RATÉ mat 0 LOTIR GE De : fe sad 5 + RASE 13 Hi : L IS tite RC ; Ê F : i ; ot et r ee TNT Le . ep. re Citer + % a #. CCE re RE Side etes dir CHRIS) LORALZE ce re se Cho SCOR S < } D } VE l gd , gros BULLETIN SCIENTIFIQUE DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE. —%8— TOME XXXVI. Sixième Série. — Cinquième Volume. 1902. D TER EST 7 BULLETIN SCIENTIFIQUE DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE PUBLIÉ PAR ALFRED GIARD, MEMBRE DE L'INSTITUT, PROFESSEUR A LA SORBONNE (FACULTÉ DES SCIENCES). PARTIS, LABORATOIRE D'ÉVOLUTION DES ÊTRES ORGANISÉS, 3, RUE D'ULM. TABLE BOHN (G.). —- Des mécanismes respiratoires chez les Crustacés Décapodes : Essai de physiologie, évolutive, éthologique et phylogénique (289 fig. ANSE TE Rte) RER AR ER re CATOIS (E.-H.). — Recherches sur l'histologie et l'anatomie microscopique de l’encéphale chez les Poissons (PIROCROS LE DR Rd Le Tome XXXVI du Bulletin Scientifique est sorti des presses le 31 Janvier 1902 Pages RECHERCHES SUR L'HISTOLOGIE ET L’ANATOMIE MICROSCOPIQUE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS, PAR LE DOCTEUR E. H. CATOIS, Professeur à l’Université de Caen (École de Médecine et de Pharmacie), Médecin suppléant des Hôpitaux. Planches I à X INTRODUCTION. « C’est surtout pour l’Anatomie des Centres » nerveux qu'il est vrai de dire que l’Ana- » tomie comparée doit éclairer l’'Anatomie » humaine ». (A. VAN GEHUCHTEN. La Cellule, 1897, Tome XII, 1e" Fascicule). Depuis quelques années nos connaissances relatives à la structure du système nerveux se sont entièrement modifiées; les méthodes histologiques nouvelles et désormais classiques, découvertes ou appliquées avec succès par des savants tels que WEIGERT, GOLGI, EHRLICH, RAMON Y CaJaL, NissL, RETZIUS, VAN GEHUCHTEN,....... etc... ont éclairé d’un jour nouveau la morphologie cérébro-spinale et ont complètement révolutionné nos conceptions sur la texture des centres nerveux. Mais, ainsi que le fait judicieusement observer le Professeur S. R. CayaL, < en dépit de l'importance considérable que possède, 2 E. H. CATOÔIS. sous le triple point de vue anatomique, physiologique et patholo- gique, la connaissance du système nerveux, on est forcé de confesser qu'il n’en est aucun autre qui garde autant d’inconnues dont on doive le débarrasser et qui ait élé étudié avec moins de fortune » (1). L’encéphale surtout, par suite de la complexité inextricable de sa trame, du nombre de ses éléments constitutifs et de la richesse des expansions fines et ramifiées de ces éléments, semble défier le scalpel de l’Anatomiste et est, peut-être, le sujet le plus difficilequ'il soit donné d'étudier. Chez l'Homme et chez les Vertébrés supérieurs de grande taille, 1l est presque impossible de suivre le trajet d’un cylindre-axe ou d’une collatérale depuis son origine jusqu'à sa terminaison; aussi les Anatomistes qui s'occupent spécialement d’études neurologiques ont-ils saisi, de tout temps, l'importance des recherches basées sur l’'Anatomie comparée. On ne saurait ignorer, du reste, que les découvertes importantes et nombreuses de ces douze dernières années, découvertes qui ont bouleversé complètement nos connais- sances relativement à la structure intime du système nerveux, s'appuient sur des observalions histologiques faites successivement chez l'embryon du Poulet, chez ceux de Mammifères, puis chez les Reptiles, les Batraciens et les Poissons. En utilisant ces matériaux et en se plaçant dans des conditions spéciales que nous aurons à indiquer plus tard dans le courant de ce travail, l'étude de la structure du névraxe est rendue plus facile : les diverses couches ou zones, plus réduites, se laissent mieux analyser, les fibres nerveuses raccourcies se colorent plus aisément et peuvent être suivies sur un plus long parcours ; il devient possible, dès lors, de préciser l’origine, la marche et la terminaison de certaines fibres nerveuses et d'indiquer les connexions intercel- lulaires ou rapports des éléments nerveux entre eux. Pendant longtemps on s’est borné, dans l'étude anatomique des centres nerveux, à une énumération aride de leurs parties consti- tuantes, à une description banale de ce qui était visible soit à la surface de ces centres, soit sur des sections macroscopiques ou sur des coupes microscopiques. (1) S. R. Cagar. Les nouvelles idées sur la structure du système nerveux chez l'Homme et chez les Vertébrés (Edition française, Paris 1894). (/atroduction). HISTÔLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 3 Aujourd'hui, grâce au concours de la physiologie expérimentale, de l'anatomie pathologique (dégénérescences) de l’embryogénie et à l'emploi des techniques histologiques modernes, on peut déceler l'existence de systèmes indépendants à fonctions spéciales et définies (neurones), ainsi que la présence de faisceaux nerveux encéphalo-médullaires à trajet nettement dessiné, là où les méthodes purement anatomiques ne nous faisaient voir que de la substance blanche ou de la substance grise. Il y a plus de cinq années que nous suivons, avec le plus grand intérêt, l'application des méthodes histologiques nouvelles à l’ana- tomie microscopique des centres nerveux, alliré vers ce genre d'étude par goût el pour notre instruction personnelle d’abord, puis pour les nécessités de notre enseignement officiel. C’est ainsi que les recherches qui font l’objet de ce mémoire nous ont élé inspirées par la lecture et l'analyse de la savante monographie du professeur VAN GEHUCHTEN sur l’encéphale de la Truite : « Nous avons pensé > que, Si nous parvenions à élucider dans tous ses détails, chez un > Vertébré inférieur, le problème si complexe de la structure et des > connexions des différentes parties de l'axe nerveux, nous > pourrions nous orienter plus facilement, peut-être, dans l’orga- > nisation presque inextricable que nous présente le système > nerveux des Mammifères et de l'Homme. (VAN GEHUCHTEN. Zu > Cellule, 1894. Contribution à l'étude du système nerveux chez les Téléostéens). L’encéphale des Poissons est, du reste, un des sujets de l’Ana- tomie comparée qui ont le plus exercé la sagacité des Anatomistes ; mais, ainsi que le déclarait le D° F. Vraur, il n’est cependant aucun naluraliste qui ait pu se vanter d’avoir donné la solution de tous les problèmes que soulève cette question et de ne rien laisser à faire à ses successeurs (VIAULT, 1876). Constatons dès à présent ce fait important: la comparaison des formes extérieures, la situation relative, les connexions des diverses parties composant l’encéphale et surtout leurs homologies ont été principalement l'objectif des anatomistes qui ont pris le cerveau des Poissons comme sujet de leurs études. Comme nous le constaterons prochainement (Chapitre: Historique) l'Histologie, née beaucoup plus tard et perfectionnée depuis quelques années seulement, n’a été encore que peu utilisée pour l’analyse des centres nerveux chez les Poissons. 4 É. H. CATOIS. Utilisant et condensant les recherches de nos devanciers, familia- risé avec les techniques modernes, 1l nous a semblé qu'il pouvait être intéressant de faire connaitre les résultats de nos investigations sur l'Histologie et l’Anatomie microscopique de l’encéphale chez les Poissons ; nous espérons contribuer ainsi, pour une faible part, en apportant notre pierre pour l'édifice commun, à l’Anatomie comparée de l’encéphale dans la série des Vertébrés. Nous ne nous dissimulons pas la difficulté du sujet à traiter ; abstraction faite des conditions matérielles de réussite, des manipu- lations délicates nécessaires et exigées par tout travail basé sur l'Histologie, c’est une tâche d’autant plus ardue qu'il existe fort peu de travaux sur la question écrits en langue française ou effectués en France. Ainsi qu'on peut facilement s’en rendre compte en jetant un : coup d'œil sur lIndex bibliographique qui accompagne notre Mémoire, presque toutes les recherches concernant le sujet qui nous occupe ont élé faites et publiées à l'étranger (Espagne, Allemagne, Italie, Autriche, Angleterre, États-Unis... ete...….). La rédaction de notre travail s’est trouvée retardée de ce chef: comme il s’agit de termes spéciaux, d'expressions techniques, nous avons tenu à consulter nous-même le texte de ces publications dans leur idiome original et n’avons confié à personne le soin de le traduire. D'autre part, l’encéphale possède pour ses différentes parties constituantes une riche synonymie et cette trop grande richesse vient encore ajouter à l'embarras du chercheur, en le gênant parfois dans l'interprétation des faits observés. Mais BEAUMARCHAIS n'a-t-il pas fait dire à Figaro : — « La difficulté que l’on éprouve à réussir >» ne fait qu'augmenter la nécessité d'entreprendre ». Depuis le milieu de l’année 1896 nous avons l'honneur et l’heureuse fortune d’être en relations avec un savant dont les travaux, universellement connus, ont en neurologie une prépondé- rance marquée : nous avons nommé M. le Professeur RAMON Y CAJAL.. C'est gràce aux excellents conseils et aux précieux encouragements du Professeur d’histologie de la Faculté de Médecine de Madrid que nous avons pu poursuivre les recherches délicates qui font l’objet de ce travail ; nous sommes heureux de lui adresser ici nos sincères remerciements et de lui offrir l'expression de notre vive et profonde gratitude. , Conservant un agréable souvenir des heures passées au Labora- toire d’histologie du Collëge de France, nous offrons au mailre, le HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 6) Professeur RANVIER, l'hommage de nos profonds respects et à son distingué préparateur, le D° SucHaRD, nos sympathiques souvenirs en reconnaissance de leurs savantes leçons. Nous tenons à remercier les personnes qui ont contribué à faciliter notre travail en nous témoignant leur bienveillance ; aussi nous est-il agréable d'adresser nos respectueux hommages à M. le Professeur Grarp et à M. le Professeur ED. PERRIER. Les matériaux utilisés pour la présente étude ont été recueillis aux Laboratoires maritimes de Luc-sur-Mer (Calvados), de Tatihou (Manche) et à l’'Aquarium du Trocadéro. Nous saisissons donc avec empressement l’occasion qui nous est offerte d'exprimer nos sincères sentiments de gratitude à M. le D Joyeux-Larruir, professeur à la Faculté des Sciences de Caen, à M. MaLarpD et à M. le D' Jousser DE BELLESME. Nous ne saurions oublier avec quelle bonne grâce MM. FAUvEL, 3RASIL et VAULLEGEARD se sont mis à notre complète disposition en nous procurant le matériel dont nous avions besoin. Nos recherches bibliographiques ont été facilitées grâce aux précieux concours et à l'extrême obligeance de notre ami M. G. MALLolzEl, sous-bibliothécaire au Muséum d'Histoire naturelle de Paris et de M. Boxxer, bibliothécaire de l’Université de Caen ; nous les prions d'accepter nos sincères remerciements et l'expression de nos vives sympathies. Lorsque nous avons entrepris nos recherches, tout nous semblait simple et facile et nous présumions que deux années suffiraient pour les mener à bonne fin; aujourd'hui encore, oserons-nous. l'avouer, après maintes investigations, après tant de longues et patientes études, bien des points sont restés obscurs et demandent de nouveaux éclaircissements. Notre intention était, d’abord, d'étudier dans son ensemble l’encéphale chez les Poissons et, puisqu'il est matériellement impossible d'étendre cette étude à toutes les espèces, il eut été intéressant de décrire au moins un type appartenant à chacune des divisions zoologiques : Cyclostomes, Chondroptérygiens, Ganoïdes, Téléostéens ; malheureusement nous n’avons pu nous procurer ni Myxines, ni Lamproies, ni Esturgeons en quantité suffisante; il nous fallait, en effet, du matériel frais, en assez grande quantité et, surtout, des sujets jeunes. Aussi, limitant nos recherches à l’encé- phale des Sélaciens et des Téléostéens, nous nous sommes adressé à 6 Ë. H. CATOIS. des espèces communes que nous pouvions facilement nous procurer en grande quantité et à divers stades de développement. C'est ainsi que nous avons étudié chez les Chondroptérygiens les genres: Scyllium, Mustelus, Acanthias, Raia et chez les Téléostéens les genres: Trachinus, Callionymus, Trigla, Scomber, Coltus, Zeus, Gadus, Solea, Pleuronectes, Anguilla, Conger, Salmo, Cyprinus, etc. Nous diviserons notre Mémoire en trois parties : La première partie sera consacrée à l’Historique et à la Technique ; on y trouvera : 1° un aperçu résumé et chronologique des travaux des auteurs qui nous ont précédé dans cette étude; 2 un exposé des méthodes histologiques employées, avec une discussion sur la valeur et l’application de ces méthodes. La seconde partie comprendra des considérations sur l’Histologie générale de l’encéphale; nous y étudierons ensuite sous divers chapitres : 1° Les éléments nerveux principaux et essentiels : (Cellules nerveuses. — Fibres nerveuses). 2% Les éléments nerveux secondaires : (Charpente névroglique: Cellules épendymaires, cellules névrogliques). 30 Les éléments non nerveux : (Vaisseaux. — Tissu conjonctif). La troisième partie sera réservée à l’Hislologie topographique spéciale, c'est-à-dire à l'Analomie microscopique des diverses régions composant la masse encéphalique. Enfin, un Index Bibliographique accompagnera notre travail ; soigneusement mis à jour et ne mentionnant que les publications relatives à l’Anatomie microscopique ou à l'Histologie des centres nerveux chez les Poissons, nous espérons que cet Index pourra êlre utile aux travailleurs qui désireront explorer le même domaine que nous, en leur évitant de trop longues recherches. Caen, 7 juin 1900. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 7 PREMIERE PARTIE HISTORIQUE Comme l'indique le titre même de ce travail, il n’entre pas dans le programme que nous nous sommes tracé de faire l’Anatomie descriptive de l'encéphale chez les Poissons ; ce serait donc sortir de notre sujet que de rappeler dans ce chapitre les noms et les œuvres des naturalistes, qui, depuis JULES CASSERIUS, NicoLas STENON, THoMas WILLIS et SAMUEL COLLINS, au XVII siècle, ont étudié la configuration extérieure, la conformation intérieure du cerveau des Poissons ou les homologies des diverses parties de cet organe (!) ; nous n’aurons donc, dans ce rapide aperçu historique, qu'à mentionner les auteurs dont les travaux se rapportent à l’Anatomie microscopique de l'encéphale chez les Poissons. Ainsi que F. VrauLcT (1876) le fait remarquer : « remonter à un > siècle ou même à un demi-siècle en histologie, surtout pour le > système nerveux, c'est presque remonter aux temps mytholo- > giques ». Dès 1839, cependant, LEURET (1839) semble avoir pressenti l'importance des recherches histologiques pour l’étude des centres nerveux des Poissons. HANNOVER (1844) employa l'acide chromique pour le durcissement du tissu nerveux et fit faire de réels progrès à l’histologie du cerveau. (1) Le lecteur que cette question pourrait intéresser trouvera, d’ailleurs, tous les renseignements désirables dans les traités classiques et notamment dans les ouvrages suivants : CuvIER et VALENCIENNES (/istoire naturelle des Poissons, tome I, 1828). A. DuMERIL (Aistoire naturelle des Poissons, 1865). BAUDELOT. Étude sur l'Anatomie comparée de l'Encéphale des Poissons (Mémoires de la Société des Sciences naturelles de Strasbourg, 1870). G. FrirscH. Untersuchungen über den feineren Bau des Fischgehirns, Berlin, 1818. MOREAU (Yistoire naturelle des Poissons de France, 1880). 8 E. H. CATOIS. Vuzpiax (1864), dans ses Leçons sur la Physiologie générale et comparée du système nerveux, faites au Muséum d'histoire naturelle, exposa le résumé de ses recherches personnelles sur l’histologie du cerveau de la Carpe et sur l'anatomie microscopique de l’encéphale des Poissons (34° leçon). Vers la même époque. Pa. OwsJaxxikow (1864) faisait paraître dans le Bulletin de l’Académie Impériale des Sciences de Slt- Pétersbourg un travail sur la structure histologique du cervelet des Poissons. | L. Sriepa (1861-1868-1873) étudia le cerveau du Brochet, de la Lotte et de quelques autres Poissons osseux. De 1863 à 1869, le Docteur BauDELOT (1869) publia d'importants mémoires sur l'anatomie de l’encéphale des Poissons; cet observateur distingué et consciencieux n'eut, malheureusement, à sa disposition, qu'une technique histologique insuffisante et des méthodes d'investigation imparfaites. Nous devons au Docteur FRANÇOIS VIaULT (1876) d’intéressantes recherches histologiques sur la structure des centres nerveux des Plagiostomes. Vinrent ensuite el successivement sur le cerveau des Sélaciens ou sur celui des Téléostéens, les travaux de Ronon (1877), de BELLONCI (1878-1881), de G. Frirscx (1878), de RABL-RÜCKHARD (1882-1884), de P. Mayser (1882) et d’AUERBACH (1886). Mentionnons en 1887 la thèse soutenue pour le doctorat ès- sciences naturelles par notre ami et ancien condisciple Marc LE Roux (1887) ainsi que le Mémoire de N. GoroxowiTscH (1887) et signalons, surtout, les beaux travaux du D° LupwiG EDINGER (1888-1892). Le D'R. Fusart (1887) est le premier histologiste qui ait employé, pour l'analyse microscopique de l’encéphale des Poissons, les méthodes nouvelles : (imprégnations chromo-argentiques de GoLG1). Cet observateur prit comme sujet d’éludes le cerveau de la Tanche, du Carassin, du Saumon et de la Truite, en insistant spécialement sur la morphologie des éléments nerveux et sur la structure du cervelet, de la valvule cérébelleuse et du toit des lobes optiques. Depuis une dizaine d'années plusieurs savants ont également publié des travaux sur le sujet qui nous occupe. En 1890, le D° PEpro RamoN y CagyaL (frère du professeur d'histologie de la Faculté de Médecine de Madrid) consacre un HISTOLOGIE ET ANATOMIE. DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 9 chapitre de sa thèse de doctorat à l'étude des Lobes optiques chez les Poissons; la même année, cet auteur faisait paraitre dans Gaceta Sanitaria de Barcelona n° 1, une note sur la structure du cervelet chez les Poissons. Signalons les travaux de RETzIUS (1891) sur les centres nerveux de Myxine glutinosa et sur les cellules épendymaires du cerveau du Brochet, ainsi que les recherches effectuées à la Station z0olo- gique de Naples par le D VALENTI (1893) sur l'histogénèse de la cellule nerveuse et de la névroglie dans le cerveau de quelques Poissons cartlagineux (Mustelus, Priusturus et Torpedo). Vers la même époque, HerRICK (1891-1893), professeur à l'Uni- versité de Chicago, publia une série de travaux sur lanatomie et l'histologie du cerveau des Téléostéens ; cet observateur s’est servi des procédés de coloration par l’hématoxyline (procédés un peu modifiés, 1l est vrai) et n’a pas utilisé les techniques d’imprégnations métalliques. Bien que ce savant ait étudié consciencieusement certaines parties de l’encéphale, notamment le pr'osencéphale et le nucleus rotundus, 11 nous semble qu'il ait eu surtout en vue des considérations homologiques. SCHAPER (1893) applique avec succès la méthode de GoLGr à l'encéphale des Poissons et analyse avec soin la structure histolo- gique du cervelet chez de jeunes exemplaires de Saumon, de Truite et de Perche. En 1894 le professeur S. Ramon Caraz (1894) publie dans les « Anales de la Sociedad Española de Historia Natural >, une étude sommaire sur le cervelet, les pédoncules cérébelleux, l'habenula et le bulbe olfactif de quelques Poissons osseux (Salmo, Trutta, Barbus et Cyprinus carpio). La même année, le Professeur VAN GEHUGHTEN (1894) fait paraître dans « La Cellule > un très intéressant Mémoire sur l’encéphale de la Truite. L'auteur y étudie successivement la structure du cerveau antérieur, le faisceau basal, le faisceau de MEYNERT, quelques éléments constitutifs des lobes opliques, l’origine et la terminaison des fibres olfactives et enfin, les origines de quelques nerfs cràaniens. L. NEUMAYER (1895) et L. Saza (1895) font connaître le résultat de leurs recherches sur les centres optiques chez les Téléostéens. Mentionnons, enfin, les travaux de Srupnicka (1895-1896), de Prague, sur l’Anatomie comparée du cerveau chez les Craniotes et 10 E. H. CATOIS. le Mémoire de SauErRBEGK (1896) sur la structure histologique de l'encéphale chez Scyllium, Mustelus, Raja et Trygon. Tel était, rapidement esquissé, l'historique de notre sujet au moment où nous poursuivions nos recherches personnelles. Nous avons déjà fait connaître, sous une forme très sommaire et dans différentes publications, quelques résultats de nos observations (Carois, 1897-1898-1899). Au cours de nos investigations et pendant la rédaction de notre Mémoire, la bibliographie du sujet s’est heureusement augmentée de quelques travaux; à signaler, notamment, les recherches de J.-B. Jonxsrox (1898) effectuées au Laboratoire zoologique de l'Université du Michigan sur l’encéphale de Acipenser rubicundus ; celles de M‘ W, SzczaAWINSKA (1898) sur le système nerveux des Sélaciens (études cytologiques); le travail de ScHapEr (1898) sur le cervelet de Mustelus vulgaris ; l'important mémoire de B. HaLLer (1898) sur la structure du cerveau chez Salino et Scyllium; enfin, la savante analyse des lobes optiques chez les Téléostéens, par PEDRO RAMON Y CAJAL (1899). IT TECHNIQUE. Les progrès réalisés dans nos connaissances concernant la struc- ture et la texture des centres nerveux ont toujours marché de pair avec les progrès effectués dans les méthodes d'étude. La Technique histologique de ces centres, actuellement perfectionnée, est devenue aujourd’hui une Technique spéciale; il nous a donc paru indispensable de consacrer ce chapitre : 1° à quelques indica- tions générales relatives à notre sujet; 2 à l'exposé des méthodes employées dans nos recherches et des procédés qui nous ont donné les meilleurs résultats. S I. — Indications générales. Lorsque l’on considère avec quels moyens imparfaits d’investi- gations -les premiers observateurs ont étudié l’Anatomie micros- copique des centres nerveux chez les Poissons, on est réellement HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 1! étonné des résultats qu'ils ont pu obtenir dans une analyse si délicate. Les procédés employés par ces Anatomistes consistaient à disséquer patiemment les fibres nerveuses avec l’aide du scalpel et à les séparer plus ou moins artificiellement au moyen de pinces ; les centres nerveux frais ou dureis soit par l'alcool, soit par l'acide chromique, étaient sectionnés en coupes minces pratiquées suivant diverses orientations ; ces coupes, effectuées au rasoir et à main levée, étaient examinées au microscope dans un peu de glycérine, voire même dans de l’eau acidulée ou salée. C’est à STILLING qu'appartient le mérite d'avoir, il y a plus d’un demi-siècle, inauguré une méthode importante et fondamentale : celle des coupes sériées. Cette méthode nous permet, journellement encore, de reconstituer dans les centres nerveux le trajet d'un faisceau déterminé et d'étudier la texture si compliquée du névraxe. Des perfectionnements successifs ont été, d’ailleurs, apportés à la méthode de STiLLING ; signalons, d'abord, l'emploi des bi-chromates, de l'alcool iodé, l'usage des microtomes , les applications de colorants variés (carmin, hématoxyline, etc...) puis, les procédés spéciaux de coloration de WEIGERT, de PAL et enfin les méthodes modernes couramment employées aujourd'hui dans tous les labo- ratoires : celles de GozGi, de Cayar,, de Nissi, d'ExRLICH, etc... (1). En plus de ces méthodes qui ont surtout pour but l'analyse histologique des éléments constitutifs des centres nerveux, il en existe d’autres complémentaires, véritables moyens de contrôle, qui permettent notamment de déterminer la marche des fibres et faisceaux nerveux à travers l'axe cérébro-spinal; nous avons indiqué : 1° Les méthodes de dégénérescences secondaires (ou de WALLER (?) ; (1) Ces méthodes histologiques et techniques étant bien connues, il n'y a pas lieu de les décrire ici en détail : le lecteur pourra consulter, à ce sujet, les traités classiques de Mercier, Ranvier, Bozzes LEE et HENNEGUY, von LENHOSséÉk, S. KR. Cayar, CIC esse et les mémoires si souvent cités de Gozcr, Nissz, Euxruicn, Rerzius, DoGtez, BeTHE.., ete... (2) La méthode de Wazzer relevant de l'Anatomie pathologique s'applique, mieux que toute autre méthode, au cerveau de l'Homme et a permis, notamment au professeur J. Deserne, l'étude des trajets et de la direction d’un certain nombre de faisceaux encephalo-médullaires (Anatomie des centres nerveux par J. DeJeriNe, 1895). 12 E. H, CATOIS. 2° La méthode de FLECHsiG, basée sur l'époque d'apparition de là myéline dans les différents faisceaux nerveux ; 3" La méthode de dégénérescences expérimentales (ou de GupbENx). Cette méthode relève de la Physiologie expérimentale et est d’une application particulièrement difficile chez les Poissons. 4° Enfin, la méthode histogénétique, fondée sur l'examen du névraxe à différentes périodes de son développement ; cette dernière méthode, si féconde en enseignements, associée à celle de GoxGi, a donné déjà d'importants résultats entre les mains de His, GoLGr, CAJAL, LENHOSSEK, KOLLIKER, RETZIUS, VAN GEHUCHTEN, elc..…. et peut, à juste titre, être considérée comme une méthode d’avenir. Les moyens mis aujourd’hui à la disposition des travailleurs sont done nombreux, peut-être même trop nombreux, car au milieu de ces méthodes il devient nécessaire de faire un choix. Le paragraphe suivant sera donc consacré, pour ainsi dire, à un travail de sélection ; après avoir essayé de nombreuses méthodes et employé divers procédés de fixations ou de colorations, nous exposerons maintenant les techniques que nous avons suivies et qui nous ont fourni les meilleurs résultats. S II. — Exposé des Méthodes de nos recherches. Ces méthodes étant classiques, l'exposé que nous en faisons sera nécessairement sommaire. Nous conformant au conseil donné par M. vox LENHOssEK (1895) : « Frische des Materials ist erste Bedin- qung >, nous avons eu soin de ne porter nos investigations que sur du matériel très frais ; le cerveau, extrait de la cavité crànienne avec toutes les précautions désirables, a été traité par les réactifs histologiques dès que l'animal a été sacrifié ou très peu de temps après sa mort. Nous avons fait varier le choix et l'emploi de ces réactifs suivant le parti que nous désirions tirer de l'organe, suivant, en d’autres termes, que nous voulions: 1° analyser les éléments histologiques, ou 2° étudier l'anatomie microscopique et topogra- phique de l’encéphale. 1° Pour l’analyse histologique (morphologie et cytologie) nous avons donné la préférence aux techniques suivantes : Fixation des pièces au moyen de procédés variés : alcool à 95; solution saturée de sublimé (5 pour 100 environ); solution de HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 13 formol à 10 pour 100 (formol du commerce); mélange chromo- acéto-osmique de FLEMMING ; — le mélange picro-nitrique de MAYER nous a semblé un réactif fixateur moins fidèle que le liquide chromo- nitrique de PERENYI; Ce dernier mélange qui n'avait pas encore élé employé dans l’étude cytologique de la cellule nerveuse (à notre connaissance du moins) nous a donné d'excellents résultats (CaToIs, 1899). Coloration: comme colorants, nous avons fait usage de l’héma- toxyline de DELAFIELD, de l’hématoxyline glycérinée acide D'Enr- LICH, de Carmin ; nous avons employé aussi, avec succès, l’éosine, la safranine, la fuchsine, le bleu de méthylène B et enfin la thionine ; nous recommandons tout particulièrement ce dernier colorant déjà utilisé, d’ailleurs et avec avantage, par M. v. LENHOSSÉK et par R. CAyAL. Enrobage simple à la celloïdine ou inclusions à la parafiine à 45° (pénétration) et à 50° (inclusion). — Coupes effectuées aux microtomes REICHERT, MINOT, ou au « Rocking microtome » de Cambridge. Dans quelques cas et pour élucider certaines questions, nous avons eu recours aux méthodes de dissociations de RANviER ou de LaxNpois-GIERKE et, enfin, aux techniques spéciales de GoLGr, de Cayar, de DoGiELz, de EHRLICH-BETHE et de NISsL. 2° Pour l'étude topographique et microscopique de l’encéphale, nous avons employé les méthodes de BETz (alcool iodé — bi- chromate de potasse), de WEIGERT-PAL et surtout les techniques de GoLGi, de CaJaL et de Cox. | Les résultats obtenus par l'application de ces diverses méthodes seront exposés, en leur lieu et place, dans le courant de ce travail. Nous pensons toutefois devoir insister ici sur l'emploi de deux méthodes bien spéciales qui ont une importance fondamentale en histologie nerveuse: nous voulons parler des méthodes de coloration au bleu de méthylène et des techniques d’imprégnations au chromale d'argent ou au bi-chlorure de mercure. On sait que le principe des colorations spéciales du tissu nerveux au bleu de méthylène est dû à Exr1icx (!); plus récemment (} ExrricH. Ueber die Methylenblaureaction (Deutsche med. Wock. ; 1886). 14 E. H. CATOIS. BETHE (1), S. MEYER (?) et DoGigL (?), ont perfectionné la technique de cette méthode. Dans ces dernières années, le Professeur R. CayaL (#) a fait connaître un procédé nouveau et les modifications indiquées par ce savant : (Coloracion por propagacion à difusion — emploi du chlorure de platine, ete.) méritaient de fixer l'attention des histologistes. Ces diverses considérations nous ont engagé, dès 1897, à présenter à l’Académie des Sciences une note sommaire dans laquelle nous exposions le résultat de nos recherches effectuées avec cette méthode sur l’encéphale des Poissons (CarTors 1897 «). Dès le début de nos investigations nous avons suivi les procédés. techniques du professeur DoGiez ; celle méthode nous ayant paru difficile dans ses applications et inconslante dans ses résultats, nous donnons maintenant la préférence au procédé suivant: Chez l’animal vivant nous injectons 1° ou 2° de solution saline concentrée de bleu de méthylène (marque Exrzicx, chez D° GRÜBLER) dans les vaisseaux branchiaux (bord externe ou convexe des branchies) ou dans les masses musculaires dorso-latérales. L'intoxicalion se produit rapidement, quelques minutes après l'injection ; à la première période, caractérisée par une assez grande agilalion, succèdent des troubles dans la natation (déplacement du corps du Poisson autour de son axe longitudinal, balancement ou roulis); puis l'animal décrit une rotalion complète autour de cet axe, présentant sa face ventrale en dessus, et tombe finalement dans un état de stupeur. Une demi-heure environ après l’injeclion de la solution de bleu de méthylène les centres nerveux sont mis à nu avec précaulion et apparaissent plus ou moins imprégnés et colorés en bleu verdâtre. On procède alors à l'extraction totale de l’encéphale et on le …*ionne, suivant le plan sagitlal ou frontal, en 4 ou 5 parties soigneusement repérées; ces pièces sont placées pendant une demi-heure environ dans une solution saturée de bleu de méthylène (1) BETHE. Arck. f. Mik. Anat., t. XLIV ; 1895. (2) Semr-MEYER. Die Subeutane Methylenblauinjection, ein Mittel zur Darstellung der Elemente des Centralnervensystems, etc. (Arch. f. Mikrosk. Anatom., Bd. 46 et 47 ; 1895-1896). (3) A. S. DoGïer. Die Nervelemente im Kleinhirne der Vôgel und Saugethiere (Arch. f. Mikrosk., Bd. 47 ; 1896). (4) S. R. Gaza. Las espinas colaterales de las celulas del cerebro teñidas por el azul de metyleno (Æevista trimestral Microgräfica, vol. 1, fase. 2 y 3 ; Agosto 1896). HISTOLÔGIE ET ANOTOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 19 el traitées ensuite par les réactifs habituels (solution de BETHE au molybdate d'ammoniaque, liquide de CayaL au formol, chlorure de platine, etc.), incluses à la paraffine et débitées au moyen du micro- tome Rocking ou Minot; xylol, baume de Canada, etc. La technique que nous venons de décrire rapidement est done, en somme, une combinaison des méthodes par injections (EHRLICH, S. Meyer) et des méthodes par immersion (Do&L) et diffusion (CAJAL). 3 La méthode au bleu de méthylène nous a surtout semblé utile dans l’étude des diverses zones fibrillaires des lobes optiques, des faisceaux nerveux, des fibres commissurales ainsi que dans l’obser- vation des noyaux d'origine et fibres radiculaires des nerfs cràniens. En résumé, cette méthode appliquée à l'anatomie microscopique de l’encéphale chez les Poissons, confirme entièrement les recherches de R. CayaL, et nous nous rallions d’une façon générale aux opinions formulées par le professeur d'Histologie de Madrid. Le bleu de méthylène rendra des services comme moyen de contrôle et pour des recherches d'ensemble (inarche des faisceaux nerveux, des fibres commissurales, étude des noyaux d'origine, etc.) ; mais ce réactif colorant ne saurait, à notre avis, remplacer dans la technique histologique des centres nerveux les fines et délicates imprégnations au chromate d'argent ou de mercure (méthodes de GoLGr, Cox, etc.). Ces dernières méthodes sont trop connues pour qu'il soit néces- saire de les décrire ici en détail; nous nous contenterons donc uniquement d'indiquer les conditions dans lesquelles on peut obtenir les meilleurs résultats. Leur application à l’encéphale des Poissons est particulièrement difficile et délicate; cette difficulté d’imprégnation des éléments histologiques dans les centres nerveux chez les Poissons est, du reste, un fait généralement admis et déjà signalé par RETZIUS, VON LENHOSSEK, VAN GEHUCHTEN et MARTIX. « Les éléments nerveux de la moelle de Truite, dit ce dernier » observateur (J. MARTIN, 1895) semblent réduire le sel d'argent > plus difficilement que ceux de la moelle des Oiseaux et des > Mammifères (!) >. Nous en dirons autant pour les éléments du (1) Contribution à l'Étude de la structure interne de la moelle épinière chez le Poulet et chez la Truite (D Is. MARTIN, La Cellule (1895), 1® Fascicule, 16 E. H. CATOIS. cerveau chez les Poissons. Aussi, pour obtenir des préparations réussies, est-il nécessaire de faire des essais multiples ct répétés en apportant, parfois, aux procédés classiques, quelques légères modificalions. Constalons d’abord un fait certain que nous avons maintes fois observé, sans pouvoir, toutefois, en fournir l'explication plausible : le cerveau s’imprègne avec une moins grande facilité et avec une moins grande constance chez les Sélaciens que chez les Téléostéens, chez les Poissons vivant dans la mer que chez ceux qui vivent dans l’eau douce. : Il ne faut pas croire, en outre, que chez ces Verlébrés inférieurs, toutes les régions de l’encéphale s'imprègnent avec une égale facilité. Notre expérience personnelle nous permet de ranger ainsi ces diverses rêgions suivant leur constance d’imprégnalion : Peuvent être considérées comme relativement faciles, les prépa- rations de ces régions : lobes antérieurs, lobes inférieurs, toit des lobes optiques, couches ou zones superficielles du cervelet. L'imprégnation est au contraire difficile pour ces parties de l’encéphale: bulbe olfactif, diencéphale, thalamencéphale, corps genouillés, noyaux ronds, ganglion de l’habenula, pédoncules cérébelleux, couches profondes du cervelet et moelle allongée. Les méthodes de Gor&ine donnent en général de bons résultats que chez les très jéunes sujets; nous conformant aux conseils du professeur R. CayaL et guidé par l'expérience de M. VON LENHOSSEK, de Vax GEHUCHTEN, de MARTIN et des autres observateurs, nous avons opéré surtout sur de jeunes exemplaires. Lorsque l’encéphale dépasse 4 millimètres en longueur, en largeur ou en épaisseur, nous le sectionnons suivant le sens sagittal, transversal ou horizontal ; dans le cas contraire nous l'immergeons en entier dans les réactifs appropriés. Après de nombreux essais nous donnons la préférence, comme premier bain, à un mélange osmio-bichromalique ainsi composé : Solution de bi-chromale de potasse à 3°/,: 6 parties. Solution d'acide osmique à 1°/, : 1 partie. On remarquera que dans cette formule (non absolue d’ailleurs et que nous avons dù parfois modifier) la quantité de solution d'acide osmique est sensiblement inférieure à celle indiquée géné- HISTOLÔGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 17 ralement par les auteurs classiques ; le durcissement trop intense ou trop prolongé nous a souvent paru être, en effet, l’écueil à éviter. La durée de ce premier bain est variable : 24, 36 ou 48 heures, suivant les cas; cette durée diffêre suivant la nature même des éléments qu’on se propose d'imprégner; ainsi, tandis que la névroglie s’imprègne très facilement, même après un court séjour dans le bain osmio-bichromatique, les cellules et les fibres nerveuses exigent un durcissement plus prolongé. La durée du second bain (solution de nitrate d'argent à 0,75 pour 100) varie entre 36 et 48 heures. Ces règles ne sont cependant pas absolues et souvent nous avons eu recours à une double ou à une triple imprégnation. Nous avons, enfin, utilisé aussi avec profit la méthode de Cox (méthode au bi-chlorure de mercure de GoLGr, modifiée) (1). (1) Pour l'application technique de cette méthode et pour l'appréciation de se avantages et de ses inconvénients, consulter : W. Cox : Imprägnation des Centralen Nervensystems mit quecksilbersalzen, Archiv, [. mikrosk. Anat., Bd. 37, 1891. R. y CagaL : Les nouvelles idées sur la structure du système nerveux, Paris 1894 (pages 185-186). te 18 E. H. CATOIS. SECONDE PARTIE HISTOLOGIE GÉNÉRALE DE L'ENCÉPHALE CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES Examiné au point de vue de sa texture macroscopique, envisagé sous le rapport de ses éléments constituants et abstraction faite du mode de groupement et de distribution de ces éléments, le cerveau des Poissons ne saurait différer d’une manière fondamentale, au moins dans les divisions supérieures de la Classe, de celui des autres Vertébrés. | Cet organe est donc essentiellement constitué par deux substances dissemblables par leur aspect, leur consistance, leur structure et leurs fonctions: la substance grise et la substance blanche. La substance grise, représentant les véritables foyers d’innervation, riche surtout en agglomérations de cellules nerveuses, est souvent translucide et de consistance assez ferme. La substance blanche, à fonctions passives, composée presque entièrement de fibres nerveuses, se fait remarquer par son opacilé et sa consistance pulpeuse. Les anciens anatomistes comme ARSAKY, SERRES, CUVIER, GOTTSCHE, BAUDELOT, etc... décrivaient minutieusement les divers modes de répartition de ces deux substances, en insistant même, complaisamment, sur les nuances de passage (gris, gris clair, gris blanc, blanc, etc...). Sans entrer dans de longues considérations, disons de suite que ce mode de répartition, fort variable du reste, diffère suivant les régions de l’encéphale ; dans les lobes antérieurs et dans les lobes inférieurs, par exemple, la substance grise est périphérique, la substance blanche est centrale, s'irradiant et s'épanouissant en éventail, du centre à la périphérie ; dans les lobes optiques, substance blanche et substance grise se disposent en zones variées et en plans superposés, etc..…., ele... Pendant longtemps et jusqu’à ces dernières années, les histolo- HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 19 gistes établissaient deux variétés d'éléments constitutifs dans l’étude analytique du système nerveux central: les éléments nerveux proprement dits et les éléments non nerveux. Les éléments nerveux comprenaient les cellules nerveuses et les fibres nerveuses ; les éléments non nerveux comprenaient les épüthéliums, les vaisseaux et le tissu de soutènement : tissu conjonctif et névroglie. Ces divisions ne sauraient être maintenues aujourd’hui. L'étude histogénique des centres nerveux effectuée dans ces dernières années avec la méthode de GoLGr, démontre en effet: 1° que l’épithélium qui tapisse les cavités encéphalo-médullaires dérive du feuillet ectodermique au même titre que les cellules de la névroglie ; 2° que les cellules de la névroglie, qui présentent de si grandes analogies avec les cellules nerveuses, proviennent, comme ces dernières, des neuroblastes, c’est-à-dire des mêmes éléments embryonnaires. Dans l'encéphale des Poissons, comme dans celui des autres Vertébrés, les éléments nerveux proprement dits sont donc représentés par l’épithélium épendymaire, la cellule névroglique et la cellule nerveuse munie de son prolongement cylindre-axile, prolongement constituant la partie la plus importante de la fibre nerveuse. Quant aux éléments non nerveux, ils ne comprennent que les vaisseaux sanguins et lymphatiques et la mince trame de tissu conjonctif qui leur sert de soutien. Il n'entre pas dans le cadre de notre travail d'étudier le dévelop- pement embryonnaire des éléments constitutifs de l’encéphale chez les Poissons ; ce ne sera donc qu'incidemment que nous aurons à traiter certaines questions relatives à l’histogénèse. Les divers chapitres qui suivent seront, par conséquent, consacrés à l'étude des éléments composant définitivement l’encéphale et envisagés soit Isolément, soit au point de vue de leurs connexions avec les éléments voisins, l'étude de leur répartition topographique dans les différentes régions du cerveau faisant l’objet de la troisième partie de ce travail. 20 E. H. CATOIS. ÉLÉMENTS NERVEUX PRINCIPAUX ET ESSENTIELS (Cellules Nerveuses. — Fibres Nerveuses. — Neurones). S I. — Étude de la Cellule nerveuse. a) Morphologie générale. — Ainsi que chez les autres Vertébrés, les cellules nerveuses, tour à tour désignées sous le nom de : corpuscules nerveux, globules ganglionnaires, cellules ganglion- naires, caractérisent essentiellement la substance grise de l’encé- phale chez les Poissons. Ces cellules sont tout aussi variables dans leurs dimensions que dans leurs formes. Volumineuses (160 & de diamètre) grandes ou moyennes, elles peuvent même être de dimensions si petites qu'on leur a donné le nom de grains, de myélocytes… ; leur diamètre, dans ce dernier cas, variant entre 4 et 6 u. Suivant les régions où on les examine, les cellules nerveuses sont ovoides, globuleuses, piriformes, fusiformes, etc. Quelle que soit leur forme générale, elles présentent comme caractères communs de donner naissance, à leur périphérie, à un certain nombre de prolongements ; suivant le nombre de ces prolongements, les cellules affecteront alors la forme unipolaire, bipolaire ou multipolaire. La cellule nerveuse présente généralement à considérer deux sortes de prolongements: a, le prolongement cylindraxile de Deirers, axone de KÔLLIKER, à conductibilité cellulifuge ; D, Les prolongements protoplasmiques, dendrites de His, à conductibilité cellulipète. Généralement unique, le prolongement cylindraxile naît habituel- lement du corps même de la cellule nerveuse ; mais il peut aussi, pour certaines cellules, se séparer de l’un de ses prolongements proto- plasmatiques, à une distance plus ou moins grande de la base de ce prolongement. L’axone se laisse plus ou moins facilement distinguer des dendrites par son diamètre plus faible, par son aspect uniforme et ses contours lisses. Contrairement aux idées autrefois admises, HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 21 le prolongement cylindraxile n’est pas toujours indivis, comme le croyait DEITERS ; C’est ainsi que les recherches récentes de GoLar et de Ramon y CayaL ont démontré l'existence, sur cet axone, de fines branches collatérales, petites divisions secondaires (collatérales de Gozci). Nous rencontrerons notamment ces collatérales sur le prolongement cylindraxile des cellules de PURKINE, de certaines cellules du prosencéphale, etc. Les prolongements protoplasmatiques ou dendrites, variables en nombre et en calibre, se distinguent de l'axone par leur volume plus considérable et par leurs contours moins réguliers ; ils sont souvent coudés, noueux, variqueux, présentant parfois un aspect épineux et semblant recouverts d’une couche de givre. Ces prolongements naissent du corps de la cellule nerveuse par une base large, conique, ont souvent une étendue considérable et constituent des ramifications multiples formant un véritable chevelu. A propos de ces deux sortes de prolongements de la cellule nerveuse (axone et dendrites) nous nous permettons d'appeler spécialement l'attention sur les considérations suivantes, nous réservant, d’ailleurs, de revenir sur ce point important : 1° La différenciation du prolongement cylindraxile est souvent moins accusée ici que chez les autres Vertébrés; l’axone se laisse parfois difficilement distinguer au milieu des autres prolongements ; 2° Les prolongements protoplasmiques ou dendritiques constituent en général des ramifications moins riches et moins nombreuses ; il existe, en somme, un état marqué de simplicité dans les arbori- sations protoplasmiques, pour les cellules nerveuses de l’encé- phale chez les Poissons. Dans les lignes précédentes, nous n'avons fait que résumer rapi- dement les caractères extérieurs des cellules nerveuses telles que les mettent en relief les méthodes de GoL@r-Carar, de Cox (impré- gnations métalliques) de ExRLICH-BETHE (bleu de méthylène). Ces méthodes sont excellentes pour établir et démontrer le trajet des prolongements des cellules nerveuses et pour dessiner la forme extérieure de ces éléments dont elles nous donnent, en quelque sorte, la silhouette; mais elles sont insuffisantes pour nous révéler les détails délicats de structure de ces cellules et ne peuvent, par conséquent, nous renseigner sur leur organisation interne. 22 E. H. CATOIS. Nos connaissances concernant l’histologie fine des cellules nerveuses datent, à peine, de quelques années ; elles sont dues, en grande partie, à l'introduction dans la technique microscopique de la méthode au bleu de méthylène connue sous le nom de méthode de Nissi et aux recherches de FLEMMING, de LENKOSSEKk, de RAMoN y CaJar, etc... Ces découvertes récentes sont devenues le point de départ d’une ère nouvelle pour l'étude physiologique et patholo- gique de la cellule nerveuse en général (travaux de LÉVI, LUGARO, Man, MAGINI, MARINESCO, etc...) et on peut dire qu'à l'heure actuelle l'étude cytologique de ces cellules est à l'ordre du jour dans presque tous les laboratoires d’histologie. Il nous paraît donc utile de consacrer maintenant une partie de ce paragraphe à l'analyse de la constitution intime des cellules nerveuses de l’encéphale chez les Poissons. b) Recherches cytologiques. — A notre connaissance, on peut citer surtout sur ce sujet les travaux de Max SCHULTZE (1871), de G. BELLONCI (1879), de RanviER, de LENKOSSEK, de FLEMMING (1896), de Ramon v Cayaz (1896), de Levi (1897) et de Grovanxi PaLaDINO (1898). Nous avons eu communication des très Inté- ressantes recherches de M°le W. SzczaAwiINsKA (1898) au moment où nous publions nous-même une note sur la structure des cellules nerveuses du cerveau des Téléostéens et des Sélaciens (CarTors 1899). Envisagées au point de vue de leur constitution histologique, les cellules nerveuses se composent essentiellement de trois parties : 1° un corps cellulaire; 2 un noyau contenant un ou plusieurs nucléoles; 3° des prolongements. Ces prolongements ayant été étudiés précédemment, il n’y a pas lieu de revenir sur leur description. Le corps cellulaire est formé d’un protoplasma plus ou moins eranuleux et nettement fibrillaire, surtout dans la zone périphé- rique ; cet état fibrillaire et strié des cellules nerveuses, mentionné par REMAK dès 1844, était déjà connu et signalé avant l'emploi des méthodes modernes de coloration. Contrairement aux idées généra- lement admises, nous ne pensons pas, comme la grande majorité des auteurs classiques, que la cellule nerveuse soit constituée par un corps protoplasmique nu, c’est-à-dire dépourvu d’une enveloppe propre. L'examen minutieux de nombreuses préparations, au moyen HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 23 d'objectifs puissants, nous permet d'admettre pour la cellule nerveuse l'existence, sinon d’une véritable membrane d'enveloppe, tout au moins d'une mince cuticule corticale (cubierta celular) ; nous nous rallions par conséquent ainsi à l'opinion du Professeur S. RAMON CaJAL (1897) pages 112-115 (ÆT sistema nervioso del He eye... Vertebr.) Dans le corps protoplasmique s’observe un noyau sphérique, plus ou moins vésiculeux, possédant à sa périphérie une enveloppe nucléaire et renfermant dans sa masse un ou plusieurs nucléoles. Grâce aux méthodes nouvelles de coloration (bleu de méthylène- thionine) nos connaissances concernant l'anatomie fine de la cellule nerveuse sont entrées dans une voie féconde. Chez les Poissons, comme chez les autres Craniotes, la méthode de NissL permet de constater, dans les diverses parties de l'encéphale, deux espèces de cellules nerveuses différentes l’une de l’autre par la façon dont leur protoplasma cellulaire se comporte vis-à-vis du bleu de méthylène. Certaines cellules colorées à la fois el dans leur protoplasma et dans leur noyau constituent les Cellules somatochromes de NissL (1895); d’autres cellules ne fixent le bleu de méthylène que dans leur noyau, tout leur corps cellulaire ne renfermant pas de substance colorable par ce réactif: ce sont les Cellules caryochromes de Nissi, cellules chez lesquelles le noyau est visible tandis que le corps cellulaire est invisible. Comme types de cellules somatochromes, nous avons étudié notamment : 1° Les cellules nerveuses motrices de la moelle allongée (cellules de la corne grise antérieure) ; 2° Les cellules radiculaires du nerf de la troisième paire (oculo- moteur commun) ; 3° Les cellules du toit des lobes optiques ; 4° Les cellules de PURKkINIE du cervelet ; o° Les cellules du télencéphale (stammganglion); 6° Les cellules mitrales du bulbe olfactif. Comme type de cellules caryochromes, nous décrirons les grains du cervelet. 24 E. H. CATOIS. Cellules somatochromes 1° Cellules nerveuses de la colonne grise antérieure de la moelle allongée : a) Chez les Sélaciens (fig. 6, PI. 1). — Ce sont des cellules de forme et de dimension variées, tantôt triangulaires, tantôt fusiformes, grandes ou moyennes ; elles peuvent être multipolaires ou affecter une forme allongée (surtout au voisinage du raphé); leurs dimensions, d’une façon générale, varient entre 65 u et 130 w. Leur corps cellulaire se continue avec les prolongements protoplas- matiques sans démarcation bien tranchée. Traitées par la méthode de Nissc elles se montrent constituées par une substance achromatique et par une substance chromatique. La substance achromatique est formée de fins trabécules disposés en réticulum et c’est sur les mailles ou entre les mailles de ce réticulum que se trouve la substance chromatique. Cette dernière substance s’observe surtout dans la partie centrale et dans les couches périphériques du corps cellulaire, ainsi que dans les grosses expansions protoplasmiques ; elle est rare dans les prolon- gements protoplasmiques de petite taille et manque entièrement dans le prolongement cylindraxile ; les fibrilles que l’on constate sur ce prolongement cylindraxile et sur les prolongements protoplasmatiques eux-mêmes sont la continuation du réticulum achromatique. La substance chromatique se présente dans le corps cellulaire sous forme de bâtonnets (g. Scyllium), de petits fuseaux allongés ou de petits blocs irréguliers et mal délimités. Il n’est pas rare de trouver des vacuoles à l’intérieur du cytoplasme. Le noyau, relativement volumineux et à contours nets, est arrondi ou ovalaire suivant la forme des cellules ; il renferme un nucléole assez gros et, parfois, un ou deux autres plus petits. La linine forme dans l’intérieur de ce noyau un réseau assez rare sur lequel se déposent des microsomes chromophiles très fins. b) Chez les Téléostéens. — A propos de la structure intime des cellules de la moelle épinière chez les Téléostéens (Cyprinus carpio), R. CayaL (1896) a constaté, dans le corps cellulaire de ces éléments, un réseau sur les nœuds duquel se dépose la substance HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 25 chromophile sans former de grosses masses bien distinctes, comme celles que l’on peut observer chez les Vertébrés supérieurs ; chez Cyprinus carpio, les corps de Nissi seraient donc plus petits et plus irréguliers qu'ils ne le sont chez les Vertébrés supérieurs et ne constitueraient jamais de gros fuseaux. Contrairement à l'assertion de Ramon y Cayar, Me W. SzczawiINska (1898) figure dans la planche qui accompagne son travail (PI. xxn, fig. 12) une cellule motrice de la moelle allongée de Cyprinus carpio dans laquelle les corps de Niss auraient une conformation rappelant beaucoup les corps de Nissz des Mammifères. Les recherches personnelles que nous avons faites sur les cellules motrices de la moelle allongée des genres Trachinus, Platessa et Gadus semblent confirmer l'opinion de Ramon y CayaL et peuvent se résumer ainsi : Corps cellulaire plus nettement séparé des prolongements protoplasmiques. Corps de Nissi, formant des masses irrégulières, cependant mieux délimitées que chez les Sélaciens, disséminées dans les mailles du cytoplasma, mais en tous cas beaucoup moins volumineuses que chez les Mammifères. Prolongement cylindraxile pâle avec des fibrilles filamenteuses fines. Présence de substance chromophile dans les DRONARANE protoplasmatiques. Noyau à membrane nucléaire nette — réseau délicat de linine — le plus souvent un seul nucléole. 2° Cellules du noyau d’origine du nerf de la III° paire (oculo-moteur commun) (fig. 3, PI. 1). — Ces cellules sont multipolaires, de dimensions moyennes (40 « environ), à structure fibrillaire nettement accusée. Dans ces cellules, la substance achromatique est réticulée; la substance chromatique est abondante et forme des amas plus ou moins granuleux, à contours irréguliers et souvent creusés de vacuoles. Le noyau de ces cellules présente un réseau irrégulier de linine avec absence de microsomes chromophiles sur les nœuds de ce réseau ; le plus souvent il n’y a qu’un seul nucléole arrondi plus ou moins central. 26 E. H. CATOIS. Les caractères de ces cellules sont à peu près identiques chez les Sélaciens et chez les Téléostéens. 3° Cellules du toit des lobes optiques. — Nous prenons comme {type de notre description une des cellules nerveuses fusi- formes, à orientation verticale et perpendiculaire à la superficie du Tectum, que l’on trouve vers les zones moyennes du toit des lobes opliques (g. Platessa), cellules de taille variable (18 à 24 u environ). Dans le corps cellulaire la substance achromatique forme un reticulum à fins trabécules ; entre les mailles de ce réseau et sur ce réseau lui-même, la substance chromatique se dispose soit en forme de grains assez épais, soit en forme de petites masses irrégulières. Très souvent on observe dans ces cellules un bloc volumineux de substance chromatique, à forme semi-lunaire ou triangulaire, recouvrant comme une coiffe ou comme un capuchon les deux pôles du noyau (Xern Kappen, capuchon nuclear) (fig. 4, PL 1). Le noyau est ovalaire ou arrondi et renferme le plus souvent un seul nucléole. La cavité du noyau est parcourue par un vrai réseau de linine à mailles fines et serrées convergeant vers le nucléole ; celte cavité renferme de très petits chromosomes, d’ailleurs peu nombreux, situés soit entre les mailles du réseau de linine, soit sur ces mailles elles-mêmes. 4° Cellules de Purkinje du cervelet. a) Chez les Sélaciens. — Chez les genres Acanthias, Scyllium, Raja, ces cellules ont une dimension variable (25 à 30 & environ) ; elles nous ont paru plus petites chez le g. Raja que chez les genres Scylliuin et Acanthias. De forme variée, le plus souvent fusiformes, parfois triangulaires, elles présentent un noyau volumineux, ovalaire dans les cellules à forme allongée et arrondi dans les cellules à forme triangulaire. Si l'on fixe ces éléments par le mélange de FLEMMING et si on les colore à l'hématoxyline, leur corps cellulaire présente une structure nettement fibrillaire; ces fibrilles s’entrecroisent et peuvent se poursuivre dans les prolongements de ce corps cellulaire. Traitées par la méthode de Nissi, les cellules de PURKINJE nous permettent de constater : 1° Dans leur corps cellulaire: les réseaux assez lâches du spongioplasma ; HISTOMOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 27 2° Les éléments chromophiles disposés soit sous forme de grains, soit sous forme de bàtonnets et souvent accumulés par place au voisinage de la périphérie du corps cellulaire (/äminas corticales), fait déjà signalé par CAJAL ; 3 Parfois, présence de capuchons nucléaires formés par les éléments chromophiles et de vacuoles ; 4° Dans leur noyau: nucléole le plus souvent unique, parfois double ; réseau de linine irrégulier et peu marqué, avec microsomes chromophiles rares, presque toujours accumulés au centre du noyau (g. Raja). Nous confirmons entiérement les observations de Melle W. SzZCZAWINSKA (1898) relativement à la structure du noyau des cellules de PURkINYE chez le genre Scyllium : on observe chez ces Sélaciens une répartition plus uniforme de la chromatine à l'intérieur du noyau, un vrai réseau chromatique avec gros grains chromophiles placés sur les nœuds d’entrecroisement des mailles de ce réseau. b) Chez les poissons osseux (fig. 2, PL. 1). — Chez les Téléos- téens éludiés par nous (genres Gadus, Platessa, Trachinus, Anguilla) les cellules de PURkINJE sont le plus souvent piriformes et de plus petites dimensions que chez les Sélaciens (18 à 22 y); quelques-unes, un peu plus grandes, affectent une forme triangu- laire. La substance chromatique constitue entre les mailles du réseau achromatique des petits amas granuleux et irréguliers. Ces masses Chromophiles sont surtout abondantes autour du noyau (capuchons nucléaires) et à la périphérie du corps cellulaire, sur le bord des cellules ; cette dernière disposition (placas o läminas corticales), signalée de nouveau et avec raison par Me W. SzczAWINSKA, avail été mentionnée par CAJAL. Le noyau de ces cellules est arrondi, volumineux, situé de préférence vers la partie inférieure du corps cellulaire et renferme le plus souvent un nucléole, quelquefois deux nucléoles situés en deux points opposés du corps nucléaire. Ajoutons, enfin, que le réseau de linine est lâche, avec quelques rares chromosomes fins. 9° Cellules du télencéphale (fig. 7, PL. 1) (Stammaganglion, Corpus Striatum). Les cellules nerveuses de cette région de 28 E. H. CATOIS. l’encéphale sont le plus souvent ovalaires ou arrondies; leurs petites dimensions (12 à 16 4) rendent leur étude cytologique fort difficile, d'autant plus que, chez elles, l'influence des réactifs fixateurs se fait particulièrement sentir et se traduit par une rétraction marquée du protoplasma cellulaire et des prolon- gements protoplasmatiques ; d’où, formation d’un espace clair péricellulaire, « la cour » de la cellule, « Hof > selon l'expression des auteurs allemands. Ajoutons de plus et signalons comme cause d'erreurs possibles dans l'interprétation, la présence de nombreux noyaux de névroglie (chez les Sélaciens) à côté des cellules nerveuses ; nous nous réservons de décrire, plus loin, les caractères différentiels de ces noyaux. En définitive et malgré ces diverses conditions peu favorables à une bonne analyse cytologique, nous pouvons distinguer dans le protoplasma de ces cellules, en nous aidant de très bons objectifs : 1° Un réseau peu serré de substance achromatique disposée sous forme de petites granulations reliées entre elles par de fins trabécules ; 2° Une substance chromatique peu développée, fort peu abon- dante, placée surtout sur les nœuds ou entrecroisements du reticulum achromatique et affectant la forme de petits amas ou de fines granulations. Dans le noyau, volumineux par rapport aux dimensions totales des cellules (n'oublions pas que celles-ci sont fortement rétractées) et le plus souvent arrondi, on observe un très fin réseau de linine et deux ou trois nucléoles. Nous ajouterons, en outre, que ces noyaux, riches en chromatine éparse sous forme de granulations plus ou moins épaisses, rentrent dans la catégorie des noyaux du type 3 de RaMoN CayaL (1896) (page 27). 6° Cellules mitrales du bulbe olfactif chez les Téléos- téens (genres Platessa, Gadus, Merlangus).— Ge sont des cellules fusiformes ou triangulaires de dimensions variables (16 à 48 y). Leur corps cellulaire nous offre à considérer un réseau achro- matique assez serré et une substance chromatique interposée irrégu- lièrement entre les mailles de ce réseau sous forme de blocs épars et assez gros ou de petites masses amorphes. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 29 Leur noyau est arrondi ou ovalaire et constitué par un réseau de linine irrégulier, sans grains chromophiles sur les nœuds; il ne possède qu'un seul nucléole (ces noyaux se rapprochent donc, par leurs caractères, du type 4 de Cayar, loc. cit., page 27). Nous ajouterons, à propos de ces cellules mitrales du bulbe olfactif, que nous avons pu vérifier et confirmer la particularité intéressante signalée par Van GEHUcHTEN (1897), page 244, c’est-à-dire que les prolongements protoplasmatiques descendant des cellules mitrales vers les glomérules (à conductibilité nerveuse cellulipète) sont dépourvus de substance chromatique. (A. Van GEHUCHTEN. Anu- tomie du Système nerveux de l'Homme, 1897). Cellules caryochromes Avec Nissi, nous désignons sous ce nom des cellules qui ne fixent le bleu de méthylène que dans le noyau; celui-ci est donc seul coloré, le corps cellulaire ne renfermant pas de substance colorable avec sa méthode reste par conséquent invisible. Comme type de cellule caryochrome nous décrirons un grain du cervelet de l’encéphale de Raja. Ces grains sont les éléments nerveux cellulaires dont le volume est le moins considérable (4 à 5 u). Autrefois désignés sous le nom _de myélocytes ou de noyaux libres, on sait aujourd'hui que les grains sont de véritables cellules nerveuses dans lesquelles le noyau relativement très gros n’est enveloppé que par une couche très mince de protoplasma. La méthode de GoLGr nous en a montré les prolongements dendritiques au nombre de trois ou quatre; la méthode de NissL nous permet de constater que ces grains du cervelet des Poissons sont constitués sur le même type que les grains du cervelet des autres Vertébrés. C’est ainsi que nous trouvons dans ces éléments nerveux un réseau nucléinien serré, à mailles épaisses, avec des amas granuleux de chromatine disposés en forme de nodosités au niveau des entrecroisements des mailles. Parfois, 2 ou 3 masses de chromatine, plus volumi- neuses que les autres et plus ou moins centrales, prennent l'aspect de nucléoles. Ce serait sortir du programme que nous nous sommes tracé que d'entrer dans des considérations d'ordre physiologique ou patholo- 30 É. H. CATOIS. gique, à propos de cytologie des cellules nerveuses de l’encéphale chez les Poissons ; aussi laissons-nous de côté : 1° L'étude des modifications que déterminent dans le noyau et le protoplasma de ces cellules les différents élats fonctionnels ; 2 L'étude des modifications consécutives aux lésions expérimen- tales et pathologiques des fibres qui en dépendent. Nous pouvons donc résumer ainsi ce présent paragraphe consacré à l'analyse de la cellule nerveuse : 1° Les cellules nerveuses centrales des Poissons (osseux et carti- lagineux) peuvent affecter les deux types classiques de Nissz que l’on rencontre chez les autres Vertébrés: cellules somatochromes et cellules caryochromes ; 2° Ilexiste dans le cytoplasma des cellules somatochromes un réseau fibrillaire de substance achromatique et une substance chromatique (éléments chromophiles, corps de Nissc) affectant surtout la forme de bàlonnets, de petits fuseaux ou de petits amas granuleux et irréguliers. (Nous ajouterons que cette substance chromatique n'existe pas dans toutes les cellules, ou du moins, qu'elle n'y est pas visible; celte même particularité s'observe d’ailleurs chez les autres Vertébrés) ; 3° L’encéphale des Poissons renferme des cellules nerveuses variées et différentes comme aspect non seulement au point de vue essentiellement morphologique (formes extérieures) mais encore au point de vue de leur organisation intime, de leur structure fine. Ces différences s’observent aussi bien dans les diverses parties constituant l’encéphale que dans les segments variés de ces mêmes parties. (Nous verrons, en effet, en étudiant l’Anatomie microscopique de l’encéphale et en faisant la topo- graphie histologique de cet organe, que les neurones du prosen- céphale, par exemple, ne ressemblent pas aux neurones du mésencéphale et que, dans le cerveau antérieur lui-même, nous avons pu délimiter des zones parfaitement caractérisées par des groupes de neurones à forme et probablement à fonctions distinctes) ; 4 Le noyau des cellules nerveuses est nettement séparé du cytoplasma environnant par une membrane nucléaire. Les travées du caryoplasma sont plus on moins irrégulières, plus où moins HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 31 épaisses ; quant à la chromatine nucléaire, elle peut être plus ou moins condensée ou éparse ; 5° D'une façon générale, les cellules somatochromes de l’encé- phale des Poissons, bien que rappelant dans leur ensemble et dans leurs grandes lignes les caractères de ces mêmes cellules chez les Vertébrés supérieurs, présentent en définitive une différenciation morphologique et cytologique moins élevée ; c’est ainsi que les gros blocs de substance chromatique, si apparents chez les Vertébrés supérieurs, font presque complètement défaut dans les cellules nerveuses des Poissons ; lorsque les éléments chromophiles ont une tendance à devenir volumineux, on les voit se localiser surtout, soit aux pôles du noyau (capuchons nucléaires), soit à la périphérie du corps cellulaire (placas 0 läminas corticales, de CayaL) ; nous n’avons jamais pu mettre en évidence les cônes de bifurcation de NissL, aux points de bifurcation des troncs protoplasmatiques. 6” Quant à savoir si ces différenciations morphologiques et cytologiques sont plus hautes chez les Téléostéens que chez les Sélaciens, le problème est assez difficile à résoudre ? Meïe W. SZCZAWINSKA (1898) dans son récent mémoire ne décrit, comme type de Téléostéen, que les cellules motrices de la moelle allongée et les cellules de PURKINE du seul genre Cyprinus (C. carpio) tout en admettant, dans ses conclusions, que les cellules centrales des Poissons osseux présentent une différenciation morphologique et cylologique plus haute que les mêmes cellules des Sélaciens. Bien que nos recherches aient porté sur un plus grand nombre de cellules et sur des groupes plus variés de Poissons (Téléostéens et Elasmobranches) nous sommes cependant moins affirmatif et nous pensons devoir, pour l'instant, réserver notre opinion sur ce sujet. Du reste, et à propos de l'étude de la structure des cellules nerveuses, sans montrer un scepticisme exagéré qui semblerail vouloir mettre en doule, à tort, les acquisitions modernes de la cylologie, nous devons avouer que la plus grande prudence s'impose, lorsqu'il s’agit d’élucider des questions aussi délicates que celles qui font l’objet du présent travail, lorsqu'il s’agit surlout d'interpréter au point de vue physiologique et fonctionnel les images diverses qui viennent s'offrir à nos yeux ! Que M. le Professeur d'Histologie de l’Université de Madrid nous 32 £. H. CATOIS. permette de citer textuellement, à ce sujet, le passage suivant de son excellent traité : « Preciso es confesar que en lo concerniente à la fina anatomia » de la célula, pisamos un lerreno menos firme que el de la » morfologia exterior. En este dificil dominio nadie puede estar » seguro de no haber tomado una disposiciôn post-mortem creada » por los reactivos fijadores por una estructura preexistente, » atribuyendo asi al mecanismo normal de la vida lo que no es sino » la obra de la muerte » (RaAMoN Cayar, 1897, page 141 et 142). « Il est nécessaire de confesser que pour ce qui a trait à » l’anatomie fine de la cellule (nerveuse) nous foulons un terrain » moins solide que celui de la morphologie extérieure. Dans ce » domaine difficile (étude de la structure intime de la cellule » nerveuse), personne ne peut être sûr de ne pas avoir pris une » disposition post-mortem, créée par les réactifs histologiques » fixateurs, pour une structure préexistante, attribuant ainsi au » mécanisme normal de la vie ce qui n’est seulement que l'œuvre » de la mort ». (Traduction de l'auteur). On admet aujourd'hui que ce qui caractérise et affirme, avant tout, le progrès d'une cellule nerveuse dans la série phylogénique, que ce qui marque, en un mot, les étapes de son perfectionnement, ce sont : le nombre et la disposition des corpuscules nerveux, l’appa- rition et la formation de nouvelles expansions protoplasmatiques groupées et distribuées de façon à établir de nouvelles associations intercellulaires (RAMON Y Caya, Revue scientifique 1895). On commence, d'autre part, à entrevoir les particularités de détails de l’organisation des neurones et les modifications qui peuvent se manifester dans leur structure intime sous l'influence des différents états fonctionnels, traumatiques ou pathologiques ; ces problèmes excessivement complexes viennent à peine d'être posés et on ne fait encore que soulever le voile qui cache à nos yeux les phénomènes étroitement liés à la vie de la cellule nerveuse ! Dans l’état actuel de la science, on considère que la substance achromatique représente le véritable protoplasma cellulaire, l'élément constituant principal de la cellule nerveuse auquel est dévolue la fonction de conduction ; la substance chromatique au contraire ne serait qu'une substance de réserve, manquant dans HISTOLÔGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 33 certaines cellules nerveuses, abondante dans les autres, non indispensable à la vie du neurone, mais dont les variations quantitatives (et, ajouterons-nous, peut-être qualitatives ?) sont liées aux diverses modalités fonctionnelles de la cellule. | D’après ces quelques données de la science moderne, certains neurones des Vertébrés inférieurs possédant une quantité de substance chromatique moindre et, en tous cas, moins bien organisée que les neurones similaires des Vertébrés supérieurs, il nous paraît logique d'admettre que ces éléments nerveux doivent être douës d’une « énergie potentielle » également moindre et s’épuisant plus rapidement ? Quel que soit le sort réservé à celte hypothèse, nous pouvons conclure ainsi : Neurones relativement moins nombreux, peu riches en prolon- gements ramifiés, partant, en associations intercellulaires, à chromatine peu abondante, tels sont, rapidement résumés, les caractères histologiques principaux par lesquels se distinguent les cellules nerveuses de l’encéphale chez les Poissons et par lesquels s'affirme l'infériorité marquée de ces animaux dans la série des Vertébrés. S IL. Étude des Fibres nerveuses centrales. Constituant l'élément histologique principal de la substance blanche de l’encéphale, les fibres nerveuses existent également, bien qu'en moins grande proportion, dans la substance grise. Le prolongement cylindraxile émané de la cellule nerveuse constitue la partie essentielle, le cylindre-axe, de la fibre nerveuse; celle-c représentant un simple conducteur chargé de transporter à distance l'influx nerveux. Tantôt ce cylindre-axe est nu (fibres amyéliniques), tantôt il est revêtu d’une couche plus ou moins épaisse de myéline (fibres myéliniques) (1). (1) Rappelons ici, pour mémoire, que les recherches de FLECHSIG ont fait connaître que la substance grise occupe chez l'embryon de l'Homme tout l'axe cérébro-spinal ; l'apparition de la substance blanche et le développement de la myéline autour des prolongements cylindraxiles des cellules nerveuses ne survenant que vers le milieu du cinquième mois de vie intra-utérine. 34 E. H. CATOIS. Chez les Poissons, comme chez les autres Vertébrés, les fibres myéliniques consliluent l'immense majorité des tubes nerveux de la substance blanche de l’encéphale ; mais on peut encore en rencontrer dans la substance grise, ainsi qu'il nous a été facile de nous en convaincre en examinant cerlaines parties du bulbe, du cervelet, du mésencéphale et du télencéphale, traitées à l’aide des méthodes de WEIGERT ou de PAL. Nous avons constaté, de même, l'existence de fibres amyéliniques dans les filets olfactifs, dans le télencéphale, le mésencéphale et dans la couche moléculaire du cervelet. Les fibres nerveuses de l’encéphale ontun diamèêtre fort variable ; elles sont de dimensions volumineuses, petites ou moyennes, suivant les diverses régions où on les observe. Parfois isolées et plus ou moins éparses au sein du tissu nerveux ambiant, ces fibres sont le plus souvent groupées en faisceaux à orientation variée; ces faisceaux peuvent affecter dès lors une disposition soit radiée, soit comimissurale ; d'autres fois, ces fibres convergent vers un point donné de l’encéphale {fibres de projection) ou s’épuisent dans une région quelconque du névraxe {fibres terminales). Quant aux fibres désignées sous le nom classique de fibres d'association, constatons de suite leur très grande rareté dans l’encéphale des Poissons considéré dans son ensemble (1). La fibre nerveuse émet des divisions secondaires, plus ou moins imporlantes et à direction variable, sur différents points de son parcours (collatérales). Moins nombreuses chez les Poissons que chez les Vertébrés supérieurs, ces collatérales existent notamment, ainsi que nous le verrons plus tard, dans le télencéphale, le mésen- céphale et certaines régions de l'encéphale. Dans l'étude que nous avons faite, au point de vue purement histologique, des fibres nerveuses centrales, notre attention s’est plus spécialement concentrée sur les trois points suivants : 1° Mode de disposition de la myéline autour du cylindre-axe ; 2° Existence d’une membrane de SCHWANY ; 9° Présence d’étranglements annulaires. (1) Ces fibres nerveuses, dites #üres d'association, augmentent en nombre propor- tionnellement à la masse de substance grise ; chez l Homme et chez les grands Mammifères, ces fibres d'association sont donc fort abondantes et constituent la masse principale de la substance blanche du cerveau. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. NE 1° Myéline. — Nous avons pu, chez les Poissons, vérifier et constater certaines particularités signalées d’ailleurs chez d’autres Vertébrés : la gaine de myéline ne recouvre pas, dans toute sa longueur, le cylindre-axe des fibres myéliniques ; cette gaîne fait défaut, soit au niveau de l’origine du cylindre-axe, soit au niveau de l'origine d’une collatérale ; elle manque également à une distance plus ou moins éloignée du point de terminaison de la fibre nerveuse et sur ces terminaisons elles-mêmes. 2 (raîne de ScHwanx. — Les auteurs classiques, à l'exception de S. Ramon Cayar, se refusent à admettre l'existence de cette gaine autour de la myéline, dans les fibres nerveuses centrales. Dans nos préparations effectuées avec les méthodes EnxrLICH- BETHE et examinées au moyen d'objectifs puissants, nous avons réussi à mettre en évidence cette gaine de SCHWANN sur certaines fibres nerveuses de l’encéphale ; cette gaine se présente alors sous forme d’une membrane très mince, très délicale, colorée en bleu pâle el surtout appréciable au voisinage des étranglements annulaires. Sur les points des tubes nerveux où cette gaine fait défaut, il n’est pas rare de constater l'aspect variqueux de ces tubes. Nous sommes donc heureux de partager la même opinion que le Professeur R. CaJarz et d'admettre, avec ce savant, l'existence d’une membrane péri-myélinique sur certaines fibres nerveuses centrales. 3 Étranglements annulaires (PL 1, fig. 1). — On sait que les avis des histologistes sont très partagés sur ce point spécial ; rappelons que Tourneux et LE Gorr (1875), SCHIEFFERDECKER (1887), PorTER (1890) et Cayaz (1897) admeltent l'existence d'étrangle- ments annulaires sur les fibres nerveuses centrales, tandis que les auteurs classiques continuent à en nier la présence. Dès le commencement de l’année 1897, nous avons fait connaître par une note sommaire présentée à l’Académie des Sciences (Carors 1897 «) le résultat de nos investigations personnelles : « Dans la substance blanche du cervelet des Poissons, nous avons constaté, par le procédé de coloration au bleu de méthylène (ExrLicH-BETHE), la > présence d'épaississements doubles et fusiformes sur le trajet de » quelques fibres nerveuses », et nous notions à ce sujet « que > nous n'avons jamais pu, dans nos préparations, faire apparaitre » la barre transversale et verticale figurée par le professeur Ÿ Ÿ 36 E.\H-NCATOIS: > DoGiEL dans son travail : « Die nervelemente in Kleinhirne..…..,». DoGiEL (1895). Depuis cette époque, nous avons eu souvent l'occasion de vérifier et de compléter nos premières observations ; l'emploi des méthodes WEIGERT-PAL et EHRLICH nous à permis de constater l'existence de ces étranglements annulaires sur les fibres nerveuses de la substance blanche de diverses régions de l’encéphale des Poissons (lobes inférieurs, mésencéphale, télencéphale, etc....). Nous avons dessiné quelques-unes de ces fibres nerveuses présentant des étran- glements et nous insistons spécialement sur les deux particularités suivantes : léger épaississement du cylindre-axe et coloration plus intense de ce cylindre-axe, au niveau de l’étranglement (PI. 1, fig. 8). Ajoutons maintenant, pour terminer, la description des éléments nerveux essentiels (cellules et fibres nerveuses) que nous venons d'étudier séparément, qu'il est bien entendu que cellules et fibres ne constituent pas deux éléments distincts l’un de l’autre, mais au contraire, que ces éléments forment un tout unique; nous consi- dérons en effet, avec les auteurs classiques, la cellule nerveuse munie de ses prolongements protoplasmiques et de son cylindre-axe, comme une unité histogénique, anatomique et physiologique, comme une individualité indépendante à laquelle WALDEYER a donné le nom de « Neurone ». Ainsi que chez les autres Vertébrés, l'encéphale chez les Poissons nous apparait donc constitué par un agrégat de neurones sans soudure entre eux ; l'onde nerveuse parcourt une série de neurones et se transmet de l’un à l’autre de ces neurones par contiguité et non par continuité. S III. — Considérations sur les Neurones de l’encéphale. Nous terminons ce chapitre [* par des considérations générales sur les neurones de l’encéphale. On doit au D° CHARLES PupiN une très savante étude sur les neurones (D° Pupix, 1896). « Il existe, dit cet auteur, des neurones > variés de forme et de rapports qu’il est facile de classer par > groupes, anatomiquement et fonctionnellement »>. Nous inspirant de l’ordre systématique suivi par le D° Pur pour la classification de ces neurones chez les Vertébrés supérieurs, nous allons essayer, HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 37 dans ce paragraphe et sous forme d’un rapide exposé, d'établir un groupement méthodique des différentes espèces de neurones que nous avons êté à même d'observer dans l'encéphale des Poissons (1). Divisons tout d'abord ces neurones en deux grands groupes : les neurones Courts et les neurones longs. A. Les neurones courts offrent, d’une façon générale, les caractères suivants : cylindre-axe relativement court, ne s’entourant jamais de myéline et se divisant, au voisinage de la cellule qui lui a donné naissance, en un certain nombre de fibrilles situées en pleine substance grise. GOLGI attribuait à ces neurones un rôle sensitif ; dans l'état actuel de la science, on les appelle neurones d'association; disons, de suite, que ces neurones courts nous ont paru relative- ment rares dans l’encéphale, chez les Poissons. Dans ce groupe de neurones courts, nous avons observé les types suivants : 1° Neurones de GoLGr (ceux de son Type Il). — Ces neurones, mentionnés par Fusari (1887) dans les lobes optiques des Poissons, ont été signalés de nouveau par P. Ramon y CayaL (1897). 2 Neurones dits de Cayar. — Ces neurones ont été figurés par J.-B. Jonxsron (1898), dans le lobe olfactif de l’Esturgeon (Acipenser rubicundus). Personnellement, il ne nous a pas été possible, jusqu'ici, de bien mettre en évidence, dans l'encéphale des Poissons, les cellules de CayaL à type classique « cellules fusi- > formes ou irrégulières, donnant naissance à 2, 3, ou 4 cylindres- > axes, se détachant tous d’une dendrite.. >. Ces neurones de CaJAL, ouneurones Corticaux, caractéristiques de la couche moléculaire de l'écorce cérébrale chez les Vertébrés supérieurs, nous ont paru être représentés, chez les Poissons, par d’autres variétés de neurones d'association (Voir plus loin, à ce sujet, la 3" partie de notre mémoire: Aistologie topographique). 3° Neurones cérébelleux de la couche moléculaire et : 4 Enfin, Neurones courts des lobes optiques et des lobes olfactifs, associant entre eux divers neurones longs à transmission centripète. (1) Cette classification artificielle et basée simplement sur des considérations de forme et de connexions est nécessairement incomplète et provisoire. 38 É. H. CATOIS. B. Les neurones longs sont caractérisés par la longueur de leur prolongement cylindraxile qui quitte la région de la substance grise où siège la cellule d’origine, prend part à la formation de faisceaux nerveux et se termine librement soit à la périphérie, soit dans un autre centre nerveux ; ce prolongement conserve son individualité propre el ces neurones peuvent être rangés dans le type de DEITERS ou type I de GoLGr. Leurs variétés sont nombreuses et nous avons pu observer les types suivants: 1° Neurones de sensibilité speciale : (olfactifs, visuels et auditifs) caractérisés par leur apparence bipolaire avec expansion proto- plasmique périphérique et prolongement central. 2 Neurones des lobes optiques et olfactifs. Situés à côté des neurones courts déjà décrits, les neurones longs des lobes optiques et olfactifs ont des prolongements dendritiques ou un prolongement cylindraxile qui dépassent, en étendue, les limites de ces lobes. 3° Neurones Commissuraux, envoyant dans les formations commissurales leur prolongement cylindraxile ou des collatérales émanées de ce prolongement. 4 Neurones encéphaliques sentitifs du premier et du second ordre. — Les neurones du 1°” ordre ont leur place propre dans un organe des sens périphériques et envoient leur cylindre-axe à un ganglion de la base de l’encéphale ; les neurones du 2° ordre ont leur cellule dans un ganglion encéphalique (noyau de substance grise) et leur prolongement cylindraxile dirigé vers d’autres groupes de neurones avec lesquels il s'articule. D Neurones encéphaliques moteurs. — Ces neurones sont représentés chez les autres Vertébrés par des cellules pyramidales dont la base donne naissance à un long cylindre-axe (fibre de projection motrice) tandis que, de leur sommet, se détache un panache dendritique dirigé vers les zones corticales du cerveau. On sait que ces cellules (cellules psychiques de CayaL) se simplifient de plus en plus, quant à leurs formes et à leurs dimensions, en descendant l'échelle des Vertébrés ; représentées chez les Batraciens par un simple bouquet terminal, les expansions protoplasmiques de ces cellules atteignent, chez l'Homme, leur maximum de développement. Il est admis que, chez les Poissons, le télencéphale ne contient pas encore de véritables cellules pyramidales (ÉDINGER, CaJAL). J.-B. JoHNSTON (1898) décrit et figure, pourtant, dans le HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 39 cerveau antérieur (fore-brain) de Acipenser rubicundus, des cellules qu'il désigne sous le nom de cellules pyramidales: « The striatum contains two distinct types of cells imperfectly > separated into two nuclei. The internal (dorso median) nucleus (Epistriatum) is composed of pyramidal cells mesuring 12 to > 26 by 16 to 40 & arranged in about ten to twelve compact layers > parallel with the internal surface of the striatum ». Il est vrai que, quelques lignes plus loin, l’auteur ajoute: « Each cell has several > basal processes, and from the apex arise from one (to > four dendrites........ The axis cylinders arise from the side or > apex of the cell body or from the first portion of one of the basal > or apical dendrites » (loc. cit., pages 229-230). Sont-ce bien là, réellement, les caractères propres aux cellules pyramidales ? — Dans l’encéphale des Poissons étudiés par nous, nous n’avons jamais constaté la présence de véritables cellules pyramidales à type classique: tige ascendante ou primordiale munie de collatérales, expansions basilaires ou procédant du corps cellulaire, etc... Pour nous, ces cellules pyramidales sont représentées chez les Poissons par des neurones 7ruwltipolaires ayant un corps cellulaire plus ou moins globuleux, plus ou moins régulier, des expansions protoplasmiques provenant du corps même de la cellule et plus ou moins ramifiées, neurones possédant, enfin, un cylindre-axe (véri- table fibre de projection) naissant le plus souvent de la base d’une expansion protoplasmique et émettant parfois de fines collatérales. . 6° Neurones cerébelleux de la couche de PURKINIE. 7° Neurones cérébelleux de la couche granuleuse : (1) (grains du cervelet, grandes cellules éloilées de Got). Il existe probablement encore d’autres types de neurones, les méthodes GoLGi-CaJaz n'ayant pas dit leur dernier mot et cette question appelant de nouvelles recherches. Pour conclure, nous dirons, avec le D’Pupnx (loc. cit., page 31) : « Ce n’est pas la forme anatomique du neurone qui détermine sa > fonction ; celle-ci dépend plutôt de sa position et de ses rapports > anatomiques. Outre les neuronesfranchement sensitifs ou moteurs, > il existe des neurones mixtes, neurones d'association mettant les Ÿ (1) Voir la 3€ partie de notre mémoire {chapitre Métencéphale) pour la description de ces neurones cérébelleux. 40 E.:f'CATOIS, > précédents en rapport. Du reste, par les collatérales qui entrent > dans les commissures, les neurones sensitifs et moteurs peuvent > eux-mêmes devenir secondairementdesneurones d'association »({). N'est-ce pas ici le moment de s'inspirer de cette grande loi formulée par Louis RouLE dans son beau travail (Anatomie comparée des animaux, 1898, tome IT) : Dès l'instant où ils se trouvent façonnés, des Poissons aux Vertébrés supérieurs, les neurones de l’encéphale ne cessent de prendre une prépondérance de plus en plus considérable, augmentant en quantité et se spécialisant davantage dans des zones déterminées ; d’abord diffus et épars, ils se localisent et groupent leurs corps cellulaires en ganglions mieux délimités ; la division du travail fait sentir son action, en cette occurrence et, suivant une série de progression croissante, dont le terme supérieur est donné par les Mammifères les plus élevés, elle intervient pour substituer une structure compliquée, accompagnée de localisations précises, à un état primitivement élémentaire, diffus et mal déterminé ? IT ÉLÉMENTS NERVEUX SECONDAIRES. (Eléments de soutien). (Cellules épendymaires. — Cellules névrogliques). Les éléments nerveux secondaires que nous allons étudier maintenant dans l’encéphale, chez les Poissons, sont disposés entre les éléments nerveux principaux et essentiels (cellules et fibres) et leur servent de soutien (névroglie de Vircaow, tissu de souté- nement, Séützzellen). Ces éléments de soutien proviennent des cellules primitives de l'axe cérébro-spinal embryonnaire et dérivent par conséquent de l’ectoderme, au même titre que les éléments nerveux essentiels. L'histogénèse des centres nerveux démontre, en effet, que parmi les cellules ectodermiques du névraxe embryon- naire, les unes constitueront des cellules nerveuses, tandis que les autres deviendront des cellules de soutien. (1) Dr CHARLES Pupix : Le Veurone, thèse de la Faculté de médecine. Paris (1896). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 41 Nous décrirons, dans l’encéphale des Poissons, deux espèces de cellules appartenant à ce tissu de soutènement (neuroglie): 1° Les cellules épendymaires ; 2 les cellules de névroglie proprement dites, S I. — Cellules épendymaires. Synonyme : Névroglie épithéliale, cellules épithéliales ; epithel- zellen, ependymzellen des auteurs allemands. Les éléments de soutènement sont surtout représentés, dans les centres nerveux des Poissons, par les cellules épendymaires ; ces cellules ont été parfaitement étudiées, décrites par les auteurs classiques et sont bien connues (travaux de Fr. NaxsEN (1886), de G. ReTzius (1891) de M. V. LENHOSSEK (1895), etc...….). Les méthodes de GoL&i-Cayaz et de EHRLICH mettent bien en évidence les caractères principaux de ces éléments. Le corps des cellules épendymaires est cylindroïde ou cuniforme et présente un noyau ovalaire allongé. L'action du bleu de méthylène se fait particulièrement sentir sur le prolongement périphérique de ces cellules qui se colore d’une façon intense, tandis que le corps cellu- laire et le noyau restent pâles; ce prolongement périphérique, à disposition radiaire, présente en outre, sur la plus grande partie de sa longueur, des excroissances irrégulières et plus ou moins ramifiées (CaJAL, 1896). Chez les jeunes sujets, ces cellules épithéliales constituent, seules, toute la névroglie ; elles s’insèrent sur les parois des cavités ventri- culaires de l'encéphale par leur extrémité interne ou centrale et présentent deux prolongements : l'un central, l’autre périphérique. Le prolongement central, très court, longtemps considéré comme un cil vibratile « Härchen, Flimmerhaare », n’est en réalité qu'un produit cuticulaire. Le prolongement périphérique se dirige vers la surface extérieure du cerveau, traversant ainsi l'épaisseur des centres nerveux de dedans en dehors et vient sé terminer sous la pie-mêre au moyen d’un pelit renflement conique. Cette disposition embryonnaire, persistante chez les sujets adultes dans les cellules épendymaires qui vont des parois anté- rieure et postérieure du canal central pour s’insérer au fond du sillon médian antérieur ou postérieur de la moelle épinière (coins 42 E. H. CATOIS. épendymaires de RETZIUS), se retrouve au niveau des parois supé- rieure et inférieure (partie médiane) du troisième, du quatrième ventricule cérébral et de l’aqueduc de Sylvius, cavités modifiées du canal neural primitif. Devons-nous admetire maintenant que, dans l’encéphale des Poissons, {outes les cellules épendymaires conservent, même chez des sujets adultes, leur disposition primitive et qu'il n'existe pas, chez ces Vertébrés inférieurs, d'autre névroglie que celle qui est constituée par les expansions périphériques de l’épithélium épendy- maire ? Nos recherches personnelles nous ont permis de faire les consta- tations suivantes : 1” Les cellules épendymaires peuvent, chez l'adulte, émigrer de leur emplacement ordinaire (voisinage des cavités ventriculaires) et ces éléments, déplacés, conservent encore leur expansion soit périphérique, soit centrale, plus ou moins modifiée ou atrophiée. 2" La migration et la transformation de ces éléments épithéliaux peuvent même s'étendre plus loin; c'est ainsi que nous avons plusieurs fois constaté la présence de véritables cellules en araignée dans la substance blanche de l’encéphale, chez les Poissons ; l'étude détaullée de ces cellules de névroglie fera, d’ailleurs, l'objet du paragraphe suivant. Nous reproduisons (fig. 5, PI. 1 et diverses) le dessin de quelques cellules épendymaires de l’encéphale des Poissons, telles que les mettent en évidence les méthodes de GoLGi-CaJaL et de EHRLICH. Ces cellules épendymaires sont surtout faciles à observer chez les jeunes sujets; une imprégnation chromo-argentique quelque peu réussie du télencéphale (Stammganglion, Basalganglion des Vorderhirns), chez un Poisson osseux, permet d'en saisir rapidement les caractères. Chez les Sélaciens, c’est surtout pendant la période embryonnaire (Raja, Mustelus, Acanthias.…) que les cellules névrogliques épithéliales apparaissent nombreuses ; plus tard et à l’âge adulte, beaucoup de ces cellules ont évolué et se sont trans- formées en cellules de névroglie proprement dites (cellules en araignée). (CaToIs 1898). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 43 S II. — Cellules de névroglie proprement dites. E2 Synonymie : Cellules de DEITERS, cellules en araignée, cellules astériformes; astrocyten, spinnenzellen, gliazellen, neurogliazellen, des auteurs allemands. Contrairement à l'opinion des auteurs classiques qui admetltent généralement que le tissu de soutènement de lencéphale chez les Vertébrés inférieurs est uniquement représenté par les cellules épendymaires, nous avons vu, dans le paragraphe précédent, que certaines de ces cellules épendymaires peuvent évoluer el se transformer en cellules astériformes. M. Arras (1897), dans son excellent travail sur la structure histologique de la moelle épmière du Têtard de la Grenouille (!), partage l'opinion de CL. SALA (1894) et, considérant les cellules en araignée observées et dessinées par Lavpowsky (1891), chez la Grenouille (?), comme le résultat d'imprégnations défectueuses, se refuse à admettre l'existence de véritables cellules en araignée ou astrocyten, chez les Batraciens, Vertébrés placés plus haut, dans la série animale, que les Poissons. Rappelons toutefois que les recherches de Frirror NANSEN (1887), de G. ReTzius (1891) et de M. V. LexHosskk (1895) mettent hors de doute la présence de véritables cellules névrogliques dans la moelle épinière des Cyclostomes et des Sélaciens. Nous avons pu nous- même (Carois 1898) réussir l’imprégnation de ces cellules dans la moelle d’un embryon d'Acanthias de 0",15 centim. de longueur et nos préparations histologiques reproduisent absolument le dessin de M. V. LexHossÈk (loc. cit., fig. 32, p. 240). Les cellules de névroglie ont été également signalées dans l'encéphale des Poissons par Fusarr (1887), ScHaper (1893) et R. Cayar lui-même (1894). Nous avons fait connaitre, dans une précédente note, le résultat sommaire de nos recherches sur ce sujet et nous avons démontré l'existence de cellules en araignée dans l’encéphale de Raja clavala, Raja batis, Raja punctata parmi les Elasmobranches, et dans celui de Platessa vulgaris, () M. Arras. Structure histologique de la moëlle épinière du Têtard de la Grenouille (Bibliographie anatomique, n° 1, p. 87, janvier-février ; 1897). (2) Lavrowsky. Vom Aufbau des Rückenmarks (Arch. für mikr. Anat., Bd. XXXNIIT 1891): 44 E. H. CATOIS. Gadus lusceus, Scomber et Labrus parmi les Téléostéens (CaTois, 1898). Nous indiquerons donc, dans ce paragraphe, les caractères de ces “cellules névrogliques, tels que nous les montrent diverses méthodes histologiques. Pour réussir à mettre en évidence les astrocyten dans l’encéphale des Poissons, au moyen des méthodes rapides d’imprégnations (GoLGI-CaJAL), méthodes simples ou doubles, il nous a semblé qu'une des premières conditions était la suivante : la durée du premier bain (mélange osmio-bichromatique) ne doit pas dépasser dix-huit à vingt heures. Si les cellules et les fibres nerveuses ne sont ainsi que peu ou pas imprégnées, les éléments névrogliques apparaissent néanmoins avec netteté. Lorsque la durée de ce premier bain dépasse vingt-quatre heures, les cellules et les fibressontimprégnées, mais alors les cellules en araignée ne le sont plus (effet probable du surdurcissement de ces éléments pendant le premier bain et de la non-diffusion du chromate d'argent dans ces mêmes éléments pendant le second bain (!). Ces remarques, d'ordre purement technique, paraissent confir- mer, d’ailleurs, les observations de OyarzuM (?) et les indications de LENHossEk relatives à l’imprégnation de la névroglie (M. V. LENHOSSEK, loc. cit., p. 11). Moins abondantes chez les Poissons que chez les autres Vertébrés, les cellules de névroglie proprement dites existent dans la substance grise et dans la substance blanche. C’est surtout chez les Sélaciens que ces éléments peuvent être observés dans la substance grise; une imprégnation réussie des lobes antérieurs du cerveau de Raja suffit pour permettre de vérifier le fait que nous avançons. Chez les Téléostéens, les cellules de DEITERS sont principalement visibles : 1° entre la substance blanche et la substance grise; au point de jonction de ces deux zones de substance, les cellules en araignée forment une sorte de feutrage (lobes inférieurs, par exemple) ; 2° au voisinage des cavités ventriculaires de l’encéphale ; 3° enfin, autour des vaisseaux. (1) Voir : Première partie de notre Mémoire (Chapitre 11, Technique, page 17). (2?) Ovarzum : Ueber den feineren Bau des Vorderhirns der Amphibien (4rehiv, f. Wik. Anat., Bd. XXXIV, 1889). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 45 Tantôt ces éléments prennent l'aspect de cellules multipolaires à prolongements longs et grèles, raides, le plus souvent indivis et rayonnant dans toutes les directions, tantôt ces prolongements sont très courts et la cellule névroglique ressemble alors à une boule épineuse. Dans ce dernier cas, il n’est pas rare de voir un prolon- gement plus long que les autres prendre une disposition radiaire et atteindre la périphérie des centres nerveux, après avoir traversé une étendue plus où moins considérable de substance blanche ou grise. Ce fait démontre bien que ces éléments névrogliques proviennent manifestement des cellules épendymaires par atrophie du prolongement interne. Commençant à apparaître, à s’esquisser dans l'encéphale, chez les Poissons, les cellules de DEITERS nous ont paru en somme y être relativement peu nombreuses et de formes peu variées. D'une façon générale nous estimons qu'on peut les grouper selon les types suivants : a) Cellules de névroglie à larges expansions. — Ces éléments (cellules araignées géantes) sont surtout relativement abondants dans la substance gélatineuse disposée autour du quatrième ventricule encéphalique (canal central de la moelle, élargi) et dans la substance blanche de certaines régions (fig. 16, PI. m1). b) Cellules de névroglie à courtes expansions. — Ces cellules sont situées, soit dans les zones intermédiaires entre la substance blanche et la substance grise (Téléostéens et Sélaciens), soit dans la substance grise même (Sélaciens) (fig. 18, PI. m). c) Cellules de névroglie peri-vasculaire, formant autour des vaisseaux un manchon névroglique et rappelant, dans leurs grandes lignes, la disposition indiquée par LLOYD ANDRIEZEN (!) chez les Vertébrés supérieurs. Pour les cellules de la névroglie, de même que pour les cellules nerveuses, on ne peut demander à la méthode de GozGr que la mise en relief de leurs caractères morphologiques extérieurs ; et encore, ajouterons-nous, faut-il apporter une extrême réserve dans l’appré- ciation et l’mterprétation des images obtenues et observées. Nous considérons, en effet, la névroglie comme un élément particulière- (1) Lioyn ANDRIEZEN. On a system of fibre-cells surrounding the blood-vessels of the brain of Man and Mammals (/ntern. Monatschr. f. Anat. u. Physiol., 1893). 46 E. H. CATOIS. ment sensible à l’action des réactifs histologiques ; le séjour trop prolongé des pièces, soit dans le mélange osmio-bi-chromatique, soit dans le bain de nitrate d'argent, l’action même d’une lumière trop nense, el. nous ont souvent paru avoir une influence réelle sur la bonne imprégnation des cellules en araignée. Quant à ce qui est relatif à la constilution intime des cellules de la Névroglie, on sait que les histologistes sont loin d’être d'accord sur cerlains détails de cette structure, notamment à propos des rapports entre le corps cellulaire et les prolongements dans les cellules de DEITERS. On comprendra donc aisément qu'après les beaux travaux de RANvier et les recherches de RENAUT, de WEIGERT, etc., nous nous abstenions de prendre place dans les débats et de prétendre résoudre une question encore controversée ; l'Encéphale des Poissons nous semblerait, du reste, un sujet d'étude mal choisi pour celle analyse intime des cellules de névroglie. Rappelons seulement nos constatations personnelles (Carois 1899) et disons de suite que, malgré des efforts mullipliés et des recherches nombreuses, nous n'avons pu réussir jusqu'à présent à metire suffisamment en relief, dans l'Encéphale chez les Poissons, les cellules de névroglie, au moyen de la méthode spéciale et compliquée de WeiGerT (1). Ce résultat négatif est d’ailleurs moins fait pour surprendre si l’on se souvient que WEIGERT lui-même et CaJaL (1897) ont constaté l'impossibilité d'oblenir, par cetle méthode, la coloralion de certaines cellules de névroglie dans la substance grise chez les Verlébrés supérieurs. En revanche, la méthode de Niss1 colore bien les noyaux de ces cellules, tandis que leur cyloplasma ne contenant pas de chromatine reste pàle, décoloré et indécis. C'est donc à cette dernière méthode que nous avons eu recours. Dans le prosencéphale (stammganglion) de ÆRaja et dans le cervelet de Gadus (couches moléculaire et granuleuse) nous avons réussi à mettre en évidence les noyaux de la névroglie (PL. 1, fig. 2 ÉD) D'une façon générale, ces noyaux sont manifestement visibles : 1° soit entre les neurones dont ils semblent être les satellites ; 2° soit entre les fibres nerveuses centrales (rôle d'isolement, d'inter- position entre les connexions intercellulaires); 3° soit enfin, au {t) WeiGErT, Beitrage zur Kenntniss der normalen menschlichen Neuroglia (Festschrift sum fünf:iqjährigen Jubilaüm des àrstlichen Vereins zu Francfurt. a. M, 1895), HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 47 voisinage des vaisseaux. Les observations de R. CayaL (1894) relatives aux caractères de la névroglie du Cervelet chez les Poissons et le travail du même savant sur les relations entre les cellules nerveuses et les cellules de la névroglie (R. Cara 1896) viennent apporter un appui considérable à la valeur de nos constatations. Dans nos préparations, ces noyaux offrent à considérer: une membrane nucléaire, sorte de cuticule hyaline se confondant vers sa partie extérieure ou périphérique avec les fines ébauches de la trame protoplasmalique, tandis que vers sa partie interne ou centrale elle sert d'insertion au réseau nucléinien. Ce réseau nucléinien sert de charpente à une substance chroma- tique localisée surtout à la périphérie de la cavité nucléaire, sous sa membrane, mais formant en plus, çà et là, de gros grains nodaux. Ce sont bien là les caractères de la névroglie tels qu’ils sont indiqués, par la méthode de Nissr,, dans l’excellent et important ouvrage de RAMON CAJAL (CAJAL 1897, page 188). Nous sommes heureux, pour notre modeste part, d’avoir pu confirmer, par cette méthode histolo- gique nouvelle, nos précédentes observalions effectuées par la méthode des imprégnations métalliques (Carois 1898). Pour terminer ce chapitre, nous dirons quelques mots sur la signification fonctionnelle qui semble devoir être attribuée aux éléments nerveux secondaires que nous venons de passer en revue. La valeur fonctionnelle de ces éléments est considérable et les rôles qu’ils ont à jouer sont importants. Sans entrer dans de longues explications et sans rappeler les théories classiques bien connues ou les opinions soutenues par différents auteurs, nous admettons comme un fait maintenant bien acquis que les cellules de névroglie ne sont pas des cellules de nalure conjonclive venues du dehors avec le tissu conjonctif qui entoure les vaisseaux ; partageant, en outre, les opinions de R. CaJAL, V. LENHOSSÉK, VAN GEHUCHTEN, etc., nous considérons les cellules en araignée comme des cellules épendymaires déplacées et modifiées. Quant aux rôles dévolus à ces éléments, en tenant compte des idées défendues par les divers auteurs (P. RAmMoN CAJAL, CL. SALA, L. ANDRIEZEN, WEIGERT, elc.), nous estimons que ces rôles sont multiples : 1° La charpente épendymaire, avec sa disposition radiaire, forme les {ravées dürectrices de la charpente névroglique et influence 48 £. H. CATOIS. l'orientation des cellules nerveuses, pour leur mise en place ultérieure ; 2° Représentant le tissu de soutènement des centres nerveux, copiant le tissu conjonctif (suivant l'expression du professeur Rexaur) les cellules de la névroglie entourent les cellules et les fibres nerveuses, doublant en quelque sorte les cellules épendymaires et se prolongeant parfois sur les vaisseaux ; 3° Enfin, les cellules épendymaires et les cellules en araignée ne constituent pas uniquement des éléments de soulien, mais proba- blement aussi, elles servent d'appareils iso/ateurs (mision aisla- dora) ({) interposés entre les éléments nerveux proprement dits, pour éviter tout contact inutile ou même nuisible. III ÉLÉMENTS NON NERVEUX (Tissu conjonctif, vaisseaux). Outre les éléments histologiques éludiés dans les précédents chapitres: éléments nerveux essentiels, éléments nerveux secon- daires, tous d'origine ectodermique, on trouve encore dans la structure générale de l’encéphale, chez les Poissons comme chez les autres Vertébrés, des éléments d'origine mésodermique: tissu conjonctif, vaisseaux sanguins et Iymphatiques. L'étude complète et détaillée de ces éléments non nerveux nous entrainerait à développer outre mesure celle seconde partie de notre Mémoire ; nous nous réservons d’ailleurs de faire connaître, dans un autre travail, les résultats de nos recherches sur ce sujet particulièrement difficile. Ce chapitre sera donc consacré simple- ment à un exposé rapide de nos constatations. (1) Voir S. R. CagaL. (El Sistema Nerv. del Hombre y de los vertebr. . ., page 191. Madrid, 1897). HISTOLOGIE HT ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 49 Tissu conjonctif En dehors des cellules épendymaires et des cellules en araignée qui constituent, ainsi qu'on l’a vu plus haut, le véritable tissu de souténement des éléments nerveux (cellules et fibres) on rencontre encore, dans l'encéphale des Poissons, du fissw conjonctif véritable. Ce tissu conjoncüif, constitué par des prolongements intra-cérébraux de la pie-mère qui accompagnent et soutiennent les vaisseaux, esl beaucoup moins abondant dans lencéphale que dans la moelle. Présentant les caractères histo-chimiques du tissu conjonctif ordinaire, il se différencie nettement de la névroglie par la forme et le volume de ses fibrilles, par la facilité avec laquelle il se colore en rose par le carmin et par ses réactions histologiques ; soumis à l’action de l'acide acétique, ce tissu conjonctif se dissout, tandis que dans les mêmes conditions la névroglie demeure intacte (RANVIER, Cours inédit du Collège de France). Dans les cenires nerveux des Poissons, comme dans ceux des Vertébrés supérieurs (J. DEJERINE, Analomie des centres nerveux, 1895), l'élément mésodermique, tissu conjonctif, parlicipe .donc à la constitution de la charpente des centres nerveux, mais ce issu n'entre pas en contact direct avec les cellules et les fibres nerveuses. Vaisseaux sanguins. — Lymphatiques. Les vaisseaux sanguins de l’encéphale se ramifient dans la pie- mère et n’abordent la masse nerveuse, en pénétrant dans son épaisseur, que sous forme de vaisseaux à petit calibre. Dans la substance blanche, les réseaux capillaires sont à mailles - allongées suivant la direction des fibres nerveuses. Dans la substance grise, le réseau capillaire, en rapport avec les fonctions physiologiques importantes de cette substance, est plus riche et forme des mailles arrondies et serrées. À défaut d'injections vasculaires, un simple coup d’œil jeté sur des préparations du lobe olfactif, du télencéphale ou des lobes inférieurs, effectuées au moyen des méthodes de GoLGr ou de Cox (imprégnations métalliques) suffit pour se faire une idée très nelle de cette richesse vasculaire. / 50 E. H. CATOIS. Ce qui caractérise surtout ces vaisseaux sanguins, c’est la présence autour d'eux d’une gaine constituant un véritable manchon (gaine périvasculaire de RoBin). Dans certains cas,-nous avons observé en plus de cette gaine, de nature conjonctive, un second manchon de nature névroglique (névroglie péri-vasculaire, voir plus haut, page 45). Enfin, l’encéphale des Poissons, comme celui des autres Vertébrés, nous à paru entièrement dépourvu de réseaux lymphatiques canaliculés ; la lymphe y circulerait donc dans les gaines péri- vasculaires el surtout dans des espaces interorganiques. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. Lit TROISIÈME PARTIE HISTOLOGIE TOPOGRAPHIQUE DE L'ENCÉPHALE. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. Chez les Poissons, comme chez les autres Craniotes, l’encéphale est cette partie des centres nerveux nettement caractérisée : 4° par sa situation dans la cavité cranienne; 2° par son origine embryonnaire. L'encéphale provient, en effet, de la partie antérieure du tube nerveux primordial {canal neural primitif) dilatée d’abord en trois vésicules (vésicules cérébrales primilives — antérieure moyenne et postérieure); ces vésicules arrivent bientôt par dédou- blement, à former cinq autres vésicules différenciées placées les unes derrière les autres, le corps de lembryon supposé hori- zontal (1). C'est ainsi que: 1° La vésicule primitive antérieure ou prosencephalon nous offrira à étudier : a. Le cerveau terminal ({élencèphale) ; b. Le cerveau intermédiaire (diencéphale ou thalamencéphale) ; 2° La vésicule primitivé moyenne ou #2esencephalon conservera chez l'adulte sa même dénomination : c. cerveau moyen (z2ésencephale) ; 3° Enfin, la vésicule primitive postérieure ou rhombencephalon comprendra : d. Le cerveau postérieur (#rétencéphale). e. L’arrière-cerveau ou moelle allongée (#yelencéphale). Ce serait sortir du cadre de notre travail que de suivre l’évo- lution particulière de chacune de ces vésicules, d'étudier leurs modifications successives subies au cours du développement embryonnaire, de faire, ‘en un mot, l’exxbryologie de l’encéphale 4) On sait que la vésicule primitive moyenne ne prend pas part à ce dédoublement,. ex À Ë. H. CATOIS. chez les Poissons (‘). Si nous rappelons ici ces notions embryolo- giques sommaires et aujourd'hui bien établies, c'est que d’une part, la division des diverses parties constituant l'encéphale des Poissons a élé longtemps arbitraire, leur description trop souvent confuse et que d’autre part, comme le fait remarquer HERTwIG, le dévelop- pement de l’encéphale aux dépens de cinq vésicules distinctes constitue une base morphologique naturelle, pour une description également naturelle de l'organe. Cette classification embryologique a encore l'avantage de fournir à l'anatomie comparée les points de repère nécessaires et utiles, et de donner la clef de l’explication d’un grand nombre de détails relatifs à la structure du cerveau (cavités ventriculaires, origines de la glande pinéale, de l’hypophyse, etc.). C’est donc elle qui nous servira de guide dans l’étude que nous allons maintenant entreprendre ; examiner au point de vue topographique, c’est-à-dire en place, dans leur zone respective et avec leurs connexions anato- miques normales, les divers éléments histologiques passés en revue dans les précédents chapitres, sera le but et l’objet de cette troisième partie de notre Mémoire. Après les travaux de BAUDELOT, de G. FRITSCH, de ÉDINGER, etc., nous n'avons pas à entreprendre l'anatomie microscopique de l’encéphale des Poissons, dans son ensemble ; le travail que nous présentons aujourd’hui n'a pas la prétention de constituer une œuvre didactique ; son but, plus modeste, est de mettre en lumière certains faits nouveaux et d'appeler principalement l'attention sur les parties les moins connues du sujet. Nos recherches sont limitées aux régions encéphaliques suivantes: télencéphale, diencéphale, mésencéphale et métencéphale. L'espace et le temps nous manquant, nous avons dû, à regret, laisser aujourd’hui de côté l'étude du myélencéphale ; cette étude de la moelle allongée ne peut, du reste, se faire avec fruit, qu'après celle de la moelle épinière. L'anatomie microscopique du myélencéphale, ainsi que la description des origines réelles des nerfs crâniens qui en dépendent, feront donc avec l'étude de la moelle, chez les Poissons, l’objet d’un autre mémoire. « Si nous voulons voir clair dans la structure interne des centres > nerveux, si nous voulons saisir la valeur morphologique et (1) Consulter sur ce sujet les œuvres magistrales de RABL-RUCKHARD. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 93 VA physiologique des différents faisceaux qui constituent le système > nerveux, nous devons reprendre, avec les méthodes nouvelles, > tous les faisceaux qui ont été décrits et nous demander pour > chacun d’entre eux : Où les fibres nerveuses qui constituent ce > faisceau ont-elles leurs cellules d’origine ? Où ces fibres nerveuses > vont-elles se terminer ? Avec quels éléments ces cellules nerveuses > arrivent-elles en contact ? À quels éléments les prolongements > cylindraxiles de ces cellules nerveuses vont-ils transmettre l’'ébranlement nerveux ? > (A. VAN GEHUCHTEN, Anatomie Ÿ du système nerveux de l'Homme ..... Préface, page XIT, 1897). — Ce sont ces paroles du Professeur de l’Université de Louvain qui nous ont encouragé dans l’idée de grouper, dans cette Troisième partie, les résultats de nos investigations. Il yalà, sans aucun doute, un programme difficile à remplir, un travail long et laborieux à exécuter; aussi sommes-nous tenté de redire avec un auteur du XVIIT siècle : « Difficillimum aggredior > laborem, et exitum vix promitto qui Lectori satisfaciat > (HALLER, Elementa physiologiæ, t. VIIT, 1766). Nous adoptons comme plan général, pour les divers chapitres qui suivent, l’ordre de description ci-dessous : 1" L'anatomie microscopique d’un organe devant s'appuyer sur l’anatomie descriptive de cet organe, nous résumerons, en quelques lignes et en tête de chaque chapitre, la disposition morphologique et macroscopique des divers segments encéphaliques étudiés, ainsi que leur synonymie. 2° Une très courte notice bibliographique rappellera le nom des auteurs qui ont traité plus spécialement le sujet du chapitre. 3° Nous arriverons ainsi rapidement à l'anatomie microscopique ou histologie topographique spéciale à tel ou tel segment de l’encé- phale, en insistant surtout sur nos recherches personnelles. Pour nous orienter dans cette étude et pour faciliter la description des diverses régions, nous avons établi une série de lignes de repère au moyen de Coupes ou de surfaces de section portant sur une des trois dimensions de l'organe : hauteur, longueur, largeur; nous aurons ainsi une série de : a. Coupes vertico-transversales ou frontales ; b. Coupes antéro-postérieures ou sagittales ; ce. Coupes horizontales. SES E. H. CATOIS. Dans certains cas, nous aurons recours à des coupes plus ou moins obliques (1) (Voir: PL. 1v, pour ces lignes de repère). 4 Enfin, chaque chapitre sera terminé par une indication sommaire des points qui nous auront semblé être encore douteux, non éclaircis et qui, partant, seraient susceptibles de nouvelles recherches. LE TÉLENCÉPHALE Synonyme : Cerveau terminal, Endhirn, Grosshirn, Vorderhirn (im Engeren Sinne). Le télencéphale provient de la diflérenciation de la partie anté- rieure de la premiére vésicule cérébrale primitive et se présente sous un aspect différent selon qu'on l'examine, au point de vue morphologique, chez un Téléostéen ou chez un Elasmobranche ; sa forme varie aussi sensiblement, comme le cerveau lui-même dans son ensemble, suivant les espèces nombreuses de la classe des Poissons. « La nalure, a dit SERRES (1824), semble avoir déployé > chez ces animaux loue la richesse de ses moyens. Leur cerveau > ne varie pas seulement de famille à famille, il diffère essenliel- > lement de genre à genre, d'espèce à espèce; c'est une métamor- > phose continuelle > (SERRES, Anatomie comparée du cerveau, 1824, page 185). D'une façon générale, le télencéphale chez les Poissons présente à considérer : une buse, des côtés et un sommet. La base forme deux masses ganglionnaires semblables, symé- triques par rapport à la ligne médiane ; chacune de ces deux masses se différencie en deux parties: une partie antérieure qui termine l’encéphale en avant : lobe olfactif ou rhinencéphale, et une partie postérieure qui unit le télencéphale aux couches optiques du diencéphale, constituant le lobe antérieur ou hémisphère cérébral (Stammlappen). (1) Il reste bien entendu que pour l'interprétation de ces directions nous supposons l’Encéphale en position normale, c’est-à-dire horizontale. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 99 Les côtés etle sommet sont uuis en une lame d'épaisseur variable : manteau ou pallium; tantôt ce pallium, privé de différenciation nerveuse, conserve sa conslitution épithéliale embryonnaire, comme chez les Téléostéens, tantôt il se transforme en tissu nerveux, s’'épaissit et s’unit avec les régions basilaires, comme chez les Sélaciens. L'Anatomie descriptive et comparée nous montre déjà des différences morphologiques entre le télencéphale des Téléostéens et celui des Elasmobranches ; ces différences sont tout aussi accentuées au point de vue de l'anatomie microscopique. Nous décrirons donc séparément : 1° le télencéphale des Téléos- téens et 2° celui des Sélaciens. I. TÉLENCÉPHALE DES TÉLÉOSTÉENS. S I. — Le Rhinencéphale. Synonyinie : Lobes olfactifs, hémisphères olfactifs, tubercules olfactifs, bulbi olfactorii, Riechlappen. Chez les Téléostéens, les lobes olfactifs se trouvent situés ou bien immédiatement au devant des lobes antérieurs (Perca, Belone, Scomber, Platessa, etc.), ou bien ils en sont éloignés et situës à l'extrémité des bandelettes olfactives (Tractus olfactorius), ainsi que cela a lieu pour les genres: Gadus, Merlangus, Cyprinus, etc. Les deux lobes olfactifs sont isolés l’un de l’autre, excepté chez le Congre et chez l’Anguille, où il existe entre eux une étroite commissure de substance blanche (!). Ces lobes sont pleins et ne contiennent pas de cavité ventriculaire centrale ; généralement peu volumineux, comparativement aux lobes cérébraux, ils prennent exceptionnellement chez le Congre et l’Anguille un développement considérable : pour ces deux espèces de Poissons, dit G. FRITSCH (1878), « Die Bulbi olfactorii sind auffallend mächtig, so dass > gleichsam zwei Paar Hemisphären entstehen ». La structure intime du rhinencéphale a été, chez divers Vertébrés, (1) Ce fait intéressant a déjà été signalé par BAUDELOT (Anatomie comparée de l'Encéphale des Poissons, 1870, page 103). 6 E. H. CATOIS. l'objet de nombreuses recherches de la part de plusieurs savants : GOLGI, PEDRO CAJAL, RAMON CAJAL, VAN GEHUCHTEN, KOLLIKER, Rerzius, LŒVENTHAL, CALLEJA, etc. ; cette partie de l’encéphale n’a été jusqu’à présent que peu étudiée chez les Poissons osseux (!). Mentionnons surtout les travaux de BELLONcI (1885) de Van GEHUCHTEN (1894) et de Ramon y CayAL (1894), sur ce sujet (?). Les observalions hislologiques effectuées sur le rhinencéphale, au moyen des méthodes nouvelles, démontrent que celte partie de l’encéphale présente la même structure fondamentale dans la série des Vertébrés, sauf toutefois quelques variations dans l'agencement des éléments nerveux. Nous trouvons donc dans le bulbe olfactif des Poissons, en allant de dehors en dedans et d'avant en arrière : 1° Les filets olfuclifs (lila olfactoria) représentant les prolon- sements cylindraxiles des cellules olfactives, éléments sensoriels de la muqueuse nasale (cellules de ScHuLrzr, cellules bi-polaires, neurones olfactifs périphériques). Ces filets olfactifs se réunissent en faisceaux. plus ou moins volumineux (fibrilles) diversement entremêlés et disposés en plexus touffus; dépourvues de myéline, les fibrilles olfactives ainsi constituées abordent le bulbe olfactif, forment à sa périphérie la couche superficielle ou fibrillaire (PI. v, fig. 26, Co. fibr.) el pénètrent dans son intérieur, en se terminant par des ramifications flexueuses et libres dans la seconde zone de ce bulbe : la zone glomeérulaire. 2° Celte zone glomeérulaire est caractérisée par la présence des gloimérules olfuclifs, petites masses ovoïdes ou sphéroïdales ; ces glomérules reçoivent, par un de leurs pôles, les fibres olfactives de la couche superficielle et, par leur autre pôle, le prolongement proto- plasmique principal émanant des cellules mitrales que nous décrirons tout à l'heure. 3 La zone ou couche moléculaire; celte zone, intermédiaire entre les glomérules et les cellules mitrales, nous a semblé assez (t) Chez les Ganoïdes, nous signalerons le travail de GoRoONOWITSCH (1888) sur Acipenser ruthenus et celui, plus récent, de JOHNSTON (1898) sur les lobes olfactifs de Acipenser rubicundus Le Sueur. (2) Les recherches de Don José Madrid MORENO (1888) ont porté surtout sur les terminaisons nerveuses de la muqueuse olfactive chez les Poissons (Voir l'index bibliographique). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 97 difficile à délimiter chez les Poissons ; elle renferme, d’ailleurs, des éléments divers: 1° prolongements descendants des cellules mitrales ; 2 quelques dendrites des grains (voir plus loin) ; 3° un certain nombre de cellules nerveuses, irrégulièrement disséminées et de petites dimensions, paraissant avoir la même valeur que les cellules mitrales ; nous retrouverons ces éléments nerveux dans un instant. 4 La couche ou zone des cellules milrales. Ges cellules (células empenachadas, de Cyr), assez volumineuses (40 à 50 y), de forme généralement triangulaire, en mitre chez les autres Vertébrés, sont, chez les Poissons, plus ou moins fusiformes, voire même arrondies ; leurs prolongements protoplasmiques, au nombre de 2 ou de 3 généralement, donnent naissance à 4, 5 ou 6 rameaux secondaires qui pénètrent chacun dans un glomérule olfacüf, s’y terminant par une arborisalion ou panache relativement simple et ressemblant, suivant l'expression de R. CaJaz « à la arborizacion nerviosa de una placa motriz >. Dans l'épaisseur des glomérules, ces expansions se mettent donc en contact avec les dernières ramifications des fibrilles olfactives. Le cylindraxe de ces cellules dites mitrales prend naissance, ou bien sur le corps même de ces cellules, ou bien, comme c’est le cas le plus fréquent, sur un des prolongements protoplasmiques ; ce cylindraxe émet quelques collatérales et se dirige ensuite en arrière, contribuant à former, avec les cylindraxes, d’autres cellules la zone 5° ou zone des fibres nerveuses centrales. A côté de ces cellules dont nous venons d’esquisser le lype, en quelque sorte, nous devons encore signaler dans le bulbe olfactif des Poissons un certain nombre d’autres cellules, un peu différentes de celles-ci comme dimensions, comme formes, et dont l’aire de distri- bution est plus ou moins irrégulière. C’est ainsi que nous mention- nerons la présence : a. De cellules nerveuses superficielles, situées au voisinage de la zone fibrillaire ou autour des glomérules ; ces cellules ont un corps globuleux orienté vers la périphérie du bulbe, et 2 ou 3 prolonge- ments protoplasmiques dirigés vers l'intérieur de ce bulbe ou ramifiés dans les glomérules ; ces éléments, dont le cylindraxe se laisse difficilement poursuivre, nous paraissent correspondre à ceux décrits par PEDRO RAMoN Y CayaL dans le bulbe olfactif des Batra- ciens et des Reptiles : (célula pequeñna periglomerular) (Cel. pg.). D8 E. H. CATOIS. b. De cellules affectant soit la disposition d'une étoile, soit la forme d’un fuseau: (s{ellate cells et spindle cells, de JOHNSTON, 1898). c. De cellules dites mitrales (ou mieux fusiformes) de petites dimensions (células empenachadas pequenas). Ces éléments divers ont tous un caractère qui leur est commun avec les cellules mitrales types : c’est la terminaison et la ramifica- tion de leurs dendrites à l'intérieur des glomérules; comme ces cellules, ils jouent donc le rôle de neurones olfactifs de deuxième ordre ou neurones olfactifs des centres. 5° Couche ou zone des fibres à myéline et des grains (couche centrale ou profonde). Cette zone est constituée : 1" Par des grains ou petites cellules sphériques, dont les expan- sions périphériques se divisent en un véritable panache de rameaux épineux. Ces éléments sont particulièrement difficiles à imprégner chez les Poissons et, on sait du reste, que leur nature n’est pas encore nettement élucidée. MEyxerT les considérait comme de véritables cellules nerveuses et, récemment, JoHSNTOoN attribue aux grains du lobe olfactif de l'Esturgeon les caractères propres aux cellules nerveuses : « The granule cells are provided with ais cylinders » and glomerular dendrites, and are therefore nerve cells > (JonxsToN, loc. cit., p. 240). Pour RAMoN y CAJAL, au contraire, les grains seraient des éléments analogues aux spongioblastes de la réline. Sans prétendre trancher la question, nous inclinons à admettre,avec KoLLIKER, VAN GEHUCHTEN et J. MARTIN, que les grains représentent des cellules épendymaires déplacées. Nous figurons (PI. vi, gr.) les grains dans le bulbe olfactif d’un Téléostéen (fig. 27). 2" Pardes fibres nerveuses à myéline entre-croisées, à direction surtout antéro-postérieure ; ces fibres sont de deux ordres : les unes, à direction centripète (!), proviennent en majeure partie des cylin- draxes des différentes cellules mitrales-fusiformes étudiées dans les zones précédentes du bulbe olfactif et leur assemblage en faisceaux constituera les tractus olfactifs ; les autres, à direction centrifuge, (1) Le ganglion basal pris comme centre, HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 59 représentent soit les ramifications terminales de fibres commissurales passant par la commissure interlobaire, soit les terminaisons cylin- draxiles de neurones provenant des lobes antérieurs et situés dans les régions inférieures du ganglion basal (Voy. plus lom: Lobes antérieurs). 3° Enfin, par des cellules à cylindre-axe court, cellules du Type II de GoL&r, dont les prolongements viennent encore augmenter le dense feutrage formé par les différents éléments du bulbe olfactif successivement passés en revue. Ces cellules, assez volumineuses, sont fusiformes ou étoilées et peu nombreuses. JonnsTon (/oc. cit., page 224) signale également leur présence dans le bulbe olfactif de l'Esturgeon : « Cells with short ais cylinders ». Au point de vue fonctionnel, ces éléments nerveux semblent représenter des voies d'association entre neurones. Pour terminer ce rapide exposé de la structure histologique du rhinencéphale chez les Poissons osseux, il nous reste à dire quelques mots sur les vaisseaux du bulbe olfactif et sur la constitution de la commissure de substance blanche reliant les deux lobes olfactifs entre eux, chez le Congre et chez l’Anguille. Les vaisseaux capillaires du bulbe olfactif sont souvent imprégnés par les méthodes GorGi-CaJaL et on les voit alors former des ramifications nombreuses et anastomosées ; cette grande richesse vasculaire est évidemment en rapport avec l'activité fonctionnelle des éléments nerveux constituant cette partie du télencéphale. La commissure reliant entre eux les lobes olfacufs chez le Congre et chez l’Anguille, commissure que nous désignerons sous le nom de : coninissure inter-bulbaire, est plus marquée et plus épaisse vers sa partie poslérieure et inférieure. Sa constitution histologique est peu complexe ; on y remarque des capillaires et des fibrilles nerveuses plus ou moins irrégulières et variqueuses entre-croisées. Ces fibrilles représentent les dendrites de cellules mitrales-fusi- formes d’un lobe olfactif, passant dans l'autre lobe, pour aller s'y terminer dans un ou deux glomérules (PI. v, fig. 26. Com. à. olf.). Les rapports du rhinencéphale avec le ganglion basal seront éludiés d’une façon complète dans un paragraphe spécialement consacré à l'analyse des voies olfactives chez les Poissons; cette étude ne peut être faite qu'après la description microscopique des lobes antérieurs chez les Téléostéens et chez les Sélaciens. 60 E. H. CATOIS. S II. — Les Lobes antérieurs. SYNoxYMIE : Lobes cérébraux, Hémisphérescérébraux. Vorderhirn, Vorderlappen, Stirnhirn, des auteurs allemands. Fore-brain, en anglais. Ces lobes, considérés par FRITSCH comme représentant les lobes frontaux du cerveau des Vertébrés supérieurs (Stirnhirn), furent homologuës par STIEDA, SANDERS, BELLONCI et MAyseR avec le cerveau antérieur tout entier des Mammifères. Les recherches embryologiques de RaBz-RucKkHaRD ont démontré que les lobes antérieurs des Poissons osseux représentent uniquement les ganglions de la base du cerveau antérieur des Mammifères. Quant à la partie périphérique des hémisphères cérébraux des Vertébrés supérieurs (pallium, écorce grise el substance blanche), elle ne se trouve représentée chez les Téléostéens que par une mince assise de nature épithéliale, persistance dans l'organisme achevé d’une disposition embryonnaire. Cette lame membraneuse s'étend des faces latérales et de l'extrémité antérieure des lobes, pour recouvrir en forme de voûte la partie antérieure de la cavité encéphalique ou veutricule antérieur. Chez les Poissons osseux, les lobes cérébraux se trouveront donc réduits exclusivement aux #asses grises de la base et constitueront le ganglion basal (Stammganglion de EnINGEr), homologue du corps strié des Vertébrés supérieurs (Corpus striatum). A chaque lobe antérieur ou hémisphère aboutissent, en avant, les fibres du tractus olfactif émanées du rhinencéphale ; en arrière, les lobes antérieurs sont reliés au cerveau intermédiaire par un ensemble de fibres (faisceau basal ou pédôncule cérébral). Séparês l’un de l’autre, dans leur plus grande étendue, par un sillon ou scissure linéaire, les deux lobes antérieurs sont réunis vers leur partie inférieure par une commissure transversale (commissure interlobaire) que nous étudierons plus loin. Bien que les lobes antérieurs du cerveau chez les Téléostéens aient été étudiés par STIEDA, FRITSCH, SANDERS, BELLONCI, EDINGER, etc., et par VAN GEHUCHTEN avec les méthodes techniques modernes, il faut reconnaître, de l’aveu même de ce dernier auteur, que nos Connaissances sont encore fort incomplètes quant HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 61 à la structure intime de cette partie de l’axe nerveux (!). L'analyse méthodique des lobes antérieurs que nous allons entreprendre maintenant a pour base l'examen de plusieurs centaines de coupes microscopiques sériées, intéressant celle région de l’'encéphale et pratiquées dans le sens soit frontal, soit sagittal, horizontal ou oblique. Afin de mettre un peu de clarté dans cette étude, nous adopterons l’ordre de description suivant : A. Etude des cellules nerveuses au point de vue de leur mode de groupement ou aires de distribution, de leurs formes et de leurs CONNnEXIONS ; B. Etude des fibres nerveuses ; C. Etude des cellules épendymaires. A. Description des cellules nerveuses. — Il existe dans les lobes antérieurs des Téléostéens des groupes cellulaires formant des ‘zones plus ou moins distinctes, plus ou moins différenciées ; déjà BELLONCI (1879) avait reconnu, dans ces lobes, des cellules nerveuses petites, réduites presque exclusivement au seul noyau et situées à la périphérie du lobe, ainsi que d’autres cellules multipolaires, les unes petites, les autres grandes, éparses dans la masse centrale du lobe. Le prolongement cylindraxile des petites cellules se divise et se subdivise dans le lobe antérieur lui-même, en prenant part à la constitution d’un réseau nerveux; le prolongement cylindraxile pour chacune des grandes cellules se continue directement avec une fibre nerveuse centrale. EbiNGER (1888) qui a étudié ces lobes chez les genres: Corvina, Rhodeus, Cyprinus et Salmo, admet pour chaque lobe une partie ventrale et une partie dorsale. La partie ventrale, pauvre en cellules nerveuses, est occupée par un faisceau de fibres nerveuses à direction antéro-postérieure : pédon- cule cérébral, faisceau basal, basale Vorderhirnbüundel; la partie dorsale est, au contraire, riche en cellules nerveuses qui sont les cellules d’origine des fibres constitutives du faisceau basal. HErRICK (1892), entrainé peut-être un peu loin, à notre avis, par des conceptions d'ordre homologique, décrit dans le cerveau anté- (1) A signaler, chez les Ganoïdes, lé travail de JoHNSTON (1898) : Fore-brain of Acipenser.., déja mentionné, 62 É. H. CATOIS. rieur de Haploidonotus un certain nombre de lobes distincts : lobe frontal, médian, occipital, central et latéral ; cet auteur reconnaît encore, dans les lobes antérieurs des Poissons, un Cunéus, un fornix, un corpus callosum et un hippocampe ?. Nous devons enfin à VAN GEHUCHTEN (1894) des recherches savantes sur l’encéphale de la Truite. Dans une coupe transversale des lobes antéricurs d’une jeune Truite de 10 jours, après fixation des pièces par une solution saturée de sublimé corrosif dans l’eau et coloration par le paracarmin de MAYER, VAN GEHUCHTEN décrit une partie interne, voisine de la cavité ventriculaire, formée exclusi- vement par les corps des cellules épendymaires et par les corps des cellules nerveuses et une partie externe, constiluée par quelques cellules nerveuses éparses entre les fibres du pédoncule cérébral. Dans chaque lobe, les cellules nerveuses sont multipolaires avec prolongements protoplasmiques nombreux ; leur cylindre-axe, né du corps cellulaire ou d’un des prolongements proltoplasmiques, se dirige toujours vers la partie externe du lobe occupée par le faisceau basal et là, se recourbe pour devenir une fibre constitutive de ce faisceau. L’auleur n’a jamais observé, dit1l, les ‘cellules nerveuses à cylindre-axe court (ou cellules de GozGr, Type Il), signalées par BELLONCI, et ne mentionne pas l'exisience de collatérales sur le cylindre-axe de cerlaines cellules du lobe antérieur. Nos recherches personnelles ont porté, principalement, sur les genres: Anguilla, Conger, Labrus, Scomber, Gadus, Callio- nymus, Cottus, Labrax et Platessa, à divers stades de dévelop- pement; nous avons pu constater, dans nos préparalions, que les cellules nerveuses forment, par leur groupement, lrois régions assez distinctes : 1° Une région périphérique ou corticale ; 2° Une région centrale ; 3° Une région ventrale ou inférieure. 1° Cellules nerveuses de la région périphérique. — Cette région périphérique ou zone corticale représente en dimension le tiers environ du lobe antérieur ; elle forme, autour de la région centralé de ce lobe, une couche assez dense et assez compacte, constituée par dix ou douze assises de cellules nerveuses multipolaires, disposées sans ordre régulier et dont les dimensions varient entre 10 et 25u. HISTOLOÔGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 63 Le maximum d'épaisseur de la zone périphérique s’observe vers la parlie supérieure et postéro-interne du lobe (Epistriaturn), tandis que son minimum d'épaisseur correspond à la partie inférieure et externe de ce lobe{fis. 30, PI. 1x). Les cellules nerveuses qui entrent dans la constitution de cette zone corticale peuvent être classées de la façon suivante : a. Neurones de la partie la plus superficielle ; b. Neurones des parties moyennes et profondes. «a. Les neurones situés à la périphérie de la zone corticale ont un corps cellulaire ovale où arrondi; leurs prolongements protoplas- matiques sont dirigés presque toujours en dedans, c’est-à-dire vers la partie centrale du lobe; parfois les troncs protoplasmiques principaux de ces prolongements sont étendus parallèlement, suivant le bord périphérique du lobe, mais leurs divisions dendri- tiques secondaires sont toujours dirigées vers la partie centrale du ganglion basal (fig. 26-27 «, PI. v et vi). Le cylindre-axe de ces neurones, né du corps cellulaire ou d’une dendrite, converge vers la parlie centrale et inférieure du lobe pour devenir une fibre conslitulive du faisceau basal ; pendant son trajet il émet souvent quelques fines collatérales (fig. 30 &, PI. 1x). b. Les neurones situës dans les parties moyennes et profondes de la zone corticale sont de deux sortes : les uns ont leurs dendrites se détachant du corps cellulaire, indifféremment, en divers sens, et leur cylindre-axe constitue également une des fibres du faisceau basal ; les autres, à cylindre-axe court, nous ont paru être des neurones d'association ou cellules de GoLGi, type Il, admises par BELLONCI, niées par VAN GEHUCHTEN qui n’a pu les obtenir imprégnées, chez la Truite (fig. 26, 27, 30). La difficulté de poursuivre et d'analyser le cylindre-axe de chaque cellule de cette région a, d’ailleurs, frappé tous les observateurs. « Riesce difficilissimo, in questa parte del cervello, — dit BELLONCI (1879) page 6, — vedere il rapporto delle fibre colle cellule >. On comprendra aisément cette difficulté, sion considère que, dans cette région périphérique du lobe antérieur, on observe un feutrage épais decellules épendymaires à directionradiaire{ependymzellenfasern), ainsi qu’un fin réseau nerveux constitué par les ramifications dendritiques et cylindraxiles des cellules nerveuses elles-mêmes et par les terminaisons de fibres centripètes (voir plus lon). 64 Ë. H. CATOIS. 2 Cellules nerveuses de la région centrale. — Cette région correspond au striatum des auteurs classiques. Les neurones qui entrent dans sa constitution forment un groupe assez bien délimité ; ce sont des cellules multipolaires, un peu plus volumineuses que les cellules étudiées précédemment, dans la zone corticale ; elles ont, en moyenne, une dimension de 22 à 32u et sont éparses entre les faisceaux, épanouis en éventail, du pédoncule cérébral (fig. 26, 27, 30 b.) D'une facon générale, ces neurones nous ont paru caractérisés par le nombre et la longueur relativement considérables de leurs dendrites; la direction et l'étendue de leur cylindre-axe nous permettent de les classer de la manière suivante : a. Neurones à cylindre-axe court ; b. Neurones à eylindre-axe long. a. Ces neurones, auxquels semble dévolu un rôle d'association, sontrelativement peu nombreux et sont surtout localisés vers la partie la plus superficielle du sfriatun ; tantôt leur cylindre-axe s’épuise dans le séyialuin lui-même, tantôt ce prolongement cylindre-axile, après s'être divisé, se dirige de dedans en dehors, par conséquent vers la zone corticale du lobe antérieur. b. Ces cellules nerveuses sont les plus nombreusesdans le sériatun et ont été, d’ailleurs, mentionnées et figurées par VAN GEHUCHTEN dans le lobe antérieur de la Truite (loc. cit., fig. 4). Nous avons vu, plus haut, les caractères de leurs dendrites; leur cylindre-axe contribue à former une des fibres du faisceau basal et émet sur son parcours quelques fines collatérales. Ainsi donc, les cellules nerveuses du s{riatuin ne sont pas seulement éparses entre les fibres du pédoncule cérébral dont elles contribuent à former les faisceaux, mais ces cellules entrent encore en Connexions, par leurs dendrites, avec les terminaisons soit des fibres olfactives, soit des fibres centripètes passant par la commis- sure interlobaire (voir plus loin). 3° Cellules nerveuses de la région ventrale ou inférieure. — Nous proposons de désigner sous le nom de « Hypostrialum > cette région complexe dont la partie antérieure correspond à: Area olfactoria, Nuclei postolfactorii des auteurs, et dont la partie posté- HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 69 rieure correspond au Nucleus thæniæ d'Enix&Er et au Nucleus occipilo basalis de HERRICK. Les neurones qui entrent dans la constitution de l’hypostriatuin sont bipolaires ou multipolaires et ont une dimension moyenne de 15 à 18 u. Ils sont répartis, soit de chaque côté de la scissure interlo- baire (région médiane), soit sur les côtés de l’hypostriatum (régions inféro-latérales). Leur étude complète ne peut se faire qu’au moyen de coupes horizontales correspondant à la ligne de repère (fig. 25, ligne 2, PI. 1v) de coupes obliques effectuées suivant la ligne de repère également oblique d’arrière en avant et de haut en bas (fig. 24, ligne 2, PI. 1v) ou de coupes frontales (fig. 24, ligne 1). Au moyen de coupes pratiquées sur les lobes antérieurs, selon ces diverses directions, on peut reconnaître dans l’hypostriatum : a. Des neurones situés sur le même plan horizontal que la commissure interlobaire ; parmi ces neurones, les uns, placés en avant de la commissure, ont leur prolongement cylindre-axile dirigé d’arrière en avant et horizontalement vers le rhinencéphale, tandis que leurs dendriles plongent, pour ainsi dire, au milieu des fibres de la commissure interlobaire ; les autres, situés en arrière de cette commissure, ct toujours sur le même plan qu’elle, ont leur cylindre-axe orienté d'avant en arrière vers le diencéphale et leurs dendrites également en rapport avec la commissure interlobaire (fig. 26 et 27, c). Nous nous réservons de préciser plus loin la signification de ces deux sortes de neurones (voir le paragraphe consacré à l'étude des voies olfactives chez les Poissons). b. Des neurones situés sur un plan inférieur à celui de la commis- sure interlobaire ; les dendrites de ces neurones sont dirigées soit horizontalement, soit de haut en bas, tandis que leur prolongement cylindraxile, orienté plus ou moins obliquement de bas en haut et d'avant en arrière, atteint ainsi les parties latérales et supérieures de la zone corticale du lobe antérieur. Ces neurones sont proba- blement les cellules d’origine du éractus olfacto-habenularis de EnixGer (voir plus loin) (fig. 27, «/.) c. Enfin, des neurones à cylindre-axe court, de petites dimensions et disposés entre les cellules nerveuses précédentes ; ce sont des neurones d'association servant probablement aux voies olfactives centrales réflexes. 66 E. IT. ICAOIS. B. Description des fibres nerveuses.— Les fibres nerveuses réunies en faisceaux forment dans les lobes antérieurs des Téléos- téens quatre groupes distincts lesuns des autres par leur volume, leur direction et leurs rapports ; nous décrirons donc séparément : 41° les Hractus olfactifs ; 2" le faisceau basal; 3° la commissure interlobaire ; 4 le tractus olfacto-habenulaire. 1° Tractus olfactifs (Tr. o1.). Situés en avant de chaque lobe antérieur, dirigés horizontalement et d'avant en arrière, les tractus olfactifs nous offrent à considérer deux faisceaux distincls, par rapport à une ligne médiane : a. Le faisceau externe : Racine ou strie olfactive externe ; tractus bulbo-corticalis ; laterale Riechstrahlung, de EniNGER. Ce faisceau peu étendu (Anguille, Congre), dessine une courbe à concavité externe et est formé de fibres courtes à direction centripète (1e lobe antérieur pris comme centre) qui vont s’épuiser dans la partie externe du lobe antérieur ; ces fibres ne prennent pas part à la constitution de la comimissure interlobaire (PI. v. fig. 26. sir. ext.). b. Le faisceau interne : Racine ou strie olfactive interne ; tractus bulbo-epistriacus ; mediale Riechstrahlung , de EpbINGER. Ce faisceau beaucoup plus compliqué que le précédent se dirige d'avant en arrière vers la partie centrale du lobe antérieur; après avoir alteint la commissure interlobaire qu’il contribue à former, 1 se recourbe de dedans en dehors en embrassant dans la concavité de sa courbe le faisceau basal (fig. 26, st. int.). Ses fibres constitu- tives viennent s’épuiser dans les régions postérieures et externes du lobe antérieur. La partie externe de cette racine olfactive interne est surtout composée de fibres à direction centripète (le lobe antérieur toujours pris comme centre), tandis que sa partie interne renferme de nombreuses fibres à direction centrifuge, orientées, par conséquent vers le rhinencéphale (fig. 26, PI. v). 2° Faisceau basal. — Synonymie: Pedunculus cerebri — Basale Vorderhirnbündel = Tractus strio-thalamicus. Ce faisceau a été, sans contredit, le mieux éludié parmi les différents faisceaux de fibres nerveuses qui entrent dans la consütution du lobe antérieur. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 67 D'après EDiNGER, les lobes antérieurs des Téléostéens ne seraient que des ganglions servant d’origine aux fibres constitutives du faisceau basal; aussi cet auteur considère-t-il le faisceau basal comme formé exclusivement de fibres nerveuses dont les cellules d’origine sont situées dans le lobe antérieur. D'après VAN GEHUCHTEN, au contraire, le faisceau basal est formé essentiellement par deux espèces de fibres nerveuses : 1° les unes ayant leurs cellules d’origine dans les lobes antérieurs du cerveau el allant se terminer dans une région inférieure de l'axe cérébro- spinal ; 2° les autres se terminant dans les lobes antérieurs et qui doivent avoir leurs cellules d’origine dans des centres nerveux inférieurs. Nos recherches personnelles nous permettent de confirmer entièrement l'opinion de VAN GEHUCHTEN: le faisceau basal est formé par des fibres otrices descendantes, à conduction centrifuge et par des fibres sensilives ascendantes, à conduction centripète. Double et symétrique, le faisceau basal du cerveau antérieur est constitué d’abord par de nombreuses fibres disposées en éventail et éparses au milieu du lobe antérieur ; ces fibres réunies ensuite en plusieurs faisceaux se dirigent d'avant en arrière, de haut en bas et obliquement de dehors en dedans pour constituer, vers la base du lobe, un faisceau compact (pédoncule cérébral) reliant le télencéphale au diencéphale ; les fibres de ce faisceau s’épuisant dans le thalamus et dans l’hypothalamus, nous les retrouverons plus loin. Ainsi qu'il est facile de s’en convaincre en jetant un coup d'œil sur la fig. 26, les fibres descendantes ou centrifuges ÆF.b” occupent la partie externe et dorsale du pédoncule cérébral, landis que les fibres ascendantes ou centripètes en occupent Ia partie interne et ventrale (Æ.b7). 3° Commissure interlobaire. — Synonymie: Commissure des Hémisphères ; Commissura interlobularis de GÜTTSCHE. Cette commissure a été, chez différents Verlébrés, l’objet des recherches de SrTIEDA, de BELLONCI, d'OSBORN, de EDINGER, de PEpro Cayar, etc. Nos connaissances sont encore bien incom- plètes relativement à la structure de cette commissure chez les Poissons. 68 E. T1. CATOIS: BAUDELOT en avait déjà pressenti la composition histologique, lorsqu'il écrivait : « La commissure des hémisphères est formée par > de la substance blanche, dont les fibres m'ont paru provenir de » trois sources, des pédoncules cérébraux, des hémisphères et des > nerfs olfactifs. Cette disposition peut être constatée avec assez de > facilité chez le Congre ». Va GEHUCHTEN a étudié la commissure interlobaire dans le cerveau chez la Truite. D’après ce savant, cette commissure serait double et comprendrait deux parties : une partie superficielle et une partie profonde ; elle ne saurait être homologuée avec le corps calleux ou avec la commissure antérieure du cerveau des Mammi- fères, car elle ne renferme pas de véritables fibres commissurales, c'est-à-dire des fibres nerveuses qui ont leurs cellules d’origine dans un lobe et leurs terminaisons dans l’autre lobe. Les prolongements cylindraxiles des cellules nerveuses des lobes antérieurs ne passant pas, non plus, par cette commissure, celle-ci n’est donc pas affectée à la voie motrice. Au contraire, les fibres commissurales seraient des fibres nerveuses sortant du faisceau basal d’un lobe et se terminant par des extré- mités libres ; on peut donc considérer la commissure interlobaire comme produite par lextrecroisement d'une grande parle des fibres sensitives centrales. Nous avons déjà exposé ailleurs le résumé de nos recherches sur la constitution de la commissure interlobaire dans le télencéphale des genres: Anguilla, Conger, Platessa et Labrus (Carois, 1899 b). Pour nous, cette commissure offre à considérer {rois plans de fibres superposées et étagées de haut en bas dans l’ordre suivant : un plan supérieur, un plan moyen et un plan inférieur. Le plan supérieur est formé par des fibres nerveuses provenant du rhinencéphale. Ces fibres représentant très probablement les cylindres-axes des cellules mitrales sont, par conséquent, centrifuges par rapport au lobe olfactif et centripètes par rapport au lobe antérieur. Emanées du tractus olfactif interne (médiale Riechstrahlung), elles sont relativement peu abondantes, disposées horizontalement et transversalement et ont un trajet rectiligne (com. à. lob, fig. 26, 23130) Au moment où ces fibres commissurales se coudent presque à HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L’'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 69 angle droit, nous avons pu observer qu'elles émettent parfois une collatérale qui se dirige vers l'Æpistriatum (Fig. 26, 27, 30). Ce plan supérieur de la commissure interlobaire, constitué eæclusivement par des fibres olfactives, représente donc, à notre avis, un véritable chiasina olfactif analogue à celui qui a été décrit et figuré chez les Batraciens par PEpRo RAamoN CayaL (1894). Le plan moyen est formé par de nombreuses fibres commissurales entrecroisées, variqueuses, épaisses, à trajet flexueux, provenant surtout des faisceaux de fibres ascendantes ou sensitives du pédoncule cérébral (fig. 26, 27, 30, com. i. lob.”). Nous avons vu plus haut (page 65) que les prolongements proto- plasmiques de certains neurones de l'Hypostriatum plongent au milieu de ces fibres commissurales. Nous n'avons pu encore. élucider la question de savoir si, comme JonxsroN (1898) l'indique pour le genre Acipenser, les cylindres-axes de certaines cellules d'un lobe passent par cette commissure pour se terminer dans l'autre lobe: « the somewhat doubtful associational fibers of the > cortical area, crossing likewise to terminate in the epistriatum of > the opposite side >. À ces neurones serait, dès lors, dévolu un rôle d'association ? Le plan inférieur de la commissure interlobaire, situé plus profon- dément etun peu en arrière du plan précédent, est constitué surtout par les terminaisons variqueuses et anastomosées de fibres dont les neurones d'origine siègent dans le T'halamencéphale. La direction de ces fibres est donc centripète par rapport au lobe antérieur et nous pensons devoir leur attribuer un rôle sensitif (com. à. lob.”, fig. 26, 27, 30). En résumé, la commissure interlobaire chez les Poissons osseux est donc affectée par sa partie supérieure à la voie olfactive et par sa partie moyenne et inférieure à la voie sensitive. La voie motrice ne passe pas par cette commissure et nous faisons toutes réserves sur le point de décider si la commissure interlobaire renferme de véritables fibres d'association entre les deux lobes. 4° Tractus olfacto-habenulaire. — On sait que les ganglions de l'habenula doivent être, d’après EDbINGER, reliés aux centres olfactifs; un faisceau peu compact de fibres nerveuses assez diffuses, éractus olfacto-habenularis, s'étend, en effet, des nuclei 70 E. H. CATOIS. postolfactorii aux ganglions de lhabenula. JoaNsrox mentionne la présence de ce tractus chez Acipenser ; bien que les fibres de ce faisceau soient d’une imprégnation fort difficile chez les Téléostéens et se trouvent mélangées avec les terminaisons des fibres du faisceau sensilif basal, il nous a été possible de constater leur présence et de poursuivre leur trajet chez Anguilla, Conger et Labrus (fig. 27, Tr. olf. hab.). Ce faisceau, {actus olfacto-habenularis, à pour origine des cellules de l’hypostriatum (Nucleï postolfactorii, Nucleus thæniæ) (voir page 65). Ses fibres se dirigent d'avant en arrière et de bas en haut pour se terminer dans le ganglion de l’habenula (du côté pposé) où elles entrent en connexions avec les cellules d’origine du faisceau de MEYNERT. Pour bien observer ce tractus olfacto- habenulaire, 1l est nécessaire de pratiquer une série de coupes soit dans le sens sagittal (ligne 1, fig. 23, PI. 1v), soit suivant la ligne de repère oblique (ligne 2, fig. 24, PI. 1v). Dans quelques-unes de nos préparations (!) nous avons obtenu, incomplètement imprégnées par le chromate d'argent, quelques fibres partant de la région inférieure du ganglion de l'habenula, croisant la face supérieure du faisceau basal et se terminant dans la partie supérieure et postérieure du ganglion basal (Epistrialum) (fig. 29, PI. vin, c. 2). Ces fibres seraient-elles une ébauche du faisceau cortico-habenulaire décrit par PEDRO RAMON CaJAL dans le cerveau des Amphibiens ? Nous n’osons pas nous prononcer sur ce point parliculier qui demande de nouvelles recherches (voir plus loin: Diencéphale, S Epithalamus). C. Description des cellules épendymaires. — L’élude de ces cellules épendymaires est facile dans les lobes antérieurs des Poissons osseux ; des coupes sagiltales ou frontales permettent de se rendre compte du nombre, de la disposition de ces éléments et de leur direction radiée; parfois même cette grande richesse de cellules épithéliales vient ajouter une difficulté de plus, lorsqu'il s’agit de suivre la terminaison d’un cylindre-axe ou d’une collaté- rale et lorsque se pose le délicat problème des connexions entre les divers neurones de cette région encéphalique. (1) Observations faites chez un Sélacien : Raja. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 71 Dès 1867, SriEpA (1867) signalait sur la face interne de chacun des lobes antérieurs, chez les Poissons, l'existence d’une couche continue de cellules épithéliales analogues à celles qui tapissent les cavités encéphaliques chez tous les Vertébrés. VAN GEHUCHTEN (1894) a élabli d’une façon indiscutable que ces cellules étaient de véritables cellules épendymaires. Rerzius (1891), dans un dessin représentant une coupe frontale du cerveau antérieur du Brochet, donne, de son côté, une bonne description de ces cellules épendymaires. Ces éléments de soutènement ayant été signalés et décrits par les auteurs classiques, nous ne faisons donc que les mentionner ici. Le corps des cellules épendymaires occupe la partie interne du ganglion basal, au voisinage de la fente médiane appartenant au ventricule antérieur ; leur prolongement périphérique, très long, s'éloigne de la cavité ventriculaire en suivant une direction radiaire et traverse, du centre à la périphérie, toute l'épaisseur du lobe antérieur. Arrivé à la surface extérieure du lobe, ce prolongement se termine par un petit renflement conique dont la base répond à la pie-mère (voir plus haut, 2° partie, page 41). Les cellules épendymaires constituent sewles tout le tissu de soutènement dans le cerveau antérieur des Téléostéens ; jusqu’à présent, du moins, nous n'avons pu constater la présence de cellules névrogliques en araignée dans le télencéphale des Poissons osseux. : II. TELENCÉPHALE DES SÉLACIENS. Le télencéphale des Élasmobranches diffère très notablement de celui des Téléostéens, au point de vue morphologique. Chez eux, en effet, le palliumn, au lieu de conserver une constitution épithéliale embryonnaire, s’épaissit, se convertit en tissu nerveux dans presque toute son étendue et s’unit avec les zones basilaires. Suivant l'expression de EbINGER (1888), page 103 : « Mantel und Slamm sind in eines verschmolzen >. Les hémisphères cérébraux constituent ainsi une masse impaire, unique, plus ou moins volumineuse, de forme à peu près quadri- latère, lisse et dépourvue de circonvolutions ; la face supérieure de F4 E. H. CATOIS. celte masse est arrondie et offre à considérer deux peliles éminences disposées de chaque côté d'un sillon médian. Deux cordons volu- mineux, qui se rendent en avant et latéralement aux organes de l'odorat, partent des angles antérieurs de cette masse: ce sont les processus olfactifs. Tantôt les lobes antérieurs sont creux et contiennent un ventricule communiquant avec la cavité des processus olfactifs (Squales), tantôt ces lobes sont pleins et en grande partie solides, le ventricule s'étendant alors fort peu en avant (Raies). Contrairement à ce qui a lieu chez les Téléostéens, le cerveau antérieur surpasse en volume les autres lobes de l’encéphale. Parmi les travaux relatifs à l'anatomie microscopique du cerveau antérieur des Sélaciens, il convient de citer, notamment, ceux de ViIauLT (1876), de RonoN (1878), de SANDERS (1887), de EpixGEr (1888) et de SauUERBECK (1896). Nos recherches personnelles effectuées principalement chez Raja, Scyllium, Acanthias et Mustelus, en nous dévoilant un certain nombre de faits nouveaux, nous permettent de contribuer pour notre part à la connaissance de cette région de l'encéphale chez les Élasmobranches. Ainsi que nous l'avons fait pour les Téléostéens, nous étudierons, chez les Sélaciens, le 7 hinencéphale et les lobes antérieurs. S I. — Le Rhinencéphale. Chez les Sélaciens, les bulbes olfactifs ont un volume considé- rable et sont reliés au cerveau antérieur par des processus où tractus olfactifs dont la longueur est très variable; tantôt ces processus sont très longs comme chez Raja, Squatina, Torpedo ; tantôt ils sont très courts et les bulbes olfactifs sont pour ainsi dire sessiles, comme chez Mustelus, Scyllium et Acanthias. Creusés d’une cavité centrale chez certains Squalides, ces processus sont, au contraire, pleins chez les Rajides. Ayant indiqué plus haut (voir page 56) la structure histologique du rhinencéphale chez les Téléostéens, nous nous dispenserons d'entrer dans de longs développements au sujet du bulbe olfactif chez les Sélaciens. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 73 Nous trouvons, du reste, dans le bulbe olfactif de ces Poissons, la même disposition et la même succession de zones : 1° La zone fibrillaire superficielle ; 2° La zone glomérulaire. Remarquons, en passant, que les glomérules olfactifs sont plus volumineux chez Scyllium que chez Raja ; nous représentons (fig. 15, PI. m1) trois glomérules olfactifs chez Scyllium catulus avec les ramifications flexueuses et libres de leurs fibres nerveuses afférentes et efférentes ; 3° La zone moléculaire : 4° La zone des cellules mitrales-fusiformes ; 9° Enfin, la zone des grains et des fibres à myéline. Notre propre expérience nous permet de considérer comme particulièrement difficile et délicate l'application des méthodes d’imprégnations (GoLGI-CaJAL) au rhinencéphale des Sélaciens ; pour l’analyse de cette région chez ces Poissons, la méthode lente de Cox nous semble préférable. C'est ici le lieu de rappeler une de nos précédentes notes consacrée à l’histogénèse du bulbe olfactif chez les Sélaciens (Carors 1897). En examinant plusieurs séries de coupes histologiques horizontales intéressant les régions des sacs olfactifs, du bulbe, des processus olfactifs et des lobes antérieurs chez un très jeune exemplaire d’'Acanthias vulgaris, nous avons constaté dans le rhinencéphale une particularité qui méritait d’être signalée au point de vue histogénétique : Tandis que les arborisations terminales des fibrilles olfactives (prolongement cylindraxile des cellules bipolaires de la muqueuse olfactive) occupaient leur situation normale et habituelle au niveau des glomérules, tous les prolongements protoplasmiques provenant des cellules mitrales et destinés également aux glomérules n'étaient pas encore arrivés à ces glomérules et en contact avec les ramifi- cations des fibrilles. D'autre part, au voisinage de la cavité ventriculaire du bulbe olfactif on pouvait observer: 1° Des cellules épithéliales, épendymaires, dont il n’y a pas lieu de décrire ici la morphologie; 74 E. H. CATOIS. 2° Des neuroblastes fusiformes en voie d'évolution; parmi ces éléments nerveux jeunes, les uns, encore voisins des parois de la cavité ventriculaire, possédaient des expansions protoplasmiques à extrémités variqueuses; les autres, plus éloignés des parois ventriculaires, envoyaient leurs prolongements protoplasmiques dans la direction de la région glomérulaire et, qu’on nous permette cette expression : semblaient à la recherche de connexions ; 3° Enfin, sur quelques points de nos préparations, quelques-uns de ces neuroblastes, plus avancés dans leur évolution et véritables cellules nerveuses, arrivaient au niveau des glomérules olfactifs et entraient en contact, par leurs prolongements, avec les fibrilles olfactives terminales, pendant que leur cylindre-axe se dirigeait vers la zone fibrillaire profonde. Ces éléments nerveux auraient pu, au premier abord, être considérés : 1° Comme des grains ; mais les éléments cellulaires décrits sous le nom de grains offrent un corps cellulaire globuleux, à expansions dichotomiques épineuses et ne pénétrant pas dans l’intérieur des glomérules ; 2° Ou, comme d’autres éléments cellulaires du bulbe olfactif désignés sous le nom de cellules étoilées (de la zone des grains et des fibres à myéline, zone 5°); or CaJaAL et VAN GEHUCHTEN ont démontré que les ramifications de ces cellules étoilées ne viennent en contact qu'avec les prolongements protoplasmiques latéraux des cellules mitrales, sans pénétrer à l’intérieur des glomérules. Nous ajouterons, de plus, que l’imprégnation était aussi complète que possible (imprégnation double) dans nos préparations. Pour ces diverses raisons, nous estimons donc que nous étions en présence de neurones olfuctifs de 2° ordre (cellules mitrales) formés aux dépens des parois du ventricule olfactif (formation ectodermique) et en voie de migration vers les parties péri- phériques du bulbe olfactif (région glomérulaire). Notre opinion se trouve d’ailleurs conforme à la loi de His: <« Tous les » neuroblastes se développent dans les couches les plus internes » de l'axe neural, aux dépens des cellules germinatives, et > de là ils émigrent secondairement dans les couches les plus > externes ». HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 79 En examinant dans ses différents détails la figure ci-contre (fig. A texte), on pourra vérifier nos observations et embrasser en même temps, d’un coup d'œil, la constitution et la disposition du rhinen- céphale chez un Sélacien. FiG. A. — Coupe horizontale du Bulbe olfactit d'Acunthias vulgaris (très jeune exemplaire). Méthode R. CaJaL (imprégnation double), Oc. 1, Obj. 3 (Leitz). S, Sacs olfactifs avec cellules bi-polaires. — P.F, Plexus formés par les fibrilles nerveuses provenant des cellules bi-polaires. — G, Glomérules. — C, Cartilage. — L, Partie externe du lobe antérieur (prosencéphale). — C.V, Ventri- cule (cavité centrale du bulbe). — V, Vaisseaux. — Æp, Cellules épithéliales (épendymaires). — m, Cellules mitrales (fusiformes). — ml, Les mêmes dont les prolongements protoplasmiques entrent en connexion avec les glomérules. — n, Neuroblastes encore en rapport avec la paroi du ventricule. — "1, Neuroblaste en voie de migration. — #0, Neurones du prosencéphale. — gr, Grains. S IT. — Les lobes antérieurs. Bien qu’il soit, sans conteste, absolument indispensable de pratiquer sur ces lobes, pour en étudier la structure, toute une série de coupes orientées suivant différents sens, nous devons néanmoins faire une sélection parmi ces coupes et porter spécia- lement notre attention sur les plus instructives. C’est ainsi que nous recommandons, comme particulièrement importantes et avanta- 76 E. H. CATOIS. geuses, les coupes verlico-frontales correspondant aux lignes de repères 1, 2, 3, PL 1v, fig. 21, les coupes sagittales effectuées suivant les lignes de repère #, 1,2 fig. 20 etles coupes horizontales exécutées suivant les lignes 1, 2, 3, 4, fig. 22. Dans certains cas, quelques coupes obliques bien orientées permettront de suivre sur un plus long parcours la marche de tel ou tel faisceau de fibres nerveuses. Cette observation importante étant établie, nous adopterons pour la description des lobes antérieurs chez les Sélaciens, un plan métho- dique conforme à celui que nous avons suivi pour l’analyse du cerveau antérieur chez les Téléostéens; nous étudierons donc successivement : A. Les groupes cellulaires ; B. Les faisceaux de fibres nerveuses ; C. Les éléments de soutènement. A. Étude des groupes de cellules nerveuses.— La méthode de WeIGERT employée par EDbINGER pour l'étude des lobes antérieurs chez les Sélaciens a été féconde en résultats. Tout d'abord, ce savant histologiste constate dans ces lobes la présence de nombreuses cellules nerveuses : « Das ganze Vorderhirn ist durchsetzt von > zahlreichen ganglienzellen > (EDINGER, 1888, page 104). Dans le stammaganglion, EDiNGER distingue ensuite trois groupes de cellules: un premier groupe, dorsal, d'où dérive le faisceau basal ; un deuxième groupe, ventral, où se terminent les fibres de la commissure antérieure et où peut-être, prennent « naissance » ? les nerfs olfactifs; enfin, un troisième groupe de cellules nerveuses, situé dans la région occipitale du manteau, donne naissance au faisceau du manteau (Mantelbündel). L'application des méthodes GoLGI-CaJAL au cerveau des Sélaciens nous a permis de compléter les découvertes de nos devanciers et de pousser plus loin l'analyse microscopique du télencéphale chez ces Vertébrés. Chez Raja, une coupe vertico-frontale du cerveau antérieur entier, correspondant à la ligne de repère 3, fig. 21, PL. 1v, ntéresse, de dehors en dedans, les processus olfactifs (T7. ol.), la base de ces processus et toute l'épaisseur des lobes ; de haut en bas, elle passe par les deux éminences et le sillon occupant la face supérieure de HISTOLÔGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 714 ce lobe, par les commissures, la cavité ventriculaire et les régions basilaires des lobes (fig. 28, PI. vu). On constate facilement sur cette coupe que les cellules nerveuses sont surtout abondantes dans les zones périphériques, tandis que la zone centrale est presque totalement occupée par des faisceaux de fibres. Une division méthodique, bien qu'un peu factice, des diffé- rents groupes de cellules en trois zones de distribution facilitera la description de chacun de ces groupes ; nous passerons donc succes- sivement en revue : 1° Les groupes cellulaires des régions latérales ; 2° Les groupes cellulaires des régions basilaires ; 3° Les groupes cellulaires des régions dorsales. 1° Les régions latérales correspondent, par leur partie antérieure, à l'insertion des tractus olfacufs sur la face externe des lobes antérieurs ; par leur partie postérieure, ces régions latérales se confondent avec la région des pédoncules. Les cellules nerveuses qui entrent dans la constitution de ces régions latérales du lobe sont des cellules multipolaires, de dimen- sions variables ; les unes, assez volumineuses (35 à 45 uw environ) ont un corps ovoide, triangulaire ou fusiforme ; leurs prolongements protoplasmiques, érès longs, s'étendent en tous sens et sont ex connexions avec les terminaisons des cylindres-axes des cellules mitrales du bulbe olfactif (fig, 28, PI. vu, a): leur axone, dirigé de dehors en dedans, se rend dans la commissure du cerveau antérieur (pars supera) qu'il contribue à former (fig. 28, PI. vu, com. ant .). Les autres cellules sont moins volumineuses (20 à 30 & environ) et possèdent un corps sphérique ou ovoïde ; leurs dendrites sont peu étendues et leur axone se détache indifféremment, soit du corps cellulaire, soit d’un prolongement protoplasmatique, pour se diriger vers d’autres neurones siluës dans les régions supérieures ou inférieures des lobes ; nous pensons que ces cellules sont destinées à jouer un rôle d’association entre neurones diversement élagés (nues, PL vx, 0). 2° Les régions basilaires, inférieures ou ventrales des lobes antérieurs chez les Sélaciens nous semblent correspondre à celt partie du Stammganglion désignée par nous, chez les Téléostéens, sous le nom de « Hypostriatum ». .78 E. H. CATOIS. Les cellules nerveuses qui entrent dans la constitution de ces régions basilaires offrent les caractères suivants : elles sont mullipo- laires, à dimensions variant entre 25 et35 w; le corps de ces cellules est le plus souvent orienté vers la partie externe ou inférieure du lobe, landis que leurs prolongements protoplasmatiques dirigés en haut eten dedans, vers la cavité ventriculaire, entrent en connexions avec les fibres ascendantes ou centripètes du faisceau basal (fig. 28, PI. vu, c). Le prolongement cylindraxile de ces cellules à une direction variable; dans quelques-unes de nos préparalions bien imprégnées nous avons pu Constaler : a, que l’axone de certaines cellules de l’hypostriatum se dirige verticalement de bas en haut et un peu de dehors en dedans, pour devenir fibre constitutive du faisceau médian (Medianbündel) (fig. 28, PI. va, F. med; et fig. 29, PI. vx, c); b, que l’axone d’autres cellules de cette mème région, dirigé horizontalement de dehors en dedans, pénétrait dans la commissure du cerveau antérieur (pars infera) (fig. 28, PL vu, d, d; et fig. 29, PE Vu, d). 3 Les régions dorsales ou supérieures des lobes antérieurs offrent à l'étude une certaine complexilé ; c’est ainsi qu'il y à lieu de considérer dans ces régions : 1° une partie médiane correspondant au sillon médian, souvent peu accusé, quise trouve sur la face supérieure du cerveau antérieur ; 2° deux parlies latérales corres- pondant aux deux pelites éminences décriles sur cette mème face supérieure. La partie médiane représente, dans son ensemble, un triangle dont la base, dirigée en haut, est adossée contre le sillon inter- hémisphérique et dont le sommet, orienté en bas, regarde les zones centrales du cerveau antérieur. Les cellules nerveuses qui siègent dans cette partie médiane sont multipolaires; elles ont une dimension moyenne de 20 à 25 u, possèdent un corps cellulaire disposé horizontalement et sont groupées suivant deux plans étagés de haut en bas: un plan superficiel et un plan profond. Le plan superficiel, correspondant à la base du triangle indiqué ci-dessus, ést composé de cinq ou six assises de cellules dont les dimensions sont variables (pelites ou moyennes), les dendrites peu élendues et dont le cylindre-axe est court. Nous pensons pouvoir HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALÉ CHEZ LES POISSONS. 79 attribuer à ces neurones un rôle d'association (fig. 28, PL. vu, e; Étui PJ PL Vire): Le plan profond, correspondant au sommet du triangle précité, se compose également de cinq ou six assises de cellules, petites où moyennes, à cylindre-axe peu étendu (fig. 28, PI. vir, /). Ainsi que nous l’indiquerons plus loin, le faisceau médian (Medianbündel) élant considéré, par nous, comme essentiellement constitué par des fibres ascendantes, c’est au niveau de ces cellules de la partie médiane des régions dorsales des lobes antérieurs que viennent s'épuiser les fibres de ce faisceau médian (voir page 83). Les deux parties latérales renferment des cellules nerveuses multipolaires, de 24 à 35 4 environ, élagées de haut en bas en deux ou trois plans, souvent confondus d’ailleurs ; le corps de ces cellules est arrondi, ovoïde, parfois fusiforme ; leurs prolongements proto- plasmaliques, dirigés horizontalement, sont en connexions, soit avec les cylindres-axes des cellules de la partie médiane, soit avec les cylindres-axes ou les collatérales des cellules des régions latérales du lobe. Leur cylindre-axe, /ong, se dirige verticalement de haut en bas et de dehors en dedans, émet quelques collatérales et devient fibre constitutive du faisceau basal (partie descendante ou motrice). Ces neurones représentent donc les cellules d’origine de ce faisceau basal du cerveau antérieur (fig. 29, PI. vin, &). À. Étude des faisceaux de fibres nerveuses.— Ronox (1878) el EbixXGER (1888) ont indiqué, dans leurs grandes lignes, la marche et la distribution des faisceaux de fibres nerveuses dans le cerveau antérieur des Sélaciens. Nous nous sommes efforcé, tout particulière- ment, de compléter les descriptions données par ces auteurs et nous avons déjà fait connaitre, dans une de nos précédentes communi- cations, le résumé de nos recherches (Carors, 1899 D). Sur la coupe microscopique que nous venons d'utiliser pour la description des groupes cellulaires (fig. 28, PI. vu), coupe exécutée suivant la ligne de repère 3, fig. 21, PI. 1v, on peut remarquer tout d’abord : des faisceaux de fibres longitudinales (Langsfasern, de Ronox) sectionnés plus où moins obliquement et des faisceaux de fibres transversales (Querfasern, de RoHoN). Sur d’autres coupes, effectuées suivant des lignes de repère que nous aurons à indiquer toul à l'heure et pratiquées en différents sens (coupes sagittales, vertico-transversales, horizontales où obliques), 80 E. H. CATOIS. il est possible de poursuivre assez loin la marche de ces divers faisceaux: Pour la commodité de la description, nous analyserons successi- vement : 1° Les fibres olfactives considérées dans leurs rapports avec les lobes antérieurs; 2" Les fibres commissurales ; 3 Le faisceau basal du cerveau antérieur ; 4° Le faisceau médian ; Enfin, le faisceau du manteau. Qt 1° Un mot sur les rapports des fibres olfactives avec les lobes antérieurs : Ces fibres, émanées du tractus olfactif, abordent le cerveau antérieur par ses parties anléro-latérales; elles sont dirigées horizontalement de dehors en dedans (fig. 28, PI. vu, fb. olf.). Nous avons vu, plus haut, que ces fibres s’épuisent au milieu des cellules nerveuses des régions latérales du lobe antérieur ; nous avons pu les poursuivre jnsqu'à leurs terminaisons que nous figurons en 4. {. fig. 28, PI. vu. Notons, en passant, leur trajet sinueux et parfois légèrement variqueux, ainsi que leur mode de divisions terminales en plusieurs branches. Pour bien observer ces fibres olfactives dans leurs rapports avec les lobes antérieurs, il faut recourir, soit à des coupes horizontales comprises entre les lignes de repère (1 et 4, fig. 22), soit à des coupes vertico-transversales correspondant aux lignes de repère 1, 2, 3, fig. 21. 2° Tout un système de fibres transversales, correspondant dans son ensemble à ce que les auteurs désignent sous le nom de commissure antérieure, S'observe dans les zones centrales et inférieures des lobes antérieurs. Pour étudier ces fibres aussi complètement que possible et dans la majeure partie de leur étendue, ilimporte de pratiquer des coupes, soit horizontales et repérées suivant les lignes 1 et 3 fig. 22, soit verlico-transversales et passant par la ligne de repère 3, fig. 21. Sur des coupes sagittales, on n'obtient que des sections transversales de ces faisceaux de fibres (fig. 29, PI. vin, com. ant’, com. ant”). Ainsi qu'il est facile de le constater (fig. 28 et 29), la commissure antérieure forme deux élages : un premier étage, supérieur, silué au-dessus de la cavilé ventriculaire, « commissura anterior, pars pres HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 81 supera », et un second étage, inférieur, situé au-dessous de ce ventri- cule « commissura anterior, pars infera >. Etudions successivement ces deux étages. Commissura anterior (pars supera) (com. ant). Cette partie correspond, d’après nous, à « cominissura pallii ou psallerium >» des auteurs ; elle se présente sous forme d’un large faisceau curviligne, dépourvu de myéline, constitué par une partie centrale plus étroite ou cozdensée et par une partie externe, plus large, radiée suivant diverses directions et s’épanouissant en éventail. Les fibres commissurales de ce faisceau, dirigées transversalement et presque horizontalement, relient entre elles les régions dorso-latérales des lobes antérieurs ; elles représentent essentiellement, pour nous, les prolongements cylindraxiles des cellules de la région dorso-latérale d’un côté des lobes allant se terminer par des arborisations libres dans la région homologue de l’autre côté de ces lobes (voir plus haut page 77). Nous ajouterons qu’il nous a été donné de voir parfois quelques collatérales se détachant à angle droit de certaines de ces fibres commissurales (fig. 28 et fig. 29). IL est très probable que cette commissure renferme encore quelques vraies fibres dites calleuses, surtout dans sa partie la plus supérieure, mais nous ne pouvons affirmer ce fait; des recherches complémentaires sont nécessaires pour bien élucider ce point spécial. Commissura anterior (pars infera) (com. ant”). — L'existence de cette partie de la commissure antérieure a été signalée par différents auteurs : « Des coupes faites sur la partie postérieure des > lobes antérieurs, c’est-à-dire au niveau de leur continuité avec > le troisième ventricule, montrent dans la partie inférieure la > section des fibres longitudinales des pédoncules cérébraux qui, > réunies en une seule masse, pénètrent dans les lobes antérieurs > pour se perdre au milieu de leur substance. Au-dessous de ces > faisceaux longitudinaux, on voit des fibres transversales, à dispo- > sition arciforme, qui doivent être considérées comme représentan { » le système de la commissure antérieure du cerveau, mais plus » particulièrement, peut-être, l'étage inférieur de ce système connu > sous le nom de comimnissura basis alba > (VrauLr, 1876, page 510). Nous ajouterons que cette commissure est moins condensée que la précédente ; les fibres qui la constituent sont espacées, leur marche est flexueuse et leur trajet onduleux. 6 82 E. H. CATOIS. 2 Nous estimons que cette commissure est formée: 1° surtout par des fibres provenant des faisceàäux ascendants ou sensitifs des pédoncules cérébraux, et 2° par l'axone de quelques cellules nerveuses siégeant dans les régions basilaires des lobes (Hypos- triatum) (voir plus haut, page 78). En résumé, la commissure du cerveau antérieur, chez les Séla- ciens, est double ; elle offre à considérer : 4, une partie supérieure, située au-dessus du ventricule, renfermant des fibres affectées à la voie olfactive et peut-être aussi quelques fibres dites calleuses ; b, une partie inférieure, située au-dessous du ventricule, et destinée surtout à la voie sensitive. 3 Le faisceau basal du cerveau antérieur (!) a été souvent décrit et est bien connu depuis les belles recherches de EnINGEr. Les cellules d’origine de ce faisceau (pour sa partie descendante) ont leur siège dans les régions dorsales ou supérieures des lobes antérieurs ; nous avons localisé ces cellules dans les parties laté- rales de ces régions (voir page 79). Le trajet du faisceau basal est oblique de haut en bas et un peu de dehors en dedans ; ce faisceau recourbé en arc (im Bogen) passe sous la commissure antérieure et se termine dans le diencéphale où nous le retrouverons. Une coupe vertico-transversale de la partie postérieure du télencéphale, vers la région pédonculaire, démontre que ce faisceau basal est double et symétrique (fig. 28, PI. vu). Il est formé par une partie dorsale (F.b”.) renfermant les fibres descendantes on motrices et par une partie ventrale (F.b””.) constituée principalement par des fibres ascendantes ou sensitives. On a vu plus haut (page 81) les rapports de cette partie ventrale du faisceau basal avec « commissura anterior, pars infera ». 4 Le faisceau médian (medianbündel) (F. med.). — Avec EnINGER, nous désignons, sous ce nom, un faisceau situé sur la ligne médiane des lobes antérieurs. Ce faisceau, dirigé de bas en haut et d’arrière en avant, est peu épais et ne peut être bien étudié que sur des coupes sagittales passant par la ligne de repère (fig. 20, PI. 1v, ligne médiane æ). (t) La synonvmie de ce faisceau est la même chez les Sélaciens que chez les Téléos- téens (voir paus haut page 66). HISTÔLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 83 Pour nous, les cellules d’origine de ce faisceau ont leur siège dans les régions inférieures ou ventrales du cerveau antérieur (Hypostriatum) et les fibres de terminaison viennent s’épuiser au milieu des cellules de la partie médiane des régions dorsales des lobes (voir pages 78 et 79). 5° Le faisceau du inanteau (Mantelbündel, Tractus palli). — Ce faisceau décrit d’abord par EDINGER a été étudié récemment par B. HALLER (1898); pour bien analyser ce faisceau, particulièrement difficile à obtenir imprégné dans toute son étendue, il est nécessaire de recourir à des coupes obliques (ligne de repère 4, fig. 21, PI. 1v). Le tractus pallii est, en effet, dirigé très obliquement de haut en bas, d'avant en arrière et de dehors en dedans. Nos recherches récentes nous ont permis de- localiser les cellules d'origine de ce faisceau dans la région dorsale et postérieure du cerveau antérieur, comme EDINGER l’a indiqué, du reste. Les fibres du faisceau du manteau se terminent, après décussation, dans la partie inférieure du diencéphale, ainsi qu'on le verra plus loin. Nous ferons remarquer, à ce sujet, que des fibres nerveuses ascendantes ou centripètes et des collatérales provenant, soit du faisceau basal (partie sensitive), soit de neurones siégeant dans les régions inférieures du télencéphale, viennent s’épuiser aw niveau des cellules d'origine du mantelbüundel; cette particularité expliquera l'erreur que nous avons commise au cours d'une de nos précédentes publications, lorsque nous disions: « le tractus pallii paraît surtout constitué par des fibres provenant du diencéphale et venant s'épuiser dans les parties supérieures et postéro-latérales du prosencéphale » (Carois, 1899 D, page 31). C’est le contraire qui demeure l'expression de la vérité, le faisceau du manteau ayant son origine dans le télencéphale et sa terminaison dans le diencéphale (te 28etlig. 29/77. pal.). B. Etude des éléments de soutènement. — Dans le télencé- phale des Sélaciens (Raja, Acanthias, Scyllium, Mustelus) ces éléments se présentent sous les deux formes classiques : cellules épendymaires où épithéliales, cellules en araignée ou de DEITERS. Nous n'avons pas à revenir ici sur la description morphologique de ces éléments et sur les conditions de technique qui s'imposent pour leur mise en évidence (voir plus haut: Deuxième partie, Chapitre IT, pages 44 et suivantes). 84 E. H. CATOIS. Chez les très jeunes sujets, les éléments de soutènement sont uniquement représentés par les, cellules épendymaires seules (fig. 28 et 29, ep.). Chez les sujets adultes, au contraire, alors que beaucoup de cellules épendymaires ont persisté avec tous leurs caractères embryonnaires, quelques-unes d’entre elles ont évolué et se sont transformées en cellules de névroglie proprement dites (cellules en araignée) (fig. 28 et 29, ng.). D'une façon générale, celles-ci se présentent sous forme de cellules de névroglie à courtes expansions (boule épineuse) et sous forme de cellules de névroglie péri-vasculaire. Ces éléments de soutènement s'observent principalement dans les zones situées entre la substance grise et la substance blanche (fig. 28, 29.) ; on en rencontre aussi, mais en moins grande quantité, en pleine substance grise (fig. 28, ng.). III, ZES VOIES OLFACTIVES CHEZ LES TÉLÉOSTÉENS ET SÉLACIENS En raison de l'intérêt capital qui s'attache à l'étude du télencé- phale au point de vue de l’anatomie comparée, nous avons dû décrire minutieusement la structure microscopique de cette région encéphalique peu connue jusqu’à présent, chez les Poissons. Dans le long exposé qui précède, nous espérons avoir démontré que le télencéphale représente, en dernière analyse, différents groupes cellulaires correspondant à des centres soit moteurs, soit sensitifs. Si la structure du cerveau antérieur nous apparait déjà complexe chez ces Vertébrés inférieurs, les fonctions assignées à cette partie du névraxe doivent être également multiples. De ces diverses fonctions, la plus importante qui semble dévolue à cette région de l’encéphale consiste à percevoir les sensations olfactives, à les centraliser etprobablement à les analyser, tout au moins d’une façon rudimentaire (1). Les centres olfactifs corticaux qui existent chez les Vertébrés supérieurs (centre hippocampique, corne d’Ammon, etc.), manquant chez les Poissons, nous paraissent devoir être représentés essentiellement chez ceux-ci par le ganglion basal (Stammganglion). Rappelant ici une de nos récentes commu- (1) BorTrazzi (1894) considère avec raison la région latérale et externe du prosencé phale chez les Sélaciens comme représentant wx centre psychique olfactif. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 89 nicalions (CarTois, 1899 c), nous terminerons donc ce chapitre consacré à l'étude du télencéphale par des considérations sommaires sur les voies olfactives chez les Poissons. Il existe manifestement chez les Téléostéens et chez les Sélaciens une voie sensitive olfactive et une voie motrice olfactive. « 1” La voie sensitive olfactive comprend 2 voies à direction centripète (le cerveau antérieur pris comme centre) : a. Une voie périphérique reliant la muqueuse olfactive aux éléments du bulbe olfactif. b. Une voie centrale reliant les éléments du bulbe olfactif à certains neurones du ganglion basal ; le groupement de ces neurones correspond à la sphère sensorielle olfactivedes Vertébrés supérieurs. La première de ces voies est identique chez les Téléostéens et chez les Sélaciens ; 1l n’en est pas de même pour la seconde. Chez les Poissons osseux, les fibres de cette voie centrale s'épuisent tantôt directement dans le ganglion basal, tantôt indirectement dans ce ganglion, en empruntant pour leur trajet la partie Supérieure de la coinmissure interlobaire. Chez les Sélaciens, les fibres de la voie centrale aboutissent directement à des neurones situës dans les régions latérales du cerveau antérieur; ces neurones contribuent ensuite par leur prolongement cylindraxile à former la comimnissure antérieure (pars supera). La voie sensitive olfactive renferme également des fibres centri- fuges qui vont se terminer dans le bulbe olfactif. Chez les Téléostéens, ces fibres ont pour origine des neurones siégeant dans la partie inférieure du ganglion basal; ces neurones transmettent ainsi une incilation qu'ils reçoivent, à leur tour, d’autres neurones situés dans le diencéphale. Chez les Sélaciens, ces fibres centrifuges, d’une analyse plus difficile, nous ont paru provenir de neurones situés dans les régions inférieures et postéro-latérales du cerveau antérieur. 2° La voie motrice olfactive est surtout constituée par des fibres émanant du cerveau antérieur et se distribuant à d’autres segments encéphaliques ; c’est ainsi que des fibres allant s’'épuiser dans l’'Hypothalamus, dans le ganglion de l'habenula, que le faisceau rétro-réflexe ou de MEYNERT, etc., représentent les divers chainons de cette voie motrice olfactive. 86 EH. CATOIS. Nous ajouterons, enfin, que des groupes de cellules nerveuses, situées sur le trajet de la voie sensitive olfactive centrale et en connexions avec les ramifications collatérales ou terminales des fibres de cette voie, nous semblent devoir représenter les éléments constitutifs d'une voie olfactive centrale réflexe. IT. LE DIENCÉPHALE. Synonymie : Cerveau intermédiaire. Thalamencéphale. Ziwischenhirn. Slañnimhirn (Lobus centralis, de FriTscH). Situé entre le cerveau antérieur et le cerveau moyen qu'il réunil l'un à l’autre, le diencéphale ou cerveau intermédiaire provient de la transformation de la partie postérieure de la première vésicule cérébrale embryonnaire. Chez les Poissons, le cerveau antérieur fort peu développé ne surplombe pas le cerveau intermédiaire, en le recouvrant, ainsi que cela a lieu chez les Sauropsides et surtout, chez les Mammifères ; en conséquence, le diencéphale se trouvant à nu chez ces Vertébrés inférieurs, sa délimitation est rendue plus facile que chez les autres Vertébrés adultes. À peu de choses près, la constitution de ce segment encéphalique est constante dans toute la série des Cranioles. Une coupe sagittale passant par la ligne médiane (x. x. fig. 23 et 20) démontre que chez les Poissons le diencéphale représente, dans son ensemble, un triangle à sommet mousse dirigé en haut et dont la base, élargie, est située à la partie inférieure ou ventrale du cerveau. Sur une coupe vertico-transversale (frontale), cette disposition triangulaire est surtout parfaitement visible et on peut constater en outre les particularités suivantes : 1" La partie centrale du triangle est creusée par une cavité toujours existante chez les Vertébrés (troisième ventricule) ; 2 Les parois sont épaissies, surtout vers la base (thalamus, couches optiques) ; HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE GHEZ LES POISSONS. 87 3° La base et le sommet subissent un accroissement moindre el demeurent, par places, à l’état embryonnaire, c’est-à-dire réduits à une mince couche épithéliale (1). Enfin, sur une coupe horizontale (fig. 25, ligne 2 et fig. 22),le diencé- phale apparait comme une gouttière plus ou moins longue et profonde, allongée dans le sens longitudinal et faisant communiquer le cerveau antérieur et le cerveau moyen. Le cerveau intermédiaire constitue la région la plus complexe de tout l’encéphale, celle dont l'analyse microscopique est la plus difficile et la structure intime la moins connue. Le diencéphale a été, chez les Sélaciens, l’objet des recherches de VrAULT (1876), de Roxox (1877), de A. SANDERS (1886), de EDINGER (1892) et de B. HALLER (1898). Nous mentionnons, tout particulièrement, le beau travail de EnixGEr : Das Zwischenhirn der Selachier, où sont exposées les consciencieuses investigations de ce savant sur le cerveau intermé- diaire de : Torpedo, Raja, Scyllium et Mustelus. Chez les Téléostéens, les recherches relatives à la structure du cerveau intermédiaire, bien que plus nombreuses peut-être, sont en tous cas demeurées incomplètes. On ne saurait s'étonner d’une pareille constatation si on veut bien se rappeler les considérations d'ordre technique que nous avons nous-même exposées plus haut (page 16), à propos de l’analyse microscopique de ce segment encé- phalique en particulier. Signalons donc, d’abord, les recherches de BaAuUDELOT (1869 et 1870), de G. Frirscx (1878) et de P. MAysER (1881) puis, celles de RaBz-RüûckHaRD (1882), de BELLONCI (1885) et de EniNGER (1892) ; ce savant avait déjà remarqué les difficultés que présente l'étude de cette région du cerveau, puisqu'il s'exprime ainsi à propos du diencéphale : « Bei den Knochenfischen entwic- kelt es sich zu einem viel mächtigeren Kürper, dessen volle (1) Chez les Poissons, de même que chez les autres Craniotes, le cerveau intermédiaire possède certains appendices, « véritables diverticules de sa paroi comme de sa cavité, correspondant à des organes sensoriels presque toujours en voie de régression et trans- formés en glandes à secrétion interne ». La premiere de ces annexes, dépendant du plancher du diencéphale, est l'Æypophyse ; la seconde, dépendant de son sommet, est l'Épiphyse (ROULE. Anatomie comparée des Animaux. .... (1898). N'ayant pas entrepris de recherches spéciales sur la structure microscopique de ces organes, parfaitement étudiés et décrits d’ailleurs par un certain nombre d'auteurs, nous ne faisons que les signaler ici. 88 £. H. CATOIS. Klarstellung mir trotz langjähriger Studien noch nicht gelungen ist > (EDINGER : Das Zwischenhirn, page 1). Hâtons-nous d'ajouter que quelques années après, dans son remarquable traité classique : « Vorlesungen über den Bau der Nervôsen Centralorgane » (1896), EnixGER nous donnait sur ce sujet des indications précieuses. Rappelons enfin les recherches effectuées par VAN GEHUCHTEN (1894) et B. HALLER (1898). Pour la commodité de la description, nous diviserons par deux lignes horizontales conventionnelles le diencéphale en trois régions : 1° Une région supérieure : l'Æpithalams : 2° Une région moyenne : le Thalamus ; 3° Une région inférieure: l'Hypothalamus. Nous étudierons chacune de ces régions dans un paragraphe spécial, en insistant particulièrement sur les points peu connus qui ont été l’objet de nos recherches personnelles. S I. — L'Epithalamus. Occupant la partie supérieure ou dorsale du cerveau intermé- diaire, l’épithalamus représente une sorte de toit vasculo-mem- braneux recouvrant la gouttière longitudinale, à rebords plus ou moins épais, formée par les pédoncules cérébraux (faisceau basal du cerveau antérieur). Cette disposition s’observe facilement chez les Sélaciens où le diencéphale est réduit, pour ainsi dire, à sa plus simple expression ; exemple: ÆRaia. Ainsi que Vraurr l’a du reste indiqué, on constate parfois, dans l'épaisseur de ce toit, la présence d'une lame de tissu nerveux assez mince, véritable bandelette commissurale ; exemple : Scyllium. L'épithalamus offre à étudier successivement d'avant en arrière : 1° un repli de nature épithéliale, homologue de la toile choroï- dienne du troisième ventricule dans le cerveau des Mammifères ; ce repli est surtout visible chez les très jeunes sujets; 2° le coussinel de la glande pinéale (zirbel-polster) ; 3° la glande pinéale ow épi- physe; 4 enfin, la comsmissure blanche postérieure, dirigée iransversalement et établissant la limite conventionnelle entre le diencéphale et le mésencéphale. Sur des coupes sagittales intéressant les parties latérales du HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 89 cerveau intermédiaire et effectuées par conséquent en dehors du plan médian, on constate la disparition du coussinet de la glande pinéale ; ce coussinet est remplacé par le ganglion de l'habenula. _ 1° Ganglions de l'habenula (9.q9.h.). Commissure habénulaire (com. hab.) (voir fig. 33, PI. x). — Les ganglions de l'habenula (fubercula intermedia de GüTrscxE) ont été étudiés par plusieurs observateurs et chez différents Vertébrés ; EDINGER, notamment, a indiqué les relations de ces ganglions avec certains centres nerveux (régions olfactives). Chez les Poissons, ils ont été désignés par BAUDELOT (1870) sous le nom de {ubercules pédonculaires ; dans ses recherches sur les centres nerveux des Plagiostomes, VIAULT (1876) les décrit comme deux petits tubercules pédiculés presque sessiles donnant naissance accessoirement aux nerfs optiques (Trygon). Des indications anatomiques très précises, permettant de s'orienter facilement dans la recherche de ces ganglions chez les Téléostéens, ont été fournies par VAN GEHUCHTEN (1894). L'emploi des méthodes de GoLGr a permis à VAN GEHUCHTEN et à S. RAMoON y CayaL (1894) d'obtenir, sur de très jeunes exemplaires de Truite, de Saumon et de Barbeau, l'imprégnation des éléments constitutifs de ces ganglions et de mettre notamment en évidence les cellules d’origine du faisceau rètro-réflexe où de MEYNERT. EDINGER (1892) avait déjà distingué dans les ganglions de l'habenula, chez les Sélaciens, une partie frontale formée exclusivement de cellules nerveuses sphériques et une partie caudale. On sait aujourd’hui que la partie périphérique de chaque ganglion renferme des cellules nerveuses unipolaires et piriforimes ; le prolongement cylindraxile de ces cellules constitue une des fibres du faisceau de MEYNERT et peut être suivi depuis son origine jusqu'au corps interpeédonculaire. Nous avons constaté ces mêmes particularités dans les ganglions habénulaires de très jeunes Callionymus lyra, Cottus bubalis et Labrus bergylta. Tandis qu'il donne naissance, par des fibres descendantes, au faisceau rétro-réflexe, chaque ganglion de l’habenula reçoit des fibres ascendantes et terminales provenant de sources diverses : 1° fibres provenant du nerf optique; 2° fibres émanées du lobe antérieur (cerveau antérieur). BAUDELOT avait déjà signalé chez le Congre la présence « d’un 90 E. H. CATOIS. > petit filet médullaire partant de l’extrémité antérieure de chaque » tubercule pédonculaire pour se porter en avant, le long du bord > supérieur du pédoncule cérébral et pour aller se perdre vers la > base de l'hémisphère correspondant ». Ayant indiqué plus haut, à propos du {actus olfacto-habenularis et du faisceau cortico-habenularis (voir page 70) les relations qui existent entre les ganglions de l’habenula et les lobes antérieurs du cerveau, nous n'avons pas à revenir ici sur ces connexions. Les fibres ascendantes se terminent dans l’intérieur des ganglions de l’habenula par des arborisations libres formant autour des cellules un plexus très riche. * Les ganglions de l'habenula sont reliés l’un à l'autre par une Ccominissure grêle (commissura tenuissima de GÜTTSCHE, commissure supérieure d’OsBoRN, commissure habénulaire ). L'étude minutieuse que nous avons faite de cette commissure chez quelques Téléostéens (Callionymus, Anguilla, Cottus et Labrus), nous permet de la considérer comme formée par l’entrecroisement de trois sortes de fibres nerveuses: 1° par des fibres provenant des nerfs optiques; 2 par des fibres provenant des lobes antérieurs et 3° enfin, par des fibres venant du ganglion habénulaire d’un côté pour s’épuiser dans le ganglion du côté opposé; ces fibres, peu nombreuses, cons- tituent ainsi un faisceau d’association entre les deux ganglions (com. hab.). 2 Commissure blanche postérieure (com. post.). — Située en arrière de la commissure habénulaire, en dessous et en avant de la partie antérieure des lobes optiques, cette commissure forme un faisceau arqué dirigé transversalement et composé de fibres nerveuses épaisses ; ces fibres ont leurs cellules d’origine situées en des zones diverses, soit du mésencéphale (lobes optiques, ganglions latéraux du mésencéphale), soit du diencéphale (noyau prétectal, corps genouillés). Nous avons soigneusement analysé la commissure blanche postérieure chez: Gadus, Scomber, Labrus, Anguilla, Calliony- mus, Cottus et Platessa ; cette commissure offre à considérer trois plans : un plan supérieur, un moyen et un inférieur (fig. 31, com. post.). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 91 Le plan supérieur (a) est en rapport, d'avant on arrière, d’abord avec les fibres de la commissure dorsale des lobes optiques (comi- sura interlobular) puis avec le torus longitudinalis. Le plan moyen (b) est surtout constitué par des fibres provenant des lobes optiques et émanées des régions profondes du toit de ces lobes. Nous verrons plus loin (Chapitre Meésencéphale, lobes optiques) que ces régions correspondent à « {ercera capa del techo optlico 0 de la substancia blanca profunda » de PEDRo RAMON CayAL (1899) (EL lobulo optico de los peces Teleosteos, in Rev. trim. micrograf., t. IV). Le plan inférieur (c) de la commissure blanche postérieure nous a paru essentiellement formé par des fibres nerveuses provenant du noyau prétectal et des corps genouillés. Ainsi qu'il ressort de cet exposé succinct, les fibres qui constituent la commissure postérieure, passant d’un côté du thalamus à l’autre côté, servent surtout à établir des connexions entre les différents centres optiques de cette région encéphalique. La commissure postérieure offrirait donc, chez les Poissons, une disposition presque analogue à celle que PEDRO Ramon CayaL indique chez les Oiseaux (P. Ramon Cagyaz. Centros opticos de las Aves, in Rev. trim. microgr., t. II, 1898). Ajoutons, enfin, que de cette commissure postérieure descendent des fibres dirigées soit en avant, soit en arrière et se rendant, les unes vers le {actus strio-thalamicus (pars superior), les autres vers le faisceau longitudinal postérieur. Ces fibres, que nous n'avons pu obtenir jusqu'à présent suffisamment imprégnées, échappent pour l'instant à notre analyse; des recherches complémentaires nous paraissent indispensables pour mettre notamment en évidence les connexions probables qui existent, chez les Poissons, entre la commissure postérieure et le faisceau longitudinal postérieur (fibres descendantes de HELD. Fibres divisées en T, découvertes par P. RaMoON CayaL chez les Reptiles) (1). () HeLp : Die centrale Gehôürleitung. Archiv. f. Anat, und Physiol., Anatom. Abth. (1893). P. Ramon CayaL : El fasciculo longitudinal posterior en los Reptiles. Xevista trimestral micrografica, t. II (1897). 92 E: H. CATOIS. S IL — Le Thalamus. COUCHES OPTIQUES. L'étude de cette région de l’encéphale présente les plus grandes difficultés dans toute la série des Craniotes. Nous rappelons pour mémoire, à ce sujet, les recherches de G. BELLONGI (1) et les travaux de L. EDiNGER (?). Déjà, cependant, les méthodes histologiques nouvelles (imprégnations de GoLG1) ont été appliquées avec succès à l'analyse du diencéphale chez quelques Vertébrés (Batraciens, Reptiles et Oiseaux) par PEDRO RAMON y CaJaL (#). Jusqu'à ce jour, du moins à notre connaissance, ces méthodes n’ont pas été employées pour l'étude microscopique complète du Thalamus chez les Poissons ; nous avons essayé de combler cette lacune, tout au moins en partie et dans une certaine mesure. Lorsqu’elles sont bien réussies, les imprégnations du Thalamus au moyen des méthodes classiques de GoL@i ou de Cox démontrent que cette région encéphalique est constituée, dans son ensemble, chez les Poissons comme chez les autres Vertébrés, par plusieurs noyaux de substance grise plongés dans une gangue de substance blanche ; les nodules de substance grise sont formés par des groupes plus ou moins compacts de cellules nerveuses, vrais centres ganglionnaires; la substance blanche est composée de fibres nerveuses et des collatérales qui en émanent; ces fibres sont disposées sous forme de faisceaux ou de tractus, plus ou moins étendus et volumineux, dirigés obliquement ou longitudinalement (#). (1) G. BeLLoncr : Ueber die centrale Endigung des Nervus Opticus bei Vertebraten (Zeitschr. f. wiss. Zool., Bd. 47, 1888). (2) L. EnnGer : Untersuchungen über die Vergleichende Anatomie des Gehirns : 1892. Das Zwischenhirn der Selachier und der Amphibien. 1899. Das Zwischenhirn der Reptilien. (3) PEDRO RAMoN y CAJAL : Investigaciones micrograficas en el encéfalo de los batrâceos y reptiles.— Zaragoza, 1894. Estructura del encéfalo del Camaleon (Rev. trim. micrograg. Tomo I, 1896). Centros opticos de las Aves (Rev. trim. micrograf. Tomo III, 1898). (4) Nous ferons remarquer que les descriptions du thalamus données par les auteurs classiques sont loin d’être claires et précises; la plus grande confusion règne, notamment, dans la défermination et dans l'appellation des différents noyaux et faisceaux thalamiques. Il est regrettable que, dans l'analyse d’une région à structure déjà si complexe, les anatomistes n'adoptent pas une nomenclature définitive. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 93 Un nerf périphérique important, le nerf optique, est en relations directes avec le diencéphale. Nous commençons donc l'analyse du thalamus par l'exposé des rapports du nerf de la deuxième paire avec un centre ganglionnaire bien déterminé : le corps genouillé ; nous procéderons ensuite à l’étude de quelques noyaux thalamiques : noyau prétectal, noyau antérieur et noyau rond (1). Nous indiquerons, enfin, les faisceaux de fibres nerveuses qui traversent le thalamus. 1° Connexions entre les nerfs optiques et le diencé- phale. — Corps genouillé thalamique.— Après leur entre- croisement dans le chiasma et avant leur terminaison dans le toit des lobes optiques, les tractus optiques pénètrent dans le diencé- phale et entrent en connexions avec un certain nombre de noyaux gris auxquels ils abandonnent des fibres terminées par des arbori- sations libres. Ces noyaux gris, centres ganglionnaires, fournissent à leur tour aux tractus optiques quelques fibres descendantes ou fibres ganglio-rétiniennes provenant de leurs propres cellules et s'étendant jusqu'aux couches profondes de la rétine où elles se terminent également par des arborisations libres. Le plus important ou du moins le mieux déterminé de ces centres ganglionnaires est le corps genouillé thalamique que nous allons maintenant analyser. Corps genouillé thalamique.— Synonymie: Corpus geniculatum thalamicum, de BELLoNCI. Corps genouillé latéral ou externe des auteurs. Nucleus opticus lateralis, de B. HALLeR (fig. 31 et 34, Cp. g.). Le corps genouillé thalamique, dont l'existence a été reconnue chez tous les Vertébrés, constitue une masse grisätre située en dehors et un peu en avant du cerveau intermédiaire. Il se compose d’une zone périphérique de substance blanche et d’une zone centrale comprenant de la substance blanche et de la substance grise ; cette substance grise revêt la forme d’une lame plusieurs fois repliée sur elle-même. Vu en coupe, le corps genouillé thalamique, au lieu d’être homogène, présente ainsi une série de stries et son aspect rappelle un peu celui de l’olive du bulbe rachidien chez les Mammifères. Il est facile de faire cette constatation en examinant des (1) Est-il besoin d'ajouter que ces noyaux sont doubles et symétriques ?, 94 E. H. CATOIS. préparations colorées à l'hématoxyline (chez Platessa, par exemple). Nous ajouterons, en outre, que cette région du diencéphale est le siège d’une riche vascularité. Chez quelques Téléostéens : Scomber, Labrus, Callionymus, Merlangus et Platessa (exemplaires très jeunes), nous avons pu obtenir de bonnes imprégnations du corps genouillé thalamique. En abordant le cerveau intermédiaire, les fibres constituant le tractus oplique se comportent ainsi: quelques-unes de ces fibres recouvrent extérieurement le corps genouillé, tandis que les autres le pénètrent; nous les diviserons donc en: 1° Fibres superficielles ou corticales ; et 2° en fibres profondes ou centrales. 1° Fibres superficielles (f. s., fig. 31 et fig. 34). — Aïnsi que P. Ramox CayaL le signale chez les Batraciens, les Reptiles et les Oiseaux, ces fibres corticales recouvrent latéralement le corps genouillé en formant sur le bord externe de ce corps une sorte de bandelette d’où se détachent des arborisations libres et irrégulières dirigées en dedans. Il faut voir dans ces arborisations, non seulement des terminaisons de quelques fibres optiques, mais encore des collatérales détachées d’autres fibres optiques qui poursuivent leur marche vers le tectum. Ces arborisations terminales entrent en connexions avec les prolongements protoplasmiques de cellules nerveuses propres au corps genouillé, cellules que nous décrirons dans un instant. 2 Fibres profondes (f. p.). — Ces fibres occupent une situation centrale par rapport aux fibres précédentes ; elles se détachent du tractus optique vers sa partie postérieure et interne et nous ont paru provenir de la racine moyenne du nerf optique. Elles se dirigent vers les régions internes du mésencéphale, abandonnant au corps genouillé, dans leur marche à travers le diencéphale, quelques rares collatérales. Nous n'avons pu obtenir une impré- gnation complète de ces fibres qui se confondent d’ailleurs, sur certains points de leur parcours, avec d’autres fibres provenant d’un faisceau étendu du corps genouillé au lobe optique (Fasciculo geniculado-lobular, de P. RAMON CaAJAL). Nous pensons, sans pouvoir toutefois l’affirmer, que ces fibres profondes se terminent probablement dans un centre ganglionnaire situé à la partie interne du lobe optique ? Ce centre correspondrait au « nucleo mesolectal > de P, RAMON CAJAL. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 99 Cellules nerveuses du corps genouillé. — La méthode de Got et surtout celle de Cox démontrent la présence, dans le corps genouillé thalamique, de nombreuses cellules nerveuses de formes et de dimensions variables : 1° Cellules à corps arrondi ou ovoïde, disposées sans ordre défini ou régulier, mais siégeant surtout dans la zone superficielle du corps genouillé ; les dimensions de ces cellules varient de 18 à 23 uv ; leurs prolongements protoplasmiques sont peu développés et leur axone, orienté vers la périphérie du corps genouillé, pénètre dans l'épaisseur des faisceaux de fibres superficielles du tractus optique (a, fig. 31 et 54). 2° Cellules à corps fusiforme ou conique, parfois presque triangu- laire, situées dans la zone profonde du corps genouillé et disposées selon un plan perpendiculaire au tractus opticus (‘). Les dimensions de ces cellules sont en moyenne de 24 à 32 y ; leurs dendrites, assez bien développées, sont orientées vers la partie externe du corps genouillé et entrent en connexions avec les arborisations terminales libres des fibres du tractus opticus ; leur cylindre-axe se dirige en dedans, vers les parties profondes et internes du corps genouillé (b, fig. 31 et 34). Quelie est la destination ultérieure du cylindre-axe de ces cellules ? À quel ordre de fibres doit-il se rendre ? Ces divers problèmes nous semblent au moins aussi difficiles à résoudre chez les Poissons que chez les autres Vertébrés et nous comprenons bien les réserves faites sur ce sujet par P. RAMON CaJAL. Nous devons donc nous borner pour l'instant au simple exposé suivant : du corps genouillé thalamique se détachent des faisceaux ténus et entremêlés composés de fibres nerveuses lâchement assemblées entre’elles ; ces divers faisceaux se dirigent : les uns, en haut vers le noyau pre-tectal ; les autres, en haut et en dedans vers la commissure postérieure, où en bas et en dedans vers le faisceau basal (partie inférieure de ce tractus strio-thalamicus). Mentionnons, enfin, un faisceau dirigé horizontalement et en arrière vers le cervelet. Nous aurons à donner plus tard la description de (1) Nous rappelons que la disposition spéciale de ces cellules par rapport au tractus optieus a été, du reste, déjà signalée par BELLONCI et par P. Ramon CayaL, chez d’autres Vertébrés. 96 E. H. CATOIS. ce faisceau associant le corps genouillé thalamique au cervelet, lorsque nous analyserons les pédoncules cérébelleux (Chapitre Meétencephale). P. Ramon CayaL a signalé, chez le Caméléon et chez les Oiseaux, la présence de petites cellules nerveuses éloilées à cylindre-axe court et ramifié dans l’épaisseur même du corps genouillé; ces cellules correspondraient au type II de GoLGi. Si ces éléments nerveux existent aussi dans le corps genouillé chez les Poissons, ce qui est possible, nous avouons n’avoir pu réussir, jusqu'à ce jour, à les imprégner. Les cellules nerveuses que nous venons de passer successivement en revue forment, dans le corps genouillé thalamique, un certain nombre de #oyaux ganglionnaires peu compacts et en quelque sorte diffus ; la délimitation de ces amas cellulaires est encore moins précise chez les Sélaciens que chez les Osseux. C’est ainsi que nous n'avons pu distinguer nettement dans le corps genouillé, chez les Poissons, les trois noyaux que P. Ramox CayaL a signalés chez le Caméléon (nucleo inferior, medio, y superior). En résumé, il existe dans le corps genouillé thalamique : 1° Des faisceaux de fibres qui traversent ce centre ganglionnaire pour se distribuer à d’autres régions de l’encéphale; ce sont des faisceaux de passage ; 2° Un ensemble de fibres ascendantes formant une voie sensitive optique centrale. Parmi ces fibres, les unes à direction centripète, proviennent de la rétine, constituent une partie du tractus opticus et se terminent dans le corps genouillé ; les autres ont leur cellule d’origine dans le corps genouillé lui-même et partent de ce centre ganglionnaire pour aller se distribuer à d'autres parties de l’encé- phale ; ces fibres ont donc une direction centrifuge par rapport au corps genouillé ; 3 Enfin, des fibres descendantes qui viennent s'épuiser dans le corps genouillé au moyen d’arborisations libres et terminales. Quelques-unes de ces fibres proviennent des lobes optiques et correspondraient aux « Fibras nacidas en el techo optico >» de P. Ramon CayaL; les autres nous ont paru se détacher du bord externe du faisceau basal (pars superior). Mais nous avons vu plus haut (page 95), que l’axone de certaines cellules situées dans la zone superficielle du corps genouillé pénètre dans la bandelette également HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 97 superficielle du tractus opticus; cet axone à trajet périphérique contribue ensuite à former une fibre centrifuge de ce tractus et se rend très probablement à la rétine. Ainsi se trouveraient esquissés, chez les Poissons, les divers chaînons d’une voie descendante optique. Le corps genouillé thalamique nous apparaît done, en dernière analyse, comme représentant tout à la fois un ensemble de relais placés sur le trajet des fibres ascendantes ou descendantes du nerf optique et de centres ganglionnaires multiples dont les éléments réagissent à leur tour sur d’autres centres nerveux. 2 Noyau préetectal (Nucleus præ-tectalis) (Gig.27 et 31, N. pr..). — Ce noyau se présente chez les Poissons sous la forme d’un centre ganglionnaire ovoïde, situé au-dessus du corps genouillé thalamique et en avant du toit des lobes optiques. Les cellules nerveuses qui entrent dans sa constitution sont des cellules multipolaires, étoilées, à corps plus ou moins arrondi, parfois ovale ; elles ont, en moyenne, une dimension variant entre 20 à 30 &. Leurs prolongements protoplasmatiques, orientés vers la parlie externe du noyau prétectal, se divisent à l’intérieur de ce centre ganglionnaire en rameaux grèles et épineux. Leur cylindre-axe se détachant soit du corps même de la cellule, soil de la base d’un prolongement protoplasmatique, se dirige surtoul vers les parties internes ou profondes du noyau prétectal et contribue ainsi à former un certain nombre de fibres centrifuges, par rapport à ce noyau. Nous avons pu constater que parmi ces fibres, les unes relient le noyau prétectal à la comimnissure blanche postérieure ; elles ont alors une direction horizontale et transversale, passent par cette commissure et vont se terminer dans le noyau prétectal du côté opposé (1). Les autres descendent presque verticalement de la partie inférieure du noyau prétectal, se recourbent ensuile en arrière et se dirigent vers la région basale du mésencéphale. Nous n'avons pu les suivre sur une plus grande étendue de leur parcours ; nous pensons, toutefois, que ces fibres correspondent au « Fasciculo descendente > del nucleo pretectal > de P. Ramon CayaL et qu’elles doivent 4) Cette disposition a été signalée déjà par P, RAMON CAJAL chez d'autres Vertébrés P £ Ja ] (Oiseaux et Reptiles). 98 E. H. GATOIS. servir à établir des connexions entre le thalamus et la moelle spinale. 4 Dans le noyau prélectal et autour des cellules nerveuses que nous venons de menlionner, on voit s'épuiser, sous forme de fines arbo- risations terminales, plusieurs fibres ayant des origines diverses : a. Fibres provenant de la commissure blanche postérieure ; b. Collatérales émanées du corps genouillé thalamique et du tractus opticus (1). Nous avons signalé plus haut l'existence de ces différentes fibres (Voir : Commissure blanche postérieure et corps genouillé thala- nique). 3 Noyau antérieur du thalarmus (Nucleus anterior thalami) (Vordere thalamuskern) (N. ant., fig. 27-31). Ce noyau, de forme oblongue, réside dans la partie antérieure des couches optiques. Il est étendu d'avant en arrière, en dessus et en dedans du corps genouillé (halamique, en dessous des ganglions habénulaires. Des cellules et des fibres nerveuses entrent dans sa constitution ; la présence de ces éléments histologiques dans le noyau antérieur du thalamus est déjà révélée par l'aspect pâle et moléculaire sous lequel se montre ce noyau dans les préparalions colorées au carmin ou à l'hématoxyline. L'applicalion des méthodes de Gorar ou de Cox démontre que les cellules, peu nombreuses, sont piriformes, irré- guliéres et de dimensions variables (20 à 40 ) ; les plus grandes de ces cellules tendent à revèlir la forme multipolaire. Le corps cellulaire de ces éléments est généralement orienté en dedans, vers la cavité ventriculaire médiane, tandis que les prolon- gements protoplasmatiques sont dirigés en dehors, vers la péri- phérie. Il est très difficile de poursuivre sûrement la marche de leur cylindre-axe. Chez Scomber, Anguilla, Conger et Cottus, nous avons pu obtenir une imprégnation suffisante de cet axone et des collatérales qui en émanent; nous avons ainsi constaté que la majeure partie des fibres qui sortent du noyau antérieur thalamique (tout au moins (4) Rappelons que P. RAMON CaJaL a indiqué ces collatérales chez le Caméléon et chez le Moineau ; la mise en évidence de ces fibres terminales est plus facile chez les Reptiles que chez les Oiseaux. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 99 par sa face antérieure), pénètre dans le faisceau basal, Ces fibres, centrifuges par rapport au noyau antérieur, établiraient donc des relations entre ce centre cellulaire et le ganglion basal du télen- céphale. Chez Scyllium catulus, en utilisant la méthode de WEIGERT, B. HALLER a, de son côté, constalé des connexions entre le noyau antérieur du thalamus el la région antérieure des lobes opliques. Dans le nucleus anterior thalari nous avons encore obtenu une bonne imprégnation de fibres nerveuses se terminant à l’intérieur de ce noyau sous forme d’arborisations libres {fibres centripètes). Un certain nombre de ces fibres provenait du tractus opticus et abordait ce noyau par sa face externe. D'autres fibres, ayant leur cellule d’origine dans la région hypothalamique (lobes inférieurs), formaient un faisceau ascendant el pénétraient dans le noyau antérieur par sa face inférieure (TC 7h th) En considérant le nucleus anterior thalami comme l’analogue du corpus album Subrotunduin, de VIEUSSENS, ces dernières fibres représenteraient l’ébauche du faisceau de VicQ D’AzZyYr des Mammifères : faisceau thalamo-mamillaire, de EbINGER, qu'il vaudrait mieux appeler faisceau mamillo-thalamique, selon la juste remarque de VAN GEHUCHTEN (!). 4" Noyau rond du thalumus (nucleus rotundus thalami (GAFRRSCH) Ne 70 h6227; 31,32; 94): Ce noyau, situé dans la région moyenne du Thalamus au dessus des lobes inférieurs, constitue chez un grand nombre de Poissons osseux le centre ganglionnaire le plus volumineux et le mieux délimité du diencéphale. Avant d'exposer le résultat de nos investigations personnelles sur la structure de cette partie du cerveau, il nous à paru intéressant d'entrer dans quelques considérations relatives à l'historique de la question. On se rendra compte ainsi du rôle important que jouent, dans l’analyse des centres nerveux, les méthodes techniques de l'anatomie microscopique. (1) A. VAN GEHUCHTEN : Anatomie du système nerveux de l'Homme, 2e édit., 1897, page 624. 100 E. H. CATOIS. Les auteurs classiques attribuent généralement à G. FrITscH (1878) la découverte et la description première de ce noyau énig- matique ; il nous semble cependant que cette priorité doit revenir à BAUDELOT. En effet, dans la séance du 5 mai 1869, cet observateur faisait part à la Société des Sciences Naturelles de Strasbourg d’une communication « Sur un petit centre nerveux qui se trouve en rapport avec le faisceau postérieur de la commissure de HALLER, chez l'Épinoche ». Dans cette « Observation > (1) BAUDELOT désignait sous le nom de nodule cominissural un pelit noyau de substance nerveuse, à contour parfaitement délimité, situé dans l’épaisseur de la substance grise qui constitue le pédicule du lobe inférieur, et appendu comme un graïin de raisin à l'extrémité de chaque branche d’une commis- sure environnant en manière de demi-lune le érigonum fissum : (Commissure du trigone). BAUDELOT indiquait ensuite les autres rapports de ce nodule commissural : « de sa face inférieure on voit > se détacher un pinceau de fibres qui plonge dans le lobe inférieur > correspondant ; de sa face supérieure part un autre faisceau qui > va se perdre dans la base du renflement semi-lunaire du même » côté (?); du bord antérieur enfin, et un peu en dehors du » point d'implantation de la commissure du trigone, se détache > un troisième faisceau qui se porte directement en avant > jusqu'à la base du nerf optique, dans lequel on voit passer > quelques-unes de ses fibres ; le reste du faisceau se confond > avec la substance blanche qui borde en arrière le troisième ventricule ». Procédant enfin à l’analyse microscopique du nodule commissural, BAUDELOT constatait les particularités suivantes : « Sous un grossis- > sement de 30 à 40 diamètres environ, ce nodule offre l'aspect d’un > petit corps arrondi, dans l'intérieur duquel on apercoit un très > grand nombre de pelits espaces clairs, de forme variable, très » Ÿ (4) Nous nous permettons d'appeler l'attention du lecteur sur cette très intéressante communication qui nous paraît avoir été ignorée ou tout au moins oubliée; nous regrettons de ne pouvoir en reproduire, à cette place, le compte rendu entier (voir Bulletin de la Société des Sciences Naturelles de Strasbourg. N° 3, avril et mai 1869, 2° année. (2) Cette partie basale du renflement semi-lunaire à laquelle BAUDELOT fait allusion correspond très probablement à la partie latérale et basale du #Wésencéphale? (Torus semi-cireularis, Ganglion laterale mesencephali). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 101 > rapprochés les uns des autres et séparés seulement par un peu > de substance d'apparence granuleuse....……. > En pratiquant des coupes directement sur le nodule commis- > sural, on constate que ce petit corps est formé d’un mélange de > fibres nerveuses fines, de cellules nerveuses et d’une faible » quantité de substance granuleuse interposée. Les fibres nerveuses > proviennent des divers faisceaux signalés précédemment avec > lesquels le nodule se trouve en rapport. En pénétrant dans Île > nodule, ces fibres paraissent se replier sur elles-mêmes et > s’enchevêtrer ; elles se groupent de manière à circonscrire de > petits îlots, dans l’intérieur desquels se trouve compris un certain > nombre de cellules nerveuses ». Suivait ensuite la description minutieuse de ces cellules. Nous sommes heureux d’avoir pu rendre hommage à la mémoire de l'observateur distingué qui concluait ainsi sa savante communi- cation: « Par sa structure, le nodule commissural paraît donc > représenter #n petit centre nerveux vers lequel convergent des > fibres nerveuses énranées de divers points de l’encéphale ; ces > fibres se trouveraient mises en rapport les unes avec les autres »> par l'intermédiaire de petites cellules nerveuses. Cette disposi- » tion toute particulière des éléments nerveux dans l'intérieur du »> nodule mérite d'appeler sur ce petit organe l'attention des > histologistes ». Quelques années plus tard, GusTAVE FrirscH (1878) étudiait à son tour ces deux corps arrondis situés vers la base des lobes inférieurs et les désignait sous le nom, demeuré classique, de « Nuclei rotundi»>. Get observateur reconnait que les éléments histologiques constituant le noyau rond ont une disposition particulière qui rappelle l'agencement des éléments dans le bulbe olfactif : « Die histologischen Elemente, welche den complex bilden, » sind von eigenthümlicher Beschaffenheit und erinnern an »> gewisse Elemente des Bulbus olfactorius > (loc. cit., p. 56). Puis il indique la présence dans les noyaux ronds de groupes cellulaires, de faisceaux de fibres nerveuses et de vaisseaux sanguins ; il désigne enfin sous le nom de commissura horizon- talis une commissure recourbée en fer à cheval, située en arrière de la commissure inférieure, dirigée transversalement et reliant les deux noyaux ronds l’un à l'autre. 102 E. H. CATOIS. En 1885, G. BELLONCI employa la méthode technique de ExNER (!{) pour l'étude analytique des noyaux ronds, chez Macropodus viridi- auratus et insista sur la présence, à l’intérieur de ces noyaux, de glomérules analogues à ceux que l’on observe dans le bulbe olfactif. Admettant, en outre, des relations directes entre les noyaux ronds et le bulbe olfactif, par l'intermédiaire des pédoncules cérébraux (tractus strio-thalamicus), ce savant considéra les noyaux ronds comme représentant, au sens physiologique, de vrais centres olfactifs. « …. la Struttura dei nuclei rotondi è affalto simile a quella dei » bulbi olfattori, in ispecie per una particolarità, la presenza > cioè dei glomeruli olfattori, che non Si riscontra in nessun » altra regione dei centri nerrosi..…. La presenza di Simili » corpuscoli nei nucleirotondi dei Macropodi e di altri Teleostei, 7 » la connessione dirella di questi nuclei coi bulbi olfallori, à > rapporti che essi hanno Simili a quelli dei bulbi olfattori, » aulorizzano «à Considerare? nuclei rotondi come veri corpi » olfattori, nel senso fisiologico > (G. BeLzLoncr 1885). On verra plus loin ce que nous pensons de cette assertion. Dans ses Recherches sur l'histologie el la morphologie du système nerveux des Téleostéens, Marc LE Roux (1887) ne semble pas avoir eu connaissance des travaux publiés avant lui, sur la question ; en tous cas, c’est probablement à un défaut d'interpré- lation qu'il faut attribuer l'erreur que commet cet observateur, lorsque, reproduisant dans la fig. 13 de son travail une coupe transversale passant par les lobes optiques et les lobes inférieurs de Labrus, il dessine bien les noyaux ronds, mais les considère comme des faisceaux pédonculaires passant au-dessus des lobes infe- rieurs pour aller former les pédoncules cérébraux (f[. p. c.). On doit à un professeur de l'Université de Chicago, HERRICK (1895), une bonne description du Nucleus rotundus, de FrirscH ; ce savant insiste avec raison sur la présence de vaisseaux nombreux, dans ce centre ganglionnaire: « The number of blood'-vessels is greater > here than in any other part of the brain. These vessels come » into intimale connection with the cells. Everything indicates a > tremendous vilal activity and a complexe interchange of » nervious shimuli >. (1) Coloration myélinique et durcissement des gentres nerveux par l'acide osmique à 1/200 ; éclaircissement des préparätions au mo;en d'une goutte d'ammoniaque, ete. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 103 Toutefois, et pour des raisons que nous indiquerons plus loin, nous ne pouvons souscrire aux conclusions formulées par cet obser- valeur, en homologuant le nucleus rotundus avec le noyau rouge (nidulus ruber) des Vertébrés supérieurs (!). Ainsi que nous venons de l’exposer, les méthodes techniques employées jusqu'à ce jour par nos devanciers dans l'étude analy- tique du Nucleus rotundus (coloralion au carmin, à l’hématoxyline, méthode de EXNER, etc.) ont donné entre leurs mains tous les résultats qu’elles pouvaient fournir. Nos recherches personnelles ont été effectuées, au moyen des méthodes de GoLer et de CayaL (double et triple imprégnation), sur de frès jeunes exemplaires de Platessa, Scomber, Labrus, Cottus et Callionynius, notamment. Disons-le de suile : rien n'est plus difficile que d’obtenir d'emblée une bonne imprégnation des éléments constituant le noyau rond thalamique chez les Poissons. Tout en complant sur un heureux hasard, 1l faut ici surtout, avoir gravées dans l'esprit les paroles de S. R. CayaL : « On ne doil espérer parvenir au succès > qu'après de longs mois et des essais multiplies et persévérants ». Il faut répéter, et répéter les préparations (?). Incité par une expérience déjà longue, nous ajouterons encore : pour se placer dans les meilleures conditions de réussite, il est nécessaire de ne soumettre à l’action des réactifs usités en pareil cas que des fragments de petites dimensions, prélevés dans la masse totale de l’encéphale, fragments seclionnés et compris, par exemple, entre les lignes de repère (3 et 4, fig. 24, PL. x). Dans la description des éléments histologiques constituant le Nucleus rotundus thaluini nous adopterons le plan méthodique suivant : a. Étude des cellules nerveuses ; b. Étude des faisceaux de fibres ; c. Rapports généraux du noyau rond et signification probable de ce centre ganglionnaire. (1) A propos du nucleus rotundus, il nous semble utile de rappeler qu’en jetant un coup d'œil sur la fig. 81 du savant ouvrage de EDiNGER : Vorlesungen ..u.. d. Bau d. Nerv. Centralorg. (1896), on peut se rendre compte des résultats de l'application de la méthode de GoL&t à l'analyse du Thalamus optieus chez un Saurien (Orvet, Auquis fraqilis, Blindschleiche). (2) Les Nouvelle idées sur la structure du système nerveux chez l'Homme. et chez les Vertébrés, par S. R. CagAL (Traduct. AZOULAY), Paris, 1894 (page 184). 104 E. H. CATOIS. a) Étude des cellules nerveuses. — Ces cellules, de forme et de dimensions variables, appartiennent à la catégorie des cellules multi- polaires; quelques-unes d’entre elles sont triangulaires, les autres sont fusiformes ou arrondies. Relativement petites, elles ont un diamètre moyen de 8 à 16 uw. Ces cellules sont en général réparties de la façon suivante: rares el espacées au sein du noyau rond, elles se localisent de préférence dans la zone superficielle, formant ainsi une sorte de réseau cellulaire à la périphérie de ce centre ganglionnaire. Ou peut facilement constater cette particularité et juger de la disposition de ces éléments nerveux lors de la confection des coupes et dès que les sections intéressent la surface du noyau rond (He) SL UNE 70): Les prolongements protoplasmatiques de ces cellules, au nombre de 2 à 6, en moyenne, sont étendus et ramifiés à l’intérieur du noyau rond ; quelques-uns de ces prolongements se terminent par un bouquet d’arborisations variqueuses assez touffues, semblables aux arborisations complexes, épaisses et moniliformes des expan- sions protoplasmiques des cellules mitrales du bulbe olfactif. Nous indiquerons plus loin le rôle de ces bouquets de branches termi- nales. Le cylindre-axe se détache soit du corps même de ces cellules, soit de la base d’une de leurs dendrites, se dirige vers la zone périphérique du aucleus rotundus, prend une part effective à la constitution de cette zone corticale et contribue enfin à former une fibre nerveuse sortant du noyau rond et dont nous aurons plus lard à étudier la marche. b) Étude des faisceaux de fibres (fig. 27, PL vi). — Nous diviserons ces faisceaux en deux catégories : les fibres de la première catégorie ont leur cellule d’origine située en dehors du nucleus rotundus ; réunies en faisceaux plus ou moins volumineux, plus ou moins compacts, elles abordent ce noyau rond en un point déterminé, pénétrant ensuite à l’intérieur de ce centre ganglionnaire; ce sont donc des fibres à direction centripète, par rapport à ce noyau. Les fibres de la seconde catégorie ont leur cellule d’origine dans le nucleus rotundus même et sortent ensuite de ce corps ganglion- naire, ainsi que nous l’avons indiqué quelques lignes plus haut; ce sont, par conséquent, des fibres à direction centrifuge. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 105 Nous considérons comme appartenant à la première catégorie : 4° Un ensemble de fibres et de collatérales provenant de la partie supérieure du Tractus Slrio-thalamicus (faisceau basal du cerveau antérieur) ; ces fibres abordent le noyau rond par sa face antéro- supérieure et se divisent à l'intérieur de ce noyau, ainsi que EbiNGER le mentionne du reste : « Jin nucleus rotundus splittern »> die züge des Tractus Striolhalanicus zu feinen Pinseln auf». 2 Un groupe de fibres procédant de la connnissure horizontale de Frrrsca ; ces fibres ont elles-mêmes une direction horizontale et péuêtrent dans le noyau rond par sa face antérieure. 3 Un faisceau grêle composé de fibres éparses provenant du corps genouillé thalamique et abordant le noyau rond par sa face latérale externe. Ce faisceau nous semble correspondre à celui qui a été signalé par G. BELLONCI (1885) : « fascelto che dal nucleo rotondo va a » risolversi presso il Corpo genicolato esterno ». 4% Enfin, un faisceau de fibres émanant de la partie antérieure et latérale du plancher des lobes optiques et dirigé verticalement de haut en bas; les fibres constituant ce faisceau ont leur cellule d'origine en arriére de la cominissure blanche postérieure, et à peu près sur le même plan que le noyau prétectal. 11 nous parait probable que ce faisceau correspond à celui qui est décrit par B. HALLER (1898) (page 596) sous le nom de: « laterale dorso- » ventrale Zwischenhirnbahn >. Après avoir pénétré dans le noyau rond par sa face supérieure, ce faisceau abandonne à ce centre ganglionnaire un certain nombre de collatérales et de fibrilles terminales, puis, décrivant une courbe à concavité antérieure, traverse le nucleus rotundus en entier et sort de ce noyau par sa face antérieure pour aller se perdre, enfin, au voisinage de la Convnissure inférieure post-oplique (d.z3.b., fig. 27). Examinons maintenant comment se terminent, à l’intérieur du noyau rond, les divers faisceaux que nous venons de décrire. On conçoit qu'il est très difficile, sinon impossible, de poursuivre chacune de ces fibres depuis son entrée dans le noyau rond jusqu’à son lieu de terminaison. L'imprégnation des éléments histologiques au moyen de la methode de GoLGt étant parfois irréguliére et souvent incomplète, on ne saurait d’ailleurs garder trop de réserve dans l'interprétation des images obtenues. Nous pensons toutefois pouvoir 106 E. H. CATOIS. dire d’une façon générale que les fibres nerveuses se divisent et se subdivisent à l’intérieur du nucleus rotundus, s’y terminant tantôt sous forme de fines ramifications libres, tantôt sous forme d’arbori- sations assez complexes qui rappellent, par leur aspect, les branches terminales des fibrilles olfactives à leur entrée dans les glomérules du bulbe olfactif. Pour compléter la similitude, nous ajouterons que ces arborisa- tions fibrillaires entrent en contact avec les arborisalions variqueuses des cellules nerveuses que nous avons signalées plus haut. Toutes ces fibrilles el toutes ces ramifications terminales enchevêtrées, entremêlées, constituent dans le noyau rond ces petites masses sphéroïdales observées par les auteurs et dont l'apparence gloméru- laire est si caractéristique. La seconde catégorie de faisceaux de fibres du noyau rond est représentée, avons-nous dit, par l'assemblage des cylindres-axes émanant de cellules situées dans ce noyau même. Les fibres qui constituent ces faisceaux peuvent être divisées en deux groupes distincts : les unes sortent du nucleus rotundus par sa face antérieure, les autres s’en échappent par sa face postérieure. Les premières, dirigées d’arrière en avant, se jettent soit dans la conunissure horizontale de Frirsc (com. Fr.) pour aller se terminer {ès probablement dans le noyau rond du côté opposé, formant ainsi les fibrilles terminales que nous avons vues, plus haut, procéder de celte même commissure horizontale el pénétrer dans le noyau rond, également par sa face antérieure ; soit dans diverses commissures occupant la région antérieure de l’Æypotha- larus: decussalio supra-infundibularis, decussatio tuberis, decussatio transversa. On peut analyser ces fibres au moyen de coupes effectuées dans le sens horizontal et suivant les lignes de repère (1 et 2, fig. 25). Les secondes, dirigées d’avant en arrière et de haut en bas, se rassemblent vers la partie postérieure du noyau rond, formant un large pinceau que l’on peut voir plonger et s'épanouir dans la région postérieure de chaque lobe inférieur (coupes sagillales suivant la ligne de repère 1, fig. 23). Nous retrouverons ces fibres, en faisant, plus loin, l'étude des lobes inférieurs. c) Rapports généraux du noyau rond et signification probable de ce centre ganglionnaire. — Ainsi qu'il ressort de l'exposé que HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 107 nous venons de faire, le aucleus rotundus thalami se trouve en relations avec des faisceaux provenant de régions diverses du cerveau (télencéphale, diencéphale, mésencéphale), faisceaux qui lui abandonnent de nombreuses branches terminales ; le nucleus rotundus, vrai centre ganglionnaire, réagit par l'intermédiaire de ses propres cellules nerveuses et émet à son tour des fibres qui se distribuent à d’autres parties du territoire de l’encéphale. Nous ne nous attarderons pas à discuter les opinions diverses émises par les auteurs relativement à l'homologie du noyau rond. On voudra bien toutefois nous permettre deux remarques : 1° n’étant pas l’aboutissant des fibres du pédoncule cérébelleux supérieur et n'élant traversé, en aucun point, par les faisceaux radiculaires du uerf moteur oculaire-commun, le #ucleus rotundus ne saurait, à notre avis, représenter le #ucleus ruber legrmenti des autres Vertébrés, ainsi que semble l'indiquer HeRRICK (1893) ; 2° D’un autre côté, si le noyau rond est en relations avec les centres olfactifs, ce qui est possible, ces relations s'effectuent en tout cas par une voie indirecte et détournée, c’est-à-dire par l’intermé- diaire des fibres descendantes du fractus strio-thalamicus. I n'existe pas, du moins selon nous, de connexions directes entre les centres olfactifs et le noyau rond thalamique ; aussi ne pouvons-nous altribuer à ce noyau rond le rôle d’un rai centre olfactif au sens physiologique, comme l'a déclaré G. BELLONCI (1885). Le nucleus rotundus thaluri constituerait, pour nous, un centre ganglionnaire important et à fonctions multiples : Centre passif, il recueillerait des impressions et des impulsions lui parvenant de sources variées ; centre actif, il transformerait, en les renforçant peut-être, ces impressions et ces impulsions, pour les distribuer ensuite à d'autres régions de l’encéphale. Telle serait, en résumé, la signification probable de ce centre ganglionnaire (!). (1) On comprendra facilement la réserve que nous apportons dans nos conclusions. N'envisageant ici le sujet qu'au point de vue « fopographie nerveuse », nous ne préten- dons pas résoudre un problème qui se rattache, en somme, à la physiologie du système nerveux ; d’ailleurs, d’autres plus compétents et plus autorisés que nous ont tout récemment exposé les théories morphologiques de ce système et les interprétations physiologiques de son fonctionnement. — Voir dans Æevue générale des Sciences pures et appliquées, Tome XI, n°% 1 et 2 (janvier 1900), le savant article de A, PRENANT : « Les Théories du Système Nerveux ». 108 E. H. CATOIS. » Les faisceaux de fibres nerveuses du thalanius. — Pour éviter de tomber dans des redites, nous limiterons ici notre étude à une analyse rapide de ces faisceaux, déjà décrits en partie dans les pages précédentes. Les faisceaux du thalamencéphale sont du reste connus, tout au moins dans leurs grandes lignes, leur trajet ayant été dessiné de main de maître par plusieurs savants et notam- meut par EDINGER, CAJAL et VAN (TEHUCHTEN. Les coupes effectuées suivant le sens sagittal permettant de consi- dérer ces faisceaux sur un plus long parcours, sont celles qui conviennent le mieux pour donner une idée générale de leur mode de distribution (voir fig. 27, PL. vi). L'examen de ces coupes démontre nettement que le thalamen- céphale représente essentiellement une région de passage pour la majeure partie des fibres nerveuses qui traversent son territoire, avec quelques J'elais, placés sur les voies de certaines d’entre elles. 1" Commissure blanche postérieure (Com. post.). (Voir la description que nous en avons faite au S Epithalamus, page 90). — Nous rappelons seulement que cette commissure étant dirigée transversalement, sa présence ne se révèle sur une coupe sagittale que par un pointüllé correspondant à la section des fibres qui la composent. 20 Faisceau de Meynert (Fasc. retro-flexus, Tractus habenulo- peduncularis) (F. 7. f.) — Ce faisceau a été bien étudié, chez les Poissons, par Vax GEHUCHTEN (1894) qui a pu obtenir, sur de jeunes Truites, une imprégnation réussie de ses éléments constitutifs. Onsait, maintenant, que les fibres nerveuses de ce faisceau ont leur cellule d’origine dans le ganglion de l'habenula ei leurs terminaisons dans le corps interpedonculaire. Le tractus habenulo-peduncularis est done constitué par des fibres descendantes ou centrifuges (par rapport au ganglion de l’habenula) et doit représenter un des chaînons d’un arc nerveux réflexe assez complexe. 3 Tractus thalamo-mamillaris (de EniNGEr), mediale dorso- ventrale zwischenhirnbahn (de B. HazLEr), homologue probable du faisceau de Vice p’Azyr des Mammifères (F. 2. th.) (Voir page 99). 4° Un faisceau décrit par B. HALLER (1898) sous le nom de /aferale dorsoventrale Re et que nous avons mentionné plus haut (4. z. b.) (page105). HISTOLOGIE KT ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE GHEZ LES POISSONS. 109 » Tractus diencephalo-cercbellares(Ped. ce. a.). — Nous conti- nuerons à désigner ainsi, avec EpiNGER, l’ensemble des faisceaux de fibres qui associent le thalamus avec le cervelet, nous réservant de faire, dans un autre chapitre, l'étude complète et détaillée de ces divers faisceaux (!). Ces tractus, disons-le dès à présent, correspondent en somme aux Pédoncules cérébelleux antérieurs (supérieurs, chez les Mammifères) et se présentent dans le thalamus sous forme de deux faisceaux disuncts, différemment étagés: 1° Brachium antero- superius (obere vordere Bindearm); 2° Brachium antero-inferius (untere vordere Bindearm). B. HALLER (1898) a donné une bonne description de ces divers tractus (voir : B. HALLER, loc. cil., pages 552 et suivantes, Klein- hirnbahnen). 6° Tractus opticus (Tr. op.). — Nous avons étudié, plus haut, les connexions qui existent entre ce tractus et le thalamencéphale (voir page 93); nous indiquerons plus loin le mode de terminaison de quelques-unes des fibres de ce tractus dans le toit des lobes optiques (voir chapitre IT, Mésencéphale). 7° Tractus Strio-thalamicus (faisceau basal ou faisceau pédoncu- laire) (F. b., F. Db.7). — Nous connaissons, pour l'avoir étudié déjà en parlie, ce faisceau compact de fibres nerveuses qui relie le cerveau antérieur aux parties sous-jacentes du névraxe (2). Suivant la juste remarque de VAN GEHUCHTEN qui a analysé avec soin le &actus-strio-thalamicus chez plusieurs Vertébrés inférieurs, les auteurs ne sont pas d'accord sur les connexions qui s’établissent, par les fibres de ce faisceau, entre les masses grises du télencéphale et les parties sous-jacentes. EDINGER, estimant que les fibres de ce faisceau ne s'étendent que jusque dans le diencéphale et qu’elles relient le cerveau antérieur aux masses grises du thalamus, désigne ce faisceau sous le nom de s{rio-thalamique (*). Nous rappelons que (t) Voir: 3° partie, Chapitre IV : Wétencéphale (voies cérébelleuses), pour l'analyse et la synonymie de ces faisceaux. (2) Voir : 3° partie, Chapitre I et Chapitre II, la description de ce faisceau et ses connexions avec les noyaux du thalamus. (3) A. Van GEHUCHTEN : Le ganglion basal et la commissure habénulaire dans l'encéphale de la Salamandre (Bulletins de l'Acad. Roy. des Se., Lettres et Beaux-Arts de Belgique, 67° année, 3° série, Tome xxxiv, 1897). 110 E. H. GATOIS. ce faisceau est composé de deux sortes de fibres : les unes 72otrices, descendantes, centrifuges par rapport au ganglion basal, occupent la partie supérieure ou dorsale du faisceau ; les autres sensitives, ascendantes, centripètes par rapport à ce même ganglion, résident dans la partie inférieure ou ventrale du faisceau pédonculaire (voir page 67). Chez la Salamandre, VAN GEHUCHTEN ayant pu poursuivre une grande partie du faisceau basal jusque dans la région supérieure de la moelle épinière, déclare que le nom de #ractus strio-thalamicus ne saurail convenir à ce faisceau. Cet observateur distingué à cons- talé, de plus, que les fibres z1otrices et sensitives de ce faisceau peuvent se poursuivre directement: les premières, jusque dans le cordon antérieur de la moelle (faisceau-strio-spinal), les secondes, jusque dans le cordon antéro-latéral de la moelle épinière (faisceau medullo-bulbo-ponto-cérébral), après entrecroisement dans la commissure de HALLER (VAN GEHUCHTEN, loc. cil., pag. 55 et suiv.). Chez les Poissons, nous n'avons pu voir les fibres de la partie dorsale du faisceau pédonculaire (fibres motrices) se continuer directerient avec le cordon antérieur de 1a moelle; ces fibres s’épuisent en partie dans le thalamus et l’hypothalamus, en partie aussi, dans les régions basilaires du mésencéphale, ainsi que nous le verrons plus loin. Quant aux fibres de la partie ventrale du faisceau basal (fibres sensilives), nous pensons qu’elles proviennent surtout de la région de l'infundibuluin ; c'est en effet dans cette région que nous avons constaté la présence des cellules d’origine de plusieurs d’entre elles. Nous ne voyons donc aucun inconvénient à conserver au pédon- cule cérébral, tout au moins chez les Poissons, le nom de #actus strio-thalamicus. 8" Comamissure horizontale de Frirscu (Com. Fr.) (Kommissur der runden Kerne), de B. HALLER (loc. cit., p. 601). Nous ne faisons que rappeler ici, pour mémoire, l'existence de cetle commissure étudiée précédemment à propos du nucleus rolundus thalami (page 101). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPIALE CHEZ LES POISSONS. 111 S IT — L'hypothalamus. (Région sous-thalamique. — Base du cerveau intermédiaire). On sait que cette région sous-thalamique a longtemps exercé la sagacité des anatomistes, au point de vue de la détermination et des homologies de ses parties constiluantes (anatomie descriptive et comparée). Désirant rester fidèle au programme que nous nous somines tracé, nous n'avons pas, à propos de lhypothalamus, à entrer dans des considérations relalives à l’embryogénie ou à la morphologie ; nous avons donc laissé de côté, pour l'instant, l'étude du chiasma optique, de l'hypophyse et des sacs vasculaires. Nos recherches ont porté principal. ment sur cette parlie nerveuse équivalant à un diverticule du plancher du thalamencéphale et désignée, dans son ensemble, sous le nom de: énfundibulum et sur une des annexes de cette partie nerveuse: les /obes inférieurs. Cette région encéphalique, ainsi délimitée, est constiluée par l'assemblage d'éléments histologiques variés : cellules de névroglie et cellules épendymaires, cellules et fibres nerveuses. Étude des fibres nerveuses de l'hypothalamus.— Ces fibres sont diversement disposées : tantôt elles prennent naissance ou se terminent dans l’hypothalamus même, tantôt elles traversent cette région en formant une série échelonnée de conunissures en arc (commissurbogen) à direction plus au moins horizontale. Non seulement chez les Vertébrés inférieurs, mais aussi chez les Vertébrés supérieurs, l'analyse de ces diverses commissures est très difficile ; aujourd'hui encore, la plus grande incertitude règne sur l'origine des fibres qui les composent. Il semble, du reste, que les auteurs aient pris plaisir à multiplier le nombre des faisceaux qui les constituent et les dénominations qui servent à les désigner. Nous allons essayer de démêler cel ëécheveau embrouillé et de pénétrer, nous aussi, dans ce fourré inextricable qui a pour noms : décussations, entre-croisements ou commissures de la région sous- thalamique. Au moment d'entrer dans le labyrinthe, avec la méthode de GoLe1 pour seul fil d'Ariane, il nous revient à la mémoire certains passages 112 E. H. CATOIS. du savant article récemment paru dans la Revue générale des Sciences pures et appliquées et dù à la plume du professeur A. PRENANT (1): « Avec la méthode de GoLGi, nous ne sommes pas > cerlains d’avoir tout vu, ni d’avoir bien vu, parce qu'avec > cette méthode, les conditions de l'observation microscopique > n’offrent pas une garantie de sécurité suffisante. Obligé d'examiner > dans des préparations assez épaisses, à des grossissements > relativement faibles, des filaments noirs qui s’entrecroisent sur > différents plans, on a une réelle peine à distinguer s'il s’agit > d'anastomoses réelles de ces filaments ou de simples entre- > croisements, et tous les points où il y a des superpositions > deviennent des points dangereux » (?}. Les coupes sériées, effectuées suivant le sens horizontal (entre les lignes de repère 1 et 2, fig. 22 et fig. 25), sont celles qui permettent le mieux de prendre connaissance des fibres commissurales de l'hypothalamus et d’en faire l'analyse. On peut diviser ainsi la région sous-thalamique en deux zones : la première zone, située en avant de l’infundibulum et en arrière du chiasma, occupe par conséquent une position post-optique ; elle présente à étudier successivement et de haut en bas plusieurs fais- ceaux de fibres commissurales : Commissure post-chiasimatique, conumissure transversale de HALLER, décussation du faisceau du manteau, décussation du corps cendre ; la seconde zone, située en arrière et au-dessus de l'infundibulum, est en rapport avec la partie antérieure du plancher du Mésencéphale et renferme un certain nombre de fibres entrecroisées dont l’existence a été signalée par EDINGER : decussatio Supra-infundibularis, decussatio hypo- thalamica Superior, etc. De l'aveu même de ce savant, un des plus autorisés sans contredit, nos connaissances sont loin d’être complètes relativement à la com- position et à la signification de ces divers faisceaux : « Alle diese > Züge sind noch recht wenig geklärt > (®). (1) Loc. eit., n° du 30 janvier 1900 « Les Théories du système nerveux ». Les voies conductrices, page 72. (2) On ne saurait exposer en meilleurs termes les difficultés d'interprétation inhérentes au sujet qui nous occupe; aussi l’auteur voudra-t-il nous pardonner l'emprunt que nous venons de faire à son intéressante monographie, (3) EniNGer. Vorles. u. d. Bau. d. Nerv. Centr. (5° édit., page 137). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 1: Indiquons le résultat de nos investigations à propos de quelques- unes de ces décussations et commissures. 1° Commissure post-chiasmatique (Com. P. ch.). — Cette com- missure correspond très probablement à la commissure de MEYNERT des Vertébrés supérieurs ; elle est située immédiatement en arrière du chiasma et se laisse difficilement distinguer des fibres entre-croi- sées du tractus opticus. Nous avons pu l’observer nettement chez Cottus bubalis. Les fibres qui la constituent proviennent d’un amas de cellules nerveuses groupées vers la parlie inférieure et latérale de l’'Hypothalamus, ganglion ectomamillare, de EbiNGER. Après s'être entre-croisées au voisinage de la ligne médiane, ces fibres vont se terminer dans le ganglion ecto-mamillaire du côté opposé. 2° Décussalion où commissure transversale de HALLER. (Com- missure de GUDDEN. — Commissure inférieure. — Commissure post- optique) (Com. Hal.). Située, comme la précédente, en arrière du chiasma des nerfs optiques, cette commissure est surtout nettement visible au niveau de sa partie médiane, tandis qu'elle se confond, par ses parties laté- rales, avec les fibres du tractus opticus. Ajoutons que le faisceau basal du cerveau antérieur ({ractus-strio-thalam.) passe au-dessus d’elle, en la croisant presque à angle droit. Nous avons indiqué, plus haut, les rapports que cette commissure affecte avec certains faisceaux du thalamus et avec le noyau rond ; examinons maintenant la provenance et le mode de terminaison des fibres constituant la commissure de HALLER, en d’autres termes : de quels centres ganglionnaires proviennent les fibres «le la commis- sure de Gudden? Où et comment ces fibres se terminent-elles ? Chez d’autres Vertébrés (Oiseaux, Reptiles et Batraciens), STIEDA, SCHULGIN, BELLONCI, EDINGER, PERLIA, PEDRO et S. R. CAJAL ont essayé de résoudre ces problèmes, sans qu'un succès complet ait couronné Jeurs efforts ; les mêmes difficultés nous attendaient, du reste, lorsqu'il s’est agi, au cours de nos recherches, d'analyser cette commissure chez les Poissons. Prenant pour point de départ la partie médiane ou post-chiasma- tique de la commissure transversale de HALLER, nous avons bien vu certaines fibres, provenant de cette commissure, pénétrer d’abord dans un amas de cellules nerveuses situé en avant et en dehors du 8 114 E. H. CATOIS. noyau rond et abandonner quelques collatérales à ce groupe cellu- laire assez diffus, en somme, qui correspondrait, selon nous, au « ganglio talamico de la comisura > de PEDRO RAMON CayaL (!); nous avons ensuile conslalé qu'après avoir traversé cette masse ganglionnaire, la plus grande partie de ces fibres se dirigeait vers les couches profondes du mésencéphale (toit des lobes optiques, ganglion de l'isthme). Mais comme 1l nous a été impossible de poursuivre avec sécurité le trajet de ces fibres dans des régions où elles se trouvent, d’ailleurs, enchevêtrées avec d’autres faisceaux : tractus tecto-spinales et tecto-bulbares, nous eslimons que des recherches complémentaires sont indispensables pour élucider ce point spécial de topographie nerveuse. Quoi qu'il en soit, nous n’avons pu constater dans la commissure de HALLER, chez ïes Poissons, la disposition signalée par VAN GEHUCHTEN chez la Salamandre (?), c'est-à-dire : wne décus- sation des fibres de la voie sensitive centrale, fibres qui peuvent être poursuivies jusque dans la moelle épinière. Conservant au ganglion de l'isthine, où semble prendre naissance la majeure partie des fibres Ge la commissure inférieure, le rôle de ganglion de transition qui lui a été attribué par STiEpA (Uebergangsganglion), nous pensons que la commissure de GUDDEN ou de HALLER représente essentiellement un système de relations établi, à travers le diencèphale, entre les noyaux de substance grise situés dans les parties postérieures et latérales des deux moitiès du mésencéphale. 3 Décussation du faisceau du manteau (Kreuzung der Mantelbündel). — Cet entre-croisement des deux faisceaux du manteau derrière le chiasma optique, chez la plupart des Sélaciens, est un fait bien connu, surtout depuis les travaux de EDINGER : B. HALLER a étudié de nouveau la question, en analysant avec soin les rapports du Mantelbündel avec les commissures post-optiques, chez Scyllium catulus (B. HALLER, loc. cit., pages 578 et suivantes). Nos recherches personnelles, entreprises sur de #rès jeunes (1) Pepro RAMON CaJaL : Centros Opticos de las Aves (in Aev. trim. micrograf., Tomo III, 1898, page 162). (2) A. vAN GEHUCHTEN : Le ganglion basal et la commissure habénulaire dans l'encéphale de la Salamandre (in Bulletins de l'Acad. Roy. des Se., Lettr. et B.-Arts de Belgique, tome XXXIV, 1897), HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 115 exemplaires de Raia batis et Raia clavata, nous permettent de confirmer les constatations faites par ce savant. En arrivant dans l'hypothalamus, le faisceau du manteau de chaque côté se divise en deux parties! une partie interne et une externe; la partie interne passe derrière le chiasma et s’entre-croise avec le faisceau du côté opposé; la partie externe ne prend pas part à cel entre- croisement et plonge directement dans les régions latérales des lobes inférieurs (fig. 36, PI. x, Dec. Trac. pal.). A propos du nantelbündel et pour plus de détails, nous renvoyons le lecteur à la description que nous en avons déjà donnée (voir 3° partie, 1” chapitre, page 83). Il existe probablement encore dans la région post-optique de l'hypothalamus un certain nombre d’autres commissures ou entre- croisements, puisque HERRICH (!) a été amené par ses recherches à en compter au moins six. De fait, lorsque les imprégnations sont bien réussies, on distingue dans cette région, surtout vers la partie médiane, quelques fibres entre-croisées et plus ou moins éparses ; mais il est bien difficile de savoir exactement où ces fibres ont leur origine. Ce qui est certain, c’est que ces commissures, si elles existent réellement, ne doivent représenter que des voies très courtes d'association entre les neurones des régions soit de l’infundibulum, soit du corps cendré, comme la « decussatio tuberis >, par exemple. Quant aux décussations ou entre-croisements dont nous avons mentionné la présence en arrière et au-dessus de linfundibulum, nos recherches sur ce point n’ont pas donné de résultats assez satisfaisants pour qu'il nous soit permis d'en produire l'analyse en toute sécurité. Les lobes inférieurs (Unterlappen) (Z.I.). — On sait que ces lobes arrondis, placés à la face inférieure du cerveau intermédiaire et empiélant même sur la face inférieure du plancher du mésencé- phale ont été, pour nous servir des termes du D°F.Vraur, « ballottés pendant plus d’un siècle entre toutes les homologies possibles et impossibles >. Considérés aujourd'hui comme représentant l'épais- sissement inféricur de la substance grise qui forme les parois de l'infundibulum et de la partie antérieure du ventricule optique, les (!) HERRICH, cité d'après EDINGER (Vorles. ., Nerros. .. Central... page 136), 116 É. H. CATOIS. lobes inférieurs peuvent être homologués avec le {uber cinereurn. ‘étude de leur structure histologique a été, jusqu'ici, quelque peu délaissée et ilne semble pas que ce sujet de recherches ait beaucoup excité la curiosité des observateurs qui n'ont fait qu'effleurer la question. Nous avons donc pensé qu'il pouvait y avoir un cerlain intérêt à indiquer le résultat de nos recherches personnelles sur la structure microscopique des lobes inférieurs considérés : 1° chez les Téléostéens ; 2° chez les Sélaciens. I. Téléostéens (fig. 32, PL.1x ; fig. 27, PL vi). Genres plus spécia- lement étudiés: Gadus, Conger, Anguilla, Platessa, Labrus, Cottus, Scomber, Merlangus, Labrax. Nous aurons à examiner successivement dans l’analyse des lobes inférieurs : a. Distribution des cellules épendymaires ; b. Forme et distribution des cellules nerveuses ; c. Disposition des faisceaux de fibres nerveuses. a. Distribution des cellules épendymaires. — Les cellules épendymaires se présentent à nous avec les caractères habituels que nous avons déjà signalés (V. deuxième partie, page 41). Disposées autour du ventricule de chaque lobe (quand ce ventricule existe), elles s'étendent des parois ventriculaires à la superficie du lobe, rayonnant ainsi en divers sens. Parfois, le prolongement périphérique, au lieu d'être indivis, se subdivise en deux ou trois branches avant d'atteindre la superficie (Mg. 27, M1); b. Forme et distribution des cellules nerveuses. — La présence de ces cellules dans les lobes inférieurs se révèle dans les prépa- rations colorées au carmin ou à l’hématoxyline ; mais c'est surtout la méthede de GoLGr qui permet le mieux d’étudier ces éléments. Appartenant, d’une façon générale, au type aultipolaire, les cellules nerveuses sont ovoïdes ou arrondies, rarement fusiformes ; leurs dimensions varient, en moyenne, entre 12 et 28 u. Relativement à la façon dont elles se disposent dans la substance même du lobe, nous pouvons les grouper ainsi: 40 Cellules voisines de la partie superficielle du lobe: géné- ralement peu volumineuses, leur corps cellulaire est ovoïde ou HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. [17 fusiforme, allongé parallélement au bord périphérique du lobe lui- même ; un prolongement protoplasmatique principal, assez long, part de chacun des pôles de la cellule; les dendrites secondaires, au nombre de 6, 8 ou plus, prennent naissance, soit sur les prolongements protoplasmatiques principaux, soit sur le corps de la cellule. Le cylindre-axe se détache indifféremment du corps cellulaire ou de la base d’une des dendrites et se dirige en dedans, c'est-à-dire vers la partie centrale du lobe. 2 Cellules occupant la partie moyenne du lobe: plus volumineuses que les précédentes, leur corps cellulaire est arrondi irrégulièrement ou ovoide ; elles présentent 4, 5 ou 6 prolongements protoplasmatiques, longs, épineux, à ramifications nombreuses ; leur cylindre-axe est orienté en divers sens et plus ou moins long. Au milieu des cellules de cette zone, nous signalons la présence d’autres cellules nerveuses plus petites et dont le cylindre-axe est court et ramifié à une petite distance de son lieu d’origine; ces éléments nous semblent devoir correspondre aux cellules nerveuses du type IT de GoLGr (neurones d'association). 3 Cellules nerveuses situées dans les parties centrales du lobe et voisines, par conséquent, de la cavité ventriculaire de ce lobe : Ces éléments sont tassés les uns contre les autres ; leur corps cellulaire, arrondi ou ovoide est {oujours dirige vers la cavité ventriculaire ; le pôle orienté vers la périphérie du lobe donne seul naissance aux prolongements protoplasmatiques ; ceux-ci, au nombre de trois ou quatre, sont relativement peu étendus, dirigés eux-mêmes vers la partie corticale du lobe et couverts d’épines très nombreuses. Le cylindre-axe est long et se dirige le plus souvent vers les régions supérieures du lobe. c. Disposition des faisceaux de fibres nerveuses. — Les faisceaux de fibres que l’on observe dans les lobes inférieurs affectent des dispositions et des directions variées. Mieux que ne saurait le faire la description la plus minutieuse, un simple coup d'œil jeté sur les fig. 27 et 32 permettra d'envisager, dans son ensemble, la marche de ces faisceaux. Nous proposons de les classer ainsi : 1° Fibres non réunies en faisceaux, espacées et dirigées parallè- lement au bord périphérique du lobe inférieur ; ces fibres sont 118 E. H. CATOIS. surtout nettement visibles sur des coupes vertico-transversales et nous les désignerons sous le nom de fibres circulaires ou en sangle (fig. 32, f. c.). 2° Fibres groupées en faisceaux plus ou moins volumineux, plus ou moins compacts, à direction oblique ou verticale ; ces fibres peuvent être divisées en deux catégories : La première calëégorie comprend des fibres dirigées de bas en haut, provenant de cellules nerveuses situées dans le lobe inférieur lui-même et sortant de ce lobe, soit par sa partie antérieure, soit par sa partie postérieure, soit enfin, par sa partie interne. a. Faisceaux de fibres sortant du lobe inférieur par la partie antérieure de ce lobe : ces fibres émanent d'un groupe cellulaire diffus situé dans la région antérieure du lobe et se rendent, soit dans le télencéphale (fibres ventrales ou ascendantes du faisceau basal du cerveau antérieur), soit dans diverses commissures de l'hypotha- lamus (!) (fig. 27). b. Fuisceaux de fibres sortant du lobe inferieur par la partie postérieure de ce lobe : les cellules d’origine de ces fibres occupent la partie postérieure du lobe; ces fibres se recourbent d’arrière en avant, gagnent ainsi la partie supérieure ou le plafond des lobes inférieurs et vont se perdre dans la région basilaire du mésencéphale (fig. 27). c. Fibres sortant du lobe inférieur par la partie interne de ce lobe : ces fibres émanent d’un petit groupe cellulaire assez compact situé dans la région interne du lobe, s'associent en un faisceau peu volumineux dirigé verticalement de bas en haut et vont se terminer dans le thalamus (voir : Nucleus anterior thalami, page 9) (fig. 3). La seconde catégorie comprend des faisceaux de fibres dont les cellules d'origine situées en dehors du lobe inférieur siègent, par conséquent, en différents territoires de l’encéphale. Ces fibres abordent le lobe, soit par sa partie antérieure : fibres descendantes du faisceau basal, tractus strio-thalamicus, soit par sa partie externe : fibres descendantes provenant de la base et des côtés du mésencéphale (fig. 32). (1) Des recherches complémentaires nous semblent nécessaires pour bien éclaircir ce point spécial, HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 119 Nous rappelons que dans la partie postérieure de chaque lobe inférieur on voit s’épuiser les fibres du large pinceau mentionné page 106, à propos du Nucleus rotundus thalami (fig. 27). 3 Enfin, fibres formant un ensemble commissural réunissant les deux lobes inférieurs dans leur moitié supérieure et cheminant au-dessous du plancher du ventricule optique (fig. 32, f. com.). Ces fibres ont été mentionnées par divers auteurs et par Marc Le Roux entre autres (Marc LE Roux (1887) page 67). II. Sélaciens (fig, 29, PI. vin ; fig. 36, PI. x). — Genres plus spécialement étudiés : Raia, Scyllium et Acanthias. On sait que les lobes inférieurs des Sélaciens sont généralement moins développés que ceux des Téléostéens et qu'ils ont une tendance à se confondre sur la ligne médiane. Envisagée au point de vue histologique et considérée dans ses grandes lignes, la structure de ces lobes est à peu près la même chez les Poissons osseux et cartilagineux. L’élude de cette partie de l’hypothalamus que nous venons de faire, chez les Téléostéens, nous dispensera donc d'entrer dans de longues considérations et nous nous bornerons à exposer ici quelques faits nouveaux et particuliers aux Sélaciens. Les méthodes de Goz&r-Cayar et de Cox mettent en évidence la présence, dans les lobes inférieurs des Sélaciens, de cellules nerveuses multipolaires semblables à celles que nous avons mentionnées chez les Téléostéens ; ces méthodes démontrent, en même temps, que les cellules nerveuses sont disposées dans ces lobes d’une façon peu régulière et selon un mode d’agencement peu précis. Il est facile de constater que ces éléments ont, toutefois, une tendance à se grouper et à se localiser principalement dans les régions antérieures el postérieures de chaque lobe. A ce propos, nous nous permettons de faire remarquer que le terme: « Vereinigungsgebiet (!) der Lobi inferiores > employé par B. HALLER pour définir certaines masses ou groupes cellulaires, Zellanhäufung, Zellgruppe, nous semble un peu vague. Il est vrai que les dessins qui accompagnent le travail de B. HALLER (?), el (1) Littéralement : « territoire de réunion » ? (2) D' B. Harrer: Vom Bau des Wirbelthiergehirns (in Æ#orphol. Jahrb., 1898, page 582). 120 E. H. CATOIS. qui sont relatifs aux lobes inférieurs des Sélaciens, ne sont pas la reproduction de préparations effectuées au GoLGr. Signalons ensuite, dans les lobes inférieurs des Sélaciens, une disposition particulière des fibres nerveuses, à savoir: l'existence des fibres terminales du Mantelbündel (Faisceau du manteau) qui viennent s'épuiser dans les régions antéro-latèrales des lobes inférieurs (voir fig. 36, PL x, la disposition de ces fibres et des collatérales qui en émanent). Mentionnons enfin la présence dans ces lobes, non seulement de cellules épendymaires, mais encore de véritables cellules de névroglie ou cellules en araignée (cellules épendymaires modifiées). Considérations générales sur le diencéphale. — Nous terminerons ce long chapitre consacré à l'analyse du diencéphale par les considérations suivantes : Le cerveau intermédiaire nous apparaît comme constituant, chez les Poissons, une région à architecture complexe et dont les fonctions doivent être importantes. Faisceaux de fibres nerveuses plus ou moins volumineux, neurones associés en groupes plusoumoinscompacts,en noyaux ganglionnaires plus ou moins différenciés et nombreux, font de ce segment encépha- lique un centre général de la coordination de réflexes multiples. Par sa situation topographique et par sa structure histologique, le cerveau intermédiaire représente tout à la fois : 1° Un moyen d'union entre divers territoires de l’encéphale ; 2° Un ensemble de relais situës sur le trajet des voies nerveuses, ou de stations cellulaires échelonnées le long de ces voies ; 3° Enfin, une série de centres récepteurs et de foyers transfor- mateurs de l'énergie nerveuse. Le diencéphale présente une complexité plus grande chez les Téléostéens que chez les Sélaciens; chez ceux-ci, les groupes cellulaires étant, en somme, moins bien délimités et moins nombreux que chez ceux-là. La structure de l'Epithalainus et de l'Hypothalamus offre une similitude presque complète chez les Poissons osseux etcartilagineux; les caractères différentiels du diencéphale s'accentuent en revanche entre les deux groupes, dès que l’on compare le Thalarus chez un Téléostéen avec cette même région encéphalique chez un Sélacien. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. l21 fIT- LE MÉSENCÉPHALE. SYNONYMIE : Cerveau moyen ; Mittelhirn. On sait que ce segment encéphalique dérive de la vésicule cérébrale #207enne et qu’il réunit les dépendances de la vésicule antérieure à celles de la vésicule postérieure. Les côtés et le plancher du mésencéphale renferment les fibres destinées à assurer cette jonction. Le sommet forme les lobes optiques (tubercules bijumeaux), homologues des éminences antérieures des lubercules quadri- jumeaux du névraxe des Vertébrés supérieurs: Vorderen Vierhügel. La cavité, au lieu de rester étroite et réduite à un simple canal faisant communiquer le 4° ventricule du étencéphale avec le 9° ventricule du diencéphale (aqueduc de Sylvius), s'élargit au contraire pour former au-dessous des lobes optiques une cavité ventriculaire plus ou moins large (ventricule optique). Le mésencéphale paraît volumineux surtout chezles Téléostéens, les lobes optiques, chez ces Vertébrés, se trouvant soulevés el formant une forte saillie par suite du développement pris par le cervelel en avant et en dedans. Chez les Sélaciens, au contraire, le volume du cerveau moyen semble restreint, par suite des dimensions considérables du cerveau antérieur et du cervelet. Au point de vue de sa structure microscopique, le cerveau moyen des Poissons a été déjà l’objet de nombreuses recherches ; l'indication des travaux de nos devanciers trouvera donc tout naturellement sa place dans les divers paragraphes du présent chapitre. Exposons de suite le plan méthodique qui nous semble convenir à une descriplion analytique des diverses parties entrant dans la constitution du mésencéphale, soit chez les Téléostéens, soit chez les Sélaciens. 122 E. H. CATOIS. 1° Elude de la région supérieure ou dorsale du mésencéphale : Toit des lobes optiques. Conimnissure interlobaire. Torus longitudinalis ; 2 Etude de la région centrale : Éminence lobée de BaAuDeLoT (valvule du cervelet) (!). Torus semni-circularis. Nucleus lateralis mesencephali (ganglion latéral du mésencéphale). Fibres radièes où couronne rayonnante de GÜÔTTSCHE, etc. 3° Étude de la région inférieure ou ventrale (mittelhirnbasis) : Faisceau longitudinal postérieur. Faisceau longitudinal latéral. Tractus tecto-spinales et bulbares. Pédoncule cérébelleux supérieur (antérieur) (2). Commissura ansulata. Noyau d'origine du nerf oculo-moteur cominun. Noyau rouge. Quelques parties de ce programnre étendu ont été traitées par d’autres observaleurs; nous insisterons donc sur certains points peu étudiés et, tout en assurant à notre description un ordre d’enchaîinement convenable, nous mettrons surtout en lumière les faits nouveaux. S 1. — Région supérieure du Mésencéphale. LES LOBES OPTIQUES (Tectum lob. optic. — Commissure interlobaire. — Torus longitudinalis). Les méthodes histologiques anciennes ne pouvaient et n'ont pu fournir que des indications peu précises relativement à la structure intime de ces lobes que CuviER, au commencement de ce siècle, considérait encore comme les vrais hémisphères cérébraux (*). Toutefois, ainsi que le fait judicieusement remarquer PEDRO RAMON CagaAL (‘), on ne saurait oublier que les travaux de Srpa (1861), et2?). Les descriptions de la valvule du cervelet et du pédoncule cérébelleux antérieur seront mieux à leur place au chapitre #Wétencéphale. (3) C’est APOSTOLUS ARSAKY (1813) qui assimila, le premier, les lobes optiques des Poissons aux tubercules quadrijumeaux. (#) Pepro RAMoN CayaL (1899) : El lobulo optico de los Peces (Teleosteos) (Æev. trim. micrograf., Tomo IV). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 123 de VrauLr (1876), de Frrrscx (1878), de MaysEr (1882), de BELLONCI (1879-1888) et de EpixGEr (1892), ont eu pour résultats de faire connaître plusieurs particularités importantes au point de vue imacroscopique : nombre des couches du toit des lobes optiques, voies optiques et faisceaux nerveux principaux reliant ces lobes optiques avec les autres régions du névraxe. Après Fusarr (1887) qui, le premier, appliqua avec succès la méthode de GoLGr à l'analyse des lobes optiques chez les Poissons, d’autres savants entreprirent de nouvelles recherches sur le même sujet. Mentionnons, par ordre chronologique, la thèse de PEDRO Ramon Cayaz (1890), le savant mémoire si souvent cité de VAN GEHUCHTEN (1894), les travaux de L. NEUMAYER (1895) et de MiRro (1895), enfin, la récente et consciencieuse monographie de PEDRO RAMON CaJaAL (1899), consacrée de nouveau à l’analyse des lobes optiques chez les Poissons osseux. Bien qu'un certain désaccord règne encore aujourd'hui entre les auteurs relativement au nombre des couches ou zones composant le toit des lobes optiques, disons mieux, relativement au mode d'énumération de ces zones, il faut reconnaitre que cette partie du mésencéphale a été la plus minutieusement étudiée, tout au moins chez les Poissons osseux (1). Il nous restait bien peu à glaner dans un champ déjà exploré par la brillante pléiade des chercheurs dont nous venons de citer les noms. Chez les Poissons cartilagineux, au contraire, la structure microscopique des lobes optiques a été peu étudiée. Nous ne connaissons guère sur ce sujet que les descriptions sommaires données par F. VrauLT (1876) et par E. SAUERBECK (1896). Comme objets de nos mvestigations sur le toit des lobes optiques chez les Sélaciens, nous avons choisi les genres : Raia, Scyllium et Acanthias. (1) Tout en rendant aux auteurs un juste tribut d'hommages et tout en admirant la patience et la sagacité par eux déployées dans cet ordre de recherches, qu'il nous soit cependant permis de faire remarquer combien les divisions et les subdivisions actuellement établies nous semblent artificielles. Chaque auteur a multiplié les diverses couches du fectum lob. optic., les dénommant à sa guise ; le numérotage de ces couches a été indiqué, tantôt de dehors en dedans, tantôt de dedans en dehors. Il résulte de ces descriptions quelque peu arbitraires un ensemble de notions confuses, de figures indécises et le foit des lobes optiques évoque le souvenir de la Your de Babel. 124 E. H. CATOIS. Rappelons d'abord en quelques lignes la disposition des lobes optiques chez les Plagiostomes, au point de vue anatomique. D'après VrauLT (!), ces lobes sont creux, mais le ventricule qu'ils renferment est en général peu développé ; la forme de ce ventricule varie en divers points de son étendue, ainsi que le démontrent des coupes transversales. Chez Raia, par exemple, on peut voir sur une coupe passant par la région moyenne du lobe optique, que ce ventricule offre la figure d’un cœur de carte à jouer. Ce ventricule canaliforme représente chez les Plagiostomes le double ventricule des lobes optiques des Poissons osseux ; mais on n’y trouve point, comme chez ces derniers, les éminences nombreuses qui ont tant embarrassé les anatomistes pour la détermination de ces lobes : corps canneles de CuüVvIER, tori semi-circulares de HALLER, tubercule médian ou éminence lobée de BaAuvpELorT. Par suite de cette simplicité du ventricule du lobe optique chez les Plagiostomes, la substance nerveuse qui l'entoure n'est pas, comme chez les Poissons osseux, réduite à une grande minceur, de façon à figurer une voûte en forme de véritable coque, mais elle atteint une épais- seur plus ou moins considérable. Entre autres causes, c’est probablement par suite de leur épaisseur relative que les lobes optiques des Sélaciens sont plus difficiles à imprégner que ceux des Téléostéens. Les méthodes de GoLGI-CaJaL (méthodes rapides ou lentes) nous ayant donné de fréquents insuccès, nous conseillons de préférence, et spécialement pour ce sujet d’études, l'application de la méthode de Cox. Analyse du toit des lobes optiques chez les Sélaciens. — Pour prendre connaissance de la structure de celte partie du mésencéphale et de la disposition des éléments qui entrent dans sa constitution, il est nécessaire de pratiquer des coupes frontales ou wertico-transversales et sagittales où antéro-postérieures (fig. 29, PI. vmm). Considérant, d’une part, qu'il n’y a pour l'intelligence du sujet aucun avantage à multiplier le nombre des couches qui composent le tectum, souhaitant, d’autre part, demeurer dans notre description aussi explicite que possible, nous avons tenu à simplifier cet exposé. En allant de dedans en dehors, c'est-à-dire de la cavité ventricu- (1) F,. VrAULT, loc. eit., pages 450-451. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 125 laire à la surface du lobe, on aura à considérer successivement dans le toit du lobe optique : 1° La zone ou couche épithéliale (1, fig. 29). — Semblable à celle qui tapisse les parois de la cavité du ventricule optique chez les autres Vertébrés inférieurs, cetle couche est constituée par une rangée d'éléments épithèliaux (cellules épendymaires), dont le corps, conique ou fusiforme, est pourvu de deux expansions : l’une externe à disposition radiaire, l’autre interne dirigée vers la cavité ventriculaire. I n’y a pas lieu d’insister sur la disposition de ces éléments, parfaitement étudiés d’ailleurs chez les Poissons osseux par PEDRO RAMON CayAL ({). Nous mentionnerons seulement quelques faits importants qui nous ont été révélés par l'application des méthodes rapides de GoL&r au mésencéphale des Sélaciens. Chez les {rès jeunes sujets, les éléments épendymaires constituent seuls toute la névroglie et cette disposition embryonnaire persiste méêine chez l'adulte, notamment au niveau du sillon interlobaire situé sur la ligne médiane du toit des lobes optiques. Chez les sujets plus âgés, il n’est pas rare de voir que plusieurs cellules épithéliales, au lieu de conserver leur disposition primitive, continuent à évoluer et perdent leur prolongement central en s’écar- tant plus ou moins de la cavité ventriculaire ; parfois même, on constate sur certaines de ces cellules épendymaires déplacées la présence de prolongements nombreux se détachant de leur pourtour et rayonnant dans tous les sens: (Cellules en araignée, cellules de DEITERS) (?).. Voër : Seconde partie de notre mémoire, Chapitre IT. 2° La zone ou couche granuleuse (2, fig. 29). — Cette zone, correspondant à la segunda capa 0 de la substancia gris central, de P. RAMON CayaL, paraît finement granuleuse dans les préparations colorées au carmin ou à l’hématoxyline ; les éléments nerveux quila constituent sont parliculièrement difficiles à imprégner.On y observe trois ou quatre rangs superposés de cellules à corps piriforme ou (1) PEDRO RAMoN CagaL. « El lobulo optico de los Peces ». (2) Rappelons, à ce propos, que la présence de ces cellules de névroglie a été signalée, dans les lobes optiques des Poissons osseux, par FUSARI, par MiTo et par nous-même ; par contre, P. RAMON CaJAL déclare n'avoir pu les mettre en évidence, 126 Es H. CATOIS. ovoide dont le grand axe est perpendiculaire à la cavité du ventri- cule. De ce corps cellulaire partent deux prolongements protoplas- miques principaux, l'un descendant, l’autre ascendant ; le premier se laisse rarement observer, probablement par suite d’un défaut d’imprégnation (1); dans les préparations réussies, on constate que ce prolongement descendant se divise en deux branches secondaires divergentes dont les rameaux vont conslituer, au sein de cette même couche granuleuse, un véritable plexus. Le second prolongement, ascendant, beaucoup plus long que le précédent, se dirige en dehors, émettant des divisions qui se rami- fient dans les autres couches du toit: tel le tronc principal d’un arbre d’où se détacheraient, à diverses hauteurs, des branches multiples. Le cylindre-axe de ces cellules, naissant d’une dendrite, nous a paru tantôt s’épuiser dans le {ectum, en se recourbant, tantôt se continuer avec une fibre optique (rêtinienne). Malgré de longues et minulieuses recherches, nous n'avons encore pu retrouver la disposilion en crosse (en cayado) si caractéristique du cylindre-axe de quelques-unes de ces cellules. 3" La couche des fibres nerveuses myéliniques profondes. — Celle zone correspond à la « Tercera capa del techo optico 6 de la substancia blanca profunda >, de P. Ramon CayaL. Les fibres nerveuses qui la constituent, ayant une direction trans- versale et plus ou moins oblique, se laissent facilement observer sur des coupes frontales, alors qu’elles apparaissent sur des coupes sagiltales, soit sous forme de pointillé, soit sous forme de petits fais- ceaux segmentés (3, fig. 29). D'où proviennent ces fibres ? Où se rendent-elles? Ainsi que P. RamoN CagaL l’a indiqué chez les Téléostéens, il est probable que ces fibres sont chez les Sélaciens, les unes centrifuges, les autres centripèles, quelques-unes enfin, commissurales où allant d’un lobe à l’autre. Les fibres centrifuges, provenant des cellules nerveuses du fectum lui-même, nous ont paru se rendre : 1° à la commissure postérieure (voir : chapitre Diencéphale). a (1) Chez les Téléostéens, P. RamoN CaAJAL considère le corps de ces cellules comme « Lxento de ramilos basilares ». HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 127 2° Dans les régions postérieures du névraxe: ({ractus tecto-bul- bares et spinales ; laqueus ; schleife). 3° Par l'intermédiaire de collatérales,au Nucleus lateralis mesen- cephali? — Les fibres centripètes , s'épuisant dans le fectumn, proviennent de cellules nerveuses situées dans ce même Nucleus lateralis mesencephali el dans des régions du Thalamus (Tractus thalamo-tectalis). Des recherches complémentaires nous semblent utiles pour élucider ces différents détails relatifs à la marche des fibres nerveuses du {ectuin. Ajoutons, enfin, que ces diverses fibres émettent de nombreuses collatérales au cours de leur trajet et qu'entre elles plongent et se ramifient les divisions dendritiques de cellules nerveuses situées, soit dans la couche précédente, soit dans les zones suivantes. 4 La zone de substance grise inediane ow centrale. — Cette zone, sensiblement la plus épaisse de toutes celles qui contribuent à former le toit des lobes optiques, est caractérisée: 1° par la présence de cellules nerveuses diversement étagées, de forme et de volume variables ; 2° par l'existence de fibres optiques dirigées d’avant en arrière (4, fig. 29). 4) Cellules nerveuses. — Abstraction faite de certains détails portant sur la morphologie de ces cellules, détails dont la description nous obligerait à créer de trop nombreuses variétés parmi les cellules nerveuses, nous pouvons reconnaitre que ces éléments sont représentés par trois types distincls : a. Cellules de grande taille, à corps irrégulièrement triangulaire ou ovoide, dont les prolongements protoplasmaliques variés el très étendus sont en conneæions avec les fibres optiques. Leur cylindre- axe se détache d’une dendrite et pénètre dans la zone des fibres nerveuses profondes ; ces éléments sont assez nombreux, surloul dans la partie inférieure de la présente zone. b. Cellules moins volumineuses, à corps ovoïde ou fusiforme disposé horizontalement ; le cylindre-axe de ces cellules à une direction également horizontale. Ces éléments sont très peu nombreux. c. Cellules de taille moyenne, à corps piriforme ou fusiforme disposé verticalement. Les dendrites de ces cellules sont relative- ment peu développées et s'étendent horizontalement ; leur axone est descendant et se dirige vers la couche des fibres profondes, 128 E. H. CATOIS. 2) Fibres nerveuses. — Ces fibres, d’origine optique, sont très déliées, assez espacées et présentent de nombreuses collatérales ; il n’est pas rare de les voir sur quelques points se résoudre en arborisations où ramifications flexueuses, plus ou moins variqueuses (terminaisons bien connues des fibres optiques) (arb. opt., fig. 29). Au niveau de la partie supérieure de lacouche quenousconsidérons en ce moment et limitant pour ainsi dire cette couche, les fibres nerveuses se rapprochent un peu les unes des autres, semblant ainsi se condenser. Au-dessus de ces fibres apparait alors une cinquième zone, ou couche de substance grise superficielle. »° La zone de substance grise superficielle. — Nous avons pu distinguer nettement dans cette zone deux types de cellules nerveuses caractérisées par leur forme el leurs dimensions. a. Cellules dont le corps, fusiforme, est disposé horizontalement el dont le cylindre-axe est lui-même horizontal. b. Cellules dont le corps est ovoïde ou conique et orientée vers la périphérie du lobe optique ; les prolongements protoplasmatiques principaux de ces éléments s'étendent horizontalement sur une étendue plus ou moins longue, tandis que les dendriles secondaires se recourbent ct se dirigent en bas, vers les zones profondes du toit des lobes. Leur axone est manifestement descendant, mais il nous à été impossible de poursuivre fidèlement son trajet définitif (5, fig. 29). 6° La zone des fibres nerveuses myéliniques superficielles. — Celle zone est la plus superficielle de toutes les couches du tectum. Comme chez tous les Vertébrés, elle est constituée par des fibres optiques à myéline se terminant par des arborisations libres (terminaisons des fibres optiques) (6, fig. 29). Le toit des lobes optiques nous apparaît donc comme représentant, chez les Poissons ainsi que chez les autres Vertébrés inférieurs, la partie du mésencéphale plus spécialement en rapport avec les fibres optiques, plus particulièrement affectée à la vision. Chez l'Homme et chez les Vertébrés supérieurs qui possèdent un centre cortical de la vision (centre psycho-optique, localisé comme on sait dans le lobe occipital), le sens de la vue devient en quelque sorte supérieur et intellectuel et les tubercules quadrijumeaux antérieurs, atrophiés, sont relégués au rang de simples centres réflexes. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 129 Chez les Poissons, au contraire, le centre cortical est absent et les impressions visuelles sont perçues par les neurones des lobes optiques (tubercules quadrijumeaux antérieurs) d’une façon automa- tique et réflexe ; mais il se peut que ces actions réflexes acquièrent en ces régions une éntensité plus considérable, précisément par suile de l'absence des centres psychiques ? qui saurait du reste se flatter de résoudre les problèmes suivants : 1° De quelle façon s'exerce le sens de la vue chez les Poissons ? autrement dit, sous quels aspects, dans quelles conditions, dans quelles mesures, ces Vertébrés inférieurs perçoivent-ils les rayons lumineux ? 2° Quels sont les mieux doués, à ces différents « points de vue >. des Poissons osseux, ou des Poissons cartilagineux ? Commissure interlobaire.— Torus longitudinalis.— Nous comprenons dans une même étude sommaire ces deux parties du cerveau moyen, distinctes l’une de l’autre bien qu'associées entre elles, siluées chez les Téléostéens sur la ligne médiane dela région supérieure du mésencéphale. Induits en erreur par une fausse interprétation homologique des lobes optiques, CAMPER, Carus et GÜTTSCHE avaient désigné ces parties sous les noms de corps calleux, de Fornix, de Brückhe. Il est évident que pour admettre de telles dénominations il fallait assimiler les lobes optiques des Poissons aux hémisphères cérébraux des Mammifères ; nous savons aujourd’hui qu’une pareille assimi- lation n’est plus soutenable (1). Rappelons en quelques lignes la synonymie de chacune de ces parties du cerveau moyen. 4° Commissure interlobaire : Strato trasversale (STIEDA). — Commissure de la voûte optique (BAUDELOT). — Quercommissur des Daches. — Corpus callosum ? (FrITSCH). — Ayant déjà signalé l'existence d’une commissure interlobaire dans le télencéphale des Poissons osseux, nous proposons de désigner la présente commis- sure sous le nom de : commissure dorso-transversale des lobes optiques (com. d. tr. opt.). (1) Nous verrons dans un instant que Frirscx a conservé à cette commissure la dénomination de corps calleux. 130 E. H. CATOIS. 2 Torus longitudinalis (Sriepa). — Lame el éminences cominis- surales (BAUDELOT) (To. L.). L. SLA (1895) et plus récemment P. Ramon Cayaz (1899), ayant donné de très bonnes descriptions du Torus longitudinalis chez la Tanche et le Barbeau, nous n'avons pas à insister sur l’analyse histologique de ces parties de l’encéphale. Nous nous bornerons à consigner ici et à figurer (fig. 35, Pl. x), quelques particularités relevées, au cours de nos rêcherches, chez Anguilla, Conger et Platessa. Faisons tout d’abord remarquer que les coupes fronto-transter- sales (ligne 3, fig. 24) et horizontales (ligne 4, fig. 25), sont les plus démonstratives ; les coupes sagittales, à moins d’être effectuées sur un plan rigoureusement médian, étant susceptibles de donner des indications trompeuses. La commissure dorso-transversale des lobes optiques est essen- liellement forinée par les fibres nerveuses myeliniques profondes ou fibres de la troisième couche du tectum. Dans le torus longitudinalis, partie intégrante du toit des lobes optiques comme le dit avec juste raison P. Ramon CaJaL,, la méthode de GoLGr démontre nettement l'existence de cellules nerveuses et de fibres nerveuses. Les cellules nerveuses, bien décrites et figurées par L. Sara et P. Ramon Cayar, sont de petites dimensions (12 à 15 v) ; leur axone se dirige en haut et en dehors et se rend #rès vraisemblablement au nerf oplique. Les fibres nerveuses qui se terminent et s'épuisent dans le torus longitudinalis nous ont paru provenir wniquement de deux sources : a. Terminaisons de collatérales procédant des fibres transversales de la commissure interlobaire optique ; b. Terminaisons de certaines fibres de la troisième zone du tectum. Les premières ont une direction verticale de haut en bas; les secondes ont une direction un peu oblique de haut en bas et de dehors en dedans. Ces fibres terminales entrent en connexions avec les dendrites des cellules nerveuses du torus longitudinalis (T0. /., fig. 35). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 131 S2. — Région centrale du Mésencéphale. Fibres radiées ou couronne rayonnante, de GÜTTSCHE — Tori _semi-circulares, de HALLER. Nous rappelons que cette région présente chez les Poissons osseux la disposition architecturale la plus compliquée. Si l’on met à nu chez un Téléostéen la partie centrale des lobes optiques, en enlevant au moyen d’une section horizontale la région supérieure de ces lobes, on aperçoit : 1° en arrière et sur la ligne médiane la valvule du cervelet (éminence lobée de BAuDELOT), renflement plus ou moins volumineux ; 2° de chaque côté de la valvule du cervelet, deux renflements en forme de croissant dont le bord externe donne naissance à des fibres radiées qui s’étalent sur la face interne du lobe optique. Ces deux renflements sont connus depuis longtemps sous les noms de: renflements semi-lunaires ou de tori semi-circulares ; les fibres radiées qui réunissent les tori semi-circulares à la face interne des lobes optiques correspondent à la couronne rayonnante de GÜTTSCHE. Ces données anatomiques sommaires étant exposées, nous analy- serons la structure microscopique de la couronne rayonnante et celle des fori semi-circulares, en prenant comme base de notre description le mésencéphale de Motella, Callionymnus, Labrus et Cottus, genres qui nous ont principalement servi de sujels d'étude. 1° Corona radiata (GüTTScHE). — Synonymie : Couche rayonnante (BauDELOT), Reil’sche Schleife, Stabkranz, Radiatio peduncularis, Tractus tecto-spinales, tecto-bulbares, tiefes Mark (EniNGer). Associationsbahn des Tectum opticum (B. HALLER) (C. rd:, fig. 38). Disons-le de suite, on ne saurait voir dans la disposition de Corona radiata, chez les Poissons, l’homologue de la Couronne rayonnante de Re chez les Mammifères, car il n'y a aucun rapport entre cette couche interne radiante des lobes optiques et l'éventail fibreux que forment, chez les Vertébrés supérieurs, les fibres des faisceaux pédonculaires en s’épanouissant dans les hémisphères cérébraux. 132 E. H. CATOIS. La structure histologique de la couche rayonnante n’a pas été analysée par les auteurs. Les fibres très délicates qui constituent celte couche se déchirent, du reste, avec la plus grande facilité etse brisent ou se déforment souvent pendant la confection des prépa- rations. Nous avons pu réussir à les étudier en employant certaines précautions (collodionnage des coupes). La couronne rayonnante de chaque lobe optique est constituée par un ensemble de 60 à 80 petits faisceaux disposés avec assez de régularité et dirigés de haut en bas et de dehors en dedans ; chacun de ces faisceaux est composé de 10 ou 12 fibres à myéline, très déliées, très facilement altérables et souvent variqueuses ou monili- formes par le fait même de cette altération; un capillaire sanguin, à trajet plus ou moins sinueux, accompagne fréquemment ce faisceau de fibres pendant son parcours. Nous ajouterons que les faisceaux composant la couronne rayonnante sont plongés au milieu d’une couche de substance spongieuse (substantia Spongiosa lobi centralis, de FRITSCH) ou substance gélatineuse centrale qui entoure et isole chaque faisceau, assurant ainsi sa fixité. 2° Tori semi-circulares (HALLER). — Synonymie: Corps can- nelès (Cuvier). Renflements semi-lunaires (To. S. c., fig. 32). De même que la couronne rayonnante, les tori semi-circu- lares ont été, jusqu'à présent, fort peu analysés au moyen des méthodes histologiques nouvelles. En effet, c’est à peine si on peut voir quelques cellules nerveuses sommairement imprégnées figurer, au niveau de ces dépendances du mésencéphale des Poissons osseux, dans les dessins ou planches accompagnant les travaux ou mémoires de Fusari, de P. RAMoN CayaL et de B. HALLER. À en juger, d’ailleurs, par notre propre expérience, il est très difficile d'obtenir de bonnes imprégnations des tori semi-circulares ; malgré des essais multiples et l'examen minutieux de centaines de coupes, nous devons reconnaître que maints détails ont dû échapper à notre analyse ; des recherches complémentaires sur ce sujet nous paraissent donc encore nécessaires pour élucider certains points douteux. D'une façon générale, nous considérons comme les plus démons- tralives pour l’étude les coupes effectuées suivant le sens horizontal et suivant le sens verlico-transversal. Pour contrôler les indications fournies par la méthode de Cox HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 133 et par celles de GoL&r-CaJTAI, nous avons eu souvent recours aux préparalions colorées soit au carmin, soit à l’éosine-hématoxyline, soit au bleu de méthylène. L'emploi de ces divers procédés de coloration permet déjà de constater que les tori semi-circulares sont loin de présenter une structure homogène : la substance grise élant principalement répartie dans leurs zones supérieures et internes, et la substance blanche formant des tractus fibreux surtout dans leurs zones inférieures et externes. Histologiquement, le torus semi-circularis est constitué par des cellules et des fibres nerveuses, par des cellules épendymaires et enfin, par des capillaires nombreux. À. Cellules nerveuses. — Ces éléments appartiennent au type étoilé ou multipolaire ; leur corps cellulaire est généralement de petites dimensions et présente des dendrites nombreuses, déve- loppées et épineuses. Relativement à leur mode de distribution, on peut dire que ces cellules nerveuses ont une tendance à se grouper, soitsous forme d’amas ganglionnaires plus ou moins arrondis, plus ou moins compacts (nucleus lateralis mesencephali), soit sous forme de trainées linéaires interposées entre des tractus de fibres nerveuses. a) Cellules des régions supérieures et internes du tlorus. — Ces éléments, situés par conséquent au voisinage de la valvule du cervelet, sont nombreux et groupés sous forme d’amas ganglion- naires. Le corps de ces cellules est ovoïde et plus ou moins allongé ; leurs dendrites sont orientées en dehors, vers le tectum opticum ; leur axone se dirige en bas et en arrière pour se perdre, soit dans la commissure ansulée, soit dans le faisceau longitudinal latéral, de EpiNGER (fig. 32, PL. 1x). b) Cellules de la région externe du torus. — Ces éléments, beaucoup moins nombreux que les précédents, sont situés au voisinage du bord externe ou convexe du renflement semi-lunaire (1); (1) Pour mieux faire comprendre cette description microscopique des tori semi- circulares, nous dirons que la disposition topographique de ces parties du mésencéphale rappelle la figure suivante : Supposez deux croissants lunaires se regardant par leur bord concave ; leur bord convexe est tourné vers la face interne du tectum opticum ; le sommet mousse de ces deux croissants est libre, dirigé en haut vers le torus longitudinalis ; leur base embrasse la valvule du cervelet et se confond elle-même avec la partie basilaire du mésencéphale, 134 E. H. CATOIS. leur corps cellulaire est ovoïde, leurs dendrites sont dirigées vers la partie centrale du torus. Par suite de l'existence d’une large bande de fibres nerveuses disposée horizontalement sur le bord convexe périphérique du torus, large bande occupant précisément le territoire où se trouvent ces cellules nerveuses, il est très difficile de poursuivre avec sécurité le trajet de leur axone. Nous pensons, toutefois, que cet axone se dirige tantôt en haut et en dehors vers le tectum opticum (partie des fibres radiées de la couronne de GüTTSCHE), tantôt en bas et en avant vers la commissure blanche postérieure du diencéphale ? B. Fibres nerveuses.— Ces fibres présentent à signaler plusieurs particularités relativement à leur direction, à leur trajet et à leur origine : 1° La majeure parte des fibres qui abordent le torus semi-circularis, par sa partie externe et sous un angle d'incidence variable, est dirigée de dehors en dedans et de haut en bas. Il est facile de constater ce fait, en examinant les nombreux faisceaux segmentés que l’on observe sur des coupes horizontales intéressant les régions superficielles du torus; ces faisceaux apparaissent alors sous forme de tronçons et dessinent des hachures plus ou moins irrégulières ; 2° Dès que la section intéresse la partie centrale du torus, les fibres prennent une disposition radiée et plusieurs d’entre elles affectent la forme d’un éventail ; 3 Enfin, au niveau de la partie profonde du torus, on observe des faisceaux à marche plus ou moins rectiligne, à trajet soit horizontal, soit oblique. Nous proposons, pour ces diverses fibres nerveuses, l’ordre de classification suivant : a) Fibres associant le tectuim opticum et le torus semi-circularis. À ce groupe apparliennent, sans conteste, les fibres radiées de la couronne de GÜTTSCHE, fibres centrifuges et centripètes par rapport au tectum. Les fibres centrifuges ou les collalérales de ces fibres proviennent de la troisième couche du toit des lobes optiques, couche de substance blanche profonde, {ercera capa del techo, de Cayar. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 135. Les fibres centripètes ou les collatérales de ces fibres ont leur cellule d’origine dans le torus semi-circularis (ganglion latéral du mésencéphale). b) Fibres sortantdutorus par Sa partie posteérieureelinférieure. Ces fibres constituent le faisceau longitudinal latéral (pro parte). c) Fibres marginales. Ces fibres longeant le bord externe du torus sont situées à la périphérie (bord convexe du croissant lunaire) ; elles nous semblent correspondre au « Sfratum zonale thalami >, de FRITsCH, et nous ont paru provenir du nucleus prætectalis, du diencéphale. d) Fibres commissurales. Siluées dans la région inférieure du torus, ces fibres associent entre eux les deux renflements semi- lunaires, par l'intermédiaire soit de la commissure postérieure du diencéphale, soit de la commissure ansulee. e) Fibres terminales provenant de l’'Hypothalamus. Ces fibres pénètrent dans le torus par sa partie inférieure ou ventrale, suivant une direction plus ou moins verticale de bas en haut et se terminent dans ce torus au moyen d’arborisations libres. Nous ajouterons enfin, comme corollaire, que d’autres fibres suivent une direction absolument inverse, c’est-à-dire que nées dans les tori semi-circulares elles se terminent dans la partie externe des lobes inférieurs (voir, chapitre Diencéphale : disposition des faisceaux de fibres nerveuses des lobes inférieurs (page 118). Cet D. Cellules épendymaires. Vaisseaux sanguins. -— Voir, pour la disposition des cellules épendymaires et pour le mode de distribution des vaisseaux sanguins dans les tori semi-circulares, les coupes sériées effectuées de préférence suivant le plan horizontal. Considérations générales sur la constitution histo- logique de la région centrale du mésencéphale. — Si nous avons conservé aux diverses parties situées à l’intérieur du ventricule optique leurs dénominations imagées de « corps canneles, renfle- ments semi-lunaires, couronne rayonnante, etc.», c’est que ces expressions, Compréhensibles et connues depuis longtemps déjà, répondent bien à une description purement anatomique il est vrai, mais en tout cas, simple et rationnelle. Après avoir indiqué la structure histologique de ces diverses parties, nous allons essayer d'en déduire la véritable signification. 136 E. H. CATOIS. Les connexions du cervelet avec l’'éminence lobée (valoula cerebelli) seront étudiées dans un autre chapitre. Quant aux lori semi-circulares, relais importants établis entre les centres optiques et les parties postérieures du névraxe, ils nous apparaissent comme ayant eux-mêmes la signification fonctionnelle de centres nerveux tout à la fois passifs et actifs : Centres passifs ou récepteurs, ils perçoivent les excitations qui leur sont transmises par d’autres neurones ayant déjà été influencés par les impressions visuelles. Cette transmission aurait lieu tantôt par une voie longue et détournée: couronne radiée, tectum opticuin, tantôt par une voie plus directe et relativement plus courte : noyau pré-tectal, faisceau de fibres marginales. Centres actifs, producteurs d'énergie nerveuse (par leurs amas de cellules ganglionnuires, nucleus lateralis mesencephali), les tori semi-circulares actionneraient à leur tour, et à distance, d’autres neurones situés en des territoires encéphaliques variés. Il nous parait même probable, bien que nos préparations ne soient pas encore suffisamment démonstratives à cet égard, qu’une influence réelle doit s'exercer, par l'intermédiaire de nombreuses collatérales, entre les fibres émanées de certains neurones des fori et les noyaux d'origine du nerf de la II paire (oculo-moteur commun) et de la IV* paire (pathétique ou trochléaire). Ajoutons enfin que chez les Sélaciens, par suite de l'épaisseur du toit des lobes optiques et du développement de la région basilaire du mésencéphale, la couronne rayonnante de GÔTrscHE et le ganglion latéral du mésencéphale restent peu distincts et se trouvent noyés, pour ainsi dire, au sein de la masse des fibres constituant soit les côtés, soit la base du mésencéphale (calotte pédonculaire, Haube) (*). S 3. — Région basale ou inférieure du mésencéphale. Dans ce paragraphe, est-il besoin de le dire, nous n’avons pas la prétention de résoudre tous les problèmes quise rattachent à l'étude de la partie ventrale ou plancher du mésencéphale. (1) Rappelons, à ce propos, ce que dit EbINGER relativement au nucleus lateralis mesencephali chez les Sélaciens : « Bei den Selachiern ist mir sein Vorkommen noch zweifelhaft » (EDINGER : Vorles. nerv. Central., 1896, page 114). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 137 Des savants, plus autorisés que nous, ont discuté et discutent encore aujourd'hui sur la structure microscopique de cette région encépha- lique. Lorsque des champions de haute valeur tels qu'EDiNGER, KôüLLIKER, HELD, CayAL et VAN GEHUCHTEN, entre autres, prennent part à de si brillants tournois scientifiques, il nous semble téméraire de paraitre en lice. Nous nous contenterons donc modestement d'enregistrer les succès remportés et de consigner les résultats acquis, l'analyse méthodique de cette partie du névraxe relevant en somme autant de l'Anatomie descriptive que de l'Histologie proprement dite. — Faisceau longitudinal postérieur (F. 1. p.). — S'ilest, dans le névraxe des Vertébrés, un faisceau de fibres nerveuses qui ait été consciencieusement et minutieusement étudié, c’est sans contredit le faisceau longitudinal postérieur, encore désigné sous le nom de faisceau longitudinal dorsal où médian (Hinteres Längsbüundel). Pour les indications bibliographiques nombreuses que ce sujet comporte, nous renvoyons le lecteur à la savante monographie de P. RAMON CayaL (1). | Ce faisceau a été décrit chez les Sélaciens, par EDINGER (1892) : 1l a été analysé chez les Téléostéens (Truite), par VAN GEHUCHTEN (1895), et plus récemment par KoLsTER (1898), Docent à l'Université d'Helsingfors. On lui reconnait comme noyau d’origine un amas de substance grise situé au-dessus du noyau d'origine du nerf oculo-moteur cominun, amas gris désigné par VAN GEHUCHTEN sous le nom de noyau supérieur du faisceau longitudinal dorsal (N. F. I. p.). Ce _ faisceau serait constitué principalement par des fibres descendantes ou motrices venant de ce noyau supérieur et par des fibres provenant des lobes optiques ; ces dernières fibres correspondent au faisceau optique descendant, de VAN GEHUCHTEN. Outre ces fibres à origine mésencéphalique, le faisceau longitudinal postérieur renfermerait encore de nombreuses fibres ascendantes ou descendantes ayant leurs cellules d'origine dans les diverses masses grises où se terminent les nerfs sensibles périphériques et dans toutes les masses grises de la formation réticulaire de l’isthme du rhombencéphale (VAN GEHUCHTEN). (1) P. Ramon-CagaL : El fasciculo longitudinal posterior en los Reptiles (in Xevista trim. micrograf., Tomo II, 1897). 138 E. H. CATOIS. Le faisceau longitudinal postérieur ne serail donc, en définitive, niun faisceau moleur, n1 un faisceau sensilif, mais un faisceau mixte, sensitivo-moteur. Nous ajouterons, enfin, que de nombreuses colla- térales se détachent de ce faisceau pour se ramifier dans les noyaux d’origine des nerfs oculo-moteur commun, pathétique et moteur oculaire externe. Nous avons pu constater sur de très jeunes Cottus, Labrus et Callionymus celte particularité signalée par Van GEHUCHTEN chez la Truite et par KôLLIKER, HELD et Casa chez d’autres Vertébrés. — Faisceau longitudinal latéral (F. 1. 1.). — Commissura ansulata, de GÔTrscE (Com. ans.). Plusieurs travaux de date récente étant venus apporter la lumière sur la composition de ces divers groupes de faisceaux latéraux ou transversaux, nous ne consacrerons que quelques lignes à leur description. Comme EDINGER l’a déjà indiqué, le faisceau longitudinal latéral provient en majeure partie du nucleus lateralis mesencephali (Hostee RETENE) Étudié chez les Cyclostomes (Anrmocætes) par FRIEDRICH MAYER (1897), ce faisceau a été soigneusement analysé chez les Téléostéens par B. HALLER (1895-1897-1898). Rappelons que cet observateur divise en trois faisceaux l’ensemble des fibres longitudinales : 1° Die ventro-laterale Lüingsbahn. 2" Die innere Lateralbahn. 3 Die aussere Lateralbahn. Ainsi que PEDRO RaMoON CaraL (1) l’a constaté chez les Oiseaux, les fibres du faisceau longitudinal latéralnous ont paru être, chez les Poissons, centrifuges et centripètes par rapport au ganglion latéral du mésencéphale. Les premières se rendent dans la moelle spinale; les secondes proviennent de la moelle spinale et du myélencéphale. De nombreuses collatérales se détachent de cesfibres. — La Commissure en anse (commissura ansulata, de GOTTSCHE, commissure antérieure des pyramides, de BAUDELOT) a été bien décrite chez les Poissons osseux par P. MaysEer (1881) et par (1) Pevro Ramox CagJAL : Centros opticos de las Aves., in Æev. trim. microgr., Tomo III (1898). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 139 B. HALLER (1898). Déjà, vers 1852 ou 1853, PHiILIPPEAUX et VULPIAN avaient indiqué que cette commissure, constituée par des fibres nerveuses transversales et formant un faisceau plus ou moins compact suivant les genres de Poissons, ne renferme pas en réalité de fibres en anse, ou du moins, que si ces fibres existent, elles sont peu nombreuses. Ces deux observateurs démontraient, en outre, que comimissura ansulata représente un entre-croisenent très reimar- quable d'un certain nombre de fibres des faisceaux du bulbe rachidien. La commissure en anse, située dans la région basilaire du mésen- céphale, figure suivant l'heureuse comparaison de BAuDELOT un X couché en travers. Résumant les données de nos investigations, nous considérons cette commissure comme représentant un ensemble très complexe de fibres ou de collatérales de pro- venances multiples : 1° Entre-croisement des fibres de faisceaux du myélencéphale et de la moelle spinale ; 2° Fibres d'associations entre les tori semi-circulares ; 3° Fibres d'associations entre les parlies inférieures du toit de chaque lobe optique ; 4° Fibres d'associations entre les lobes inférieurs du diencéphale et la région basilaire du mésencéphale (fig. 32 et fig. 34, com. ans.). Pour terminer cette description sommaire de la structure micros- copique de la région basale du cerveau moyen ou portion pédoncu- laire du tronc cérébralde REISSNER (1860), nous exposerons quelques- unes de nos constatations concernant le #oyau d'origine du nerf oculo-moteur commun et le noyau rouge. Nos préparations les plus démonstratives ont été effectuées sur des pièces traitées par la méthode rapide de GoLa@r et proviennent de très jeunes exemplaires de Conger, Anguilla, Platessa, Labrus et Labrax pour le groupe des Téléostéens ; de Raia pour celui des Sélaciens (fig. 37, PI. x). — Noyau d'origine du nerf'oculo-moteur commun(N.N.TIT).— Les travaux de SriLLING, de SriEpa et de MarHras DuvaL ont fait connaître que le nerf de la IT° paire a pour origine réelle une masse de substance grise située dans le cerveau moyen, de chaque côté de la ligne médiane, entre le faisceaulongitudinal postérieuretl’aqueduc de SYLvIus. Chez les Poissons, de même que chez les autres Vertébrés, 140 E. H. CATOIS. le noyau d’origine de ce nerf revêt une forme spéciale et se dispose topographiquement d’une façon toute particulière. Nous n’avons pas à insister ici sur ces faits bien connus dont l'exposé rentre d’ailleurs dans le domaine de l'anatomie descriptive (1). Formé, non par une masse compacte, mais par la réunion de petits groupes ganglionnaires assez diffus, le noyau d’origine du nerf oculo-moteur commun est composé histologiquement de cellules assez volumineuses, wni ou bi-polaires, quelquefois zrulti- polaires (surtout chez les Sélaciens), dont les prolongements protoplasmatiques se ramifient entre les fibres du faisceau longitu- dinal postérieur ei dont le prolongement cylindraxile, unique et dépourvu de collatérales, se dirige en bas et en avant pour consti- tuer une fibre périphérique. Plusieurs de ces fibres s’entre-croisent sur la ligne médiane, tandis que d’autres fibres non entre-croisées se rendent directement de leur cellule d’origine au nerf périphérique du même côté (fig. 37). Il nous a été impossible, jusqu’à présent, d'obtenir une imprégna- tion suffisante pour préciser le point important suivant: les fibres entre-Croisées proviennent-elles à la fois des cellules occupant la partie dorsale et la partie ventrale du noyau d’origine? Nous nous proposons de poursuivre nos recherches en vue d’élucider celte question. Quoi qu'il en soit, il demeure établi pour nous que chez les Téléostéens et les Sélaciens, les racines du nerf de la ITI° paire présentent une décussation partielle et non totale. Il nous à paru intéressant de rapprocher cette constatation des résultats obtenus par VAN GEHUCHTEN dans ses recherches sur l’ori- gine du nerf oculo-moteur commun chez des embryons de Canard et de Poulet (?). À propos du mésencéphale des Poissons, et puisque nous venons de citer le nom du professeur VAN GEHUCHTEN, rappelons que l’on doit encore à ce savant une importante contribution à l'étude de (1) Consulter sur ce sujet, entres autres, lés travaux de J. V. RonoN (1877), de G. SCHWALBE (1879), de H. SCHNEIDER (1881), de VAN GEHUCHTEN (1895) et de B. HALLER (1898). (2) A. VAN GEHUCHTEN. De l'origine du nerf oculo-moteur commun. Zull, Acad, Roy. des Sc, Lettres et B. Arts de Belgique, Tome XXIV (1892). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 141 l'origine et de la direction des fibres radiculaires du nerf pathétique chez la Truite (!). — Noyau rouge (nucleus tegmenti) (N. rg.). — On sait que la signification anatomique du noyau rouge est encore fort obscure et que les connexions de ce noyau sont loin d’être nettement élucidées ; aussi ne saurions-nous prélendre apporter la lumière complète sur un sujet d'étude aussi délicat. Nous avons cherché, sans succès, ce noyau rouge chez les Téléostéens (2); en revanche, chez Raia, nous avons constaté dans la région inférieure du mésencéphale (partie pédonculaire), en dehors et de chaque côté du raphé médian (r), au-dessous des noyaux du nerf oculo-moteur commun, deux petites masses nette- ment arrondies dont les caractères correspondent bien à ceux du noyau rouge de SriLLiNG chez les Vertébrés plus élevés. Nous reproduisons (fig. 37), une coupe vertico-transversale passant par la partie postérieure du mésencéphale de Raia, au niveau de l'émergence du nerf de la II° paire. On voit sur cette coupe que les deux noyaux rouges sont traversés, de haut en bas et un peu de dedans en dehors, par les faisceaux radiculaires de ce nerf (N.TIT). Nous ajouterons que ces noyaux se trouvent situés sur le trajet des pédoncules cérébelleux antérieurs (supérieurs): Bindearm, Tractus tegmento-cerebellaris. L'analyse histologique démontre que le noyau rouge chez Raia se compose d'éléments divers : a) Cellules nerveuses bi-polaires (rarement multipolaires), mesu- rant en moyenne de 20 à 50 u, disséminées entre des faisceaux de fibres nerveuses. b) Ces fibres nerveuses se présentent tantôt sous forme de petits tronçons de faisceaux sectionnés, tantôt sous forme de collatérales ou de fibres terminales. Parmi ces fibres, quelques-unes se rendent dans le pédoncule cérébelleux antérieur et correspondent proba- blement aux fibres ascendantes de MaHaimM (?) ; d’autres pelits (4) A. van GEHUCHTEN : De l'origine du nerf pathétique, Pull, Acad. Roy. des Se., Lettres et B.-Arts de Belgique, Tome XXIX (1895). (2) Depuis la rédaction de notre manuscrit, nous avons observé nettement le zoyau rouge chez un Téléostéen : coupe sagittale de Cottus bubalis. (G) Mana : Recherches sur la structure anatomique du noyau rouge. Wémoire couronné de l'Académie de Médecine de Belgique (1894). 142 É. H. CATOIS. faisceaux de fibres efférentes, dont nous n'avons pu poursuivre le trajet ultérieur, nous ont paru se détacher de la partie antérieure du noyau rouge pour se rendre dans les régions sous-thalamiques. Nous devons indiquer que les coupes effectuées suivant le sens » sagittal permettent surtout l'étude de ces différentes fibres. c) De nombreux vaisseaux sanguins se distribuent dans le noyau rouge, contribuant ainsi à donner à ce noyau sa teinte caracté- ristique ; ces vaisseaux (artérioles radiculaires des artères pédon- culaires), situés d’abord dans le sillon de l’oculo-moteur commun, pénètrent dans la région pédonculaire et abordent Ie noyau rouge par sa partie inférieure, en suivant de bas en haut le même trajet que les faisceaux radiculaires du nerf de la IIT° paire. Ainsi constitué, le noyau rouge nous apparait, en résumé, comme représentant moins un was ganglionnaire véritable, qu'une masse arrondie correspondant à la section du pédoncule cérébelleux antérieur dont les fibres sont entremêlées de cellules nerveuses, avec interposilion de capillaires sanguins. Pour terminer ce chapitre Mésencéphale, deux mots enfin sur celte substance, particulière à la région pédonculaire comme au myélencéphale, désignée dans les traités d'anatomie descriptive sous le nom de formation réliculaire (substantia reticularis). La formation réticulaire offre chez les Poissons la même signili- cation et la même structure que chez les autres Vertébrés. Elle se compose de cellules nerveuses de forme et de dimensions variables, grandes, moyennes ou petites, fusiformes ou multipolaires et étoilées, irrégulièrement disséminées entre un lacis ou réseau inextricable constitué à la fois par des fibres longitudinales et par des fibres transversales ou arciformes. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 143 IV. LE MÉTENCÉPHALE Synonymie : Cerveau postérieur. Cerveau pénultième. Hinterhirn (Frirscu). — Cette partie du cerveau, sur laquelle les observateurs ont toujours été à peu près d'accord au point de vue des homologies, dérive de la partie antérieure de la vésicule cérébrale postérieure. Anatomiquement, le métencéphale offre à considérer : un sommet, une base et des côtés, enfin, une cavilé. Le sommet forme une partie nettement différenciée, le cervelet, dont le volume et l'aspect varient non seulement chez les Téléostéens et chez les Sélaciens, mais encore suivant chaque genre. Rappelons que, chez les Téléostéens, le cervelet développé extérieurement en un épais mamelon se recourbe en arrière, recouvrant ainsi plus ou moins le myélencéphale; également étendu dans ses parties internes, cet organe constitue en avant et en bas une saillie plus ou moins volumineuse ({walvule du cervelet), pénétrant dans la cavilé du cerveau moyen. La base et les côtés contiennent les fibres nerveuses reliant le cervelet aux autres parties de l’encéphale (pédoncules cérébelleux:) et les fibres propres du métencéphale. La cavité, commune avec celle du myélencéphale (4° ventricule), reste confinée dans la base et ne pénètre pas dans le cervelet (L. RouLE, Anatomie comparée). Ces notions anatomiques sommaires étant exposées, 1l n'est pas sans intérêt de faire remarquer que si le métencéphale a été souvent décrit etest depuis longtemps connu dans ses formes extérieures, dans ses connexions apparentes et dans sa consti- tution macroscopique, il présente encore aujourd'hui plusieurs points obscurs ou douteux à élucider, au point de vue de sa structure microscopique. Relativement à sa constitution histologique, le sommet du méten- céphale, ou cervelet proprement dit, a êté dans les différentes Classes de Vertébrés l’objet de travaux nombreux et importants. 144 £. H. CATOIS. Chez les Poissons, nous signalerons particulièrement les conscien- cieuses et patientes recherches de R. Fusari (1887), PEDRO RAMON y CaJaL (1890), A. ScHaper (1893, 1894, 1898), CÉSAR FALCONE (1893), S. Ramon y CaJaL (1894) et de B. HALLER (1898). Dès les premiers jours de 1897, nous faisions nous-même connaitre, dans une note présentée à l’Académie des Sciences par M. le Professeur E. PERRIER, quelques résultats obtenus dans l'analyse du cervelet chez les Poissons, en utilisant les méthodes de coloration au bleu de mêthylène (Carois, 1897 «). Enfin, en 1899, nous avons dû à l’obligeance de M. le Professeur À. GraRD, président de la 10° section du Congrès de Boulogne-sur- Mer (Association française pour l'avancement des Sciences), de pouvoir présenter devant ce Congrès une note sur les voies cérébel- leuses chez les Poissons (Carois, 1899 c). | Depuis la publication de ces divers travaux nous avons continué nos recherches et multiplié nos investigations. Ne pouvant, dans ce chapitre, entreprendre l'analyse complète du métencéphale et l'étude des nerfs qui dépendent, en tout ou en parte, de ce segment encéphalique (nerfs de:la IV°, V°, VI, VII et VIII paire), nous nous proposons d'apporter seulement ici quelques contributions à la connaissance du cervelet chez les Poissons. Aiïnsi limité, le présent Chapitre comprendra un certain nombre de paragraphes : 1° Valvule du cervelet; 2° Structure du cervelet ; 3 Connexions extrinsèques du cervelet. S I. Valvulve du cervelet (Va. c.). — Etudiée avec soin par BAUDELOT sous le nom d’éminence lobée, homologuée par STIEDA avec la valvule de VIEUSSENS, léngula des Mammifères, celte valvule offre une structure histologique identique à celle du cervelet. Les coupes sagittales démontrent nettement que la valvule cérébelleuse doit être considérée comme le prolongement de la partie antérieure du cervelet sous le toit des lobes optiques. R. Fusari, en employant le premier la méthode de GoLer pour analyser le cerveau chez les Poissons, a donné une très bonne description de cette partie de l’encéphale (valvola del cerveletto). La Planche II qui accompagne sa monographie indique bien les HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 149 connexions anatomiques et les relations histologiques existant entre le cervelet et la valvule cérébelleuse. L'auteur a eu, de plus, le mérite de mettre en relief les rapports respectifs de la couche moléculaire et de la couche granuleuse, la disposition spéciale des cellules de PurKINJE de cette région, ainsi que la façon dont se détachent les prolongements protoplasmatiques de ces cellules. Nous avons, pour notre part, analysé plus particulièrement les fibres nerveuses qui se rendent à la valvule du cervelet et celles qui en sortent. Ces fibres sont centripètes ou centrifuges par rapport à la valvule cérébelleuse ; quelques-unes sont manifestement commissurales. 1° Les fibres centripètes, peu nombreuses, abordent la valvule soit par sa face inférieure, Soit par ses faces latérales; elles proviennent, en majeure partie, du mésencéphale (tori semi-circu- lares) et du diencéphale (thalamus) ; 2° Les fibres centrifuges, plus nombreuses, forment deux caté- gories distinctes : (a Fibres constituant cinq ou six petits faisceaux distincts, recourbés en arc à concavité dorsale et sortant de la valvule pour se rendre dans le cervelet; ces fibres qui nous semblent corres- pondre à Xleinhirn-Associationsbahn, de B. HALLER, une fois parvenues dans le cervelet, ont une tendance à quitter la partie centrale de la substance médullaire et à s'épanouir dans les couches les plus superficielles de la zone granuleuse, par conséquent, immédiatement au-dessous des assises des cellules de PURKINIE. b) D’autres fibres se détachent de la partie dorso-latérale de la valvule cérébelleuse, formant un faisceau descendant arqué, à concavité antérieure, qui vient s’épuiser dans la région des noyaux d’origine du nerf de la IV° paire et du nerf de la II° paire. Il se peut que ce faisceau descendant corresponde à celui que KLIMOFF à récemment décrit, chez les Mammifères, comme se rendant du pédoncule cérébelleux supérieur au noyau d’origine du nerf oculo- moteur commun (1). (1) Krmorr : Connexions du cervelet avec le noyau oculo-moteur commun (Wratch — 1896), 10 146 ES. IH. CATOIS. 3 Les fibres comsnissurales de la valvule cérébelleuse ne peuvent èlre analysées que sur des coupes horizontales et surtout vertico- frontales. Ce sont de véritables fibres d'association s'étendant d’un côté de la valvule à l’autre côté. S IT. Structure du cervelet. — S'il est vrai que les méthodes de GOoLGI-CAJAL ont démontré que la Structure du cervelet est uniforme dans ses principales lignes chez tous les Vertébrés, il faut toutefois reconnaître que certains points douteux restent encore à éclaircir. Ne sait-on pas, en effet, qu'il y a justement dans le cervelet des éléments histologiques dont l'existence n’a été révélée que dernièrement, et que l'imprégnation argentique peut, à tout instant, faire apparaître des éléments nouveaux ou des formes. nouvelles (1). Nous n'avons pas l'intention de décrire ici les éléments du cervelet qui ont été bien vus, bien étudiés par les auteurs et parfai- tement analysés dans leurs formes et dans leurs rapports respectifs (cellules de PURKINE, fibres parallèles, grains, fibres moussues, etc.). Nous ne faisons que consigner dans les lignes suivantes les résultats de nos études, quoique très incomplets. La méthode de coloration au bleu de méthylène nous a permis de » mettre en évidence dans l’écorce cérébelleuse chez les Poissons : 1° Les prolongements protoplasmiques des cellules de PURKINIE avec leurs saillies épineuses signalées par R. CaJaAL, confirmées par VAN GEHUCHTEN, RETZIUS et mentionnées chez les Poissons par A. SCHAPER, au moyen de la méthode de GoLGl. 2 Les cellules nerveuses étoilées de la couche moléculaire du cervelet, ainsi que leur cylindre-axe à marche plus ou moins parallèle. 3° Les corbeilles (Cestas terminales, Endkærben) formant autour du corps cellulaire des cellules de PURKINJE un plexus assez irrégulier, assez lâche et moins accusé que chez les Oiseaux et les Mammifères (fig. 1, PI. 1}. Ainsi que le fait a été constaté par RamoN Y CayaL (1894) en utilisant l'imprégnation argentique, les corbeilles sont constituées par des rameaux descendants et obliques (1) Voir M. Arias : Recherches sur l'histogénèse de l'écorce du cervelet (Journal de l'Anatomie et de la Physiologie, de Mathias-Duval, N° 4, 1897). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 147 provenant des cellules étoilées de la région la plus interne de la couche moléculaire. Les méthodes de GoL@i-CaraL sont d’une application plus difficile chez les Sélaciens que chez les Téléostéens; au moyen de ces méthodes, nous avons pu néanmoins analyser les fibres moussues, les fibres grimpantes et les grandes cellules éloilées de la zone granuleuse. Comme il nous semble inutile d’insister sur la disposition et la morphologie de ces divers éléments dont la description est en quelque sorte classique, nous renvoyons le lecteur à l'exphcation des fig. 1, PL. ret fig. 9, PL ur. A propos de la structure microscopique du cervelet chez les Poissons, se pose une question importante à résoudre : le cervelet étant, chez ces Vertébrés inférieurs, l’homologue du lobe moyen ou vernis chez les Oiseaux et chez les Mammifères, peut-on reconnaître dans la substance centrale de cette partie de l’encéphale des amas ganglionnaires ou foyers gris délinités, en un mot, des royaux cérébelleux ? EniNGER professe que ces noyaux, facilement reconnaissables chez les Vertébrés supérieurs, sont à peine connus chez les Vertébrés inférieurs : « £igenkerne des Kleinhirnes kann man Kerngruppen nennen, welche bei Säugern und Vügeln gut, bei den Reptilien und Anphibien noch hkaur gekannt, bei den Fischen aber wenigstens in einer Gruppe gut abscheidbar sind >. Ce savant reconnait toutefois la possibilité de leur présence chez ces Vertébrés inférieurs : « Moch ist er bei den niederen Vertebraten nicht wiedererkannt, aber es ist wahrscheinlich, dass er existirt » (EniNGER (1896) Vorles. üb. d. Bau. der Nerv. Centr., pages 100- 101). S. Ramon y CayaL (1894) a d’ailleurs observé chez les Téléostéens deux amas ganglionnaires à contours bien nets, siégeant dans la substance cérébelleuse centrale: un noyau interne, homologue probable du ganglion du toit des Mammifères, dû à des cellules dont le cylindre-axe se termine dans l’écorce du cervelet ; un autre noyau, externe, composé de cellules dont le cylindre-axe se porte vers le bulbe. La figure très démonstrative qui accompagne la description de l’auteur représente une coupe antéro-postérieure de la base du cervelet chez une jeune Truite (âgée de quelques semaines). 148 E. H. CATOIS. La haute valeur scientifique des travaux de CayaL donnant à ces observations une importance toute spéciale, nous avons recherché avec le plus grand soin les noyaux ganglionnaires cérébelleux chez les Poissons. Nous n'avons pu, jusqu'a présent, réussir à constater leur présence chez les Sélaciens choisis par nous comme sujets d'études: Raia, Scyllium, Mustelus, Acanthias ; il ne faudrait pas, toutefois, inférer de notre insuccès que les noyaux cérébelleux n'existent pas chez les Sélaciens: le hasard heureux d’une préparation microscopique bien réussie pouvant, un jour ou l’autre, les mettre en évidence. Nous ne saurions trop répéter, du reste, que la substance centrale du cervelet est, chez les Poissons en général et chez les Sélaciens en particulier, une des parties du névraxe les plus difficiles à impréègner par les méthodes rapides de GoLar. Chez les Téléostéens, l'emploi de la méthode de Cox nous a permis de constater l'existence d’un amas ganglionnaire situé vers la base du cervelet et un peu en avant de cette partie de l’encéphale. La fig. 38 représente, chez un très jeune exemplaire de Platessa, une coupe sagittale de la base du cervelet effectuée en dehors de la ligne médiane. On remarque sur ce dessin un groupe de cellules nerveuses gg. €, amas ganglionnaire qui nous semble bien correspondre au noyau du toit (ganglio subcerebeloso, ganglio del techo, Casa, loc. cit.). Cette masse ganglionnaire nous apparaît comme formant un noyau unique (!), irrégulièrement arrondi, en rapport: en haut avec le pédoncule cérébelleux antérieur, en arrière avec le pédoncule céré- belleux postérieur et en bas avec les fibres nerveuses du bulbe et du faisceau longitudinal postérieur. Considérée dans sa structure, cette masse est composée de cellules nerveuses, de fibres soit de passage, soit comimissurales, enfin de collatérales et arborisations terminales de ces fibres. Les cellules, (4) Il nous semble probable que ee noyau correspond au ganglion cérébelleux décrit par CAJAL sous le nom d'amas interne ; faisons remarquer, en passant, qu'il serait peut- être préférable de le désigner sous le nom d’amas antérieur. Nous ne nous permettrons pas de nier l'existence d’un deuxième noyau (noyau externe ou ganglion cérébelleux postérieur, de CAJAL) — ce noyau ayant parfaitement pu échapper à l'imprégnation et par conséquent à notre examen. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 149 généralement de dimensions moyennes et diversement orientées, sont fusiformes, bipolaires ou unipolaires, {ès rarement multipo- laires. Elles possèdent des expansions protoplasmiquesdescendantes, le plus souvent peu développées, qui se ramifient dans l’intérieur même de la masse ganglionnaire. Le cylindre-axe de quelques-unes de ces cellules se dirige en haut et plus ou moins obliquement vers le pédoncule cérébelleux antérieur, devenant ainsi une fibre constituante de ce pédoncule. Nous n’avons pu, malheureusement, établir en toute sécurité le trajet du cylindre-axe des autres cellules. Il est probable que pour certaines d’entre elles, le cylindre-axe sectionné par cette coupe sagittale doit constituer une des fibres commissurales que nous . aurons à mentionner dans un instant. Les fibres de passage traversent la masse ganglionnaire sous forme de petits faisceaux {angentiels et lui abandonnent quelques collatérales. Les fibres commissurales, destinées à unir le noyau du toit d’un côté à celui de l’autre côté, abordent ou quittent chaque noyau par son côté interne. On ne peut se rendre compte de cette particularité, non signalée jusqu'à présent chez les Poissons, qu’en examinant des coupes horizontales ou fronto-verticales. Ces fibres commissurales dirigées transversalement (commissure des noyaux du toit) émettent, au cours de leur trajet, quelques collatérales peu nombreuses. Ajoutons, enfin, que nous avons pu constater à l’intérieur même du noyau du toit la présence de fibres terminales provenant, soit du faisceau longitudinal postérieur, soit des faisceaux du bulbe. On voit, par le court exposé qui précède, que nos études sur les ganglions cérébelleux des Poissons demeurent forcément incom- plètes et que ce point spécial d’histologie topographique réclame encore des recherches plus approfondies. Tout en comprenant fort bien les sages réserves formulées par CaJAL, disons donc, pour nous résumer, que nous nous rallions d’une façon générale aux opinions émises par ce savant : 1” L’amas ganglionnaire ou foyer gris cérébelleux, à peine ébauché chez les Poissons, correspond au noyau du toit des Vertébrés supérieurs. 2° Les cellules nerveuses qui entrent dans la composition de ce noyau cérébelleux associent leur cylindre-axe aux fibres de la 150 E. H. CATOIS. substance blanche du cervelet; ces fibres vont constituer très proba- blement une partie des fibres mousseuses où moussues. 3° Nous ajouterons que, pour nous, ce noyau cérébelleux est l’aboutissant de fibres terminales ou collatérales de diverses prove- nances: Comimissures des noyaux ceérébelleux, cellules de PurkINJE ? faisceaux du bulbe, faisceau longitudinal postérieur, peut-être même, faisceaux émanêés du toit des lobes optiques. S IIT. Connexions extrinsèques du cervelet (Pédoncules cérébelleux). — Chez les Poissons, de même que chez les autres Vertébrés, tout un ensemble de fibres extrinsèques relie le cervelet à divers départements du névraxe. Ces fibres sont de deux ordres : centrifuges ou centripètes, par rapport au cervelet. Les fibres centrifuges naissent dans le cervelet pour aller se terminer en dehors de lui. Les fibres centripètes proviennent de la moelle dorsale, du myélencéphale, du mésencéphale ou du diencé- phale et viennent se terminer dans le cervelet. Ces deux sortes de fibres passent par les pédoncules cérébelleux. Ces pédoncules, au nombre de trois de chaque côté, peuvent être désignés, suivant leur situation naturelle, sous les noms de : 1° Pédoncules cérébelleux antérieurs (supérieurs dans l'anatomie humaine) ; 2° Pédoncules cérébelleux #0yens ; 3 Pédoncules cérébelleux postérieurs (inférieurs). L'analyse détaillée des fibres qui constituent ces trois sortes de faisceaux pédonculaires est hérissée de difficultés ; au demeurant, la solution des problèmes importants que comporte l'étude des connexions cérébelleuses n’est pas beaucoup plus aisée chez les Vertébrés inférieurs que chez les Vertébrés supérieurs. A l'appui de cet aveu, nous citerons lextuellement les paroles d’un maitre en névrologie comparée: « Die Verbindungen und der innere Verlauf der Fasern des Kleinhirnes sind noch sehr wenig sicher bekannt > (EnixGer : Vorles. üb. d. Bau. d. Nerv. Central. 1896, page 101). Dans l'aperçu sommaire que nous donnons d'un sujet aussi complexe, nous allons essayer d’en esquisser les principales lignes. Commençons par rappeler que plusieurs observateurs consciencieux et distingués ont publié maints travaux sur la question qui nous HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 191 occupe en ce moment et que les pédoncules cérébelleux des Poissons ont été l'objet des recherches de EbINGER, de R. Cayar, de Van GEHUCHTEN et de B. HALLER. En l’état actuel de nos connaissances et pour dégager la physio- nomie générale des pédoncules cérébelleux chez les Sélaciens et chez les Téléostéens, nous ne saurions faire mieux que d'associer les résultats acquis par nos devanciers à ceux que nous avons déjà obtenus au cours de nos propres recherches (Carois, 1899). A. Pédoncules cérébelleux antérieurs. — L'ensemble de ces pédoncules correspond au Crus cerebelli ad cerebrum directum, de FriTscH, au tractus diencephalo et tegmento-cerebellaris, Brachium conjunctivum anterius, Bindearm zum Kleinhirn, de EniGer. Composés en majeure partie de fibres à direction centripète, les pédoncules cérébelleux antérieurs mettent en relations les centres ganglionnaires optiques, les noyaux du thalamencéphale et la région basilaire du mésencéphale avec le cervelet. Ils constituent à cet effet des faisceaux multiples et diversement orientés : 1° Un faisceau double (un de chaque côté) non croisé, reliant les corps genouillés et le thalamencéphale au cervelet ; ce faisceau est décrit par B. HaLLErR (1898) sous le nom de obere vordere Bindearm ; 2 Un faisceau également double et non croisé, associant le diencéphale et le mésencéphale avec le cervelet et venant s’épuiser dans la région hypothalamique, au voisinage de la partie postérieure et terminale du faisceau basal (tractus strio-thalamicus). Cette partie du pédoncule cérébelleux antérieur correspond au wntere vordere Bindearm, de B. HALLER ; » 3° Enfin, un faisceau croisé (gekreuzte Bindearm, de B. HALLER), à direction presque verticale, s'étendant de la partie inférieure de la valvule du cervelet à la région voisine du noyau d'origine du nerf oculo-moteur commun. Les fibres qui entrent dans la constitution de ce dernier faisceau ont donc une direction centrifuge par rapport à la valvule du cervelet. Rappelons en outre, ainsi que nous l'avons vu plus haut, que le cylindre-axe de certaines cellules du noyau du toit (ganglion cérébelleux), prend part à la constitution du pédoncule cérébelleux antérieur et contribue à former #ne partie lout au moins des fibres mousseuses de la substance blanche du cervelet. 152 E. H. CATOIS. B. Pédoncules céreébelleux moyens. — Ces pédoncules, corres- pondant aux pédoncules cérébelleux externes (mittlere Arm, EniGer ; Pedunculo cerebeloso lateral, R. CAJAL), sont, pour ainsi dire, ébauchés et en quelque sorte diffus, chez les Poissons. Visibles surtout sur des coupes transversales, ils sont plus développés chez les Sélaciens que chez les Téléostéens et unissent le cervelet aux parties latérales du bulbe (ventrale Fasersystem des Kleinhirns, de B. HALLER). Les pédoncules cérébelleux moyens sont constitués par des fibres ascendantes et par des fibres descendantes. Les fibres descendantes ou centrifuges partent de l'écorce cérébel- leuse et semblent provenir des prolongements cylindraxiles des cellules de PURKINE pour aller s’épuiser dans un amas irrégulié- rement arrondi, composé de cellules nerveuses piriformes et situé dans les parties inférieures et latérales du bulbe. Cet amas ganglionnaire ou foyer de substance grise, corres- pondant très probablement au noyau olivaire du bulbe des Mammifères, a été déjà signalé chez les Sélaciens (Carcharias) par ViauzT et chez les Téléostéens (Salino trutta, Cyprinus), par R. CAJAL. Les fibres ascendantes ou centripètes ont leurs cellules d’origine dans les masses ganglionnaires du myélencéphale et se terminent dans l’écorce cérébelleuse où elles nous ont paru contribuer à former les fibres grimpantes disposées le long des prolongements protoplasmiques des cellules de PüuRkINJE. De nouvelles recherches nous semblent nécessaires pour élucider la question suivante : Ces fibres sont-elles, chez les Poissons, homolatérales ou croisées ? C. Pédoncules cérébelleux postérieurs. — L'ensemble de ces pédoncules (inférieurs, dans l'anatomie humaine), correspond aux Spinalen Kleinhirnverbindungen, caudale Kleinhirnarm, Trac- lus cerebello-Spinalis, de EniNGER ; au Pedunculo posterior ? de R. CayaL (1). (1) Si nous avons bien interprété cet auteur, il nous semble probable qu'il y a eu un lapsus calami de sa part, ou une erreur d'impression dans le texte, lorsqu'il déclare que ce pédoncule correspondrait aux pédoncules cérébelleux supérieurs des Mammifères (Bindearm, de EpiNGER)? — (S. R. CayaL : Notas preventivas sobre la Estructura del Encéfalo de los Teleosteos (Anal. de la Soc. Esp. de Hist. nat. Tomo XXIII, 1894, page 97). = HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENGÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 153 Les pédoncules cérébelleux postérieurs se composent de fibres ascendantes et de fibres descendantes. Les fibres ascendantes proviennent de neurones situés dans la moelle dorsale et dans le bulbe et pénètrent dans la couche granu- leuse du cervelet en formant wne partie des fibres mousseuses. Nous avons pu, notamment chez Platessa, vérifier ce fait déjà signalé par les auteurs classiques: VAN GEHUCHTEN, ÉDINGER et CayaL. Ces fibres ascendantes entrent encore en relations avec les noyaux terminaux ou les racines des nerfs {rijumeau, auditif et preumogastrique. Les fibres descendantes nous ont paru provenir du cylindre-axe des cellules de PURKINIE ; ces fibres se rendent directement dans le cordon antéro-latéral de la moelle, ainsi que VAN GEHUCHTEN l’a mentionné, d’ailleurs, dans ses recherches sur le système nerveux central de la Truite. Elles se terminent au voisinage des cellules motrices de la corne antérieure. Pour terminer cette analyse sommaire du métencéphale, nous ajouterons que, dans certaines préparations bien imprégnées, nous avons pu constater la présence de quelques fibres intrinsèques, véritables fibres commissurales ou d'association. Ces fibres, assez rares en somme et à peine ébauchées, sont plus nombreuses dans le cervelet des Sélaciens que dans celui des Poissons osseux ; elles ont, en général, une disposition arquée et sont dirigées, soit transversalement, soit d'avant en arrière. 154 E. H. CATOIS. CONCLUSIONS GÉNÉRALES Nous allons maintenant résumer aussi succinetement que possible les résultats obtenus au cours des recherches qui ont fait l'objet de ce mémoire, tout en prévenant le lecteur que la meilleure énumé- ration que nous puissions en donner se trouve tout naturellement exposée sous forme d’une Table des Matières méthodiquement élablie et placée à la fin de ce travail. Nous avons eu déjà, du reste, le soin de formuler un cerlain nombre de conclusions en terminant divers chapitres, voire même divers paragraphes, lorsque cela était nécessaire pour l'intelligence du sujet spécialement traité. Dans la Première partie de ce mémoire (Historique et Technique) nous avons tenu à indiquer d’une façon générale les divers travaux publiés sur l’Anatomie microscopique de l’Encéphale des Poissons, nous réservant de citer les recherches personnelles de chaque auteur en traitant particulièrement tel ou tel point de la question. Faisons remarquer, à Ce propos, que nous avons dû, maintes fois, faire des incursions dans le domaine de l'Histologie comparée. Sans négliger l'emploi des méthodes déjà anciennes (coloration au Carmin, à l’hématoxyline, méthodes de WEIGERT, etc...) nous avons utilisé surtout les techniques modernes et classiques de Exrnicx, de Nissi, de GoLGr, de CaJAL et de Cox, variant les pro- cédés, au besoin même les modifiant, suivant les nécessités du sujet. Dans la Seconde partie (Histologie générale), nous avons insisté d’abord sur la morphologie générale des cellules nerveuses de l’'Encéphale des Poissons. Ces cellules affectent le type bipolaire, unipolaire ou multipolaire. Il n'existe pas dans l’encéphale, chez les Poissons, de véritables cellules pyramidales. Le degré le plus élevé dans la différenciation morphologique et probablement physiologique des cellules nerveuses est représenté, chez ces Vertébrés inférieurs, par des cellules multi- polaires. La différenciation du cylindre-axe des cellules nerveuses est fort peu accusée ; souvent même, on peut à peine distinguer les dendrites de l’axone. Les arborisations protoplasmiques se présentent d’ailleurs sous un aspect marqué de simplicité. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 199 Les recherches cytologiques offrant un certain cachet d'actualité, nous avons appliqué à diverses cellules des centres nerveux encépha- liques la z#2e6thode de Nissi. Les résultats obtenus ont été résumés à la fin d’un paragraphe spécial. Il nous a également paru intéressant d’esquisser un classement methodique des cellules nerveuses de l’'Encéphale des Poissons considérées en tant que #ewrones. Comme éléments de soutien, en plus des cellules épendymaires classiques, nous avons reconnu l'existence de cellules de nétroglie dites ex araignée ; ces cellules de DEITERS sont surtout visibles chez les Sélaciens et nous avons insisté sur les procédés techniques qui permettent de les mettre en évidence. La Troisième partie de notre mémoire (Histologie topographique) comprend, tout d’abord, l'Analomie rnicroscopique du Télen- céphale ainsi que d’une de ses parties essentielles: le Rhinencé- phale, « Ausstülpung der Vorderhirnblase > comme le désigne EDINGER. Ce segment encéphalique minulieusement analysé chez les Téléostéens et chez les Sélaciens, nous avons procédé ensuite à l'étude du diencéphale, du mnésencéphale et du #nétenceéphale. Nous avons cru devoir insister tout particuhèrement sur l'anatomie microscopique du télencéphale (cerveau terminal) et du diencéphale (cerveau intermédiaire), ces deux segments encéphaliques avant été, jusqu’à présent, fort peu étudiés chez les Poissons. Nousavonsdoncessayé de pénétrer les secrets de la structure d'une partie du névraxe chez ces Vertébrés inférieurs. Malgré les belles recherches de nos devanciers, c'était là une entreprise difficile. Comme le fait si bien remarquer S. R. Cayaz à propos de l’Histo- logie du système nerveux chez les Vertébrés (!), les illustres savants découvrant la signification des hiéroglyphes égyptiens ou surprenant le sens mystérieux des caractères cunéiformes de Ninive et de Babylone, se trouvaient en présence de problèmes plus faciles à résoudre que lhistologiste s’efforçant de saisir les caractères non moins mystérieux de cellules nerveuses qu’il faut d’abord mettre en évidence à l’aide de réactifs appropriés, pour ensuite analyser l'ordonnance de leurs prolongements. 4) S. R. GayaL : El sistema nervioso del Hombre y de los Vertebrados, Madrid, 1897. 156 E. H. CATOIS. Le télencéphale offre chez les Sélaciens wne architecture plus complexe que chez les Téléostéens. Chez ceux-ci, le degré d’infériorité du cerveau terminal, réduit aux ganglions basilaires, s’affirme non seulement par l'absence de palliurm, mais encore par la pénurie relative des groupements de neurones, des faisceaux nerveux et des cellules dites d'association. Chez ceux-là, bien qu'il soit difficile d'établir une délimitation exacte entre le pallium et le ganglion basal, comme le fait d’ailleurs remarquer EbiNGER (!), il existe néanmoins wne ébauche de différenciation fonctionnelle se traduisant histologiquement par l'apparition de groupements de neurones, groupements plus nombreux et mieux définis ; par la présence de cellules d’associa- tion plus abondantes ; enfin, par une complexité plus grande dans l'agencement des faisceaux de fibres de projection et de fibres terminales ou cominissurales. Chez les Poissons osseux el carüilagineux le cerveau terminal représente : l° Un centre récepteur où un foyer d'analyse principalement pour les impressions olfactives, accessoirement pour d’autres impressions sensitives ; : 2° Un centre incitateur réagissant à son tour, mais secondaire- nent, Sur les neurones des autres départements de l’encéphale. Enfin, immédiatement après avoir étudié le télencéphale, nous avons exposé des considérations sur les voies olfactives. Le diencéphale constitue tout à la fois un territoire de passage pour des fibres nerveuses de provenance multiple, un çentre général de la coordination de réflexes nombreux, enfin, un ensemble de relais situés sur le trajet de diverses voies nerveuses. Ce segment encéphalique offre, surtout dans sa partie thalu- nique, une complexité plus grande chez les Téléostéens que chez les Sélaciens. Dans le chapitre consacré à l’étude du diencéphale, nous avons insisté tout particulièrement sur les connexions entre les nerfs optiques et les noyaux du thalarnus et nous avons exposé la structure du nucleus rotundus et des lobes inférieurs. (4) « Die gränze zwischen Mantel und Stammganglion ist bei Selachiern eben nicht scharf ». EDINGER (Das Zwischenhirn), 1892, page 29. HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 197 Le snésencéphale constitue, par: sa région supérieure (toit des lobes optiques), un centre essentiellement récepteur des impres- sions visuelles. Les éléments constitutifs de ce centre, disposés sur une longue étendue et formant des assises multiples diversement étagees, réagissent à leur tour et actionnent d’autres centres du névraxe. Dans sa région centrale, le mésencéphale offre à considérer, chez les Téléostéens, des masses ganglionnaires (torisemi-circu- lares), véritables centres actifs. Dans sa région basale (portion pédonculaire de REISSNER), ce segment encéphalique est formé surtout par un ensemble de faisceaux de fibres de passage ou d'association. Mentionnons enfin, à propos du mésencéphale, l'existence d’une decussation partielle des racines du nerf de la froisième paire et la présence du nucleus ruber tegmenti. Dans le chapitre relatif au #nétencéphale, sans nous étendre sur la description de l'écorce du cervelet si bien anaiysée par les classiques, nous avons procédé à une étude aussi complète que possible des fibres nerveuses de la valvule du cervelet, des noyaux cérébelleux et enfin des connexions du cervelet (voies céré- belleuses). Essayons maintenant de dégager la physionomie générale de l’encéphale des Poissons. Bien que la division de cet organe en segments soit purement conventionnelle, puisque nous avons vu ces divers segments demeurer tributaires les uns des autres, on peut, en dernière analyse, reconnaitre dans chaque région encéphalique : 1° Des territoires ou zones constitués par des amas de neurones, véritables centres ganglionnaires où parviennent et d’où partent des incitations (sensitives et motrices, actions réflexes) ; 2% Des territoires ou zones de passage des fibres nerveuses ; 9° Des territoires ou zones de {erminaison de ces fibres. L'ensemble de ces divers territoires, les connexions de ces diverses zones entre elles, contribuent en fin de compte à l'édification de cette partie du névraxe désignée sous le nom d’encéphale. Par quel mécanisme intime s’accomplissent ces fonctions si complexes de réceplion des impressions sensitives, de production d’impulsions motrices, de conduction de ces impressions et de ces impulsions ? 158 E. H. CATOIS. L'histologie s'avoue impuissante à donner la solution du problème et cède ici le pas à la physiologie expérimentale et comparée. Un savant anatomiste allemand, EniNGER, dont nous avons eu si souvent à rappeler les beaux travaux, pose la très intéressante queslion suivante : Les Poissons possèdent-ils de la mémoire ? Sans prétendre imposer notre opinion sur ce point spécial de psychologie comparée, nous répondrons ainsi à cetle question : La mémoire pouvant être considérée comme éfant la persistance consciente et inconsciente d'une perception (!), il est admissible que, chez les Poissons, les noyaux ganglionnaires de l'encéphale, quoique réduits au rôle de centres sous-corticaux, doivent conserver la faculté de retentir pendant plus ou moins longtemps après une excitation. Cette faculté, désignée par Cx. RicHET sous le nom de Mémoire élémentaire ou de Vibration prolongée, paraît bien caractériser les centres nerveux, puisque son existence est mani- feste, même dans les centres médullaires. Il nous semble donc logique de dire qu’à défaut de #2énoûre compleæe, d'associations des idées, de manifestations intellectuelles proprement dites, phénomènes qui supposent l'existence de véri- tables cellules pyramidales psychiques, absentes chez les Poissons, ces Vertébrés inférieurs doivent posséder une mémoire rudimen- taire forcément restreinte et réduite à des réactions simples, plus ou moins automatiques. Parvenu au terme de notre labeur, nous réclamons l’mdulgence du lecteur qui aura eu la patience de lire notre Mémoire en entier. Dans ces pages qu’on jugera peut-être trop longues, dans ces des- criptions qui paraîtront sans doute trop minutieuses, nous avons cru faire œuvre utile en présentant un ensemble aussi complet que possible des observations faites à l'étranger sur le sujet choisi par nous, observations généralement trop peu connues en France ; nous avons cédé, de plus, au désir de signaler un certain nombre de constatations nouvelles et personnelles. Puissions-nous ne pas nous être montré trop au-dessous de la tâche. Est-ce à dire que nos suc- cesseurs n'ont plus rien à découvrir dans le champ que nous venons (1) CHaRLES RicHET : Physiologie des muscles et des nerfs (Paris, 1882). HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. [59 de défricher et après le travail que nous soumettons présentement à la critique ? Si nous nous bercions d’une illusion semblable, nous serions vite ramené à des sentiments plus modestes, en méditant ces paroles de S. RAMON CAJAL : « Alors que deux ou trois générations > de chercheurs ont avec un noble courage passé leur vie entière > à étudier l'architecture du névraxe, pour n’obtenir que des éclair- > cissements partiels et ne donner que des synthèses prématurées, > on peut prédire, sans crainte d’être taxé d’exagération, que l’aché- > vement complet de l'édifice de la névrologie nécessitera encore > un labeur de plusieurs siècles > (S. R. Cayar : EI sistema nerv. del Hombre y de los Vertebrados. Madrid 1897) (Traduction de l’auteur). Y N7 160 E. H. CATOIS- INDEX BIBLIOGRAPHIQUE DES AUTEURS CITÉS (1) AHLBORN,F. — (1883). Untersuchungen über das Gehirn der Petromyzonten. — Zeitschr. fur. Wiss. z001., Bd. 39. APOSTOLUS ARSAKY. — (1813). De piscium cerebro et medulla spinali dissertatio inauguralis. AUERBACH, L.— (1886). Die Lobi optici der Teleostier und die Vierhügel der hôher organizirten Gehirne. — Morphology. Jahrbuch, Bd. XIV. BAUDELOT, D' — (1869), Bulletin de la Société des Sciences Naturelles de Strasbourg (N° 3 et 8). — (1870). Etude sur l'Anatomie comparée de l'Encéphale des Poissons. — Mémoires de la Société des Sc. Nat. de Strasbourg, t. VI. BELLONCI, G. — (1879). Ricerche intorno all intima tessitura del Cervello dei Teleostei. — Reale Accademia dei Lincei, 1878-1879. _ (1880). Uber den Ursprung des Nervus opticus und den feineren Bau des Tectum opticum der Knochenfische, — Zeitschr. f. wiss. 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HISTOLOGIE ET ANATOMIE DE L'ENCÉPHALE CHEZ LES POISSONS. 165 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES. Pages. RO D UEERIONN 2 amande toners poto OP EE es 1 PREMIÈRE PARTIE. CNP ITR IENIMETISTORIQUER LA 50e de once te tee LI TD RSR 7 CHA BIRRE TIME CHNIQURS MR NN LE en OS ENINNINEREeex 10 SéCrmdicationsisénérales: 2,0% 220 TN re 11 $ IT. Exposé des méthodes de nos recherches... ........... 12 SECONDE PARTIE. (Histologie générale de l'Encéphale des Poissons). ÉONSIDÉRATIONS/GENBRALES 220 2ielen ete e s'eiee Dents stoeleeie sine 18 CHAPITRE I. Éléments nerveux principaux et essentiels : S I. Étude de la cellule nerveuse .......:... AU et 20 Morphologie rénérale. A PAC Ce Me CC 20 brecherehes eytologiques 0" Re re ee euro 22 S IT. Etude des Fibres nerveuses centrales. .... .......... 33 S III. Considérations sur les Neurones de l’Encéphale..….. 36 CHAPITRE IL. Éléments nerveux secondaires ou de soutien. .......... 40 SI: Cellules épendymaires "0... EE Cr ee Al $ IT. Cellules de névroglie ou Cellules de Deiters . ......:, 43 CHAPITRE II. Éléments non nerveux (Tissu conjonctif, — Vaisseaux). 48 TROISIÈME PARTIE. (Histologie topographique de l’Encéphale des Poissons). CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. .. .. 2... eee es seemecssleenlse | 5 CHAPITRE I. Le Télencéphale ou Cerveau terminal.................. D4 Sous-CHAPITRE I. — Le Télencéphale des Téléostéens ............... 59 SHblerhmencéphale”.t "2" AR cos CO 00 Sevres lobes antérieurs. "."#...2.0.". 2e MER ee ce 60 SOUS-CHAPITRE II. — Le Télencéphale des Sélaciens .......:........ 71 SoAoe rhinencéphale. 7.40 RE ee 72 SP [Les lobes antérieurs : ::e. PE eee ce 75 Sous-CHAPITRE III. — Les voies olfactives chez les Téléostéens et chere Sélaciens aus Cros so CE 84 166 E. H. CATOIS. CHAPITRE II. Le Diencéphale ou Cerveau intermédiaire. ............. Se 1. L'Eprthalamuss er cer RER So II. Le Thalamus (couches optiques). -.-....%.....0.6.7e (Les lobes inférieurs : {Chez les Téléostéens HER ERee 2 Chez lés'Selaciens). 2 MT ne LA ARR CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LE DIENCÉPHALE ............... CHAPITRE III. Le Mésencéphale ou Cerveau moyen................. S 1° La région supérieure du Mésencéphale (les lobes Optiques) est de beeontenee R0T APPRNRE AE CE COLLE Analyse du toit des lobes optiques, chez les Sélaciens..... $ 2° La région centrale du Mésencéphale (Corona radiata.— Tori Semi-CIrCulares)#. rare ce ete Cet EP ÉLELE S'3° La récion/basale du 'Mésencéphale "2" 0e CHAPITRE IV. Le Métencéphale ou cerveau postérieur............... SHOTaivalyuletdu cer ve le RER RE CP PRE EEE S 2° La structure du cervelet (noyau cérébelleux)......... S 3 Les connexions du cervelet(pédoncules cérébelleux).. GONCLUSIONSIGÉNER ALES ASE A ETES INDEX BIBLIOGRAPHIQUE: Xe 0e One OR RCE CCR ERERE TABLE DES MAIRES, 2.0 entree diet IR UT CCS LES NÉPHRIDIES, Réponse à M. C. Cosmovicr. PAR PrEerRE FAUVEL Professeur-adjoint à l'Université libre d'Angers. Il y a une vingtaine d'années, M. Cosmovicr a publié un mémoire sur les « Organes segmentaires et organes génitaux des Polychètes » (Archives de zoologie expérimentale, T. VII dans lequel il chercha à établir une singulière théorie relativement à ces organes. Pour l’auteur, ce. que l’on appelle maintenant néphridie, est un organe formé en réalité de deux organes distincts: l’un, qu'il nomme organe de BoJanus, serait un rein, l’autre plus interne, pourvu d’un pavillon vibratile, l'organe segmentaire proprement dit, serait uniquement un conduit évacuateur des éléments sexuels. L’organe segmentaire, greffé sur le Bojanus, emprunterait à ce dernier son orifice externe. L'auteur, à l'appui de sa thèse, prétendait même avoir retrouvé les deux organes séparés, c’est-à-dire des organes de Boyanus dépourvus de tout orifice interne et des organes seginentaires, réduits à des pavillons vibratiles, sans organes de BoJanus. Malheureusement la plupart des faits sur lesquels l’auteur appuyait sa théorie ayant été depuis reconnus erronëés ou inexacts cette théorie a été réfutée par presque tous les zoologistes qui ont étudié les néphridies des Polychètes. Dans mes « Recherches sur les Ampharétiens >», après avoir décrit la structure des néphridies de l’Aripharete Grubei, je me suis permis d'écrire qu'ici encore, comme chez le Chétoptère, les faits apportent un nouvel argument contre l'étrange théorie de M. Cosmovicr. 168 P. FAUVEL. La critique était modérée car je n'ai même pas déclaré la théorie fausse, impossible, inexacte et je n’ai prodigué à son auteur aucune des attaques passionnées dont certains zoologistes ont fait usage, allant jusqu'à dire que: «le mieux serait, si possible, d’exclure > complètement le mémoire de Cosmovicr de la littérature du sujet » qu'il prétend traiter et de ne lui accorder seulement qu’un intérêt > psychologique » (1). Néanmoins M. Cosmovicr a relevé cette nouvelle allusion au désaccord entre les faits et sa théorie et il essaie de faire revivre celle-ci en attaquant violemment mes résultats. Dans sa « Réponse > M. Cosmovicr soutient, avec raison, que toute théorie doit être appuyée sur des faits acquis, mais sans mettre en pratique ce sage: axiome il se lance de nouveau dans une discussion théorique assez nébuleuse, basée presque entièrement sur de simples affirmalions catégoriques, à l'appui desquelles il ne fournit guère de preuves. Sur des faits précis on doit arriver à se mettre d'accord ; sur leur interprétation on peut discuter indéfiniment. Voyons donc les faits. Je commencerai d’abord par ceux que j'ai mentionnés et au sujet desquels M. Cosmovicr me donne un démenti formel, sans fournir d’ailleurs d’autres arguments que des consi- dérations théoriques ! La théorie de M. Cosmovrcr est uniquement basée sur des faits acquis, c'est entendu, seulement, quand un fait gênant ne cadre pas avec sa théorie, M. Cosmovici le nie purement et simplement. C'est aussi commode que scientifique ! Revenons aux faits. Chez l'Anipharel®Grubei il existe seulement deux paires de néphridies: l’une antérieure, s’ouvrant dans la chambre thoracique antérieure par un petit pavillon vibratile traversant le diaphragme, l’autre postérieure, située tout entière en arrière de ce diaphragme. La première, débouchant dans une partie du cœlome où ne pénètrent jamais les œufs et les spermatozoïdes, ne peut servir qu’à l’excrétion tandis que la seconde sert surtout à l'évacuation des produits génitaux et se développe considérablement à l’époque de la reproduction. (4) CUNNINGHAM. On some points of the Anatomy of Polychæta (Quart. journ. of Microse. Se. T. XX VIII, p. 240). LES NÉPHRIDIES. 169 La néphridie antérieure est formée d’un long tube recourbé en V dont les deux branches sont étroitement accolées. La branche interne, terminée par le pavillon vibratile, est étroite, très foncée et fortement ciliée, la branche externe plus grosse, de couleur plus claire, moins ciliée, s’ouvre à l'extérieur par le néphri- diopore. L'examen histologique montre que l’excrétion est principalement, nas non exclusivement, localisée dans la branche interne tandis que la branche externe joue surtout le rôle d’un conduit évacuateur. D’après la théorie de M. Cosmovicr la portion interne, étant un organe segmentaire, ne devrait pas participer à l’excrétion, ce rôle étant dévolu à la branche externe du corps de Boyanus. Joyeux-LAFFUIE ayant aussi constaté, chez le Chétoptère, la même discordance entre les faits réels et la théorie je me suis cru autorisé à conclure que l’Añipharete et le Chétoptère fournissaient deux nouveaux arguments à l'encontre de celte théorie. M. Cosmovicr prétend que je mets en doute le rôle excrétleur de la branche externe parce qu'elle est moins fortement ciliée que l’autre et 1l conclut: « en quoi — s’il vous plait — les cils en plus > grand nombre, contribuent-ils à une fonction rénale » ? Ceci prouve que M. Cosmovicr ne m'a pas lu ou pas compris. D'abord je ne nie pas complètement Le rôle excréteur de cette branche disant seulement : « si l’excrétion s’y fait encore elle est beaucoup > moins active que dans la branche interne », ensuite cette conclusion n’est pas tirée de la moins grande abondance des cils vibratiles, fait que je signale seulement comme un caractère acces- soire, mais uniquement de la structure des cellules et de leur contenu. M. Cosmovicr ajoute : « Je me permets de nier l'existence du pavillon sur la branche » interne de la néphridie des Ampharétiens, même si c’est vrai que > l'organe se trouve par une de ses extrémités, dans la chambre > thoracique antérieure qui (affirme M. FAUVEL) ne contient jamais » d'éléments sexuels. Tel est le cas pour la néphridie des Térébelles » (Voyez PI. xx et xxiv de mon travail) ». « Je nie (encore une erreur due à une idée préconçue), que le > pavillon, quand il existe, s'ouvre dans le segment qui précède > celui qui renferme l'organe ». 170 P. FAUVEL. Puisque M. Cosmovicr prétend discuter sur des faits, je me permeltrai de lui demander sw quels faits il se base pour me donner un démenti. J'ai décrit et figuré le pavillon vibratile de la néphridie antérieure de l’Arrpharele Grubei l'ayant vu sur de nombreuses dissections d'animaux vivants et conservés, et l'ayant, en outre, retrouvé neltement sur toutes mes séries de coupes, tant sagittales que longi- tudinales et transversales. Ces pavillons sont très petits, il est vrai, mais leur fente mesure encore 604 de diamètre, dimension très appréciable au microscope, même à un faible grossissement. Les cils qui les garnissent mesurent, fixés, de 6 à 10 » pour les plus courts et 30 w pour les plus longs. Puisque M. Cosmovicr nie catégoriquement l'existence de ces pavillons de deux choses l’une: ou bien il a disséqué et sectionné l’A7- pharete Grubei et alors qu'il veuille bien produire des documents, dessins, coupes, préparations ou descriptions à l'appui de son affirmation, ou bien il n’a jamais étudié cet animal et . alors ses dénégations sont sans valeur fie. pu a M aucune et ne peuvent avoir la pré- la néphridie antérieure. tention d'être basées sur des ais M. Muscles longitudi- précis. nd Pour ma part j'affirme un fait précis Coupe agittale. (X 75). que le premier venu peut aisément contrôler tandis que M. Cosmovicr nie sans fournir d’autres arguments que des raisons théoriques. Dans toutes mes recherches j'ai toujours employé la dissection sur le vivant et sur l’animal fixé, l'examen par transparence toutes les fois que je l’ai trouvé possible, et enfin les coupes en série dans les trois dimensions de façon à contrôler mes observations par des méthodes différentes. | M. Cosmovicr nous apprend qu’il n’a employé dans ses recherches sur les Annélides que la dissection à l'exclusion de la méthode par transparence et des coupes et il en conclut triomphalement : « Donc je sais ce que j'avance ! » À l'appui de ses dires M. Cosmovici cite ses observations sur les Térébelles. Il reconnait que les produits génitaux n'arrivent jamais LES NÉPHRIDIES. 171 dans la chambre antérieure et prétend que les néphridies situées dans cette région sont dépourvues de pavillons. Ses études ont porté sur Terebella (Lanice) conchilega et Terebella gigantea. En ce qui concerne la première, il suffit de comparer la description et les figures de l’auteur avec celles de CuxniNGxaM et de MEYER pour voir combien elles sont nexactes. La disposition, si curieuse, des néphridies communiquant les unes avec les autres, lui a complètement échappé. Il ne s’est même pas rendu compte de leur nombre exact et n'ayant pas vu les pavillons vibratiles des néphridies antérieures il les nie. Ayant moi-même contrôlé les résultats de CuNNINGHAM et de Meyer sur Lanice conchilega je suis en mesure d'affirmer que les néphridies situées dans la chambre antérieure sont bien pourvues de pavillons vibratiles très nets et faciles à voir. Si la Terebella gigantea de M. Cosmovicr est bien, comme je le pense, l'Amphitrite Edhvardsi je puis également, d'accord avec DE SAINT-JOSEPH, réitérer la même affirmation. Cette espèce possède neuf paires de néphridies ; sept en arrière du diaphragme et deux en avant. Le pavillon de la troisième paire traverse le diaphragme, et s'ouvre dans la chambre antérieure ; les deux autres paires de néphridies que renferme cette chambre sont également pourvues de pavillons vibratiles. La chambre antérieure des Térébelliens (comme, d’ailleurs, celle des Ampharétiens) ne renfermant pas d'éléments génitaux, M.Cosmo- RICI lui-même le reconnaît, il s'ensuit que les pavillons vibratiles des néphridies qui y sont contenues ne sont pas des oviductes ou des spermiductes. Il est vrai que ces faits étant génants pour sa théorie M. Cosmovici les nie carrément, accusant les naturalistes d'inventer des pavillons vibratiles qui n'existent pas ! C’est simple autant que commode ! Il est cependant peu croyable que depuis vingt ans les z00l0- gistes de tous pays se soient entendus pour décrire d'imagination des organes n’existant pas dans le seul but d’infirmer la théorie de M. Cosmovrcr. Si M. Cosmovicr veut se donner la peine de reprendre ses recherches sur les Annélides il arrivera facilement à constater lui- même la présence des pavillons vibratiles en question, même par la simple dissection. Sur des coupes en série la chose ne présente pas la plus légère difficulté. 172 P. FAUVEL. Autre question de fait : M. Cosmovicr nie que le pavillon — quand il existe — s'ouvre dans le segment qui précède celui qui renferme l'organe, et il nous renvoie aux figures qu’il. a données pour Sthenelais et Marphysa. Ici encore, je le crains bien, les faits ne témoignent pas en faveur de la théorie. M. Cosmovicr admet, je pense, que les diaphragmes, quand ils existent, séparent les segments les uns des autres. Si donc le pore externe d’une néphridie s'ouvre en arrière d’un dia- phragme tandis son pavillon vibratile traverse cette cloison FiG. 2. — Ampharete Grubei. Coupe POLE souvrir en avant on peut longitudinale ; P, pharynx; Æ. admettre je crois, que, dans ce estomac ; G; glandes ventrales ; cas: le néphridiopore s'ouvre Pv, pavillons vibratiles des , néphridies antérieurestraversant dans un sepment \et\ lepnés le diaphragme Di (X 30). phrostome dans le segment précédent. Or, chez les Ampharétiens et les Térébelliens nous venons de voir que tel est le cas, au moins pour certaines néphridies. Comme exemple contraire on nous cite le Sthenelais. Malheureusement des travaux récents viennent ici encore démentir la théorie. M. Dargoux, dans son mémoire sur les Aphroditiens (Thèse, Paris 1899), après avoir montré l’inexactitude des descriptions de M. Cosmovicr qui place le pavillon de l'ouverture interne de la néphridie en arrière du dissépiment chez Sthenelais et qui décrit l'orifice externe chez l’Herrnione sur la rame dorsale alors que ce pore est en réalité situé à la face ventrale, à la base du parapode, conclut : (p. 257). « Les organes segmentaires sont des tubes, plus ou moins » contournés ouverts à leurs deux extrémités : l'extrémité posté- > rieure perfore les téguments dans la région postérieure de chaque. > segment et latéralement. L’'extrémité antérieure traverse le LES NÉPHRIDIES. 173 > dissépiment et l'entonnoir s'ouvre dans l'anneau qui précède celui > où la néphridie accomplit la plus grande partie de son trajet ». Chez l’Arenicola marina la première néphridie a également un pavillon vibratile traversant le diaphragme. En outre pour les autres néphridies de celte espèce, ainsi que pour celles d'A. Grubei et d'A. ecaudata, le néphridiopore s'ouvre au voisinage d’un parapode tandis que le pavillon vibratile est inséré tout près des muscles du parapode précédent et il reçoit son vaisseau du vaisseau transversal de ce parapode, Je me borne à ces quelques exemples, contrôlés personnellement, mais il suffit de consulter les mémoires parus sur les Polychètes depuis vingt ans pour en trouver des quantités d’autres. Voici pour les faits ; reste maintenant la question d'interprétation théorique. Je pourrais laisser complètement de côté cette question car dans le mémoire attaqué j'ai décrit seulement les néphridies des Ampha- réliens adultes, sans donner aucune théorie ontogénique ou phylo- génique de ces organes. Néanmoins je tiens à faire quelques réflexions. La néphridie des Polychètes est-elle un organe unique, homogène, susceptible de s'adapter à des fonctions diverses ou bien est-elle formée, soit de la réunion de plusieurs organes primitivement distincts, soit d’un organe primitivement simple mais en train de se dédoubler en organes séparés ? Telle est la question et il faut avouer qu’en l'état actuel de la science il est bien difficile de la trancher d’une façon irrévocable. La première interprétation est la plus simple et celle qui semble le mieux d'accord avec la généralité des faits observés. Quelques rares faits peuvent cependant être interprétés en faveur de la seconde et surtout de la troisième théorie. Chez les Capitellidés, Eisi& a signalé des pavillons génitaux, distincts des néphridies,mais il les regarde comme dérivés du pavillon vibratile des néphridies dont une partie s’est énormément développée et adaptée à un rôle spécial tandis que l’autre a conservé son rôle de néphrostome, mais en se réduisant notablement. Ces faits semblent donc témoigner en faveur du dédoublement d'un organe primilivement unique et non à l'appui de l'hypothèse de M. Cosmovrci, qui d’ailleurs ne les invoque pas. 174 P. FAUVET. Depuis, Goopricu (!) a décrit la structure intéressante des néphri- dies de Nephthys, Glycera et Goniada. Les Nephthys et les Glycera ont des néphridies, terminées par des bouquets des solénocytes, et sans communication avec le cœlome. Ce sont les deux seuls exemples connus actuellement chez les Polychètes. Chez ces deux espèces il existe en outre des organes ciliés, et chez Glycera une grande poche en communication avec l'organe cilié. Ces organes ciliés servent indubitablement à l’excrétion, ainsi que GoopricH, et plus récemment encore STEWART (?), l'ont établi par la méthode des injections physiologiques. Par contre on n’a pas encore la preuve qu'ils servent à l'émission des produits sexuels. Chez la Goniada, 1 existe une néphridie à solénocytes et un grand pavillon vibratile communiquant largement avec elle. Ici encore les faits semblent plutôt témoigner en faveur de la complication progressive de l'organe que de sa dualité primitive et il est difficile de le considérer comme formé de la réunion d’un rein et d’un organe génital puisque les deux parties fonctionnent certai- nement comme organe d’excrétion tandis que le rôle génital du pavillon n’est encore que supposé. En tout cas ces faits sont trop exceptionnels et trop susceptibles d’interprétations différentes pour que l’on puisse en faire, dès maintenant, la base d’une théorie générale. Nos connaissances sur le développement des néphridies sont aussi trop insuffisantes encore. Revenons aux néphridies des Ampharétiens et des Térébelliens. Voici des organes construits sur un plan général assez uniforme, possédant un certain nombre de caractères communs et différant seulement par quelques détails de forme et de structure histologique. Quand ils remplissent des fonctions différentes, suivant les régions considérées, devons-nous les considérer comme des organes homo- logues adaptés à des besoins divers ou au contraire comme des organes non homologues, malgré toutes leurs ressemblances. Je soutiens la première opinion, qui me semble seule d'accord avec les faits, M. Cosmovicr défend la seconde. (1) GoopricH. On the nephridia of the Polychæta. Part Jet II, (Quart. Journal of Micros. Sci. vol. 40 et 41). (2) Srewarr. On the Nephridium of Nephthys cœca (Aunals of Nat. Hist. 7, vol. 5 Febr. p. 161-164). æ LES NÉPHRIDIES. 175 Voici par exemple l’Arpharete Grubei qui ne possède que deux paires de néphridies, d’aspect assez différent. L’antérieure ne peut servir à l'expulsion des produits génitaux qui ne pénètrent pas dans la chambre antérieure où débouche son pavillon. C’est uniquement un organe d'excrétion, ainsi que le démontre d’ailleurs l’histologie de ses parois. Pour M. Cosmovict c’est un organe de BoyJanus ! La paire postérieure, très réduite en temps ordinaire, prend un développement relativement considérable au moment de la repro- duction et sert à l'expulsion des produits sexuels. Pour M. Cosmovicr c’est un spermiducte ou un oviducte !'II n'admet même pas, sans cependant nous dire pourquoi, que cela soit une néphridie adaptée à l'évacuation des produits sexuels. Pourtant si cette néphridie ne remplit guère que ce rôle d’organe évacuateur des produits sexuels, cela ne veut pas dire qu’elle ne joue absolument aucun rôle dans l’excrétion mais seulement que ce rôle est devenu secondaire. Je crois en outre qu'elle sert aussi à l’expul- sion des matières d’excrétion solides. Admettons pour un instant que M. Cosmovicr ait raison et exa- minons les autres Ampharétiens. Voici la Melinna palmata dont les quatre paires de néphridies sont sensiblement identiques comme forme et comme structure et semblablesaux néphridies antérieures de l'Aripharete. Nous devrons alors admettre que la première paire, qui traverse le diaphragme et ne peut évacuer de produits génitaux, est une néphridie, un Bojanus, tandis que les trois autres paires, malgré leur similitude avec la première, sont des organes complètement différents sans homologie avec elle ! Chez l'Amiphicteis, dont toutes les néphridies sont semblables, mais du type des néphridies postérieures de l’Arrpharete, et servent toutes, plus ou moins, à l'émission des produits sexuels, nous devrons alors déclarer qu'il n’y à que des organes génitaux et pas de néphridies car M. Cosmovicr dénie tout caractère rénal à la néphridie postérieure de l’Arpharete qui est identique. Parce qu’un organe sert à la fois à l’excrétion et à l’évacuation des produits génitaux, comme c’est le cas le plus fréquent pour la néphridie des Polychètes, je ne vois là, en l’absence de toute autre preuve, aucune raison de le considérer comme résultant de la fusion de deux organes différents. 176 P. FAUVEL. Pour ma part, jusqu'à preuve du contraire, basée sur des obser- valions certaines, je ne vois là qu’une néphridie, organe unique, adapté à des besoins divers. Chez les Polychètes les plus élevées en organisation, comme certaines Sédentaires, la division du travail étant poussée plus loin, certaines néphridies restent presque seules chargées de la fonction rénale tandis que les autres s'adaptent plus ou moins exclusivement à l'évacuation des produits sexuels. C’est le cas de répéter que : « la Nature procède parfois, bien plus > simplement que ne se le figurent les morphologistes à la recherche > d'homologies ». Chez l’Aphrodite, DarBoux a démontré que les cœcums du tube digestif fonctionnent comme reins à indigo-carmin, excrèlent des dérivés de l’acide urique et secrètent en outre des ferments digestifs assez actifs. Logiquement M. Cosmovicr devrait considérer le cœæcum comme formé de deux organes distincts : un organe de Bojanus greffé sur un estomac ! En outre l’Aphrodile possède encore des néphridies fonctionnant comme reins à Carminate et comme conduits évacuateurs des produits génitaux, sans qu’il y ait même alternance entre ces deux fonctions. En résumé, M. Cosmovict affirme : 1° Que les néphridies des Polychètes, quand elles ne servent pas à l'expulsion des produits génitaux, ne S'outrent jamais à l'intérieur du cœlome par un pavillon vibratile ; 20 Que jamais les pavillons vibratiles, quand il existent, ne s'ouvrent dans le segment qui précède celui qui renferme l'organe. A l'appui de la première proposition il cite l'exemple des Téré- belles et nie mes observations sur les Ampharétiens. Or d’après les recherches de CuNNINGHAM, MEYER, DE SAINT- Josepx et mes propres observations sur les Térébelles et les Amphicténiens, il est démontré que les néphridies antérieures de ces Annélides, qui ne servent pas à l'expulsion des produits génitaux, ont des pavillons vibratiles parfaitement nets. Je crois avoir démontré qu'il en est de même chez les Ampha- rétiens et 6n ne connait acluellement que deux exemples de LES NÉPHRIDIES. 179 néphridies sans communication directe avec le cœlome: chez Nephthys et Glycera. A l'appui de sa seconde proposition M. Cosmovicr cite l'exemple de Sthenelais, et DARBOUx a démontré que la description en question est complètement erronée et que chez les Aphroditiens les pavillons vibratiles s'ouvrent toujours dans le segment qui précède l'organe. Nous avons vu qu'il en est de même pour les néphridies des Téré- belliens, des Ampharétiens, des Amphicténiens et des Arénicoliens, pour se borner à quelques exemples. Ceci est le cas général. Cependant, moins affirmatif que M. Cosmo- VICI, je ne prétends pas que Jamais une néphridie ne puisse appar- tenir à un seul segment, il y a en effet quelques exceptions, chez les Capitellidés par exemple, et en biologie il faut se garder de poser des règles trop absolues. Pour conclure : tous les faits sur lesquels M. Cosmovicr prétend appuyer sa théorie étant reconnus inexacts, je persiste à la consi- dérer comme étrange et peu vraisemblable tant qu'on n’aura pas produit en sa faveur d’autres arguments plus probants. Je reconnais cependant que quelques faits, non mentionnés d’ailleurs par M. Cosmovicr, pourraient à la rigueur êtreinterprétés en sa faveur. En tout cas si celte théorie arrive jamais à prévaloir elle ne le devra, sans doute, à aucun des arguments mis en avant par son auteur car ils sont basés sur des faits erronés. Angers, 1° juin 1900. DES MÉCANISMES RESPIRATOIRES CHEZ LES CRUSTACÉS DÉCAPODES ESSAI DE PHYSIOLOGIE ÉVOLUTIVE, ÉTHOLOGIQUE ET PHYLOGÉNIQUE PAR GEORGES BOHN, Agrégé de l'Université, Docteur ès-sciences, Préparateur à la Faculté des Sciences de Paris, INTRODUCTION Depuis cinquante ans les Sciences naturelles sont entrées dans une voie bien spéciale : les naturalistes, au lieu d'étudier les êtres vivants à la fois aux trois points de vue que doit envisager tout biologiste, ceux de la physiologie, de la morphologie et de l'évo- lution, se sont engouës d'anatomie et d’histologie, et ont laissé de côlé la physiologie, du moins celle qui concerne les animaux dits inférieurs. Tandis que les ouvrages sur la physiologie de l'Homme et des Vertébrés supérieurs sont innombrables, un seul livre, machevé d’ailleurs, celui de KRruKENBERG, Vergleichend-physiologische Vorträge (1886), rend compte de ce quia paru dans le domaine de la physiologie des Invertébrés. Quand on parcourt les index biblio- graphiques qui sont à la fin de chaque chapitre, on est frappé de ce fait que les quelques recherches qui ont êté effectuées sur les animaux inférieurs viennent en général des physiologistes de l'Homme. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 179 Ceux-ci ont souvent une technique merveilleuse, les résultats auxquels ils arrivent sont d’une rigueur absolue, mais, quand ils sortent de leur domaine habituel, ils restent pénétrés de la conception anthropomorphique : ils ramènent, comme le faisaient les anciens zoologistes, tout à l'Homme ; ils expliquent les phénomènes simples qui se passent chez un Protozoaire ou chez un Cœlentéré par les phénomènes complexes qui ont lieu chez les Vertébrés supérieurs. Ils choisissent les animaux pour expériences d’après leurs instru- ments : ce sont ceux qui par leur taille ou par quelques dispositions spéciales se prêtent le plus facilement à l’expérimentation telle qu'ils la conçoivent, animaux dits physiologiques, qui sont naturellement l’objet de leur étude, et ainsi celle-ci s’éparpile sur quelques êtres pris au hasard dans le règne animal, types terminaux et aberrants pour la plupart (1), et ne permet pas de suivre l'évolution d'une fonction. Les médecins trouvent un certain intérêt à mjecter à des animaux marins des poisons, tels que la strychnine, la digi- taline, la nicotine, extraits de plantes terrestres, alors qu’il est du plus haut intérêt pour le zoologiste d'étudier les intoxications par les substances chimiques dissoutes en quanlité variable dans l’eau demer, O, CO?, NaCI, CaO, AzH*, ptomaïnes, etc., substances qui dépendent de l'habitat et du genre de vie de l'animal étudié. C’est pénétré de la théorie de l’évolution que j'ai abordé l'étude physiologique des Crustacés; j'ai cherché à mettre en évidence l'influence du milieu extérieur, de l'habitat, du genre de vie (éthologie) sur la fonction et ensuite sur la forme, et ainsi à suivre la filiation des espèces (phylogénie), en deux mots j'ai essayé de faire de la physiologie comparée, éthologique et phylogénique. J'ai essayé de faire de la physiologie éthologique, et pour cela j'ai eu recours à l'observation sur le vivant, si délaissée de nos jours, bien qu’elle ait fait la gloire des RÉAUMUR, des TREMBLAY, des SPALLANZANI. Mon père m'ayant exercé à la pratiquer dès l'enfance, à l’âge de 10 ans je soupçonnais déjà l'influence des facteurs étholo- giques sur la croissance des hôtes de nos mares. Plus tard, en suivant les leçons de M. GraRp, j'ai pu me rendre compte combien ces (1) Ce sont la Grenouille, l’Ecrevisse, l'Escargot, le Scorpion, etc. ; il faut remarquer d’ailleurs combien antiscientifiques sont ces expressions ; qu’entend-on en effet par /a Grenouille, alors que la Grenouille verte, la Grenouille agile, la Grenouille rousse, ete., se comportent au point de vue physiologique de manières si différentes. 180 GEORGES BOHN. facteurs sont variés et dépendent les uns des autres, el me persuader de leur importance. Mon plus profond désir serait réalisé s'il y avait dans ce travail quelques reflets de enseignement de ce Maitre. J'ai essayé de faire de la physiologie phylogénique, et, pour rechercher comment les changements du milieu extérieur et ceux de l’activité des animaux ont entrainé l’évolution des espèces, je suis revenu aux vieilles traditions scientifiques françaises. Sur le conseil de M. EDMOND PERRIER, qui a bien voulu me guider dans les nombreuses recherches expérimentales que j'ai faites au labora- toire de St-Vaast-la-Hougue, j'ai médité longuement l’œuvre de LAMARCK, et je me suis toujours efforcé d'appliquer dans les sciences naturelles les méthodes rigoureuses des sciences physiques ; ainsi je suis arrivé à me bien convaincre que toute variation qui se produit chez un être vivant est le résultat de la réaction physico-chimique de l'organisme contre le milieu extérieur. J'ai choisi les Crustacès Décapodes, parce que chez ces animaux toutes les fonctions pour ainsi dire extériorisées sont faciles à étudier, et que le moindre changement dans le mode de vie déter- mine des variations morphologiques ; chez eux on peut arriver à expliquer les plus minimes saillies de la chitine qui revêt le corps. J'ai choisi l'élude de la respiration, après avoir entendu au Muséum, pendant l'hiver 1896-97, les belles leçons de M. BouviER sur l'appareil respiratoire des Arthropodes; gagné par l'enthousiasme de l’éminent zoologiste, j’entrevis alors tout ce que l’on pouvait tirer d’un pareil sujet. Je publie aujourd’hui une partie de mes recherches, celle qui concerne les mécanismes respiratoires; je me réserve de traiter plus tard le côté chimique de la question. L'étude éthologique que j'ai entreprise m'a conduit successivement en divers points du littoral français. J'ai passé trois saisons au labo- ratoire de St-Vaast-la-Hougue (août et septembre 1896, 16 juillet à 16 octobre 1897, 1% août à 10 septembre 1898) ; c’est donc dans cette station que j'ai effectué la majeure partie de mes observations. J'ai visité la côte du Boulonnais et travaillé au laboratoire de Wimereux (août 1899) ; j'ai séjourné à la Station zoologique d'Arcachon du 15 septembre au 3 novembre 1898 ; enfin j'ai exploré la côte proven- çale, séjournant successivement aux laboratoires de Tamaris et d'En- doume (septembre et octobre 1899). À Wimereux, M. GraRD à attiré mon attention sur l'influence des œufs et des parasites sur la respi- SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 181: ralion et les rapports qui existent entre le mode respiratoire de l'hôte et la nature du parasite. À Arcachon, j'ai eu la bonne fortune d’être inilié à certaines méthodes de physiologie par M. le Professeur Jozver. À Marseille, MarIoN, par sa profonde connaissance des conditions éthologiques dans le golfe de Marseille, a beaucoup contri- bué à l’achévement de mon travail. Dans l'intervalle de mes séjours à la mer, j'ai travaillé au labora- toire d'Entomologie et de Carcinologie du Muséum ; M. BOUVIER m'y a fait faire sous sa direction l'étude anatomique de l'appareil respi- raloire chez les Crustacés Décapodes, il m'a communiqué une foule d'espèces de Crabes très rares et fort intéressantes (provenant des explorations du Travailleur, du Talisman, du Blake, etc.) et m'a prodigué ses savants conseils avec un dévouement que je n’oublierai jamais. Je tiens ici à exprimer toute ma reconnaissance aux savants éminents qui ont dirigé mon travail, MM. EbMoND PERRIER, GIARD et E.-L. Bouvier, et aux distingués directeurs des laboratoires maritimes d'Arcachon et de Tamaris, MM. Jozyer et R. DuBois pour l'accueil qu'ils m'y ont fait. Je suis heureux de pouvoir exprimer également àM.REMY PERRIER, chargé de cours à la Faculté des Sciences de Paris, toute ma grati- tude respectueuse pour la bienveillance qu’il n’a cessé de témoigner à son préparateur. Je me souviens aussi de tout ce que je dois à l'excellente amitié de M. GRAVIER, assistant au Muséum. Je tiens en terminant à adresser un souvenir ému à la mémoire de mon père, qui me donna le goût des sciences naturelles, à celle d'une personne qui me fut particulièrement chère, FÉLIX BERNARD, enfin à celle du professeur MarioN, de Marseille, qui, au cours de la maladie qui l’a enlevé à l'affection de ses élèves et amis, a bien voulu s'intéresser d’une facon toute particulière à mes recherches et m'adresser des encouragements. | 182 GEORGES BOHN. HISTORIQUE La respiration des Crustacés a fait, il y a longtemps déjà, l’objet des recherches d’anatomistes, tels qu'AupouIx et MILNE-EDWARDS [D.b, 27 ](*). La relation du voyage de ces illustres savants à Granville etaux îles Chausey est restée classique ; accompagnés de Mesdames AUDOUIN et MizxE-Epwarps, qui leur servaient d’aides, ils firent un certain nombre d'expériences sur les gros Crustacés de nos côtes, Maia, Cancer, Homard, etc. ; ils en éludièrent la circulation et la respiration, et c’est MizNE-EDWARDS qui découvrit que le scaphognathite, exopodite de la deuxième mâchoire, est l'agent principal de la formation du courant respiratoire. MILNE-EDWARDS [D, a, 39], dans une communication mémorable, faite à l’Académie des Sciences le 8 octobre 1838, posa le problème du mécanisme de la respiration chez les Crustacés, et le résolut en partie. Beaucoup plus tard (1883 et 856) deux zoologistes allemands contemporains, connus pour leurs recherches d'anatomie comparée, Boas [E, 80 et D, a, 83] el CLaus [D, a, 86] s’intéressèrent à ce problème physio- logique; Boas le fit en initiateur : il essaya de tracer l'arbre cénéalogique des Crustacés en s'appuyant sur des considérations éthologiques ; CLAUS, reprenant les conclusions de MiLNE-EDWARDS et les acceptant sans les discuter, se tortura l'esprit pour expliquer la marche de l’eau dans la chambre branchiale ; il fut conduit à accorder aux épipodites un rôle vecteur qu'ils n’ont pas. En 1880, FriTz MüLLER [D, a, 80], l'immortel auteur de Für Darivin, publia un court mais fort joli mémoire sur les pattes neltoyeuses (Putzfusse) des Crustacés, montrant ainsi ce que l’on peut tirer de ce genre de recherches. Dans leur remarquable travail sur les Bopyriens, MM. Grarp et BoxNIER [D, f, 87] ont montré la nécessité de reprendre l’étude de MILNE-Epwarps et ont rectifié un certain nombre d'erreurs commises par ce savant. Enfin dans ces dernières années, M. GARSTANG | D, a, 96 et 97], le distingué savant d'Oxford, a abordé l'étude de la respiration chez les Crabes et a publié d’intéressants mémoires sur quelques espèces fouisseuses {Corystes, Portumnus nasutus, Calappa granulata). (*) Les chiffres entre crochets et les lettres qui les précèdent renvoient aux diverses parties de la bibliographie. SUR LA RESPIRATION:DES DÉCAPODES, 183 PREMIÈRE PARTIE CHAPITRE PREMIER Aperçu sur la phylogénie et l'éthologie des Crustacés Décapodes. $S 1. — LE MILIEU MARIN. L'évolution des Crustacés Décapodes s’est effectuée presque entiè- rement dans le milieu marin. Pour bien la comprendre, il faut tenir compte des variations de la température, de l’éclairement et de la composition chimique de ce milieu. Variations de la température etde l’éclairement.— D'après Joan Murray, les 921/ des eaux marines, c’est-à-dire celles situées au-dessous d'une profondeur de 180 mètres, sont, en toutes les saisons, à une température invariable, toujours inférieure à 4°,4, alors que les 8°}, eaux de la surface, sont à une température variable. Dans l'Océan Indien, la presque totalité des eaux profondes est à une température inférieure à 19,7. La température n'est pas la même dans les différentes parties du Pacifique ; celle de l'Atlantique du Nord est plus élevée que celle de l'Océan Indien. La lumière solaire ne pénètre qu'à une faible profondeur ; les fonds éclairés, ceux où poussent des Algues, ne correspondent guère qu'aux 7 °/, de la surface totale des fonds marins. Variations de la composition chimique. — La composition chimique de l’eau de mer est fonction de la vie des êtres qui y habitent. 184 GEORGES BOHN. Ces êtres appartiennent à deux catégories bien différentes : 1° celle des êtres cellulaires ou plastidaires, végétaux et animaux ; 2° celle des êtres plastidulaires, Bactéries. Influence de la vie des êtres plastidairès. — Les êtres plasti- daires agissent sur la composition de l’eau de mer surtout par leurs échanges gazeux. Tous absorbent de l'oxygène et dégagent de l’anhydride carbonique (respiration) ; un grand nombre (végétaux verts et animaux ne vivant pas dans le voisinage de végétaux) absorbent de l'acide carbonique et fixent du carbone. 1° La consommation d'oxygène par les animaux est assez variable ; chez les Crustacés Décapodes, animaux actifs, les chiffres sont relativement élevés, moins cependant chez ceux des pro- fondeurs; j'ai constaté en effet [G, 98] qu’au mois d'octobre les Gonoplax rhomboïdes Roux n’absorbent que 33°%° d'oxygène par heure et par kilo; d’après MM. JoixeT et REGNARD [| H,77|, les Langoustes absorbent 44° et les Homards 68°"; chez les animaux liltoraux, au contraire, l'absorption de l'oxygène est plus prononcée, qu'il s'agisse de Macroures, d’Anomoures ou de Brachyures : Eupagurus bernhardus Linnk, 120% (expérience personnelle 17 octobre 98, avec l'appareil de MM. JoLyeT et REGNARD), — Palæmon squilla LixxE, 125% (J. et R.), — Cancer pagurus LINNÉ, 107eme (J. et R.); chez le Pachygrapsus marmoratus FABR., qui vit en partie dans l’air, j'ai obtenu ‘le chiffre de 127,8, et cela en plaçant ce Crustacé dans un simple flacon où loxygène n’a pas Lardé à faire défaut. 2% Si dans les conditions normales, le rapport de l’anhydride » , , « L « , CO2 , « 2 carbonique dégagé à l'oxygène absorbé, ==, est égal à environ (0) 0,8, à l'approche de l'hiver et dans certains fonds, comme je l'ai constaté [G, 9%], ce rapport diminue et devient même négatif, c'est- à-dire qu'il y a absorption d’une certaine quantité de CO? par les Crustacés. J'ai montré ailleurs [ D,c, 01 ] que c’est là une manifestation de la défense des animaux contre l’acide carbonique, quand les végétaux sont insuffisants à protéger ceux-ci contre cet acide. La respiration et l'absorption de l’anhydride carbonique, tant par les végétaux que par les animaux, influent sur l'acidité de l’eau de mer. SUR LA RESPIRATION. DES DÉCAPODES. 185 Toutes les fois que j'ai recueilli de l'eau sur le littoral, j'ai constaté qu'elle était légèrement acide à la phtaléine du phénol : il faut ajouter une certaine quantité d’un liquide alcalin pour obtenir la teinte rose; or, cette méthode de virage est extrêmement sensible. Les eaux où les manifestations vitales sont le plus accentuées sont donc légèrement acides ; si ces eaux deviennent, ou neutres, ou légèrement alcalines, les animaux littoraux souffrent et souvent même finissent par périr; ceci est opposé à ce que l’on admet généralement à savoir que la vie s'effectue en milieu alcalin et que les acides sont des agents de mort | Cette acidité des eaux littorales est due à l'acide carbonique rejeté par les êtres qui y vivent, et qui ne suffisent pas à l’absorber. On conçoit qu'à cause de la distribution irrégulière des Algues et des animaux et aussi à cause des courants variables l'acidité de l'eau de mer soit soumise à des changements considérables dans l'espace et dans le temps. | THOULET a signalé que la quantité de CO? est moindre dans les mers chaudes que dans les mers froides (sans doute parce que Île phénomène d’absorplion d'acide carbonique est plus intense, voir plus loin). Etant à Arcachon, j'ai eu l’occasion de faire sous la direction de M. JoLYET un certain nombre d'analyses d’eau de mer; les échan- üllons ont été prélevés ou bien au débarcadère d'Arcachon , ? heures avant la haute mer, ou bien (une fois) dans la passe nord à 10 mètres de profondeur ; dans l’espace de quelques jours, j'ai obtenu des chiffres extrêmement variables (centimètres cubes par litre). CO?2coms. 17 octobre 1898 1! 2,96 18 Bassin 6,2 19 Chenal 5j 6,0 22 5,9 25 : 7,21 6,4 29 3,8 186 GEORGES BOHN. M. JoLYET a trouvé jusqu'à 15°" de CO? par litre d’eau (15°) et rarement moins de 3°", MM. JoLyer et REGNARD [H, 77] ont d’ailleurs fourni les analyses suivantes : | | | CO? (®) AZ | CO? coms. Concarneau, août...| 9,2—9;,1 4,5 —24,8 | 12,5— 12,8 | 35,5—36 Croisic, septembre .. ARS IO B'ONa0 AIM2 OM 41,5 à 43,7 Dieppe, octobre..... D,0 SI 14 62,0 Influence de la vie des Bactéries. — Dans une étude sur les D: causes chimiques de l’évolution [D,c, 01], j'ai montré que les Bactéries nitrifiantes et dénitrifiantes jouent dans la mer un rôle aussi important que dans le sol. . « Des recherches récentes m'ont conduit à penser que les bactéries de la mer se comportent comme celles du sol. VERNON [G, 98] à indiqué le rôle que jouent les organismes nitrifiants et dénitrifiants dans la purification de l’eau de mer, mais il lui a semblé que les algues avaient des actions analogues : en effet, les algues vertes, telles que l’'Ulva latissima, entrainent la diminution de l’ammoniaque libre de l’eau de mer assez rapidement, et aussi l'augmentation de l’ammoniaque combinée ; les algues rouges ont un effet inverse sur l’ammoniaque libre; la filtration de l’eau à travers le sable où pullulent des Diatomées, algues brunes, entraine la disparition presque totale de l’ammoniaque libre. Or, ayant examiné à mon tour l'influence de diverses algues sur le degré d'alcalinité de l’eau de mer, j'ai reconnu que la même espèce d’algue, suivant l'habitat et la saison, se comporte de façons diverses, et je serais assez disposé, pour expliquer cette inconstance d’allure, à admettre des associations symbiotiques des bactéries avec les algues ». L'ammoniaque libre semble se développer très particulièrement dans les fonds à Algues calcaires, ce qui correspond à une remarque de M. Bouvier, qui a observé que souvent les SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 187 fonds de dragues répandent une forte odeur d’alcali volatil (1). Avec les Bactéries, intervient donc un second facteur éthologique important, l’'ammoniaque. Influence simultanée de la vie des êtres plastidulaires et de la vie des êtres pluriplastidaires. — Calcification. — J'ai cons- taté que dans une eau faiblement additionnée d’ammoniaque, les Crustacés qui vivent d'habitude dans les eaux littorales se modifient physiologiquement dans le sens des habitants des fonds à Algues calcaires, et que, dans ces conditions, le dégagement de CO? devient très faible ou nul, bien qu'il y ait absorption de ©. Il semble que l’excrétion de CO? ne se fasse pas, afin de neutra- liser dans le sang et les tissus l’ammoniaque qui tend à y pénétrer ; le résultat de cette neutralisation doit être la formation de carbonate d'ammoniaque, et finalement de carbonate de chaux. On sait en effet que le carbonate d’ammoniaque, qui est l’un des derniers termes de l’excrélion chez les êtres vivants, agit sur le sulfate de chaux soluble, suivant la réaction suivante : SOZ Ca + COS (Az H1)2 = COS Ca + SO (Az H#2 Soluble Insoluble L'optimum thermique de cette réaction est au-dessus de 20° C ; la double décomposition indiquée se fait en effet plus rapidement à des températures élevées (26°) qu'à des températures basses (moins de 8°); telle est la raison pour laquelle la sécrétion du calcaire est plus abondante dans les régions tropicales que dans les régions polaires (Algues, Foraminifères, Coraux, Echinodermes, Crustacés, Mollusques) et dans les eaux de surface que dans les abysses; de là résulte la lente migration du calcaire, des pôles vers les tropiques [Murray et IRVINE |. | . J'ai constaté que le calcaire se produit aussi dans des circonstances différentes de celles qui viennent d’être indiquées, contraires, semble-t-il. A l'approche de l'hiver, lorsque la température de l’eau s’abaisse de 20 — 18° C à 16 — 14°, un grand nombre d'organismes littoraux développent du calcaire à l’intérieur de leurs tissus ; c’est : (1) L'ammoniaque peut être introduite accidentellement dans l’eau de mer ; c’est ce qui a eu lieu pendant longtemps à l'entrée du port de Marseille, où se déversaient les ésouts de la ville. 188 GEORGES BOHNX. le phénomène que M: GraRp a désigné sous le nom de calcification hibernale, ek auquel il a consacré une étude dans les C. R. de lu Soc. de Biol., 5 novembre 1898 [G, 98]. J'ai reconnu que ce phénomène est lié à l'absorption de CO? que je signalais il y a quelques instants, el qu'il est présenté, même en été, par divers animaux qui habitent les fonds à Algues calcaires {Lithothamnium), à des profondeurs de 20 à 40”, où la température de l’eau est plus basse qu'à la surface. Tous ces faits nous amènent à considérer la composition saline de l’eau de mer ; elle est assez constante. En tout point de l'Océan, et à quelque profondeur que ce soit, il y a toujours le même rapport entre les poids des divers sels dissous ; seul le calcaire présente de très légères variations ; on a remarqué qu'il y en a plus en solution dans les eaux profondes et mêmes intermédiaires que vers la surface [Dirrmar, G, 85]. Toutefois, dans la zone littorale, la salure de l’eau peut diminuer, par suite de l'apport des eaux douces. J'aurai à tenir compte des faits indiqués dans ce paragraphe pour l'étude physiologique que j'ai entreprise. S 2. — ETUDE DES DIVERS HABITATS DANS LES STATIONS OU A ÉTÉ FAIT CE TRAVAIL, ET EN PARTICULIER ÉTUDE DE LA NATURE DU FOND. La nature géologique et la configuration de la côte ont natu- rellement une grande influence sur les conditions d'habitat que l’on rencontre dans une station donnée. J'ai travaillé dans la Manche, à la pointe de la Hougue et sur la côte du Boulonnais. L'ile de Tatihou et la presqu'ile de la Hougue ne sont que les débris d'un massif granitique plus ou moins rongé par la mer. À Wimereux et à Boulogne, au contraire, affleurent des bancs d'un calcaire gréseux portlandien. St-Vaast-la-Hougue. — Zes détroits. Les fonds vaseux. Les Zostères. Diverses zones caractérisées par les Alques.— Au nord- ouest, l’île de Tatihou, où est installé le laboratoire du Muséum, est séparée de St-Vaast par un large détroit qui émerge à mer basse, sauf quelquefois dans les périodes dites de morte eau; ce détroit est SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 189 appelé le Rhun ; il est couvert de rochers et dans une grande partie de son étendue les habitants du pays y ont installé depuis longtemps des parcs pour l'élevage des Huitres. Au sud, Tatihou est séparé de l’Ilet, par un détroit moins large, bombé transversalement en son milieu, qui émerge également à basse mer. A l’est, les rochers s'étendent sans discontinuité de l’île à la pleine mer, où se dresse /a Dent; mais, dans les grandes marées, à basse mer, on reconnait l'existence d’un troisième détroit, plus profond que les deux premiers, entre ce massif et la pointe rocheuse du Catvat, Située en pleine mer. De Tatihou, on aperçoit la longue presqu'île de /a Hougue qui s'avance vers le sud; entre les murs du fort et les rochers qui forment la pointe en pleine mer, se trouve un défilé analogue aux détroils de Tatihou. Tous ces détroits sont, me semble-t-il, la caractéristique de cette région de St-Vaast; le plus profond, celui du Cavat, n'est pas abandonné complètement par la mer, même à l’époque des grandes marées ; tous, sauf quelquefois le Rhun, restent submergés à l’époque de la morte eau. La nature des fonds est extrêmement variable; les fonds rocheux dominent, mais souvent ils font place à de vastes nappes de sable, comme celle qui s'étend de Tatihou à Réville, comme aussi la bande de sable coquillier à Solen qui se trouve en avant de la jetée. La vase s’accumule en bien des anfractuosités ; dans le port, elle abonde; en face, de Tatihou à l’Ilet, elle forme une bande littorale ; la grande dépression qui s'étend entre la Hougue et Morsalines, et qui a reçu le nom expressif de Cul de Loup, est envahie complètement par la boue, et on retrouve celle-ci jusque dans le détroit de la Hougue. La vase est l’une des caractéristiques de toute cette région, qui fait contraste complet avec celle de la pointe de Gatteville, battue constamment par les eaux venant du large, et je montrerai dans la suite combien différent, au point de vue physiologique, les Crabes de l’une et de l’autre régions. La distribution des Algues autour des ilots de la région de la Hougue est celle d’une côte granitique dans une mer fermée, el dans les points où la mer est calme, dans les endroits où se sont 190 GEORGES BOHN. accumulées des vases argileuses, poussent d’abondantes prairies de Zostères. Au contraire à la pointe de Gatteville les Algues sont celles d’une mer ouverte. Le tableau suivant indique la succession des zones dans la région _ de la Hougue. ROCHERS oo | ALGUES VASES ———— Le z MOLLUSQUES VERTES BRUNES ROUGES 1n50 Dee Pelvetia canaliculata. Balanes..... 7 ‘ |[Ulves....|Fucus platycarpus .… Trochus..... 2m. Fucus vesiculosus.... | Patelles: 2: 3m. HUCUSISCREAUSe EC Algues rouges non | incrustantes ...... 0n50 Ceramium rubrum.. Furcellaria du | Corallina officimalis..! E : à : \Buccins.....|Zostères. Janiarubens,- Daminaires CR STNE SHexXUOSAEE ETES J. saccharina } Alques rouges incrus- (TNTES Eee cer Melobesiasee rer Lithothamnium ..... Aux marées hautes d’équinoxe, la mer oscille de la zone à Pelvetia canaliculata à celle des Laminaires ; aux marées de morte eau, de la zone à Fucus platycarpus à celle à Fucus vesiculosus. Dans les points où la mer est plus agitée, les Fucus font place à des Ascophyllum. Dans les zones à Fucus vesiculosus et à F, serratus, deux sorles d’Algues brunes, les Cystoseira et les SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 19] Halydris, sont des repaires de Crustacés (Pisa, Isopodes); ces Algues et Crustacés abondent à Gatteville (mer ouverte). On peut remarquer que les Algues rouges n'apparaissent qu'avec les zones un peu profondes, et que la fonction calcigène augmente avec la profondeur ; au-dessus des Laminaires, les Algues rouges ne sont pas incrustantes, mais déjà les Corallines (C. officinalis et Jania rubens) sécrètent du calcaire; les touffes de Corallines, comme celles des Cystoseira, renferment toute une faune spéciale (Caprelles, etc.). Au large, parmi des fonds de 40 mètres, à Hydraires (Anten- nulaires, Sertulaires, Plumulaires) et à coquilles d'Huitres trouées, se trouvent des hauts fonds (Petit Nord) de 20 à 25 mètres occupés par des Algues rouges calcaires, les Croix rouges où Liüthotham- nium, et caractérisés également par une faune tout à fait spéciale (Ebalies, Eurynome aspera PENNANT, Euwupagurus cuanensis THompson, etc.) ; j'ai montré que tous ces animaux présentent plus ou moins le phénomène de l'absorption de l’anhydride carbonique. En résumé, à Si-Vaast-la-Hougue, j'ai pu étudier: 1° l'influence d'un agent mécanique, la vase; 2° les influences des substances chimiques dues aux Cystoseira et aux Halydris d'une part, aux Corallines et aux ZLithothamnium d'autre part. Wimereux. — Bancs d'Hermelles. Sables. — Les falaises du Boulonnais sont formées par des bancs d’un grès calcaireux intercalés dans les argiles portlandiennes ; ce calcaire forme des roches battues par la mer, à Audresselles, à la Pointe-à-Zoie, à la Tour de Croÿ, à la Crèche, et même à l'entrée du port de Boulogne; ces roches ont la forme de plateformes, ou de tables surplombantes. Dans la zone qui ne découvre que par des marées assez fortes, on voit se développer en bordure ou sur le dessus de la roche des colonies d'Hermelles (Hermella alveolata Sax.) ; au début ce sont de petits amas de forme bombée constitués par la juxtaposition des tubes arénacés de ces Annélides; bientôt les tubes se recouvrent et s’enchevèêtrent les uns dans les autres et forment finalement des «rochers artificiels, hauts parfois de plus d’un mètre, d’une structure caverneuse, dont les grandes cavités servent d’abri aux Poulpes, aux Congres, aux Homards, etc. ; la voûte de ces cavernes est tapissée d’Ascidies, de Bryozoaires, d'Hydraires, d’Alcyons, de Salina- cina,ete.; en les brisant à coups de marteau, on en fait sortir une foule 192 GEORGES BOHN. d’autres animaux, Annélides, Némertiens, Siponcles, Tapes, etc., et l’on y trouve, blottis dans les moindres anfractuosités, des Pilumnus hirtellus de loutes dimensions ; ilest facile, quand la mer se relire suffisamment, de recueillir en quelques heures des centaines de ces Crustacés > [GrarD et Bonnier. D, f, 87]. Ces roches d'Hermelles constituent une des particularités éthologiques les plus curieuses de Wimereux. Elles se développent en général sur les côtes calcaires, remplaçant les Zostères des côtes granitiques, c’est-à-dire au niveau des Algues rouges non incruslantes et des Laminaires. Sur la côte du Boulonnais, les sables, qui prennent tant d'extension plus au Nord, forment déjà d'assez vastes étendues (Ambleteuse, au pied des dunes; port de Boulogne). De temps à autre les vases du port de Boulogne salissent une partie de la côte. Arcachon. — Les sables. — Pour étudier les habitants d’une plage de sable, le mieux est de se rendre à Arcachon. J'ai décrit précédemment |B, 99] la configuration du bassin, vaste cuvette creusée dans le sable, présentant des hauts fonds bordés de Zostères (crassats) et des chenaux. On trouve quelques rochers à la pointe de l’Aïguillon et des eaux saumâtres dans l’ancien fond du bassin. Marseille. — Faune des ports. Calangues à Ulves et calangues à Algues incrustantes. Broundo. Prairies de Posidonia. — Les fonds du golfe de Marseille ont été admirablement décrits par MaRioN |B, 83]. Dans son étude sur la faune du golfe, ce savant distingue : 1° la faune des ports ; 2° la zone littorale (zone émergée, zone immergée, plages); 3 les Zostères (fonds des calangues, prairies littorales, Zostères de 10 à 20 mètres); 4 le pourtour des prairies de Zostères, Broundo des pècheurs marseillais (graviers coralligènes et graviers à Bryozoaires, sables vaseux) ; 5° les fonds vaseux. Lorsque les égouts de Marseille se déversaient dans le vieux port, on trouvait dans la passe du fort St-Jean des formes des profondeurs, et en particulier celles du Broundo; j'attribue ce fait signalé par MARION à la présence d’ammoniaque dans l’un et l’autre de ces milieux. Au pied de la Corniche, la côte est rocheuse, ainsi qu’en face aux Iles ; ici et là, elle présente des anfractuosités.ou calangues. Celles du fond du golfe, soumises aux apports d’eau douce, sont particu- liérement favorables au développement des Ulves ; quelques Cysto- seira et diverses Floridées accompagnent ces Algues vertes. Les SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 193 calangues des Iles (Eaux vives) sont bordées d’une sorte de bourrelet calcaire formé par des Algues : Melobesia corallina, Lithophyllum incrustans, L. cristatum, Amphiroa, Corallines, etc., au-dessous desquelles se trouvent des Cystoseires (C. ericoïdes, discors, etc.) ; les Algues vertes sont rares ; on trouve parfois d’autres Algues rouges que les Algues calcaires : Dictyota, Halyseris, ete. Les Crustacés de ces deux sortes de calangues sont assez différents; dans les premières, on trouve surtout des Pachygrapsus marmoratus FABR., des Æriphia spinifrons HerBsT, des Xantho rivulosus RIsso ; dans les secondes, les Grapses et les Eriphies sont plus rares et vivent en tout cas en dehors des Algues calcaires et surtout des Cystoseira qui les intoxiquent, mais qui attirent en revanche, comme à St-Vaast, des Pisa tetraodon PENNANT ; parmi les Algues calcaires, on peut recueillir [MarioN] des Acanthoæyx lunulatus, des Pisa corallina, des Lissa chiragra, à la carapace toute déformée par la calcification, des Pilumnus villosus, alors que l’on trouve les mêmes espèces ({Pisa corallina, Lissa chiragra) ou des espèces voisines (Pilumnus spinifer) dans le Broundo. Marseille se prête donc comme on le voit à l’étude des associations des animaux et des Algues. Tamaris. — Racines des Posidonia. — La rade de Toulon renferme des eaux souvent fort impures, ce qui explique la présence de formes des profondeurs dans ses eaux superficielles (Gonoplax rhomboïides Roux et Ilia nucleus HERBST). Une foule d'espèces de Crustacés se rencontrent sous les pierres, au bord de l’eau, ou bien dans les racines des Posidonia, qui s’enfoncent dans un sable caillouteux, plus ou moins vaseux (Xanthes, Pagures variés, Alphées, etc.); tous ces animaux vivent à une faible profondeur dans une eau qui se désale et qui s’échaulffe rapidement. Dans les diverses stations que je viens de passer en revue j'ai pu étudier les influences biologiques de la fermpérature, de la quantité de lumière, du degré de salure et d’oxygénation, de la nature des Algues, de la qualité du fond; ce sont là en effet d'après MARION |B, 83] « les principaux agents perturbateurs de la nature organique et de la distribution géographique des êtres vivants ». 194 GEORGES BOHN. à 6 So. — Nalantia ET Replantia. Les Décapodes, dont j'ai observé la vie dans les divers milieux que je viens de signaler, sont des Crustacés supérieurs caractérisés : 1° par un thorax muni de huit paires d’appendices (3 paires de palles mâchoires bifurquées el 5 paires de patles ambulaltoires), enveloppés plus ou moins par une expansion céphalique, la carapace ; 2° par un abdomen de 7 segments, — développé chez les formes primitives du groupe, les Macroures, et muni alors d’appendices natatoires, — fort réduit, au contraire chez les formes spécialisées, les Brachyures. (Dans ce travail j'ai insisté davantage sur ces dernières). Les Décapodes dérivent de formes nageuses, les Schizopodes (Mysis), caractérisées par les appendices thoraciques tous semblables et bifurqués, les exopodites servant de rame; chez les Décapodes adultes ceux-ci subsistent seulement sur les pattes màchoires, el perdent d’ailleurs leur rôle natatoire. Malgré cela, beaucoup de Décapodes sont restés nageurs (nageurs par leurs rames abdominales), ce sont les Natantia de Boas [F, 80], groupe qui comprend : 1° les formes ancestrales de Décapodes, les Pénéides (1) et 2° les Crevettes variées, les ÆZucyphota (Palæmo- nidæ). Boas oppose aux nageurs, Natantia, les marcheurs, Rep- tantia ; j'adoplerai naturellement ici cette distinction éthologique, qui m'a conduit à l'explication d’un certain nombre de particularités de la respiration. S 4. — DIVERS MODES DE VIE DES Æucypholu. Je n'ai pas la prétention d’esquisser ici l'arbre généalogique des Eucyphota; je me contenterai d'indiquer les divers modes de vie des quelques espèces que j'ai pu observer: Afhanas el Alphées, Caridina, Pandalus, Hippolytes, Palémons, Nika, Crangon, (1) Je n'ai pu étudier les Pénées à l’état vivant, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 195 c'est-à-dire la plupart des types qui figurent dans l'arbre généalogique que l’on doit à Boas [F, 80]. Nika Palæmon-Pontonia PSS noté Hippolyte Crangon ’andalus Pandalu 4 Alpheus FA Caridina 110 ne Alphéidés. — Conditions spéciales de l'habitat de l'Athanas nitescens LEACH. £n général, les Alphéides recherchent les Alques calcaires el les formations coralliennes ; ils sont sédentaires el offrent des convergences reptantiennes. — Les Alphéidés sont les plus primilifs des Æucyphota ; COUTIÈRE dans sa thèse |A, 991 a très bien étudié les divers modes de vie et les habitats de ces animaux, si rares dans nos mers septentrionales. Dans la Manche, on ne trouve guère qu’une espèce, très commune du reste, l’Afhanas nilescens LEac. L’Alpheus ruber M.-Ebw. figure parmi les Crustacés de la Grande-Bretagne décrits par BELL [B, 53], mais il ne s’agit que d’un échantillon trouvé dans l'estomac d’une Morue à Falmouth ; il fizure aussi dans la liste des Crustacés des Iles Anglo-Normandes donnée par K&xLer [B, 86], fait qui peut s'expliquer par l'influence du Gulf Stream sur cet archipel, car on y lrouve également les Xanthes qui font défaut sur les côtes normandes, le Stenorhyncus ægyptius M.-Ebw., espèce essentiel- lement méditerranéenne, etc. À Herm, l'Alpheus ruber M.-Ebw. vit sous les pierres, dans les mêmes conditions que l’Afhanas nitescens LEACH. J'ai rencontré celui-ci à Saint-Vaast sous les cailloux qui découvrent lors des marées assez fortes, dans la zone où commencent à apparaitre les Algues rouges (1), particulièrement dans les endroits où les courants apportent de la vase (défilé de la Hougue du côté du Cul de Loup, et aussi Cavat). (1) Presque toujours dans les points où se montrent les Ascophyllum, c’est-à-dire ceux où l'eau est particulièrement agitée. 196 GEORGES BOHN. J'ai retrouvé l'A/hanas nilescens LeacH dans le bassin d'Arcachon sous les cailloux de la pointe d'Eyrac, dans des eaux souillées d'impuretés, et à l'entrée du port de Marseille (passe du fort St-Jean), dans une eau encore plus impure. Dans ces deux stations il vit comme à St-Vaast dans la vase et en compagnie du Portunus arcuatus LEACH. Sa teinte est souvent d'un gris verdâtre pointillé de rouge ; d’autres fois sur un fond bleu s'’épanouissent de superbes et nombreux chromatoblastes rouges, tandis qu'une bande blanche s'étend sur le dos de l’animal ; dans les aquariums il peut devenir à la longue d’un rouge vit uniforme. On trouve dans les descriptions des auteurs (COUTIÈRE, p. 472) des fails analogues ; CZERNIAWSKY en particulier a décrit de nombreux spécimens vivant parmi les Cystoseira, sur un fond pierreux, et présentant d'importantes variations de couleur. A Marseille, les A/pheus dentipes GUÉRIN-MEÉNEVILLE se ren- contrent dans les prairies lilorales, dans les calangues coralligènes et dans le Broundo. À ‘Tamaris, on les trouve à une faible profondeur, au milieu des racines de Posidonia, dans des eaux relativement impures ; ils sortent la nuit de ces racines. Le « Challenger >» en a dragué, au Cap Vert, sur un fond corallien, par 52 brasses, et le Talisman, dans la même localité, par 801-100". Ainsi quand les Alphéidés gagnent les profondeurs, c’est pour rechercher les fonds coralliens. Dans les mers chaudes, ils pullulent parmi les formations coralliennes sublittorales ; il en est ainsi dans la région indo-pacifique; sur les côtes américaines, Brooks et HerRick ont noté que ces Crustacés vivent en très grand nombre dans les îlots coralliens, dont ils sont les habitants les plus carac- téristiques ; enfin CouTIÈRE a décrit les nombreuses espèces qui vivent dans les récifs de Djibouti; là ils logent à l’intérieur des Éponges (oscules, canaux tortueux), ou parfois creusent des galeries dans la vase calcaire ou sous les dalles de pierre. Cette recherche des Algues calcaires (Broundo) ou des formations coralliennes (récifs) est la tendance dominante dans le groupe des Alphéidés. C’est là sans doute la manifestation d’une affinité chimique particulière entrainant la vie sédentaire. Ces animaux s’abritent en effet sous les pierres, dans les Éponges, parmi les racines de Posidonia, dans les anfractuosités des massifs coralliens ; dans ces conditions leur faculté visuelle s’affaiblit, et les yeux tendent à être recouverts par un prolongement de la carapace ; SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 197 la locomotion se réduit à une sorte de glissement horizontal, en ligne droite et silencieux ; on n’observe pas les mouvements abdo- iminaux qui déterminent les brusques saccades de la plupart des Salicoques : Pandales, Hippolytes, Palémons, et, comme l’a bien montré COUTIÈRE, ce mode de locomotion converge vers celui des Thalassiniens, qui vivent dans des galeries. Hippolyüdés.— Hippolyte et Virbius. — L'Hippolyte Cranchi LEacn se rapproche des Alphéides par l'habitat. Les Virbius, au contraire, sont indifjérents au choix de l’Alque, et présentent le phénomène de l'adaptation chromatique. — Les espèces d'Hippolytidés que l'on rencontre le plus communément, aussi bien dans la Manche ou l'Océan que dans la Méditerranée, sont l Hippo- lyte Cranchi LEacH (y compris l’T. crassicornis de M.-Epw.), le Virbius varians HELLER (A. varians LEacu), et le Virbius viridis HELLER (y compris l'A. Brullei de M.-Ebw.); ce dernier se ren- contre dans les iles Anglo-Normandes, en Vendée, à Arcachon, à Marseille, c'est-à-dire dans des eaux relativement chaudes; le Virbius varians LEacn, lui, abonde partout et remonte fort au nord. J'ai trouvé quelques autres espèces, mais des exemplaires isolés qui ne m'ont pas permis une étude physiologique sérieuse. Les Virbius se distinguent des Hippolyte par le nombre considé- rablement réduit des épipodites;les Hippolyte sont donc sous certains rapports plus primitifs que les Vérbius. L'H. Cranchi LEacn, que l’on rencontre sur le rivage et dans les profondeurs, a encore quelque peu les tendances éthologiques des Alphéidés; il recherche les Cy- stoseira etles Algues rouges calcaires, et ses mouvements sont assez lents. Je l’ai trouvé, au Cavat, parmi les Corallines; les dragages dans les fonds à Lithothamnium de St-V aast ramènent en abondan des échantillons presque transparents ; à Marseille, l'A. Cranchi LEACH vit dans les calangues aux eaux vives, près des Algues rouges incrustantes, el il y est mimétique (brun, dans les Cystoseira, rouge, parmi les Floridés) ; il s'accroche à la drague qui se promène dans les graviers coralligènes. Les Vü-bius sont beaucoup plus actifs, et ils semblent indifférents au choix de l’Algue. Le V. varians LEACH vit parmi les Zostères, les Algues brunes, les Floridées, les Corallines, et sa teinte, variable (verte, brune, rouge, bigarrée), S'harmonise avec celle de ces plantes marines. 198 GEORGES BOHN. On a prélendu que les variations de coloration pouvaient se produire assez rapidement, soit sous l'influence d’un changement de milieu, soit sous celle d'un éclairement variable (rouge, à l'obscurité ; brun, à la demi-obscurité ; vert émeraude, à la grande lumière). Le V. viridis OTrro, abondant à Arcachon, est également tantôt vert ou brun, suivant les Algues dans lesquelles il vit; bien qu'il ne se rencontre dans la Manche qu’à Jersey (à ma connaissance du moins) il ne paraît pas très sensible au refroidissement de l'eau à l'approche de l'hiver. Les Virbius peuvent vivre au milieu des diverses Algues, mais cela n'empêche pas qu'ils doivent être soumis, de Ja part de certaines, à des phénomènes d'intoxication, qu'il serait, j'en suis convaincu, intéressant d'étudier pour la compréhension de l'adaptation chroma- tique. Palémonidés. — Zewr: grande activité. Les espèces el leurs divers habitats. — Les Palémons {Palæmon où Leander) sont parmi les Æucyphota les plus nageurs, les moins sédentaires. Faire l'étude des habitats des Palémons, c'est presque faire la spécification de ces animaux. Celle-ci exige que l’on distingue les Palémons des côtes d’Angle- terre et de la Manche, et les Palémons spéciaux à la Méditerranée. | ANGLETERRE MÉDITERRANÉE \ P. treillianus Risso. Rostre long ou | \ Re RTS Palæmon serratus PENNANT .../P. œiphias Risso — ..... assez long. \ [P. crenulatus Risso. Prsquite LiNNE OS TEEN | Rostre court, . JP LeachiiBELL ee A ENNE P. rectirostris ZADDACH. | Palæmonetes vulgaris Leacu.… | | Celte distinction ne doit pas être prise 4 la lettre; les Palémons de la première catégorie, que l’on rencontre aussi dans la Méditerranée, sont surtout connus par la description des auteurs anglais, LEACH | B, 18-21] et BELL [B, 53]; pour les autres, 1l faut remonter aux descriptions classiques de Risso [B, 26] et de Roux [G, 28], et on arrivera peut-être à identifier des espèces de lune SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 199 et l’autre origine (P. squilla Lane ou P. Leachi BELL et P. rectiroslris ZADDACH par exemple). Les P, serratus, treilliunus et æiphias (ces deux derniers élaient confondus volontairement par MILNE-EDWARD) ont un rostre qui dépasse plus où moins l’appendice lamelleux des antennes externes, qui se relève plus ou moins vers l'extrémité et qui est muni de nombreuses dents. P, Serratus (1) P. treillianus P. æiphias. Br old 7 ARC Ste MORT 0 PARENT) CEE Hi: 5ou4 Les autres Palémons cités ont au contraire un rostre court, droit, et un nombre de dents qui va constamment en diminuant. Paula (LP. reclirostris " P.. Leachi P. varians. 87 à DATA DNS 6.5 6.5.1 4.3 E TES à 1.3.2 1e Le rostre de toutes ces espèces est assez variable, en particulier le nombre de dents au bord supérieur et au bord inférieur. L'ornementation est plus constante pour chaque espèce, mais la teinte varie d'une localité à l’autre, suivant la nature du fond ou de l’eau, comme on peut le constater expérimentalement. Malgré la variabilité du rostre et de l’ornementation, c'est surtout sur les caractères de l’une ou de l’autre qu'ont été établies les différentes espèces : or, les conditions de vie dont ces caractères dépendent sont assez différentes dans la Manche et la Méditerranée, ce qui expliquerait que des formes quelquefois très voisines aient été décrites sous des noms différents. Mais cela n'a pas d'importance ici où il s’agit d’une étude de physiologie éthologique : nous verrons souvent que deux représentants d’une même espèce vivant dans des conditions différentes sont plus dissemblables au point de vue physiologique que les représentants de deux espèces vivant dans le même milieu (2). (1) D'après mes observations personnelles, à St-Vaast et à Marseille ; la significa- dents du bord supérieur tion de la formule est la Suivante : petites dents de l'extrémité. dents du bord inférieur (2) Je n'ai pas la prétention ici de discuter les espèces de Palémons ; il faudrait faire pour cela, ce qui n’a jamais été fait jusqu'ici, la morphologie comparée des divers appendices. £ - 200 GEORGES. BOHN. Dans la Manche, les P. serratus recherchent les fosses rocheuses profondes, n’approchant du littoral que certaines années; les P. squilla, si abondants parmi les Zostères, se rencontrent fréquem- ment dans les flaques d’eau, à marée basse, flaques d’eau qui peuvent subir une surchauffe assez considérable. J'ai trouvé des P. squilla, mais de petite taille, dans des eaux saumâtres, stagnantes, même à quelque distance de la mer. J'ai pu observer des inter- médiaires entre eux et les Palæmoneles vulgaris, qui eux peuvent parfaitement vivre dans l’eau douce, momentanément du moins ; ces formes de passage répondent sans doute au P. Leachi de BELL. Le corps des P. freillianus, qui vivent dans les eaux souvent limpides des calangues, est transparent, celui des P. æœiphias est translucide et a un peu l'aspect de lhuile, jaune verdâtre ; c'est là une teinte en rapport avec les herbages des fonds qu'ils habitent. Le tégument des uns et des autres présente des chroma- toblastes rouges, mais ceux-ci ont une disposition absolument différente: chez les P. treillianus, ils dessinent des bandes transversales sur l’abdomen, des bandelettes obliques sur le thorax ; chez les P. æœiphias, ils sont innombrables et répartis unifor- mément sur tout le corps; c’est grâce à eux que les pièces transparentes de l'extrémité de l'abdomen et les écailles antennaires prennent une teinte rougeâtre, et que les antennes sont annelées de rouge. Les P. rectirostris se rapprochent à tous les points de vue des P. squilla ; ils ont une teinte bleuâtre générale, les pattes sont bleues, jaunes aux articulations. D'une façon générale, tous les Palémons sont des animaux excessivement actifs ; ils nagent en avant avec leurs pléopodes : ils s’élancent en arrière par bonds successifs dûs à des flexions de l'abdomen. Après la section des yeux, ils conservent leur activité, mais prennent une coloration foncée constante (due aux chromato- blastes). Ils sont assez féroces, et il est bon de les séparer les uns des autres, surtout au moment de la mue. Nika. — Les Nika sont beaucoup moins actifs que les Palémons ; on ne les trouve sur le littoral de St-Vaast qu'à certaines époques, dans la vase, sous les pierres et dans les Zostères ; à Tamaris, les Niha logent dans les racines de Posidomia. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 201 Crangon. — Les Crangon sont fouisseurs; ils se tapissent dans le sable et parfois creusent même des galeries (formes saumâtres de l'étang de Berre d’après Marion). Leur carapace a en général l'aspect du fond sur lequel ils vivent; ils peuvent rester des heures entières immobiles. Formes saumâtres. — Chez les Palæmon on trouve tous les passages entre les formes marines et les formes saumâtres. Les Crangon vivent dans l'étang de Berre, ils s’enfouissent et les femelles porteuses d'œufs sortent l'hiver (MARIN). J'ai rencontré des Caridina dans la petite rivière de Lamothe qui se Jette dans le bassin d'Arcachon, un peu au-dessous de la route du Teich à Lamothe, c'est-à-dire à plus d'un kilomètre de la mer, près du bord, au milieu d'herbes abondantes; en ce point les oscillations de la mer se font très bien sentir ; ayant recueilli un échantillon d’eau au moment où la mer commençait à monter, j'y ai trouvé 08, 994 de chlorures par litre; ces Caridina ont vécu très bien dans l’eau de Cazeaux (eau distribuée à Arcachon) et qui renferme Ogr. 226 de chlorures par litre; l’eau de mer pure au contraire les a luées. J’ai observé qu’elles venaient très fréquemment à la surface comme pour respirer l’air en nature, surtout au bout d'un séjour de quelques heures dans une eau non renouvelée. On à signalé des Caridina dans la Meuse, à Dinant, et dans la Marne près de Paris. En résumé, parmi les Eucyphotes, — certains convergent vers les Reptantia (Alphéidés et quelques Hippolytes) et recherchent les Algues rouges et les formations coralligènes ; d’autres sont nageurs et se reposent sur des Algues variées, dont ils prennent plus ou moins l'aspect (Virbius, Palæinon), — d’autres enfin, plus séden- taires, vivent, ou dans la vase {Nika), ou dans le sable {Crangon). S D. DE L'ADAPTATION REPTANTIENNE. HOMARIDÉS ET THALASSINIDES. Les Æucyphota, en particulier les Alphéidés, formes les plus primitives, présentent déjà des {endances replantiennes ; mais les Homaridés sont par excellence adaptés à la marche. 202 GEORGES BOHN. Homards. — Zocomotion. Nettoiement de la carapace. Abris divers el enfouissement. Combats, défense, préhension des ali- ments. Attitude spéciale de l'abdomen. — Les Homards (Homarus vulgaris M.-Epw.) se meuvent au moyen des quatre dernières paires de pattes thoraciques ; les portions des membres formées par les articles basilaires et par les articles 1 et 2 sont dirigées transversalement et en avant; elles subissent des oscillations fréquentes d'avant en arrière et de bas en haut; les portions constituées par les articles 3, 4 et 5 sont fléchies sur les précé- dentes, faisant avec elles un angle «, dent l’ouverture regarde en avant pour les trois paires de pattes antérieures, et en arrière pour la dernière paire; les pattes extrêmes (2° et 5° paires thoraciques) sont celles pour lesquelles l'angle 4 est minimum el subit les variations les plus considérables; ces paltes sont done les plus mobiles et il est facile de constater qu’elles Jouent un grand rôle, d’une part dans le déplacement antéro- postérieur de l'animal, et, d'autre part, quand celui-ci est à l’état de repos, dans le nettoiement de la carapace (voir chapitre des pattes netloyeuses, p. 377). Les Homards, comme la plupart des animaux qui marchent sur le fond de la mer, recherchent les abris que présente ce fond ; dans les régions rocheuses, ils se réfugient dans les anfractuosités des roches profondes ; à Wimereux, ils vivent dans les grandes cavités des bancs d'Hermelles ; à Arcachon, où ils ne trouvent guère que des fonds de sable, ils peuvent s'adapter à la vie fouisseuse. LAFONT [C, 69] raconte qu'à Arcachon « dans les réservoirs où on les conserve, les Homards se creusent, lorsque le sol est friable, des galeries semblables à celles des Lapins», et le Guide pour l'aqua- rium de la Slation zoologique de Naples [C| rapporte que «les Homards ont l'habitude, phénomène que l’on peut observer à l'aquarium, de creuser des trous et des cavités dans le sable, soit pour se construire des retraites, soit pour y enterrer leur nourri- ture ». Les Homards vivent en ermites, manifestant les uns à l'égard des autres une grande méfiance ; parfois ils se livrent entre eux des combats acharnés ; mais le plus souvent ils emploient leurs fortes pinces pour se défendre contre les animaux qui les menacent, ou pour attaquer ceux dont ils se nourrissent. Ainsi, quand ils sont dans leurs trous, ils saisissent avec les pinces de la deuxième paire SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 203 les petits Poissons (1), et ceux-ci sont dévorés tout vivants (au moyen des mandibules et des pattes mâchoires). Quand on examine un Homard dans un bac d'aquarium, on constate que ce Crustacé agite presque incessamment ses palpes buccaux en forme de plumes, et aussi les antennules, qui sont immédiatement au-dessous du rostre ; les Poissons de petite taille qui nagent dans le voisinage sont manifestement attirés par ces pièces colorées en mouvement ; il y a là un appt pour les proies, appât dont se servent d’ailleurs beaucoup d’autres Crustacés. Quant aux longues antennes, elles se balancent et ne semblent pas bien sensibles aux attouchements, quoiqu'on les considère comme un organe de tact. Tandis que les appendices antérieurs se partagent diverses fonctions de l'animal, les appendices abdominaux ne servent plus guère qu'à soutenir les œufs chez la femelle ; leurs battements, très rares, ne permettent plus la natation, et l'abdomen lui-même, quoique encore développé, a l'habitude de se replier sous le thorax ; de temps à autre il y a cependant des alternatives répétées d'extension et de flexion qui déterminent le renouvellement de l'eau tout autour de l’animal. Nephrops. — Habillement par le sable et appäts. — Les Ne- phrops (N. norvegicus L.) sont très voisins des Homards ; ils marchent et respirent comme eux; on les rencontre dans des stations variées, profondeurs rocailleuses des côtes de la Norwège et de la Méditerranée (Risso), plaines sableuses d'Arcachon, par 50 brasses, vases du fond de l’Adriatique d’après MarioN (2). Dans les endroits vaseux, ils nettoient leur carapace au moyen des pattes thoraciques ; à Arcachon, j'ai observé [C, 98 et 99] l’Aabillement par le sable de ces Crustacés. Les pattes de la 4° paire vont et viennent, recueillent dans la concavité des pattes mâchoires une sécrétion visqueuse qui sert à agglutiner le sable, et appliquent le ciment ainsi formé à la surface de la carapace en partie pubescente. Les pinces présentent des dents d’un blanc éclatant qui font saillie au-dessus du revêtement de sable, ressemblant à de petits cailloux, et aussi des taches rouges, (1) COUTIERE [A, 99] a constate chez les Alphéidés fouisseurs un mécanisme semblable. (2) Ils pullulent dans cette région et sont vendus en quantité considérable sur le marché de Trieste, 204 GEORGES BOHN. non recouvertes par le sable, et qui servent évidemment d'appäts. Les Nephrops ont ädes mouvements plus lents que ceux des Homards, leurs appendices sont plus longs et plus sensibles aux attouchements ; les yeux sont un peu dilatés. Ce sont là des caractères en rapport avec la vie dans les profon- deurs, et qui s’accentuent chez les Homaridés abyssaux, que je n'ai pu étudier au point de vue physiologique. Ecrevisses. — Un certain nombre de Homaridés ont émigré au contraire dans les eaux douces ; les Écrevisses (Astacus fluviatilis Auct.) abondent dans les ruisseaux et les rivières d’une partie de l'Europe, les Cambarus dans les eaux douces de l'Amérique. Les mœurs de l'Ecrevisse ont été maintes fois décrites ; on sail en partli- culier que ces Crustacés creusent des lerriers dans les rives. Gébies et Callianasses. — Jabitat et teintes. Enfouissement. Locomotion. — La vie fouisseuse se rencontre fréquemment chez les Homaridés : les Homards et les Écrevisses peuvent s’y adapter, les Calocaris sont fouisseurs, les Nephrops qui se couvrent de sable sont bien près de l'être. On retrouve l'adaptation à la vie fouisseuse, mais plus complète, chez les Thalassinidés, qui sont des formes assez voisines des Homa- ridés ; les Gébies et les Callianasses vivent dans les galeries souter- raines, et, d’après des observations personnelles, les Gébies empruntent des galeries creusées par d’autres animaux, tandis que les Callianasses les creusent elles-mêmes. Les Thalassinidés sont ou incolores, ou à peine pigmentés ; les Grebia dellura LEAcn prennent parfois la teinte jaune-orange des Bernhards ; ces animaux peuvent sortir de leurs galeries et venir en bandes à la côte ; les Upogebia stellata MonraGu sont beaucoup plus pelites, et vivent en général dans la vase noire et compacte des rivages (Arcachon et Tamaris) ; les Callianassa sublerranea Mox- TAGU aiment le sable pur ; à Saint-Vaast, elles vivent dans un sable coquillier à Solen ; à Wimereux, elles occupent des galeries creusées dans un sable beaucoup plus consistant, et dont on reconnait les ori- fices à marée basse ; les téguments sont incolores et laissent voir par transparence les viscères colorés. J'ai décrit ailleurs [C, 98 et 99! avec détails la facon dont les Callianasses creusent et maçonnent leurs galeries; les pattes- SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 205 mâchoires, qui sécrètent la substance visqueuse agglutinant le sable, contribuent avec les paltes thoraciques à cette double opération ; celles de la 1" et de la 2° paires fouissent le sable, qui s’accumule dans une sorte d’auge formée par les pattes-mâchoires externes, et où il se convertit en ciment; les pattes de la æ paire sont transformées en véritables truelles; les pattes postérieures fonctionnent comme balais. Quand le travail est terminé, la Callianasse se trouve dans un tube ‘dont les parois intérieures sont revêtues de ciment; l’eau filtre à travers ces parois comme à travers une bougie Chamberland, à tel point que lorsque le sable est accidentellement vaseux le contenu de la galerie reste limpide. L'eau est d’ailleurs renouvelée fréquem- ment par suite des battements des pattes abdominales qui déterminent des chasses d’eau en arrière el la progression de l'animal en avant. On conçoit que les pattes thoraciques, différenciées en vue des diverses opérations que nécessite la vie fouisseuse, n’aient qu'un rôle secondaire dans la locomotion ; les Thalassinidés, contrairement aux Homaridés, nagent plus qu'ils ne marchent ; l'abdomen el ses appendices sont extrêmement développés comme chezles Natantia, et non comme chez les Homaridés, type des Reptantia. Les Callianasses et les Gébies, se déplacent silencieusement en ligne droite, dans un plan horizontal, comme les Alphéidés ; elles nagent par suite des mouvements des palettes abdominales, qui alternativement se rapprochent par leurs extrémités et s’écartent, les postérieures beaucoup plus vers l'arrière que les antérieures vers l'avant. Thalassinidés et Homaridés.— Entre les Alphéidés, qui vivent principalement dans les canaux des Éponges, et les Callianasses qui circulent dans les galeries qu’elles creusent, il y a, comme l’a fait remarquer CouTiÈRE, des faits de convergence. Mais il est peut-être intéressant de signaler que, si les Alphéidés sont les formes les plus primitives des Æucyphota, les Thalassinidés sont à beaucoup de points de vue plus primitifs que les Homaridés, que l'on considère comme la souche originelle des Pagures, des Galathées et des Crabes. Les Thalassinidés ont un abdomen développé qui joue un rôle considérable dans la locomotion, comme chez les Eucyphota et en particulier chez les Alphées (glissement); les Homaridés, au 206 GEORGES BOHN. contraire, ont un abdomen non fonctionnel et qui a {endance à se replier sous le thorax, comme chez les Brachyures. Les Thalassinidés ont des branchies beaucoup plus te que les trichobranchies des Homaridés. Pourtant l'appareil branchial des Thalassinidés est du type de celui des Homaridés. Tout s'explique si l’on considère, ainsi que je l’ai fait [C, 98], les Thalassinidés comme un rameau frère des Homaridés, comprenant . des formes profondément modifiées par la vie dans le sable, mais ayant conservé, comme cela paraît être la règle chez les formes fouisseuses, des caractères larvaires ancestraux ; les Thalassinidés reproduisent presque les premiers stades larvaires libres des Homaridés (formule branchiale, forme des branchies à 4 rangées de filaments, faible extension du branchiostégite, faible chilinisation, abdomen, mode de locomotion, etc.). Les Thalassinidés, en un mot, seraient des Homarides fouisseurs el progénétiques ; mais de ce fait ils seraient plus primitifs, plus macroures'et nageurs que les Homaridés proprement dits, chez lesquels nous voyons déjà apparaître la {endance brachyure. Xs fournissent des indications précieuses sur les ancêtres des Homaridés, qui n'étaient peut-être pas, avec leurs caractères des Thalassinidés, très éloignés des Alphéidés. L'évolution de ceux-ci a été, comme nous l’avons vu, soumise surtout à des facteurs chimiques, l’évolution des Thalassinidés- Homaridés au contraire est avant tout sous la dépendance des facteurs mécaniques. S 6. — DE L'ADAPTATION PAGURIENNE. Un certain nombre de Crustacés en voie d'évoluer vers les Homaridés se sont adaptés à une vie spéciale, la 2e pagurienne. L'origine de cette adaptation à été bien mise en lumière par Boas |[F, 80] et plus récemment par M. Bouvier [F, 95]. D’après ces savants « les Paguridés doivent être considérés comme des Homariens (Astaciens) qui, au lieu de rester sans abri au fond de la mer, se sont logés dans les cavités naturelles de certams corps qu'ils promènent avec eux, el dans lesquelles ils rentrent dès qu’un danger les menace ». SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 207 « Ces animaux choisissent le plus souvent les coquilles vides des Gastéropodes ; les Pylocheles se logent dans les Eponges siliceuses ou dans les fragments de rochers, les Cancellus dans les pierres excavées, les Xylopagurus dans les morceaux de bois entrainés par les flots ». Les Paguridés normaux, ainsi adapiés, ont pour caractères saillants: 1° l'abdomen et la partie postérieure du céphalothorax décalcifiés (glandes génitales et foie ont émigré dans l'abdomen) ; 2 les deux dernières paires de palles thoraciques réduites el munies sur l’avant-dernier article d’une aire rugueuse, comme les fausses pattes de l’avant-dernier segment de l'abdomen qui, au lieu d’être des rames natatrices, sont transformées en crochets fixateurs ; 3° l’asymétrie du corps (1), d'origine adaptative, n’existant pas encore chez les Pylocheles, formes les plus primitives du groupe. L'évolution des Paguridés a été donnée par M. Bouvier [F, 95]; J'ai pu étudier sur le vivant des représentants des branches termi- nales des deux troncs principaux (Mixtopaguriens et Eupa- guriens) (2). ge des Faqurus Eupagurus gr des Clibanarius Pylopaqures Paquris tes a Tomopagurus Mixtopaqurus | P Bb te ‘is (1) L'enroulement dextre des Paguriens est dû à ce que les coquilles dextres sont les plus nombreuses dans la mer. (2) Chez les Mixtopaguriens E.-L. Bouvier, les maxillipèdes externes sont contigus à leur base, et les pinces sont subégales ou bien la gauche est plus grande que la droite ; chez les Eupaguriens même auteur, les maxillipèdes sont très nettement séparés à la base, et la pince droite est beaucoup plus forte que la gauche. 208 GEORGES BOHN. Habitats. — Les espèces les plus communes que l’on rencontre sur les côtes de France sont les suivantes (1) : Paguristes maculatus Risso. — Tamaris. Marseille. Clibanarius misanthropus Risso. — Tamaris. Marseille. Arcachon. Pagurus striatus LATREILLE. — Marseille. Pagurus calidus Risso. Diogenes pugilator Roux. — Tamaris. Marseille. Arcachon. Wimereux. Calcinus ornatus Roux. Anapagurus lævis THOMPSON. Anapagurus Hyndmanni THoMPsox. Eupagurus anachoretus Risso. — Tamaris. Marseille. (— Æ. pictus MILNE-EDWARDS). Eupagurus sculptimanus Lucas. — Marseille. Eupagurus excavatus HERBST. Eupagurus cuanensis THOMPSON. — St-Vaast.'Tamaris. Marseille. Eupagurus Prideauxi LEAcH. — Arcachon. Eupagurus bernhardus L. — Arcachon. St-Vaast. Wime- reux. Les Pagures sont d'autant moins nombreux qu’on se rapproche plus des mers: froides; les Diogenes pugilator el les Eupa- gurus bernhardus sont les seules espèces que j'ai observées à Wimereux. Dans la rade de Toulon, aux eaux impures, soit sur les fonds sablo-vaseux, soit parmi les racines de Posidonia, souvent à une profondeur de moins d’un mèêtre, abondent cinq petits Pagures : Paguristes maculatus, Clibanarius misanthropus et Eupagurus anachoretus,aux vives couleurs, Diogenes pugilator, Eupagurus Cuanensis. + Dans le golfe de Marseille, ces Pagures se répartissent suivant les habitats et les profondeurs: les Diogenes pugilator, qui sont fouisseurs, pullulent sur les plages de sable (Prado) et dans les fonds sableux (Pharo, Catalans); parmi les Zostères, de 5 à 10 m., on rencontre tous les petits Pagures de la rade de Toulon, mais peu (1) J'indique en regard des diverses espèces les localités où j'ai pu les étudier, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 209 d'Eupagurus anachoretus et d'Eupagurus cuanensis ; Îles Eupagurus anachoretus affectionnent la bordure d’Algues calcaires des calangues aux eaux vives, où on les rencontre souvent associés aux Alpheus dentipes GuErix et aux Hippolyte Cranchi LEACH; les Paguristes maculatus atteignent des régions plus profondes : on les trouve dans le Broundo, ainsi que les Pagurus striatus, les Eupagurus sculptimanus (un échantillon trouvé par moi-même), les Eupagurus Prideauxi, encore avec les Alpheus dentipes Guërn et les Hippolyte Cranchi Leac. Les Pagurus maculatus et les Ewpagurus Prideauxi peuvent descendre jusque dans les abysses ; MarIoN [B, 83] les a trouvés dans les graviers vaseux au sud de Riou et du Planier, à 100 et 200 mètres de profondeur, mais avec un aspect particulier : feintes pâles, pelite taille. « Les Pagurus maculatus, dit MarioN, abondent dans les prairies littorales de zostères et se logent dans de vieilles coquilles recouvertes par le Suberites domuncula; dans ces conditions le Crustacé anomoure atteint sa taille maximum et porte toujours une livrée brillante et très vive. Au sud de Riou, dans les.fonds de graviers vaseux à 100 et 200 mètres, l'espèce n’est plus représentée que par des individus décolorés, plus petits de moitié que ceux de la côte et abrités par des coquilles sur lesquelles les Suberites ne sont pas fixés... L'Eupagurus Prideauxi, commensal ordinaire de lAdamsia palliata, se propage jusque vers 200 et 250 mètres, mais ce n’est plus dans ces régions qu'un animal nain et ses belles couleurs ont complètement disparu ; l’Actinie souvent perd ses couleurs aussi. » A Saint-Vaast, j'ai pu étudier les Æupagurus cuanensis el bernhardus. J'ai signalé [G, 98] l'habitat tout à fait spécial des Eupagurus cuanensis, dans les fonds à Züthothamnium, et leur physiologie particulière. Ilsemble que ce Pagure, qui logé souvent dans des coquilles épaisses, ait des affinités chimiques spéciales, tout comme un certain nombre de Pagures de la Méditerranée. Les Paguridés, comme les Alphéidés, affectionnent les mers chaudes, et ont par suite plus facilement l’occasion de s’habituer aux eaux marines modifiées par les Algues rouges et les organismes coralli- gènes. Les espèces de Pagures qui se propagent au contraire vers le nord semblent beaucoup plus indifférentes aux influences chimiques, et s'inquiètent davantage de la nature lithologique du fond; les Diogenes pugilator, que l’on rencontre jusque dans les mers du 1 210 GEORGES BOHN. nord, pullulent là où le sable leur permet de s’enfouir ; les Zupa- gurus bernhardus se (trouvent dans toutes les zones, mais ils semblent émigrer vers la profondeur avec l’âge : les jeunes vivent sur la plage de St-Vaast, au milieu de diverses Algues, recherchant. les coquilles de Trochus, etc. dont ils font leur demeure; plus tard ils descendent dans les zones où abondent les Buccins; enfin ils gagnent les fonds à Hydraires des alentours de Tatihou; les Bernhards recherchent toujours les coquilles qui leur conviennent le mieux, el non un milieu chimique de nature déterminée. Pigmentation. — Chez les Pagures, on trouve toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, quelquefois réunies sur le même individu. Le Clibanarius misanthropus est le plus remarquable à cet égard ; il présente le violet, le bleu, le vert, le jaune, l’orangé, le rouge, plus le noir, le brun et le blanc. Les parties qui sortent habituellement de la coquille sont d’un vert olivâtre souvent nuancé de violet ; les pattes antérieures sont tachées de bleu, et le rouge se montre sur les dactylopodites (stries longitudinales bleues et rouges) ; les pattes-mâchoires présentent un mode de coloration analogue ; les antennes et les antennules passent de même au rouge vers les extrémités. Le thorax et l'abdomen ont des teintes variant du bleu au vert et au brun. L'Eupagurus anachoretus, qui a été pris par KossMANN pour un Clibanarius (CL. inediterraneus), a également un coloris vif et très varié. Sur un fond jaune se détachent des lignes longitudinales brun violacé, bordées d’une zone bleuâtre plus ou moins large; le bleu prédomine sur le thorax, le brun violacé sur les pattes ; les antennes sont annelées de rouge ; les pédoncules oculaires, d’un jaune verdâtre, présentent deux anneaux rouges. Chez les Diogenes pugilator, principalement chez les races fouisseuses, les couleurs, très variées encore, s’atténuent ; le fond bleu verdàtre est lavé de blanc et de brun. Chez tous ces Pagures, de petite taille, extrèmement bigarrés, ce sont les couleurs les moins réfrangibles du spectre qui prédominent : le violet, le bleu et le vert. Chez d'autres Pagures, de plus grande taille en général et d’une teinte plus uniforme, ce sont au contraire les couleurs de la seconde partie du spectre qui l’emportent : le jaune, l’orangé, le rouge. L’orangé est la teinte dominante chez les Bernhards;les Paguristes SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. DE maculatus sont d’un rouge uniforme et présentent seulement deux taches bleuâtres sur les faces externes des pinces ; les Pagurus striatus sont d'un beau rouge, strié de jaune. Il faut remarquer que les teintes bigarrées où domine le vert se rencontrent chez les Pagures très actifs de la zone littorale, et que le rouge est, en général, l'apanage des formes sédentaires des eaux profondes. Mœurs. — Les mœurs des Pagures, vulgairement Bernards- l’'Herimite, Sodats, Piados (Provence), £rmitos, ont été observées de tous les temps, — par les Grecs (Carcinion), par les Latins (Cancelli), — par ALDROVANDE, GESSNER, RONDELET, SWAMMERDAM, etc., et malgré cela, comme on va le voir, sont bien imparfaitement connues. Pour bien les comprendre, il aurait fallu faire un peu la physiologie de ces Crustacés ; or, on n’est renseigné de nos jours que bien imparfaitement sur la locomotion, la sensibilité visuelle et tactile de ces animaux. Locomotion. — Choix d'un abri. Pénétration dans la coquille. Progression à l’intérieur de la coquille et rétrachons brusques. Déplacements généraux. Activité. Choix d'un abri. — Les petits Pagures littoraux {Clibanarius inisanthropus, Paguristes maculatus, jeunes Æupagurus ber- nhardus), semblent peu s'inquiéter du choix de l'abri; 1ls pénètrent dans les coquilles les plus diverses, suivant les hasards des rencontres. Pour cette opération, les yeux ne jouent qu'un rôle très secondaire ; il m'est arrivé à plusieurs reprises de priver des Pagures de leurs yeux ; ces Crustacés continuaient à vivre parfai- tement dans les aquariums, et ne mettaient pas plus de temps que les autres à pénétrer dans les coquilles vides. Ce sont les pattes, surtout celles des 2° et 3° paires, dont la sensibilité tactile est très grande, qui reconnaissent les coquilles et leurs ouvertures. Dès que la reconnaissance est faite, l'animal évolue de manière à donner à son corps une position telle que l’abdomen y puisse pénêtrer. Expériences faites à Tamaris sur les Clibanarius misanthropus et les Paguristes maculatus. — Quelques Pagures au corps nu sont placés parmi des coquilles variées et des fragments de coquilles. Les Pagures évoluent dans tous les sens; quand ils rencontrent des obstacles, ils les explorent avec leurs pattes, et si celles-ci recon- Li GEORGES BOHN. naissent une ouverture (naturelle ou artificielle), à bords circulaires et mousses, ils y font pénétrer leur abdomen ; quand l'ouverture est anguleuse, l'animal cherche ailleurs, et n’y revient que s’il n’a rien trouvé de mieux. Expériences faites à St-Vaast sur de jeunes Æupagurus ber- nhardus.— Des Pagures nus ont à leur disposition des coquilles variées et des tubes de verre de faible calibre. Quand ils heurtent la paroi d’un de ces tubes, ils ne vont pas à la recherche d’une ouver- ture, comme lorsqu'il s’agit d’une coquille; mais s’ils viennent à rencontrer l'ouverture même du tube, ils essaient d’y pénétrer et y arrivent après quelques exercices ; cela se produit surtout quand ils n'ont pas à leur disposition de coquilles. On voit d’après ces expériences que le choix d’un abri dépend avant tout des sensations tactiles éprouvées par les pattes ambu- latoires, et que l'animal apprécie la nature de la surface de l'abri et la forme de l'ouverture. Pénétration dans la coquille. — L'abdomen des Pagures est extrêmement musculeux et effectue des mouvements variés (d’ex- tension, de latéralité et de torsion), qui ont pour but la fixation de l'extrémité de l'abdomen en un point convenable de la cavité ; en même temps, on voit les rames terminales transformées en crochets s'écarter à plusieurs reprises jusqu’à ce que les aires rugueuses qui les recouvrent s'appliquent et adhèrent contre les parois de la cavité; si cela ne réussit pas en un point de celle-ci, l'abdomen, par suite de mouvements généraux du corps, s'enfonce davantage, en une région où le diamètre transversal de la coquille est moindre et où l'adhérence a plus de chance de se produire ; après plusieurs insuccès, le Pagure quitte l'abri qu'il vient d'explorer. Dans un tube de verre, où l’adhérence des crochets abdominaux ne se fait pas, il éprouve incessamment le besoin de sortir ; mais si c’est le seul abri qu'on lui offre, il s’en accommode; l'abdomen prend alors une direction rectiligne, tout en restant tordu de 180° sur son axe; à l'extrémité, c'est la face ventrale qui regarde en haut. Progression à l'intérieur de la coquille et rétractions brusques. — Une fois que l'animal a trouvé un abri où il peut fixer l'extrémité de son abdomen, il est bien rare qu’il le quitte (du moins dans la durée d’une observation, 10 à 15 jours en aquarium). Les déplacements SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 213 dans la coquille se font d’après un mécanisme spécial et peuvent s'expliquer par l'organisation de l'abdomen. Mes observations ont porté tout particulièrement sur les Clibanarius misanthropus qui, à la moindre alerte, rentrent brusquement dans leurs coquilles. L'abdomen d’un Misanthrope a tout à fait l'aspect d’une Sangsue, et il peut subir les allongements, les rétractions, les déformations que présente cet Annélide; quand on dissèque l'animal, on constate que l'abdomen est occupé en grande partie par une bande musculaire ventrale, très épaisse, élastique au plus haut point. Par la traction, ce muscle peut s’allonger du double, il prend alors l'aspect d’une bande de caoutchouc que l’on distend outre mesure ; c’est lui qui, à la moindre, alerte se rétracte avec une promptitude remarquable. Quand l'animal se sent en sécurité, il essaie de faire sortir de la coquille la partie antérieure de son corps; pour cela, il avance progressivement les pattes postérieures thoraciques, qui, avec leurs aires rugueuses, peuvent adhérer à la face interne et au bord même de la coquille, mais il laisse fixe l'extrémité de l'abdomen, en sorte que celui-ci s’allonge peu à peu. À la moindre alerte les pattes thoraciques postérieures deviennent libres et l'abdomen étiré se rétracte brusquement. Quand on excite l'animal, il s’enfonce de plus en plus dans la coquille ; l'abdomen pour cela devient libre à son extrémité et s'allonge, de manière à aller chercher un point d'appui plus en arrière. L'abdomen, tout décalcifié qu’il est, joue donc un rôle actif capital dans les déplacements de l'animal à l’intérieur de la coquille; il est loin donc de se comporter comme chez les Brachyures! La rétraction dans la coquille se fait à des degrés divers et avec une rapidité variable. Elle est remarquable chez les Clibanarius misanthropus, qui pour un rien rentrent dans leurs coquilles ; celles-ci basculent alors et si elles sont nombreuses, dans un cristallisoir, elles produisent une sorte de sonnerie. Les Eupagurus anachoretus se comportent comme les C/iba- narius misanthropus ; physiologiquement ils ressemblent beaucoup à ceux-ci, et il n’est pas étonnant que Kossmanx les ait décrits sous le nom de Clibanarius mediterraneus. Ces animaux sont très vifs: ils ont l'habitude de sortir en partie leur corps des coquilles et de 214 GEORGES BOHN. les rétracter, sous l'influence d’une impression même minime, avec une rapidité extraordinaire; quand ils essaient de sortir, ils sont tellement impressionnés par les agents du milieu extérieur qu'il n'y arrivent qu'après une série d'extensions et de rétractions successives. La rétraction est moindre chez les Paguristes maculatus; elle est peu accusée chez les Diogenes varians, animaux qui ont une acti- vité très grande, mais des attitudes spéciales que je décrirai dans un instant. Les Pagurus slriatus el les Eupagurus bernhardus, Pagures qui atteignent des tailles assez élevées, ne peuvent rentrer en général qu'ncomplètement dans les coquilles, mais chez eux la rétraction abdominale est très énergique. Déplacements généraux. — Activité. — Le déplacement du Crustacé avec sa coquille entraîne certainement un état de fatigue plus prononcé que celui causé par les simples rétractions de l’ab- domen ; l’activité spéciale de l'abdomen et celle des pattes locomo- trices paraissent être d'ailleurs indépendantes l’une de Pautre. Les Clibanarius misanthropus et les Æupagurus anachoretus (CT. mediterraneus de KossmanN), du moins ceux qui habitent les eaux de la surface, peuvent se déplacer avec une très grande rapidité ; l’activité si intense à certains moments entraîne naturel- lement des périodes de repos. Les Paguristes maculatus, même ceux des eaux superficielles (rade de Toulon), sont assez sédentaires ; dans les aquariums, ils orimpent souvent au sommet des rocailles et restent dans la même attitude des heures et des journées entières. Les Pagurus striatus, des eaux profondes, sont encore moins actifs. Chez les Æupagurus bernhardus, l'activité dépend de l’âge, c’est-à-dire en définitive de l'habitat ; elle est grande pour les jeunes qui vivent dans les eaux superficielles, assez faible pour les adultes qui vivent dans les eaux profondes. Les Diogenes varians courent sur les plages avec beaucoup d’agi- lité ; mais ils s'enfouissent fréquemment dans le sable, et peuvent alors se reposer pendant des périodes de temps assez longues. En général le corps est en grande partie (corselet et pattes antérieures) en dehors de la coquille, et il peut se dresser verticalement en prenant appui sur la main gauche plus développée que la droite et rabattue ; l'animal s’effraie peu ; il répond à l’attaque au lieu de se SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 215 cacher ; si on l’excite un peu brutalement, il recule cependant petit à petit, jusqu'à ce que les pédoncules oculaires viennent butter contre le bord de la coquille. Ce Pagure s’enfouit au moyen de ses pattes antérieures, et, une fois caché dans le sable, il étale ses antennes plumeuses à la surface et dresse ses yeux. Quand le repos ne peut s'effectuer dans le sable, l'animal se retire dans sa coquille et rabat la main gauche qui forme alors une sorte d’opercule. L’enfouissement se fait par des mouvements de glissement des pattes antérieures les unes sur les autres ; or, celte sorte de mouve- ment se montre assez fréquemment chez les Pagures. Ainsi chez les Paguristes maculatus les pattes des deux premières paires thora- ciques, poilues, se nettoient réciproquement : la pince droite brosse les faces internes des appendices gauches, et à son tour la pince gauche nettoie les faces internes des appendices droits ; les pattes de la 2° paire glissent également sur les faces supéro-externes des pinces. Tout ce nettoiement se fait à l’intérieur de la coquille, les pinces, subégales, ne sortant souvent que fort peu. Chez les Eupagurus bernhardus, la pince gauche est moins bien déve- loppée que la droite, et a un rôle considérable dans le nettoiement des appendices antérieurs : elle brosse les maxillipèdes externes, les fouets exopodiaux des pattes màchoires, les pédoncules oculaires, les antennes (articles basilaires et fouets sur une certaine longueur), les antennules ; tous ces organes passent entre les bords internes des deux branches de la pince garnis de touffes de poils comme dans un laminoir. Je reviendrai sur les pattes nettoyeuses dans un chapitre spécial (Ch. VII) et je parlerai alors des pattes postérieures thoraciques. On voit que les Pagures emploient leur activité à se déplacer et à se nettoyer. L'activité locomotrice semble être en rapport avec le degré d’oxygénation de l’eau : très grande chez les formes de faible profondeur, Diogenes varians, Clibanarius misanthropus, Eupua- gqurus anachoretus, jeunes Æupagurus bernhardus, assez faible cependant chez les Pagurisles maculatus des eaux superficielles, qui, comme les Bernhards, ont tendance à descendre à des niveaux inférieurs, faible chez les Pagurus striatus des profondeurs. Comme je l'ai déjà indiqué l’activité de ces Crustacés semble avoir quelque rapport avec leur pigmentation ; les formes bigarrées où dominent le vert, le bleu, le violet sont très actives ; les formes 216 GEORGES BOHN. colorées uniformément en rouge le sont très peu. J'indiquerai une relation semblable chez les Crabes (Grapses bigarrés, Carcinus verdâtres, Portunus violets, d’une part, Oxyrhynques rouges, d’autre part). Sensibilité visuelle et sensibilité tactile. — 7nfluence de la vie fouisseuse, de la profondeur. — Relation entre l'œil et l'abdomen. — L'étude de la sensibilité des Pagures vis-à-vis des divers agents physiques et mécaniques peut se faire particulièrement bien en s'adressant au Clibanarius misanthropus. Les Misanthropes sont en effet très émotifs; des causes minimes déterminent leur rétraction dans les coquilles ; j'ai cherché les sensations qui peuvent être le point de départ du réflexe. Un bruit ou un son intense, et souvent même l’ébranlement de l’eau, ne le déterminent pas; certains gestes de l'observateur au contraire le provoquent, ce sont ceux surtout qui ont lieu en arrière et sur les côtés de l’animal, la main formant alors une tache éclairée et mobile que l’æil perçoit à distance; mais le plus souvent la rétraction de l’animal dans sa coquille se produit lorsqu'une ombre est portée sur l'œil, ce qui peut arriver fréquemment dans une pièce qui est éclairée par un seul côté; l'expérience dans ce cas est des plus faciles à répéter, et elle réussit même avec des ombres que nous percevons à peine ; au contraire une augmentation de l'intensité lumineuse, si intense et si brusque soit-elle, n’a aucun effet sur l’animal. Les pattes thoraciques antérieures, les doigts et les pinces surtout, qui ont acquis une sensibilité tactile très grande (Voir plus haut, recherche des coquilles), sont naturellement aussi le point de départ des impressions de terreur, comme on peut le constater en les touchant avec une aiguille, ou en leur faisant subir un choc. Le front, les flancs du branchiostégite, la zone cardiaque de la carapace sont également très sensibles à ces sortes d’excitations. Les antennes, au contraire, que lon a l'habitude de considérer comme les organes du tact, sont d’une insensibilité presque absolue ; on peul les toucher, les pincer, sans que l’animal manifeste quoi que ce soit; il faut que les fouets, agissant comme des leviers, ébranlent les articles basilaires pour qu’une réaction se produise. Les antennules, sauf les poils qui garnissent les filets terminaux, sont peu sensibles. Après section des yeux et repos prolongé. (plusieurs jours), la SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 217 sensibilité aux attouchements seule subsiste el reste intacte; les variations de l’éclairement n’ont plus aucun effet ; les mouvements de l’animal deviennent moins énergiques ; la rétraction de la coquille se fait avec moins de rapidité et d'intensité, et quand on vient à porter un attouchement sur une des surfaces tactiles, on voit l’abdomen se raccourcir assez lentement, et les crochets abdominaux s'écarter faiblement. Ceci nous montre qu'il y a des corrélations intéressantes entre l'œil et l'abdomen d’un Pagure. Les Paguristes maculatus sont également très sensibles aux ombres portées ; seulement chez eux les rétractions de l'abdomen sont moins accentuées. Chez les Pagurus striatus, qui eux vivent dans les profondeurs, souvent au-dessous de la limite de la pénétration de la lumière, on rencontre encore une sensibilité visuelle du même ordre. Expérience faite à Endoume, le soir, sur des Paqurus striatus. — Un de ces Pagures est disposé sous une assez faible épaisseur d’eau (1) à environ un mètre d’un bec de gaz ordinaire donnant un éclairement assez intense. On interpose un écran opaque qu'on maintient pendant ? minutes. Au premier instant l'animal rentre dans sa coquille ; au bout de 36 secondes il est sorti en partie et montre le corselet; une minute après, le thorax est à découvert ; au moment où on enlève l'écran, l'animal ne paraît pas impres- sionné. Autre expérience. — Le même Pagure rétracté dans la coquille reste soumis constamment à l’éclairement du bec de gaz: dans ces conditions il sort de la coquille beaucoup plus rapidement qu'à l'obscurité (8 secondes). Les Diogenes pugilator ont une sensibilité visuelle beaucoup moindre, ce qui n’est pas étonnant chez un animal qui se dépig- mente (2), mais en même temps la sensibilité tactile est accrue, du moins celle des pattes fouisseuses garnies de poils (les antennes quoique plumeuses sont toujours peu sensibles aux attouchements). et S'accentue à mesure que les mœurs fouisseuses sont plus habi- tuelles (à Arcachon en particulier). (1) L'animal qui est à l'air se comporte différemment ; dans ce cas, il faut tenir compte de l’action directe de la chaleur. (2) Ce Pagure est fouisseur et de ce fait perd son pigment et les yeux qui émergent toujours au-dessus du sable doivent participer à cette dépigmentation. 218 GEORGES BOHN. Un Eupagurus sculptimanus que j'ai trouvé dans le Broundo de Marseille s’est comporté au point de vue de la sensibilité visuelle et tactile exactement comme un Diogenes pugilator ; les rétractions de l'abdomen étaient aussi per. accusées que chez ce dernier; il semble donc qu'ici encore les mouvements de l'abdomen soient ex rapport direct avec la sensibilité visuelle. Tout le Pagure est en effet dans son abdomen et dans ses yeux ; et l’on conçoit l'importance des caractères tirés de ces derniers organes pour la spécification. Soclabilité. — Vie en société ; combats ; appâts ; associations avec d'autres animaux. — Les Pagures sont des visuels et des émotifs ; et, comme chez les animaux où les organes des sens sont développés, leurs facultés psychiques et sociales sont intéressantes à étudier. Les Pagures sont très sociables ; on les trouve souvent réunis en nombre considérable; dans les aquariums, ils se livrent des combats, mais ceux-ci sont rarement mortels, el on peut les comparer plutôt à des jeux; j'ai vu même deux Pagures d'espèce différente (Clibanarius misanthropus et Pagquristes maculatus) occuper la même coquille, l’un au fond, l’autre à l'entrée. Les Pagures utilisent leur livrée brillante pour attirer les proies. Le Clibanarius misanthropus est admirablement doué à ce point de vue; quand il sort de sa coquille, on voit d’abord les extrémités des antennules, qui forment deux taches rouges en continuel mouvement; puis on entrevoit, entre les pinces, les maxillipèdes aux articulations colorées en bleu, c’est-à-dire six points d’un bleu d'azur s'agitant de chaque côté; les faces internes des pinces présentent elle-mêmes deux taches de la même couleur qui ressortent nettement sur le fond vert olive. Deux taches analogues d’un bleu violacé se retrouvent chez les Paguristes maculatus. Ces deux Pagures ont des yeux longuement pédonculés, comme d'ailleurs l'£Ewpagurus anachoretus ou Clibanarius mediter- raneus de KOSSMANN. Les Pagures sont connus depuis longtemps pour les associations à bénéfices réciproques qu'ils contractent avec d’autres animaux. Les Æupagurus Prideauxi sont presque toujours recouverts d'Actinies (excepté dans les abysses) ; de même beaucoup SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 219 d'Eupagurus bernhardus ont des coquilles couvertes d'Hydraires (Hydractinia echinata, Tubularia indivisa) ; ces Pagures aiment vivre en compagnie des Actinies, et, quand ils s'emparent d'une proie, ils commencent par l’anesthésier au moyen de la sécrétion des nématocystes de ces Polypes. Les Paguristes maculatus sont fréquemment recouverts de Swberiles rouges et les Pagurus striatus d'Actinies. En général ces associations se présentent d'autant plus fréquemment que le Crustacé est plus lent. En résumé les Pagures sont caractérisés par leur abdomen extrémement developpe et fonctionnel; plus macroures que bra- chyures, ils dérivent de la souche des Homaridés, et s'en détachent avant d'avoir acquis les caractères de ceux-ci. Ils soni remarquables surlout par le développernent de la sensibilité, qui explique les mœurs curieuses de ces animaux. Is n’ont pas d'affinités chimiques bien marquees ; les formes actives sont celles qui vivent dans les eaux oxygérées superficielles ; beaucoup émigrent dans la profondeur, et finissent par perdre leurs couleurs, en même temps que leur sensibilité visuelle baisse ; ce parallélisme entre la perte de la pigmentation et lu dini- nution de l'acuile visuelle se retrouve également chez les Liogènes fouisseurs, ce qui n’est pas étonnant puisque l'œil n’est en scmme qu'une tache de pigment. Les Pagures sont {rès craintifs, et leur abdomen est ainsi fait qu'ils peuvent rentrer brusquement à l’intérieur de leurs coquies. Si les Crevettes sont avant tout soumises aux 2nfluences chimiques et les Homaridés aux influences mécaniques, chez les Pagures 1l faut tenir grand compte des influences nerveuses. Sue (GALATHÉES ET PORCELLANES. — LANGOUSTES ET SCYLLARES. De la souche homarienne se sont également détachées les Galathées et les Langoustes, qui se rapprochent beaucoup du type Homard. Les Galathées ont les attitudes des Homards; les Langoustes ont beaucoup de caractères identiques. Je n'ai pu faire des Galathées qu'une étude physiologique tout à fait insuffisante ; j'ai bien observé sur les Galathea Squamifera LEacn 220 GEORGES BOHN. (rochers littoraux), inlermedia LirrseBorG (fonds à Hydraires), strigosa FABRriciuS (prairies de la Méditerranée) et le Munida bamffia PENNANT (fonds sableux d'Arcachon), mais ces animaux sont en général fragiles et supportent mal le transport et la captivité. Quant aux formes abyssales, si intéressantes, il m'était matériellement impossible de me les procurer. Les conditions de vie des Langoustes sont assez connues pour que je n'insiste pas. De même que les Paguridés ont donné naissance à des formes brachyures, de même aux Galathées se rattachent les Porcellanes et aux Langoustes les Scyllares. Les Porcellanes vivent dans la zone littorale, et se cachent comme les Gaiathea squamifera LEacx sous les pierres ; on trouve abon- damment sur nos rivages les Porcellana platycheles PENNANT et longicornis PENNANT, celles-ci à test lisse, brillant, souvent coloré, celles-là couvertes de poils abondants. Les P. platycheles PENNANT paraissent excessivement sédentaires ; elles se déplacent lentement quand on soulève les rochers; elles sont très sensibles à l’action directe des rayons solaires, qui produisent au bout de quelques minutes une sorte d’engourdissement de l'animal : seules les pattes thoraciques postérieures (nettoyeuses) continuent à réagir. Ces animaux semblent pouvoir supporter dans une immobilité complète et à l'obscurité l'influence de la sécheresse : au bout de huit jours de dessication, elles peuvent pincer violemment quand on essaie de les prendre. Les P. longicornis PENNANT sont beaucoup plus actives, et elles descendent jusque dans les fonds de la zone sublittorale. Les Scyllares vivent avec les Langoustes dans la Méditerranée ; on rencontre communément les Scyllarus arctus L. ou Cigales de mer sur le littoral provençal, — dans les Zostères de 10 à 20", dans les prairies littorales, 5 à 10 ", et même dans les calangues ; souvent le soir, à la lueur des falots, on les voit venir en bandes à la surface de l’eau. Les Scyllares peuvent rester des heures entières immo- biles ; par un certain nombre des caractères, ils sont voisins des Brachyures, mais les formes voisines exotiques le sont beaucoup plus qu'eux. En résumé, les Galathées et les Porcellanes recherchent un abri sous les rochers, fuient la lumière, gagnent les abysses, sont plutôt sédentaires, — les Langoustes et les Scyllares recherchent les rochers et les Zostères, et les Scyllares, assez actifs, à l'obscurité du SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 22] moins, semblent parfois venir respirer l’air en nature à la surface des calangues. Les Porcellanes et les Scyllares sont presque aussi brachyures que les Crabes primitifs. S 8.— LEs CRABES PRIMITIFS. — (CARACTÈRES ANCESTRAUX DES DROMIACÉES. AFFINITÉS CHIMIQUES DES OXYSTOMES. ENFOUISSEMENT DES CORYSTIDÉS. On fait dériver les Crabes des Homaridés, et on leur attribue en général une origine monophylétique ; les Dromiacées sont les formes actuelles qui se rapprochent le plus de la souche originelle. Boas en 1880 [F, 80] a classé ainsi les Brachyures : 1° Les DRoMIACEZ ou Brachyures primitifs ; 2° Les BRACHYURA GENUINA (Oxystomes, Cyclométopes, Cato- métopes, Oxyrhynques). C’est cette classification qui a été adoptée par M. EDMOND PERRIER dans son Traité de zoologie |F]. ORTMANN à récemment [E, 94] adopté un autre groupement : 1° Les DROMIIDÉS ; 20 Les OXYSTOMES ; 3° Les BRACHYURES PROPREMENT DITS, qui admettent, d’après cet auteur, pour souche commune, les Corystidés. | J'aurai l’occasion, dans la deuxième partie de mon travail, de discuter ces classifications et l’arbre généalogique des Crabes. Pour le moment je me contenterai de quelqués aperçus éthologiques. Dromiacées. — LesDromiacées, commel’a montrétrès nettement M. Bouvier |F, 97] sont des Brachyures qui se rattachent direc- tement aux Homariens. Les orifices sexuels femelles en particulier sont situés sur les hanches des pattes de la 3° paire, comme chez les Macroures et les Anomoures, les pattes postérieures thoraciques sont réduites et modifiées, ce qui donne à ces Crabes’ une allure d’Anomoure. Dans les divers groupes de Dromiacées, les formes primitives ont conservé la carapace étroite et les pattes allongées des Macroures. 292 GEORGES BOHN. L'étude des formes abyssales aurait été fort intéressante à faire au point de vue physiologique ; malheureusement je n’ai pu étudier qu'un représentant de la famille, la Dormeuse, Dromia vulgaris M.-Epw., assez commune dans la Manche et très commune dans la Méditerranée, où elle vit en général au pourtour des prairies de Zostères (Zostères, 10 à 20 mètres ; Broundo). Ce Crabe a, comme son nom l'indique, des mouvements extrêmement lents, mais en revanche une vigueur musculaire très considérable ; il est fort habile et a l'habitude bien connue d'appliquer sur sa carapace des corps étrangers au moyen de ses pattes postérieures réduites; ce sont tantôt des fragments de Laminaires taillés par l'animal lui-mème (St-Vaast), tantôt des Eponges, des Ascidies (Marseille), etc. Oxystomes. — Les Dorippidés, parmi les Oxystomes, semblent avoir beaucoup de ressemblance avec les Dromiacés, Les Dorippe lanata Bosc ont des mouvements assez lents, un revêtement laineux sur le corps, et des pattes postérieures courtes, qui leur permettent d'appliquer sur leur carapace une foule de corps étrangers: coquilles, Ascidies, Crustacés, Étoiles de mer, têtes de Poisson, débris de verre, de bois, etc. Les Dorippidés admettent d’ailleurs des variations considérables, et chez eux le type oxystome n'est pas fixé, comme chez les Leucosidés (Z/i4, Ebalia) et chez les Calappidés ; en particulier les orifices respiratoires afférents y sont très variables. Il m'a semblé qu'en général les Oxystomes vivent dans des conditions éthologiques spéciales; comme chez loutes les formes de mers chaudes les affinités chimiques sont à étudier de près. Dans la Manche, le groupe n’est représenté que par des Æbalia, petits Crabes polymorphes et fortement calcifiés ; or, ceux-ci ne se rencontrent qu'en certains points : sur des hauts fonds, à 20 mètres - environ, couverts d’Algues rouges calcaires (Lithothamniun ou Croix rouges, etc.). J'ai indiqué à diverses reprises [G, 98] la façon toute spéciale dont se comportent les animaux qui habitent ces fonds. Dans le golfe de Marseille, les Oxystomes, quoique assez rares, sont plus variés. On ue les trouve normalement qu’à une certaine profondeur, et presque toujours dans le Broundo coralligène ; les Calappa granulata L. s’aventurent parfois dans les Zostères, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 223 ainsi que quelques rares Zlia. Les espèces du Broundo sont : Dorippe lanata Bosc, Elhusa mascarone HERBST, Calappa granulata L., [lia nucleus HERBEST, Ebalia Costæ HELLER, Æ. Cranchi LEacn, E. Pennanti LEACH. Certaines espèces (Dorippe lanata, Ethusa mascarone) vivent également dans les fonds vaseux. Des Æthusa mascarone, rares et de petite taille, et des Æbalia Cranchi, peu modifiées, se rencontrent dans les graviers vaseux de Riou et du Planier (100 à 200 mètres). Des £thusa granulata et des Ebalia nux descendent jusque dans les abysses. Dans les eaux impures, à l'entrée du vieux port de Marseille, au pied du fort St-Jean, MarioN [B, 83] a signalé une colonie d'espèces des profondeurs, en particulier : Ethusa mascarone, Ilia nucleus, Ebalia Cranchi. Le musée du laboratoire de Tamaris renferme des Zlia nucleus qui ont été recueillis avec des Gonoplax dans des eaux impures de la rade de Toulon. J’atitribue l'existence de toutes ces espèces de profondeur dans les eaux superficielles à la présence d’ammoniaque; les eaux impures des ports et des rades sont chargées d’ammoniaque comme celles où vivent les Algues rouges qui sécrètent cet alcali. Ce qui tend à le prouver c’est que, depuis que les égouts de Marseille ne se déversent plus dans le port, la petite colonie signalée par MaRioN a disparu. Corystidés. — Dans le voisinage des Oxystomes, on pourrait placer les Corystidés qui, comme les Dorippidés, ont des caractères variables, mais qui sont modifiés profondément par la vie fouisseuse. Ces Crustacés sont soumis surtout à des influences mécaniques et physiques. J'ai essayé de le montrer dans une étude biologique sur les Atelecyclus que j'ai publiée dans le Bulletin de la Société scienti- 224 GEORGES BOHN. fique d'Arcachon |C, 99]. Je rappelle ici seulement les principales conclusions de ce travail. 1° Les modifications de la pigmentation et de la chilinisation qu'entraine la vie fouisseuse sont en rapport direct les unes avec les autres. Chezles Atelecyclus heterodon LEaAcx des fonds sableux d'Arcachon, la décoloration porte sur beaucoup de points de la carapace : tandis que la face dorsale est d’une couleur jaune-orange, le sternum et l’abdomen sont blanchâtres, et les pattes présentent une coloration bigarrée, jaune et blanche ; les parties décolorées sont beaucoup plus faiblement chitinisées que les autres, le rebord ptérygostomien est translucide. Chez les Corystes, décolorés complètement, la chitinisation est plus faible encore, et les extrémités des branchies qui s’enroulent ne développent que des rudiments de lamelles branchiales. 2° Les frottements de la carapace contre le sable, résultant du mode de vie spécial des Corystidés, entraînent le développement de poils ; et ces poils acquièrent une sensibilité tactile très grande qui supplée la sensibilité visuelle plutôt faible. 3° L’enfouissement des Corystes a été étudié par Gosse en 1865, puis par GARSTANG | D,a, 96]; il est dû aux mouvements des pattes thoraciques postérieures ; les Atelecyclus se comportent de même. Une fois enfouis, ils restent des heures dans une #nmobilite absolue: les divers appendices, en particulier les pattes-mâchoires, n’effectuent aucun mouvement. Et c'est là une des caractéristiques des Corystidés de présenter des périodes de repos très prolongées el des périodes d'activité très courtes. Ceci se passe du moins à la lumière ; or, celle-ci a, comme je lai constaté dans beaucoup d'occasions (1), en particulier chez les Crustacés fouisseurs et obscuricoles (Voir les Porcellanes, p. 210), une influence inhibitrice marquée. Les modifications qu’entraîne la vie fouisseuse rappellent celles que l’on observe chez les animaux cavernicoles connues depuis longtemps, ce qui semble indiquer que les uns et les autres sont dûs en grande partie à l'influence d’un faible éclairement. Ces modifications portent sur les diverses phases du dévelop- (1) Chez les Pagures, les phénomènes sont assez complexes, car les muscles des pattes ambulatoires et le muscle abdominal ventral semblent se comporter différemment. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 225 pement et entraînent chez l'adulte la persistance de caractères larvaires. J'aurai l'occasion dans la seconde partie de ce travail de révenir sur ces diverses considérations. S9. — Les CANCÉRIDES. — ILS DÉRIVENT DE FORMES FOUISSEUSES CORYSTIDIENNES. CAS D’ALBINISME ET LEUR EXPLICATION. ORTMANN |[E, 94] voit dans les Corystidés les ancêtres des Cyclo- métopes, des Catométopes et des Oxyrhynques; la descendance n’est bien nette que dans le cas des Cancéridés qui dérivent directe- ment des Atelecyclus. Les études morphologiques etembryologiques ont conduit déjà quelques auteurs à cette conclusion. Sur les côtes d'Amérique vivent des Cancer (C. dentatus BELL., etc.) qui ont encore l’aspect des Atelecyclus et qui sont évidemment fouisseurs (boue ou sable dans la chambre branchiale). Notre Cancer pagurus L. se tapit dans le sable, mais n’est plus fouis- seur à proprement parler; cependant :il présente un phénomène qui est souvent corrélatif de la vie fouisseuse, à savoir une dépig- mentation parfois assez prononcée ; l’albinisme n’est pas rare chez les jeunes Cancer que l’on recueille sous les pierres, en compagnie d’une foule d'animaux qui, eux, ne sont pas décolorés. Il semble donc que les pigments soient plus fragiles chez les Cancer que chez les autres Crabes; en ceci ils se rapprochent des Homaridés, qui eux aussi sont parents d'animaux fouisseurs. Je pense qu’il faut voir dans les cas d’albinisme signalés chez les Crustacés Décapodes des cas ataviques, un rappel d'états ancestraux fouisseurs. Les Cancer pagurus sont assez sédentaires ; ils peuvent rester de longues heures immobiles comme les Afelecyclus. S 10. — Les CRABES NAGEURS (PORTUNIDES). Les Portunidés sont, d’après ORTMANN, des Corystidés fouisseurs qui se sont adaptés à la natalion; LATREILLE en avait fait sa division des Brachyures nageurs; les pattes postérieures ont une conformation particulière, et c’est là le caractère saillant du groupe. 15 226 GEORGES BOHN. Formes fouisseuses.— Portumnus variegatus Leacu. — Une des formes les plus primitives peut s’observer aisément sur les bancs de sable littoraux de nos côtes, dans le nord (Wimereux) et dans le midi (Arcachon), c'est le Portumnus variegatus LEAcH (— Platyonichus latines PENNANT). J'ai pu observer en octobre 1898 ce joli petit Crabe au cap Ferret, où il s’enfouit plus ou moins dans le sable ; sa carapace, jaune toute mouchetée de blanc, se dissimule parfaitement sur le fond. Quand ces Crustacés se promènent dans les flaques d’eau laissées derrière elle par la mer qui descend, il est assez difficile de les voir, mais ils laissent des traces de leur passage sous forme de trainées caractéristiques ; on peut ainsi les capturer, même quand ils sont enfouis ; quand ils ne le sont pas et qu’on les menace, ils s’enfoncent dans le sable aveë la plus grande dextérité. Ces Crabes, très actifs par moment, aiment respirer l’air en nature, et on les voit fréquemment s'élever en nageant jusqu’à la surface de l’eau. Ils peuvent être alors entraînés par les courants et gagner ainsi un autre point de la côte, mais cela est rare, car quand l’eau est agitée ils restent tapis dans le sable. Ces Portumnes sont avant tout fouisseurs; ils sont aussi marcheurs et nageurs, mais bien peu semble-t-il: il résulte de quelques observations qu'a bien voulu faire pour moi M. JOLYET à Arcachon que les migrations saisonnières sont peu importantes, car on trouve les Portumnes en hiver au cap Ferret, peu abondants il est vrai, comme à l’automne, après les grandes tempêtes. Platyonichus ocellatus LaATR.— Le Platyonichus ocellatus LATR. est une forme extrêmement voisine, mais de grande taille. On ne posséde pas de renseignements sur son mode de vie; j'ai pu examiner au Muséum un échantillon conservé dans l'alcool pro- venant du Vineyard Sound. C’est évidemment aussi une bête fouisseuse, mais elle doit l'être bien peu, car l’enfouissement est incompatible en général avec un grande taille ; de plus le P/atyoni- chus ocellutus LaTR. semble bien fait pour nager, et rappelle par son organisation les Neptunes (Lupées) qui, eux, sont essentiellement pélagiques. Formes pélagiques. — Neptunus, Callinectes.— On a signalé maintes fois les habitudes pélagiques de ces Crabes. Le Neptunus pelagicus L., bleu ou rouge à taches jaunes, est abondant dans toutes SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 227 les mers; dans l'Océan Indien nage le Neptunus sanguinolentus HERBsT, avec ses trois taches rouges sur la carapace ; l'Hirondelle |[MrxE-Epwarps et Bouvier, B, 94] a recueilli de nombreux exem- plaires du Neptunus Sayi GiBBEs à la surface de l'Océan, dans la mer des Sargasses ; le plus souvent «le Crabe est attaché aux touffes de Sargasses flottantes, dont il présente le mode de coloration, la carapace et les pattes étant d’un brun sépia lavé, avec des taches irrégulières d’un blanc jaunâtre ; les yeux sont d’un vert clair; les œufs forment un paquet couleur jaune citron ». Formes à genre de vie variable. — Polybius Henslowi LEAcH.— Les Polybies, Crabes à carapace bleuâtre, circulaire (verres de montre), si différents des Neptunes, semblent les égaler au point de vue de la puissance natatoire : toutes les pattes sont transformées en rames ; On rencontre ces Crustacés parfois en pleine mer, à une grande distance des côtes; ils nagent à la surface, mais ils s’enfoncent aussi à une assez grande profondeur, comme l'ont montré les dragages de l'Hirondelle [B, 94]. Je les ai observés en 1898 à Arcachon |B, 99] où ils n’ont pas du tout l'allure d'animaux franchement pélagiques. Au large, au mois de septembre, à 3.000 mètres de la côte et à 20 mètres environ de profondeur, ils pullulent sur des fonds vaseux d’où les dragues des bateaux de pèche les ramènent en extrême abondance avec les autres hôtes des mêmes fonds : Soles, Tourteaux, Maia. Au commencement de l'hiver, en novembre en particulier, il en est qui remontent par les passes dans le bassin d'Arcachon jusqu’au Moulleau, et même jusqu’au banc de Bernett. Les Polybies ne sont donc pélagiques qu'à certaines époques ; à d’autres, elles se rapprochent des côtes, pour se traîner sur les fonds, ou devenir même tout à fait littorales. Les Portunes. — Les Portunes sont migrateurs comme les Polybies, mais ne sont plus du tout pélagiques, dans le sens propre du mot. D'ailleurs on est bien mal renseigné sur leur mode de vie. A Arcachon, dont le bassin se prête merveilleusement à l’étude des migrations saisonnières, j'ai pu observer en 1898 [B, 98] quelques faits intéressant ces Crustacés. Les Portunus puber L. (Etrilles) apparaissent en abondance dans les mois d’été ; d’août à octobre, ils nagent à travers les Zostères, et 228 GEORGES BOHN. sur les bancs de sable où l’on pêche la Torpille, c’est-à-dire dans des eaux très chaudes ; ils disparaissent en novembre. A la fin d'octobre, j'ai constaté au contraire l'apparition sur la plage du Portunus imarimoreus LEACH, espèce que l’on trouve d'habitude à plus de profondeur, et vers le large. À Saint-Vaast, lors des grandes marées d'automne, à la pointe de la Hougue, on trouve à demi enfouis dans la vase sous les pierres des Portunus arcuatus LEAcH, et c’est dans les mêmes conditions qu'on rencontre ces Crabes parmi les rochers de l’Aiguillon à Arcachon. Les jeunes Portunus marmoreus s'enfouissent d’ailleurs dans le sable avec la plus grande facilité, el un petit Portune, le Portunus pusillus LEACH, au front avançant, semble jouir de la même propriété dans les vases calcaires des fonds à Lithothamnium ; on en ramène en abondance lorsque l’on drague aux environs du Petit Nord, à Saint- Vaast ; ils sont associés aux Ebalia et aux Eurynome, Crabes qui, comme je l’ai montré, sont dans des conditions respiratoires spéciales. Les recherches de MarioN [B, 83], à Marseille, permettent de se rendre compte de la distribution bathymétrique des Portunes. Les Portunus arcuatus Leaca et les Portunus (Liocarcinus) holsatus FABR. se rencontrent fréquemment dans la zone littorale, mais, tandis que les premiers peuvent vivre dans les endroits vaseux (1), les seconds recherchent surtout les fonds sableux (plage du Prado) ; les uns et les autres vivent dans les prairies littorales ; les Portunus arcuatus LEACH descendent jusqu’à 20-25 mètres ; à ces profondeurs, on les rencontre dans les sables vaseux et dans les îlots boueux. Ce dernier habitat semble être celui des Portunus corrugatus PENNANT, qui pullulent dans les prairies profondes de Zostères, toutes parsemées d’ilots boueux. Les Portunus depurator L., que l’on peul rencontrer dans la zone littorale (plage du Prado), vivent dans les prairies profondes et dans les graviers coralligènes, et gagnent les profondeurs vaseuses (65-90 mèêtres). Les Portunus pusillus LEACH affectionnent les mêmes habitats, et ils figurent avec les Portunus tuberculatus Roux parmi les espèces des profondeurs ramenées par le Caudan [B, 96]. Chez les Portunes, on trouve donc une tendance marquée à « émigrer dans les profondeurs ; beaucoup recherchent les fonds où (1) Les ?. arcuatus figurent parmi les quelques espèces de Crustacés qui résistent dans les eaux marines où se déversent des égouts. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES, 229 ils peuvent s’enfouir (momentanément du moins); ce sont, comme on peut le constater aisément, de faibles nageurs. Les Carcins. — Les Portunes, comme les Polybies, semblent d’ailleurs présenter suivant les saisons des changements notables d'habitat et d'activité, encore mal connus : les Polybies, à l'approche de l'hiver, abandonnent la vie pélagique, et recherchent les habitats de leurs ancêtres ; les Portunes laineux (Etrilles) viennent nager dans les eaux littorales à l'approche de l'été; les Portunes arqués, à l'automne, sont tapis dans la vase ; les Portunus corrugatus LEACH abondent dans les prairies profondes l'automne et l'hiver. Il est impossible de se refuser à rapprocher de ces faits ceux présentés par les Crabes enragés (Carcinus mœænas PENNANT) de nos côtes. Toute l'étude de ces Crustacés montre qu’on doit les considérer comme des Portunidés, mais fort peu nageurs (les pattes postérieures n’ont point la conformation de rames). Leurs migrations ne paraissent pas très étendues, car, dans les différents points d’une côte, telle que celle du Cotentin, on trouve en chaque localité une race déterminée ; les Crabes des rochers de Gatteville (pointe de Barfleur) battus par la grande mer ne ressemblent pas à ceux du Rhun, détroit qui sépare Tatihou de St-Vaast, et ceux-ci diffèrent à leur tour considérablement des Crabes qui vivent dans les vases voisines du Cul de Loup ; M. Grarp a signalé des différences dans le mécanisme de la pigmentation chez les Crabes des côtes et chez ceux des estuaires saumâtres. Les Carcinus marchent le plus souvent sur les fonds littoraux et ils s’enfouissent facilement là où ils rencontrent du sable, du gravier Ou de la vase; ils ne laissent apparaître qu'une partie du front, triangulaire ou ellipsoïdale, qui se détache en blanc ou en noir sur le reste de la carapace, simulant un caillou blanc ou noir sur le sable; 1l y a là un fait de mimétisme protecteur des plus remarquables. L’enfouissement est un acte de défense souvent effectué avec une grande facilité (surtout par les jeunes); dans certains milieux il est /a règle ; toutefois le Crabe ne peut rester indéfiniment enfoui ; le soir en particulier il se dresse au-dessus de la vase par suite d’une disposition spéciale des pattes. À Arcachon, où les fonds sableux favorisent la vie fouisseuse, on observe un enfouissement estival ; dans la dune du phare, plaine vaso-sableuse recouverte par l'eau des grandes marées, ils creusent pendant les 230 GEORGES BOHN. mois les plus chauds des terriers, d’où ils ne sortent que la nuit; mais, dès septembre, ils commencent à les quitter, et plus tard ils vont gagner en bandes les fonds des chenaux ou les bordures des Zostères ; et c’est là qu'a lieu l'enfouissement hibernal bien connu. Marcheurs, nageurs même, les Carcinus reviennent à la ve fouisseuse, soit par accident (acte de défense), soit pour s'adapter à un habitat particulier (fonds vaseux), soit sous l'influence des saisons. Et en cela ils ont bien l’allure des Portunes. En résumé, les Porlumnus sont presque exclusivement fouisseurs ; par les Platyonichus on passe à des formes exclusi- vement pélagiques (Neptunes). Au contraire, les Polybies, péla- giques, et les Portunes, nageurs, n’ont abandonné le littoral que pour y revenir; suivant les saisons et les localités, ils ont des modes de vie assez différents; chez les Carcins, les migrations des Polybies et des Portunes se font en petit. S 11. — LES CRABES LITTORAUX, TERRESTRES ET D'EAU DOUCE. Les Crabes qui vivent dans les eaux litlorales sont en général trés acufs ; beaucoup respirent l'air en nature et nous conduisent aux formes purement terrestres; un certain nombre supportent parfaitement la désalure des eaux, et font le passage aux formes d’eau douce. Portunidés Httoraux.— Certains Portunes, commeles Portunus arcuatus LEACH, peuvent être littoraux, mais ne respirent pas l'air en nature. Les Carcinus mœnas PENNANT, eux, respirent l'air en nature, grâce à un mécanisme que j'ai indiqué et qui sera décrit ici même ; ils peuvent vivre dans l'air humide, et aussi dans les eaux saumâtres; placés dans l’eau douce, ils meurent en moins de 24 heures (la salure du sang étant toujours celle du milieu >xtérieur). Les Pirimela denticulata MonraGu, voisins des Carcinus mænus PENNANT, se rencontrent accrochés à des touffes d’Algues, à basse mer lors des grandes marées (Barfleur, Wimereux). Xanthidés littoraux.— Les Xanthes proprement dits sont des formes littorales ; dans la rade de Toulon on trouve en abondance SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 231 les Xantho rivulosus Risso et floridus MoxraGu; les premiers, à carapace verdàtre, vivent sous les pierres presque à fleur d’eau ; les uns et les autres se rencontrent dans les racines de Posidonia, de 50 centimètres à 1 mètre de profondeur. Les Xanthodes sont au contraire des formes de profondeur ; on peut leur rattacher le Xantho tuberculatus Coucx. Les Pilumnus, qui offrent de grandes ressemblances avec les précédents (ornementation en particulier), vivent depuis le littoral jusque dans les profondeurs. À St-Vaast, les Pilumnus hirtellus L. se trouvent dans la vase sous les pierres, en particulier sous celles de la zone à Algues rouges non incrustantes (Cavat, la Hougue) ; dans ces conditions, ils ont une certaine activité et se déplacent assez aisément. À Wimereux, l'habitat de ces Crabes est tout à fait différent : cavités des roches d'Hermelles ; les animaux qui vivent ainsi sont tout à fait sédentaires et peuvent rester des heures entières immobiles. Dans le golfe de Marseille, on rencontre dans les eaux littorales des Pilumnus villosus Risso el des Pilumnus Spinifer M.-Epw. ; ceux-ci vivent aussi dans le Broundo, où ils sont assez sédentaires (ils restent blottis des heures dans les excavations des concrétions calcaires) et dans les fonds vaseux environnants. Les Eriphies (£7iphia spinifrons HErBsT) sont au contraire des Crabes exclusivement littoraux ; elles vivent dans les fissures des roches à moitié émergées, peuvent rester plusieurs jours à l’air et supporter même une température assez élevée, ce qui s'explique si l’on songe à la surchauffe considérable des rochers de la côte de Provence sous l’action du soleil du midi. Grapsidés. — Mais le type des animaux littoraux est incontes- tablement le Pachygrapsus marmoratus FABr., Crabe qui abonde sur les côtes de l'Océan et de la Méditerranée, et dont les mœurs curieuses ont depuis longtemps déjà attiré l'attention des natu- ralistes. Voici ce qu’en dit Risso [B, 26] : « Le Grapse mélangé (1) estun des Décapodes sur lesquels un observateur patient pourrait étudier avec le plus d’exactitude les mœurs de ces animaux. Faibles el timides, ils cessent leurs courses, leurs jeux ou leurs combats, (1) Dénommé ainsi à cause du mélange des nuances vertes, grises, brunes et blanches qui ornent la carapace, 232 GEORGES BOHN. aussitôt qu'ils ont à redouter le moindre danger: ils s'arrêtent en fixant l’objet de leur crainte et ne lardent pas à se rassurer et à reprendre leurs exercices si on ne les inquiète pas, ou bien, dans le cas contraire, 1ls fuient avec vitesse au moindre mouvement que l’on fait pour les saisir. Il est vraiment digne de la curiosité d’un naturaliste d'étudier les combinaisons que cet animal emploie pour se soustraire à son ennemi, quand il est poursuivi dans une de ces laisses d’eau séparées de la mer, telle qu’il s’en trouve sur nos rivages : 11 semble calculer ses démarches, il court dans un sens, revient, s'arrête, et s’il rencontre quelque fente de rocher pour s'y placer, il menace de ses pinces, et ne fuit que quand il est assuré d'échapper au danger. Le Grapse mélangé abandonne plusieurs fois le jour sa demeure aquatique pour se promener au soleil. Il rode pendant la nuit pour chercher les corps morts rejetés par les flots. La femelle, qui a des couleurs plus ternes, pond plusieurs fois l'année, chaque fois 4 à 500 petits œufs ; alors elle se tient sous les pierres ». J'ajouterai que le Pachygrapsus imarmoratus FaBr. est digne également de la curiosité d’un physiologiste, et je le montrerai plus loin. Pour le moment, j'attirerai l’attention sur quelques faits des plus importants, jetant le jour sur l’éthologie de tout le groupe. 1° Les Grapses sont très sensibles à l'oxygène, et le recherchent, soit dissous dans l’eau (zone littorale), soit mélangé à l'azote de l'air; ils font barboter celui-ci dans la chambre branchiale, employant pour cela le mécanisme que j'ai signalé chez les Carcinus mœænas PENNANT. Ils peuvent vivre quelques heures seulement en dehors de l’eau. 2° Les Grapses vivent parfaitement dans des eaux assez désalées ; dans l’eau douce, ils résistent beaucoup plus longtemps que les Carcinus mœænas PENXANT. Ils fuient en revanche les eaux chargées de calcaire. Ils pullulent là où abondent les Ulves, et sont absents parmi les Algues rouges et en particulier parmi les Algues incrus- tantes ; celles-ci les intoxiquent rapidement. 3° Les Grapses, ou Couriento des pêcheurs provençaux, courent avec une très grande agilité, mais ils dépensent en très peu de temps toute l'énergie dont ils sont susceptibles. En une minute, surtout si on les excite, ils parcourent 2-3 mètres, puis ils s'arrêtent et, comme s'ils renonçaient à la lutte, ils semblent faire les morts ; SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 233 en réalité ils s'arrêtent épuisés, et, si on les laisse alors sur la table du laboratoire, ils y restent souvent et meurent sur place, ne retrouvant pas la force pour aller à la recherche de l’eau qui est nécessaire à leur respiration; placés dans l’eau, ils sont assez longtemps à recouvrer leur énergie et leurs mouvements. 4° Ces Grapses qui sont comme on le voit si sensibles aux poisons de la fatigue sont empoisonnés également par leurs produits d’excrétion (CO?, produits rénaux, etc.) et aussi par les excrétas des autres animaux. 5° J'ai déjà indiqué l'action toute particulière de l’'ammoniaque sur Ces animaux. L’ammoniaque abonde là où il y a des matières organiques et inorganiques azotées(azotates, azotites) et des organismescapables de produire la dénitrification. Dans les ports, comme le port de Marseille, les Grapses ne se trouvent qu'accidentellement, et s’y rencontraient encore moins quand les eaux d'égoût s'y déversaient, parce que ces eaux sont chargées de matières azotées toxiques et de produits ammoniacaux. Au milieu des Algues rouges, VERNON [G, 98] a montré qu'il y a également production d’ammoniaque libre, et c’est sans doute ce fait qui peut expliquer, du moins en partie, que les Grapses fuient les Algues des profondeurs. Les Grapses peuvent d’ailleurs lutter contre lintoxication ammoniacale par divers procédés. a) Ils recherchent l'oxygène des eaux superficielles ou de l'air pour fabriquer de l’acide carbonique qui sert à neutraliser le milieu intérieur où pénètre l’ammoniaque; la respiration chez eux est excessivement intense, et, à l'approche de l'hiver au moins, le quotient respiratoire s’abaisse, indiquant que l’excrétion de CO? n’est que partielle. b) Ils recherchent l’eau douce ; on sait en effet que les poisons s’exaltent réciproquement dans les organismes ; en supprimant ou en diminuant les poisons salins qui se trouvent en dissolution dans l'eau de mer, on atténue ainsi l’action toxique des corps azotés (Voir Ch. V, p. 329). Les Grapses, avons-nous dit, ne quittent pas la limite de l’eau et de l’air, et les rivages où se fait sentir l'influence de l’eau douce. 234 GEORGES BOHN. Ils ne peuvent descendre dans les eaux plus profondes, où il y a plus d’ammoniaque et où vivent les Algues rouges toxiques pour eux. Malgré leur agilité, ils ne peuvent d’ailleurs se déplacer beaucoup, car la fatigue les arrête presque immédiatement. Les Grapsidés comprennent un grand nombre de représentants exotiques, littoraux. Diverses espèces propres à l'Amérique méridionale sont abondantes dans les marais sales, et s’abritent dans les interstices des arbres morts ; d’autres fréquentent l’'embou- chure des rivières. Roux a signalé il y a déjà longtemps [C, 28] l'habitude qu'ont certains d’entre eux de vivre en parasites sur les Tortues. Il a décrit deux espèces ayant ce mode de vie: 1° le Grapsus testudinum Roux, qui n’est autre que le Nautilograpsus minutus M.-Epw., ou le Planes linneana BE, (= Planes minutus DANaA) et qu'il avait trouvé abrité sous les plis de la peau des cuisses et de l’anus d’une Tortue Couane ; 2° le Grapsus pelagicus Roux, qu'il avait rencontré dans les mêmes conditions sur la Tortue Couane des côtes de Sardaigne, à plus de 6 lieues du rivage. Les navires qui viennent de l’Inde transportent fréquemment des Grapsidés ; les Plagusia chabrus Wire et squarnosa LaTR., les Nautilograpsus ininutus M.-Enw., les Pachygrapsus transversus GIBBES, arrivent ainsi dans nos ports (Marseille ; Boulogne, septembre 1899, d’après M. Grarp). Ces Crustacés erratiques [Voir CATTA, C, 76] restent ainsi accrochés aux flancs des navires en marche, parmi les Algues vertes, les Hydraires et Crustacés fixés, dans une eau parfaitement aérée et pure ; s'ils quittentle navire par instants, ils y reviennent immédiatement pour s'y reposer. En résumé, les diverses substances chimiques contenues dans l’eau de mer et celles développées par les organismes en activité (poisons de la fatigue en particulier) agissent avec beaucoup d'intensité sur les Grapsidés, qui les évitent et qui luttent vaillamment contre l’empoisonnement qui les menace. Des associations biologiques chez les Crabes littoraux.— Les Grapses sont fréquemment attaqués par des parasites ; ceci me conduit à indiquer quelques considérations générales sur les asso- ciations biologiques présentées par les Crabes littoraux. Les Crabes littoraux s’infectent plus facilement que les autres ; les Portuninus variegatus LEACH présentent très fréquemment leur SUR LA RSPIRATION DES DÉCAPODES. 239 Entoniscien ; les Carcinus mænas PENNANT portent quelquefois le leur, etsouvent aussi des Sacculines ; de même les Portunus arcuatus LEACH ; les Xantho floridus MoxraGu et les Piluinnus hirtellus L. sont parfois parasités ; les Grapses des côtes de Provence portent très souvent la Sacculine de VAN BENEDEN. Quand un Crabe est parasité, sa respiration est profondément modifiée (Voir chapitre spécial des parasites, 3° p., I); l’activité du Crabe s’en ressent profondément ; les mouvements deviennent plus lents ; la croissance et les mues sont arrêtées, et sur la carapace qui se recouvre plus ou moins d'organismes fixés, le Crabe éprouve souvent le besoin de planter des Algues. M. GiARD a signalé depuis longtemps la curieuse habitude qu'ont les Portumnus variegatus LEAcH porteurs d’un Entoniscien de placer une touffe d’Algue sur le pointle plus convexe dela carapace;j’ait remarqué queles Carcinus sacculinisés du port de Boulogne se comportent de même; mais l'habillement par les Algues est la règle chez les Pachygrapsus marmoratus FABR. sacculinisés ; dans les calangues rocheuses de la côte de Provence, les Grapses vivent au milieu des Ulves, et c’est toujours avec ces Algues, et jamais avec des Algues rouges qu'ils s’habillent ; parfois toute la carapace est dissimulée sous des Algues vertes et des Bryozoaires ; ceux-ci sont fixés aux poils qui garnissent les pattes et mêmes sur la carapace. Ainsi l'habillement par des Algues n’est pas l'apanage exclusif des Oxyrhynques ; il se rencontre aussi chez les Cyclométopes et les Catométopes parasités. Crabes terrestres el Crabes d’eau douce. — Je n'ai pu les observer à l’état vivant. Crabes parasites. — Aux Crabes littoraux se rattache tout un groupe de formes profondément modifiées, par la vie parasitaire dit-on, le groupe des Pinnothéridés. J'ai pu observer fréquemment les Pinnotheres pisum L., petits Crabes qui viverit à l'intérieur des coquilles de Mytilus,de Cardiui, etc. Chez ces Crabes le dimorphisme sexuel est très prononcé et le développement se fait par une série de véritables métamorphoses. L'eau que respirent ces animaux est une eau filtrée, mais souvent cette eau reste plusieurs heures à l’intérieur de la coquille sans être renouvelée, et pendant ce temps elle se charge des produits 236 GEORGES BOHN. d'excrétion de la Moule (CO?, excréta urinaires, etc.) ; aussi les Pinnotheres présentent une très grande résistance aux intoxications ; dans une eau très chargée de CO?, ils entrent dans une sorte de vie latente, et peuvent rester immobiles, comme morts, pendant 4 jours. Les Pinnotheres pisum L. se trouvent fréquemment, comme à Arcachon, dans les coquilles fixées aux flancs des bateaux ; celles-ci n'émergent alors jamais de l’eau, qui circule d’une façon continue dans la chambre branchiale. On verra dans la seconde partie de ce travail que les modifications présentées par les Crabes parasites rappellent celles provoquées par la vie fouisseuse, et qu’un certain nombre de formes de la famille des Pinnothéridés (Myctire) sont même probablement fouisseuses. S 12. — Les OXYRHYNQUES. Les Oxyrhynques abondent sur nos côtes, ils vivent à diverses profondeurs, presque toujours parmi les Algues rouges; les Pisa se rencontrent fréquemment dans les toufles de Cystoseira et d’'Halydris; les Eurynoine miment les concrétions coralligènes. Leurs mouvements sont assez lents. Leurs mœurs, bien connues, sont des plus curieuses : l'habillement a été en particulier fort bien décrit par AURIVILLIUS | G, 89] ; il peut se faire grâce à des saillies chitineuses à ornementation variée. Ces divers Crabes se comportent presque tous de même au point de vue respiratoire, aussi n’insisterai-je pas sur les conditions éthologiques qui varient peu. J'ai observé à l’état vivant les espèces suivantes : Stenorhynchus phalangium PENNANT. — Wimereux. Si-Vaasl. Arcachon. Méditerranée. Stenorhynchus tenuirostris LEACH. — Arcachon. Inachus dorynchus LEeac. — Wimereux. St-Vaasl. Inachus dorseltensis PENNANT. — Arcachon. Inachus thoracicus Roux. — Méditerranée. Pisa Gibsi LEacH. — St-Vaast. Pisa tetraodon PENNANT. — Wimereux. St-Vaast. Arcachon. Méditerranée. Hyas coarclata YrAcH. — Si-Vaasl. Hyas araneus L. — St-Vaast. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 237 Maia squinado HERBST. — St-Vaast. Arcachon. Méditerranée. Eurynome aspera PENNANT. — St-Vaast. Marseille (Broundo). Les Stenorhynchus phalangium et les Inachus dorynchus abondent surtout parmi les Algues rouges littorales ; les premiers s’habillent d’Algues, les seconds, qui peuvent vivre dans les endroits vaseux, d’Eponges, de Bryozoaires. Les Pisa letraodon sont fréquents dans les touffes d'Halydris ; J'ai rencontré assez souvent des Pisa Gibsi dans des Cysloseira (parcs aux Huitres et Gatteville). Les Hyas araneus et les Maia squinado vivent dans des eaux plus profondes, souvent avec les précédentes ; les Hyas coarctata sont fréquents dans les coquilles d’Huitres trouées de St-Vaast. Les Stenorhynchus tenuirostris et les Inachus dorsettensis se rencon- trent dans les profondeurs sableuses d'Arcachon, et les échantillons ramenés par les filets de pêche sont toujours habillés de sable. Les Eurynome aspera sont caractéristiques des fonds à Algues calcaires, avec les Æbalia et quelques autres espèces; à Marseille les _Eurynoine aspera abondent également dans les graviers coralii- gènes du Broundo, avec quelques formes spéciales, telles que les Pisa corallina, les Lissa chiragra (dits Crabes goutteux, à cause de la déformation de la carapace), et aussi des Znachus Scorpio. Les Stenorhynchus longirostris, les Inachus scorpio et les Eurynome aspera gagnent les grandes profondeurs. CONCLUSIONS. Dans les aperçus éthologiques qui précèdent, j'ai insisté presque uniquement sur Les faits qui ont quelque rapport avec les phénomènes respiratoires. Dès maintenant on voit que les Décapodes, suivant les groupes et les habitudes, subissent très inégalement l'influence des agents chimiques, des agents physiques (chaleur, lumière), des agents mécaniques, et aussi les influences nerveuses. Agents chimiques. 1° J'ai reconnu qu’il fallait toujours placer en première ligne l'influence des agents chimiques : la répartition des animaux est en corrélation avec les intoxications qui peuvent se produire au sein des eaux, ce qui n’est pas étonnant si l’on considère que les intoxications sont dues à des variations de la composition 238 GEORGES BOHN. chimique du milieu auxquelles les êtres vivants ne sont pas habitués. On sait combien la notion de poison est relative; telle dose de poison toxique pour un animal ne l’est pas pour un autre, et telle dose cesse d’être loxique si l’animal y arrive progressivement. Dans les intoæications, tout est affaire d'habitude. J'ai essayé de le montrer dans les divers groupes que j'ai examinés ; mais il y à des Crabes qui changent difficilement d’habitudes, comme les Grapses, et d’autres au contraire pour lesquels c’est chose facile (Portunes). 21 J'ai montré qu’en général les formes qui vivent dans les eaux chaudes et qui ont eu plus de chance que les autres de rencontrer des organismes calcigènes se sont habituées souvent à un genre d'intoxication particulière, à une érloæication alcaline, par l’'ammoniaque très vraisemblablement, au point que souvent elles ne peuvent plus s’en passer; c’est ce que j'ai fait voir chez les Alphéidés, chez certains Pagures, chez les Oxystomes, et quelques Oxyrhynques. J'ai remarqué que les formes des fonds coralligènes vivent aisément dans les eaux littorales souillées de matières azotées el d'organismes dénitrificateurs. 3° J'ai indiqué également le mécanisme par lequel d'autres Crabes résistent momentanément à l’intoxication ammoniacale : l'acide carbonique est plus souvent un antitoxmique qu'un toxique. 4° J'ai reconnu que les actions toxiques, soit des alcalis (ammo- niaque), soit des acides, se font inoins sentir dans. les eaux désalées ; il semble que l’eau de mer renferme des substances capables d’exalter les poisons qui agissent sur les organismes ; mais ici c’est encore affaire d'habitude, comme on le constate chez les animaux qui vivent dans les eaux à salure variable (Grapses). Chaleur. — L'influence de la chaleur est souvent indirecte ; le chimisme des eaux chaudes n'étant pas le même que le chimisme des eaux froides ; à l’automne on constate des modifications curieuses à ce point de vue. On sait qu'en général à mesure que la température s'élève les combustions respiratoires augmentent, et que leur intensité est proportionnelle aux carrés des températures. Ceci est vrai pour les Champignons, pour les plantes vertes; je l'ai vérifié chez les SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 239 Carcins et les Palémons qui supportent parfois des surchauffes considérables. Mais beaucoup de Crustacés périssent par une chaleur trop intense, ou par un froid trop vif, et certainement, avant de mourir, ils luttent contre l’échauffement ou le refroidissement. A Arcachon, du 15 octobre au 1% novembre 1898, la température s’est abaissée brusquement de 18° à 15-14°; c'est alors que les Crabes littoraux étudiés se sont mis à absorber de l'acide carbonique ; sous l'influence de ce changement de température, les Bactéries dénitrifiantes l’'auraient sans doute emporté sur les Bactéries nitrifiantes : les eaux se seraient chargées d’ammoniaque et d'azote libre et, en luttant contre cette intoxication saisonnière, les Crustacés auraient lutté en même temps contre le froid, car il se serait formé du carbonate d’ammonium et par suite un grand dégagement de chaleur dans les tissus, qui aurait favorisé sans doute ensuite la transformation de ce carbonate en carbonate de chaux. Lumière. — 1° L'influence de l'obscurité se fait sentir chez les formes des profondeurs, en particulier chez les formes abyssales (Pagures), chez les formes fouisseuses (Pagures, Homaridés, Thalassi- nidés, Corystidés), et chez certaines formes parasites {Pinnoiheres). Partout elle semble être la cause d’une plus faible chitinisation et de la dépigmentation ; on voit donc qu’elle est modificatrice des actions chimiques internes qui se passent dans l'organisme. 2° Il semble résulter de mes observations que, toutes les fois que la pigmentation générale tend à s’affaiblir, la sensibilité visuelle diminue (Pagures), ce qui n’est pas étonnant puisque l’œil n’est en somme qu'une tache pigmentaire. 3° La lumière a une influence marquée sur l’activité musculaire. On sait qu’en général les Crustacés sont beaucoup plus actifs la nuit que le jour, et j'ai remarqué qu'un éclairement un peu intense a souvent des effets d’inhibition (Porcellanes). Chez les Pagures, les phénomènes sont beaucoup plus complexes qu'ailleurs, car l’activité de l'abdomen semble indépendante de celle des pattes ambulatoires. Ici encore il faut tenir compte de l'influence de l'habitude. Agents mécaniques.— 1° J'ai étudié avec soin la vie fouisseuse, chez les Crangon, les Homaridés, Thalassinidés, les Atelecyclus, 240 GEORGES BOHN. les Portunidés, etc., et j'ai en particulier indiqué le rôle des divers appendices dans l’enfouissement des Callianasses. 20 J'ai montré l’immobilité adaptative qui résulte de la vie fouisseuse. 30 J'ai indiqué que, chez les animaux fouisseurs, la sensibilité tactile s’accroit notablement. 4° J’ai étudié au point de vue mécanique l'adaptation pagurienne el en particulier le rôle important joué par l'abdomen. D° J'ai mis en évidence l'influence de la fatigue chez Crustacés, et ici encore j'ai traité la question en me plaçant sur le terrain de la chimie (influence des poisons de la fatigue sur les Grapses). Influences nerveuses. — 1° J'ai fourni comme on vient de le voir quelques indications sur la sensibilité visuelle et sur la sensibilité tactile. 20 J'ai montré l'influence des émotions chez les Pagures, qui précisément se sont prêtés à l'étude précédente. Lorsque plus tard j'étudierai la physiologie des muscles respira- toires, je montrerai que suivant les cas ils sont sensibles surtout ou bien aux agents chimiques, ou bien aux agents physiques, ou bien aux agents mécaniques ; mais bien souvent les réflexes nerveux viennent modifier les mouvements respiratoires et masquer en partie l'influence que l’on cherche à mettre en évidence. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 241 CHAPITRE II Schéma de l’appareil respiratoire chez les Crustacés Décapodes (1). Les Crustacés Décapodes descendent, comme tous les Crustacés dits supérieurs, des Phyllopodes, par l'intermédiaire des Nebalia et des Schizopodes; aussi pour comprendre l'architecture d’un Décapode, il peut être intéressant de rappeler les dispositions présentées par les formes primitives : Phyllopodes, Nebalia, Schizopodes. Chez les Branchipus, la portion basilaire du membre est vague- ment divisée en trois articles, qui portent des vésicules aplaties en forme de lame : proëpipodite (sur le 1° article), épipodite (sur le 2° article ou coxopodite), exopodite et endopodite (sur le 3° article ou basipodite). Ces lames, faiblement chitinisées, qui noircissent faci- lement par l'acide osmique et rougissent de même par l'acide azotique (ce qui indique une affinité particulière des tissus pour l'oxygène) ont un rôle respiratoire manifeste. Les Nebalia ont encore des appendices lamelleux, mais les endopodites s’allongent et sont composés d'articles, tandis que les proépipodites sont rudimentaires. Les exopodites et les épipodites sont respiratoires au niveau du thorax, qui a 8 segments et qui est protégé par une carapace céphalique comme chez les Décapodes. Chez les Schizopodes, les branchies se développent en général par bourgeonnement de l’épipodite ; chez les Lophogaster, elles se composent de 3 rameaux ; chacun d'eux porte une double rangée de pinnules; celles-ci portent elles-mêmes une double rangée de lamelles branchiales ; chez les Eucopéidés | Sacs, Schizopodes du Challenger] une branchie s’insère au-dessus de l’article basilaire qui porte l’épipodite, et semble située sur les flancs du corps; on (1) Ce chapitre, pour lequel j'ai emprunté beaucoup au Cours de M. BouvIER, ne renferme rien de personnel ; il n’est que l'exposé sommaire de la conception classique de l’appareil respiratoire des Crustacés étudiés dans ce travail. 16 242 GEORGES BOHN. voit apparaitre là une disposition qui deviendra constante chez les Décapodes. Chez les Pénéidés, que beaucoup d’auteurs considèrent comme les formes ancestrales de ces Crustacés, on voit assez nettement, surtout chez la larve, les 3 articles basilaires des appendices des Phyllopodes, mais les premiers articles soudés aux épimères, lames fortement chitinisées, forment les flancs du corps (1) et portent ce que l’on appelle les pleuro et arthrobranchies, tandis que les deuxièmes articles (coxopodites) sont munis des épipodites qui bourgeonnent souvent une branchie {podobranchie). CLAUS a indiqué chez un Pénée le développement des bourgeons branchiaux ; ceux-ci apparaissent sur les appendices thoraciques, d’abord suivant trois rangées : les bourgeons a sur les épipodites ep, les bourgeons d sur la portion de chitine amincie qui relie les articles basilaires 1 et 2, les bourgeons c sur ou auprès des articles 1 qui se soudent aux flancs du corps: bientôt après apparaît une quatrième rangée, c”. En désignant par les chiffres 1 à 8 les divers segments du thorax, d'avant en arrière, on a pour un stade larvaire de Pénée la formule suivante : Ep) 20 6 bB- EU ETDN CARE Cette formule est aussi celle du Cerataspis, mais chez un Pénée adulte de nos côtes, il y a une réduction presque totale des podo- branchies @. Ep (1 —6) « (2) bB—6) cU =D be); Pour certains auteurs (HUxLEY), b — arthrobranchies, pour d’autres, b + c — arthrobranchies. Chez les Æucyphota, on observe des réductions très grandes dans la formule branchiale. Le nombre des épipodites est très variable (Voir le chap. des épipo- dites, p.396); il y a tout au plus une podobranchie, a (2), souvent une seule arthrobranchie, b (3) ; les branchies c ne se montrent jamais ; (1) Les ligne de soudure entre les articles basilaires 1 etles épimeres correspondants sont très nettes chez les Pénéides, et se voient également chez quelques Galathéidés (Voir à ce sujet le chapitre relatif aux épipodites, p. 354). SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 243 les 5 branchies développées qui sont couchées sur les flancs épiméraux sont les branchies €” (4 — 8); c” (3) est rare. Les Pandalus sont parmi les formes qui présentent une formule branchiale assez complète, les arthrobranchies étant au nombre de 5. Ep (1 — Ÿ) a (2) b(3—7) cT (4 — 8). Chez les Alphéidés, à caractères très primitifs, la formule la plus complète que l’on rencontre (chez l'A/pheus strenuus DANA) est : Ep (1 —7) (1) « 2) b(3) Be sy: b est souvent rudimentaire ou nulle ; c” (3) manque en général; le nombre des épipodites peut s’abaisser jusqu’à 2. Tandis que chez beaucoup d'Hippolyte, on a: Ep (1 —5) a (2) c" (4 — 8); chez les Virbèus varians LEAcH et vèridis Orro, on n’a plus que : Ep (1 — à) C” (4 — 8). Chez les Palæmon serratus PENNANT, la formule est : Ep (1 — 2) a (2) b (3) c" (3 — 8). Chez les Reptantia les plus primitifs, c’est-à-dire chez les Homaridés-Thalassinidés, les épipodites, qui (contrairement à ce qui se passe chez les formes nageuses, Virbius et Palæimon) restent fonctionnels grâce aux mouvements des pattes marcheuses, subsistent en général, ainsi que les branchies qu'ils protègent et nettoient. La formule du Homard est Ep(1—7) a(2—7 d(3—7) c” (5 — 8). Chaque épipodite, sauf le premier, porte en dedans de lui une podobranchie (concrescente avec lui chez les Astaciens); il y a (1) CouriÈRE [A, 99] admet un 8° épipodite ; je ne suis pas de son avis (Voir le chapitre des épipodites, p. 358.). 244 GEORGES BOHN. D paires d'arthrobranchies (3 — 7), celles des deux premières paires plus développées que les autres, et 4 pleurobranchies (5 — 8). Chez les Paguridés et les Galathéidés, on retrouve, du moins chez les formes primitives, les branchies, D, c et c” des Homaridés, mais les épipodites subissent des réductions souvent considérables, ce qui entraine la disparition des podobranchies. Les Dromiacés abyssaux ont un appareil branchial de Homarien ; chez les Homolodromia M.-Epw. vivant à 2.000%, M. Bouvier a trouvé : Ep(i—6) afR—6) b(3—7) c(3—7) c'(5 —8); chez les Dromia vulgaris M.-Epw., on a: Ep(1—4) «a(2) b(32 je Peters) mais les arthrobranchies (5, 6, 7) sont très réduites, et l’on est conduit à la formule habituelle des Crabes : Épli 3) al2—3) 54 c(2=24) cb 6); les podobranchies (2 — 3) sont plus ou moins réduites (surtout 3 4), ainsi que € (2); il y a deux paires d’arthrobranchies (3 et 4); celles de la paire 4 ont à peu près le développement de €” (5 et 6). Mais cette formule admet des réductions portant surtout sur les branchies antérieures, chez les formes pélagiques (Neptunidés), chez quelques formes terrestres (Sésarmes), mais surtout chez les espèces des fonds coralligènes (Oxystomes) et les formes parasites (Pinnotheres); les formes fouisseuses ont une formule assez com- plète. En général ce sont les branchies exposées aux actions toxiques qui disparaissent. Le plus souvent les branchies, quelle que soit leur origine, sont formées d'un axe qui porte deux rangées de lamelles. Chez les Reptantia primitifs, ces lamelles sont remplacées par des filaments ; il y en a 4 rangées chez les larves de Homards et chez les Thalassi- nidés adultes ; chez les Paguridés et les Dromiacés primitifs, on assiste à une évolution commençante dans le sens des Homaridés. Dans le chapitre relatif aux épipodites, j'aurai à expliquer cette transformation adaptative de la branchie, durable ou passagère (Voir p. 366). SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 245 CHAPITRE II. Aperçu sur le fonctionnement de l'appareil respiratoire. Le fonctionnement de l'appareil respiratoire chez les Crustacés Décapodes est indiqué d’une façon très remarquable dans une note, lue à l’Académie des Sciences le 8 octobre 1838 par H. MixEe-Ebpwarps, et intitulée : Recherches sur le mécanisme de la respiration chez les Crustaces [D, a, 39]. C’est le compte rendu d'expériences que fit l’illustre zoologiste, en compagnie d'AUDOUI, lors du voyage de ces deux savants à Granville. Voici les conclusions que l’on peut dégager du mémoire de MILNE- EDwaRDs. I. L'organe actif dans la production du courant respiratoire est le scaphognathite, grande lame ovalaire dépendant de la mâchoire postérieure, incessamment en mouvement dans le canal qui prolonge en avant la chambre branchiale. Expérience 1. — Si on ouvre largement la cavité branchiale d'un Crabe, si on enlève la voûte de cette cavité, en ayant soin de ne pas léser le canal antérieur, le courant qui traverse celui-ci d’arrière en avant subsiste. Donc l'agent actif est situé à l’intérieur de ce canal. Expérience 2. — Si on laisse intacte la cavité respiratoire, mais si on maintient dans l’immobilité les pattes-màchoires, et par suite les épipodites qui en dépendent, le courant ne subit pas de variations notables. Le courant n’est pas dû aux épipodites. Expérience 3. — Si on coupe le scaphognathite, le courant s'arrête et il n’est pas possible de le rétablir en mettant en mouvement les épipodites. L'organe actif n’est autre que le scaphognathite. 246 GEORGES BOHN. II. L'entrée de l'eau dans la chambre branchiale a lieu, chez les Macroures par tout le bord inférieur du branchiostégite, chez les Crabes par un point particulier immédiatement en avant des pattes antérieures (sauf le cas des Dorippes, des Leucosies el des Ranines). Les orifices expirateurs sont toujours situés en avant du cadre buccal. Expérience 1. — « Nous plaçàmes dans un vase rempli d'eau de mer un Maia squinado, en ayant soin de faire plonger dans le liquide l’ouverture de la cavité branchiale située au-devant de la base des pattes antérieures, et de maintenir au-dessus de la surface de l’eau la terminaison du canal par lequel cette même cavité vient communiquer avec l'extérieur, au-devant de la bouche. Les pattes- mâchoires externes étaient d'abord rapprochées, et par conséquent la première de ces ouvertures était fermée par le prolongement externe de l’article basilaire de ces organes, mais l'animal ne tarda pas à les écarter de façon à relever l'espèce de volet formé par cette pièce solide, et alors nous vimes presque aussitôt l’eau monter dans le canal dont il vient d’être question et déborder de chaque côté de la bouche en quantité considérable ». Expérience 2. — « Nous renversämes ensuite l’animal, de façon à maintenir au-dessus du niveau de l’eau l’ouverture qui auparavant y était plongée, et à placer dans ce liquide l'extrémité du canal qui dans l'expérience précédente était exposée à l'air. Le Maia fit mouvoir comme auparavant ses pattes-mâchoires, mais il n’arriva pas une seule goutte d’eau au bord de l’ouverture ainsi soulevée, et nous remarquâmes bientôt qu'un grand nombre de bulles d'air s'échappaient de l'extrémité du canal immergé, de la même manière que nous avons vu l’eau en sortir quand l'appareil respiratoire était en communication avec ce liquide par l'ouverture postérieure de la cavité branchiale ». © Se er SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. CHAPITRE IV. Discussion raisonnée et expérimentale de l'opinion de Milne-Edwards sur la circulation de l'eau dans la chambre branchiale. Complexité du problème ; ses données (données mécaniques el données biologiques). — Travail du scaphognathite. — Falique de cet organe. — Critique des expériences de Milne-Edhoards et de la methode de l’émersion. — Méthode des liquides et des poudres colorés. — Du renversement du courant respiratoire el de ses conséquences. | $S 1. — COMPLEXITÉ DU PROBLÈME. SES DONNÉES. — DONNÉES MÉCANIQUES; DONNÉES BIOLOGIQUES. Les conclusions des expériences de MiLxE-EpwaRps ne sont pas exactes ; le problème de la circulation de l’eau dans la chambre branchiale est beaucoup plus complexe que ne le supposait ce savant; les données sont à la fois des données mécaniques et des données biologiques. Je n’ai pas la prétention de résoudre d’une manière rigoureuse le problème, — cela serait, je crois, bien difficile, — mais seulement de l’aborder par ses points de vue intéressants. Les quelques calculs : que j'introduirai ne doivent être considérés que comme un mode facile d'exposition ; comme leurs résultats seront traduits en langage ordinaire, ils pourront être passés sans inconvénients par le lecteur ; ils ne seront d’ailleurs qu'une expression imparfaite de la réalité. Données mécaniques. — Je simplifierai déjà la question en supposant que l'appareil respiratoire des Crustacés que j'étudie a une forme géométrique. La chambre branchiale et la gouttière expiratrice peuvent être 248 GEORGES BOHN. assimilées à deux cylindres superposés, Cet €, le cylindre inférieur, C, de longueur Z et de diamètre large, le cylindre supérieur, €, de longueur / et de diamêtre étroit. Les deux cylindres communiquent. L'eau peut entrer par une fente pratiquée le long d’une génératrice du grand cylindre, ou bien par une série d’orifices le long de la même génératrice, et sortir par l'orifice supérieur du petit cylindre. FRERE See A 1 ! 1 l l Û 1 ! l Û l Û l l | | 1 ÿ A 1 1 ! à 1 | LA Ce ee = Fi. 1. — Schéma de l'appareil respiratoire. ZL, longueur du cylindre € ; l, longueur du cylindre c ; , hauteur verticale comptée du point d'entrée de l'eau au niveau libre de celle-ci ; y, distance entre la base de la cavité branchiale et l'orifice d'entrée de l'eau ; A. diaméêtre maxima de la fente d'entrée ; à, diamètre au point d'entrée. La circulation de l’eau a lieu sous l’action d’une lame ondulante, le scaphognathite, qui se meut à l’intérieur de €, emprisonnant à chaque battement une quantité d’eau w, pour la rejeter ensuite par l'orifice supérieur ; le nombre des battements de la lame motrice élant # par minute, la quantité d'eau qui est ainsi rejetée pendant cet espace de temps est D = nu A mesure que l’eau est ainsi soustraite à la partie supérieure, il SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 249 en rentre une quantité égale, par la fente inspiratrice ou par les orifices qui remplacent celle-ci. En un point quelconque la quantité d’eau qui entre est propor- tionnelle à la largeur de la fente ou au diamètre de l’orifice. Si en effet on considère un temps { assez court pour que la masse d’eau contenue dans l’appareil puisse être supposée immobile, on peut appliquer à cette masse liquide le principe de PascaL. La diminution de pression exercée par le scaphognathite sur l'unité de surface au niveau de la section du petit cylindre, — p, se transmet intégra- lement en tous les points de la surface-limite du liquide, et en particulier en tous les points de la fente inspiratrice. C’est la pression — p ainsi transmise qui est la cause de l'entrée de l’eau. Les pressions étant égales sur des surfaces égales, l'entrée de l’eau, calculée par unité de surface, est uniforme. En supposant la fente de diamètre constant, la quantité d’eau qui entre en un point pendant une minute sera Données biologiques. — Ce qui rend fort original cet appareil, et ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que le scaphognathite, la lame motrice, est un organe vivant, susceptible de se renforcer ou de S'afflaiblir, subissant au plus haut point l'influence de la fatigue. Force du scaphognathite. — La force du scaphognathite est d'autant plus intéressante à considérer qu'elle est proportionnelle à — p, et par suite à © — nu. La force du scaphognathite est assez variable, 1° Elle varie d'une espèce à l'autre ; en général, je le montrerai dans la suite, elle s’affaiblit dans chaque phylum de l'arbre généa- logique des Crustacés à mesure que les formes se différencient. 2 La force du scaphognathile varie avec l’äge ; elle diminue avec lui, relativement à la taille. 3 La force du scaphognathite est considérablement influencée par les poisons qui peuvent apparaître dans le milieu externe ou le milieu interne; les acides, tels que CO?, semblent augmenter, du 250 GEORGES BOHN. moins pour une durée de temps limité (la fatigue survenant vite), la force de l'organe; les alcalis, tels que AzH*, au contraire, la diminuent considérablement ; les poisons de la fatigue (influence de l’activité et de la sédentarité) ont des effets intéressants. $ 2. — TRAVAIL DU SCAPHOGNATHITE. Les données précédentes vont me permettre d'établir, d’une façon approximative, la valeur du travail effectué par le scapho- gnathite. Il est bon, à cet effet, de distinguer plusieurs cas. 1% Cas. — L'eau entre par un seul point (point limité de la fente supposée obturée dans le reste de son étendue, ou bien orifice unique). - Soit 2 la distance verticale de ce point à l’orifice expirateur. Le travail effectué pendant une minute sera (frottements non compris) t = nugh > étant la densité de l’eau (1 pour l’eau douce, valeur un peu lus forte pour l’eau de mer). D P . e { e] 1] n 2° Cas. — L'eau entre par une fente de largeur uniforme et de longueur L. La quantité d’eau qui entre en un point quelconque es nu SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 251 Le travail total # je +- l L +4 L Ti ugh. dh = 748 h dh J L L J; = NU (+1) Ceci en supposant les cylindres verticaux ; s'ils sont imclinés sur l'horizon d’un angle w, on aura la formule — Up (+ } sin w Pour les frottements, il faut ajouter un terme F ; d’où TOUR ( ns l ) sir w + K 3° Cas. — L'eau entre par une série d'orifices étages les uns au-dessus des autres et égaux. En général il y a G orifices, le premier en arrière des palles- mâchoires postérieures, les autres en arrière des diverses pattes. -La quantité d’eau qui entre par chaque orifice est in 6 et le travail correspondant dt nup AO 6 A En supposant les orifices équidistants, le travail correspondant à l'orifice de rang K sera égal à Te. | et le travail total à 252 GEORGES BOHN. S 3. — FATIGUE DU SCAPHOGNATHITE. Le travail du scaphognathite ne peut pas dépasser une certaine limite, car l'organe se fatigue. La fatigue du scaphognathite est évidemment fonction du travail qu'il accomplit lui-même, et des autres travaux effectués par l'animal. | Or, le scaphagnothite ne peut se reposer sans danger pour l'animal qui s’asphyxierait. Toutes les circonstances qui entraîneront une diminution du travail du scaphognathite sans déterminer une diminution de l’hématose seront donc avantageuses. D’après l'évaluation même de ce travail, ST | L + ) sin w + F 29 on voit que les circonstances qui peuvent entrainer sa diminution seront diverses; les frottements, la longueur de la chambre branchiale, la densité du fluide, enfin le débit peuvent varier. Diminution des frottements. — Les frottements dépendent du nombre, de la disposition et de la structure des branchies ; mais ceux-ci sont eux-mêmes fonction du mode de circulation de l’eau, et j'aurai à les examiner plus loin au cours de cet ouvrage. Diminution de la longueur de la chambre branchiale. — 1° Elle peut être obtenue simplement par un changement d'atti- tude du Crustacé; l'attitude horizontale a un grand avantage, le travail se trouvant réduit aux frottements (sin w — 0); mais chez un animal la possibilité des attitudes obliques et verticales constitue, dans bien des cas du moins, une supériorité notable. 2 À mesure que les formes se spécialisent, la longueur de la chambre diminue, et par ce fait le scaphognathite se trouve soulagé quand l'animal à une situation verticale ou oblique. Dans la seconde longueur de la carapace largeur partie decetravail,jemontreraiquelerapport SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 253 est fort intéressant à considérer, et qu’en particulier chez les Cancé- didés il permet de sérier les espèces (Voir p. 402). 3 La fente d'entrée de l'eau a des formes diverses qui équiva- lent, au point de vue du travail du scaphognathile, à des longueurs diverses. Je vais supposer que l’eau entre par une fente qui partant de O s'élargit progressivement, ceci d'arrière en avant. Soient A le dia- mètre maximum el à le diamètre en un point situé à la hauteur y. Ne UC AUS La quantité d’eau qui entre en ce point est proportionnelle à à, c’est-à-dire égale à a étant une constante que l’on peut déterminer par la relation L L 27] d'y Es il C _ dYyYy— = GAL nu ce qui donne La quantité d’eau qui entre au point considéré est donc égale à 2 nu -L+i— et le travail correspondant dt _ 2nup ST JA L+lt—-h)h 254 GEORGES BOHN. Le travail Lotal est donc égal à LA HE r= eat f Fe a] dh 2 _— = [+0 24311430 | = HUE (+ + 1) Je suppose maintenant que la fente s'élargil d'avant en arrière. On a = | tÙ = & D & \ z+ Fe LL " 2C D 2 Bd 5 EC 2 STI SSL +25 | — nup LE L+1) Ainsi, dans le premier cas, tout Se passe comme si la carapace avail un tiers de la longueur en moins ; dans le second cas, comine si elle avait un tiers en plus. L’élargissement antérieur de la fente, si petit qu'il soit, a donc un avantage très grand. 49 Il y a un avantage du même ordre quand il existe des ori- fices séparés pour l'entrée de l'eau et que l'orifice antérieur augmente son diamètre. Précisément MiLNE-EbwWARDs a montré que cel orifice a undiamètre qui peut varier d’un moment à l’autre; quand les pattes mâchoires s'écartent, celui-ci augmente, et par suite le scaphognathite est soulagé. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 255 Je suppose que l’orifice antérieur devient K fois plus grand. On à TR ve (5 ++ (5 +1) = nue [65 +R 0 + (6+—5) | £ 36 + (K— 1) | ni mue | BL6+R—DT (| Se ; 30 L SiK=1, T= ne (Le —-L +4) = nu (= +1) Si K = *}. nr 49 (mes L+t) Si K — 1) ol — Nue a FE + t) = nud (+ +- l ) On voit en effet que tout se passe comme si la longueur de la carapace diminuait lorsque l’orifice antérieur s’élargit. Valeur deRE Lt. ne. 7. l D 10 25 DD Valeur correspondante de L 00 ONMIENNENE B) ur LH 20 On voit de plus, d'après ce tableau, que ceci n’est sensible que pour les faibles élargissements de l’orifice antérieur ; or, ce sont précisément ceux que l’on observe dans la nature, et c'est heureux pour les branchies postérieures qui, sans cela, seraient irrémédia- blement vouées à une disparition prompte, car pour qu’une branchie se conserve il faut qu'elle soit placée dans une eau renouvelée et pure. Lorsque l’orifice antérieur devient cinq fois plus grand, et c’est là le maximum, le résultat est le même que lorsque la fente d’entrée s'élargit progressivement d’arrière en avant. 256 GEORGES BOHN. »° Enfin l'émersion d'une partie de la fente inspirutrice équi- vaut à une modification de longueur, mais elle entraîne en même temps des changements dans la nature du fluide respiratoire ; je vais donc étudier ses effets avec la diminution de la densité du fluide respiratoire. Dimimution de la densité du fluide respiratoire. — Les Crustacés Décapodes ont souvent émigré au cours de leur évolution dans les eaux douces et même dans l’air. La vie dans les eaux douces et la vie mi-aérienne entraînent des modifications du travail du scaphognathite, la densité de l’eau douce et surtout celle de l’air étant plus faibles que celle de l’eau de la mer. Je vais examiner l'influence d’une émersion partielle. Influence de l’émersion. — Je suppose que la partie antérieure de la fente inspiratrice sorte de l’eau d’une quantité e. Dans ce cas le scaphognathite pompe à la fois de l’eau et de l'air. Le travail relatif au déplacement de l'air est négligeable par rapport à celui que nécessite la circulation de l’eau ; de plus l’air en se mélangeant à l'eau a pour but de l’aërer plus ou moins, ce qui est un second avantage. D'ailleurs l'air entre proportionnellement en plus grande quantité que l’eau ; on voit que par suite le travail total se trouve diminué d’une façon considérable, et l'expérience montrera que l'intensité respiratoire ne faiblit pas, tout au contraire 10 = ne (+ + ! ++) mais w”, la quantité d’eau qui circule dans la chambre branchiale. n’est qu'une faible fraction de la quantité totale de fluide (eau et air) qui y circule uw = uK K est toujours beaucoup plus petit que 1 et varie. L'étude des variations de X est d’ailleurs assez complexe, et peut être faite expérimentalement. Expériences. — On prend un tuyau de flûte; on immerge un SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 257 cerlain nombre d'orifices, laissant au-dessus de l’eau les autres, et on aspire à la partie supérieure. 1° En maintenant la flute verticale, on constate que, pour une aspi- ration faible, l'air seul circule, mais que si l’on augmente progres- sivement la force de l'aspiration il arrive un moment où l’eau se mêle à l'air. À ce moment la force aspiratrice a une valeur /”". A partir de cette valeur, f'croissant, la proportion d’eau augmente, mais reste loujours inférieure à celle de l'air. 2° On arrive à ces résultats d'autant plus difficilement que la portion émergée est plus considérable ; /" augmente donc avec e. 3° L'inclinaison de la flûte a aussi son influence ; avec une flute inclinée, en partie émergée, il est beaucoup plus facile d'aspirer de l’eau qu'avec une flûte verticale. En résumé, il y a avantage à ce que l'air circule en même temps que l’eau, et cela se produit facilement lorsque : 1° Le scaphognathite est fort ; 2 La portion émergée, e, est peu considérable ; 3 L'inclinaison est faible. Malheureusement c’est précisément lorsque ces trois conditions manquent que l’animal se trouve dans la nécessité de soulager le scaphognathite. Diminulion de ##. —— Le travail du scaphognathite diminue enfin lorsque la quantité du fluide respiratoire diminue, mais cette diminution entraine celle de l'intensité du phénomène respiratoire. S 4. — CONCLUSIONS DES PARAGRAPHES QUI PRÉCÉDENT (1). Le travail du scaphognathite se compose de deux parties: une première partie correspond aux /rottements ; une seconde partie, à l'élévation de l’eau. Le travail qui correspond à l'élévation de l’eau dépend de la longueur de la chambre branchiale, de la densité de l’eau, et de (1) Ces conclusions permettront au lecteur qu’effrayeraient les quelques caleuls que j'ai introduits de les laisser de côté. 17 258 GEORGES BOHN. la quantité de ce liquide qui circule pendant l'unité de temps. 1° Les frollements dépendent de dispositions organiques que j'examinerai plus lard. 20 La diminution de longueur de la chambre branchiale peut être obtenue de bien des façons différentes, par l'attitude du Crus- tacé, oblique ou horizontale, par l'élargissement antérieur de la fente inspiratrice, qui, si petit qu'il soit, entraine une diminution d'un tiers, par l'ouverture de l’orifice inspirateur antérieur (orifice dit de MIixE-EDWARDS). Chacun de ces moyens a un avantage, celui de diminuer le travail du scaphognathile, mais aussi des inconvénients : souvent un animal ne peut prendre une attitude horizontale ou mème oblique qu'à son préjudice ; l'élargissement antérieur de la fente inspiratrice, qui a un effet limité (diminution d'un tiers), et l'ouverture de l’orifice ins- pirateur de MiLxE-EbwWaRDs, qui n’a d’effel sensible que pour de faibles ouvertures, ont l'inconvénient de diminuer la circulation de l’eau au niveau des branchies postérieures (qui sont alors dans de mauvaises condilions pour se développer) et par suite l’hématose. 3 L’émersion en produisant un mélange d'air et d’eau diminue beaucoup le travail du scaphognathite. Ceci serail fort avantageux pour un scaphognathite faible ou affaibli, et dans le cas de la posi- tion verticale de l'animal, mais malheureusement il faut un organe fort pour produire le mélange de l'air et de l’eau, surtout dans la position mentionnée ; de plus le phénomène quand il se produit est limité et n’est réellement utile que pour les seules branchies anté- rieures. 4° La diminution de la quantité du fluide respiratoire entraine évidemment une diminution notable de l’hématose. En définitive, que ce soit la longueur de la chambre branchiale qui diminue par suite d'un élargissement antérieur de la fente inspi- ratrice, que ce soit le débit de l’eau qui diminue, le résultat est à peu près le même pour l'organisme : il y a diminution de travail du scaphognathite, mais aussi diminution de l'hématose; dans le premier cas, le groupe postérieur des branchies perd de son impor- tance, dans le second, toutes les branchies fonctionnent, mais le renouvellement de l’eau est moins intense. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 259 Dans l’un et l’autre cas, il ya tendance à l’asphyxie. L'anhy- dride carbonique qui s’accumule dans les tissus quand le scapho- gnathite faiblit trop joue le rôle de régulateur, excitant, passage- rement du moins, l'organe. Dans ces conditions, le Crustacé a avantage à rechercher des eaux aérées. el mème à émerger une partie de son corps. S D. — CRITIQUE DES EXPÉRIENCES DE MILNE-EDWARDS ET DE LA MÉTHODE DES ÉMERSIONS. Miixe-Epwarps a entrevu l'importance chez les Brachyures de l'élargissement antérieur de la fente inspiratrice, mais il l’a exagérée; ses expériences l'ont conduit à une opinion erronée, devenue classique, à savoir que l'eau entre chez les Crabes par un orifice situé en avant de la première patte thoracique. MiLxE-EDpwaRpDs s’est trompé, précisément parce qu’il a employé des Crabes de grande taille, âgés par conséquent, et érès difje- renciés, et qu'il s’est servi de la méthode des émersions, méthode qui est dangereuse à employer, surtout avec des scaphognathites faibles. Je ne m'altarderai pas à faire la critique directe des expériences de MrxE-Epwarps ; les conditions qu'il indique sont bonnes, mais s'est-il placé dans ces conditions ? C’est peu probable, car ses descrip- tions laissent beaucoup à désirer ; il nous raconte entre autres une chose qui est bien invraisemblable, à savoir que l’eau ne monte pas quand l'orifice inspirateur est invmergé et que les pattes- mâchoires sont rapprochées sur la ligne médiane. J'ai repris ces expériences, mais en me plaçant dans des conditions variées, et on va voir quels résultats différents j'ai obtenus suivant les cas. Expériences sur de grosses araignées de mer (Maia squinado HergsT).— Ces expériences ont été effectuées à St-Vaast-la-Hougue, au commencement d'août 1897, sur des Maïas originaires des côtes de Bretagne et acclimatés dans les pares aux Huitres du Rhun. J'ai choisi des exemplaires de grande taille, femelles pour la plupart, quelques-uns mâles. 1° Emersion progressive d'avant en arrière. — L'animal étant renversé et plus ou moins incliné, je l'ai plongé dans l’eau, et ensuite 260 GEORGES BOHN. j'ai soulevé progressivement l'avant de la carapace de manière à amener successivement hors de l’eau l’orifice inspirateur de MiLNE- Epwanps et le sillon qui est situé entre les articles basilaires des pattes, très développés ici, et le bord du branchiostégite. J'ai constaté que dans tous les cas l’eau sortait par l’orifice, mais que petit à pelit le débit diminuait, des bulles d’air de plus en plus nombreuses se mêlant à l’eau. Ainsi l’orifice d'entrée signalé par MiLxE-EbwaRDs n'est qu'une partie de la véritable porte d'entrée, qui est constituée par: loute La fente latéro-postérieure de la carapace. Les mouvements des pattes-mâchoires postérieures étaient inter- miltents; j'ai maintenu les paltes mâchoires immobiles et rap- prochées pendant plus de dix minutes, sans que le courant cessàt ou même s’affaiblit. — Ici encore MILNE-EbwaRDs à mal observé. 20 Emersion progressive d'arrière en avant. — L'animal étant placé comme précédemment, j'ai fait sortir de l'eau en sens inverse les divers points de la fente du branchiostégite. L'air a apparu dans le courant expirateur avant même que l’orifice inspirateur de MILNE-EbwaRps soit émergé, ce qui confirme la conclusion de l'expérience précédente. Expériences sur de gros Tourteaux (Cancer pagurus LinNE). — Ces expériences ont élé faites également à St-Vaast, dans le courant d'août 1897. 1° Emersion progressive d'avant en arrière. — Comme pour les Maïas. Mais ici, surtout lorsque la carapace est fortement inclinée, l’eau cesse de circuler à peine les orifices inspirateurs de Mixe-Epwarps sont-ils émergés. Ceci se rapproche de l'observation de MiLNE-EDWARDS, nas ne prouve rien au point de vue de l'entrée de l'eau, quand l'animal est immergé complètement (Voir plus haut les expériences relatives à l’émersion). 2% EÉmersion progressive d'arrière en avant. — Le Crabe étant renversé, la carapace était immergée jusqu’à une ligne passant par le bord antérieur de la carapace et par une saillie du bord du branchiostégite située entre les articles basilaires des dernières et avant-dernières pattes ; de cette façon l'extrémité postérieure du bord du branchiostégite était seule hors de l’eau ; or, SUR LA RESPiRATION DES DÉCAPODES. 261 précisément en ce point, celui-ci forme au-dessus des articles basi- laires des paties postérieures un orifice de pénétralion bien diffe- rencie, el que l’on peut qualifier à très juste titre d'« inspirateur postérieur ». En effet, l'animal étant dans la position indiquée, des bulles d'air, nombreuses et volumineuses, sortaient constamment en avant. Lors de l’émersion progressive, ces bulles continuaient à sortir, et le maximum du phénomène semblait atteint lorsque le point compris entre les coxa des pattes 3 et ? sortait de l’eau. Expériences sur de gros Portunes laineux (Portunus puber LINNE).— Ces expériences ont eu lieu à St-Vaast, au commencement de septembre 1897, sur des Portunes venant des îles St-Marcouf. 1° Emersion progressive d'avant en arrière. a) La face sternale du Crabe élail tenue verticalement. — Quand tout le bord du branchiostégite était immergé, l'eau se déversait abondammenten avant; dès que l’orifice d'entrée de MILNE-Epwarps était émergé, le débit diminuait beaucoup et les bulles d'air se mêlaient à l’eau. Ceci prouve que l'eau entre également en arrière de l'orifice d'entrée de Mizxe-Epwarps ; elle entre en effet ici par un second orifice, située entre les coœa des pattes T et 2. Dés que ce second orifice était émergé, l’eau cessait de circuler dans la gouttière expiratrice. b) La face sternale du Crabe était tenue le plus horizonta- lement possible. — L'eau continuait à circuler même après l’'émer- sion du second orifice. L'entrée de l’eau se fait donc tout le long de la fente. La seconde experience donne des résultats différents de la première. Cela n’est pas fait pour nous étonner, après ce que nous avons lu au sujet des conditions mécaniques de l’émersion. 20 Emersion progressive d'arrière en avant. — L'animal étail fixé dans sa position habituelle, ou bien sur le dos. L'air apparaissait en avant en général dès que le 2° orifice (entre 1 et 2) était émergé. Conclusions des expériences sur les gros Crabes. — Mrixe- Epwarps & mal observé, et'en particulier s'est fort mal rendu 262 GEORGES BOHN. compte de l'influence de l'écartement des pattes màchoires ; de plus il 4 mal interprété les résultats de ses expériences. En effet, si lors de l’émersion progressive d'avant en arrière, l'eau cesse de monter lorsqu'une partie de la fente inspiratrice est. émergée (orifice d'entrée de MILxE-EpwaRDs pour les Cancer, 1* el 2° orifices pour les Portunes, grande partie de la fente pour les Maïas), c'est que le scaphognathite affaibli de ces formes ägées et diffe- renciées peut faire circuler l'air et non soulever une colonne d'eau. Ce qui le prouve c'est que, chez certains individus qui présentent des mouvements du scaphognathile plus vigoureux, l'eau monte en même lemps que l'air dans loules les circonstances. Ce qui le prouve encore ce sont les expériences que J'ai faites en inclinant plus où moins la; carapace des Portunus puber ; pour une inclinaison peu prononcée le scaphognathile arrive à souleter l’eau. Les expériences d’émersion progressive d’arrière en avant m'ont montré que la pente inspiratrice se différencie en certains points en orifices inspirateurs : orifice en arrière des pattes postérieures chez les Cancer, orifice entre les coxa des pattes 2 et 1 et en avant des coxa des pattes 1 chez les Portunes. Expériences sur des Crabes de tailles diverses. — Ces expériences ont été faites à St-Vaast, en août et septembre 1897. Le 27 août 1897, j'ai pris des Tourteaux de petite taille provenant du Cavat: j'ai constaté que chez ces Crabes le scaphognathite étail capable de soulever l'eau, de l'orifice inspirateur postérieur jusqu'à l'orifice expirateur, c'est-à-dire de toute la hauteur de la carapace. Ceci ne peut s'expliquer qu’en admettant que le scaphognathite des jeunes est relativement plus vigoureux que le scaphognathite des Crabes ägés et de grande taille. Je suis arrivé à la même conclusion en prenant toute une série de Carcinus mœænas PENNANT, depuis les plus petits jusqu'aux plus gros. Il faut naturellement prendre des moyennes, car il y a des différences individuelles et de race exlréemement importantes (différence de la vigueur du scaphognathite). Toutes ces expériences confirment les conclusions précédentes, et SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 263 montrent bien clairement que MiLxe-Enwarps a eu tort de s'adresser aux Crabes de grande taille. Elies nous prouvent ce que nous avons admis au début de ce chapitre que La force du scaphognathile varie avec les espèces, avec l'âge, la taille, avec les races (déterminées par les habilats en général), avec les individus eux-mêmes, que plus un Crustacè se «lifférencie dans la série ontogénique ou la série phylogénique plus son Scaphognathite faiblit. C'est là un fuit biologique capital pour la compréhension des faits nombreux et variés qui seront rapportés dans le chapitre suivant. S 6. — INFLUENCE REGRETTABLE DES ERREURS DE MILNE-EDWARDS. Mune-EpwaRDs a cru, a tort, que l’eau entrait par le seul orifice antérieur. Son opinion, sans être vérifiée, est devenue classique, et des savants tels que CLAUS, au lieu de vérifier purement et simple- ment le dire de Mirxe-Epwarps, se sont torturé l'esprit pour expliquer comment l'eau entre en avant et baigne les branchies souvent si développées qui soul en arrière. « Puisque le courant d'eau, dit CLAUS [D, à, 86], n’est pas, comme chez les Macroures, dirige d'arrière en avant dans la Chambre branchiale, mais conmence en avant derrière l'appareil buccal et à la limite antérieure des branchies, il doit exister des dispositions qui le conduiraient en arrière et en haut. Gette fonction appartiendrait au 3° épipodite, allongé en fouet, dont.la partie basilaire ordinai- rement munie d’une brosse de poils très serrés, s'étend en avant et au dessus du coxa des pattes préhensiles, puis se recourbe à angle droit pour se prolonger dans le fouet qui se loge entre la dernière arthrobranchie des 3% pattes-mâchoires et la branchie antérieure des pattes préhensiles. Les oscillations de cet épipodite ont visiblement pour objet de conduire dans la direction des mouvements du fouet, vers la pointe des pyramides branchiales, c’est-à-dire dorsalement et dans la partie postérieure de la chambre branchiale, le courant d’eau qui est entré entre la base de l'épipodite et l’article coxal de la patte. > Quant à l'épipodite des pattes-màchoires 1, qui dépasse nota- blement en étendue le précédent,il n'est pas resté la lamelle bilobée 264 GEORGES BOHN. plus ou moins triangulaire qu'on rencontre si fréquemment chez les Macroures, mais, par le prolongement de sa partie postérieure, il est devenu un fouet aplati puissant dont les oscillations sur la face dorsale des branchies entretient le courant d’eau dans l’espace supérieur de la chambre branchiale ». J'ai tenu à citer tout ce paragraphe ; je reviendrai plus loin sur le rôle des épipodites, je montrerai que certainement CLAUS n’a pas regardé le mouvement des fouets épipodiaux, et qu'il s’est laissé suggestionner par l'opinion erronée de MILNE-EDWARDS. Seuls, BELL [B,53], en Angleterre, et MM. GrarD et BoNNIER, en France, ont vu que l’orifice d'entrée signalé par MILNE-EbwaRDs n’était qu'une partie, assez insignifiante, de la véritable porte d'entrée. Celle-ci comprend toute la fente latéro-postérieure de la carapace, et MM. Grarb et BoNNIER ont insisté sur ce fait dans la note de la page 199 de leurs Ætudes sur les Bopyriens |D, f, 87]. Ces auteurs rappellent que BELL a parfaitement vu celte disposition. S 7. — MÉTHODE DES POUDRES ET DES LIQUIDES COLORES. MM. Giarp el BoNNIER sont arrivés à se rendre compte de la fausseté de l'opinion de MizxEe-EbwaRps, en employant une autre méthode que celle des émersions, méthode si défectueuse, la méthode des poudres et liquides colorés. En mettant dans de l’eau carminée un Portumnus variegatus LEACH, espèce très commode pour l'étude de la respiration, d’après M. GiaRD, ce savant a vu le carmin se déposer sur toutes les touffes de poils filtrants qui bordent les ouvertures respiratoires afférentes, et surtout sur celle qui est située entre la dernière et l’avant- dernière patte où se trouve le point d'entrée principal de l’eau. C'est cette méthode que (GARSTANG a reprise dans ses recher ches récentes ; c’est celle que J'ai employée le plus souvent ; je me suis servi du carmin, de l'encre de Chine et aussi du bleu de méthylène. Les expériences suivantes ont été faites en même temps que celles décrites au $ 5. Expériences sur les Wait. — La pénétration de l'encre de Chine se fait trés nettement au niveau des coxa des diverses pattes, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 269 sur le côté, c'est-à-dire ni en arrière de l’article basilaire où fait saillie un fort bourrelet articulaire ni en avant où existe une saillie de l’article basilaire. Une goutte d'encre déposée à quelque distance de l’orifice s’effile pour y pénétrer. Peu après, l’eau de l'expiration se teinte en noir; si l’on injecte l'encre en arrière, c'est 3 secondes après (chez un individu de grande taille), si on la fait entrer par l'orifice de MIrNE-EpwaRps, c'est 2 secondes environ après; ceci prouve que l'opinion de CLAUS est à rejeter ; le liquidese rend par le chemin le plus direct et en avant. Enfin la pénétration de l'encre se fait par l’orifice de MILNE- Enwarps même quand les pattes-màchoires sont rapprochées sur la ligne médiane. Expériences sur les Cancer (analogues). Expériences sur les oÿlunus puber. — Le Crabe étant renversé et immergé, j'ai déposé successivement en différents points du bord du branchiostégite de la poudre de carmin. Au niveau des orifices de MILNE-EbwaRD, la pénétralion se fait très bien, même quand les paltes-màchoires sont dans la position du repos; de même au niveau de l’orifice situé entre les coxa des pattes 1 et? ; de même enfin dans les interstices plus postérieurs. Des poils diversement disposés arrêtent plus ou moins le carmin. Expériences sur les Carcinus inænas. — De la même façon, on peut mettre en évidence chez les C. mænas une série d'orifices entre les coxa des pattes successives, et des appareils fillrants. J'ai pu compléter toutes ces expériences en pratiquant «des fenêtres dans les parois de la cavité branchiale et de la gouttière exæpiratrice. Pour cela, j'ai employé les précautions suivantes : 1° j'ai limé la carapace suivant 4 lignes qui se coupent, puis j'ai décollé avec soin la partie chilinisée de la membrane sous jacente, et j'ai laissé reposer l'animal ainsi opéré ; 2 au bout d’un certain temps, après avoir constaté qu'iln'y avait pas d'hémorrhagies, j'ai sectionné avec précau- 266 GEORGES BOHN. tion le double feuillet qui constitue la paroi de la chambre branchiale y compris le mince revêtement chitineux interne. Expériences sur les Waia. — Pour les Maïas l'opération est un peu délicate, car l'hypoderme se rend dans les diverses saillies de la carapace pierreuse ; celui-ci constitue une double lame, peu sensible à la pression, à la piqûre, mais excessivement sensible à la section ; il a évidemment un rôle sensoriel, un rôle de défense de la cavité branchiale : la lame externe pénètre dans les saillies de la carapace, saillies usées qui se terminent fréquemment par des orifices, la lame interne, particulièrement sensible, à un revêtement chitineux tout hérissé de poils (neltoyeurs, je le montrerai, mais aussi sensoriels). De plus lhypoderme, richement vascularisé, et qui a probablement un rôle respiratoire, sectionné, peut laisser écouler beaucoup de sang. En regardant par un fenêtre ainsi pratiquée, on voit que l'encre de Chine qui pénètre par la fente inspiratrice s'écoule en nappe contre les flancs épiméraux, et n'apparaît pas manifestement du côté extérieur des branchies, sauf toutefois si l’on écarte deux d’entre elles ; les branchies forment donc dans leur ensemble une sorte de filtre. Expériences sur les Cancer. — La section rencontre sueces- sivement, 1° la carapace ; 2° l’hypoderme (1 feuillet); 3° le foie ; 4 l’hypoderme (2° feuillet); 5° une mince pellicule de chitine papilleuse. On aperçoit les branchies accolées aux flancs ; l'épipodite externe se promène lentement et irrégulièrement à leur surface. 1° Si l'on introduit une malière colorante quelconque par l'orifice postérieur, une coloration apparait à la base des branchies et envahit progressivement d’arrière en avant; le courant intéresse probablement une partie de l'épaisseur des branchies, car on ne voit pas de courants secondaires de pénétration. En écartant avec soin deux branshies, on voit que la coloration a teinté également les faces internes des branchies. Il y a donc deux courants dirigés en avant, l’un à l'extérieur, l’autre à l'intérieur des branchies, et chacun intéresse une partie de l'épaisseur de ces organes. SUR LA RESPIRATION DÉS DÉCAPODES. 267 2 Si on introduit du bleu de méthylène par l'orifice d'entrée de Mize-EbwanRps, le bleu pénètre entre les bases des branchies 4bet3c, puis plus extérieurement devant les branchies antérieures; il ne diffuse guère en arrière ; c’est à peine si, en général, la moitié antérieure de la branche 4b se colore (exceptionnellement 4 c). Pourtant le bleu de méthylène est une substance qui se diffuse facilement. Tout courant qui naît au niveau du bord du branchiostégite va directement en avant, même quand les épipodites se proménent il ne va jamais en arrière, contrairement à ce qu'a dit CLAUS. J'ai effectué chez les mêmes Cancer des pesées de branchies imbibées d’eau, et j'ai trouvé les chiffres suivants : En arrière de l’orifice de MiLxE-EbwaRps. 6 © — 28gr. | DICO. 1 108r.,35 4c+4b=5,% En avant : Sc+3b+3a—3,7 | 261075 Der.,2 24 00,9 Le rapport entre le poids des branchies postérieures et celui des branchies antérieures est donc chez les Cancer. 1] > Le groupe postérieur est plus développé par rapport au groupe antérieur, mais ilest vrai qu'il correspond à plus de segments ; en tout cas, il est nécessaire qu'il reçoive de l’eau aërée ; comme il n'en reçoit pas par l’orifice de MILxE-EpwaRps, comme je l'ai montré, il en reçoit par la fente latéro-postérieure, et particulièrement par l'orifice postérieur que j'ai décrit chez les Cancer. 268 GEORGES BOHN. S 8 — Du RENVERSEMENT DU COURANT RESPIRATOIRE ET DE SES CONSÉQUENCES . Cependant, en opérant d’après la méthode précédente sur les Crustacés communs de nos côtes, j'ai constaté que très souvent la matière colorante ressort par le point même où elle vient d'entrer, ou même par un point plus postérieur. J'ai entrevu ce phénomène tout d’abord chez les Écrevisses (mars 1897), puis chez les Maia (août 1898) ; j'observai de temps à autre, irrégulièrement, des reflux brusques, de courte durée, vers l'extérieur, et cela au niveau de divers orifices; ces reflux ne dépendent nullement du mouvement de l’épipodite. Mais avec les Portunus puber Line le fait est beaucoup plus net. Lorsqu'on dépose du carmin près de l'orifice de MILNE-EbWaARDS, il pénètre petit à petit, mais souvent, 2 à 3 fois par minute, il se fait au-dessus de cet orifice une projection de carmin, qui ressemble un peu à une gerbe de feu d'artifice, et qui ne dure guère qu'une ou deux secondes. Ces expériences ont élé exécutées pour la première fois à St-Vaast le 4 septembre 1897; je venais de constater le renversement du courant respiratoire chez les Carcins, reconnu qu'il était dù à un renversement dans le sens du mouvement ondulatoire du scaphognathite, et vu qu'il entrainait la pénétration de l'air dans l’eau immobile de la chambre branchiale, qui se trouvait ainsi aérée. C'est alors que je rapprochai ces faits d’un autre signalé un peu auparavant par GARSTANG [D, a, 96], le renversement de la circulation de l’eau pendant la nuit chez les Corystes, Crabes qui s’enfouissent sur les côtes d'Angleterre. Le phénomène n’était done pas exceptionnel, comme le prétendait, en mars 1897, GARSTANG, alors qu'il venait de signaler un second cas de renversement, chez un autre Crabe fouisseur, le Portumnus nasutus LaTR. | D, a, 97]. Celui-ci est un Crabe étrange, avec uue avancée frontale développée ; GARSTANG trouva entre la forme et la fonction une corrélation évidente (!), et il était si convaincu qu'il démontrà qu'il ne pouvait y avoir renversement chez les Carcinus mænas SUR LA BRESPIRATION DES DÉCGAPODES. 269 PENxaNT (1). Pourtant ces Crabes présentent le phénomène au plus haut point ; il en est de même chez les Grapses, qui ont le front linéaire et non avançant. Le phénomène du renversement, comme je l'ai montré depuis longtemps [D, a, 97], est un phénomène absolument général, et qui a des conséquences biologiques importantes. Dans le chapitre suivant, je ferai voir ses mnodalités infinies et les circonstances variées qui déterminent son apparition. Pour le moment, je vais indiquer l’érportance du renversement au point de vue mécanique. La fatigue du scaphognathite diminue avec un débit d’eau moindre, c’est-à-dire quand le nombre des battements par minute ou leur amplitude devient moindre. Il arrive souvent au scaphogna- thite de s'arrêter. Il lui arrive de renverser le sens de son mouve- ment; à ce moment la valeur du débit de positive devient négative. Le scaphognathite, au lieu de soulever de l’eau, en abaisse. La partie du travail qui correspond au déplacement de l’eau prend également une valeur négative, c'est-à-dire se retranche du (au lieu de s'ajouter au) travail dû aux frottements, et l’on a T = F — x" ( == 2e ) Sin w On voit que dans ce cas, les conditions qui étaient désavanta- geuses précédemment deviennent avantageuses, el inversement. Il y à avantage pour le Crustacé dont le scaphognathite fonctionne en sens inverse : 19 A avoir une chambre branchiale longue (et par suite étroite) ; 20 A tenir celle-ci le plus verticalement possible ; 3° À augmenter le débit. Or, chez les Crabes qui présentent le renversement la carapace est souvent restée étroite (Corystes, Portunidès primitifs, Carcins), (1) « Since I have found no indications of a reversal ofthe respiratory currents in the latter species (C. mænas), I am inclined te believe that the retention of this larval feature in Port. nasutus is to be correlated with the reversal of the currents, wich occurs as Thave shown above, in this type ; while its eventual loss in €. »#æœnas is to be indi- rectly attribued to the lack of any further use for it after the larval stages » [D, a, 97]. 270 3EORGES BOHN. l'attitude habituelle est voisine de la verticale (attitude fréquente des animaux fouisseurs et des animaux aériens). Le débit peut augmenter, sans que de ce fait le travail augmente. Le renversement est donc très avantageux. Les périodes de renversement tout en permettant un débit considérable (n est manifestement plus grand et x plus accentué), sont des périodes de repos relatif. Le renversement se rencontre en effét chez les Crabes qui se fatiguent, et il est souvent déterminé par la fatigue elle-même ; une fois le renversement produit, l'organe est soulagé, el on ne doit pas être étonné que dans ces conditions il puisse fonctionner plus vite et avec plus d'énergie. De plus le renversement est un procédé particulier d'aération de l’eau; aëérer constamment une masse d’eau immobile, c’est là encore, vu la suppression de la plupart des frottements, ce qu'il y a de plus avantageux. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 271 CHAPITRE V Étude physiologique du scaphognathite. S 1. — DIFFÉRENTS MODES D'EXCITATION. L'étude physiologique du scaphognathite est d'une grande diffi- culté. Le scaphognathite.est un organe caché ; il n’est visible direc- tement que chez les formes à carapace transparente, comme les Palémons ; il bat avec une rapidité très grande : 1l y a jusqu'à 200 battements à la minute ; un zen modifie le nombre, l'amplitude et le sens de ses mouvements. I est l’aboutissant d'une mullitude de réflexes à point de départ périphérique. Cela ne doit pas nous étonner chez un Arthropode, où la sensibilité des téguments, surtout dans les régions hérissées de saillies chilineuses (crochets, poils, etc.) est extrème, où toute excitation périphérique retentit d’une façon considérable sur le mécanisme des organes essentiels de la vie. L'exemple du cœur est particulièrement frappant. DE VARIGNY [D, d, 87], puis JoLyEr et VIALLANES ont montré que sous l'influence d’excitalions portées sur les téguments on pouvait provo- quer, tantôt des accélérations, tantôt des arrêts du cœur. < Il est très facile, disent JoyET et ViALLANES |D, d, 93], de produire par voie réflexe des arrèls même très prolongés du cœur en excilant vivement un point quelconque du tégument par des moyens mécaniques, thermiques ou chimiques. Parmi ces moyens, ceux qui réussissent le mieux sont /e pincement avec un fer chaud, La section ou l’écrasement d'un membre, l'application d'un acide énergique. Toutefois chez les animaux conservés en aquarium et peu vigoureux, surtout en hiver, les réflexes d'arrêt sont quelquefois difficiles ou impossibles à provoquer, mais chez des animaux en bon élat ils ne manquent jamais. Ce réflexe d'arrêt est un phénomène que nous avons produit plusieurs centaines de fois, que nous avons observé chaque jour à toute époque de l’année, el nous nous 272 GEORGES BON. étonnons qu'il ait échappé à lant d'observaleurs, car 0n ne peul pour: ainsi dire toucher un Crabe sans le déterminer. »> Le moyen qui nous a servi le plus souvent, quand au cours d’une expérience nous voulions produire successivement plusieurs arrêts, est celui qui consiste à saisir une patte, l'œil ou la mächoire avec une pince chauffée. De la sorte, si c'est une patte qu’on excile, on détermine souvent l’aulotomie : mais cela n'a pas d'importance au point de vue qui nous occupe aujourd'hui. Même chez un animal affaibli, alors que l'excitation des pattes reste infructueuse, la brûlure ou le pincement d’une branchie détermine presque toujours un arrêt. L'introduction dans la bouche, l’œsophage ou l'estomac d'un corps étranger, le manche d’un pinceau par exemple, produit un effet plus marqué encore. > La durée de l'arrêt est sensiblement variable... de quelques secondes à une ou plusieurs minutes; c’est par l'application d'un acide sur le tégument ou par l'introduction d'un corps étranger dans la bouche qu’on provoque les arrêts les plus prolongés. > Nous venons de voir que des excitations portées sur les téguments provoquaient des arrêts du cœur, de même allons nous montrer qu'une accélération du cœur peut être déterminée par des moyens analogues. Tandis que des excitations violentes deter- minent l'arrêt, ce sont au contraire des excitations faibles et prolongées qui provoquent l'accélération cardiaque. C'est ainsi qu'on voit se produire une accélération du rythme du cœur, lorsque l’on vient à mettre à nu le derme sur une cerlaine étendue, en soulevant un lambeau de la carapace préalablement circonserit par quatre traits de scie. On peut également obtenir un effet identique en excitant par un courant faradique faible la muqueuse stomacale ou en touchant le labre avec un pinceau imbibé d'acide picrique. Ajoutons que l'accélération cardiaque par excitation des téguments est plus difficile à produire que l'arrêt, qui, lui, peut être provoqué avec certitude ». | J'ai tenu à citer tout au long ce passage, pour montrer combien les physiologistes ont été préoccupé jusqu'ici d'étudier l'action des pinces, du fer rouge, des poisons tels que la digitaline et la strychnine, sur les animaux, alors qu'il eût été si intéressant de rechercher l'effet des excitations délicates auxquelles l’animal peut être exposé dans la nature. SUR LA RESPIRATION. DES DÉGAPODES. 273 J'ai constaté, au cours de mes recherches, que, dans la nature, il existe une foule d’excitants mécaniques el chimiques, excessi- vement peu intenses, inais capables de déterminer des modifica- lions notables dans les mouvements du scaphognathite : arrèts, accélérations, renversements, etc. S 2. — PROCÉDES QUE L’ON PEUT EMPLOYER POUR L'ÉTUDE PHYSIOLOGIQUE DU SCAPHOGNATHITE, ET LEURS DÉFAUTS. Ces procédés peuvent se ranger dans les quatre catégories suivantes : 1° Examen direct, en plaçant les animaux à carapace transpa- rente dans des tubes de verre de diamètres assortis ; 2 Examen, après avoir pratiqué une fenêtre dans le bord ptérygostomien, au niveau de l’organe ; 3 Observation des courants respiratoires produits par le scapho- gnathite, au moyen, ou de poudres, ou de liquides colorés, ou bien d'une émersion déterminant le mélange de bulles d’air à l’eau. Tous ces procédés sont défectueux. Dans tous les cas, la contention de l’animal détermine des attouchements qui ont naturellement leur retentissement sur le scaphognathite. 1° Procédé. — J'ai employé le premier procédé avec les Palémonidés; mais l'observation du scaphognathite ne peut être aisée qui si l’animal à un diamètre légèrement inférieur à celui du tube ; et alors il y a un double inéonvénient : le Crustacé, gêné, se heurte constamment à la paroi du tube; l’eau s’échauffe et se charge assez rapidement d’acide carbonique. Avec les très petites espèces de Palémonidés, les larves, la Caridina, il est possible de placer les sujets à observer dans un verre de montre contenant de l’eau de mer sous l'objectif faible d’un microscope ; l'animal peut alors se trouver dans les mêmes conditions que dans la nature (flaques d’eau, etc.) 2° Procédé. — Pour effectuer les sections, j'ai observé les pré- cautions indiquées plus haut (p. 265) pour celles du branchiostégite. I 18 274 GEORGES BOHN. importe de laisser l'animal se reposer longtemps avant de l’observer à nouveau et de le rejeter comme sujet d'expérience s’il semble mal à l'aise. 3° Procédé. — L'emploi de poudres et de liquides colorés peut s'effectuer de deux façons. 1° On peut placer l'animal dans de l’eau de mer chargée unifor- mément, soit de carmin, soit d'encre de Chine ; un examen attentif permet de suivre la marche des grains rouges ou des flocons noirs. 2° On peut déposer en un point de la fente inspiratrice ou au- devant de l’orifice expirateur un petit amas de carmin, ou bien laisser tomber dans le voisinage de l’entrée ou de la sortie de l’eau, avec une pipette, une goutte d’eau carminée ou d'encre de Chine ; le dépôt peut être momentané ou répété; le sens et l’intensité de la pénétration ou du rejet peuvent donner des indications précieuses sur le fonctionnement du scaphognathite. Ici encore les inconvénients sautent aux yeux: les poudres exercent des actions mécaniques sur les poils qui garnissent les orifices d'entrée et de sortie de l’eau, et aussi sur ceux des épipodites et des branchies; or, je le montrerai, le scaphognathite est très sensible à ces sortes d’attouchements ; j'ai beaucoup insisté dans la suite sur ces faits, qui rappellent ce qui se passe dans la nature el qui sont par conséquent beaucoup plus intéressants que les réflexes brutaux mentionnés plus haut. Les encres peuvent donner lieu également à des excitations chimiques faibles. Ce qui vient d’être dit des poudres el des encres peut s'appliquer à l’air que l’on peut introduire dans le courant respiratoire par le moyen des émersions, et qui agit mécaniquement et chimiquement - sur la surface si sensible des organes respiratoires. Tous ces procédés sont défectueux, c’est entendu. Mais ce sont les seuls, je crois, que l’on puisse employer (laissant de côté naturelle- ment la méthode des enregistrements dont les défauts l'emportent de beaucoup sur les avantages). Il est vrai, il y a l'observation directe dans la nature, mais celle-ci n’est pas toujours applicable. J'ai déjà indiqué qu'on pouvait observer les larves transparentes dans des verres de montre, où l'agitation de l’eau est un peu SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 279 comparable à celle des couches superficielles; c'est ainsi que j'ai observé les Mégalopes, que l’on trouve abondamment en août sur les brindilles flottantes. Chez certaines formes de Crustacés (Thalassinidés, Pagures) le bord plérygostomien est échancré naturellement et recouvre incomplètement le scaphognathite. Dans la nature il y a nombre de bêtes fouisseuses et de bêtes mi- aériennes, mi-aquatiques : du sable, de la vase, de l’air circulent plus ou moins à travers la chambre branchiale de beaucoup de Crustacés Décapodes et peuvent remplacer le carmin, l'encre, l'air de nos expériences précédentes. Pour le choix du procédé que j'avais à employer, j'ai eu toujours présent à la mémoire les observations que j'ai consignées précédem- ment ; le procédé le meilleur, après celui de l'observation directe dans la nature, est celui qui correspond le mieux aux conditions de vie de l’animal en expérience. J’ai employé des poudres chez les animaux fouisseurs (Callianassa, Atelecyclus), dont les organes respiratoires ont déjà subi les attouchements multiples d’une infinité de particules solides ; j'ai employé l’émersion avec les Crabes qui respirent l’air en nature (Carcinus). La conséquence de toutes mes recherches est que : 1° Les mouvements du scaphognathite sont fonction des agents mécaniques, physiques, chimiques externes, et par suite de l'habitat, qui est une Somme d'agents mécaniques, physiques et chimiques ; 20 Secondairement üs sont fonction du mécanisme et du chimisme interne de l'organisme (influence de l’activité et de la sédentarité, de la fatigue, des mues, etc.). Je vais passer en revue, groupe par groupe, les résultats de mes expériences. S 3. — DE L’ALLURE DU SCAPHOGNATHITE CHEZ LES Æucyphota. L'étude physiologique du scaphognathite est très difficile chez les Eucyphota ; si ces animaux sont transparents ou translucides, ils sont en général de petite taille (les espèces de nos pays du moins), et le scaphognathite, lamelle transparente, bat souvent avec une rapidité telle que l’œil ne distingue plus ses mouvements. Seuls les Palémons se prètent assez bien à l'observation. C’est par eux que je commenceral, 276 Q GEHORGES BOHN. Expériences sur les Palémons de nos côtes. — Méthode employée pour l’élude du scaphognathite. Palèëmons de la Manche el de l'Océan. Palémons de la Méditerranée. — Conclusions. — Pour observer le scaphognathite, j'ai employé une eau très légère- ment carminée (carmin finement pulvérisé) et j'ai toujours placé l'animal dans un tube de verre à Annélide, beaucoup plus long que lui, — de manière à avoir une masse d’eau relativement considérable, — mais d’un diamètre permettant juste les mouvements des appendices abdominaux et thoraciques, car plus le tube est étroit plus l’obser- vation à la loupe du scaphognathite et du bord du branchiostégite est facile. Dans ces conditions, on voit de chaque côté un jet de carmin s'élever à l'avant des pattes-mâchoires, et, le long des flancs de l'animal, des particules colorées gagner le bord latéro-postérieur du branchiostégite, et pénétrer dans la chambre branchiale ; une série de courants remontent sous la carapace entre les diverses branchies, pour ensuite s’incliner et se réunir en avant; assez rapidement les sillons interbranchiaux se colorent d’une façon nette. Tous les 25 à 35 secondes, chez des Palæmon serratus PENNANT de grande taille, provenant des roches profondes de St-Vaast (27 août 1897), on voit des flots de carmin sortir de l'intervalle des pattes, et en une ou deux secondes toute la cavité branchiale est nettoyée, comme par une espèce de chasse d'eau d'avant en arrière. Les pattes ambulatoires, y compris celles dites nettoyeuses, restent fixes ; mais après, les palettes abdominales salies à leur tour s'agitent et secouent la poussière colorante qui les couvre. Les chasses d'eau se produisent en réalité, et sont dues à un renversement dans le sens du fonctionnement du scaphognathite. En effet : 19 Elles ne sont pas dues aux pattes nettoyeuses, en général immobiles et qu’on peut maintenir avec un fil ou même sectionner, sans que d'ailleurs on constate aucun changement appréciable dans les mouvements du scaphognathite ; 2° Elles ne sont pas dues aux paleltes abdominales, qui entrent en fonctionnement après, et que l’on peut immobiliser en prenant un tube suffisamment étroit; celte opération ne supprime pas les renversements ; il semble cependant qu'après ceux-e1 se font plus mollement ; SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 277 30 Elles ne sont pas dues à des mouvements de la carapace, car si on enlève avec des ciseaux le branchiostégite, sa f toutefois l'étroite languette qui recouvre le scaphognathite, et si on dépose en arrière de cet organe un petit amas de carmin, on voit de temps en temps la matière colorante projetée en arrière ; toutes conditions égales d’ailleurs les renversements subsistent presque en même nombre ; dans une expérience, avant la section j'en comptais un tous les 36 à 48 secondes, et après, davantage, un tous les 48 à 54 secondes (Paul. serratus PENNANT, St-Vaast, 25 septembre 1897). Exp. sur les Palémons de la Manche et de l'Océan.— Exp. Palæmon serratus PENNanT, de grande taille (7°). Roches profondes de Talihou. 7 septembre 1897. Durée: 10 m. Tube — TS PEER VE Ur + spas 2 Ti. des HE Fiac. 2. — Palæmon serratus PENNANT. Schéma de la circulation de l’eau dans la chambre branchiale (1). Exe. Palæmon squilla L., d'assez petite taille (3%). Mare saumâtre du déversoir de Tatihou. 7 septembre 1897. Durée : 10 m. Tube proportionné. T. — 18°. Eau saumâtre. Fig. 3. — Palæmon squilla LiNNé. (1) Dans ce schéma, ainsi que dans tous les graphiques contenus dans Je présent chapitre, les traits verticaux équidistants marquent les minutes successives (en général 1 minute — 2 centimètres), la ligne horizontale continue correspond à l'arrêt de la circulation de l’eau, les traits horizontaux du tracé situés au-dessus de cette ligne représentent les périodes pendant lesquelles le courant est direct, ceux situés au-dessous de la même ligne les périodes pendant lesquelles le courant est inverse ; les changements de sens sont done marqués par les traits verticaux du tracé, 278 GEORGES BOHN. Les résultats obtenus avec l’une et l’autre espèce, et malgré les habitats si différents, ne sont pas très dissemblables. D'ailleurs dans les nombreuses expériences que j'ai faites sur les Palémons, je n’ai pas observé des variations bien considérables et j'ai trouvé de un à quatre renversements par minute, le plus souvent deux. Dans la plupart des cas, les chasses d’eau se produisaient simultanément des deux côtés (Arcachon, octobre 1898). Exp. sur les Palémons de la Méditerranée. La comparaison que j'ai pu faire à Marseille entre les Palæmon treillianus Risso, formes tout à fait littorales (qui vivent sous les pierres du rivage, et dans les débris de Posidonia jetés à la côte), et les Palæmon æœiphias Risso, provenant des prairies profondes (15 à 20”), a été plus intéressante. Exr. Palæmon treillianus Risso, 6°". Calangues de la côte. 26 septembre 1899. Durée : 10 m. Tube — 12°" X 1°",5. Eau aérée. Fia. 4. — Palæmon treillianus Risso. ExPr. Palæmon xiphias Risso, même taille. Prairies à 15" en avant du château d’'If. Même jour et mêmes conditions. Durée : 15 m. ; TT (Se | = An FiG. 5. — Palæmon xiphias Risso. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 279 Exp. Palæmon œiphias Risso, porteur d'œufs. Mêmes conditions. F1G. 6. — Palæmon xiphias Risso, porteur d'œufs. Dans toutes ces expériences, les conditions étaient rigoureusement les mêmes: animaux de même taille, même eau, même tempé- rature, etc. Tous les P. {reillianus Risso que j'ai examinés ont présenté en moyenne un renversement par minute, dans une eau très aérée ; les P. œiphias Risso, au contraire, en ont présenté peu. Il y a là une différence qui est évidemment en rapport avec l'habitat ; les P. œiphias Risso vivent dans les herbes profondes, dans des eaux qui, tant au point de vue mécanique qu’au point de vue chimique, subissent peu de variations, tandis que les P. {reillianus Risso, beaucoup plus actifs, habitent des eaux qui subissent fréquemment des altérations de la pureté (sable, eau douce, etc.). Le premier graphique relatif aux P. œiphias Risso (Voir fig. 5), est d’ailleurs curieux ; l'expérience a duré 15 m., les cinq premières, il n’y à eu que deux ébauches de renversements, les cinq suivantes, les renversements ont été plus nombreux (trois) et plus intenses (le dernier s’est fait par une série de reprises), enfin les cinq dernières, il y a eu trois chasses d’eau comparables à celles des espèces littorales étudiées. Il faut évidemment voir là un effet de l’asphyxie progressive, car CO* augmente toujours le nombre et l'intensité des périodes de renversement. J'ai pu produire une asphyxie beaucoup plus rapide chez un P. treillianus Risso, en le plaçant dans un tube étroit et court, ne contenant par conséquent qu'un volume d’eau restreint. J'ai constaté que les chasses en arrière se rapprochaient de plus en plus, et qu'à la fin, à la suite de la surexcitation trop prolongée due à CO?, les mouvements du scaphognathite devenaient fort irréguliers et subissaient des arrêls. 280 GEORGES BOHN. Arrêts et renversements vont souvent ensemble; ils sont ici l'expression d’un état maladif. Exe. Palæmon treillianus Risso, 6m, Même origine que précédemment. 20 septembre 1899. Durée: 10 m. Tube court et étroit. Eau aérée au début. ER | | l | CN DE LL LOL LL à ms FiG. 7. — Palcæmon treillianus Risso, asphyxié progressivement. Expériences sur les Virbius.— Les Virbius se rapprochent beaucoup par leur genre de vie des Palémons, en particulier les Virbius varians LEACH, qui se trouvent abondamment parmi les diverses Algues (vertes, brunes et rouges) du littoral. Si les renversements sont faciles à constater chez ces Crustacés (je les ai vus à St- Vaast dès septembre 1897), il est difficile d'en noter exacte- ment la succession, car les mouvements généraux du corps et ceux des appendices, chez des animaux si petits, interrompent souvent les observations. Je suis arrivé cependant à un résultat à Wimereux. Exp. Virbius varians LEACH. Flaques d’eau à marée 10 11 Fia. 8 à 12. — Virbius varians LEeAcH, de diverses teintes, porteurs d'œufs ou non ({ minute — longueur totale d'une ligne). La 3° exp. n'a duré qu'une demi minute, comme la dr. _ basse autour de la Tour de Croy. 27 août 1899. Petits tubes. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 281 Eau aérée. Durée de chaque observation : une minute seulement. (Le graphique est donc à une autre échelle que les autres). Les trois premiers tracés se rapportent à des femelles porteuses d'œufs, l’une verte (fig. 8), l’autre brune (fig. 9), la dernière hyaline (fig. 10). Les deux autres (fig. 11 et 12) à des individus ordinaires, l’un vert, l’autre brun. Chez les porteuses d'œufs, surtout les vertes, on observe des mouvements incessants du bord du branchiostégite, qui est souvent écarté sous l'influence de renversements répétés, mais fables. Chez les autres individus, les renversements sont manifestement plus rares, mais 1ls sont plus intenses. Des battements abdominaux et les mouvements généraux du corps accompagnent plus ou moins ces renversements. Les Virbius, surtout les formes vertes excessivement actives, présentent donc, à un plus haut degré encore que les Palémons, la faculté de renverser souvent le sens du courant respiratoire. (Ces expériences doivent d’ailleurs être considérées comme approximatives et seraient à reprendre). Expériences sur d’autres Z'ucyphola. — Athanus nitescens Leacx. — Alpheus Edwardsi Aupoux. — Nika edulis Risso. — Crangon vulgaris L. — Les autres Æucyphola que j'ai examinés, soit qu'ils appartiennent au groupe primitif des Alphéidés (Athanas et Alpheus), soit qu'ils se rangent parmi des formes plus spécialisées (Nika, Crangon), sont des espèces moins aclives que Les précédentes. Les Athanas nitescens LEacH, qui vivent dans la boue, sous les pierres, à St-Vaast et à Wimereux, ont un scaphognathite qui bal avec une rapidité très grande (comme chez la plupart des Æucy- phota), mais variable (jusqu’à 200 battements et plus par minute), et assez irréguliérement, même dans l’eau absolument pure; dans de l’eau carminée, on entrevoit des chasses en arrière et même aussi en avant: deux à trois chasses en arrière chez les individus de la Hougue (15 septembre 1897) et une chasse en arrière chez ceux de Wimereux (29 août 1899) ; mais ces différences n’ont pas grande importance, on peut les attribuer peut-être à l'inégalité de pureté de l’eau. 282 GEORGES BOHN. Les Alpheus Edwardsi AvpouIn des racines de Posidonia de la rade de Toulon ont présenté des renversements très rares, bien que vivant dans un milieu plutôt vaseux. Exp. Tamaris. 9 septembre 1899. FiG. 13. — Alpheus Edwardsi Aupoux. On voit qu'il n’y a qu'un renversement loutes les trois minutes environ. Et pourtant les Nika edulis Risso, de la même localité et du même habitat, placés dans les mêmes conditions (9 septembre 1899), ont présenté deux à quatre renversements par minute (Voir fig. 14), il est vrai que l’eau était assez fortement carminée, surtout dans le cas de quatre renversements (carmin non encore déposé). Les renversements étaient accompagnés d’ailleurs de mouvements généraux assez accentués, ce qu'on n'observe plus chez les formes réellement sédentaires comme les Alphées. | i [FT Fr. 14-15. — Nika edulis Risso. Les Nika edulis Risso de St-Vaast se sont comportés sensiblement comme ceux de Tamaris. Exr. Nika edulis Risso, 9, 5°. Vase des Zostères des Anes. 9 août 1898. Tube — 12°" X 1. Durée : 10m. (Voir fig. 15). SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 283 Si les N. edulis Risso sont des formes sédentaires et fouisseuses par moments, à d’autres ils sont actifs et émigrent, semble-t-il. Les Crangon eux paraissent plus sédentaires. Exp. Crangon vulgaris L.,6",0o œufs. Sables de Tatihou. 24 septembre 1897. Durée : 5 m. Tube — 12 X 1. Eau pure. | | | | FiG. 16. — Crangon vulgaris LiNXé. Chaque renversement, il y en a un seulement par minute, est suivi des mouvements des pattes nettoyeuses. Conclusions. 1° Les Æucyphota présentent tous des chasses d'eau en arrière qui sont dues aux renversements des mouvements du scaphognathite (et non à la carapace, dont les bords sont immobiles ou s’écartent passivement) et qui ont un rôle nettoyeur. Les appendices abdominaux et quelquefois les pattes neltoyeuses fonctionnent ensuite. 2 Tandis que chez les formes nageuses (Palémons et Virbius de la zone littorale) les renversements sont très fréquents, 2, 4, et jusqu’à 16, chez les formes moins actives, — marcheuses (Palémons des fonds), — fouisseuses (Crangons), — sédentaires (Alphées), — l { 1 les chasses d’eau sont plus rares, 0, —, — ,—1, — I HE 3 Nika qui ont des périodes d'activité se comportent plutôt comme des Palémons. Les 3 Chez une même espèce, l’activité semble avoir son influence (ex. des Virbius verts), et par l’asphyxie progressive on arrive aussi à multiplier le nombre des renversements (Palæmon treillianus Risso et Palæmon æiphias Risso). Les tracés des Palæmon treillianus Risso asphyxiés finissent par ressembler à ceux des Virbius verts en activité. . 4° L'influence des œufs sera interprétée dans un chapitre spécial (œufs et parasites, 3° part., ch. I). 284 GEORGES BOHN. $ 4. — MOUVEMENTS COMBINÉS DU SCAPHOGNATHITE ET DE LA CARAPACE CHEZ LES MACROURES MARCHEURS. — HOMARIDES. — THALASSINIDÉS. — (GALATHÉIDÉS. — PALINURIDÉS. A) Homaridés. 1. Observations et expériences sur les Homards.— Elles ont porté successivement sur des Homards de moyenne taille et sur des Homards de petite taille. Exp. Homarus vulgaris M.-Epw., de moyenne taille. Roches profondes de St-Vaast. 10-11 septembre 1897. Cristallisoir. Eau pure. Pour observer le scaphognathite, j'ai employé successivement l'observation directe, le carmin, et l'émersion. a) Observation directe, après avoir cependant abattu l'angle antéro-inférieur du branchiostégite. Le scaphognathite se meut à raison de 150-160 battements réguliers à la minute, et, dans l’espace de 5 minutes, il ne présente que deux changements d’allure, peu manifestes d’ailleurs. b) Carmin, déposé dans l'intervalle des coxa des pattes thora- ciques. Il sort constamment en avant, mais, de temps en temps, il se produit, le long du bord du branchiostégite, de légères chasses d’eau, — environ toutes les 80 à 100 secondes ; ces chasses, de très courte durée (1-2 s.) et peu intenses, sont évidemment insuffisantes pour le nettoyage de la chambre branchiale. c) Emersion. La portion expiratrice du bord du branchiostégite étant émergée (animal renversé et disposé horizontalement), de temps en temps, on voit des bulles d’air apparaître à la base des pattes (entre les deuxième et troisième coxa de préférence), sans que pour cela le courant paraisse interrompu. L’émersion postérieure n’a rien donné d’intéressant. ExP. Homarus vulgaris M.-Enw., de très petite taille. Rochers de St-Vaast. 15 septembre 1897. Cristallisoir. Eau pure légèrement carminée. Durée : 10 m. SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 285 L'animal était renversé comme précédemment, el j'avais disposé un peu de carmin entre les coxa des pattes 2 et 3, et 3 et 4. FiG. 17. — Homarus vulgaris M.-Epw. Les chasses, assez rares, surtout quand l'excitation du carmin diminue, sont plus accentuées que chez les Homards de grande taille. | En résumé, chez les Homards : 1° Les mouvements du scaphognathite sont réguliers et assez rapides (160 environ) ; 2 Il se produit des chasses d’eau en arrière, faibles, espacées, de courte duree ; 3° Quand elles ont lieu on devine plutôt qu’on n’observe une modification dans les mouvements du scaphognathite ; si on cherche à mettre cette modification en évidence au moyen de l’émersion de la partie antérieure du bord du branchiostégite, on est sujet à erreur, Car l'expérience dans ces conditions est fort délicate ; avec le carmin, la démonstration n’est pas meilleure. En effet, quand on dépose du carmin le long du bord du branchiostégite, on constate que, à l'instant où se produit une chasse en arrière, ce bord se rapproche des coxa des pattes; il pourrait donc se faire que les chasses d’eau soient dues à un mouvement de la carapace par rapport aux flancs épiméraux. L'expérience suivante va trancher la question. Exp. Sur le petit Homard précédent, auquel on a sectionné, la veille, la partie antérieure d’un branchiostégite, et qui a perdu beaucoup de sa vigueur. 16 septembre 1897. Cristallisoir. Eau pure. Par suite de la faiblesse générale de l’animal, le scaphognathite 286 GEORGES BOHN. bat moins vite, quoique régulièrement, et on peut constater facilement, par l'examen direct, ses changements d’allure. Par des attouchements répétés dans la région de la fente inspiratrice, on remarque que la base des épipodites est en particulier le point de départ de réflexes importants. Avec l'extrémité d’une aiguille, on peut provoquer ainsi des chasses en arrière; on constate alors: 1° que le scaphognathite change d’allure ; 2° que, souvent, le bord du branchiostégite se rapproche des coxa; 3° que, presque toujours, les pattes abdominales se mettent à osciller. Une excitation limitée à la base des épipodites est donc le point de départ de réflexes associés. Mais le réflexe qui paraît le plus constant est celui qui a pour aboutissant le scaphognathite. Dans d’autres expériences, j'ai fait tenir par un aide le scapho- gnathite, et j'ai porté l'excitation comme précédemment ; je n’ai pu obtenir ainsi de chasses de carmin, bien que le bord de la carapace subit de légères oscillations. Il résulte de ces expériences que les mouvements de la carapace existent réellement et ne font que renforcer les chasses affaiblies produites par le scaphognathite, contribuant à chasser l’eau en arrière, et diminuant la fente de sortie. 2, Observations et expériences sur les Kcrevisses. — Résultats analogues, 20inS nets, comme cela arrive en général chez les Crustacés d’eau douce (Voir plus loin). 3. Observations et expériences sur les Vephrops.— Avec des Nephrops des profondeurs sableuses d'Arcachon (23 septembre 1898), j'ai obtenu des résultats analogues, mais j'ai constaté que la fente inspiratrice est excessivement sensible aux attouchements des grains de carmin; il se produit aussi des chasses d’eau très faibles, toutes les 12 à 20 secondes. Ces animaux ont acquis, comme beaucoup d'habitants des sables et des profondeurs, une grande sensibilité tactile (Comparer avec les pattes nettoyeuses). B) Thalassinidés.— Cette sensibilité des bords de la fente du branchiostégite, qui occasionne le rétrécissement de celle-ci, ne doit pas surprendre chez des Crustacés marcheurs tels que le Homard et le Nephrops, qui sont menacés constamment de l’ensa- SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 287 blement de la chambre branchiale. On doit la considérer comme un mode de défense, et pour cela la retrouver, accrue encore, chez les Thalassinidés qui vivent dans les galeries souterraines. 1. Observations et expériences sur les Gebia deltura LEACH. — C'est le cas de la Gébie, qui se promène dans des galeries creusées par d’autres animaux, et qui ne sort que la nuit ou à certaines saisons. La région antérieure du bord du branchiostégite, fortement échancrée, recouvre à peine la scaphognathite, dont l'observation est facilitée de ce fait. Les mouvements sont réguliers ; le rythme — environ 160. Par la simple observation dans l'eau pure (non carminée), on constate que le bord latéro-postérieur du branchiostégite se rapproche de temps en temps des coxa. Ce bord est excessivement sensible ; quand on y dépose du carmin, la poudre pénétre dans la chambre branchiale, et bien qu’elle semble sortir en avant d’une façon continue, toutes les 10 secondes environ, au début de l’expé- rience du moins, on constate des chasses colorées en arrière. ExP. Gebia deltura LEacu, de grande taille. Sables coquilliers à Solen, en avant de la jetée de St-Vaast. 29 et 30 septembre 1897. Durée : 10 m. Cristalhisoir. Eau pure. + Fe FRE FiG. 18. — Gebia deltura LEracx. Par des attouchements sur les coxa, on détermine des chasses en arrière. Ici il faut encore distinguer la part du scaphognathite et celle de la carapace. 288 GEORGES BOHN. Exp. Même animal. 30 septembre 1897. Eau pure. En examinant avec som un côté de l’animal, il semble que les mouvements de la carapace et ceux du scaphognathite ne se fassent pas toujours simultanément. Dans l’espace de 5 m., j'ai observé cinq changements d’allure du scaphognathite, s, et six rapprochements de la carapace, c; la succession élait la suivante : Pa] Le) Le) PA] Le) Mais certains changements d’allure du scaphognathite sont peu manifestes, et presque toujours l'un des mouvements doit entraîner l'autre. 2. Observations el expériences sur des l/pogebia stellata MoNTAGU.— Ces Gébies vivent dans des galeries à l'intérieur d’un sable vaseux, noirâtre, — à Arcachon, sous les Zostères de la plage d'Eyrac, — à Tamaris, près. du bord. Elles ressemblent beaucoup aux précédentes, mais sont plus petites, moins chitinisées, moins pigmentées. Qu'’elles soient placées dans l’eau pure ou dans de l'eau car- minée, on constate des mouvements de la carapace, avec renver- sement du courant respiratoire, mais ceux-ci sont difficiles à compter. A Arcachon (septembre 1898), j'ai placé un individu qui venait de muer dans un tube renfermant de l’eau carminée ; j'ai constaté des rapprochements fréquents, mais peu accentués, du bord cilié du branchiostégite, et parfois même une sorte de frémissement. À Tamaris (septembre 1899), j'ai étudié l'influence du parasile (Voir chapitre spécial, 3° part., Ch. 1°). Sur les individus non parasités. j'ai trouvé souvent six à sept renversements par minute. Exp. Upogebia slellata MonraGu, de moyenne taille. Sables noirâtres de Tamaris. 11 septembre 1899. Petit cristallisoir. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 289 Eau pure. Durée: 1 minute seulement (Graphique à échelle particulière). FiG. 19. — Upogebia stellata MoNTAGu (1 minute — longueur totale d'une ligne). On voit par ces exemples que, le bord du branchiostégite élant très excitable, les renversements sont parfois très fréquents. 3. Observations et expériences sur des Callianassa sublerranea MONTAGU. — Il n'en est pas tout à fait de même chez les Callianasses, qui sont des animaux beaucoup plus actifs que tous les précédents, et qui ont un mode de vie très particulier que j'ai décrit. Ils fouissent eux-mêmes : dans les premiers instants, ils sont en contact avec le sable même; ensuite ils se meuvent dans des galeries aux parois cimentées, ne renfermant guère que du sable agglutiné, et d’ailleurs travaillent sans cesse. Les chasses d'eau sont moins nombreuses, car les bords du branchiostégite, sauf au moment de l'enfouissement, sont moins souvent excités par les grains pierreux, mais elles sont plus éner- giques, comme chez les animaux qui travaillent. | | | Fic. 20. — Callianassa subterranea MoNTAGuU. Conclusions.— 1° Les Homaridés - Thalassinidés présentent des chasses d'eau en arrière, en général faibles, et qui sont dues à la fois au renversement des mouvements du scaphognathite et au déplacement de la carapace par rapport aux flancs épiméraux. En général, les mouvements des appendices abdominaux accom- pagnent ces chasses ou les suivent de très près. 10 290 GEORGES BOHN. 2° Le changement d'allure du scaphognathite, le déplacement de la carapace et les mouvements des appendices abdominaux, sont les aboutissants de réflexes associées, plus ou moins simultanés, ayant vraisemblablement pour point de départ les poils qui avoisinent la fente d'entrée de l'eau. La base des épipodites chez les Homaridés, le bord même du branchiostégite chez les Thalassi- sinidés (qui perdent les épipodites) sont excessivement sensibles aux alttouchements. Cette sensibilité est surtout développée chez les espèces qui vivent dans le sable, et chez lesquelles les poils mentionnés sont heurtés souvent par des grains pierreux. Les chasses d’eau, insuffisantes ici pour le nettoyage de la chambre branchiale elle-même, sont plutôt la manifestation de réflexes défensifs, très importants à considérer chez les formes fouisseuses. 3" À mesure que les espèces deviennent plus actives, les chasses d'eau deviennent plus intenses ; ces chasses intenses sont en parti- culer observées chez les Callianasses pendant la période de leur plus grande activité, celle de la pénétration dans le sable. 4 L'influence des parasites sera étudiée dans un chapitre spécial (SparetcnAl)| C) Galathéidés. 1. Observations et expériences sur les Gralathées. — Les Galathea Squamifera LEacx, que l’on trouve sous les pierres à marée basse parmi les roches de la Hougue ou celles du Cavat, se comportent presque identiquement comme les Homaridés, dont elles ont conservé encore trois épipodites. (De même pour le nettoiement externe). Chez les Galathea strigosa Far. (formes sans épipodites) du volfe d'Hyêres (fonds à Posidonia, profondeurs diverses à partir 2 d’un mètre), j'ai pu me rendre compte des mouvements de la carapace, qui sont éres accentués, et qui suppléent dans une certaine inesure les inouveinents du scaphognathite, faibles et urréquliers. 1° Mouvements du scaphognathite. — On observe trois ou quatre battements de suite, puis un repos. J'avais déjà observé cette allure du scaphognathite chez une très jeune Galathée recueillie dans une SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 291 « pêche pélagique à St-Vaast (août 1898): ayant placé ce Crustacé minuscule dans un verre de montre contenant de l’eau noircie avec de l'encre de Chine, j'ai constaté que l’eau s’échappait en avant par bouffées successives. De même une Galathea strigosa Far. adulte, placée dans de l’eau carminée, présente en avant des bouffées de carmin tous a 6 ; ; les 100 de minute environ. 2° Mouvements de la carapace. — Avec le carmin, on retrouve les chasses d’eau en arrière des Homaridés ; mais ici les mouvements de la carapace sont plus manifestes, et on peut les constater par l'exainen direct dans l'eau de mer pure. En général ce sont des mouvements asymétriques, dùs à un déplacement latéral de la carapace par rapport aux flancs épiméraux: lorsque l’une des chambres branchiales se rétrécit, l’autre augmente de volume. (Galathea strigosa FABr., 6 de grande taille. Golfe d'Hyères. 16 septembre 1899). Avec la méthode des émersions, je n'ai obtenu que des arrêts prolongés du scaphognathite, ce qui n’est pas étonnant ici (0. Golfe d'Hyères. Septembre 1899). 2, Observations et expériences sur les Mwnida bam/ffia PENNANT. — J'ai retrouvé la faiblesse et l’irrégularilé des mouvements du scaphognathite chez les Munides des profondeurs d'Arcachon. Il est vrai que les individus que j'ai eus entre les mains étaient fort affaiblis par le transport. Le carmin et l'encre sortaient en avant par bouffées successives. Je n’ai pu constater sur les exemplaires que j'ai eus entre les mains les mouvements de la carapace. 3. Observations et expériences sur les Porcellanes. — 11 v en a sur nos côtes deux espèces, très communes: la Porcellana platycheles PENNANT, toute hérissée de poils, vit sous les pierres du rivage et est lente dans ses mouvements ; la Porcellana longicornis PENNANT, glabre au contraire, habite depuis le rivage jusqu'à une certaine profondeur, et est douée d’une plus grande activité. Ces deux espèces ne se comportent pas de même au point de vue respiratoire. 292 GEORGES BOHN. Exe. Porcellana platycheles PENNANT, de moyenne taille. Rochers du Cavat. 28 septembre 1897. Tube le plus étroit possible, l'animal devant y entrer avec ses pinces (énormes). Eau aérée, légèrement carminée. Le carmin s'échappe en avant par bouffées successives, comme chez les Galathées ; des arrêts assez prononcés précèdent ces chasses en avant. Exe. Porcellana longicornis PENNANT, de moyenne taille. Même localité, même jour, mêmes conditions que dans l'expérience précédente. On observe une grande irrégularité dans les mouvements du scaphognathite, souvent des chasses en avant succèdent à des périodes d’arrêts, d’autres fois un courant inverse prolongé succède à un courant direct ou à l'arrêt. Les deux tracés, correspondent à une période de 3 minutes. FiG. 21-22. — Porcellana longicornis PENNANT. Notons ici, chez une forme presque brachyure, l'apparition de périodes de renversement prolongées. Dans d’autres observations faites à Wimereux (août 1899), j'ai observé des déplacements de la carapace comparables à ceux des Galathées, et, dans l’eau carminée, des renversements prononcés. Ceci complète les analogies entre les Galathées et les Porcellanes. Conclusions. — 1° Les Galathéidés ont un scaphognathite faible, à mouvements très irréguliers. Le courant est discontinu ; il se fail par une série de chasses d'eau en avant; celles-ci succèdent à des arrêts ou à «les renversements, courts en général ; 2 Chez les Galathéidés les z2ouvements de la carapace sont en général beaucoup plus accentués que chez les Homarides; ils sont dûs à une musculature compliquée, que je décrirai ailleurs ; SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 293 3° Les deux Porcellanes se comportent de façon assez differente ; chez l’une, les irrégularités du scaphognathite sont marquées, et on observe des renversements prolongés. Ges renversements que nous rencontrons pour la première fois, nous les retrouverons chez les Pagures et surtout chez les Crabes. J'ai remarqué maintes fois que les Galathées meurent facilement en captivité, et qu'alors la carapace est soulevée en arrière; les muscles actifs qui relient celle-ci aux plans épiméraux se relàchent, le scaphognathite s'étant arrêté, comme cela arrive souvent chez ces animaux. D) Palinuridés. 1. Observations et expériences sur les Langoustes. — La disposition de l'appareil respiratoire de la Langouste se rapproche beaucoup de celle présentée par les Homards. Le scaphognathite a l'allure de celui des Homards. Les battements sont réguliers, environ 140 par minute; il y à parfois quelques changements d’allure. La section du branchiostégite détermine un trouble profond dans les mouvements du scaphognathite. L’émersion antérieure indique des chasses d’eau en arrière, faibles et très espacées (Arcachon), ou plus souvent de simples arrêts (Endoume). Le dépôt de carmin en un point quelconque du bord du bran- chiostégite détermine tout le long de ce bord des chasses successives et rapprochées, se renouvelant au fur et à mesure que l’on dépose le carmin. Ces chasses sont dues vraisemblablement au scaphognathite, car le bord de la carapace ne bouge pas. Fig. 23. — Pulinurus vulgaris LATR. (une minute — la longueur de la ligne). Exp. Langousie jeune. Calangues d'Endoume. 26 septembre 1899. Eau carminée, aérée. Durée : 24 s. (Échelle particulière). 294 GEORGES BOHN. 2. Observations et expériences sur les Scyllares. — Les Scyllares sont des Langoustes qui sont en train de se céphaliser, et qui souvent, le soir, après un long repos, viennent dans les calangues respirer l’eau de la surface. J'ai effectué de nombreuses expériences sur ces animaux en septembre 1899, à Tamaris, puis à Endoume; je me suis servi du carmin ou de l’émersion. a) Carmin. ExP. Scyllarus arctus L. de moyenne taille. Tamaris, 12 sep- lembre 1899. Flacon de mème diamètre que l'animal. Eau carminée. Durée : 5 m. = FiG. 24. — Scyllarus arctus LiNNé. On observe, comme chez les Langoustes, des chasses peu intenses, espacées, et il n'y a également aucun mouvement apparent de la carapace. Au fur et à mesure que le carmin se dépose, les chasses deviennent plus faibles, et il suffit de secouer le flacon pour leur rendre un peu d'intensité. D'ailleurs quand on dépose du carmin directement sur le bord du branchiostégite, les grains colorés sont repoussés dès qu’ils pénètrent dans la chambre branchiale par des coups en arrière du scaphogna- thite, et sans qu’il se produise de mouvements de la carapace. b) É‘nersion. — En maintenant l'animal presque horizontalement, mais la tête hors de l’eau, on constate de temps en temps quelques arrêts ou renversements peu intenses, et c’est tout. Mais si, sans changer beaucoup l’inclinaison, on plonge la tête dans l’eau, on émerge le bord latéro-postérieur du branchiostégite, on constate parfois des renversements très prolonges du courant respiratoire ; l’eau pénètre par les orifices qui sont en avant des piéces buccales el s'écoule par la fente dite aspiratrice. « SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 295 ExPr. Scyllarus arctus L., de moyenne taille. Tamaris. 12 septembre 1899. Cristallisoir. Eau pure aérée. Durée: 10 m. FiG. 2. — Scyllarus arctus LINNE. Exe. Scyllarus arctus L., 9 non porteuse d’œufs, abdomen en extension. Endoume. 21 septembre 1899. Cristallisoir. Eau pure aérée. Durée : 1/2 heure. (Le graphique est à une autre échelle : 1° — 1 m.). D FiG. 26. — Scyllarus arctus 1, porteur d'œufs (une minute — un centimètre). Exp. Une porteuse d'œufs (couleur orange). Mèmes conditions. Durée : 15 minutes (Même échelle). FiG. 27. — Scyllarus arctus LiNNÉ, porteur d'œufs. Ces divers graphiques sont intéressants, car ils nous montrent que chez les Palinuridés qui sont en train de se 296 GEORGES BOHN. céphaliser, comme d’ailleurs chez les Galathéidés céphalisés (Porcellanes), il y a de longues périodes de renversement, surtout chez les porteuses d'œufs. J'ai pu les mettre en évidence, par l’émersion postérieure, mais non par le carmin. En outre, de temps en temps, il y a de courtes périodes d’hésitation, où l’eau va alter- nativement en avant et en arrière, prenant un #ouveinent oscillatoire que j'ai retrouvé chez les Crabes les plus primitifs, où il est associé ou non aux renversements. En général quand l’eau oscille les appendices abdominaux battent vigoureusement. Or, si l’on place un Scyllare dans les conditions mêmes de la nature, on constate que ce Crustacé reste de longues heures absoluinent iminobile et dans une position quelconque ; qu'il soit porteur d'œufs ou non, le courant est direct avec quelques chasses légères en arrière, comme chez les Langoustes; mais à certains moments, surtout la nuit, le Crustacé s'agite, vient à la surface de l'eau : c'est alors que se produisent les renversements du courant et les oscillations de l'eau. Ici encore, comme chez les Porcellana longicornis PENNANT , c'est l’activilé de l'animal qui semble provoquer ces changements mécaniques; toutefois il suffit d’émerger un point du bord du branchiostégite pour les déterminer : il y a là sans doute un réflexe dont le point de départ est au niveau de ce bord, qui est très sensible. A 2 ; : ET : : Conclusions. — 1° Les Palinuridés ont un scaphognathile qui se meul en général régulièrement. Le courant direct n'est interrompu que par des chasses en arrière faibles et espacees. 20 [n'y a point de mouvements de la carapace. 3 Les Scyllares, dans leurs périodes d’activité ou quand ils sont émergés, présentent des renversements prolongés du courant respiratoire, et parfois des #ouvements oscillatoires de l'eau comme on en observe chez les Crabes inférieurs. Conclusions générales. — Chez les Macroures marcheurs : : 1° Les parties qui avoisinent la fente d'entrée de l'eau (épipodites, coxa, bord du branchiostégite) sont excessivement sensibles aux attouchements, et sont le point de départ de réflexes multiples, dont les aboutissants peuvent être : le scaphognathite, les muscles moteurs de la carapace, les appendices abdominaux. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 297 > Chez les Homaridés, on observe communément le triple réflexe, et, chez les Thalassinidés fouisseurs, l'effet s’accentue. 3° Les Galathées sont des Homaridés chez lesquels la musculature motrice de la carapace s’est développée beaucoup; ce développement est corrélatif de l’affaiblissement et de l’irrégularité du scapho- gnathite. 4 Chez les Palinuridés, au contraire, les mouvements de la carapace ont disparu. o° Les Callianasses, surtout quand elles travaillent, présentent des chasses d’eau en arrière, assez fortes mais espacées (comme les Nalantia actls) ; certaines Porcellanes actives (Porcellana longi- cornis PENNANT) ont des renversements prolongés; enfin les Scyllares, quand ils vont nager à la surface de l’eau, se comportent de même et présentent en outre des mouvements oscillatoires de l’eau dans la chambre branchiale. Nous retrouverons toutes ces tendances chez les Crabes primitifs. S 5. — DE L'INFLUENCE DE L'ACTIVITÉ ET DES MŒURS SUR LE SCAPHOGNATHITE DES PAGURES. On trouvera plus haut (Ch. I, p. 206 à 219) une étude biologique assez détaillée sur les Pagures. Les uns, richement colorés (le vert domine), très actifs, vivent surtout dans les eaux superficielles: Clibanarèius inisanthropus Risso, Eupagurus anachorelus Risso, etc. Les autres, teintés presque uniformément d'orange ou de rouge, plutôt sédendaires, vivent, ou bien à diverses profondeurs (Paqu- ristes inaculatus Risso), ou bien seulement dans les eaux profondes (Pagurus strialus LATR.). Chez les Æupagurus bernhardus 1, de la Manche et de l'Océan, la teinte et l’activité dépendent de l’âge, et en définitive de l'habitat, ce Crustacé gagnant progressivement les profondeurs. Les Diogenes pugilator Roux, enfin, agiles, plus où moins fouisseurs, et par suite décolorés, pullulent sur nos plages sableuses du Nord au Midi. Chez ces divers animaux, le scaphognathite ne se comporte pas de même. 298 GEORGES BOHN. 1. Observations et expériences sur les Zwpaqurus bern- hardus L. de la Manche. — J'ai d'abord étudié les Bernhards à St-Vaast (1897 et 1898); dans cette localité, on les trouve en abondance ; les jeunes pullulent en août et septembre sur la plage, où M. Bouvier a étudié leurs mœurs [C, 9%]; ce sont des animaux très agiles et en perpétuel mouvement ; ils cherchent des coquilles variées ; à 3 milles de là, la drague qui se promène dans les fonds à Hydraires (10-20 m.) ramène des adultes logés dans des coquilles de Buccin. Un Pagure adulte offre un contraste frappant avec un Homaridé : le branchiostégite, membraneux, à bord garni de longues soies filtrantes, ne paraît jouer aucun rôle dans la production du courant respiratoire ; le scaphognathite bat uniformément. 1° Si l’on émerge la partie antérieure du branchiostégite, on voit l’eau déborder en avant, — à moins que l’émersion porte sur une hauteur égale à la moitié du branchiostégite, car le scaphognathite n’est pas bien fort (Voir Chapitre IV). Jamais l’air ne sort en arrière, même si le bord de la carapace est dans une position voisine de l'horizontale ; 2° Si l’on dépose du carmin le long de ce bord, celui-c1 s'engage dans la chambre branchiale, pour sortir régulièrement en avant ; on n’observe jamais de chasses en arrière. De même quand on retire l’animal d’une eau fortement carminée, on constate que le carmin ne sort de la chambre branchiale que par l'avant. Un jeune Pagure de la plage se comporte différemment; on retrouve chez lui les chasses en arrière, faibles et espacées, des Homaridés. Fi. 28. — Eupagqurus bernhardus Linné, jeune. Exr. Petit Pagure, 2%. Plage de St-Vaast. 8 septembre 1897. Durée : 10 m. Tube — 4" X 0O°n,7. Eau de là pleine mer (midi). T0 SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 299 Ainsi chez les jeunes, qui sont très actifs, on observe des chasses d'eau, faibles, il est vrai, et espacées, qu'on ne retrouve pas chez les formes plus ägées, à activité moindre. Chez ces dernières, J'ai essayé de provoquer les renversements par des attouchements, mais cela a été en vain. Les observations que j'ai faites en 1899 sur les Pagures de la Méditerranée ont jeté la lumière sur ce fait assez remarquable. 2. Observations el expériences sur les Pagures actifs de la Méditerranée. 1° Clibanarius misanthropus Risso. Exe. Clibanarius misanthropus Risso. Taille maxima. Racines boueuses des Posidonia. Rade de Toulon, en face Tamaris, 14 septembre 1899. Tube de verre. Eau pure carminée. Durée : 6 m. Fig. 29. — Clibanarius misanthropus Risso. Les chasses, assez espacées par instants, rapprochées à d’autres, sont assez énergiques ; après une succession de chasses en arrière, les pattes nettoyeuses se mettent en mouvement. Le bord du branchiostégite, garni de quelques poils rares, est peu sensible aux attouchements ; le dépôt de carmin ne provoque rien. 2 ÆEupagurus anachoretus Risso. — Il n'en est pas de même avec l'Eupagurus anachoretus Risso, qui accompagne les précé- dents dans la rade de Toulon. Lorsque l'animal est à demi-sorti de sa coquille et que l’on dépose du carmin à la partie postérieure du thorax (partie échancrée), on observe des chasses en arrière de temps en temps ; l'abdomen se salit ainsi, mais il suffit de quelques rélractions de cette partie du corps, pour chasser l’eau contenue dans la coquille au dehors et balayer les particules de carmin. 300 GEORGES BOHN. ExP. Eupagurus anachoretus Risso. Taille maxima. Racines des Posidonia. Tamaris. 14 septembre 1899. Tube de verre. Eau pure carminée. Durée : 5 m. es FiG. 30, — Eupagurus anachoretus Risso. On observe des chasses d’eau environ toutes les minutes, mais d'une durée de 3 à 4 secondes, parfois même de 8 s. Les renversements sont également prononcés, et suivis d’un nettoyage assez complexe. 3° Eupagurus cuanensis THompsox. — Dans les racines des Posidonia de la rade de Toulon, on trouve, outre les Clibanarius misanthropus Risso et les ÆEupagurus anachoretus Risso, des Evupagurus cuanensis THOMPSON, à la carapace marbrée de vert et de blanc, aux larges mains poilues et épineuses. Exp. Eupagurus cuanensis THomPsoN. Taille maxima. Mêmes conditions et même jour que dans l’expérience précédente. On observe de longues périodes où le courant va en arrière ; de temps en temps, il y a des reprises plus ou moins prolongées du courant direct : le nettoyage coïncide avec le changement de sens. ë FiG. 31. — Eupagurus cuanensis THompsox. Quand le courant est renversé, les poils des pinces forment un filtre pour l’eau qui entre en avant. On voit que chez toutes ces formes, littorales, vertes plus ou moins, actives, les renversements sont toujours intenses, et peuvent même durer un certain temps. Cette particularité va SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 301 expliquer l’adaptation à la vie fouisseuse d’un petit Pagure, plus actif que ceux que je viens d'étudier, qui vit sur les plages sableuses de notre littoral et dont les teintes bigarrées sont affaiblies comme chez toutes les espèces qui se cachent plus ou moins dans le sable. 4° Diogenes pugilator Roux.— À Arcachon ce Pagure, qui mérite bien le nom de Pagurus arenarius qu'on lui a donné, s’enfouit dans le sable fin et pur du banc de Bernett et de la plage du Moulleau ; il se sert pour cela des pattes locomotrices 2 et 3 et de ses pinces, inégales et lisses, la gauche plus développée; l'opération se fait en quelques instants. Une fois enfoui, les antennes plumeuses couchées sur le sable le maintiennent, tandis que les antennules et les pédoncules oculaires sont dressés; les palpes des pattes mâchoires sont immobiles. On constate que, dans ces conditions, le courant entre par l'avant, et sort par une filtration diffuse à travers le sable. De temps à autre seulement, il se produit des chasses en avant, et les palpes s’agitent. J'ai pu.constater tout ceci avec de l'encre de Chine (Arcachon, octobre 1898). On remarque de plus qu'immédiatement après l’enfouissement, l’eau étant légèrement trouble, les chasses en avant sont plus rapprochées. On sait que le Diogenes pugilator Roux présente une foule de variétés (D. varians) qui ont été décrites soigneusement par M. Bouvier [ D, g, 91]. A Wimereux j'ai trouvé des exemplaires qui avaient un aspect différent de ceux d'Arcachon; ils couraient sur le sable, se cachaient sous les rebords des rochers, mais ne s’enfouissaient pas ; ils étaient plus vigoureux et plus vivement colorés (vert, bleu, brun). C’est seulement quand on les sortait de leurs coquilles, qu'ils se tapissaient dans le sable; ils présentaient des périodes de courant direct, des périodes de renversement et parfois même des arrêts notables ; mais chez certains individus je n’ai pu constater le renversement. Les Diogenes pugilator Roux des racines des Posidonia de la rade de Toulon ont présenté, tantôt des courants inverses discon- nus, tantôt de simples chasses d’eau en arrière, suivies de nettoyage. 302 GEORGES BOHN. Enfin les Diogenes pugilator Roux de l’anse des Catalans, près d'Endoume, petits et décolorés, ont donné le graphique suivant : | FiG. 32. — Diogenes pugilator Roux. Le nettoyage avait lieu seulement de temps en temps. Ainsi aux différences morphologiques correspondent des diffé- rences physiologiques. Chez les formes fouisseuses, le renverse- ment tend à s'établir d'une façon continue, el l'ensablement de la chambre branchiale est ainsi évité. 3. Observations et expériences sur les Pagures séden- taires de la Méditerranée. 1° Paguristes maculatus Risso. — J'ai trouvé des exemplaires de cette espèce presque à fleur d’eau dans la rade de Toulon, à Tamaris, toujours parmi les racines des Posidonia. Quand je déposais du carmin à l'arrière de la carapace, l'animal rentrait dans sa coquille par petits bonds successifs, de façon à produire autour de lui des courants d'eau d'arrière en avant, el à chasser ainsi le carmin; celui-ci s'engageait cependant en partie dans la chambre branchiale, et les seuls irrégularités du courant que j'ai constatées ont élé des accélérations passagères du courant direct. Cependant certains individus, placés dans un tube renfermant de l’eau fortement carminée, ont présenté des chasses d’eau en arrière, courtes et espacées, non suivies d’un nettoiement. Exp. Paguristes maculatus Risso. Taille moyenne. Racines des Posidonia. Tamaris. 14 septembre 1899. Conditions indiquées. | 0 | | | | | | | 2 + — l | | | | | | | FiG. 33. — Paguristes maculatus Risso, de Tamaris. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 303 Exp. Paguristes maculatus Risso. Taille moyenne. Endoume. 20 septembre 1899. Tube. Eau carminée. FiG. 34. — Paguristes maculatus Risso, d'Endoume. Il faut remarquer que cette espèce est parfois encore littorale el douée alors d'une certaine activité. Le: Pagurus striatus, lui, n’habite que les profondeurs. 2 Pagurus Striatus LaATR. — Chez lui les chasses d’eau en arrière sont espacées et faibles. ExP. Pagurus striatus LATR. Taille moyenne. Profondeurs au large d'Endoume. 20 septembre 1899. Tube. Eau carminée. * T | | FiG. 35. — Pagurus striatus LATR. Conclusions. 1° Les Paqures qui ne Sont pas actifs se comportent, au point de vue de renversement du courant respiratoire, comme des Homarides. 2° Quand l’activité augmente, quand la teinte verte envahit la carapace, les renversements, tout en devenant plus fréquents, prennent plus d'intensité et plus de durée. 3° Avec la vie fouisseuse, des renversements de longue durée s'établissent. 304 GEORGES BOHN. S. 6. — DES VARIATIONS DE L’ALLURE DU SCAPHOGNATHITE CHEZ LES CRABES PRIMITIFS. Parmi les Crabes primitifs, certains ont conservé les caractères ancestraux et mènent une vie passive (Dromies), — d’autres recherchent les fonds coralligènes (Ebalies et Calappes), — d’autres enfin s’enfouissent dans le sable {Corystes et Alelecyclus). 1. Dromies. — Les Dromia où Dormeuses ont des mouvements rares et lents qui leur ont mérité leur nom. Je les ai observées dans l'aquarium d'Endoume ; j’en ai vu rester fixées contre une rocaille, absolument immobiles, de longues heures, voire même une journée entière ; en excitant ces Crustacés de diverses façons, je ne pouvais déterminer aucun mouvement. Cependant les battements du scaphognathite sont énergiques et continus : le courant respiratoire, intense, va constamment en avant. L'air (dans le cas d’émersion), le carmin (que l’on dépose le long du bord du branchiostégite), l'encre de Chine (dans les mêmes conditions), des attoucheinents variès ne modifient en rien le courant. J'ai enlevé successivement les pinces, les exopodites des pattes-mâchoires postérieures, le bord ptérygostomien, une grande partie du branchiostégite..…. et malgré ces traumatismes violents, Les battements du scaphognathite restaient rapides (160 environ), intenses, réguliers. J'ai alors excité de diverses façons les branchies, les bases des épipodites, et, pendant la durée d’une demi-heure, je n'ai pu provoquer aucune modification dans le rythme, l'intensité et le sens des mouvements de la palette respiratoire. Dans les milieux asphyxiants, le scaphognathite continue à battre de même; cependant, dans ces conditions, on constate une plus grande irrégularité du côté des exopodites des maxillipèdes, et je montrerai dans la suite que c'est là souvent le signe d’une irrégularité commencante du scaphognathite. Enfin quand le Crabe fait le mort, ce qui est fréquent, le scaphognathite continue à battre, en sorte que la respiration reste toujours active. Ces diverses expériences ont été effectuées à St-Vaast, au commen- cement de septembre 1898, sur des Dromies provenant des fosses rocheuses à Laminaires des environs des îles St-Marcouf. Une seule fois, j'ai entrevu des chasses en arrière, très faibles et SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 305 espacées, rappelant celles présentées par les Homaridés sédentaires : c’est chez une Dromie qui séjournait depuis quelques heures dans un vase clos de faible dimension contenant de l’eau de mer addi- tionnée d’un peu de baryte. Les chasses se manifestaient assez nette- ment en arrière des coxa des 3% pattes, et étaient toujours accom- pagnées de mouvements des pattes postérieures ; il y a là évidemment un souvenir ancestral, un souvenir de Homaridé ; mais les pattes nettoyeuses, au lieu de réagir pour nettoyer la carapace (Homaridés) ou la chambre branchiale (Galathéidés), ont pris un rôle fixateur et servent à l'habillement de la carapace ; or, nettoyage et habillement sont des opérations du même ordre et qui souvent se remplacent l’une l’autre. Exe. Dromia vulgaris M.-Epw. Femelle, de grande taille. St-Vaast. 8 septembre 1898. Vase clos. Eau additionnée de baryte. Long séjour. FiG. 36. — Dromia vulgaris M.-Epw., dans eau barytée. D'autres expériences, faites à Endoume en septembre 1899, m'ont donné les mêmes résultats; certains individus se sont montrés un peu plus sensibles aux blessures; celles-ci ont pu provoquer chez eux des arrêts parfois prolongés du scaphognathite. En résumé la Dromia, qui est le type le plus parfait des Crabes sédentaires, présente un Scaphognathite vigoureux, constant dans ses mouvements, et fort peu influencable par les agents meca- niques et chimiques du milieu extérieur, surtout dans les mers froides. 2. Ebalies et Calappes. — Les habitants des fonds coral- ligènes, Ebalia et Calappa, quoique assez peu actifs, ne se compor-- tent pas de même. E'balia. — Les Ebalia que j'ai examinées provenaient des fonds à Lithothamnium de St-Vaast-la-Hougue et ressemblaient à de petites concrétions calcaires ; la calcification chez ces animaux est 20 306 GEORGES BOHN. en effet très prononcée, en même temps que l'intensité respiratoire est faible; les branchies sont réduites (il n’y en a plus que 5: 3 b+3c, 40 + 406, 5 c”) normalement; l’eau entre en partie en avant par une gouttière recouverte par les exopodites des pattes- mâchoires externes et sort également en avant. Pour observer le courant respiratoire, j'ai opéré de la manière suivante : 1° j'ai enlevé l’exopodite de la patte mâchoire droite, de manière à découvrir précisément le canal dit inspirateur qui part de l'avant et aboutit à l’orifice inspirateur de Mizxe-Enwarps ; 2 j'ai placé le Crustacé dans un verre de montre contenant de l’eau carminée. Souvent, quand l’animal fait le mort (les pattes-mâchoires sont alors appliquées étroitement entre elles et contre le cadre buccal), le courant ne passe pas. Mais tout à coup les maxillipèdes postérieurs s'abaissent et le carmin s'échappe avec le courant en avant de la bouche. Si l’on dépose alors du carmin dans le canal, on voit qu'il se dirige en arrière pour pénétrer dans la chambre branchiale. Le sens de la marche du carmin dans la gouttière mise à nu indique donc le sens du courant ; aussi ai-je porté toute mon attention sur elle. J’ai constaté que le carmin y est quelquefois immobile (arrêt du courant respiratoire), que le plus souvent il va en arrière (courant direct), mais que, de temps en temps, il est entraîné alternativement en avant et en arrière, présentant une sorte de mouvement oscilla- toire (alternances de courants directs et de courants inverses). Le tracé demi-schématique suivant (1% septembre 1898) indique l'allure tout à fait particulière du scaphognathite. J'ai pratiqué Fig. 27. — Ebalia des fonds à Lithothamnium de St-Vaast. d’ailleurs une fenêtre dans le branchiostègite et j'ai constaté que de temps en temps l’eau présente une sorte de mouvement oscilla- toire, est brassée pour ainsi dire de l'avant à l'arrière et de l'arrière en avant dans la cavité branchiale. Celle-ci, avec son canal dit inspirateur et son canal dit expirateur, peut être comparée à une sorte de tube en Uo l'eau oscille fréquemment. Les périodes SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 307 d'oscillation reviennent toutes les minutes environ et durent de 5 à 10 secondes ; les périodes de repos sont fréquentes. Calappa. — Avec les Calappa granulata L. de grande taille du Broundo coralligène de Marseille les phénomènes sont les mêmes, mais beaucoup plus apparents. J'ai fait de très nombreuses observations et expériences sur ces animaux, à la fin de septembre 1899, au laboratoire d'Endoume. J'ai employé : 1° la méthode des émersions ; 2° le carmin; j'ai dû dans certains cas faire quelques amputations. J’ai obtenu des émersions progressives en plaçant le Crustacé dans des cuvettes renfermant de moins en moins d’eau, et j'ai distingué quatre degrés d'émersion : 1 degré. — Front au niveau de l’eau; 2° et 3° degrés. — Orifices « expirateurs >» un peu au-dessus du niveau de l’eau ; 4° degré. — Partie antérieure de la fente « inspiratrice » au-dessus de l’eau. Une expérience préliminaire (48 septembre 1899) m'a permis de me rendre compte de l'instabilité des mouvements du scapho- gnathite. Le Crabe étant dans l’eau, le front plus ou moins émergé, par les orifices « expirateurs » étroits et rapprochés sur la ligne médiane s'échappe un véritable jet d'eau qui s'élève notablement au-dessus du niveau de l’eau, décrivant un arc de cercle, et qui peut même franchir les parois du vase. Quand le Crabe est faiblement Fic. 38. — Calappa granulata LiNNÉ, immobile, en partie émergée. émergé (1* degré) et immobile, le jet d'eau s'arrête de temps en temps quelques secondes, et l’eau parait alors monter et descendre dans les canaux expirateurs; quand le courant régulier reprend, l’eau est chargée de bulles d'air ; dans aucun cas l'air n'apparaît à la base des pattes. 308 GEORGES BOHN. En faisant varier l’'émersion, on obtient des arrêts plus ou moins prolonges, suivis de-courants plus ou moins discontinus et irré- guliers; Vactivité de l'animal et les réflexes nerveux ont une grande influence sur la marche du courant respiratoire. a) Influence de l'activité. ExP. Endoume. 18 septembre 1899. Le Crabe, maintenu par la main de l'observateur, est disposé de façon que le bord antérieur des maxillipèdes postérieurs soit immergé, mais que la lacinie des maxillipèdes antérieurs ne le soit pas (2° degré). 1° L'animal est passif. Le jet d’eau antérieur est subcontinu ; à certains moments il augmente progressivement d'intensité pour diminuer ensuite; les arrêts sont marqués, comme il à déjà été indiqué, par wn léger mouvement oscillatoire de l’eau. Fra. 39, — Calappa granulata L., passive, puis active (deux dernières minutes). 2 L'animal entre en mouvement. Immédiatement le jet d’eau monte beaucoup plus haut, mais il s'arrête bientôt et l’eau est chassée alternativement en avant et en arrière (par les fentes dites inspiratrices). L'intensité du courant respiratoire et les mouvements oscil- latoires sont donc exagérés par le fait de l’activilé de l'animal. b) Influence des réflexes. Pour bien comprendre l'influence des réflexes, il faut se rappeler quelques particularités anatomiques des Calappu. 1° Les pinces sont énormes, aplaties, et leur bord supérieur a la forme d’une crête de coq; 2 L'eau entre (dans le courant direct) par un orifice spécial en forme de fente, qui est l'aboutissant d’une gouttière creusée d'avant SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 309 en arrière aux dépens du rebord ptérygostomien et qui est comprise entre ce rebord et l’article basilaire poilu des maxillipèdes postérieurs (Voir fig. 80, p. 386). Les pinces et les poils de cet orifice peuvent être le point de départ des réflexes. 1° Attouchement des pinces. Quand on excite la crête des pinces et que l'on maintient le Crabe immobile dans toutes ses parties, on détermine des mouvements oscillatoires fort intenses. 2° Ablation des pinces. J'ai dû pratiquer, pour l'emploi du carmin, l'ablation des énormes pinces, ce qui a eu un effet considérable sur la circulation et sur la respiration ; le cours du sang est devenu discontinu, le courant respiratoire s’est arrêté complétement ; c'est seulement au bout d'un temps très long que s’est rétabli un courant discontinu et irrégulier. 3" Excilation des poils de l'orifice afférent par des grains de carmin. Dans ces conditions cependant, on peut provoquer encore les mouvements oscillatoires de l'eau; il suffit de déposer du carmin dans la gouttière du bord ptérygostomien, celui-ci est arrêté en partie par les poils de l’orifice afférent qui sont excessi- vement sensibles ; presque immédiatement il se produit une réaction violente, et le nettoyage a lieu par une alternance de chasses d’eau en arrière et en avant. Dans la nature, les mouvements des pinces et ceux des pattes- mâchoires externes peuvent déterminer les réflexes que je viens de décrire, et par suite aussi des mouvements oscillatoires intenses de l'eau. Mais ces oscillations persistent après l’ablation des pinces et l’immobilisation complète des pattes-mâchoires ; dans ce dernier cas, elles se rapprochent, car les poils se salissent plus vite, et présentent une intensité moindre, car les frottements mécaniques déterminés par les pattes-màchoires ne sont plus là pour exalter les réflexes. J'ai recherché également s'il y avait des réflexes partant des pièces buccales qui contribuent à former les orifices dits expirateurs ; j'ai constaté que les attouchements sur ces pièces entraînent des modifications importantes dans la forme de ces orifices (Voir Ch. IX, Appendices buccaux) et un rétrécissement progressif; 310 GEORGES BOHN. quand celui-ci est maximum, le courant respiratoire, peu modifié jusque-là, s'arrête. Conclusions. — Les Orystomes que j'ai étudiés ont présenté des mouvements oscillatoires de l'eau tout à fait caractéristiques ; et la chambre branchiale de ces animaux, avec ses canaux afférents et efférents, peut être comparée à un tube en U où l’eau oscille. A l’état de repos et dans l’eau pure les oscillations sont très faibles, mais celles-ci prennent une grande intensilé quand le Crabe remue, ou quand on excite les crêtes de ses pinces ou les poils des orifices afférents. Les réflexes nerveux se produisent d'ailleurs à l'occasion d'excitations minimes, et, plus tard, je montrerai que les mouvements oscillatoires et celte sensibilité nerveuse ont, vraisemblablement, la méme cause, une intoxication due aw milieu extérieur. 3. Corystes el Atelecyclus. — J'ai déjà parlé à diverses reprises du fort joli mémoire de (GARSTANG sur les Corystes; l’auteur avait vu dans les renversements prolongés présentés par ces animaux une particularité caractéristique du genre ; il n’en est rien. Les Atelecyclus que j'ai étudiés à Arcachon présentent le même phénomène, ce qui n’est pas étonnant, mais les Carcins et les Grapses aussi le présentent. J'ai consigné les résultats de mon étude sur les Afelecyclus dans le Bulletin de la Societé d’Arca- chon |C, 99], je les rappelle brièvement ici. Les mouvements du scaphognathite sont très instables comme chez les Calappa. Quand l'animal est dans une immobilité absolue, cet organe bat assez vite et régulièrement, mais dès qu’il change de position les battements deviennent irréguliers. D’autre part l’attou- chement avec la pointe d'une aiguille des poils qui garnissent le bord antérieur des maxillipèdes postérieurs détermine le rappro- chement de ces appendices et une modification momentanée, quelquefois un arrêt des mouvements du scaphognathite. Ici donc encore on retrouve l'influence de l’activité et celle des réflexes sur les mouvements de la palette respiratoire. Ces particularités m'ont permis de comprendre le mécanisme de l’enfouissement des Afelecyclus. Pendant que le Crabe s'enfonce dans le sable, il v a des alternatives de chasses d'eau en avant et SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 311 n arrière, qui ont pour but de déblayer les orifices antérieurs et la fente du branchiostégite. Quand l’animal est enfoui, il garde une immobilité absolue, et le courant est constamment inverse : ainsi les branchies qui reçoivent l’eau directement de la surface risquent moins de s’ensabler ; dans les premiers temps de l'enfouis- sement, il y a encore quelques chasses d’eau en avant, mais celles- ci finissent par disparaître, et le courant devient d’une constance remarquable. 4. Cancer. — Cette constance nous la retrouvons chez les Cancer: pagurus L., si abondants sur nos côtes, et qui descendent presque directement, comme je le montrerai dans la 2 partie de ce travail des Alelecyclus. Ce sont des animaux peu actifs, non fouisseurs, et chez lesquels les poils avertisseurs du bord antérieur des maxillipèdes se sont atrophiés. Je n'ai jamais observé de renversements, sauf chez un Cancer très Jeune recueilli à Wimereux. Conclusions. — Seuls parmi les Crabes primitifs les Dromiacés ont conservé l'allure des Homaridés; seulement, à cause de la sédentarité de ces animaux, les chasses en arrière se sont affaiblies encore. Les Oxystomes, mtoxiqués par les eaux des fonds coralligènes, présentent au contraire une excessive susceptibilité du scaphogna- thite ; pour un rien, cet organe est secoué par des spasmes, qui chassent l'eau alternativement en avant et en arrière. Les Corystidés ont encore ces mouvements oscillatoires mais amoindris, au moment où ils s’enfouissent ; quand ils sont dans le sable, le courant est dirigé constamment en arrière ; les variations d'allure du scaphognathite sont surtout sous la dépendance d'attouchements mécaniques, et les influences chimiques viennent certainement au second plan. $ 7. — DE L'INFLUENCE DE L'HABITAT SUR LE SCAPHOGNATHITE DU C@/'Cinus MŒ@naSs PENNANT. L’allure du scaphognathite est en rapport avec le mode de vie, ce qui explique le contraste frappant entre les Corystidés-Cancéridés 312 GEORGES BOHN. et les Portunidés ; les premiers ont un mode d'existence parfaitemen} déterminé ; les seconds, essentiellement migrateurs, ont des habitats variés, peuvent en changer; le scaphognathite si sensible aux modifications du milieu extérieur s’en ressent. Les Carcinus mœænas PENNANT, par leur abondance, par leur adaptation à une multitude d’habitats, permettent merveilleusement de s’en rendre compte. On peut voir les modifications physiologiques de la respiration se faire progressivement avec l’âge, la faille, à mesure que les races se différencient et que les habitats se précisent. Expériences effectuées aux environs de St-Vaast. 1° Exp. sur des larves Megalopa (août 1897).— Les Mégalopes sont placées dans un verre de montre sous le microscope ; les courants respiratoires sont mis en évidence par l'addition à l’eau de mer d’un peu d'encre de Chine ; on voit l’eau entrer par le bord du branchios- tégite, mais plus abondamment en avant, au niveau des branchies bien développées, et sortir par la fente comprise entre le bord antérieur des maxillipèdes postérieurs, légèrement abaissés, et l’'endostome. À des intervalles de temps assez rapprochés, on constate, que l’on regarde l’avant ou l'arrière, ou même l’intérieur de la cavité branchiale par transparence, un renversement ou tout au moins un arrêt du courant respiratoire. Comme les mouvements du scaphognathite sont excessivement rapides, il est assez difficile d'apprécier les changements d’allure de cet organe, surtout que les renversements coïncident en général avec les mouvements des maxillipèdes, souvent avec ceux des pattes thoraciques, quelquefois avec les battements de l'abdomen, comme cela se passe chez les Palémons. En examinant par transparence à traŸers la carapace les courants internes, les faits sont plus nets; les courants qui naissent dans les intervalles des pattes montent le long des flancs épiméraux, en s’affaiblissant, car l’eau filtre à travers l'épaisseur des branchies, pour consliluer ensuite des courants d'arrière en avant au-dessus d’elles ; or, de temps en temps on voit, soit les courants ascendants profonds, soit les courants antéro- postérieurs superficiels changer de sens, et cela souvent sans que les épipodites interviennent. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 313 ExP. Megalopa provenant d’une pêche pélagique entre St-Vaast et Tatihou. 6 août 1897. Verre de montre. Eau additionnée d’une très petite quantité d’encre de Chine. Examen avec un Obj. 2 CRU microscope Leitz . Echelle spéciale (1 m.—2":). FiG. 40, — Megalopa (1 minute). On voit que, dans ces conditions, il y a en moyenne 10 renver- sements prononcés par minute, d'une durée d'une seconde environ. L'eau est chassée en arrière par la fente du branchiostégite à une grande distance. Nous retrouvons donc l'allure respiratoire des Vèrbius chez des larves qui en ont l’activité. 2 Expériences sur des Carcinus mænas PENNANT We taille moyenne (2 cm.) placés dans une cuvette à fond de sable (septembre 1897). — L'une de ces expériences a été faite le 8 septembre sur un Crabe provenant des rochers de la Bécue près de la jetée de St-Vaast. Le Crabe est placé dans une cuvette avec une couche de sable légèrement vaseux (recueilli à la Bécue) de 1 pouce d'épaisseur, surmontée d'un peu d’eau (aérée, 17°). | Il s'enfouit immédiatement, et il se forme en avant du front une sorte de fossé, dont les extrémités sont façonnées en entonnoirs au moyen des antennes externes mobiles, entonnoirs par où s’échappent les courants expirateurs. 4 fois par minute en moyenne, le courant subit un renversement suivi d'un arrêt ; la cessation du courant normal dure suivant le cas de 1 à 20 secondes 314 GEORGES BOHN. Exp. Conditions indiquées. Durée : 10 m. . | | | l FiG. Al. — Carcinus mœænas PENNANT, enfoui dans le sable. 3 Observations sur des Carcinus vivant au milieu de la vase. — On observe fréquemment des Carcins qui s’enfouissent dans le sable fin ; il en est qui vivent au milieu de la vase. Entre la Hougue et Morsalines (Manche), dans la région dite du Cul de Loup, les fonds vaseux abondent. Le Cul de Loup n’est recouvert complètement par la mer que lors de grandes marées ; des îlots de verdure s'élèvent au-dessus de cuvettes et de couloirs vaseux ; sur le pourtour des ilots la limite de l’eau lors de la grande marée précédente est marquée par une ligne sinueuse due à l'accumulation de carapaces blanchies de Carcins. À morte eau, sur la vase qui n’a pas été recouverte par l’eau depuis quelques jours, on voit çà et là des cadavres de Crabes plus ou moins embourbés ; dans l’eau qui reste au fond des cuvettes et des couloirs se promènent des Crabes de différentes tailles ; ils se terrent rapidement quand on les menace. J'ai capturé trois de ces C'arcinus avec de la boue du fond, boue noire, à émanalions putrides, et j'ai placé le tout dans une cuvette de verre. Voici comment ils se comportent. Tout d’abord ils s'agitent; par instants c’est de l’eau boueuse qui sort par les orifices antérieurs, mais le plus souvent c’est de l’air qui, aspiré par ces mêmes orifices, sort par les intervalles des coxa thoraciques. Le lendemain, dans cette eau aux odeurs pestilentielles, un des Crabes est mort ; les autres maintiennent leur corps beaucoup au- dessus de la vase qui s’est déposée; le courant respiratoire est presque toujours renversé, ce qui détermine l'aspiration de l'eau pure ou de l’air en nature dans la chambre branchiale, et l'aération de l’eau ; plusieurs fois par minute, on voit cependant un flot d’eau boueuse sortir par l'avant; les pattes-mâchoires et les fouets nettoyeurs s’agitent sans cesse. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 315 Ainsi quand les Carcinus sont dans le sable, dans la vase, le scaphognathile change fréquemment d’allure ; il renverse, pour un temps plus ou moins long, le sens de ses mouvements; par suite l'eau pure de la surface et l'air sont aspirées dans la chambre branchiale, l'air qui est l'agent respiratoire et assainissant par excellence. Malgré une mortalité considérable, surtout parmi les jeunes qui n’ont pas acquis encore ces longs renversements, beaucoup cependant résistent. 4 Expériences sur des Carcinus de tailles diverses placés mi-partie dans l'eau, mi-partie dans l'air. — Les Crabes sont disposés dans une cuvette de verre avec une couche d’eau de faible épaisseur. Exp. Crabe de 2,5, provenant des sables de la Hougue. St-Vaast. 6 septembre 1897. Eau aérée. 17°. Durée : 10 m. FRERE RFF FiG. 42. — Carcinus mœænas PENNANT, des sables ; petite taille. Il y a environ trois renversements par minute ; chaque renver- sement a une durée de 2 à 4 secondes. Exp. Crabe de 5°", même provenance. 4 septembre 1897. Eau aérée. 17°. Durée : 10 m. EE fi EEE nt FiG. 43. — Carcinus mænas PENNANT, des sables ; grande taille. Ily a enmoyenne 2 renversements par minute; mais chaque renversement dure en moyenne 20 secondes. 316 GEORGES BOHN. 5 Expériences du même ordre avec des Crabes d'un autre habitat. — Les très nombreuses expériences que j'ai faites et qui concordent avec les précédentes ont été effectuées sur des Crabes des fonds sableux de la Hougue. Avec ceux provenant de la côte rocheuse de Gatteville j'ai obtenu des résultats différents. Exe. sur un Crabe de 6 cent. provenant des rochers de Gatteville. 21 septembre 1897. Même eau que dans les expériences précédentes. Durée : 10 m. FiG. 44. — Carcinus mœænas PENNANT, des rochers ; grande taille. En moyenne, seulement un renversement par minute d'une durée de 5 secondes. Résumé. — En désignant par à le nombre moyen d’inversions par minute, et par 7 le rapport de la durée de la circulation inverse ou nulle à la durée de l'observation, on a: Mégalope Carcins 2 cm. [a Bécue. Sable vaseux Carcans Var. Le Cul de Loup. Vase I Carcins 2 cm., 5. La Hougue. Air e] [æ] Caremsbicm® La Hougue/ Air: 0-"ee CLR Cee Carcins 5 cm.. Gatteville. Air SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 317 Ainsi l'allure du scaphognathite est essentiellement variable ; elle est fonclion de la taille, de l'habitat, des conditions actuelles dans lesquelles se trouve le Crabe et des conditions dans lesquelles il s’est développé. Chez les jeunes ce sont d’abord des chasses d’eau en arrière comparables à celles des Macroures actifs et de petite taille (Virbius). À mesure que l'animal s'adapte à la vie fouisseuse, à la vie aérienne, l'allure du scaphognathite change plus ou moins; il y a moins d’inversions, mais la durée en est plus longue, et, comme le scaphognathite s'affaiblit, les chasses et les renversements en arrière s’affaiblissent aussi ; ce changement est peu de chose chez un Crabe de Gatteville, qui a vécu toujours dans les eaux pures au milieu des roches profondes ; il est beaucoup plus considérable chez un Crabe de St-Vaast qui a vécu dans des détroits sablo-vaseux qui découvrent facilement, et aussi dans des eaux impures. Au fur et à mesure que l'animal grandit, il acquiert un nouveau mode respira- toire, en harmonie avec le genre de vie qu'ont mené ses ancêtres et avec celui qu'il va mener. Les jeunes Carcins qui s'engagent trop tôt dans les vases du Cul-de-Loup périssent en grand nombre. Voilà ce que l’on peut observer sur le Carcinus mœnas PENNANT, ce Crabe qui pullule sur nos côtes rocheuses, sableuses et vaseuses, qui est capable de s'adapter à tous les habitats, grâce précisément à cette faculté remarquable de pouvoir renverser pour un temps plus ou moins long le sens du courant respiratoire. Nous sommes loin, on le voit, des observations de GARSTANG, inspirées par des idées théoriques, fausses quoique très séduisantes. En mars 1897, cet auteur décrit le renversement chez le Porltumnus nasutus LATR., forme fouisseuse qui pour un œil encore peu exercé pourrait paraître une variété anormale d'un jeune Carcinus. Le caractère spécifique du Portumnus nasutus LaTr. est le front pro- jeté en avant entre les cavités orbitaires : « ce lobe interorbital est similaire, dit GARSTANG , de la protubérance frontale des Carcinus mænas au stade Megalopa > ; il est, ajoute-t-il, corrélatif du phéno- mène du renversement, et, comme chez les Carcinus mænas PENNaANT adultes ce caractère est perdu, le renversement n'existe plus !! Pour moi, les renversements (fréquence, durée, force) sont fonc- tion de l’activité de l'animal, des agents mécaniques (sable, vase, etc.) et chimiques (aération et pureté de l’eau) du milieu extérieur, de l'habitat en un mot. 318 GEORGES BOHN.. Expériences effectuées à Wimereux et à Boulogne-sur- Mer. Des expériences effectuées à Wimereux m'ont permis de me rendre compte de l'influence des agents chimiques (CO?) et des réflexes nerveux. 1° Un Crabe quine présente que des renversements espacés et courts dans une eau très pure se met à présenter des renversements prolongés dans une eau chargée d’acide carbonique ; l'effet est immédiat. Ceci prouve que l'influence de l’asphyæie et des agents chimi- ques (boue fétide)se fait très bien sentir sur le scaphognathite des Carcinus. 2° Le scaphognathite d’un Crabe est mis à nu (ce qui produit un arrêt de l’organe d’environ 5 m., des deux côtés ; au bout d’un quart d'heure seulement la régularité des mouvements est retrouvée) ; de temps en temps on émerge les poils qui garnissent le bord antérieur des maxillipèdes postérieurs, les mouvements sont accélérés et les renversements deviennent plus fréquents et plus prolongés. Ceci nous explique la production des renversements qui entraînent le barbotement de l’air dans la chambre branchiale, — en partie du moins , Car l'ablation des pattes-mâchoires ne supprime pas les renversements. Le rôle avertisseur des poils des maæillipèdes est curieux à rapprocher de celui des mêmes poils chez les Corystidés ; ces poils peuvent être impressionnés, ou par l'oxygène de l'air, ou par l'attouchement de grains de sable. Nous entrevoyons donc chez les Carcinus, à côté de l’influence de l'habitat et de l’activité, celle des agents chimiques, endogènes et exogènes. Cette dernière influence se placera au premier plan chez les Grapses (Voir plus loin). S 8. — PERSISTANCE DES RENVERSEMENTS PROLONGÉS CHEZ LES PORTUNIDÉS ET LES XANTHIDES. VIE FOUISSEUSE ET VIE SUBAËRIENNE. Chez les Portunidés et les Xanthidés, on retrouve plus ou moins les renversements prolongés des Corystidés et des Carcinidés ; SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 319 ORTMANN altribue une origine corystidienne aux Portudinés et aux Xanthidés ; pour le moment je ne discuterai pas cette opinion. A) Portunidés. — Des renversements prononcés et prolongés ne doivent pas nous étonner chez des formes aussi actives que les Portunidés qui adoptent la vie fouisseuse et la vie subaérienne si facilement. Portunidés exclusivement fouisseurs. — J'ai observé le Portumnus variegatus LEacH à Arcachon et à Wimereux. Cette forme a bien les caractères corystidiens, et son scaphognathite a la même allure que chez les Atelecyclus. Quand l'animal est dans le sable, l’inversion du courant respiratoire est presque constante ; parfois cependant on voit sortir une bouffée d’eau jaunâtre par les orifices antérieurs. Dans un aquarium, les Portumnus variegatus LEACH meurent rapidement si on ne les laisse pas aller respirer l’air en nature ; en général ils viennent à la surface de façon à émerger l’orifice inspirateur le plus important, celui qui est situé entre le coxa des pattes 4et5. Cependant quand le Crabe repose sur du sable humide, on observe fréquemment la sortie de bulles d’air par le même orifice ; le Crabe respire alors l’air à la façon d’un Carcinus mœænas PENNANT. Portunidés franchement pélagiques. — Je n’ai pu les étudier; la disposition corystidienne de la bouche me fait penser que ces animaux, du moins dans leur période d'activité, doivent présenter des inversions prolongées. Portunidés littoraux et migrateurs (Portunes et Polybies). 1. Portunes. — Les Portunes nageurs ont des migrations plus étendues que celles des Carcinus, tant en surface qu’en profondeur. J’ai recueilli des Portunus arcuatus LEACH, à la Hougue, dans le voisinage des Carcinus mænas PENNANT sur lesquels j'ai fait les expériences relatées plus haut; dans cette localité ils se tapissent dans la vase sous les pierres. J’ai rencontré à l'extrême pointe de la Hougue, au milieu des roches, des Portunus puber L. venant du large. Enfin dans les fonds de chalut, j'ai ramassé fréquemment des P. depurator L. Ces divers Portunes se comportent les uns et les autres de façons très différentes. 320 GEORGES BOHN. Les Portunus arcuatus LEACH, qui choisissent, au moins à certaines périodes de leur existence, un habitat comparable à celui des Carcinus, ont un scaphognathite qui se comporte comme celui de ces Crabes. Les renversements sont très nets et prolongés. En déposant du carmin d’une façon continue devant la partie antérieure de la fente du branchiostégite, on arrive quelquefois à déterminer un renversement presque continu, qui n’est interrompu que par quelques chasses en avant. Le scaphognathite est très instable, très sensible aux attouche- ments périphériques (poudre de carmin); il y a des périodes où prédomine le courant direct, d’autres où prédomine le courant inverse ; dans les premières, il y a des chasses en arrière d’assez longue durée, 10-20 secondes ; dans les secondes, des chasses en avant, d’une durée très courte en général. J'ai eu les mêmes résultats avec des Portunus arcuatus LEACH des eaux impures du passage du Vieux Port de Marseille. Si l’on opère avec le carmin chez un Portunus puber L., on constate que ? ou 3 fois par minute il se fait par la fente inspiratrice une projection de carmin qui s'élève dans l'eau, mais cela dure chaque fois à peine quelques secondes. Enfin avec le Portunus depurator L. les chasses de carmin sont très espacées et de courte durée. C'est par des excilants mécaniques que l’on arrive à produire les renversements et les chasses en arrière chez les divers Portunes ; il est à remarquer que ces animaux ne respirent pas l'air en nature, comme les Carcinus et les Grapses, qui eux sont surtout sensibles aux eæcitants chimiques. L’allure du scaphognathite d’un Portune est en rapport avec la nature du fond sur lequel l'animal vit. Les Portunus arcuatus LEAcH arrivent parfois jusqu'à fleur d’eau et vivent sous les rochers boueux ; ils habitent aussi les îlots vaseux des profondeurs; chez les uns et chez les autres, les renversements sont prolongés. Les Portunus corrugatus PENNANT, que j'ai étudiés à Endoume (1% octobre 1899), vivent en bandes dans les prairies profondes, et apparaissent surtout à certains moments; ils se déplacent dans des régions où il y a beaucoup d’ilots vaseux ; ils comptent parmi les rares espèces de profondeur chez lesquelles on peut déterminer des renversements prolongés. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 321 Il n’est guère naturel d'employer la méthode des émersions chez un animal de profondeur; mais pour un animal qui vit dans la vase, on peut employer le carmin. Les Portunus corrugatus PENNANT sont d'une extrême sensibilité aux dépôts de carmin effectués le long du bord du branchiostégite; le renversement se produit presque instan- tanément, accompagné des mouvements des épipodites, et peut persister un certain temps ; souvent les endopodites et les exopodites des pattes-mâchoires entrent en mouvement, ainsi que les pattes, en particulier les deuxièmes. Le renversement n’est pas dû aux mouvements des épipodites, ni aux autres mouvements réactionnels ; il suffit de maintenir immo- biles les divers appendices pour s'en rendre compte ; on obtient des renversements instantanés et prolongés, surtout si l’on continue à déposer du carmin. Exp. Portunus corrugatus PENNANT, © tigrée. Marseille, 1 octobre 1899. Tube de verre. Eau carminée faible. Durée : 7 m. FiG. 45. — Portunus corrugatus PENNANT. Il y a tantôt des chasses violentes espacees et courtes, tantôt des renversements prolongés. Avec l'encre, on obtient des résultats analogues. Si l’on maintient les épipodites, et si on dépose une goulte d'encre dans le voisinage de l’entrée de l’eau, on voit celle-ci s’effiler et pénétrer, mais bientôt il y a rejet violent en arrière, puis reprise ; les chasses se reproduisant de temps en temps. 2. Polybies. — Les Polybies que j'ai observées à Arcachon venaient du large (Voir Ch. I). Avec le carmin, j'ai constaté des chasses en arrière, plus ou moins accentuées, à intervalles très irréguliers ; mais ces chasses ayant coincidé toujours avec un mou- vement brusque de l'épipodite interne, je ne sais pas au juste quelle est Sa nature. 21 522 GEORGES BOHN. Résumé. 1 snesure que les Porlunidés quittent le sable el la vase, les chasses en arrière S'espacent, deviennent irrégulières et s'altéenuent (les formes pélagiques non comprises). B) Xanthidés.— Je n'ai pu examiner que les Xanthes (Xantho floridus MonraGu et X. rivulosus Risso), les Pilumnus (Pilumnus hirtellus L. et P. spinifer M.-Epw.), les Eriphies (Æriphia Spini- [rons HERBST). 1. Xanthes. — Mes observations ont porté sur les Xanthes qui vivent dans les eaux superficielles de la rade de Toulon, devant Tamaris, à savoir les Xantho rivulosus Risso et floridus MoxraGu. Les uns et les autres peuvent présenter des renverse- ments assez prolongés.. Expériences sur les Xantho rivulosus Risso (Taimaris, 7 septembre 1899). — Les Xantho rivulosus Risso, verdâtres, vivent communément sous les pierres à fleur d’eau; ils paraissent peu actifs pour des Crabes liltoraux ; souvent ils relèvent la partie postérieure de leur corps de manière à laisser pénétrer l’eau aérée de la surface par les orifices postérieurs, les cinquièmes pattes glissent alors sur l'arrière de la carapace ; celte altitude s’observe surtout quand l’eau est chargée d'acide carbonique. Placés dans l’eau carminee, les Xantho rivulosus Risso présentent des chasses en arrière, très courtes, environ une fois par minute. Placés mi-partlie dans l’eau, mi-partie dans l'air, is présentent des renversements de quelques secondes, d'autant plus rapprochés et plus longs que l’eau est plus chargée d'acide carbonique. PE a el pd LEA à come Fig. 46-47. — Xantho rivulosus Risso. La fig. 46 correspond à une expérience exécutée dans l’eau pure, la fig. 47 à une expérience dans de l’eau chargée d’acide carbonique. L’attitude du Crabe a aussi son influence. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 323 Les fig. 48-49 ont été obtenues sur le même individu, dans la même eau, mais en tenant celui-ci de deux manières différentes, ou par la pince (48), ou en appuyant sur le dos (49). « | | | il | | fi | Fi&. 48-49. — Xantho rivulosus Risso. Le Crabe peut prendre librement deux attitudes : l'attitude de la défense (pinces en extension, pattes-mâchoires externes assez rapprochées du cadre buccal) et l'attitude de la murche (pinces fléchies, pattes-mâchoires plus ou moins éloignées et mobiles); dans le premier cas, le courant est direct el presque continu; il se produit une chasse en arrière toutes les minutes environ; dans le deuxième cas, on observe des périodes de courant direct, mais aussi des périodes où les renversements sont fréquents et d'assez longue durée; pendant les renversements, les pattes-mâchoires s’abaissent, entraînant les lacinies poilues qui limitent les orifices respiratoires. Expériences sur les Xantho floridus MoNraGu. (Tamaris, 8 septembre 1899). ExP. Xantho floridus MonraGu, de taille moyenne. Racines des Posidonia. 8 septembre 1899. Eau pure. Cristallisoir. Durée : 10 m. | | | Fig. 50. — Xantho floridus MonTaGu. Ici encore on constate l'influence de l'extension des pinces et des mouvements du Crabe (Pinces demi-fléchies pendant les 4 premières 324 GEORGES BOHN. minutes, en extension pendant les 3 minutes suivantes ; agitation des appendices dans les 3 dernières minutes). En résumé, les Xanthes présentent des renversements prolonges, ou bien gnand ils sont dans l'attitude de la marche, ou bien quand ls marchent effectivement en remuant les pattes. 2, Pilumnus.— J'ai observé les Pilumnus hirtellus L., à St-Vaast et à Wimereux, et les Pilumnus Spinifer M.-Enw., à Endoume. J'ai constaté un contraste remarquable entre le scaphognathite des Pilumnus hirtellus L. de SI-Vaast et celui des mêmes animaux à Wimereux. L'habitat et le mode de-vie sont en effet différents dans les deux localités : à St-Vaast, les Piluinnus vivent dans la boue, sous les rochers, et sont libres; à Wimereux, ils sont engagés le plus souvent dans les cavités des blocs d'Hermelles et sont forcément sédentaires. Or, à St-Vaast, contrairement à Wimereux, les chasses en arrière peuvent être déterminées assez facilement par le dépôt de carmin. Expériences faites à St-Vaast (septembre 1897).— Si on dépose le carmin devant l’orifice inspirateur de M.-Epw., il y pénètre, mais de temps en temps il se produit des bouffées colorées vers l'arrière ; le phénomène est moins apparent au niveau de l'orifice situé entre les coxas des premières et deuxièmes pattes, et encore moins accentué au niveau de l'orifice suivant; on ne fait plus que soupçonner le renversement au niveau de l'orifice postérieur, qui correspond à celui des Cancer. jaæpériences fuites à Wimereux (août 1899).— Les mouvements qui contribuent au nettoyage de la cavité branchiale sont très fré- quents, mais malgré cela les renversements ne sont pas sensibles. J'attribue cette différence à la sédentarilé ; on aurait pu également l’attribuer à la pureté de l’eau, car les Lamellibranches, qui purifient l'eau, comme l’a montré VIALLANES, sont très nombreux dans les roches d’'Hermelles. Les Pilumnus spinifer M.-Enw., du Broundo de Marseille, placés dans un tube avec de l’eau carminée, n’ont présenté qu'une chasse . par minule et faible. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 329 Ainsi chez les Pilumnus, qui ont des tendances à la sédentarilé, les r'enversements prolonges n'existent pas, et les chasses en arrière s'affaiblissent. 3. Ériphies. — Chez les Eriphies, les renversements sont prononcés et déterminent le barbotement de l’air dans la chambre branchiale. Je l'ai constaté à Arcachon, puis à Endoume. Exp. £riphia Spinifrons HERBsT, 9 de taille moyenne. Rochers d'Endoume. 24 septembre 1899. Eau pure. CGristallisoir. Durée 5 minutes, Eau impure. Durée 5 minutes. FiG. 5. — Æriphia spinifrons HergsT, d'abord dans de l’eau pure ({"° ligne), puis dans de l’eau impure (2° ligne). Les graphiques ont été obtenus avec une demi-émersion. Dans l’air, il y a une alternance assez irrégulière de courants directs et de courants inverses. Ainsi chez les Eriphies, les renversements expliquent l’adap- lation à la vie aérienne. Résumé. — Chez les Xanthideés, les renversements sont assez variables ; prolongés chez les Xanthes marcheurs, üls s'atténuent chez les Pilumnus sédentaires. Les Eriphies nous conduisent aux Grapses, dont l'adaptation à la vie aérienne peut s'expliquer par des renversements prolonges. 326 GEORGES BOHN. $S 9. — DE L'INFLUENCE DES AGENTS CHIMIQUES SUR LE SCAPHOGNATHITE DU Pachygrapsus marmoralus FABRICIUS. Les Grapses qui vivent à la fois dans l'air et dañs l'eau, grâce à des renversements prolongés du courant respiratoire, el qui ont une activité prodigieuse, mais discontinue, sont des sujets merveilleux pour l'étude de l'influence des agents chimiques sur le scaphognathite. J'ai étudié successivement l'influence des produits d’excrétion de l’animal, celle des poisons de la fatigue, celle de la salure de l’eau, celle du degré d’acidité ou d’alcalinité ; j'ai comparé divers alcalis, et mis en évidence le rôle tout particulier de l’ammoniaque ; toutes ces expériences ont été effectuées au laboratoire d'Endoume, en septembre 1899. 1. Influence des produits d’excrétion de l’animal.— Exp. Grapse 0, de petite taille, non parasité. 20 septembre. Alternativement eau pure et eau dans laquelle l'animal a séjourné depuis la veille ; même température, 20° C. Durée : 20 m. si mp sa D AE RE D ARRERR FOPE A E FiG. 52. — Pachygrapsus marmoratus FABr., alternativement dans de l'eau pure ({r et 3° ligne) et dans de l'eau contenant les produits d'excrétion (2e et 4e ligne). Exp. Grapse ©, de petite taille, parasité. 20 septembre. Eau pure et eau de la veille aérée; quantité de CO? peu différente SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 927 (1æ, 2 et 1%, 4 eau de baryte pour 20% eau de mer) 20° C. Durée : 20 m. Fc. 53, — Pachygrapsus marmoratus FABR., alternativement dans de l’eau pure et dans de l’eau contenant les produits d’excrétion (quantités de CO? peu différentes). Les produits d'excrétion de l'animal ont pour effet d'augmenter la fréquence el peut-être aussi l'intensité des renversements respiratoires. e Influence de l’acide carbonique. — Si on insuffle de l'acide carbonique dans l’eau les effets sont beaucoup plus prononcés. Exp. Grapse ©, de moyenne taille, non parasité. 20 septembre. Eau pure et eau + CO?. Durée : 2 X 5 m. Fic. 54. — Pachygrapsus marmoratus FABR., successivement dans de l'eau pure ({r ligne) et dans de l'eau chargée de CO? (2° ligne). 328 GEORGES BOHN. 3. INFLUENCE DES POISONS DE LA FATIGUE.—Il suffit de faire courir un Grapse quelques instants pour augmenter souvent d’une manière notable la fréquence des renversements. Exr. Grapse 6, de moyenne taille, non parasité. 21 septembre. FiG. 55. — Pachygrapsus marmoratus FABR., avant d'avoir couru ({r° ligne) après avoir couru (2° ligne). Exp. Grapse 9, de petite taille, non parasité, teinte claire. 23 septembre. Fic. 56. — Pachygrapsus marmoratus FaBr., avant d'avoir couru (1e ligne) après avoir couru (2° et 3° lignes). SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 329 4. Influence de la désalure progressive. — Exr. Grapse 9, de petite taille, non parasité, teinte claire. 23 seplembre. | | el | | | | ee | hi * EE = | LES ue | | | | Ï | ROBES SERIE ENS | DHEA Ra enr | TR | | | Fc. 57. — Pachygrapsus marmoratus FABR., d'abord dans de l'eau désalée progressivement (9 premieres lignes), puis dans de l'eau de mer pure (3 lignes suivantes), enfin dans de l’eau douce (2 dernieres lignes). J'ai ajouté successivement: 1, 2, 8, 4, 5, 6 dixiemes d’eau douce à l'eau de mer n, 2, 3, 4, 5, 6, 7); puis j ai plonge l'animal dans de l'eau de mer pure (lignes 8 et 9). 330 GEORGES BOHN. De l’eau douce aérée a été ajoutée à de l'eau de mer parfaitement aérée par dixièmes successifs; le nombre des renversements a diminué ; il s'est abaissé dans le rapport de 7 à 1. Après avoir séjourné quelque temps dans l’eau douce, le Crabe a été replacé dans de l’eau de mer ; dans l’espace de 15 minutes, les renversements sont redevenus aussi fréquents qu'au début. L'effet n’est pas immédiat comme par l'acide carbonique ; il faut sans doute que le sang subisse une modification dans la salure. 5. Influence simultanée de la fatigue et de la désalure. — ExP. Même Grapse que dans les deux expériences précédentes. 24 septembre. = ——— = = - | + = fe | —— FE; — — D V1) ES se FERRER ES FRERE LÉ. —— Fi. 58. — Pachygrapsus marmoratus FABR., dans de l'eau douce, avant d’avoir couru (2 premières lignes) et après avoir couru (4 dernières lignes 20m): Dans l’eau désalée, l'effet de la fatigue est moins intense, mais semble de plus longue durée. Il suffit de comparer le graphique ci-dessus à celui de la figure 56, pour voir que les renversements après la course sont loin d’être aussi nombreux dans le 2° cas que dans le 1%, mais qu'il persistent en revanche plus longtemps. Cette expérience a une portée générale. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. aol Les Grapses des calangues de la côte de Provence vivent habituellement dans des eaux fortement désalées, et il n’est pas étonnant que chez eux les sels de l'eau de mer aient une action sur le scaphognathite identique à celle de substances toxiques (CO*, produits d’exerétion, poisons de la fatigue). Or, les poisons dans l'organisme ajoutent leurs effets, s'exallent réciproquement. Done en supprimant un des poisons, NaCI, on diminue l'effet des autres poisons (poisons de la fatigue). Cependant dans l’eau pure, l’effet de la fatigue persiste plus longtemps, cela tient sans doute à ce que l'animal lutte contre la désalure, et élimine par suite moins vite les poisons développés dans l’organisme. 6. Influence de la chaux et de l’ammoniaque. — De petites quantités d’eau de chaux diminuent la fréquence des renversements, sans doute par suite de la neutralisation de l'acide carbonique contenu dans l’eau de mer. ExP. Grapse 6 vigoureux, non parasité. 29 septembre. Eau de mer pure à 18, et ensuite eau additionnée de 5 ‘, d'eau de chaux. Fic. 59. — Pachygrapsus marmoratus FaBr., d'abord dans de l'eau pure ({r ligne), puis dans de l’eau additionnée de 5 ° de chaux (2° ligne). Des quantités d’eau de chaux plus considérables entraînent une sorte de mouvement de va-et-vient régulier de l’eau dans la chambre branchiale. 332 GEORGES BOHN. Exe. Même Grapse que dans l'expérience précédente. 29 septem- bre. Eau de mer pure, et ensuite additionnée de 30°/, d’eau de chaux. - RARPULRANAPIRNE | FiG. 60. — Pachygrapsus marmoratus FABr., d'abord dans de l’eau pure ({re ligne), ensuite dans de l'eau additionnée de 30 °/, de chaux (2° ligne). VI gouttes d’une dissolution ammoniacale dans un litre d’eau de mer produisent instantanément le même résultat; après un séjour prolongé ou pour de plus fortes doses d’ammoniaque, le mouvement du scaphognathite devient tout à fait spasmodique. | ExP. Grapse 6 vigoureux, non parasité. 28 septembre. Eau de mer pure, puis additionnée : 4° de VI g. d’ammoniaque ; 2° de XIV g. FiG. 61. — Pachygrapsus marmoratus Fagr. 1° dans de l'eau pure ; 2° dans de l'eau additionnée de VI g. Az H3; 3° dans de l’eau additionnée de XIV g. ; 4° après un séjour prolongé dans cette eau. En résumé, chez les Grapses qui sont des Crabes très actifs et qui se fatiguent vite, le scaphognathite est très sensible aux agents chimiques, et en particulier à l'acide carbonique et à l'ammoniaque. Tandis que l'acide carbonique augmente l'amplitude des mouvements SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 333 du scaphognathite, l’ammoniaque a l'effet contraire ; lun et l’autre de ces agents chimiques augmentent la fréquence des renversements, mais l’ammoniaque conduit rapidement à une sorte de mouvement oscillatoire spasmodique, rappelant celui présenté par certains Crabes des profondeurs. $ 10. — DE L'INFLUENCE DE LA SÉDENTARITÉ SUR LE SCAPHOGNATHITE DES OXYRHYNQUES. Chez les Oxyrhynques, animaux sédentaires, le scaphognathite présente une constance d’allure assez remarquable. Seuls les Stenorhynchus phalangiur PENXANT, qui sont doués d'une certaine activité, ont des renversements facilement obser- vables. Exp. Stenorhynchus phalangium PENNANT. La Hougue. {°° octo- bre 1897. Tube de verre — 1 cent. X 7 cent. Eau de mer légèrement carminée. Fi. 62. — Stenorhynchus phalangiuin PENNANT. J'ai retrouvé également les renversements, mais très espacés et affaiblis, chez un /nachus thoracicus Roux, recueilh à Endoume. Exe. /nachus thoracicus Roux. Endoume. 21 septembre 1899, | | | | | | EE ee je sel —_—_—_—____——. 5 F = — ÉPARRE -- | | Î | | | | | | | | | | Fra. 63. — Inachus thoracicus Roux. Un examen altentif du scaphognathite des diverses espèces d'Oxyrhynques révèle cependant certaines irrégularités dans l'allure de cet organe : périodiquement on constate des battements 334 GEORGES BOHN. anormaux, des sortes de fauæ-pas du scaphognathite, pour employer une expression usitée en médecine. Chez certains Pisa leltraodon PENNANT, ces faux-pas corres- pondent à des arrêts du courant respiratoire ; ils se répètent en moyenne 9 fois par minute. | ExP. Pisa tetraodon PENNANT habillé d’Algues. Marseille. Bordure coralligène de la calangue du cap Croix. 28 septembre 1899. Orifices expirateurs légèrement émergés ; scaphognathite mis à découvert. = CTI OO COTON ICO | | | | | | i | 1 L Fic. 64. — Pisa tetraodon PENNANT. Les gros Maia squinado HERBST de nos côtes se prêtent particu- lièrement à l'observation du scaphognathite. Quand on a mis cet organe à découvert par section partielle du bord ptérygostomien, on constate, surtout quand le rythme est ralenti (65-70 battements par minute), 1° qu’après 2, 3, 4 ou 5, parfois 6 ou 7 battements ordi- naires, il se produit un fauxæ-pas,immédiatement suivi d’une nouvelle série de 2-5 battements ordinaires ; 2° qu’une fois par minute environ (en général quand les épipodites des 3% pattes-mâchoires remuent) ilse produit de suite 8-14 battements plus rapides et modifiés de façon à entrainer un léger reflux de l’eau vers l'arrière de la chambre branchiale ; dans ce dernier cas, le mouvement ondula- toire de la lamelle respiratoire, au lieu de se propager d'arrière en avant, se propage d'avant en arrière; Ce mouvement inverse commence d’ailleurs par un léger battement du lobe antérieur de l'organe, battement qui semble assez caractéristique des faux-pas ; dans bien des cas ceux-ci semblent être des battements inverses incomplets ou isolés. Pour terminer, je citerai le cas des Æurynome aspera PENNANT. (Endoume, 28 septembre 1899) qui ont la faculté d'arrêter pour un temps plus ou moins long le courant respiratoire, lorsque, sous l'influence de la peur, ils rétractent leurs pattes et, par leur immobilité, miment les concrétions calcaires des fonds dans lesquels ils vivent. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. JO: S 11. — DES INFLUENCES CHIMIQUES, MÉCANIQUES ET NERVEUSES S'EXERÇANT SUR LE SCAPHOGNATHITE. Après examen de ce qui se passe dans les divers groupes de Crustacés Décapodes, on voit, comme je l'avais annoncé, que le renversement du courant respiratoire, dù à une modification des mouvements du scaphognathite, est un phénomène absolument général, mais qui se présente avec des modalites différentes, suivant les influences agissantes. Ces influences sont de trois sortes: influences chimiques, mécaniques et nerveuses. Les premières sont de beaucoup les plus importantes. 1. Influences chimiques. Le scaphognathite subit l’action de poisons variés, la plupart d’origine organique, — animale, vêgélale ou bactérienne. Parmi les poisons d'origine animale, il en est qui se développent dans le milieu intérieur même du Crustacé : poisons résultant de l’activité musculaire (poisons de la fatigue), CO? et un certain nombre d’autres produits d’excrétion, — et d’autres qui y pénètrent, après avoir été déversés dans l’eau de mer par d’autres animaux. Parmi les poisons d’origine végétale ou bactérienne, 1l faut surtout ciler l’'ammoniaque. Les poisons de la première catégorie détermineraient à des inler- valles variables, des séries de battements du scaphognathite dirigés en sens inverse, plus intenses et plus rapides que les battements normaux, et entrainant des renversements du courant respiratoire plus ou moins prolongés. Les poisons de la seconde catégorie détermineraient, les mouve- ments spasmodiques de la lamelle respiratoire, d'où résultent des oscillations répétées de l’eau dans la chambre branchiale. C’est par la considération de ces diverses intoxications qu’on peut se rendre compte de l’influence du genre de vie (activité et séden- tarité) et de l'habitat (animaux liltoraux, animaux des fonds) sur les mouvements respiratoires. 1° Activité et sédentarite. — Dans tous les groupes que j'ai passés en revue, j'ai observé un contraste frappant entre le mécanisme 336 GEORGES BOHN. respiratoire des animaux actifs et celui des animaux sédentaires. Les Palæmon treillianus Risso qui nagent activement parmi les Algues du littoral méditerranéen présentent des chasses d’eau en arrière beaucoup plus fréquentes que chez les Palæmon œiphias Risso qui se traînent dans les prairies profondes. Quand on soumet les premiers à une asphyxie progressive, les renversements deviennent aussi fréquents que chez les Virbius verts dont l’activité est prodi- gieuse. Chez les Crevettes, les renversements se perdent d’ailleurs, à mesure que ces Crustacés, de nageurs qu'ils étaient {Vérbius, Palæmon), deviennent marcheurs (certains Palæmon), fouisseurs (Crangon), où même tout à fait sédentaires (Alphées). On trouve une série analogue chez les Homaridés-Thalassinidés ; les renversements s’accentuent et se multiplient à mesure que ces animaux s'adaptent à une vie fouisseuse active ; le maximum d’inten- sité et de fréquence est présenté par les Callianasses au moment où elles fouissent le sable. | J'ai donné plus haut une classification des Pagures basée sur l’activité; je rappelle seulement ici que les Diogenes pugilator Roux, qui s’enfouissent dans le sable avec une si grande agilité, présentent souvent des r'enversements prolongés. On voit apparaître ceux-ci également chez les Porcellanes, les Scyllares et certains Crabes primitifs ; des deux espèces de Porcel- lanes qui vivent sur nos côtes, l’une (Porcellana longicornis PENNANT) est beaucoup plus active que l’autre (Porcellana platy- cheles PENNANT) : c’est précisément celle qui présente ces renver- sements ; les Scyllares les acquièrent la nuit quand ils viennent nager à la surface de l’eau ; chez les Crabes primitifs, tandis que les mouvements respiratoires des Dromies (Dormeuses) présentent une constante remarquable, ceux des Corystidés fouisseurs se modifient aisément, surtout pendant les périodes d'enfouissement. Parmi les Crabes spécialisés, on retrouve les renversements prolongés chez les Portunes, nageurs, chez les Carcins et les Grapses, connus pour leur activité, et non chez les Araignées de mer, aux mouvements si lents. Mais la démonstration la plus curieuse de l'influence de la sédentarité sur les mouvements respi- ratoires est fournie par le Pilumnus hirtellus L.: les individus qui sont libres sous les pierres et sous les roches présentent encore des renversements faciles, contrairement à ceux qui sont exprt- sonnés dans les blocs d'Hermelles. SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. SO 2 Animaux lilloraux et animaux des fonds. — Les animaux de la surface, qui vivent parmi les Algues vertes, dans des eaux chargées d'oxygène, sont en général beaucoup plus actifs que les animaux des profondeurs, et plus éprouvés que ceux-ci par les poisons de la fatigue ; les renversements prolongés qu'ils présentent expliquent l'adaptation à la vie aérienne de certains d’entre eux. Toutefois 1l arrive que des Crustacés des profondeurs soient très acüfs, tels les Portunus corrugatus PENXANT ; ils présentent alors des renversements prolongés, comme les Portunes littoraux. C’est là une exception ; en général les animaux des profondeurs ne subissent guère d’auto-intoxications ; dans maintes localités, ils sont soumis à l'influence de poisons végétaux ou bactériens, comme l’ammoniaque ; les mouvements oscillatoires du courant respiratoire sont une des particularités les plus remarquables des Oxystomes ; ces Crabes ont besoin d’ammoniaque ; ils vivent en général dans les fonds coralligènes, mais peuvent s'adapter aux eaux superficielles quand les eaux d’'égout chargées de produits ammoniacaux s’y déversent (ancien port de Marseille). Remarque. — Chez les Crustacés soumis à l’intoxication ammoniacale d’origine externe, les poisons d’origine interne, bien qu'ils ne se forment qu’en petites quantités, ont cependant une action appréciable sur les mouvements respiratoires, car dans tout organisme vivant les poisons exaltent réciproquement leurs effets ; chez les Calappa, un simple mouvement du Crabe suffit pour entrainer un changement d’allure du scaphognathite ; or, les poisons qui résultent d’une activité partielle et de courte durée ne peuvent s'être produits qu’en quantités infinitésimales. Cette remarque permet, il me semble, de donner une réponse à une question posée par M. Bouvier [| D, a,99] au cours deses remar- quables études morphologiques surles Crabes Oxystomes. Cet auteur décrit dans la région buccale des Cyclodorippæ ORTMANN un canal médian et deux canaux latéraux ptérygostomiens, et se demande quelles sont les voies afférente et efférente ? « Il est possible que le médian soit affecté au courant d’eau expiratoire comme chez les Dorippes et les Crabes les plus normaux, mais dans ce cas, les voies afférentes seraient formées par les canaux latéraux et comme ceux-ci s'ouvrent exactement à la base des tubercules urinaires, il en résulterait que le courant inspiraloire entraînerait avec lui les 28 338 GEORGES BOHN. produits d'excrelion que rejellent ces derniers. Celte hypothèse est en désaccord avec les règles les plus sûres de la biologie des animaux ; aussi Croirais-je volontiers que les voies latérales des Cyclodorippue sont réellement efférentes, tandis que le canal médian servirait à l'entrée de l'eau. En d’autres termes, les Crabes qui nous occupent présenteraient à l'état normal les phénomènes physio- logiques de renversement du courant respiraloire, phénomènes que M. GarsrTANG a signalés chez les Corystes et que M. Box a pu observer, dans des conditions spéciales, chez la plupart des autres Décapodes ». Je crois en effet qu'il faut faire intervenir ici le renversement ; mais Celui-ci ne serait pas constant, il se produirait, dans la période d'activité de l'animal, et chaque fois que par le pore urinaire s'échapperaient les produits d’excrélion: ceux-ci arrivant même en quantités infinitésimales au niveau des branchies provoqueraient instantanément le réflexe d’inversion. IT. Influences mécaniques. Les influences mécaniques ne se font réellement sentir que chez les animaux qui sont soumis déjà aux influences chimiques précitées. Il est bien évident que la boue et le sable dans l’eau favorisent les renversements. Cependant il ne suffit pas de vivre dans la vase ou le sable pour en présenter : les Alphées sédentaires qui habitent les racines boueuses des Posidonia n’ont que des renversements très espacés (toutes les trois minutes), tandis que les Nika plus actifs du mème habitat en ont trois par minute; chez les espèces des sables, mème quand l’eau est agitée, les réflexes nerveux occasionnés par les excitations périphériques des grains quartzeux n’ont guère lieu que pendant les périodes d'activité de l’animal, qui sont des périodes d'intoxication. Cette remarque permettra d'expliquer bien des particularités de la vie fouisseuse. LI. Influences purement nerveuses. — Chez les animaux intoxiqués fortement par les poisons dérivant de l’activité musculaire, comme chez ceux soumis à l’action de l'ammoniaque, les réflexes nerveux qui déterminent des changements dans les mécanismes respiratoires se produisent très facilement (Thalassinidés, Atele- cyclus, Grapses, etc. d’une part, Calappa d'autre part). Dans certains cas, il arrive même que les modifications du courant respiraloire paraissent indépendantes d’excitations mécaniques SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 339 directes. Un Crabe passif (Xanthe) placé dans une attitude active (attitude de la marche, ou de la défense) acquiert immédiatement les renversements qui caractérisent ordinairement l’état d'activité ; il y a là un phénomène que les médecins qualifieraient de purement nerveux. Dans cette catégorie, il faut placer aussi les phénomènes imhibitoires dûs à la peur (Eurynome). Conclusions.— On sait que Core, le chef de l’école néo-lamarc- kienne, a distingué deux sortes d’influences capables d'agir sur les végétaux et les animaux: les influences physico-chimiques, molecular action, physiogénèse, et les influences mécaniques, inolar action, kinélogenèse, el a attribué un rôle prépondérant aux premières dans l’évolution des végétaux, et aux secondes dans celle des animaux. Les recherches que j'ai exposées au cours de ce chapitre démontrent que les animaux swbissent plus particulièrement les influences chimiques, et je prouverai dans la suite de ce travail (2° partie) que les modifications physiologiques déterminées par les variations chimiques du milieu extérieur et du milieu intérieur entraînent des changements morphologiques importants, en sorte qu'il faut admettre, malgré l'opinion de CopEe, que l’évolution des animaux relève à la fois de la physiogénèse et de la kinétogénèse ; un poison, modifiant les éléments histologiques du corps de l'animal, et par conséquent ses éléments musculaires, modifie infailliblement, par la voie des muscles, les mécanismes des appareils, et fina- lement encore le chimisme interne. Pour la compréhension de l’évolution des animaux, l'étude des influences chimiques est donc de la plus haute importance, en particulier celle des poisons neuro-musculaires. Mais cette étude est à peine commencée; toutefois nous devons citer ici, comme susceptibles d'éclairer les phénomènes que j'ai étudiés, les travaux de Log et de son élève Miss E. CooKkE sur les variations chimiques des muscles à l’état de repos et d'activité. S 12. — MÉCANISME DU RENVERSEMENT. Les renversements du courant respiratoire, les oscillations de l’eau dans la chambre branchiale, sont en définitive le résultat de 340 GEORGES BOHN. l'intoxication des muscles respiratoires par des poisons variés, autrement dit des dyspneées toxiques (1). Les médecins ont étudié des dyspnées de cette nature chez l'Homme; ils ont montré, en particulier, l'influence des poisons alimentaires et bactériens et celle de la fatigue sur les dyspnées des cardiaques ; toutefois ils restent encore dans une grande incer- titude au sujet du mécanisme même de ces dyspnées, car son étude offre des difficultés très grandes, que j’ai rencontrées également chez les Crustacés. Les muscles des deuxièmes mâchoires constituent deux systèmes: un premier système, moteur des arlicles basilaires, un deuxième, moteur exclusivement de l’exopodite, qui est transformé en lamelle respiratoire (scaphognathite); ce sont des fibres musculaires remarquablement striées et disposées en une sorte d’éventail, parfois sur une seule assise. On conçoit qu'il soit difficile de mettre en évidence les variations chimiques de muscles d’une si faible masse. Il est assez difficile également de déterminer la part qui revient à chacun des deux systèmes dans les mouvements si variables du scaphognathite. J'ai fait à ce sujet des observations sur les Crabes, de grande taille malheureusement, Carcinus, Cancer et Maïia, après l'ablation du rebord ptérygostomien, ablation qui, en ralentissant les battements de l'organe permettait de les observer plus facilement. Chez le Carcinus mœænas PENNANT, j'ai constaté deux sortes de mouvements superposés : 1° des mouvements d'ensemble du scapho- gnathite, quis’élève et s'abaisse, sous l’action des muscles basilaires; 2° un mouvement ondulatoire se propageant ou d’arrière en avant (courant direct) ou d'avant en arrière (courant inverse), ou même alternativement dans un sens ou dans l’autre (mouvement oscilla- toire) ; le sens de la propagation semble dépendre en grande partie des fibres musculaires en éventail, car la section partielle a déter- miné fréquemment le renversement. Chez les Maia, j'ai décrit déjà plus haut (Voir p. 334) trois sortes de battements : 1° battements directs ; 2° battements incomplets et isolés; 3° battements inverses complets et en série; on peut (1) J'ai déterminé également des dyspnées toxiques chez les Crabes au moyen de l'alcool et d’autres substances chimiques. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 341 provoquer facilement un battement inverse, en excitant légèrement avec la pointe d'une aiguille les fibres antérieures de l'éventail. Chez les Cancer (Voir fig. 65), enfin, j'ai constaté : 1° des mouve- ments de bombement et d’aplatissement du scaphognathite, dûs à une sorte de balancement d’une pièce chitineuse &« b € par rapport à la tige à d disposée obliquement sur la colonne d'attache, et ame- nant des variations de l’angle « b d; 2° des mouvements du lobe antérieur résultant du muscle en éventail, 2 ; 11 semble que le renver- sement, qu'on peut provoquer, soit dû à une combinaison différente des variations de l'angle & b d'et de londe musculaire qui se propage à la surface de m. A Arcachon (octobre 1898) j'ai Fi. 65. — Schéma du scaphogna- appliqué la méthode des inscriptions thite du Cancer pagurus L. … .., x ee be gd l'étude des mouvements du sca- épaississements chitineux. phognathite, chez ces trois Crabes, qui sont les seuls qui supportent le contact de la pointe de l'épingle fixée à l’un des tambours conjugués. J'ai obtenu en particulier, avec le Carcinus mœnas PENNANT, le tracé suivant, en appuyant la pointe sur le muscle en éventail. NAN NES SN PSN Fic. 66. — Tracé des mouvements du scaphognathite chez le Carcinus mænas PENNANT, pendant une période de renversement. — 4 battements ordinaires, suivis de 8 battements inverses (1 lent, 4 rapides, 3 lents) et d'un arrèt prolongé. A chaque renversement, il se produit en général : 19 4 battements rapides et différents des battements normaux ; 2° 3 battements lents et différents des précédents ; 342 GEORGES BOHN. e 3 Un arrêt plus ou moins prolongé. On voit que je n'ai analysé que fort incomplètement les mou- vements spasmodiques du scaphognathite (1). S 13. — DES MOUVEMENTS DU SCGAPHOGNATHITE DANS LEUR RAPPORT AVEC LA PHYLOGENIE. Il nous reste à rechercher si les variations des mouvements du scaphognathite ont quelques relations avec l’évolution phylogénique du groupe. Les mouvements irréguliers du scaphognathite doivent être considérés comme dûs à des intoxications variées ; or, on entrevoit maintenant le rôle que celles-ci ont joué dans l’évolution des animaux, évolution qu'on pourrait ainsi regarder en grande partie comme la résultante de phénomènes pathologiques, se succédant parfois dans un ordre déterminé, mais d’autres fois purement accidentels. D'autre part le renversement du courant respiratoire a pour effet immédiat de soulager le scaphognathite (Voir Chapitre IV, p. 270); or, cet organe s’affaiblit manifestement au cours de l'évo- lution. | Chez les Macroures (Natantia et Homaridés), à carapace (chambre branchiale) allongée, on observe des chasses d’eau en arrière, plus ou moins espacées et plus ou moins affaiblies, accom- pagnées souvent de mouvements divers de la carapace et des appendices. Dans un certain nombre de groupes (Anomoures) qui dérivent d'une souche voisine de celle des Homaridés, on constate un (1) Jozver et ViALLANES [D, d, 93]ont enregistré sans s’en douter, avant 1895, les renversements du scaphognathite. En effectuant leurs tracés pléthysmographiques du cœur de Tourteau, ces auteurs ont mis en évidence l'influence adjuvante des mouvements respiratoires sur la circulation de retour ; chaque mouvement du scaphognathite retentit sur la pression du sang dans la chambre péricardique ; or « les tracés 1 et 2 de la figure 5 montrent qu'il se produit périodiquement, toutes les minutes environ, Sous l'influence des mouvements respiratoires, une grande oscillation de pression (a à 6) dans la cavité péricardique ». J’attribue cette oscillation au renversement du courant respiratoire qui a pour effet de comprimer les branchies et de faire refluer le sang vers le cœur. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 343 raccourcissement progressif de la longueur de la chambre bran- chiale, ce qui conduit aux Brachyures. En même temps, les renversements, ou bien acquièrent une durée plus longue (renversements prolonges),.ou bien se répètent à intervalles rapprochés (ce qui donne lieu aux #o0ouvements oscillatoires) ; c'est ce que nous avons constaté chez les formes terminales des Paguridés, des Galathéidés (Porcellanes), des Palinu- ridés (Scyllares) et chez certains Crabes primitifs. L'évolution des Crabes est particulièrement intéressante; chez les formes primitives, on observe facilement trois tendances: 1° la tendance oxystomienne, tendance aux mouvements oscillatoires de l'eau, à la constitution d'orifices respiratoires antérieurs et à la réduction de la formule branchiale ; ‘? la fendance corystidienne, tendance aux renversements prolongés, à la constitution d’une chambre proslomiale pour la filtration de l’eau et à la conservation des branchies ; 3° la fendance conversatrice, tendance à l'opercu- lisation pure et simple du cadre buccal par les pattes-màchoires externes. Il semble que tous les Crabes se soient engagés au début dans la voie d'évolution des Oxystomes, c’est-à-dire qu'ils aient éprouvé pendant une durée plus ou moins longue l’action de l’ammoniaque ou d’autres poisons analogues qui leur auraient fait perdre en partie les branchies ; dans tous les groupes, en effet, on constate chez les formes manifestement les plus primitives, une tendance au rétrécis- sement du front et de la région prostomiale et à la réduction bran- chiale, tendance qui s’est réalisée complètement chez les Oxystomes. Beaucoup de Crabes, fuyant au bout d’un temps variable cette intoxication, se seraient adaptés à la vie dans le sable, adaptation corystidienne et auraient acquis les renversements prolongés. Certains, enfin, une fois ces renversements acquis, s’en sont servis pour mener une autre vie, la vie littorale ou même la vie aérienne, et alors ont manifesté des retours aux caractères des ancêtres. Les Corystes et les formes voisines ont le front étroit; chez les Atelecyclus ce rétrécissement est déjà moins prononcé; et il disparait complètement dans la série des Cancer. Toutes ces formes ont évolué ensuite dans le sens corystidien ; mais chez les Atelecyclus et surtout chez les Cancer les tendances conservatrices auraient finalement pris le dessus. Si les Portunidés et les Xanthidés primitifs sont fort peu oxystomiens, en revanche ils 344 GEORGES BOHN. ont souvent des caractères corystidiens plus ou moins marqués, acquis sans doute dans une période de vie fouisseuse qui se perdent au cours de l’évolution, surtout dans le second groupe. Les Lambres, au contraire, auraient évolué au début dans le sens oxystomien et non dans le sens corystidien, pour revenir ensuite aux tendances conservatrices. Les Dromiacées, voisins des Dorippidæ (Oxystomiens), ont des ressemblances frappantes avec les Oxystomes les plus primitifs, mais n'ont pas évolué dans cette voie, ni dans la voie corystidienne, ils sont restés homariens; le scaphognathite de ces animaux sédentaires étant demeuré insensible aux intoxications internes et externes, ainsi que les branchies qui ont été conservées beaucoup plus que chez les autres Crabes. | Le tableau suivant résume ces quelques hypothèses que je discuterai en partie dans la 2° partie de ce travail. Tendance corystidienne 7 Uxystomes Dorippes Corysthdes Aleleceyelus Nc ee Haine Lambrus Xanthides RL ns + O xyrhynque S Dromiaces alyonichus Cyclomel opes SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 349 CHAPITRE VI. Etude physiologique des exopodites des pattes-mâchoires. J'ai montré précédemment [D, a, 99] que les exopodites des pattes- mâächoires aident l’exopouite de la deuxième mâchoire (scaphogna- tlite) dans la production du courant respiraloire. De nombreuses observations faites depuis lors m'ont confirmé dans cette manière de voir. « Souvent on voit battre au côté du cadre buccal, au point où le courant sort de la chambre branchiale, les exopodites des pattes- màchoires ; ils continuent la tâche du scaphognathite, prenant l'eau amenée jusqu'à eux par cet organe pour la rejeter de diverses façons loin de l’animal; leurs mouvements rapides, saccadés, discontinus, bien que le plus souvent unilatéraux (ils s'arrêtent d'un côté pour reprendre de l’autre), rappellent ceux du scapho- gnathite [D, a, 99]. I. Ressemblance fonctionnelle entre les exopodites des pattes-mächoires et le scaphognathite. — Cette ressemblance est frappante chez la Langouste, où les exopodites des maxillipèdes sont transformés, comme le scaphognathite, en lamelles ondu- lantes ; en réalité, chez ce Crustacé, quatre scaphognathites battent de chaque côté dans le courant expirateur. Toutefois les battements des exopodites ne sont pas toujours aussi constants que ceux du scaphognathite. Chez les Galathea strigosa FABR. où les mouvements du scapho- gnathite, suppléés par ceux de la carapace, sont faibles et irréguliers, il en est de même des mouvements des exopodites. Je l'ai constaté sur des individus de grande taille, parfaitements vivants, provenant du golfe d'Hyères (Tamaris, septembre 1899): les battements du scaphognathite se produisaient par séries de 3 ou 4, séparées par des repos courts ou rarement prolorgés, ceux des exopodites 3 et 2 avaient lieu simultanément des deux côtés, par séries de 4,5, 6 ou 7 battements, séparées par des arrêts courts en général; des arrêts 346 GEORGES BOHN. plus prolongés avaient lieu quand les endopodites correspondants se rapprochaient de la ligne médiane ; une fois un de ces arrêts coïncida avec un des mouvements de la carapace. Chez les Pagures, bien que les mouvements des exopodites soient en rapport avec le genre de vie si particulier et les diverses attitudes de ces animaux (Voir plus loin), on constate que si le scaphognathite a une allure constante (Æupagurus bernhardus L.. de grande taille), les palpes exopodiaux battent régulièrement d’un côté ou de l’autre, tandis qu’à l'allure variable du scaphognathite sont associés des battements irréguliers et inconstants. Il en est de même des Crabes: chez les Dromia (St-Vaast, septembre 189$ et Endoume, septembre 1899), si remarquables par l'allure régulière de leur scaphognathite, les exopodites des maxilli- pèdes 1, 2 et 3 battent constamment d'un côté ou de l’autre, régulièrement et avec force, balayant l’aire prostomiale, et même (3) s'engageant dans la fente siluée entre le rebord ptérygostomien et la pince correspondante; — chez les Calappa (Endoume, septembre 1899), où l’eau entre et sort alternativement par les orifices antérieurs caractéristiques des Oxystomes, les battements exo- podiaux ne se produisent que très rarement, et pendant des périodes très courtes, toujours du même côté semble-t-il; — chez les Carcinus (Wimereux, août 1899) l'allure des exopodites est aussi variable que celle du scaphognathite : 1° les pattes-màchoires étant écartées du cadre buccal, et le courant respiratoire s'échappant en avant par une large fente prostomiale, trois fouets battent d’un côte ou de l’autre, mais par intermiltences ; 2 les pattes-mâchoires se rapprochant et rétrécissant cette fente, que le courant reste direct ou qu'il se renverse, on observe toujours une immobilité absolue des fouets. Nous retrouvons cette inconstance d’allure chez les autres formes à renversements prolongés, Portunes, Xanthes, Pilumnus, Grapses. Chez les Portunus puber L. et les Portunus arcualus LEacx, on observe souvent que les pattes-mâchoires d’un côté et de l’autre ont des positions asymétiques ; c’est du côté où la patte-màchoîre externe est la plus écartée que se produisent les battements exopodiaux. Chez les Portunus corrugatus PENNANT, formes actives des profondeurs et à renversements, j'ai observé (Endoume, 1 octobre 1899) un parallélisme complet entre les variations SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 347 des imouveñnents du Scaphognathite et ceux des fouets exopo- diaux. Exp. Portlunus corrugalus PENNANT. Marseille. 12 octobre 1899. 1° Animal renversé, front émerge. Courant continu faible. Battements intermittents. Arrêt prolongé. Arrêt. Courant continu faible. Battementsreprennentpar instants. Mouvements généraux. Courant continu assez Battements presque cons- intense. tants et vigoureux. 2 Arrière de la carapace émergee. Arrêts ou courantrenversé Battements intermittents, vigoureux. 30 Anämal libre ; position naturelle : immersion complète dans de l'eau de mer pure. Pattes-màächoirestrès abaissées. Courant continu. Battements continus vigoureux. Arrèts de t. en t., exces. courts. Pattes-mâchoires en mouvement. » Battements s’accentuent et de- viennent plus vigoureux. I. Influence du genre de vie sur les mouvements des exopodites des pattes-mächoires. Les mouvements des exopo- dites sont, encore plus que ceux du scaphognathite, sous la dépen- dance du genre de vie. 1° Vie nageuse. — Chez les Crustacés qui ont conservé la vie nageuse de la larve, les exopodites des maxillipèdes ont gardé quelque peu l'allure des rames exopodiales larvaires. Chez la plupart des Palémons ïls battent très rapidement d'un côté ou de l'autre, et ont peut-être comme chez la larve Mysis un rôle dans le déplacement latéral de ces animaux. 2" Vie pagurienne. — Chez les Pagures, ces exopodites fonc- ionnent en général avec une grande activité, et d’un seul côté également ; ils chassent l’eau qui sort de la cavité branchiale alter- nativement d'un côté ou de l’autre, et au loin, de façon qu'elle ne rentre pas immédiatement, encore toute chargée de CO?, dans la coquille ; chez la larve, l’activité de ces organes est également très 348 GEORGES BOHN. grande, ils constituent les trois paires de rames de la Métazoë, qui, comme chez les larves Mysis d’ailleurs, ont pour but, outre leur rôle natatoire, de renouveler l’eau à l’extérieur de l’animal ; cette seconde fonction seule à été conservée chez les Pagures adultes. 3° Vie fouisseuse. — Chez les formes qui S'adaptent progres- sivement à la vie fouisseuse, les exopodiles perdent de leur importance fonctionnelle et morphologique, et cela déjà même chez la larve. Chez les Homaridés, le exopodites ont des mouvements faibles ; chez le Homard, ils ondulent le long du bord du branchiostégite, symétriquement d’un côté ou de l’autre ou non; chez les Nephrops des sables, les exopodites, courts et faibles, ondulent de même, mais seulement par intermittences. Les exopodites des maxillipèdes externes ont disparu au cours même du développement larvaire des Thalassinidés : chez la larve Zoë qui sort de l'œuf, les troisièmes pattes-màchoires restent longtemps à l'état de bourgeon, et ne déve- loppent pas d’exopodites : c’est là un bel exemple de l'influence du mode de vie de l'adulte sur la larve. Parmi les Pagures, il en est un qui s’est adapté à la vie fouis- seuse, c’est le Diogenes pugilator Roux. Les observations que j'ai faites sur cet animal, à Wimereux (août 1899) et à Tamaris (septembre 1899), m'ont montré une d'minution notable des mou- vements exopodiaux. Quand l'animal est enfoui dans le sable, les _pattes-màchoires immobiles apparaissent dans un espace limité par les articles basilaires des antennes ; les attouchements des grains de sable contre les endopodites poilus des maxillipèdes 2 peuvent entrainer cependant, outre le frottement l’un contre l’autre de ces endopodites, les mouvements des exopodites correspondants et de ceux de la paire suivante (exopodites poilus également), et cela simultanément des deux côtes : il en résulte le nettoyage de toutes ces pièces. Chez d’autres individus, moins enclins à s’enfouir, les exopodites (2 principalement) battent constamment, des deux côtés, mais sans énergie, Chez les Atelecyclus, Crabes fouisseurs, la règle est, comme je l'ai montré | C, 99] l'immobilité absolue des pattes-mâchoires. Chez les Cancer pagurus |. qui en dérivent, les battements, très faibles, n’ont lieu que d’un côté à la fois. Nous avons vu déja SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 349 combien irréguliers sont les battements chez les Portunes, les Xanthes, elc., qui dérivent vraisemblablement aussi de formes fouisseuses. II. Influences nerveuses qui agissent sur les mouvements des exopodites des pattes-mâchoires. — Les mouvements des exopodites, comme ceux du scaphognathite, sont soumis aux influences nerveuses. Ici on peut mettre en évidence tout particu- liérement celle de la locomotion. l° Pagures. — Les Pagures se prêtent facilement à celte démonstration. Chez les Æ£upagurus bernhardus L., on constate que les exopodites d’un seul côté chassent loin de l'entrée de la coquille l’eau qui sort de la chambre branchiale. Il n’y a donc rien d'étonnant à ce que, la position de l'animal ayant changé par rapport à la coquille, les mouvements des exopodites se modifient à leur tour. Exp. Eupagurus bernhardus L. Arcachon. 3 octobre 1898. Les pinces étant en extension en avant, des frottements sur la face munie de tubercules ont souvent pour effet Immédiat de changer les mouvements exopodiaux ; un point plus sensible encore est la membrane articulaire située entre les méropodites et les carpo- podites: dès qu'on la touche avec une pointe, les mouvements cessent du même côté et reprennent de l’autre. Cette expérience rend compte de l'observation suivante. Quand l'animal fléchit la pince droite sur elle-même, immédiatement les palpes exopodiaux du côté opposé s’animent de mouvements intenses, continus et rapides; tant que la flexion persiste, ces mouvements persistent aussi, sauf toutefois si en même temps il se produit une flexion prononcée de la pince gauche. À Tamaris (septembre 1899), j'ai observé un autre £upagurus, l'E. anachoretus Risso, qui présente des arrêts fréquents, avec reprise à droite ou à gauche. Les battements, d'habitude wnilaléraux, ont lieu simultanément des deux côtés quand l’animal remue à la fois ses deux pinces ; en immobilisant une des pinces, on provoque des battements du même côté. 390 GEORGES BOHN. Exp. Æupagurus anachorelus Risso. Pince droite plus forte que pince gauche. Tamaris. 13 septembre 1899. Pince droite immobilisée en extension. Pince droite à demi immobi- lisée. Pince gauche immobilisée en [æ] à droite Battements continus pendant plus de 2, Battements continus pendant plus de 2%. Pas de battements. à gauche Quelques battements de t. ent. Battements plus pro- longés. Baitements continus; extension. qqs arrêts seulement. J'ai constaté des faits analogues chez une forme des profondeurs, le Pagurus Striatus LaTr. (Endoume, septembre 1899); les fouels des exopodites 3 et 2 sont développés et larges ; ils battent d'un côté, quelquefois des deux, mais alors ils sont limités aux xopodites 2. Les attouchements des membranes articulaires et les mouvements des pinces ont une influence. Les battements sont surtout irréguliers, quand l'animal est en train de se dégager de sa coquille, et effectue par conséquent des flexions variées des pinces. L'influence de l’éxsotion intervient chez les Paguristes mnaculatus Risso. Exr. Paguristes maculatus Risso. Endoume. 20 septembre 1899. Animal à demi-sorti de sa coquille; ouverture faisant face à l'observateur. {re minute — maxillipèdes en mouvements — quelques arrèts Je ar Far N 3e immobilité absolue — un seul arrêt “a ame re e 5e 5 1 — arrêts provoquées J'ai provoqué des arrêts des fouets exopodiaux à volonté pendant ces deux dernières minutes, rien qu’en projetant de temps en temps la très légère ombre de mon doigt sur les yeux de l'animal. Or, j'ai indiqué plus haut (p. 216), que lorsqu'une ombre est pro- jetée sur les yeux d'un Pagure, elle provoque. par réflexe, sa rétraction dans la coquille et les mouvements des pinces associés. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 3) Dans l'expérience actuelle, l'ombre étant très légère, le réflexe n’aboutit pas, et malgré cela, l'arrêt des fouets se produit comme si le mouvement de rétraction et ceux des fouets avaient eu lieu effectivement. On est donc conduit à admettre dans le cas présent l'existence d’un énflux nerveux commandant les mouvements des pinces, mais insuffisant à les produire. Ainsi, les moindres gestes de l'observateur, pourvu qu'ils produi- sent de l'ombre, retentissent sur les mouvements des fouets exopo- diaux ; il y a là une cause d'erreur dans les observations, qu'il faut écarter. 20 Portunes. — Chez les Portunus puber L., les mouvements des fouets exopodiaux ont lieu d’un seul côté. La flexion des pinces et l’aitouchement de leurs membranes articulaires n’ont pas d'effets sensibles sur eux. Mais si l’on porte l'attention sur les appendices qui effectuent les mouvements les plus habituels, c’est-à-dire les les pattes postérieures natatrices, on constate qu'en effectuant l’attouchement sur la membrane articulaire située entre l’article basilaire et le premier article de l’endopodite, on détermine le mouvement des fouets du même côté et leur arrêt du côté opposé. ExP. Portunus puber L. Arcachon. 3 octobre 1898. Mouvement constant à droite. Atiouchement patte natatrice gauche. Arrèt. Reprise à gauche: mouvem. discontinu. Attouchement patte droite. Reprise à droite : mouvement continu. 3 Maia. — Ayant examiné (septembre 1899) des Maix de grande taille provenant des fonds rocheux des environs de Marseille, dans les grands bacs de l'aquarium d’'Endoume, j'ai constaté que les battements des exopodites dépendent du Sens de la locomotion (locomotion latérale), et par suite des mouvements d'extension et de flexion des pattes de ces animaux. Les battements ont toujours lieu du côté opposé au sens de la locomotion; quand l'animal arrive à une extrémité du bac, s'il tend à monter contre la muraille qui se dresse sur son côté, les battements restent de même sens mais deviennent beaucoup plus intenses, les flexions et extensions aüg- mentant;, dès qu’il rebrousse chemin, les battements cessent pour reprendre du côté opposé. 32 GÉORGES BOHN. Lorsque l'animal arrive en un point où il peut hésiter sur le sens de sa marche, il décide parfois de se diriger dans une certaine direction, mais le commandement du centre nerveux, trop faible sans doute, n’aboutit pas au déplacement projeté ; malgré cela les exopodites se mettent à battre du côté opposé. Ici encore on doit tenir compte de l’influx nerveux commandant un mouvement, mais insuffisant à le produire. Toutes ces observations mettent bien en évidence les relations entre les battements exopodiaux et les mouvements de translation du corps de Panimnal; 1 faut toujours chercher le point de départ de l'influx nerveux modificateur, soit du côté de l'appendice locomoteur le plus actif, soit du côté du centre nerveux moteur correspondant. Les centres moteurs des anciennes rames exopodiales de la larve auraient contracté des associations nombreuses avec les centres moteurs plus récents. SUR LA BESPIRATION DES DÉCAPODES. 393 CHAPITRE VII : Etude physiologique des épipodites. J'ai indiqué plus haut: 1° que les épipodites font partie du plan ancestral des appendices thoraciques ; 2° qu'ils ne jouent qu'un rôle tout à fait secondaire dans la vection des liquides et que, chez les formes plus différenciées, ils fonctionnent comme des balais pour nettoyer les branchies. Les épipodites ont des rapports intimes avec les branchies ; on peut dire que celles-ci sont fonction de ceux-là. A mesure que les épipodites diminuent de nombre, la formule branchiale se simplifie beaucoup ; ce fait s'expliquera quand le rôle nettoyeur des épipo- dites sera mis suffisamment en valeur ; une branchie qui n’est pas nettoyée s’ensable et doit périr fatalement. Après avoir recherché, par l'étude morphologique, le rôle des épipodites chez les Pénéidés, j'examinerai les variations physiolo- giques et morphologiques de ces organes, 1° chez les Natantia ; 2° chez les Reptantia. S 1. — EPIPODITES DES PÉNÉIDES. Je prendrai comme exemple ce qui se passe chez l'Aristeus antennatus, dont j'ai pu examiner de nombreux exemplaires rapportés d'Alger par M. Diaugr. Si on observe avec soin les flancs épiméraux chez cet animal, on remarque (fig. 67) qu'ils sont divisés par une série de sillons dorso-ventraux ; immédiatement en arrière de chaque sillon, et sur les deux tiers de la hauteur à partir du bord supérieur, la chitine est fortement épaissie et toute couverte, surtout dans le voisinage du sillon, de poils nombreux. Ces poils sont courts ; en général leur pointe est acérée et légèrement courbe; parfois ils sont garnis d'épines latérales très fines, à peine visibles; dans des cas très rares, leur pointe 9 29 354 GEORGES BOHN. étant brisée, ils présentent des épines plus longues et plus fortes. L'ensemble de tous ces poils constitue, au point de vue physiolo- gique, une sorte de brosse. Entre ces bandes fortement chitinisées et poilues/{{), les articles basilaires 1 des appendices, limités par une membrane assez molle, forment de légers renfle- : ments, sur lesquels s’insérent souvent deux branchies (5° segment thoracique), une « pleurobranchie » dont le point d'attache (pl) est assez haut et en arrière, et une « arthrobranchie > (ar) située près du pli articulaire qui sépare le segment 1 du segment 2, mobile. Celui-ci (coxopo- dite) porte un épipodite (ep), à base contournée développant une branchie (podobranchie) (pd) et s’allongeant en une languette molle et poilue, située en avant de la brosse épimérale ({) décrite plus haut. FriG. 67. — Aristeus antennalus. À, flancs Lorsque les membres re- épiméraux et articles basilaires des muent, les épipodites corres- membres (5° segment thoracique) : pondants et les podobranchies phare pd; pie GRO ANREU RE ssE AE branchies ; ep, épipodite ; {, brosse épimérale. B, poils des brosses épi- ou moins dans leur mouve- mérales. C, poils des épipodites. ment les autres branchies ; tous ces organes forment en eflet des tubes cylindriques tangents les uns aux autres suivant leurs génératrices. Les branchies ainsi agitées abandonnent les particules étrangères qui s’y sont attachées, et celles-ci, entraînées en avant par le courant respiraloire, sont obligées de traverser les barrières transversales poilues constituées par les épipodites, qui à leur tour les abandonnent par leur frottement contre les brosses épimérales, s’agilent, et entrainent plus SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 30) S 2. — KEPIPODITES CHEZ LES Natantia. Chez les Natantia, les épipodites, ainsi que les arthrobranchies, subissent une réduction progressive. Le tableau ci-contre, résumé des recherches de nombreux carci- nologistes et de M. CourTiÈRE |A, 99] en particulier, indique les variations relatives aux Alphéidés, aux Pandalidés, aux Palémo- nidés et aux Hippolytidés. La formule branchiale est la suivante: 1 2 3 4 D 6 ÿl 8 JSUPO NS NO EE OR GE) Ze De 6 c’ CA & c’ AE NOTES REA Ne nie ele oeie + A Te done CARD Set etre RAS eee re sentant. dote fase nat eee CET LU I ARE RE fasn | CENTS sais Nu Re Les épipodites sont représentés, d’après COUTIÈRE, Souvent par un tubercule {{) et un fouet (f). En général il y a 5 pleurobranchies {P1. br.) ; une 6°, 3c”, existe chez les formes marquées dans le tableau par (6). L’unique podobranchie 24 manque chez les formes marquées dans le tableau par (O). NOTA. — Les Hippolytidés sont inscrits en italiques, et les Palémonidés en petites capitales. 356 GEORGES BOHN. | 6 ARTHRO- 5 ARTIHROBRANCIIES | # ARTHROBRANCHIES À ARTHROBRANCHIE O | BRANCHIES | mme me 8 épipodites |Nauticaris | Merhipyolyte Caridion Gordoni ..... (7) Marionis | Agulhahensis Lysmata seticauda (6). (BATE)(6)| (BaTE) (6) Pandalus..... Gariinar. Mine CNT Heterocarpus . Betæus (— un)......... Parabetæus Recent JOUSSeAUMEAT 60-00 Amphibetæus.......... AUTOMALCE ee Creer eL : Alpheopsis (— un)..... À RACIILS RER SRE : Tous les Alpheus(qqf.6) 7 épipodites H. (Spirontocaris)| (6) SDENUS . "CR | Athanas? "708 b. Athanopsis........| 6 épipodites Chorisnus (BATE)...... Hippolyte turgida.| (D) H. Gaimardi .....| 1. polaris 7008 : H. aculeatus......| | | un Alpheopsis......... Arete dorsalis.….….Î] UND ELRUSER EEE ARERTE 2 épipodites Amphiplectus| Alope palpalis ......... Virbius varians (BATE).. PALÉMONIDÉS ( — 6) ... | V. viridis... (CiNEMOUNELER AI USE SYHAÏDREUS LR ere Sete OVER) ER TRE Tee { épipodite Bythocaris Pageri. | B'ALEUCOPIS RER (O) B. simplicirostris.. \ VAFIATIONS DU NOMBRE DES ÉPII ODITES ET DES BRANCHIES CHEZ LES E£ucyphota (d'après CouTiERE, A, 9%, p. 276-286). SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 397 Je n’insisterai ici que sur la forme et le rôle remarquables des épipodites chez les Alphéidés, et citerai les travaux de COoUTIERE [A, 991. « Les épipodites, dit-il, se montrent d’une façon très constante chez les Alphéidés. Ils se composent de deux parties bien distinctes : l’une est un petit mamelon conique ou hémisphérique, portant à son sommet un nombre variable de longues et fortes soies finement plumeuses et flexibles, que l’on trouve, à l'ouverture de la chambre branchiale, insinuées entre les branchies et même entre leurs lamelles (épipodile de PAuLSoN) ; le reste de l’épipodite (exopodile de PAuULsSoN) est un petit appendice en forme de crochet emmanché, parallèle au plan sagittal du corps... C'est là une disposition qui a été souvent décrite, par Jory chez Caridina, par HiLGENDORF chez Alpheus, par CLAUs dans le même genre et chez plusieurs Hippo- lytidés. Elle a pour but, comme l'ont fait ressortir les deux derniers auteurs, d’agiter dans la cavité branchiale les soies plumeuses, embrassées par le crochet de l’épipodite qui précède ». Chez les Pandalus, les Caridina, les Alpheus,ïil y a autant de tubercules sétigères que de crochets; à un crochet correspond toujours un tubercule séligère ; le 8° segment possède un de ces tubercules, car à ce niveau arrive le crochet du 7° segment; le 3° segment ne possède en revanche qu'un crochet. Le crochet et le tubercule sont portés tous les deux par le coxo- podite et possèdent par suite la valeur d'une mastigobranchie. « L'homologation du crochet récurrent avec un épipodite de Penñeus, dit CouTIÈRE, est facile, et peut même se pousser assez loin ; le « manche » du crochet existe chez Peneus sans modification ; quant aux deux branches du crochet lui-même, elles correspondent à la bifurcation de la lame foliacée présente chez Peneus, surtout chez les formes où la branche postérieure du crochet se relève verticalement sur une portion de son étendue, rappelant ainsi la disposition primitive de cet épipodite (Pandalus, Lysmata, plusieurs Hippolytidés) >. « Reste le tubercule sétigère. Il apparaît lorsque la lame foliacée épipodiale se transforme en crochet, et dans ce cas seulement. Aussi manque-t-il chez tous les Pénéides et chez les « Reptantia » qui en sont dérivés (Boas), car dans ces formes, y compris celles où l'épipodite se réduit à un sac cylindrique, bifurqué ou non (S{enopus, Sicyona, Spongicola) il ne porte jamais de crochet. Le tubercule 398 GEORGES BOHN. sétigère apparait ainsi comme une formation secondaire propre aux Eucyphotes et n'ayant en apparence pas d'homologue, soit parmi les « Reptanlia », soit parmi les Pénéides ». L'auteur cherche ensuite à homologuer l’épipodite des Eucyphotes avec une branchie : les lamelles branchiales seraient devenues des soies, le rachis qui les supporte une tige terminée par un crochet ; et l’ensemble du tubercule sétigère et du crochet sur chaque segment aurait la valeur d’un épipodite complet ; les 3° et 8 segments n'auraient que des épipodites incomplets (crochet dans un cas, tubercule dans l’autre). Je considére cette opinion comme contraire à la réalité. CoutiÈRE a bien vu en comparant le crochet et son manche à un épipodite de Pénéidé réduit ; il a eu grandement raison de voir dans le tubercule sétigère une formation secondaire propre aux Eucy- photes ; mais pourquoi alors a-t-il voulu faire de ce tubercule une partie d’un appendice ancestral, une mastigobranchie ? Voici comment j'explique les choses. L'extrémité d'un épipodite en forme de crochet, en oscillant, vient frotter l'article basilaire 2 (coxopodite) de l’appendice suivant et le frottement longtemps répété a pour but de développer un tubercule, c’est-à-dire une saillie de chitine, et sur celui-ci des poils. Il se passe là quelque chose de semblable à ce que nous avons rencontré chez les Aristeus (Voir p. 354 et fig. 67) où toutes les régions des flancs épiméraux frottées par les épipodites en lanière se transforment en bandes épaissies couvertes de poils. Au contraire, chez les Alphéidés et chez beaucoup d'Eucyphotes, les épipodites, plus courts, frottent les coxo- podites et c’est sur ceux-ci que se développent des saillies couvertes de poils, les tubercules sétigères. Les bandes sétigères épimérales et les fubercules sétigéres coxopodiaux auraient la même origine : ils seraient dûs au frottement des épipodites contre les flancs épiméraux et les coxopodites ; ils auraient le même rôle, celui de nettoyer les épipodites. Est-ce une raison parce que le hasard a fait porter les frotlements dés épipodites contre les coxopodites, de qualifier la formation sétigèred’épipodite? D'ailleurs ilfautremarquer que chez les Eucyphotes les épipodites des premiers segments thoraciques ne viennent pas frotter les coxopodites et que par suite il ne se forme pas de tubercules sétigères sur ces segments. Il faut remarquer également que, si le 8° segment ne possède pas de véritable SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 399 épipodite, 1l offre un tubercule sétigère, justement parce que le 7° épipodite vient frotter le coxopodite du 8° appendice. Je rejette donc l'opinion de CouTikRe qui attribue 8 épipodites aux Alphéidés ; le tubercule du 8° segment n’étant pas un épipodite, il faut considérer le 7 épipodite comme le dernier, et diminuer dans le tableau précédent (p. 356) d’une unité tous les chiffres indiquant le nombre des épipodites. S 5. — EPIPODITES CHEZ LES Replantia. Ainsi les formations sétigères des flancs épiméraux et des articles basilaires dépendraient des frottements des épipodites ; de même la forme et l'ornementation (saillies chitineuses, poils) des épipodites doivent être fonction des frottements et par suite des mouvements imprimés à ces fouets. Or, les mouvements des épipodites dépendent de ceux des appendices thoraciques, pattes en particulier ; il n’est donc pas étonnant que chez les formes marcheuses {Replantia) les épipodites aient conservé une importance plus grande que chez les formes nageuses (Æucyphota). 1. Homaridés-Thalassinidés.— Homarus vulgaris M.-Enw.— Chez les Homards, on retrouve des épipodites complets comme chez les Pénéidés ; ils forment de véritables cloisons entre les divers groupes branchiaux ; ce sont des lames qui reçoivent dans leur conca- vité antérieure les branchies : & en avant, b et € en arrière, € visible cependant partiellement sur le devant de la lame; en arrière de chaque lame épipodiale se trouve un léger sillon. J'ai porté mes observations sur le Homard (St-Vaast, septembre 97). Aprés avoir pratiqué une fenêtre dans le branchiostégite en regard des épipodites 5 et 6, j'ai constaté que quand les pattes remuent : 1° La' face postérieure de l’épipodite 5 frotte sur la face antérieure de la branchie 6 4 qui est située immédiatement en arrière (frotte- ment suivant la ligne du sillon) ; 2° La face externe de la branchie 6 « et le bord externe de l’épi- podite 5, qui est couvert de poils, frottent contre la face interne du branchiostégite ; 360 GEORGES BOHN. 3° La base de l’épipodite 5, couverte de poils, frotte contre l’article basilaire de la patte 6, qui est également poilu. L'animal étant dans de l’eau carminee, la matière colorante se dépose surtout sur les articles basilaires en arrière des épipodites ; ce sont là les points d’entrée des courants afférents qui montent ensuite dans les sillons en arrière des épipodites. J'ai eu l’idée de froisser l’épi- podite 6; l’article basilaire 7 et d'une manière générale tout le sillon situé en arrière de l’épipodite 6 se sont alors fortement chargés de carmin, contrairement à l’article basilaire 6 et au sillon situé en arrière de l’épipodite 5. D'une façon générale, la face externe des branchies se teinte fort peu, sauf quelquefois la ligne de séparation des branchies « et €, ce qui montre qu'il VO là une fente Fic. 68-69. — Homarus vulgaris par laquelle l’eau s’insinue. M.-Enw. Schéma d'un groupe En réalité les frottements sont in = ne A. ee beaucoup plus complexes que ceux transversale. &, b,c, c”, diverses que nous avons indiqués plus branchies ; ep, épipodite. haut. Quand l’épipodite n se déplace, il entraine les branchies ar, €”, et même 4", qui frottent, sans doute entre elles, mais d’une façon manifeste sur c?, qui est plus profonde ; l’épipodite n frotte, un peu sur €, mais surtout sur la face antérieure et le bord inférieur de la branchie bn (l'épipodite se recourbant un peu sous D). Ces frottements sont en rapport avec la marche de l’eau dans la chambre branchiale, marche qui est la suivante : 1° L’eau pénètre en glissant sur les articles basilaires dont les poils assez développés s’intriquent avec ceux des bases épipodites (et qui par conséquent sont comparables à ceux des tubercules sétigères) ; SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 361 2° Une partie de l’eau monte dans le sillon superficiel en arrière de l’épipodite, pour se diriger ensuite en avant et former une nappe entre les branchies et le branchiostégite ; cette eau doit passer sur les bords externes filtrants des épipodites, et sur les aspérités qui se dressent sur la face RE —— externe de la podo- ie branchie(extrémités plus ou moins saillantes des —— filaments de &), aspérités qui viennent rencontrer des poils très développés garnissant la face interne du branchiostégite ; cer- tains de ces poils offrent une ornementation en FrG. 10. _ Homarus vulgaris M.-Enw. Ornemen- Erosse d’un côté et en tation des poils qui garnissent la face interne NE L : FE Fi De Let du branchiostégite. scie de l'autre ; d'autres sont ramifiés; d’autres enfin sont comme articulés et présentent des sortes d'épines de distance en distance ; 3° Une autre partie de l’eau s'engage sous lépipodite et sous b, dans un canal profond situé en avant de c” pour donner sans doute naissance à une nappe profonde ; 4° L'eau s’infiltre de la nappe superficielle vers la nappe profonde, et inversement de la nappe profonde vers la superficielle, par des sillons divers (&c en particulier). Ainsi le nettoyage présente ici ce fait remarquable qu'il se fait par une sorte d’auto-brossage: les parties de même origine frottent les unes contre les autres, les faces postérieures des épipodites contre les branchies qui précèdent, les bases des épipodites (encore un peu à la manière des Eucyphotes) contre les articles basilaires des appendices postérieurs ; enfin les branchies frottent contre le branchiostégite. Tous ces mou- vements sont dûs à ceux des pattes thoraciques : chez les Crustaces niarcheurs la locomotion entraine le nettoyage des branchies. Les procédés de nettoiement des branchies sont trop complexes 362 GEORGES BOHN. pour être suffisants, surtout chez un animal sédentaire comme le Homard. Il est vrai que l’enlisement des branchies détermine des réflexes qui incitent le Crustacé, sinon à se déplacer, du moins à faire basculer ses membres. 1° Si l’on excite, avec l'extrémité d’une aiguille, l’une ou l’autre des faces du sillon qui sépare deux groupes branchiaux, n et n +1 (face postérieure de l’épipodite n, et plus sûrement faces antérieures des branchies 4° +1 et b +1) on constate que le membre n + 1 et souvent le membre n + ? réagissent. 2° Si l’on excile la face antérieure de l’épipodite, vers la base, dans le voisinage des branchies & et b, le membre n réagit. Aslacus [luviatilis Auct. — Ces expériences nous ont conduit à examiner avec soin les soies coxules des Ecrevisses, qui viennent former des espèces de réseaux de filaments à la surface externe des branchies, réseaux qui rappellent un peu le feutrage constitué sous le branchiostégite du Homard par les filaments qui en dépendent, — et que j'ai décrits plus haut. Ces filaments ne sont pas plus homo- logues à des épipodites que les tubercules sétigères des Eucyphotes. Fi. 71. — Astacus fluviatilis. Extrémité d’une soie coxale. Gébies et Callianasses. — Chez les Thalassinidés, les épipodites subissent une réduction progressive, et chez les seules formes que j'ai pu examiner à l’état vivant, les Gébies et les Callianasses, ils manquent complètement, ainsi que les podobranchies. I. Palinuridés. — Chez la Langouste, la constitution et le fonctionnement de l'appareil branchial sont les mêmes que chez le Homard : chacune des quatre premières paltes thoraciques possède un grand épipodite, et j'ai pu observer des frottements entre les SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 363 divers groupes branchiaux et entre les diverses branchies de chaque groupe rappelant ceux que j'ai décrits plus haut chez le Homard (Voir page 399). II. Galathéidés et Paguridés. — Chez les Galathéidés et chez les Paguridés, Crustacés qui se cachent en général sous les pierres ou dans les coquilles, les épipodites subissent rapidement une réduction considérable. Le nombre variable des épipodites constitue pour J. BOoNNIER | E,88 | un des caractères importants pour la détermination des Galatheidæ des côtes de France. \ G. squamifera. Epipodites sur les 3 premières pattes thoraciques (1).. © G. nexa. l G. dispersa. Epipodite sur la première patte thoracique seulement. G. intermedia. | G. strigosa. | Munida et Diptychus. NDisi ane else sole ee Or, la Galathée du dernier groupe, G. strigosa FaBr., est la seule qui se prête facilement à l'examen physiologique; je ne fournirai done aucun renseignement ulile sur le rôle des épipodiles chez les Galathées. Chez celles-ci, à la réduction des épipodites correspond un perfectionnement considérable du neltoiement des branchies par les endopodites des pattes thoraciques (Voir le chapitre suivant); les « pattes nettoyeuses » peuvent pénétrer dans la chambre branchiale par l'arrière de la carapace qui se soulève assez fréquemment. Elles pénètrent de même chez les Pagures où la carapace, courte, s'éloigne des flancs épiméraux. IV. Crabes. — Chez les Crabes, la réduction des épipodites se rencontre déjà chez les Dromiacés, qui ont conservé tant de carac- tères homariens. Chez la Dromia vulgaris M.-Ebw., forme très évoluée du groupe, en dehors des trois épipodites des pattes-mâchoires, qui chez tous les Crabes sont adaptés au nelttoiement des branchies, on ne trouve plus qu'un rudiment d’épipodile sur la première patle thoracique. (1) IL y a des épipodites sur les pattes-maächoires 3 et 1, 364 GEORGES BOHN. J'ai noté avec soin le développement et la position des épipodites chez cette espèce. Fig. 72-73. — Dromia vulgaris M.-Ew. 3° et 4° épipodites. L'épipodite de la patte-mâchoire 1, assez bien développé, composé d’une base large et d’un fouet très étroit, balaie la surface externe des branchies. L’épipodite suivant porte la branchie 2 & bien développée; situé en avant des branchies épimérales 3 b + 3 c, il s'insinue plus ou moins sous la branchie 3 b, surtout lorsque, prenant une disposition transversale, il s'incline en arrière. L’épipodite de la patte-mâchoire 3 s'insêre à la base d'une saillie sétigère de l’article basilaire, ne porte aucune branchie {3 «a — 0) et passe en arrière du groupe 3 b +3 c. Le 4° épipodite, enfin, comprend deux branches, l’une courte, antérieure, l’autre plus longue, postérieure, embrassant la base de la branchie 4 €, située immédiatement en arrière de 4 b. Il est intéressant de remarquer que le tubercule sétigère sur lequel s'articule le 3° épipodite est dû vraisemblement au frottement de l’épipodile immédiatement antérieur sur le coxopodite des o% maxillipèdes, et rappelle par conséquent, par son origine, sa situation et son rôle, les tubercules sétigères des Æwcyphota; ce tubercule, situé du côté externe de l’article basilaire, se recourbe en dedans vers l’exopodite, et sa crête supérieure (ligne suivant laquelle s'effectue le frottement) est bordée de longs poils, qui nettoient, non seulement l’épipodite 2, mais aussi la branchie 2 4. Les ép'podites ne jouent évidemment qu'un très faible rôle dans le nettoiement des branchies antérieures, qui sont relativement SUR LA PRESPIRATION DES DÉCAPODES. 365 réduites, sauf 2 a qui, elle, est nettoyée par un mécanisme assez complexe ; 2 € manque, faute de place, semble-t-il; 3 &« manque peut-être parce que le tubercule sétigère a pris sa place ; les groupes 3b0+S3cet 4b + 40csont réduits. En revanche tout le groupe postérieur est bien développé: ces branchies sont les premières qui reçoivent l’eau pénétrant dans la chambre branchiale; elles échappent à l'ensablement, grâce à l'habitat de l'animal et aussi à une disposition toute spéciale des branchies : celles-ci, au lieu d’être appliquées sur le flanc épiméral, sont arquées, et laissent entre elles et lui une sorte de tunnel postéro-antérieur pour le courant respiratoire, canal muni, tout à fait à sa partie postérieure, d’un appareil fi/trant, formé par l’en- chevêtrement de poils nombreux, et dont il serait intéressant de chercher l'origine par l'anatomie comparée. Ceci explique que, chez les Dromies, les maxillipèdes postérieurs auxquels sont annexés les épipodites internes, ne présentent pas ces écarts fréquents que nécessite le nettoyage des branchies. Chez beaucoup de Crabes, au contraire, les mouvements de latéralité des maxillipèdes se répètent assez souvent et sont en rapport avec le mode de vie. A cet égard, il est indispensable de distinguer (en dehors des Oxystomes que j'ai insuffisamment étudiés au point de vue physiologique) deux sortes de Crabes : ceux qui se sont adaptés à la vie fouisseuse au moins pendant une certaine période de leur développement phylogénétique, et ceux qui n'ont jamais recherché ce mode de vie. Dans la première catégorie, on a tendance à placer, outre les Coryslidés, les Cancéridés, les Portunidés, les Xanthidés (sens large) et les Pinnothéridés; dans la deuxième, tous les Oxyrhynques. J'examinerai avec un certain soin les cinq groupes de la première catègorie dans la deuxième partie de ce travail, et je discuterai, en me basant sur l'étude physiologique que j'ai faite, les affinités de ces divers Crustacés. Nous verrons que chez les formes actuellement fouisseuses, comme les Corystidés, les pattes- mâchoires, contribuant à former un appareil filtrant antérieur, les épipodites correspondants, le plus souvent immobiles, n’ont qu'un rôle assez faible dans le nettoyage des branchies. 306 GEORGES BOHN. Il n’en est pas de même chez les Oxyrhynques : chez ces Crustacés, les fouets épipodiaux sont toujours relativement bien développés, et leurs frottements répétés sur les branchies déterminent sur le bord des lamelles la formation des saillies chitineuses de diverses formes, qui constituent, dans leur ensemble, l’'ornementation de ces organes. S 4. — EPIPODITES ET ORNEMENTATION DE LA BRANCHIE. On remarque que d’une façon générale la forme des branchies est sous la dépendance du développement des épipodites. Toutes les fois que les épipodites des pattes thoraciques sont développés et entraînent dans leurs mouvements, non seulement les podobranchies, mais encore les arthrobranchies et les pleuro- branchies, l'axe initial dela branchie produit des filaments en une multitude de points variés et suivant des dispositions assez diverses. Il semble que les axes des branchies étant heurtés constamment les uns contre les autres, les filaments croissent aux points qui reçoivent les chocs les plus répétés. Au contraire chez les formes où les axes des branchies deviennent immobiles, au lieu de branchies en forme de brosses à bouteilles (trichobranchies), on a des phyllobranchies, c'est-à-dire des branchies à lamelles régulières. Cette remarque montre l'importance de la considération des mouvements des branchies chez les Homaridés, et c’est pour cela que j'ai tenu à donner la description que l’on a lue plus haul (Voir p. 399). Chez les Thalassinidés, où ces mouvements disparaissent progres- sivemnet, on trouve des branchies d’une forme toute particulière, qui rappelle cependant un peu celle présentée par les larves des Homards au moment où les branchies sont en train d'acquérir les filaments caractéristiques des Homaridés. La forme de {ichobranchie pourrait être donc considérée, non comme une disposition première, mais comme une désposition acquise par suite de l'adaptation des Pénéidés à la vie marcheuse, adaptation qui aurait été durable chez les Homaridés proprement dits, et passagère chez les Galathéidés, les Paguridés et les Crabes ; en effet dans ces derniers groupes la forme trichobranchie n'est elle-même que passagère. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 367 Je compte développer plus tard ces considérations relatives aux Macroures et aux Anomoures, qui se résument dans le graphique suivant : Adaptation à la vie marcheuse Homarides S Thalassnides (ralathéides Paquridés ET TR Crabes Ayant porté mon attention surtout sur les Crabes, je vais montrer maintenant comment chez eux les frottements des épipodites des pattes-mâchoires contre les lamelles branchiales déterminent une ornementation particulière. Les branchies des Crabes arrivées à leur complet développement sont disposées toutes sur une même surface les unes à côté des autres, et prennent, par pression réciproque, vaguement la forme d’une pyramide quadrangulaire ; les faces latérales par lesquelles les branchies prennent contact sont planes et légèrement inclinées l’une sur l’autre ; la face interne présente un vaisseau saillant dans le plan médian (v. efférent); la face externe est, ou bien plane, ou bien constituée par une dépression médiane (v. afférent) comprise entre des sortes de lobes plus ou moins développés aux dépens des lamelles. Tandis que l’épipodite 1 se déplace sur une surface tangente aux faces externes des branchies, l’épipodite 3 glisse sur une surface 368 GEORGES BOHN. tangente aux vaisseaux internes saillants. Aux points de tangence, les frottements développent des épaississements, des saillies chitineuses, qui dessinent des lignes variées à la surface des branchies. En général les ornements développés sur le vaisseau interne ont la forme de crochets se détachant d'un mamelon plus ou moins prononcé ; du côté de l'insertion de la branchie, ces crochets sont dirigés vers la base de l'organe, du côté de la pointe, en sens inverse; dans la région intermédiaire, il sont absents ou bien ont une direction indifférente. Geci s'explique si l’on considère que le fouet épipodial occupe en général la région moyenne de la branchie, et que ses déplacements se font d'un côté et de l’autre symétrique- ment par rapport à cette région. Les ornements développés sur la face externe sont plus variés ; ce sont en général des tubercules plus ou moins irréguliers bordant les lamelles, ou disposés entre elles, de manière à les maintenir écartées, à les empêcher de se toucher, et à favoriser ainsi l'imbibition par l’eau. Cancer pagurus L. — Chez le Cancer pagurus L., j'ai observé d'une part les mouvements des épipodites (Voir plus haut p. 266) et d'autre part l’ornementation de la branchie et j'ai pu me rendre compte de l'exactitude de l’opinion que je viens d'exposer. En général les épipodites voyagent entre la partie moyenne de la branchie et la base ; rarement ils font quelques excursions vers la pointe; or, c’est précisément dans la première région que les saillies chitineuses sont le plus développées. Le vaisseau interne vi (fig. 74 à 77) présente sur sa ligne médiane une rangée de longs poils recourbés à leur extrémité (d’après la règle indiquée précédemment). | Suivant les lignes latéro-internes /é (lignes séparant les faces latérales de la face interne) les lamelles sont épaissies symétri- quement sur les deux faces de manière à maintenir les lamelles écartées les unes des autres. La face externe est creusée d’une légère dépression médiane occupée par le vaisseau afférent ; le bord postérieur de la dépression, assez proche de ce vaisseau, est marqué par une crête formée de tubercules alignés ; le bord antérieur est beaucoup moins net, car de côté les tubercules se correspondent mal. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 369 Enfin à la limite de la face externe, Le, s’observent des tuber- cules de formes très variées, ayant parfois l'aspect de gros crochets ou de têtes d'oiseaux faviculuires). C s P M ve- Li k a ‘li FiG. 74 à 17. — Ornementation progressive des lamelles branchiales chez les Cancer (C) et les Oxyrhynques: Stenorhynchus (S) et Inachus, Pisa (P), Maia (M). vi, vaisseau interne; ve, v. externe; li, ligne latéro-interne ; le, ligne latéro-externe. Les poils des épipodites ont également une ornementation assez compliquée, en scie vers la pointe, en brosse à poils longs un peu plus en arrière. Oxyrhynques. — Voyons maintenant l'ornementalion progres- sive de la branchie chez les Oxyrhynques. 1° Stenorhynchus phalangiii1 PENNANT. — Chez cette espèce, on observe quelques poils courts sur la ligne médiane du vaisseau interne ; la face externe est plane et présente de part et d'autre du vaisseau, à une certaine distance, une rangée de lubercules recourbés vers la base de la branchie. Si l'ornementation extérieure de la branchie est encore très peu développée, en revanche toute la surface des lamelles est recouverte de saillies, extrêmement peu prononcées, et servant de base d'insertion à de très petites épines (fig. 78). Or, les lamelles sont très écartées les unes des autres, et l'on peut voir les poils des épipodites pénétrer et se déplacer entre elles. C'est là un mode tout à fait particulier de nettoyage de la branchie. 2 Inachus dorynchus LEeacH. — Même ornementation externe ; aucune ornementation interne visible. 3 Pisa tetraodon PENNANT. — Chez ce Crabe, les lignes /4 et Le sont beaucoup plus nettes que chez les espèces précédentes, où la branchie avait souvent (/nachus)une forme vaguement triangulaire. 24 370 GEORGES BOHN. Vers la base, la ligne /e est marquée par des épaississements du bord des lamelles en forme de tubercules ronds. Sur la face externe, dans toute la longueur, on observe des tubercules, inconstants et disposés irrégulièrement et avec pointe dirigée vers la base; on constate à facilement que {ous ces ornements s'acquièrent progr'essivernent avec l'age. A Tyas tandnens LM RICE vaisseau interne présente des épines assez bien développées ; l'ornemen- talion de toutes les lamelles rappelle celle des lamelles de la base chez les Pisa; seulement les pointes médianes ont des formes variées (aviculaires), comme d’ailleurs les tubercules des lignes latérales /e. 5° Maia squinado HERBST. — C'est chez le Maia que l'ornementa- lionexterne atteint son maximum de complication (fig. 77). Les lignes W li sont marquées par des épais- sissements du bord des lamelles. Fi. T. — Stenorhynchus phalan- Le vaisseau interne présente alle gium PENNANT. Ornementation des poils des lamelles bran- rangées de poils - crochets et le chiales, du bord (4), des faces vaisseau externe une rangée (fait (B), et des épipodites (C). exceptionnel). D'une manière géné- rale toute la face externe de la branchie est hérissée de saillies chitineuses, qui lui donnent un aspect tout à fait particulier, et qui sont dues vraisemblablement aux frottements des branchies contre le revêtement chitineux interne du branchiostégite, lui-même tout couvert de poils chitineux, courts, simples et barbelés. Le Homard offre, comme nous l’avons vu, une disposition analogue; il est curieux de rencontrer chez des espèces si éloignées des formations similaires; celles-ci sont peut-être dues à une con- vergence physiologique occasionnée par le genre de vie commun de ces deux animaux. Quoi qu'il en soit les Oxyrhynques montrent nettement que l’évo- lution de la branchie est fonction du développement des épipodites. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 371 CHAPITRE VII Etude physiologique des endopodites thoraciques (Pattes nettoyeuses). Frirz MÜLLER, dans un court mais fort joli mémoire sur les pattes nettoyeuses des Crustacés [ D, a, 80 ], avail signalé l’ornementalion variée des poils des épipodites, et soupçonné une ornemenlation correspondante de la branchie. Voici la description qu'il nous donne de cet organe chez un Telphusien d'Amérique : « Sur la ligne médiane, du côté qui regarde la face interne de la cavité branchiale, se trouve une rangée d’'écailles qui ressemblent tout à fait à des têtes d'oiseaux. Quand le fouet se balance entre les branchies et la paroi interne, les particules attachées aux poils sont détachées par ces aviculaires ». Cette disposition n'est pas exception- nelle ; nous venons de voir combien elle est fréquente, sur l’une et l’autre face de la branchie. chez les Crabes de nos côtes; le Carcinus mœænas PENXANT lui-même la présente (voir fig. 123). Frirz MÜüLLER, dans le même mémoire, décrit avec assez de soin les pattes nettoyeuses de certains Crustacés, et en particulier celles des Crevettes. J'ai étendu ces observations à un assez grand nombre d'espèces vivant dans nos mers, appartenant aux groupes des Eucyphotes, des Homaridés-Thalassinidés, des Galathéidés et des Paguridés. S 1. PATTES NETTOYEUSES DES EUCYPHOTES. Frirz MÜLLER a décrit comme pattes nettoyeuses, chez les Palé- mons, les pattes antérieures, et chez les Alphées et les Hippolrtes, les deuxièmes pattes. Nous devons à CouTIERE |A, 99] des considérations importantes sur la morphologie comparée de ces deuxièmes pattes chez les Eucyphotes primitifs. Les variations portent surtout sur la consti- tution du carpe: chez les Caridina et les Thalassocaris, il est 372 GEORGES BOHN. simple, tandis que chez les Pandalus, formes aussi primitives que les précédentes, il est divisé en un grand nombre d'articles, au point de ressembler à un fouet antennaire ; chez les Alphéidés, il comprend 5 articles en général; chez les Hippolytidés, le nombre des articles est au contraire extrêmement variable : Lysmatas 60 Amphiplectus.. Merhippolyte .. n articles. me Bythocaris 9 articles. Nauticaris ..... Spirontocaris .. / * 7 articles. Cryptocheles .…. RLiN es AlGpe Amen Hippolyte ..... } L e 3 articles. Latreutes . ..... \ 3 articles Platybema...…. j ; Le | article. Candion er. \ “es Chez les Nika enfin le carpe ressemble à un fouet antennaire. D'après ORTMANN, le caractère de la multiarticulation du carpe, si variable et si inconstant, est de récente apparition chez les Eucy- photes ; il a été acquis secondairement dans le but manifeste de faciliter les mouvements de l'appendice el d'augmenter le champ qu'il explore. BATE [B, 88] en a fait la base de sa classification des Eucyphotes ; il distingue deux tribus: 1° celle des Polycarpidea (Nihkidæ, Alpheidæ, Hippolytidæ, Pandalidæ); 2 celle des Monocarpidea (ex : Palæmonidæ). CouTIÈRE, qui adopte cette classification, remarque que le nombre maximum des épipodites est atteint fréquemment dans la tribu des Polycarpidea, à plusieurs égards plus primitive que celle des Monocarpidea, landis que chez les Palæmonidæ, les épipodites thoraciques ont disparu totalement. « Il semble même, ajoute l’auteur, que l’on puisse établir, d’une façon très générale, une corrélation entre la structure du carpe de la 2° paire et la simplification graduelle des formations épipodiales. Parmi les Schizopodes, les Mysidés au moins présen- tent sur tous les appendices thoraciques la multiarticulation de la moitié distale. Parmi les Pénéides, S/enopus offre une division homologue du carpe, bien que très différente d'aspect sur les paires SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 373 4et5. Les Eucyphotes « Polycarpidea > conservent seulement la multiarticulation du carpe sur la deuxième paire, poussée fréquem- ment, il est vrai, à un degré qui rappelle de près Stenopus (Nika, Pandalus). Puis ce caractère, après avoir éprouvé des variations très grandes, allant jusqu'à son absence presque totale (Caridion), disparait enfin chez les « Monocarpidea >. On pourrait tracer un tableau presque parallèle en ce qui concerne les formations épipo- diales ; il faut faire toutefois cette restriction essentielle, formulée plus haut, que les deux ordres de faits sont comparables seulement de facon très générale. C’est ainsi que Nika manque d’épipodites, alors que le carpe de la 2° paire se montre dans ce genre semblable à un fouet antennaire ; la disposition inverse se remarque chez les Caridina, où le carpe est indivis. Les Alphéidés et surtout les Hippolytidés sont parmi les Eucyphotes ceux où le nombre des épipodites et celui des articles du carpe éprouvent les plus grandes variations, de façon indépendante le plus souvent ». Il m'a paru intéressant de signaler ici cette corrélation entre les épipodites et les deuxièmes pattes, c’est-à-dire entre des organes ayant une fonction commune, lenettoyage de la chambre branchiale, et d'en chercher la raison. Je n’ai pu faire malheureusement l'étude physiologique comparée des divers Eucyphotes mentionnés, — littoraux, des profondeurs, des récifs coralliens ; — je me contenterai donc d'émettre quelques hypothèses, en me basant sur les faits que j'ai observés chez les espèces les plus communes de nos côtes. Observations sur les Virbius et les Palémons. — 4° Les Virbius liltoraux offrent une grande activite ; en conséquence, ils présentent des chasses d’eau en arrière fréquentes et souvent vigoureuses. Dans ces conditions, le nettoyage des branchies s'effectue d'une facon parfaite, ce qu'on constate facilement en plaçant l'animal dans de l’eau chargée de poudres colorées. 2° Ces Crustacés étant surtout »4geuwrs, on conçoit que les épipo- dites qui ne remplissent leur rôle que chez les formes marcheuses, où ils sont entraînés par les mouvements des pattes, aient perdu de leur importance et aient subi une réduction notable. 3° Comme le nettoyage des branchies est effectué par les chasses d’eau en arrière, ces organes n'ont pas besoin d’être remplacés par 374 GEORGES BOHN. les pattes nettoyeuses ; le carpe au lieu d’être multiarticulé comme chez les Lysmates n'a que 3 segments. J'ai d’ailleurs observé à plusieurs reprises (St-Vaast, août 1898. et Wimereux, août 1899) l'allure des pattes de la deuxième paire chez le Vérbius varians LEAGH, el je ne les ai jamais vues, même dans de l’eau assez fortement carminée, pénétrer franchement dans la cavité branchiale pour Ja nettoyer. Souvent les pattes dites netloyeuses se replient simultanément dans le plan sagitial pour venir brosser: 4) les articles basilaires des pattes thoraciques ; b) les branchies postérieures (?) ; c) les pattes abdominales. D'autres fois une patte, la gauche par exemple, nettoie les articles basilaires des pattes du même côté, puis le bord du branchiostégite opposé, sans pénétrer dans la cavité branchiale. Chez les mdividus de couleur verte que j'ai examinés à Wimereux dans de l’eau légèrement carminée, et qui présentaient des chasses d'eau très actives, les pattes nettoyeuses fonctionnaient très peu ; chez les femelles transparentes, ces pattes nettoyaient les bords du branchiostégite et les œufs. Les Palémons liltoraux qui ont le même genre d'activité que les Virbius se comportent de mème: chasses d’eau nettoyeuses, pas d’épipodites, pattes nettoyeuses externes (1° paire). Ou bien ces pattes brossent la ligne médiane sternale pour aller ensuite sous l'abdomen, ou bien elles froltent les articles basilaires, pénétrant parfois dans l'intervalle de deux articles, et arrivant ainsi à l'entrée de la chambre branchiale. Les pinces terminales sont garnies (Palæmon squilla L.), comme l'avait décrit Fr. MuzLErR chez une espèce d'Amérique, de poils ornés de diverses façons (barbelés, en scie à dents sur deux rangs, en scie à dents sur un rang, en scie à dents barbelées). Observations sur les Afhanas el les Alphées. — Ces Crustacés sont sédenlaires ; ceux que j'ai observés vivaient, les uns {Athanas) dans la boue sous les pierres, les autres (Alphées) dans les racines vaseuses des Posidonia. Chez eux les renversements se sont montrés trop espacés et trop faibles pour déterminer le nettoyage de la cavité branchiale. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 3179 Les épipodites, nombreux, peuvent contribuer à celui-ci; mais il faut pour cela qu’ils oscillent, et que les pattes (horaciques soient en mouvement ; or, il semble au premier abord que ceci ne se réalise pas souvent chez ces formes sédentaires; toutefois j'ai observé quelque chose de fort curieux chez les Afhanas nilescens LEACH, à St-Vaasl, puis à Wimereux , il arrive que l’animal étant en repos, les deuxièmes pattes thoraciques présentent, pendant des périodes assez longues, des z2ouvements rythmiques oscillatoires, rapides (80 oscillations par minute), dans un plan langent au branchiostégite, ce qui entraine les mouvements des épipodites correspondants. Chez les Athanas chaque tubercule sétigère est représenté par un long poil en forme de corde sinueuse, transformé en brosse dans la Fig. 79. — Athanas nitescens LEACH. Schéma de l’ornenentation des poils sétigères. | région subterminale, et en harpons vers l'extrémité ; les cordes des segments thoraciques 5 et 6 se promènent à la surface accidentée des branchies, balayant et accrochant les particules étrangères, lorsque les deuxièmes pattes thoraciques oscillent. Ces pattes qui oscillent sont précisément les pattes dites nettoy- euses ; grêles, elles peuvent se replier sur elles-mêmes de façon à venir nettoyer la ligne médiane sternale et les articles basilaires des pattes ; dans un cas je les ai vues pénétrer dans la cavité branchiale par la partie postérieure. Ainsi il semble que chez les Alphéidés sédentaires les épipodites et Les pattes neltoyeuses contribuent au nettoyage des branchies ; et il n'y aurait rien d'étonnant à ce que chez les formes où les épipodites disparaissent les pattes nettoyeuses prennent une plus grande impor-- tance. Chezles Athanas (7 épipodites), « la pince distale est de forme très simplé, avec des doigts joignant exactement, presque glabres ou parsemées de quelques soies divergentes » | A, 99]; au contraire chez les Synalpheus et les Cheirothrix, seuls Alphéidés qui n’ont plus que deux épipodites, la pince a une ornementation qui a frappé tout particulièrement GouTIERE. « Chez Synalpheus, de Yolumineux 376 GEORGES BOHN. bouquets de soies sont situés irrégulièrement sur les doigts et sur le bord inférieur palmaire..….... Chez Cheirothrix, la position de ces soies se régularise de façon singulière. Elles sont insérées sur les doigts très grêles, très réduils, et les rendent à peu près invisibles par leur grand développement. Ces soies sont en effet longues et fortement plumeuses, elles rappellent, par leur forme et leur fonction probable, les « fauberts > dont on munit les dragues; ce sont des appareils collecteurs de petits organismes et des particules alimen- taires de toute nature dans l’eau ambiante ». Observations sur les Vika et les Crangon. — Les Nika présentent ceci de particulier : suivant les saisons ils ont un genre de vie absolument différent. Dans leur période d'activité, celle où nous les avons observés (St-Vaast, août 1898 ; Tamaris, septembre 1899), les chasses d’eau en arrière suffisent pour le nettoiement de la chambre branchiale, et je n’ai jamais constaté de mouvements spontanés ou provoqués des pattes nettoyeuses, qui, mégales, restent constamment repliées sur elles-mêmes. Ces pattes doivent fonctionner pendant les périodes de vie séden- laire, alors que les chasses d’eau s’espacent et s’affaiblissent proba- blement ; en effet présentant un carpe multiarticulé, ces appendices paraissent bien appropriés à cette fonction. Chez les Crangon, il en est peut-être de même ; les pattes nettoy- euses, lorsque les chasses sont prononcées, fonctionnent, mais seulement pour nettoyer l'extérieur de la carapace. Ayant placé de ces Crustacés dans de.l’eau carminée, j'ai constaté qu'après toute chasse d’eau en arrière, ces pattes, grèles, viennent nettoyer toute la région sternale ; là se trouve une sorte d’épine contre laquelle elles se frottent pour se nettoyer à leur tour; chez une femelle porteuse d'œufs, les incursions de ces appendices s’étendaient jusqu’à ceux-ci. Résumé. — Chez les espèces nageuses actives, les épipodites des formes marcheuses disparaissent, et les pattes nettoyeuses ne sont plus adaptées qu’au neltoyage externe, le nettoyage de la chambre branchiale étant dû aux chasses d’eau en arrière. Chez les espèces sédentaires, les épipodites sont conservés en général, et contribuent ainsi que les pattes nettoyeuses au nettoyage de la cavité brauchiale. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 2 fl Chez les espèces tour à tour actives et sédentaires, les pattes nettoyeuses ne fonctionnent sans doute que dans les périodes de sédentarité, alors que les chasses d'eau en arrière s’espacent et s’alfaiblissent. S 2. — PATTES NETTOYEUSES DES HOMARIDÉS-THALASSINIDES. J'ai montré ailleurs [C, 99] les diverses adaptations des pattes thoraciques chez les Homards, les Nephrops, les Gébies et les Callianasses, et comment les pattes de la cinquième paire, qui nettoient primitivement les articles basilaires des appendices, se mettent à nettoyer les branchies, qui n’en sont que des dépendances. « Chez les Gébies, ces pattes nettoient plus particulièrement la ligne sternale, Les articles basilaires des pattes, les sillons qui les séparent ; elles frunchissent facilement la ligne médiane, vont du côté opposé, et, comme aucune barrière ne les arrête, elles pénètrent dans la chambre branchiale opposée, l'article terminal pointu glissant dans les sillons interbranchiaux et entre les filets branchiaux eux-mêmes, — elles arrivent même sur la face interne du branchio- stégite opposé et la balaient avec la main qui est en forme de brosse. Quand le nettoyage de la cavité branchiale est effectué d’un côté par la patte du côté opposé, sa symétrique entre en activité, et les deux pattes viennent au dehors se frotter l’une contre l’autre. On peut provoquer ces mouvements en attouchant avec la pointe d’une aiguille la face interne du branchiostégite du côté où l’on veut produire le rettoiement, ou bien, si l'on à abattu à l'avance le branchiostégite, en déposant du carmin sur les branchies ; dans ce dernier cas les pattes de la quatrième paire concourent au nettoiement des branchies elles-mêmes ». J'ai décrit la façon dont les Callianasses creusent leurs galeries et cimentent les parois intérieures : grace à la filtration de l’eau à travers celles-ci, ces animaux n’éprouvent pas le besoin de nettoyer leurs branchies ; les pattes de la 5° paire n’entrent en fonctionnement que dans des circonstances exceptionnelles, par exemple quand un accident vient à troubler la pureté de l’eau (introduction du carmin). Il est à remarquer que chez les Gébies et les Callianasses, l’évo- lution des pattes nettoyeuses correspond à la disparition des épipodites. 318 GEORGES BOHN. SEC S 95. — PATTES NETTOYEUSES DES GALATHEIDÉS. Chez les Galathéidés, où les épipodites sont en train de dispa- raitre, et où la carapace a des mouvements d'écart assez fréquents, les pattes de la cinquième paire se sont également adaptées au neltoiement des branchies. J. BoxNIER à décrit ces pattes grèles el souples, garnies de poils. J'ai fait de nombreuses observations sur les Galatheu Squamifera LEACH qui possèdent encore trois épipodites (St-Vaast, individus provenant du Cavat ; 1898). Dans leur attitude ordinaire, ces paltes sont repliées sur elles- mêmes ; les méropodites (25 articles) sont dirigés en avant ; cachés d’abord en partie sous la lame épimérale du 1” segment abdominal, ils s'appliquent ensuite sur la face externe du branchiostégite ; les carpopodites (3%), de même longueur, sont repliés sous les méro- podites ; les dactylopodites (5%) viennent ainsi se placer en arrière de l’article basilaire des quatrièmes pattes thoraciques. 1° Les pattes de la 5° paire peuvent nettoyer la /ace dorsale du céphalothorax, le branchiostégite et son bord, es sreropodiles des pattes thoraciques, la face dorsale de l'abdomen. Pour cela le méropodite se déplace dans un plan tangent au branchiostégite, tandis que le carpopodite se défléchit plus ou moins. 2° Ces appendices peuvent nettoyer la ligne inédiane sternale et les articles basilaires des pattes, successivement d'un côté et de l’autre ou simultanément. | Souvent le méropodile s'écarle du corps pour passer sous la quatrième patte thoracique et se diriger en avant; il effectue en même temps un mouvement de rotation sur lui-même qui amêne la face inférieure en haut; le carpopodite se met en extension sur lui, et ainsi le dactylopodite, après avoir passé le long des articles basilaires des pattes, atteint la base des pattes-mâchoires et la région buccale (allant peut-être chercher dans cette région le produit d’une sécrétion buccale). 3° Les pattes, enfin, peuvent pénétrer dans la cavité branchiale, pour nettoyer les branchies. On provoque d’ailleurs assez diffici- SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 319 lement ces derniers mouvements. L'introduction de carmin par la partie postérieure du bord du branchiostégite ne détermine pas en général la réaction immédiate des pattes nettoyeuses. Un jour, comme j'avais placé une Galathée dans une eau légèrement carminée, ces pattes n’ont pas bougé pendant plusieurs heures; mais elles sont entrées immédiatement en fonction dans l’eau pure. Pour le nettoyage des branchies, le méropodite se rejette en arrière en effectuant un mouvement de rotation de 180° autour de l'extrémité proximale, eten maintenant {oujours la même face vers le haut ; —le carpopodite se place en dedans au lieu d’être en dehors, le dactylopodite s'engage sous le bord postérieur du branchio- stégite, puis pénètre dans la chambre branchiale quand le méropodite achève le mouvement de rotation commencé. Chez les Porcellanes, les cinquièmes pattes thoraciques sont également des pattes nettoyeuses. Les Porcellana platycheles PENNANT, qui vivent constamment appliquées sous les rochers, offrent une très grande sensibilité à la lumière. Exposé au soleil, un de ces Crustacés perd rapidement tous les réflexes qu'il présente habituellement, pour les recouvrer peu à peu quand on le soustrait à cet agent mhibiteur; les pattes postérieures seules conservent leurs mouvements. Chez les Porcellana longicornis PENNANT, les pattes nettoyeuses entrent en fonctionnement surtout après les renversements qui, chez cette espèce, sont assez accusés ; elles nettoient en général le bord du branchiostégite et le dessous de l'abdomen, qui présente souvent des batlements répétés; quelquefois elles pénètrent, par un mouvement de rotation compliqué, dans la chambre branchiale. Déjà Frirz Müzer [D, à, 80] avait décrit le rôle de ces paltes chez une Porcellane qui était l'hôte d’un gros vers tubicole {Chæto- pterus) sécrétant beaucoup de mucus. Une femelle munie d'œufs, conservée longtemps en vie, ne laissait pas ses palles postérieures en repos : « tantôt elle les enfonçail profondément dans sa chambre branchiale, tantôt elle les promenait sur le dos, parfois même elle les introduisait parmi les œufs, comme un boulanger introduit ses mains dans la pâte ». 380 - GEORGES BOHN. S 4. — PATTES NETTOYEUSES DES PAGURIDES. Chez les Paguridés, grâce au genre de vie tout spécial de ces animaux : 1° l'abdomen et la partie postérieure du céphalothorax sont décalcifiés; 2° les pattes postérieures de l'abdomen et les quatrième el cinquième paires thoraciques sont transformées ; courtes, elles présentent vers leurs extrémités des aires rugueuses, toutes couvertes d’ecailles, vraisemblablement dues au frottement de la chitine contre les parois accidentées des coquilles. L'étude comparée de ces pattes chez les divers Paguridés serait du plus grand intérêt ; les aires rugueuses, d’après les observations et les expériences que j'ai faites (section tolale ou partielle de ces aires), servent à la progression de l’animal dans sa demeure, el n’ont aucune relalion avec une autre fonction remplie par certains de ces appendices, le netloiement des branchies. Voici à ce sujet ce qui se passe chez les Æupagurus bernhardus L. Observations etexpériencessur les Z’upaqurus bernhardus L. — Les cinquièmes pattes thoraciques sont douées d’une grande mobilité et semblent particulièrement destinées à nettoyer : les aires rugueuses ont une faible étendue; les poils par contre ont une ornementalion compliquée (une ou deux rangées de croche:s sur une face, une multitude de petites saillies chitineuses sur l’autre) par rapport à ceux des quatrièmes pattes thoraciques (prolongements en forme d’épines). Le fonctionnement des pattes thoraciques postérieures se perfectionne avec l'âge, à mesure que les chasses d’eau en arrière s'afjaiblissent. J’ai examiné d’abord les jeunes Pagures qui pullulent sur la plage de St-Vaast, — ces Pagures qui vont d’une coquille à l’autre et qui ont des mœurs si curieuses, décrites par M. Bouvier ; en plongeant ces Crustacés dans de l’eau carminée, j'ai constaté de temps à autre des chasses en arrière, et plus rarement encore des mouvements des pattes nettoyeuses. Ogs. faite le 8 septembre 1897 sur un très jeune Pagure. — Pendant les dix premières minutes, 4 chasses en arrière ; à la onzième minute, nouvelle chasse et mouvements réactionnels de la SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 381 cinquième palle ; après la sortie d’une bouffée de carmin par le bord postérieur du branchiostégite, cette patte a effectué quelques contorsions et a essayé de pénétrer dans la chambre branchiale, mais, après des essais infructueux, elle est rentrée dans l'immobilité ‘complète. Il faut peut-être chercher dans ce mouvement réactionnel l'origine de l'adaptation de ce membre, déjà réduit par suite de son rôle locomoteur, au nettoyage de la cavité branchiale. Chez les jeunes, il fonctionne rarement et semble peu habile; chez les adultes, il fonctionne fréquemment el réagit beaucoup plus facilement, comme l’ont montré nettement les expériences que j'ai pratiquées chez les adultes. | Exp. faites en septembre 1897 sur des Pagures adultes. — En déposant du carmin le long du bord du branchiostégite, bord qui est garni de soies filtrantes, une partie de la matière colorante est arrêtée, et l’autre pénètre dans la chambre respiratoire et vient salir les branchies ; immédiatement les pattes postérieures pénètrent dans la chambre branchiale pour nettoyer ces organes. Exr. 7 septembre 1887. — Ayant coupé les articles terminaux de la patte nettoyeuse droite (cinquième), j'ai constaté que, après le dépôt du carmin, le moignon exéculait des contorsions désespérées, comme pour amener l'extrémité supprimée à nettoyer les branchies ; pendant ce temps le membre symétrique nettoyait avec fureur la face externe du branchiostégite gauche, son bord cilié, et la cavité branchiale correspondante, qui étaient dans un état de propreté parfaite. Exp. 8 seplembre 1897. — Le lendemain malin, ayant repris celle expérience avec le même animal, j'ai constaté que l'introduction du carmin dans la chambre branchiale gauche ne provoquait ni les mouvements du moignon, ni ceux de l’appendice opposé; au contraire l'introduction des grains colorés dans la chambre droite déterminait des mouvements coordonnés de celui-ci. Ainsi, ex une nuit, j'ai pu Supprimer la coordination si remarquable des mouvements des deux côtés. Dans toutes ces expériences, les quatrièmes pattes n’ont réagi dans aucun cas. 382 GEORGES BOHN. A Arcachon (septembre 1898) j'ai observé les mêmes Pagures dans des coquilles globuleuses, ne permettant que la protection de l'abdomen; j'ai remarqué que, tandis que les quatrièmes pattes élaient constamment dirigées en arrière, immobiles et appuyées contre le bord rugueux du péristome, les cinquièmes pattes étaient douées de mouvements fréquents et variés : elles frottaient la face veutrale de l'abdomen, la ligne sternale thoracique, et s'avançaient parfois jusqu'aux pattes-mâchoires externes ; de temps à autre, elles pénétraient dans les chambres branchiales. Observations sur les autres Pagures.— Chezles Clibanarius seisanthropus Risso, les Æupagurus anachorelus Risso et les Diogenes pugilator Roux, les mouvements des cinquièmes pattes suivent presque toujours les renversements ; chez les premiers, la pénétration de la patte netloyeuse dans la cavité branchiale se fait souvent avec une certaine difficulté. Chez les Paguristes maculatus Risso, les pattes nettoyeuses fonctionnent assez fréquemment, surtout chez les femelles porteuses d'œufs ; on sait que celles-ci portent leurs œufs (de couleur jaune- orange) dans un grand sac ovigère silué à gauche de l'abdomen ; les pattes neltuyeuses sont alors presque constamment en mouvement ; elles frottent la face externe du branchiostégite, quelquefois sa face interne; la patle gauche va brasser les œufs, évoluant entre les parois de la poche ou les œufs, ou même à l’intérieur même de leur masse. On voit encore, d’après ce dernier exemple, que c'est toujours chez les formes à renversements peu prononcés que les pattes nettoyeuses fonctionnent le mieux. S 5. — PATTES NETTOYEUSES DES CRABES. Chez les Crabes primilifs les pattes postérieures sont réduites, mais elles acquièrent un rôle particulier : celui de fixer des corps étrangers sur la carapace du Crabe (modification du rôle nettoyeur). Chez les Crabes qui vivent dans le sable, ces pattes deviennent fouisseuses, acquièrent par suite un développement relatif assez considérable, et perdent complètement leur rôle nettoyeur. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 383 CHAPITRE IX. Étude physiologique des antennes et des appendices buccaux. Si le renversement du courant respiratoire influe sur le fonclion- nement el la constitution des palles nettoyeuses, il modifie d'une façon beaucoup plus profonde encore les antennes el Les appendices buccaux (màchoires, paltes-mâchoires). Pour bien comprendre ces modifications, il faudrait faire une étude physiologique minutieuse de ces divers appendices; or, cette élude est très difficile, vu la céphalisation assez prononcée de tous les Crustacés Décapodes. Un fait assez général chez ces animaux est le netloiement des antennes par les pattes-mâchoires externes rapprochées l’une de l’autre en extension ; il en résulte une certaine corrélation entre les mouveinents des antennes el ceux des mnaxillipèdes poste- J'ieurs. Espèces fouisseuses. — Chambre proslomiale. — Chez toutes les formes qui s'adaptent à la vie fouisseuse, on observe que ces appendices prennent et conservent pendant une durée plus ou moins longue des atliltudes particulières. Un premier exemple est fourni par le Diogenes pugilator Roux, pelit Pagure fouisseur qui présente des renversements prolongés. Les articles basilaires des antennes, bien développés, maintiennent le sable de chaque côté; les fouets, qui avec leurs deux rangs opposés de longues soies ressemblent à des plumes, se couchent sur le sable et en maintiennent ainsi les particules constituantes. Entre elles se trouve une dépression où se dressent les pattes-màchoires : celles-ci sont fléchies sur elles-mêmes et sont garnies, au point de flexion, de nombreux poils, qui forment une sorte de barrière filtrante au-devant de la dépression. Ces poils, très sensibles aux alttouchements, peuvent être le point de départ de réflexes, déterminant des mouvements de tous les maxillipèdes (endopodites 304 GEORGES BOHN. et exopodites) et finalement le nettoiement des antennes et des appendices buccaux. Un deuxième exemple est fourni par l'Atelecyclus, Crabe dont jai décrit l’enfouissement |[C, 99]. Les articles basilaires des antennes el les pattes-mâchoires constituent une sorte de chambre filtrante antérieure, que l’on nomme chambre prostomiale, et qui est caractéristique de beaucoup de Crabes primitifs. Cette chambre a pour effet, une fois que le courant inverse est établi (Voir plus haut p. 310), de maintenir le sable autour des antennes et des appendices buccaux et de ne laisser passer que l’eau au-devant de la bouche et dans les gouttières occupées par les scaphognathites. Toute chambre prostomiale admet un orifice antérieur que le Crabe façonne à la limite du sable et de l’eau, et deux orifices postérieurs, droit et gauche, qui font communiquer la chambre avec les gouttières des scaphognathites. Un certain nombre d'appendices peuvent contribuer à former l'orifice antérieur : 1° Les antennules, et en particulier leurs articles basilaires, mobiles, gros, souvent saillants et poilus ; 2 Lesantennes, et en particulier les deuxièmes articles basilaires (ceux qui font suite aux tubercules urinaires) qui se dressent de chaque côté des articles basilaires des antennules ; 3° Les patles-m1ächoires postérieures, par leurs méropodites et leurs carpopodites. En outre : 1° Au-dessus des antennules, le front s’'avance plus ou moins ; 2° Entre les antennes et les pattes-mâächoires, se trouvent la paroi orbitaire inférieure et l'extrémité antérieure du rebord plérygos- tomien, qui prennent parfois un développement assez considérable. Par suite des frottements contre le sable, toutes ces pièces peuvent s'hypertrophier de façons variables et se couvrir de poils. Ceux-ci, outre leur rôle filtrant, peuvent avoir un rôle avertisseur : il suffit d’attoucher avec une aiguille les antennules pour ranimer chez un Crabe mourant (Maia) les mouvements du scaphognathite ; quand on excite de même les poils du bord antérieur des maxillipèdes chez un Atelecyclus, l'ouverture de la chambre prostomiale se resserre en une simple fente el les mouvements du scaphognathite sont SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 389 modifiés de façon à produire des chasses d’eau en avant qui dégagent l'entrée de cette chambre. La chambre prostomiale à pour plafond l'épistome ; celui-ci est limité en arrière par une crête plus ou moins saillante, l'erdostome, qui le sépare plus ou moins des gouttières des scaphognathites. Les orifices postérieurs, qu'on pouvait appeler prélabiaux, sont constitués par des lobes particuliers, les lacénies, qui se développent sur les endopodiles des maxillipèdes antérieurs, et qui s'appliquent parfois contre la crête de l’endostome. Celles-ci sont d’ailleurs mobiles, et par suite l'ouverture des orifices varie. Espèces non fouisseuses. — Orifices antérieurs. — Des renversements prolongés ou répétés peuvent se présenter en dehors des espèces fouisseuses ; dans ce cas, s’il ne se forme pas de chambre prositomiale, il se constitue des orifices dits fort improprement expirateurs, puisqu'ils n'ont de raison d’être que quand ils sont inspiraleurs (ce sont souvent les orifices prélabiaux modifiés). Ceci s’observe chez les Porcellanes, les Scyllares et les Crabes Oxystomes, Crustacés qui présentent fréquemment des oscillations de l'eau dans la chambre branchiale. Chez tous ces animaux, les pattes-mâchoires externes forment une sorte d’opercule pour le cadre buccal. Chez les Porcellanes, les orifices sont constitués par les dents du front raballu en avant presque jusqu'au bord antérieur des pattes- mâchoires. Chez les Scyllares, les orilices, à bord cilié, sont formés par les deuxièmes pattes-mâchoires. Chez les Oxystomes, ils sont limités par les lacinies des premières pattes-mâchoires, alors que les exopodites des troisièmes pattes- mâchoires viennent recouvrir plus ou moins un canal creusé dans le rebord ptérygostomien, et qui sert à l'entrée de l’eau dans le cas où le courant est direct, à sa sortie dans le cas contraire. Les modifications des gouttières respiratoires latérales et des orifices antérieurs ont attiré depuis longtemps l'attention des zoologistes, et ont fait en particulier l'objet des recherches de M. Bouvier. Malheureusement je n'ai pu étudier, parmi les Oxy- stomes, que les Ebalies et les Calappes. Chez les £balia Bryerii Leac, les pattes-mâchoires postérieures forment deux volets qui recouvrent le cadre buccal, et le débordent 25 3806 GEORGES BOIN. même latéralement par suite de l'élargissement des exopodites ; elles sont douées de mouvements variés : mouvements d’abaissement et de latéralité; c'est sans doute en frotlant contre les rebords ptérygostomiens que les exopodites ont acquis leur développement ; quand les deux pattes-màächoires s’écartent symétriquement, les articles distaux netloient fréquemment les régions orbitaires et périorbitaires ; elles s'écartent asymétriquement, quand l’une d'elles vient brosser l’autre. Assez souvent, quand le courant commence, les méropodites des pattes-mâchoires s'abaissent, tandis que les premiers articles des endopodites restent immobiles. Chez les Calappa granulatu L., quand le courant est direct, l'eau sort en avant par deux orifices bien limilés et contigus, en acquérantune assez grande vitesse; le jet expirateur, très étroit, atteint souvent un point assez éloigné ; on comprend que, dans ces conditions, l’eau, aspirée par la chambre branchiale, puisse l'être dans des ré- gions voisines du jet expira- teur ; d’un côté etde l’autre de celui-ci se trouvent des courants dirigés en sens contraire et s'engageant plus ou moins sous Îles exopodites des pattes-mà- FiG. 80. — Calappa granulata L. Disposition . CC » choires. J'ai retrouvé un des antennes et des voies respiratoires. pareil voisinage entre les Les maxillipèdes 3 et 2 ont été enlevés ; É : : n voit à gauche axillLpède antériear courants inspiraleurs el ex- on voit à gau( he le maxill:pède antérieut droit avec son palpe exopodial et sa pirateurs chez les Dromies : lacinie (endopodiale) celle-ci S'avance au les premiers s’établissent devant de la gouttière expiratrice. en dessous des exopodites des maxillipèdes postérieurs pour attendre le bord antérieur du branchiostégite ; or, on sait que les Dromies ont beaucoup d’affinités avec les Dorippidés, Crabes Oxystomes assez primitifs. Chez les Calappa, outre. les mouvements des pattes-mâchoires postérieures, on observe des mouvements plus ou moins indépendants des lacinies des pattes - mâchoires antérieures , SUR LA PRESPIRATION DES DÉCAPODES. 387 lacinies qui contribuent à constituer les canaux dits expirateurs. Quand le courant est direct, les lacinies limitent des orifices très étroits, ce qui détermine l’augmentation de la vitesse du courant à sa sortie, momentanément du moins, car petit à petit la vitesse diminue, les lacinies s’écartent progressivement, et les orifices s’élargissent de même. Au moment des renversements, les patles-mâchoires s'écartant une ou deux fois, les lacinies s’abaissent brusquement, pour se rapprocher ensuite. Dans les alternatives de chasses en arrière et de chasses en avant (mouvements oscillatoires), les troisièmes pattes-màchoires oscillent latéralement, les extrémités de leurs endopodites nettoyant les orifices antérieurs, dont l'ouverture subit des dilatations et des contractions successives, mais pas très considérables. Beaucoup des mouvements décrits peuvent être déterminés par des attouchements du bord antérieur des maxillipèdes qui est extrèmement sensible. Résumé. — Les antennes et les appendices buccaux s'adaptent au renversement du courant respiratoire. Dans le cas des espèces fouisseuses, ls contribuent à la formation d'une chambre filtrante, dite chambre prostomiale. Dans celui des espèces non fouisseuses, les pattes-mäâchoires délimitent des orifices particuliers, qu'on pourrait appeler orifices prostomiaux ou prélabiaur, selon qu'ils sont formés surtout par les pattes màchoires postérieures ou par les pattes mâchoires anté- rieures. Ces adaptations expliquent les modifications morphologiques considérables des antennes et des appendices buccaux, modifications qui constituent d'excellents caractères pour les zoologistes qui s'occupent de systématique. Dans la deuxième partie de ce travail, nous allons montrer comment les changements dans la fonction entraînent les change- ments dans la forme. Je prendrai comme exemple les Crabes qui présentent à des degrés divers une chambre prostomiale : Corystidés, Portunidés, Xan- thidés, Pinnothéridés, et je discuterai, en m’appuyant sur l'étude physiologique que j'ai faite de ces animaux, les affinités de ces divers groupes. 388 GEORGES BOHN. DEUXIÈME PARTIE CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES ET PHYLOGÉNIQUES. CHAPITRE PREMIER. La chambre prostomiale des Corystidés. Le groupe des Corystidés, qui comprend des espèces profon- dément adaptées à la vie fouisseuse et à caractères primitifs, est pour nous du plus grand intérêt. Voici pourquoi. Chez toutes les formes fouisseuses, le courant respiratoire se renverse pendant une durée parfois considérable; ce qui entraine des modifications notables des antennes et des appendices buccaux. Le renversement du courant respiratoire a été trouvé chez les deux formes étudiées (Corystes, d’après GaRsTANG [D, a, 96], Atelecyclus, d’après moi-même [C, 99}, et les antennes et les appendices buccaux constituent chez toutes les espèces une sorte d’antichambre respiratoire, munie d'appareils filtrants variés, dési- gnée par GaRsTANG (Corystes) sous le nom de chambre prostomiale. Les pédoncules antennaires, bien développés et à deuxième article souvent encore mobile, ont en général une part importante dans la constitution de cette chambre ; celle-ci est fermée en partie par les pattes-màchoires externes, qui s'avancent au delà du cadre buccal. Ce sont là, à certains égards, des caractères primitifs, mais aussi et avant tout, des caractères accentués par le genre de vie. Chez certaines formes, la paroi orbitaire inférieure et le prolon- SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 389 gement plérygostomien antérieur prennent uné importance assez considérable. Nous allons voir en effet que la chambre prostomiale se constitue chez les Corystidés de façons variées, et 1l serait peut-être utile, bien que le groupe des Corystidés soit admis par tous les carcino- logistes contemporains el considéré comme la souche ancestrale des Cyclométopes (Portunidés, Xanthidés) et par suite des Catométopes, il serait utile, dis-je, de rechercher si la ressemblance des divers Corystides n'est pas due à des convergences adaplatives. J'ai étudié, sur le vivant, l'Afelecyclus heterodon MoNTAGt qu'à Arcachon on ramène assez fréquemment des profondeurs sableuses. Les collections du Muséum n'ont fourni pour l'examen morpho- logique : 1° Corystes cassivelaunus PENNANT (= C. dentatus FABr.); La Rochelle, D'ORBIGNY. 2 Pseudocorystes armatus M.-Epw.; San Lorenzo (Pérou), SERRES. 3° Corysloides abbreviatus M.-Ebw. ; Montevideo, HASSLER. 4° Hypopellarion spinulosum Wire. ; Cap Horn, Mission. o° Atelecyclus dentatus MoxraGu ; Golfe de Gascogne, Talisman. 6° Thia polita LxAcu ; Naples, Laboratoire. 70 Telmessus serratus WuiTE ; Japon, FRANCK. 80 Osachila tuberosa StTimpsox ; St-Vincent, AGassiz (Blake). Je vais faire l'étude comparée de la chambre prostomiale chez ces diverses espèces. Corystes cassivelaunus PENNANT. — La chambre prostomiale chez les Corystes a été bien décrite par GARSTANG [D, a, 96]; je renvoie à son mémoire, et ne donnerai ici qu'un aperçu topogra- phique de l’antichambre respiratoire. Quand les antennes et les appendices buccaux sont disposés de faucon à constiluer cette chambre et qu'on les regarde par leur face ventrale, on aperçoit l'ouverture externe limitée de la façon suivante, — d’arrière en avant : 1° Par le bord interne et l'extrémité arrondie de l’avancee des méropodites des maxillipèdes postérieurs (fig. 81, an); 390 GEORGES BOHN. 20 Par les bords internes des articles basilaires, 2,3 et 4 des antennes externes, arlicles qui sont disposés à angle droit les uns Fig. 82. — Corystes cassivelaunus Fig. 81. — Corystes cassivelaunus PENNANT. Marche de l’eau dans la PENNANT, 9° maxillipède gauche. chambre prostomiale (les appen- am, avancée du méropodite ; ep, dices buccaux ont été enlevés sauf épipodite ; pd, podobranchie. les mandibules). sur les autres, de façon à amener presque dans le plan sagittal les deux fouels antennaires; toutes ces pièces sont situées sensi- blement au même niveau, et sont munies de longs poils, formant un filtre pour l'ouverture décrite (fig. 82). Cette ouverture, qui conduit dans une cavité profonde laisse apercevoir seulement les deux antennules repliées longitudinalement dans deux fossettes séparées par une crête médiane. Si on écarte les maæxillipèdes postérieurs, on aperçoit les deux goutüères respiratoires qui aboutissent obliquement à la rencontre l’une de l’autre, sur la ligne médiane ; en avant, sur un plan un peu plus inférieur, se trouve l'épistome, petite cuvette vaguement pentagonale, séparée par deux très légères crêtes des gouttières. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 391 Les maxillipèdes étant en place, leurs carpopodites atteignent le niveau de l'épistome, mais les avancées méropodiales vont jusqu’à la base des antennules. Voici maintenant quelle est la marche du courant inverse. L'eau arrive par l'ouverture externe que j'ai décrite il y a un instant, ou bien par une cheminée formée par la rencontre des deux rangées de poils qui garnissent les articles 4 et les fouets antennaires d’un côté avec les deux rangées similaires de l’autre côté. Elle passe ensuite dans la cuvette de l’épistome, qui est garnie de quelques poils, puis, franchissant une crête surmontée d’une houppe de poils, elle pénètre dans l'une ou l’autre des gouttières des scaphognathites. Pseudocorystes armatus M.-EDbwW. — La chambre prostomiale est aussi prononcée que chez les Corystles, mais elle n’est pas con- tuées exactement des mêmes pièces. _ 1° Les maxillipèdes postérieurs (fig. 84) ont une configuration différente : les articles terminaux paraissent être fréquemment en état d'extension sur les articles 1 et. 2 (—= Ano- moures); ils sont poilus et prennent part à la constitu- lion de l’ouverture de la chambre prostomiale. \ 2° Un prolongement an- térieur du bord ptérygo- stomien en forme de saillie se pointue et courbe (de dent) cache (fig. 85) l’article 2 FiG. 83-84-85. — Pseudocorystes armatus M.- des antennes externes, situé 7. {re figure : antennes, ennules et . DIN ES HO SRE ORIEnneS, OR TEE nage du pédon- épistome; 2e fig.: maxillipède postérieur, Ë He avancée prostomiale et antenne ; 3° fig. : cule oculaire. Son bord avancée prostomiale, antenne et orbite. antéro-imnterne est garni de poils extrêmementlongs qui forment comme une sorte de rideau au-devant des articles terminaux des maxillipèdes.- 392 GEORGES BOHN. 3 Les divers articles des antennes externes et la hampe sont placés dans le prolongement les uns des autres, et sont garnis sur leur face antérieure de poils disposés régulièrement. L'orifice externe de la chambre prostomiale est double ; il comprend : 1° Un orifice postérieur situé entre les extrémités des maxilli- pêdes ; 20 Un orifice antérieur, limité par le bord antérieur de ceux-ci, par le bord antéro-interne de l'apophyse ptérygostomienne et par les articies terminaux des antennes. En écartant les maxilipèdes, on découvre une excavation assez profonde, dont le fond est garni abondamment de poils; par l’orifice externe postérieur, on aperçoit l'épistome tout poilu et le commen- cement des gouttières. Voici quelle est la marche présumée de l’eau (fig. 83). Elle entre évidemment par les deux orifices externes décrits, dont les bords sont garnis de poils filtrants ; les poils d’une antenne rejoignent ceux de l’antenne opposée, et forment une sorte de rideau au-dessus de l'ouverture, rideau qui se continue plus en arrière grâce aux poils des apophyses ptérygostomiennes et à ceux des maxillipèdes. Une fois que l’eau a pénétré dans la chambre, elle glisse vraisem- blablement sous le front, les antennules, l’épistome, pour atteindre les gouttières des scaphognathites ; elle rencontre ainsi une série de barrières filtrantes : a) En avant, la face inférieure du rostre est poilue ; b) Les antennules se replient en long de chaque côté d'une crête médiane qui en gagnant le rostre va en s’effaçant ; leurs articles basilaires saillants sont poilus sur les bords ; c) Une légère crête, glabre, se détachant en blanc, sépare les fosseltes antennulaires de l’épistome poilu ; d) Celui-ci est en presque continuité avec les gouttières; les crêtes de séparation, peu prononcées, sont dissimulées par des poils abondants qui garnissent l’épisitome et envahissent les gouttiéres dans le sens de la pénétration de l’eau. La chambre prostomiale du Pseudocorystes armatus M.-Epw. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 393 n'est pas constituée par les mêmes parties que la chambre analogue des Corystes : les antennes chez les Pseudocorystes passent au second rang, tandis que le premier est pris par les prolongements ptérygostomiens antérieurs ; nous retrouverons ailleurs (Voir plus loin, p. 458) cette disposition. De plus, le filtrage de l’eau, au lieu de se faire simplement au niveau de l’orifice d'entrée, a lieu tout le long de son trajet : le front, les antennules, l’épistome et l’espace prélabial étant tapissés de poils. | Les différences entre les Corystes et les Pseudocorystes sont fort intéressantes à mettre en évidence, car elles nous font voir la plas- ticilé remarquable des pièces qui avoisinent les orifices respiratoires antérieurs ; chez les Corystes, ce sont les articles basilaires des antennes et les méropodites des maxillipèdes externes qui s’hyper- trophient ; chez les Pseudocorystes, ce sont surtout les parois orbi- taires inférieures et la partie antérieure du bord ptérygostomien ; par suite les maxillipèdes et surtout les articles 2 des antennes sont protégés contre les frottements mécaniques, cause certaine de lhy- pertrophie des organes chilineux. Corystoides abbreviatus M.-Enw. — Chez les Corystoïdes abbreviatus M.-Ebw., étrange petit Crabe verdâtre, la chambre prostomiale est constituée suivant un mode différent encore. Les pattes-mâchoires, les apo- physes ptérygostomiennes , les antennules exceptionnellement dé- veloppées contribuent à sa forma- tion, et chose étrange, paradoxale presque, les antennes chez ce Co- rystidé sont si réduites qu'elles ont élé méconnues pendant longtemps. Le cadre buccal, très large en arrière, se rétrécit notablement à la FiG. 86. — Corystoides abbreviatus parte antérieure ; il est fermé M.-Enw. Chambre prostomiale. Presque hermétiquement par les troisièmes paltes-mâchoires qui s'appliquent l’une contre l’autre sur la ligne médiane. Les méropo- dites forment deux avancées poilues en avant des carpopodites. 394 GEORGES BOHN. Les antennules sont remarquablement longues ; dirigées en avant, elles ne peuvent se loger sous le front ; leurs articles basilaires sont poilus, les articles 2 portent une rangée de poils sur leur face in’é- rieure, et sur leur face supérieure quelques poils au niveau du rostre, ceux de droite rejoignant ceux de gauche. Parallèle entre ces trois formes. — Les Corysles cassive- launus PENNANT, les Corystoides abbreviatus M.-Ebw. et les Pseudocorystes arimatus M.-Epw. ont une chambre prostomiale des mieux caractérisées et une allure commune, comme l'indique la ressemblance des appellations génériques; malgré cela elles présentent des différences parfois très accentuées. Il m'a paru intéressant pour la suite de cette étude d'établir 1c1 un parallèle entre ces trois espèces. 1° Elles sont toutes profondément adaptées à la vie fouisseuse ; les mœurs des Corystes sont bien connues (GOssE, (ARSTANG) : ils s'enfouissent dans le sable et ne sortent guère que la nuit ; les échantillons de Pseudocorystes que j'ai examinés et qui venaient de Valparaiso élaient tout imprégnés d’une boue rouge ; les Corystoides de Montevideo que j'ai étudiés étaient recouverts en parle d’une boue grisâtre. 2° Chez toutes, la carapace est lisse; chez les Corystes, elle est mince est souple, la chitinisation se fait mal (comme le montrent les extrémités des branchies afoliées et enroulées); chez les Corys- toïdes et surtout chez les Pseudocorystes, elle est plus résistante. 3 La teinte de la carapace varie; elle est ambrée chez les Corystes, jaune, semble-t-il, chez les Pseudocorystes, verte chez les Corystoides. 1 Chez les Corystes et les Corystoides, les pinces sont développées et ne s'appliquent pas contre la carapace ; les mains sont renflées, déformées. Chez les Pseudocorystes, les pinces peuvent s'appliquer sur la face ptérygostomienne, en épousant plus ou moins ses contours. »° Chez les Corystes etles Corystoïdes, le rebord ptérygostomien présente un bombement qui correspond à la gouttière du scapho- gnathite, el qui porte des ornements chez les Corysloïdes ; il n'en est pas de même chez les Pseudocorystes. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 395 6° Chez les Corystes et les Corystoïdes, les pattes-mâchoires externes sont fléchies sur elles-mêmes ; chez les Pseudocorystes, elles sont en extension. 7° Chez ces Crabes, la chambre prostomiale profonde est constituée de diverses manières. Corystes Pseudocorystes Corystoides Avancée des méropodites des Avancée des méropodites des maxillipèdes postérieurs. maxillipèdes postérieurs. Apophyse ptérygosto - Apophyse ptérygosto - mienne. mienne. Articles bas. des antennes. Articles bas. des antennes. ( Antennes extrêmement 2-3-4 D réduites). Fouet des antennes Antennules excessivement développées. Chez tous ces Crustacés, grâce sans doute à l’affaiblissement de la fonction chitinogène qui résulte de la vie fouisseuse presque exclusive, l'ornementation de la carapace est faible et la forme des appendices très variable ; la chitine offre une très grande plasticité, et il est difficile d'établir une parenté d’après la morphologie comparée. Les Crustacés que Je vais étudier maintenant, Hypopelturion el Atelecyclus, Sont beaucoup moins modifiés par la vie fouisseuse, et sont d'un type morphologique mieux défini ; la chambre prosto- miale est peu profonde et largement ouverte. Atelecyclus septem-dentatus MONTAGU. — J'ai décrit ailleurs avec détails la chambre prostomiale des Afelecyclus [C, 991. Le front est assez avançant ; sous lui, les antennules se replient longitudinalement de chaque côté d’une crête mousse et entre les articles basilaires des antennes. Celles-ci répondent à la définition classique des Corystidés : les deuxièmes articles très développés sont suivis des articles 3 et 4 développés également ; chaque lige antennaire posséde des poils sur deux arêtes diamétralement opposées (face inférieure et face 396 GEORGES BOHN. supérieure), et ceux d’une antenne n’ont aucune tendance à se réunir à ceux de l'antenne opposée pour former une cheminée antennaire. Les fouets d’ailleurs sont peu développés. Les méropodites des maxillipèdes postérieurs ont une avancée garnie par des poils qui rencontrent ceux des articles basilaires des antennules. L'épistome est glabre ; on observe seulement quelques poils sur la crête endostomiale. Hypopellarion spinulosum WuiTE. — Chez les Hypopella- rion, la disposition générale est la même ; les antennules se replient Fic. 87. — Atelecyclus heterodon MONTAGU. Antennes, anten- nules, épistome. longitudinalement sous le front qui avance en triangle ; les antennes ont des articles basilaires moins saillants ; les articles 3 convergent obliquement, mais les poils qui les garnissent sont dirigés vers le dehors, et par conséquent ne peuvent se rencontrer sur la ligne médiane. Le palais est lisse et glabre, limité en avant par un bourrelet dont le prolongement antérieur s’insinue entre les deux antennules ; il est en continuité en arrière avec les gouttières expiratrices, qui pré- Fi. 88. — Hypopeltarion spinulo- sur \VHITE. Antennes, an- tennules, épistome. sentent dans leur partie anté- rieure quelques poils courts el abondants. Les maxillipèdes, abondamment poilus (sur leurs méropodites et leurs carpopodites), s'avancent jusqu'à la crête antérieure de l'épistome; les articles terminaux fléchis sur les méropodites maintiennent ceux-ci écartés de la ligne médiane. Les Atelecyclus el les Hypopeltarion sont caractérisés par une dépression prostomiale Située entre les articles basilaires bien SUR LA RESPIPATION DES DÉCAPODES. 397 développés des antennes, occupée par les antennules, et devant laquelle s’avancent fort peu les pattes-mâchoires operculiformes. Chez les Telmessus et les Thia, les pattes-mâchoires non opercu- liformes avancent peu aussi, mais une sorte de vestibule pour l'entrée du courant inverse est constitué par un front très-avançant, et par les articles basilaires des antennes. Telmessus serratus WHITE. — Le Telmessus serratus WHITE est un Crabe qui vit dans les mers du Japon; il a reçu un assez grand nombre de noms, entre autres: Cheiragonus cheiragonus Tiesius, Plalycorystes ambiquus BranDT, Platycorystes cheira- gonus BraNpT, et a été placé dans divers groupes. La carapace, fortement chitinisée, est bosselée et toute couverte de tubercules terminés par des ‘pines et des poils raides ; son bord présente de fortes dents ; les pattes ont également une ornementa- tion compliquée. Par l’ornementation, le Crabe se rapproche donc desOxyrhynques; la disposition des antennes et des appendices buccaux semble indiquer une adaptation à la vie fouisseuse , au moins chez les ancêtres. Ce qui frappe tout d'abord chez ce Crabe, c’est l'avancée très accentuée du front ; c’est un trapèze dont le bord antérieur est garni de poils fort longs (une houppe médiane et deux houppes latérales) et qui dépasse de beaucoup les fossettes où les antennules se replient presque longitudinalement, en dedans de leurs articles basi- laires. Les antennes, dont les articles basilaires sont très développés, Sn runs APIAUS: poilus et mobiles, débordent Wire. Chambre prostomiale. de chaque côté de l’avancée fron- tale. En revanche les maxillipèdes postérieurs contribuent fort peu à la constitution d’une chambre prostomiale ; les méropodites ne 398 GEORGES BON. présentent pas de lobe antérieur, et les trois articles qui suivent, bien développés, fléchis les uns sur les autres, constituent une courbe saillante en avant, qui, malgré de longs poils, recouvre incomplètement l’épistome. Celui-ci est nettement limité, en avant par un bourrelet muni de quelques tubercules, en arrière par une crête (endostome) présentant une rangée de poils espacés. Notons enfin que les épipodites et les branchies présentent, contrairement aux autres formes de Corystidés, une ornementation très développée. L'étude des Telinessus est fort suggestive : si la chitinisation et l’ornementalion rappellent celles de beaucoup de Crabes sédentaires, la disposition des antennes et des appendices buccaux semble indiquer une vie active et fouisseuse déterminant le renversement du courant respiratoire. Je serais assez disposé à voir dans les Telmessus des Crustacés primitivement fouisseurs, ayant abandonné ce genre de vie pour prendre celui de la plupart des Crabes sédentaires (Oxyrhynques) ; il y aurait à rechercher si les jeunes ne sont pas fouisseurs. Thia polila LEACGH.-— Les Thia sont bien curieuses aussi. Ce sont des formes actuellement fouisseuses, par suite faiblement chitinisées, avec avancée frontale notable. La disposition des antennes el appendices buccaux rappelle un peu celle des mêmes appendices chez les Telmessus : le front garni en avant par une rangée de longs poils forme une sorte d’auvent qui recouvre en partie les articles basilaires bien développésdesantennes; les extrémités des pattes-màchoires (dont les méropodites n’avancent pas) se croisent au-devant de la dépression prostomiale. Les T'hia semblent être des formes assez primilives qui auraient conservé la vie fouisseuse, alors que d’autres voisines, en l’aban- donnant, auraient donné naissance à un certain nombre de types du groupe des Portunidés. (Voir plus loin Ch. I). SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 399 Résumé et conclusions. — La chambre prostomiale a; chez les divers Corystidés, une constitution très variable. \ Corystes. Véritable chambre prostomiale. ..... Cr ne : Pseudocorystes. Corystoides. Dépression prostomiale comprise entre les articles | Atelecyclus. pastloirestdes antennes... :.........:1 0e | Hypopeltarion. : . sue : ; | Telmessus. Sorte d'auvent constitué par l'avancée frontale....... | Thia J'ai indiqué plus haut que les trois premiers genres se distinguent les uns des autres par des caractères mêmes de la chambre prosto- miale : antennes rudimentaires chez les Corystoïides (ce qui parait extraordinaire chez un Coryslidé), avancée plérygostomienne chez les Pseudocorystes et pattes-mâchoires non operculiformes. La chambre prostomiale, chez les divers Corystidés, semble résulter de l’hypertrophie de telles ou telles portions de la carapace (rebord ptérygostomien, paroi orbitaire inférieure, front...) et de tels ou tels appendices (antennes, pattes mâchoires postérieures...) par suite de frottements variés contre le Sable. Elle serait le résultat de l’adaptation, plus ou moins prononcée, à une vie particulière, la vie fouisseuse, et par conséquent aurait pu se consli- tuer chez des espèces appartenant à des groupes divers de Crabes prinilifs. On conçoit d’après cela qu’il n’y aurait rien d’impossible à ce que les divers Corystidés aient été groupés d’après des caractères résultant d'une convergence adaptative. La chitinisation et l'ornementation de la carapace ne sont pas faites pour nous éclairer à cet égard, car elles sont influencées elles aussi par le mode de vie. Chez les Corystes, les Pseudo- corystes, les Corystoïdes, les Thia, genres caractérisés la plupart par une chambre prostomiale profonde, la chitinisation est faible et la carapace lisse, comme cela a lieu chez tous les Crustacés à vie fouisseuse presque exclusive; la chitine devient presque transparente chez les Corystes et chez les Thia; chez les Corys- loïdes au contraire, elle se colore et commence à s’ornementer. Chez les Atelecyclus et les Hypopellarion, la chitinisation est plus prononcée et la carapace devient granuleuse; chez les seconds, les tubercules du bord de la carapace s’hypertrophient d’une façon singulière en épines fines et nombreuses ; de temps en temps une 400 GEORGES BOHN. épine plus forte semble correspondre aux dents qui garnissent le bord de la carapace chez les Afelecyclus et beaucoup d’autres Crabes. Chez les Telmessus, la chilinisation et les ornements rappellent ceux des Oxyrhynques, et ce fait semble indiquer que la vie fouisseuse a été abandonnée au cours du développement phylo- génique. Enfin, chez les Osachila tuberosa STIMPSON, ramenés de certains fonds (88 brasses) par le Blake, la carapace est caillouteuse, toute couverte de tubes de Serpules, toutes les pièces s'emboitent les unes dans les autres, les pattes-mâchoires postérieures s’enchässent exactement dans la cavité correspondante du cadre buccal, laissant à découvert l’épistome et les antennules (les antennes sont rudimentaires). Ce sont là des particularités présentées par les espèces vivant dans les fonds coralligènes (£urynome, Ebalia), et, si certaines auteurs retrouvent des caractères corystidiens chez ce Crabe, ceux-ci sont au second plan, masqués par une vague allure d'Oxystome. On voit combien, pour comprendre un Crabe, il y aurait lieu de tenir compte des adaptations successives aux divers genres de vie qu'il a pu présenter au cours de son développement phylogénique. Un certain nombre de Crabes, après avoir adopté au début la vie fouisseuse et avoir pris ainsi des caractères dits corystidiens, auraient abandonné ensuite ce mode de vie pour un autre. C’est peut-être le cas du T'elmessus; je vais montrer dans les deux chapitres suivants : 1° que les Cancéridés ne différent guère des Atélécyclidés que par le fait qu’ils ont abandonné le sable pour vivre sous les rochers ; 2° que la vie fouisseuse a modifié un certain nombre de formes primitives du groupe des Portunidés. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 401 CHAPITRE II Les Cancéridés. Les Cancéridés sont proches parents des Atélécyclidés. Les formes larvaires se ressemblent beaucoup. On peut trouver une série de passages entre les Afelecyclus et les Cancer pagurus L. de nos côtes; c’est ce qui résulte d’un examen qui a porté sur les espèces suivantes (1). 1° Cancer dentatus BELL (Bouvier det.) ; Pérou, WIENER ; 2 Cancer irroratus Say. (Mus. Comp. Zool. Cambridge) ; 3 Cancer productus RaANDALL (Mus. Comp. Zool. Cambridge) ; San Francisco, AGASSIZ ; 4 Cancer borealis SrimPsox ; Am. du N; individus de divers tailles ; 5 Cancer Novæ-Zelandiæ Lucas (Lucas det.) ; Nouvelle- Zélande, la « Zélée » ; 6° Cancer pagurus L.; S-Vaast. + Trichocera (Trichocarcinus) oregonensis Dana (M.-Edw. det.); Sitka. Deux faits ont particulièrement attiré mon attention. 1° J’ai été frappé par la ressemblance du Cancer dentatus BELL avec les Atelecyclus. Ce Crabe qui vit sur les côtes du Chili (Valparaiso) et du Pérou, a, comme les Afelecyclus, une carapace granuleuse, fortement poilue; l'échantillon que j'ai observé était tout couvert de petites éponges calcaires et devait vivre hors du sable ; toutelois la chambre prosto- miale est identique à celle des Afelecyclus : les pattes-mâchoires bien différentes de celle des autres Cancer, avec leurs avancées méropodiales garnies de longs poils raides, dissimulent une dépression prostomiale assez profonde: les antennes, également (1) Mises à ma disposition par le Professeur E.-L. Bouvier. 402 GEORGES BOHN. bien développées, sont assez rapprochées l’une de l’autre pour que les poils qui les garnissent s'enchevêtrent quelque peu. 2° J'ai remarqué qu'au cours du développement ontogénique la carapace s’élargit progressivement par rapport à sa longueur, et qu'en même temps la distance relative des antennes s’accroit. Ainsi chez de jeunes Cancer borealis SrimPsox le rapport de la x : H c : longueur de la carapace à sa largeur maxima,-, est 1,453, landis que chez les adultes ce rapport devient 1,55. r, si l’on considère les diverses espèces de Cancer, on constate Or, sil nsid ; LA LE H A qu'à mesure que la valeur numérique du rapport — croit les caractères corystlidiens s’affaiblissent, et l'on entrevoit ainsi l’impor- tance de la considération des variations de l'indice / = pour H ae : =: L sérier les diverses formes. J'ai indiqué dans le tableau suivant ces varialions et quelques autres qui paraissent également intéressantes : à H longueur sagittale carapace TU— = Q L largeur maxima carapace pe 5: longueur sagittale carapace __ d distance entre les deux antennes H longueur sagittale carapace == = = 7 C l h longueur des max. post. (fléchis) x h longueur des max. post. (fléchis tæ] ASE = = EVE FE im hauteur du méropodite C. dentatus BELL..... o2mm 1,46 10,1 2,33 2,4 d a m CRTIOPAUSISATEE Eee sl 1,47 6,8 NT) 210 dm C. productus RanpaLL.| 71 1,97 6,4 2,0 25 [dm C. borealis STIMPSON . = JeUNC se se 31,9 1,43 » » » » adultes ee ete 56 1,55 (0 2,16 2.6 DR C. N.-Zelandiæ Lucas.| 35 1,40 6,2 2,9 2,9 dm CG. pagurus LINNÉ . ..: . ne 6 tt ; de > fre } 69 1,62 7 2,9 26 |d=m | SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 403 Ce tableau donne lieu à quelques remarques intéressantes. Il y a un certain parallélisme entre les variations des divers indices qui expriment : l'élargissement de la carapace (i), l’écartement des antennes (k), le retrait des pattes-màchoires externes (p), et les variations de forme du méropodite de ces appendices (à). 1° Les Cancer dentatus BELL ont des indices bien distincts de ceux des autres Cancer adultes: la carapace est beaucoup plus étroite par rapport à la longueur (— 1,46); l’écartement des antennes est beaucoup plus faible (4—10, au lieu de 6-7); les pattes- mâchoires avancent beaucoup plus (p=— 2,3, au lieu de 2,5—2,9) ; l’avancée du méropodite donne à cet article une hauteur relative maxima (celle-ci l'emporte sur la distance interantennaire, fait exceptionnel dans le groupe). En un mot, les Cancer dentatus BELL ont une chambre prosto- miale encore fort nette. 2 Les Cancer irroratus SAY et productus RaANDALL différent déjà notablement de celui-ci. 3° Les Cancer borealis SriMPsoN jeunes se rapprochent du Cancer Novæ-Zelandiæ décrit par Lucas. L'échantillon que j'ai observé (déterminé par Lucas lui-même) est de très petite taille et présente des caractères de jeune: très faible élargissement de la carapace ( — 1,40), antennes encore assez rapprochées (4— 6,2), maxillipèdes caractérisés par les mêmes indices que ceux du C. productus RaANDaLr, indices intermédiaires entre ceux du C. dentatus BELL et ceux du C. borealis Srimpson adultes : il y aurait lieu de tenir compte de ces données pour reviser cette espèce. 4 Chez les Cancer pagurus L., on observe des différences numériques assez prononcées entre les divers individus, certains m'ont donné les chiffres extrèmes du tableau ; d’autres au contraire, parfois de taille plus grande, se sont rapprochés des ancêtres par la majorité des indices. Une série de figures (90 à 94) indiquent les variations de forme du méropodite et l'effacement progressif de la chambre prostomiale. A l’évolution des formes semble correspondre une évolution des teintes. La carapace du Cancer dentatus BELL parait être d’un rouge brique ; la chitine se décolore plus ou moins dans l'alcool chez les 404 GEORGES BOHN. Cancer productus RANDALL, irroralus SAY, borealis SrIMPson, et Novæ-Zelandiæ Lucas, ce qui indique une assez faible calcification ; celle-ci est plus prononcée chez les C. pagurus L. Le pigment qui entre dans une combinaison calcique orangée devient stable; toutefois des cas assez fréquents d'albinisine semblent rappeler la vie fouisseuse des ancêtres. Fra. 90 à 9%4 (1). — Effacement progressif de la chambre prostomiale chez les Cancer : C. dentatus BELL (C. d.), C. productus RaANDALL (C.pr.), C. irro- ratus Sax (C.i.), C. borealis SrimPsox (C. b.), C. pagurus LiNNÉ, venant de muer (C.p.). En résumé, si l’on considère la série des Cancer (2), on met neltement en évidence la parenté de ceux-ci avec les Atelecyclus. (1) Ces figures, celles qui suivront (sauf exceptions indiquées), représentent les appendices et organes de la partie gauche de l'animal. (2) Les Trichocera ne semblent avoir qu'un rapport lointain avec ces formes, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 405 Le Cancer dentatus BELL est un véritable Atelecyclus ; on peut s'étonner qu'ORTMANN ait intercalé entre ces deux formes presque identiques un {ype tout à fait différent, celui des Carcinus (Voir chapitre suivant). Les Cancer perdent peu à pen les caractères dûs à la vie fouis- seuse (chambre prostomiale), élargissent leur carapace pour loger les glandes hépatiques et génitales volumineuses, se calcifient davantage et se pigmentent par suite différemment. Le courant respiratoire, qui chez les Corystidés est si régulier pendant les longues périodes de l’enfouissement, est ici d’une constance remarquable. D'ailleurs les poils du bord antérieur des méropodites qui avertissent le scaphognathite (Voir p. 310) ont disparu petit à petit, et ne se retrouvent guère nettement parmi les Cancer pagurus L. que chez les jeunes, surtout après les périodes de mue. 406 GEORGES BOHN. CHAPITRE Il Les Portunidés. Parmi les Portunidés, j'ai distingué plus haut (1° p., Ch. I, S 10): 1° Des formes presque exclusivement FOUISSEUSES, telles que le Portumnus variegatus LEacx et le Platyonichus ocellatus LATR ; 2 Des formes PÉLAGIQUES, telles que les Neptunus el les Callinectes ; 3° Des formes MIGRATRICES, mais n'ayant que des périodes d’acti- vilé assez courtes, telles que les Polybius et les Portunus ; à ces dernières, j'ai rattaché les Carcinus. Chez tous les Portunidés, j'ai constaté (1° p., Ch. V, S S 7et8) que l'allure du scaphognathite est essentiellement variable, qu'elle est fonction de la taille, de l'habitat... , de l’activité surtout ; chez tous, on trouve plus où moins les renversements prolongés des Corystidés ; ces renversements sont la règle chez les Portunidés fouisseurs et très probablement chez les Portunidés pélagiques, si actfs ; chez les Portunidés migrateurs plus ou moins littoraux, ils sont remplacés par des chasses en arrière, de plus en plus espacées, irrégulières et atténuées. Les Portunidés fouisseurs se comportent au point de vue physiologique comme des Corystidés, et il n’est pas étonnant que les premiers offrent avec les seconds des ressemblances assez marquées. Ces ressemblances paraissent persister en grande partie chez les Portunicdés pélagiques, qui ont aussi vraisemblablement les renversements prolongés ; elles sont peu prononcées au contraire chez les autres Portunidés, où le courant respiratoire pénètre moins souvent par l'avant que par l'arrière. Je vais essayer d'appliquer ces considérations d'ordre physio- logique et d'ordre éthologique à l'étude morphologique des Portunidés. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 407 SU LES PORTUNIDÉS ONT-ILS À L'ORIGINE UNE CHAMBRE PROSTOMIALE ? ORTMANN considère les « Portuninea > comme les descendants des Corystidiens ; les Platyonichidæ (P. fouisseurs) formeraient le passage ; on trouve en effet chez ces derniers la chambre dite prostomiale des Corystidés; mais comme celte chambre n’est qu'une disposition spéciale des appendices antérieurs liée à l’inversion du courant respiraloire, elle peut se rencontrer dans des groupes qui n'ont qu'une parenté lointaine. Je tiens dès maintenant à signaler ce fait remarquable que les Portumnus nasutus LATR, qui sont incontestablement des formes très primitives, ne présentent aucune trace de chambre prostomiale. Nous devons donc nous demander si {ous les Portunidés ont eu à l’origine une chambre prostomiale de Corystidé, ow bien si un cerlain nombre de Porlunides prümilifs, en S'adaptant secondatrement à la vie fouisseuse, en ont acquis une ? Au point de vue de la chambre prostomiale, on peut classer les Portunidés dans deux séries : Première série. — ?latyonichus. Neptunes.Thalamites. — Chez le Platyonichus ocellatus LATR., la chambre prostomiale est TRÈS ACCUSÉE ; elle est d’un TYPE SPÉCIAL que nous retrouverons chez les Neptunes, les plus primitifs du moins. Cette chambre se serait effacée progressivement sans disparaitre complètement chez les autres Neptunes et les Thalamites. Deuxième série. — Polybies. Porlunes. Carcins. — Au contraire les formes qui habitent le littoral ou qui y reviennent, et qui ne sont, ni exclusivement fouisseuses, ni éxclusivement pélagiques, ne présentent dans aucun cas des traces bien nettes d’une chambre prostomiale. Souvent la chambre prostomiale est complétée en avant par le front. Or, les Plalyonichus, les Neptunes et les Thalamites (1° série) ne présentent pas d'avancée frontale; chez les Polybies, les Portunes et les Carcins (2° série), au contraire, il y a tendance à la constitution de cette avancée. Exemple: Portunus pusillus LEACH. 408 GEORGES BOHN: Première série. — /’latyonichus. Achelous. Neptunes. — Nous insisterons d'abord sur la constitution de la chambre prosto- miale du Platyonichus ocellatus Larr., Crabe de grande taille et à carapace bien chitinisée. Platyonichus ocellatus LATR. — Un des caractères qui frappent le plus alors qu'on examine la région antérieure du Crabe par la face ventrale, c’est la forme particulière de la paroi orbilaire inférieure ; c'est une muraille qui se dresse surtout du côté interne (sorte de dent orbitaire interne saillante) et qui se confond avec le prolongement antérieur du bord ptérygostomien. C’est sur le bord de cette avancée plérygostomienne que vient reposer le bord latéral externe du méropodite des maxillipèdes postérieurs, et à l'avancée ptérygostomienne correspond une avancée très caractéristique des méropodites ; une s'appuie sur l'autre ; leurs frottements réciproques contribuent certainement à les développer, mais c’est surtout le frottement contre le sable de ces pièces dans l’acte d'enfouissement qui me parait être la cause principale de leur hypertrophie. De cette disposition, 3üïl résulte: 1° que les maxillipèdes postérieurs sont sur un plan relativement beaucoup plus inférieur que celui de lépi- Fic. 95. — Platyonichus ocellatus LATR. stome ; 2° que lecontour ant Chambre prostomiale. rieur des maxillipèdes masque l’épistome et les articles basilaires des antennes. L'épistome, en effet, se voit incomplètement dans la profondeur ; on en aperçoit assez bien la partie médiane, qui est /osangique, presque carrée, mais on ne se rend pas compte qu'il se prolonge de chaque côté par une crête transversale (endostome) située entre la gouttière expiratrice (cachée complètement) et l’article basilaire de l’antennule, gros, saillant et poilu ; l’endostome passe sous le carpopodite et atteint la base de l'avancée méropodiale. L'écartement des maæxillipèdes postérieurs au - devant de SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 409 l'épistome et leur avancée contribuent à former une chambre prostomiale très nette. Cette chambre présenteles deux caractères particuliers suivants: a) elle s'ouvre sur la face dorsale de la carapace, grâce à une érosion interorbitaire ; b) elle communique largement avec les cavités orbitaires. a) Toute la partie antérieure de la carapace semble fortement érodée ; la face dorsale montre une grande échancrure en forme d'arc de cercle, située entre les dents extraorbitaires (supérieures), mais où s’avancent cependant trois dents interorbitaires : la médiane seule est un peu accusée, mais elle ne dépasse pas en avant les limites de l'érosion interorbitaire. En se plaçant au-dessus du Crabe, on aperçoit par cette large échancrure (fig. 96) : — sur un premier plan, de dedans en dehors: l'lesarticles basilaires globuleux et poilus des antennules ; 2° les plate-formes poilues qui termi- nent les deuxièmes articles des antennes, articles très mobiles, mais peu développés; 3° les Fi. 96. — Platyonichus ocellatus pédoncules oculaires gros et Does assez allongés ; — sur un second plan, de dehors et de dedans: 1° l'avancée ptérygostomienne, 2° le bord antérieur des méropodites des maxillipèdes postérieurs; 3% les carpopodites des mêmes maxillipèdes. En se plaçant en avant de l'animal, on aperçoit une sorte de fossé transversal, dont les orbites, allongées transversalement, forment les extrémités, et dont les bords supérieur et inférieur présentent des saillies variées. b) Les orbites sont en effet en large communication avec la chambre prostomiale, car les articles basilaires des antennes, pelits et très mobiles, ne les ferment pas. Ce second caractère (b) avait frappé vivement À. Mizxe-EpwaRps, qui s’en est servi pour la caractéristique des genres Platyonichus et Polybius (Voir plus loin) : « Premier article des antennes externes (notre deuxième) #robile ét de même forme que les suivants, inséré au-dessous des yeux 410 GEORGES BOHN. et des antennes internes au bord inférieur d’un grand hiatus par lequel l'orbite communique avec la fossette antennaire, caractère différentiel d'avec les Portunes, les Carcins, les Lupées (?) ». Platyonichus lalipes PENNANT (Portumnus variegatus LEACH). — La chambre prostomiale du Platyonichus latipes PENNANT est constituée sur le même type, mais chez ce Crabe de petite taille, faiblement chitinisé par suite d’une vie presque exclusivement fouisseuse, il y a quelques atténuations dans les caractères essentiels. Les avancées iméropodiales el plérygostomiennes sont momdres ; les méropodites ont toujours la même forme spéciale, plus longue que large, mais ont tendance à moins déborder sur la paroi ptérygostomienne. Les patles-mâächoires ferment mieux sur la ligne médiane la chambre prostomiale. Celle-ci est moins profonde; l'érosion frontale estmoïins accentnée ; l'avancée qui en surgit dépasse à peine le niveau des dents orbitaires externes ; la conmunicalion avec les orbites est également moins pro- noncée. L'article 2 des antennes est assez gros et poilu ; venant en contact avec le front, il a perdu de sa mobilité ; les articles 3 et 4 sont mobiles; l’article 3 porte une touffe de poils sur une Saillie apophysaire interne ; l’article 4 est petit ; le fouet est moyen, presque glabre. Le palais est un peu plus développé. Fig. 97. — Platyonichus latipes On voit qu'un certain nombre de PENNANT. Chambre prosto- miale. caractères particuliers de la chambre prostomiale des Platyonichus S'atté- nuent chez les Portumnes; chez les Neptunes, la chambre prostomiale va s’effacer notablement, mais certains des caractères des Platyonichus S'accentueront au contraire : ainsi les pattes- mächoires externes fermeront de moins en moins la chambre prostomiale sur la ligne médiane. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 41] Achelous orbicularis Ricurer. — Ce Crabe, circulaire et plat, avec sa chambre prostomiale assez nette, constitue une forme primitive de Neptunes. | Amphitrite hastala 1. Neptunus sanguinolentus HERBST. Callinectes diacanthus LATR. — L'Amphitrite hastata L., quoique peu différencié, a déjà la forme de carapace caractéristique des véritables Neptunes : Neptunus sanguinolentus HERBST, Cualli- nectes diacanthus LATR. Chez tous ces Crustacés, les caractères corystidiens sont beaucoup plus marqués que chez n'importe quel Portune {Portunus, Bathy- nectes, Polybius) ; tous les Neptune, ont une allure excessivement particulière: les pattes-mdchoires postérieures, avançantes, atteignent le niveau du front qui saillit à peine d’une vaste érosion frontale, en sorte qu'à l’avant de l'animal se trouve une sorte de fente transversale poilue ; les poils du bord antérieur du méropodite el ceux du carpopodite rejoignent plus ou moins ceux qui garnissent les articles basilaires des antennules el ceux des antennes (article 2: bord circulaire supérieur). Mais sur la ligne médiane, 11 y a we échancrure, qui.est due à l'écartement latéral des maxillipèdes postérieurs ; loutefois Les poils des carpopodites qui convergent vers la ligne médiane la dissimulent plus ou moins (Azrphitrile hastata L.). Chez le Callinectes diacanthus Larr. (fig. 98), l'écartement latéral des pattes - màchoires est très considérable et les #é6ropodites qui viennent glisser contre la paroi inférieure de l'orbite subissent une sorte d'hypertrophie latérale, caractère qui commençail à s’esquisser déjà chez les Platyonichus ocellatus LATR. Chez tous les Neptunes, le front est efjacé comme nous Pavons dit, mais on voit souvent une saillie médiane se former; chez le Neplurus sanguinolentus HErgsr, l'épisiome développe une sorte de dent médiane mousse; chez le Callinectes diacanthius LaTR. (fig. 98), une pointe médiane surgit d’entre les antennules. Celles-ci sont dégagées, mais elles peuvent se replier transversalement au- devant de leur article basilaire, saillant et poilu. Chez les Neptunes, la communication avec les orbites existe, quoi qu'en ait dit Mizxe-KEnwarps. Chez l'Amphitrite hastata L., il est vrai, l’articie 2 des antennes semble soudé au front et possède “une apophyse dirigée vers l'orbite, ne laissant qu'un hiatus peu 412 GEORGES BOHN. profond et sinueux ; l'orbite se trouve ainsi presque fermée. Mais chez le Callinectes diacanthus Larr., beaucoup plus spécialisé à certains égards, la communication est très nette: l'article 2 des antennes, dont la forme disparait sous des poils abondants, est indépendant du front et de l'orbite ; il est, semble-t-il, immobile ; l'article 3, assez gros, est dans son prolongement; l’article 4 est beaucoup plus petit; le fouet, grèle, presque glabre, est couché sur l'orbite. Podophthalnius vigil FAgr. — Chez ces Crabes, toute la région antérieure subit des modifications extraordinaires. Goniosomes et Thalamites. — Au tronc neptunien, il semble qu'il faille rattacher un rameau un peu aberrant, celui des Goniosomes et des Thalamites, formes extrêmement spécialisées. Fic. 98 Fi. 99 Ne Fic. 100 FiG. 98-99-1000. — Effacement progressif de la chambre prostomiale chez les Neptuniens. 1° Callinectes diacanthus africanus À. M.-Enw. ; 2° (oniosoma miles DE HaAAN ; 3 Goniosoma anisodon DE HAAN. Chez elles, la chambre prostomiale s’efface progressivement ; les méropodites ne recouvrent pas l’épistome,; il y a encore une SUR LA BRESPIRATION DES DÉCAPODES. 413 dépression en avant d'eux chez le Goniosoma miles DE HAaax, dépression qui s'elface chez le Goniosoma anisodon DE Haax, et surtout chez le Thalamita sima M.-Epw., cependant les méro- podites sont un peu dilatés latéralement, le front, plus ou moins transversal, n’est jamais avançant ; les orbites se ferment. Résumé. — En résumé, chez les Neptunes (Lupées) et chez les Goniosomes-Thalamites: la chambre prostomiale subsiste plus ou moins, jamais le front n'avance, les orbites se ferment plus ow moins au moyen de l’article 2 des antennes qui «a une forme spéciale. Chez l Achelous orbicularis RicHTER, forme très primitive, l’article 2 est mobile, comme chez les Platyonichus, mais une apophyse se dirige vers l'orbite ne laissant qu'un étroit passage, hiatus orbitaire interne; chez l'Amphitrile hastata L., la dispo- sition est la même, mais l’apophyse se soude à l'orbite, tandis que chez les Callinectes l'apophyse est atrophiée, laissant l'orbite ouverte; chez le Goniosoma niiles DE Haan, l’article 2 ferme l'orbite toujours au moyen de la même apophyse (fig. 99). Chez les Neptunes, les méropodites des maxillipèdes postérieurs sont dilatés latéralement ; chez les Goniosoma, on retrouve un reste de cette dilatation. Deuxième série. — Polybius. Portunus. Bathynectes. Carcinus. — Les formes de la deuxième série font un contraste complet avec celles de la première. Les maxillipèdes sont sensiblement dans le même plan que l'épistome qu'ils laissent à découvert s'arrêtant à l’endostome ; ils ne présentent pas de dilatation latérale (caractère qui correspond à l'absence de saillie ptérygostomienne). Le front est plus ou moins avançant. Les articles ? des antennes, plus ou moins prismatiques, closent assez bien les orbites ; 11 y a quelquefois un hialus orbitaire interne, mais aucune apophyse ne tend à le combler. Polybius Henslowi LEAcH. — Si l’on considère la disposition et la constitution des appendices antérieurs, les Polybies sont des Crabes à évolution relativement avancée. L’endostome forme une crête bien accentuée, contre laquelle vient s'appliquer le bord antérieur des maxillipèdes. Le relief de la 414 GEORGES BOHN. gouttière du scaphognathite est peu prononcé et ne porte aucune ornementation spéciale (différence avec le Platyonichus) ; l'avancée plérygostomienne n'existe qu'à l’état d’ébauche, aussi les méropo- dites des pattes-mâchoires (qui ont cependant des mouvements de latéralité) ne présentent pas l’hypertrophie latérale que j’attribue au frottement de ces méropodites sur l'avancée ptérygostomienne. Enfin le bord orbitaire ne dresse pas en dedans sa muraille bien haut. Les antennules se replient transversalement, mais d’une façon anormale (3 au-dessus de 2), au-dessous du front. C’est contre une apophyse du rebord frontal, siluée entre la dent latérale du front et la dent orbitaire interne, que vient s'appuyer l’article 2 des antennes. Celui-ci, assez large et prismatique, est bien découvert (différence avec l’autre série) ; sa hauteur dépasse un peu celle de la saillie orbitaire interne ; cependant il ne clôture pas exactement l’espace orbitaire interne, un hiatus subsiste entre lui et le bord interne de la paroi orbitaire inférieure ; du côté de l'orbite, il y a également une communicalion en forme de canal (dans laquelle on peut faire passer une épingle). Porlunes. — Les Portunes ne différent que par des nuances des Polybies. Chez le Portunus depurator L., par exemple, l’article basilaire 2 des antennes n’a pas une forme aussi régulière que chez le Polybèus ; on provoque plus facilement sa mobilité, et il n'existe entre lui et la paroi inférieure de l'orbite (muraïlle assez élevée) qu'un hiatus peu large, visible seulement quand on dirige le regard obliquement ; de plus les antennules sont beaucoup mieux protégées. Chez les autres Portunes, on trouve des variations de la mobilité de l’article basilaire des antennes et de la largeur de l’hiatus. Chez le Portunus tuberculatus Roux, l'article 2 des antennes, assez mobile, est étroit et de forme un peu irrégulière, il laisse un hialus considérable dans l’espace orbitaire interne ; les antennules repliées débordent le front; mais ce qu'il y a de plus remarquable, c'est la forme spéciale des méropodites des pattes-mâchoires externes. Ces méropodites présentent sur leur pourlour une auréole antéro-latérale membraneuse, sorte de prolongement aliforme latéral. Dans les mouvements de latéralité des maxillipèdes, les SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 415 méropodites passent au-devant de l'avancée ptérygostomienne effacée, mais peuvent venir butter contre la paroi orbilaire infé- rieure, et, comme leur bord est très faiblement chilinisé, il est très plastique et peut subir de ce fait une légère déformation, qui peut au premier abord rappeler celle que l’on observe chez les Neptunes. Je ne connais pas le mode de vie des Portunus tuberculatus Roux, mais il est facile de constater chez eux une insuffisance notoire de la fonction chitinogène : les articles 2 des antennes sont atrophiés, le bord 0 Por tber: des maxillipèdes est devenu membra- culatus Roux. Maxillipéde neux, les branchies sont afoliées à postérieur. ; leurs extrémités et se déforment plus ou moins. Chez ces Crabes les phéno- mènes de régression sont évidents, et il est possible qu'on puisse y trouver quelques retours vers l’état ancestral, et parfois une tendance vers l’évolution neptunienne (méropodites, forme de la carapace, etc.). En réalité, il y a un abime entre ce Portune et les Neptunes ; nous le verrons dans la suite. Chez les Portunus puber L., au contraire, les soudures se font au maximum. Balliynectes. — Les Bathynectes présentent de grandes analogies avec les Portunes, mais l’hiatus est bien prononcé ; l’épistome est découvert et les articles basilaires des antennes sont glabres. Carcinus. — Le Carcinus offrent les mêmes caractères que les Portunes et de vagues ressemblances avec certains Neptunes. Comparaison des deux séries. — Ainsi l'étude de la chambre prostomiale permet de grouper les Portunidés en deux séries : 1° Celle des Platyonichus, des Neptunes, des Goniosomes et des Thalamites, caractérisée par la disparition progressive de la chambre proslomiale, par la forme spéciale des méropodites des pattes-mâchoires 3 (expansion antéro-latérale plus ou moins pro- noncée), par l’absence d’avancée frontale, par l’article basilaire 2 des 416 GEORGES BOHN. antennes non enchässé dans les parties voisines, #2obile ou bien soudé au front, muni d'une apophyse qui rejoint quelquefois l'orbite, par les antennules mal protégées en général. 2 Celle des Polybies, des Portunes, des Carcinus, caractérisée par l'absence de chambre prostomiale, par les méropodites des paltes-mâchoires 3, sans avancée frontale, ni latérale (sauf chez les Porturus tuberculatus Roux et un peu chez les Portunus depu- rator L., chez lesquels la chitinisation est anormale), par l'avancée plus ou moins accentuée du front, par l’article basilaire antennaire 2 de forme régulière, prismatique, enchâssé dans les parties voisines, #20bilisable en général plus ou moins facilement et sans apophyse, par les antennules bien protégées grâce à l'avancée frontale. Jusqu'ici j'ai laissé de côté le Portumnus nasutus LaTR., d'un grand intérêt pour le point de vue auquel je me suis placé. Portumnus nasutus LaATr. — C’est un petit Crabe faiblement chitinisé, qui vit enfoui dans le sable coquillier, sous des eaux assez profondes et vives; M. GARD qui m'a fourni ces renseignements l’a trouvé à Concarneau ; les échantillons que j'ai étudiés viennent de M. CHEVREUX qui les a rapportés du Croisic. La distribution de ce Crustacé est sporadique, etla bête par son aspect fait penser à ces animaux archaiques qui ont vieilli sans évoluer. Le Portumnus nasultus LaATR. a toujours été réuni aux Platyonichus, bien qu'il ressemble étrangement à un jeune Carcinus manas PENNANT, comme le fait observer justement GARSTANG; malgré cela, celui-ci maintient les coupures génériques classiques: je crois qu'il est utile de les modifier; en effet le Portumnus nasutus LaTR. a tous les caractères de la seconde série, tant ceux relatifs à l'appareil respiratoire que ceux relatifs aux autres appareils. Le front a une forme spéciale caractéristique de l'espèce. Or, chez le Platyonichus, le front fait saillie à peine dans une grande érosion interorbitaire ; — chez les jeunes Carcins, au contraire, le front est saillant ; il en estde même chez plusieurs Portunes, le Portunus pusillus LEacx entre autres. Nous verrons dans la suite que la forme du front joue un grand rôle dans la classification : front des Xanthidés, etc. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. A7 Si on examine le Crabe par la face ventrale, on constate l'absence complète de chambre prostomiale. L'épistome est découvert ; c'est à peine si les quelques longs poils qui garnissent le bord antérieur des maxillipèdes le recouvrent ; les méropodites ne possèdent ni avancée antérieure, ni avancée latérale (caractères de la famille des Platyonichidés cependant) ; l'article basilaire 2 des antennes est de forme prismatique régulière ; 1l est #20bile, non soudé au front qui envoie vers lui une apophyse; il épouse exactement les me ce CONOUS de l'article basilaire des antennules nasucus Lair Absence + et de la paroi orbitaireiniémeure ermant de chambre prosto- ainsi l'orbite; les antennules se reploient miale. sous l'avancée frontale, et peuvent sy abriter , en se couchant en avant de leur article basilaire. Ainsi le Portumnus nasutus Larr. ne répond pas à la caracté- ristique du genre Platyonichus, telle qu'elle a été donnée par Mixe-Epwarps : fossettes des antennules incomplètement séparées des orbites, méropodites étroits s'avançant obliquement jusqu'au milieu ; il ne peut également rentrer dans la famille des Platyoni- chidæ de ORTMANN. Nous proposerons de le déplacer, et de le faire passer dans le groupe des Carcinidés. $ 2. — ORIFICES ANTÉRIEURS DES GOUTTIÈRES DES SCAPHOGNATHITES (LOBE PORTUNIEN). Chez les Platyonichidæ (ORTMANX), la chambre prostomiale communique largement avec les gouttières des scaphognathites ; l'épistome, linéaire sauf au milieu, a un relief peu prononcé ; toutefois il existe à l’avant des gouttières respiratoires un appareil filtrant, dont le rôle physiologique serait à préciser, et qui est constitué par les lacinies externes des maxillipèdes antérieurs. Ces lacinies ont des formes variables chez les divers Portunidés et l’évolution de ces formes est assez intéressante à suivre. tÙ -—? 418 GEORGES BOHN. Lacinies chez les Portunidés primitifs. — Chez les espèces les moins différenciées de l’une et de l’autre séries, espèces plus ou moins fouisseuses, c'est-à-dire chez les Platyonichus (+ le Porturnnus variegatus LEACH), d'une part, et chez le Carcinus d'autre part, la lacimie externe est encore entière, mais elle a chez les uns et les autres des formes assez diffé- rentes. Chez le Platyonichus ocellatus LATR. (fig. 104), elle est très allongée transversalement et a vaguement la forme d’un triangle dont la pointe atteint la ligne médiane; le bord antérieur est garni de longs poils disposés régulière- ment et formant comme une palissade filtrante. Chezle Portumnus variegatus LEacx, la forme de la lacinie est sensible- ment la même. Chez le Carcinus mœænas FiG. 103. — Carcinus mænas PENNANT. Lacinie des maxillipèdes antérieurs. PENNANT (fig. 103), au contraire, la lacinie est courte, entière, arrondie. Toutefois l’extrémité présente déjà une disposition des poils qui va s’accentuer chez le Portumnus nasutus LATR. Fc. 104-105. — Lacinie des maxillipèdes antérieurs chez le Platyonichus ocellutus LaTr. et chez le Portumnus nasutus LATR. Chez celui-ci (fig. 105), comme chez le Curcinus, la hauteur et la largeur de la lacinie sont égales, le bord antérieur est garni de SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 419 longs poils réguliers ; vers l'extrémité il se produit un rabattement, accompagné d’une légère incisure; il y a comme une ébauche du lobe portunien que nous allons voir se découper sur la lacinie de tous les autres Portunidés, tant dans la série des Neptunes, que dans celle des Portunes. Lacinie chez les Neptunes.— Chez l’Achelous orbicularis RICHTER, à la pointe, se différencie un lobe dit /obe portunien (p); au-dessous apparaît l’ébauche d’un second lobe (e). Le lobe » esi couvert de longs poils contre lesquels viennent frotter les extré - mités des fouets exopo - diaux. Le lobe e est garni sur son bord de poils plu- meux. Le bord antérieur de FiG. 106.— Lacinie des maxillipèdes anté- ]a Jacinie présente, comme rieurs chez l'Achelous orbicularis dhabitud an RicuTer. p, lobe portunien; e, pseudo- 6e, Une gee c lobe portunien. poils. Chez l’Amphitrite hastata L., le lobe portunien a à peu près la même forme. Chez le Neptunus sanguinolentus Hergsr (fig. 107), il se redresse vers le haut, en se détachant nettement. Chez les Callinectes diacanthus LaTe. (fig. 109), il ne dépasse pas le niveau du bord anté- rieur poilu de la lacinie. Quel est le rôle dé ce lobe portunien ? En examinant ce qui se passe chez l'Achelous orbi- cularis RICHTER, On arrive à Dr à: Er le considérer comme me sorte Fe ET EL SN de brosse pour les fouets sanguinolentus HERBST; 2 chez le exopodiaux. Goniosoma anisodon DE HAAx. Voyons si il a un rôle dans la constitution des orifices respiratoires. Chez l'Amphitrite hastata L., le bord antérieur poilu de la lacinie et le lobe portunien s’avancent jusqu'à une très petite distance 74 420 GEORGES BON. de l’endostome qui est très accusé, et ainsi l’eau est obligée de passer par une fente élroite garnie de poils. Chez le Neptunus sanguinolentus HEergsr, le bord antérieur de la lacinie est assez éloigné de l’endostome qui présente une incurvalion antérieure, Contri- buant à former un orifice expirateur. Chez le Callinectes «dia- canthus LaATR., l’endostome est à peine indiqué par une rangée de poils (Voir fig. 110); a de O- en 2 de un peu en arrière se trouve le Fi. 109 110. Callinectes diacanthus bord Æ de en africanus A. M.-Epw. Lacinie des ord antérieur de la lacinie ; maxillipèdes antérieurs et orifice quant au lobe portunien, 1l respiratoire qu'elle délimite. atteint la ligne médiane et esl balayé par les extrémités des fouels exopodiaux. Chez le Podophthalinus vigil FaBr., la lacinie, allongée dans le sens latéral, se redresse en arrière ; or, le fouet exopodial est très développé. Lacinie chez les Polybies et les Portunes. — Chez les Polybies, la lacinie est courte comme chez les Carcins; le lobe portunien commence à se différencier Fig. 111-112. — Lacinie des pattes mâchoires antérieures chez les Portunes (Portunus depurator L. et P. puber L.). Les Porlunes présentent des variations nombreuses de la lacinie mais qui ne paraissent pas avoir une grande importance : chez les Portunus puber L. en particulier, le lobe portunien développé se dresse vers le haut. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 42] Résumé. — En résumé, la lacinie est plutôt allongée transversa- lement dans la première série, plutôt courte dans la deuxième : son bord antérieur garni de poils semble jouer un rôle filtrant; quant au lobe portunien, il ne tarde pas à apparaître chez les formes différenciées des deux séries ; il semble que les lacinies en s'étendant vers la crête de l’endastome pour constituer des orifices filtrants, suppléant l'absence de chambre prostomiale, rencontrent des saillies variées, qui déterminent leur contour irrégulier ; le développement du lobe portunien semble également en rapport avec celui des fouets exopodiaux, pour lesquels il servirait de brosse; outre le lobe portunien {p) on observe une languette fe) qui résulle de ce fait que la lacinie vient se mouler plus ou moins sur les mandibules ; je l’appellerai languette mandibulaire et la désignerai désormais par m. S 3. — CHAMBRE BRANCHIALE DES PORTUNIDES. La forme de la cavité branchiale dépend dans une certaine mesure : 1° De la largeur du sternum par rapport à la longueur de la carapace ; 2° De la largeur de la carapace par rapport à sa longueur (largeur maxima et rétrécissement postérieur) ; 3° De la distance verticale entre le sternum et le dessus de la carapace ; 4° De l’inclinaison des flancs épiméraux ; »° De l’envahissement de la carapace par le foie. Chez le Platyonichus ocellatus LATR., qui a une carapace subor- biculaire (un peu rétrécic. postérieurement), le sternum est très large, et les flancs épiméraux sur lesquels reposent les branchies sont très peu inclinés ; aussi celles-ci ont la même inclinaison et sont très longues ; cette disposition s'accorde avec le grand aplatissement du corps. Nous la retrouvons chez tous les Neptunes. L’Achelous orbicu- laris RicuTER, l’une des espèces les plus primitives, par la forme de la carapace, l'extrême aplatissement du corps, la largeur du sternum, se rapproche d’ailleurs beaucoup du Platyonichus 422 GEORGES BOHN. ocellatus LaATR. Chez les Arrphitrile, les Neptunus, les Callinectes, la carapace subit un élargissement des plus caractéristiques, augmenté encore par la présence de deux pointes latérales (d’où l'apparence de rétrécissement postérieur) (1). Chez l’Amphitrite hastata L., la largeur de la carapace est double de la longueur; chez les Neplunus et les Callinectes, elle est plus considérable encore. Le sternum est très large, comme on peut le constater chez le Callinectes diacanthrus LATR. Si l'on examine chez ce dernier Crabe la disposition des branchies sur les flancs épiméraux, on constate que la pente des branchies n'est jamais très prononcée : maxima pour 6 c” et 5 c”, faible pour 4 c et 4 b, elle est insignifiante pour les branchies antérieures, qui sont de plus en plus courtes. Le Podophthalinus vigil Fasr. se comporte comme un Neptune : la pente des branchies est faible (ces organes se trouvent presque directement sous la carapace). Le Polybius Henslowi LEacx présente un contraste complet avec le Platyonichus ocellatus ef les Neplunes : la carapace ne présente qu'un faible élargissement, et les branchies ont une pente plus considérable. , . H longueur carapace Chez les Portunes, l'examen du rapport = —— TE" 2% L largeur donne lieu à des considérations intéressantes, comme pour les Cancer (Voir plus haut). Chez les Portunes de différenciation moyenne et avancée, tels que le Portunus holsatus FaBr. (à — 1,32), le Portunus arçuatus LEacx (i — 1,25), le Portunus puber L. (i = 1,33) l'élargissement de la carapace n’est pas plus considérable que chez le Platyonichus ocellatus LATR. (i — 1,28). Chez le Portunus pusillus LEACH, qui a une avancée frontale très prononcée, le rapport ? = — descend à 0,89, tandis que chez le Portunus depurator L. et chez le Portunus tuberculatus Roux (lequel a deux épines latérales), il s'élève à 1,5 et à 1,84. Il est à remarquer que chez tous les Portunes qui présentent pour à des valeurs extrêmes, la chitinisation est anormale, et par suite la membrane de chitine est assez plastique : le Portunus pusillus LEACH (1) Le foie n'envahit pas la carapace au même degré que chez les Cancer. SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 423 reviendrait peut-être à une forme ancestrale à front avançant voisine du Portumnus nasutus Late. : le Portunus depuralor L. etsurtout le Portunus tuberculatus Roux manifesteraient une tendance à l’évolution neptunienne, et ces faits pourraient peut-être conduire à cette conclusion que les deux séries de Portunidés auraient eu un ancêtre commun, dont le Portumnnus nasutus LaTr. n'est peut- être pas très éloigné. Remarquons pour terminer que chez les Careins ? est faible : 1.15. Valeurs diverses du rapport à — = chez les Portunidés. PREMIERE SÉRIE Platlatipes.:...…. 1 Ach. orbicularis ... Gon. erythrodactylum 1,5 Plat. ocellatus..... 1,28 | Ach. spinimanus.... 1,6 | Goniosoma miles .. 1,27 Plat. bipustulatus.. 1,42! Amphitrite hastata.. 2 Neptunus.."....23à22 Callinectes diacanthus 2,3 DEUXIÈME SÉRIE Polybius Henslowi. 1,14] Port. pusillus ..... 0,80 | Portumnus nasutus 1,13 Port. tubereulatus . 1.84 | Carcinus mænas... 1,27 } Port. depurator.... 1,5 Port holsatus..:.. 152 ! BOAT ATUS Te RS | Port. puber....... 1,33 En résumé, on constate dans l'évolution des Portunidés une double tendance : 1° La tendance neptunienne, très marquée chez les formes dont les branchies sont peu inclinées sur le plan horizontal, et consistant dans l'élargissement rapide de la carapace ; 2° La tendance opposée, se manifestant chez les formes dont les branchies sont très inclinées, et consistant dans l'accroissement antérieur de la carapace, accompagné seulement d’un faible élargissement. Les formes primilives des groupes ont pu présenter à la fois les les deux tendances; ceci expliquerait que le Portumne nasuté, 424 GEORGES BOHN. malgré son avancée frontale, se rapproche par d’autres caractères des autres Portumnes et des Platyonichus. Chez les Portunes qui, sous l'influence du genre de vie, présentent une chilinisation imparfaite, on retrouve ces deux tendances: le Portunus tuberculatus Roux Ss'élargit comme un Neptune, le Portunus pusillus LEACH acquiert une avancée frontale. La série des Platyonichus et des Neptunes est très remarquable ; la tendance neptunienne se manifeste déjà nettement chez les Platyonichus : chez les Plalyonichus ocellatus Larr., Crabes encore assez primitifs, la largeur l'emporte déjà sur la longueur (i — 1,28); les Platyonichus bipustulatus M.-Ebw. présentent un POLYMORPHISME remarquable et le rapport À variable suivant l’âge et les races peut atteindre jusqu’à 1,42. Chez les Goniosomes, on trouve des espèces à carapace large (1,9 : Goniosoma erythrodactyluni LaAmarck), à côté d'espèces à carapace plus étroite (1,27: Goniosona miles DE HAax). L'étude de l’évolution de la carapace conduit donc à maintenir les deux séries que j'ai établies dans le groupe des Portunidés. } S 4. — FORMULES BRANCHIALES CHEZ LES PORTUNIDÉS. L'évolution de la formule branchiale se. fait également d’une manière différente dans les deux séries. Première série. — Le Platyonichus ocellatus Larr. offre un fait remarquable : toutes les branchies étant longues et ne pré- sentant pas de variations de taille considérables, la podobranchie 54 est peu développée, et n'est point enchâssée, comme cela a lieu chez les Cancéridés et beaucoup de Crabes, à la base de 5c. Chez l’Achelous orbicularis RICHTER, qui présente la même disposition générale des branchies, les choses sont poussées même plus loin ; chez l'unique exemplaire que j'ai eu entre les mains, Je n'ai pu constater la présence de 34. Chez l’Arnphitrite hastata L., celte branchie est encore repré- sentée, mais son axe qui ne développe plus que quelques lamelles rudimentaires oscille avec l’épipodite correspondant entre les bran- chies 3 et les branchies 4. Il en serait de même chez le Neptunus SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 425 Sayi Gisges. Je n'ai pas trouvé cette branchie chez les Calli- nectes diacanthus LATR. Chez tous les Neptunes, il se produit d'ailleurs un phénomène remarquable : les branchies 3 et 2 subissent une grande réduction ; 3c, souvent, 3b, toujours, sont considérablement en retrait sur 4b ; 2e est moins de la moitié de 4b, et 2a subit une réduction parallèle (Voir fig. 115). Chez le Podophthalnus vigil Fasr., où 3a est atrophiée, le phénomène est moins prononcé. Le Thalamita sima M.-Enw. a la formule branchiale de l’Achelous orbicularis RICHTER. Deuxième série. — À l'égard des branchics antérieures, les Polybies et les Portunes offrent un contraste frappant avec les Platyonichus el les Neptunes. Chez les Polybius Henslowi LEacu, les branchies 3 et 2? sont faiblement en retrait sur les branchies 4, et 3« est bien développée : cette branchie est enchâssée à la base de ÿc. Fi&. 113 à 115. — Disposition des branchies antérieures chez les Portunes, les Portumnes et les Neptunes. P. {., Portunus tuberculatus Roux ; PART Portumnus nasutus LATR. ; N, Amphitrite hastata L. Chez les Portunes, où la réduction des branchies antérieures est un peu plus prononcée (2c environ moitié de 4b), Sa est toujours bien développée (fig. 113). 426 GEORGES BOHN. Ainsi chez le Portunus luberculatus Roux. malgré l'aspect neptunien et les extrémités des branchies afoliées et déformées, la formule branchiale ne se modifie pas, et la réduction des branchies antérieures est même moindre que chez la plupart des autres espèces du même genre, c’est là précisément le contraire de ce qui se passe chez les Neptunes, et j'ai cru intéressant de donner en regard l’une de l’autre la représentation des branchies antérieures chez l’Asnphitrite hastata 1. et celle des mêmes branchies chez le Portunus tuberculatus Roux. espèces assez peu différenciées dans leurs groupes respectifs. Ces dessins (fig. 113 et 115) n’ont pas besoin de commentaires. En résumé, dans la première série on constate facilement une tendance, qu’on peut qualifier de neptunienne, à savoir la {endance à la réduction des branchies 3 et 2, et, en partüculier, à l’atrophie «de la podobranchie 54. Dans la seconde série, au contraire, 34 est toujours bien développée, et les branchies antérieures se réduisent relativement peu, même chez des formes extrêmement différenciées comme les Portunus puber L. Il est possible que la tendance à la réduction des branchies antérieures soit sous la dépendance de l’inversion du courant respiratoire, car chez les formes toutes très actives de la première série les renversements doivent être très prononcés. $S 5. — ENTRÉE DE L'EAU DANS LA CHAMBRE BRANCHIALE CHEZ LES PORTUNIDÉS. Si l’eau entre parfois en avant, elle entre souvent en arrière, el il y aurait lieu d'examiner ce qui se passe du côté des branchies postérieures. L’eau entre chez les Portunidés, comme chez la plupart des Crabes, par toute la fente du branchiostégite, entre les articles basilaires des diverses pattes ; chez les Portunes (Voir expériences relatives au renversement, p. 268), elle entre abondamment en avant de l'article basilaire des pinces, et aussi entre celui-ci et l'article basilaire des deuxièmes patles thoraciques; de même chez les Polybies et les Carcins. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 427 Remarquons que chez toutes ces formes le groupe antérieur branchial est bien développé. Chez les Platyonichus, l'eau entre en abondance entre les articles basilaires de pattes 4 et », comme on le constate aisément en laissant pendant un certain temps un Platyonichus latipes PENNANT dans de l’eau carminée : les poils qui avoisinent cette région se chargent de la matière colorante. Il en est probablement de même chez le Platyonichus ocellatus LaTR., comme l'indique la morphologie de la partie postérieure de la chambre branchiale. Chez ce Crabe, comme chez tous les Portunidés d’ailleurs, foute la partie postérieure de la chambre branchiale, formée par les épimères 7 et 8 extrêmement déve- loppés, surtout 8 qui correspond aux pattes natatrices, esl inoccupée; l'espace libre est considérable ; l'axe de la branchie 6 c” est presque transversal ; la branchie elle-même se dilate un peu en arrière pour venir reposer sur une sorte de saillie apophysaire de l’'épimère 7; Fc. 116. — Platyonichus ocellatus Sous la branchie soulevée se trouve Larr. Entrée de l'eau dans la l'indication d'un canal qui prendrait -chambre branchiale. Epimères : AE : ; nel 47iCe LE l'orifice inspirateut l'épimére T3; 6c°, branchie signalé plus haut. Quant à l'épimére postérieure. 8, il n'est même plus recouvert complètement par le branchiosté- gite dont le bord vient s'appuyer sur une sorte de crête transversale. Il y aurait lieu d'étudier avec soin les poils qui d'une facon générale garnissent le bord du branchiostégite. S 6. — ORNEMENTATION DE LA BRANCHIE CHEZ LES PORTUNIDÉS. L’ornementation de la branchie chez les Portunidés est en général assez simple; elle n'offre une certaine complication que chez le Portumnus variegutus LEacn, le Platyonichus ocellatus Larr. et l’Achelous orbicularis RICHTER, c'est-à-dire chez les 428 GEORGES BOHN. formes initiales des rameaux neptuniens ; chez les Polybies, les Portunes, les Carcins, elle est très faible au contraire. Ceci ne doit pas nous étonner, car l'ornementation de la branchie, comme d'ailleurs l'ornementation de la caräpace, est fonction de l’activité chitinogène ; or, chez les Crustacés que nous étudions en ce moment, la chitinisation est faible en général, et la carapace présente peu de crêtes, de tubercules, etc. Seuls les Platyonichus et les Neptunes font exception, et ce sont eux précisément qui ont des lamelles branchiales munies d’ornements. Première série. — Platyonichus ocellatus LarR. — C’est un Crabe d'assez grande taille et fortement chitinisé ; le dessus de la carapace est couvert de lubercules développés surtout dans sa partie antérieure ; le front, qui est situé dans un enfoncement, a trois dents, et les bords latéraux ont cinq épines développées ; le dessous de la carapace est granuleux ; le rebord ptérygostomien saillant est couvert de tubercules et présente, en dedans d’une ligne latérale prononcée, une crête dentée, due au frottement des pinces contre la face inférieure de la carapace. Celles-ci sont fortes, anguleuses, garnies de crêtes, d’épines, de tubercules, de brosses, ce qui indique, semble-t-il, des mœurs carnassières. Je prendrai pour type de la branchie une des branchies 4, qui sont les plus développées. La forme générale est celle d'une pyramide quadrangulaire (fig. 117, À) dont le plan de symétrie serait légèrement incurvé en S, dont la face externe serait un peu plus large que la face interne, la largeur de l’une et l’autre faces allant régulièrement en décroissant de la base au sommet. Les lamelles sont insérées perpendiculairement aux vaisseaux externe et interne: cinq ou six lamelles de grandeur croissante constituent la base de Ia branchie et leur bord externe est taillé en une sorte de triangle saillant, comme cela s’observe tout le long de la branchie chez certains Corystidés. Au delà de la base, l’ornementation se perfectionne et a lieu suivant un type uniforme. La face externe est constituée par deux sortes de pleins cintres, entre lesquels s’étend à la façon d’un ruban le vaisseau externe, et qui sont séparés des pleins cintres des branchies voisines par des sillons prononcés ; il en résulte que les faces latérales proprement dites, celles qui sont en contact d’une branchie à l’autre, ne corres- SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 429 poudent guère qu’à la moitié de l’épaisseur totale de la branchie. Ces faces latérales présentent une particularité extrèmement remarquable (fig. 117, C); dans toute leur étendue, les bords des lamelles extrêmement épaissis se touchent (1) : il faut attribuer cet épaississement à la pression et au frottement des branchies les unes contre les autres, et remarquer qu'il a un avantage, celui de maintenir les lamelles écartées les unes des autres, et par suite de forcer l’eau, pour passer de la face interne (flancs des épimères) (2) à la face externe, de couler entre les diverses lamelles. Sur la face interne, assez étroite, plane, fait saillie le large vaisseau interne; vers la base, ce vaisseau présente quelques crochets chitineux, espacés et courts, indiquant un faible frottement de l’épipodite correspondant, qui, en effet, est très grêle; sur l'échantillon observé, cette face présentait d’ailleurs des traces manifestes d’ensablement. Il faut noter que cet épipodite dépend des maxillipèdes postérieurs et par suile a tendance à devenir immobile comme cela a lieu chez les formes fouisseuses. La face externe, au contraire, présente une ornementation compliquée et qui est évidemment en rapport avec les frottements exercées par les épipodites externes, bien développés. Les bords des lamelles sur cette face offrent typiquement de chaque côté deux rangées laspérilès chilineuses saillantes et bien visibles : une rangée n'existe en général que vers la base, à quelque distance de la limite supérieure de la face latérale (7. para-latérale); l'autre ‘angée, sensiblement parallèle au vaisseau médian (7. para- médiane), est beaucoup plus constante. Considérant les lamelles postérieures de la branchie 4 D (fig.117, A); la rangée para-latérale se poursuit sur les 22 premières lamelles, et comprend : 1° (lamelles de la base) de simples incurvations du bord ; 2 des saillies prononcées dirigées vers le sommet de la branchie et en haut, chevauchant les unes sur les autres, et s’éloignant de plus en plus de l’axe de la branchie; 3° de simples accidents du bord ; la rangée para-médiane, qui commence après les lamelles de la base, est formée également de saillies : 1° celles-ci sont d’abord (1) Les faces latérales ont par suite une teinte différente de celles des faces externe et interne. (2) L'eau qui entrerait par l’orifice postérieur décrit plus haut (p. 250), commencerait par glisser contre lés flancs épiméraux., 430 GEORGES BOHN. dirigées du côté de la base de la branchie et ne présentent pas un alignement rigoureux ; 2° elles disparaissent ensuite sur 18 lamelles (sauf deux); 3° elles réapparaissaient pour former cette fois une ligne régulière parallèle au vaisseau externe, et sont alors plutôt dirigés vers la pointe de la branchie; 4° elles ont tendance à dispa- raitre, ce qui a lieu À à Ma pomte“de, ul | B | branchie. Les lamelles anté- | rieures de la même | branchie 4b présen- tent également les pig. 117. — Platyonichus ocellatus Larr. Ornemen- deux rangées de sail- tation de la branchie. À, branchie 4 b vue par lies chitineuses, mais le côté postéro - externe ; B, profils - de à è : lamelles branchiales de 4 b et de 3e; C, la rangée para -laté- épaississement du bord des lamelles au niveau rale se poursuit sur des faces latérales. une plus grande lon- gueur, les saillies étant moins prononcées, là où il y a des saillies correspondantes de la rangée para-médiane. ) / GC pv) La dissymétrie S'accentue dans la branchie voisine 3 € (fig. 117, B, en bas); les lamelles postérieures non bombées vers la base présentent deux rangées de saillies chitineuses, correspondant aux deux lignes de tangence avec l’épipodite, — les lamelles antérieures, au contraire, fortement bombées, présentent une seule rangée de saillies, l'épipodite ne frottant les lamelles que suivant une seule ligne, qui existe dans toute la longueur de la branchie. Chez 3b, la symétrie se reconstitue : les lamelles antérieures el postérieures ne présentent que la rangée para-médiane de saillies, le contour des lamelles ayant une courbure régulière; c’est à peine si l’on trouve quelques traces des saillies para-latérales vers la base et sur les lamelles postérieures. Il en est de même sur les lamelles postérieures de 2 €, qui sont seules visibles. Les branchies 5 et 6 ont l’ornementation des branchies 4; seulement les lamelles postérieures de 6 c”, qui présentent d’ailleurs la rangée régulière des saillies para-médianes , s’allongent: vers l'arrière, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 431 et se terminent en des pointes qui chevauchent les unes sur les autres. J'ai décrit dans ses plus petits détails l'ornementation des branchies du Platyonichus ocellatus LATREILLE, afin de montrer l'influence du frottement de l'épipodite sur le développement d’épaississements et de saillies le long du bord des lamelles bran- chiales, épaississements qui maintiennent l'écart des lamelles, saillies qui, accrochant celles des poils des épipodites, jouent un rôle considérable dans le nettoiement des branchies. Achelous orbicularis RicaTER. — Chez l’Achelous orbicularis RICHTER, à carapace très plate, les branchies ne peuvent pas se développer en hauteur, et 3 l'ornementation est d’un type un peu différent (fig. 118). Le vaisseau interne, peu saillant, est garni de quelques crochets, dirigés vers la base ou le sommet de la branchie A suivant leur position. Le vaisseau externe est débordé de part et d’autre par les lamelles. Les rangées FIG. 118.— Achelous orbicularis RIGHTER. de crochets qui garnissent la Ornementation de la branchie. À, profil d’une lamelle branchiale; PB, face externe de chaque côté ornements des lamelles, face externe; sont au nombre de érois ; C, ornements, face latérale. la rangée para-médiane est formée d’aspérités pointues dirigées en avant; dans la rangée suivante, ces aspérités ont pris une forme hémisphérique et viennent butler chacun contre la lamelle située immédiatement en avant, maintenant ainsi l'écart ; la rangée la plus écartée (para-latérale) est composée de saillies irrégulières en forme de tête. Les épaississements latéraux sont réduits; ils occupent seulement la limite des faces latérales avec la face interne, et ont la forme de fuseau. Ainsi chez le Platyonichus ocellatus LarTr. et chez l’Achelous orbicularis RicaTER, les lamelles bien régulières et rigides sont 432 GEORGES BOHN. maintenues écartées les unes des autres par des épaississements de leur bord ; ilen résulte que la branchie forme un tout qui se tient bien. Portuinus varieqatus LEacx. — Chez le Portumnus varie- gatus LEACH, forme actuellement fouisseuse, la branchie est du type de celle du Platyonichus ocellätus LaTR. Mais l'influence de la vie fouisseuse prolongée et presque exclusive modifie la chitini- sation ; la branchie commence à se déformer, les contours des lamelles chevauchent déjà un peu les uns sur les autres ; les saillies para-latérales de la face externe qui se trouvent sur presque toute la longueur de la branchie présentent des formes variées, tètes plus ou moins régulières rappelant les saillies correspondantes de l’Achelous orbicularis RICHTER. Neptunes. — Chez les Neptunes, les faces latérales se dêve- loppent en hauteur, tandis que la face externe s’aplanit, entre les diverses branchies, il n'existe plus que d’étroits sillons. Chez le Callinectes diacanthus Larr (fig. 120 C), les lamelles ne se sont épaissies d’une façon sensible sur les faces latérales qu'à leur limite inférieure ; quant aux faces externes,elles présentent deux rangées de saillies chi- Ns c tineuses bien prononcées qui rappellent celles des Platyo- nichus ; la rangée para-laté- rale n'occupe de même que le premier tiers ou la première G Là | nolentus HErBsrT (fig. 119, ou a N.s.), la rangée para-médiane | seule est bien développée; de Di Fe NT aies . plus, sur chaque demi face : (à h NA | ER interne, une ligne régulière Hergsr: C, Callinectes diacanthus est dessinée, vers le milieu, LaTR.; G, Goniosoma anisodon DE par de légers épaississements Haax; T, Thalamita sima M.-Enw. des lamelles. Chez les Neptunes, le vaisseau interne fortement saillant présente moitié de la branchie. Chez le Neptunus sangui- plusieurs rangées de poils, de diverses tailles, ornés plus ou moins SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 433 eux-mêmes ; ceux-ci développent à leur extrémité deux rangées de soies fines et acérées ; les épipodites correspondants sont relative- ment plus développés que chez les Platyonichus (Voir fig. 128). Goniosomes. — Les branchies du Goniosoma anisodon DE HAAN, Crabe qui a des caractères neptuniens manifesles, ressemblent à celles des Neptunes; à la limite des faces latérales et de la face interne, il y a des épaississements du bord des lamelles ; sur la face externe, les saillies ont la forme de tampon d'écart et rappellent celles des Achelous. Thalamites. — Les branchies des Thalamites ressemblent beaucoup à celles du Platyonichus ocellatus Larr.; les épaissis- sements portent sur toute la hauteur des faces latérales. Deuxième série. — Les branchies des Polybies et des Portunes ont une consistance bien moindre que celle des branchies que j'ai décrites jusqu'ici. Chez le Polybius Henslowi Leacu (fig. 124, P.H.), il y a encore, à la limite des faces latérales et de la face interne, de légers tampons de séparation entre les lamelles branchiales ; mais les saillies de la face externe, peu saillantes, ne se voient pas au premier examen ; elles sont d’ailleurs assez irrégulières. G PH. Pp. Fi, 123 à 125, — Ornementation des lamelles branchiales des Portuniens. C, Carcinus mœnas PENNANT ; P.H., Polybius Henslowi LEacH; P. p., Portunus puber L. Chez les Portunes, on ne trouve plus les épaississements des faces latérales, et, même chez des formes de grande taille, comme le Portunus puber L. (fig. 125, P.p.), il n’y a qu'une rangée de crochets peu saillants de chaque côté du vaisseau externe. Chez le Portunus holsatus FaBr., les lamelles sont sinueuses ; à la limite des face 28 434 GEORGES BOHN. latérales et de la face externe, il se forme des saillies irrégulières ; celles-ci sont rares sur le reste de la face externe; le vaisseau interne en revanche présente quelques poils espacés, grêles et commençant à se barbeler. Chez le Carcinus mœnas PENNANT (fig. 123, C), le bord des lamelles porte des saillies irrégulières et peu accentuées. En général chez les Polybies, les Portunes, les Carcins, les épaississements des faces latérales sont très atténuës ou manquent, l’ornementation des faces externes est irrégulière et toujours peu prononcée; chez tous (sauf chez le Portunus holsatus FaBr.) le vaisseau interne saillant porte des tubercules, développés surtout vers la base, et sur chacun desquels s’insère obliquement un poil ; la direction du poil dépend de la position du tubercule (Voir plus haut, p. 368). Chez le Portumnus nasutus LaTr., enfin, la branchie subit l'influence de la vie fouisseuse exclusive; elle se développe mal, présentant des chevauchements et des rétrécissements qui lui donnent une forme tout à fait irrégulière. On voit donc ici encore que l’ornementation diffère suivant que l’on envisage les Crabes de l’une ou l’autre série. S 7. — ORNEMENTATION DES POILS DES ÉPIPODITES. A l’ornementation des lamelles branchiales correspond celle des poils des épipodites. RTE anni FiG. 126. — Platyonichus ocellatus Larr. Ornementation des poils des épipodites. Les épipodites externes sont toujours bien développés chez les Portunidés. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 495 Les épipodites internes le sont peu dans la première série ; chez le Platyonichus ocellatus LATR., l’épipodite 3 est linéaire, l’épipo- dite 2 est beaucoup plus court; chez les Neptunes, l'épipodite 3, qui doit fonctionner plus activement, est un peu élargi à son extrémité. Chez les Portunes et les Carcins, les deux épipodites internes ont à peu près un égal développement (ce qui est en rapport avec la formule branchiale). J'ai étudié l’ornementation des poils des épipodites externes (1). FiG. 127. — Portumnus nasutus LATR. Ornementation des poils des épipodites. Chez le Platyonichus ocellatus LaTR. (fig. 126) et le Portumnus variegatus LEAcH, l'ornementation du poil n’est pas encore fixée, FiG. 128. — Callinectes diacanthus LATR. À, poils qui garnissent le vaisseau interne de la branchie ; B, poils des épipodites. mais chez les uns et les autres on voit se constituer de forts crochets dirigés en arrière ; or, ceux-ci seront caractéristiques des Neptunes. (1) Les poils des épipodites internes paraissent avoir des ornements de #éme forme. 436 GEORGES BOHN. Chez l'Amphitrile hastata 1. (fig. 129), il y a deux rangées opposées d’ornements, crochets d’une part, pointes dirigées en avant d'autre part, les uns et les autres remplacés vers l'extrémité des poils par de petites saillies chitineuses qui se développent progressivement en longs poils. Chez le Neptunus sanguinolentus HErBsr et le Callinectes diacanthus LATR., il y a une ou deux rangées de crochets; chez le Podophthalmus vigil Fagr. il y en a deux; l’ornementation de la pointe reste dans tous les cas la même. FiG. 129 à 131. — Ornementation des poils des épipodites chez les Neptunes, A, Amphitrite hastata L.; N, Neptunus sanguinolentus HERBST ; P, Podophthalmus vigil FABr. Les Goniosoma miles DE HaaN et anisodon DE HaAN offrent de grandes analogies avec les Neptunes. Re F1G. 132-133. — Ornementation des poils des épipodites chez les Goniosomes et les Thalamites, G, Goniosoma anisodon DE HaAaAN; 7, Thalamita sima M.-Epw. Chez l’Achelous orbicularis RicuTer (fig. 134), les crochets ont deux pointes, une dirigée en avant, l’autre en arrière; or,on rencontre parfois de pareils crochets chez les Platyonichus ocellatus LATR. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 437 Le Thalomila sima M.-Enw. (fig. 133) présente une grande variété de poils ; il y a encore quelques crochets irréguliers entre une région transformée en brosse et la région terminale. ne nee. LT Fic. 134. — Achelous orbicularis RicaTer. Ornementation des poils des épipodites. Chez les Portumnus nasutus LATR. (fig. 127), l'ornementation est mal définie ; mais ce qui tend le plus à se former ce sont des crochets à double pointe, ou des crochets à contour découpé, les uns et les autres caractéristiques des Portunes (Portunus tuberculatus Roux, P. plicatus Risso, P. puber L.) et des Carcins. Chez les Poly- bies, 1l n’y à qu'une ornementation peu visible en dents de scie. D . Ppl y 41 ITA. a & : P.Y SR ——— FiG. 135 à 139. — Ornementation des poils des épipodites chez les Portuniens. P. t., Portunus tuberculatus Roux ; P. p., P. puber L.; P. pl., P. plicatus Risso ; C, Carcinus mœænas PENNANT ; P. H., Polybius Henslowi LEAcx. Ces quelques indications ne contredisent pas le groupement des Portunidés en deux séries. 438 GEORGES BOHN. S 8. — RÉSUMÉ. — APERÇU SUR LA PHYLOGÉNIE DES PORTUNIDÉS.—- NOUVELLE CLASSIFICATION. I1 semble que l’évolution se soit faite dès l’origine dans deux sens différents. 1% Sens À DAS En e Porturmnus Te Carcinus ntrne __Plalyonichus Podophthalm mænas latipes Eee CCe vigil Polybiu S Àc helous Henslowi orbicularis Portunes Neptunes © © À TN" Nageurs ; Fouisseurs Nageurs accidentellement fouisseurs CS Lobe portunien Lobe — o Lobe — € Lobe — o 1 ou 2 lobes a — Pas de chambre prostomiale Chambre prostomiale marquée I, "©" +, © Branchie 3a bien développée, Branchie 3 à réduite ou nulle enchàässée à la base de Yc. (libre) Système antérieur des branchies (3 et 2) Syst. ant. (3 et 2) développé chez ne subit qu'une RÉDUCTION INSIGNIFIANTE les Plutyonichus et les Achelous, chez les Portunes (P. tuberculatus subit une RÉDUCTION NOTABLE Chez compris). les Neptunes. Ornementation de la branchie très Ornementation assez compliquée, simple (se complique à peine chez les surtout chez les Platyonichus et grandes espèces). les Achélous. NOTA. — Les Portunes n'ont suivi la voie d'évolution À qu'avec une certaine hésitation ; certains, comme les P, tuberculatus, présentent en effet quelques caractères neptuniens. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 439 Tous ces faits me permettent d'aborder la discussion de l'arbre généalogique des Portunidés (M.-Enw.) donné récemment par ORTMANN | E, 94] et que je reproduis ici : Thalamilidæ Lissocarcinidæ (GoniosomgThalamita ) Po dopht halmidæ Portunidæ ( Ports Neplunus ) Po Lybii dæ Cancridæ Portuninea Platyonichidæ Carcinidæ { Platyonichus Portumnus ) Cancrinea Âtelecyelidæ On retrouve dans ce tableau l’idée originale de ORTMANN, qui est de considérer les Cyclométopes commes des Corystidés modifiés. Sans discuter pour le moment l'origine commune que ce zoologiste attribue aux Cancrinea et aux Portuninea, je parlerai des Platyo- nichidæ, caractérisés par une chambre prostomiale des plus nettes, et verrai s’il est possible d'en faire dériver les divers Porlunidés de MILNE-EDwaRDs. J'ai étudié minutieusement une des formes les plus remarquables de ce groupe, le Platyonichus ocellatus LATR.; j'ai examiné un exemplaire de grande taille. La carapace de ce Crabe est bien chitinisée et présente des orne- ments variés : tubercules, crête dentée sur le rebord ptérygostomien, épines, etc. 1° La chambre prostomiale est des plus nettes: les méropodites des pattes-mâchoires postérieures beaucoup plus longs que larges 440 GEORGES BOHN. s'avancent au-devant d’un épistome presque linéaire et des articles basilaires des antennes, — gros, saillants et poilus pour les anten- nules, — bien développés et mobiles pour les antennes externes ; la chambre prostomiale se trouve en large communication avec les orbites, dont la paroi inférieure se dresse comme une muraille; en dessus elle est découverte grâce à une grande érosion interorbitaire, où se dessinent à peine les trois dents frontales. 2 La carapace est un peu plus large que haute, : — 1,28, et les bords antéro-latéraux présentent cinq dents bien marquées. 3° Les branchies couchées sur les flancs épiméraux présentent comme ceux-ci une faible inclinaison ; elles subissent des variations de longueur peu considérables; toutefois les podobranchies 24 et 3a sont très réduites, surtout 3a ; il en est de même des épipodites qui les portent : ceux-ci sont -grêles, et l’épipodite 2 n’est guère plus long que la moitié de l’épipodite 3. 4° Les poils qui garnissent ces épipodites présentent des ornements variés : dents de scie, quelquefois crochets à têtes antérieure et postérieure, souvent crochets à pointe postérieure. 5° Les branchies ont une ornementation compliquée : les bords latéraux des lamelles branchiales sont épaissis, ce qui maintient l’écart de celles-ci, et les bords externes offrent des saillies chiti- neuses de forme variée qui s’accrochent aux aspérités analogues des poils des épipodites. 6° Les épimères postérieurs, bien développés (car ils correspondent aux pattes natatrices), restent découverts. Le Portuimnus variegatus LEAcH (— Platyonichus latipes PENNANT), est construit identiquement comme le Platyonichus ocellatus LATR., mais il est presque exclusivement fouisseur, et le doigt des pattes de la cinquième paire thoracique, au lieu d’être elliptique, largement ovale, comme chez le Platyonichus ocellatus Larr., est de forme lancéolée, svelte ; de plus, la carapace n’a pas subi d’élargissement, elle est aussi large que longue. Ce sont là d’ailleurs les deux caractères essentiels qui servent à la différenciation des genres Platyonichus LaTR. et Portumnus LEACH, et l’on peut dire, semble-t-il, que /es Platyonichus ne sont que des Portumnus, #neilleurs nageurs, et dont la carapace s'est élargie. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 441 Cet élargissement se manifeste davantage chez le Platyonichus bipustulatus M.-Enw. (— PI. purpureus Dana) du Chili et des Indes, dont la carapace jaunâtre et pointillée de rouge acquiert une teinte plus foncée avec l’âge, en même temps qu’elle s'élargit (à — 1, 42); le front, très en retrait, est armé de 4 petites dents. Par cette forme, on passe facilement aux Lupées, aux L. dites marcheuses, telles que l’Amphitrite hastata L.,et aux L. dites nageuses, telles que le Neplunus sanguinolentus HEergsr et le Cailinectes diacanthus FaBr., excellents nageurs à la carapace jaunâtre souvent tachée de rouge et élargie considérablement. Les Lupées nous présentent encore tous les caractères essentiels des Platyonichus : 1° Une chambre prostomiale encore bien marquée; des méropo- dites avançants et munis de sortes d’expansions antéro-latérales ; des antennes dont l’article basilaire 2, souvent indépendant du front et de l’orbite, envoie vers le bord inférieur de celle-ci une apophyse qui tend à la fermer ; un front très en retrait, ne dépassant pas l'avancée des méropodites des maxillipèdes, et muni d’un nombre pair de petites dents. 2° Une carapace souvent plus de deux fois plus large que haute (à — 1,6 à 2,3), dont les bords antéro-latéraux présentent chacun 9 dents. 3° Des branchies souvent faiblement inclinées, et offrant de grandes réductions dans le groupe antérieur ; 3 €, souvent, 3 b, toujours, en retrait considérable sur 4 & ; 2 a réduite plus ou moins ; 3 a nulle ou afoliée. 4 Des poils épipodiaux à ornementation parfaitement déterminée et caractérisée par de forts crochets dirigés en arrière. 5° Des branchies présentant des épaississements plus ou moins marqués sur les faces latérales et souvent plusieurs rangées de saillies chitineuses sur la face externe ; en même temps des poils se développent et se différencient sur le vaisseau interne. 6° Des épimères postérieurs développés (1). (1) Auxquels se rattachent, comme chez les Platyonichus, une plateforme, sorte de gouttière allongée, pour le soutien du tube digestif, 442 GEORGES BOHN. Ainsi toutes les tendances qui apparaissent chez les Platyonichus se réalisent chez les Lupées, surtout l'élargissement de la carapace et la réduction des branchies antérieures, et l'on peut dire que les Lupées ne sont que des Platyonichus dont les caractères se sont exagérés. A côté du rameau neptunien proprement dit, on doit placer quelques rameaux frères, ceux des Achelous, des Goniosomes, des Podophthalmes. Chez les Achelous, la chambre prostomiale est du type neptunien (et l’article 2 des antennes est mobile), mais l'élargissement de la carapace est moindre (les bords antéro-latéraux offrent 9 dents), et la réduction des branchies ne porte que sur les podobranchies ; l’'ornementation des branchies et celle des épipodites sont d’un type un peu spécial. Chez le Podophthälmus, toute la région antérieure a subi des transformations bizarres, mais l'appareil branchial à des caractères neptuniens marqués. Chez les Goniosomes, le Goniosoma anisodon DE HAAN, qui a beaucoup d’un Neptune, montre comment a pu se faire la multipli- cation des dents ; si la chambre prostomiale est plus effacée que chez les Neptunes, si l’orbite se ferme au moyen de l’apophyse mentionnée, la réduction des branchies antérieures est bien moindre. Chez toutes ces formes, la branche 3 & est rudimentaire ou même nulle. Tous ces faits nous montrent qu'il n’est pas besoin d’intermé- diaires entre les Platyonichus et les Lupées d’une part et entre les Platyonichus et les Goniosomes d'autre part. Je vais montrer de plus combien est erronée l'opinion des auteurs qui ont êté chercher un passage dans des formes telles que les Polybies et les Portunes, qui ont une anatomie différente. Les Polybies et les Portunes diffèrent en effet beaucoup des Platyonichus et des Neptunes. 1° Ces Crabes ne présentent en général aucune trace de chambre prostomiale ; le bord antérieur des maxillipèdes peut venir s’appli- quer plus ou moins contre la crête de l’endostome ; les articles ? des antennes, plus ou moins mobilisables, au lieu d'être irréguliers, sont prismatiques et ferment assez bien les orbites ; s’il y a parfois SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 443 un hiatus orbitaire interne, aucune apophyse ne tend à le combler ; souvent il y a une avancée frontàle plus ou moins accusée (Portunus pusillus). 2° La carapace s’élargit peu en général, et les bords antéro- latéraux ne présentent jamais plus de 5 dents (Polybius : à — 1,14; Portunus : à = 1,27 à 1,33, sauf quelques exceptions). 3° Les branchies, qui peuvent atteindre dans certains cas une inclinaison assez forte, ne subissent pas de réductions considérables dans le groupe antérieur ; même chez les formes les plus spécialisées, les podobranchies sont invariablement bien développées: 3 a en particulier toujours enchàssée à la base de 3 c. 4° Les poils épipodiaux présentent des ornements en dents de scie. peu prononcées (Polybius Henslowi LEacx), ou bien des têtes à deux pointes ou à pointes multiples (Portunes). 5° Les branchies offrent très rarement des épaississements latéraux (épaississements très peu marqués chez le Polybius Henslowi LEacx) et les saillies chitineuses de la face externe, peu prononcées, sont disséminées un peu irrégulièrement. 6° Les épimères postérieures sont moins développés (1). Deux faits importants à noter sont : 1° la présence d’une branchie 3a bien développée, comme d’ailleurs touteslesbranchies ; 2 l'absence complète de chambre prostomiale. Ces deux caractères sont peut-être corrélatifs et liés tous deux au peu d'importance des courants inverses. Il résulte de ceci que les Polybies-Portunes, aux branchies 3a bien développées, ne peuvent descendre, ni des Neptunes, formes très spécialisées (3a — 0, carapace élargie), ni même des Platyo- nichus, qui ont si nettement des tendances nepluniennes. Comme d’ailleurs il serait absurde de faire dériver les Platyo- nichus des Portunes, on est forcé d'admettre que la souche des Portunidés élait au moins bifurquée lorsque les Platyonichides se sont difjérencies, el par suite que ceux-ci ne sont pas les ancêtres des Portunidés, mais seulement peut-être ceux des Neptuniens. On doit admettre que de bonne heure les Portunidés ont évolué (1) La plateforme viscérale est courte et large. 444 GEORGES BOHN. dans plusieurs voies ; une voie très nette est celle qui a été suivie par les Platyonichus et les Lupées. D'autres auraient conduit aux Polybies, aux Portunes et même aux Carcins; tous ces derniers ne présentent pas, même à l'origine (?), les caractères corystidiens; d’ailleurs il serait bien difficile de trouver leur forme ancestrale. Callindctes Lupees Neptun LS Amphil ile Goniosoma pA\ chelou S bicularms : UHR Polybies Podophthalmus viqil J Portunes Portunus À latipes Carcanus Platyonic hus Depuis longtemps déjà on a rangé dans le groupe des Platyoni- chidæ (ancien genre Platyonichus), on ne voit pas trop pourquoi d’ailleurs, une forme à caractères archaïques manifestes, le Portumnus nasutus LATR., qui diffère considérablement de l’autre espèce qu'on faisait rentrer dans le même genre, le Portumnus variegatus LEACH. En eflet : 1° Le Portumnus nasutus LATR. ne présente aucune trace de chambre prostomiale (moins que les Carcinus et que certains SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODÉS. 445 Porlunes), et cela bien qu'il soit fouisseur ; les pattes-mâchoires sont nettement operculiformes ; les articles 2 des antennes sont prismatiques, mobilisables (comme chez les Portunes) et ferment les orbites ; 1l y a un front extrêmement avançant, au lieu de l'érosion frontale des Platyonichus ; 2 La carapace du Portumnus nasutus LaTr. est élargie (é = 1, 13) comme celle des Polybies et à peu près comme celle des Carcins ; malgré l'avancée frontale, elle est beaucoup plus élargie que celle du Portumnus variegatus LEACH (à — 1); 9° Mais le Portumnus nasutus LaATR. ne peut dériver du Portumnus variegatus LEAcH, car les podobranchies, si réduites déjà chez le second, sont bien développées chez le Portumnus nasutus LATR. ; 4° Les poils des épipodites ont comme ornements les plus constants ces saillies à doubles crochets, si fréquentes chez les Portunes et les Carcins, si rares chez les Neptuniens ; 5° Les branchies, déformées par suite de la vie fouisseuse, ne présentent pas d’ornements saillants. On voit, d’après tous ces faits, que le Portumnus nasutus LATR. est situé sur un rameau frère de ceux des Carcins, des Portunes, etc., détaché du tronc commun, certainement, avant la différencia- tion des Platyonichus et de l’autre Portumne; il serait donc bon de retirer le Portumnus nasutus du genre Portumnus qui ne renfermerait plus qu’une espèce, le Porlumnus variegatus LEACH, ayant des caractères corystidiens marqués et manifestant déjà une tendance à la réduction des branchies antérieures. Il est étrange en effet qu'on ait songé à placer le Portumnus nasutus LATR. dans le genre Porltumnus LEACH, caractérisé, avec le genre Platyonichus LATR., par l'avancée des méropodites sur l’épistome non limité par une crête saillante du côté de la bouche, et aussi par la carapace pas plus large que longue, puisque ces caractères ne s'appliquent pas au Portumnus nasutus LATR. Seul le doigt des pattes postérieures est semblable chez les deux Portumnes, mais cela est un caractère lié étroitement au genre de vie commun que mênent ces deux Crabes, et qui par suite n’a qu’une importance toute relative. 446 GEORGES BOHN. Mais dira-t-on ces deux espèces ont un certain air de ressemblance ? Ce n’est pas étonnant chez des formes, qui, quoique déjà éloignées l’une de l’autre, sont encore peu différenciées, ont eu sans doute les mêmes ancêtres et vivent de la même vie. Quel a été l'ancêtre commun ? Il est difficile de se prononcer à cet égard.Ressemblait-1il plutôt aux Platyonichus, plutôt au contraire au Portumnus nasutus Larr.? Était-ce une forme à front peu avançant, mais chez laquelle les pattes-mâächoires recouvraient une chambre prostomiale bien nette ; était-ce, au contraire, une forme à front avançant ? Il me plairait assez d'adopter cette seconde opinion, car le retrait du front semble s'exagérer dans la série des Platyonichidés-Neptu- nidés, et marcher parallèlement à la réduction branchiale. S'il en était ainsi, il serait peut-être possible que les caractères corystidiens des Platyonichidés ne soient que des caractères acquis secondairement, et non des caractères primitifs, ce qui permettrait d'envisager les Corystidès comme un groupement de formes diverses se ressemblant par suile d’un genre de vie Commun. Mais, dira-t-on, pourquoi alors admettre, chez les Portunidés, un ancêtre commun, et non deux ou même plusieurs? L’adap- tation à la vie nageuse, comme celle à la vie fouisseuse, a pu se manifester simullanément dans plusieurs groupes primitifs de Crabes. | Les ressemblances qui existent entre les formes des deux séries de Portunidés ne permettent guère d'adopter cette hypothèse. Le Portumnus variegalus LEAcH ressemble un peu au Portum- nus nasutus LATR., certains Portunes prennent des aspects neptu- niens.Et il me fauticirappeler ces deux Portunes chez lesquelslafonc- tion chitinogène est manifestement troublée, le Portunus pusillus LeAcx qui vit dans les fonds à Algues calcaires et dans les profondeurs et le Portunus tuberculatus Roux qui se rencontre souvent avec le précédent ; la première de ces formes semble revenir à un état ancestral, prenant un peu, avec son avancée frontale, l'aspect d’un Portumnus nasutus LaTR., la seconde, au contraire, bien qu'ayant l'appareil branchial des Portunes, prend un aspect neplunien et élargit d’une façon inusitée chez les Portunes sa carapace (à — 1,6); en même temps les méropodites des pattes-mâchoires acquièrent des SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 447 expansions latérales, qui soulèvent ces appendices au-dessus de l’endostome. Ainsi il semble qu’un état maladif (état aphyxique peut-être) réveille chez le Portune des souvenirs ancestraux ; comme chez l’ancêtre, on verrait se manifester la double tendance, celle à la couservation de l'avancée frontale, celle à la constitution d’une chambre prostomiale de Neptune. Beaucoup d'auteurs (Voir Trailé de Zoologie de M. Enmoxp PERRIER) partagent la famille des PORTUNIDÉS en deux groupes : 1° Les PLATYONICHINÆ, comprennentles Carcinus, les Portumnus les Platyonichus, les Polybius ; 2° Les PoRTUNINÆ, comprennent les Portunus, les Thalamita, les Lupa. Chez les premiers, les lacinies des pattes-mâchoires antérieures présentent un lobe portunien rudimentaire ou nul ; chez les seconds, le lobe dit portunien est bien développé. Cette tendance à la formation d’un lobe portunien est une tendance commune aux diverses branches de Portunidés et même se retrouvera chez les Xanthidés; c’est là un caractère de faible importance pour la classification, car c’est un caractère adaptatif, ou même accidentel. En résumé, nous croyons utile de modifier la classification des Portunidés de la façon suivante : Platyonichus. Platyonichides…. Portumnus(une seule espèce: P. latipes). N'EPTUNIENS Lupa (Amphitrite, Neptunus, Box \Meptunides......{l Gallinectes). Achelous. PORTUNINÆ Podophthalmidés Podophthalmus. ORTMANN Goniosomidés.... Goniosoma. Portumnoides Box (une Carcinides..... espèce: P. Garstangi). PORTUNIENS no (Carcinus. Portunides...... Portunus et Bathynectes, | Polybiiés ....... Polybius, NOUVELLE CLASSIFICATION LES lorluninæ, 448 GEORGES BOHN. Je démembre ainsi la famille des Polybiidæ de divers auteurs, la famille des Platyonichidæ de ORTMANNX et le genre Portumnus lui-même. Ce genre ne comprendrait plus que le P. latipes et rentrerait dans la famille des Platyonichidés ; quant au Portumnus nasutus LATR., pour éviter des confusions regrettables, je propose de le désigner sous le nom de Portumnoïdes Garstangi (= Portum- noîdes nasutus), et de le placer à côté des Carcinus dans la famille des Carcinidés, car je considère avec GARSTANG que ces deux Crabes offrent beaucoup de ressemblances. % ‘ SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 449 CHAPITRE IV Les Xanthidés. Le groupe des Xanthidés (sens large) comprend une multitude d’espèces ; or, je n’ai pu examiner sur le vivant que 5 d’entre elles, à savoir : deux Xanthes (Xantho floridus MonTaGu, X. rivulosus Risso, deux Pilumnus (P.hirtellus Liné, P. spinifer M.-Epw.),une Eriphie (Eriphia spinifrons HERgsr). Par conséquent il ne m'a pas été possible d'appliquer les résultats de l’étude physiologique de ces Crabes à leur étude morphologique. C’est dommage, car il n’y a pas de question plus embrouillée que celle de l’origine et de l’enchaînement des divers Xanthidés ; la plupart des carcimologistes ont échoué en voulant la résoudre. J'ai été entrainé comme bien d’autres par la difficulté même du sujet; pendant plus d'un an, guidé par les conseils d’un de mes éminents maîtres, M. Bouvier, et m’aidant de données acquises dans l’étude à la fois morphologique et physiologique que j'ai faite des Portunidés, j'ai examiné minu- tieusement un grand nombre d'espèces de Xanthidés, el je me suis acharné, en vain, à la résolution d’un problème qui restera, je crois, irrésolu tant que l’étude physiologique de ces Crabes (respiration, chitinisation, pigmentation, etc.) ne sera pas poussée plus loi. Quoi qu’il en soit, j'ai accumulé beaucoup de matériaux ; peut-être pourrai-je publier un jour le résultat de mes recherches; en attendant je donnerai ici quelques aperçus sur les formes les plus suggestives du groupe. 1° J’étudierai avec assez détails la série des Xanthes ; 2 Je dirai quelques mots des Actées, formes qui paraissent se rattacher assez nettement aux précédentes ; 3 J'examinerai et comparerai entre elles des espèces qui paraissent isolées: les Carpilies, les Pseudozius, les Epixanthus et les Eurytium ; 4° Je signalerai un genre très intéressant, vu la variabilité de ses caractères, les Panopées ; 5° J'étudierai le Paragalene longicrura NarDo. 29 450 GEORGES BOHN. La plupart de ces formes se prêtent particulièrement à la recherche de l’origine des Xanthidés. Si on peut démontrer rigoureusement l’origine atélécyclienne des Cancer, si l’on entrevoit dans une forme voisine du Portumnoides Garstangi Bonn (— Por- tumnus nasutus LATR.) l'ancêtre des Portunidés, il est en revanche bien difficile de voir d’où s’est détaché le rameau xanthien. S 1. — LA SERIE DES XANTHES. Parmi les Xanthes, on trouve une forme très intéressante à cet égard : le Cycloxanthus 16-dentatus. Étude du Cycloxanthus 16-dentatus M.-Enw. — Avec sa carapace peu élargie, son front étroit et saillant, ses pattes- màchoires avançantes au-dessus d’une dépression prostomiale, ce Crustacé à l'allure d’un Crabe primitif. Quand on le voit pour la première fois, on lui trouve une certaine ressemblance avec les Atelecyclus, dont ila le contour général et les dents du bord antéro-latéral, et aussi avec les Cancer, dont il paraît avoir la chitine et le pigment. Malgré cela c'est un Xanthe, c’est-à-dire un Crustacé assez différent d’un Cancer. Toutefois on peul se demander si l’évolution xæanthienne n'aurait pas eu un point de départ voisin de celui de l’évolution cancé- rienne ; tandis que celle-ci se serait faite dans un sens unique, la première aurait eu lieu suivant des voies multiples. + Fi. 140, — Cycloxanthus 16-dentatus M.-Enw. Front asymétrique. Le front du Cycloxanthus 16-dentatus M.-Enw. est remarquable. C’est un front avançant, divisé sur la ligne médiane par une suture longitudinale. Chez l'échantillon que j'ai observé, originaire du Chili, les deux parties droite et gauche de l’avancée frontale pré- sentaient une asymétrie marquée, un des côtés ayant subi un arrêt de développement considérable par rapport à l’autre ; il y a comme SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. A5] une annonce de ce qui à lieu chez les Xanthes où /e front, divisé par une fente médiane en deux parties, constitue une avancée variable, faible en général. Si l’on ne tenait par compte de l’étroite fissure médiane, on pourrait considérer que le front du Cyclo- æanthus présente un nombre impair de festons, un lobe médian et deux lobes latéraux, comme cela a lieu d’ailleurs chez des formes primitives de Portunidés, le Portumnoides Garstangi Box (Poï-- tumnus nasutus LATR.) et le Carcinus mœænas PENNANT (espèce où l’on peut rencontrer anormalement la division du front en deux parties). Chez le Cycloxanthus 16-dentatus M.-Enw. l'avancée frontale se projette au-dessus des antennes ; les antennules peuvent se replier obliquement au-devant de leurs articles basilaires, et sans que des loges nettes soient creusées pour les recevoir ; les antennes ont le 2° article basilaire large et assez régulier, appuyé contre une forte saillie sous-orbitaire, qui le dépasse ; les deux articles suivants, libres entre le front et la paroi sous-orbitaire, sont encore bien développés ; le fouet est assez court. On retrouve là quelque peu les caractères des Thia, chez lesquels les anten- FiG. 141. — Cycloxanthus 16-dentatus nules sont couchées sous l'auvent M.-Enw. Chambre prostomiale. frontal, les articles basilaires sont éloignés du bord du front et situés à une certaine distance d’une avancée sous-orbitaire ; il y a encore quelques ressemblances avec le Portumnoides nasutus et le Carcinus mænas ; la direction des antennules est la même chez toutes ces espèces. Le Cycloxanthus 16-dentatus M.-Enw. semble étre une forme assez primitives offrant des ressemblances multiplies et par suite assez vagues : {1° avec les Afelecyclus et les Cancer, 2 avec les Portumnoiïdes et les Carcinus, 3° avec les Thia. Elle nous indi- querait peut-être que les Xanthidés dérivent, comme les Portunidés, de formes à avancée frontale assez marquée. 452 GEORGES BOHN. Le schéma suivant indiquerait l’évolution du front chez les Crabes primitifs. Aucune tendance Eégére lendance Avancée Tendance constante alavancée à lavancée notable à l'avancée Retrait Nepluniens Alelecyclus Cancer Portuniens Xanthes (Carcmdés - Portunidés) Thia L'appareil branchial du Cycloxanthus 16-dentatus M.-Epw. est celui d'un Xanthe typique ; le méropodite des maxillipèdes posté- rieurs ressemble à celui des Xanthes, la lacinie des maxillipèdes \ Fig. 142-143. — Lacinie des maxilli- Fi. 144. — Cycloxanthus 16-dentatus pèdes antérieurs. 1° chez le Cyclo- M.-Epw. Disposition de la lacinie / æanthus 16-dentatus M.-Epw. (C); dans l’espace prélabial ; e, crête 2° chez le Xantho floridus Mox- endostomiale. TAGU (X). antérieurs (fig. 142, C) s'étend transversalement jusque sur le devant des mandibules, rappelant beaucoup celle du Xantho floridus SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 453 MoxTaGu (fig. 143, X); les poils des épipodites sont identiques, de même le nombre et l’ornementation des branchies. Autres formes étudiées. — Le Cycloränthus 16-dentatus M.-Epw. permet donc de passer directement aux Xanthes {Xantho, Xanthodius, Xanthodes). Je n’'essayerai pas d'établir des coupures génériques, celles-ci seraient un peu illusoires chez des formes si plastiques, dont les caractères de détail ont évolué dans une multi- tude de directions. Les Leplodius ont les extrémités des doigts en forme de cuiller, mais ce caractère peut se rencontrer chez certains Xanthes. L'union de l’article basilaire des antennes avec le front est un caractère bien infidèle pour la séparation des Xantho et Xanthodes. Parmi ceux-ci, il y a des formes relativement grandes, à carapace élargie et aplatie, épaisse et lisse, et d’autres petites, à carapace moins élargie, accidentée et souvent ornée de poils. J'ai étudié les Xanthes suivants : 1. Cycloxanthus 16-dentatus M.-Epw. ; Chili. 2. Cycloxänthus californensis RATHBUN (Auct. det.); Catalina Harbor, 30-41 brasses, W. H. Dar. 3. Xantho rivulosus Risso (Bouv. det.) ; Méditerranée. 4. X. floridus MonTaGu ; Messine. LÀ 5. X. tuberculatus Coucx (Ebw. et Bouv det.); Talisman, 1883, 8 juillet, 355 ”. 6. Xantho bidentatus M.-Epw. ; Samoa, 1887. 7. Xantho punctatus © M.-Epw. ; Samoa, 1887. 8. Xantho varius Q ; Samoa, 1887. 9. Xanthodius Sternberghi Srimpson (Mus. Yale Coll.); baie de Panama, F. H. BRraDLEY coll. 10. Xanthodes Taylori Srimpsox (A.M.-Epw. det.); San Diego, Lord ESMARE coll. 11. Xanthodes eriphioïdes À. M.-Epw. (Epw. et Bouv. det.); Talisman, 1883, juillet, Cap Vert, La Praya, 10-30". 12. Xanthodes granosus (Ebw. et Bouv. det. ; type) ; idem. 13. Xanthodes Talismani (EDw. et Bouv. det.; type). 14. Xanthodes melanodactylus À. M.-Epw. (Epw. et Bouv. det.); Travailleur, 9 août 1882, Desertas, 100 à 150". 454 GEORGES BOHN. Forme de la carapace. — Chez ces diverses espèces, j'ai déterminé le rapport de la longueur de la carapace à sa largeur H Maxima, C— Voici le tableau des résultats trouvés. CGycloxanthus sexdecimdentatus. 1,38 Cycloxanthus californensis ..... 1,45 à 1,46 EE — —— ]_ _— XanthOIVUIOSUS er 1,531 "Xantho tuberculatus "10172 1,52 Xantho flonidus.. Re MAT IX anthodesteriphioides" "HF 1,97 Xantho bidentatus. LH A7. 1,73 | Xanthodes granosus........... 1,40 Xantho vVarius 2.4.0. 1,72 | Xanthodes melanodactylus..... 1,48 Xanthodius Sternberghi........ 1,19 On voit que les Cycloxanthus ne présentent qu’un très faible élargissement de la carapace (i — 1, 38 à 1, 46). Les Xanthes proprement dits (Xantho, Xanthodius), ont une tendance à l’élar- gissement qui se manifeste peu chez les Xanthes d'Europe, mais qui atteint chez certains Xanthes de Samoa une valeur élevée (= 1,73). Les Xanthodes, comme le Xantho tuberculatus, ont une très petite taille et un faible indice d’élargissement (à = 1,40 à 1,57). L'élargissement porte sur une zone notable de la carapace ; cette zone forme une bande transversale, plane sensiblement, et laisse en avant d'elle une région déclive (gastrique antérieure et frontale) et en arrière une région légèrement excavée de chaque côté pour recevoir les pattes postérieures (ceci est très net chez le X. floridus). Ornementation de la carapace. — Chez le Cycloæanthus 16- dentatus, la carapace présente les bombements caractéristiques des Xanthes (b. stomacal et 2 b. latéraux) ; le front est festonné, les bords antéro-latéraux de la carapace offrent 9 dents obtuses, irrégu- lières. La chitine développe seulement quelques poils dans la région postérieure du branchiostégite. Chez le Cycl. californensis, les dents antéro-latérales sont fort inégales. Les Xanthes présentent des variations infinies dans le genre d’ornementation. C’est sur cette dernière que MILNE-EpwaARps s’est SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 455 basé pour ranger les diverses espèces qu'il a décrites dans son Histoire naturelle des Crustacés (I, p. 389 à 399). S A. Espèces dont la carapace est granuleuse ou tuberculeuse en dessus. a. Pattes des 4 dernières paires, ni épineuses, ni dentées. a* Carapace couverte de GRANULATIONS ARRONDIES et ISOLÉES : X. hirtissimus, X. rufo-punctatus, X. asper, X. setiger, X. scaber, X. Lamarcki. u** Car. couverte de petits TUBERGULES SOUDÉS entre eux par doubles rangées et ayant l'aspect vermoulu : X. vermiculatus. aa. Pattes des 4 d. p., ni épineuses, ni dentées (CAR. TUBERCULEUSE) X. Reynaudi, X. Peroni. S: B. Espèces dont la carapace n’est couverte ni de granulations ni de tubercules. b. Mains et pattes des 4 d. p. dépourvues de crête tranchante sur leur bord supérieur. b* Car. bosselée dans toute son étendue et piquetée (b. a. L. f. dentés). X. impressus. b** Car. bosselée antérieurement, plane dans moitié postérieure (bords a. 1. fortement dentés). X. lividus, X. floridus, X. rivulosus, X. parvulus, X. hirtipes. b*** Car. sans bossellements notables. X. crenatus, X. Gaudichaudi, X. punciatus, X. planus, X. rotundifrons. bb. M. et p. des 4 d. p. avec crête longitudinale. M.Bouvier dans son étude récente sur les Xanthes d'Europe | E,98 | a montré l'énportance des caractères tirés de l’ornementation. Le Xantho rivulosus Risso et le Xantho floridus MoxraGu ontune carapace unie ou ornée de ponctuations, et dans tous les cas très peu granuleuse (pas de lignes granuleuses sur le corps et sur la pince des pattes antérieures), — souvent pas de poils sur la face externe etle bord antérieur du carpe et du propodite des pattes ambulatoires. 456 GEORGES BOHN. Chez le Xantho rivulosus, le front est moins infléchi, les sillons de la carapace sont beaucoup moins profonds, les dents latérales sont moins saillantes et plus aiguës. Chez le Xantho floridus, il existe presque toujours des anfractuosilés sous forme de larges ponctuations irrégulières dans les régions plérygostomiennes, parfois sur l’épistome ( + sur les pattes-màchoires externes), dans certains cas même sur la partie antérieure de la carapace ; le bord supérieur des articles moyens des pattes ambulatoires est le plus souvent irrégulier, des épines et des fubercules s'y développent sur le méropodite; la face externe des mêmes articles présente fréquemment des anfractuosilés longitudinales qui séparent un ou deux bourrelets saillants ; souvent enfin on voit apparaitre sur le carpe des pattes antérieures des an/ractuosites irrégulières, ei, sur la face externe de la pince, des sortes de rides transversales. Le Muséum possède un exemplaire de Xantho floridus #ès rugueux, plus rugueux que celui qu'a décrit HELLER, à tort, sous le nom de Xantho tuberculatus, qui a encore plus d'anfractuosités méandri- formes sur le carpe des pattes antérieures, plus de dépressions transversales sur les pinces et sur les pattes ambulatoires, qui porte même comme lui deux tubercules dans la région hépatique. Chez le Xantho tuberculatus Couc, la carapace est recouverte, surtout dans dans ses parties dorso-latérales, de lignes de granules transversales ou légérement obliques (notamment deux ou trois de ces lignes sur l’aire hépatique, qui n'est ni tuberculeuse, ni lohée, et une immédiatement en arrière du bord frontal); — les régions plérygostomiennes sont ornées de gros granules, l’épistome est lisse ; — les pattes antérieures sont munies de gros granules sur la face externe du méropodite et d’un certain nombre d’eépines sur le bord supérieur du même article ; le carpe est orné de lignes granuleuses droites ou arquées el très saillantes, qui déterminent à sa surface des dessins le plus souvent #éandriformes (aspect corrodé avec l’âge); la face externe des pinces, chez les jeunes, est ornée de quelques lignes longitudinales de gros granules entre lesquelles se trouvent d’autres granules plus petits, etc.; — les pattes ambulatoires sont munies de poils serrés et inégaux sur toute leur longueur ; il y a des epires sur le bord supérieur du méropodite et parfois aussi sur le bord supérieur du carpe. J'ai tenu à donner ces quelques extraits du mémoire de M. BouviER pour montrer les variations en nombre infini de l'ornementation SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 457 chez les Xanthes; ces variations sont caractéristiques de formes peu différenciées ; notons pour le moment la tendance à la forma- tion d'anfractuosités dans la carapace ; nous retrouverons celles-ci chez des types plus différenciés. La carapace des Xanthes est bosselée ; des régions plus ou moins saillantes sont séparées par des sillons plus ou moins profonds. Ceci est particulièrement net chez le Xantho floridus, à carapace peu élargie (2 — 1, 47); chez le Xantho rivulosus, à carapace plus large (4 — 1,53), le relief de la carapace qui s’aplanit s’efface; de même les dent ; les Xantho bidentatus et varius, de Samoa, ont des carapaces très larges et peu accidentées; de même le Xanthodius Sternberghi. Le Xantho tuberculätus, qui vit uniquement dans les profondeurs, et qui à une carapace de petite taille et déjà granuleuse, nous conduit aux Xänthodes, petits Xanthes qui ont été recueillis en abondance par le Travailleur et le Talisman dans la région du Cap Vert et dans les profondeurs. Chez les Xanthodes, on voit se différencier progressivement des poils extrêmement curieux, des poils en massue, rappelant un peu ceux des Pilumnus ; la plupart des poils chez les Xantho rivulosus et tuber- culätus ont leur extré - mité arrondie garnie d'une houppe de poils secon - daires ; chez le Xantho rivulosus, les poils pré- sentent quelquefois dans leur région subterminale Fi. 145 à 147. — Ornementation progressive Un pointillé de courtes des poils de la carapace chez les Xantho saillies chitineuses. Il en t les Xanthodes (formati *s poils en A 3 et les de SUR ion des poils et slide mien on TON He massue). X, r., Xantho rivulosus Risso; X. T., Xanthodes Taylori Smmprsox:; (0des Taylori, mais les X.e., Xanthodes eriphioides A. M.-Enw. saillies les plus éloignées dusommet s’hypertrophient en poils secondaires ; chez le Xarthodes eriphioïdes, enfin, on a de véritables poils en massue. Des faits de ce genre, relatifs à l’évolution d’un détail de l’'ornementation, ont une plus grande importance qu'on ne pourrait 458 GEORGES BOHN. le penser; celui que je viens de citer servira peut-être dans la discussion de la parenté des Pilumnus. Disposition antennaire.— J'ai déjà insisté sur la disposition antennaire du Cycloxanthus 16-dentatus, disposition qui paraît assez primitive et rappelle un peu celle présentée par les Thia : le front se projette comme un auvent au-dessus des antennes. Chez le Cycloxanthus californensis décrit par RATHBUN, l’article 2 des antennes vient s'appuyer (se souder) contre un bourrelet latéral du front ; deux fossettes assez profondes reçoivent les antennules. C’est là un passage vers le Xantho floridus. con Fi. 148. — Cycloxanthus califor- Fig. 149. — Xantho varius. Antennes nensis RATHBUN. Chambre prosto- et maxillipèdes postérieurs. miale. Chez cette dernière espèce, le front est moyennement avançant et très déclive ; étroit, il s'incurve vers ses deux extrémités latérales de manière à former deux bourrelets sur lesquels viennent s'appuyer, par leur angle supéro-interne, les articles 2 des antennes ; ceux-ci ont une direction oblique, et, quoique bien développés en largeur et en hauteur, ils n’atteignent pas le sommet de l’avancée ptérygosto- mienne ; les articles 3 et 4 sont encore assez développés, et sont situés dans un hiatus compris entre le front et la paroi orbitaire inférieure ; le fouet est court; entre les articles 2 des antennes droite et gauche se trouvent des fossettes antennulaires, situées, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 459 comme l’épistome, sur un plan supérieur à celui des pattes-mâächoires externes. Une des caractéristiques essentielles des Xanthes paraît être la suivante: articles 2 des antennes, larges, mais relativement courts (plus courts que l'avancée ptérygosto - mienne) et venant s’appuyer, par leur angle supéro-interne, sur une certaine étendue d’un repli formé par l'angle FiG. 150. — Xantho rivulosus Risso. Disposition des an- externe du front. tennes externes. C’est sur une variation de détail de ce caractère que repose la distinction entre les Xantho et les Xanthodes (Voir à ce sujet ORTMANN. Z. Jähr., VIL, 3, p. 443-4). Orifices antérieurs des gouttières des scaphognathites. — La disposition antennaire varie relativement peu chez les Xanthes et ne semble pas avoir une grande influence sur la manière dont le courant respiratoire sort ou entre. En revanche d’autres appendices (buccaux) subissent des variations multiples qui peuvent être en rapport avec la circulation de l’eau. L’épistome bien développé est limité par une crête endostomiale (fig. 151, e), peu élevée, surtout au voisinage de la ligne médiane ; c’est en ce dernier point que semblent converger les courants respi- ratoires de sortie; les pattes-mâchoires sont un peu écartées de cette crête, et ne la dépassent en avant que chez les Cycloæanthus. L'espace prélabial ne présente pas de crêtes, mais on y voit s’avancer les lacinies des pattes-mâchoires internes, qui, en général, se prolongent en avant des mandibules, assez près de la ligne médiane, et offrent des formes assez différentes. M. Bouvier a montré [E,98] que le lobe portunien, nul chez le Xantho floridus, rudimentaire chez le X. r'ivulosus, est développé chez le Xantho tuberculatus et les Xanthodes. Il est curieux de retrouver ici le lobe dit portunien, et de le voir se découper progressivement en passant des Xanthes aux Xanthodes, comme on le voitse différencier dans la série des Neptuniens et dans celle des Portuniens (Voir plus haut, p. 418). Chez le Cycloxanthus 16-dentatus (fig. 144), le bord antérieur de la lacinie ne dépasse pas le niveau des mandibules, mais une lan- 460 GEORGES BOHN. guette s'avance au-devant de ceux-ci sur une certaine longueur ; chez le Cycl. californensis, les choses s’accentuent ; chez la plupart des Xantho, la lacinie, notablement allongée dans le sens transversal, n’atteint pas cependant la ligne médiane ; elle se détache davan- tage de la mandibule ; son bord TR antérieur est situé très avant = dans l’espace prélabial et est An assez écarté de la paroi sur laquelle glisse l’eau; chez le Xantho varius, la lacinie a une disposition tout à fait spéciale : elle n'avance pas plus que chezles , Cycloxanthus, mais elle est très É courte dans le sens transversal. Chez les Xanthodes (fig. 155- 96), la lacinie, courte en général, s'incurve souvent, ainsi que son Fic. 151-152. — Xantho varius. Dispo- bord antérieur poilu (X. Tulis- sition _de la lacinie dans l’espace mani, X. melanodactylus) de RÉ RE £ ne ; m, facette mandibulaire de la manière à constituer une sorte lacinie. d’orifice expirateur. Aux variations de position correspondent en effet des variations de forme. La lacinie a vaguement la forme d’un tétraèdre à sommet antéro- interne, dont les faces sont: l’une supérieure (face regardant le plafond de l’espace prélabial), l’autre inférieure, la troisième interne. Cette dernière (fig. 152, +) qui est en continuité avec une des faces de la tige portant la lacinie se moule plus ou moins sur les mandibules el offre des variations nombreuses, qui entraïnent des différences d'aspect considérables de la lacinie. Chez le Cycloxanthus 16-den- latus, elle regarde en haut et se rétrécit progressivement jusqu'au sommet de la lacinie ; chezle Xantho floridus, il en est de même. sauf que, le rétrécissement étant brusque, la face est remplacée presque tout de suite par un simple bord. Chez le Xantho rivulosus, cette face est incurvée et son bord inférieur déborde, par suite d'une extension, vers la ligne médiane de la face de même nom; dans d’autres cas c’est l'inverse: chez le X. punctatus, la face SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 461 supérieure déborde au-devant de la facette interne. Dans d’autres cas enfin c’est la face interne, bien développée, qui déborde sur les deux autres faces {X. varius); dans certaines dispositions, on entrevoit al Fi. 153... — Xantho bidentatus M.- Fi. 154. — Xantho punctatus M.-Enw. Ebw. Maxillipède antérieur gauche. Maxillipède antérieur gauche. comme une ébauche de lobe portunien (X. rivulosus), X. varius, mais ce lobe rudimentaire a des valeurs différentes, étant formé par les trois faces indifféremment, et soit par leur bord ou par leur sommet ; il semble résulter des contacts variés de la lacinie avec la mandibule et son palpe, et n'avoir aucune importance physiologique, dans la respiration toutefois. IL est à remarquer que la formation de ce lobe dépend surtout de la forme de la face interne, et que FiG. 155-156. — Lacinie des maxillipèdes antérieurs FiG. 157. — Xantho tuber- chez les Xanthodes. X.e., Xanthodes eri- culatus Coucx. La- phioides A. M.-Enw ; X.T., X. Talismani cinie. M.-Epw. et Bouv. celle-ci est en général en relation avec la forme générale de la lacinie: elle est sensiblement la même chez le Cycloxanthus 16 dentatus, le Xantho floridus, et le Xanthodius Sternberghi ; or, chez ces trois espèces, la lacinie s’allonge beaucoup transversalement au-devant 462 GEORGES BOHN. des mandibules, et il n’y a aucune apparence de lobe portunien. Chez les Xanthodes (fig. 155-56), il y a un lobe portunien constitué en général par l'extension d’une partie du bord interne de la face supérieure vers la ligne médiane, au-dessus du palpe des mandibules semble-t-il (X. Talismani, X. eriphioides); c'est une languette qui n'a aucune importance physiologique, de formation purement acci- dentelle ; 1l en est de même chez le Xantho tuberculatus (fig. 157). Ce qui est plus important, ce sont les variations de forme et de position du bord antérieur de la lacinie ; ce bord est toujours garni de longs poils filtrants ; il est très long chez les espèces primitives (Cycloxanthus), droit chez les Xantho et Xanthodius, court chez beaucoup de Xanthodes, et contribue alors à constituer un orifice respiratoire. Ces considérations sur les variations de forme accidentelles (lobe dit portunien) et adaptalives(incurvation du bord antérieur) de la lacinie pourront être, je crois, d’une certaine utilité pour les carcinologistes qui voudraient reprendre l'étude générale des Xanthes et Xanthodes ; le caractère tiré du lobe portunien ne semble pas avoir une valeur très grande pour le groupement des espèces par affinités. Branchies et épipodites. — Je ne donnerai ici que quelques indications sur la constitution des organes contenus dans la chambre branchiale. FiG. 158 à 160. — Disposition des branchies chez les Xanthes. C, Cycloxanthus 16-dentatus M.-Epw.; X. {., Xantho tuberculatus Goucu ; X. r., Xantho rivulosus Risso. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 463 Chez le Cycloxanthus 16-dentatus (fig. 158), les branchies ne laissent qu'un espace libre insignifiant à la partie postérieure, et le Fig. 161. — Cycloxanthus 16-dentatus M.-Enw. Ornementation des branchies. groupeantérieur complet nesubit pasde réductions notables ; le vaisseau interne saillant présente des tubercules à cro- chets, tandis que les faces externes planes sont semées çà et là d’un pontillé de petitessaillies chitineuses (fig. 161). Les poils des épipodites ont une ornementation parfaitement détermi - née : crochets dirigés en arrière, puis une à deux pointes, enfin des dents courtes de plus en plus petites à mesure qu'on se rapproche du sommet. FiG. 162 à 168. — Ornementation des poils des épipodites chez les Xanthes. C, Cycloxanthus 16-dentatus M.-Enw.; X. f., Xantho floridus MonrTaAGu ; X.r., Xantho rivulosus Risso ; X. p., Xantho punctatus M.-Enw. ; X. b., Xantho bidentatus M.-Epw.; ZX. v., Xantho varius; X. s., Xanthodius Sernberghi STImPsox. 464 GEORGES BOHN. La disposition et l’ornementation des branchies varient peu chez les autres espèces considérées. Il n’en est pas de même de l'orne- mentation des poils des épipodites; chez la plupart des Xantho (fig. 162-68) (y compris le Xantho tuberculatus) et chez le Xantho- dius Sternberghi ce sont le plus souvent des crochets disposés comme chez le Cycloxanthus ; chez le X. bidentatus, les crochets sont associés à des brosses de poils secondaires ; ceci parait être la règle chez les Xanthodes, où les crochets ont des formes et de dispositions variables. Xe @. "<< < = LR AT SR SL, D mn X.rn EE Le AA DE RL = : FiG. 169 à 173. — Ornementation des poils des épipodites chez les Xanthodes. X.t., Xantho tuberculatus Coucx ; X. e., Xanthodes eriophioides A. M.- Epw. ; X. T., X. Taylori Srimpsox ; X. T., X. Talismani Epw. et Bouv. ; X. m., X. melonodactylus À. M.-Enw. Enchaînement des espèces. — Chez les Xanthes on observe une multitude de variations qui rendent difficiles les coupures géné- riques et, vu les conditions si différentes dans lesquelles ils vivent (Crabes littoraux, Crabes des profondeurs, Crabes des îles subtropi- cales et tropicales), il est difficile de se rendre compte de l’enchai- nement des espèces. J'ai signalé l'existence d’une espèce à caractères assez primitifs, le Cycloxanthus 16-dentatus, qu'on aura, je crois, intérêt à examiner. Je ne me suis pas fait une opinion précise au sujet de la parenté des Xantho et des Xanthodes ; ces derniers présentent un singulier mélange de caractères primitifs et de caractères spécialisés ; ils sont modifiés sans doute profondément par leur genre de vie, et on pourrait peut-être les considérer comme des formes pédomor- phiques. Qu SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 46 S 2. — LES ACTEES. J'ai étudié les espèces suivantes : 10 Actæa rugata WuiTe ( —A. Rüppelli KRAUSSE) ; Vanikoro ; 20 Actæa granulata AUDOUN ; Japon, 1895, FRANK ; 30 Actœæa hirsutissina RüPrez; Nouvelle-Calédonie, BALANSA ; 4° Actæa fossulata GiraRD (A. M.-Epw. del.); COUTIÈRE, 1897, Djibouti ; 5 Actæa rufopunctata M.-Enw.{(Bouv det.); Travailleur, 9 août 1882, Deserlas, 100 à 150 mètres ; 6° Heteractæa lunata M.-Epw. et Lucas ; Basse-Californie, 1894, DIGUET ; 7 Hypocælus granulatus DE Haax (= Xantho granulatus DE HaaAN); Japon, 1895, FRANK ; 8 Phlyctenoxanthus erosus ( — Actæa erosa) (Smiths. Inst.) ; Floride, AGassiz; 9 ZLuæanthus imamillatus M.-Epw.; Vanikoro, 1893, FRANÇOIS. Toutes ces formes se ressemblent beaucoup entre elles et paraissent se rapprocher des Xanthes. Le corps est en général moyennement élargi. La chitinisation et la calcification se font suivant un mode tout à fait parti- culier : la carapace divisée en un certain nombre de territoires saillants présente, — ou bien des granulations (Actæa rugata, Actœæa rufopunctata des pro- fondeurs, où les granulations blanches sont disposées en monticules, Hypo- = cœlus granulatus) — ou bien des Fiac. 174. Aclæa rugata : Wurre. Antennes et ma #4mMmelons (Euxanthus mamillatus), — xillipèdes postérieurs. ou bien des érosions. C’est là le résultat de l’exagération de certaines tendances que nous avons signalées chez les Xanthes. Les pattes postérieures assez courles peuvent venir en général 30 466 GEORGES BOHN. s'appliquer sur le dessus de la carapace, dans des dépressions situées aux angles postérieurs ; chez l’Heteractæa lunata, ces pattes sont garnies de poils en massue. Le front des Actées peut être considéré comme un front de Cycloxanthus 16-dentatus qui se serail rabattu en avant, de manière à recouvrir plus ou moins l'angle supéro-interne de l'article basilaire 2 des antennes, el s’y souder. H C FiG. 175. — Hypocælus granulatus de FiG. 176 à 179. — Comparaison de la Haan. Antennes et maxillipèdes disposition des antennes externes postérieurs. chez l'Actæa rugata AUDOUN (À), l'Euxanthus mamillaris M.-Epv. (H), l'Hypocœlus granulatus DE Haax (E)), et les Carpilius (C0). Ceci se voit très nettement en particulier chez l'Actæa rugata et chez l'£Euxanthus mamillaris (ig. 176 et 178, À); chez l’'Hypo- cœlus granulatus (Gig. 175 et 177, £), le front vient s'ajuster contre le bord interne de l’article basilaire 2 de l'antenne, sans le recouvrir. Le bord externe de cet article basilaire est soudé plus ou moins SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 467 dans toute sa hauteur à la paroi orbitaire inférieure ; il en résulte que l'orbite est close; on y voit, au-dessus d'un gros pédoncule CA Fi. 180. — Phlyctenoxanthus erosus. Méropodites des ma- xillipèdes postérieurs. oculaire, les articles antennaires, 3 et 4, et le fouet peu développés. Les antennules sont toujours obli- ques. Le bord antérieur des méropodites des maxillipèdes postérieurs est parfois entaillé de manière à conslituer une ébauche d’orifice respiratoire externe (Phlyctenoxæanthus erosus, fig. 180). Les lacinies offrent souvent la même position et la même forme que chez les C'ycloxanthus et les Xanthes pri- mitits (Actæa rugata,...… Euæanthus mainillatus, qui montre un pseudo- lobe portunien au sommet, etc.). Les branchies n’offrent rien de parti- culier; les poils des épipodites ont des ornements variés ; l’'ornementation du Cy- cloxæanthus se trouve parfois chez l'Actæa rugala, toujours chez l'Euxanthus ma- millatus ; chez certains Actæa, on observe des brosses el des crochets de formes variées. ; Le SE ALES FiG. 181. — Actæa rugata De l’étude que j'ai faite, 1l résulte que Aupouix. Maxillipède toutes ces espèces sont très voisines les unes antérieur gauche. des autres, et que certaines d’entre elles, comme l’Actæa rugala, à carapace granuleuse, et l'£uæanthus marmillatus, à carapace bosselée, offrent de grandes analogies Fig. 182, — Actœæa rugata AUbouIN. Poils des épipodites. avec les Cycloxanthus : la différence essentielle résulte du rabatte- ment d’un front étroil, avançant, bilobé, sur les antennes. 468 GEORGES BOHN. Par l'Euæanthus mamillaris, 1 semble, de plus, qu'on puisse passer au Lophactæu granulata, qui possède plutôt un front de Xanthe qu'un front d’Actée, et de là aux Zozymes. Je n’éludierai pas plus ces dernières espèces que l’Atergatis floridus RümPHius, qui offre avec elles de grandes analogies. Je passerai immédiatement à la discussion des affinités du curieux genre Carpilius. S 3. LE GENRE Carpilius LEACH. Parmi les Xanthidés, les Carpilies ont un aspect tout à fait à part, el on peut s’élonner qu'on les ait prises pour lype d’un groupe qui ne renferme que des formes absolument différentes d'elles. On rapproche fréquemment les Carpilius des Atergalis, qui eux aussi ont la caparace lisse, el des Actæa. Pendant longtemps les Carpilies et les Atergatis faisaient partie du genre Cancer lel que l'avait défini LiNXE, et c’est une habitude assez fréquente que l’on a de maintenir les groupements imparfaits dûs aux connaissances Si incomplètes des premiers naturalistes. Déjà MILNE-Epwarps avait montré que la disposition de la région antennaire est différente chez les Carpilies et les A {er gatis ; ORTMANN n’a fait que reprendre cette remarque lorsqu'il établit sa classification des XANTHINI, et le groupement : Carpilius, Euxanthus, Carpilodes, Hypocælus (+ Phymodius, Chlorodius). J'ai examiné deux espèces du genre Carpilius : 1° des échantillons de tailles très diverses du C. #27aculatus L., un échantillon du C. convexus FoRSKkAL. Je vais insister sur les nombreux caractères qui mettent les Carpilius à part des autres Xanthidés, et je discuterai ensuite les groupements classiques. Forme générale du Corps. — La forme du corps est très remarquable ; elle est globuleuse, ou tout au moins subglobuleuse ; le petit échantillon de C. conveæus que j'ai examiné était globoïde, et, ses paltes élant repliées sous la carapace, on pouvait le faire rouler dans la cuvette à dissection comme un caillou. SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 469 La face dorsale de la carapace est fortement bombée dans les deux sens et ne présente qu'un faible élargissement transversal. Valeurs de 1 — & pour les Carpilies et un certain nombre de Crabes qu'on a l'habitude de grouper aulour d'elles. CAPDIANSICONVELUS" 4... 1,320 |ACtædrUDA EME ee 1,33 CÉMACLLATLS RER PANNES 1,317 | Actæa rufopunctata... ...... PARTS ACIRAaMOSSULATAR ERP PAP ARRETE 1,64 Hypocælus granulatus ......... 1,37 Atergatis Horidus 2.261... 1,42 Carpilodes tristis nee 0 1,71 Chez les Carpilius l'élargissement porte surtout sur la zone postéro-médiane de la carapace ; à la limite des bords antéro- latéraux et des bords postéro-latéraux, il y a un tubercule p; la ligne qui réunit les deux tubercules symétriques correspond à la largeur maxima et passe au milieu de la région cardiaque. Malgré cela le bord postérieur de la carapace est très étroit; le sternum a de même une faible largeur. Ornementation de la carapace.— La carapace est très fragile. L'ornementation est réduite à sa plus simple expression. Le dessus de la carapace est lisse, non sillonne, non bosselé, absolument glabre. Le bord antéro-laléral, épais, non marginé, ne présente ni dents, ni incisures; en arrière il se termine par une sorte de tubercule mousse. Les branchiostégistes sont glabres dans toute leur étendue (y compris le bord) et présentent une ligne latérale extrêmement nette, mais sans ornements, se prolongeant nettement jusqu’au bord postérieur de la carapace. Les pinces ne présentent pas d’ornements non plus. Or, chez les Afergatis, qui ont la carapace lisse, il y a des restes d’une ornementation disparue en grande partie. La carapace est jaunâtre, tachée de rouge ; chez le C. maculatus, la disposition des taches est parfaitement régulière ; les doigts des pinces ne sont pas colorés en noir (différence avec la plupart des Xanthidés). 470 GEORGES BOHN. Locomotion. — Les patles sont particulièrement longues, cylindriques, grêles. (C'est là une particularité qui semble éloigner les Carpilies des Xanthes, des Actées, des Carpilodes, des Atergatis). Disposition anlennaire.—[a disposilion des antennes est assez particulière et a altiré déjà depuis longtemps l'attention des zoolo- gistes (base de la classification de ORTMANN). Elle est commandée par la disposition du front. Celui-ci, large, épais, Hilobé, est rabattu en avant : il atteint ainsi presque l'angle orbilaire inféro-interne, ne lais- sant entre lui el l'orbie qu'un etroil hiatus. (Chez les Æriphia, il se produit quelque chose d'analogue, et le front se.soude même à la paroi orbitare inférieure sur une certaine longueur). L'article basilaire ? des antennes est bien développé ; il a une direction oblique, el, comme le front lend à se räbattre sur lui, il Fig. 183. — Curpilius maculatus ne repose pas sur une apophyse L. Antennes et maxillipèdes frontale comme cela a lieu chez les postérieurs. Xanthes, mais, au contraire, il est « enchässé >», comme l’a bien montré A. M.-Epwarps, entre le rebord sous-frontal et le bord interne de la région ptéry- gostomienne. Il est long par rapport à sa largeur, mais 1l est plus court que l'avancée pérygostomienne. L’étroit hiatus compris entre le front et la partie supérieure de celui-ci est occupé par les articles Suivants peu développés; le ‘fouet est très court. (Chez les Curpilodes, l'article 2, oblique aussi, bien développé, repose sur une apophyse frontale ; il est presque aussi long que le bord libre ptérygostomien ; aussi l'orbite est-elle également presque fermée, mais c'est alors par Farlicle 2, landis que la fermeture de l'orbite a lieu chez les Carpilies par suile du rapprochement du front et de la paroi orbitaire inférieure). SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 471 Respiration. — L'appareil respiratoire des Carpilies présente des faits intéressants. La fente d'entrée de l’eau n’est pas garnie de poils, et le bord du branchiostégite qui la limite est fortement entamé par l’article basilaire, saillant, des pinces. La disposition des appendices buccaux n'offre rien de bien particulier ; tous ces appendices ont tendance à s’enchàsser dans des cavités ; les pattes-màchoires externes en particulier deviennent operculformes. L'épistome est une aire plane assez bien développée; la crête endostomiale le surplombe un peu. Fi. 184. — Carpilius maculatus L. Fic. 185. — Carpilius maculatus L. Orifice prélabial, 0 ; /, lacinie; #, Lacinie des maxillipèdes anté- languette mandibulaire; e, endo- rieurs. 22, face mandibulaire : stome. x et B, ses deux bords, En soulevant les pattes-mâchoires, on se trouve en présence d'une disposition des plus caractéristiques du genre, qui est due à une FORME TOUTE SPÉCIALE DES LACINIES DES PATTES-MACHOIRES INTERNES. Le bord antérieur de la lacinie présente une échancrure circulaire profonde, qui constitue, à une cerlaine distance de la ligne médiane, un ORIFIGE RESPIRATOIRE. L'espace prélabial spacieux ne présente d’ailleurs aucune crête, aucune saillie. Je ‘vais douner une description détaillée de cette lacinie. Partons de la forme 472 GEORGES BOHN. trétraédrique (Voir plus haut, p. 460). Les deux faces supérieure et inférieure déterminent un plan horizontal, qui aboutit en dedans a une face interne ##, courte, large, débordant suivant les deux lignes « et 6. L’échancrure a lieu aux dépens du bord antérieur de la lame horizontale ; elle est comprise entre deux lobes garnis à leurs extrémités, surtout du côté de l'échancrure, de longs poils filtrants. Le bord « a dessiné un pseudo-lobe portunien. Quand on pénètre dans la chambre branchiale, on est frappé du grand développement, tant en longueur qu'en largeur, des branchies 3, JC el 30 alleignent sensiblement le même niveau que 4; et 34, relativement bien développée, est enchassée à la base de 3e, les branchies 2, au contraire, sont faiblement développées ; 2c est étroite et n’est guère plus longue que la moitié de 50; 24 n’atteint même pas la partie postérieure de 34. Les branchies formées de lamelles molles pressées les unes contre les autres n'offrent rien de particulier au point de vue de l’orne- mentation. Les poils des épipodites sont garnis de brosses et de scies à dents hautes et fines. Résumé. — Les Carpilius ont une physionomie tout à fait particulière : 1° Un corps globuleux porté par de longues pattes cylindriques et grêles ; des pinces grosses et inégales ; 2° Une carapace mince, fragile, lisse, sans ornements chilineux (— pinces), tachée de rouge ; 3° Des sutures nettement marquées, — dans la région antennaire où les appendices sont plus ou moins enchässés, et au niveau de l'abdomen (chez le mâle, il y a 6 segments parfaitement distincts) ; 4° Un front trilobe, rabattu, de facon à rejoindre presque les parois orbilaires inférieures et à clore ainsi les orbites; des antennes enchâssées, à disposition spéciale ; D° Un ORIFICE RESPIRATOIRE ANTÉRIEUR de constitution particulière (forme caractéristique des lacinies des pattes-maächoires internes); 6° Des branchies 3 bien développées aux dépens des branchies 2 ; 7° Des branchies faiblement chiliuisées ; des poils en brosse sur les épipodites. A SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 473 Par la plupart de ces caractères, les Carpilius différent des espèces que nous avons étudiées jusqu'ici parmi les Xanthidés, et par suite de celles que leur associe ORTMANN. En effet les Xanthes, les Actées et autres formes voisines ont: 1° Une carapace aplalie et élargie dans toute la zone médiane (la ligne joignant les dents postérieures droite et gauche passe en avant de la région cardiaque); des pattes assez courtes el aplaties pouvant glisser les unes sur les autres et sur l'arrière de la carapace ; 2° De la chitine épaisse ; une carapace divisée par des sillons en territoires très nets, présentant sur les bords des incisures une teinte jaune foncée uniforme (les doigts des pinces se détachant en noir) ; 3° Des sutures plus ou moins effacées ; 4° Un front plus ou moins avançant, plus ou moins déclive et présentant une incisure médiane fort nette; sur deux plis latéraux viennent reposer les articles 2 des antennes ; »° Des lacinies, avançanies, s'allongeant plus ou moins vers la ligne médiane, à bord antérieur droit ou légèrement incurvé (Xan- thodes) ; 6 Des branchies 3 moyennement développées ; 7° Des poils épipodiaux à crochets puissants. Après avoir comparé les Carpilius avec les autres « Xanthidés de l’Agèle des Carpilides », il m'a fallu placer le genre Carpilius à part de tous les autres, et le rapprocher plutôt de formes telles que les Menippe, les Paragalene, les Eriphia. Les Paragalene (Voir plus loin) ont en effet un certain nombre de caractères des Carpilius : pattes longues, lacinie incurvée, branchies 3 développées, poils des épipodites, etc. Chez les Æriphia, le front se rabat et vient se souder à la paroi orbitaire inférieure; des orifices respiratoires antérieurs se constituent. | Mais ce sont là des ressemblances lointaines; nous allons examiner encore quelque: Crabes qui paraissent isolés, et qui se rapprochent peut-être davantage des Carpilies. 474 GEORGES BOHN. S 4. — Pseudozius Bouvieri. — Epivanthus frontalis. — Eurytium limosum. Ce sont le Pseudozius Bouvieri À. M.-Enw., l'Epiranthus fr'ontalis M.-Ebpw, l'Eurytliuim limosum Say. Hs présentent entre eux de vagues ressemblances, et leur place dans la classification varie avec les auteurs, qui les ont disséminés çà et là. Pseudozius Bouvieri À. M.-Epw. — De ces trois Crabes, le Pseudozius Bouvieri est le moins différencie. J'ai examiné trois échantillons, deux de petite taille provenant des îles Açores, un de grande taille recueilli par le Talisman dans les îles du Cap Vert. Je n'insisterai pas sur leur descriplion, vu que ces échantillons ont précisément servi à MIiLxE-Ebwarps pour élablir l'espèce (1). La carapace est lisse, brun-orange, légèrement bombée d’arrière en avant, assez élargie (à — 1, 5; zone médiane). Les pattes postérieures sont assez longues, subcylindriques. Les pinces sont noires. Les bords antéro-latéraux présentent des indications de dents à la partie postérieure. | Le front, recliligne, muni d’une suture médiane, large, forme une légère avancée, une sorte d'auvent qui abrite les antennules très inclinées et les antennes. L'article 2 de celles-ci reste indépendant du front; court et légèrement incliné vers le dehors, il est compris entre l’article basilaire des antennules et le bord ptérygostomien ; 1l est dépassé à l'avant par l’un et par l’autre ; l'orbite est assez largement ouverte, et dans la fente orbitaire interne, les articles 3 et 4 sont moven- nement développés et mobiles. Les néropodiles des pattes-màchoires externes, larges, ne dépassent pas lendostome: leur bord antérieur en est un peu écarté, les carpopodites reposant sur la partie médiane de l’espace prélabial. (1) On trouvera dans les (Crustacés Décapodes du Travailleur et du Talisman (CG, 00), la description de cette espèce, p. 52, et des figures (PL XV, 11 à 14) représentant les principaux appendices buccaux, en particulier la lacinie fortement échancrée et qui ressemble beaucoup à celles des Carpilies ; d’où l'absence de figures dans ce travail. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 475 L'eau sort en effet par les côtés, comme l’indiquent la situation et la forme des lacimies des pattes-màchoires internes ; ces lacinies sont siluées en dehors d’une ébauche de crête antéro-postérieure, s'avancent assez avant, el présentent une forte échancrure ; ainsi se lrouve constituée une sorte d’orifice resptratoire ; cette disposition rappelle un peu ce que j'ai décrit chez les Carpilies ; il y a également un pseudo-lobe portunien rudimentaire. Les branchies sont moyennement inclinées ; 6 c” est assez courte et n'atteint pas la pointe épimérale; les branchies 3 sont bien développées ; 3 b esteffilée à son éxtrémité ; les branchies ? sont peu développées (2 & en particulier). Les branchies sont plutôt faiblement chitinisées ; leur ornemen- lation est peu accentuée, les poils épipodiaux ont une brosse sublermimale et un peigne lerminal. En résumé, l'un des traits les plus caractéristiques du Psewdozins Bouvieri est la constitution de lorifice respiratoire ; les caractères de faible spécialisation sont indiqués par l'indépendance des antennes d'avec le front, par la formule branchiale et l’ornemen- tation des lamelles et des poils. Epixvanthus frontalis M.-Enw. — L'Epixvanthus frontalis, d'après ce que j'ai pu voir sur un exemplaire délerminé par M. Bouvier et provenant de Poulo-Condor, est un Crabe ayant subi une spécialisation assez marquée, un peu dans le sens des Xanthes. La carapace, fragile, lisse, brillante, très finement granuleuse en avant, ne présente pas de territoires saillants comme chez les Xanthes ; une légère dépression médiane s'étend d'avant en arrière sur la région gastrique. La carapace montredesponctualions rougessur un fond jaunatre. Régulièrement bombée d'avant en arrière, elle est élargie moyennement (2 — 1,53). Les pattes postérieures sont relalivement beaucoup plus longues que chez les Xanthes ; les méropodites sont subeylindriques au lieu d’être plats. Les pinces, assez inégales, ont les doigts faiblement colorés, munis de tubereules irréguliers; les mains sont renflées el sans ornements ; elles sont done bien différentes de celles des Xanthes. Le bord antéro-latéral de la carapace offre dès 29028078. 476 GEORGES BOHN. Le front, relativement plus large que chez les Xanthes, est recti- ligne et avance peu ; les antennules sont fransversales (elles sont obliques chez les Xanthes) ; les articles 2 des antennes, obliques, sont notablement dépassés par une saillie plérygostomienne, mais dépassent les articles basilaires des antennules, pour venir s'appuyer, un peu comme chez les Xanthes, sur une saillie frontale inférieure ; l'orbite est largement ouverte. AT \ 7 ds fe A FiG. 186. — Epixanthus frontalis M.- FiG. 187. — ÆEpixanthus frontalis M.- Epw. Antennes et maxillipèdes Epw. Lacinie du maxillipède anté- postérieurs ; orifice prostomien. rieur g., ct Sa position. Les néropodiles des pattes-mâchoires sont larges, non avan- cants; leur bord antérieur présente une petite échancrure qui indique à l'extérieur l’orificerespiratoire.Celui-ci rappelle beaucoup celui des Pseudozius ; les lacinies sont situées au dehors de crêtes antéro-postérieures bien marquées; le bord antérieur assez irré- gulier est incurvé (Voir fig. 187); il y a une ébauche de lobe portunien. Les branchies 3 sont relativement moins développées que chez les Pseudozius ; c’est l'inverse pour les branchies 2. Fi. 188. — Epixanthus frontalis M.-Enw. Extrémité des poils des épipodites. Les poils des épipodites présentent une brosse peu fournie, quelques crochets, puis un peigne à dents lamelleuses. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES, 477 En résumé, l'Epiranthus frontalis a les orifices respiratoires des Pscudozius; il est plus spécialisé; l’article 2 des antennes prend contact avec le front un peu comme chez les Xanthes, et les branchies antérieures (3) subissent une légère réduction, également comme chezles Xanthes ; mais ceci n'implique pas une ressemblance familiale, car les soudures des antennes et les réductions branchiales se font dans tous les groupes, et à plus forte raison, somme toute, dans deux groupes assez voisins. Par l’ensemble des autres carac- tères (forme, chitinisation, ornements, pattes, orifices respiratoires, etc.), les £pixanthus se rapprochent beaucoup plus des Pseudozius que des Xanthes. Eurytium limosum Sax. — L'Eurytium linosum se spécialise un peu dans le sens Telpheuse. J'ai étudié un échantillon déterminé par A. MiLne-EpwaRps, et provenant de Rio de Janeiro. La carapace est lisse, violacée (dans l’alcool), finement granuleuse el glabre, sauf en arrière et en dessous ; à part une légère dépression gastrique antéro-postérieure, elle est régulièrement bombée, la courbure étant plus forte du côté du front que du côté de l'arrière ; elle est moyennement élargie (i — 1, 55), au maximum dans la zone médio-antérieure. FiG. 189. — Eurytium limosum Sax. Antennes et maxillipèdes postérieurs. Les pattes postérieures sont assez longues, subcylindriques ; les pinces sont inégales et ont des doigts non colorés. 478 GEORGES BOHN. Les bords antéro-latéraux, assez courts, ne présentent que quatre dents ; le bord postérieur est assez large. Le front est large, rectiligne ; les antennules sont absolument transversales ; l'article basilaire 2 des antennes, court et très large, n'attemt pas le front ; le bord orbitaire inférieur n’est pas plus élevé que lui, et les articles 3 et 4, ainsi que le pédoncule oculaire, sont bien à découvert par la face ventrale. L'épistome est bien développé et se soulève du côté de l’endostome en une lame, qui envoie en avant une sorte d’éperon sur la ligne médiane et qui s’incurve au niveau de chaque orifice respiratoire. Les 2néropodites des pattes-màchoires externes sont plutôt en retrait sur l'endostome, et présentent même une excoche au niveau de l’orifice respiratoire. La lacinie a une faible largeur et s'arrête à une crête de l’espace prélabial; son bord antérieur est légère- ment incurvé (pas d'ébauche de lobe portunien). Fi. 190. — Eurytium limosum Say. Maxillipède antérieur g 5* Les branchies antérieures sont en retrait les unes sur les autres. Les poils neltoyeurs possèdent une brosse assez bien fournie, quelques crochets peu saillants, un peigne terminal (intermédiaire entre Pseudozius et Epixanthus). Le trait le plus saillant est ici encore la constitution d'un orifice respiratoire, à laquelle prennent part: 1° l’endostome ; 2° le bord antérieur des meropodiles ; 3 une crête anteéro-postérieure ; 4 la lacinie incurvée. [l serait intéressant de comparer ce genre avec le genre Æury- carcinus, moins différencié semble-t-il. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 479 Les analogies entre les rois genres étudiés peuvent se résumer de la façon suivante. Pseudozius Epixanthus Eurytium. Bouvieri frontalis limosum DATAPACE ee ere ehen de. Carapace lisse légèrement bombée d'avant en arrière EL. plutôt antérieur 250 LH EES = 1159 + REUTAS ES OSEO E CE Pattes postérieures assez longues, subcylindriques Bord. ant. lat. carapace... Dents a, L. peu prononcées 2 post. 5 4 IRON RON ERO ARR A ENTER Front rectiligne, large, avec suture médiane un peu avançant ADICNUILE SE EAN ner raelen lee Obliques Subtransversales Art. 2 antennes............. Indépendant du S'appuyant au front N'atteignant pas front le front (OH ATEN SANTE NS Orbite ouverte ORIFICE RESPIRATOIRE Différencié prélabial Bord méropodite B. méro. échancré B. méro. avec soulevé encoche Lacinie découpée Lacinie échancrée Lacinie incurvée Crète antéro postérieure BraneNeS Perte tr cc CNP At. bien Br. 3 en retrait Br. 3 en retrait développées Porls nettoyeurs.........:.. BROSSE +- peigne Brosse + crocHETS Brosse + crochets +- peigne lamelleux + peigne. $ D. — VARIABILITÉ DES PANOPÉES. Les Panopées sont, comme les Crabes précédents, fort peu spécialisées, et, comme elles présentent une EXTRÈME VARIABILITÉ DE CARACTÈRES, leur étude est précieuse pour la recherche de l’ori- gine et de la parenté des Xanthidés. | Ce sont des Crabes de pelite taille, qui vivent sur les côtes d'Amérique; malgré les formes nombreuses qu’elles présentent, elles ont été groupées dans un seul genre, le G. Panopeus. J'ai pu étudier 11 espèces sur des échantillons conservés dans l'alcool et provenant des collections du Muséum ; ce sont : 1° Pan. angustifrons B. el RaraB. (Auct. det.); Lond Island Sound, 1890 ; 480 GEORGES BOHN. 20. Pan. texanus; Texas; 3° Pan. depressus, S. J. Surrx (type); Eymont Key ; 4 Pan. Harrisi (Mus. de Cambridge) ; D Pan. Sayi S. J. Suiru (type) ; New Haven ; 6° Pan. purpureus LocKINGTON (type) ; Californie ; 7 Pan. affinis Sr. KiNGsLEY (RATHBUN det.); Basse-Californie ; 8 Pan. peruvianus A.M.-Epw.(Auct. det.); San Lorenzo (Pérou); % Pan. HarttiS.J. Surra (Auct. det.); Panama ; 10° Pan. planus S. J. Surrx (Auct. det.); Panama ; 11 Pan. ovatus B. et RATHBUN ; Guaymas (Mexique). Et de plus Æuriypanopeus planissimus Srimpsox : Basse Cali- fornie, DIGUET. Les variations portent sur : a) La forme de la carapace ; b) L'ornementation de la carapace ; c) La forme du front et la disposition des antennes ; d) La forme de la lacinie et sa position (constitution d’un orifice respiratoire) ; e) Le développement des branchies antérieures ; f) L’ornementation des poils nettoyeurs des branchies. a) Variations de forme de la carapace. Ælargissement variable. — Voici les diverses valeurs du rapport de la longueur à la largeur maxima de la carapace, à — IE = QUES = LS SAVE Ce 1,23 te | P. angustifrons.. ... DOINP texanUus-- 220 mt P Harris... : 17e" |P:purpureus. et | Piplanus 7° 1,73 ! P:peruviants 4: me |P, depressus.."..0 l Patins 200 in PSPÉHADEIR EME UE m + Euryp. planissimus Piiovains ere mn SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 481 La largeur maxima est atteinte immédiatement en avant de la zone médiane (— ÆEurytlium limosum). On constate chez un certain nombre d'espèces une tendance à l'élargissement du bord postérieur e — bord étroit #2 — bord moyen ! — bord large La carapace tend à prendre une forme quadrangulaire. On peut remarquer de plus qu'il y à un certain parallélisme entre l'élargissement du bord postérieur et l'élargissement sub- antérieure de la carapace; si le P. angustifrons semble faire exception, c’est que, vu l’avancée du front, l'indice À a une valeur apparente inférieure à la valeur réelle. D) Variations de l’ornementation de la carapace.— La cara- pace a des aspects extrêmement divers. Dans bien des cas, elle est lisse, avec quelques rides, et presque glabre (P. Sayi, P. planus, P. depressus, etc.); chez le P. Harrisi, ces rides deviennent des lignes transversales saillantes. Chez le P. purpureus, la carapace, légèrement bosselée, est luisante, granuleuse, verdâtre ; les pinces sont ponctuées de rouge; chez le P. peruvianus, sauf la teinte, l’aspect est à peu près le même. Ailleurs l'aspect se modifie complè- tement : le P. affinis a une carapace subquadrangulaire, rougeàtre, couverte de poils en arrière ainsi que les paltes (un peu l’aspect d’un Pilumnus), tandis que P. Hartti a une carapace accidentée, granuleuse, et des pinces noires. En général le bord antéro-latéral présente 4 dents ou saillies, la plus antérieure variant beaucoup de forme. c) Variations de la forme du front et de la disposition des antennes. Dans tous les cas les articles 2 des antennes restent indépen- dants du front; c'est là un caractère de très faible spécialisation , toutefois ils se soudent souvent avec l'avancée ptérygostomienne (paroi orbitaire inférieure). Ceci se voit nettement chez le P. peruvianus (fig. 192) ; le front constitue une sorte d’auvent, au-dessus des antennules obliques et sans fosseltes distinctes, et des antennes, dont les divers articles se détachent les uns des autres très nettement ; l’article 2 mobilisable ol 482 GEORGES BOHN. est soudé avec une partie du rebord de l'avancée ptérygostomienne, et est absolument indépendant du front, quoique reposant sur une sorte de repli de sa face inférieure. (ey Fi. 191 Fia. 192 FiG. 191-192. — Panopeus augustifrons B. et R. et peruvianus A. M.-Enw. Disposition des antennes ; front ; maxillipèdes postérieurs. Certaines des particularités observées chez le P. peruvianus s’accentuent chez d’autres espèces, en particulier chez le P. angus- tifrons (fig. 191); le front, tout en restant bilobé et étroit, s'avance beaucoup (un peu à la façon du front du Cycloxanthus) et le repli sur lequel les articles antennaires 2 reposent se précise. Chez d’autres espèces, P. purpureus, P. Sayi, P. Harrisi, au contraire, le front avance moins que chez le P. peruvianus Chez le P. Harrisi, en particulier, il est fort peu avançant et étroit, sur un échantillon de P. purpureus, j'ai observé un fait assez curieux (rappelant celui que j'ai signalé chez un Cycloxanthus 16-dentatus) : les deux lobes offraient une asymétrie assez nette, l’un d'eux était plus avançant que l’autre. Ceci mdique combien le front est plastique chez ces Crabes, et rien ne prouve que l'avancée frontale soil un caractère primitif Chez eux. ‘ SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 483 Chez ceux qui paraissent le moins spécialisés : P. Harris, P. Sayi, P. purpureus, le front est peu avançant; chez des Panopées assez peu spécialisées également, mais à carapace plus large: P. peruvianus, P. texanus et P. angustifrons , il s'hyper- trophie pas mal dans le sens antéro-postérieur; enfin chez des formes beaucoup plus spécialisées, comme. le P. affinis (qui rappelle les Pilumnus) et le P. Hartti, le front reste bas, s’élargit, et les articles 2 des antennes semblent s’ankyloser. d) Variations relatives à la lacinie. Si l'avancée frontale ne semble pas un caractère primitif chez les Panopées, les pattes-màächoires externes de ces Crabes n’avancent jamais au-devant de l’épistome ; le bord antérieur des méropodites est même plutôt en retrait de l’endostome. Ainsi les Panopées ne semblent se rattacher à aucun ütre aux formes corystidiennes, c’est-à-dire à chambre prostomiale. En revanche les lacinies des pattes-mächoires internes se modifient déjà de façon à ébaucher des orifices respiratoires prélabiaux. P bios FiG. 193-194. — Disposition de la lacinie chez les Panopées. P, S., P. Sayi S.-J. SMITH ; P. p., P. peruvianus A. M.-Epw. Chez toutes les espèces les lacinies avancent beaucoup dans l’espace prélabial, présentent une face interne qui se termine assez en arrière en une sorte de lobe portunien, et un bord antérieur court, plus ou moins soulevé et incurvé, et garni de poils nombreux (surtout chez le P. texanus). e) Variations relatives aux branchies et aux poils net- toveurs. — Les br'anchies antérieures subissent une réduction 484 GEORGES BOHN. notable, es branchies 3 en particulier ; 3 a très réduite est intercalée entre 3 bet 3c: FiG. 195. — Panopeus augustifrons B. Fic. 196. — Panopeus augustifrons B. et R. Disposition des branchies et R. Extrémité des poils des antérieures. épipodites. Les poils épipodiaux (fig. 196) présentent une brosse subterminale, puis des crochets à double pointe et enfin un peigne à dents fines. Résumé. — En résumé, les Panopées sont des Crabes qui ont conservé ou setrouvé des caractères assez primitifs; j'ajoute «retrouvé», Car j'ai montré plus haut (p.415) que, chez les Portunes, il suffit que la chitinisation devienne pour une cause ou une autre anormale, pour que les diverses tendances ancestrales se manifestent à nouveau. Quoi qu'il en soit, les Panopées sont susceptibles de fournir des renseignements sur l’origine des Xanthidés et la parenté des divers groupes. L'avancée du front serait un caractère acquis secondairement ; quant à une chambre prostomiale, on n’en trouve aucune trace. Les Panopées seraient des formes assez voisines des trois espèces que j'ai décrites dans le paragraphe précédent, et en particulier de l'Eurytium limosum. 1" La carapace est en général lisse, comme chez le Pseudozius, l’'Epixvanthus, VEurytium; l'élargissement moyen est de 1,5, indice du Pseudozius ; 2° Les pattes postérieures sont relativement longues et subcylin- driques, comme chez les trois espèces mentionnées plus haut ; SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 489 3° Le bord antéro-latéral de la carapace présente 4 dents ou avancées, comme chez l'Ewrylium limosum ; 4 Les antennules sont obliques, comme chez le Psewdozius Bouvieri, ou subiranversales comme dans les deux autres formes voisines ; 5° Les antennes sont indépendantes du front, comme chez le Pseudozius et l'Eurytium, ou bien viennent s'appuyer contre celui- ci, comme chez l’Epiranthus frontalis ; le front, de forme excessi- vement variable, s’élargit souvent en devenant rectiligne comme cela a lieu chez ces trois espèces ; 6° Il y a une ébauche d’orifice respiratoire dans l’espace prélabial, due à l'incurvation du bord de la lacinie, comme chez l'Ewrytlèum ; 7 Les branchies 3 subissent une réduction, un peu plus accentuée que celle présentée par l'£Eurytium limosum ; S& Enfin les poils des épipodites ont la même ornementation que chez lEurytium. | L'Epixanthus frontalis diffère du Pseudozius Bouvieri par une différenciation plus grande, marquée par le contact des antennes avec le front qui s'effectue un peu comme chez les Xanthes, par la réduction des branchies antérieures et la différenciation des crochets sur les poils nettoyeurs. L'Eurytium limosum diffère du Pseudozsius Bouvieri surtout par la forme de la carapace, élargie dans la région médio-antérieure ; de plus, si l’orifice respiratoire prélabial est moins différencié, les branchies antérieures subissent déjà une réduction assez consi- dérable. C’est également par ces trois caractères que les Panopées différent du Pseudoztius Bouvieri. Il semble que l’on puisse admettre une étroite parenté entre toutes ces espèces (Voir p. 477); elles auraient eu un ancêtre commun X, caractérisé : 1° par un front bilobé peu avançant, sous lequel se replient obliquement les antennules, et éloigné des antennes, assez développées et mobiles dans les articles basilaires (2, 3, 4); 2° par des pattes-mâchoires externes non avançantes ; 3° par des lacinies courtes, latérales, avançantes, à bord antérieur légèrement incurvé et présentant une facette interne (pseudo-lobe portunien), et aussi 4° par la forme de la carapace, peu élargie, à bord postérieur court, 486 GEORGES BOHN. et l'absence d'ornements chitineux ; 5° par des pattes antérieures longues subcylindriques. Une première voie de différenciation aurait élé suivie par les ancêtres du Pseudozius Bouviert ; la lacinie des pattes-mâchoires internes se serait découpée pour constituer un orifice respiratoire prélabial. D'autres formes auraient subi un élargissement de la carapace antérieur et postérieur à la fois, et pris ainsi #ne forme vaguement quadrangulaire; en même temps les branchies antérieures auraient subi une réduction de volume notable; ce seraient les ancêtres X’ de l'Æurytium limosum, qui se comportaient sans doute comme le font encore actuellement les Panopées des côtes d'Amérique. Dans une troisième série, la différenciation aurait élé poussée plus loin ; outre l’orifice respiratoire des Pseudozius et la réduction branchiale antéricure des Æurytium, il y aurait un acheminement vers la soudure des antennes avec le front (Æpixanthus frontalis). Pseudozius (orifice prelabial) orifice prélabial PAR RR , Epixanthus LT a antennesel réductions branchiales — Pilurmnus anopees (réduclions branchiales ) Curtonotus Eurylium (réductions branichiales ) La longueur de chaque flèche représente le degré APPEoxInANE de différenciation. Les Panopées, très peu différenciées, ont conservé ou retrouvé la plasticité des ancêtres; chez certaines espèces, on retrouve la tendance dominante des ancêtres des Pseudozius (constitution d’un SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 487 orifice prélabial) ; chez d’autres celle des ancêtres des Æpixanthus (rapprochement des antennes et du front), qui n’est autre que la tendance xanthienne {(Xantho, Actæa). Aulour des nombreuses espèces de ce genre prennent place d’autres espèces que l’on a fait rentrer dans des genres voisins ; ce sont en particulier : l'£urypanopeus planissimus (étudié avec les Panopeus); le Glyptoplax pugnaz S.-J. Suirx (Panama) et l’Eucra- toplax quitata À. M.-Epw., caractérisés par un front assez avançant ; le Catoptrus nitidus À. M.-Enw. (Samoa), qui semble se rapprocher des Curtonotus, formes qui diffèrent déjà notablement des Panopeus. Les Curtonotus (C. longimanus DE H4ax et C. vestitus DE HAAN), des mers du Japon, sont des Crabes très curieux, car, tout en prenant une allure très particulière de Catométope, ils ont conservé des caractères très primitifs : les lacinies sont constituées comme chez les Panopeus, mais les branchies 3 sont longues et bien développées; la disposition antennaire se modifie d’une façon toute spéciale : article 2 peu développé, indépendant de la paroi orbitaire ; orbite largement ouverte ; etc. Je ne suivrai pas cette nouvelle voie d'évolution. FiG. 197-198. — Orifice prélabial : {1° chez le Pilumnus vespertilio (P); 2° chez l'Eurytium limosum (E) ; L, lacinie ; e, endostome. Je serais également tenté de rapprocher de toutes les formes précédentes les Pilumnus, Crabes très différenciés. Certaines Panopées (P. affinis) prennent déjà un peu l'aspect de ces derniers, des poils se développant sur l'arrière de la carapace et sur les pattes. Chez les Pilumnus, le front, plus ou moins avançant, est bilobé ; les articles 2 des antennes sont soudés intimement à la paroi orbitaire inférieure, les antennules sont presque transversales ; les 488 GEORGES BOHN. méropodites des pattes-mâchoires souvent un peu entaillés et l’endostome incurvé laissent entre eux comme une sorte d’orifice expirateur distinct; les lacinies, situées en dehors d’une crête antéro- postérieure, et à bord antérieur avançant et incurvé, ont tendance à constituer un orifice respiratoire prélabial ; elles ont d’ailleurs la forme de celles des Panopées; enfin, fait très remarquable, les branchies 3 subissent des réductions ( 3b courte, 3 « réduite); les poils nettoyeurs présentent seulement des brosses et des scies. S6. — LE Paragalene longicrura NARDo. Je terminerai par l'étude d’un Crabe méditerranéen, qui est un peu à part parmi les Xanthidés et qui ne semble pas se ratlacher au premier abord aux formes que je viens de passer en revue (Panopées, elc.) ; c’est le Puragalene longicrura NaRDo, que j'ai examiné sur un échantillon provenant de la Station zoologique de Naples. FiG. 199. — Paragalene longicrura Fi. 200. — Paragalene longicrura Narpo. Lacinie des maxillipèdes Orifice prélabial. /, lacinie ; e, antérieurs. endostome. La carapace fortement chitinisée, granuleuse, présente des crêtes et des dents très neltes ; le front a 6 dents, y compris les dents orbitaires supéro-internes (les orbites, 4), les bords antéro-latéraux, o Lrès fortes, y compris les dents orbitaires supéro-externes ; le front SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 489 assez avançant s'incline en avant; les pinces sont très fortes, à contours arrondis. Il y a une avancée ptérygostomienne très accusée contre laquelle viennent appuyer les articles 2 des antennes ; ceux-ci sont éloignés du front et mobiles ; les antennules sont assez obliques. Le bord antérieur du méropodite est plutôt en retrait de l’endo- stome. La lacinie a une forme tout à fait particulière (fig. 199); sa face interne est large, mais courte ; son bord antérieur est profondément incisé; elle est assez courte et vient butter en dedans, non contre une crête antéro-postérieure, mais contre une saillie irrégulière développée dans l’espace prélabial ; il existe donc dans cette région un orifice respiratoire assez bien différencié. Les branchies 3 sont bien développées, mais la branchie 2 est très réduite, faute de place. L’ornementation de poils nettoyeurs comprend deux rangées de longs poils secondaires diamétralement opposées, dont l’une s’inter- rompt pour faire place à une double ligne de petites saillies chitineuses et à un peigne aux dents courtes et fines. Fig. 201. — Paragalene longicrura Narpo. Extrémité des poils de épipodites. En comparant avec soin le Paragalene longicrura aux formes déjà décrites, on arrive forcément à le placer à côté du Pseudozius Bouvieri, dont il a le caractère de faible spécialisation, la formule branchiale et l’orifice respiratoire particulier. On sait qu'on a rapproché le Geryon des Paragalene et ‘ on à vu dans cette forme un passage aux Catométopes. 490 GEORGES BOHN. Re APERÇU SUR L'ORIGINE ET LES AFFINITÉS DES DIVERS XANTHIDÉS. L'évolution de Xanthidés semble s'être faite dans une multitude de directions, à partir de deux points de départ distincts, au moins. Premier point de départ. — II semble qu'un premier point de départ soit constitué par des formes voisines du Cycloxanthus 16- dentalus M.-Epw. L'avancée frontale,souslaquelle s'abritent des antennules obliques et viennent s'appuyer des antennes assez bien développées, et la légère avancée des méropodites sembleraient indiquer que ces formes anceslrales auraient adopté quelque peu la vie fouisseuse, au moins à un moment assez court de leur évolution. Les lacinies s'étendent transversalement dans presque toute la largeur de l’espace prélabial, et leurs bords antérieurs droits n'ont aucune tendance à limiter des orifices respiratoires distincts, qui n’ont aucune raison d'être chez des espèces à tendances corystidiennes. Le genre de vie primitif est marqué aussi par la constitution des pattes postérieures, courtes, aplaties. et pouvant glisser les unes sur les autres. De ce premier centre d’origine seraient sortis : 1° Les Xanthes proprement dits (Xantho, Xanthodius, Lopho- æanthus, Xanthodes (?)) qui présentent de nombreuses variations de détails, relatives tant à la forme et à l’ornementation de la carapace qu'à la constitution du front, des antennes, des pattes-mâchoires, des lacinies ; 2 Les Actées (Aclœa, IHeteractæa, Hypocætus, Phlycteno- æanthus, Euvanthus), dontla carapaceestgénéralement granuleuse, et chez lesquelles le front avançant se rabat jusque vers l’angle interne et supérieur de l’article 2 des antennes ; 3° Les Zozymes, qui semblent se rattacher aux formes précédentes par l'Æuæanthus, qui elle n’est qu’une Actée à carapace mamelonnée ; 4 Les ÆEltisus et Etisodes, dont certaines espèces, telles que l'Etisus conveæus SrTIMPsON (Japon), avec leur front très avançant, SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 491 leurs antennules presque longitudinales, leurs lacinies très allongées transversalement, etc., reproduisent beaucoup de carac- tères ancestraux présumés ; la spécialisation vient surtout du mode tout à fait spécial de fermeture de l'orbite. Chez toutes ces formes la carapace, assez bien chitinisée et divisée en territoires distincts, tend à s’élargir beaucoup, les pattes posté- rieures restent courtes, les pinces ont en général les doigts noirs, aucun orifice prélabial ne se différencie, les branchies ne subissent jamais de réductions notables, les poils nettoyeurs possèdent en général des crochets. Les Atergatis semblent s’y rattacher. Les Chlorodius doivent probablement en être isolés. Deuxième point de départ. — Un point de départ distinct du premier semble être la forme X définie plus haut (p. 486). Le front bilobé aurait été peu avançant, ce qui aurait entrainé l'extrême obliquité des antennules; les pattes-mâchoires, dès le début, n'auraient pas dépassé l’endostome. Ces caractères indiqueraient que la forme X ne menait en rien la vie fouisseuse. D'ailleurs les pattes postérieures longues et subcylindriques auraient été plus adaptées à la marche qu’à l’enfouissement. Les formes issues de X ‘ont pu ainsi émigrer dans diverses directions, et un certain nombre auraient quitté les eaux marines, soit pour les eaux douces, soit même pour le continent (Telpheuses, certains Catométopes). L'adaptation à la vie aérienne aurait été facilitée par la formation de lorifice respiratoire prélabial. Mais celui-ci ne s’est pas toujours formé. Autour de ce point de départ, en effet, l'évolution se serait faite dans une foule de directions ; il semble qu'on puisse grouper les lignes évolulives en deux faisceaux, ayant respectivement pour formes les moins différenciées, les Panopées et le Pseudozius Bouvieri À. M.-Epw. Chez les Panopées, si variables, l'orifice respiratoire prélabial reste à l’état d’ébauche très vague, et les branchies antérieures subissent des réductions de volume notable ; les Æurytlium sont un peu plus spécialisés ; les Pi/umnus se raltacheraient peut-être à ce groupe. 492 GEORGES BORN. Chez le Pseudozius Bouvieri A.M.-Enw., la lacinie s’échancre pour la constitution d’un orifice respiratoire; nous retrouvons celui-ci chez l'Epixanthus frontalis M.-Epw., forme spécialisée dans le sens xanthien et qui subit des réductions branchiales, et chez le Paragalene longicrura NaRDo, qui a conservé les branchies antérieures bien développées. Chez tous les Crabes issus du deuxième point de départ et apparte- nant à ces deux séries, la carapace, en général peu chilinisée et lisse, a plus ou moins tendance à prendre la forme quandrangulaire, les pattes postérieures sont longues, les pinces sont assez inégales et souvent à doigts incolores, les lacinies sont courtes, avançantes, à bord antérieur incurvé ou découpé, les branchies subissent assez souvent des réductions notables, les poils nettoyeurs possèdent en général des brosses et des peignes. Les Carpilies sont des formes isolées, qui paraissent issues d’ancêtres éloignés, distincts des précédents, mais se rapprochant sans doute plutôt de l’ancêtre X. Notons en passant que la coloration des Carpilies rappelle quelque peu celle de l'£pivanthus frontalis M.-Epw. (pomullé de rouge) et celle de certaines Panopées(Panopeus purpureus LOCKINGTON). Les Eriphia sont probablement aussi l’aboutissant d’une voie évolutive spéciale. Toutes ces considérations peuvent se résumer dans le tableau ci-contre : SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES, 493 Elisus Elisodes Lacime s'élend Eransversalement Cycloxanthus EN Xanthes(Xantho, Xanthodins Lophoxanthus) Pas d'orifice —__- Aclées (Actæa, Hypocetus) respiratoire Vaques caractères corystidiens Euxanthus < - Zozymes prélabial à Atergatis Chlorodius D Orifice E Erniphia Se £ prélabial 5 £ Pas de À © En LOOZRISEEOUVAEN) U ë = SU PTUIaReS pranthus frontalis 5 coryslidiens Faragalene) , na Curtonot LE Catomél Che E Pilumnus o Panopees Ebauche © £ : Rue LS Eurytiurm d orifice 5 TK Telpheuses Nora. — Les Menippe ont encore une place douteuse, ainsi d’ailleurs que les Pilumnus. Je proposerai la classification suivante : I. Xanthidés vrais (Xanthes, Actées, Zozymes,... Etisus). IT. Pseudo-Xanthidés ou Panopéidés. à ARE Carpiliens. Orifice prélabial......... pement Pas d'orifice prélabial .... — Panopéiens. 494 GEORGES BOHN. CHAPITRE V. CONCLUSIONS La vie fouisseuse et la phylogénie des Crabes. ORTMANN [E, 94] a donné le tableau suivant relatif à la généa- logie des Brachyures : | . Gecarcinidæ Ocypodidæ ce sidæ Re Lissocarcinidæ Thalamitidæ Pinnotheridæ Podophthalmideæe Trapez udæ Jan \ C'arupidæ Porlunidæ Xanthidæ Oziidæ Ca ni 4 Cancridæ . Ve r - E Felphusidæ E ; ù À Menippido Pr ue Majoidea Eypiea ( Porluninea lypica) Nautilocorystidæ Caremidæ Thidæ ES ( Crancrinea Platyonichidæ C'orystidæ At elecycelidæ "4 SUR LA RESPIRATION DÉS DÉCAPODES. 495 On voit que cet auteur fait descendre la plupart des Crabes, c'est- à-dire les Oxyrhynques, les Cyclométopes, les Catométopes, de forme fouisseuses {Corystidæ, Atelecyclidæ, Thiidæ). Au cours des chapitres qui précèdent j'ai dû mettre en doute bien des fois cette opinion. Chez les Oxyrhynques, il m'a été impossible de retrouver des traces d’un état ancestral corystidien. Parmi les Portunidés, la forme la plus primitive que l'on connaisse paraïitêtre le Portumnoides Garstangi Boax (ancien Por- tumnus nasutus LATR.); or, chez ce Crabe, si Le front est avançant, les pattes-mâchoires externes s'arrêtent à l’'endostome ; cette dispo- sition subsiste également chez le Carcinus mœænas PENNANT, peu différencié, qui perd l'avancée frontale au cours du développement, et chez les Polybies et les Portunes, qui, en général, n’ont pas le front avançant; mais chez les Portumnus etles Platyonichus, Crabes plus exclusivement fouisseurs, on voit se façonner une véritable chambre prostomiale de Corystidé, sous l'influence des frottements des antennes et des appendices buccaux contre le sable ; j'ai montré plus haut (p. 446 et p. 452) que cette chambre prosto- miale est une acquisition secondaire, et qu’il est impossible de considérer les Platyonichidés comme les intermédiaires entre les Atélécyclidés (ou autres Corystidés) et les Portunidés. J'ai dû séparer des Xanthidés un certain nombre d'espèces qui ont été jusqu'ici assez peu étudiées (Panopées, Pseudozius Bouvieri A. M.-Epw., etc.) et qui auraient admis pour ancêtre des Crabes non fouisseurs, à pattes postérieures subcylindriques, à front peu avançant, À pattes-mâchoires non soulevées et en retrait même de l’endostome (Voir p. 486). Ces ancêtres se rapprocheraient beaucoup de ceux des Portunidés; bien des fois, J'ai retrouvé chez les Pano- pées des côtes de l'Amérique du Nord l'aspect de nos Carcinus mœænas PENNANT; aussi c’est avec un vif plaisir que j'ai lu dans l'Histoire naturelle des Crustacés de MIzNE-EbwaRDs (I, p. 403) : « Genre Panopé; ce petit groupe semble conduire vers le genre Carcin >; chez certaines Panopées, on voit Se constituer une avancée frontale absente chez les formes primitives ; il en est de même dans le genre Portune, où le Portunus pusillus LEeaAcx seul prend, sous l'influence du genre de vie tout à fait particulier qu'il mêne (Voir p. 443), un front avançant. Il est probable que les Calométopes dérivent de Crabes voisins des Panopéesel encore moins 496 GEORGES BOHN. différenciés. Ainsi les Pseudo-Xanthidés et les Catométopes ne prendraient pas leur origine parmi les Corystidés ; l'avancée frontale que l’on trouve chez quelques espèces serait une acquisition secon- daire, comme le prouve la disposition générale des antennules, qui sont dès le début presque transversales. c Les vrais Xanthidés (Xanthes, Actées,.… Ætisus) comptent encore une espèce assez primitive, le Cycloxanthus 16 - dentatus M.-Epw., chez laquelle le front est étroit et avançant, et les antennules peu inclinées vers le dehors, mais où il y a à peine une ébauche de chambre prostomiale. Les Atelecyclus, avec leur front avançant, leur antennules longi- tudinales, les antennes hypertrophiées, leurs pattes-mâchoires soulevées et avançantes sont nettement des formes corystidiennes ; mais sont-elles vraiment primitives? En se transformant, elles donnent naissance à des formes non corystidiennes, les Cancéridés ; mais n’avons-nous pas vu les Platyonichus, formes corystidiennes, donner de même les Neptunes, Crabes qui grâce à leur activilé ont conservé les renversements des Crustacés fouisseurs et les appareils filtrants de la chambre prostomiale. Formes non corystidiennes..... F. corystidiennes..... F. non corystidiennes FORMMNONTES een Platyomichus:.."...".HNentynus CRE ATElECYCIUS ES NE Cancer. EC Il n’est donc pas impossible que les Afelecyclus, qui sont déjà assez différenciés, dérivent comme la plupart des autres Crabes de formes sans avancée frontale et sans chambre prostomiale. J'arrive ainsi à considérer les Corystidés d'une façon tout à fait différente de ORTMANx : l‘ils ne seraient pas des formes ancestrales ; 2° ils ne constitueraient pas un groupe naturel, car 3° ils provien- draient de l'adaptation à la vie fouisseuse de Crabes peu différenciés naturellement, mais appartenant à divers phylums. Il y aurait, non pas des Corystidés, mais des formes corysti- diennes, résultant d’une convergence adaptative. Ceci expliquerait les différences considérables que l’on observe chezles divers Corys- tidés, et que l’on atiribuait jusqu'ici à l’extrème variabilité des espèces primitives. Je résumerai dans le tableau suivant la façon dont j'entrevois l'évolution des Crabes. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 497 ues | ÿnc / = v Oxyrh 2$) f Ron Ce RE S £ : SA ARS S LÉ . . S " Où ES \ ST € S NN < En S © S ù &E à ce AD à \ SS à S 2. \ \ À, & LD S N \ NS S S > \ Ca) T s;: LE 8 | Fa L= S \ \ RS \ \ a pie’ \ ; A ul je \ fron® | F Pl pan An ormes primilives - AE à 9 branchi ges je na l'anopéidés — a Ÿ branches Curlonotus | / aus { ide de NB ES =Pseudo -Xanthides ‘hp & Sn Pne N alométopes | à front et à paltesmächores Pseudo DE: » Epixa Cu non avançantes Vin AN ptite Pseudoziens 2È M Ed D Carr: #pilius « | Carpij P . VERNON. — The Relation between marine Animal a Vegetable Life. Mitthei- lungen aus der Zool. Station Neapel, 1898. H. Technique. JoLyer (F.) et REGNARD (P.).— Recherehes physiologiques sur la respiration des animaux aquatiques. Arch. de Physiol. norm. et path., 2° s., t. 4, p. 44-62 et p. 584-633. TABLE ANALYTIQUE. GEORGES BOHN. A. — Animaux étudiés ou signalés (Crustacés, Parasites, Hôtes). Acanthonyx lunulatus Risso. Achelous. A. orbicularis RICHTER. A. spinimanus. Actæa. A. fossulata GIRARD. A. granulata AUDOUIN. A. hirsutissima RÜPIEL, A. rufopunctata Mizxe-EDWaRps. À. rugata \VHITE. Alphéidés. Alpheus. A. dentipes GUÉRIN. A. Edivardsi AUbouIN. A. strenuus DANA. A. ruber MiLnNE-EpWaRps, Amplhitrite hastata LINNÉ. Aristeus antennatus. Ascidiella aspersa. Astacus fluviatilis Auct. Atelecyclus. A. heterodon LEACH. A. 7-dentatus MONTAGU. Atergatis floridus RüUMPHIus. Athanas niîtescens LEACH. Bathynectes superba Cosra. Bopyridés. Botrylloides, Botryllus. Brachyures. Branchipus. Calappa granulata Linxé. Callianassa subterranea MoNTAGu. 1re partie 2) 145. 1T VIT. NII A, NIT2NITIN. I 4, 6. V3. ll, I 4, VII 1, 2. 15. V4. VII 3. NAS AIX. PS ANIDAVE NES PAU PA AT EE NES IT. 8 V6. NT. IX. Dore NIES.VIre: 28 partie IA, 23, 60) III 3. IV-2. 7. IV 2, 3. IV 2. IV 2. IV 2,3. IV 2, 3. HA 2 SE (1) Les chiffres romains indiquent les chapitres, les chiffres arabes les paragraphes. 3€ partie SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. Callinectes diacanthus LATREILLE. Calocaris. Cambarus. Cancellus. Cancéridés. Cancer. C. borealis SrImMPsoN. C. dentatus BELL. C. irroratus SAy. C. Novæ-Zelandiæ Lucas. C. pagurus LINXÉ. C. productus RANDALL. Cancricepon elegans Grarp et BONNIER. C. pilula Grarp et BONNIER. Cancrion floridus Grarp et BONNIER C. miser GrARD et BONNIER. Carcinus mænas PENNANT. Cardium edule. Caridina. Caridion. Carpilodes tristis Daxa. Carpilius. C. convexus FORSKAL. C. maculatus LIiNNÉ. Catoptrus nitidus A. MILNE-EbwaRps. Cepon. Cerataspis. Cheirothrix. Chlorodius. Clibanarius misanthropus Risso. Corystes cassivelaunus PENNANT. Corystidés. Corystoïdes abbreviatus Mizxe-EbWaRps. Crangon vulgaris LINNÉ. Curtonotus longimanus DE HAAN. C. vestitus DE HAAN. Cyclodorippæ ORTMANN. Cycloxanthus 16 -dentatus Marne - En- WARDS. C. californensis RATHBUN. Décapodes. Diogenes pugilator Roux. (= D. varians HELLER). Dorippe lanata Bosc. Doropygus. Dromia vulgaris MILNE-EpwaRps. Dromiacés. Ebalia. E. Bryeri LEACH. 9" I 10, 41. IV 5,7. [. BV 1108 ES PÉONIT 2 VIT NE BE. META F6" ISA 1e partie 13. D. 6, VIII 4. 13. PÉNES UINTIe Te VO PS1 Ve 16.V5. VI. VIIT 4. IX. 18: 18. IN V6. VI VIT: I 8. V 13. LS V6 15 V'ONLX 29 partie HE 12 SR ET TEA 2, 3 Ge: 933 3° partie 934 Ebalia Costæ HELLER. E. Cranchi LEAcH. E. nux. NORMAN. E. Pennanti LEACH. Entoniscidés. Epixanthus frontalis Mixe-EpwaRps. Eriphia spinifrons HERBST. Ethusa mascarone HERBSr. E. granulata NORMAN. Etisodes. Etisus. Eucratoplax quittata À. MILNE-EbWaRps. Eucopéidés. Eucyphotes. Eupagurus. E. anachoretus Risso. (— E. pictus Mizne-EbWARDS). E. bernhaïrdus LINNE. E. cuanensis THOMPSON. E. Prideauxi LEACH. E. sculplinanus Lucas. Eurycarcinus. Eurynome aspera PENNANT. Eurypanopeus planissimus STIMPSON. Eurytium l'mosum Say. Euxanthus mamillatus MILNE-EbWARDS. Galathea (voir GALATHÉIDÉS). G. intermedia TLILLIEBORG. G. squamifera LEACH. G. strigosa FABRICIUS. Galathéidés. Gebia (voir aussi UPOGEBIA). G. deltura LEACH. Geryon. Gigantione Bouvieri BONNIER. Glyptoplax pugnax. S.-J. Sir. Goniosomu«. G. anisodon DE Haax. CG. erythrodactylum LAMARCK. G. miles bE HaAAN. Gonoplax rhombo'des Roux. Grapsidés. Grapsion cavolinii Giar». Grapsus (voir Pachygrapsus). Gyge branchialis CORNALIA et PANCGERT. G. galatheæ BATE et WESTWOOD. Heteractaea lunata M.-Enw. et Lucas. Hippolyte (voir aussi Virbius). GEORGES BOHN. 1re partie 18. I 8. 116? I 8. l'2,11. V6: 18. 16: ile LS TMS VIRE: HO: Vr5.VI MIRE 1 PIC a A A PA TES I 2NG2RVRS: 116: I 6. I 2, 12. V 10. LEN VAN NULS: VA VIS MIS: Îl mm AE Ed 4 : CPE SE < < EE L NORPHEONITET. 1: H. Cranchi LeAcu (A. crassicornis M.- I 4, G. EbwaRps). 2° partie IV 4. IV 5. IV 4,5. IV 2, 3, 7. IVNG: IV 5. III. AG TS 13. Id 3% 3* partie IL. ed bd pd © &w 1 SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 939 1r6 partie 2 partie 3° partie Hippolytidés. INIT 2, MATE ] 2. Homaridés. MÉSNOMVE AIT 12: VIII 2. Homarus vulgaris Mizxe-EnwaRps. L'ONTEN Æ VI: VIT 3: % VIII 2. Homolodromia Mirve-EnwaRps. IL. Hyas araneus LINNÉ. A2 VILA H. coarctata LEACH. I 12. Hypocœlus granulatus DE Haax. IM2,; 557 Hypopeltarion spinulosum \VuiTe. F. Ilia nucleus HERBST. IS: Inachus dorsettensis PENNANT. I 12: (= In. scorpio FABRIGIUS). I. dorynchus LEACH. I 12. VII 4. I. thoracicus Roux. I 12. V 10. lone. F2: Tonella. p2: Lambrus. V 13. Leptodius. à IVe Lissa chiragra LEACH. I 2. Lophogaster. IL. Lupées (voir Neptunes). Lysmata. l'A Maia squinado HEREST. SP AIUIENNOES, Yet) VISITE EE Menippe. IV 35. Mictyris longicarpus. I'11. Ve Monocarpidea. AUS Munida bamffia PENNANT PV p2 Mysidés. IL. Mytilus edulis. ET 12: Natantia. 1BD A Nautilograpsus minutus FABRICIUS. LES QI — Planes Linnæana LEACH — Grapsus testudinum Roux). Nebalia. II. Nephrops norvegicus LINxé. SNA Neptunes (voir aussi Neptunus, Calli- II. INT 3,400. nectes, Amphitrite). Neptunus. N. pelagicus LINNÉ. I 10. N. sanguinolentus HERBST. I 10. IS 220,0 N. Sayi GIBBES. I 10. III 2, 4. Nika edulis Risso. OPA AE AU ES Le Osachila tuberosa STIMPsON. je Oxyrhynques. I 12. V 13. Oxystomes. Dre VG HAE Pachygrapsus marmoratus FABRICIUS. AS 2 MN ONE LE 1,2% P. transversus GIBBES. lle 936 Paguridés. Faguristes maculaltus Risso. Pagurus striatus LATREILLE. Palæmon (Leander). P. Leachi BELL. P. rectirostris ZADDACH. P. serratus PENNANT. P. squilla LiNNé. P. treillianus Risso. P. œiphias Risso. Palæmonetes varians LEACH. Palémonidés. Palinuridés. Palinurus vulgaris LATREILLE. Pandalidés. Pandalus annulicornis LEACH. Panopeus. P. affinis STR. KINGSLEY. P. angustifrons B. et RATHBUX. P. depressus S.-J. SMITH. P. Harrisi. P. Hartti S.-J. Surrx. P. ovatus B. et RATHBUN. P. peruvianus À. Mixe-Enwarps. P. purpureus LOCKINGTON. P. planus S.-J. SmirH. P. Sayi S.-J. SMITH. P. texanus. Paragalene longicrura Narbo. Pénéidés. Peneus. Perophora. Phlyctenoxanthus erosus. Phryxus. Phyllopodes. Plhynodius. Pilumnus. P. hirtellus LINXÉ. P. spinifer Mizxe-EpwaRps. P. villosus Risso. Pinnctheres pisum LiNxé. Pinnothérides. Pinnotherion vermiforme Grarp et BONN. Pirimela denticulata MonrTaqu. Pisa. P. corallina Risso. P. Gibsi LEACH. P. tetraodon PENNAXNT. Plagusia chabrus Wire. GEORGES BOHN. 1'e partfe 22 partie H 6.1. V5. VI. VIT 3. VII 4. POV: VINS DONNE VITE VS MILAVATE 1° I 4. I 4. TATE VS US I 4. V3. DA NS I 4. I 4. VIT 2. VIII 1. V 4. TV 4 NL VIT. VII 2. I 4. II. VII 2. VIIT 1. IV 5,7 IV 5. IV 5. IV 5 IV 5 IV 5 IV 5. IV 5. IV 5, 7 IV 5. IV 5. IV 5. IV 3, 6. 7. T3 0 VITE 2 VII 2. IVe 7 II. (NS; V 8. VI. IV 5. I 2, 41. V 8. 12, 41. V8. I 2, 41. I 41. I 41. II. = . « ee 1 (l 2, V 10, 12. VII 4. mm Eu = 10 = 1 1 — — 3° partie I 2. I IL. SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 537 ré partie 2° partie 32 partie Plagusia squamosa LATREILLE. Te Platyonichidés. IT. Platyonichus LATREILLE (voir aussi Por- III. tumnus LEACH). PI. bipustulatus Mixne-EnwaRps. III 3, 8. (= PI. purpureus DANA). PI. ocellatus LATREILLE. I 10. LL 25349, 078: Pleurocrypta galatheæ HESsE. P. intermedia Giarp et BONNIER. P. porcellanc Grarp et BONNIER. P. strigosa GrARD et BONNIER. 10 ei Ed ed © D © © Pleurocryptella. Podophthalmus vigil FABRicius. TA SANS Polybius Henslowi LEACH. FIDMANES INA 2210108 Polycarpidea. ALARME Porcellan«. VER RIXe 1e P. longicornis PENNANT. EN EVIIES I 2. P. platycheles PENNANT. IN CENEIT 3 Portumnus LEACH III 8. Portumnus variegatus LEACH. RAD MINT AVE IT AS 90 ONE RES (= Platyonichus latipes PENNANT). Portumnoides Garstangi BoHx. VITE IT 1,290; 1,16 (= Portumnus nasutus LATREILLE). Portunicepon cervicornis Risso. 12. Portunidés. DAD:VS;, 19: III. Portunion Kosmanni GIARD ET BONNIER. M? P. mænadis GIARD ET BONNIER. L'2 P, Moniezri Grarr. I 2 P. salvatoris KosSMANx. 12 Portunus. 110 VS Mr PACE CS: P. arcuatus LEACH. AS IOMMENVES AVI NS: 22 (= P. Rondeleti Risso). P. corrugatus PENNANT. PAO VS VIT. J 2. P. depurator LiNXE. I 10. V 8. ASE (= P. plicatus Risso). Ç P. holsatus FABRICIUS. I iQ UE 82, (GX 12 P. marmoreus LEACH. I 10. P. puber LiNXé. AUS IVI5 TN S. VI TM Re PC RTE 12 P. pusillus LEACH. I 10. III 3, 8. IL. P. tuberculatus Roux. I 10. ITTARS URSS; Priapon Fraïssei GIARD ET BONNIER. I Pseudione callianassæ KossMANx. I P. Fraissei KOoSSMANN. I P. Hyndmanni BATE ET WESTWOOD. [ P. insiqnis GIARD ET BONNIER. I P. proxima BoNNiEr. I Pseudocorystes armatus Mixe-EbwaRps. : Pseudozius Bouvieri A. Mizxe-Enwarps. IV 4, 5, 7. Pylocheles. 6: ’ Reptantia. 1 TVA PUIS: 038 Sabelliphilus elongatus Sars. Sacculines. Schipozodes. Scyllarus arctus LINNÉ. Sésarmes. Spirontocaris. Stenorhynchus. S, ægyptius MixNE-EnwaRps. S. phalangium PENNANT. S. tenuirostris LEACH. Synalpheus. Telmessus serratus WHITE. Thalamita sima MiIxe-EpwaRps. THALASSINIDÉS. Thalassocaris. Thia polita LeAcH. Trichocera oregonensis DANA. Upogebia stellata MoNTAGu. Virbius. V. varians LEACH. V. viridis OTTo. (+- H. Brullei M.-Erw.). Xanthidés. Xantho. X. bidentatus MizNE-EbwaRps. X. floridus MoNTAGU. (= X. incisus LEACH) X. punctatus Mizne-Enwarps. X. rivulosus Risso. X. tuberculatus Coucx. X. varius. Xanthodes. X. eriphioides À. Mizxe-Enwarps. X. granosus M.-EDWARDS ET BOUVIER. GEORGES BON. 1"€ partie II. 17. V 4. IX. IT. NIET. 4. 12. VII 4 2500) 10. EE Se or I5:V A NENIS VILA: MAI <<, # I: Le LI VILA. IA TE NS. VII? VIN A: I4.I X. melanodactylus A. MILNE-EDWARDS. X. Talismani M.-EpwaRDs ET BOUVIER. X. Taylori STIMPSON. Xanthodius Sternberghi STIMPSON. Xylopagurus. Zozymus. 16. 2€ partie EVENE IV 7: EVA EVA: IV 1. IV 1. IV 1. IV 1. TVA IV 1. IV 1. IV 1. IV 1. IV 1. IV 1, 7. IV pe: SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. B. — Points de vue divers envisagés dans l'étude des Crustacés. 1"C partie 2° partie Abdomen. E5;, 6: Abdominaux (appendices). V 3,4. Acidité (variations de l’) de l'eau de mer. I 1. Acides [Voir Carbonique (acide)]. Actinies associées aux Pagures. IG. Activité (variations de l°). LAS G,v7: Activité (influence de l’) sur les mouve- ments respiratoires. Vo A5 O0 AMV Age (variations physiologiques et morpho- logiques s’'effectuant avec l°). Y,1: NTI. ne Albinisme. I 9. Algues (distribution des). tee Algues (influence des) sur les Crusta- cés. [Voir aussi Cystoseira, Halydris, Coral- lines, ZLithothamnium, Coralligènes (fonds), Broundo]. LADA Aliments (préhension des). 150: Ammoniaque (influence de l') sur les Crus- tacés. NEA -eVe0; Ammoniaque (formation de l°). DA Ammoniaque (variations de |). 12: _Amputations (conséquences de certaines). V 6. VIII 4. Analyse chimique de l'eau de mer. Antennes externes [Voir aussi Prosto- miale (chambre) |]. UE, CRAVATE Antennules. [Voir Prostomiale (chambre)]. Appats. 15, 6. Appeadices (constitution des). IT Arcachon (conditions éthologiques de la station d'). l2. Arthrobranchies. IT Asphyxie (influence de l’) sur les Crus- tacés. Mie Asphyxie (résistance à l’). Association biologiques [Voir Actinies, Chætoptère]. 1 11 Asymétrie. I 6. Attitudes (influence des) de l'animal sur les mouvements respiratoires. IIS AVIS. Avertisseurs (poils). V ï 039 3° partie ES IL Il IL Il 540 GEORGES BOHN. Bactéries (influence des) sur la compo- sition de l’eau. Baryte (influence de la) sur les Crusta- CÉS: Bathymétrique (distribution). Branchiales (formules). Branchiale (chambre). Branchiale (influence de la longueur de la chambre) sur les mouvements respira- toires. [Voir Indices]. Branchie (constitution de la) [Voir Trichobranchies, Phyllobranchie]. Branchie (ornementation de la). Branchies (disposition des). Branchiostégite [Voir aussi Carapace, Entrée de l'eau, Orifices respiratoires]. Broundo. Calcification. Carapace (forme de la). [Voir aussi Indices]. Carapace (mouvements de la). Carbonique (absorption de l'acide) par les Crustacés. Carbonique (dégagement de l'acide) par les Crustacés. Carbonique (influence de l'acide) sur les Crustacés. Carbonique (variations de l'acide) dans les mers. Carpe (multiarticulation du). [Voir aussi Nettoyeuses (pattes)]. Chætoptère (commensaux des). Chaux (influence de l'eau) sur Crusta- cés). Chaux (emploi de l’eau). Chimique (variations de la composition) de l’eau de mer. Chimiques (influences). [Voir Oxygène, Carbonique (acide), Ammoniaque, Chaux]. Chitinisation (divers modes de). Coloration. [Voir Pigmentation]. Combats. Convergences adaptatives. Coquilles (recherche des) par les Pa- gures. Coralliens (récifs). 1re partie 11° V6 16, 40,.12: Il IV 5, 4. IT. VIT 4. VII 4. VII 3. IIL.V 4. 12, 4, 6, 8, 41, 12. 11. V 3, 4. Tue 1 1. I 41. V 7, 9. I 1. VIII 1. VIII 3. V 9. [A V 6, 9, 41. 15, 6. I 6. I 4. 2° partre III 4. IV 1, 4, 5,6. III 3. 16 AVAL IV 1, 3, 4,5, 6. I. NII 8, 1VA 2 32 partie l'E IL. NE LE SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 541 ; 1'é partie 2€ partie 32 partie Coralligènes (fonds). I 4. IIIe: Corallines. 125% Corrélatifs (caractères). NET 4 1IX: Courants de surface. [2. Coxa des pattes. REV Crassats. 2° Cystoseira. 2,4, 12. Dépigmentation. 15, 6. Désalure (influence de la) sur les Crus- tacés. td V0; Dyspnées toxiques. V1, Emersion (conséquences mécaniques del). IV 3, 4. Emersion (influence de l) sur les Crus- tacés. V 7: Emersions (méthode des), IV5. 002: Emotions (influence des) sur les Crus- tacés. 15 PA Endopodites. IL. [Voir aussi Nettoyeurs (appendices)]. Endostome. ITU AINE Enfouissement. I 10. [Voir aussi Fouisseuse (vie)]. Entrée de l’eau (variations de la forme et de la longueur de la fente d’). IV 3, 4, 6. I 5. IV 3. Epimères. JS Epipodites (nombre des). DEAVIE VTT 1C Epipodites (ornementation des). 117. IV 1.2,3,4,5,6. Epipodites (rôle et fonction des). IPAINRO VA VI. Epistome. JP NDAE Erratiques (Crustacés). IEC Excitants (divers). MT Excrétion (influence des produits d”) sur la respiration des Crustacés. PAPERS: Exopodites. IEVI III 2. Fatigue (influence de la) sur les Crus- I 11. V 9. tacés. Faux-pas du scaphognathite. V 10. Front. [Voir Prostomiale (chambre)]. Frottements (conséquences des). LAURE SE Fouisseuse (vie). LA5 6, 8 410 11VE [Voir aussi Prostomiale (chambre)]. 5516, 13 GMIENIXS ATARI PIVE Gouttières respiratoires. V 11. Gulf stream (influence du). DA Habillement par les Algues ou le sable, 15, 6, 8, 11, 12. V 6. NIIT5: 4e Habitat (influence del”) sur la respiration. des Crustacés, VAT Halydris. 2742 Hermelles (bancs d°), 12, 1% 542 Indices. Infection parasitaire. Inhibition. [Voir Lumière]. Jersey (conditions éthologiques des îles). Kinétogénèse. Lacinies (rôle des) des pattes-mâchoires internes. [Voir aussi Portunien (lobe)]. Lithothamnium. Locomotion. Locomotion (influence de la) sur les mouvements respiratoires. Lumière (influence de la) sur les Crus- tacés. Marin (milieu). Marseille (conditions éthologiques de la station de). Maxillipèdes antérieurs. [Voir aussi Lacinies]. Maxillipèdes postérieurs. [Voir Prostomiale (chambre) ]. Mécaniques (influences). Migrations des Crustacés. Mimétisme. Moœurs des Crustacés. Nageuse (vie). [Voir aussi Pélagiques (formes)]. Nerveuses (influences). Nerveux (réflexes). Nettoiement de la carapace. Nettoiement des branchies. [ Voir Epipodites et (pattes) ]. Nettoyeuses (pattes). Œufs (influence des) sur la respiration des Crustacés. Orbitaires (parois). [Voir Prostomiale (chambre)]. Orifices respiratoires postérieurs. Orifices respiratoires antérieurs. [Voir Lacinies]. Ornementation de la carapace. Ornementation de la branchie. [Voir Branchie]. Ornementation des épipodites, [Voir Epipodites]. Oscillations de l’eau. Nettoyeuses GEORGES BOHN. 1'e partie 2€ partie II. III 3, 8. IV 3,5. 1 I 2. V 11. V 6. IX. III 2. IV 3, 4, 5,60 12, 4, 6, 8, 10, 12 I 4, 5, 6. IV 3, 4. VI. ET 8 NII 11. IX. V 11. I d0 4" I 4, 10. I, en particulier 16. A0: VT V 41. VI. VAL AVG VI: NID. VINS 15,6. V6. MIRE V 3, 4. LAC IIT TV, 4516.26: IL V6. LATINE LIL TL 8. 1V4,2, 8061 V 4,6. 3€ partie SUR LA RESPIRATION DES DÉCGAPODES. 543 1ré partie 2€ partie 3° partie Oxygène (absorption de 1”) par les Crus- tacés. Jbals Oxygène (influence de l') sur les Crus- tacés. NT: Oxygène (sensibilité à l”). 114 Pagurienne (vie). PONT Parasitaire (infection). [Voir Infection]. Parasite (fixation du). 22: Parasite (respiration du). 22 Parasites (crabes). HA Parasites (influence des) sur les Crus- tacés. n IMRNEE I Pélagiques (formes). I 10. IT. Pattes. [Voir Maxillipèdes, Thoraciques (pattes), Nettoyeuses (pattes) ]. Phtaléine du phénol (emploi de la). IT Phyllobranchies. VII 4. Phylogénie des Crustacés. 1558: SAINTE Physiogénèse. l'A Pigmentaires (associations). III. Pigmentation des Crustacés. 16, 10. I TPS IVES Pigmentation (variations de la). I 4. Pigments (relations des) avec les phéno- mênes respiratoires, V:3; 5: Pinces (rôle des). V 6. Pleurobranchies. a II. Podobranchies. UE Polymorphisme. II 3. Portunien (lobe). IL 2. LV Posidonia (racines des), 124 Poudres colorées (emploi des). INA Préhension des aliments. [Voir Aliments]. Prélabiaux (orifices). be NUE [Voir aussi Lacinies]. Proépipodite. ET: Profondeurs (modifications des Crustacés dues à la vie dans les). NES os A. l'1. Prostomiale (chambre). IX. L'AUMAIV4,2 4, 5, 6. Ptérygostomien (rebord). [Voir Prostomiale (chambre) ]. Réflexes. [Voir Nerveux (réflexes) ]. Renversement du courant respiratoire. IV 8. V tous les S&. Respiration des parasites. [Voir Parasites]. Respiratoire (intensité) des Décapodes. T1. 12 044 Sable (influence de la vie dans le). [Voir Fouisseuse (vie)]. Saumâtres (eaux). Scaphognathite (rôle du, fonctions du). Scaphognathite (force, travail, fatigue du). Sécheresse (influence de la) sur les Crustacés. Sédentarité (influence de la). Sétigères (tubercules). Sociabilité. Suberites associés aux Pagures. Tactile (sensibilité) des Crustacés. Taille (modifications en rapport avec la). Tamaris (conditions éthologiques de la station). Température (variations de la). Température (influence des variations de la) sur les Crustacés. Thoraciques (pattes). [Voir aussi Nettoyeuses (pattes) Pinces |. Vaast (conditions éthologiques de station de St-). Variations de forme. [Voir aussi Indices]. Variations de teinte. [Voir Pigments]. Vase (influence de la vie dans la). Virages (méthode des). Vision des Crustacés. VWimereux (conditions éthologiques de la station de). Yeux (influence de la section des). Zostères. [Voir aussi Posidonia]. GEORGES BOHN. 1're partie 2€ partio Dex 141. III. V tous les $. WA, D, 3.4, 8 1e V 6, 8, 10, 11. VII 2. I 6. 1 6. 1 5, 6, 8. VE AAC 15,6. V 9,8. IR I 4. IV 1,5. 3t partie LE SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 545 TABLE DES MATIÈRES. Première Partie. CHAPITRE I. APERCU SUR LA PHYLOGÉNIE ET L'ÉTHOLOGIE DES CRUSTACÉS RIHÉAPODRS EE ME orne oui soma nue ages ss daue suis ous dre UE 183 SRE TUE M UIU ere a ace anretien Daiaede hais More des eve sente AIT 183 S 2. Étude des divers habitats dans les stations où a été fait ce travail, et en particulier étude de la nature du fond............. 188 St- Vaast-la-Hougue. — Les détroits. Les fonds vaseux. Les Zostères. Diverses zones caractérisées par les Algues.......... 188 Wimereux.— Bancs d'Hermelles. Sables.............,,..,..... 191 Arcachon: Dent Sables Gers LeReseeu.seeecdees core 192 Marseille. — Faune des ports. Calangues à Ulves et calangues à Algues incrustantes. Broundo. Prairies de Posidonia........... 192 Tamarnis. "Racines dés PostlOnt. nr 0 2eme 193 Sos Nafantia-cAUReDIANTIRS. 52.102 ser oe ere ees ses sm oe 194 S 4. Divers modes de vie des Eucyphota........., DR be ne 19% Alphéidés. — Conditions spéciales de l'habitat de l'Athanas nites- cens. En général, les Alphéidés recherchent les Algues calcaires et les formations coralliennes ; ils sont sédentaires et offrent deNCONVETCENCes TEDIANHIENNES , 2222 ce ess ece tee see enr oeboeose 195 Hippolytidés. — Hippolyte et Virbius. L'H. Cranchi se rapproche des Alphéidés par l'habitat. Les Virbius, au contraire, sont indifférents au choix de l’Algue, et présentent le phénomène de l'adaptation chromatique. ........ ER DRE ONE RENE 197 Palémonidés. — Leur grande activité. Les espèces et leurs divers Habitats en en de CD DORE DCE TS UE Po Poe 3,198 NA. OCTO M den a ne e node ie Gti . 200 Crangon. Seeds. SR OT RD PO EE Lorie 201 Formes saumâtres............ Ho CE e ire PART EET 201 S 5. De l'adaptation reptantienne. Homaridés et Thalassinidés. .... . 201 Homards. — Locomotion. Nettoiement de la carapace. Abris divers et enfouissement. Combats, défense, préhension des aliments. Attitude spéciale de l'abdomen... ........., RL te 202 GEORGES BOHN. NePhrOpS ee Le Re er cet ere mer DDR 0 HOTOPISSON 222 2 2 de ee ME -20 5 à ce DÉC UN HSE Gébies et Callianasses. — Habitat et teintes. nou es DOCOMONON 22. se PERTE eo ne sédirere etre : Thalassinidés et Homaridés............. SE 0 Pssnseece Lee S 6. De l'odaptation payurienne ren... ...1eest Oo 50 00: ADI TA ts Re 2 ee EE en CE Sete ne Pigmentatiom ee. encre METEO #05 coin à --o MOULES SRE MO CSS UN RER tea e de Tee seen te Locomotion. — Choix d'un abri. Pénétration dans la coquille. Progression à l’intérieur de la coquille et rétractions brusques. Déplacements généraux. ACIER c Sensibilité visuelle et sensibilité tactile. — Influence de la vie fouisseuse, de la profondeur. Relations entre l'œil et l'abdomen. Sociabilité. — Vie en société ; combats ; appâts ; associations avec d'autres animaux, ess rer dei ve ce LE . S 7. Galathées et Porcellanes. — Langoustes et Scyllares........... S 8. Les Crabes primitifs. — Caractères ancestraux des Dromiaceées. Affinités chimiques des Oxystomes. Enfouissement des Corystides.. Dromiacéesrt ser nes SRI OUR JEAN DE SUR PRORERREE OxVÉLOMES ER EE AE ne came re Ce ecrire RCE COTYBUUÉS. re M RE au ee DEL ENRE ee E ECEEE - $S 9. Les Cancéridés. — Ils dérivent de formes fouisseuses corys- tidiennes. Cas d’albinisme et leur explication..............,..... + S A0. Les Crabes nageurs \(Portunidés) 60 Eee eee Formes fouisseuses, — Portumnus variegatus. Platyonichus DCPUQUUS 5 nes entrera nada ces ct donner ee 00 Formes pélagiques. — Neptunus, Callinectes .............,... Formes à genre de vie variable. — Polybius Henslowi. ne Portunes. -Les Gareins.. 56 EL MRNR En D: $ 11. Les Crabes littoraux, terrestres et d'eau douce......... on tate Portumides NOFAUXS Se Mens nresmerdemeernerde PR rie CES xanihides ITIOTAUXS. MR ares de driver COTE ER > Grapsidés......... RCD MTS QT AC DT 0 0 Soc doc Des associations biologiques he les Crabes littoraux........... Crabes terrestres et Grabes d'eau douce:.:..,4.4.1:.,.% 210.002 Crabes parasites 22 rence Pt decor PCR CEE SA: ULes Ooynynquess. 2 Re ER CPR ET RUES NEER RES CORCIMSONS ENT TE eee CRTREEe BD SA RL ADR NOTA SE So Arents Chimiques. init ER CE UPRERECREEE PRE cite t LEE : Chaleur LEP RCE E Recette MEET retectiscases Je LUMIÈRE, Le e eureiamusrrne CRE ETC CPE NT CR LIRE ES SD Ar Apents MÉCADIQUOS 242.2... t0 eee rence eee CHR D Influences nerveuses... ee RER EC derrcecre ee Cet CHAPITRE II. SCHÉMA DE L'APPAREIL RESPIRATOIRE CHEZ LES CRUSTACÉS DÉCAFODES ia ele ne nan tAe 0e DCE EL ce LEE SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 514 CHAPITRE III. APERÇU SUR LE FONCTIONNEMENT DE L'APPAREIL RESPIRA- TOIRE (EXPÉRIENCES DE MILNE-EDWARDS)................. asser ame 249 CHAPITRE IV. DISCUSSION RAISONNÉE ET EXPÉRIMENTALE DE L'OPINION DE MILNE-EDWARDS SUR LA CIRCULATION DE L'EAU DANS LA CHAMBRE BRANCHIALE. S 1. Complexité du problème ; ses données. ............,....,..,.. 247 DONNÉE MECALQUES. ses lee se mens es docs eee ee 247 Données biologiques. Force du scaphognathite.................. 247 SR rabat, SCAPDRONAANULE Normes eco see once 240 S 3. Fatigue du scaphognathite......... MonmcReee PR 250 Dibinnonidesfrottoments,.. 120... Rs enescceodee ee 252 Diminution de la longueur de la chambre branchiale........... … 252 Diminution de densité du fluide respiratoire (Influence de PéMErSION) ses ee A A D Un c ce MROD Dinimuion de) nu ..:.......... OA A dc Gun Po S 4. Conclusions des paragraphes qui précédent ........... AE 201 S o. Critique des expériences de Milne-Edwards et de la méthode DESTCMETSIONS eee enen ee Lo No se - 020) Expériences sur de grosses Araignées de mer (Maia squinado).. 259 Expériences sur de gros Tourteaux (Cancer pagurus).......... .. 260 Expériences sur de gros Portunes laineux (Portunus puber)...... 261 Conclusions des expériences sur les gros Crabes........ cine 261 Expériences sur des Crabes de taille diverse. ........,... OM e re 262 S 6. Influence regrettable des erreurs de M.-Ediwards...... Eco 263 S 7. Méthode des poudres et des liquides colorés................. .UeDE Expériences oumeles Moi es ent ie ccm rte he 265 EXPÉRIENCES SUR IC CANCER EN ME Re red Len ie 265 Expérniencesisurmles PORAUNUS DUDEN.. creer . 265 Expériences sur, les CarcuS MEN... emo secc we 265 Nouvelles expériences Sur les Ma1a 5... 2L. 20e ..e-.ce. ess AOÛ Nouvelles’expériences sur les Cancer........... ec PDO Ce) S 8. Du renversement du courant respiratoire et de ses conséquences. 268 CHAPITRE V. ETUDE PHYSIOLOGIQUE DU SCAPHOGNATHITE.. ............. m2T/il SL DMICRENISMOdES eLCUQLION.. 2. use cesmrs masse see cree Ci S 2. Procédés que l'on peut employer pour l'étude physiologique du Scuphognathite ctleurs défauts... 0: eoneshmmeceecee . 213 S 3. De l'allure du scaphognathite chez les Eucyphota ...... es SO NE Expérience sur les Palémons de nos côtes. — Méthode employée pour l'étude du scaphognathite. Palémons de la Manche et de l'Océan. Palémons de la Méditerranée. Conclusions............ 276 Expénences sureles inbius. 022 sue REC AO) Expériences sur d'autres Eucyphota. — Athanas nitescens. Alpheus Edwardsi. Nika edulis. Crangon vulgaris. .......... 281 CORCIUS ON Eheim sens en non are cute br CCE OO 548 GEORGES BOHN. S 4. Mouvements combinés du scaphognathite et de la carapace chez les Macroures marcheurs. — Homaridés. — Thalassinidès. — Galathéidés. — Palinurides ................. RE AE co boue À TAOMATIAES ARRETE en à à | 0 00e AT ARE OS Hione ec 1. Observations et expériences sur les Homards...... ...... 2. Observations et expériences sur les Ecrevisses............ 3. Observations et expériences sur les Nephrops ...... ATP B:ThAlASSIMAES EP ERE Re. 2. 0 RTE RE op ue cd 25 1. Observations et expériences sur les Gebia deltura....... ; 2. Observations et expériences sur les Upogebia stellata.... 3. Observations et expériences sur les Callianassa subter- TORRES EN ee es Mes cree Ut Conclusions ....... ESS ee Et à Re 0 CG. 'Galathéidés 5.318 Re raes EE MRC NE Mt 1. Observations et expériences sur les Galathées ......... 4 2 Observations et expériences sur les Munida Bamffia... 3. Observations et expériences sur les Porcellanes .......... Conclusions ....... sa savoie ie MN CE SOC ORDRE se D: Palinurmidés: sn MO re CRE SE : Observations et expériences sur. les-Langoustes..........° . Observations et expériences sur les Scyllares........... +. He TR ER AE D ds “be Conclusions générales. 2540 een R RES Te #3 S D. — De l'influence de l'activité et des mœurs sur le scaphogna- thite des Paures 25e eh ea dt re Rene Ve Der 40 1. Observations et expériences sur les Eupagurus bernhar- auside la Manche: #0. PR A Se Ho . Observations et expériences sur les Pagures nn. de " Méditerranée. — Clibanarius misanthropus. — Eupa- gurus anachoretus — Eupaqurus cuanensis.— Diogenes DuTilaloriel Ses TONER CO C EEE PC ECC EEE 3. Observations et expériences sur les Pagures sédentaires de la Méditerranée. — Paguristes maculatus. — Pagqurus SÉPIDÉUSS NE TE eee nee ue To e SRE NEC ob Gonclusions #7. erreur RER SAR BCE S 6. Des variations de l'allure du scaphognathite chez les Crabes BRUNES IE CO eee ee a onnape me ele Se dre à ; 1. Dromies . D dans net Had auto 00 Do uié als ddl 90 d'a © 2. babes et. BDs PA ENTRE EE 2 PRE Asa I 3. Corystes et Atelecyclus........:.. PT OR RE LE LACGNCET. Send rs ce ECC ETS SE PS ARE TA Conclusions 2.0.0. ENS e 2. A à S7. De l'influence de l'habitat sur le scaphognathite du Cercinus mænas Expériences effectuées aux environs de St-Vaast............ due Expériences effectuées à Wimereux et à Boulogne-sur-Mer...... 284 281 28 280 280 280 287 288 289 280 290 290 201 292 292 203 SUR LA RESPIRATION DES DÉCAPODES. 549 $ 8. Persistance des renversements prolonges chez les Portunides et les Xanthidés. — Vie fouisseuse et vie subaërienne .......... . 918 Le POMITNGES, 020 PO AR RENE" AN De CU Ci) Portunidés exclusivement fouisseurs............ RS no Luke Éranchéementpeélasiques.s......... 1.2.1, 64 seit eee JL) Phttoraux et migrateurs....:....... EN a da rete Re oo Li) LME CAUSE ARROPPSEOAERRE 5 DO RD Ce res de IE 2. POLYDIES, 05e 0 0 RE TO RO NE A CRM vil ROSE RER coms Ce MARGE 1322 PCI. ee seems doi 00 à ED CU THEPANC 7 IFR ANINONE 22.eeee A OO AE Te ES RS D PUUNNUS... 1... Ro bee 50 ace HN OO ue: 2 TO 3. Eriphies:....... Fraser ben nolares attee1d PR nu S9. De l'influence des agents chimiques sur le scaphognathite du Pachygrapsus-marmoratus...%.....#41:.44:%0. 0 ue esse O0 1. Influence des produits d’excrétion de l'animal ............ 326 2 Influence de l'acide carbonique......-.:......... So 21 dHInibence dés poisons de la fatigue... 0... . 28 4. Influence de la désalure progressive. .............. DE PE 9. Influence simultanée de la fatigue et de la désalure....... 330 6. Influence de la chaux et de l’ammoniaque................ 3931 S 10. De l'influence de la sédentarité sur le scaphognathite des Oxy- MUHAUES Serre cree Mode door pti donne bee 333 S 11. Des influences chimiques, mécaniques et nerveuses s'exerçant sur le scaphognathite........... D RS Re UE ... JO) I. Influences chimiques. — Activité et sédentarité. — Animaux littoraux et animaux des fonds............ RNA 000 TL, Influencesmécaniquess,.. 1"... entre . 338 IE Infuences parementneryeuses.. Lente. 390 COCO re eme Dee CRE tee 339 SAP MECanISMe TU MENLETSEMENT eee. meroe eee des ce OU) S 13. Des mouvements du scaphognathite dans leur rapport avec la LOG CERN a ie US Sie old nee: ds die cer ce POS CHAPITRE VI. ETUDE PHYSIOLOGIQUE DES EXOPODITES DES PATTES - MAGHOIRES I se ce pese se en le aan a De nes dire RES Er.) I. Ressemblance fonctionnelle entre les exopodites des pattes- mAchoires et le Scaphôgnathite.........,........0.0 .., JA IT. Influence du genre de vie sur les mouvements des exopo- dites des pattes-mächoires. — Vie nageuse. Vie pagu- HENNe VIE AUISSEUSO 22e secs nae messes see 3! IIT. Influences nerveuses qui agissent sur les mouvements des exopodites des pattes-mächoires.— Pagures. Portunes. MAG RER. RD ia nu à CE et A) CHAPITRE VII. ETUDE PHYSIOLOGIQUE DES ÉPIPODITES. ..... ET RS ON S 1. Epipodites des Pénéidés ....... RCE RL nie ei AU RTE à ss) = 590 GEORGES BOHN. S 2 EpiporiteS\che= RS Natantis MMA REIN RICE EMMA ee 30) S 3. Epipodites chez Les Reptantia . ... 40... crea 30) I. Homaridés-Thalassinidés. — Homarus vulgaris. Astacus fluviatilis.“Gébies et Callianasses On AAC ee 30) IL Panunidése es... Or eue ee Leo 302 NI Galatheridés etPaguridés SU MRRenE EME CEE EEE 903 ENV SCA ERRRE A e R SER ETC EECEE 303 S 4. Epipodites et ornementation de la branchie.................... 306 CHAPITRE VIII. ETUDE PHYSIOLOGIQUE DES ENDOPODITES THORACIQUES. (PATIES NEFFOYEUSES) 5 22020 ce cocon eee eee fil S 1. Pattes nettoyeuses des Eucyphotes............ ... ............ 371 S 2. Pattes nettoyeuses des Homaridés-Thalassinidées................ 77 S 3. Pattes nettoyeuses des Galathéides............................ 318 S 4. Pattes nettoyeuses des Pagurides .............................. 300 S 5. Pattes nettoyeuses des Crabes................................. 302 CHAPITRE IX. ETUDE PHYSIOLOGIQUE DES ANTENNES ET DES APPENDICES OEM) ne en ion oO modo DOS DE UAa id CD à 00:00 0.00 383 Deuxiéme Partie. Conséquences morphologiques et phylogéniques. CHAPITRE PREMIER. LA CHAMBRE PROSTOMIALE DES CORYSTIDÉS....... 388 CHAPITRE IL. Les CANCEBIDÉS- ere echec EC er AOL CHAPITRENIT. LES POREUNIDÉS. 2eme nec ee cer pee 406 8 1. Les Portunidés ont-ils à l'origine une chambre prostomiale?.:.. 407 S 2. Orifices antérieurs des gouttières du scaphognathite. (Lobe DOFÉUNMIEN) ER nement ocre 417 S 3: Chambhrebranchale. re Re rene cet et 421 8 4. Formules branchialés............................mm. 424 S 5. Entrée de l'eau dans la chambre branchiale......... .... .... 426 8 6. Ornementation de la branchie.................... ........... 427 S 7. Ornementation des poils des épipodites.................. ..... 434 S 8. Résumé. — Apercu sur la phylogénie des Portunidés. — Nouvelle classification. .................... TE OR D NI 438 CHAPITRE AV. LES. KANTHIDES- 22e sec s-hemehe-ms eee Le 449 S 4. La série des Xanfhes "Re eee 450 SP ALES ACLÉES = reed deco cesse Ce CE iehe 465 S 3. Lesgenre Carine... TE PRE Eee 0 de TE 408 S 4. Pseudozius Bouvieri. Epixanthus frontalis. Eurytium limosum... 474 S5. Vartiabilié desiPanonees.s...4 2eme LE CEE ER 479 SUR LA RÉSPIRATION DÈS DÉCGAPODES. SOS CAlene lOnDiCEU TA... 240 nec... eee dette. S 7. Aperçu sur l'origine et les affinités des divers Xanthidés........ CHAPITRE V. CONCLUSIONS. LA VIE FOUISSEUSE ET LA PHYLOGÉNIE DES CRABES AS ie note ns nine le nss auauete lotte one SN LT EUR 5 Troisième Partie. — Conséquences éthologiques. CHAPITRE PREMIER. ASSOCIATIONS PARASITAIRES, .............. En NE S 1. Influence des parasites sur les mouvements respiratoires... S 2. Influence des mouvements respiratoires variés sur l'établissement CHICOEtelOpReMeEnt deES PATASILES. secret +28 Relations entre la modalité des mouvements respiratoires de l'hôte CHAAMATUrE des DATASITES LE. 4. Der euee cusecs on eee e Mec Mécanisme de l'infection parasitaire chez les Crustacés Décapodes. Respiration du parasite et respiration de l'hôte.................. CHAPITRE II. RELATIONS ENTRE LES ANIMAUX ET LES PLANTES........... CHAPITREMITE ASSOCIATIONS PIGMENTAIRES se. 40124 a eohee » sise ie coonie CONCÉDSIONSS.- Aa ue tenter es Me Perinen sue sp TR MR IDBIENO ICI D DE DS CA D en I raser dat LABEF ANAL YMIQUES".:...2. SOC Re dns raie PLANCHE I. LETTRES COMMUNES A TOUTES LES FIGURES. DES PLANCHES I A X. C.A. — Cerveau antérieur. C.I. — Cerveau intermédiaire. C.M. — Cerveau moyen. C.P. — Cerveau postérieur. ch. 0. — Chiasma optique. Com. ans. — Commissura ansulata, de GOTTSCHE. Com. ant. — Commissure antérieure. Com. d. tr. opt. — Commissure dorso- transversale des Lobes optiques. Com. Fr. — Commissure horizontale de FRiTscH. Com. Hal. — Commissure transversale de HALLER. Com. hab. — Commissure habénulaire. Com. 1. lob. — Commissure interlo- baire. Com. à. olf. — Commissure olfactive inter-bulbaire. Com. post. — Commissure blanche postérieure. Com. P. ch. — Commissure post- chiasmatique. C. rd. — (Couronne radiée, de GOTTSCHE. Déc. Tr. 2 — Décussation du fais- ceau du manteau. d. 3, b. — Faisceau latéral dorso- ventral du cerveau intermédiaire. ep. — Cellules épithéliales ou épen- dymaires. HO HF DO. — Faisceau basal. — Tractus strio-thalamicus. F. 1,1, — Faisceau longitudinal latéral. l. p. — Faisceau longitudinal pos- terieur. med. — Faisceau médian. F, F. F.m. th. — Faisceau mamillo-thala- mique. F. olf. — Filets olfactifs. F, r. f. — Faisceau rétro-reflexe, de MEYNERT.— c.i. p. — Corps inter- pédonculaire, g.9. ©. — ganglion ou noyau céré- belleux. g-g. h. — Ganglion de l'habenula. gl. — Glomérules olfactifs. gr. — Grains. Hyp. — Hypophyse. Inf. — Infundibulum. L. À. — Lobes antérieurs. L. ol. — Lobes olfactifs. L. I. — Lobes inférieurs. L. op. — Lobes optiques. N. ant. — Noyau antérieur. N. pr. — Noyau prétectal. N\. f. L. p. — Noyau d'origine du fais- ceau longit. post. ng. — Cellules de névroglie. n. N. III. — Noyau d'origine du nerf de la IIT° paire. n. rd. — Noyau rond, de FRITSCH. n. rg. — Noyau rouge. N. II. — Nerf optique. N. III. — Nerf oculo-moteur commun. Ped. ce. a. — Pédoncules cérébelleux antérieurs. Ped. c. m.— Pédoncules cérébelleux moyens. Ped. c. p. — Pédoncules cérébelleux postérieurs. To. 1. — Torus longitudinalis. To. s. c. — Torus semi-circularis. Tr. ol. — Tractus olfactifs. Tr. olf. hab. — Tractus olfacto-habe- nulaire. Tr. op. — Tractus opticus. Tr. pal. — Tractus pallii (Faisceau du Manteau). Tt. op. — Tectum des Lobes optiques. Va. c. — Valvule cérébelleuse, PLANCHE I. Fig. 1. — Coupe (demi-schématique) du Cervelet de Cottus bubalis (Méthode au bleu de méthylène). ce. m. — Couche moléculaire et fibres parallèles. c. P. — Couches des cellules de PURKINIE. C. gr. — Couche granuleuse. S. m. c. — Substance médullaire centrale. «a. — Petites cellules étoilées de la couche moléculaire, avec corbeiïlles termi- nales c. b. b. — Grande cellule étoilée de la couche granuleuse. G. — Grains ; f. m. fibres mousseuses ; f. »., fibres nerveuses avec épaissis- sements doubles et fusiformes. - Fig. 2. — Deux Cellules de Purkinje, quatre grains (G) et trois noyaux de névroglie (N) pour montrer les dimensions relatives de ces trois sortes d'éléments du cervelet (Gadus luscus) (L.). ob}. 1/12 (160 Mm. Tubuslänge). — Leirz ocul. 4 (chambre claire). (On remarque notamment dans cette figure les capuchons nucléaires et les vacuoles du cytoplasma des cellules de PURKINIE). (Méthode de NissL) Fig. 3. — Deux cellules d'origine du nerf de la IIT° paire du Merlangus vulgaris (L.). de Re y obj. 1/12 à immersion homog. (SAONE NE RE ÉEz | ocul. 3 (chambre claire). Fig. 4. — Deux cellules nerveuses fusiformes du toit des Lobes optiques (Platessa vulgaris) (Méthode de NissL). obj. 1/12 ocul. 3 Fig. 5. — Cellules épendymaires (épithéliales) du cerveau moyen de Platessa. ; { ob. 1/12 (Méthode de ExrLICH) Date (Capuchons nucléaires) (chambre claire). — LErrz. (chambre claire). — Lerrz. Fig. 6. — Une cellule nerveuse de la moelle allongée (colonne grise anté- rieure) de Raja batis (L.). 2 usläng (Méthode de sc) 0bj. 1/12 (160 Mm. Tubuslänge) ocul.4 (chambre claire). —Lerrz. Fig. 7. — Deux cellules nerveuses (C) ettrois cellules de névroglie (N) du Prosencéphale (Stammganglion) de Raja batis (L.). (Méthode de Nissx) ARE ocul. 3 (Le trait pointillé autour des cellules nerveuses indique la limite de ces cellules avant la rétraction du protoplasma cellulaire). (chambre claire). — Lerrz. Fig. 8. — Fibres nerveuses de la région basilaire du mésencéphale de Xaja batis. { obj. 1/12. ARMOR ER ASE) | oc. 3. (chambre claire).— Le1Tz. Bulletin scientifique, Tome XXXVT. PLANCHE I. 0 À. : dl PLANCHE II. Fig. 9. — Zones corticales du cervelet de Platessa (très jeune exemplaire). — Méthode GoL@I-CaJaL (triple imprégnation). — Fibres parallèles. — Dendrites épineuses des cellules de Purkinje. — Petite cellule étoilée de la couche molé- culaire, — Corbeilles terminales. — Grains et cylindre-axe de ces éléments. Leirz L=0bj7 (chambre claire) |. oc Al Fig. 10. — Cellule nerveuse du lobe antérieur ( Epistriatum) de Gadus luscus (très jeune exemplaire): cy., cylindre-axe et collatérales (méthode de GOLGI). LEITZ ox (chambre claire) | oc. À Fig. 11. — Cellule nerveuse grande et multipolaire du lobe antérieur (Striatum) d'Anguilla vulgaris (méthode de GoL&r). LEITZ du, À (chambre claire) Fig. 12. — Cellule nerveuse à cylindre-axe court (Type II de GoL&r) située dans le lobe antérieur de Gadus luscus (entre le Striatum et l'Epistriatum) (méthode de GoLa&i). LEITZ ni - (chambre claire) Fig. 143. — Cellule nerveuse multipolaire des lobes antérieurs de Raja batis (méthode de Gor&r). | LEITZ a : (chambre claire) Fig. 14. — Cellule mitrale (fusiforme) du bulbe olfactif d'Anguilla vulgaris (méthode de GoL@r); cy, cylindre-axe; p.p., prolongement protoplasmique avec arborisations variqueuses. LEITZz “ cl (chambre claire) Bulletin scientifique, Tome XXXVT. PLANCHE II. PLANCHE III. Fig. 15. — Éléments du bulbe olfactit de Scyllium catulus. Glomérules olfactifs. — Cellules mitrales. — Ramifications terminales des fibrilles olfactives (méthode de GoL&r-CayaL). { ob}. 5 | oc. 3 Fig. 16. — Myélencéphale de Platessa vulg. Cellules épendymaires : ep. ct cellules de névroglie : #g., dans la substance grise entourant le 4 ventricule (substance gélatineuse) (méthode de GoLGr, imprégnation de courte durée). LEITZ (chambre claire) LEITZz pbs (chambre claire) oc. 4 Fig. 17. — Névroglie de la substance blanche des lobes antérieurs de Raja batis (méthode de GoL&r, courte imprégnation) ; V, capillaires sanguins. LEITz CN (chambre claire) oc. À Fig. 18. — Névroglie (cellules en araignée ou de DEITERS) dans les lobes antérieurs de Raja batis (méthode de GoLar, courte imprégnation). LEITz NE (chambre claire) oc. { Fig. 19. — Cellule nerveuse à cylindre court ; cy. (type IT de GoLar). Lobe antérieur de Raja batis (méthode Gor&r-CayaL). obj. 7 LEITzZ OC (chambre claire) PLANCHE II Tome XXXVI. Bulletin scientifique. PLANCHE IV. Figures pour le repérage des coupes. Fig. 20. — Encéphale de Sélacien vu par sa face supérieure ou dorsale. Figure destinée au repérage des coupes sagittales ou antéro-postérieures. (Les lignes de repère correspondent aux coupes les plus importantes au point de vue topographique). Fig. 21. — Encéphale de Sélacien sectionné suivant un plan sagittal et médian. Figure destinée au repérage des coupes frontales ou vertico-transversales. Fig. 22, — Encéphale de Sélacien sectionné suivant un plan sagittal et médian. Figure destinée au repérage des coupes horizontales. Fig. 23. — Encéphale de Teléostéen vu par sa face supérieure ou dorsale. Figure destinée au repérage des coupes sagittales ou antéro-postérieures. Fig. 24. — Encéphale de Téléostéen sectionné suivant un plan sagittal et médian. Figure destinée au repérage des coupes frontales ou vertico-transversales. Fig. 25. — Encéphale de Téléostéen sectionné suivant un plan sagittal et médian. | Figure destinée au repérage des coupes horizontales. PLANCHE IV. Bulletin scientifique, Tome XXXVT. PLANCHE V. Fig. 26. — Coupe horizontale du Télencéphale (lobes olfactifs et lobes anté- rieurs) de Conger vulgaris (méthode de GorGr-CayAL). (Coupe correspondant à la ligne de repère 2, fig. 25, PI. IV). Pour l'explication des lettres de cette figure demi-schématique se reporter au Tableau général et aux descriptions données dans le texte du travail. Bulletin scientifique. Tome XXXVI. PLANCHE V. Cotibr ll Cel. pg.-—{## Le ” an . 4. - PLANCHE VI. Fig. 27. — Coupe sagittale, antéro-postérieure de l'Encéphale de Platessa vulgaris (méthode de GoLGr-CAJAL). Cette coupe, demi-schématique, intéresse le Télencéphale, le Diencéphale et la partie antérieure du Mésencéphale ; elle correspond à la ligne de repère 1, fie: 23, PL IV. Voir au Tableau général et aux descriptions données dans le texte, pour explication des lettres. PLANCHE VI. Bulletin scientifique. Tome XXXVI. UE A PLANCHE VII. Fig. 28. — Coupe vertico-transversale ou frontale du Telencéphale de Raja batis (méthode GoL&r-CAJAL). Cette coupe, demi-schématique, correspond à la ligne de repère 3, fig. 21, ELUIN: Voir au Tableau général et aux descriptions données dans le texte, pour l'explication des lettres. PLANCHE VII. Bulletin scientifique, Tome XXXVI — = = \ \ À \ \ \ o EE \\ PLANCHE VIII. Fig. 29. — Coupe sagittale, antéro-postérieure, de l'Encéphale de Raja batis (méthode de GoLGI-CAJAL). Cette coupe, demi-schématique, comprend le Telencéphale, le Diencéphale et le Mésencéphale. Elle passe un peu en dehors de la ligne de repère X, fig. 20, PI. IV. Se reporter au Tableau général et aux descriptions données dans le texte, pour l'explication des lettres, Bulletin screnhifique, Tome XXXVI. PLANCHE VIII. 4 29, Dec.Mant. WE FA ul [1 54 SR mi un Qi 17 à one PLANCHE IX. E Pour l'explication des lettres des fig. 30, 31, 32, consulter le Tableau général ou se reporter aux descriptions données dans le texte. Fig. 30. — Coupe vertico-transversale (frontale) du Telencéphale (lobes antérieurs) d'Anguilla vulgaris (méthode GoL&r-CAJAL). Cette coupe correspond à la ligne de repère 1, fig. 24, PL. IV (un peu en arrière de cette ligne). Fig. 31. — Coupe vertico-transversale (frontale) du Diencephale de Scomber (méthode de GoLGr-CAJAL). Cette coupe correspond à la ligne de repère 3, fig. 24, PI. IV (un peu en avant de cette ligne). Fig. 32. — Coupe vertico-transversale (frontale) du Diencephale et du Meésen- æéphale de Scomber (méthode GoLGr-CAJAL). Cette coupe est comprise entre les lignes de repère 3 et 4, fig. 24 PI-ULV. PLANCHE IX. Bulletin scientifique, Tome XXXVI. 30. KO à S1: Le Com-post. Z LS 37 f) PIN PLANCHE X. PLANCHE X. Pour l'explication des lettres des figures 33, 54,35, 36, 37 et 38, consulter le Tableau général et se reporter aux descriptions données dans le texte. Fig. 33. — Coupe horizontale de l'Encéphale de Callionymus lyra (Epitha- lamus), correspondant à la ligne de repère 3, fig. 25, PI. IV (méthode de GoLai- CAJAL). Fig. 34. — Coupe horizontale de l'Encéphale de Callionymus lyra (Thala- inus) correspondant à la ligne de repère 2, fig. 25, PI. IV (méthode GoL&i-CayaL). Fig. 3. — Coupe vertico-transversale, frontale, de la partie antérieure du mésencéphale de Platessa vulgaris (torus longitudinalis). Coupe correspondant à la ligne de repère 3, fig. 24, PI. IV (méthode GoLGi- CAJAL). Fig. 36. — Coupe horizontale du Diencéphale de Raja batis (lobes inférieurs. Décussation du faisceau du manteau). Coupe correspondant à la ligne de repère 1, fig. 22, PI. IV (méthode GoLar- CAJAL). Fig. 37. — Coupe vertico-transversale, frontale, du mésencéphale de Raja batis (noyau d'origine du N. III et noyau rouge). Coupe correspondant à la ligne de repère 5, fig. 21, PI. IV. Fig. 38. — Coupe sagittale du cerveau postérieur de Platessa vulgaris (base du cervelet, noyau cérébelleux), coupe correspondant à la ligne de repère 1, fig. 23, PL IV. Bulletin scientifique. Tome XXXVI PLANCHE X. {@m'hab. À Com.dtropt 1 Erf ! Ert € om.post. 50. 35. y eZ LL UD \ LLLLA t ; 3 \ LE Trpal. Thop---—--5i. FN Dec. Tract.pal- RE DT Catois del. Lit. Anst.vWerner 4 Winter, Frankfurt M. LA SD. Il] | 04463 ——— = —_—_— | | | — lis ÊL—© | = —__—— | ——— — Il ——= — = —_ == 10) l … ; > + $ € + + cts ste atele Le a le 5m tant 2. si" DETE . mn + 4 3 , . nietet 21e te Î , L ; î *ieie [ = : : ‘ . ; » . > ; a Le 7 " net Q ÿ tete res tistetr, tr vire ee " ke