siège même de la fracture, à l’aide d’une machine ana- logue au tourniquet de J. Louis Petit. M. Mayor, de Lausanne, a aussi

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reconnu la nécessité de cette pression et l’a pratiquée avec des cra- vates et des compresses graduées. Dupuytren employait un bandage roulé avec des compresses graduées placées sur la fracture.

Mais d’abord , quoi qu’on fasse, on ne réussit jamais à obtenir la ré- duction complète. Quelle que soit la force employée dans l’extension et la cdntre-extension, quelle que soit la pression exercée directement d’avant en arrière sur le siège de la fracture , on ne peut jamais effa- cer entièrement la saillie du fragment inférieur. Espérait-on , par les appareils ordinaires , maintenir une réduction que les plus violents efforts ne peuvent opérer? Et quand même on y réussirait , pense-t-on que la peau puisse résister à cette pression considérable exercée sur le bec tranchant du fragment inférieur? Pott nous apprend que l’em- ploi du tourniquet produisit promptement une eschare; le bandage roulé de Dupuytren amena le même résultat dès le septième jour ; le tourniquet, appliqué dans le service du même professeur, déter- mina, en vingt-quatre heures, une gangrène superficielle ; les exem- ples de cet accident sont très-mullipliés, et je ri’ai pas besoin d’en citer d’autres.

Le chirurgien se trouve donc dans une position très-embarrassante : ou laisser subsister la difformité, et même courir la chance de ne point obtenir la consolidation ; ou bien , tout en ne remédiant au dé- placement que d’une manière incomplète, apporter lui-même une nou- velle complication à une fracture déjà si rebelle. En pareil cas, il est permis de recourir aux moyens extrêmes; aussi ne peut on que louer M. Malgaigne pour ses hardies tentatives, que le succès du rote a pleinement couronnées. Ce chirurgien distingué, après avoir épuisé inutilement pendant vingt-trois jours tous les moyens connus pour réduire une fracture très-oblique du tibia; après avoir été obligé de renoncera la moulure en plâtre, qui menaçait de sphaeéler la peau au niveau des saillies osseuses, finit enfin par imaginer un a p pare 1 semblable au tourniquet de J.-L Petit, dans lequel la pelote serait remplacée par une vrs terminée en pointe. Après avoir solidement fixé le pied et la jambe dans une gouttière , il tourna la vis jusqu’à ce que,

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pénétrant à travers les téguments, elle vînt s’implanter dans le frag- ment inférieur, très-près de son extrémité supérieure. Alors , pour la première fois, la réduction fut possible ; la puissance énorme de la vis fut suffisante pour contre-balancer et au delà l’action musculaire, et les fragments restèrent en contact. Chose remarquable, la présence de celte vis implantée dans l’os ne produisit aucun accident' quelcon- que; il n’y eut même pas la moindre trace de suppuration. Vingt jours après l’application de l’appareil , le malade, qui était aliéné, retira la vis ; le déplacement ne s’élant pas reproduit , on se contenta de l’ap- pareil ordinaire, et au bout de vingt jours encore, la consolidation fut complète, il n’y avait aucun raccourcissement (1).

Deux ans après , M. Malgaigne eut encore recours au même appa- reil, pendant son intérim à l’hôpital des Cliniques, j’ai eu occa- sion de voir son malade et de m’assurer par mes propres yeux de l’in- nocuité de la vis.

Enfin , depuis cette époque, le même appareil a été appliqué par le même chirurgien six fois à l’hôpital Saint-Antoine (2), cinq fois à Saint- Louis , et une fois en ville: il y a eu deux cas de mort; mais les com- plications, dans ces deux cas , étaient telles que l’amputation immé- diate avait été proposée par M. Malgaigne lui-même. Ce n’est qu après le refus des malades que le tourniquet à vis avait été employé en déses- poir de cause (3).

Ainsi, je pense que les faits sont aujourd’hui assez nombreux pour autoriser la conclusion suivante : dans les cas tous les autres moyens ont échoué pour obtenir et maintenir la réduction des fractures très- obliques de la jambe, le tourniquet à pointe offre une ressource pré- cieuse. Cet appareil doit être considéré comme une véritable conquête de la chirurgie moderne.

(1) Journal Je chirurgie , t. 1er, p. 289, septembre 1843.

(2) Davasse, des Fractures obliques de la jambe ( Archives générales , juillet 1W6).

(3) Journal de chirurgie, t. 4, p. 2U7.

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J’ai supposé jusqu’ici que la fracture était oblique de haut en bas, et d’avant en arrière. La tendance au déplacement est plus facile à combattre quand l’obliquité est dirigée en sens contraire. Le fragment inférieur tend à remonter derrière le supérieur, et celui-ci, tiré en avant par les extenseurs de la jambe, vient soulever la peau. L’appa- reil à pointe remédierait certainement à la déformation ; mais on peut , et, par conséquent, on doit s’en passer. En effet, le fragment supérieur, offrant une surface assez considérable, peut être repoussé directe- ment en arrière à l’aide de compresses soutenues par des cravates, des tours de bande, en un mot, à l’aide des appareils ordinaires. En combinant ces moyens avec l’extension qui s’oppose au déplacement longitudinal, on pourra toujours mener à bien ces sortes de fractures. La pression se trouvant répartie sur une large surface, on n’aura pas lieu de craindre la production des eschares à la peau.

J’ai cru devoir m’étendre sur cette partie de mon sujet plus que sur les autres, à cause de son importance d’adord , ensuite et surtout parce que cette complication revêt à la jambe une forme toute spéciale.

L’issue des fragments est un accident très-commun dans les frac-

tures de jambe, surtout quand leur direction est très-oblique. Le tran- chant du biseau perfore la peau, se fait jour à l’extérieur, et fait, dans certains cas, une saillie tellement considérable qu’on l’a vu, dans une chute sur les pieds, descendre jusque sur le sol et s’y enfoncer. Il est urgent de praliquerla réduction le plus tôt possible; si l’on attendait, l’os, exposé à l’action de l’air, ne tarderait pas à se nécroser. Cette ré- duction n’est pas toujours facile. La plaie des téguments peut être très- étroite, revenir promptement sur elle-même, embrasser les inégalités du fragment qui fait issue.On doit alors, sans hésiter, faire les débridements necessaires; les contractions des muscles, surtout des gastroenémiens, sont un obstacle de plus, obstacle d’autant plus grand que le membre est plus dévié de sa direction primitive J’ai déjà parlé et je parlerai en- core des moyens d’y remédier. Enfin, lorsque la lésion date de plu- sieurs jours ou lorsque la réduction est impossible, il faut se décider à praliquerla résection des extrémités saillantes. La réduction s’opère

alors sans difficulté et on place le membre dans une position conve- nable. La planchette de Mayor, qu’elle soit ou non suspendue , me semble ici mériter la préférence ; elle offre tous les avantages de la boite de J.-L. Petit, et présente, en outre, celui d’étre beaucoup plus simple. On pourra employer en même temps l’irrigation continue.

J’ai vu, l’année dernière, M. le professeur Velpeau pratiquer deux fois la résection dont je viens de parler pour une fracture des deux os de la jambe à leur extrémité inférieure, avec issue des fragments et luxa- tion du pied en dedans ; l’un des malades succomba à une infection purulente, l’autre guérit. La plaie mit près de deux mois à se cicatri- ser. On employa alors l’appareil dextriné, et la femme sortit au bout d’un mois avec une claudication due principalement à une anky- losé de l’articulation du pied.

§ U. Accidents qui commencent aussitôt après la production de la

fracture.

Je n’ajouterai que peu de mots à ce que j ai déjà dit sur les contrac- tions spasmodiques des muscles . C’est une des principales. causes des dé- placements consécutifs, un des plus grands obstacles à ia réduction et à la consolidation régulière des fractures. Pour les combattre, on a proposé les saignées générales et l’emploi des narcotiques; mais ces moyens ne réussissent pas toujours. M. Meynier, d’Ornans, a propose le premier la section sous-cutanée du tendon d Achille ; et , quoique cette opération n’ait pas réussi à M. Laugier, le succès obtenu par M. A. Bé- rard me porte à croire qu’il ne faut pas se priver de cette ressource.

g [J1 Accidents qui se développent plus ou moins longtemps après la

production de la fracture.

Les phlyctènes sont une complication trop peu grave pour que je doive m’y arrêter longtemps ; quelquefois elles précédent l’appari- tion de la gangrène, mais leur importance disparaît alors en presence

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de cct accident funeste. Du reste, elles n’offrent à la jambe rien de particulier. On se contente de les percer avec des ciseaux sans enle- ver le pellicule pour éviter la douleur, et de les recouvrir d’un linge enduit de cérat; lorsqu’elles sont seules , elles n’empêchent pas l’ap- plication de l’appareil ordinaire.

Les eschares sont fréquentes dans les fractures de jambes; elles peuvent résulter de l’attrition produite sur la peau par la force con- tondante dans les fractures par cause directe, ou de la pression exer- cée de dedans en dehors, sur le tégument externe, par les fragments déplacés; ou enfin de la compression qu’opèrent sur les saillies osseuses les pièces de l’appareil. Dans le premier cas et dans le troisième, les eschares, à leur chute, peuvent laisser des plaies simples, mais, dans le deuxième, la perle de substance communique toujours avec le foyer de la fracture, ce qui en rend la guérison plus longue, plus difficile. Le membre sera tenu immobile sur la planchette ou dans un bandage de Scultet et on visitera la plaie au moins une fois par jour.

La dénudation des os et le décollement du périoste donnent lieu à la séparation des esquilles secondaires. Ces esquilles sortent par la plaie, quand celle-ci n’est pas encore cicatrisée; mais si le contraire a lieu, elles produisent de petits abcès qui s’ouvrent d’eux-mèmes et dont l’ouverture reste fistuleuse : on les reconnaît à l’aide d’un stylet , et on les extrait, sans difficulté, après avoir débridé, si cela est né- cessaire. Une esquille peut rester emprisonnée dans le cal; cela ne change en rien le traitement, et cette esquille finit tôt ou tard par être éliminée à son tour.

4" La violente contusion des tissus intérieurs par les fragments dé- placés, ou par la cause fracturante, produit souvent une inflammation plus ou moins étendue. Le membre se tuméfie, et les tissus comprimés par l’aponévrose jambière peuvent finir par se mortifier. Ce n’est pas cependant la cause unique de la gangrène; un fragment d’os , un pro- jectile peuvent contondre, froisser l’artère principale du membre sans l’ouvrir; le vaisseau s’oblitère et le sphacèle se produit.

Quoi qu’il en soif, dans cesphlegmasies générales du membre, on em-

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ploiera les anliphlogistes les plus puissants; saignées locales ou géné- rales, larges cataplasmes sur tout le membre, diète absolue, rien ne sera négligé. Si la tuméfaction devient très-considérable, et qu’on juge que les parties profondes se trouvent trop fortement compr i- mées par l’aponévrose, on pratiquera, sans hésiter, de larges dé- bridements. Enfin, quand, malgré tous ces moyens, la gangrène se produit, l’amputation devient la seule ressource.

Le plus souvent ces phlegmons profonds se terminent par suppura- tion. Dès que la fluctuation est manifeste, il faut donner issue au pus ; car le contact de ce liquide exercerait une influence fâcheuse sur la consolidation.

Telles sont les principales complications des fractures de jambe ; on le voit, il est bien difficile de donner des préceptes généraux applica- bles à tous les cas ; les accidents sont si variables et dans leur nature et surtout dans leur gravité, que certaines questions ne pourront être décidées qu’au lit même du malade. C’est ainsi, par exemple, que dans les délabrements considérables de la région qui nous occupe , l’état général du blessé , les circonstances extérieures dans lesquelles il se trouve, indiquent seuls au chirurgien s’il est permis de tenter la guérison , ou s’il faut recourir promptement à la ressource extrême , l’amputation.

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III.

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De la terminaison et des fonctions du nerf naso-palaiin. Exisle-t-H un ganglion nerveuse particulier, comme le veut Hippolyte Cloquet, dans le conduit palatin antérieur du canal incisif?

Le nerf sphéno-palatin interne, nerf de la cloison ( nervus naso- palalinus), fut découvert par Cotugno, et décrit le premier par Scarpa sous le nom de nerf naso-palatin. Il naît du ganglion de Meckel, pé- nètre avec les sphéno- palatins externes dans le trou sphéno palatin, se recourbe au devant du sinus sphénoïdal, gagne ainsi la cloison des fosses nasales. Dirigé d’abord presque verticalement en bas, il se porte ensuite presque horizontalement d’arrière en avant jusqu’au ni- veau de l’orifice supérieur du canal palatin antérieur, il s’engage, pénètre dans un conduit qui lui est propre et bien distinct du canal palatin antérieur (Hippolyte Cloquet prétend que celui du côté droit se prolonge un peu plus en avant que le gauche pour rencontrer l’o- rifice qui doit le recevoir); il s’adosse bientôt dans la portion uni- fide de ce canal à son congénère, et enfin se termine par des filaments nombreux et déliés dans la muqueuse palatine, derrière les dents in- cisives supérieures.

D’après Hip. Cloquet, les deux nerfs naso-palatins étant parvenus au milieu du canal palatin antérieur, sortiraient de leur conduit par- ticulier pour venir se terminer aux angles supérieurs d’un ganglion qu’il appelle naso-palatin sans arriver jusqu’à la bouche.

Le nerf naso-palatin fournit-il quelques filets à la pituitaire sur la cloison ? Scarpa dit formellement que pendant son trajet dans les fosses nasales, le naso-palatin ne fournit aucun filet: nullo sepli membranœ dato surcu/o ad pulatum procedit (I oc. cit.. p. 76). Wrisberg prétend en

1846. Archtn.

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avoir suivi sur cerîains sujets jusque dans le tissu papillaire de la mu- queuse nasale.

Arnold a fait représenter sept ramuscules dérivés du naso-palatin , et se distribuant à la pituitaire qui revêt la partie supérieure et pos- térieure de la cloison.

Ai. Longet a pu en compter jusqu’à cinq, mais souvent il n’a vu qu’une simple bifurcation qui disparaissait par le rapprochement ul- térieur des deux filets qui l’avaient constitué.

M. Oruveilhier a vu trois fois un filet de la partie antérieure du nerf se porter de bas en haut.

Fonction Pour connaître le rôle physiologique que joue le naso- paiatin, nous allons procéder par voie d’exclusion. D’abord il ne peut être un nerf de mouvement, puisque l’anatomie nous apprend qu il ne se distribue à aucun muscle; ce n’est pas non plus un nerf de sen- sation spéciale: car en admettant, contrairement aux observations et aux expériences, qu’il y eût un nerf spécial dégustation, ne pourrait il remplir ces fonctions, puisque MM. Guyot , Admirault, Vernière et Longet ont démontré que la muqueuse palatine placée derrière les dents incisives n’est pas susceptible de percevoir les saveurs. Nous en conclurons donc que le naso palatin est un nerf de sensibilité géné- rale et que sa section doit paralyser le sentiment de la partie il se distribue.

D’après Hip. Cloquet , les deux sphéno-palatins internes viendraient dans le canal palatin antérieur se terminer aux angles supérieurs d’un ganglion qu’il appelle naso-palatin : Ce ganglion, dit-il, est une pe- tite masse rougeâtre, fongueuse, un peu dure, comme fibro-carlila- gineuse, et plongée dans un tissu cellulaire graisseux (Longet). Plu- sieurs anatomistes, et surtout MM. Cruveilhier et Longet, nient com- plètement l’existence de ce ganglion.

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IV.

Caractères généraux des animaux carnassiers ; leur division en sous- ordres et en familles , et i indication des espèces intéressantes à con- naître pour le médecin.

Les carnassiers constituent le quatrième ordre de la classe des mam- mifères. Ils diffèrent des bimanes et des quadrumanes par l’absence des mains; des rongeurs et des édentés par leur dentition complète, q’est- à-dire composée de trois espèces de dents , incisives, canines et mo- laires; des marsupiaux, en ce qu’ils naissent avec un développement plus complet et que les femelles ne présentent point au devant des or- ganes de la génération une sorte de poche dans laquelle les petits viennent se réfugier longtemps après leur naissance; ils diffèrent dos pachydermes et des ruminants en ce que leurs membres se termi- nent par des doigts libres; enfin ils se distinguent des cétacés par le nombre de leurs membres qui est de quatre, tandis que ces derniers n’en ont que deux, conformés pour la natation.

Les carnassiers se nourrissent plus ou moins exclusivement de ma- tières animales; leurs dents molaires sont plus ou moins tranchantes et leur canal alimentaire moins long que les animaux qui, comme les ruminants et les pachydermes, tirent leurs aliments du règne végétal. Les muscles qui servent à rapprocher les mâchoires ( masseters et temporaux) sont très-volumineux et donnent à leur tète plus de lar- geur; les mâchoires elles-mêmes sont très-courtes. L’articulation de la mâchoire est transversale, elle ne lui permet pas d’exécuter des mou- vements latéraux, comme cela s’observe dans les ruminants et les pa- chydermes, ni des mouvements d’avant en arrière, comme dans l’ordre des rongeurs. Ce genre d articulation ne lui permet que des mouve- ments d élévation et d’abaissement.

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L’ordre des carnassiers a été divisé en trois sous-ordres, en raison des différences que présentent la terminaison des membres et la con- figuration des dents. Ces trois sous-ordres sont :

Les chéiroptères ,

Iæs insectivores ,

Les carnivores.

Premier sous-ordre.

Les chéiroptères sont caractérisés par un repli de la peau, qui, pre- nant naissance sur les parties latérales du cou, s'étend entre les quatre membres et les doigts des membres thoraciques.

Les chéiroptères forment deux familles , les galéopithèques et les

chauves souris.

Deuxième sous-ordre.

Les insectivores sont différents des autres par la couronne de leurs dents molaires, qui sont hérissées de pointes coniques; leurs mamelles sont placées sous le ventre.

Us passent l’hiver en léthargie, vivent dans les souterrains et se

nourrissent d’insectes.

Les principaux genres sont :

Les hérissons;

Les musaraignes;

Les taupes.

Troisième sous-ordre.

Les carnivores ont six incisives à chaque mâchoire; leurs canines sont également très-longues et très-fortes; leurs molaires sont ou entière- ment tranchantes ou en partie tranchante» et en parue tuberculeuses.

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Les animaux qui appartiennent à ce sous-ordre sont remarquables par la Hnesse de leur odorat et par leur appétit sanguinaire.

On les a divisés en trois familles :

Les plantigrades.

Les digitigrades ,

Les amphibies.

Plantigrades.

Ils s’appuient dans la marche sur la* plante entière du pied. Les plantigrades comprennent deux genres: les ours et les blaireaux.

Digitigrades.

Ils ont les os du tarse relevés pendant la marche et ne s’appuient sur le sol que par l’extrémité des doigts.

Cette famille se divise en trois groupes:

Dans le premier, les loutres, les putois;

Dans le deuxième, les chiens et les civettes;

Dans le troisième , les chats et les hyènes.

La troisième famille est celle des amphibies.

Leurs membres sont fort courts et conformés plutôt pour nager que pour marcher.

Parmi les animaux carnassiers , deux seulement fournissent un pro duit indiqué dans quelque vieille pharmacopée. Tous deux appar-

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tiennent au genre civette : la matière qu’ils contiennent , et qui est connue sous le nom de civette, est contenue dans une poche à parois folliculeuses située entre le rectum et le vagin.

Cette matière épaissie , grasse , onctueuse , ayant la consistance de l’axonge , est blanchâtre quand elle est fraîche , et brunit en vieillis- sant.

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