f-, : mm^ "'m ^■2?«- >^ ^■^j .■ -y.,^ ' w » î^li «r •►♦. v....y^ ,-^xr '• '^■ Cf^...® ^v j/ ^ \: ^■m ^^«.>-^ rSP^=i? • Vi ■.. ",, ■^3^ 0à :^^ fô ^^ mii ■k '^ .. '^^m: .i;, r i'f :h^ Bruxelles, irapriniorie de Te P. -M. De Vrooin , rue de Louvaio, lOS. Bîaw.BSBÎj; A® jeu: .IPEM^IilL LA BELGIOUE HORTICOLE, JOURNAL DES JARDINS, DES SERREli ET DES VERGERS, Charles MORREN, Docteur en soienecs , en philosophie naturelle et en médecine, Professeur ordinaire de botanique et d'agri- culture à Tuniversité de Liège, Directeur du jardin botanique. Chevalier de l'Ordre de Lcopold, de l'Ordre royal et militaire du Christ, de l'Étoile Polaire de Suède et de Norwcge, de l'Ordre royal de Dane- brog, de la Couronne de 'Wurtemberg, de la Couronne de Chêne, etc. Membre titulaire de l'académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, Membre du Conseil supérieur d'agricul- ture du royaume , Membre lionoraire de l'académie royale de Dublin , correspondant des académies des sciences de Breslau, Florence, Madrid , Naples, Padoue, Rome, Turin, de l'académie royale d'agriculture du royaume de Sardaigne et de Piémont, Membre honoraire de la Société générale d'Agriculture de» Pays-Bas, de l'Académie impériale des sciences de Rouen, de la Société royale d'encouragement de l'horticulture des Pays-Bas , des Sociétés impériales ou royales d'agriculture et de botanique , de Barce- lonne, Berlin, Bruxelles, C«en , Chartres, Clermont-Ferrand, Cherbourg, Dijon, la Drenthe, Edim- bourg, Gand, Groningue, Halle, Heidelberg, Leipzig, Mâcon , Malines , Marbourg, la Moselle, Pari», Ratisbonne, Roslok, Rotterdam, Rouen, la Sarthe, Silésie, Strasbourg, Stockholm, lItrecht,Valenoe, etc. TOME IV. LIBRART NEW YORK 80TANICAL (JARI>BN LIEGE, A LA DIRECTION GENERALE, RUE LOUVREX, 71. 1854 PROLOGUE I CONSACRE à la mémoire d'Adrien SPIEGEL, de Bruxelles, UN DES PÈRES DE LA PHYSIOLOGIE DES PLANTES, DE LA BOTANIQUE ET DE L'HORTICULTURE, LlBRAKt appartenant à l'histoire de tes sciences en Belgique. v<ïWK .-— BOTANICAL 0AKl>6N Nous avons payé dans les trois premiers volumes de la Belgique horticole, notre légitime tribut d'hommages aux trois premiers grands auteurs de la science des plantes, en limitant le cercle de nos études à riiistoire des sciences dans notre patrie. Charles De L'Escluse tenait le sceptre de la vraie science dans ce triumvirat, et la postérité en recon- naissant l'éminencc de son mérite, lui a rendu pleine justice. S'il le cédait à 31athias De L'Obel sous le rapport de la philosophie qui doit dominer toute l'histoire naturelle, s'il n'avait pas autant que son émule, la pre- science des analogies qui lient les êtres les uns aux autres et deviennent, quand elles sont formulées par la classification, l'expression du système sublime qui présida à la création; si De L'Escluse ne sut se rapprocher de Dieu, pour dire noire pensée toute entière, autant que De L'Obel, il eut du moins l'avantage immense de composer ses grands ouvrages non avec des livres seuls, mais avec les êtres naturels eux-mêmes. L'érudition venait à son aide, sa patience rivalisait avec son savoir et tous les deux obéissaient à une conscience pure où les assertions allaient puiser la sécurité qu'on aime tant à trouver dans l'étude de la vérité. Nous l'avons déjà dit ailleurs, mais ces choses ne sauraient assez se répéter, que les écrits de De L'Escluse et surtout son Histoire des plantes rares sont des monuments éternels de génie et de science. Ce jugement de Sprengel, de Cuvier et de tous les hommes qui ont étudié à fond l'histoire des sciences naturelles, est un brillant éloge pour la part que les Belges ont su prendre dans le développement progressif des connaissances humaines. Ainsi, à {Yj De L'Escluse appartient la palme de la vraie gloire. Puis, nous parlons non pas selon l'ordre des dates, mais scion l'ordre de la valeur, apparaît sur la scène de l'histoire botanique et de l'horti- culture ce prophète, cet homme à double vue dont le regard plonge dans l'avenir. Jusque là le caprice de l'alphabet ou d'autres considérations ar- bitraii'es, basées même parfois sur la mode et le goût, avaient présidé dans les grands ouvrages descriptifs à la connaissance des objets. De L'Obel entrevoit que de la structure, de l'organisation dépend l'essence de l'être; il sent que les natures analogues ou similaii-es, pour amener l'har- monie dans le classement de tant de corps naturels en apparence si disparates, doivent se rapprocher; il saisit, par ce sentiment de l'ordre, — VI — ce cachet divin de rnnivcrs, un grand noniln-e de Eîroiipomonis d'clres que les Jussicu et les adhérents aux classilications |>;n' lanulles natu- relles, n'eussent pas formés autrement que lui. Hnlin, De I/Ohel voit la nature en grand, et dans un ensemble immense, il se fait une idée juste de la division profonde et radicale de la nature des corps. Van Roycn et Bernard De Jussieu n'ont eu besoin }»our arriver plus tard aux mêmes résultats, (pie de savoir i)laeer un 7,éro devant les signes de l'unité et de la dualité, en fornndant ces cond)inaisons par des noms dont l'apparence paraît borriblenient seienlilique aux yeux des gens du monde, à savoir Aroli/lcddiws, MoJWcolijlcdiDies et Diculijlêdoiies , mais De l/Obel qui avait le ])ressentiment de cette division, formulait d'après elle la classi- fication des plantes connues de son temps, sans donner des noms aux grands grou|)es. Il les sentait, il les faisait sentir à ses lecteurs, mais ni lui, ni personne ne les nommait. Le langage de cette science virginale de l'époque ne faisait pas, comme aujourd'hui, reculer d'époiivanle tant de personnes (]ui ont peur de la science piun* rester intelligibles avec leur |»rochain. Le rc'sumé de l'étude littéraire et scientiliipie sur De L'Obel est doue (et nous l'avons prouvé dans le second volume de cet ouvrage) (|uc le précurseur des j)lus grands noms que la France cite dans l'histoire^ de la botanique, les Jussieu , était flamand. La Belgique peut être fière d'ajouter un fleuron de cett(! importance à la couronne de ses gloires nationales. Un jour, dans une séance de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux- arts de Belgique, un de ses plus honorables membres, le fondateur de la géologie du pays, M. D'Omalius d'Halloy, s'écriait : Toute cette doctrine est, comme on le voit, très-claire et très-positive, mais la seule objection à faire, c'est de savoir la vraie nature de ce sang végétal qu'on a nommé depuis lalex; est-ce le fluide de la circulation? est-ce un liquide sécrété? A l'heure où nous — XV — écrivons ces lignes, la physiologie prudente qui ne s'engoue pas de théories, attend d'autres arguments que ceux consignés jusqu'aujourd'hui dans les traités, mais on ne peut pas nier que Spiegel n'ait parlé beaucoup mieux que ses prédécesseurs d'un phénomène dont l'importance saute aux yeux. Spiegel a de plus très-bien reconnu la cuticule ou l'épidermc des plantes, et ses idées sur leur peau ou derme sont justes. Il établit mieux que Grew, 3Ialpighi et Van Leeuwenhoek le siège véritable de la colora- tion des fruits. Il porte parfois des jugements qui paraissent singuliers, tout en étant d'une grande justesse : ainsi il ne reconnaît pas, disait-il, les racines à leur forme, mais à leur usage. Les physiologistes actuels, quand ils sont clairvoyants, ne font pas mieux. Devant la feuille, Spiegel recule. « Qu'est-ce que la feuille? se demande-t-il... Je l'ai longtemps cherché et je n'ai rien trouvé de satisfaisant )> [Isagoges, cap. IV). Cepen- dant il arrive à une pensée très-ingénieuse par rapport à la feuille dont aucun auteur, quelque grand qu'il soit, n'a pu donner une définition exacte, " Je dis donc (ce sont ses paroles à la fin de ce qui concerne les feuilles), que les feuilles sont des productions de l'écorce servant d'organes protecteurs aux tiges, aux fleurs, aux fruits. Ainsi la nature a donné à la peau qui couvre la tète de l'homme des cheveux, aux animaux (qui ne pouvaient s'habiller) elle a fait pousser par le système cutané des poils, des plumes, et pour la défense, elle a planté des cornes au front de quel- ques-uns. Tous ces organes tombent à leur temps, les uns disparaissent périodiquement ou une fois pour toujours et de nouveaux organes pro- tecteurs renaissent après la mue. Or, les feuilles des arbres ne tombent- elles pas non plus périodiquement et d'autres reviennent? Les végétaux ont donc aussi leur mue. » Quand Linné définit la feuille, un organe qui transpire, absorbe et donne de l'ombre, il ne dit pas grand'chose non plus par rapport à la nature d'origine de la feuille : Spiegel la fait dépendre de l'écorce, et qu'est-ce que la physiologie actuelle a prouvé, si ce n'est l'exacte vérité de cette assertion ? Dans le dix-septième chapitre des Isagoges, Spiegel énumère les prin- cipaux auteurs qu'il avait lus et les recommande à ses lecteurs. Il ne cite pas une seule fois Dodoëns, son compatriote, mais il parle de Césalpin, et engage les botanistes à classer les espèces selon les fruits, comme Césal- pin l'avait fait. Nous avons dit que ce dernier, professeur à Pise, avait publié en 1S85 à Florence, la grande découverte de la sexualité des plantes. Spiegel passe sous silence cette manière d'envisager les fleurs : il distingue le calice et la corolle dont les parties sont des folioles pour lui et le pédoncule devient la représentation des pétioles, idées analogues à celles que Goethe publia deux siècles environ après le professeur de Padoue. Les étamines sont pour lui des appendices dont la valeur lui échappe, et l'ignorance de leur rôle va si loin qu'il admet qu'il y a des fruits que des fleurs n'ont pas précédés. Dans toute la doctrine sur les amours des plantes, il laisse beaucoup à désirer. XVI — Après avoir parlé des plantes en particulier dans l'ordre que nous avons fait connaître, il expose l'application de la botanique à la médecine. Il sépare l'aliment du médicament, il expose les propriétés médicinales et admet des vertus occultes, c'est-à-dire des propriétés dont il ne pouvait se rendre compte : Spiegel pensait là-dessus comme Molière. Le hasard des circonstances spéciales doivent faire connaître les qualités des plantes; les saveurs et les odeurs sont cependant les indices des j)ropriétésetdes vertus. Enfin, pour propager et rendre plus facile l'étude des plantes, il con- sacre les deux derniers chapitres de ses Isagoges à la confection d'un Florilegium ou journal de botanique. Il entre dans les plus petits détails à cet égard, et en indiquant les titres des sujets à traiter il embrasse jus- qu'aux cultures. Il veut que chacun fasse les monographies des végétaux alement ruguleuses, terminées par un style court, graines tuberculées de points. Plante vivace du mont Olympe en Arménie, signalée par Boissier dans les plantes d'Aucher Éloy, recueillies en Egypte, Arabie, Palestine, Syrie, Asie-]\]ineure, Grèce, Turquie et Arménie. Elle s'élève à 2 et 5 pieds, se lient droite et porte au sommet des rameaux. Les fleurs sont disposées comme dans VA. mlgaris, de la même grandeur, bleues et variées de blanc. Elle a des analogies avec les A. vulgaris et A. viscosa, mais elle est tellement distincte qu'il est impossible de la confondre avec aucune autre. Nous croyons qu'elle n'est pas encore introduite dans nos jardins. IV. Aqnilèges» de Tlude. 18» A. PUBIFLORA. Wall. Cat. 4714. Royle lllust. 34. Éperons recourbés, plus courts que le limbe des pétales; capsules velues, tige multiflore, dichotome, feuillue, pubescenle, styles ne dépassant pas les étamines. Il en existe une variété /3 dite Jhtssooriensis : éperons recourbés, quatre fois plus courts que le limbe, capsules velues, sépales aigus, tige striée feuillue, pétioles et folioles poilus , styles ne dépassant pas les étamines. Originaire du Myssore. Selon le docteur Royle, elle abonde sur THima- laya à 6,000 et 10,000 pieds. Vivace. La lige est feuillue, d'un pied de bauteiu'; les fleurs sont d'un bleu — 9 — clair, inodores. L'espèce a été introduite en 1839 en Angleterre, par les soins des directeurs de la Compagnie des Indes. Lindley en a parlé dans le Botanical register, p. 6G. Miscellanées ^ vol. de 1840. 19» A. MOORCROFTIANA. Wall. cat. 4715. Royle Illust. 34. Éperons allongés, recourbés, égalant le limbe obovale, le double plus longs que les sépales lancéolés, styles ne dépassant pas les élamines, plus courts que les pétales, cinq capsules velues. Espèce du Cashmire , non introduite jusqu'ici. 20» A. GLAUCA. Lindl. Bot. reg. XIII. 1840, t. 46. Vivace , glauque pubescente; lige feuillue pluriflore, folioles trifides cunéiformes, divisions bi-trilobées, les supérieures ovales très-entières; fleurs amples, jaunâtres , odorantes, un peu poilues; sépales ovales-lancéolés aigus, éperons des pétales droits plus courts que les lames tronquées, élamines égalant les pétales en hauteur, ovaires glanduleux-velus. Vivace , des montagnes de THimalaya et du Cashmire. Introduite en 1859 par les directeurs de la Compagnie des Indes dans les jardins anglais. Très-jolie espèce à feuillage glauque et à grandes fleurs soufrées. La tige s'élève de i à 2 pieds; les fleurs exhalent un parfum délicieux et se suc- cèdent de mai à juin. Culture. On lui donne un sol un peu humide et riche, de l'ombrage; on divise les souches dans l'état de repos et on sème immédiatement après la maturité. Nous l'avons reçue aussi sous le nom de A. glaucifolia, ce nom est erroné. On peut la confondre avec VA. frugrans dont la fleur est odorante aussi, mais les éperons de cette dernière sont tournés en dedans et le feuillage n'est pas glauque. 21° A. FRAGRANS. Bth. the Botanist. IV, p. 161. Tige feuillue, pluriflore en haut, feuilles supérieures et ovaires pubescents subglanduleux; segments des feuilles inférieures trifides au-delà du milieu, fleurs amples à peine pubérules, sépales ovales-lancéolés aigus, éperons des pétales incurvés-uncinés, le double plus courts que la lame tronquée ; élamines un peu plus courtes que la lame. Originaire du nord de l'Inde-Orientale ; vivace. Les fleurs sont d'un jaune de paille et répandent une excellente odeur pénétrante ; elles sont grandes et belles. La culture est la même que celle de 1'^ . glauca avec laquelle espèce elle a été introduite en Angleterre. 22» A. KANAORIENSIS. Jacquem. Voy. IV, 7, 2, 3. Tige, pétiole et pédoncule glanduleux- pubérules, éperons droits, égalant les folioles du calice, limbe des pétales obové, élamines plus courtes que les styles et les pétales ; fruits pilosiuscules. Nous en avons donné l'histoire complète dans cet ouvrage, t. III, p. 502. .lacquemont la trouva au Kanaor entre le Cashmire et le Thibet à une altitude de 5,450 à 5,500 mètres. Le docteur Thomas Thompson en a envoyé des graines, en 1831 , à Kew où elles ont produit de belles plantes. Les éperons sont bleus, les glandes vertes et les limbes soufrés. La cul- ture se fait absolument comme celle des ancolies ordinaires. L'ombrage augmente la grandeur de sa fleur. Cette dernière répand une odeur ana- BELG. HOUT. T. IV. 2 — 40 — logue à celle du Tayetes erecta, selon Jacquemont, mais Hooker, qui la vue ouverte à Kew, ne dit rien de ce phénomène. Il y aurait une variété (3 suaveolens à grandes fleurs blanches répandant l'odeur du CheircmtJms alpmus. Dietrich donne ces détails. A. Aqnilèges» de 1^ Amérique. 23» A. CANADENSIS. Linn. Éperon droil, plus long que la lame, recourbé au sommet, sépales ovales-oblongs, presque plus longs que les pétales, étamines et styles exerles. II en existe une variété /3 hyhrida (Hook.) à éperon recourbé au som- met, styles plus courts, fleurs pourpres. On cite en Belgique un A . canadensis major dont la tige s'élève à un pied et demi et qui porte des fleurs plus grandes. Celles du type sont pendantes, rouges-écarlates allant au pourpre et à éperons jaunes. Vivace, originaire de Géorgie et du Missouri. Nuttall en a trouvé aux bords du fleuve Platte une variété à fleurs violettes. La culture exige plus de soins que celle des autres espèces : il lui faut une terre de jardin amendée de terreau ou de terre de bruyère, une exposition protégée, des arrosements réglés et de Tombrage avec éclaircies. La multiplication se fait mieux par divisions de pieds au printemps à l'époque de la végéta- tion. Le semis immédiatement après la multiplication ne réussit pas tou- jours et les graines ont peine à se lever. 24» A. FORiMOSA. Fisch. Élancée, feuilles biternées, découpées, glabrescenles, glauces- centes au-dessous, sépales oblongs-lancéolés, très-ouverts, d'un orange vif, pourpre, éperons un peu plus courts, droits, trois fois environ plus longs que le limbe, jaune clair tronqué; génitalics exertes. Vivace, originaire de l'Amérique du Nord, du Kamtschatka et de l'île Sitcha. Bongard l'a appelée Aquilegia canadensis dont cette espèce est fort distincte par des fleurs plus grandes , des sépales étalés , plus longs que les éperons, des éperons plus gros et moins longs. Les horticulteurs la vendent ordinairement sous le nom d'Aquilegia arctica dont on trouve la dénomination dans Steudel, comme attribuée à Loudon, sans qu'on sache où celui-ci l'aurait consignée. La culture de cette espèce est la même que celle de VA. canadensis. Elle s'est introduite par les jardins botaniques du nord de l'Europe. Nous l'avons reçue de Christiania (voy. pi. 4). C'est une des plus jolies plantes que l'on puisse cultiver. 23» A. SKINNERI. Hook, Bol. mag. t. 3919. Glabre; éperons ouveris droits, très-longs, cinq fois plus longs que le limbe; sépales lancéolés, le double plus longs que le limbe des pétales; étamines longuement exertes, excédant trois à cinq fois les styles. Vivace , originaire des parties australes de l'Amérique du Nord vers rOcéan Pacifique. Envoyée par M. Skinnerde Guatemala, elle croît plus au midi que toutes les autres espèces d'ancolies. — Il — Culture. Introduite en 1840-41 , elle a supporté de prime-abord les hivers en Angleterre, mais, sur le continent, elle gèle souvent et aujour- d'hui encore on la voit très-rarement dans les jardins. Des horticulteurs la font plus rustique qu'elle ne l'est. Elle périt aussi à la division des pieds et on préfère la multiplier par la voie du semis. 26" A. BREVISTYLA. Hook. FI. bor. amer. 1,21. Plante subpubescente, éperons recourbés plus courts que le limbe; styles courts , inclus, pétales dépassant un peu les élamines. Originaire du Canada. Fleurs bleues. Richard la prit pour VAquilegia vulgaris à laquelle elle doit ressembler. On ne la connaît pas encore sur le continent. 27» A. COERULEA Torr. Ami. Lye. IS'ew. IV, p. 164. Eperons droits, très-gréles, le double plus longs que le limbe; sépales rhomboïdeo-ovalcs aigus, plus longs que les pétales; éta- niines et styles plus courts que la corolle. Originaire des montagnes rocheuses, cette plante vivace passe pour la plus belle du genre par ses grandes fleurs bleues ou jaunes. Nuttall la prenait pour 1'.^ . leptoceras dont elle est tout à fait différente. En représentant sur la planche qui accompagne cette monographie les Aquilegia viscoso, nigricans, jucimda, forniosa et Skinneri, nous avons reproduit les types des espèces les plus tranchées dans les ancolies de l'Europe, de l'Asie et de l'Amérique. Plusieurs horticulteurs en Belgique s'occupent spécialement de ce genre et leurs tentatives pour réunir les espèces de ce genre remarquable n'ont pas été sans succès. M. Thimister, amateur à Liège , et M. Jean Van Volxem à Bruxelles, peuvent être cités actuellement parmi les cultivateurs les plus riches en espèces et variétés de ces fleurs qui laissent encore un champ fort vaste aux explorations. Nous avons tâché à notre tour de réunir bon nombre de ces espèces. Aussi communiquons-nous volontiers aux abonnés qui le désirent des graines des espèces comme les A. alpina, A. hy brida, A. viridiflora, A. nigricans, A. canadensis, etc., et même nous espérons pouvoir y joindre celles de 1'^. forniosa qui est encore aujourd'hui si recherchée. QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES VARIÉTÉS NOUVELLES DE ROSES, Par m. Eugène Verdier, fils aîné. II y a cinq ans environ, lorsqu'on vit apparaître pour la première fois une trentaine de roses nouvelles, on fut émerveillé d'un pareil succès. 11 est vrai que la moitié au moins de ces nouveautés ont été trouvées telle- ment inférieures au moment de la floraison, qu'on a dû les rejeter des — 12 — collections. C'est ainsi que sur 50 variétés mises au commerce eu 1847, 20 environ furent réformées l'année suivante; 10 autres l'ont été ensuite successivement, à mesure que les nouveaux gains, plus beaux, apparais- saient dans le même genre, 11 sur 20 de ces roses réformées provenaient du même producteur. Depuis cette époque le nombre des nouveautés s'est tellement augmenté, qu'on ne doit pas s'étonner de le voir dépasser, aujourd'bui, le chiffre de 100; l'année dernière, et il y a deux ans, il était déjà à 70 et 80. Mais il est bon d'ajouter que les deux tiers de ces nouveautés ont disparu promptement du commerce horticole, et que quelques-unes n'y sont res- tées qu'en reprenant leur ancienne place et leur ancien nom. Dans l'intérêt de la science, nous allons donner quelques explications sur cette apparition et disparition successives de variétés nouvelles de roses. Certains producteurs, plus séduits par l'appât du gain que guidés par l'amour de leur art, veulent, n'importe à quel prix, jouir du bénéfice, je ne dirai pas de l'honneur d'être parrain , cherchant dans leurs semis et souvent dans ceux qui n'ont jamais eu la peine d'élever, ce qui a l'avantage de coûter beaucoup moins de peine et de temps, ils prennent un ou plu- sieurs individus auxquels ils imposent un nom. Ils les décrivent, font grand bruit de leurs roses, crient même au miracle. Le prix est annoncé : ce n'est ni 10 fr., ni 5 fr., ni 2 fr. c'est 20 et 2S fr. ! ! Cette somme ne permet pas de douter du mérite de la nou- veauté. Les horticulteurs et amateurs font un nouveau sacrifice pour acquérir ces hautes nouveautés, et ils achètent quoi?... la première florai- son se charge de leur apprendre que c'est une rose inférieure ou une ancienne connaissance qu'on trouve alors un peu chère. Par dépit on la jette au feu , ou bien on se contente de la reporter sur le catalogue au numéi'o et nom qui lui ont été assignés antérieurement. C'est ainsi que les rosiers Charles Souchet, Georges Cuvier, Edouard Desfosse, Henri Lecoq, Lady Canning, souvenir d'un ami, Clémentine Seringe, Comte de Paris, Lady Fortwitch, Louis Bonaparte, Madame Saffay, Rose de la Reine, etc., etc., nous ont été vendus, depuis quelques temps, chacun sous deux et trois noms différents et toujours au prix de 15 à 25 francs. Si nous avons dévoilé ces sortes de spéculations , c'est parce qu'elles sont préjudiciables autant au progrès de la science horticole qu'à la bourse des amateurs; mais nous espérons en voir bientôt la fin. Les contrées des bonnes roses étant maintenant à peu près connues , on pourra arrêter les progrès de ce charlatanisme en ne puisant dans ces contrées qu'à des sources certaines. En attendant, nous avons pensé être agréable à nos lecteurs et ama- teurs de ces charmantes fleurs, en leur faisant connaître les nouveautés de ce beau genre, parues depuis 1848 et conservées dans les collections. Celles qui ne sont pas mentionnées dans cette note sont réformées ou à — 15 — réf'oinner , sauf cependant quelques-unes qui ont pu échapper à notre examen. En 1848, nous avons reçu 30 variétés. L'année suivante 10 dont 5 noms changés ont été réformées et depuis cette époque 5 ou 6 ont encore été supprimées. Les variétés conservées sont : Noisette». Caroline Marniesse. (Raeser.) — Arbuste vigoureux, à fleurs en corymbes, moyennes pleines, blanc légèrement carné, ayant tous les caractères du sempervirens Félicité Perpétue ; seulement il n'est pas sarmenteux comme lui et il remonte très-franchement. C'est une des meilleures variétés de cette section; elle réussit aussi bien greffée que fi'anche de pied. Vicomtesse d'Avesnes. ( Rœser. ) — Plante très-vigoureuse , fleurs moyennes, pleines et bien faites, rose lilacé. Très-bonne variété propre à garantir les berceaux, tonnelles, etc., re- montant assez franchement, aussi vigoureuse greffée que franche de pied. Ile Bourbon. Appoline. (Verdier, père.) — Plante très-vigoureuse, à grandes fleurs pleines, rose tendre, fortement nuancé. Obtenue de semis de Pierre de St.-Cyr, avec lequel elle a beaucoup d'analogie par sa végétation. C'est une bonne variété qu'il serait préférable d'avoir franche de pied et de tailler très-long. Bernardin de St.-Pierre. (Oger.) — Plante de moyenne vigueur, fleurs grandes , pleines , rouge violacé foncé. Assez bonne variété, mais ayant beaucoup de rapport avec Souchet, dont elle n'a pas la vigueur, on peut l'avoir greffée ou franche de pied. Léon Oursel. (Oger.) — Plante vigoureuse, fleurs moyennes, pleines, rouge feu clair. Très-bonne variété soit greffée ou franche de pied. Paul et Virginie. (Oger.) — Plante vigoureuse, fleurs moyennes, pleines, carné clair, maculé-lilacé. Bonne variété qui tient très-facilement greffée ou franche de pied. Souvenir du 4 mai. (Morel.) — Plante vigoureuse, fleurs moyennes, pleines, rose carminé, saumoné. Jolie variété fleurissant très-abondamment, réussit aussi bien greffée que franche de pied. Vierge de VEmnos. (Morel.) — Plante de moyenne vigueuj', fleur moyenne, presque pleine, rose vif. — 14 — Hybride remontant § 1 ('). Etendard de Marengo. ( St. -Armand.) Plante vigoureuse, fleurs moyennes, très-multiples ou presque pleines, cramoisi vif d'un grand effet. Jolie variété qu'il vaut mieux avoir greffée que franche de pied et dont le seul défaut est de n'avoir pas les fleurs tout à fait assez pleines. Hybride remontant § %. Chateaubriand, (Portemer.) — Plante vigoureuse, fleurs moyennes, multiples ou presque pleines, rose tendre nuancé. Très-jolie variété de coloris, dont les fleurs, malheureusement, ne sont pas assez pleines , greffée et franche de pied. Jeanne d'Arc. (Verdier, père.) — Plante vigoureuse, fleurs très-grandes, presque pleines, à larges pétales blancs; le centre de la fleur est rose, tendre, variété magnifique, dont le défaut est d'être très-rebelle à la multiplication. Madame Pépin. (Verdier, père.) — Plante vigoureuse, fleurs grandes, pleines, beau rose tendre, à revers des pétales blancs. Superbe variété remontant franchement et réunissant bien greffée et franche de pied. Général Négrier. (Portemer.) — Plante peu vigoureuse, à fleurs moyennes ou grandes, pleines, de forme admirable, très-odorantes, dun beau rose. Cette variété serait certainement une des plus belles, si elle n'avait pas le défaut d'être presque toujours chétive et délicate. Madame Guillot. (Guillot.) — Plante assez vigoureuse, à fleurs moyennes, pleines, beau rose foncé. Bonne variété remontant franchement et réunissant parfaitement greffée ou franche de pied. Georges Lecamus. (Oger.) — Plante assez vigoureuse, fleurs moyennes, pleines, bien faites, rose clair lilacé. Variété qui pourrait être bonne si elle n'avait pas le très-grand défaut de périr souvent la première année de greffe ; elle est aussi très-difficile à obtenir franche de pied. [Hortiadteur français, juillet 1853.) (1) Les hybrides lemoiilanlb S 1 , soiil hybrides de rosiers de l'Ile Bourbon el sont moins vigoureux que ceux du § 2 ; mais ils sonl plus franchement remonlants. — lo — REVUE DE PLANTES NOUVELLES. Brillîiiitaiisia owaricuisis. Pal. de Beauv. FL d'Ow. el de Ben., V. 2, p. 08, t. 100, f. 2. — Lindl. in Joiirn. of hort. Soc. Lond., v, 8, j). 129. — Hook. Bot. mag., 48d3, tab. 4,717. Brillantaisie d'Oware. Famille des Acanthacées. Synonymes : Belantheria Lamium. Benth. in Niger fl., p. 477. — Belantheria Belvisiuna. Nées in De Cand. Prodr., V. 2, p. 97. — Belantheria vogeliana. Benth. in Niger fl., p. 477. — Leucographis Lamium. Nées in De Cand. Prodr., v. 2, p. 97. — Leuco- graphis vogeliana. Nées in De Cand. Prodr., v. 2, p. 97. u Par une méprise étrange, dit M. ITooker, le professeur Nées Von Esenbeck, mé- connut le Brillantaisia oivariensis de Palisot de Beauvois, mais trou- vant un exemplaire sans nom de cette plante dans l'herbier des plantes africaines de Beauvois, conservé à Berlin, il le décrit dans le prodrome de De Candolle, sous le nom de Belantheria belvisiana. Les acanthacées du docteur Vogel, réunies dans l'expédition du Niger, ayant été soumises à l'examen de M. Nées, il y trouva deux plantes analogues différentes par les étamines (celles-ci ayant des staminodes, tandis que le Belantheria était supposé en manquer). M. Nées leur donna les noms de Lencographis lamium et L. vogeliana que M. Bentham ramena avec justesse au genre Brillan- taisia dans sa Flore du Niger. Ces deux espèces diffèrent à peine par la forme des feuilles dans les exemplaires originaux, mais la plante en fleur à Kew, montrant ces deux formes sur le même individu, il ne peut exister aucun doute sur l'existence d'une seule espèce. 31. Whitfield introduisit cette plante de Sierra-Leone à Chelsea, et elle y a fleuri en mars 1853 dans la serre chaude. Les rameaux sont divergents, puis droits, sil- lonnés; les feuilles ovales, cordées, dentées, diminuant en pétiole large- ment ailé ; la panicule terminale , les rameaux triflores , les bractées petites, linéaires; les fleurs grandes (comme celles de la sauge oflîcinale dont elles ont la forme et le port), violettes. Rhododeudrou Dalhousise. Hook. fil. Sik. Rhod., 1. 1-2, Journ. of hort. Soc. Lond. v. 7, p. 77 et 95. — Hook. Bot. mag. 1853. tab. 4,718. Rosage de lady Dalhousie. Famille des Éricacées. Arbrisseau haut environ de 6 pieds, souvent épiphyte; feuilles elliptiques raides, subon- dulées, mucronées-aiguës (les jeunes poilues), glabres au-dessus, veines impi'imées en creux, au-dessous glaucescentes, lépides éparses, pétioles courts, fleurs au nombre de 5 à b, terminales subombellées, calice pro- fondément quinquefîde, lobes oblongs, obtus, ciliés, corolle très-grande, blanche, subcampanulée, limbe ouvert, quinquclobé , lobes arrondis, dix étamines, capsule oblongue, quinqueloculairc. De tous les rhododendrons du Sikkim-Himalaya, celui-ci est peut-être, dit sir William Hooker , un de ceux qui a excité le plus grand intérêt, — IG — surtout à cause de la grandeur de ses fleurs odorantes. Elles ressemblent, en effet, aux fleurs du lis blanc. De plus, la plante croît dans ses localités natives comme une orchidée tropicale, dans des mousses, avec des fou- gères et des aroïdées, sur de vieux troncs d'arbre. On douta même, à cause de cette station, du succès dans la culture; mais les graines ont parfaitement germé en Angleterre, et les jeunes plantes ont prospéré dans la serre tempérée humide. Cependant, en trois ans de culture, à Kew, il n'a pas été donné d'en voir fleurir un seul , les individus dans le pays allant à six pieds de hauteur avant de porter fleur. Cependant , la première arrivée des plantes datant du printemps 1850, M. John Laing, jardinier du marquis de Rosslyn à Dysart-House, a eu le premier l'hon- neur de faire développer les fleurs. M. John Laing a donné sur ce succès les détails intéressants qu'on va lire : « En janvier 1852, je choisis de mon parc un vigoureux tronc de Rho- dodendron po7iticum , pourvu d'un tronc fort, de six pieds de hauteur; j'en coupais toutes les branches latérales et je le plantai dans un pot de huit pouces. Vers la fin de janvier, je le plaçai dans la serre où bientôt il fut grefl'é par approche du Rh. Dalhoiisiœ. A mesure que les jeunes pousses de ce dernier commençaient à se lignifier, je les coupais jusqu'à la séparation et la plante fut placée dans une serre froide. Bientôt il y eut une seconde pousse et le pied fut encore une fois remis en serre chaude et repassa derechef dans la serre froide pour y mûrir son bois. Il n"y resta pas longtemps , poussa de nouveau et alla une troisième fois mûrir son bois en serre chaude. Vers la fin d'octobre, il y eut un bouton de visible; on modéra les arrosements jusqu'à ce que les racines fussent desséchées au bout, et enfin le pied passa dans la serre froide jusqu'à la fin de l'hiver. A la troisième semaine de février 1855, il entra de nouveau dans la serre chaude et la couleur se développa le 16 du mois. Quand les fleurs appa- rurent, elles étaient vertes, puis devinrent graduellement jaunes et enfin passèrent à la fin de leur vie à la couleur blanche. Ainsi cette espèce fleurit sans aller à l'air libre et c'est à cause de ceci que la couleur rousse des feuilles ne s'est pas développée. L'écorce et les premières pousses sont brunes, mais les pousses ultérieures sont vertes. » Le Rhododendron Dalhousiœ, que les horticulteurs appellent le rot des rhododendrons, est originaire du Népaul oriental, du Sikkim et duBhotan, selon rherbier de Griffîth, où il croît dans les forêts humides entre 6,000 et 9,000 pieds d'altitude. Rosiei* hybride ■•emonlaiit. — Le inaittean d'é^éque (Moulin aîné et fils). MM. 3Ioulin, horticulteurs à Mons (Quai de l'amiral Lalande), ont donné ce nom à une rose dont la teinte, d'un beau pourpre violet, rappelle en effet les couleurs de la robe épiscopale. Le gain provient d'un semis fait en 1850 avec des graines récoltées sur — 17 — une autre variété de Rosier hybride remontant (général Changarnier) obtenue par M. Foulard et répandue par MM. Moulin. La description de cette rose a été prise par nous sur un rameau fraîche- ment coupé et présentant une première fleur épanouie. Voici les princi- paux traits qui la caractérisent : Fleur grande (10 centimètres de diamètre), bien ouverte; pétales peu serrés, les extérieurs planes assez régulièrement imbriqués , les intérieurs plies et légèrement chiffonnés , infléchis et roulés sur eux-mêmes au centre, de manière à présenter un peu, dans Tensemble, le caractère pœo- niflore; couleur pourpre-violet, passant à l'amaranthe-violet; odeur pro- noncée, très-suave; rameaux florifères robustes, garnis de forts aiguillons rougeâtres, portant au sommet, sur un court pédoncule, une fleur en- tourée de 3 à 5 boutons qui atteignent à peu près la même hauteur; bou- tons à moitié épanouis , volumineux et d'un beau pourpre ; feuillages larges et planes, d'un vert foncé. Tels sont les caractères qui recom- mandent cette rose aux amateurs aux mêmes titres que sa mère avec laquelle elle a d'ailleurs plus d'un trait de ressemblance. Sandersonia aiirantiaca. Hook. Bot. mag. 4,716, ann. 1855. Sandersonic à fleurs oranges. Famille des Liliacées. Plante unique du genre caractérisé comme suit : périanthe corollin , tubuleux-campanulé, subglobuleux, ouverture à six divisions très-courtes; base nectarifère et prolongée en six éperons très-courts et incurvés. Six étamines hypo- gynes, entièrement incluses dans le périanthe; filets subulés-filiformes ; anthères oblongues, égalant en longueur les filets, oblongues-obtuses, insérées un peu au-dessous du milieu, versatiles, inverses, biloculaires; ovaire libre, oblong-ovale, longitudinalement trisillonné, trigone, trilocu- laire; loges pluriovulées, ovules obovales insérés en deux séries à l'angle interne ou axile. Fruit inconnu. M. John Sanderson, secrétaire honoraire de la Société d'horticulture de Natal fit, en 1851, une excursion dans l'intérieur de l'Afrique, à partir du port Natal à Magalisberg, et y décou- vrit cette liliacée que sir William Hooker lui a dédiée. C'est une fort jolie plante droite, simple, à racine tubéreuse didyme, à tige ronde : elle a le port du sceau de Salomon avec de grandes fleurs globuleuses comme le muguet de mai, mais jaunes. Elles sont unilatérales aussi et pendent tandis que les feuilles les couvrent au-dessus. Elles étaient ouvertes le 15 novembre 1851 au Swartkophill près de Pietermaritzborg, au Natal. M. Hooker y voit une transition des Fritillaires aux Convollaria ou Poly- gonatum. Il a cultivé la plante à Kew et a réussi à la faire fleurir. Depuis que l'intendant de Kew ne reçoit plus les communications horticoles du jardinier en chef M. Smith, il ne donne plus les modes de cultiver les plantes. BELG. HORT. T. IV. — 18 — LITTÉRATURE HORTICOLE ET BOTANIQUE. L'HORTICULTURE ET LES REPOSOIRS DE LA FÊTE-DIEU AU MANS, Par m. J.-L. Le Bêle, Secrétaire de la Société d'iiorliculture de la Sarllie. Les merveilles de l'art ne pourront jamais égaler celles de la nature parce qu'il y aura toujours entre elles la distance incommensurable qui existe entre l'œuvre de Dieu et celle de l'homme. Le rôle de l'homme ici-bas doit donc se réduire , le plus souvent à imi- ter, à approcher, autant que possible, des beautés de la nature. Ces réflexions nous sont suggérées par le succès qu'ont obtenus der- nièrement plusieurs de nos horticulteurs, dans la construction de re- posoirs de la Fête-Dieu. Les fleurs et le feuillage se retrouvaient partout comme toujours, ce sont les éléments indispensables de toute belle ornementation. Mais au lieu de tirer parti de fleurs artificielles ou des plantes coupées disposées d'une manière variée et plus ou moins gracieuse , nos horticul- teurs ont eu l'heureuse idée d'appliquer aux reposoirs l'architecture des jardins , ou mieux encore de prendre , dans la nature , des sites tout en- tiers et de les transporter avec leurs perspectives animées bien supé- rieures à toutes les inventions et à toutes les imitations de l'art. A la place des Halles, avec l'inspiration heureuse et le bon goût de M. Bougard, on est parvenu, en très-peu de temps, à représenter un gra- cieux effet de nos jardins paysagistes. L'autel reposait sur une espèce de terrasse à laquelle aboutissaient deux rampes circulaires bordées de mélèzes aux feuilles rayonnantes et déliées. Entre ces deux sentiers escarpés , on admirait un joli parterre bordé sur les côtés de tapis de mousse émaillés de fleurs et limités au fond par une haie légère de feuillage, figurant une sorte de charmille, au travers de laquelle l'œil curieux désirait entrevoir de nouvelles perspectives; enfin au milieu du cintre, le tableau était animé par un bassin d'eau vive et jaillissante. Dans la rue Saint-Victor à Sainte-Croix, existait une œuvre bien autre- ment gigantesque : on s'imaginait voir une création réelle de la nature ; c'était un site nouveau, improvisé de toutes pièces, toute une colline escarpée avec ses sentiers, ses rochers, ses grottes, ses arbres verts, ses pelouses de verdure et ses arbustes en fleur. — 19 — Honneur à M. Tassin, qui a pu sortir victorieusemenl de ce vaste plan qui devra figurer dans nos souvenirs comme une œuvre d'une brillante conception. Pour être juste, nous devrions encore mentionner ici le reposoir de la rue du Mûrier, conçu de la même manière que les précédents; mais, pour celui-ci comme pour les autres, nous ne pouvons mieux faire que de renvoyer aux belles descriptions que nous en ont données les journaux de la localité. Nous tenions ici à rappeler à nos lecteurs les conceptions de MM. Bou- gard et Tassin que nous comptons au nombre de nos membres actifs. Le Comité d'administration de la Société les félicite bien sincèrement du zèle dont ils ont ftiit preuve. Convaincu des immenses intérêts qui s'at- tacbent à la manifestation publique des croyances et des pratiques reli- gieuses, il sera toujours prêt à encourager, dans notre localité, cette pieuse application de l'horticulture aux reposoirs de la Fête-Dieu. {Bull, de la Soc. dliort. de la Sarthe, 1853.) REMARQUES ADDITIONNELLES. Le mois de Marie tout entier, mais seulement depuis 1852, époque où les pères du divin Rédempteur (rédemptoristes) ont introduit cette dé- votion en Belgique, et la fête de S'". -Dorothée, le 6 février, depuis plus de deux siècles , étaient jusqu'à ces dernières années , les seules fêtes de l'église où l'horticulture jouait un rôle principal. Les reposoirs embellis de grandes plantes et notamment de palmiers, ont commencé à se ré- pandre cette année (1855) à Liège, dans plusieurs points de la ville par où passait la procession de la Fête-Dieu. Cependant, nous devons recon- naître que le luxe horticole des reposoirs est poussé en Belgique à un point extraordinaire de splendeur, dans la ville d'Anvers où, le 15 août, à la procession de la fête de l'Assomption , la place de Meir est ornée d'un immense amphithéâtre de dattiers, de chamœrops , de lataniers entre- mêlés d'orangers, de lauriers et d'autres arbustes, dont la noble verdure rehausse singulièrement la beauté des draperies d'un tronc colossal con- sacré à la Vierge. Il serait à désirer que les sociétés d'horticulture existant aujourd'hui dans presque toutes les villes de la Belgique, prissent sous leur patronage la construction et l'oi'nementation des reposoii's de la Fête-Dieu. 11 y aurait lieu à ouvrir à cette occasion toute une voie d'application de l'hor- ticulture : cette fête tombe dans une saison où les plus belles plantes de serre peuvent sortir impunément, et c'est une des rares occasions où il sera permis aux populations d'admirer en plein air et en plein soleil les magnifiques formes des palmiers. — 20 PI. 2. \%.\ 1, y,^P »sr- N. \f I — 21 — HORTICULTURE DE SALON ET HISTOIRE DE PLANTES CURIEUSES. L'ECHINOCACTUS A POILS , DE M. GALEOTTI, OU L'ECIIINOCACTUS CURE-DENT, Par m. Ch. Moruen. En 1844 on introduisit à Kew, clans les jardins de la reine d'Angleterre, un énorme échinocactus du Mexique, auquel les botanistes anglais donnent le nom à' Echinocactus Stainesii ou Steinesii en l'honneur de son intro- ducteur M. Staine, selon sir William Hooker, M. Stein selon le prince de Salm-Dyck. En 4843, ce même M. Staine envoya un autre exemplaire d'échinocactus encore plus grand et sir William proposa de le nommer Visnaga, rappelant ainsi VAmmi vîsnaga ou l'herbe aux cure-dents dont le nom lui-même provient, dit-on, d'une corruption du mot bis acuta, deux fois aigu ou aiguille à deux pointes, pour indiquer l'usage des pédon- cules de l'ombelle de l'Ammi ou des épines de l'Echinocactus , lesquelles servent au Mexique de cure-dents. Cet Echinocactus visnaga ainsi que V Echinocactus Stainesii , furent bientôt reconnus pour être de la même espèce et tous deux n'étaient autre qu'une espèce décrite antérieurement par le botaniste belge, M. Galeotti, aujourd'hui directeur du Jardin bota- nique de Bruxelles, sous le nom à' Echinocactus pilostis , dénomination adoptée depuis par le prince de Salm-Dyck , Labouret et autres cacto- graphes. L'échinocactus poilu de Galeotti est un des végétaux les plus extraor- dinaires du monde. Un exemplaire envoyé à Kew, mesurait un mètre cin- quante centimètres de hauteur, et depuis le sommet jusqu'au pied, la moitié de son contour était de trois mètres quatre-vingts centimètres. A trente-cinq centimètres de terre , sa circonférence était de deux mètres soixante-dix centimètres, et son poids était de plus de cinq cents kilo- grammes. Il a fallu quatorze hommes pour le placer sur le chariot qui devait le transporter à Vera-Cruz. Quand M. Staine trouva cet énorme échinocactus au Mexique, il eut à surmonter de grandes difficultés vu que dans ce pays il n'y avait ni bois pour en faire une caisse, ni ouvrier pour la confectionner. On enveloppa le monstre d'abord de feuilles de til- landsia usnéoïde, et puis de 15 nattes de palmier. Il fit ainsi 500 lieues de voyage par terre à travers les montagnes, de son lieu de naissance à Vera-Cruz et sur un chariot, son poids ne permettant pas de le porter à dos de ninlel. — 22 — M. Staine annonça, en i843, l'envoi d'un nouvel individu delà même espèce, u Maintenant , disait-il, que VE. Stainesii est arrivé sain et sauf en Angleterre, je vais vous expédier un des monstres que j'ai longtemps gardé dans l'espoir de l'expédier à Kew ; car, je l'écris à regret, l'individu en question commença, il y a un mois, à pourrir vers la racine, proba- blement à cause de son grand poids et de ce qu'il n'était pas dans une terre assez profonde. Je suis très-pciné de cette circonstance, après tous les soins qu'il a fallu avoir pour le transporter jusqu'ici. Quoi qu'il en soit, j'en ai en vue un autre qui sera mis dans une caisse que j'enverrai à la montagne où croissent ces monstres et que l'on placera ensuite sur un chariot qui devra le porter à Vera-Cruz. Mon ami le monstre {my monster friend) ne peut voyager par aucun autre moyen en raison de son énor- mité et de son immense poids que je ne pourrai estimer ici où les ma- chines à peser ne portent pas plus de 16 arrobes ou 400 livres. Il faudra 20 hommes au moins pour placer cette plante colossale sur le véhicule à l'aide de leviers que savent si bien confectionner nos indigènes à l'occa- sion. Si ce magnifique spécimen arrive à Kew , quelle ne sera pas votre admiration puisque vous exprimez une si haute satisfaction pour le pre- mier. Ce cactus croît dans la profondeur des ravins de nos plus majes- tueuses montagnes, parmi les masses rocheuses; les plus belles plantes de ce genre sont inaccessibles aux chariots, c'est à peine si on peut y atteindre à cheval. Pourtant, je ferai tous mes efforts pour en conquérir une des plus remarquables, et je mettrai toute mon attention à ce que le^ nattes de palmier soient préparées avec soin autour de sa vaste circonfé- rence épineuse, avant d'adapter à sa base les leviers qui devront l'arracher de la place où il vit depuis des siècles. Je serai heureux d'apprendre que dans le trajet de 300 lieues qu'il aura à parcourir, le chariot n'aura pas été rompu entre cette cité (Sati-Lniz-Potosi) et Mexico, capitale qu'il devra traverser pour se rendre à Vera-Cruz). » Ces promesses n'ont pu être réalisées. L'ami le monstre a péri, et bien que M. Staine parle de plusieurs individus de près de trois mètres de hauteur, il n'en est plus arrivé depuis en Europe. Un jeune échinocactus, provenant de celui de Kew, a été introduit à Paris chez M. Cels, mais en 1852, un exemplaire possédé par M. Desmoutis à Montivilliers près du Havre, a montré ses fleurs. Il n'avait que GO centimètres de hauteur et 50 environ de diamètre. Malheureusement, la fleur n'a pu être ni décrite ni figurée. La tige de V Echinocactus pilosiis a de 15 à 18 côtes. On le cultive en serre tempérée , l'hiver et l'été on le met à l'air en bonne exposition. 11 devient ainsi une véritable incrvcille pour l'horticulture de salon. — 23 — CONSTRUCTIONS HORTICOLES. LES SERRES EN JARDINS D'HIVER DE MM. COTTAM ET HALLEN, Par m. Ch. Morren. Plusieurs de nos abonnés nous ont demandé quelles seraient les meil- leures formes à donner à des serres qui pussent servir de jardins d'hiver. On comprend quelle extension on peut donner à la réponse et de quelles façons différentes on peut la résoudre. L'architecture moderne multiplie les toits curvilignes qui se prêtent aussi bien au style en plein cintre qu'à la forme ogivale ou aux constructions byzantines, mais il y a toujours de la part des jardiniers praticiens un certain attachement aux toits plats, pour l'égoutlement d'abord, puis pour la lumière et le rapprochement des plantes contre les vitres. Cette question n'est pas si résolue sous le rap- port pratique qu'elle en a l'air dans les ouvrages de théorie, et nous con- naissons pour notre part plus d'un horticulteur marchand, lequel mesure les succès par l'argent qu'ils rapportent , qui n'échangerait pas sa serre hol- landaise bien platecontre la plus belle courbe de l'architecture métallurgique. Ce n'est pas au reste qu'en Angleterre même, cette patrie de la courbe, on ait abandonné tous les toits plats. Il existe un établissement de grande renommée, celui de MM. Cottam et Hallen, au Wisley-street n" 2 et Ox- fort-street 76, à Londres, même où l'on donne encore comme modèle de serre jardin d'hiver , les toits plats combinés avec un dôme curviligne. Nous reproduisons ci-contre (pi. 3) une gravure d'une serre confectionnée chez ces messieurs et qu'on trouve toute faite dans leurs magasins, de manière à pouvoir la placer où on le veut et à l'acheter toute faite : avantages qu'aucun établissement du continent ne nous présente. Dans rétablissement de MM. Cottam etllallen, on achète des conservatoires, des orangeries, des appareils d'eau chaude, des vases, des machines à transporter, des fontaines, des clôtures de toute espèce, des piédestaux en fer pour fleurs, des châssis en fer, des treillis, des meubles de jardin, des bordures , des tuteurs , en un mot tout ce qui concerne l'industrie métallurgique dans ses applications à l'horticulture. Le modèle dont nous donnons ci-contre la gravure , se compose d'un corps principal placé comme le transcept d'une église, le toit en est très- élevé, aplati sur les côtés, mais arrondi en avant et en arrière. La porte principale est à l'extrémité circulaire et permet de sortir les grandes plantes avec facilité. Une galerie circulaire parcourt le haut de la rotonde. De chaque côté se trouvent deux ailes entièrement formées de surfaces rec- tilignes, pans et toits, ayant ou non, à volonté, un adossement contre un mur au nord. Une de ces ailes peut servir d'orangerie à plantes mobiles, l'autre à plantes fixes ou bien les plantes mobiles peuvent se poser selon le besoin de l'ornementation dans toute l'étendue de l'édifice. — 24 — PI. 5. 1 ' -i — 25 — ARBORICULTURE. LE HÊTRE PLEUREUR OU LE HÊTRE PARASOL, Par m. Ch. Morren. Le hêtre d'Europe, Fagus silvatica, l'arbre aux sabots et aux violons, deux choses retentissantes , a fourni des variétés qui donnent aux paysages et aux scènes du jardinage des aspects et des coloris divers, témoins le liétre noir, le hêtre crête-de-coq et le hêtre pleureur ou le hêtre parasol. Ce dernier est une variété produite il n'y a pas longtemps, car Miller, dans l'édition de son Dictionnaire de 4785, n'en dit pas un mot, pas plus que du hêtre noir et ne cite qu'un hêtre à feuilles panachées. Loudon, dans son Arboretuni hritannkuni , cite les plus hauts hêtres parasols de l'Angleterre et leur limite extrême atteignait, vers 1844, 50 et 55 pieds de hauteur. Loddiges, dans ses catalogues, mentionne cet arbre seulement en 1856, à la suite d'un exemplaire de la pépinière de Kensington dessiné en 1855 comme une nouveauté. A Briel-Temple, en Irlande, on citait alors un exemplaire de 55 pieds de hauteur et de 24 pieds de diamètre à la cime. Le révérend Berkeley signalait dans une lettre à Loudon, du 2 juin 1857, que, dans la plantation d'une avenue de hêtres au parc de Milton, dans le Northamptonshire, le marquis Fitzwilliam possédait un hêtre pleureur comme un accident, une chose curieuse. On avait tout coupé autour de lui, il était jeune et commençait à fleurir : ses branches pendaient avec grâce et les plus hautes atteignaient six pieds au-dessous du sommet. M. Ilenderson le propageait par les greffes, sa hauteur était de 50 pieds et son tronc mesurait 5 pieds de circonférence à un pied de hauteur au-dessus du collet. Loudon souhaitait qu'un si bel arbre pût se propager par les pépinières. A côté de ces faits, voici ce que l'arboriculture de Belgique peut citer à son tour. De Poederlé n'a pu parler du hêtre pleureur inconnu de son temps. En 1828, on planta le jardin du palais de la rue Ducale, alors ha- bité par le prince d'Orange devenu depuis Guillaume IL C'est dans ce jardin que se trouve le plus bel hêtre parasol qui, croyons-nous, puisse se montrer en Belgique et peut-être un des plus anciens. On peut en voir un pied fort beau encore mais plus jeune dans le jardin de M. Brahy- Ekenholm, à Herstal, près de Liège. Cependant, on rencontre rarement cet arbre et on a grand tort de ne pas le propager davantage. Sa forme est gracieuse (voyez la pi. 4), son port majestueux, ses panaches ondoyants rehaussés par le jeu de lumière de ses feuilles luisantes. Il est moins eflîlé que le saule, plus grave que le bouleau pleureur : sa cime est un vrai manteau aux plis larges et pleins qu'aucune autre espèce d'arbre pleureur ne peut imiter. CELG. HOIIT. T. IV. 4 26 — PI. 4, Sùi.. lie. ^. Seoeret/iu l\ Il 1)11 S biflorus 27 JARDIN FRUITIER. LE FRAMBOISIER DU NEPAUL, Par m. Ch. Morren. M. Alphonse De Candolle est arrivé à une désespérante conclusion , après avoir étudié l'histoire naturelle des substances alimentaires que nous demandons au règne végétal. Toutes les plantes dont l'homme se nourrit, sont vieilles comme l'humanité elle-même et leur premier emploi se confond avec les premières lueurs de la société. L'Amérique ne dota pas l'Europe d'un mets nouveau, mais seulement de plantes inconnues à l'ancien monde tandis qu'en Amérique même, nul ne sait à quelle époque reculée il faut faire remonter la connaissance de ces aliments. En agri- culture, l'innovation semble donc réprouvée par l'organisation même des choses créées. Heureusement que le jardin fruitier échappe à cette triste fixité : des fruits nouveaux s'introduirent, mais, après tout, leur nombre est encore très-restreint en comparaison de la quantité immense d'espèces à fleur qui viennent orner nos serres et nos jardins. Aussi, est-ce une bonne fortune qu'un fruit réellement nouveau et j'entends par là d'une espèce ou d'un genre antérieurement inconnu. C'est donc avec plaisir que nous livrons à nos abonnés le portrait d'un framboisier arrivé tout récemment du Népaul, en Angleterre, sous le nom botanique de Ronce biflore, Rubus biflorus, décrit comme tel par Buchanan, dans la Cyclopédie de Rees, et confirmé sous le même nom par De Candolle, dans le prodrome général. Cependant Don, dans le prodrome de la Flore du Népaul, décrivit la même plante sous le nom fautif de Ronce pédonculeuse, Rubus pedunculosiis, et plus tard les jardiniers, quand ils connurent ce framboisier, le prirent pour une espèce à écorce fort blanche, décrite par Douglas, sous le nom de Rubus leucodermis. Il ne serait pas même étonnant que sous ce nom fautif, cette même espèce ne circulât encore dans le commerce, surtout chez les horticulteurs qui ont des relations avec l'Angleterre. Le framboisier du Népaul forme un arbrisseau rameux et touffu comme notre framboisier du mont Ida, en atteignant de dix à douze pieds de hauteur, droit, branchu, armé de branches latérales grêles; tout l'épi- derme des tiges et des branches entièrement couvert d'une couche pulvé- rulente qui s'ôte par le frottement de la main, cette poussière blanche devenant quelquefois rosâtre; ce caractère est ce qui a fait nommer ce végétal leucodermis ou peau blanche; la tige et les rameaux aiguillonnés, les aiguillons pointus, acérés, à base élargie, subulés au bout, recourbés; — 28 — ceux des liges forts, résistants, ceux des rameaux plus faibles. Les feuilles sont très-variables sur une même plante, vertes ou presque glabres, duveteuses et blanchâtres au-dessous, au sommet cordiformes, irréguliè- rement et inégalement lobées, et ailleurs très-régulièrement trilobées, parfois composées et ternées; les lobes latéraux généralement étroits, ovales et sessiles, l'intermédiaire ou le terminal plus large et pétiolulé, quelquefois, mais plus rarement, penné avec cinq folioles, toutes incisées- dentées, à nervures pennées ou réticulées. Les pédoncules ont environ deux pouces de long, parfois naissant deux à deux, plus généralement fascicules, au bout des branches latérales herbacées inclinés, simples ou branchus et portant de une à trois, ou rarement plus, de fleurs blanches. Le calice est presque hémisphérique, divisé en cinq lobes acuminés, duveteux; pétales obcordés, étalés, se recouvrant parleurs bords; les étamines petites, formant un anneau dense autour de l'ovaire. Le fruit est de la grandeur d'une framboise ordinaire , de la même forme , mais d'une belle couleur jaune d'ambre. Quand le fruit est jeune, il est enve- loppé dans le calice persistant, mais plus tard le calice s'ouvre, se rejette en arrière et le fruit se montre nu et dans toute sa beauté. La floraison a lieu en mai et juin, se succède ensuite jusqu'à la fin de la saison avec une fructification qui continue de même. Quand la fram- boise d'ambre est mûre, elle est appétissante à la vue et à l'odorat : son arôme est délicieux. Le goût est aussi nouveau qu'agréable. Partout en Angleterre on recommande aujourd'hui la culture de ce framboisier comme fruit de dessert. La culture n'offre rien de diflîcile : elle est en tous points semblable à celle du framboisier et la reproduction se fait de même par surgeons , divisions de pieds, boutures et graines. Nous recommandons aux horticulteurs de tous les pays de se procurer au plus tôt le framboisier du Népaul, de le reproduire afin de pouvoir en meubler les jardins des nombreux amateurs d'un arbuste qui promet un avenir sérieux et agréable. NOTE SUR LA POSSIBILITE, LES MOYENS ET LA NECESSITE DE DOTER LA POMOLOGIE D'ESPÈCES A FRUITS A NOYAU A FLO- RAISON TARDIVE , Par m. Bossin , Membre de la Sociélc Impériale d'Horlicullure de Paris. La pomologie est sans contredit une des branches de l'horticulture qui a accompli de nos joiu's les plus notables progrès. Jusqu'à présent les recherches et les travaux des pomologues ont eu pour but la conquête des — 29 — Iruits recojîimandables par leur saveur, leur volume, leur succession de maturité, et on peut dire qu'ils étaient dans la bonne voie, comme le prouvent leurs éclatants succès , dont il nous reste pour preuve et pour résultats cette foule de fruits nouveaux introduits depuis un demi-siècle dans nos jardins et vergers, fruits dont l'ensemble rivalise avec les meil- leurs du dernier siècle et sur lesquels quelques-uns ont un mérite incon- testable de supériorité. Le côté de la solution qui s'est le plus approcbé de la solution est celui de la succession maturative et non interrompue des bonnes espèces hâtives et tardives. M. le colonel Leconteur nous écri- vait de Jersey en l'année 1845 : u Je ne cesserai de semer et de travailler à la propagation des bons fruits que quand je serai en possession de cin- quante-deux espèces toutes méritantes à divers degrés, dont la maturité se suivra de semaine en semaine, pendant toute l'année, de manière à pouvoir changer de fruits tous les dimanches. » Il faut plus que la vie d'un homme persévérant et dévoué pour atteindre même partiellement un semblable résultat. La masse des consommateurs, dont la vue, l'odorat et le goût sont également charmés et satisfaits par la présence de tous ces fruits nouveaux et délicieux, ne se doutent guère de ce que ces conquêtes pomologiques ont coûté desoins, de peines, de re- cherches aux véritables amateurs. Aujourd'lmi que, pour ainsi dire sur tous les points du globe, les hommes les plus compétents travaillent assidûment à la solution prise de ce point de vue, nous voudrions, s'il était possible, appeler aussi leur attention sur un autre côté de la même question dont il est à notre con- naissance qu'aucun homme ne s'est occupé sérieusement; voici notre projet. Un fait désastreux se produit périodiquement tous les ans; dans les deux tiers de nos départements, il y a souvent absence complète ou presque totale de récolte sur les arbres à fruit à noyau, tels que pruniers, amandiers, cerisiers, pêchers, abricotiers, sur ces derniers plus souvent que les autres. La cause de ces désastres, si fréquents dans nos jardins, est bien connue: elle réside uniquement dans les gelées tardives qui sur- prennent les arbres en fleur, ou qui atteignent les fruits au moment même où ils viennent de nouer. Vivement impressionné par le renouvel- lement annuel de ce fait et de sa conséquence déplorable, voici l'idée qui s'est présentée à nous pour essayer d'y porter remède, il faudrait pour réussir, que notre voix fut entendue, et que des semis de noyaux des quatre ou cinq genres désignés plus haut fussent faits simultanément, tous les ans, sur tous les points de la France, de l'Europe et du monde civilisé , dans le but exclusif de parvenir à la conquête d'espèces à flo- raison tardive, ne s'opérant que quinze jours ou trois semaines après celle des variétés ipie nous possédons, c'est-à-dire après les dernières gelées, et ayant devant elles toutes la belle saison pour nouer leurs fruits, les retenir et les mûrir. Il suffirait, pour cela, selon nous, que les — 50 — nouveaux arbres provenant de semis, fussent rigoureusement surveillés à l'époque de leur lloraison, de manière à ne conserver que ceux à floraison tardive. Pour atteindre ce but, ou au moins tenter sa réalisation, nous faisons appel ici à tous les amateurs d'horticulture, aux directeurs des fermes- écoles, modèles et régionales, aux professeurs de botanique, etc., etc., afin que dans chaque département, mieux dans chaque arrondissement, il surgisse un homme de bien, éclairé, persévérant, dévoué aux progrès de l'horticulture, qui consacre quelques ares de terre et peu d'argent à des semis comprenant i "/o cent noyaux d'abricots, 2 "/o cent noyaux de pêches, 5 "/„ cent noyaux de cerises, 4 % cent noyaux de prunes. Ces noyaux sont stratifiés pendant Thiver et semés au printemps suivant; voilà le premier travail. Dans la seconde année, quelquefois la première, les jeunes arbres de semis devront être transplantés dans un terrain destiné à les recevoir, et distancés de 50 à CO centimètres les uns des autres; aussitôt la première ou la seconde floraison qui aura lieu, dans certains genres la quatrième, la cinquième ou sixième année, on mettra à part les variétés qui fleuri- raient plus tard que celles qui se trouveraient plantées dans le jardin, et on ferait des autres tels usages que l'on voudrait. En supposant que notre appel ne fut entendu que d'un seul amateur par département, ce serait pour la France, dans les conditions les plus diverses de sol et de climat, 54,000 pieds d'arbres par an; soit, pendant dix ans qu'il serait nécessaire de suivre cette expérience, un total de 540,000 jeunes arbres, entre lesquels il y aurait bien du malheur s'il ne sortait pas des variétés à la fois bonnes et à floraison tardive, donnant par conséquent des récoltes constantes et toujours assurées. Quant au choix à faire dans les noyaux que l'on devra employer de préférence pour les semis, nous nous adressons ici aux botanistes et aux physiologistes, dont les connaissances profondes pourraient nous venir en aide et nous guider utilement dans la voie génératrice que nous ouvrons; nous leur demandons, avec toute la confiance qu'ils méritent, si nous devons donner la préférence et choisir exclusivement des noyaux recueillis sur des arbres à fructification tardive, ou bien si nous aurions autant de chance de succès en semant des noyaux recueillis au hasard , mais sur de bonnes espèces. Ainsi par exemple, dans les pêches, prendra-t-on plutôl le téton de Vénus, que la 3Iadeleine hâtive? Dans le cerisier, préféra-t-on la cerise du Nord, ou la cerise anglaise, etc.? On dit que dans les Py- rénées espagnoles, l'olivier Saye, à floraison très-tardive, qui s'est produit par semis accidentel, ne gèle jamais, parce qu'à l'époque des gelées il n'est pas encore en végétation. Il n'y a pas de raison pour que les semis géné- ralisés et répétés du nord au midi, de l'est à l'ouest de la France, ne donnent pas aussi naissance à un abricotier Saye, à un pêcher Saye, etc., donnant des recolles égales fous les ans, d'une manière constante. Dans — 51 — quelques localités de la Normandie, on accorde la préférence aux pom- miers à floraison tardive, parce qu'il est notoirement prouvé qu'ils manquent moins souvent que les autres à la fructification, dans ces con- trées où les brouillards sont assez fréquents. Or, comme il existe des pommiers à floraison tardive, nous pouvons espérer le même résultat dans les semis de noyaux que nous entreprenons (*). Par suite des manques de récoltes successives occasionnés par les gelées printanières, on se trouve dans beaucoup de localités dans la triste néces- cité de changer la nature des produits et de remplacer les plantations d'arbres en plein rapport par d'autres cultures qu'il faut approprier ; mais quand il s'agit d'arracher des arbi'cs plantés depuis cinquante ans, c'est une perte réelle, considérable et irréparable. Ainsi, sur toute la côte qui s'étend de Meulan à Nantes, on était dans l'habitude de planter, dans les jardins et dans les champs , depuis fort longtemps , des abricotiers- tiges, dont les fruits étaient apportés sur les marchés de Paris ou exportés en Angleterre. Les gelées tardives portent une atteinte si grave à toutes ces plantations , qu'elles disparaissent peu à peu. Nous connaissons un propriétaire de nos voisins qui en a arrachés plusieurs centaines en 1852, qui furent plantés par son père , il y a une trentaine d'années environ. Nous-mêmes, qui habitons ce château, nous sommes forcés d'abattre des abricotiers-tiges de tous les âges, dont la plantation fut faite par nos pré- décesseurs, dans notre humble et modeste domaine d'Hannecourt. Un propriétaire de la commune de Fougerolles , entre Plombières et Luxeuil (Haute-Saône), nous racontait dernièrement que cette commune fournissait à elle seule, avant 1847, selon l'état contributif dressé par l'administration des droits réunis , 800,000 litres de kirsch, première qualité. Depuis cinq ou six ans, la récolte des cerises est tellement com- promise par les gelées du printemps, que beaucoup de propriétaires parlent, en ce moment, d'arracher leurs cerisiers. Pour donner plus d'autorité à notre projet et justifier nos convictions, nous citerons un exemple frappant des avantages de la floraison tardive dans les fruits, et principalement dans ceux à noyau. Un amateur d'arbres fruitiers, qui possède une propriété dans le département de l'Yonne, dont le jardin est situé sur un plan fortement incliné, a des espaliers de haut en bas. Les pêchers, abricotiers, etc., qui se trouvent dans la partie (1) Le Comité de pomologie, de la Société d'horticulture de la Seine, après avoir pris connaissance de cette note, est d'avis que le choix des semences est tout à fait indifférent dans les arbres à fruit à noyau surtout. Le plus grand nombre, en effet, donne d'assez bons fruits, dont quelques-uns se rapprochent même beaucoup de leur type ; il en est ainsi dans les pêchers et abricotiers. Les pruniers donnent des produits fort incertains. On voit des prunes vertes pro- duire des prunes violettes et vice-versa. Quant aux cerises c'est encore pis, quelle que soit la qualité du fruit-mère : il est fort rare que les enfants ne soient pas petits, aigres et mauvais. Il est donc inutile de se donner la peine de choisir les noyaux; ce n'est qu'en multipliant les semis qu'on peut espérer quelques hasards favorables. — 52 — inférieure, fleurissent beaucoup plus lot que ceux qui sont en haut du jardin et produisent rarement; ceux au contraire qui sont dans la partie supérieure , donnent des fruits en assez grande quantité tous les ans , mais fleurissent quinze jours ou trois semaines plus tard. II s'agit donc de conquêtes nouvelles à faire qui seront d'un haut et puissant intérêt pour l'horticulture comme pour la physiologie. Osant croire au succès de notre entreprise, dont nous rendrons compte l'année prochaine , nous avons l'espoir que notre appel, adressé aux hommes compétents, sera entendu et qu'il donnera de bons résultats. CULTURE MARAICHERE VIN DE RHUBARBE, Par m. Ch. Morren. 11 n'est bruit, dans le monde horticole, de l'autre côté du détroit, que du vin de rhubarbe. Les Anglais prétendent que l'oïdium va leur faire boire du Champagne mousseux excellent , à très-bon marché ! M. Brocks a donné à M. James Cuthill le procédé suivant pour confec- tionner un délicieux vin de Champagne ; « Pressez six livres de pétioles coupés de rhubarbe, ajoutez un gallon d'eau froide de source; laissez reposer cinq ou six jours , remuez le tout trois ou quatre fois par jour; passez à travers un tamis ; ajoutez quatre livres de sucre et un citron coupé en tranches; mêlez exactement; et puis laissez la liqueur en repos absolu, pendant environ dix jours. Cette période passée, on filtre à tra- vers un tamis de fine mousseline et enfin on met le liquide en tonneau. On ajoute un peu de colle de poisson dissoute dans ce même jus. Une once de colle suffit pour 9 gallons de liquide. Seulement, il ne faut mélanger la colle qu'après que la fermentation est finie. Alors on ferme la bonde ou bien on met en bouteille et on en fait usage un an après. Si l'on désire du Champagne fort clair, on n'emploie que du sucre blanc, en pain. » M. James Cuthill se promet beaucoup de ce procédé et calcule quelle effroyable quantité de Champagne l'Angleterre pourra bientôt fournir au monde entier. Pendant que le Champagne de rhubarbe vieillit dans ses bouteilles, M. Robert Sait produit à Longton une variété de rhubarbe entièrement pourpre et d'un pourpre foncé, et un jardinier du Chirk-Castle obtient des pétioles dont quatre séparés de leurs feuilles ont pesé 22 livres et demie ! C'étaient des rhubarbes Victoria. 1-0. hpiuieclniiii rubrun. j. Kpmiedium versicolor, 8-().J'l|)iinctlium piuiialum. — 53 — HORTICULTURE. NOTICE SUR QUELQUES EPIMEDES REMARQUABLES,) Par m. Cii. Morren. Epimcdîuiii rubruui. Il circule dans le commerce horticole de Belgique un Epimedium sous le nom d' Epimedium rubruni. Le nom est bien donne; nous le conser- vons. Seulement la plante n'étant ni décrite, ni figurée, ni analysée, nous tâcherons de combler ces lacunes. EPIMEDIUM RUBRUM. (§ Macroceras.) Caule subpedali, tereti, ad foliorum inser- tionem arliculato , ibi piloso, cœterum pubc raro, albido, flaccido veslito; foliis tritcr- nalis, foliolis bi-tripollicaribus lenipore ilo- rationisvix pollicaribus, obliquis, cordatis, lobis basées aculis, apice uni-bi aut Iri-cus- pidalis, acuminalis, argule denlalis, dcnlibus pungentibus setosis , basi 5-7 nerviis ; spica lerminali slricla, glabra, niulliflora, floribus primum cernuis, mox erectis ; bracteis niinu- tissimis , acuminatis ; calyce tetraphyllo , fo- liolis ovato-oblongis, navicularibus purpureo- griseis; petalis infimis oblongo-lanceolalis , concavis, apice suboblusis, subundulalis , alro-purpui-eis, inleriora vix superantibus neclariformia, cucullata, basi inflata, intégra, rotundata, apice obliiso, elongato, flavesccn- tia , vix rubicunda ; genitalibus ul in E. ma- crantho. Tab. 6, fig. 1-5. Fig. 1. Calycis foliolum. 2. Petalum. 3. Nectarium. 4. Slamen. 5. Pistillum. EPIMEDE ROUGE. (§ Macroceras.) Tige presque d'un pied, arrondie, arliculée à l'in- sertion des feuilles, poilue en cet endroit, ailleurs couverte d'une pubescence rare, blanche, lâche ; feuilles Irilcrnécs, folioles de deux ou trois pouces de longueur, à peine d'un pouce au temps de la floraison, obliques, cordées , lobes de la base aigus , au sommet deux ou trois fois cuspidées, acuminées, fine- ment dentées (dents piquantes, séteusesj, por- tant à la base de 5 à 7 nervures; 17»' terminal , raide, glabre, niultiflore, fleurs d'abord pen- chées , puis relevées ; bractées très-petites , acuminées, calice tétraphylle, folioles ovales- oblongues , naviculaires , d'un pourpre gri- sâtre; pétales inférieurs oblongs-lancéolés, concaves, au bout subobtus, subondulés, d'un pourpre noir, à peine dépassant les in- ternes nectariformcs, cucullés, enflés à la base, entiers, arrondis, obtus au sommet, allongés, jaunâtres, à peine rougeâlres; les organes reproducteurs comme dans VEpime- dium macranthum. PI. 6, fig. 1-5. Fig. 1. Folioles du calice. 2. Pétale. 3. Nectaire. 4. Étamine. 5. Pistil. L'origine de cet Epimedium est douteuse. Les uns prétendent que c'est une espèce introduite en Belgique à la suite du voyage de M. Von Sicboldt, au Japon, et restée lougtenq)s ignorée au jaixlin botanique de Gand. Les autres soutiennent que c'est un produit hybride enfanté par M. Donckelaar, BELG. nORT. T. IV. 5 — 54 — jardinier en clief de cet établissement. La première opinion a pour elle l'étrangeté de la plante, la plus distincte de tous les épimcdes, sa fixité dans les jardins, la force de sa végétation qui n'indique guère une origine d'hybridité toujours sujette à disparaître. La seconde opinion invoque en sa faveur que c'est la forme en général de V Epimedium macranthum (Morr. ctDccaisn., Ann. des se. nat., t. 2, 4854), avec le coloris fortement prononcé et plus foncé de VEpiniedium alpinnm. Nous ajouterons que sur les pieds que nous possédons, beaucoup de feuilles sont tricuspides, mais elles n'ont aussi parfois qu'une pointe; le bord est coloré de rose comme dans des epimedium donnés naguère comme hybrides, par les Annales de la Société royale d'agriculture et de botanique de Gand, tome V, 1849, p. 91. Quelle que soit la vérité au sujet de l'origine de cette plante, il est de fait qu'il n'y a pas un seul epimedium qui puisse rivaliser avec elle pour la beauté, l'ampleur des fleurs, quoique plus petites que celles du macran- thum, mais plus fournies, plus larges, moins sveltes et moins délicates que celles de ce dernier. La végétation est très-vigoureuse, les épis abondants et la feuillaison touffue. On sait combien la culture des épimèdes est facile. Il leur faut une terre de bruyère ordinaire de jardin , engraissée de fumier consommé , de la mi-ombre sous quelques bosquets. Nous nous trouvons bien de les placer sous et entre les massifs des Mahonia, des Berberis, leurs analogues de famille, sous la protection desquels ils s'étendent en plaques toufl'ues d'une splcndide fleuraison au mois de mai. La reproduction se fait facilement par la division des pieds. Si ce que l'on dit de la facilité à s'hybrider entre elles des différentes espèces d'Epi- medium est exact, ces plantes se multiplieraient encore mieux par graines. Il serait curieux d'essayer des semis successifs sans aucun mélange depollen, et très-probablementles produits seraient aussi variés par cette simple voie de progéniture naturelle que par ces opérations très-problématiques dont les jaixliniers s'attribuent aisément le mérite sans s'inquiéter de la répul- sion toute providentielle que la nature doit apporter à ces mélanges. V Epimedium nihrum se vend à Liège, au prix de trois francs. Epîmcdium vcrsicolor cupveutn. Nous avons fait connaître le type de cette variété de VEpimedium ma- cranthum dès 1849, dans le cinquième volume des Annales de la Société royale d'agriculture et de botanique de Gand (p. 92). Elle provient, dit-on, de la plante typique hybridce par on ne sait quel pollen. Les éperons deviennent beaucoup plus courts, plus trapus, la coloration de ces organes est jaune comme dans VEpimedium pinnaium, mais les extrémités en — 55 — sont pourpres. Sur les variétés que nous cultivons sous ce nom dans les jardins de Liège, la couleur des pétales est aussi remarquable que rare dans la végétation , c'est le rouge saumoné clair ou le rouge cuivré. La culture de cet Epimedium n'a rien qui la distingue de celle de ses congénères. On le place en pleine terre, dans de la terre de bruyère et le plus possible à l'abri de quelques arbustes, comme rosages, azalées, épines-vinettes, mahonia et autres plantes analogues. La multiplication se fait uniquement par division de pieds, à l'arrièrc-saison ou au com- mencement du printemps. Epimedium piiiiiatiim. Beaucoup d'horticulteurs vendent encore sous le nom à'Epimcdium colchicum une espèce d'epimedium qui n'a jamais eu réellement ce nom, injustifiable d'abord et né ensuite dans les catalogues commerciaux sans la sanction de la description botanique. VEpimedium colchicum est sim- plement YEpimedîiim pinnatimi, anciennement décrit par M. Fischer, et figurant dans le premier volume du Prodrome de De Candolle. C'est une très-jolie et très-gracieuse plante, et nous ne savons pourquoi elle ne se trouve pas dans tous les jardins à côté des jolies espèces japonaises. Poilue, à feuilles ternées ou biternées, devenant très-grandes, à folioles longuement pétiolulées, les adultes glabres, cordées, ovées, ciliées et den- tées, ses épis radicaux sont multillores , les pétales arrondis, les nectaires cucullés, éperonnés et les bords mordus. La vraie patrie de cette jolie plante sont les bois montagneux et om- bragés du Gilan, province de la Perse, où Ilablitz découvrit naguère le premier cet épimède à fleurs jaunes. On a ensuite retrouvé cette même espèce au Caucase, sur le mont Talusch, entre Lenkoran et Suwant, à une élévation d'environ 2,400 pieds au-dessus de la mer. Introduit dans les jardins d'Europe vers 1848, à l'état vivant, VEpime- dium pinnatum a, dès le commencement, été méconnu et vendu sous le nom de Colchicum. Sur les premiers pieds l'extrémité des éperons était rouge et quatre boutons de cette couleur se distinguaient sur le fond doré de toute la fleur. Depuis, nous voyons que la plupart des Epimedium pin- natum sont entièrement jaunes, sans la moindre apparence de pourpre. On pourrait nommer cette variété unicolor , car elle l'est réellement. V Epimedium pinnalum fait un charmant clTet dans les jardins : sa fleur rappelle les hélianlhèmes, mais les épis l'en éloignent et l'épimèdc fleurit d'ailleurs à une époque où les hélianthèmes commencent seulement à végéter, c'est-à-dire au mois de mai. Très-répandue aujourd'hui dans nos jardins de Belgique, cette espèce ne s'y vend plus qu'un franc. On devrait la voir partout. De la terre de bruyère, de la mi-ombre, de la protection de quelque arbuste, des arrosements jnodérés, tels sont les — 56 — seuls soins qu'elle demande. On la reproduit par graines qu'on sème immédiatement à maturité et on la multiplie par division de pieds au premier printemps ou en automne. Il y a peu d'années, les botanistes (M. Decaisne et autres), pensaient que dans nos climats les épimèdes japonais ou indiens ne donnaient pas de graines mures , mais le fait est bien prouvé aujourd'hui que ces graines mûrissent chez nous et les hy- brides nés sous notre ciel en sont d'ailleurs des preuves irréfragables. QUELQUES MOTS SUR LA CULTURE DU DAHLIA, SA DÉPLANTATION ET SA CONSERVATION, Par m. Bauduin, Propriétaire à Loos, près Lille, Tcri'aiu. — En général, tous les terrains produisent de belles fleurs de dahlias, lorsque les plantes sont bien exposées et la terre profondément labourée et suffisamment pourvue d'engrais; cependant le dahlia s'accom- mode mieux d'un sol humide et léger. Fumures. — Aussitôt la déplantation de vos dahlias, quel que soit le terrain , donnez-lui, tous les deux ou trois ans, une couche de fumier gras, béchez-le en terre et mettez votre terrain en sillons; ne nivelez que dans le courant d'avril et donnez encore un léger labour. — Dans l'année où le terrain n'a pas reçu de fumier, il devra recevoir, soit de la courte graisse, au moins quinze jours avant la plantation, soit du tourteau de colza délayé dans l'eau pendant quatre à cinq jours; cet engrais peut se mettre quelques jours avant la plantation. En plantant vos dahlias, mettez dessous et à l'entour du sujet un peu de terreau bien consommé : c'est assurer sa reprise et son développement immédiat. Du 10 au 20 août, vos plantes doivent être en boutons : alors, seule- ment, gratifiez-les encore de tourteau ou de courte graisse à 50 centimètres en tous sens de la tige; répétez deux ou trois fois, si besoin est, à quinze jours de distance. Les dahlias striés, panachés ou à bouts blancs demandent à être cultivés en terre plus maigre. — Un mélange de sable avec la terre est parfois utile. — Les variétés destinées à la formation des bouquets , exigent peu d'en- grais si on veut avoir de petites fleurs. Le dahlia à centre vert ne demande que de l'eau pure et un arrosemcnf plus fréquent. Boiitiipcis. — Que vos plantes soient saines et courtes avant de les — 57 — planter; rejetez toutes celles dont les pointes sont rabougries et les tiges dures, c'est-à-dire toutes celles dont la sève a été arrêtée. — Ne livrez pas tout de suite à la pleine terre les plantes qui auraient voyagé ; rempotez aussitôt réception, dans un pot un peu plus grand, celles dont la fatigue est trop grande; toutes doivent être arrosées légèrement et placées plu- sieurs jours à l'ombre; — au soleil quelques jours avant la plantation; — sur couche froide, les plantes moins fortes, en ayant soin de leur donner le plus d'air possible; — les malades, en serre, et que le degré de chaleur soit assez élevé. — Si, lorsque vous recevez vos plantes, l'époque delà plantation est arrivée, et qu'il vous tarde de les mettre en place, si elles ne sont pas trop délabrées, plantez-les en ayant la précaution de les bien garantir du soleil jusqu'à leur reprise : employez quelques branches de feuillage comme abri , ou couvrez-les avec un pot qu'on enlève le soir ou par un temps couvert. Greffes. — Une greffe bien faite, sur un bon tubercule, fait souvent merveille; elle a l'avantage de pouvoir se planter jusqu'au 15 juillet et de donner des fleurs remarquables pour les concours. Pour qu'une greffe soit née viable , il faut que les yeux soient adhérents au tubercule et la tige affranchie. Tiibercnlcs. — Un bon tubercule a pour moi plus de valeur qu'une bouture et qu'une greffe. — La plante en est ordinairement plus vigoureuse; mais n'abusez pas de cette vigueur, et laissez votre dahlia fleurir sur une seule tige. Plautatîou. — Avant même de commencer votre plantation, tracez sur le papier le plan de vos massifs de dahlias et disposez la place que chaque pied doit occuper. Personne n'ignore que les couleurs doivent être variées et les hauteurs assorties. Placez d'abord les coloris jaunes, éloi- gnez-les les uns des autres; il en est de même de ceux à fond blanc; oppo- sez bien vos couleurs; que le goût préside à ces arrangements, alors au- cune fleur n'aura à redouter la concurrence de sa voisine et votre massif charmera les yeux. C'est un point essentiel que le moment de la plantation, c'est une des conditions dont dépend toujours une floraison plus ou moins belle. — Plantez du 10 au 20 mai les variétés sujettes à donner des centres verts et noueux ; celles d'une complexion plus délicate, du 10 au 20 juin; ces plantes exigent une terre forte , un air vif et pur. Quant aux autres variétés, plantez-les dans les premiers jours de juin; — dans le midi de la France on doit planter au moins 10 jours plus lard et à l'exposition de Vest, qui est la plus favorable. Aucune ne doit l'être à l'ombre, sous les arbres ni dans un terrain creux. — Les dahlias doivent être placés à 1 mètre 50 centimètres de distance en tous sens , pour qu'on en obtienne toute la croissance désirable. — Placez vos tuteurs avant la plantation de vos dahlias; adjoignez-leur deux tuteurs plus petits qui — 58 — afl'ermii'ont le grand et préserveront les racines de vos plantes. — Que les principales tiges soient bien assujetties au tuteur principal. — Au fur et à mesure du développement de vos plantes, distancez les branches à donner fleur. — Ayez soin que le soleil et l'air circulent partout. Labour.- — Un mois après la plantation de vos dahlias, donnez un bon labour à la surface de la terre, répétez-le souvent; prenez garde aux jeunes racines ! Arrosenients». — Un arrosement constant est nuisible; il rend la terre dure et mauvaise autour des pieds; pour les tenir constamment liu- mides, recouvrez d'un fumier décomposé après avoir remué la terre. — Employez toujours l'eau douce mêlée d'engrais. — Lorsque vos plantes sont fortes, il faut leur donner une grande quantité d'eau à la fois et non arroser souvent. — Par un temps sec, ne négligez jamais, lorsque le soleil aura ([uitté vos plantes, de donner sur le feuillage un léger arrosement : cette rosée est un préservatif contre la grise , et donne une grande vigueur à vos plantes. Taille. — Pour obtenir de belles fleurs dignes des expositions, il faut, du 10 au 20 juillet, supprimer les branches inutiles; ménagez-en une ou deux à 2S centimètres du sol; alternez d'étage à étage les suppressions; ne laissez jamais à vos plantes une quantité de petites branches inutiles pour les retrancher toutes ensemble. — Ne soumettez pas à la même taille toutes les variétés, car ce qui est convenable pour l'une serait nuisible pour l'autre. — Épargnez celles à centres durs et épais. — Taillez forte- ment celles dont vous voulez forcer la culture pour rendre les fleurs plus grandes et le centre plein. Il faut suivre à peu près la même règle dans la manière de retrancher les boutons; aux fortes fleurs, éboutonnez plus tard : pétales et forme y gagneront. — Aux variétés qui donnent trop de boutons et dont les fleurs ne sont pas destinées pour bouquets, supprimez de bonne heure les bou- tons.— Vers la fin de septembre, on peut déshabiller un dahlia presque complètement, c'est-à-dire supprimer toutes les branches qui ne por- teront plus de fleurs, tous les boutons qui ne doivent plus éclorc, néanmoins, ménagez encore un peu les plantes dont le centre vert n'aura pas entièrement disparu. Floraison. — Si vous destinez des fleurs aux expositions, couvrez celles à coloris clair et à fond jaune quatre à cinq jours auparavant. — ' Quelques jours sufiisent pour les variétés légèrement bordées ou pointil- lées. — Evitez le frottement contre les fleurs et les feuilles voisines. — Employez de préférence les couvertures en fer blanc peintes en blanc. — Ne laissez jamais séjourner sur vos plantes les pétales tombés de vos fleurs, ils brûlent les feuilles, arrêtent la sève des jeunes liges et vos plantes n"ont plus la fraîcheur désirée. — 59 — Les dahlias à pédoncules faibles demandent à être abrités. Ayez une planche carrée, de 20 centimètres environ, clouée par le milieu à l'ex- trémité d'un tuteur spécial. — Que votre planche soit fendue pour y faire passer le pédoncule de la fleur que vous désirez recouvrir d'un pot. — Ce moyen a un double avantage : les fleurs se conservent plus fraîches et c'est un préservatif contre les insectes. — Par ce procédé, on peut aussi hâter l'épanouissement d'un bouton, en plaçant au lieu d'un pot un verre dépoli. In.ectcs. — On détruit les perce-oreilles au moyen de petits pots con- tenant un peu de mousse sèche ou de foin que l'on place au sommet du tuteur. — Il faut une active vigilance et une destruction journalière. — En commençant la chasse en avril, vous atteindrez les mères. — Lors de la floraison, cet insecte aura à peu près disparu. Lavez avec un pinceau trempé dans une forte infusion de tabac les tiges attaquées par les pucerons, et vous les détruirez. Le ver blanc attaquera de préférence le fraisier ou la laitue; plantez-en donc autour de votre dahlia si vous avez à redouter ce terrible insecte. Quant aux limaces, on les écarte en jetant, dès le début de la planta- lion, au pied du dahlia, soit de la chaux, soit des cendres ou du plâtre; on les prend au moyen d'un peu de son dont elles sont très-friandes. — La chasse aux limaçons doit se faire le soir et le matin, surtout après la pluie. — On fait aussi le soir la chasse aux chenilles dans les mois d'août et de septembre. — Si besoin est, faites une ou deux chasses de nuit, le dé- rangement sera compensé par les résultats. Le tigre, l'un des plus pernicieux de tous les insectes, se détruit le matin, avant les premières chaleurs, il est alors sans force : secouez lé- gèrement une à une les branches attaquées, faites tomber cet insecte sur un objet propre à le faire apercevoir pour le tuer. Si les guêpes tourmentent aussi vos dahlias, placez à la plante attaquée de petites bouteilles contenant de l'eau avec un peu de miel. On écarte et on détruit les fourmis par plusieurs moyens : — la ver- dure de la tomate mise au pied du dahlia ; — l'arrosement avec de l'eau dans laquelle on aura fait bouillir du persil; — par un pot retourné mis au pied du dahlia sous lequel elles se réfugieront, dès que vous avez soin de rendre la terre très-légère , il vous sera facile alors de les prendre et de les détruire, ou bien encore entourez le bas de la plante attaquée par de la laine trempée dans l'huile. — L'eau de pruneaux placée dans un vase, près des fourmillières, les attire et les fait périr. — Enfin leur des- truction peut s'opérer par les fumigations de soufre. Les grillons taupes plus connus sous le nom de courtillières, sont d'une destruction plus difficile; ces insectes sont friands du dahlia qu'ils font périr en peu d'instants. — Ils voyagent dès le soir et la nuit, et signalent leur présence comme les taupes; ils fouissent, tracent, et élèvent aussi de petits monceaux de terre. Faites-leur une chasse incessante , suivez-les — 40 — dans leurs excursions, dansleurs nombreux zig-zags, et avec delà patience vous parviendrez à en atteindre et à les détruire. — S'ils se réfugient sous un arbre, sous une plante, qui arrête vos poursuites, prenez un arrosoir rempli d'eau, ajoutez-y un verre d'huile de lin ou tout autre huile grasse, versez sur leurs traces et leurs environs, et, si les courtillières s'y trouvent logées, elles sortiront de leurs retraites pour venir mourir à la surface. — Le soufre et l'essence de térébenthine auraient aussi pour effet de suffo- quer et d'ôter la respiration à ces redoutables insectes. Un sol maigre, une grande sécheresse donnent parfois naissance à une multitude de petits insectes [acarus) qui amènent la grise, maladie fu- neste aux dahlias : clic arrête la sève et produit le désordre le plus com- plet dans la végétation. — Que la plante soit en serre ou en pleine terre, le tabac est un remède efficace; — en serre par la fumigation; en pleine terre par l'infusion : lavez et seringuez les plantes malades , supprimez les feuilles fortement attaquées et améliorez le sol. — Si ces insectes résistent à ce remède, seringuez avec de l'eau pure les plantes attaquées, et sau- poudrez-les de soufre. Déplantatiou. — La vérification de vos dahlias doit précéder la dé- plantation; c'est dans les premiers jours d'octobre que cette opération doit être faite. — Il est facile alors de constater Tidentité de la plante et d'indiquer le mérite de chacune d'elles ; — assurez-vous bien de leurs numéros, s'ils correspondent à ceux indiqués dans votre catalogue. Les erreurs accusent une grande négligence et peuvent même laisser soupçonner la bonne foi. Du 5 au 40 octobre, dans la crainte d'une gelée précoce, ayez soin de couvrir le pied des dahlias de terre ou de feuilles sèches. — On peut ainsi attendre avec sécurité, avant de commencer la déplantation, une pre- mière gelée , qui arrive souvent ici du 20 au 50 octobre. — A cette époque, la floraison touche à sa fin. — Déplantez vos raretés d'abord, choisissez un beau temps, laissez essuyer les racines, et ne négligez pas de les ren- trer le soir même. Les tiges devront être coupées à 2 centimètres environ du collet, l'en- lèvement doit s'opérer avec soin, afin de ne pas endommager les tuber- cules; trois à quatre coups de bêche doivent suffire; assujettissez bien les étiquettes; ne laissez pas séjourner dans la tige la sève qui s'y épanche, elle pourrait porter, au collet, une atteinte parfois mortelle. — Plusieurs jours après la déplantation, on peut faire tomber la terre qui couvre le collet, celle qui est inutile aux racines; mais prenez garde de rompre ou de tordre les tubercules qui alimentent les yeux. — Un morceau de bois pointu suffit à cette opération. Les tiges coupées, mises en terre immédiatement, seront un bon en- grais. — Tassées dans une fosse, elles fourniront, deux ans après, un excellent terreau. _ 41 — ConscPTatioii. — Quoi qu'on fasse, on pord toujours quelques plantes tous les ans. — Dans nos contrées nous ne les conservons pas en terre ni dans des fosses ad hoc. — La racine du dahlia se maintient mieux avec une légère humidité qu"avec une grande sécheresse; cependant, un à deux degrés de gelée porteraient une atteinte mortelle aux racines humides, tandis que celles qui sont sèches pourront ne pas en souffrir. L'orangerie, la serre tempérée, sont les lieux les plus favorables à la conservation des tubercules. — L'endroit où l'on met les fruits convien- drait aussi. — On doit préférer la cave au grenier. Dans tous les cas, placez les racines sur des planches, il ne faut les empiler que par défaut d'espace , pour plus de garantie de conservation , couvrez-les soit de terreau ou de terre sèche et tamisée, soit de sable, de sciure de bois, etc. — Visitez-les de temps à autre afin d'emi)ccher toute moisissure, prélude de corruption. Tout tubercule gâté devra être enlevé. CULTURE DES VIOLETTES DE PARME, Par m. Rosciand , -^ Membre des conférences horticoles de Meulan. Cette belle violette de Parme, si appréciée des dames, est d'une odeur incomparable. Ses fleurs, portées sur un long pédoncule, sont grandes, doubles, d'un bleu lilas clair passant au bleu pâle et fleurissent depuis le commencement de novembre jusqu'en avril, sous panneaux bien en- tendu. Pour la cultiver , j'ai soin de mettre cette violette dans une terre siliceuse ou graveleuse, légère mais fertile. Je fume avec du fumier bien consommé ; Je laboure avec précaution , c'est-à-dire que je brise bien la terre, afin de la rendre meuble. Je dresse une planche dont je fais cinq rayons du 4 S mai au 1" juin, je plante au plantoir par poignées à la dis- tance de 20 centimètres les unes des autres. Je dis à la poignée, parce que je fais de fortes touffes, et pour cela je prends ordinairement les pousses de l'année que j'assemble de manière que leur hauteur soit partout égale. La plantation faite, j'arrose pour faciliter une prompte reprise et je ré- pète souvent cette opération si le temps est au sec, en continuant pen- dant les ardeurs de l'été. Au commencement de novembre, je place les châssis et ensuite les panneaux, de manière que la violette soit près du verre, en lui donnant de l'air, si le temps le permet. Au mois de décembre, je l'entoure de feuilles à la hauteur des châssis, en forme de réchaud, et je puis cueillir ainsi de la violette depuis les premiers jours de novembre jusqu'au moi? de mai. BELG. HORT. T. IV. C — 42 — Les délails que je viens de donner, sont le résultat de ma propre expé- rience. Je ferai seulement observer que je ne la plante jamais à la même place, parce que je présume que je ne réussirais pas si bien. Depuis dix ans que j'en plante douze panneaux cliaque année, je n'ai cessé de cette façon d'avoir de belles fleurs, et sans autre ingrédient que des feuilles pour rhiver. Cette espèce ne fleurit bien que sous verre et en hiver; elle est pré- férable à toutes ses congénères. Je la recommande. Elle ne date pas d'au- jourd'hui, mais elle mérite d'être plus répandue. Cultivons-la; nous aurons le plaisir de nous faire des amis. {Conférences horticoles de Menlan.) REVUE DE PLANTES NOUVELLES. Episcia inelitlifolia. Mart., Nov., Gen. cl Sp., Braz., v. 5, p. 42. — De C. Prod., v. 7, p. 547. — Hook., Bot. mag., ann. 1855, tab. 4720. Episcia à feuilles de Mcllittis. Famille des Gesnériacécs. Synony- mies : Besleria melittœfolia, Linn., Sp., p. 8G2. — Besleria melissœ tragifolio, Plum., Gen. Am., p. 29, t. 5. Plante droite, tige obtusément tétragonc, blanchc-pubescente, feuilles ovato-elliptiques, aiguës, pubes- ccntes, hirsutules, à doubles crénelures grossières, réticulées et ru- gueuses, brillantes, au-dessous pâles, pédoncules axillaires, subpaniculcs, pauciflorcs, plus courts que les feuilles; sépales de la corolle égalant presque le tube, longuement lancéolés, subdentés, lobes de la corolle entiers. Cette jolie gesnériacée, anciennement connue de Plumier et de Linné, est récemment cultivée dans nos serres. Le docteur Imray l'a envoyée de Saint-Domingue à Kew où elle a fleuri en mars et avril 4853. Il est probable que cette plante se trouve sur une grande étendue, car De Candolle lui donne comme lieux originaires les lies Caraïbes, la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane française. Hooker en possède des échantillons de Saint- Vincent. Les feuilles sont élégamment réticulées et les fleurs d'un rouge carminé très-élégant. La culture se tiplication aussi La culture se fait comme celle des gesneria de serre chaude et la mul- Littoiiia inodcsta. Hook., Bot. mag., ann. 4855, tab. 4725. Littonia modeste. Famille des Uvulariacées. Ce nouveau genre est carac- térisé comme suit par William Hooker. Périantho subcampanulé, hexasé- pale, sépales oblongo-acuminés, subcarinés, concaves, droits, ouverts, pourvus en dedans, à la base, d'un pore nectariflère , bordé de chaque côté d'une petite écaille. Six étamines hypogynes, libres, plus courtes que le périanthe. Filets subulés, glabres. Anthères oblongues-sagittées. — 45 — obtuses, basifixes , biloculaires, loges s'oiivrant longitiiclinalement par une fente. Connectif ample. Ovaire ovale, longitudinalenicnt Irisulqué, les lobes marques d'une ligne moyenne et longitudinale, triloculairc, pluriovulé; ovules fixés en deux séries à l'angle externe des loges; style de la longueur à peu près de l'ovaire, droit, raidc, profondément trifîde au bout, lobes réfléchis; stygmates obtus, pubescents. Fruit inconnu. La seule espèce de ce genre est une plante de Natal, découverte par M. John Sanderson, grimpante, du port et de l'aspect des methomca; la racine est tubéreuse, le tubercule inférieuremcnt bilobé, le lobe unique produisant le nouveau tubercule; la tige grimpante, simple, arrondie, herbacée, feuillue. Les feuilles inférieures verticillées par trois, les supérieures opposées, toutes lancéolées, longuement et finement acuminécs, glabres, parallèlement veineuses, striées, cirrhifèrcs au bout. Pédoncules courts, axillaires, solitaires, uniflores. Fleurs penchées, oranges. Ces fleurs ont un pouce de hauteur. Ce genre est dédié par Hooker au docteur Samuel Litton , ancien pro- fesseur de botanique à la Société royale de Dublin, homme instruit, aimable et professeur populaire. Le metlwnica portant le nom de snperba et de gloriosa, par Linné, Hooker a cru pouvoir donner par antithèse celui de modesla ou Littonia, qui est après tout une brillante fleur. Culture. La propagation se fait par les tubercules qui, trois mois après avoir été plantés, ont donné des fleurs dans la serre chaude de Kcw, au mois d'avril 1855. La culture spéciale n'est pas indiquée dans le Botani- cal magazine. Lopczia uiacpopliylla. Benth. in pîant., Hartweg.^ p. 83, n° 577. — Lindl., Journ. of Hort. Soc, v. 7, p. 278, etc. — Bot. mag., ann. 1853, tab. 4724. Lopczie à grandes feuilles. Famille des Onagrariacées. Synonymies : Lopezia grandi/Iora , Flora od., Bot. Zeit., 4852. Beitr., p. 401. Jehlia fuchsioïdes des horticulteurs. Plante frutiqueuse, glabrius- cule, feuilles pétiolées, elliptiques ou oblongues, acuminées, denticulées, aiguës à la base, sépales droits ouverts, lancéolés, rouges, égaux à la corolle, deux pétales légèrement onguiculés. Il est bien reconnu mainte- nant que le Jehlia fuchsioïdes des horticulteurs n'est autre que le Lopezia inacrophylla de Bentham. C'est un joli arbuste dans le genre des fuchsias, à fleurs rouges et irrégulières. Culture. Elle est exactement la même que celle des fuchsias. Rliododciidron glaiiciini. llook. fil., Sikk. Hhod., t. 17. — Journ. of hort. Soc. of Lond., v. 7, p. 78 et 102. — Ilook., Bol. mag., ann. 4855, tab. 4724. Rosagc glauque. Famille des Éricacées. Arbrisseau droit, rameaux et feuilles lépidotés; feuilles à pétiole court, oblongucs- clliptiqucs, mucronées, aiguës, coriaces, au-dessous blanchcs-glauccs- centes, ombelles pluriflores à bractées, fleurs médiocres, calices amples _ 44 — à cinq divisions, lobes aigus, siibfoliaccs ; corolle cxtéiiciircmcnl ponc- tuée de glandes roses, tube campanule, intérieurement pubescent à la base, comme celle des filets, lobes du limbe planes, arrondis, dix éta- mines, ovaire couvert d'écaillcs nu à la base, capsule subglobuleuse, égale au calice lequel persiste, squammuleuse, glauque, quinqueloculaire. Au mois de mars 4855, un pied de Rhododendron ylcmcum, environ de 12 pouces de hauteur, montra déjà à Kew ses boutons et le mois suivant les fleurs s'ouvrirent. C'est une espèce très-distincte, introduite par M. Hooker fils, de l'Himalaya du Sikkim par graines, en 1850. Elle se l'cncontre dans les vallées rocheuses du Sikkim et de Bhotan, à l'altitude de 40,000 à 42,000 pieds. Dans sa patrie elle fleurit en mai. Les tiges sont d'un orange brun, tout couvertes de lépides; les feuilles glauques en sont couvertes aussi et elles y deviennent brunes; la corolle est d'un beau rose et le bouquet formé de 5 ou G fleurs. Toute la plante exhale une odeur résineuse. Cidture. On la tient en Angleterre dans une serre tempérée. D'autres pieds plantés en pleine terre de bruyère passent impunément les hivers, mais n'ont pas encore fleuri. La culture est donc celle des rhododendrons ordinaires. Nous avons vu cette plante en reproduction chez M. Jacob Makoi à Liège, qui ne la vend plus qu'à dix francs. C'est une bonne ac- quisition. Skiiiimia japonica. Thunb., Fl.jap. p. 62. — De C. Prodr. v. 2, p. 18. — Sieb. et Suce, Fl.jap. \. 4, p. 425, t. 68. — IIook.,^of. mag., 4855. tab. 4719. Skimraia du Japon. Famille des Aurantiacées. Synony- mies : Ilcx Skimmia. Spreng., Syst. veg.,\. 4, p. 495. Elégant arbuste du Japon où il croît sur les collines de Nangasaki; mais Kœmpfer en a fait à tort un grand arbre. Kœmpfer l'appelle Sin San, valgairemcnt Migami Skimmi. Les feuilles sont alternes, à pétioles courts, obovalcs-oblongues ou oblongues, amincies aux deux bouts, aiguës, entières, coriaces, ponc- tuées de glandes pellucidcs, panicules terminales, thyrsoïdcs, mulliflores, drupes globuleuses. Cet arbuste répand par ses fleurs une délicieuse odeur de daphne. Les Anglais le disent introduit par M. Fortune qui l'envoya à 3IM. Standish et Noble, mais les Hollandais revendiquent cet honneur en faveur de la Société royale pour l'introduction des plantes japonaises dans la mère-patrie, société fondée par M. Von Sieboldt. Il fleurit en serre froide où il passe fticilemcnt l'hiver. Son feuillage froissé répand une odeur aromatique comme ses parents de la même famille, les orangers; les fleurs ressemblent à celles du houx, quoi(|ue faites selon le type des auranliarées; les feuilles sont d'un écarlatc vif et brillant. — 45 — LITTÉRATURE HORTICOLE ET ROTANIQUE. CE QUE JUSTE-LIPSE PENSAIT DE L'HORTICULTURE, Par m. Cii. Morren. Juslc-Lipse, le célèbre philologue et érudit du seizième siècle, ctail Irès-scnsible aux charmes des fleurs. Rubens le représenta à côté de belles tulipes qui étaient ses plantes fovorites comme elles l'étaient du reste du grand artiste lui-même : le roi du coloris devait aimer ces pétales si chauds (le ton et si variés dans leurs inimitables nuances. Juste-Lipse, dans son traité de la constance, s'exprime de manière à convaincre ses lecteurs que son amour pour l'horticulture reposait sur les plus hautes réflexions philosophiques. On peut arriver h aimer les fleurs par toutes sortes de voies , mais celle choisie par Juste-Lipse n'est pas la moins remarquable, et c'est h coup sûr l'une des plus nobles et des plus dignes de respect. Jugez-en par cet extrait : «1 11 faut avouer que votre alTcction pour les jardins est belle, qu'elle est louable : affection à laquelle, si je ne me trompe, l'homme le plus bienfaisant et le plus modeste se sent porté par la nature; ce qui le prouve, c'est qu'il n'est aucun autre plaisir plus désiré et plus recherché dans tous les temps par les hommes d'élite. i> Lisez les livres saints, vous y verrez, avec la naissance du monde, celle des jardins que Dieu donna au premier homme pour sa demeure et pour être le siège, le témoin, le confident d'une vie heureuse, s'il avait su s'y maintenir par sa fidélité. Ouvrez l'histoire, vous trouverez les jar- dins établis par Cyrus, ceux de Sémiramis et ses pots de fleurs, et la meilleure manière de les cultiver de 3Iassinissa , qui a fait l'admiration de l'Afrique. i> Chez les Grecs et les Romains, que de personnages illustres ont laissé tout autre soin pour se livrer au jardinage?... Il faut convenir qu'en cela le jugement des hommes d'un mérite plus élevé a été généralement par- tagé parles classes inférieures du peuple, où l'on voit tous les gens sim- ples et sans ambition s'attacher à la culture des jardins. Puis, il faut reconnaître qu'il y a un certain instinct secret, dont il ne nous est pas facile d'expliquer la cause, qui porte à ce plaisir inoffensif et salutaire. i> Interrogez votre cœur : il vous dira qu'il se sent ému et qu'il scmblc icnaitrc à Taspccl des richesses de la terre, de la beauté de ses fruits ol des merveilles de ses familles de fleurs. Que de variétés dans les formes! dans les coloris , dans les parfums ! 0 mon jardin chéri ! c'est là que mon esprit trouve à agir sans travail et à travailler sans peine. — 4G — i> Je ne suis jamais moins seul, disait un sage, que lorsque je suis seul; je n'ai jamais plus d'affaires que lorsque je suis désœuvré!... Belle expres- sion, que j'ose dire être née dans les jardins, qui sont faits pour récréer l'esprit encore plus que pour servir de repos au corps, et qu'il faut re- garder comme un asile consolateur dans toutes les inquiétudes et toutes les tribulations delà vie. Les hommes vous sont-ils opportuns ou onéreux? Là, vous êtes seul avec vous-même, délivré de leur morgue ou de leurs flatteries, de leur injustice ou de leurs scandales. La veille vous a-t-elle épuisé? C'est là où vous reprendrez, dans un air plus pur, une nou- velle vie, et dans un délassement plus naïf, une énergie plus prononcée pour raccomplissemcnt de vos devoirs. » LA VERVEINE OU L'HERBE AUX ENCHANTEMENTS, Par m. a. Debay, Petite fleur qui dut sa célébrité aux propriétés miraculeuses qu'on lui attribuait. Les anciens croyaient que les cendres de cette plante, mêlées aux boissons, éteignaient les haines et réconciliaient deux ennemis. Les héraults d'armes qui allaient proposer la paix tenaient à la main un rameau de verveine. Les druides en jetaient quelques tiges dans les flammes du bûcher avant le sacrifice, comme symbole de purification. « La Verveine, dit Pulteney, après qu'on avait d'abord fait des libations de miel, devait être cueillie au commencement de la canicule , quand ni le soleil , ni la lune ne paraissaient, avec la main gauche seulement, après avoir décrit un cercle autour de la plante, etc.; ainsi préparée, elle triomphait des lièvres et des autres maladies, elle était un antidote contre la morsure des serpents et un charme pour concilier l'amitié. » Les amants heureux portaient un bouquet de myrte entremêlé de ver- veine. Dans certains endroits de l'Allemagne, on coiffe les jeunes mariés d'un chapeau entouré de verveine pour les garantir de certains maléfices, l'iusieui's provinces de France ne sont point exemptes de cette supcrsti- lion; on y voit des bergers cueillir la mandragore et la verveine en mar- mottant des mots mystérieux. Ils accréditent le bruit qu'ils peuvent, au moyen de ces plantes, jeter des sorts sur les personnes et les troupeaux : on les redoute, on les évite; mais les jeunes filles malades d'amour vont les consulter, et, en échange de quelques pièces d'argent, reçoivent le lameau de verveine qui doit attendrir un cœur indifférent. On voit par là, qu'aujourd'hui la verveine est encore l'herbe aux enchantements. Additiun : En Belgique, les paysans boivent au printemps du thé de \ erveinc pour éviter de se faire saigner : cela ne coule rien et réussit en dépit de la faculté. 1' rai s es. i.Mammoiilh , 2. [.aroc Whilo f grande hlaïu-hc) . !^. Ilaiilbois IivWkIc de .\l\al ce ' • • 4 . Black Prince (^Prince iioir). — M — JARDIN FRUITIER. LE FRAISIER MAMMOUTH, Par m. Cii. Morren. M. Myatt est connu en Angleterre comme l'un des plus heureux pro- tlucteurs de fraisiers. En 4847, il obtint de ses semis une variété remar- quable par l'ampleur de ses fruits, au point qu'il nomma ce fraisier Mammouth, faisant ainsi allusion au gigantesque pachyderme fossile. Le fraisier ]\Iammouth était introduit en Belgique dès 1848, et depuis, il s'y est propagé dans beaucoup de jardins. Les feuilles radicales se dis- tinguent par leur long pétiole qui mesure jusqu'à io centimètres, tandis ([ue les folioles, subarrondies et fortement dentées, n'en mesurent que 6. Leur vert est très-foncé. La Heur est ordinaire. Le fruit varie beaucoup de forme : celle que nous figurons ci-contre pi. 7, fig. i, est cependant la plus habituelle, transversale et presque bilobée, quoiqu'il y en ait aussi d'allongées, de bosselées, d'arrondies. Toutes ces formes, ainsi que la structure du calice indiquent une fusion de fruits en un seul, de sorte que ce fraisier Mammouth n'est pour le botaniste qu'un monstre par soudure. On y voit jusqu'à 20 sépales, ce qui indiquerait jusqu'à quatre calices soudés ou quatre réceptacles soudés ou multipliés. Ce fruit est d'un rouge foncé, les graines (fruits) noires ou brunes. La chair est souvent farineuse, d'un rose couleur de chair, un peu creuse parfois. Le goût est convenable, mais moins parfaitcependantquedansd'autres variétés, parfoisun peu acide. La plante donne peu de filets. Le Mammouth croît en touffe, ne porte })as énormément et nous lui voyons préférer aujourd'hui par les fins amateurs des variétés en effet meilleures. LE FRAISIER BICTON'S LARGE WHITE (GRAND BLANC DE BICTON), Par le même. Les fraisiers à fruits blancs sont des cas d'albinisme du réceptacle seu- lement, et alors le pigment rouge se concentre dans les fruits véritables, c'est-à-dire les graines du vulgaire. L'albinisme des fraises comporte ce que Linné a posé comme un principe général dans la théorie des cou- leurs considérée dans ces applications, à savoir : une saveur plus sucrée, un goût plus mucilagineux et beaucoup moins d'acide que dans les fruits rouges. Le fraisier Bicton's large white est une preuve de plus de ce principe. Le fruit est subarrondi, souvent transversal, lobé en deux, trois ou quatre lobes obtus; les akènes roses ou rouges très-brillants. La chair ferme, le goût amylacé, sucré, aromatique. C'est une bonne fraise, très- digne d'être recommandée. Sa production est moyenne. — 48 — Il est à remarquer que bien que ce fraisier existe depuis quelques années dans nos jardins, il s'y propage peu et les horticulteurs ne le con- servent pas tous. Il doit faire partie cependant de toute bonne collection. Nous Tavons figure pi. 7, fig. 2. LE FRAISIER HAUTBOIS FERTILISÉ DE MYATT, Par le même. La fraise Myalt 's fcrtilized IIautboîs,(\ci^ Anglais, est sans contredit une des espèces les plus remarquables de tout genre, et quand nous disons espèce, c'est avec intention de ne pas dire variété. Elle appartient en effet au Fragaria moschata. Le Hautbois que quelques-uns écrivent Ifaiilboi/, comme nom propre, témoin M. Uilkens, dans son Groot Wctrmoeziers Handhock, le Hautbois prolifique a été la mère de celui de Myatt, et c'est la raison pour laquelle il fa nommé Hautbois fertilisé, c'est-à-dire Hautbois prolifique, hybride par un autre fraisier ordinaire. A la vue comme à l'odeur, ce fruit se distingue de tous. Voyez pi. 7, fig. 5. Il est oi'dinairc de grandeur, pyriformc. Sa couleur est lie de vin violet ou rose fané, ou violet terne sur fond jaune également terne ou un peu ocrcux. Les akènes jaunes ou rougcâtres. La chair est blanche, grasse, farineuse. L'odeur est fortement parfumée, vineuse et aromatique. Le fumet est aussi sui generis dans la dégustation. Pour beaucoup de personnes, cette fraise éclipse toutes les autres, quels que soient leur couleur, leur gran- deur ou leur aspect. Elle n'est pas très-répandue et mériterait de se trouver partout. 31. Hennau, un de nos plus fins producteurs de fraisiers liégeois, la tient en très-haute estime, la cultive tout spécialement et la recom- mande aux vrais amateurs. LE FRAISIER PRINCE NOIR OU BLAR PRINCE, Par le mè3ie. Le Prince noir est rouge; il est ordinairement long, conique, de 5 à G centimètres moyennement, un peu subaplati en bas, d'un rouge vineux foncé, les akènes distribuées partout uniformément, pas de col dénude au réceptacle, sépales du calice simple ordinairement au nombre de 10, planes. Chair rose, fortement colorée vers les bords, goût très-parfumé. Cette fraise est la plus hâtive de toutes, mais elle veut du soleil ; elle pro- duit beaucoup, et, en vue des marchés, elle offre toutes les garanties pour le transport, sa consistance est suffisante pour aller loin sans contusions ni plaies. M. Hennau l'estime au plus haut point et son avis est générale- ment partagé par les amateurs liégeois, ville où, à l'endroit des fraises, on a le droit d'être fort difficile. C'est à Liège, en effet, qu'on produit les meilleures fraises de toute la Belgique. — 49 — NOTICE SUR LA CULTURE DU PÊCHER, Par m. J.-B. Louvet, HorliciiUeuv, Vice-Président de la Société horticole de Poiitoise. Peu de personnes s'occiipcnl avec soin de la culture du pêcher; il est cependant, pour la plupart d'entre elles, un arbre de prédilection; fa- veur méritée, qu'il doit à ses fleurs d'un beau rose et à ses fruits dont le brillant coloris et sa saveur excitent l'admiration et la convoitise. Déjà beaucoup d'écrivains distingués ont disserté savamment sur le [)ècher , mais aucun d'eux n'a dit assez hautement, et je ne puis répéter assez de fois pour être bien entendu, que des habitudes routinières, en perpétuant l'ignorance et Terreur, nuisent à cet arbre avec toute la violence d'un abus, et sont, sans contredit, la seule cause qui compromet toujours sa culture. Pour le pêcher, il faut un praticien instruit, possédant en physique et en chimie les connaissances nécessaires à l'horticulture, et capable de résoudi'C quelques problèmes de géométrie, qui met constamment en œuvre l'application des principes et les ressources de son intelligence. Ainsi, Topération de la taille n'ayant rien qui tienne du hasard, on doit d'avance répondre du résultat et préciser pourquoi l'on conserve ou l'on supprime telle branche plutôt ([ue telle autre. Le classement que j'ai adopté, et les développements méthodiques autant que succincts que je vais y rattacher, seront le combat à outrance que je livre aujourd'hui à la routine, mon ennemie jurée; j'aborde mon sujet de la manière sui- vante : 1. — Des expositions. Il faut supputer les avantages et les inconvénients qui peuvent résulter pour un pêcher de se trouver exposé à tel ou tel vent; l'exposition du levant est assurément la plus préférable, et celle du nord la plus mau- vaise. Au levant les pêchers sont moins sujets à la maladie appelée cloque et au blanc ou meunier, mais ils sont plus accessibles aux gelées du prin- temps; ces gelées, en atteignant les organes sexuels des fleurs, les rendent très-sensibles aux premiers rayons du soleil, qui brùlc et décompose cha- cune d'elles. On évite tout dommage en tendant des paillassons devant les arbres, chaque soir; tant que les gelées sont à craindre ces paillassons doivent être placés avec précaution, et être enlevés aussitôt que les efl'ets des rayons du soleil ne sont plus contraires. L'expositiou du midi n'est inférieure à celle du levant que parce qu'elle attire sur les arbres certaines maladies, dont la principale est celle où l'arbre périt quand il paraît en parfait état de végétation, et même lorsqu'il BELG. IlOUT. T. IV. 7 — 1)0 — est chargé de fruits presque mûrs. J"aUribue cet accident aux rayons du soleii qui, en agissant directement sur les tissus, les désorganisent en peu de temps; je hase mon opinion sur ce que cette mortalité n'a jamais lieu qu'à l'exposition du midi ou plutôt sur les arhres placés devani un mur blanc que devant un mur noirci : un mur hlanc repousse les rayons du soleil, et l'arhrc étant d'une couleur foncée, absorbe natu- rellement toute la chaleur et acquiert alors une somme de calorique trop forte pour son organisation. Les fruits qui mûrissent sur un arbre frappé de cette maladie sont sans saveur , et l'arbre meurt à défaut de sève : on peut prévenir un pareil résultat en couvrant les principales branches de nattes de paille. A l'exposition du couchant, les arbres sont plus sujets aux maladies qu'occasionnent les vents d'ouest. On plante à l'exposition du nord les pèchei's tels que : la grosse et la petite Mignonne, et la Pavie tardive, quoique ces arbres n"y deviennent pas très-forts, on doit les tenir éloignés l'un de l'autre de deux mètres de moins qu'aux autres expositions. 2. — Des agents ludispeiisableis à la Tégétatlou. Un jardinier, avant de tailler vm pêcher, doit connaître les agents indispensables à la végétation, qui sont : la terre, l'eau, l'air, la chaleur et la lumière; et, en effet, tout développement est impossible sans leur concours : la terre sert à fixer l'arbre, aidée par l'eau et par la chaleur, elle fournit aux racines les matières nutritives contenues dans son sein, la réunion de ces trois corps établit la fermentation nécessaire, afin de réduire à l'état gazeux les divers engrais que l'on a employés pour l'amélioration d'un terrain. La lumière et la chaleur agissent aussi à l'extérieur : la chaleur conduit, par les pores dont l'arbre est criblé à sa surface , les gaz destinés à pour- voir aux combinaisons qu'il réclame ; la lumière colore et l'air durcit les diverses parties de l'arbre, en solidifiant le carbone qui forme leur char- pente. La taille du pêcher exige donc du praticien un certain degré de per- fection, car il ne doit jamais perdre de vue, 1° que la vigueur et la durée d'un arbre dépendent du constant équilibre et de l'égale répartition de la sève, qui doivent exister entre ses racines et ses branches; 2" que les bourgeons produits par une branche taillée court sont toujours branches à bois et jamais branches à fruits, parce que la sève, tendant sans cesse à affluer à l'extrémité des branches, développe des bourgeons terminaux avec plus de vigueur que les latéraux : partant de là, peu de fruits sur l'arbre; 5° qu'au contraire les branches où la sève ne se porte point en abondance produisent beaucoup de fruits et peu de bois; 4" que si la sève est en travée dans sa circulation, elle produira plus de branches à fruit; mais (|u'alors ou arrivera à épuiser son arbre; h" que plus on maintiendra de — al — branches à bois, plus Ton augmentera sa vigueur; G" que les boulons à fruits du pêcher naissent sur le bois d'une année; 7" que tout bouton à /leur est stérile, si un bouton à bois ne l'accompagne point; 8" et qu'une branche à fruits ne produit qu'une fois. Toute branche à fruits qui manque d'air, de lumière et de chaleur, s'allonge, s'étiole, et alors ne produit plus ni bois, ni fruits. Si Ton sup- prime tout canal direct de la sève, pour multiplier les fleurs, on obtient, dans sa circulation, une marche plus lente, laquelle procurera des fruils plus gros et plus savoureux. 3. — Des fonctions des feuilles. Les feuilles servent à la respiration des végétaux, comme les poumons à celle des animaux; un arbre en partie dépourvu de son feuillage est altéré dans sa constitution, et il peut périr lorsqu'il en est entièrement privé. 4. — Du terrain. Avant que de creuser le sol destiné à recevoir un pêcher, on doit reconnaître s'il est homogène à une grande profondeur, dans le cas con- traire, on percera le tuf de deux mètres au moins de profondeur pour les sujets greffés sur amandiers, et un peu moins profondément pour ceux greffés sur pruniers; la largeur de la fosse sera égale à sa hauteur; on enlèvera la mauvaise terre du fond et on la remplacera par une terre meuble préalablement préparée. Généralement, avant que de planter un arbre, on devrait s'assurer quels sont les principes qui forment la base du sol , pour ajouter ceux qui y manquent, ou pour diminuer ceux qui y sont dominants. Les terres primitives, si elles sont isolées, ne sont pas propres à la cul- ture , le mélange des terres entre elles constitue leur bonne ou leur mau- vaise qualité. Les terres arables sont composées d'alumine (argile pure), de silice (sable) et de chaux (terre calcaire). Lorsque l'alumine domine, la terre est ti'op forte ; elle est au contraire trop légère et trop poreuse lorsque c'est la silice. Il importe cependant que ces trois sortes de terres se trouvent réunies dans des proportions convenables pour constituer ce que l'on appelle un bon terrain; aussi, l'attention d'un jardinier intelligent doit se porter à obtenir un résultat favorable, en divisant toute terre argileuse par l'addition de la silice, qui la rendra friable et plus per- méable alors à l'air et à l'eau, puis à n'employer dans une terre siliceuse que des engrais d'une nature plus compacte. Les autres terres primitives ne se trouvant qu'accidentellement et ne formant d'ailleurs que des substances employées davantage dans les arts, je crois inutile de m'en occuper ici. — 52 — 5. — Du choix des» ai*bi*c». Avanl que de piauler uu pêcher, on doit visiter alleulivcmenl toutes SCS racines pour s'assurer si quelques-unes ne sont pas viciées, puis on les raffraîchit, au vif, avec une serpette bien tranchante en ayant soin de n'en supprimer aucune, surtout des petites que l'on nomme chevelus; car, pour que Tarbrc reprenne, il y a nécessite absolue de conserver ces racines capillaires et menues terminées chacune par nui petit suçoir ou pompe aspirante qui transmet à l'arbre les sucs nourriciers de la terre, lesquels sont propres à la végétation. Lorsque, par inexpérience, on coupe, on mutile ces petites racines, l'arbre ne reprend que comme une bouture et avec plus de lenteur, faute des précautions que je viens de signaler, Tcxistence de l'arbre est com- promise et l'attente du propriétaire trompée. Souvent on attribue, par erreur, le défaut de réussite aux pépiniéristes. Le pépiniériste qui, d'après les usages reçus, demeure répondant de ses arbres, n'en livre que de bons au consommateur et il trouve toujours à se débarrasser de celui de rebut, en les cédant à des colporteurs qui en tra- fiquent, à vil prix, dans les foires et dans les marchés, où Ton rencontre plus d'achelcurs (juc de connaisseurs. 6. — De la plantation. Il faut, quand on plante un pêcher, étendre ses racines à droite et à gauche, de manière à ne point laisser un vide et à ce qu'il ne fasse qu'un corps avec la terre, qui ne doit pas être molle, sinon étant foulée, elle forme mastic et produit un mauvais effet. La greffe doit être à quelques centimètres au-dessus du niveau du sol et à 20 ou 25 centimètres du mur; on inclinera l'arbre de telle sorte que son extrémilé repose dessus. 7. — Des soins» de première année. Lors de la première pousse, on taille un arbre à quatre ou six yeux, et l'on se bornera, la première année, h favoriser et à surveiller le dé- veloppement de ses nouveaux bourgeons, à choisir les deux plus beaux, lun du côté droit et l'autre du côté gauche, à les palisser légèrement dans une position presque verticale, puis à supprimer tous les autres; si lun des deux bourgeons poussait avec plus de vigueur que l'autre, afin de rétablir entre eux l'équilibre, on aura soin de le palisser plus rigou- reusement, et on tirera en avant le plus faible pour l'exposer davantage à l'air et à la lumière. On donne toutes sortes de formes au pêcher; mais, ne pratiquant que la |)lus généralement adoptée, celle dite à la IMontrcuil parce (pi'cUc est l>lus économique, je m'abstiendrai de parler des autres. S. — Les soins de la seconde année. Les soins de la seconde aimée consistent à dépalisser le pêcher, à tailler 00 SCS deux membres sur un œil de devant ou un œil de derrière pour éviter de faire faire un coude à la branche (la longueur est déterminée par la plus on moins grande végétation de Tarbre), puis à ouvrir son arbre à peu près de 20 degrés, en ménageant deux nouvelles branches, — qui portent le nom de secondaires, — une de chaque côté, et toujours en dessous. 9. — Des jsoius de la troisièuie auuée. On donne aux branches-mères qui sont déjà bien caractérisées, 50 de- grés d'ouverture, cl on tire encore deux autres branches, — dites ter- tiaires, — dont une de chaque côté et en dessous; après quoi on allonge les membres de Tarbre en proportion de leur vigueur. 10. — Soins de quatrième et de cinquième années. L'arbre doit être tout à fait formé dans la cinquième année; les deux [trincipaux membres qui sont toujours les dominants ne devront avoir que 43 degrés d'ouverture, et jamais plus, car, la sève tendant à se diri- ger le plus verticalement possible , si Ton donnait une ouverture j)lus grande à son arbre, on n'obtiendrait des branches que du côté supérieur; alors l'équilibre serait détruit, elles bourgeons les plus favorablement placés deviendraient des branches à bois. Lorsque Tespace à garnir l'exigera , on tirera au fur et à mesure les membres inférieurs de troisième et de quatrième ordres, en ayant soin de ne jamais pratiquer cette opération qu'au-dessous, en vue de les maîtriser. 11. — Des diverses branches. Aous voici maintenant devant un arbre fait; il est utile de caractériser les différentes sortes de branches qui le garnissent; on en compte quatre espèces : la branche à bois, la branche gourmande et les branches à fruits. La branche à bois est celle qui termine naturellement les membres cl les rameaux principaux. La branche gourmande, d'une voracité excessive, cause de grands ra- vages au pécher sur lequel on l'a laissée se développer ; en attirant à elle toute la sève destinée aux autres branches, clic enlraine souvent leur perte. La présence de cette branche sur un arbre indique assez qu'il n'est pas soigné. On la reconnaît à sa croissance rapide, à son volume et à son écorcc grise , dès la première année , ses yeux plats et simples soni beaucoup plus éloignés les uns des autres que ceux des autres branches. Il y a deux sortes de branches à fruits : la première rouge du côté du soleil, croît le long des membres; elle n'est jamais aussi grosso (\\ic les branches gourmandes et à bois; ses yeux sont doubles et souvent triples; sa longueur \arie de lli à 50 centimètres. La seconde branche à fruits , espèce de lambourde qui n'a que (pielqucs fcntimctres de longueur, est terminée par un bouton à bois; on ne la taille jamais, elle meurt presque toujours après avoir donné son fruit. {La fin au miméro prochain.) u PI. 8. — m CONSTRUCTIONS HORTICOLES. TENTES, ABRIS, PAVILLONS, ÉTAGÈRES, CLOTURES POUR EXPOSITIONS DE FLEURS, Par m. Ch. Morren. Les grandes sociétés d'iiorticullurc ne sont pas embarrassées pour les expositions. Quelques-unes ont leur palais , témoin la Société royale d'agriculture et de botanique de Gand, les autres disposent de monuments publics, comme les Sociétés royales de Bruxelles ou d'Anvers, mais il y a des associations moins vieilles , plus modestes , plus restreintes dans leur revenu qui, le jour de l'exposition proche, sont dans une anxiété très-excusable à l'endroit des locaux , et ces sociétés mêmes existent parfois dans des villes qui n'ont rien à leur offrir, pas même un toit pour les abriter. Nous connaissons des sociétés, qui toutes royales qu'elles se le disent, n'en sont pas moins de pauvres trotte en ville, ouvrant des salons qu'elles n'ont pas, s"liébergeant tantôt dans des maisons-de-ville, tantôt dans les théâtres, dans les églises abandonnées, presque toujours au milieu de décombres ou de ruines. On voit ce spectacle de misère dans de grandes villes où Ihorticulture est en honneur. La Société des Conférences horticoles, établie à Liège, depuis environ cmq ans, est basée sur ce principe que les plus petits horticulteurs doivent pouvoir prendre part aux fêtes florales, et par conséquent pour se rendre accessible à tous, cette association fixe à un taux très-bas sa cotisation annuelle (cinq francs). Le nombre des membres s"est accru très-prompte- mcnt; monté à près de deux mille, il n'offre pas encore les ressources nécessaires pour se bâtir un monument. En attendant ce jourheureux, on a emprunté pour rornement d'une exposition assez vaste, la réalisation d'une pensée anglaise qui depuis longtemps fait fortune de l'autre côté du détroit. Cette idée, c'est la construction, à l'air libre, de tentes, d"abris, de pa- villons, d'étagères et de clôtures, le tout provisoire, en planches, en toiles et tentures. C'est le système économique, mais c'est le système suflisant. Nous avons fait dessiner les vues générales de l'exposition de cette Société, exposition ouverte les 12, 13 et 14 juin 1855, et destinée à recevoir la visite du roi Léopold et de sa famille, si le voyage de Sa Majesté n'avait été remis. Ces vues, prises la première à l'entrée du local, la seconde au pavillon royal et la troisième à la tente des fleurs les plus délicates, montrent comment avec peu de ressources on a pu présenter un ensemble des plus satisfaisant, et qui a conquis les sympathies des dix mille visiteurs qui on( parcouru ce jardin féerique pendant les trois jours de son ouverture. Le lieu, une colline en terrasse, placée près des anciens remparts de liO 1>I. 9. I — 57 — la ville, en ados d'une houillère et devant un magnifique panorama d'où se découvre toute la cité et le bassin si industriel de la Meuse, rappelait une découverte à jamais célèbre, celle de la houille qui a eu lieu au dou- zième siècle, précisément au même endroit, le Publémont. Cette localité se prêtait à la construction d'un jardin dit anglais, mais rarchitccle coordonna leur, M. Jamart, membre du Conseil communal de la ville, a eu soin d'approprier à plusieurs lignes quelques heureuses dispositions rappelant plutôt le style français ou géométrique. C'est ce qu'on remar- que à la première vue , dans l'arrangement des arbres taillés , des statues et dans les formes des clôtures. Le fond sur lequel reposaient ces in- nombrables pots fleuris était de la mousse, et le milieu, où trônait un immense dattier, était bâti en rocher artificiel. Des yuccas à feuilles striées de blanc font un excellent effet dans ces points ronds. Des chaînes de fer liaient ces clôtures, et ce système est excellent pour empêcher la foule de se précipiter sur les fleurs. Les très-grandes tentes coûtent cher, et le plus souvent dansées exposi- tions à l'air libre, de simples abris contre le soleil, le vent et la pluie suffisent. Les toits provisoires, ornés de tentures, remplissent ces con- ditions. Les tentes ont un point difficile à régler pour contenter à la fois l'œil de l'homme et les prétentions des fleurs. C'est leur couleur. Les toiles blan- ches ou grises uniformes ont l'air triste, pauvre et inspirent plutôt l'idée de foire que l'idée de fête. Les toiles rayées de couleur sont plus joyeuses, mais alors vient la difficulté de choisir une couleur qui ne fasse pas de mal aux coloris si variés des plantes. Le rouge est la teinte la plus com- mune dans les fleurs : elle est donc exclue pour la tente; reste le bleu ou le vert, car le jaune se séparera trop peu du blanc pour faire effet. Le vert est cru, dur, et la verdure naturelle l'écrase, le salit ou l'elîace. Le bleu est une couleur très-rare dans les fleurs, sinon au printemps et sur les Alpes, mais dans toutes nos expositions c'est évidemment la cou- leur que l'on retrouve le moins. Quand le bleu se rapproche donc de l'azur du ciel , et que le jour qu'il reflète sur les fleurs n'est pas trop foncé, le seul tort qu'il fait est d'amortir l'éclat des fleurs blanches et d'amoindrir la vivacité de certains rouges qu'il rend violet. Hors de là, c'est encore le bleu qui fait le moins de tort aux fleurs, quoique, comme nous venons de le dire, on doit, dans l'appréciation des qualités des fleurs exposées, tenir compte même de la teinte la moins active. Il serait à désirer qu'on fit sur ce sujet quelques expériences. Il est très-probable que des teintes mixtes, comme le fauve, l'aurore adouci, le rose bistré, ce qu'on nomme en peinture des teintes fausses, seraient celles qui auraient le plus de succès pour conserver aux verdures leur éclat et leurs tons diflerents, aux corolles toute la pureté de leur coloris, La couleur adoptée à Liège, était le bleu de ciel et on ne s'en plaignait pas. BELG. IlORT. T. IV. 1)8 IM 10. — 59 — PATHOLOGIE DES PLANTES IlOMIGULES. LA POURRITUPxE DES NARCISSES ET LES MOYENS D'EN PRESERVER CES PLANTES, Par m. F.-W. Van Eeden, de HarlEx\i ('). Parmi les bulbes qu'on reproduit clans la Nord-IIollandc, les narcisses n'ont pas sans doute la haute importance des jacinthes et des tulipes , parce qu'ils n'ont pas la richesse et la diversité des couleurs de ces der- niers, mais cependant ils s'exportent beaucoup à cause de leur facilité à fleurir l'hiver. Les narcisses appartiennent à Thorticulture du salon , car partout où se trouve un buffet orné de jacinthes, de tulipes et de crocus, les narcisses avec leurs fleurs jaunes ou blanches, toujours éclatantes, de- viennent indispensables. Leur culture a été très-heurcusc à Harlem pendant les dernières années. De préférence on les plantait dans un sol sablonneux et humeux, et jamais on ne remarquait dans les narcisses la présence de cette maladie qui sévit avec tant de fureur dans les jacinthes. On avait bien quelquefois constaté antérieurement que quelques bulbes pourrissaient, mais on at- tribuait cette destruction à l'influence de l'humidité régnant pendant les hivers doux. Cependant, dans des temps rapprochés de notre époque, pendant que la culture des narcisses s'étendait de plus en plus , et que le nombre des plants devint considérable, la pourriture des bulbes s'observait de plus en plus, jusqu'à ce qu'en 1847, il y eut un tel désastre dans cette indus- trie, qu'on sentit le besoin de connaître quelle était enfin l'origine de ce fléau (2). (1) Ce mémoire a clé écrit en réponse à une dcmamle de la Société hollandaise, pour l'avan- cement de l'indusUic (1849), et couronné d'une médaille d'argent; celle demande était ainsi conçue : Donnez la cause, la nature et les remèdes de la maladie connue sous le nom de la pourriture des narcisses (het rot in de narcissen). Le Tydsvhrift ou journal de celle Société, paru en 1855, donne le texte de ce mémoire. Nous nous sommes empressés de le traduire , car ce travail éclaircil un point important de la pathologie des plantes horticoles. {iSotc de Cit. Morren.) (2) Le mal paraît avoir été importé peu d'années auparavant de Marseille, d'où les jardiniers hollandais reçoivent annuellement les bulbes des narcisses marseillais doubles. Là et ailleurs, dans le midi de l'Europe, habile l'insecte (juc l'auteur du mémoire regarde avec raison comme la cause de la maladie. Ce qui prouve encore l'origine étrangère du mal des narcisses est cette autre circonstance que pendant les deux dernières années, l'étal météorologique des deux mois d'avril et de mai, mois de raccouplemeul de l'insecte, comportait une température très-froide, près de zéro, ou même ce point ilc rongcla'ion Aussi, la pourriture dans les narcisses s'csl- ellc presque cnlièremcnl arrêtée. (!\'otc de (a Commission du jttgcmenf.) — 60 — Les bulbes qui montraient un retard dans la pousse des feuilles, furent ôtés de terre; examinés au-dehors, on les trouvait sains et intacts. Mais, quand on coupait ces bulbes en deux longitudinalement, tout changeait ; on voyait alors le centre ou le cœur qui devait être occupé par les bou- tons, envahi par une substance pourrie, décomposée, dans laquelle logeait une larve ou ver court, épais, d'un blanc sale, à peu près de la longueur de deux centimètres et épais de 5/4 de centimètre. Ainsi fut mise en lumière la vraie cause de la maladie des narcisses , mais il restait à découvrir d'où et comment cette larve était entrée dans la bulbe. Était-elle connue de nos prédécesseurs et ne vint-elle dans notre pays qu'à l'époque actuelle? J'ai tâché de donner dans les lignes qui vont suivre l'histoire de l'in- secte et sa manière de vivre, en y joignant les meilleurs moyens pour le détruire aussi complètement que possible. En 1730, au mois de novembre, le célèbre entomologiste de Paris, Réaumur, reçut du non moins célèbre botaniste Bernard de Jussieu, quelques bulbes de narcisses dans l'intérieur desquels ce dernier avait observé des larves qui lui étaient inconnues. Jussieu avait recours aux lumières de Réaumur pour les déterminer. Ce dernier les conserva, les éleva avec soin sous un verre et vit après un certain temps qu'elles se métamorphosaient dans leur propre peau , et changeaient ensuite en grandes mouches comme des bourdons; il en donne une description dé- taillée enrichie de gravures publiées dans ses Mémoires "pour servir à l'histoire des insectes, t. 4, p. 499. L'honneur d'avoir le premier fait connaître cet insecte, revient donc à Réaumur. Parmi les entomologistes modernes, ce diptère est connu sous le nom de Merodon (en allemand Schenkelfliege). J.-W. Meigen donne dans ses Ziveiflugelige insekten, t. 3, p. 342, la manière de vivre et les espèces de ce genre. Il en compte 27, lesquelles appartiennent surtout aux contrées chaudes de l'Europe, au Portugal, à l'Italie. Les espèces qui habitent les bulbes des narcisses sont les Merodon narcissi, Fabr., Merodon ferriigineus, Fabr. et le 3Ierodon equestris. (Fabric. syst., 2édit., 239. 52. id. 106.2.) Pauzer les nomme Stynpkus [Fauna germanica, p. 60, v. 1). Latreillc en fait son genre Milesia [Gen. Criist. et Insect., t. 4, p. 331). La description donnée en détail par Réaumur doit se rapporter, selon Meigen, auMerodon equestris, tandis que selon Fabricius, elle aurait trait au M. narcissi, de sorte que cette divergence d'opinion prouve que les caractères de ces espèces ne sont pas très-faciles à distinguer ('). (1) Le ver que l'on découvre dans le lis d'or {Laklelicn, Amaryllis formosissima) , parait Icvoir se rapporter à la larve du Merodon nmcisxi, Fab. On trouve parfois de 2 à 5 ou mcnic — Cl — On peut, en consultant ces ouvrages, et notamment l'œuvre de Meigen, prendre d'autres renseignements sur ces espèces, détails qui seraient ici d'un moindre intérêt. Les mœurs de cet insecte appartenant aux diptères, diffèrent peu de celles de ses congénères. La larve sort de l'œuf au mois de mai. L'œuf est déposé sur les feuilles les plus proches de l'oignon : de là , la larve des- cend jusque dans l'intérieur de celui-ci et s'y choisit une demeure. Là, elle corrode peu à peu la substance interne, elle secrète la matière corrosive brune dont elle s'entoure, et sur le bord de laquelle on découvre le plus souvent des légions entières de mites qui y viennent chercher leur nourriture. Quand la larve n'a plus rien à dévorer, elle abandonne le bulbe (ce qui a lieu le plus ordinairement en mars) en y laissant un trou ou ouverture extérieure. Elle va se métamorphoser en nymphe dans le sol, dans sa propre peau, et en avril ou mai suivant, elle devient une mouche d'un jaune brun ou tout à fait brune de la grandeur d'une mouche ordinaire de viande ou d'un bourdon, laquelle quitte la terre et cherche à s'accou- pler pour reproduire son espèce. Dans chaque bulbe attaqué, j'ai observé le plus souvent une seule larve, rarement deux. L'assertion de Mcigen, qu'elle vit aussi sur d'autres bulbes, ne m'est pas encore démontrée être exacte. Ce n'est qu'en connaissant ces mœurs qu'on peut arriver à un système rationnel de destruction. Il est indubitable que le procédé dont je vais parler (procédé qui me paraît de beaucoup préférable que l'introduction dans la terre des matières les plus étonnantes ou les plus nuisibles), ap- pliqué en grand par les horticulteurs, ne pourra avoir qu'un résultat utile. Dans la plantation, on sépare avec le plus grand soin les bulbes atteints, bulbes que l'on distingue à leur mollesse, à leur facilité à se laisser com- primer et aussi à une très-petite ouverture qui se retrouve à la couronne des racines ('). plus de ces larves dans le bulbe de cette plante, où elles séjournent non pas tant dans le centre que latéralement entre les écailles. Un horliculleur habile me manda que lorsqu'il voulut planter ses bulbes de narcisses, le 23 août 1848, il observa de petites larves non dans le lœur ou le nez de ses bulbes, mais latéralement entre les écailles, de sorte qu'il en conclut qu'il faul, avec un couteau, peler plus ou moins les oifjnons, afin que par cette opération on aperçoive les parties entamées où se trouvent les insectes. Ceci le porta , en suivant ces traces , à découvrir par centaines de petites larves, sans constater la moindre mollesse ou pourriture dans le bulbe, et à l'extérieur ce dernier ne présentait rien non plus qui put le faire distinguer d'un autre. (Noie de lu Commission du jugement.) Ce nombre si considérable, cette centaine de petites larves, fait penser qu'il s'agit ici d'une autre sorte d'insecte que celle produisant la pourriture dans les bulbes des narcisses. {Noie de M. le professeur Van Hall.) (1) Selon les horticulteurs les plus experts, ce n'est pas la tendreté du bulbe qui est en elle- même un signe certain de l'existence du mal , car ce défaut de consistance ne se déclare que lorsque la larve a déjà une certaine grandeur. Un signe moins équivoque pour distinguer les — 62 — Il lie faul pas jclcr ces bulbes atteints, pas nièiiie à l'eau. Il est reconnu, en effet, que l'insecte se cliange en nymphe et en mouche, même lorsque le bulbe réside dans l'eau, de sorte qu'on propage toujours le mal en maintenant l'existence de sa cause. Chaque bulbe atteint est donc soigneusement visité et on tire les larves qui s'y trouvent. Le bulbe est sans doute blessé par cette recherche, mais non perdu, parce que ce qui en reste donne naissance à une infinité de bulbilles qui propagent les narcisses mêmes. Quand, au printemps, les couches de narcisses sont dépouillées de leurs couvertures d'hiver, on les examine minutieusement et on cherche s'il y en a qui ne poussent pas de feuilles (on les appelle des trous dans les couches), ou bien onremarque encore ceux qui, au lieu de montrer une belle couronne de feuilles, ne donnent qu'une feuille latérale unique. On ôte ces bulbes soit à la bêche, soit à la fourche : ils contiennent tous une larve qu'on tue. Si on fait celte recherche plus tard qu'en février, on ne trouve plus les larves changées déjà en nymphes ('). On attend alors les mois d'avril et de mai , et au lever du soleil on cherche s'il n'y a pas des mouches de narcisses grimj)ées hors du sol. On les reconnaît à leur couleur brune jaunâtre et à leur ressemblance avec les jeunes abeilles. Ces mouches ne peuvent pas de sitôt employer leurs ailes et on les prend avec la plus grande facilité. Vient-on plus tard dans le jour, elles se sont envolées. On peut encore empêcher ce départ en semant à l'éjjoque de leur dernière métamorphose, (les cendres ou de la chaux à la surface du sol ou autour des plantes (^). Pour dessécher leurs ailes avant de voler, ces mouches doivent aupara- vant marcher sur la terre , et l'expérience prouve que la cendre ou la chaux exercent sur elles une influence mortelle (^). Nous espérons que ce travail sur un insecte nuisible, trop longtemps méconnu, puisse être favorablement accueilli par la société. bulbes envahis et ilcjà connu de nos cullivalenrs de narcisses est ce qu'on appelle le nvz du bulbe. On coupe le bout de ce nez. Le pclil nez esl-il bon, e'esl-à-dire, tout à fait blanc dans sa coupe, sans taches ni jaunes, ni brunes, alors le bulbe n'est pas piqué, mais s'il offre de ces lâches ou stries de cette couleur, alors on est sur que l'insecte y est. {IVole de la Commission du jugement.) (1) Dans les contrées où les couches de narcisses sont à peine dépouillées de leurs couver- tures d'hiver, de février à mars, il y aura inipossibililc d'opérer comme dit l'auteur, et l'on devra alors s'en rapporter au choix des bulbes avant la plantation, comme il a clé dit plus haut, [Note de la Commission du jugement). (2) Beaucoup de cultivateurs de narcisses eraifçnent la cendre ou la chaux répandue sur les couches, parce que par ces substances le sol devient moins aple à ces cullures. [Note de la Commission du jugement.) (3) Voici encore un procédé (|u'un des commissaires eomniuniquc et qui lui a été révélé par un cultivateur des plus capables. « En l'année 1850, je résolus de visiter mes narcisses, non à la mi-juillet, conmie c'est la coutume, mais en juin, alin de découvrir les jeunes larves dans leur premier clal de développement cl à l;i pninic. Je levais mes bulbes, coupais les pointes avec — C3 — CULTUPxE MARAICHERE. LA KETMIE POTAGÈRE OU COMESTIBLE, Par m. Praxèclès P. Pacheco, de Rio-Janeiro. On cultive clans les pays tropicaux une espèce de Ketmie qui, d'après Linné, se nomme Hibiscus escidentus, et appartient à la Monculelphia potijandra, et, d'après Jussieu, à la famille des Malvacées. Ce végétal, d'une utilité incontestable, est connu généralement au Brésil, sous le nom de Quiabo, mot indigène, et dans cpiclqucs localités, sous le nom éthiopien de Qiiimgombo; les Portugais l'appellent aussi Quiabo; en Angleterre, il est désigné par le nom cVEatable hibiscus; aux États-Unis de TAniérique du Nord il est appelé Okra, et en France Gombo, Gombau et même Gombaud ou Ketmie comestible, d'après le bon jardi- nier. On connaît au Brésil trois variétés remarquables du fruit dTIibiscus, la grande (assa), la petite (mirim), et la crochue (chifre de ocado.) La première espèce se durcit facilement, la seconde jouit d'une supé- riorité reconnue sur tous les végétaux potagers de petite dimension ; elle est plus savoureuse et plus délicate au palais. La troisième espèce, d'une forme plus longue que la seconde et plus étroite que la première, est reconnue par bien des cultivateurs pour être la meilleure des trois espèces, par rapport à certaines qualités qui lui sont spéciales, et que ses devan- ciers ne possèdent point, avantages du reste qui lui sont fort contestés par d'autres cultivateurs, partisans de la Ketmie de la seconde variété. Cet Hibiscus a le même port que ces congénères, la guimauve et la rose soin el reconnus les pelites larves encore dans ces pointes. Cliaque bulbe n'avait guère qu'une larve. Par lacoui)eon apercevait un petit trou comme fait avec une épingle, dans la pointe du bulbe. En suivant celte ouverinre dans le canal qui lui correspondait, on trouvait toujours la toute petite larve commençant à faire ses dégâts. C'est ainsi que j'en ai trouvé des centaines sans endommager un seul bulbe : ce dernier, quoique levé un peu plus de bonne heure, n'en était pas moins très-propre au commerce, comme les années antérieures. Je dois déclarer ici que cette opération eût pour résultat que l'année d'après, je ne trouvais plus un seul ver dans toutes mes cultures de narcisses, bien que j'en cultivai plus de 70 verges. Une expérience faite par deux autres borticullcurs (il voir que des bulbes dans lesquels il y avait des larves, ayant été jetés dans une cnvelle d'eau, les vers vivaient encore deux fois 24 heures après, mais, 24 heures plus tard, il y avait beaucoup de vers morts descendus au fond de l'eau. Chez l'un de CCS horticulteurs, ces bulbes sortis de l'eau, se développèrent passablement et chez l'autre par- tiellement, de sorte que ce moyen ne semble pas très-recomniandablc. (Traduit du Tydsclirifl 1er levordering van nyvcrhcid. Annales pour l'avancement de l'in- dustrie, ISaô.) — 64 — licmière, et est d'un aspect fort agréable. En végétation sa tige sert de support aux haricots et aux pois à rames, ses feuilles remplacent dans certains cas, la mauve, et, tant qu'elles sont encore jeunes, elles font d'excellents épinards et de très-bonne garniture de ragoûts; enfin ses fruits, capsules earpellaires, cueillis en état de verdure, servent pour accommoder les crevettes, les crabes et toutes les espèces du genre crus- tacées, ainsi que la volaille et toutes sortes de viandes fraîches et salées. Soit bar habitude, soit par prévention, on trouve que la Ketmie perd de sa saveur et acquiert un goût fade et insipide, si elle est mangée avec du pain, et non avec une sorte de pâte faite de râpures torréfiées de manioc, ou bien de la farine torréfiée de maïs et mises en bouillie, et dont on se sert au Brésil et dans d'autres pays en guise de pain. A l'exemple du peuple romain, qui attribue à la fontaine de Trevi la vertu de fixer à Rome tout étranger qui avait bu une fois de son eau, le peuple brésilien croit ses sources douées du même pouvoir, et de plus , attribue à la Ketmie la vertu de river à son sol producteur tous les étran- gers qui s'habituent à ce fruit. La graine sèche de cette Ketmie, torréfiée par un certain procédé, s'emploie dans les sauces, auxquelles elle communique beaucoup de mucilage et un goût exquis. De plus, on se sert de la même graine en médecine, au lieu et place de la graine de lin, dont elle possède les qua- lités sans en avoir les inconvénients, car quelque forte qu'en soit la dose, elle n'est jamais nuisible. Bref, toute la plante, en général, est reconnue très-rafraîchissante et non-seulement stomacale, mais d'une facile diges- tion, et de plus, constituant le meilleur émollient. Au Brésil, la Ketmie potagère est annuelle et très-rustique; elle s'ac- commode facilement de tous les sols , même des terrains quelques peu maigres. Dans le midi de l'Europe, cette plante précieuse est cultivée en plein air, bien que toutes ces vertus y soient ignorées, et je suis con- vaincu qu'elle peut être cultivée avec succès sur toute l'étendue de la France, et même dans toutes les régions où s'obtiennent les autres espèces de Ketmie, sinon avec la même abondance, du moins avec le même profit qu'en Algérie et aux Colonies. Pour les semer on pratique, comme pour les pois, de petits trous en terre où l'on dépose deux ou trois graines : bientôt elles poussent, et ne demandent pour tout soin, qu'un support pour la tige, et encore cet appui n'est-il nécessaire que si son emplacement l'expose aux intempéries des gros vents. (Ami. de la Soc. imp. iVhortic. de Paris. J (Ylu XUh.. <& â fSevere>ynj liilas 1. EkenKolm . 2. Croix de Brah\ . ?).Cliarlema6no. 4i)ouljle azuré. — G5 — HORTICULTURE. LES LILAS NOUVEAUX: 1° CROIX DE BRAIIY; 2" ERENHOLM ; 3° DOUBLE AZURÉ ; 4" CHARLEMAGNE, Par m. Ch. Morren. Il n'y a pas, il ne saurait y avoir de jardin sans lilas. Messager du printemps, cet arbuste porte ses thyrses fleuris dans le plus beau mois de l'année, et tandis cpfil rappelle aux yeux de l'éruditundes génies qui illustra le règne de Cbarles-Quint, il devient dans nos bouquets, dans nos couronnes et nos fêtes, l'emblème de la jeunesse. Le lilas, originaire d'Orient où on l'appelait indifféremment Lillach, Lilac ou Ben, a été introduit dans le centre de l'Europe en 1562, et en premier lieu en Belgique, par Auger de Busbccq, de Commines, en Flandre , nommé ambassadeur de Ferdinand P", près la Sublime-Porte , en 1555. Busbecq, auquel nous devons aussi les tulipes, rapporta lui- même, à son retour, le lilas en nature, tandis que Cortusus adressait quelques années plus tard à 3Iatthiole, célèbre botaniste de Sienne, en Italie, des branches et des fruits du même arbuste venus d'Afrique. Tous nos lilas, belges, allemands et français sont des descendants du pied amené des bosquets de Constantinople, par l'illustre Busbecq, dont les écrits sur l'Orient jouissent encore de la plus grande estime. Le lilas rap- pelle ainsi, selon le vœu de Bernardin de Saint-Pierre, une des illustra- tions du siècle de Charles-Quint. Comment le lilas est-il devenu l'emblème de la jeunesse? Voici, dit M. Debay, dans son ^i Histoire des parfums et des fleurs» comment la mythologie grecque raconte la naissance du lilas: Nous acceptons, en l'honneur et au bénéfice des lilas nouveaux que nous allons décrire, cette représentation emblématique de la jeunesse, BELG. HORT. T. IV. 9 — 66 — souhaitant aux nombreux acquéreurs de ces charmantes variétés, les perles des lilas, de conserver longtemps la force, la joie et la santé du bel âge. Ce souhait, fait avec toute la sincérité d'un horticulteur, ne peut manquer d'amener à 31. Wilbelm, seul possesseur de ces remarquables plantes, un grand nombre d'adhésions. Miller et les botanistes du siècle dernier croyaient le lilas originaire de la Perse, et s'étonnaient, à cause de cela, qu'il put supporter les tempé- ratures de nos plus rudes hivers, mais on étendit plus tard la patrie du lilas à tout rOrient, jusqu'à ces dernières années où Baumgarten dé- montra que cette espèce s'avance spontanément jusque dans toute la Transylvanie. On peut donc être parfaitement rassuré sur la rusticité de l'emblème de la jeunesse. En 1785, et nous en attestons Miller, on connaissait trois variétés du li\as on SjjringavHlgaris de Linné, Tune à fleurs blanches, l'autre à fleurs bleues et la troisième à fleurs pourpres. Ce célèbre jardinier de Chelsea avait déjà fait à cette époque une observation singulière à l'égard de ces variétés, à savoir que la blanche et la pourpre se perpétuaient par le se- mis , sans variation : le lilas bleu faisait seul exception, cette couleur étant fugace et non fixe. Le lilas pourpre, le plus beau des trois , selon Miller, s'appelait Lilas d'Ecosse, parce qu'il avait été signalé pour la première fois dans le catalogue du jardin d'Edimbourg. Ces détails sont loin d'être sans intérêt pour nous, parce que s'il est constaté déjà avant 1785, et par des autorités comme celles de Miller, que les lilas pourpres sont les plus rustiques et les plus fixes, au point qu'ils restent identiques dans leurs générations , même par le semis , nous pouvons en conclure que trois des nouveaux lilas dont nous avons à parler, ofl'rent et la même constance dans leurs apanages et la même résistance aux rigueurs des saisons, deux qualités essentielles qu'on aime de pouvoir garantir aux amateurs de nouveautés. Le lilas de la Perse véritable, Syringa persica de Linné, arrivé en Europe seulement en 1G40, a produit selon M. Duchartre, par sa copula- tion hybride avec le lilas vulgaire, Syrincja vidgaris, la plante que l'on connaît dans les jardins sous le nom de Lilas varin, mais beaucoup de botanistes le croient une vraie espèce indépendante de toute hybridité et qu'ils nomment Syringa rothomagensis : ses feuilles sont petites, les thyrses grêles et les fleurs plus fluettes. Nous disons ceci afin qu'on puisse se persuader par des preuves solides, que trois des nouveaux lilas, ici an- noncés, ne sont pas des hybrides possibles du lilas de Perse fécondant le lilas ordinaire. Nous n'exceptons de cette règle que le Lilas d'azur à fleurs doubles. Les trois autres lilas, provenant de semis et de féconda- tions croisées, reconnaissent comme père et mère des variétés du Syringa vulgaris ou lilas d'Orient, de sorte que ces mêmes lilas ne sont pas à pro- prement parler des hybrides, mais bien des métis, ce qui est tout difl'é- rent, et cette qualité de métis doit être pour l'amateur une garantie de — 67 — fixité et de durée, les vraies hybrides étant moins viables et de plus changeantes. Les trois nouveaux lilas à la description desquels nous allons passer, sont des productions du plus haut intérêt horticole, ducs à l'intelligente persévérance et aux soins curieux et artistiques de M. Brahy-Ekcnholm, propi'iétaire, amateur d'horticulture, de Herstal, près de Liège. M""" Brahy , née Ekenholm, à Java, dans de vastes possessions de son père, naguère gouverneur des Moluqucs, a puisé dans le berceau et sous les frondes des palmiers asiatiques l'amour des belles plantes et l'art de les cultiver. Avec de tels producteurs, très-difliciles à l'endroit du beau et du parfait, on peut être assuré que ces nouveautés sont dignes d'être présentées comme réunissant un mérite incontestable et de haute valeur à une origine pure de toute mésalliance. 1° Lflas croix de Brahy. La figure 2 de la planche 11 représente cette variété obtenue par le croisement du Lilas Charles X avec le Lilas Noisette. Voici comment nous la décrivions déjà en 1830 et nous n'avons rien à modifier à cette description : « Le thyrse est d'une délicatesse extrême, large du bas, ni effilé, ni pendant. Les fleurs plus petites, mais plus mignonnes que celles des types, sont remarquables par leur belle forme, plutôt en entonnoir qu'en sous-coupe (hypocratérimorphe); le fond du coloris est un rose clair et tendre, mais à chaque extrémité des divisions, en haut, se dessine en s'effaçant graduellement une belle teinte azurée et le rebord de ces divisions porte un liséré d'un pourpre vif.» Nous ajoutions, en donnant à cette variélé le nom de Croix de Brahy ^ que cette croix serait une vraie décoration de jardin et trois ans d'expérience sont venus confirmer cette prédiction. M. Braliy-Ekcnholm a attendu ce laps de temps pour s'assurer de la fixité de sa belle variété, et ce n'est qu'en 18od qu'il s'est décidé à régler avec M. Augustin Wilhelm, propriétaire-horticulteur à Clauscn, fau- bourg de Luxembourg, la propagalion et la mise dans le commerce des plantes du lilas croix de Brahy, qui ne sera nullement une croix pour ceux qui en meubleront leur jardin, mais au contraire une belle et remarquable fleur. 2° Lilais Ekenholm. Le lilas Ekenholm, dédié à madame Brahy, née du nom de son enfant, le lilas en question, est représenté fig. 1 de la pi. 11. Le thyrse est long, haut, fourni, produisant souvent à la base des thyrses supplé- mentaires au nombre de cinq, ce qui donne alors une inflorescence d'une richesse et d'une magnificence telles qu'un seul bout de branche devient à lui seul un bouquet. Les fleurs se pressent sur ce thyrse sans se défor- mer; leur fube est régulier et leur limbe parfaitement dessiné. Les divi- — G8 — sions sont arrondies à leur extrémité, en foinne de cuillères relevées sur les bords en faisant la navicule ou le batelet. Le coloris est un lilas azuré des plus délicats, chatoyant d'une teinte de rose et imitant ces soieries appelées vulgairement gorges de pigeon. La gorge ou entrée du tube estplus foncée. Le parfum de cette belle plante est d'une suavité extraordinaire. Ce lilas figurera toujours parmi les variétés les plus parfaites et y occupe le premier rang jusqu'aujourd'hui. 3° Lilais d'aziii* à fleur double. En 1845, près de trois siècles après l'introduction de l'espèce dans notre pays, et bien que les anciens écrits de botanistes attestent qu'on semait le lilas pour le reproduire, naquit à Liège , entre les mains et dans les parterres de M. Libert, le premier lilas double dont on ouït parler. Depuis, les catalogues annoncent encore un Seringa vulgaris, flore purpurco duplici. Celui que nous fesons figurer (fig. 4, pi. \\) a été l'objet d'une de nos études spéciales de tératologie végétale , insérée dans le Bulletin de V Académie roycde des sciences, lettres et beaux-arts de Bel- gique, ann. dSoô. Nous ne le voyons guère dans les jardins, sinon à Liège et à Malines. Le thyrse est plus grêle , plus maigre que celui des Syringa vidgaris, la feuille est plus petite aussi, mais ces caractères ne sont pas suffisants pour motiver l'idée que ce lilas soit une hybride du persica et du vulgaris comme le Syringa rothoniagensis ou lilas varin. Dans ce lilas double, le plus remarquable est sa belle couleur bleue d'azur. La corolle est souvent à cinq divisions et dédoublée en dedans d'une seconde; de plus les étamines sont devenues des pétales dont un, le der- nier ou le plus haut, est presque toujours le plus long; il l'est tellement qu'il se tient recourbé par l'évolution de la fleur dans la gorge de celle-ci. Souvent encoi'C la première corolle est lilas pourpre et la seconde bleue et alors le thyrse chatoyé. L'arbuste de cette variété devient fort, touffu, et il est très-florifère. 4° Lilas Cbarlemague. Le lilas Charlemagne est encore un gain de M. Brahy, lequel, pour pro- duire Charlemagne, avait employé Charles X. Malgré cette marche essen- tiellement rétrograde, le nouveau-né l'emporte pour la grandeur des fleurons sur son parent. Le thjrse de ce lilas est gros, plus arrondi que celui des variétés décrites plus haut, les fleurs sont plus grandes, plus espacées, le tube est plus visible en regardant l'ensemble du thyrse et le limbe plus plat, a les bords des divisions moins élevés. Le coloris est le rose lilacé. C'est un lilas voyant, moins délicat que les trois autres et surtout que les deux premiers. Le nom de Charlemagne lui a été dévolu à cause de cette circonstance curieuse à savoir que le jardin où ce lilas est — 69 — né, est proche du lieu à Herstal où Charlemagne avait, dit-ou, fait établir ses écuries, stcd (1er lieer, écurie du seigneur ou du maître, d'où serait venu le nom d"IIerstal même. CONDITIONS. M. Augustin Wilhclm met en vente, les lilas croix de Brahy et Ekcn- holm, au prix de 20 fr. le pied greffé chacun. La souscription ne sortira son effet qu'après que le nombre de cent adhésions aura été inscrit. Les livraisons seront faites suivant Tordre d'inscription des demandes. Tout souscripteur aux deux lilas croix de Brahy et Ekenholm, jouira d'une prime consistant en un lilas d'azur à fleurs doubles fourni gratuitement. Ce lilas d'azur à fleurs doubles, pris séparément et sans les autres, se payera 2 fr. le pied. Le prix du lilas Charlemagne est fixé à 5 francs : on recevra dès ce moment les souscriptions. 3IM. les souscripteurs qui prennent cinq pieds de chaque variété (croix de Brahy et Ekenholm) reçoivent un exemplaire gratis. M. Wilhelm prend l'obligation de ne pas diminuer le prix de la sous- cription qu'après la cinquième année. S'adresser au bureau de la Belgique horticole, rue Louvrex , 71 , à Liège (affranchissement complet de rigueur), ou à M. Aug. Wilhelm, horticulteur à Clausen, faubourg de Luxembourg. CULTURE DU MANDEVILLEA SUAVEOLENS OU JAS.MIN DU TUCU- MAN, BELLE PLANTE GRIMPANTE, Par m. Thorne, Direcleur du parc de Shuckbiirgii. Il y a quelques années, immédiatement après l'introduction en Europe de cette charmante plante floréalc, on la cultiva comme une plante de serre chaude. Dans cette situation elle fleurit, mais elle est loin de pré- senter l'abondante floraison qu'amène sa culture dans une serre tempérée ou froide ou même un salon. Toute orangerie, tout conservatoire l'exige comme ornement principal. Pendant sa croissance, elle supporte bien la température et l'atmosphère humide, et les feuilles sont attaquées de bonne heure par l'araignée rouge. Dans les serres trop humides, cet in- secte est commun. Cette même plante est sujette aux attaques de la mouche verte (tenthrède). Une simple fumigation de tabac l'en débarrasse. Ses Heurs d'un blanc pur, d'un parfum délicieux, font cependant qu'on désire partout la cultiver et la conserver. On répond à ce double but par le trai- tement suivant : — 70 — En généntl, je trouve qu'elle se propage beaueoup mieux par les cou- lanls marcottes que par les boutures des branches aoiUées l'an d'avant. Pour accélérer la végétation des jeunes plants, on les Aiit croître d'abord à la température de 15 à 16 degrés centigrades, après quoi on les place dans une serre tempérée ou une orangerie. Dans cette situation les plantes grandissent et fleurissent bien librement, dans des pots de douze pouces de diamètre, et quand on mène les branches sur des treillis, la plante étale toutes ses grâces. Quelque soit le lieu où on la tient, elle se trouve bien d'une aspersion d'eau, par dessus, une ou deux fois par jour, selon l'état de l'atmosphère extérieure, et, quand le jour est chaud, il lui faut quelques heures d'ombrage. Du terreau de feuilles , de la terre franche et de la terre de bruyère sablonneuse constituent le compost qui lui est le plus favorable, les pieds y croissent et fleurissent avec luxe. Quand la saison de la croissance est passée, on diminue peu h peu l'eau et le jasmin du Tueuman passe l'hiver en dormant. Quand on soigne les plants tôt dans l'année, cette espèce devient pour l'automne une charmante décoration. On a essayé de la ûure passer l'hiver en pleine terre , protégée par un mur, mais on ignore le résultat de cette expérience. Ohscè^rations. — M. Joseph Ilarrison assure qu'il a vu cultiver de cette manière le Mamlevilha snaveoleus avec le plus grand succès. Nos horticulteurs belges ne réussissent pas tous, loin s'en ftiut, à maintenir cette apocynée de Bonare en bonne santé. Nous leur recommandons le mode de culture expérimenté par M. Thorne. CULTURE EN PLEINE TERRE ET A LAIR LIBRE, EN BELGIQUE, DU SELAGINELLA APODA, Par m. Ch. Morren. Il n'y a personne qui, visitant dans ces derniers temps une serre chaude, une serre à orchidées surtout, n'ait remarqué comme un gazon courant, très-dru, très-vert et très-moëlleux, ce tapis de mousse formé par une petite lycopodiacée que les botanistes désignent sous le nom de ScUujinella apoda. Elle se distingue par ses petites tiges en stolons , tout couvertes par de microscopiques et mignonnes feuilles de deux ou trois millimètres seulement de largeur et longueur. Les horticulteurs vendent même avec succès des pots, des corbeilles, des devantures de fenêtres uniquement cultivés en celle mousse. On croit géuéralement que c'est une plante de serre chaude , même très-chaude et humide, comme le sont les serres basses, à demi-jour et fortement vaporeuses où l'on tient les orchidées, les broméliacées, les m'-penlhacécs et quelques palmiers. Les horticulteurs, dans leurs cala- — 71 — logucs, placent le Seluginella apoda parmi les espèces non susceptibles de croître dans une serre tempérée. Dans une excursion que nous avons faite cette année à Louvain, nous avons vu dans un hôtel public (à la Cour de Mous), le Selaginella apoda cultivé avec succès, en pleine terre et à l'air libre, dans un jardin de ville, clos à la vérité de quatre murs et protégé contre les vents, assez humide et généralement sombre. L'élégante sélaginelle y occupe un cercle au mi- lieu d'une pelouse et elle est protégée par une grande gypsophyllie, alors que nous l'avons vue, tout en fleur. Chaque printemps on place les Selaginella cultivés en pots pendant riiiver, en pleine terre, et sous cet abri ils deviennent aussi sains que vigoureux pendant lété. C'est un ornement que bien des personnes ne possédant que des jardins de ville dans une situation analogue, vou- draient voir croître chez elles avec le même succès. L'expérience est ici péremptoire. LES PETUNL\S CULTIVÉS COMME ORNEMENTS DE MURS, Par le même. J'ai vu réaliser chez M. Haquin, horticulteur à Liège, une méthode de cultiver les pétunias de manière à leur donner un emploi aussi général que flatteur, comme cachc-misèrc des vieux murs qu'on veut voiler sous une tapisserie de fleurs naturelles. Sur le plat du mur que l'on veut dérober aux regards pendant l'été, on place des bacs peu profonds , ou mieux encore on fixe aux deux bords parallèles du mur deux planches faisant saillie. Le vide est rempli par de la bonne terre terreautée de cinq à six pouces de profondeur. Dans cette couche, car c'en est une , on place en mai ou même en juin , des boutures de pétunias , en quinconce et en nombre suffisant pour que la végétation recouvre l'espace, je suppose de six en six pouces de distance. Bientôt les pétunias, entretenus et arrosés, poussent leurs branches en quantité et les fleurs se succèdent sans cesse pendant les mois d'août, de septembre et d'octobre, jusqu'aux gelées. De même que les pétunias forment des plantes admirables pour les corbeilles suspendues , de même, en descen- dant leurs branches le long du mur, elles le couvrent d'un tapis de fleurs innombrables. Le mélange des corolles blanches, pourpres, roses, vio- lettes et même vertes aujoui*d'hui , produit un efl'et charmant, et l'on dirait que la végétation descendante, imposée à cette plante, en rehausse le charme en multipliant à l'infini et pendant longtemps ses éclatantes fleurs. On sait que le soir, aux heures où les pétunias répandent dans l'air calme une suave et pénétrante odeur aromatique, les corolles blanches restent visibles malgré de profondes obscurités. Ce phénomène est surtout — 72 — saillant après les jours fortement éclairés du soleil. Un mur cultivé en pétunias blancs, placé au fond d'un jardin, produit dans ces circonstances un effet fantastique, et qu'on serait parfois aise de pouvoir réaliser dans les jardins de campagne. Enfin, si on veut, le soir encore, surtout aux crépuscules et les pre- mières heures de la nuit, jouir auprès de ces pétunias d'un spectacle na- turel curieux, on doit se placer dans une tranquillité parfaite près d'un mur ou d'un parterre cultivé en ces plantes , à la fin d'août ou au com- mencement de septembre. Dans ces heures de repos, on voit apparaître comme des oiseaux nocturnes ou des chauves-souris, mais volant avec une célérité extraordinaire, de grands sphinx, qui plongent leur longue langue dans les corolles ncctarifères de ces pétunias embaumés. Le sphinx con- rolvuli, gris et noirâtre, portant sur le corps des anneaux roses et répan- dant des lueurs phosphoriques hors de ses deux grands yeux, est l'hôte le plus habituel des pétunias; il darde avec rapidité sa trompe jaune dans les fleurs et fait une ample consommation de leur nectar sucré. REVUE DE PLANTES NOUVELLES : Azalca auiœiia. Paxton et Lindîey, Floiver Garclen, v. o, t. 89. — Hook., Bot. mag., ann. 1855, tab. 4728. Azalée agréable. Famille des Éricacées. Arbrisseau petit, feuilles obovées-clliptiques , très-entières, couvertes principalement au-dessus et sur les bords de poils sétacés, ainsi que les rameaux, fleurs terminales, subcorymbeuses, calice coloré, ample, égalant la corolle, profondément quinquefidc, lobes incisés, ciliés, cinq étamines exsertes. Cetazalea a été introduit par 31. Fortune, à Bagshot, chez MM. Standish et Noble. La plante venait de Shanghae où elle était cultivée et où elle était arrivée de la fameuse ville de Soo-Chowfoo. M. Fortune suppose que cette espèce provient originairement dune loca- lité la plus boréale de toutes celles où croissent des espèces de ce genre , ou bien d'une élévation sur quelque montagne plus froide que le climat de toutes les autres espèces. A Bagshot, VAztdea amœna passe les hivers en pleine terre, sans protection, ni couverture, et il est parfaitement rustique. En avril 1853, un arbrisseau était littéralement couvert de fleurs dans une serre froide avec d'autres azalées de l'Inde. M. Fortune était d'avis que c'est une espèce très-distincte. Ce qu'elle a de très-re- marquable, c'est le calice coloré comme la corolle en pourpre violet et au fond en orange feu. On a pu croire un instant que cet organe était une seconde corolle comme dans les fleurs prolifères , mais ralternance des lobes et l'absence de tout calice vert, indiquent bien que c'est un calice vrai , mais coloré. Culture. Terre de bruyère, en orangerie, serre froide en pleine terre. Les mêmes soins que l'azalée ordinaire de rilcllespont, Alzalea pontica. — 75 — Diclioi'i«aiidi*a leiicoptlialiuos. Hook., Bot. mag., 1835, tab. 4755. Dichorisandre à œil blanc. Famille des Commelinées. Feuilles elliptiques acuminées , glabriuscules des deux côtés, hampes radicales ou subradicales, aphylles, vaginées, en grappes paniculées, très-glabres, bractées à base large, acuminées, ne dépassant qu'à peine les sépales ex- térieurs; fleurs hcxandres. Originaire du Brésil, cette plante curieuse a été introduite dans les serres de MM. Henderson, à Londres. Quoique très-voisine du Dichorisandra radkalis, de Nées et aiartius, cependant elle en a été distinguée par sa taille beaucoup plus courte, et spécialement par les fleurs, par la villosité des tiges, des gaines et des pédoncules, par les bractées subulécs et velues très-longues , plus longues même que les fleurs et par la présence de cinq étamines aux fleurs. Cette espèce-ci a fleuri en juin, les panicules se couchent sur le sol, les corolles sont blanches et bleues, et les anthères jaunes. Enfin, il y a encore un Dichorisandra rhizophora, mais les feuilles sont plus longues et très-étroites, les fleurs capitées et les étamines au nombre de cinq. Culture. Les Dichorisandra exigent la serre chaude, même étouff'ée et vaporeuse comme les orchidées, un sol riche comme du terreau mêlé de terre de bruyère, im dépotement annuel ou bisannuel et peu ou point d'eau dans le repos , tandis que dans la végétation ces plantes absorbent et perdent beaucoup. Les fleurs se développent sous ces conditions. La multiplication se fait par bouture sous couche chaude. fritillapia oxypetala. Royle, Bot. Himal., p. 588. — Hook., Bot. mag., 1855, p. 4751. Feuilles linéaires ou linéaires lancéolées, alternes, la radicale lancéolée, à longue base amincie, tige uniflore, fleur penchée, sépales à la fin ouverts, oblongs-ovales , aigus, contractés à la base, subonguiculés, onglet nectarifère, intérieurement et extérieu- rement barbu de poils fascicules à la base des lames, bulbe tunique d'écaillés allongées. MM. Strachey et Winterbotton trouvèrent cette jolie plante bulbeuse au Pindare, dans le Kumaon, à une élévation de 12,500 pieds. Des bulbes ont été envoyées à Kew, et , en juin 1855, on en vit s'ouvrir les premières fleurs. Sir William Hooker rapporta cette espèce à Voxypetala de Royle, dont cependant cet auteur n'a donné qu'une diagnosc fort courte. Royle la vit à Taranda dans le Kunawar. La corolle n'est point en cloche comme les vraies fritillaires, mais en lis. La couleur du périanthe est le lilas lavé de vert à l'extérieur, de blanc à l'intérieur et le fond de cette partie toute parsemée de taches d'un violet très-foncé; les anthères non ouvertes sont écarlates, les autres montrent un pollen jaune. C'est une fort jolie espèce. Culture. On l'a cultivée avec succès dans une bâche froide et en terre de bruyère. Rhododendron niTeuin. Uook., fil., Rhod. Sik. Himal., Con- spect.^i-. — Hook. ^Bot. mag., 1855, tab. 4750. Rosage à feuilles neigeuses. BELG. nom. T. IV. 10 — 74 — Famille des Ériacécs. Arbuscule vaguement rameux, écorce brune, ru- gueuse, feuilles obovées-lancéoléès, pétiolées aiguës, opaques, laineuses au-dessous et sur le pétiole par un tomentum apj)rinié neigeux (rarement fuligineux), capitules globuleux, compactes, multiflores, calice avorté, corolle largement campanulce, tube pourvu à la base de cinq plis mem- braneux, l'ovaire ayant un anneau bypogyne grand et lobé, capsules ovali-oblongues, cylindracées , tomcnteuses, obtusément biloculaires, valves ligueuses. C/cst une des précieuses découvertes de M. Ilooker fils, au Sikkim Himalaya, dans les vallées rocbeuses et les défilés de Lacbcn, Lachong et Chola, à une altitude de 10,000 et 12,000 pieds, où elle est commune. Cependant ce voyageur ne la vit pas en fleur dans son lieu natal, mais il reconnut cependant au fruit que ce devait être une espèce particulière. En mai 1853, on vit fleurir à Kew les premiers pieds. La laine blancbe et tomenteuse des feuilles la distinguent de suite des Rho- dodendron arhornmi et Campbellîœ. Ce tomentum est permanent. Les fleurs sont, de plus, violettes et blanclies, ressemblant à celles du R. pon- ticum d'Europe, et du }»mxmîri\ modéré. — 86 — PATHOLOGIE VÉGÉTALE. LÉS VIGNES 3IALADES. — RAPPORT SUR L'OUVRAGE DE M. L. LECLERC, PORTANT CE TITRE, Par m. F. Porcher, Président de la Sociclc d'horticulture d'Orléans. L'ouvrage de M. Louis Leclerc, intitulé les Vignes malades, a été déposé sur le bureau par notre collègue M. Pesty, au nom de M. Hachette, édi- teur, qui en a fait hommage à la Société. Chargé par vous, Messieurs, d'examiner cette brochure, je me suis acquitté avec empressement de cette mission, et je viens vous rendre compte de mes impressions. Ce travail est d'autant plus opportun, qu'il paraît dans un moment où la vigne va incessamment développer ses bourgeons, et où chacun se préoc- cupe de savoir quels sont les remèdes qu'on doit employer dans le cas où la maladie ferait une irruption nouvelle, ce qui est malheureusement probable, car la présence en a été récemment constatée dans les cultures forcées à Paris. Se préoccupant à juste titre du développement que prenait en France la maladie de la vigne, M. le Ministre de l'intérieur et de l'agriculture donna mission à un homme compétent, M. Louis Leclerc, de visiter les principaux vignobles, ceux du Midi particulièrement où cette maladie exerçait ses ravages avec une certaine intensité, alin de rechercher les causes du mal, sa véritable nature, les circonstances qui favorisent son invasion et les moyens employés pour le combattre. Pour se conformer aux instructions ministérielles, M. Leclerc a par- couru les bords de la Loire, la Charente, les vignobles de Bordeaux, le bas Languedoc, la Provence, le Dauphiné , le Lyonnais et la Bourgogne. Il a même fait une excursion dans les Etats sardes , dont les importants vignobles alors étaient cruellement atteints par le fléau. Dans toutes les localités, il s'est mis en relation avec les hommes les plus éclairés, avec les praticiens les plus en renom, et il a pu ainsi re- cueillir des documents précieux dont l'ensemble forme l'ouvrage qui a été imprimé par ordre du 3Iinistre. L'auteur examine successivement dans plusieurs paragraphes la situa- lion générale du vignoble, les causes de la maladie et sa nature, les cir- constances favorables à l'invasion, les moyens employés pour prévenir cl combattre le mal. Historique de la maladie. — Avant de parcourir l'ouvrage, il me semble utile de retracer en quelques lignes Ihistorique de cette épidémie que l'auteur a cru devoir négliger comme étant bien connue de — 87 — ceux auxquels il s'adressait principalement, mais qui aura son intérêt pour notre Société, qui n'a encore rien publié clans son bulletin sur cette grave question. La maladie de la vigne a éclaté pour la première fois dans l'année 1845, près l'embouchure de la Tamise, en Angleterre. M. Tucker, jardinier, remarqua à cette époque que les vignes de ses cultures forcées étaient couvertes d'effloresccnces blanchâtres si nombreuses qu'on aurait pu croire qu'elles étaient saupoudrées de farine ou de poussière de chaux. Concentrée d'abord à Margate, l'épidémie s'étendit plus tard au loin, et, en 18i7, les journaux de Londres constataient que ses ravages s'exer- çaient dans toutes les serres du pays. Ce fut en l'année 4848 que les premiers symptômes apparurent à Suresne , dans les serres de M. de Rothschild; de là elle s'étendit l'année suivante dans les vignobles voisins, et, en 4850, tout Paris et plusieurs départements étaient envahis ('). Sa présence n'a été constatée à Orléans qu'en 1854 où elle causa peu de dommage; elle reparut en 4852 sans avoir plus d'intensité. Quelques treilles furent atteintes , mais le vignoble n'éprouva aucune perte. Un département voisin, celui de Loir-et-Cher fut moins heureux, la récolte de quelques vignes fut entièrement perdue. L'étude à laquelle se sont livrés les savants de France, de Belgique, d'Angleterre et d'Italie, a démontré que les efflorescences blanchâtres qu'on remarquait sur les vignes n'étaient autres qu'un cryptogame para- site, de la famille des mucédinées, dont les filaments microscopiques donnent naissance à un nombre infini de spores ovoïdes d'une extrême ténuité qui, par leur accumulation, donnent à la vigne l'aspect blanchâtre, signe de l'invasion de la maladie. Le savant botaniste Berkeley, de Bristol , reconnut que cette mucédinée était un oïdium , espèce inconnue et non encore observée par les bota- nistes, et il la dédia au jardinier qui le premier l'avait observée. De Iji vient son nom d'Oïdium Tuckeri. Il l'a parfaitement décrite dans le n" 48, Gardener 's chronicle, 4847, p. 779. Aujourd'hui le fléau, après s'être étendu sur toute la France, a franchi les Alpes, les Pyrénées, il a traversé la Méditerranée pour s'abattre en Algérie et sa présence a été signalée en Syrie et dans l'Asie-Mineure. La maladie a causé des désastres certains et considérables dans les vignobles du Midi , mais jusqu'à présent sur les autres points le mal a été de peu d'importance. Les craintes furent telles , à Montpellier, qu'un in- stant on crut non-seulement à la perte de la récolte, mais encore à la ruine (1) La maladie de la vigne, \iro\ena.ni AcYOïdium Tuckeri ou VOïdaitie, se déclara en Belgique en 1850 au mois de juillet et d'abord à Louvain. Voyez mon Mémoire à ce sujet dans le Joiirnal d'agriculture pratique du royaume de Belgique, tome III, 1830, pageSGl. {Note de Ch. Morren.) — 88 — totale de la vigne; aussi, Tcveque s'emprcssa-t-il , pour calmer les popula- tions alarmées , de prescrire des prières publiques. CauiscjS de la maladie. — Quelle est la cause de la maladie ? La science n'a-t-ellc rien pu formuler de précis à cet égard, et l'auteur dans un tel état de choses n'a eu qu'à résumer les débats animes dans la science de cette grave question. Vnulium, est-il la cause essentielle ou un simple effet de la maladie, ou en d'autres termes les tissus de la vigne sont-ils altérés par le dévelop- pement du champignon parasite, ou bien au contraire serait-ce parce qu'ils sont déjà altérés que Yoïdium y rencontre des circonstances favorables à son développement? Tel est le champ de bataille sur lequel la science s'est livré de nombreux combats, sans qu'une victoire pût être remportée. L'Italie a été féconde en cette matière plus que tous les autres pays, sur une liste de quatre-vingt-dix ouvrages ou articles de journaux publiés à cette occasion, quarante-et-une publications reviennent aux savants italiens. Et, tandis que la science se livre à une controverse animée, le peuple des campagnes, ignorant et superstitieux comme au moyen-âge, attribue la maladie de la vigne au gaz d'éclairage ou à la vapeur des locomotives; ce sont pour lui des inventions sataniqucs qui engendrent bien d'autres fléaux. Dans le Midi, on prétend que la peste de la vigne (tel est le nom qu'on donne à la maladie) est mortelle pour l'homme, et à l'appui on raconte qu'un enfant endormi dans une vigne malade y a trouvé la mort. Où? personne ne peut dire le lieu de cette scène tragique et imprécise. Mais laissons ces absurdités que M. Leclere raconte avec beau- coup de charme, pour opérer un retour vers le côté sérieux de la question. Tout récemment, dans le numéro de mars des Annales de la So- ciété Impériale dliorliculturc de Paris, deux honorables rapporteurs, MM. Forest et Roussclon, ont soutenu que Voïdimn est l'unique cause de la maladie; ce n'est point, disent-ils, un mal mystérieux, né dans l'arbuste même, et ce qui le prouve, c'est qu'une vigne malade une année et qui n'a reçu aucun traitement ne l'est pas nécessairement l'an- née suivante. Si la cause était interne, il ne suffirait pas d'essuyer avec soin au moyen d'un linge ou d'un pinceau une grappe de raisin malade pour lui rendre la santé. Il n'y a point, suivant eux, d'insectes à accuser ni de maladie préliminaire à combattre, le seul ennemi, c'est Yoïdium. Cette thèse n'est pas nouvelle. Dans un mémoire du docteur lîertola , à Turin , publié en septembre 1851 , ce savant soutenait que la maladie régnante était une maladie du raisin et non de la vigne, qu'elle était ex- trinsèque et duc à la présence et au déveloi)pement d'une production cryptogamique. Cette oi>inion(*),adoptéepar plusieurs professeurs distin- (1) Cette même opinion était aussi la nôtre dès le mois de juillet 1850. Nous l'avons exposi^c dans le mémoire du Journal d'agricullnre de celte année. {IMolc ifc Ch, IHorrc».) — 89 - gués de Naplcs, de Florence et de Modène a trouvé, il i'aut bien le dire, non-seulement en France mais encore en Italie même, des adversaires. Dans un sens oppose, nous avons lu avec intérêt un article de 31. Guérin- Méneville, dans \c Journal cVagricullure pratique du 20 février 1855, où l'auteur soutient avec force rexislcncc d'une maladie interne , pré- existante; il l'attribue à un état pléthorique de la vigne, à un excès de vitalité, à une surabondance de sève qui aurait pour cause principale la température anormale de nos trois derniers hivers pendant lesquels on n'a pas ressenti de froids rigoureux. De nombreuses observations tendraient à prouver, suivant M. Guérin- Méneville, que le mal réside dans la vigne et procède du dedans au dehors. En effet, dit-il, des points livides, des taches jaunes ou brunes se remarquent toujours avant la naissance de l'oïdium et leur production ne saurait être attribuée qu'à une altération de la sève. A l'appui de son opinion, il cite des phénomènes analogues que sou- vent il a eu occasion de constater dans la maladie des vers à soie ; ce sont les vers auxquels on a donné une nourriture trop abondante et trop sub- stantielle, qui sont plus sujets que d'autres à être attaqués par la mus- cardine sporadique. Il trouve encore un appui dans l'état pléthorique des animaux élevés pour la boucherie et qu'on a poussé trop rapidement dans leur croissance et leur engraissement, cet excès de vitalité est une cause certaine de perte, si l'on ne s'empresse d'y apporter remède. De même pour la vigne la température trop douce de nos derniers liivers aurait produit une surabondance de sève , qui aurait amené le végétal à un état de pléthore, cause véritable de la maladie. De là l'al- tération des tissus de la vigne et le développement ultérieur de Voïdiimi. Insectes. — On a constaté sur la vigne malade la présence d'in- sectes à l'état parfait et de larves. A l'époque du Congrès scientifique à Orléans, l'un de ses membres, M. Robineau-Desvoidy , a pensé que cet insecte était la cause de la maladie. Consulté sur ce point par l'un des vice-présidents du Congrès, le doc- teur Léon Dufour , entomologiste distingué, a bientôt fait justice de cette assertion , dans un petit écrit publié par la Société Linnéenne de Bor- deaux. Après avoir reconnu quelle était l'espèce des larves à lui adres- sées, il termine en disant que le cryptopluujiis est parfaitement innocent de la maladie du raisin. C'est exclusivement à la moississure, à Voïdium, qu'il s'attaque; la Providence l'a investi de la mission de modérer la pro- pagation de cette mucédinée en la dévorant. Aussi , M. Lcclerc énonce qu'il n'a rien à dire des animalcules ni des insectes. Personne aujourd'hui (il le pense du moins) ne lui attribue plus sérieusement, comme cause déterminante, la maladie. Au milieu de ces débats que nous ne retraçons que très-imparfaitement , M. Leclerc ne formule aucune opinion; il n'est pas assez éclairé, pcr- BELG. nORT. T. IV. 12 — 90 — sonne n'est en état de répondre d'une manière satisfaisante à de si graves questions, la cause ne lui pai'aît pas assez instruite, il est nécessaire d'at- tendre une plus grande somme de lumières. Cependant, dans le paragraphe 5, intitulé Conjectures, W se livre à des appréciations qui sembleraient dénoter chez lui une tendance à se rappro- cher de ridée d'un mal interne antérieur à la naissance de l'oïdium. Les bornes limitées de ce rapport ne nous permettent pas de suivre l'auteur dans CCS suppositions et, opérant de suite un retour vers le paragraphe 3, nous vous entretiendrons des symptômes et des caractères de la maladie. Symptômes et capactèpes de la maladie. — Les symptômes du mal se manifestent sur la feuille, le sarment et le fruit, du moins on n'a rien remarqué sur la souche et les racines. Dans toutes les localités c'est bien le même parasite qui a été remarqué, l'Oïdium Tuckeri; mais l'aspect, la physionomie et les effets varient étrangement d'un vignoble à l'autre, on dirait que chaque cep est affecté selon son tempérament propre, selon son individualité. Lorsque la vigne est envahie à l'époque de son développement prin- tannier, le mal est facile à reconnaître, il se décèle aux yeux par la blan- cheur anormale du mycélium; mais si elle n'est atteinte que plus tar- divement, le mal ne se trahit qu'à la longue; la feuille, quoique malade, demeure lisse et verte; elle se couvre de taches d'un jaune livide ou noires; elle se crispe, se recoquille, se flétrit et sèche, ou bien elle noir- cit et tombe vers la fin de juillet ou dans la première quinzaine d'août. Le sarment malade est ponctué ou maculé de plaques irrégulières d'un rouge acajou, ou brunes, ou noires comme de l'encre. Quant au fruit, les symptômes sont peut-être encore plus mobiles dans leur aspect et leur résultat. Quelques points blanchâtres apparaissent d'abord et bientôt, tant la propagation de l'o'idium est rapide, ils en- vahissent toute la grappe. Le mycélium, en adhérant à la pellicule de la baie, a pour effet de la piquettcr de points en relief, noirs ou bruns. Le fruit arrêté dans son développement se fendille, dessèche et tombe. Une planche coloriée et trois planches noires d'une parfaite exécution donnent une idée de la forme et de la couleur des taches qui affectent le sarment et le fruit, de même qu'elles permettent de se rendre un compte exact de la disposition des sporules de l'o'idiura et de leur aggrégation. Cipconstances faTorables à ^invasion. — Dans le para- graphe suivant M. Leclcrc indique quelles sont les circonstances favora- bles à l'invasion de la maladie. Il paraît que les vignes situées dans un sol riche et profond, bas et humide ont été plus maltraitées que celles qui croissent sur les hauteurs. Sans être entièrement préservés, les vignobles des collines ont été atteints moins généralement. Une atmosphère chaude et Inimide est très-favorable à la fructification — 91 — de roïdium. Il se reproduit avec une rapidité et une abondance tellement lormidables qu'en peu de temps les raisins apparaissent comme si on les eût roulés dans de la farine. L'opinion la plus généralement accréditée est que l'humidité favorise la germination des spoi'es et que l'extrême chaleur active le développement du cryptogame. Des essais ont eu lieu, et il en résulte que les spores ne germent qu'avec une chaleur de quinze degrés centigrades. Tous les cépages ne semblent pas être indistinctement frappés par la maladie. Les observations recueillies à cet égard ne sont pas assez nom- breuses pour qu'on puisse indiquer avec certitude quelles sont les espèces qui y sont le plus sujettes. Toutefois on a remarqué que le Frankental (grosse race , Trollinger ) paraît être la pâture favorite de l'oïdium. Remèdes conti*e la maladie. — Je me hâte d'arriver à la partie pratique de l'ouvrage, à celle où l'auteur indique les moyens recom- mandés par la science pour la destruction du champignon. Laissons la théorie de côté pour un instant, et, sans nous occuper de savoir si l'oïdium est la cause essentielle ou le simple effet de la maladie, indiquons à l'horticulteur ce qu'il doit faire pour sauver sa récolte. De nombreux procédés ont été mis en pratique pour la destruction de l'oïdium. L'expérience a démontré l'ineflicacité du plâtre pulvérisé, du sable, de la poussière de route, de la cendre dont il a été fait usage comme agents mécaniques. Il en a été de même des eaux de lessive et de savon, du lait de chaux, des eaux saturées de sel marin, de goudron , de potasse, de couperose, qui n'ont donné que des résultats incomplets. Aussi, l'auteur glisse-t-il légèrement sur tout cela pour arriver à quelque chose de vraiment sérieux, la fleur de soufre et Thydrosulfate de chaux. La fleiii* de soufre. — L'application de la fleur de soufre par voie d'insufflation est une invention toute française, elle est due à un des plus habiles horticulteurs de Paris, M. Gonlhier, notre collègue, qui le premier en a fait usage dans ses cultures, au Grand-Mont-Rouge. De tous les procédés décrits , dit-il au nom d'une commission dont M. Bossin est le rapporteur {Annales de Paris, février 1855), il n'y a (lue ceux où le soufre est employé seul ou associé avec d'autres substances qui soient réellement assez puissants pour combattre, arrêter ou détruire l'oïdium. M. Gonthier a trouvé non-seulement le remède, mais il a encore inventé les instruments nécessaires pour en faire l'application avec éco- nomie de temps et d'argent. Chacun de vous, Messieurs, connaît, ou du moins a entendu parler de son ingénieux soufflet sulfurisateur, ({u'on i)out se procurer au prix mo- dique de 5 fr., chez M. Gervais, rue des Fossés-S'.-Jacqucs,o, à Paris('). (I) Voyez la description cl la figure du souftlcl siilfurisadur de M. Gonlhier dans la iiti- Qique horticole, t. Il , p. 94 (1852), ainsi (jue le soufllcl à relation d'Iîpp. (Note de Ch. Jflorr.) — 92 — M. Gonthier est en outre l'inventeur d'un appareil hydraulique à jet continu , avec lequel on peut facilement mouiller les plus hauts espaliers et les vignes en plein champ. Si vous désirez avoir une description com- plète de cette fontaine portative veuillez-vous reporter au numéro des Annales déjà cité. Comme elle est d'un prix élevé, GO francs, à défaut, on peut employer une pompe h. main, ou mieux encore celle à jet continu de M. Groulon, dont nous avons dit quelques mots dans le compte-rendu de l'exposition de Paris. Cette pompe, ajustée et soudée à un seau de zinc contenant dix litres d'eau, est d'une grande simplicité, tenant au réservoir, on peut circuler en pompant et diriger l'eau avec une extrême facilité, même dans les parties les plus basses des plantes. On procède de la manière suivante : pour obtenir un succès certain, deux personnes doivent agir presque simultanément, l'une d'elles mouille toutes les parties de la vigne, feuilles, bois et grappes, à l'aide d'une j)ompe à main dont les jets sont dirigés de bas en haut pour que le des- sous des feuilles soit bien humecté, l'autre répand le soufre à l'aide du soufflet inventé par M. Gonthier, ou le projette à la main. Cette seconde opération doit suivre immédiatement la première, afin que la vigne n'ait pas le temps de sécher et que le soufre puisse adhérer à la vigne. C'est de cette adhésion que le succès dépend, aussi on doit opérer par un temps calme et non pluvieux pour que le vent ou la pluie n'entraînent pas la fleur de soufre. Un kilogramme de fleur de soufre suflît pour cent mètres superficiels de vignes. L'application de la fleur de soufre aux treilles est facile, peu coûteux et d'une réussite certaine alors qu'on en fait usage dès la première appa- rition de l'oïdium. L'emploi de ce remède pour le vignoble est encore problématique, bien que M. le comte Duchàtel s'en soit servi avec succès dans ses vignes de la Géronde, où il a traité et guéri à peu de frais un hectare environ de vignes. Dans le rapport que nous venons de citer, il est dit qu'on a beaucoup (rop exagéré les frais de main-d'œuvre et d'achat de matières. La dépense , pour un hectare , ne serait que 51 francs. S'il en était ainsi il n'est pas douteux que le vigneron aurait le plus grand intérêt, même quand il s'agirait d'un crû ordinaire, à se servir de ce remède et à sauver sa récolte, qui autrement serait totalement perdue. Il est un fait dont 31. Leclerc n'a pas parlé, sans doute parce qu'il s'ap- plique principalement aux serres et que sa mission s'appliquait à la grande culture. (]omme ce fait atteste d'une part les bons elTets du soufre et d'autre part établit que ce n'est point comme agent mécanique qu'il s'agit, ainsi qu'on l'avait d'abord supposé, mais au moyen du gaz sulfuré (pic le calori([ue dégage, il nous semble utile de vous en entretenir en peu de mots, afin que ce rapport contienne en substance tout ce qui a trait à la question importante que nous agitons. — 95 — M. Bergniann , fils, chef des cultures de M. le baron James de Roth- schild, au domaine de Ferricres, eût l'idée de répandre de la fleur de soufre sur les tuyaux du thermosyphon de l'une des serres où Ton force la vigne, après les avoir préalablement mouillés; l'eau ayant été mise en ébullilion, une forte odeur sulfureuse se répandit dans la serre, au point qu'on ne pouvait y séjourner longtemps. L'opération fut renouvelée chaque soir pendant huit jours consécutifs, ensuite restreinte à deux fois ])ar semaine. A la suite de ces opérations où l'on employait pour 90 cent, de soufre, l'oïdium fut radicalement détruit, et le 12 octobre, quand une commission de la Société d'horticulture de la Seine visitait cette belle serre, elle constatait qu'au-dessus des tètes pendaient une multitude de magnifiques raisins revêtus de cette fleur délicate qui ajoute tant de prix à la beauté du fruit. Au-dehors de la serre et dans toute sa longueur une treille malade avait été abandonnée, et elle était alors dans l'état le plus déplorable, toute végétation avait cessé, les feuilles étaient tombées, le bois rabougri étant couvert de taches noirâtres, avait une apparence de carbonisation, les sporules de l'oïdium avaient donc toute facilité pour pénétrer dans la serre, c'est qu'ils étaient tout aussitôt détruits par l'elTet des gaz sulfurés. M. Hardy, fils, chef du potager de Versailles, et M. Truffant ont expé- rimenté avec succès ce procédé. Bien qu'au premier abord l'application de ce remède semble impraticable pour le vignoble, cependant il a été tenté à Macau , près Bordeaux, par M. de Lavergnc. L'expérience a été faite avec le plus grand soin, mais sur un nombre trop restreint de ceps malades et ses résultats ont été satis- faisants. Après avoir couvert d'une sorte de capuchon en toile cirée le cep atteint par l'oïdium, on suspend au bas un petit godet contenant de la fleur de soufre et une mèche soufrée à laquelle on met le feu. Le gaz acide sulfureux, par l'effet de la combustion, se développe en quantité et l'action se produit en deux minutes. L'auteur de ce procédé, par des calculs, a établi devant une commission qu'il pourrait être appliqué avec avantage à un vignoble d'une vaste étendue. Venons à présent à l'hydrosulfatc de chaux. De l'hydrosulfatc de chaux. — Ce procédé est dû à l'invention de M. Grison, jardinier en chef des serres du potager de Versailles. II consiste à mouiller, à l'aide d'une pompe à main, toutes les parties d'une vigne malade avec de l'eau chargée de sulfate de chaux. Il faut prendre une demi-livre de fleur de soufre et une égale quan- tité de chaux fraîchement éteinte, dont on fait une bouillie épaisse en mouillant avec trois litres d'eau, placer le tout dans une marmite en fonte ou dans un vase en terre vernie et faire bouillir en agitant le mé- lange. Après avoir laissé reposer le liquide , on tire à clair et on le mot — 94 — dans des bouteilles ordinaires, où il peut se conserver pendant trois mois. Un litre de ce liquide, étendu dans cent litres d'eau pure, suffit pour mouiller quinze mètres superficiels de vigne en espaliers. M. Grisou pense qu'il faut opérer une première fois avant la floraison de la vigne et une fois après que le raisin est noué. Ce procédé est économique, car le litre de cette mixtion revient seule- ment à 5 centimes, et il suffit pour l'appliquer, d'une seule personne. Il a été expérimenté avec succès, et une commission de la Société de Versailles a proposé une récompense pour l'inventeur. M. Leclerc nous apprend que le docteur Turrel, du Var, s'est livré à une très-belle expérience, la plus étendue qui ait été faite jusqu'à ce jour. M. Turrel a traité avec l'hydrosulfatc de chaux, ou eau Grison, dix hec- tares de vignes, et, par ce moyen, il a détruit une première fois l'oïdium ; mais hélas! le terrible champignon a bientôt reparu, lui et ses funestes conséquences, l'habileté de l'opérateur et la vertu du remède ont été vaincues par la production nouvelle de l'oïdium. L'efficacité de Thydrosulfate de chaux a été tout récemment contestée. On lit en effet dans les annales précitées, qu'à Thomery on en a fait usage à huit ou dix reprises, sans aucun résultat et qu'on fût même obligé de recourir à la fleur de soufre; comme ce fait est en contradiction avec de nombreuses expériences signalées par les ouvrages horticoles, il serait à craindre que l'essai fait à Thomery, ait été pratiqué dans de mauvaises conditions, ou bien avec un liquide mal préparé. Aussi, avant de pros- crire à toujours l'eau Grison, il nous semble prudent de se livrer à de nouvelles épreuves. Tels sont les moyens employés jusqu'à présent pour la destruction de l'oïdium, moyens impropres, comme vous pouvez en juger, pour en empêcher l'invasion. Remède contre le principe de la maladie. — Reste l'opi- nion de ceux qui demeurent convaincus que dans la vigne il existe un principe morbide, préexistant à l'oïdium auquel est dû le développement de cette multitude infinie de cryptogames microscopiques, quant à eux, j)Our attaquer le mal dans son principe, au lieu de s'appliquer seulement à en détruire les conséquences, ils ont tenté de combattre cette affection par divers moyens tels que la taille prématurée ou tardive, et même l'abstention de toute taille. A ce ci'i, que la vigne était malade par une surabondance nuisible de la sève, on a été conduit assez logiquement, il faut bien le reconnaître, à traiter le mal comme le vétérinaire traite la pléthore chez les animaux, c'est-à-dire par d'abondantes saignées, et on a pratiqué des scarificateurs aux branches et de fortes incisions au pied de la souche. D'autres ont déchaussé le cep au mois de novembre, en ayant soin de couper en même temps le chevelu des racines à la surface du sol; enfin en Italie, ajoute M. Leclerc, on a coupé et gratté les racines, — 95 — mais toutes ces opérations n'ont pas été couronnées de succès, de telle sorte que l'incision et la taille comme moyens prophylactiques paraissent abandonnées. Qnestiou d^histoire. — Avant d'arriver au résumé et à la conclu- sion, on rencontre un paragraphe intitulé Question cVhistoire, et malgré tout notre désir de terminer ce long rapport, je ne puis me refuser d'en dire quelques mots. Les savants italiens, et il en est un grand nombre de premier ordre en botanique et en physiologie, ont présumé que l'oïdium n'était pas une chose nouvelle, qu'on ne pouvait admettre que cette plante, toute micros- copique qu'elle soit, n'ait fait son apparition en ce monde pour la première fois, qu'en l'an de grâce, 4855. Aussi, ils se sont livrés à de patientes re- cherches et après bien des labeurs, ils ont cru avoir trouvé la mention de ce cryptogame dans Pline, l'ancien Théopraste et Dioscoride. Cette idée ne fut pas de longue durée, car, lors de son voyage, M. Leclerc trouva la science italienne très-sceptique, et voire même railleuse à rencontre du mal en forme de toile d'araignée qui couvrit les oliviers et la vigne du temps de Pline, le naturaliste. En riant on lui demandait s'il avait ren- contré l'oïdium sur les oliviers de la Provence, et s'il lui semblait que ce cryptogame eût la moindre ressemblance avec une toile d'araignée. On disait encore que dans un écrit de Targioni, naturaliste florentin, il était question de la maladie de la vigne; vérification faite de cet ouvrage, M. Leclerc, alors qu'il était à Turin, trouva une longue et difficile chro- nique sur les intempéries et les mauvaises récoltes de 4764 à 1775, mais pas la moindre allusion à l'oïdium. Il faut donc se résigner à considérer la maladie de la vigne comme une de ces épidémies qui sont venues afïliger le monde moderne et que l'anti- quité n'a pas connu, ou du moins n'a pas contesté dans les ouvrages venus à notre connaissance. Résumé et conclusion de Tonvrage. — Il ne me reste plus qu'à vous entretenir du résumé et de la conclusion de l'ouvrage et ce sera fort court, car l'auteur, à proprement parler, n'en formule pas; voici comment il termine. L'origine réelle, la source primitive de la maladie de la vigne, est encore un profond , peut-être impénétrable mystère. La cause du mal sera encore l'objet de débats scientifiques prolongés, et j)0ur qu'ils aient une issue satisfaisante et utile, il faut une suite non inter- rompue de recherches et d'observations faites avec ordre et méthode. Di- sons-le en passant, que c'est sous l'inspiration de cette pensée de la Chambre d'agriculture d'Orléans, qu'on vient de prescrire des moyens semblables. Aucun moyen sérieux de prophylactique n'a encore été découvert. Parmi les médications directes, le soufre et les lotions d'hydrosulfate de chauxauxquclssontdésormais attachés les noms de MM. GonthieretGrison, — 96 — sont le salut des treilles et peut-être seront-elles applicables au vignoble. En dernier lieu, M. Leclerc émit le vœu que des récompenses et des encouragements fussent offerts à l'effet de provoquer les expériences com- paratives et de quelque étendue, sur tous les procédés déjà connus el ceux qui ne manqueront pas de surgir. Telle est l'œuvre de M. Leclerc, cet ouvrage est écrit avec esprit el élégance, et bien qu'on n'y trouve pas le mot de l'énigme, que nous n'aurons peut-être pas de longtemps, de même que pour la maladie des pommes de terre , il sera néanmoins un document fort utile dans lequel les naturalistes, les borticulteurs et les vignerons rencontreront l'exposé des symptômes qu'affecte cette maladie et l'indication de tous les moyens tentés avec plus ou moins de succès pour détruire l'oïdium. Aussi, nous nous proposons, Messieurs, de voter des rcmercîmcnts à l'éditeur et des éloges à l'auteur. CULTURE MARAICHERE. CULTURE BOHÉMIENNE DU CRANSON OU RAIFORT SAUVAGE , Par m. Ch. Morren. Le cranson, raifort sauvage, moutarde d'Allemagne, moutarde de ca- pucin, pepcru'ortcl de nos populations flamandes, devient un bon légume cultivé à la manière bohémienne. M. Mittnaclit, de Bcblcnheim, expose cette méthode dans le Riccke\s wockenhlatt en ces termes : On creuse la terre à la profondeur de deux pieds et on couvre le fond de briques cuites, poreuses ou de toute autre substance pierreuse, suscep- tible d'absorber et de laisser passer l'eau. Sur ce fond, on replace de nou- veau la terre qui avait été enlevée , avec cette différence qu'on y plante perpendiculairement les racines de cranson. Ces racines, en croissant, rcnconti'ent les pierres ou les briques et forment sur elles des renfle- ments ou des espèces de plateaux d'où poussent de nouvelles plantes. On se sert de celles-ci pour la reproduction, laquelle se fait en novembre, saison où l'on arrange les nouvelles couches briquetées pour la récolte suivante. La planche de cranson, ainsi plantée, est du reste sarclée, soignée el engraissée, comme s'il s'agit des meilleures terres. On met du fumier tous les ans. — Le raifort sauvage ou cranson devient ainsi très-gros, très- succulent et contracte un goût sucré qui avec le piquant naturel des cru- cifères et surtout avec le poivré de cette espèce, est loin de ne pas être agréable. — Râpée, assaisonnée de vinaigre et d'un peu de sucre, celte racine est un condiment très-sain et se sert avec les viandes. Son usage est répandu surtout au nord de l'Europe. Ç-.aeverei/nj 1. Atraoeiie uatens.Dsr.et Mon. var. vSonhia*. 2. Gaslrolobiuiu cuneaUmv. Ar.Himf — 97 — HORTICULTURE. LA CLEMATITE DE S, M. LA REINE SOPHIE DES PAYS-BAS/ Par m. Ch. Morren. Pendant que le Clematis lanuginosa de Lindley nous arrivait comme nouvelle espèce chinoise , introduite de Tein-Tung près de Ningpo, par le voyageur anglais, M. Fortune, nos jardins recevaient des Pays-Bas une autre clématite appelée parles horticulteurs Clematis Sophiœ, ou clématite de S. M. la reine SopiiiE-Frédérique-Mathilde de Wurtemberg, reine des Pays-Bas. A peine les journaux horticoles de Belgique donnaient-ils la fleur de Fortune comme la plus grande et la plus belle du genre, comme la plus rustique et la plus digne « des premiers honneurs de l'orangerie comme plante de treillis » que ces premiers honneurs (s'il y a des hon- neurs de l'orangerie, distinctions que nous ne comprenons guères) étaient réclamés à leur tour par une plante de pleine terre, la Clématite de Sophie, excessivement rustique, dont la fleur l'emportait sur celle de sa rivale d'un tiers en grandeur, par huit grands sépales au lieu de six, par une teinte rose charmante et des veines blanches en place d'un ton plombé, et par une profusion de fleurs telle que pas un amateur qui l'aura jamais vue , ne voudra s'en priver. La clématite de la reine Sophie, nommée par les horticulteurs Clematis (ou Atragène) SoPHiiE, est-elle une espèce distincte et nouvelle? Nous ne le pensons pas. Nous sommes d'avis que cette clématite est une variété à grandes fleurs et à développement extraordinaire du Clematis patens, décrit naguère par nous et par M. Decaisne, dans le Bulletin de l'Aca- démie royale des Sciences et Belles-Lettres de Bruxelles, tome III, p. 175. Mais nous ne pouvons nous dissimuler que si ce n'est pas à nos yeux une espèce distincte, c'est tout au moins une variété remarquable qui mérite une description et une désignation toute spéciale, description qui, com- parée à celle du type, nous a paru être la suivante : CLEMATIS PATENS. Var. SOPHI.^ {Clé- matites asiaticœ japonicœ). Foliis pinnatim sectis, foliolis infcrioribus oppositis, ovato- oblongis aculis, bi-lrilobatis, inlegerrimis, superioribus trinalis, ovalo-lanccolalis, acu- minalis , longiuscule petiolatis , supra ad nervos, sublus unJique aclpresse puberulis, petiolis pedunculis que laxe pilosis ; (loribus eximiis solitariis lerminalibus; sepalis octo, patentibus, speciosis, ovato-lanceolalis, ulrin- que aUenuatis, apice acutis , subtus medio incano-tomentosis,/iia»(en«îsglabris(v. v.c). CLEMATITE PLANE. Var. DE LA REINE SOPHIE {Clématites asiatiques japonaises). Fetiilles pinnali-séquécs, folioles inférieures opposées, ovales-oblongues , aiguës, bi-tri- loI)ées, très-enlières, les supérieures triner- vées, ovales-lancéolées, aiguës, assez longue- ment pétiolées, au-dessus le long des ner- vures, au-dessous partout poilues par des poils apprîmes ; pétioles et pédoncules à poils làclies; fleurs très-grandes, solitaires, termi- nales ; huit sépales planes , Irès-clégants, ovales-lancéolés et amincis aux deux bouts, aigus au sommet, au-dessous et au niilieu couverts d'un duvet tomenteux blanc; /î/e,092) de diamètre, et qui sont d'un blanc irréprochable, forment, pour ainsi dire, autant de bouquets délicieux que rehausse encore le beau feuil- lage qui les encadre. L'espèce est une de celles qui croissent le plus faci- lement, et lorsqu'on la soumet à un traitement rationnel, il ne faut, comparativement, que peu de temps pour en obtenir de beaux et vigou- reux arbustes. A l'inverse des autres Gardénia à fleurs doubles, celui-ci ne fleurit qu'une fois par an, mais comme ses fleurs sont très-persis- tantes, il est facile, au moyen de quelques échantillons d'un avancement inégal et calculé, d'en avoir en fleurs pendant la plus grande partie de la belle saison. La multiplication du Gardénia Fortimi, s'elTectue avec la plus grande facilité au moyen de boutures munies d'un talon et prises sur le jevme bois de l'année à demi-aoùté. Ces boutures se plantent dans du sable pur, en pots bien drainés, qu'on met sur une couche tiède et de température égale, et qu'on recouvre d'une cloche. Cinq à six semaines suffisent ordi- nairement pour qu'elles prennent racine, après quoi on les rempote séparément dans des vases de 4 pouces (0"",10) de diamètre qu'on replace sur la couche. En supposant que le bouturage ait eu lieu au mois de juin ou de juillet, si les sujets marchent bien on pourra leur faire subir un second rempotage et continuer à activer la végétation, il importera cependant de la modérer, et de l'arrêter même tout à fait, lorsque la saison n'est pas encore trop avancée, afin que les pousses aient le temps de s'aoùter avant le mois de novembre, dont les jours nébuleux et som- bres ne permettraient pas à cette phase de la végétation de s'accomplir. Une fois la sève arrêtée, on hiverne les plantes en les tenant à une tem- pérature de 7 à 10 degrés centigrades qui doit être prolongée aussi longtemps qu'elles resteront en repos. Les arrosages seront soigneuse- ment ménagés pendant cette période; on devra se borner au strict néces- saire. Aprèsavoirobtcnu, parcemoyen, un certain nombrede plantsvigoureux, il faudra, vers le commencement de mars, choisir les plus avancés pour les soumettre à une température plus élevée. La couche dans laquelle les — 101 — pots seront enterrés devra atteindre la température de 15 à 18 degrés, nécessaire pour mettre la végétation en mouvement. Lorsqu'elle aura commencé, on donnera, si l'état des plantes le permet, plus d'espace à leurs racines par un nouveau rempotage dans des pots de 5 à 9 pouces (de 0'",10 à O^jSd) d'ouverture, suivant la taille des sujets, en ayant soin de remplacer par d'autre la terre usée et de dégager doucement l'extré- mité des racines, sans toutefois enlever ou ébranler le reste de la motte, qu'on laissera aussi intacte que possible. L'opération terminée, on remet les plantes sur la couche et on active leur développement. A mesure que la chaleur du soleil augmentera, on donnera des arrosages et des bassi- nages plus fréquents avec de l'eau tenue à la température de la seri'e ou de la bâche qui contiendra les plantes; on pourra ombrer légèrement quand les rayons du soleil seront trop vifs, et l'on aura soin de retrancher tous les boutons à fleur qui se montreront, comme aussi de pincer l'extrémité des rameaux qui tendraient à s'emporter, afin de former à la plante une tête peu élevée mais bien garnie. Si cela devient nécessaire on procédera à un nouveau rempotage dans des pots de 15 pouces (0™,53) de diamètre, sans modifier autrement la marche adoptée. En distribuant à propos l'air, l'eau et la lumière, en pinçant avec une sage discrétion les sommités trop vigoureuses et les boutons à fleurs qui se montreraient, on obtiendra, dans le courant de la saison, des plantes bien faites et pleines de vigueur. Ce sera une affaire de tact, pour le jar- dinier, que de savoir suspendre graduellement ces diverses opérations et de les arrêter en temps convenable , pour permettre aux pousses de s'aoûter et les préparer à un nouvel hivernage qui s'exécutera dans les mêmes conditions que le premier. C'est dans l'année qui va suivre, que les plantes devront commencer à fleurir. Si on voulait les avoir de bonne heure dans cet état, par exemple en mai, il faudrait les remettre sur la couche chaude dès les premiers jours de février; on attendrait davantage pour celles qu'on voudrait voir fleurir plus tardivement. Lorsque la floraison sera com- mencée, on les enlèvera de la couche pour les mettre dans tel autre endroit de la serre ou de l'orangerie qu'on jugera à propos; il faudra seulement que la température y soit maintenue à un degré convenable, soit pour ne pas arrêter la floraison, soit pour ne pas la précipiter, afin d'en jouir plus longuement. Quand cette dernière phase est achevée, on rabat les branches sur un bon œil et on reporte les plantes sur la couche pour ranimer la végéta- lion. Il convient aussi, h cette époque, de rempoter les plantes dans des vases un peu plus grands, attendu que cette espèce pousse vigoureuse- ment en racines et que les fleurs en sont d'autant plus belles et plus abondantes que les racines ont plus d'espace à parcourir. Dans le cas où on ne pourrait pas donner des pots de plus grande dimension, il faudrait retrancher une partie considérable de la motte et la remplacer par de la ~ 402 — terre nouvelle. En procédant ainsi, on aura des plantes bien censtituées, qui fleuriront pendant plusieurs années; si elles venaient à s'épuiser par une floraison trop abondante ou à être atteintes de quelque maladie, on les remettrait sur la couehe pour leur appliquer le même traitement qu'aux plantes fraîcbement obtenues de boutures. Le Gardénia Fortuni prend chez moi un développement merveilleux , dans un mélange, par parties égales, de terre franche et de terre de bruyère, coupé d'une quantité suffisante de gros sable, pour entretenir la préméabilité de la terre; j'ajoute à ce mélange une bonne dose de charbon de bois concassé en fragments de la grosseur d'une noisette ; c'est un véritable engrais en même temps qu'un agent de purification pour le sol. Quant aux autres engrais, je les administre sous la forme liquide, et j'ai remarqué que deux arrosages d'engrais liquide très-délayé donnés chaque semaine dans la période de la végétation , produisent les effets les plus remarquables. S'il arrivait que les plantes fussent attaquées par les cochenilles, on devrait se hâter de les en débarrasser. Le meilleur moyen, à mon avis, est de les sortir de la serre, de coucher les pots sur le côté et de donner de copieux bassinages avec de Teau chauffée à 65 ou C6 degrés. En répétant l'opération à quelques jours d'intervalle, les insectes sont détruits sans que les plantes en aient souffert. Il est bon de les tenir à l'ombre pendant quelques jours après chaque opération. [Revue horticole, 1855.) CULTURE DES CINÉRAIRES, Par m. Thorne, Direcleur du parc de Sliuckburgli. Les cinéraires peuvent actuellement se classer parmi les plantes qui fleurissent de bonne heure, au tout premier printemps, et même si on leur donne un traitement convenable, on peut les regarder comme des plantes qui fleurissent toute l'année, et, pour obtenir ce résultat, il faut seulement les répéter à différentes saisons. Depuis janvier jusqu'à la lin de juin, tel est le laps de temjjs pendant lequel on doit posséder des cinéraires dans leur plus bel état de perfection. Si la culture a été appropriée, elles présenteront alors leur plus grande beauté et feroni l'admiration de tous les amateurs de jolies plantes par la masse de leurs fleurs, leurs couleurs infinies en nombre, si on les a élevées de graine. Il est vrai qu'il y a des horticulteurs qui ont abandonné la culture des ciné- raires à cause de leur envahissement trop facile par les pucerons, mais on peut eertainenicnt remédier à ce défaut qui est réel, en im[)rimant une plus grande vigueur à la végétation et en éloignant toutes les feuilles — 405 — mortes, lesquelles sont nombreuses dans toutes les cultures où le feuillage est dense et pressé. Dans aucun temps il ne faut que les cinéraires souffrent du manque d'eau, car elles consomment beaucoup de ce liquide, particu- lièrement lorsqu'elles occupent leur pot de fleuraison. Quand on traite bien les cinéraires, elles ont rarement le puceron. Et quand cet insecte a fait irruption, une légère fumigation de tabac suffît pour le détruire : ce procédé vaut mieux que tous les moyens préventifs qu'on a recommandés. Pendant les mois d'avril et les suivants, quand les fleurs commencent h se faner, on coupe les sommités des plantes et on les sort quand tout danger de gelée est passé. On les laisse dans cet état jusqu'à ce qu'une nouvelle pousse se fait jour et alors on les divise et on les repote dans des pots plus grands, de six pouces de limbe, en préparant la terre de terreau de feuilles consommé, de terre franche argileuse et de sable siliceux. On les place alors dans une bâche froide, à l'abri du soleil pour environ deux semaines. Puis on les sort à Tombre, et enfin, quand les racines sont bien formées, on les rcpotc de nouveau dans des pots encore plus grands. Si Ton désire une fleuraison ample sur des plantes plus petites, il convient de prendre des pots moins grands, mais si l'on choisit de fortes plantes et qu'on leur donne des pots de douze pouces, on obtient alors des plantes énormes et des fleuraisons extraordinaires. Voici un compost que l'expérience m'apprend donner aux cinéraires un dévelop- pement luxueux : deux parties de terre franche argileuse, une de terreau de feuilles et une partie de fumier d'étable vieux de deux ans, mélangé d'un quart de sable siliceux rugueux. Au-dessus des tassons pour assurer le drainage, mettez une couche d'argile brûlée ou de poudre de brique, en vue d'absorber et de faire écouler les eaux. Ajoutez un seizième de purin liquide à l'eau d'arrosement et les effets seront surprenants. Les cinéraires seront, cultivées ainsi, des plantes de premier ordre et du plus bel ornement. REVUE DE PLANTES NOUVELLES. Brassavola lineata. Hook. Bot. mag., 4853, tab. 4754. — Bras- savole à feuilles linéaires. Famille des Orchidées. Feuilles cylindriques, allongées, pointues, un peu amincies à leur base, sillonnées en avant ; pédoncule radical biflore, fleurs grandes, pendantes, sépales et pétales linéaires-lancéolés conformes, onglet du labellum allongé, entier, lame ample, cordée, acuminée , longitudinalcment pliée et striée. Celte or- chidée a été vendue à la vente de M. Warsowitz à Londres, en 18o2, composée de plantes de l'Amérique méridionale. Déjà elle a donné do grandes fleurs en 1855, à MM. Jackson de Kingston. Cette espèce a de l'analogie avec le Brassavola venosa. Selon M. Lindiey clic diffère peu du Brassavola acavfis de Paxton, FI. Gard. vol. H, p. 152; mais celui-ci — 404 — se distingue par ses feuilles plus courtes, par son pédoncule uniflore et son onglet court. Le pédoncule biflorc de ce Brassavola lineata est son caractère principal et distinctif. Le caudex donne ce pédoncule qui au fait est radical et non terminal comme le porte la description du genre. Le périanthe est blanc citronné, lavé d'aurore, et le labellum blanc teinté de jaune citron. Culture. Elle est semblable à celle des orcbidées de ce genre appartenant aux serres très-chaudes. Elle croît bien suspendue. Gilia Intea. Steud. Nomencl. Bentli. in De Cand. Prodr. v. 9, p. 515. — Hook. Bot. mag., ann. 1855, tab. 4755. Gilia jaune. Famille des Polé- moniacées. Synonymie : Leptosiphon luteus, Benth. in Bot. reg. sub. tab. 1622. Tiges filiformes, faibles, mollement poilues, rameaux opposés grêles, flexueux, feuilles opposées sessiles, palmées à 5 ou 7 lobes linéaires, subspathulés , charnus , ciliés; bractées semblables, mais les lobes plus grands, subulés, lobes du calice velus, glanduleux , lancéolés-subulés, corolle jaune, tube glanduleux très-long et filiforme. 31. Bentham réunit les Leptosiphon aux Gilia dont ils ne diffèrent nullement que par la lon- gueur et la ténuité du tube de leur corolle. Dans celte espèce jaune, ce tube est très-long et très-étroit; l'entrée de la gorge est d'un jaune soufré brillant avec un œil orange vif. Les flcui's naissent à profusion et cette plante devient ainsi un fort bel ornement pour les parterres, les massifs, les boulingrins et la culture en pot. Elle aura une grande faveur, dit M. Hooker, du moment qu'elle sera connue. M. Douglas la découvrit en Californie. (Encore une espèce à fleurs dorées de ce pays de l'or.) Cepen- dant, M. William Lobb est le premier qui en a envoyé des graines en Angleterre où cette espèce a fait l'admiration à la Société horticole de Chiswick. Culture. Plante annuelle , sa graine se confie au printemps au sol ter- reauté de nos jardins et même à la terre de bruyère; elle demande assez d'humidité. Sa floraison a lieu en été et les graines mûrissent en automne pour le semis suivant. Hoemanthns TÎrescens. Hertb. Amaryllid. 255. — Kunth. Ama- ryll. 592. Enum. pi. tome V. Hœmanthus verdâtre. Famille des Amaryl- lidacées. Feuilles pubescentes ou ciliées, spathe non colorée; périantlie blanc plus court que les filets. Cette espèce du cap de Bonne-Espérance comprend trois variétés : a pithescens qui est V Hœmanthus pubescens de nos horticulteurs marchands (valeur 2 fr.) et que quelques-uns notent de la parenthèse (le vrai), comme s'il pouvait y avoir un faux; s'il y avait un faux Hœmanthus pubescens , ce ne serait pas lui, apparemment, mais un autre. Cet Hœmanthus virescens a pubescens a les feuilles larges, poi- lues, obtuses, la spathe plurivalve, verte; le périanthe blanc, les étamines et le style plus longs. Il a été représenté par Loddiges, Bot. cab. t. 702, — lOS — et dans le Botanical register, pi. 582. Son introduction dans les serres d'Europe remonte à 1774. — La seconde variété, /3 intermedius , a les feuilles glabres, le bord velu et cilié; la spathe blanche, les veines vertes et le style très-long. Le Botanical magazine l'a figuré pi. 1259. Nos hor- ticulteurs ne l'ont pas. — Enfin, la troisième variété ■> est Valbiflos, carac- térisé par les feuilles glabres, marginées de cils; la spathe blanche et le style non allongé. C'est VHœmanthiis albiflos de Jacquin , figuré par lui dans les plantes de Schœnbrunn , tome I, v. 51 , pi. 59. Le Botanical cabinet l'a gravé pi. 602. Il est introduit depuis 1791. Comme ses feuilles sont glabres, c'est de lui que les catalogues marchands (Van Houtte, etc.) disent Hœmantims albiflos (non pubescens). Ce qui prouve bien que ces trois variétés albiflos, intermedius et pubes- cens, vendues à tort comme çspèces, ne sont qu'une seule et même espèce, ce sont les pieds de cette plante cultivés par M™'' Lcgrelle-d'Hanis à Berchem près d'Anvers. Cet Hœmanthus , venu du Cap , a les feuilles larges, obtuses, poilues et ciliées, la spathe plurivalve, comme Y Hœman- thus pubescens, la spathe blanche, striée de nervures vertes, comme Y Hœmanthus intermedius , et le style non allongé comme Y Hœmanthus albiflos, mais il n'a pas les feuilles glabres de celui-ci , ni les longs styles de Y intermedius, ni les spathes vertes du pubescens. Il offre donc les trois caractères distinctifs des variétés réunies ensemble. Herbert avait raison en remarquant que Y Hœmanthus virescens se dis- tingue de tous les autres par ses bulbes vertes, et les pieds deM^^Legrelle- d'Hanis ont aussi cette couleur. D'après cet état de choses, il faudrait distinguer cette quatrième variété de M""" Legrelle-d'Hanis sous le nom de: Hœmanthus virescens, var. J" omnimodus ; foliis latis, obtusis, pilosis, margine ciliatis; spatha plurivalvi alba venis viridibus; stylo haud elon- yato. Cette diagnose rentre dans l'esprit de celles écrites par Herbert et conservées par Kunth. Cet HoEMANTHus VIRESCENS omnimodiis est une jolie plante de serre chaude. L'inflorescence n'est pas aussi grande que celle de Y Hœmanthus coccineus, mais sa blancheur la fait remarquer. Les feuilles et les hampes sontfortementvelues, les poilsmous. Elle fleurit en septembre et en octobre. Culture. Elle est la même absolument comme celle des autres hœman- Ihes : peu d'eau et même pas du tout dans le repos; assez bien dans la végétation ascendante, beaucoup pendant la floraison et peu à peu de moins en moins. La reproduction par graines ou la multiplication par cayeux. Impatiens Jerdonise. Wight. Je. Plant. Ind. or. v. 4, t. 1G02. — Ilook. Bot. mag., ann. 1855, tab. 4759. Impatiente de Jerdon. Famille des Balsaminées. Plante épiphyte, tiges agrégées simples, courtes, char- nues, épaisses, violettes , s'cnracinant ça et là; feuilles subterminales, ovales , aiguës , dentées , pétioles trois fois plus courts que les feuilles, BELG. HORT. T. IV. 14 — i06 — glanduleux au sommet, pédoncules axillaires, de 2 à 4 fleurs, pédicelles plus longs que les pédoncules (rouges), sépales latéraux lancéolés, Tante- rieur ample, renflé, comprimé, éperonné au sommet, éperon court, obtus et recourbé au-dessus. M. Mac'Jvor envoya au Jardin de Kew les tiges tubéreuses de cette singulière balsamine qui lui avait été expédiée des Neilgberries.M™^ Norton, femme du juge-avocat de Madras, avait dessiné cette plante remarquable sur ses collines natives, et ce dessin ,.comparé avec les plantes fleuries en 4855 à Kew, en a prouvé la scrupuleuse exac- titude. Les fleurs sont réunies au sommet d'une tige violette, charnue, épaisse et épiphyte, les feuilles sont épaisses, d'un beau vert brillant, les fleurs sont jaunes en haut et rose vif pourpre en bas. L'éperon dans cette espèce absorbe tout le limbe du sépale nectarien. Culture. Cette remarquable espèce d'Impatiens est de la serre tempérée: c'est là qu'elle a fleuri, mais M. Ilookcr ne dit pas si on Fa cultivée comme épiphyte ou comme espèce terrestre. La gravure du Botaniccd Magazine ferait supposer que c'est ce dernier mode qu'on a suivi. Au reste, cette espèce doit reprendre de bouture , vu sa consistance charnue. Philesia bnxifolia. Lam. Jllust. t. 358, Encyc. v. 5, p. 269. — Kunth. Enum. pi. v. 5, p. 285, etc. — Hook. Bot. mag., ann. 4855, tab. 4758. Philésie à feuilles de buis. Famille des smilacées. Cet arbuste est encore seul de son genre. Il est droit et rameux, les rameaux alternes, écailleux , principalement feuillus au sommet et allant jusqu'à quatre pieds de hauteur dans son pays natal. 11 fleurit dès qu'il atteint quatre pouces de hauteur. La tige porte des écailles brunes, lancéolées aux joints des branches, les rameaux anguleux, verts, ci et là écailleux. Les feuilles alternes d'un pouce ou d'un pouce et demi de longueur , pétiolées, linéaires-oblongues, coriaces, toujours vertes, penninerves, glabres, mu- cronées, glauques au-dessous, les bords réfléchis; pétiole articulé à la base de la lame d'où la feuille se désarticule pour laisser subsister le pétiole. Pédoncule très-court , terminant les branches des bractées à la base de la fleur solitaire, pendante, grande. Calice de trois quarts de pouce, formé de trois sépales oblongs, obtus, imbriqués, apprîmes, con- caves et scarieux. Corolle de deux pouces de longueur ou un peu plus, erecto-campanulée; pétales obovés-oblongs , mucronulés, d'un rose pourpre vif, un peu cireux, égaux, concaves , veinés étant secs, la base unie; chacun porte à la base une glande ou un nectaire oblong et déprimé. Filets réunis en un tube jusqu'à leur milieu, puis libres, égaux, un peu plus courts que les pétales ; anthères droites , subsagittées. Ovaire petit, ovale-trigone, uniloculaire, avec ti'ois placentas portant plusieurs ovules. Style un peu plus long que les étamines, égal en grosseur, stigmate déprimé capité, le bord recourbé, obscurément trilobé. Le fruit est une baie subglobuleusc, mucronulée, rugueuse et contenant plusieurs graines. Commcrson a découvert cet arbuste au détroit de Magellan; Banks et — 107 — Solander l'ont revu h la baie du Bon-Succès, et enfin les botanistes l'ont retrouvé depuis sur toute la côte occidentale de l'Amérique antarctique, depuis le Chili jusqu'à Baldivia ou Valdivia. Dans cette ville on l'appelle Pepino, et on le trouve au sommet de la cordillière du lieu, dans les endroits marécageux et sous des arbres. Longtemps les jardins d'Europe ont désiré la possession de cette plante que M. William Lobb a enfin envoyée en Angleterre. On l'a donc vue en fleur à l'exposition de Chiswick en juin 1855. Ces fleurs ont pu convaincre les botanistes que le genre Philesia ne peut être confondu avec les Lapa- gcra, bien qu'ils se ressemblent quant aux pétales, mais le calice et les étamines monadelphes les séparent complètement. MM. Veitch, d'Exeter, pensent que le Philesia bnxifolia pourrait bien passer en pleine terre aux environs de Londres et se naturaliser dans les jardins. En attendant, tout ce que nous savons de sa culture, c'est qu'il lui faut de la terre de bruyère humide, une position comme nos bruyères de marais. Rliyucbosperuuim jasiiuinoïdes. Lindl. Journ. Soc. of Lond. v. 1 , p. 74. Cou. Xylogr. Hook. Bot. mag., ann. 1855, tab. 4757. Rhyn- chosperme à fleurs de jasmin. Famille des Apocynées. Feuilles petites, ovales-lancéolées, aiguës, corymbes terminaux et axillaires, plusieurs fois plus longs que les feuilles , divisions du calice lancéolées, ciliées , réflé- chies, corolle blanche, divisions obovales, marginées, réfléchies, ondulées, glandes hypogynes distinctes. C'est un joli arbuste toujours vert, fleuris- sant de bonne heure et jeune, présentant une allure un peu grimpante. Il a la désinvolture du jasmin volant , mais il est plus ramassé. Sa fleur blanche émane une délicieuse odeur de jasmin. Introduite de Shanghai d'où cette espèce est originaire, nous la devons à M. Fortune, et bientôt elle a franchi le détroit et aujourd'hui, en Belgique, un beau pied ne coûte plus que 5 francs. Il faut remarquer que des horticulteurs la vendent sous le nom de Trachelospermum jasminoïdes, nom inexact. M. Lindley a fait remarquer qu'elle a le port des Agcinosma, mais les lobes de la corolle diffèrent, le nectaire cupuliforme a cinq lobes obtus, le stigmate est tout autre. Enfin le Bhynchospermum Wcdlichii de De CandoWe, ouVEchites rhynchosperma de Wallich, est différent par ses larges feuilles et ses fleurs roses. Culture. Cet arbuste est de serre chaude sans réclamer toutefois de haute température : il demande de la terre de bruyère, assez d'eau pen- dant la floraison , beaucoup de lumière et une exposition libre. 11 est sujet aux coccus blancs dont il faut le débari'asser aux aisselles des feuilles par un coup de brosse sèche. La multiplication se fait par le jeune bois, en couche chaude et étouffée; la reprise a lieu promptcment. — 108 — PHYSIOLOGIE DES PLANTES. REPRODUCTION DU BOIS ET DE L'ECORCE A LA SURFACE DE L'AUBIER DÉCORTIQUÉ, Par m. a. Trécul. Il y a un siècle environ que Duhamel a dit que le bois dépouillé de ses tissus corticaux peut reproduire du bois et une nouvelle écorce. Cette vérité contestée jusque dans ces derniers temps, fut mise hors de doute par mes observations sur le Nyssa; mais de nouvelles études étaient nécessaires. Duhamel, en effet, n'avait pu reconnaître par quel mode de multiplication utriculaire les tissus du bois dénudé se recouvrent de productions ligneuses et corticales nouvelles, et moi, j'avais trouvé les excroissances du Nyssa toutes développées. Tout le phénomène organo- génique était donc à découvrir. Depuis les expériences de Duhamel , qui avait vu, à la surface du bois décortiqué, des mamelons gélatineux, isolés, sortant iV entre les fibres longitudinales de l'aubier, s'étendant peu à peu et se réunissant pour constituer la nouvelle écorce sous laquelle était aussi un feuillet ligneux très-mince; depuis ces expériences, dis-je, il en a été fait par Dutrochet, Meyen et M. Dalbret. Ayant déjà exposé ailleurs l'opinion de Dutrochet, je ne m'en occuperai pas dans cet extrait. Quant aux deux derniers obser- vateurs, ils virent des gouttelettes gélatineuses exsuder du corps ligneux, se condenser en tissu cellulaire, s'étendre et se réunir comme l'avait remarqué Duhamel. Ces gouttelettes, dit Meyen, ne sont pas sécrétées sous la forme d'un tissu, mais sous celle d'un mucilage sans organisation, qui renferme le principe de son organisation ultérieure. L'observation attentive des faits montre qu'il ne sort rien d'entre les fibres de l'aubier, qu'à aucune époque les nouvelles productions ne sont liquides, mais qu'elles sont formées de cellules dès le principe, et que ces cellules, d'aspect gélatineux comme toutes les très-jeunes productions utri- culaires, sont engendrées par celles de la couche génératrice, qui sont restées à la surface de l'aubier après l'enlèvement de l'écorce. Mais ce phénomène de régénération de l'écorce présente deux modifi- cations jirincipales : 1° ou bien la reproduction se fait à la surface des tissus mis à nu, c'est-à-dire, par les cellules les plus externes; 2° ou bien elle a lieu dans les cellules internes de la couche de l'année, produite avant la décortication; les cellules externes sont alors repoussées au dehors par celles qui sont formées plus à l'intérieur dans le voisinage de l'aubier. — 109 — Dans le premier cas, quand ce sont les cellules extérieures qui opèrent la multiplication, les rayons médullaires, les jeunes cellules ligneuses et les vaisseaux d'un petit diamètre eux-mêmes, peuvent concourir à la régénération des nouveaux organes; ils sont métamorphosés en tissu cellulaire ordinaire. Le Gleditschia, le Robinia, VOnne, \c Marronnier d'Inde, \eTiUeid, le Paulownia, etc., m'ont fourni de nombreux exemples de ces transfor- mations. Dans quelques circonstances, les cellules ligneuses seules produi- sirent les nouveaux tissus ; celles des rayons médullaires les plus externes, devenues brunes, étaient mortes en apparence. D'autres fois, ainsi que l'a observé M. Brongniart, les rayons médullaires seuls donnent naissance aux excroissances. Dans tous les cas, voici comment le phénomène s'accomplit. Toutes les cellules de la couche utriculaire formée dans l'année se gonflent; les plus externes s'étendent les premières, et cette extension des uti'iculcs se propage de la périphérie à l'intérieur. La plus externe est souvent glo- buleuse, puis elle devient claviforme ; c'est alors qu'elle se partage en deux par une cloison. Les nouvelles cellules et celles qui sont placées au-dessous d'elles, se divisent de la même manière, en sorte que la multi- plication s'opère bientôt dans toute l'épaisseur de la couche utriculaire. Cependant, il arrive quelquefois que les cellules les plus internes ne subissent aucune modification. Dans quelques arbres, j'ai vu ces changements se faire simultanément dans les rayons médullaires et dans les cellules ligneuses; dans d'autres, la multiplication commençait par les rayons médullaires. C'est alors que ceux-ci sont terminés par des groupes de cellules qui constituent les prétendues gouttelettes qui semblent exsuder des rayons médullaires. Insensiblement, la métamorphose s"élend aux tissus adjacents. Le tilleul m'a fourni les plus beaux exemples de cette dernière modification. Rien de liquide n'exsude donc des rayons médullaires. De nouvelles preuves en sont données par le second mode de génération des utricules. Ils sont dus sans doute à des états différents de dessiccation de la surface des tissus sur lesquels ces phénomènes s'accomplissent. J'ai observé le second mode sur l'Orme, le Paulownia et le Robinia. Dans VOrme, les cellules primitives, rejetées à l'extérieur, recouvraient les plus jeunes. Celles-ci s'étaient étendues considérablement; elles for- maient des tubes horizontaux dont la longueur diminuait graduellement en se rapprochant du bois près duquel le nouveau tissu n'avait rien de particulier dans son aspect. Dans le Pauloivnia et dans le Robinia, les longues cellules transver- sales signalées dans l'Orme, n'existaient pas. Il y avait déjà de grands vaisseaux dans la jeune couche ligneuse à l'époque de la décortication. Dans les points où des protubérances se sont développées, ces vaisseaux ont souvent été rejetés loin du point où ils sont nés, avec les cellules les — no — plus externes, par celles qui naissaient près de l'aubier. Quelquefois aussi la multiplication ne se faisant pas immédiatement au contact de cet aubier, les vaisseaux qui en étaient les plus rapprochés n'étaient pas déplacés, comme ceux qui étaient plus voisins de la périphérie. Quand une excroissance composée de tissu utriculaire a été produite par l'un ou par l'autre des deux modes de génération, dont je viens de donner la description, d'autres changements surviennent au milieu des nouveaux tissus. Il s'y développe des vaisseaux, des fibres ligneuses et des fibres du liber; mais, dans la formation de l'écorce, des cellules assez grandes, à parois épaisses et ponctuées, disposées par groupes, précèdent ordinairement l'apparition des fibres du liber. Ce que l'on remarque d'abord dans la masse utriculaire, ce sont les vaisseaux; puis, vers la même époque, quelquefois même avant eux, on aperçoit une zone de cellules délicates, aplaties parallèlement à la circonférence de la tige et disposées en séries horizontales : ce sont les premières fibres ligneuses. Bientôt se manifeste le périderme dont les utricules forment aussi près de la périphérie une zone plus transparente que les tissus environnants; ses utricules sont aussi distribuées avec assez de régularité en sci'ies per- pendiculaires à la circonférence. A peu près en même temps, naissent dans plusieurs arbres les cellules incrustées dont j'ai parlé. Les vraies fibres du liber sont les derniers organes développés. Assez souvent aussi j'ai observé, au lieu d'une zone ligneuse continue, plusieurs centres fibro-vasculaires dans la même masse utriculaire. Un ou ])lusieurs vaisseaux occupaient ordinairement le milieu de ces sortes de faisceaux isolés. Je terminerai en demandant s'il ne serait pas possible que les divers centres ligneux que l'on remarque dans les tiges d'un grand nombre de lianes, dont la structure bizarre a tant occupé les anatomislcs, eurent une origine analogue à celle des parties fibro-vasculaires des excroissances que je viens détudicr? Je suis porté à croire que leur développement est le même; c'est pourquoi j'ai cru devoir appeler sur ce point l'attention des botanistes qui pourraient se trouver dans des circonstances favorables pour étudier raccroissement de ces végétaux singuliers. LES GÉMISSEMENTS DES ARBRES ET LE TASSE PHYSIOLOGISTE. Après Coulomb , de nombreux savants français , italiens , alle- mands, etc., ont constaté que les peupliers renferment dans le centre de leurs tiges une grande quantité de sève chargée d'air et que, lorsque ces arbres sont perforés ou coupés, cette sève et cet air s'échappent avec un bruissement particulier. M. Gaudichaud a eu la confirmation de ce fait, en faisant percer un l)ruplier noir à un mètre environ au-dessus du sol, avec une tarière de — \\i ~ 25 millimètres, qu'on fit pénétrer jusqu'à G ou 6 centim. au-delà du canal. Plus la tarière pénétrait vers le centre de Tarbre et plus la sève, qui coulait en jet, était abondante, plus le bruit augmentait. M. Gaudichaud assure que ce bruit était alors comparable à celui que fait une voiture roulant avec rapidité sur une route pavée et peu distante. A quelle cause faut-il attribuer cet amas de sève fortement aérée au centre du tronc des peupliers? — Cette sève est-elle ascendante ou des- cendante? — Le liquide et l'air ont-ils une même origine? — Quelle est la nature de ce liquide? ■ — Quelle est la nature de cet air? Telles sont les questions que M. Gaudicbaud s'est posées en présence des pbénomènes précités : questions délicates , au sujet desquelles les faits qu'il a recueillis ne lui permettent pas encore d'émettre une opinion. Il nous est impossible de placer tous ces faits sous les yeux de nos lec- teurs, qui ne sauraient d'ailleurs, aujourd'hui, en tirer aucune déduction précise; mais l'extrait suivant d'une lettre du maréchal Vaillant, dont M. Gaudichaud a donné connaissance à l'Académie, est trop curieux pour que nous ne le reproduisions pas. «1 Je doute que votre peuplier se soit plaint d'une aussi piteuse manière.» «c En même temps il sortait de nos pauvres arbres blessés un peu de liquide rougeâtre, mêlé de bulles de gaz et chassé avec force au dehors pendant tout le temps que duraient les gémissements, x Ainsi, cette fable du poëte a sa partie vraie et je vous assure que si, au lieu d'être en Algérie au xix^ siècle, nous y eussions été au xni" avec les superstitions de ce temps, et si l'on nous avait dit que les plaintes que nous entendions étaient des gémissements humains provenant de sorciers ou de sorcières renfermés dans les arbres que nous charpentions, et que le liquide rouge était leur sang, nos palissades auraient bien pu rester inachevées. » — 112 PI. 17. i*Mii- — H3 — HORTICULTURE DE SALON. UN SILENE DE KERIDACH DEVENU UN ORNEMENT DE SALON, Par m. Ch. Morren. Le mont Keridach situé dans le district de Suwant, province russe de Talysch, produit naturellement une plante herbacée, gaie et gentille qui, depuis son introduction (en 1844) dans nos jardins, a fixé Fattention de tous ceux qui l'ont vue et reçu particulièrement des dames l'honneur d'être cultivée et choyée dans les salons. Elles peuvent à ce sujet avoir quelques pensées de reconnaissance envers le professeur M. Fischer, con- seiller de Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies. C'est M. Fischer qui a envoyé le premier le silène du mont Keridach aux jardins de l'ouest de l'Europe, et a permis aux dames de l'admirer à côté d'elles dans toutes les grâces de son ampleur. C'est par Dorpat et spécialement par son jardin botanique qu'il a fait son entrée dans le monde. Ce silène croît sur le mont Keridach à une altitude de 2,500 à 4,000 pieds, il fleurit chez lui en octobre. C'est le docteur Hohenacker qui l'a fait connaître le premier sous son nom de Schafta à la Société impériale d'histoire naturelle de Moscou en 1858, en affirmant que S. G. Gmelin l'avait déjà nommé ainsi. Voyez ci-conlre pi. 17, le portrait de ce silène, dans son ensemble d'abord, dans ses détails ensuite. Il n'atteint guère que six pouces de hauteur et c'est une de ses qualités, de manière à former un de ces lits fleuris comme la Flore alpine en offre de si moelleux et de si élégants. Dans les vases, les branches latérales irradient et se plient en festons; dans les jardins, sur la terre, la touffe forme pelouse; sur le rocher, elle devient édredon. Les branches se subdivisent à l'infini, les feuilles se pressent denses et touffues et du sommet de chaque rameau se déve- loppent une demi-douzaine de grandes et belles fleurs en étoiles, dont chaque pétale offre la forme d'un cœur, d'un beau rose pourpre vif. Cette corolle porte au centre une collerette d'où sortentdes étamines couvertes d'un pollen jaune d'or. Cet ensemble forme une végétation des plus gra- cieuses, et quand on a vu une fois le Silène Schafta, on veut le possé- der toujours. Ce nom de Schafta est, à ce qu'il paraît, le nom russe que les habitants de la province de Talysch donnent à leur silène du mont Keridach, d'après la localité où il croît. On en fait actuellement pour la culture des salons les plus jolis vases, les plus mignonnes corbeilles qui puissent se voir. Ce silène est le meil- leur enfant du monde; on le met où l'on veut, il croît, grandit, fleurit toujours et parfume tous ses environs. On l'a fourré entre les pierres sur les rochers, il y est devenu charmant; on l'a placé dans les parterres, il DELG. HORT. T. IV. 15 — 114 — y a fait merveille. Nous l'avons vu conduit en bordures dans un jardinet de ville et pendant tout l'été il a donné des millions de fleurs sans sortir de ses limites. Ailleurs, on l'a élevé dans un vase de jardin, il en avait couvert le limbe comme un gazon fleuri. Planté au pied d'un laurier, il en protégeait la terre uniformément; enfin, introduit dans les corbeilles et ses vases d'ornement pour les salons et cultivé dans l'intérieur des appartements, le Silène Schafta est montré partout d'une docilité et d'une bénignité de nature à ne pas lui susciter le moindre reproclie. Donnant des graines par quantité , on le sème immédiatement à la maturation , il lève mieux dans ces conditions sans toutefois refuser de pousser au printemps suivant. Obtenu de semis, il lui faut la seconde année avant de fleurir; mais, venu de bouture, il fleurit dès la première année de bouturage. Le sol doit être poreux et pas trop riche, sinon le silène file. 11 craint toutefois le froid et doit passer l'hiver dans l'inté- rieur. Ce silène enfin, ne coûte plus que cinquante centimes chez tous les horticulteurs, mais il vaut beaucoup plus que son prix. QUELQUES DÉTAILS SUR L'IVOIRE VÉGÉTAL , Par le même. On sait que le fruit d'un palmier {Phytelephas macrocarpa) fournit une espèce d'ivoire utilisé dans les arts pour la confection d'une foule d'objets de notre vie d'intérieur. La première connaissance de l'ivoire végétal ne remonte qu'à 1798, époque où Ruiz et Pavon firent la découverte du palmier qui le produit. Les Indiens donnaient à cet arbre le nom de Pullipunta et d'Homero. On le trouve dans les vallées basses cl très- chaudes des Andes du Pérou, près de Chancbamoya, Vitor, Cuchero et San-Antonio de Playa-Grande, sa véritable et primitive patrie. Les Espa- gnols nommaient l'arbre Palma del Marsel ou Marsil végétal. Le fruit est d'abord rempli d'un liquide qui sert à étancher la soif des voyageurs. Puis, cette liqueur devient comme du lait et acquiert un goût sucré comme une espèce d'orgeat. Enfin, peu à peu il s'épaissit et sa dureté augmente au point de lui donner tous les caractères de l'ivoire. Ce dernier ne se forme hors de cette liqueur que sur l'arbre. Quand le fruit est détaché du pied, alors que le liquide existe encore, celui-ci s'aci- difie et l'ivoire ne se produit pas. Beaucoup d'animaux, les ours entre autres , sont très-avides de noix d'ivoire quand le tissu solide n'est pas encore formé. Avec l'ivoire râpé ou avec ses raclures, on peut faire une espèce de blanc-manger qui n'est pas sans agrément. Les Anglais citent des noix d'ivoire de 10 pouces de diamètre et de 25 de circonférence. — 115 CONSTRUCTIONS HORTICOLES. LA SERRE CLOSE DE M. WARD A CLAPHAM, OU TABLEAU VIVANT DE LA NATURE, Par m. Ch. Morren. M- N.-B. Ward , propriétaire à Clapham, a acquis en horticulliire le nom d'un inventeur et d'un inventeur utile, en ce qu'il a donné, le pre- mier, le meilleur modèle actuellement connu de caisses fermées et vitrées propres à transporter les plantes vivantes d'une localité éloignée dans une autre. M. Ward est, comme l'appellent les Anglais, le sauveur des plantes en voyage. On sait que ces caisses portent le nom de leur inven- teur « Wardian case » caisses wardiennes. Elles sont devenues même des espèces de serres permanentes dans les localités où l'air est chargé de fumées comme les villes industrielles d'Angleterre et du continent : elles ont prouvé que les végétaux pouvaient vivre dans une atmosphère renfer- mée, sans renouvellement d'air, du moment qu'ils reçoivent de la chaleur, delà lumière, de l'humidité et une source constante d'acide carhonique. M. Ward , établi à Clapham dans une somptueuse demeure, a voulu réaliser chez lui une de ses caisses en grand. Cette caisse est devenue une serre : il y a exécuté ce qu'on appelle un tableau vivant de la nature, ou, en d'autres termes, une foret vierge tropicale avec tout le luxe de sa végé- tation digne des temps antédiluviens. Le sol n'est couvert de dalles que dans la partie où l'on marche, tout le reste est rocher, terres, pelouses, herbes et mousses. Malgré l'expérience qui a constaté que dans les nuits d'hiver la température y descende jusqu'à 4 degrés centigrade au-dessus de zéro, et que dans le jour cette même température s'y élève à 38° et ce en hiver en plein décembre, tandis qu'en été la chaleur y monte fréquem- ment à midi à 54"; cependant, malgré cette expérience certaine, il est de l'ait qu'une très-grande quantité de très-belles plantes s'y portent à mer- veille. Cette serre n'a d'autre circulation d'air que celle qui résulte de la différence des pesanteurs spécifiques des gaz qui le composent et des cou- rants amenés par les températures. M. Ward s'est assuré que les Oxaiis acetosella, Dentaria hulhifera, Prinmla vulgaris, Convallariamulliflora, de nos bois et champs ouverts, les Clerodendron fruyrans, Canna indicu, Strelitzia reginœ, les Bégonia de nos serres chaudes ont vécu des années sans avoir jamais renouvelé d'air et en portant plusieurs années de suite des fleurs et des fruits nu'us. M. Ward orne les serres closes de Passiflores, Manetlia, Aristolo- chia, etc., courant sur les colonncttes, de toutes les orchidées tropicales — 116 — suspendues dans les corbeilles ou dans de petits bûchers de bois garnis de mousses. Les rochers et les parties moussues servent à nourrir les Pal- miers, les Fougères, les Bambous, les Bananiers, les Balisiers, les Aroïdées, les Clérodendres, les Achimènes et une foule de plantes analo- gues, la beauté et la gloire de nos serres chaudes. Tout cela y prospère avec luxe. Un Cuphea ignea y devint tellement grand en y vivant plusieurs années et fleurissant toujours, qu'à la fin on dut le détruire parce qu'il occupait trop de place. Les fuchsias s'y changèrent en arbres si grands que leurs racines sortirent de la terre close par dessous et leurs branches du toit par dessus. Au milieu de cette miniature d'une scène tropicale se trouve un bassin dans lequel des poissons rouges et des plantes aqua- tiques se multiplient à l'infini. Remarquons qu'une fois plantés, les végé- taux y jouissent d'une liberté absolue et le désordre de tous ces êtres s'entremêlant ensemble est précisément un des charmes les plus puissants de cette sorte de culture. La gravure (pi. 18) représente l'intérieur de la serre de M. Ward. DE LA CULTURE EN SERRE CLOSE DES DIFFÉRENTES ESPÈCES DE LiELIAS, Par le même. On connaît la beauté des lœlias , ces brillantes orchidées rivales des sobralies. Elles croissent et fleurissent parfaitement dans les serres closes comme celles dont nous venons de parler. Quand elles sont en fleurs, il faut les placer à l'ombre : leurs fleurs se conservent alors très-longtemps. Le Lœlia majalis ne laisse faner les siennes qu'après quatre ou cinq semaines d'éclosion. Le Lœlia anceps, dont les épis ne mesurent que trois à quatre pieds de longueur, porte ses fleurs durant quatre semaines. Les Lœlia autnmnalis, acuminata, alhida , superhiens, etc., présentent les mêmes avantages. Les espèces connues sous le nom de L. cinnabarina et flava demandent surtout la culture suspendue, l'emploi des sphaignes ou mousses de marais, au moins d'un pouce d'épaisseur, mélangées avec des tassons et entremêlées de morceaux entiers ou de mottes de terre de bruyère compacte. Les racines des Irelias s'enchevêtrent facilement dans ces corps de consistance diverse et agissent autant comme véhicules de nourriture que comme réservoirs d'air. Si l'on cultive les lœlias de cette façon, on ne sera pas fi\ché de leur consacrer des soins. 117 — PI. 18. ïît%\^ . «^ < '} — 118 — JARDIN FRUITIER. LE PLAQUEMINIER PISIIAMIN OU LE PRUNIER-DATTIER DE VIRGINIE, Par m. Ch. Morren. La famille des Ebënacées renferme le genre Plaqueminier, en latin Diospyros, lequel offre lui-même plusieurs espèces des plus intéressantes. Quoique nous possédons dans nos jardins le Pershnon ou le Pishanrin, qui est le Prunier-Dattier de Virginie, cependant nous ne voyons guère arriver son fruit sur nos tables. Aux iles d'IIyères , dans le midi de la France, en Italie, en Espagne, sa fructification réussit en pleine terre, et, vu la facilité avec laquelle on l'obtient, nous devrions dans nos contrées tenter la culture de cette espèce, Diospyros Virginiana, dans nos oran- geries. Il est indubitable que nous aurions ainsi un excellent fruit de plus. Miller, Duhamel, Thouin et De Poederlée ont déjà voulu, dans le siècle dernier, acclimater, comme ils le disaient, cet arbre de Virginie. De Poe- derlée avait eu soin d'indiquer le Pishamin ou le Plaqueminier à gros fruits comme devant être préféré. Il parle de plantations faites à Louvain, par 3Iichaux, au Jardin botanique, se plaint des insuccès et les attribue à ce que pour porter fruit, le Diospyros demande d'être cultivé entre les buissons, dans les fourrés, et non à ciel ouvert. Notre planche représente le port de l'arbre et une branche chargée de fruits qui nous a été envoyée par M. Rantonnet, de Tile d'IIyère. Cet hor- ticulteur consciencieux se loue extrêmement de la fertilité de cette espèce et de la bonté de ses produits. Ce fruit est en effet de la grosseur d'une prune ordinaire, sphérique , terminé par une toute petite pointe, il a sa peau lisse, d'un orange vif et recouverte par une fleur d'un beau bleu comme les raisins; à sa base se trouve un calice à quatre lobes ovales et légèrement pointus. Il est attaché par un pédoncule très-court. Quand le froid de l'automne l'a saisi, il devient blet et c'est alors qu'il est bon à manger comme une nèfle, mais son goût est infiniment plus délicat. Il renferme de G à 8 graines aplaties, dures, semi-circulaires, lisses et imitant de grands pépins. On mange le fruit blet, sans sucre, car il est doux comme une datte, on dirait d'une excellente confiture. On peut d'ailleurs le réduire en cet état. A la Virginie, on le confit à l'esprit de vin, on en fait une espèce de cidre et d'alcool. Au moyen de l'eau chaude et du houblon, on en fabrique de la bière. L'arbre a de belles feuilles ovales et pointues : il s'élève jusqu'à 20 et ôO pieds; sa ilcur est petite et jaune, s'ouvre en juillet, et le fruit, à Londres, par cxem{)le, n'est mûr qu'à la chute des feuilles en uovendnT. Nous proposons sa culture en orangerie ou en serre froide. Le prix de cet arbre est si minime en Belgique, (jue personne ne doit se refuser le plaisir de le posséder. ■ ■'■^nereufu: Prunier- Dattier clo Virdlnie. o Diospyros viràniiana. L . — 419 — ARBORICULTURE. LE CHÊNE DES MARAIS, QUERCUS PALUSTRIS, PAR LE MÊME. Le chêne des marais est, d'après Michaux le jeune, un bel arbre, crois- sant naturellement dans les endroits humides, s'élevant à 80 pieds de hauteur et acquérant au tronc trois ou quatre pieds de diamètre. Il remarque que beaucoup de ses branches secondaires sont plus fines et plus nombreuses que sur ses congénères et entremêlées aux autres, de sorte que de loin on le croirait un arbre épineux. On le reconnaît de loin à cette particularité etmcme en hiver quand lesfeuillessont tombées. Quand l'arbre est jeune, il est pyramidal, ses branches s'étendent au loin par l'âge, son feuillage est léger, élégant, gracieux, ses feuilles sont glabres, oblongues, très-profondément sinuées, supportées sur de longs pétioles, les lobes distants, parallèles, aigus, finement dentés, pointus, les aisselles des nervures fortement poilues au-dessous. L'écorce du vieux tronc se fendille partout, mais la jeune est lisse; le bois montre un grain fin et ressemble à celui du chêne rouge. Le gland est supporté par un pédon- cule très-court, la cupule est évasée, un peu plate, le gland subarrondi, court, glabre, terminé par une petite pointe saillante. Ce chêne croît spontanément depuis la Nouvelle-Albion jusqu'à la Virginie et dans les parties occidentales des monts Alleghanis. Introduit en Europe dès 4800, il a supporté très-bien les climats du centre et surtout les climats humides comme ceux de Londres et des Pays- Ras. Sa croissance n'est dépassée que par celle du Quercus ambigua parmi les espècesd'Amérique, que possèdent aujourd'hui les plantations anglaises, et cependant, en Relgique, on se plaint de la petite taille îi laquelle restent les chênes de marais dans beaucoup de localités. C'est dans le sol sablon- neux humide qu'il prospère. En Amérique on préfère le chêne des marais pour les axes des moulins, parce qu'il peut en fournir de plus gros, de plus longs et de plus droits que les autres espèces. Le bois sert d'ailleurs à tous les autres usages aux- quels on consacre le chêne. La beauté de son port, l'élégance de son feuillage lui donnent entrée dans les jardins, autant que dans les plantations industrielles. Quand il faut garnir un fonds marécageux, c'est une espèce à recommander. Reau- coup de parties de la Relgique, dans nos provinces peu élevées au-dessus du niveau de la mer et dépourvues de tout accident de terrain, peuvent offrir au Quercus pahistris toutes les chances d'une bonne venue et de prospérité. L'écorce possède , comme celle de plusieurs autres espèces, les qualités tannantes. Les glands qu'on fait venir d'Amérique et notam- ment de New-York pour le semis, perdent aussi leur qualité germinative avant l'année révolue après la récolte. C'est donc unecirconstancc à stipuler que leur germination lorsqu'on en fait emplette. — 120 — PI. 19. I — 121 — CULTURE MARAICHERE. LA TRUFFE NOIRE , ENVISAGÉE AU POINT DE VUE DE LA MANIÈRE DONT ELLE VÉGÈTE , DES PROCÉDÉS EMPLOYÉS POUR LA RÉCOLTER ET DES TENTATIVES DE CULTURE QUI EN ONT ÉTÉ FAITES, Par m. Lodis-René Tulasne , L'ouvrage de M. Tulasne, sur les champignons souterrains , du genre des truffes, est un des plus savants qui aient été publiés sous le rapport de l'anatomie et des caractères botaniques de ces singuliers végétaux. Il ne faudrait pas juger du livre par le fragment que nous allons en donner, car c'est de beaucoup le moins scientifique et le seul peut-être où l'auteur se soit attaché à raconter les observations des autres , plutôt qu'à faire lui-même des recherches d'une nature difficile. Les botanistes n'ignorent pas l'importance de l'ouvrage et sauront bien le consulter dans les rares bibliothèques où il se trouve (*) ; aussi n'est-ce pas précisément pour eux que nous transcrivons cet article, mais pour la généralité de nos lecteurs qui verront probablementavec plaisir un exposé dépourvude charlatanisme, de tout ce qui concerne la vie, l'exploitation elles cssaisde culture de la truffe. Pour que l'on comprenne bien, nous dirons d'abord quelques mots de l'organisation des truffes, et nous signalerons en particulier la découverte importante faite par M. Tulasne sur le premier développement de ces végétaux qui avait été mal observé jusqu'à présent. Le genre Tuber , truffe, appartient à la division des champignons appelée Fungi hynienogastrei , dont le principal caractère est que les corps reproducteurs ou semences (spores) se développent dans les replis d'une membrane située à l'intérieur du champignon. Les Lycoperdon, ces gros champignons sphériques blancs, qui croissent dans les prés, sont un peu analogues, mais les truffes appartiennent à une subdivision appelée du mot tuber, tubéracées , où les espèces vivent sous terre etnerépandeiit pas leurs spores sous forme de poussière, comme les Lycoperdoii. On con- naît déjà, dans le groupe des tubéracées, treize genres; celui de la truffe, Tuber, est le plus important, car il renferme vingt-et-une espèces, dont quatre sont généralement employées. La truffe de l'Algérie, que les an- ciens estimaient beaucoup, appartient à un genre distinct, Terfezia; on le reconnaît , sans le secours du microscope , à la présence d'un support analogue à une racine. L'espèce principale, Terfezia Leonis , est grosse comme le poing, à l'extérieur jaunâtre comme une pomme de terre, à l'intérieur solide et jaune, avec sinuosités plus pâles. Les avis sont par- tagés sur sa valeur gastronomique. (1) On en a lire peu d'exemplaires , le prix est de 80 francs. BELG. UOKT. T. IV. ' I () — 122 — Le genre Tuber renferme, entre autres espèces, la truffe l)lanclie de Piémont [Tuhermaijnatnm) et trois truffes extérieurement noires, que les botanistes ont de la peine à distinguer et qui se confondent dans l'usage, quoique leur valeur soit très-diverse. La meilleure est le T. melanos- porwn qui est commun en Italie, dans le Poitou et en Provence, et qui existe aussi , mais rarement, aux environs de Paris et en Angleterre. La superficie présente des aspérités plus petites que dans le T. hrnraale, si souvent mélangé avec elle; son tissu intérieur est, à maturité, d'un noir uniforme, tirant sur le rouge, sans sinuosités plus foncées, mais avec des veines minces nombreuses, d'abord blancbes, puis rougeàtres quand le champignon vieillit. L'espèce qui s'avance le plus vers le nord, est le T. œstivwn, commun en Allemagne, comme autour de Paris et dans le centre de la France; ses verrues superficielles sont grosses et sa chair d'abord blanchâtre, ensuite tirant sur le brun, n'a pas de sinuosités fon- cées, mais des veines minces, de couleur pâle, qui se ramifient beaucoup et diminuent à la maturité. Le T. 6r<«Ha/e, dont on extrait une grande quantité en Italie , en Provence et dans le Poitou , présente de faibles aspérités, une chair blanchâtre et tirant sur le brun dans sa jeunesse, puis noirâtre; elle a rarement des sinuosités obscures, mais constamment des veines blanches, nettement détachées. Enfin, le T. mesentericimi , commun en Italie , a été retrouvé près de Paris , ses aspérités sont moyennes, sa chair, d'abord blanche, puis d'un brun grisâtre, offre des sinuosités foncées et des veines blanches très-contournées. Les spores contenues dans la truffe ont environ 0™03 de millimètre de longueur (dans le T. melasporum , par exemple); ells sont ovo'ides, cou- vertes d'aspérités qui ressemblent à celles d'une truffe toute formée. C'est par ce motif que Bulliard, Turpin et d'autres auteurs ont cru que les spores sont de petites truffes dont le développement consisterait seule- ment à grossir et à se débarrasser du tissu environnant. Les truffes étaient , dans cette manière de voir, des plantes en quelque sorte vivi- pares. C'était une anomalie dans la classe des champignons, et M. Tulasne a prouvé qu'il y avait erreur. En observant les truffes avant leur matu- rité, il a vu les jeunes plantes, alors de la grosseur d'une noix ou d'une noisette, enveloppées complètement d'un feutre blanchâtre, analogue aux filaments déliés (mycélium) d'où sortent tous les champignons ordinaires. Les filaments de ce feutre tiennent à la truffe. Il a vu aussi dans une autre espèce de tubéracées, les spores donner naissance aux filaments. Ainsi, quoique la germination de la truffe ordinaire n'ait pas été suivie dans toutes ses phases, on ne peut douter, par analogie, qu'elle ne se reproduise à la manière des autres champignons, c'est-à-dire, que les spores répandues dans le terrain, quand la truffe est pourrie, ne donnent naissance à des filets très-déliés et ramifiés, sur lesquels naissent ensuite les truffes : c'est exactement comme pour les agarics, les bolets et tous les champignons connus. Si donc on n'est pas parvenu à cultiver les truffes, — 125 — ce n'est pas qu'on ignore leur mode de reproduction , mais tout en con- naissant leurs graines , on ne sait pas les placer dans les conditions qui amènent la germination. Maintenant nous citerons le texte de M.Tulasne. Quatre espèces de truffes, les Tiiher brumale, inelanosporiim, œstivuni, et meseniericiim, sont à peu près les seules qui , en France, soient recher- chées et qui soient Tobjet d'un commerce important; le Piémont et la Lombardie possèdent, en outre, les T. oligosporum et T. macrosporum, qui peuvent aussi servir d'aliment, mais on y prise particulièrement la truffe blanche proprement dite , ou le T. magnatum; en Algérie , c'est le [Terfex Terfezia leonis) qui parait remplacer seul toutes les truffes comes- tibles de l'Europe occidentale. La tâche que nous avons entreprise nous oblige à faire connaître ici les renseignements que nous avons recueillis nous-mêmes, et ceux qui nous ont été communiqués ou se trouvent con- signés en divers livres, relativement à la végétation des truffes noires, aux moyens employés pour se les procurer, au négoce dont elles sont l'objet, et enfin aux essais tentés pour les soumettre à la culture. Nous négligerons ce qu'on pourrait appeler leur histoire littéraire (*) et médi- cale, ne nous étant proposé pour objet que l'étude de leur histoire naturelle. Les truffes noires comestibles [Rabaços des Provençaux , Turtu/i des Italiens) sont des champignons ^re(/aiVes (réunis ensemble); on les trouve chaque année dans les mêmes lieux qui sont appelés pour ce motif : Truf- fières, Rabassières , Trifolaje. Ces truffes se rencontrent exclusivement dans les sols calcaires, ou calcaires et argileux; du moins toutes celles du Poitou, de la Touraine, du Vivarais, du Comtat-Venaissin et de la Pro- vence, qui sont situés dans les environs de Brives (Corrèzc) et de Cahors (Lot). M. Delastre a fait connaître, il y a plusieurs années, la nature du terrain aride qui, près de Loudun (Vienne), est si favorable à la végéta- tion des truffes, et y reçoit le nom de Galltiche; il est formé de quelques pouces d'une terre argilo-ferrugineuse , à peu près stérile, et contient toujours en grande quantité des fragments roulés de calcaire compacte et des sables fins mélangés , calcaires et quartzeux. Il recouvre un banc puissant de calcaire argilo-marneux à pâte compacte et sonore, qui se fendille naturellement en feuilles déliées de peu d'épaisseur. Ce calcaire a quelque l'apport avec celui que l'on exploite pour la lithographie. Un sol aussi maigre contient, sur mille parties, environ cinq cents de calcaire, trois cent vingt-cinq d'argile et de fer , cent cinquante de sable quartzeux et vingt-cinq tout au plus de terre végétale proprement dite. (1) Nous ne pouvons cependant nous dispenser de citer à celte occasion, ne serait-ce qu'il litre de renseignements, deux poënics inspirés par les truffes. L'un est du docteur padouan Alph. Biccarelli, qui vivait au seizième siècle, cl que ses impostures et falsilications ont con- duit au supplice {De Tuberibus opus. iii-12 ; L. Bosvllcn. Patavii, 1504.). M. Slan. Aniorcux en a publié uucomnienlaire sous le lilrc de: Itc marques sur Biccarelli {lioiiclw Dumencq). L'autre poème sur les truffes est de Jean-Bernard Vigo , (pii fut professeur de rhétorique à Turin {Tubera Icrrœ carmcn, in-4", Taurini , typogr. rei^. 1776); à la suite se trouve une traduction en ver.s latins par l'auteur lui-même (/. Tarlu/i /wcniellu di G.-ll. Vi'/o, Irad. dcl la(ino). — 124 — Le coteau de Beauté et la leiTasse de Cliarenton qui , dans l'enceinte du parcdeVincennes, près Paris, produisaient des truffes assez abondamment il y a peu d'années, sont aussi formés par un sol calcaire, et, près de la porte de Nogent, ce sol renferme beaucoup de décombres, de plâtras, pro- venant de l'ancien cbàteau de Beauté, donton voit encore debout les ruines. L'inclinaison du sol où se trouvent les truffières doit importer à leur fertilité en raison du degré d"bumidité qu'elle leur conserve, mais il serait difficile d'évaluer dans quelle mesure ; les truffières des environs d'Apt, celles de Saint-Saturnin et de Rians (Provence) sont toutes situées sur les pentes montueuses plus ou moins inclinées; et cejtendant elles ne le cèdent point en fécondité à celles qui , près d'Avignon, se trouvent dans la plaine; les truffières de Civray , Loudun et Riclielieu occupent aussi dans le Poitou de vastes plaines, tandis que la même province en offre un grand nombre d'autres sur des collines souvent très-raides (à Angle, Ingrande, etc.) dont les produits sont aussi très-abondants. Une circonstance qui a sur la végétation des truffes encore plus d'in- fluence que la nature du sol , c'est la présence des arbres dans la truffière. Celte nécessité , reconnue indispensable , a été diversement expliquée. Les uns ont attribué aux arbres une inlluence directe, et supposé qu'il existait entre leurs racines et les truffes accrues près d'elles un tel rap- port, que ces dernières devaient être regardées comme les parasites de ces racines; d'autres n'ont voulu voir dans le fait dont il s'agit, que le besoin qu'auraient les truffes pour se développer, d'un sol ombr;igé et fécondé en outre parles feuilles et les fruits qui tombent annuellement des arbres, ou par le produit de la décomposition de leurs ramilles et radi- celles. Nous avons souvent rencontré des chercheurs de truffes qui parta- geaient la première opinion ; cependant , quelque soin que nous ayons mis à déterrer les truffes dans le voisinage des arbres , il nous a toujours été impossible de découvrir entre elles et les racines de ces arbres la moindre adhérence, le moindre rapport de continuité. La seconde ma- nière de voir est donc bien plus plausible. En l'acceptant nous ferons remarquer que les truffes ne sont point dans le même cas qu'un très-grand nombre de champignons qui ne sauraient croître ailleurs que sous l'ombre et sur les détritus d'une seule sorte d'arbres, des pins, par exemple, tels sont les yl(/oric«/.s yompims , déliciosus , arenurius, Ilydtmm auriscal- pnim, etc., etc.; qu'elles s'accommodent au contraire de l'influence de plusieurs espèces, quoiqu'elles paraissent certainement en préféi'cr quel- ques-unes. Entre toutes, les chênes et les charmes sont surtout favorables à leur développement; mais elles végètent aussi à l'ombre des noisetiers, du bouleau, du châtaignier, du marronnier, du buis, du lilas. M. Re- quien nous a même montré des Tiiber melanosporum, qu'on lui avait dit être nés près du Pinus halepensis , ce qui est très-digne de remarque, si tant est que le fait soit exact, car nous sommes disposés à le mettre eji doute en considérant combirn est petit le nombre des champignons qui — 125 — croissent indifféremment sous les pins et à l'ombre d'autres arbres. M. Etienne Bonnet, d'Apt, auquel nous devons d'intéressants détails sur les truffes, affirme que ces champignons ne se rencontrent jamais dans les lieux exclusivement plantés de pins, et que s'il s'en trouve quelquefois près de ces arbres, dans les bois composés de pins et de chênes (comme il en existe un si grand nombre en Provence), c'est à ceux-ci qu'il convient plutôt d'attribuer leur présence. Les chercheurs de truffes (truffiers, truflleurs en Poitou, rabassaires ou rabassiers en Provence) s'exagèrent sans doute la nécessité de l'ombre pour la truffière, quand ils assurent que le retranchement de telle branche qui s'avance au-dessus d'elle, pourra amener sa stérilité, car nous avons vu des collines presque dépouillées d'arbres (à Rians , Cruas , etc.), ou même dans des terres labourables, distantes de plusieurs mètres de chênes qui ombrageaient exclusivement la truffière voisine , en sorte que l'in- fluence qu'exercent les arbres par leurs racines semblerait plus efficace que celle de leur ombre. Quoi qu'il en soit, il est bien positif que l'élagagc inconsidéré de tous les arbres de la truffière compromettrait singulière- ment sa fécondité, par cela seul peut-être qu'elle ne serait plus suffisam- ment protégée contre les ardeurs du soleil ; à plus forte raison l'abattage de ces arbres aurait pour résultat certain, sinon l'entière destruction de la truffière, du moins une interruption de la fertilité, dont la durée serait déterminée par celle de l'absence des arbres. Les truffes, dans ce cas, subis- sent le sort de nombreuses plantes phanérogames, et de cette multitude de champignons qui, ne vivant que dans les bois ombragés, disparaissent plus ou moins complètement, lorsque ces bois viennent à être coupés, pour se montrer encore quand de nouveaux arbres ont remplacés les premiers. Nous ne saurions dire si les truffiers sont mieux fondés à mettre l'in- fluence de tel chêne au-dessus de tel autre; car, dans ce cas , ils peuvent fort bien attribuer à l'arbre une fertilité que la truffière doit à une autre cause, comme par exemple à la nature et à l'exposition du sol. Il est éga- lement difficile de se rendre compte ou de découvrir le véritable motif de la stérilité apparente ou extérieure de la truffière , de l'absence si fré- quente d'herbes quelconques à sa superficie. On prétend que les truffières qui n'ont point encore été exploitées, se décèlent par cette nudité, et même par la dessiccation hâtive ou maladive des plantes qui auraient crû sur le lieu qu'elles occupent, de sorte que les truffes se trahiraient à la manière des Rhizoctonia, en faisant périr tous les végétaux plantés dans leur voisinage. Nous ignorons ce qu'il y a de vrai dans cette opinion, car nous n'avons jamais vu de truffière qui n'eût été fouillée déjà un grand nombre de fois. Celle-là, il est vrai , est une terre nue et dépouillée de verdure, mais on peut attribuer cette circonstance aux bouleversements réitérés et pro- fonds que chaque année on leur fait subir. Si les truffes nuisaient réelle- ment à la végétation des plantes phanérogames, on l'aurait, ce me semble, remarqué cl signalé dans les terres cultivées en froment siu' la lisière de> — I2G — bois de chênes, terres où Ton trouve très-fréquemment ces champignons souterrains. On ne saurait, d'ailleurs, tirer un argument en laveur de la réalité de cette action nuisible, de ce que les truffières, au fur et à mesure qu'elles s'épuisent, se recouvrent d'herbes de plus en plus abondantes; le vrai motif en est, sans doute, qu'elles sont de moins en moins fouillées par ceux qui les exploitent. Enfin, ce qui prouve beaucoup contre la pré- tendue assimilation des truffes au Rhizoctonia , c'est que les truffes du bois de Vincennes naissent sous des gazons ou des tapis de mousses, à la végétation desquels elles ne paraissent aucunement préjudicier, et que là seulement où on les a recherchées assidûment depuis plusieurs années, les graminées vivaces font plus ou moins défaut et sont remplacées par quelques plantes annuelles. On conçoit facilement que les Rhizoctonia, en enveloppant les racines de leurs innombrables filaments , s'opposent promptement à ce qu'elles remplissent leurs fonctions d'alimentation, et que la vie des végétaux ainsi attaqués soit empêchée ; mais l'action nui- sible des truffes , si elle existait , ne serait explicable qu'en accordant à leur mycélium une puissance de développement qu'il ne semble point avoir, car qui voudrait se contenter de croire, avccBradlcy, que les truffes attirent à elles toutes les substances nutritives contenues dans le sol, ou qu'elles chassent les autres plantes par leurs odeurs. [Obs. sur le jardin., tome m, p. 277, de l'édition française.) Un fait plus certain, et qui n'a point été signalé jusqu'ici, du moins que nous sachions, c'est que la plupart des espaces où les truffes se déve- loppent sont circulaires, et tout porte à croire que leur végétation res- semble, plus que l'on ne croit , à celle des agarics, des hydnes et autres champignons hyménomycètcs, qui dessinent des cercles appelés ronds des fées. Les bois, truffières des Agnels et de Claparède, près Apt, nous ont surtout offert de nombreux exemples de cette végétation centrifuge, qui est chaque année rendue frappante par les profonds sillons circulaires que le chercheur de truffes, ou le porc qu'il conduit, creuse dans le gisement du champignon. Le centre de l'aire demeurant stérile, et la zone d'ac- croissement de la truffe s'en éloignant sans cesse, il arrive, comme pour les agarics et les hydnes, que cette zone perd incessamment de sa cour- bure et se rapproche peu à peu d'une ligne droite ; les truffes alors semblent éparses dans la truffière. Il est vraisemblable que les truffes sont dans le même cas que d'autres champignons, auxquels il suffit de toucher ou de causer un léger dérange- ment, pour nuire ou même s'opposer tout à fait à leur accroissement ultérieur; telle est du moins roi)inion des trufileurs qui se gardent de laisser dans le sol des petites truffes qu'ils ont déplacées, car ils n'espèrent pas qu'elles puissent , après ce déplacement , acquérir un plus gros \olume; ces champignons ne se prêteraient donc point à la transplanla- lion. Toutefois , si on ne peut, sans inconvénient, changer de place les jeunes truffes, la fertilité de la truffière ne soulï'ro aucunement des mou- — 127 — vements qu'on fait subir à son sol lorsque ces champignons sont arrivés à leur maturité; ceux que cette sorte de labour ne fait point découvrir suf- fisent , à ce qu'il pai*aît, pour la reproduction de la plante, et leurs spores ou germes se développent même, dit-on, d'autant mieux que la terre a été plus remuée en automne ou en hiver. Aussi, ne faudrait-il pas croire que les truffes ne peuvent naître que dans des lieux incultes et respectés par la charrue , puisque , d'une part , les fouissements périodiques des truffières équivalent certainement à un labourage plus régulier, et que, de l'autre, ces champignons, ainsi que nous l'avons déjà dit, et que Munier l'a constaté lui-même (op., cit. 41,521), se rencontrent souvent dans les champs cultivés au bord des chênaies; c'est même surtout dans les lieux cultivés, à l'ombre des peupliers, que croît de préférence, en Piémont, la truffe blanche. Il n'y a pas, au surplus, que les truffes dont les spores ou le mycélium ne redoutent rien des déplacements occasionnes parles labours : le Geaster floriformis, Vitt. qui croît depuis plusieurs années dans une des serres chaudes du Muséum et histoire naturelle de Paris, a, jusqu'ici, résisté aux efforts qu'on a faits pour le détruire en bouleversant la tcri^e de la plate- bande dans laquelle son mycélium pousse incessamment de nouveaux rameaux et multiplie ses fruits. On trouve des truffes noires comestibles en quelque saison de l'année que ce soit, mais à la fin de l'hiver, ainsi que pendant le printemps et l'été on semble ne rencontrer que des Tuber œstivmn et T. mesentermnn. La plupart de ces truffes, celles surtout qu'on récolte dans les premiers mois de l'année, sont fort difficiles à déterminer quant à l'espèce, attendu leur défaut de maturité ; elles portent collectivement en Provence le nom de Maïenques, truffes de mai, truffes blanches, et leur caractère commun est d'offrir une chair où les veines blanches aérifères occupent beaucoup de place, et où la pulpe qui devra renfermer les spores, n'en contenant encore aucun, n'est que peu ou point colorée. Un grand nombi'e de ces jeunes champignons appartient certainement aux Tuber mesenterictim non parvenus à leur maturité, qui avaient été apportés au marché d'Avignon, en a\Til 1856, et nous nous sommes as- surés que les truffes qui, dans le Poitou, sont dites truffes de la Saint- Jean, parce qu'on les recueille vers l'époque de cette fête, doivent aussi être rapportées aux T. œstivuni et T. mesentericum. Quelques-unes d'entre elles étant alors parvenues à leur maturité, on peut les déterminer avec certitude. Ces mêmes T. œstivmn et T. mesentericum, parfaitement mûrs, se vendent abondamment à Carpentras, au mois d'août, ainsi que l'herbier de M. Requien en fait foi; cependant il est extrêmement probable que ce ne sont pas les seuls qui soient recueillis murs pendant l'été ou au commencement de l'automne, et que les truffes maïenques, si elles étaient attentivement étudiées, offriraient une plus grande variété d'espèces. Quant aux T. brumale et T. melanosporum, ils ne mûrissent certainement — 128 — qu'à la fin de l'automne ou en hiver, et nous ne les avons jamais vu mêlés aux truffes récoltées en été. iNous voudrions pouvoir conclure, de ces diverses observations, quel laps de temps il faut à une truffe pour croître et mûrir; mais elles sont trop incomplètes pour nous fournir une réponse certaine à cette question. Beaucoup d'auteurs ont écrit, et la plupart des chercheurs de truffes supposent que les truffes emploient toute une année pour atteindre leur entier développement; il faudrait croire, d'après celte opinion, que la destruction du T. melanosporum , mûr en décembre ou janvier, par exemple, est immédiatement suivie de l'apparition de nouveaux individus qui ne cesseraient de croître jusqu'à pareille époque de l'année suivante. S'il en est ainsi, on doit encore supposer que ces jeunes individus demeurent au moins jusqu'à l'automne avec un si petit volume, qu'ils échappent aux recherches ordinaires, puisqu'il paraît assez probable que pendant le pinntemps et l'été on ne rencontre aucun T. melanosporum. Une autre opinion, généralement répandue, veut que les pluies du mois d'août aient une influence capitale sur la végétation des truffes, et que de leur abondance dépende la fertilité des truffières, de sorte qu'on serait conduit à penser que ce sera à partir de ce mois seulement que les truffes d'hiver, encore sans doute à l'état rudimentaire, commencent à se déve- lopper, et, comme elles sont toutes parfaitement mûres en décembre, il s'ensuivrait que trois ou quatre mois leur sufllraient pour achever leur accroissement. Le T. mesentericuni ne réclame certainement pas plus de temps, car nous avons trouvé à Vincenncs, au commencement d'octobre, des individus gros comme des grains de millet, qui cependant devaient, avant la fin de décembre, acquérir tout leur volume, puisque, vers cette époque, on ne rencontre cette truffe que dans un état complet de maturité. Les truffleurs du Poitou s'accordent aussi à dire que la truffe de la Saint- Jean commence à croître vers le mois d'avril, ce qui supposerait de même qu'elle emploie trois ou quatre mois à prendre son volume normal. (M. Le blanc, in /iï.).Les truffières, comme on sait, ne réclament ni culture, ni soins particuliers. Les fumer serait, assure-t-on, s'exposera lesdétruire, et c'est, en effet, le moyen qui a été proposé pour arriver à ce but. Nous doutons qu'il faille le croire efficace, lorsqu'on rencontre si souvent des truffes dans les lieux cultivés , les champs semés en froment , sur lesquels des engrais sont répandus chaque année. Les truffesont été, jusqu'ici, un produit spontané, un don gratuit du sol, et celui qui le possède ou l'ex- ploite, se borne à faire des vœux pour que Tété et le mois d"août surtout, soient à la fois chauds et humides ; car c'est là seulement qu'il place l'es- pérance d'une abondante récolte. Il est des cultivateurs qui croient, en outre, à l'influence des orages sur la végétation des truffes, et qui gardent ainsi fidèlement la tradition d'une croyance qui fut universelle dans Tan- tiquité, et dont on trouve de nombreux témoignages dans les livres des poètes et des naturalistes. [La fin au prochain numéro.] P 2 i_4-Azaloa ('l'ispillora . Ilook . .)_(). liiliiim roseuin.Wall — 129 — HORTICULTURE. L'AZALÉE A FLEURS CRÉPUES DE LA CHINE | ^ Par m. Ch. Morren. L'acquisition d'une nouvelle espèce d'Azalée est une bonne fortune pour l'horticulture. Celle que nous faisons figurer ci-contre est une récente introduction de M. Fortune qui l'a reçue de la Chine; mais dans ce pays même on ne sait trop si c'est une espèce indigène ou une natura- lisation, et , dans ce dernier cas, sa patrie serait inconnue. Le fait est que les Chinois la cultivent dans leurs jardins et sur les terrasses de leurs demeures. M. Hooker n'oserait pas affirmer que ce ne fut une véritable hybride, mais alors aussi on ne connaîtrait pas ses parents. Tout est donc obscur relativement à l'origine et au berceau de cette azalée qui conser- vera, malgré ces doutes sur sa naissance, un premier rang parmi les beautés de sa famille. L'arbrisseau est moyen de grandeur, assez buissonneux, les branches souvent en verticille, ligneuses, l'écorce d'un brun foncé, couverte de poils apprimés ou couchés, plus abondant sur les jeunes branches. Les feuilles sont alternes d'un pouce et demi de longueur, submembraneuses, planes, obovales-oblongues ou presque lancéolées, aiguës, entières, pen- ninerves, velues des deux côtés et les poils couchés. Les pédoncules sont solitaires, terminant presque toujours les branches, courts, d'un demi- pouce ou un peu plus en longueur , enveloppés de trois à cinq bractées ovales, concaves, membraneuses, droites et colorées en rouge. Le calice divisé jusqu'à sa base en trois lobes oblongs, obtus et velus. La corolle est fort grande, d'un rose pourpre éclatant, le tube infondibuliforme et puis campanule, à cinq angles et divisé en cinq lobes au limbe large et ouvert; ces lobes sont arrondis, et, ce qui constitue le caractère de l'es- pèce le plus saillant, ils sont très-élégamment crépus, crispés et ondulés sur leurs bords. Cinq étamines inégales , défléchies ou droites. Filets rouges, poilus vers la base; anthères d'un pourpre foncé, apparemment stériles. Ovaire petit, ovale, à cinq lobes, très-hispide. Style aussi long que les étamines, glabre. Stigmate pourvu de cinq pointes obtuses. Culture. La floraison de ce joli arbrisseau vivace a lieu en avril. On ne l'a cultivé encore qu'en orangei'ie ou dans une serre froide et dans de la terre de bruyère, en l'entourant des soins ordinaires qu'exigent les azalées de l'Inde. Un brillant avenir l'attend partout où l'horticulture compte des amis. Elle est encore rare en ce moment dans les serres de Belgique, mais les horticulteurs ne vont pas tardera en multiplier les pieds, soit par la marcotte, soit par la grefl"e. BELG. HORT. T. iV. 17 — ISO- LE LIS ROSE DU KAMAON , Par le 3iême. En voyant ce lis nouveau , on dirait d'une fritillaire ou d'une héméro- calle ; aussi, M. le docteur Wallicli , en envoyant la description de la plante en Europe, avait-il cru devoir en faire un genre nouveau sous le nom de Nothollrion, en conservant à l'espèce l'adjectif de roseinn. Royle, dans ses lUustrationes, et Kuntli dans son Enumeratio plantaruni , l'avaient placée dans le genre Fritillaire sous le titre de Fritillaria tJiont- soniana, tandis que lïooker, Lindley, Walpers en ont fait un vrai lis. Voici sa description, la planche 21 en donne la figure. La bulbe est longue d'un pouce, oblongue, ovale tuniquée, les écailles oblongues-lancéolées , brillantes, les extérieures d'un brun de noisette. La tige florale d'un pied et demi de longueur, droite , cylindrique , glabre comme loute la ])]ante. Les feuilles réunies au bas de la tige, mais alternes, sessiles, linéaires, acuminées, graininiformes, les inférieures très-longues, mesurant un pied ou un pied et demi, graduellement plus petites et plus distantes, plus larges à la base, et devenant peu à peu des bractées, toutes carinées. La tige se terminant en épi portant aux environs de huit fleurs grandes, lilacées, jolies et pendantes. Pédicelles près d'un pouce de lon- gueur, plus courts que les bractées qui sont lancéolées-subulées. Périanthe moyen entre l'infondibuliforme et le campanule. Sépales libres à leur base, exactement spath ulés, les bouts réfléchis, la base dépourvue d'un nectaire réel, blanche, mais creusée d'un sillon pourpre foncé. Six éta- mines hypogynes , de la même longueur ou plus longues que le pistil , légèrement déclinées. Filets filiformes-subulés, blancs. Anthères oblon- gues, pourpres-foncées. Pollen d'un rouge orange foncé. Ovaire oblong, obtus , à trois sillons profonds et trois qui le sont moins, triloculaire et polysperme. Ovules situes en deux rangs sur l'angle interne des loges. Style filiforme, décliné avec les étamines et aussi longs (ju'elles. Stigmate recourbé vers le haut à trois loges. Capsule turbinée (Royle) à six angles obtus; graines sans ailes. Le Lilium (notholirion) roseum de Wallich est originaire du Gossain- Than, du Kamaon où cet auteur Ta trouvé. Royle l'a rencontré au Mus- sooree et sur l'Almora, à une élévation de 8,000 pieds au-dessus de rOcéan. MM. Thomson et Strachey l'ont retrouvé dans cette dernière localité. Ce sont ces derniers qui ont envoyé des graines de ce lis en An- gleterre, à Kew, où, semées en bâche froide, elles ont donné des bulbes dont les premières fleurs se sont ouvertes en avril 1855. Culture. Elle est semblable à celle des autres espèces de ce genre originaires de l'Inde. 11 est très-probable que le lis rose passera, comme le Lilium speciosum, l'hiver en pleine terre; mais pendant qu'il se vend encore à un prix élevé, il sera prudent de le cultiver comme le Lilium gixjanteum en serre tempérée ou en conservatoire. 131 IMPORTANCE DE LA CHALEUR QUON DOiNNE AUX RACINES, DÉMONTRÉE PAR LA CULTURE DES NELUMBIUM , Par m. Lindley, Professeur à l'Université libre de Londi'es^ etc. Depuis des années , je ne cesse d'insister sur l'immense importance pratirpie de la chaleur du sol [bottom-heat] dans la culture des végétaux. Je me suis efforcé de faire comprendre que chaque espèce exige, autour de ses racines, une quantité déterminée de chaleur, et cependant ce fait capital semble universellement méconnu, puisque jusqu'à ce jour toute la science des jardiniers s'est bornée à entretenir une température quel- conque autour des racines des plantes, soit au moyen de fumier en fer- mentation, soit au moyen de tannée ou de conduits d'eau chaude, sans se préoccuper du degré qui convient au tempérament de chaque espèce. Il n'y a pas de pratique plus déplorable; une telle ignorance fait l'effet d'une cataracte sur les yeux des horticulteurs, si elle ne les aveugle pas complètement, elle enveloppe pour le moins d'un épais brouillard des conséquences qui devraient être nettement et clairement aperçues. La température du sol , en s'en tenant au point de vue physiologique, consiste dans le degré de chaleur nécessaire à une plante donnée pour acquérir son parfait développement. Elle commence à 55 degrés Faren- heit (0'',56 centigr.) et cesse à 900 degrés Farcnheit (52", 22 centigr.), au- delà de ce point, clic affaiblit la végétation ou l'arrête totalement, car ce degré géothermique (on nous passera ce néologisme) est le maximum de la chaleur nécessaire à la plante la plus tropicale pour nourrir ses organes déjà formés sous rinflucnce d'une température moins élevée. Le degré de chaleur réclamé par les racines d'une plante quelconque, est précisément celui que la nature lui fournit dans les contrées où elle croit spontanément. Ce degré n'est pas invariable ; il s'élève ou s'abaisse avec les saisons, présentant son minimum au moment où la végétation commence, puis s'accroissant insensiblement et atteignant son point le plus haut à l'époque de la maturité du fruit. La chaleur géothermique est-elle trop basse pour le point où est arrivée la végétation, cette der- nière s'arrête jusquà ce que la température du sol soit redevenue nor- male. C'est une remarque que chacun a pu faire pendant le printemps irrégulier de celte année : le sol était d'environ 4 degrés (2", 24 centigr.) plus froid que d'habitude à pareille époque; aussi n'apercevait-on aucun progrès dans la végétation, si ce n'est chez les plantes des latitudes sep- (cnlrionales. Un phénomène tout semblable se fait voir dans les sols com- pactes et non drainés, si on les compare à ceux ((u'on a artificicilcmonl débarrassés de leur huniidilc excessive; il suflit, pour apprécier Icnorme différence qui existe sous ce ra[)port, de jeter allcrnativcmcnt les )cux sur — 152 — les blés croissant en terre drainée et sur ceux qui végètent dans une terre qui ne Test pas. Le sol drainé gagne de 8 à 10 degrés (de 4°,48 à 5°, 60 centigr.), avantage énorme, qui équivaut aune avance de 10 degrés en latitude vers le sud et qui donnerait, par exemple au Ilampshire, la chaleur géothermique de la Castille. Nous ne pouvons, pour le moment, rappeler les saisons qui font que les plantes sont si fortement affectées par la température du sol, il nous suffit de constater le fait et d'affirmer qu'on ne saurait être un bon jardi- nier si l'on n'en fait pas le sujet d'une étude journalière. La circonstance (|ui nous a amené à reprendre cette question, nous a été fournie par un correspondant que le hasard a mis à même d'observer un cas qui vient heureusement à l'appui de notre thèse. Il s'agit de la floraison duNeluni- himn luteum, obtenue, pour la première fois peut-être, en Angleterre, par un procédé suivi accidentellement et sans dessein préconçu. Voici comment l'auteur de cette observation, qui est établi à Cherley dans le Lancashire, s'exprime à cet égard. u Le Nelumbium luteum passe pour ne fleurir qu'avec une extrême difficulté dans ce pays; si j'ai été plus heureux que mes devanciers, je l'attribue à la circonstance dont je vais parler. J'avais jusqu'ici cultivé cette plante comme l'espèce d"Orient (le N. speciosiim) , convaincu qu'étant originaire des parties les plus chaudes de l'Amérique septentrio- nale, elle devait s'accommoder du même traitement. Les pots dans les- quels je les avais plantées, avaient été mis dans un bassin dont l'eau était maintenue à une température de 85 degrés Farenheit (29'',44 centigr.), et les deux espèces poussaient avec vigueur, mais celle d'Amérique refu- sait toujours de fleurir. Pour une raison que je n"ai pas à indiquer ici, il arriva un jour que mon jardinier ferma en partie le tuyau qui conduisait l'eau chaude sous le bassin et que, par suite , la température générale de ce dernier s'abaissa à 70 ou 73 degrés Farenheit (de 21 à 24" centigr.). Dans cette nouvelle condition, le Nelumbium speciosum poussa une mul- titude de hampes dont pas une ne put épanouir sa fleur, tandis que deux échantillons sur trois de Tespèce américaine fleurissaient parfaitement et mûrissaient leurs graines. A partir de ce moment on augmenta la chaleur de Y aquarium, et le Nelumbium d'Orient reprit le dessus et fleurit à son tour abondamment. Je ne doute pas que, de même que plusieurs autres plantes aquatiques de l'Amérique septentrionale , telles que les Hydro- peltis, les Nymphéa et d'autres encore, qui croissent en plein air dans ce pays et quelquefois y fleurissent dans les étés chauds,leiVe/«»i6i Quand sonna le quart d'heure où cette espèce, si hautement appréciée, allait enfin se disperser et se multiplier dans toutes les directions du monde horticole, il y eut un moment de solennel silence, pendant lequel un des héritiers de feu Parmentier déroula deux dessins représentant la fleur de ce Cattleya reflexa macrophjlla , et à l'instant même chaque botaniste, amateur ou horticulteur, de s'écrier que c'était bien là le Cattleya crispa de Lindley. Malgré cette unanimité, les dix-sept pieds furent vendus sépa- rément et produisirent ensemble la somme de fr. 5,495. Dans le nombre figure un exemplaire de 500 fr. Si absolument rien de distinct n'avait caractérisé ce Cattleya d'Enghien, il est peu probable que le prix s'en fut élevé si haut, aussi trouvait-on à examiner le port de ces végétaux , que leur faciès était quelque peu diffé- rent, la plante est plus divariquée, les feuilles sont plus larges, plus grandes, plus charnues; les pseudo-bulbes, plus cylindricjues que dans le type et moins anguleux, se déjettent souvent hors du vase et pendent ou mieux se dirigent vers la terre. Les fleurs naissent séparément ou plu- sieurs ensemble et se tournent en dedans de la fronde ou bien suivent les feuilles et pendent en dehors. Ce sont ces signes qui avaient inspiré le nom de reflexa à l'ancien possesseur. La fleur est d'ailleurs très-déve- loppée, largement ouverte, les sépales linéaires longs, étroits, obovés, lancéolés-aigus, entiers; les pétales plus larges, oblongs-lancéolés, on- dulés, élégamment et finement crépus et frangés sur les bords ; le labellum est indivis, grand, large, le limbe non acuminé comme dans le type, mais crispé, deux fois frangé, obtus au bout et ondulé; la base est jaune citrin, linéolé en avant de pourpre, puis une grande macule de cette couleur vive et veinée d'ai^tères plus foncées de la même couleur. La figure ci-jointe représente le Cattleya crispa, var. reflexa-macro- /)/t?///ad'Engluen, d'après le dessin qu'a bien voulu nous communiquer un membre de la famille de feu M. Parmentier. LE CIIEIRANTHERA LINEARIS , D'ALLAN CUNNINGHAM, Par le même. Le genre Cheirauthera, fondé par Allan Cunningham, appartient à la famille des Pittosporées et se trouve caractérisé comme suit : Calice à cinq — 1G5 — folioles inégales, corolle (un peu inégale, siibringens en lalin) à cinq pé- tales hypogynes, alternes avec les sépales, ovales, à onglet court (il serait plus exact de dire sessiles), rotato-planes. Cinq étamines hypogynes citernes avec les pétales, presque unilatérales (il serait plus juste de dire unilatérales et parfois une étaminc distraite du groupe formé par l'adhé- rence des anthères), filets subulés, anthères introrses, biloculaires,oblon- gues-linéaires, émarginées à la base et insérées par le bas du dos (on dit dans les auteurs par le dos) sur les fdets , loges ouvertes par deux trous longitudinaux finissant en fausse fente en bas. Ovaire elliptique, un peu comprimé, subdécliné (décliné réellement), biloculaire. Ovules nombreux dans les loges, insérés en deux séries sur Taxe de la cloison, horizontaux. Style court , ascendant, stigmate obtus, bifovéolé. Baie papyracée, sèche, ventrue, biloculaire. Graines nombreuses, subglobuleuses, embryon petit, orthotrope à la base d'un albumen dur. L'unique espèce connue de ce genre est une fort jolie plante originaire de la Nouvelle-Hollande orientale et austro-occidentale. MM. Baumann de Bollwiller l'ont introduite il y a quelques années par des graines venues du Swan-River. C'est le Cheiranthera Imearis (d'Allan Cunningham) que nous repré- sentons ci-contre avec les étamines et le pistil séparés et agrandis, d'après un bel individu en fleurs de cette espèce (du 20 avril au 8 mai) et appar- tenant à la maison Jacob-Makoi de Liège. Putterlick,dans sa monographie des Pittosporées, a conservé l'espèce que M. Adolphe Brongniart avait nommée Cheiranthera cya7iea, la croyant distincte de celle de l'auteur primitif. C'est un sous-arbrisseau haut de 2 à 2 Ya pieds, droit , à rameaux ouverts, faibles et pendants, à feuilles alternes, linéaires, pointues au sommet, naissant d'abord apprimées contre la tige, très-étroites, à ner- vure médiane plus foncée, très-entières. Je n'ai pas vu qu'elles fussent incisées au sommet comme Endlicher le dit, les jeunes rameaux portant des feuilles fasciculécs, disposées comme celles des polytrichum ; les fleurs en corymbes terminant les pédoncules armés de bractées; pétales linéaires et longs de un à deux pouces. La corolle grande (55 millimètres de dia- mètre), d'un beau bleu céleste qui varie de ton selon l'heure de la journée, l'éclairement et l'âge de la fleur : il vise au lilas et au rose. Odeur nulle. Culture. Cette charmante plante est de serre froide, très-aérée, et, en été, on la sort à l'ombre. Il lui faut une terre de bruyère mélangée de sable siliceux, modérément d'eau, jamais de l'excès, et un drainage facile. La reproduction se fait par graines et par boutures. Le Sollija helcro- plijjlla, le genre le plus voisin et connu de tous les horticulteurs, indique la culture, mais le Cheiranthera linearis est beaucoup plus beau par sa fleur. Son prix en Belgique est de 4 à 5 fr. — 164 — CULTURE FORCÉE DES LILAS, Par m. Chardon-Régnier, Horticulteur à Coulommiers. La Belgique horticole a public dans le troisième volume, p. H (juillet, 1832), un article fort curieux de M. Quetelet, relatif au mode de culture que ce savant emploie pour faire fleurir, endix-sept jours, des lilas Varins soumis h une culture forcée. Cette étude aura sans doute été utile aux horticulteurs, qui auront su en tirer parti pour faire fleurir à une époque donnée, les plantes qui pourraient leur être demandées pour rorncment des salons et la décoration des salles de bal. Quoi quïl en soit, la publication de l'article dont je viens de parler m'engage à faire connaître aux lecteurs de la Belgique horticole, les moyens dont je me sers pour obtenir, comme M. Quetelet, à différentes époques, la floraison du lilas, appelé vulgairement Sauge, dont je m'oc- cupe depuis longtemps, car le succès a presque toujours couronné mes efforts. Ma manière est simple, et j'ai réussi à obtenir la floraison de mes lilas à trois époques différentes, avantage que sauront, je n'en doute pas, apprécier les horticulteurs qui me liront. Voici donc comment j'ai agi jusqu'à présent : Dès le mois de mars, je place dans des pots 0'°,40 à 0"',15 de dia- mètre des sujets provenant de boutures, de greffes ou de couchages opérés l'année précédente, et j'enterre mes pots à bonne exposition. Je laisse alors mon plant au repos jusqu'au mois de juin ou au commence- ment de juillet au plus tard. A cette époque, je change de vase pour augmenter de 0'",0y à 0"',08 le diamètre de ceux-ci, et j'enterre de nou- veau mes pots dans une planche de jardin préparée dans ce but; je paille soigneusement ma planche, afln de conserver à la terre, qui contient mon jeune plant, une humidité qui favorise singulièrement la végétation. Vers le 15 octobre, je retire mes pots de terre, et je distribue en trois lots selon leur foixe et leur avancement, les lilas qui s'y trouvent, afin de faire ce que j'appellerai mes trois saisons de fleurs. Pour faire ma première saison, je choisis les sujets les plus vigoureux, et je les plante immédiatement avec force, dans des pots de 0"',15 à 0"',20 de diamètre, que je transporte dans une serre tempérée, où la chaleur ne s'élève jamais au-dessus de 10 à 12 degrés centigrades ; je les y laisse jusqu'en novembre, et, à partir de cette époque, je les place successive- ment dans ma serre à ananas, où ils restent jusqu'à ce que les grappes de fleurs et les feuilles soient bien développées, ce qui arrive jusqu'au 5 dé- cembre au plus tard. Lorsque ces fleurs commencent à s'épanouir, je reporte les pots, pendant vingt-quatre heures seulement, dans ma serre tempérée; sans cette précaution, les fleurs, sous l'influence d'une tem- pérature élevée, perdraient leur beau coloris et blanchiraient. — 1C5 — Après ces vingt-quatre heures, je remets mes lilas dans la serre chaude où ils restent jusqu'à parfaite floraison , oi'dinairement vers le 15 décembre, époque à laquelle ils peuvent sans danger recevoir la des- tination qui leur est assignée. Lorsque la fleur est passée, je taille mes sujets comme on taille les lilas varins , mais je dois faire remarquer que je les laisse dans un repos complet pendant un an et que jene les soumets une seconde fois au forçage qu'après cette année de repos. Les arbres forcés deux fois sont ensuite livrés à la pleine terre, ils me servent à faire des boutures, des couchages ou des greffes. Ce que je viens de dire de ma première saison, serait à répéter pour la seconde et la troisième ; la seule différence consiste dans les époques auxquelles je fais mes rempotages et autres opérations que j'ai détaillées plus haut. Je commence ma seconde opération dans les premiers jours de novembre, et je continue ainsi de vingt en vingt jours, de manière à avoir continuellement des lilas en fleurs depuis le 45 décembre jusque dans les premiers jours d'avril. Les plantes qui attendent leur tour restent dans l'orangerie, et je rempote à fur et à mesure que celles qui se trou- vaient dans la serre tempérée, passent dans la serre à ananas. J'ai également appliqué aux rosiers et avec succès la méthode que j'em- ploie pour forcer les lilas, mais je ne taille pas en les rempotant au mois d'octobre, ceux qui sont destinés à faire ma première saison ou, si on l'aime mieux, à fleurir en décembre; ceux qui doivent leur succéder sont taillés comme ceux qu'on plante en pleine terre. Quant h la culture géné- rale de mes lilas ou de mes rosiers destines à être forcés, elle n'a rien d'exceptionnel, mais je crois que le double rempotage, dont j'ai parlé, est nécessaire; on obtient ainsi de belles fleurs, tandis que lorsqu'on se borne à arracher les sujets en octobre, pour les faire passer aussitôt le rempo- tage dans la serre tempérée, on obtient h la vérité des fleurs, mais maigres, souffreteuses, hors d'état de supporter la comparaison avec celles qui ont été obtenues par le procédé que j'indique. Je ne connais pas de méthode de forçage plus simple que la mienne. Je serai heureux si sa simplicité pouvait èlre utile aux horticulteurs, et leur éviter les mécomptes qui se présentent si fréquemment dans la car- rière qu'eux et moi nous parcourons. {Revue horticole,) \ EMPLOI DU GUANO DANS LE JARDINAGE, Par m. Berthaud. Ce curieux engrais a déjà pris une certaine importance dans la pra- tique de lagricullure; depuis quelque temps, en Angleterre surtout, on l'applique aussi aux cultures de jardins et de serres. Il paraît même que — 166 — des horticulteurs français l'emploient secrètement depuis de nombreuses années. [Revue horticole.) A l'état d'engrais solide, le guano ne semble pas avantageux, sans doute à cause de sa trop grande énergie et de la difficulté de le faire agir uniformément et à petites doses sur les organes des plantes. Aussi, dans ce cas, et, par exemple, pour le répandre sur des prairies, doit-on le mélanger intimement avec quatre ou cinq fois son volume de cendres , de sable ou de terre desséchée; mais, délayé dans l'eau (un décilitre dans un hectolitre d'eau) , il constitue un liquide précieux et d'un emploi com- mode en horticulture. Suivant M. Lansezcur, ce n'est pas dans l'eau pure qu'il faut le délayer, mais dans une eau déjà mélangée de gadoue (boues et immondices des villes). Le sol sur lequel on le répand doit être sec, et il ne paraît avantageux que pour les plantes exposées au soleil. On peut d'abord arroser la terre sur laquelle on veut semer avec de l'eau contenant un kilogramme de guano par hectolitre ; puis continuer l'arrosement sur les plantes levées et sur celles qu'on a repiquées, mais en réduisant à moitié la dose de guano. Ces arrosemcnts se font une fois ou deux par semaine, sans préjudice des arrosages à l'eau pure ou addi- tionnée d'autre engrais , qui peuvent être nécessaires dans les inter- valles. Le guano s'applique très-bien à la culture des plantes en vases; on peut même parfois forcer un peu la dose ; mais cet engrais est si actif qu'il est important d'en user prudemment. Certaines plantes délicates ne peuvent en recevoir utilement que de faibles doses. M. Lansezcur a vu des dahlias prendre sous l'influence du guano, une verdure et une flo- raison admirables, mais aussi monter démesurément; des pensées se sont développées jusqu'à 60 centimètres de hauteur, mais sans fleurir, et elles ont fini par périr ; des oignons ont monté sans former des bulbes, etc. En général, on doit cesser l'usage du guano lorsque les plantes sont arrivées à environ la moitié de leur développement, et on recommande même de suspendre cet usage pendant la formation des boutons à fleurs. On a employé le guano, notamment pour les couches à melons, les choux, carottes, épinards, choux-fleurs, fraisiers, etc., et on cite des exemples remarquables du prodigieux et rapide développement que prennent les plantes sous l'influence de ce puissant engrais. On prétend même que les plantes arrosées avec le guano liquide sont préservées des insectes. Nos horticulteurs ont déjà l'habitude d'arroser avec de l'eau dans laquelle ils délaient les engrais ordinaires; nous désirons vivement qu'ils arrivent à employer, le plus tôt possible, le guano. Son prix est un peu élevé (35 francs l'hectolitre ou 2a centimes le kilo, à peu près); mais l'élévation du prix disparait quand on sait que trois kil. de guano équi- valent, pour Tusage, à environ cent kil. de bon fumier. Il est vrai que, dans le commerce, le guano est souvent falsifié. — 4G7 — REVUE DE PLANTES NOUVELLES : Bégonia biscrrata. Lindl. Journ. of Ilort. Soc. v. 2, p. 313. — Walp. An7i. Bot. Syst. v. 3, p. 892. — Ilook. Bot. mag. 18S3, tab. 474G. Famille naturelle : Begoniacées. Begonie deux fois dentée. Plante droite, lâche, toute velue de poils mous, épars et blancs; feuilles assez longues, pétiolées , obliques , largement palmées-lobées , subcordées , lobes au nombre de 4 ou de 5, inégaux inciso-dentés, ciliés, panicules dichotomées, axillaires terminales, fleurs penchées, mâles tétrasépales, femelles de 5 à 6 sépales, les intérieures trois fois plus petites, sépales tout cordés-in- cisés, ciliés-dentés, poils mous ; fruit à trois ailes, hérissonné de gros poils blancs, ailes courtes, obtuses, ciliées de gros poils, une aile plus grande que les autres. Ce Bégonia a été présenté par M. William Wilson Saunders à sir William Hooker, comme originaire de Guatemala où il aurait été découvert par M. G. V. Skinner. M. Hooker l'a toutefois fait figurer. C'est une belle espèce à fleurs roses, voyantes et nombreuses. Aussi , les serres chaudes où on la possède, y tiennent-elles comme à un objet d'or- nement. La fleuraison a lieu en été. Culture. Elle est identique avec celle de ses congénères de serre chaude. Il est essentiel de souvent la bouturer et de la conserver ainsi toujours jeune parce qu'elle est plus florifère dans cet état. Les boutures se font avec la plus grande facilité des tiges, pétioles ou feuilles. Campaunla Yidalii. H. C. Wats. in Hook. le. Plant, t. 684. — Walp. Repert. Bot. v. 6, p. 387. — Hook. Bot. mag. 4833. tab. 4748. Campanule de Vidal. Syn. Campanula Vidaliana. H. C. Wats. (Plants collected in the Azores in 1842, n" 113.) Famille des Campanulacées. Plante ligneuse inférieurement, rameuse, visqueuse, rameaux sillonnés, feuilles (souvent réunies en rosettes) oblongues spathulées , à grosses dents, les supérieures petites, en forme de bractées, fleurs en épi penché, unilatéral, pédicelles bractéolées, lobes calicinaux courts, triangulaires, corolle urcéolée-campanulée, blanche , étamines éloignées , disque hypo- gyne ample, à pourtour épais , orangé. Entre les échantillons séchés aux Azores et les individus venus de graine à Kew , la différence est assez grande. La plante n'est pas aussi ligneuse, les feuilles sont moins en ro- settes et moins contournées, mais les fleurs offrent plus de largeur et un nombre plus grand. Le disque à bord orange, très-charnu , l'éloignement des étamines les unes des autres sont des caractères suffisants pour faire reconnaître cette espèce. La fleur est blanche. La découverte a eu lieu par le capitaine Vidal, de la marine royale, sur un roc isolé de la côte orien- tale de Flores, entre Santa-Cruz et Porta-Delgada, aux Azores. Culture. Cette campanulacée est destinée à augmenter le nombre des plantes vivaces dans nos jardins où elle fleurit en août. On doit la semer — 168 — en couche et la repiquer , et on peut même risquer de la semer en place , mais il faut avoir soin de la reconnaître à sa germination des autres herbes. Eiindia aciiminata. Dne. Rev. hort. 4" sér., t. 2, p. 221 , fig. 12. Lundie acuminée. Famille des Bignoniacées. Cette plante est originaire de Bahia et le Jardin des Plantes de Paris la doit à M. Morel. Les tiges sont volubiles, arrondies, les feuilles opposées à deux ou trois folioles, réunies au sommet d'un pétiole commun , cylindrique et parsemé au-dessus de petits poils papilleux , les pétiolules sont aussi duveteux. Le limbe de la feuille est glabre des deux côtés, parcouru de nervures roses en dessous, et porte des cils sur les bords; folioles ovales, acuminées, cordiformes, aisselle des nervures sans poils. Fleurs paniculées terminales; calice bilabié ou spathacé, fendu dans sa longueur, à deux lèvres denticulées et puis se coupant à la base près la chute de la corolle. Corolle d'un beau rose, à reflets bleuâtres, tubuleuse, infondibuliforme, limbe à cinq divi- sions et parfois six, tube à l'extérieur et lobes de même recouverts de poils courts et roux. Quatre étamines fertiles, inégales, saillantes; filets glabres, anthères à loges divergentes portant de longs poils articulés violets. Le style, inclus, creusé en entonnoir, glabre, partagé au sommet en deux lobes stigmatiques ovales , arrondis , ovaire velu , blanc , sans disque basilaire. Ce Lundia acuminata se distingue de ses congénères par la pointe plus longue de sa feuille, l'absence de poils à l'aisselle , des nervures à sa face inférieure et par le style plus court. Culture. Cette belle bignoniacée se place en pleine terre dans une serre chaude, et l'on conduit les branches à volonté et en les palissant. On arrose et on seringue fréquemment en été ; on chasse par là les insectes; mais, le repos arrivé, on donne de l'air à la'scrre, on diminue l'eau sans cesser d'en donner, et après cette époque critique on voit poindre les boutons. La multiplication se fait par boutures surtout de rameaux mi-aoïités, on en coupe la partie verte en leur laissant l'articulation des feuilles. On dispose ces boutures isolément dans de petits pots remplis de terre sablon- neuse placés ensuite sur couche et sous cloche. (Abrégé d'un article de M. J. Dccaisne, Revue horticole.) nicttemichia Priiicipis. Mikan , Delect. PI. et Faun. Bras, (pas de page ni de numéro) cum ic. — Mart. FI. Brasil. Fasc. v. 6, p. 227. — Dunal in De Cand. Prodr. v. 15, p. 594. — Hook. Bot. mag. 1853. tab. 4747. — Metternichia du Prince. Famille des Solanacées. Syn. i/d- ternichia PrincepS) Miers, in Ilook. Lond. Journ. of Bot. v. 5, p. 145. — Lisianthus ophiorrhiza , Vell. fl. Hum. v. 2, t. 78. Les Metternichia forment des arbres à cimes, originaires du Brésil; les feuilles sont alternes — 169 — à pétiole court, coriaces ou subcoriaccs, elliptiques, penninerves , réti- culées, très-entières, brillantes , les fleurs terminales, presque solitaires ou nombreuses, presqu'en grappe, fasciculées, belles et blanches. L'espèce citée ici a le tronc arboré, les feuilles lancéolées-elliptiques, au-dessous un peu plus pâles, pédoncules courts, de la longueur des pétioles, termi- naux et presqu'en grappe, divisions du calice ovales-oblongues, obtuses, uninerves et réticulées. Ce genre de plantes du Brésil a été dédié par Mikan à S. A. S. le prince autrichien Clément-Venceslas-Lothairc de Metternich-Winncbourg, duc de Portella, etc., comme un hommage de reconnaissance que les botanistes lui ont voué pour la haute protection dont ce célèbre ministre ne cesse d'entourer l'étude et la diffusion de la science des plantes. Mikan décrit les grandes fleurs blanches du Metternichia Principis comme inodores , tandis que, s'étant ouvertes à Kew en 1855, elles ont embaumé la serre de leur parfum pénétrant, aromatique et agréable. Mikan rapportait cet arbre aux Convolvulacées, Meisner aux Bignoniacées, Lindley, Miers et Hooker aux Solanacées, et Miers pense même qu'il en faudrait faire le type d'une famille à part : les Metternichiacées. Il est douteux qu'il y ait plus d'une espèce actuellement connue dans le genre, et ce serait une famille par conséquent un peu pauvre que celle je ne dirai pas des plantes, mais de la plante du prince de Metternich. Culture. La fleuraison a lieu en août : il demande les mêmes soins que les Solandras; beaucoup d'eau, de la chaleur et des repoiements fréquents avec de la terre meuble et terrcautée. Reproduction par boutures étoufi'ées sous cloche et en couche chaude. Papaver pilosiim. Sm. Prodr. FI. Grœc. v. 1 , p. 530. — Fl.Grœc. Sibth. V. 5, p. 73, t. 402. — De C. Prodr. p. 419. tom. 1. — Hook. Bot. mag. 1835, tab. 4749. — Pavot poilu. Synon. Papaver olympkum. Sibth. Mss. Famille des Papavéracées. Plante élancée, rameuse, partout poilue et hispide, les poils ouverts, feuilles radicales, oblongues, amincies en un pétiole assez long, pinnatifides , dentées, les caulinaircs larges- oblongues, incisées-dentées, subcordées à la base, amplexicaules et ses- siles ; pétales très-grands d'un rouge de minium, maculés de blanc à la base ; capsules (non mûres) oblongues , obovées et glabres. Sir William Hooker suppose que la racine de ce pavot est vivace, qu'elle passe l'hiver sous terre tandis que l'herbe périt annuellement. Il ne se souvient plus d'où , de qui et quand il a obtenu cette espèce pour Kew , mais il ne se trompe pas sur Tidentité et la correction de la détermination. L'espèce voisine est le Papaver somniferum , dont il se distingue par l'absence de toute couleur glauque , ses bien plus larges feuilles et ses poils nombreux. Nous pouvons assurer que le Papaver pilosum est très-connu sur le continent, que cette espèce se trouve communément dans les jardins BELG. IIORT. T. IV. 22 — 470 — botaniques qui s'en communiquent les graines par leur correspondance. Culture. La propagation se fait par graines et par divisions de pieds, quand ceux-ci ont quelque âge. Une terre bien terreau tée , quelques bi- nages, de Tarrosement au besoin, tels sont les soins que réclament ordi- nairement les plantes de pleine terre en général et celle-ci en particulier. Ce pavot passe l'hiver dans les jardins en Belgique. Plumiepia Jameisoni. Hook. Bot. mag. 4853, tab. 4751. — Plumieric de Jameson. Famille des Apocynacées. Les Plumieria sont des arbuscules de l'Amérique ou plus rarement de l'Asie tropicales. Celui-ci, cité plus haut, a les feuilles très-amples, largcs-oblongues , amincies aux deux bouts, plus pâles, au-dessous réticulées ; les pédoncules sont allongés et rouges comme les pédicelles , les cimes multiflores , lobes du calice petits, courts, droits, corolle jaune (extérieurement teintée de pourpre), lobes elliptiques aigus. M. Jameson découvrit cette espèce de Plumieria dans le voisinage du Guayaquil. La grandeur et le nombre de fleurs, leurs couleurs, le jaune et le pourpre, l'ampleur, la pureté et la teinte du feuil- lage, le port du végétal , toutes ces circonstances contribuent à lui donner un certain mérite qui le fera rechercher des amateurs des plantes nobles. Culture. Il fleurit au mois de juillet, en serre chaude. Voilà tout ce qu'en dit sir William ITooker, dans le Botanical magazine. Il est vrai- ment regrettable qu'une des principales sources où le continent va puiser la connaissance des espèces nouvellement introduites, soit complètement dépourvue de toute donnée horticole. On sait cultiver à Kew cependant! Vibnrniiiii cotiiiifolitini. Don. Prodr. FI. nep. 141. — De C. Prodr. 4. 327. — Boule-de-neige à feuilles cotonneuses. Famille des Capri- foliacées. — Synonymie : Vihurnum polycarpon. Wall. cat. n° 45S. Feuilles cordiformes-oblongues , rugueuses, presque entières, au-dessus sans poils ou pubescentes , au-dessous cotonneuses et blanchâtres , ainsi que les cimes; corolles infondibuliformes; fruits oblongs. Cet arbrisseau, originaire des montagnes du Kamaon , une des provinces du nord de l'Inde anglaise, où le découvrit le docteur Wallich, est toujours fort estimé en Angleterre. Sa station est à 5000 ou 7000 pieds d'altitude sur l'Himalaya. Les Indiens l'appellent Juwa et mangent son fruit. Son port est tout à fait celui du Vihurnum Lantanœ, et, comme lui, il se reproduit par des marcottes ou des branches couchées en terre. Il fleurit en mai et résiste assez bien aux froids de nos hivers. Les fleurs sont plus grandes, plus belles, plus roses que celles du Lan- tanœ. Leur forme est aussi sensiblement différente, vu que leur limbe est plus aplati et plus évasé, et toute la corolle est en cône renversé. Dans l'ensemble, l'inflorescence fait ainsi plus d'effet. — 171 — LITTÉRATURE HORTICOLE. LES NARCISSES, PAR M. F. HOEFER. Le plus grand nombre de narcisses appartient à l'ancien continent; presque tous croissent dans les régions méridionales de l'Europe, au milieu des prés, dans les belles contrées de la Grèce, de l'Asie mi- neure, etc. L'Amérique en possède aussi quelques espèces. Les narcisses sont tous munis d'une bulbe à leur racine; les étamines sont inégales, trois plus courtes, trois plus longues, attacliées sur le tube, et non por- tées par les divisions du limbe intérieur. Les anciens, tels que Pline, Dioscoride, Galien, attribuaient aux bulbes de plusieurs espèces de narcisses une propriété émétique. A l'aspect du narcisse des poètes {JYa7-dssus poeticiis, L.),on dirait une fleur échappée des riches contrées de l'Inde pour venir habiter parmi nous. Quel air de fête il donne aux prairies lorsqu'au mois de mai il développe ses charmantes fleurs, mollement inclinées sur leur pédon- cule, d'une odeur suave, d'une blancheur parfaite, que relève la petite couronne pourpre ou d'un jaune d'or à son bord, qui en occupe le centre, tandis que le limbe extérieur, ample, très-étalé, tel que le disque de la lune dans son plein, se partage en six pièces larges, ovales, arrondies à leur sommet! On s'est empressé de transporter dans les jardins une aussi> jolie fleur : elle y a produit de nombreuses variétés, soit en doublant sa corolle, soit en variant la couleur de son limbe intérieur. L'imagination se plaît à rapporter à cette fleur la fable du beau narcisse. Elle croît dans les contrées méridionales, en Auvergne, en Bourgogne, dans le Dau- phiné, ainsi que dans l'Allemagne, la Belgique (*), la Suisse, l'Italie, etc. Il ne faut pas séparer de cette plante une variété dont les modernes ont fait une espèce sous le nom de Narcisse à deux fleurs {Narcissus hiflorus, Curt-), que Linné, dans son Mantissa, avait nommé Narcissus oricntalis. Les fleurs sont d'un blanc jaunâtre, le limbe intérieur court, en roue, en- tièrement jaune, crénelé et crépu sur ses bords. Cette plante a été observée dans plusieurs contrées, dans les îles voisines de la Bretagne, dans l'An- jou, aux environs de 3Iontpcllier, de Genève, aux lieux marécageux. De belles fleurs jaunes, la grandeur du limbe intérieur, en forme de godet allongé, frangé et crépu à son bord, caractérisent le narcisse des bois {narcissus pseudonarcissus , L.). La tige ne porte qu'une seule fleur qui sort inclinée d'une spathe mince, ouverte sur le côté. Cette plante croît souvent en abondance sur les coteaux, dans les forets de l'Europe (1) On U'ouve le narcissus pocticua dans les foilificalions dr Maesiriclil, le long de la Vesdrc dans les prairies, cnirc Vcrviers cl Ensival, dans les parties liuniides des bords de l'Ourllie. province de Liège. (,Vy/e de Cli. Murren.) — 172 — méridionale, en France, en Espagne, en Italie, en Belgique ('), etc. On lui donne les noms vulgaires de aymdt porillon, fleur de coucou, narcisse jaune, etc. La culture de cette plante est d'autant plus intéressante que ses fleurs s'épanouissent dès les premiers jours du printemps , et que , répandues dans nos bosquets, elles s'y retrouvent comme dans leur sol natal, elles y produisent un effet enchanteur par la brillante couleur et la forme agréable de leur corolle. Elles fournissent beaucoup de variétés, qui rendent douteuses plusieurs espèces, telles que le narcissus major, de Curtis, le narcissus minor, de Linné, le narcissus hispanicus, de Gouan, le narcissus moschatus, de Linné, etc.; autant de plantes qui varient par la forme, la couleur de leur corolle et surtout de leur godet. Le narcisse à bouquets [Narcissus tazetta, Linn.) est l'espèce de nar- cisse la plus commune; elle est aussi la plus recherchée : c'est elle qui brille la première dans les belles prairies des contrées méridionales; souvent même elle précède le printemps; c'est encore elle qui égayé nos appartements l'hiver, où, associée avec les jacinthes et les muguets, elle nous fait oublier qu'au dehors la teiTC est couverte de frimas. Poiret l'a vue, en Barbarie, se montrer dès la fin de janvier, au milieu de la verdure renaissante des prés et parfumer au loin l'air de son odeur. D'une spatlie membraneuse sort un bouquet de fleurs presque en om- J)elle à pédoncules inégaux. Le limbe extérieur est blanc, quelquefois un peu jaunâtre dans une variété. Les divisions sont ovales, un peu mucro- nées; le godet beaucoup plus court, d'un jaune orangé, entier, resserré et tronqué à son orifice. Les feuilles sont planes, assez larges. Plusieurs de ces variétés ont été distinguées comme espèces par plu- sieurs botanistes. Les fleurs sont-elles nombreuses, entièrement blanches, le godet non resserré à son orifice, c'est le narcissus polyanthos, de Desfontaines, ou le narcissus orientalis de Vlioi'tus Kewensis. Sont-elles un peu plus petites, entièrement blanches, peu nombreuses, avec le godet un peu dentelé au sommet, c'est le narcissus dubius, de Gouan. Sont- clles tout à fait blanches, avec le godet blanc ou jaune, les découpures (lu limbe extérieur longues et pointues, c'est le narcissus niveus, de Des- fontaines, \c. narcissus orientalis, de Willdenow, le narcissus slellatus , de De CandoUe. Enfin, dans le narcissus calathinus, de Linn., qui pai'ait devoir être distingué comme espèce, les fleurs sont d'un blanc jaunâtre; leur godet très-grand, à bords droits, tronqués, un peu crénelés; les segments du limbe extérieur oblongs, réfléchis, de la longueur du godet. Une jolie petite espèce de narcisse ne se montre qu'en automne, le narcisse d'automne [narcissus serotimts, Linn.). 11 se distingue par sa (1) C'est celle espèce que les niaraichers apportent, aux niarcliés de BriiNclles au premier prinlenips et qu'on vend aux portes des églises ordiiiairenieul le diiiianilie des rameaux. Le peuple les appelle sleuter-bloemen , fleurs de la clef, c'est-à-dire, la clef du printemps. Ce nar- risse abonde dans toutes les provinces de Belgique. Les bois de la Hesbaye en sont rempli?; i! devient moins commun dans le Condroz. i^otc de Ch. Morrcn.) — 175 — corolle, tout à fait blanche, ayant les segments de son limbe extérieur étroits, lancéolés, très-aigus; le limbe intérieur très-court. Les feuilles sont planes, fort étroites; la hampe menue, tantôt terminée par une ou deux fleurs, tantôt, dans des individus beaucoup plus forts et plus élevés, il sort de la même spathe huit à dix fleurs. Ces différentes variétés se trouvent en Barbarie ainsi qu'en Espagne, en Italie, etc. Le narcisse bulbocode {Narcissus bulbocodium, Linn.) est l'espèce la plus remarquable de ce genre, la plus facile à distinguer par la forme de sa corolle. Le limbe extérieur est un peu courbé, divisé presque jusqu'à sa base en six lanières longues, étroites, collées contre le limbe intérieur, qui ne s'en détachent que vers leur sommet; ce limbe intérieur a la forme d'une cloche. Il est grand, rétréci à sa base, très-ouvert et tronqué à son sommet ou un peu frangé. La tige ne porte qu'une seule fleur jau- nâtre; les feuilles sont étroites, au moins aussi longues que la tige. Cette espèce croît en Espagne, dans le Portugal, aux Pyrénées, dans les prai- ries, dans les landes du département de la Gironde, etc. La jonquille ou le narcisse jonquille [Narcissus junquUla, Linn.) est encore une des espèces recherchées à cause de l'odeur exquise et de la beauté de ses fleurs. La couleur jaune de la corolle est si douce, si agréable à la vue, qu'on s'est efforcé de l'imiter sur nos meubles, nos vête- ments, nos tentures, etc. Ses feuilles sont étroites, en alêne, semblables à celles de quelques joncs, d'où vraisemblablement lui est venu son nom de jonquille. Sa tige se termine par une, deux, quelquefois six ou huit fleurs et plus; leur tube est grêle, fort long : le limbe intérieur court, campanule, un peu crénelé. Parmi les variétés, moins nombreuses que dans quelques autres espèces, il en est dont les fleurs sont plus ou moins grandes, le limbe intérieur plus allongé, d'un jaune rougeâtre. La variété à fleurs doubles dure plus longtemps, mais ses fleurs ont moins de viva- cité. Cette belle plante, qu'on croyait originaire de l'Orient, a été décou- verte également dans les prairies et sur les collines en Provence, aux environs d'Aix, dans le bas Languedoc, les Pyrénées, etc. Parmi les espèces qui se rapprochent le plus de la jonquille ou qui peut-être n'en sont que des variétés, on distingue le narcissus iiitermc- (lius , de Loiseleur-Deslongchamps, observé dans les Basses-Pyrénées, aux environs de Bayonne ; ses fleurs sont jaunes, ayant leur godet entier sur les bords, mais plissé et crénelé. Les contrées méridionales de l'Europe, les prairies des départements de l'ouest et du midi de la France nour- rissent le narcisse odorant {narcissus odorus, Linn.), dont les fleurs sont jaunes, très-odorantes, une fois plus grandes que celles de la jonquille; leur godet est large, en cloche, divisé en six lobes arrondis. Miller a décrit, sous le nom de Narcissus incoiiiparahilis, une plante qui n'est qu'une variété du Narcissus pseuilonarcissus. — 174 — HORTICULTURE DE SALON. LES ROCHERS AUX FOUGÈRES ET AUX REPTILES , Par m. Ch. Morren. Il y a peu d'années lorsqu'on appliqua les caisses vitrées de Ward à la culture des plantes dans les appartements, on s'assura bientôt que la con- stante évaporation de l'eau dans un espace clôturé et privé de toute cir- culation d'air, était plutôt favorable que nuisible à certaines végétations. Ce fait constaté , il dut venir facilement à l'esprit de faire tourner cette persistance dans la vie à la construction et à l'ornementation d'un nouveau genre de meubles de salon par des plantes dont la physiologie se prête à ce mode d'existence. Et, comme il est arrivé plus d'une fois, ce qu'on fit d'abord par plaisir, par passe-temps, on le fait aujourd'hui par nécessité : une découverte en amenant souvent une autre. Sous un bocal de verre et sur un pied en marbre ou en pierre creusé d'une rainure circulaire recevant le verre et laissant écouler l'eau , on place un rocher en terre cuite, et même nous l'avons fait en terre à pote- rie fraîche dans laquelle on creuse quelques trous qu'on remplit de terre de bruyère ou de terre de bois. Ces cavités sont destinées à recevoir des divisions de pieds de fougères, comme les serres nous en offrent aujour- d'hui une si grande quantité, de Lycopodiacées, surtout des genres Sela- ginella; des Jungermannes, des Marchantias, des Mousses, etc. On entre- mêle ces espèces de Sedum, petits, comme le dasiphyUum, l'ocre et autres. Quand tout l'arrangement est placé à sa convenance , on recouvre cette végétation d'un bocal de verre, on donne de la lumière modérée, delà chaleur suffisante, et on laisse ces brins de plantes reprendre des racines et s'ancrer sur ces rochers lilliputiens. Lorsque la végétation est solidement fixée, on introduit des orvets ou des couleuvres à collier qui anmient cette petite scène; on l'égaie par quelques rainettes [Hyla viridis) dont les ventouses digitales permettent la promenade sur la paroi interne du verre, de jolis bombinators bleus et oranges , des salamandres, des lézards, etc., auxquels on a soin de donner de temps en temps leur pâture appropriée comme œufs de fourmis, in- sectes vivants, etc. Par la chaleur d'un salon et le rayon de soleil qui y entre , ces animaux endormis dans leur vie de liberté pendant l'hiver, passent cette saison dans une activité incessante et communiquent leur animation aux plantes semées ou plantées près d'eux. Aujourd'hui, on a imaginé de garnir des rochers semblables seulement de deux espèces de fougères ou de lycopodiacées, et de les recouvrir d'un bocal qu'on tient plus fermé. On dit que l'hybridité est souvent le résultat de cette cohabitation , et que c'est ainsi que les expériences sur cette faculté curieuse réussissent le mieux. - 170 PI. 27. — \7(\ — MODÈLES DE CULTURE. DE L'INFLUENCE EXERCÉE SUR LA CULTURE DES PLANTES, PAR LE GOUT ARTISTIQUE PUISÉ DANS LA CONTEMPLATION DES SCÈNES DE LA NATURE, Par m. Ch. IMorren. L'impulsion que le génie d'Alexandre de Ilumboldt n"a cessé depuis un demi-siècle de communiquer aux sciences des œuvres de la création, la popularité que ses attachantes descriptions ont su donner aux scènes de la nature, sont devenues, avec les voyages d'un grand nombre d"liommes instruitsetle luxe typographique de nos éditions contemporaines, les causes pour lesquelles on cultive aujourd'hui beaucoup mieux certaines espèces de plantes qu'on ne le faisait naguère. Telle est la famille des orchidées. Il y a quelques années encore, quand les envois d'orchidées débar- quaient dans nos villes horticoles, on avait hâte de séparer les pieds, afin que les marchés pussent se conclure plus nombreux; on achetait un mor- ceau de plante et on passait quinze ou vingt ans de sa vie à attendre pour qu'elle ait une forme, un port, un aspect honnête et digne d'elle. On la- cérait les beautés et on écartelait la grâce. Aujourd'hui, les temps ont bien changé. Ce sont des exemplaires immenses, sains et vigoureux, des indi- vidus amples et robustes , aux membres pleins de sève , ruisselant de ra- cines et projetant dans tous les sens des milliers de fleurs; ce sont des mer- veilles naturelles qu'on veut et l'on a bien raison, puisque après tout c'est toujours par amour qu'on cultive : c'est là Vultima ratio de l'horticulture. Les comparaisons rétrospectives sont parfois utiles à s'établir à deux époques même peu distantes entre des échantillons d'une même espèce. En 4840, M. Skinner fit un envoi d'orchidées de Guatemala, dans lequel se trouvait le premier pied àe Lœlia swperhiens introduit en Europe. Déjà, en la voyant fleurir, on s'écriait : « Smn you ever any thing like tliisH! » Vîtes-vous jamais chose pareille à celle-ci! — Et pour motiver cette excla- mation admira tive, une vingtaine de fleurs s'étaient développées sur une tige de neuf pieds de longueur. Cette orchidée de Quesaltenango est telle- ment belle de végétation, que les Indiens d'Acatenango eux-mêmes, tout habitués qu'ils soient à voir ces sortes de merveilles, ne la plantent pas moins aux portes de leur demeure. Aujourd'hui, la culture permanente donne à cette espèce en Europe toute la splendeur de son organisation. Un exemplaire exposé à Chiswick (voy. la gravure ci-jointe) mesurait 6 pieds de diamètre, portant neuf tiges fleuries, chacune de neuf pieds de longueur et terminée par un épi de dix fleurs; chaque fleur de quatre à cinq pouces de diamètre, où le blanc, le lilas, le pourpre et l'orange venaient se marier dans les plus admirables contours. Et cependant c'est l'étude des ports ou des allures des plantes qui a doté l'horticulture de ces sortes de merveilles. — 177 — l>l. 28. CELG. HOKT. T. IV. 25 — 178 — ARCHITECTURE HORTICOLE. LES TERRASSES RUSTIQUES, D'après M. H. Noël Humphrey. Une construction rustique demande presque toujours d'être accompa- gnée, surtout le long de sa façade principale, d'une terrasse qui en étende la vue. Cette levée doit comporter une différence de niveau d'avec le jardin sur lequel se porte la perspective, La situation demande d'être choisie avec discernement et avec goût. Le site veut s'encadrer, et se prêter néanmoins à la distinction des détails. La terrasse ne peut, à côté de ces avantages, laisser prendre trop de vue à la maison et dépouiller la vie d'intérieur d'un de ses plus grands charmes, surtout dans les pays où les intempéries ne permettent pas toujours de sortir. La terrasse est faite pour s'harmoniser avec la maison dont elle doit suivre le style général, avec le terrain qu'elle est destinée à embrasser, avec la végétation à laquelle elle se marie. Le parapet est la construction en ceci qui exige le plus de soin. On le fait en troncs forts et rameux, dont l'écorce n'est pas ôtée pas plus qu'aux branches. Ces dernières s'ajustent et s'enchevêtrent le mieux possible, comme si la nature les avait mariées elles-mêmes ensemble. Les ornements en poterie, surtout les formes basses et massives, vont très-bien avec le genre rustique. La gravure ci-jointe représente comment des plantes à fleurs voyantes, des roses, des pivoines, des dahlias, des pétunias, etc., cultivées dans des pots ramassés et arrondis, deviennent les accompagnements obligés de ces galeries rustiques. On deman- dera pourquoi les branches du parapet elles-mêmes ne peuvent pas servir d'appui à des plantes grimpantes et se garnissant de fleurs , mais nous aurons de fortes objections à faire contre ce procédé généralement suivi sur le continent. Nous demanderons à quoi sert un parapet rustique, quand on le cache sous un tapis de verdure? Autant vaut garnir une mu- raille de clous et y conduire des pampres. Qui fait le charme d'un travail rustique si ce n'est son contraste avec la verdure et la végétation d'alen- tour, et par ces festons qui finissenttou jours par tout recouvrir on cache le travail parfois très-élégant de cette dentelle de bois. Ces raisons sont plus que suflisantes pour ne pas autoriser de telles cultures. En jetant un coup d'oeil sur la gravure jointe à cet article, on remar- quera la forme heureuse du jardin au-dessous de la terrasse. Ces contours arrondis, se perdant au loin dans les campagnes, viennent s'entrelacer au pied de ce parapet dans les replis de ses branches rustiques, et une harmonie générale règne dans ce plan qui appartient cependant à ces jardins qu'on a nommés gothiques , alors que le gothique est plus d'une fois aimable. — 179 PI. 29. — 180 — JARDIN FRUITIER. LA PECHE DE BRAHY, Par m. Ch. Morren. Nous avons eu déjà l'occasion d'enregistrer plusieurs fois les succès de M. Brahy-Ekenholm, amateur d'horticulturs à Herstal, près de Liège, et il n'est pas probable qu'il en clôturera de sitôt la liste. Voici donc encore un pêcher sur sa conscience. Nous en avons fait dessiner le fruit et les feuilles. Le fruit est à peu près sphérique, un peu surbaissé, de 7 centimètres de diamètre, transversal avec l'enfoncement ou l'entonnoir pédonculaire peu profond , une simple fente élargie. Le haut du fruit ne porte qu'une pointe simple sans mamelon. L'épicarpe est jaune cireux pâle, tout par- semé de très-petites taches blanches. Du côté du soleil, une tache vineuse ou des plaques foncées comme une affection dartreuse. Le duvet très- court. La pâleur, le ton blême de cette pêche n'indiqueraient guère des qua- lités de premier ordre, mais aussitôt qu'on a dégusté la chair, on change d'avis sur son compte. Juteuse , odorante , finement parfumée, vineuse, subacide et sucrée, elle figurera désormais à côté des pêches les plus renommées. L'arbre est fertile et ne demande pas d'autres soins que les pêchers ordinaires. M. Brahy avait cédé l'exploitation de son gain nouveau à un horticulteur de Belgique pendant quelques années, mais le terme de ce contrat étant maintenant expiré, les amateurs pourront se procurer, par l'entremise de la Belgique horticole, de jeunes pieds de cette variété excellente. MANIÈRE DE PRÉPARER LA GRAINE DE FRAISIER, Par m. Gros , Imprimeur de la Société d'iiorlicultuve de la Seine. Pour pouvoir semer régulièrement les graines des fruits charnus, il est nécessaire de débarrasser exactement ces graines de la pulpe qui les con- tient. Celles du fraisier sont dans ce cas. Voici le procédé que j'emploie pour obtenir des semences de fraises parfaitement épurées, procédé très- simple comme on va le voir. Ui M 'i^v Â&SSetiereyn^ Pèche Brahv — 181 — Je récolte les fraises lorsqu'elles sont parvenues à leur complète matu- rité et je les garde pendant quelques jours dans un endroit sec, jusqu'à ce qu'il y ait un commencement de décomposition de la partie charnue. Je les écrase alors dans de l'eau de pluie, et les réduis en une sorte de bouillie. Dans cet état, je verse le tout dans un simple tamis en crin, dit tamis de cuisine, que je pose sur deux bâtons placés en travers sur un baquet ; on peut solidifier ce petit appareil à l'aide d'une ficelle pour faciliter l'opération suivante : D'une main je verse de l'eau dans le tamis avec un arrosoir muni de sa pomme, et de l'autre je remue activement le liquide avec un pinceau, afin d'aider les graines à se dégager de la partie charnue , qui , devenant de plus en plus liquide, passe au travers des mailles du tamis. Je continue ce lavage jusqu'à ce que l'eau découle naturellement. Je laisse alors sécher dans ce même tamis et en dehors de l'action du soleil , toute la partie qui n'a pas pu passer et qui, en se séchant, forme une sorte de galette. Quand elle est bien sèche, je la froisse entre les mains pour la pulvériser. J'ai alors des graines et de la poussière. Je me débarrasse de cette der- nière et des mauvaises semences au moyen d'une vannette. Par ce pro- cédé très-simple, j'obtiens de la graine extrêmement pure et sans perte aucune. [Horticulteur français, 18S5.) RESULTAT DES SE3IIS DE VIGNES DE M. VIBERT , PÉPINIÉRISTE A Angers, d'après les rapports de M. Bouchardat, Présentés à la Société Impériale et centrale d'agriculture de France. Le comte Odart, qui a fait lui-même de nombreux semis de vignes, estime qu'il faut vingt-cinq ans pour pouvoir apprécier les résultats réels d'une semblable expérience. On comprend d'après cela que peu d'agricul- teurs se soucient de s'y engager. En outre , parmi ceux qui essaient , un grand nombre n'arrivent à aucune conclusion faute d'ordre , de persévé- rance ou d'une longévité suffisante. Il y a donc de l'intérêt à connaître l'issue des rares expériences qui ont été conduites jusqu'au bout. Malheu- reusement, l'intérêt est bien plus pour le naturaliste qui aime à scruter la nature de l'espèce et de ses modifications que pour l'agriculteur, car de tous les semis de M. Odart, de ceux des établissements de Bude, de Nihita et de M. Vibert dont nous allons parler, il n'est sorti qu'un nombrc insignifiant de bons ceps, et dans la pratique il sera évidemment plus avantageux de chercher les meilleurs raisins existants et de les propager que de suivre la voie lente et peu productive des semis. M. Vibert a semé, de 1829 à 1847, vingt variétés de vignes environ, et il a amené à fruit plus de deux mille plantes de raisins. Quelques-unes — 182 — élevées le long des murs, ont fructifié à cinq ans; d'autres, loin des murs, n'ont pas encore fructifié à l'âge de treize ans. En général, les vignes hâtives fructifient plus tôt que les autres, les chasselas et ses variétés à grains moyens les suivent de deux à trois ans , et celles à gros grains, presque toujours plus vigoureuses, sont les dernières à produire. Chîis»selas. Dans ce groupe, M. Vibert a semé surtout de la variété Gi'os Coulart, etil en résulte différentes modifications de chasselas. Parmi 650 plants élevés, quatre ont présenté les conditions de grosseur du Gros Coulart, sans offrir l'inconvénient de couler. Si ce résultat se confirme dans plusieurs récoltes successives, dit le rapport, M. Vibert aura obtenu un beau succès. Le cioutat, ou chasselas à feuilles lacinées, s'est conservé de semis avec des feuilles découpées , sans ou presque sans variations de découpures, résultat qui fournit aux physiologistes un exemple bien con- staté de modification héréditaire. Le chasselas rouge s'est montré constant de forme et de grosseur, mais, sur trente-six pieds élevés de semis, quel- ques-uns ont donné des fruits blancs. Muscats». Ils ont présenté dans les semis des variations beaucoup plus grandes que celles des chasselas. La saveur s'est affaiblie ou s'est mo- difiée, la forme des feuilles, la couleur des grappes, l'écartement des grains et l'époque de la maturité ont souvent changé. Trente-quatre plants de Muscat-Jésus sont restés blancs, mais la saveur était ordinaire- ment perdue. Le muscat noir de la mi-août a donné vingt-trois pieds tous noirs. Au contraire, un muscat noir dit Caillaba, a produit quatre ceps blancs sur quarante-deux, et souvent le goût avait disparu. Madeleines. Sur quatre-vingts pieds obtenus de la Madeleine noire, il y avait de nombreuses modifications dans les feuilles et le grain était resté petit, mais quelquefois blanc. La qualité précoce qui fait rechercher ce raisin s'était souvent perdue. Sur 60 plants de Madeleine blanche, il y en a eu six à raisins noirs. Fraukenthal. M. Vibert a élevé 240 pieds de semis de ce beau raisin estimé pour la table. Ils sont restés noirs, mais la grosseur a été souvent réduite et jamais augmentée. Quelquefois ils ont gagné en précocité. Isabelle ou Alexaiidei*. Cette vigne a été obtenue, dit le rapport, aux États-Unis d'Amérique, en 1816, d'un semis du Vitis Labrusca, L.; elle fut envoyée d'abord à Ncuilly, où elle fut cultivée par M. Jacques, de là elle s'est répandue dans divers jardins. M. Vibert a élevé , jusqu'à leur mise à fruit, 75 plants issus d'Isabelle; il attend encore la fructifi- cation d'une vingtaine semés en 183C et 1857. Des les premières années, — 185 — les jeunes plants ont présente de singuliers feuillages, qui n'avaient aucune analogie avec ceux connus aujourd'hui. On y remarquait les formes des feuilles du peuplier d'Italie, de l'érable, de platane et d'autres. Il n'y avait peut-être pas deux pieds semblables. Depuis la dimension d'une petite feuille de peuplier jusqu'à celle de l'Isabelle, toutes les grandeurs étaient représentées. Quelques feuilles étaient très-épaisses et particuliè- rement échancrées. Il y a eu des pieds à fruits noirs, à fruits blancs, à fruits jaunâtres et rouges bruns. La forme du grain a varié du sphérique à l'ovale allongé. La saveur si pénétrante de l'Isabelle, qui ressemble d'or- dinaire à la framboise , a été moins forte et plus agréable. 31. Vibert pense que ces semis si variés d'Isabelle venaient de fleurs fécondées par d'autres espèces. La chose est d'autant plus probable que le Vitis Labrusca est désigné ainsi que la plupart des vignes spontanées en Amérique. La Société Impériale et centrale d'Agriculture de la Seine a décerné une médaille d'or à M. Vibert, pour les travaux persévérants dont nous venons de donner un aperçu. DEUX GROSEILLIERS EPINEUX POUR HAIES A FRUIT, Pau m. Ch. Morren. On se sert avec avantage des groseilliers épineux pour garnir des treillis de clôture, cette sorte d'arbuste étant pourvue de défenses et n'étant pas inutile à cause de ses fruits. Mais, on doit se demander naturellement s'il n'y a pas quelques variétés plus convenables que d'autres pour ce genre d'utilisation, et à cette demande l'horticulture répond affirmativement. Le Groseillier épineux, nommé le Champagne rouge [red Champagne des Anglais), est préférable à tous les autres connus jusqu'à présent, parce que ses pousses montent mieux que celles des autres variétés ; elles s'élèvent droites, et on peut les maintenir parallèles et équidistantes en soignant la taille et la ligature. Le fruit est un des meilleurs connus, sur- tout par son goût aromatique et sucré. Le Groseillier épineux , nommé le Warrington rouge , ou red War- rington, comporte un mode de croissance tout différent de celui du Champagne rouge; au lieu de développer ses jets vers le haut et perpen- diculaires, il les donne horizontaux et parallèles. La taille les a bientôt maintenus latéraux et uniformes de chaque côté des troncs. Le fruit est plus grand que celui de la variété précédente. En combinant ces deux variétés sur un treillis ou un lattis, on peut obtenir une haie impénétrable de groseilliers épineux dont les rameaux se couvrent de dard* et de fruits. — 184 — CULTURE MARAICHERE. CONSERVES DE TOMATES, Par m. Andry, Membre de la Société d'Horlicullure de la Seine. Plusieurs procédés ont déjà été conseillés pour la conservation des tomates, aucun ne me semble préférable à ceux que je vais indiquer, tant sous le rapport de l'économie que sous celui de la facilité avec laquelle ils peuvent être employés. Pour conserver les tomates entières, il faut choisir les plus intactes et arrivées à un degré de maturité convenable ; après les avoir essuyées et leur avoir enlevé la queue, on les range aussi régulièrement que possible dans un vase à large ouverture. Lorsque ce dernier est convenablement rempli, on verse sur les tomates un liquide composé de huit parties d'eau commune, d'une partie de bon vinaigre et d'une partie de sel de cuisine, de manière que ce liquide, en recouvrant complètement les tomates, arrive seulement à trois centimètres environ au-dessous du vase. On verse ensuite, par dessus le tout, une couche d'huile ordinaire d'environ un centimètre d'épaisseur. Les tomates se conservent tellement bien dans ce liquide qu'au bout de plusieurs mois elles sont aussi fraîches que si on venait de les y plonger et que, par conséquent, elles peuvent être em- ployées facilement pour le service de la table. L'autre procédé, qui ne peut être employé que pour la conservation des tomates destinées à faire des sauces, est encore plus simple et plus facile. Il consiste à couper les tomates par segments de grosseur satisfai- sante pour pouvoir être introduits dans une bouteille ordinaire. Il faut avoir grand soin de les y tasser le plus possible, soit à l'aide de chocs légers imprimés à la bouteille, soit à l'aide d'une baguette qui agit comme refouloir, afin de laisser le moins d'air possible entre les divers mor- ceaux introduits dans la bouteille. Lorsque celle-ci est convenablement remplie, il faut la boucher le plus serré possible, ficeler le bouchon et la conserver droite dans un endroit frais. Il est indispensable, je le répète, de laisser dans la bouteille le moins d'air possible pour éviter une fermentation trop active, qui aurait pour résultat inévitable ou le bris des vases, ou des explosions lors de l'enlè- vement du bouchon. Pour l'usage, il faut laisser égoutter convenablement les tomates con- servées, soit sur un tamis, soit sur un linge, et s'en servir ensuite comme des tomates fraîches dont elles conservent parfaitement le goût, la saveur et la couleur. Ces conserves peuvent durer de longues années. — 185 — LA TRUFFE NOIRE , ENVISAGÉE AU POINT DE VUE DE LA 3IANIÈRE DONT ELLE VÉGÈTE , DES rnOCÉDÉS EMPLOTÉS POUR LA RÉCOLTER ET DES TENTATrVES DE CULTURE QUI EN ONT ÉTÉ FAITES, Par m. Louis-René Tclasne , [Suite et fin. V. p. 456 de ce volume.) La récolte des truffes d'hiver qui , comme nous l'avons dit , commence avec le mois de novembre, se prolonge jusqu'en février. Une ou deux fois par semaine , le rabassier se rend dans les truffières qu'il exploite el y déterre les truffes au fur et à mesure de leur maturité; puis, il porte aussi fréquemment qu'il peut, et généralement chaque semaine, au marché le plus voisin , le produit de ses recherches, afin d'éviter que les truffes retirées de terre ne perdent de leur volume en séchant ou ne se couvrent de moississures. Nous voudrions pouvoir donner quelques renseignements précis sur rimportance du négoce dont les truffes sont l'objet en France; ces ren- seignements nous manquent tout à fait (') , si ce n'est en ce qui regarde la Haute-Provence. Des notes que nous a communiqué M. Requien , et qui, à notre prière, lui avait été obligeamment envoyées de Carpentras (I) Nous ne sommes pas mieux insU-uils en ce qui touche l'époque à laquelle remonlenl les premières recherches des truffes daus les provinces françaises où elles se trouvent aujourd'hui. Le seul fait qui soit hors de doute, c'est que, dans nos dt'partemenls de l'ouest, ces recherches sont infiniment plus générales et plus actives qu'il y a soixante ans, et qu'elles ont amené la découverte des truffes sur une foule de points où elles n'étaient pas soupçonnées. Ainsi, en 1779, suivant Meunier qui écrivait à cette époque, le Poitou et la Sainlonge, aujourd'hui si fertiles en truffes, en produisaient encore très-peu. {\o}'(iz Essai d'une mcth., de., p. 'old.) D'autre part, la chasse a presque entièrement cessé d'être faite à ces champignons dans l'Ile- de-France où elle avait lieu autrefois sur divers points avec succès. La preuve de ce dernier fait a été fournie par Gaillard qui a donné , dans ses Mémoires sur différentes parties des scictices et des arts, tome 1 , 1768, p. xcij , la copie du bail fait en août 1674, devant le notaire Sillocque, par Ant. Girard, comte de Villelaneuse, Jean Cardin, marchand fruitier ù Paris, du droit de reclierclier les truffes dans le parc de Villelaneuse, situé près de Saint-Denis. Au temps de Guettard, ce parc avait depuis longtemps perdu sa fécondité en truffes, ou du moins on ne les y cherchait plus. Il y a peu d'années, SI. Bouteille a fait connaître que ces chanijii- gnons croissaient assez abondamment à .Magny-en-Vexin (Seine et Oise), el il en a communiqué des échantillons à l'Académie des Sciences (voyez Comptes-rendus, tome XIV, p. 450, mars 184-2). Quant aux truffières du bois de Vincennes , près Paris, elles étaient habituellement affermées par l'administration forestière à des chercheurs de truffes venus de la bourgogne, et qui faisaient usage de chiens dressés; mais elles ont tellement perdu de leur importance depuis les constructions et les défrichements que le génie militaire a fait exécuter au-dessus de Charenton, qu'elles ne sont plus exploitées aujourd'hui. C'était pour l'Ltat, nous a-l-on dit, un modique revenu de 80 à 100 francs par an. Suivant JIM. Moynier, la découverte de ces truf- fières date de l'année 1831. On trouvera, dans le livre qu'ils ont écrit {De la truffe, traitécom- plet, in-8", Paris, 183G), des renseignements qui sufliront à rinsullisance des nôtres en ce qui regarde le commerce des truffes. BELf.. IIORT. T. IV. 24 — 180 — par M. Fabre, et d'Apt par M. Etienne Bonnet, constatent que sur le marché de cette dernière ville on apporte cliaque semaine, au temps le plus favorable de la récolte , environ mille six cents kilogrammes de truffes, et qu'on peut évaluer en moyenne à quinze mille kilogrammes la quantité totale de celles qui y sont vendues pendant la saison d'hiver. Suivant M. Fabre, le département de Vaucluse ne fournit pas moins de vingt-cinq à trente mille kilogrammes de truffes annuellement. Carpen- tras , dont les environs produisent une énorme quantité de ces champi- gnons, est le centre du commerce auquel ils donnent lieu. La plus grande ])artie en est expédiée de suite par les spéculateurs, au fur et à mesure de leurs achats, à Lyon, Paris et dans le nord de FEurope; celles qui sont ilestinées à des pays plus éloignés sont préparées par la méthode dite d'Appert, ou cuites dans le vin, puis conservées dans l'huile. Il n'y a que les truffes d'été non mûres ou maïnques qui soient coupées en tranches et séchées. Les raarcliands provençaux, indépendamment de cette sorte de truffes, distinguent encore les truffes caïettes (ou caillettes) et les truffes nègres ; les premières sont les truffes d"hiver imparfaite- ment mûres, c'est-à-dire des Tuber brumale et melaiiosporum , dont la pulpe fertile renferme encore très-peu de spores, et sont naturellement très-abondantes en automne au commencement de la saison d'hiver; les truffes nègres sont ces mêmes truffes caïettes parvenues à leur complète maturité; ce sont aussi les meilleures et les plus estimées. Jusqu'ici l'art n'a pris, en quelque sorte, aucune part à la production des truffes , en ce sens, du moins, que ces champignons n'ont pu encore être soumis à une culture régulière et facile comme celle de l'agaric rose ou Agarkns campestris. Ce n'est pas toutefois que de nombreux essais n'aient été tentés; depuis Bradley , qui crut bien mériter du public et s'acquérir des droits à une gratitude universelle en divulguant un procédé de culture auquel, s'il en eût conservé le secret, il aurait pu devoir, pensait-il, une grande fortune, u puisque les truffes nouvelles se ven- daient jusqu'à ime guinée la livre; n depuis ces espérances déçues, on a proposé de nombreux moyens d'obtenir des truffes à volonté par des soins convenables de culture. Les plus connus sont ceux conseillés par M. le comte De Borch , dans ses Lettres sur les truffes du Piémont , et par Alex, de Bornholz, dans un petit ouvrage dont nous ne connaissons qu'une traduction italienne publiée à Milan sous ce titre : Délia coltivazione de tartufi (in-16 de 72 pages, chez Pirotta, 1827). Ces moyens consistent, en général , à préparer un compost avec de la terre franche et du terreau des feuilles sèches ou de la sciure de bois, puisa l'arroser convenablement, et à y déposer, en hiver, des truffes parfaitement mûres, entières ou coupées par fragments. M. de Borch assure avoir obtenu de la sorte de petites truffes hhnchcs [T, magjiutiim) , certainement nées dans le sol îuliliciel qu'il avait préparé. A propos de nouveaux essais que le docteur Klolzsch aurait écrit, il y a peu d'années (ce que nous n'avons pu vérifier), — 187 — M. Bouché-Duniencq, auquel on doit deux, mémoires sur les truffes, croyait pouvoir affirmer, sans crainte de se tromper, que toutes ces ten- tatives n'avaient été suivies d'aucun succès. On peut, en effet, jusqu'ici, conserver des doutes légitimes sur l'issue favorable qu'on leur attribue. Cette culture artificielle des truffes serait cependant le moyen qui amè- nerait à savoir avec le plus de certitude, si ces cbampignons ont une exis- tence indépendante des arbres près desquels ils vivent, ou si, du moins, elle l'est assez pour qu'on puisse avec succès substituer à l'influence des arbres, sans doute très-complexe, des soins et des agents , tels que ceux dont l'agriculture dispose, comme seraient des abris, des composts, etc. Nous regrettons beaucoup de n'avoir pu faire quelque chose pour éclairer cette question intéressante. Le seul fait qui soit hors de doute, c'est qu'on peut facilement déter- miner la production des truffes dans certains sols calcaires où, jusque-là, on n'en aurait pas observé. L'artifice consiste à semer des glands dans ces terrains, et lorsque les chênes qui en naissent ont atteint l'âge de dix à douze ans, on commence à récolter les truffes dans les intervalles qui les séparent. Les truffières , actuellement si étendues , des environs de Loudun, ne doivent pas leur origine à une autre cause, ainsi que 31. De- lastre l'a très-bien fait connaître dans sa notice déjà citée sur la végétation du département de la Vienne. La création de pareilles truffières a eu pareillement lieu sur d'autres points dumcme département, en particulier dans l'arrondissement de Civray. Il faut remarquer que ces campagnes possédaient déjà des truffières exploitées depuis de longues années, ce qui indiquait suffisamment aux habitants l'aptitude naturelle de leur sol à produire des truffes; mais il est certain que celles-ci naissent dans les jeunes semis de chênes, spontanément et sans qu'on se soit jamais inquiété d'en répandre des fragments sur le sol, qui déjà sans doute, recelait leurs germes reproducteurs. 11 en a été tout autrement dans la plupart des cas où l'on a cru former des truffières; on a jeté des truffes entières, ou coupées par fragments, aux pieds de quelques chênes ('), le long des charmilles d'un parc, et les truffes qu'on a recueillies plus tard dans ces (I) Les essais de celle iialure , lenlés par M. «le Noé dans l'Agcnais, sont mentionnés par M. Roques [Hist. des champ, corn, et vciicn., p. Ijo). Il en avait élé fait de semblables dans la campagne de Turin , au temps de Keyszlcr. Ce voyageur rapporte qu'on répandait à la fois sur le sol l'eau dans laquelle les truffes avaient élé cuites et les fragments provenant de leur net- toyage préalable. La multi|)licalion de ces champignons, ajoute Keyszler, s'opère sans doute à l'aide de semences qui sont emportées dans ces débris (voy. Keyszler, N. Reisen, t. I , p. 22i). I>'ailleurs, pour admettre le succès de celle culture , il n'est pas nécessaire de croire, avec BulJiard et Paulet {Ilist- des rhaiii/jit/., t. I , p. ^36), que ce sont les spores de la trulïe qui deviennent précisément de nouvelles irufl'es par un accroissement graduel dont il porte la durée ù une année entière , opinion qu'a renouvelée Turpin , comme on sait, cl que Hill avait professée avant ces trois auteurs (voy. son Vcgel. Sis!., Londoii, 17S0, p. 154, ou on lit : Each secd is really a truITle... wanling oniy growth ; il is a perfect Iruflle and requires only year to increase in size lo bc wliul ils parent wa«. — bc. Plivs. t. XXIL) — 488 — lieux ont été attribuées aux premières, dont les spores se seraient heu- reusement développées; le fait est possible, mais il ne l'est pas moins, que les lieux choisis continssent déjà les truffes à Tinsu des auteurs de l'expé- rience. La création des truffières de Loudun est à l'abri de cette incer- titude, puisque les champs qu'elles occupent étaient, il y a peu d'années, encore des plaines nues et abandonnées, sans culture , où la truffe était inconnue; ce champignon n'y paraît qu'au milieu des jeunes chênes, semés à dessein de favoriser son développement, et seulement au bout de huit à dix ans. Ces taillis doivent être peu épais, on les coupe pour la première fois vers leur douzième année, et successivement ensuite à des intervalles de sept à neuf ans ; ils sont fertiles en truffes jusqu'à l'âge de vingt-cinq à trente ans, où ils cessent à peu près d'en produire, parce que, dit-on, le sol est alors trop ombragé par les branches des jeunes arbres. On prolongerait sans aucun doute l'existence de la truffière, en sacrifiant quelques-uns de ces arbres pour éclaircir le bois; mais ce parti ne sera pris , peut-être, que lorsque les galluches ou terres incultes seront devenues plus rares. On convertira ainsi peu à peu les taillis en futaies, si l'on veut avoir des truffières inépuisables, comme le sont celles des environs d'Ingrande (Poitou) et celles de la Haute-Provence, du Limousin, du Quercy, etc., et qui presque toutes se rencontrent au pied ou sous l'ombre d'arbres de haute tige plus ou moins âgés et assez distants les uns des autres. En supposant que la culture purement artificielle des truffes, comme celle qui serait praticable dans un jardin, dût un jour être couronnée de succès, nous doutons qu'elle puisse jamais équivaloir à la culture indi- recte, si l'on peut ainsi parler, que les Loudunois semblent avoir les pre- miers mise à profit. Aussi, serait-il à souhaiter que leur exemple fut suivi dans une foule de lieux où il le pourrait être avec bonheur. Leur mé- thode, qui a pour autre conséquence de créer des bois là où il n'en existe point, mérite doublement d'être recommandée. Quant à celle qui consiste à répandre des fragments de truffes mûres dans un terrain boisé qui ne produit point encore ces champignons, nous croyons qu'elle peut aussi donner des résultats satisfaisants, quoi que nous ayons dit plus haut à son sujet; mais elle ne devra être tentée que dans des circonstances analogues à celles offertes par les truffières naturelles; on reconnaîtra alors qu'une fouie de lieux supposés improductifs en truffes en produisent réellement déjà avec plus ou moins d'abondance, et que beaucoup de bois pourraient être convertis en truffières à l'aide de quelques soins, qui consisteraient surtout à diminuer le nombre des arbres et à débarrasser le sol des brous- sailles qui l'empêcheraient de recevoir à la fois facilement les eaux plu- viales et rinlluence directe des rayons du soleil ('). (1) Léopokl TraUillick , ilans ses « Essbaro ScliMiiniiiic, p. 29, Iff^ cilit., » Irailc aussi de (•|jini('ri(iiit's v\ iiiapplicalilfs les procèdes arlificiels pro|)Oscs avant lui pour la culture des — 189 — L'industrie loiidunoise , mise également en pratique dans les environs de Civray, a donné une valeur importante à des terrains qui n'en avaient antérieurement presque aucune; elle a enrichi beaucoup de cultivateurs qui, aujourd'hui, dit M. Delastre, u font des semis réglés de chêne, cal- culés de façon à en avoir chaque année quelques portions à exploiter comme truffières, x A la Bonardelière,près Civray, on évalue 80 à 100 fr. le revenu annuel en truffes d'une boisselée (1 5 ares 20 centiares) de taillis de chêne. Dans l'arrondissement d'Apt (Vauclusc) , comme nous l'apprend M. E. Bonnet , plusieurs propriétaires ont aussi créé des truffières dans leurs domaines , à l'imitation d'un chercheur de truffes , natif du Rous- sillon, et nommé Talion, qui , le premier, avait eu l'idée de semer des chênes verts , dans l'espoir de recueillir plus tard des truffes sous leur ombre. Le petit bois né de ce semis a trente ans aujourd'hui, et protège une truffière en plein rapport. Les arbres y sont espacés de cinq mètres environ les uns des autres; mais dès que leurs branches se joindront et couvriront le sol d'une ombre trop épaisse, ils devront être éclaircis, sous peine pour l'industrieux cultivateur de voir sa truffière devenir prompte- ment stérile, ainsi que l'expérience l'a déjà pi'ouvé maintes fois en Pro- vence comme ailleurs. REMARQUE DE LA RÉDACTION. M. Tulasne n'a probablement pas connu, puisqu'il ne Ta pas cité, le travail d'un botaniste belge, François Van Slerbecck, lequel décrivit, dis- séqua et tenta de cultiver la truffe à Anvers, en 1062. Il est vrai que le TnEATRUM FuNGORUM, oft liet Tooneel der Campernoellën , de cet auteur, est écrit en flamand, ce qui le condamne à rester forcément inconnu d'une grande partie de rEuro|)e. Van Sterbeeck cite un auteur plus ancien que lui, Tack, pour une méthode de semer la truffe, et cette méthode est la même que celle de Bornholz, laquelle d'ailleurs a été tentée avec un in- succès si constant qu'on doit la regarder comme une erreur, si pas une mystification. (Cii. M.) Iniffes. Néanmoins, malgré son incxpéricnrc, il se hasarde à en indiquer de nouveaux. Celui qu'il conseillerait de préférence, coiisisl( rail à choisir un coteau incliné à l'ouest qui oflVirait dans sa partie supérieure un ruisseau ou un réservoir ombragé d'arbres, el dont le bas serait planté de chênes, de châtaigniers et de genévriers épars ; le sol devrait èlrc léger, noir, meuble et sablonneux; on le nelloyerait avec soin des broussailles et des gazons qui le cou- vriraient; puis, en avril ou mai, on y placerait de jeunes truffes fraichenicnt arrachées de leur sol nalal et qui retiendraient encore beaucoup de terres autour d'elles. Les circonstances ([n'exige Trattinick seraient difiieiles à renconirer, et la nature du sol (|u'il indique, n'est point celle ordinaire aux truffières naturelles; mais quoique les champignons ne semblent pas, en général, se prêter facilement à la Iransplanlalion , on réussirait sans doute à la pratiquer sur déjeunes individus enveloppés de mycélium ; ainsi , les Tuber melanvsporum, que nous avons récollés dans les Iriillières du Poilou, en seplembre ISiiO, auraient vraisemblablement très- bien pu èlrc replanlés avec succès, au moins poiii- la propaj^alioii de leur espèce, car non.'; avons vu croître leur mycélium dans les flacons où nous les avons renfermés. {Uibliothc J'ai séjourné à Genève de 1819 à 1822, m'occupant spécialement de botaniipie , sous la direction du célèbre De Candolle. Comme fils de pépiniériste, j'avais accès à peu près dans tous les jardins et j'en parcou- rais beaucoup. Dans une maison de campagne de 31. Duval se trouvait un grand marronier auquel on remarquait une branche couverte de feuilles beaucoup plus fortes et plus vigoureuses que les feuilles ordinaires, d'une couleur plus foncée. Je signalai cette branche au jardinier en lui deman- dant s'il n'avait rien observé de particulier à la floraison, mais il me dit que son attention n'ayant pas porté sur ces fleurs , il ignorait si elles se distinguaient des autres. !> Au printemps suivant, au moment de la floraison, il me fit prévenir pour examiner ensemble la branche remarquée, et ce fut alors que nous lui trouvâmes des bouquets magnifiques formés de fleurs où les étamines étaient métamorphosées en pétales : ces fleurs étaient devenues doubles. J'envoyai des grefl^es de cette branche précieuse à mes parents, à Boll- willer, qui ont conservé et multiplié cette variété, mais trop faiblement, eu égard à la valeur de la plante. Rentrant chez moi en 1828, après onze ans d'absence , j'ai planté de ces arbres dans le pare que je créais alors pour M. Ed. Vaucher, armateur à Mulhouse, et c'est là qu'au bout de quelques années d'attente, on a pu juger du bel eff'et de ces fleurs de jacinthes pro- duites et portées par des arbres. Depuis cette époque j'ai considérable- ment multiplié ce marronier et je l'élève à haute tige ou en pyramide. » Nous remercions M. Baumann, de Bollwiller, de ces détails au sujet d'un arbre dont la beauté et l'utilité ne sont pas suffisamment appréciées : ils répondent au reproche d'une revue anglaise à l'égard de la négligence des horticulteurs du continent , de rarement savoir l'histoire des plantes qu'ils mettent dans le commerce: cela est vrai parfois, mais pas toujours. ' iU.£.Sct>a-e!j Noîseller nu*r\oill(' de BollwilIcM* {'o//('c/i(>/( Uaumann c/t- /io/Zioif/vr. 217 — JARDIN FRUITIER. LA NOISETTE MERVEILLE DE BOLLWILLER, Par m. Ch. Morren. M. Aiig.-Nap. Baumann, horticulteur très-connu de Bolhviller, nous a fait parvenir en novembre 1853, le dessin et l'histoire d'une variété de noisetier dont le fruit est sans contredit un des plus remarquables. Il avait obtenu la souche de l'arbre d'un amateur de la Silésie, qui s'occupe de semis de noisetiers depuis un grand nombre d'années , et procède à ces opérations avec des soins exemplaires. La variété en question n'est pas récente. Elle est cultivée depuis quel- ques années à l'établissement de Bollwiller et s'y montre très-productive. L'arbuste est vigoureux, très-branchu , susceptible d'un grand dévelop- pement. L'écorce est grise, lisse sur les branches moyennes, poilue sur les branches récentes ou à l'extrémité des vieilles; le pétiole de la feuille court, la lame un peu inéquilatérale, ovale, arrondie à la base, un peu échancrée, les échancrurcs inégales, fortement nervées et veinées, l'inter- veine relevée, bosselée et d'un vert gai; le bord doublement denté et les dents obtuses. Deux ou trois chatons mâles à l'aisselle des feuilles supé- rieures, se développant déjà lorsque les fruits sont mûrs, croissant en hiver et s'ouvrant au premier printemps. Pédoncule du fruit long d'un à deux et même à deux et demi centi- mètres, cylindrique et faisant pendre la noisette. Cupule double, une première petite, relevée, à divisions dentées irrégulières, une seconde beaucoup plus grande formée de laciniures déchiquetées à leur bord supé- rieur et libre, poilues à l'extérieur et les poils courts; le fond de la cupule large parfois de trois centimètres pour recevoir la noisette qui , sur trois centimètres de diamètre, mesure aux environs de 25 à 27 millimètres de diamètre transversal. L'épicarpe est pâle, d'un jaune faune et d'un vert blanc fai'ineux, parcouru par une côte semi-latérale très-visible. La noix elle-même ou la graine est blanche, douce, onctueuse, d'un goût aussi délicat que la noisette la plus fine. Ce noisetier sera mis en vente chez M. Aug.-Nap. Baumann, horticul- teur à Bollwiller (poste restante, Soultz, Haut-Rhin, France), pour l'au- tomne de 4854. Le prix des pieds sera de 15 francs pour les personnes qui le demanderont avant le 1" septembre prochain. liELG. HOUT. T. IV. 28 — 218 — NOTICE SUR LA PLANTATION DES ARBRES FRUITIERS , Par m. Martin Mulleu , Jardiniei' en chef du Jardin botanique de Strasbourg. Il arrive très-souvent que des propriétaires font faire des plantations d'arbres fruitiers soit en grand, soit en petit, en se servant pour cela de jardiniers qui, malheureusement, n'ont aucune idée de la chose; au lieu de faire du bien aux arbres qu'ils plantent, ils les massacrent en muti- lant leurs racines, ils les plantent dans des trous non proportionnés à la qualité du terrain, ou bien ils les taillent sans intelligence. Je crois donc me rendre utile en donnant quelques indications sur le terrain qui con- vient le mieux aux différentes espèces de fruits , sur la grandeur des trous, sur la préparation des terres, sur les distances à prendre pour les différentes forces , sur l'époque de la plantation , etc. De la terre. Je ferai observer d'abord que les arbres à fruit à noyaux sont moins difficiles que les arbres à fruit à pépins, car ces derniers exigent, pour prospérer, une terre profonde et substantielle, tandis que les fruits à noyaux se contentent d'une terre plus légère , soit calcaire, soit siliceuse. Quand même la terre dans laquelle on veut planter, paraît bonne à la surface , il ne faut jamais négliger de la sonder, afin de connaître son épaisseur et le sous-sol sur lequel elle repose. Pour que les arbres à fruit à pépins greffés sur franc réussissent, il faut que la terre végétale ait au moins un mètre de profondeur (les pommiers sur doucin et sur paradis, les poiriers sur cognassiers viennent dans une terre moins profonde). Pour les fruits à noyaux, il convient qu'elle n'ait pas moins de 0'".50, soit qu'elle ait cette profondeur naturellement , soit qu'il faille la lui donner par des moyens artificiels. Le meilleur sous-sol est celui qui est sablonneux ou caillouteux, parce qu'il permet l'infiltration des eaux; le plus mauvais est le sol argileux, glaiseux ou tuffeux, car il empêche celte infiltration et nuit par conséquent aux racines. Dans ce dernier cas, il faut planter les arbres dans des trous aussi peu profonds que possible, car si le terrain n'a pas assez de pente, les racines inférieures des arbres se ti'ouvent bientôt dans une humidité stagnante, elles souffrent et s'altèrent et l'arbre dépérit. Lorsqu'on veut planter des arbres en remplacement d'autres qui sont morts ou en mauvais état, il est indispensable d'enlever la terre dans laquelle les vieux arbres avaient vécu, et de la remplacer par une autre bonne terre. Si la terre de dessus est reconnue bonne, on n'est pas obligé — 219 — d'en prendre d'aulrc pour combler les trous ; celle qu'on sort des trous, on la répand dessus. Généralement la terre de dessus est meilleure que celle de dessous, de sorte qu'il est bon de faire l'opération indiquée, soit qu'on plante des arbres là où il y en avait déjà, soit qu'on en plante là où il n'y en avait pas encore. Des» trous» et des tranchéeis. Quand la terre est d'une bonne qualité , et qu'elle repose sur un bon sous-sol, on fait des trous carrés de 0"'.30 sur 1 mètre de profondeur; plus grands les trous vaudraient encore mieux; toutefois, si la terre est à la fois bonne et perméable, on peut à la rigueur se contenter de 0'".60 et 0'".70 de profondeur, sauf à donner un bon coup de piocbe au fond. Si la terre végétale a moins d'un mètre de profondeur, et que le sous-sol est tuffeux ou argileux, il faut faire les trous moins profonds, mais d'un tiers plus larges, pour que les racines puissent plus facilement s'étendre hori- zontalement plutôt que de s'enfoncer. Pour donner une direction plus horizontale, on peut aussi faire des incisions aux racines pivotantes que l'on courbe, ou bien mettre des planches de sapins ou autres à 0"\08 ou 0"'.10 au-dessous des racines dans les trous, ces planches empêchent les racines pivotantes de s'enfoncer et leur font prendre une direction hori- zontale. Si on a une plantation régulière à faire, on peut ouvrir, au lieu de trous, des tranchées de l'".50 à 2 mètres de largeur sur 1 mètre de profondeur, en mettant la couche supérieure d'un côté et la couche infé- rieure de l'autre. Pour planter ces arbres dans ces tranchées, on procède comme avec ceux qu'on met dans des trous , en ayant soin de jeter tou- jours la meilleure terre dans le fond. Cette méthode est un peu plus dis- pendieuse que la route ordinaire, mais on ne tarde pas à en être récom- pensé par le bon résultat de la végétation et les fi'uits. Pour planter dans un sol mauvais, il faut nécessairement remplacer la mauvaise terre par une bonne terre à blé, mélangée soit avec des mottes de gazon, soit avec des curures d'étangs ou des balayures des rues, bien décomposées et mêlées avec une terre ordinaire, ces matières fournissent d'excellents résultats. La terre provenant des fossés des routes et mise en tas pendant un an, n'est pas moins favorable. L'emploi du fumier pour la plantation des arbres, quoique certains auteurs le rejettent, est, selon moi, une très-bonne chose, surtout dans un mauvais terrain, seulement il faut avoir soin de l'écarter un peu des racines et de prendre pour les terres légères du fumier de vache, et, pour les terres fortes, du fumier de cheval. Dans les terres fortes et froides les décombres font un excellent usage. En plantant des arbres nains ou des pyramides en massifs dans des jardins })ittoresqucs, on fait bien de défoncer tout le terrain à un mètre de profondeur. — 220 — De la plantation. En premier lieu, il importe d'indiquer les distances qui conviennent aux différentes espèces et formes , c'est là un des points principaux, car, dans notre pays surtout, on a l'habitude de trop rapprocher les arbres les uns des autres, ce qui fait qu'ils se privent réciproquement d'eau et de nourriture, et qu'on voit tant d'arbres rabougris et malades. Les espèces greffées sur franc et élevées à hautes tiges, comme les poi- riers et les pommiers, doivent être espacées de 10 à 42 mètres dans un bon sol, et de 8 mètres dans une terre médiocre; les cerisiers sur meri- siers, de 8 mètres ; les poiriers sur cognassiers, les pruniers et les abri- cotiers, de 6 à 8 mètres; les pyramides de poiriers et de cerisiers , de 4 mètres; les poiriers sur cognassiers, les abricotiers, les pruniers et les pommiers sur doucin (pyramides), de 3 mètres; les pommiers sur paradis, de 2 mètres; les abricotiers et les pêchers sur amandiers en espalier, de 6 à 8 mètres, suivant la hauteur du mur; les mêmes sur pruniers, de 6 mètres; les cerisiers, poiriers et pommiers en éventail ou en palmcttc, de 6 à 8 mètres. Les distances étant déterminées et les trous ou les tranchées disposées, il faut préparer les arbres, c'est-à-dire raffraîchir l'extrémité des racines avec une serpette en faisant la coupe en dessous, et supprimer seulement les parties qui se trouvent avariées ; moins se raccourciront les racines mieux cela vaudra , car la reprise et la prospérité d'un arbre dépendent beaucoup de la longueur et de la qualité de ses racines. Si l'on peut dans un baquet assez grand recevoir les racines des arbres et la bouse de vache délayée dans une suffisante quantité d'eau , on fait bien d'y tremper les racines de chaque arbre avant de le planter. Du bon terreau peut à la rigueur remplacer la bouse de vache ; je recommande cette opération principalement pour des plantations tardives ou faites par un temps sec. Pour bien faire en plantant un arbre, il faut être à deux, l'un place l'arbre en écartant bien les racines, l'autre laisse glisser enti'e celles-ci, au moyen de sa bêche, de la terre bien meuble (si on peut mettre un panier et plus de terreau à l'entour des racines de chaque arbre, cela n'en vaudra que mieux). Quand on a jeté assez de terre pour que l'arbre se tienne debout, on le prend à deux mains vers la base de sa tige , on le secoue légèrement pour mieux faire entrer la terre fine entre les racines, on achève de remplir le trou et l'on appuie les terres doucement, si elles sont légères et peu humides , on s'abstiendra de les presser, si elles sont fortes et mouillées. Une chose qui n'est pas moins essentielle, c'est que les arbres ne soient pas trop enfoncés, la greffe doit être de 10 à 15 centimètres au-dessus du niveau du sol, en terre forte et humide, et en terre légère et sèche elle peut être au niveau du sol même, excepté pour les arbres greffés sur franc, dont la greffe devra toujours cire au-dessus du niveau. Il est im- — 221 — portant, en posant un arbre dans un trou nouvellement fait , de compter sur le tassement que la terre pourra subir, et par conséquent de planter l'arbre d'autant plus haut , car soulever les arbres plantés trop profondé- ment, en les tirant par la tige, comme cela se pratique ordinairement, a les mêmes conséquences fâcheuses que si on laisse un vide sous la cou- ronne des racines, ou si on tend celles-ci au point de les déchirer et de leur faire prendre une direction perpendiculaire. Je répète qu'il est très-important dans les terrains froids et humides comme dans une terre franche et argileuse , que la greffe soit toujours élevée le plus possible au-dessus du sol ; si dans ces terrains on voit partir de la tige les grosses racines , cela n'en vaudra que mieux, car plus les racines sont près de la surface du sol, plus les arbres sont fertiles et les fruits savoureux. Malheureusement on a, surtout chez nous, Tliabitude de planter les arbres à une trop grande profondeur, sans se soucier si la greffe est enfoncée de 10 à 20 centimètres de plus ou de moins : de là vient que tant d'arbres font une végétation peu forte et que les feuilles jau- nissent au milieu de l'été. La première année qui suit la plantation, surtout si elle est sèche, il est de haute importance de barbouiller au printemps les troncs avec un mé- lange de terre et de bouse de vache, et de répandre au pied de chaque arbre un paillis consistant en du fumier court ou en de la mousse, du résidu de chanvre cassé, des feuilles ou autres substances semblables; cette litière conserve l'humidité et empêche l'évaporation , surtout lorsque, par de fortes clialeurs, il faut arroser les arbres, ce qu'on ne doit faire que le soir après le coucher du soleil. Époque de la plantation. On peut planter dès que les arbres ont cessé de végéter, ce qui a ordi- nairement lieu au mois d'octobre ; on peut continuer jusqu'en avril chaque fois que les gelées ou les grandes pluies ne s'y opposent pas. Dans les terres sèches et légères , on doit planter de bonne heure, et le plus tard possible dans celles qui sont fortes , froides et humides. Les pêchers sur amandiers restent quelquefois en végétation jusqu'à la fin d'octobre, par conséquent il ne faut les planter qu'après ce terme. — 222 — PATHOLOGIE VÉGÉTALE. DE L'ACTION DU SOUFRE ET DE LA CHAUX SUR LA MALADIE DE LA VIGNE, Par m. Broquet-Goblet , Vice-Président du tribunal de première instance, à Tournai. (Lettre adressée au Directeur de la Belgique horticole.) Beaucoup de personnes attribuent au défaut d'hiver réel depuis plu- sieurs années, les diverses maladies que nous avons vu envahir successi- vement le règne végétal. Elles concluent naturellement de la rigueur de la saison que nous venons de passer , qu'enfin nous serons débarrassés de ces fléaux, le désespoir des cultivateurs, que la pomme de terre rede- viendra saine et que la vigne va reprendre cette santé florissante dont elle jouissait naguère. Puissent ces espérances n'être pas déçues! 3Iais en at- tendant je ne crois pas hors de propos de vous communiquer le résultat de quelques expériences que j'ai faites sur les vignes de mon jardin. Il me semble qu'on peut en conclure que pour nos treilles, au moins, nous pouvons victorieusement lutter contre ce malheureux oïdium qui déjà a fait tant de ravage. Je possède une dixaine de treilles en ville et un très-grand nombre à la campagne. En 1852, les unes et les autres ont été tellement maltraitées que tous les raisins ont péri; même le jeune bois se trouvait maculé de taches noires, signes d'une maladie profonde qui pouvait entraîner la perte du sujet lui-même. Au printemps de 1855, je me décidai à traiter par le soufre mes vignes de la campagne et j'abandonnai celles de la ville à leur malheureux sort. Quant à ces dernières, la maladie a agi de la même manière qu'en 1852; tous les raisins ont péri et les sujets sont encore aujourd'hui dans un état maladif évident. Pour mes vignes de la campagne , je commençai au mois d'avril, au moment de la pousse, à les laver au moyen de la pompe à la mainavec du sulfure de chaux liquide. Je le composai de la manière suivante: Un demi-kilogramme de soufre , un demi-kilogramme de chaux et trois litres d'eau, le tout tenu en ébullition pendant une heure. Le lendemain on décante le liquide et on le mélange de cent litres d'eau. J'entre dans ces détails parce qu'il est essentiel que le liquide ne soit trop concentré et qu'il ne brûle pas les jeunes pousses ; plusieurs d'entre elles s'étant déjà trouvées en quelque sorte grillées par le liquide tel que je l'ai employé. Plus tard, lorsque le raisin a été bien formé, j'ai soufflé avec le soufflet Gonthier, après avoir mouillé les vignes avec de l'eau fraîche. Un demi- kilogramme de soufre m'a encore sufli pour celte opération qui a eu lieu sur une vinulaine de viij;ues. — 225 — Enfin, ayant remarqué que lorsque les raisins sont parvenus à peu près à leur grosseur, quelques grappes commençaient à blanchir, je fis recom- mencer la dernière opération. Le résultat de ces diverses manières d'employer le soufre, qui n'ont exigé chaque fois qu'une demi-journée de jardinier, n'a rien laissé à dé- sirer, et la récolte fut tellement complète que j'ai pu jouir du raisin jusqu'à la mi-décembre après avoir eu soin de cueillir ce qui restait en treille avant les gelées de la fin de novembre. Je dois faire remarquer du reste, que dès que le raisin a pris couleur, j'emploie les sacs en aloës qui me servent depuis sept ou huit ans et dont je ferai pour longtemps encore usage, tellement ces fils sont résistants. Le procédé dont je viens de parler, a été employé sur des sujets de diverses espèces de raisins blancs précoces et tardifs, muscats, gros bleus et gros S'-Bernard. Tous ont été préservés de la maladie. S'il pouvait rester quelque doute sur l'effet du soufre dans la destruc- tion de l'oïdium, les résultats si différents obtenus de vignes traitées au soufre et de celles qui ne l'ont pas été avec cette matière, formeraient la preuve la plus convaincante de cette éminentc efficacité. Aussi , malgré toute la confiance qu'on peut avoir dans le pouvoir d'un hiver rigoureux, et malgré l'espoir de voir disparaître un fléau comme celui de la maladie de la vigne par les simples phénomènes naturels, cependant j'engage for- tement les amateurs de raisins à traiter leurs vignes comme je traite les miennes. Dans la médecine des plantes , comme dans la médecine de l'homme , l'expérience est le plus grand des maîtres. Tournai, 29 janvier 1854. La Société des sciences industrielles et littéraii'cs de Paris, vient de décerner à l'unanimité à M. l'abbé Delpy, ancien administrateur du grand séminaire, membre du comice agricole de Sarlat, la médaille d'or pour un travail sur la maladie de la vigne. En France aussi on espère beaucoup des effets de l'hiver, mais la prudence exige de ne pas trop se fier à de simples conjectures que des observations rigoureuses n'ont pas justifiées. COMMISSION POUR L'ÉTUDE DE LA MALADIE DE LA VIGNE. Le ministre du commerce, de l'agriculture et des travaux publics, à Paris, a nommé une commission chargée d'apprécier la valeur pratique des méthodes proposées contre la maladie de la vigne. Ont été nommés membres de la commission : MM. De Bouchardat, Chatin, Dubrcil, Duchartre et Rendu, président, tous connus pour leurs études spéciales sur la matièi'e. — 224 — CULTURE MARAICHERE. LA CULTURE DU PISSENLIT, Par m. Codrbe, Horliculleur, àBellieniville (Marne). L'amélioration des plantes par la culture a occupé un grand nombre d'horti- culteurs; frappé de ce qui a été dit et écrit sur ce sujet, et notamment des re- marques contenues dans le cinquième volume de la Maison rustique du XIX^ siècle (page 224), relativement au pissenlit dent-de-lion, j'ai voulu essayer si je parviendrais à obtenir de bons résultats de sa culture ; ceux auxquels je suis ar- rivé ne me paraissent pas indignes de fixer l'attention des amateurs de légumes. Je vais donc décrire rapidement les divers procédés que j'ai employés pour obtenir de cette plante une salade agréable et bienfaisante. Premier procédé. — Je creuse , dans un terrain bien amendé , une rigole d'une longueur quelconque et de 0"',20 de profondeur, dont j'ameublis le fond avec soin. Cela fait, je vais choisir dans un champ les plus belles racines de pissenlit que je puis trouver, et je les plante très-près les unes des autres dans le fond de ma rigole. Lorsque les feuilles commencent à se développer, je comble cette rigole, soit avec du terreau, soit avec un mélange de terreau et de sable par par- ties égales, et je laisse le tout en repos. Lorsque les premières feuilles se montrent au-dessus de ce terreau, je découvre un bout de la rigole, je coupe la quantité de feuille dont j'ai besoin, et je recouvre immédiatement. Je puis, par ce moyen, avec une rigole de 20 à 30 mètres de longueur obtenir tous les jours, et pendant assez longtemps, un bon plat de salade, que je préfère de beaucoup à la barbe de capucin : Ce que j'ai dit suffit pour faire connaître l'étendue de rigoles que de- vraient cultiver ceux qui voudraient faire commerce de ce produit perfectionné. On peut pendant l'hiver activer la végétation en recouvrant les rigoles avec des feuilles, ou mieux encore avec du fumier; on peut également appliquer à cett„ culture les procédés de chauffage usités pour celles des asperges. Deuxième procédé. — Ici au lieu de planter les racines de pissenlit je récolte, soit dans les champs, soit dans les jardins, mais sur les pieds qui portent les feuilles les plus larges, la graine dont je puis avoir besoin et, après avoir préparé la rigole, comme je l'ai dit plus haut, j'y sème cette graine très-épais. Je la re- couvre légèrement de terreau, j'arrose si le sol est trop sec, je laisse mes plantes se développer, et au printemps je les traite comme celles qui proviennent des racines. Troisième procédé. — Au lieu d'une rigole, je prépare un coin de terre d'une étendue proportionnée à la récolte que je veux faire, et j'y sème ma graine de la manière que je viens d'indiquer. Lorsque l'hiver commence à faire sentir sa ri- gueur, je relève mon plant et je le transporte dans ma cave où je cultive exacte- ment comme la barbe de capucin. J'obtiens aussi pendant la saison dhiver une salade qui , comme je l'ai dit, me paraît bien préférable à cette dernière. Je suis persuadé, que si quelques-uns de mes confrères qui habitent les envi- rons des villes voulaient se livrer à la culture, très-simple d'ailleurs, de la plante qui nous occupe et qui a été jusqu'ici très-négligée, à mon avis ils ne laisseraient pas d'en tirer un assez bon bénéfice. C'est dans l'intention de leur être utile que décrit les procédés qui m'ont toujours réussi. [Revue horlic.) i.Caslilloja lilliospcMMiioides . Humb.B.ri K.2 -5.Knlillapia oxspetala. Roylo — 225 — HORTICULTURE. LE CASTILLEJA LITHOSPERMOIDES , CHARMANTE SCROPHULARIACÉE DU MEXIQUE, Pau m. Ch. Morren. La tribu des Euphrasiées,dansla famille des Scrophulariacées, renferme un genre de plantes qui a fixé trop peu jusqu'à présent l'attention des horticulteurs, nous voulons parler des Castilleja, groupe générique fondé par Linné fils, conservé parEndliclier (4004),Renlham (Prodr.DeC. t.X., p. 528), et Kunth (Humb. et Bonpl. nov. gcn. etsp. II, p. 528). Nuttliall sépara , comme genre particulier, une de ses sections sous le nom d'Eu- chroma, celle précisément à laquelle se rapporte la plante que nous signalerons ici d'une manière particulière. Les Oncorrhynchiis signalés par M. le professeur Lelimann, dans le catalogue des graines du Jardin bota- nique de Hambourg, en 1852, ne sont aussi que des Castilleja. Ce sont des plantes herbacées, des sous-arbrisseaux ou des arbrisseaux répandus par toute l'Amérique, le nord et l'orient de l'Asie, ayant les feiylles alternes, entières ou trifîdes, les feuilles florales en forme de brac- tées, hétéromorphes ou différentes des feuilles ordinaires, colorées et donnant aux espèces des aspects riches et brillants ; les fleurs sont axil- laires, solitaires ou terminales, disposées en épi et les corolles blanches ou vertes. . Les caractères du genre sont, d'après Bentham : Calice tubuleux, comprimé, souvent dilaté à la base, fendu au sommet en avant ou des deux côtés, lobes entiers ou bilobés à lobes couris; tube de la corolle renfermé, le casque allongé, étroit, cariné et concave, lèvre inférieure petite, trilobée, lobes très-courts, concaves, égalant rarement la moitié de la longueur du casque ; étamines didynames renfermées dans le casque, loges des anthères oblongues-linéaires, l'extérieure fixée par le milieu, l'intérieure pendante. Valves de la capsule entières, seplifères par le milieu, portant les placentas. Graines nom- breuses, testa lâche, réticulée, radicule des graines regardant le hile. La section des Euchroma contient l'espèce suivante, figurée pi. 5G. CASTILLEJA LITHOSPERMOIDES. Humb. Bonpl. et Kunth. nov. gén. et sp. 2, p. 551, t. 164. — Florist. 1847, p. 16. Plante entièrement poilue et hispide, les feuilles entières, linéaires-lancéolées, un peu obtuses au sommet et arrondies, la plupart à la base, feuilles florales dilatées à leur bout oval ou oboval, colorées à ce même bout et par moitié en pourpre vif; épi court (Benlh.), s'allongeant par la culture; lobes du calice oboval-oblongs, entiers ou obtus avec une légère dépression, un peu plus courts que la corolle. Humboldt et Bonpland signalent cette espèce comme appartenant aux champs du Mexique. Ils la décrivent comme haute d'un pied, à tiges droites, presque simples. M. Galéotti Ta retrouvée aux mêmes endroits. (Gai. pi. sech. 985, 1078. — Linden, n" 1099). Sinclair on signala une BELG. HOnT. T. IV. 29 — 226 — variété plus grande, haute d'un pied et demi, flexueuse et rameuse, sponta- née entre San-Blas et Tepic, mais Bentham doute que ce soit une espèce spé- ciale, et le même botaniste hésite à admettre que les individus recueillis par M. Linden , sur le mont Orizaba, appartiennent aussi à une espèce distincte. Le Castilleja lithospermoïdes a été introduit au moyen de graines im- portées du Texas, au mois de juillet 1845, chez M. Cattell, horticulteur à Westerham , dans le comté de Kent : elles étaient sans nom mais re- commandées comme produisant des plantes aussi belles que curieuses. Vers le mois de novembre suivant les fleurs commencèrent à se montrer, mais en décembre l'humidité les tua. L'expérience apprit l'année sui- vante , que les plantes placées en pleine terre au mois de mai se portent mieux : elles fleurissent presque pendant tout l'été et l'automne, et si on la traite à l'arrière-saison comme une espèce d'orangerie, sa fleuraison continue pendant l'hiver. En janvier, les boutons s'arrêtent et avortent. M. Cattell possédait une plante, en 1847, suspendue dans sa floraison au mois de janvier, couverte de vingt épis de fleurs, tandis que les relations des naturalistes voyageurs et les exemplaires conservés en herbier et recueillis en Amérique, accusent une espèce pauciflore : Bentham dit même que l'épi est très-court sur ces exemplaires secs, tandis que dans les cultures, cet épi mesure un décimètre et plus. Cnhure. Si Ton est en possession de bonne graine de Castilleja, on la sème à la fin d'août ou au milieu de ce mois, et, lorsque les plantes sont assez fortes pour supporter la transplantation , on les rempote dans une couche aérée ou une orangerie et on les y laisse pendant l'hiver; même un froid de gelée semble ne pas leur faire du mal. Leurs plus grands ennemis sont ces jours humides et sombres de la mauvaise saison. Aussi, doit-on drainer la terre avec la plus grande attention , et si les horticul- teurs ont presque tous perdu aujourd'hui le Castilleja lithospermoïdes, cet insuccès ne doit être attribué qu'à l'humidité, qu'à l'excès d'eau et aux moississures qui en sont la conséquence. On peut aussi traiter ce joli végétal comme espèce de pleine terre mais seulement pour la bonne saison : elle se sème alors en février et en juin suivant elle fleurit. Si l'automne est convenable, elle donne beaucoup de graines, mais dans un été humide, ces graines avortent. Une capsule bien venue renferme cinq ou six cents graines. On reproduit aussi de boutures, et, malgré ces chances de multiplication facile, le Castilleja lithospermoïdes est une plante rare qui ne se trouve indiquée sur les catalogues d'aucun horticulteur marchand à notre connaissance. Le Jardin botanique de Hambourg en donnait des graines en 1852. Nous avons attiré sur cette espèce l'attention des personnes qui auraient des relations avec le Mexique pour en faire venir des graines. La terre qu'elle demande, est un mélange de terre franche et de terre de bruyère légère et un peu sablonneuse. A l'air libre, elle se contente d'un sol de jardin meuble, mais non humide. — 227 — LA FRITILLAIRE A PÉTALES ROUILLES, Par le même. Le botaniste Royle a fait connaître le premier, dans sa flore de l'Hima- laya, une fritillaire qu'il a nommé Fritillaria oxijpetala, pour indiquer que les pétales semblaient être couverts de rouille. Cette rouille n'est autre chose que des glandes ou des surfaces caronculeuses qui passent insensiblement à l'état de poils. Cette plante était au reste fort jolie quoique la fleur en parut rouillée. Royle l'avait trouvée à Taranda, dans le Kunawar. Aujourd'hui, elle a été retrouvée par MM. R. Strachey et Winterbottom, qui l'ont publiée dans leur herbier (n° 4), sur le Pindari dans le Kumaon (Asie), à une altitude de 12,o00 pieds. Ils en envoyèrent des bulbes au Jardin royal de Kew, où, cultivées avec soin dans une serre tempérée, elles donnèrent naissance à des plantes dont les fleurs se sont ouvertes en juin 4833. En voici la description. Bulbes oblongues couvertes de nombreuses écailles lancéolées, droites, charnues, d'un blanc verdâtre, les externes aussi longues que les internes; tige d'un pied à un pied et demi de hauteur, cylindrique, feuillue; feuille radicale ordinairement solitaire, longue, lancéolée, s'amincissant en une base étroite ressemblant à un pétiole; feuilles caulinaires distantes, linéaires ou lancéolées, variant de longueur, recourbées; fleur solitaii'c terminale, légèrement pendante, au commencement subcampanulée et plutôt s'ouvrant au large. Périanthe à six divisions ovales ou ovales- oblongues aiguës, contractées à la base en un onglet nectarifère portant une touffe de poils extérieurement au bas de l'onglet et à la base de la lame une touffe de points caronculiformes déprimés. Couleur des divi- sions du périanthe d'un lilas pourpre portant une carène verte extérieu- rement, tandis que l'intérieur de la fleur est violet avec les points caron- culiformes d'un violet foncé pourpre. Six étamines plus courtes que les pétales; anthères oblongues d"un pourpre foncé; ovaire oblong légèrement à six angles, à trois loges; style égalant les filets en longueur; stigmate à trois lobes, papilleux. Capsule oblongue-globuleuse à six angles. Voyez pi. 56 , fig. 2, fleur vue de côté, — fig. 3, vue en face, — fig. 4, pétale, — 5, pistil. Celle fritillaire s'éloigne de toutes ses congénères par son périanthe ouvert et nullement en cloche, par l'absence du nectaire en pli. Il est très- probable qu'elle sera séparée de ce genre sous un nom distinct. D'ailleurs, le port n'est pas celui de nos fritillaires connues. Culture. Le seul renseignement de culture que nous ayons sur cette espèce, est qu'on l'a tenue en serre fi'oide à Kew, où sa fleuraison s'est donc faite sans peine. Cette circonstance est donc d'un bon augure pour espérer devoir cette espèce résister en pleine terre aux intempéries d'une bonne partie de l'Eurojic et peut-être même de Belgique. Nos horticul- teurs ne manqueront pas de se procurer la fritillaire rouillée qui présente de bonnes chances pour le commerce horticole. — 228 — NOTICE SUR QUELQUES PLANTES D'ORNEMENT OU UTILES , DONT LES GRAIKES ONT ÉTÉ OFFERTES AUX ABONNÉS DE lA Belgique IlOrticok, Par m. Ch. Morren. La livraison de janvier 1854 de la Belgique horticole a porté à la connaissance des abonnés qu'ils pouvaient recevoir, sur leur demande affranchie, une première liste de graines de douze plantes d'agrément, plus une seconde collection de huit espèces ou variétés de courges. Le temps des semis étant proche , surtout si l'on tient compte des lenteurs d'une correspondance et des distances fort grandes parfois où il faut en- voyer ces graines, nous avons dû remettre à la publication d'une livraison suivante la notice sur les espèces promises. Voici donc quelques détails sur l'histoire et la culture de ces plantes : 1" Acanthe des» Grecs. V Acanthe des architectes, appelée encore Acanthe molle, Acanthe sans épines, Blanc-Ursine, Acanthus mollis (L.), est beaucoup trop rare dans nos jardins et nos parcs où elle fait un charmant effet lorsqu'elle est con- venablement cultivée et placée selon les lois de la perspective. Originaire du midi de l'Europe et notamment de la Grèce, on sait que cette plante a fourni aux anciens le modèle des feuilles qui ornent le chapiteau de la colonne coi7nthienne. Ces feuilles sont remarquables par leur ampleur, leurs découpures , leur couleur qui est le vert brillant. Elles subsistent pendant presque toute l'année, l'hiver seulement on couvre la plante de feuilles mortes dans les régions où il gèle ; avec ces précautions nous maintenons dans une splendide végétation de belles plantes d'acanthe. A la fin de l'été les tiges montent à un mètre, se couvrent de bractées et de fleurs grandes, singulières de forme, aplaties et présentant une lèvre rose à trois divisions, qu'on dirait d'abord être la fleur tout entière. Parfois à ces fleurs succèdent des capsules biloculaires renfermant une grande quantité de graines, mais celles-ci ne mûrissent pas toujours sous nos latitudes. Il est donc prudent de faire venir des graines du midi de l'Europe , et celles que nous offrons aux abonnés, sont de cette pro- venance. Culture. Il faut semer la graine le plus tôt possible dans une bonne terre meuble de jardin, bien amendée de terreau, en pot et conserver en orangerie , serre ou bâche froide , ou à défaut de ces lieux , en simple appartement bien éclairé et chauffé modérément, jusqu'au printemps, pour mettre alors les jeunes plantes en place, cinq ou six réunies, mais à GO centimètres de distance au moins , dans un parterre particulier ou dans une pelouse. On sarcle la terre de temps en temps autour des pieds ~ 229 — et l'on donne de l'eau guanée (un kilo de guano sur un hectolitre d'eau), trois ou quatre fois par mois selon les exigences des plantes et la vigueur qu'on leur désire. La multiplication se fait surtout par division du pied. Plante vivace. S'* Ail à odeur de vanille. L'ail à odeur de vanille ou Allium fragrans, de Linné, est originaire d'Afrique et se rencontre très-peu dans les jardins du nord et même du milieu de l'Europe où elle exige en effet l'exposition la plus chaude qu'on puisse lui donner : en hiver, elle doit être reléguée dans une serre tem- pérée ou sous châssis. La plante est jolie, pousse d'une bulbe sphérique; des feuilles longues, ensiformes ou en épée et planes; dès le mois de mai apparaissent des ombelles de fleurs roses à l'extérieur, blanches et rayées de pourpre h l'intérieur ; ces fleurs exhalent une délicieuse odeur de vanille ; mais si l'on vient à les couper pour les placer dans les bouquets, la plaie faite à leur pédoncule répand l'odeur d'ail particulière à tout le genre. Cette circonstance donne lieu parfois à des plaisanteries aux dé- pens des mains trop avides à cueillir les fleurs dans le jardin des amateurs d'horticulture. Culture. On reproduit surtout par graines ou par bulbilles, les bulbes étant vivaces. Celles-ci se mettent en pot pour être reléguées l'hiver dans la serre tempérée ou dans un appartement où il ne gèle pas : on tient sec pendant cette saison. On plante en pleine terre, en mai, quand il ne gèle plus et on choisit un endroit chaud exposé au midi. 3° Anémone étoilée on anémone desi jardins. On connaît en horticulture les coloris variés et riches de l'anémone étoilée, Anémone stellata , Lam., rivale des renoncules et demandant pour sa culture les mêmes soins et la même attention constante. L'espace nous manque ici pour décrire les fleurs d'anémone dans ce singulier lan- gage adopté par les adeptes et qui exige un dictionnaire particulier pour le comprendre. Les amateurs d'anémone ont vu dans leurs corolles des fanes, des baguettes, des manteaux, des culottes, des cordons, des béquil- lons et des peluches , et toutes ces choses revêtent des formes et des conditions particulières. Bornons-nous à rappeler ici que, pour avoir de belles anémones, il faut semer et les semences doivent avoir été foi'mécs et cueillies sur des plantes cultivées expressément pour ce but et sous des climats favorables. Les graines que nous offrons ont été produites ainsi. Culture. Terre légère, substantielle, meuble, fraîche et terreautée, terreau de feuilles consommé ; semis en place ou en terrine. On recouvre le semis de mousses; les plants levés, on sarcle constamment, on bine et on arrose; à la fin de juin on ôte les pattes ou racines, on les laisse — 230 — ressuyer à l'air et on les enferme dans des caisses pour les replanter au printemps ou à l'automne suivant , d'après les saisons où l'on veut avoir les anémones en fleur. 4° Tecoma de Virginie ou Biguoiiia h griffes. Le Tecoma de Virginie, Tecoma radicans, ou Bignonia radicans de Linné, est un arbrisseau grimpant et sarmenteux qu'on cultive surtout le long des murailles pour les couvrir, ou sur le tronc d'arbres pour imiter, sous nos climats, les lianes des pays chauds. Le Tecoma porte des griffes pour s'attacher aux corps étrangers. Les feuilles ailées, les fleurs disposées en cime , en forme de trompettes , jaunes , sanguines ou d'un pourpre foncé en font un des végétaux dont on tire grand parti pour l'ornemen- tation. Nous avons connu à l'université de Liège, un Tecoma qui garnis- sait les fenêtres du bâtiment où se tenaient les professeurs, il montait jusqu'au deuxième étage; on dut le faire abattre à cause de l'insuppor- table odeur de jus de réglisse qu'il répandait dans sa longue floraison et qui occasionnait à plusieurs personnes des maux de tète et des nausées. Il faut donc éloigner le Tecoma des habitations, et, dans les parcs, c'est une vraie liane. Culture. Les graines restent ordinairement un an entier en terre avant delever. Il faut semer en terre franche, légère, fraîche et terreautée, et mieux vaut semer en place que repiquer. On multiplie aussi par éclat et marcotte , car le Bignonia ne reprend par boutures que sur bois de 2" année, encore le bouturage est-il chanceux , à cause de la singulière structure des liges dans lesquelles se trouvent un grand nombre de vais- seaux à air. Les graines offertes donnent des plantes indifféremment à fleurs jaunes, écarlates, pourpres, brunes, etc. 5° Lagupiis queiie-de-lièvre. Le Lagurus queue-de-lièvre ou Lagurus ovatus de Linné , est une des plus jolies graminées originaire d'Asie et de l'Europe australe et occiden- tale, qui a fait son entrée dans le monde horticole grâce aux soins de M. Rantonnet à Hyères. Cet habile horticulteur a démontré son heureux emploi comme bordure annuelle. Les feuilles planes, molles, sont du plus beau vert; les panicules en épi serrés portent des glumes plumeuses blanches, et deviennent un ornement comme on en voit très-peu parmi les plantes d'agrément. Les tiges fleuries entrent alors dans les bouquets auxquels elles donnent de la gracieuseté et de l'air; on en fait des bouquets d'hiver comme des immortelles et des Rhodanthe Manglesii, etc. Entre- mêlés avec les fleurs sèches, les épis blancs et comme formés par un édredon végétal produisent un Irès-gracicux clfcl. Cnltiire. On sème les graines sur place au printemps, et on traite les plantes comme les annuelles; on peut en faire des bordures autour des — 251 - parterres. L'iierbe jaunit à sa maturité et on récolte les graines après avoir laissé sécher les épis. Les caryopses ou ce qu'on appelle vulgaire- ment les graines , sont attachés à deux glumes subulées dont l'une est très-longue. Ces fruits détachés, les épis servent encore aux bouquets, ils n'ont rien perdu de leur édredon. 6° Lantana à feuilles de mélisse. Le Lantana à feuilles de mélisse, Lantana caniara de Linné, est un arbrisseau de la famille des Verbénacées ou Verveines , originaire de l'Amérique méridionale, d'un mètre à un mètre et demi de hauteur, tou- jours vert, à feuilles ovales, rudes au toucher, développant des corymbes de fleurs d'abord jaunes, puis aurores, puis rouges et enfin pourpres, et comme le développement de ces fleurs procède du centre , le milieu du corymbe est toujours jaune. L'odeur de toute la plante est celle du mar- rube et peu agréable à certaines personnes. Culture. Le Lantana camara en vertu de son origine américaine a été d'abord cultivé en serre chaude, puis on l'a essayé en serre tempérée , et enfin il est devenu aujourd'hui un des plus brillants ornements de nos jardins en plein air où on le place dès le milieu du mois de mai. On le taille alors et on le pince pour le faire fleurir abondamment en s'adres- sant aux rameaux effilés pendant l'hiver dans les orangeries ou serres tempérées. En automne on rempote les pieds dans des pots longs et on rentre dans un endroit sec, éclairé et d'une température modérée. Les pieds de 1 à 5 ans sont les plus beaux et il vaut mieux bouturer et pro- duire de jeunes pieds que de conserver les vieux qui ne fleurissent plus. Les graines que nous offrons proviennent d'un métissage ou d'une hy- bridation opérés entre plusieurs variétés ou espèces. Le semis se fait en terrine et sur couche dans un sol riche et meuble. 7° Phlox de Diuiinmond. Chacun sait aujourd'hui que ces jolis Phlox Radetski , Phlox Léo- pold, etc., ne sont que des Phlox Drummondi dont la variabilité est indéfinie. Ces variétés remarquables ont beaucoup de peine à se propager et à continuer leur existence, parce que la plante n'est que subvivace et elle retourne, surtout dans nos cultures artificielles, avectant de facilité à sa nature annuelle. On cultive donc plus facilement ce phlox comme une plante annuelle , et lorsqu'on a de bonnes graines recueillies dans le Midi, on obtient des fleurs plus grandes et des variétés à l'infini. Ce phlox est comme les calcéolaires, les pétunias, etc., la joie des personnes im- pressionnables qui recherchent dans les fleurs des couleurs vives, des dessins harmonieux et des formes gracieuses. Culture. On sème au printemps dans de la terre de bruyère et à mi- ombre, ou mieux, dans nos climals, sous châssis. On rempote les jeunes — 252 — plantes que Ton conserve dans ces vases, ou bien on les place en pleine lerre, mais dans les deux cas on n'obtient de belles plantes couvertes de rteurs que par des pincements successifs dirigés avec art, pour rendre les cimes courtes et touffues. On multiplie par bouture et on hiverne en serre. 8" Phlox paniculé. Le Phlox paniculé, Phlox panicidata (Linné), est la plus belle et la plus recherchée de toutes les espèces cultivées. Plante vivace à tiges nom- breuses, hautes de i'".20, feuilles opposées, lancéolées, bords scabres; fleurs en paniculé, lilas et d'un effet riche par leur nombre. Culture. Il est prudent de couvrir les pieds pendant l'hiver après avoir coupé les tiges séchées, bien que les phlox résistent aux froids ordinaires de nos climats. On multiplie par éclat de vieux pieds, par boutures et par graines. Semis au printemps en terre franche tcrreautée. 9" Statîce h feuilles en lyi»e. La Statice à feuilles en lyre, Slatice sinuata (Linné), est une des plus belles du genre : les tiges et les rameaux portent des lames membra- neuses, saillantes, d'un singulier effet et dont l'usage est inconnu. Feuilles en lyre très-élégantes, étalées en rosace au bas de la plante, feuilles de la tige plus petites. Fleurs en corymbe, calice d'un bleu tendre, en forme d'entonnoir, denté, entourant une corolle jaune clair. Ce végétal, très-estimé dans les jardins , est originaire des côtes maritimes de l'Es- pagne, de l'Italie, de la Barbarie, etc. Culture. Les graines que nous présentons aux abonnés, proviennent du midi de la France : il faut les semer sur couche de bonne heure pour avoir des plantes qui fleurissent encore la même année ; la culture se fait en pot pour placer la plante en plein air en été ; on rentre et on conserve en orangerie pendant l'hiver. 10° Vniole à larges feuilles. L'Uniole à larges feuilles , Uniola latifolia, de Michaux, est une du petit nombre des graminées d'Amérique qui ait mérité l'honneur de lïn- troduclion dans nos jardins. C'est une plante des plus gracieuses, et, de plus, très-curieuse à observer au moment de sa floraison par ses épillets verts; sa paniculé est lâche, les épillets longuement pédicellés ; les feuilles planes, larges. On en doit la propagation à M. Rantonnet d'IIyèrcs. Culture. On sème en place dans une terre un peu humide , sinon on iirrose souvent en été; le reste de la culture est la même que celle des graminées vivaces auxquelles Tuniole appartient. — 235 — 11" Verveines hybrides. Les amateurs de belles verveines ne manquent pas. Les graines que nous offrons ont été obtenues dans des jardins du midi de la France où ces plantes acquièrent une grande force et des fleurs magnifiques par leur coloris. Culture. Le semis se fait sur couclie dans une terre bien terreautée et meuble; on repique à une exposition cbaude et un peu sèche. On mul- tiplie par boutures et marcottes pour les variétés à conserver, mais, traitées comme plantes annuelles quand on a de bonnes graines, les fleurs sont plus belles et les pieds plus florifères. 12° Pei*Teuche du Cap. La Pervenche du Cap, Vinca rosea ou Lochnerarosea, de Reichenbach. Ce joli arbuste, trop négligé aujourd'hui en Belgique, est originaire des parties trojticales de l'Asie et de l'Amérique; ses feuilles lisses, brillantes, ovales lui donnent un air propret; mais viennent les fleurs, c'est alors une plante charmante ; ces fleurs sont tantôt blanches à cœur rose, tantôt roses à cœur blanc ; sur quelques pieds ces cœurs restent verts. Culture, Semis sur couche et dans une terre très-substantielle et puis repiquer en pots dans un sol très-terreauté. On conserve l'hiver dans les serres chaudes , mais on préfère aujourd'hui resemer tous les ans et traiter le Lochneria en plante annuelle; les pieds sont plus florifères, seulement le difficile est d'obtenir dans nos climats froids de la bonne graine. Nous offrons cette bonne fortune à nos abonnés. 13" Collection de sept espèces de courges. Il y a en Belgique un grand nombre d'amateurs de courges qui figurent comme objets de montre dans les expositions, mais nous connaissons moins l'utilité de ces fruits. Voici donc une collection de sept espèces utiles, savoir : iô" Courge aubergine, excellent légume : on coupe les jeunes fruits aussitôt qu'ils sont dcfleuris; ils mesurent alors de 4 à 6 pouces de lon- gueur. On les mange en friture et assaisonnés de diverses manières, selon le goût des convives. H" Courges Potiron d'Espagne, donne beaucoup de fruits aplatis et d'un volume ordinaire; la chair est ferme, moelleuse, d'un goût très-fin. C'est une courge qu'on mange en soupe ou en potage dans le midi de la France. 15° Courge Giraumon, Giraumon Turban, Bonnet d' Électeur [cucur- bita melopepo clypeatus), à fruit moyen couronné. Cette variété est très- connue, mais on ne sait pas assez que le fruit est très-comestible comme choux-fleur : il a l'avantage de se conserver longtrm|)s. BELG. HORT. T. IV. ~>0 — 254 — 46° Courge de Malabar (on écrit aussi, mais par erreur, Malarbar), appelé encore melon de Malabar quand le fruit est jeune. On le mange comme les aubergines; il est beaucoup plus délicat, frit à la poêle, en tranches. A l'état mûr , on lève la peau et la partie molle à côté des graines, on confit le reste; il devient, dans cet emploi, un excellent objet de pâtisserie. Le fruit enfin se garde parmi les curiosités de campagne pendant plusieurs années. 47° Courge pleine ou Porte-manteau de Naples; fruit long de 50 à 60 centimètres, gros, cylindrique; il est excellent lorsqu'il est bien mûr. On en consomme une grande quantité à Nice où on les vend au marché tout rhiver. En Belgique, on a nommé cette variété Courge massue. On en ignorait complètement les qualités comestibles. C'est le Cucurbita mos- chata, variété de Naples. 48° Courge musquée, Cucurbita moschata (Duchesne, De Cand., etc.) ou le Cucurbita indica rotunda, de Dalechamp; elle est originaire des Antilles et de l'Europe australe. Les graines que nous distribuons viennent de Marseille. A Venise , on l'appelle Zucca santa; c'est le Mantel-kurbis des Allemands; les fleurs sont blanches, les fruits varient, ils sont indif- féremment sphériques ou déprimés, ovales ou cylindriques, en massue ou turbines, en poires, en carafons ou en flûtes, grands ou petits, à côtes ou tout unis , et toutes ces variations se produisent sans cause connue. Toutefois on recommande, si on veut avoir une pulpe musquée qui varie aussi du jaune-soufre à l'orange-pourpre très-intense, de cultiver dans la partie la plus chaude du jardin. Cette chair se mange en potage. 49" Courge à la moelle. Nous avons donné naguère dans les Annales de la Société royale d'agriculture et de botanique deGand, tome 5, p. 437, une notice sur la courge à la moelle où nous disions que si Don a eu raison de rapporter cette fameuse courge si estimée des Anglais, au Cucurbita ovifera de Linné, nos Belges cultivaient et mangeaient cette courge des siècles avant les Anglais. Dodocns, en effet, la figure et la décrit comme Irès-commune de son temps, sous le nom de Cucurbita silvestris, nom qui devrait l'emporter sur tous les autres d'après les lois de la nomencla- ture. Cette courge circule encore dans le commerce sous le nom de Cucur- bita succada. On en mange les fruits encore verts apprêtés comme les choux-fleurs dont ils ont le goût et un peu l'aspect. Les gourmets en sont très-friands. Culture. Toutes ces courges se cultivent de la même manière. Semis sur couche de février à fin mars, sous cloche et dans du terreau; on habitue peu à peu les plantes à supporter l'air et on les confie à la pleine terre de la fin d'avril à la mi-mai, dans un sol exposé au midi et souvent dans des fossettes d'un demi-mètre de largeur sur trente centimètres de profon- deur que l'on a rempli de fumier recouvert de terreau. On obtient de plus beaux fruits si on n'en recherche pas le grand nombre , en n'en lais- sant qu'un seul , deux ou tout au plus trois par plante. Quand le fruit est — 255 — bien noué on coupe la branche au-dessus de lui à 2 ou 3 yeux ou feuilles. EnOn, on évite que ces grosses masses ne pourrissent du côté où elles touchent à la terre, en plaçant dessous une ardoise, une tuile ou un corps semblable. 14° Coruicbou d'âne ou Ecbaliuni agreste. Si vous consultez à l'égard de ce végétal le Bon Jardinier, vous trou- verez ceci : « Fruit curieux en ce qu'il s'ouvre de lui-même et montre son Il intérieur qui est d'un beau rouge et ses graines noires. » Évidemment il y a ici erreur, ces mots s'appliqueraient bien mieux à la noix muscade qu'au Momordica elateriiwi de Linné. On nous demande souvent cette plante de la famille des Cucurbitacées , cultivée par les pei'sonnes qui se plaisent â jouer des tours à leurs amis. Quand les fruits sont mûrs ils ressemblent assez à des cornichons , mais au moment où l'on veut les cueillir, même y toucher, ils se détachent brusquement, le bout se lance contre la base où il existe un trou, et cette élasticité projette au dehors une quantité de jus visqueux et de graines qui atteignent ordinairement le visage de celui qui a touché au fruit. On serait tenté de croire, dit M. Hœfcr, que ces fruits sont des êtres animés qui se tiennent en état de défense contre ceux qui viennent pour les fouler aux pieds, ce à quoi ils sont d'autant plus exposés que leurs tiges sont rampantes, étalées à terre de tous côtés, longues de plusieurs pieds , qu'elles ne peuvent se relever étant privées de vrilles. Le concombre d'âne , nommé aujourd'hui Ecbalium agreste par Rei- chenbach et sépai'é du genre Momordica, est originaire des lieux aban- donnés aux bords de la Méditerranée et de la Barbarie. Le jeu dont nous parlons plus haut, de faire sauter le jus et les graines sur celui qui touche au fruit mûr, peut devenir dangereux en ce que ce jus, s'il atteint l'œil, y occasionne des douleurs très-vives et un gonflement érysipélateux qui s'étend aux paupières. Si cet accident arrivait, il faut recourir immédiate- ment à l'eau froide dont on doit bassiner l'organe atteint. Les gouttes de ce jus, séchées sur la peau du corps ou des mains, l'enflamment en peu de temps par un principe corrosif dont on ne connaît pas encore toutes les propriétés. Culture. On sème les graines de cette plante annuelle en place , au printemps, dans une terre meuble exposée au midi, et mieux sur un petit monticule dont les tiges ensuite descendent avec grâce. Nous donnerons ces graines mais avec prière de se conduire avec prudence à l'égard d'une plante dont les propriétés peuvent entraîner des inconvénients. A VIS. — Les abonnés qui voudraient recevoir la collection de ces graines en tout ou en partie, voudront bien écrire (franco) leur désir le plus tôt possible. — 256 — REVUE DE PLANTES NOUVELLES. Augpscciiui cburneiim. Thoiiars, Orchid. Afr. t. 65. Lincll. Bol. reg. t. 1523. — Ilook. Bot. mag. 1834, n" 4761. Angraecum éburné. Syn. : Limodormn elmrneuni , Bory, voy. v. 1, p. 559. — Angrœcum superbmn, Thouars, Orch. Afr. t. 62, 65, 64. — Lindl. Gcn. et Sp. Orchid, p. 245. — jEroinon superbmn, Spreng. Syst. veg. v. 5, p. 716. Famille des Orchidacces. Tige simple, feuilles coriaces brillantes, obliques au sommet et marquées de 7 à 10 stries ; épis multiflores unilatéraux, labellum cordé, presque arrondi, cuspidé, portant à la base une crête élevée ou un frein ; éperon parallèle au sépale supérieur et une fois plus long que lui , ovaire rude. Sir William Hooker croit que cette orchidée est devenue très-rare aujourd'hui : la première introduction eut lieu par la Société d'iiorticul- ture de Londres; les plantes provenaient de Madagascar, d'où M. Forbes les avait rapportées. On la rencontre aussi aux îles Bourbons. Aujourd'hui, un fort pied provenant de la collection de feu M. Clowes a fleuri à Kev^^. Les fleurs sont vertes, avec le labellum blanc, et, malgré cette couleur blanche, elles n'exhalent aucune odeur. Le professeur Lindiey a fait sur cet Angrœcum une observation remar- ({uable de physiologie. 8. — Hook. Bot. mag. 1854. Tab. 4759. Epidcndrc de Stamford. — Synonyme : Kpidendrniiihasilarr. — 258 — Klolzsch. in Link et Olto. Je. pi. 2, p. 144, l. 45. Pseudo-bulbes fusi- foiMiies, feuilles oblongues-obluses , coriaees, rétrécies à la base, grappe radicale paniculée, sépales planes, pétales le double plus étroits, labelluiu tripartite, divisions planes-cequilongucs , les latérales oblongues, arron- dies, l'intermédiaire transverse, bilobée ou émarginée, frangée. M. Lindley a décrit dans ses Folia orchidacea, dont la publication se continue lentement, 340 espèces d'épidendres : toutes sont originaires des parties cbaudcs de l'Amérique et presque toutes sont cpipbytes. Elles se divisent en douze groupes ou sections et celle-ci appartient à la 5™", les Psilanthemum de Klotzsch, distincts par leur inflorescence radicale, le labellum soudé à la colonne et semblables pour le reste aux Amphiglol- tiuni. On n'en connaît que deux espèces : VE. picrpurascens (de Focke) et celle ici décrite. Elle est originaire de Guatemala où elle a été découverte par M. Skinner, et de Santa-Martba où la trouva M. Purdie de qui viennent les exemplaires de Kew. C'est une belle grappe de fleurs jaune citrin moucheté de pourpre, très-odorantes et qui s'ouvrent de février en mars. Culture. Semblable à celle des épidendres de serre chaude. SalTia Jaiithiua. Oit. et Dietr. Allein. Gastenzeit, 4847. Sauge violette. Revue hort. février 4854, p. 64. Famille des Labiées. Tiges carrées, cannelées ainsi que les rameaux , hautes d'un mètre, glabres ou parsemées de poils courts et blanchâtres. Feuilles ovales-cordiformes, crénelées sur les bords, glabres ou légèrement pubescentcs, à deux ner- vures basilaires, pétioles canaliculés, de 4 centimètres de longueur, réunis à la base par une sorte de bride colorée ou violet et pubescente; fleurs en longues grappes dressées à l'extrémité des jeunes rameaux , verlicil- lastres de six fleurs environ; bractées, calice et corolle violets; bractées ovales, acuminées , légèrement pubescentcs ; calice campanule , bilabié, lèvre supérieure entière , acuminée-aiguë, l'inférieure à deux lobes atté- nués en pointe et ciliés ; corolle de 4 à 5 centimètres, tubuleuse, bilabiéc, lèvre supérieure bifide, l'inférieure à trois lobes ovales, arrondis, plus ou moins étalés ou concaves. Les étamines atteignent au plus la longueur de la lèvre supérieure sous laquelle elles se cachent ordinairement; style dé- passant la corolle. Cette belle plante se rapproche des Salvia cyanea et S. ametliystina, et, comme elles, appartient au groupe des sauges du Pérou et du Mexique. Son odeur ressemble à celle de la Ballote noire. Elle fleurit en automne. Culture. On fait les boutures que Ton conserve Ihivcr en serre pour les mettre en pleine terre, à exposition chaude vers la mi-mai. On renire les pieds au mois d'octobre. Sa culture est donc exactement la même que celle de la Sauge écarhte. — 259 — OPÉRATIONS HORTICOLES. TAILLE DES ARBRES EN ESPALIER ET EN PYRAMIDE, NOUVELLE MÉTHODE , Par m. Ursin Vasseur , Propriétaire à Lisieux. On peut obtenir, en quatre ans, sur des murs de 4 mètres de hauteur, des pêchers de 10 mètres d'envergure et des poiriers de 7 mètres, garnis à volonté de branches à fruits parfaitement conditionnées , sans avoir à craindre qu'aucune inégalité dérange la charpente que, d'ordinaire, l'on manque presque toujours, même en employant le mode de taille le plus moderne et le plus perfectionné. D'après cette invention, qui est applicable à tous les arbres soumis à la taille et à toutes les hauteurs de murs, il est très-facile de donner une belle forme aux arbres les plus mal dirigés, de rajeunir les vieux, et de faire produire aux uns et aux autres, en trois ans, une quantité prodi- gieuse de magnifiques et d'excellents fruits. Au bout de quatre ans, si on a planté ainsi que l'indique la méthode, on obtiendra chaque année. Tune compensant l'autre, au moins 5 p. "/" du prix qu'auront coûté les bâtiments d'exploitation des fermes, s'ils ont été établis à frais ordinaires. II ne faut plus quinze ans d'exercice et d'expérience pour connaître la taille. La précision est jointe à la clarté ; en une heure, à l'aide des gra- vures, on peut lire et comprendre cette méthode si éminemment avan- tageuse. INTRODUCTION. La première année que je me livrai à la culture des arbres en espalier, j'éprouvai la plus grande contrariété en voyant raccourcir des branches charpentières jusques à 2 mètres de chaque côté, et cela pour leur donner la forme à laquelle on voulait les assujettir. Plus la végétation d'un arbre était vigoureuse, plus il était mutilé. Cependant, je voyais des arbres en plein vent abandonnés à eux-mêmes, magnifiques et chargés de fruit, ce qui me fit espérer que je pourrais trouver, pour ceux qui sont en espalier, une forme qui permettrait de les laisser profiter de toute leur végétation sans rien supprimer des branches de la charpente. Après quelques expériences, mon espoir s'est réalisé, ainsi que je l'ai fait connaître au commencement de ce travail. Ce sont les palrncttes à double et à simple tige qui sont les seules formes qui puissent convenir à ce système qui réunit tant d'avantage. — 240 — La forme en y ouvert rendrait la régularité de la charpente impossible, ]>arcc que les membres de dessus remporteraient en vigueur sur ceux de dessous, sans qu'on put jamais remédier à ce grave inconvénient. Voyons maintenant comment il faut opérer pour chaque espèce d'arbre, en commençant par le pécher qui, sous tous les rapports, mérite le pre- mier rang. CHAPITRE I". Choix des arbres et manière de les planter pour que la végétation soit vigoureuse. Il faut préféi'cr ceux qui, greffés sur amandiers provenant d'amandes douces à coque dure, ont reçu un écusson de chaque côté, parce que, étant ainsi disposés, ils font gagner une année pour la formation de la char- })ente, surtout si on les prend près de l'endroit où ils doivent être mis en espalier. Il faut les arracher avec précaution pour qu'ils ne perdent au- cune de leurs racines, et les planter sans aucun retard afin d'interrompre le moins possible la végétation. On les conserve dans toute leur longueur, de sorte que, s'ils ont des pousses d'un mètre 63 centimètres de chaque côté, dès la même année ils peuvent arriver à 53 centimètres du chaperon d'un mur de 4 mètres de hauteur, s'ils ont été plantés dans une terre meuble et de bonne qualité. Si la terre de la bordure est usée par des arbres ou d"auti*es productions, il faut l'enlever et mêler avec la nouvelle, environ un dixième de fumier consommé. Les trous doivent avoir environ 1 mètre de profondeur sur 2 de largeur. Les arbres doivent être plantés h 15 centimètres du mur vers lequel on les penche, pour qu'ils puissent être facilement attachés au treillage avec de l'osier. 11 faut calculer sur le tassement des terres de manièi'e à ce que les greffes restent à découvert. On peut planter depuis le l" novembre jusqu'au lo de mars, mais il faut avoir soin d'enlever toutes les feuilles qui seraient restées aux pê- chers ; mais le mois de novembre est préférable. Aussitôt que les arbres sont plantés, il faut apporter, au pied, de la bruyère ou de la fougère. Une épaisseur de 8 à 10 centimètres est suffisante sur toute l'étendue des trous, pour empêcher les pluies de durcir la terre et pour maintenir la fraîcheur pendant la sécheresse de l'été. A défaut de ces deux produc- tions, des herbiers d'étang et des ratissures d'allées suffiraient. Cette opération ne doit être faite que vers le commencement du mois de juin, sur les terrains qui conservent l'humidité. CHAPITRE H. Manière de diriger le pêcher la première année. Nous le considérons comme ayant deux tiges d'un mètre 03 centimètres de hauteur, et comme ayant été planté ainsi qu'on l'a expliqué au chapitre précédent. 241 — PI. 57. BELfi. HORT. T. IV. 31 — 242 — La figure n" i le représente sans avoir reçu aucune taille, celle n" 2 le fait voir tel qu'il doit être livré à sa végétation. Les deux tiges sont con- servées dans toute leur longueur; tous les rameaux ont été coupés près des brandies principales, au-dessus des yeux qui en sont le plus rappro- chés, lesquels formeront des bourgeons dont la quantité sera considéra- blement augmentée par d'autres yeux qui sortiront de l'écorce, en grand nombre, depuis le bas jusqu'au haut de ces deux branches-mères. Ces bourgeons , au fur et à mesure qu'ils atteindront une longueur d'environ 40 centimètres, seront réduits à la moitié. Ils devront être coupés avec les ongles de l'index et du pouce ; c'est ce qu'on appelle pin- cement. On conservera intacts tous ceux qui sont destinés à former la charpente, c'est-à-dire, tous les membres horizontaux qui doivent être distants les uns des autres d'environ GO centimètres, afin de pouvoir at- tacher sans confusion, toutes les branches à fruit qui doivent être placées sur tous les membres de la charpente, de manière à représenter une arête de poisson, ainsi qu'on le verra au chapitre suivant. La figure 5 représente l'arbre avant le pincement , et la fig. 4 le fait voir après cette opération. A mesure que les deux tiges s'allongent, il faut continuer les mêmes opérations, en conservant toujours à peu près le même intervalle entre tous les membres liorizontaux. Il faut aussi, autant que possible, conserver la même distance entre les deux tiges verticales. Ce n'est ordinairement qu'à 1 mètre, à partir de la greffe, que l'on peut assez écarter ces deux branches-mères pour laisser entre elles un intervalle d'environ 60 centimèt. Lorsque les branches pincées finissent par atteindre une longueur de 55 centimètres, il faut les pincer de nouveau, mais on ne doit alors en- lever qu'une très-faible partie de l'extrémité. On ne doit pincer les bourgeons sur les membres horizontaux que lors- qu'ils ont une longueur de 15 centimètres; mais on ne doit enlever que la petite pointe. Il faut attacher les deux branches-mères et tous les membres avec de l'osier ou de petites cordes de coton , et éviter de les serrer contre le treillage. Les branches à fruit doivent être attachées avec du jonc lorsqu'elles ont une longueur d'environ 55 centimètres ; celles des deux branches verticales seront fixées horizontalement, et toutes les autres seront inclinées vers les membres, celles de dessus comme celles de dessous. Lorsque les deux branches verticales sont parvenues à 55 centimètres du chaperon du mur, on les attache au point où elles en sont à 50, sans trop les serrer dans les liens, ensuite on ploie l'une à droite et l'autre à gauche, ce qui forme les deux derniers membres horizontaux de la char- pente dont plusieurs étages présentent, dès cette première année, une envergure de plus de 5 mètres, ainsi qu'on i)cut le voir sur la fig. 5. Après le deuxième pincement, il y a beaucoup de branches à fruit qui atteignent une longueur de plus de 60 centimètres. — 245 — CHAPITRE III. Taille du pèclici (deuxième auiiée). Ou doit commencer à tailler les pêchers vers la fin de février, au mo- ment où les boutons sont assez gonfles pour qu'on puisse facilement dis- tinguer les boutons à bois d'avec ceux qui sont à fruit. Les premiers sont pointus , et les autres sont ronds. Les branches à fruit sont placées à droite et à gauche des deux tiges verticales, et dessus et dessous les membres horizontaux. Il y a quatre espèces de branches à fruit. La première a les yeux triples, un à bois entre deux à fruit. La deuxième a les yeux doubles, un à bois et un à fruit. La troisième a les yeux simples qui ne sont ordinairement que des fleurs. La quatrième est en petits bouquets dont les plus longs ont environ 10 centimètres. Ils sont garnis de fleurs tout autour, et n'ont qu'un œil à bois au milieu, lequel suffit pour nourrir les fruits qui ne manquent presque jamais sur ce petit rameau. Avant de tailler, il faut détacher du mur toutes les branches de la char- pente ainsi que les autres, et nettoyer le treillage et le mur de toutes les ordures qui pourraient renfermer des insectes ou leurs œufs. Il faut com- mencer par les branches à fruit que portent les deux branches verticales. En général, les branches à fruit du pécher se taillent à environ 10 centi- mètres des branches charpentières. Il ne faut pas laisser sur chacune d'elles plus de deux à quatre bons yeux à fruit. Tout bouton qui n'est pas accompagné d'un bon œil à bois, est ordinairement stérile. Les pêches nouent comme sur les autres, mais elles tombent presque toujours avant d'être formées. S'il y a des branches qui ne remplissent les conditions que je viens d'indiquer que vers le haut, on est forcé d'allonger la taille; mais dans ce cas, il faut éborgner tous les yeux à bois de dessous et avoir soin d'en conserver un ou deux des plus rapprochés du bas, pour former des bran- ches de remplacement pour l'année suivante; car le pêcher diffère des autres arbres en ce qu'il ne produit de fruits que sur des pousses de l'année, lesquelles doivent toujours être totalement supprimées immédia- tement après la récolte des fruits qu'elles portent. Il faut les couper près des branches de remplacement qu'une taille courte, ainsi que je l'ai indi- qué, ne manque jamais de faire naître. Toutes les branches à fruit qui sont sur les autres membres de la charpente doivent être traitées de la même manière. On doit aussi couper, en ne consei'vant qu'un ou deux yeux dans le bas, ccflcs qui n'ont pas noué, et plus tard celles dont les fruits sont tombés. ' Il faut attacher avec de l'osier toutes les branches charpentières ainsi que celles à fruit qui ont assez de longueur. On a dû laisser sans tailler la quatrième espèce de branches à fruit n'ayant que de 6 à 10 centimètres de longueur et formant un bouquet de fleurs avec un œil à bois au milieu. _ 244 — Le bourgeon à bois qui en sort est sufiisanl pour nourrir ses fruits qui deviennent ordinairement très-beaux et manquent rarement. Ainsi, on laisse ce précieux bourgeon partout où il se trouve, sauf à le supprimer, après la maturité des fruits, quand il est sur le devant des branches char- pentières. Lorsqu'il se trouve deux branches de remplacement, il faut couper celle dont l'œil est le plus rapproché de la branche charpentière, au- dessus de cet œil et tailler sur l'autre branche. La fig. 6 représente le pêcher après la taille. La fig. 5 a dû suffire pour donner une idée de ce qu'il était auparavant. Pendant le mois de mai , on a dû ébourgeonner, c'est-à-dire, enlever tous les bourgeons inutiles, ceux de devant et de derrière les branches charpentières, ainsi que ceux de dessus et de dessous qui sont trop rapprochés les uns des autres. Ces branches à fruit doivent être distantes les unes des autres d'environ 15 centimètres, afin qu'on puisse les attacher au treillage, sans confusion, lors du palissage qui commence en juin et finit vers la fin d'août. C'est en juillet que l'on doit achever de supprimer tous les bourgeons inutiles. C'est ce qu'on appelle la taille d'été. La fig. 7 représente l'arbre avec des branches chargées de fruits et leurs bi'anches de remplacement. Celles qui portent les fruits ont dû être pin- cées, c'est-à-dire, coupées, avec les ongles, au-dessus de la sixième des feuilles qui surmontent ou accompagnent ces fruits. Six feuilles sont suffi- santes pour les nourrir. On n'a dû pincer la petite pointe des branches de remplacement que lorsqu'elles ont atteint une longueur d'environ 15 centimètres. La fig. 8, d'un côté, fait voir le pêcher dégagé de ses fruits et des branches qui les ont portés, et de l'autre le représente après la taille du commencement de la troisième année : alors il peut avoir plus de 6 mètres de largeur, ce qui doit faire supposer qu'il en aura au moins dix à la fin de la quatrième année. Lorsqu'il a totalement rempli la place qu'on lui a destinée, il faut alors que l'extrémité de toutes les bi'anches charpen- tières qui n'avaient été aucunement raccourcies soit taillée comme toutes les branches à fruit. Lorsqu'un membre est plus faible que l'autre, il est bon d'y laisser moins de fruits, pour qu'il se fortifie. Ce moyen est appli- cable à toutes les espèces d'arbres. CHAPITRE IV. Manière de diiigev les pêchers envoyés par les pépiniéristes. Ces arbres ne présentent pas les mêmes avantages que ceux qu'on a écussonnés sur les lieux, tel que celui dont nous venons de suivre le trai- tement. Les autres, avant de les planter, doivent être coupés à 50 centi- mètres environ au-dessus de la greffe, soit qu'ils aient reçu un écusson de chaque côté ou qu'ils n'en aient qu'un seul, ce qui est moins avantageux. Dans le premier cas, ils ont deux tiges, et se dirigent de la manière que 245 PI. 38. — Mi) — j'ai indiquée. Les deux pi^emiers membres horizontaux doivent être à environ 40 centimètres du terrain. A mesure que l'arbre s'allonge, il faut établir les autres membres ainsi que je l'ai expliqué. Dans le second cas, c'est-à-dire, lorsqu'ils n'ont qu'une seule tige, il faut bien ménager les yeux qui sont sur l'écorcc et choisir les deux meilleurs afin d'obtenir deux tiges le long desquelles on n'est pas sur d'avoir, dès la première année, des membres horizontaux à des distances convenables. Dans ce cas, à l'époque de la taille, il faut couper tous les bougeons, ainsi que je l'ai expliqué au commencement du chapitre II. Si on n"a pu obtenir deux tiges, on foiniie une palmette à simple tige, laquelle se dirige absolument comme l'autre. La fig. 9 fait voir l'arbre ainsi dirigé, avant et après la taille. On voit ({u'aucun des membres ne se trouve vis-à-vis l'un de l'autre, parce qu'ils se disputeraient la sève. L'un l'emporterait sur l'autre, ce qui rendrait l'équilibre fort difficile à établir. CHAPITRE V. ObscPTations essentielle!»*. C'est à la deuxième année, ainsi qu'on le voit au chapitre III, qu'on doit commencer à tailler les branches à fruit du pêcher ; mais pour favo- riser la végétation des branches eharpentières , il faut seulement, cette deuxième année, que toutes les branches à fruit soient coupées au-dessus du deuxième œil. La même opération doit être continuée une année de plus pour les arbres envoyés par les pépiniéristes, à cause du retard qu'ils font éprouver. On ne doit point établir de cordons de vignes au-dessus des arbres en espalier, parce qu'il en résulte toujours un préjudice plus ou moins con- sidérable. Il est bon de planter quelques fraisiers sur les bordures afin d'y attirer les vers blancs qui couperaient les racines des jeunes arbres, surtout des pêchers. On arrache les fraisiers aussitôt que les feuilles en sont fanées, et l'on écrase les vers blancs qui se trouvent au pied. Lors du palissage, il ne faut laisser qu'un bourgeon aux branches à fruit bifurquées. Dans la palmette à double tige, lorsque l'une des branches verticales est plus forte que l'autre, il faut la courber et la serrer près du treillage, et détacher l'autre de ses liens et la porter en avant pour qu'elle ait plus d'air. L'équilibre se rétablit bientôt ; alors on remet les deux branches dans la position où elles doivent rester. Si les gelées faisaient mourir l'extrémité d'une branche charpenticre, il faudrait la couper au-dessus d'un œil vigoureux le plus rapproche do l'extrémité. Il ne faut jamais se servir du sécateur pour la taille des arbres, mais — 247 — de la serpette qui, Jusqu'à présent, est ce qu'il y a de meilleur pour faire une coupe nette et sans meurtrissure. La eoupe doit se faire près du bouton en engageant la lame du côté opposé, de manière à ee qu'il y ait assez de pente pour le préserver du tort que lui causerait Tliumidité pendant les pluies abondantes. Le sécateur ne peut convenir que pour la vigne que Ton taille à près d'un centimètre au-dessus de l'œil, parce que le bois en est mou et très- poreux. Si un pêclier est attaqué de la cloque et du puceron, il faut écraser le puceron dans les doigts, et couper, avec les ongles, les feuilles plus ou moins contournées et boursoufflées, desquelles il faut conserver le pétiole pour favoriser la sortie des boutons et des bourgeons. Il est bon de déta- clier du treillage les brandies les plus malades, de les porter en avant à l'aide de quelques tuteurs, et d'arroser la totalité de l'arbre tous les deux jours, jusqu'à ce qu'il se trouve en bon état. Plusieurs auteurs conseillent des fumigations de tabac pour faire mourir le puceron. J'en ai essayé sans succès satisfaisant. Je préfère le moyen fort simple que je viens d'indiquer. Lorsqu'un arbre est cliargé d'une trop grande quantité de fruits, il faut en supprimer assez pour que ceux qui restent soient beaux et de bonne qualité , ce qu'on obtient en les découvrant quinze jours avant leur maturité, pour qu'ils jouissent du soleil qui les colore et les rend exquis. On doit plutôt écarter les feuilles que les supprimer. Dans ce dernier cas, il faudrait en conserver le pétiole. Ce serait causer aux pèches un préjudice notable et même les faire pourrir en vingt-quatre heures, que de poser le pouce dessus et de les presser pour s'assurer qu'elles sont mûres. Leur maturité se reconnaît à une teinte jaune qui paraît au travers de leur coloris. On prend la pêche avec les cinq doigts, et, en tirant doucement, elle vient aussitôt à la main, si elle est mûre. En traitant les arbres d'après ma méthode , il n'y a presque rien à faire lors de la taille d'été , qui se fait ordinairement en juillet. Il n'y a en ([uelque sorte que la continuation du palissage, puisqu'il ne se trouve presque plus de bourgeons à supprimer. Je recommande particulièrement de ne jamais bêcher au pied des arbres, mais de ratisser seulement, et d'ouvrir légèrement la surface du terrain avec une fourche, en prenant garde d'endommager les racines. Il faut veiller avec soin à ce que les insectes ne coupent pas l'extré- mité des branches charpentières. On peut détruire les fourmis en suspendant aux branches principales de petites fioles remplies à moitié d'eau miellée ou de jus de pruneau. Le goulet doit toucher aux branches. On en détruit aussi beaucoup en mettant sur la terre un petit morceau (le sucre ou des pruneaux recouverts d'un pot à (leur. Elles viennent — 248 — dessous en grand nombre, et on les écrase en i'rottant fortement avec une truelle. Presque toutes les observations ci-dessus sont applicables à tous les arbres en espalier. CHAPITRE VI. Taille des autres arbres à noyau. L'abricotier, le prunier et le cerisier doivent être dirigés comme le pêcher. Il n'y a de différence qu'en ce qu'il ne doit y avoir que 35 centi- mètres environ entre toutes les branches de la charpente, au lieu de (50 centimètres, comme au pêcher dont les branches à fruit sont beau- coup plus longues ; c'est pourquoi il faut beaucoup plus d'intervalle pour pouvoir les attacher sans confusion. Le second pincement doit avoir lieu lorsque les bourgeons sont d'une longueur de 4 5 centimètres , au lieu de 55 pour le pêcher. Il est bon de meurtrir un peu l'extrémité du bourgeon en le pressant entre les doigts, parce que c'est un moyen de plus pour retarder la végétation qui, séjour- nant plus longtemps dans les boutons, les fortifie et leur fait produire des fruits infiniment plus beaux. Cette dernière observation est appli- cable à toutes les espèces d'arbres fruitiers. L'abricotier doit être taillé avant le pêcher, comme étant plus hâtif. Il nécessite moins d'attention et de ménagement, parce qu'il repousse faci- lement de nouveaux bourgeons sur toutes ses branches. Il faut généra- lement le tailler beaucoup plus court que le pêcher, surtout ces petites branches qui se trouvent groupées ensemble jusqu'à dix à douze , et que l'on doit avoir soin d'eclaircir lors du palissage. Les petits bouquets de 5 à G centimètres de long sont laissés intacts, mais il faut les supprimer à la taille suivante, lorsqu'ils sont sur le devant des branches. Le prunier doit être taillé comme l'abricotier, parce qu'il donne aussi ses fruits sur les nouvelles branches. Le cerisier nécessite peu de taille, parce que ses branches à bois sont garnies de petits bouquets qui n'en veulent aucune; c'est pourquoi on pourrait, sans inconvénient, laisser un peu moins de 55 centimètres entre toutes les branches charpentières. CHAPITRE VH. Taille du poirier. Le poirier, quant à la charpente, doit aussi être dirigé comme le pê- cher; mais, comme pour l'abricotier, le prunier et le cerisier, il ne doit y avoir qu'un intervalle d'environ 55 centimètres entre toutes ses bran- ches charpentières. Le second pincement doit être fait comme celui de ces trois espèces dont il diffère, en ce que ce n'est pas le nouveau bois qui donne les fruits, mais les lambourdes qui sont ordinairement trois ans à se former. On — 249 — laisse les lambourdes sur le devant des branches du poirier, mais il faut avoir soin de les tenir fort courtes. On doit supprimer totalement les bourgeons qui se trouvent derrière les branches aussitôt qu'ils ont une longueur de 2 centimètres. Il faut choisir des sujets vigoureux. Je préfère ceux qui sont destines pour faire des quenouilles ou des pyramides. On les plante sans suppri- mer aucune de leurs branches ; et ce n'est que la deuxième année, vers le commencement de mars, qu'on doit les couper à 20 centimètres au-dessus de la greffe, après avoir supprimé toutes les branches jusque près de l'ccorce. On choisit, ainsi qu'on l'a explique, les deux meilleurs bour- geons pour former les deux tiges verticales. Si, au lieu de deux, on n'a pu obtenir qu'un seul bon bourgeon , on en fait une palmette à simple tige , comme pour toutes les autres espèces. Si on coupait l'arbre dès la même année, il se mettrait trop tôt à fruit, parce que ses pousses auraient peu de vigueur , et il serait difficile de lui donner une gi'ande étendue. D'après ce système, des poiriers greffés sur franc, c'est-à-dire, sur des sujets provenant de semis, donneront des résultats étonnants pour l'éten- due des arbres et pour la grosseur des fruits. Lorsqu'un poirier est parvenu à garnir totalement la place qu'on lui a destinée , il pourrait avoir trop de lambourdes ; dans ce cas , il faut en supprimer et avoir soin de conserver toujours celles qui sont le plus rapprochées des branches charpentières. Une floraison trop abondante épuise les arbres, ainsi que trop de fruits. Dans ces circonstances, le pincement doit être modéré, c'est-à-dire, qu'il ne faut plus pincer que les pousses qui aiu'aient tendance à dépasser une longueur de 20 centi- mètres. Il doit aussi être modéré sur toutes les espèces d'arbres; aussitôt qu'on s'aperçoit qu'il fait tourner en bourgeons un grand nombre de boutons qui, sans cette opération, auraient produit des fruits. Toutefois, c'est l'expérience qui, seule, pourra parfaitement diriger à cet égard. Lorsque des bourgeons placés à des distances convenables pour former les membres horizontaux, sont un peu trop devant ou derrière les branches verticales, on doit, quand ils ont 20 centimètres de longueur, les attacher au treillage sans trop les serrer, afin de leur faire prendre, doucement, la direction qu'ils doivent avoir. Comme pour les espèces précédentes, on ne doit aucunement raccour- cir les branches charpentières du poirier, et ne le tailler que lorsque les boutons commencent à se gonfler. La taille n'est rien ; elle consiste seu- lement à réduire à environ 5 à 6 centimètres les brindilles ou branches à fruit qui dépassent 10 centimètres. Les bourgeons qui sortent des lam- bourdes doivent être supprimés en juillet. Si l'on faisait cette opération plus tôt, on pourrait faire pousser un grand nombre de faux jets qui nuiraient beaucoup à la formation des lambourdes qui pi"oduisent des fruits pendant plusieurs années, sans avoir besoin d'être raccourcies. 15ELG. IIORT. T. IV. 52 — 250 — CHAPITRE VIII. Moyen de donner une belle forme aux avbres mal dirigés et de rajeunir les vieux. On panient à ces deux fins par les mêmes moyens qui consistent à couper toutes les branches charpentières plus ou moins près du tronc. Si l'arbre est jeune et d'une forme en V, on redresse verticalement les deux branches qui se prêtent le mieux à cette opération. On les coupe à envi- ron bO centimètres du tronc. Les branches et bourgeons qui se trouvaient le long de ces deux tiges ont dû être supprimés. Lors des premières pousses, il faut choisir, pour la continuation de ces deux mères-branches, deux bons bourgeons, et ménager les autres des deux côtés pour les membres horizontaux. Les figures iO et 11 (pi. 58, p. 245) représentent un arbre avant et après le recepage. Les figures 12 et 13 le font voir avec les pousses qu'on doit pincer et avec celles qu'il faut conserver. On pince les pousses en A pour en faire des branches à fruit, et l'on conserve celles en B. Avant de faire ces opérations, il faut que les bourgeons aient une lon- gueur d'environ 10 centimètres. Il y a des arbres mal dirigés et de vieux arbres dont on tire grand parti en appliquant la palmette à simple tige au bas, et la palmette à double tige à la partie supérieure. La fig. 14 fait voir l'arbre avant le recepage; la fig. 15 le fait voir après cette opéra- tion et avec ses pousses; celles en B doivent être conservées et toutes les autres pincées. II y a beaucoup de vieux arbres à rajeunir qu'il est bon de couper très- près du tronc. Si l'on ne peut obtenir deux bourgeons pour former une palmette à double tige, on en choisit un, le plus au milieu, et on le dirige en palmette à simple tige. D'après ces explications, pour peu qu'on ait d'intelligence, on doit connaître les coupes qui conviennent aux arbres mal dirigés. La vieille écorce a dû être enlevée à l'aide d'un outil tranchant , et l'ex- trémité des branches coupées a dû être totalement couverte de mastic à grelTe dont la composition est indiquée au chapitre IX. C'est surtout pour un vieil arbre amputé qu'il est bon de renouveler la terre, en prenant garde d'endommager les racines. Si on a eu soin de mettre au pied, sur une largeur de plus de 2 mètres, une couche de bon fumier consommé, la végétation ne tarde pas à se manifester d'une manière étonnante. Ses pousses sont tellement vigoureuses, qu'elles sortent comme des pointes d'asperges. Les feuilles sont énormes ainsi que les boutons, qui, la troisième année, produisent des fruits d'une grosseur prodigieuse et d'un goût exquis. Un arbre rajeuni, si l'on a eu soin de conserver in- tacte l'extrémité des branches verticales, peut, dès la même année, avoir plus de 2 mètres 50 centimètres de hauteur, avec quatre étages de mem- bres horizontaux dont les deux premiers présenteront une largeur de près de 4 mètres. — 2bi — D'après les syslèmes ordinaires, pour obtenir ces résultats, il faudrait près de huit ans, et l'on éprouverait pendant tout ce temps, pour la con- duite de la charpente, les difficultés inévitables qui résultent des mutila- tions que l'on fait subir aux arbres vigoureux; cardes pousses de 2 mètres bO centimètres de hauteur, obtenues la première année, seraient l'année suivante, réduites à 50 centimètres, et des pousses latérales de 1 mètre 50 centimètres seraient coupées à 35 centimètres de la branche-mère. Traiter ainsi les arbres, c'est agir contre nature, parce que la vigueur des racines qui sont restées intactes n'est plus en rapport avec celle des branches mutilées, ce qui cause un grand nombre de bourgeons dits gour- mands, qui sortent de toutes parts et rendent la charpente fort difficile à établir. La fructification est si retardée par un tel traitement, qu'il y a des arbres qui sont quinze ans sans produire. D'autres sont mis à fruit par des opérations plus oumoins ridicules. On coupe des racines, on perce les tiges, on y enfonce des clous, on fait des incisions annulaires, c'est-à- dire, qu'on enlève une petite partie de l'écorce autour des branches-mères. Peut-on, de bonne foi, penser qu'en agissant ainsi on est dans la bonne voie! Indépendamment de toutes ces bizarreries, on est environ vingt ans à former la charpente du i)oirier, tandis que, d'après mon invention, il peut, en quatre ans, garnir totalement un mur de 4 mètres de hauteur sur 7 de largeur, et être couvert de fruits. D'abord, ainsi que les racines, les branches sont faibles (je parle ici du poirier qu'on élève); elles sont, la première année, minces et déliées. Chaque année, elles prennent, en même temps que les racines, une force et une vigueur dont on est étonné quand on compare ce mode de direc- tion avec tous les autres. Le corps et les membres grandissent ensemble , sans être aucunement raccourcis; dès-lors, plus de gourmands ni d'irrégularités dans la char- pente dont il est si facile de conserver l'équilibre. On peut dire, avec vérité, que traiter ainsi les arbres, c'est suivre complètement la nature. CHAPITRE IX. OI).^ci*Tatioiis iinportautes. Si l'extrémité des branches verticales du poirier ne se trouve pas rac- courcie par des insectes ou par d'autres causes, les étages de la charpente se succéderont à partir du bas ; mais il ne faut négliger en rien tous les pincements qui doivent strictement être exécutés, ainsi qu'ils sont indi- qués. Si un œil sur lequel on compte pour former un membre horizontal ne se développe pas la première année, il poussera la seconde, sans quoi il faudrait poser un écusson pour former le membre manquant. Quelque différence de longueur qu'il y ait entre les membres de la charpente, aucun ne doit être raccourci. Les plus retardés finiront par — 252 — remplir aussi la place qui leur est destinée. Il sera bon de laisser beau- coup plus de fruits sur les plus forts et les plus avancés. Les amputations considérables de tous les arbres soumis à la taille doivent être faites avec une égoliine ou scie de jardinier, et il faut avoir soin d'effacer les traces de la scie avec la serpette et de couvrir toutes les cicatrices de mastic à greffe, lequel est composé de 50 grammes de cire jaune, autant de cendre tamisée, 400 grammes de résine et 50 grammes d'essence de térébentbine. On commence par faire fondre la cire par un feu modéré ; immédiatement après, on y ajoute la résine; aussitôt qu'elle est liquéfiée, on retire promptement du feu cette composition, on y met la cendre ainsi que l'essence de térébentbine, et l'on mêle bien le tout à l'aide d'un petit bâton rond, jusqu'à ce que la composition s'y altacbe. Ce mastic n'a point besoin d'être chauffé pour être appliqué , parce qu'il se pétrit facilement. Au mois de novembre, on enlève, avec la scie , tout le bois qui n'a pu servir à la charpente des arbres rajeunis, ensuite on efface, avec le tranchant de la serpette, jusqu'aux plus petites traces de la scie, sans quoi la carie se formerait; et, immédiatement après, on couvre les plaies de mastic à greffer. Il est essentiel de ne pas oublier que, pour toute espèce d'arbres, les traces de la scie auraient des suites pernicieuses si on ne les enlevait. Le chaperon d'un mur doit avoir environ 25 centimètres de saillie; il ne faut pas qu'il s'avance assez pour que le dernier étage de la charpente des arbres en souffre. Il vaut infiniment mieux garantir les fleurs des suites pernicieuses des frimats et des gelées tardives par des abris que l'on pose dès le mois de février, avant l'ouverture des fleurs, et que l'on retire vers la mi-mai , lorsqu'on présume n'avoir plus de gelées à craindre. Pour toutes les espèces d'arbres, à l'époque de la taille, tous les bour- geons de l'extrémité des branches charpentières doivent être coupés au- dessus de l'œil qui est le plus rapproché de ces branches , sur une lon- gueur d'environ 50 centimètres jusqu'à ce qu'elles aient atteint la dimension qu'on veut leur donner. Lorsque les arbres sont parvenus à remplir les places qui leur sont destinées, alors l'extrémité des branches charpentières se taille comme toutes les autres branches à fruit. Pour les palmettes à simple tige, lorsque la flèche est arrivée à la hau- teur où elle doit être courbée pour former le dernier membre, il faut la diriger du côté le moins favorisé par le soleil. En général, le rajeunissement, pour en tirer grand parti, n'est appli- cable qu'au poirier et à l'abricotier. Lorqu'un arbre n'a plus aucun reste de vigueur, il vaut mieux l'arra- cher que de le receper; mais avant de le remplacer, il faut avoir soin d'enlever toute la terre qui a nourri les racines , et d'en mettre à la place de la nouvelle qui soit préparée ainsi qu'on l'a expliqué au èhapitrc premier. — 2S5 — C'est une bonne précaution que de faire tenir devant le pied des arbres, une légère couche de paille pour empêcher le soleil de durcir l'écorce. L'observation suivante qui est la dernière pour ce qui concerne les espaliers, est de la plus haute importance. Si l'on plante avec les soins que j'ai indiqués, au bout de quatre ans on obtiendra, chaque année, au moins cinq pour cent du prix qu'auront coûté les bâtiments d'exploitation des fermes, s'ils ont été établis à frais ordinaires; il est bien entendu que le produit chaque année ne sera pas égal, mais les bonnes compenseront les mauvaises. En général, ce sont les palmettes à simple tige qui conviennent davan- tage pour garnir convenablement l'entre-deux et le dessus des fenêtres. Avec des lisses peu dispendieuses que l'on garnira d'aubépine ou de jonc-marin, on garantira les arbres des atteintes des bestiaux et des volailles. Que l'on fasse un calcul seulement sur deux ou trois communes, et l'on verra que les produits des arbres qu'on peut planter le long des bâtiments des fermes seraient immenses. Ici se termine ce que j'avais à dire sur les espaliers et la tâche que je m'étais imposée; mais, d'après les sollicitations réitérées de plusieurs personnes, j'expliquerai en peu de mots la manière de diriger les arbres en pyramide et à haute tige ainsi que la vigne. CHAPITRE X. Moyen de diriger sans difficuKé un poirier en pyramide. On choisit chez un pépiniériste qui ne trompe pas pour les espèces , un arbre vigoureux, quand même il serait à haute tige, pourvu qu'il ait été écussonné dès le bas. Il faut bien ménager les racines en l'arrachant et le planter le plus tôt possible. On ne supprime aucune de ses branches la première année, ce n'est qu'à la deuxième qu'on le coupe à 10 cen- timètres au-dessus de l'écusson, qui ne doit point être enteri'é. Il sort beaucoup de bourgeons dont on choisit le plus vigoureux et le plus droit. On supprime tous les autres. Ce bourgeon, dès la première année, pourra avoir une longueur de plus de 2 mètres SO centimètres, si l'arbre a été planté avec les soins recommandés au chapitre premier. Au fur et à me- sure que la flèche s'allongera, il sortira tout autour un grand nombre de bourgeons dont la vigueur, à partir du bas, suivra la grosseur de la flèche; ceux du haut seront moins longs que ceux du bas, de sorte que la pyramide se formera naturellement. Il faudra veiller à ce que les branches se dirigent[de manière qu'aucune de celles de dessus ne couvrent celles de dessous. On laissera un intervalle d'environ 25 centimètres entre chaque étage delà charpente , dont toutes les branches devront être sans aucunes ramifications. — 254 — Il y aura donc beaucoup de bourgeons à supprimer le long de la flèche et à pincer le long des branches latérales. — Ceux des branches latérales , lorsqu'ils auront une longueur d'environ iO centimètres, seront réduits à la moitié. La taille doit être la même que pour le poirier en espalier. Il faut bien veiller à ce que les insectes ne coupent pas la plus petite partie de l'extrémité de la flèche. On aura probablement besoin , la première année, de tuteurs et de petites baguettes enfoncées obliquement dans la terre pour diriger les branches et les maintenir dans la position qu'elles devront conserver. Quelques légers pincements seront aussi probable- ment nécessaires pour retarder la pousse de quelques branches qui au- raient trop de vigueur. Une pyramide d'une belle forme doit avoir deux fois plus de hauteur qu'elle n'a de largeur à la base. Il faut, chaque année, plus ou moins de taille quand le pincement ne sufïît pas. On doit, en général, tailler sur un œil du dehors, c'est-à-dire, du côté opposé à la flèche, et faire le contraire pour quelques espèces dont les pousses se recourbent vers la terre. On taille plus ou moins long les branches charpentières, afin de conserver la forme pyramidale indiquée par la figure 16. Ainsi que les espaliers, les vieilles pyramides peuvent être rajeunies. Il y a deux moyens à employer. Le premier c'est en coupant jusque près l'écorce de la flèche toutes les branches latérales, depuis le haut jusqu'au bas. La flèche doit être rac- courcie plus ou moins, selon la vigueur qui reste à l'arbre. S'il est peu vigoureux, on lui laissera moins de longueur. Il sera facile de le rétablir dans son ancienne forme, par les pincements et la taille, au fur et à me- sure que les bourgeons se développeront. Le second moyen est de couper l'arbre à 10 centimètres au-dessus de l'écusson. Il sortira un grand nombre de bourgeons, dont on choisira le plus convenable pour former la pyramide , ainsi qu'on l'a expliqué au commencement de ce chapitre. CHAPITRE XI. Manière de diriger les arbres en plein vent. Si ce sont des arbres à haute tige qui viennent d'être grefî'és , on doit pincer l'extrémité de la greffe, lorsqu'elle a atteint une longueur d'environ 50 centimètres, pour obtenir 4 à 5 branches de ramification, lesquelles doivent être dirigées de manière à ce que le centre de l'arbre soit dégagé de branches qui viendraient s'y croiser, ce qui ferait une confusion pré- judiciable à la quantité et à la qualité des fruits. Les quatre à cinq bran- ches qu'on a obtenues se ramifient et finissent par former une belle tête arrondie qu'on abandonne à elle-même après deux ans de surveillance employée pour supprimer les branches mal placées. Si l'on plante des arbres dont la tête est mal dii-igée, il faut la couper — 235 — à 50 centimètres environ, et supprimer les branches du centre, de ma- nière à ce que l'on puisse obtenir des autres les ramifications nécessaires pour parvenir à une direction conforme a ce qui vient d'être expliqué. CHAPITRE XII. Taille de la vigne en espalier. Chaque année , à la fin de l'hiver , les branches à fruit de la vigne doivent être taillées au-dessus des deux yeux les plus rapprochés des branches charpentières. Ces deux yeux produiront des bourgeons sur chacun desquels on ne devra laisser que deux grappes. Le pincement devra être fait sur chaque bourgeon, au-dessus de la deuxième feuille qui surmonte les grappes , afin que les grains de raisin soient infiniment plus gros et pour favoriser les yeux de remplacement pour la taille de l'année sui- vante. Il sera bon de supprimer les vrilles qui se trouvent sur les branches et près des grappes. On supprimera aussi tous les bourgeons inutiles aussitôt que le raisin sera de la grosseur d'un petit pois. Si un premier pincement n'était pas sufiisant, on en ferait un second afin d'éviter la taille d'été. La charpente de la vigne s'établit ordinairement par cordons horizon- taux, chaque cep n'en doit avoir que deux d'environ un mètre cinquante centimètres de longueur, l'un à droite l'autre à gauche. Il n'y a que le dessus de ces cordons qui porte les branches à fruit, lesquelles sont éloi- gnées de 15 à 16 centimètres les unes des autres, et qu'il faut attacher au treillage aussitôt qu'elles ont assez de longueur. Il faut supprimer tous les bourgeons qui se trouvent devant, derrière et dessous les branches charpentières qui doivent être distantes entre elles de 50 centimètres. C'est parle pincement réitéré, s'il est nécessaire, que l'on empêche les branches à fruit de dépasser cette distance. Moins les cordons ou bran- ches charpentières ont d'étendue, plus les récoltes sont belles et bonnes; c'est pourquoi les habitants de Thomery (village près Paris), plantent leurs vignes à des distances tellement rapprochées , que les racines sont enlacées les unes dans les aiitres , et ils prétendent que leurs récoltes en sont infiniment meilleures. Il est essentiel de toujours tailler les branches à fruit sur les yeux les plus rapprochés des cordons. Je n'ai rien fait connaître de nouveau quant à ce qui concerne les ar- bres en plein vent et la vigne, mais je suis heureux en pensant au plaisir et à l'immense avantage que je procurerai à tous ceux qui suivront mon système pour la direction et la taille des arbres en espalier et en pyramide. — 2S6 — LITTÉRATURE HORTICOLE. INTRODUCTION DU FUCHSIA , Par m. De Valmer. Il y a une cinquantaine d'années que M. Lee , jardinier près de Lon- dres, montrant son jardin à un de ses amis, celui-ci lui dit : — Tout cela est bien beau, mais ce n'est rien comparativement à ce que j'ai vu ce matin à Wapping. — Vraiment, répliqua Lee, et à quoi ressemble cette merveille?... — Cette plante est d'une élégance parfaite, ses fleurs pendent comme des glands au bout de ses branches flexibles , sa couleur pure est d'un beau cramoisi , son calice est semé de pourpre et d'or... — Le vieux Lee lui demanda l'indication du lieu qui recelait ce trésor, courut à Wapping, découvrit cette plante sur l'appui d'une fenêtre, s'assura du premier coup d'oeil qu'elle était encore inconnue en Angleterre, entra dans la maison et demanda à la pauvre femme qui l'habitait, si elle vou- lait lui vendre cette petite plante. — Oh! non, monsieur, répondit-elle, je ne veux pas m'en défaire; mon mari me l'a apportée des Indes-Orien- tales, il est reparti et je lui ai promis de conserver cette fleur. — Le jardinier insiste, la femme refuse de nouveau; alors tirant de sa poche tout l'argent qu'il avait sur lui (huit guinécs, 200 fr.), il le lui offrit. — C'est bien de l'argent, répondit la femme en hésitant, et Lee se hâta de conclure le marché, emporta la plante après avoir promis à la femme du matelot de lui donner la première multiplication qu'il obtiendrait. Lee se jeta alors dans un fiacre, cachant la plante sous ses habits comme s'il l'eût dérobée. Arrivé chez lui, son premier soin fut de couper les fleurs et les boutons; il boutura, marcota toutes les branches, et au commencement de la saison suivante , l'habile jardinier avait trois cents plantes des fuchsias. Une grande dame acheta la première un louis, elle la montrait avec orgueil à SCS amis. Tout le monde voulut bientôt avoir cette jolie fleur, et Lee gagna 500 louis pour huit qu'il avait risqués. Si ce brave homme pouvait revenir au monde, quel serait son étonnement en voyant ce que nos horticulteurs ont fait de son petit fuchsia ; pourrait-il le reconnaître en voyant le Fulgens, le Corimbiflora, le Multiplex, l'IIcnderson , la Belle-Étoile, le Changarnicr , le Roi des fuchsias, le prince Arthur, le Mazeppa, le Snowball, et mille autres. [Journal de la Sac. dliort. de Maçon.) Poipo Délices (le Troyonnos.oain do Mri)c(\)urcoll('S. — 257 — JARDIN FRUITIER. LA POIRE DÉLICES DE TROYENNES , PRODUCTEUR M. A. DE COURCELLES, DÉCRITE PAR M. Ce. MORREN. La pomologic belge s'enorgueillit depuis longtemps, et non sans raison, des succès nombreux obtenus dans la production de fruits nouveaux et de première qualité par les cultivateurs des environs de Tournai. Leur zèle est loin de se ralentir, et chaque année leurs soins sont récompensés par des gains dignes de fixer l'attention des connaisseurs. Nous ne pou- vons qu'applaudir à cette persévérance si éclairée dans l'intérêt des res- sources matérielles du pays qui exporte tant d'arbres fruitiers, et de l'honneur de la pomologie belge si respectée à l'étranger et parmi nos compatriotes. M. A. De Courcelles, propriétaire à Troyennes, nous a fait l'honneur de nous adresser une poire nouvelle qui vient d'enlever tous les suffrages des membres de la Commission pomologique de Tournai. Le nouveau gain a été couronné de la médaille d'honneur par ces messieurs. La variété nouvelle obtenue de semis a été nommée Délices de Troyen- nes. Le fruit est subsphérique , par conséquent presque aussi large en diamètre que haut, de l'œil au pédoncule. Les diamètres sont des deux parts en moyenne de 5 centimètres et demi. Le pédoncule est long de 2 à 272 centimètres, cylindrique, mais bien implanté et adhérent; il est brun-bistré, sillonné en longueur. L'épicarpe est un peu rude au toucher, d'un jaune d'ambre passant au jaune clair du côté non éclairé. Il est par- semé d'un pointillé à petites macules d'un jaune d'ocre d'un millimètre de largeur, arrondies et distantes de deux ou trois fois leur propre diamètre. Ce pointillé donne à la variété un aspect distinctif qui n'échappera point auxpomologues. L'œil est placé dans une très-légère concavité, régulier, brun, à cinq lobes sinueux et mousses. La chair est blanche, excessivement juteuse, fondante, d'un goût sucré, frais, légèrement aromatique, savoureuse et rivalisant avec les beurrés du premier choix. La zone du pointillé calculeux de xylogène est placée près des loges et peu étendue. Les loges sont au nombre de cinq, bien placées et régulières, à un ou deux pépins par loge. Les pépins sont lacry- méformes, d'un brun foncé, presque noir ou acajou, dodus et pleins. On voit que c'est un fruit très-sain. Il mûrit dans le commencement de novembre. La poire Délices de Troyennes est sortie du Beurré gris; l'arbre a actuellement dix ans , il est très-généreux, ses branches plient sous le poids des fruits, il est bien éperonné et couvert de bourgeons à fruits. Elle tient aussi de la poire connue sous le nom de Soleil ou de Grand Soleil d'EsT^eren. KELG. HORT. T. IV. 55 238 PI. 40. — 259 — INSTRUMENTS D'HORTICULTURE. LES FLOROMBRES DE SANGSTER ET LES FUMIGATEURS DE BROWN , à Par m. Ch. Morren. MM. William et John Sangster (Cheapside, 75, Londres) ont inventé un appareil auquel ils ont donné le nom de florombres, mais qui sert à d'autres usages qu'à protéger les plantes en fleur des rayons du soleil. Ces appareils sont à la fois des parapluies , des ombrelles et des ballons dans lesquels on souffle la fumée de tabac pour tuer les insectes. La figure ci-jointe indique les usages de ces florombres appliqués à la culture des rosiers comme exemple. S'agit-il de préserver contre l'ardeur du soleil quelque arbuste de choix, en fleur, on plante à côté de lui la hampe d'une ombrelle susceptible de hausser ou de baisser son pavillon, selon la hauteur même de la plante : cette hampe est pourvue d'une arti- culation qui permet en outre d'incliner le pavillon dans tel sens que l'on désire, de sorte qu'on l'oppose au soleil dans les différentes parties de la journée. Le florombre devient parapluie quand il pleut; une seconde figure indique cette utilité; il protège alors les cimes ou têtes fleuries des arbustes d'amateur et déverse l'eau du ciel tout autour de la plante, dans l'étendue d'un cercle qui est précisément celui où se trouvent les extré- mités des racines dans la terre, puisqu'on sait que le diamètre des cimes est proportionnel à celui du chevelu. Enfin, le florombre est construit de manière que le pavillon ouvert sert d'appui à un sac de tissu léger qui , descendant beaucoup plus bas — 260 — que le bord du pavillon, peut se lier à la tige de l'arbuste dont il s'agirait de tuer les pucerons, les insectes, les vers, etc. La troisième figure indique aussi la forme de l'appareil. Dans ce cas, l'opérateur tenant à la main le fumigateur de Brown , chasse la fumée de tabac dans ce ballon dont le tissu la laisse traverser facilement, il secoue légèrement l'arbuste et les animaux, étouffés parla fumée, tombent dans le ballon; on délie celui-ci et la plante est ordinairement très-proprement nettoyée par une seule opération. Le fumigateur de Brown (représenté p. 258) est un instrument très-por- tatif, dans la cheminée duquel on brûle du tabac dont la fumée, chassée par le mouvement d'une manivelle que l'on tourne à la main, passe dans un tuyau et se dirige vers l'endroit où ou veut la voir agir. Cet instru- ment se vend à Londres chez tous les marchands grainiers ou seedsmen, au prix de 10 schellings, et les florombres coûtent, avec le ballon, 7 schellings et 4 sous. VARIÉTÉ. TRANSFORMATION DES PRUNES EN PRUNEAUX; Par m. Andry, Membre de la Société d'Horlicullure de la Seine. Prenez des prunes, n'importe de quelle espèce, mirabelle, reine Claude, etc., dans un état de maturité complète, placez-les dans un panier à claire-voie. Faites chauffer, dans une bassine de dimension convenable, des cendres de bois dans une quantité d'eau suffisante pour faire une bonne lessive. Lorsque cette dernière entrera en ébuUition, plongez-y le panier à trois reprises différentes et consécutives , pendant quelques secondes seulement, ensuite et immédiatement, immergez de même, et à trois reprises différentes, vos prunes lessivées dans un vase contenant de l'eau fraîche. Etendez ensuite les prunes sur des claies, des paillassons ou tout autre récipient. Laissez-les se ressuyer pendant quelques jours, soit au soleil, soit au grand air, et vous aurez des pruneaux aussi mollets et aussi délicats que possible , conservant parfaitement la saveur et le goût du fruit, et se gardant aussi bien et aussi longtemps que les pruneaux ordinaires , qu'il n'est pas toujours facile de manger crûs tant ils acquièrent de dureté et de sécheresse. Ce pi'océdé , aussi simple que prompt et facile, convient à toute personne qui n'a pas à sa disposition un four et tout l'ustensilage nécessaire à la fabrication des pruneaux. i.L'..'>. Lmviin orand il loruiii . Dtsl" 4. >),l) . Si vl uli uni saxilraiioulrs . I.'mill — '2(H — HORTICULTURE. LE LIN A FLEURS ROUGES , LL\UM GRANDIFLORUM DE DESFONTAINES , Par m. Ch. Morren. Desfontaines, clans sa Flore atlantique publiée de 4798 à 4799, a figuré et décrit une espèce de lin à grandes fleurs rouges qui mérite, sous tous les rapports, de fixer l'attention deshorticulteurs.il lui donna le nom de Linum grandiflorum et la croyait vivace. De Candolle exprima le doute à cet égard et depuis il a été reconnu, en effet, que cette espèce est annuelle. Desfontaines avait rencontré ce lin dans les champs argileux des environs de Mascara. Retrouvée depuis par M. Durieu, botaniste de Texpédilion scientifique envoyée en Algérie par le gouvernement français, cette jolie plante a fait l'objet, en 4848 , d'un article inséré dans la Revue horticole de cette année et dû à M. Decaisne dont on connaît le talent descriptif. En voici le résumé : Tiges dressées ou étalées de 0™.2 de hauteur, glabres, cylindriques, feuillues,- feuilles des rameaux stériles , oblougues, obtuses , presque sessiles , un peu contournées à la base, d'un vert glauque, entières; feuilles des rameaux florifères beaucoup plus espacées, linéaires- oblongues , aiguës, ovales-acuminées près des fleurs et ciliées sur les bords, cils déliés; fleurs terminales, grappe lâche, rejetée sur le côté ; pédoncules dressés, cylindriques, vert- jaunâtre; calice à cinq folioles inégales en largeur, ovales, aiguës, carénées, d'un vert fonce, les deux intérieures membraneuses à la base , finement dentelées sur les bords ; corolle ample à cinq pétales en forme d'éventail, estivation tordue à gauche, arrondis au sommet, bords entiers ou crénelés; onglet parcouru par une bande blanche finement nervée de lignes noi- râtres, disposées en éventail et se perdant dans un double cercle de couleur foncée à l'origine du limbe; étamines à peine saillantes, filets membraneux soudés à la base, anthères oblon- gues, d'un bleu ardoisé; ovaire à cinq styles filiformes, violets; capsule arrondie, anguleuse, miieronée, s'ouvrant en cinq valves , chacune à deux graines lisses semblables à celles du lin ordinaire. De Candolle disait les pétales roses , mais il n'avait vu que des fleurs séchées en herbier; ils sont au contraire d'un beau rouge pourpre éclatant, dans le genre de ceux du Portidaca Gilliesu auxquels M. Decaisne les compare aussi. Quelques jardins botaniques se communiquent entre eux un prétendu Linum grandiflorum qui n'est autre chose que le Linum usitatissimum hmnile, lequel serait cultivé, au dire de M. Scheidweiler, dans les provinces rhénanes. Ce dernier lin est, en effet, plus court que le type de l'espèce ordinaire , plus tallant et à grandes fleurs bleues , un tiers plus grandes que celles de nos lins de Flandre. Il est fort douteux, par suite de ces circonstances, qu'il y ait de l'avantage à cultiver ce lin humble au lieu du lin dit de Riga, puisqu'on estime et on paye le lin ordinairement vendu sur place selon le nombre des palmes que mesurent BELG. HORT. T. IV. 54 — 262 — les tiges, la palme étant la main d'un homme ordinaire, étendue et les doigts séparés , depuis le bout du petit doigt à l'extrémité du pouce. En résumé, les horticulteurs qui veulent posséder le lin à fleurs rouges doivent donc être circonspects à l'égard des sources où ils en deman- deraient les graines. Culture. Le Linum grandiflorum à fleurs rouges est annuel. On le sème au printemps dans un terrain léger, sablonneux et engraissé l'année d'avant. Il s'élève peu, fleurit depuis juillet jusqu'à la fin d'octobre ou mieux jusqu'à la gelée. Les capsules ne mûrissent pas toujours et la Revue horticole de France a publié, en septembre 1855, un article par lequel on tend à prouver que la terre de bruyère est contraire à la fructifica- tion ou qu'elle l'empêche. L'expérience apprenant depuis des siècles que toutes les plantes oléagineuses sont épuisantes, il allait de soi que le lin à fleurs rouges exigeait, comme tous ses congénères, des terres antérieu- rement fumées. M. Decaisne a eu l'ingénieuse idée de réaliser le drapeau national fran- çais dans les parterres, en y semant le lin à fleurs rouges {Linum gran- diflorum)., le lin à fleurs blanches {Linum monogynum) et le lin à fleurs bleues {Linum usitatissimum ou le Linum perenne). LE STYLIDIUM SAXIFRAGOÏDE DE LA RIVIÈRE DU CYGNE , Par le même. Nous cultivons trop peu les Stylidium sur le continent : ces plantes gynandres sont cependant aussi jolies que curieuses , tout en n'offrant aucune difficulté réelle dans leur entretien. Celle que nous faisons figurer ci-contre, d'après un dessin de sir Wil- liam Hooker, est nommée par M. Lindley qui la décrivit le premier dans la Flore de la Rivière du Cygne (Australie), p. 28, par Sonder, collection des plantes Preisseniennes de Lehmann (p. 374) : STYLIDIUM SAXIFRAGOÏDES. Plante touffue, cœspiteuse; feuilles radicales en rosaces très-copieuses, linéraires, aiguës, ciliées et scabres sur le bord, amincies à la base, pilifères au sommet, hampes glabres à peine portant des bractées, épis simples couverts de poils glanduleux courts comme les fleurs, corolles jaunes et labellum tubercule. Bentham paraît avoir nommé cette espèce Stylidium assimile , dans rénumération des plantes Ilugéliennes. Elle se trouve comme toutes ses congénères en Australie et particuliè- rement sur les rives de la rivière indiquée. MM. Veitch et fils, à Exeter, en avaient reçu des graines qui , cultivées convenablement en serre tem- pérée, ont donné des pieds dont les épis fleuris se sont développés pour 1 — 205 — la première fois en 1830, et depuis cette époque les mêmes succès ont été obtenus toutes les années. Tous les Stylidium jouissent d'une particularité physiologique extrê- mement curieuse : les étamines et le pistil sont soudés ensemble comme dans les orchidées en une colonne unique; les anthères sont placées au nombre de deux , dos à dos aux deux côtés du stigmate. On conçoit dès ce moment la difficulté du contact entre le pollen et le stigmate, mais la nature n'est jamais au bout de ses ressources; elle place dans la colonne, vers le milieu ou le tiers de sa longueur, un coude formé par des cellules fortement excitables et susceptibles de se mouvoir. Au moment où quelque objet touche à la fleur, cette colonne coudée se détend comme un ressort avec une vivacité extraordinaire et les anthères projettent, par cette secousse subite , le pollen mûr qu'elles ont mis à nu , le stigmate s'en recouvre et la formation des graines est assurée. Un problème que la science n'a pas encore résolu, est celui de savoir pourquoi ce coude mobile est rempli de fécule ou de farine et qu'il l'est seul dans toute la colonne: du mouvement et de la farine, qu'ont donc de commun ces deux choses ? c'est là un mystère pour lequel les Stylidium se recommandent à Tatten- tion des horticulteurs observateurs. Culture. Il y a près de cent Stylidium connus : leur végétation les rap- proche des Statice, Jasione , Phyteuma, Samoliis, Drosera. Le Saxifra- goïde se cultive en serre froide, craint les chaleurs l'été, demande dans cette saison beaucoup d'air et ne souffre ni humidité ni vapeur l'hiver. Le sol est une terre tourbeuse mélangée avec de la terre de bruyère un peu grasse. Multiplication par divisions de pieds ou de rosaces ou par graines. CULTURE DE LA PENSEE , Par un collaborateur du Fleuriste écossais fScotch-FloristJ. Ce qui conserve tant de faveur à cette charmante j)etite plante c'est, auprès de beaucoup d'amateurs , sa facile floraison et sa réussite plus ou moins complète en tout sol , à toute exposition, avantages inappréciables dans les jardins exigus d'une ville. Les avis que je vais donner sur sa cul- ture peuvent être de quelque utilité à plusieurs de mes lecteurs. En premier lieu procurez-vous de bons plants (c'est la base de tout succès) et placez-les sur des plate-bandes préparées de la manière sui- vante : Vers la fin d'octobre relevez la terre à 12 pouces d'épaisseur et criblez-la légèrement pour en extraire tous les gros cailloux ; puis mêlez-y un tiers de terreau de feuilles et de sable , et laissez reposer tout l'hiver sans lui donner d'autre façon , afin que la gelée puisse pénétrer et tuer ou chasser l'ennemi le plus formidable, le lombric. Au printemps, c'est- — 264 — à-dire vers le milieu de Mars, nivelez voire terrain et placez-y votre plant; si le temps est doux et clair , sinon attendez. Quelques personnes ne veulent pas qu'on crible la terre , mais je crois qu'il est bon de le faire ; seulement je m'abstiens de cribler le terreau de feuilles; je me contente de le diviser avec la main , parce que les racines de la pensée aiment à s'enfoncer dans les mottes compactes de ce terreau. Au commencement de mai , les plants formeront de petits buissons : c'est alors qu'il convient d'éclaircir les drageons et de ne laisser que les trois plus forts pour fleurir; les plus petits font des boutures pour l'automne. Si ces plantes sont destinées à concourir au printemps; une semaine avant l'exposition, j'ai soin d'abriter mes sujets de la pluie qui les gâterait et des rayons verticaux du soleil qui ternit promptement les fleurs ; mais les abriter plus tôt ce serait risquer de leur nuire en poussant à s'allonger, La meilleure manière d'ombrer est de placer une ardoise sur trois bâtons, mais en ayant bien soin d'ôter l'ardoise quand le temps est sombre. Un bon arrosement , une fois par semaine, d'eau détrempée de suie, ne peut que leur faire grand bien , il donnera une belle couleur vert-foncé au feuillage, en même temps qu'il donnera au lombric un breuvage fort peu de son goût. {Bull, de la Société d'horticulture de la Sarthe.) Observations de la rédaction. Le lombric ou ver de terre est souvent calomnié. On lui attribue des dégâts que le pauvre ver ne saurait commettre, privé comme il l'est de dents et de défenses quelconques : ses lèvres sont molles et sa bouche même est incapable de sucer à la manière des sangsues. Nous avons prouvé naguère dans le cinquième volume des Annales de la Société royale d'agriculture et de botanique de Gand (p. 273-^79) , la haute utilité des vers de terre dans l'ameublissement naturel des terres, les seules matières que ces animaux avalent et rejettent tout pulvérisées. Les lombrics peuvent nuire à la manière des taupes par leurs galeries, mais ils ne mangent jamais les racines des plantes. Les tuer, c'est engraisser la terre et en ce sens on peut y trouver son intérêt, mais il n'en reste pas moins certain que ces annélidcs sont d'une utilité très-grande dans les phéno- mènes de la nature. EMPLOI DE L'ARENARIA C^ESPITOSA POUR FAIRE DE PETITES PELOUSES , Par m. X Rien n'est préférable assurément aux belles pelouses de l'Angleterre. Mais on ne peut guère en obtenir de pareilles en France, à moins d"y con- sacrer des soins et des dépenses qui ne sont pas du goût cl à la portée de — 26d — lout le monde. Pour rivaliser tant soit peu avec les gazons de nos voisins, les nôtres doivent être arrosés tous les jours en été, tondus et roulés très- fréquemment, sarclés avec minutie et souvent renouvelés. Les Anglais fauchent et balayent seulement les leurs tous les dix à quinze jours : le Climat, le sol, les brouillards se chargent du reste. Pour jouir du même coup d'oeil et sans beaucoup de peine, dans un espace très-restreint, il est vrai, j'ai pensé à former une petite pelouse iVArenarta cœspitosa, jolie plante vivace, touffue, traçante, dont on doit l'introduction au Mans à M. Foulard; aujourd'hui assez connue et selon moi , préférable à la bruyère herbacée , parce qu'elle est bien plus unie, et au Thymus corsicus, moins rustique et dont la fleur microsco- pique est presqu'invisible à l'œil nu. Je vais dire comment je m'y suis pris pour éviter le seul inconvénient que YArenaria me parut avoir, celui de se boursoufler sur un terrain profond, inconvénient assez notable surtout pour des bordures d'Aixnaria. En effet, la plante en cherchant son développement, et faute d'espace pour s'étendre, se gonfle, élève en dos d'âne au milieu de sa largeur cette bande de bordure, au lieu de la surface unie qu'on aimerait à lui voir, ne présente plus que de désa- gréables inégalités. Un pied qui s'égare y cause un renfoncement qui choque l'œil, la symétrie est rompue. J'ai donc commencé par consolider mon terrain au moyen d'un lit de gros gravier bien damé, sur lequel j'ai ensuite établi un pouce de bonne terre, et sur celle-ci j'ai appliqué d'espace en espace de petites plaques d'Arenaria. Au fur et à mesure qu'elles ont commencé à s'enraciner et k s'étendre en traçant, sous l'influence des pluies du printemps, j'ai recou- vert légèrement ma plante de sable fin et de terreau mélangés, et en quelques mois j'ai obtenu un charmant tapis de velours vert le plus uni. Bientôt ce velours s'est émaillé de milliers de petites fleurs blanches, qui ont duré en se renouvelant sans interruption, jusqu'au mois d'octobre, et sans autre précaution de ma part que d'arroser tous les soirs, pendant les chaleurs, un sol que son peu de pi'ofondeur rendrait naturellement trop brûlant, si on négligeait de le rafraîchir. Les éloges que ma petite pelouse a généralement reçus m'engagent à conseiller les mêmes procédés pour arriver au même succès. [Bull, de la Soc. dliortic. de la Sarthe.) LES VIORNES OU VIBURNUM , Par m. Ch. Morren. Les Viburnum ou Viornes constituent un genre très-étcndu renfermant un assez grand nombre d'arbustes populaires. Le Viorne obier, sureau d'eau, rosier de Gueldre [Viburnum opidus), appelé encore Boule de neige, Caillebotte, etc., est connu de tous et ses variétés ont du mérite — 2G6 — pour l'ornementation de nos jardins. Ils portent tons des fleurs blanches, différentes dans leurs dispositions et ayant un air de parenté avec les hortensias : ils fleurissent dans cette aimable saison du second printemps et leurs fleurs durent longtemps. Les grands auteurs d'horticulture, Loudon entre autres, font observer qu'avec ces viornes, les lilas, les laburnum et les aubépines rouges on forme les massifs et les groupes les plus élégants, mais comme les viornes atteignent de huit à dix pieds de haut et que leurs fleurs sont blanches, on les emploie dans ce groupement comme repoussoirs dans le fond des massifs. Quoique toute position et toute espèce de sol leur aillent, cependant ils deviennent plus beaux dans une terre un peu basse et légèrement humide. On prétend même qu'ils purifient l'air malsain des endroits marécageux. Ils craignent la protection d'arbres plus élevés qu'eux et ne supportent pas l'ombrage des cimes qui viendraient à les dominer. La variété panachée attire surtout l'attention dans les jardins bien plantés. Le Laurier-tin appartient encore à ce genre et l'on sait assez que ce bel arbuste est un ornement obligé pour toutes les maisons de campagne, les jardins de ville, les conservatoires, jardins d'hiver où il fleurit dès le mois de février, et, selon les cultures, depuis l'automne jusqu'au printemps. Ce laurier-tin est originaire du midi de l'Europe et entre autres d'Es- pagne : en Italie c'est un arbuste des plus communs , remarquable non- seulement par son feuillage dense et serré, mais encore par la profusion de ses fleurs et de ses fruits noirs qui possèdent (chose très-rare dans le règne végétal) un éclat métallique. Voici environ deux siècles et demi qu'on le cultive en Belgique, en Angleterre et en Allemagne et ce temps n'a pu s'écouler sans qu'on n'en ait produit différentes variétés, comme le laurier-tin à larges feuilles {Vibitrmim tinus latifolia), le brillant {Vihur- nmn tinus lucidum) dont les feuilles sont larges, très-foncées en couleur et très-brillantes, le dressé [V. tinus strictmn), remarquable pour ses branches dressées, droites. Chacune de ces variétés a produit des sous- variétés à feuilles panachées. VHirtum et le Virgatum sont extrêmement gracieux sous cet état de panachure : le premier se distingue à ses feuilles et ses tiges rugueuses et le second à ses baguettes , ses rejetons nom- breux, en fouets flexibles et délicats. Le laurier-tin se plaît dans un sol riche, doux, argileux-, on s'aperçoit vite quand il a trouvé un fond qui lui convient. Les hivers rigoureux de nos climats du nord le tuent et il ne supporte pas les gelées. Dans les climats intermédiaires, on le couvre de nattes pendant la mauvaise saison. A Paris, on commence à le cultiver en pleine terre; à Bruxelles, il gèle et il faut le tenir en orangerie. On en voit souvent de fort beaux pieds (ju'on a préservés des atteintes du froid et forment alors des tètes ou des pyramides d'un fort bel effet. Nous en connaissons entre autres deux pieds à Liège qui ont atteint, en 1854, soixante-quatre ans et jouissent de la plénitude de leur santé. Sans doute que le lauricr-tin peut vivre beau- — 2G7 — coup plus longtemps , et nous sommes loin de donner cet âge comme lexemple d'une vieillesse pour cette sorte d'arbustes, mais nous voulons seulement prévenir les personnes qui cultivent cette espèce, qu'il ne faut |>as la rejeter vite sous prétexte que les pieds seraient trop vieux. Dans les terrains secs , les lauriers-tin réussissent comme arbustes de dessous , mais alors il est nécessaire de faire attention à l'influence du plein soleil et du grand air que ces arbustes réclament dans cette situation. S'ils doivent filer, s'étioler en s'allongeant pour trouver de l'air et de la lumière, ils sont perdus. Dans les terrains gras et humides, il ne faut jamais songer à les cultiver dans une situation semblable. La taille des lauriers-tins se fait en avril ou en mai, et ceux cultivés en pleine terre se taillent jusqu'au vieux bois. En buisson, on les coupe rez- terre. Après cette opération et en un an ou deux on obtient de très-belles formes et des pieds vigoureux. Si la taille se faisait plus tôt, on risque- rait fort que les plaies nues ne gèlent et que la destruction des tissus ne se communique plus bas , et , si on taille plus tard , on ne permet plus aux nombreux bourgeons de faire mûrir leur bois avant l'hiver, ni aux boutons à fleur de les développer. La propagation se fait le mieux par le couchage ou les surgeons : on couche en automne et on fixe au moyen de petites baguettes en A ren- versé. De belles racines sont formées l'automne suivant et on place les jeunes plantes en pot ou en pépinière; mais si ce dernier mode est em- ployé, il faut éviter qu'un soleil trop ardent ne brûle les jeunes plants, que les vents de bise ne les roussisse ou que la gelée ne les atteigne. Les mêmes précautions deviennent alors nécessaires comme pour les pieds cultivés en pot. On place ceux-ci dans la cendre de houille et on les re- couvre d'une natte quand l'état du ciel l'exige, ou enfin on les protège sous une couche froide. Il faut trois ans pour obtenir par ces procédés de petits lauriers-tin viables qu'on transplante alors dans la pépinière de revente en soignant le chevelu des racines. Ce mode est employé dans les vastes établissements marchands de l'Angleterre. Ailleurs on rempote et on continue de cul- tiver dans des vases dont l'ampleur augmente successivement , cependant on voit des lauriers-tin dont les couronnes ont un mètre soixante centi- mètres de diamètre , prospérer dans des pots de trois décimètres de largeur. Si l'on aspire à obtenir de nouvelles variétés par les graines, on sème ces dernières en mars époque de leur maturité : on hâte leur germination par la chaleur d'une bâche et on sème en terrine dans une terre légère mais à fond d'argile (terre franche des jardins). Les jeunes plantes passent ensuite à l'air libre pendant tout l'été suivant en les abritant dans une ombre salutaire sans coups de soleil et en leur donnant les arrosements suffisants. Au printemps suivant on songe à les transplanter comme il a été dit plus haut. — 268 — Les autres espèces de viornes sont assez nombreuses ; l'une des plus remarquables est le Vibnrmim lœvigaium ou le buisson de Cassiohiiri/ des Anglais, arbuste d'ornement de dix pieds de bauteur, produisant en juillet et août des fleurs d'un bleu tendre. On l'associe au rosier de Gueldre. Le Vihurnum cassinoïdes , arbrisseau bas et à feuilles persistantes tou- jours vertes; il atteint rarement trois pieds de hauteur et porte des tètes de fleurs blanches, assez semblables à celles du laurier-tin. Il est origi- naire des endroits sombres des forêts de la Caroline et de la Géorgie , des montagnes Kaatskill et des marais de la Nouvelle-York, Le Viorne comestible, Viburnum edule, est un arbuste touffu pourvu de feuilles tombant avant l'hiver , de fleurs blanches auxquelles succèdent des fruits rouges qui deviennent mangeables après avoir fermenté. Les Indiens du nord de l'Amérique en font des gâteaux, des tartes, etc. Cette espèce croît spontanément sur les rives des fleuves depuis le Canada jusqu'à la Nouvelle-York, Le port de l'arbuste est celui du Viburnum boule de neige; il passe l'hiver en pleine terre dans nos contrées. Les bois marécageux et ombreux, depuis le Canada jusqu'à la Nouvelle- Jersey , produisent le Viorne-myrtille ou Viburnum oxycoccos dont les fruits se mangent comme l'oxycoccos de nos bruyères ou la myrtille de nos bois. Les corymbes de cette espèce irradient et les feuilles sont tri- lobées, aiguës postérieurement et à trois nervures. Cette espèce est culti- vable dans les terres de bruyère humides et les marécages, mais elle n"a pas fixé assez l'attention des personnes qui possèdent de ces sortes de propriétés. Les sols calcareux et surtout crayeux de la partie moyenne de TEurope produisent le Mansiène ou Viburnum lantana. En Belgique , on ne le rencontre guère que dans la partie du Brabant où la craie domine et sur les calcaires de la Meuse et du Condroz il est beaucoup plus rare. Sa région naturelle s'étend jusqu'au Caucase. S'élevant à une hauteur de trois mètres, c'est un arbuste irrégulier qui possède plusieurs propriétés intéressantes à connaître. On demande souvent aux horticulteurs quels sont les arbustes qui croissent le mieux sous les grands arbres, et plusieurs sont embarrassés pour indiquer quelles sont ces espèces. Le Viburnum lantana forme parfaitement ce qu'on appelle en x\ngleterre les sous-bois. Il convient dans les fourrés, les massifs, les taillis et l'ombre des hautes cimes lui est même très-favorable. Ses feuilles sont en cœur à la base, ovales-oblongues , rugueuses et cotonneuses au-dessous par des poils en étoile; aux fleurs blanches et en corymbe terminal succèdent des baies d'abord rouges , puis noires , très-aimées des oiseaux , de sorte que le Mansiène est un des arbustes que l'on plante de préférence dans les fourrés et les taillis destinés à la tenderie, à la chasse aux grives, etc. L'écorce des racines et les jeunes branches servent à préparer de la glu. Dans le comté de Kent, on appelle le Viorne lantana du nom d'arbre à coton _ 2G9 — parce qu'en effet le duvet de ses feuilles ressemble beaucoup à celte ma- tière textile. Les brandies servent aux vanniers pour en faire des paniers, des liens, etc. Le jardinage en a produit aussi une variété panachée. La multiplication se fait par boutures, par branches couchées en terre et par graines. Deux espèces de Viornes sont entrés récemment dans les jardins d'Eu- rope. Ce sont les Vihurnmn macrocephalum dont le prix est encore au- jourd'hui d'une dixaine de francs, et le Viburmimplicatmn coté actuelle- ment à quatre francs. Ces deux espèces croissent spontanément en Chine et ont été introduites par 31. Fortune. Le Macrocephalum est entièrement couvert d'un duvet écailleux , les feuilles sont ovales , obtuses , le pétiole est court; les fleurs se disposent en corymbes composés qui, lorsque les fleurs sont neutres, peuvent s'étendre à huit pouces de diamètre, sans prendre la forme d'une sphère comme ceux de la boule de neige , mais bien une disposition pyramidale. Chaque corolle a près d'un pouce et quart de diamètre. M. Fortune a vu, dans l'ile de Chusan, des arbustes de cette espèce, hauts de 2o pieds, qui se couvraient chaque année au mois de mai d'une énorme quantité de ces fleurs blanches comme neige. Le Viorne du Japon [Vihurnumplicatinn] a quelque ressemblance avec son congénère de l'Amérique du Nord , Vihurnnm dentatum. Kœmpfer et Thunberg l'ont trouvé au Japon aux environs de Flammato , dans le Fakona. Les feuilles sont larges, dentées, un peu pliées, étroites à la base et terminées en une pointe brusque au sommet ou cuspidées, d'un vert très-foncé. Les fleurs blanches se réunissent en tête comme celles du Viburnum opidus. Il n'est plus douteux que cette plante, cultivée jus- qu'aujourd'hui en serre tempérée, ne puisse passer nos hivers en pleine terre, seulement quand les froids sont très-rigoureux , on fera bien de la couvrir. On la reproduit surtout par marcottes. On annonce encore parmi les nouveautés le Viorne de Hartweg, Vibui^- nuni Hartivegii de Bentham , originaire de Guatemala, à rameaux et inflorescences tomenteuses , les feuilles oblongues , ovales, obtusément acuminées et finement crénelées sur les bords; la cime des fleurs est pédonculée, nue et multiflore. Quelques horticulteurs vendent cette plante sous le nom de Viburnum Jlarivegiamtm. Enfin il circule dans le commerce horticole quelques Viornes indéter- minés qu'il serait urgent de revoir, car le nombre des espèces connues de ce genre, qui était de 51 en 4850, s'est accru depuis d'une vingtaine d'espèces nouvelles. BHLf.. HOUT. T. IV. 01» — 270 — REVUE DE PLANTES NOUVELLES OU INTÉRESSANTES. Aiuoiniini Dauielli. Hook. fil. Journ. of Bot. v. 4 (1852), p. 129. tab. 5 (sur la planche sous le nom de A. Afzdii). — Hook. Bot. inag. 4854, tab. 4764. Amomc de Danicll. Famille des Zingibéracées. Plante glabre, tige allongée, feuillue; feuilles oblongues lancéolées, minces, acu- minées, striées-veineuses ; hampes radicales florifères de deux pouces de hauteur, fructifères de quatre à cinq, portant de trois à cinq fleurs; bractées oblongues cymbiformes, obtuses, rouges, corolles de la même couleur, lobes latéraux étalés, lancéolés acuminés, le dorsal ample, obové- oblong, plus long que les autres, labellum large, obové-subspathulé , varié de blanc, de jaune et de rose, plane, bord ondulé, crépu, filet de l'étamine portant un appendice subulé à la base, de chaque côté ; fruit linéaire en ampoule et terminé en bec. Celte espèce d'Amonum est originaire de la Côte-d'Or, de la Côte des Esclaves (en Guinée) et des environs de la ville de Clarencc dans l'Ile de Fernando-Po. Les naturels l'appellent Bassalo. Elle porte le nom de Danidli, parce que le docteur Daniell l'a fait connaître comme un poivre meliguetta bâtard. On remplace par cette espèce dont nous parlons, Vamo- num graim Paradisi ou les graines de Paradis , cpicc salutaire employée dans les soupes économiques telles qu'elles sont préparées à l'usage des pauvres, des hospices et des ouvriers dans la plupart de nos villes de Belgique. Culture. Cet Amonum d'Afrique est de serre chaude et se trouve mieux de celle aux orchidées que des autres. On lui donne une terre riche quoi- qu'à fond de sable. La multiplication se fait par la division des pieds, les nouvelles pousses se développent sans cesse en avant de la plante. Les fleurs se montrent parfois avant les feuilles et dans le temps du repos de la végétation on diminue les arrosements et on rempote souvent. Cissus cliscoloi*. Blume Bydr. v. 1 , p. 181. — Hasskarl, Caf. Plant. Bogor. p. 16G. Walp. Repert. Bot. v. 4 , p. 457. — Hook. Bot. mag. 1854, tab. 4763. Cissus discolore. Famille des Ampélidées. Tige grimpante, anguleuse; feuilles cordées-oblongues, acuminécs, dentées, au-dessous d'un rouge pourpre intense , au-dessus vertes , maculées de taches ovales blanches, parallèles aux nervures secondaires; stipules ovales; pédoncule de la longueur environ du pétiole; cimes subtrifidcs. Cette charmante espèce de Cissus est originaire de Java : ses feuilles sont d'une élégance extrême et ses tiges rouges remplacent, en fait d'or- nement, avec les taches blanches de la grandeur et de la forme des perles ordinaires, les fleurs fort insignifiantes. Ces feuilles sont veloutées au- dessus. Les fleurs sont d'un jaune pâle et s'ouvrent en septembre. Culture. Plusieurs Cissus sont devenus aujourd'hui pour les serres chaudes de ces ornements indispensables, soit qu'on les cultive sur des — 271 — tuteurs treillages, soit qu'on les mène, à demeure, le long des fils de fer ou des soutiens en bois. Ils produisent ainsi un cfl'ct gracieux, très-attractif (selon l'expression anglaise) et rivalisent avec les fleurs les plus écla- tantes. Nous ne leur trouvons qu'un défaut, c'est d'exiger une chaleur tropicale humide, tellement haute qu'elle suffoque les visiteurs, car c'est dans des circonstances semblables que nous avons toujours trouvé les serres où les Cissus prospéraient. Le froid leur est fatal et les tue sur le coup. Le sol qu'ils exigent est une terre de bruyère grasse, assez humide, jnélangée avec un tiers d'argile franche de jardin, plus un excellent drainage au moyen de têts placés au-dessous de la terre. La multiplication se fait par le bouturage en bâche très-chaude, dans la tannée ou par un chauffage de dessous et sous cloche. Goldftissia glouierata vav. Spcciosa. Nées in Wall. PI. asiat. rar. v. 3, p. 88. — Ilook. Bot. mag. t. 3881, et (1854) t. 4767. Gold- fussia aggloméré. Syn. : Ruellia glomerata. Wall. Cat. n° SSCI*"'" . Fa- mille des Acanthacées. Tige fruticuleuse poilue; feuilles inégales. Tune ovale, cuspidée, inégalement dentée-crénelée, multiplincrve, l'autre beau- coup plus petite, ovale, subarrondie, obtuse à la base, très-inégales, opposées aux épis axillaires, solitaire, globuleuse et portant des pédoncules très-courts , poilus ; bractées lancéolées très-entières , les intérieures égalant les capitules. Ce Goldfussia était connu , mais la variété actuellement décrite par M. Hooker possède des fleurs plus grandes , d'un violet vif et empourpré Il est originaire du Silhet selon Wallich , mais ses fleurs y sont ordinaire- ment d'un lilas grisâtre. Des exemplaires envoyés du jardin botanique de rile Maurice à Kew, ont offert des fleurs bien plus colorées. Culture. Ce Goldfussia glomerata est de serre chaude et fleurit en novembre. PitcaiPiiia uiuscosa. Martius. FI. Bras. ined. Schult. Syst. veg. v. 7, p. 1240. — Ilook. Bot. mag. (I8b4), tab. 4770. Pilcairnia poilu. Famille des Broméliacées. Feuilles linéaires recourbées, acuminécs, en- tières, inférieurement carinées, glabres au-dessus par l'âge; au-dessous couvertes de poils tomenteux gris-blanc comme toute la lige feuillue ; racème simple , bractées subulées de la longueur des pédicelles ; fleurs rapprochées rouges, calices colorés (rouges bordés de jaune au bout), pé- tales formant un casque au-dessus des étamines. Originaire du Brésil, de la Serra de Piedade, province de Minas Geraes, ce Pitcairnia a été introduit ])ar le Jardin botanique impérial de Saint- Pétersbourg qui l'a envoyé à Kew où sir William Ilooker a confirmé la diagnose et le nom. C'est le plus jpctit des Pitcairnia connus, les feuilles nont qu'un empan en longueur (l'empan est une mesure de neuf pouces environ) ; il y a de six à douze fleurs rouges. Culture. La serre chaude lui est nécessaire : une bonne (erre de 272 bruyère à fond de sable et quelques arrosements lui conviennenl. Un grand nombre de plantes croissent ensemble et elles fleurissent pendant l'hiver, vers décembre. Spiraea expausa. Wall, in hort. — Car. Koch in append. Spec. nov. quœ in hort. Bot. Berol. col. ad cat. sem. 1855, n" 55. Spirée de l'Himalaya. Synonymes : Splrœa nepalensis, Spirœa montana, Spirœa de Kamaou des horticulteurs. Rameaux roux, pubesccnts , arrondis; feuilles elliptiques ou eIliptico-lancéolces,pubérules, glauques au-dessous, à pétiole court, dentées à la partie supérieure; fleurs en corymbe pubes- cent; calice épanoui à la base en urcéole campanulée , cinq divisions au limbe, horizontales, triangulaires-lancéolées; pétales blancs, ari'ondis, un peu plus grands que les divisions calicinales, égalant les filets, disque à dix dents inséré avec les étamines sur la gorge du calice ; cinq pistils rouges, libres mais renfermés dans le bas de l'urcéolc calicinale, poilus, biovulés; styles divergents. Cette espèce croissant spontanément sur les montagnes subalpines de de l'Himalaya, circule sous plusieurs faux noms dans quelques jardins. Elle se rappi'oelie selon 31. Koch de la Spirœa callosa de Thunberg, mais s'en distingue par ses rameaux à stries élevées, son disque très-apparent, ses pétales d'un rose blanchâtre ou roses. A Berlin, où on la cultive, elle fleurit environ quatre semaines avant la S. callosa. Culture. Cette Spirée de pleine terre croit dans les terres franches des jardins, mais h Berlin elle gèle les hivers rudes jusqu'au pied , tout en repoussant, après, des racines sur des points très-nombreux et dès le printemps. La culture est pour le reste celle des arbustes ordinaires de pleine terre, IVarrea qiiadrata. Lindl. in Gard. Chron. 1853, p. G47. — Hook. Bot. mag. d854, lab. 4766. Warrea odorant. Famille des Orchidées. Le caractère spécial de ce Warrea consiste dans le labellum dont le lobe du milieu est orbiculaire, rétus, les lobes latéraux semi-ovales connivents, et portant un appendice charnu presque carré et confusément tridenté au bout. Cette orchidée est terrestre, possède des racines très-fortes et pas de pseudo-bulbes, les feuilles sont droites, minces, légèrement carinécs, les hampes radicales, uniflorcs, la fleur grande, d'un jaune soufl'ré très- pàle avec le bord du labcUum pourpre devenant violacé, des flammes violettes sur le milieu de l'organe. Cette orchidée exhale une excellente odeur. Elle a été introduite de l'Amérique centrale par M. Warszewicz dans les serres anglaises, chez M. Jackson de Kingston entre autres, mais chez les jardiniers commerçants c'est une espèce encore fort rare. Cnlture. Elle n'exige aucun soin spécial et sa culture est celle de la plupart des orchidées terrestres de serre chaude. — 273 — MODELES DE CULTURE. L'ORCHIDEE PHALENE ou le PHALOENOPSIS AMABILIS , Par m. Ch. Morren. Les personnes, peu au fait des ressources et des eontrariétés de l'hor- ticulture, s'imaginent que dans le commerce des plantes, une espèce ne saurait rester rare et d'un prix élevé pendant longtemps. Elles jugent de ce commerce spécial par le trafic ordinaire des marchandises où une ma- tière demandée ne se fait pas attendre avec les moyens actuels de com- munication et d'exploitation. Les plantes ne jouissent pas encore de cet avantage et l'on en cite qui restent d'une grande rareté pendant des pé- riodes de vingt-cinq années ou plus encore, hien que les pays de produc- tion soient parfaitement connus. Voici plus de dix années que parmi les orchidées on aspire à posséder des Phulœnopsis amahilis, espèce riche, magnifique, d'une élégance de port , de forme et de couleur extraordinaires , et ce Phalœnopsis reste, malgré son nom, si peu aimable qu'il se refuse à tous. Cette année encore, i)eaucoup de catalogues marchands le portent sans prix , et MM. Bootli et fils (de Hambourg) viennent de le mettre à un taux qui prouve assez la valeur que les amateurs y attachent, cent marcs le pied. Amboine , Ma- nille, Java, l'Ile de Nusa Kamanga,sont les lieux originaires de cette orchi- dée si recherchée, et malgré l'activité des commerces anglais et hollan- dais, c'est à peine si l'Europe en possède quelques individus. Rumph (llumphius) , dans son herbier d'Amboine, la découvrit dans cette île, la dessina et la décrivit sous le nom à' Ancjrœcum album majus. Elle s'élance, dit-il , comme des liens sur les arbres rabougris de Tile et les enlace ensuite dans d'inextricables festons pendants. M. Blume et Cuming ont revu cette espèce , le premier à l'île de Nusa, le second à Manille, mais le plus beau pied, celui dont nous reproduisons ci-contre le portrait, figurait dans une grande exposition de Londres en 1851 , et avait été en- voyé de Java par M. Fortune. Cet exemplaire explique les paroles de Rumph au sujet de ses filets formés par les i\acines de l'épiphyte et de ses cordes qui font les tiges fleuries. Ce dessin ne peut rendre la beauté de la fleur vue individuellement. Elle offre un calice à sépales verdàtrcs, une corolle à pétales blancs et le labellum blanc bordé de rose, flammé de pourpre foncé sur un fond jaune d'or rehaussé d'un pointillé d'écarlate. La forme singulière de la colonne ajoute encore à l'intérêt qu'inspire cette orchidée dont il importe de rappeler l'existence aux amateurs afin qu'elle se propage plus qu'elle ne l'a fait jusqu'à présent. 274 - PI. 42. — 275 — HORTICULTURE DE SALON. DE LA CULTURE DE L'HOYA CARNOSA , Par m. Ad. Weick, Horticulteur à Slrasboura:. 'S* Quoique cette plante ne soit plus une nouveauté , elle est néanmoins une des plus jolies fleurs de serre tempérée, et a de plus l'avantage de bien venir et de prospérer dans les appartements. Voici la manière de la cul- tiver et d'en obtenir des fleurs. On multiplie cette plante par boutures, ce que l'on peut faire pendant toute l'année; cependant le printemps est la saison la plus convenable. Il suffit de couper une brancbe de 10 à 15 centimètres de longueur, au- dessous du nœud. On la plante dans un petit pot de 4 à 5 centimètres, rempli de terre de bruyère et on arrose légèrement; si l'on a à sa dispo- sition une couche chaude de melons, concombres, etc., on enterre le pot dans le terreau de cette couche, et, dans l'espace de trois à quatre semaines, la bouture sera bien enracinée; à défaut de couche, on place le pot dans une chambre chaude, près des croisées, et dans cinq ou six semaines elle aura également des racines. On arrose très-peu et seule- ment quand la plante commence à sécher. Au commencement de mai, on transplante cette jeune plante dans un plus grand pot, on ajoute à la terre de bruyère à peu près un quart de terreau et de terre franche , et on laisse la plante dans la chambre pendant tout l'été, en ayant soin de donner de l'air de temps en temps. On rempotera une seconde fois en août, dans un pot plus grand, de 12 à 15 centimètres de diamètre, en prenant cette fois-ci et pour tous les rempotages suivants, le compost suivant : Deux quarts de terre de bruyère, un quart de terre franche, un quart de terreau de couche et un peu de sable blanc. A chaque rem- potage on aura soin de donner un bon drainage , c'est-à-dire de mettre dans le fond du pot quelques centimètres d'épaisseur de tessons de pots, de gravier ou de toute autre matière qui puisse faciliter l'écoulement des eaux des arrosemcnts. (Je trouve d'un bon usage les écailles d'huîtres concassées.) Pendant tout l'été on bassinera les plantes, légèrement, tous les deux ou trois jours. L'hiver arrivé, on diminue les arrosemcnts et on tient la température de l'appartement d'une moyenne de 6 à 8 degrés cen- tigrades. Si la plante est exposée à la poussière, on en lavera les feuilles de temps en temps pour leur conserver leur vert luisant. Cette plante demande beaucoup de chaleur pour fleurir ; il faut donc la placer le plus — 276 — possible au soleil. Les premières fleurs apparaissent vers le mois de juin, et se succèdent jusqu'en automne. Il ne faut jamais couper les pcdicelles des fleurs quand celles-ci sont défleurics , parce que ces pédicclles pro- duisent le plus de fleurs les années suivantes. Cette plante étant grimpante, il faut avoir soin de la palisser convena- blement, soit contre un treillage, soit en la laissant filer en guirlande, soit de toute autre manière. A partir de la deuxième année, on rempotera une seconde fois tous les printemps, en février ou mars, en employant le compost que j'ai recom- mandé plus baut; ce n'est aussi qu'après la deuxième année que la plante fleurira avec abondance. En observant ces recommandations, l'amateur sera amplement dédom- magé de quelques soins qu'il aura voués à cette belle plante dont les fleurs imitent la cire. [Journ. de la Soc. d'hortic. deStrashoiirg.) LE JASMIN NUDIFLORE CONSIDÉRÉ COMME PLANTE D'AP- PARTEMENT, Par m. Ch. Morren. Nos jardins possèdent depuis peu d'années un jasmin auquel on a fail trop peu d'attention. Il mérite de se populariser à cause de la grandeur, du nombre et de la belle couleur de ses fleurs d'un jaune brillant et gai. Après l'hiver rigoureux que nous venons d'éprouver, à peine, les pre- miers rayons d'un soleil de printemps ont-ils échauffé légèrement la terre, les fleurs du jasmin nudiflore se sont épanouies dans une santé parfaite. Le seul reproche qu'on pourrait faire à cet arbuste, c'est de ne pas produire ses feuilles en même temps que ses fleurs; mais ce défaut devient une qualité dans le mode de culture que nous lui avons appliqué. Il était facile de prévoir qu'une plante à fleuraison si printannière, devait se prêter à la culture forcée. Elle a donc été mariée au lierre dont les branches flexibles, toujours couvertes de feuilles , s'enlacent avec grâce autour des rameaux un peu raides du jasmin midijlore. Les fleurs de ce dernier semblent appartenir au lierre et par cette combinaison dans un même vase, ou produit des treillis portatifs d'une grande élégance. Les personnes de bon goût en tireront profit pour l'ornementation des meubles horticoles répandus aujourd'hui dans les salons. Ne coûtant plus (ju'un franc, le jasmin nudiflore est donc destiné à une véritable popu- larité. — 277 — FLORICULTURE DE L'EAU. LES AQUAIRES ANIMES ET CULTIVES. Par le même. Nous avons fait connaître dans le deuxième volume de la Belgique horticole (p. 298) un premier aquaire de M. Warington , meuble portatif, dans lequel on cultive des plantes aquatiques, des espèces amphibies et des fougères des bois humides. Ce meuble a été depuis imité par plusieurs de nos lecteurs qui ont éprouvé beaucoup d'agrément à suivre, pas à pas, cette végétation qui ne tombe pas d'ordinaire sous nos sens. On a, bien voulu nous écrire à cet égard des choses si obligantes que nous avons fait graver un second modèle d'un aquaire encore de l'in- vention de M. Warington, aquaire destiné à la culture des plantes et à l'entretien de quelques animaux. La figure explique assez bien la construction : une caisse carrée , dont les parois sont formées de glaces à miroir d'une notable épaisseur selon la quantité d'eau sur laquelle on opère. Les arêtes de ce meuble sont en zinc et assez forts, les glaces sont soudées au moyen d'une composition de blanc de plomb et d'huile auquel on ajoute une égale quantité de minium. Ce mélange retient parfaitement l'eau. Au fond , occupé par une couche de sable siliceux blanc, on dispose avec art des pierres également siliceuses, des silex, des granits et autres substances imitant des rochers et au moyen du ciment romain on attache, même contre les parois verticales des glaces, des pierres en saillie susceptibles de servir de réservoir à des fougères de différentes espèces et notamment des Hymenophyllum Tunbi-idgense et //. Wilsoni, des Trickomanes specîosum, Blechnum boréale, Adiantum Capilhis-Veneris et d'autres. On y joint aussi des mousses. M. Warington plaça au fond de son aquarium quelques pieds de Vallisneria spiralis, surtout des pieds femelles. Les longues feuilles ne tardèrent pas à se développer ; ce sont elles que l'on voit dans le dessin et puis de nombreux rejetons poussèrent des souches : il y eut ainsi dans ce réservoir jusqu'à 3S plantes de Vallisnerie qui bientôt montrèrent leurs pédoncules en spirale terminés par des fleurs allant s'épanouir à la surface de l'eau. On en compta plus de quarante. Si l'on eut placé en même temps des pieds mâles au fond du réservoir, ceux-ci eussent sans doute développé leurs nacelles vertes, formées de deux bractées, d'abord réunies en vessie ou en ballon pour protéger les fleurs contre le contact de l'eau, puis séparées en forme de poupe et de proue, alors que la petite gondole détachée de la plante, nage à la superficie du liquide BELG. HORT. T. IV. 3G — 278 — pour se rencontrer avec les fleurs à spirale dont nous avons parlé phi;^ haut et assurer la formation du fruit et la fécondation des graines. Ce fait physiologique s'observe bien dans les jardins botaniques, mais on ne voit pas les plantes dans leur totalité : on ne peut bien saisir qu'une partie de ces phénomènes qui se passent à la superficie de l'eau. Le réservoir aquaire de Warington permet au contraire de suivre la struc- ture des spirales depuis leur origine jusqu'à la fleur. On avait placé des poissons rouges dans cet aquarium, mais les vieilles feuilles des vallisnéries devenaient jaunes ; ces organes mou- raient ensuite et donnèrent naissance à un putrelage permettant à des algues vertes de se développer, de garnir les glaces de leurs propagules; l'appareil perdait sa transparence, sa propreté, son élégance. Quel remède opposer à ce mal? Un naturaliste seul pouvait le trouver. Ce naturaliste s'est demandé quels animaux maintiennent propres, pures et limpides les eaux de nos ruisseaux et de nos étangs et l'expérience a bientôt répondu que ce sont les mollusques. Cinq ou six Lininœa stagnalis ou colimaçons d'eau furent donc introduits dans l'aquaire et au bout de quelques jours toute l'eau était redevenue transparente, les algues avaient disparu , elles étaient dévorées ainsi que les feuilles lan- guisantes des vallisnéries. Les êtres qui paraissaient ainsi les plus abjects , les plus méprisables aux yeux d'un grand nombre de personnes devenaient ici indispensables pour maintenir en vie, en santé et dans leurs relations réciproquement utiles, les hôtes de l'aquarium, d'un côté la plante la plus élégante du Rhône et l'une des plus célèbres dans la physiologie, et de l'autre le poisson rouge de la Chine, qu'aucune espèce de son règne n'a pu remplacer jusqu'ici dans nos demeures. Une harmonie curieuse s'établit entre ces êtres exigeant, pour vivre, des conditions différentes. Le poisson consomme dans sa respiration l'oxygène de l'air tenu en solution par l'eau , fournit de l'acide carbonique et des matières qui servent de nourriture aux lymnées et d'engrais aux vallisnéries. Ces dernières par leur respiration consomment à leur tour l'acide carbonique produit par le poisson, s'ap- proprient le carbone pour faire croître leurs tissus et rendre libre l'oxygène à l'état gazeux au profit de la vie des animaux. Les mollusques consomment les produits de la transpiration et les déjections des pois- sons de manière à conserver l'eau à l'état limpide, dévorent et dispersent de plus les tapis d'algues microscopiques qui encroûteraient les verres et empêcheraient la lumière d'apporter ses bienfaisants rayons aux plantes qui en ont besoin pour respirer. Cet aquarium est un appareil rempli d'instruction et qui mériterait de se répandre dans les maisons d'éducation ou les sciences sont enseignées. — 279 IM. 4a — 280 — ARCHITECTURE HORTICOLE. DE L'HARMONIE ENTRE LES CONSTRUCTIONS ET LES PLANTA- TIONS PROUVÉE PAR L'ÉTUDE DU CASINO DES SACHETTI. Par m. h. Noël Humphreys. Dans les écoles qui règlent le style des constructions du jardinage, deux excès sont à craindre : d'un côté, la profusion des ornements architectoniques , de l'autre l'absence complète de tout ornement. Il faut donc rechercher dans l'art de l'architecture, appliqué à l'art des jardins, jusqu'où peut s'étendre cet emploi des ornements. Il est facile de conce- voir qu'une grande demeure très-prétentieuse à l'endroit de l'ornemen- tation, placée au milieu de promenades sinueuses et sur une pente dominant une plaine étendue, paraîtra incomplète si elle n'est entourée ou flanquée, sur le devant et les côtés, d'esplanades et de terrasses, tandis que dans d'autres situations ces terrasses seront un hors d'oeuvre. La gravure ci-contre montre un exemple riche , trop riche peut-être , d'une villa appartenant à la haute école italienne si vantée pour ses ornements : cette villa est entourée des embellissements de l'art et des ornements naturels , dus à une horticulture de goût, tels que l'exige le sentiment du beau. Ce n'est point un projet, mais une construction exécutée, le casino de la famille Sachetti de Rome, bâti d'après les plans de Pietro Barettini de Cortona. C'est l'un des plus beaux exemples que l'on puisse citer dans l'architecture des villas, châteaux ou maisons de plaisance, mais déjà du temps de la publication de Vasi, on regrettait de la voir tomber en ruine. Cette composition imposante a dû coûter des sommes immenses : on peut les regretter pour une demeure de campagne. Les ressources du paysage y ont été admirablement utilisées et méritent d'être étudiées par les architectes de jardin. Même , en ne prévoyant pas qu'on puisse jamais être appelé à réaliser quelque chose de semblable ou d'analogue, cette étude est riche en instruction. Une des causes principales de l'effet agréable des constructions en pierre ou en briques, dans leurs relations avec les plantations dont l'horticulteur dispose, est l'harmonie des matériaux, conséquemment la couleur et la texture qui doivent se trouver dans le ton des localités et du paysage. Il faut une suite de modulations dans la conduite et la coupe des arbustes et des arbres placés et groupés de manière à faire ressortir le fond de la scène et la beauté des détails. L'attention doit même se porter jusque sur les végétations rabougries ou rampantes et leurs rela- tions avec la nature des matériaux qu'elles sont destinées à embellir. Un parc ou le devant d'un château est une espèce d'épisode qui parle à l'âme du spectateur. Ce n'est pas le prix de ces plantations qui en fait le mérite, mais c'est leur langage qui en fait toute la valeur. 281 l'I. U. — 282 — JARDIN FRUITIER. LE BEURRE VERT DE TOURNAI, GAIN NOUVEAU DE M. DU PONT. Par m. Ch. Morren. M. Du Pont, médecin vétérinaire de Tournai , un des membres les plus actifs de la Société Royale d'Horticulture de cette ville, nous à com- muniqué un gain nouveau du Beurré d'Hardenpont, lequel gain nouveau avait mérité à l'exposition d'automne de 4853 , une distinction spéciale, une médaille de bronze. Le comité pomologique avait nommé la poire nouvelle Beurré vert et pour indiquer son origine nous y joignons de Tournai. Le beurré vert est une belle et grosse poire, moyennement de 9 à 10 centimètres de hauteur et de 8 à 9 centimètres de diamètre transversale. Sa forme est conico-pyriforme avec la grosse partie placée près de la tête du fruit. La partie pédonculaire est le plus souvent oblique, avec le soutien inséré de côté dans un enfoncement en entonnoir. Le pédoncule est long d'un centimètre et demi, brun, luisant et moins épais qu'on pourrait s'y attendre à voir un fruit si lourd. L'œil est très-régulier, étoile, à lanières chiffonnées, placé au milieu d'un enfoncement parfaitement conique, et couronnant la tète du fruit. L'épicarpe, lisse et luisant est d'un vert pomme très-frais et très-gai avec le côté éclairé du soleil jauni; il est tout parsemé d'un pointillé jaune dont les points sont des aréoles d'un demi millemètre de largeur et dont la distance intersticiale est moyennement de quatre milli- mètres. La chair est blanche, un peu graveleuse et neigeuse. Les membres du comité pomologique de Tournai ne se sont pas dissimulé que le beurré vert sorti du beurré d'Hardenpont ne valait pas sa souche, mais à tout prendre c'est encore une bonne variété que la culture améliorera. Les loges sont grandes, écartées; les pépins peu développés, plats et larges. VISITE AUX PÊCHERIES DE MONTREUIL ET PRINCIPALEiMENT A CELLES DE M. A. LEPÈRE , Par m. Maktin Muller. Le 15 août dernier, je suis allé à Montreuil pour visiter avec M. A. Lc- père, ses pêchers et ceux de ses concitoyens qui s'occupent , comme lui , de cette intéressante culture. ■'.':■ *! Vf-. •• '• •• •'.■>£i.*..- ^•■■:-ï:'. ^.■.•.•.•• Ai^r . ■■' P)(MiiM>é vcpl (Ir Toiiniav «nin .1.. M'; Du poni . i I M — 28Ô — Montreuil est connu pour ses cultures d'espaliers et principalement pour celle des pêchers, dont la réputation est encore bien inférieure à ce qu'ils sont en réalité. Quatre cent deux jardiniers se livrent à la culture d'arbres fruitiers en espaliers. Environ mille arpents de jardins sont consacrés à la culture de ce genre; les pêchers dominent; un tiers à peu près est en vignes, pru- niers, poiriers, pommiers, cerisiers et abricotiers, le tout en espaliers. L'arpent contient 800 mètres de murs; les jardins en sont tous entourés et traversés, ces murs sont à dO mètres de distance les uns des autres; les expositions du levant et du couchant sont préférées pour les pêchers, les parties au nord sont plantées de poiriers ou de cerisiers. Les murs d'une hauteur de 3 mètres, ont à leur base une épaisseur de 40 centimètres et de 30 centimètres au sommet. Les deux côtés sont en- duits d'une couche de plâtre de 3 centimètres d'épaisseur. Le sommet est garni d'un chaperon ayant une saillie de 13 centimètres à l'exposition du levant, et de 16 centimètres aux autres expositions. Au midi et au cou- chant , il y a dans les murs , outre la saillie , des supports espacés entre eux de 4 mètre 50 centimètres environ. Ces supports ont une longueur de G5 centimètres en sus de la partie scellée dans le mur. C'est sur ces supports qu'on fixe des paillassons de la même largeur lorsque le mauvais temps du printemps l'exige. Les pêchers sont palissés contre ces murs avec des clous de loques, ce qui permet de faire un palissage beaucoup plus régulier qu'avec des lattes ou des fils de fer. La récolte, dans les années ordinaires, est de 13 millions de pêches qui produisent 850,000 à 900,000 fr. Parmi les quatre cents cultivateurs , il y en a qui ont des arbres en assez mauvais état, malgré l'avantage du sol, du climat et de l'exposition du sol; mais il y a aussi des arbres magnifiques, et je citerai parmi les plus beaux ceux de M. A. Lepère, qui sont réellement d'une beauté rare. M. Alexis Lepère est certes le premier cultivateur de ce genre d'arbres, il a su donner à ses pêchers les formes les plus gracieuses et en même temps les plus avantageuses pour la production. Ainsi , l'on voit chez lui la forme dite carrée, à la Montreuil , de tout âge et exécutée avec la plus grande régularité, ayant jusqu'à 1 5 mètres d'envergures et produisant de 6 à 8 cents pêches de premier choix; ensuite des pêchers en candélabres, dont les deux branches-mères de l'un mesuraient, au mois d'août dernier, 17 mètres; puis des arbres en lyre, exécutés en nature contre le mur comme une peinture ; enfin , des palmettes à cordons alternes , en U en éventail, etc. Toutes ces formes sont de véritables chefs-d'œuvre et sont dues en partie à l'ingénieuse invention de M. Lepère, quoique certain auteur ait fait figurer les dessins de ces arbres dans son ouvrage, en les faisant passer pour ses œuvres. M. Lepère est fils d'un ancien cultivateur de pêchers de Montreuil ; il a — 284 — commencé en bas-âge à élever le pêcher comme le lui enseignait son père, plus tard son expérience lui démonlra que l'on pouvait faire mieux. Il perfectionna l'arbre en éventail à la Montreuil , puis le pêcher carré à la Montreuil , dont Ch.-E. Baussé est l'inventeur , mais au lieu de cinq branches secondaires inférieures et cinq supérieures, M. Lepère ne lui en laissa que trois, car il avait reconnu que cinq épuisaient l'arbre trop vite. Une fois certain de l'avantage qui résultait de cette forme et d'autres en- core, M. Lepère voulut faire connaître ses améliorations et il commença par donner des leçons aux jeunes jardiniers qui allaient le voir de Paris ; plus tard il publia son ouvrage sur celte culture et une seconde édition de son livre a bientôt suivi la première, et elle lui valut une grande mé- daille d'or , que lui décerna M. le Ministre de l'agriculture et du com- merce. Enfin, une troisième édition a paru depuis peu, et cet ouvrage si complet et si clair est à la portée de tout le monde. Avec un peu de goût pour cette culture, chacun peut maintenant obtenir d'aussi bons résultats. M. Lepère est assurément le cultivateur le plus habile de pêchers qu'on puisse trouver, et ses efforts sont dignes des plus grands éloges et méri- teraient les plus grands encouragements. M. Alexis Lepère (fils) seconde avec ardeur son père, il va publier sous peu un nouveau travail sur la culture des pêchers, et cet écrit sera certai- nement accueilli avec empressement par les jardiniers et les amateurs. CULTURE DE LA VIGNE. Par m. Prose Charmecx , Horticnlleur à Thomery, (^) Terrain d'exposition, — Bien que la vigne s'accomode à peu près de tous les terrains, pourvu qu'ils soient perméables à l'eau, on s'accorde généralement à reconnaître qu'elle prospère surtout dans un terrain sili- ceux et graveleux. Lorsqu'on ne possédera pas un semblable sol, il con- viendra de défoncer à 1 mètre ou \ mètre 25 centimètres de profondeur, sur une largeur de 2 mètres, et de rapporter de bonne terre normale perméable et engraissée avec du fumier mélangé de vache et de cheval. Par ce moyen il sera possible d'obtenir de bons raisins, mais leur matu- (1) Le nom de Charmciix se rend célèbre dans la culture de la vigne. Il y a plus de 120 ans que le grand-père de iM. Prose Charmeux construisit le premier mur à Thomery; en 1828, son père modifiait lecorrfon horizontal^ en intervertissant l'ordre régulier de la direction des cordons; et celui-ci vient de perfectionner la culture totale de la vigne ù un tel point qu'elle est citée comme modèle par plusieurs sociétés et ouvrages d'horticulture des plus renommés, {Rédaction du liulhtin de la snriëlé d^hnrtiniUure de l'Aube.) — 285 — rite sera en retard de quinze jours environ sur celle obtenue dans les terres siliceuses et sablonneuses. La vigne aime l'exposition du midi , mais elle préfère encore celle du levant, lorsque le soleil y donne jusqu'à deux ou trois beures de Taprcs- midi. Les espaliers doivent être fumés tous les deux ans de la manière sui- vante : on enlève une bande de terre de 80 centimètres de large à partir du pied du mur, sur une profondeur de 15 à 20 centimètres, qu'on emplit de fumier de vache et de cheval mélangés, on recouvre ensuite avec la terre provenant de l'excavation; deux années plus tard on ouvre une nouvelle bande d'égale dimension , à partir de la première , on la fume comme elle. Les espaliers ne se trouvent ainsi recevoir d'engrais que tous les quatre ans à la même place. Si la végétation était trop forte, il suffirait de fumer de trois en trois ans. Plantation. — Lorsque le terrain a été préparé comme je l'ai indiqué plus haut, on plante indifféremment, soit au pied même , soit à une dis- tance de 50 centimètres du mur. Dans le second cas, qui est préférable, parcequ'il procure à la plante une plus grande nourriture , on amène la vigne au pied de l'espalier en une année, au moyen d'un couchage, sans que la récolte soit retardée. Le mode de plantation au pied du mur offre l'avantage de débarrasser entièrement des monceaux de terre que produit l'ouverture des fosses à 0,50 centimètres. Les pieds doivent être placés à 0,40 centimètres en tr'eux, dans les terrains froids et forts, on peut leur donner un espacement de 0,45 à 0,50 centi- mètres. Chacun d'eux se trouvera vis-à-vis d'un montant de treillage. Au lieu de simples chevelés, je conseillerai toujours de choisir les chevelés en paniers; ils sont d'une reprise plus assurée, leur végétation est bien supérieure, et on récolte une année plus tôt. Desmurs et des treillages. — Les murs doivent avoir 2 mètres 60 centi- mètres de hauteur, sous le chaperon et la saillie de celui-ci 25 à 50 centi- mètres. Si le mur était plus élevé de 4 mètres, par exemple , il serait convenable d'augmenter le chaperon et de lui donner 55 centimètres. Cette large saillie protège les raisins contre les pluies et les intempéries atmosphériques, surtout pour les cordons bas. Pour treillage un mur de 2 mètres 60 centimètres de hauteur, devant recevoir cinq cordons, il faut placer le premier rang de crochets à 40 centimètres du sol, et le qua- trième à 40 centimètres au-dessous du chaperon, les deux autres rangs doivent partager également l'espace intermédiaire. Les crochets devront présenter une saillie d'au moins 5 centimètres, de manière à égaler l'épaisseur de deux treillages, on engage la perche horizontale du bas et celle du haut dans les crochets, on passe entre celles-ci et le mur les montants perpendiculaires, sur lesquels doivent être clouées les perches horizontales destinées à supporter les cordons et le palissage. UELG. HOIIT. T. IV. 57 — 28G — Ce nouveau mode de treillage est préférable à l'ancien, en ce que les cordons s'appliquent directement sur toute l'étendue do la surface des perches et ne subissent aucun étranglement nuisible à la végétation. Condition d'un espalier. — J'ai dit qu'un mur de 2 mètres GO cen- timètres de hauteur doit recevoir cinq cordons; le premier sera formé de 40 centimètres du sol, les autres seront distancés de 42,45 et même 50 centimètres dans les terrains froids où la végétation est très-abon- dante. Le premier pied de vigne formera le premier cordon ; le second for- mera le troisième; le troisième formera le cinquième; le quatrième for- mera le deuxième; le cinquième formera le quatrième. Alors on dit que les cordons sont tiercés par 1, 5, b, 2, 4. Dans la pratique il convient de numéroter ainsi chacun des montants perpendiculaires du treillage sans intervertir l'ordre de la série (1). Cette manièi'e de tiercer a été inventée et mise en pratique par mon père, en i828, elle est préférée à l'ancienne, parce qu'aucun des cordons ne se trouve gêné dans son développement par la végétation du cordon su- périeur. Formation des cordons. — La taille de la vigne, comme celles des autres arbres fruitiers, est appelée à faire des progrès. Nous sommes restés longtemps dans l'ornière qu'avaient creusée nos pères, il importe d'en sortir au plus tôt, La formation des cordons réguliers a surtout appelé dans ces derniers temps, l'attention des horticulteurs ; pour l'ob- tenir, on a successivement proposé différents moyens qui, à mon avis, n'ont pas amené le résultat tant désiré, c'est-à-dire la parfaite régularité du T. On appelle ainsi le point où la ligne verticale donne naissance aux deux cordons qui s'allongent horizontalement en sens inverse. On l'a formé d'abord par la pousse herbacée ou non. A cet effet on incline sur le treillage destiné à supporter le cordon, et sous un angle de o5 degrés environ, la pousse, de manière à ce qu'il se trouve un œil du côté opposé à la courbure. La sève étant entravée dans son ascension par suite de la courbure, l'œil se développe et forme le second bras du T. Je condamne cette méthode, parce que j'ai toujours remarqué que le bras formé par la courbure, est toujours plus faible que l'autre, il n'absorbe que le tiers environ de la sève de la tige. Je ne conseille donc pas le T par la courbure. On Ta obtenu de cette autre manière : on taille sur l'œil qui se trouve le plus rapproché du treillage qui doit supporter le cordon, c'est-à-dire à 1 ou 2 centimètres au-dessous; le sarment produit par cette taille a deux yeux à son talon, qui se trouvent situés vis-à-vis l'un de l'autre. Au printemps suivant, on taille sur ces yeux, qui se dévelop- pent et forment les deux bras du cordon. Lorsque d'autres bourgeons (I) Le oliiffrp indique la hauteur du rordou sur cliaqnc montant. — 287 — apparaissent sur ce point , on les supprime à l'ébourgeonnenienl. Cette méthode est bonne, mais offre riuconvénient de retarder d'une année la i'ormalion du T. Nouvelle manière de former le T. — J'ai imaginé un nouveau procédé de taille à l'aide duquel j'avance d'une année la formation du T, sans perdre la l'écolte. Lorsque l'espalier est palissé, je choisis sur un bourgeon vertical l'œil qui se trouve à 1 ou 2 centimètres du treillage sur lequel je veux établir mes deux cordons horizontaux. Je taille au-dessous de cet œil, qui me produit au bout de huit à dix jours, un bourgeon anticipé ou faux bourgeon. J'abats ce faux bourgeon pour ne point perdre de sève et faire déve- lopper la bourre, qui ne devait sortir que l'année suivante. Lorsque cette bourre est suffisamment poussée pour être palissée, je l'attire en avant pour lui donner de l'air, si cela est utile, et je favorise sa végé- tation en pinçant les autres bourgeons au-dessus des grappes ce qui favorise celles-ci pour devenir plus grosses. Si faible que soit le dévelop- pement de la bourre ainsi obtenue (elle n'aurait que 10 centimètres) ; elle sera toujours pourvue à sa base de deux bons yeux très-rapprochés qui formeront mon T parfaitement régulier pour Tannée suivante. On pourrait encore former les bras la même année, mais les bourgeons n'auraient pas assez de force. Cette méthode est très-simple, facile à pratiquer elle avance d'une année la jouissance des cardons, j'affirme qu'elle m'a toujours procuré d'excellents résultats. Taille en palmette. — Lorsque le mur n'a que 2 mètres de hauteur, on peut le garnir à l'aide de palmettes simples. Les pieds se plantent à la distance de 70 centimètres. On taille habituellement de telle sorte, qu'il se trouve un œil alternativement à droite et à gauche , pour former courson sur chaque perche horizontale. Lorsque le mur à trois ou quatre mètres de hauteur, j'ai imaginé de planter à 40 centimètres. Le premier pied forme la sienne dans la moitié supérieure, et ainsi de suite, toujours en alternant. Par cette méthode, j'évite l'inconvénient que présentent les palmettes qui s'étendent sur toute la hauteur des murs , la végétation se porte toujours à l'extrémité supérieure, les coursons inférieurs se dégarnissent, deviennent languis- sants et meurent bientôt faute de nourriture. J'ai imaginé une autre palmette à coursons opposés. J'obtiens chaque année ces deux coursons par la méthode que j'ai conseillé pour le T. Toutefois en laissant trois bourres au lieu de deux, les coursons se trouvent placés sur chaque perche horizontale, vis-à-vis l'un de l'autre. Taille, èbourgeonnement , pinccmenl cl palissage. — J'ai indiqué les diverses manières de former les cordons ; il ne me reste que peu de chose à dire sur la taille de la vigne. Elle consiste à créer et entretenir — 288 — les coursons et les rameaux à fruits ou sarments qui se développent à la partie supérieure des cordons. 11 importe de faire développer tous les yeux à bois qui se trouvent sur les cordons aussitôt que le T est formé, et, pour cela, il faut tailler court, à trois yeux, par exemple. Le premier œil produira un bourgeon, destiné à devenir le premier courson, l'œil terminal qui doit être pris en dessous , formera le prolongement du cordon. Le premier sera palissé verticalement , le second recevra une direction oblique jusqu'à ce que sa consistance permette de l'incliner tout à fait liorizontalement. L'année suivante, le premier sarment pro- duit, sera coupé immédiatement au-dessous du deuxième œil et le plus près possible de la base; le second, qui forme le prolongement du cordon, sera taillé à deux ou trois yeux et traité comme l'année pré- cédente. La troisième année, il en sera de même que la deuxième , toutefois en donnant une distance de 20 ou 27 centimètres à chaque courson , on n'en formera qu'un tous les ans, lorsqu'il y en a deux sur chaque bras. Si les sarments des coursons se sont développés deux à deux , on devra supprimer complètement celui qui s'éloigne le plus du cordon; l'autre sera taillé à deux yeux comme précédemment et ainsi de suite, jusqu'à ce que les deux cordons qui sont conduits sur la incme perche, soient près de se rencontrer. Alors, il s'agit de raccourcir les bras des cordons en laissant pousser un bourgeon à peu près au milieu du bras qui doit servir de prolongement; on supprime l'extrémité, puis on continue à tailler comme les années précédentes [léger rajeunissement de la vigne). On doit veiller particulièrement à ce que les cordons ne s'allongent pas trop et n'arrivent pas à former ce qu'on appelle une tète de saule. Pour cela, il faudrait s'attacher à rajeunir ces coursons; on devra profiter des bourgeons qui naissent souvent à leur base, et on les taillera sur les deux yeux les plus rapprochés du cordon. L'ébourgeonnement consiste à supprimer, aussitôt qu'ils ont atteint 5 ou G centimètres, les bourgeons inutiles, on n'en doit laisser à chaque courson qu'un ou deux, suivant la qualité de raisin qu'on veut obtenir. Si parfois on n'en conserve qu'un , on choisira de préférence le plus rapproché de la branche mère, si l'on en garde deux, et, que celui qui est pour abaisser le courson, n'ait pas de fruit, on pincera à II) centi- mètres, afin d'éviler la confusion lors du palissage. On ne doit jamais laisser que deux bourgeons à l'extrémité du cordon, l'un supérieur, pour former courson, l'autre inférieur, pour le pro- longement. Lorsque le pied de vigne ne doit pas former cordon dans l'année, on ne lui laissera que quatre boui'geons pom- avoir de la grappe ; ces bourgeons ne devront pas produire plus d'une livre et demie de raisin, soit cinq ou six grappes. Quand le cordon est formé, il ne faut jamais conserver plus de trois — i>89 — livres ou douze bonnes grappes. On supprimera de préférence une grappe sur les bourgeons qui en ont deux, et celle qui sera la plus élevée, à moins qu'elle ne soit la plus belle. Lorsque les bourgeons sont sur le point d'atteindre le cordon su- périeur, il faut les pincer. L'opération doit toujours commencer sur les bourgeons qui se trouvent à l'extrémité des pieds, on supprime en même temps les vrilles et les faux bourgeons. Le palissage s'effectue en commençant par les extrémités des pieds, on incline avec précaution les bourgeons de prolongement afin de favo- riser la végétation des coursons. Lorsque ceux-ci ont atteint la longueur voulue, on les palisse verticalement en les espaçant le plus régulièrement possible. On renouvelle l'opération du palissage , lorsque l'état de la végétation l'exige. Cisellement. — Par cisellement, on entend la suppression, à l'aide des ciseaux , des petits grains des grappes qui ne sont pas trop serrées et de la moitié même des grappes qui le sont trop. On doit s'attacher à ne laisser que les grains égaux en grosseur. Lorsqu'une gi'appe est trop longue, on en supprime l'extrémité inférieure afin de rendre la maturité plus régulière. Effeuillaison. — Au moment du cisellement, on peut enlever déjà quelques feuilles frisées qui se trouvent près des murs, et qui ne favorisent en aucune manière la végétation. Plus tard lorsque le raisin commence à mûrir, on supprime quelques-unes des feuilles qui pour- raient froisser les grappes et particulièrement celles qui se trouvent du côté du mur. Au moment de la complète maturité, on enlève celles qui couvrent les grappes, et qui commencent à blondir, c'est alors que la rosée du matin combinée avec la chaleur du soleil, donne aux raisins cette belle teinte dorée si estimée des amateurs. Manière de rajeunir la vigne. — Lorsqu'on veut renouveler une vigne (jui a vieilli, il faut récepcr les cordons jusqu'aux coursons les plus rap- j)rochés du T. On taille les sarments à trois ou quatre yeux , afin d'ob- tenir deux ou trois forts bourgeons. On les laisse se développer sur une longueur de 1 mètre 50 centimètres , puis on les pince. Au printem])s suivant , on ouvre une fosse de 1 mètre 20 centimètres de largeur, sur une profondeur telle que le premier couchage ne soit pas cndonnnagé. On couche le pied avec précaution, et la même année, on obtient ainsi deux ou trois nouveaux pieds, suivant le besoin, destinés à renouveler le mur, ayant soin de ne se servir que des pieds qui donnent les plus beaux raisins, en les marqiiant d'avance. On peut encore quelque fois profiter des bourgeons qui poussent au pied des treilles. Au bout de deux ans de taille, il est possible de sup- primer le vieux bois et de commencer à cordonner comnK; avec de nou- velles plantations. — 290 — Conservation des raisins, — Les raisins qu'on désire conserver, ne doivent pas avoir atteint leur parfaite maturité ; il faut cependant qu'ils soient bien transparents. L'époque de la récolte varie du 23 septembre au 45 octobre pour ceux qui proviennent des couches ou des contre - espaliers, et du l*' au 15 novembre pour ceux des espaliers. On peut, néanmoins, attendre jusqu'à la veille des gelées. Le dernier récolté est plus sujet que les autres à la moississure, et, bien qu'il soit plus beau, il ne peut guère se conserver que jusqu'en mars, tandis que le premier, s'il a été rentré bien sec, peut attendre le mois de mai. On devra choisir les grappes les plus saines, celles dont le grain est le plus gras est le moins serré. Pour la bonne conservation des fruits en général et du raisin en par- ticulier, il faut : 1" Maintenir une température constamment égale à quelques degrés au-dessus de zéro ; 2° Empêcher l'action de la lumière ; 5° Prendre la plus sèche possible l'atmosphère du fruitier. Pour que la température soit égale, il faut que le fruitier soit inté- rieur, c'est-à-dire, qu'il soit entouré de murs extérieurs laissant entre eux un espace vide. La couche d'air interposée entre ces doubles murs empêchera la gelée de pénétrer et soustraira l'intérieur du fruitier à l'influence de la température extérieure. On aura soin de ménager une ouverture au midi et une au nord, pour la ventilation et l'assainissement de la pièce. L'intérieur devra être meublé de tablettes superposées ou étages en bois, laissant entre elles un intervalle de 40 à 45 centimètres. Chacune d'elles recevra à son bord extérieur une volige formant saillie de 10 centimètres environ pour protéger les grappes pendant le travail. Il est convenable d'établir en fil de fer le sol de ces ta- blettes, pour faciliter la circulation de l'air. On les garnit d'un lit de fougères ou de paille d'avoine, au moins ([uinze jours avant d'y placer les raisins. Soins à donner aux raisins. — Lorsque les raisins sont disposés sur les tablettes, il faut donner de l'air pendant quinze jours environ poui- leur faire perdre leur humidité, lorsque toutefois l'état de la température le permet. Après ce temps, on ferme hermétiquement pour interccplci- l'air et la lumière. On devra enlever avec soin les grains qui menacent de se gâter, sans craindre de retourner les grappes et de les chaugei- même de place. Si la gelée pénétrait dans le fruitier, il faudrait y intro- duire un poêle qui ne devrait donner que la chaleur nécessaire pour (jue le thermomètre ne descende pas au-dessous de zéro. Autrement la maturation des raisins serait trop hâtée;, et il en résulterait de graves dommages de l'élévation subite de la température. - 291 — PATHOLOGIE DES PLANTES. JMALADIE DE LA VIGNE. Le Moniteur français contient un rapport adressé par M. Victor Rendu, au nom de la commission de la maladie de la vigne à M. le Ministre du commerce, de l'agriculture et des travaux publics. Le rapport constate que la commission s'est rendue dernièrement dans la commune de Tbo- mery, afin d'examiner les résultats obtenus de l'emploi du soufre à sec préconisé comme moyen préventif d'une application facile et peu coû- teuse, et dès lors, susceptible d'être adoptée dans les grands vignobles. Le rapport constate que les vignobles de Tbomery sur lesquels on avait employé le soufre étaient dans un état ne laissant rien à désirer, tandis que quatre propriétés sur lesquelles on avait négligé tout moyen curatif avaient le plus triste aspect. » rhinensis. 24. Paeonia AiBiFLonA flore pleno. 25. » >i f'ragrans. 26. » » Ilumei. 27. » » Pollsi. 28. » >' festiva. Ce groupe se distingue des autres par le port et les couleurs. Les [)lantcs s'élèvent de deux à trois pieds de hauteur , se tiennent plus droites et plus belg. hort. t. IV. 39 — 502 — majestueusement, la teinte du feuillage est plus grave et plus foncée, et les fleurs varient du blanc pur au rose clair et au pourpre très-vif. Ces variétés s'utilisent pour l'ornementation festivale des jardins avec le plus grand succès et devant les lieux plantés d'arbres ou d'arbrisseaux ; elles embellissent aussi les parterres. Les numéros 49, 20 et 21 sont de fort jolies plantes, croissant de 48 pouces à 2 pieds en hauteur, portant des fleurs d'un blanc pur de G à 8 pouces de diamètre et contrastant avec les masses d'étamines jaunes placées sur le disque. Les numéros 22, 25 et 24 sont d'un port élégant et distingué, les fleurs toutes doubles, d'une odeur très-délicate, de 6 pouces en diamètre, toujours blanches. On vend aussi le P. whitlev et le P. ciii- NENsis sous le nom de P. albiflora flore pleno. Le Paeonia albiflora fragrans s'élève de 2 à 5 pieds ; la verdure en est sombre, les fleurs sont grandes, d'un pourpre rose, elles répandent une odeur exactement semblable à la rose. Le Paeonia albiflora //imiei ressemble à la variété précédente pour le port, mais les plantes sont ordinairement plus grandes; les feuilles de- viennent rudes, les fleurs n'ont pas d'odeur, mais si ces caractères ne sont pas précisément des qualités, il y a compensation, quant au diamètre des fleurs qui s'élève jusqu'à 9 pouces sur les pieds d'une bonne vé- gétation. Le Paeonia albiflora Potsii porte des fleurs qui malgré le nom d'a/- hiflora n'en deviennent pas moins d'un pourpre foncé. Elles sont très- doubles et d'une grandeur moyenne. Le Paeonia albiflora festiva se pose bien dans un parterre avec ses grandes feuilles d'un vert foncé , ses fleurs très-larges , claires , d'un blanc de crème et réunies en bouquet ; parfois elles se strient de rose ou de pourpre ou bien des teintes nuageuses de ces couleurs se forment sur ces grands pétales blancs. Le nom de festiva, fleur de fête, est très-bien donné à cette variété. Les pivoines herbacées en plantes faites se multiplient par divisions de pieds, mais il faut avoir soin de respecter le bourgeon de la couronne et de le laisser entier aux divisions enracinées. La reproduction par graines amène souvent la naissance de belles variétés. Les fruits mûrissent en septembre , ils s'ouvrent largement à leur maturité. On dépose les graines en terre, de suite, en choisissant un sol frais, humide , terreauté et meuble, on les enterre a un demi pouce de profondeur sous la surface de la terre. Au printemps suivant les petites plantes se montrent au jour et on les laisse deux ans en pépinière sans y toucher autrement que pour leur donner les soins de propreté. Quand les feuilles sont fanées ou qu'elles ont disparu, on sème sur le sol un peu de terre fraîche, sub- stantielle et engraissée avec du purin. La troisième, en septembre, on ôte les plante et on les place dans un parterre à ce destiné où la terre est légère , fraîche et terrcaulée. Chaque plante se met à 6 pouces d'une autre — 303 — et à trois pouces de profondeur. Les pieds restent dans ce parterre jus- qu'à ce qu'ils fleurissent , ce qui arrive ordinairement à la quatrième ou cinquième année après le semis. Quand la plante est faite, elle est beaucoup moins difficile sur le sol, la situation et la température. Elle résiste à nos hivers les plus rudes et celui de 1853-54 où le froid est descendu à 25 degrés Réaumur sous zéro, n'a nullement agi sur sa végétation. La pivoine herbacée ne craint même pas l'ombre des arbres, au contraire, elle y devient souvent plus belle et plus ample que sous une exposition au soleil. La seule circonstance extérieure avec laquelle elle ne s'accorde pas, est la sécheresse, et l'eau est un point qu'il faut spécialement soigner. Toutes ces conditions s'expli- quent par la patrie des pivoines herbacées, qui sont nées dans les gorges des Alpes et des hautes montagnes de l'Europe et de l'Asie pour descendre ensuite le long des vallées où l'humidité et l'humus des forêts entre- tiennent facilement leur vie. REVUE DE PLANTES NOUVELLES. Ceratosteina longifloriiin. Lindl. in Gard. Chron., 1848, p. 87. cum. ic. — Klotzsch in Linnœa, v. 24, p. 68. — Hook., Bot. mag., ann. 1854, tab. 4779. Ceratostema à longues fleurs. Famille des Vacci- niées. Synonymie? Ceratostema grandifloriim. Ruiz. et Pav. t. c. ined. t. 383. Arbrisseau à rameaux jeunes pubescents, feuilles à pétioles courts, petites, coriaces, ovales-cordées, ponctuées sur les deux faces, les bords retournés en-dessous, très-entières; fleurs pendantes, subterminales, solitaires ou agrégées principalement dans les aisselles des feuilles supé- rieures; pédoncules dépassant à peine en longueur les feuilles, pubes- cents, ainsi que les calices; corolles amples, suburcéolées cylindriques, dépassant cinq fois le calice, limbe à cinq lobes ouverts. Cette magni- fique vacciniée provient des Andes du Pérou où M. W. Lobb l'a trouvée à une altitude de 12,000 pieds. En 1853, fleurissant en Angleterre chez MM. Veitch et fils, elle fixa surtout l'attention du public horticole à l'ex- position de Chiswick. Les fleurs ont près de cinq centimètres de longueur et une brillante couleur rouge un peu orangé; l'intérieur du tube est plutôt d'un rose foncé s'approchant du pourpre. La synonymie citée plus haut est douteuse à cause du peu de détails que Don a communiqués sur cette plante ou une autre voisine conservée dans l'herbier de Ruiz et Pavon, dont ce botaniste avait eu la communication à la bibliothèque de Lambert. Culture. On cultive ce Ceratostema en Angleterre, comme une espèce semi-rustique, c'est-à-dire, de pleine terre en été et d'orangerie dans la mauvaise saison. On la reproduit par division de pieds, mais on ne dit pas si les graines ont acquis leur maturité pour assurer leur germination. — 504 — Exacum macrauthniii. Arn. in A n?i. des Se. nat., \. 2, p. 175. — Griseb. Cent., p. 5, in De C. Prodr. v. 9, p. 46. — Hook.,jBot. mag., 1854, tab. 4771. Exacuni à grandes fleurs. Famille des Gentianées. Tige un peu arrondie, presque simple; feuilles sessiles, elliptiques-lancéolées, plus ou moins amincies au sommet et à la base, à trois nervures, calice à cinq divisions, segments ovales, lancéolés, pointus, les ailes semi-subu- lées, corolle d'un bleu intense un peu pourpré, lobes largement ovales, acuminés, anthères conniventes, réunies en cône, style décliné. Cette élé- gante gentianéc est originaire des montagnes de Ceylan où elle croit à une élévation de COOO pieds au-dessus du niveau de l'Océan. Sa décou- verte est due au général Walker, et les graines sont parvenues en Angle- terre, à Rew et à Dublin, en 1852, par les soins de M. Thwaites. Des plantes fleurirent d'abord à Dublin au jardin de Glasniven, en décembre 1855, sous la direction de M. Moore et en 1854 (mars) sir Will. Hookcr publia la gravure et l'histoire de cette espèce. Ce botaniste trouve de la ressemblance entre ses fleurs et celles du Solanum amazonicum [Nycte- riiim Ker) en ce qui touche les étamines conniventes et le style décliné, mais la couleur des corolles est bien plus foncée et plus brillante. Le jaune des étamines ofl"re un contraste harmonique avec le bleu des corolles. Culture. Jusqu'à présent, on a cultivé cet exacuni dans la serre chaude; il y a quelques raisons aux yeux de sir William pour supposer qu'il ne sera qu'annuel ou bisannuel tout au plus. Gentiana Fortuni. Ilook. Bot. Mag., ann. 4854, tab. 4776. La Gentiane de Fortune. Famille des Gentianées. Plante de la section des pneumonanlhe du genre Gentiana. Tiges en touffe, droites ou ascen- dantes , feuilles largement lancéolées , les inférieures ovales , à trois ner- vures, scabres sur les bords, fleurs rassemblées vers le haut des tiges, solitaires-axillaires, terminales, sessiles; calice à tube campanule, cinq divisions linéaires, recourbées, corolle d'un bleu intense, maculée de blanc, ouverte, pentamère, lobe cordés ovales, sinus marqués de trois plis courts , inégalement tridentés et à peine exsertes , anthères libres. Grisebach dans le tome IX du prodrome de De Candolle, a décrit 455 espèces de gentianes, mais dans toutes ces espèces, la gentiane de Fortune ne le cède à aucune sous le rapport de la beauté des fleurs. Elle appartient évidemment aux pneumonanthe et a des rapports avec le Gen- tiana septemfula de Pallas, surtout avec sa variété maculata originaire de la Sibérie et de l'Altaï. La gentiane de Fortune est une plante robuste, à feuillage distant, et l'espèce se reconnaît très-facilement à ces plis ou écailles dentées qui garnissent la gorge de la corolle, et se prolongent par soudure dans le tube de la corolle. Elle est originaire du nord de la Chine, sans qu'on sache principalement les localités où elles croît sponlanémenl. En 4849, M. Fortune la comprit dans un envoi fait à MM. Standisch et Noble, horticulteurs à Bagshot. 1 — 303 — Culture. Quoique cette espèce soit très-probalement de pleine terre , cependant elle demande quelques soins particuliers pour amener sa flo- raison à bon port. La formation de ses fleurs se fait tardivement en automne et si tard que les gelées viennent les détruire. On doit alors rempoter les plantes en bouton et les faire ouvrir en orangerie ou serre froide. — Le sol qui seul peut lui convenir, est la terre de bruyère un peu marécageuse. Heiutzia tigrina. KarsteninOttoet Dietr. Allgm. Garl.Zeit.,\. 17^ p. 55 et Answ. Schônbliihend Gwcbse. Venezuel, v. 54, t. 2. — Hook., Bot. mag., ann. 1854, tab. 4774. Heintzia à fleurs tigrées. Famille des Gesnériacées. Tiges de 2 , 5 à 5 pieds de hauteur, selon quelques obser- vateurs obscurément téfragones, presque arrondies, droites, branchues, rouges, cotonneuses. Feuilles grandes, opposées, d'une consistance épaisse etunpeu charnue, ovales, acuminées, fortement dentées, cotonneuses au- dessus, poilues et pâles au-dessous, côte forte et veines parallèles nom- breuses, proéminentes sur la face inférieure, s'amincissant à la base en un pétiole long, succulent doux et rouge. Inflorescence axillaire et décrite comme ombelliforme, mais aussi à pédoncules simples, à une fleur ayant deux bractées à la base; fleurs presque droites ou droites, de plus de qua- tre centimètres de longueur. Calice fort grand, d'un jaune verdàtre clair, teinté de rouge, tronqué à la base, profondément divisé en cinq lobes ovales, longs et dentés. Corolle blanche, infondibuliforme , plus longue que le calice de moitié, tube blanc cotonneux, limbe à cinq lobes égaux, arrondis, étalés, orbiculaires, ponctués, les bords entiers, des points rouges pourpres sur fond blanc; étamines et style inclus, doux au toucher. Ovaire oval, doux, pourvu d'un anneau obscur à sa base. V Heintzia tigrina est originaire de Caraccas et on le prend le plus souvent pour une espèce de Gesneria. Karsten l'a élevé au rang de genre adopté par Wal- pers et Hooker. Ce dernier auteur le place près des Drijmonia et des Besleria^ mais ne peut encore se prononcer sur sa valeur définitive. Culture. Absolument semblable à celle des Gesneria. V Heintzia fleurit au milieu de l'hiver dans les serres chaudes. Sa nature charnue permet de le reproduire par les feuilles divisées le long de la base des nervures. Pitcairnia longifolia. Ilook. Bot. mag., ann. 1854, tab. 4775. Pitcairnie à longues feuilles. Famille des Broméliacées. Tige droite, allongée, simple, marquée d'anneaux rapprochés; feuilles très-longues (4 pieds), partant d'une large base amplexicaule striée, pubesccnte, lan- céolées, Irès-aigiies, relrécies au-dessus de leur base, vertes et ciliées d'épines; paniculc terminale, rameaux en grappe, fleurs unilatérales; pédicelles pourvus de bractéolcs; sépales subulés, verts, (rois fois plus courts que la corolle d'un rouge écarlate; pétales convolutés ccarlalcs, à sommets unilatéraux, écailleux à la base en dedans; étamines et style — 506 — subexerts, un peu plus courts que la corolle. M. William Nation reçut cette espèce de Lima, en 4852. Elle est très-remarquable par sa tige liante d'un empan et grosse d'un pouce , très-annelée finement par les vestiges des feuilles qui ont successivement péri. Les feuilles sontlarges d'un pouce et demi. Les fleurs, étroites et longues de deux pouces, sont d'un beau rouge vif, écarlate, avec le calice vert. Le Pitcairnia Jacksoni est, dans rénumération des espèces connues la plus rapprochée du Pitcairnia lon- gifolia. Culture. Elle est de serre chaude; sa floraison a lieu en décembre. Les Pitcairnia demandent une terre meuble, formée de terreau substantiel et tenue assez humide; ils exigent aussi la partie chaude de la serre, mais leur floraison est cependant favorisée par des arrêts dans la végétation occasionnés en été par un ralentissement prolongé dans les arroseraents. SaccolaMum denticulatum. Paxton. 3Iag. ofBot., v. 7, p. 145. — Hook. Bot. mag., ann. 4854, tab. 4772. Saccolabe denticulé. Famille des Orchidées. Tige rampante et radicante, feuilles linéaires oblongues très-aigûes, grappes corymbeuses plus courtes que les feuilles, sépales et pétales subsemblables, obovés-spathulés , planes, éperon du labellum globuleux, gros, unidenté de chaque côté et aussi grand que le périanthe, lame du labellum large et triangulaire, bord garni de franges glandu- leuses et touffues; colonne courte denticulée. Des dents à la colonne, des dents au tablier, des dents à l'éperon, on voit que le nom de l'espèce a dû venir très-naturellement à l'esprit du premier observateur qui l'a dé- finie. Le périanthe est jaune verdâtre, pointillé de rouge pourpre, le label- lum est blanc et les parties latérales de la colonne sont rouges. On dit la l)lante originaire de Khasya dans le Bengale oriental. Elle a été introduite par Clowe, à Kew, en 4857. Ce n'est pas une de ces brillantes orchidées à grandes fleurs, mais sa structure est si originale et si fine qu'on aime à la regarder de près. Culture. Sa culture est semblable à celle de la plupart des orchidées tropicales à tiges rampantes et poussant des racines le long de leur trajet. La culture aérienne ou suspendue lui convient, bien qu'elle ramjje aussi à terre sur les têts entremêlés au sol. Elle fleurit en novembre. — 507 — LITTÉRATURE BOTANIQUE ET HORTICOLE. LES FLEURS ET LES OISEAUX DU PRINTEMPS, EXTRAIT DES SCÈNES DU MONDE ANIMÉ, Par m. h. Lecoq, Professeur d'histoire naturelle de la ville de Clermont-Ferrand ('). Sous la zone tempérée que nous habitons , nous sommes témoins chaque année de la lutte des saisons. L'hiver et ses frimas glacés résistent longtemps encore aux premiers souffles du printemps; le combat s'éta- blit dans l'atmosphère, et la victoire d'abord indécise appartient de droit à celui qui livre la bataille, et suit l'ordre établi par le Créateur pour l'harmonie des mondes. Le froid est la mort, le printemps est la vie. La jeunesse qui triomphe aujourd'hui succombera plus tard sous le vent mortel de l'hiver et le cercle éternel qui enlace et conduit les mois de l'année, ramène aux mêmes époques, les mêmes scènes et les mêmes tableaux. Suivons un instant ce cercle qui nous entraîne avec lui, comme la fleur des champs qu'il fait éclore et qu'il anéantit, comme l'insecte qui bour- donne enivré de vie et de bonheur, et qui tombe ensuite sans laisser la trace de son passage. Un seul printemps suffît à la fleur éphémère, à l'insecte occupé de ses plaisirs et de ses amours; mais puisque Dieu nous a permis de parcourir en entier le cercle que nous ne pouvons arrêter, laissons nous entraîner sur sa pente et suivons en respectueux admirateurs, les scènes successives de ce monde animé. Les montagnes sont encore couvertes de neige; les nuages, emportés par le vent du nord , reviennent sous une impulsion contraire ; ils se (1) Nous avons reçu naguère des félicilalions d'un grand nombre de nos abonnés au sujet des deux communications publiées dans le premier volume de la Belgique horticole et dues à la plume, nous dirions mieux, dues au cœur de M. Henri Lecoq. Ces communications avaient trait , l'une au sommeil des plantes ou tableau de la végétation pendant la nuit , l'autre à la toilette et à la coquetterie des fleurs. Nous sommes heureux d'avoir reçu aujourd'hui de leur savant auteur les scènes du inonde animé dont nous donnons ici un exU'ait. M. Henri Lecoq est un des rares écrivains de notre époque qui , cnirant dans la grande voie parcourue avec tant de gloire par Linné , Buffon, Cuvier , Humboldt, savent entourer les grandeurs d'une science positive et exacte, de toute la splendeur d'un style noble et soutenu. En exprimant ce sen- timent de haute estime pour les pages si vraies et si pures du penseur de l'Auvergne, nous sommes persuadés do rencontrer les sympathies de tous ceux qui les liront. Les Scènes du monde animé paraissent à Paris, chez Baillière, un volume in-S"; 2 livraisons ont paru. — 308 — groupent en flocons ou s'étendent en un voile sombre qui couvre toute la terre et la sépare des beautés du firmament. Des étoiles légères, composées de cristaux glacés, descendent en oscil- lant de la voûte assombrie. Le vent siffle et s'arrête, puis il siffle encore, et la nuée entr'ouverte laisse s'écbapper des ondées de grésil qui tour- noient et qui tombent sur la végétation naissante. Le calme se rétablit, le soleil brille ; sa lumière décomposée dans les globules de glace no peut suffisamment cchaufTer l'atmosphère et les germes engourdis restent abrités sous leurs chaudes enveloppes. Le printemps est la jeunesse de l'année; comme elle, il a ses écarts qui s'apaisent avec l'âge, et bientôt les variations de l'atmosphère obéissant à des influences opposées, cessent et cèdent à cette douce température, à ces tièdes ondées qui donnent le signal du réveil à tout ce qui peut vivre et respirer ! 0 vous qui, pendant les longues soirées d'hiver, n'avez vu les fleurs qu'à la lueur des flambeaux, vous qui les avez admirées dans vos serres attiédies , sortez dans les campagnes; les vents glacés se sont retirés de nos riantes contrées, les bourgeons des arbres ont ouvert leurs écailles, l'eau tombée de la nue a vivifié tous les germes, les premières fleurs sont épanouies : venez jouir un instant du concert des oiseaux, de l'har- monie des fleurs, des parfums de l'air, et de ces scènes vivantes qui vont si rapidement vous passer sous les yeux. Les forêts abritées vous offrent les prémisses de la saison; l'anémone des bois y tient encore ses blanches corolles inclinées vers la terre; craignant un retour de l'hiver , elle ose à peine développer ses feuilles découpées. Près d'elle croît le corydalis aux racines tubéreuses; ses fleurs roses, étagées le long d'un épi, séparées par d'élégantes bractées, et suspendues sur leur mobile support, attirent de laborieux insectes sortis de leurs retraites et se livrant à leurs travaux. Des bombus annelés de blanc , de noir et d'orangé , y cherchent un miel rare et sans parfum , puis s'envolent en bourdonnant, se croisent, se poursuivent et s'arrêtent sur d'autres fleurs dont le sol est déjà couvert. Ils essaient la jolie pul- monaire aux feuilles tachées et aux corolles d'azur, ils effleurent la pri- mevère élevée, dont les ombelles soufrées sont l'indice certain des beaux jours. Près des corydalis, et autour des moelleux tapis de mousses éclatantes croît en abondance la scille à deux feuilles, avec ses grappes épanouies d'un bleu d'outremer; l'humble pâquerette étend ses rayons purpurins pour dé- couvrir un disque d'or. Le léger ysopyrum à feuilles de thalictrum balance au gré du moindre vent ses fleurs délicates et passagères, qui rappellent celles des hellébores. L'anémone renoncule montre ses fleurs orangées, sous les buissons de hêtre encore dépourvus de leurs feuilles. Des groupes de houx, au feuillage éternel, aux fruits ccarlates, sont disséminés au hasard sur le sol, et laissent deviner mille détours sur la mousse émaillée. i — 509 — Le merle et la fauvette y célèbrent une belle journée, et viennent avec inquiétude ou curiosité voltiger autour de vous. Le ciel est bleu comme la scille à deux feuilles, et le papillon citron aux ailes anguleuses sor- tant de sa retraite d'hiver, essaie de comparer la nuance pure de ses ailes au pourjjrc du corydalis, à l'or des renoncules, changeant à chaque instant par son inconstance les contrastes que vous admirez. Combien de fois déjà ce tableau s'est il renouvelé, depuis qu'assis sur cette mousse verdoyante, j'écrivais ces lignes, au milieu des montagnes et loin du séjour des hommes. Mais qui pourrait contempler à satiété les merveilles des forêts et cette majestueuse végétation arborescente qui , dans tous les pays du monde, donne au paysage son caractère et sa grandeur. Dans nos climats c'est au printemps que les grands arbres laissent épanouir leurs fleurs, et presque toujours avant que les feuilles ne vien- nent les entourer d'ombrage et de fraîcheur. Dès les premiers jours de l'année on voit les aulnes et les noisetiers, munis de longs chatons sus- pendus, abandonner à l'air des nuages de poussière fécondante, germes de vie transportés à d'énormes distances de leur point de départ. Les trembles à la verte écorce et les peupliers blancs laissent tomber les écailles résineuses qui réchaulTaicnt leurs fleurs unisexuées, le saule marceau et plusieurs de ses congénères, allongent subitement les filets de leurs étamines, et leurs anthères jaunes et odorantes attirent de nombreuses tribus d'insectes qui s'agitent pendant le jour entier sur leurs épis par- fumés. Le printemps jouit du soleil, et les arbres à peine feuilles ne répandent pas encore leur ombre protectrice. Plus tard de nombreuses espèces habi- teront les bois, y chercheront un abri contre les feux du jour; main- tenant le contraire a lieu, et c'est au contact d'une vive lumière que les espèces yernales se développent sur la terre. Le daphné lauréole cache ses fleurs vcrdâtres sous son brillant feuillage, et le bois joli aux flexibles rameaux, couvre ses branches de fleurs roses, dont le parfum rappelle le daphné des Indes. Les violettes sauvages ouvrent leurs corolles inodores, cause d'innocentes déceptions pour la jeune fille qui croit trouver sa fleur chéi'ie. Des tapis de pervenches restent humblement appliqués sur la terre, mêlés au lierre des forêts, parsemés de corolles d'un bleu céleste et près d'elles, paraissent de petits groupes d'adoxa musquée, frêle et délicate création, que la tiédeur de la saison peut seul conserver quelques jours. Ces plantes vivent en société, et ne soulTrcnt pas que d'autres espèces viennent partager avec elles le sol qu'elles ont acquis par la conquête ou par la proscription. Mais, plus loin, on voit l'érithrone à feuilles agréablement dessinées, à la fleur rose et inclinée, qui fait le charme de la forêt; puis le narcisse jaune qui allonge ses godets orangés, et près duquel la nature a placé la BELG. IIORT. T. IV. 40 — 510 — scille penchée , aux épis bleus et violets , pour former une nouvelle scène du printemps. Quelle vie et quel mouvement dans ces heureuses journées, où l'hiver paraît avoir abandonné, sans retour, les vastes forêts et les campagnes fleuries. La sève puisée dans le sol monte silencieusement dans des milliers de canaux invisibles à nos yeux; elle se divise et se partage dans les plus minces rameaux; les bourgeons s'entr'ouvrent, et les fleurs des arbres se montrent sans éclat. Les chênes laissent flotter leurs chatons verdàtres, le bouleau déroule ses épis suspendus, le sycomore balance ses grappes allongées, et le hêtre, à la cime majestueuse, laisse deviner, sous un feuillage translucide et plein de fraîcheur, le berceau de ses fruits et le coloris modeste de ses fleurs. Au milieu de cette confusion de verdure, des arbres paraissent avoir conservé la neige des hivers; ils se distinguent au loin par leur blancheur éclatante. Ce sont des cerises sauvages, dont les fleurs en bouquets cou- vrent les branches étagées, et dont le vent, dans ses tourbillons, aura bientôt emporté les blanches corolles au milieu des airs. La guêpe, au corsage annelé de noir, voltige sur la lisière des bois; elle arrache à l'écorce du frêne les fibres dont elle va tisser ses cellules, et des milliers d'abeilles bourdonnent sur le disque nectarifère de l'érable champêtre^ qui vient d'ouvrir ses fleurs jaunâtres et polygames. La grande abeille noire sort de sa retraite et ses anneaux métalliques ré- fléchissent la lumière du soleil, le bombix Tau cherche dans de brusques détours sa femelle immobile et de la même couleur que les feuilles des- séchées; la vanesse lo montre ses yeux irisés et le morio, aux ailes fran- gées d'or, étale en planant sur vos têtes toute la splendeur de ses taches azurées. L'écureuil amasse à la bifurcation des branches , la mousse qui doit abriter sa femelle; il saute gaiement dans les cimes des vieux chênes. Le loir, pressé par le danger s'élève au sommet des grands arbres, ou poursuivi par le chat sauvage, il s'élance sur le sol, gonflé d'air, la mem- brane de son corps étendue, et descend lentement en rappelant les scènes animées des polatouches de la Lithuanie et de la Finlande , ou les mœurs analogues des espèces de Java et des Philippines. De gros lézards verts, à gorge bleue, courent avec bruit sur le sol; l'orvet se traîne dans l'herbe naissante, et la couleuvre à collier expose à la chaleur tout son corps engourdi. Les tableaux sont aussi variés que les sites, et dans les lieux même où la perce neige s'est déjà montrée , on trouve un peu plus tard les fleurs papillonacées de l'orobe printanier, les panaches des luzules, les py- ramides verdoyantes des euphorbes et la sanicle autrefois vénérée, mais qui a subi l'inconstance des hommes. Le règne des orchidées arrive avec le cours des saisons, YOrchis fusca y tient le premier rang, le pourpre et le lilas nuancés par la nature en — 5H — font une des belles plantes de la forêt. VOrchis galeata l'accompagne, et autour d'eux, à l'ombi'e du feuillage, paraissent ces fleurs singulières des Ophrys copiant les formes anomales des mouches et des araignées , celles des bombus et des abeilles. Pourquoi ces formes imitatives que nous retrouvons sur différents points de la terre , dans les Epidendrum mosquito et torito de l'Amérique Méridionale, dans VAngidoa ou fleur du St. -Esprit et dans le singulier Blétia du Pérou, Ailleurs, le printemps fait éclore les corolles panachées des Millitis; il fait épanouir les larges spathes des arums et rechauffe leurs massues pourprées; il couvre de fleurs éclatantes le Litospernium cœruleo pur- pureum et garnit la lisière des bois de fusains et de nerpruns ou de viornes aux couronnes de neige et aux feuilles lobées. Les chantres des forêts, éloignés par le froid des hivers, se confient au souffle des beaux jours , ils arrivent en foule et reprennent possession de leurs bosquets. Bientôt ils abandonnent leur plumage, terni par la tempête et se couvrent d'une livrée aux couleurs éclatantes. La mélodie commence au sein des bois; elle exprime à la fois et l'amour et la crainte, le plaisir ou la peine, et souvent le bonheur. Ecoutez leurs accents, n'ont- ils pas un langage pour célébrer cette fête de la nature, n'ont-ils pas pour se comprendre cet alphabet harmonieux dont les notes distinctes ou soudées par de douces modulations se précipitent , se modèrent ou se traînent selon l'expression que l'oiseau veut leur donner; langage animé et sonore, chantant souvent les délices de leur existence , leurs désirs et leurs espérances. Dans ce concert des bois, il semble que chaque arbre, que chaque buisson rend un son différent ; le merle siffle en volant et traverse la clairière, l'alouette jette ses notes du haut des airs, la linotte ramage sous l'aubépine fleurie , le pinson lui répond sous le feuillage d'un ormeau , la grive se fait entendre sous le bosquet voisin , chacun paye un tribut à l'harmonie, et leurs compagnes silencieuses écoutent sans les ré- péter tous ces refrains d'amour. Ils voltigent, ils chantent encore, se dé- tournent et reviennent toujours, puis le couple heureux s'envole au milieu des bois dans les fourrés impénétrables, sur la cime des rochers ou se perd dans les nues. Sans cesse agités au milieu du feuillage naissant, ils cherchent un lieu tranquille ou chaque couple pourra s'établir. Les uns le trouvent au som- met des grands arbres, d'autres au milieu d'un buisson fleuri, qucl- (jucs-uns se cachent sous la terre, dans les champs verdoyants ou dans Iherbe des prairies; le creux d'un rocher, le vieux tronc séculaire ser- vent de retraite à des familles entières qui y trouvent repos et bonheur. Aussitôt ils sont à l'œuvre, le ménage est d'accord et travaille en com- mun. La charpente est posée et l'on commence à tisser la trame qui doit supporter la couche moelleuse. Tous alors redoublent d'activité; ils entraînent les tiges desséchées de — 312 — plantes herbacées, celles des caille -laits, des paturins et des agrostis légères; ils recueillent les crins abandonnés par les animaux; ils trans- portent les mousses que les vieux arbres leur offrent en abondance, et les plus élégants Hypnum, et les Leskea veloutés et transparents sont mis en œuvre par ces ingénieux constructeurs, les lichens sont arrachés des branches ou des rochers; leurs petites feuilles reliées par des racines ou collées par de l'argile délayée, masquent l'extérieur de l'édifice, de ce séjour qu'ils cherchent à entourer de mystère. La laine que les buissons épineux arrachent aux troupeaux, la plume emportée par le vent, vont tapisser l'intérieur de ces charmants réduits. L'aigrette vaporeuse de la graine du saule et du peuplier, portée rapide- ment sur les ondes mouvantes de l'air, devient pour eux le prix de la course ou du combat. C'est l'édredon d'une jeune famille dont la brise balancera le berceau. Hélas! nous qui avons la raison en partage, nous combattons souvent pour un motif plus futile encore que ce léger duvet qui voltige au gré du vent; nous portons la mort au milieu des glaces polaires, pour l'élégante fourrure d'une zibeline, dans les déserts de l'Afrique pour les marabouts d'une autruche, et dans les forêts vierges de l'équateur pour les plumes éclatantes des aras. L'oiseau ne détruit rien pour construire l'habitation de sa famille , des débris lui suffisent, et de ces riens il forme les plus charmants ouvrages. Cherchez avec persévérance, étudiez leurs ruses et leurs détours, et vous découvrirez alors quelques-unes de ces retraites où votre présence amènera l'inquiétude et les tourments. Admirez, puis éloignez- vous. La linotte a déposé cinq œufs blancs, dont le gros bout est moucheté de rouge. La grive dont le nid est tapissé d'argile, a quatre œufs d'un vert bleu parsemé de points noirs. La corneille , sur le haut d'un arbre soli- taire, couvre les siens qui sont d'un vert gris maculé de noir. Le loriot à la livrée d'or, à la noire mantille, a suspendu sa nacelle à la bifurcation d'un pommier, et quatre œufs blancs tachés de noir contiennent les ger- mes de sa postérité. Le merle de roche, à la poitrine rose, mantelé de bleu, niche dans le creux du rocher; six œufs d'un vert de mer composent sa famille, et le rossignol, sans éclat et presque sans parure, décèle par ses mouvements le lieu où des feuilles mortes, artistement groupées, contiennent cinq œufs couleurs d'olive, produit de ses amours. Le pic-vert frappe à coups redoublés le vieux tronc qui résiste à ses coups ; il en essaie un autre , et avec une laborieuse persévérance il y creuse un abri; la mousse le tapisse, et six œufs blancs purs et brillants y sont préservés de la pluie et des orages. Les mésanges, constamment agitées, profilent des cavitées des vieux arbres et y pondent des œufs nombreux blancs et sablés de points rouges, tandis que l'engoulevent pose au pied d'une touffe de bruyère, sur un — 515 — sol dénudé, deux œufs marbrés de gris. L'alouette s'élève en célébrant l'hymne du printemps, elle se perd dans la nue pendant que sa compagne attentive au moindre bruit, couve, sous la motte du guéret, des œufs pointillés de gris et de brun. Déjà dans l'antre du rocher, ou sur le plus vieil arbre de la forêt, l'oiseau de proie a placé son aire; les petits sont éclos, et des scènes de carnage contrastent avec les fêtes des oiseaux chanteurs et leur douce mélodie. Le milan plane dans les airs et rapproche ses cercles concen- triques pour fondre sur sa proie; la buse fait entendre son cri monotone et guette le passereau qu'elle va sacrifier à sa progéniture ; l'autour, au vol rapide, fond sur la perdrix craintive et l'enlève dans ses serres acérées. Telle est la destinée des êtres animés, que la mort elle-même devient la source de la vie, cercle éternel de générations successives qui se tiennent et s'enchaînent, mélange de plaisirs et de peines pour tout ce qui respire, source profonde de rêveries poétiques et de religieuses émo- tions. Un son plaintif a frappé votre oreille ; c'est la tourterelle qui vient de traverser le feuillage. Elle a dit son chant d'amour et sa compagne rapide la suit d'un vol assuré. Les beaux jours les ont surpris, et sur la branche bifurquée d'un érable, au point même où elle vient s'attacher sur le tronc, le couple construit à la hâte un léger berceau de branches des- séchées. C'est une coupe élargie, sans mousse et sans duvet où deux œufs, blancs comme l'ivoire, assurent leur postérité. Un couple en sor- tira, de sexe différent, et avant que les saisons aient terminé leur cours, les enfants répondront au roucoulement de leur mère. Qui donc, si ce n'est Dieu lui-même, inspire au jeune oiseau le désir de traverser les airs. Mollement étendu sur la couche où il a pris nais- sance, il cherche à s'en éloigner; il hésite, il tremble et pourtant il brûle d'essayer ses ailes, dont l'usage lui est inconnu. Pressé par l'exemple, il hésite encore, mais il s'est trop avancé sur le bord du ber- ceau où il dormait avec sécurité; il tombe, il ouvre les ailes, l'air le sou- tient et le balance. Il se repose sur la branche voisine, il monte, puis redescend; et confiant dans l'élément vaporeux où il doit passer sa vie, il dit à ses parents un éternel adieu. (La suite au mmiéro "prochain.) 514 — PI. 47. AVelliniïloiiia «[isaiilea. Lindl. — 315 — HISTOIRE DES PLANTES CURIEUSES. LE WELLINGTONIA GIGANTEA OU LE PLUS GRAND ARBRE CONNU DU MONDE, Par m. Ch. Morren. L'événement horticole des derniers jours de 1855, n'est pas seulement un fait extraordinaire dans les annales de la science des jardins, de la botanique et de Téconomie forestière, mais c'est un événement aussi dans la connaissance du globe, des œuvres de la création et de cet ordre de choses qu'il n'est permis à personne d'ignorer, sous peine de n'être, ni de son époque, ni de son pays. La nouvelle la plus extraordinaire de ces temps, c'est la découverte et surtout l'arrivée en Europe, à l'état vivant, du plus grand arbre que la végétation ait sans doute produit, d'un im- mense colosse, d'un prodige tellement prestigieux, dit un des témoins oculaires, qu'il a fallu évoquer l'ombre du plus illustre des héi'os de l'his- toire moderne pour trouver un nom digne de la merveille elle-même. Ce héros, ce nom, du moment que l'idée venait d'un Anglais, vous l'avez deviné; c'est Wellington, et l'arbre, par conséquent, le plus gigantesque végétal, sera désormais le Wellingtonia gigantea. Ainsi l'a voulu Lindley, le botaniste célèbre de Londres , et il a pour excuse l'enthousiasme patriotique, l'amour de son pays et le culte de ses gloires ; mais il faut une excuse pour légitimer ou mieux , disons le fran- chement, pour faire passer un baptême si contraire à tous les usages et à toutes les règles admises dans la nomenclature des plantes. Que de fois n'a-t-on pas reculé devant l'intention de donner aux végétaux des noms qui puisaient leur valeur dans la politique, la littérature, les arts, etc. Wellington ne s'est jamais, que nous sachions, occupé de fleurs, de par- terres et de boulingrins, et lui-même rirait sans doute de bon cœur, s'il pouvait voir son souvenir définitivement classé par ses compatriotes entre les sapins, les ifs et les cyprès, arbres aussi raides et droits que l'était sa noble personne. Peut-être, dans cet entraînement à donner ce grand nom politique au plus grand des arbres verts, n'a-t-on pas réfléchi que la place naturelle où l'on plantera souvent le représentant du général, sera pré- cisément le lieu de repos où son genre de mérite conduisait tant de ses amis et de ses ennemis : le cimetière. Un arbre funéraire consacré à un grand homme de guerre, l'analogie est parlante, et cependant nous doutons fort qu'elle soit entrée dans la volonté de celui qui a posé cette coïncidence. On ne peut pas avoir de plus lugubre rapprochement. L'histoire du Wellingtonia gigantea est du reste très-intéressante en elle-même. On peut maintenant se figurer exactement la forme et le port de cet arbre , puisqu'on possède des gravures qui le représentent. La — 516 — description botanique ne laisse plus aucun doute sur ses caractères de genre et d'espèce. Les naturalistes, les horticulteurs, savent tous que David Douglas était un des leurs, pauvre amoureux de toutes les jolies choses de ce monde des fleurs; né à Sconc, dans le comté de Pcrth et pourvu comme beau- coup d'Ecossais d'un esprit tenace et hardi et d'une volonté énergique. Il partit une première fois, en 1825, pour les États-Unis et le Canada, revint l'année d'après pour entreprendre un voyage plus long, à la suite duquel il ramena en Europe des plantes charmantes, cultivées aujourd'hui dans tous les jardins. En 4830, il retourna en Californie d'où il envoya en Europe des conifères naguère inconnus, mais aujourd'hui répandus dans les fines collections. Le malheureux Douglas voulut enfin visiter les îles Sandwich pour en étudier la flore : il y périt à Tàge de cinquante-cinq ans d'une façon lamentable. Il tomba dans une fosse destinée à capturer des bétes sauvages et y fut mis en pièces par un taureau furieux. Un mo- nument, élevé par la reconnaissance des botanistes à sa gloire, dans le cimetière de Scone, rappelle ses plus belles découvertes et son martyre. Pendant que Douglas se trouvait en Californie, il écrivit à sir William Ilooker, intendant des cultures royales de la reine d'Angleterre, une lettre où il mentionna la beauté et la grandeur des conifères de cette flore. «La merveille, disait-il, de la végétation californienne est une espèce de Taxodiiim qui donne aux montagnes de ce pays un aspect imposant et solennel, un caractère majestueux inconnu dans les plus vieilles forets de l'Europe. J'ai, ajoutait le naturaliste écossais, mesuré plusieurs fois des individus de cet arbre, hauts de 270 pieds, d'une circonférence, à trois pieds au-dessus du sol, de 32 pieds. J'en ai même rencontré de 300 pieds de hauteur, mais pas plus gros que la mesure en circonférence désignée ci-dessus.» Quand cette nouvelle arriva en Europe, on se demanda quel pouvait être cet arbre? Nul ne pouvait le dire dans l'absence de graines, de cônes et d'exemplaires fleuris. Cependant feu le professeur Endlicher, de Vienne, ramena Tarbre gigantesque de Douglas au genre séquoia et nomma déjà l'espèce cjigaiitea; il fonda sa spécification sur sa différence d'avec le Taxodmm sempervi- rens qu'Hooker avait figuré d'après la collection même de Douglas, mais il se trouva, et on le sut plus tard d'une manière certaine, que ce même dessin représentait VAhicshracteata, une espèce de sapin. Le Taxodmm de Douglas devenant ainsi un être problématique, le Séquoia gigantea ne fut plus qu'un doute et ce n'est pas de conjectures que doit se composer l'histoire naturelle des êtres crées, et encore moins de ceux qui mesurent trois cents pieds de taille. En efl'ct, M. William Lobb a prouvé depuis que l'arbre gigantesque de Douglas ne pouvait pas être le Wellingtoniaf qui ne se trouve qu'à 120 milles de la localité du premier, mais que larbrc de Douglas est le Séquoia sempervirens. L'observation de M. Lobb rangea enfin le Séquoia gigantea d'Endlicher dans les êtres imaginaires. -- 517 — La conséquence de ces faits est que le Wellinglonia possède en Cali- fornie un émule en grandeur, émule découvert par Douglas, mais que ce dernier naturaliste n'a aucun droit à la découverte du premier de ces arbres. En effet, M. Lindley reçut un jour du mois de décembre 4835, de M. Veitch, horticulteur, à Exeter, des branches et des fruits d'un coni- fère californien dont les graines et des individus vivants lui avaient été importés par un collectionneur, fameux déjà dans le commerce des plantes rares, M. William Lobb. Ce dernier avait écrit les renseignements sui- vants au sujet de son conifère : <( Cet arbre magnifique et toujours vert est d'une dimension en hauteur et en grosseur tellement extraordinaire qu'il peut être regardé comme le souverain ou le monarque des forêts californiennes. Il habite un dis- trict solitaire sur les pentes élevées delà Sierra Nevada, près des sources du Stanislau et de la rivière de San Antonio, par 58" lat. N., une longi- tude de 128" 10,0. et à une élévation au-dessus de l'Océan de 5000 pieds. Tous les arbres de cette espèce, au nombre de 80 à 90, existent dans le circuit d'un mille anglais seulement; ils varient en hauteur de 250 à 520 pieds et offrent de 10 à 20 pieds de diamètre. Leur manière de croître est exactement celle des Séquoia, les uns solitaires, les autres par couples et assez souvent trois ou quatre se réunissent par groupes. Un arbre abattu récemment était d'une longueur de 500 pieds environ sur un dia- mètre, l'écorce comprise, de 29 pieds 2 pouces, à o pieds du sol. A 18 pieds au-dessus de ce dernier, ce diamètre était de 14 pieds, et à 200 pieds de hauteur, le diamètre était encore de 5 pieds, 5 pouces. L'écorce est d'un brun cannelle, épaisse de 12 à IS pouces. Les petites branches sont rondes , un peu pendantes et ressemblent à celles d'un cyprès ou d'un genévrier. Les feuilles sont d'un vert d'herbe pâle, celles des jeunes arbres, éparses, se terminent par une pointe finement acuminée. Les cônes ont deux pouces et demi de longueur sur deux de largeur dans leur partie la plus épaisse. » «t Le tronc de l'arbre en question était parfaitement solide , depuis le bois en sève jusqu'au centre et en jugeant par le nombre des couches concentriques , l'âge de l'arbre devait être infailliblement estimé à trois mille ans. Le bois est léger, doux, d'une couleur rougcâtre, comme le bois rouge du Taxodiitm sempervirens. Les journaux ont déjà publié ce fait, ajoutait M. Lobb, qu'à l'exposition de San Francisco, figurait un morceau d'écorce de 21 pieds enlevé à ce monstre, et avec ce lambeau d'écorce on avait construit un salon à tapis, contenant un piano et qua- rante sièges pour visites. Dans une autre occasion, on y avait admis, sans inconvénient, 140 enfants. )> «t Quel peut être cet arbre? se demanda 31. Lindley à son tour, — quel imposant aspect et quelle fabuleuse antiquité! puisque le pied, coupé à la jonction du Stanislau et du San Antonio, comptait 5000 ans d'âge, ce devait être un petit arbre au temps où Samson défit les Philistins, où BELG. HOUT. T. IV. 41 — 5i8 — Paris enleva Hélène, où Enée transporta sur ses épaules son père Anchise, — et tout cela, continue le secrétaire de la Société d'horticulture de Londres, doit être ainsi, puisqu'on sait positivement qu'en 20 ans, sa croissance ne dépasse certainement pas deux pouces anglais en diamètre. Un échantillon d'une branche adulte et des cônes : voilà tout ce que l'on possède à Londres de cet arbre gigantesque, sans compter les graines qui sont actuellement en pleine germination et croissance chez MM. Veitch pour les livrer au commerce à la fin de cette saison. On ne connaît pas la fleur mâle et on ne sait pas si les fleurs sont bien dioïques. Voici donc la description, nécessairement incomplète, que sir William Hooker publie du Wellingtonia gigantea : Arbre gigantesque atteignant plus de trois cents pieds de hauteur (voyez son port et sa forme, pi. 47). Diamètre du tronc de cette hauteur : de vingt à trente pieds ; écorce très-épaisse. Extrémité des branchettes légèrement pinnée et dichotome, pendante, étroite, filiforme. Feuilles (voy. pi. 48) petites, alternes, coriaces, d'un vert pâle, disposées en spirale de ma- nière que trois embrassent le circuit de l'axe, toutes droites et imbriquées, de manière que les branches couvertes de feuilles paraissent cylindriques. Feuilles des plantes jeunes oblongues-subulées, apiculées ou mucronées, semi-amplexicaules à la base, carinées au dos, planes en dedans, mais avec une côte centrale un peu saillante ; celles des rameaux plus âgés sont plus petites, plus courtes, plus compactes, comprimées, ovales-lancéolées et aiguës. Fleurs mâles complètement inconnues. Cônes (voy. pi. 48) à leur maturité complète et privés de graines , de deux pouces à peu près de longueur , sur un diamètre d'un pouce trois quarts dans la partie la plus large, ovales, obtus, sessiles, ligneux, composés au centre d'un axe (ou apophyse) d'une forme cylindrique portant plusieurs écailles grandes, épaisses, éparses, de la même consistance que l'axe lui-même et faisant corps avec lui par leur base épaissie. L'épaisseur de ces écailles s'augmente par la soudure complète de la bractée avec elles; la pointe est dilatée, convexe , transversalement rhomboïdale avec une ligne ou carène élevée transversale et au centre une dépression pourvue d'une pointe [umho des latins). Sous chaque écaille, selon M. Lindley, se logent sept graines (voy. pi. 48), exactement comme dans les Sciadopitys. Graines de la même forme que dans ce genre, c'est-à-dire, presque orbiculaires , com- primées, petites, moins d'une ligne en longueur et à peine ailées sur les bords (voyez pi. 48, le cône, les feuilles et les graines). On regarde en Angleterre , le Wellingtonia comme parfaitement rus- tique et capable de braver en pleine terre les intempéries des hivers de nos climats. L'importance d'une telle introduction ne saurait donc être niée. On annonce déjà la possibilité de délivrer aux amateurs des petits géants de la Californie, dès l'automne prochain. — 519 PI. 48. Rameaux, feuilles, cône el graines du Wellingtonia giganlea. 520 — PI. 49. Banc de verdure de la villa Slrada. — 521 — ARCHITECTURE DE JARDIN. DE L'EFFET PRODUIT PAR LES ARBRES TONDUS DANS LA DÉCORATION DES JARDINS; EXAMEN DE LA QUESTION JUSQU'oÙ CES ARBRES SONT ADMISSIBLES, Par m. h. Noël Humphreys. Les premières aspirations à la décoration des choses, dans les diffé- rentes branches des beaux-arts, consistent dans la volonté de soumettre l'irrégularité des formes naturelles aux régularités de la géométrie, en réalisant en même temps la régularité de la répétition où l'œil le plus vul- gaire reconnaît l'existence de l'ordre et de ses lois. Ce sont là les premiers pas de tout ce qui fait la civilisation et l'art du décorateur a marché comme les arts sociaux, politiques et plastiques. Ainsi l'indien sauvage orne la grossière écorce de sa massue; il y sculpte avec recherche une série de zig-zag ou de lignes ondulées et la régularité de ces lignes devient dans son estime un mérite auquel il attache un grand prix. Il arrive cependant tôt ou tard, une époque où l'avancement de l'art consiste dans un retour qui le ramène aux contours naturels. C'est alors qu'on trouve une autre race d'artistes dédaignant les modèles réguliers et à moitié sauvages; ils imitent les sculptures raboteuses et âpres que leurs devanciers s'efforçaient d'effacer. Ainsi, dans le jardinage, les premiers pas dans l'ornementation ont été partout de couper, de tailler, de tondre. En premier lieu, on voulait obtenir la symétrie des lignes, équarir et niveler. A peine ce résultat obtenu , des vues plus ambitieuses se font jour : il faut des temples, des amphithéâtres, des colonnades, des por- tiques de verdure à ces architectes en feuilles. En Italie l'art ne dépassa guère ces limites, mais dans le nord de l'Europe, en Hollande, en Bel- gique, en Angleterre, les arbres prirent la forme humaine et toutes sortes de monstres feuillus s'emparèrent des jardins; le buis, l'if et quelques autres espèces à feuilles persistantes et serrées, se prêtèrent à ces jeux en se laissant façonner comme le voulait la fantaisie du maître. Des bergers et des bergères, des chiens et des paons, mille autres conceptions furent réalisées, et comme pour ajouter au mauvais goût de ces décors, on ajoutait à ces mannequins de verdure, des faces, des mains peintes aux couleurs na- turelles. Cette manie dura près d'un siècle, mais la réaction fut violente. Quant on se mit à faire la guerre aux arbres tondus, on les rasa jusqu'au pieds et il est bien rare aujourd'hui de retrouver un jardin où ces restes tl'un siècle d'erreur ont été sauvés. En Hollande, au Hanovre, on en cite encore quelques-uns de conservés, mais ils deviennent tous les jours de plus rares en plus rares. Cependant à tout bien examiner, il doit y avoir dans l'art de la taille — 522 — PI. 50. .,1 ,'.iriil!M'Ui!il'l'l'l''l''i''|i'!'' Aniphilhéàli'e de vrrdiiro. — 525 — quelques réalisations à adopter qui ne blessent ni le bon goût, ni les prin- cipes de l'art de la décoration. Les Italiens ont beaucoup mieux compris ce fait que les autres peuples de l'Europe, à cause de leur tendance na- turelle vers l'esthétique et aussi par suite de leur ciel ardent et chaud. Il fallait pour eux chercher l'ombre épaisse des cimes odorantes et les Ita- liens firent des murs et des galeries en arbres et en arbustes d'une viridité perpétuelle. Voyez pi. 49, ce long banc de verdure de la villa Strada, près de Rome : il est adossé à un mur de tilleul taillé et maintenu serré. Quand on y remarque des ouvertures faites par le temps, on a soin de les rem- plir par des espèces susceptibles de croître dans un fourré aussi dense, et à la villa Strada, on emploie à cet effet le laurier s'entourant d'une atmosphère parfumée. On voit aussi qu'un peu au-dessus du dossier on a ménagé dans le mur en feuilles une entaille horizontale qui permet à l'air refroidi de l'intérieur du taillis de venir se déverser dans l'air échauffé du devant et de lui communiquer sa fraîcheur. La planche 50, représente un «t amphithéâtre de verdure » pris aussi dans les jardins de l'Italie. Cette forme est une de celles qui, introduites et réalisées en Angleterre, y ont obtenu un plein succès. Après le jardin à fleurs qui se trouve ordinairement près de la demeure et sur une ter- rasse, vient l'amphithéâtre de verdure d'où l'on découvre les vues sur la campagne, les scènes de la nature ou quelque point de perspective qu'un propriétaire aime à faire valoir. Une série de tilleuls se relient vers le haut par une suite d'arcades et la plantation se fait en demi cercle avec deux ailes terminées selon les convenances des lieux. Les troncs des tilleuls sont embrassés par des rosiers grimpants ou même par des ronces à fleurs voyantes, dont les feuilles et les fleurs nombreuses cachent entièrement l'écorce de ces arbres. Il est à remarquer que le haut des arcades taillé simplement sur un plan uniforme, ne laisse à la ligne du sommet qu'une touffe ou bouquet de branches peu élevée au-dessus de chaque colonne. En effet, le moins d'ornement possible dans ces sortes de constructions, la simplicité grave et harmonique de ces tailles sont des qualités d'autant plus essentielles que la nature tend sans cesse à les déformer par des croissances continues. Un bassin placé au milieu du demi cercle rafraîchit l'atmosphère par un jet d'eau et donne un caractère de somptuosité à l'édifice de verdure. Dans les parcs des pays du nord, ces amphithéâtres de verdure se voient trop rarement et pourraient s'obtenir avec des avantages que ne connaissaient pas nos pères : les nouvelles espèces d'arbres verts résineux ou à feuilles résistantes ont beaucoup augmenté de nombre dans l'hor- ticulture moderne. On peut y trouver des ressources et sans suivre les anciens errements, approprier la taille aux justes exigences d'un goût épuré. - 524 — JARDIN FRUITIER. L'ABRICOTEE OU LA PÈCIIE-ORANGE, Par m. Ch. Morren. En -1758, Knoop dans sa Pomologia , signale la pêclie-orange sous le nom d' Oranje-persik , en lui donnant pour synonymes les noms d'Abri- coté, d' Abricot-pêche , d'Admirable jeaune, d'Hermaphrodite, de San- dalie, de Pêche de Biirat et de Grosse jeatine. Jean-Herman Knoop, ci-devantjardinier [hortulanus in tempore, comme il l'indique sur le titre de son ouvrage), alors mathématicien et amateur de sciences {mathematicus et scientiariim amator), a surtout décrit et figuré les variétés et espèces d'arbres à fruit cultivées dans les Pays-Bas. La pèche-orange était un fruit estimé dans ces contrées et elle l'y est encore. Seulement d'après l'auteur, elle ne réussit pas toutes les années et dans les terrains froids et secs elle devient farineuse et insipide. Sa floraison ne comporte qu'une petite fleur, mais l'arbre produit ordinairement beaucoup. Duhamel assurait au contraire que l'abricotée et l'alberge étaient parfois munies de grandes fleurs, mais Noisette et Gautier mettent l'asser- tion de Duhamel en doute, et si l'observation a eu lieu, elle n'a constaté qu'une anomalie. Chacun de ces auteurs a décrit cette variété, mais sans donner un seul mot relativement à son origine. Cultivée aux bords de la Meuse, à Liège, par M. Brahy-Ekenholm ('), cette pêche obtenue sur des arbres en plein vent et plantés seulement depuis 4847, a présenté, en 4855, les caractères suivants: Fruit ovoïde, privé de mamelon, de 7 à 8 centimètres de diamètre, pourvu d'un enfoncement orbiculaire et conique pour l'attache du pédon- cule. Duvet cotonneux, épais. Tout l'épicarpe d'un jaune-orange brillant, de la teinte de l'or ou d'un jaune d'œuf et du côté où le soleil avait frappé le fruit, une coloration rouge due à une double cause : d'abord des plaques pourpres irrégulières, mais d'une étendue de deux à dix millimètres et ensuite un pointillé très-fin de la même couleur. La chair est entièrement orange, très-belle et appétissante à voir ; son odeur est exquise et son goût délicieux. Cette chair tient un peu au noyau, ce qu'ont vu aussi les auteurs cités ci-dessus, mais ils lui donnent l'arôme de l'abricot, ce que nous n'avons pas constaté. Ce parfum, dit Noisette, ne se développe que dans un automne très-chaud. Elle ne mûrit que vers le milieu d'octobre. On peut se procurer facilement ce péchera Liège. (1) A propos de la pèche Brahy décrite et figurée par nous page 180, 4e vol. de la Belgique horticole, M. Brahy désire que nous rectifions un mot de l'article en question. M. Brahy n'avait pas cédé l'exploitation de sa variété à un horticulteur, mais lui avait donné gratuilcinent la permission de la multiplier et de la vendre. A 23 fr. même, cet horticulteur en trouvait le placement. lat-.pi) pmJK,. IV'chc abricoléc Xi£^ C Jep&reyns 1 . G^^nnol)sis muserinlis . llook. 2-4-- Kxaeuin macvaullumi. llook — 525 — HORTICULTURE. LE GYMNOPSIS UNISÉRIAL DU TEXAS, GRANDE FLEUR JAUNE A ODEUR DE JASMIN, Par m. Ch. Morren. De Candolle fonda en i 856, le genre Gyninopsis dans les sénécionidées, famille des composées, en le caraclérisant comme suit : Capitule multi- flore hétérogamc ; fleurons des rayons disposés sur une seule série, ligu- les, neutres 5 fleurons du disque tubuleux, hermaphrodites. Involucre en deux séries; écailles extérieures subfoliacées. Réceptacle plane convexe ou fortement conique paléacé. Style du disque à rameaux appendiculés. Achènes couronnés d'une aigrette coroniforme courte et dentée. Ce sont des plantes herbacées ou des sous-arbrisseaux d'Amérique assez mal connus et qui demandent d'être mieux examinés par un botaniste. En 1856, on en connaissait une dizaine d'espèces, et plus tard Hooker, dans ses Icônes plantariim, o" tab. , 145, fit connaître le Gymnopsis uniserialis, figuré dans la Revue horticole de juillet 1855, p. 261, et décrit de nouveau par 31. J. Decaisne. Gymnopsis uniserialis. Hook, ic, pi. 5, t. 145. Tiges droites scabres, subdichotomes, rameuses, diffuses, cylindriques, poilues, poils blancs apprimés,un peu tuberculeuses à sa base; feuilles oblongues, ovales, pétio- lées, alternes, anguleuses-dentées, dents aiguës, acuminées, pourvues de trois nerviu'es basilaires, presque nues au-dessus, obscurément ponctuées et au-dessous strigeuses-poilues, poils couchés blanchâtres ; capitules ter- minant des pédoncules scabres, renflés du haut; involucre formé d'écaillés foliacées, unisériées, oblongues-spathulées, poilues; paillettes du récep- tacle entourant les achènes, glabres et brillantes; achènes à leur maturité tubercules, scabres, toruleux, l'aigrette coroniforme, frangée. Le célèbre Drummond découvrit cette plante au Texas ; on la retrouva aussi dans les plaines du Mexique. Elle est annuelle et on la cultive, selon M. Decaisne, dans les jardins botaniques, d'où elle mériterait de sortir pour se répandre dans les jardins consacrés aux plantes d'ornement. Le même savant lui a constaté une excellente odeur de jasmin, propriété rare dans sa famille où le principe aromatique se localise surtout dans les feuilles et les tiges. Remarquons que la couleur des fleurs et de l'invo- lucre est aussi la même que celle des fleurs de jasmin. Culture. Rien n'est plus facile que de cultiver cette plante. On sème au printemps à bonne exposition et en pleine terre, quand on ne craint plus les gelées, ou bien on confie à la terre les graines sous châssis et on repique les jeunes plantes en avril pour Paris et en mai pour la Relgique. Le sol peut se borner à une terre franche de jardin ; on arrose au besoin comme pour toutes les plantes ordinaires des jardins. BELG. HORT. T. IV. 42 — 526 - L'EXACUM MACRANTHUM OU GENTIANÉE A GRANDES FLEURS BLEUES DE CEYLAN, Par le même. Les Exacum, genre de gentianées fondé par Linné, sont des plantes herbacées, originaires de l'Asie tropicale, ayant des feuilles opposées, à trois nervures, des fleurs terminales et axillaires. Les caractères du genre sont les suivants : Exacum. Linn. Calice quadrifide, divisions planes. Corolle hypogyne, presque en roue, qua- drifide, niarcescenle. Quatre élaniines insérées sur le tube de la corolle; les filets égaux depuis la base ; anthères s'ouvrant par un pore géminé ou par deux petits sillons, droites, fixes et permanentes dans leur position. Ovaire biloculaire par l'introflexion des bords des valves. Ovules nombreux situés sur les placentas adnés de chaque côté du milieu de la cloison. Style terminal, décliné; stigmate indivise. Capsule biloculaire, septicide-bivalve, placentas à la lin libres. Graines nombreuses , très-petites. Ce genre renferme 22 espèces connues dont 5 le sont imparfaitement. Dans la première section, les Pseudochironia, M. Grisebach, auteur du traité de cette famille dans le 9« volume du prodrome de De Candolle^ figure l'espèce appelée : ExAcuM Macranthijm, Arn. D. C.Prodr. vol. 9, p. i6. Tige arrondie, presque simple; feuilles sessiles, elliptiques-lancéolées, plus ou moins rétrécies à la base et au sommet, à trois ner- vures; calice à cinq divisions, ovales-lancéolées, aiguës, ailes semi-subulées; corolle d'un bleu intense, lobes larges, ovales, acuminés; anthères connées en cône et style décliné. La première connaissance qu'on a de cette espèce extrêmement intéres- sante par la grandeur et le coloris de ses fleurs, remonte à Georges Wal- ker Arnott,qui écrivit, comme docteur, une dissertation latine sur les Exa- cum de Ceylan {Ann. des scienc. nat., seconde série, tome 11, p. 173), tandis que sir William Hooker lui donne le titre de général. Quoiqu'il en soit, Walker Arnott trouva cet Exacum sur les montagnes de Ceylan à 6,000 pieds d'altitude. Il ne rapporta toutefois que des pieds secs. Il y a quelques années seulement (1852), M. Thwaites envoya aux jardins de Kew et de Dublin des graines de cette gentianée, dont on savait les fleurs grandes de deux pouces en diamètre, et M. Moore vit ces fleurs s'épa- nouir en 1853, au mois de décembre, dans le jardin de Glasnevin, à Du- blin. Sir William Hooker en donna le dessin et la description dans le Botanical magazine de 1854 (mars) , et le dessin nous l'avons reproduit ici, afin d'engager les amateurs de belles plantes de se procurer cette espèce. Ilooker lui trouve de l'analogie avec le solaymm mnazonicum [Nycte- rium Ker) surtout à cause de la connivence des étamines et de l'inclinai- son du style, mais la couleur, le bleu d'azur intense de la corolle, est bien au-dessus de la solanée. Culture. Walker Arnott ne parle pas de la qualité de sa plante, et Gri- sebach en fait une annuelle. Hooker doute et ne sait si elle est annuelle, bisannuelle ou vivace. Par prudence on l'a tenue dans la serre chaude, — 327 — mais il est plus que probable qu'elle passera l'été à l'air libre et qu'on la rentrera en orangerie l'hiver, si elle est vivace. Si non, on risquera de la perdre, car ne montrant ses fleurs que très-tardivement, ce n'est pas en décembre que la température de nos régions permettra encore l'éclosion de ces fleurs. On pourrait donc la cultiver à l'air et la rentrer fin d'au- tomne, afin d'en faire une belle plante de floraison hivernale. Le sol qu'elle exige, est la terre de bruyère pure, drainée par des pierres. Dans le jardin, on entoure la motte où elle croit, de gros moellons pour imiter la station rocailleuse; l'ombre alors protège la plante. La propagation se fera surtout par graines. LA CULTURE EN CHINE DU CHRYSANTHÈME, Par m. Robert Fortune. En fait de fleurs d'hiver, la plante la plus recherchée et la mieux soi- gnée en Chine est le Chrysanthemum, bien qu'il soit vrai de dire qu'à l'époque du nouvel an, elle n'est plus tout à fait dans son plus beau mo- ment. Pour les camélias, les azaléas, les roses, le jardinier anglais l'em- porte sur le jardinier chinois ; mais pour la culture du Chrysanthemum, celui-ci n'a pas d'égal; il excelle surtout à leur donner à volonté les formes les plus variées; il semble, en vérité, que ces plantes font la moitié du chemin et se prêtent d'elles-mêmes à toutes ses fantaisies. J'en ai vu qui avaient la forme d'animaux, de chevaux, de daims, d'autres qui imitaient des pagodes; mais, soit qu'elles aient subi toutes ces transformations, soit que le jardinier les laisse venir de leur forme naturelle, elles sont tou- jours dans le meilleur état de santé, les feuilles toujours d'un beau vert, et ne manquent jamais de donner des fleurs à profusion en automne et en hiver. Voici comment on cultive le chrysanthemum en Chine : des boutures sont plantées chaque année avec les nouvelles pousses, comme nous le fai- sons en Angleterre; quand elles ont pris racine, elles sont placées dans les pots où elles doivent rester et fleurir. La terre mise dans les pots pour cette culture est de la meilleure qua- lité. Aux environs de Canton, on la compose ordinairement de la vase des étangs où croissent le Nelumhium ou le Lotus. On la laisse sécher et se réduire en poudre pendant plusieurs mois ; ensuite on la mêle à de l'engrais humain que fournissent les dépots formés dans chaque jardin. On laisse encore quelque temps le mélange se mûrir avant de l'employer ; on le retourne plusieurs fois , et alors il est bon à mettre dans les pots qui reçoivent les Chrysanthemum . On arrose ensuite fréquemment les plantes avec le purin qui s'écoule des dépôts dont je viens de parler, et ses effets se connaissent promptement à la vigueur de la végétation et à !a belle couleur vert-foncé des feuilles. — 528 — Voici le système adopté pour former la plante en belles touffes com- pactes, ce que je préfère de beaucoup, pour mon compte, aux animaux et aux pagodes. On ne laisse d'abord à la plante qu'une seule tige : elle est forcée de pousser à sa tige un grand nombre de jets latéraux, qui sont réunis et liés avec un fil de soie. En ayant soin de maintenir ainsi les branches réunies en touffes autour de la tige principale, on entretient la vigueur des feuilles, qui se manifeste par leur belle couleur verte, et on obtient une plante touffue, garnie jusqu'au sommet , formant bien le bouquet. A Shanghaï et à Ning-Po, les Chnjsanthemian sont, en général, mieux soignés que du côté de Canton; mais les beaux résultats qu'on y obtient, doivent être aussi attribués, en grande partie, à l'influence du climat natal, la plante étant originaire des provinces du centre et du nord de l'empire. Quant au mode de culture, il est à peu près le même, au moins pour les points principaux que je viens de mentionner. Les Chinois aiment beau- coup les fleurs à larges dimensions et, pour les obtenir, ils ont soin, en général, d'enlever tous les boutons qui leur paraissent trop petits. Le Chrysanthemum est la fleur de toutes les classes en Chine. On la voit partout, chez le riche comme chez le pauvre, dans la chaumière du petit laboureur comme dans la splendide habitation du mandarin à bou- ton rouge. Quoique nous soyons redevables aux Chinois de l'introduction de cette plante, il est certain qu'elle a donné en Europe plus de variétés qu'en Chine. Quelques-uns de ces magnifiques Chrysanthemum, obtenus en France par M. Salter, exciteraient certainement l'admiration et l'étonne- ment des Chinois eux-mêmes, et ce qui est assez remarquable, c'est que plusieurs de ces charmantes variétés, telles que le formosum et le Inci- diim, qui en sont originairement produites de semence en Europe, se retrouvent aujourd'hui dans le nord de la Chine. (Traduit par M. le baron De Lagarde-Monllezun. — Mém. de la Soc. imp. d'Agriculture). DE L'AIR DE LA TERRE DANS SES RAPPORTS AVEC DIFFERENTS MODES DE CULTURE , Par m. Ch. Morren. Plusieurs amateurs de plantes grimpantes à cultiver en pot, d'espèces de la Nouvelle-Hollande, et en général de ces formes à spirales et circon- volutions telles qu'on les recherche tant aujourd'hui, ont éprouvé à Liège, et sans doute ailleurs, les bons effets dans ces cultures, de l'aérage à donner à la terre. En Angleterre, depuis quelques temps aussi, on attache une grande importance à ce sujet : les Gastrolobium , les Hovea, les Chorizema, les Brachysema, etc., et en général toutes les plantes aus- tralasiennes sont soumises à ce mode d'entretien. Une santé vigoureuse, — 529 - un ample feuillage, foncé et touffu, des fleurs en quantité et parfois des graines mûres, sont les conséquences très-agréables de ce traitement, pour nous servir d'une expression de l'autre côté du détroit. Ces plantes ne souffrent pas d'être étouffées à leur racine : il leur faut de l'air aux spongioles. On prend donc de la bonne et substantielle terre de bruyère qu'on casse en mottes, mais qu'on n'a garde de tamiser ; on y laisse les fibrilles des racines et les brancbettes ; on ajoute du sable rude, blanc et siliceux, et à Liège où ce sable est cber, on le remplace par de la houille brûlée et choisie comme cendre d'une égale épaisseur ; ses mor- ceaux ont un centimètre d'épaisseur et moins. A cela, on mêle à peu près un sizième d'argile franche, jaune, très-douce au toucher. Le fond des pots est bien drainé par des tessons et ce mélange de terre est entassé de manière à conserver toute sa légèreté. L'eau y passe facile- ment et à sa fuite, on reconnaît la densité convenable de ce sol excessive- ment aéré. L'habitude fait surtout reconnaître cette densité. Le seul inconvénient attaché à un sol si fortement poreux et aéré, est son peu de résistance aux secousses. Les plantes cultivées ainsi à demeure deviennent superbes, mais elles ne peuvent voyager. Un horticulteur marchand ferait une très-mauvaise spéculation en cultivant ses plantes à vendre dans un sol dont la consistance est nulle. La terre se disloque, les racines se dénudent, les tiges et racines tombent hors des pots ; enfin, les dégâts que subissent, dans le transport, des plantes élevées, comme nous venons de le dire, ne permettent pas de recommander au commerce hor- ticole d'adopter cette méthode, mais ce défaut n'ôte rien au mérite de cette culture quand les plantes sont permanentes. On s'explique très-bien d'ailleurs pourquoi certains végétaux jouissent d'une santé si robuste par l'action d'une terre si poreuse. MM. Boussingault et Levy ont prouvé par une très-belle série d'expériences que l'air contenu dans les différentes terres, s'y trouvait en quantités très-diverses, sans qu'on puisse actucllem(;nt assigner les vraies causes de ces différences. De plus, l'acide carbonique que cet air souterrain contient, varie aussi en quantité dans des rapports très-différents. Ainsi, tandis que l'air de l'atmosphère ne renferme que 0,04 à 0,06 p. % d'acide carbonique, l'air de la terre en contient 0,24 à 9,74 p. "/o. Cet acide entrant dans les racines par l'absorption spongiolaire, soit à l'état de gaz, soit dissous dans l'eau, doit exercer sur la végétation un effet considérable, puisqu'il forme une des nourritures principales de l'organisme vivant. La culture dans de la terre fortement poreuse, n"est donc en horticul- ture qu'une application d'un principe qu'on propose aujourd'hui en laveur de l'agriculture proprement dite, le drainage aérien. M. Simon Ilutchin- son a fait drainer par des tuyaux à air un champ de quatre hectares d'un fond argileux fort et compacte. Vingt-cinq drains se partageaient l'espace, placés à 0'",61 de profondeur et à 4'",57 de distance les uns des autres. Tous ces drains aboutissaient à un drain principal. — 530 — Dans les expériences faites sur ce champ drainé avec circulation d'air, comparativement aux mêmes cultures sur un autre champ de même éten- due et de même nature, l'avantage resta en faveur de la circulation aérienne souterraine. Les navets cultivés avec circulation d'air produi- sirent 26,080 kilog. d'un côté et dans une seconde expérience 40,626, tandis que le champ non drainé ne donna que 47,500 kil. dans le premier essai et 54,105 dans le second; il y eut donc une balance en faveur de l'action de l'air de 8,780 kil. dans la première culture et de 6,521 dans la seconde. Le blé cultivé comparativement dans ces deux systèmes pré- sentait aussi une différence : le drainage par l'air donna une faveur de 85 centimes au grain vendu au marché et la paille l'emportait sur l'autre par sa beauté et ses bonnes qualités. M. Barrai, en rendant compte de ces expériences, rappelle aussi qu'on a proposé dans le congrès de Valenciennes, en 4832, d'établir dans les champs drainés pour la fuite des eaux, des cheminées verticales placées au point culminant des champs drainés et communiquant avec les tuyaux pour amener de forts couinants d'air. Il est certain que des principes sem- blables pourraient être appliqués avec avantage aux sols des conserva- toires, des serres et des jardins d'hiver dans lesquels on cultive des plantes en pleine terre. Le fond de ces terres deviennent beaucoup trop com- pactes au bout de quelques années et les racines y périssent. Le drainage aérien est encore à son enfance dans les applications à Thorticulture, et on y a pensé trop peu. L'horticulture fait un grand usage de l'humus dans lequel rentre la terre de bruyère. Un hectare de cette terre renferme 4,472 mètres cubes d'air pour une couche de 35 centimètres d'épaisseur; une terre récemment fumée en contient 824, la terre argileuse d'une prairie 566, le sol sablonneux d'une forêt 442, le sous-sol de cette forêt 509 et l'argile du dessous de ce sous-sol, argile où plongent en définitive les racines des arbres, ne donne plus que 247 mètres cubes d'air. Ces détails méritent d'être médités. CULTURE DU DIPTERACANTHUS SPECTABILIS DE HOOKER, Par m. Ad. Weick. Cette plante, de la famille des Acanthacées, est originaire des andes du l^érou et a été introduite, en 4850, par MM. Veitch dExeter. Elle est remarquable par ses grandes fleurs bleues ayant de l'analogie avec celles de VAchimènes longiflora. C'est une plante de bonne serre tcmj)érée, un peu difficile en hiver, mais avec quelques soins on réussira parfaitement. Je la plante dans une terre composée de trois quarts de terre de bruyère sablonneuse et un quart de terreau de fumier et de terre franche par par- ties égales; je la rempote plusieurs fois dans le courant de l'année; une première fois en mars, une seconde fois en mai et une troisième fois en — Dol — octobre, après la floraison. Les deux premières fois je donne chaque fois un pot plus grand, selon la force de la plante, mais au rempotage d'octo- bre je fais le contraire et je prends un pot de plus petite dimension ; à chaque rempotage je ménage un bon drainage. Du printemps à l'automne cette plante vient mieux en serre froide qu'en plein air, et elle commence à fleurir dès le mois d'août jusqu'en octobre. Après le troisième rempo- tage, je place la plante un peu plus chaudement pour la faire entrer de nouveau en végétation, et je la remets ensuite en serre tempérée (tempéra- ture en hiver de 8 à 42 degrés centigrades) aussi près du verre que pos- sible. En été, il faut arroser copieusement et même une ou deux fois par quinzaine, il sera bon d'employer un engrais liquide quelconque; mais après le dernier rempotage d'octobre, et pendant tout l'hiver, il faut ménager les arrosements et n'y avoir recours que lorsque la plante en a très-besoin, que la terre commence à trop sécher; il faut surtout éviter de mouiller les feuilles qui pourrissent facilement. De cette manière on hivernera cette espèce avec succès, et une fois le mois de février passé, elle est sauvée. La multiplication en est des plus aisées : aussitôt que les plantes poussent en mars et que les nouvelles branches ont quelques centimètres de long, on coupe celles-ci (ce qui est même utile pour la plante-mère : les branches latérales augmentent et elle devient plus trapue) ; il n'est pas nécessaire de les couper à un joint; on place ces boutures en pots remplis de terre de bruyère, et on les met sous verre et sous châssis sur une couche; elles seront enracinées en moins de quinze jours et bonnes à traiter, comme il est dit plus haut. (^Journal de la Société d'horticulture du Bas-Rhin). Observations de la rédaction de la Belgique Bofticoîe. Nous avons donné dans le premier volume de ce journal , p. 94, une notice sur le Dipleracanlhus spectabilis, une des plus belles espèces qui puissent se cultiver ; mais on la disait alors de serre chaude. M. Weick a rendu un vrai service aux amateurs de plantes d'ornement en publiant une méthode qui permettra au plus grand nombre de jouir de celte floraison. Rappelons ici que cette acanthacée est descendue à un prix tellement minime que chacun peut se permettre cette fan- taisie de très-bon goût d'ailleurs. REVUE DE PLANTES NOUVELLES OU INTERESSANTES. Angrseciim pertiisum. Lindl. in Paxton's. Mag. of Bot.^ v. 7, p. 237. — Hook., Bot. Mag., ann. 4854, tab. 4782. Angrsequc perforé. Famille des Orchidées. Tige courte, feuilles distiques, allongées-oblon- gues, presque droites, carinées, pinnulées de chaque côté, obliquement bifides et équi-distantes à la base; grappes denses, penchées, axillaires égales aux feuilles, fleurs imbriquées distiques; ovaire et sépales arrondis, concaves, tubercules ; pétales ovales, labellum arrondi au sommet, obtus, — 552 — dilaté à la base, déprimé, éperon claviforme,de la longueur du labellum. Le genre Angrœcwu est éminemment africain, et il est probable que dans les parties de toute cette contrée du monde et dans les îles adjacentes, les botanistes en trouveraient un grand nombre. Ceux que l'on connaît par les soins d'Aubert du Petit Thouars, ont été imparfaitement décrits par cet auteur. V Angrœciim pertusum se trouvait dans la collection d'orchi- dées des frères Loddiges, mais sans indication exacte de la localité natale. MM- Jackson, de Kingston, ont réuni toutes les espèces connues du genre ; elles ne sont pas brillantes en couleurs, mais elles compensent ce défaut par l'extrême élégance du port, leurs grappes pendantes et comme ciselées de toutes petites fleurs, lesquelles se montrent en mars. Culture. Elle n'a rien qui la distingue de celle des orchidées épiphytes. Bai*kepia elegans. Knowles et Westcott., Floral Cab., 2, p. 7, cum. ic. — Hook., Bot. Mag., ann. 4854, tab. 4784. — Barkerie élé- gante. Famille des Orchidées. Feuilles lancéolées, grappe pauciflore; sé- pales et pétales larges, ovales, lancéolés, légèrement pointus, labelle obové, obtus et retus , portant à la base une callosité oblongue trilamellée au milieu et lamelles courtes, colonne largement spathulée et pétaloïde. Originaire de la même contrée que le Barkeria spectabilis, le Mexique, cette orchidée est très-belle : quatre ou cinq fleurs à l'épi , chaque fleur de cinq a 6 centimètres de diamètre, rose et blanche, et le labellum marqué d'une grande macule pourpre, d'un ponctué de la même couleur et de quelques nébulosités jaunes. C'est une fleur de mars. Culture. M. John Ilenshall s'est occupé spécialement de la culture des Barkeria, dont M. Hooker ne dit rien. Le premier met ces plantes dans des corbeilles en fil de fer, seulement de quatre pouces de profondeur. Au fond il place un nid de sphagnum, puis une couche de mottes de terre de bruyère et des sphagnum coupés menus, le tout mélangé avec des tessons. M. Henshall a remarqué que les Barkeria se trouvent bien d'un morceau de bois doux et décomposé près de leurs racines. Ils aiment l'eau, de fréquents arrosements, mais il faut soigner que les racines ne s'allongent trop. Le pied tend par cela à se soulever constamment , mais il faut le lier par des fils transversaux de plomb à la corbeille. Dans la période de la croissance en mars ou avril, la température du jour ne peut excéder -+- 18° C, mais elle peut tomber à -t- 14° C la nuit. Dans le temps de repos , il faut très-peu d'eau, assez pour que les racines ne dessèchent pas. Une température de ■+- 42° C suffit alors dans le jour et -t- 7° C sont également convenables la nuit. On voit par ces détails que les Barkeria sont des orchidées qu'on peut réellement appeler de serre tempérée. Desfontauia stpinosa. Ruiz et Pav., F/. Pcn(u.,v. 2, p. 47, t. d8G. — Hook. Je. pi. v. 4, t. 55. — Bot. mag., t. 4781, ann. 1854. — Dunal. in De C. Prodr., v. 4 5. p. 675. Desfontainie épineuse. Synonymes : Des- — 555 — fonlainia sploidens. Humb. Bonpl., pi. sequinoct, v. 1, p. 457, t. 45. — Desfontaima Ilookeri, Dun. I. c. , p. G7ti. — Desfontainie acutangula, Dun. l. c, p. 67G. Famille des Solanées. Arbrisseau roidc, droit, pourvu de quelques branches un peu anguleuses , pâles de couleur , opposées et de feuilles opposées. Ces dei'nières à pétioles courts, longues de deux à deux pouces et demi, plutôt ovales qu'ovées, onduleuses, roides , lui- santes, lobées au bord, les lobes variant en nombre et finissant comme le sommet de la feuille en épines pointues. Pédoncules solitaires , axil- laires et terminaux, gros, plus longs que les pétioles et portant des bi'actées oblongues, vertes, penchés, inclinés, uniflores. Fleurs grandes, pendantes. Calice à 5 divisions, lobes oblongs, obtus, droits, planes, glabres ou un peu poilus , finement ciliés aux bords , persistants et mar- cescents. Corolle de deux pouces de longueur, infundibuliforme, angu- leuse, d'un écarlate vif, pointée de jaune. Lobes du limbe à peine ouverts, obtus. Anthères presque sessiles, linéaires, insérées à la gorge du tube, plus courtes que les lobes de la corolle. Ovaire oval-cylindrique, glabre, à cinq loges. A l'angle interne de chaque loge un placenta grand et charnu , portant un grand nombre d'ovules pendants , attachés par le dos et dis- posés en quatre séries. Style aussi long que le tube de la corolle. Stig- mate à peine dilaté, obscurément quinquelobé. Baie globuleuse, delà grandeur d'une cerise sauvage. Cette plante est selon Sir William Hooker, difficile à placer dans sa famille naturelle. Le genre contient peu d'espèces connues. Le Desfon- tainia spinosa est originaire de Tarma ; le Splendens de Bonpland est de Quindiu, dans l'Ecuador; VHooperi de Dunal provenait de Valdivia et Vacutangida provient de Tolima, près de Maraquita, dans la Nouvelle- Grenade. Les individus du Nord ne diffèrent pas de ceux du Midi , et selon Sir William toutes ces espèces prétendues n'en font qu'une en réalité. Culture. Cette plante porte un feuillage permanent. MM.Veitchd'Exeter, l'ont fait introduire de Valdivia dans les orangeries d'Angleterre par les soins de M. William Lobb. Elle fleurit en août. Sa culture n'est pas in- diquée dans le Botanical magazine, lacune regrettable, mais il est pro- bable qu'elle se contente des soins généraux et de la sorte de sol que réclament les autres solanées d'orangerie. Gomphpena coccinea. Decsne., Revue hort., 4° sér., t. 5, (1854), p. 161, cum. ic. Gomphrene écarlate. Synonymes : Gomphrena Hoveyana var. suberpa, Vilmor., cat. 1855. — Gomphrena Jfaageana, Vilmor., cat. 1855. Famille des Amaranthacées. Plante annuelle, herbacée, haute de 0",30 à 0'",55; rameaux cylindriques, légèrement velus, d'un pâle vert pointillé de blanc ainsi que les feuilles; celles-ci opposées, lancéolées- oblongues ou linéaires-lancéolées, aiguës au sommet, atténuées inférieu- rement en un pétiole court, longues de 0"',07 à 0"',08 sur 0'",01 à 0'",01 5 de large. Capitules terminaux, solitaires, ovoïdes, de la grosseur d'im BELG. HOBT. T. IV. 45 — 334 — œuf de pigeon, formé par raggrcgation de petites fleurs imbriquées régu- lièrement, portés sur de longs pédoncules produisant au sommet deux ou trois grandes bractées à peine différentes des feuilles, formant un involucre étalé au-dessous des capitules. Fleurs petites, cachées par trois bractéoles scarieuses, ovales, acuminées, l'inférieure moitié plus courte, plane, inco- lore; les latérales concaves, carénées, ciliées extérieurement sur la ner- vure médiane, rouge orangé. Calice à 5 divisions aiguës, presque incolores, sommet coloré; tube staminal à 10 dents ou divisions au-dessous des- quelles se montrent dans le tube 5 anthères sessiles, allongées et unilo- culaires. Ovaire monosperme, style et stygmate à 2 divisions. Originaire du Mexique, cette plante annuelle a été introduite par M. Vil- morin de Paris, en 1855. On y a cru reconnaître deux espèces dont nous avons donné les noms dans la synonymie, mais M. Decaisne les a réunies sous le nom de G. coccinea, et en a fait une savante description dans la Revue horticole citée plus haut. Culture. Elle est semblable à celle de Celosia ou crêtes de coq, mais provenant d'un pays équatorial, le gomphrena veut de la chaleur surtout dans sa jeunesse. On sème donc en mars, sur couche chaude, on repique encore sur couche et on enfonce les pots dans la tannée en fermenta- tion. On empêche les froids de sévir. Elle fleurit de juin à septembre. Spiraea fortuuei. Planch., Revue hort., v. 2, 1854, p. 21, avec fig. — Spirée de Fortune. Synonymie iSpirœa callosa, Thumb. ap Paxt., Flow. Gard., v. 2, p. 113. Famille des Rosacées. Arbuste buissonneux, branches et rameaux cylindriques, légèrement pubescents, roux; feuilles alternes, ovales-elliptiques, acuminées, pointues au sommet, dentelées sur les bords, dentelures irrégulières, vertes au-dessus, glauques en- dessous et munies du même côté, sur la nervure médiane, de quelques poils argentés très-courts. Pétioles de 5 à 4 millimètres, parfois légère- ment calleux au point d'injection et en dehors; feuilles jeunes d'un rouge purpurin souvent très-prononcé; fleurs en corymbe, nombreuses, petites, rouges ou d'un rose vif plus foncées que celles du Spirœa bella. Belle plante très-florifère, introduite d'abord par Reeves dans le jardin de la Société d'horticulture de Londres, perdue et de nouveau introduite par un envoi de M. Fortune chez MM. Standisch et Noble. M. Carrière en a donné une nouvelle description avec figure dans la Revue horticole de Paris, de janvier 1854. Culture. Bouturé et planté en pleine terre au mois d'avril 1853, cet arbuste fleurissait en juillet suivant et avait atteint 40 centimètres de hau- teur. C'est un bel ornement pour les massifs, car il est très-rustique et supporte les froids de nos hivers, même celui de 1855-1854. On multiplie par boutures étouffées sous cloches, et sans doute aussi par éclat et couchage. Il leur faut la terre ordinaire de tout bon jardin. — 555 — LITTÉRATURE BOTANIQUE ET HORTICOLE. LES FLEURS ET LES OISEAUX DU PRINTEMPS; EXTRAIT DES SCÈNES DU MONDE ANIMÉ, Par m. h. Lecoq, Professeur d'hisloire naturelle de la ville de Clermonl-Ferrand. {Suite, voy. p. 507 de ce volume.) Heureux celui qui, frappé de ces douces émotions du printemps, peut s'abandonner, à l'ombre des forêts , aux rêveries d'un cœur pur et d'une àme tranquille, écouter à la fois le ramage des oiseaux et le bruit tumul- tueux du ruisseau, suivre à demi-assoupi les moelleuses ondulations d'une branche feuillée que le vent abaisse et relève tour à tour, comme pour nous indiquer les inévitables fluctuations de la vie. Le bruit cadencé du feuillage agité, la brise chargée d'eflluves parfumés, le bleu du ciel qui se montre à travers la cime des vieux chênes, tout invite au sommeil. Instants de repos et de bonheur! qu'ils sont rares dans la vie! Le monde est oublié, le monde avec ses éternelles fictions et ses jouissances calculées, le monde, ses déceptions, ses caprices et ses calomnies. La na- ture seule est devant vous et le songe enchanteur vous entraîne vers des régions lointaines où le printemps est éternel, il vous conduit dans de riantes contrées, sous les dômes impénétrables des forêts du nouveau monde, préludant ainsi aux merveilles d'une autre vie. Les palmiers étendent au-dessus de vous leurs gigantesques parasols, les i/ùnosa agitent leurs branches aériennes et vous montrent les houppes légères de leurs fleurs colorées. Des Baiihinia, des Bannisteria, lianes élégantes de la forêt, s'étendent pour vous en guirlandes et en festons, retombent et s'é- lèvent encore, et semblables aux cordages d'un navire, relient les arbres en un faisceau et leur prêtent Téclat de leurs fleurs ravissantes. Votre imagination, doucement excitée par les merveilles que vous avez contemplées , vous transporte bientôt vers d'autres points du globe tou- jours calmes et sans cesse animés. Vous êtes sur cette terre nouvelle où les arbres et les animaux ont un aspect étrange, sur les rivages de cette Océanie dont vous êtes si loin. Votre songe y embellit encore la nature. Tout paraît étrange à vos sens; les branches articulées des casuarinas résonnent au moindre vent, des bosquets de métrosideros s'enfoncent au milieu des terres ; d'innombrables essaims de perroquets, de cacatoès, de perruches australes, revêtus des plus riches couleurs, voltigent sur le sommet des eucalyptus séculaires, et de charmanles mésanges à collier bleu d'outre-mer folâtrent au milieu de leurs feuilles acérées. — 55G — L'esprit céleste qui préside à votre rêve, vous transporte encore sur divers points de la terre et vous ramène de nouveau sous les arceaux de verdure des forêts vierges de l'Amérique. Vous entendrez les notes mélo- dieuses de l'organiste (Pipra musica, Latli), le chantre de ces merveil- leuses solitudes. Balancé sur la tige flexible d'un bignonia, il chante Ihymne du matin sur des tons aussi purs que la nuance du ciel. Vous êtes réveillé et vous rêvez encore, vous êtes dans votre patrie, et ces sensations, inspirées par le sommeil, ne se sont point évanouies; la mélodie continue, mais ce n'est plus l'organiste, c'est le rossignol, dont l'exil est fini, qui chante son retour et ne songe qu'au bonheur. Ce parfum qui vous entoure, c'est la violette, fleur du printemps, parure de la terre, éveillée par les premiers beaux jours, et le hêtre majestueux dont les bourgeons viennent de s'entr'ouvrir, c'est la voùle feuillée qui vous rap- pelait les palmiers de l'équateur. Le lierre qui s'attache à vos arbres, le chèvre-feuille qui s'enroule autour de la charmille, la clématite dont les rameaux sont enlacés, voilà les lianes que vous avez rêvées. La nature, aussi simple dans ses moyens que grande dans l'exécution de ses œuvres, reproduit sur les points les plus éloignés de la terre des tableaux qui ne diffèrent que par les détails, et dont les grands traits ramènent à l'uni- formité et à la généralité de ses lois. Le parallélisme des plantes différentes produisant dans le paysage un effet analogue et se remplaçant avec le même aspect, est un des phénomènes les plus curieux que présentent les êtres organisés. L'ombre des bois plaît par sa solitude et le demi-jour qui règne sous ces vastes berceaux. Longtemps vous errez au hasard sous les voûtes de ces arbres séculaires, et vous n'apercevez partout que les colonnes innom- brables qui supportent les arceaux de la forêt. Isolé du monde, seul au milieu de ces vieux témoins de tant de printemps successifs, vous arrivez tout à coup sur la lisière, où la campagne à son tour vous déroule ses riants aspects et son immense étendue. Les prairies se présentent en par- terres émaillés, les champs, dépourvus de leurs épis, montrent le vert- tendre des céréales. La cime des montagnes n'a pas abandonné ses neiges, et le lac azuré reçoit l'eau murmurante des glaciers. Ce ne sont plus ni les mêmes scènes ni les mêmes impressions. Les saisons marchent à grands pas, et le printemps s'avance au-devant de l'été. Tous les arbres sont cou- verts de leur feuillage, et cette teinte douce et uniforme est souvent in- terrompue par les fleurs. Les pêchers qui teignaient les coteaux de rose, près des blancs amandiers, ont pei'du cette parure éphémère; l'aubépine aux mille corolles, compagne du mois de mai et des plus beaux jours de l'année, agite doucement ses guirlandes fleuries; les gênets aux fleurs dorées égayent tous les coteaux, le narcisse des poètes fleurit dans la prairie, se mélange aux troUius à fleurs globuleuses et aux nombreux orchis, dont les épis marbrés et purpurins apparaissent sous les trem- blantes panicules des brises et des paturins. Les pommiers des vergers — 537 — conservent leurs pétales carminés, et sous leur ombrage naissent à profu- sion ces simples fleurs des champs que souvent nous avons transportées dans nos jardins, et qui partout reçoivent nos hommages. C'est la bugle rampante avec ses épis bleus, c'est le lychnis aux pétales découpés, souvenirs d'enfance et de nos joies passées, c'est la véronique chamœdris dont la corolle semble refléter à la fois l'azur du ciel et la trans- parence des eaux. Des touffes de myosotis semblables à des bouquets de turquoises multi- plient à l'infini leurs charmantes corolles , image de la pureté et de la modestie. A mesure que l'eau du bruyant ruisseau vient humecter la terre, les végétaux changent d'espèces, et la nature renouvelle ses tableaux. Sous les bouquets d'aulnes qui indiquent le cours sinueux des eaux, naissent les Chrysosplenium; leurs bractées d'un beau jaune supportent encore quelques fleurs , et présentent des corbeilles en miniature ouvertes bien avant la maturité des graines et où celles-ci finissent de mûrir. Les Ccdtha palustris, au sombre feuillage sont couvertes de fleurs do- rées, et dominent de gracieux parterres entourés par les fleurs délicates et teintes de lilas de la cardamine des prés. Un papillon voltige autour de cette jolie crucifère, c'est la piéride aurore aux ailes enflammées, dont la femelle modeste, blanche et nuancée de vert, vient pondre sur l'herbe de sa prédilection. Combien de plantes excitées par l'eau et la chaleur se développent à Tenvi et se hâtent d'occuper les rives baignées par le ruisseau. La lathrée clandestine s'y montre une des premières ; parasite sur les saules et les peupliers, sans feuilles et sans racines, elle forme de larges touffes d'un admirable violet, et avant la fin du mois de mai ses capsules élastiques auront lancé au loin ses graines globuleuses qui mendieront leur vie aux arbres puissants qui ont déjà nourri leurs parents. L'alliaire aux larges feuilles fleurit près des touffes de myosotis dans les lieux frais où la coas- soude tient inclinées ses corolles jaunâtres et enfonce ses profondes racines, la ficaire tapisse la berge du courant qui baigne le pied des Lunaria redi- viva, de VHesperis matronalis dont l'odeur et la nuance remplacent dans ces lieux sauvage le lilas de nos jardins. Le thalictrum à feuille d'ancolic se couvre de houppes soyeuses, argentées ou améthystes, et balance ses jolies panicules près des tiges feuillées de V Eqinsetum thelniatheya, prêle gigantesque dont la forme et la croissance rapide nous reportent vers un monde qui n'est plus, et nous rappelle sa végétation. Le Géranium phœiim, sombre mais d'une grande fraîcheur, suit le cours de l'eau, souvent accompagné du Géranium robertianum dont \cs feuilles élégamment divisées, et les fleurs striées de rose ne cessent de répéter par de gracieux balancements les mouvements rapides que les Ilots du ruisseau communiquent aux ondes aériennes. Nous retrouvons près de là VOsmunda regalis, la plus belle des fougères, avec ses frondes — 558 — à demi-i'oulées , atlendant un peu plus de chaleur pour redresser ses épis fructifères. Puis viennent les saules, aujourd'hui couverts d'un feuillage naissant et de chatons fleuris, et plus tard de ces aigrettes légères qui peuvent comme les voiles du navire, conduire l'arbre en miniature, germer sur des lointains rivages. On voit poindre au-dessus des eaux ou dans la terre délayée, les feuilles coupantes de nombreux Carex. Déjà leurs étamines font saillie en dehors des écailles noires de leurs épis, et les fleurs femelles réunies en séries droites ou penchées, attendent le pollen qui doit en vivifier les germes. Les Eriophorum dépourvus des aigrettes blanches que le vent doit agiter, naissent le pied dans la vase; YAlopecunis geniculatiis couché sur la terre inondée, dresse ses longs épis et ses étamines orangées; la valé- riane dioïque est en boutons couleur de rose, et le ménianthe ou trèfle d'eau attire de loin l'attention par ses thyrses couleur de chair, et la pe- luche délicate que revêtent ses corolles d'albâtre. Les eaux elles-mêmes sont habitées par des fleurs; les callitriches aux longs rameaux oscillent au gré du courant et le teignent d'un vert pur. La renoncule aquatique s'y balance mollement; ses fleurs blanches y ccloscnt, et chacune d'elles enfermée dans la bulle d'air qu'elle a sécrétée, ressemble à une perle mouvante que l'eau ne peut entraîner. Le cresson de fontaine s'élève au-dessus de la surface et marie ses fleurs blanches aux corolles bleues des véroniques aquatiques. Les Ceratopliyllum constam- ment submergés y traversent les différentes phases de leur vie, et le Ilot- tonia y élève ses plumets blancs, et rapprochés sur de longues guirlandes verticillées, qui envahissent le lit du ruisseau. Il n'est pas jusqu'aux poissons qui ne sentent la douce influence du soleil. Vous les voyez glisser avec rapidité dans les eaux pures ou cou- rantes des lacs et des ruisseaux. La lumière décomposée dans leurs écailles se transforme en faisceaux dorés ou en rayons d'argent, ou en teintes nacrées qui contrastent avec l'azur de rélément qu'ils habitent. Déjà les épinoches ont rassemblé les racines qui doivent former leurs nids, le mâle a revêtu sa livrée d'amour, et gardien vigilant de la couche qui doit recueillir sa famille , il étale les épines dont son corps est armé et court à chaque instant au devant du danger réel ou imaginaire. Malheur à l'insecte imprudent qui s'abat alors sur ces plaines liquides, malheur au vermisseau qui, réveillé par la chaleur, s'agite sur un sol incliné et roule jusque dans le courant. Il est bientôt saisi par la truite à la course rapide ou par les cyprins bondissants, réchaufl"és aux premiers rayons du soleil. Les champs ont aussi leur parure. Les bleuets et les coquelicots ouvrent leurs premières fleurs; les adonis étalent aux feux du jour leurs pétales | écarlates et les ferment à l'astre des nuits, au serein du soir. La pensée sauvage y tient sa place, tantôt blanche et quelquefois nuancée de bleu. Les sainfoins, les trèfles incarnats et le vert pur des céréales divisent les — 359 — campagnes en un réseau à larges mailles, dont chacun offre sa nuance et son aspect, les légumineuses fleurissent sur la berge des chemins et sur la lisière des sentiers ; les Bromus et les Avena suspendent leurs trem- blants épillets, et dans les moissons plus avancées le glayeul montre la pourpre de ses pétales près des fleurs vulgaires de la moutarde des champs. Les pelouses sont chargées de petites plantes printanières , le Carex prœcox et quelques-uns de ses congénères; le Cerastiiim triviale, le Mœnchia erecta, le Luzula campestris, font partie de ces associations, au-dessus desquelles s'élève souvent la jolie fleur blanche la saxifrage granulée. Plus loin , le terrain sec produit de petits massifs de graphale dioïque dont les capitules roses et immortels persistent pendant longtemps; ou bien le sol plus humide et plus sablonneux offre le curieux phénomène de ce trèfle souterrain qui enfonce lui-même dans la terre le germe con- tenu dans ses fruits [Trifolium siibterraneimi). Les rochers les plus arides, humectés par la neige de l'hiver, par les pluies vernales, ou arrosés par l'eau des fontaines, subissent aussi l'in- fluence des beaux jours. La potentille printanière les caclie sous la multitude de ses fleurs, VAnthericuni liliago les décore de ses calices d'un blanc d'ivoire, V Anthé- mis montana y fixe ses racines et y reçoit les premiers rayons du soleil. De nombreuses crucifères les ornent de bonne heure, depuis la giroflée de muraille, au délicieux parfum, jusqu'à ces Alyssum et ces Arabis à fleurs blanches, attachés aux bords des précipices ou fixés sur leurs flancs; depuis ces genêts soyeux qui s'étendent en gazons fleuris sur les blocs de granit exposés aux rayons solaires, jusqu'aux sagines verdoyantes qui tapissent les rochers, et aux fougères naissantes qui se cachent dans les grottes humides et fructifient loin du jour. Quand le printemps a terminé dans la plaine le temps voulu dans l'ordre des saisons, il se réfugie dans les montagnes. Leurs cimes glacées rafraîchissent l'atmosphère , et l'eau pure qui des- cend et se précipite dans tous les ravins, entretient la fraîcheur et la jeu- nesse des végétaux. Les forêts d'arbres verts et surtout les grandes forêts de sapins y offrent une sombre et solennelle mélancolie, que l'on ne sent plus de la même manière, sous le feuillage moins sévère de nos chênes à feuilles caduques, ou sous le vert gai des hêtres et des bouleaux. Les sapins fleurissent au moment où ils produisent les jeunes feuilles de l'année, et le gui, leur parasite, qui a quitté les forêts pour nos ver- gers, est la première plante qui ouvre sa fleur aux brises du printemps. Les Vacciniuni, et surtout le myrtille se serrent sur le sol et occupent les moindres clairières. Leurs fleurs roses en grelots sont penchées comme celles du muguet, qui recherchent au contraire l'ombre et la lumière dif- fuses pour fleurir et embaumer l'atmosphère. Le sceau de Salomon, le — 540 — muguet verlicillé, le myantliène à deux feuilles, se réunissent aussi sous les arbres verts. Des massifs de Scilla lilio-hyacinthus colorent de grands espaces, en bleu ou en lilas; l'ancolie y déploie ses nectaires éperonnés; VActœa y élève ses panaches près de la curieuse parisette, dont toutes les parties sont symétriques et concordantes. On voit Taspérule odorante semée à profusion sur le sol ; on y remarque la délicate Oxalis. Ses pétales veinées sont d'une finesse extrême et ses folioles acides s'endorment tous les soirs. Le Stachijs sylvatica, le Lychnis dissecta se couvrent de fleurs carminées. Le Petasites albus ne quitte pas les filets d'eau limpide. Les larges feuilles et les thyrses blancs qui les précèdent en indiquent le cours. Avec lui paraît VEquisetiim sylvaticum aux liges articulées et aux verticilles superposés. Les pelouses supérieures ont leurs geneviners aux fruits bleus qui des- cendent jusqu'à la lisièi'e des forêts où le groseiller des rochers montre ses grappes de fleurs rembrunies. Au-dessus de la zone arborescente, le soleil lutte encore contre la neige accumulée par l'hiver: lentement elle disparaît; le printemps s'empare des terrains qu'elle abandonne. La gentiane bleue, l'androsace carnée, naissent auprès des touffes nombreuses de l'anémone des Alpes. Les grandes fleurs blanches ou soufîrées paraissent au loin sur les pelouses encore décolorées, pendant que la soldanelle des montagnes, sortant des neiges à demi-fondues, déroule ses pétales frangés et semble heureuse d'échapper à sa prison glacée. Mais il faut s'arrêter : nous devons au printemps l'évolution de tous les germes, ces miracles de tous les jours, de toutes les années, et aux- quels l'homme indifférent par habitude donne à peine un instant d'atten- tion. Comment peindre ces mystères du développement des tiges, et comment concevoir cette action vernale qui excite à la fois la graine et le bourgeon , et les débarrasse tous deux des enveloppes qui les proté- geaient pendant l'hiver. Dieu leur a-t-il refusé l'instinct à ces plantes qui attendent engourdies l'arrivée des beaux jours ; à ces germes qui restent ensevelis pendant les calmes éphémères d'un hiver adouci, mais qui paraissent à l'époque fixée et développent leurs organes? Est-il de plus grands miracles que cette évolution, que ce prolongement d'un bourgeon qui va devenir la branche d'un grand arbre, et ce germe de la semence qui s'allonge et se modifie, se charge d'organes nouveaux, fleurit et fructifie dans l'espace d'un prin- temps. Ou bien bravant les siècles et conservant la vie, se réveillant chaque fois que la nature engourdie reprend son essor, ce germe primitif atteint ses limites ; le gland produit le vieux chêne, la graine impercep- tible et cotonneuse a formé le peuplier élancé, et le gigantesque sapin jouet du vent dans son origine, brave maintenant la furie des tempêtes. Chaque année, l'influence du printemps accomplit ces prodiges , miracles ou métamorphoses, peu importe le nom qu'on voudra leur donner. — 541 — Une des impressions les plus profondes que puisse ressentir celui qui contemple la nature, c'est celle qui est produite par cette force de vie, répandue sur tous les points de la terre. Le règne organique est partout, depuis la ceinture ornée qui entoure les tropiques jusqu'au milieu des glaces polaires et des neiges des montagnes, le monde entier est animé. La vue des organes qui se déroulent et s'étendent, le bruit confus de tous les êtres vivants qui courent et s'agitent en poursuivant leur destinée, ce cercle éternel de vie et de mort dans lequel tous ces grands phénomènes sont enfermés, tout nous frappe et donne à nos sens une impulsion qui les excite, et nous conduit ensuite à de profondes méditations. Qui sait si, dans la suite des âges. Dieu perfectionnant son œuvre, n'ac- cordera pas à l'homme des sensations nouvelles pour son intelligence et pour son cœur ; peut-être alors sera-t-il encore plus impressionné des beautés de la nature et des charmes du printemps, son âme élevée par la prière et moins soumise à ses liens matériels, sentira plus directement les merveilles qui l'entourent; la nature plus belle à ses yeux, lui montrera sous des couleurs plus pures le songe de la vie, le repos du tombeau et le réveil de l'éternité ! Si votre cœur est endurci , si les maux de vos semblables et les souf- frances des animaux n'excitent ni votre générosité, ni votre pitié, ne venez point respirer dans les campagnes l'air parfumé du printemps. L'égoïsme a desséché votre âme ; vous ne jouiriez ni des sites enchanteurs, que la lumière du matin colore de ses teintes les plus pures; vous ne ver- riez pas les pompes du soleil couchant, ni ses rayons de pourpre, ni ses franges dorées. Le concert des oiseaux ne réveillera pas chez vous le sen- timent du bonheur, ni les doux souvenirs ou le gracieux espoir. La fleur sera terne et décolorée; la verdure sans fraîcheur; le bleu du ciel sans nuages ne vous conduira pas aux douces rêveries de l'âme; le printemps ne vous appartient pas. Mais vous dont le cœur généreux a soulagé les infortunes de l'hiver, vous dont les seuls regards portent à l'affligé la consolation ou l'espoir, vous qui partagez les souffrances de tout ce qui est malheureux, vous ne resterez pas insensible aux splendeurs du printemps ; c'est pour vous que la brise agite le feuillage et transporte l'encens des fleurs; c'est pour vous que le ciel est azuré, que le soleil émaille les prairies de fleurs nouvelles; à vous s'adressent les hymnes et la mélodie des oiseaux. Jouissez en paix, c'est le bonheur des anges, la volonté de Dieu ! DELC. HORT. T. IV. 44 - 342 PI. 53. • — 545 — HISTOIRE DES PLANTES CURIEUSES. LE CYPRÈS PLEUREUR DE LA CIHNE OU CUPRESSUS / ^ FUNEBRIS, Par m. Robert Fortune. Le plus bel arbre, sans aucun doute, que j'ai trouve dans le district de Hwuy-Chow-Foo, est un Cyprès pleureur, que je n'avais jamais vu dans aucune autre partie de l'empire chinois et qui même, je dois le dire, m'était tout à fait inconnu. J'aperçus d'une distance de près d'un kilo- mètre, une espèce de pin d'un port élégant, haut d'environ 60 pieds anglais (18 mètres), ayant une tige aussi droite et aussi élancée que le })in de l'île de Norfolk, avec des branches retombant comme celles du saule-pleureur de Sainte-Hélène. Ces branches, qui partent d'abord à peu })rès à angle droit de la tige principale , décrivent ensuite une courbe gra- cieuse et se replient encore à leur extrémité. De ces mêmes rameaux pen- dent perpendiculairement d'autres branches secondaires, ce qui donne à l'ensemble l'aspect du saule-pleureur avec une plus grande élégance de formes. Quel pouvait être cet arbre? Il était évident pour moi qu'il appartenait à la famille des conifères, mais qu'il était le plus beau et le plus distingué de sa famille. Je marchai , ou pour mieux dire , je courus à lui , à la grande surprise de mes compagnons de voyage, qui crurent que j'étais devenu fou. Lors- que je fus à proximité , il me parut encore plus beau qu'à la première vue. Sa tige était parfaitement droite comme celle du cryptomeria, et ses feuilles ressemblaient à celles d'un arbre bien connu, Yai'bor vitœ (*) seu- lement plus petites et d'une forme plus élégante. Ce spécimen si remarquable était, à ma grande satisfaction, chargé de fruits mûrs , et je désirais vivement pouvoir en emporter une certaine ([uantité. L'arbre se trouvait dans un enclos dépendant d'une auberge; un mur nous en séparait et j'avoue que je me sentais une forte velléité de le franchir. Mais cette pensée ne dura pas. Je jugeai qu'il était convenable de nous diriger vers la maison, dans la supposition, exacte du reste, que l'objet de mon enthousiasme était la propriété de l'aubergiste. (I) Uarbor vilœ, arbre île vie, est le nom qu'on doniiail naguère au Thuya ociidculalis parce que dans lapaU-iede cet arbre on cnlourait les morts de ses branches dans un but d'em- l)auniemcnl. On sait que le Thuya a élé introduit en France sous François I" . Clusius en vil If premier pied planté dans le jardin de Fontainebleau. {IS'ote de Ck. Morren.) — 344 — Nous entrâmes donc dans l'auberge, et, grâce à un bon repas que nous y prîmes et à quelques gracieusetés que je lui adressai, j'en obtins un certain nombre de graines , que je serrai précieusement. Elles sont main- tenant en Angleterre. J'espère qu'elles prospéreront et que, dans quel- ques années, ce bel arbre décorera nos jardins et nos parcs. Du reste, à mesure que j'avançais, j'en trouvai beaucoup d'autres et je reconnus qu'on en voyait assez communément des massifs sur les pentes de ces coteaux. Cet arbre a reçu le nom de Cijprès funéraire (funereal cypress) : Cu- pressus funebrîs. Le professeur Lindley , à qui, j'envoyai quelques bran- ches que j'avais cueillies pendant ce voyage a écrit «c qu'il le considérait comme une acquisition du plus haut intérêt » et il ajoute : « L'échantillon (pie nous avons reçu, ne nous permet pas de douter que ce ne soit un très- bel arbre. On pourrait le décrire à peu près ainsi : semblable au saule- pleureur, quant à son port (et au sabina pour le feuillage, sauf qu'il est d'un vert plus vif. Ce n'est pas cependant un genévrier comme notre cyprès funéraire [Juniperus virginiana) : c'est un véritable cyprès. Nous avons longtemps regi'clté que le cyprès d'Italie ne put pas se naturaliser en Angleterre et décorer nos cimetières, mais nous avons maintenant un arbre qui lui est supérieur en beauté et qui convient encore mieux pour un tel emploi. » (Traduit du voyage agricole cl horticole en Chine de M. Fortune, par M. le baron de Lagarde-Montlezun et extrait des mémoires de la Sociélé impériale et centrale d'agriculture de France. ) ADDITIOIVS. Le Cupressiis ftmebris introduit en Belgique peu de temps après son arrivée en Angleterre, commence à s'y répandre. L'hiver si rigoureux de 1855 à 1854 lui a servi d'un baptême de recommandation. A Liège oii dans nos jardins élevés (S'''.-\Valburge) la température est descendue, le i26 décembre 1853, à — 28, 75 centigr. (-23" R.), les Cupressus funebris ont parfaitement résisté, tandis que les genévriers de Virginie auxquels on les compare, ont été complètement gelés. Le Cedrus Deodara lui-même est plus faible que le cyprès de la Chine, car du côté du midi surtout, ses feuilles ont roussi et sont tombées. Les jeunes pieds de la nouvelle acquisition de la Chine, à une hauteur de 30 à 40 centimètres, n'olfrent pas encore le port pleureur de leur cime définitive. L'arbre adulte est d'une beauté extrême. Nous reconnnandons sa plantation aux magistrats édiles de nos villes pour rornementation des cimetières , d'autant plus, que sa valeur commerciale le met à la portée des plus minces budgets. [Ch. Morrcn.) - — 545 — ARCHITECTURE HORTICOLE. DE LA DÉCORATION DES JARDINS PAR DES EAUX OU L'ON CULTIVE DES PLANTES, Idées de M. Noël Husiphreys. L'eau dans son clat de repos produit le meilleur effet dans les jardins, (juand elle est introduite dans les parties les plus déclives d'un terrain ondulé, de manière à imiter ce qui arrive dans la nature elle-même. Ce ([u'on appelle les ornements artificiels dans la décoration horticole, peuvent sans doute reposer sur l'arbitraire et la fantaisie jusqu'à un certain point, mais ils n'ont jamais grand succès que lorsqu'ils sont basés sur les lois des phénomènes naturels. C'est ainsi qu'une série d'étangs à poissons se décorent parfaitement par des pierres et des rochers saillants, par des barrages en rocailles, etc. Dans les pays montagneux, la nature l'arrange de cette manière et plaît toujours. Ou bien encore d'étroits canaux, destinés à la culture des plantes en plein air, peuvent devenir des charmants objets d'ornementation, comme nous le montre la planche 54 ci-jointe, lorsque placés au-dessous du niveau du jardin à fleurs, leurs côtés protègent des coups de vent et des rafales de pluie les êtres si délicats et si tendres, en- fants d'une atmosphère chaude et humide. Le Calla ou Richardia ethio- pica, natif de S*«-IIélène et du Cap, est dans cette situation et surtout dans les coins de ces canaux un objet de la plus grande élégance, et on réussit pour le faire fleurir longtemps lorsqu'on lui donne un pied d'eau au- dessus de ses racines (*). Ce Calla avec son cornet blanc et son pompon jaune contraste avec la fleur basse et rosacée du nénuphar qui nage sur les eaux de nos climats, selon l'expression poétique d'IIemans n comme une fleur sculptée dans l'ivoire, rehaussée d'or, image de la royauté pai- sible des eaux en silence. ;> La gravure ci-jointe montre comment l'eau entre par une cascade dans le bassin du milieu dont nous décrivons la végétation plus loin ; de la même manière, arrivée à l'autre extrémité du bassin, cette eau après avoir produit une nouvelle cascade, disparaît dans des tuyaux souterrains qui sous la forme de drains vont alimenter de petits bassins distribués avec art dans toute l'étendue cultivée, afin d'abréger le temps et d'alléger les fatigues de l'arrosement. De chaque côté du bassin central s'étendent (I) J'ajoulerai à ces paroles de M. Noël Iluiiii)lireys, que le TItalia dvolhala qui imite un >li'eliuia à farine l)leuc cl ileuril Irès-éléj^aninicul, est encore une de ces piaules à cficl aux- ipiellcs on ne pense pas toujours pour orner les canaux el les pièces d'eau. M. Slereknians. jaî'dinier (rès-liabile du Jardin bolauique de Louvain, excelle dans la cullure de celle planle .lussi riche el aussi belle en pleine eau que des palmiers en pleine (erre le sonldans une serre 'liaude. {l\'ntc de Ch. Morreu.) 546 IM. U. .Ml 'ïyik:iii!iiiiii|!i,i,.:ii;i^^' liiililniÉPP ,*Ki^l«''' I — 547 — deux canaux murés de toute part, recevant de l'eau à son arrivée et ];i perdant à son départ par des niveaux appropriés. Dans ces canaux les plantes aquatiques sont cultivées en pots enfoncés dans le vase et sans trous ouverts au fond, de crainte que les racines n'en sortent et que les plantes les plus tallantcs ne tuent les autres en occupant tout Tespace. Ces pots, après qu'ils ont reçu un fond d'argile et de vase où la plante a été déposée dans un état de repos sans tiges ni feuilles à la morte saison, sont recouverts d'un couvercle percé d'un grand trou au milieu et do quatre autres à côté de cette /'' X latéraux percés dans le vaso manière. Ce couvercle en terre / ^ \ empêchent le couvercle de se cuite comme le pot, est fixé par y J mouvoir et de se lever. Par ce des chevilles qui, par des trous \__^ procédé très-simple, on main- tient les plantes aquatiques en place et on peut les soigner en les levant, terre, racines et plantes hors de l'eau, pour les remettre après leur toi- lette dans le lieu où elles doivent vivre et briller. Les ornements d'architecture de ce canal doivent s'harmoniser avec ceux placés dans son voisinage , comme le montre la gravure ; les deux grands vases qui occupent le fond de la perspective, s'accordent avec les globes de pierre ornant les angles de la construction. Le point essentiel pour une construction de ce genre est d'abord, que l'on ait toujours une certaine quantité d'eau. Une source, un ruisseau sont donc nécessaires; dans quelques cas on peut recourir à des puits artésiens. Si ces origines du liquide sont à distance, on conduit les eaux par des tuyaux de plomb, mais aujourd'hui on emploie de préférence des tuyaux de gutta-percha qui ne communiquent absolument aucune propriété délétère aux eaux, se conservent longtemps et prennent toutes les courbures selon la fantaisie du constructeur. La grandeur d'une bonne construction de ce genre peut varier : celle ici représentée est de 24 pieds de large sur 48 de long; on peut se contenter de la moitié de cette di- mension. Au centre, le bassin offre une profondeur de 2 pieds, 4 pouces et d'un pied 4 pouces dans les compartiments des côtés. Quand le fond est bien uni l'œuvre du maçon commence; on commence à placer les briques ou les carreaux sur les bords, et on emploie de la bonne chaux hydraulique pour cimenter ces matériaux entr'eux. Ce travail se fait par un temps bien sec, quand la terre n'est plus humide et quand le ciment prend bien. Quelquefois une seule couche de carreaux suffît, mais il en faut deux dans d'autres circonstances avec de la chaux hydraulique entre deux comme ciment. Les murs seront aussi parfaitement soignés pour empêcher toute fuite d"eau. Une saison très-convenable pour les élever est le printemps, lorsque les gelées ne sévissent plus. Quand la bâtisse est achevée et séchée, et avant de laisser entrer l'eau, on dispose ses plantes aquatiques dans les pots construits comme nous l'avons dit plus haut, et on les place selon qu.e les plantes par leurs formes peuvent plaire à l'œil du maître. Il faut pour faire ce travail — 348 — avec succès connaître d'avance le port, les grandeurs, les feuilles et les fleurs de ces végétaux aquatiques. L'idée de placer ces plantes en pots est extrêmement favorable à ce mode de culture, parce qu'elle permet d'introduire dans nos eaux, sous nos climats, des espèces exotiques qui périraient, si avant l'hiver on ne les rentrait pas pour les conserver en orangerie et dans des doubles pots plus grands, remplis d'eau qu'on renouvelle, selon les besoins des plantes. Les Nelumbium peuvent se cultiver ainsi dans nos pays septentrionaux. On classe les plantes aquatiques selon leur grandeur : 1" les élevées-^ 2" ]es moi/ennes ; 5" les superficielles. Parmi les élevées, on distingue les Thalia dealhata, dont nous venons de parler dans la note p. 546, les Nelumbium remarquables par leurs feuilles peltées et en cornet, les Typha ou sceptres de dérision, parmi lesquels Vangiistifolia est très-élégant; la massette ou Typhalatifolia fait bel effet dans les grands bassins. VAcorus, VAlisma planlago et la fléchière, Sagittaria sagittifolia donnent une utile diversion par leurs feuilles singulières, variées et leurs fleurs élégantes, et près d'elles les Sparganium {natans, sîmplex, ramosum), ramènent déjà les espèces les plus grandes à l'ordre de celles qui le sont moins. Les moyennes, en effet, comme les Iris parmi lesquels le Flambe se distingue à sa fleur d'or, les Calla palustris, les renoncules comme les lingua, les flammula, et même le Philonotis , qui aime bien ces lieux humides. Le Caltha palustris élève aussi ses larges feuilles et ses nom- bi'euses fleurs jaunes au-dessus de l'eau, tandis que ses racines s'en abreuvent. Les Hottonia, Myriaphyllum, Mœnianthes, Comariim, for- ment avec leurs fleurs blanches, roses et pourpres les plus gracieux contrastes avec les fleurs jaunes des Utriculaires, bleues des Myosotis et les épis sombres des pédiculaires. Enlin, les espèces superficielles nagent à la surface des eaux; ici figurent les Nénuphars et les Nuphars, les uns à fleurs blanches, les autres à fleurs jaunes, les Villarsia tous frisés d'une bourre de soie de la même couleur, les renoncules aquatiques à fleurs blanches, le singulier Hydrocharis qui laisse tomber ses bourgeons au fond de Teau pour assurer sa multiplication, etc. Enfin, il y a des plantes entièrement sub- mergées et de forme très-variées, tel est le Stratiotes aloïdes, l'ananas d'eau auquel les Anglais donnent le nom de soldat aquatique ( Water soldier). Il y aurait toute une flore de ces bassins à écrire. Quelques jardins possèdent des bassins dans le but d'élever des pois- sons extraordinaires. Les plantes en sont alors exclues. On peut voir une belle construction de ce genre dans la gravure (pi. bo) représentant la série des carrés d'eau de la Villa Strada, près de Rome. Les vases à jets d'eau y alternent avec les têtes d'orangers et d'autres arbustes taillés; le but est autre : les plantes figurent ici à titre d'appoint et tout l'intérêt se porte sur la piscine. 549 PI. 55 'i^ilii!i!!'iii'%'V „ I 'Il ■« lil ihii iii lilii J * I J rJ DELG. lIOnT. T. IV. 45 — 3S0 — JARDIN FRUITIER. LE POMMIER BELLE-FLEUR DACHY, DE TOURNAI, Par m. Ch. Morren. L'exposition de novembre 1855, ouverte à Tournai, a fait connaître aux amateurs de fruits, une nouveauté en fait de pommes, que le Comité pomologique de la Société royale d'Horticulture de cette ville a jugée digne de son attention. Le semis a obtenu les honneurs de la médaille du baptême, et M. Dupont, un des membres de la commission, nous a demandé pour le nouveau-né son portrait illustré et enluminé avec la relation de son histoire. C'est à peu près tout ce qu'on peut faire, pen- sons-nous, pour les bons et excellents fruits, avant de leur rendre le der- nier honneur, celui de les croquer. M. Dachy, jardinier de madame Dumon-Dumorlier, veuve de l'ancien président du Sénat belge, a obtenu la pomme Belle-fleur qui porte son nom par le semis. La pomme Belle-fleur Dachy est oblongue, obconique, obpyriforme, ayant le gros bout au pédoncule et le petit à l'œil. Son diamètre longitu- dinal est de 9 à 10 centimètres, son diamètre transversal de 8 centi- mètres. A sa base, il offre un enfoncement conique régulier, peu large et profond; sur son pourtour, cinq larges côtes effacées et longues, for- mant un pli en se retournant sur le pourtour de l'œil de la pomme. A ce pourtour, entre ces larges plis s'en trouvent un ou deux plus petits, convergeant aussi vers le calice ou l'œil, de sorte qu'au bout supérieur, cette pomme est froncée. Le fond de couleur pour l'épicarpe est jaune verdâtre clair, passant au rose du côté éclairé et sur cette partie jaune des vergures inter- rompues linéaires, de rouge sanguin vif; entre ces vergures des lignes plus étroites et des points de la même couleur. La chair est d'un blanc un peu jaune, la partie capsulaire est très- étroite en proportion de la partie calicinale. Sa consistance est un peu neigeuse, mais son goût est sucré et accompagné d'un léger arôme extrê- mement agréable. Au demeurant, c'est une bonne pomme délicate et savoureuse; sa productivité étant considérable, elle conviendra pour les vergers et méritera de se répandre. Pommo BelK- -fltMir Dadw — 551 — OPÉRATIONS HORTICOLES. LAPS DE TEMPS QUI DOIT S'ÉCOULER ENTRE LA PLANTATION DES JEUNES ARBRES FRUITIERS ET LEUR PREMIÈRE TAILLE, Par m. a. Du Breuil. J'ai toujours conseillé de n'appliquer la première taille aux jeunes arbres fruitiers, le pêcher excepté, qu'un an environ après leur planta- tion, c'est-à-dire, après leur reprise, et l'expérience a constamment jus- tifié cette méthode. Toutefois, quelques praticiens mettant encore en doute l'efficacité de ce mode de l'opérer, il me parait utile de revenir ici sur cette importante question. Principes théoriques. On ne peut former convenablement la charpente des arbres fruitiers qu'autant qu'ils se développent vigoureusement. — Les jeunes arbres récemment plantés ne présentent ce degré de vigueur qu'après avoir pris possession du sol , c'est-à-dire, après avoir développé de nouvelles radicules pour remplacer celles détruites par la transplantation, car c'est alors seulement que ces arbres peuvent puiser abondamment dans la terre les éléments nutritifs nécessaires à leur végétation. Ce nouvel appareil de racines ne peut se former que sous l'influence du développement des feuilles, car celles-ci sont les organes qui engendrent les racines. — D'où il résulte que plus un jeune arbre développera des feuilles, plus ses ra- cines seront nombreuses et plus sa vigueur sera grande. — Or, la pre- mière taille appliquée aux jeunes arbres, a pour but de faire développer, vers la base de la tige, les branches nécessaires à la formation de la char- pente, et ce résultat ne peut-être obtenu qu'en recepant la tige à G™, 40 au-dessus de la greffe, et à 0"',20 au plus pour les arbres en espalier. D'où il suit qu'on enlève ainsi à l'arbre presque tous ses boutons et qu'on le prive alors de la plus grande partie des bourgeons, et, partant des feuilles qu'il eût développées. On conçoit que cette suppression presque complète des organes générateurs des racines, empêche celles-ci de répa- rer les pertes éprouvées par suite de la déplantation, et que la végétation qui succède à cette opération est faible, languissante et ne peut donner lieu aux bourgeons vigoureux, dont on a besoin pour former la charpente de l'arbre. Toutefois, l'évolution des boutons de ces jeunes arbres ne peut avoir lieu que par une action suffisante de la sève ascendante. Dans ceux qui — 552 — n'ont pas été transplantés, celte force est assez intense pour agir efficace- ment sur le développement de tous les boutons, parce que la masse de lacines qui puisent cette sève dans le sol est proportionnée au nombre de boutons que porte la tige. Mais dans les arbres qu'on vient de trans- ])lanter, il en est presque toujours autrement : une partie notable des l'acines et surtout les points essentiellement absorbants, les extrémités radiculaires sont retrancbées ou altérées par suite de la transplantation. Pour ces arbres; il n'y a plus rapport entre la masse des racines et l'éten- due de la tige qu'elles doivent alimenter. Si l'on n'opère aucune suppres- sion sur la tige' de ces arbres immédiatement après leur plantation, le peu de sève que pourront fournir les racines, partageant son action entre tous les boutons, ceux-ci n'en recevront qu'une influence insuffisante, et ne donneront lieu qu'à quelques bourgeons longs de quelques millimètres seulement, et pourvus d'un très-petit nombre de feuilles languissantes. L'action absorbante des racines étant trop faible pour réparer les pertes d'humidité qu'éprouvera la tige sous l'influence desséchante de l'air et du soleil, beaucoup de ces arbres pourront périr pendant l'été suivant. Il est bien entendu que ces effets se produiront avec d'autant plus d'inten- sité que les arbres auront plus mauvais pied, que le terrain sera plus sec, ({ue la plantation sera faite au printemps et que cette saison sera moins humide. De là résulte donc la nécessité de pratiquer non pas une première taille, mais seulement quelques retranchements sur la tige des jeunes arbres en les plantant, afin de rétablir l'équilibre entre cette partie et les racines qui doivent l'alimenter. On comprend, dès lors, que ces suppres- sions doivent égaler à peu près celles éprouvées par les racines. Si l'on néglige cette opération, le développement des bourgeons et des feuifles se faisant à peine, on ne verra pas se former le nouvel appareil de racine que le retard a porté à l'application de la première taille avait pour but de faire naître, et Ton aura un insuccès égal à celui qu'eût donné la pre- mière taille opérée immédiatement après la plantation. Si, au contraire, on retranche sur la tige des jeunes arbres, immédia- tement après la plantation, une proportion de rameaux égale aux pertes éprouvées par les racines, les boulons conservés recevront une action suffisante de la sève pour donner lieu pendant l'été, à autant de bour- geons pourvus de feuilles nombreuses, et celles-ci produiront un nouvel aj)pareil de racines. Si, au printemps suivant, on applique à ces jeunes arbres lerecepage, résultant de la première taille, on concentre alors toute l'action de la sève, abondamment fournie par de nombreuses racines, sur quelques boutons seulement, et l'on force ceux-ci à produire de très- vigoureux bourgeons à l'aide desquels on forme seulement la charpente de l'arbre. — 555 — Faitis à l^appiii de cette théorie. La pratique m'a constamment montré l'exactitude de celte tliéorie mais l'expérience suivante que j'ai tentée à Rouen, il y a quelques années, ne laisse aucun doute à cet égard. J'ai planté à l'automne 50 poiriers appartenant à la même variété, greffés sur coignassier, âgés de deux ans, ayant été déplantés avec le même soin et placés sous l'influence des mêmes circonstances. Dix de ces arbres reçurent la première taille au printemps suivant, c'est-à-dire, qu'on les recepa à 0™,40 au-dessus du sol. Dix autres ne reçurent qu'un habillage, c'est-à-dire, qu'on retrancha le tiers environ de la longueur des rameaux vigoureux pour rétablir l'équilibre entre la tige et les racines. Les dix derniers furent laissés intacts. A la fin de l'automne suivant, les dix arbres taillés n'avaient déve- loppé que quatre ou cinq rameaux maigres, et dont les plus longs ne dépassaient pas 0'",40. Cinq d'entre eux, qui furent déplantés, mon- trèrent qu'ils n'avaient développé qu'une très-faible quantité de nouvelles racines. Les dix sujets dont la tige n'avait éprouvé que des suppressions par- tielles avaient épanoui tous leurs boutons, et chacun d'eux avait donné lieu à un petit rameau dont quelques-uns présentaient O^jiO de lon- gueur. Cinq d'entre eux qui furent déplantés, permirent de constater que les racines avaient produit pendant l'été une très-grande quantité de radicules : Enfin, les dix arbres laissés intacts avaient aussi épanoui un grand nombre de leurs boutons, mais ceux-ci n'avaient donné lieu qu'à autant de boutons à fleurs portés sur un petit axe long de 0'",01 au plus. J'ai remarqué, en outre, sur ceux qui furent déplantés, qu'ils avaient encore moins développé de nouvelles racines que ceux auxquels on avait appliqué la première taille au printemps précédent. Au printemps suivant, les cinq premiers arbres reçurent la seconde taille, les cinq sujets habillés seulement l'année précédente reçurent la première taille, c'est-à-dire, qu'on la recepa à 0'",40 au-dessus du sol. Il en fut de même des cinq arbres qui étaient restés intacts. Après la végé- tation, les cinq pi'cmiers avaient produit de nouveaux rameaux encore assez maigres, quoiqu'un peu plus vigoureux que ceux de l'année précé- dente. Les cinq arbres qui avaient été seulement habillés lors de la plan- tation, avaient développé six à huit rameaux d'au-moins un mètre de longueur. De sorte, que le produit de cette première taille équivalait au double de celui des deux tailles sur les premiers arbres. Enfin, les cinq sujets laissés entiers lors de la plantation, ne portaient que trois ou ([ualre petits rameaux plus chétifs encore que ceux des arbres taillés aussitôt après la plantation. — 554 — Ces faits, comme on le voit, ne laissent aucun doute sur Tutilité du retard apporté à la première taille. Ils sont d'ailleurs complètement en harmonie avec ce qui se passe encore malheureusement dans la pratique du plus grand nombre des jardiniers. En effet, la plupart d'entre eux taillent les arbres en les plantant. Ceux-ci ne donnent lieu qu'à de chétifs rameaux qui sont encore taillés l'année suivante. L'année subsé- quente, les arbres, toujours languissants, se couvrent de boutons à fleurs et de fruits qui achèvent de les épuiser, de sorte que ces arbres arrivent à la décrépitude au bout d'un très-petit nombre d'années et sans qu'on ait pu former la charpente. On cite, il est vrai, des résultats qui semblent contredire ceux que nous venons d'indiquer ; mais après m'étre enquis des circonstances sous l'influence desquelles ils s'étaient produits, j'ai pu me convaincre que celte contradiction n'est qu'apparente. Ainsi, on a obtenu parfois une végé- tation vigoureuse sur de jeunes arbres taillés l'année même de leur plan- tation. Mais il convient d'ajouter que ces arbres, déplacés à l'automne, avaient été déplantés avec le plus grand soin, presqu'en motte, de façon à conserver intactes toutes les radicules. On comprend alors que ces arbres, n'ayant été privés d'aucun de leurs organes nourriciers, aient pu donner lieu, au printemps suivant, à une végétation aussi vigoureuse, que si on ne les eût pas transplantés. Est-ce là ce qui se passe dans la pratique habituelle? Non assurément. Le plus grand nombre des jeunes arbres sont achetés dans des pépinières souvent fort éloignées du lieu où l'on plante. Les arbres y sont fréquem- ment plutôt arrachés que déplantés ; les racines et surtout les radicules se dessèchent sous l'action du soleil et de l'air, jusqu'au moment d'un emballage qui ne les garantit que très-imparfaitement de cette influence fâcheuse ; de sorte qu'à leur arrivée au lieu de destination , ces arbres ont perdu plus de la moitié de leurs racines. Qu'on veuille alors appli- quer immédiatement la première taille à ces arbres, et l'on peut être assuré que les chétifs résultats que je viens d'indiquer, se produiront. C'est donc pour ces sortes de plantations, qui sont les plus générales, que nous conseillons de n'appliquer la première taille qu'après la reprise des arbres, et non pour celles tout exceptionnelles où les arbres n'ont pas à reprendre. Conclusions. De tout ce qui précède, il résulte donc la nécessité de n'appliquer la première taille aux jeunes arbres fruitiers qu'après qu'ils sont complète- ment repris, c'est-à-dire, un an environ après leur plantation; et, en se- cond lieu, qu'il convient, en les plantant, de supprimer sur la lige une étendue de rameaux égale aux perles éprouvées par les racines. Il y aura d'ailleurs toujours plus d'inconvénients à faire un retranchement insuffi- sant qu'à l'exagérer un peu. L'insuflîsance de ces suppressions de rameaux — 3S5 — sera démontrée à la fin de la végétation par l'absence, sur la tige do nouveaux rameaux un peu vigoureux. Dans ce cas, il faudra s'abstenir de pratiquer la première taille au printemps suivant, car l'arbre ne ■ierait pas assez enraciné. On devra opérer seulement de nouvelles sup- pressions et remettre la taille à Tannée subséquente. Dans tous les cas, on devra bien se garder de laisser porter les fruits aux jeunes arbres avant l'été qui suit la troisième taille, attendu que ces fruits absorbe- raient, au détriment de l'arbre, la sève dont il a besoin d'employer toute l'action pour former sa charpente. Quant aux jeunes arbres qui présentent l'état languissant dont nous avons parlé, par suite de l'application de la première taille immédiate- ment après la plantation, il n'y a d'autre moyen à tenter pour leur rendre une vigueur convenable, qu'à les receper de nouveau au-dessous du point où ils ont été coupés d'abord, puis à supprimer toutes les branches latérales. Si cette opération énergique ne réussit pas, il faudra les remplacer. Les principes que je viens d'exposer, s'appliquent à toutes les espèces d'arbres fruitiers, moins le pêcher que j'ai excepté au début de cet article. Cette espèce offre, en effet, ce fait particulier que les boutons qui ne font pas leur évolution pendant l'été qui suit celui qui a présidé à leur naissance, sont anéantis l'année suivante. D'où il suit que, si l'on ne pratiquait pas la première taille sur ces arbres aussitôt après la plantation, les boutons placés vers la base de la tige, et qui sont indispensables pour former la charpente, ne se développeraient plus. (Journal de la Société d'Horticulture de la Moselle, 1854.) OEILLETS EN FLEUR PENDANT L'HIVER, Par m. Vincent, Jardinier au château de Ponl-Saint-Mard (Aisne). Lorsque les tiges de l'œillet commencent à monter, c'est-à-dire, vers la fin de juin, je les marcotte; un mois ou cinq semaines après cette opéra- tion, toutes les marcottes ou à peu près, se trouvent garnies de racines. Je les rempote dans des pots de 16 à 20 centimètres de diamètre et je les transporte sur une couche garnie de panneaux sur lesquels je pose leur châssis; je les prive d'air pendant quelques jours, après quoi je le leur rend peu à peu. Au mois d'octobre, lorsque mes marcottes commencent à monter, je leur donne un tuteur, et des les premiers froids je les rentre dans une serre tempérée. C'est là que les fleurs se montrent, et on en jouit tout l'hiver. {Revue horticole). — 35G — VARIÉTÉS. INCONVENIENTS DE LA VIE DE CAMPAGNE. 1° Les coHJiiins et moyen de les empêcher de brnire et de piqnei*. Des maisons de campagne bâties dans le voisinage de marais ou de rivières ou qui possèdent des étangs, offrent rincommodité des cousins, les moustiques de l'Europe. Pour être à l'abri du vol de ces insectes d'abord, vol dont le bruit est désagréable et ensuite de leurs brûlantes piqûres, il existe un moyen très-simple, c'est de réduire les cousins à une complète immobilité, de les clouer sur place dans un état d'inaction qu'on croit produit par la peur ou par l'asphyxie, on ne le sait pas précisément. Pour obtenir cet effet, les cousins étant entrés dans la chambre et y prenant leurs ébats , on brûle et on fait fumer surtout quelques mor- ceaux de papier d'emballage brun, tel qu'on l'emploie depuis quelques années, surtout ce papier dont se servent les négociants pour envelopper les objets qui sont expédiés par mer. Son odeur est légèrement celle du goudron. Quand les cousins les plus bruyants et les plus mordants ont senti cette fumée, ils se dirigent piteusement vers quelques tapisseries, s'y tiennent coi pendant des heures entières, comme s'ils étaient plongés, dit un entomologiste anglais, dans une stupéfaction voisine de l'hébétement. Cet auteur penche vers un effet moral, produit par la peur de la fumée, le cousin aimant les vapeurs, mais non ce qui brûle. D'autres natura- listes, s'étant convaincu de la réalité et de Tefficacité de l'action, l'at- tribue à une influence énervante de la fumée d'une petite quantité de goudron sur le système nerveux, très-irritable et la respiration très-déli- cate de cet insecte. 2" Les orties et procédé de faire cesser la donlenr de leurs piqûres. On sait très-bien pourquoi et comment les orties piquent et occa- sionnent de petites plaies brûlantes, parfois très-douloureuses. Les poils de ces plantes sécrètent une liqueur acre, caustique et alcaline; ces poils entrent dans la peau, se brisent, versent le contenu dans la plaie qui vient d'être faite et le bout même du poil y persiste aussi. On voit donc pourquoi on augmente le mal de la piqûre en se grattant; on agile cette pointe acérée entrée dans la peau et l'on étend le contact de la liqueur corrosive et bindante. Avec un peu de réflexion, on arrive à la connaissance d'un moyen bien simple pour diminuer la douleur qu'occasionnent les orties : Neu- tralisez l'alcali de la liqueur caustique versée dans la plaie par un acide. Un peu de vinaigre étendu d'eau, un peu de bière ou de vin acides, un citron, un fruit aigre, etc., suflisent pour arriver à ce résultat. Enfin, ce qui vaut tout autant, c'est de recourir à l'oseille, aux rumex, aux oxalix si communs dans les endroits où les orties se trouvent elles-mêmes. On frotte les plaies des feuilles de ces plantes, on les mouille de leur jus et la souffrance disparaît. C»i. M. i-8.()robus (orniosus. Siev. ().(":il('('olari;i floxiiosa . i'.ni/,..-i PnNon. — 5S7 — HORTICULTURE. L'OROBE ELEGANT, OROBUS F0R3I0SUS, STEV. , CHARMANTE PLANTE DU CAUCASE, DE PLEINE TERRE POUR NOS JARDINS, Par m. Ch. Morren. Le chevalier De Steven , conseiller de rimiversité de Moscou , a fait connaître dans les mémoires de la Société des Sciences de cette ville, quelques plantes du Caucase, et parmi elles un Orobiis formosus, le sujet de ces lignes. Pyrame De Candolle, dans le deuxième volume du Pro- drome (p. 376), fait une fausse citation en disant que la description de la même plante est aussi consignée dans les Transactions of the Linnean Society of London, tome 9, p. 415, tab. 36; c'est tome 41 qu'il faut lire. En effet, on y trouve une bonne description par De Steven et une gra- vure au trait avec quelques détails de la fleur assez mal dessinés d'un charmant orobus méritant l'attention des amateurs de belles plantes. Nous tenons à reproduire ici la description du premier botaniste qui a découvert cette espèce, parce qu'elle explique pourquoi on a si souvent perdu dans les jardins une plante si digne d'y être conservée. Orobus forjiosus. De Stev. Trans, Linn. Soc, tome 11, p. 415, pi. 56. — Feuilles conjugées subcordées , pédoncules uniflores. iîacme vivace , filiforme, brunâtre, pénétrant profondément entre les fragments de schiste. — Tiges nombreuses, rameuses, décombentes, fili- formes, presque flexueuses en haut, striées, glabres ainsi que toute la plante. — Feuilles horizontales, pétiolées, conjugées, ovales, obliquement subcordées, un peu obtuses, pourvues d'un mucron très-court, très- entières, glabres, glaucescentes , veines proéminentes des deux côtés. Pétiole plus court que la lame, droit, plane, finissant en un cirrhe subulé et très-court. — Stipules rhomboïdes-subcordées , aiguës, pourvues de 3 à 4 dents , beaucoup plus courtes que la feuille. — Pédoncules axil- laires, solitaires, droits, plus longs que les feuilles, uniflores, pourvues d'une bractée linéaire, de deux lignes de long sous la fleur. — Calice horizontal, obtus à la base, quinquefide jusqu'au milieu, divisions lancéo- lées aiguës, subégales. — Corolle d'un pourpre rose très-agréable, tube égal au calice (comme dans le Platijlobium formosum). — Étendard droit, réfléchi, ample, le double plus grand que la carène, presque rond, émar- giné, avec un petit mucron et deux plis à la base. — Ailes presque planes, un peu plus longues que la lame qui est subarrondic. — Carène montante, le double plus longue que le calice, le sommet entier un peu aigu et portant un prolongement en arrière. — Étamines diadelphes, incluses. — Anthères iaunes. — Style poilu au sommet et en haut. — BELG. HORT. T. IV. 46 — 3S8 - Gousse lancéolée, glabre, polyspermc, mucronéc par le style dans sa jeunesse, d'un pouce et demi à la maturité. Cette espèce iVOrobus, continue De Steven, est la plus belle du genre : Species omnium congeiierum pulcherrima ; ^nr le port résultant de la forme des feuilles et des pédoncules droits et uniflores. Enfin, il nous apprend que cette espèce est rare et qu'elle habite les montagnes alpine^du Caucase oriental, vers les sources de la rivière nommée Chodjal. Elle croît où aucune plante ne peut vivre, entre les fragments mobiles des rochers schisteux. Elle fleurit au Caucase en juin. C'est en 1815 que parut la publication de De Steven dans les Transac- tions de la Société Linnéenne de Londres, et en 1824, la plante fut intro- duite dans la partie centrale de l'Europe. En 1825, M. De Candolle ne l'avait vue que sèche. Aucun auteur ne la fit figurer, ni n'en parla de visu, et les grands journaux iconographiques de l'Angleterre n'en donnèrent pas la représentation. On la posséda dans quelques jardins où sa présence ne fut pas de longue durée, précisément, croyons-nous, parce qu'on ne connaissait pas sa manière de vivre entre les fragments de rochers. M. Séringe, de Lyon^ en sécha une variété (S, microphyllus , dont les feuilles sont beaucoup plus petites, presque rondes et les stipules à peine dentées. La culture modifie évidemment quelques caractères de cet élégant orobe, et nous avons vu la preuve de ces changements sur les pieds énormes du jardin de M. D. Ilenrard, démonstrateur d'agriculture de l'université de Liège. Ce sont des touffes de 60 à 80 centimètres de dia- mètre, hautes de 50 centimètres; toutes les branches se courbent vers le haut et portent leurs extrémités fleuries comme des panaches. La branche que nous avons dessinée d'après nature (pi. 57, fig. 1), prouve que dans les descriptions, il y a plusieurs faits à rectifier : 1° les stipules (fig. 5) sont bien semi-sagittées, mais elles ne sont pas denticulées; il y a seulement des sinuosités irrégulières sur le bord. Cultivée dans un endroit sec et pierreux, il est probable que les denticules se montreront; 2° les pédon- cules loin d'être subbiflores (De Candolle) ou uniflores (De Steven), sont au contraire subtriflores, surtout dans le milieu des branches; vers le som- met ils deviennent biflores et quelquefois uniflores par avortement d"une des fleurs. Plus la culture est soignée, la terre fertile, plus les pédoncules triflores abondent, et vu que la corolle acquiert non pas la grandeur de celle de VOrobus vernus, mais bien celle d'une fleur du pois comestible ordinaire, on conçoit que le rose pourpre vif de ses pétales doit en faire, réunies trois à trois, une des plus jolies plantes de pleine terre qu'il soit possible de posséder dans nos pays. Le calice est mal défini dans De Steven (voy. fig. 4) : il a trois dents plus grandes inférieurement et deux plus petites supérieurement; il est légèrement polygone et les deux petites dents limitent une sorte de sur- face en bouclier picotée de rouge; le reste est membraneux, mince et — 559 — vert. Le mucron de l'étendard n'existe pas toujours (fig. o). L'aile porte une pointe en arrière de la forme d'un demi éperon, qui, avec son voisin de l'autre aile, enclave un prolongement de même forme de la carène dans le bout antérieur de laquelle se trouvent les anthères et le stigmate épaissi en massue et poilu (voyez fîg. C, 7 et 8). Les parties vertes de ce végétal offrent aussi des particularités peu ordinaires. Les nervures des feuilles sont plates, saillantes au tact des deux côtés de la feuille; elles deviennent si fortes, si tendineuses qu'en froissant les feuilles entre les doigts ou mieux encore dans l'eau, tout le tissu vert parenchymateux se détruit et on obtient des squelettes de feuilles fort élégants, tenaces et durables. On les blanchit ensuite au soleil et à l'eau et on en fait plusieurs petits meubles de salon. Culture. Enfant du Caucase, croissant sur de hautes montagnes où il naît seul, enfonçant profondément ses racines filiformes entre les lamelles mobiles des schistes, si telles sont ses conditions natives de bien être, VOrobe élégant est une heureuse acquisition pour les maisons de campagne et les jardins de nos provinces montagneuses où les schistes abondent. Ailleurs, il ne dédaignera pas les calcaires, comme l'expérience nous l'a prouvé. Même dans une terre meuble, bien terreautée, un peu humide, souvent arrosée, dans le carré d'un amateur de plantes de pleine terre, nous avons vu prendre à l'Oro^e élégant de considérables développements et les fleurs se suivaient sans interruption du iS mai jusqu'en juillet. La multiplication se fait par division de pieds, à l'arrière-saison de préférence, parce qu'au printemps les Orobtis sont trop précoces, et en les divisant à cette époque, on arrête leur végétation. La reproduction s'assure aussi par les graines qui doivent être cueillies à une parfaite maturité et semées, au premier printemps suivant, dans une couche froide consacrée aux plantes alpines. Quand lOrobe est de force à être trans- planté, sa nature ne lui fait pas craindre les froids : il a bravé en pleine terre le rude hiver de 1855-54, c'est-à-dire, 28", 75 centigrades sous zéro. Sa qualité vivace est donc très-assurée pour nous. C'est une acquisition à recommander. Nous espérons que le dessin ci-joint donnera une idée suf- fisante de la beauté de la plante. Mais ce que nous ne pouvons pas rendre, c'est la richesse de sa végétation , l'ampleur de ses touffes arrondies, pressées, d'où les fleurs cherchent à s'échapper sur leurs longs pédon- cules; ce sont ces longs panaches de feuilles d'un vert très- tendre aux extrémités, successivement plus foncé vers le milieu des plantes. Nous n'avons pas essayé la culture en corbeille de TOrobe élégant; peut-être la longueur de ses racines deviendrait-elle un obstacle à ce mode de vivre, mais si lexpérience prononçait en faveur de cette culture, ce serait une des plus précieuses acquisitions pour Ihorticulturc des salons. — 560 — LA CALCÉOLAIRE FLEXUEUSE DU PÉROU : CALCEOLARIA FLEXUOSA , Par le même. Des établissements horticoles de Liège et notamment celui de M. Ha- quin, produisent un genre de calcéolaires , vivaces et subligneuses, très- abondantes en fleurs éclatantes, faisant grand effet dans les expositions et les jardins, et cependant d'une origine encore douteuse. Les uns disent ces calcéolaires des hybrides, mais aucun ne nomme les espèces qui auraient été mises en rapport, et l'on s'inquiète encore moins de la presque impossibilité où serait l'opérateur le plus dextre et le plus habile d'amener avec certitude une telle hybridation. Les variétés naissant dans cette section de calcéolaires procédant du jaune pour converger vers le rouge et le brun, ont toutes une physionomie de parenté telle qu'on peut tout aussi raisonnablement soupçonner que ce ne sont pas des hybrides, mais simplement des variations de coloris : Nimium ne crede colori. Une des espèces de calcéolaires récemment introduites dans les collec- tions est la: Calcéolaria FLEXUOSA. Ruiz et Pavon. FI. Peruv. et Chil. L, p. 17, t. 26, fig. A. — Moore, 3Iag. of Bot., Pars I, p. 55. cum. ic. Sous- arbrisseau subligneux, velu; rameaux flexueux; feuilles ovales, crénées, cordées à la base, âpres et rudes au-dessus, veinées au-dessous; panicules corymbeuses feuillues; calice velu, divisions légèrement obtuses; coi'olle concolore, lèvre supérieure plus courte que le calice, l'inférieure obovale- orbiculée large, contractée à la base sur une certaine étendue et ouverte au milieu (voyez pi. 57, fig. 9). Ruiz et Pavon ont trouvé cette espèce aux précipices de Canta, et Wil- liam Lobb l'a retrouvée près d'Andaylis au Pérou, à une altitude de 8,000 pieds. Sir William Hooker ramena la plante de Lobb cultivée par M. Veitch d'Exeter à l'espèce de Ruiz et Pavon, bien que la Flore du Pérou et du Chili de ces auteurs donne une très-mauvaise figure de cette calcéolaire. Culture. L'espace dont nous avons pu disposer sur la planche est bien trop restreint pour représenter la grandeur des panicules de ces fleurs. Dans un parterre ou dans une serre d'été , ces panicules deviennent des amas de corolles jaunes et les pieds en produisent pendant longtemps. On n'amoindrit cette ampleur et ce nombre qu'en cultivant la plante selon les conditions de sa station natale : des pierres, des rochers, des briques mêlées à de la bonne terre de bois, à fond argileux et gras. Le purin mêlé à de l'eau devient un engrais pour lui donner une végétation plus abon- dante, surtout pendant les temps secs et chauds. — La multiplication ne se fait pas avant la fin de septembre, dans une couche close où les boutures reprennent facilement, tandis que si on opère avant cette époque, il n'y a pas formation de racines. On prend pour les boutures — 561 — des branches qui n'ont pas fleuri. En hiver et au printemps, les pucerons attaquent vigoureusement les plantes et les boutures, et les fumigations de tabac deviennent nécessaires. Les calcéolaires ordinaires des serres appartiennent, comme on le sait, aux espèces nommées : C. crenatiflora, Cav. ; C. corymbosa, Ruiz et Pav. C. arachnoidea, Grah. Il est très-peu probable qu'il y ait hybridation entre ces espèces corymbifères et la calcéolaire flexueuse d'un tout autre port. CULTURE DES SPARAXIS ET DES IXIAS, Par m. Rosier, Amateur-fleuriste à Terrington dans l'Herefordshire. Les Sparaxis et les Ixias sont les plus grands amis de mon esprit, et je me livre à leur culture avec un succès que je n'ai jamais vu se réaliser ailleurs. C'est pourquoi je me donne la douce satisfaction de dire aux autres comment je fais moi-même, afin que des fleurs si jolies et si déli- cates trouvent en d'autres mains les soins dont elles sentent le prix et qu'elles récompensent par des tapis multicolores tissés de corolles qui ont emprunté à l'arc-en-ciel ses inimitables teintes. Je vous engage d'abord à vous procurer des îles de Jersey et Guerne- sey des bulbes qu'on y vend à très-bas prix et qui n'ont pas leurs égales ailleurs. On classe ces bulbes en celles qui donnent des fleurs d'or, de pourpre, de velours, blanches, roses, vertes, incarnat, rouges, écarlates, et enfin de toutes les teintes possibles hors le bleu. Je trouve qu'ici, ces bulbes se cultivent très-bien et donnent de beaux résultats, dans une exposition au midi, plantées à une profondeur de six pouces et à deux ou trois pouces de distance de la bordure en pierre d'un parterre muré; ou bien on les place encore sur le devant d'une orangerie, d'un conservatoire, d'une serre, dans le parterre qui côtoyé ces construc- tions et qui se ressent toujours de leur chaleur. Le sol doit être un terreau végétal sablonneux, perméable, si on le veut, à la gelée de l'hiver, c'est-à-dire, meuble et poreux. Mais afin de le préserver de la gelée, on le couvre de feuilles sèches, pressées et rete- nues de manière que le vent ne les enlève pas. Cultivés ainsi, les Spîiraxis et les Lxias donnent bien plus de fleurs qu'emprisonnés dans des pots, et on jouit de leurs appas depuis mai jusqu'au mois d'août. J'ai vu et j'ai eu au moyen de cette méthode, des épis floraux de la hauteur de trois pieds, et à Guernesey, on en voit souvent de quatre. Quand il faut enfin cultiver ces plantes en pot, on forme un compost d'une terre franche sablonneuse , de terreau de feuilles consommé et de terre de bruyère en égales proportions, le tiers. L'égouttement du pot (drainage) demande d'être soigné selon toutes les règles d'une horticul- ture avancée. — 302 — On plante en octobre ; les bulbes se placent à un pouce d'épaisseur. On range immédiatement les pots dans une couebe froide et on les pré- serve seulement de la gelée, jusqu'à ce que les pots soient garnis de racines, et alors on les aligne sur les gradins d'une orangerie et on leur donne de légers aiTosemenls. Après la floraison, on arrête et on modère les aspersions d'eau jusqu'à ce que la terre devienne peu à peu sèche; l'on conduit ainsi ces plantes jusqu'à l'époque du repotement. On casse les mottes de terre et on ôte les bulbes sans les blesser. Quand on laisse les bulbes tranquilles après leur floraison et qu'on ne les remue pas quand elles ont à peine séché leurs feuilles, ils refleurissent beaucoup mieux que dans le cas contraire. La multiplication se fait par graines ou par bulbilles. Ces dernières se séparent dans l'action du repotement. La graine se sème de très-bonne heure au printemps, afin d'obtenir de bonnes bulbes en automne. On obtient des variétés par l'hybridation. C'est là l'origine des belles plantes qu'on a vu apparaître sur la scène dans les expositions depuis une douzaine d'années. Je possède quatre-vingt-six variétés bien dis- tinctes que j'ai fait naître de cette manière. A Guernesey, c'est le grand mais mystérieux secret des horticulteurs dans l'obtention de leurs variétés. (En Belgique, les Ixias les plus chers se vendent 1 fr. 50 à 5 fr. Sou- vent les dix valent 1 fr., et les Sparaxis tricolor, formant des mélanges de toutes les couleurs et panachures, valent les vingt-cinq, 2 fr. ; les cent, 5 fr. et le mille 55 fr. Pourquoi donc cette culture n'est-elle pas encore plus populaire?) CULTURE DU LIS NANKIN [LILIUM TESTACEUM. LINDL.), Par m. Ch. MorrExN. Le Lilium testaceum que M. Lindley décrivit pour la première fois, en 1842, dans les 31isccllanées du Botanical register, et fit figurer dans le volume du même ouvrage de l'année suivante (n" 11) commence à se répandre dans les jardins où sa haute taille attire l'attention. 11 serait à désirer que sa multiplication s'étendît encore, puisque ce lis est un des plus beaux du genre, que la couleur de sa fleur est très-rare dans la végétation; mais il faut bien le reconnaître, la culture de cette espèce n'est pas entendue partout de manière à assurer son succès. Les uns la considèrent comme une plante de pleine teiTC, les autres comme une espèce de couche froide pendant l'hiver, et ce qui est remarquable, c'est qu'en Angleterre où la température est plus douce que sur la partie cor- respondante du continent, on lui donne l'abri de la couche. Cette culture est la plus certaine; la voici : On plante les bulbes à l'automne ou au premier printemps sous châs- sis, et on les respecte en les laissant dans un repos absolu; ces plantes ne soullrentpas la transplantation parcequ'elles brisent facilement leur chevelu radiculaire des plus délicats et après cet accident, les bulbes se dessèchent. — 5G5 — Plantées en pleine terre ou en pot, ces bulbes doivent être enfoncées dans le sol plus profondément que celles des autres espèces, parce que des fibres se développent au-dessus des bulbes tout autant qu'au-dessous. Aussi ce n'est que pendant l'époque du sommeil hivernal qu'on peut songer à changer les pieds de terre. Les plus grandes précautions doivent être prises quand il s'agit de retourner le pot et d'en donner un nouveau , et un plus grand à ces bulbes dont les fibres ne peuvent se déranger sans nuire à la végétation de la plante entière. Le sol nouveau à ajouter autour de la motte ancienne, se placera aussi de manière à lui donner la même consistance qu'avait le sol ancien. Le Lis Nankin veut le repos physique elle renouvellement de la terre sans mouvement ni perturbation. On commence par donner au pot un drainage bien aéré, par le moyen des tessons et de scories. Puis on compose le sol de terre de bruyère sablonneuse et dont le sable est siliceux et grossier ou à grains rudes, de terre argileuse franche, et enfin d'une troisième part de terreau de feuilles bien consommé et arrosé de purin. On tient très-sec dans les premiers temps de la plantation jusqu'à ce que se montrent les indices de la végétation active; on donne alors de l'eau, mais très-peu, en augmentant la quantité peu à peu d'après les besoins de la croissance. Le danger le plus grand qui expose les bulbes à une mort certaine est la trop grande humidité après le rempotement. La multiplication se fait par le bouturage des écailles des bulbes. On place ces écailles dans du sable légèrement humide et recevant une cha- leur modérée dune couche à reproduction. Les bulbilles naissent et les racines se montrent. II faut trois ans pour qu'une bulbe produite de cette manière fleurisse. REVUE DE PLANTES NOUVELLES OU INTERESSANTES : Ccelogyne tes^tîicea. Lindl.,5o^ Reg,, 1842. Msc. n. 54. — Hook., Bot. Mu(j., ann. i8o4, tab. 4783. Cœlogyne argilée. Famille des Orchi- dées. Pseudobulbes étroites, ovales, anguleuses; feuilles lancéolées à trois côtes, grappe pendante, bractées ovales, cucullées , delà longueur de l'ovaire; sépales et pétales presque égaux, labellum oblong, lobes la- téraux arrondis, rognés, l'intermédiaire obtus, avec quatre veines papil- Icuses en forme de crêtes. S'il fallait juger du mérite de cette orchidée , au point de vue de l'horticulture , on pourrait employer le langage du métier, en disant que c'est une espèce tthotanique». Les espèces hota- niques sont destinées à la science et ne valent la peine d'être cultivées que dans les établissements subsidiés par l'État ou de grandes associa- tions d'instruction , tandis que les espèces horticoles doivent être cotées à la bourse! C'est vous dire que ce Cœlogijne testacea avec ses fleurs cou- leur d'argile et son labellum rogné {obsolelus, vieux, vieilli, qui a passé de mode), n'entrera jamais dans une colleclion d'orchidées de luxe. Ori- — 564 — ginaire de Singapore, elle a été introduite par les soins de M. Loddiges, il y a déjà plusieurs années. Culture. Elle est de serre chaude et rien de particulier ne distingue le traitement qu'il faut donner à cette petite et modeste enfant, de mine terreuse : elle fleurit en été. Di*acdena elliptica, var. maculata. Thunh. inDiss. v. 3. — Schultz, Syst. veg.,v. 7. p. 345. — Kunth, Enum.pL, v. 5, p. 14. — Var. Hook., Bot. mag., ann. 4854, tab. 4787. Dracœna elliptique, var. tachetée. Synonymes : Dracœna spicata. Roxb., Fl.Ind., v. 2, p. 457. — Dracœna terniflora. Roxb., Fl. Ind., v. 2, p. 459. — Wall., cat. n" 5447. a — Dracœna Wallichii. Kunth in act. acad. Berol. 1842, p. 26. Enum.pL^ V. 5, p. 44. — Dracœna javanica. Kunth, Enum. pL, v. 5, p. 42. — Sanseviera javanica, Blume, Enum. pi. jav., v. 1, p. H ; Schultz, v. 7, p. 360; Harskarl,P/anf.Jai'. rar.,p. 114. — Cordyline Sieboldii, Planch., Fl. des Serres, v. 6, p. 109, t. 569, var. y maculata. — Terminalis alha, Rhumph. Amb., v. 4, p. 79, t. 54. f. 1. /5 maculata. — Dracœna macu- lata, Roxb., Fl. Did., V. 2, p. 157, etc. Fam. des Asparaginées. Tige simple ou rameuse, grêle, toute la plante très-glabre, haute dans nos serres de 5 à 7 pieds, portant des lignes circulaires, cicatrices des feuilles tombées ; fronde au sommet de 4 à 20 feuilles rapprochées , pétiolées , elliptiques-lancéolées, subcoriaces, brillantes, mucronées-aiguës, quel- quefois avortées, stipuliformes, pétioles canaliculés, dilatés amplexicaules à la base; panicules terminales, presque sessiles, rameaux droits, ouverts, bractées petites, fleurs ordinairement ternées, pédicellées, segments du périanthe, linéaires, planes, de la longueur du tube un peu enflé vers sa base, style à peine plus long que les étamines. — A voir les nombreux synonymes de cette espèce de Dracœna, et nous n'en avons pas épuisé la liste, il ne faut pas s'attendre à trouver beaucoup de clarté dans l'histoire de cette espèce. Il est javanais d'origine et M. le docteur Von Siebold l'a compris dans ses introductions de plantes en Belgique. En 1849, il a fleuri chez M, Van Houtte et mérité d'être cité parmi les plantes d'élite distinguées par la Société d'horticulture de Gand; enfin, en 4850, M. Plan- chon traita de toute son histoire éruditive, descriptive et culturale dans la Flore des Serres. Sir William Hooker revient, en 4854, sur ce même Dracœna, se borne à dire que M. Low l'avait reçu des jardins belges sous le nom de Sanseviera javanica, identique, du reste, avec le Cordyline Sieboldii maculata de M. Planchon, mais seulement d'après l'affirmation de Walpers ! Sir William affirme qu'il possède cette espèce dans son her- bier de Ceylan, Java, Sumatra, Bornéo, Silhet, Bombay. Il existe aussi à Amboine et dans les îles de l'Archipel malais. Culture, lies Dracœnas et surtout celui que nous venons de mentionner sont de serre chaude; ils exigent beaucoup de chaleur et d'humidité, des arrosements de la terre et du pied et les aspersions sur la fronde. Le sol — 3(J5 — doit être riche en substances nutritives même animales, et nous avons vu des pieds devenir très-beaux après des arrosements d'eau fortement pu- rinée. On draine le pot avec soin. La multiplication se fait en coupant la pousse terminale d'une tige, qu'on bouture du reste. De cette opération procède sur le tronc décapité une foule de bourgeons qui sont autant déjeunes frondes. On divise aussi la stipe ou la tige en tronçon de quelques pouces qu'on place dans une bâche très-chaude et sous-cloche ou dans une serre à orchidées. On recommande de placer les Dracœna ou Cordyline en pleine terre dans les serres chaudes , afin de leur voir acquérir une grande taille. Cet effet peut dans quelques circonstances particulières être atteint , comme dans les serres représentatives des scènes végétales de la zone tropi- cale; mais dans la culture ordinaire, les plantes de ce genre d'une taille moyenne, de 10 à 20 pieds selon les espèces et la grosseur des troncs, sont bien mieux proportionnées et partant plus élégantes. Le Dracœna elliptica, var. maculata, porte sur ses feuilles des ocelles blanchâtres : ce sont des taches circulaires ou à peu près , d'un vert très- pâle, ayant au centre un point vert comme le reste de la feuille, à peu près comme les ocelles du Bégonia argyrostigma , dont la structure est au reste tout autre. — Ce Dracœna ne coûteplus en Belgique que 10 francs. Hedaroma tnlipSfera. Lindl., Swan-River VII, t. 2, f. /3, — Flor. Cah., june 1854, p. 125. Iledarome porte-tulipes. Famille des Myrtacées. Syn. : Genetyllis tulipifera. Les Hederoma sont des arbustes de l'Aus- tralie, séparés des genetyllis de De Candolle, par M. Lindley, qui a pris pour type du genre le Genetyllis citriodora d'Endlicher. Les Iledaroma se caractérisent par des bractéoles géminées, distinctes, carinées,un calice dont le tube est cylindrique, pentagone, conné inférieurement avec l'ovaire, limbe quinquefide, lobes un peu obtus; corolle à cinq pétales, insérée à la gorge du calice, alternes avec ses lobes, ovales lancéolés, carinés, connivents; 20 étamines insérées sur les pétales et plus courtes qu'eux, alternativement stérile, liguliformes, tronquées, les fertiles à filets subulés, anthères biloculaires, globuleuses s'ouvrant en arrière par des pores. Ovaire infère, uniloculaire; de 2 à 5 ovules, droits, dressés, anatropes; style filiforme, exsert, glabre ou barbu au-dessous du stig- mate terminal; capsule uniloculaire, monosperme par avortement, indé- hiscente. Ces arbustes appartiennent à la région austro-occidentale de la Nouvelle-Hollande et sont tous odoi'ants; les feuilles sont opposées, sans stipules, ovales-lancéolées, légèrement obtuses, cordiformes à la base, planes, les feuilles de l'involucre très-larges colorées et les capitules pau- ciflores. M. Drummond découvrit Vlledaroma porle-ttdipes dans cette région; il a le port et l'aspect du Beaufortia decussata ou Pimelea deciis- sata. Les fleurs portées à l'extrémité des branches pendent et sont for- mées par une coupe d'un vert blanchâtre , d'un pouce et demi de pro- BELG. HORT. T. IV. 47 — 560 — fondeur, parsemée de rouge sombre et passant à la structure des feuilles vers sa base. Les vraies fleurs se trouvent dans cet involucre, chacune est entourée de deux écailles dont la partie supérieure est d'un beau roug(; carminé. Tout l'appareil floral a l'air d'une cloche en forme de tulipe, pendant au bout des rameaux. M. Backhouse de York est le jardinier au- quel on doit l'introduction de cette singulière plante. On pense qu'en An- gleterre elle passera en pleine terre. Elle était en fleur au mois de juin 4854 à York, et déjà quelques horticulteurs belges possèdent l'espèce dans leurs collections. Iinantophylliiin? miniatnm. Hook. , Bot. m ag., nnn. 4854, tab. 4783. Imantophylle écarlate. Synonyme: Vcdota? miniata, Lindl., Garden. chron., 1854, p. 419 et 449. Famille des Amaryllidacées. Pé- rianthe supère, corollin, à six divisions, ouvert-campanulé, tube très- court, divisions larges obovales-lancéolées, presque égales, les trois internes un peu plus grandes. Sixétamines; filets épais, subulés, ouverts, insérés au haut tube et à peine plus courts que les divisions du périanthe. Anthères versatiles, courtes-oblongues. Ovaire infère, trigone, trilocu- laire, loges oligospermes, ovules ordinairement jusqu'au nombre de six et en deux séries dans chaque loge fixés à l'angle interne. Style épais, décurvé et se relevant, plus long que le périanthe; stigmate trifide. Cap- sule charnue, indéhiscente. Graines uniques et solitaires par avortement dans chaque loge, bulbiforraes, rugueuses, subpulpeuses, de la grandeur de la graine des fèverolles. Cette espèce est originaire de Natal d'où elle a clé envoyée à M. Backhouse et à l'établissement de Kew. C'est un objet qui provoque de grands doutes sur sa nature. Sir William Hooker ne sait pas même si c'est un Imantophyllum. Lindley le rapproche des Vallota et M. Backhouse le ramène aux Clivia; mais ce n'est pas un Vallota, puisqu'il lui manque la duplicaturc à la gorge de la corolle. 31. Back- house a reçu un fruit mûr et les graines qu'il décrit, sont bulbifoi'mes comme celles des crinum et des amaryllidées. C'est une grande plante acaule , herbacée ; la racine formée de fibres fasciculées charnues et épaisses; les feuilles radicales, amples, lorées, distiques, s'embrassant par une base trcs-élargie; la hampe est piano-convexe, large, multiflore et ombellée au sommet ; la spathe polyphylle, marcescente, colorée ; les fleurs grandes, rouges écarlates, unicolores, dit M. Hooker, et il les dessine bico- lores, rouge-vermillonné et jaune brillant au fond; ces fleurs sontpédicellées et bractéolées ; bractéoles linéaires, de la longueur à peu près des pédicclles. Culture. Un vieux pied qui depuis deux ans a renouvelle ses feuilles, a donné une tige fleurie à peu près tous les quatre mois. Les fleurs ont besoin d'un temps très-long pour se former , de sorte qu'une ombelle demande de quinze jours à un mois pour bien se développer selon la température. C'est une plante de serre chaude, dont la culture ressembler à celle des Clivia et des Crinum. Sir William Hooker n'en dit pas un mol. — 567 — LITTÉRATURE ROTANIQUE ET HORTICOLE. LE JARDIN DES AZALEES A SHANGHAI; HISTOIRE DES SKIM31IA,\ l^' DES OLIVIERS PARFU3IÉS ET DES GLYCINES DE LA CHINE, Par m. Robert Fortune. Quelques jours après avoir visité le jardin des Pivoines, j'allai voir celui des Azalëas, qui est également très-digne d'intérêt. A 5 ou 6 kilo- mètres de Shanghaï se trouvent deux pépinières dont chacune contient une très-belle et très-considérable collection. On les désigne sous le nom de Poii-shcm Gardens (jardins des Azalées), et elles sont fréquemment visitées par les étrangers. La route traverse un pays très-uni et très-bien cultivé. On apercevait cà et là des massifs d'arbres de deux sortes bien tranchées. Les arbres à feuilles caduques, recouverts d'une fraîche ver- dure à laquelle les insectes n'avaient encore fait aucun tort, annonçaient l'existence d'un village. Les arbres verts, parmi lesquels dominaient les cyprès et les genévriers, étaient surtout placés près des tombes dissémi- nées dans la campagne. En une heure de marche j'atteignis les jardins des Pou-slian. Le jardi- nier me reçut très-bien, m'offrit la tasse de thé de rigueur, après quoi il s'empressa de me faire voir l'établissement. A la façade de la maison, sur trois ou quatre rangées de tablettes, figu- raient des plantes japonaises dont le brave homme avait une assez belle collection. Il me fit ensuite remarquer, au même endroit, une petite espèce de pin très-estimée, et qui, lorsqu'on peut la réduire à l'état d'arbre nain, a beaucoup de valeur. Il est généralement greffé sur une espèce de pin pignon (Stone-Pine). VAzalea obtusa placé sur les tablettes et quelques-unes de ses variétés semi-doubles, très-prisécs des Chinois, étaient en pleine fleur. Je n'ai jamais vu, en Angleterre, cette plante briller d'un éclat aussi vif qu'en Chine. Je vis là une très-jolie variété, tout à fait nouvelle, qui porte en très-grande quantité de petites fleurs rouges semi-doubles. Je ne doute pas qu'elle n'ait beaucoup de succès parmi mes compatriotes. La nou- veauté de sa nuance, ses petites feuilles, la pureté de ses formes la ren- dront très-précieuse pour les bouquets et pour l'ornement des habitations. Je l'ai nommée Azalea amœna, et elle est maintenant en Angleterre (I). (1) La prédiclion de M Fortune s'est réalisée : Y Azalea amwna devient une planic jiopulaire en Belgique et sur le continent, seulement il se trompe en disant que la Heur de eetle espèce est senii-doublc; c'est au contraire une fleur simple enveloppée dans un calice devenu péla- loïde, par cas tcralologique. La question vaut la peine d'être examinée. Si la transfor- mation du calice en organe «le la consistance et de la couleur de la corolle existe, la grcfl'e seule reproduira celte forme; si au contraire la (leur était semi-double, les clamines auraient été métamorphosées, et c'est ce partage, avec la prune d'Agen, la supériorité pour la transformation en pruneaux. Pour la bonté et la beauté du fruit, cette <: Goutte d'or » figure immédia- tement après la Reine-Claude. Quelle est donc l'origine de ce fruit remarquable? M. Em. Cappe dit, dans Y Horticulteur français, qu'elle ne doit pas être nouvelle, puisque Knight, l'illustre physiologiste et botaniste anglais, parie de prunes Coë, suspendues par la queue en 1808 dans un endroit sec où elles se sont con- servées jusqu'à la mi-décembre, mais VHorticidteur français ne remonte pas plus haut. Tous les autres auteurs parlent de cette variété comme si elle était un enfant du dix-neuvième siècle. Le nom de Coë devait cependant mettre sur la voie : c'est évidemment un nom d'homme. Or, dans le Sufîolkshire , existe le château de Bury- Saint-Edmond, célèbre par la bonne culture de ses vergers et par les suc- cès du jardinier Coë qui la dirigeait. C'est, en effet, à Coë qu'on doit deux variétés de prunes portant son nom et datant de 1798. L'une de ces varié- BEl.G. MOUT. T. IV. 48 — 374 — tés est le Coë's golden drop, appelé encore, dès l'origine, pour exprimer l'excellence de ses qualités, Coë's impérial (c'est la prune dont nous don- nons ici l'histoire) et l'autre est une variété très-tardive, Coë's fine late red) qui a fait beaucoup moins de bruit dans le monde horticole et gas- tronomique que son frère l'impérial. Le Pomological magazine de 18ô3 donna l'histoire, la description (p. 57) et la figure du Coë's golden drop, et, en 1831 déjà, la Pomologia britannica (t. H , p. 57) publia un très-joli dessin colorié de cette variété, mais seulement on peut y regretter la fidélité sous le rapport de la forme et du coloris. M. Em. Cappe a donné aussi, en 1854, une représentation de cette même prune qui vaut beaucoup mieux ; et , enfin , nous en com- muniquons une nouvelle à nos lecteurs, faite d'après nature sur des fruits provenant des jardins royaux de Laeken , et que nous avions en porte- feuille depuis environ dix ans. Nous assurons que ces derniers dessins sont extrêmement exacts. C'est un arbre très-vigoureux et très-fertile, qui peut être planté en plein vent, à peu près à toutes les expositions sous le climat de Paris, ou en espalier au levant et au couchant; mais en Angleterre on recommande pour assurer la récolte de fruits de le conduire en espalier contre un mur exposé au levant ou au couchant. En Belgique, les pyramides doivent être abritées dans leur exposition et l'espalier est plus productif au cou- chant qu'au levant. Vécorce est glabre, d'un brun pourpre foncé, avec des petites taches pâles. Les feuilles sont pétiolées, ovales, amincies aux deux extrémités, aiguës au sommet, dentées en scie, glabres et légèrement brillantes en dessus. La surface supérieure est d'un vert plus foncé que celle de dessous. Les pétioles sont courts, légèrement pubescents, pourvus de deux glandes globuleuses à la base de la lame. Les fleurs n'ont rien de remarquable; elles sont de moyenne grandeur, les pétales ovales-arrondis, imbriqués. Le fniit est ovale, de la grosseur des plus grandes prunes jaunes ou 6 à 7 centimètres de longueur sur 4 à 5 centimètres de largeur; la suture est très-marquée et parfois les deux extrémités sont en forme de mamelons; le mamelon terminal est un peu pointu et celui de la base est creusé pour recevoir le pédoncule dans ce vide : ce pédoncule est long de 2 à 3 cen- timètres et demi. Vépicarpe (peau) est d'un beau jaune maculé de taches et de points rouge-pourpre du côté du soleil, et en Angleterre, sous le climat brumeux, l'épicarpe devient d'un jaune verdàtre et les taches d'un violet foncé. Le sarcocarpe (chair) est jaune ou jaune verdàtre, il adhère au noyau, très-doux et délicieux au goût sans avoir l'arôme de la Reine- Claude. Le noyau [endocarpe) est allongé, pointu aux deux bouts et très- aplati. La maturation a lieu fin septembre et commencement d'octobre. — 575 — On fait servir aussi le fruit comme prune à sécher, et c'est une des plus recommandables variétés à cet égard. D'où est sortie la Goutte d'or de Coë? Nul ne le sait, et cette ignorance est déplorée par la plupart des bons pomologues. Le jardinier de Bury- Saint-Edmond est mort avec son secret, mais puisque c'est une pi'une-type qui n'a rien de commun avec les types connus, où aucune parenté n'est appréciable. Van Mons n'eut pas hésité de déclarer que son type devait se trouver à l'état sauvage en Angleterre, ce qu'aucun pomologue anglais n'a certes vérifié, vu que cette théorie est basée sur un rêve ou une mystifi- cation. Le prunier de Coë existe dans toutes les bonnes pépinières de la Bel- gique et se vend de 1 à 2 francs. MONSTRUOSITE PAR DISJONCTION DE LA FRAISE DITE BRITISH-QUEEN, Par m. Ch. Morren. Les botanistes savent que le fruit du fraisier n'est pas cette partie char- nue et succulente auquel le public donne ce nom ; mais que le vrai fruit est précisément ce que ce même public appelle la graine. Vachène, ou la graine du vulgaire, quand on le suit dans sa dissection, aboutit à des vaisseaux nourrissiers qui traversent le réceptacle ou porte- fruit, legyno- pfiore selon quelques auteurs, et c'est l'ensemble de ces gynophores char- nus qui forme le fruit communément nommé Fraise. L'été de 1854 est tellement humide, tellement froid qu'une maladie a frappé les pieds de fraisiers et notamment la variété dite British-Queen, et cette maladie est tératologique, c'est-à-dire qu'elle appartient à des désordres de monstruosité. Au lieu d'une grosse fraise conique, on ob- tient une mûre, une ronce, formée de tous globes charnus «ayant au som- met une prétendue graine ou achène dur et sec. C'est une disjonction de fruits dont chacun entraîne à son profit la part du gynophore dans laquelle passe son cordon nourricier. Toutes les achènes de la fraise tendent à s'isoler et le fruit devient beaucoup plus petit sans que le goût se pervertisse en rien. La même monstruosité se déclare chez les oran- gers où les carpelles se séparent en autant de cornets différents et dans les rosacées de la section des pomacées où le calice s'atrophie et avorte, tandis que les carpelles s'isolent et se placent régulièrement en verticilles. Je n'ai jamais vu dans aucun auteur d'horticulture ni de tératologie végétale qu'on ait cité la fraise parmi les fruits disjoints, mais le nombre de pieds observés cette année est excessivement grand et évidemment en rapport avec les localités humides. S'il y avait des fraises de marais, elles seraient, pensons-nous, disjointes. — 37G — ARCHITECTURE DE JARDIN. DE L'ART DE REHAUSSER LA BEAUTÉ D'UN JET D'EAU PAR LA VÉGÉTATION QUI L'ENTOURE, Par m. Ch. Morren. « Je veux bien voir l'eau tomber et retomber en cascade, se précipiter en torrent, s'épanouir en nappe, parce que ces mouvements existent dans les scènes du monde, mais je ne la veux pas voir s'élancer en jet parce que ce spectacle ne s'offre dans aucun pays par les seules forces de la nature. Un jet d'eau est un artifice de l'art et doit être exclus des jardins paysagers. » Telle était la condamnation qu'un propriétaire trop paradoxal lançait contre toutes les gerbes de liquide. Le malheureux ne se souve- nait pas d'avoir lu quelque part dans la description du pompeux jardin de Versailles comment l'eau peut Là, s'épancher en nappe, ici, monter en gerbes. Et. dans l'air s'enflainmant aux feux d'un soleil pur Pleuvoir en gouttes d'or, d'émeraude et d'azur. (Delille, les Jardins, I" chant). D'ailleurs, les jets d'eau existent même naturellement, et M. Noël Ilumphreys donne dans son aperçu sur le rôle des fontaines en connexion avec les jardins, les représentations de plusieurs scènes de ce genre où l'eau jaillit dans des bas-fonds, alors qu'elle arrive d'un niveau supérieur. Les pays de montagnes abondent en exemples de ce phénomène. Mais le simple jet d'eau, quand il a pour but d'orner un jardin d'agré- ment, doit accomplir sa mission principale, c'est-à-dire: rehausser sa beauté propre par tout ce qui l'entoure, objets de construction d'art et végétation appropriée. Un jet d'eau dans un bassin circulaire au niveau du sol, placé au milieu d'un jardin floréal, entre des parterres, et recevant depuis le malin jusqu'à la chute du jour les rayons d'un soleil ardent, est une conception de mauvais goût condamnée et abandonnée aujourd'hui. L'eau qui jaillit à une grande hauteur doit être éclairée obliquement par la lumière que de hauts arbres laissent passer dans une certaine direction. Alors la gerbe se détache sur un repoussoir de verdure sombre, et les couleurs de l'arc- en -ciel produisent dans ces goutelettes un effet de la plus haute magnificence. Un vase saillant, au-dessus de la terre, ajoute à la noblesse de la gerbe et le paysage ci-joint , dii à la conception de M. Ilumphreys, permet d'apprécier comment un temple, vu dans le lointain, des escaliers en pierres ou en marbre conduisant vers le lieu du plus bas niveau d'où la fontaine jaillira plus haut et plus belle, et des groupes de statues harmonisés avec une végétation sévère, dense et pleine, comment, disons-nous, des arrangements de ce genre contribuent se faire valoir les uns les autres. Rien ne sent la prétention de l'art dans cette combinaison, et cependant tout a été agencé chez elle pour en faire ressortir les plus heureux effets. — 377 PI. '09. — 578 — CONSTRUCTIONS HORTICOLES. L'ETA BLE-SERRE, Par m. Ch. Morren. Faire servir une étable à vache, de serre à forcer pour y produire des raisins et des fraises est une idée qui a surgi dans le cerveau d'un seigneur anglais, vers 4847, mais depuis cette époque on n'a guère pu- blié sur la réussite ou les inconvénients de l'entreprise , que quelques lignes. Nous n'avions pas cru devoir entretenir nos lecteurs de cette idée qu'après des plus amples renseignements. Aujourd'hui nous pouvons annoncer qu'un de nos agronomes les plus honorables, M. le lieutenant- général Langermann , propriétaire à Provedroux, dans la province de Liège, vient de visiter une partie de l'Angleterre, en vue d'études agri- coles et horticoles , et qu'il y a vu des étables-serres dans une brillante situation et donnant des revenus considérables en fruits-primeurs. Pour peu qu'on réfléchisse sur les rapports naturels qui existent entre les plantes et les animaux, sur les liens qui unissent la vie des uns à celle des autres, on n'aura plus de peine à comprendra que cette harmonie dans les conditions de leur existence doit porter l'homme à les élever ensemble. Peu de mots prouveront ces vérités ; par exemple : On ne peut pas forcer les fruits sans chaleur : la température des serres à forcer est exactement celle d'une étable comme elle doit être entre- tenue pour l'hygiène de ses animaux. Il suit donc de là que la chaleur émanée de ces animaux peut servir parfaitement au développement des plantes. Les étables sont d'autant plus saines qu'elles peuvent s'aérer à volonté, sans toutefois placer les bêtes dans des courants d'air; de là, la supré- matie des étables élevées, et puisque l'air chaud tend à monter, ne voit- on pas de suite que l'air dans lequel les vignes donneront leurs fruits ou l'emplacement dans lequel les fraisiers pourront se cultiver seront juste- ment les parties les plus hautes de ces étables, parties au-dessus des atteintes de ces animaux. Dans une étable, la vie des animaux comporte un dégagement con- stant d'acide carbonique, d'ammoniaque et de vapeur d'eau; toutes sub- stances favorables à la vie des plantes. De sorte qu'en prenant les précautions pour que l'animal ne puisse pas corroder, blesser ou détruire la plante, et en soignant toutes les autres conditions de leur vie commune, on peut très-facilement les faire coha- biter ensemble à leur mutuel avantage. L'expérience a d'ailleurs prononcé son jugement dans le même sens. Il suffît de jeter les yeux sur la planche 60 pour se rendre compte de la — 379 ^- PI. 60. A — 380 — disposition et de la construction de ces étables-serres. L'intelligence des architectes-horticoles suppléera aux détails qui manquent. Les vignes sont plantées à l'extérieur dans un talus reposant sur la partie murée qui sert de base à l'étable. Alternativement un pied passe une année à l'intérieur de la serre-étable et y donner du fruit, pour se reposer l'année d'après, à l'extérieur, dans une stérilité salutaire. On sait depuis longtemps que ces alternances enti'etiennent les vignes dans une longue fécondité. Les ceps et sarments sont conduits le long du toit vitré selon les formes et les dispositions exigées par la taille , de manière que les pampres ne descendent ni ne pendent pas librement dans l'étable, mais que les grappes seules font saillie. Les vignes dans leur partie feuillue s'arrêtent à l'angle montant du toit. Cette étable-serre représentée ici est double; sa largeur en dedans des murs est de 7™, 50, les murs latéraux ont 2 mètres de hauteur et 60 centimètres d'épaisseur. Les verres du toit (en bois, comme étant plus chaud que le fer) sont épais et d'une couleur verte d'une translucidité moyenne. Les châssis de ces toits sont con- struits de manière que dans les nuits froides du printemps on puisse des- cendre des rideaux entre les vignes et les vitres afin de protéger les jeunes inflorescences. Ce plan est extrait de VAkkerbouw, journal fla- mand d'agriculture, qui l'a donné déjà en 4852. FIN DU QUATRIEME VOLUME. TABLE DES MATIERES DU QUATRIÈME VOLUME DE LA BELGIQUE HORTICOLE. 1. — HorticuUnre. 1. Monographie des Aquilèges, par M. cil. Morren 1 2. Quelques observations sur les variétés nouvelles de roses, par W. Eugène Verdier. 11 3'. Notice sur quelques épinièdes remarquables, par M. Ch. Morren 33 -t. Quelques mots sur la culture du dahlia, sa déplanlation et sa conservation, par M. Bauduin, propriétaire à Loos, près Lille. . , 36 5. Culture des violettes de Parme, par M. Rosciand, de Meulan 41 G. Les lilas nouveaux: 1" Croix de Brahy; 2" Lilas Ekenholm; 3» Lilas double azuré; i" Lilas Charlemagne, par M. Ch. Morren 65 7. Culture du Mandevillea suaveolens ou Jasmin du Tucuman, belle plante grimpante par M. Thorne, directeur du parc de Shuckburgh 69 8. Culture en pleine terre et à l'air libre, en Belgique, du Selaginella apoda, par M. Ch. Morren = 70 9. Les pétunias cultivés comme ornements de murs, par le même 71 10. La Clématite de S. M. la reine Sophie des Pays-Bas, par le même 97 H. Le Gas«?'o^o6«MîK c?(nearH?M, dcM. Arthur Henfrey, par le même 99 12. Culture du Gardénia Fortuni, par M. Naudin 100 13. Culture des Cinéraires, par M. Thorne, directeur du parc de Shuckburg .... 102 14-. L'Azalée à fleurs crépues de la Chine, par M. Ch. Morren 129 13. Le Lis rose du Kamaon, par le même 130 16. Importance de la chaleur qu'on donne aux racines , démontrée par la culture des iVe/it»i6n«Hi , par M. Lindley. 131 17. Modèles de culture en fait de Cyclamens , par M. Ch. Morren 135 18. Le CaUleya crispa, variété Re/lexa-macrophylla , d'Enghien, par le même. . . . 161 19. Le Clieiranthera Unearis, d'AlIan Cunningham, par le même 162 20. Culture forcée des Lilas, par M. Chardon-Régnier 164 21. Emploi du guano dans le jardinage, par M. Berthaud 165 22. VUropedium Lindenii, de Lindley, par M. Ch. Morren 193 23. Le Sollya de Drummond {Sollya Drummondi) fleur éblouissante pour vases, bouquets et ornements, par le même 196 24. Culture des chrysanthèmes, par M. Ad. Weick, horticulteur à Strasbourg. . . . 197 25. Comment croit et fleurit à profusion l'élégant Pleroma elegans , par un ardent admi- rateur de cette fleur 199 20. De la grcfTe de Reine-Marguerite pour réunir diverses couleurs sur le même pied, par M. Tollet, de Champcret . . . , , . . . . 200 27. Le Castilleja UlhunpertHoïdes , charmante Scrophulariacée du Mexique, par M. Ch. Morren. . 225 28. La Fritillairc à pétales rouilles . par le même 227 29. Notice sur quelques plantes d'ornement ou utiles dont les graines ont été ofl'crles aux abonnés de la /icii^iV/î/e /*o»7j>o/e, par le même 228 30. Acanthe des Grecs 228 37. Phlox paniculé 232 31. Ail à odeur de vanille 229 38. Statice à feuilles en lyre. . . . 232 32. Anémone éloilée 10. .39. IJniole à larges feuilles fb. 33. Tecoma de la Virginie 230 40. Verveines hybrides 233 34. Lagurus queuc-de-lièvre. . . . 230 41. Pervenche du Cap 2.33 35. Lanlana à feuilles de mélisse. . . 231 42. Collection de sept courges. ... Jb. 36. Phlox de Drummond Ib. 43 Cornichond';\neouEcbalium agreste. 235 44. Le lin à fleurs rouges, linnm grandillnrnw de Desfonlaincs , par M. Ch. Morren. 261 45. Le slylidium saxifragoïde de la rivière du Cygne, j)ar le même 202 46. Culture de la pensée par un collaborateur du f/eîir/.ï/e rfo,s'.s-«!s 263 BELG. HORT. T. IV. 49 — 38i2 — 47 49. bO. SI. 52. 55. 54. 53. 5G. 57. 58. 59. 60. 61. 02. , Observations de la rédaclioii au sujet du ver de terre dans ses rapports avec l'horli- cullure 2G1 . Emploi de IMj'eHarm ccps/)i7o«< pour faire de petites pelouses, par M. X Ib. . Les Fiûj'wesou V'î6it»')(Mm, par M.Ch. Morren 265 Le Pavot de Bilhynie, ou Papaver pUosum des botanistes, par le même. . . . 295 Le Méconopsis de Wallich, papavéracée à fleurs bleues, parle même 294- La cullure pratique du lis du Japon et le moyen rationnel de produire la variété ponctuée de celle espèce, par le même 296 Les Pivoines herbacées, d'après M. William Wood, horticulteur à Holdgate. . . . 299 Le Gymnopsis unisériul du Texas, grande fleur jaune à odeur de jasmin, par M. Ch. Morren ô23 VExaciim macranlhnm ou Gentianée à grandes fleurs bleues de Ceylan, par le même. 526 La cullure en Chine du Chrysanthème, par M. Robert Fortune 527 De l'air de la terre dans ses rapports avec différents modes de cullure, par M. Ch. Morren 528 Culture du Z)i/)/erafan//ms s/jer/a6i7« de Hooker, par M. Ad. Weick 530 L'Orobe élégant , Orobus formosus, Stev., charmante plante du Caucase , de pleine terre pour nos jardins , par M. Ch. Morren 337 La Calcéolaire flexueuse du Pérou, Caifeoiaj'ia/ZcxKosa, par le même 560 Culture des Sparaxis et des Ixias, par M. Rosier 361 Cullure du lis Nankin (LiVÙMrt Viburnum cotinifolium. Don. . 170 Warrea qnadrala. Lindl. . . 272 -- 385 — 3. Littérature botanique et Siorticole. {. L'horliculture et les reposoirs de la Fête-Dieu au Mans, par W. J.-L. Le Bêle. . 18 2. Remarques additionnelles par la rédaction , . . . . 19 3. Ce que Jusle-Lipse pensait de rhorlicullure, par M. Ch. Morren 43 4. La verveine ou l'herbe aux enchantements, ])ar W. A. Debay 46 5. La Société agri-horlicole des Indes, par M. le docteur Wallich, intendant général du Jardin botanique de Calcutta 76 6. Les Narcisses, par M. F. Iloefer 171 7. Des progrès de l'horticullnre en France, par M. le comte de Rambuteau. . . . 207 8. Quelques souvenirs relatifs à l'oranger, par W. Stanislas Martin 209 9. Inlroduclion du fuchsia, par M. De Valmer 236 10. Les fleurs et les oiseaux du printemps, extrait des scènes du monde anime, par M. Lecoq , de Clermonl-Ferrand 335 11. Les fleurs et les oiseaux du printemps; extrait des Scènes du monde animé, par M. n. Lecoq {Sidte et fin) 307 12. Le jardin des azalées à Shanghaï ; histoire des Skimniia, des Oliviers parfumes et des Glycines de la Chine, par M. Robert Fortune 570 4. — Physiologie des plantes. 1. Reproduction du bois et de l'écorce à la surface de l'aubier décortiqué , par M. A. Tréeul 108 2. Les gémissements des arbres et Le Tasse physiologiste 110 5. Une fleur tournante, le V'îV- DE LA TADLE DES MATIERES DU QUATRIEME VOLUME. itis uÎL. v- ''ts ^m. rrr m «L '-'- m w'm ' A m» New York Botanical ^arden Librai g 3 5185 00259 2002 / '^ A. ' y^J h^ f.^ï H?':^< '^s^^a^. ■■»■, W '*>% W/'ÊA 0^ -Si*' ^'iW.^'^^i' 7'-^ e-.- ■ityS^ fi-* l <•- ,**^ >C>^'^i ■'\i f" î J i . ^- W ?*;■■ .» ■ • ;v^ 1. . *' rSrf «I