THE UNIVERSITY OF ILLINOIS LIBRARY 570.5 BU V4-7 — BtoLoevg » vî - ' Tm$i" «KMk , s m • Sv*8 > ù' $Ï¥r$ J S» ' • • - >i,-. ■; . y-: tjnpxtifc^ ’ • ■ y* « ' ■.•' Éi *ïv BULLETIN Scientifique, historique et littérale du Département du Nord ET DES PAYS VOISINS BULLETIN SCIENTIFIQUE, HISTORIQUE ET LITTÉRAIRE DU DÉPARTEMENT DU NORD et des pays voisins (Pas-de-Calais, Somme, Aisne, Ardennes, Belgique) PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION* DE MM. GOSSELET, Professeur à la Faculté des Sciences de Lille et l’Abbé DEHAISNES, Archiviste du département du Nord. Tome IV. — 1872. LILLE "O. Q U A R R É, Éditeur Grand’Placc, 64. 1872 . 0 m ' mM ’Fbu. 4.e Année — 1872 v-A-l J _ TABLE GÉNÉRALE Table des Sociétés Amiens. Académie d’ — 103. Belgique. Académie — 29, 104, 131, 212; — Société Entomologique — 94; — Société Malacologique — 108 ; Bruxelles. Congrès international d’anthropologie et d’archéologie préhistorique — 80, 99, 164, 205, 234. Douai. Société d’Agriculture. Sciences et Arts — 69. Flamand. Comité — de France — 52. Française. Académie — 203. Lille. Société des Sciences — 25, 51, 76, 110, 129, Mans. Cercle archéologique — 35. Nord. Commission historique du département du — 14 ; — Association géologique du département du — 159. Pas-de-Calais. Commission des antiquités départementales du — 40, 98. Saint-Omer. Société des Antiquaires de la Morinie — 162. Table des noms d’Antcurs dont les ouvrages ont été analysés ou cités; Apollinaire (le P). 164. Barrois (Ch). 159 Backer (de). 2o4 Belgrand 208 Bernier. 35 Berthoud. 137j Blanquarl-Evrard. 51 100 - Bourgeois (l’abbé). 164 X ! £1 Briart. 131 Brun-Lavainne. 40 Cardevacque. 98 Cartaillac. 210. Casati. 111 Chelloneix. 161 Cornet. 131. 190. 207 Corenwinder. 25. 76. 129 Cousin. 79. 220 Coussemaker (de). 53. 181. Dancoisne (l’abbé.) 7 Dancoisne. 40. 98 Davreux. 131 Debray. 160 Dechamps de Pas. 20. 118. 163 9 X a. Decocq. 160 Dehaisnes. 112 Desplanque. 60. 84. Dewalque. 82. 33. 213 Dolfus' 161. Dubois. 214 Dupont 165. 212 Dupureux. 35 Faidherbe (le général) 129. 209 Farez 72 Folie. 131 Fontaine de Resbecque (de). 227 Fremaux. 178 Frey. 69 Fromentin (l’abbé). 164 Gloesner. 131. 212 Godin 40 Gosselin. 59 Gosselet. 162. Gratry (le P.) 40 Hamy 166 Ha us. 106 Hebert. 173 Hericourt (d’) 98 Houdoy. 28. 114. 133. 174 Houzeau. 131 Kerwyn de Leltenhove 106 Koninck (de). 34. 131 Kulhmann 111 Lagneau. 166 Lavainne. 40 Lebeau. 2 ! 9 Lecesne. 40 Leieune. 99. 909 Leuridan. 226. 14 Louise 80 Malaise. 10 Malengreau. 36 • Malherbe. 33. Melsens. 34 Meurein. 19 22. 39. 61 76. 97. 119. 139. 180. 219. 240 Montée. 72 Montigny (de). 30 Morren. 30 Nadaud. 204 Norguet (de). 4. 27. 96. 110. 201. 234 Off'ret. 71 Omalius D’Halloy. 29 Ortlieb. 161 Parsy. 70 Petit. 41 Piré 28 Plane (de la) 163 Plateau (Félix). 30. 132. 201 Quairefage (de). 169 Quetelet. 30. 131.212 Ricquier. 203. Rigaux. 57. 20. 120 Roussel - Defontaine. 1 10 Rozan 204. Schuermans. 234 Slaas. 29 Tailliar. 74 Tellitz 29 Ternas (de). 178 Termnck. 40. 98 Tilmant 130 Valerius. 212 Van Beneden. 30. 32. 132. 213 Van Beneden (Ed). 34. 133 Van Drivai. 40. 98. 192 Vanderkindere. 169 Varenberg. 105 Vauters. î 04 Violette. 52 Table des Titres des Arlicles insérés , analysés ou cités. Académie d'Arras. Histoire de 1’ - 192 Adam de la Halle, 181 Anappes. (N). Poisson fossile d’ — 161 Anclres (P). Pierre tumulaire d’ — 163 Angre (B) Antiquités à — 35 Archéologie préhi «torique. 80. 164 205. 212. 213. 234 Arras. (P). Ruines à — 98 Aurores boréales, 21. 30. 131. 212 AvPluy. Tourbière 160. Avesnes. (N). AntiquitésRomaines 220. Baleines. 30. — des sables d’Anvers, 213 Bacaille. de Saucourt 212 B«*lg» parlement du Nord, 4. 24. 43. 91. 121. 141. Homme préhistorique. 72 Inscriptions, puniques , 129 ; lumulaires d’Andes , 163; — de Wallers, 240 Inventaire. Des objets d’art et d’archcologie. 16 Leticns Le PagUS — 221 Lune. Calcul dés phases de la — 131 Lille. (N). Chapitre de l’histoire de — 114. 133. 174 ;— Statisti¬ que féodale de la châtellenie, 15; Inventaire des églises, 17; Objets Gallo-Romains, 20; Hache en pierre, 20; en bronze, 60; Tour¬ be, 60 Malus, 110 Macquenoise. (B). Camp, 37 Merle blanc. 1 Mérovingien. Cimetière à Bou¬ vines. 57. 108 Météorologie, 18. 38. 60. 76. 97„ 119, 139. 179. 217. 238 Mollusques. Catalogue des — du département du Nord, 27 Musée Sleriboiid. 137 Néerlandaises. Etudes — 204 Nitrate de soude. Analyse, 52 Numis matique. Monnaies à Harnes, 100; Méréaux à Thé- rouanne, 1 18 Opé ra. Les nuits de Florence, 40 Peruwelz (B). Histoire de — 41 Pierre. Age de — 165; — Hache à Lille, 20; au BlancNez. 20-. 99. 209 Photographie. 51 Planisphère, des écoles, 130 Roisin le livre - 1 14 Rouvroy. (B). Camp romain, 35 Sundgatle (P). Diluvium 161 Saucourt. (S). Bataille de — 112 Spiennes (B). Haches en pierre, 206 Tcnremoncle. La famille de — 178 Thérouanne. (,P) Méreaux- 118 Trêves du Comte. 105 Vision. 212 Wallers en fagne. (N). Antiquité 240 Zoologie. Conservation des ani¬ maux inférieurs, 34; - Poissons du Nord, 231 ; — Mollusques du Nord, 198; - Myriapodes de Belgique, 132 201 ; - Chauves- Souris de Belgique. 133; — Oiseaux d’Europe, 214;- Gy¬ paète des cavernes, 132; - Pla- norbis complanalus , 23 ; — Invasion de Mulots, 220 Les noms de localités sont accompagnés d’initiales désignant les divisions géogra. phiques on elles sont situées : — (A) Aisne, (Ar) Ardennes, (N) Nord, (PJ Pas-de-Calais (S) Somme, (B) Belgique. _ Lille, lmp. Six-Horemans. 73-136 4e Année. — K° 1. — Janvier 1872. MERLE BLANC. Le Musée d’histoire naturelle de la ville de Lille s’est enrichi Tannée dernière d’une belle variété blanche du Merle vulgaire. J’ai eu occasion d’en voir dernièrement une autre capturée dans nos environs. Ces deux oiseaux m’ont rappelé tout naturellement le dicton populaire qui fait du Merle blanc un être imaginaire ou tellement rare qu’on ne risque guère à le promettre en revanche d’une chose impossible. Comme presque tous les proverbes qui font allusion à des faits d'histoire naturelle, celui-ci manque d'exactitude. Les variétés albines du Merle noir ne sont pas plus impossibles ni plus rares que celles des autres espèces d’oiseaux, parmi lesquels l’albinisme est rare sans doute, mais se rencontre de temps en temps. Il n’est pas de collection ornithologique un peu complète qui n’en possède quelques échantillons. Celles du Merle sont même, jusqu’à un certain point, plus communes, parce qu’on leur rapporte souvent les albinismes de deux espèces voisines de mêmes formes, ceux du Merle à plastron et de la Grive litorne. Il est vrai qu’un examen sérieux peut éviter cette erreur, mais il n’est pas toujours fait par les personnes peu attentives. Donnons, avant d’aller plus loin, les différences qui distin¬ guent les individus blancs de ces trois espèces : Le Merle noir a les troisième, quatrième et cinquième rémiges égales et les plus longues de toutes, la deuxième plus courte que la sixième ; le Merle à plastron a la troisième rémige la plus longue, la deuxième plus courte que la sixième. La Grive litorne se distingue facilement du’ Merle noir par la dimension des ailes : pliées, elles arrivent à 0,47 de l’ex¬ trémité de la queue, tandis que chez le Merle elles s’en éloi- — 2 — gnent de 0,65, c’est-à-dire qu’elles sont plus courtes et plus obtuses chez ce dernier. Au reste, la confusion n’est possible que si les oiseaux sont parfaitement blancs ; quand la nuance naturelle paraît à cer¬ taines places, comme il arrive souvent, le doute ne peut exister. J’ai observé un grand nombre d’exemples d’albinisme de ces trois espèces d’oiseaux ; le moins commun est l’albinisme complet, s’étendant au bec et aux pattes ; ceux qui ne sont qu’imparfaits affectent diverses nuances depuis Pisabelle jusqu’au gris ; les plus nombreux offrent simplement des maculatures blanches, surtout à la tête. Le Merle à plastron est celui qui présente le plus souvent ces taches à la tête et au cou. D’après Polydore Roux (Ornithologie provençale), on trouve aux environs de Nice une variété du Merle noir qui, dans sa jeunesse seulement, a une barre blanche sur les ailes et la queue. Le Merle à tête blanche de Brisson (Merula leucoce - phala) est aussi une de ces variétés. La croyance populaire à la grande rareté du Merle blanc ne date pas d’aujourd’hui. Aristote le premier mentionna l’albinisme du merle. « Il y a deux espèces de merles, dit-il, le noir ou vulgaire, qui se trouve partout, et le blanc, de la même grandeur que le premier et qui a la voix à peu près la même ; mais on ne le trouve qu’à Cyllène, en Arcadie, et nulle part ailleurs. (Hist. anim ., liv. 9, ch. 19). » Ce qui veut dire très-probablement que le naturaliste grec avait eu connaissance de quelques captures de Merles blancs à Cyllène, où peut-être cette variété s’était reproduite quelque temps, et que ne connaissant pas d’autres localités où pareille chose soit arrivée, il en avait conclu que c’était une espèce particulière à cette contrée. Le respect profond que toutes les écoles eurent si longtemps pour la parole du maître ne permettait pas de révoquer en — 3 — doute cette assertion, et l’on comprend qu’un oiseau annoncé comme ne se trouvant que sur un seul point de la Grèce dut passer pour infiniment rare. Ce ne fut qu’au seizième siècle que Bélon se permit de prendre Aristote à partie. Après l’avoir cité textuellement, il ajoute : « Aristote parlant de telle assurance se faisait fort des récits de gens du pays , mais nous croyons que si Alexandre eut aussi bien commandé en Savoie ou en Auver¬ gne, comme en Arcadie, et qu’ Aristote y eut envoyé ses oiseleurs, possible n’eut-il pas dit : nec usquam alibi nascens 5 car les paysans du pays lui eussent fait voir tout le contraire, s C’est très-bien dit, mais le bon Belon tombe lui-même ensuite dans une autre erreur : us renvoyons nos lecteurs au mémoire original qui ne tardera pas à être publié. LE COMITÉ FLAMAND DE FRANCE. Au nombre des sociétés savantes qui rendent à la science historique les services les plus signalés, il faut citer le Comité flamand de France. Ce Comité vient de publier le tome Xe de ses annales ; 5 cette occasion nous voudrions jeter un coup — 53 •= d’œil sur l’ensemble de ses travaux. Cette revue rétrospective offrira d’utiles enseignements à toutes les sociétés savantes et à tous les érudits. La création du Comité est due à l’initiative du savant membre de l’Institut qui a été le restaurateur des études flamengantes dans notre contrée, M. E. de Coussemaker. Connaissant, par ses travaux et ses goûts personnels, tout ce qu’il y a d’important, de curieux et de poétique dans l’his¬ toire de la Flandre maritime et aussi tout ce qu’il y a de patriotisme local et d’aptitude pour les travaux historiques dans la population flamande de la France, il n’hésita point, malgré l’existence de plusieurs autres sociétés savantes, à former une association historique pour toute la contrée. Le 10 avril 1853, à Dunkerque, où il exerçait alors les fonctions de juge au tribunal civil, il réunit quelques érudits, et leur communiqua les statuts du nouveau Comité ; il y était déclaré que ce Comité avait pour but « l’étude de la littérature fla¬ mande, la recherche et la conservation des documents histo¬ riques et littéraires en langue flamande. i> Un programme fut imprimé et répandu principalement parmi les Flamands de la France : avant la fin de l’année quarante-quatre membres s’étaient engagés à payer une cotisation annuelle de cinq francs et à s’associer aux travaux du Comité. Depuis lors, le nombre des membres actifs s’est considérablement accru. Des sympathies précieuses arrivèrent de toutes parts : Jacob Grimm accepta la présidence honoraire, tandis que Franz Mone à Carlsruhe , Albertingk - Thym en Hollande , et Snellaert, le baron Kervyn de Lettenhove , le docteur de Ram, en Belgique, s'associèrent au Comité; Prudent Yan Duyse, de Garni, le prince des poètes flamands modernes, salua sa naissance dans une ode enthousiaste. Fonder l’œuvre n’était peut-être pas chose très- difficile dans une contrée comme la Flandre ; il fallait lui faire atteindre son but. Sous l’impulsion de son fondateur, elle y arriva par ses publications. A l’aide de la modique cotisation de ses souscripteurs, le Comité flamand a publié, depuis 1853, dix volumes d’Annales et cinq volumes de Bulletins, d’environ 450 pages chacun. Ces volumes ne sont point remplis de notices nécrologiques, de dissertations morales, de poèmes et de fables : l’on y rencontre des documents nombreux reproduits avec exactitude, d’importantes études historiques, de curieuses mentions. En 1860, dans un Rapport présenté au Congrès archéolo¬ gique de Dunkerque, M. Victor Derode offrait, dans les chiffres suivants, un résumé exact des sept premières années d’exis¬ tence du Comité flamand de France : « Cent quatre notices 5> ou mémoires plus ou moins étendus ont trouvé place dans * les publications du Comité, Numismatique 1, Commerce 2, » Géographie 3, Blason et Généalogie 6, Épigraphie 6, Sta- » tistique 7, Paléographie 7, Philologie 10, Bibliographie 11, » Biographie 12,',LUtérature 13, Histoire 16, Sujets divers 10 ; » en un mot, ajoutait le savant rapporteur, le Comité ras- » semble les matériaux pour l’œuvre capitale de la Monogra- 3> phie de la Flandre maritime. Il aime la contrée et pratique » le culte des souvenirs. Il cherche avec un pieux empresse- » ment chacun des traits de cette physionomie si chère qu’il 3> voudrait reconstituer. Il s’efforce de fixer chacun de ceux 3> qu’il peut constater ; il se met en quête de tout ce qui peut » aider à déterminer cet ensemble curieux, et trop peu 3> connu. >3 Depuis 1860 jusqu’aujourd’hui, le Comité flamand a con¬ tinué de publier, avec non moins d’activité, des travaux his¬ toriques de plus en plus importants. Tous les érudits de la contrée lui ont apporté leur concours. M. Derode lui a con¬ sacré les derniers écrits sortis de sa plume féconde : Un Projet d'études pour la monographie de la Flandre maritime , les Ancêtres des Flamands de France , et les Rôles des dépenses de la maison de Bourgogne ; le docteur de Smyttère, à qui 55 — une province toute française ne peut faire oublier sa ville natale, a envoyé d’Auxerre une Notice historique sur les armoiries, scels et bannières de la ville de Cassel , de sa cour , de sa châtellenie et de ses seigneurs, ainsi qu’un Mémoire sur l'apanage de Robert de Cassel. Ce dernier personnage a été, de la part de M. Carlier, l’objet d’une étude remarquable, suivie de pièces justificatives qui offrent un véritable cartu- laire de l’administration de ce riche et puissant seigneur ; outre ces recherches sur Robert de Cassel , seigneur de Dunkerque , Cassel , Nieppe , Warneton. Gravelines , Rourbourg , M. Carlier a fait paraître dans les Annales des mémoires sur Y Origine des foires et des marchés publics en Flandre , sur les Souvenirs de Saint-Thomas de Cantorbéry qui existent dans la contrée, sur les Maisons de l’ordre des Trinitaires en Flandre, sur la Famille Faulconnier et les grands-baillis de Dunkerque. Le même recueil a reçu et publié une note de M. Deschamps de Pas , sur YOverdrach , machine de traction pour les bateaux employés dans la Flandre, une reproduc¬ tion, avec traduction sommaire, d’un passage du Spiegel Historael , par M. l’abbé Carnel, un travail de M. Courtois sur l’origine du mot Ruthen , de M. Van der Straeten une Notice sur Liévin Van der Cruice , de M. Jules Cordonnier une autre notice sur la chapelle et commanderie de Saint -Antoine- le z- Bailleul , de M. le marquis de Queux de Saint--IIilaire les Fabulistes Flamands et Hollandais antérieurs au XVIIIe siècle , de M David un Relevé du personnel des maisons reli¬ gieuses du district de Ber gués, et de M H Dufeutrel des Notes sur Steenvoorde et le couvent de Notre-Dame des Sept Fontaines • M. Bonvarlet, outre ses Notes sur la commune de Pitgam, a fait paraître dans les Annales YÉpigraphie des Flamands de France, recueil d’un nombre considérable d’inscriptions très-impor¬ tant et très-curieux pour les familles et l’histoire de la con¬ trée ; une introduction et des planches accompagnent ce travail. Le successeur de M. Le Glay, M. Desplanque, avait # - 56 - compris que, pour bien connaître les origines historiques de la contrée, il devait suivre avec soin les travaux du Comité flamand, et il avait accepté les fonctions de secrétaire de cette compagnie ; il a publié plusieurs mémoires dans les Annales • Des remaniements qu'a subis la province belge des Carmes durant les guerres de Louis XIV ; les Troubles de la châtellenie de Cassel et les Recherches sur l’abbaye de Capelle en Calaisis. Portant un nom qui oblige, M. de la Roière, a prouvé qu’il ne dégénère point, par ses études sur le Sinus ltius et sur la Nécessité de maintenir V enseignement de la langue flamande dans les arrondissements de Dunkerque et d’Haze- brouck. Enfin, le fondateur et l’âme du Comité, M E. de Coussemaker lui a fourni, entre autres travaux, des notices sur Y Hôpital Saint-Jean et les Lépreux de Bour bourg, sur les Lépreux de Ber gués, sur les Archives de l’abbaye de Bourbourg, sur Y Abbaye de Ravensberg,e u y ajoutant des pièces justifica¬ tives qui sont les cartulaires ou les inventaires d’archives de ces institutions ; il a publié Y Analyse du carlulaire de Saint- Bertin et un Rapport et dénombrement des villes et châtellenies de Dunkerque , Bourbourg et Warneton ; c’est à lui aussi qu’est due la reproduction des Procès-verbaux , cahiers de * r doléance et autres documents sur les Elections des Etats-Géné¬ raux de 1789 dans la Flandre maritime Nous n’analyserons pas les cinq volumes des Bulletins , dans lesquels l’on trouve non -seulement les procès-verbaux des séances, mais un grand nombre de notes, de mentions, de courtes notices biographiques : nous avons assez fait com¬ prendre l’importance du Comité flamand. Si l’exemple qu’il offre était suivi dans toute la France, l’histoire locale serait sérieusement connue ; il serait bientôt possible d'écrire une histoire générale de la France. CHRONIQUE. Fouilles archéologiques à Bonfines. — Des fouilles faites à Bouvines , en 1870 et 1871, par M. Rigaux fils , lui ont permis de retrouver la trace des Gaulois , des Gallo-Romains et des Francs* Mérovingiens. Nous citerons : Pour l’époque gauloise, de nombreux débris de poteries recueillis principalement dans un fossé qui parait antique; un peson de fuseau en terre cuite ; quelques fibules et une pointe de javelot en fer ; plusieurs monnaies des Nerviens. Les débris de poteries sont très-curieux pour l’étude de la céramique anté- romaine et quelques-uns ne manquent pas d’une certaine élégance. Plusieurs présentent des trous de suspension ou des bourrelets saillants dans la pâte , un fond de vase est percé de quatre trous ; beaucoup sont ornés de dessins faits avec l’ongle ou l’extrémité des doigts. Pour l’époque gallo-romaine, quelques pans de murailles en partie croulées; un puits; des outils de maçon; une clef; des monnaies de cuivre depuis Auguste jusqu’aux successeurs de Constantin ; quelques fibules et boutons en cuivre; des quantités de poteries et de tuiles brisées; des fragments de vases avec l’estampille des potiers, deux épin¬ gles en os, des cornes de cerf sciées et des ossements entaillés. Pour l’époque mérovingienne, plus de 150 sépultures; des haches; des lances; des sabres; plusieuis umbos de bou¬ cliers ; une épée ; un angon de 1 111 15 de longueur ; quelques fers de javelot; des perles de colliers , des fibules et des boucles de ceinturon en cuivre ou en fer ; des ciseaux en fer; des coupes en verre; des vases en terre agrémentés d’ornements en creux produits au moyen d'une estampille. Malheureusement trois sépultures seulement étaient in¬ tactes, toutes les autres avaient été volées à une époque — 58 — reculée. Nous ajouterons à ces trois époques une quatrième qui n’a pu être déterminée. Elle n'a fourni que des sépul¬ tures, sans le moindre objet d’industrie humaine. Ces sépul¬ tures se trouvaient soit au-dessus, soit même dans les sépultures mérovingiennes employées à cet effet. Nous mentionnerons enfin des éclats de bombes qu’on prétend provenir d’un combat livré à l’époque des Cent- Jours. Des boulets ont été déterrés à peu de distance. Ces fouilles ont duré plusieurs mois. Bien qu’elles aient été sujettes à de trop nombreuses déceptions, elles ont du moins, comme dédommagement, fourni de précieuses indi¬ cations pour la topographie antique de l’arrondissement de Lille. C’est là d’ailleurs ce qui fait l'intérêt d’une fouille; ce que l’on cherche en terre, ce n’est pas tant un objet antique, qu’un renseignement qui permette de reconstituer l’histoire des époques disparues. M. Rigaux est redevable de cette découverte aux bienveil¬ lantes communications de M. Lefebvre, rédacteur du Propa¬ gateur ■, et de M. l’abbé Bogie. Nous donnerons prochainement le résultat des fouilles de 1872, qui ont été terminées dans le courant de ce mois. £lodea canatSensis dans le nord de la France — Au mois de décembre dernier, j’ai trouvé dans la Scarpe, en aval de Douai, entre cette ville et Raches et au-delà, une très-grande quantité d 'Elodea canadensis. Il y a quelques jours, j’ai revu cette Hydrocharidée en abondance dans un fossé des fortifications de Douai. Son introduction dans le département du Nord, qui jusqu’ici, je crois, n’avait pas encore été signalée peut être regardée comme certaine. Le botaniste belge F. Crépin, dans une notice publiée en 1862 dans les bulletins de la Société royale de botanique de Belgique, nous donne la date de l'introduction en Europe de VElodea. « Il paraît avoir été remarqué pour la première « 59 - fois en Europe, dit-il, vers 1836, par un jardinier du nom de John New, dans une pièce d’eau à Warrington (Irlande), où des plantes exotiques étaient cultivées. » En 1816, M. Johnston signale son apparition en Écosse, de là il passa en Angleterre, et en 1862 M. Crépin indique qu’il en a trouvé en quantité énorme aux environs de Gand et exprime la crainte qu’il n’arrive à étouffer toute autre végétation et à obstruer les cours d’eau. « C’est avec peine, dit l’auteur de la Flore de Belgique, que je signale l’apparition dans nos eaux de cette funeste hydrocharidée. » VElodea canadensis est peut-être la plante aquatique dont le développement est le plus rapide. Il est presque exclusi¬ vement cultivé dans les aquariums d’appartement dans lesquels il végète, en toute saison même lorsqu’il ne reçoit qu’une lumière très-faible. Cette faculté de pouvoir vivre dans une demi-obscurité explique comment cette plante, introduite dans un fossé même rempli de végétation, s’y développe à coup sûr et sa croissance rapide fait qu’elle arrive très-vile à étouffer la végétation primitive. C’est ainsi qu’à Fontainebleau dans la Mare aux fées , VElodea est main¬ tenant la seule plante aquatique qu’on puisse trouver. Dans les fortifications de Douai, elle a été certainement introduite par les eaux de la Scarpe qui ont couvert les bas-fonds en 1870, lors de l’inondation faite en vue de la défense delà place, car je puis affirmer que le fossé dans lequel elle existe maintenant en très-grande abondance n’en contenait pas avant cette époque. Quant à son introduction dans la Scarpe elle-même, elle paraît plus ancienne. M. Crépin, dans la notice précédemment citée, nous montre cette plante remontant l’Escaut. Il est probable qu’elle a passé ainsi dans la Scarpe où elle existe maintenant sur les deux rives en très-grande abondance. Edmond Gosselin, Ingénieur des arts et manufactures. - 60 - Météorologie. Février Février 1872. année moyenne Température atmosphér. moyenne. 6? 74 3? 05 — — des maxima. 9? 75 — — des minima. 3° 73 . — exlr. maxima, le 9. 13? 7 — — minima, le28. — 1? 6 Baromètre, hauteur moyenne à 0°. 758m™109 760m™379 — — extr. max. le 22. 766^94 — — — min. le 26. 749mm22 Tension moy. de la vap. atmosph. 5mlu77 4m™88 Humidité relative moyenne %• • 81,8 . 83,9 Épaisseur de la couche de pluie. . 30mm42 43mmÜ7 — — d’eau évap. 25m™ 81 20m“82 La tempéralure de février fut très-douce, la moyenne fut plus que double de la moyenne générale. Il n’y eut qu’un seul jour de gelée, et quatre de gelée blanche. Les vents régnants ont été le S. (10 jours), le S -E. (8 jours), le S.-O. (7 jours) : leur intensité a généralement dépassé la moyenne. Quoique les brouillards aient été presque permanents, l’air fut relativement peu humide; aussi, malgré les 16 jours de rosée, Tépaisseur de la couche d’eau évaporée fût-elle de 25m™ 81 , tandis qu’elle n’est ordinairement que de20ITlIU82. Les couches supérieures de l’atmosphère assez chargées de vapeurs, comme l’indiquèrent la dépression barométrique, la nébulosité du ciel, les hélos au nombre de 4, et la fré¬ quence de la pluie (19 jours) ne donnèrent lieu qu’à une faible condensation, 30m“ 42 (43°T07 année moyenne). Malgré l’état électrique de l’atmosphère, il n’y eut ni neige, ni grêle, ni éclairs, ce qu’on observe souvent en février. Sous l’influence de ces conditions météoriques, la végéta¬ tion ne tarda pas à se réveiller de son sommeil hivernal, et donna des signes d’une précocité qu’on observe rarement. La constitution médicale a été généralement bonne et le typhus des bêtes bovines paraît être en décroissance. Hache en bronze à Lille. — On vient d’entamer pour les fondât ons d’une maison rue Beauharnais une couche de tourbe de 1 m 50 d’épaisseur sous 1 mètre environ de terres rapportées Vers la partie inférieure de la tourbe on a rencontré une hache en bronze. La tourbe repose sur un sable calcarifère rempli de coquilles fluviatiles C est le lit d’un an¬ cien cours d’eau qui persista en se déplaçant pendant la durée de la formation de la tourbe , car au milieu de celle-ci on trouve des lambeaux de sable comparables aux précédents. La hache a été donnée au musée de la ville par M. Snoutzen. Lille, lmp. Six-Horemans. 72-196 4e Année. — N° 4. — Avril 1872. LES CHATELAINS DE DOUAI AU XIe SIÈCLE (a). Quand les comtés de Flandre et de Hainaut se trouvèrent constitués , le principe d’hérédité tendit à s’emparer de tous les offices inférieurs. On se succéda , de père en fils , dans la garde des pagi secondaires comme dans celle des grands pagi ou comtés . Chaque centre de population avait son castrum qui dominait le territoire environnant. Peu à peu, le château donna son nom à la châtellenie. De leur côté, les anciens vicomtes , ou vicaires du comte, prirent le titre de châtelains.' Ce n’est guère qu’à partir du XIe siècle que l’on voit ces per¬ sonnages féodaux se dessiner avec leur physionomie indi¬ viduelle. Si, encore à cette époque, la chronique se tait trop souvent sur leur compte , on peut suppléer à son silence par des chartes émanées d’eux ou qui s’y rapportent. Les châtelains de Douai n’ont pas eu jusqu’ici d’historien. Nous croyons qu’ils n’ont rien perdu pour attendre : car nous connaissons un investigateur, plein de zèle et de sagacité, qui se livre sur eux à de longues et patientes recherches. — Nous permettra-t-il de lui soumettre, sur les premiers châtelains de sa ville natale , quelques vues dont il appréciera mieux que nous le degré de justesse et de nouveauté (1)? Elles nous ont été suggérées par un examen consciencieux des documents de l’époque. I. Nous commençons notre liste des châtelains de Douai au a XD siècle , par Hugues Ier l’Ancien (2). Hugues l’ancien est sans doute le Hugo castellanus qui (a) Quelques jours avant sa mort, M. Desplanque mettait la dernière main à ses Recherches sur les châtelains de Douai au XI' siècle, qu’il destinait au Bulletin Nous sommes heureux de pouvoir faire protiler nos lecteurs de la collaboration posthume de l’érudit qui s'est occupe avec tant de zèle de notre publication. — 62 — souscrit, en 1024, à la donation faite par le comte de Flandre Bauduin IV « au glorieux tombeau de Saint-Amé. (3) t> Sous Henri Ier, roi de France (1031-1060) , il intervient , comme châtelain de Douai et comme avoué majeur de Saint-Amé , dans un acte par lequel dix hommes et femmes se constituent censitaires de cette dernière église. Un de ses chevaliers ser¬ vants , Witselims , apparaît en ce même acte, comme sous- avoué de l’insigne collégiale (4)* Entre 1036 et 1060, « Bau¬ duin V se trouvant à Douai, » un châtelain nommé Hugues (le nôtre apparemment) appose son nom au bas d’un diplôme de ce comte (5). Dans les énumérations ultérieures des possessions de Saint- Amé, il est souvent parlé de biens ayant appartenu au châte¬ lain de Douai Hugues et à son épouse Adeluïa ou Adeloïa (Adèle). Ces biens se composent de deux moitiés d’aleux , sises l’une à Hunlin ou Huvlin , qu’on croit être Houvin (6); l’autre à Fins (7), dans l’ancien Cambrésis (8). Il ne nous semble pas douteux que les aïeux dits du châtelain Hugues ne doivent leur nom à Hugues l’ancien (9) , et nous arrivons ainsi à savoir comment s’appelait son épouse. Hugues Ier et Adèle paraissent avoir eu deux fils : 1° Gau¬ tier Ier qui, comme héritier de la châtellenie de Douai, obtiendra tout à l’heure un article biographique assez éten¬ du ; 2° Hugues II, à qui nous allons immédiatement consacrer quelques lignes. Hugues II , ou , pour mieux dire , Hugues le jeune ( car il n’a point rang sur la liste des châtelains de Douai (10J , est mentionné comme frère de Gautier Ier, dans au moins quatre chartes d’une authenticité irrécusable (11). L’acte principal qui le concerne le représente comme propriétaire des aïeux de Hugues l’ancien. Ces aïeux, il les possède par droit héré¬ ditaire , lier editario jure patris atque matris , et il les vend à Gautier Ier avec d’autres biens qu’il avait également reçus de ses parents, c’est à savoir : — 63 — Le quart du village de la Comté (12); Le huitième du village d’Auchel (13); La moitié du village de Frévillers (14J; La moitié du village de Maisnil , dans le territoire d’Aubi- gny (15). Cet ensemble de possessions formait tout ou partie de l’apanage de Hugues le jeune. Il s’en dépouille du consente¬ ment de sa femme Adrienne et de leur fils Simon (16). En quelle circonstance ? C’est ce qui nous reste à examiner pour épuiser nos renseignements sur ce personnage moins connu peut-être qu’il ne mérite de l’être. L’acte inédit que nous alléguons rapporte que Hugues, époux d’Adrienne , vendit à son frère les biens précités t masqué alors par la fonction d’assimilation. Pendant le jour ces organes ne laissent pas échapper l’acide carbonique qui se trouve dans leur sphère d’activité, au moins lorsque la lumière est assez vive. La chlorophylle fixe à son tour et décompose l’acide produit par la respiration avant qu'il ne s'échappe au dehors de la plante . Ces faits ont déjà été énoncés dans quelques ouvrages, (1) Sur 100 parties d’air en volume, ce rameau en avait absorbé 20,36. MM. Dumas et Boussingauit, par des analyses précises, ont trouvé dans l’air 20,90 pour cent d’oxigène. — 78 — mais ils avaient besoin pour prendre place dans la Science, d’une consécration expérimentale. M. C. a fait encore d’autres expériences sur la manière dont les feuilles se comportent lorsqu’on les confine dans différents gaz. Enfin il démontre aussi que la fonction d’assimilation de ces organes est indépendante de celle de la respiration, car la première peut s’effectuer dans un milieu privé d’oxigène. CHRONIQUE. ItldéoB^logie. Mars 1872. Mars année moyenne Température atmosphér. moyenne. 70 41 5? 45 — — des maxima. 11° 04 — — des minima. 3? 78 — exlr. maxima, le 29. 18? 3 — — minima, le 24. — 2? 2 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 756T1 591 758mm 566 — — extr. max. le 4. 769mm 17 — — — min. le 30. 744mm 33 Tension moy. de la vap. atuiosph. 6mm 14 5mm 35 Humidité relative moyenne %• • 78,5 77,7 Épaisseur de la couche de pluie. . 56m™ 88 45mm 85 — d’eau évap. 48 mm 32 40 mm 32 Les 56™m88 d’eau météorique comprennent 37'?m52 d’eau de pluie, 1 7ni™ 66 d’eau de neige, 1 miy 70 d’eau de grêle . Le nom¬ bre des jours de neige fat de 6, et comme souvent ce météore fut accompagné de pluie et de grêle, à une température au- dessus de zéro, la neige fondit au furet à mesure de sa chute. Cependant le 22 au matin les champs en étaient couverts d’une couche assez épaisse qui ne disparut que vers midi. L’air fut très-fréquemment chargé d'électricité, et les 18 et 21 des orages éclatèrent dans différentes localités du département. Le mois de mars fut plus chaud que le mois correspondant d’une année moyenne. Cela tient surtout à la faible nébulosité du ciel et à la direction des vents régnants (S. E. 10 jours ; S. 0. 7 jours). — 79 — Sous l’influence de ces vents chauds Y air fut plus humide qu’en année moyenne , mais néanmoins l’épaisseur de la couche d’eau évaporée fut plus grande parce que ce météore fut surtout influencé par l’élévation de la température. Le 12 il y eut un halo solaire et le 27 un halo lunaire, tous deux suivis de pluie dans les vingt-quatre heures. Les pluies furent assez fréquentes (14 jours) mais peu abondantes et toujours intermittentes. L’humidité de l’air donne lieu par la condensation noc¬ turne à 19 rosées qui, sous l’influence du rayonnement favo¬ risé par la sérénité des nuits-, constituèrent sept fois des gelées blanches. Les gelées des 21, 22, 23, 24 et 25 furent fatales aux abri¬ cotiers et aux pruniers en pleine floraison, mais ne causèrent que peu de dommages aux pêchers en espaliers et aux poi¬ riers dont les fleurs n’étaient pas encore épanouies, malgré l’état avancé de la végétation. V. Meurein. Société «lunkes'ciuoBse. — Dans la séance du 1er mars 1872, M. Cousin, président, rappelle que dans les premières années de l’établissement de la Société Dunkerquoise , elle recevait des autographes d’hommes illustres ou de savants éminents, ainsi que des documents relatifs à l’histoire soit de Dunkerque, soit de la Flandre maritime et qu’il est très- regrettable qu’on n’en envoyé plus, il est persuadé qu'il en reste encore beaucoup tant en ville que dans les environs et il est bien à désirer qu’ils soient offerts également a tin d’être conservés au pays, il propose donc de faire de nouvebes ins¬ tances à cet effet et afin de donner lui-même l’exemple, il dépose sur le bureau six imprimés qui tous concernent Dun¬ kerque (ordonnances royales, arrêts du conseil d’État et ré¬ glement pour l’établissement de gardes de nuit et afin d'em¬ pêcher les vols et la contrebande). Cette proposition est adoptée. M. le président donne lecture de la suite de son travail — un itinéraire au Xe siècle Les chemins cités comme ayant été parcourus en 944 , dans le voyage de Boulogne à Gand , se 80 trouvent dans l’arrondissement de Dunkerque depuis Saint- Georges près de Gravelines jusqu’à la frontière de la Belgique. Cette seconde partie du travail est écoutée avec encore plus d’intérêt que la première qui concernait le Boulonnais et le Calaisis. M. Alard est prié de continuer la lecture qu’il avait aussi commencée sur les Indiens du cap Flastery à l’entrée du dé¬ troit de Fouca (États-Unis). Congrès international d'anthropologie et d’ar-* rhéologie préhistorique. — Ce congrès va s’ouvrir à Bruxelles, le 22 Août prochain, sous la présidence de M. d’Omalius d’Halloy. Il a été fondé en 18G5 pour déve¬ lopper les études sur les origines de l'humanité et les pre¬ mières pages de 1 histoire , en rapprochant ceux qui s’en occupent. Il se tient tous les ans dans des pays différents ; ses sessions précédentes ont eu lieu à Neuchâtel, Paris, Norwich, Copenhague et Bologne. La proximité de Bruxelles permettra à nos concitoyens de se rendre à une réunion où ils rencontreront des savants illustres de toutes les nations. Du reste les découvertes anté- historiques se multiplient dans les environs. Nul doute que plus le goût de ces recherches se répandra, plus on trouvera de faits nouveaux ; et notre département qui était en retard sous ce rapport arrivera à fournir son contingent à la science. Dans ce but, M. le professeur Gosselet fait tous les mer¬ credis. à cinq heures, à la Faculté des sciences, un cours sur les antiquités préhistoriques et sur les premiers âges de l’humanité; c’est une excellente introduction au Congrès. Rouvrîtes. — Nous sommes heureux d’annoncer à nos lecteurs que M. Th. Louise, ancien professeur des classes supérieures au collège de Valenciennes, auteur de la Sorcel¬ lerie et la justice criminelle à Valenciennes (XVIe et XVIIe siècles), prépare une nouvelle édition de son ouvrage. Entre autres documents nombreux et inédits où il a puisé, nous citerons un registre reposant dans la salle des archives ecclésiastiques du Nord et ayant pour titre : Statuts de Cileaux ; visite des monastères de l’ordre, duquel ont été extraits plusieurs passages très-intéressants. Lille, lmp. Six-Horemaus. 72*196 4e Année. — N° 5. — Mai 1872. LES CHATELAINS DE DOUAI AU XIe SIÈCLE. (suite.) IL Venons à Gautier Ier, troisième et dernier objet de cette étude. Gautier Ier est témoin , avec son frère Hugues le jeune , en 1051, de l’acte par lequel un certain Robert prend à cens une terre de Saint-Amé, sise à Loos, près Lens (20). Il avait, dès lors, succédé à Hugues l’ancien dans la châtellenie de Douai; car il s’intitule en propres termes : Walterus castellanus (21). En 1065, il souscrit à l’acte de restauration de l’abbaye d’Hasnon par Bauduin de Mons , comte de Hainaut , et à la confirmation de cet acte par Philippe Ier, roi de France (22). L’année suivante, nous le retrouvons avec son frère à la dédi¬ cace de l'église Saint-Pierre de Lille (23), où l’on avait apporté la châsse de Saint-Amé. Ce même jour et en considération du déplacement d’une aussi précieuse relique , il détermine la » comtesse Adèle, épouse de Bauduin V, à exempter de tout droit d'avouerie la terre d’J Éverlmghem (24), appartenant à la prévôté de Saint-Amé (25). En juillet 1071, il assiste à l’inhumation de Bauduin de Mons dans l’abbaye d’Hasnon, et aux dons faits, en conséquence, à ce monastère, par Arnould III, comte de Flandre (26). En 1072, il se trouve à Saint-Bertin le jour où Robert-le- Frison accorde sa protection au monastère de Watten (27); il souscrit aussi la charte de DrogoD, évêque de Térouane, en faveur de ce dernier établissement (28). C’est l'année suivante qu’il acquiert la part d’immeubles et de revenus qu’aliène son frère Hugues : il abandonne ce lot de biens au chapitre de Saint-Amé (29). Le même châtelain fait remise aux chanoines d’un muid de vin , auquel il avait droit à chaque mutation de prébendes ; il leur donne le mou- — 82 — lin de Talvoy à Douai , ainsi que la dîme de Bouvines-en- Pévèle ; il enrichit la trésorerie de leur église et, « pour en aug¬ menter le luminaire, » il leur attribue le fonds de la bergerie de Ghyvelde dans la châtellenie de Bergues (30). Nous avons des détails sur le cérémonial qui accompagna cette dernière donation. Gautier se transporta à Ghyvelde avec sa femme Ermengarde et un nombreux cortège de clercs et de laïcs, tous montés à cheval : le corps de Saint-Amé fut amené sur le terrain de la bergerie comme pour en prendre possession par lui-même. Le donateur se dévêtit de ce terrain, du con¬ sentement de son suzerain Robert-le-Frison, en présence des juges et échevins du pays de Flandre , ainsi que des gens qu’il avait amenés de Douai , parmi lesquels on remarque le prévôt , le chantre et le trésorier de Saint-Amé , Sohier de Loos, de la famille des seigneurs deLens, Gautier, fils d’Ursion, etc. (31) Tout cela se passait avant la fin de l’année 1076, époque où Gautier Ier fit confirmer les possessions et privilèges de Saint- Amé par Philippe Ier et Roberl-le-Frison. Deux ans plus tard, en 1078 , il fit de nouveau preuve de libéralité envers la collégiale et de piété envers les saints, en faisant sculpter la nouvelle châsse de marbre dans laquelle furent transférées les reliques de Saint-Amé (32). Ce Gautier Ier, que nous venons de voir si dévoué, en toute circonstance, aux intérêts de l’église, est-il bien le même que le Gautier de Douai [Walterus de Duaco) qui, frappé d’excom¬ munication par l’archevêque de Reims, alla implorer, en 1077, l’appui du Pape Grégoire VIL Nous ne répugnons pas à le croire. Peut-être Gautier de Douai pécha-t-il simplement par excès de zèle pour les privilèges du chapitre de Saint-Amé, privilèges nécessairement restrictifs de l’autorité diocésaine et métropolitaine. Peut-être sa faute (si faute il y a) avait-elle un lien avec celle du chanoine Azon dont il est parlé dans la même épître de Grégoire VII. Ce qu’on peut affirmer, c’est — 83 — que la soumission chrétienne dont Gautier fit preuve avant et depuis la promulgation de la sentence d’excommunication, c’est que l’absolution provisoire qu’il obtint du pape jusqu’à plus ample examen de sa cause par Gcolïroy de Boulogne , évêque de Paris , n’accusent pas, chez le sujet incriminé, un esprit rebelle au joug, ni trop récalcitrant — A ces signes nous croyons reconnaître notre châtelain. L’arme de l’excommuni¬ cation ne larda pas, du reste, à se retourner contre le prélat qui vraisemblablement en avait abusé à l’égard de Gautier Pr. En 1080, Grégoire VII sépara, de la communion des fidèles et déposa de son siège , Manassès, archevêque de Reims. La seule puissance séculière à qui le pape notifie celte sentence, afin d’en assurer l’exécution, est Ebles de Roucy, alors revenu de son expédition d’Espagne. Ebles fut, en plus d’une ren¬ contre, le bras droit de Grégoire Vil* et il semble avoir tour à tour entraîné dans sa sphère d’action les deux fils d’Hugues l’ancien. Manassès ne reprochait peut-être rien tant à Gau¬ tier Ier que de graviter à l'entour d’Ebles, champion résolu du Saint-Siège (33). Gautier Ie* termina sa carrière par un acte éclatant de foi et de renoncement. Il transféra la châtellenie de Douai à son fils Gautier II, l’un des héros de la première croisade et, se dépouillant des grandeurs humaines, il entra en religion. Son humilité le détourna sans doute de franchir les degrés du sacerdoce; car, en 1086, il figure , comme laïc , parmi les témoins de l’acte de donation de l’église Notre-Dame de Va¬ lenciennes à l’abbaye d’Hasnon. La qualification de voluntarie pauper s’ajoute a son nom au bas de cette pièce. Une autre fois, le 3 février 1096, il se trouve à Arras, dans l’abbaye de Saint-Vaast, et il souscrit, avec son frère Hugues, qui habitait Cambrai, la charte par laquelle Robert II, comte de Flandre, restitue aux chanoines de Saint-Martin-de-Tours une rente de 10 livres sur la terre de Baralle en Cambrésis : S. Gautherii , prius castellani Duacensis, modo autem clerici. Gautier Ier vécut au moins dix ans (de 1086 à 1096) dans l’abbaye de Mont-Saint-Éloi, où il s’était voué au service de Dieu. C’étaient, on le voit, de zélés chevaliers du pape et de l’église que ces deux frères de Douai, dont l’un va combattre les infidèles au-delà des Pyrénées, dont l’autre, après avoir comblé de dons les serviteurs de Dieu , s’ensevelit pour de longues années , dans le cloître , laissant son pouvoir hérédi¬ taire à un fils qui se fera le compagnon de Godefroy de Bouil¬ lon, de Robert et de Bauduin de Jérusalem. . A. Desplanque. notes. (20) S. Walleri castellani , S. Hugonis , ejus fratris. Charte indiquée par M. Le Glay, Mèm. de la Soc. des Sc . de Douai, 2* série, t IV, p. 120. (21) A ce compte, les pièces mentionnées dans nos notes 3 et 5, et où Hugues-l'Ancien intervient, sont d’avant 1051. (22) S. Walleri, castellani Duacensis. Gallia christiana nova, t. III, instrum. col. 85. (23) S. Walteri duacensis; S. Hugonis , fratris ejus. Miræüs, 1. 111. p. 692. (24) Seigneurie d’Everlinghem à Herlies. (25) Quamvis Adela comitissa, comitis Roberli mater, Heverlengehen quæ ad Sancti-Amati Duacensis præposituram pertinet, toto vitæ suæ spacio, censu xx1' imor solidorum lenere deberet, tamen Walteri cas¬ tellani et plurimorum fidelium ammonicione, in dedicatione Hislensis ecclesiæ , sancto Amato illuc delato, reddidit integram et ab omni advocatiæ jugo absolutam. Cartul. de Saint-Amé , f° 20 v°, n°2T— Le fait est rappelé, en 1076, dans la confirmation des biens de Saint-Amé par Robert-le-Frison, et, en 1081, dans la charte de Gérard II pour le même établissement. (26) 5. Walteri Duacensis. Gall. christ, nov. t. III, instrum. col. 86. (27) Waltero de Duaco. Miræüs, t. II, p. 1131. (28) Waltero de Duaco. Charte indiquée par M. De Coüssemaker, Documents relatifs à la Flandre maritime , p. 43. (29) Voir ci-dessus, notes 16 et 19. (30) Modium vini quem habebat Duacensis castellanus nomine Gual- terus in prescripli sancti prebendarum mulatione reddidit ecclesie. Qui vero in Bergensi terrilorio apud villam que vocatur Gunevelt prefato sancto dédit terram dimidiam bercarie et parum plus. Item, in Peule, décimant ville que appelatur Bovinies et in Duaco libéré molendinum Tollevie. Le Glay, Revue de Miræüs, p. 125. — Cf. Champollion-Figeac, t. III, p. 446. (31) Walterus castellanus, satis non incredulus, cum sancti Amati Duacensern æcclesiam pluribus ornamentis honestissime decorasset, addens bénéficia beneficiis, lerram suæ bercariæ villæ nomine Wime- velt [in] aumentum scilicet luminarium a se datorum Deo el sancto Amato dare vovit. Quod votum ut persolveret, cum uxore sua et multo equitatu clericorum et laïcorum, ad supradictam tcrram sancti corpore feretro deportato perrexit, et, concedenle terræ ejus comité Rotberto ac favente, immo simul tradente uxore suaErmengardi, dictæ bercariæ terram sancti Amati præsentiæ légitimé tradidit coram judicibus et ejusdem regionis scabinis, atque aliis autenticis personis, hiis videlicet quorum hic nomina suscribuntur: ....ecce nomina flandrensium. Dua- censium vero clericorum sunt hæc : Raimarus præpositus, Péraldus cantor, Bertuinus thesaurarius . Laïcorum autem nomina sunt hæc : Walterus, Ursionis filius, Sohierus de Lohes, etc. Hæc autem traditio et confirmatio facta est anno M sexagesimo septimo ab incarnatione Domini in festivitate sanctæ Crucis die scilicet ter-tia transitus ejusdem sancti Amati, vivente septimo papa Gregorio, Manasse, Remensi archie- piscopo, Gerardo, Cameracensi episcopo, régnante rege Philippo. — Charte indiquée par M. Le Glay, Mèm. de la Soc. des Sc. de Douai, 2° série, t. IV, p. 120. — Il est à remarquer que la date d’année de cette pièce, dont au surplus nous ne possédons qu’un projet, ou copie du temps, sur une bande longue en parchemin, est nécessairement fau¬ tive. En effet, Grégoire VII n’est monté sur le trône pontifical qu’en 1073, et Gérard II n’a obtenu l’évêché de Cambrai qu’en 1076. Nous croyons donc qu’une distraction du scribe l’a porté à écrire MLXVII au lieu de MLXXVI. La fête de la Sainte-Croix, dont on parle ici, est celle de l’Exaltation qui se célèbre le 14 septembre : elle venait, non pas le troisième jour après l’anniversaire de la mort de saint Amé, mais bien le lendemain. — Le sol de la bergerie, donné à la collégiale par Gau¬ tier 1er, figure dans l’énumération des biens de cet établissement par Robert-le-Frison, en 1076. Il faut en conclure : 1° que la donation de ladite bergerie, si elle n’a pu avoir lieu avant le 14 septembre 1076, a bien été effectuée ce jour et cette année-là ; 2° que la charte de Robert- le-Frison, qui ne porte point de date de jour ni de mois, mais où est rappelée la donation en question, est postérieure au 14 septembre. — Quant au Wimevelt de l’acte de Gautier Ier, Gonnevelt ou Gunevelt, des chartes de Robert-le-Frison et de Gérard II, c’est, à n’en point douter, Ghyvelde, canton d’Hondschoote. (32) Voyez les extraits du Liber argenteus sancti Amati , publiés par Georges Colveneere et par les Bollandistes. (33) Nous signalerons pour mémoire seize passages des Domesday Book qui nous montrent un Gautier de Douai et un Walcin de Douai obtenant, comme compagnons de Guillaume-le-Conquérant, des do¬ maines importants en Angleterre. T. I, p. 82 ; t. II, p. 91 ; t. IV, p. 150, 151, 159, 329, 69, 70, 73, 324, 328, 467, 472, 484, 486. ESQUISSE GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD, ETC. (Suite). TERRAIN CARBONIFÈRE. Distribution géographique et division en assise. On a vu qu’à la fin de l’époque dévonienne, notre région était — 86 — divisée en deux bassins : le bassin de Namur entre le Bra¬ bant et le Condros,etle bassin de Dinant entre la bande silu¬ rienne du Condros et l’Ardenne. Le bassin de Dinant était subdivisé en deux sous-bassins : celui de la Sambre et celui de la Meuse. Sons-bassin occidental ou de la Sambre. Le calcaire carbo¬ nifère remplit dans cette région les plis du terrain dévonien ; il y constitue une série de petits bassins ou bandes parallèles dirigées approximativement de PE. à PO., rétrécies vers la Fagne, et s’élargissant vers la Sambre, avant de s’enfoncer sous le terrain crétacé. On peut réunir ces diverses bandes en deux massifs dont la constitution est un peu différente, le ' massif d’Avesnes et celui de Berlaimont. Massif d'Avesnes. Il est formé par les bandes d’Etrœungt, d’Avesnes, deMarbaix, de Dompierre. La bande d’Etrœungt, visible dans le bourg, est cachée presque dès sa naissance par le terrain crétacé. Il ne faut pas la confondre avec le calcaire d’Etrœungt que nous avons placé dans le terrain dévonien. La bande d’Avesnes se montre à PE. sur le territoire de Sémeries, où elle est réduite à sa partie inférieure ; elle se dirige vers Avesnelles; puis une faille la rejette vers le N. et on la voit apparaître dans la fortification d’Avesnes, le long du ruisseau de Gaudin et enfin dans la vallée de la petite Helpe, à Cartignies. La bande de Marbaix a sa terminaison orientale à PE. de St-Hilaire ; le chemin de fer y a ouvert une magnifique tran¬ chée ; puis on la voit sur les deux rives de la grande Helpe, au hameau des Ardennes, et enfin au S. du village de Marbaix. La bande de Dompierre s’étend du hameau du Fuschiau à St-Hilaire jusqu’à Marbaix; elle n’est séparée de la précé¬ dente que par une étroite bande de psammites. — 87 Les principales zones [que Ton distingue dans le calcaire carbonifère de ces diverses bandes sont : Calcaire d’Avesnelles, noir compacte, à cassure conchoïdale, exploité pour marbre, à Cartignies et à Avesnelles. Dans la fortification d’Avesnes il est mélangé de schistes. Ses prin¬ cipaux fossiles sont : Produclus Flemingii. Produclus Heberti. Chonetes variolaria. Rhynchonella pleurodon. Spirifer mosqucnsis. Chemnilzia Lefebvrei. Euomplxdlus œqualis. Serpularia serpula. M. Hébert (1) y a trouvé en outre quelques fossiles spé¬ ciaux jusque-là à l’Irlande : Gomphoceras fusiforme. Pecten Sowerbyi. Dolabra securiformis. Pecten Knockoniensis. Avicula flexuosa. Calcaire de Marbaix, calcaire sublamellaire, dit granité, formé de tiges d’encrines. On l’exploite comme pierre de taille à Marbaix et à Gaudin. Il est séparé du précédent par une couche de 5 à 10 mètres de schiste. Ses principaux fos¬ siles sont : Produclus semireticulatus. Orlhis crenislria. Leplœna rhomboidalis. Orlhis resupinala. Spirifer mosquensis. Phillipsia gemmulifera. Calcaire de Dompierre, bleu foncé, légèrement grenu et raide au toucher, criblé partout de cavités ou géodes. Il est employé comme pierre de taille, mais moins estimé que le précédent parce que les cavités dont il est rempli nuisent à ses emplois. C’est maintenant presque le seul qu’on exploite à Marbaix et à Dompierre. Ses géodes sont tapissées de cristaux de calcite et quelquefois contiennent du soufre. Les fossiles y sont rares. M. Dupont (2) cite : Produclus cora. Spirifer Iricornis. 4 (1) Bull. soc. géol., 2* série XII, p. 11*79. (2) Bull. Acad. Belg., 2* série XVII. Dolomie : elle n’a que peu d’épaisseur et n’a pas encore fourni de fossiles. Calcaire des Ardennes : Calcaire gris en bancs très-épais où la stratification n’est plus visible. Sa ténacité le fait rechercher pour l’empierrement des routes et pour le pave¬ ment des cours et des écuries. On l’exploite à Marbaix, au Baldaquin, aux Ardennes (hameau de Dompierre), à Saint - Hilaire. Le seul fossile abondant est : • * Produclus sublœvis. Calcaire et brèche de Saint-Hilaire : calcaire bleu foncé ou gris alternant avec des bancs de Dolomie. Il est telle¬ ment cassant qu’on l’emploie peu. Pas de fossiles connus. A la carrière du Rivage, commune de Saint-Hilaire, on voit entre les bancs des infiltrations d’argile rouge qui est employée comme bol pour faire de la couleur. Dans quelques points, le calcaire a été fendillé et les morceaux recollés par l’argile de manière à produire une brèche. Massif de Berlaimont. Il comprend les bandes de Bachant, de Beaufort, de Taisnières et de Sars-Poteries. La bande de Sars-Poteries qui ne s’étend que sur les deux communes de Sars-Poteries et de Lez-Fontaines est complè¬ tement isolée ; on ne doit pas lui rapporter toutes les carrières de Sars-Poteries, dont quelques-unes appartiennent au terrain dévonien (calcaire d’Étrœungt). La bande de Taisnières s’étend depuis Floursies à l’E. jusqu’à Taisnières et Noyelles. La bande de Beaufort n’est visible que par lambeaux de Beaufort à Sassegnies. Dans la vallée de la Sambre elle se soude à la suivante pour constituer une masse qui s’étend sans discontinuité de Pécluse du Pont du Bois jusqu’à Quartes. La bande de Bachant s’étend de Ferrière-la -Petite à — 89 — Baciiant, en passant par Limon-Fontaine. On voit au N. de ce village une excellente coupe qui fait connaître la struc¬ ture du massif de Berlaimont. Les différentes zones observées dans le calcaire carbonifère de ces bandes sont : Calcaire noir de Beaufort , correspondant à celui d’Aves- nelles. Il était jusqu’à présent inconnu dans le massif de Berlaimont; mais M. Dombret vient de l’y découvrir à la Marlière, hameau de Beaufort. Il est séparé de la zone sui¬ vante par une couche de schistes ; c’est exactement la meme position qu’à Avesnelles. Calcaire de St-Rémi-mal-Bâti, exploité à la Marlière, à St-Rémi-mal-Bâti, etc. C’est le môme que celui de Marbaix. Calcaire de Sachant , calcaire noir à grains fins, en bancs assez épais dans le bas, minces et schistoïdes à la partie supérieure, contenant un grand nombre de rognons de silex noirs nommés Phtanites. Il renferme de nombreux fossiles dont M. Brochet, de Landrecies, possède une belle collection. M. Dupont (l) cite : Naulilus sulcatus. Orthoccras munster ianum. Cyrthoceras Verneuilianum. Chemnitzia Lefebvrei. Nerita ampliata ? Serpularia serpula. Euomphalus cirroides. E. helicoides. E. œqualis. Bellerophon huilcus. B. btcarenus. Dentalium priscum. On l’exploite dans les grandes carrières de Bachant, à Levai et à Ferrière-la-Petite. Le calcaire noir à phtanites du massif de Berlaimont, cor¬ respond au calcaire géodique du massif d’ A vesnes, outre la position stratigraphique qui est la môme, on peut citer comme analogie les quelques silex que l’on rencontre dans le calcaire géodique à St-IIilaire, 5 Avesnes et môme à Marbaix. (l) Loc. cit. — 90 - On trouve souvent ces silex phtanites peu altérés, cassés, mais non roulés, empâtés dans de l’argile jaune diluvienne et remplissant des poches à la surface du calcaire. Ainsi vis- à-vis le château Raymont, à Ferrière-la-Petite, où le silex est criblé de cavités dues à des moules de tiges d’encrines. Dolomie. Pas de fossiles connus. Calcaire de la Garenne. Ce calcaire, bien que minéralo¬ giquement identique au calcaire gris du massif d’Avesnes, s’en distingue par l’absence presque complète du Produclus sublœvis ; par contre il renferme en abondance le Chonetes comoides et assez rarement le Produclus cora. Le type peut en être pris aux carrières de la Garenne, à Ferrière-la- Petite. Calcaire et brèche de St- Remi- Chaussée. Cette zone qui constitue la partie la plus élevée du massif de Berlaimont, est formée de calcaire compacte noir bleuâtre, ou blanc grisâtre, exploité sur les territoires de St-Remi-Chaussée, St-Aubin, Dourlers, Bachant, St-Remi-mal-bâti, Limon-Fontaine, Fer¬ rière-la-Petite, Sars-Poteries. Il contient des bancs de Dolomie, tantôt solide, tantôt pulvérulente, comme à St- Remi-mal-bâti et au hameau des Creuttes, à Taisnières. Il arrive fréquemment que le calcaire est traversé de filons rouges qui, par leur multiplicité, le font passer à la brèche. Cette dernière roche a été exploitée pour marbre à Dourlers, à St-Remi-Chaussée (hameau de la Queue-Noire-Jean), à Taisnières, etc. A Limon-Fontaine, on rencontre, à la base de la zône, d’après M. Dupont, un calcaire blanc ou rosé très-fossilifère. Il contient : Spirifer lineatus. Rhynchonella pugnus. Sp. glaber. Produclus undatus. Sp. duplicicosta. Pr. semireticulaius. Terebratula sacculus. - 91 — ESQUISSE HISTORIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD. 1ÎTAT SOCIAL ET POLITIQUE (suite). Époque féodale. — En 863, Bauduin-Bras-de-Fer obtint de Charles-le-Chauve , son beau-père , le titre de comte de Flandre , et, vers la même époque, Bégnier-au-long-Col fut reconnu comte du Hainaut Ce dernier comté comprenait le pagus Hainoensis et \epagus Fanomartensis dans le territoire actuel du département du Nord , et le comté de Flandre tout le reste du territoire, même le pagus Cameracensis qui forma un comté particulier en 879 et fut octroyé à l’évêque de cette ville en 1007 ; le comté de Hainaut , après avoir été réuni à la Flandre en 1067 et en 1091 , lui fut définitivement incor¬ poré en 1436 sous Philippe-le-Bon. Comme tous les autres pairs de France, le comte de Flandre dépendait du roi. Dans les premiers siècles il ne lui était uni que par les simples obligations féodales ; mais à partir de 1196, il lui fut attaché par l’hommage-lige qui lui imposait le devoir de suivre le roi à la guerre en tout temps ; après 1211 les liens furent de plus en plus étroits, puisque les vas¬ saux du comte et les communes prirent l’engagement de porter secours au roi si le comte violait ses serments ; les appels au parlement de Paris tendirent encore à développer la puissance du souverain, ainsi que la défense faite au comte de construire des places fortes en-deçà de l’Escaut. En 1304, le comté de Flandre perdit même les villes et châtellenies de Lille, Douai et Orchies qui furent réunies à la couronne; mais elles furent rétrocédées par Charles V en 1368, afin d’obtenir la main de Marguerite de Flandre pour Philippe-le-iïardi, frère du roi, et d’empêcher ainsi le mariage de cette unique héritière du comté avec le fils aîné du roi d’Angleterre. Quand l’alliance de Marie de Bourgogne avec Maximilien eut ajouté la Flandre à toutes les possessions de la maison • « — 92 - d’Espagne- Autriche , la souveraineté du roi de France ne cessa pas d’exister en principe ; mais en 1526, au traité de Madrid, François Ier renonça complètement à ce droit. Sans doute, il protesta plus tard et fit protester par le parlement contre cette renonciation; mais il la renouvela en 1529 au traité de Cambrai , et en 1544 au traité de Crépy. Malgré de nouvelles protestations , cet état de choses dura jusqu'à Louis XIV. Soumis au roi au point de vue de la souveraineté et des obligations féodales , les comtes de Flandre étaient indépen¬ dants dans leur administration. Ils jouissaient de la haute juridiction criminelle et de la connaissance des cas réservés au roi ; les baillis du souverain n’avaient aucun droit dans le comté ; plus tard cependant le roi parvint à obtenir de l’in¬ fluence au point de vue de l’administration de la justice , en s’efforçant de multiplier les appels au parlement de Paris. Parmi les autres droits du comte , nous devons citer ceux de déclarer la guerre , de battre monnaie , de faire grâce , de créer des communes et d’accorder des privilèges. Le souve¬ rain ne pouvait faire publier aucune ordonnance ou lever des taxes en Flandre sans l’assentiment du comte : mais il pouvait demander des aides aux États. Le comte ne pouvait être tra¬ duit devant la cour des pairs que pour défaut de droit ou déni de justice. La cour du comte rappelait celle du roi. Au nombre des grands officiers se trouvaient le chancelier , office donné à perpétuité au prévôt du chapitre de Saint-Donat de Bruges, et parfois au prévôt du chapitre Saint-Pierre de Lille ; le conné¬ table , dont les fonctions devinrent héréditaires dans la famille des châtelains de Lille; le chambellan , dignité qui appartint aux seigneurs de Ghistelles ; le bouteillier , office réservé à la famille de Gavre; le sénéchal , dignité héréditaire dans la famille de Wavrin; les deux maréchaux , charges héréditaires - 93 - dans les familles de Bailleul et de la Vichte. Ces grands offi¬ ciers assistaient le comte dans l’exercice du pouvoir judiciaire et administratif, et siégeaient dans sa cour plénière et dans celle des barons. Outre les barons et les grands vassaux, ch⬠telains et vicomtes , qui exerçaient l’autorité dans les terres relevant immédiatement du comte, il y avait des barons qui administraient et rendaient la justice dans leurs cours féodales pour les terres relevant médiatement du comte, mais en présence du bailli nommé par ce dernier. A côté du comte, se trouvaient les États. Les État s- généraux, assemblées des députés du clergé, de la noblesse et de toutes les communes de Flandre, qui se tenaient presque annuelle¬ ment et dans lesquelles étaient discutées les questions relatives aux affaires politiques , à l’administration et aux impôts ; Charïes-le-Quint lui-même devait compter avec ces assemblées nationales , auxquelles il faisait presque annuellement un exposé de situation analogue à ce que nous appelons le dis¬ cours de la couronne. Il y avait aussi dans les pays qui for¬ ment aujourd’hui le département du Nord, des États particu¬ liers : les États de la Flandre Maritime , les États de la Flandre-Wallonne , les États du Hainaut et les États du Cam- brésis. Les députés des villes qui représentaient la bourgeoisie avaient la prépondérance dans ces assemblées ; leurs attri¬ butions principales étaient le vote, l’assiette et la perception de l’impôt, la voierie et tout ce qui en dépendait, le droit de représentation au roi au sujet de la situation politique et de l’administration de la province. Dans la Flandre, durant la seconde partie de la période féo¬ dale, une partie du pouvoir appartenait aux villes et aux com¬ munes. Les principaux droits des villes étaient l’échevinage ou administration municipale, avec l’hôtel-de-ville, le beffroi, la prison et les marchés ; la pêche dans les fossés , rivières et marais ; une part dans les amendes et dans les tonlieux ou — 94 — octrois sur les marchandises et denrées ; 1 exemption des taxes arbitraires ; l’organisation des milices communales chargées de défendre la ville. Les principales charges étaient le service militaire, la prestation de subsides, l’offrande de présents qui devinrent des impôts, une part des amendes et tonlieux à donner au comte , et un certain nombre de redevances au sujet des domaines, delà culture, des denrées et du com¬ merce. Période française . — Après la réunion de la Flandre à la France par Louis XIV, nos contrées furent soumises au régime imposé à toutes les autres provinces. Nous le ferons connaître en parlant de l’administration ; nous nous contentons de rap¬ peler ici que Colbert etLouvois durent compter avec les États et les communes de notre province. (La suite prochainement.) W —IJ» TRAVAUX DES SOCIÉTÉS. SOCIÉTÉ ENTOMOLOGIQUE DE BELGIQUE. Annales, tome 14me. La Société entomologique de Bruxelles continue à se mon¬ trer très- hospitalière pour les étrangers. Les principaux mémoires contenus dans le volume qui vient de paraître sonl dus à MM. Chevrolal et de Chaudoir. Le premier y a fail insérer : Description de six coléoptères exotiques éclos à Paris ; Monographie du genre Rhinochenus ; Description d'un Peribleptus nouveau. Le second : Essai monographique sur U groupe des Pogonides; Essai monographique sur les Ortho- goniens. Tout en félicitant la Société belge de sa bonm volonté, nous ne pouvons nous empêcher de regretter qu( la Société entomologique de France laisse échapper ains de remarquables travaux qui lui seraient confiés très-pro¬ bablement sans ses tiraillements intérieurs et sans les retards déplorables que subissent ses publications. — 95 — Parmi les autres mémoires nous trouvons une nouvelle révision des Odonates de l’Algérie, par .M. de Sélys-Long- champs. L’auteur, en 1850, avait décrit dans Y Exploration scientifique de V Algérie 32 espèces de Libellules de cette partie de l’Afrique; aujourd’hui il en cnumère 47 dont il est intéressant, au point de vue de la géographie entomologique, de donner les rapports climatiques : sur ces 47, 37 vivent en Europe, 5 appartiennent à des groupes purement tropicaux, et 5 autres ont un faciès européen qui fait présumer qu’elles se retrouveront ou ont du se trouver dans le midi de l’Espagne. M. Sauveur donne un supplément au Catalogue des Co¬ léoptères de la Faune belge, ou plutôt une liste de toutes les additions publiées partiellement dans les Annales depuis la confection des catalogues primitifs qui ont paru aux premiers volumes, dans les années 1857 et suivantes. Ces catalogues et leurs addenda sont loin de former une énumération sérieuse des coléoptères belges, et l’on peut s’étonner qu’une Société qui compte autant de collectionneurs zélés, n’ait pas encore mis au jour un Catalogue véritable et homogène de la Faune coléoptérique belge, avec dési¬ gnation des localités pour toutes les espèces non vulgaires, et les noms des collecteurs pour les plus rares. Si nous étions en position de lui donner un conseil, nous lui indiquerions ce travail comme un des plus utiles et des plus pressants. Et comme il est convenu qu’il n’y a que le premier pas qui coûte, nous oserons encore demander à la Société pourquoi les entomologistes de Belgique négligent autant l’étude des Hémiptères dont il n’est presque pas question dans ses Annales. Cet Ordre que les travaux de Fieber ont fait sortir de ses langes, quant aux Européens, est adopté aujourd’hui par une foule de spécialistes qui trouvent dans son étude autant de charmes que dans celle des Coléoptères et des Lépidoptères, avec l’agrément de marcher dans une voie moins battue. — 06 — Le volume se termine par des appréciations intéressantes du Catalogue des Lépidoptères d’Europe de MM. Staudinger et Wolke, 2e édition, par MM. Breyer et de Borre. Ces Mes¬ sieurs soulèvent, dans cette analyse, deux questions capitales : comment faut- il comprendre les limites des grandes Faunes régionales, et jusqu’à quel point faut-il, dans la nomenclature, être esclave de la loi de priorité ? Nous ne pouvons disposer ici d’un espace suffisant pour aborder ces sujets très-controversés, nous dirons simplement notre avis sur les deux questions : Staudinger en étendant son énumération aux espèces de la Sibérie, du Kamchatka, du bassin de l’Amour, du nord de la Perse, de l’Asie mi¬ neure, de la Syrie, de la Palestine, de l’Algérie, du Maroc, de Madère, des Canaries, du Labrador et du Groenland, n’a point fait le catalogue de la Faune lépidoptérique européenne, mais celui d’une agglomération quelconque qu’il eut pu élargir ou rétrécir à son gré, sans que nous ayons à lui demander compte de ses préférences ; sous ce rapport son livre n’a qu’un défaut, c’est son titre. Quant à la loi de priorité des noms, c’est là, à notre avis, un principe excellent à établir, mais dont l’application rigou¬ reuse, telle que l’a comprise Staudinger, mène au cahos. La reprise d’un nom inconnu ou délaissé nous paraît tout aussi fâcheuse que l’imposition d’un nom nouveau. Le nomen- clateur consciencieux, qui n’est poussé par aucun préjugé d’école ou de patrie, doit être guidé dans ses appréciations par un certain tact que l’habitude et ses connaissances géné¬ rales doivent donner, et sans lequel il n’y a qu’une chose à faire, c’est de ne point être nomenclateur. A. de Norguet. - 97 — CHRONIQUE. Météorologie. Température atmosphér. moyenne. — — des maxima. — — des minima. — extr. maxima, le 12. — — minima, le 20. Baromètre hauteur moyenne, à 0°. — — extr. max. le 7. — — — min. le 21. Tension moy. de la vap. atmosph. Humidité relative moyenne %• • Épaisseur de la couche de pluie. . — — d’eau évap. Avril 1872. 9? 48 13? 56 5? 40 21? 90 — 0? 60 758m“ 331 771 mm go 739m® 06 6mm 44 69,90 46m“ 06 80mm 20 Avril année moyenne 9? 19 760m?Il333 6m“ 35 69,74 37mm 70 90m“ 69 L’état météorique d’avril 1872 se rapproche beaucoup de la moyenne déduite d’une série d’observations de vingt ans. Les différences se remarquent pour la hauteur barométrique, pour la quantité de pluie et pour l’évaporation. La cause de la moindre évaporation réside surtout dans les dix-huit jours de pluie et dans la nébulosité du ciel. Les nom¬ breuses rosées (18) ont eu aussi leur influence. Les halos solaires , signes précurseurs de la pluie , se produisirent six fois. Les vents régnants furent ceux du S, de l’O et du N. Leur force fut généralement au-dessus de la moyenne. La tension électrique fut grande , comme c’est l’ordinaire en avril. Elle se manifeste par les orages des 23 et 28, par la grêle des 1er, 18, 19, 23 et 24, et par l’aurore boréale qui succéda à l’orage du 23. Dans la nuit du 19 au 20, il y eut en ville une gelée blanche avec congélation de l’eau sur les terrains découverts et large¬ ment ventilés. A la campagne le thermomètre descendit de — 1°.5 à— 2°.0. Heureusement cette gelée n’exerça pas d’in¬ fluence fâcheuse sur les colzas en pleine floraison, et sur les arbres fruitiers. Y. Meurein. — 98 — Commission des antiquités du Pas-de-Calais. Séance du 4 avril. — M. l’abbé Van Drivai donne lecture d’un rapport sur le Dictionnaire historique et archéologique du Pas-de-Calais ; l’honorable membre constate la marche satis¬ faisante de cette publication, dont il présente à ses collègues les premières épreuves , et il annonce que si rien ne vient entraver cette œuvre , le premier volume sera terminé pour le mois d’août, et le second pour la fin de l’année. M. Dancoisne parle d’une découverte faite récemment à Monchy-au-Bois , de 476 deniers carlovingiens. Le savant numismate promet d’adresser prochainement un rapport dé¬ taillé sur cette précieuse trouvaille. M. Charles d’Héricourt appelle l’attention de ses collègues sur un ancien cimetière d’Arras désigné sous le nom de Petit- Atre, et il communique à la Commission une planche de cui¬ vre qui servait autrefois à tirer des gravures représentant ce cimetière et son calvaire. On donne lecture d’un travail sur la prévôté de Berclau, rédigé par M. Adolphe de Cardevacque: à ce sujet, plusieurs communications intéressantes sont présentées sur les faits historiques dont Berclau fut témoin au XIIe siècle, notamment sur l’histoire de l’enlèvement du chef de saint Jacques , dont la Commission a publié le récit complet il y a environ quinze ans. M. Terninck signale* une ruine importante mise en ce mo¬ ment à découvert, par suite des travaux exécutés derrière le théâtre. Il y a là une tour carrée et une porte de l’enceinte à laquelle cette tour était soudée. Les murs sont très-épais : le mur de revêtement intérieur de la tour est en pierre calcaire de moyen appareil, et le mur intérieur de l’enceinte est en blocage. La tour semble avoir été remplie de terre, et l’en¬ ceinte se compose de deux murs parallèles dont l’intervalle est aussi rempli de terre. Évidemment , il y a là un reste du Castrum Nobiliacum qui certainement passait en cet endroit. Un membre rappelle que la mission de la Commission est de veiller à la conservation des monuments anciens, et d’ap¬ peler l’attention du gouvernement ou du département sur les édifices à conserver. A ce sujet, il constate que la Commission — 99 — a signalé à plusieurs reprises l’état déplorable dans lequel se trouvent les tours de Saint-Éloi, dont la chute causerait dans le pays de bien vifs regrets. La Commission tout entière décide que l’attention de M. le préfet sera appelée de nouveau et très -sérieusement sur ce monument, afin d’en obtenir, sinon la restauration , au moins la consolidation par des moyens économiques, mais efficaces. Congrès Internationa! d'anthropologie et d’ar- rhéologie préhistorique. — La sixième session s’ouvrira à Bruxelles, le jeudi 2 2 août et sera close le 30 août. Toute personne, s’intéressant au progrès de ces sciences , peut prendre part aux séances du Congrès en acquittant la cotisation qui est fixée, pour cette année, à 12 fr. Le reçu du trésorier donne droit à la carte de membre et aux comptes- rendus des séances. Le Congrès visitera les cavernes de la vallée de la Lesse ; l’une d’elles sera fouillée devant les membres. Le champ de Spiennes où les populations de l’âge de la pierre polie exploi¬ tèrent le silex, et le camp retranché d’Hastedon près de Namur, qui semble avoir été construit à la même époque, feront l’objet de deux autres excursions. Les personnes qui ont l’intention de faire partie du Congrès sont priées d’en informer le plus tôt possible M. Dupont, se¬ crétaire du Comité. Les adhérents sont également priés de faire parvenir sans retard, en indiquant avec soin leurs Noms et Prénoms , Qualité et Résidence , le montant de leur cotisation au Trésorier du Congrès, M. Preudliomme de Borre, conser¬ vateur-secrétaire du Musée d’histoire natur elle, à Bruxelles ; il suffit d’envoyer un bon postal. Le Comité d’organisation du Congrès a choisi deux corres¬ pondants à Lille pour recueillir les adhésions, ce sont MM. le général Faidherbe et le professeur Gosselet. Atelier tic l’âge de la pierre poisemi cap II hua c- Aez. — Nous recevons de M. Lejeune , de Calais, l’annonce d’un travail important sur les silex taillés du cap Blanc-Nez. Ils avaient déjà été signalés par M. Cousin et par M. Antonio Lassubez (1). M. Lejeune après huit mois de recherches labo- (1) Bulletin sc., h. et litt. IV, p. 20. — 100 — rieuses faites depuis la plus grande des Noires-Mottes jusqu’au bord de la falaise est parvenu à en recueillir plus de 300 dont plusieurs appartiennent à des types qui n’ont jamais été dé¬ crits. Il y a de nombreuses formes dites racloirs et couteaux, des haches en amandes simplement taillées et d’autres qui sont polies. Il est très-facile de suivre pas à pas le travail de la fabrication depuis les instruments à peine ébauchés jusqu’à ceux qui sont finis. D’après M. Lejeune les haches étaient commencées en formant un losange à faces perpendiculaires avec le silex que l’on rencontre sous la forme de plaque. La rareté des haches polies fait présumer que là comme à Spiennes, près Mons, la fabrication n’allait pas plus loin que la taille ; chacun polissait lui-même sa hache , travail long, pénible, qui demande au moins une quinzaine de jours. Ce qui augmente l’intérêt des recherches de M. Lejeune, c’est qu’en poursuivant les fouilles entreprises par M. Cousin sur les tumuli des Noires-Mottes, il y a reconnu un très-grand nombre d’instruments en silex semblables à ceux de l’atelier précité. Les squelettes y sont couchés sur le côté, un genou replié sous le menton. Un vase en terre non cuite se trouve près de la tête et un silex taillé plat et court sous le bassin. Les tumuli, dit M. Lejeune, sont certainement contemporains de la fabrication des outils en silex. C’est dans la démonstra¬ tion de ce fait très-intéressant que consiste le grand mérite des études de M. Lejeune. Nous espérons que son travail complet ne tardera pas à paraître. Découverte de monnaies. — Un ouvrier vieDt de découvrir, à Harnes (Pas-de-Calais), dans un bénitier en grés, plusieurs monnaies d'or et d'argent. Ces monnaies sont des archiducs Albert et Isabelle , et de Philippe IV. La pièce la plus récente étant de 1662, l’enfouissement n’a donc aucun rapport avec la bataille de Lens , comme l’ont dit plusieurs journaux. Nécrologie. — M. Blanquart-Évrard qui joua un si grand rôle dans le perfectionnement de la photographie, vient de mourir à Lille. Nous lui consacrerons une notice biographi¬ que. Lille, lmp. Six-Horemans. 72-1253 4’ Année. — K° .6. — Juin 1872. ESQUISSE GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD. (Suite). Soas-bassin oriental ou de la Meuse. Le calcaire carbonifère de la vallée de la Meuse, bien plus compliqué que celui de la Sambre, a fourni à M. Dupont, directeur du Musée d’histoire naturelle de Bruxelles, le sujet de travaux nombreux et importants (1). Il y distingue les quatre massifs de Dinant, de Cinev, de Falmignoul et d'Hastières. Le massif de Dinant est formé par la réunion de plusieurs bandes ou plis synclinaux qui se soudent aux environs de Dinant. Au-dessus des schistes avec bancs calcaires intercalés, Spirifer Verneuili et mosquensis, qui correspondent au calcaire d’Etrœungt, on trouve : 1° Calcaire schistoïde noir à Spirifer mosquensis et Chonetes variolaria ; 2° Calcaire sublamellaire, à Spirifer mosquensis , exploité à Sorinne près d’Yvoir ; 3° Calcaire noir, compacte, en bancs minces avec phia- niles, Productus semireliculatus, Pr. Flemingii, Pectcn inter - médius ; 4° Calcaire noir, en bancs épais, avec phtanites, dolomie, Eomptialus serus, E. œqualis ; 5° Dolomie à grands Eomphales et Chonetes comoides ; 6° Calcaire blanc ou gris, sub-compacte, à Productus cora ; 7° Calcaire compacte, noir bleuâtre, avec Productus gigan- teus, brèches et bancs subordonnés à Productus undatus. On voit que ces couches peuvent se comparer parfaitement (l) Bull, acart. Belg. XII, p. 293, XV, p. 86, XVII, p. 181, XX, p. 116, XXXII, p. — 102 — à celle du massif de Berlaimont; elles s’y trouvent toutes représentées, à l’exception du calcaire noir à Pecten interme - dius, que nous appellerons calcaire de Binant , parce qu’on en fait des dalles connues sous le nom de carreaux de Dinant. M. Dupont le désigne sous le nom d’Assise II. Ce qui est au-dessous est son Assise I ; le calcaire à Eomphale et la dolomie forment son Assise Y et le reste son Assise VI. Dans le massif de Ciney, une nouvelle zone vient s’inter¬ caler entre les calcaires noirs à Pecten intermedius et les cal¬ caires noirs à Eomphalns serus; elle est caractérisée par un calcaire gris à veines bleues, contenant, outre des variétés spéciales de Spirifer mosquensis , le Spirifer cuspidatus et YOrthis resupinata. C’est l’Assise III de M. Dupont ; nous pouvons la nommer calcaire d’Anserenne parce que la grosse roche d’Anserenne, sur les bords de la Meuse, a fourni une très -grande quantité de fossiles de ce niveau. Le massif de Falmignoul peut parfaitement s’étudier en montant la route de Dinant à Givet. Sans décrire ici les détails locaux, constatons qu’un nouveau membre vient encore s’in¬ tercaler dans la série. Entre le calcaire d’Anserenne et le calcaire à Eomphalns serus, on trouve du calcaire gris sou¬ vent dolomitique, rempli de noyaux spathiques radiés. Ses principaux fossiles sont Spirifer cuspidatus et Conocardium alœforme. M. Dupont l’a nommé Assise IV ou calcaire de Waulsort. Le massif d’Hastières, bien que soudé au précédent, en diffère beaucoup par l’absence des calcaires de Dinant et d’Anserenne. Ainsi, il résulte des travaux de M. Dupont, que dans le bassin de la Meuse il y a trois ensembles de couches qui manquent dans celui de la Sambre (1). Quel était donc, pen- (1) M. Dupont signale à Beaufort, près de Maubeuge, un calcaire avec Sp. cuspidatus, qui doit correspondre à celui de Waulsort. dant leur dépôt, l’état de ce dernier bassin ? Est-ce qu'il ne s’y produisait aucune sédimentation? Mais comment expliquer alors que l’on puisse constater un pa sage insensible des couches inférieures aux couches supérieures. La difficulté s’accroît encore si on réfléchit que dans le bassin de la Meuse, les différents massifs ne sont pas également complets. M. Dupont s’est borné à exprimer le fait e.i lui-même et indépendamment de toute théorie, en disant qu’il y avait des lacunes dans tous les massifs de calcaire carbonifère, celui de Falmignoul excepté. Dans la carte géologique que ce savant a dressée pour les environs de Dinant, on constate la présence d’un très-grand nombre de failles qui compliquent encore la structure, déjà si complexe, du massif et qui témoignent ce qu'il a fallu de travail et de recherches pour établir, d’une manière aussi sure, la composition du calcaire carbonifère dans le bassin de la Meuse. TRAVAUX DES SOCIÉTÉS. ACADÉMIE D’AMIENS. T. VIII, 2e série. L’académie d’Amiens a fait paraître dans le courant de cette année le VIIIe volume de ses mémoires, comprenant ses travaux pendant les années 1870 et 1871. Comme toutes les corporations savantes elle s’est ressentie des malheurs de la patrie. Nous aurons donc peu à dire au sujet du présent volume; d’autant moins qu’il est presqu’enlièrement consacré à des discussions sur ces hautes questions de philosophie naturelle où se plaît particulièrement l’académie d’Amiens : l’unité Me force et de matière, la variabilité des espèces, etc. C’est le résultat ordinaire des discours de réception, disser¬ tations éloquentes parfois, mais presque toujours stériles et faisant souvent gronder forage au sein de nos paisibles — 104 — séances. Aussi M. Anselin, le vénérable secrétaire perpétuel que l’académie perdait le 30 Octobre 1869, avait-il fait, quelque temps avant sa mort, un touchant appel à la con¬ corde qui doit régner entre confrères, a N’oublions jamais, dit- il, qu’ici nous sommes en famille, et gardons-nous de tout ce qui pourrait relâcher le lien qui nous unit. > Parmi les travaux insérés dans ce volume, mentionnons dans le domaine de la littérature, la Tragédie et la Comédie, dialogue en vers par M. Yvert; les Forêts dans Virgile, étude où l’auteur, M. de Beaussire, conservateur des forêts, s’efforce de montrer, selon son expression * dans cet illustre amant de la nature, l’amant des forêts. * Sous le rapport des sciences appliquées, nous trouvons la description du Transpositeur ou Improvisateur de tissus , imaginé par M. Gand pour composer les étoffes les plus variées. ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES , DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. Classe de lettres. Année 1871. L’Académie royale de Belgique ne se contente point de publier des Mémoires qui forment déjà une importante collection. Même dans ses Bulletins elle fait paraître des rapports, de courtes notices, dans lesquels se trouvent de curieux renseignements; en 1871 elle y a inséré quatre travaux que nous croyons utiles de faire connaître à nos lecteurs. L’Archiviste de la ville de Bruxelles, M. Alphonse Wauters, a lu dans l’une des séances une notice qui a pour titre : Ce que Von appelait en Brabant les trêves du comte (Treugae Comitis) , et à ce propos de la paix instituée par VEvêque de Liége> Henri I. Après avoir rappelé la Trêve de Dieu , insti- — 105 — tution due à la double autorité de l’Église et du Roi, qui empêcha en partie les maux causés par la guerre, M. Wau- ters se demande ce qu’il faut entendre en Brabant par les mots Pax Ducis ou Treugae Comitis. Les auteurs n’avaient point pu jusqu’ici l’expliquer avec précision : l’auteur de la notice parvient à déterminer le sens de ces mois en compa¬ rant un passage de Gilles d'Orval avec les décrets relatifs à la paix publique, rendus par l’Archevêque de Cologne, Sigewin, et publiés par Bertz dans les Monument a Germaniœ Historien, . Par ces trêves, il était défendu de porter les armes depuis le premier jour de PAvent jusqu’à la fin du jour de l’Epiphanie et du commencement de la Septuagésime jusqu’à l’octave de !a Pentecôte, du vendredi matin au lundi matin; il en était ie même la veille et le jour des fêtes principales, ainsi qu’aux Quatre-Temps. Les transgresseurs de cette trêve étaient punis sévèrement : le coupable, si c’était un homme libre, perdait son héritage, était dépouillé de son fief et devait quitter e pays ; si c’était un serf, on lui enlevait son avoir et on lui mupait la main. — Cette courte analyse du travail de M. Wauters suffit pour faire comprendre l’importance de fins- itution dont il parle et pour donner l’explication des expres- ;ions analogues à celles de Treugae Comitis qui se trouvent souvent dans les chartes anciennes. Sous le titre d 'Épisodes des relations antérieures de la Flandre, nous trouvons un fragment de l’important travail pie M. Émile Varenbergh prépare sur les Relations de la Flandre avec V Angleterre au moyen-âge. Dans ce passage se rouvent assez nettement dessinés les rôles des divers partis : e roi d’Angleterre emploie l’intrigue , l’argent ou la force mur arriver à dominer en Flandre ; le roi de France se sert de on pouvoir, de ses armées et souvent du comte de Flandre, mur étendre ses droits et confisquer les libertés ; — le comte ncline vers la politique française, mais en craignant de w — 106 — mécontenter la riche bourgeoisie flamande. Cette bourgeoisie, surtout celle de Bruges et de Gand, est favorable à l’influence anglaise qui est repoussée par la noblesse, et qui satisfait médiocrement la petite bourgeoisie et les communes. L’ou¬ vrage de M, Varenbergh jettera un jour nouveau sur l’his¬ toire de notre contrée, surtout si l’auteur se souvient que la Flandre, outre Biuges, Gand et Ypres, comprenait Cassel. Lille, Douai, et que, plus tard. Tournai, Mons et Valenciennes, Saint-Omer et Arras, furent sous la domination des comtes * de Flandre. Le savant historien de la Flandre, M. Kervyn de Lettenbove, a publié, d’après un document original conservé dans la collection du marquis de Salisbury à Hatfield, un acte secret du 29 décembre 1580, qui montre le duc d’Anjou et le prince d’Orange trafiquant odieusement des Pays-Bas et se vendant l’un à l’autre nos contrées, afin de se créer des souverainetés héiéditaires, l’un dans les provinces de Hollande, Zélande et Utrecht; l autre dans les provinces flamandes situées au sud de l'Escaut. Il est utile de publier les documents qui révèlent la pensée secrète des ambitieux. L’espace nous manque pour analyser, d’une manière com¬ plète, le travail consacré par M. Haus à la Pratique criminelle de Damhouder. Josse Damhouder, né à Bruges, le 25 novem¬ bre 1507 et mort à Anvers, le 20 janvier 1581, est l’un des jurisconsultes les plus remarquables des Pays-Bas. L’ouvrage qui a fondé sa réputation porte le titre de Praxis rerum criminalium ou Pratique criminelle Dans cet ouvrage, qui se compose d’un discours préliminaire et de 159 chapitres, l’auteur traite à la fois des formes et de la pénalité. Après avoir parlé très-sommairement de la nécessité et du but des peines et indiqué les divisions des crimes et des procès cri¬ minels, il trace la marche de la procédure jusqu’à la condam¬ nation. C’est à cette matière qu’il rattache le droit pénal, en — 107 — exposant, d’abord, les diverses espèces de peines que le juge peut appliquer en Flandre et les causes générales de justifi¬ cation; ensuite les différents crimes et les peines qui leur sont applicables. Le traité du droit pénal est suivi d’une série de chapitres dans lesquels l’auteur revient sur la procédure criminelle, et qui ont pour objet la transaction, l’abolition, la grâce, l’appel, la préparation du condamné à mort, F exé¬ cution et l’exécuteur. L’auteur termine son livre en signalant les avantages et les inconvénients de la justice de l’homme et en exhortant les juges à suivre les règles de l’équité. L’œuvre de Damhouder est conçue d’après un plan peu logique et certaines parties sont incomplètement développées; on peut encore lui reprocher d’avoir partagé trop complètement l’opi¬ nion de ses contemporains sur l’arbitraire des procédures contre le crime de lèse-majesté, sur la cruelle sévérité avec laquelle les coupables étaient punis, sur la torture et les sor¬ tilèges. Mais il faut reconnaître que ce célèbre jurisconsulte avait au plus haut point le sentiment de la justice et qu’il la considérait comme la base de l’ordre social, et comme la condition du bonheur des nations. Tout acte arbitraire, toute violation du devoir, tout ce qui n’est pas strictement conforme à la notion du juste, le blesse et le révolte. C’est avec indi¬ gnation qu’il blâme le système de vénalité et de favoritisme qui présidait à la nomination des juges, et l’ignorance, la cupidité, la barbarie de tous les officiers de justice, depuis les fonctionnaires les plus élevés jusqu’aux agents subal¬ ternes. Non-seulement le livre Damhouder offre l’histoire de la procédure criminelle et de l’administration de la justice vers la fin du seizième siècle ; c’est aussi un réquisitoire contre les abus les plus odieux. Il ne fut pas inutile aux légis¬ lateurs; les ordonnances réformatrices des 5 et 9 juillet 1570, publiées pour les Pays-Bas par Philippe II, se sont inspirées des idées du jurisconsulte brugeois; et il a exercé en Allema- — 108 - gne une puissante influence sur la pratique judiciaire. M. Haus a rendu un véritable service à nos contrées, en faisant connaître l'important ouvrage de Damhouder. SOCIÉTÉ MÀLACOLOGIQUE DE BELGIQUE. Celte société toute jeune encore, puisqu’elle ne date que • de 1863, a exposé son but en ces termes dans un article de ses statuts : propager le goût des études malacologiques, en faire apprécier Futilité, concourir aux progrès de la science en formant des collections et une bibliothèque, en publiant des Annales et en prenant telle autre mesure qui peut être jugée utile. Elle entend la malacologie dans son acception la plus éten¬ due, embrassant, outre les Mollusques vivants et fossiles, tous les animaux inférieurs. D’après le dernier Bulletin qui nous est parvenu, elle compte 48 membres effectifs, 29 correspondants et 6 hono¬ raires. Ses publications forment cinq volumes contenant chacun deux parties; dans la première sont les mémoires spéciaux et les notices plus ou moins étendues; dans la seconde, les procès verbaux des séances. La plus grande partie des tra¬ vaux roule surla conchyliologie de la Belgique; nous citerons: Excursions et découvertes malacologiques faites en quelques localités de la Belgique de 1860 à 1865 , par M. Colbeau; Liste générale des Mollusques vivants de la Belgique , par M. Colbeau ; Liste des Zoophytes et des Mollusques inférieurs du littoral be'ge, par M. Lanszweert; Observations malacolo¬ giques, notes sur quelques monstruosit és observées en Belgique , par M. Van den Bi oeck; Excursions et découvertes malacolo¬ giques faites en Belgique pendant Vannée 1870 . par le même. Tous ces matériaux forment une Faune des Mollusques belges aussi complète que possible et où l’avenir aura très — 109 — probablement peu de choses à ajouter. Nous adressons nos sincères félicitations à leurs auteurs pour avoir résisté au courant qui entraine tant de Malacologi?tes modernes à la fabrication d’espèces nouvelles ou à l’adoption de celles que façonne tous les jours l’école Bourguignatienne. L’occasion aurait pu paraître bonne dans un pays comme la Belgique qui, sur un espace relativement restreint, comprend plusieurs zônes géologiques bien tranchées. Qui sait si quelqu’adepte de cette école n’y trouverait pas deux centres de création distincts ? Quoique le nombre des espèces nouvelles introduites dans les travaux des malacologistes belges soit très minime, nous croyons qu’il est encore trop grand, puisqu’on y voit figurer un Hélix Sauveuri qui serait intermédiaire entre Héüx nemoralis et Hélix hortensis. ces deux formes tellement fu¬ sionnées que beaucoup de naturalistes se refusent à les sépa¬ rer spécifiquement. Quant aux variétés nouvelles dénommées , on s’y est donné carrière.. C’est un champ qui n’a pas de limites et dans lequel on est entrainé très loin dès qu’on l’aborde. M. Colbeau, auteur du plus grand nombre de ces noms de variétés, a du moins évité un écueil, c’est l’emploi des noms propres ; ses étiquettes signifient quelque chose: minor, major , albus, bico- lor , depressns, dimidiatus, parms, aquarii ; tel nomenclateur français que nous pourrions citer y eut épuisé l’état civil de tous ses parents et amis. Puisque nous parlons des variétés, signalons encore un long Mémoire de M. Sauveur sur les variations de 1 "Hélix nemoralis , travail qui pourrait passer pour un peu puéril aux yeux des personnes étrangères à l’histoire naturelle, mais qui ne l’est pas pour celles qu’anime le feu sacré. L’auteur trouve 89 variétés principales et 8,748 sous-variétés, total 8837; mais comme il fait abstraction de la couleur, de la taille — 110 — et de la forme, pour ne s’occuper que des bandes, il faut d’abord multiplier ce nombre par celui des nuances qui est au moins de cinq,^)uis le nouveau produit par quatre pour les formes minor, major , depressus , elevatus, ce qui produit 176,740 variétés! A. DE NORGEET. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE. La Société des sciences vient de joindre à sa collection de portraits une photographie qui lui a été envoyée par M Dupuis. C’est celle d’un beau portrait de Malus gravé par Tardieu. Elle s’est souvenu à ce propos que le célèbre physicien avait été, non-seulement un de ses membres résidants, mais encore un des dix fondateurs, et elle a prié M. de Norguet de recher¬ cher ce qu’il a pu rester de ses travaux dans les archives. Étienne-Louis Malus, né à Paris en 1775, d’abord engagé volontaire, puis élève de l’école polytechnique, fut employé comme officier du génie à l’armée de Sambre-et-Meuse, puis à l’armée d’Egypte; il fut chargé ensuite d'importantes constructions militaires et se trouvait à Lille, comme com¬ mandant du génie, lorsque, à la fin de 1802, dix amateurs de physique, qui se réunissaient dans le cabinet de M. Becquet de Mégille, eurent l'idée de fonder une Société scientifique; le premier réglement fut adopté le 4 février 1803, et Malus nommé vice-président. Les archives de la Société contien¬ nent plusieurs mémoires scientifiques présentés par lui, dans lesquels paraît contenue en germe la fameuse découverte de la polarisation de la lumière. Appelé à Paris en 1805, Malus s’y livra avec ardeur aux travaux d’optique qui ont illustré son nom, devint membre de l’Institut, directeur de l'École polytechnique et mourut en 1812, à peine âgé de 37 ans. M. Roussel-Defontaine a présenté un calcaire coquiller rencontré à une profondeur de 1 à 3 mètres, dans la ville de Tourcoing, ce calcaire peut prendre le poli du marbre. — 111 — D’après M. Ortlieb, la coquille dominante est la Turrilella édita , que l’on trouve abondamment dans les sables de Mons-en-Pévèle. On peut donc rapporter ce calcaire à l’étage éocène inférieur. Il correspond probablement aux plaques siliceuses à Turritella édita et Nummulitcs planulata que l’on voit au Mont de la Trinité, près de Tournai. La grande rareté de ces roches calcaires et siliceuses porte M. Ortlieb à croire à une grande dénudation qui les aurait enlevé à la fin de la période éocène inférieure. M- Kulhmann a continué ses communications sur la force cristallogénique. Il a insisté surtout sur ce fait que tous les sels qui cristallisent avec de l’eau de cristallisation augmen¬ tent de volume, et que les sels qui cristallisent à l'état anhydre à la température ordinaire, peuvent retenir de l’eau de cristallisation à basse température. Ainsi le sulfate de fer dont l’eau de cristallisation à la température ordinaire s’élève à 45,60, en retient 77,10 pour 100 à basse température. Dans ces sels l’augmentation de volume par la cristallisation a lieu proportionnellement à la quantité d’eau de cristalli¬ sation fixée. Cette augmentation de volume des sels par la cristallisation explique la désagrégation des roches feldspathiques , du granité, dans les contrées tropicales, là où on no peut pas faire intervenir la gelée. M. Kulhmann propose d’appliquer la même force pour désagréger les phosphates de chaux naturels destinés à servir d’engrais. Un autre membre, M. Casati, a fait connaître un manus¬ crit de la bibliothèque de Turin, dans lequel se trouve la plus ancienne traduction française de la Divine Comédie de Dante; cette traduction, qui rappelle les vers de Christine de Pisan, se fait surtout remarquer par la fidélité avec laquelle sont exprimées dans notre langue les beautés du grand poète florentin. — 112 — M. l'abbé Dehaisnes, archiviste du Nord, a payé sa bien¬ venue dans la Société par deux communications. Les détails que nous avons déjà donnés sur le regretté M. Desplanque, nous dispensent d’analyser la consciencieuse Notice biogra¬ phique que M. Dehaisnes a consacrée à son prédécesseur ; nous croyons devoir signaler à l’attention de nos lecteurs le mémoire du même membre sur la Bataille de Saucourt. Cette bataille gagnée en 881 sur les Normands par le roi de France Louis III, à quelques lieues d’Abbeville, a été longtemps considérée comme l’une des pages les plus glorieuses de notre histoire nationale. En 1641, après la publication des annales de Saint-Bertin , Mabillon appela l’attention des historiens sur une phrase de cet annaliste qui met en doute l’importance de cette victoire ; en 1749, le savant abbé Le Beuf confirma l’observation de Mabillon par le récit des Annales de Saint-Vaast, dont il venait de découvrir un exemplaire. Depuis lors, les historiens s'accordent à la consi¬ dérer, cette victoire, comme peu glorieuse ; Mézeray et le P. Daniel disent qu’elle n’eut aucun résultat; d’après Sismondi ce fut une défaite; Depping, dans son histoire des expéditions des Normands, l’appelle une demi-victoire ; M. Henri Martin montre les deux armées prenant la fuite chacune de son côté, et le Nord de la France dans une situation aussi triste qu’au- paravant. En publiant une nouvelle édition des Annales de Saint- Bertin et des Annales de Saint-Vaast , M. l’abbé Dehaisnes a trouvé des textes qui lui permettent, par des rapproche¬ ments avec les chroniques du Xe, du XIe et du XIIe siècle, de prouver clairement que l’abbé Le Beuf et les historiens modernes sont dans l’erreur, et que la bataille de Saucourt a été une victoire glorieuse et importante. Tous les annalistes qui ont écrit dans les trois siècles qui ont suivi cette bataille la regardent comme un succès. En dehors des annalistes de Saint-Vaast et de Saint-Bertin, quatre chroniqueurs contem- - 113* - porains ont parlé de ce combat, les auteurs des annales de Fulda, des annales de Metz, de la chronique des Normands, et Réginon, abbé de Brüm ; tous quatre donnent le triomphe au roi Louis. A ces autorités il faut ajouter celle du Lud- tvigslied , chant de victoire sur la bataille de Saucourt. Le codex dont l’abbé Le Beuf s’est servi, présente, au sujet de la bataille de Saucourt, un texte incomplet; M. l’abbé Dehaisnes a trouvé dans deux autres manuscrits des mêmes annales conservés l’un à Douai, et l’autre à Bruxelles, une phrase complétant ce récit qui prouve jusqu’à l’évidence que l’annaliste de Saint-Vaast considère cette bataille comme importante en elle-même et par ses suites, Les annales de Saint-Bertin montrent les Normands vaincus, et les Français prenant la fuite de leur côté, sans être poursuivis par aucun ennemi. Étudiant ce dernier récit en lui-même, M. Dehaisnes prouve que l’on ne peut opposer un passage sans précision, sans détails, sans clarté, offrant des contradictions et des impossibilités au récit de six autres auteurs contemporains ; en étudiant Hincmar l'auteur de ces annales, M. Dehaisnes rappelle que cet écrivain résidait loin du pays où se livra la bataille, qu’il était âgé de 76 ans, et qu’il a dû être porté à juger sévèrement Louis III, avec lequel il était alors en lutte, puisque dans ses écrits il lui arrive souvent d’attribuer à ses adversaires des opinions ou des actes dont ils n’étaient pas coupables. De ce mémoire, il résulte clairement que la bataille de Saucourt est une victoire importante. Durant plusieurs de ses séances la Société de Lille a entendu avec le plus vif intérêt la lecture des Chapitres de r Histoire de Lille , par M. Houdoy. A l’aide des notes qu’il a lui meme recueillies durant des années de travail, dans les archives municipales de Lille et dans le dépôt départemental, l’auteur peut écrire, au moins pour certaines périodes, une histoire de Lille qui abondera en faits inédits, en aperçus complètement nouveaux : il l’a surabondamment prouvé par — 114 — les travaux que nous analysons. Nous le remercions d’avoir bien voulu , sur noire demande , nous faire obtenir les épreuves de son travail, et nous permettre d’en faire le résumé pour nos lecteurs. Nous adopterons pour cette analyse, le titre et les divisions que présente le travail du savant érudit lillois. BIBLIOGRAPHIE. CHAPITRES DE L’HISTOIRE DE LILLE Par M. Houdoy. I. Le Livre Roisin. — Les Libertés communales sous la domination française ; / 296-1 369. Dans ce premier des Chapitres de V Histoire de Lille , M. Houdoy commence par étudier en lui-même le Livre Roisin , cet important manuscrit qu’il appelle avec justesse le code de Lille, et qui est certainement, sinon le plus ancien , du moins l’un des plus anciens recueils de coutumes écrites que possède la Flandre. M. Brun-Lavainne, qui a donné en 1842 une édition de ce livre d’après le manuscrit n° 266 de la Bibliothèque communale de Lille, et M. Le Glay dans son Catalogue des manusi rits de la même Bibliothèque, regardent ce codex comme le texte original C’est une erreur : ce codex a été écrit, ainsi que le rappellent MM. Brun-Lavainne et Le Glay, de 1348 à 1351 ; or, M. Houdoy a retrouvé dans les Comptes de la ville , une mention qui rappelle que 174 sous ont été octroyés en 1348 et 1349, à Wuillaume de Bonrou- wart, pour écrire le Livre de mestre Jehan Roisin . Ce manus¬ crit n’est donc qu’une copie officielle. M. Houdoy a eu, par l’une de ces bonnes fortunes qui n’appartiennent qu’aux chercheurs les plus habiles et les plus patients, le bonheur de retrouver l’original du Livre Roisin, ou du moins une copie contemporaine écrite vers 1397, dans le codex que — 115 — M. Le Glay s’était contenté d’indiquer, en son Catalogue des manuscrits de la Bibliolhègue de Lille , sous le titre suivant, » n° 157 : Anciennes lois , coutumes et usages de Lille. Ecriture des premières années du XIVe siècle. Un travail de compa¬ raison que M. Houdoy établit entre la situation de la ville de Lille à la fin du XIIIe siècle, le texte des manuscrits et les mentions qu’il a lui-même retrouvées dans les comptes de la ville, conservés aux Archives du département du Nord, ne permet aucun doute au sujet de cette question. Le texte primitif de Roisin est retrouvé, grâce aux longues et sagaces investigations de l’érudit lillois. Après ces intéressants préliminaires, M. Houdoy aborde la partie historique de son travail. En formant à la fin du XIIIe siècle un recueil des libertés politiques de la cité. Roisin rappelle que la ville jouissait de ses franchises de si lonctemps dont il nest mêmore de trois cens ans et plus ; et à l’appui de ses dires, il ne cite aucune charte, aucune confirmation, pas même la lettre d’organisation pour l’échevinage octroyée en 1235 par la comtesse Jeanne. Cette manière de procéder, démontre que la cité , comme Douai et Orchies , jouissait depuis longues années de ses franchises communales ; les chartes des libertés communales, là même où elles existent, n’ont été que des titres régularisant des coutumes déjà en usage. Le roi de France Philippe-le-Bel, de 1296 à 1301, confirma ces libertés, et flattant l’amour des Flamands pour leurs franchises municipales, il les détacha de leur comte. La politique des officiers qui le représentaient devait être toute différente, lorsqu’en 1304, le traité d’Athies eut soumis à la couronne de France les villes et châtellenies de Lille, Douai et Orchies. Les principaux privilèges des bourgeois de Lille consis- laient dans le droit : 1° de n’être justiciable que des éche- vins; 2° de n’être soumis à une enquête, qu’en vertu d’une autorisation échevinale ; 3° d’être exempt de confiscation, — 116 — même en cas de condamnation capitale ; 4° d’être protégé par le privilège de YArsin, c’est-à-dire l’abattis et l’incendie de la maison de celui qui aurait attaqué un bourgeois et refuserait de comparaître devant l’échevinage. Durant leur réunion à la couronne de France, de 1304 à 1369, les villes et châtellenies de Lille, Douai et Orchies, trouvèrent, dans la personne même des rois de France, des protecteurs qui confirmèrent et soutinrent leurs droits. Mais il en fut tout autrement des officiers de la gouvernance du grand-bailli et du prévôt, des seigneurs hauts-justiciers et des nobles de la châtellenie ; ils attaquèrent ces privilèges qu’ils devaient nécessairement trouver excessifs. Le magistrat de Lille a la gloire de leur avoir résisté, avec une froide énergie que nul obstacle ne put décourager. L’auteur, que l’on pourrait appeler l’historien des libertés communales de Lille, a retrouvé, dans les archives et les comptes de la cité, un grand nombre de faits qui témoignent de cette résistance courageuse, de cet esprit d’indépendance. En 1313, à la suite d’un acte de violence commis sur un bourgeois par un habitant de Wavrin, le droit d'arsin fut inv oqué. En vain le seigneur de Wavrin s’y opposa avec l’aide du bailli : le privilège municipal fut reconnu par le délégué royal et plus tard, en 1315, par le parlement de Paris. Parmi les pièces nombreuses qui constatent le droit pour tout bourgeois de Lille de ne pouvoir être arrêté que sur l’autorisation des échevins, on peut citer un acte de 1337 par lequel le bailli du roi reconnaît qu’il a injustement arrêté un bourgeois de Lille, et qu’il l’a remis entre les mains des échevins, déclarant à haute voix qu’il a fait ce qu’il ne pouvait faire, comme le lui ont démontré les privilèges octroyés à la ville. Ces difficultés sans cesse renaissantes étaient â charge à la ville. Le magistrat vers 1340, présenta ses doléances au roi et demanda une enquête sur les agissements des officiers et — 117 — fonctionnaires. Le roi envoya une commission à Lille ; des mémoires furent présentés ; de longues et minutieuses enquêtes furent opérées ; la ville obtint encore gain de cause. Par un acte en date du mois d’ Avril 1340, qui prit le nom de Traité des XVII articles , toutes les franchises de la cité furent définies et confirmées : le roi fit enregistrer cet acte au Parlement de Paris. Restait le droit d’arsin , question qui avait été réservée par les commissaires, à cause d'une affaire pendant devant le Parlement. Les hauts-justiciers et les nobles de la châtellenie, ayant à leur tête Jean de Luxem¬ bourg, châtelain de Lille et le seigneur de Wavrin, atta¬ quaient ce privilège avec la plus grande ardeur ; comprenant que l’affaire allait être traînée en longueur, le magistrat acheta le désistement d’un des chefs de l’opposition, et, par un arrêt définitif qui porte la date de 1352, l’échevinage resta en possession de ce droit, qu’il considérait avec raison comme l’un de ses plus importants privilèges. Mais la clef de voûte des institutions municipales était l’in¬ dépendance des échevins. M. Houdoy rappelle un certain nombre de lettres qui nous montrent le magistrat de Lille interdisant les fonctions d’échevins aux avocats plaidant ou consultant, aux étrangers, aux célibataires, à ceux qui n’étaient pas justiciables des échevins, aux officiers de la maison du roi, aux usuriers et au \ personnes reprochables ; ces interdictions assuraient l’autorité dans l’échevinage aux représentants honorables des familles bourgeoises. De ce résumé trop rapide, on peut conclure, que sous la domination française, de 4304 à 1369, la ville de Lille conserva ses libertés communales, et vit se développer encore son amour pour le droit et la liberté. (La suite prochainement). — 148 — NOTICE DESCRIPTIVE DES MÉREAUX TROUVÉS A TIIÉROUANNE ET QUE L’ON PEUT ATTRIBUER A CETTE VILLE, Par M. Deschamps, de Pas. Déjà le savant auteur des Monnaies des comtes de Flandre de la maison de Bour gogne, avait décrit des Méreaux et plombs de marque relatifs à l’Artois , et ses patientes recherches historiques lui avaient donné lieu de relever de l’oubli quelques unes de ces pièces plus intéressantes et plus précieuses que belles. Car si les méreaux ne pré¬ sentent qu’un intérêt local, ils ont du moins l’avantage de rappeler des mœurs et des institutions particulières dont l’étude apporte un charme aussi puissant que celui de la nou¬ veauté. Des recherches couronnées de succès et des rappro¬ chements bien ménagés, ont amené M. Deschamps à recons¬ tituer et faire revivre bien des souvenirs de l’antique capitale des Morins. Le soc de la charrue a remis au jour une quantité de petits monuments des institutions civiles et religieuses de cette ville, dont le sein delà terre recélait encore quelques vestiges; l’auteur les a déchiffrés et classés, il en a composé vingt plan¬ ches formant un ensemble remarquable. Ces planches offrent de riches séries relatives à l’évêché, au chapitre, aux monnaies des innocents et aux corporations civiles. Il est intéressant d’examiner en détail ces plombs et ces méreaux, parce que leur aspect et leur composition parti¬ culière autorisent à en attribuer l’origine au lieu où ils ont revu le jour. La dernière planche, celle des mér eaux-monnaies, selon l’heureuse dénomination de M. Deschamps, est des plus cu¬ rieuses. Les types en établissent sans conteste l’usage à Thérouanne, où ils ont circulé du XIIIe au XVIe siècle. Ces pièces confirment la théorie dont M. Dancoisne a prouvé l’application à Béthune et que nous avons revendiquée pour — 119 Lille, à savoir qu’elles paraient au manque de monnaie divi¬ sionnaire. Les autorités locales en circonscrivaient la circula¬ tion entre les mains de leurs administrés, et spécifiaient qu’elles n’auraient point cours comme les monnaies du sou¬ verain. CHRONIQUE. Météorologie. Mai 1872. Mai année moyenne Température atmosphér. moyenne. 11? 38 12? 45 — — des maxima. 15? 85 — — des minima. 6? 92 — extr. maxima, le 28. 22? 02 — — minima, le 12. — 0? 03 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 758m.m428 758m?1984 — — extr.max.le26. 769m“27 — — — min. le 18. 745m™54 Tension moy. de la vap. atmosph. 7m“59 7m™94 Humidité relative moyenne %. . 70,01 68,39 Épaisseur de la couche de pluie. . 90m™57 60m™77 — — d’eau évap. 95m?150 116m™18 Le mois de Mai fut froid et humide. Le ciel fut nébuleux, Tair constamment chargé d’électricité. Les orages des 7, 9, 17, 18, 23, 28, furent accompagnés de pluies abondantes et de grêle ; celle-ci n’occasionna jamais dé dégâts, mais la quantité d’eau pluviale tombée en 19 jours, ne put toujours s’écouler facilement et inonda de nom¬ breuses parties de terres basses couvertes de récoltes. L’hu¬ midité et le froid furent défavorables à la végétation du blé, qui jaunit dans presque tous les champs; aujourd’hui cet étiolement a cessé sous l’influence des quelques jours de sécheresse. La gelée du 12 fut préjudiciable à beaucoup d’arbres à fruit, surtout aux poiriers; les autres végétaux en souffrirent peu. Les vents régnants furent ceux du N. -N. et N.-O. Les courants atmosphériques supérieurs se dirigeaient du S. au N. Les nuits furent froides et généralement sereines ; peu de — 120 pluies et beaucoup de rosées (23), c’est à cet état du ciel qu’il faut attribuer le grand abaissement de la moyenne des minima. Deux halos solaires furent observés, et chaque fois ils furent des signes précurseurs d’une pluie prochaine. V. MEURE1N. Fouilles archéologiques de Bouvines. — Les fouilles de Bouvines viennent d’être complètement termi¬ nées, M Rigaux y a retrouvé, comme dans ses précédentes recherches, quatre époques distinctes. Ces fouilles ont pro¬ duit deux catégories de faits; les uns servant de confirmation aux résultats antérieurs, ainsi la constatation delà haute anti¬ quité du fossé dont nous avions parlé dans le bulletin de mars; les autres complètement nouveaux, de ce nombre est la découverte de la limite du cimetière mérovingien. L’époque gauloise a fourni de nombreux débris de poteries en terre grossière et quelques objets en fer, tels que frag¬ ments de libules et une pointe de javelot. Ces débris ont été recueillis dans un fossé de plusieurs mètres de largeur, au dessus duquel se trouvaient les cinq dernières sépultures mé¬ rovingiennes. Plusieurs monnaies gauloises ont encore été découvertes, deux portent le nom d’un chef nervien. L’époque gallo-romaine n’a fourni que des débris épars par tout le champ, et un certain nombre de monnaies des Tetricus et de Constantin, M. Rigaux a fait déblayer un puits romain rempli de décombres et d’ossements d’animaux pro¬ venant de la construction antique; il n’y a malheureusement rien trouvé qu’un maillet de bois, semblable à nos maillets d’aujourd’hui, et que l’humidité des terres remblayées avait relativement bien conservé. Le puits avait environ douze mè¬ tres de profondeur. L’époque mérovingienne a de nouveau donné des haches, des lances, une épée, des sabres, un bouclier, des fibules et des boucles de ceinturon, plusieurs bagues et pendants d’oreilles ornés de verroteries rouges, quelques vases en ter¬ re et en verre. Mais, comme précédemment, presque toutes les sépultures avaient été volées à une époque reculée ; leur nombre était de cent environ, en y comprenant les inhuma¬ tions beaucoup plus récentes qui font partie d’une quatrième époque dont la date est toujours indéterminée. Les fouilles ont duré plusieurs mois, comme celles de 1871. Lille, lmp. Six-Horemans. 72-1251 4“ Année. — K° 7. — Juillet 1872. ESQUISSE HISTORIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD. (Suite). Divisions ecclésiastiques antérieures à 1559. Depuis l’introduction et l’organisation du christianisme jusqu’en 1559, les quatre diocèses entre lesquels était partagée la contrée qui forme aujourd’hui le département du Nord , dépendaient de l’archevêché de Reims, l’ancienne métropole de la Gaule-Belgique. Ces évêchés étaient ceux de Cambrai, Arras, Tournai et Térouanne (l). évêciié de cambrai. L’évêché de Cambrai comprenait, outre les archidiaconés d’Anvers, de Brabant et de Bruxelles situés en dehors de notre département , l’archidiaconé du Cambrèsis formé des trois décanats de Cambrai, le Câteau et Beaumetz, l’archidiaconé de Valenciennes ( rive droite de l’Escaut), formé des décanats de Valenciennes, d’Haspres et d’Avesnes-sur-Helpe, l’archidiaconé de Hainaut formé des décanats de Bavai et de Maubeuge, avec ceux de Binche et Mons,Condé dépendait de J’archidiaconé de Brabant; l’évêché d'Arras fut uni à celui de Cambrai depuis l’épiscopat de Saint- Vaast jusqu’en 1093. évêciié d’arras. L’évêché d’Arras, rétabli en 1093, com¬ prenait dans le département actuel du Nord , le décanat de La Bassée qui appartenait à Yarchidiaconê d’Artois et Varchi- diaconé d'Ostrevaut formé des décanats de Douai et de Valen¬ ciennes (rive gauche). évêciié de tournai. L’évêché de Tournai comprenait Yarchidiaconé de Tournai formé des décanats de Lille , du décanat de Seclin , et aussi du décanat de Tournai auquel (1) On a souvent fait remarquer que les évêchés ont les memes limites que les civilalcs , et que les pagi ont donné naissance aux archidia¬ conés. Celle observation est exacte pour la contrée qui a formé le département du Nord. — 122 — appartinrent plusieurs paroisses qui formèrent plus tard le décanat de Saint-Amand ; il faut citer en outre les décanats d’Helchin et de Courtrai qui étendaient leur juridiction sur plusieurs paroisses de la châtellenie de Lille , aujourd’hui du département du Nord. évêché de térouanne. Cet évêché comprenait Yarchidia- coné d'Artois qui avait l’Aa pour limites du côté de notre département, et aussi Yarchidiaconé de Flandre ou d' Ypres formé des décanats de Bourbourg, Bergues, Cassel, Bailleul et Merville. Divisions ecclésiastiques postérieures à 1559. En 1559, le Souverain-Pontife Paul IV créa dans les Pays- Bas plusieurs nouvelles métropoles et plusieurs nouveaux évêchés , pour empêcher le protestantisme de se répandre parmi les populations de ces contrées. archevêché de cambrai. Le siège épiscopal de Cambrai fut érigé en un archevêché qui eut pour sufïragants les évêchés d’Arras, de Tournai et de Saint-Omer, ainsi que celui de Namur. L’archevêché perdit, au point de vue de la juridic¬ tion épiscopale , les archidiaconés de Bruxelles et d’Anvers, mais il conserva ses anciennes limites dans la contrée qui forme aujourd’hui le département du Nord ; il n’y eut point de changement pour les décanats. évêché d’arras. Des modifications s’introduisirent dans les parties de notre département soumises à l’évêque d’Arras : dans l’archidiaconé d’Artois, le décanat d’Ar inentières fut formé aux dépens du décanat de La Bassée qui diminua d’étendue ; et dans Parchidiaconé d’Ostrevaut, les décanats ( Y Arleux en Palluel , de Marchiennes et de Bâches , détachés de celui de Douai , et les décanats d ’Hasnon et de Bouchain, détachés de celui de Valenciennes. évêché de tournai. L’évêque Jean de Vendeville établit, en 1588 ou 1589 , de nouvelles divisions qui amenèrent des changements dans les circonscriptions qui sont actuellement — 123 — du département du Nord. De l’ancien décanatde Lille furent formés les trois décanats de Lille, Qnesnoy -sur-Deûle et Wavrin ; l’ancien décanat de Seclin fut changé en ceux de Seclin et de Carvin, et le décanat d’IIelchin fut décomposé en ceux de Tourcoing et de Roubaix ; Saint Arnaud forma un décanat particulier; enfin, du décanat de Courtrai fut détaché celui de Menin, qui plus tard fut divisé lui-même en décanat de Menin pour les Pays-Bas et de Werwick pour la France. diocèse de saint-omer. Après la destruction de Térouanne en 1553, du diocèse, dont cette ville était le siège, furent for¬ més les diocèses de Boulogne, de Saint-Omer et d’Ypres. Le diocèse de Saint-Omer comprenait les archidiaconés d 'Artois et de Flandre. Ce dernier archidiaconé était formé dans la circonscription actuelle du département du Nord , du décanat de Bollezeele détaché de ceux de Cassel et de Saint- Omer, du décanat de Morbecque, dont les six paroisses Boese- ghem, Ebblinghem, Lynde, Sercus, Steenbecque et Thiennes avaient été détachées du décanat de Merville , du décanat de Bourbourg avec vingt-quatre paroisses, du décanat de Cassel avec neuf paroisses, et du décanat de Merville avec Estaires, La Gorgue, Neuf-Berquin, Vieux-Berquin, Haverskerque et ce qui forma plus tard le décanat de Morbecque. diocèse d’ypres. Outre les décanats d’Ypres, de Poperingue et de Fûmes qui comprenaient plusieurs paroisses faisant aujourd’hui partie du département du Nord, ce diocèse com¬ prenait le décanat de Warneton avec vingt-quatre paroisses, le décanat de Bailleul avec treize paroisses, dont les princi¬ pales étaient Cae>tre , Flêtre , Hazebrouck , Meteren et Stra- zeele, le second décanat de Cassel avec vingt paroisses, parmi lesquelles Arnecke, Ilardifort, Steenvoorde , le décanatde Bergues avec vingt-neuf paroisses, et le décanat de Dunkerque détaché en 1781 de celui de Bergues. Le concordat signé à Paris le 15 juillet 1801 et ratifié à Borne le 15 août, incorpora à la partie du département dn — m — Nord qui avait formé le diocèse de Cambrai, plusieurs déca- nats qui avaient appartenus aux anciens diocèses d’Arras, de Tournai, d’Ypres et de St-Omer. L’archevêque, monseigneur de Rohan, se démit de son siège à la demande du souverain- Pontife; M. Louis Belmas fut nommé évêque de Cambrai en avril 1802. {La suite prochainement.) ESQUISSE GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU TîORD (Suite) Bassin de Namur. Ce bassin carbonifère s’étend de Liège jusqu’à Tournai où se trouve son dernier affleurement occi¬ dental. Il se divise en deux bandes séparées par le terrain houiller et correspondant aux deux versants du bassin. Bande du Sud ou de Landlies. Elle présente à peu près la même constitution géologique que la bande de Berlaimont. Le calcaire gris compacte qui correspond à celui de la Garenne y est caractérisé par l’abondance du Produclus cora. Le calcaire noir bleuâtre qui le surmonte contient fréquem¬ ment Productus giganteus. On y trouve à peu de distance des schistes houillers une petite couche de houille sèche ; c’est là un fait qui n’est pas propre au bassin de Namur, car il se reproduit à Yvoir dans le bassin de Dinant. Cette bande se continue d’une manière assez régulière entre la Sambre et la Meuse; elle y est complètement renversée de manière à plonger vers le Sud, paraissant ainsi superposée aux schistes houillers et recouverte par les psammites dévoniens. Vers l’E. les couches inférieures s’amincissent; le calcaire noir à phtanite disparaît le premier ; le calcaire sublamellaire à Sp. mosquensis se voit encore à Malonne et à Wépion ; à Choquier près de Liège, il n’y a plus que les zones à Productus cora et à Productus giganteus ; plus loin le calcaire carbonifère — 125 disparaît et les schistes houillers forment le bord Sud du bassin. Vers PO. de la Sambre le calcaire carbonifère de la bande Sud est très-irrégulier; presque partout il a été englouti dans la grande faille qui limite de ce côté le bassin de Namur. Bande nord ou de Soignies. Les couches inférieures de cette bande n’affleurent que dans le Hainaut; à PE. comme à PO. elles disparaissent sous les couches supérieures qui s’avan¬ cent plus loin sur le rivage du bassin et reposent alors direc¬ tement sur le terrain dévonien. Dans le Hainaut le calcaire carbonifère est presque partout recouvert par le limon ; on ne peut guère l’observer que dans les vallées profondes telles que celles de l’Escaut, de laDendre et autres. Il y est disposé en couches faiblement inclinées. Les principales zones que l’on peut y reconnaître sont : Calcaire de Ma f fies, sublamellaire, en bancs épais, exploité comme pierre de taille et pour faire de la chaux grasse. C’est la pierre de Maffles, de Soignies, des Écaussines. Le Spirifer mosquensis s’y trouve assez abondamment. Calcaire d'Ath, noir, subcompacte, exploité anciennement près de cette ville pour faire de la chaux hydraulique. On y trouve en grande quantité Spirifer mosquensis, Productus Flemingii, Philipsia gemmulifera. Il correspond aux bancs supérieurs des carrières de Soignies où MM. Cornet et Briart (1) ont trouvé le Sp. cuspidatus et V Eomphalus pentan- gulatus associés au Sp. mosquensis. Ces fossiles sembleraient indiquer des rapports avec le calcaire de Waulsort. Calcaire de Mevergnies , noir, en plaquettes minces ou en bancs plus épais subgrenus, contenant de nombreux phtanites et des traces de Bellerophon. C’est assez exactement le niveau de Bachant. Dolomie de Brugelette contenant un grand nombre de tiges d’encrine, on peut y distinguer plusieurs niveaux minéralo- (1) Bull. acad. Belg. 2e série, t. 21, p 11. — 126 — giques. Ainsi à la base elle est remplie de cavités géodiques, tapissées de cristaux de calcite. Calcaire de Thieusies , compacte, gris à Productus cora ; les bancs inférieurs exploités à Lens sont encore noirs et con¬ tiennent quelques lamelles d’encrines. Calcaire de Péruwelz , noir, compacte, exploité comme pierre de taille et même comme marbre, à Péruwelz, Sirault, Basècle et à Blaton. Ainsi la bande calcaire de Soignies ressemble presque com¬ plètement à celle du massif de Berlaimont ; toutefois on n’a pas encore trouvé dans ce dernier le niveau à chaux hydrau¬ lique d’Ath. Le calcaire de Tournai appartient probablement au même niveau ; mais comme il est complètement isolé du reste de la bande de Soignies , on n’a pas encore pu déter¬ miner sa position exacte. Il est très-riche en fossiles. Dans les provinces de Namur et de Liège les parties infé¬ rieures du calcaire carbonifère manquent. Ainsi au château de Mialmont, dans la vallée de l’Orneau, c’est la dolomie qui repose directement sur le terrain dévonien. Elle y forme, comme sur les bords de la Meuse, entre Namur et Liège, des rochers pittoresques, dont les parois perpendiculaires sont creusées de nombreuses cavités qui servent d asile aux corbeaux. Le bruyant accueil que ces oiseaux font au voyageur accroit encore l’aspect déjà si sauvage de ces vallées. A Hucorgne la dolomie est réduite à une faible couche , et plus loin le calcaire supérieur lui-même disparaît, les schistes houillers venant se superposer directement au terrain dévo¬ nien. Le calcaire carbonifère supérieur reparaît à Visé, entre Liège et Maestricht. Il y est très-fossilifère, aussi a-t-on pris le calcaire de Visé comme type de l’assise supérieure du calcaire carbonifère. M Horion y a distingué plusieurs niveaux paléontologiques qui n’ont pas encore été reconnus dans les autres massifs. A l’O. de Tournai le calcaire carbonifère est caché par les — 127 — dépôts plus récents ; mais de nombreux sondages l’ont indi¬ qué à Vred, Flines-les-Raches, Moncheaux, Thumeries, Cam- phin , Carnin , Don , Lille , Loos , Fâches , Béthune , Lillers , Thérouanne, Lumbres, etc. Boulonnais. Le calcaire carbonifère reparaît dans le Bou¬ lonnais avec le terrain dévonien. On peut y distinguer trois zones : Dolomie de Ferques remplie de tiges d’encrines comme celle de Brugelette, et exploitée pour castine dans les usines de Marquise. Calcaire du Haut-Banc , gris foncé avec veines rougeâtres. Il abonde en Productus cor a. Il fournit le marbre Henriette. Calcaire Napoléon , gris blanchâtre. Les fossiles y sont rares sauf le Spirifer glaber. M. Scharpe y a recueilli un certain nombre d’espèces qui se retrouvent presque toutes à Visé et dont les principales Spirifer glaber , Terebralula haslata ( saccu'us ), Spirifer lineatus, Productus undalus. Spirifer duplicicosta. se retrouvent à Limont dans le massif de la Sambre. Le cal¬ caire noirâtre du bois des Aulnes, situé au contact du terrain houiller d’Hardinghem contient le Productus giganteus. On peut partager les diverses zônes du calcaire carbonifère en trois assises, comme le montre le tableau suivant. Si on voulait donner à ces assises des noms de localité tirés des endroits les plus fossilifères, on pourrait nommer l’assise inférieure assise de Tournai , l’assise moyenne assise de Waulsort, et l’assise supérieure assise de Visé. BASSIN DE DINANT. BASSIN DE NAMUR. 128 j- < z 25 O G> O CQ 02 . 'G CO 02 G 43 • »-< CO gS fcb« o S Cm • •—* •= a o .Ëp K G cO O æ 2- o cr •« "3 ! ® cS Cm Cm • •- -p 0:5 Sj- «3 ~ O ü 03 M-» • 02 02 02 G a a a Cr* o o G Cm c *02 P 02 Pu 02 fi #c- ^ o. 02 C0 M-> Z? 03 fi 02 G 02 fi P rt M cj S *c fi CO £ o -5 •3 jf O o fi G O CJT3 c 50 g. 2 ■g a rr bo CU 6m mM o 02 O --S cO o a? *g"0 O i • 02 Cm fco s g“g 02 G • cO G t« o ^’a. O) *02 .tP* cO C2 02 rt'0 CJ cO O cO O a. 03 c« G •r* ? *G - " CO a> ► <î *b Cm ’o G © eo* .2 o G 33 O O) 02 ~a G G Cm *>k fil Cm g rt ■3* CJ o G G 02 G "b O) Cm *G O *G CJ G cO 02 "O 02 Cm S O *3 cj 02 T3 cO ^2 cO O C .8 r* g tD Cm 50 o *02 S 02 o CO o •Îm • CO G O 'o o G Cm ^ Gh « fi cO U CO eo 02 02 02 »4m • G M-» Cm • rCJ » G «G B . 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Les inscriptions puniques ou phéni¬ ciennes se lisent assez facilement à l’aide de l’hébreu ; et il est remarquable, comme le fait observer M. Faidherbe, que ce peuple que les Israélites reniaient comme frères et appe¬ laient Chananéens, parlait une langue sémitique et même un vrai dialecte de l’hébreu. L’inscription présentée par M. Faidherbe, comme toutes celles qui ont été recueillies jusqu’à présent, ne renferme que des noms de dieux et ceux des personnes qui ont voué la pierre. Dans la séance du 5 juillet dernier, M. Corenwinder a communiqué une première série d’expériences qu’il a entre¬ prises sur la transpiration des plantes. On sait depuis cent cinquante ans, par les belles recherches du physicien anglais Haies , que les végétaux exhalent une grande quantité de liquide et que cette perte varie suivant de nombreuses circonstances, particulièrement en raison de la température. Les conclusions de Haies ont été conlirmées depuis par M. Chevreuil et tout récemment par M. Barrai. Pour rendre ce phénomène plus sensible et en montrer les variations, M Corenwinder a imaginé un appareil encore imparfait, sans doute, mais qui pourra être amélioré. Il (l) Bulletin II, p. 240. — 130 permet de mesurer les quantités d’eau que des plantes, des branches garnies de feuilles transpirent dans des conditions déterminées. Bien entendu, ces végétaux sont maintenus dans leur état normal. Les chiffres qu’il a obtenus ne sont pas susceptibles d’une précision absolue, mais les rapports qu’ils présentent révè¬ lent des faits très-importants. Ainsi, lorsque la température ne dépasse pas 10° et que l’air est saturé d’humidité, la transpiration pendant le jour est peu sensible ; dans les mêmes conditions et pendant la nuit elle est nulle. Si au contraire la chaleur augmente et si l’air est sec, la plante exhale une quantité d’eau beaucoup plus considérable que l’on peut recueillir et mesurer dans un tube gradué fixé à l’appareil. M. Corenwinder ayant eu la curiosité d’examiner l’eau très-claire et limpide obtenue par la transpiration, a trouvé que ce n’était pas de l’eau pure, mais quelle laisse par l’éva¬ poration un résidu de matière organique. M. Tilmant, directeur de l’École primaire supérieure, a présenté à la Société le Planisphère des Ecoles, qui a pour but de faciliter l’étude des constellations, en reproduisant le mouvement apparent du ciel, et donnant pour chaque jour et même pour chaque moment indiqué dans l’année, l’aspect de la partie visible sur l’horizon de Lille, ou sur celui de Paris, qui diffèrent peu. Le Planisphère, pivotant autour du pôle Nord, fournit aussi très-simplement l’indication des heures de lever et de coucher du soleil, ses différences de hauteur sur l’horizon à midi, selon l’époque de l’année, et par suite explique l’inéga¬ lité des jours et des nuits. La réalité des faits dont le Planisphère montre les appa¬ rences, est rendue plus intelligible par une sphère terrestre suspendue sous le ciel. y — 131 — ACADÉMIE DE BELGIQUE. Classe des Sciences. Dans les premiers mois de cette année, FAcadémie a en¬ tendu la lecture de plusieurs mémoires de mathématiques de la part de M. Catalan, Gilbert, Orlofï ; M. Folie propose de diminuer de 0,137 la valeur attribuée par Airy à la densité moyenne de la terre 6,439. M. Houzeau (1) donne des tables qui permettent de calculer rapidement les phases de la lune, pour tel jour passé ou futur. Il fait remarquer que cette question peut être très-intéressante pour les historiens : ainsi la clarté de la nuit après une bataille a une influence sur les poursuites que le vainqueur fait de l’armée battue. M. Plateau établit une formule permettant de relier l’intensité des sensa¬ tions physiques à l’intensité de la cause excitante. Les aurores boréales du 4 février et du 10 avril ont donné lieu à plusieurs communications de M. Quetelet (2). Notons aussi quelques recherches chimiques par M. Swarts et par MM. de Koninck fils et Marquart. M. Glossener (3) fait remarquer que la foudre et les aurores boréales influent souvent sur les boussoles des vais¬ seaux en diminuant et même en détruisant complètement l’aimantation de l’aiguille ou en renversant les pôles. Chacun comprend les accidents qui peuvent en résulter. Il propose de placer à côté de la boussole magnétique, une boussole électro magnétique dont l’aiguille sera toujours tenue aiman¬ tée par le courant et dont le pôle austral pourra toujours être reconnu par la règle d’ Ampère. MM. Briart et Cornet (4y établissent à l’aide des mollusques divers niveaux dans le terrain houiller du Hainaut. Nous reviendrons bientôt sur cet important travail qui fait suite à celui de M. Malherbe pour le bassin de Liège. MM. de Koninck fils et Davreux (5) ont analysé les grenats de Salm Château. Ils leur trouvent la composition de la Spes- (1) Bulletin ac. Belg , l. 38, p. 197. (2) ld., p. 177, 312, 375. (3Ï Id., p. 321. (4) Id., p. 21. (5) ld., p. 324. — 132 — sartite ou grenat alumino-manganésien. Ils ont aussi analysé la roche qui les contenait et lui ont trouvé la composition de la Damourite, espèce de mica hydraté. Ils auraient dû s’en tenir là et ne point conclure que cette roche est réellement de la Damourite. Deux substances pierreuses peuvent donner le même résultat à l’analyse tout en étant très-différentes. C’est ce qui a lieu dans le cas présent : la Damourite a une com¬ position bien définie , tandis que la roche schisteuse en question varie avec la localité et le niveau géologique. On ne peut en juger d’après un seul échantillon. M. Félix Plateau (6), continuant ses intéressantes recherches sur la faune belge, a donné le catalogue raisonné des Myria¬ podes. Nous le reproduirons prochainement. M. Van Beneden (7) a reconnu dans un os des cavernes des environs de Liège, un humérus de Gypaète, vautour qui habite encore les Alpes et les Pyrénées. On l’appelle souvent vautour des agneaux, parce qu’on l’accuse d’enlever les agneaux et même les enfants Le Gypaète ne se rend pas coupable de pareils méfaits ; ses serres peu crochues ne lui permettraient pas d’imiter l’aigle sous ce rapport ; mais il diffère des autres vautours parce qu’il ne vit pas en troupe et parce qu’il se nourrit de proie vivante. Malheur à l’agneau ou à la brebis malade attardée sur le bord d’un précipice : le Gypaète fond dessus et d’un coup d’aile la fait rouler dans l’abime, où il va ensuite la dévorer à loisir. Le savant professeur a présenté (8) aussi sur les Chauve- souris de Belgique et leurs parasites, un grand travail qui sera inséré dans les mémoires de l’Académie. En attendant, il résume en quelques mots les résultats principaux de ses recherches. Les chauve-souris qui devraient, plus que tous les autres animaux, subir l’effet de la concurrence vitale et de la sélec¬ tion naturelle, n’ont éprouvé aucun changement depuis l’époque diluvienne. (6) ld., p. 409. (7) Id., p. 16. (8) Id., p. 207. — 133 - Les chauve-souris ne nourrissent pas cT Ascarides ; leurs vers intestinaux sont spéciaux ; ils subissent les effets du sommeil hibernal. M. Van Beneden fils qui promet de marcher sur les traces de son illustre père, a communiqué la suite de ses recherches sur les Grégarines (9). BIBLIOGRAPHIE. CHAPITRES DE L'HISTOIRE DE LILLE Par J. Houdoy. IL Le privilège de non-confiscation. Parmi les droits dont jouissait la ville de Lille, le plus im¬ portant, le plus particulier, était le privilège de non -confis¬ cation. Dans toutes les provinces de la France, le droit écrit et le droit coutumier reconnaissaient au roi le droit de confisquer les biens de ceux qui étaient par jugement déclarés coupables du crime de lèse-majesté et de certains autres forfaits : seuls, les habitants de la Flandre wallonne, formée des villes et ch⬠tellenies de Lille, Douai et Orchies, n’étaient pas soumis à cette peine inique, qui punissait non-seulement le coupable, mais aussi sa famille innocente de son crime. M. Houdoy s’est occupé de l’histoire de ce glorieux privilège ; il a suivi, dans les faits, la lutte que les échevins de Lille ont soutenue durant cinq siècles, contre tous les intérêts et tous les gouver¬ nements, pour maintenir cette précieuse liberté. Comme toutes les autres franchises municipales, le privi¬ lège de non-confiscation a dû précéder la rédaction de la charte des libertés communales de la ville de Lille ; il est mentionné en quelques mots dans le livre Roisin ; en 13i0, e traité des XV 11 articles le formule d’une manière plus nette et plus développée. Quelques années avant ce traité, les officiers de la couronne (9) Id., p. 210. — 134 — avaient fait confisquer les biens d’un bourgeois de Lille ; en 1343, les échevins s’engagèrent à soutenir les héritiers de ce bourgeois dans ses réclamations contre la confiscation, s’ils voulaient promettre de ne pas transiger. Des hérétiques lillois, cités devant l'inquisiteur en 1416, furent condamnés à la peine du feu avec confiscation de leurs biens, comme cela se pratiquait partout ailleurs Le magistrat de Lille, pour gagner du temps, fit appel en cour de Rome contre la confiscation, puis s'adressa au comte de Flandre Philippe-le-Bon ; celui-ci décida que les biens des bourgeois de Lille seraient rendus à leurs héritiers, attendu que jamais dans la Flandre wallonne il n’y avait eu de confiscation, mais en ajoutant que sa sentence ne pourrait être invoquée comme un précédent. Quelques années après, un autre bourgeois, accusé de sédition contre le roi, fut condamné au bannissement et à la confiscation; en vain l’officier royal insista, au nom du sou¬ verain, pour mettre la main sur les biens du condamné. Le magistrat invoqua l’antique privilège de non-confiscation. Cette même franchise fut reconnue en 1453, à l’occasion du jugement du Piémontais Louis Assegnier, déclaré coupable du crime de sodomie ; tous ses biens furent confisqués au profit de Philippe le-Bon, à l’exception de ceux situés dans la châtellenie de Lille, oii il n’y a point de confiscation. Il en fut de même dans l’affaire du célèbre connétable de Saint-Pol, décapité en place de grève pour trahison, par ordre de Louis XI ; par ses lettres en date du 24 mars 1476, Marie de Bourgogne accorda la main-levée des terres et biens du comte de Saint-Pol situés dans la châtellenie. La Flandre wallonne était devenue une terre franche dont les proprié¬ taires étrangers eux-mêmes partageaient les immunités. L’époque de la domination espagnole et la lutte du duc d’Albe contre les libertés flamandes et contre le calvinisme, devaient susciter de nouvelles discussions au sujet du privi¬ lège reconnu partant de jugements. En vertu d’un placard de Charles-Quint , qui prononçait la confiscation contre les — 135 — protestants, le lieutenant du gouverneur de Lille saisit les biens d’un hérétique de Mouveaux ; sur les réclamations des échevins de Lille, le conseil de Flandre décida en 1543 qu’il y aurait surséance à ce sujet ; et il résulta d’une enquête opérée par le gouverneur de Lille, que les villes et châtelle¬ nies étaient en possession, de temps immémorial, du privilège de non-confiscation pour tous cas et sans aucune exception. Un nouvel édit de Charles-Quint, publié en date du 20 septembre 1549, changea la situation : l’empereur y pronon¬ çait la confiscation des biens des hérétiques, nonobstant cou¬ tumes, privilèges et usances prétendues par les villes et pays. Cet édit a été transcrit dans les registres aux mandements de Lille; mais il ne porte pas, comme les autres actes, la mention d’une publication à la bretèque ; et, sous le règne de l’empereur, aucune confiscation n’eut lieu à Lille ; on voit même sous le règne de Philippe II, en 1562, trois hérétiques condamnés à perdre leurs biens ès-lieux où confiscation a lieu; et le 1er juin 1565, le même souverain confirma, par lettres-patentes, les coutumes de Lille dans lesquelles est nettement formulé le privilège de non-confiscation. En cette année 1565, un ministre protestant, du nom de Paul Chevalier, fut aussi condamné à la peine de mort avec confiscation des biens. Il y eut, au sujet de cette dernière peine, de longues discussions entre le gouverneur, d’une part, et de 1 autre les échevins, les nobles et les notables de la ville ; la régente Marguerite écrivit une lettre particulière au magistrat pour l’engager à céder dans ce cas particulier : Les échevins furent inflexibles ; ils soutinrent leur privilège ; le gouvernement dut encore céder, malgré les placards de Charles-Quint. Le duc d’Albe renouvela la lutte. Le 19 août 1567, il fit signifier au magistrat que les biens de Jehan le Sauvage, sei¬ gneur d’Escobecques, étaient confisqués ; les échevins protes¬ tèrent et firent consigner leur protestation dans le Registre aux mémoires. Le 15 décembre suivant, le gouverneur avertit — 136 - les mêmes officiers municipaux, que, par ordre du duc, il allait procéder à la saisie des biens de tous ceux qui avaient quitté le pays à cause des troubles religieux. Après avoir pro¬ testé de nouveau, les échevins eurent recours aux États de la Flandre wallonne, dont ils étaient membres. A la première demande de subsides que fit le duc, les États déclarèrent qu'ils subordonnaient l’accord de l’aide à la reconnaissance du privilège de non- confiscation. Dans sa réponse à cette observation, le duc d’Albe invoqua l’autorité du placard de 1549 ; nouvelles remontrances des États en 1571, nouvelle lettre du duc défendant d'insister davantage. Cette défense fut le signal de la discussion : à chaque sentence portée par les tribunaux du gouvernement, le procureur des États répondait par un appel au gouverneur général. Le 12 juin 1573, le duc demanda des subsides nouveaux : les Etats subordonnèrent encore l’octroi de ces aides à la reconnais- sance du privilège de non- confiscation, et finirent par de¬ mander à être entendus à ce sujet devant le Conseil privé ou le grand Conseil de Malines. Don Louis de Requesens, suc¬ cesseur du duc d’Albe, qui reçut cette dernière demande, proposa une transaction ; les États la refusèrent et ne vou¬ lurent plus même consentir à comparaître devant les juges à qui ils en avaient appelé ; après de nombreuses lettres et de nombreux mémoires, de concession en concession, le gou¬ verneur général finit par déclarer, dans l’accord du 12 octobre 1575, qu’il maintenait et conservait à ceulx des villes et châtel¬ lenies tontes leurs anchiennes coutumes voire de non-confisquer, comme elles leur sont concédées et que sa dite Majesté les leur a juré. Les Etats demandaient plus ; ils finirent pourtant par se déclarer satisfaits de cette reconnaissance qui ne tranchait pas définitivement la question. Le même accord renvoyait tous les procès relatifs à la confiscation devant la gouver¬ nance de Lille, Douai et Orchies ; et les États savaient que les officiers de cette juridiction royale étaient favorables à leurs prétentions. C’était encore un véritable triomphe. — 137 — Après la mort Je don Louis de Requesens, les États affir¬ mèrent encore l’antique privilège , en 1577, dans le projet du traité d’union avec les États-Généraux , en 1579, dans le traité d’Arras, par lequel la Flandre se réconcilia avec Phi¬ lippe II. Lorsqu’en 1580, ce souverain ordonna la confiscation des biens de ceux qui tenaient pour le prince d’Orange, le gouverneur de Lille omit, à la bretèque, la publication de ce passage de l’ordonnance royale ; et dans un jugement rendu en 1582 contre des partisans de la Hollande, le prince de Parme, gouverneur général des Pays-Bas, ne put insérer la confiscation des biens. A partir de cette époque, le privilège de la ville ne fut plus menacé. Le magistrat ne fut point satisfait de ce triomphe ; il voulut obtenir la réparation de quelques confiscations qui avaient eu lieu au mépris de ce privilège. Les nombreux procès engagés à cette occasion se terminèrent tous à l’avan¬ tage de la ville. Voilà l’histoire du privilège de non-confiscation à Lille : elle est intéressante et glorieuse pour la cité ; elle est féconde en enseignements. Remercions M. Houcloy, qui nous Fa fait connaître, avec des citations qui ne permettent aucun doute fur les faits qu’il avance, avec des pièces justificatives qui sont de ce chapitre le Cartulaire du Privilège de non-confisca¬ tion à Lille. C. DEHAISNES. (La suite prochainement). CHRONIQUE. Inauguration «lu musée Berthonet à Blouai. Les érudits et les amateurs qui s’occupent d’ethnographie, ceux surtout qu’intéresse la question de / âge de pierre , peu¬ vent enfin visiter et étudier dans le nord de la France une curieuse et importante collection : le musée, offert à la ville de Douai par M. S.-Ilenry Berthoud, est ouvert au public depuis le 30 juin dernier. M. Berthoud ne s’est point contenté de vulgariser la science en des livres écrits avec une plume toujours noble, élégante. — 138 — et facile , et de mettre ainsi les découvertes des voyageurs, des naturalistes et des géologues à la portée de toutes les intelligences ; il a consacré de longues années à 'ormer une collection ethnographique. En relation avec d’éminents voya¬ geurs et des savants distingués, avec les missionnaires les plus hardis et les collectionneurs les plus intelligents, il a pu, en faisant des sacriüces considérables , réunir un nombre considérable d’objets relatifs aux moeurs, aux usages, à l’art primitif des populations sauvages et des contrées les moins explorées. Attentif à suivre, dès ses premiers débuts, l’étude de la période que l’on appelle préhistorique , il a recueilli beaucoup de haches, de flèches, de couteaux, d’ustensiles de ménage et d’objets de toilette, en silex. Le travail de l’enfance de l’humanité se trouve ainsi à côté du travail des sauvages de notre époque ; on voit que l’homme primitif de nos contrées vivait et travaillait d’après les usages et les moyens employés de nos jours par l’insulaire encore barbare de l'Océanie. A ces objets si importants pour la science et pour l’histoire du travail, M. Berthoud a réuni des objets qui rappellent des événements historiques , tels que la hache en pierre sous laquelle périt le capitaine Cook, avec de nombreux costumes qui intéressent l’art et la curiosité. Nous avons déjà rappelé à nos lecteurs qu’en 1869 M. Berthoud et M.e Jomard-Boselli ont fait don à la ville de Douai des terres cuites , des bijoux en or et en pierre précieuse, et des Katouns ou inscriptions hiéroglyphiques, provenant de l’Amérique centrale, qu’avait réunis le savant M. Jomard. B y a quelques années, en cédant, avec cette précieuse collection , la plupart des objets qu’il possédait lui-même et les ouvrages spéciaux de sa riche biblio¬ thèque, M. Berthoud s’était réservé la jouissance de la sec¬ tion de Vâge de pierre . Il vient de se dépouiller complètement; toutes ses collec¬ tions sont aujourd’hui installées dans une salle du musée de Douai. Au lieu de livrer les objets qu’il avait réunis au hasard d’une vente publique , au lieu de laisser à des héritiers la mission d octroyer son legs à une ville, au lieu d'abandonner à une autre génération le soin d’installer son musée ethno¬ graphique, M Berthoud a voulu que sa collection fût conser¬ vée dans son ensemble et dans ses détails, il a voulu lui- même en faire don à la ville de Douai » il a voulu lui-même l’installer et la classer dans la salle qui lui est destinée; et quand il a vu que cette installation n’était pas indigne des objets qu’elle devait contenir, il a complété sa donation en y ajoutant la section de Vâge de pierre. C’est un exemple qui devrait faire réfléchir tous les collectionneurs; nous espérons qu’il sera imité. — 139 — C’est le 30 juin dernier que M. Berthoud a confié son musée à la ville de Douai. La municipalité de la ville a voulu que cet acte s’accomplit solennellement, dans l’ancienne grande salle des fêtes : un public nombreux et distingué se pressait dans cette salle ; le savant ethnographe y avait pris place auprès de M. le maire de la ville, et de M. le baron de Watteville délégué de M. le ministre de l’instruction publique. Dans un rapport, remarquable par cette élégante simplicité qu’il est si rare de trouver aujourd’hui, M. Berthoud a fait l’his¬ torique de sa collection; ses récits pleins de charme ont intéressé l’auditoire; tous les assistants ont été émus quand l’orateur a exprimé son regret de ne pas voir dans cette en¬ ceinte son ami M. Asselin, ancien maire de Douai, et surtout quand il a dit combien il lui était pénible de se séparer de ces objets au milieu desquels, durant tant d’années, il a écrit, pensé et vécu. Sa voix était pleine de larmes; et il y avait des pleurs dans les yeux d’un grand nombre d’hommes qui sem¬ blaient défier l’émotion. M. le baron de Watteville a ensuite interprété la pensée de tous avec autant d’élévation que d’éloquence, en montrant l’utilité de la collection Berthoud au point de vue de l’étude de la géographie, et en remerciant, au nom de M. le ministre, et la ville et le généreux donateur. M. Merlin, maire de Douai, avait la veille, lors de l’inauguration du musée, exprimé à M. Berthoud la reconnaissance de tous ses concitoyens. Le nom de la famille Berthoud était dans la mémoire de tous les bibliophiles à cause des nombreux ouvrages publiés durant deux à trois siècles par les presses cambrésiennes. tl sera connu, de tous et au loin, par le musée ethnographique dont se glorifie à bon droit la ville de Douai. Météorologie. Température atmosphér. moyenne. — — des maxima. — — des minima. — extr. maxima, le 18. — — minima, lesîet II Baromètre hauteur moyenne, à 0°. — — extr. max.le 10. — — — min. le 9 . Tension moy. de la vap. atmosph. Humidité relative moyenne %• • Épaisseur de la couche de pluie. . — — d’eau évap. Juin Juin 1872. année moyenne 15? 81 15? 94 20? 44 11? 24 27? 1 8? 00 759“™ 465 759““ 749 767““ 80 751““ 77 9““58 10^26 65,02 69,85 82““ 50 63““ 06 133““ 74 128““ 52 — 140 — La température atmosphérique moyenne différa peu de celle du mois correspondant année moyenne. La température diurne fut à peu près constante du 1er au 11. Dès ce moment elle s’éleva jusqu’au 25 et redescendit du 25 au 30. Les vents dominants furent ceux du S.-O. (9 jours) et du N.-O. (7 jours). Le ciel fut serein 1 seul jour, demi -couvert 25 jours et 4 jours seulement complètement couvert. La direction moyenne des différentes couches de nuages fut du S.-O. au N.-E. La hauteur moyenne du baromètre fut aussi sensiblement égale à celle de juin année moyenne. Cependant la quantité de pluie fut de près de 20™" supérieure à celle qu’on observe ordinairement. Celte différence est due surtout aux pluies d’orage des 4, 7 et 24 qui, ensemble, fournirent une couche d’eau d’une épaisseur de 51 56. Or, si on retranche cette épaisseur des 82m™ 50, épaisseur totale de la couche d’eau pluviale du mois, il reste 30n™ 94 pour 14 jours de pluie, in¬ dice certain de la présence d’une faible quantité de vapeur d’eau dans les hautes régions atmosphériques, concordant avec les indications barométriques. L’air fut moins humide pendant ce mois qu’en année moyenne, ce qui rend compte de la plus grande épaisseur de la couche d’eau évaporée, et de la faible tension de l’électri¬ cité atmosphérique. L’orage du 24 fut accompagné de très-gros grêlons, mais leur rareté ne causa pas de dégâts aux récoltes, qui n’eurent à souffrir que de l’abondance de la pluie et de la force du vent. On observa 4 halos solaires indice de pluie dans les vingt- quatre heures de leur apparition. V. Meurein. Lille, lmp. Six-Horemans. 72-1 7f 2 4° Année. — fS0 8. — Août et Septembre 1872. ESQUISSE HISTORIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD. (Suite). Organisation administrative. Moyen-âge. — Depuis les commencements de la féodalité jusqu’aux temps modernes, la Flandre, le Ilainaut et le Cambrésis ont offert une organisation bien ordonnée dans son ensemble et ses détails. Dans toutes les provinces et toutes les villes importantes se retrouvent, à ce point de vue, des institutions qui ne diffèrent que par des modifications peu importantes. Le comte, ainsi que nous l’avons déjà dit, réunissait le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire et le commandement des armées. Il exerçait complètement ces pouvoirs dans les domaines très-étendus, dont il possé¬ dait la seigneurie foncière. Sans doute les terres qui appar¬ tenaient au clergé et à la grande féodalité échappaient à son action directe ; mais comme ces terres possédaient des insti¬ tutions analogues à celles qui étaient établies dans les domaines du comte, nous n’avons pas à nous occuper ici de savoir à quelle influence principale elles étaient soumises. La grande étendue des contrées sur lesquelles dominaient les comtes de Flandre, de Ilainaut et du Cambrésis, la multi¬ plicité des affaires dont ils avaient à s’occuper, et la fréquence des guerres, leur rendirent bientôt impossible l’exercice per¬ sonnel de l’administration au point de vue des finances, de la police, de la guerre et de la justice : ils furent forcés de confier leurs pouvoirs à des délégués qui furent leurs repré¬ sentants. Ces délégués étaient les châtelains, les baillis et les écoutèles, les membres de la Chambre des Renenghes, les receveurs des épiers et autres impôts, les régisseurs des — 142 — domaines, et plus tard le magistrat des villes auquel le comte octroya les droits les plus étendus. Les châtelains étaient, dans une partie du territoire qui portait le nom de châtellenie , les représentants du comte ; ils agissaient en son nom, lieu et place, et c’est pour cela qu’ils sont souvent désignés sous le nom de vicomtes. Chargés origi¬ nairement de la garde du burg ou château-fort, ils eurent longtemps le commandement militaire dans la châtellenie ; c’est à eux qu’il appartenait de présider la cour des échevins et celle des vassaux ; ils exerçaient aussi le pouvoir judiciaire au nom du comte. Mais comme ils finirent par acquérir des fiefs considérables dans la circonscription qui leur était confiée, leur puissance devint dangereuse pour le comte lui- même ; alors ce dernier leur retira leur pouvoir et le trans¬ féra en des mains différentes. Au XIVe siècle les cours sei¬ gneuriales furent chargées des affaires financières, domaniales et judiciaires dans les châtellenies ; à des gouverneurs ou capitaines fut donné le pouvoir militaire ; les baillis prirent la place des châtelains près du magistrat des villes ; et les villes elles-mêmes obtinrent d’importants privilèges. Un certain nombre de châtelains durent céder ou vendre leurs droits : beaucoup conservèrent leur titre ou celui de vicomte ; mais ils perdirent tout pouvoir effectif. Le mot châtellenie s’appliqua à un arrondissement administratif et non plus à une contrée dans* laquelle le pouvoir appartenait à un châtelain. Parmi les châtellenies de la Flandre, on peut citer celle de Bourbourg, dont l’existence est mentionnée en 1038 et qui fut rachetée par le comte Guy, de 1272 à 1279 ; la châtellenie de Cassel, qui fut acquise au moyen d’échange par la comtesse Jeanne, en 1218 ; celle de Bergues, qui a existé de 1096 à 1380 et dans laquelle on trouve des vicomtes en 1436 ; celle de Lille, mentionnée en 1039, qui passa à la maison de Bourbon et ainsi aux rois de France ; celle de Douai et Orchies, qui dura pendant plusieurs siècles. « — 143 — Les baillis étaient des fonctionnaires amovibles chargés de représenter le comte dans les tribunaux des cours féodales et des échevinages ; ils y remplissaient le rôle de ministère public. L’historien Marchautius fait connaître d’une manière très-exacte la nature des fonctions du bailli, en les comparant à celles des échevins : « Les échevins jugent, les baillis » exécutent le jugement, ainsi que les arrêtés des échevins » et les ordonnances des comtes ; les premiers appellent » devant eux, les seconds ont le droit de prise de corps, » d’emprisonnement et d’accusation ; ceux-là reçoivent un » traitement annuel, ceux-ci se paient sur le montant des » amendes , dont ils remettent l’excédant au comte ; les » échevins représentent le peuple dont ils soutiennent les ï droits, les baillis mettent plus de soin à conserver ceux du 3> comte ou des seigneurs par lesquels ils sont commis, et ils » font la semonce en forme aux échevins afin de leur » mander de rendre justice » En outre les baillis, au nom du comte, assistaient à la reddition des comptes des villes, intervenaient à l’élection des échevins et refusaient leur consentement aux réglements de la magistrature locale lors¬ qu’ils étaient de nature à compromettre les droits du comte. Il leur arriva souvent de dépasser leurs prérogatives, et de vouloir arrêter ou juger au nom du comte : de là les nom¬ breux différends qu’ils eurent avec les échevins. Ces fonction¬ naires existaient en Flandre et en Hainaut, dès le XIe siècle ; leur pouvoir augmenta dans la suite des temps, surtout quand les châtelains perdirent leur influence ; ils ont subsisté jusqu’en 1790. L'écoutéle ou amman exerçait des fonctions analogues à celles du bailli dans les domaines de la campagne, dans les circonscriptions territoriales qui portaient le nom d 'ammanie ou de vierschare , pour les réunions du magistrat, l’adminis¬ tration de la justice et les prisons, et aussi pour la perception des impôts. C’était un office dépendant du comte ou du châ- — 144 telain, dont le titulaire était souvent subordonné au bailli. Au point de vue des finances , le comte de Flandre faisait gérer ses domaines par des villici , des mayeurs et des baillis de bois qui étaient ses receveurs ; d’autres receveurs, aussi nommés par lui, étaient chargés de percevoir les espiers ou redevances en nature, grains, vaches, beurre, fromages, poules , œufs , qui étaient dûs pour la consommation de la cour du comte, les brie fs impôts analogues indiqués, comme le mot l’indique , sur des rôles ou registres , les aides et les subsides , les amendes payées aux officiers de justice , les contributions des guerres, les tonlieux et plusieurs autres droits. Ces receveurs étaient contrôlés par la Chambre des Renyngues, et à partir de 1386, par la Chambre des Comptes, qui était chargée de l’apurement des pièces comptables, de tout ce qui concernait les domaines, de l’enregistrement des chartes et actes importants, de la garde des archives. Le magistrat des villes avait sa part dans l’administration de la contrée. Les officiers municipaux, les échevins avaient dans la cité, Yambacht ou la vierschare, la tutelle des per¬ sonnes et des choses, le soin des domaines et des revenus, de la religion, de l’instruction, des affaires militaires et du com¬ merce ; ils portaient des ordonnances relatives à la paix publique et aux intérêts les plus importants. Temps modernes. — Lorsque la France eut repris possession de la Flandre, du Hainaut et du Cambrésis, elle y établit, d’après les anciennes circonscriptions, des divisions adminis¬ tratives qui reçurent le nom d’intendances ou généralités. Intendance de la Flandre maritime , 1649 à 1713. — Cette division territoriale, créée en 1649, après le traité de West- phalie et formée des territoires de Gravelines et de Bourbourg ainsi que de Dunkerque, acquis en 1662, avait d’abord été unie à l’intendance de Picardie. En 1667, on la détacha de cette dernière intendance pour former, avec le territoire de Bergues et de Fûmes, l’intendance de la Flandre maritime, à laquelle furent encore ajoutées en 1678 les châtellenies d’Ypres, de Cassel, de Warneton et de Bailleul. Cette der¬ nière partie était désignée sous le nom de nouveau départe¬ ment ; le reste sous le nom d 'ancien département. L’intendance de la Flandre maritime subsista jusqu’en 1713. Intendance de la Flandre-Wallonne , 1668 à 1713. — Cette intendance comprenait le pays de l’Alleu , la ville et verge de Menin, Tournai et le Tournésis, les villes et châtellenies de Lille, Douai et Orchies, la ville de Valenciennes et la Prévôté- le-Comte, la ville de Condé et son territoire, Cambrai et le Cambrésis, la ville et châtellenie de Bouchain. Créée à la suite de la conquête de la Flandre par Louis XIV, elle subsista jusqu’en 1713. Intendance du Hainaut. — Cette intendance se divisait en deux départements, P ancien formé en 1659, après le traité des Pyrénées, qui comprenait les villes, châtellenies et pré¬ vôtés d’Avesnes, de Landrecies et du Quesnoy, le nouveau formé en 1678, après le traité de Nimègue, qui comprenait les villes et prévôtés de Bavai et de Maubeuge ; le pays d’entre Sambre-et-Meuse était placé sous les ordres de l'in¬ tendant de cette province. Lorsque la France eut été forcée de subir le traité d’Utrecht, Louis XIV et son successeur Louis XV firent subir un rema¬ niement aux divisions administratives de la contrée qui forme aujourd’hui le département du Nord. Intendance de Flandre. — Cette intendance, qui eut Lille pour chef-lieu, comprit toutes les parties des intendances de la Flandre maritime et de la Flandre wallonne, à l’exception de la ville de Valenciennes, qui fut réunie à l’intendance du Hainaut, et, à partir de 1730, de Condé et de ses dépendances qui furent aussi ajoutés au Hainaut. En 1754, sous le nom d’ Intendance de Flandre et d’Artois , cette circonscription administrative comprit l’Artois qui fut enlevé à la généralité — 146 - d’Amiens, mais perdit Cambrai et le Cambrésis, Bouchain, Saint-Amand , Mortagne et leurs dépendances, qui furent réunis à l’intendance du Hainaut. Intendance du Hainaut — Comme nous venons de le dire, à ses anciennes provinces, cette généralité vit successivement s’ajouter en 1715 Valenciennes, en 1730 Condé, en 1754 Cambrai, Bouchain, Saint-Amand et Mortagne. Dans chacune de ces intendances , il y avait un certain nombre de villes où résidaient les subdélégués nommés par l’intendant Ces subdélégalions, qui n’eurent pas une existence permanente, étaient dans la Flandre maritime , Dunkerque, Bergues, Bourbourg. Cassel, Gravelines, Bailleul et Merville ; dans la Flandre wallonne , Douai et Orchies, Lille ; dans le Hainaut, Avesnes, Barbençon, Bavai, Bouchain, Cambrai, Condé, Fumay, Givet, Landrecies, Mariembourg, Maubeuge, Mortagne, Philippeville , Le Quesnoy, Saint-Amand, Trélon et Valenciennes ; dans Y Artois , Aire , Arras , Bapaume , Béthune, Hesdin, Saint-Omer, Saint-Pol, Saint-Venant. Attributions des intendants. — Les intendants , appelés commissaires départis ou intendants de justice, police et finances de Flandre et d’Artois, étaient chargés de l’adminis¬ tration en général et de tout ce qui pouvait concerner le service du roi et de ses sujets. Voici leurs attributions : 1° Au point de vue des finances, ils avaient mission de faire voter les impôts par les États, de les répartir avec leur aide, et d’en surveiller la perception. Le contrôle de la Régie et des Fermes générales leur appartenait, ainsi que l’audition des comptes de toutes les villes importantes. Le domaine royal proprement dit et l’audition des comptes d’octroi des localités moins importantes appartenaient au Bureau des finances ; 2° Toutes les mesures de police qui exigeaient une prompte exécution leur étaient confiées, ainsi que les affaires relatives — 147 — aux prisons , à l’hygiène , aux bouchers et aux débitants de boissons, à l’inspection des chemins et à la sûreté des routes ; 3° Les détails militaires , tels que le logement des troupes, leur chauffage, leur éclairage et aussi leur paiement, étaient aussi confiés à l’intendant ; 4° Ils s’occupaient du commerce manufacturier, des arts et métiers, de l’agriculture, du défrichement des marais, des rivières et des canaux ; 5° Au point de vue de la justice , ils connaissaient en pre¬ mière instance d’un grand nombre d’affaires relatives aux impôts, à la police, au commerce et en général des questions contentieuses concernant les affaires dont ils étaient chargés. A l’époque de la Révolution les trois divisions du secréta¬ riat de l’intendance étaient ainsi formées dans la généralité de Lille: 1° Détails militaires, — monts de piété, — pensions civiles des ci-devant jésuites ; 2° Affaires relatives à la province d’Artois , — Fermes générales, — domaines et régies, — amortissements, francs- fiefs, oblats et mains-mortes, — défrichements, marais et communs, — agriculture et grains, — population, — rivières, canaux et navigation, — caisse de mendicité ; 3° Affaires relatives aux provinces de la Flandre wallonne et de la Flandre maritime, — postes et messageries, — maisons de force et lettres do cachet, — carrières et extraction des pavés, — imprimerie et librairie, — impositions, commerce, manufactures, arts et métiers, — affaires générales à tout le département ; 4° Secrétariat du cabinet de l’intendant. Fermes générales.— Les Fermes dépendaient du contrôleur- général des 'finances et de l’administration particulière aux¬ quelles le Roi les confiait. Elles comprenaient trois divisions : 1° La Ferme générale chargée des recouvrements qui tenaient à l’importation ou à - 148 — l'exportation des marchandises étrangères et nationales et aux droits à l’entrée des provinces réputées étrangères, comme le Hainaut : Traites ; charbon de terre et Pas de pennas ou droit sur les bestiaux sortant du Hainaut, droit sur les bestiaux sortant de la Flandre maritime ; — 2° La Bégie générale , droits sur les boissons et objets divers, papier, carton, cartes, amidon, droits des quatre membres de la Flandre maritime, les eaux-de-vie dans la Flandre et le Hainaut : on appelait ces droits, droits réunis;— 3° Administration générale des Domaines et Droits domaniaux , recettes des bois , domaines et droits domaniaux, divers articles et autres biens. Les minesse ratta¬ chaient aux fermes, section des droits sur le charbon de terre. Les Fermes étaient concédées pour six ans à un adjudica¬ taire ou fermier-général qui nommait les directeurs , les contrôleurs, les receveurs, et qui administrait sous la direc¬ tion du contrôleur- général des Finances. Les bureaux des Fermes générales se trouvaient à Lille, à l'hôtel des Fermes du Roi, rue du Palais. Bureau des Finances de Lille. — Créé en septembre 1691, son ressort était celui des intendances de Flandre, Artois et Hainaut. Les autres bureaux des finances du royaume étaient chargés de la direction, et intendance du domaine du roi , de la taille et de toutes les impositions qui n’étaient pas affermées, de la grande et petite voirie, des greniers à sel, des élections et du blâme des dénombrements de fiefs. Il ne pouvait en être ainsi pour le bureau des finances de Lille : dans la Flandre, l’Artois et le Cambrésis il n’y avait point de taille , de greniers à sel ni d’élections ; les aides , la grande et la petite voirie et les ponts-et-chaussées dépendaient des États; le blâme des dé¬ nombrements était exercé par les baillis et contrôlé par les hommes de fiefs En compensation, le roi accorda au bureau des finances de Lille certaines attributions qui appartenaient auparavant à la chambre des comptes. — m — Voici les divisions que comprenaient les archives du bureau des finances : 1° Pièces relatives à l’organisation et au personnel du bureau des finances, mémoires historiques, correspondance, privilèges. 2° La connaissance et la juridiction contentieuse du do¬ maine engagé et non engagé et de toute matière d’épave , aubaine, bâtardise, déshérence, retrait lignager, conformé¬ ment à l’édit d’avril 1627, qui accorde ce droit à tous les bureaux des finances et d’après confirmation par les édits du 16 avril 1697, des 18 mars et 9 juillet 1701 (1). 3° La connaissance des contestations relatives au paiement des droits des quatre membres de Flandre et des droits de feux, cheminées, impôts sur les boissons et autres droits domaniaux qui se lèvent en Hainaut, avec le jugement en dernier ressort pour les causes qui n’excèdent pas 20 livres (2). 4° La réception des hommages , aveux et dénombrements des fiefs relevant du roi, ainsi que les saisies féodales, excepté pour la cour de Mons et pour les terres titrées (duchés, comtés, marquisats, baronnies), dont les propriétaires peu¬ vent faire hommage à la personne du roi ; cette attribution est confirmée par les arrêts du 7 juin 1695 et du 9 septembre 1699. Toutefois cette réception s’opèr e seulement après l’envoi des dénombrements aux baillis des chefs-lieux dont relèvent les fiefs. 5° Le renouvellement du papier terrier des terres relevant du roi (3). 6° L’exécution et la réception des États de distribution des deniers royaux, tant des recettes générales des finances que des domaines et bois , et même des gages des officiers de (1) La direction des domaines appartenait à l’intendan i affaires^ inlcn(ianls s’arr°gèrent souvent le droit de connaître de ces iu(20 ïui]llet0i^oo‘i0n fUt commeDcée à la suite de la déclaration royale maréchaussée , avec pouvoir de contraindre les comptables qui refuseraient de payer les gages et droits , de procéder à la réception des cautions qu’ils présentent et , quand il y a lieu, d’apposer les scellés en leur logis. 7° L’audition et clôture des comptes d’octrois des villes, bourgs et villages du ressort, à l’exception des comptes des « villes d’Arras, Saint-Omer, Béthune, Aire, Hesdin, Bapaume, Lens, Saint-Pol, Dunkerque, Gravelines, Bourbourg, Bergues, Cassel,Bailleul, Maubeuge.Le Quesnoy, Avesnes, Landrecies, Charlemont, Givet, dont les intendants sont auditeurs comme le déclare l’arrêt du 29 avril 1692. L’arrêt du 9 février 1694 étendit la juridiction du bureau des finances à l’audition des comptes des deniers patrimoniaux des villes et communautés qui ont des octrois, des comptes des hôpitaux et maladreries de fondation royale, et des droits d’assennes, ainsi qu’à l’adju¬ dication des deniers d’octrois des villes. 8° La réception des officiers dont la provision aura été adressée au bureau de l’enregistrement, de la provision des autres officiers dont les gages seront assignés sur les états des finances et des domaines royaux. 9° L’enregistrement des lettres d’anoblissement , création de terres en dignités. 10,° La visite, l’adjudication et les ordonnances de paiement pour les ouvrages et réparations au domaine royal et les ponts-et-chaussées à la charge du même domaine, la voirie. 11° En vertu de l’arrêt du 9 février 1694, les saisines et les dessaisines des fiefs situés dans le ressort et mouvance de la chambre légale, furent attribués au bureau des finances. Hôtel des Monnaies. ~ L’hôtel des Monnaies fut érigé à Lille en 1685. Sa juridiction s’étendait aux provinces de Flandre, Artois, Hainaut et Cambrésis. Il connaissait : 1° De la fabrication des monnaies: édits, déclarations, réglements; modes de fabrication; crimes de fausse monnaie. — 151 - 2° Métiers de monnayeurs, orfèvres, changeurs, horlogers, etc. 3° Affaires contentieuses relatives à la fabrication et à la circulation des monnaies et aux métiers. Les appels étaient portés à la cour souveraine des monnaies de France. L’hôtel était situé à Lille, rue de la Monnaie. Une chambre du conseil y était établie, avec un général, trois conseillers, trois conseillers honoraires , quatre hommes du roi. A cet hôtel était attaché une chambre de délivrance , juridiction pri¬ vative exercée par les juges-gardes sur les officiers et ouvriers qui s’occupent de la fabrication des monnaies. I. Organisation et composition de l'hôtel. II. Édits, réglements et correspondance. III. Comptes et dépenses, états de fabrication. IV. Visites. V. Contrôles ; poids. VI. Chambre de délivrance, change. Juridiction des Eaux et Forêts. — L’administration de la juridiction des eaux et forêts dépendait du contrôleur général des finances. Un conseiller du roi était grand-maître enquê¬ teur et général-réformateur des eaux et forêts aux départe¬ ments de Picardie, Artois, Boulonnais, Flandre et pays conquis et reconquis. Maîtrise de Lille et de la Flandre wallonne. — Les séances étaient tenues dans un quartier de l’hôtel des monnaies appelé la Motte-Madame. Il y avait un maître particulier, un procu¬ reur, un garde-marteau, un greffier, un receveur, un huissier, des arpenteurs, un garde général, des gardes particuliers. Maîtrise des eaux et forêts de Nieppe, dont le siège était au château de la Motte-au-Bois. Un maître résidant à Merville ; même personnel qu’à Lille , gardes plus nombreux à la forêt de Nieppe, au bois de Bailleul, au bois de Merris, au bois d’Escouffes. - 152 - Eaux et forêts du Hainaut. — Trois maîtrises dépendant du conseiller grand-maître enquêteur et général réformateur des eaux et forêts de France au département du Hainaut, pays d’entre Sambre et Meuse et outre Meuse. Maîtrise du Quesnoy. — Fondée en 1661, importante par le nombre des employés ; siège à l’hôtel-de-ville du Quesnoy. Maîtrise de Valenciennes. — Créé en 1693 , sa juridiction comprenait la prévôté de Valenciennes, la gouvernance et ressort de Douai et le Tournésis , les terres et seigneuries de Mortagne, Saint-Amand, Vicoigne, Bouchain, Condé. Maîtrise de Givet. I. Pièces relatives à l’organisation et au personnel. II. Ordonnances générales et correspondance avec les grands maîtres. III. Rôles de capitation. IV. Procès-verbaux de visites. V. Audiences, minutes, sentences. VI. Adjudications VII. Requêtes. ESQUISSE GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD, ETC. Terrain carbonifère (Suite). Étage moyen ou houiller. Cet étage , formé de couches de grès, de schistes et de houille, n’est guère développé dans le bassin de Namur. On n’est pas encore parvenu à y distinguer des zones ca¬ ractérisées par la présence d’espèces végétales spéciales. Dernièrement, M. Malherbe (1) pour le bassin de Liège, et MM. Briart et Cornet (2) pour celui de Mons , ont indiqué plusieurs niveaux de mollusques. Mais ces niveaux ne se correspondent pas dans les deux, bassins , et ne sont encore que des faits purement locaux. Dumont avait divisé l’étage en terrain houiller sans houille (1) Bull. acad. Belg., t. 32 p. — (2) T. 33 p. - 153 et terrain houiller avec houille. Dans la première assise , il rangeait les phtanites et les schistes alunifères. Plitanites. La phtanite, silex tantôt blond, tantôt noir, existe déjà dans le calcaire carbonifère en nodules disséminés, sem¬ blables aux silex de la craie; à la partie supérieure , elle y forme même parfois des bancs réguliers , tels que ceux de Briquegneaux au N. de Namur. Au N. de Mons, à la base des schistes houillers, la phtanite se présente en plaquettes minces schistoïdes qui passent du noir au gris par une longue exposition à l’air, leur épaisseur augmente à mesure que l’on descend; elles prennent en même temps une cassure conchoïdale et une grande tendance à se diviser en prismes comme le basalte. Ces phtanites, dont l’épaisseur atteint, d’après MM. Briart et Cornet, 68 mètres , renferment en grande abondance des empreintes d’une coquille que ces savants géologues rappor¬ tent aux Posidonomya. A Hozemont, près de Liège, où le calcaire carbonifère manque, la phtanite repose directement sur le terrain dévo¬ nien ; elle est schistoïde dans le bas , compacte dans le haut, puis passe à des psammites pénétrés de veines de quartz et même transformés en quartzites. Schistes alunifères. On désigne sous ce nom des schistes noirs bitumineux remplis de sulfure de fer. On s’en est servi pour la fabrication de l’alun , et grâce aux traces des an¬ ciennes exploitations, on peut les suivre depuis Namur jus¬ qu’à Liège. Ils forment une zone épaisse de 2 à 30 mètres entre le calcaire carbonifère et les schistes houillers A Cho- quier, on y trouve des boules de calcaire noir compacte ren¬ fermant entre autres fossiles : Goniatiles diadema. Orllwceras. — alratus. l'roduclus carbonarius. Schistes houillers. Ils atteignent dans le bassin de Mons une — 154 — épaisseur de plus de 2,000 mètres. On y a trouvé à 50 mètres au-dessus des phtanites : Produclus carbonarius. Posidonomya velusta. Chonetes Laguessiana. Avicula, Orthis crenistria . Anthracosia. D’autres couches fossilifères contenant des coquilles d’ An¬ thracosia {Car dinia) , Posidonomya, Mytilus ont été signalées par MM. Briart et Cornet à des altitudes de 280 mètres, 440 mètres, 530 mètres , 1,150 mètres et 1,700 mètres au dessus de la base. Dans le pays de Liège, M. R. Malherbe a reconnu sept ni¬ veaux différents Anthracosia, et M. Dewalque (3) cite Am¬ euta papyracea et Gonialites Listeri à la base de l’étage à Mélin. La disposition des schistes houillers est assez régulière aux environs de Mons. Ils forment un bassin dont le côté septen¬ trional est faiblement incliné , tandis que le côté méridional plonge fortement en faisant de nombreux plis , que les mi¬ neurs désignent sous le nom de crochons. Les plissements ont réduit à 11 kilomètres la largeur du bassin , dont le développement horizontal serait de 14 kilo¬ mètres. On donne le nom de naye au pli cenlral qui sépare les couches ou combles du Nord des couches ou combles du Sud. La houille distribuée en 156 couches est d’autant plus riche en matières bitumineuses que l’on avance des bords du bassin vers le centre. C’est au moins ce que l’on peut conclure de l’étude des combles du Midi , qui sont les seuls connus , car les combles du Nord . aux environs de Mons , sont recouverts de sables aquifères que l’on n’est pas encore parvenu à traverser. Les couches les plus méridionales fournissent des char¬ bons secs impropres à la fabrication du coke et nommés à tort houilles maigres ; puis viennent les charbons gras , les (3) Bull. acad. Belg., t. 32, p. - 155 — charbons durs et le llénu. Dans le flénu, on trouve une couche de houille compacte , sèche , qui se rapproche beau¬ coup du jayet ou cannel coal des Anglais. Vers PE., du côté de Charleroy, le bassin houiller se rétrécit et se plisse davantage , les mêmes couches reparais¬ sent plusieurs fois au jour, ce qui fait croire d’abord à une richesse plus grande que celle qui existe réellement. On n’y connaît plus que 82 couches de houille ; celles qui sont à la partie supérieure du bassin de Mons font ici défaut. Les , 9 combles du Nord y sont exploités ; ils sont maigres et pres- qu’anthraciteux, tandis que les combles du Sud sont gras , même au contact du calcaire. Ce sont cependant les mêmes bancs. La disposition symétrique des couches inférieures à la houille, des deux côtés du bassin, démontre de la manière la plus évidente que les schistes houillers sont enfermés dans un pli du calcaire carbonifère et du terrain dévonien, et, à moins d’admettre pour eux une géologie spéciale, nous devons croire qu’ils affectent la même disposition que les roches qui les contiennent. Du reste, on a constaté que la qualité de la houille varie dans une même couche. Ainsi, on voit les houilles maigres du Nord du bassin de Charleroy devenir de plus en plus gazeuses vers l’O. Dans les charbonnages du centre, elles sont propres à la fabrication du gaz. Elles ne sont pas connues, comme nous Lavons dit , près de Mons ; mais lors¬ qu’on les retrouve à PO. vers Sirault et Bernissart, elles sont redevenues de nouveau maigres et anthraciteuses. A l’E. de Charleroy, le bassin houiller se rétrécit encore ; \ Namur, on ne trouve plus que quelques veines de houille naigre et pyriteuse. A Andenne, le bassin est tellement îtroit que l’étage houiller disparaît complètement sur une ongueur de 2 à 3 kilomètres , puis s’élargit de nouveau vers ûége. Cependant, le bassin houiller de Liège est moins riche it plus étroit que celui du Hainaut. — 156 — Entre Liège et Aix-la- Chapelle , le terrain carbonifère occupe un large espace, mais il est presque partout occupé par le calcaire , les phtanites , et des grès avec veines de houille maigre caractérisés par une flore riche en lycopodiacées. Cependant, vers Aix-la-Chapelle, le véritable terrain houiller existe ; des sondages l’ont indiqué dans la plaine du Rhin ; puis il se retrouve en Westphalie, entre Dusseldorf et Munster avec une richesse , une puissance et une régularité qui font du bassin de la Ruhr le premier bassin houiller du continent. Le terrain houiller de Belgique présente quelques acci¬ dents sur lesquels il faut appeler l’attention. Aux environs de Theux , il y a un lambeau de terrain dé¬ vonien supérieur et de terrain carbonifère isolé au milieu du dévonien inférieur dont il est séparé partout par des failles. C’est une portion détachée du grand bassin houiller d’Aix- la-Chapelle. Lors des dislocations qui suivirent le dépôt du terrain houiller, il se produisit depuis Liège jusque dans le Boulon¬ nais une grande faille, qui longe l’affleurement septentrional de la bande silurienne du Condroz et, quand celle-ci manque, la limite du poudingue de Burnot. Les divers étages dévo¬ niens et carbonifères du bassin de Namur viennent butter au midi contre la faille et y sont parfois absorbés de manière à ce que les schistes houillers arrivent au contact du terrain silurien et du poudingue de Burnot. La faille est souvent oblique ; la lèvre septentrionale s’en¬ fonce sous la lèvre méridionale qui est coupée en sifflet , de sorte que les schistes houillers passent sous le poudingue de Burnot. C’est ce qui a lieu à Seraing, près de Liège. A partir de Choquier, on voit le calcaire de Givet , les psammites'du Condroz, le calcaire carbonifère , puis les schistes houillers s’enfoncer successivement sous le poudingue de Burnot et disparaître dans la faille. Sur les bords de l’Heure , entre Jamioulx et Landlies, on — 157 — peut constater un second exemple du terrain houiller exploité au contact du poudingue de Burnot. Au bois de Boussu , près de Mous , les faits sont plus cu¬ rieux encore. On a atteint les schistes houillers en traversant le terrain dévonien qui est en couches presque horizontales et qui était lui-même surmonté de schistes que l’on peut rap¬ porter au terrain silurien. Ce serait l’effet d’un formidable éboulement où tout un immense rocher appartenant au bassin de Dinant serait tombé en se renversant sur le ter¬ rain houiller du bassin de Namur. Le bassin houiller du Nord et du Pas-de-Calais est caché sous les terrains crétacés et tertiaires. Pour en comprendre facilement la structure, il faut toujours avoir présent à l’es¬ prit la disposition de ce terrain dans les parties de la Bel¬ gique où il affleure. En France , comme en Belgique , les couches houillères constituent un bassin régulier dont le côté méridional a été fortement plissé et renversé sur le côté septentrional de ma¬ nière à avoir la même inclinaison vers le S Ce renversement peut se constater, parce que dans ces couches méridionales le toit et le mur n’occupent pas leur position normale. On peut admettre qu’une couche de houille est le produit d’une végétation qni est venue sur un sol argileux et à la¬ quelle succède un dépôt de sédiments argileux ou arénacé. La couche inférieure à la houille, sou mur , est le produit de l'ancien sol végétal; c’est un schiste à cassure irrégulière qui pénètre dans tous les sens par les Stigmaria ou racine des arbres houillers. La couche supérieure ou toit est au con¬ traire régulièrement feuilletée et porte des empreintes de tiges et de feuilles. Quand Jes couches sont renversées, les schistes à Stigma- ria forment le toit, et les schistes à Sigillaria ou à feuilles de fougères constituent le mur. En France, comme en Belgique, la grande faille qui limite — 158 — au S. le bassin de Namur a fréquemment atteint les schistes houillers qui viennent alors au contact du poudingue de Burnot. Ils en sont parfois séparés par un calcaire qui est soit le calcaire carbonifère, soit un lambeau de calcaire dévo¬ nien ; dans ce cas, le calcaire pourrait , comme au bois de Boussu, recouvrir le terrain houiller. Bien que la quantité de gaz contenu dans la houille soit assez variable dans une même couche , on peut dire cepen¬ dant d’une manière générale que la houille des combles du Midi est grasse , tandis que celle des combles du Nord est maigre. Dans la pratique, on divise le bassin houiller en trois zones, qui sont du N. au S. 1° Les charbons maigres de Vieux-Condé , Fresnes, Vi- coigne ; 2° Les charbons demi-gras d’Anzin ; 3° Les charbons gras de Denain, Lourches, Aniche. A l’E. de Douai, les houilles maigres des combles du Nord reposent sur une épaisse couche de grès stérile. Parmi les failles les plus importantes, il faut citer celle dite Cran de retour , qui s’étend dans la concession d’Anzin sur une longueur de 30 kilomètres, séparant les houilles grasses des houilles demi-grasses. Elle se relie à d’autres failles de second ordre. Le bassin décrit plusieurs courbes. Tantôt les couches de houille suivent les courbes ; ainsi, elles se dirigent vers l’O. 70° S. près de Condé, vers FO. 30° S. à Anzin ; vers FO. 25° S. à Denain, sensiblement vers FO. à Lourches et à Aniche, vers FO. 30° N. à Sains et à FEscarpelle. D’autres fois, la di¬ rection reste la même, mais les couches sont rejetées, soit vers le Nord, soit vers le Midi par des failles successives. Le bassin houiller se rétrécit peu à peu vers l’Ouest. Il disparaît à Fléchinelle par suite du rétrécissement du Y cal¬ caire qui le renferme , puis il reparaît dans le Boulonnais près d’Hardinghem avec quelques accidents stratigraphiques, — 159 — qui sont cause que plusieurs savants se sont trompés sur sa position géologique. Dans le bassin de Dinant, les schistes houillers n’existent qu’à l’état de petits bassins remplissant les plis du calcaire carbonifère. La houille y est toujours maigre et de mauvaise qualité ; aussi toutes les exploitations qui y ont été tentées sont-elles abandonnées. Dans le sous-bassin de la Meuse , on peut citer les petits gites houillers d’Anhée , de Modave , de Gesvre et de Flo- rennes. Dans le sous-bassin de la Sambre, il y a ceux d’Aul- noye et de Taisnières. Ces derniers ne montrent à l’extérieur que des schistes, mais on en a retiré de la houille , et il est regrettable qu’ils n'aient pas été l’objet d’explorations suivies, car il se pourrait qu’ils s’élargissent vers l’Ouest sous ce terrain crétacé. ASSOCIATION GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD. Travaux de 1871-1872. Cette Société, dont nous avons annoncé il y a un an le but et l’organisation, continue ses travaux sur la géologie du pays M. Charles Barrois a donné la coupe des terrains traversés par la nouvelle voie de fer actuellement en construction entre Saint-Omer et Boulogne. Dans ce long parcours, suivi depuis Saint-Martin-au-Laërt jusqu’au delà de Desvres, il a reconnu d’abord les diverses zones de la craie blanche à Micraster, moins le thun , ou les nodules de phosphate de chaux , qui paraissent faire défaut sur ce point du Pas-de-Calais A Lumbres, il a vu les marnes à Terebratulina gracilis très— développées, mais peu fossilifères; puis, entre Nielles et le Grand-Bois, la craie marneuse à lnoceramus labiatus. Aux environs de Desvres vient la craie glauconieuse à Ammonites varions , puis le gault A Wierre-au Bois, M Barrois a trouvé, à la partie supérieure de cette dernière assise, une argile plastique bleue, toute semblable à celle de Wissant et de 460 - Folkestone, avec les mômes fossiles ; sons l’argile, un sable argileux glauconifère et, à la partie inférieure, une couche de nodules de phosphate de chaux. Au-dessous du gault commence la série des sables ferrugineux, suivie par les argiles du Kimmeridge, à Ostrea virgula. M, Barrois a signalé, d’autre part, la présence des sables landéniens inférieurs (éocène inférieur) à lra,50 sous la chaussée de la grande route de Lille à Roubaix, faubourg de Roubaix-lez-Lille. M. Debray a présenté une note sur les importantes tour¬ bières exploitées entre Albert et Aveluy (Somme). Parmi les faits les plus saillants qui ressortent des coupes nombreuses prises par l’auteur de ce travail, on peut citer : Des succes¬ sions alternatives de lits de tourbe et de craie pulvérulente ou de calcaire tourbeux, épais de 8m, traversés par des failles et offrant parfois des traces de ravinements à leur surface, puis l’indication près du chemin de fer d'Albert à Aveluy d’un lit de tourbe présentant, en place, de nombreux troncs d’arbres ayant l’aspect carbonisé. M. Debray termine cet inté¬ ressant exposé par une liste de débris d’animaux et d’objets provenant de l’industrie humaine des premiers âges, re¬ cueillis dans ces tourbières, savoir : Tête de jeune castor, — bois de cerf et de chevreuil, — têtes de bœuf et de sangliers, — silex taillés : couteaux , grattoirs, pointes de flèche, — os travaillés, — fragments de poteries grossières, etc. Le même membre a présenté quelques remarques sur les tourbières de Nortkerque. Il a aussi signalé la découverte à Bouvy, près de Denain , dans les fondations d’un moulin à eau d’une couche de tourbe qui contenait une tête de ruminant et des fragments de poteries anciennes. M. Decocq a appelé l’attention sur la découverte en Cali¬ fornie d’un crâne humain rencontré sous des sables volca¬ niques et des graviers aurifères. M. E. Chellonneix a donné la coupe du diluvium de San- gatte el des assises crétacées du cap Blanc-Nez (Pas-de-Calais). Dans la première partie de cette étude, l’auteur signale la découverte d’un débris de mammifère dans le drift de San- gatte et indique au sommet du cap la présence des-sables de Diest avec grès et poudingues. La seconde panie est con¬ sacrée à la description des différents niveaux crétacés qui apparaissent dans les falaises , depuis la partie inférieure de la craie blanche jusqu’au gault exclusivement. Quelques zones y sont signalées pour la première fois sur ce point de la côte, telles que celles à Inoceramus Brongniarti et à Belemnites plemis, dans la craie marneuse et, dans la craie glauconieuse, un banc très-riche en Ammonites cenomanensis affleurant à la plage. L’exposé se termine par des rapprochements entre ce gisement et les formations correspondantes de la Normandie et du plateau crétacé du département du Nord. M. Ortlieb a présenté un poisson fossile provenant de la craie blanche d'Annappes (zone à Micrasler cor testudina - rium). Cette belle pièce, très-complète à l’exception de la tête, offre un ensemble de caractères qui permet de la rapporter à l’ordre des Cténoïdes, et, selon toutes probabi¬ lités. au genre Beryx , dont M. Decocq a trouvé des traces nombreuses au même gisement. M. Dolfus a présenté une note sur le Sinus ltius. Dans ce travail , l’auteur constate d’abord dans le Nord de la Flandre française, en deçà de la ligne actuelle des côtes, la présence de dépôts marins , compris entre la tourbe ancienne et la terre végétale, et qui semblent correspondre à l’emplacement de l’ancien golfe désigné par les Romains sous le nom de Sinus ltius. Il marque les limites de ce dernier à l’O., au pied du cap Blanc-Nez; au S., aux environs d’Aire et de Watten en avant de Saint-Omer; à l’E., à la base des collines tertiaires des deux Flandres; au N.-E. seulement les indica¬ tions sont encore incomplètes. — 162 — Les sédiments qui ont comblé la dépression, ajoute M. Dol¬ fus, sont tantôt sableux, tantôt argileux. Ils sont sableux dans les endroits où la plage était exposée aux courants du large, argileux sur les points où celle-ci était protégée par quelque partie proéminente du rivage, ou dans le voisinage des cours d’eau. Ainsi, l’ancienne plage est argileuse, de Calais à Au- druick , par Ardres , à cause de l’abri du cap Blanc-Nez et à la gauche de Dunkerque, où elle était protégée par la pointe des Synthes ; elle est sableuse au contraire à la droite du même port et au S -E. , à partir de Watten, parages où elle était plus accessible aux grandes vagues venant de l’Atlantique. L’argile se rencontre encore aux environs de l’ancienne em¬ bouchure de PAa. Dans les deux dépôts en question , M. Dolfus indique une faune marine qui diffère en même temps que la nature du fond, mais tout à fait contemporaine de celle qui vit actuelle¬ ment dans le détroit. Cette faune indique de plus un golfe peu profond , occupé par une mer calme , plutôt froide que tempérée. L’exhaussement ultérieur de la côte sur ces points serait dû, selon M. Dolfus, au courant constant qui traverse la Manche de l’O. à l’E. M. Gosselet a raconté qu’il avait vu à Condé une belle m⬠choire de Ptychodus latissimus. Quarante- deux dents de ce poisson sont en la possession de M. Mention , commissaire priseur; elles proviennent de carrières ouvertes dans la craie marneuse au hameau de Macout, où l’on trouve en abon¬ dance : Terebratulina gracilis — Frondicularia sculiformis — Terebratula semiglobosa — Ostrea hippopodium , etc. E. Chellonneix. SOCIÉTÉ DES ANTIQUAIRES DE LA MORINIE. Bulletin historique, liv. 77 à 80. Dans les 50 pages de ces quatre livraisons, la Société des Antiquaires de la Morinie a fait paraître , outre les procès- — 463 — verbaux de l’année 4871 , des documents et des travaux qui ont de l’intérêt et de l’importance. M. Deschamps de Pas a décrit avec le plus grand soin deux pierres tumulaires provenant de l’abbaye d’André s , dont les inscriptions présententfPune le nom de Bauduin de Balinghem (1270), et l’autre celui de Robert de Verlinghem (1276). Le secrétaire général de la société, M. de la Plane, a continué ses intéressantes communications; il a publié dans le Bulletin une charte inédite de Milon, évêque des Morins, confirmant, en 1153, la possession de l’autel de Boningues et de Colonia à l’abbaye de Saint-Vulmare, et une lettre de Henri IV, roi d’Angleterre , ordonnant au bailli de Guisnes de conduire à Calais Thomas Shirburn , renvoyé devant le maire de cette ville pour l’exécution de la sentence du connétable d’Angle¬ terre qui le déclare coupable de haute trahison (10 mars 1402). Le même érudit a publié une curieuse notice sur les trois de Valbelle, XVe, XVIe et XVIIe évêques de Saint-Omer, de 1684 à 1754, qui se sont surtout distingués par leur bien¬ faisance envers les pauvres. La ville de Saint-Omer leur doit l’érection et la dotation du remarquable hôpital général qui s’est élevé, par leurs soins et à leurs frais, dans la rue Saint- Sépulcre. L’essai sur les Franciscaines hospitalières et garde-malades , par le P. Apollinaire, de l’ordre des Frères Capucins , de la résidence de Paris, ne trace que les grandes lignes du sujet; l’auteur n’a voulu que reproduire ce qui se trouve dans divers ouvrages imprimés ; les loisirs lui manquent pour consulter les documents. Un autre correspondant de Paris, M. J. Lion, a communiqué à la Société un extrait du nouveau Terrier de la terre et seigneurie de Floyecques ; les mentions que cet extrait renferme au sujet de la généalogie des seigneurs de Vaudringhem , fait regretter que ce document n’ait pas été publié in extenso. Nous sommes heureux de pouvoir terminer ce compte- - m - rendu en signalant l’hommage rendu à la mémoire de notre regretté collaborateur M. Desplanque, par la Société des Antiquaires de la Morinie. M. l’abbé Fromentin a consacré à l’ancien archiviste du Nord une intéressante notice dont la première partie est publiée dans le Bulletin. CONGRÈS INTERNATIONAL D’ANTHROPOLOGIE ET D’ARCHÉOLOGIE PRÉHISTORIQUE. Le Congrès international d’anthropologie et d’archéologie préhistorique a ouvert sa sixième session à Bruxelles, le 22 août, sous la présidence de M. D’Omalius d’Halloy. Il a con¬ sacré huit jours à discuter les questions les plus intéressantes de palœ-ethnographie et à visiter les localités belges qui ont fourni à cette science les documents les plus importants. Les journaux ont tenu le public au courant de ses travaux , aussi craindrions-nous d’ennuyer nos lecteurs en en publiant un nouveau compte-rendu : nous préférons, à cette occasion, exposer ex professo les principales découvertes d’archéologie préhistorique faites en Belgique , et nous en servir comme d’un cadre où noüs ferons entrer les travaux du Congrès , ceux au moins qui concernent notre région. Il est cependant impossible de ne pas parler d’une des plus grosses questions agitées dans cette réunion : de l’homme tertiaire. Quelle est la date de la première apparition de l’homme sur la terre ? D’après l’abbé Bourgeois, l’homme daterait des temps géo¬ logiques, de Tâge tertiaire et même du milieu de cet âge. Il a trouvé dans le calcaire de Beauce des silex qui lui ont paru taillés. Depuis plusieurs années qu’il les soumet à l’appré¬ ciation des savants français , il est parvenu à en convaincre beaucoup , mais il a rencontré aussi beaucoup d’incrédules. Le Congrès de Bruxelles lui a semblé une occasion favorable de résoudre la question, en faisant examiner ses silex par une — 165 - commission composée des hommes qui ont le plus étudié le travail de la pierre. Malheureusement, le but n’a pas été atteint, car les membres de la commission n’ont pu se mettre d’accord. A cette occasion , le Congrès s’est informé des dernières publications faites au sujet de l'homme rencontré dans les graviers aurifères de la Californie, graviers que l’on rappor¬ tait aussi aux terrains tertiaires. On a reconnu que ces cou¬ ches sont plus modernes , car elles renferment des coquilles vivant encore dans nos mers , ainsi que des grands édentés caractéristiques de l'époque diluvienne. En Portugal aussi on a cru avoir trouvé l’homme tertiaire; mais l’abbé Bourgeois est venu dire qu’à son grand regret, il ne pouvait voir des marques du travail humain dans les silex recueillis par M. Ribeiro au milieu des couches ter¬ tiaires du Portugal. Aucune trace humaine ne paraît en Belgique antérieure à l’époque diluvienne ou quaternaire , mais l’existence de l’homme à cette époque a été mise hors de doute par les belles découvertes de M. Dupont. Rien de concluant comme le livre dont il a offert une seconde édition au Congrès : L'homme pendant les âges de la pierre dans les environs de Dînant sur Meuse . Nous le recommandons vivement à tous ceux qui désirent étudier ce sujet. Il se lit comme un roman et convainc comme un traité de géométrie. Dans les grottes des Ardennes, M. Dupont a trouvé 46 espèces de mammifères, dont 19 vivent encore en Belgique. Parmi les 27 autres espèces , il y en a 6 qui ont succombé sous les coups des chasseurs à une époque dont l’histoire a gardé le souvenir. Ce sont : l’ours brun , le lynx , le castor, l’élan, le bœuf urus, et le bison d’Europe ou aurochs. Quatorze espèces détruites dans notre région à une époque inconnue vivent encore dans d’autres pays. Le chamois , le bouquetin , la marmot e se sont réfugiés sur les hauteurs des Alpes et des Pyrénées ; le hamster ne dépasse plus les Vosges - 466 - à Pouest; l’antilope saïga vit en Russie centrale et en Tartarie; l’ours gris (ursus fcrox ) et le cerf du Canada ne se trouvent plus qu’en Amérique; le renne, le lemming , le lagomys, le renard polaire et le glouton se sont réfugiés dans les contrées glacées du pôle , tandis qu’un lion (F élis spelœa , variété du Felis leo ) et une hyène (. Hyœna spelœa , variété de la Hyœna crocuta) sont allés chercher le soleil sur le continent africain. Comme complément de cette faune vivaient 7 espèces qui ont maintenant complètement disparu et dont la présence caractérise Pépoque diluvienne. Ce sont deux éléphants ( Ele - plias primigenius ou mammouth et E. antiquus ), un rhino¬ céros (Rh. tichorinus ), un hippopotame {H. major), le grand cerf d’Irlande ( Cervus megaceros) 3 l’ours des cavernes (U- spelœus ) , un chat de moyenne taille (F. antigua). Cette singulière association d’animaux des pays chauds avec d’autres qui n’habitent plus que les climats tempérés et les régions polaires indiquent qu’alors l’été n’était pas assez chaud pour incommoder le renne, et que l’hiver n’était pas assez froid pour chasser le lion et l’hippopotame. La température moyenne devait être à peu près celle dont nous jouissons aujourd’hui. Selon l’opinion de M. Priuner Bey, adoptée par M. Dupont, l’homme qui habitait les bords de la Meuse et de la Lesse à Pépoque diluvienne appartenait à la race mongolique et se rapprochait des Esthoniens. Cette assertion a été vivement combattue dans le sein du Congrès. M. Lagneau , président de la Société anthropologique de Paris, a fait remarquer que les crânes trouvés dans les grottes de Furfooz sont dolichocéphales, c’est-à-dire allongés d’avant en arrière, et nullement pyramidaux, qu’ils indiquent une taille assez grande et une forte stature, caractères que Pon ne retrouve pas chez les Esthoniens et les autres rameaux mongoliques. M Hamy, aide naturaliste au laboratoire d’anthropologie - 167 - du Muséum d’histoire naturelle de Paris, rapporte à trois types principaux les races humaines préhistoriques de la Belgique. La première race, qu’il nomme Australioïde, parce qu’elle n’a d’analogues que certaines races de l’Australie, serait représentée chez nous par le maxillaire inférieur trouvé dans la caverne de la Naulette. On sait combien est remar¬ quable cette pièce osseuse qui fit sensation au moment de sa découverte, tant elle présente de caractères simiens. L’absence de l’éminence mentonnière et des apophyses geni, la prépondérance de la dernière molaire ou dent de sagesse par rapport à la pénultième, sont autant de caractères qui la rapproche au plus haut degré de l’os correspondant des singes. Cependant, c’est bien une mâchoire humaine, et M. Hamy y voit un représentant de la race qui a fourni les crânes de Neanderthal et de l’Olmo. La seconde race re¬ connue par M. Hamy est représentée par le crâne d’Engis découvert par Schmerling; elle est brachycéphale, mais nul- b ment mongoloïde. Quant à la troisième, dont les crânes de Furfooz sont le type , elle paraît être une race métis , assez difficile à caractériser. D’après M. Hamy, ces races ne seraient pas complètement éteintes. Leurs caractères reparaîtraient de temps en temps par l’effet de cette hérédité éloignée que l’on a désignée sous le nom d'atavisme. Il en a vu un exemple dans une batelière des environs de Mons qui présente tous les caractères de la race australioïde. Le hideux portrait qu’il en a présenté au Congrès ne fait pas certes regretter qu’une autre race l’ait supplantée dans nos campagnes. M. Wirchow, l’illustre professeur de l’Université de Berlin, a étudié, à l’aide de quelques mesures précises, les crânes des cavernes , en les comparant à ceux des populations ac¬ tuelles. Malheureusement , il n’a eu pour faire cette compa¬ raison que quelques têtes de criminels déposées à l’Université de Bruxelles. Il leur a trouvé des analogies avec les crânes de - 168 - Furfooz. L’un d’eux lui a offert exactement les mêmes me¬ sures qu’un crâne recueilli à Marche-les-Dames et déposé au musée de Namur. Ce crâne se rapproche assez du type de la race mongolique. Un autre crâne du musée de Namur, trouvé , il y a quel¬ ques mois, dans les cavernes de Chauvau, lors des fouilles si habilement dirigées par M. Soreil , est le plus dolichocé¬ phale , non-seulement de toute la Belgique , mais aussi de toute l’Europe. Par ce caractère , il se rapproche beaucoup des Esquimaux , mais la conformation de la face est si diffé¬ rente qu’elle exclut toute idée de parenté. A propos des ossements humains de la caverne de Chau¬ vau, M. Wirchow a dit qu’il n’y avait pas remarqué les traces d’anthropophagie signalées par Spring. A l’exception de ce crâne très-dolichocéphale de Chauvau, M. Wirchow ne voit dans tous les autres crânes que des variations d’un même type : les uns sont encore dolichocé¬ phales, d’autres sont brachycéphales; ceux que M. Soreil a retiré de la caverne de Sclaigneaux présentent à un haut degré ce dernier caractère. Néanmoins, il y a des passages insensibles entre tous. Le savant professeur en conclut qu’une même population peut présenter une grande variabi¬ lité dans le développement des diverses parties du crâne , et que l’on ne doit pas conclure de ces différences à l’existence de plusieurs races. Il insiste sur la difficulté de déduire d’observations isolées une théorie scientifique, et montre par un exemple combien il faut être prudent si l’on ne veut s’ex¬ poser à de singulières erreurs. « Jusqu'à présent, dit-il, on considère la capacité de la boîte crânienne comme un indice presque certain du développe¬ ment des facultés psychiques. Or, la Société anthropologique de Berlin a reçu récemment des crânes provenant de fouilles faites à Athènes et qui remontent positivement à l’époque ma¬ cédonienne. Ces crânes, a en juger par leur capacité, feraient — 169 — supposer une intelligence tellement en dessous du dévelop¬ pement normal que, si on les avait trouvés à Furfooz, on les aurait attribués à une race très-inférieure , à peine aussi avancée que les sauvages de l’Australie Un de ces crânes appartient à une femme qui s’appelait Glycère , et qui évi¬ demment était dans une situation privilégiée, ainsi que le prouvent les objets précieux trouvés dans son tombeau, et la place même de ce tombeau au milieu de la ville. » M. de Quatrefages attribue à des croisements la variabilité signalée par M. Wirchow. L’homme, dit-il, a toujours été beaucoup plus voyageur qu’on ne le croit communément. Il n’est rien d’étonnant à ce que la Belgique ait reçu à plusieurs reprises des hôtes étrangers. Ainsi l’homme de Furfooz avait la plus grande ressemblance avec celui de Cromagnon dans le Périgord. Mais une autre influence a pu aussi contri¬ buer à faire varier les types , c’est celle des milieux , c’est-à- dire des conditions vitales. Il pense que l’étude des races de l’âge de pierre finira par résoudre les problèmes que sou¬ lève l’ethnographie actuelle. M. Léon Vanderkindere, qui vient de publier une brochure intéressante sur l'Ethnologie de la \ Belgique , croit aussi que les races préhistoriques ont laissé des traces, et que les deux éléments germanique et celtique qui sont venus peupler notre contrée s’y sont mélangés à un élément non aryen plus ancien. L’homme dont nous venons d’indiquer les caractères an¬ thropologiques, menait une existence misérable dont les populations les plus abaissées de l’époque actuelle peuvent à peine donner un exemple. Il ignorait complètement les métaux. Ses instruments étaient uniquement faits en silex, en os .et bois de renne : ce sont des haches, des couteaux, des racloirs, des pointes de dards et de flèches; d’autres sont plus délicats. Ainsi , on trouve des aiguilles en os avec trou ou chas pour passer le fil. Nous disons fil, mais les troglo¬ dytes de la Meuse n’avaient pour fil que des tendons d’ani- maux. Cependant, ils se servaient de crin, comme le démon¬ trent le grand nombre d’extrémités de queues de cheval que l’on retrouve dans leurs demeures. Ils se couvraient de peaux d’animaux et avaient même un goût marqué pour la parure. Ils se peignaient le corps en rouge , à l’aide du fer oligiste , comme le font encore les sauvages de l’Amérique du Nord. Ils se faisaient des colliers et des pendeloques de toutes na¬ tures ; ce sont de petits morceaux de fluorine violette, d’ar¬ doise de Fumay, dejayet, et surtout des coquilles fossiles. Ils en avaient ramassé quelques uns dans la région, mais d’autres, en plus grand nombre, proviennent de la Champagne. Rien de curieux comme la présence de ces coquilles des environs de Reims dans les grottes de Dinant. Les troglodytes qui y vivaient avaient donc des rapports avec les habitants de la Champagne à travers la forêt des Ardennes et les pro¬ fondes gorges de la Meuse. Ce fait a servi de point de départ à M. Dupont pour découvrir l’origine des silex dont ils fabri¬ quaient leurs instruments. Sauf un très-petit nombre d’ex¬ ceptions , le silex ne provient pas du pays; ils n’allaient pas non plus le chercher aux environs de Mons , où ils l’eussent trouvé en très grande quantité. Ils l’empruntaient à la Cham¬ pagne, et M Dupont, guidé par cette pensée que les coquilles fossiles et le silex pouvaient provenir du même trafic, est allé en chercher le gisement à Vertus , près de Reims. Quelques éclats de silex couleur cire vierge semblent même indiquer qu’ils en faisaient aussi venir de la Touraine. Les troglodytes de la Meuse se nourrissaient des produits de leur chasse. Ils dépeçaient sur place les grosses pièces, éléphants, rhinocéros, ours, cheval, renne pour en apporter seulement les quartiers dans leur demeure. La faiblesse de leurs armes fait supposer que la ruse jouait un grand rôle dans la manière dont ils s’emparaient de leur proie. Tout porte à croire qu’ils cuisaient leurs aliments; au moins , ils connaissaient l’usage du feu , et l’obtenaient en frappant avec un silex sur un nodule de pyrite de fer. — 171 — Ces peuplades sauvages habitèrent longtemps dans le Con- dros. Dans l’opinion de M. Dupont, les profondes vallées de la Meuse et de ses affluents furent creusées par les cours d’eau qui y coulent maintenant , mais qui avaient alors une importance beaucoup plus grande. Ainsi, on retrouve à 90 mètres au dessus de la vallée actuelle des dépôts d’un ancien cours d’eau dont la largeur dépassait plusieurs kilomètres. Pour M. Dupont, c’est là les traces de l’ancienne Meuse au commencement de l’époque diluvienne. C’est possible, mais c’est un fait capital qu’il serait important d’établir à l’aide de preuves irréfutables. Nous demanderons donc à M. Dupont s’il a trouvé dans les graviers des plateaux des traces d’élé¬ phants ou d’autres animaux caractéristiques de l’époque qua¬ ternaire. A mesure que le fleuve se rétrécissait par le dépôt de sables et de galets sur les bords, son cours devenait plus rapide et il entamait les roches du fond, il se creusait un lit. On trouve dans la vallée de la Meuse, trois terrasses étagées indiquant autant de périodes de repos pendant le phénomène du creusement des vallées. Les cavernes sont des poches creusées dans les rochers calcaires par des sources thermales antérieurement à l’époque quaternaire. Le fleuve, en sillonnant son lit au milieu de ces rochers , a dû rencontrer plusieurs de ces poches qui sont d’ailleurs fort nombreuses. Quand il n’enlevait qu’une partie des parois, il en résultait une cavité à ouverture béante sur le flanc de la vallée. Quand l’homme arriva dans l’Ardenne , il profita de ces cavités pour s’y loger, et souvent il dut les disputer aux lions, aux ours, aux hyènes qui y avaient élablis les premiers leurs demeures. Après avoir chassé ces grands animaux , il n’en resta pas pour cela le tranquille possesseur. Le fleuve le lui disputait; à chaque période de crue , il envahissait la caverne et y déposait une nouvelle couche de gravier, de sable et de — m — limon. Dans certaines cavernes, on trouve cinq ou six couches de dépôts fluviatiles séparés par autant de lits fossi¬ lifères qui indiquent le séjour de l’homme. Si on admet la théorie de M. Dupont, on doit conclure que les grottes les plus élevées au dessus du niveau de la vallée ont été abandonnées les premières par l’eau et ainsi ont été les premières habitées. Leur contenu est en rapport avec cette manière de voir. Les premiers silex sont de simples pierres à forme trian¬ gulaire , dont une des faces est plate et l’autre taillée à facettes irrégulières , de manière à obtenir une arête tran¬ chante. Mais la difficulté de se procurer le silex engagea à le tra¬ vailler avec plus d’économie On enlevait du bloc de silex de longues lames minces qui se détachaient d’un seul coup et que l’on retouchait ensuite sur les bords. C’est ce que nous appelons des couteaux. En même temps , le travail de l’os se perfectionnait, non-seulement on le sculptait mieux, mais on y gravait des dessins qui ne manquent pas d’élégance. M. Dupont a établi dans les dépôts des grottes une autre division fondée sur les modifications subies par la faune. Le mammouth, le rhinocéros, l’hippopotame, la hyène, le lion , l’ours disparurent peu à peu ; de tous ces animaux étrangers à la faune actuelle , il ne resta plus que le renne. De là la division de la période diluvienne en deux âges : l’âge du mammouth et l’âge du renne. Pendant ce second âge, les habitudes des troglodytes se modifièrent peu, mais leur nour¬ riture changea ; à la chasse du rhinocéros et de fours suc¬ céda la chasse du renne et surtout du cheval. Quand le gros gibier venait à manquer, on prenait le petit , et le rat d’eau entre pour une part considérable dans les festins des sau¬ vages de l’âge du renne. A ce sujet, nous avons une seconde question à poser à M. Dupont. M. Lartet , dans ses belles études sur le midi de la France, a aussi distingué l’âge du renne, de l’âge du mam- — 173 — moulh. Dans ses recherches si admirablement conduites, il a trouvé à l’époque du renne des objets gravés et sculptés avec une perfection remarquable. C’est à peine s’il en a rencontré quelque ébauche chez les contemporains du mammouth. Au coniraire, M. Dupont a reconnu dans la caverne de Goget, au milieu d’ossements de mammouth, d’ours, etc., un bâton de commandant très-joliment gravé et un harpon barbelé. Faut-il en conclure que le mammouth a persisté dans l’Ardenne plus longtemps que dans le Périgord, ou que nos populations tro- glodytiques ont précédé dans la carrière artistique les troglo¬ dytes périgourdins? Un autre fait qui semblerait venir à l’appui de la civilisation relative des habitants de notre région, c’est qu’à Furfooz on a trouvé dans les dépôts de l’âge du renne une urne d’assez grande dimension, tandis que la poterie ne semble avoir été connue des habitants du midi qu’à une période beaucoup plus récente. L’âge du renne a été le témoin d’un phénomène géologique dont la nature est encore inconnue, et qui a eu pour effet de recouvrir les divers dépôts du fleuve, limon stratifié, sable, galets, etc., d’une épaisse couche d’argile rouge renfermant à la base de nombreux fragments de roches éboulés et non brisés. C’est dans cet argile à blocaux, comme l’appelle M. Dupont, que se trouvent les nombreux débris de l'âge du renne tout le limon fluviatile étant de 1 âge du mammouth. M Hébert pense que l’argile à blocaux a succédé à la période du renne, que les débris de cet âge que l’on y trouve y sont à l’état remanié , et que pendant la formation de ce dépôt problématique l’homme avait disparu du pays. Pour ceux qui croiraient que nous venons d’écrire un conte fantastique, nous les renvoyons au livre de M Dupont, et, s’ils ne sont pas convaincus , qu’ils aillent fouiller une grotte, ou plutôt qu’ils aillent visiter le musée de Bruxelles. Dans tme salle en forme d’hémicycle, dans une sorte de ca- — m — verne artificielle, M. Dupont a étalé le produit de ses recher¬ ches avec un luxe d’étiquettes et d’explications qui sont à elles seules un véritable livre. Tout homme sensé sortira de ce musée plein d’admiration pour une science , qui est par¬ venue à faire revivre en quelque sorte devant lui une popu¬ lation éteinte depuis une antiquité aussi reculée. J. G. (A suivre). 4 BIBLIOGRAPHIE. CHAPITRES DE L’HISTOIRE DE LILLE Par J. Houdoy. HL ! Les comptes de la ville de Lille. L’érudit lillois, dont nous analysons l’ouvrage, a compulsé durant plusieurs années les comptes de la ville de Lille , de 1302 à 1789, ainsi que les comptes du domaine de Lille où sont indiqués les droits seigneuriaux du comte et sa part dan les assises et fermes de la ville avec les dépenses faites dam la cité pour sa personne , ses officiers et son château , le: archives des fonds ecclésiastiques et les documents relatif: aux arts et métiers. De ces cinq à six cents volumes manus¬ crits, M. Houdoy a extrait, outre un certain nombre de men¬ tions historiques d’intérêt général et de particularités inté¬ ressantes et anecdotiques, tous les passages qui lui ont pari intéresser l’archéologie, les arts et l’industrie. C’est ui immense travail, dont le résultat ferait connaître le mouve ment intellectuel et artistique qui animait les grandes cité de la Flandre dans les derniers siècles du moyen- âge et 1 commencement des temps modernes. L’auteur, qui publie la préface destinée à servir d’intro duction à cette importante publication, dit en tête de cetl préface qu’ayant reconnu , l’œuvre étant terminée , que 1 nombre des lecteurs que ce genre de documents peut inté resser est trop restreint, il renonce à faire paraître so ro — 175 — travail. Nous ne pouvons partager l’avis de M. Houdoy ; nous avons la conviction que son œuvre serait accueillie avec empressement par les érudits de la France, de la Belgique et de l’Angleterre, qu’elle offrirait une source abondante de renseignements dans laquelle iraient puiser non-seulement tous ceux qui s’occupent d’histoire locale, mais aussi tous les écrivains qui veulent tracer, dans ses grandes lignes, l’histoire des arts et de la civilisation. Nous espérons que ce travail sera publié : c’est avec bonheur que nous saluerions son apparition à la lumière. Après avoir exprimé ce regret , nous nous efforcerons d’initier nos lecteurs à la comptabilité en usage dans la ville de Lille , en suivant l’analyse sommaire des comptes de la ville, qui est exposée par le patient investigateur des archives lilloises. Le compte de 1317 à 1318 se divise, comme tous les autres, en deux parties, la recette et la dépense. La recette comprend la recelte des tailles par semaines, qui était de 1199 livres, 13 sous, 6 deniers ; ensuite la recette du saiiel as connissanches (sorte d’impôt d’enregistrement créant hypo¬ thèque sur les maisons et héritages de la ville), qui était de 421 1. 10 s. et 5 d. ; la recette des censes par semaines, de la goiulale (bonne bière), du blé, de la marque des draps, de la friperie, du poids de la ville, du cuir, de la laine, delà teinture, du bois, qui montait à 1405 1. 18 s. 10 d. ; la recette des censes par années , qui comprenait la location des halles, et de la pêche de la rivière et des fossés, les droits de place sur le rivage et pour les foires, les impôts à l’occa¬ sion des chaussées, de la circulation, etc., était de 830 1. 2 s. 6 d. ; puis venaient la recette des rentes héritières de la ville, des rentes viagères, des échoppes en location, de la taille mise sur les usuriers con apiele bougres , des amendes, des escassements ou droits de mutations de propriétés mobi¬ lières et immobilières pour les non-bourgeois, des deniers provenant d’orphelins, de l’argent prêté à la ville, de la — m — recette de nouveaux bourgeois. Le total de la recette était de 10180 livres, 12 sous, 7 deniers. Les dépenses étaient divisées en dix-neuf articles : quatre sortes de rentes diverses que la ville devais les aumônes, les mariées , les grosses pièches (dépenses importantes), le nouvel emprunt, les rentes à vie et leurs arriérages, les dépenses pour l’adjudication des censes ou fermes , les dépenses diverses, les ouvrages, les voyages, les présents, les messageries, les services et pensions donnés aux officiers de la ville : elles s’élevaient à 9894 livres, 15 sous, 8 deniers. De 4319 à 1364, les comptes sont établis sur le modèle que nous venons de reproduire. A partir de 1364, les diffé¬ rents chapitres sous lesquels se répartissaient les divers arti¬ cles sont supprimés, à l’exception de celui qui comprend les services et pensions , et toutes les dépenses s’inscrivent par mois, à la suite de l’une de l’autre, sans aucune distinction. En 1393, à l’exemple et sans doute d’après les ordres de la Chambre des Comptes qui venait d’être instituée, la compta¬ bilité se modifie de nouveau pour se modeler sur celle de la maison de Bourgogne. Mais si la forme apparente devient meilleure, les procédés laissent longtemps encore à désirer : en 1409, une ordonnance de Jean sans-Peur exige en vain des réformes ; en 1466, une autre ordonnance de Philippe- le-Bon, citée in-extenso par M. Houdoy, signale les abus qui existaient dans l’emploi des finances de la ville, décrété la suppression des commis de la hanse et crée un argentier responsable. A partir de cette date, les comptes sont rédigés d’après une division nouvelle. En 1468, la Recette comprend : 1° les arré¬ rages des diverses rentes, héritages, locations et octrois ; 2° les rentes, les locations, les droits sur les chaussées, le vin débité, le scel aux connaissances, les octrois par semaines sur le vin, la bière, le blé, le cuir, les bestiaux, les impôts provenant du poids de la ville, de la pêche, des halles, du sel, du nettoiement des places et des rues, de la marque des draps, de la bourgeoisie, des amendes de police, etc. ; cette recette s’élève à 27231 1. 5 s. 7 d La dépense se divise en paiements de rentes diverses et de locations, en pensions , chapitre qui comprend les gages de tous les hauts employés de l’administration municipale, avocat au parlement, procu¬ reur, argentier, conseillers pensionnaires, etc. ; en salaire des officiers , employés subalternes, tels que mesureurs, égards aux vivres, ménestrels ; en voyages et journées , cha¬ pitre intéressant dans lequel se trouve la partie politique et diplomatique des comptes ; en présents de vin , mentions qui offrent la liste de tous les personnages de distinction passant par la ville ; en dons honorables , indications relatives au coût des robes d’échevins et des présents de joyeux avènement; en ouvrages et réfections, source précieuse pour l’histoire de l’art et des métiers ; en anciennes marnées ; en dons et aumônes ; en renchères de censes , augmentations demandées par les fer¬ miers de la ville ; en dépenses pour les fêtes ; en courtoisies, pourboires d’aujourd'hui ; en messageries , chapitre presque aussi t urieux que celui des voyages ; en dons pour agréables services , gages supplémentaires ; en rachat de rentes ; en dépenses pour procès ; en dépenses communes , où se trouve le côté anecdotique des comptes ; en dépenses extraordinaires. La somme totale de la dépense est de 26,047 1. 13 s. 10 d. ; comme la recette est de 27,000, la situation financière de la ville paraît excellente. Mais en voyant que les arrérages des rentes figurent pour 15,000 livres environ, on se dit que les réformes de Philippe-le-Bon étaient bien nécessaires. Voilà l’analyse du chapitre consacré par M. Houdoy aux Comptes de la ville de Lille. Nos lecteurs y auront trouvé, comme dans les deux autres chapitres , de curieuses révéla¬ tions, et comme nous ils souhaiteront que M. lloudoy ne tarde pas à publier ses Extraits de Comptes , qui seront les véritables sources de fliistoire de la capitale de la Flandre. - 178 — HISTOIRE GÉNÉALOGIQUE DE LA FAMILLE DE TENREMONDE , 1268-1864. Par MM. Amédée DE TERNAS et Henri FREMAUX (1). Les Souvenirs de la Flandre wallonne , revue historique dont nous avons déjà parlé à nos lecteurs, avait publié la Généa¬ logie de la maison de Tenremon le ; les auteurs de ces articles MM. le Chevalier Amédée de Ternas et Henri Fremaux viennent de réunir ce travail en volume et de le faire paraître sous le titre d 'Histoire généalogique de la famille de Tenre- monde. Ils avaient le droit de prendre ce titre ; leur travail est plus complet et non moins sûr que ceux des généalogistes renommés qui ont adopté un titre analogue pour leurs ouvrages. Le sujet a été très-bien choisi pour la Flandre Wallonne. Peu de familles, dans nos .contrées présentent une origine aussi ancienne que celle des Tenremonde et offrent autant de personnages qui se sont distingués à la cour des ducs de Bourgogne et des rois de France, dans les charges munici¬ pales à Lille , et à Tournai, parmi les chevaliers de Malte, dans la chapelle de Saint-Pierre de Lille et dans plusieurs ordres religieux : ce n’esd; pas sans raison que la capitale a donné à l’une de ses rues le nom de cette famille. L’ouvrage avec une conscience, une exactitude et un esprit méthodique qui ne laissent rien à désirer : les renseignements ont été relevés sur les documents originaux dans les Archives de Lille, Tournai et Douai, dans le dépôt du département du Nord et dans le grand dépôt national de Paris ; les sources sont toujours indiquées avec précision. Comme tous les généa¬ logistes dignes de ce nom , les auteurs ne croient que sur preuves, n’affirment que sur preuves. A la suite de la généalogie MM. de Ternas et Fremaux ont % (i) Volume in-8 de 134 pages, sur papier vergé. En vente, à Lille, chez L. Quarré, GramUPlace, 64. publié une courte Notice sur plusieurs terres et seigneuries ayant appartenu à la famille de Tenremonde. Ce sont les terres et seigneurie de Mérignies, le fief de la Huilerie , situés à la chapelle d’Armentières, le fief d 'Hébuterne situé à Houplines, le fief de le Becque situé à Frelinghien, la seigneurie de Bachy , la seigneurie de Bernas située à Nouchin, le fief des Fremaux situé à Verlinghem, le fief d'Asck situé à Deûlémont, le fief de Dormfort situé à Sequedin, le fief du Gars ou du Gard situé à Wazemmes. Cette seconde partie de l’ouvrage n’est certes pas la moins curieuse pour l’histbire féodale de la contrée. L’ouvrage n’a été tiré qu’à soixante exemplaires. C’est trop peu ; quand des auteurs ont consacré des années à un travail, ils doivent vulgariser le résultat de leurs laborieuses recherches. CHRONIQUE. Météorologie. Température atmosphér. moyenne. — — des maxima. — — des minima. — extr. maxima, le 22. — — minima, le 18. Baromètre hauteur moyenne, à 0°. — — extr. max.le 4. — — — min. le 30. Tension moy. de la vap. atmosph. Humidité relative moyenne %. . Épaisseur de la couche de pluie. . — — d’eau évap. Juillet 1872. année moyenne 19? 32 17? 72 ' 24? 72 13? 92 33? 4 9? 8 759mm 155 700mm 322 765m“ 85 752mm 90 1 1 mnl 70 1 1 cnm Q8 63,90 69,72 135m“ 73 60"““ 7 1 156mm 23 140m“98 La haute température de ce mois, qui ne fut dépassée que parcelle du mois correspondant de 1852 (22°.20) de 1859 (21°.06), de 1868 (20° 58), occasionna une abondante évapo¬ ration et par suite l’accumulation d’une grande quantité d’électricité dans l’atmosphère. Cette électricité donna heu — 180 aux orages des 9, 12, 13, 23, 27, 28, 29, qui tous furent accompagnés de pluies torrentielles qui couchèrent les récoltes. Une seule fois il tomba de la grêle qui , heureuse¬ ment, ne dura que cinq minutes, ce fut le 13; mais elle causa de grandes avaries aux tabacs. L’orage du 23, qui éclata à 2 heures 30' de l’après-midi, détermina la chute de grêlons très-volumineux et très-nombreux qui hachèrent les récoltes comprises dans une bande de terrains s’étendant de Merville à Bailleul. La foudre , en plusieurs endroits, alluma des incendies et causa la mort d’hommes et d’animaux. Ces divers' orages vinrent du S. S.-0., du S.-O.- et de F 0. S.-O. Malgré la fréquence et Fabondance de la pluie, l’air fut bien plus sec pendant ce mois que dans le mois correspon¬ dant d’une année moyenne ; aussi l’épaisseur de la couche d’eau évaporée fut-elle fortement accrue par cet état hygro¬ métrique des couches atmosphériques en contact avec le sol. Les couches supérieures ne furent humides que par inter¬ mittence ; ce que démontrent la nébulosité moyenne, 27 jours ciel demi-couvert, 7 jours couvert, et la hauteur moyenne du baromètre. Sous l’influence électrique, de grandes quan¬ tités de vapeur dissoute se précipitaient rapidement à l’état globulaire, couvraient le ciel, se condensaient en pluie tom¬ bant par torrents, et le ciel ne tardait pas à reprendre sa sérénité. Toujours les nuages électriques avaient une marche excessivement lente. La pluie la plus abondante a été celle du 13 (37rnir,04). Les vents régnants ont été ceux du S.-O. (9 jours), S.-E. (8 jours), N.-O. (8 jours) Le nombre des brouillards observés pendant le mois a été de 18, celui des rosées 20, celui des jours de pluie 16. La tension de l’électricité atmosphérique a toujours été grande. V. Meurein. Lille, lmp, Six-Horemans. 72-1 ï où il dit : On m’apèle Bochu, mais je ne le suis mie. j .s . : , v ' 4 Cependant il est probable que sa taille n avait pas toute l’élégance désirable : car Jean Bretel, son concitoyen et son contemporain, lui reproche de raisonner bochuement . On ne trouve rien sur la position occupée dans Arras par son père Henry de la Halle ; mais la qualité de maître qui lui est donnée par son fils dans le Jeu de la feaillée , semble témoigner qu’il n’était pas étranger à l’étude des lettres et des arts. Dès son adolescence , Adam fut reçu dans la société des riches seigneurs et bourgeois d’Arras, qui lui ouvrirent leur maison et leur bourse et l’admirent à leur table. Bien doi avoir en ramembranche Deus frères en cui j’ai fianebe. Signeur Baude, et signeur Robert Le Normant : car ils m’ont d’enfanche Nourri et fait mainte honnestanche ' Et se li cors (1) ne le dessert, Li cuers à tel cose s’aert (2). Que, se Dieu plait, meri leur iert (3), Se Diex adrèche m’espéranche (4), Leur huis m’ont esté bien ouvert. Cuérs que tel compaignie pert, Doit bien plourer la dessevranche (5). Dans d’autres strophes, Adam nous parle aussi du bour¬ geois Jakemon Pouchinois, de Pierre Pouchin, Gilles Joie, et, Colart Nasart, ses compagnons de joyeuse vie. — Celte vie de dissipation à laquelle il se livra avec toute la fougue de la jeunesse, lui fit abandonner l’étude. Il en fait lui-même l’aveu dans ses vers : Vous m’avez bien fait en partie, Se tous m’ostales de ciergie, Je l’ai par vous ore repris . Les plaisirs lui avaient fait abandonner la science, la ciergie , comme on disait alors ; mais ils l’y ramenèrent, lit voici comment, d’après les biographes. Maître Henry de la Halle, que son fils accuse dans ses vers d’être dur et avare et qui n’était peut-être qu’un père énergique et ferme, voulut arracher le jeune Adam à cette vie désordonnée. 11 le con¬ duisit à l’abbaye de Vaucelles, où il lui fit prendre l’habit de clerc, et continuer ses études. Lejeune trouvère ne semble pas y être resté longtemps. 11 retourna à Arras, rappelé par le souvenir d’une jeune tille du nom de Marie, dont les bois, le cloître grandiose et le docte savoir de Vaucelles ne pouvaient lui faire oublier la beauté. Il nous le dit aussi dans le Jeu Adam : (î) Corps. (2) S’atiache, du latin aclhcerere , adhœrel. (3) Meri leur iert , que récompense leur en soit; incri , du latin merere, meretum ; iert , du latin erit. (4) Si Dieu exauce mon espoir, mes vœux. (5) Dessevr anche, séparation. — 186 — Bonnes gens, ensi fui jou pris Par amours, qui si m’ait souspris : Car faitures (1) n’ot pos si bêles Corne amors le me fist sanler (2) Et désirs me le fist goûter A le granl saveur de Vauchèles. A son retour il trouva Arras en pleine discorde. Adam et sa famille semblent avoir pris part à ces luttes ; peut-être les vers satiriques du trouvère avaient-ils contribué à cette situation qui fut le partage de beaucoup d’autres habitants. Avec son père, il se réfugia à Douai. C’est l’un de ses concitoyens et de des confrères en poésie, Baude Fastoul, qui nous l’apprend. A l’occasion de ce départ, Adam composa son congé, où il fait ses adieux en termes affectueux et où il ne ménage pas ceux qui étaient cause de son exil et de ses infortunes. Voici comment il apostrophe Arras : Arras, Arras, ville de plait (3) Et de haine et de détrait (4) Qui soliés estre si nobile (5) On va disant c’on vous refait ; Mais si Diex le bien n’y ralrait (6), Je ne vois qui vous reconcile (7) : On i aime trop crois et pile Chascuns fuberte (8) en cesle ville Au point qu’on estoit à le mait (9). Adieu de fois plus de cent mille. Ailleurs vois oïr l’Evangile : Car chi fors mentir on ne fait. (1) Faitures , beauté, de factura, façon, forme. (2) Sanler , sembler, paraître, croire. (3) Fiait, de placilum, plaid, querelle. (4) Dé trait, de detrahere , detractum, détracter, médire : médisance. (5) Nobile, noble, de nobilis . (6) Ra trait, ramène. (7) Reconcile, réconcilie. '(8) Fuberte, est fourbe. (9) Être a le mait, au pétrin, en confusion. — 187 — En des strophes, que nous avons rappelées plus haut, il avait salué ses amis et compagnons ; il a aussi des paroles de tendresse pour celle dont il désirait obtenir la main : Bêle très douce amie chière Je ne puis faire bêle chièrc, Car plus dolant de vous me part Que de rien que je laisse arrière. De mon cuer serés trésoriôre ; Et li cors ira d’autre part Apprendre et querre engien et art De miex valoir ; si arés part Que miex vaurrai, mieudres vous ière, Pour miex fructifier plus lart : De si (1), au tierc an ou au quart, Laist on bien se tère à gaskière (2). L’exil ne paraît pas avoir été de longue durée. Après l’apaisement des troubles, la famille de la Halle revint à Arras ; Adam s’empresse de chanter son pays, ses amis et surtout la dame de ses pensées : De tant com plus aproime (3) mon païs, Me renouvèle amours plus et esprent, Et plus me sanie en aprochanl jolis Et plus li airs et plus truis (4) douche gent. Che me tient si longuement Et chou aussi Qu’en souvenir i choisi Dame de tel honneranche C’un poi de le conlenanche De me Dame en l’une vi, Si qu’a le saveur de li Me délita (5) se semblanche. C’est alors seulement que maître Henry de la Halle finit par consentir au mariage de son fils. Adam jouit de son bonheur (1) De si, ainsi. (2) Laisse-t-on la terre en jachère. (3) Aproime, d 'approxemare, approcher. (4) Truis, je trouve. (5) Délita, dclecta, plut. — 188 — dans sa ville natale, durant un temps qu’il est difficile de déterminer ; mais son humeur inconstante et vagabonde finit par prendre le dessus ; il abandonne sa femme, pour aller à Paris compléter ses études : Sachiés je n’aie mie si chier Le séjour d’Arras ni le joie, Que l’aprendre (1) laissier en doie ; Puisque Diex m’a donné engien (2) Tant est que je l’atour (S) à bien : J’ai chi.assés me bourse escouse (4) Il se rendit sans doute à Paris, où il suivit les cours de l’Université ; mais son séjour ne semble pas y avoir été très- long, puisqu’il n’en est pas question dans ses vers. Il revint à Arras et il paraît même être retourné à Vaucelles. couvent dont il avait conservé bon souvenir. C’est peut-être dans cette abbaye, où la sainte Vierge était l’objet d’un culte tout particulier, qu’il composa ses deux chansons en l’honneur de Marie. Dans l’une de ses strophes, il exprime son repentir du passé : Gcntiex Roine couronnée Qui voslre amour donnés briement (5), Merchi (6) de mon fol errement ! Et se tant vous est réclamée Par vanité qué j’ai antée Et par mauvais enortement (*7), Ne conseillés, Dame doutée, Que che soit à mon grèvement. Son imagination ardente et mobile ne tarda pas à l’en¬ traîner loin de sa ville natale et de sa famille. Il s’attacha à la maison de Robert II, comte d'Artois, neveu de saint Louis : (1) L'aprendre , l’apprendre, la science. (2) Engien , génie, talent. (3) Que je l’atour, que je le règle, que je l’amène (4) Escouse, secouée. (5) Briement , brièvement, en peu de temps, facilement. (6) Merchi, pitié. CO Enortement, excitation, de inhortari. — 189 — . Chis clers dont je vous conte Est amés et prisiés et honnerés dou conte D’Artois . Il visita à sa suite et avec Robert de Béthune, plus tard comte de Flandre, et Charles d’Anjou, frère de saint Louis, l’Égypte, la Syrie, la Palestine et toute l’Italie. Ce sont encore ses vers qui nous l’apprennent. Il suivit probablement les diverses fortunes de Charles d’Anjou, qui reçut en 1265 l’in¬ vestiture du royaume de Naples, et se dévoua complètement à ce prince, en l’honneur duquel il écrivit le poëme du Roi de Sicile. Ce fut aussi à sa cour, paraît-il, qu’il composa le Jeu de Robin tt de Marion . Le Jeu du Pèlerin , auquel sont empruntés les derniers détails sur Adam de la Halle, nous fait connaître qu’il fut absent d’Arras, et voyagea durant trente-cinq ans : Bien a trente et chienc ans que je n’ai arreslé, S’ai puis en maint bon tieu et à maint saint este. Le même poëme porte à croire qu’il revint à Arras, où on le croyait mort, et qu’il n'y reçut point de ses amis d autrefois l’accueil qu’il attendait. Peut-être aussi ce retour à Arras n’a-t-il existé que dans l’imagination du trouvère , pour fournir un sujet à une nouvelle pièce dramatique. Il est certain quil mourut à Naples, entre 1285 et 1288 « Telles sont, dit M. de Coussemaker en terminant la » biographie d’Adam de la Halle, les principales circonstances » de cette existence où se heurtent les uns contre les autres » les faits et les sentiments les plus opposés : à côté de la » reconnaissance , du dévouement , d’une certaine piété d même, on voit une imagination ardente, un caractère d d’une mobilité extrême, une fougue de jeunesse qui brave » tout, qui méprise même les lois de la morale. C’est un d mélange sur lequel il serait difficile de porter un jugement ï> absolu, d A la suite de cette esquisse de la vie d’Adam de la Halle, l’auteur donne une notice bibliographique sur les manuscrits — 190 — que nous avons indiqués plus haut ; vient ensuite une curieuse étude littéraire sur les seize j^ux-partis , les dix- sept rondeaux , les sept motels , le congé , le fragment de poëme épique et les trois poëmes dramatiques qui nous restent du trouvère d'Arras, et enfin un important travail sur Adam de la Halle considéré comme mélodiste et comme harmoniste. Le trouvère d’Arras, nous dit M. de Coussemaker, a doit » être considéré comme un des musiciens les plus distingués » du XIIIe siècle. Son mérite est pour le moins égal à celui » des meilleurs déehanteurs de cette époque ; il est incon- » testablement supérieur à celui des autres trouvères » Si nos lecteurs ont trouvé quelque intérêt, ont appris quelque chose, dans les lignes que nous venons d’écrire, qu’ils en remercient le savant éditeur des œuvres d’Adam de la Halle ; nous n’avons fait qu’abréger son introduction, en empruntant le plus souvent les termes mêmes dont il s’est servi. CALCAIRE CARBONIFÈRE DU HAINAUT A l’occasion du dernier article de l’Esquisse Géologique, M. Cornet, directeur des mines du Levant du Flenu, m’a en¬ voyé sous forme de tableau synoptique le résultat de ses recherches sur le calcaire carbonifère du Hainaut. Remarquons d’abord qu’il établit d’une manière positive la position stratigraphique du calcaire à chaux hydraulique de Tournai. C’est un point capital acquis à la science. Les nom¬ breuses divisions qu’il adopte peuvent rentrer dans celles que j ’ai indiquées; elles en sont le développement. Cependant il se pourrait que les calcaires inférieurs des Ecaussines et de Féluy dussent être rapportés au terrain dévonien. En désignant le calcaire noir à phtanites sous le nom de calcaire de Mevergnies, j’ai fait une erreur de localité; il devrait porter le nom de calcaire de Brugeletles. J. G. — 191 VALLÉE de la Dendre. • C-O DIVISIONS DU CALCAIRE CARBO- :=* ro — ■ — - 03 C=J O c— « NIFÈRE SUR LE VERSANT SEP- €>* g • =3 3 OO 03 es* 03 ’ eo a 03 & P TENTRIONAL DU BASSIN DE MONS. 03 03 rrd Maffles. —ta 1 03 ’ 2 bo 03 « 03 ' 03 OO S3 «0 03 C-J3 c— « a 03 n3 ttJ CJ « «S ^3 03 Pc-. 03 *OL> CtJ 03 U— 03 CP B 1 » * cj 1 Psammites dévoniens. . . 1 Calcaire gris bleuâtre à tex- + * * * ture compacte et en bancs minces . * * 2 Calcaire à crinoides en bancs minces, souvent argileux, fournissant de la chaux hydraulique (chaux de Me* vergnies) . * * * ♦ 3 Dolomie très-fossilifère . . 4 Calcaire à crinoides (petit * granité) . 5 Calcaire noir avec quelques * * ★ * + crinoides, bancs peu épais, chaux grasse . 6 Calcaire noir en bancs peu * 1 * * ★ * » épais et à chaux hydrauliq. 7 Calcaire noir avec noyaux de * 3 * • 1* * Phtanites . ♦ * * 8 Dolomie . 9 Calcaire bleu sans crinoides ★ ♦ ♦ et à bancs assez épais. . * 4 * » 10 Calcaire gris avec géodes. . 11 Calcaire gris avec Chonetes • * 6 papillonacea et Productus Cora . * 7 12 Calcaire noir en bancs min- ces ; chaux hydraulique . 13 Calcaire noir ..... * 8 * 9 * 10 « 11 * 11 * 13 * 14 Bancs de Phtanite. . . . * * * * 1 Carrières Nord de Vaulx et Chcrcq. — 2 Carrière de la Terre volée. — 3 Carr. de Vaulx et d’Antoing. — * Carr. de Cliièvres. — 5 Carr. de Lens. — 6 Carr. de la ferme Plumât. — 7 Carr. de >a Saisinne au N. de Castcau-Thieusies. — 8 Basècles et Peruwelz — 9 Casleau-Thieusics. — Viesville et Timéon. — 11 Blaton : chaux grasse. — 12 Sirault : veines de galène.— 13 Casteau-Thieusies : accompagné de brèche avec phtanite. — 192 — BIBLIOGRAPHIE HISTOIRE DE L’ACADÉMIE D’ARRAS (1) Faire connaître quelles études ont successivement occupé les générations qui depuis un siècle et demi se sont succédé dans une province, dans une ville importante, montrer comment cette ville et cette province se sont associées aux mouvements intellectuels de l’humanité et sont parvenues à répandre autour d’elles le goût des choses de l’esprit et de toutes les utiles améliorations ; énumérer les noms et les travaux de tous ceux qui ont pris part à cette œuvre, et en même temps rappeler à une société savante ses traditions, son passé, ses gloires : c’est produire un ouvrage tout à la fois utile et intéressant. M. le chanoine Van Drivai l’a entrepris pour l’académie d’Arras, dont il est le secrétaire général. L’histoire d’une société sa¬ vante peut, au premier abord, paraître un travail assez facile: pour celui qui prétend à une exactitude parfaite, mathéma¬ tique, et qui ne veut donner un nom, une date, un fait, qu’a- près avoir vu les pièces probantes, il faut beaucoup de temps et de patience, il faut des recherches longues et minutieuses parfois difficiles. M. le chanoine Van Drivai y est parvenu, après trois années entières employées à cette besogne avec une té¬ nacité que lui-même il appelle tant soit peu artésienne. Ainsi qu’il le dit lui-même « aujourd’hui que l’on attache enfin de » l’importance à ce qui s’est fait dans les provinces, aujour- d’hui que la vie réelle et chez soi semble vouloir remplacer y> la vie factice d’une excessive centralisation, if a voulu faire » l’histoire d’un mouvement littéraire qui dure depuis un d siècle et demi dans l’ancienne province de l’Artois. » Nous allons le suivre pas à pas dans l’ Historié de V académie d’Arras. Origine de V académie , travaux de ses membres de 1737 à (1) Histoire de l’academie d’Arras, depuis sa fondation en 1737 jus¬ qu’à nos jours par M. le chanoine E. Van Drivai, secrétaire général de cette société. — Arras A. Courtin 1872. — 193 — 1793.— Les origines de l’académie d’Arras sont très-modestes. Au mois de mai 1737, un certain nombre de personnes nota¬ bles de la ville d’Arras se réunirent dans le but de connaître, plus complètement qu’on ne peut le faire étant seul, les écrits périodiques et tous les mémoires et journaux de tous les pays ainsi que tous les travaux de la république des lettres. Dès le 11 Décembre suivant, cette réunion se constitua en véritable société savante, il fut décidé qu’on s’occuperait d’études sur l’histoire et la langue, et qu’on y établirait une académie sur le modèle de l’académie française. L’année suivante l’intendant 4> ayant rappelé les statuts de l’académie de Soissons d’après lesquels cette société devait avoir un protecteur choisi dans l’académie française, et envoyer chaque année à l’académie le jour de la fête de saint Louis quelque ouvrage en prose ou en vers, ces deux clauses déplurent singulièrement aux artésiens qui déclarèrent fort nettement qu’ils préféraient se borner au titre d’association littéraire plutôt que d’accepter ce qui ne pouvait convenir au temps présent et n’était pas dans l’esprit de l’établissement proposé. « Ils tinrenl parole et d attendirent jusqu’en 1773: ils reçurent alors des lettres » patentes qui érigèrent la société en académie royale des » Belles-Lettres parfaitement indépendante et à l’abri des deux » clauses qui leur avaient déplu avec tant de raison. t> A peine instituée, la société se mit à l’œuvre. Chaque an¬ née, d’après un usage excellent qui pourrait être adopté avec fruit dans nos sociétés d’aujourd’hui, elle posait deux points d’étude , sur lesquels quelques uns de ses membres , désignés par les suffrages de leurs collègues, devaient plus spécialement porter leurs travaux. Les mêmes questions étant ainsi étudiées en même temps par un certain nombre de membres, les discussions devaient être plus sérieuses et plus complètes Celte mesure n’empêchait point la lecture de mémoires dans lesquels .les divers membres de la société exposaient à leurs collègues le fruit de leurs éludes spéciales. — 194 — La plupart des nombreux travaux que rappelle M. Van Drivai pour la première période de la société, mériteraient d’être signalés. Nous ne pouvons ici que mentionner les prin¬ cipaux. La société entendit de M. d’Artres, ingénieur en chef de la ville d’Arras, des notes historiques sur des personnages célèbres originaires de l’Artois ; de M. Désirons un mémoire sur la rivière de PAa; de M de la Ferté un mémoire sur la rivière l'Authie ; de M. de Lestré un autre mémoire sur les fortifica¬ tions de Douai; de M. d’Allecourt un travail historique sur le monastère de Notre Dame de la Brayelle-les-Annai ; de M. de Grandvaldes mémoires sur l’histoire d’Artois, une dissertation sur l’usage des machines dans les poèmes épiques, une autre dissertation sur l’origine des fiefs et des observations sur les fossiles de l’Artois ; de M. de Mirabel, ingénieur ordinaire du roi, un discours sur l’excellence des mathématiques, des mé¬ moires sur les principales villes et abbayes du pays d’Artois, sur la rivière de la Lawe, sur les endroits par lesquels les ennemis pourraient pénétrer dans l’Artois, sur les levées de milice qu’on peut opérer dans la province et sur la citadelle d’Arras; de M. Binot, avocat et trésorier des chartes d’Artois, des dissertations sur l’érection du pays d’Artois en comté et sur l’antiquité de l’église d’Arras; de M Cauwet, des mémoires sur Robert et Mahaut d’Artois, sur la rivière de Scarpe et sur les anciennes aides accordées par les états d’Artois à leurs souverains ; de M. du Camp, des dissertations sur les anti¬ quités trouvées dans les environs d’Arras, sur le commerce et les manufactures des Atrébates, sur l’origine et l’étymologie de plusieurs noms de lieux situés en Artois. Ces sujets ont été traités pour la plupart de 1738 à 1750. De 1750 à 1773, époque ou la société d’Arras fut érigée en académie, les mémoires sont le plus souvent relatifs à la philo¬ sophie et à la morale ; ce sont des essais sur l’homme, sur la bienfaisance, sur le jugement et le goût; de 1773 à l’époque de la révolution nous appellerons l’attention de nos lecteurs — 195 — sur les mémoires de M. Buissart touchant l’utilité d’un hygro¬ mètre, les trombes terrestres et le flux et le reflux de la matière électrique, et sur plusieurs membres dont les noms méritent d’être signalés ; dom Gosse et dom du Marquet, chanoines d’Arrouaise, M de Champmorin, M. de Marescot ingénieurs distingués et M Carnot, alors simple officier du Génie et destiné à une grande célébrité et aussi M. de Robespierre dont le nom devait être si tristement connu. Ce nom nous amène à une époque, ou il n’y avait plus d’association littéraire; dès 1790 le registre est d’un laconisme désespérant: en 1791, dans le procès verbal de la séance extraordinaire du mois de mars il n’est question que de journaux ; en 1793, les scellés sont apposés sur les portes des appartements occupés par la ci-devant société littéraire d’Arras. L'académie d'Arras de 1816 à 1872. — C’est au sein du conseil d’arrondissement d’Arras, session de 1816, que fut émis le vœu de la restauration de la société. Cinq membres de l’ancienne académie existaient encore; M. le préfet du Pas-de- Calais et M. le Maire de la ville leur adjoignirent onze per¬ sonnes connues par leur goût pour les travaux intellectuels, et le 15 mai 1817 fut installée dans l’Hôtel-de-Ville une société royale d’encouragement pour les sciences, les lettres et les arts. Jusqu’en 1829, cette société semble avoir pris part avec activité au mouvement intellectuel et scientifique qui a dis¬ tingué l’époque de la restauration ; M. le chanoine Van Drivai nous dit en effet que les volumes publiés de 1817 à 1829 con¬ tiennent un total de 3669 pages, tandis que ceux publiés de 1831 à 1843 n'en renferment que 1830, juste la moitié. Et il ajoute que l'examen des travaux contenus dans les volumes démontre jusqu’à l’évidence l’exactitude de cette appréciation ; de 1840 à 1848, la société travaille avec une nouvelle ardeur. Il est à regrelter que l’auteur n’ait pas cru devoir, comme il i avait fait pour la période antérieure à la révolution, citer les principaux mémoires lus par les membres dans les séances — 196 — de la société. Il dit, pour motiver ce silence, que pour parler de ces travaux, comme de ceux qui ont été lus de 1848 jusqu’à nos jours, il faudrait louer des hommes encore vivants pour la plupart. Une simple nomenclature des mémoires eut pu se faire sans éloges; beaucoup de lecteurs auraient été heureux de connaître ces travaux, parmi lesquels auraient figuré avec honneur les études de M. le secrétaire-général. La simple succession des membres et la reproduction des statuts n’ont rien d’important pour le lecteur qui n’est point membre de l’académie. Du moins on lira avec intérêt et profit les pages dans lesquelles M. le chanoine Yan Drivai nous montre l’aca¬ démie encourageant, par le vote de plusieurs sommes impor¬ tantes, les expositions de la société des amis des arts d'Arras. Nous trouvons davantage à glaner dans l’appendice qui offre des notices biographiques sur quelques uns des membres de l’ancienne académie. M. Harduin secrétaire perpétuel, méritait une notice ; l’académie a entendu de lui sept mé¬ moires historiques snr les abbés de Liesse d’Arras, les entrées solennelles des souverains, lesjoutes, tournois, et faits d’ar¬ mes au quinzième siècle et sur l’histoire de la ville d’après les registres des archives communales; ses travaux sur la langue ont été plus nombreux encore; et il a composé un grand nombre d’odes, de poésies fugitives et d’épigrammes.Ses lettres que la société possède en quatre volumes in-quarto, révèlent une âme d'élite et un esprit élevé avec toutes les qualités du cœur, et le zèle pour les choses de l’esprit. Il fut l’âme de l’académie d’Arras durant tout le XVIIIe siècle : il s’occupa de toutes les affaires grandes et petites ; on le trouvait dans les plus minces détails comme dans les intérêts les plus élevés. L’abbé Delys, chanoine d’Arras, fut aussi l’un des membres les plus actifs de l’académie; elle lui doit beaucoup de mémoires sur les sciences et surtout une longue série d’observations météorologiques ; il ne négligea point les travaux d’histoire locale ni l’étude de la science appliquée à l’industrie, comme — 197 — en font foi plusieurs mémoires. La triste histoire de l’abbé Montlinot, qui était, sous l’habit ecclésiastique, un partisan de l’incrédulité et des encyclopédistes, est ensuite racontée, avec les luttes qu’il eut à soutenir contre des membres de l’académie d’Arras. Pour M. Dubois de Fosseux, le secrétaire perpétuel qui succéda à l’infatigable Harduin, M. Van Drivai renvoie à l’excellente notice publiée dans les mémoires de l’académie. Nous avons parlé plus haut de M. Enlart de Gran- val dont la biographie est ensuite tracée avec détail. La notice sur dom Gosse, dernier prieur de l’abbaye d’Arrouaise, est une des plus curieuses: elle donne une idée des productions légères et gracieuses de ce savant aimable et une analyse de son important travail d’érudition : Histoire de l’abbaye et de l’ancienne congrégation des chanoines réguliers d'Arrouaise, avec des notes critiques , historiques et diplomatiques , par M. Gosse , prieur d’Arrouaise , de l’académie d'Arras. A la suite, viennent quelques mots sur le poète M. Legay, une notice de M. Parenty sur M. Lenglet, auteur de travaux d’économie poli¬ tique, et des notes sur les Ansart, famille qui a fourni cinq membres à l’académie d’Arras. A la fin de l’appendice, l’au¬ teur rappelle les notices nécrologiques publiées dans les mémoires de l’académie depuis environ 1820 en indiquant le tome et la page. M. le chanoine Van Drivai a fait un ouvrage utile et inté¬ ressant. Ecrivant surtout pour ses confrères concitoyens, il a négligé à dessein de publier certains renseignements que l’étranger voudrait posséder ; malgré cette lacune, l’histoire de l’académie d’Arras est un livre qui a son importance ; il serait à désirer que toutes les sociétés savantes puissent trouver un secrétaire-général qui eut le même zèle et la même patience, unis au même talent. — 198 — ZOOLOGIE DU DÉPARTEMENT DU NORD. Mollusques terrestres et ftuviatiles. Le prochain volume de la Société des sciences de Lille contiendra un Catalogue des Mollusques terrestres et fluviatiles du département du Nord que j’ai présenté à la Société au commencement de cette année. Messieurs les directeurs du Bulletin m'ayant demandé d’en donner ici un aperçu, comme suite aux articles déjà consacrés à la zoologie du Nord, je vais en faire une courte analyse. J’ai constaté dans notre département la présence de 132 espèces, rigoureusement déterminées d’après les auteurs qui ont précédé l’école dite moderne et surtout d’après M quin- Tandon. C’est dire assez que je n’ai pas cherché à allonger la nomenclature à la manière de beaucoup de malacologistes actuels, en fabriquant des espèces nouvelles sur des variations souvent insignifiantes, ou en admettant celles qui ont été ainsi indiquées. J’aurais pu, d’après cette méthode, doubler au moins mon catalogue ; je l’aurais certainement décuplé en inscrivant toutes les variétés sous un nom spécial ; mais dussè-je passer pour retardataire, je ne puis comprendre qu’on fasse aimer et progresser la science en la compliquant par la mul¬ tiplication des termes , et surtout en dédoublant des formes spécifiques sur un simple examen de cabinet, souvent sur une minime différence d’habitation, sans chercher à con¬ naître les rapports vitaux, et les affinités de reproduction qui seront toujours, quoiqu’on fasse, le critérium de l’espèce.. Je n’ai cependant pas la prétention d’avoir dit le dernier mot sur les Mollusques de notre contrée ; quelques espèces ont pu échapper jusqu’à ce jour aux recherches ; d’autres qui n’y existent pas aujourd’hui, s’y rencontreront peut-etre plus tard ; d’autres enfin , parmi celles qui ont été creees avec des variétés de formes, seront reconnues dûment valables, à la suite de vérifications consciencieuses et devront — 199 - prendre rang sans conteste. Ceci pourrait arriver surtout dans la famille des Limaciens. M. J. Mabille, en 1870, portait le nombre des Limaciens français à. 56, soit 44 de plus que Moquin-Tandon. Une vingtaine de ces espèces, presque toutes de la création de l’auteur, sont indiquées des départe¬ ments de l’Aisne, de l’Oise ou des environs de Paris et doivent se retrouver parmi les nombreuses variétés que nous rencontrons dans le Nord. Il y aurait là une étude intéressante à tenter. J’indiquerai aussi comme digne d’attention une étude approfondie de nos espèces des genres Vitrifia, Limncea et Pisidium , mais plutôt au point de vue de la réduction que de la multiplication. En détaillant mon catalogue je trouve : lre famille, Limaciens , 11 espèces. 2e y> Colimacés , 61 3a » AuriculacéSj 2 » 4e ï> Limnéens , 24 » 5e 3> Orbacés, 2 » 6e y> Péristomiens , 6 » 7e » Valvatidés , 3 » 8e » Neritacés, 1 » 9e » JSaiadés , 21 » 10e » Dreissénacés , 1 » ~132 T Ce chiffre de 132 se retrouve à peu près dans la liste des Mollusques vivants de la Belgique que M. Colbeau a publiée dans les Annales de la Société Malacologique de Bruxelles (tome III, page 85), en faisant abstraction toutefois d’une dizaine d’espèces nouvelles , telles qu 'Hélix Sauveuri et Villersii , Limnœa linearis et pseudostagnalis , Planorbis Roffiaeni , Unio Lambottei et Robianoi , etc., que je n'ai pas vérifiées, mais qui très-probablement doivent rentrer parmi les variétés des types aux dépens desquels elles ont été faites. Cette ressemblance , quant au nombre , entre les listes de — 200 — notre seul département et de toute la Belgique, est assez surprenante quand on observe que la Belgique comprend dans ses provinces orientales un système géologique très- favorable au développement des Mollusques, et qui n’existe dans le Nord que sur une étendue restreinte. Un habile observateur de Boulogne , M. Bouchard- Chantereaux, a publié en 1837 un Catalogue des Mollusques terrestres et fluviatiles du Pas-de-Calais, où il ne compte que 102 espèces, parmi lesquelles une dizaine doit dispa¬ raître. M. Picard, en 1840, mentionnait 95 espèces dans le dépar¬ tement de la Somme , et Poiret, en 1801 n’en comptait que 54 dans l’Aisne et les environs de Paris ; il est vrai qu’il omet les Mollusques nus, mais le nombre des espèces fausses à retrancher forme à peu près compensation. On voit quels ont été les progrès de la science d’observa¬ tion ; malgré l’extension quelle a prise aujourd’hui il n’est pas douteux qu’elle en fera de nouveaux et que mon cata¬ logue, comme toutes les listes locales, paraîtra insuffisant dans l’avenir ; il aura dans tous les cas rempli le rôle des travaux de ce genre : être un jalon pour marquer la route des découvertes et servir de point de départ vers de nouvelles recherches. J’avais espéré que ce travail serait fait par un conchyliolo- giste très-expert qui a consacré une longue carrière à l’étude des Mollusques, M. Normand, de Valenciennes ; il en réunis¬ sait les matériaux depuis longtemps : deux fragments en avaient même paru : Description de six Limaces nouvelles des environs de Valenciennes (1852), et Coup d’œil sur les Mol¬ lusques de la famille des Cyclades observés jusqu’à ce jour dans le département du Nord (1854); malheureusement, M. Normand est mort récemment sans avoir pu tenir sa pro¬ messe ; cette perte sera vivement ressentie par tous ceux qui s’occupent de notre malacologie locale, car elle les prive d’un guide expérimenté, qui avait beaucoup exploré la contrée, et — 201 — surtout les environs de sa ville natale, la localité la plus favo¬ rable de tout le département. A. de Norguet. LES MYRIAPODES DE BELGIQUE. Le Bulletin s’est donné la tâche de passer successivement en revue toutes les branches de la Zoologie du Nord de la France. C’est un travail considérable pour lequel tous les documents ne sont pas encore réunis , mais qui, je l’espère, se complétera un jour. En attendant il est très-intéressant do suivre et de noter ce qui se fait en ce genre chez nos voisins de Belgique, dont la Faune diffère si peu de la nôtre. J’ai déjà indiqué une liste des Isopodes terrestres belges, par M. Félix Plateau (1870, page 195) ; le même naturaliste vient de publier dans le Bulletin de V Académie de Bruxelles (41e année , n° 5 ), un relevé des Myriapodes de la Belgique qui devient un bon guide pour les recherches à faire dans le Nord. Il en indique vingt-quatre espèces ; sans avoir étudié d’une façon spéciale les Myriapodes de notre département, je crois pouvoir affirmer que notre liste serait plus longue. Lithobiidés. 1 Lithobius forftcatus (Linné). Commun partout. 2 Lithobius calcaratus (Koch). Pas rare ; Ardennes. 3 Lithobius curtipes (Koch). Rare; Gand. 4 Cryptops Savignyi (Leach). Pas rare. 5 Cryptops agilis (Mernert). Très-rare. Huy. 6 Cryptops hortensis (Leach). Commun. Geophilidés. 7 Himantarium Gervaisii (Plateau), peut- être Geophilus simplex (Gervais). Commun. 8 Scoliophanes acuminatus (Meinert). Geo¬ philus sanguineus (Gervais). Très-rare ; Gand. — 202 — 9 Schendyla nemorensis (Meinert). Assez rare ; Gand. 10 Geophilus sodalis (Meinert), Rare ; Gand. 11 Geophilus longicornis ( Gervais) Pas rare. 12 Geophilus electricus (Linné). Commun; Gand. Gloméridés. 13 Glomeris limbala (Latr.). Commun. 14 Glomeris annulata (Brandt). Très- rare ; Gand. Pollyxenidés. 15 Pollyxenus lagurus (Latr.) Assez commun; Gand. Polydesmidés. 16 Polydesmus complanatus (Latr.). Commun; Gand. Julidés. 17 Juins londinensis (Leach). Commun. 18 Juins pusillus ( Leach ). Assez rare ; Bruges. 19 Juins arboreus (Latr.). Très-commun. 20 Juins albipes (Koch). Assez rare ; province de Liège. 21 Juins sabulosus (Linné). Très-commun. 22 Juins silvarum (Meinert). Très-rare ; Gand. 23 Juins terrestris (Linné). Pas rare ; Gand. 24 Blaniulus guttulatus (Gervais). Très- commun. On voit qu’à très-peu d’exceptions près, toutes ces espèces sont ou communes partout ou indigènes des Flandres, et se trouvent sans doute dans les environs de Lille. Il resterait le Cryptops agilis , espèce nouvelle, indiquée de Huy, et le Juins albipes des bords de POurlhe, mais que j’ai observé dans l’arrondissement d’Avesnes. En outre il est probable que nous possédons une partie des autres espèces que Newport et Leach ont déterminées d’Angleterre, et Koch, d’Allemagne ; il y aurait donc un vaste champ d’observations à parcourir, avec d’autant plus d’in¬ térêt qu’il a été jusqu’ici moins exploité. A. de Norguet. — 203 — SOCIÉTÉS SAVANTES. ACADÉMIE FRANÇAISE. Nous croyons devoir reproduire dans le Bulletin , des passages du rapport de M. Patin, relatifs à quelques livres couronnés par l’Académie française : les auteurs de ces livres appartiennent à notre contrée par la naissance ou par une résidence de plusieurs années : rnement. L’âge de fer ne commence réellement qu’avec l’emploi de ce métal pour les armes. Les tumuli découverts aux environs de Gédinne et de~ Louette- Saint-Pierre remontent aux premiers temps de cet âge ; car on y trouva 3 épées en fer, ployées, 1 en bronze, 1 lame en bronze et 19 vases peu ornés. > jp Le cimetière de Somsois (Aisne), découvert’ en 1866, est un peu plus récent. Toutes les armes sont en fer, le bronze étant uniquement réservé aux ornements. Il y a un collier de 132 grains de verroterie et d’ambre, mais pas encore de monnaie. Celle-ci se montre un siècle environ avant l’arrivée de Jules César, qui ouvre, pour notre pays, 1 ère des temps historiques. J. G. (1) C’est sous ce roi et après la défaite des Tamahous, qu’eut lieu l’exode des Israélites. — 238 — CHRONIQUE. 1872 • BSétéorologîe. Octobre Novembre Température atmosphér. moyenne. 10? 27 8? 04 — moy. des maxima. 13? 92 10? 53 — — des minima. 6? 63 5? 55 — exlr. maxima, le 2. 19? 1 ; le 6, 15? 7 — — minima, le 14. 2? 6; le 15 0? 1 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 754°?m594 753mm969 — — extr. max. le 7. 69n?m 01 ; le 8, 69 77 — — — min. le 25. 45mm 86; le 30, 36.90 Tension moy. de la vap. atmosph. 'J’y 6mm 95 Humidité relative moyenne %. . 82.0 83.9 Épaisseur de la couche de pluie. . 95m™ 87 191mm 98 — — d’eau évap. 36“m 75 19mm Q2 Le mois d’octobre fut plus froid que le mois correspondant d’une année moyenne. Pendant les trois premiers jours la température des nuits n’éprouva pas un grand abaissement, mais le 4 elle commença à s’abaisser jusqu’au 17. Malgré la prédominance des vents du S, il y eut cinq gelées blanches. Jusqu’au 15 la sécheresse observée en septembre se pro¬ longea. La colonne barométrique se tint assez haut et les pluies, quoiqu’au nombre de sept, furent peu abondantes : le ciel fut peu nébuleux et l’air assez sec détermina l’évapo¬ ration d’une couche d’eau relativement épaisse. A partir du 15 la nébulosité du ciel augmente, le baromètre baisse, quinze jours de pluie fournissent une couche d’eau d’une épaisseur de 81 31 . Les couches d’air en contact avec le sol, plus humides aussi, atténuent l’évaporation dont le .chiffre total reste de 5mra 2 inférieur à la moyenne géné¬ rale. Nous entrons dans une période de pluies" incessantes qui vont compromettre tant d’intérêts divers. Pendant ce mois l’état électrique de l’atmosphère fut assez prononcé ; le 11 et le 21 il y eut des éclairs sans tonnerre. On observa 29 jours de brouillard, 24 de rosée, 22 de pluie; le 11 un halo solaire. La nébulosité du ciel fut au-dessus de la moyenne, il en fut de môme de l’intensité du vent. Les courants atmosphériques supérieurs se dirigèrent, comme les courants inférieurs, du S. au N. Ce qui caractérise le mois de novembre 1872 c’est l’énorme — 239 — quantité de vapeur d’eau contenue dans les régions élevées de l’atmosphère, par süite l’énorme dépression barométrique et la grande tension de l’électricité. En novembre année moyenne il tombe à Lille 50T1 40 de pluie ; cette année, en 26 jours, il tomba une quantité d’eau formant une couche d'une épaisseur de 191?™ 98, composée de 166mm 40 d’eau de pluie, 23™m 98 d’eau de neige (4 jours), ll?m GO d’eau de grêle (2 jours). C’est la plus grande quantité d’eau qui ait été recueillie en un mois depuis vingt ans au moins. Pendant cette période les pluies mensuelles les plus abondantes ont été les sui¬ vantes : 155®m octobre 1854 ; 145™m juillet 1865 ; 150™“ mai 1869 ; 16Gmm octobre 1866 ; 135™“ juillet 1872. Du 10 à midi au 11 à midi on a recueilli 62n.ltn 0 d’eau de pluie et de grêle fournie par des nuages N.-O. C’est la plus grande quantité qu’on ait jusqu’ici obtenue à Lille en vingt- quatre heures. Pluies antérieures maxima en vingt-quatre heures : 40"?“ 7 le 18 octobre 1854; 54™“ 45 le 27 juillet 1870 ; 34™“ 83 le 20 juin 1871 ; 35™“ 25 le 15 juillet 1871 ; 37““ 04 le 13 juillet 1872. Les 13, 14, 15, 16, grand abaissement de la température (moyenne 2°. 2) par suite des vents N.-O. et N -E., neige abondante couvrant les toits et la campagne pendant la nuit. Le vent dominant pendant le mois fut celui du S. très-fort, souvent tempétueux; la direction moyenne des nuages fut du S.-O. au N.-E. Le 10 à neuf heures du soir et le 11 à trois heures du matin,. le tonnerre se fit entendre à Marcq-en-Barœul. Le 17, entre 6 et 7 heures du soir, ciel serein, lune brillante, éclairs sans tonnerre, horizon S -S.-O. Le 26, à 7 heures 30' du matin, orage à Croix. Les pluies abondantes et continues ainsi que la constante nébulosité du ciel, qui s’opposait au rayonnement de la cha¬ leur, élevèrent la température atmosphérique moyenne du mois (8°. 04) bien au-dessus de celle de novembre année moyenne (5° 69). Malgré la continuité de la pluie l’air fut moins humide qu’il ne l’est ordinairement dans ce mois et l’épaisseur de la couche d’eau évaporée fut de 19n.im 62, sensiblement égale à celle observée en moyenne, 20™“ 28. Enfin on observa pendant le mois 26 jours de brouillard, 12 de rosée, 2 de gelée. — 240 — De pareilles conditions météoriques paralysèrent les tra¬ vaux des champs rendus impraticables. Beaucoup de bette¬ raves ne sont pas encore déplantées et sont couvertes d’eau par les inondations. 30 % des blés sont semés et les 9/10 levés sont en bon état de végétation. On redoute la pourri¬ ture des graines non encore levées. Les scourgeons, les seigles, les hivernaches sont beaux. Y. Meurein. Archéologie. — Découverte romaine à W aller s^en-Fagne. — On voit dans la petite commune de Wallers- en-Fagne, située au N.-E. de Trélon, sur le ruisseau de Wasterum, les ruines d’une vieille forteresse qui a donné son nom à ce village, concurremment avec le ruisseau, car les deux mots celtiques Wal et Ers se traduisent l’un par forteresse, et l’autre par ruisseau. J’ai visité dernièrement ces ruines Au milieu d’une grande quantité de morceaux de tuiles (tegula et imbrœ), de fragments de pierre et de ciment, j’ai remarqué le fût d’une colonne et deux énormes pierres tumulaires parfaitement taillées, sur lesquelles j’ai la ces mots : 1° D. M. (Dis Manibus) PROBI TIBERI Oo D. M. LATINÏANI Près de là , un tailleur de pierres a mis à nu une tombe romaine contenant des poteries, qu’on a malheureusement brisées et jetées, et dix menus objets en bronze émaillé que j’ai recueillis. Je distingue parmi eux un large bouton émaillé rose, bleu et vert, et trois agrafes ornées de têtes très-finement ciselées. 1. D. Objets fr«nc§. — M. Delphin Petit a offert au musée archéologique de Lille plusieurs objets francs découverts dans l’Aisne entre Hirson et Guise ; ce sont une lance , un sabre , un poignard, une partie de boucle de ceinturon damasquinée d’argent. H. R. Lille, imp. Six-Horemans, 72-29i7. BULLETIN Scientifique, Historique et MHcraire du Département du Nord ET DES PAYS VOISINS BULLETIN SCIENTIFIQUE, HISTOEIQUE ET LITTÉRAIRE DU DÉPARTEMENT DU NORD et des pays voisins (Pas-de-Calais, Somme, Aisne, Ardennes, Belgique) PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION DE MM. GOSSELET, Professeur à la Faculté des Sciences de Lille et L’ABBÉ DEHAISNE, Archiviste du Département du Nord TOME Y. — 1873 LILLE Imprimerie SIX-HOREMANS 1873 5e ANNÉE — 1873 TABLE GÉNÉRALE Tables des Sociétés Amiens. Société Linnéenne — 58. Belgique. Académie de — 84. Commission royale d’histoire de — 203. Cambrai. Société d’émulation de — 53. Dunkerque. Société dunkerquoise — 132. i.aon. Société académique de — 8. Lille. Société des sciences de — 42, 56, 253. Faculté des sciences de — 81. IVord. Commission historique du — 199. Société géologique du — 34, 259. Saint-Quentin. Société académique de — 130. Vervîns, Société archéologique de — 176. Tables des H>onis d'iiitetirs Auger. 44 Bachy. 12. 255 Barrois (Charles). 33 Bai rois (Jules). 37 Balandieau. 132. Berlemont. 132 Billiet. 16 Blin. 55 Boire. 258 Bourgeois. 132 Boussinescq. 83 Breton. 47 Bruyelle. 54 Buteux. 60 Carpentier. 60 Casali. 258 Chelloneix. 183, 259 Chreslien. 132 Copinau. 58 Corenwinder. 13,35,256 Cornet. 194 Cotly. 58 Cousin. 133, 147 Coussemaker. (de) 113, 201, 209 Cox. 257 Daudville. 132 Debray. 93 Dehaisnes (l’abbé). 203 Delanoue. 136 Demazc. 131 Derveaux. 203 Desjardins. 243 D’Henry. 57 Dolfuss. 35 Dours. 58 Dupont. 171, 244 Durieux. 54 Dusanter. 130 Dutilleul. 253 Duviller. 15 Farez. 181 Faidherbe(legénéral) 13 Ferrus. 131 Flahaut. 110 Fleury, il Garnier. 58 Gaspart. 212 George. 131 Giard. 6,77,81, 107, 1 II 135, 143, 181, 194, 213, 240, 242 Girard. 60 Godefroy de Menilglaisc *75 Godin. 183 Gosselet. 37 Guerne (de) 158 Hautcœur (l’abbé). 161 Renquin. 136 Houdoy. 31, 202 Kouzcau. 128 Houzé de l’Aulnoit. 258 Johanne. 242 Kuhlmann. 13, 56, 255 Ladriôre. 37 Laloy. 123 Lebeau. 203 Lecocq. 131 Lefebvre. 54 Lejeune. 63 Lemaire. 131 Leuridan, 93, 200, 259 Louise. 44, 71 Manesson. 177 Mannier. 1, 69 Matton. 10 Mercey (de). 59 Meurein 13, 17, 40, 61, 88, 109, 134, 180, 211, 264 Miller. 168 Monligny (de). 86 Mordacq. 133 Mourlon. 38, 194 Norguet (de). 64, 103, 259,262 Omalius d’Halloy (d’). 84 Orilieb. 35 Parent. 197 Pichon. 177 Pieters. 133 Piette. 177 Quœdvlieg. 164. Rédard. 16 Richer. 60 Rigaux. 20, 150 Schodt. 251 Selys Lonchamps(de)196 Taiée. 11 Terquem SI, 254 Van Bemmcl. 173 Van Beneden. 198, 220, 247 Van den Broeck. 168 Van Hende. 57. 253 Violette. 14 Viollelte. 14, 257 Wilbert. 54 Zandyok. 133 TtiMes «8e® ITâtrê» «Ses Aetieles Ahhaye. Cartulaire de 1’ — de Flines, 161 ; Monastère de Pré¬ montré. 11 Agnez (P) 24 Amputations souspériostées.258 Archives départementales pen¬ dant la Révolution. 157, 186, 220 Arclres (P). Monnaies romaines. 183 Arras . 23 Avesnes-le-Sec (N). 66 Baitazar. Le Chevalier — 177 Bavai (N). Monnaies gallo-romaf- ncs. 216 Beauvais { N). Vase gallo-romain. 20 Belgique. Patria Belgica ; Météoro¬ logie et climatologie, 128 ; Oro- logie, aspect pitforesque, 173 ; Géologie, 194; Mines et car¬ rières, 195; Mammifères, Oi¬ seaux, Reptiles, 196; Chasse, 197 ; Poissons, 198; Populations préhistoriques, 173; Paléonto¬ logie, 175 Boore (N). 41 Botanique. Straîiotes aloïries , 61, 109, 135; Eiodœa canaden- sis, 213; Flore du bois d'An- gres, 103 ; — de Vandignies, 140; Géranium phœum,240; Absorp¬ tion de l’acide carbonique par les plantes, 255 ; La soude dans les végétaux, 256 Bousies (N). Sépultures. 131 Caestre (N). 41 Cambrai (N). Bourgeoisie de — 54 Celle». 84 Charles IX. 246 Chat aux yeux discolores, 212 Chimie. Préparation de l’hydro¬ gène, 257 ; Fabrication de la soude, 255 ; Acide chrornique, 15; Chroniale de plomb, 259; Recherche sur les sucres. 14 Cobrieux (N). 27 Coîart. Les peintres — ■ n Commanderies du Temple et de l’ordre de Malte. 1,21,41, 165 Cousin. Élude biographique sur — 209 v Douai (N). 25, 68 Bourges . (P) Terr. houillcr de — 47 Êculin (N). 67 Éléphant dans le diluvium de Sandgatte. 259 Entomologie. Chironomcs, 79 ; Bibio Marci. 1 00 ; Les papillons diurnes de Belgique, 164; Bel- tisa mille punclata, 184 ; Nocau- rismaculata, 184; Empis ciliata, 192 ; Les guêpes du Nord de la France. 234 États du Cambrésis. 55 Favril (N). 68 Flandre. Topographie ancienne de la — 147 Fourneau à haute température. 14 Gaillo-romains. Vases, 20 ; Ha¬ bitations, 19; Constructions, 216 ; Poteries, 264 ; Objets, 21 5; Monnaies. 183, 215 Gaudiemprè (P). 22 Géographie du Nord. 242 Géologie. Esquisse géologique, 4, 28, 75, 96, 118, 137, 181, 217; Terrain houillcr de Bourges, 47 ; du Boulonnais, 37; Gault de Saint-Waast, 37 ; Craie du Blanc- Nez, 38 ; Analyses de Dolomies, 3o; Eaux sulfureuses, 123; Cou¬ pe à Roubaix, 35; Puits à Croix, 36; Les rideaux, 59, 112; Amm. mamillaris. 136; Affaissement de la cote de Dunkerque, 21 1 • n-?UruM^rfs (*u l'^oral flamand, 93 ; Eléphant fossile, 259 ; Ours fossile, 181. ’ Godfroy. Les savants - 72 Guise (A). 264 LIaspres (N). Ville et prévôté d'— 44, 69 natuavesnes (P). 21 tJonin- Lié tard (Pj. 27 * ■fioop. Le - 113, 144, 177 Industrie. Régénération du pe- roxide de manganèse, 56 * lu- uuere monochromatique 'des sels de soude. 57 Jeton. Le — 251 La Flamengrie (N). 65 Le Fresnoy (N). 67 llabitation gallo- romainp, 19 ; Objets gallo - romains, 215 • Lhalelleiiie de — : origine 89 • Matistique féodale, 200 ; - au XV P siècie, 202; Hôtel des Mon¬ naies, 120 Lomme (N). 42 I.orfjnin. Éludes biographiphes sur — 260 1 ‘ Lucheux (S), p 2 Mammifères marins, 191 Manuscrit de Sainte - Catherine de Sienne de Douai, 201 Mérovingiennes Sépultures — 109, 216 Météorologie. 17 39 G0, 87, 107 133,179,210.262 Musaraignes. Amour mat- rnel des — 181 ; Musaraigne pvg- mée, 40 » h. b Noires moles Fouilks. 61 tVomismatfqne lilloise, 57;' Monnaies romaines, 183, 216 Oiseau*. Milan, 40; Cigognes noires, 264 ; Huppes, 264 Ours fossile, 18 L Pêrenchies (N). 42 Physique. 254 Poissons de nos côtes , 220 : Anarrhique loup, lit Prëmonlré (A). Abbaye de — il Prison. Maison centrale de Loos, 253 Puits. Assainissement des — 12 Radinghem (N). 43 Reumies (A). 109 Ribeuiont (A). Baiilage de — 10 Roubaix (N). 35 Saint- Aubin (N). 68 Saint-Léger (B). 23 Sépultures mérovingiennes, 109, 216 ; — Ancienne, 131 Tapisserie flamande, 31 Temple. Commandcrie du — 8, m J. Thermométrie clinique, 16 Tératologie. Chèvre heteradel- phe, lll Valenciennes. 65 Yandignies (N). 140, 184 Vent. 86 Vervins (A). Prise de — en 1*712, 1*77 ; Sépultures, 216 Vcsperugo leisleri, 264 W ami n (P). 68 Winnezeele (N) 43 Wormoudht (N). 43 Zoologie Ascidies, 77 ; Synasci- dies, 6 ; Hélix cantiana, 180 ; Dreissena cochleata, 154 ; Cor- dylophora palustris, 214; Mol¬ lusques nouveaux des côtes du Boulonnais, 134 ; Foraminifôres vivants de Belgique, 168 P. 78, 1. 2 et 30 au lieu de amphionus lisez amphioxus. P. 79, 1. 9 en remontant au lieu de Le mâle de lisez Le mâle des. P. 80, 1. 1 au lieu de Kïilznig lisez Kützing . — 1. 7 au lieu de Cyprius lisez Cyprins. — 1. 18 au lieu de Phrygomiens lisez Phryganiens. au lieu de microlepideplères lisez microlepidoplères . — 1. 20 au lieu de A. Millier et Delpius lisez JI. Millier et Delpino. P. 81, 1. 1 au lieu de Mernuis lisez Mermis. P. 105, 1. l en remontant au lieu de rubens lisez purpurascens. P. 112, 1. 16 en remontant au lieu de habitant lisez habitat. P. 182, 1. 1 en remontant au lieu de oolide lisez oolite. P. 184, 1. 7, 15 et 38 au lieu de maculatas lisez maculata. — 1. 13 au lieu de senecio paludosus lisez sonchus palustris. P. 192, L 13 au liéu de ombillifère lisez ombellifère. P. 183, l’article sur les Monnaies romaines à Ardres est deM. Debray. • P. 220, 1. 1 au lieu de Lamberti lisez Cordalus. Lille, împ. Six-Horcmans. 74-298. 5* Année. — N» 1. — Janvier 1873. LES COMMANDERIES DU TEMPLE ET DE L’ORDRE DE MALTE DANS L’ARTOIS, LA FLANDRE WALLONNE ET LE HAINAUT FRANÇAIS. Le livre que M. E. Mannier vient de publier sous le titre de Commanderies du grand Prieuré de France , intéresse tout particulièrement notre contrée : les chevaliers du Temple et de Saint-Jean de Jérusalem possédaient plusieurs maisons dans le nord de la France ; toute une partie de l’ouvrage est consacrée à ces maisons par l’auteur, qui ne pouvait pas oublier qu’il est né et qu’il a vécu longtemps dans notre dé¬ partement (1). Ainsi qu’il le dit lui-même, M. Mannier a écrit son livre d’après les documents inédits conservés aux archives nationales de Paris. La plupart des érudits de la province publient leurs travaux d’après les monuments originaux con¬ servés dans les localités dont ils essayent de tracer l’histoire; l’auteur des Commanderies du grand Prieuré de France négligeant à dessein les documents des archives de la pro¬ vince, a voulu mettre, à la portée de tous les travailleurs, les faits qui résultent de longues recherches opérées dans les archives nationales. En consultant l'Inventaire sommaire et tableau méthodique des fonds conservés aux archives nationales , on voit que l’ensemble des archives de l’ordre de Malte a été conservé, et l’on peut se faire une idée de l’immense travail qu’a demandé la publication de l’ouvrage dont nous essayons de donner une idée à nos lecteurs, pour la partie qui concerne 1 Artois, la Flandre wallonne et le Hainaut français. ' O (1) Les Commanderies du Grand prieuré de France , d’après les documents inédits conservés aux Archives nationales, à Paris , par E. Mannier, I vol. in-8° de 808 pages; Paris, 1872, chez Aubry et chez Dumoulin. — Outre les Recherches sur La Bassée , sa ville natale, M. Mannier a publié les Eludes étymologiques , historiques et compa¬ ratives sur les noms des villes, bourgs et villages du département du Ford, et les Flamands à la bataille de Cassel. — 2 — Les deux ordres religieux militaires de Saint- Jean de Jé¬ rusalem et du Temple possédaient, dans le grand prieuré d( France , deux cents établissements dirigés par des comman- deurs (preceptores) , qui avaient sous leur dépendance ui grand nombre de maisons moins importantes ; les cinquante trois commanderies, qui existaient encore au siècle dernier dirigeaient près de cinq cents maisons. On sait qu’après L suppression de l’ordre des Templiers , ses biens^ furer réunis à ceux des chevaliers de Saint-Jean de Jéiusalem , ( qn’après la prise de Rhodes, en 1523, ces derniers s etabliren à Malte et prirent le nom de chevaliers de Malte. Comm l’auteur, nous réunirons dans le même récit Thistoire de maisons fondées par les Templiers et celle des maison fondées parles chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, antt rieurement à la suppression de l’ordre des chevaliers d Temple. Commanderie de Loison (l). — Cette commanderie ava pour siège principal une vaste maison avec chapelle , bât ments à usage de ferme , et tour élevée servant dé prison située dans la grande rue du village, près d’une rivière au milieu des bois, prairies et champs qui lui appartenaien. parmi les fiefs qui en dépendaient était le château de Loison ! les hommes cottiers de la seigneurie étaient au nombre ; 422 ; ses revenus s’élevaient en 1783, à 7,560 livres. Fond; par les Templiers , cette maison eut à lutter en 1353 contre; comte d’Artois, et en 1364 contre Jean de Créquy, bailli ; Saint-Omer; en 1595 elle fut brûlée, et son territoire :t ' ravagé durant les guerres qiii divisaient Henri IV et Philip; tI ; en 1635, nouveau pillage, nouvel incendie, après lequel; commandeur, M. de Rieux-Crèvecœur, fut fait prisonnier i emmené par les Espagnols au château d Hesdin, en \i .t pendant les sièges de Béthune et d’Aire, les Français rai (1) Loison (Pas-de-Calais), arrondissement de Montreuil-sur-M’, canton de Campagne-lez-Hesdin. 3 - gèrent les terres de la môme maison et enlevèrent les grains et les bestiaux. Trois membres dépendaient de la comman- derie de Loison : la maison de Frencq, celle de Campagne et celle de Temple-lez-Waben. Frencq et Montreuil (1). — L’établissement de Frencq n’était dans l’origine qu’une grange , où les Templiers ren¬ fermaient le rendement de leur dîme et terrages des envi¬ rons de Montreuil. Ils possédaient dans cette dernière ville une maison de refuge, nommée la Maison de la Commanderiez dont la porte donnait sur le cimetière. Les hospitaliers ar- rentèrent la dîme de Frencq, qui leur rapportait annuelle¬ ment 1,100 livres. Campagne (2). — Le Temple de Campagne , désigné plus tard sous le nom d’hôpital, était une ferme située au nord du chemin de Campagne à Buire, près de laquelle se trouvait une chapelle sous le vocable de l’Assomption. Ce domaine possédait au xve siècle 142 mesures de terres labourables et de bois, avec droit de haute , moyenne et basse justice; en 1783, son revenu était de 1.100 livres. Comme celle de Loison, cette maison eut à souffrir des malheurs de la guerre; dans le chapitre provincial tenu à Paris en 1600, le comman¬ deur de Loison, le chevalier Du Sart de Thury, vint déclarer que la ferme de Campagne avait été brûlée pour la troisième fois. Au xvme siècle , la chapelle était desservie par des ca¬ pucins de Montreuil; en 1770, les ornements et les objets du culte furent transportés dans la maison du Temple près Waben. Le Temple-lez-Waben (3). — Entre Waben et Conchil-le- Temple, il y a un heu, nommé la Commanderie , qui fait (1) Frencq (Pas-de-Calais) , arrondissement de Montreuil. — Mon- treuil-sur-Mer (Pas-de-Calais). (2) Campagne-lez- Hesdin (Pas-de-Calais) , arrondissement de Mon¬ treuil. (3) Conchil-le-Temple et Waben (Pas-de-Calais), arrondissement de Montreuil. — 4 — partie aujourd’hui de la commune de Conchil; c’est là que se trouvait, entre deux chemins, la maison que 1 on appelait le Temple-lez-Waben. 60 journaux de terre, 700 journaux de bruyères, un moulin, un four banal et des menues rentes for¬ maient à cette maison un revenu qui s’élevait en 1783 à 1,500 livres. Le rapport de la visite prieurale de 1495 trace un triste tableau des ravages causés dans cette maison par la guerre. La chapelle était dédiée à la sainte Vierge ; le curé de Saint- Vaast la desservait en 1759. Gombermont (1). — Cette petite commanderie du Temple avait été entièrement ruinée et détruite en 1373; rétablie en 1479, elle fut réunie à celle de Loison. Le commandeur Emery d’Amboise fit alors reconstruire la chapelle , qui fut desservie par un prêtre séculier. Elle formait un domaine seigneurial de 300 mesures de terre et 40 arpents de bois , situé sur le chemin de Gombermont à Ergny, qui rapportait en 1783 un revenu de 3,600 livres. L. LL (La suite prochainement.) ESQUISSE GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD ET DES CONTRÉES VOISINES (suite.) Ridements du sol à Page primaire. Pendant l’âge primaire, le sol a subi à deux reprises diffe rentes une série de ridements qui ont amené les plissement et les failles dont nous avons parlé. 1° Ridement de VArdenne. — Ce ridement, qui s’est effectu à la fin de la période silurienne, a eu pour effet de redresst les couches antérieures de l’Ardenne et du Brabant, qi toutes plongent vers le Sud ; celles qui avaient leur incl naison primitive vers le Nord ont été complètement renve sées. On pourrait donc voir dans ce ridement l’effet dT (1) Gombermont (Pas-de-Calais), arrondissement de Montreuil. refoulement considérable du S. vers le N., comme si FAr- denne avait été poussée sur le Brabant. La direction des rides n'est pas droite : à FO. d’une ligne tracée de Bruxelles à Signy-le-Petit, elle est vers E. 20 à 30° S. ; àl’E. de cette ligne, elle est vers E. 20 à 30° N, ; puis elle tourne encore plus vers le Nord ; elle est vers E. 35° N. à Spa et vers E. 50° N. à Montjoie (Prusse). Si la première direction coïncide, comme le fait remarauer M. Dewalque, avec celle attribuée par M. Élie de Beaumont au système du Finistère, il n’en est pas de même des autres. 2° Ridement du Hainaut. — Ce ridement, qui s’est effectué pendant la dernière partie de la période carbonifère, a dû commencer à se faire sentir dans notre région avant la fin de l’époque houillère, car notre terrain houiller n’est pas complet. Il manque des couches caractérisées selon M. Geinitz par la présence de nombreuses Fougères et l’absence des Sigillaria. Il paraît aussi s’être accompagné d’un refoulement du Sud vers le Nord qui a dû être plus violent dans le bassin de Namur que dans celui de Dinant, car les couches y sont presque toujours renversées. La direction du ridement est également brisée. A Avesnes elle est environ vers E. 20° N. ; sur les bords de la Meuse, vers E. ; près de Modave, vers E. 30° N. ; entre Spa et Liège, vers E. 40° N. Dans le Hainaut et le Boulonnais, la direction est vers E. 15° S. M. Élie de Beaumont a désigné ce ridement sous le nom de système des Pays-Bas et du Nord du Pays de Galles. Mais il s’est trompé en lui attribuant une direction unique. C’est du reste une erreur de croire que la direction d’une faille ou d’un plissement puisse indiquer l’époque géologique où ils se sont faits. J. G. — 6 — RECHERCHES SUR LES SYNASCIDIES. Thèse pour le Doctorat ès-sciences naturelles, par M. Alfred Giard (de Valenciennes). 7 _ * , * • l / » V J . Ce livre est le début d’un jeune naturaliste qui n’a pas craint d’aborder pour son coup d’essai les difficultés les plus sérieuses de l’étude de la zoologie. Quand on sait combien, dans les recherches microscopiques, les premiers pas sont pénibles et incertains, et quelle longue expérience il faut acquérir ordinairement, pour arriver à la sûreté de la main et du coup d’œil, on doit doublement applaudir ceux qui, comme M. Giard, commencent par un succès. Qu’est-ce que les Synascidies, ou Ascidies composées ? Ce n’est pas faire injure aux lecteurs du Bulletin de sup¬ poser qu’ils se font cette question pour la plupart. Il serait plus facile d’y répondre par une description que par une définition proprement dite. Essayons toutefois : Les Ascidies sont des invertébrés acéphales de taille et d’aspect fort variés, formés d’une espèce d'utricule contractile, à deux orifices, et fixés par leur base aux corps marins, tantôt isolément, tantôt en groupe. Ce double mode d’adhérence les a fait diviser en Ascidies simples et en Ascidies composées ou Synascidies. Entraîné vers ce groupe zoologique par les travaux de M. Lacaze du Thiers, son maître, M. Giard voulut aller chercher sur place les objets de ses études, et séjourna longtemps sur les côtes de Bretagne, à Roscoff, où ces productions sont très-abondantes. Il s’y livra à de minutieuses investigations sur les rochers, les algues, les fucus et les coquilles, décou- vrit beaucoup d’espèces nouvelles, disséqua, dessina, étudia en physiologiste et en nomenclateur, et de toutes ces recher- * ches composa l’ouvrage que nous nous sommes donné la lâche d’analyser. Il fait d’abord l’historique des travaux entrepris avant lui sur ces êtres si curieux, depuis Schlosser (1750) jusqu’à M. Lacaze, en passant par Pallas, Savigny, Cuvier, Lister, Milne-Edwards, etc., puis, après avoir déterminé la position organique de TAscidie, il entre dans tous les détails anato¬ miques de l’enveloppe cutanée, du système musculaire et nerveux, de l’appareil digestif, du système circulatoire, du sang, des organes de la respiration et de la reproduction. Ce chapitre est tout à la fois descriptif et critique ; l’auteur non-seulement décrit ce qu’il a vu sous sa lentille, il com¬ pare en outre avec tout ce qui a été dit par les physiologistes les plus renommés, rectifie les erreurs, complète les obser¬ vations, et compose ainsi un résumé substantiel des connais¬ sances actuelles sur la matière. Le chapitre suivant est consacré à la manière de vivre des Ascidies, à l’influence exercée sur elles par les agents exté¬ rieurs, aux endroits les plus propices pour les rechercher, à leur nourriture, à leurs ennemis. Il débute par un axiome qui devrait être inscrit en tête de tous les traités d’histoire naturelle : « On ne connaît bien un être que lorsque l’on sait comment il se conserve, comment il conserve son espèce, enfin comment il entre en rapport avec le monde extérieur et quels sont ces rapports. » C’est là le principe des prin¬ cipes, c’est la condamnation sans réplique de tous les spéci¬ ficateurs de cabinet qui créent des espèces sur des diversités minimes, sans avoir cherché leurs relations biologiques. L’auteur aborde ensuite son sujet spécial, les Synascidies, ou agglomérations d’Ascidies, vivant en commun et comme greffées les unes aux autres, un peu à la manière des fleurs composées. Il donne à ces aggrégations le nom de Cormns et leur trouve trois modes de formation , la Scissiparité ou bouture, la Gemmiparité ou bourgeonnement, la Concres¬ cence ou greffe par approche ; on voit que nous côtoyons toujours le règne végétal et que les Synascidies sont bien près des Zoophytes, si même elles n’en sont pas plus près que des Mollusques. — 8 — Arrive enfin la classification systématique ; M. Giard, après avoir analysé et rejeté toutes celles qu’avaient essayées ses devanciers, en propose une autre appuyée sur le mode de formation du Cormus , qui comprend trois classes , sept familles et vingt-deux genres. Il décrit trente-cinq espèces, toutes de Roscoff, dont vingt-quatre sont nouvelles, et ter¬ mine par où peut-être il eut été plus logique de commencer, par l’embryogénie des Synascidies et la recherche de leur place dans la chaîne des êtres. On comprend que nous ne pouvons présenter ici que ce simple squelette du travail de M. Giard ; mais c’est en donner une bien faible idée. Il a çà et là des échappées philosophi¬ ques sur la classification, la spécification, le transformisme, qui mériteraient toutes d’être signalées et discutées ; notons surtout le curieux chapitre du Mimétisme, ou analogie par imitation, qui ouvre tout un horizon aux amateurs des pro¬ blèmes finalistes. N’oublions pas de remarquer que M. Giard donne la preuve qu’aucune des branches de l’histoire naturelle ne lui est étrangère ; nous savions d’ailleurs que la botanique et l’ento¬ mologie lui sont familières, et que les environs de Valen¬ ciennes ont été explorés par lui , pour la recherche des plantes et les insectes, avec autant de soin que les rochers de Roscoff. Si , comme on l’assure, il se voue à l’enseignement de l’histoire naturelle, nous faisons des vœux pour qu’il soit prochainement appelé à professer dans le Nord ; ce sera l’éloigner de ses chères Ascidies, mais ce sera donner à l’étude de notre Faune locale un utile et vif stimulant. A. de Norguet. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DE LAON. Tome XIX (années 1869-1870). La Société académique de Laon est au nombre des sociétés qui prouvent, par d’importants travaux, l’utilité des sociétés — 9 savantes et de leurs mémoires. Les douloureux événements qui se sont accomplis depuis la publicaiion de leur dernier volume, les tristesses et les péi ils au milieu desquels les a jetés l’occupation étrangère ont pu entraver la réunion des membres de cette académie ; ils n’ont pu les empêcher de continuer leurs travaux. V archéologie n’a pas été négligée. En juillet 1870, en pleine émotion politique , un certain nombre de sociétaires sont allés étudier les blocs symétriquement alignés qu’offre le promontoire qui sépare les deux vallons de Montchâlons et d’Orgeval, afin d’y discuter les opinions opposées de M. Mel- leville et de M Robert Fleury. Avec M. Midoux , la même société a visité la crypte de l’église Saint-Julien de Laon et des caves offrant de curieux pilastres à chapiteaux sculptés qui remontent peut-être au vnr et au ixe siècles , ainsi que des peintures murales d’une haute antiquité Parmi les deux cents médailles, trouvées récemment par M Pilloy, quel¬ ques-unes sont remarquables par leur rareté et leur belle conservation. A propos d’un vitrail dans une église de La Ferté-Milon, M. l’abbé Roquet a donné d’intéressants détails sur cette ville , et a enrichi le bulletin d’un beau dessin de la verrière qu’il était chargé de faire restaurer. Outre les travaux historiques de M. Malton et de M Taïée que nous étudierons à part, nous devons citer du modeste et regrettable M. Thillois un mémoire sur l’emplacement de Bibrax. de M. Melleville un travail sur le chevalier d’Amerval, où Fauteur montre trop d’indulgence envers le mari nominal qui a été accusé d’avoir jeté Gabrielle d’Estrées dans les bras de Henri IV, de M. Combier, président de la Société , l’his¬ toire d’un procès de chasse intenté aux religieux de Pré¬ montré au nom d’un tribunal spécial nommé la Varenne du Louvre , de M. l’abbé Ration une Etude sur le passage de Louis XV à Laon en 1714- , et de M Marville une Notice sur le village d' Aulreville, situé près de Chauny. Des études biographiques ont été consacrées à Fauteur as. — 10 cétique Mathieu Beuvelet par M l’abbé Batton. au graveur et statuaire Guillaume Dupré, et aux artistes Colart de Laon et Colart le Voleur par M. Ed. Fleury. A cette revue générale des travaux de l’académie que nous avons en partie empruntée à l’intéressant rapport du secrétaire M. Ed. Fleury, nous devons ajouter une etude particulière sur trois mémoires importants publiés dans le Bulletin : le Bailliage de Ribemont , l'abbaye et l’ordre de Prémontré , les Peintres Colart de Laon et Colart le Voleur . Le Bailliage de Ribemont , par M. Matton, est une étude pleine de faits qui montre l’état de l’adminislraiion judiciaire au xvnc et au XYine siècle. L’auteur a esquissé les détails de .ce curieux tableau, d’après des documents conservés dans les archives départementales de l’Aisne , en indiquant toujours avec la plus grand soin les séries auxquelles il a puisé. Nous aurions désiré un travail d’ensemble sur la situation et les divisions topographiques du bailliage en tête de ce mémoire, et quelques lignes de conclusion ; mais, telle qu'elle a été publiée, celte étude est importante, curieuse, originale. Elle fait connaître, par des détails et par des anecdotes piquantes , les intermi¬ nables conflits de juridiction qui éclataient entre les trois polices rurales, celle des officiers municipaux, celle du prévôt et celle du bailliage, entre les magistrats royaux d’un même siège, entre les lieutenants du bailliage d’un côté, et de l’autre les nombreux notaires , huissiers et procureurs postulants qui manifestaient des velléités d’indépendance ; le cumul des offices royaux était toléré, malgré les graves abus qui en résul¬ taient; et à tout cela se ujêlentles désastres causés par la solda¬ tesque, les émeutes dans les campagnes, la violence employée contre les magistrats. Envoyant, dans les détails, ce qu’étaient devenus les offices royaux créés autrefois pourfaire sentir l’ac¬ tion bienfaisante du pouvoir central, on ne peut regretter que le bailliage de Ribemont ait été supprimé, on dit avec le savant auteur de ce travail : « Il devenait urgent de faire disparaître y> une autorité méconnue. L’exécution des édits de décembre — 11 — » 1764 et de mai 1766, supprimant le bailliage de Ribemont j> pour l’unir à la justice ducale de Guise , mit fin à d’inter- » minables différends , qui reflètent, dans une certaine me- » sure, le désordre de la société qui, depuis longtemps, » dpsirait un régime mieux approprié à ses intérêts et à ses espérances légitimes. » Malgré l’intérêt qu’elle présente, la première partie de P Etude sur Vabbayede P rémontré parM. Taiée, ne satisfait point le lecteur comme le travail de M. Matton ; au lieu de citer les documents en bas de chaque page et de faire connaître avec précision les titres qu'il a consultés, le numéro et le folio des cartulaires et des volumes manuscrits dont il s’est servi , l’auteur s’est contenté de publier en tête de son volume la liste de quelques manuscrits , sous la rubrique Ouvrages et recueils consultés ; au lieu d ajouter à son long et important travail un certain nombre de documents originaux publiés in extenso, il n’a reproduit dans l’appendice que des extraits ou des analyses de certaines chartes et de certains manus¬ crits. Nous regrettons d’autant plus ces défauts de méthode, que l’ouvrage de M. Taiée témoigne d’un long travail , de nombreuses recherches et d'un talent d’exposition qui rend agréables à lire les pages consacrées à l’abbaye de saint Norbert. Dans l’article qui a pour titre les Peintres Colart de Laon et Colart le Voleur , M. Ed. Fleury a eu l’excellente idée de réunir toutes les mentions publiées, il y a vingt ans, par M. de Laborde, et de faire connaître un précieux document re¬ trouvé par M. Matton , archiviste du département de l’Aisne, qui établit que le vieux maître de Laon résidait dans cette ville entre 1420 et 1428. Mais on peut reprocher à M. Ed* Fleury, ce qu’il reproche à son collègue, M Mellevil'e, de ne pas appuyer de preuves les hypothèses qu’il avance ; il n’a pas lu les écrivains dont il parle. Il reproche à l’auteur de l’ouvrage sur Y Art chrétien en Flandre de n’avoir pas rendu justice à Colart de Laon, et cet auteur, n’a pas dit un mot de — 12 — Colart de Laon et n'a parlé que de Colart le Voleur; il emprunte presque toutes ses citations à M. de Laborde, et il paraît ignorer qu’un extrait de comptes, reproduit dans le tome I des Ducs de Bourgogne , prouve que Colart le Voleur est fils et héritier de Jehan le Voleur, peintre de Jean-sans-Peur.et que par consé¬ quent il ne peut y avoir entre Colart de Laon et Colart le Voleur cette filiation que M. Ed. Fleury donne encore comme une probabilité. Au sujet des écoles de peinture flamandes, dont il nie l’existence antérieurement à 1390 ou 1400, nous ren¬ voyons M. Ed. Fleury aux ouvrages de M. Félix Devigne et de M. Ed. de Busscher, qui citent le règlement de la corpo¬ ration des peintres et sculpteurs de Gand en 1338, et offrent les noms d'environ deux cents peintres gantois antérieure¬ ment à 1410, au Messager des sciences de Gand , aux travaux de M. A. Pinchart, au livre de Crowe et Calvacaselle sur les Early flemish pain fers, qui établissent l’existence d’écoles dans tous les grands centres des provinces de la Flandre , comme il y en avait à Lille et Douai, et sans doute à Amiens et à Laon. Dans ses appréciations sur l’art, M. Ed. Fleury en est encore à la première édition de V Histoire de la peinture flamande , de M. Alfred Michiels; il ne tient aucun compte des travaux publiés depuis vingt ans en Belgique, en France, en Angleterre et en Allemagne. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE. Travaux courants. Moyen facile d'assainir les puits infectés de gaz méphitiques. — M. Bachy, après avoir rappelé quelques uns de ces déplo¬ rables événements reproduits, chaque année, par l’ignorance des personnes qui descendent dans des puits infectés de gaz méphitiques et y sont frappées de mort, expose un moyen facile qu’il a imaginé et dont il s’est servi depuis longtemps pour prévenir un pareil malheur, moyen qui , appliqué à — 13 temps, sauverait la vie des personnes simplement asphyxiées. Il suffit d’attacher un parapluie à une longue corde, de le lancer renversé dans le puits et de l’y manœuvrer en lui imprimant un mouvement rapide de bas en haut. En peu de temps, le gaz délétère se trouve remplacé par Pair atmosphérique et conséquemment tout danger a disparu. Pour confirmer ces faits d’une manière péremptoire, M. Bachy a récemment entrepris des expériences de laboratoire. Elles ont pleinement répondu à son attente et lui ont fourni cette donnée qu’avec un parapluie on parviendrait à extraire, en une minute , l’acide carbonique et, à plus forte raison , tout autre gaz, remplissant entièrement un puits de sept mè¬ tres de profondeur sur un mètre de largeur , et qu’on arrive¬ rait au même résultat, mais en trois minutes, avec une plan¬ che de 33 centimètres carrés, horizontalement suspendue à une corde et mises très vivement en mouvement répété de bas en haut. M. Meurein a ajouté qu’en quelques localités du Pas-de- Calais, il a vu assainir des puits par l’emploi de deux bottes de pailles liées en croix, et développées en forme d’éventails par chacune de leurs extrémités. Inscriptions numidiqnes. — M. le général Faidherbe, en présentant à la Société quatorze nouvelles inscriptions numidiques (1), a annoncé que la lecture de ces inscriptions vient de faire un grand pas. M. Halevy, en modifiant la signi¬ fication de quelques lettres , est parvenu à trouver sur les épitaphes un certain nombre de noms historiques , tels que Elisat (nom de Didon), Masippa, etc. Iode dans les phosphates calcaires. — M. Kulhmann a décou¬ vert que le phosphate de chaux du Lot-et-Garonne qu’il emploie en grande abondance dans ses usines, contient une (1) Bulletin II, 240. — 14 - certaine quantité d’iode, mais seulement des traces de brôme. Ce phosphate est un produit de sources thermales qui datent de l’âge tertiaire. Fourneau à haute température , par M. H. Violette. — Il résulte des essais de l’auteur qu’un simple fourneau à vent, accolé à une cheminée à vapeur de 30 m. de hauteur, peut servir à développer une chaleur capable de fondre la platine et par conséquent les métaux et substances les plus réfractaires : cette dernière opération n’est ordinairement réussie qu’à l’aide du souffle puissant d’une machine , ainsi que par la combustion de l’oxigène et de l’hydrogène. C’est là un exemple remarquable de l’influence considérable de la hauteur de la cheminée sur le tirage. Il est si violent que pendant l’opération les parois du fourneau, qui n’ont que 0 m. 35 d’épaisseur, ainsi que le couvercle restent tout à fait froids à l’extérieur, malgré l’excessive température développée d ms l’intérieur : aussi un semblable fourneau ne nécessite aucune armature en fer pour la maintenir. Recherches sur les sucres bruts de 3e jet . Par M. Ch. Viollette , professeur à la Faculté des sciences. L’auteur trouve que les sucres du Nord contiennent les principes qui existent dans les mélasses d’où ils proviennent, mais en proportions différentes. Nous ne saurions entrer ici dans le détail des analyses contenues dans ce travail, nous nous bornerons seulement à rappeler la conséquence que l’auteur en déduit parce qu’elle offre un intérêt particulier pour notre industrie sucrière. M. Viollette montre que la méthode d’énumération due au DrSchleiber, et adoptée géné. râlement par le commerce des sucres est inexacte et que en ' ce qui concerne les sucres de 3e jet du Nord , elle constitue un préjudice aux fabricants au profit des raffmeurs, préjudice qui peut aller jusqu’à 4 fr. 50 par chaque sac de sucre de 100 kil. pour les échantillons analysés. — im¬ préparation de Vacide chronique. — M. Duvillier, prépara¬ teur de chimie à la Faculté des sciences de Lille, modifiant un procédé vaguement indiqué par Yauquelin , a trouvé moyen de préparer en quelques heures une quantité d’acide chromique que l’on mettait plusieurs jours à obtenir La méthode repose sur l'insolubilité du nitrate de baryte dans un excès d’acide nitrique On fait bouillir pendant dix minutes 100 parties de chromate de baryte, 100 parties d’eau et 140 parties d’acide nitrique. Il se forme du nitrate de baryte qui se dépose; on chasse l'acide nitrique par distillation et on obtient l’acide chronique cristallisé en mamelons noirs. Distribution de récompenses. Le 29 décembre dernier, la Société a tenu sa séance solen¬ nelle. M. Coremvinder, président, a prononcé un éloquent dis¬ cours sur l’utilité du travail et sur les avantages tant maté¬ riels qu’intellectuels de la science. Il a terminé par un appel patriotique à la jeunesse française. « Il ne faut pas se le dissimuler : les peuples, ainsi que les î individus, sont soumis à la loi de la sélection naturelle. j) La nation qui se laisse corrompre est une proie pour la » tyrannie. Celle qui néglige de cultiver son intelligence, de î se soumeltre aux lois imprescriptibles du devoir, est des- » tinée à périr, et devra céder la place à d’autres qui auront » montré plus d’aptitude dans les travaux de l’esprit et dans ï> la pratique des vertus sociales. » Le concours de cette année a été brillant. La Société avait été bien inspirée en mettant au concours l’étude de la ther¬ mométrie clinique. Depuis quelques années, la médecine s’est emparée du thermomètre; elle s’en sert avec succès pour apprécier la marche de la maladie et même pour prévoir sa terminaison. En 1869, lorsque la Société proposa cette ques¬ tion, il y avait un grand nombre de travaux sur l’application — 46 — du thermomètre, mais aucun traité didactique. Il lui sembla utile de résumer toutes ces recherches en les soumettant à une critique raisonnée. Trois mémoires lui ont été remis. Elle a accordé le prix Wicar de 14,000 fr. à M. Billiet, médecin aide-major au 1er chasseur d’Afrique, et une médaille d’or de 5,400 fr. à M. P. Redard, étudiant en médecine à Paris. Ces deux mémoires se complètent l’un par l’autre. Le pre¬ mier s’occupe surtout des augmentations de température. Un grand nombre de tracés thermométriques donnent une idée nette de la marche de la température dans un certain nombre de maladies, et mettent en lumière les différences frappantes et caractéristiques qu’elles offrent entre elles; si bien que par le tracé d’une courbe thermométrique , on peut reconnaître la maladie, son intensité et prédire sa terminaison. Le second mémoire a surtout en vue les abaissements de température dans les grands traumatismes. Il arrive à cette conclusion que tout blessé dont la température descend à 35°5 succombera infailliblement. Le concours de géologie n’a pas eu moins de succès. Des médailles d*or ont été décernées 1° à M. Debray, conducteur des ponts-et-chaussées à Lille, pour un mémoire sur le gise¬ ment et l’âge de la tourbe ; 2° à M. Ludovic Breton, ingé¬ nieur des mines d’Auchy-au-Bois, pour une étude géologique sur le terrain houiller de Dourges. Nous rendrons compte ultérieurement de ces travaux. M le docteur Chonnaux-Dubisson, de Villers-Bocage (Cal¬ vados) , a eu une médaille d’argent pour des recherches sur l’absorption des poisons par les muqueuses M. J Chabrier, sculpteur à Lille, une médaille de vermeil pour une statuette de Ganthois, fondateur de deux maisons hospitalières. Quelques récompenses accordées aux poètes habitués des concours ont donné à M. Chon , rapporteur, l’occasion de — 17 — faire une excellente digression sur la pauvreté de notre litté¬ rature et sur son rôle dans l’avenir. La séance s’est terminée par une cérémonie toujours émou¬ vante : la distribution des médailles aux agents industriels et aux actes de haute moralité. Rien de touchant comme de voir ces vieux serviteurs ornés de leurs cheveux blancs, monter * sur l’estrade pour recevoir leurs récompenses, pendant que M. Aimé Houzé de l’Aulnoit raconte leur vie de travail , de dévouement et de sacrifices. CHRONIQUE. Décembre. Météorologie. 1872 année moyenne. Température atmosphér. moyenne. 6? 59 — moy. des maxima. 9? 09 — — des miuima. 4» 09 — exlr. maxima, le 25. 12? 8. — — minirna, le 10. 0? 9. Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 751™m156 — — extr. max. le 27. 761™m05. 3? 54 760^853 — — — min. le 10. 721t?m90, 6h. du soir. Tension moy. de la vap. atmosph. 6°?m13 5m?'39 Humidité relative moyenne %. . 83 7 87.2 Épaisseur de la couche de pluie. . 129inrr,83 52m?69 — — d’eau évap. 14™m87 15m“79 En décembre on observe la continuation de la période pluvieuse commencée en octobre. La terre saturée d’eau et battue par la pluie n’absorbe plus ; l’eau se rend directement dans les ruisseaux, fossés, rivières, qui faute d’écoulement assez rapide, débordent partout et causent des inondations très-étendues. L’abondance de la pluie, sa température , la nébulosité du ciel, souvent couvert, déterminent une élévation anormale de la température atmosphérique, presque double de la moyenne ordinaire de décembre. La tension électrique fut assez grande et se manifesta par Lorage du 11, les éclairs sans tonnerre des 9 et 10, les tem¬ pêtes des 8 et 9. Les 6 et 9 il tomba un peu de grêle, les 10 et 13 un peu de neige. — 18 — A cause de rénorme dépression barométrique du 10 , il importe de décrire avec quelques détails Tétât météorique de ce jour, de la veille et du lendemain. Dans la nuit du dimanche 8 au lundi 9, tempête S. 0., éclairs sans tonnerre. Lundi 9, six heures malin, pluie S. 0., matinée ciel serein nébuleux et nébulo-serein alternativement, vent très- fort S. 0., nuages des 2e et 3e couches , cirri et cirro-cumuli 0. S. 0., marche très-lente. Onze heures trente minutes soir srêle ; minuit ciel couvert, vent très-fort S. S. 0. Mardi 10, nuit, ciel nébulo-couvert, pluie, vent très-fort S. S. 0., éclairs sans tonnerre. Neuf heures matin, ciel nébulo-serein , des cirri et cirro-cumuli des 2e et 38 couches viennent lentement de TO N O., de grands cumuli,peu épais d'abord, à la marche rapide S. S. E. passent au-dessous d’eux et les cachent en partie. Vent très-fort S. S. E. Baromèire 742““ 50 à 7? 7; à 0° 74i““ 58 Dès ce moment la baisse du baromètre est régulière et progressive jusqu’à six heures du soir, moment où s’observe le minimum 723““ 00 à 9? 5, 721™m 90 à 0°. Ce minimum n'a jamais été observé à Lille. À partir de six heures la colonne mercurielle remonte d’une manière régulière et continue, de même qu’elle était descendue. 8 heures, 724““ 22 à 9°. 7 ou 723““ 09 à 0° 10 heures, 725““ 00 à 9°.0 ou 723““ 95 — minuit, 726““ 50 à 8°. 6 ou 725““ 50 — Mercredi 11, 9 h m. 742““ 92 à 6°. 8 ou 742““ 11 — (Le O de l'échelle barométrique est à 22“ 585 au-dessus du niveau moyen de la mer). Le mardi 10, à 0 h. cinquante minutes soir, com¬ mencement d’une pluie continue mêlée de neige, nuages S. S. E. à dix heures du soir, le vent étant à TO S. 0., on voit au travers des éclaircies les nuages de la 2e couche venir lentement, comme le matin, de TO. N. O A minuit, le vent souffle très-fort de PO. S. 0., le ciel est couvert. Dans la nuit du 10 au 11, pluie abondante (10““7) mêlée d’un peu de grêle, éclairs, tonnerre. L’énorme dépression barométrique ne peut être attribuée qu’à un cyclone d’un diamètre excessivement étendu. La tourmente atmosphérique qui accompagne ordinairement ces météores, s’est peu fait sentir dans notre localité. La hauteur moyenne du baromètre en décembre est bien au-dessous de la moyenne générale. Malgré la continuité de la pluie , Pair fut moins humide qu’en décembre année moyenne , et l’épaisseur de la couche d’eau évaporée fut très-peu inférieure à la moyenne. Les vents régnants furent ceux du S. 0. et du S. S. E. Les courants supérieurs vinrent surtout du S. 0. Il y eut pendant le mois 24 jours de brouillard, 9 de rosée, 27 de pluie, 2 de grêle, 2 de neige, 1 de gelée blanche, 1 de gelée à la campagne , 2 de tempête , 1 d’orage , 2 d’éclairs sans tonnerre. Enfin, le 23, la pluie cesse à peu près, et partout les culti¬ vateurs labqurent la terre et l'ensemencent, travaux qui se font dans d’assez bonnes conditions. ANNÉE ASTRONOMIQUE. 1872 Température atmosphérique moyenne . ... 10°. 96 — moyenne des maiima . 14°. 68 — — des minima . 7°.25 — extrême maxirna le 22 juillet. . 33°. 4 — — minima le 2 janvier . . 2». 6 Baromètre hauteur moyenne à 0° .... . 7o7mm.596 — extrême maxirna le 7 avril. . . . 77tram.60 — — minima le 10 décembre . . 721n)m.90 Tension moyenne de la vapeur atmosphérique. 7““.82 Humidité relative moyenne °/o . 75.5 Épaisseur de la couche de pluie . 101 7mm.81 — — d’eau évaporée . . . . 836.01 année moyenne. 1 0°,02 759““. 61 1 ‘.““.67 77.6 67 l mm.87 841.01 Les 101 7””. 81 d’eau météorique comprennent 960“”. 5-2 d’eau de pluie, 44”“. 34 d’eau de neige, et I3mm.05 d’eau de grêle. Ciel serein 15 jours, demi-couvert 2 48, couvert 103. Habitation gallo-romaine à Lille. — En retrouvant l’an dernier, de nombreux ^débris antiques, rue Solferino (voir Bulletin scientifique , tome 3, pages 88 et 144), j’avais présumé qu’ils provenaient d’une habitation existant à pro¬ ximité de la fontaine del Saulx, vers les premiers temps de la domination romaine; cette supposition a été confirmée, au mois de juillet, par la découverte que j’y ai faite, d’une fondation cachée par les remblais de la digue élevée par Louis XIV. Dnns la partie explorée (qui n'a, il est vrai, que deux mètres de largeur) il ne reste, de cette fondation, que la dernière assise, composée d’un lit de gi os silex noyés dans de la chaux au milieu de laquelle j’ai recueilli des éclats de tuiles romaines de la grandeur d un doigt. Entre la fondation et la rue, j’ai, de nouveau, ramassé des pierres de construc- — 20 — tion, des tuiles, des scories de fer, des fragments de poteries gallo-romaines, parmi lesquels plusieurs en belle terre rouge lustrée, dont l’un marqué d’une estampille de potier malheu¬ reusement très-fruste. Il ne me parait donc pas douteux que cette fondation a appartenu à l’habitation d’où proviennent tous les débris exhumés. Je suis redevable de cette décou¬ verte à la bienveillante autorisation qui m’a été, comme précédemment, accordée par l’administration municipale, d’entreprendre des fouilles sur les terrains de la ville ; il est regrettable que les pluies continuelles n’aient point permis jusqu’aujourd’hui de poursuivre les recherches commencées. Vase» gaüo-romnius à Beauvoîs, — M. Passet, ma¬ nufacturier à Beauvois (Nord), a offert récemment au musée de Cambrai, une très-belle collection de vases gallo-romains en terre et en verre, trouvés en 1870, sous le sol de sa fabrique Le faire de ces vases, les incinérations qu’ils accom¬ pagnaient, les monnaies trouvées avec eux, et dont la plus récente est d’Hadrien, prouvent qu’ils sont contemporains des premiers siècles. Beaucoup sont de formes connues, tels que vases à la boisson avec anses, tasses en terre rouge lustrée à bords ornés de feuilles d’eau, soucoupes en terre noire brillante, etc.; deux des vases rouges sont signés, l’un porte la marque du potier Licinius, l'autre l’estampille Vita. Nous citerons, comme s’écartant des formes ordinaires, un vase en terre noire, très-gracieux, à panse large et à col élancé qui s’élargit graduellement jusqu’à l’ouverture; un vase rouge orné de petits cercles peints en blanc ; une sorte de jatte munie de deux petites anses, dans lesquelles passent des anneaux mobiles également en terre; deux vases hémis¬ phériques présentant un grand bord rabattu comme ferait une assiette renversée qui leur servirait de couvercle ; deux vases avec un long manche en terre cuite, qu’on peut com¬ parer aux couets de nos ménagères ; enfin, parmi les verres, une magnifique bouteille carrée, à anse coudée, d’une hau¬ teur de trente-deux centimètres sur seize de largeur. Cette bouteille est remplie d’ossements incinérés. Avec ces vases, ont été trouvées quelques garnitures de coffres funéraires, et deux clous en bronze, ornés d’une tête en relief. Cette décou¬ verte vient d’être l’objet, dans les mémoires de la Société d’Emulation, d une notice d’autant plus intéressante, que fauteur, M. Durieux, l’a accompagnée d’un grand nombre de dessins dus à son crayon bien connu. H. Rigaux. Lille, imp. Six-Horemans, 73-274. 5* Année. — N° 2. — Février 1873. LES COMMANDERIES DU TEMPLE ET DE L’ORDRE DE MALTE DANS L’ARTOIS LA FLANDRE WALLONNE ET LE IIAINAUT (suite.) Commanderies de Hautavesnes. Hautavesnes (1). — Les ruines d’une ancienne tour féodale, enclavées dans une ferme de la Grande-Rue du village de Hautavesnes, indiquent aujourd’hui l’emplacement de cette riche et puissante commanderie. Seuls seigneurs du village, résidant dans un château dont l’enclos comprenait 288 mencaudées, les chevaliers de St-Jean possédaient à Hautavesnes plus de mille autres mencaudées qui leur devaient rentes. Ils jouissaient du privilège de ne payer aucun droit de tonlieu pour les denrées et marchan¬ dises qu’ils avaient à acheter ou à vendre dans la ville d’Arras, et possédaient aussi la prérogative de lever à leur profit tous les reliefs des fiefs tenus du souverain dans le comté d’Artois et la terre de Saint-Venant (2). Au nombre des bienfaiteurs de cette commanderie, il faut compter, outre les comtes d’Ar¬ tois et les abbés de Saint-Vaast, les familles nobles de Sau- chy, de Pas, d’Anstaing, de Vimy, de Givenchy. En 1190 et en 1198, Adam de Hors et Jean Revel de Noyelles, deux sei¬ gneurs qui voulaient partir pour la croisade, empruntèrent de l’argent aux hospitaliers de Hautavesnes, en engageant les dîmes de leurs terres. Lorsqu’en 1312 le roi eut prescrit à son bailli d’Amiens de faire mettre les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem en possession des biens qui se trouvaient dans la Picardie, l’Ar¬ tois et la Flandre, la commanderie de Hautavesnes eut sous sa direction en Artois , les maisons du Temple d’Arras , de Blairville, d’Agnez et d’Hénin-Liétard, dans les châtellenies (1) Hautavesnes, Pas-de-Calais, arrondissement d’Arras, canton de Beaumelz-les-Loges. (2) Les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem en 1372, abandonnèrent cette prérogative h Marguerite, comtesse d’Artois, qui leur donna en éehinge une rente de 200 livres à prendre, chaque année, sur les revenus de la ville de Béthune. — 22 — de Lille , Douai et Orchies celles du Temple de Douai, de Cobrieux, de Maisnil, de la Haye-lez-Lille et de Pérenchies, dans le Tournaisis celles de Saint-Léger et d’Anseghem, près d’Audenarde. Bientôt après on réunit encore à la comman- derie de Hautavesnes, celle de Gaudiempré avec la maison de Lucheux qui en dépendait. Devenue ainsi l’une des principales commanderies de France, Hautavesnes fut chambre prieurale de 1370 à 1521. Mais vers 1550, démembrée pour la formation de la commanderie de Caestres, elle fut réduite aux membres dont nous allons parler. Gaudiempré (1). — Parmi les actes de donation passés en faveur de celte maison, nous distinguerons celui de demoi¬ selle Marie Sarton qui, en 1262 , fit abandon de son manoir et de ses terres à l’hôpital, en échange du droit d’aller chaque jour cueillir à la main seulement, dans le bois de Gaudiem¬ pré appartenant aux frères Templiers, l’herbe nécessaire à la nourriture de deux vaches. Le domaine consistait en une maison avec chapelle, 450 mencaudées avec les terres censives du lieu, la justice sei¬ gneuriale, le patronage et la collation de la cure, des dîmes et rentes seigneuriales en plusieurs localités. Le revenu était en 1605 de 400 florins, en 1783 de 3,000 livres. Lucheux (2). — Cette maison, qui avait sa chapelle chargée de trois messes, avait été fondée en 1190, par Hugues, comte de Saint-Pol et Yolande, sa femme, qui lui avaient donné un manoir libre de toutes charges, une charrue de 150 journaux de terre et la franche mouture de leur blé, à condition que les frères de Saint-Jean de Jérusalem bâtiraient à leurs frais une chapelle où ils feraient dire la messe tous les jours et qu’ils ne pourraient rien acquérir à l’avenir dans le comté de Saint- Pol. En 1373, Lucheux rapportait 164 francs et 3 sols tournois. Au XVIIe siècle, la maison et la chapelle étaient détruites; les (1) Gaudiempré (Pas-de-Calais), arrondissement d’Arras, canton de Pas. (2) Lucheux (Somme), arrondissement et canton de Doullens. — 23 — terres qui en dépendaient furent dès lors réunies à la com- manderie. Le Temple d’Arras — Le siège de celte commanderie des Templiers se trouvait 5 Arras, au haut du faubourg Ronville, à droite de la chaussée conduisant à Bapaume, sur une por¬ tion de territoire qui était de la juridiction de l’abbaye Sainl- Yaast. Guiman (1), dans le cartulaire de cette abbaye , rap¬ porte la charte de 1140, par laquelle Gauthier, abbé de Saint- Vaast, autorise les frères du Temple à construire une chapelle dans leur maison du faubourg. Les empiètements de ces der¬ niers , leur mésintelligence avec l’abbaye , et leur avidité à augmenter leurs richesses , semblent déjà montrer le germe des vices qui devaient souiller un siècle plus tard la plupart des membres de l’ordre. Néanmoins un grand nombre de donations furent faites au Temple d’Arras, par Bertrand de Beaufort, Louis de Blairville, le chevalier Vaast et plusieurs autres nobles personnages. Au nombre des personnes qui tinrent à honneur d’obtenir leur sépulture dans la chapelle de cette maison , nous citerons Éloi de Berlette et Isabelle de Longué {de longo vado ), dite de Fontaine. A l’époque du procès des Templiers, une triste scène eut lieu au faubourg d’Arras. Une bande de soldats sortie de la ville vint envahir le couvent et égorger la moitié des per¬ sonnes qui s’y trouvaient ; ceux qui échappèrent à la mort furent emmenés dans les prisons de la ville (2). La maison d’Arras fut donnée aux hospitaliers qui culti¬ vèrent les terres qu’elle possédait. Brûlée plus tard par les Anglais qui faisaient le siège d’Arras, elle ne fut jamais relevée. La chapelle fut conservée, comme l’atteste l’extrait suivant du rapport de la visite prieurale faite en 1495 : « Aux faubourgs > de la ville d’Arras, a une chappelle fondée de Saint-Jehan, (1) Une erreur typographique fait dire à M. Mannier, Gusman au lieu de Guiman , nom de l’auteur de l’important cartulaire de l’abbaye de Saint-Vaast. (2) Hennebert , Herbaville et autres historiens d’Arras indiquent comme théâtre de ce massacre la maison de l'hôpital de Hautavesnes, c’est une erreur d’autant plus manifeste, qu’il n’y a jamais eu de Tem¬ pliers à Hautavesnes. — 24 — » chargée de troys messes la sepmaine, servie à présent par > chappelain séculier , bien réparée et entretenue et garnie j> de calice d’argent, livres et ornements pour le service di- > vin. Joingnant la chappelle, est la maison du sencier, grange, » estables, semblablement en bonne réparacion où a le com- j> mandeur toute jurisdicion. * Incendiée au XVI0 siècle, celte chapelle ne fut point rétablie. Outre un grand nombre de terres censives dans Arras et sa banlieue, les Templiers possédaient trois maisons dans l’inté¬ rieur de la ville, le Four du Temple dans la rue de Pavie (in vico de Pavia ), le Temple devant la porte Saint-Nicolas, la Brasserie du Temple , nommée plus tard le Rouge-Chevalier dans le faubourg entre la porte Saint-Nicolas et la Barre du Ris. Agnez (1). — Les Templiers d’Arras possédaient une mai¬ son et des terres à Agnez-les-Duisans ; c'était un petit domaine seigneurial qui leur avait été donné en 1219, par Bauduin d’Agnez. Cette maison n’existait plus, lors de la visite prieu- rale de 1446. Blairville (2). La maison de Blairville, qui était aussi une succursale du Temple d’Arras, était située dans la rue d’Au- bigny. Elle est mentionnée pour la première fois dans une donation de 1218. Les terres de ce domaine étaient assez considérables; elles furent encore agrandies parla générosité des chevaliers Louis d’Adinfer, Gotrand et Martin d’Hende- court. En 1373, elles rapportaient, dit le Livre vert, Le commandeur jouissait de toute justice haute, moyenne et basse. Ayant souffert des guerres du XVI0 siècle , cette maison était devenue inhabitable. Pour éviter de la rebâtir, le com¬ mandeur de Hautavesnes fut autorisé en 1584, à affermer toutes les terres qui en dépendaient. (1) Agnez-les-Duisans (Pas-de-Calais), arrondissement d’Arras, can¬ ton de Beaumetz-les-Loges. (2) Blairville (Pas-de-Calais), arrondissement d’Arras, canton de Beaumeiz-les-Loges. — 25 — Le Temple de Douai. — Le plus ancien titre que M. Mannier ait pu rencontrer dans les archives nationales sur le Temple de Douai, remonte à l’année 1213. C’est une charte du doyen de la collégiale Saint-Pierre et de son chapitre confirmant la donation d’une rente de douze sols douaisiens faite par Pierre Mulés , aux frères de la chevalerie du Temple , résidant à Douai, fratribus militie Templi apud Duacum (1), sur la maison de Gautier de Faumont située vers la porte des Wetz. Les archives nationales conservent encore l’acte de fondation d’une chapelle dans l’église du Temple de Douai en novembre 1296; cet acte très-curieux montre Robert, seigneur d’Attiches et Gillotte , sa femme , déclarant « qu’ils ont demandé leur i> cimetière à Notre-Dame du Temple à Douay, requis les d orésons et les biensfais des maisons de ça mer et de là mer, i et puis ces orésons requises ils sont devenus confrères 3> doudit Temple et ont juré àwarderet à tenir le droit dou- 3> dit Temple. 3> En conséquence ils fondèrent dans cette église une chapelle où il devait être dit trois messes par semaine pour eux et pour leurs parents trépassés, qui étaient « madame Aélis de Hellingnies qui mère fut à Werin, père j> de devant dit Robert, demoiselle Gillotine qui mère fut à t> demoiselle Jakemine, mère Robert devant dit, pour l’âme 3> madame Emme, castelaine de Raise, sautain (2), pour les » âmes des frères et neveux de devant dit monseigneur Ro- d bert, et pour l’âme monseigneur Gillion de Wasières, che- » valier. » Les Templiers possédaient à Lambres, un moulin à eau d’un grand rapport dont ils arrentèrent le saut en juin 1307, par un acte dont furent témoins le frère Guillaume, comman¬ deur des maisons du Temple dans la baillie d’Arras, frère Simon, d’Arras , frère Denis de le Gorghe, commandeur du (1) Cette expression fait supposer qu’il n’y avait qu’une seule maison du Temple à Douai, et favorise l’opinion de M. l’abbé Dancoisne, qui est d’avis, contrairement à M. Guilmot, que l’hôpital de Saint-Sampson de Douai, n’a pas ôté donné aux Templiers, mais aux Hospitaliers vers 1 année 1300. (2) Au lieu de castelaine de Raise, sautain , il faut lire castelaine de Raise , santain (châtelaine de Raches, sa tante.) Temple de Douai, frère Pierre de Haymant, porte-clefs de la maison du Temple d’Arras, frère Cehan de Honnechies, cha¬ pelain des maisons d’Arras et de Douai, Jakemes, de Seclin clerc du Temple (IJ. Le Temple de Douai était situé près du rempart, assez loin de la rue des Wetz, à quelque distance de la porte aujour¬ d’hui désignée sous le nom de porte de Lille. C’était un bel hôtel, espèce de château-fort, entouré de fossés et de murs dont il reste aujourd’hui des tourelles en briques et quelques constructions à demi-ruinées. Un rapport de 1424 offre de curieux détails sur la siluaüon de cette maison. On trouvait dans la chambre du commandeur « une caiere à enclaslre bien vièse, un banc adossez, un autre » apuyé, ung grant lit de deux lez avec queute et coussin j> boin de plume, une table et un hestaulx, une grande huche, d ung petit dreschoir ployant, ung buffet double, ung coffre t> de mer bien ferré tout autour à double serrure . * Dans la chapelle, l’autel, qui était en bois, était surmonté ges.... » Au nombre des reliquaires se trouvait « une t> petite croix double, couverte d’argent, quy est dorée, en t> laquelle a plusieurs reliques de la vraye croie et autre ave, j> une autre relique en manière de serure de laiton doré en » laquelle a plusieurs osselmens desaines. » Parmi les vases sacrés, un grand calice d’argent doré émaillé autour du pied, « Il aultres calices d’argent doré ung enchensoir d’ar- » gent, et ung aultre aorné de couivre de Limoges . » Au nombre des missels, bréviaires et autres livres figurait un » roman escript en parchemin , contenant plusieurs ystoires ï de Bauduin Desebourt et aultres. » (2). - - - ■ — — . — ■■ — — — ■- ■- - - - . - -, (1) Daté de juin 1307, ce document offre les noms de deux des reli¬ gieux qui devaient être dans le Temple de Douai, le 13 octobre de la même année, lors de l’arrestation des Templiers. Comme on ne retrouve ni le nom de Denis de le Gorghe, ni celui de Jean de Honne¬ chies dans la relation du P. Wauthier, publiée par M. Guilmot, on peut suspecter l’authenticité de celte relation qui ne repose sur aucune preuve certaine. (2) Le texte Ystoire Daucluin , Desebourl et aultres , donné par M. — 27 — La maison du Temple de Douai possédait une centaine de razières de terre dans les environs. Le commandeur de Hau- tavesnes avait auXVe siècle, toute justice et seigneurie dans le Temple de Douai et aussi dans la maison de Saint-Sanson (1). Hénin-Liètard (2). — La maison, qui porte ce nom bien qu’elle fût située sur Dourges parcequ’elle était tplus près d Hénin-Liétard, consistait en une ferme de 88 mencaudées, qui dépendait du Temple de Douai Cobrieux (3). — Cette commanderie était plus importante. Au mois de janvier 1226 , Raband , seigneur de Rumes , en présence de frère Salverte, commandeur des maisons du Temple en Flandre, renonça en sa faveur à tous les droits qu’il avait sur le fief d’Amaury , seigneur de Cobrieux, et le 15 août suivant , celui-ci donna à l’ordre des Templiers dont il faisait partie, le tiers du fief de Cobrieux qu’il tenait de Robert de Gondecourt et de Robert, châtelain de Lille, avec promesse de lui abandonner les deux autres tiers, lorsque le châtelain de Lille aurait reçu des Templiers une somme de 500 livres ; Amaury leur accordait en outre le tiers du fief de Genech. Au XIVe siècle, les Hospitaliers prirent possession de la maison de Cobrieux, et devinrent, en la place des Templiers, les sei¬ gneurs et haut-justiciers du village. Leur domaine se composait d’un château ou donjon sei- Mannier, est évidemment fautif, il s’agit du célèbre roman de Bauduin de Sebourg. (1) Aux détails exposés par M. Mannier, nous ajouterons quelques faits recueillis par M. l’abbé Dancoisne,dans son remarquable mémoire siur les établissements retigieux du clergé séculier et du clergé régu¬ lier qui ont existé à Douai avant la révolution. La maison du Temple r'e Douai a été fondée au mois d octobre 1155, par le comte de Flandre Thiéry d’Alsace, qui lui donna une charrue de terre (6 rasiôres) à Sin- le-Noble; Philippe d’Alsace, fils et successeur de Thiéry, fut le second bienfaiteur de cette maison à laquelle il donna tous les reliefs des fiefs 3ui dépendaient du château de Douai , des terres à Dourges et le ixième de la dîme du Forest; plusieurs bourgeois imitèrent la géné¬ rosité des comtes de Flandre envers les Templiers.— 11 y avait à Douai un hôpital de Saint-Sanson, fondé par le douaisien Garin, archevêque de Thessalouique. Le savant M. Guilmot a cru que cet hôpital avait élô donné aux Templiers. La bulle du 3 août 1309, mentionnée par le curieux travail de M. Mannier sur Saint-Sanson, établit que M. Dan- coisne avait eu raison de mettre en doute l’assertion de M. Guilmot. (2) Hénin-Liétard (Pas-de-Calais), arrondissement de Béthune, can¬ ton de Carvin. (3) Cobrieux (Nord), arrondissement de Lille, canton de Cysoing. 28 — gneurial qui se trouvait au couchant du chemin de Cobrieux à la Poterie et à Bachy , d’une ferme ou basse-cour qui en dépendait et de 94- boniers de terre en labour, bois et prés situés sur Cobrieux, Bourghelles, Genecli et Bachy. La seigneurie de Cobrieux comptait plus de 60 horr mes côtiers ou tenanciers qui lui devaient cens et rentes. Voici les fiefs qui relevaient de ce domaine. A Cobrieux, le fief du Sec-Pré , au relief d’une paire de gants blancs ; le fief de Bure , manoir sur la place du village , près du cimetière, au relief d’une lance blanche ; le fief de la Houblonnière, près du sentier conduisant de l’église au bois de la commanderie et six autres petits fiefs. A Genech , le fief Englebert , appelé aussi le fief de la Molle de Cobrieux , sur le chemin de Co¬ brieux à Genech, au relief d’une paire d’éperons blancs et un autre petit fief à la Voie-Cloyette. A Bachy, la terre et sei¬ gneurie de Y Hôtel, qui appartenait à la fin du XVIe siècle, à Philippe de Tenremonde, seigneur de Bachy ; le petit fief des Prés, au sentier d’Hôtel à Baisieux ; et un autre fief à Hôtel. A Templeuve-en-Pevèle trois fiefs et un à Wannehain. Saint-Léger. — De la commanderie do Hautavesnes dépen¬ dait encore le Temple de Saint-Léger, situé dans le village de ce nom qui fait aujourd’hui partie de l’arrondissement de Tournai (Belgique). C. D. (La suite prochainement.) ESQUISSE GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD ET DES CONTRÉES VOISINES (suite.) Filons . Les fentes produites par les mouvements du sol ont livré passage à des sources minérales dont les dépôts comblantpeu à peu les cheminées par où elles sortaient , ont donné nais¬ sance à de nombreux filons. Les filons de Quarz et de Calcite sont très-communs, les premiers dans les roches schisteuses et arénacées de TAr- denne, les seconds dans les calcaires dévonien et carbonifère. 29 — Près de Chimai et de Matagne, il y a dans le calcaire dévo¬ nien des filons considérables de quarz qui sont peut-être plus récents. La Fluorine (fluorure de calcium) accompagne la calcite dans le calcaire dévonien à Glageon, à Givet et à Yierves. La Barytine (sulfate de Baryte) se trouve aussi dans le même terrain, surtout entre Couvin et Givet. Les filons métallifères n’existent qu’en Belgique et encore y sont-ils peu nombreux en comparaison des terrains analo¬ gues de l’Allemagne et de l’Angleterre. Plomb . — Le seul minerai de plomb abondant est la Galène ou sulfure de plomb. On la trouve en filons dans le calcaire dévonien de Couvin à Givet et des environs de Philippeville, dans le calcaire carbonifère de Theux et de Verviers, dans les schistes houillers de Bleyberg et dans les schistes inférieurs de Longueville, du côté de Bastogne. Le gîte le plus important est celui du Bleyberg à Moutzen. C’est un filon de galène et de blende traversant les schistes houillers sur une longueur de un kilomètre jusqu’à leur contact avec le calcaire carbonifère. En ce point la fente s’élargit en une poche remplie d’argile encore imprégnée de galène. Généralement les filons plombifères ont été modifiés près de la surface par les agents extérieurs ; la galène a été trans¬ formée en Céruse blanche (carbonate de plomb) et en Pyro- morphite jaune (phosphate de plomb). Cuivre. — On ne peut citer que pour mémoire les enduits de Malachile (carbonate de cuivre hydraté) que l’on trouve très souvent dans les grés de l’assise du Poudingue de Burnot, on en connaît à Angres, à Monligny-sur-Fioc, etc. Zinc. — La Blende ou sulfure de zinc accompagne souvent la galène; elle se trouve aussi avec les minerais calaminaires qui sont les plus importants de la Belgique. On désigne sous le nom de minerais calaminaires des mé¬ langes de Calamine (carbonate de zinc), de Smilhsonite (silicate de zinc hydraté) et de Willémite (silicate de zinc — 30 — anhydre). Ils sont associés à l’oxide de fer et à de l’argile dans des poches creusées à la surface du calcaire carbonifère ou au contact de ce calcaire, soit avec les schistes houillers, soit avec les psammites de Condros. Vers la profondeur, on voit peu à peu les sulfures de zinc, de plomb et de fer se substituer aux autres minerais et on constate presque toujours que la poche métallifère est en rapport avec une faille perpendiculaire aux couches. Les amas calaminaires ne seraient donc que des parties supérieu¬ res de filons, ou, comme disent les mineurs, des têtes de chapeau , formés lorsque les eaux minérales pouvaient bar- botter dans une large poche où elles réagissaient mécanique¬ ment et chimiquement sur les roches encaissantes. L’âge de ces sources zincifères n’est pas déterminé, mais on peut supposer qu’après avoir pris naissance peu après les fractures du terrain encaissant, c’est-à-dire à la fin de l’époque houillère elles ont eu une longue durée. Les principaux gites calaminaires sont: la vieille Montagne près deMoresnet à deux lieues S, 0. d’Aix-la-Chapelle; la nouvelle Montagne à Verviers ; Corphalie à six kilomètres d’Huy sur la route de Liège ; Engis ; Ampsin, etc. Manganèse. — Des oxides de manganèse de composition variable sont disposés en filons couchés presque parallèles aux strates dans les schistes siluriens des environs de Lierneux. Pyrites.— Le bisulfure de fer ( Pyrite et Marcassite) accom¬ pagne les sulfures de plomb et de zinc dans leurs filons. Il constitue à lui seul des filons, perpendiculaires aux couches, dans le calcaire dévonien de Jemelle,Sautour, Villers-en-Fagne, etc. , dans le calcaire carbonifère de Saint-Marc et de Saint- Servais, près de Namur, du Rocheux près de Theux, etc. Le filon du Rocheux qui a été reconnu sur une longueur de 1,200 mètres, a en certains points 14 mètres de large. Fer. — UOligiste ou sesquioxide de fer anhydre, existe en couches fossilifères et régulièrement stratifiées à divers niveaux du terrain dévonien. Il est exploité dans la grau- — 31 — vacke de Hierges à Spirifer cullrijugalus , aux environs de Trélon et de Chimai ; dans les schistes des Isnes à Spirifer Verneuili, au N. de Namur. On connaît un filon d’Oligiste compacte et terreux à Porcheresse, dans les schistes dévo¬ niens inférieurs, et un filon d’Oligiste laminaire accompagné de quarz à Viel-Salm. La Limonile, ou sesquioxide de fer hydraté , se trouve parfois aussi en filons, mais elle paraît plus récente et il en sera question plus tard. TAPISSERIES FLAMANDES DU XVIe SIÈCLE REPRÉSENTANT LA CONQUÊTE DE TUNIS PAR CIIARLES-QUINT. Sous le titre : Tapisseries représentant la conqueste du royaulme de Thunes par Vempereur Charles-Quint , M. Iloudoy vient d’éditer, en les accompagnant d’une curieuse préface, deux conventions passées entre la reine de Hongrie, gouver¬ nante des Pays-Bas, et les artistes chargés d’exécuter douze grandes pièces de tapisserie, qui devaient rappeler à la pos¬ térité la conquête du royaume de Tunis par le souverain qui régnait alors sur l’Allemagne, l'Espagne et les Pays-Bas (1). De toutes les guerres entreprises par l’habile et heureux adversaire de François Ier, la plus glorieuse est sans contredit l’expédition de Tunis. En s’emparant de cette ville, non- seulement il délivrait de la captivité plus de vingt mille esclaves chrétiens, mais il enlevait un refuge aux pirates qui ravageaient la Méditerranée et les côtes d’Espagne, de France et d’Italie; il affaiblissait la puissance des Turcs, alors si re¬ doutables pour l’Europe, la civilisation et le christianisme; il montrait aux monarques de l’Occident la route dans laquelle ils devaient marcher, au lieu de dépenser les trésors et le sang de leurs sujets en des luttes fratricides qui n’étaient interrompues un instant que pour recommencer plus san¬ glantes. Aussi l’heureux succès de celte expédition a été (1) Tapisseries représentant la conqueste du royaulme de Thunes par l'Empereur Charles-Quint ; Histoire et Documents , par J. Iloudoy. — Lille, Danel, 1873. — 32 - célébré par les historiens , les poètes et les artistes (2). Charles-Qnint voulut lui-même en conserver le souvenir par des monuments durables. Il avait fait relater sa victoire dans une inscription gravée sur une table de marbre qui a été retrouvée en 1809 sous les ruines de l’ancienne forte¬ resse de la Goulette et qui se trouve aujourd'hui dans la grande mosquée de Tunis ; il voulut encore la rappeler en faisant confectionner en Flandre des tapisseries destinées à décorer TEscurial aux jours des grandes solennités. Afin de rendre cette dernière œuvre digne de l’évènement qu’elle devait retracer, il n’épargna ni les soins, ni la dépense. Pour le dessin des modèles qui devaient servir aux tapis¬ siers, il s’adressa à Jean Yermay, peintre officiel de la cour sous Marguerite d’Autriche , l’auteur de portraits des mem¬ bres de la famille impériale admirés dans toute l’Europe , le dessinateur des patrons des trois remarquables tombeaux encore aujourd'hui conservés dans l’église de Brou. Cet ar¬ tiste avait accompagné l’empereur dans son expédition; il pouvait reproduire, de visu et d’après ses croquis les lieux qu’il avait parcourus , les faits glorieux dont il avait été le témoin. Les documents reproduits par M. Houdoy nous donnent une idée de l’œuvre du peintre. Les douze pièces de tapis¬ serie, larges chacune d’environ cent aunes carrées, devaient ràppeler toute l’expédition. La première représentait la quarte (carte) de la contrée , probablement une vue à vol d’oiseau dans le genre de celles des graveurs de l’époque ; la seconde, la navigation ; la troisième, la monstre (revue des troupes); la quatrième, V escarmouche; la cinquième, le camp ; la sixième, le fourrage; la huitième, la bataille; la neuvième et la dixième, le sac ; le sujet des autres n’est pas indiqué. Mais ces mentions suffisent pour montrer que l’œuvie du peintre était toute l’histoire de la célèbre expédition. L’em¬ pereur lui-même s’occupa de cet œuvre ; Jean Yermay lui (2) Bulletin de la Commission royale d’histoire de la Belgique, t ir, p. 47 et suiv.; t. vu, p. 135. — 33 — soumit les modèles dessinés au petit pied , et, après avoir reçu ses observations , reproduisit son travail de sa propre main sur un papier de la dimension que devaient présenter les tapisseries, en s’engageant à les peindre de ses meilleures et plus vives couleurs, et à se faire aider, à ses frais, par les artistes les plus savants et les plus soufflants , afin que les tapisseries pussent être exécutées le plus tôt possible. JeanVermay devait recevoir pour cette œuvre la somme totale de dix-huit cents florins, qui est considérable si on la compare aux prix que les peintres recevaient pour leurs tableaux. D’après la con¬ vention, il s’engageait à renoncer à tout autre ouvrage jus¬ qu’à ce qu’il eut terminé les patrons , qu’il promettait pour dix-huit mois après le mois de juin 1546, époque où il signa la convention. Les patrons achevés, la reine Marie de Hongrie fit appeler Guillaume Pannemaker, célèbre fabricant de tapisserie de Bruxelles ; et un marché , qui est longuement détaillé , fut conclu avec lui en date du 2 février 1548. Après avoir étudié les petits et les grands patrons exécutés par Jean Yermay, Pannemaker s’engagea à exécuter ces douze pièces de tapisseries, qui devaient être tissées de fil d’or, d’argent, de soie ou de la plus fine sayette ; il fut convenu , en outre, que toutes les soies seraient de la provenance de Grenade , qu’on emploierait les laines les plus fines qu’il serait possible de trouver, et que , pour la chaîne , on ferait usage du meilleur et plus exquis fület de Lyon, quoi qu'il puisse coûter. Un ar¬ ticle spécial obligeait aussi le fabricant à ne pas ménager les quantités de soie à employer, et réglait le nombre des fils de soie à placer après le fil d’or ou d’argent avant d’arriver à l’emploi de la laine , tant dans les bordures que pour la reproduction des figures , paysages , arbres et verdures. Le prix était fixé à douze florins pour chaque aune de tapisserie; chaque tenture devait être soumise à des experts spéciaux. Un envoyé particulier partit pour Grenade , afin d’y acheter et d’y faire filer et teindre les soies nécessaires à l’ouvrage ; elles furent fournies au tapissier par Simon de Parenty, qui — 34 — était chargé de tenir les comptes relatifs à la dépense- Le 21 avril 1554, six ans environ après l’époque de la con¬ vention, les douze pièces de tapisserie étaient terminées et définitivement reçues. Quelques corrections seulement avaient été demandées à Pennemaker; il reçut, en sus du prix convenu, 673 florins pour des modifications demandées durant le travail et qui consistaient en changements dans les inscriptions , en une moresque à l'esguille dans la tapis¬ serie dite la carte ,e t dans celle de la navigation ou il osta ung naviere et remit ung aultre avec cordons et bannières. Quand ces tentures eurent été acceptées définitivement par les maîtres jurés de Bruxelles , la régente les fit emballer avec soin, et, le 2 juillet 1554, Guillaume Pannemaker reçut la charge de les transporter lui-même en Angleterre , d’où elles furent expédiées pour l’Espagne. Au xvme siècle , on s’en servait encore pour décorer le palais royal de Madrid , lors des réceptions solennelles. S’y trouvent -elles encore au¬ jourd’hui? M. Houdoy n’a pu le savoir : la lettre qu’il a écrite à ce sujet au conservateur du musée de Madrid n’a pas reçu de réponse. Peut-être sont-elles reléguées dans les greniers des palais royaux de la capitale de l’Espagne, parmi ces tapis¬ series anciennes , qui , d’après certains auteurs , seraient assez nombreuses pour couvrir une route de dix lieues de long. Quoi qu’il en soit , il faut remercier M. Houdoy d’avoir publié les documents que lui a fournis le triage récemment opéré des liasses jusqu’ici inexplorées de la Chambre des Comptes de Lille. Il a fait connaître une œuvre importante de l’art flamand. ASSOCIATION GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD. Décembre 1872. — Janvier et Février 1873. La Société continue et augmente ses travaux qui sont con¬ duits avec la plus grande activité par M, le professeur Gos- selet, son directeur. - 35 - Parmi les sujets à l’étude se trouvent la création d’une carte agronomique; de plus, la Société se propose des re¬ chercher dans notre région, les gisements de roches propres à enrichir le sol arable, tels que les calcaires dolomitiques et des roches à base de potasse. L’adjonction d'un calcaire magnésien aux engrais en usage aurait-elle un effet utile à l’agriculture? M. Corenwinder, président de l’association, le pense. Car, il n’est pas encore démontré , dit-il , que la magnésie se rencontre en quantité suffisante dans tous les sols, et cependant elle est aussi nécessaire à la végétation que quelques autres principes dont le rôle n’est pas contestable, tels que la potasse, etc. En attendant des recherches plus complètes, M. Coren¬ winder a donné plusieurs analyses de roches dolomitiques, dont voici la richesse en carbonate de magnésie: m. c. Dolomie sableuse du Hure (Pas-de-Calais) .... 38,50 — de Saint Remy-Chaussée (Nord) . 39,20 — de Pont-Sainte-Maxence (Oise) . 34.60 — du comté de Durham (Angleterre) . . . 42,20 — d’Henripont (Belgique) . 37,90 La dolomie du Hure est à la base du calcaire carbonifère du Boulonnais; cePe de Saint-Remy-Chaussée à peu près au même niveau géologique dans l’arrondissement d’Avesnes; la dolomie du Pont-Sainte-Maxence à la base du calcaire grossier, celle du comté de Durham dans l’étage pénéen, ( t celle d’Henripont dans le terrain dévonien supérieur. M. Dolfus, dontj’avis est partagé par M. Ortlieb, croit avoir rencontré, dans les travaux effectués à la gare de Roubaix, la partie supérieure de l’argile des Flandres , en place , avec fossiles , et notamment la Nummulites ptanulata et VOslrea flabellula. La succession des terrains , d’après, la coupe qu’il en a donné, est la suivante: 1° Terre végétale; 2° lehm ou terre à briques; 3° lit de cailloux roulés; 4° lehm compacte avec Ostrea flabellula re¬ maniées; 5® argile brune ou bleue avec mêmes fossiles, le — 36 - tout d’une épaisseur de 3m30c; 6° argile des Flandres, ln,05c. Cette argile est brune ou bleuâtre , légèrement sa¬ bleuse, offrant à 1 m de la partie supérieure un lit de fossiles fragiles, mais dont le test est blanc et intact : ce sont Turri- tella ed la, Cardita planicosta , Ostrea flabellula , Nummulites planulata. Plus bas, ces fossiles existent encore, mais dissé¬ minés dans l’argile. M. Chelonneixa émis à ce sujet quelques réserves basées sur la nature des fossiles indiqués ci-dessus. Ces derniers ne lui paraissent pas suffisamment distincts de ceux qui carac¬ térisent, dans notre région, l’assise des sables de Mons-en - Pévèle , pour que l’on voie dans la couche qui les renferme autre chose qu’un passage à cette assise. Un forage pratiqué à Croix et poussé jusqu’au calcaire carbonifère a fourni à M. Ortlieb 83 échantillons de roches qu’il a ensuite classés par terrains , en évaluant comme suit l’importance des assises traversées par le puits : m. c. 1. Terrain quaternaire . 21 » 2. Terrain tertiaire (Landénien inf.r) . 2 ,75 3. Craie blanche . 8,5 4. Craie sableuse . 6 » 5. Craie bréchiforme . 2 » 6. Craie marneuse . 24 » 7. Tourtia . »,5 82,75 M. Ortlieb ayant comparé ces données avec celles recueil¬ lies dans un autre forage pratiqué à Roubaix, à la filature de MM. Mimerel et fils, et ayant tenu compte delà différence d’altitude des deux stations, a constaté , entre les gisements, de grandes analogies, mais en même temps quelques diffé¬ rences dans l’épaisseur des couches. L’assise landénienne inférieure notamment épaisse de 4m à Roubaix, n’a que 2m,75c au forage de Croix. Pour la craie, la différence n’est que de 6m à l’avantage de la dernière station. 37 — Le tourtia qui clôt la série secondaire à Croix correspond- il à celui de Tournai ou à celui de Mons plus récent? M. Ortlieb a constaté que les indications paléontologiques fournies par le forage de Croix sont insuffisantes pour élucider ce point, mais il ne croit pas à la présence de la craie glau- conieuse dans cette partie du bassin, et il rapporte à la craie marneuse les 32 mètres de calcaire sableux ou marneux compris à Croix entre la craie blanche et le tourtia. M. Gosselet a donné les prémisses d’un travail qu’il vient d’achever sur le terrain carbonifère du Boulonnais. Après un historique des ouvrages ayant déjà paru sur la matière, M. Gosselet a fait ressortir le point principal qui restait en discussion. Pour une partie des géologues, la houille du Boulonnais appartient à l’étage du calcaire carbo¬ nifère; pour les autres , elle se trouve dans l’étage houiller. Or, la houille se trouve plscée dans cette région, sous le calcaire carbonifère. M. Gosselet prouve, appuyé sur des données paléontologiques incontestables.quele bassin houiller du Boulonnais est bien comme il l’avait dit antérieurement, le prolongement de celui de la Belgique , et que c’est par suite d’accidents particuliers où les failles jouent un grand rôle qu’il a été recouvert par le calcai;e carbonifère. M. Jules Barrois a recueilli dans le terrain houiller d’IIar- dinghem les végétaux suivants : FOUGÈRES. Pecopteris Loshii. Nevropleris helerophylla. Sphcnopleris coralloules. Trie h om anites de li calu lus. EQUISÉTâCÉES. Sphenophyllum erosum. Annularia radiala. Asleroph], llites delicalula. Calamites Suckoivii . — Cislii. M. Ladrière a étudié les carrières de Saint-Waast-Icz-Bavay. Dans l’une d’elles, la pierre bleue ou calcaire dévonien qu’on y exploite est surmontée par les sables verts à Pecten asper ; ceux-ci passent peu à peu à une marne , dont proviennent probablement quelques Belemnites plenus qu’on lui a données, puis viennent l’argile à silex tertiaire, puis le limon. # — 38 — Dans une seconde carrière , à 50 mètres de la précédente, on trouve entre les sables verts et le calcaire dévonien une couche de 3 à 4 mètres formée de lits irréguliers de sable grossier et d’argile plastique grise remplie de lignites et de pyrites. Cette couche est ravinée à la surface; une des poches est comblée par du sable blanc très-fin. M. Ladrière rapporte ces couches aux Gault. Il suppose que cet étage, dont il fait ressoriir l'importance au point de vue industriel , a rempli un bassin assez profond entre les deux lignes d’affleurement des roches primaires qui se diri¬ gent de Bellignies vers Saint-Waast et vers Houdain. M. Charles Barrois a présenté une coupe des affleurements du gault et du terrain néocomien, relevés par lui récemment à la côte du Blanc-Nez , entre la pointe du Petit-Blanc-Nez et Wissant. Entre l’argile à Ostrea Leymerii et une assise de sable ferrugineux exploités à Wissant, M. Barrois a noté di¬ verses couches d’argile et de sable ferrugineux avec fossiles marins , qui , partiellement du moins , lui semblent corres¬ pondre aux couches parallèles que l’on rencontre dans la même position de l’autre côté du détroit. M. Debray, qui avait entretenu précédemment la Société au sujet des tourbières d’Aveluy et d’Albert, a complété cette communication des plus intéressantes en parlant des tour¬ bières du littoral. Son travail , couronné par la Société des sciences de Lille, sera l’objet d’une analyse plus étendue. Nous passons sous silence dans ce compte rendu succinct, quelques autres lectures et les discussions aussi animées que courtoises qui suivent chaque communication. Lecocq. BIBLIOGRAPHIE. Géologie de la Belgique, par Michel Mourlon. Bruxel¬ les, 1873. C’est un excellent traité de géologie locale, parfai¬ tement au courant des nouvelles découvertes de la science. Il est remarquable par une grande clarté d’exposition qu’aug¬ mentent encore de nombreuses coupes empruntées à diffé¬ rents mémoires ou que l’auteur a relevées lui-même. Les personnes qui voudront étudier la géologie de la Belgique ne pourront trouver un meilleur guide. Nous n'avons à lui re¬ procher que la grandeur du format, grand in-octavo , qui le rend peu portatif. — 39 — CHRONIQUE. Janvier. Météorologie. 1873 année moyenne. Température atmosphér. moyenne. 5? 22 2? 94 — moy. des maxima. 7° 56 — — des minima. 2° 88 — extr. maxima, le 10. 12? 00 — — minima, le 29. — 3? 30 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 756™261 759™398 — — extr. max. le 14. 768"?™ 09 — — — min. le 19. 724™ 69, minuit. Tension moy. de la vap. atmosph. 5™ 47 5™02 Humidité relative moyenne %• • 81.3 86.7 Épaisseur de la couche de pluie. . *7 1 mm j | 56™ 16 — — d’eau évap. 18™ 77 14™ 98 La température atmosphérique de janvier fut remarqua¬ blement élevée, jamais le thermomètre à maxima ne des¬ cendit au-dessous de 0 et le thermomètre à minima ^indiqua que six jours de gelées, encore furent-elles faibles. Cette haute température, la faible humidité des couches d’air en contact avec le sol, la nébulosité moyenne du ciel, et l’intensité des courants favorisèrent l'évaporation qui fut plus grande que celle observée ordinairement en janvier. Les couches élevées de l’atmosphère furent assez humides, comme l’indique la dépression barométrique ; néanmoins les pluies, quoiqu’au nombre de 20, ne furent pas abon¬ dantes, car si de la quantité totale 71™ 11 on retranche les pluies du 19 (26™ 15) et du 24 (10™ 60), il reste 34™ 36 pour 18 jours, soit en moyenne 1™ 90 par jour. La quantité d’eau de neige fut de 5™ 80, et celle d’eau de grêle 1™ 05. Le vent régnant fut celui du S. S.-O. soufflant avec force ; les courants supérieurs venaient du S.-O. La gelée eut lieu sous l’influence du vent E. N.-E. Le 19 il y eut énorme dépression barométrique : mm 9 h. matin . 734.38 9 h. soir . 726.06 10 h. 40' . 725.68 Minuit . 724.69 — 40 — A partir de minuit le baromètre remonte, car le 20 à neuf heures du matin, il n’était qu’à 726“m 50. Pendant toute la journée du 19, par un vent fort S.-O., la pluie fournie par les nuages S.-O. et 0. S.-O. ne cessa de tomber et occasionna dans tous les cours d’eau une crue énorme et d’une rapidité étonnante, ce qu’explique du reste l’état de saturation de la terre qui ne pouvait plus absorber. La tension électrique fut énorme ; le 20 dans la soirée il y eut de nombreux éclairs sans tonnerre. Les 8 et 10, on observa deux halos lunaires suivis de pluie. De 10 h. 15' soir, le 7, à 1. h matin le 8, il se produisit une magnifique aurore boréale. Enfin pendant le mois il y eut 29 jours de brouillard, 19 de rosée, 5 de gelée blanche, 2 jours le ciel fut complète¬ ment serein ; 16 demi-couvert et 13 couvert. V. Meurein. milan. Le 30 octobre 1872, un milan royal ( Milvusregali Brisson) a été tué à Mérignies, canton de Pont-à-Marcq. Les apparitions de cet oiseau aux environs de Lille sont toujours rares et accidentelles. Musaraigne pygmée. Le 15 octobre 1872, une musa¬ raigne pygmée {Sorex pygmeus, Laxm.) a été prise au cime¬ tière de l’Est, à Lille; c’est une espèce à ajouter au catalogue des mammifères du département du Nord. Elle habite la Russie et l’Allemagne , et dépasse très-rarement le Rhin ; la Zoologie de la Lorraine , de M. Godron. ne la mentionne pas; on n’en cite que deux captures en Belgique, sur la rive droite de la Meuse. Comme il n’est pas probable que l’individu pris à Lille soit seul dans le pays et qu il serait très-intéressant de bien cons¬ tater l’indigénat de l’espèce, nous en donnons une courte des¬ cription : De moitié plus petite que la musaraigne ordinaire et que la musaraigne carrelet — 4 cent 7 mill. sans la queue , celle-ci de 3 cent. 2 mill. — dos, sommet de la tête et dessus de la queue, gris roussâtre à reflets fauves , gorge et ventre gris , dents brunes à la pointe ? queue renflée à la base, couverte de poils égaux et couchés. On ne pourrait la confondre qu’avec les jeunes des autres musaraignes , mais son reflet fauve , le renflement de la queue, et la consistance de la charpente osseuse propre aux adultes la feront toujours distinguer. C’est avec le Sorex etr usons, d’Italie, le plus petit mammi¬ fère connu. De N. Lille, imp. Six-Horemans, 73 5i2. # 5* Année. — N° 3. — Mars 1873. LES COMMANDERIES DU TEMPLE ET DE L’ORDRE DE MALTE DANS L’ARTOIS, LA FLANDRE WALLONNE ET LE IIAINAUT (suite.) Commanderie de Caestre (1). Cacstre. — La maison de Caestre était un membre de la commanderie de Slype (2), lorsqu’en 1565, le revenu toujours croissant de cette commanderie et de celle de iïautavesnes, détermina le chapitre du grand-prieuré de France à en déta ¬ cher un certain nombre de membres pour former la baillie de Caestre. Nous parlerons successivement de toutes les maisons dépendant de cette commanderie. Son chef-lieu était situé à droite du chemin qui conduit de Caestre à Eecke (3), sur le territoire de cette dernière localité. Auprès de la maison se trouvait une chapelle dédiée à saint Jean-Baptiste, qui était desservie par le vicaire de Caestre moyennant une pension annuelle de 200 florins. Le domaine comprenait 128 mesures de terre en labour, prés et bois, situés à l’entour de la maison. Le commandeur était seigneur de Caestre, avec la haute, moyenne et basse justice, le moulin banal, des cens et rentes seigneuriales à Caestre, Eecke, Vieux-Berquin , Hazebrouck, Oxelaere et autres lieux; il prenait une portion de la dîme d’Eecke. La seigneurie de Caestre comptait dix-huit hommes de franc fief, dont le relief dû à la commanderie était le revenu d’une année de chacun d’eux à chaque mutation. Cette terre et seigneurie rapportait 1,650 florins en 1783. Boore (4). — Dépendance de la commanderie de Caestre, cette maison comprenait un domaine de 108 mesures de terre, traversées par la rivière la Nieppe , qui avaient été données aux Templiers en 1244 par Arnould de Landas, sire d’Esnes, malgré l’opposition de ses enfants. Les constructions ayant (1) Caestre , Nord, arrondissement dTIuzebrouck. (2) Slype (Belgique), Flandre occidentale, arrondissement d’Ostende. (3) Eecke , Nord, arrondissement d’Hazebrouck. (4) Boore , Nord, arrondissement d'Hazebrouck. — 42 — été détruites au xvne siècle , les terres , comme les cens et rentes, furent réunies au chef-lieu de la commanderie. Le Temple de la Haie à Canteleu. — Cet établissement était situé près de Lille , au delà du pont de Canteleu , à gauche de la route qui conduit à Lomme (1) , à l’endroit dépendant aujourd’hui de cette dernière commanderie , qu’on appelle encore le Temple. Il en est fait mention en 1205 dans une charte de l’abbé et des religieux de Loos. Il y avait dans cette maison une chapelle où l’on disait encore, à la fin du siècle dernier, trois messes par semaine. Le domaine se composait, en 1378, de 28 boniers de terres à labour, 14 boniers de bois, prés et pâturages, et d’un moulin à vent. Le Temple de la Haie possédait en outre deux maisons à Lille près de Saint- Maurice , 16 boniers et demi de terre en dehors de la porte des Malades et des terres et rentes foncières à Esquermes, Sequedin, Ennetières-en-Weppes et Lomme. Le commandeur avait toute justice et seigneurie dans son fief de la Haie. Le revenu total était, en 1783, de 3,300 livres. Pérenchies (2). — La maison de Pérenchies, située près de cette dernière localité, mais sur le territoire de Verlinghem, dans un hameau qui porte encore aujourd’hui le nom du Temple, possédait un domaine de 22 boniers de terre en labour et pâturage, et rapportait, avec le terrage de Lomme- let, une somme de 39 livres par an. Cette terre avait été donnée aux Templiers en 1167 par les religieux de l’abbaye de Saint-Quentin-en-lTle. Le commandeur avait toute justice et seigneurie dans sa terre de Pérenchies; il percevait des cens et autres droits seigneuriaux dans les villages de Péren¬ chies et de Verlinghem , ainsi que sur plusieurs maisons et héritages à Lompret, Wambrechies, Fâches et autres lieux de la châtellenie de Lille. Le revenu était, en 1783 , de 4,400 livres. Le Grand-Maisnil. — Cette maison, qui était, comme celle de Pérenchies, une succursale du Temple de la Haie , était (1) Lomme , Nord, arrondissement de Lille. (2) Pérenchies , Nord, arrondissement de Lille. — 43 — située sur le territoire de Radinghem (1), du côté de V Epine VApostel , près du chemin qui se dirige vers Wez-Macquart. Elle possédait 16 boniers de terre à labour et 3 boniers de pâturages. En 1403 , le duc de Bourgogne reconnut , malgré les prétentions contraires de révoque de Tournai , que le commandeur de Grand-Maisnil possédait toute justice et sei¬ gneurie. Avec les dîmes de Radinghem, Erquinghem-le-Sec, Prémesques et la Boutillerie, cette maison avait, en 1783, un revenu de 4,000 livres. Winnezeele (2). — Située dans le hameau de Winnezeele, encore aujourd’hui appelé le Temple, cette maison était en¬ tourée de 200 mesures de terre en pâturage et bruyère , et possédait en outre une vingtaine de mesures de bois. Le com¬ mandeur était seigneur de ce petit domaine, où il avait haute, moyenne et basse justice, avec des dîmes sur Zerme- zeele et Arneke et des cens à Houdezeele, Hondeghem, Linde, Steenwoorde , etc. La chapelle se trouvait sur un monticule en tête des bois, à un quart de lieue de la maison. Des reli¬ gieux de Tordre de Saint-Augustin la desservaient au siècle dernier. En 1757, le revenu était de 550 florins. Wormoutli. — Dépendance de Winnezeele , ce petit do¬ maine du Temple comprenait une maison et une vingtaine de mesures de terre, qui rapportait 120 florins en 1783. La commanderie de Caestre comptait au nombre de ses membres l’importante maison d’Ypres, et celles d’Everdinghe, de Wareghem, du Temple-lez-Bruges, de Ruysselede , de Gand et d’Anseghem, situées en Belgique. Le revenu général de cette commanderie était, en 1783 , de 25,400 livres. Le dernier commandeur a été Eugène Ca¬ mille, prince de Rohan, ancien général des galères de Tordre, nommé en 1780. {La fin au prochain numéro). (1) Radinghem , Nord, arrondissement de Lille. (2) Winnezeele , Nord, arrondissement d’Hazebrouck. — U — LA VILLE FRANCHE ET LA PRÉVÔTÉ D’HASPRES (1). Il est intéressant de connaître ce qu’étaient les prévôtés. Un grand nombre d’érudits ont écrit l’histoire des abbayes el des maisons religieuses les plus importantes ; il en est peu qui aient tourné leur attention sur les prévôtés, dépendances des monastères. Le possesseur des archives de la prévôt* d’Haspres ayant bien voulu mettre ces documents originaux — malheureusement incomplets ou mutilés par le temps, - à la disposition de MM. Th Louise et E. Auger, ces auteur; ont écrit l’histoire de cette institution religieuse , en ayan soin de faire connaître ses rapports avec la maison-mère e l’influence qu’elle exerça autour d’elle. Nous nous faisons ui devoir d’analyser ce curieux travail pour les lecteurs du Bul letin. Ce n’est pas à Pépin-le-Bref, comme le dit Simon Leboucq que doit être attribuée la fondation de la prévôté d’Haspres elle est due à Pépin d’Héristal qui établit cette maison en 692 pour remercier le ciel de l’importante victoire qu’il ava remportée à Testry cinq ans auparavant, et la plaça sous 1 dépendance de la célèbre abbaye de Jumièges, qui était situé sur les bords de la Seine dans le Vexin normand (2). « Ce fi » sur les bords de la Selle, dans une vallée sauvage, formé » de côteaux légèrement inclinés , au sein de l’antique for» » charbonnière, que s’éleva le nouveau monastère. » On ne sait rien de l’histoire de la prévôté d’Haspres depu sa fondation jusqu’au milieu du ixe siècle. A cette dernièi date, de 845 à 851, l’abbaye de Jumièges ayant été saccagt par les Normands , les religieux , forcés de quitter leur asi et leur contrée, se dirigèrent vers leur maison d’Haspres, c (l; La Ville franche et la Prévôlé d’Haspres (092-1794), par Th. Loui et E. Auger. - Douai, A, Crépin, 1872. (2) Il est à regretter que les auteurs de l’excellent travail sur la vh franche et prévôté d’Haspres n’aient pas fait connaître par des indu- lions précises les documents originaux qui prouvent les laits qu> racontent. Pour la date de la fondation d’Haspres et pour le motif ci i a fait créer cette maison, il eut été utile de citer les documents ou > auteurs qui prouvent en faveur de l’assertion de MM. Louise et Aug<- — 45 — ls espéraient être à l’abri des barbares. Ils y transportèrent eurs richesses, entre autres les châsses qui contenaient les •estes de saint Achaire, un de leurs abbés, et ceux de saint lugues. Ils y furent aussi exposés aux attaques des pirates lu Nord, en 881; mais, avant l’arrivée de ces terribles ennc- nis, ils s’étaient réfugiés , avec leurs reliques, dans la ville le Saint-Omer. Quand le Gambrésis n’eut plus à craindre les uvasions des barbares, les restas des saints furent rapportés i Haspres, et renfermés dans une châsse d’argent. Les moines de Jumièges étaient aussi rentrés dans leur uonastère , et , après l’avoir relevé de ses ruines, ils récla- uèrent les reliques qu’ils avaient confiées aux religieux l’Haspres. « Mais ceux-ci, de concert avec les prélats des > diocèses voisins, refusèrent de les rendre, et firent d’ail- • leuis remarquer que la prévôté d’Haspres relevant de » l’abbaye de Jumièges, celle-ci restait toujours maîtresse > de ces reliques. Les religieux de Jumièges cédèrent à ces • raisons. Saint Achaire et saint Hugues devinrent alors les patrons du monastère d’Haspres. C’est à la présence de ces reliques qu’il dut en partie sa célébrité. Les reliques de saint Achaire, dit un ancien auteur, guérissaient d’un certain mal qui rend les hommes furieux , insensés et comme trans¬ portés de rage , en un mot acariâtres. — On va les servir , dit un chroniqueur valenciennois , quand le cerveau est blessé.... A partir du IXe siècle, la réputation des reliques de saint Achaire et de saint Hugues s’étendit au loin. • Alors de nombreux fidèles arrivaient presque sans inter- • ruption à la prévôté pour les vénérer. Dum multa et cele- » berrima dignatus est per utrumque operari virtutum pro- ' digia (1). Sans parler encore des autres pèlerins, on voyait ) accourir à Haspres les seigneurs du voisinage avant d’en- > treprendre une expédition Des rois , des princes et des > comtes enrichirent même le monastère par leurs dons et > leur munificence et lui conférèrent des privilèges » Mais cette affluence , ces fréquents pèlerinages et ces ri- (1) Molanus ad natales SS. Belgii auctorium. — 46 — chésses contribuèrent sans doute , outre les causes générales qui introduisirent le relâchement dans les maisons religieuses au xie siècle , à faire pénétrer le désordre dans la prévôté d’Haspres. Les religieux vivaient en hommes du monde, sans discipline, et il était difficile à l’abbé de Jumièges d’exercer une surveillance active sur cette maison éloignée. Un jour, Gérard, évêque de Cambrai et d’Arras, traversant, en compagnie de Ledwin, abbé de Saint -Vaast d’Arras, la prévôté d’Haspres , apprit à connaître par lui-même la vie dissolue des moines d’Haspres ( obscœnam monachorem con- versationem) ; pour remédier au mal, il engagea l’abbé de Saint-Vaast, s’il possédait quelque territoire dans le voisinage, à en faire l’échange contre la prévôté d’Haspres. Celui-ci se décida à céder à l’abbé de Jumièges le prieuré d’Angicourt, situé dans le Beauvaisis, contre la prévôté d’Haspres. L’échange eut lieu en janvier 1024 ; l’acte est cité in extenso par les au¬ teurs du travail. L’abbé Ledwin veilla avec sollicitude aux intérêts de la pré¬ vôté. Il rebâtit l’église, construisit un cloître régulier, restaura les bâtiments nécessaires aux religieux et rétablit la discipline monastique. Cette maison devint alors l’une des plus impor¬ tantes prévôtés du nord de la France. « Les petites colonies » religieuses, connues sous le nom de prévôtés, n’étaient » autre chose que des celles , des fermes, des granges , cellæ, » ferme e, grangiæ, en un mot, des domaines donnés à une » abbaye ou acquis par elle. L’abbé, ou tout autre supérieur j> régulier , y envoyait un certain nombre de religieux pour » les régler et les administrer. Or, le religieux préposé aux » autres s’appelait prior ou prœpositur. Il était révocable , » amovible et devait rendre un compte exact de sa gestion » à l’abbé qui l’avait investi. Parmi ces prévôtés , les unes y> avaient été données aux monastères à la condition d'y en- >) trenir un certain nombre de religieux qui en feraient valoir » les domaines et en géreraient les revenus , sans négliger » toutefois les exercices de la régularité. D’autres constituaient * de véritables domaines , appartenant dès le principe à un » monastère qui était obligé de les faire administrer, à cause — 47 — » de leur éloignement du chef-lieu ; mais les unes et les au- » très restaient toujours la propriété des abbayes. Les reli- » gieux qu’on y envoyait prenaient sur les revenus ce qui * était nécessaire pour leurs dépenses particulières , pour » le culte divin, pour les œuvres de charité, et, comme » de simples régisseurs, ils rendaient compte du surplus au » monastère qui était seul propriétaire. Les prieurs et les » prévôts abusèrent parfois de leur autorité afin de se rendre » indépendants.... Toutefois, ces abus ne pénétrèrent point » dans les abbayes des provinces belgiques. Les prieurés ou » prévôtés y conservèrent toujours leur caractère primitif. • » La prévôté d’Haspres entr’autres resta jusqu’à la fin la pro- » priété de l’abbaye royale de Saint-Vaast, dont elle n’était, » dit Mabillon, qu’une cella . » c d. {La suite prochainement). ÉTUDE GÉOLOGIQUE DU TERRAIN ROUILLER AU SUD DE LA CONCESSION DE DOURGES, par M. Ludovic Breton, Ingénieur des Mines d’Auchy-au-Bois. L’immense intérêt qui s’attache à tout ce qui concerne le terrain houiller nous engage à donner avant sa publication l’analyse d’un mémoire couronné il y a quelques mois par la Société des Sciences de Lille. Depuis longtemps les géologues se servent des coquilles fossiles comme de médailles pour reconnaître l’âge des ter¬ rains. Avec leur aide, ils peuvent distinguer divers niveaux dans une même masse minérale et s’orienter dans leurs recherches. Les mineurs, au contraire, ont jusqu’ici négligé l’élude des fossiles. On ne peut cependant admettre que le terrain houiller soit exceptionnel, et qu’il y ait pour lui des règles différentes de celles qui régissent les autres assises du globe , seulement les fossiles houillers ne sont plus des débris d’animaux, ce sont des végétaux ; mais chaque niveau, on pourrait même dire chaque couche de houille, doit avoir — 48 — sa florale spéciale, s'il en est ainsi, on pourra par la paléon¬ tologie raccorder ensemble les couches de deux exploitations voisines, ce qui est une des grandes difficultés de l’art du mineur ; on arrivera même à reconnaître la position où l’on est dans le terrain houiller, à savoir combien on trouvera de houille au-dessus, et combien au-dessous. Dans la conviction que l’on retirerait de grands avantages delaconnaissance exacte delà distribution des végétaux fossiles dans le bassin houiller du nord de la France, la Société des Sciences de Lille avait proposé la question comme sujet de prix. De son côté un jeune ingénieur, alors attaché aux mines de Dourges, M. Ludovic Breton, frère du célèbre peintre de Courrières, s’était aussi convaincu par sa propre expérience que les végétaux affectent dans le terrain houiller une distri¬ bution très régulière. Il s’est donc trouvé amené à répondre à la question posée par la Société et il l’a fait d’une façon très-satisfaisante. Son mémoire est divisé en trois parties, dont la première est consacrée à des considérations générales sur le terrain houiller et à l’étude stratigraphique de la concession de Dourges. L’auteur débute par des considérations générales destinées à faire comprendre le sujet dont il va s’occuper. Nous lui laissons la parole: « Dans la couche de houille les végétaux qui Font formée sont non seulement décomposés de nature mais aussi de forme et il ne reste aucun vestige de végétal ; mais dans ce qu’on appelle le toit, c’est-à-dire dans la couche de schistes ou de grès qui recouvre immédiatement la veine, quand celle-ci est en position naturelle, on trouve de magnifiques empreintes ayant conservé les formes des végétaux qui ont crû immédiatement après la formation de la couche de char¬ bon et qui, s’ils ne sont pas ceux qui l’ont formée, ont du moins des rapports intimes avec eux et se développent dans les mêmes conditions climatériques. » « Les 80 couches de houille reconnues par les deux fosses — 49 — _ T *• de Dourges donnent 80 couches à empreintes qui forment les toits. Ces couches sont commç 80 pages d’un livre, où, sur chacune, est inscrite l’histoire des êtres végétaux qui ornaient la nature de cette belle période géologique et qui se succé¬ daient après chaque nouvelle formation d’une couche de charbon ; l’on n’a qu’à lire. Les lettres sont ici des arbres et des feuilles à l’état de momies, conservant avec une pureté qu’un artiste ne saurait rendre, les moindres détails d’orga¬ nisation. Le tissu cellulaire peut être étudié tout aussi bien que sur une plante vivante et la photographie qui reproduirait des feuilles ne ferait pas mieux que ce qu’à fait la nature, » « Ces schistes si durs à travailler pour le percement des galeries étaient à cette époque à l’état de boue formée d’une argile noire à grains très fins qui se prêtait parfaitement pour modeler les végétaux dans leurs moindres détails ; la feuille nageait à la surface de l’eau, s’étalait, puis descendait lente¬ ment au fond du lac, ou bien févaporation de toute l’eau déposait naturellement la feuille ou l’arbre sur le fond vaseux; puis une nouvelle couche de boue argileuse amenée par les eaux enfermait pour des siècles ce témoin de la nature de cette époque, d « Ainsi donc à une époque très-reculée et pendant des milliers d’années, des arbres grandioses et des plantes maré¬ cageuses ont crû à Hénin-Liétard et ont formé le charbon que l’on retire aujourd’hui des entrailles de la terre. Et ce qu’il y a de plus surprenant, c’est qu'il soit possible de venir donner la suite des arbres qui se sont succédé sur cet ancien sol et dont nous retrouvons aujourd'hui les cadavres avec autant de certitude que le cultivateur qui inscrirait sur un livre ce que chaque année il a semé dans son champ. » M. Breton admet que l’atmosphère était primitivement chargée d’une quantité considérable d’acide carbonique et que la luxuriante végétation de l’époque houillère fut destinée dans les vues du Créateur à rendre notre planète habitable pour les animaux supérieurs. Quoique cette théorie se soit introduite dans la science sous le patronage de savants illustres, nous ne pouvons — 50 l’adopter. L’époque houillère ne marque pas une délimitation tranchée entre les animaux imparfaits et les animaux plus élevés en organisation. Pendant cette époque, comme avant, on trouve des animaux terrestres , des insectes , qui certes n’eussent pu vivre dans une atmosphère fortement chargée d’acide carbonique. Mais, dira-t-on, quelle est alors l’origine du carbone que Pon trouve aujourd’hui dans le charbon de terre ? Pendant toute la durée de la période houillère , il y eut de très nombreux épanchements porphyriques qui furent accompagnés de dé¬ gagement d’acide carbonique comme les éruptions volca¬ niques actuelles ; le carbone était donc restitué à l’atmos¬ phère à mesure que les végétaux l’appauvrissait. Nous ne partageons pas non plus les vues de l’auteur lors¬ qu’il attribue au soulèvement du terrain dévonien de Fébvin, Pernes, etc., le redressement des couches houillères. Nous admettons que cette chaîne de terrain dévonien parfaitement parallèle à la limite sud du bassin houiller constituait déjà à l’époque carbonifère une colline élevée séparant le bassin du nord où se développaient les richesses houillères que nous connaissons d’un bassin méridional encore inexploré. Lors des dislocations qui ont redressé les couches pri¬ maires de notre pays, cette chaîne dévonienne a été refoulée latéralement vers le nord ; le bord méridional du bassin houiller entraîné dans ce mouvement s’est relevé et replié sur la partie septentrionale. M. Breton a parfaitement mis en lumière le renversement du sud du bassin houiller. Il a in¬ diqué en détail les failles ou cassures qui sont résultées de ces dislocations et qui ont une si grande importance dans les tra¬ vaux d’exploitation. En un mot, il a fait une excellente étude stratigraphique de la concession houillère de Dourges, et l’a complétée par de nombreuses coupes. Il distingue trois faisceaux de houille séparés par des failles. Le premier faisceau, qui comprend les veines du sud, fournit de la houille très-grasse spécialement employée à la fabrication du gaz. Le second faisceau produit de la houille grasse recherchée par les forgerons. Enfin, le troisième fais- — 51 — ceau comprend les houilles moins grasses encore , qui con¬ viennent surtout au chauffage domestique et aux chaudières à vapeur. C’est un fait assez constant que cetfe diminution de la matière volatile contenue dans la houille à mesure que Y on passe des couches plus récentes aux couches plus anciennes, des veines méridionales aux veines septentrionales. Mais ce n’est point une règle sans exception. M. Breton en cite quel¬ ques-unes. Ainsi, certaines couches de la concession de Lens sont plus grasses à la fosse n° 4 qu’à la fosse n° 2. Le terrain houiller est formé de trois roches principales : grès, schistes et houille. Le grès ou cuerelle des mineurs forme une grande partie du terrain houiller. L’épaisseur des couches de grès subit des variations considérables quand on suit une môme couche dans une grande étendue. Le banc de grès le plus épais sans aucune trace de schiste a 22 mètres d’épaisseur. Presque toujours les couches de grès se sont déposées presqu’immédiatement après la formation d’une couche de charbon; elles forment môme quelquefois le toit de la veine; par contre , on n’a pas encore constaté le dépôt de charbon sur une couche de grès. On rencontre dans les grès des tiges et des troncs de plantes, mais non des feuilles ; au contraire, dans les schistes qui recouvrent immédiatement une couche de grès, les em¬ preintes y sont aussi abondantes que dans un toit de houille. Il faut admettre que ces plantes , qui ne pouvaient croître sur un sol de sable, y ont été amenées par les eaux. Les schistes sont d’autant plus noirs et plus riches en em¬ preintes végétales que l’on approche d’un toit de veine. Ce¬ pendant, les plus belles empreintes ne sont pas dans le banc de toit en contact avec la veine; elles se trouvent à 50 centi¬ mètres au dessus. La plupart des empreintes ont une position parallèle aux couches; elles sont alors aplaties et intercalées entre deux bancs. Quand elles occupent une position normale, les parties végétales conservent leur forme cylindrique. — 52 — Il y a dans les mines de Dourges 750 mètres de terrain houiller comprenant 80 couches de houille de toute épais¬ seur, depuis 1 centimètre jusqu’à lm,50. Une veine exploitable est souvent accompagnée à une faible distance , soit au toit , soit au mur d’une petite veinule de 1 à 20 centimètres et que l’on nomme voisin de la veine. Le plus souvent ce voisin reste à la même distance de la veine sur de grandes étendues., parfois aussi il s’en rapproche. La seconde partie du Mémoire est consacrée à exposer les caractères des familles végétales de l’époque houillère. Nous ne résumerons pas cette étude que nos lecteurs trouveront dans un volume précédent (1). M. Breton remarque avec beaucoup de raison et comme l’ont déjà fait plusieurs auteurs, que les Sligmaria ne sont pas toujours des racines de Sigillaria , car on les trouve dans des couches qui n’offrent aucune trace de Sigillaria ; mais il a tort de les considérer comme des végétaux aquatiques. Il nous semble maintenant démontré par les travaux de MM. Binney, Geinitz, Brown, Gœppert, que ce sont des racines de diverses plantes appartenant à la famille des lycopodiacées, telles que les Sigillaria et les Lepidodendron. La troisième partie du Mémoire comprend la description de chaque veine de houille et l’indication des plantes qu’on y rencontre. Elle n’est pas susceptible d’analyse. Nous nous bornerons à donner la liste de ces végétaux, en indiquant par les signes G., g., dg., s’ils ont été trouvés dans les faisceaux de charbon très gras, gras ou demi-gras. M. Breton a désigné par des lettres les espèces qui lui paraissaient nouvelles. FOUGÈRES. Sphenopteris arlemisiœ folia dg. Pleris aquilina g. dg. delicalula dg. Dournaisn g. nervosa dg. pliimosa dg. acutifolia g. irregularis G. dg. mïcrophylla dg tenuifolia dg. tridactylites dg. tri fo liai a dg. (1) Bulletin sc. hist. et litt., IV, p. 66. New opter is gigantea G. dg. heterophylla dg. microphylla «ig. Cyclopteris trichomanoides dg. Pachypterus dg. LlCOIM)l)llCËE§. Lcpidodendron aculeatum G. Sigillaria elliptica G. inter media G. mamillaris G. obliqua G. rugosa g. dg. E. . . . g. F. . . . dg. 53 — Sigillaria G. . . . dg. //.... dg. EQUISELACÉES Calamites Cistii g. dubius dg. Suckowii G. A . . • * g. Aster ophy Hiles 1 dg. Sphenophynum J dg. K . G. dg Annularia L dg. M dg. N dg. Picnophyllum G. Comme le fait observer Fauteur, on ne peut tirer de cette première liste aucune conclusion générale , il faut attendre que les travaux de ce genre se multiplient. Puisse M. Breton trouver de nombreux imitateurs parmi les jeunes ingénieurs attachés aux mines du nord de la France. En leur montrant la voie, il aura rendu un grand service à la science et à l’in¬ dustrie. J. G. SOCIÉTÉ D’ÉMULATION DE CAMBRAI. Mémoires, t. xxxi, 2e partie, 1872. En tête du dernier volume publié par la Société d’émula¬ tion de Cambrai, se trouvent le discours de M. Wilbert, pré¬ sident, et le rapport de M. Durieux, secrétaire-général de la Société, au sujet du concours de moralité. Ces documents et la liste des récompenses qui les accompagne offrent une occasion de signaler ce qu’il y a d’utile et de beau dans l’al¬ liance heureuse de la bienfaisance à la science et à l’érudi¬ tion. A l’appui de cette pensée , nous nous permettrons de rappeler, avecM. le secrétaire-général de la Société de Cam¬ brai, les lignes écrites en 1868 par le savant M. Bellaguet dans la Revue des sociétés savantes : a Les qualités du cœur » ne sont pas inférieures à celles de l’esprit, et une compagnie » littéraire ne déroge pas en décernant une récompense aux — 54 » bons ouvrages comme aux bons esprits. » C’est, d’ail¬ leurs, l’un des moyens les plus certains de rendre populaires les sociétés savantes et de donner un auditoire nombreux à leurs séances publiques de chaque année. La Société de Cambrai ne se contente pas d’encourager la vertu et l’amour du travail et de la famille ; elle a publié plusieurs importants travaux d’histoire et d’archéologie. Nous trouvons dans ses mémoires les noms d’auteurs déjà cités dans nos comptes-rendus : M. Durieux , qui a publié une r f Etude sur les armoiries de la ville de Cambrai, une note détaillée sur des sépultures gallo-romaines découvertes à Beauvois, et une remarquable description des lampadaires votifs présentés par souscription à la métropole de Cambrai pour remercier Notre-Dame de Grâce d’avoir défendu de l’invasion prussienne la cité dont elle est la patronne ; M. C. A. Lefebvre, qui a fait connaître, pour l’histoire des arts dans la vie privée , l'Inventaire de la maison d'un bourgeois au XVB siècle ; M. J. Gosselet, membre corres¬ pondant, qui a continué son importante étude sur la constitution géologique du Cambrésis; M. Bruyelle , qui a reproduit les Statuts de l'hôpital Saint-Julien de Cambrai et qui a continué son Bulletin archéologique ; M. Wilbert qui , sous le titre les Etats du Cambrésis , a fait paraître un nou¬ veau chapitre de son histoire de Cambrai. A ces travaux , nous devons ajouter la description d’une intéressante médaille de Notre-Dame de Grâce, par M. Ch. Roth, et la Notice histo¬ rique sur Walincoart, publiée par M. J. -B. Blin. Le travail auquel M Lefebvre a donné pour titre : Bour¬ geoisie cambrésienne au XVIe siècle, échappe à l’analyse. L’auteur a extrait d’une sorte d’inventaire après décès de 1521-1522, le détail de tous les meubles, ustensiles et objets divers que possédait à cette époque un bourgeois de Cambrai, en faisant connaître les divers appartements de la maison qui les contenait. Il faut remercier l’auteur d’avoir reproduit in extenso le passage relatif au contenu d’un coffret-écrin , que nous empruntons à son travail : - 55 — « Ung baudret d’or retraict doublé de rouge velours, le » bloucque et morgeant ? (aiguillon) doré ouvrage de Venise à jour. — Une faune (faille) de soye rouge ferré y> de ung baudre d’or. — Deux agrappins d’or émailliés por- » tant une pensée. — Ung petit dent de loup d’argent portant i> 2 cloquettes. — Deux agrappins d’argent de petite sorte. y> — Ung chapelet de corail à six témoings dorés et cinq y> agnus Dei. — Ung chapelet de blanc ambre de moyenne » sorte. — Une bourse de noir velours à chincq poirettes » dorrés. — Ung anneau d’or portant une cornaline. — Un » scel d’argent. — Une corroyo de dessoubs de soie, le tissu j> à bloucques senn (?) d’argent doré portant 2 clous. — Une >• manchetie de gris Damas bordé de rouge velours. » Il eut été à désirer que M. Lefebvre multipliât les citations, ou même , ce qui eut été préférable , publiât in extenso le texte de l’inventaire. On ne peut adresser le même reproche à M. Bruyelle, qui a reproduit in extenso les anciens statuts donnés en 1531 à l’hôpital Saint-Julien de Cambrai par l’évêque Robert de Croy. Les travaux antérieurement publiés par M. Bruyelle lui- même et par M. Wilbert dispensaient l’auteur d’accompagner d’une notice historique le document qu’il a publié. Le même membre de la Société d’émulation n’a pas négligé de conti¬ nuer le Bulletin archéologique de V arrondissement de Cam¬ brai , dans lequel il a rappelé tous les faits intéressant l’ar¬ chéologie et les arts qui se sont produits dans l’arrondisse¬ ment de 1869 à 1873. La Notice historique sur Walincourt, publiée par M. Blin, est intéressante et pleine de faits ; l’auteur a dû se livrer pour l’écrire à un long et glorieux travail. Il néglige trop souvent d’indiquer les sources. Avant de terminer ce compte-rendu, nous attirerons l'at¬ tention de nos lecteurs sur le mémoire de M. Wilbert qui a pour titre les Etats du Cambrésis. Il suffit de lire le sommaire placé en tête de ce travail pour comprendre toute l’étendue et toute l’importance de la question étudiée par M. le prési- — 56 — dent delà Société de Cambrai; nous sommes d’avis qu’il ne sera possible de la résoudre complètement qu’après le clas¬ sement définitif des archives des Etats de Cambrai conservées dans le dépôt départemental du Nord. M. Wilbert a dépouillé tous les documents qui se trouvent à Cambrai ; il y a trouvé des renseignements curieux et importants qui jettent du jour sur un côté peu connu de l’histoire politique et administra¬ tive du nord de la France. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE. Travaux courants. M. Kuhlmann fait connaître une série d’expériences qu’il a faites en vue de péroxider le protoxide hydracé de manganèse extrait par la chaux du résidu de la fabrication du chlore. Après avoir signalé les procédés déjà en usage, M. Kuhlmann a cherché à augmenter la propriété oxidante de l’air en char¬ geant cet air d’ozone par son contact avec de l’essence de térébenthine ou du phosphore, ou enfin par un courant électrique. Il a reconnu que, dans celle circonstance, l’action oxidante de l’air n’était pas considérablement augmentée et que le dernier procédé était d’une application fort coûteuse. L’auteur s’est adressé ensuite à faction oidante de l'acide hypoazotique , qui est si efficacement mis à profit dans la fabrication de l’acide sulfurique , et il est arrivé à des résultats plus satisfaisants. Il a démontré par expérience que par le contact de l’acide hypoazotique ou du deutoxide d’azote avec le protoxide de manganèse, ces composés nitreux ne sont pas ramenés à l’état de protoxide ou d’azote. En répétant ses expériences sur un mélange d’acide sulfureux et de deutoxide d’azote , il a constaté ce fait important qu’à une température élevée une partie du deutoxide d’azote était transformée en azote. Ce résultat se produit déjà, mais en faible proportion, à la température ordinaire. — 57 - Ces derniers résultats doivent faire repousser, dans la fabrication de Tacide sulfurique, tout procédé où les vapeurs nitreuses sont mises en contact avec le gaz sulfureux près du point de sa production où la chaleur est fort élevée. M. Yan Hende lit ffn second supplément à la Numismatique Lilloise, accompagné de 5 planches. Il commence par une des¬ cription des méreaux capitulaires de la collégiale Saint-Pierre et de pièces distribuées aux pauvres dans les paroisses de la ville en vertu de fondations charitables agréées par le Magis¬ trat. Un exposé succinct de l’histoire de la bourse commune des pauvres explique l’attribution de quelques méreaux par¬ ticuliers à l’institution charitable qui, durant plus de deux siècles, a centralisé la plupart des secours accordés aux indi¬ gents. Plusieurs médailles de pèlerinages inédites , des prin¬ cipaux sanctuaires de la Vierge, dans la ville et les environs, terminent cette première communication sur ce que l’auteur appelle la numismatique populaire de Lille. Noie sur remploi de la lumière monochromatique produite par les sels de soude, par M. D'Henry, chimiste aux usines de Steene. — Tous les chimistes savent qu’il est à peu près im¬ possible de faire un essai alcalimétrique exact, à la lumière des lampes ou du gaz, à l’aide de la teinture de tournesol. En effet, cette teinture, rouge oa bleue à la lumière du jour, paraît toujours plus ou moins rouge à la lumière ordinaire des lampes, et le virement de couleur est alors difficile à saisir. Dans les fabriques de sucre , on emploie fréquemment la teinture de tournesol acidifiée pour déterminer l'alcalinité des jus et régler le travail. Comme c’est pendant l’automne et l’hiver que la fabrication a lieu , c’est le plus souvent la nuit que les essais devraient être faits. M. D’Henry propose d’opérer dans une chambre obscure, éclairée par la lumière monochromatique produite par un bec à gaz Bunsen, à flamme non lumineuse, dans lequel plon¬ geait un fil de platine humecté d’une pâte formée de sel marin pilé et d’eau. — 58 — A la lumière orangée jaune intense ainsi obtenue, la tein¬ ture rouge de tournesol paraît incolore comme de l’eau, tandis que la teinture bleue semble noire et opaque comme de l’encre. On peut par le même moyen déterminer l’alcalinité des sirops à 25° Baumé, qui, surtout à la fin de la fabrication, sont très-colorés. Un appareil à flamme monochromatique a été installé à l’usine de Steene et a donné les meilleurs résultats. SOCIÉTÉ LINNÉENNE DU NORD DE LA FRANCE. Le 12 novembre 1865, une société d’histoire naturelle se fondait sous ce titre à Amiens, dans le but de faire connaître les recherches naturelles du pays. En 1867 elle publiait une fascicule de son premier volume de mémoires, qu’elle com¬ plétait en 1869. Le second volume vient de nous parvenir (1872). C’est avec un certain étonnement que l’on constate, en les parcourant , que la Société Linnéenne du Nord de la France s’occupe fort peu de l’histoire naturelle de notre région. On peut certes trouver quelqu’intérêt aux mémoires de M. Cotty sur la faune de l’Algérie, sur le Musée et le Jardin botanique de Tours ; mais pour la Société Linnéenne du Nord de la France ce ne devraient être que des hors-d’œuvres. On ne peut en dire autant des mémoires d’histoire natu¬ relle générale ; ils sont partout à leur place. La clef dichoto¬ mique des mousses d'après Mérat , par M. Copineau, peut rendre des services aux personnes qui débutent dans l’étude de ces cryptogames. La monographie du genre Anthophora, par M. le docteur Dours, est un travail sérieux ; tout le monde lira avec plaisir l’essai historique de M. Garnier, intitulé : les insectes dans l’antiquité et au moyen-âge . Le savant érudit parcourt tous les auteurs anciens et du moyen- âge et nous fait connaître ce qu’ils ont écrit sur les insectes. — 59 — Enfin les amateurs d’aquarium trouveront dans une note de M. Lefebvre une foule de renseignements &ur la manière de construire et de peupler les aquariums d’eau douce. Pour quiconque aime la nature , rien n’est plus intéressant qu’un aquarium, rien de plus propre à développer chez les enfants le goût de l’histoire naturelle. C’est tout un monde qui se découvre à nous avec ses mœurs, ses combats, ses malices, ses amours. Les travaux d’histoire naturelle régionale sont peu nom¬ breux. M. le docteur Dours a fait l’histoire du Cephus pygmeus, insecte voisin des guêpes qui, à l’état de larve, se loge dans le chaume du blé, contre la racine et flétrit la plante avant la maturation. M. de Mercey a fait connaître un affleurement de la craie à Belemnites, à Dreuil-Hamel. M. le docteur Richer a indiqué les améliorations qu’il avait appor¬ tées au Jardin des plantes d’Amiens. Il a présenté quelques considérations sur les Rideaux. On désigne sons ce nom des sortes d’escaliers, de terrasses étagées que l’on voit sur le flanc des coteaux. M. Ruteux les attribue au retrait successif des eaux qui remplissaient la vallée à l’époque diluvienne. M. de Mercey, nous dit M. Dours, les considère de préférence comme des dépôts de boues glacières. Quant ô M. Dours, il attribue à la culture la formation des Rideaux. Nous sommes d’accord avec lui , tout en reconnaissant dans certains cas l’existence de terrasses alluviales. L’action de la charrue a pour effet de niveler le sol de chaque parcelle en faisant des¬ cendre la terre meuble des parties les plus élevées vers les parties les plus basses. La Société Linnéenne a parfaitement senti d’elle-même l’objection que nous faisions en commençant cet article ; elle a compris que ses Mémoires ne remplissaient pas le but qu’elle s’était proposé et ne répondait pas à l’esprit de pro¬ pagande qui l’anime. Elle vient donc de créer un Bulletin mensuel destiné à faire connaître les nouvelles, les commu¬ nications intéressant l’histoire naturelle, le compte-rendu de ses excursions, etc. Nous pensons que le Bulletin nuira aux — 60 - Mémoires; mais loin d’y voir une objection, nous y applau¬ dissons. Ce sera un recueil d’observations quotidiennes , où chacun pourra prendre sa part. Bien des naturalistes qui ne se sentent pas l’inspiration nécessaire pour faire un long mémoire, apporteront leur modeste, mais précieuse collabo¬ ration au nouveau Bulletin. Il débute par un travail géologique de M. de Mercey, inti¬ tulé : Géologie résumée du canton d'Amiens. Les deux pre¬ miers articles, les seuls parus, sont consacrés à la craie ; une note de M. Buteux fait connaître que l’on a trouvé à Étalon un fémur d’éléphant dans du sable tertiaire (sables d’Ostri- court). Il suppose, en toute raison, que le sable était remanié. Il y a une description topographique de la vallée de la Bresle, par M. Girard ; une dissertation semi-poétique sur les instincts des plantes, par le docteur Richer ; un procédé pour conserver sur papier gommé les empreintes colorées des ailes de papillon, par M. Carpentier; un rapport sur l’installation d’une collection d’histoire naturelle au Musée Napoléon, à Amiens. Les Bulletins se terminent par un article bibliographique du président de la Société , M. Garnier ; une chronique due au soin de M. Réné Yion, rédacteur en chef, et une petite correspondance. Sous ce titre on a réuni une série de nouvelles, de questions, de réponses qui mettent les abonnés en rapport avec la Société. CHRONIQUE. Février. Météorologie. 1873 année moyenne. Température atmosphér. moyenne. 1° 59 3? 05 — moy. des maxima. 3? 56 — — des minima. — 0? 37 — exlr. maxima, le 26. 11? 8 — — minima, le 2 .—5? 00 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 761™m555 760?)m379 — — extr. max. le 18. 779n?m48 — — — min. le 26. 738™m 01, minuit Tension moy. de la vap. atmosph. 4“m48 4m™88 Humidité relative moyenne %• . 87.2 83.93 Épaisseur de la couche de pluie. . 48“m61 43m“07 — — d’eau évap. 13“m96 20m“82 — 61 — Le mois de février fut froid et humide; il y eut 16 jours de gelée et 21 jours de pluie ou de neige. Les 48r?m61 d’eau météorique comprennent 30™m90 d’eau de neige et 17“m62 d’eau de pluie. Les vents régnants soufflèrent avec force du N.E. et du N.O.;'les nuages des différentes couches avaient la même di¬ rection. Les couches d'air en contact avec le sol furent très-hu¬ mides ; les brouillards presque permanents exercèrent une influence défavorable à l’évaporation, qui fut moindre qu’en année moyenne. Cette humidité n’exista pas dans les couches élevées de l’at¬ mosphère ; car , lorsque les éclaircies des nuages permet¬ taient d’apercevoir la région des cirri, on n’en remarquait aucun. Aussi, malgré la fréquence de la neige et de la pluie, la quantité totale d’eau météorique ne fut pas considérable. La grande hauteur du baromètre était en parfaite harmonie avec cette constitution hygrométrique. La neige (12".,m4, épaisseur 8 centim.) et la pluie (10t68) des 24, 25 et 26 furent suivies, le 26, d’une grande élévation de la température, vent S.O. , qui amena une fonte rapide, cause de nouvelles inondations. Pendant ces deux jours, l’atmosphère fut très-électrique et le tonnerre se fît plusieurs fois entendre. La différence entre les oscillations extrêmes de la colonne barométrique fut de 41™m47. Les travaux agricoles furent enrayés par la gelée et l’hu¬ midité. V. MEUREIN. Fouilles aux Kolres-RIottfes. — Il existe sur les Noires-Mottes une formation continue de terre de bruyère qui m’a été d’un grand secours pour établir (avec approxi¬ mation , bien entendu) , la chronométrie (?) des couches que j’ai traversées , et dans lesquelles j’ai trouvé les vestiges de l’industrie humaine. Cette formation est relativement rapide. Elle est dûe , en effet , non-seulement aux débris des bruyères dont les feuilles tombent annuellement, mais en- — 62 — core à une certaine quantité de grains de sable que les vents y apportent et que les bruyères retiennent. 1° J’ai trouvé à 15 centimètres (14 à 15), à différentes places , mais à une profondeur toujours identique, des débris de l’époque romaine, poteries rouges, plates et portant l’es¬ tampille du potier (MARIANVS, MARTIALISF). Cette dernière estampille se rencontre sur plusieurs poteries romaines qui ont été trouvées en divers endroits dans le Calaisis , et qui sont déposées au musée de Calais. 2° Sous les poteries romaines, il y a encore 41 centimètres de terre de bruyère formée naturellement et identique à celle qui se trouve entre les poteries et le sol moderne. Au dessous de ces 41 centimètres , on trouve le sommet du tumulus de l’époque de la pierre polie, c’est-à-dire le sol de cette époque. Ce niveau, de l’époque de la pierre polie , est donc séparé du niveau moderne par 41+14=55 centimètres de terre de bruyère formée par couches successives et annuelles , à la manière des tourbières. Ne pouvons-nous pas en tirer une conclusion ? En mettant l’époque romaine à 2,000 ans, et en supposant, ce qu’il est permis de faire, que la formation de terre de bruyère a été régulière, nous basant ensuite sur ce qu’il a fallu 2,000 ans pour en former une couche de 14 centimètres, nous supposerons qu’il a fallu 5,797 ans pour former la couche qui sépare l’époque romaine de l’époque de la pierre polie, et qui a 41 centimètres d’épaisseur. Cela mettrait donc approximativement l’époque de la pierre polie à 5,797+2,000, c’est-à-dire à 7 ou 8,000 ans. Cela ne concorde-t-il pas avec l’opinion émise par plusieurs auteurs et d’après des observations faites en plusieurs pays, en Dane¬ mark entr’autres? J’ai cru trouver dans cette formation de terre de bruyère une échelle chronologique qu’on n’a pas encore utilisée. Je la crois plus solide que celle que l’on base sur d’autres for¬ mations sur les tourbières par exemple. Celle-ci dépend de causes, si multiples, qu’elle doit être très-variable d’année en année , et par conséquent bien sujette à erreur. Dans notre formation de terre de bruyère , au contraire , tout doit faire présumer la régularité. La coupe en est homo¬ gène en toutes ses parties , excepté à l’époque romaine , où on voit qu’il y a eu piétinement ; des couches s’y sont suc- — 63 cédées régulièrement , sans interruption , et elles sont d’une minceur extrême, qui rappelle les descriptions faites des cou¬ ches annuelles du limon déposé par le Nil. Après avoir retiré avec soin tous les matériaux qui de mains d’homme avaient été apportés pour former le tumulus, c’est- à-dire terre végétale (non de bruyère) , rognons de silex, etc. j’ai remarqué à la base une nouvelle couche de terre de bruyère formée naturellement et en place, mais fort peu épaisse : 5 à 6 centimètres. En dessous était une couche qua¬ ternaire de limon de 15 centimètres. Elle est identique à celle qui surmonte la falaise un peu plus haut, celle que l’on trouve au sommet des falaises de Châtillon, à Alprech, Equilien, etc. C’est à la base du limon que j’ai trouvé en place des silex taillés , silex qui n’ont aucun rapport avec ceux de l’époque de la pierre polie qui se rencontrent dans les environs. C’est là aussi que j’ai recueilli une coquille percée de Turitella sulcifera et deux ossements de renne parfaitement conservés. J’ajouterai enfin que vers le centre, mais toujours en des¬ sous de la couche de limon, il y avait les traces d’un foyer qui a dû être très-considérable On voyait une grande quan¬ tité de charbon , et l’argile tertiaire qui en formait la base était cuite à près de 70 à 75 centimètres de profondeur. Nous avons donc sur la grande Noire-Motte trois époques bien représentées : l’époque romaine, l’époque de la pierre polie et l’époque du renne. Lejeune. Les faits signalés par M Lejeune nous paraissent bien ob¬ servés el parfaitement établis, mais nous ne partageons pas son appréciation sur la valeur comme chronomètre d'une formation due à Pinlluence du vent. C’est, dans nos régions au moins, le plus variable, on peut même dire le plus capri¬ cieux, des phénomènes naturels, et rien ne prouve, qu’il y a quelques milliers d’années , il ne soufflât pas plus ou moins fort qu’à l’époque actuelle. De plus, si l’on suppose que la station romaine des Noires- Mottes prit fin lors de l’invasion franque (473), elle n’a qu’une antiquité de 1,400 ans. Une telle supposition servant de base au chronomètre de M. Lejeune rajeunirait l’âge de la pierre polie de 2,000 ans. On voit combien ces calculs laissent de place à l’incertitude.. J. G. Stratiotes aloi«ies. — Le Bulletin a donné l’année der~ nière une note intéressante sur une plante de la famille des Hydrocharidées , VElodea canadensis , observée pour la pre¬ mière fois dans le Nord. Je signalerai aujourd’hui, non plus l’apparition, mais la disparition des environs de Lille d’une autre plante de la même famille , le Stratiotes aloïdes qui y était très-abondante, il y a quelques années, et qu’on y cher¬ cherait en vain maintenant. Cette espèce est remarquable à plus d’un titre : par ses feuilles, dont l’aspect exotique rappelle les genres Bromelia , Agave et Aloe , par ses Heurs, toujours privées dans nos con¬ trées de l’organe femelle, et par conséquent toujours stériles, et par cette singularité qu’elle s’enfonce sous l’eau à l’ap¬ proche de l’hiver pour remonter à la surface au printemps , ne tenant plus à la vase que par l’extrémité de ses radicules. Elle est depuis longtemps très-commune aux environs de Gand; c’est de là que le botaniste lillois, F. -J. Lestiboudois en rapporta quelques pieds en 1799. Il lesjeta dans un fossé, à gauche de la route de Dunkerque, près du chemin du Sabot; l’espèce s’y multiplia beaucoup par scs stolons et cou¬ vrit toutes les eaux d’alentour; mais , à l’époque de l’agran¬ dissement de la ville, elle avait déjà beaucoup diminué; au¬ jourd’hui, les rues et les constructions ont envahi tout le quartier et desséché les quelques fossés qui subsistent encore; la plante a totalement disparu. Il y a sept à huit ans , on l’observait aussi dans un fossé formant la limite des glacis de la citadelle , vers le Grand- Tournant , mais elle n’a pu résister aux curages successifs. Ne serait-ce pas rendre hommage à la mémoire de l’esti¬ mable botaniste Lestiboudois que de réintroduire dans un des bassins de nos jardins publics la plante qu’il avait natu¬ ralisée à Lille? Je confie cette idée au directeur des planta¬ tions municipales. Il ne faudrait pas s’éloigner beaucoup pour se la procurer; elle n’a pas quitté l’Escaut, et elle abonde aux environs de Saint-Omer , dans les fossés d’un fort avancé , vers Arques , et dans toute la partie marécageuse qui s’étend vers Watten et Eperlecques. A. de N. Lille, imp. Six-Horemans. 73-798 5* Année. — N° 4. — Avril 1873. LES COMMANDERIES DU TEMPLE ET DE L’ORDRE DE MALTE DANS L’ARTOIS, LA FLANDRE WALLONNE ET LE HAINAUT (suite.) Commanderie de Valenciennes. Cette commanderie, une des dernières fondées par l’ordre de Malte, fut formée en 1777, par suite du démembrement de la commanderie du Piéton, dont on retrancha tous les membres qui se trouvaient dans le Hainaut français et le Cambrésis. Hôpital de Valenciennes. — La maison de Valenciennes , qui devint le chef-lieu de cette nouvelle commanderie, était connue sous le nom d’hôtel du Petit-Saint-Jean ; elle était située dans la rue de la Vieserie. La chapelle fut donnée en 1217 aux religieux de Saint-Jean-de-Jérusalem par Guillaume Rousseau, bourgeois de Valenciennes. Gérard , seigneur de Jauche, en 1231, et Nicolas, évêque de Cambrai, en 1159, lui donnèrent des témoignages de bienveillance et de générosité. Le commandeur avait toute justice et seigneurie dans son hôtel du Petit-Saint-Jean, qui était formé de trois corps de bâtiments. Le principal servait de logement au commandeur ou au receveur de la commanderie ; les deux autres étaient loués à des particuliers, a La chapelle du Petit-Saint-Jean, j> dit M. L. Devillers, était d’architecture romane : on en * voit un curieux dessin dans l’ouvrage de Leboucq... Au- » dessus de l’autel se trouvait un tableau représentant saint » Jean dans le désert ; et au-dessus d’une porte les armes * du commandeur Louvois et celles de l’ordre. Les offices ï religieux qu’on y célébrait consistaient en une messe quo- > tidienne, vêpres les dimanches et deux saluts par semaine. » Le revenu de l’hôpital était en 1783 de 1,230 livres, sans y comprendre le produit des dîmes des paroisses dont les cures étaient à la collation du commandeur. Beaulieu. — Cet ancien établissement de Templiers était situé dans la paroisse de Marly, sous les glacis de la ville de 66 — Valenciennes. Le domaine consistait en une grande ferme avec chapelle et 65 muids de terre arable ; cette maison jouissait aussi d’un droit de terrage sur Marly et de la sei¬ gneurie foncière de Beaurepaire située hors de la porte Montoise de Valenciennes. La commanderie avait toute justice seigneuriale dans son domaine de Beaulieu. En 1783, son revenu était de 2,940 livres en argent et de 365 muids de blé. Chiply. — La carte de Cassini indique clairement le siège de cette maison, qui était située au lieu appelé Y Hôpital, à une lieue au sud de Valenciennes, entre Maing et Famars. Gauthier, fils de Simon de Famars, fit en 1177 remise de tout son fief de Chiply entre les mains de Bauduin, comte de Hainaut, avec prière d’en investir incontinent la maison de l’hôpital de Jérusalem. Le revenu de cette maison s’élevait en 1783 à 1,500 francs en argent et 250 muids de blé. La maison de Chiply, qui était en très-mauvais état en 1661, fut reconstruite à l’exception de la chapelle qu’on ne releva point de ses ruines. Avesnes-le-Sec (1). — Cette ancienne maison du Temple n’était pas très-importante au moment où les Hospitaliers en prirent possession ; elle comprenait 65 muids et demi de terre. Elle posséda à A.vesnes-le-Sec et dans les villages cir- convoisins un certain nombre de cens et de revenus. Une partie de ces revenus était consacrée à desservir la chapelle où se disaient trois messes par semaine, aux aumônes et à l’entretien des édifices. Le commandeur avait toute justice et seigneurie dans sa terre et sur ses hommes. Incendiée et détruite vers le milieu du XVIIe siècle, la ferme fut rebâtie ainsi que la chapelle située au milieu de la cour. En 1757, la chapelle était abandonnée et ne servait plus au culte divin. Le revenu en 1783 était de 3,000 livres et de 200 muids de blé. La Flamengrie (2). — La cense de la commanderie , située (1) Avesnes-le-Sec , arr. de Valenciennes, Nord. (2) La Flamengrie , arr. d’Avesnes, Nord. —67 - au village de la Flamengrie, marque l’emplacement de cette maison, dont le revenu était en 1783 de 1,950 livres. Le Fresnoy (1). — Cette ancienne commanderie des Hospi¬ taliers était située dans la paroisse de Boussières, à deux lieues de Cambrai, sur la gauche de la route qui mène de cette ville au Câteau. Bernard d’Audencourt et ses beaux- frères, Gauthier, abbé de Saint-Aubert et Hugues d’Avesnes- lez-Gobert, lui avaient fait don de plusieurs propriétés. Aussi cette maison était assez riche ; elle possédait en 1783 un revenu de 2,200 livres et de 370 muids de blé. Le comman¬ deur avait toute justice et seigneurie dans son domaine et possédait quantité de censes à Boussières , au Fresnoy et lieux circonvoisins, ainsi que des droits de dîme et de terrage dont le produit montait en 1757 à 800 mencaudées de blé. La chapelle du Fresnoy était chargée de trois messes chaque semaine. Mais comme elle était très-défectueuse au siècle dernier et menaçait ruine, on la ferma et les messes furent O 7 déchargées par les RR. PP. Carmes dans leur église au Câteau- Cambrésis. Cambrai. — Le commandeur avait, au XIVe siècle, dans la ville de Cambrai, une maison où il retirait et mettait en sûreté ce qu’il avait de plus précieux. Cette maison n’est plus mentionnée dans les titres du XVe siècle. Écaelin (2). — Cette ancienne commanderie était située au village du même nom, entre la grande route d’Avesnes à Maubeuge et le chemin de Maubeuge à Landrecies. Les Hos¬ pitaliers y possédèrent un alleu dès 1167 ; il est fait mention de la commanderie dans plusieurs actes du XIIIe siècle. Le commandeur avait toute justice et seigneurie dans sa terre. Le revenu était en 1783 de 2,200 livres. Commanderies situées en d'autres provinces. — Plusieurs autres maisons situées dans l’Artois, la Flandre et le Cam- (1) Le Fresnoy, lieu dil de la commune de Boussières, arr. de Cambrai, Nord. (2) Ecuelin, arr. d’Avesnes, Nord. - 68 — brésis dépendaient de chefs-lieux établis en dehors de ces provinces. De la commanderie de Fieffes, dont le siège était en Picardie, dépendait la maison de ViUers-V Hôpital (t), que possédaient les Hospitaliers dès la seconde moitié du XIIe siècle. Les bâtiments étaient situés sur la place, près du presbytère. Le gardien avait seul en ces lieux les droits de haute et basse justice ; le revenu s’élevait en 1783 à 3,200 livres. La maison de Bois-Saint-Jean (2), ancienne commanderie des Hospitaliers, existait dès 1182 ; les libéralités de plusieurs seigneurs et des religieux de l’abbaye d’Auchy-aux-Moines Pavaient rendue importante. Son revenu s'élevait en 1787 à 3,000 livres. Elle avait sur le marché d 'Hesdin une maison de refuge qui fut aliénée ou donnée à rente perpétuelle en octobre 1335. La commanderie de Baisieux-sous-Laon avait parmi ses dépendances deux maisons situées dans des localités qui font aujourd'hui partie du département du Nord; celle de Toillon , située sur le territoire de Favril (3), entre ce village et le Sart, à peu de distance de la route de Landrecies à la Capelle, sur un affluent de la Sambre, dont le domaine formé de 181 arpents de terre et d’un bois rapportait 1,600 livres en 1793, et celle de Saint-Aubin (4), ancienne commanderie du Temple qui avait été fondée dès le commencement du XIIIe siècle, grâce aux libéralités des seigneurs d’Avesnes- sur-Helpe, dont la chapelle, dédiée à saint Jean-Baptiste, était desservie au siècle dernier par le curé de Saint-Aubin, qui venait y dire la messe une fois par semaine. Nous avons déjà parlé de la maison de Saint- Sanson, située à Douai, qui, après avoir dépendu de la commanderie de (1) Villers-l' Hôpital, arr. de Saint-Pol, Pas-de-Calais. (2) Aujourd’hui ferme Saint-Jean , commune de Wamin, Pas-de- Calais. (3) Favril, arr. d’Avesnes, Nord. (4) Saint- Aubin , arr. d’Avesnes, Nord. Hautavesnes, fut rattachée à celle de Laigneville (Oise). Parmi les intéressants détails qu’offrent les pages consacrées à cette maison se trouvent deux curieux documents dont l’un présente un état des reliques possédées par l’hôpital vers 1236, et l’autre les noms des portes, des rues et des places publiques de Douai en 1307. Nous ne pouvions mieux ter¬ miner cet article, pour faire comprendre l’intérêt que pré¬ sente le livre de M. Maunier. Cette analyse trop courte des chapitres consacrés aux pro¬ vinces du Nord de la France donnera une idée des recherches et du temps qu’a demandés l’exécution de cet ouvrage qui embrasse toutes les commanderies du Grand-Prieuré de France. L’esprit méthodique avec lequel il a été conçu et les tables des noms de lieu qui le terminent en rendent l’usage très-facile. L’auteur, en publiant ce volume , a rendu un im¬ portant service à la science historique. C. D. LA VILLE FRANCHE ET PRÉVÔTÉ D IIASPRES (suite). Dans les quatre derniers chapitres de leur travail, les auteurs s’occupent d’une question importante et curieuse, la coutume et les institutions communales dans la ville d’Haspres. La coutume d’Haspres, qui, selon nous, donnait déjà à celte localité des institutions communales, a été concédée vers 1176 par le comte de Hainaut Baudouin V ; vers 1184, ce prince y fit de légères modifications ; elle fut confirmée vers 1197 par Baudouin IX, comte de Flandre et de Hainaut. Bien que le texte latin de cette coutume ait été publié par Miræus, les auteurs ont eu l’excellente pensée de rééditer ce texte en mettant en regard une traduction en vieux français empruntée au cartulaire d’Haspres. Ils ont fait précéder cette publication d’une étude sur les principaux points de cette coutume, que nous analyserons ^our nos lecteurs. Le préambule de cette charte nous apprend qu’elle a été préparée par le commun accord des hommes de la ville, du comté et de l’église , et nous montre ainsi que dès le douzième siècle la commune existait à Haspres. Le premier point fixé c’est que cette ville relève de la juridiction de l’abbé de Saint-Vaast, qui jouissait des produits des fours et du moulin banale où chacun faisait moudre et cuire son blé, des tonlieux ou impôts correspondant aux octrois, du cens ou impôt foncier, des droits de marché et de divers autres revenus. Ces droits du seigneur étant ainsi nettement déter¬ minés, les habitants d’Haspres n’avaient plus à redouter l’établissement de taxes arbitraires ; les réglements de cette nature forment l’un des éléments des liber tés communales. Les pouvoirs dont jouissait l’abbé de Saint-Vaast étaient exercés par le prévôt de l’abbaye ; dans l’exercice de ses fonctions il était assisté par un maire, un doyen et des éche- vins , officiers de justice que sans doute il nommait lui- même. Dans beaucoup de communes, les échevins étaient nommés, non par la bourgeoisie, mais par le comte et le clergé. Le prévôt-le-comte, établi et nommé par le comte de Hainaut, semble avoir été chargé de mettre le prévôt de l’abbé et les échevins en demeure d’agir quand un délit se produisait et d’exercer dans les plaids les fonctions de partie publique ; sans doute, il faisait exécuter les jugements et per- cevaitles amendes. La villene devait au comte que deux rede¬ vances, une sorte d’impôt foncier dû pour chaque maison et une somme de soixante valenciennois payée chaque année au prévôt-le-comte. Chaque année aussi, il y avait trois assem¬ blées générales en la maison des hommes de la ville , dans lesquelles étaient sans doute jugées les affaires les plus im¬ portantes Valenciennes était le chef de sens d’Haspres, c’est- à-dire que s'il y avait une enquête à faire sur l’interprétation des coutumes , les échevins d’Haspres devaient porter cette affaire devant les échevins de Valenciennes. La charte con¬ tient ensuite quelques règles de procédure et détermine le chiffre des amendes pour coups et blessures : cette dernière question avait aussi une grande importance dans l’établisse¬ ment des institutions communales, de même que les obliga- — 71 — lions des habitants envers le comte , question traitée dans la dernière partie de la première charte. La seconde charte, concédée en 1184 par Baudouin de Mons, ne renferme que des règles concernant le criminel. Des souvenirs de la loi salique et des usages germains se remarquent dans cette coutume ; les auteurs de cet ouvrage insistent avec raison sur l’institution des apaiseurs, magistrats communaux chargés d’ empêcher les querelles des particuliers de dégénérer en procès et de créer ces haines de famille à famille, source do crimes et de meurtres. L’influence de l’évangile triomphait insensiblement du farouche caractère des barbares de la Germanie. Dans le cinquième chapitre qui traite du développement des institutions communales , les auteurs , sans doute en l’absence de documents anciens, sont forcés de recourir aux considérations historiques générales. Ils disent que les abbayes et les monastères virent décroître peu à peu leur puissance et que la commune s’organisa plus fortement : on pourrait contester la justesse de ces considérations. Dans nos contrées, les institutions communales ont été presque partout concédées par le comte ou le seigneur sans lutte, sans résistance , sans mauvais vouloir de sa part ; et les modifications que ces institutions ont subi depuis le treizième siècle jusqu’en 1789, sont le plus souvent sans importance ou même contraires à l’influence de l’échevinage. Les droits seigneuriaux, énumérés dans le sixième cha¬ pitre, étaient des formes sous lesquelles étaient payés à cette époque les impôts et le fermage d’aujourd’hui, en retour des concessions faites par les possesseurs du sol ; à Haspres les principaux étaient le pontenage, l’affouage, le cambrelage, le tuage et le quint-denier ou cinquième partie de l’héritage dans les successions collatérales. Cette analyse trop courte suffira pour faire comprendre à nos lecteurs l’intérêt de l’ouvrage que nous analysons et pour leur faire désirer la publication de la seconde partie , qui est promise par MM. Th. Louise et E. Auger.. , . C. D. 72 - LES SAVANTS GODEFROY, Mémoires d’une famille pendant les XVIe, XVII® et XVIIIe siècles. Sous ce titre , vient de paraître , à la librairie académique de Didier, un ouvrage intéressant pour le département du Nord, dont l’auteur, le marquis de Godefroy-Ménilglaise , ne fait connaître son nom que par une note modestement placée au verso du titre. Ce volume contient les mémoires d’une famille de savants ; il est sorti d’une noble et pieuse pensée : « La Providence, dit l’auteur, nous a placés dans un siècle > de bouleversements. S’il nous faut subir ce mouvement d irrésistible qui arrache les familles du sol où elles avaient > pris racine, faisons du moins comme certaines tribus : y> emportons avec nous les os de nos pères, c’est-à-dire ne y> nous séparons point de leurs souvenirs, de leurs exem- * pies, de leurs traditions ; n’ignorons pas comment ils ont » vécu, comment ils ont servi Dieu et leur pays, quel esprit > les anima, quelles œuvres ils ont laissées... Cette pensée d m’a préoccupé dans les loisirs du soir de ma vie : j’ai cru » remplir un devoir pieux, en même temps que je cédais à 3> un vif attrait, en coordonnant et étudiant tout ce que j’ai d pu trouver de documents sur mes ancêtres. Ils forment une » lignée non interrompue d’hommes graves, doctes et reli- d gieux, serviteurs constants et infatigables de leur patrie, 3) recueillant beaucoup d’honneur et peu de fortune dans 3) leur carrière modeste et dévouée, obtenant par leurs 3> labeurs et leur travail assidu un nom dans les sciences du s> droit et de l’histoire, nom consacré par tous les diction- » naires des hommes illustres et au Musée historique de » Versailles. 3> Comme famille, les Godefroy remontent à une lignée de noblesse fort ancienne qui descend de Symon Godefroy, né à Mons, seigneur de Sapigneulx, près Berry-au-Bac (Aisne), vers l’an 1320. Comme savants, ils forment une succession non interrompue qui a pour chef le célèbre Denis I Godefroy (Dionysius Gothofredus). C’est l’auteur du Corpus juris civilis — 73 — et du Praxis civilis , vastes compilations accompagnées de notes et de remarques, indispensables à quiconque étudie le droit romain, de Commentaires sur les coutumes du Berry, de l'Orléanais et de la Touraine, et de plusieurs grands travaux relatifs aux littératures de l’antiquité , parmi lesquels nous citerons une édition des Grammairiens latins accompagnée de notes et éclaircissements, les œuvres de Cicéron et les œuvres de Sénèque. Son fils Jacques laisse aussi des travaux de la plus haute importance sur le droit romain ; son autre fils Théodore es nommé historiographe de France et chargé d’affaires à Munster Ce dernier eut pour fils aîné Denis II Godefroy, par lequel l’histoire de la famille se rattache à notre contrée. Louis XIV ayant rendu la Flandre à la couronne de France, voulut souder définitivement cette importante province au royaume, en tirer administrativement tout le parti possible et préparer, en la basant sur le droit et sur des titres, la réunion des autres provinces des Pays-Bas. Pour arriver à ce résultat, il était nécessaire de connaître à fond les archives de la Chambre des Comptes de Lille et de placer à la tête de ce riche dépôt un homme d’élite, aussi savant dans la politique et la diplomatie que dans l’histoire. Cette importante et diffi¬ cile mission fut confiée en septembre 1 6G8 à Denis II Godefroy. Le savant historiographe de France fut émerveillé à la vue des richesses de la Chambre des Comptes, qu’il trouvait plus nombreuses que celles accumulées au Trésor des Chartes du Roi et à la Chambre des Comptes de Paris. Le travail auquel il se livra dans ce dépôt fut immense. Les inventaires, encore aujourd’hui conservés dans les archives du département du Nord, prouvent qu’il fit dresser un état général de tous les documents, en respectant avec raison l’ordre établi depuis 1385 par les gardes des archives, ses prédécesseurs. Cet état général fut transmis à Colbert, qui voulut aussi avoir sous la main un grand nombre de titres soit en original, soit en copie. L’exécution de ces dernières instructions du Ministre produisit la grande collection, encore aujourd’hui conservée — 74 — à la Bibliothèque nationale, qui porte le nom des 182 Colbert , le recueil le plus important de cette bibliothèque pour la Flandre et la Belgique. Il a été formé par les soins et le travail de Denis Godefroy. L’érudition , le talent et le dévouement au pays étant devenus des qualités en quelque sorte héréditaires dans cette famille, les Godefroy se succédèrent de père en fils, jusqu’à la révolution, dans les fonctions de garde des archives et directeur de la Chambre des Comptes. En 1681, elles sont confiées à Jean Godefroy, qui acquiert la charge de Procureur du Roi au bureau des Finances, fait l’inventaire des archives de Mons et de Namur et représente le Roi dans tes conférences pour le réglement des limites : ses principaux travaux sont les Lettres du Roi Louis Xll et du cardinal G. d’Amboise, la Satyre Ménippée, les Mémoires de Marguerite de Valois , les Mémoires pour servir à V histoire de France et le Mémoire sur l’Intendance de Flandre. La survivance de la direction de la Chambre des Comptes de Lille fut octroyée le 14 octobre 1726 à Jean-Baptiste-Achilie Godefroy de Maillart, qui succéda à son père cinq ans plus tard; d’importants travaux de classement et d’inventaire, dont il n’est point parlé dans les Savants Godefroy, furent opérés sous la direction de J.-B.-A. Godefroy dans les archives de la Chambre des Comptes. Son fils Denis- Joseph Godefroy lui succéda en 1760, bien qu’il ne lut âgé que de vingt ans. Homme du monde et amateur de livres, il entretint des relations avec les familles nobles de Lille auxquelles les Godefroy étaient alliés et avec les érudits et les bibliographes ; en même temps il prit goût à l’accom¬ plissement des devoirs qui lui avaient été confiés. « Vivant » en tête à tête avec les parchemins témoins des siècles » écoulés, il sut y découvrir une source de jouissances. La d rencontre d’un vieux document lui causait une vive satis- » faction, satisfaction non stérile, car il aimait à en exprimer * les conséquences au point de vue de l’histoire. » Il fut l’un des membres les plus actifs du Comité des Chartes, qui se proposait de publier les titres de quelque importance seratta- - 75 — chant à l’histoire de France depuis les origines jusqu'enl 450. Dès janvier 1682, il commença la publication de Y Invent aire analytique et chronologique des archives de la Chambre des Comptes de Lille , « dans lequel les actes, comme le dit M. Le » Glay, sont savamment et nettement analysés, selon leur ï> ordre chronologique, depuis l’an 706 jusqu’en 1307. Ce » travail de savoir et de patience a reçu de justes éloges de » la part des hommes les plus capables de l’apprécier. » Secousse, de Laurière, Moreau, Bréquigny, dom Clément, » le ministre Bertin ont adressé à l’auteur des félicitations » unanimes. » La révolution interrompit ce grand ouvrage : Denis-Joseph Godefroy fut forcé d’émigrer en 1791. Rentré en France en 1801 , il accepta l’emploi de directeur de la bibliothèque de Lille ; et plus tard, membre de la commission des hospices, il consacra trois heures au moins de chaque jour, durant les seize dernières années de sa vie, à rédiger l’inventaire des archives hospitalières de Lille. Son fils, M. le marquis de Godefroy-Ménilglaise, a prouvé qu’il est de la famille des savants Godefroy par les importants travaux qu’il a publiés et aussi par l’ouvrage que nous venons d’analyser. Nous le remercions d’avoir écrit et fait paraître les annales de sa famille, avec une élégante simplicité et une sincérité souvent trop modeste, qui lui a permis d’arborer le mot de Montaigne : Cecy est une œuvre de bonne foy. C. D ESQUISSE GÉOLOGIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD. Terrain triasique . Le terrain triasique n’est représenté dans notre région que par quelques lambeaux de roches rouges , grès poudingue ; on n’y a pas encore trouvé de fossiles. A l’époque triasique, la mer recouvrait l’Allemagne et la Lorraine; mais elle ne s’étendait probablement pas îi PO. d’une ligne tirée de Luxembourg à Autun. Dans quelles con¬ ditions était alors le bassin de Paris? Etait-ce une mer com¬ muniquant avec celle de l’Allemagne ? Etait-ce un lac salé ou — 76 — une portion de continent? Ce sont autant de questions dont la solution, ensevelie sous une épaisse couche de dépôts plus récents, ne semble pas devoir être jamais élucidée. Sur le bord de ce bassin, le long du rivage de l’Ardenne et du plateau central , on trouve encore des dépôls triasiques, mais ils ne contiennent plus de fossiles marins , et on peut supposer qu’ils ont été formés dans des lacs salés plus ou moins en relation avec l’Océan. Quelques-uns même sont peut-être simplement des alluvions déposées sous l’influence de puis¬ sants cours d’eau. Sur le flanc sud de l’Ardenne , à l’O. de Luxembourg , le terrain triasique forme entre les terrains primaires et le ter¬ rain jurassique une étroite bande composée de poudingues, dont les cailloux viennent de l’Ardenne , et de psammites rougeâtres accompagnés de marnes bigarrées et de quelques bancs de calcaire dolomitique. Le muschelkalk, ou assise moyenne du terrain triasique de Lorraine , n’y existe pas ; aussi peut-on ranger ces cou¬ ches , soit dans le grès bigarré (assise inférieure) , soit dans le keuper (assise supérieure), soit y voir les représentants de ces deux assises. A partir de Villers-sur-Semoy, le terrain triasique est caché par le terrain jurassique, qui le dépasse en s’élevant davan¬ tage sur le rivage ardennais. M Delanoue (1) a rapporté au terrain triasique quelques dépôts rouges qui ont été rencontrés dans plusieurs sondages du Pas-de-Calais, et qui affleurent à Lilette, Dennbrœucq, Febvin , Maltiance , Flechin , Audinctun , etc. Ils reposent en bancs faiblement inclinés sur les couches redressées du ter- i rain dévonien. C’est tantôt un poudingue rougeâtre à galets calcaires qui proviennent du calcaire carbonifère; il a été ex¬ ploité comme marbre à Audunctun; tantôt des grès jaunes ou rouges et des argiles bigarrées. M. Delanoue signale aussi comme preuve du voisinage du terrain triasique l’invasion d’eau salée qui en 1806 a noyé un (1) Bull. Soc. Géologique de France, 2® s. X, p. 235. — 77 - puits percé près d’Arras. Mais la présence d’eaux salées dans les terrains primaires est un fait fréquent qui se rencontre dans bien des cas uù on ne peut pas soupçonner la présence du trias. Aux environs de Stavelot et de Malmédy (Prusse) , il y a aussi trois petits lambeaux de terrain triasique alignés dans une même direction. Ce sont encore des poudingues , des grès, des psammites et des schistes grossiers colorés en rouge et disposés en couches horizontales ou faiblement inclinées vers le N. 0. A Malmédy, ce terrain, qui a 150 mètres d’épais¬ seur, forme de beaux escarpements sur les rives de la Warge. * Ces dépôts ont probablement été formés dans une série de lacs disposés à la suite les uns des autres le long du cours d’un fleuve. Les cailloux roulés sont en quartz blanc et en s calcaire dévonien dont ils contiennent souvent les fossiles. On admet généralement qu’ils viennent de l’Eifel. Il est plutôt probable qu’ils sont originaires du Condros , car les fossiles qu’on y rencontre existent tous dans les schistes dévoniens des environs de Marche, et la vallée qui eût suivi le fleuve est alors nettement tracée par le golfe du terrain dévonien , qui pénètre dans le terrain silurien de Stavelot du côté de Basse-Bodeun. ÉTUDES EMBRYOGÉNIQUES SUR LES ASCIDIES. Par M. Giard. Depuis quelques années, l’embryogénie des ascidies a été l’objet d’études ardemment poursuivies et de nombreux tra¬ vaux en France, en Russie et en Allemagne. C’est qu’en effet outre son importance générale, cette question présente un intérêt tout particulier au point de vue du grand problème de la parenté originelle de l’homme ou des vertébrés avec les animaux inférieurs. La larve des ascidies est un être presque microscopique dont la forme générale rappelle assez bien celle des têtards de grenouilles. En 1867, le professeur Kowalevsky, de l’Uni¬ versité de Kiew, annonça que cet embryon présentait dans - 78 — son développement une étroite analogie avec le plus simple des vertébrés, Yamphionus ; comme ce dernier, il possède une corde dorsale et on y retrouve à peu près les mêmes con¬ nexions entre les principaux systèmes organiques. Küpffer et Ganin ont aussi apporté quelques faits à l’appui de ce rappro¬ chement. Sans attendre de nouvelles preuves et des argu¬ ments plus solides, Hæckel et Darwin ont proclamé l’origine acidienne des vertébrés. Les Tuniciers sont, d’après eux, le pont jeté sur l’abîme qui séparait les deux grandes subdivi¬ sions du règne animal. M Giard résume et discute les opinions des naturalistes qui s’étaient occupés de ces questions difficiles et contro¬ versées. Il a fait entrer dans cette discussion les résultats que lui ont fourni de longues recherches personnelles sur l’em¬ bryogénie des Ascidies simples et des Synascidies ou Ascidies composées, et c’est au nom même de la théorie transformiste qu’il a combattu les conclusions de ses prédécesseurs. Il a fait voir combien chez les animaux inférieurs les caractères de l’embryon sont modifiés , non seulement par les milieux ambiants, mais même par les mœurs de l’animal adulte , ce qui exige de la part du zoologiste une excessive réserve dans l’appréciation des rapports de parenté déduits de l’observa¬ tion des premiers états des êtres organisés. La corde dorsale des têtards ascidiens n’est , d’après lui , qu’un appareil de transport jouant le même rôle que les cils vibratiles qui existent chez un grand nombre d’autres em¬ bryons. Les raisons qui légitiment cette croyance peuvent se résumer de la manière suivante : 1° L’homologie entre les divers organes du têtard des as¬ cidies et ceux de famphionus à l’état d’embryon n’est pas aussi complète et aussi solidement établie que l'affirment Küpffer et Kowalevsky. 2° Il existe des larves d’ Ascidies composées qui ont une corde dorsale parfaitement développée et dont les viscères ont déjà la disposition qu’ils acquièrent seulement à l’état adulte chez les ascidies simples. Parfois même, comme chez — 79 les Pseudodidemnum , le têtard renferme déjà une petite co¬ lonie de trois ascidies , l’appareil caudal étant encore dans toute son activité. 3° Les Ascidies simples du genre Molgula qui ressemblent à de petits blocs de sable sont tantôt fixées contre les corps étrangers, tantôt simplement enfoncées dans la vase et libres de s'y mouvoir en tous sens. Or, dans le premier cas, l’em¬ bryon a la forme de têtard comme celui de toutes les autres Ascidies. Dans le second, au contraire, il est dépourvu d’or¬ ganes des sens et d’appareil locomoteur, parce que l’animal adulte pouvant se mouvoir, il est inutile que l’embryon choi- sisse d’avance la place où il doit vivre. De tous ces faits, il ressort que l’homologie entre la corde dorsale des Ascidies et celle des vertébrés n’est qu’une homo¬ logie d’adaptation à des conditions d’existeuce analogues, homologie déterminée par l’identité des fonctions à remplir et n’indiquant pas des rapports de parenté immédiate entre les vertébrés et les Tuniciers. Les Chlronomes. — Les chaleurs qui depuis le 20 mars ont brusquement succédé aux pluies des jours précédents nous ont valu une invasion de petits diptères qui, emprisonnés dans nos appartements, viennent se débattre et mourir contre les viB très des fenêtres. On les prend généralement pour des cousins 9 et on les considère comme des hôtes fort suspects. Rien de plus innocent cependant que ces frêles Chironomes ( Chironomus riparius ), et l’on ne peut leur reprocher que l’insouciance avec laquelle ils salissent de leurs cadavres les chambres où ils ont pénétré. Le mâle de Chironomes se distingue de la femelle par ses antennes , qui forment deux énormes pana¬ ches, par son corps plus grêle et ses mouvements plus vifs. La larve est un petit ver d’un rouge sale qui vit dans les réservoirs où l’on conserve de l’eau de pluie, et plus généra¬ lement dans la vase des marais , où il se construit un étui grossier de limon et de débris de conferves. Les œufs forment de longs chapelets et sont réunis par une substance gélati¬ neuse qui leur donne l'aspect de cerlains cryptogames infé- - 80 — rieurs. Aussi le botaniste Kütznig décrivait-il comme des algues les pontes de plusieurs de ces tipulaires. Bientôt va éclore une seconde espèce de Chironome, le Chironomus plumosus, un peu plus grand que son congénère (6mm au lieu de 4) et dont la larve négligée dans notre dépar¬ tement donne lieu à Paris à un commerce très-actif. C’est le ver rouge des aquariums, la nourriture préférée des Cyprius, des Axolotls et de cet admirable petit poisson nouvellement importé de Chine, le Macropode doré (Macropodus viridi auratus). A l’état parfait, les Chironomes s’assemblent et volent par troupes nombreuses au-dessus des cours d’eaux. Ils sem¬ blent attirés par les objets de couleur foncée et les hauts chapeaux noirs en particulier, sont suivis souvent à de lon¬ gues distances par ces essaims de Tipulaires. Ces jeux aériens et ce vol en tourbillon ne sont d’ailleurs pas spéciaux aux seuls Diptères : on retrouve les mêmes mœurs chez cer¬ tains Phrygomiens et chez quelques Microlépideptères. Simi¬ litude d’instincts qui vient encore corroborer l’opinion des Zoologistes qui, comme A. Müller et Delpius, admettent l’origine commune de ces trois groupes d’insectes. L’étude des Chironomus fournirait certainement des résul¬ tats fort intéressants pour la Zoologie générale. Déjà Oscar Y. Grimm a signalé chez une espèce de ce genre un cas des plus curieux de génération païdo génétique. La larve, après avoir subi quatre mues dans l’eau, se change en nymphe et sous cet état donne des œufs qui ne tardent pas à se développer : ces nymphes fécondes arrivent rarement à l’état parfait et la ponte dure pendant toute la belle saison. Mais les larves nées à l’automne se transforment complètement en individus des deux sexes. Toutefois, même en cette saison, en extrayant les œufs du corps de la nymphe, on peut encore les faire éclore et en obtenir des larves parthénogénéliques. Les larves de Chironomes jouent encore un rôle important dans les migrations de certains vers depuis longtemps connus, les Dragonneaux, que l’on rapprochait des Filaires et des - $1 - Mernuis et dont on ignorait complètement les métamor¬ phoses. Un jeune naturaliste de Grenoble, M. Villot, a décou¬ vert les embryons du Dragonneau. Cet embryon possède une trompe protractile armée de piquants robustes et se rapproche à certains égards des Échinorynques , il pénètre dans les larves de Chironomes et va achever ses métamorphoses dans le corps des poissons d’eau douce qui se nourrissent de ces larves. Il n’est pas, on le voit, d’animal si vulgaire fut-il, qui ne puisse donner lieu, par des observations suivies, à de belles et importantes découvertes zoologiques. Giard. FACULTÉ DES SCIENCES DE LILLE. Pendant le premier semestre de l’année universitaire 1872-73, la Faculté des Sciences de Lille a vu son personnel se renouveler presque complètement. M. Hanriot, professeur de Physique, etM. Dareste, professeur de Zoologie, ont emporté, l’un dans la retraite, l’autre dans un avancement bien mérité, l’affection de leurs collègues et les regrets de leurs élèves. Us ont été remplacés par MM. Terquem et Giard. De plus, une seconde chaire de mathématiques a été créée. On a appelé M. Boussinecq à la remplir M. Terquem, ancien élève de l’École normale supérieure, était professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Strasbourg au moment de la guerre ; après l’annexion il fut envoyé à Marseille, puis appelé à Lille pour remplacer M. Hanriot. M, Terquem a produit de nombreux travaux sur l’acous¬ tique. Le premier en date, celui qui lui a valu le titre de docteur ès-sciences, a pour objet l’étude des lignes nodales des verges vibrant transversalement. Savart avait reconnu que ces lignes sont dues à un mouvement transversal qui accompagne le mouvement longitudinal, mais ne put en donner l’explication. M. Terquem sut triompher des diffi¬ cultés qui avaient arrêté Savart. Il constata d’abord que ces — ' ’ 82’ — lignes nodales n’apparaissent que quand la verge donne un harmonique transversal à l’unisson du son longitudinal. Il prouva ensuite que les nodales et leur alternance résultent de la co-existence des deux mouvements. Plus tard M. Terquem appliqua aux lames carrées le prin¬ cipe de la combinaison des mouvements vibratoires à l’u¬ nisson. On lui doit aussi une explication du son produit dans l’harmonica chimique et un grand travail sur la cause de la perception simultanée de plusieurs sons. Dernièrement il a publié dans les Annales de physique une série d’articles sur les diverses unités électriques et de ces unités entre elles. Ces divers travaux, qui indiquent chez leur auteur un puissant esprit d’investigation, assignent à M. Terquem un rang honorable dans le monde savant. M. Giard est aussi un des brillants élèves de l’École nor¬ male, dont il est sorti il y a seulement quelques années. Nos lecteurs connaissent l’important mémoire qu’il vient de publier sur les Ascidies composées et qui lui a valu le titre de docteur ès-sciences. Ces animaux lui avaient déjà fourni l’occasion de faire plusieurs publications importantes. Sous le titre de : Études des travaux d'embryogénie relatifs à la parenté des Vertébrés et des Tuniciers , il a fait connaître les travaux récemment parus sur les Ascidies en Russie et en Allemagne. C’est un grand service rendu à la science fran¬ çaise que de nous faire connaître les recherches de ces savants étrangers écrites dans une langue encore trop peu. connue parmi nous. D’ailleurs M. Giard ne se borne pas à un simple compte-rendu, mais il met en présence les con¬ tradictions des auteurs, leurs différents systèmes, leurs billes souvent peu polies et leur oppose ses propres observations. Le genre Molgula , objet d’un mémoire du professeur Kupffer, est très-longuement étudié. Kupffer avait prétendu trouver dans les premiers états des jeunes Molgules la forme typique et originelle de l’embryon de toutes les Ascidies. - 83 - M. Giard réfute cette opinion et prouve que cette forme doit être cherchée dans les espèces à larves urodèles. M. Boussinescq n’a été formé dans aucune de nos grandes écoles. Entré fort jeune dans l’instruction, il a rempli jus¬ qu’aujourd’hui les postes les plus modestes dans de petits collèges du Midi, à Agde, au Vigan, à Gap. C’est sous le titre de régent au college de Gap qu’il s’est révélé au monde savant par des travaux qui ont fait une sensation d’autant plus vive que l’âge et la position de l’auteur en faisaient moins prévoir le mérite exceptionnel. Ces travaux ont pour objectif la Physique mathématique, c’est-à-dire l’application du calcul à la connaissance appro¬ fondie des phénomènes du monde physique. Ils ont pour objet la théorie de l’élasticité, la théorie de la lumière, l’hy¬ drodynamique, etc. Il est impossible d’énumérer ici les titres des 40 ou 45 mémoires que M. Boussinescq a publiés depuis sept ans. Ils lui ont valu un prix de l’Institut en 1871 et une médaille au concours des Sociétés savantes en 1872. Enfin, par une distinction d’autant plus flatteuse qu’elle est plus exceptionnelle, M. Boussinescq a été deux fois présenté comme candidat à l’Institut parla section de mécanique. Il n’a que 31 ans. L’enseignement littéraire qui est annexé à la Faculté des Sciences a subi aussi d’heureuses modifications. Si tout le monde a vu avec peine la loi trop rigoureuse sur les pensions de retraite forcer M. Chon à descendre de la chaire d’histoire qu’il occupait avec tant de succès depuis sa fondation, l’éloquente parole de son successeur a tempéré bien des regrets. On ne peut qu’applaudir à la bonne inspi¬ ration qu’a eue le Conseil municipal de Lille en appelant à faire des cours dans cette grande ville les professeurs de la Faculté de Douai. Mais pourquoi la Philosophie ne s’y trouve- t-elle pas représentée ? A-t elle cessé d’être le couronnement et la synthèse de toutes les connaissances humaines ? Ou juge-t-on les Lillois trop ensevelis dans la matière, trop entraînés à rechercher l’utilité pratique pour goûter un — 84 - instant l’utilité des vérités abstraites d’enseignement philoso¬ phique ? Aux cours d’histoire, de littérature française et de littéra- ture étrangère on a joint un cours de géographie, science dont nous avons appris à nos dépens à connaître l’impor¬ tance. M. Mamet, professeur d’histoire au Lycée, a choisi un sujet tout local : la géographie du Nord de la France sous le rapport physique, militaire et commercial. ACADÉMIE DE BELGIQUE. La séance publique de la classe des sciences de l’Académie de Belgique a donné au président , M. D’Omalius d’Halloy, l’occasion de faire une intéressante lecture sur l’ethnogra¬ phie. Laissant de côté toutes les considérations générales, nous nous bornerons à exposer les passages qui concernent les anciens habitants de notre pays. On oppose souvent la race celtique à la race teutonne. Ce serait une erreur, selon M. D’Omalius , car les Celtes appar¬ tenaient à la grande famille teutonne. Ils en avaient la cheve¬ lure blonde et la haute taille. On peut du moins le conclure de ce que disent les auteurs romains des Gaulois qui enva¬ hirent Tltalie. Les Gaulois qui, au temps de César, habitaient entre la Seine et la Garonne , étaient formés de la fusion de deux peuples, l’un conquérant, les Celtes, l’autre conquis, les Galls, reconnaissables à leur taille plus petite et à leurs cheveux noirs. Les Galls sont encore représentés actuellement par les Breysads de la Basse-Bretagne , les Gaels ou Erses de l’Ir¬ lande, les Kymris du pays de Galles. M. D’Omalius combat aussi l’idée d’une nation kymerique à laquelle il faudrait rapporter les Cimmeriens d’Homère et d’Hérodote , les Cimbres de Marius et les Kymris du pays de Galles et les Belges de César. Il y a , dit-il , une simple res¬ semblance de noms. Les Cimmeriens d’Hérodote ont disparu depuis leur défaite par les Scythes sur les bords de la mer d’Azow. - 85 - Les Cimbres battus par Marius appartenaient à la famille teutonne , et par conséquent au type blond. Quant aux Kymris du pays de Galles , M. D’Omalius fait observer que si ce petit peuple, resserré dans un coin de terre par les Teu¬ tons, avait aussi appartenu à cette famille, il n’aurait certai¬ nement pas abandonné sa langue pour en adopter une toute différente. La ressemblance de celte langue avec le bas-breton et ses rapports avec le gaelic d’Irlande le portent à croire que les Kymris sont un des restes des populations qui habi¬ taient la Gaule avant l’invasion des races teutonnes. Quant aux Belges, M. D’Omalius pense que c’était, comme les Celtes, un peuple conquérant d’origine teutonne qui avait adopté le langage des peuples conquis. Ainsi, dans l’opinion de M. D’Omalius, la Gaule , lorsque César en fit la conquête, était depuis longtemps déjà en la possession de peuples ger¬ maniques. La population ancienne était asservie ou refoulée dans l’Aquitaine, l’Armorique, le pays de Galles et l’Irlande; mais, par contre, les vainqueurs avaient adopté la langue des vaincus. Le prix quinquennal des sciences naturelles a été décerné à M. l’abbé Carnoy pour ses Recherches anatomiques et phy¬ siologiques sur les champignons. L’Académie avait mis au concours la question suivante : Faire connaître, notamment au point de vue de leur compo¬ sition, les roches plutoniennes, ou considérées comme telles, de la Belgique et de l’Ardenne française. Un seul mémoire a été présenté en réponse à cette ques¬ tion, et l’Académie ne Fa pas jugé digne de récompense. Les commissaires se sont montrés sévères à son égard, nous dit M. D’Omalius. C’est regrettable, carie sujet est difficile et cependant bien important. Il serait à désirer, puisque la question reste au concours, que l’auteur reprit son œuvre et l’améliorât en tenant compte des observations d’ailleurs très- justes que lui ont faites MM. De Konninck et Dewalque. Un travail, ne fut-il même pas parfait sur cette question , serait un vrai service rendu à la géologie du pays. — 86 — M. Crepin, auteur de la flore de Belgique et de nombreux travaux botaniques, a été élu correspondant; M. Edouard Yan Beneden, fils de l’illustre professeur de Louvain, et lui-même zoologiste distingué, est passé titulaire, laissant de nou¬ veau une place vacante parmi les correspondants. Lorsqu'il s’agira de la remplir, nous espérons que l’Académie se sou¬ viendra qu’elle n‘a pas encore ouvert ses portes au géologue stratigraphe qui, depuis Dumont, a fait faire le plus de pro¬ grès à la géologie du pays. Il y a longtemps que la place de M. Cornet est marquée à l'Académie, et les étrangers s’éton¬ nent avec juste raison de ne pas encore le voir figurer dans la liste des membres. Parmi les travaux récemment publiés dans le Bulletin, nous citerons un mémoire de M. le vicomte du Bus sur les dau¬ phins fossiles du cray d’Anvers. Il en décrit 27 espèces nou¬ velles. C'est beaucoup, surtout si l’on songe que plusieurs de ces espèces ne sont connues que par des fragments de crâne ou par quelques dents isolées. M. de Montigny a présenté la suite de ses recherches sur l’influence du vent sur le baromètre aux divers étages de la tour d’Anvers. Dans une première série d’observations, il avait reconnu que l’altitude des diverses galeries de ce monu¬ ment, calculée à l’aide du baromètre, est variable avec la force et la direction du vent; elle est moindre que l’altitude vraie sous l’influence des vents de l’est et supérieure à cette valeur sous l’influence des vents de l’ouest. Règle générale : la vitesse du vent augmente avec l’éléva¬ tion de la galerie d’observation, ce qui tient à ce qu’au con¬ tact du sol le mouvement de l’air est retardé par une foule d’obstacles qui ne se rencontrent plus dans les régions élevées. Cependant, M. de Montigny a constaté en plusieurs circonstances des exceptions à cette règle et a vu la vitesse décroître à mesure que l’on montait. La plus grande vitesse qu’il ait observée est de 17m,12 par secoude lors de la bourrasque du 8 février 1867 et à la ga¬ lerie supérieure (404m au dessus du niveau du sol); à la galerie — 87 — octogone (89ra,06) la vitesse n’était que de 16m,52 et de 15ra,12 seulement à la galerie des cadrans (64“,! 8). € La nature des vents qui soufflent dans les pays de plaine, » dit Poncelet, est telle que leur direction fait avec l’horizon t> un angle de 18°; c’est pour cette raison que i’arbre des n moulins à vent est aussi tenu incliné sous cet angle. » M. de Montigny voulut contrôler cette loi. Il reconnut que la direction est parfois horizontale, parfois plongeante, et plus souvent relevante , surtout à la galerie supérieure. La forme élancée de la tour doit avoir pour effet de redresser le vent dans son voisinage. Les vents du Nord qui arrivent de la mer avec une direction horizontale ou une inclinaison faible se relèvent sous un angle moyen de 14° à la galerie supérieure, tandis que les vents du Sud qui descendent de l’Ardenne ne font dans les mêmes conditions qu’un angle de 8°, 30. CHRONIQUE. Météorologie. Mars. 1873 année moyenne. Température atmosphér. moyenne. 7° 36 5» 45 — moy. des maxima. 11° 44 — — des minima. 3° 28 — extr. maxima, le 30. 20° 50 — — minima, le 1er. -0? 10 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 755"?®748 758”m566 — — extr. max. le 26. 764™m 41 — — — min. le 12. 741 mm 08 Tension moy. de la vap. atmosph. Gl°m 03 5™" 1 35 Humidité relative moyenne %. . 83. 0 77, .71 Épaisseur de la couche de pluie . . 61mm 10 45mm 85 — — d’eau évap. 56®“ 1 07 46ram 32 Pendant ce mois, la température atmosphérique s’éleva de près de 2° au dessus de la moyenne. Il n’y eut qu’un seul jour de gelée indiquée par le thermomètre, mais sous l’in¬ fluence du rayonnement nocturne pendant les nuits des 21 et 22 la rosée se congela. Jusqu’au 23, on remarque une température moyenne à peu près stationnaire; à dater de ce jour, elle s’élève et arrive le 31 à 14<>.80. La direction du vent — 88 — n’ayant pas changé, on peut attribuer ces premières chaleurs à la faible nébulosité du ciel, coïncidant avec une hausse sen¬ sible de la colonne barométrique, et à l’absence de pluie L’élévation de la température, les vents régnants du N.E., et la sérénité du ciel, déterminèrent une évaporation supé¬ rieure à la moyenne de Mars , quoique l’air ait été plus hu¬ mide que dans le mois correspondant d’une année moyenne. L’humidité des couches atmosphériques en contact avec le sol exista aussi pour les couches élevées , ce que dénotent la dépression barométrique et la quantité d’eau météorique dé¬ passant la moyenne de 10“m. Cet air très-humide devait être très-électrique; c'est cet état qu’indiquèrent les électromètres et l’ozonomètre. Enfin, le 30, il y eut à Lille des éclairs sans tonnerre ; dans quelques communes voisines , le tonnerre se fit entendre. Le 31, le mois se termina par un orage venant du S. On observa 2 halos solaires et 5 halos lunaires toujours suivis de pluie. La fréquence et la presque continuité de la pluie dans les deux premiers tiers de Mars furent défavorables aux travaux agricoles; mais on s’empressa de profiter de la sécheresse de la fin du mois pour regagner le temps perdu. Partout alors on se mit à l’œuvre avec activité et les semailles se firent dans de bonnes conditions. Sous l’influence de cette sécheresse , le niveau des eaux de surface et souterraines baisse d’une manière générale. Y. Meurein. Lille, imp. Six-Horemaus. 73-1080 5* Année. — N» 5. — Mai 1873. LILLE; CHATELLENIE DE LILLE. J’ai signalé au premier chapitre des Châtelains de Lille (1), dans un acte publié par M. Van Lokeren sous la date 958-961 (2) , la plus ancienne mention connue du nom de Lille , Castrum lsla nomme , nom qu'on n’avait trouvé jus¬ qu’alors dans aucun titre diplomatique antérieur à 1063; mais il s’est élevé depuis, sur cette date, des doutes fondés, et il paraît, par des raisons que je ne puis développer ici , qu’il faut la reporter entre les années 1034 et 1047. Un quart de siècle reste du moins acquis. Aujourd’hui, je voudrais re¬ gagner tout le terrain lâché à regret, et, par des documents que je soumets aux lecteurs du Bulletin , essayer de faire re¬ monter à 967, non-seulement l’existence avérée de Lille, mais encore la constitution, en châtellenie portant son nom, de la contrée que sa forteresse dominait et protégeait. La chronique de Saint-Trond rapporte qu’en 967, sous l’abbé Thietfrid , une illustre dame , Berthe , comtesse de Flandre , veuve consacrée à Dieu , étant allé visiter Notre- Dame à Aix-la-Chapelle, gagua, au retour, la ville de Saint- Trond, dans l’intention de prier sur le tombeau du saint patron. S’y étant arrêtée pendant quelques jours pour se re¬ poser, elle y tomba malade. Ce qu’apprenant, le comte Arnoul se rendit en toute hâte près de sa mère , et là , à sa prière , pour le repos de son âme et de celles des siens , en présence de Thierri, évêque de Metz, et de l’abbé Thietfrid, il donna au monastère de Saint-Trond , pour l’usage perpétuel des frères qui y servaient Dieu, la villa de Provin, située dans la châtellenie de Lille , in Castellania Ylensi , près de la Deûle , avec les serfs, mancipiis , les terres, les dîmes, les bois, les (1) Mémoires de la Société des sciences , de Pagricullure et des arts de Lille, 3« série, t. X. (2) Chartes et documents de l’abbaye de Saint-Pierre, à Gand, N° 26. 90 — prés, les eaux et les pêcheries, avec l’église paroissiale et toutes les dépendances de la villa. Il donna en outre à Saint- Trond un bois situé non loin de la villa Merwel, et une dîme dans la villa Brustemium , afin d’obtenir, par les mérites du saint patron, le pardon de ses péchés. Étaient aussi présents plusieurs comtes et autres personnages, comme cela se trouve clairement relaté, ajoute le moine chroniqueur, dans les ar¬ chives de notre monastère, prout in privilegiorum nostri mo • nasterii archivis clare conscriplum reperitur. Cela fait , l’état de la comtesse s’aggravant, elle reçut les derniers sacrements et rendit son âme à Dieu le 17 des calendes d’août 967. Malheureusement, l’acte primitif de cette donation n’existe plus. Il donnerait la preuve incontestable de la constitution de la châtellenie de Lille dès 967, c’est-à-dire plus d’un siècle avant le temps que les données historiques certaines m’ont permis d’assigner à cette constitution (1). En effet, je n’ai trouvé ailleurs la dénominaiion expresse de châtelain de Lille qu’en 1087, bien qu’on ait coutume de l’appliquer par induc¬ tion à Saswalon, fondateur de l’abbaye de Phalempin en 1039. La constitution de la châtellenie prouverait de soi l’existence de la ville même, au moins à l’état de Castrum. Mais si l’acte original est perdu, il en existe une reproduc¬ tion , que tout porte à croire littérale , dans un diplôme de 1146 par lequel Thierri d’Alsace confirme la donation et en renouvelle le titre (1). Le comte Thierri déclare à tous les fidèles présents et à venir que le comte Arnoul , de pieuse mémoire , venant au monastère de Saint-Trond , qui est situé en Hesbaye, et où repose le corps du saint confesseur du Christ, en présence de Thierri , évêque de Metz , et de l’abbé Thietfrid , à la prière de sa mère nommée Berthe, pour le repos de son âme, donna à Dieu et à saint Trond , pour l’usage des frères, la villa de (1) Pièce justificative ci-après, K* 2. — 91 — Provin , située dans la châtellenie de Lille près de la Deûle, in Castellania Ylensi, jnxta fluvium Donlam, avec les serfs, mancipiis , les terres, les dîmes, les bois, les prés, les pâtu¬ rages , les eaux et le cours des eaux , afin d’obtenir par les mérites du saint patron le pardon de ses péchés; — qu’à cette donation du comte Arnoul furent présents les comtes Erem- frid, Herman, Rayner, Rodolphe, Geveard, Roger et beaucoup d’autres; — que l’église de Saint-Trond a toujours joui libre¬ ment et sans trouble de cette donation attestée par l’acte écrit du donateur, prefati largitoris scripto firmam , et par la tra¬ dition; — qu’enfin, à la prière de l’abbé Gérard, lui Thierri, comte de Flandre, renouvelle et confirme par écrit ladite donation , afin qu’elle demeure à toujours ferme et stable , sans trouble ni contradiction. Le comte fait ensuite régler par son châtelain , par l’avoué et son fils, suivant l’avis des échevins de la villa, les droits respectifs de l’abbé, du prévôt de celui-ci et du maire de Provin, au sujet desquels droits il y avait eu entre eux quelques contestations. Il me paraît hors de doute que le rédacteur du diplôme de Thierri d’Alsace s’est inspiré, ainsi que la chronique de Saint- Trond, du texte d’un titre primitif, dont il n’a changé que la forme personnelle; qu’il en a reproduit les termes mêmes, comme cela se pratiquait habituellement dans les confirma¬ tions qui visaient des titres anciens. En 1146, il n’aurait plus employé cette forme insolite du nom de Lille, Ylensis ; il ne se serait plus servi de l’expression mancipia , esclaves , qui eût été un anachronisme dans notre contrée , surtout pour désigner les vassaux d’un établissement monastique; mais il aurait écrit hospiles et colories, comme dans la seconde partie du diplôme où le comte Thierri règle les devoirs du maire de Provin. « Si la maison, la grange , l’encloture ou la bras¬ serie ont besoin d’être restaurées, il doit léunir les hôtes et les colons dans la forêt pour faire couper et transporter les bois nécessaires. Si domus , vel horreum , vel clausura , sive — 92 — camba restauranda est , debet hospites et terre colones in silva congregare ad cedenda et adducenda ligna. » On est doDC ici en présence d’un renouvellement d’acte par insertion , poste- ritati inserentes scripto veritatis nostre renovamus , en pré¬ sence d’une copie pour ainsi dire conforme où figurent jus¬ qu’aux noms des témoins. Dès lors , le titre de 967 est re¬ trouvé et ma preuve diplomatique est faite : Lille existait au milieu du Xe siècle et la châtellenie de ce nom était constituée. I. 967. — Extrait de la chronique de Saint-Trond. Circa hæc tempora plus minusve, lempore hujus abbatis Thietfridi, illustris femina domina Bertha, vidua elDeo sacrata, comitissaFlandrie, cum peregre visitasset limina Beale Marie Aquis grani, contigit eam in reditu opidum Sancti Trudonis devotior.is causa visitare et ad sepulchrum prefati Sancti preces humiles fundere. Que cum per aliquot dies causa repausaiionis ibidem moram facere, in lecium egritudinis incidit. Quot ut Arnulfo illuslri viro, filio suo, Flandren sis comiti, innotuit, ad prefatum locum quantotius properat, ibique presentibus Metensi episcopo Theodorico primo ac Thietfrido abbate, ad preces sue malris domne Berlhe, ob remediun sue et suorum animarum Deo et beato Trudoni, in usus servorum Dei in ibi Deo famulanlium, villam Provin, in castellania Ylensi sitam juxta fluvium Doulam, cum man- cipiis, terris, decimis, silyis, pratis, pischariis aquartim que decursibus liberaliter hereditarieque donavii , cum ecclesia parochiali illius ville et omnibus appendiciis ejusdem. Contulit insuper beato Trudoni silvam unam sitam non longe a villa Merwel, et unam decimam apud villam que vocatur Brustemium hac de causa, ut predicli patroni meritis deliclorum suorum veniarn adipisci mereretur, presentibus ibidem pluribuscomitibus ac aliis viris, prout in privilegiorum nostri monasterii archivis clare conscriptum reperitur. Quo peracto, ingraves- cente infirmitate prefata comitissa, sumptis ecclesiasticis sacramentis, extremum spiritum efflavit anno Domini 967, 17 kalendas Augusti. Pertz, Monumenta, t. xii, p. 379. 11. 1 146. — Extrait du diplôme de Thierri, comte de Flandre. Ea propter notum facimus presentibus et futuris Christi fidelibus, qualiter pie memorie, illustris cornes Arnulfus, ad monaslerium Sancti Trudonis veniens, quod silum est in Hasbaniensi territorio, ubi ipse preciosus Christi confesser corporetenus requiescat, presentibus Theo¬ dorico, Metense episcopo, et Thiefrido, ejusdem loci abbate, jussu matrissue, nomine Berthe, ob remedium anime ipsius, tradidit Deo et predicto sancto beato Trudoni, in usus servorum Dei inibi Deo famu- - 93 — lantium,villam Provin, sitam in castellania Ylensi, juxla fluvium Doulam, cum mancipiis, terris, decimis, silvis, pratis, pascuis, aquis, aquarumque decursibus, quatinus predicti palroni mrritis veniam deliciorum suorum adipisci mereretur Iluic traditioni facte ab Arnulfo comité intertuerunt : Eremfridus cornes, Hermannus cornes, Raynerus cornes, Rodulfus cornes, Geveardus cornes, Rogerus cornes, et alii multi. Tradi- lionem hanc légitimé factam et prefati largitons scripto firmam et memorie tradilam, ecclesia beati Trudonis absque omrn contradiclione libéré semper tenuit ; quam nos quoque petente Gerardo, memorate ecclesie abbate, posteritati inserentes scripto veritatis nostre lenovamus cl confirmamus, quatenus omni post futuro lempore sine pei tubatione aliqua aut alicujus potestalis contradiclione jure perpetuo solida et inconcussa permaneat . Acta sunt hec anno ab incarnatione Domini M° C° xlvi0, indictione vima, Rome papa Eugenio, rege Ludowico. Piot, Car lulaire de l’abbaye de Saint-Trond, LUI. Th*e LEUR1DAN. LES TOURBIÈRES DU LITTORAL FLAMAND. Il y a deux ans, en analysant une étude de M. de La Royère sur le Sinus ltius (1), je démontrai que l’on avait une preuve géologique de l’existence de ce golfe dans un sable rempli de coquilles marines qui couvre le sol depuis la mer jusqu’à Watten. Je disais en même temps que, pour déterminer l’époque où se sont déposé ces sables et où existait le Sinus ltius, il était nécessaire d’étudier les tourbières du littoral flamand et de constater de quels niveaux proviennent les nombreux débris de l’époque romaine que l’on y trouve constamment. M. Debray, conducteur des ponts et chaussées, à Lille, en¬ treprit ce travail et l’a soumis à la Société des sciences, qui l’a récompensé d’une médaille d’or à son dernier concours. Le mémoire de M. Debray est à la fois géologique et archéologique : géologique dans sa méthode, archéologique dans ses conclusions. Il commence par une description détaillée des tourbières (I) Bull, sc., h. et 1., t. m, p. 233. d’Ardres, de Bois en Ardres, de Nortkerque, de Guemps, de Looberghe, de Sandgatte. Leur composition générale est la suivante : 1° Terre de marais . 0”20 2° Argile grise ou sable avec coquilles marines, et couche d’eau saumâtre à la partie supérieure . . . . 0,85 3° Argile bleue plus ou moins sableuse avec coquilles marines . . . . 0,80 4° Tourbe . . 1,10 5° Argile bleue faisant le fond des tour¬ bières . , La tourbe est parfois divisée en deux couches séparées par un mince banc d’argile. A sa partie supérieure, il y a souvent une zone plus ou moins impure, désignée sous le nom de faux gazon. Un second chapitre est consacré à l’examen des végétaux et des animaux qui ont laissé des restes dans les tourbières. On y voit cité le cheval, le bœuf, le mouton, le cerf, le daim, le chevreuil, le chien, le putois, la baleine, le coq et l'es¬ turgeon. Dans un troisième chapitre, M. Debray indique les objets de l’industrie humaine trouvés dans les tourbières, aussi bien ceux qu’il a ramassés lui-même, que ceux qu’il a vus dans les riches collections de MM. Herrewyn de Bergues, Dartois de Nortkerque , docteur Robbe de Sandgatte. Ce sont des objets en bronze : trépied, lance, vases, ornements; des po¬ teries rouges gallo-romaines , une poterie noire de la même époque avec sujet en relief, représentant des cerfs qui pour¬ suivent une biche; des poteries grises grossières que l’auteur qualifie simplement d’anciennes. C’est trop de prudence, car le mot d’ancienne est bien vague, et ces poteries ayant été trouvées avec des objets gallo-romains sont certaine- — 95 — ment du même âge , quelqu’imparfaite qu’ait pu en être la fabrication. Tous ou presque tous ces objets ont été trouvés dans la tourbe et généralement à sa surface. Seul, le cru¬ chon gaulois de Hoymille, qui porte encore des empreintes de feu , a été rencontré au dessous de la dernière couche de tourbe (1). L'auteur conclut avec toute raison que la tourbe existait déjà à l’époque romaine et que le pays était habité. Il pense que la tourbe s’est formée dans un lac qui était séparé de la mer par les dunes et qui devait avoir environ 3 mètres de profondeur, car le fond de la tourbe est actuel¬ lement à lm75 au dessous du niveau moyen de la mer et à 2m67 au dessous des eaux douces du pays. A une époque postérieure à la conquête romaine , la mer rompit les dunes, fit irruption dans le lac et y séjourna un temps assez long, puisqu’elle y déposa des couches d’argile et de sable dont l’épaisseur moyenne est de lm65. L’auteur fait voir, à l’aide d’un tableau graphique emprunté en partie à M. Meugy, que la tourbe et les couches qui la surmontent sont comprises entre les niveaux de haute et basse mer de mortes eaux. Plus tard, ajoute-t-il, la brèche ayant été comblée, et le travail des hommes aidant, la mer s’est retirée dans les limites qu elle occupe encore aujourd’hui Je ne puis partager ses idées concernant le mode de for¬ mation de la tourbe; ce combustible ne prend en général naissance que sous une faible couche d’eau , et la tourbe du littoral où abondent les cypéracées me semblent indiquer un marais plutôt qu’un lac. Si le fond de ce dépôt est actuelle¬ ment à lm75 sous le niveau moyen de la mer, c’est que la côte s’esl abaissée comme je l’ai dit précédemment. L’envahisse¬ ment s’est fait d’une manière progressive , car s’il y avait eu (]) Loc. CÎt., p. 238. — 96 — inondation brusque, le souvenir de cet événement, qui aurait dû faire de nombreuses victimes, n’eût pû disparaître entière¬ ment des annales du pays. Cette réserve faite, j’admets pleinement les conclusions de M. Debray, et je le félicite de son travail destiné à jeter un jour nouveau sur l’archéologie de notre pays. Il démontre d’une manière péremptoire l’existence d’un grand golfe postérieur à l’époque romaine et dont l’histoire ne nous a conservé aucune mention. Il fait aussi prévoir qu’à l’époque romaine le rivage de la Flandre n’avait pas sa forme actuelle. Tout n’est pas encore dit sur la question. Il s’agit mainte¬ nant de tracer les limites du golfe, de déterminer exactement le rivage de l’époque romaine. Ce sont encore des questions où la géologie pourra être pour l’archéologie un précieux auxiliaire. Le mémoire de M. Debray ne se borne pas aux tourbières du littoral; il en décrit quelques-unes dans le département du Nord et dans celui de la Somme; ce sera l’objet d’un ar¬ ticle ultérieur. J. G. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain jurassique. Caractères minéralogiques. — Les principales roches qui composent le terrain jurassique de notre région sont : le calcaire, la marne, l’argile, le sable, le grès et le minérai de fer. Les calcaires du terrain jurassique présentent tous les passages entre la texture compacte et la texture grossière ; souvent ils sont oolitiques. On désigne sous ce nom un cal¬ caire formé de petits grains arrondis et égaux, ce qui lui donne l’apparenee d’une masse d’œufs de poissons. Le cal¬ caire oolitique se produit encore de nos jours, sur les côtes — 97 — de Floride, par exemple, là où les Ilots fouettent avec force un rivage composé presqu’uniquement de récifs de coraux. Le carbonate de chaux de ces récifs se dissout dans l’eau de la mer, puis se précipite d'autant plus rapidement que l’éva¬ poration est plus active dans ces contrées tropicales. En devenant solide, il se concrétionne autour des particules que le mouvement des vagues tient en suspension, grain de sable ou fragment de coquille. L’oolite s’accroît à la manière des dragées des confiseurs. Une seconde couche calcaire s’ajoute à la première, puis une troisième, el ainsi de suite jusqu’à ce que le grain soit devenu assez lourd pour aller au fond. Là toutes les ooliles sont réunies et cimentées par un précipité calcaire de même origine. Le terrain jurassique fournit de nombreuses pierres de taille et des calcaires argileux qui servent à la fabrication des ciments hydrauliques. L’argile est quelquefois dure, feuilletée et passe alors au schiste. D’autres fois elle renferme des lignites pyriteux qui sont employés sous le nom de cendres pour amender les terres. Le minerai de fer jurassique est du sesquioxide plus ou moins hydraté. Il a souvent une texture oolitique comme le calcaire. Caractères poléontologiques. — Dès le début de l’époque jurassique apparurent les mammifères ; mais jusqu’à présent on n’en a pas encore trouvé de débris dans notre région. Les reptiles y sont plus frequents. Dans les carrières à chaux hydraulique de Warcq, près Charle ville, on rencontre assez abondamment des vertèbres d Ichthyosaure, grand rep¬ tile marin, dont la forme générale rappelle celle des Cétacés : tête volumineuse, mâchoires allongées, cou court, membres transformés en palettes pour la nage. C’était des animaux carnassiers, très-voraces. On trouve souvent aussi leurs excré¬ ments connus des géologues sous le nom de coprolites et on — 98 — peut y reconnaître les débris des poissons qui servaient à leur nourriture. La plus grande espèce connue avait dix mètres de long. Dans le terrain jurassique du Boulonnais on rencontre, outre les Ichthyosaures, les Plésiosaures, les Pliosaures et les Téléosaures. Les Plésiosaures ont aussi les membres en palettes, mais plus semblables, par leur structure osseuse, aux pattes des autres reptiles que ceux des Ichthyosaures. Ils ont en outre un cou très -long et une tête petite. Les Pliosaures joignent aux membres des Plésiosaures, les formes massives, le cou court et l’énorme tête des Ichthyo¬ saures. Les Téléosaures sont des Ciocodiles voisins des Alligators. Le terrain jurassique du Boulonnais a fourni aussi un grand nombre de poissons fossiles (1) qui appartiennent aux groupes des Ganoides et des Placoides. Les Ganoides, aujourd'hui presque éteints (ils ne sont plus représentés que par le Polyptère, le Lepidostée, l’Esturgeon), avaient les écailles recouvertes d’une couche d’émail, juxta¬ posées et de forme rhomboidale. Les Pyenodus avaient les dents arrondies comme des boutons, tandis que chez les Lepidotus elles étaient petites et pointues. Les Placoides, qui comprennent de nos jours les Requins ou Squales , les Raies et les Chimères, ont sur la peau des écailles osseuses isolées les unes des autres. Les lschyodus des mers jurassiques étaient* des Chiméridcs à mâchoires robustes. Les Strophodus , Curtodus , Acrodus , appartiennent à la famille des Geslraciontes, Requins herbivores, qui ont encore un représentant dans les mers de l’Australie ; d’autres, les Hybodus , ont les dents en forme de cônes arrondis, intermé- (l) Ils ont été décrits par M. Sauvage (Bull, sc., h , 1., I, p. 27). - 99 - diaires entre les dents plates ou tuberculeuses des Cestra- tiontes et les dents tranchantes des vrais Requins Parmi les mollusques fossiles du terrain jurassique. on doit citer au premier rang les Bélemnites et les Ammonites. Les Bélemnites appartiennent à l’ordre des Céphalopodes Dibranches, qui comprend dans la faune actuelle la Seiche, le Calmar, le Poulpe, etc. Chez ces mollusques, tantôt la coquille manque, tantôt elle e>t réduite à une partie dure, calcaire ou cornée, située dans l'intérieur des tissus sur le dos de l'animal. Telles sont Los de la Seiche et la p'ume du Calmar. Les Bélemnites avaient une lame cornée s’enroulant inférieurement en un cône cloisonné terminé par une pointe calcaire. C’est cette pointe seule qui nous a été conservée à l’état fossile. Les Ammonites sont des Mollusques Céphalopodes voisins des Nautiles et des Goniatites. Dans leur coquille, les lignes suturales qui unissent les cloisons aux parois décrivent des sinuosités, les unes saillantes les autres rentrantes et chacun de ces lobes ou sinus sont élégamment découpés comme les feuilles du persil. Parmi les Mollusques Gastéropodes, on doit citer les Néri- nées , dont la coquille, de forme assez allongée, présente des replis à la bouche et à la columelle, de sorte que son moule interne ressemble à une vis à double pas. Ge genre est éteint, mais les Ptèrocères , les Cérites et les Notices que l'on trouve assez abondamment dans le terrain jurassique, vivent encore • aujourd’hui. Au premier rang des Mollusques Lamellbranches . on doit citer les Huîtres, dont les espèces très-nombreuses à l’époque jurassique servent à caractériser les diverses assises. Quel¬ ques-unes dont le crochet est très-recourbé ont reçu le nom de Gryphées. Il y a aussi les genres encore subsistants Pecten , Adcula , Penia , Lima, Cardium , Astarte , Pliola- domya ; les genres éteints Posidonomya , Ceromya, Opis, — 100 — Cardinia ; le genre Trigonia , qui, après avoir eu un grand développement en Europe à l’époque jurassique, est aujour¬ d’hui relégué dans les mers australiennes. Au commencement de l’époque jurassique on trouve encore quelques formes de Brachiopodes de l'âge primaire, les Spi- rifer et les Leptæna , qui ne tardent pas à disparaître, les Rijnchonella , qui persistent encore. La famille des Térébra- tules prend au contraire plus de développement. Parmi les Oursins, il faut mentionner les genres Cidaris , Hemicidaris , Pygurus , Clypeus. Le premier est le seul qui ait encore des représentants. Les Encrines jurassiques appartiennent à une famille diffé¬ rente de celles des terrains plus anciens. Les principaux genres reconnus dans notre région sont Apiocrinus , Penta- crinus , Millecrinus. Enfin on trouve dans le terrain jurassique de nombreux récifs de coraux. Les animaux qui les ont formés ont bien plus de rapport avec les coraux actuels qu’avec ceux de l’âge primaire. BIBIO MÀRCI. On a pu remarquer, aux environs de Lille, pendant les jours de chaleur de la mi-avril, une énorme quantité de mouches noires, posées sur les buissons et les herbes ou volant cà et là ; elles étaient surtout abondantes dans les fortifications de la citadelle, d’où quelques-unes ont pénétré jusqu’au Champ de Mars et dans les jardins de la ville. Ces mouches, communes tous les ans, n’avaient pas été observées depuis longtemps en aussi grand nombre. C’est le Bibio Marri , ou Mouche de Saint-Marc, bien connu des naturalistes et qui ne mériterait pas l’attention, s’il n’avait été, l’année dernière, à pareille époque, l’objet des plus singulières erreurs de la part des journaux de — 101 — Paris. Son apparition en avril 1872 fut extraordinairement nombreuse à Paris, il volait en nuées, non-seulement dans la campagne et dans les jardins, mais jusque sur les quais et au milieu des rues La plupart des feuilles publiques signalèrent cette invasion en y ajoutant les commentaires les plus bizarres. D’après le Petit Moniteur : « Ces mouches sont lentes et paresseuses, un vol de quelques mètres les surmène et les oblige à s’arrêter. Il est manifeste que ce sont des produits incomplets, des larves de la grande mouche tigrée (?) ordi¬ nairement si alerte et si rapide. » Voulant ensuite expliquer cette infériorité, il ajoute : « La température exceptionnelle de février a hâté la maturation de ces larves qui, moins pro¬ fondément enfouies que les larves des mouches ordinaires, sont plus facilement influencées par les variations atmosphé¬ riques. Le retour brutal des grands froids au commencement de ce mois a arrêté dans leur développement les jeunes êtres et ils ont végété jusqu’à ce que les dernières chaleurs les aient r, mimés. Ce sont donc des produits avortés, éprouvés par le froid, qui promènent au milieu de nous leur conva¬ lescence désagréable. Ces mouches sont incommodes et mal¬ propres, mais elles ne sont pas du tout dangereuses » Il continue sur ce ton avec le même aplomb, et notons que tout cela est intitulé : Notions utiles t Citons mainlenant la France : « Tous les journaux ont parlé de la pluie de mouches qui s’est abattue sur Paris. Ces mouches dont le corps est très-étroit, les ailes veinées et les pattes longues et grêles, ont effrayé les bonnes gens qui les ont considérées comme les avant-coureurs de que'que fléau. Les moins superstitieux disaient que c’était une importation de l’armée allemande et l’on rappelait à ce propos les puces du Don que les Cosaques ont acclimatées en France. » Renseignements pris, ces mouches, qui appartiennent à la grande famille ichneuraonienne, non-seulement ne sont — m — pas nuisibles, mais font une guerre acharnée aux nids de chenilles qui infestent les environs de Paris. Ces ingénieux parasites nous ont été amenés par les ouragans qui ont soufflé sur Paris la semaine dernière. » La Petite Presse reproduit à peu près ces mêmes rensei¬ gnements : « Ces insectes sont ailés comme des mouches, mais ils en diffèrent par tout un ensemble de caractères dont plusieurs sautent aux yeux. Les entomologistes les appellent Ichneumons » Plus tard le Figaro , rendant compte de l’Exposition des insectes au Palais de l’Industrie, dit : « Nous apprenons qu’on vient de classer dans la catégorie des insectes utiles les mouches noires dont nous avons été infestés il y a quelques mois. Il est avéré que ces insectes ont détruit pen¬ dant leur invasion toutes les petites mouches nuisibles qui s’introduisent dans les fruits , les pucerons et les autres insectes qui sont la plaie des récoltes. » Ce n’est pas tout : l’affaire fut portée devant l’Académie des sciences. Un savant professeur, qui représente 1 entomo¬ logie dans la docte compagnie, fut naturellement interrogé sur le véritable nom de l’insecte, il le déclara Bibio hortu- lanus ; or, le premier collectionneur venu n’eut pas manqué de reconnaître le Bibio Marri , qui diffère de P hortvlanus par plusieurs caractères importants et dont la femelle est noire, tandis que la femelle d hortidanus a l’abdomen rouge. Il est inutile de réfuter toutes les assertions fantaisistes des journaux qui viennent d’être cités ; sauf le certificat d’inno¬ cuité , elles contiennent à peu près autant d’erreurs que de mots. l e Bibio Marri vit à l’état de larve dans la terre où il se nourrit de matières végétales ; on trouve aussi ces larves dans les bouses et les fumiers. Il éclôt du 15 avril au 1er mai, suivant la température ; les femelles volent peu, mais les mâles sont assez agiles, quand le soleil donne ; les deux — 103 — sexes vivent peu de temps , leur principale et presque leur seule occupation est la reproduction ; à peine s’ils sucent l’humidité des feuilles pour toute nourriture. Dès les premiers jours de mai l’espèce a disparu et fait place au Bibio horlulanus , toujours moins commun dans le Nord. Voilà toute la vérité, le reste est pure fantaisie, ce qui n’empêchera pas la crédulité publique d’ajouter foi, à la prochaine occasion, aux renseignements des journaux. Mais pourquoi ces apparitions insolites comme celles de Paris en 1872, de Lille en 1873 ? Tout simplement parce que pendant l'année ou ces années qui ont précédé chacune d’elles, la ponte s’est faite dans des conditions très-favora¬ bles, parce que les circonstances atmosphériques ont aidé les évolutions de l’espèce, et amené à bien la plus grande partie des œufs. Supposez un mois d’avril constamment froid et pluvieux, l’éclosion se fait mal, la reproduction est gênée, c’est la rareté pour plusieurs générations ; supposez au con¬ traire une série de générations favorisées, c’est l’abondance. Cette abondance est donc l’état normal, et si l’on raison¬ nait d’après la marche naturelle, ce ne serait pas dans les années de fréquence qu’il faudrait crier au phénomène, mais bien plutôt dans les années de rareté. A. de Norguet. LA FLORE DU BOIS D’ ANCRE. Les lecteurs du Bulletin connaissent déjà depuis longtemps l’intérêt géologique que présentent les environs d’Angre et de Montignies- sur-Roc (1). La Flore et le Faune de cette région méritent également l’attention du naturaliste : leur aspect relativement méridional et leur grande richesse s’a¬ joutent à la beauté du site pour provoquer chaque année de nouvelles explorations toujours productives , malgré les défrichements et les progrès incessants de la culture. (I) Voyez Bulletin, tome l«r, 1869, page ibü. — 104 — N. C’est surtout au printemps, vers la seconde quinzaine d’avril, qu’il faut parcourir cette jolie vallée de PHoneau, gravir les petits rochers qui l’entourent, visiter les bosquets et les bois qui l’avoisinent. On y voit alors en pleine floraison la Saxifraga gramüala , le Galeobdolon liiteum , le Sisymbrium alliaria, le Ranunculus auricomus , plantes qui dans les environs de Lille, ne montrent leurs fleurs que bien plus tard, et vers le commencement du mois de mai. Déjà vole sur les cardamines l’élégant papillon aurore, YAnthocharis car- damines , plus précoce également en ce lieu que dans aucune partie du département. En suivant les rives de PHoneau on peut faire rapidement, non loin du Caillou-qui-bique , une ample moisson de plantes rares. Là se trouvent en effet : VHelleborus viridis, qu’on voit encore à Rampemont, mais qui disparaîtra certainement avec les petits taillis que tra¬ verse la rivière ; [Y Anémone ranunculoides, plante généralement rare quoique abondante dans ses localités. On la retrouve sur les bords de la Meuse, à Pairy-Bogny ; Le Corydalis solida , digne de figurer dans les parterres : il orne aussi les belles prairies que domine le mont Fépin ; Le Ghrysosplenium ait er ni folium, qu’on peut encore récolter dans le bois d’Audregnies, le long d’un petit ruisseau aux eaux incrustantes, où il accompagne son congénère le Clirysosple- nium opposdifolinm. Ce dernier existe également à Angre, sous les rochers tapissés de Scolopendre ( Scolopendrium officinale) qui font face au Caillou, sur le flanc gauche de la vallée. Ces deux plantes se retrouvent dans les bois de Raismes et d’Aubry, aux environs de Valenciennes ; Le rare Gagea sylvatica , dont les fleurs peu nombreuses et verdâtres échappent facilement aux regards du botaniste ; La Cardamine amara , que j’ai recueillie aussi à Aubry. Ses congénères C. sylvatica et impatiens se voient, l’une — 105 - en suivant l’affluent de l’Honeau qui passe à Monlignies, l’autre dans les bois voisins où elle a été signalée par M. Lelièvre, le zélé naturaliste valenciennois. Je ne l’y ai pas revue. La Lathrœa squammaria , curieuse Orobanchée qui vit en parasite sur les racines des peupliers. Ces arbres portent en abondance sur leurs rameaux un autre parasite, le Gui , Viscum album , qui vit aussi sur les pommiers des vergers avoisinants. Je ne puis m’expliquer l’absence complète de cet arbrisseau dans la vaste forêt de Raismes et les bois qui en dépendent. L’influence de la nature du sol pourrait-elle se faire sentir jusque sur le parasite ? Le Petasites officinalis , qui forme de ses fleurs roses un riche tapis sur les parties dénudées des rives de l’Honeau. Le Géranium phœum , déjà signalé par Hécart sous le nom d e.lividum (1) et qui menace d’être enseveli sous les pierres rejetées des carrières voisines Je ne fais que citer en passant les espèces plus générale¬ ment répandues sans être absolument communes, telles que Paris quadri folia, Allium ursinum , Tamus communis , Nar- cissus pseudo-Narcissus , Potentilla verna , Sambucus ebulus , etc., etc. C'est aussi au bord de l’Honeau que j’ai observé il y a quelques années la variété Flosculosus du Senecio Jacobæus , que Th Lestiboudois a rencontré dans les dunes. Dans la rivière, au voisinage des ponts, on peut recueillir la Zannichellia palustris , et contre les pierres humides la Marchanlia conica. Les rochers nous offrent au printemps la Montia minor , les Myosotis versicolor , stricla et hispida ; plus tard la Malva moschata, les Sedum acre , rubens, reflexum} boloniense, toutes (l) La Florula hannonensis porto lucidum. C’est évidemment une faute d’impression : le G. lucidum n’a été trouvé, que je sache, ni à Angre, ni dans les limites du département du Nord. 106 - plantes qui se retrouvent parfois dans les champs sablon¬ neux, sur les murailles, les talus des chemins de fer, en un mot, dans des stations beaucoup moins naturelles. Les bois qui couronnent ces rochers renferment les Eu- pliorbia dulcis et Amijgdaloides , le Mercurialis perennis , souvent ravagé par YOEcidium mercuria'is , le beau Myosotis sylvatica, le Ribes rubrum , le Vincetoxicum officinale, la Viola hirta, YOrchis purpurea , le Neoltia nidus-avis , le rare Phyteuma nigrurn , le Luzula Forsteri, signalé pour la pre¬ mière fois dans notre pays par MM. Lelièvre et Boutmann, le Carex depauperata , également signalé par M Lelièvre, la Stellaria nemorum, l’ Alchemilla vulgaris , le Dianthus armeria , et parmi les cryptogames l’intéressante Morchella semi-liber a. Le bois d’Audregnies possède de plus Y Astragalus glyci- phyllos, le Carex pendilla, qu'on. retrouve à Aubry, le Carex strigosa et le Fragaria magna , espèce intéressante et trop peu étudiée jusqu’à présent. Sur les bords d’un mince torrent qui descend vers les bosquets de Rampemont, existe une petite tourbière où croît YAquilegia vulgaris et le Triglochin palustre. Le bois très- rocailleux de Rampemont renferme deux belles fougères : Y Aspidium aculeatum et YAspidium angulare. On y rencontre aussi YAconitum Lycoctonum, qui y a été découvert par M. Boutmann, et vers la lisière, dans les champs cultivés, la Sagina vegetalis. Une espèce voisine de cette dernière et généralement rare, la Sagina erecta , se trouve parmi les Polytrichum sur les rochers de Montignies, qui sont d’ailleurs plus riches encore que ceux d’Angre et d’Audregnies, puisqu’on y rencontre, outre les plantes que nous avons citées, Y Asplénium adianthum nigrurn, Y Asplénium septentrionale , et de plus le Buxus sempervirens et la Melissa officinalis . qui, s’ils ne sont pas entièrement indigènes, y croissent certainement depuis une époque fort ancienne et y ont conquis leur droit de cité. — 107 — Dans cette rapide esquisse de la flore des environs d’Angre, j’ai passé sous silence un certain nombre de plantes assez intéressantes qu’on trouve plus ou moins abondamment dans les champs ou au voisinage des habitations, par exemple : Valerianella carinata , Thlaspi arvense , Crépis Taraxaci folia, Ammi majus , Lolium italicum. etc. Ces plantes ne sont pas en effet spéciales à la région qui nous occupe et se rencon- contrent çà et là dans des conditions analogues. J’en dirai autant de la Parietaria erecta et du Chenopodinm bonus Henricus , qu’on trouve souvent dans les jardins d’Angreau, etc., et de V Helminthia echioides , bien que cette dernière plante se soit très répandue depuis quelques années dans la vallée de l’Honeau. Giard. CHRONIQUE Avril. météorologie. 1873 année moyenne. Température atmosphér. moyenne. 8? 21 9? 19 — moy. des maxima. 12° 02 — — des minima 4° 40 — exlr. maxima, le 16 24“ 10 — — minima, le 26. — 1? 20 * Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 758>r887 760^333 — — extr. max. le 3 . 767mm 75 — — — min. le 17. 747'"” 35 Tension moy. de la vap. atmosph. 6mm 23 6mm 35 Humidité relative moyenne %• • 72.80 69.74 Épaisseur de la couche de pluie. . 49 mm 93 37mm 70 — — d’eau évap. 76mm 22 90m™ 69 Le mois d’avril fut plus froid qu’en année moyenne : la haute température de mars se fit encore sentir dans les pre¬ miers jours, mais elle alla sans cesse en s’abaissant jusqu’au 10. Dès lors elle s’éleva jusqu’au 16 et redescendit jusqu’au 26 pour reprendre une marche ascendante jusqu’à la fin du mois. Les gelées des 24, 25, 26 et 27 furent très-préjudiciables — 108 - à la végétation. Les groseillers en pleine floraison et offrant les plus belles apparences, furent stérilisés. Les pruniers, les cerisiers, les abricotiers furent aussi très-éprouvés et la récolte future est très-compromise. Les premières tiges des pommes de terre et des houblons sont gelées également. La neige qui tomba pendant ces quatre jours aggrava encore l'influence néfaste du froid. Pendant tout le mois le vent souffla avec force du N.-O. et du N.-E. Le ciel fut moyennement nébuleux pendant le jour et presque toujours serein pendant la nuit, ce qui détermina un rayonnement considérable de la chaleur vers l’espace. L’air [des couches inférieures fut beaucoup plus humide qu’en année moyenne; il en fut de même pour celui des couches supérieures, dont le baromètre est le véritable hygro¬ mètre. Aussi l électricité atmosphérique fut-elle considérable. Elle se manifesta par la grêle des 6, 7, 8, 9, la grêle et la neige des 24, 25, 26, 27, les éclairs sans tonnerre du 17 et l’orage du 18. La quantité totale de pluie recueillie en 22 jours ne fut pas abondante, ce qui s’explique par l’intermittence des chutes, caractère distinctif du mois d’avril. Le 27 seulement elle fut continue et fournit 10“m 33 d’eau. L’état hygrométrique des couches inférieures de l’atmos¬ phère fut défavorable à l’évaporation, de beaucoup inférieure à celle d’avril année moyenne. Dans les régions élevées, on observa les phénomènes opti¬ ques déterminés par l’humidité, tels que les halos solaires des 3 et 21, halos lunaires des 4 et 14, le magnifique par- hélie du 4. La hauteur barométrique fut au-dessous de la moyenne et les oscillations fréquentes d’une grande amplitude. Enfin pendant le mois il y eut 26 jours de brouillard, 14 de rosée, 1 de gelée blanche, 7 de grêle, 4 de neige. 20 jours le ciel fut à moitié couvert de nuages et 10 jours complète¬ ment couvert La quantité d’eau pluviale , quoique supérieure à celle qu’on constate en avril année moyenne, ne fut pas grande néanmoins. Elle n’entrava nullement les travaux agricoles et permit au niveau des nappes souterraines de s’abaisser d’une — 409 - manière continue, condition favorable à l’asséchemeut des terres arables. Malheureusement, après les dommages causés par les inondations, se produisirent ceux causés par un abaissement tardif et considérable de la température, aggravés encore par l’activité que les chaleurs des 44, 45, 46, 47 et 48 avaient imprimée à la végétation. V. Meurein. Sépulture franque. — On vient de découvrir à Remies (Aisne), dans une prairie qui borde la Serre , plusieurs tombes de pierre qui appartiennent incontestablement à l’époque franco-mérovingienne. Certains de ces tombeaux ou étaient vides, ou contenaient des ossements de différents cadavres, preuve de violation à une époque plus ou moins reculée. Dans une de ces tombes qui n’avait pas été fouillée, on a trouvé un certain nombre d’objets en fer : une boucle de baudrier, une hache, une lance de 60 centimètres dont la douille a conservé les rivets métalliques qui fixaient la hampe au fer M. Parent, sur la propriété duquel se trou¬ vaient ces tombeaux, a fait don des objets qu’ils contenaient au Musée de Laon, déjà si riche en armes et en bijoux mérovingiens. Stratiotes aloïdes. — Une note de M. A. de Norguet appelle l’attention des lecteurs du Bulletin sur le Stratiotes aloïdes (L.), dont l’espèce vient de disparaître de l’arrondis¬ sement de Lille. Qu’il me soit permis de consoler les bota¬ nistes lillois, en les mettant sur la piste de cette rare espèce, qu’ils pourront aller recueillir à la lisière même de cet arrondissement. Les stations du Stratiotes sont peu communes en France. L’herborisaleur parisien va chercher cette plante à l’étang de Trivaux, dans le bois de Meudon, ou encore à Marly, loca¬ lités où M. Weddell l’a introduite en 1842. Plus près de nous, les botanistes picards, comme tant d’autres, nous enviaient le Stratiotes , dont Pauquy, dans son excellente Flore, ne fait pas mention ; mais la Flore, d’apparition ré¬ cente, de MM De Vicq et de Brutelette, l’indique à Hesdin (Dovergne, Herbier-Bâillon). En Artois, M. J. Cussac, dans — 110 — la Flore Vandamme, constate sa propagation rapide dans les environs de Saint-Omer, à Clairmarais, à Watten, à Éper- lecques, et le long du chemin de fer jusqu’à Audruicq. Lestiboudois enfin nous indique comme stations, Courtrai, Gand, et les fossés de Lille ; elle n’existe plus dans cette localité. Personne n’a, je crois, cité une station bien plus rappro¬ chée, et que je vais indiquer aussi minutieusement que pos¬ sible. celle de Comines (Belgique), où il est facile au botaniste lillois d’ailer la recueillir à coup sûr. De Comines (France) l’amateur descendra vers la Lys, qu’il traversera sur un pre¬ mier pont, et remontera jusqu’à son extrémité la grande rue de Comines (Belgique), franchissant sur un second pont la Morte-Lys. A l’extrémité de la rue, il suivra à gauche la route de Warnéton et, en quelques pas, arrivera au canal de Lille à Ypres, canal à point de partage resté en souffrance et auquel il ne manque plus guère que de l’eau ; il traversera le canal, puis, tournant immédiatement à gauche, il redes¬ cendra vers la Morte-Lys, dans les prairies; c’est dans les fossés qui arrosent et divisent ces dernières qu’il recueillera le Slratiotes , que j’y ai découvert une première fois en 1868. Espérons que ce renseignement ne sera pas le signal de la disparition de l’espèce, comme cela a lieu trop souvent ; tous les ans en effet, aux environs de Paris surtout, des botanistes trop avides détruisent par des récoltes excessives les stations de telle ou telle espèce rare ; il faut savoir ménager aux autres les jouissances qu’on a savourées soi-même J ajou¬ terai que cette station est déjà menacée, si le canal s’achève, de disparaître rapidement sous les constructions nouvelles. Cette récolte, on le voit, exige peu de temps; s’il reste après cela au botaniste deux ou trois heures de loisir, il pourra remonter les bords ou le lit du canal et y récolter nombre de plantes des marais ou des étangs, et arriver ainsi jusqu’aux foirades (pardon ! le terme est technique) et éboulements gigantesques de la tianchée d’Hollebeke, qui lui réservent encore quelques bonnes trouvailles, mais dans le terrain mouvant desquels il devra s’aventurer avec pré¬ caution. E. Flahault. 111 — Anarrliique loup. — UAnarrichas lupus , Lin. (vulg. loup, chat marin), est un poisson du Groenland et des mers du Nord , qui , assez fréquent encore sur les côtes d’Angle¬ terre, devient rare dans la Manche où on le rencontre sur¬ tout, d’après M Marcotte, sur les bords de la Somme. M. Cha¬ rron, contrôleur des marchés de Lille, a récemment envoyé au Musée d’histoire naturelle un de ces loups de mer mesu¬ rant plus d’un mètre de long, et qui fera bientôt l’ornement de la galerie icthyologique. L’Anarrhique apport ent au groupe des Blennoïdes : il présente une dentition des plus remar¬ quable et d’une puissance telle qu’il peut, dit-on. briser une lame d'acier d’une certaine épaisseur. Le tube digestif est en rapport avec cette armature buccale : il est court et mince comme chez tous les carnassiers. Nous avons trouvé l’estomac rempli de débris de crabes (Cancer menas , Pagures ou Ber¬ nard l’Hermite). On y voyait aussi de gros fragments de co¬ quilles de Buccins ( B-uccinum undatum ), mais ces coquilles étaient roulées et avaient évidemment servi de logement aux Pagures engloutis par le vorace animal. Le foie est volumi¬ neux; le fiel, très-abondant, est recueilli par les Islandais, qui l’emploient en guise de savon. Au Groenland , on mange la chair de l’Anarrhique séchée ou salée: les avis sont partagés sur la valeur gastronomique de ces salaisons ; mais on s’ac¬ corde à reconnaître que la chair du loup marin est bonne quand elle a été bouillie. La peau sert à faire de la colle forte, des lanières assez résistantes et aussi une sorte de chagrin peu estimée. L’Anarrhique n’a jamais été rencontré au Sud de la Manche; mais on le trouve jusqu’en Amérique, et l’on en a pêché sur le banc de Terre-Neuve. Il vit longtemps hors de l’eau, nage avec lenteur et habite de préférence parmi les rochers, ce qui explique sa rareté sur nos plages sablonn uses. Giard. Chèvre fictérarielphe. — M. le docteur Couvreur, de Seclin, vient d’envoyer au Musée d’histoire naturelle de Lille un jeune chevreau à six pattes. C est une monstruosité appar¬ tenant au genre UHéradelphe (famille des Helerotypiens) de Geoffroy Saint-Hilaire. Les hétéradelphes sont des monstres parasitaires dont la partie postérieure du corps est double , — 112 — l'antérieure restant simple. Chez notre chevreau , la partie parasite (postérieure) est réduite aux deux membres abdo¬ minaux. La collection tératologique du Musée de Lille, rendue si intéressante par les travaux de M. Dareste , renferme déjà plusieurs cas de monstruosités analogues chez d’autres ani¬ maux, notamment un lapin acquis à Lille en 1867, et deux chats, dont l’un fut donné au musée en 1864 et l’autre offert en 1868 par M. Gustave Leroy. Plusieurs exemples d’hétéradelphie ont été aussi observés chez l’homme. Dans un cas recueilli par Buxtorff et tout à fait identique à celui de notre chevreau, l’individu porteur de membres supplémentaires vécut assez longtemps. A l’époque où on l’examina , il était marié de; uis six ans et père d’une fille et de trois fils tous bien conformés. On connaît d’ailleurs plusieurs observations d’hétéradelphes humains ayant vécu un temps plus ou moins long, et cette vitalité est d’autant plus remarquable que chez les animaux presque tous les cas connus sont présentés par des fœtus ou des sujets ayant quelques jours seulement. C’est là une diffé¬ rence singulière et encore inexpliquée , malgré les progrès incessants de la science tératologique. Giard. Socié é linnéenne «la nord de la France. — La Société Linnéenne d’Amiens continue avec le plus grand succès la publication de son Bulletin mensuel. Nous y remar¬ quons des articles sur l’habitant des Dytiscides, les Vers lui¬ sants et les Mouches phosphoriques, la Poule d’eau, les Infu- soirs des eaux stagnantes, la Guêpe frelon, la Cigogne blanche, etc., près Amiens. — M. de Mercey continue son résumé delà Géologie du canton d’Amiens. Nous avons déjà entretenu nos lecteurs de la discussion qui avait eu lieu au sein de la Société au sujet des Rideaux. Dans le Bulletin du Ie' février, M. Buteux défend son opinion. Les cultivateurs picards, dit-il, n’ont jamais été assez entre¬ prenants et disposés à faire des frais pour établir des rideaux ; il n’a pu entrer dans leur esprit de faire de pareils travaux. Il faut reconnaître que les grandes terrasses sont l’œuvre de la nature, mais dans bien des cas le cultivateur y a aidé tantôt volontairement, tantôt d’une manière inconsciente Je crois avec M. Dours que l’action séculaire de la charrue a eu pour effet d’exagérer les différences de niveau. J. G. Lille, imp. Six-Horemans. 73-1353 5* * Année. — N° 6. — Juin 1873. LE HOOP (1). I. Institution du Hoop. — Signification de ce mot. L’institution désignée sous le nom de Hoop semble avoir été spéciale à la Flandre maritime ; du moins, les recherches que nous avons pu faire pour en découvrir l’existence ailleurs sont restées stériles. Aucun des écrivains qui ont traité du droit public et des institutions politiques et judi¬ ciaires de la Flandre n’en fait mention. Warnkœnig et Rapsaet, dans leurs savants ouvrages sur le droit public, u’en parlent pas. Ce qu’il y a même de plus remarquable, et ce qui peut paraître singulier, c’est que les dépôts d’archives des localités où cette institution a fonctionné n’en conservent pour ainsi dire, aucun vestige. Cependant, elle a été en vigueur durant tout le moyen âge et pendant une partie de l’époque moderne; elle n’a disparu totalement, comme on le verra plus loin, qu’avec la révolution de 1789 (2). (1) Nous remercions M. de Coussemaker, le savant fondateur et pré¬ sident du Comité flamand de France, d’avoir bien voulu nous permettre de détacher, en faveur de notre Bulletin, quelques-unes des pages si curieuses qu’il vient de publier sur les Sources du droit public et coutumier de la Flandre maritime , dans les Annales du Comité flamand. (2) Un de nos savants confrères, M. le chevalier de Burbure d’Anvers, nous a fait remarquer que les ordonnances arrêtées « par la réunion » des délégués du Comte avec les échevins d’Anvers et les autres » ayant-droiis, ordonnances qu’on appelle ici les statuts du Hoop, » étaient qualifiées à Anvers de Turbe. Les décisions*prises par cette » réunion étaient prises Turbatim ; les registres où on les inscrivait » s’appellent Turbeboeken. Quelques réunions ont encore eu lieu au » XVIIe siècle à Anvers. Ces décisions formaient le complément des * coutumes- » — La compétence et les attributions de ces réunions ne paraissent avoir eu rien de commun avec les attributions législatives de notre Hoop. Ces appellations et ces mentions n’avaient plus aucune signification réelle ; c’étaient de vaines formules qu’on maintenait par une sorte d’habitude, et peut-être pour rappeler des droits dont on était encore fier. On les trouve dans le préambule de la Coutume de Cassél, publiée à Anvers en 1576. — 114 — Le mot Hoop est une expression flamande ayant diverses acceptions ; par rapport aux choses, il signifie tas, monceau : een hoop koorn, un tas, un monceau de blé; par application aux animaux, il signifie troupeau : een hoop scaepen , un troupeau de moutons ; appliqué aux personnes, il signifie troupe, bande : een hoop krygsvolk , une troupe de soldats ; et par extension assemblée. Dans quelques documents , le mot Hoop est traduit en latin par Cumulus , et en français par Mont. La traduction latine n’est pas satisfaisante, car cumulus ne s’applique qu’aux choses. Quant au mot français mont , il est encore plus impropre à désigner une assemblée. Dans la charte de Cappellebrouc, le Hoop (1) est appelé Conseil de toute l’association du brouck, Consilium totius universilatis de Brocho, quod vulgariter dicitur Hop. Au surplus, le latin Cumulus et le français Mont n’ont été employés que très-accidentellement. Le mot Hoop a été usité dans presque tous les actes flamands, et souvent même dans les documents français et latins depuis le XIIIe siècle. Le Hoop était une assemblée générale des échevins d’un certain nombre de communes indépendantes les unes des autres, mais liées ou associées entre elles dans un intérêt naturel ou réciproque. IL Origine du Hoop. — Son fonctionnement. — Sa disparition. Avant d’examiner le caractère et les attributions du Hoop ; avant d’indiquer le ressort territorial où il fonctionnait ; avant de parler de ses attributions judiciaires, disons un mot de son origine et voyons les modifications qu’il a subies avant de disparaître. Son origine, on la trouve dans l’une des plus anciennes traditions germaniques, dans ces assemblées où les tribus (1) Cartulaire de Watten. — Essai sur le Hoop, p. 22. — 115 — avaient coutume de traiter les affaires publiques. Tacite, dans son admirable livre sur les mœurs des Germains, raconte qu’à des jours marqués au commencement de la nouvelle ou de la pleine lune, les Germains s’assemblaient pour délibérer sur les affaires publiques et pour exercer le droit de haute-justice. Ils ne comptaient pas comme nous, dit Tacite, par jours, mais par nuits (1). Cette tradition est conservée dans les statuts du Hoop. On y compte par nuits et non par jours (2). Ce droit de s’assembler pour traiter les affaires nationales s’est conservé en Flandre. Sauf quelques modifications, il a traversé tout le moyen-âge jusqu’à l’époque moderne où il s’est transformé en ce qui est la base du gouvernement anglais. Il était tellement considéré comme fondamental qu’on ne jugea pas nécessaire de l’insérer dans les Kenres soumises à l’approbation du souverain. La Heure de Bergues, de Bourbourg et de Fûmes, sanctionnée en 1240 par Thomas de Savoie, ne parle pas du Hoop qui unissait les trois villes. Mais une charte de Louis de Crécy, de 1332, citée par Meyer, et par laquelle ce prince enlevait aux habitants de Fûmes leur privilège d’alliance avec Bergues et Bourbourg, constate d’une manière formelle que le droit de Hoop existait alors au profit de ces trois villes (3). Ce privilège et d’autres, qui avaient été confisqués en même temps, leur furent rendus plus tard. Les libertés communales 1 c’était la grande affaire des communes flamandes ; elles en étaient jalouses à l’excès ; le (1) Nec dierum numerum, ut nos, sed nocluum, computant. Germ. c. xi. (2) Voir les n08 2 et 8, page 237. (3) 1332, Pascha, XIX aprilis Furnensibus Ludovicus sua innovavit privilégia, per novas tubellas suas quæ centum XXXVII aut eoamplius utiles continebant articulos. Inler alia conjunclionem suslulit trium prætoriorum Furnensis, Bergcnsis et Broburgensis in materia appcl- lalionum, sanxitque ut omnes intcrjectæ appellationes illorum prælo- riorum sortirentur suo in concilio. Meyei com. sive. Annales Fland, Anvers, 1561, p. 135. — 11.6 — moindre soupçon qu’on pût porter atteinte à leurs préroga¬ tives donnait naissance à des difficultés fréquentes entre elles et le souverain. Ces démêlés sans cesse envenimés par des discussions de famille entre les membres des comtes de Flandre, par les intérêts opposés des grandes corporations ou des grandes villes, par les intrigues et les rivalités de la France et de l’Angleterre, occasionnèrent les troubles funestes de la fin du XIVe siècle, qui aboutirent à la bataille de Roose- beke, qu’on peut considérer comme le tombeau des libertés flamandes , car sur le champ de bataille même Louis de Male exigea que toutes les villes de Flandre lui remissent leurs privilèges. Cet ordre s’exécuta le 20 février 1382. On visita les privilèges de Bailleul, Cassel, Bergues, Bourbourg, Mar- dique et Dunkerque (1) ; les uns furent rendus, les autres retenus. Le Statut des enquêtes et celui du Hoop surtout ne furent pas rendus. Les prérogatives du Hoop furent donc considérées comme empiétant sur les droits du souverain. On trouve à la Chambre des comptes de Lille un document qui semble se rattacher au fait dont il vient d’être parlé. C’est un ensemble d’articles de lois que le comte de Flandre imposa à la ville de Bruges et qu’il déclare vouloir appliquer aux autres villes et châtellenies. Le savant Godefroy est d’avis que la date à assigner à cette pièce est 1324 ; nons inclinons à penser qu’elle pourrait avoir été faite à l’occasion de l’en¬ lèvement de la Keure de Bruges en 1382. Mais qu’elle appar¬ tienne à l’une ou à l’autre de ces époques, elle a été faite dans le but de restreindre, et elle restreint effectivement, les privilèges des villes de Flandre dans certains points essen¬ tiels. Nous appelons spécialement l’attention sur les articles 38, 40, 41 et 42 de ce document qui est publié à la fin de l’Appendice, sous la lettre B (2). _ (1) Nous reproduisons ces intéressants documents dans l’appendice A. (2) Voir l’important travail de M. de Coussemaker dans les Annales du Comité flamand , t. XI, p. — 117 — A partir de cette époque, les renseignements sur le Hoop de Cassel et de Bailleul manquent. On ignore par conséquent quand il a cessé d’y fonctionner (1). N’oublions pas toutefois que déjà précédemment Robert de Cassel, qui avait eu à se plaindre de plusieurs villes de Flandre soumises à sa domi- nalion, avait enlevé leurs privilèges et ne les leur avait rendus qu’après soumission et rançon. D’un autre côté , Robert, à l’instar des souverains, avait institué près de lui un Conseil privé, composé de ses grands feudataires. Ce Conseil était chargé non-seulement de donner des avis sur ses affaires privées, mais aussi de statuer sur certaines causes de haute criminalité dont le prince voulait connaître. Cette attribution, qui était un empiètement flagrant sur les droits des assemblées des Enquêtes et du Hoop, ne fut pas accueillie sans murmure et sans protestation. Un nouvel évènement dont les faits, restés presque in¬ connus jusqu’alors , ont été si remarquablement mis en lumière dans les Annales du Comité flamand de France (2), par notre regretté confrère Alex. Desplanque, arraché si jeune à la brillante carrière ouver'e devant lui, a occasionné de nouvelles modifications dans la coutume de Cassel. Nous voulons parler des troubles de la châtellenie de Cassel, de 1427 à 1431, à la suite desquels Philippe-le-Bon imposa une nouvelle coutume où il n’est plus question ni des En¬ quêtes ni du Hoop (3). Enfin, là où le Hoop avait persisté à fonctionner, il avait perdu son caractère primitif. La juridiction d’appel en ma¬ tière judiciaire et administrative, le droit de modifier les lois et coutumes ainsi que les diverses attributions qui en décou- (1) On verra ailleurs ce qu’il est devenu dans les châtellenies de Bergues et de Bourbourg. (2) Annales du Comité flamand de la France, t. VIII, p. 2F7. (3) Une copie ancienne de ce précieux monument coutumier est entre les mains de M. Tadliar, à Douai. 11 en existe aussi une autre aux archives de la ville d’Ypres. — 118 — laient, tout cela avait disparu ; on avait oublié jusqu'au nom lui-même qui résumait ses droits et ses privilèges. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain jurassique. (Suite). Caractères stratigraphiqucs. Pendant toute la durée de l’époque jurassique , le nord de la France fit partie d’une mer intérieure désignée sous le nom de Bassin de Paris , et dont les rivages étaient l'Ardenne, le Hundsruck, les Vosges, le Plateau central, la Bretagne et la Vendée , la presqu’île de Cornouailles, le pays de Galles, etc. Entre les Vosges et le Plateau central d’une part, entre la Vendée et le même Pla¬ teau central d’autre part, les détroits de la Côte d’Or et du Poitou faisaient communiquer le bassin de Paris avec les * mers du sud. Ils furent comblés vers le milieu de l’époque jurassique et le bassin de Paris devint un golfe. Notre région était alors partiellement à l'état de terre ferme , car le rivage de la mer, après avoir décrit un golfe dans les environs de Luxembourg, passait au N. d’Arlon à Mézières, à Hirson , au S. d'Arras et à Marquise. Dans tout l'intervalle entre Hirson et Marquise, le terrain jurassique est caché par une épaisse couche de terrain crétacé, mais on en aperçoit quelques lambeaux plus au S. dans le relèvement du pays de Bray. Pendant la première partie de l’époque jurassique, le rivage de la Flandre et de l’Ardenne s’abaissait et la mer gagnait de plus en plus , de sorte que les dépôts les plus nouveaux re¬ couvrent les plus anciens. Puis, il se produisit un mouvement contraire : le rivage s’exhaussa, la mer recula , et les sédi¬ ments alors formés sont en retrait sur les précédents. Bistribution géographique et division en as¬ sises. Le terrain jurassique affleure dans trois points diffé¬ rents de notre région : les Ardennes, le Boulonnais, le pays de Bray. — 119 — On peut le diviser en quatre étages : le jurassique infé¬ rieur, Poolite, Poxfordclay et le jurassique supérieur. Le premier étage manque dans le Boulonnais et le dernier existe seul dans le pays de Bray. 1° Ardennes. Le terrain jurassique du département des Ardennes forme une pointe triangulaire qui s’avance jusqu’à Ilirson entre les terrains primaires de PArdenne et le terrain crétacé de la Champagne. L’extrémité de cette pointe est composée par l’étage oolitique, celui qui s’est déposé à l’époque où la mer avait sa plus grande extension. Par suite du double mouve¬ ment d’abaissement, puis d’exhaussement, les assises infé¬ rieures affleurent successivement à mesure qu’on s’éloigne d’Hirson en suivant l’ancienne côte ardennaise, et les assises supérieures se montrent, aussi successivement, le long de la bordure crétacée. Etage jurassique inférieur. Cet étage a été partagé en deux assises , le Lias et P lnfralias ou zone à Avicula contorta. Au milieu du lias, il y a des couches remarquables par l’énorme quantité de Gryphées qu’elles renferment elles peu¬ vent servir 5 diviser l’assise en trois zones. La zone supé¬ rieure est caractérisée par la Belemniles tripartitus ; la zone inférieure aux Gryphées se divise en deux niveaux : celui du bas à Ammonites planorb 's , celui du haut à Amm. angu- latus ; quand à la zone à Gryphées, on peut aussi y distinguer le niveau à Ostrea arcuata à la base, et le niveau à 0. cijm- bium dans la partie supérieure. Le long de PArdenne, la composition minéralogique du Lias est très-variable ; en un point il se déposait des sables , plus loin des argiles ou des calcaires argileux. Il en est ré¬ sulté pour l’étude géologique de grandes difficultés qui n’ont pu être vaincues que lorsque MM. Terquem et Piette se sont astreints à suivre pas à pas les divers niveaux fossilifères (1). (1) Bulletin de la société géologique de France, 2° série, XIX, p. 322. — 120 - Ajoutons que les modifications dans la nature des sédiments ont dû amener quelques changements dans la faune , telles espèces se plaisant dans l’argile , d’autres , comme les Car- dinies, préférant les fonds sableux. Assise de l'Infr alias. L’Infralias est composé de grès jaune micacé et de poudingue argilo-siliceux renfermant un grand nombre de débris de vertébrés, ce qui lui a valu le nom an¬ glais de Bone Bed, couche à ossements. On y trouve intercalé un petit banc calcaire qui contient quelques fossiles et par¬ ticulièrement Avicula contorta , il se termine par une couche de marne rouge semblable à celle du trias. Cette assise, épaisse de 10 mètres, a reçu des géologues lorrains le nom de Grès de Kedange et des géologues belges celui de Grès de Martinsart. On peut la suivre d’une manière continue au dessus du terrain triasique de la Lorraine jusqu’auprès des Bulles (village sur la Semoy au S. de Neuf château) , puis par lambeaux au fond des vallées jusqu’à Muno contre la fron¬ tière française. L’HÔTEL DES MONNAIES DE LILLE. Les archives de l’Hôtel des Monnaies de Lille ne se trou¬ vent pas dans le dépôt départemental du Nord; elles sont conservées aux archives nationales et à l’Hôtel des Monnaies de Paris ; mais on trouve sur cette institution des renseigne¬ ments dans les archives communales de Lille et dans la col¬ lection de M. Gentil, juge au tribunal de la même ville. En consultant les inventaires du ces archives, Y Histoire de Lille de M. Victor Derode et les documents mis au jour par la Chambre de Commerce, il est possible de reconstituer, dans leur ensemble, les événements relatifs à l’Hôtel des Monnaies de Lille. Dès le XIe siècle, Lille avait une monnaie ; mais l’institu¬ tion même de YHôtel ne date que du XVIIe siècle. Après avoir rétabli la domination française en Flandre, Louis XIV, par — 121 — un édit de septembre 1685 daté du château de Chambord, établit à Lille un Hôtel des Monnaies sur des bases à peu près semblables à celles de l’Hôtel des Monnaies de Paris (1). La situation de la capitale de la Flandre, l’activité commer¬ ciale et industrielle de la contrée qui l’entoure, sa proximité des ports de l’Angleterre et de la Hollande, donnèrent au nouvel atelier monétaire une importance considérable. Dès 1686, son voisinage fit fermer l’Hôtel des Monnaies d’Amiens ; huit ans après sa fondation il avait déjà fabriqué sept millions et réformé vingt millions d’espèces monnayées de diverse na¬ ture. Aussi au XVIIIe siècle, on augmenta à plusieurs reprises le nombre des officiers de la Monnaie et le personnel de ses ateliers : en 1791, l’Hôtel de Lille était à même de frapper par jour trois à quatre cent mille livres d’or en louis et sept cent cinquante livres en sous. Durant la révolution et en 1800, il fut question de concen¬ trer tous les ateliers monétaires à Paiis et de transporter celui de Lille à Bruxelles ; les réclamations du Conseil municipal et de la Chambre de Commerce de Lille empêchèrent la réalisation de ce projet. L’Hôtel des Monnaies de Lille ne tarda pas à devenir le plus important de tous ceux de la pro¬ vince. A partir de 1803, époque où commencèrent à être frappées les pièces d’or de 20 et de 30 francs, on chargea plus particulièrement de cette fabrication les ateliers du chef-lieu de notre département. On y a parfois frappé, en un seul jour, 20,882 pièces de 40 francs ou 835,280 francs; durant l’année 1821, on fit par jour 20,000 pièces de 20 francs ou 400,000 francs. En consultant le tableau de fabrication d’espèces d'or et d’argent de 1818 à 1834, il est facile de voir l’importance de l’Hôtel des Monnaies de Lille : En tête, se trouve Paris qui a fabriqué 558 millions en argent et 272 millions en or ; puis Lille, 396 millions en argent et 57 millions en or ; puis Rouen, 179 millions en argent et 5 millions en or; puis Lyon, (1) Ce document se trouve dans les Archives municipales de Lille. — 122 — 101 millions en argent, pas de fabrication d’espèces d’or ; les neuf autres villes où se trouvaient des ateliers monétaires n’atteignaient pas 100 millions en argent, et étaient de beau¬ coup inférieurs au point de vue de l’or. Dans l’année 1833, le chiffre de fabrication de Lille égala celui de Paris. Les ateliers du Nord devaient bientôt dépasser considérablement, à certains points de vue, ceux de la Capitale. Voici le tableau de la fabrication des monnaies d’argent de 1839 à 1843 : Lille, 139,249,516 fr. ; Paris, 71,478,001 ; Rouen, 74,272,986; Bordeaux, 25,000,000; Strasbourg, 42,000,000; Lyon, 3,000,000. Ainsi, pendant ces cinq années, l’établissement de Lille a produit les 2/5 de toute la monnaie d’argent fabriquée en France. Les causes des développements de l’Hôtel des Monnaies de Lille se trouvent principalement dans la situation de cette ville. Les lingots et les monnaies qui doivent servir de matières premières, sont fournis principalement par l’Angleterre et la Hollande; au point de vue des sources d’approvisionnement, le chef-lieu du nord est donc mieux placé que toutes les autres grandes villes de la France. Au point de vue des frais de fabrication, il peut se procurer plus facilement le charbon, le fer et tous les ustensiles nécessaires aux ateliers. D’un autre côté, cet Hôtel des Monnaies, situé dans un centre commercial et manufacturier, l’un des plus importants de la France, et qui plus que tout autre à besoin de numéraire, trouvait autour de lui un débouché facile et favorisait le commerce qui profitait de la négociation de ses valeurs. Les idées de centralisation excessive, qui dominaient les générations qui nous ont précédés, déterminèrent le gouverne¬ ment de Juillet à laisser tomber peu à peu l’établissement fondé par Louis XIV. Les réclamations des principaux commerçants de Lille et des environs, les pétitions et les lettres de la Chambre de Commerce, les vœux émis par les Conseils d’arrondissement et le Conseil général empêchèrent la - 123 suppression officielle des ateliers monétaires de notre chef- lieu de département; mais, bien que la loi de 1837 n’eut supprimé que six Hôtels des Monnaies parmi lesquels n’était pas compris celui de Lille, le gouvernement cessa d’y faire travailler. Malgré les réclamations plusieurs fois renouvelées de la Chambre de Commerce de Lille et du Conseil général, ses ateliers restèrent inoccupés durant environ vingt-cinq ans. Il y a plusieurs années déjà, le matériel des ateliers moné¬ taires de Lille a été transporté à Paris, et l’Hôtel, vendu à un particulier, a même perdu son nom. La rue qui l’avoisine en rappelle seule le souvenir pour notre génération. Espérons qu’un jour les réclamations de la Chambre de Commerce seront entendues, et que le chef-lieu du département du Nord verra se rétablir, dans son enceinte agrandie, une institution que les développements de l’indus¬ trie rendraient encore plus utile aujourd’hui que dans le passé. RECHERCHES SUR LES EAUX SULFUREUSES DU NORD, Par M Roger Laloy. Les eaux sulfureuses de Saint-Amand jouissent d’une cer¬ taine célébrité médicale ; aussi ont-elle déjà donné lieu à de nombreuses études tant historiques que chimiques. Parmi ces dernières, on peut citer une analyse de M. Drapier, phar¬ macien à Lille (1804) ; il a trouvé environ un gramme et demi de résidu solide par litre d’eau, ce qui est encore exact. En 1820, M. Pallas, médecin à l’hôpital militaire de Lille, fit une première analyse complète de ces eaux ; une seconde fut faite en 1830 par M. Kuhlmann, délégué par le Préfet du Nord, dans un rapport sur la situation et l’avenir des bains de Saint-Amand. C’est de là que date la restauration et le bon aménagement de l’établissement actuel. En 1850, M. üelanoue, de Valenciennes, présenta quelques idées géologiques sur l’origine de ces eaux ; il suppose que — 124 — ce sont des eaux superficielles comparables, sous tous les rapports, à celles d’Enghien. Mais ces idées n’étaient basées sur aucune observation sérieuse (on verra qu elles sont erronées) et les analyses des savants étaient contradictoires. Ensuite les sources de Saint-Amand ne sont pas les seules sulfureuses du départe¬ ment du Nord. Il était donc désirable de faire une nouvelle étude d’ensemble avec tous les progrès que la science moderne a mis à la disposition des travailleurs. M. Laloy l’a entreprise avec beaucoup de zèle et son mémoire a reçu l’approbation de la Société des Sciences de Lille qui doit le publier pro¬ chainement. M. Laloy établit qu’il y a dans notre région deux espèces d’eaux sulfureuses qui, par une circonstance assez bizarre, se trouvent toutes deux dans les environs de Saint-Amand et de Marchiennes. Les premières sont froides, ne contiennent qu’une très- petite quantité d’hydrogène sulfuré (0,00012 par litre). On les rencontre à la base des terrains tertiaires, au contact de la craie. Elles n’existent que là, où les couches tertiaires inférieures sont chargées de lignites pyriteux. Il est probable que l’hydrogène sulfuré qui communique à ces eaux une légère odeur provient de l’oxidation de la pyrite et de la décomposition du sulfate de fer formé par la matière orga¬ nique des lignites. Beaucoup d’eaux de cette nature se retrou¬ vent dans les arrondissements de Douai et de Valenciennes. Les eaux sulfurées de seconde espèce sont thermales. Elles renferment une plus forte proportion d’acide sulfhydrique et de matières salines entr’autres du sulfate de chaux ; enfin elles contiennent de la barégine, matière organique particulière qu’elles laissent déposer à l’air et à la lumière. M. Laloy suppose même que cette barégine est la cause directe de la sulfuration des eaux, en s’oxydant au -dépens du sulfate de chaux qui y est en dissolution. Telles sont celles de St-Amand. — 125 — M. Laloy étudie d’abord la boue de St-Amand, dont l’effica¬ cité médicale est supérieure à celle des eaux. Elles le doivent probablement à ce qu’elles enlèvent aux eaux minérales qui les imprègnent et les traversent la plus grande partie de leurs principes actifs ; elles les condensent et en facilitent l’ab¬ sorption. Les sources minérales de l'établissement de bains de Saint- Amand sont au nombre de quatre, dont deux seules sont sul¬ fureuses : les fontaines de l’Évêque d’Arras et du Pavillon ruiné. Les deux autres non sulfureuses sont celles de la fon¬ taine Bouillon et de la Chapelle (ancienne fontaine du Puisard). La première, la plus sulfurée des quatre et la seule employée en boissons, se déverse dans un kiosque isolé ; les trois autres coulent dans un bassin, au centre de l’établissement. Ces eaux minérales étaient fréquentées par les Romains ; elles furent ensuite abandonnées jusqu’en 1650. On ne con¬ naissait alors que la fontaine Bouillon. Lors des travaux de captage qu’on lui fit subir, elle se divisa de manière à donner naissance, à la source do Pavillon ruiné ; les deux autres parurent plus tard. * La fontaine de l’Evêque d’Arras a une température de 23°, 5 et contient 0,00132 par litre d’acide sulfhydrique. La fontaine Bouillon marque 27° et, à l’exception de l’hydrogène sulfuré et de la barégine, renferme les mêmes principes que la précédente et dans les mêmes proportions. Aussi M. Laloy la considère-t-il comme provenant de la même source. Une circonstance particulière ayant détruit la barégine dans le courant de la fontaine. Bouillon, il n’a pu s’y* produire d’hy- drogéne sulfuré. Près de Saint-Amand, à trois kilomètres de l’établissement des bains, un sondage entrepris dans la prairie du Clos, il y a près de trente ans, pour obtenir du charbon, a fait naître une source sulfureuse, qui n’a pas encore été étudiée, ni même mentionnée. Après avoir traversé les sables et l’argile ter- tiaires, la craie, les dièves, le tourtia , on atteignit le calcaire carbonifère. A peine l’eut-on entamé, que l’eau jaillit en abondance et inonda les environs. On voulut d’abord boucher le trou ; n’y pouvant parvenir, on eut l’idée, qu’on abandonna ensuite, d’employer ce cours d’eau comme force motrice. A la fin de janvier dernier, son débit était encore de 18,500 hectolitres en vingt-quatre heures. Sa température est de 18°, sa teneur en acide sulfhydrique très-faible. M. Laloy démontre que ce n’est pas autre chose que de l’eau thermale comme celle de la fontaine de l’Évêque d’Arras, mélangée d'une cer¬ taine quantité d’eau froide et calcaire qu’elle a entraînée en traversant les divers niveaux aquifères de la craie. La relation de ces sources a du reste été mise en évidence, par ce fait que lors du percement et du jaillissement de la fontaine du Clos, les sources de l’établissement ont subitement diminué. Il y a encore dans les environs deux autres sources sulfu¬ reuses provenant également de forages destinés à la houille et qui ont paru dès qu’on a entamé le calcaire carbonifère. L’une est dans la forêt de Saint-Amand, près du Rond-Point, l’autre au Sec-Marais, sur la route de Marchiennes à Orchies. En 1865, dans une fosse houillère en creusement à Meur- chin, on atteignit le calcaire carbonifère par une galerie hori¬ zontale ouverte à une profondeur de 240 mètres. Il jaillit aussitôt une source thermale et sulfureuse d’un débit de 20,000 hectolitres par jour. On ne put la maîtriser et on dût abandonner la fosse. Le niveau de l’eau s’y maintient à une profondeur de neuf mètres, tandis que dans les puits voisins elle n’est qu’à onze mètres. La température est de 26° à la surface et de 40° à deux cents mètres de profondeur. La teneur en acide sulfhy¬ drique est de 0,031 par litre. C’est un peu moins qu’à Enghien et beaucoup plus que dans les eaux sulfureuses de la Savoie et des Pyrénées. Aussi le gouvernement en a-t-il autorisé l’exploitation au point de vue médical. La source de Meurchin — 127 — présente avec les précédentes quelques différences de com¬ position que M. Laloy tente d'expliquer par un mélange avec une eau chlorurée comme on en trouve en plusieurs points du terrain houiller. De ces recherches il résulte quil existe dans notre pays, au. contact du calcaire carbonifère et de l'étage houiller, une source thermale sulfureuse, dont le niveau se maintient à vingt-deux mètres au-dessus du niveau de la mer. C’est là un fait important pour l'histoire naturelle du pays et dont la découverte est due toute entière à M. Laloy. Il ne tente pas d'expliquer l'origine de la minéralisation et de la températnre. Nous louons cette prudence ; elle sied bien à un jeune homme et donne d’autant plus de confiance aux résultats qu'il annonce. Non-seulement cette étude a un grand intérêt scientifique, mais on pourra peut-être en faire sortir des déductions pra¬ tiques pour l’établissement de Saint-Amand. Puisque les sources sulfureuses viennent du calcaire car¬ bonifère et se mélangent en route à l’eau des nappes aqui¬ fères plus élevées, pourquoi ne ferait-on pas un forage par¬ faitement tubé qui irait les prendre à leur lieu d’origine et les amènerait au jour sans mélange? Leurs qualités curatives ne pourraient qu’y gagner. J. G. PATRIA BELGICA. Ce livre a pour but, comme l’indique son titre et les pre¬ mières lignes de l’introduction, de réunir toutes les connais¬ sances relatives à la Belgique. C’est une encyclopédie où prennent part les hommes les plus distingués de la Belgique et que dirige M. Eugène Van Bemmel, professeur à l’Univer¬ sité de Bruxelles, ancien directeur de la Revue trimestrielle * Le succès de cette publication est immense. Nous en ferons connaître successivement tous les articles à mesure qu’ils paraîtront. — 428 — I. — Climatologie et météorologie. Par M. J.-C. Houzeau , membre de l’Académie. Cet article nous intéresse au plus haut degré , car le climat de la Belgique est le nôtre. t d'accord pour les pros¬ crire. Le produit alimentaire en est insignifiant, tandis que le résultat en est désastreux pour la propagation des oiseaux insectivores. VIII. — Poissons et Pêches , Par M. le professeur Van Beneden. Cet article, auquel nous avons emprunté la liste des Poissons de nos côtes, contient quelques détails sur chacune des espèces rencontrées dans les eaux douces ou marines de la Belgique et sur les principales pêches dont elles sont l’objet. M. Yan Beneden supprime, probablement comme syno- nimes, de nombreuses espèces de poissons d’eau douce citées par M. de Selys Longchamps dans la Faune Belge et repro¬ duites dans notre Bulletin (t. IV, p. 231). Ainsi il contient treize espèces de moins de la famille des Cyprinidés. C’est aussi en vain que nous y avons cherché la Truite, qui est pourtant bien un poisson belge. Une telle omission ne peut s’expliquer que par la perte d’une portion de manuscrit. L’article termine par des considérations très-intéressantes sur la conservation de la pêche maritime. Déjà à la fin du siècle dernier, on se plaignait de la dimi- - 199 - nution des poissons de mer et l’Académie de Bruxelles mit au concours, en 1780, l’étude des abus de la pêche, ainsi que des moyens d’y remédier. M Van Beneden est persuadé que « toutes les mesures réglementaires et restrictives, ne peuvent être que vexatoires pour le pêcheur, nuisibles à- son industrie- et sans utilité pour personne. ') Il s'appuie sur l’exemple de la Hollande, où la pêche est libre depuis 1867, sur l’enquête faite en Angleterre, qui conclut à la suppression de toute entrave, à la liberté la plus complète de temps, de lieu et d’engins. a D’après l’avis du rapporteur, le professeur Huxley, l’homme ne saurait mettre le trouble dans la fécondité de cette vaste mer que l’on appelle la mer du Nord et un certain nombre de poissons voraces pourraient plus détruire en quelques heures que toutes les flottilles de pêche réunies en plusieurs semaines. Le poisson, en général, ne se reproduit pas par une dizaine d’œufs, comme les oiseaux, mais par des milliers ou plutôt par des millions, dont une large part est destinée à servir de pâture. » BULLETIN DE LA COMMISSION HISTORIQUE DU DÉPARTEMENT DU NORD (\) . La Commission historique du département du Nord con¬ tinue ses travaux avec activité. Le XIIe volume de ses Mé¬ moires vient d’être publié, après avoir été présenté au Conseil général durant sa dernière session. Il suffit de prendre connaissance des procès-verbaux pour avoir la certitude du zèle qui anime les membres de cette Commission et des efforts qu’ils ne cessent de faire pour établir des sous-commissions dans les arrondissements On ne saurait trop approuver ces efforts ; pour un département aussi vaste et aussi riche en souvenirs historiques que le (1) Tome XIIe. Lille, Danel, 181 , in-8, 562 pages. N. — 200 - Nord, pour une contrée qui offre des provinces jadis si différentes par leurs institutions, par leurs mœurs et par leur langue, il faut que des travaux soient opérés sur tous les points et puissent être centralisés au chef-lieu du départe¬ ment. Le tome XIIe du Bulletin de la Commission historique qui vient de paraître renferme plusieurs mémoires curieux, importants pour l’histoire de la contrée. Nous ne reviendrons plus sur Y Histoire de la sainte et noble famille, qui ouvre ce volume ; déjà dans ce recueil nous avons félicité l’auteur de cette intéressante publication, M. le comte de Fontaine de Resbecq. La Statistique féodale de la châtellenie de Lille qu’offre ensuite le volume, est l’un de ces travaux histori¬ ques qui ne peuvent être analysés Lorsque l’auteur de ces curieuses recherches, M. Leuridan, archiviste de Roubaix, publia la première partie de son travail, nous l’avons remercié au nom de tous les érudits. La seconde partie, qui concerne le Carembaut, mérite encore à bien plus juste titre les éloges de ceux qui s’occupent d’histoire locale : sortant des bornes, peut-être un peu étroites, dans lesquelles il avait été forcé de se tenir pour la première partie de son ouvrage, le savant historien de la châtellenie de Lille rappelle tous les fiefs de chaque localité, donne la succession de toutes les familles qui ont possédé ces fiefs ; tous les noms géographiques et histo¬ riques de la féodalité se trouvent dans ces recherches. Comme le Carembaut renferme le domaine de Phalempin qui était le fief du châtelain de Lille, le chef-lieu de cette châtellenie héréditaire, M. Leuridan, publie une étude sur l’origine des châtelains de Lille, sur leurs offices, leurs attributions et leurs devoirs, sur leurs rapports avec les communes et les monastères, que l’on peut considérer comme un modèle du genre. Nous ne saurions trop recommander ces pages à l’attention de nos lecteurs. Deux autres mémoires concernent Fépoque de 1 Intendance. L’un, qui a été retrouvé dans les archives d’Orchies par un — 201 - chercheur aussi laborieux que modeste , M. Lahaussois , présente les réponses faites par le magistrat d’Orchies à des questions que le subdélégué M. d’Haffreingues avait posées en 1766 sur l’état des juridictions judiciaires dans cette ville et fait connaître avec netteté la situation à ce point de vue ; l’autre établit que ce n’est pas à l’intendant M. Desmadrys qu’il faut attribuer le mémoire sur l’Intendance de la Flandre flamingante qui a été publié dans le tome XIe du Bulletin, mais à J. -À. de Caligny, ingénieur, honoré de l’estime et de l’amitié de Vauban, qui fut longtemps chargé de la défense de Calais, Dunkerque, Gravelines, Mardyck, Bergues et Ypres. Une étude sur la vie et les travaux de ce personnage trop peu connu dans notre histoire, montre ce qu’était alors un officier du génie. L’infatigable M. E. de Coussemaker a publié, dans ce volume , une notice descriptive du Manuscrit de Sainte- Catherine de Sienne de Douai, dont il est l’heureux posses¬ seur. Voici comment un célèbre bibliophile, M. G. Duplessis, alors recteur de l’Académie de Douai, s’est exprimé sur ce manuscrit : « Le troisième manuscrit de M. E. de Coussemaker est un » livre précieux, puisqu’on peut le considérer comme un » monument unique en son genre. Ce volume, in-folio, d exécuté sur vélin vers le milieu du dix-septième siècle, » comprend les archives historiques et religieuses du couvent » de Sainte-Catherine de Sienne, de l’ordre de Saint- » Dominique, à Douai, et renferme une suite considérable » de peintures exécutées par des artistes habiles, entre » autres par Vaast Bellegambe, qui était de Douai, et que » l’on croit avoir étudié sous Bubens. Ces peintures offrent la » suite à peu près complète des ascendants et des descen- î) dants de saint Dominique, une série d’emblèmes applica- » blés à l’histoire de ce saint, et la représentation de tout ce d que le couvent de Sainte-Catherine de Douai offrait de — 202 — » remarquable en tout genre. Un pareil volume mériterait j> une description détaillée qui ne saurait trouver place ici ; » mais nous dirons que nous ne connaissons que bien peu y> de manuscrits aussi précieux et aussi remarquables que » celui-ci et que nous le considérons comme un véritable » trésor pour son heureux possesseur. j> Cette description détaillée, M. E. de Coussemaker l’a tentée et Fa exécutée avec le soin et le talent que nos lecteurs lui connaissent. Son travail comprend les divisions suivantes : A quelle occasion le manuscrit a été exécuté ; description du manuscrit ; documents historiques ; étude sur les peintures, lre série : généalogie spirituelle de saint Dominique, 2e série : allégories de la procession du 11 mai 1631, 3e série : généa¬ logie temporelle de saint Dominique, 4e série : objets d’art du couvent de Sainte-Catherine de Sienne ; recherches his¬ toriques sur les peintres Yaast Bellegambe et Bon Lenglet. Plusieurs annexes intéressantes complètent cette publication ; un fac-similé offrant les signatures des peintres, dont l’une est curieuse par son originalité, et une reproduction du sceau de Georges Bellegambe, le père du célèbre auteur du rétable d’Anchin, complètent cette publication. Sous le titre de Joyeuse entrée des Altesses sérénissimes Albert et Isabelle , février 1600, — ■ Lille au XVIe siècle, M. Houdoy, qui est aussi connu de nos lecteurs, publie une curieuse relation qui se trouve dans un manuscrit de la bibliothèque de Lille. Tous ceux qui se sont occupés un peu de l’histoire de nos grandes cités savent avec quelle richesse et quelle variété de décorations et de plaisirs nos pères célé¬ braient autrefois les fêtes publiques ; celle dont le récit est donné dans le manuscrit publié par M. Houdoy est certaine¬ ment l’une des plus brillantes et des plus curieuses par son originalité artistique. Mais ce qui fait surtout l’intérêt de ce travail, c’est la description de Lille au commencement du XVIIe siècle. Avec une abondance de détails et une sûreté de — 203 - main que seul il pouvait montrer, M. Houdoy a retracé la physionomie de la capitale de la Flandre à l’époque où LL. AA. SS. y firent leur première entrée. C’est un nouveau chapitre de l’histoire de la grande cité du Nord; et ce n’est pas le moins curieux. Une fois de plus, M. Houdoy a bien mérité de Lille et des études d’histoire locale. Nous regrettons de ne pouvoir, faute d’espace, qu’indiquer le Mémoire pour servir â la revendication du coffret renfermant les principales reliques de saint Chrysole , par M. l’abbé Derveaux, et la Découverte d'un cimetière gallo-romain à Avesnes, par M. Lebeau. Nous ne pouvons toutefois oublier d’ajouter que la Commission historique a décidé qu'elle s’occuperait de la publication d’un Dictionnaire topographique du département du Nord ; un rapport sur ce projet, présenté par M. l’abbé Dehaisnes, a été lu et adopté. Il s’agit d’une œuvre importante, sérieusement utile. Faisons des vœux pour que la Commission historique puisse accomplir la tâche difficile qu’elle vient de s’imposer. En menant ce travail à bonne fin, elle rendra un immense service à la science. LA COMMISSION ROYALE D’HISTOIRE DE LA BELGIQUE La pensée de former une association d’érudits , qui put mettre en un corps et publier les monuments inédits de l’his¬ toire de la Belgique, a été formée plus d’une fois avant d’être mise à exécution. Juste Lipse en a, le premier, conçu le projet. Swertius, son disciple et son ami, s’efforça de commencer à la réaliser en faisant paraître en 1620 un volume des Rerum Belgicarum Annales. A la fin du siècle dernier, sous le ministère du comte Charles de Cobenzel, ami éclairé des sciences, des lettres et des arls, l’abbé Paquot, historiographe de l’impéra¬ trice Marie-Thérèse, reprit cette tentative et adressa à toutes — 204 - les maisons religieuses d’une certaine importance une circu¬ laire où il leur demandait l’indication de tous les manuscrits concernant l’histoire ecclésiastique ou civile des Pays-Bas, qui existaient dans les archives et les bibliothèques de leurs couvents ; ce projet aboutit à la publication par Paquot de la Chronique de Robert Maquereau, et par l’abbé Nélis d’un recueil de lettres d’Hopperus. En 1773, à la veille de la sup¬ pression de leur Compagnie dans les Pays-Bas, les jésuites d’Anvers firent paraître le prospectus des Analecta Belgica , quils se proposaient de publier ; après la suppression de l’ordre, un décret du prince Charles de Lorraine statua qu’un ancien membre de cette Compagnie , l’abbé Ghesquière , reprendrait avec quelques érudits, le projet de faire paraître les Analecta Belgica. Ghesquière publia, de 1783 à 1789, cinq volumes des Acta sanctorum Belgii selecta, et le marquis de Chasteler, la Chronique de Gilbert , chancelier du comte de Hainaut. Sous le règne de Guillaume Ier, roi des Pays-Bas, le ministre de l’intérieur, Louis Yan Gobbelschroy, établit à Bruxelles, au mois de juillet 1827, une commission, compo¬ sée d’érudits actifs et sérieux, à laquelle fut confiée le soin de publier les Scriptores rerum Belgicarum. Le plan adopté par cette commission venait d’être mis au jour, lorsque les évè¬ nements de 1830 rendirent à la Belgique, avec ses vieilles libertés, ses antiques traditions et le goût pour les annales du pays et la recherche des documents qui pouvaient répandre de nouvelles lumières sur son passé. Après avoir ordonné la publication des inventaires des archives appartenant à l’État, le roi Léopold Ier, par arrêté du 22 juillet 1834, institua une Commission royale d’histoire, pour rechercher et faire pa¬ raître les chroniques belges inédites. Cette commission fut formée de MM. de Gerlache , premier président de la cour de Cassation, l’abbé de Ram , archiviste de l’archevêché de Ma- lines, le baron de Reiffenberg , professeur à l’université de Louvain, Dewez , inspecteur des athénées et collèges, Gachard , archiviste général du royaume, Warnkœnig, professeur à l’uni- — 205 — versité de Gand, et J. -B. Willems, receveur de l’enregistrement à Eecloo. Depuis cette époque jusqu’en 1872, à la suite du décès de plusieurs de ses membres, la Commission a reçu dans son sein MM. le chanoine de Smet, membre de l’Acadé¬ mie, Barthélemi Du Mortier, membre de l’Académie et de la Chambre des représentants, Bormans et Adolphe Borgnet , professeurs à l’université de Liège, le baron Kervyn de Lettenhove , membre de l’Académie et de la Chambre des représentants et Alphonse Wauters , membre de l’Académie et professeur d’histoire au Musée de Bruxelles. La Commission royale d’histoire conçut au sujet de la pu¬ blication des Chroniques belges inédites, un plan très-vaste, qui a été encore élargi sur la proposition de plusieurs de ses membres. Elle a fait paraître pour chacune des divisions de ce plan, des ouvrages importants, dont nous donnerons une idée à nos lecteurs, en nous attachant plus particulièrement aux travaux qui peuvent concerner le Hainaut, la Flandre wallonne et la Flandre maritime. M. le chanoine de Ram, abandonna les matériaux qu’il avait réunis pour la continuation des Acta sanctorum Betgii à l’association des Bollandistes lorsqu’elle se reforma en 1836 ; il a publié des Documents relatifs aux troubles du pays de Liège sous les princes évêques Louis de Bourbon et Jean de Homes , en un volume, et la Chronique De Dynter , en trois volumes. M. de Reifïenberg a livré au public la Chronique de Philippe Mousqués , en deux volumes qui ne renferment pas moins de 2,200 pages, avec des préfaces, notes, tables et glossaires qui complètent son importante publication. Le soin de mettre en lumière les chroniqueurs en vers flamands fut confié à M. Willems, dont la principale publication est la Chronique de Jean Van Heelu. Le Corpus chronicorum Flandriœ , confié d’abord à M. Warnkænig, fut ensuite remis aux mains de M. le cha¬ noine De Smet; dans les quatre volumes de cette importante publication, nous citerons la Brevissima genealogia comitum 206 — Flandriœ , d’après un manuscrit de Saint-Bertin conservé à Boulogne, le Clironicon sancti Bavonis , le Brève chronicon Elnonense sancti Amandi , les Chronica OEgidii li Muisis, abbatis sancti Martini Tornacensis , la Chronica Tornacensis, d’après un manuscrit de la bibliothèque de Lille, le Recueil des Antiquités de Flandre , du président Ph. Wielant, la Chronique anonyme qui concerne surtout la Flandre Wallonne et YHistoire des guerres et troubles des Flandres , sous Maxi¬ milien, par Jean Surquet, surnommé Hoccalus, de Béthune. Les publications dues à M, Borgnet sont relatives au pays de Liège. M. Gachard a fait paraître dans la même collection des travaux d’une très-grande importance au point de vue de l’histoire générale de ces contrées : la Relation des troubles de Gand sous Charles- Quint, qui a paru en 1846, et la Collée tion des voyages des souverains de la Belgique , précédée d’un itinéraire des ducs de Bourgogne, tiré des comptes de la re¬ cette générale des Finances et des comptes de la maison de ces princes conservés aux archives de Dijon, de Lille , de Bruxelles et dans la bibliothèque Goethals-Vercruysse , à Courtrai. Les travaux de rédaction des bulletins destinés à former la Table chronologique des chartes et diplômes im¬ primés concernant lliistoire de la Belgique, avaient été com¬ mencés par M. G. Gachet, chef du bureau paléographique ; elle a été reprise et mise en œuvre par M. Wauters , qui a fait paraître trois volumes de cette table , qui s’étendent , le t. Ier. de 275 à l’an 1100, le t. IIe, de 1101 à 1190 et le t. IIIe, de 1191 à 1225. Dans les Monuments pour servir à Y histoire des provinces de Namur, Hainaut et Luxembourg , édités par M. de Reilïen- berg, nous remarquons un cartulaire de Namur dont l’ori¬ ginal repose dans les archives départementales du Nord, la Description du Hainaut par Jacques Lessabé, de Marchiennes, le roman en vers qui a pour titre le Chevalier au cygne et Godefroid de Bouillon , ainsi que celui de Gilles de Chili , seigneur de Berlaimont , le Chronicon Lœnelse de Jacques — 207 — Lespée et le cartulaire de l’abbaye de Cambrai. Au chanoine de Ram fut confiée la publication des Documents relatifs à V Université de Louvain. M. Kervyn de Lellenhove a fait pa¬ raître en 1870 les Chroniques relatives à P histoire de la Bel¬ gique sous la domination de la maison de Bourgogne , docu¬ ments curieux qui ont été publiés d’après des textes origi¬ naux. Nous ne négligerons pas de signaler une autre publfcation faite par la Commission historique, c’est celle des Bulletins ou comptes-rendus des séances, qui est formée de 41 volumes remplis de curieux renseignements historiques. Une troi¬ sième série de publications est celle des Annexes aux bulle¬ tins , 12 volumes, parmi lesquels nous devons signaler la Revue des opéra diptomatica de Mirœus , de M. Le Glay, et de M. Gachard la Retraite et mort de Charles-Quint au monastère de Saint-Just , les Relations des ambassadeurs vénitiens sur Charles-Quint et Philippe 11, la Correspondance de Charles- r Quint et d'Adrien VI, les Actes des Etals-Généraux des Pays- Bas, 1576-1585, Don Carlos et Philippe IL Enfin nous n’o¬ mettrons pas de rappeler que la Commission a souvent mis à * * profit les lumières et les travaux de M. Emile Gachet. Ces indications suffiront pour donner une idée de l’impor¬ tance des travaux opérés par la Commission royale d’histoire de la Belgique et pour faire comprendre combien il est à désirer que les sociétés savantes s’efforcent d’entrer dans la voie où une province, sœur et voisine de la nôtre, a su trouver matière à des publications si utiles et si importantes. _ C. D. BIOGRAPHIE. L. COUSIN. M. L. Cousin naquit à Boulogne-sur-Mer, en 1804, d’une très-honorable famille du pays. Après avoir fait ses premières études chez M. Haffringuès, il se rendit à Paris où il se pré- — 208 - para, par de sérieuses études de droit, à la carrière de ma¬ gistrat qu’il avait à cœur d’embrasser. L’avenir s’annoncait à lui sous les plus favorables aus¬ pices. A peine licencié en droit, il fut nommé substitut près le tribunal d’Avesnes ; à 25 ans il fut installé procureur du roi près le même siège. 11 occupait ce poste depuis près de deux ans, quand éclata la révolution de 1830 qui brisa sa carrière pour toujours. Doué d’une grande force d’âme et n’écoutant que l’inspi¬ ration de sa conscience, il n’hésita pas à donner sa démis¬ sion et à quitter des fonctions qu’il aimait et où il s’était fait aimer. Il rentra à Boulogne où il prit rang dans le barreau. En 1843, il s’allia à l’une des anciennes familles de . Dunkerque, dont il fit sa ville adoptive, sans oublier toutefois son pays natal. Le barreau de Dunkerque l’accueillit avec la plus bienveillante sympathie, je dirai même avec une sorte de déférence pour son caractère public et privé ; aussi s’est-il empressé de déposer sur sa tombe l’expression de ses meil¬ leurs sentiments de confraternité. Mais M. Cousin n’était pas seulement homme public, homme de bien surtout, imbu des sentiments les plus exquis de générosité et de dévouement, inébranlable dans ses convictions politiques et religieuses, il était en même temps un érudit consciencieux, un patient archéologue, auteur de travaux pleins de savantes recherches. C’est à ce point de vue surtout qu’il nous appartient. M. Cousin a débuté, dans la carrière historique, par de curieuses études sur l’emplacement de Quentovic. Les mé¬ moires qu’il y a consacrés lui ont valu de la part de l’Aca¬ démie des Inscriptions et Belles-Lettres une appréciation favorable et flatteuse, en même temps qu’ils attirèrent l’at¬ tention des savants qui travaillent à l’élucidation de l’histoire des localités dont le sol a été foulé par les compagnons de César. — 209 — L’étude des voies romaines et des anciens chemins dans le Nord de la France paraît avoir eu pour M. Cousin un attrait particulier. Il s’est livré à cet égard aux investi¬ gations les plus minutieuses, tant dans les chartes et les vieux documents, que sur les lieux mêmes, investigations qu’il poursuivait avec une rare patience et un zèle persévé¬ rant, qui ont été quelquefois couronnés de résultats sinon toujours concluants, du moins propres à jeter la lumière sur certains points obscurs de la topographie. Dans cet ordre d’idées, il a publié deux mémoires qui lui font grand honneur. On a de lui aussi une notice sur les anciens Seigneurs de Cappel (en West-Cappel, arrondissement de Dunkerque) Il y retrace le rôle qu’ont joué dans l’histoire de la Flandre plusieurs personnages parmi lesquels on remarque Robert de Cappel et Denis de Morbecque. Ce travail, établi sur les documents authentiques, est un des meilleurs qui soient sortis de sa plume. Les savants auteurs de la topographie de la Gaule ont trouvé en M. Cousin un collaborateur qui leur a fourni des indications utiles. Un de ses plus savants mémoires est sans contredit celui qui porte le titre de : Une étude sur le Monastère de Steenland. L’auteur y donne sur toutes les localités des renseignements très-intéressants et puisés aux meilleures sources. Les antiquités celtiques et gallo-romaines ont été aussi l’objet de ses recherches, il a ensuite écrit des notices inté¬ ressantes sur la commune de Saint-Ingelvert et les châteaux de Tingry et de Monthulin dans le Boulonnais. M. Cousin a éié élu plusieurs fois président de la Société Dunkerquoise dont il était l’un des fondateurs. II avait pour cette association une prédilection marquée, qui se reflète dans plusieurs discours qu’il a prononcés dans son sein. Il mourut à Wormhout en 1872. DE COUSSEMAKER. (Extrait du Bulletin de la Commission historique, XII.) — 210 — CHRONIQUE. 1873. !$lé£éoS»«Hogie. Juillet.— Août. Température atmosphér. moyenne. 18? 24 O o • OO — moy. des maxima. 23? 72 23°13 — — des minima. 12? 76 12-91 — extr. max., le 22. . . 32? 2 le 8, 33°9 — — minima, le 18. 9? 4 le 17, 9°6 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 760t?m750 760ym584 — extr, max. le 21. 7 65t^m9i le 17,7 66^m07 — — min. le 4, 753mm771e 28, 754‘?m20 Tension moy. de la vap. atmosph. Urçm12 ll“m01 Humidité relative moyenne %• • 6-1.6 69.7 Épaisseur de la couche de pluie. . 29mm27 55m™ 49 — — d’eau évap. 170“m16 131mîn25 Le mois de juillet fut chaud et sec, aussi l’atmosphère fut-elle très-peu électrique, et le nombre des orages, trois. Chacun d’eux fut accompagné d’une faible quantité de pluie. Les oscillations barométriques eurent peu d’amplitude et on ne remarqua pas les mouvements brusques, indices de condensations rapides d’énormes quantités de vapeur d’eau atmosphérique. Il y eut deux tempêtes S. et S -0. les 13 et 14. La tension électrique fut grande pendant ces bourrasques et se manifesta par la déviation de l’aiguille de l’électromètre et par des éclairs sans tonnerre. La hauteur moyenne du baromètre fut en harmonie avec la faible nébulosité du ciel et la minime quantité de pluie (29*“ 27) tombée en quinze jours. La grande sécheresse de Pair favorisa l’évaporation qui dépassa de beaucoup la moyenne de juillet. Néanmoins, pendant les nombreuses nuits sereines, il y eut 18 rosées et 26 brouillards le matin, ce qui rafraîchit un peu les végé¬ taux, dont les racines. heureusement, pénétraient dans un sol humecté par la capillarité et les vapeurs se dégageant d’un niveau encore assez élevé. Les vents prédominants furent ceux du S.-O. et de l’O.-S.-O. La température atmosphérique moyenne du mois d’août fut de bien peu inférieure à celle de juillet ; mais quoiqu’on ait observé le 8 le maximum de l'année (33° 9), quoique la moyenne des minima ail été supérieure à celle de juillet, celle des maxima est inférieure à celle du mois précédent, ce qui est dû à la plus grande nébulosité du ciel. — 211 — Malgré une hauteur barométrique moyenne très-peu au- dessous de celle de juillet, le nombre des jours de pluie fut de 18 au lieu de 15 et la quantité d’eau recueillie de 55mm49 au lieu de 29?™ 27; cette anomalie n’est qu'apparente, elle est due aux 19rf,u1 9 de la pluie d’orage du 29 L’air fut plus humide en août qu’en juillet, la tension électrique plus grande, les orages plus nombreux (5) et les éclairs sans tonnerre en meme nombre. Cette humidité atmosphérique fut défavorable à l’évaporation dont la couche fut sensible¬ ment atténuée. Comme en juillet, les vents régnants soufflèrent du S. -O et de TO -S.-O., les nuages les plus élevés suivaient la direc¬ tion S -S.-O. au N.-N.-E. Le nombre des rosées ne fut que de 14 et celui des brouil¬ lards 23. Y. Meurein. ÂflTaisüevnrnt do la cote die OHiikei'qwe. — Vous savez que M. Belpaire dans un travail sur les changements subis sur la côte d’Anvers à Boulogne, dit que Nieuporl serait l’axe d’un mouvementde bascule. La mer perdrait continuel¬ lement du Pas-de-Calais à Nieuport, tandis qu’elle gagne de cette ville à l’embouchure de l’Escaut. D’après la découverte que je vais avoir l’honneur de vous signalerai semblerait au contraire qu’il y aurait eu des affais¬ sements successifs de la côte qui borde la ville de Dunkerque. A la suite de ces affaissements , les sables entraînés par les courants sous-marins sont venus se poser sur nos rivages et les ont exhaussés. En pratiquant des fouilles pour établir les fondations du parement extérieur (côté nord) de la fortification placée contre la porte de la Samaritaine, on a rencontré à la profondeur de trois mètres au dessous du niveau des marées basses de vives eaux ordinaires, ou, si l'on prend la côte du Génie, à six mètres quarante centimètres au dessous du niveau de la mer moyenne, une couche de tourbe de l’épaisseur de trente centimètres Sur cette couche on a recueilli un bois de cerf et des flècnes à pointes en os. Divers témoins, parmi lesquels je tiens à citer M. le Capitaine du génie, directeur de ces travaux, auquel je rends hommage pour ces précieux renseignements, m’ont certifié ces faits. Malheureusement les objets trouvés n’ont pu être remis au Musée. Il faudrait donc conclure qu’il y avait un marais dans cette partie de terrain recouverte à présent par une grande épais- — 212 — seur de couches de sable, et placée en contrebas du niveau des marées basses de vives eaux ordinaires. Quelques couches très-minces de sable tourbeux ont été rencontrées au-dessus de ce lit de tourbe, alternant avec d’autres couches de sables blancs. Tous ces sables ont certainement été amenés sur les rivages par les courants sous-marins, puis ayant été asséchés pendant les marées de mortes-eaux, ils ont été portés par le vent dans l’intérieur des terres. C’est le système de la forma¬ tion des dunes. Auguste Gaspart Secrétaire de la Commission du Musée de Dunkerque. Chat aux yem discolores. — C’est un fait bien connu des vétérinaires que chez le cheval et le chien on trouve parfois, mais rarement, des individus présentant un œil noir et l’autre bleu ou verrou. La même particularité a été aussi observée chez l’homme, et une personne digne de foi m’assurait récemment en connaître un exemple bien authentique. On peut voir en ce moment à Lille, rue Nationale, 60, dans un magasin portant l’enseigne prédestinée du Chat- Botté, un magnifique chat blanc dont un œil est d'un beau bleu et l’autre vert. Le cas acquiert un intérêt tout particulier par suite d’une observation faite en 1828 par le Dr Sichel et confirmée depuis par de nombreux naturalistes : les chats qui ont le poil entièrement blanc, sans mélange d’une autre teinte , sans aucune tache d’une autre couleur , et chez lesquels l’iris est bleu ou bleu grisâtre, sont constamment sourds. Tous les bruits possibles les laissent indifférents , pourvu que le sol ne soit pas ébranlé et ne leur transmette pas les vibrations, comme cela a lieu quand on frappe le plancher avec les pieds ou avec un marteau Tous les jeunes chats de la race commune ont les yeux bleus; ceux d’entre eux qui ont le pelage blanc pur sont sourds et cette surdité disparait avec l'âge à mesure que l’iris change de couleur et devient verdâtre Dans l’observation de Sichel, l’iris devint plus foncé au bout de quatre mois et en même temps l’animal commença à donner des signes d’attention lorsqu’on agitait une sonnette d’un timbre aigu à la hauteur de sa tête ou à peu près à un mètre de lui. Cependant, il paraît que grande était encore sa surdité, car un jour s'étant échappé dans la rue il fut tué par un gros chien de boucher qu’il n’avait pas vu s’approcher et dont il n’avait pas entendu la voix. Dans la race Angora si communément élevée à Paris, il n’est pas très-rare de rencontrer des individus à pelage blanc 213 — qui gardent toute leur vie la teinte bleue de l'iris et ne recou¬ vrent jamais l’ouïe. Je connais depuis 1867 un bel angora blanc aux yeux bleus qu'on tient à l'attache à la porte d’une maison de la rue d Ulm et qui paraît s’inquiéter fort peu du bruit qui se fait dans la rue. On m'a affirmé que notre chat aux yeux discolores âgé, je crois, de deux ans, a toujours eu l'ouïe très bonne. Il serait intéressant, néanmoins, de comparer la sensibilité des deux oreilles et nous espérons que les maîtres de Blanc-Blanc voudront bien nous le confier pour les expériences d’ailleurs inoffensives que nécessite cette comparaison. Nous rappellerons en terminant cette note que la corréla¬ tion bizarre dont nous venons de parler n’est pas la seule que l’on ait signalée chez les animaux atteints d 'albinisme plus ou moins complet. Heusinger, en 1846, et plus récemment Ch. Darwin, ont insisté sur ce que certaines plantes véné¬ neuses ne manifestent leurs effets que sur des animaux à poil blanc ou taché de blanc (moutons, porcs, chevaux), à l’exclu¬ sion des individus noirs de la même espèce. La calvitie et d'autres maladies de la peau n’ont affecté sur des vaches pies que les endroits blancs sans atteindre aucunement les autres parties de la surface cutanée. Outre leur importance au point de vue de la physiologie générale , de pareilles observations intéressent à un haut degré les éleveurs et les agronomes. Nous ne saurions trop engager ces derniers à les recueillir avec soin et à nous les faire connaître en détail A. Giard. Eiod«*a C'aiiacleeasi». — A la fin de l’année 1871, mon ami E. Gosselin me signala la découverte intéressante qu’il venait de faire de VElodea Canadensis aux environs de Douai, dans la Scarpe et les fossés qui en dépendent (1). M. Crépin avait déjà lait voir qu’en Belgique, où cette plante fut remar¬ quée en 1862, elle remontait peu à peu le cours de l’Escaut. Il était donc naturel de supposer qu’elle avait ainsi passé dans la Scarpe où on la trouve maintenant en abondance. M Gosselin me fit part de cette supposition qui me parut très-probable ; mais ne pouvant alors la vérifier par moi- m<*me, j’engageai M. Lelièvre, botaniste valenciennois, à faire des recherches dans ce sens. Dès le printemps de 1872, ce dernier m’apprit que YElodca existait communément dans la Traitoire, rivière de dessèchement des marais de la Scarpe, près Saint-Amand, vers 1 endroit appelé le Moulin des loups. L’observation fut confirmée par M. Warion, médecin-major (1) Voyez Bulletin 1872, page 58. — 214 — du 4me dragons, alors en garnison à Lille. L’année suivante» sur les indications de l’an de nos élèves, M. Havez, nous avons retrouvé la plante â Marchiennes- Campagne, dans la même Traitoire et aussi, mais en moins grande quantité, dans un fossé qui longe un petit bois entre les' marais d’Hel- ïesmes et la tourbière de Grohain (Wandignies), pour aller se' jeter dans la Scarpe. Depuis, M. Boutman, un autre botaniste de Valenciennes, fort zélé pour les recherches de cette nature, a observé la présence de YElodea en grande abondance dans la rivière de Péruwelz, la Vergne, qui vient aussi déboucher dans l’Escaut, non loin du confluent de ce fleuve et de la Scarpe. Cet été même, MM. Lelièvre et Henquin, ont trouvé très- communément la plante qui nous occupe à Saint-Ghislain (Belgique), dans un large fossé parallèle à la Haine, dans la direction du hameau de Douvrain. Or, la Haine est reliée par des canaux d’une part à l’Escaut, et d’autre part à la rivière de Péruwelz. Nos stations de YElodea doivent donc, selon toute appa¬ rence, se rattacher à celle de Gand, signalée dès 1862 par l’éminent botaniste belge Fr. Crépin. J’ajouterai, en terminant, que j’ai récemment recueilli cette plante envahissante à Lille même, dans l’Arbonnoise, près de la porte de Canteleu. Il serait intéressant de chercher si l’immigration s’est faite par le canal de la Haute-Deûle qui, on le sait, va rejoindre la Scarpe à Douai. Giard. Coi’riylopfrora 3acisstr£s. — Dans un récent numéro du Bulletin, l’un de nos élèves, M. J. De Guerne, a donné une histoire détaillée de la propagation dans le département du Nord de deux espèces de mollusques appartenant au genre Dreissena , les Dreissenct cochleata et polymorpha. De ces deux espèces, la dernière est de beaucoup la plus répan¬ due. Elle abonde dans l’Escaut et la Scarpe et l’on peut en recueillir d’énormes quantités dans les fortifications de Douai et de Valenciennes. J’ai la conviction qu’un examen attentif des coquilles de ce mollusque observé à l’état vivant amènera la découverte dans notre région d’un animal très-curieux et très-rare, le Cordylophora lacuslris. Le Cordylophora est un polype hydraire vivant dans les eaux saumâtres et même dans les eaux douces. Pendant longtemps on n’a rencontré ce zoophyte qu’en Angleterre et au Danemarck, dans des localités très-peu nombreuses et d'une faible étendue. M. Allmann, dans son magnifique — 215 ouvrage sur les hydroïdes, donne de longs détails sur la répartition géographique de ce polype et fait allusion au parallélisme qui paraît exister entre ses stations et celles du Dreissena polymorpha . M. Ph. Van Beneden a rencontré le Cordylophora sur les Dreissena , dans Peau saumâtre du bassin etdu canal d’Ostende. Enfin .tout récemment, M. Perrier, aide-naturaliste au Muséum, a retrouvé le meme hydraire sur la môme coquille dans les bassins et les conduites d’eau du Jardin des plantes. D’après ces diverses observations, il me paraît évident qu’il y a plus qu’une simple coïncidence dans la présence simultanée du Cordylophora et du Dreissena en des lieux où les deux espèces ont longtemps été inconnues : j’incline à penser que le mollusque aux tendances cosmopolites qui, depuis quarante ans, pénètre peu à peu dans tous nos cours d’eau, a sur plusieurs points transporté avec lui le polype hydraire, fort peu difficile également dans le choix de ses conditions d’existence. La Belgique n’est pas loin de nous et rien ne s’oppose à ce que nous possédions le Cordylophora puisque le Dreissena abonde dans notre département. J’en¬ gage donc tous nos zoologistes à diriger leurs recherches vers cet animal intéressant, leur zèle ne peut manquer de recevoir sa récompense. Giard. ABifiqailés romaines « Lüïe. — M. Rigaux vient de découvrir, près de la Noble-Tour, plusieurs objets gallo- romains, tels que vases entiers ou brisés, fibules en cuivre recouvertes d’émail, fragments d’os travaillé, etc. Cette décou¬ verte, ajoutée à celles dont le Bulletin a déjà rendu compte, confirme l’existence d’un centre de population, dans les environs de la porte de Paris, vers les pruniers siècles de la domination romaine, et, à ce point de vue, elle ne manque pas d’intérêt pour notre histoire locale. J. G. Découverte de monnaies romaines, à Bavai. — Au moment où paraissait le dernier n° du Bulletin, plusieurs journaux annonçaient qu’une découverte très-importante de monnaies romaines en or venait d’être faite à Bavai. Voici de quoi se composait ce prétendu trésor: 1° d’une quantité considérable, il est vrai, de*monnaies romaines, mais toutes en bronze et tellement oxydées que je n’ai pu en déchiffrer que quelques unes d’Antonin, de Marc-Aurèle de Lucius-Vérus, de Lucille, des.Faustiues ; 2° d’une marmite en cuivre qui contenait les monnaies et qui a été brisée par les ouvriers. Il faut par conséquent, pour être dans le vrai, retrancher la plupart des zéros, sinon tous, au chiffre de dix millions qui a été indiqué, ce qui n avait pas empêché les briqueteurs de transporter le tout sur le territoire Belge, dans - 216 — la persuasion où ils étaient qu’ils avaient mis la main sur un véritable trésor. Beaucoup d’idées fausses circulant sur la propriété des trésors, il n’est pas inutile de profiler de l’occasion pour rappeler quels sont les droits de ceux qui en découvrent. « La propriété d’un trésor, dit le Code, appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds ; si le trésor est trouvé dans le fonds d’autrui, il appartient pour moitié à celui qui l’a découvert et pour l’autre moitié au propriétaire du fonds. i> D’où il résulte 1° que la loi accorde à l’ouvrier qui trouve un trésor, dans le terrain d’autrui, la moitié de ce trésor, mais aussi qu’elle poursuit, comme voleur, celui qui s’en attribue la totalité ; 2° que l’État ne réclame une part des trésors que dans un cas, celui où ils sont découverts sur un terrain qui lui appartient. Il est donc de l’intérêt bien entendu de ceux qui trouvent de ne pas aller vendre, à vil prix, leur trouvaille au delà de la frontière, mais de la signaler aux musées ou aux amateurs du pays, pour qui elle a toujours une plus grande valeur, en qualité de découverte locale. H. R. CoustiB*uctions galSo-romaincs et sép*aUuB*e@ îiiérofiiigieuni^, g»rè*> de Vervims (Aissie). — A quelques centaines de mètres de cette ville, au lieu dit la Planchette , entre les routes de Tenailles et de Rabouzy, des fouilles opérées par les soins de la Société archéologique de Yervins, ont amené la découverte d intéressantes construc¬ tions qui remontent aux premiers siècles de i’ère chrétienne. La plus importante consiste en une chambre sépulcrale dont les parois construites en pierres blanches de moyen appareil, offrent encore, tout-à- fait intactes, trois des niches destinées à recevoir les urnes cinéraires. A ce caveau se rattache une série de substructions qui ont révélé l’existence d’une habi¬ tation el d’un cimetière mérovingien. Quinze tombes ont été reconnues, elles étaient séparées les unes des autres par des cloisons en cailloux ; une tête de jeune mérovingienne pré¬ sente encore une admirable denture. Parmi les objets recueillis, les plus intéressants sont : une bague avec chaton en pierre bleue sur laquelle est gravée une Léda ; des fragments d’enduit coloré ; une boucle de ceinturon ornée de dessins et recouverte d’un brillant éta¬ mage ; un collier de femme composé de verroteries et de grains en terre cuite ; quelques armes ; enfin plusieurs vases en terre brune. Quant à l’habitation, son importance n’a pu encore être constatée. Lille, imp. Six-Horemans. 73-2977 5° Année— Nos 11-12 — Novembre-Décembre 1873. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain jurassique. (Suite). 2° Boulonnais. Lorsque Monnet, le premier auteur d’une carte géologique de France, arriva près de Samer en allant de Paris à Bou¬ logne, il fut frappé de l’aspect que lui offrait le pays. Devant lui était une région plus basse que celle qu’il venait de parcourir et qu’un escarpement de craie demi- circulaire entourait comme un amphithéâtre s’ouvrant vers la mer. Il eut été bien plus étonné encore de cette disposition si on lui eut dit que sur la côte anglaise opposée, il y avait une région analogue, le Weald, qui n’était qu’un prolonge¬ ment du Boulonnais dont il avait été séparé à l’époque de l’ouverture du détroit. Le Boulonnais et le Weald réunis constituent une région ovale dirigée du S.-E. au N.-O. et formée de terrains plus anciens que la craie qui les entoure de toutes parts. Par une circonstance fort heureuse, le Bas Boulonnais nous offre, près de Marquise, le rivage de l’époque juras¬ sique. Nous y voyons l’extrémité du plateau primaire de l’Ârdenne formant un cap que les Ilots de la mer jurassique atteignirent à l’époque de la grande oolite. Beste à tracer la ligne que suivait la côte entre llirson et Marquise. Les nombreux sondages entrepris dans le Nord et le Pas- de-Calais pour la recherche de la houille, ont partout ren¬ contré les terrains primaires sous le terrain crétacé. Seul le puits de Pommier-Sainte-Marguerite, à 18 kilomètres au S. d’Arras, a pénétré de 10 mètres dans un calcaire oolitique qui ne différait de ceux du Boulonnais et de i’Ardenne que par une couleur bleuâtre ; c’est un caractère que l’on trouve souvent dans les roches rencontrées à de grandes profon¬ deurs. — 218 La limite du terrain jurassique ne passe pas beaucoup au N. de Pommier, car le puits de Mouchy-le-Preux , près d’Arras, a rencontré les roches primaires immédiatement sous le terrain crétacé. « A l’époque jurassique le département du Nord faisait donc entièrement partie du continent. Etage oolitique, — Cet étage, le plus ancien de l’époque jurassique qui existe dans le Boulonnais, y est lui-même incomplet ; l’oolite inférieur manque, et la grande oolite est beaucoup moins épaisse que dans les Ardennes. Assise de la grande oolite. — On peut la diviser en trois zones : 1° Zone de la Marne à Ostrea Sowerbyi. — Les premiers sédiments qui se déposèrent sur les roches carbonifères redressées furent des sables avec bancs d’argile et de lignites pyriteux intercalés. Ils ont une épaisseur très-variable, man¬ quent souvent et parfois atteignent une épaisseur de 25 m. (Bréquenèque) . C’est essentiellement une formation de rivage, peut-être même sont-ce d’anciennes dunes. Dans la carrière d’Hydrequent, ils n’ont que deux à trois mètres et sont sur¬ montés de deux mètres de marne et de calcaire marneux où l’on trouve très-abondamment une Modiole (mollusque voisin des Moules) et une petite huître, 0. Sowerbyi , que l’on a longtemps prise pour PO. acuminata. Celle-ci s’y trouve aussi, mais très-rarement. Au-dessus de ces marnes, il y a trois mètres de calcaire jaunâtre, sableux, qui contient de nombreux gastéropodes, Rhynchonella concinna et un oursin, Clypeus Plotii. 2e Zone de l'oohte miliaire à Rhynchonella Hopkinsii. — C’est' la roche exploitée pour les constructions sous le nom de Pierre de Marquise : calcaire oolitique, régulier, de couleur blanche, pauvre en fossiles et caractérisé spécialement par la Rhynchonella Hopkinsii , qui est une espèce voisine, peut- être même une simple variété, de la Rh. decorata. Il a 8 à 10 — 219 — mètres d’épaisseur. M. Rigaux, qui a si bien étudié la géo¬ logie du Boulonnais (1) dit que l’on trouve à l’Est des sables et des argiles contemporains du calcaire de Marquise. 3° Zone des marnes à Terebratula Lagenalis. — Cette zone, formée de marne et de calcaire marneux ou siliceux, n’a que cinq mètres d’épaisseur. On peut cependant y distinguer deux niveaux. L’inférieur ne contient guère que Rhynchonella elegantula ; le supérieur, beaucoup plus fossilifère, est carac¬ térisé par T. lagenalis , et en outre par T. inter media, T. obo- vata, Endesia cardium, que l’on retrouve aussi dans la zone à T. digona des Ardennes. Aux environs de Marquise, sur le bord de l’ancien rivage primaire, l’assise de la grande oolite n'a que 20 mètres environ ; mais son épaisseur augmente rapidement vers l’in¬ térieur du bassin. Ainsi on lui a trouvé 30 m. au sondage du Bail, commune de Bazinghem, et 40 m. au sondage de Montataire. Étage de l'Oxford Clay. — La partie inférieure de l’étage, c’est-à-dire l’assise callovienne, est peu développée dans le Boulonnais , la partie supérieure ou oxfordienne l’est beaucoup plus. On peut surtout l’observer au S. de Marquise. Assise Callovienne. — On n’y distingue qu’une zone : Zone de la marne à Ammonites Calloviensis. — Près de Belle, M. Rigaux a observé à la partie supérieure du Corn- brash, durcie et percée de trous de lithodomes, une marne ferrugineuse, oolitique, épaisse de 6 à 8 m. Elle contient Oslrea dilatata , Ammi Calloviensis et représente les couches à A. Backeriæ des Ardennes. Assise Oxfordienne. — On peut aussi y distinguer deux zones : (1) Notice stratigraphique sur le Bas Boulonnais, 186^7. — Description de quelques espèces nouvelles de l’étage Balhonien du Bas Boulonnais. 1867. — 220 — 1° Zone de l'argile à Ammonites Lamberti. — Cette argile, exploitée à la tuilerie du Wast, renferme un très-grand nombre de fossiles transformés en pyrite. Ammonites Cordatus (1). Belemniles hastalus. A . alhlela. Ostrea dilatata. A . . . crenatus. TcrebratuJa impressa. A . Mariæ. Rhynchonella spalhica A . Erato. Millecrinus echinatus. Cette zone, épaisse d’environ 50 m., correspond à la zone à Cordatus des Ardennes ; à la partie supérieure il y a un lit rempli de tiges d’encrines. 2° Zone des argiles à Thamnastrea. — Cette zone, évaluée par M. Pellat à 12 m. environ près de Marquise, est caracté¬ risée par des Opis , Amm. Martelli , Ostrea dilatata et des polypiers du genre Thamnastrea. On y trouve déjà des ra- dioles de Cidaris florigemma , fossile considéré ordinaire¬ ment comme caractéristique du Coral-rag. Elle est géné¬ ralement argileuse, mais par place comme à Houllefort on y trouve des bancs calcaires Son épaisseur est de 45 m. au sondage de Montataire. J. G. POISSONS DE NOS COTES. Nous empruntons cette liste à l’article du Palria Belgica , dû à M. Yan Beneden, l’illustre professeur de Louvain. Parmi les poissons de mer : 4 peuvent être considérés comme de passage : le Hareng, le Maquereau, le Maquereau bâtard, l’Esprot. 8 remontent périodiquement les fleuves : l’Esturgeon, le Saumon, l’Alose, la Flinte, l’Éperlan, l’Outil, l’Anchois, le Flet. (l) Celle ammonite souvent désignée sous le nom de Lamberti est rapporlée par M. Pellat à Y Amm. Corclalus. — 221 20 font l’objet d’une pêche régulière qui dure toute l’année ou pendant l’hiver seulement : La Morue, l’Eglefin, le Mollet, le Merlan, la Lingue, le Charbonnier, le Lançon, le Poisson Saint-Pierre, le Congre, la Plie, la Barbue, le Turbot, le Flétan, la Sole, la Limande, l’Ange, la Raie lisse, la Raie bouclée, la Raie ronce, la Raie blanche. 11 autres que l’on prend accidentellement ont une chair estimée : le Bars, le Loup de mer, le Maigre d’Europe, le Muge, le Rouget, le Trigle, le Grondin, le Merlan blanc, le Scombresox sauras, l’Orphie, la Lamproie. Poissons de mer. 1° ORDRE DES SÉLACIENS. §(]ual!Més. Scillium canicula. Roussette. Lamna cornubica. Lamie. Carchariasglaucus. Squale bleu. Spinax acanlhias. Aiguillât. Galeus canis. Milandre. Scimnus borealis. Leiche. Mustelus vulgaris. Emissole. Squatina angélus. Ange Selaehe maxima. Squale pèlerin. Rajidés. Trigon pastinaca. Pastenague. Raia rubus. Rate ronce. Torpédo marmorata. Torpille. R. circularis. R. lisse. Raia bâtis. Raie blanche. R. clavata. R. bouclée. 20 ORDRE DES HOLOCÉPHALES. Ohcmcridécs. Chimæra monslrosa. Chimère. 3° ORDRE DES STIIR10NIENS. Accipenseridés. Accipenser sturio. Esturgeon. 4o ORDRE DES SQUaMMODERMES. A. Achantopterygiens. Percidées. Trachinus draco. Grande Vive. Mullus surmuletus. Rouget. T. vipera. Boideroc. Labrax lupus. Bars. 222 — Triglidés. Trigla hirundo. Perlon. CoUusscorpius.Scor/tfowctewer. T. gurnardus. Grondin. Aspidophorus Europæus. Scienidés. Sciæna umbra. Maigre. Scoznberldées. Caranx trachurus. Maquereau Gasterosteus spinachia Castre. bâtard. Scomber scombrus. Maquereau. Zeus Faber. Poisson St-Pierre. Xiphias gladius. Espadon. Lampris gutlatus. Poisson lune. Thynnus vulgaris. Thon. Magilidées Mugil chelo. Muge. Atherina presbyter. Prêtre. Sparldées Canlharus brama. Brème demer. Brama raii. Pagellus ceniroâonius.Rousseau. Blennldés. Gobius niger. Centronotus gunellus. Gobius minutus. Cycloplerus lumpus. Lump. Anarrhicas lupus. Loup marin. Liparis barbatus. Zoaries viviparus. Blennie vivi- Callionymus dracunculus. pare. Savary. Lophiidés. Lophius piscalorius. Baudroie . Labridés. Labrus macuîatus. Vieille. Gtenolabrus rupestris. B. Malacopterygiens subbrachiens. Gadidés. Morrhua vulgaris. Morue ou Cabil¬ laud. M. æglefmus. Eglefin. M. luscus. Lotta molva. Lingue. Motella quinque cincla. Merlangus vulgaris. Merlan. M. albus. M. carbonarius. Merlan noir. M. pollachius. Lieu. — 223 — Plenronectcs. Rhombus maximus. Turbot. Platessa vulgaris. Plie. Rh. vulgaris. Barbue. P. flesus. Flet. Rh. megastomus. Cardine . P. inicrocephala. Limanda limanda. Limande. Hippoglossus vulgaris. Flétan . Solea vulgaris. Sole. C. Malacopterygiens apodes . Angullliformes. Conger vulgaris. Congrè. Ammodytes Tobianus. Lançon . D. Malacopterygiens abdominaux. Clapeidés. Clupea harengus. Hareng. Engraulis incrasicolus. Anchois • C. sprailus. Sprot. Alosa communis. Alose. Salmonidés. Salmo salar. Saumon. Osmerus eperlanus. Eperlan. Coregonus oxyrhinchus. Outil. Esocidés. Belone vulgaris. Orphie. Scombresox scarurus. 50 ORDRE DES OSTÉODERMES. Orthngoriscides. Orthagoriscus mola. Poisson lune. Sjngnathidées. Hippocambus brevirostris. Cheval Syngnalhus acus. Aiguille de mer . marin. Syngnathus aquoreus. S. rostellatus. 60 ORDRE DES CYCLOSTOMES. Petromyzonidés. Petromyzon marinus Lamproie. P. Omalii. Lamproie. LES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES DU NORD PENDANT LA RÉVOLUTION. (Suite). Archives des districts. — Les archives , provenant des éta¬ blissements religieux supprimés, des corporations abolies et — 224 des émigrés, furent réunies au chef-lieu de chaque district, d'où elles devaient être transférées au chef-lieu du dépar¬ tement. Le décret du 2 novembre 1789, sanctionné par les lettres royales du 27 du même mois, avait ordonné que l’inventaire des archives de tous les monastères et chapitres fût dressé dans tout le royaume. Il avait été complété par un autre dé¬ cret en date du 14 avril 1790, qui ordonnait aux assemblées des districts de faire exécuter la même mesure pour les titres et papiers dépendant de tous les bénéfices, maisons et com¬ munautés de l’un et de l’autre sexe, qui n’auraient pas encore été inventoriés. Le 5 mars 1791, le procureur syndic du département rap¬ pelant les articles 2 , 3 et 9 de la loi du 5 novembre 1790 au sujet de la vente. des biens nationaux, adressa aux adminis¬ trateurs du département un réquisitoire, à la suite duquel des commissaires spéciaux à qui seraient adjoints des mem¬ bres des municipalités, furent chargés de faire opérer le transfert des archives de tous les établissements supprimés dans le dépôt du district. La loi du 5 novembre 1790 concer¬ nant les registres , papiers , terriers et chartes des bénéfices , corps, maisons et communautés ecclésiastiques , comprenait, en outre, les titres relatifs aux anciennes corporations et aux émigrés, en un mot à tous les biens déclarés nationaux. C'est cet ensemble de documents, qui forma, avec un grand nombre de pièces provenant des anciennes administrations et juridic¬ tions qu’on avait négligé de transférer au chef-lieu du dépar¬ tement, les archives des districts de Bergues, Hazebrouck, Lille. Valenciennes, Le Quesnoy, Avesnes, Cambrai et Douai. Dans le district de Bergues existait un grand nombre de maisons religieuses possédant des archives : l’abbaye de St- Winoc, le Nouveau Cloître, les Capucins, les Dominicains et onze maisons moins importantes dans le chef lieu du dis¬ trict ; le Chapitre Noble , les Capucins et les Pénitentes et — 225 — plusieurs hôpitaux à Bourbourg; les Récollets , les Cannes, les Capucins , les Bénédictines anglaises et plusieurs autres fondations pieuses à Dunkerque ; les Clarisses anglaises, les Ursulines et l’hôpital à Gravelines; les Trinitaires, les Récol¬ lets, les Récollectines, et les Sœurs grises à Hondschoote; et enfin à Merkeghem l’antique abbaye de Ravensberg. De plu¬ sieurs procès-verbaux, encore aujourd’hui conservés dans les archives départementales , il résulte que les administrateurs du district de Bergues firent inventorier ces documents en octobre et novembre 1790, avec ordre de les transférer au chef-lieu du district. L’ensemble des archives de ces communautés religieuses fut porté dans la meme ville vers 1793, et y resta dans les bureaux de l’administration. En vertu de la loi du 7 messidor an II (25 juin 1794), M Vernimmen, de Bergues, fut nommé par décret de la Convention nationale, en date du 6 juillet 1795 (18 messidor an III), préposé au triage des titres du district de Bergues. Il ne put accepter. Nous ignorons si un autre préposé au triage fut choisi pour le remplacer. On ne sait ce que sont devenus les innombrables docu¬ ments contenus dans le dépôt du district Ont-ils été en partie employés pour confectionner des gargousses et des cartou¬ ches, comme tous les papiers des Pauvres Clarisses de Dun¬ kerque et une grande partie des livres de la riche bibliothèque de Bergues? Il est possible, il et môme probable que l’or¬ donnateur civil de la marine , qui demandait du parchemin et du papier 5 Dunkerque et à Douai, en aura aussi demandé à Bergues , où les livres et les documents étaient entassés pêle-mcle dans l’ancienne bibliothèque de Saint-Winoc et dans une salle de la municipalité. Ces documents avaient-ils servi à alimenter les llammes lorsqu’en exécution d’un arrêté du département du Nord, en date du 28 septembre 1793 , toutes les marques de la royauté et du fanatisme furent sup¬ primées ou brûlées, et qu’on conduisait au bûcher dans — 226 — un tombereau un certain nombre d’objets, parmi lesquels un célèbre portrait équestre de Louis XIV peint par Lebrun et Mignard ? Ont-ils été en partie vendus à la livre, comme la tradition l’a raconté dans la ville de Bergues? Nous n’avons trouvé aucun détail précis à ce sujet. Nous savons que la partie la plus importante des archives existait encore à Ber¬ gues en 1799 , puisqu’à la suite de la circulaire du ministre de l’intérieur, en date du 1er nivôse an VII (21 décembre 1799), qui O’ donnait d’envoyer à Paris les cartulaires des anciens instituts religieux , la municipalité de Bergues expédia dans la capitale huit cartulaires du chapitre de Bourbourg , plusieurs cartulaires des abbayes de Saint-Winoc et de Ra- vensberg, et sans doute en même temps les 211 chartes en¬ levées à ces mêmes couvents. Ces documents , un cartulaire de Bergues conservé en Belgique et trois registres relatifs à l’abbaye de Ravensberg donnés par le département et par M. De Laroière , forment ce qui reste des nombreux éta¬ blissements religieux situés dans l’ancien district de Bergues. L’histoire des archives de l’arrondissement d'Hazebrouck rappelle celle des documents de l’arrondissement de Bergues. Les membres du directoire du district et des municipalités de plusieurs communes se firent remettre , à la suite des lettres du procureur syndic-général, les baux et titres de pro¬ priété de toutes les maisons religieuses supprimées. Nous avons retrouvé, dans les archives départementales, les procès- verbaux de ces opérations dans les maisons des Récollets et des Sœurs grises d’Estaires , de la prévôté du Doulieu et de la cure de Steenwerck, dépendances de l’abbaye de Choques, des Filles dévotaires et de l’abbaye de Beaupré à La Gorgue, des Capucins et des Dominicains à Merville, des Trinitaires de Préavin à Morbecque, des Capucins, des Hospitaliers, de la prévôté de Saint- Antoine et des Sœurs grises à Bailleul , des Carmes , des Religieux de Sdint-Laurent et des Augustines à Steenwoorde , des Sœurs grises à Hazebrouck , de l’abbaye — 227 — de la Woestyne à Renescure, et des Guillelmites de Notre- Dame de Nazareth à Noordpeene. Ces procès-verbaux furent envoyés à Douai le 5 et le 8 novembre 1790. Quant aux do¬ cuments, ils restèrent à Hazebrouck, où furent réunis plus tard, sans doute en 1792, tous les documents provenant de ces couvents. Le rapport des membres du. district d’Haze- brouck, daté du 18 brumaire an III (8 novembre 1794), nous apprend que les archives des établissements religieux étaient réunies dans cette ville ; le même rapport constate que les titres et papiers provenant des États et des quatre membres de Flandre étaient conservés à Cassel ; ceux de la châtellenie, du bailliage et du présidial de Bailleul dans cette ville , et les documents de la maîtrise des eaux et forêts de la Motte-au- Bois dans rhôtel-de-ville de cette commune. Dans la lettre qui renferme les indications précédentes, les membres du district d’Hazebrouck demandent au directoire du département de choisir l’une des deux personnes qu'ils présentent pour rem¬ plir les fonctions de préposé au triage des titres du district. A-t-il été donné suite à ce sujet? On l’ignore. Les archives du district de Lille pouvaient compter au nombre des plus importantes de la France. Dans cette ville étaient conservés , comme nous l’avons déjà dit , les docu¬ ments si importants et si nombreux de la Chambre des Comptes, ceux des États de la Flandre Wallonne et de l’In¬ tendance de la Flandre et de l’Artois, avec les titres et papiers delà gouvernance, des bailliages, de la maréchaussée, de l'iiôtel des monnaies, de la juridiction des eaux et forêts et de la Chambre de commerce. Au nombre des fonds ecclé¬ siastiques, nous nous contenterons de citer les archives des collégiales de Saint-Pierre de Lille et de Saint-Piat de Seclin, des riches abbayes de Cysoing, de Pbalempin , de Loos, de Marquette et de l’Abbiette, autour desquelles se groupaient un nombre considérable de couvents d’Augustins, de Carmes, de Frères prêcheurs et de Franciscains, de Carmélites, de — 228 — Clarisses et d’Ursulines, de prieurés, de collèges, d’hôpitaux et de fondations pieuses. Au mois de mai 1790 , le maire et les officiers municipaux des localités dans lesquelles se trou¬ vaient les maisons religieuses comprises dans le décret de l’Assemblée nationale, avaient dressé l’inventaire de tous les registres, comptes et pièces pouvant servir à l’administration des biens et revenus de ces maisons. Nous n’avons trouvé aucun détail sur le transfert de l’en¬ semble des documents restés dans les maisons religieuses qui durent être remis au district de Lille , à la suite du réquisi¬ toire adressé aux administrateurs du département par le procureur syndic. Peut-être ces documents ont-ils été enlevés au milieu des désordres qui éclatèrent dans quelques loca¬ lités et des pillages de plusieurs abbayes. Nous voyons , en effet, en date du 25 septembre 1793, le procureur syndic Sta informer le district de Lille que quantité de meubles, effets, titres et papiers provenant des maisons religieuses, se trouvaient , comme le lui apprenaient des dénonciations plu¬ sieurs fois répétées, chez des particuliers. Il fut ordonné de remettre le tout à l’administration du district. Tous ces docu¬ ments, avec les livres qui provenaient des maisons religieuses supprimées, avaient été jetés dans le couvent des Récollets, dont on avait fait une sorte de magasin. Après avoir réclamé pour le service de l’artillerie une partie des riches archives de la Chambre des Comptes, l’administration militaire de¬ manda du parchemin et du papier au dépôt dans lequel étaient conservés les titres provenant des maisons religieuses. Le 7 ventôse an II (25 février 1794), le général Songis adressa aux administrateurs du district une lettre dans laquelle, rap¬ pelant qu’il avait besoin de papier pour la fabrication de trois millions de cartouches, il les invitait à lui livrer les biblio¬ thèques monacales de V ancien régime et les archives de la ci- devant intendance. Les archives de l’Intendance semblent avoir été épargnées; mais les papiers et les bibliothèques des mai- sons religieuses supprimées furent laissées à la disposition du service de l’artillerie qui les fit enlever. Ces faits font comprendre pourquoi les fonds des abbayes de Cysoing, Phalempin, Marquette et de la plupart des établis¬ sements religieux de l’arrondissement de Lille ne sont re¬ présentés dans le dépôt départemental que par des registres et des documents relativement modernes. En dehors de quel¬ ques épaves échappées à la main des artilleurs, on n’y ren¬ contre que les titres et papiers relatifs à la gestion des biens transférés dans le dépôt du district dès 1790. Heureusement, les archives de la collégiale de Saint-Pierre de Lille avaient été, dès le commencement des troubles, remises intégralement dans les mains de l’autorité municipale; l’administration com¬ munale de Sequedin avait aussi, on ne sait comment, recueilli dans la mairie de ce village une partie des documents relatifs à l’abbaye de Loos, qui ont été, vers 1845, restitués aux Ar¬ chives départementales. Celles des couvents de l’Abbiette et de Marquette sont aussi conservées presque complètement. A Valenciennes, les archives du district étaient formées de plusieurs fonds civils : ceux du siège royal de la Prévôté-le- Comte, de la juridiction des eaux et forêts, de la juridiction des traites, de la justice foncière de la Tannerie ou du Bas- Bourg appartenant à l’abbaye Saint-Jean, et de la partie des archives de l’intendance qui n’avait pas été remise au direc¬ toire du département Les fonds ecclésiastiques envoyés au môme district étaient ceux de la collégiale Saint Géry et du chapitre de Notre-Dame de la Salle-le-Comte , de l’abbaye Saint-Jean , des Dames de Beaumont et des Carmes , des Chartreux, des Brigi ttines, des Carméliies, des Urbanistes de Valenciennes, des Récollets et des Sœurs grises de Coudé, des Récollets et des Récollectines de Bouchain, de la prévôté dllaspres, ainsi que des abbayes de Saint-Arnaud, Ilasnon, Vicoigne, Crespin, Saint-Saul ve. Fontenelles, Denain et Châ- teau-PAbbaye. La remise des titres et papiers nécessaires à 230 — la régie des biens de toutes ces maisons religieuses se fit entre les mains de M. Bouchelet, receveur du district , du 30 octobre 1790 au 14 juillet 1791, comme le constate un docu¬ ment officiel conservé dans le dépôt départemental du Nord. En vertu d’une commission conférée par le directoire du département, en date du 28 mai 1791, Claude-Emmanuel- Joseph Delbauve et Jean-Baptiste-Joseph Desespringale ap¬ posèrent les scellés sur les meubles , l’argenterie, les biblio¬ thèques et les archives de toutes les maisons religieuses, et firent transporter tous les titres , registres et papiers dans le secrétariat du district. Les documents provenant des maisons religieuses du dis¬ trict de Valenciennes eurent-ils beaucoup à souffrir à l’époque de la révolution? Dans sa notice sur les archives municipales de cette ville, M. Caffiaux, archiviste communal, rapporte qu’on alla chercher dans les archives les papiers propres à faire des gargousses nécessaires pour les feux d’artifice. Ces déprédations ne se firent sans doute pas aux dépens des archives municipales , qui , au moment où l’émigration com¬ mença, avaient été emmenées en Allemagne; elles eurent lieu plus probablement dans les documents provenant des commu¬ nautés religieuses. Quoiqu’il en soit , les archives ecclésias¬ tiques du district de Valenciennes ont été en grande partie conservées. Au mois de septembre 1794, en rentrant dans la ville après le départ des troupes autrichiennes qui l’avaient occupée, l’administration municipale , ainsi que le rapporte une lettre du 25 nivôse an III (14 janvier 1795), avait trouvé les divers dépôts d’archives dans un état de désordre effrayant. Le 12 nivôse an III (1er janvier 1795) , les fonctions d’archi¬ viste du district avaient été confiées au citoyen Boucher ; l’administration de la ville semble avoir été satisfaite de ses services, puisque, le 18 thermidor an iV, elle demanda que le directoire départemental doubla le traitement de cet em¬ ployé, qui n’était que de 800 francs valeur fixe. Le dépôt — 231 - départemental a conservé plusieurs inventaires par ordre chronologique des archives provenant des maisons religieuses qui ont peut-être été rédigés par cet archiviste. Malgré leurs pertes, les archives ecclésiastiques du district de Valenciennes étaient encore très-importantes. Un rapport du secrétaire-général constate qu’en 1808 elles se trouvaient encore gisant dans la poussière des greniers de la mairie. En 1810, elles furent, comme la loi l'ordonnait, réintégrées dans le dépôt départemental ; elles comprenaient les fonds plus ou moins incomplets des abbayes d’Hasnon , de Saint- Jean, de Vicoigne, deSaint-Saulve, deDenain, deSaint-Amand, de Crépin et de Funtenelles, du Béguinage, de Saint-Géry, des Carmes déchaussés, des Brigittines, des Carmélites, des Dames de Beaumont, des Chartreux, des Urbanistes et des grands Carmes de Valenciennes. Aujourd’hui, les archives ecclésiastiques de l’arrondisse¬ ment de Valenciennes sont conservées dans le dépôt dépar¬ temental du Nord, à l’exception d’un certain nombre de documents qu’on peut encore retrouver dans les archives municipales de Valenciennes, Condé et Saint-Amand, et peut- être en divers dépôts et collections de la Belgique et de l’Allemagne. Le Quesnoy, aujourd’hui simple chef-lieu de canton, était durant l’époque de la révolution le siège d’un district qui comprenait les cantons de Bavai et Landrecies. Les archives civiles du bailliage et de la maîtrise des eaux et forêts du Quesnoy , de la prévôté de Bavai , de la prévôté de Landre¬ cies et de plusieurs offices seigneuriaux y furent réunies en partie dans le greffe du tribunal et en partie dans le greffe de l’hôtel de ville; les documents relatifs aux eaux et forêts res¬ tèrent dans le local de l’administration provisoirement établie pour remplacer l’ancienne juridiction. Il en était encore ainsi le 26 brumaire an III (16 no¬ vembre 1793), époque à laquelle l’administration municipale 232 du Quesnoy déclarait qu’elle n’avait pu s’occuper de ces documents , surtout parce que les travailleurs faisaient dé¬ faut. Quoique moins importants que dans les autres districts, les fonds religieux n’étaient pas sans intérêt; ils compre¬ naient les archives du chapitre paroissial de l’abbaye des Dames de Sainte-Élisabeth , des Récollets , des Conception- nistes et des Filles de la Visitation ou Sœurs noires du Quesnoy, des Récollets et des Sœurs grises de Bavai, des Récollets du prieuré de la forêt de Mormal dit de l’ermitage, des Sœurs grises de Berlaimont et les Carmes de Landre- cies. Comme dans les autres districts, le procureur syndic se fit remettre les titres et papiers relatifs à la gestion des biens et fit apposer les scellés sur les effets mobiliers et les archives en octobre 1790. Le 28 de ce même mois, il envoya à Douai au procureur général syndic du département les seize inven¬ taires qui constatent ces opérations, et qui sont encore au- d’hui conservées dans les archives départementales. Toutes les archives de ces maisons religieuses furent entassées , ainsi que les livres réunis, pour former une bibliothèque au chef-lieu du district , dans un local humide qui avait servi auparavant de hangar et d'orangerie, dans lequel les livres et les titres souffrirent beaucoup. Ce local , ou plutôt , ainsi que l’appelle un préposé au triage , cette écurie était privée de fermeture; les fenêtres manquaient de vitres. Les titres et papiers , rapporte l’archiviste M. Habille , furent comme au pillage , qui a eu lieu en effet ; il sen trouve chez tous les mar¬ chands de tabac et les épiciers , qui font des enveloppes avec des parchemins. Ces dépôts eurent aussi beaucoup à souffrir des obus autrichiens ; la majeure partie fut brûlée durant le bombardement acharné qui détruisit ou endommagea en 1793 tous les monuments et presque toutes les constructions de la ville Durant l’occupation autrichienne , qui ne prit fin qu’en 1794, les archives restèrent dans l’état d’abandon le plus complet. . — 233 — Avant le siège, un travail d'inventaire avait été commencé; il ne restait plus trace de ce travail, lorsqu’un décret de la Convention, en date du 18 messidor an IV (6 juillet 1796), nomma préposé au triage des titres du district le citoyen Mabille, auquel l’administration municipale confia les fonc¬ tions de bibliothécaire. Le zèle consciencieux et le goût éclairé de ce préposé au triage nous sont révélés par les lettres qu’il écrivit à la muni¬ cipalité , au directoire du département , ainsi que par les voyages qu’il fit à Douai pour obtenir un local convenable. Le couvent des Soeurs grises et Dhôtel de la famille de Né- donchel ne furent point acceptés , à cause des réparations qu’il était indispensable d’y opérer; l’administration de la ville, dans l’un de ses arrêtés, désigne comme une somme conséquente les frais de bureau nécessaires pour le papier, les plumes et l’encre. Durant plusieurs mois, le préposé Ma¬ bille réclama en vain une somme modique pour les frais de bureau : il ne put même commencer son travail. Dans cette situation, sa conscience se refusant à toucher plus longtemps un traitement sans utilité , il envoya, en date du 15 frimaire an V, sa démission de bibliothécaire et de préposé au triage, • aux administrateurs du département. Il rappelait les avertisse¬ ments successifs qu’il avait donnés et déclarait que le dépé¬ rissement des titres et des livres ne pouvait lui être imputé , puisqu’il avait plusieurs fois fait connaître l’état des choses; il venait d’ailleurs d’être nommé secrétaire de l’administra¬ tion municipale de Solesmes. En donnant sa démission, M. Mabille indiquait au choix de l’administration deux hommes de loi qu’il avait pensé s’adjoindre dans ses travaux, les citoyens Briffaut et l’ex-procureur syndic du dis¬ trict Pierre-Maximilien Ereaux. Ce dernier fut nommé par l’administration départementale du Nord, en date du 4 nivôse an V (24 décembre 1796), et sa nomination fut approuvée par le ministre de la justice sur la présentation du citoyen — 234 — Le Sage Sénault. Le 5 nivôse an VI, il écrivait que depuis un an il exerçait assiduement ses fonctions sans avoir reçu aucun O A traitement , demandant qu’on lui fournit au moins les plu¬ mes, le papier et l’encre, et, en hiver, le feu et la chandelle. Le ministre des finances , à qui cette requête fut adressée , écrivit aux administrateurs du département, le 28 pluviôse suivant , pour demander leur avis sur cette lettre ; ceux-ci , en date du 19 prairial, répondirent qu’ils n’avaient pas retrouvé la circulaire , que le ministre citait à l’occasion de cette affaire. Nous ignorons si le préposé au triage Ereaux, plus heureux que M. Mabille, parvint enfin à obtenir un salaire quelconque. Une partie des archives provenant des établissements religieux supprimés étaient restés dans l’hôtel de ville du Quesnoy ; au mois d’août 1845, ils ont été réin¬ tégrés dans les archives départementales. LES GUÊPES DU NORD DE LA FRANCE. Les insectes hyménoptères ont, dès la plus haute antiquité, attiré l'attention des naturalistes par l’intérêt qui s’attache à l’étude de leurs mœurs si curieuses et de leurs instincts si variés. Cependant, à part de trop rares exceptions, les ento¬ mologistes actuels, surtout les Français, laissent ces insectes dans le même abandon où demeure plongé tout ce qui n’est pas coléoptère ou papillon. Sans doute, on pourrait alléguer pour justifier cette négligence les difficultés que présentent la préparation et l’entretien d’une collection d’hyménoptères, difficultés réelles sans doute , mais beaucoup moins grandes cependant pour cet ordre d’insectes que pour celui des diptères. C’est là, d’ailleurs, une objection bien faible pour qui sait de quels soins minutieux sont capables les amateurs de papillons et surtout de microlépidoptères. La crainte des piqûres parfois un peu vives de certaines espèces munies de tarières n’est pas de nature à faire reculer des gens qui — 235 — manient sans la moindre appréhension les carabes les plus féroces et doublement redoutables par leurs mandibules et la secrétion acide qui les défend. Au reste, rien n’est plus facile que d’éviter le moindre coup d’aiguillon , et la seule raison sérieuse du dédain que nous signalons nous paraît être, après la routine , l’absence d’ouvrages spéciaux facili¬ tant les recherches des débutants. Nous sommes heureux d’annoncer que cette lacune sera bientôt comblée. M. le doc¬ teur Dours , d’Amiens , l’élève et le collaborateur de l’illustre Siebel , s occupe en ce moment à nous donner une Faune complète des hyménoptères de France. M. Dours s’est acquis dans 1 étude de ces insectes une réputation européenne , et tandis que son nom est à peine connu de nos compatriotes ses ti avaux sont lus et discutés avec le plus grand soin en Angleterre , en Allemagne , en Suède, et même en Piussie. Animé, comme tout vrai savant du désir de propager le goût de la science qu’il aime , M. Dours se fait un plaisir de venir en aide aux jeunes entomologistes dans leurs premiers essais de détermination. C’est ce qu’il nous disait à nous-même dans une visite que nous lui avons faite récemment, en nous engageant à lui adresser tous les amateurs du département du Nord. En attendant l’importante publication dont nous venons de parler, et dans le but d’attirer l’attention des zoolo¬ gistes sur l’une des tribus les plus curieuses de l’ordre des hyménoptères , nous présentons aux lecteurs du Bulletin un tableau analytique des espèces françaises du groupe des Ves- pides, tableau dressé par M. le docteur Puton d’après les ré¬ sultats de ses chasses aux environs de Remiremont (Vosges). Bon nombre des espèces qui y figurent se trouvent certaine¬ ment dans notre contrée. Genre Polistes , Latr. Abdomen non tronqué ni caréné à la base. Antennes du mâle recourbées au sommet. — 236 — 1. P. Diadema , Latr. Antennes noires en dessus, le scape jaune en avsnt, le funicule jau¬ nâtre en dessous. 2. P. Gallica , Lin. Antennes jaunâtres et n’ayant de noir que le dessus du scape et des deux ou trois premiers articles du funi¬ cule. Genre Vespa , Linné. Abdomen tronqué à la base et caréné transversalement , antennes du mâle non recourbées au sommet. 1er Groupe. Pronotum avec une ligne élevée ou carène jaune ou rousse transverse et parallèle au bord postérieur des yeux; antennes du mâle avec quelques articles munis latéralement en des¬ sous d’un tubercule. A. Taille grande. Tête dilatée derrière les yeux. 1. Crabro, Lin. B. Taille moyenne. Tête non dilatée derrière les yeux. 2. Media , de Géer. 2e Groupe. Pronotum avec une ligne élevée ou carène noire transverse et parallèle au bord postérieur des yeux. Extrémité inférieure des yeux éloignée de la base des mandibules. Antennes simples chez le mâle. A. Les deux premiers segments de l’abdomen avec une grande tache rousse de chaque côté. Tibias antérieurs avec une tache noire en dessous. Epistome de la femelle avec une grande tache noire. 3. Norvegica , Fab. B. Abdomen noir et jaune, sans taches rousses. a Tibias avec une ligne noire en dedans. Femelle : Epistome avec une grande tache irrégulière noire. — 237 — Mâle : Bandes noires abdominales plus étroites sur les côtés. Funicule des antennes plus ou moins marqué de brun en dessous. Dernier segment ventral sub- émarginé au sommet et avec une fossette large à la base. 4. Saxonica , Fab. b Tibias entièrement jaunes. Femelle : Epistome entièrement jaune ou avec un petit point noir. Mâle : Bandes noires abdominales d’égale largeur sur les côtés et au milieu. Funicule des antennes entiè¬ rement noir. Dernier segment ventral arrondi au sommet, sans fossette à la base. 5. Sylvestris Scop. (Holsatica Fab.) 3e Groupe. Pronotum sans carène transverse élevée. Extrémité infé¬ rieure des yeux touchant presque la base des mandibules. Antennes simples chez les mâles. Mâles. A. Dernier segment dorsal de l’abdomen excavé en dessus et échancré au sommet. a Lignes jaunes latérales du thorax bien régulières et d’égale largeur. Couleur noire de la base du pre¬ mier segment de l’abdomen, se prolongeant en triangle en arrière. Tibias le plus souvent maculé de noir. Epistome avec une ligne médiane noire. 6. Vulgaris , Lin. b Lignes jaunes latérales du thorax irrégulières et dila¬ tées extérieurement. Couleur noire de la base du premier segment de l’abdomen se prolongeant en arrière en trois lobes. Epistome avec trois points noirs. Tibias le plus souvent entièrement llaves. 7. Germanica , Fab. — 238 B. Dernier segment dorsal de l’abdomen convexe en dessus et régulièrement arrondi sur ses bords. a Les deux premiers segments de l’abdomen variés de noir, de jaune et de roux. Scape des antennes ordi¬ nairement noir en entier. 8 Rufa, Lin. b Base de l’abdomen noire et jaune sans mélange de roux. Scape des antennes tlave en dessous. 9 Austriaca, Fabr. Femelles. A. Base de l’abdomen variée de noir, de jaune et de roux. Scape des antennes entièrement noir. 8 Rufa, Lin. B. Base de l’abdomen noire et jaune , sans mélange de roux. a Scape des antennes flaves en dessous. 9 Austriaca , F. b Scape entièrement noir. a Lignes jaunes, etc., ut supra pour le mâle. 6 Vulgaris, Lin. b Lignes jaunes, etc., ut suprà pour le mâle. 7 Germanica , Fab. Les guêpes du genre Polistes n’ont pas encore été signalées dans notre département. Elles sont très-communes aux en- M. virons de Paris, où Ton trouve leurs nids à l’air libre sur les tiges de graminées (camp de Saint-Maur , etc ), ou sur les murailles exposées au soleil (fort de Charenton). Elles abon¬ dent aussi dans les Vosges, sur les rochers de Saverne, de Bar, de Thann , de Gerardmer, etc. Ï1 faudrait les chercher dans l’arrondissement d’Avesnes : peut-être aussi aurait-on quelque chance de les découvrir à la frontière de Belgique, dans les bois et les rochers d’Angres, Montignies, etc. La Vespa Crabro (vulgairement Frelon) n’est pas rare dans les environs de Lille et de Valenciennes. C’est la plus grande espèce de guêpe que nous ayons en France. Elle fait géné¬ ralement son nid dans les vieux troncs d’arbres cariés — 239 — (ormes, saules, peupliers, etc ), parfois aussi, dit-on, dans la terre. J’ai pu observer, il y a quelques années, un nid de Vespa Crabro dans un jardin des environs de Valenciennes. Ce nid était construit dans une armoire vitrée d’une cabane rustique. La femelle pénétrait dans l’armoire par un trou de la toiture à laquelle la voûte du nid était suspendue. Un pont bordé d’une balustrade de bois d’orme non écorcé se trou¬ vait à quelque distance. C’est dans ce bois mort que la guêpe frelon allait chercher les matériaux destinés à former l’espèce de carton grossier qui compose le nid. D’après M. Bouvart, inspecteur des forêts (1), le frelon ronge la jeune écorce des frênes dont il se montre très- friand , et où il trouve à la fois un miel convenable pour ses larves et des matériaux pour son habitation. Les frênes de un à quatre ans seraient principalement attaqués, soit à l’aisselle des rameaux, soit entre les nœuds et en des points très-rapprochés. M. Bouvart attribue en grande partie à ces attaques des frelons la mort de la flèche des jeunes arbres et la bifurcation qui en résulte si souvent. Cette opinion nous paraît fort exagérée. Pendant la belle saison, le frelon recherche surtout le suc des arbres déjà souffrants des blessures faites par les larves du Cossus ligui- perda, du Zeuzera œsculi, des Sesies, etc. Au moment de la construction du nid, on les voit, comme nous l’avons dit, sur le bois déjà mort, les vieilles palissades, les troncs cariés, etc., et s’ils vont sur les jeunes pousses des arbres , c’est surtout pour y recueillir la matière gom¬ meuse des bourgeons qu’ils emploient comme ciment. La Vespa media , de Geer, que je crois identique à la Vespa Geerii , Lepeletier, ne paraît pas avoir été observée dans le Nord. On l’a trouvée en Suède et aux environs de Paris; de nouvelles recherches la feront certainement découvrir dans notre région. (1) Voy. Bulletin de la Société linnéenne du Nord, N° 7, janv. 73. — 240 — Nous n’avons pas rencontré non plus les espèces du deuxième groupe, et c’est seulement avec doute que notre ami, M. Lelièvre, nous signale la Vespa Saxonica aux envi¬ rons de Valenciennes. La Vespa Germanica est certainement l’espèce la plus com¬ mune du pays , celle qui pénètre le plus souvent dans les villes et les habitations. La Vespa vulgaris, presque aussi commune que la précé¬ dente , fréquente plus spécialement les abords des bois où elle creuse ses nids souterrains. C’est dans ces nids qu’on a trouvé plusieurs fois dans notre département le curieux co¬ léoptère parasite appelé Bipiphorus paradoxus. La Vespa rufa ne se voit non plus que très-rarement dans les villes. Elle aime les endroits boisés, surtout au bord des cours d’eau , où on la trouve souvent butinant sur les fleurs des Scrophulaires. Elle n’est pas rare dans nos environs. Peut-être faut-il considérer comme simple variété de cette espèce la Vespa Austriaca. Les deux types sont séparés par Thompson, réunis par Schenck, et, comme le fait judicieuse¬ ment observer le docteur Puton , l’étude de nombreuses sociétés permettrait seule de sortir de cette incertitude. Quoi¬ qu’il en soit, la V. Austriaca paraît assez rare dans le Nord, et je n’en ai recueilli qu’un très -petit nombre d’individus. L’étude des nids de guêpes a fourni dans ces derniers temps des résultats très-intéressants au point de vue de l’ob¬ servation des parasites qu’ils renferment. Elle a aussi con¬ tribué entre les mains de Siebold à élucider en partie la question si importante de la reproduction sans le concours du mâle (Parthénogenèse) dans le groupe des hyménoptères. A. Giard. SUR LA DISPERSION DU GERANIUM PHÆUM. Le Géranium pliæum est une jolie plante aux fleurs d’un rouge violacé très-sombre portées par des pédoncules biflores — 241 — disposés le long de la tige. Il est caractérisé par ses pétales à onglet cilié, ses sépales étalés ouverts à la maturité, la grandeur de sa corolle et l’épaisseur de sa souche vivace à rhizome oblique et prémorse, ses coques plissées transversa¬ lement au sommet. Le Géranium phœum habite en France les prairies monta¬ gneuses des Pyrénées, de l’Auvergne et du Dauphiné (voyez Grenier etGodron, Flore de France , t. I, p. 300;. En Bel¬ gique, on l’observe à Everbecq, entre Lierde-Saint-Martin et Deftinge, à Opbrakel , Schoorise, Hoorebeke, Maeter, Eti- chove, Maerke, vers Boucle-Saint-Denis et à Munkswalm. M. F. Crepin fait remarquer, dans son excellente Flore de Belgique , que ces diverses stations appartiennent toutes à une région montueuse située entre Audenarde et Grammont dans la zone argilo-sablonneuse. Près de notre frontière , on retrouve la plante au Caillou- qui-Bique (bois d’Angres) , au bord de l’Honeau dans un sol calcaire. Cette station , bien que déjà signalée par Hécart (. Florula Hannonensis) au commencement de ce siècle , nous paraît tout-à-fait artificielle : elle est d’ailleurs fort peu étendue, et diminue tous les ans sous les pierres rejetées des carrières voisines . En Picardie, le Géranium phœum a été recueilli aux envi¬ rons de Montdidier (Besse, cité par Pauquy dans la Flore du département de la Somme , 1834; Picard, Etud. Geran ). Selon M. Besse , cette espèce, qui ne s’étend pas au delà de 4 à 5 kilomètres de Montdidier, aurait été introduite vers 1800 avec des graines de houblon venant de Belgique. (Voyez de Vicq et Blondin de Brutelette, Catalogue des plantes vasculaires de la Somme , p. 52). Si l’on fait attention que la région de la Flandre belge où la plante paraît franchement indigène est une de celles où la culture du houblon est la plus florissante , on admettra faci¬ lement l’exactitude des indications de M. Besse. D'un autre côté , il résulte des renseignements que nous avons pris que - m — l’on a longtemps cultivé le houblon à Angres dans le voisi¬ nage de la station actuelle du Géranium phœum. Il y a donc lieu de croire que cette station pourrait bien avoir la même ori¬ gine que celle de Montdidier. Je souhaite toutefois que les botanistes de la Flandre s’assurent par expérience s’il y a souvent mélange des graines de notre Géranium avec celles de YHumulus lupulus. A. Giard. BIBLIOGRAPHIE. GÉOGRAPHIE DU NORD (1) par Adolphe Johanne. Nos désastres militaires ont eu pour effet d’appeler l’attention sur quelques lacunes de l’enseignement national. A tort ou à raison, on a reproché à nos chefs d’ignorer la géographie. En supposant l’accusation fondée, ils eussent pu répondre qu’on ne la leur avait pas apprise, que les pro¬ grammes imposés partout pour les études ne laissaient à cette science qu’une place très-réduite souvent même im¬ perceptible, que la majorité des cartes représentent le sol à peu près comme les caricatures de Cham représentent la société* Le mal connu, il fallut songer à le guérir. Une plus large part fut faite à la géographie dans l’enseignement, les juges des examens devinrent plus sévères , l’autorité universitaire fit paraître un long règlement sur l’enseignement de la géo¬ graphie. On y recommandait, pour faire comprendre aux en¬ fants ce que c’est que la géographie, de commencer par l’étude de la commune pour s’élever à celle du canton, du département et du pays tout entier. C’est comme application de cette méthode que M. Johanne a fait paraître ses géographies départementales. Ce sont de jolis petits livres bien imprimés, ornés de belles gravures qui représentent les principaux monuments de la contrée, et accompagnés d’une carte, peu claire, mais assez fidèle. (1) Paris, Hachette 1813. — 243 — Une introduction commune à tous les départements, est destinée à expliquer les termes géographiques. La description du département au point de vue physique, historique, admi¬ nistratif et économique, se termine par un dictionnaire des villes, bourgs, villages et hameaux curieux. On y trouve Damousies — église de 1300 avec un clocher de 1513. — Ilaynecourt — tour (xve siècle) de l’église.— Mais on y chercherait en vain Aniche, Somain, Caudry, Ferrières, Estaires et bien d’autres lieux industriels qui font la richesse du pays. On parle de l’Obélisque de Denain et on ne dit pas un mot de ses mines de charbon. C’est à peine si on consacre cinq lignes à l’industrie de la houille et la compagnie d’Anzin est seule mentionnée. La culture de la betterave est attribuée spécialement à l’arron¬ dissement de Douai, celle de l’œillette est oubliée: en revanche on cite parmi les céréales, l’épautre et le sarrazin. L’article climat présente des chiffres inexacts : ainsi la quantité moyenne de pluie tombée à Lille est estimée à 572rara tandis qu’elle est réellement de 669 mra. Rien sur les watteringues et les moëres. Pas un mot de détail sur les canaux. Nous savons il est vrai qu’il y a 4,604 chemins vicinaux, dont 4,400 de petite communication s’éten¬ dant sur 6,107 kilomètres et demi. L’enfant qui retiendra ces chiffres sera un phénix de science aux yeux des.... canton¬ niers. J’ai loué tout à l’heure le charme des gravures-; il y aurait cependant bien à dire. L’église dTIazebrouck est isolée au milieu des champs; Cassel paraît plutôt dans un fond que sur une hauteur. Quant à“Landrecies, pas un de ses habitants ne pourrait la reconnaître. L’idée des géographies départementales est excellente ; mais elle exige pour être appliquée, une parfaite connaissance du pays et l’on ne s’étonne pas qu’un étranger, quelque savant qu’il fût, y ait rencontré des obstacles insurmontables. J. g. — 2 U — PATRIA BELGICA. XI. — Les populations préhistoriques , Par M. Dupont, directeur du Musée d’Histoire naturelle. Nous avons si souvent entretenu nos lecteurs des recherches préhistoriques faites en Belgique, que nous hésiterions à revenir sur ce sujet à propos du Patria Belgica , si un article de M. Dupont n’était toujours une bonne fortune, car il est rare qu’on ne puisse y trouver quelqu’idée nouvelle. Dans celui-ci, il insiste sur deux points déjà formulés par lui au Congrès de Bruxelles, savoir que les populations du Condros et du Hainaut à l’âge de la pierre taillée différaient complè¬ tement l’une de l’autre et que l’industrie de l’âge de la pierre polie procède par une filiation directe de l’industrie de l’âge de la pierre taillée du Hainaut. Au contraire, d’après l’opinion généralement admise, les peuples du Hainaut ont vécu avant ceux du Condros et les hommes de la pierre taillée sont postérieurs aux deux autres et en sont complètement séparés par un grand hiatus dans l’histoire de l’humanité. Les peuplades du Condros vivaient dans les cavernes, celles dn Hainaut, qui habitaient un pays dépourvu de cavernes, devaient se construire des cabanes. Les premiers allaient chercher le silex en Champagne et le taillaient en lames tranchantes que l’on désigne maintenant sous les noms de lances et de couteaux, les seconds prenaient leurs silex sur place et en faisaient des haches et des racloirs. En comparant les silex taillés du Hainaut aux ébauches de silex polis que l’on trouve en si grande quantité sur les champs de Spiennes, on est frappé d’une certaine ressem¬ blance de forme, on dirait le même type perfectionné. « En résumé, dit M. Dupont, quand nous remontons dans les temps géologiques, nous voyons l’existence de l’homme se manifester simultanément sous deux formes distinctes en — 245 — Belgique, durant la période quaternaire. Alors que notre sol recevait les derniers traits importants de son relief et qu’il nourrissait le Mammouth, le Rhinocéros, le Lion, le Renne, ainsi que tant d’autres espèces qui ont disparu de nos lati¬ tudes ou même de la surface du globe, deux populations humaines, n’ayant aucun rapport entre elles, ni par leur industrie, ni par leurs mœurs, ni par leur trafic, se parta¬ geaient le pays. L’une habitait les cavernes du Condros et de FEntre-Sambre-et-Meuse, et se développa sous son impulsion propre durant toute la période quaternaire, ayant les mêmes caractères généraux que les troglodytes du centre et du midi de la France. L’autre occupait la moyenne Belgique, le nord-ouest de la France et les bords de la Tamise ; elle progressa plus rapidement, par le développement régulier de son industrie qui l’amena à l’âge de la pierre polie, l’une des phases les mieux marquées et les plus constantes de l’évolution humaine. Elle envahit alors la région des troglo¬ dytes belges, fit disparaître ceux-ci et semble avoir subi à son tour l’invasion d’un autre peuple de l’âge de la pierre, de celui qui construisit les dolmens.» Les idées de M. Dupont venant, comme nous l’avons dit, contredire les théories généralement admises, demandent une confirmation. La coexistence de deux civilisations con¬ temporaines à l’époque de la pierre taillée ne paraît pas avoir soulevé d’objections bien graves ; il n’en est pas de même des rapports de filiation entre l’âge de la pierre taillée et celui de la pierre polie (1). X. — Paléontologie des Vertébrés , Par M. le professeur Van Beneden. Le savant professeur de Louvain donne la liste dans l’ordre zoologique de tous les vertébrés dont les restes fossiles ont été trouvés en Belgique. Il consacre à chacun quelques (1) Bulletin , t. IV, p. 208. — 246 — lignes pour indiquer leur âge géologique et leur gisement. Cet article n’est pas susceptible d’analyse. Remarquons cependant que M. Van Beneden rapporte l’Ours des cavernes (Ursus spelæus ) à l'Ours brun, le Lion des cavernes (Felis spelœa) au Lion, le Felis engiholensis au Léopard, la Hyène des cavernes ( Hyœna spelœa) à la Hyène tachetée. J. G. CHARLES IX. Deux années de règne. 15^70-1572 (1). Sous ce titre, le doyen de la Faculté des Lettres de Douai, M. Abel Desjardins, a publié, d’après des documents inédits conservés dans les Archives de Florence, un important travail sur les deux années qui précédèrent la Saint-Barthélemi. La passion, la crainte ou Fintérêt ont obscurci la vue des acteurs ou des témoins des évènements de 1572. Les historiens venus après eux, ceux-là mêmes qui se sont affranchis de tout esprit de parti, n’ont pas toujours su échapper à l'esprit de système. De là, des dissentiments multipliés, souvent fort graves. Les uns inclinent à croire qu’à partir de la paix de 1570, s’ourdit sans relâche la conspiration qui devait aboutir au massacre du 24 août 1572 ; d’autres admettent de la part de Catherine de Médicis une longue préméditation en ce qui touche l’assassinat de Coligny, mais non en ce qui concerne le massacre de la Saint-Barthélemi; quelques-uns sont convaincus que la reine-mère était incapable de se tracer une ligne de conduite suivie et d’y persévérer. En présence de ce conflit d’opinions, M. Abel Desjardins apporte des documents nouveaux , qu’il a trouvés dans les lettres de l’envoyé du duc de Florence, Cosme de Médicis, le commandeur Pétrucci , homme habile et prudent , qui avait gagné la confiance de la reine-mère et celle du roi, bien placé (1) Douai, Crépin, 1873. — 247 — pour tout voir, assez pénétrant pour tout apprécier. Cette cor¬ respondance éclaire d’un jour nouveau les faits qui précédèrent la Saint-Barthélemi, Nous conservons dans ce compte-rendu analytique l’ordre adopté par le savant professeur d’histoire de la Faculté de Douai. La paix de Saint-Germain. Ses causes , ses suites. — La paix de Saint-Germain, signée le 8 août 1570, a été repré¬ sentée par la plupart des historiens comme un piège tendu par Catherine de Médicis à la bonne foi des protestants. Les correspondances de l’ambassadeur italien font comprendre que d’autres causes expliquent cette paix : le parti du roi et de la reine était sans ressources, sans argent, sans discipline ; les Guises, qui étaient opposés à la paix, furent écartés, et le Souverain-Pontife Pie V, prince vertueux et rigide, ennemi des tempéraments et des concessions, fut amené à ne pas faire d’éclat si le traité était conclu. Dès lors, on pouvait s’arranger avec les protestants. Cette paix fut « une humi- y> Dation que le roi et la reine durent subir, malgré leurs » répugnances, parce qu’ils étaient dans la détresse ; ce ne » fut pas un guet-apens qu’ils dressèrent à loisir, pour y » faire tomber deux ans plus tard leurs trop confiants adver- 3> saires. » Les partis après la paix. Politique de la reine-mère. — Après la paix de Saint-Germain qui reconnaissait l’oubli du passé, tolérait la religion réformée et cédait la Rochelle, Cognac. Montauban et La Charité comme places de sûreté, les protestants avaient lieu d’être satisfaits. Des conditions étaient imposées aux catholiques qui, cependant, avaient été vainqueurs ; l’amiral de Coligny était arrivé à l’apogée de sa renommée : un ne l’appelait plus que le roi de La Rochelle ; il ne lui restait qu’à licencier son armée prudemment et sans désordre et à surveiller l’exécution du traité. Il avait le beau rôle. Celui de la reine-mère était moins facile. Obligée d’avouer sa défaite, elle ne perdit pourtant pas courage, s’attachant à - 248 — sauver du naufrage sa fortune toujours menacée et sa pré¬ caire autorité. Prévoyant qu’il lui faudrait éloigner les Guise, elle avait rompu en visière avec le cardinal de Lorraine et Pavait amené à prendre congé. Forcée de vivre avec le parti protestant, elle cherchait à découvrir les côtés faibles par où elle pourrait l’entamer un jour. Elle s’inquiétait peu de Goligny, vieillard usé par les fatigues et les combats qui, sans doute, n avait pas longtemps à vivre. Elle étudiait le jeune Henri de Navarre, âgé de dix-sept ans à peine, et son cousin, Henri de Condé, qui avait à peu près le même âge. Le prince Henri de Navarre était, disait-on, d’humeur légère et fort ami du plaisir. Le détacher de Coligny et le conquérir au parti de la cour et à la religion catholique, était un coup de maître. Comment y arriver ? En l’amenant, se dit Catherine de Médicis, à épouser la sœur du roi de France, Marguerite de Valois. Marguerite de Valois était spirituelle et charmante ; elle prendrait assez d’empire sur un époux de dix-huit ans, pour l’enchaîner au pied du trône et opérer sa conversion, ce qu’on réputait chose assez facile. Tel fut, à n’en pouvoir douter, le plan de la reine-mère. Henri de Navarre et Henri de Condé avaient plusieurs fois témoigné, comme l’attestent les lettres du commandeur Pétrucci, des velléités de rapprochement, des preuves du déplaisir que leur causait la guerre civile : c’étaient des symptômes de bon augure pour les desseins de Catherine. Aussi, dès le 4 juillet, elle parlait ouvertement de son inten¬ tion de donner à l’héritier de Navarre la main de sa fille Marguerite. Ce dessein explique des passages de sa corres¬ pondance qui pourraient paraître se prêter à une interpré¬ tation fâcheuse. Les citations textuelles, reproduites par M. Desjardins, ne permettent aucun doute à cet égard. Tels étaient, à la fin de 1570, les projets de la reine-mère. Quant au roi Charles IX, souvent malade, toujours lan¬ guissant, il ne sortait de cet état que pour se livrer à outrance — 249 — à sa passion pour la chasse. La reine-mère le maria à Élisabeth d’Autriche, fille de Maximilien II. Cetté union avec une princesse aimable et qui sut toujours rester irrépro¬ chable au milieu d’une cour corrompue, fit sortir le roi, pour quelque temps, de sa somnolence et de son apathie. Mais il ne tarda pas à reprendre ses habitudes et à chasser le cerf à outrance. « N etait-ce pas à peu près la seule occu- » pation qui lui fut permise? Il avait pour sa mère une * déférence poussée jusqu’à la crainte, ce qui, en l’annu- » lant, le déconsidérait. y> Quant au peuple, il s’accoutumait volontiers au régime de la paix. Projets de guerre extérieure. Négociation secrète. — La paix était faite ; mais les partis étaient encore en présence et n avaient pas désarmé. Pour empêcher la guerre civile, il fallait recourir à ce qu’avait jadis employé Charles Y afin de délivrer la France des grandes compagnies; il fallait une guerre nationale, réunissant, comme frères d’armes, sous le drapeau royal, les protestants et les catholiques. Pour Ja guerre, il fallait de l’argent, et le royaume était en détresse. L’Italien Birague, qui ne craignait pas de se com¬ promettre, fut nommé chancelier et chargé de trouver le mo\en d obtenir de nouveaux impôts. La guerre pouvait se faire contre l’Angleterre ou contre l’Espagne. C’étaient deux guerres populaires, nationales. Un instant, en 1570, on pensa à s allier avec 1 Autriche et plusieurs puissances italiennes contre Cosme Ier de Médicis, qui venait d’être élevé par le pape Pie V à la dignité de grand-duc. Un instant, le danger fut imminent pour ce dernier. Un Génois, Jean-Galéas Frégose, homme de mérite, fort mêlé aux négociations de cette époque, fut assez habile pour détourner le coup. Frégose se trouvait à La Rochelle en même temps que Louis de Nassau, qui venait, au nom du prince d’Orange son frère, conclure avec les Huguenots une alliance contre le grand-duc et le Saint-Siège. Il fit observer au comte Louis — 250 — qu’il serait bien plus avantageux au roi de France de rompre avec l’Espagne dans les Pays-Bas , que les protestants de l’Allemagne le seconderaient dans cette guerre et que le prince d’Orange en profiterait. Au contraire, que pouvait-il lui revenir d’une guerre en Toscane et dans les États du Saint-Siège? Frégose fut écouté et compris. Il fut décidé qu’on s’effor¬ cerait d’amener le roi de France et les princes de l’Allemagne à attaquer les Espagnols dans les Pays-Bas. Le protestant Téligny, Yâme de l'amiral , jeune homme, aimable et bon, que Charles IX se plaisait à entendre , fut envoyé à la cour de France. Après avoir entretenu de ce projet l’ambassadeur Pétrucci, il en parla au roi. Celui-ci, entrant dans cette idée et d’ail¬ leurs heureux d’agir une fois par lui-même en dehors de l’initiative de sa mère, fut bientôt tout disposé à faire la guerre à l’Espagne. Il en fut de même de la reine Élisabeth, des Montmorency, et surtout des protestants ; ils étaient disposés à se grouper autour du Saint-Siège pour attaquer Philippe II. La reine-mère et le duc d’Anjou ne firent pas d’objection. Il fallut consulter le grand-duc de Toscane : le vieux Cosme, qui avait beaucoup de sagacité et d’expérience, hésita à se lancer dans les aventures. Assuré, maintenant, de n’être pas dépossédé, il conseilla la paix à tout le monde. Sa réponse mit fin à toutes les négociations. Catherine de Médicis, incapable d’embrasser résolûment un grand parti, fut heureuse de ce message politique ; Charles IX, se voyant arrêté au premier pas, renonça à cette velléité d'être roi. La négociation fut abandonnée. Ainsi échoua ce projet, qui voulait continuer François Ier et devancer Richelieu. Ces tentatives servent du moins à prouver qu’il y eut parfois quelques idées sérieuses à la cour de Charles IX et qu’on ne pensait pas, à cette époque, au massacre qui devait s’accomplir en 1572. La guerre contre — 251 — l’Espagne suffisait pour empêcher la guerre civile, les luttes religieuses. C. D, (La suite au prochain numéro). LE JETON CONSIDÉRÉ COMME INSTRUMENT DE CALCUL. La Revue de la Numismatique belge a publié sous ce titre, dans sa dernière livraison (5e série, t. Y), un intéressant tra¬ vail de M Alph. de Schodt. L’opération familière du calcul par les jetons remonte à une haute antiquité. Au Ve siècle avant Jésus-Christ, le peuple, en Egypte comme en Grèce, comptait avec de petites pierres (calculi) , et, avant l’ère chrétienne , les Grecs avaient rem¬ placé l’emploi de ces calculs par celui de pièces d’airain rondes , plates et polies , usitées concurremment avec la ta¬ blette d’arithmétique connue sous le nom d’abaque (a%6«5 abacus). Les Romains se servirent aussi de jetons. C’étaient géné¬ ralement des rondelles de verre présentant des couleurs variées de plusieurs manières. On lit dans Juvénal que les familles opulentes les faisaient faire en ivoire. Les jetons conservèrent à Rome , de même que les cailloux', le nom de calculi, d’où nous est venu le mot calcul. M. de Schodt reconnaît qu’il n’est pas possible de préciser l’époque à laquelle remonte l’emploi du jeton métallique en France, en Allemagne ou dans les Pays-Ras. R accepte comme fondée l'opinion qui attribue une origine française aux jetons de métal , dont l’usage ne fut généralement répandu dans nos contrées qu’à la fin du xme siècle ou au commencement du xiv°. L’auteur en a relevé les désignations dans les comptes municipaux et dans ceux du Franc de Rruges. II fait la nomenclature des quarante-huit transformations subies en français par le mot gectouer avant que l’on voie apparaître au xvie siècle la forme jetton, qu’on écrivit ensuite jeton. R passe rapidement sur les légendes , le millésime , la fabrication, le — 252 - métal et la distinction entre le jeton banal et celui des admi¬ nistrations, des Chambres, etc. Au sujet de ces derniers , M. de Schodt appuie sur le soin particulier qu’on apportait à la composition des devises , des légendes et des inscriptions , même avant que Louis XIV eût fondé la Petite Académie , appelée plus tard Académie des ins¬ criptions et médailles , et depuis 1716 Académie des ins¬ criptions et belles-lettres. Les personnes qui ont vu jouer le Malade imaginaire se rappellent qu’au début de la pièce le héros de la comédie vérifie le mémoire de son apothicaire. Pour suivre la tradi¬ tion , l’acteur doit être assis devant un comptoir et régler le compte avec des jetons. Ce comptoir, tout différent de l’aba¬ que des anciens , machine à calculer , composée d’un carré long, évidé, sur lequel étaient tendus des fils auxquels on enfilait des boules, et d’où procède, croyons nous, l’habitude prise par les Chinois d’enfiler leurs monnaies ; ce comptoir était une tablette présentant des liteaux peu saillants, disposés de la même manière que les lignes de la portée musicale dans le méloplaste. Le premier intervalle servait de case aux unités, le second aux dizaines, le troisième aux centaines, etc. A chaque vente, le marchand plaçait dans ces cases le nombre de jetons nécessaires pour indiquer le montant du débit, puis faisait tomber les jetons par un trou rectangulaire donnant ouverture dans un tiroir divisé par des cloisons cor¬ respondant aux cases. A la fin de la journée, il faisait une addition mécanique qui lui donnait un résultat certain. Dans les additions ou vérifications de comptes , les compteurs avaient ordinairement cent jetons. On les reprenait quand ils étaient épuisés. Parfois, au lieu de cases horizontales, on plaçait à une dis¬ tance d’un peu plus de deux doigts, une rangée perpendi¬ culaire de jetons indiquant, comme les cases, les unités, les dizaines, les centaines, etc. Le calcul par les jetons ne s’enseignait pas dans les écoles, — 253 - mais il était très-répandu dans la pratique. Vers 1628, dit M. de Schodt, on faisait entrer dans la dot d'une fille à marier son aptitude et son habileté à calculer à l’aide des jetons. Mrae la marquise de Sévigné écrivait à sa fille (10 juin 1671) : « Nous avons trouvé, avec ces jetons qui sont si bons , que 3> j’aurai cinq cent trente mille livres de bien , en comptant » toutes mes petites successions. » M. Charles Robert affirme, dans un article sur les jetons d’une importante famille du Méconnais, que l’usage n’en était pas encore perdu aux der¬ niers temps de la monarchie. E. Van Hende. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE TRAVAUX COURANTS Il y a quelques mois, M. Dutilleul a lu à la Société une étude sur la maison centrale de Loos et le pénitentier agri¬ cole de Saint-Bernard C’est un travail écrit avec cœur par un homme qui a étudié sous toutes ses faces la question si vaste du régime pénitentiaire, qui sait garder un juste milieu entre la compassion pour le criminel égaré et les intérêts de la société qu’il faut avant tout sauvegarder. Il constate que la population de Loos est formée de récidi¬ vistes dans la proportion effrayante de 90 %. C’est la con¬ damnation de notre régime pénitentiaire. Loin de corriger, d’améliorer, de moraliser le détenu, la prison l’enfonce de plus en plus dans l’ornière du vice et du crime. Ce fait dé¬ plorable et hors de toute discussion, M. Dutilleul l’attribue à la promiscuité « qui entretient et exalte presque fatalement une passion incurable pour le mal dans les natures perverses et engendre, d’autre part, des appétits criminels chez ceux qui n’en sont encore, en fait de culpabilité, qu’au délit. » Il propose d’abord de séparer les réclusionnaires des cor¬ rectionnels. Car, dit-il, les statistiques prouvent que le forçat est moins corrompu que le réclusionnaire et celui-ci que le — 254 — ' correctionnel ; la perversité est en raison inverse de la durée de la condamnation. Il repousse néanmoins l’idée de classer les condamnés par catégories d’après la nature de leur crime, et l’arrêt qui les frappe, parce que ce système sans suppri¬ mer les inconvénients de la promiscuité rend la surveillance plus difficile. Il voudrait que le réclusionnaire fut soumis à l’emprison¬ nement cellulaire pendant la première année, puis rendu à la vie commune pendant le jour, alors qu’il est à demi- amendé. 11 voudrait aussi que le condamné put, par son assi¬ duité au travail et par sa bonne conduite, conquérir la remise du quart de sa peine. Enfin, il pense que le régime cellulaire devrait être appliqué dans les maisons d’arrêt de justice et de correction pendant toute la durée de la peine. On objecte que le système cellulaire peut entraîner la folie. M. Dutilleul répond que la durée d’un an est insuffi¬ sante pour produire un pareil résultat, d’autant plus que l’isolement est mitigé par les visites quotidiennes du gardien, du directeur ou de l’aumônier. Il aurait pu ajouter qu’en supposant que quelques esprits faibles succombent à l’isole¬ ment, il s’agit du salut moral d’un grand nombre. D’ailleurs ce système fonctionne en Angleterre et on s’en trouve bien. Quant aux colonies agricoles comme celle de Saint-Ber¬ nard, M. Dutilleul s’en montre le partisan convaincu et constate les excellents résultats qu’elle obtient pour l’amélio¬ ration des jeunes détenus. M. Terquem a présenté un appareil propre à démontrer le mouvement de propagation des ondes sonores , mouvement que l’on a souvent de la peine à se figurer. Déjà on avait eu l’idée de faire glisser derrière une fente étroite des plaques de verre noircies sur lesquelles étaient tracées des courbes transparentes. Les divers points de cette ligne en passant successivement vis-à-vis la fente figurent les molécules d’air se déplaçant pendant la propagation du son. Afin d’obtenir — 255 des courbes bien régulières et de les reproduire régulière¬ ment, M. Terquem les trace en grand sur des feuilles de papier blanc et les reproduit sur les plaques de verre par la photographie. Dans les cours on peut projeter facilement ces mouvements avec la lumière solaire ou même la lumière Drummond. Tout le monde connaît les belles expériences de M. Plateau avec les bulles de savon. Il les obtient avec un liquide com¬ posé d’oléate de soude et de glycérine. Comme l’oléate de soude est difficile à préparer, M. Terquem propose de se servir d’une des solutions alcooliques de savon de Marseille, car le stéarate est à peu près insoluble dt.ns l’alcool concen¬ tré. Avec ce liquide, il répète toutes les expériences de Plateau. M. Bachy a entretenu la Société de quelques expériences qu’il a tentées sur le mode d'absorption du gaz acide carbo¬ nique par les plantes. Il pense que l’acide carbonique aspiré par les racines se rend avec la sève dans les parties folia¬ cées. Celles-ci, sous l’action de la lumière, fonctionnent de manière à lui faire abandonner son carbone dans le végétal. Il résulte en effet d’une expérience qu’il a organisée pendant deux années consécutives, qu’une branche renfermée dans de l’air confiné, contenant par conséquent une quantité insi¬ gnifiante d’acide carbonique, a bien végété, s’est développée et a produit des feuilles ; ce qui indique que l’acide carbo¬ nique lui est arrivé par les racines. Les conquêtes de la science aux prises avec l’impôt , par M. Kuhlmann. Sous ce titre le savant président de la Société des sciences examine les péripéties subies par l’industrie de la soude et les dangers qu’elle courrait de l’établissement d’un impôt sur le sel marin.- Le sel marin ou chlorure de sodium est la source d’in¬ dustries les plus variées et les plus importantes. Traité par l’acide sulfurique il produit de l’acide chlorhy- — 256 — drique et du sulfate de soude. Du premier de ces corps on extrait le chlore, si utilisé dans le blauchîment ; le second, traité par le procédé Lebanc, est la source de la soude, qui est un des agents principaux de la fabrication du savon et du verre. Ne pouvant suivre Fauteur sur le terrain économique qui est interdit à notre publication, nous indiquerons d’après lui les sources où l’industrie pourrait aller chercher le chlore et la soude en dehors du sel marin. Depuis la découverte des mines de chlorure de potassium à Staasfurt en Prusse, il s’est établi en Allemagne et dans le nord de la France, des usines où on traite ce sel par le pro¬ cédé Leblanc. On produit donc des quantités considérables d’acide chlorhydrique qui échapperait à l’impôt. Quant à la soude on pourrait la retirer, comme on le fait en Allemagne, de la Gryolite ou fluorure double d’aluminium et de sodium, ou même de l’azotate de soude du Chili. Il faut ajouter que le carbonate de soude est un produit du raffinage des salins de betterave. De la soude dans les végétaux , par M. Corenwinder. — Jusqu’à ces dernières années on admettait que les sels solubles contenus dans les cendres de végétaux étaient à base de soude et de potasse. M. Peligot le premier reconnut que la soude n’est pas constante. Dans le cours de ses longues et patientes recherches chi¬ miques sur la végétation, M Corenwinder eut l’occasion de reconnaître l’exactitude des vues de M. Peligot. Des cendres de feuilles de lilas, d’érable et de tabac ne lui ont donné que de la potasse. Il est cependant d’autres végé¬ taux qui ont incontestablement la propriété de puiser de la soude dans le sol. Tels sont les Atriplicées et la betterave en particulier. Mais la quantité de soude absorbée dépend beaucoup du terrain et des engrais, car des betteraves récoltées sur un champ fumé avec de l’engrais flamand a donné plus de 33 °/° 4 — 257 — de sels de soude, tandis que les betteraves récoltées dans les environs de Nevers n’en ont donné que 4, 8 °/°. Lorsque la betterave croît aux bords de la mer ou qu’elle pousse d insdes marais récemment desséchés, la quantité de soude peut être encore plus considérable et cet accroissement est accompa¬ gné d’une diminution en potasse. Des cendres de betteraves récoltées dans des marais de Saint-Omer ont fourni 38 % de sels de soude et celles de betteraves récoltées dans un relai de mer à Dunkerque en contenaient 43 %. Parmi les végétaux qui ont la propriété d’absorber de la soude, il faut classer probablement certains arbres des tro¬ piques qui poussent dans les îles ou au bord de la mer. M. Corenwinder a trouvé 14 % de sels de soude dans des cendres du lait des noix de coco. Sur la préparation du gaz hydrogène, par M. Viollette. — On lit dans la plupart des traités de chimie que l’hydrogène préparé par l’action de l’acide sulfurique sur le zinc contient de l’hydrogène carboné. Cependant, dans son travailclassique sur la composition de l’eau, M. Dumas ne cite parmi les im¬ puretés qui accompagnent l’hydrogène que le gaz hydrogène arsénié et hydrogène sulfuré. M. Viollette s'esl assuré qu’effectivement il n’y avait pas d’hydrogène carboné. On ne sait à quoi attribuer l’erreur générale. M. Cox a entretenu la Société de différents systèmes de machines à vapeur en grande détente. Le système aujourd’hui appliqué consiste à opérer une grande introduction de va¬ peur par de gros tuyaux venant sans obstacles du généra¬ teur ; à interrompre cette introduction à un moment donné et à laisser exécuter le reste de la course par la détente. Dans ce système la sortie de la vapeur est libre et instan¬ tanée, la machine est horizontale et n’a qu’un cylindre. M. Cox examine deux machines construites suivant ce sys¬ tème, les machines Corliss et Noblet; il donne la préférence à la dernière. Mémoire sur les régulateurs à force centrifuge [ employés — 258 — dans V industrie, par M Boire. — L’auteur examine deux, régulateurs dont les boules et le manchon ont un poids total déterminé. Dans l'un, les boules ont un poids supérieur à celui du manchon et l’articulation des deux tiges d’un même côté est en un point quelconque ; dans l’autre les tiges sont articulées entre elles au centre des boules et le poids du manchon est supérieur à celui des boules. M. Boire prouve que le second appareil possède une régularité de mouvement supérieure au premier. Des amputations sous périostées, par M. le docteur Houzé de l’Aulnoit. — L’auteur propose de substituer aux amputations par le procédé ordinaire les amputations par la périostéoto¬ mie, c’est-à-dire de recouvrir l’os sectionné par une lamelle de périoste et de soumettre le membre tout entier ainsi que l’articulation qui le relie au tronc à la plus grande immobi¬ lité. Il expose l’historique de ce mode d’opération dont il s’est fait le propagateur ardent et convaincu, discute les objections qu’on lui a faites et expose en détail les différents cas où il a pratiqué ces opérations. M. Casati a communiqué ses impressions sur le Musée de Madrid ; puis il a présenté des Faïences de Talaveyra la reyna qui se distinguent par la nuance verdâtre de l’émail et par des dessins faits à grands traits et avec une certaine ampleur. M. Casati a aussi publié une note sur la valeur de la lettre \ dans l 'alphabet Etrusque. Cet alphabet est commun, sauf de légères différences, à plusieurs langues de l’Italie primitive, notamment aux langues Osque, Yolsque, Ombrienne et Sa- bellique, qui ne sont guère mieux connues que l’Étrusque. D’après des inscriptions récemment découvertes , Fabretti supposa que le signe en question est synonyme de M. M. Casati ne le pense pas, il appuie son opinion de l’autorité de M. Maury, membre de l’Institut, directeur des Archives. Nous ne faisons que mentionner un nouveau supplément à la Numismatique lilloise , par M. Yanhende , V Histoire 259 — d 'Annappcs, par M. Leuridan, et le Supplément au catalogue des Coléoptères du département du Nord , par M. de Norguet, nous réservant de donner des détails ultérieurs sur ces tra¬ vaux si intéressants pour notre contrée. M. Duviller, préparateur de chimie de la Faculté des sciences, a présenté à la Société qui l’a admis dans son recueil, un travail sur les chromâtes de plomb. Ce sel est décomposé par l’acide nitrique en acide chromique et en ni¬ trate de plomb qui se précipite en présence de l’excès d’acide nitrique employé. En traitant le chromate de plomb par le double de son poids d’acide nitrique, on obtient une solution d’acide chromique ne contenant que 2 % d’oxide de plomb. Il arrive à constater la présence du sulfate de plomb tou¬ jours contenu dans les chromâtes de plomb du commerce en les réduisant par l’acide nitrique et l'alcool. Il se forme des nitrates de chrome et de plomb solubles, tandis que le sulfate de plomb reste au fond du vase. SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DU NORD Travaux courants M. Chellonneix signale la découverte effectuée par M. Robe, d’une partie de la mâchoire inférieure d’un Elephas primigenius , dans le Diluvium de Sangate. Cette pièce intéressante comprend la symphise du menton, mesurant 0.m27 de circonférence, en bon état, et la première dent antérieure de gauche. « La dent était encore fixée dans son alvéole, dit M Robe, au moment où ces débris ont été aperçus, mais les bords alvéolaires se sont fragmentés lorsqu’on les a détachés de la couche ambiante. Elle mesure 0 m12 de longueur sur 0.m27 de largeur maxima, et l’on y compte 10 lamelles ou dents simples, parallèles et presque droites. » Ces détails impliquent qu’il s’agit bien de l’espèce indiquée ci-dessus. Le gisement, mis à nu accidentellement par une forte — 260 — marée , est situé sous les sables de la plage à cent mètres environ au S -0. du chemin qui donne accès à la mer , à la sortie de Sangate, quand on marche vers le Blanc-Nez , et à 4m horizontalement du pied des escarpements diluviens. La couche fossilifère est un limon verdâtre, à pâte fine, parsemé de petits nodules de craie et analogue au limon infé¬ rieur de notre contrée. Elle forme la partie supérieure d’un ensemble de bandes alternantes de marnes à menus frag¬ ments de craie arrondis, et de limon argileux, qui constitue la partie moyenne du Diluvium de Sangate. A la hauteur du gisement, la bande fossilifère passe à 0.ra30 sous la falaise , mais on la retrouve dans l’escarpe¬ ment, à quelques centaines de mètres plus au S.-O., ensui¬ vant l’élévation des strates dans cette direction. Cette découverte vient combler une lacune dans nos données antérieures sur le Diluvium de Sangate, et permet de pousser plus loin les rapprochements entre cette forma¬ tion et celle qui lui correspond sur la côte anglaise. D’après une note de M. Mackie ( the Geologist, 1860), sur le Diluvium de Folkestone , si riche en grands mammifères de l’époque quaternaire , c’est dans une couche de marne sa¬ bleuse, à gros éléments de silex et de grès ferrugineux, cor¬ respondant minéralogiquement à la partie tout à fait supé¬ rieure du Diluvium de Sangate, que l'on aurait trouvé, de l’autre côté du détroit, la faune à Elephas primigenius. On conclut en ce que l 'Elephas primigenius pourrait se rencontrer à Sangate dans l’assise supérieure comme dans l’assise moyenne du Diluvium. Ces deux assises, malgré le ravinement très-accusé qui les sépare, seraient donc à peu près de même âge. BIOGRAPHIE. LORQUIN. Les Annales de la Société entomologique de France ont donné dernièrement la biographie d’un voyageur naturaliste — 261 — qui avait acquis une grande notoriété et que sa naissance rattache à notre département. Voici le résumé de cette nécro¬ logie présentée à la Société par le docteur Boisduval : Pierre-Joseph-Michel Lorquin naquit à Valenciennes, le 2 juillet 1797 ; il se destina d’abord à la carrière militaire. Mais le désastre de Waterloo changea ses projets, et il devint clerc de notaire et agent d’affaires. Ayant été ruiné par la faillite d’un de ses amis, il résolut de chercher des ressources dans l’histoire naturelle pour laquelle il avait toujours été passionné. Il partit en 1847 pour l’Andalousie, qu’il explora avec fruit; visita ensuite l’Algérie, et en 1849 alla s’établir en Californie, où il espérait trouver à la fois de l’or et des insectes. Les placers ne lui procurèrent que déceptions et il dut, pour vivre, exercer à San Francisco divers métiers fort en dehors de ses habitudes. S’étant procuré ainsi une certaine aisance, il parcourut en naturaliste tout le pays, depuis la mer jusque dans les gorges des montagnes de l’intérieur ; ses récoltes en oiseaux, en coquilles et surtout en papillons furent très-intéressantes. En 1859 il s’embarqua pour la Cochinchine, chassa aux environs de Saïgon, puis passa aux Philippines et y fit de superbes trouvailles en Lépidoptères. Après deux années de chasses incessantes, il revint en Californie en passant par la Chine ; mais il n’était pas plutôt remis de ses fatigues qu’il prit la mer de nouveau, revit la Cochinchine et Manille, et explora les Moluques et les Célèbes, d’où il envoya en France de magnifiques espèces nouvelles ou connues seule¬ ment des Anglais! Malgré le dépérissement de sa santé, il parcourut encore l’archipel d’Arrow, Amboine et Java et ne revint en France qu’en 1865. Son séjour dans les contrées intertropicales avait gravement atteint ses fonctions cérébrales, sa vue était très- affaiblie et sa mémoire presque perdue. En dépit de ces — 262 infirmités, rien ne put le soustraire à la nostalgie des pays chauds, il repartit pour la Nouvelle-Grenade où la faiblesse de ses yeux l’empêcha de chasser fructueusement. Après un court séjour en Californie il revint en France exténué, et mourut le 8 février 1873. Lorsqu’on a vu, dit M. Boisduval, les brillantes récoltes de Lorquin, on se demande comment il est possible à un homme seul, abandonné à lui-même, dan> des pays inhospitaliers, avec de très-faibles moyens, de recueillir un aussi grand nombre d’objets remarquables. Il lui fallut une santé de fer au service d’une force de volonté à toute épreuve, pour pouvoir supporter les fatigues et les privations de ses aventureux voyages. Il lui arriva aux Moluques de passer plusieurs jours sans prendre aucune nourriture, et de ne trouver ensuite pour se rassasier que la moelle des sagoutiers ; d’autres fois il dut se nourrir de la chair des chauves-souris. Il est fâcheux que le temps lui ait manqué pour rédiger des notes qui eussent pu servir à un récit détaillé de ses curieuses explorations. C’eut été le digne pendant des célèbres voyages d’un autre enfant du Nord, Adolphe Délegorgue. A. DE N. CHRONIQUE. 1873. Wlctéorologëc. Septembre. — Octobre. Température atmosphér. moyenne. CO • O oo O 10° 75 — moy. des maxima. 17? 55 14°72 — — des minima. 10? 06 6° 7 9 — extr. max., le 28. . . 23? 7 le 3, 26°5 — — minima, le 25. 6? 5 le 29, 0n6 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 760.310 758.233 — — extr. max. le 22. 772.41 le 28,771 .91 — — — min. le 16 752.56 le 23,740.47 Tension moy. de la vap. atmosph. 9r?m05 8mm 15 Humidité relative moyenne %. . 73.9 82.6 Épaisseur de la couche de pluie . . 46mm0 81mm g2 — — d’eau évap. 71.27 36.64 — 263 — Quoique les premiers jours du mois de septembre aient é'é très-chauds, la température moyenne est restée bien au- dessous de celle du mois correspondant, année moy. 15°27. L’air a été plus sec dans les différentes couches de l’atmos¬ phère. Dans celle immédiatement en contact avec le sol, il n’y eut que les 0,739 de la quantité de vapeur qui l’eût saturée à la température de 13°8 (année moyenne 0.774). Dans les couches supérieures, sécheresse décelée par la grande pres¬ sion barométrique, par la faible nébulosité du ciel , et la quantité de pluie, bien au-dessous de la moyenne ordinaire de septembre 70mm59. Aussi cet air fut-il très-peu électrique; et n’observa-t-on pendant le mois ni grêle, ni éclairs sans tonnerre ni orage. Malgré la sécheresse de l’air, il y eut des rosées presque chaque nuit et du brouillard le matin. L’épaisseur de la couche d’eau évaporée fut moindre qu’en septembre année moyenne (80®m48), ce qui est dû surtout à l’abaissement de la température. Le vent dominant souffla du S 0. Le mois d octobre fut plus froid qu’en année moyenne (1 lm 44). Les minima pendant les nuits, généralement se¬ reines, s’abaissèrent sensiblement, et les 17, 18, 29, 31, il y eut des gelées blanches. Le 29 il gela assez fort à la cam¬ pagne. Malgré les dix-neuf jours de pluie qui ont fourni une couche d’eau d’une épaisseur de 81inm82, supérieure de 14n.,m07 à la moyenne, l’air de la couche en contact avec le sol fut moins humide qu’ordinairement (0,833); on aurait pu croire que cet état hygrométrique eût favorisé l'évaporation (ce qui a eu lieu d’une manière absolue) ; mais la résultante des actions concomitantes, nébulosité du ciel et température , fut une atténuation de l’épaisseur de la couche évaporée 36™mU4 (en moyenne 41r?m99). Les couches élevées de l’atmosphère furent assez humides et assez électriques, surtout vers la fin du mois, où on observa trois jours d’éclairs sans tonnerre. Gourant dominant 0 S O ; sensible dépression de la colonne barométrique. En somme, temps favorable à l’agriculture. Constitution médicale, bonne. v. meurein. — 264 — Huppes. — En septembre un passage de Huppes (Upupa epops) s'effectua aux environs de Lille et sur plusieurs autres points du département. Tous les ans à la même époque on tue à Lille quelques-uns de ces oiseaux, mais depuis long¬ temps on n'en avait pas observé en aussi grande quantité. Ces émigrants viennent très-probablement du Nord de l’Alle¬ magne et gagnent les contrées plus chaudes en voyageant obliquement du nord-est au sud-ouest, comme beaucoup d'autres espèces de Sylvains. Degland, dans son Tableau des oiseaux observés ('ans le nord de la France (1830), dit en parlant de la Huppe : On assure qu’elle niche dans l’arrondissement de Valenciennes Depuis dans son Ornithologie européenne , il ne fait plus mention de ce fait, dont sans doute il n’avait pas eu la confirmation. Aujourd’hui on peut regarder comme certaine la nidification de cet oiseau dans le département du Nord. J’en ai eu la preuve personnelle au printemps 1871, dans les bois de Sains (arrondissement d’Avesnes). A. de N. Cigogne» noires. — Le passage des Cigognes noires ( Ciconia nigra) dans nos contrées, sans être tout-à-fait rare, mérite d’être noté. En septembre 1873, plusieurs de ces oiseaux ont été vus ou tués dans les environs de Lille, notam¬ ment à Deûlémont et à Quesnoy-sur-Deûle ; comme toujours, ils portaient la livrée des jeûnes de l’année. . A. de N. Vesperngo Lcisierl. — Cette espèce de chauve-souris, voisine du V. noctula habite suivant Blasius , l’Angleterre, la France orientale et l’Europe centrale jusqu’en Sibérie. Elle n’avait pas encore été signalée en Belgique ni dans le nord de la France; on vient d’en trouver quatre individus à Notre- Dame-aux-Bois, près de Bruxelles. (Bull Ac.Belg., t. 36 p.345). Poterie» roemiitie». — La construction du chemin de fer de Saint-Quentin à Guise a mis au jour plusieurs poteries antiques qui ont été recueillies avec grand soin par M. Bourbier, ingénieur à Guise. On a trouvé à Sainte-Claire, près de Vad'encourt, des tuiles romaines, des poteries sa- miennes avec inscription sigillaire et même une poterie mé¬ rovingienne. Ces objets étaient près de 1 Oise, dans un endroit où la rivière est facilement guéable. Des tuiles et des poteries romaines ont encore été trouvées à Hauteville, au lieu dit Chemin-du-Roi, sur le territoire de Mont-d’Origny, en face de Bernot et à Origny-Sainte-Benoîte, sur le chemin de Thenelle à Courjumelles. Lille, imp. Six-Horemans. 73-3365 BULLETIN Scientifique , Historique et Littéraire du Département du Nord ET DES PAYS VOISINS - - / BULLETIN SCIENTIFIQUE, HISTORIQUE ET LITTÉRAIRE DU DÉPARTEMENT DU NORD et des pay# voisins ( Pas-de-Calais, Somme, Aisne, Ardennes, Belgique. ) PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION DE MM. GOSSELET, Professeur à la Faculté des Sciences de Lille et L’ABBÉ OEHAISNE, Archiviste du Département du Nord TOME VI. — 1874 LILLE Imprimerie SIX-HOREMANS 1874 6e ANNÉE — 1874 TABLE GÉNÉRALE Table des Sociétés Abbeville. Société d’émulation d’ — 92. Belgique. Académie royale de — 54. Société entomologique de ==• 163. Société de microscopie de — 286. Cambrai. Société d’émulation de — 220. Dunkerque. Société dunkerquoise — 119. France. Association française — 118, 165, 204, 219. Société géologique de — 72, 230. Laon. Société académique — 226. Lille. Société des Sciences — 19, 89, 137, 285. Pas-de-Calais. Commission des monuments historiques du — 15, 141 Table des noms d’Auteurs Barrois(Ch.). 39, 83, 110, 288. Beauvillers (de). 226. Bertillon. 204. Boussinescq. 279. Breger. 45. Brutelotte (de). 94. Calonne (de). 16. Cardevacque (de). 17. Cellier. 20. Chrestien 91. Corblet (l’abbé). 261. Corenwinder. 137. Cornet. 61. Crépin. 57, 161. Delhaye. 20. Delignières. 93. Demarsy. 228. Demay. 47. Deseille. 88. Desjardins (Abel). 13,41, 87. Desjardins (Ernest). 51, 83. Durieux 220. Fleury. 228. Folie. 39. Giard. 71, 120, 165, 276. Guerne (de). 70, 144. Gluge. 58. Haulcœur (l’abbé). 20. Ko! b. 257. Kuhlmann.. 19. 275. Laloy. 20. Lejeune. 240. Lelièvre. 81. Leroy. 203. Lerveley (de) 235. Lelhicrry. 254. Leuridan. 110. Malaise, ni Mansion 61. Marey. 280. Masquelez. 182,214,268. Melsens. 56, 257. Menche de Loisne. 89 Meurein. 23, 118, 143, 192, 233. Moet. 99. Montigny (de). 54. Norguet(de). 13, 32, 129, 204. Nyst. 45. Omalius d’Halloy (d’). 59. Orval (d’). 95. Papillon. 240. Pilloy. 229. Plateau (Félix) 58. Quetelet (Ernest). 58 Rigaux. 87, 246. Selys Longchamps (de) 58. Souillarl. 279. Taillar. 83. Terquem. 277. Tranin. 278. Van Beneden. 57, 59. Van Beneden (Ed ). 58. Van Drivai. 16. Vicq (de). 94. Violletle. 276. Wacquez-Lalo. 20. Wilbert 224. Table des Titres des Articles Archéologie. Manuel d’ — 261. Archives départementales pen¬ dant la Révolution, l, 32. Art religieux, Exposition d’ — 121, 145. Bavai. Monuments épigra; biques - 51, 83. Belgique. Patria Belgica : Mala¬ cologie, 45 ; Entomologie, 45 ; Botanique, 161 ; Economie ru¬ rale, 235. Biologie. Enseignement de la — 58. Boissons. Refroidissement des — alcooliques. 56. Botanique. Fonction des feuil¬ les, 137 ; Anemone Svlvestris, 70; Polypodium dryopteris, 120; Phragmatæcia arundinis , 71 ; Catalogue des plantes vascu¬ laires de la Somme, 94. Cambrai. Artistes cambrésiens. 220. Cassel. Hôtel-de-ville de — 285. Châtelains de Lille. 110, 197. Charles IX. 13, 41. Congrégation des cardinaux en 1595. 87. Creuttes du Laonnais. 228. Daullé. Catalogue des œuvres de - 93. Déclinaison magnétique. 58. Démographie du Nord. 204. Eaux potables 89; distribution d’ — dansle Nord, 182, 214, 268. Eleu-Liauvelle (P.). Puits d’ — 283. Epigraphiques. Monuments — de Bavai 51, 83. Fin du monde. 59. Géologie. Esquisse géologique, 5,25.73,97, 156, 193,241 ; Puits de Macou, 81 ; — d’Eleu-Liau- vette, 283; Caverne d’Hydre- q uent. 240; Oiseaux fossiles, 57; Reptiles fossiles du nord de la France, 39, 96 ; Poisson ter¬ tiaire, 57 ; Poissons crétacés du nord de la France, loi, 130. Hyclrequent (P.) Caverne d’ — 240. Imposteurs. Trois — 88. Lille. Ancêtres des Lillois. 246. Macou (N.). Puits de — 81. Narcomiricnno. Dynastie — 99. Météorologie. 20, GG, 95, 117, 142, 190, 281. Musées de Douai, 69; d’Arras, 72; de Lille, 192. Nnmismatsqne. 192. Orfèvrerie du XVe siècle. 192. Pèche. Origine de la — 88. Pierre. Haches en — 143, 229, 284, 285. Phosphore. Acier de — 275. Phosphate de chaux. 257. Physiologie. Expérience de — 276. Poissons fossiles du nord de la France, loi. Population. Démographie du Nord. 204 ; mouvement de la — à Lille, 91 . Préséance. Questions de - 226. Reptiles fossiles du nord de la France. 39, 96. Sceaux de la Flandre. Inven¬ taire. 47. Serret 113. Sucre Détermination du - clans la betterave 276. Tiers-État. Rôle du — à Cambrai. 224. Tonomèïre. 277 Tremblement de terre. 23. Vent. Vitesse du — 54. Tervins. Fouilles à — 240. Winierctix (P.). Laboratoire de — 105- Soologle. Hyperoodon, 144; Ibis, 24 ; Coléoptères du Nord, 8, 28 ■ Hémiptères du Nord, 254 ; Lépi¬ doptères du Nord, 203 ; Cutere- bra , 68; Adelops Wallastom, J2G ; Entomologie de Belgique, 45 ; Malacologie de Belgique, 45; Collection conchyliologiquc d'Hécart, 75 ; Hélix nemoralis, seneslre, 285; Laboratoire de zoologie maritime de Vimereux, 165. Lille, imp. Six-Horemans. *15-718. ' ♦ . \ • 6° Année. — No 1. — Janvier 1874. LES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES DU NORD PENDANT LA RÉVOLUTION. (Suite). Le district d’Avesnes était plus riche en institutions ancien- • i nés et par conséquent en archives, que celui du Quesnov. Au point de vue civil il y avait à Avesnes un baillage royal et la maréchaussée, et à Maubeuge,une importante prévôté royale; parmi les établissements réguliers , nous nous contentons d’indiquer les plus connus : le chapitre de Sainte-Aldegonde, à Maubeuge, et celui de Saint-Nicolas, à Avesnes, les abbayes de Hautmont, de Liessies et de Maroilles. Le procureur-syndic du district d’Avesnes lit rédiger le récolement des titres et se fit remettre les documents nécessaires à l’administration des biens dans le chapitre d’Avesnes, où cette opération eut lieu le 4 août 1798, comme le constate un procès-verbal, et dans les autres établissements religieux du district. En mai 1790, M. de Lannoy, ancien procureur du roi au bailliage d’Avesnes et les administrateurs, Courte, Hannoye et Ghislain, furent chargés de lever les scellés dans les établissements religieux et de faire transférer les docu¬ ments au chef-lieu du district. Ces archives furent jetées au hasard dans les bâtiments où se réunissait le directoire de ce district: une lettre de ces administrateurs du 18 pluviôse an III (5 février 1795), nous font connaître qu’une immense quantité de papier de toute espece, parmi lesquels il s'en trouve beaucoup provenant des oîbbayes , s'y trouvaient dans les gre¬ niers et autres coins dans le plus grand désordre. C’est là qu’on allait puiser à pleines mains, quand on voulait alimen¬ ter les feux de joie allumés pour les fêtes républicaines ; une autre lettre des mêmes administrateurs nous fait connaître qu’à l'époque de la destruction du régime féodal une quantité considérable de titres et de cartulaires provenant des cy-devant — 2 — instituts religieux , a été brûlée dans les réjouissances publiques. Une telle situation rendait plus nécessaires encore que, dans les autres districts, la nomination de préposés au triage : ces fonctions furent confiées, en date du 5 thermidor an III (23 juillet 1795), aux citoyens Humbert J. Evrard, ancien tabel¬ lion de Taisnières, et Humbert Evrard, agent national delà commune de Maroilles. Ils réclamèrent immédiatement l’instruction qui devait leur servir de guide dans leurs travaux; elle leur fut envoyée. Nous ne savons ce qu’ils ont fait pour remédier au désordre; mais nous pouvons constater qu’en 1808 les archives des établissements religieux du district d’Avesnes encombraient encore les greniers du tribunal de celte ville, et qu’en 1810 le secrétaire-général Bottin et l’archiviste M. Poret avaient reçu, dans le dépôt du Nord, les documents provenant des chapitres de Maubeuge et Avesnes et des abbayes de Liessies, Maroilles et Hautmont. Siège d’un archevêché dont le titulaire était prince du Cam- brésis , et d’une assemblée d’États investie des pouvoirs les plus étendus, la ville de Cambrai et toute la contrée qui en dépendait présentaient un nombre considérable de juridic¬ tions civiles et d’établissements religieux. La simple indication des juridictions civiles remplirait des pages : les principales étaient, en dehors du Magistrat de la cité, celles du grand bailliage de l’archevêché, des bailliages du chapitre métropo¬ litain, de la métropole, de la Prévôté Notre-Dame, de l’Eco- lâtrie, du chapitre Saint-Géry, de la Feullie, du chapitre Sainte-Croix, des abbayes de Saint-Aubert, Saint-Sépulcre, Saint-André du Câteau, Yaucelles, Mont-Saint-Martin, Fémy et des douze pairies du Cambrésis, avec plus de 300 autres juridictions seigneuriales ressortissant en partie des précé¬ dentes. Pour donner une idée de ce que devaient être les fonds ecclésiastiques, il suffira de dire que l’inventaire des plans, caries, registres, chassereaux et titres déposés au - 3 — secrétariat du district de Cambrai en octobre 1790, renferme des indications sur les archives de 61 établissements religieux et fondations pieuses, parmi lesquels se trouvaient l’archevê¬ ché, le chapitre métropolitain et plusieurs autres collégiales, ainsi que les célèbres abbayes de Saint-Aubert, d’Honne- court, de Vaucelles et de Saint-André du Câteau. Le 3 janvier 1791, le directoire du département, chargea un officier municipal de Cambrai, de mettre les scellés sur le mobilier, les livres et les papiers de toutes les maisons religieuses d’hommes de Cambrai ; et nous voyons, par le procès-verbal dressé le 4 février et les jours suivants dans l’abbaye de Saint-André du Câteau, que cet officier public, assisté de la municipalité, commença par les chambres dans lesquelles étaient conservées les archives. Il en fut ainsi dans les autres maisons religieuses, où partout, d’ailleurs, les do¬ cuments confisqués furent trouvés en bon état et souvent en ordre. L’hôtel-de-ville et le tribunal de Cambrai étaient déjà en¬ combrés par les registres et les dossiers provenant des juri¬ dictions seigneuriales et des archives des Étals ; les documents envoyés par les maisons religieuses furent déposés dans les salles de la maison Sainte-Agnès, fondée autrefois par l’évê¬ que Yan der Burch pour l’éducation de cent jeunes filles de Cambrai, du Câteau, d’Ors et de Cûtillon. Dès 1791, ces dépôts avaient été confiés aux sieurs Lenoir et Basselet qui sont désignés l’un comme préposé au triage et l’autre comme archiviste; en 1792, cette dernière qualité est donnée au sieur Delsaux. Les documents ne semblent pas avoir moins souffert que dans les autres districts : en 1790, les salles de l’hôtel-de-ville étaient tellement remplies de pa¬ piers qu’il était impossible d’y travailler et que la chùte du plafond et du plancher de la salle des domaines était redou¬ tée par les hommes spéciaux; en 1792, l’administration dé¬ partementale se plaignait au procureur-syndic, M. Cacheux, de la négligence impardonnable des employés aux archives de Cambrai; en date de septembre 1793, le procureur syndic requérait, vu les dégradations et dilapidations effroya¬ bles faites à l’archevêché, qu’il fût pourvu à la fermeture de la salle ou étaient renfermés les effets, papiers, procès et autres objets qui pouvaient se trouver dans les archives de l’archevêché ; dans la même année, à la suite d’une dépêche ministérielle qui ordonnait de supprimer les signes de la royauté et de la féodalité tout en recommandant de respecter tout ce qui avait un caractère artistique, les municipalités du Cambrésis avaient fait disparaître les écussons, les emblèmes, les fleurs de lis, les statues, et l’on détruisit ou l’on vendit bon nombre de documents importants au point de vue de l’histoire et des intérêts communaux ; par exemple à Anneux et à Gonnelieu, où, un jour de décadi, des terriers et autres titres furent brûlés auprès des arbres de la liberté. Le désordre existait au sein des divers dépôts établis dans la ville , puisque le citoyen Douai-Mallet , notaire et homme de loi, lorsqu’il fut nommé, le 14 thermidor an IV (31 juillet 1976) préposé au triage des documents appartenant au dis¬ trict , répondit que , vu la quantité considérable de titres à classer et la confusion qui y régnait , un collaborateur lui serait nécessaire. Il renouvela la même demande le 14 ven¬ tôse suivant en faveur du sieur Doudan , homme de loi , qui se trouvait alors sans fonctions et réunissait , ajoutait-il , toutes les qualités qu’exige l’inventaire des titres et papiers déposés en nombre presque incalculable dans le local du ci-devant district. Le sieur Doudan semble avoir reçu sa iâ nomination ; mais il est resté peu de traces du travail des deux archivistes , si réellement ils se sont occupés de classe¬ ment et d’inventaire. Les archives civiles , documents prove¬ nant des États , de la ville et de toutes les juridictions éche- vinales ou seigneuriales, étaient dans le plus grand désordre lorsqu’en octobre 1872, elles ont été transférées des mansardes O du tribunal de première instance dans ]e dépôt départemental du Nord. Quant aux archives ecclésiastiques, aucune main ne paraît y avoir touché durant de longues années. Un rapport de 1808 constate que ces documents, propriété de l’État, gisent dans la poussière des greniers de Sainte-Agnès. En 1835, M Le Glay, dès sa nomination aux fonctions d’archi¬ viste du Nord, entretint M. le Préfet de l’importance de ce dépôt ; l’année suivante , il obtint que la ville de Cambrai restât provisoirement en possession de celte annexe du dépôt départemental conservée dans trois pièces de la maison Ste- Agnès; Uautorité municipale s’était déterminée à faire quel¬ ques légers sacrifices pour en opérer le classement et l’ex¬ ploration. Mais l’allocation ayant cessé et l’administration des hospices ayant demandé de rentrer en possession des trois pièces dans lesquelles les archives étaient rangées , il. fallut aviser sans délai aux moyens de transférer au dépôt central une annexe si importante et jusqu’alors si négligée. La trans¬ lation , consentie par le conseil municipal , fut effectuée en novembre 1844. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain jurassique (suite). 2° BOULONNAIS (suite). L’étage jurassique supérieur est très-développé dans le Boulonnais (1). Il comprend trois assises : le Coral ragt le Kimmeridge , le Porlland. Coral rag. — Cette assise a été l’objet de nombreuses dis¬ cussions. Nous l’exposons selon les vues de M. Pellat. Elle ne comprend dans ce cas qu'une seule zone : (1) Il a élé l’objet de nombreux et importants travaux de la part de M. Pellat depuis 1865. Bull. Soc. Géol. 2e XXIII. p. 193, XXIV, p. 181, XXV, p. 196, XXV11, p. 681, XVIX, p. 222 et Mem. Soc. de Phys, et d’Hist. Nat. de Genève XIX. Voir aussi Hébert Bull. Soc. Géol. 2e XXIII p. 216, Rigaux loc. cit., etc. — 6 — Zone du calcaire du Mont-des-Boucards. — Cette zone est composée de calcaires blancs, compactes, entremêlés de bancs d’argile et exploités pour faire de la chaux. Les principaux fossiles qu’on y rencontre sont : Isocardia striata. Rhynchonella inconstans. Ceromyaexcentrica ? Terebratula insignis. A divers niveaux dans cette zone, on trouve des lentilles de calcaire rempli de polypiers et de baguettes d’oursin (Cidaris florigemma). C’est le faciès ordinaire du Cor al rag qui, dans le Boulonnais, est subordonné à un faciès de nature toute différente. Une de ces lentilles, épaisse de 2 m. environ, se trouve au pied du Mont-des-Boucards. Une autre qui a 20 m. se voit à Brucdale, à la partie supérieure du calcaire à Céromyes. Assise du Kimmeridje. — Dans le Boulonnais cette assise peut se diviser en deux zones principales : 1° Zone de V argile à Ostrea deltoidea. — Elle présente de nombreux niveaux distincts sous le rapport minéralogique et paléontologique. 1er niveau : Argile du Mont-des-Boucards (10 à 15 m.). — C’est une argile noirâtre qui couronne le Mont-des-Boucards. Elle est remplie de rognons de limonite et de fragments d’une grande huître plate, PO. deltoidea. 2e niveau : Calcaire ferrugineux d'Echinghen (10 m. 50). — C’est une argile sableuse, avec un lit de calcaire siliceux et ferrugineux rempli de Trigonies, T. Bronnii , etd’Astartes. On y trouve un petit banc de grès de 2 centimètres, qui atteint une épaisseur de 3 mètres à Brunemberg en même temps que le niveau y devient uniquement sableux et plus puissant. 3e niveau : Calcaire oolitique d' Hesdin-V Abbé (6 m.). — C’est un calcaire formé d’oolites assez grosses et rempli de fossiles , en particulier de Nérinées. Les principales espèces sont : Nerinæa Desvoidyi. Pholadomya Protei. Pholadomya hortulana. Rhynchonella inconstans. Terebratula humeralis. T..., . subsella. Pygurus Royerianus. Holectypus corallinus. 4e niveau : Calcaire compacte d'Alinclhun (1 m. 50). — 11 rappelle par son apparence et par ses usages comme pierre à chaux, le calcaire du Mont-des-Boucards. Il est associé à de l’argile avec 0. delloidea. 5e niveau : Calcaire oolitique de Bellebrune (3 m.). — Cal¬ caire jaunâtre finement oolitique, qui contient entre autres espèces : Pholadomya Protei. Terebratula humeralis. Trigonia papillata. Pygurus Royerianus. 6e niveau : Grès de Wirvigne (5 m.). — Sable jaunâtre plus ou moins argileux avec bancs de grès intercalés. Il y a de nombreux oursins Pygurus jurensis , Pseudo-diadema mamillanum , Stomechinus semiplacenta , et des 0. virgula de petite taille. 7e niveau : Calcaire de Bréquerèque (6 m ). — Calcaire blanc compacte rempli de Pholadomya hortulana. 2° Zone de Vargile à Ostrea virgula. — C’est une grande masse d’argile de 80 m. d’épaisseur qui constitue les falaises du Boulonnais à Châtillon et au Gris-Nez. Elle est remplie de la petite huître désignée sous le nom d’O. virgula. Il y a aussi des bancs de sable, de grès et de calcaire argileux que l'on emploie pour faire du ciment. On peut y distinguer trois niveaux qui sont caractérisés par trois espèces d’ Ammonites : 1° niveau de YAmm. ortho- ceras, 2° niveau de YAmm. caletanus, 3° niveau de YAmm. pseudo-mutabilis. Assise de Portland. — Cette assise, rudimentaire dans les Ardennes, a au contraire une grande épaisseur dans le Boulonnais. Elle s’y divise en trois zones : 1° Zone des grès à Ammonites gigas. — Ce sont les grès - 8 — et sables qui couronnent les falaises du cap Gris-Nez ; ceux que l’on voit au Portel et au fort la Chrèche. Ils ont 20 m. d’épaisseur. On peut y distinguer quatre niveaux paléontolo- giques caractérisés, à partir de la base, par les espèces sui¬ vantes : 1° Ammonites gigas , 2° Trigonia Pellati , 3° Perna rugosa , 4° Hemicidaris Purbeckensis et Pteroccra Oceani. 2° Zone de Vargile à Ostrca expansa. — Ce sont les argiles glauconieuses avec bancs calcaires subordonnés visibles vis- à-vis la Crèche et le fort d’Alprech. Elles ont 30 m. d’épais¬ seur. VOstrea expansa y abonde dans le haut, le Cardium Morinicum dans le bas. On y trouve aussi une Ammonite, Amm. biplex. 3° Zone des grès à Serpula coacervata. — On range dans cette zone les 10 m. de grès et de sable qui couronnent les falaises vis-à-vis la tour de Croï. On y distingue'aussi quatre niveaux étroitement reliés et développés quelquefois aux dépens les uns des autres : 1° niveau à Serpula coacervata et Cardium Pellati , 2° niveau à Natica Ceres et Trigonia gibbosa , 3° niveau à Serpula coacervata et Cardium dissimile , 4° niveau à Aslarte socialis et à Cypris. Ces derniers animaux indiquent qu’une eau saumâtre suc¬ cédait à des eaux purement marines. C’était le début du lac qui couvrit le nord du bassin anglo -parisien à la fin de l’époque jurassique et dont on retrouve des lambeaux dans la presqu’île de Purbeck. FAUNE ENTOMOLOGIQUE DU NORD. — COLÉOPTÈRES. La Société des Sciences de Lille a inséré dans le dernier volume de ses Mémoires un second supplément au Catalogue des Coléoptères du département du Nord que nous lui avons présenté cette année. Il porte le nombre de ces insectes à 2700. Probablement de nouvelles chasses assidues augmen¬ teront encore ce chiffre et dans quelques années nous arri- — 9 — verons à pouvoir signaler 3000 espèces de Coléoptères dans nos limites. Pour le moment, le nombre atteint peut être considéré comme suffisamment complet et il est permis de déduire toutes ses conséquences. Constatons d’abord que c’est un résultat très-considérable, eu égard à la topographie du département. On ne compte guère en France que 7000 espèces de Coléoptères ; nous arrivons donc à dépasser de beaucoup le tiers de toute la production française, dans une contrée qui ne forme qu’une bande de terrain étroite de moins de six cent mille hectares, et offrant les conditions les plus défavorables à la multiplica¬ tion des insectes. On y trouve peu de forêts, pas de jachères, ni de friches ; le sol y est cultivé partout avec le plus grand soin ; les récoltes sont alternées ; l’aménagement des bois i très-soigné et la population très- dense. Il est vrai que la moitié à peu près des espèces que con¬ tient notre Catalogue doivent être regardées comme rares, et que parmi celles qui sont les plus communes, il en est peu qui commettent sur la végétation ces dégâts importants signalés ailleurs comme de véritables fléaux. Malgré le nombre de ses Coléoptères, notre département ne dément donc pas la loi générale qui veut que l’abondance, dans la nature sauvage, soit en raison inverse de la population et de la civilisation. Une des causes de la rareté en zoologie est évidemment le refoulement produit sur certaines espèces par la présence progressive de l’homme, et la majeure partie de nos raretés n’ont cessé de se montrer en nombre normal qu’à la suite des défrichements , des mises en culture et de la multiplica¬ tion des habitants. Il serait très-intéressant de pouvoir remonter en arrière assez loin pour comparer notre Faune locale actuelle avec celle des temps antérieurs ; malheureusement , il n’y a guère — 10 - qu’un siècle que les recherches entomologiques sont faites sérieusement, et les premiers documents que nous ayons sur l’entomologie du département ne datent que de 1804. La Statistique publiée à cette époque par le Préfet Dieudonné indique quelques Coléoptères? les plus apparents, parmi lesquels se trouve le Cerambyx héros ; nous ne croyons pas qu’on le prenne aujourd'hui. L’Annuaire de Bottin pour l’an XII en nomme d’autres : le grand Cerf-volant est donné comme rare, excepté dans les grandes forets ; il en a à peu près disparu de nos jours. La Cantaride paraissait commune alors, elle est rare aujourd’hui. Ces quelques remarques sont sans doute bien insuffisantes, mais elles indiquent déjà Futilité des catalogues locaux, qui formeront dans l’avenir des points de comparaison pour cons¬ tater les changements que le temps apportera dans l’état des Faunes régionales. Si l’on peut regarder comme rares la moitié à peu près de nos Coléoptères, il faut distinguer plusieurs degrés dans cette rareté : environ trois cents espèces qui n’ont été prises qu’une ou deux fois sont rangées parmi les très-rares, car dans une contrée facile à explorer comme la nôtre, et qui a été très-consciencieusement fouillée, il est permis de croire que des espèces rencontrées pendant vingt-cinq ans une ou deux fois seulement, ne peuvent être que très-peu répandues; tout au plus y aurait-il exception pour quelques insectes souterrains ou endophytes qui ont échappé à l’attention des chasseurs. Ces grandes raretés sont en général des espèces dont le centre de diffusion est à l’est, vers la région rhénane, ou au sud, dans le bassin de Paris; les unes ont été refoulées comme nous venons de le dire ; les autres, se trouvant à l’extrémité de leur aire de multiplication, ne peuvent se pro¬ pager faute de milieux ambiants favorables. Quelques-unes de ces captures uniques, ou à peu près, — 11 — sont des insectes fortuits, amenés par le hasard des trans¬ ports, dans les bois, les engrais, les racines des plantes, les fourrages ; bien que provenant de pays peu différents du nôtre et n’ayant pas une grande disparité de climat, ils ne se propagent pas. On cite, il est vrai, quelques exemples d’ac¬ climatation produits par ces déplacements, mais c’est le très- petit nombre, et nous ne croyons pas qu’on puisse en trouver un seul dans le Nord. Toutes nos espèces ont dû évidemment arriver par la diffusion de proche en proche, et en rayonnant de leur centre de création, quelqu’ait été leur mode d’appa¬ rition dans leur forme actuelle. Celte résistance à l’adaptation climatérique est un des bons arguments à opposer à la doctrine du transformisme, puis¬ qu’elle indique une force intime faisant obstacle à l'influence des milieux, dans le cas même où ils ne sont pas incompa¬ tibles avec l’entretien de la vie. Après les grandes raretés viennent les espèces moins diffi¬ ciles à rencontrer, se trouvant assez régulièrement, çà et là, en petit nombre ; nous comprenons aussi dans celte catégorie un bon nombre d’espèces ne vivant que sur des points très- espacés, ou sur un point unique, bien que là elles forment une colonie nombreuse et permanente. Ce genre de rareté s’explique par plusieurs causes : 1° L'infécondité ; car, pour des motifs physiologiques qui resteront sans doute toujours incertains, toutes les espèces enlomologiques ne jouissent pas d’une fécondité égale ; soit que le nombre des œufs soit moindre, soit que la rencontre des sexes soit moins facile, par suite de la disproportion du nombre des mâles ou des femelles, ou de la non-concordance de leur apparition ; 2° La destruction ; certaines espèces sont arrêtées dans leur multiplication par les dangers plus grands qu’elles courent à l’état d’œuf, de larve ou de reproduction ; les unes sont plus exposées au parasitisme, les autres sont la proie - 12 - favorite d’un ennemi plus nombreux, d’autres enfin sont victimes de vicissitudes météorologiques qui les atteignent plus aisément ; 3° La famine ; car une espèce se multiplie en proportion de la nourriture qu’elle rencontre ; dans les genres phyto¬ phages surtout, la rareté d’une plante amènera naturellement la rareté de l’insecte qu’elle nourrit, et, dans notre départe¬ ment où la végétation sauvage est peu abondante , celte cause de rareté est plus ordinaire que partout ailleurs. Dans la moitié de nos Coléoptères qui sont communs, il faut aussi distinguer plusieurs degrés, selon que les causes opposées à celles de la rareté, c’est-à-dire la fécondité, la sécurité et l’abondance, sont plus ou moins développées ; il est inutile d’insister sur ces points qui s’expliquent d’eux-mêmes. Remarquons toutefois qu’il y a dans la fréquence des alternatives qui font apparaître certaines espèces en nombre très-considérable pendant une ou deux saisons, pour les réduire ensuite pendant une autre période à l’état de rareté. Les causes de cette anomalie presque toujours localisée, sont complexes et, sans doute ne sont pas toutes connues. C’est en premier lieu un ensemble de circonstances atmosphériques favorables, agissant sur plusieurs générations successives; puis l’émigration, amenant sur un point donné une masse d’individus qu’un instinct quelconque a réunis et déplacés, mais ceci est surtout le cas des ordres de vol facile comme les Lépidoptères ; les Coléoptères y sont moins sujets ; enfin un état végétatif particulier qui attire les insectes en leur offrant une pâture abondante. Ainsi les Xylophages s’abattent sur un groupe d’arbres maladifs et s’y multiplient en peu de temps prodigieusement, ou bien une culture fatiguée et mal venante est la proie d’insectes nombreux qui n’y avaient pas été observés quand la vigueur était normale. La cause en disparaissant fait disparaître l’effet et tout rentre dans l’ordre accoutumé. — 13 — En résumé, on peut, d’après le résultat de nos recherches répartir nos 2700 Coléoptères dans l’ordre suivant : Très-rares . 300 Rares . 500 Assez rares . 550 Assez communs . 550 Communs . 500 Très-communs . 300 Total . 2700 Bien entendu ces divisions n’ont rien d’absolu, et sont très- approximatives, puisque chacune d’elles se joint à sa voisine par des dégradations peu appréciables. Dans un prochain article, nous examinerons nos Coléop¬ tères sous le rapport de leurs mœurs et de leur répartition territoriale. A. de Norguet. BIBLIOGRAPHIE. CHARLES IX. Deux années de règne. 1570-1572. (Suite). L'amiral à Blois ; 1571. — Dans le second mémoire qu’il a publié sous ce titre, le savant doyen de la Faculté des Lettres de Douai, M. Abel Desjardins, fait encore connaître, d’après les documents conservés dans les archives de Flo¬ rence, des faits inconnus jusqu’aujourd’hui qui jettent une lumière nouvelle sur les deux années du règne de Charles IX antérieures à la Saint-Barthélemi. Après avoir échoué en 1570 dans son espoir de faire cesser les dissensions civiles en attaquant la maison d’Autriche, le roi Charles IX entra dans les vues de trois négociateurs qui auraient voulu amener un rapprochement sincère et une entente cordiale entre* les partis. Ces conciliateurs étaient — 14 — l’ambassadeur de Florence Pétrucci, l’italien Frégose et le protestant Téligny, qui avaient joué un rôle important, ainsi que nous l’avons dit, dans les négociations de 1570. L’initiative du projet de conciliation appartient à Pétrucci. Sachant par Frégose que l’amiral de Coligny, pour rendre la paix au royaume, consentirait à prier la reine-mère de lui rendre ses bonnes grâces et à lui laisser le pouvoir, il fit parler de ce projet à Catherine de Médicis et il en parla lui- même à Téligny. Ces ouvertures furent accueillies des deux côtés ; le roi et le duc d’Anjou les reçurent avec joie. L’amiral envoya les meilleures nouvelles à ce sujet. Une convention préliminaire fut proposée, examinée, puis acceptée par les deux partis. Elle portait : 1° que l’amiral consentait, si ses co-religionnaires lui donnaient leur assen¬ timent, à restituer toutes les places de sûreté; 2° qu’il se rendrait immédiatement auprès du roi, ne demandant pour toute sûreté que sa parole et celles de la reine-mère, du duc d’Anjou et du duc d’Alençon ; 3° que l’amiral prie la reine- mère de le recevoir en sa bonne grâce et d’assurer l’édit de pacification, en faisant droit aux réclamations légitimes des protestants, afin d’épargner à l’amiral l’obligation d’impor¬ tuner Sa Majesté à ce sujet; 4° que l’amiral resterait à la cour autant qu’il plaira à la reine-mère, et non davantage. En prenant connaissance de ce document, dont l’original est conservé dans les archives de Florence, on est convaincu que l’amiral était de bonne foi dans son désir de conciliation et, d’après les correspondances de Pétrucci, il en était de même du roi, de la reine-mère et du duc d’Anjou. Ici encore il faut rejeter la pensée d’une préméditation de la Saint- Barthélemi. L’amiral vint à Blois le 15 septembre. Par une coïncidence fortuite, ce jour-là même la reine-mère et le duc d’Anjou étaient malades. Le roi le reçut convenablement, mais avec une sorte de réserve ; le duc d’Anjou, qui était au lit, lui fit — 15 — un froid accueil ; chez le duc de Montpensier eut lieu une assez vive altercation. Mais le roi intervint et le duc de Montpensier changea d’allures. Dès lors, l’amiral sembla avoir la confiance du Roi, de la reine-mère et des princes. Il proposa des plans au sujet de l’édit de paix, des finances, de la fusion des églises et des affaires intérieures. Le roi semblait si satisfait qu’il lui fit don d’une somme de cent cinquante mille livres et... d’une abbaye 1 Tout allait bien ; mais la reine- mère, qui craignit de voir l’influence de l’amiral s’élever à côté et peut-être au-dessus de la sienne, commença à montrer de la froideur. Ce fut bien pis, quand éclata la grande nouvelle de la victoire de Lepante. Les partisans de l’Espagne et les Guise se sentirent les plus forts ; la reine tourna de leur côté , comme la fortune. L’amiral eut une dernière audience avec le roi, la reine- mère et le duc d’Anjou, le 15 octobre; il se retira ensuite dans sa terre de Châtillon. La tentative de Pétrucci avait échoué. Le roi n’était pas plus heureux que dans sa tentative au sujet d’une guerre contre l'étranger. Du moins, i) y avait eu de sa part des efforts qui prouvent qu’il ne préméditait point les massacres de la Saint-Barthélemi. G. D. (La suite au prochain numéro). SOCIÉTÉS SAVANTES COMMISSION DÉPARTEMENTALE DES MONUMENTS HISTORIQUES DU TAS-DE-CALAIS. La commission des monuments historiques du département du Pas-de-Calais a tenu le 6 décembre dernier une séance importante, sous la présidence de M. le comte de Ilambuteau, préfet du Pas-de-Calais. Depuis vingt ans peut-être, on « — 16 — n’avait pas vu rassemblée aussi nombreuse, et la discussion sur les propositions de la sous-commission contenues dans le rapport de M. le chanoine Yan Drivai, a été longue et approfondie. Il s’agissait, du classement définitif des monuments du Pas- de-Calais. Voici la liste de ceux de ces monuments qui ont été admis, et qui seront proposés à M. le ministre de l’instruction publique, des cultes et des beaux-arts : 1 . Epoque ancienne : Les Pierres d’Acq ; Le Dolmen de Fré- micourt. 2. Epoque romane : L’église de Lillers ; le chœur de l’église de Blandecques. 3. Epoque de transition : L’église d’Hénin-Liétard. 4. Epoque ogivale primaire : L’église Notre-Dame de Saint- Omer, la tour de Saint-Denis à Saint-Omer, l’église de Fau- quembergues , l’église d’Auchy-lez-Hesdin , le château de Bours. 5. Epoque ogivale secondaire : Le beffroi de Béthune, la tour de Saint-Bertin à Saint-Omer, l’église d’Aire-sur-la-Lys. 6. Epoque ogivale tertiaire : Le beffroi d’Arras et la partie ancienne de PHôteLde-Ville, l’église de St*Vaast de Béthune, le château d’Hollain, l’église de Fressin, l’église d’Ablain-St- Nazaire. 7. Renaissance et temps ultérieurs: Les tours de St-Eloi, l’abbaye de St-Vaast d’Arras, l’église des Jésuites de St-Omer, le bailliage, la colonne de la grande armée. On a suivi, pour ce classement, le caractère principal des monuments et ce qu’ils ont de plus remarquable : car bien peu sont tout à fait homogènes , et la présence de plusieurs styles dans les diverses parties s’y constate souvent. Dans sa séance de Janvier, la Commission a entendu M. le baron de Calonne qui a donné communication de plusieurs des notices qu’il a préparées sur lès communes de l’arrondis* — 17 — sement de Montreuil. M. de Calonne s’est partagé l’arron¬ dissement de Montreuil avec MM. Robitaille et Normand; il a pour son lot les quatre cantons de Campagne, Etaples, Huc- queliers et Montreuil. On s est ensuite occupé des notices sur plusieurs maisons remarquables de la ville d’Arras. Ces notices sont de M. A. de Cardevacque, avec quelques notes de M. Van Drivai. Elles disent tout ce que l’on a pu trouver sur quatre de ces maisons, dont le prochain bulletin offrira en même temps les dessins. Arras est très -remarquable par ses constructions an¬ ciennes. Aussi a-t-on décidé la publication de tout un nou¬ veau groupe d édifices analogues, sans préjudice du travail considérable sur les places de cette ville, travail que l’Acadé¬ mie a proposé depuis plusieurs années dans ses concours. Il est étonnant que ce sujet n’ait pas encore été traité, car ces places sont une chose unique, et ce sujet est des plus féconds, soit au point de vue de l’architecture, soit à celui de 1 histoire des Pays-Bas, soit même sous le rapport artistique. Un mémoire sur ce sujet, avec planches à l’appui, serait d une utilité réelle et aurait beaucoup de succès. Diverses communications ont été faites ensuite , de photo¬ graphies de monuments, d’églises, de châteaux, de tableaux anciens, notamment des études faites à La Buissière et à Hes- digneul. La commission des monuments du Pas-de-Calais travaille beaucoup ; elle recrute des membres nouveaux et pleins d ardeur; elle rétablit son personnel dans chacun des six arrondissements, de manière à hâter l’époque où l’inventaire et la publication de tout ce qu’il y a d’intéressant dans le Pas- de-Calais aient été faits, soit dans le Bulletin, soit dans l’Album de la commission, ouvrages fort recherchés aujour- d hui, et dont il est déjà difficile de réunir la collection. La Commission départementale des monuments historiques du Pas-de-Calais a trois publications distinctes : — 48 — La première, qui remonte à l’origine même de la Commis¬ sion, est un Album des monuments, consistant surtout en planches gravées ou lithographiées, dans le format in-4°, avec notices courtes, impression et papier de luxe. Cette publication est ordinairement désignée sous le nom de Statis¬ tique monumentale du département. Le premier volume, composé de vingt-et-une notices avec trente-cinq planches, a paru en 1858 ; le second va paraître. Ce second volume comprend une introduction, vingt notices et trente-sept planches. C’est, comme le premier, un livre magnifique, véritable musée des monuments du Pas-de- Calais. Voici quelles sont les pièces dont il se compose : Il y a d’abord une introduction, par M. le chanoine Van Drivai, puis un travail du même auteur sur l’emplacement primitif de la ville d’Arras, avec cinq plans. On trouve ensuite, en suivant l’ordre chronologique des monuments, les travaux de M. de Linas sur l’église et la prévôté de la Beuvrière, et de feu M. le comte A. d’Héri- court, sur les églises de Souchez et de Vimy. Plus loin des études sur l’église d’Heuchin par Mgr Lequette, aujourd’hui évêque d’Arras, et sur l’église d’Hénin- Liétard, par M. Dancoisne. L’abbaye et l’église d’Auchy-lez-Hesdin sont traitées par M. Terninck, et l’église de Wismes par M. Quenson. On a ensuite le château et l’église de Fressin par M. Ter¬ ninck, l’hôtel d’Artois par feu M. le comte A. d Héricourt, le château et l’église d’Anvin, par M. le chanoine Robitaiile, l’église d’Aix-Noulette et l’église de Béthune, par feu M. le comte A. d’Héricourt. M. Normand traite de l’église de Wil- leman, et M. de Cardevacque du château de Remy. L’hôtel de Guise de la ville de Calais est présenté par un auteur anonyme, et la tombe de J. de Beaulaincourt est décrite par M. de Linas. Enfin, M. Deschamps de Pas parle des églises des Jésuites de Saint-Omer et d’Aire, ainsi que du Bailliage de cette der- — 19 - nière ville; et M. Le Gentil fait connaître les plans et élévation de l’église de l’abbaye d’Arrouaise, construite presque au moment de la Révolution. La notice qui termine le volume est de M. le chanoine Van Drivai ; elle décrit la nouvelle église des Ursulines d’Arras. On le voit, presque tous les siècles sont représentés dans ce volume comme ils l’étaient dans le premier : les deux volumes forment dès maintenant un album réellement ma¬ gnifique, et tout-à-fait digne de la haute administration dont ils émanent. Le mode de publication est établi de manière à rendre le classement facile et logique. Chaque notice est tirée à part avec ses planches et vient se ranger dans une livraison, mais avec sa pagination indé¬ pendante. Quand le nombre des livraisons est suffisant pour un volume, alors on distribue les notices d’après un ordre chronologique et à l’aide d’une table de classement. Rien n’empêche toutefois d’établir cet ordre pour les deux volu¬ mes, afin de mettre côte à côte et dans chaque siècle les notices qui traitent de sujets analogues et d’obtenir ainsi pour tout l’ensemble, et non pas seulement pour chaque volume, un classement rigoureusement exact. Nous ferons connaître prochainement les deux autres publications de la Commission, c’est à-dire le Bulletin monu¬ mental , de format grand in-8°, et le Dictionnaire historique et archéologique. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE. La Société des Sciences de Lille a tenu le 28 Décembre sa séance solennelle. M. Kulhmann, président, a parlé du rôle de la science dans la société moderne, dans les diverses condi¬ tions humaines et aux principales époques de la vie. 11 s’est élevé du kalédioscope, des ballons captifs, du serpent de Pharaon, aux charrues à vapeurs, aux canons Krupp, à l’ana- — 20 lyse spectrale, au tunnel du Mont-Cenis, en un mot à toutes les merveilles de la science moderne. En terminant il a annoncé que l’Association française pour l’avancement des sciences venait de désigner Lille comme lieu de réunion en 4874. Les récompenses accordées par la Société, sont : Le prix Yicar (1,000 francs), à M. l’abbé Hautcœur, pour son histoire sur l’Abbaye de Flines ; Des médailles d’or 1° à M. Flamant, ingénieur des ponts et chaussées à Lille, pour un avant-projet d’un égoût collecteur conduisant à la mer les eaux industrielles de l’arrondisse¬ ment de Lille ; 2° à M. Laloy, pour ses travaux sur les eaux sulfureuses et chlorurées du département du Nord; 3° à M. Wacquez-Lalo, pour ses cartes et livres de géographie destinés aux écoles; 4° à M. Louis Cellier, secrétaire perpé¬ tuel de l’Académie de Valenciennes, pour ses recherches sur les institutions politiques de la ville de Valenciennes ; 5° à M. Ach. Millien, pour ses poésies. Des médailles d’argent à M. Delhaye, auteur de l’histoire de la Prévôté de Bavai et à M. Deplantay, organiste à Lille, pour diverses compositions musicales. Une médaille en bronze à M. F. Tahon, qui avait présenté un plat en cuivre au repoussé. CHRONIQUE. météorologie. Novembre. — Décembre. Température atmosphér. moyenne. 6? 92 4? 35 — moy. des maxima. 9? 91 7? 00 — — des minima. 3? 94 lo 7 \ — exlr. max., le 23. . . 14° 7 le 16, 12° 4 — — minima, le 12. — 1? 0 le 9, —3? 2 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 758®ro006 768n;rn462 — — extr. max. le 17. 770.73 le 4, 777.53 g4 CM G • r-H a 1 1 1 743.52 le 31, 754.49 — 21 — Tension moy. de la vap. atmosph. G“m32 5™m30 Humidité relative moyenne %. . 84.7 87.0 Épaisseur de la couche de pluie. . 45tl)ra95 4 0mrp70 — — d’eau évap. 20.32 13.92 La température du mois de novembre a été supérieure à la moyenne (5? 69), ce qui est la conséquence de la faible nébulosité du ciel, favorable à l’action directe des rayons solaires, et de la direction du vent qui, le plus fréquemment, a soufflé de la région S. Ce courant atmosphérique amena beaucoup d’humidité dans les hautes régions, ce qu’indique la dépression de la colonne barométrique ; néanmoins les pluies, quoique fré¬ quentes (18 jours), ne furent pas abondantes. Les couches d’air en contact avec le sol furent moins humides qu’en novembre année moyenne (85.6 %) ; et, malgré celte condition favorable à l’évaporation, malgré la chaleur relative, l’épaisseur de la couche d’eau évaporée fut égale à celle qu’on observe en moyenne (20™m28). Le 2, entre quatre et cinq heures du matin, il y eut de nombreux éclairs sans tonnerre à l’horizon S. S. 0., le ciel était presque serein et la lune brillait. La tension électrique était grande: baromètre 746ra“00; vent S. fort; humidité 85.6 %. On observa pendant ce mois cinq jours de gelées accom¬ pagnées de gelées blanches. Le mois de décembre fut aussi plus chaud qu’en année moyenne (3? 54). Il y eut 8 jours de gelées, mais très-faibles, et 7 gelées blanches. Le caractère dominant fut la sécheresse de l’air de la région des nuages, décelée par la grande pression exercée sur la colonne' barométrique, et la faible nébulosité. Aussi quoiqu’il y ait eu 17 jours de pluie, l’épaisseur de la couche d’eau recueillie ne fut-elle que de 10™m70, renfermant lmm0 d’eau de grêle et 0rçm2 d’eau de neige. La tension moyenne de la vapeur atmosphérique et l’hu¬ midité relative furent sensiblement égales aux moyennes observées ordinairement en décembre. L épaisseur de la couche d eau évaporée fut peu inférieure — 22 — à la moyenne 15“m 79. On peut attribuer ce résultat à la fré¬ quence des rosées et des brouillards, dont quelques-uns furent très-épais. Le vent dominant fut celui du S. 0. Si maintenant nous comparons l’année météorologique 4872-73 à une année moyenne, nous observons ce qui suit : Température atmosphériq. moyenne. — moyenne des maxima . — — des minima . — extr. max. le 8 août . — — min. le 2 février. Baromètre hauteur moyenne à 0°. . — ext. maxima le 18 février. — — minima le 10 décem¬ bre 1872, 6 h. soir. Tension moy. de la vapeur atmophér. Humidité relative moyenne %. . . Epaisseur de la couche de pluie . . — — d’eau évapor. Année météorologique. 1872-73. Moyenne. 10? 26 9? 99 13? 99 6? 53 33? 9 — 5? 0 758““444 759^633 779.48 721.90 7“m58 7“m65 76.7 77.61 710“m72 669“m68 833.19 841.03 Quant à l’état météorique de chaque saison de l’année 1872-73, comparé à celui des mêmes saisons d’une année moyenne : voici quel il a été Tempér. 0 TensioD. mm Humidité. HIVER. Baromètre. mm Pluie. mm Évaporat. mm 1872-73. 4.47 5.36 84.10 756.324 249.55 47.60 Année moyenne 3.12 5.04 85.99 760.215 PRINTEMPS. 149.73 51.48 1872-73. 8.66 6.41 75.10 758.156 160.13 226.03 Année moyenne 9.03 6.54 71.94 ÉTÉ. 759.327 144.34 253.33 1872-73. 17.42 10.73 67.50 760.446 127.27 441.33 Année moyenne 17.08 10.83 70.37 759.860 AUTOMNE. 186.85 393.45 1872-73. 10.49 7.84 80.40 758.849 173.77 128.23 Année moyenne 10.73 8.21 82.16 759.131 188.75 142.75 — 23 — De ce qui précède, il résulle que la température moyenne de l’année météorologique 1872-73 a été de O? 27 supérieure à celle d’une année moyenne ; que la dépression baromé¬ trique a bien indiqué un état hygrométrique plus prononcé des hautes régions de l’atmosphère, puisque la quantité de pluie a été de 41[Vm04 plus abondante que celle recueillie en moyenne. Les 7lOt?m72 d’eau météorique comprennent 660n}m75 d’eau de pluie, 42?“ 37 d’eau de neige, 7™m60 d’eau de grêle. On observa, le 10 décembre 1872, une dépression baromé¬ trique extraordinaire. L’air pendant l’année fut un peu moins humide qu’en année moyenne, mais cette condition météorique ainsi que la température favorable à l’évaporation, furent annihilées par l’influence contraire de la nébulosité du ciel et finale¬ ment la couche d’eau évaporée fut amoindrie. Quant aux saisons , nous n’en dirons rien : l’examen attentif du tableau ci-dessus permet de les caractériser sous leurs différents points de vue. Nous dirons, pour terminer, que pendant cette année 1872-73 il y a eu 310 jours de brouillard, 209 de rosée, 238 de pluie, 18 de grêle, 25 de neige, 35 de gelée blanche, 28 de gelée, 5 de tempête, 18 d’orage, 21 d éclairs sans tonnerre, 14 halos solaires, 10 halos lunaires, 13 jours à ciel serein, 236 demi-couvert, 116 couvert. Vent dominant S-O., nuages de la couche la plus élevée 0. Y. Meurein. TrcBufsleinent de tare eu Belgique. — Un trem¬ blement de terre est chose rare dans nos régions ; aussi doit-on savoir gré à M. Albert Lancaster, attaché au secré¬ tariat de l’Académie de Belgique, d’avoir recueilli toutes les indications sur celui qui ébranla une partie de ce royaume le 22 octobre dernier. Le centre de la commotion fut à Ilerzogenralh , entre Juilers et Maestricht. Dans cette petite ville, plusieurs che¬ minées s’écroulèrent et des maisons furent lézardées ; à Cologne, les meubles dans les appartements furent secoués et renversés ; à Stavelot (Belgique), le secrétaire communal, — 24 — qui était à l’Hôtel-de-Ville, crut qu’une personne lourdement chargée montait l’escalier en frôlant le mur avec son fardeau. Une espèce de mugissement semblable à celui du vent annon¬ çant l’orage accompagnait cette première commotion suivie sans interruption d’une seconde, pendant laquelle l’édifice parut être comme soulevé. La secousse se fit sentir à Liège et expira à Bruxelles. Les Ibis eu France. — Nous lisons dans la Revue scien¬ tifique du 20 novembre 1873, qu’un chasseur du départe¬ ment de la Somme a tué deux Ibis, oiseaux qu’on ne trouve ordinairement qu’en Egypte et aux bouches du Danube. Ce n’est pas la première fois que l'Ibis falcinelle se montre dans notre région. Dans son Catalogue des animaux vertébrés de V arrondissement d'Abbeville, M. Marcotte signale cet oiseau comme de passage irrégulier , surtout par les temps d’orage et de forts vents. Il ajoute qu’on en a tué deux sur les bords de la Somme en octobre 1857. L’Ibis voyage par petites troupes, ou à trois ou quatre. On suppose que Vlbis falcinellus Vieil est l’Ibis noir des anciens. MM. Thielens et A. de Norguet ont aussi indiqué des pas¬ sages de cet oiseau rare en Belgique , en Picardie, et même aux environs de Lille (1). A. G. Bibliographie. — MM. de Loriol et Pellat viennent*de faire paraître dans les Mémoires de la Société de physique et d’histoire naturelle de Genève, la première partie de la Monographie paléontologique et géologique des étages supé¬ rieurs de la formation jurassique des environs de Boulogne- sur-Mer. Cette première partie est destinée à la description des mollusques céphalopodes et gastéropodes. A la fin de 1873, M. Malaise, membre de l’Académie de Belgique, a publié un Manuel de minéralogie pratique. Ce livre est particulièrement intéressant par les renseignements qu’il donne sur les minéraux qui se rencontrent en Belgique. (1) Voyez Bulletin scientifique , t. II, 18“70, p. 79 et 38S. Lille, imp. Six-Horemans. 74-306 6 Année. — Nos 2 et 3._ Février et Mars 1874. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain jurassique. (Suite). 3° PAYS DE B fl A Y. Ée pays de Bray est une région en forme d’ellipse très- a longee, dont l’axe, dirigé du S.-E. au N.-O., traverse les dépar ements de l’Oise et de la Seine-Inférieure, de Beauvais a Neufchatel : Elle est formée de terrain jurassique et entourée de toutes parts d’escarpements de craie. C’est, selon la spiri- uelle comparaison de M. Elie de Beaumont, comme une de déchirures qui se produisent dans les nuages et nous font percevoir 1 azur du ciel. Ainsi ce plissement qui a amené au jour les terrains anterieurs à la craie, nous fait connaître la omposdion profonde du bassin de Paris. Le plissement a été accompagne d’une faille qui est située sur le bord septen- nonal de la rive. C’est ce qu’a parfaitement démontré la coupe géologique du chemin de fer d’Amiens à Rouen dressee par M. de Lapparent (1). * Étage jurassique supérieur. - Tout le terrain jurassique du Pays de Bray appartient à l’étage supérieur et !nême aux assises supérieures de l’étage le Kimmeridje-clay et le Port- Assise du Kimmeridje. - Les couches les plus anciennes du pays de Bray sont les argiles à O. tir gu la, dont quelques bancs à l’etat calcaires limachelles ont été exploités sous le nom de marbre de Beauvais. Assise du Porlland. - On peut y distinguer trois zones : 1» Zone des sables à Hemicidaris Purbeckiensis et ârès glaucomeux. — Cette zone, épaisse environ de 25 à 30 m est formée de zones alternatives de sables, de grès et de (O Bull. Soc Géo!., XXIV, p. 227. ~ ‘ - 26 27 • en • • cï 'E co 3 es CO 3 •o CO (H C te La • — • > o • E U aj 15 u 3 Oa X eu © O K eu 33 La d «03 ✓CS 3 «3 • Oh • < C/5 < 3 C . O 03 te co o ^ 33 C/3 •3 co r? 3 • co es jsp cS O co O te 3 La -Q La 3 eu "eu eu £ O _te 3 O o c. te CS d _3 ”03 CQ > C-4 CT * > • > > • > • > • > • > o O U Z Z. Z Z Z Z co C Z co 3 3 QJ L+ • rt 6 • co s CO 3 •< CS w o te La «3 b£ ”ô3 3 *03 • < O ’tfi co o. X eu • o «3 _o 'te c_ < «co d co [cü o o CO 3J . O CO ns co c O C *2 «S ■Q co te -o .2 S c 3 ° 3= L- bc ^ co c- co co H O -C «c« ,c0 «c0 > > > z z z — i2 ~ co £■ > O £> C/D o cO O O O • *-* t— • • s CL» Ü eu CO O) ta. • ^ CTS es O • co o = s o « c.s: m G co £ > «jZ 3 H, ÇJ t CO «^ O CO co Eco • «* -g co Q t- te •iD •— C « C co £ E te te * “ ÜS • - S-I o •t £ oS . CO ” c» o ce t_ co • < Co si o e •*S» s> •o — 28 — calcaires marneux. Elle est peu riche en fossiles ; cependant, ôn peut citer Hemicidaris Purbeckicnsi et Trigonia bolo - niensis qui, dans le Boulonnais, se trouvent dans la zone à Ammonites gigas . 2° Zone de l'argile à 0. expansa. — Elle est représentée par 10 m. d'argile bleue avec bancs de calcaire ciment. On y trouve, outre 0. expansa et Amm. biplex , Cardium mori- nicum , caractéristiques de la même zone dans le Boulonnais. 3° Zone du sable à Trigonia gibbosa. — Cette zone de 5 m., est formée de sable très-argileux glauconifère suivi de sable et de grès ferrugineux. Le principal fossile qu’on y rencontre est Trigonia gibbosa . Au-dessus, il y a quelques plaquettes de lumaclielies ferrugineuses, où on a cru distinguer des fossiles d’eau saumâtre. On voit donc que l’assise de Portland, dans le pays de Bray, présente à un haut degré le caractère d'un rivage ; il est probable que le rivage de la mer Portlandienne n’était pas situé bien loin au nord. FAUNE ENTOMOLOGIQUE DU NORD. — COLÉOPTÈRES. (Suite). Nous avons dernièrement établi une répartition des Coléop¬ tères du département du Nord au point de vue de leur rareté et de leur fréquence ; nous essayerons aujourd'hui de donner une idée de la manière dont on peut les diviser par rapport à leurs mœurs et à leur habitation. Six grandes catégories se présentent, assez vaguement définies, comme toutes les divisions de ce genre, mais suffi¬ samment distinctes pour une esquisse à grands traits : » Les Aquicoles , qui vivent dans l’eau, soit qu’ils y nagent, qu'ils y marchent ou s’y tiennent accrochés ; Les Sylvicoles , habitant les bois ; Les Campicoles , hôtes des champs et des plaines ; — 29 — Les Paludicoles, qui préfèrent les marais et tous les en- droits humides; Les Sabulicoles, qui vivent dans ou sur le sable, soit au ord de la mer, soit dans les dunes ou les sablières de l’in- teneur ; Les Domicoles, habitants des maisons, hangars ou maga- sms , 1» Agricoles. - Nous en comptons 180, dont 120 environ pourvus d organes natatoires, sont purement aquatiques ; ils rment la famille des Dylisciens et les premiers genres des Pa'ruom,, Ifew contrée bien ponr.ne «te „,re!8 de “«J ""T’ deV31t en.fourn,r un "ombre relativement i rable, et, en effet, il atteint presque les deux tiers de celui de toute la France. Les autres Agricoles vivent dans l’eau, à la manière des —T5; marchant au fond °“ sar les herbes, et 1 la , dan P Part' aUSSi bien S0US reau q«e hors de 1 eau, dans son voisinage. Ces mœurs anomales , cette faculté de vivre immergé tout en conservant sans modification les organes de V vie aerienne, sont un bien joli sujet d’études pour les physiolo¬ gistes qui cherchent à se rendre compte du pourquoi et du comment de toute organisation. Ce serait encore un curieux problème à sonder, que de c erc er pourquoi il n’existe aucun Coléoptère marin Nous voyons plusieurs espèces Agricoles s’avancer jusqu’aux mares saumâtres, et dans les eaux demi-salées des arrière-ports, aucun ne vit dans la mer; jamais leurs organes ne se sonf adaptés a ce nouveau milieu où ils entraient à demi. Des t Carabiques, des Brachélytres , des Silphales se laissent so'irî’ea'u ' T‘ SUbmerger Par l6S maréeS’ s’Wdissent eau et reprennent leur vigueur aussitôt émergés • et cependant aucune modification ne s’est produite, ils sont restés doués des mêmes caractères que leurs congénères. — 30 — L’étendue des mers, occupant les trois-quarts du globe, et nourrissant tant d’animaux analogues à ceux des eaux douces, est restée privée de Coléoptères. Il faut avouer que la doc¬ trine darwinienne a perdu là une belle occasion de se mani¬ fester. 2° Sylvicoles. — Ils se subdivisent naturellement en espèces vivant sur le sol et y cherchant leur proie dans la motisse, les feuilles sèches et tous les débris végétaux ; et en espèces vivant aux dépens de la végétation ligneuse ou foliacée. Les premières (Géobies), composées surtout de Carabiques et de Brachélytres , sont une centaine environ ; les secondes (Phytobies) sont au moins 900 ; nous y comprenons tous les lignivores, quoique leurs ravages s’exercent aussi bien sur les arbres des bosquets, des vergers et des routes, que sur ceux des forêts ; les sous-familles des Omaliens , des Nitidu - liens , des Mèlolonthides , des Buprestides , des Elatérides, des Téléphorides , des Attelabides, des Erirhinides et des Alticides y comptent de nombreuses espèces. C’est là que se font les chasses les plus agréables, les plus productives, et que les chances de découvertes nouvelles et intéressantes se présen¬ tent le plus souvent. Les bois qui ont été le mieux explorés sont ceux de Clair- marais, de Nieppe, de Phalempin, de Carvin, d’Ostricourt, de Mormal, de Marchiennes, de Raismes, d’Angres, de Sains, de Glageon et de Trélon. On remarque qu’à part les espèces vulgaires, qui se trouvent communément partout, les insectes y sont localisés, de sorte que chaque bois en contient un bon nombre qui ne se retrouvent pas dans les autres. Chaque partie de bois semble même avoir ses espèces propres, qui se répandent peu , et forment des colonies assez bien déli¬ mitées. Quand ou recherche l’explication de ce fait, on ne peut lui trouver d’autre cause qu’un arrêt d’expansion produit par l’infécondité. - 31 — • 3° Campicoles. — Nous en comptons à peu près 900. mais de nos six divisions c’est la plus arbitraire et la moins nette¬ ment tranchée ; elle se fond avec les Sylvicoles d’une part, et de l’autre avec les Paludicoles. Il y entre beaucoup de Cara- biques , de Brachélytres , de Psélaphides , de Sylphales, de Scarabœïdes, de Curculionides et de Coccinellides. Les meil¬ leurs- endroits d’exploration sont les prairies, les fortifications des places fortes, les champs de légumineuses et de crucifères, et en général toutes les plantes basses et les Heurs. Les espèces y sont en général communes et répandues ; c’est là que se rencontrent les plus dangereuses, comme Atomaria linearis, fléau des jeunes betteraves, Meligethes œneus etCeuthorynchus assimilis , si nuisibles aux colzas, et les altises des houblons et des crucifères; c’est aussi là qu'on trouve les plus utiles, comme les Scarabœïdes coprophages, qui purgent la terre des matières putrescibles. 4° Paludicoles. — Ils sont environ 300, vivant au bord des eaux, sur la croûte de la vase ou dans ses interstices quand elle se dessèche, sous les débris de roseaux, sur les plantes des marais, dans les feuilles engainantes des grandes grami¬ nées. Le marais d’Emmerin, ceux des environs de Valen¬ ciennes, les étangs de l’arrondissement d’Avesnes, les fossés desséchés des fortifications de Lille, sont d’excellentes sta¬ tions pour les Coléoptères de ce groupe, qui compte beaucoup de Carabiques , de Brachélytres , de Chrysomelines et toutes les Donacies. 5° Sabulicoles. — C’est une division bien tranchée, ayant environ dans le Nord 300 représentants. Sa principale station est le littoral de dunes s’étendant du cap Gris-Nez à la fron¬ tière belge. La côte belge jusqu’à l’embouchure de l’Escaut ne diffère en rien de la nôtre. L’entomologiste qui se livre à cette chasse très attrayante, doit reconnaître dans ces dunes trois zones à parcourir : le bord même de la mer où les débris de toutes sortes, les œufs de Buccins , les pierres, — 32 — cachent beaucoup d’espèces ; puis le sable nu parcouru sans cesse par les -Mèlasomes, par beaucoup d’J ElalérïJcs, et de Curculionides ; enfin les bas fonds herbus, souvent humides au printemps, où la végétation nourrit beaucoup de bonnes espèces, et qu’habitent, dans les endroits mouillés, le beau Carabus nitens et le charmant Bembidium argenteolum. 6° Domicoles. — Ils sont une vingtaine des genres : Der- mestes , Anthrenus , Attagenus , Ptinus , Anobium , Sitopliilus , Rhyncolus , Tenebrio , etc., commensaux trop assidus des appartements, des offices, des magasins de grains et des col¬ lections. En résumé : Aquicoles . 180 Sylvicoles . 1,000 Campicoles . 900 Paludicoles . 300 Sabulicoles . 300 Domicoles . 20 2,700 On voit qu’aucune proportion n’existe entre ces nombres et l’étendue des parties du territoire auxquelles ils corres¬ pondent. Si cette proportion existait, les Campicoles devraient former les quatre cinquièmes de notre Faune coléoptérique, puisque sur 580,000 hectares, les plaines cultivées du dépar¬ tement en comptent plus de 480,000. Les bois seraient bien pauvres, car leur superficie n’est que de 60,000 hectares environ. C’est la meilleure preuve de ce que nous disions que les bois sont et seront toujours la meilleure station des Coléoptères et que c’est là que doivent se faire les chasses les plus assidues. . A. de Norguet. LES ARCHIVES DÉPARTEMENTALES DU NORD PENDANT LA RÉVOLUTION. (Suite et fin). Il nous reste à parler du district de Douai. Cette ville étant - 33 — le chef-lieu du département et le siège du directoire, les ins¬ tructions relatives aux titres et papiers durent être mises à exécution avec plus de soin et de promptitude; d'un au're côté, nous possédons plus de documents sur ces opérations: il sera donc plus facile d’apprécier quelle a été la manière d’agir des hommes de l’époquo au sujet des archives Les archives civiles qui furent sauvées et déposées au district étaient celles du Parlement , qui forment une catégorie à part dont nous n’avons pas à parler, ainsi que celles de la gouvernance et des autres juridictions judiciaires; il en fut de même des documents provenant de toutes les corporations d’arts et métiers, qui étaient nombreuses, et des archives privées de beaucoup d’émigrés, les de Wavrechin, les de La Grange, les de Buissy, les de Bavai , les de Bailliencourt , les Maloteau , les Guerne , les Bacquehem , M Chevalier , doyen de Saint- Amé, etc., etc. L’Université et les 24 séminaires ou collèges groupés autour d’elle fournirent aussi beaucoup de docu¬ ments. Les couvents d’hommes étaient nombreux dans la ville , parce que chaque ordre voulait y posséder une rési¬ dence pour donner aux jeunes religieux la possibilité de suivre les cours de l’Université; les couvents de femmes s’y étaient de même considérablement multipliés. Non loin de cette ville avaient été fondées les grandes et riches abbayes de Marchiennes , Anchin , Ilasnon , Beaurepaire , ainsi que celle de Flines où résidaient des Cisterciennes. Les procès- verbaux de remise des titres nécessaires pour la gestion des biens, rédigés du 21 avril au 22 décembre 1790, et de nou¬ veau en septembre, octobre et novembre 1791, dans cinquante à soixante de ces établissements, sont encore aujourd’hui con¬ servés aux archives départementales. Quelques-uns , entre autres ceux des abbayes de Marchiennes et de Flines , pré¬ sentent des détails circonstanciés sur la situation dans la¬ quelle se trouvaient les archives de ces abbayes , sur l’ordre suivi dans le classement et même sur la nature des docu¬ ments. — 34 — L’administration départementale du Nord avait déjà reçu, ainsi que nous l’avons dit, une partie des archives provenant de toutes les anciennes administrations. Il était impossible, on le comprendra facilement, de trouver un local assez vaste pour renfermer le nombre immense de titres et papiers qui furent remis au district. Aussi ces documents furent placés en partie dans le grand bureau et la salle des marbres de Phôlel-de-ville , en partie dans l'ancienne église Saint-Amé, et le reste dans l’ancien collège d’Anchin et dans quelques salles du Parlement de Flandre. C’est dans ce dernier local que fut formé le principal dépôt du district qui avait d’abord été établi à l'hôtel-de-ville. Ce dépôt a-t-il éprouvé des dé¬ sastres en 1793 et dans la première partie de l’année 1794? Nous n’avons rien trouvé à cet égard. Le 20 prairial an II ( 8 juin 1794), le directoire du dépar¬ tement choisissait, pour archiviste du district, le citoyen Réal. Réal, ancien aumônier du régiment de tout artillerie , avait prêté le serment à la constitution civile du clergé et, en date du 17 avril 1791, avait été élu curé de Somain, dans l’assem¬ blée réunie en l'église Saint-Pierre de Douai, par trente-cinq suffrages sur quarante-huit électeurs présents et volants. Partisan déclaré du nouveau régime, il avait rédigé un catéchisme républicain par demandes et par réponses, qu'il présenta au représentant du peuple Florent Guyot , en le priant de le corriger s'il y avaitlieu. En 1794, nous le trouvons membre de la société populaire de Douai. Le jour qui suivit sa nomination en qualité d’archiviste du district, Réal déclara à l’administration « qu’étant tout dévoué en franc républicain « pour s’occuper de tout ce qui était nécessaire à la chose « publique, » il allait entreprendre le travail du triage et du classement des papiers, mais qu’il demandait un aide ou deux à cause de l’importance de ces opérations. Il commença seul le triage dès le 25 prairial ; le citoyen Bouvigny lui fut adjoint par décision du 19 messidor suivant. Le travail était immense. Il fallait classer et inventorier les - 35 archives de cinquante à soixante établissements religieux et de plus de soixante paroisses, ainsi que tous les documents provenant de l’Université, des corporations de la ville et d’un nombre assez considérable d’émigrés parmi lesquels plusieurs notaires. La plupart de ces documents étaient entassés dans trois salles de l’hôtel-de-ville, dans l’église Saint-Amé et dans le collège d’Anchin, tandis que d’autres n’avaient pas encore été retirés des couvents et des habitations confisqués au profit de la nation. Certaines pièces avaient souffert de fréquents transports, d’autres de la poussière et de l’humidité dans lesquelles on les laissait dépérir. Réal se mit résolument à l’œuvre, en prenant soin d’indi¬ quer tout ce qu’il faisait sur deux registres qui sont encore aujourd’hui conservés dans les archives du département. L’une de ses préoccupations paraît avoir été de faire rentrer, dans le dépôt central, des documents appartenant à l’État, dispersés en différents locaux. Mais il ne se contentait pas de concentrer les archives dans le dépôt qui lui était confié ; il en faisait le triage avec soin. Il a dressé un état général des archives de plus de quarante établissements religieux, parmi lesquels les abbayes de Marchiennes, de Flines, de Beaulieu, de la Paix et des Prés, l’Université de Douai et dix collèges ou séminaires, les couvents des Carmes, des Dominicains, des Chartreux et des Trinitaires, les paroisses de Saint-Jacques, Saint-Albin, Saint Pierre, Saint-Nicolas et de Notre-Dame de Douai, ainsi que des communes de Villers-Campeau, Férin et Flé- quières ; il en est de môme des titres et papiers provenant de toutes les corporations de Douai et de trente-cinq émigrés ou suspects, parmi lesquels les de Buissy, les de la Grange, les de Traisnel. Voici comment il procédait. Prenant les fonds d’archives isolément et sans ordre à mesure qu’ils lui étaient apportés ou qu’ils lui tombaient sous la main, il étudiait les docu¬ ments, et les divisait en deux catégories : les pièces à con- - 36 — server et les pièces à détruire. Dans la catégorie des pièces à conserver, il rangeait les titres de fondations, les baux, les contrats, les comptes, les cartulaires, les terriers, les plans et tout ce qui pouvait être utile au point de vue des pro¬ priétés nationales ou particulières ainsi que tous les actes auxquels il accordait quelque valeur historique, il formait ces pièces en liasses, les numérotait et les mentionnait sous le même numéro dans le registre d’iuventaire. Malheureu¬ sement, dans la catégorie que Réal vouait à la destruction étaient compris un nombre considérable de pièces impor¬ tantes; c’était, ainsi qu’il le dit et le mentionne dans ses registres, les procès de vieille date , chicanes et patrocines inu¬ tiles aux républicains libres et égaux en droits , les rapports et dénombrements, les muniments des comptes et parfois les comptes eux-mêmes. Les documents de cette seconde caté¬ gorie étaient destinés au service de l’artillerie : Réal, avec ses allures d’ancien aumônier militaire, désigne ces titres sous les mots : papiers inutiles , bons pour les cartouches , propres aux gargousses. Et l’exécution suivait de près cet arrêt sommaire. Assez souvent, c’était l’officier de La Marti- nière, directeur de l’arsenal, qui demandait du parchemin et du papier ou l’administration départementale qui ordon¬ nait d’en expédier à l’arsenal ; parfois, c’était Réal lui-même qui provoquait ces envois et faisait venir aux archives les voitures de l’artillerie pour débarrasser des papiers qui en¬ combraient les salles des archives. Bien longue et bien triste est la nomenclature des distractions opérées par l’archiviste du district de Douai : le 21 messidor an II, 200 livres de papier pesant, provenant des paroisses Saint-Pierre, Saint - Albin et Notre-Dame, ainsi que du citoyen Bavai ; le 8 ther¬ midor, 300 livres ; le 10, 300 livres, provenant des citoyens de la Grange et de Buissy, et des églises de Férin, Fléquière et Saint-Jacques de Douai ; le 9 fructidor, 300 livres ; le 22 vendémiaire an III, 300 livres ; le 11 brumaire, 360 livres ; le 5 frimaire, 360 livres papier et 260 carton ou parchemin ; — 37 — le 16 pluviôse, 400 de papier et 300 de vieux parchemin, reliefs de fief, chartes et abbayes de Sin, de Flines ou autres prieurés et des arrêts d’extension ; le 5 nivôse, 400 livres de papier ; le 22 ventôse, 500 livres de papier et 100 livres de bons parchemins détrichés ; le 21 germinal, 550 papier et 200 parchemin ; le 8 floréal, 500 papier ; le 29 floréal, 550 papier et 250 parchemin ; le 11 prairial, 560 papier et 270 parchemin; le 14 messidor, 650 livres papier et 300 livres parchemin ; le 29 messidor, 650 livres papier, 300 livres parchemin; le 1er fructidor, 500 livres papier, 300 parchemin; le 23 vendémiaire an IV, 500 papier, 300 parchemin ; le 6 brumaire, papier et parchemin sans désignation du poids ; le 21 frimaire, 600 papier et 250 parchemin; en tout, plus de 8,920 livres de papier et plus de 2,430 livres de parchemin. Voilà , d'après les chiffres relevés sur le livre-journal des archives, l’ensemble de ce qu’a détruit dans le district de Douai l’archiviste Réal. L’histoire pourra-t-elle jamais trouver des paroles assez sévères pour flétrir le vandalisme d’un archiviste, qui, de lui-même, expédie à l’arsenal des monta¬ gnes de documents ? Toutefois, pour être juste, nous devons ajouter que les pièces vouées à la destruction par Réal étaient généralement les moins importantes des fonds auxquelles elles appartenaient ; dans les fonds des abbayes de Flines (t de Sin, par exemple, qui ont fourni une large part à l’arsenal, les titres originaux et la plupart des pièces curieuses semblent avoir été conservés. La perte la plus regrettable dans ces fonds et dans la plupart des autres, est celle d’un nombre considérable de comptes. Nous ne savons si l’ancien aumônier Réal appartenait à la famille du célèbre historiographe du même nom ; mais nous croyons , d’après son journal et ses travaux, qu’il avait une connaissance sérieuse des archives et des monuments histo¬ riques. Son nom et son écriture figurent dans le travail d'inventaire jusqu’en frimaire an IV (novembre ou décembre 1795); en date du 27 brumaire de la même année, il avait — 38 — écrit à la municipalité de Douai pour lui dire qu’étant attaché au tribunal civil du département, il ne pouvait plus employer tout son temps au triage et au classement des titres et papiers de la nation, et le priait de lui donner, comme second adjoint, le citoyen Grégoire Vasseur, qui possédait toutes les qualités nécessaires pour remplir cette fonction. Réal était encore alors désigné sous le titre d’archiviste de la nation. A partir de cette époque, les mentions du registre des archives, qui sont de la main des employés, n’offrent plus aucune importance ni aucun intérêt. Nous ne savons ce que devint l’archiviste Réal. Il avait été, pour les archives départementales conservées à Douai, tout à la fois un instrument de perte et de salut. Il faut le blâmer d’avoir envoyé à l’arsenal des milliers de livres de papiers et de parchemins, mais il faut le louer d’avoir réuni les documents égarés, et de les avoir sauvés de l’incurie souvent plus funeste que la destruction organisée. C’est dans les archives du district de Douai que Ton paraît avoir le plus détruit ; et cependant ce sont ces archives qui ont le moins souffert dans le département et qui présentent aujourd’hui l’ensemble le moins incomplet. Elles furent transférées à Lille en 1801, lorsque cette ville fut choisie, au lieu de Douai, pour être le chef-lieu de la préfecture. Nous avons rappelé, d’après les documents et, nous l’espérons , avec impartialité, l’histoire des archives dépar¬ tementales du Nord , durant la Révolution. Nous serions heureux si ces pages pouvaient contribuer à inspirer l’horreur du vandalisme et de l’incurie , si elles pouvaient faire com¬ prendre aux travailleurs l’importance des archives en général et en particulier du riche dépôt de Lille, si elles pouvaient déterminer un certain nombre d’érudits à venir recueillir ce dépôt des renseignements sur l’histoire de la contrée, sur l’administration, les usages, les mœurs, et les arts de l’ancienne France. Il y a dans les archives du Nord, de vastes champs à défricher, d’amples moissons à recueillir. De nombreux — 39 — ouvriers viendront-ils y travailler? Nous espérons qu’on ne dira pas de ces riches collections : messis quidem mulla , operarii autem pauci. Gu. Deiiaisne. FAUNE DU TERRAIN CRÉTACÉ DU NORD DE LA FRANCE. Les animaux qui vivent actuellement dans notre pays, sont généralement assez bien connus, et de nouveaux catalogues étendent tous les jours nos connaissances à ce sujet. On s’est beaucoup moins occupé jusqu’ici des espèces qui habitaient nos contrées aux périodes géologiques antérieures. La Faune qui peuplait notre région, alors que se déposaient dans les eaux de la mer la craie exploitée aujourd’hui près de nous à Lezennes et à Haubourdin , est en particulier peu connue quoique très-riche. C’est cette Faune crétacée que nous vou¬ drions aujourd’hui mettre sous les yeux des lecteurs du Bulletin. Les mammifères et les oiseaux ont apparu sur la terre avant l’époque crétacée, mais on ne les a rencontrés que dans quelques gisements privilégiés, on n’en a jamais trouvé dans le terrain crétacé du Nord de la France. Il n’en est pas de même des Reptiles : cette classe d’ani¬ maux était très-développée pendant la période crétacée ; elle nous présente encore, mais pour la dernière fois, ces types remarquables qui ont servi à établir les ordres des Dinosau- riens, Pterodactyliens et Enaliosauriens, reptiles puissants qui régnaient en maîtres sur tous les animaux qui vivaient à cette époque. On a trouvé jusqu’ici quatre espèces de reptiles dans la craie du Nord de la France ; chacun peut les voir au Musée géologique de Lille. Ordre des Chéloiiiciis. Genre Chelone. MM. Ortlieb et Chellonneix ont publié en 18G9, dans les Mémoires de la Société des sciences de Lille, la description — 40 — d’une tortue trouvée par eux à Hellemmes, et qu’ils ont rapportée au genre Chelone. Cette Chélonée forme une espèce nouvelle, assez voisine de la Chelone Benstedi (Owen) d'Angleterre ; elle en diffère surtout par son diamètre antéro¬ postérieur, plus petit de un sixième, par sa forme générale moins elliptique, et par la moindre convexité de sa carapace. M. Hébert, qui a étudié les reptiles de la craie de Meudon, a trouvé également quelques fragments indéterminables de Chélonées. Il existe encore de nos jours des Chélonées, presque toutes les tortues de mer appartiennent même à ce genre ; on sait qu’ePes vivent aujourd’hui dans les régions chaudes du globe. Ordre des Sauriens. Famille des Crocodiliens . On n’en a pas encore trouvé de représentant dans le Nord de la France ; M.* Hébert en cite un ù Meudon : le Crocodilus ? Brongniarti (Gra”). Famille des Lacer tif ormes. Genre Mosasaure. Inconnu aussi dans le Nord ; M. Hébert en cite deux espèces à Meudon : Mosasaurus Camperi, Mosasaurus gracilis (Owen). Genre Leiodon. Ces animaux avaient d’assez grands rapports avec les Mosasaures ; des dents de Leiodon anceps (Owen) ont été trouvées dans le gault à Grandpré, pendant l’excursion dirigée par M. Gosselet, en août 1873. M. Hébert en cite aussi à Meudon. Genre Onchosaurus. Il a des analogies avec les deux genres précédents ; M. Gervais a décrit Y Onchosaurus radicalis , trouvé à Meudon. 41 — Genre Polyptychodon. Les reptiles que l’on range dans ce genre, ne sont pas bien connus, on n’a encore trouvé que leurs dents et quel¬ ques os détachés ; ils rappellent les Dinosauriens, mais sem¬ blent avoir été des animaux aquatiques. Des dents de Polyptychodon interruptus (Owen) ont aussi été trouvées en excursion, dans le gault de Grandpré. Ordre des FâcB’odactylicns. Les Ptérodacty liens, reptiles volants, sont certainement au nombre des animaux les plus curieux qui vivaient pendant l’époque secondaire. M. Décocq a trouvé à Lezennes un os, qui nous semble être le tibia du Pterodactylus giganteus (Bow.). Ce gigantesque reptile avait deux à trois mètres d’envergure. Ch. Barrois. BIBLIOGRAPHIE. CHARLES IX. Deux années de règne. 1570-1572 (1). (Suite). Les mariages. — Après avoir montré Catherine de Médicis essayant de donner son fils le duc d’Anjou, alors âgé de vingt ans, et même après l’opposition de celui-ci, son autre fils, le duc d’Alençon , âgé de dix-sept ans, à la reine d’An¬ gleterre Elisabeth , qui ne comptait pas moins de trente-huit printemps, le savant professeur de la Faculté de Douai étudie dans les lettres de l’ambassadeur florentin la suite des négo¬ ciations relatives au mariage de Henri de Navarre , le chef du parti huguenot, avec Marguerite, fille de la reine-mère. Le pape Pie V, homme rigide et de principes sévères, s’op¬ posa à cette union , jusqu’à sa mort , avec la plus inflexible (1) CnARLEs IX. Deux années de règne; cinq Mémoires historiques, par M. Abel Desjardins, doyen de la Faculté des lettres de Douai. — 42 — énergie. Jeanne d’Albret, la mère du roi de Navarre, vint à Paris au sujet de cette affaire , et ne montra que peu d’em¬ pressement pour ce projet , qui fut toutefois résolu. Divers obstacles le retardaient, lorsque Jeanne d’Albret mourut subi¬ tement d’un mal dont elle avait apporté les germes à Paris, et non , comme l’ont dit bon nombre d’auteurs , par effet d’un poison que lui aurait fait administrer Catherine de Médicis. Retardé de nouveau par cet événement, le mariage d’Henri de Navarre et de Marguerite fut célébré le 18 août, dans l’église Notre-Dame de Paris. « Ce mariage, dit M. Desjardins après avoir suivi les négo¬ ciations dans le détail , a été l’objet des plus vifs désirs de Catherine de Médicis, qui en a poursuivi l’accomplissement avec une sorte de passion; ce point est hors de doute. Quel sentiment l’animait? Quel but se proposait-elle? A cet égard, les jugements diffèrent. » Le cours des évènements, qui, au lendemain des noces, amena le massacre de la Saint-Barthélemi, a fait croire à une connexité entre ces deux faits. Nous ne saurions l’admettre. Le mariage de Navarre, non plus que le retour de l’amiral à Blois, n’a, à nos yeux, le caractère d’un guet-apens. » Il faut songer que les négociations se sont prolongées pendant un an; que les Biron, les Nassau, les La Noue, les Frégose, les Grancourt, les Beauvais-Lanocle, c’est-â-dire les hommes les mieux intentionnés et les plus clairvoyants, y ont pris part, et que tous en ont approuvé la conclusion. » Le concours extraordinaire des huguenots à Paris , à la fatale époque des noces , n’est pas le résultat des artifices de la reine-mère, qui en fut presque intimidée; il fut surtout motivé par les opérations militaires dont la Flandre était le théâtre , et auxquelles l’amiral et les siens se proposaient de « prendre part. » Quant à l’ardeur de la reine-mère et à sa persistance inaccoutumée, quelle en est la cause, sinon la conviction, peut- être erronée, mais sincère, que la conversion du prince sui- — 43 — vrait le mariage , et que la ruine du parti huguenot suivrait la conversion. Ainsi l’entendait l’ambassadeur florentin , et nous l’entendons comme lui. 5> Le devoir de l’historien est de respecter la justice et la vérité partout et toujours, et de se montrer scrupuleux, même à l’égard des personnages, qui, comme Catherine de Médicis, ne sont dignes ni de son intérêt, ni de son estime. » L'assassinat de l'Amiral. — Ainsi que l’établit M. Desjardins, l’amiral Coligny, dans la pensée d’éviter le retour des guerres civiles, désirait que la France attaquât les Espagnols dans les Pays-Bas. N’espérant rien de la reine, il s’adressa directe¬ ment au roi, et, malgré l’opposition de Tavannes, l’âme et le bras droit du parti d’Anjou , cette entreprise fut accueillie avec faveur par Charles IX, qui manifestait enfin la volonté de gouverner par lui-même. Quelques chefs huguenots pri¬ rent les devants , avec l’assentiment secret de l’amiral , et commencèrent la lutte; ils échouèrent, et l’entreprise avorta à cause de la trahison, de l’incurable faiblesse du roi et de la perfidie du duc Cosme de Médicis. L’amiral, néanmoins, insistait de nouveau. Catherine de Médicis comprenait que la réussite des projets de Coligny lui enlèverait l’ascendant qu’elle exerçait sur son fils, elle jura sa perte. c< Il y avait â la cour une Italienne qui nourrissait contre Coligny d’implacables ressentiments : c’était Madame de Nemours , la veuve de François de Guise , la mère du jeune Henri. Les deux femmes se rapprochèrent dans un commun sentiment de haine et de vengeance. On les vit s’en¬ fermer seules et prolonger leurs entretiens bien avant dans la nuit. Elles complotaient la mort de l’homme qui pour l’une était l’assassin de son mari , et pour l’autre une menace au point de vue de son influence politique. Après uil conseil intime avec le duc d’Anjou et deux affidés, sans doute Retz et Birague , il fut arrêté d’assassiner l’amiral ; on fit entrer les Guise dans le complot. Nous ne rappellerons pas les circonstances qui amenèrent — U la tentative d’assassinat contre Coligny, malgré l’intérêt que présentent les récits empruntés par M. Desjardins aux dépê¬ ches des ambassadeurs llorentins, et que nous avons voulu faire ressortir, comme l’a voulu aussi l’auteur, c’est que la reine-mère forma ce projet, peu de temps avant de l’exécuter, dans un but d’ambition personnelle, et que les deux grandes coupables sont la reine-mère et madame de Nemours. La Saint -Barthêlemi. — La tentative d’assassinat du 22 août amena le massacre du 25. Les. Huguenots s’étaient, avec raison, montrés mécontents; ils s’étaient présentés au Louvre pour réclamer les armes à la main, et plus de 80 d’entre eux y étaient installés ; on assurait qu’ils attendaient du renfort pour le mardi 26, et qu’ils feraient main-basse sur tous les auteurs et les complices de la tentative d’assassinat. « C’est sous l’impression de ces craintes, sous l’obsession » de ces pressentiments, que Catherine prit dans la soirée du » 23 -août la résolution d’en finir, en frappant à la fois tous » les chefs du parti protestant. Peut-être crut-elle sincère- » ment que la cour se trouvait dans le cas de légitime y> défense, et elle le persuada aisément au mobile et violent » Charles IX. » Les conseils se succèdent coup sur coup ; on délibère » précipitamment et sans ordre. Celui qui lit le récit de ce » qui se passa au Louvre dans Tavannes sent qu’on s’est » réuni à l’improviste, qu’on n’a pris d’avance aucun parti : y> c’est, du moins, notre impression. » Que, depuis l’entrevue de Bayonne, la reine, Anjou et » leur entourage aient conçu plus d’une fois le dessein vague y> et indéterminé de se défaire des protestants, nous ne le » nions pas. Mais , à l’instant même où va sonner le tocsin » de la Saint-Barthélemi, nous ne voyons nulles traces d’un 3> plan mûr et arrêté, d’un système coordonné et suivi. Ta- » vannes fait cette remarque judicieuse : Ce conseil , nay de » V occasion, ne se fust pu exécuté sans estre découvert , s'il » eust esté prémédité. » — 45 — Enfin le forfait s’accomplit. Nous ne le raconterons pas. Notre but, dans l’analyse de l’important travail de M. Desjardins, était de faire connaître les conclusions qui découlent des documents mis au jour et exposés avec tant de sagacité par le savant professeur : la Saint-Barthélemi n’avait pas été préparée de longue main ; la responsabilité de ce massacre doit tomber sur Catherine de Médicis. PATRIA BELGICA. XI. Malacologie, par M Nyst. Cet article e*t traité avec toute la science que l’on devait attendre de l’auteur. Il envisage la faune malacologique belge non-seulement dans l’état actuel, mais à toutes les époques de la géologie. La faune actuelle ne comprend que 84 espèces terrestres, 18 fluviatiles et 158 marines. Cette dernière catégorie est particulièrement pauvre , ce qui tient à la nature des côtes complètement dépourvues de rochers. On connaît déjà 4,000 espèces fossiles. C’est encore beau¬ coup trop peu pour pouvoir comparer les faunes passées à la faune actuelle. De l’étude de ces faunes en elles-mêmes, M. Nyst tire des conclusions fort importantes sur la configuration et le régime des différentes mers qui sont venues successivement couvrir notre sol. XII. Entomologie, par M. le docteur Breycr. L’auteur estime qu’il y a en Belgique 11,324 espèces d’in¬ sectes ; mais pour plusieurs ordres il n’existe qu’une appré¬ ciation fondée sur la comparaison avec l’Angleterre. Les chiffres suivants sont plus certains , parce qu’ils sont fondés sur un catalogue des espèces belges : — 46 — Névroptères . 239 Coléoptères . 3,161 Lépidoptères . 1,475 Orthoptères . 46 Au point de vue de l’habitat, M. Breyer divise le territoire belge en 4 régions : 1° Le bord de la mer, comprenant les dunes, « Ces mon¬ ticules de sable forment des entonnoirs qui s’ouvrent en demi-cercle vers le midi. Le soleil y plonge pendant une grande partie du jour; il n’y a d’ombre que celle qui est fournie par la végétation des broussailles et des graminées. Protégée contre les vents du Nord, la température intérieure des dunes devient en quelque sorte méridionale » 2° La Campine, avec ses marécages, ses plaines sablon¬ neuses, ses forêts de pins et la proximité de la mer. 3° L’Ardenne et la région montagneuse qui l’entoure. « La faune y varie surtout en raison de la direction des vallées ; c’est la quantité de chaleur et de lumière dont jouissent les espèces pendant Pété qui influe sur les formes plus ou moins méridionales ; le froid de l’hiver et même sa longueur n’ont que peu d’action; en effet, au dessous de la congélation, Pin - secte n’est plus atteint, car il a cherché des retraites et il s’est construit des abris qui lui font passer cette période du froid en véritable troglodyte. s> Moins les plateaux sont élevés, plus vite s’y établit la chaleur printannière. On pourrait dire que l’été est en retard d’une semaine à tous les 5 ou 600 pieds de hauteur. Il en ré¬ sulte que la même espèce apparaît quelques jours plus tôt dans la vallée et quelques jours plus tard sur les plateaux élevés. Quand les chasseurs entomologistes rencontrent des espèces diurnes déjà fatiguées par plusieurs jours de vol, ils savent qu’un peu plus haut ils les rencontreront fraîchement écloses. » 4° La Belgique cultivée. L’homme y a peu à peu détruit la — Al — faune aborigène , qui a été remplacée par une faune qu’on pourrait appeler agricole. L’entomologie est très cultivée en Belgique. Il suffit de rap¬ peler les noms de MM. Candèze, Chapuis, Preudomme de Borre-, etc. Les collections y sont nombreuses , et M. Breyer a eu l’heureuse idée de les indiquer aux savants. Nous repro¬ duisons celte liste qui pourra ctre utile à nos entomologistes Musée de Bruxelles. Collection générale. — Collection spéciale de la faune belge. — Longicornes de Lacordaire. — Ichneumonides de Wesmael. Putzeijs. Carabiques. Candèze. Lamellicornes et Elatérides. Chapuis. Chrysomélides et Erotyliens. Roelofs. Curculionides. Weyers. Buprestides. J. de la Fontaine. Coprophages. Van Volxem. Longicornes, Lamellicornes, Hémiptères. De Selys Lonchamps. Orthoptères et Névroptères. Collection la plus riche connue. Puis. Diptères et Hyménoptères. Collection excessivement riche. De Thysebaert. Lépidoptères européens. Fologne. Lépidoptères d’Europe. Seule collection complète de Microlépidoptères de la faune helge. Capronnier. Lépidoptères du globe. Weinmann. Lépidoptères d’Europe. — Lycénides du globe. Tennstedt. Brachélytres belges. INVENTAIRE DES SCEAUX DE LA FLANDRE Par M. G. Demay. Sous ce titre , M. G. Demay vient de publier un riche et magnifique recueil en deux volumes in-4°, imprimés par autorisation du Gouvernement, à l’Imprimerie nationale. Cette faveur particulière accordée à l’auteur, archiviste aux — 48 — archives nationales, jointe à l’autorité de son nom et de ses fonctions, suffit à faire comprendre qu’on est en face d’une œuvre sérieuse où les difficultés typographiques ont dû être résolues avec intelligence. Les dépôts d’archives, les musées et les collections parti¬ culières du département du Nord ont fourni à M. G. Demay près de 8,000 sceaux dont les légendes sont reproduites en caractères gravés et fondus exprès pour chacune d’elles en manière de fac simile. Trente planches photo-glyptiques ajoutent à la richesse du texte les splendides épreuves d’une centaine de types remarquables par leur composition magis¬ trale, ingénieuse ou naïve et leur caractère archéographique. Mais la parfaite exécution du travail est légitimée par l’im¬ portance de l’œuvre. Il n’est pas nécessaire d’avoir connais¬ sance des longues études de M. G. Demay dans nos archives départementales, ni de ses visites au Musée de Lille et chez les amateurs, pour se rendre compte du zèle, de la science et des soins minutieux qu’il lui a fallu déployer dans la recherche des documents, avant d’apporter au classement de ses notes la méthode et la clarté qui en font un recueil aussi commode à consulter qu’intéressant à parcourir. Les sceaux laïques et ecclésiastiques sont divisés en vingt séries classées suivant l’ordre hiérarchique (1), séries dont les subdivisions sont énumérées dans une table systématique qui précède la table alphabétique. La richesse des dépôts de la contrée a permis à M. G. Demay de retrouver un grand nombre de sceaux intacts ou à peu près. Ceux qui proviennent des archives départemen- lales, communales et hospitalières sont encore attachés aux actes qu’ils authentiquent et illustrent pour ainsi dire, car certaines pièces en sont munies d‘un nombre considérable. (1) Souverains, grands dignitaires, grands feudalaires et corps poli¬ tiques, dignitaires, seigneurs, hommes de fiefs, villes, cours et tribu¬ naux, offices, papes, cardinaux, archevêques et évêques, chapitres, paroisses, universités et collèges , abbayes d’hommes et de femmes, corporations religieuses, ordri s militaires, hôpitaux et maladreries. — 49 — Un acte passé avec le comte de Flandre porte le scel des cinquante-quatre métiers de Bruges. On compte soixante- huit sceaux appendus à l’acte de soumission des habitants de Grammont en 1380, et chacune des six expéditions du traité de Louis de Nevers avec le duc de Brabant, offre la garantie de cent sceaux disposés sur quatre rangées horizontales. Deux chartes curieuses, l’une scellée de cent-soixante et douze sceaux placés en bas du document sur onze rangées horizontales, et l’autre munie de cent-dix sceaux des prélats, gens d’église, nobles et bonnes villes du Hainaut, contiennent la reconnaissance du duc de Bourgogne comme héritier et gouverneur de ce comté. En décrivant ces monuments héraldiques, l’auteur a pris soin de mentionner, à la suite du nom du contractant, son titre honorifique ou particulier, la forme et le diamètre du sceau, le dépôt dont il provient, la description du type, la légende en fac simile suivie d’une reproduction en caractères modernes, complétée quand il y a lieu, enfin la nature, l’objet et la date de l’acte. Ce dernier point est d’autant plus important qu’il signale l’existence d’une foule d’actes posté¬ rieurs à l’époque où s’arrête V Inventaire des archives de la chambre des comptes , documents inédits relatifs aux mœurs féodales, aux juridictions diverses et aux familles qui en ont exercé les emplois. La ville de Lille seule, parmi les deux cents et quelques fiefs de la sixième série, affectée aux hommes de fiefs, éche- vins, juges, juges côtiers, juges rentiers et hommes de cour, a fourni à M. G. Demay plus de 75 familles d'hommes du fief de la Salle, à la suite desquelles viennent pour la même ville celles du royaume des Estimaux (20 familles); les juges ou les échevins des pairies de Bazenghien, Berlaimont, du Bos( Jean Boudet, Tristran Canard, Amauri de Carnin, Gérard Diclebecque, Jacques Ilallct, Malringhem, Robert de Nédon- chel, Alix de Quesnoy, de Raineval, Rœux, Bauduin de Solre et le Vincourt; des fiefs Boinebroque, de Langlée et de la — 50 - Motte de Lambersart; des seigneuries du Breucq, de Croix, de Lannoy, du Yertbois et de Jacques Vrelet ; les hommes de la cour de Roubaix, du chapitre de Lille (55 sceaux); de l’Abbiette et de l’Hôpital Comtesse. La facilité de posséder désormais près de soi tant de docu¬ ments restés inconnus même à la plupart des personnes qui s’occupent d’études historiques, déterminera bien des biblio¬ philes à se procurer Vlnvenlaire des sceaux de la Flandre. Ils y trouveront les enseignements les plus variés sur l’histoire générale de la province, ses institutions et ses mœurs ; ils y découvriront le secret de la puissance , de la richesse et de l’indépendance des communes industrieuses et commerçantes du pays ; ils pourront suivre dans leurs fonctions multiples ces bourgeois, jurés de la paix, échevins, keuriers exerçant la justice, ratifiant les traités, validant les actes, estvardant les marchandises, construisant leur beffroi, inspectant les rivières, administrant les hôpitaux, opposant sans cesse au pouvoir ecclésiastique le pouvoir envahissant de la commune. Les sceaux leur montreront les seigneurs dans toute la ma¬ jesté de leur rang et l’éclat de leur appareil guerrier, et leur fourniront, sur le costume et l’armement du moyen-âge, les plus précieux renseignements. Les savants qui préparent des monographies puiseront, dans de longues séries de person¬ nages séculiers ou ecclésiastiques, des données sérieuses sur les institutions dont ceux-ci étaient les mandataires, sur les événements auxquels ils ont participé, sur les affaires publi¬ ques ou privées qu’ils ont traitées. Les habitants du Nord doivent se féliciter de ce que M G. ï)emay a bien voulu consacrer à la Flandre son premier travail en ce genre. Pour notre part, nous sommes heureux d’y trouver une éclatante justification de cet aphorisme de Millin : « La numismatique et la sphragistique sont sœurs. » Ces deux nobles filles de l’histoire occupent aujourd’hui dans la science le rang honorable que devaient leur assigner les monuments qu’elles ont tirés de l’oubli. E. Van Hende. — 51 — NOTICE SUR LES MONUMENTS ÉPIGRAPHIQUES DE BAVAI ET DU MUSÉE DE DOUAI, Par M. Ernest Desjaidins. La Société d’agriculture , sciences et arts de Douai , vient de publier, sous ce titre, un important Mémoire rempli de savantes recherches sur les documents épigraphiques qui ont rapport à la cité des Nerviens pendant la domination romaine, et dont le plus grand nombre a été exhumé du sol de Bavai, le chef -lieu incontestable de cette cité. Deux sortes de documents permettent aux historiens de reconstituer l’histoire d’un pays, les textes classiques et l’étude des vestiges anciens que le hasard a rendus au jour. Dans la seconde série rentrent les documents épigraphiques, mine précieuse de renseignements sur les peuples de l’anti¬ quité et sur les institutions qui les régissaient On peut diviser en deux catégories les documents qui vont faire l’objet de cet examen. Les premiers se rapportent essen¬ tiellement à la cité des Nerviens, ce sont des inscriptions monumentales, votives, tumulaires. Les seconds s’y rappor¬ tent d’une manière indirecte, ayant été tous exhumés de son sol ; ce sont des cachets d’oculistes, des fragments de terre cuite, des objets en verre ou en cuivre, portant des marques de fabrique, des noms de potiers ou des inscriptions diverses. Cela dit, examinons chacune de ces catégories. La pre¬ mière se compose de huit inscriptions gravées sur la pierre ou sur le bronze. La plus importante de ces inscriptions est en même temps la plus ancienne, en voici la traduction : a A Tibère César, y) fils d’Auguste, petit-fils du divin César. A l’occasion de son arrivée, Cneius Licinius Navos, fils de Caius, inscrit dans » la tribu Voltinia, a consacré ce monument. » Cette inscrip¬ tion nous apprend que Tibère est venu dans la Gaule, ce qui est d’ailleurs conforme aux écrits des historiens romains , mais elle nous apprend en outre qu’il •s’est arrêté à Bavai ; 52 — elle nous dit que ce fait historique s’est passé postérieure¬ ment à l’an 4, année de l’adoption de Tibère par Auguste, puisqu’il est qualifié du titre de fils d’Auguste, mais anté¬ rieurement à la mort d’Auguste, en l’an 14, puisque ce prince n’y est pas encore honoré du titre de Divus. D’où nous pouvons conclure que Bavai, antérieurement à l’an 14, était déjà la ville principale de la cité des Nerviens. Les trois inscriptions suivantes sont gravées sur des monu¬ ments funéraires. Le premier est dédié aux mânes de Julia Felicula par Julius Ulpianus ; le second donne les noms de deux personnages, Utilis et Optata, que l'inscription semble désigner comme des esclaves de Quintus Sutorius Brocchus ; le troisième a été élevé par Pompeius Victor, encore vivant, pour lui et pour son épouse Ocratia Secunda , et dédié à ses parents Pompeius Crispus et Tarquinia Secunda. Ce dernier monument appartient au Ier siècle. Or, ce Pompeius Victor s’intitule questeur des citoyens romains établis dans la cité des Nerviens, ce qui prouve l’établissement, au Ier siècle, sur ce territoire, de citoyens romains formant un collège à part qui avait confié la gestion de se. intérêts à un magistrat désigné sous le nom de quœstor. Voyons maintenant les inscriptions votives. La première est dédiée aux divinités nerviennes par Julius Tertius, la seconde à Apollon par Timincius ; nous y joindrons, comme ayant également rapport au culte, une inscription importante trouvée à Lyon. On y lit : «AL. Osidius, fils de Quiétus, » Nervien, ayant exercé, dans sa cité, tous les honneurs, » prêtre à l’autel de notre César, dans le temple de Rome » et d’Auguste, situé au confluent de la Saône et du Rhône, d les trois provinces de la Gaule. » Pauvres divinités ner¬ viennes ! si elles conservent encore des adorateurs, comme Julius Tertius, déjà dès le premier siècle leur prestige doit se courber non-seulement devant les dieux antiques du pan- — 53 Ihéon romain, mais encore devant les divinités à la mode, Rome et Auguste, en un mot, devant le culte officiel. Nous avons vu plus haut que les citoyens romains de la cité des Nerviens étaient organisés en collège, la cité des Nerviens elle-même, au contact des étrangers qui s’étaient établis dans son sein, dut calquer de bonne heure les institu¬ tions municipales romaines. Nous en avons la preuve dans la huitième et dernière inscription qni nous donne les noms d’un duumvir des Nerviens, Tiberius Julius Tiberinus. Voilà pour les monuments dont l’authenticité est incontes¬ table. M. Ernest Desjardins passe ensuite à l’examen de mo¬ numents qui ont disparu pour la plupart et qui sont faux ou suspects. Deux monuments sont suspects, celui qui aurait été élevé par la cité des Nerviens en l’honneur de l’empereur Sévère- Alexandre, et l’inscription lumulaire chrétienne de Lucinus, mentionnée par de Bast. Ces deux inscriptions ont sans doute certaines particularités qui peuvent les rendre suspectes, mais comme il est possible qu’elles sont le fait des premiers lecteurs , elles n’ont point été rejetées dans la catégorie dont nous allons parler, c’est-à-dire celle des inscriptions fausses ou inventées. Une inscription est fausse , celle qui rappelle le souvenir d’Hirtius. Le vase en bronze sur lequel elle est gravée est d’ailleurs aussi faux que l’inscription ebe-même. Les ins¬ criptions inventées sont, celle de Varrusius, donnée par de Bast, et celle de la prétendue borne irilliaire trouvée à Quartes, en 1777, par Dom Bévi. D’abord Dom Bévi ne découvrit à Quartes que le socle d’une borne milliaire, et quant au milliaire lui-même il a été trouvé, non pas en terre, mais dans l'imagination d’un faussaire illettré, comme le prouve M. Desjardins par une argumentation serrée et irréfutable. Règles de la langue latine, de l’administration romaine, de l’épigraphie violées, erreurs historiques capi- — 54 — taies, graves anachronismes, tout se trouve dans ce prétendu milliaire, à l’exception toutefois de ce qui devrait s’y trouver. Avis à ceux qui avaient tiré de cette inscription toutes choses qu’on ne pouvait d’ailleurs y voir, el qui avaient gratifié d’un temple des Nymphes notre modeste hameau de Quartes. Comme appendice, M Desjardins décrit une inscription iné¬ dite dédiée à Flavius Félix Gabinianus, chevalier romain, ancien duumvir de la splendide colonie de Carthage. Cette inscrip¬ tion, qui concerne l’Afrique, où elle a été trouvée, fait partie de la belle collection offerte à la ville de Douai par M. Henry Berthoud. Nous renvoyons pour les détails au savant travail de M. Desjardins, et nous terminerons cette première partie en disant qu’il faut également aller chercher plusieurs de celles qui précèdent au Musée archéologique de Douai , devenu l’un des plus importants de France par l’acquisition du cabinet Carlier, faite sous l’administration éclairée de M. de Guerne. H. Rigaux. (A suivre) SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIE DE BELGIQUE. Nous sommes fort en retard avec l’Académie de Belgique ; aussi, passant au-dessus des travaux de science générale, nous ne nous occuperons que de ceux qui offrent pour le pays un intérêt spécial. M Montigny (1) a continué à rendre compte de ses recher¬ ches, sur la vitesse du vent, exécutées dans la tour de la cathédrale d’Anvers. On se rappelle que M. Montigny a ins¬ tallé des baromètres à différentes hauteurs dans la tour. Si l’on vient à calculer par la mesure du baromètre l’altitude des diverses stations, on la trouve toujours inférieure à l’alti¬ tude vraie pour tous les vents de la région semi-circulaire E. (1) Bullclin de l’AcadCmie, t. 35. p. 646 et t. 36, p. 4’,î5. — 55 — et supérieure pour tous les vents de la région 0. Les alti¬ tudes relatives aux vents du S. et du N. s’écartent peu de l’altitude vraie de chacune des galeries. Le maximum et le minimum des altitudes barométriques se sont présentées, le premier par un vent violent d’O.-N.-O., le second par un fort vent d’E -N.-E. Les altitudes barométriques sont donc en relation d’une part avec la direction du vent, de l’autre avec sa vitesse. Si on se place entre Bruxelles et Namur, les altitudes barométriques observées par les vents d’E. et de N.-E. sont supérieures à l’altitude vraie, tandis que celles observées par les vents d’O. et S.-O. sont inférieures. C’est le contraire de ce qui a lieu à Anvers M. de Montigny l’attribue à ce que la vitesse du vent est plus grande à Anvers et devient d’autant moindre qu’on s’approche de l’Ardenne. Ainsi elle est plus grande à Bruxelles qu’à Namur. Dans une troisième notice, M. de Montigny insiste sur l’obliquité des vents. C’est un fait reconnu depuis longtemps par la pratique. Ainsi l'axe des ailes des moulins à vent est inclinée d’environ 18° pour que sa direction soit sensible¬ ment parallèle à celle du vent. C’est à cause de son obliquité que le vent parvient à sou¬ lever l’eau des mers , des lacs, ou môme des étangs. Ainsi , le 19 novembre 1824, le vent de N. 0. soufflant avec une grande violence , éleva tellement le niveau de la Baltique sur toute sa côte orientale qu’il en résulta d’épouvantables inon¬ dations, non-seulement à Cronstadt, cù le changement de niveau fut de 3m70, mais à Saint-Pétersbourg, où l’eau s’éleva à la hauteur de ln,60 dans les rues les plus reculées de la ville. Parmi les causes de cette obliquité, M. de Montigny signale l’inégalité de vitesse des différentes couches d’air. Les cou¬ ches inférieures éprouvent de la part des aspérités du sol un frottement dont l’inlluence s’atténue à mesure qu’on s’élève; — 56 — il en résulte des différences de pression qui tendent à modi - fier la direction primitive supposée horizontale. Pour ce qui concerne les bourrasques , il est bien constaté nue l’axe des mouvements tournants qui les engendrent est plus ou moins incliné. Il en résulte que la direction du vent dans le plan vertical doit varier selon la position de 1 obser¬ vateur par rapport à la masse d’air de la bourrasque, qui es^ douée à la fois d’un double mouvement de translation dans l’atmosphère et de rotation autour de son axe incline. ^ L’auteur termine par l'examen des divers appareils destine^ à l’observation régulière de l'inclinaison du vent. M. Melsens (1) a fait des expériences très-interessantes sur le refroidissement des boissons alcooliques. Il a été frappé du peu d’impression que font, sur la langue, des vins portes à Quelques degrés sous zéro en les comparant à des boissons non alcoolisées soumises à la même température. De l’eau-de-vie à _ 35o a paru excellente, plus agréable, plus moelleuse qu’à la température ordinaire. On ne peut la boire dans un verre il faut la tenir dans de petits godets de bois. _ ■ A -1 30°, les liquides alcooliques contenant à peu près la moitié d'eau deviennent visqueux ;'à-50», on peut les pren re à la cuiller comme une glace, et sur la langue ils produisent une sensation de froid moindre que celle de la glace ord 1- naire On peut les servir dans un vase en mercure congele, mais on ne peut les prendre qu’avec des cuillers de bois une cuiller de métal produirait une véritable b, dure M. Melsens a pu prendre ces liqueurs abaissees à une emp rature de 60 et même de 70» sous zéro, mais alors ils faisaient l’effet d’une cuillerée de soupe trop chaude. Poursuivant les études de M. Yergnette-Lamothe eja commencées par Van Helmont et Stahl sur la congélation du vin, il est parvenu à retirer du vin des glaçons qui ne renferment que de l'eau pure : et par conséquent a améliorer (l) T. 35, p. 685. — 57 — le vin, à l'enrichir en alcool dans la proportion de 154%, tandis que son prédécesseur n’était arrivé qa’à la proportion de 111 %. M. Melsens a eu l’heureuse idée de chercher à enrichir la bière par un procédé analogue. Il a opéré sur le lambic de Bruxelles. Ces expériences ont pour notre pays tant d’in¬ térêt, que nous les publions textuellement : « La bière se trouble légèrement avant la congélation ; amenée à 5 ou 7 degrés sous 0, elle forme un magma épais, facile à presser ou à passer à la turbine. > Le liquide qui s’écoule se fonce en couleur et devient d’autant plus sirupeux qu’on lui enlève plus d’eau ; même en poussant la congélation jusqu’à extraire environ 40 % d’eau, la glace est peu colorée, et ne renferme que très-peu d’alcool et très-peu d’extrait, tout s’est concentré dans le liquide. » Il me semble donc facile de doubler la valeur nutritive et excitante de nos bières brunes. » M. Yan Beneden (1) signale dans l’argile rupélienne du pays de Waes des os d’oiseau qu’il rapporte à une espèce qui vit encore en Belgique, P Anas marila ou milouinan. M. Yan Beneden me permettra d'élever quelques doutes, non pas sur la détermination zoologique de l’animal, qui émanant de lui ne peut laisser aucune incertitude, mais sur le gisement et par conséquent sur l’âge géologique. Jusqu’à présent on n’avait trouvé dans les couches ’si anciennes aucune espèce de vertébré vivant encore de nos jours. Le même savant (2) a présenté et décrit un poisson fossile trouvé dans les grès bruxelliens (Pierre de grotte), Homo - rhynchus bruxelliensis. Il est voisin des Orphies et des Scombresox. M. Crépin (3) signale la présence d’un végétal, le Caulinites (1) T. 35, p. 354. — (2) T. 35, p. 201. - (3) T. 36, p. 170. - 58 — parisiensis , dans les sables lackéniens, légèrement supérieurs aux précédents. M. de Selys Longchamps (1) a publié de troisièmes addi¬ tions aux Synopsis des Gomphines et des Colopterygines. Plusieurs de ces insectes lui ont été rapportés par M. Ed. Yan Beneden ('2), du Brésil et de la Plata. Ce jeune savant a rendu un compte sommaire de son voyage qui nous promet - des résultats scientifiques très- intéressants. M. Félix Plateau (3) décrit et figure une Nyctéribie parasite des Chauve-Souris belges. M. Ern. Quetelet donne le tableau des déclinaisons et incli¬ naisons magnétiques à Bruxelles. La déclinaison, le 29 juillet, était de 17° 39' 22". Le 16 décembre, l’Académie a tenu sa séance publique. Le Président, M. Gluge , a lu un discours sur renseigne¬ ment de la biologie dans les écoles. L’enseignement public en Belgique est presque le même que celui qui régit la jeunesse française ; nous pouvons donc prendre pour nous les judicieuses observations du président de l’Académie des sciences de Belgique. « Je pense , avec plusieurs membres du Corps législatif , que les méthodes d’enseignement des langues anciennes sont vicieuses; elles enlèvent inutilement aux jeunes gens un temps précieux. Personne , excepté les philologues de profession, n’est appelé à écrire en grec ou en latin, ou à faire des vers et des discours dans ces langues : par contre , presque tous les élèves quittent l’école sans avoir appris à apprécier les beautés immortelles des poètes, des historiens et des philo¬ sophes de l’antiquité; et j'ai constaté souvent aux jurys d'examen , que deux années d’intervalle avaient suffi pour effacer toute trace du grec dans leur mémoire. Ils étaient de- (1) T. 35, p. 469. 492, *732, 36, p. 492 et 610. — (2) T. 35, p. T75. — (3) T. 36, p. 335. — 59 — venus incapables de traduire les expressions helléniques si nombreuses, introduites dans les livres de science. » M Gluge ajoute avec beaucoup de raison, que le public, et même la plupart des littérateurs et des écrivains qui se chargent de l’instruire, ont conservé sur les phénomènes scientifiques les idées du moyen-ûge; que les gouvernements et les administrations chargés de veiller à la santé publique sont souvent d’une ignorance complète des lois de l’hygiène. M. Gluge voit dans l’étude des sciences naturelles un autre avantage. L’harmonie qui existe entre tous les organes d’un être vivant doit, selon lui , inspirer à l’observateur le senti¬ ment des devoirs réciproques de tous les membres d’une même société. Nous doutons un peu de l’efficacité d’un pareil enseigne¬ ment ; mais nous pensons avec Cuvier que les sciences d'observation ont pour effet de soustraire l’homme à l’empire des préjugés et des passions, de le transformer en un témoin qui domine les faits de haut et dont le jugement est d’autant plus impartial qu’il est plus désintéressé. Il seraitbienà désirer que tous les hommes fussent assez imbus de cette méthode pour la transporter dans le domaine de l’histoire et de la politique 1 M. D’Omalius d’Halloy a fait une lecture sur le transfor¬ misme; il se déclare partisan de cette théorie et cherche à montrer qu’elle n’est pas contraire aux récits bibliques. M. Yan Beneden a exposé quelques faits de la vie sociale des animaux inférieurs , le commensalisme , le mutualisme , le parasitisme, etc. M. Folie a fait une lecture intitulée : Du commencement et de la fin du monde d'après la théorie mécanique de la chaleur. Il commence par expliquer à l’aide de quelques faits la trans¬ formation de la chaleur en travail et réciproquement celle du travail en chaleur. Il conclut, avec Mayer et Helmholtz, que l’énergie totale de l’univers, c’est-à-dire la somme des travaux — 60 — de toutes les forces physiques et des forces vives de tous les mouvements , tant des corps que des molécules , est cons¬ tante. C’est un principe qui semble très favorable à l’éternité de la matière. Mais il y a un second principe émis par Clau- sius, c’est que chaque transformation tend à accroître la chaleur et la disgrégation des corps aux dépens de la quan¬ tité de travail. D’autre part la chaleur tend à s’équilibrer et à se répartir d’une manière de plus en plus uniforme dans l’espace et la disgrégation des corps , c’est-à-dire la sépara¬ tion des molécules augmente chaque jour. Chaque jour nous rapproche du moment fatal où les molécules seront arrivés à une distance telle les unes des autres que toute transfor¬ mation deviendra impossible, le mouvement n’existera plus; le monde rentrera dans le chaos d’où il est sorti. (l Non-seulement le monde finira , mais il a commencé. En effet, s’il existait depuis toute éternité, il y a une éternité déjà qu’il aurait dù finir, puisque la tendance à l’anéantisse¬ ment de tout travail et à l’équilibre final de température agissant depuis toute éternité aurait dû se réaliser entière¬ ment depuis une éternité déjà.... On est en droit d’affirmer scientifiquement que l’univers, constitué sur les lois phy¬ siques que nous lui connaissons, et il est interdit à la science positive de lui en supposer d’autres , n’existe que depuis un temps limité, quelque long du reste qu'il puisse être. Et quelle cause l’a ainsi constitué dans le temps? Une cause inhérente à lui-même? mais cette cause aurait dû agir aussi bien de toute éternité. Celte cause ne peut être que le fait d’une volonté libre , et la création se trouve ainsi démontrée phy¬ siquement, j’allais dire mathématiquement.» Nous avons insisté sur la lecture de M. Folie pour montrer que les études scientifiques sérieuses sont absolument néces¬ saires aussi bien à ceux qui s’occupent de philosophie et de théologie qu’à ceux qui prétendent à gouverner l’opinion publique ou à administrer la société. — 61 Quatre Mémoires avaient été envoyés pour le concours; un seul a été jugé digne de récompense. Une médaille d’or de 1,000 fr. a été accordée à M. Mansion^ professeur à l’université de Gand , pour un Mémoire répon¬ dant à la question suivante : Résumer et simplifier la théorie de l’intégration des équations aux dérivées partielles des deux premiers ordres. Un concurrent avait présenté la description du système houiller du bassin de Liège ; son Mémoire avait un certain mérite; ses cartes surtout étaient faites avec grand soin. Mais, vu l’importance des lacunes, l’Académie a maintenu la ques¬ tion au concours , en se bornant à exprimer l’espoir que l’auteur pourra mériter l’année prochaine une médaille dor. Pourvu que ce Mémoire sur le système houiller n’aille pas rejoindre dans la catégorie des travaux inachevés le Mémoire sur les roches éruptives qui avait eu le môme sort au con¬ cours de 1872. Un troisième Mémoire avait été présenté sur les relations de la chaleur avec le développement des végétaux phanéro¬ games , particulièrement au point de vue des phénomènes périodiques de la végétation. Il n’a pas satisfait l’Académie; mais il a fourni à un des rapporteurs, M. Morren, l’occasion d’exposer ses vues sur la question. Enfin, la question sur le mode de reproduction des anguilles n’avait suscité qu’un Mémoire indigne de fixer l’attention. A cette occasion , M. de Selys-Lonchamps remarque que la question a fait des progrès sérieux en Italie par suite des recherches de MM. Ercolani, Mondini, Balsamo, Crivelli et La Maggi. Il semble en résulter que les anguilles sont her¬ maphrodites. La classe des sciences a élu cette année membre titulaire M. Malaise, professeur à l’université de Gembloqx, et membre correspondant M. Cornet, ingénieur du Levant du Flenu à Cuesmes. — 62 — BIOGRAPHIE M. QUETELET. La science belge vient de perdre M. Quetelet ; nous ne pouvons mieux nous associer à son deuil qu’en rappelant les mérites de l’illustre défunt à l'aide des discours prononcés sur sa tombe par MM. Mailly, de Kayser, Putzeys, etc. » Lambert- Adolphe- Jacques Quetelet est né à Gand, le 22 février 1796. > Dès l’année 1814, nous le trouvons professeur de mathé¬ matiques au college de sa ville natale. Au mois de juillet 1819, il est promu au grade de docteur en sciences de la nouvelle université fondée à Gand par le roi Guillaume : la dissertation qu’il publie à cette occasion, le fait appeler à l’Athénée royal de Bruxelles et lui ouvre les portes de l’Aca¬ démie des sciences et belles-lettres. 3) M. Quetelet savait inspirer l’amour de la science. Pen¬ dant les sept ou huit ans de son professorat à l’Athénée de Bruxelles, il forma plusieurs élèves, devenus plus tard des savants distingués et dont le plus éminent, M. Plateau, lui exprimait naguère sa reconnaissance dans une touchante dédicace (1). d M. Quetelet eut toujours du goût pour l’enseignement. Lorsqu’il eut quitté l’Athénée, il continua à donner son cours public d’astronomie, auquel il avait joint, depuis 1827, un cours de l’histoire des sciences (2). Plus tard, il professa longtemps l’astronomie et la géodésie à l’École militaire. (1) Voici cette dédicace, placée en tête de la Statique expérimen¬ tale et théorique des liquides soumis aux forces moléculaires : « Vous qui avez été l’un des actifs promoteurs de la régénération intel- » lectuelle de la Belgique, et dont les travaux ont tant contribué à » l’illustration de ce pays ; vous, qui avez guidé mes premiers pas » dans la carrière des sciences , et qui m’avez appris , par votre » exemple, à exciter chez les jeunes gens l’amour des recherches ; » vous enfin, qui n’avez cessé d’ètre pour moi un ami dévoué, per- » meltez-nioi de vous dédier cet ouvrage, en témoignage de reconnais- » sance et de constante affection. » (2) Ce cours se donnait au Musée des sciences et des lettres, fondé à Bruxelles à la fin de 1826 par le gouvernement des Pays-Bas. - 63 — » C’est en 1823 que M. Quetelet songea à réaliser une idée souvent émise dans l’ancienne Académie, celle de la fondation d’un Observatoire à Bruxelles. M. Falck, ce ministre à qui les lettres et les sciences ont tant d’obligations en Belgique, s’empressa de l’envoyer à Paris pour s’y exercer à la pra¬ tique des instruments et des calculs et recueillir les rensei¬ gnements nécessaires à l’établissement projeté. » M. Quetelet s’acquitta de sa mission avec l’ardeur d’un homme poursuivant un but qui lui est cher. Dès son retour, il envoya son rapport au gouvernement ; mais, malgré l’in¬ tervention officielle de l’Académie et les démarches person¬ nelles de son président, le prince de Grave, auprès du roi, l’arrêté ordonnant la création de l’Observatoire ne parut que le 8 juin 1826. » La persévérance, qui fut toujours l’une des grandes qualités de M. Quetelet, allait être mise à l'épreuve. Nommé directeur du nouvel établissement par un arrêté royal du 9 janvier 1828, il dut attendre encore quatre ans avant de pouvoir s’y installer. » De 1824 à 1832, nous le voyons fonder, avec M. Garnier, la Correspondance mathématique et physique , dont le cadre, d’abord restreint, ne tarda pas à s’élargir et qui est encore très-recherchée. » En 1833, il entreprend cette longue série d’observations relatives à la météorologie et à la physique du globe, qu’il a discutées dans une suite de mémoires particuliers et qui ont fondé la Climatologie et la Périodologie de la Belgique. » Membre de l’Académie des sciences et des lettres de Bruxelles depuis 1820, il a présidé la compagnie du 5 mai tl832 jusqu’au 22 novembre 1834, époque à laquelle il fut nommé secrétaire perpétuel. » Il eut une part prépondérante dans la réorganisation ■ qui, à la fin de 1845, compléta l’Académie par l’adjonction d’une classe des beaux-arts. Les statuts confèrent au secré- — 64 — taire perpétuel le droit de siéger dans chacune des trois classes [comme membre titulaire ; Quetelet aurait pu se passer de cette disposition ; il méritait à juste titre, par la variété de ses connaissances , un siège dans toutes les trois : si les sciences exactes avaient été l’étude principale de sa vie, les lettres étaient loin de lui être étrangères ; il s’était même essayé à la poésie et il avait conservé du commerce de la muse un style facile, élégant et toujours correct qui rehausse le mérite de ses écrits scientifiques; il a, d’ailleurs, produit de nombreux travaux qui rentrent dans la spécialité des sciences morales et politiques ; sa place était encore marquée dans la section des sciences et des lettres dans leurs rapports avec les beaux-arts. Ses minutieuses recher¬ ches sur les proportions du corps humain, ses propositions ayant pour objet l’élucidation de divers points de l’histoire artistique de la Belgique ont prouvé son aptitude dans cet ordre d’idées. » Pour rappeler les services que Quetelet a rendus à l’Académie, il faudrait refaire l’histoire complète de la com¬ pagnie, depuis le jour où il a pris les rênes de son gouver¬ nement ; il les a tenues d’une main ferme, s’identifiant avec l’institution au point que ni l’âge ni les infirmités n’ont jamais pu les lui faire abandonner un seul instant. On peut dire aujourd’hui qu’il est mort au champ d’honneur : il sié¬ geait encore à l’une des séances de ce mois. » En 1826 le gouvernement des Pays-Bas fit de la statis¬ tique une branche de l’administration. Quetelet y fut attaché pour le Brabant et, dès l’année suivante, il publiait le pre¬ mier travail de ce genre qui eût encore paru dans le pays. Profondément imbu des sciences mathématiques, il était l’ennemi-né de la statistique de fantaisie ; il n’admettait pour point de départ que des faits bien vérifiés et rien ne lui coûtait pour que ses déductions aboutissent à la plus grande somme possible de certitude. — 65 — * Sous l’impulsion d’un homme qui, déjà alors, était un vétéran de la science, la commission centrale de statistique aborda résolûment son œuvre et, un an à peine après sa création, elle se trouvait en mesure de tracer le plan général des travaux à accomplir. Grâce au dévouement de tous, ce cadre a été rempli, parfois même élargi. » Trois recensements généraux de la population ont été exécutés en 1846, 1856 et 1866, avec des garanties de cer- ' titude ignorées jusqu’alors. » La situation générale du royaume a été exposée en tous ses détails dans des publications renouvelées de dix ans en dix ans. » Toutes les parties du service public ont été l’objet de travaux statistiques qui ont suggéré des améliorations plus ou moins importantes. 3> Tous ces travaux ont été accomplis, non-seulement sous la présidence et l’impulsion de Quetelet, mais avec sa coopé¬ ration la plus active. j) Aux yeux de M. Quetelet comme à ceux de sir John Ilerschel, les documents statistiques étaient, pour la philoso¬ phie sociale et politique, ce que sont les données astrono¬ miques ou les registies de la météorologie pour une explica¬ tion raisonnée des mouvements des planètes ou de l’atmos¬ phère Il aurait voulu que le soin de les réunir et de les discuter fût confié à des hommes versés dans l’étude des mathématiques et surtout du calcul des probabilités. Leur usage ne devait pas, d’après lui, se borner à des objets de nature administra¬ tive ou législative : sa Physique sociale et son Anthropométrie ont montré qu’on pouvait en relever considérablement l’em¬ ploi. Il a été, pour me servir des expressions de l’Académie de Berlin, le créateur « d’une nouvelle science, dans laquelle 3> l’observation et le calcul s’allient pour faire ressortir les 3> immuables lois qui gouvernent les phénomènes en appa- — 66 — j) rence les plus accidentels de notre vie physique et jusqu’à » nos moindres actions. » » L’Observatoire, l’Académie et la Commission centrale de statistique ont été les institutions dans lesquelles l’activité de M. Quetelet s’est exercée avec les plus heureux fruits. Lorsque, déjà affaibli par l’âge et par une perte sensible de la mémoire, il cessa de participer utilement à leurs travaux, le souvenir des services rendus contribua à maintenir le prestige attaché à son nom et l’autorité dont il jouissait. » A l’étranger, sa réputation n’avait fait que grandir. Dans sa séance du 18 mai 1872, l’Académie des sciences morales et politiques de l’Institut de France, qui, depuis de longues années, le comptait au nombre de ses correspondants, lui avait décerné la plus grande distinction dont elle dispose, en le nommant à une place d’associé. Quelques mois après, des honneurs presque princiers lui étaient rendus au Congrès international de statistique de Saint-Pétersbourg. Il était membre de la Société royale de Londres, de la Société astronomique de la même ville, de l’Académie des sciences de Berlin, de l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg et de bien d’autres sociétés savantes (1). 3> CHRONIQUE. 1874. Météorologie. Janvier. — Février. Température atmosphér. moyenne. 4° 89 3 PUragniataecia arundinis. - Le Phragnalaecia (Zeuzera) arundinis est 1 une des plus grandes raretés de la faune lépidoptérologique française. La patrie de cette espèce paraît être surtout l’Allemagne du Nord. En France, elle a été signalée seulement aux environs d'Amiens, où Duponchel assure qu’elle a été trouvée en 1835 par 1\I. Janvier. Il me paraît donc intéressant d’indiquer ici quelques captures ré¬ centes de ce papillon si recherché par les amateurs. M. Havez, déjà connu des lecteurs du Bulletin par ses belles trouvailles botaniques, a rencontré en 1872 un couple de Z. arundinis dans les marais de Wandignies, au lieu dit les Hu- dions, près de Marchiennes-Campagne. Le mâle put s’envoler; la femelle est actuellement dans la collection de M. Foucart’ Douai. M. Deligny a aussi trouvé un couple de Zeuzera dans les marais de l’Escarpelle, au dessus du fort de Scarpe; ces deux individus font partie de la collection de M Deligny, à Douai. Enfin, M. Gronier, de Saint-Quentin, a pris également plu¬ sieurs couples de Phagmataecia dans les marais des environs de Saint-Quentin. On voit d’après ce qui précède que le Zeuzera du roseau habite principalement les marais tourbeux où croissent les plantes du genre Typha à l’intérieur desquelles il doit vivre à l’état de larve. Une circonstance tics remarquable est que toujours les individus capturés ont été pris à l’état d’accouplement, ce qui porterait à supposer que ce lépidoptère n’est peut-être pas aussi rare qu’on le croit et qu’on l’a mal cherché jusqu’à présent. Peut-être aussi un même roseau nourrit-il deux larves devant donner naissance à deux papillons de sexes différents. De pareils faits ne sont pas rares chez les Crus¬ tacés parasites; mais, pour les insectes, nous ne pouvons émettre une pareille supposition qu’avec la plus grande ré¬ serve et en appelant l’attention des entomologistes sur cette curieuse particularité. " A. Giard. — 72 ivinscc d’Arras. — Le musée d’Arras vient de recevoir deux momies péruviennes accompagnées d’un nombre con¬ sidérable d’objets trouvés dans les tombeaux des environs de la ville de Cuzco. Ces tombeaux représentent l’antique civilisation du Pérou, antérieure aux Incas, celle qui a produit les merveilleux édi¬ fices de la ville de Cuzco. Les objets trouvés dans ces tombeaux sont des toiles unies, écrues ou teintes, des toiles peintes, des étoffes tissées de diverses couleurs, et même de vrais ouvrages de tapisserie, des ornements en plumes brillantes, des ceintures, des bau¬ driers en grains agencés avec art. quelques armes, des ins¬ truments de toute espèce. Les momies appartiennent à la classe si curieuse des corps ensevelis dans la position accroupie, les membres repliés sur eux-mémes. Le musée d’Arras est redevable de ce riche présent à M. Fernand de Briois d’Angre. lieutenant de cavalerie, quia formé lui-même cette collection, au Pérou, en 1871. Société géologtqsie do France. — Pendant les va¬ cances, les solennités scientifiques vont se succéder dans notre région. Après la session de l’Association française, viendra fa réunion de la Société géologique de France." Elle se tiendra à la fin d’août à Monset à Avesnes; les Montois lui préparent une réception splendide ; les habitants d’Avesnes ne resteront pas en retard et montreront l’estime qu’ils ont pour la science par l’accueil empressé qu’ils feront à l’une des principales sociétés scientifiques de France. Congrès inicriiRtiiosmS d’auïlaropogogie et d’ar¬ chéologie préhistoriques. — Ce congrès, qui tint sa dernière séance à Bruxelles en 1872, doit se réunir à Stockolm en 1871, le vendredi 7 août. C’est une excellente occasion pour nos compatriotes qui veulent visiter les pays Scandinaves. Beaucoup qui reculent devant le voyage, vou¬ dront néanmoins faire partie du congrès pour avoir le volume publié par le congrès. Pour en être membre, il suffit d’ac¬ quitter une cotisation de 12 fr. On peut s’adresser à M. Gabriel de Mortellet, conservateur- adjoint au musée de St - Germain - en-Laye, ou à M. Gosselet, professeur à la Faculté de Lille, membre correspondant du congrès. Lille, imp. Six-Horemans. 74-663. 6* Année. — IN» 4. — Avril 1874. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. (Suite). Terrain crétacé . Caractères minéralogiques. — Les principales roches du terrain crétacé sont la craie, la marne, l’argile, le sable ; parmi les substances minérales accessoires, on doit citer le silex, la glauconie, le phosphate de chaux, la limonite et la pyrite. La Craie est du carbonate de chaux pulvérulent, terreux, laissant sous les doigts une poussière blanche. Elle est formée en partie de petites coquilles microscopiques d’infusoirs, en partie de petits globules dus à la précipitation du carbonate de chaux tenu en dissolution dans l’eau de mer. La craie est souvent marneuse, c’est-à-dire qu’elle con¬ tient de l’argile, et elle passe ainsi à la Marne, qui est un mélange de carbonate de chaux et d’argile. La Mariette que l’on pétrit avec le charbon pour le lier et en faire des bri¬ quettes destinées aux foyers domestiques, contient de 26 à 36 % d’argile. Les mineurs désignent sous le nom de Diètes des marnes très-argileuses qui renferment 66 % d’argile (1). Le terrain crétacé contient de l’argile très-pure qui est employée pour faire de la poterie ; telle est celle d Hautrage, de Baudour, de Sars-Poteries, de Ferrières, etc. On y rencontre aussi des sables de toute couleur et de toute grosseur ; mais les grès y sont rares ; il en est de même des poudingues. Toutefois, les premières couches crétacé; s qui reposent directement sur les terrains primaires renfer¬ ment fréquemment des cailloux roulés. Le Silex est disséminé dans la craie à l’état de nodules que leur forme irrégulière a fait désigner sous le nom de Cornus . (1) Savoye. Analyse comparative des calcaires du département du Nord. — 74 — Aux environs de Mons, le silex constitue des masses consi¬ dérables exploitées pour l’entretien des routes. Il y avait là des sources siliceuses analogues aux geysers de l’Islande. C’était probablement aussi l'origine première des silex de la craie. La silice mélangée à l’état gélatineux aux sédiments crayeux, s’est coucrétée, réunie en masses en vertu d’une % sorte d’affinité de soi pour soi que M. Kulhmann a désignée sous le nom de force cristallogénique. Fréquemment la ma¬ tière siliceuse a pris comme centre d’attraction un fossile ; c’est pourquoi on voit tant d’oursins en silex Le Phosphate de chaux se trouve également en nodules soit dans la craie , soit dans les sables. Ce sont aussi de sources minérales qui ont amené le phosphate de chaux à l’état de dissolution dans l’acide carbonique, et très-fré¬ quemment, comme pour le silex, la matière minérale s’est concrétée autour de certains fossiles. Mais on a eu bien tort de donner aux nodules phosphatés des Ardennes et du Bou¬ lonnais le nom de coprolites. Si c’était réellement des excré¬ ments fossiles, on ne pourrait expliquer leur accumulation en si grande quantité et sur une si grande étendue. La Limonite ou sesquioxide de fer hydraté se rencontre abondamment à la base du terrain crétacé de notre région. Tantôt on la trouve en grosses concrétions dans les sables, tantôt elle est en grains oolitiques, soit qu’elle forme des couches continues, soit qu’elle se présente disséminée dans le calcaire ou dans la marne. Aux environs de Bavai il y a un calcaire ferrugineux connu sous le nom de Sarrazin. La limonite provient sans aucun doute de sources ferrugineuses. La Glauconie est un silicate hydraté de fer et de potasse dont la teneur en alcali varie de 5 à 15 °/0. Elle se présente en grains verts colorant beaucoup de rocnes du terrain crétacé. Il y en a jusqu’à 55 % dans les marnes de Noyelles, près Maroilles. La glauconie est un précieux amendement beaucoup trop négligé. Son origine dans la nature reste encore à déter- — 75 — miner. Mais on peut constater que très- souvent elle a rempli l’intérieur de petites coquilles microscopiques. La Pyrite du terrain crétacé est la Marcassite ou pyrite orthorhombique. On la trouve communément dans la craie à l’état de boule à structure radiée hérissée de pointes octaé¬ driques, parfois tronquées par la base du prisme. La mar¬ cassite s’altcre fréquemment à l’air en se transformant en limonite. Cette altération peut aussi se produire dans l’inté¬ rieur de la craie sous l’influence de l’eau aérée, telle que l’eau de pluie. Les sulfates qui se forment dans ces circons¬ tances, mis en présence de matières organiques, dégagent de l’acide sulfhydrique. C’est là l’origine probable des eaux sul¬ fureuses que l’on rencontre parfois dans la craie ; elles se produisent surtout lorsque des eaux sulfatées se trouvent en contact avec un tuyau de sondage en bois. » On rencontre dans le terrain crétacé quelques couches d’argile ligniteuse imprégnée de Marcassite. Elles sont em¬ ployées sous le nom de Cendres pour l’amendement des terres. RÉVISION DE LA COLLECTION CONCHYLIOLOG1QUE D’HÉCART. Il est extrêmement regrettable pour les conchyliologistes du Nord de la France que M. Normand soit mort avant la publication de son Catalogue raisonné des Mollusques de notre département. Nous avons fait, M. Giard et moi, de vains efforts pour décider la veuve de ce savant à laisser publier ce résultat de toute une vie d’observations, et nous avons eu le regret de voir sortir de France une collection qui présentait un intérêt exceptionnel pour notre pays. Le Musée de Valen¬ ciennes eut acquis, au point de vue malacologique, une double importance, si nous avions pu joindre les types de Normand à ceux recueillis et nommés par Hécart. Ayant entrepris la révision de ces derniers, j’y ai découvert de — 76 — nombreuses erreurs de détermination. De longues recherches personnelles et l’examen comparatif du catalogue d’Hécart, de celui de MM. Potiez et Michaud et d’autres ouvrages des¬ criptifs, m’ont permis de rectifier ces erreurs. J’ai aussi mis à profit les renseignements que m’ont fournis de nombreuses conversations avec M. Normand, l’élève d’Hécart , et grâce à l’obligeance de M. J. De Guerne , j’ai pu connaître plusieurs types importants décrits par ce naturaliste. Enfin , M Ortlieb a bien voulu me communiquer une liste écrite de la main de Normand et qu’on peut considérer comme un résumé du grand ouvmge que préparait notre regretté concitoyen. Il convient d’exclure de la Faune du Nord de la France : 1° Vitrina elongata ; Hélix strigrlla et cespitum ; Vertigo plicata var. nam ; Planorbis spirorbis ; Unio margarihfer , sinualus et littoralis ( espèces inscrites dans le catalogue d’Hécart); ’ J 2° Bythinia similis et Anodonta Avonensis (espèces indi¬ quées par MM. Potiez et Michaud) ; 3° Clausilia perversa. Sous le nom de V. scmilimax (1) (elongata), je n’ai trouvé dans la collection d’Hécart que de jeunes Physa fontinalis. Son Hélix slrigella était 17/. Cantiana. L’Helix ericetorum avec bandes ou sans bandes , formait ses H. ericetorum et cespitum Son Vertigo plicata var. nam , était le V. pusilla ! Ses exemplaires de Planorbis spirorbis étaient de jeunes • P. Vortex. Hécart n’a bien connu aucune espèce du genre Unio ; de P Unio balavus il a fait ses Unio balavus , littoralis et sinuatus. Les exemplaires d ’Lmo LltoraUs , de sa collection de quatre provenances sur cinq, étaient des U. batavus. J’ai vu dans la même collection des exemplaires étiquetés (1) J’ai adopté dans ce travail les synonymes modernes en les faisant suivre des noms donnés par Hécart, placés entre parenthèses. — 77 — Unio batavus ou sinuatus, d’où il suit que c’est bien encore le batavus qu’Hécart a eu en vue en indiquant dans l’Escaut Y Unio sinuatus. De Y Unio piclorum il a fait ses Unio margaritifer ( elongatus ) et Prostratus. — Les exemplaires de sa collection sont éti¬ quetés : Unio elongata ou rostrata. De Y Unio tumidus il a fait ses Unio pictorum , tumidus (in fia ta) et ovalis. Son Unio ovalis n’était donc pas Y Unio ovalis Mont, var. D. de Y Unio batavus pour Moquin-Tandon. Les individus de sa collection sont de jeunes U. tumidus. Le Bythinia similis , de la même collection, est le B. Leachii. Le B. similis de MM. Potiez et Michaud comprend deux espèces : B. similis et B. Leachii . Ces auteurs, qui ne connaissaient pas alors les caractères fournis par les stries de l’opercule des deux espèces, signa¬ laient déjà cependant une différence entre les exemplaires de Cette (Hérault) et ceux qu’ils possédaient d’autres prove¬ nances. Le B similis Drap, n’existait pour eux qu’à Cette (Hérault). La description comparative qu’ils en font avec les exemplaires du Nord de la France, etc., ne peut laisser aucun doute à cet égard. Ces derniers appartiennent, à n’en pas douter, au B. Leachii. Le B. similis est donc aussi une espèce à exclure et que Moquin-Tandon a signalée à tort dans le Nord de la France, d’après Potiez et Michaud. UAnodonta du Honneau à Angres, doit être la même que celle indiquée par M. Normand dans le Honneau près Bavai, sous le nom d’A. Scaldiana. — Elle existait dans la collection * d’Hécart sous le nom d’A. Avonensis (ponderosa). — Il faut probablement rapporter au même type 1 espèce signalée sous le nom de ponderosa à Herbignies près Le Quesnoy, par — 78 — MM Potiez et Michaud. — Je tiens de M. Normand lui-même que Y A. ponderosa n’existe pas dans nos environs. La réunion de VA. anatina d’Hécart avec la variété scal~ diana de Y A. anatina , réunion opérée par Moquin-Tandon, ne peut se soutenir. Il en résulte que le nom de scaldiana se trouve donné par Dupuy et Moquin à une espèce qui n’existe pas dans l’Escaut. Ce nom devrait donc être rejeté. La Clausilia perversa ( rugosa , Drap.) n’est pas plus la C. rugosa d’Hécart que celle de MM. Potiez et Michaud. Leur C. rugosa est la C. nigricans. M. De Norguet a rapporté la C. dubia (Potiez et Michaud et Hécart, collection) au C. nigricans ; or la C. dubia de ces auteurs est la C Rolphii. La description que MM. Potiez et Michaud donnent de leur i C. dubia et les exemplaires de la collection d’Hécart au Musée de Valenciennes, ne peuvent laisser aucun doute à ce sujet. La Clausilia parvula de la même collection appartient à une petite forme de C. nigricans , fort répandue dans les bois. La C. minima d’Hécart, pour laquelle il n’indiquait pas de provenance, est la C. parvula des auteurs modernes. Sous le nom d 'Hélix aculeata , je n’ai trouvé que de jeunes Pupa doliolum , et sous celui d 'Hélix pygmaea , que de jeunes Zoniles fulvus . Les exemplaires du Cyclas lacustris , de la collection d’Hé¬ cart, de trois provenances différentes, n'étaient que des CycL cornea. U Hélix Althœnana Potiez et Michaud non Gaertn, appar¬ tient à Y Hélix rufescens et non à l’Jï. strigella ; il en est de même des exemplaires de la collection de notre Musée. L’admission par M De Norguet du V. pellucida d'Hécart, à titre de synonyme du V. major , est tout-à-fait imaginaire. La plus grande partie des exemplaires de la collection, et ils sont nombreux, appartiennent bien au F. pellucida Mull. ; 4 — 79 — quelques-uns, il est vrai, sont des V. major, mais c’est le petit nombre. Reste maintenant à signaler les espèces dont l’indigénat n’est pas tout-à-fait certain. — Il est possible, je dirai même probable, que si Ton avait à sa disposition les échantillons qui ont servi à les signaler dans notre région. Ton arriverait également à exclure la plupart des espèces suivantes : Arion albus , — Limax g agates, — Hélix fusca , — H. plebeia , — Bylhinia gibba , — Valvata minuta. A part Arion albus et Limax gagates , à l’égard desquels l’opinion de M. Normand me manque tout-à-fait, cet ama¬ teur qui est celui qui s’est occupé le plus sérieusement des Mollusques du Nord de la France, n’y signale aucune des espèces précédentes. Il n’y signale pas davantage Hélix concinna , lineata . Pnpa cylindracea < t Physa acuta> admis par M. De Norguet parmi les espèces de nos contrées. M. De Norguet ne signale, du reste, pas de captures dans le département du Nord des Hélix fusca et Valvata minuta. Moquin- Tandon soupçonne le V. minuta d’être un jeune de V. crislata; j’ai récolté de tout jeunes V. cristala et ils ne peuvent en rien se rapporter à la description qu’il donne de son V. minuta. — Si ce V. minuta n’est pas une espèce dis¬ tincte, ce ne peut être qu’un tout jeune V. piscinalis. M. Normand, qui avait plutôt l’habitude de diviser que de réunir, ne mentionne pas 1 "Hélix lineata dans la liste des coquilles du Nord de la France qu’il a adressées à M. Ortlieb. S’il avait compris V Hélix lineata parmi nos espèces du Nord, il n’aurait pas manqué de l’envoyer à cet amateur. Quant au Succinea arenaria Bouch., d’après la liste ou plutôt le cata¬ logue dont je viens de parler, écrit de la main de M. Normand et que M. Ortlieb a eu l’extrême obligeance de me communi¬ quer, j’ai tout lieu de croire que M. Normand ne le regardait que comme une variété du Succinea oblonga. — 80 — A part le Zoniles nitidulus (1), je n’ai pu parvenir à ren¬ contrer aucune des espèces que M. Normand n’a pas admises parmi celles de nos régions dans le catalogue qu’il a envoyé à M. Orllieb, et MM. Giard et J. De Guerne n’ont pu me donner l’assurance d’avoir rencontré aucune des espèces que je signale comme douteuses. La conclusion à tirer de ces observations, est que la liste manuscrite de M. Normand est le catalogue complet de notre faune conchyliologique. Après les exclusions, la place est naturellement aux addi¬ tions qui doivent être faites au catalogue de M. De Norguet. Ont été trouvées en plus les espèces suivantes : 1° Hélix sylvatica. — Bois d’Eth (Normand) ; 2° Vertigo muscorum. — Valenciennes (Normand) ; 3° Dreissena cucullata.— Étang de Bergues (J De Guerne). J’aurais aussi à faire quelques observations par rapport aux Pisidium , mais je ne puis me prononcer en parfaite connaissance de cause sur ce sujet difficile après une seule année de chasses sérieuses. Toutefois je dois dire, à propos du Pisidium Gratelou- pianum Norm., que sa réunion au P. amnicum proposée par Moquin-Tandon, n’est pas fondée. Ce n'est pas le moins du monde un jeune de P. ammicum , je l’ai récolté depuis le plus jeune âge jusqu’à l’état tout-à- fait adulte ; il acquiert, à son plus grand développement, la taille de tout jeunes P. amnicum. — Cette dernière espèce devient quarante à cinquante fois plus grande pour le moins. En faisant des réunions de ce genre Ton pourrait aller loin et singulièrement réduire le nombre des espèces véritables. Un caractère très-net et qni permettra toujours de distin¬ guer le P. Grateloupianum adulte des jeunes du P. amnicum , (1) Peul-êlre cette espèce est-elle celle désignée par Normand sous le nom de Z. nitens. — 81 — c’est le gonflement des sommets et partant l’épaisseur ou plutôt la largeur de la coquille. Les jeunes de Pisidium et Cyclas sont toujours plus ou moins aplatis, et ce n’est qu’à l’état adulte qu’ils présentent le gonflement propre aux adultes. A. Lelièvre, de la Commission du Musée de Valenciennes. PUITS DE MACOU PRÈS VIEUX CONDÉ (Voir la page ci-contre) Observations 1° La faune de la zone F à Terebratulina gracilis est remarquable; d’abord elle contient des Gastéropodes, ani¬ maux très-rares dans la craie du Nord. Je n’avais encore trouvé ces Turritelles qu’à Bouvines, de sorte quelles sem¬ blent caractéristiques de ce niveau. On n’avait observé jus¬ qu’ici le Klytia Leachii et le Pecten Dnjardini qu’à la base de la craie à Micraster cortestudinarium , ils ont donc fait leur apparition plus tôt ; 2° Tous les fossiles que j’ai trouvés dans les Dièves appar¬ tiennent, on le voit, à ce que l’on appelle généralement la craie glauconieuse Je n’en ai trouvé aucun de la craie à Inoceramns labiatus. Je ne puis, néanmoins, regarder comme démontré que la mer à cette époque n’existait pas près de Condé, pour la seule raison que les quelques mètres carrés seuls connus n’ont fourni que des caractères négatifs. L’élude de sondages précédents avait montré à M. Gosselet que la craie glauconieuse était peu développée à Guesnain et 5 Carvin, et à M. Ortlieb qu’elle manquait à Croix, où la craie marneuse à Inoceramns labiatus reposerait sur le Tourtia. Je crois que la craie glauconieuse cénomanienne existe à Croix comme à Carvin ; la craie à Inoceramns labiatus existe à Macou ; si on n’a pas trouvé les fossiles caractéristiques de PKOFON-i — 82 Terrains traversés par la fosse de Macou près Condé U2 P DÉSIGNATION DE LA COUCIJ E t n (A 1 » fri Sri W FOSSILES ÉQUIVALENCE m. 7.00 16.40 22.20 A. Limon ...-•••• B. Sable argileux très-fin . . . C. Craie blanche, nombreux silex. D. Marne sableuse gris-clair . . E. Silex altérés gris ou brunâtres. F. Craie sableuse gris-bleu avec concrétions siliceuses (Bleus). m. 2.15 4.85 9.40 0.60 5.20 29.10 51.30 59.00 60.55 62.50 64.20 64.50 G. Argile grise ou bleue se déli ' tant à l'air en minces feuillets schistoïdes ....•• H. Sable grossier noirâtre avec petits galets ...••• I. Poudingue à galets quarzeux à pâle calcaire, coloré par des infiltrations ferrugineuses et de la glauconie . ' Lit de gros galets isolés . . Poudingue comme plus haut /. Grès gris ou vert pâle, dur, ca carifère contenant de la silice gélatineuse . _ Argile verte très-glauconifère Nombreux galets . . K. Argile noire sableuse , que ques galets . . . . . L. Schistes houillers . . . . Terebratula semiglobosa. Inoceranius involutus. 7.70 1.55 1.55 0.20 0.20 0.40 1.30 0.39 Inoceramus Brongniaiti. Spondylus spinosus. Odontaspis sp. Osmeroïdes Lewesiensi( Ag). Klytia Leachii (Reuss) Turritella sexlineata (Rœm). » alternans (Rœm), » nodosa (Rœm). Spondylus spinosus (Gold). Spondylus sp. _ Pecîen Dujardini (Rœm). Ostrea lateratis (Nillssh Ostrea hippopodium (d’Orb). Terebralulina gracilis (Schl). » striata (d'Orb). Frondicularia scutiformis. Beryx. Corax pristodontus (Reuss). Ammonites falcatus (Manl). » Mantelli (Sow). » varians (Sow ). Raculites baculoïdes (d’Orb). Toxoceras gracilis d’Oib). Ostrea vesicularis (Lamk). » lateralis (Nillss). » hippopodium (d’Orb). Inoceramus striatus (Mant.). Spondylus hys>rix (Gold.). Plicatula nodosa Duj.). Terebratula lima (Defr). Aptychus. Serpula. Ostrea conica (d'Orb). » carinata (Lamk). » lateralis (Nillss). Pecten membranaceus (Nillss). » opercularis (Sowl. » Galliennei (d’Orb). Rudiste (fragment très-mau¬ vais). Janira quinquecostata (d’Orb). Rhynchonelia compressa Janira quadricostata (d’Orb). Trigonia. Ostrea hippopodium (d’Orb). Cidaris. Pas de fossiles. Concrétions rappelant les scotites silu¬ riens de Bretagne. Tufeau landénien. Craie àmicraster breviporus. Gris des mineurs. Rabot de Mons. Fortes toises. Nombreux calamites. Dièves. Tourtia de Mons. Tourtia de Mon- tigny sur Roc. L’as¬ pect est identique. Meule. Gault. 83 — ces couches, cela tient à ce que les sondages sont tombés sur des points relativement pauvres, inhabités, de ces fonds de mer, à ce qu’en un mot on n’a pas rencontré de gîtes ; ou bien, cela tient peut-être à ce que dans tout le centre de ce golfe crétacé des Flandres, où les sédiments (Diêves n’ont subi aucun changement du Cénomanien au Turonien , la Faune ne s’est pas modifiée autant que dans d’autres régions mieux connues, où les sédiments formés pendant ces deux époques différaient, et que par suite les deux Faunes sont moins tranchées; 3° La présence d'un Rudiste au niveau H est intéressante, malheureusement il m’est impossible de le déterminer ; je n’ai trouvé qu’un fragment de test, et je n’ai pu reconnaître sa nature que par des coupes microscopiques. Cette zone, dont la suivante n’est sans doute qu’un faciès littoral, est continue dans tout le N -E. du bassin de Paris ; c’est le niveau à Picten asper , qui a été reconnu dans le Boulonnais, aux environs d'Avesnes, dans l’Argonne ; elle correspond à une partie de l’ Upper green sand d’Angleterre, le reste de cette division devant être rapporté à la gaize. comme m’en ont persuadé mes coupes dans File de Wight, et depuis une étude comparée des fossiles que j’y ai trouvés. Ch. Barrois. • BIBLIOGRAPHIE NOTICE SUR LES MONUMENTS ÉPIGRAPHIQUES DE BAVAI ET DU MUSÉE DE DOUAI, PAR M. ERNEST DESJARDINS. (Suite). La seconde catégorie des documents épigraphiques qui ont rapport à la cité des Nerviens , comprend tous ceux dont l’attribution à cette cité ne peut-être établie d une manière incontestable, mais qui cependant sont intimement liés à l’histoire du peuple nervien, par leur découverte sur un point quelconque de son territoire. — 84 — M. Desjardins examine en premier lieu les cachets d’ocu¬ listes, c’est-à-dire le sceau qui servait à marquer les produits de telle ou telle fabrique et à les distinguer entre eux. Ces cachets, ordinairement plats et de forme quadrangubire , portaient sur la tranche le nom de l’oculiste, le nom du médicament et celui de l’affection ophthalmique qu’il était propre à guérir. Une estampille gravée en creux et au rebours, (c’est le cas des cachets d’oculistes), suppose une pâte molle, sur laquelle elle était imprimée ; on peut donc conclure que la plupart des remèdes employés consistaient en pommades et onguents qu’on appliquait à l’état mou, ou en pâtes solides, solubles dans certaines préparations qu’on employait pour frictions. 4 Les oculistes romains n’ont pas conservé une bonne répu¬ tation auprès des praticiens de notre époque, et pourtant il paraît certain que, s’il y avait alors des charlatans qui spéculaient honteusement sur la crédulité publique, il y avait aussi, comme de nos jours, des praticiens sérieux. Le plomb , le cuivre, le fer , entraient dans la composition des remèdes préconisés par les oculistes de l’antiquité, et l’analyse chimique de substances pharmaceutiques découvertes à Reims avec la trousse d’un oculiste romain a prouvé que, malgré l'altération apportée par le temps à ces médicaments, on y retrouve cependant les éléments essentiels des remèdes employés par l’oculistique moderne. Le nombre des cachets d’oculistes actuellement connus est * de 130; huit ont été découverts dans la cité des Ner viens, ce qui donnerait à supposer que les affections ophthalmiques étaient fréquentes dans le pays que nous habitons. L’examen de ces huit cachets , et de deux autres trouvés , l’un à Térouanne , le second dans l’Oise, fournit à Monsieur Desjardins l’occasion de rectifier toutes les lectures vicieuses qui avaient été faites des légendes gravées sur leurs tranches, — 85 — et d’entrer dans des détails pleins d’intérêt sur les oculistes de l’antiquité et sur les remèdes qu’ils employaient. Si les cachets d’oculistes sont de précieux auxiliaires pour l’histoire de la médecine chez les anciens, les noms des potiers imprimés sur les objets sortis de leur fabrique, présentent un très-grand intérêt au point de vue philologique, en particulier pour les études celtiques, un grand nombre de ces noms propres appartenant à la langue gauloise. La liste donnée par M Desjardins, des marques.de potiers trouvées à Bavai, est évidemment la plus complote qui ait encore été publiée ; elle se compose de 517 noms, nombre considérable, si l’on songe que beaucoup de ces débris dépourvus de valeur commerciale, ont été perdus pour la science , par suite de l’indifférence de ceux qui les ont trouvés Ce qui ajoute à l’intérêt de cette liste , c’est la reproduction fidèle qui est donnée de ces empreintes, d’après les originaux conservés aujourd’hui dans diverses collections publiques ou privées. L’intérêt philologique n’est pas le seul qui s’attache aux débris de vases portant des marques de potiers ; leur prove¬ nance bien constatée permettra plus tard de les rattacher d’une manière certaine à un centre de fabrication déterminé, ce qui fournira d’utiles indications sur l’industi ie des différents peuples et sur les routes suivies par le commerce. Il n’est pas téméraire d’affirmer dès maintenant que, parmi les 517 marques de potiers trouvées à Bavai, beaucoup appartiennent à la fabrication du pays. Un dessin conservé par le curé Carlier donne une inscrip¬ tion tracée à la main sur des ruines d’hypocauste, aujourd’hui perdues, qu’il avait recueillies à Bavai. L’endroit précis où ces ruines ont été trouvées n’est pas indiqué, nous sommes cependant assez tenté de croire qu’elles proviennent des ruines absolument semblables qui existent, encore près de l’église, et dont le prolongement devait se trouver sous la rue - 86 — et probablement sous l'église elle même. Quant à l’inscription on ne saurait y attacher une grande importance, elle peut avoir éié mal lue ou transcrite inexactement. Nous en dirons autant des inscriptions gravées sur deux bagues-clés, elles sont probablement, incomplètes ou mal lues. La même remarque ne saurait s’appliquer à un petit objet gravé dans l'album Niveleau-Meurs, et' portant la devise : dnlcis vivas. M Desjardins a deviné juste en supposant qu’il s’agissait d’un objet en métal ; c’est évidemment une petite fibule en cuivre, et nous pouvons l’affirmer avec d’autant plus de certitude que nous en possédons une exactement semblable avec devise gravée au pointillé. Après avoir si parfaitement décrit les documents épigra¬ phiques concernant la cité des Nerviens, et avoir montré toute leur importance au point de vue historique et archéo¬ logique, M Desjardins jette un coup d’œil sur la localité qui les a fournis, et il en profite pour ajouter un nouveau et précieux renseignement à ceux qui nous sont donnés par les anciens itinéraires, sur les voies qui rayonnaient autour de Bavai. * L’itinéraire d’Antonin en signale quatre, celles de Boulogne, de Reims, de Cassel, de Cologne; tous les éditeurs de la Table de Peutinger avaient pensé que cette carte ne signalait également que quatre voies correspondant aux voies indi¬ quées par l’itinéraire d Antonin. Or, M. Desjardins a récem¬ ment découvert sur la Table de Peutinger une cinquième route dont la distance est inscrite, mais dont le tracé n’avait pu l’être parce qu’il se serait confondu avec la voie de Bavai à Cambrai Cette route , indiquée par les chiffres XXL, est celle de Bavai à Vermand, déjà connue comme route romaine, mais qui paraissait avoir été omise sur les itinéraires anti¬ ques. Et maintenant, ce chef lieu de la cité des Nerviens, Bavai, d’où rayonnait toutes ces routes, qu’est-il devenu après sa — 87 — destruction au Ve siècle? A-t-il disparu si complètement qu’il faille descendre jusqu’au XII* siècle pour avoir un témoignage de sa résurrection? Il serait difficile de l’affirmer. Peut être avons-nous la trace de son existence, au IXe siècle, dans une monnaie de Charles-fe-Chauve, mais son attribu¬ tion à Bavai est contestée. Quoiqu’il en soit d’ailleurs de cette monnaie, fut-elle de Bavai, ce ne serait encore que le témoignage d’une bien modeste résurrection pour cette ville autrefois la première du peuple qui, sur les bords de la Sambre, avait mis en péril la fortune de César. Les savants travaux de M. Ernest Desjardins concernant la Table de Peulinger et la Géographie de la Gaule , sont trop connus pour que nous nous permettions d’insister sur l’im¬ portance du Mémoire que nous venons d’analyser; et avant de terminer, nous exprimerons un regret c’est de n’avoir pu faire de cette remarquable étude qu’un trop court compte- ren(^u* ' H. Rigaux. SOCIÉTÉS SAVANTES RÉUNION DES DÉLÉGUÉS DES SOCIÉTÉS SAVANTES A LA SORBONNE. Parmi les lectures faites à ces réunions nous remarquons les suivantes qui sont faites par des personnes du pays. Une congrégation générale des cardinaux en 1595, par M. Abel Desjardins, doyen de la faculté d*s lettres, membre de la Société d’agriculture, sciences et arts, de Douai. — La négociation la plus longue, la plus délicate et peut-être la plus importante de tout le règne de Henri IV, est celle qui eut pour objet l’absolution du roi par 1 • pape Clément VIH et pour résultat sa réconciliation avec l’Église. Pour bien juger les incidents et les périties de ce grand débat, ce n’est pas en France qu’il faut se placer, c’est à Rome, où se trouve constitué le tribunal souverain qui do.t prononcer l’arrêt définitif. 88 — Si l’on tient compte des énormes difficultés qu’avait à surmonter Clément VIII, on comprend ses longues hésitations et l’on doit les lui pardonner. M. Abel Desjardins a tiré les nombreux et intéressants détails qu’il a communiqués à la réunion de la correspondance du cardinal Del Monte avec le grand-duc de Toscane et des dépêches adressées à son ambassadeur Giovanni Niccolini. Étude sur les origines de la pêche maritime 932-1550, d’après les chartes, comptes de deniers et autres documents officiels, par M. Deseille, de la Société académique de l’arrondissement de Boulogne-sur-Mer. — L’auteur nous fait assister d’abord aux diverses transformations qui font passer les premières familles habitants les bords de la mer de 1 état de piraterie à une condition plus fixe et plus sédentaire. Il esquisse rapide¬ ment le tableau du genre de vie et des habitudes des matelots, et s’occupant spécialement de ceux qui exercent leur péril¬ leuse industrie aux environs de Boulogne, les suit à travers les siècles depuis les premières années dumoyen-âge jusqu’à nos jours. Leur s femmes jouent un grand rôle dans l’existence de ces tribus de pêcheurs. M. Desedle, pariant de la cérémonie du baptême pour h frêle barque à laquelle ils confient leur existence, cite, d’aprè: une tradition locale, quelques.-unes des paroles par lesquelle: les matelotes considèrent comme une sorte d’être animé c< bateau qui, comme son maître, doit être christianisé. « Ui bateau, disent-elles, ne vous paraît que du bois et du fer m iis le bon Dieu y met autre chose qui l’anime, et ça devien un être. Jamais pêcheur n’oserait s’aventurer sur un bateai païen; celui-là le mènerait droit à la mort 1 » Notice sur trois imposteurs qui, du douzième au quatoi zième siècle, se tirent passer pour de grands personnages par M. Tailliar, de la société d’agriculture, sciences et arts d Douai. — Ce n’est pas seulement de nos jours que se sor produits des personnages se donnant pour de hauts et puis sants seigneurs en usurpant des noms et des titres qui ne leur appartenaient point. M. Tailliar fait l’histoire de trois de ces imposteurs : Un faux Bauduin se disant baron d’Ardres en 1146; un autre faux Bauduin se donnant pour un comte de Flandre, et un empereur de Constantinople, en 1225; et enfin un faux Jean de Vierson, se disant châtelain de Mortagne. Les deux pre¬ miers revenant de la Terre-Sainte, commencent par se déguiser sous le capuchon d’hermites vivant d'aumônes, édifiant les fidèles par leur piété apparente Ils finissent par être démasqués; le premier se sauva et les deux autres furent pendus. M. Gosselet, de Lille, fait une communication sur le terrain houiler du nord de la France. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE Sur V alimentation des villes en eaux potables , par Monsieur Menche de Loisne (séance du 6 février). — La ville de Lille est dotée d’une distribution d’eau potable prise à Emmerin, qui donne par jour au moins dix mille mètres cubes. L’on sait que c’est sur l’indication d’une commission syn¬ dicale, dont M. Girardin était président et dont M. Menche de Loisne était rapporteur, que la ville de Lille fit dans cette localité des travaux de captation. Les détails d’exécution sont relatés dansfintéressantlivre publié en 1 87 1 , par M. Masquelez, Ingénieur en chef de la voirie municipale, qui a effectué la distribution d’eau; et les deux rapports de la Commission des eaux de 1864-1865. figurant dans le recueil de la Société. Mais les études de détail, qui avaient conduit la Sous-Commission formée de M. Kaulle et de M. Menche de Loisne, à affirmer que, par des lra\aux de déblais, les suintements observés à Emmerin se transformeraient en sources abondantes, n’ont — 90 — pas été annexées à ces rapports. Depuis lors , M. Menche de Loisne a pu étendre le champ de ses études basées sur l’exa¬ men de faits observés dans la construction des avaleresses du bassin houiller du Nord et du Pas-de-Calais. On sait que dans la construction de ces avaleresses on est souvent entravé par la rencontre d’une énorme quantité d’eau. Ce qu’on subit comme un accident en ce cas , ne peut-on pas et ne doit- on pas le rechercher, quand voulant alimenter une ville, on ne peut disposer que de sources insuffisantes ou lointaines? Partant de cet ordre d’idées, l’auteur a recherché dans quels terrains et quelle situation topographique on a trouvé des débits importants, lors de la construction des avaleresses du bassin voisin. Il lui a paru que les procédés de fonçage et de cuvelage des avaleresses à faide de l’air comprimé, dans certains cas , et d’une manière plus générale , le procédé Kind et Chaudron, dit à niveau plein, pouvaient être avanta¬ geusement appliqués, avec quelques modifications, à la captation des eaux souterraines. Ces eaux seraient puisées et élevées au jour, à l’aide de pompes mues par une machine à vapeur. Car plus on extrait d’eau à une nappe souterraine, plus on augmente son débit, en élargissant les canaux par où circule le liquide. Parmi les applications présentées par M. Menche de Loisne, sur lesquelles on doit citer des aperçus qui intéres¬ sent directement l’arrondissement de Lille : 1° La recherche d’une seconde nappe souterraine à Em- merin, que la Commission des eaux potables avait recom¬ mandée dès 1865 ; 2° La recherche d’eau potable pour les villes de Roubaix et de Tourcoing. Le problème ne se présente pas, malheureusement pour ces deux villes, dans des mêmes conditions que pour Lille. En effet, la vallée de la Marque séparée de celle de la Haute- — 91 Deûle par le plateau crayeux central de l’arrondissement de Lille, n'est pas symétrique, au point de vue géologique, à cette vallée où Ton a trouvé à la séparation des terrains tertiaires et de la craie sénonienne, une nappe d’eau puis¬ sante. A celte dernière observation de M. Menche de Loisne, on peut ajouter que si les nappes aquifères d'Emmerin ne se retrouvent pas dans la vallée de la Marque, il y en a d’autres auxquelles on pourrait recourir, soit directement, soit avec les procédés de fonçage recommandés par M. Menche de Loisne. Mouvement comparé de la population de Lille dans les périodes de 1851 à 1856 , et de 1866 à 1872 , — par M. le Dr Chrestien (séance du 24 avril). — L’auteur établit que pendant la première période, Lille comptait un mariage pour 109 habitants, que dans la seconde période il n’y a plus qu’un mariage par 115 habitanis, premier résultat de la guerre de 1870. L’instruction des contractants s’est augmentée, si l’on en juge par le rapport de ceux qui ont signé leur acte de ma¬ riage, de 08 pour 100 pour la première période, et pour les hommes il s’élève à 71, et pour les femmes de 48 à 51. On ne remarque pas de différence entre les deux périodes quant à l’âge du plus grand nombre des conjoints. Les hommes se marient en majorité de 25 à 30 ans, et les femmes de 20 à 25. La fécondité des mariages est exprimée par 2,9 pour la première période et 3,3 pour la seconde, augmentation assez notable. Dans la première période les naissances sont au nombre de 33 pour 1,000 habitanis, ou 1 naissance par 29 habitants ; dans la seconde période elles s’élèvent à 37 pour 1,000 habi¬ tants, ou 1 par 26 habitants. La natalité est donc plus puis- — 92 — santé dans la deuxième période. Mais le rapport des nais¬ sances aux décès est inverse, puisque de 119 naissances pour 100 décès, il tombe à 115 pour la deuxième période. Les rapports des deux sexes ne sont pas sensiblement mo¬ difiés. L’excédant des naissances masculines sur les féminines est dans les deux périodes peu marqué. Dans les deux périodes, le rapport entre les naissances légitimes et naturelles ne varie que de quelques fractions : il est de 79 légitimes pour 20 illégitimes. Les décès généraux sont sensiblement plus considérables pendant la deuxième période ; en effet, de 28 pendant la première période, ils s’élèvent à 32 pour la seconde par 1,000 habitants, et de 83 pour 100 naissances à 86. Mais cette augmentation est bien plus le résultat de l’épidémie de variole que du fait de la guerre, car c est presqu’uniquement sur les décès de 1 à 12 mois que porte cette augmen¬ tation. En résumé, les mariages, les naissances et les décès restent à Lille dans les proportions considérables qui sont communes aux grandes agglomérations ; et si l’accroissement de la popu¬ lation est peu sensible dans la seconde période, cela doit être attribué à ce que le mouvement d’immigration pour Lille a cessé par suite des événements de 1870. Tout peut faire augurer qu’il aura repris son cours normal dans la période quinquennale que nous parcourons. société d’émulation d’abbeville. La Société d’émulation d’Abbeville vient de faire paraître le treizième volume de ses publications ; il comprend les travaux que lui oot présentés ses membres pendant les cinq dernières années. Le premier mémoire est une notice sur la Société qui nous — 93 — permet de retracer brièvement son histoire. Elle date du 11 octobre 1797 ; jusqu’en 1833, ses travaux ne furent pas imprimes in-exlenso } un bulletin trimestriel en donnait sim¬ plement 1 analyse. A celle époque commencèrent ses publica¬ tions régulières qui comprennent dès-lors une foule de notices intéressantes , résumé de tout le mouvement intellectuel des quarante dernières années, dans cette cité d Abbeville, le vrai foyer des sciences et des arts en Picardie. Bien peu de villes en France, de la population et de l’étendue d'Abbeville , peuvent se vanter d’avoir produit des graveurs comme Claude Mellan, Daullé, Levasseur, les AUiamet ; des historiens comme Louandrepère ; des naturalistes comme les Bâillon, de Lamothe, Casimir Picard, Boucher, Tillette de Clermont, pour ne parler que des morts. Bien peu de chefs-lieux d’arrondissement possèdent comme Abbeville, une bibliothèque de choix que suffiraient à illus- lustrer l’Evangéliaire de Charlemagne et la bibliothèque bota¬ nique de M. Tillette de Clermont* une collection entomolo- gique et malacologique comme celle que lui a léguée M. de Cérisy ; une collection ornithologique comme celle de M de Lamothe , la plus belle peut-être qu’ait j ossédée un amateur; un musée d’archéologie et d’ethnographie antéhistorique comme celui de Boucher de Pertlies. Il ne manque à toutes ces richesses que d’être réunies dans un local bien disposé pour former un ensemble envié par les villes les plus impor¬ tantes. Ces grandes traditions se sont perpétuées dans la Société d’émulation; la longue et consciencieuse élude de M. Prarond sur la Ligue à Abbeville, dont le treizième volume contient la dernière partie, est un travail du plus haut intérêt pour l’his- oire de la Picardie ; nous espérons qu’il serà prochainement malysé dans le Bulletin. Le catalogue raisonné de l’œuvre du graveur Daullé, par 1 Delignières , est non-seulement un monument élevé à la — 94 — gloire d’un éminent artiste d’Abbeville , mais aussi un guide précie ix pour les amateurs et les collectionneurs II est pré¬ cédé d’une biographie qui nous apprend que Daullé naquit à Abbeville le 18 mai 1701 et mourut le 23 avril 1763. 11 fut l’élève elle protégé de son compatriote Robert Hecquet, et se fit connaître de bonne heure par la franchise et la netteté de son burin. Le fameux portraitiste Rigaud se l’attacha comme graveur et bientôt de nombreux travaux lui assurèrent une légitime réputation. Malheureusement sa facilité était extrême et il en abusa pour produire vite et beaucoup, surtout dans les sujets de genre dont quelques-uns déparent son œuvre. Cet œuvre compterait d’après Wille au moins trois cents pièces, en tête desquelles on doit placer ses 91 portraits, presque tous des chefs-d'œuvre. M Delignières détaille 174 pièces principales, presque toutes déposées à la biblio¬ thèque d’Abbeville et qui suffisent amplement pour confirmer la célébrité dont l’artiste jouit depuis plus d’un siècle. Mentionnons encore le supplément au Catalogue des plantes vasculaires du département de la Somme , par MM. de Yicq et de Brutelette. L’ouvrage primitif, paru en 1865, est un des meilleurs catalogues locaux qui ont été faits pour une pro¬ vince de France; il donne avec une scrupuleuse exactitude Fénumération de toutes les plantes relevées par les anciens botanistes ou trouvées par les auteurs, classées d’après la Flore de Cosson et Germain, avec la description de toutes celles qui ne figurent pas dans ce dernier ouvrage L’ex¬ ploration des vastes dunes qui s’étendent de 1 embouchure de la Somme à celle de l’Authie donne surtout un grand intérêt à ce travail ; c’est là que se trouvent ces formes maritimes , variétés ou espèces, si curieuses à étudier au point de vue de l’influence des milieux. La publication du livre n’avait pas ralenti les recherches de MM de Vicq et de Brutelette ; leur supplément indique beaucoup de localités nouvelles et quelques espèces que leur. rareté avait dérobées jusqu’ù présent aux herborisations ; citons entr autres : Arabis arenosa , Rndiola linoïdes , Circium rigens , Chondrilla juncea , Sa//# mollissima, Naias major . eJc. Enfin, le volume que nous analysons se termine par deux notes de M. d’Orval sur des sépultures et des objets antiques trouvés dans les environs d’Abbeville et rapportés a l’époque franque, et par un récit de l’inauguration du monument élevé à Boucher de Perthes, le 14 mars 1870, dans le cimetière de la ville. Les discours prononcés à cette occasion retracent les principaux traits d’une longue existence dont le mérite scien¬ tifique a pu être contesté, mais qui n’en eut pas moins une part considérable dans le mouvement de notre siècle vers les recherches antéhistoriques. A. de Norguet. CHRONIQUE. Météorologie. Mars. — Avril. Température atmosphér. moyenne. 6? 31 — moy. des maxima. 10.’ 06 — — des minima. 2? 56 — extr. max., le 2 . . . 14° 0 — — minima, le 11. — 3? 3 10? 66 14? 97 6? 36 le 21, 24? 0 lpql ^ 9o 9 es(29 • Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 765?’" 810 757'?m78l — — extr.max. le 6. 776-37, le 29. 770.21 — — — min. le 20. 749.71, le 11. 744.42 Tension moy. de la vap. atmosph. 5'.,m64 6'?m84 Humidité relative moyenne %. . 79.5 68.0 Épaisseur de la couche de pluie. . 39 um44 29mm82 — — d’eau évap. 42,,.,m49 91l,.in)03 La température atmosphérique moyenne du mois de mars fut de 0°. 86 plus élevée que la moyenne ordinaire; il n’y eut que 7 jours de gelée et 8 jours de gelée blanche. La tension de la vapeur fut de 0?m30 supérieure à la moyenne générale, et l’humidité relative, de 1.79 % plus grande. Cette humidité de l’air fut défavorable à l’évaporation, qui ne fut que de 42™m49, tandis qu’en année moyenne elle est de 4-6'?m32 pour le mois de mars. L’épaisseur de la couche de pluie fut de 6™m41 moindre que celle de la moy nne Aussi la hauteur de la colonne barométrique fut- elle très grande pendant tout le mois, et la moyenne de 7, et l’humidité relative un peu au-dessous (69 1 %). _ . , Malgré l’abaissement de la moyenne barométrique, la quantité d’eau de pluie recueillie pendant le mois fut faible et moindre que la moyenne ordinaire d’avril ; aussi la séche¬ resse fut-elle très-sensible, d’autant plus que l’évaporation commence, à ce moment de l'année, à être abondante. Les vents régnants soufflèrent du S.-O. et du N.-E. ° \T AI prTDriv isrptüei» fossiles _ LeBulletinmeusueldelaSociélélm- néenne du Nord de la France annonce qu'une^ mâchoire de grand saurien a été trouvée dans la craie a Micraster cor anguiuum, à Ailly-sur-Noye (Somme). C est un fait très- inté¬ ressant; il serait utile pour la science que cette mâchoire fut ^Daus le Bull lin de la Société géologique de France (3e série. c [« n 365». M. Sauvage vient dedéenre quelques restes de rentiles du Boulonnais. Ce sont deux tortues du genre Plesio- chelys provenant du Kimmeridje un P te i ° d a eu ! e d e s rae mes couches, une grosse dent carenée et stnce de 1 uxfoid clay du Waast dont il fait nn nouveau genre, Liopleuron , assez voisin des crocodiles, d’autres dénis du Kimmeridje et du Portland qu’il avait déjà fait connaître sous le nom de Liocton primœcum et qu'il faut rapporter au genre Dacosaurus, voisin des Mosasaures. Lille, iaip. Six-Horeinans. r74-i 198. 6' Année. — N» 5. — Mai 1874. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain crétacé (suite). Caractères paléontologiques. — Les mammifères et les oiseaux devaient exister à l’époque crétacée, mais nos régions n’en ont encore révélé aucune trace. On y a trouvé au contraire quelques débris de reptiles : une tortue du genre Chélone, un os de Ptérodactyle, reptile volant à la manière des chauve-souris, des dents de Mosasaure, grand lézard marin et de Leiodon. Les poissons y sont plus fréquents ; au premier rang, on doit mentionner : le groupe de Placoïdes comprenant les Plychodm de la famille des Gestraciontes ; les Lamna, les Oxyrhina , les Olodus , de la famille des Requins carnivores. Il y a aussi de nombreux poissons osseux, tels sont : les Beryx , de la famille des Perches, les Encliodus et les Anen- chelmn , de la famille des Scombres. Gomme le terrain jurassique, le terrain crétacé renferme une certaine quantité de Belemnites et d’Ammonites. Les Belemnites delà craie présentent des caractères spéciaux qui ont engagé quelques paléontologistes à créer pour elles les genres Actinocomax et Belemniiella. La famille des Ammonites ne présente pas dans notre région les formes si remarquables que l’on trouve dans le midi de la France, On ne connaît chez nous que les genres Ammonites, Scaphili's , Hamiles. Baculites. Lo seul genre qui mérite d’ètre cité parmi les Gastéropodes judiciaires, administratives et militaires, leurs devoirs en- (1) Les Châtelains de Lille, par Th. Leuridan, archiviste de Roubaix. Lille, Quarré, 18*73. — 111 — d vers la commune de Lille qu’ils avaient mission de dé- » fendre, leurs rapports avec les abbayes dont ils étaient ou » du moins devaient être les protecteurs, leurs prérogatives, » leurs droits et jusqu’à leur patrimoine de grands seigneurs, j> tout m'a vivement intéressé. Mais ai-je réussi à communi- j> quer à mon rapide récit cet intérêt qui captive et qui m’a f> soutenu dans de longues et patientes recherches et dans un j> labeur obstiné? Il est certain que le lecteur ne pourra s’en j> prendre qu’à mon inhabileté, si mon travail n’offre pas tout » l’attrait que le sujet comporte et que j’y ai trouvé moi- » même. » Les lecteurs , qui se contentent peu de chercher dans une lecture une distraction du moment, reconnaîtront, après avoir lu les Châtelains de Lille , que l’auteur a communiqué à son livre l’intérêt qu il a trouvé dans l’étude du sujet; ils recon¬ naîtront qu’il y a, dans cet ouvrage, une étude sérieuse, neuve et attrayante : nous allons essayer de le prouver en faisant l’analyse de ce travail. L’histoire des châtelains de Lille se divise, comme le sujet le commande, en deux parties : la châtellenie et les châte¬ lains, l’office et les officiers Archiviste, l’auteur n’a pas failli au devoir de compléter son travail par une troisième partie, le carlulaire qui sert de base et de preuves. I. La châtellenie ce Lille. — Après avoir montré le châte¬ lain, ce lieutenant du comte, naissant et grandissant au milieu des invasions des barbares, et sous cette forme d’organisation administrative plus sérieuse qu’on ne le croit généralement, qui s’appelle la féodalité, l’auteur se demande à quelle époque a commencé la châtellenie de Lille. Les nombreux débris de l’époque gallo romaine établissent, comme la légende , ce voile qui recouvre souvent la vérité, que sur l’emplacement actuel de Lille, d y avait une agglomération importante et sans doute un château. Des documents authentiques prou¬ vant que des vicairies ou châtellenies existaient à Bavai et â — 112 — Tournai dès le commencement du Xe siècle, ne devait-il pas y on avoir une au château de Lille? M. Leuridan a pensé d’abord pouvoir reporter à 958-961 un acte, reproduit par les Archives historiques du nord de la France et par Van Lo- keren dans le Cartulaire de Saint-Pierre de Gand ; mais une étude plus attentive du document ne lui a point permis d’ac¬ cepter la date de Van Lokeren; c’est entre les années 1034 et 1047 qu’il faut placer l’époque où fut rédigé cette charte qui offre la mention la plus ancienne du castrum ou château de Lille. Dès lors, et sans doute plus anciennement, on appella ch⬠tellenie de Lille le ressort dans lequel le châtelain exerçait personnellement la triple délégation judiciaire, administrative et militaire qu’il tenait du comte ; cette dénomination dési¬ gnait encore la même contrée considérée au point de vue territorial, ainsi que l’office dont le château était le siège. Ce siège fut établi en un manoir seigneurial que Dauduin V fit bâtir près du château du Bue et qu’il décora du nom de pa¬ lais de la Salle : cet édifice s’élevait près de l’endroit où a été construit le Palais-dc-Justice. La châtellenie , formée de parties des anciens territoires des Ménapiens et des Atrébates, comprenait les pays de Mé- lantois, ayant pour chef-lieu Seclin ; de Carembault, ayant pour chef-lieu Phalempin ; de Pévèle , ayant pour chef-lieu Cysoing ; de Ferrain, dont Comines peut être considéré comme la capitale; de Weppes, ayant pour chef-lieu Wavi in, de Fan- cien pagus Leticus , qui tire son nom des Lètes, et comprenait plusieurs localités des environs de La Cassée , Haisnes, Au- chy, Mazingarbe, Violaines, Lorgies, et enfin de FOulre- Escaut , très-petit quartier formé de six villages et hameaux au nord de Tournai. Dans cette division territoriale se trou¬ vaient enclavées environ trente seigneuries., qui ne ressorlis- saient point de la châtellenie et qui étaient appelées terres du comté , terres d'empire ; les principales étaient llaubour- din et Linselles. — 113 — Jusqu'au XIIIe siècle , les attributions des châtelains , dans le ressort où s’étendait leur juridiction , ont été importantes. Ils exerçaient le pouvoir judiciaire et administratif, au nom du comte de Flandre qu’ils représentaient , ou par eux- mêmes ou le plus souvent par les pairs de la châtellenie et par les magistrats du bourg qui portaient le nom germanique d’échevins ( skcpen , juge). Plusieurs causes vinrent successi¬ vement diminuer ce pouvoir : la création vers le XIIIe siècle du bailli de Lille devant lequel les hommes de fief jugèrent les affaires qui intéressaient les vassaux , la substitution du pouvoir échevinal de la commune à la mairie féodale soumise au châtelain, qui prit fin à Lille en 1185, et enfin l’établisse¬ ment dans la même ville d’un gouverneur chef du bailliage royal , dont la juridiction s’étendit sur tous les villages de la châtellenie. c. d. {La suite prochainement). BIOGRAPHIE ERNEST SERRET M. Ernest Serret , l’auteur de huit ou dix comédies très- remarquables, entre autres : Que dira le monde? et les Fa¬ milles (deux œuvres couronnées) , vient de succomber , à Versailles, emporté par une fièvre typhoïde. M. Ernest Serret, né à Boulogne-sur-Mer, avait épousé la fille de M. Achille d’Artois de Bournonville. Il est mort en chrétien, laissant à sa veuve deux tout jeunes enfants Sa devise littéraire était : « Un peu moins d'argent , mais plus de considération. » Il la méritait. M. Ernest Serret a écrit un grand nombre de romans qui furent accueillis avec faveur à cause de leur élégance et de leur honnêteté : Perdue et retrouvée , le Prestige de Puni forme , les Coudées franches , Neuf Filles et un Garçon , Francis et Léon , les Rancunes de femmes , et tant d’autres dont la vogue n’est pas épuisée. M. Ernest Serret avait beaucoup travaillé pour le théâtre, et la Comédie-Française, l’Odéon, le Gymnase peuvent té¬ moigner des succès qu'il a obtenus. Voici les titres de quel¬ ques uns de ses ouvrages : Un Mauvais riche , comédie en cinq actes et en vers; la Paix à tout prix , comédie en deux actes et en vers ; les Touristes , comédie en trois actes et en vers; En province, comédie en trois actes et en vers; les Pa - t rents de ma femme , le Compagnon de voyage, l'Egide, les Illusions de l’amour , les Incertitudes de Rosette , les Fonds secrets , comédies-vaudevilles en un acte ; V Anneau de fer , comédie en quatre actes et en prose ; un Ange de charité , comédie en trois actes et en vers, etc. Il y a un au, M. Deseille lisait à la Société académique de Boulogne-sur-Mer une critique très-spirituelle des romans d’Ernest Serret. Nous lui empruntons in extenso les quelques pages qu’il a consacrées au roman si plein d’humour Neuf Filles et un Garçon. O « Belle famille ! dirait un Anglais ; lourde charge, mur¬ mure le Français. M. Ernest Serret n’est pas de l’avis de son compatriote, et il veut prouver cretaceus (Ag.) . + + + + + + + + Placoïdes. himæra Egertoni (Buck.) . » Townsendi (Buck.) d Bouchardi (Sauv.) archarias priscus (Gieb ) . orax prislodontus (Ag.) . » appendiculatus (Ag.). » falcatus (Ag.) . . . » kaupii (Ag ) . . . otidamus microdon (Ag.) . phyrna prisca (Ag.). . . todus appendiculatus (Ag.) » serratus (Ag ). . .. » recticonus (Ag ). . » semiplicatus (Münst ) » sulcatus (Gein.) . . » spathula (Sauvg.) . » oxyrhinoïdes (Sauvg.) . ~h + + + + + + -h + + + + + + + + + + + + + + + 136 — » T> Oxyrhina mantelli (Ag ). . subinflata (Ag.) . crassidens (Dixon) » zippei (Ag.) . . Lamna acuminata (Ag.). . Lamna (odontaspis) subulata (Ag.) » raphiodon (Ag.) » Bronnii (Ag ) » plana (Ag ) . » gracilis (Ag.). j) Bouchardi (Sauvg.) Lamna (sphenodus) longidens (Ag. » planus. Ptychodus mamillaris (Ag.). » polygurus (Ag.) . * sulcatus (Ag.) . jf latissimus (Ag.). » oweni (Dixon) . Myliobates sp . B D E G H + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + Téléostéens. + + + + + + + + + + + + + + + + + + Beryx microcephalus (Ag. ). . » radians (Ag ) . . . • j> Yalenciennesi (Héb ). . » Lewesiensis iMant.) . . y> Sp . Calamopleurus anglicus (Dixon) Berycopsis elegans (Ag.). . • Enchodus Lewesiensis (Mant.). » Halvocyon (Ag.) . . Anenchelum marginatum (Héb.) Hypsodon Lewesiensis (Ag ) Saurocephalus dispar (Héb.) . Cladocyclus Lewesiensis (Ag.). Osmeroïdes Lewesiensis (Ag.). Aulolepis typus (Ag ). . . • + + + + — 137 — SOCIÉTÉS SAVANTES. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE Dans la séance du 21 mai. M. Corenwindera donné com¬ munication de la suite de ses recherches sur les fonctions des feuilles. Jusqu'ici on s’était borné à élucider les rapports de ces organes avec les agents extérieurs: M. Corenwinder a pensé qu’il serait avantageux pour élucider les lois de leur accrois¬ sement d’en faire l’analyse chimique à différentes époques de leur végétation. Ces recherches lui ont révélé des faits importants qui sont de nature à intéresser les physiologistes. Nous allons les résumer en peu de mots : 1° Les feuilles en sortant de leurs bourgeons sont très riches en substances azotées, ainsi qu’en acide phosphorique. 2° Ces substances , de même que l’acide phosphorique , diminuent avec rapidité dans ces organes, jusqu’au moment où ceux-ci ont atteint leur grandeur naturelle. 3° Cette diminution relative est occasionnée par l’acquisi¬ tion rapide de matières carbonées que font les feuilles , pen¬ dant leur premier développement. 4° Lorsque les feuilles ont atteint leurs dimensions nor¬ males , l’accroissement en carbone est moins prononcé. Cet accroissement continue cependant d’avoir lieu , avec une gradation assez régulière; mais au moment où les feuilles jaunissent et sont sur le point de tomber, il s’opère en elles une action inverse , c’est-à-dire une perte légère en carbone. 5° A cette époque, les matières azotées et surtout les phos¬ phates ont subi un décroissement considérable. Par contre, les feuilles se sont enrichies en substances minérales qui jouent un rôle secondaire telles que la silice et la chaux. En même temps qu’il faisait ces analyses , M. Corenwinder a soumis les feuilles à des expériences physiologiques , afin — 138 - de découvrir les rapports qui pourraient exister entre leurs fonctions et leur constitution moléculaire. C’est ainsi qu’il a confirmé cette observation importante : que les feuilles à la sortie de leur bourgeon exercent simul¬ tanément deux fonctions qui , de prime-abord , paraissent contradictoires. 1° Elles inspirent pendant le jour de l’oxigène et elles ex¬ pirent de l’acide carbonique , en quantité abondante quelque¬ fois, lorsque la température s’élève. 2° Dans le même temps , leur matière verte remplit le rôle qui lui est propre : elle absorbe au contraire de l’acide car¬ bonique et elle exhale de l’oxigène. 3° Ces deux fonctions simultanées varient en intensité, selon l’âge des feuilles. D’abord la première est prédomi¬ nante ; elle diminue ensuite en apparence à mesure que ces organes grandissent ; et enfin lorsque ceux-ci ont atteint leurs dimensions naturelles , cette fonction cesse générale¬ ment d’être ostensible. La seconde seule est apparente alors , dans les conditions ordinaires, c’est-à-dire lorsque les plan¬ tes sont environnées de lumière. En rapprochant ces deux ordres de phénomènes des résul¬ tats obtenus par l’analyse chimique des feuilles , on remar¬ que que la première fonction se manifeste pendant toute la période où la proportion relative de matières azotées est à son maximum, elle diminue ensuite de caractère à mesure que les matières carbonées augmentent et lorsque celles-ci , à leur tour , ont atteint une limite qui désormais varie peu, alors les feuilles ne donnent plus d’indice d’acide carbonique pendant le jour, sauf dans des cas exceptionnels. Il résulterait donc de ces nouvelles acquisitions , que dans les plantes naissantes, les matières azotées, organisées, indé¬ pendantes des tissus utriculaires , vasculaires , fibreux, ainsi que de la chlorophylle , respirent à la manière des animaux , c’est-à-dire absorbent de l’oxigène et exhalent de l’acide car¬ bonique. En même temps, la matière verte qui est chargée de — 139 — fournir le carbone aux végétaux, commence à puiser cet élément dans l’atmosphère qui le lui procure sous forme d’acide carbonique. Cette simultanéité de fonctions, qui est démontrée pour les feuilles primordiales, cesse- t-elle d’avoir lieu, lorsque ces organes ont atteint leur grandeur naturelle? M. Corenwinder a soumis ce sujet à l’étude et : voici le résumé de ses obser¬ vations. 1° A priori , on se demande pourquoi les matières azotées toujours présentes, cesseraient-elles à un moment déterminé, d’accomplir l’acte qui leur est propre? 2° Les plantes ne peuvent soutenir leur existence dans un milieu privé d’oxigène. Lorsqu’on les fait séjourner dans un gaz différent, elles y périssent plus ou moins rapidement. 3° On sait que les feuilles vertes maintenues dans l’obscu¬ rité complète , absorbent de l'oxigène et expirent de l’acide carbonique. Le phénomène de la respiration se manifeste alors dans sa plénitude. Si on les place , pendant le jour , dans un milieu où la lumière est affaiblie, comme en un ap¬ partement , par exemple , elles exhalent encore de l’acide carbonique, ordinairement en faible quantité ; enfin en les transportant en plein air dans une station où elles sont environnées de lumière, tout dégagement d’acide carboni¬ que cesse complètement d’avoir lieu. Or, M. Boussingault a prouvé que: 1° pendant la nuit , la chlorophylle est absolument inactive, c’est-à-dire que la plante n’absorbe pas d’acide carbonique : le phénomène de l’assimilation est en ce cas complètement suspendu. 2° Dans de la lumière diffuse , dans un appartement , par exemple, la chlorophylle reprend son rôle, mais avec peu d’activité , c’est-à-dire , qu’elle absorbe une faible quantité d’acide carbonique, en fixe le carbone et dégage de l’oxigène. 3° En plein air et sous l’influence d’une lumière vive, la fonction assimilatrice est prépondérante , les feuilles adultes n’expirent plus que de l’oxigène. — 140 — En rapprochant ces deux ordres de phénomènes ,on expli¬ que facilement toutes les phases qui résultent de leurs ac¬ tions propres, mais simultanées. 1° Pendant la nuit, Pacte delà respiration s’exerce isolé¬ ment, il n’est contrarié en rien par celui qui est dévolu à la chlorophylle. 2° Sous l’influence d’une faible lumière , celle-ci com¬ mence à agir, faiblement aussi , sur l’acide carbonique éma¬ nant de la respiration ; elle en retient et en décompose une partie plus ou moins importante et s’il s’en échappe encore une faible quantité , c’est que cette matière verte a été im¬ puissante à la saisir, son action étant contrariée par l’affaiblis¬ sement de la lumière. 3° Enfin dans la lumière vive. Pacte assimilateur est pré¬ pondérant : la chlorophylle retient non-seulement l’acide car¬ bonique produit par' la respiration , mais elle en puise encore dans Pair atmosphérique. Si l’on pouvait enlever la matière verte des feuilles, sans les altérer , on mettrait peut-être en évidence la fonction exercée par les corps azotés, c’est-à-dire Pacte respiratoire. Or la nature se charge de nous faciliter les moyens de faire cette opération. Il existe des végétaux qui portent à la fois des feuilles ver¬ tes , des feuilles panachées, et d’autres tout à fait blanches, tels sont une variété de maïs et un érable bien connu des amateurs de jardin. Si l’on examine ces organes , au point de vue actuel , on voit que les feuilles tout à fait blanches exhalent pendant le jour de l’acide carbonique , en inspirant de l’oxigène , mais que les feuilles vertes ne jouissent de cette propriété que dans l’obscurité. Que l’on prenne des feuilles de chicorée , blanches , étio¬ lées , que l’on a fait pousser dans une cave : et l’on verra que, pendant le premier temps de leur exposition à la lumière, elles expirent de l’acide carbonique ; mais si au — 141 — préalable , on les laisse verdir à l’air , elles n’ont plus la même propriété. Il résulte donc de ces nouvelles acquisitions qu’il faut ad¬ mettre que les végétaux sont le siège de deux fonctions dis¬ tinctes qui s’exercent simultanément : la respiration et l’assi¬ milation du carbone. Dans une séance suivante, M. Corenwinder a rendu compte de ses recherches sur les plantes confinées dans d’autres gaz que l’air atmosphérique. Les résultats en seront consignés à la suite du Mémoire que l’auteur a écrit sur l’ensemble de ces nouveaux travaux et qui paraîtra dans un prochain volume de publications de la Société des sciences de Lille. COMMISSION DES MONUMENTS HISTORIQUES DU PAS-DE-CALAIS . Dans la séance du jeudi 16 Avril, M. le chanoine Van Drivai, président, a rendu compte de l’œuvre du Dictionnaire historique et archéologique du Pas-de-Calais. Le second volume de l’arrondissement d’Arras vient de paraître. Il contient l’histoire et l’archéologie, commune par com¬ mune, des cantons de Croisilles, de Marquion, de Pas, de Vimy, c’est-à-dire la suite et la fin de l’arrondissement d’Arras. Il donne, par chaque commune, les notions les plus intéressantes et les plus variées; car souvent il n’y a qu’à glaner dans ce champ de l’histoire si profondément ravagé par les guerres et les destructions qu’elles entraînent. Toutefois, avec de la patience, avec l’esprit d’investigation qu’ont les auteurs de ces notices, on finit par trouver, sur les communes, sur les églises, sur les familles, sur les œuvres de toute nature, sur les expéditions militaires elles- mêmes, une foule de faits qui rétab’issent la véritable his¬ toire du pays, et c’est plaisir alors de vivre de la vie de ce passé mystérieux, bien ressemblant au présent, car les hommes sont toujours les mêmes et ce ne sont guères que les circonstances extérieures qui changent autour d’eux. — 142 — Le second volume se termine par une statistique fort cu¬ rieuse des juridictions ecclésiastique et civile d’autrefois, aussi commune par commune, pour tout l’arrondissement d’Arras. Les auteurs des notices du second volume sont: MM. Paul Lecesne, de Cardevacque, Godin, Cavrois Lantoine, Ter- ninck. Plusieurs annotations ou appendices sont du directeur de l’œuvre, qui n’épargne ni soins, ni temps, ni démarches, pour mener ce dictionnaire à bonne fin. C’est une entreprise bien conçue, patiemment conduite, et qui aura de l’écho, dans d’autres départements. Le volume de l’arrondissement de Montreuil est sous presse, la rédaction des notices concernant les arrondissements de Saint-Omer et de Béthune est très avancée. Tout fait penser que deux volumes nouveaux pourront être publiés cette année, et les autres volumes en 1875. Elle ne nuit d’ailleurs en aucune manière aux autres publications de la Commission. La preuve en est dans le sixième numéro du tome III du Bulletin, qui a été distribué dans la même séance. M. Le Gentil a lu une série d’études sur une ancienne porte de la cité, sur la Maison-Rouge, sur la chapelle du Temple. L’Académie d’Arras a élu, comme membres correspon¬ dants, M. Auguste Terninck, auteur de nombreuses publi¬ cations archéologiques, et M. le baron de Calonne, qui s’est fait connaître par les notices qu’il a lues à la Commission des monuments historiques, et par un important travail cou¬ ronné par la Société des antiquaires de Picardie, dont il est membre. CHRONIQUE. Juin. météorologie. !87*- Température atmosphér. moyenne. 15? 47 — moy. des maxima. 20? 41 — — des minima. 10? 53 — extr. max., le 1er . . 27? 40 — — minima, le 14. 5? 70 Année moyenne 15° 94 — 143 — Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 762““961 759®œ749 — — extr. max. le 4 . 774. 27 — _ _ min. le 26. 753. 12 Tension moy. de la vap. atmosph. 8®m 91 10®m 26 Humidité relative moyenne %• • 63. 50 69. 85 Épaisseur de la couche de pluie. . 52®m 55 63®m 06 — — d’eau évap. 137®m 54 128®m 52 La température atmosphérique du mois de Juin 1874 fut de 0°.47 inférieure à la moyenne déduite d’une série de quinze années. Du 12 au 25, on observa sous l’influence des vents N. et N.-E. soufflant avec force, un refroidissement notable de l’air ; depuis le 25 jusqu’à la fin du mois, le vent souffla du S.-O. et la température s’éleva. Le caractère dominant du mois fut une grande sécheresse des couches d’air en contact avec le sol, ce qui s’opposa à la production des brouillards et des rosées, et ce qui favorisa l’évaporation. La même sécheresse exista dans les couches élevées de l’atmosphère, état physique décelé par la hauteur de la colonne barométrique et la faible nébulosité du ciel. Aussi les pluies ne furent-elles qu’au nombre de 15 et peu abondantes ; car si de la quantité totale d’eau recueillie (52mm 55) on retranche les pluies d’orage des 9, 27 et 28 (32mm 6), il ne reste que 19ujm95 pour 12 jours, soit l“m66 par jour. Les vents régnants pendant le mois de juin furent ceux du N. et du N.-E. Sous l’influence de cette grande sécheresse le débit des cours d’eau fut réduit et complètement tari pour quelques- uns ; le niveau des nappes souterraines s’abaissa sensible¬ ment ; et les récoltes de beaucoup de contrées furent com¬ promises ou perdues. Nos terres du Nord, labourées très-profondément et riches d’engrais, conservèrent assez d’humidité pour suffire aux besoins de la végétation qui, heureusement, est restée dans une situation favorable. Les prairies naturelles furent seules à souffrir. V. Meurein. Haches en pierre polie des environs de Douai. Notre savant maître, M. Gosselet, a pris soin de signaler aux lecteurs du Bulletin , les nombreuses et intéressantes décou¬ vertes d'instruments èn pierre, faites depuis quelques années aux environs de Lille, de Valenciennes et dans le départe¬ ment du Pas-de-Calais. L’arrondissement de Douai , moins exploré jusqu’ici, n’a plus rien à envier à ses voisins. — 144 M. Favier vient d’offrir au musée une dizaine de haches en pierre polie , qui toutes , ont été recueillies à quelques kilo¬ mètres au sud de Douai. La plupart de ces haches, de grandeurs diverses , parais¬ sent avoir été brisées intentionnellement vers le milieu de leur longueur ; la cassure est simple, nette, présentant la mêm'e patine que le reste de la surface. Ces armes raccour¬ cies, à tranchant d’ailleurs parfaitement fini, s'emmanchaient sans doute dans des gaines en corne de cerf. Une hache d’assez petite dimension, entière mais non terminée, a été rencontrée au bois d’Hamel, au lieu dit les Pendus. En ce même endroit, des ouvriers ont découvert à dix ou douze pieds de profondeur, une pierre assez grande recouvrant des ossements et des cendres, restes probables d’un tumulus, qui, malheureusement n’ont pas été recueillis. Une autre pièce intéressante est une hache en grès , telle¬ ment bien polie qu’on serait tenté de la prendre pour un silex. Cet instrument formé d une matière rarement employée, a été trouvé à Cantin par des chercheurs de grès. Voici, sans les indications spéciales relatives à chaque objet, que nous ne pouvons détailler ici, l’énumération des communes sur le terroir desquelles ont été recueillies les haches. Trois proviennent d’Hamel , deux d’Oisy-le-Verger, trois de Cantin, une d’Erchin et une de Lewarde. En ce qui concerne ces trois dernières localités, il importe de rappeler l’observation précédemmeut faite par M Farez , à propos des silex des environs de Valenciennes : que les pierres taillées se rencontrent souvent sur les hauteurs. Réuni à quelques pièces du pays existant déjà au musée de Douai, le don important de M. Favier forme une série intéres¬ sante pour la région. Nous devons ajouter, en toute justice, que la collection Berthoud, si riche en instruments de pierre de toutes provenances, a le grand mérite d’attirer l’attention des Douaisiens sur des objets trop ordinairement négligés. J. de Guerne. llypcroodon. — Un Hyperoodon, H. rostratum , a été capturé le 17 novembre dernier, dans l’Escaut, en aval d’Anvers. Après avoir été montré dans les principales villes de Belgique, il a été acquis par le Musée de Liège. II y a vingt cinq ans, un autre individu de la même espèce fut pris aussi dans l’Escaut. Un troisième individu, dont la peau et le squelette sont conservés au Musée de Lille, a été recueilli sur la côte de Dunkerque en 1839. Lille. îiup. Six-Horemans. '74-1674. 6e Année. — N°s 7 & 8. — Juillet-Août 1874. L’EXPOSITION D’OBJETS D’ART RELIGIEUX OUVERTE A LILLE (Suite). I. Les manuscrits à miniatures. Les Romains se plaisaient à décorer avec élégance et ri¬ chesse le parchemin et le papyrus de leurs livres les plus précieux. Les lettres initiales et parfois tous les caractères du manuscrit étaient tracés avec des encres de couleur dont la plus usitée était le cinabre que les Latins appelaient minium mot d’où est venu le nom de miniature ; autour des pages , quelquefois complètement couvertes de pourpre ou de violet, se croisaient et s’enroulaient des lignes et meme des Heurs dessinées avec cette grâce qui caractérise les encadrements des fresques de Pompeï. Les peintures du célèbre Virgile du Vatican prouvent qu’un certain nombre de volumes étaient ornés de ces sujets, de ces scènes auxquelles nous donnons le nom de miniatures (1). La vénération que les Chrétiens des premiers siècles avaient pour les Livres saints les portèrent à faire transcrire la Bible et l’Évangile avec plus de soin encore et de luxe que les païens n’en montraient pour les ouvrages de leurs orateurs et de leurs poètes; rien ne leur parut trop riche pour les missels et les livres qui devaient servir au saint sacrifice. Des fragments d’un Ancien Testament du IVe siècle, qui offrent plus de deux cents miniatures, PÉvangéliaire, conservé autre¬ fois dans l’abbaye de Saint-Germain des Prés, sous le n° 663, dont le texte était écrit en lettres d’or ou d’argent sur un vélin pourpré, le Traité de saint Hilaire sur la Trinité, ancien n° 2630 de la bibliothèque du Roi, et bien d’autres ouvrages, que nous pourrions indiquer, font connaître qu’antérieure- ment au VIe siècle de Père chrétienne les livres servant aux (1) Bibliothèque du Vatican, n° 8225. — 146 — saints offices ou traitant de sujets religieux offraient des mi¬ niatures et des décorations artistiques (1). Dans le nord de la France, nous trouvons, dès le VIIe siècle, des mentions relatives à l’art de la miniature. De puissantes familles franques avaient donné au pays la richesse et la sé¬ curité; à Liessics, 6 Maroilles, à Saint-Arnaud, à Marchiennes, à Arras, à Saint-Omer, à Corbie avaient été construites de vastes abbayes, dont les religieux étaient obligés, par la règle de leurs saints fondateurs , de s’occuper de calligraphie ; les missionnaires de l’Irlande faisaient connaître à Gand , à Ni¬ velles , à Péronne les livres qui avaient été enluminés dans les monastères de leur contrée natale ; les évêques fondaient des écoles dans leur ville épiscopale, dans les monastères, dans les églises des villes et des campagnes. Vers 640, l’évêque- missionnaire saint Amand partage entre ses monastères de la Gaule-Belgique un grand nombre de livres qu’il avait rap¬ portés de Rome : vingt ans plus tard, dans l’abbaye qui devait bientôt porter son nom , est illustré un manuscrit dont Ma- billon et les auteurs des Mélanges d’archéologie ont reproduit plusieurs miniatures (2). Les évêques saint Vaast et saint Géry avaient, dès le VIe siècle , fondé, pour les jeunes clercs et même pour les laïcs , des écoles dans lesquelles devaient nécessairement se trouver des calligraphes, des enlumineurs: c’est, sans doute à cette influence que la ville de Cambrai doit le bonheur de posséder un Grégoire de Tours du VIIe siècle et plusieurs très-beaux manuscrits du VIIIe et du IXe. L’ab¬ baye de Saint-Vaast d’Arras cite au nombre de ses plus an¬ ciens calligraphes le moine Radulphe, dont les écrits ont été conservés jusqu’à la fin du siècle dernier, l’abbé Radon qui envoya un missel enluminé à son ami le célèbre Alain et les religieux Ansebert et Anseher qui étaient plus miniatu- (1) Bibliothèque cottonienne. — Bibliothèque nationale de Paris. Bibliothèque du Vatican, 405, 1209, etc. (2) Mabillon. Annales, t I, p. 327. — Mélanges d’archéologie, par les RB. PP. Arthur Martin et Cahier, t. IV, art. Crosses. — 147 — ristes encore que transcripteurs (1) Au couvent de Nivelles, la poésie sacrée et le chant étaient enseignés, dès le VIIe siècle, par deux prêtres formés aux lettres et aux arts dans les ab¬ bayes de l’Irlande ; non loin de là , dès le commencement du VIIIe siècle , dans un couvent de Valenciennes ou de la con¬ trée , les jeunes filles apprenaient non-seulement l’art de broder en or et de former des dessins avec des pierres pré¬ cieuses, mais encore la calligraphie et la peinture (2). Au mois d’avril 794, Charlemagne octroyait aux religieux de Saint- Bertin le droit de chasse dans ses forêts , afin qu’ils pussent se procurer le cuir nécessaire à la reliure de leurs livres (3). Au IXe siècle , le comte Evrard léguait à son monastère et à son château de Cysoing des missels, des évangéliaires , des ouvrages de théologie, de géographie et de médecine , dont plusieurs étaient écrits en lettres d’or, d’argent ou de défé¬ rentes couleurs , ainsi qu’un bestiaire ou traité d’histoire na¬ turelle offrant des représentations d’animaux : son testament est daté de Mugliastro, forteresse de la marche de Trévise, où les artistes de Byzance se mêlaient aux artistes italiens (4). Nous avons rappelé ces faits avant d’étudier les manuscrits qui h gui en t à 1 Exposition de Lille, non pas seulement pour établir que l’art de la miniature était sérieusement cultivé dès le VIIe, le VIIIe et le IXe siècle dans le nord de la France , mais aussi pour faire connaître les tendances qui hâtèrent son développement et contribuèrent à le modifier. L’influence de l’art antique, venue de Borne, de l’Italie et de Byzance, se retrouve dans les manuscrits du VIIIe et du IXe siècle pour disparaître bientôt complètement ; celle des Irlandais et des (1) Acta sanctorum Belgii, t. IF, p. 27, 42, 91, 256, 316. - Dom Mar- ’Ene. Voyage littéraire, t. II, p. 630 et suiv. (2) Annales ordinis S. Benedicli, t III, p. 609. -Acta sanctorum , nars, t. V, p. 388. — Ozanam. De la civilisation chrétienne chez les rancs. (3) De la Plane. Les abbés de Sainl-Bertin, p. 40. (4) Mirqeus. Opéra diplomatica , l. I, p. 19. — 148 — Anglo-Saxons dont le caractère se rapprochait de celui des populations du nord de la France , ne fit , au contraire , que gagner : c’est le sentiment chrétien se développant au milieu d’une société encore à demi-barbare qui inspire principale¬ ment le miniaturiste.' Le religieux, qui enluminait un livre dans la cellule d’un monastère, travaillait pour la gloire de Dieu et pour le salut de son âme ; il travaillait aussi afin de satisfaire son goût pour les arts et d’être utile à ceux qui li¬ raient son livre. Mais , dans le calme et le silence du cloître, il ne pouvait rester complètement étranger à cette société qui l’avait nourri, à ce bruit et à ces mouvements qui troublaient partout les seigneurs , le clergé, les gens d’armes et les ma¬ nants : il était de son siècle. Nous le ferons mieux comprendre en étudiant en détail les caractères de chaque époque de¬ puis le IXe siècle jusqu’au XVIe. Au IXe siècle , certains évangéliaires , écrits probablement pour les princes, les prélats et les abbés, offrent la page de pourpre des manuscrits antiques avec des lettres d’or ou d’ar¬ gent en écriture capitale : mais sur les manuscrits à miniatures et sur tous ceux qui n’offrent pas le luxe déployé pour le saint Évangile , les tendances barbares des hommes du Nord sont plus nettement accusées. Une naïveté excessive dans la com¬ position , des idées parfois originales , mais souvent triviales et exagérées, un défaut choquant de proportions, une expres¬ sion étrange , des yeux énormes , des contours dessinés à la plume avec un trait facile et sûr, mais souvent trop épais, des couleurs appliquées par teintes lavées et sans empâte¬ ments au lieu des gouaches qui se trouvent dans certains ma¬ nuscrits francs de la même époque , un goût prononcé pour ces élégantes bordures à losanges , à fleurs et à gracieux en¬ trelacs qui se dessinent en or ou en blanc sur un fond noir, quelques animaux fantastiques , des détails romans avec des tons durs dans les constructions architecturales : voilà les ca¬ ractères des miniatures flamandes au IXe siècle. Ces caractères — 149 — ne se modifient guère au Xe', époque où l’art de la miniature semble avoir été moins cultivé. Les tendances que nous venons de signaler pouvaient se remarquer à l’Exposition sur le manuscrit n° 1455, évangé- üaire du règne de Charlemagne, appartenant à la bibliothèque d’Arras, dont les feuillets teints de pourpre offrent des lettres d’or et d’argent , avec de grandes initiales en capitale , ainsi que des enroulements et des entrelacs en or sur fond noir ; dans le n° 4 de la bibliothèque de Boulogne , œuvre de la fin du IXe ou du Xe siècle, écrite complètement en lettres d’or, et dans le n° 1454, collection des conciles de la bibliothèque d’Arras, dont les titres sont en lettres capitales ornées de cou¬ leurs grossièrement apposées comme on le voit souvent dans les livres de la même époque. Au XIe et au XIIe siècle, les dogmes, le culte, les légendes et les traditions artistiques du christianisme font naître un sentiment poétique ; les idées du Nord, avec leur naturalisme et leur originalité, pénètrent peu à peu cette société à qui elles avaient auparavant donné l’esprit guerrier avec 'un caractère dur et cruel; par le Rhin et la Belgique orien¬ tale, l’art byzantin, à la suite des croisades, fait sentir son influence dans la Flandre : dès lors l’art de la miniature tend à se modifier. Malgré les défauts de dessin qu’ils pré¬ sentent, malgré les yeux démesurément grands et les formes allongées des personnages , les manuscrits , avec leurs gra¬ cieux enroulements blancs se détachant sur un fond d’un vert ;rès-léger , avec les êtres fantastiques dessinés d’une main aussi sûre que la pensée est originale, avec des têtes de saints l’un grand caractère , rappellent complètement le faire des irtistes de la même époque travaillant l’ivoire et les métaux arécieux. Si les administrateurs des bibliothèques de Cambrai et de Valenciennes, imitant ceux de Lille, Boubaix, Arras et Bou- ogne , avaient confié leurs manuscrits à l’Exposition , de — 150 — riches et nombreux spécimens de Part de la miniature au XIe et au XIIe siècle auraient attiré l’attention des visiteurs ; elle pouvait néanmoins se porter sur le n° 19, livre aussi cu¬ rieux par ses ornements que par son texte qui est consacré à la vie de saint Yaast; sur le n° 10, provenant de la biblio¬ thèque publique d’Arras comme le précédent; sur le n° 1441, livre appartenant à M. Lécuyer, curé de Colleret, où se trouve la vie de saint Humbert , abbé de Maroilles, et surtout sur le n° 1444 , psautier offrant de belles initiales qui appartient à la bibliothèque publique de Lille, ainsi que le n° 1445, évan- géliaire du XIIe, dont les grandes miniatures sur fond bleu , avec ornements en or, présentent tous les caractères de l’époque, sans avoir toutefois la finesse et la sûreté de main qui caractérisent les manuscrits des bibliothèques de Douai , Cambrai et Valenciennes. C’est sur cet évangéliaire, prove¬ nant de l’abbaye de Cysoing , que les baillis de cette ville juraient, avant d’entrer en charge , d’observer les privilèges et les franchises de l’abbaye. Comme spécimen de la fin du XIIe siècle, nous citerons le n° 1, Bible écrite en 1184 , par Goderan , religieux de l’abbaye de Lobbes , qui offre vingt- huit miniatures d’un assez beau caractère , malgré le peu de finesse de l’exécution. Ce manuscrit, qui appartient au sémi¬ naire de Tournai , présente un intérêt tout spécial comme souvenir : les Pères du concile de Trente l’ont consulté pour la correction du texte de la Vulgate. Au XIIIe siècle , la composition prend , en général , un ca¬ ractère plus spontané et plus original, qui se traduit par des poses tourmentées, quoique certains personnages principaux, comme Dieu le père, le Christ et la Vierge , conservent l’atti¬ tude noble et un peu raide que leur avaient donnée la mo¬ saïque et l’art byzantin. Les sujets sont variés, parfois grands, souvent bizarres, presque toujours poétiques. Les formes des personnages sont élancées ; leurs figures d’un ovale plein, présentent des yeux largement ouverts , des sourcils arqués, — 151 - un nez droit, une bouche légèrement déprimée aux coins, de l’énergie et une certaine grandeur plutôt que de la douceur; les pieds, les bras et surtout les doigts sont excessivement longs. Les plis des draperies , quoique trop symétriques , n’ont rien de lourd. Le dessin est encore faible, mais il y a dans l’en¬ semble des personnages une expression grande , et parfois douce, qui plaît aux regards. Les encadrements sont formés de lignes d’or ou d’argent, de bordures losangées, quadrillées et diversement entrelacées avec des médaillons aux quatre coins et parfois au milieu. Les lettres initiales deviennent de véritables miniatures , qui offrent matière à cette verve inta¬ rissable qui a rempli les manuscrits d’enroulements capricieux, d’animaux fantasliques et d’êtres plus bizarres les uns que les autres. Le champ des peintures, qui d’abord était très-clair et présentait un vert léger, se charge plus tard d’un rouge foncé ou d’un bleu lourd, relevé d’étoiles ou de dessins qua¬ drillés , et se couvre, vers la seconde moitié du siècle, de la plaque d’or massif des peintures byzantines. A cette date, les formes gothiques s’accentuent de plus en plus dans les ma¬ nuscrits, de même qu’elles étaient aussi plus nettement mar¬ quées sur la pierre des églises. Ces caractères se retrouvent dans le n° 38, remarquable ma¬ nuscrit de l’Apocalypse, offrant 73 miniatures, qui appartient à M. E. de Coussemaker, de Lille; sur le n° 3, grande Bible in-folio, appartenant à la bibliothèque de Boulogne, qui montre des miniatures |à fond d’or et des sujets traités avec finesse; dans le n° 14, manuscrit, daté de 1278, qui renferme de nombreuses miniatures aussi sur fond d’or, parmi lesquelles de nombreuses représentations d’animaux où l’on cherche déjà la reproduction exacte de la nature. Les cinq Bibles, en caractères presque microscopiques tracés sur un vélin de la plus grande finesse, ont été écrites et enluminées à la fin du XIIIe ou au commencement du XIVe siècle. Dans la seconde moitié du XIIIe et durant le XIV° siècle , • — 152 — les procédés changent. L’artiste a quitté la plume pour le pin¬ ceau; au lieu de teintes lavées , il emploie , pour l’exécution des miniatures, des rehauts qui tendent à devenir des emp⬠tements; délayées avec la gomme, les couleurs offrent un éclat, une fraîcheur et une solidité qu’on ne leur connaissait pas. Si le père Éternel et le Christ présentent encore le type hiératique que les peintres de Byzance et de l'Italie leur avaient donné, les autres têtes changent complètement ; elles offrent un caractère d’individualisation qui est propre à l’art flamand, et, trop souvent, des poses violentes et contournées. Au XIVe siècle , l’art se développe encore. L’ovale de la tête est bien dessiné ; le front est large et haut ; les formes sont encore longues' et amaigries, mais les poses sont plus calmes et plus vraies, les draperies prennent plus d’ampleur. Les fonds d’or gaufrés ou en damier or, rouge et bleu, qui dominent de 1300 à 1350, font face peu à peu à des paysages, à des détails d’architecture ou à un intérieur de maison garni d’un mobilier; après 1350, les bordures, au lieu d’être de simples lignes entre lesquelles se détachent, sur fond bleu ou vert, des dessins fantastiques tracés en blanc présentent , sur les marges du vélin , des arabesques et des fleurons, contournés comme des bourgeons de vigne très-légers et presque tou¬ jours tracés avec le bleu, le rouge et l’or. On reconnaîtra l’exactitude de ces appréciations en étudiant un certain nombre de manuscrits du XIVe siècle qui se trou¬ vent à l’Exposition; le n° 1418, fragment d’un grand anti- phonaire appartenant à M. Béthune , de Gand, que l’on dit venir d’Allemagne et qui présente les mêmes caractères que l’art flamand; le n° 1430, Apocalypse du séminaire de Namur, dont chaque page offre un sujet traité avec vigueur et sûreté de main par un enlumineur de la première moitié du XIVe siècle; les trois missels nos 2 , 12 et 28 , qui appar¬ tiennent l’un à la cathédrale de Tournai , l’autre à la biblio¬ thèque d’Arras , et le troisième à M. l’abbé Carnel , curé de — 153 — Sequedin; et le n° 7, psautier de la bibliothèque d’Arras, très-curieux à étudier , parce que n’étant pas achevé, il fait connaître la manière dont les enlumineurs préparaient leur travail. Les caractères de la seconde partie du XVe siècle se présentent sur le n° 72, œuvre d’art splendide, donnant l’as¬ pect de la société au XIVe siècle, qui a probablement été exé¬ cutée pour Charles Y, roi de France : ce beau livre appartient à M. Yan der Cruysse de Waziers, de Lille. Nous signalerons encore le n° 1449 a Traité des Vertus, » provenant de la col¬ légiale Saint-Pierre de Lille et appartenant à la bibliothèque de la même ville, qui offre un certain nombre de miniatures, dont l’une, représentant saint Benoit, est entourée de ces or¬ nements à longues branches de feuillage et à feuilles de lierre sur lesquels sont jetés les sujets de chasse qui se ren¬ contrent souvent à la fin du XIVe et au commencement du XVe siècle. Nous mentionnerons encore les nos 5 et 9, deux riches manuscrits d’origine italienne, qui permettent de comparer l’art transalpin à l’art flamand; ils appartiennent aux bibliothèques publiques d’Arras et de Boulogne. Dans le XVe siècle, l’art de la miniature offre les caractères de la seconde moitié du XIVe, mais avec plus d’élévation , de vérité et de fini. Pour s’en convaincre , il suffit de jeter les yeux sur les nombreux manuscrits de cette époque que pré - sente l’Exposition : après avoir contemplé le n° 16, missel des Frères mineurs d une très-belle exécution, on s’arrêtera devant trois précieux ouvrages de la bibliothèque de M. Van der Cruysse de Waziers, l’Apocalypse (n° 64) avec ses 65 mi¬ niatures en grisaille relevées par des traits d’or et des tons très-légers ; le Traité des Quatre dernières choses (n° 69), dont les grisailles sont d’un ton plus foncé et attestent une main très-habile, et le grand manuscrit de la Toison d’or (n° 68) , sans oublier un petit psautier de la Passion (n° 83) orné de camaïeux de la plus grande finesse , qui fut donné à l'hô¬ pital de Roubaix par sa fondatrice Mme de Richebourg, et qui — 154 — appartient aujourd’hui à la bibliothèque publique de la même ville. Les livres d’Heures du XVe siècle abondent à l’Exposi¬ tion de Lille : nous nous contenterons d’indiquer ceux qui appartiennent à MM. Leroy, de Raismes; Van der Cruysse de Waziers; Ignace de Coussemaker , de Bailleul; d’Estreux de Beaugrenier, de Valenciennes ; à Mme de Badts de Cugnac, de Marcq en-Barœul ; et aux bibliothèques publiques de Bou¬ logne, Arras, Roubaix et Lille. Cette dernière ville a bien voulu envoyer à l’Exposition un missel (n° 1448) offrant des miniatures d’une richesse et d’une finesse remarquables, avec de gracieux enroulements au milieu desquels sont peintes les armoiries de Jean de Lannoy, chevalier de la Toison d’or, elle « Livre des Méditations » (n° 1 446), en tête duquel se trouve une grande miniature, avec empâtements très-accentués, qui re¬ présente les quatre docteurs de l’Église latine, saint Grégoire- le-Grand, saint Jérôme, saint Ambroise et saint Augustin. Cette dernière œuvre est probablement du XVIe siècle; elle offre en effet cette bordure à fond d’or mat , sur laquelle les enlumineurs de cette époque aimaient à peindre des papillons, des paons, des fraises, des roses, avec ces rinceaux façon camaïeu ornés de glands et de feuilles de chêne , qui for¬ maient l’encadrement de miniatures ravissantes par le fini, la richesse et l’éclatante fraîcheur des nuances , quoique moins pieuses et d’un caractère moins élevé que les enluminures des siècles précédents. Ici encore nous nous contenterons de signaler les noms des personnes qui possèdent des livres d’Heures de cette époque : MM. Van der Cruysse de Wa¬ ziers ; Jules de Vicq , de Lille ; Albert de Badts de Cugnac , d’Amiens; Mme la comtesse du Hamel de Bellenglise ainsi que Mrae de Badts de Cugnac, de Marcq-en-Barœul, qui possède un livre d’Heures ayant appartenu à Jacqueline de Lallaing, abbesse de Flines. Nous devons citer spécialement le Bréviaire des Princesses et un autre livre d’Heures, appartenant aux Cla- risses d’Amiens, riches spécimens de l’art (nos 32 et 33) de la — 155 — fin du XVe et du commencement du XVIe siècle, qui auraient servi à Jeanne et Marie de Bourbon et à Catherine de la Marche , religieuses dans le couvent des Clarisses; nous si¬ gnalerons encore le n° 17, manuscrit sur papier dont les 351 dessins à la plume, datant de la fin du XIVe ou plus proba¬ blement du XVIe siècle, ornent un Mystère de la Rédemption, en vers français, appartenant à la bibliothèque d’Arras, et surtout le « Mistere par personnaiges de la Vie , Passion , Mort , Résurrection et Ascension de Nostre Seigneur Jésus Christ, en vingt-cinq journées , qui fut jouet triumphamment en la ville de Valenchiennes, 1547. » Chaque page de ce dernier manuscrit offre une miniature qui rappelle le récit du mystère ; la première représente tous les décors qui ser¬ vaient à jouer ce drame religieux. Ces peintures sont l’œuvre d’un artiste, que l’on pourrait presque appeler le dernier des enlumineurs flamands, Hubert Cailleau, de Valenciennes, qui a enluminé un nombre considérable de livres dont plusieurs sont encore aujourd'hui conservés dans la bibliothèque publi¬ que de Douai. Le manuscrit, aussi important que curieux dont nous venons de parler , appartient à Mme la marquise de la Coste , de Sebourg. A cette liste, nous ajouterons le manuscrit n° 29, œuvre du peint; e Vaast Bellegambe , de Douai, qui offre la repro¬ duction de tous les tableaux et de tout le trésor artistique du couvent des Sœurs de Sainte-Catherine de Sienne de la même ville. Ce manuscrit , qui renferme une centaine de peintures à l'huile et l’histoire du couvent, appartient à M. E. de Cous- semaker ; il est encore aujourd’hui dans l’état où il se trou¬ vait lorsqu’il sortit des mains du relieur au milieu du XVII0 siècle. C’est une importante production de la peinture sur manuscrit à une époque où l’art de la miniature avait cessé d’exister. C. Dehaisnes. — 156 - ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain crétacé (suite). Caractères stratigrapliiciues. — Le terrain crétacé est dans tout le Nord, disposé en couches horizontales. Cependant, on y reconnaît des plissements peu visibles sur un point déterminé, mais très nets quand on envisage de grandes étendues ; il y a aussi des failles et il est traversé de quelques filons. Distribution géographique. — Lorsque la mer vint à l’époque crétacée recouvrir notre région, elle y trouva un sol qui élait émergé depuis l’époque houillère. Il y avait, comme de nos jours sur le continent, des vallées et des col¬ lines. Si, pour rétablir la géographie physique de cette an¬ cienne terre, on fait abstraction par la pensée des terrains secondaires et tertiaires, on trouve une crête dirigée d’Arras au Bas Boulonnais et correspondant aux affleurements de grès rouge du Pas-de-Calais ; elle s’élève vers le nord-ouest, où elle atteint, près de Loquingoie, 90 m. au dessus du niveau de la mer ; au sud-est, elle se rattache probablement au plateau des environs de Cambrai, qui est à une profondeur de 70 à 80 m. au-dessous du même niveau. A partir de cette chaîne le plateau allait en pente rapide vers la Flandre, car la surface des terrains primaires se trouve à — 150 m. à Béthune, à — 200 m. à Aire, à — 220 m. à Guines, à — 240 m. à Saint-Omer, à — 320 m. à Calais. Mais une partie de cette différence de niveau actuel entre les terrains primaires de la plaine et ceux de la chaîne de PArtois, doit être attribuée à un affaissement postérieur à l’époque crétacée. Au Nord-Est, le sol primaire se relève vers l’Ardenne et la Belgique, des¬ sinant déjà comme une vaste vallée la plaine actuelle de la Flandre. La surface de cette vallée n’était pas plane ; on y distingue aussi des hauteurs et des vallées secondaires. Ainsi le terrain — 157 — primaire de Tournai se prolonge vers Lille sous forme de colline avancée et vient se terminer entre Lezennes et Watti- gnies, à une profondeur de — 22 m. Au nord le sol plonge : — 51 m. à Lille, — 58 à Lannoy, — 170 à Menin. Il en est de meme au sud. Près de Mons se trouvait également une vallée, profonde de plus de 400 m. en dessous du plateau voisin et creusée dans les schistes houillers. Elle est limitée au nord par la crête du calcaire carbonifère de Blaton, et au sud par la bande de grès rouge du Caillou qui bique. Les principales profondeurs en suivant le thalweg sont : — 315 à Mons, — 240 à Baudour, — 317 à Pommerœuil, — 247 à Hensies. En pénétrant sur le territoire français, le fond de la vallée se relève ; il est encore de — 120 à — 140 m. entre Condé et Valenciennes, mais dans la forêt de Vicoigne il n’atteint plus que — 80 m. En arrivant près de Douai, la vallée gagne en largeur et en pro¬ fondeur ( — 147 m. à Flines-les-Raches, — 200 à Auber- chicourt). Puis sa direction change : elle prend à peu près celle du canal de la Deûle passant entre le promontoire de Lezennes et les collines du Pas-de-Calais ; à Carvin elle a — 110 m. de profondeur. Au-delà de La Bassée, elle va se joindre à la plaine de Flandre. Ces vallées étaient arrosées par des cours d’eau dont il nous reste des traces ; aussi devrons-nous distinguer au commencement de la période crétacée des formations fluvia- tiles et des formations marines. Les premières mers crétacées n’atteignirent pas, vers le nord, les rivages où étaient arrivées les mers jurassiques. Mais notre région subissant un affaissement lent, la mer gagna de plus en plus vers le nord, sans toutefois s’étendre jusqu’à Bruxelles, Gand, Ostende. Au sud-est il semble qu’une partie des hauteurs de l’arrondissement d’Avesnes ne furent jamais couvertes par les eaux de l’océan crétacé. Le terrain crétacé se divise en deux étages : l’étage supé- — 158 — rieur ou étage de la craie, et l’étage inférieur qui se subdivise en plusieurs assises, dont une seule est connue dans notre région. C’est l'assise la plus élevée, ou le gault. Gault. « 1° Formations fluviatiles. Sable et argile de Sar s-Poteries. — Les formations fluviatiles que Ton peut rapporter à l’assise du gault se trouvent principalement dans l’arrondissement d’Avesnes et dans le bassin de Mons. Elles se composent : 1° De sables grossiers, ferrugineux, avec nombreux galets de quartz blanc et concrétions de limonite à la base ; 2° De sables à grains plus fins qui passent aux précédents par l’augmentation de grosseur du grain ; 3° D’argile de couleur variable, généralement noire, accompagnée de bancs de lignites pyriteux. Ces roches sont disposées sans ordre dans des poches à la surface des terrains primaires. Cependant on remarque que le gros sable et le minerai sont dans le bas, tandis que le sable fin et l’argile sont à la partie supérieure (1). Toutefois, à la Haye de Trélon on exploite une sablière de sable blanc à grains fins, au fond de laquelle il y a une couche d'argile lignileuse avec minerai. Les sables grossiers sont exploités pour balaste par le chemin de fer, près de Féron C’est d’eux que sort la fon¬ taine ferrugineuse de Féron. Le sable fin, qui est généra¬ lement très-blanc, sert pour les verreries ; l’argile est em¬ ployée pour la fabrication des poteries à Sars-Poteries , Ferrières, etc. ; les lignites pyriteux, qui y sont contenus à Sains et à Offy, ont été utilisés sous le nom de cendres pour l’agriculture. (1) Bull. Soc. Géol.. 2°, XVI., p. 122. 1858. — 159 — Les sables et argiles de Sars-Poteries forment, dans Far- rondissement d’Avesnes, trois massifs principaux : 1° celui de Sars-Poteries, Beugnies, Dimechaux et Ferrières ; 2° celui de la ferme du Défriché à Sains ; 3° celui de Fourmies Féron, Couplevoie , etc. Elles s’étendent dans le nord du département de l’Aisne. Des cendrières comparables à celles de Sains ont été exploitées à la Folie-Not, près d’Aubenton. On peut les suivre dans l’Entre-Sambre-et-Meuse jusqu’au delà de Couvin. On doit aussi leur rapporter les argiles d’Andenne, si célèbres comme terre à pipe, et peut-être aussi les argiles rouges qui, en Belgique comme dans le nord de la France, traversent les bancs du calcaire carbonifère. Dans le bassin de Mons on trouve les mêmes dépôts de sable et d’argile lignitifère ; MM. Cornet et Briart ont donné de belles coupes (1) qui montrent bien leur irrégularité. Souvent le sable présente une fausse stratification très- inclinée caractéristique des dépôts fluviatiles. Leur épaisseur est très-variable ; à La Louvière on en a trouvé 105 mètres, et à Hautrage on 1’» traversé sur 141 mètres sans rencontrer le terrain houiller sous-jacent ; mais généralement elle est beaucoup moins considérable. L’argile est exploitée à Hondeng, à Baudour, à Hautrage ; on tire aussi le sable quand il est blanc comme à Hautrage. Les mêmes roches se voient tant sur la lisière nord du golfe de Mons, à Soignies et Tournai, que sur la lisière du sud, comme près de Bavai. On les rencontre aussi souterrai- nement dans quelques points de notre département, rem¬ plissant des poches à la surface des terrains primaires. Le torrent d’Anzin est une de ces poches de sables ferru¬ gineux. Il est rempli d’eau salée qui lui vient du terrain houiller. La difficulté de passer ce niveau d’eau lui a fait donner par les mineurs le nom qu’il porte. (1) Mémoires cour, de l’Ac. de Belg., t. 33. 1867. — 160 — A Sainghin, près du canal de La Bassée, un sondage a traversé à la base du terrain crétacé 15 m. d’argile accom¬ pagnée de limonite et de silex. L’âge du sable et de l’argile de Sars-Poteries a été très- controversé. Dumont les nommait aachenien parce qu’il les comparaît, bien à tort, aux sables d’Aix-la-Chapelle. Il les supposait correspondre au Wealdien d’Angleterre. MM. Cornet et Briartont émis une opinion séduisante, mais qui, jusqu’ici, n’a rencontré que peu d’adhérents. Ils supposent que ces dépôts sè sont faits pendant tout le temps que notre région est restée émergée, c’est-à-dire depuis la fin de l’époque houillère jusqu’à celle de la craie glauconieuse. A Wignehies, on peut constater que les sables ferrugineux sont surmontés par une couche fossilifère appartenant au gault. Ils ne peuvent donc être plus récents. Dans le Boulon¬ nais, dans le pays de Bray et dans les Ardennes, on trouve aussi des sables ferrugineux ou blancs et des argiles qui ont la plus grande analogie avec les dépôts en question. Dans ces régions ils reposent sur le terrain jurassique et appartiennent manifestement à l’étage crétacé inférieur. On n’a encore trouvé dans le sable et l’argile de Sars- Poteries d’autres débris animaux que des traces d’unios. Les végéta x y sont un peu plus communs. Outre un certain nombre de bois silicifiés, on peut y ramasser des cônes de pins, dont une espèce, le Pinus Corneti , est identique avec le Pinus oblongus du gault des Ardennes. Cette belle flore de conifère étudiée par le regretté abbé Coemans (1), indique le voisinage de montagnes. Tout porte à croire que les Ardennes étaient alors plus hautes qu’elles ne le sont actuellement. J. G. (ij Mém. cour, de l’Ac. de Belg., t. 83. 1867 — 161 — PATRIA BELGICA XIV. Géographie botanique. — XV. Paléontologie végétale. — XVI. Flore médicale. Par M. François Crépin M. Crépin, naturaliste du musée de Bruxelles, a été chargé de la partie botanique de la publication, et nul ne pouvait la traiter avec plus d’autorité que lui. Nous ne pouvons guère résumer ses substantiels articles, qui ne sont guère eux-mêmes qu’un résumé de ses nom¬ breuses observations... Un mot seulement sur le plan qu'il a suivi. Il divise la Belgique en quatre régions botaniques : 1° la région jurassique formée par la partie sud du Luxembourg; 2° la région Ardennaise ; 3° la région moyenne, subdivisée en zone calcareuse qui comprend les terrains primaires du Condros et de l’entre Sambre et Meuse et zone argilo-sableuse limitée au nord par une ligne sinueuse allant d’IIasselt à Fûmes; 4° la région septentrionale, où l’auteur distingue une zone maritime , les dunes , une zone poldérienne et la zone campinienne. La végétation de ces diverses régions est en relation avec la composition du sol. Dans la région maritime , la présence du sel marin déter¬ mine la production d’un certain nombre d’espèces, dites pour cetle raison halophiles , en même temps que le voisinage de la mer en adoucissant le climat permetla croissance de cer¬ taines plantes méridionales. La zone poldérienne possède aussi quelques espèces halo¬ philes. Quant à la zone campinienne, dont le sol est formé de landes sablonneuses et de marécages, sa végétation est essen¬ tiellement silicicole et hygrophile. La zone argilo-sableuse de la région moyenne n’a pas de cachet particulier. La zone calcareuse , au contraire , dont le — 162 sol est accidenté , où les rochers sont nombreux et de nature minéralogique variable , offre un grand nombre d’espèces appartenant surtout au groupe des Xérophyles , c’est-à-dire des plantes qui recherchent les stations sèches. La zone ardennaise doit à son altitude la présence de plu¬ sieurs espèces dites subalpines. Ses collines , formées de ro¬ ches siliceuses, ses nombreux cours d’eau, les marécages qui couvrent ses plateaux , impriment à sa faune un caractère silicicole et hygrophyle qui la fait ressembler sous ce rapport à la Campine. Cependant la proportion des plantes hygro- philes y est moindre. M Crépin a vérifié pour la Belgique l’existence de certaines lois qui avaient été reconnues dans la distribution des plantes d’autres pays. Ainsi, il a constaté que l’humidité augmente la proportion des monocotylédones. Ces plantes sont aux dicotylédones dans la proportion de 1 : 2,71 dans la zone campinienne et de 1 : 3,16 dans la zone calcareuse qui est beaucoup plus sèche. La présence de 1,046 espèces végétales dans la zone calca¬ reuse, tandis qu’il n’y en a que 838 dans la zone campi¬ nienne, est une nouvelle preuve en faveur d’une autre loi : à latitude égale , la variété dans la nature des roches et leur relief augmente le nombre absolu des espèces. M. Crépin envisage ensuite les rapports de la flore belge, soit avec les contrées voisines, soit avec toute la végétation de l’hémisphère boréal. Il termine par quelques considéra¬ tions sur les Cryptogames cellulaires , et regrette que leurs études soient peu développées en Belgique. L’article consacré à la paléontologie végétale contient une liste par terrains de tous les végétaux fossiles découverts en Belgique. Cette liste est très-complète si on tient compte de nos connaissances, mais elle est bien incomplète au point de vue de la science pure. Mieux que tout autre , M Crépin est — 163 à même d’en remplir les lacunes. Il y travaille avec un zèle digne des plus grands éloges, et nous espérons que sous peu il fera paraître un beau mémoire sur la flore dévonienne. Dans le troisième article , on trouve la liste des plantes indigènes de Belgique classées d’après leurs propriétés médi¬ cinales, puis la distribution de ces mômes plantes officinales dans les diverses régions botaniques. SOCIÉTÉS SAVANTES. SOCIÉTÉ ENTOMOLOGIQUE DE BELGIQUE. Le Bulletin a déjà entretenu deux fois ses lecteurs des travaux de la Société entomologique belge (1) ; elle continue à prendre un développement considérable et ses volumes de 1872 et 1873, tomes 15 et 16, marquent un progrès de plus en plus soutenu. Il y a loin de ces beaux volumes de 400 pages aux minces fascicules des premières années ; les bul¬ letins des séances, qu’elle distribue mensuellement, grossis¬ sent dans la môme proportion, et le catalogue de sa biblio¬ thèque annonce une collection d’ouvrages entomologiques qui peut rivaliser avec les mieux garnies. Comme par le passé, elle ouvre ses publications aux savants étrangers qui lui communiquent des travaux mono¬ graphiques importants : MM. de Chaudoir, Mac Lachlan, Boisduval, Desbrochers des Loges, ont largement profité de cette hospitalité ; nous ne dirons rien de leurs Mémoires qui roulent en grande partie sur des familles exotiques, non plus que de la Monographie des Calathides , de M. Putzeys, travail très-remarquable, mais qui ne renferme rien de neuf quant aux espèces de nos contrées. Nous préférons signaler brièvement, ce qui se rapporte à notre faune locale. Quatre Rapports de feu Wesmael, (l) 18T1, page 89 : tomes 12 et 13. — 1872, page 94 : tome 14. 164 — adressés au ministre de l’intérieur en 1840 et années sui¬ vantes, signalent les principaux insectes rencontrés en Bel¬ gique dans des excursions scientifiques officielles ; ils n’ont plus d’intérêt aujourd’hui, et leur publication ne peut être qu’un hommage à la mémoire de l’entomologiste belge. M. de Selys-LoDgchamps, dans une révision des Psocides décrits par Rambur, donne une liste des insectes de cette famille rencontrés en Belgique, ils sont au nombre de 21. Aucune étude sérieuse des Névroptères du département du Nord n’a encore été faite ; les nombreux matériaux réunis par M. de Selys sur ceux de la Belgique , matériaux qui vont prochainement paraître en un Catalogue raisonné, doivent donc nous être doublement précieux. Il faut surtout se féli¬ citer de cette révision des Psocides si peu connus et si mal étudiés en France ; elle poussera peut-être quelqu’entomo- îogiste du Nord à des recherches qui ont fait défaut jusqu’à présent. Citons encore une Note de notre compatriote, M. Lethierry, donnant une liste de Coléoptères rencontrés par lui sur divers points de la frontière belge, à Warneton, Hollebeke, Mont- Noir, Angres, etc., et non mentionnés dans les catalogues de Belgique ; ils sont au nombre de 38. Les bulletins des séances de la Société occupent à peu près la moitié des volumes ; ils montrent une certaine ten¬ dance à la discussion des théories à la mode, sur l’espèce et son. origine, sur l’amixie, sur la délimitation des faunes régionales, sur la priorité en nomenclature, etc. Certes, nous n’avons pas qualité pour y trouver à redire ; nous croyons même que les théories ont leur utilité, car, ayant besoin de s’appuyer sur des faits, elles poussent aux recher¬ ches positives et contribuent à l’avancement de la science ; malheureusement, ces discussions ne convertissent en général personne, et n’ont souvent pour résultat que d’apprendre à douter. A. de Norguet. — 165 — CONGRÈS DE LILLE. V Association française polir V avancement des Sciences a tenu à Lille, du 20 au 27 août, sa troisième session annuelle qui a été inaugurée par les discours, chaleureusement applaudis, de Monsieur le Maire de Lille et de Monsieur Wurlz, doyen de la Faculté de médecine de Paris, président de l’Association pour 1874. Les travaux du Congrès se sont partagés entre les séances générales et les séances de sections , ainsi subdivisées : Sciences mathématiques, Génie civil et Navigation, Physique et Météorologie, Chimie, Géologie, Botanique, Zoologie, Anthropologie, Sciences médicales, Agronomie, Géographie, Économie politique et Statistique. Plusieurs excursions ont aussi été entreprises, la première à Boulogne, la seconde à Roubaix, la troisième à Anzin ; dans ces diverses localités, comme à Lille, les membres de l’Association ont reçu un très-sympathique accueil. Dans l’impossibilité où se trouve le Bulletin de donner un compte-rendu détaillé de tous les importants travaux qui ont été présentés, en grand nombre, pendant le cours de la session, il s’attachera plus spécialement à passer en revue ceux qui intéressent la région du Nord. Cette revue sera commencée dès aujourd’hui et continuée dans les prochains numéros du Bulletin. SÉANCES GÉNÉRALES. M. GIARD Laboratoire de zoologie maritime à Wimereux (Pas-de-Calais) Messieurs, Ce n’est pas devant une assemblée telle que celle à la¬ quelle j’ai l’honneur de m’adresser, qu’il est nécessaire de plaider la cause des laboratoires de zoologie maritime. L’uti- 166 — lité de semblables établissements n’est plus à démontrer, et il semble qu’il devrait suffire aux zoologistes de notre génération de citer les œuvres de ceux qui furent leurs maîtres, pour convaincre les timides et les incrédules s’il en existe encore. Mais comme il n’arrive que trop souvent, alors que de tous côtés Y on s’élance avec ardeur dans les voies ouvertes par des savants français, tandis que des zoologistes allemands, suisses, russes, anglais, décrivent la faune de Saint-Vaast la Hougue, de Port-Vendres, de Nice, on hésite, chez nous, à créer quelques-uns de ces observatoires zoolo¬ giques que les nations voisines multiplient dans toutes les mers; on refuse d’encourager des recherches dont les consé¬ quences pratiques et les applications, pour ne pas être immédiatement sensibles, n’en sont pas moins importantes et parfaitement assurées. Aussi ne comptons-nous, en France, que trois laboratoires de zoologie maritime : Concarneau, Marseille et Roscoff. Concarneau est devenu à jamais célèbre par les travaux de Coste, de*Gerbe et de G. Pouchet. Marseille est connu par les belles recherches de Lespès et surtout de Marion, le jeune et habile directeur de ce laboratoire. Quant à la station de Roscoff, bien que de création récente, elle a déjà fourni le sujet de plusieurs mémoires importants, dont il ne m’appar¬ tient pas d’apprécier la valeur. Mais ces trois points de notre littoral, si intéressants qu'ils puissent être, sont trop éloignés du nord de la France pour pouvoir servir aisément aux investigations des naturalistes de notre pays. Le département du Nord, malgré son aspect uniforme, malgré les tendances pratiques de la plupart de ses habitants, a vu naître cependant bien des amants passionnés de la nature. Les Macquart, les Degland, les Desmazières, les Lestiboudois, les Lecoq, ont laissé parmi nous des traditions qui sont loin d’être perdues. Toutefois, c’est surtout depuis — 167 — quelques années qu’un courant plus marqué entraîne nos jeunes gens vers l’étude des sciences biologiques. Grâce à Féclat que mes prédécesseurs, MM. de Lacaze-Duthiers et Dareste, ont jeté sur l’enseignement de la zoologie dans notre Faculté; grâce au zèle infatigable que mon collègue, M. Gosselet, a déployé depuis dix ans pour répandre dans notre pays le goût des recherches géologiques et des sciences naturelles en général, j’ai trouvé en arrivant à Lille un noyau de travailleurs tel qu’on en rencontre dans peu de facultés de province. Quelques excursions, faites pendant la durée des vacances, m’avaient permis de comprendre tout ce qu’on pouvait attendre de cette jeunesse flamcnde difficile à en¬ thousiasmer, peu accessible aux théories, mais douée d’une rare ténacité et d’une sage prudence dans les obser¬ vations. C’est ainsi que pendant une année j’ai exploré successive¬ ment les points les plus intéressants de notre littoral et même de la Belgique, depuis Oslende jusqu’au cap Gris-Nez. Toute¬ fois, élevé à l’école de M. Lacaze-Duthiers, je ri’étais que médiocrement satisfait par ces excursions plus ou moins ra¬ pides, faites dans des conditions d’installation toujours fort défectueuses. En effet, comme l’a si bien dit mon savant maître, « ces recherches, faites à pied levé, ne peuvent nous fournir que des données, non-seulement insuffisantes, mais encore trompeuses, parce qu’elles n’ont pas leur point de départ dans des études longtemps poursuivies. » J’ai donc dû me préoccuper de chercher, sur un point de nos côtes, une localité où l’on put établir, non pas un labo¬ ratoire complet destiné à faciliter les travaux de personnes ayant déjà un nom dans la science, mais une sorte de dé¬ pendance du laboratoire de la faculté de Lille, où les jeunes étudiants, dont la direction m’est confiée, pussent, d’une part, compléter sur la nature l’enseignement théorique du cours, et, d’autre part, s’essayer à des recherches originales 168 — en faisant connaître la faune encore si peu étudiée de cette partie du littoral. Le choix de la station de Wimereux m’était indiqué par des raisons nombreuses et importantes. La première et la plus sérieuse est la nature géologique du rivage. L’on a re¬ marqué depuis longtemps, en effet, que la richesse zoolo¬ gique d’une côte est en raison directe de l’âge des roches qui la composent. Mon attention devait donc se porter tout d’abord sur les terrains jurassiques du Boulonnais, et, parmi ces terrains, sur ceux d’entre eux dont la structure minéralogique est le plus compacte, les grès portlandiens qui forment les plages de Wimereux et du Portel. Ces plages rocheuses sont, en effet, bien plus riches que les baies sa¬ blonneuses d’Ambleteuse et d’Audresselle, bien plus riches surtout que les environs de Dunkerque et le rivage plus ré¬ cent de la mer du Nord. Du reste, les catalogues des mol¬ lusques et des crustacés supérieurs des environs de Boulogne, dressés il y a plus d’un demi-siècle par un zélé naturaliste de cette localité, M. Bouchard-Chanteraux, m’avaient fait pressentir que les rochers souvent cités de la Tour de Croy et de la Pointe-aux-Oies, devaient renfermer aussi une grande variété d’animaux inférieurs peu connus et intéressants. Vous estimerez, j’espère, que mon attente n’a pas été trompée. Wimereux est près de Boulogne et relié à cette ville par le chemin de fer; c’est là un second avantage qui m’a paru avoir quelque valeur. On peut, en effet, en jouissant du calme de la campagne et du recueillement nécessaire aux études sérieuses, profiter des ressources que donne le voisi¬ nage d’une grande ville, éviter des transports coûteux et se procurer aisément sur place une foule d’objets qui consti¬ tuent un bagage incommode quand on doit passer quelque temps dans des localités plus écartées. L’absence d’établisse¬ ment balnéaire et le manque d’hôtel luxueux écartent de - 169 - Wimereux cette population oisive et malsaine dont la curio¬ sité paresseuse est si gênante pour le travailleur dans les ports de mer plus courus et plus renommés. Enfin, grâce au nouveau chemin de fer de Saint-Omer à Boulogne, on peut facilement faire en trois heures le trajet de Lille à Wimereux ; venir, par exemple, recueillir des animaux pendant une grande marée et retourner le soir à Lille avec son butin pour l’étudier les jours suivants. J’ai pu ainsi entreprendre à la Faculté des études suivies d’em¬ bryogénie : il est même intéressant de noter que l’eau de mer conservée depuis longtemps, et dans laquelle on ne trouve plus ni infusoires ni crustacés copépodes, est mer¬ veilleusement propre à l’éducation de certains embryons qui se trouvent, ainsi mis à l’abri d’une dangereuse concur¬ rence vitale. Ce trajet si court et si facile de Lille à Wimereux est, pour le service, un avantage inappréciable. Pendant l’été, par au¬ torisation spéciale de M. le recteur de l’Académie, les cours de botanique auront lieu deux jours de suite, et le professeur passera le reste de la semaine au laboratoire de zoologie maritime, où il remplacera, par un enseignement pratique de tous les instants, les conférences et manipulations qu’il a instituées au laboratoire de la Faculté. # Je sais qu’en procédant ainsi (et j’en ai fait l’expérience depuis le mois de juin de cette année), je perdrai une grande partie du temps que les nécessités de l’enseignement me lais¬ sent pour mes travaux personnels; mais j’ai la conviction que je ne rendrai pas pour cela moins de services à la science dont je désire les progrès avant tout. Telles sont, Messieurs, les idées qui ont présidé à la création de la station maritime de Wimereux : telles sont les raisons qu’à diverses reprises j’ai cherché à faire valoir pour obtenir quelque assistance dans la réalisation de mon projet. La ville de Lille, qui sait admirablement comprendre les — 170 — besoins de la science, venait de m’accorder, à Lille même, en face des bâtiments de la Faculté devenus trop étroits pour les services qu’ils renferment, une vaste maison où seront installés l’année prochaine des laboratoires d’histologie, d’anatomie et de physiologie, en un mot tout ce qui compose ce qu’on appelle en Allemagne un institut zoologique. Je suis heureux de saisir cette occasion pour remercier publique¬ ment M. le Maire de la ville de Lille et tout le conseil muni¬ cipal, dont la générosité à l’égard de l’enseignement supérieur ne s’est jamais démentie un instant. On comprend qu’après une pareille faveur je ne pouvais recourir à notre cité, dont les charges sont déjà si lourdes, pour l’entreprise que je voulais tenter à Wimereux. C’est donc au ministère que j’adressai mes demandes, encouragé par les promesses de M. Dumesnil dont le dévouement aux intérêts de la science est bien connu de tous ceux qui ont pu l’approcher. Malheureusement, les crédits trop restreints affectés aux nécessités les plus urgentes des diverses facultés n’ont pas permis à M. le ministre de nous venir en aide dans cette circonstance. Ma plus vive reconnaissance n’en est pas moins acquise aux personnes qui ont bien voulu appuyer mes démarches et surtout à M. Violette, doyen de la Faculté des sciences de Lille, dont les conseils et l’assistance ont puissam¬ ment secondé mes efforts. C’est alors que je me suis décidé à entreprendre avec mes seules ressources la première instal¬ lation du laboratoire de Wimereux. J’ai bientôt reçu le concours le plus empressé de la plupart de mes élèves, MM. H. Leloir, Ch. et J. Barrois, Dutertre et de Guerne qui ont déployé le zèle le plus louable pour le succès de notre œuvre. J’ai aussi été fort bien secondé par M. P. Hallez, mon préparateur, que je suis heureux de remercier ici du dé¬ vouement qu’il m’a toujours témoigné. Si je suis entré dans les détails minutieux de nos misères, c’est que je tiens à vous expliquer d’avance tout ce que l’in¬ stallation de notre laboratoire maritime présente encore de — 171 — défectueux. Vous savez ce que peuvent être les économies d’un professeur suppléant dans nos Facultés françaises. J’ai pris à ma charge le local, la verrerie et les aquariums. Mes élèves ont apporté leurs instruments de travail et une partie des livres indispensables. L’état de nos finances ne nous a pas permis d’avoir cette année un garçon de laboratoire, nous avons donc été forcés de faire nous-mêmes tout le service d’appropriation, de remplir et de vider les aquariums, de transporter seau à seau l’eau de mer dont nous avions besoin, de nettoyer et entretenir les instruments de dissecca- tion que le contact de l’eau salée détériore si rapidement. Malgré cette modeste, cette trop modeste installation, nos dépenses pour cette année s’élèvent à 3000 francs environ, dont 1000 francs pour la location de l’immeuble du 15 juin 1874 au 15 juin 1875. Voici maintenant l’inventaire rapide de ce que nous avons rencontré à Wimereux et des recherches que nous avons pu y faire. Je n’ai pas, cela va sans dire, la prétention de vous donner un catalogue complet de la faune de cette localité. Je veux simplement attirer votre attention sur les types les plus intéressants que nous y avons observés et sur les prin¬ cipaux résultats que l’étude de ces animaux nous a fournis jusqu’à présent. Plusieurs de ces résultats ont été déjà com¬ muniqués à l’Académiç des sciences; beaucoup sont encore inédits et formeront le sujet de mémoires qui ne tarderont pas à être publiés. Rien n’est plus facile pendant l’été que d’observer à Bou¬ logne la phosphorescence de la mer. Cette phosphorescence est due presque exclusivement à la Noctiluca miliaris , ani¬ mal du groupe des Protozoa , qui est parfois tellement abon¬ dant qu’il constitue un véritable embarras pour le naturaliste en encombrant les vases où l’on conserve des embryons. Pendant quelques jours, du 20 au 25 juin, l’eau de la mer, à la marée montante, présentait sur le bord la consistance du tapioca et une couleur d’un rouge tomate assez pâle. Cette — 172 — couleur était due, comme je m’en suis assuré, aux spores des noctiluques qui paraissaient se reproduire avec une prodi¬ gieuse rapidité pendant les journées chaudes et orageuses. Ces spores sont vertes à la lumière transmise et rougeâtre par réflexion ; il m’a été facile de vérifier à cette époque la plupart des observations de Cienkowsky. Parmi les autres protozoaires, je dois citer les grégarines, dont de nombreuses espèces se rencontrent dans les némer- tiens, les amélides, etc. Une espèce intéressante du genre Monocsytis se trouve fréquemment dans les lobules hépatiques du Molgula socialis. Je ne parle pas des radiolaires, des rhi- zopodes et de tout le monde des infusoires, dont les types innombrables exigeraient encore, rien que pour être décrits, la vie de plusieurs naturalistes. J’ai pourtant remarqué plus particulièrement deux curieux acinétiens, dont l’un vit en parasite sur les crustacés copépodes, l’autre se fixe de préfé¬ rence sur les cormus des bryozoaires. Les spongiaires comprennent plusieurs espèces intéres¬ santes. On trouve fréquemment, sous les rochers de la zone profonde, YHalisarca Dujardini, et bien plus rarement une autre espèce de myxosponge qui présente une singulière res¬ semblance avec le Botrylloides rubrum du groupe des asci¬ dies. Parmi les siliceuses on remarque plusieurs Vioa ou éponges perforantes : le Chalina oculata , qui est parfois re¬ jeté sur les coquilles d’huîtres, V Hymeniacidon caruncula , VIsodictrya rosea , et surtout YHolicondria panicea , dont la cormogenèse est singulièrement modifiée suivant les condi¬ tions extérieures d’existence et mériterait d’être étudiée avec soin. Les calcispongiaires sont représentés également par des types nombreux : le Sycortis quadrangulata, YAscandra contorta, le Sycandra compressa, YAscandra variabilis. L'un des jeunes travailleurs de la Faculté des sciences, M. Ch. Barrois, s’est occupé cet été de l’embryogénie de ces animaux, qui présente de grandes difficultés et sur laquelle — 173 — on est loin de s’entendre. Haeckel et Metschnikoff, les deux zoologistes qui ont étudié cette question, sont arrivés à des résultats tout à fait différents. M. Ch. Barrois a choisi comme objets de ses recherches le Sy ceindra compressa , espèce voi¬ sine de celles étudiées par ses prédécesseurs, et excessive¬ ment commune à Wimereux, où elle présente les faits de polymorphose les plus intéressanis. Les résultats obtenus par ce jeune naturaliste ne tarderont pas, je l’espère, à être publiés; ils me paraissent confirmer d’une façon remarquable l’opinion que j’avais émise en m’ap¬ puyant principalement sur des considérations d’ordre mor¬ phologique, à savoir : que les oscules des éponges sont le plus souvent des ouvertures d’expulsion de l’eau, des cloa¬ ques et non des bouches ou des pseudostomes, comme le prétend le professeur Haeckel. Les idées du savant profes¬ seur d’Iéna sur la nature des éponges ne peuvent s’appliquer convenablement qu’au groupe des Asconcs. Chaque tube radial des Sycones est homologue à la personne des Ascones , l’ouverture garnie de longs spiculés est un cloaque commun. Chaque Sycon est un cormus et non une personne unique. Il en est de même pour les Leucones, où chaque personne est constituée par ce qu’on a appelé les chambres ou corbeilles vibratiles. La couche de grosses cellules extérieures de l’embryon, que Haeckel considère comme un exo îerme, paraît plutôt comparable aux cellules formatrices du testa chez les asci¬ dies composées et en général chez tous les tuniciers, mais c’est là un point qui exige encore de nouvelles recherches. Enfin, il résulte des recherches de M. Charles Barrois que les spiculés simples apparaissent les premiers et ont par conséquent, contrairement à l’opinion de Haeckel, une im¬ portance très-grande pour la phylogénie, c’est-à-dire pour la classification généalogique des éponges. Le groupe des zoophytes proprement dits est assez large¬ ment représenté à Wimereux. — 174 — Le charmant Cydippe pileus est souvent rejeté par milliers sur la plage, tout à fait au premier printemps. Quand la mer est agitée, elle amène fréquemment sur le sable des méduses d’espèces variées. On rencontre aussi sur les côtes du Boulonnais la plupart des tubulaires, des campa- nulaires et des sertulaires signalés par Yan Beneden sur les côtes de Belgique. L’Alcy onium digitatum couvre souvent les grandes huîtres draguées aux environs d’Étaples; on le trouve communément aux grandes marées sous les rochers de la tour de Croy et de Châtillon. Les anémones de mer, ces gracieuses créatures semblables à des fleurs composées, sont excessivement nombreuses en espèces et en individus ; je citerai parmi les plus remar¬ quables le superbe Actinoloba dianthus (l’œillet), le Bucodes crassicornis (le dahlia), Y Actinia equina et sa variété mesem - brianthemum reliée par une multitude de formes intermé¬ diaires; les Sagartia troglodytes , rosea , viduata , bellis, etc. Gomme caractère négatif pour notre faune, on peut indi¬ quer l’absence complète de YAnthea cereus si commune sur les côtes de Bretagne. Les échinodermes ne comprennent qu’un petit nombre d’espèces, mais quelques-unes d’entre elles sont représen¬ tées par des myriades d’individus. Telles sont l’ Aster acanthion rubens et le Psammechinus miliaris. Vers Ambleteuse, on trouve communément rejetés sur le sable les Echinocardium purpureum et arenarium. L’intestin des soles nous a plusieurs fois fourni les Echinocyamus tarenlinus et pusillus. Enfin, sous les pierres, on rencontre plusieurs espèces d’ophiures dont chacune paraît avoir des zones d’habitats parfaitement circonscrites. Le groupe des géphyriens nous a fourni le Sipunculus nu- dus, qui n’est pas rare au milieu des tubes d’hermelles, dans la zone des laminaires, et un type très-curieux que j’ai ren¬ contré parmi les corps étrangers recouvrant le dos d'un — 175 - lnachus scorpio. C’est un petit géphyrien qui, par la disposi¬ tion de ses tentacules buccaux, semblerait appartenir au curieux genre Petalostoma de Keferstein : mais la trompe est armée et les muscles rétracteurs, au nombre de quatre, sont situés à la partie antérieure de l’animal. C’est donc un type synthétique réunissant les caractères des genres Peta¬ lostoma, Sipuncuhis et Phascolosoma. Parmi les bryozoaires, je citerai particulièrement le remar¬ quable genre Pedicellina, dont nous possédons au moins deux espèces distinctes. L’une d’elles, très-voisine du Pedi- cellina echinata , vit en parasite sur les Bugula et notamment sur le Bugula plumosa. Les affinités de ces animaux avec le groupe si anormal du Loxosoma ont déjà frappé tous les naturalistes qui les ont étudiés. Or, le Loxosoma Kefersteinii vit aussi, d’après Claparède, en parasite sur les Bugula. Le Loxosoma singularis habite sur les annélides du genre Capi- tella. Le Loxosoma neapolitana a été trouvé psr Kowalewsky dans les tubes d’un chétoptère. J’ai observé sur nos côtes une espèce inédite de Loxosoma qui vit sur les siponcles. Les relations du parallélisme qui existe entre l’arbre généalogique des animaux parasites et celui des êtres sur lesquels ils vivent, me portent à voir dans les faits précédents une con¬ firmation des idées ingénieuses auxquelles Schneider est arrivé par l’embryogénie, relativement à la parenté des annélides, des géphyriens et des bryozoaires, le genre Plo- ronis, établissant un passage entre ces derniers types. Du reste, les recherches embryogéniques sur le groupe des bryozoaires sont encore fort insuffisantes. Les larves sont loin de présenter une structure aussi simple que celle qui leur est attribuée par Yan Beneden, Nitsche, Claparède. M. Jules Barrois, élève de la Faculté, qui se livre en ce mo¬ ment à des recherches sur ce sujet, a trouvé chez les em¬ bryons du Bugula et de deux autres genres une organisation au moins aussi compliquée que celle du Cijplonautes qm n’est, on le sait, qu’une larve de Membranipora. — 176 - M. J. Barrois s’est occupé aussi de l’organisation des né- mcrtiens, dont on trouve à Wimereux des types nombreux et variés. Ses recherches ont porté surtout sur les questions si pleines d’intérêt, mais encore si obscures de la cavité du corps et du système circulatoire ; elles l’ont amené à ce ré¬ sultat, que la cavité générale desnémertes est généralement composée d’un ensemble de cavités secondaires plus ou moins complexes, dont les rapports constants avec certains organes jettent un jour nouveau sur la signification mor¬ phologique de ces derniers. La trompe est bien, comme l’ont annoncé Claparède et Marion, un organe tout à fait indépendant du tube digestif. Ces recherches, que l’auteur s’occupe en ce moment à compléter, ont été faites sur plu¬ sieurs espèces de Polia, notamment le curieux Polia involuta , parasite des œufs de Cancer marnas, sur le Borlasia longis- sima , le Tetrastema marmoreum , les Valencenia , etc. Les turbellariés de notre région ont déjà fourni le sujet de deux travaux importants à M. P. Hallez, préparateur à la Faculté des sciences de Lille. Ce jeune naturaliste a fait voir que le testicule des rhabdocœles possède, comme l’ovaire, des follicules dont le produit n’est plus un élément direct de la génération, mais une sécrétion accessoire destinée à par¬ achever le développement des spermatozoïdes, comme la pro¬ duction des cellules vitellines dans le vitellogène complète le développement de l’œuf. Parfois, cette glande accessoire, tout en gardant ses rapports morphologiques, joue un rôle physiologique très-différent et sécrète un liquide vénéneux. C’est ce qui a eu lieu dans le beau genre Prostamum , dont M. Hallez a pu étudier à Wimereux plusieurs espèces ma¬ rines pour la plupart encore inédites. Les annélides nous ont présenté plusieurs espèces d’oligo- chètes marines, dont l’étude serait certainement très intéres¬ sante. Les chétopodes sont excessivement nombreuses. Les plus abondantes sont : VAphrodita aculeata , le Peclinaria — 177 - belgica , l’arénicole des pêcheurs, de nombreuses espèces de Néréides, Phyllodoce , Polynoc , Sj/Ww, etc. Les hermelles sont assez abondantes dans la région des laminaires pour caractériser une zone très-nette, où les ro¬ chers sont complètement recouverts par les masses alvéolées que forment leurs tubes en s’agrégeant. On rencontre également des Leucodorum , des Terebelles , des Sabella , des S pirorbis, qui recouvrent souvent la tige et les expansions foliacées des fucus et des laminaires. Parmi les vers, j’ai remarqué une abondance extraordi- naire de nématoïdes libres, et de très-nombreuses espèces de nematoïdes parasites, de cestodes et de trématodes. Je signa¬ lerai seulement deux types de ce dernier groupe : un petit distome parasite du Cydippe pileus , et le singulier Bucepha- lus polymorphus dont j’ai eu le bonheur d’observer l’enkys- tement dans les viscères de l’orphie (Belone vulgaris). Les tuniciers simples sont représentés, à Wimereux, par le Ciona inleslinalis , YAscidia scabra, VAscidia chlorhena , qui abondent sous les pierres de la tour de Croy et de la roche Bernard. La Cynthia ruslica tapisse le dessous des rochers qui surplombent; elle est surtout foit commune au Gris- Nez. Les huîtres draguées d’Étaples sont souvent couvertes de beaux échantillons de Cynthia rustica. Cette espèce se trouve d’ailleurs, aux basses eaux, à la surface inférieure des pierres. Parmi les molgulides, il faut citer d’abord le très-intéres¬ sant Molgula socialis , qui caractérise une zone et se trouve largement distribué à l’est et à l’ouest de Boulogne-sur-mer. J’ai déjà fait connaître plusieurs particularités remarquables que présente cette espèce au point de vue de l’embryogénie et de l’éthologie. Je signalerai encore la suivante, qui me parait avoir une certaine importance. Tandis que le Molgula socialis est excessivement abondant au printemps et au com¬ mencement de l’été, et représenté alors principalement par de très- gros individus, il devient, au contraire, bien moins — 178 commun et même rare vers la fin de juillet et au commence¬ ment d’août. Puis à la fin d’août on le retrouve de nouveau très-commun, mais représenté uniquement par des individus jeunes et de petite taille. Comme cette espèce vit très-solide¬ ment fixée sur la roche et en masses compactes, il e.'t clair qu’il n’y a pas ici de migrations, mais les vieux individus qui ont hiverné meurent après la reproduction, sont entraî¬ nés par les vagues et bientôt après remplacés par la jeune génération qui échappe quelque temps à la vue par sa peti¬ tesse. On comprend à quelle méprise ces faits pourraient donner lieu si l’espèce, au lieu d’être fixée sur les pierres, se trouvait libre et plongée dans le sable. Au milieu des masses grégaires formées par le Molgula socialis, on ren¬ contre assez fréquemment un petit Gymnocystis dont le têtard présente, d’une façon déjà très-remarquable, les sin¬ guliers rayons natatoires que j’ai signalés chez diverses larves d’ascidies, et qui atteignent un si haut degré de déve¬ loppement chez les Cynthia composés du genre Polystycle. Parmi les ascidies composées, on trouve très-abondam¬ ment le Circinalium concressens, le Polyclinum succineum , un botrylloïde nouveau que j’appellerai Botrylloïdes bolo- niense, une forme très-remarquable du Morchellium argua, YEncœlium parasiticum , les Leptoclinum maculosum et du- rum, etc. Les Polyclinum , les ascidies simples et autres corps étran¬ gers de la zone des hermelles sont fréquemment recouverts par les cormus d’une intéressante espèce de diplosomien. Les synascidies de ce groupe, dont j’ai le premier nettement indiqué l’organisation et la place taxonomique, sont encore confondues par des zoologistes très-distingués avec les genres si distincts de la tribu des didemniens. C’est une erreur que n’a pas su éviter l’un des premiers zoologistes de notre épo¬ que, Kowalewsky, dans un travail récent qu’il vient de publier sur le bourgeonnement des ascidies, travail dans lequel se trouvent confirmés une grande partie des faits que — 179 j’avais indiqués en 1872 relativement au bourgeonnement ovarien des Amarœcium. Une nouvelle espèce de ce dernier genre a été découverte cet été à Wimereux. Je l’ai nommée Amaracium bilaterale, à cause d’une disposition remarquable de la branchie qui présente de chaque côté une ligne longi¬ tudinale de papilles analogues à celles que l’on trouve entre chaque rangée de fentes dans l’organe respiratoire du Perophora Listeri. Je ne parlerai pas de la classe des mollusques qui est aussi largement représentée à Wimereux, mais dont l’étude est relativement plus avancée, du moins pour ce qui concerne la spécification, giace aux laborieuses recherches de Bou¬ chard Chanteraux, et de son zélé continuateur, M Allaud, adminisrateur du musée de Boulogne. J’insisterai cependant sur l’intérêt que présente l’étude purement descriptive de ces animaux au point de vue de la géographie zoologique Les belles publications de Forbes, de Jeffreys, de Aidez et Han¬ cock, nous ont fait connaître parfaitement la faune malaco- logique des côtes d’Angleterre. Hensen et Moebius publient en ce moment celle de la baie de Kiel. Plusieurs mollusques du Boulonnais, particulièrement les nudibranches, présen¬ tent des formes intermédiaires entre les types britanniques et ceux observés à l’entrée de la Baltique. Tels sont, pour citer quelques exemples, YEolis papillosa, les Polycera occllata et cristata, le Dendronotus arborescens , etc. Le groupe des arthropodes, aux formes si variées et sou¬ vent si bizarres, a particulièrement attiré mon attention. L’embryogénie des pycnogonides, dont cinq ou six espèces se retrouvent communément à Boulogne, m’a fourni plu¬ sieurs résultats intéressants. Les quatre paires de pattes que ces animaux possèdent à l’état adulte ne peuvent être regar¬ dées comme homologues des quatre paires de pattes des acariens, dont la première forme larvaire présente cependant une ressemblance indiscutable avec le Nauplius des Pycno- gonum. — 180 — La première paire d’appendices de la larve des Pxjcnogo- num littorale renferme un organe glandulaire que je crois comparable à celui qu’on rencontre chez les embryons des cirrhopodes et des rhizocéphales. Cet organe n’est autre que le rudiment de la glande verte, depuis longtemps connue chez un grand nombre de crustacés, et qui souvent vient débou¬ cher au dehors, comme cela a lieu dans la corne frontale des embryons des cirrhopodes vrais ou parasitaires. Il est singulier que Claparède ait pris cette glande pour une partie musculaire chez le Nauplius de l’anatife, Claparède, qui avait fait connaître un organe analogue et probablement homologue chez les embryons d’un grand nombre d’annéli- des. Keferstein a aussi indiqué cette formation chez les larves des Spirorbis : elle paraît du reste permanente chez une foule d’espèces du groupe des chétopodes. J’ai étudié avec une satisfaction toute particulière les types dégradés par le parasitisme, notamment ceux qui appartien¬ nent sux groupes des rhizocéphales, des isopodes et des copépodes. Cette étude m’a convaincu de l'insuffisance des recherches anatomiques, quand ces recherches ne sont pas complétées par l’embryogénie. Il est remarquable, en effet, que sous des conditions d’existence similaires, les parasites appartenant aux classes les plus différentes arrivent à pré¬ senter une structure anatomique des plus uniformes. Les organes des sens et ceux de la locomotion ont subi le plus souvent une athrophie complète. Le tube digestif lui-même a souvent fini par disparaître, et tout l’animal à l’état adulte se réduit, dans le sexe femelle à un simple sac ovigère, dans le sexe mâle à une bourse à spermatozoïdes Entre un Saccu- lina et un Peltogaster , un Cryptoniscus et un Ophioseides, il y a, au point de vue de l’anatomie pure, des différences bien peu considérables. Mais l’embryogénie nous révèle aussitôt les véritables relations de parenté de ces êtres dégradés par le parasitisme. L’étude des parasites fournit, si je ne me — 181 — trompe, toute une série d’arguments décisifs en faveur des idées de Darwin. Telles sont, Messieurs, les quelques observations que nous avons pu faire au laboratoire de Wimereux. La satisfaction d’un devoir accompli et le plaisir que j’éprouve à m’occuper des questions si intéressantes que soulève l’étude de la na¬ ture sont pour moi un ample dédommagement des sacrifices que je me suis imposés et que je suis tout prêt à m’imposer encore pour les progrès de la science. Si, accédant au vœu exprimé dans les dernières réunions de notre comité local, l’Association française daigne encourager nos efforts, je crois pouvoir affirmer sans trop de présomption que les travail¬ leurs de notre pays se montreront dignes d’un semblable patronage et redoubleront de zèle pour rivaliser avec les nations voisines, dont il serait puéril de nous dissimuler actuellement la supériorité. Réduits à nos propres forces et avec le seul concours de l’initiative privée, nous avons pu organisera Wimereux, non pas un de ces aquariums de parade destinés à la vulgarisa¬ tion, non pas un de ces laboratoires où l’on n’entre qu’en aliénant une partie de son individualité et en contractant des engagements pour l’avenir. Nous nous sommes inspirés de ces belles paroles de l’immortel Savigny : c( Des obligations trop impérieuses paralysent les facultés, elles semblent alté- térer la volonté même. Si les bonnes observations sont le fruit de la patience, elles sont aussi’celui de la pleine et en¬ tière liberté. Venena servitas, liber tas poma. » Je vous l’ai dit, Messieurs, je ne veux pas dissimuler nos misères, je ne suis pas un pauvre honteux. Je suis loin de supposer aussi que, même avec nos faibles ressources, j’ai fait tout ce qu’il était possible de faire et tiré le meilleur parti de la situation. Vous verrez notre laboratoire de Wimereux. Je compte sur vos critiques et surtout sur vos conseils. Les conseils ne doivent être dédaignés à aucun âge, et plus que tout autre, je dois les réclamer. Grâce à votre bienveillant 182 — concours, grâce aux lumières de ceux d’entre vous qui de¬ puis longtemps s’occupent avec tant de succès de l’étude si attrayante et si indispensable des animaux inférieurs, j’es¬ père créer un jour auprès de notre Faculté des sciences un centre actif et de puissante attraction : j’espère former à Lille un groupe de zélés travailleurs comme on en rencontre dans la plupart des universités étrangères. Mon plus grand désir, je dirai presque la seule passion qui m’anime, est de voir se propager, grâce aux travaux entrepris dans notre région, ces admirables doctrines que les Darwin, les Vogt, les Claparède, les Kowalevsky, les Haeckel, ont depuis bientôt vingt ans répandues chez tous les peuples où la science a fait les plus rapides progrès, ces doctrines qui ont opéré dans les recherches biologiques une révolution comparable à celle que l’hypothèse de Newton a jadis amenée dans les sciences astronomiques, ces doctrines qui ont imprimé aux sciences naturelles le même caractère de grandeur et de simplicité que la théorie mécanique de la chaleur et l’hypo¬ thèse des ondulations avaient antérieurement communiqué à l’étude des grandes lois physiques de la nature. A. Giard, Professeur à la Faculté des sciences de Lille. SECTIONS DE GÉNIE CIVIL ET NAVIGATION. M. MASQUELEZ Les distributions d’eau dans le Nord. Nous avons eu à nous occuper d’un assez grand nombre de distributions d’eau dans le Nord, notamment de celles de Valenciennes et de Lille que nous avons successivement exécutées, de celle de Dunkerque que nous avons achevée et de quelques autres pour lesquelles nous avons été con¬ sulté. C’est évidemment pour ce motif que le bureau du comité local nous a fait l’honneur de nous demander une note sur ce sujet, dans l’espoir sans doute que nous serions — 183 — en mesure de fournir des indications d’une utilité générale pour notre région. Malheureusement, nous aurons le regret de ne pas répondre complètement à cette attente, car la solution du problème varie presque toujours du tout au tout, d’une ville à l’autre, parce que les capacités financières de la cité à desservir forcent souvent d’écarter, à cause de leur éloignement ou de leur altitude, les eaux qui devraient être choisies de préférence. Il nous est possible, néanmoins, de relater un fait qui contient un grand enseignement, non-seulement pour notre région, mais encore pour toute la France. Pendant la lutte si active et si persistante que la ville de Seclin a faite au projet de distribution d’eau de Lille, il nous est arrivé fréquemment d’avoir des audiences succédant à celles que ses mandataires venaient d’obtenir. Un jour, où ils avaient produit leur démonstration « que nous devions nous en tenir à l’eau de la Deûle », devant l'homme éminent qui prési¬ dait la section des travaux publics au Conseil d État, et qui est devenu ministre peu de temps après, celui-ci nous dit finement : « 11 était de mon devoir de bien écouter toutes » leurs raisons, mais ils ne pouvaient convaincre un homme » qui voit passer sous ses yeux les plaintes de toutes les villes » qui ont commencé à s'alimenter aux rivières et qui s’ingé- » nient ensuite à trouver mieux , en recourant aux eaux de » sources comme Paris va le faire en ce moment , sur une si » grande échelle. Quand j’ai le malheur de prendre un bain » dans ma ville natale, moins de six semaines après une i> crue de la Garonne, j’en sors couvert de moutarde, malgré » tout ce qui a été fait pour perfectionner le filtrage. » Nous regrettons de n’avoir pas profité d’une si bonne occa¬ sion de recueillir un certain nombre des exemples les plus saillants, mais nous en citerons trois très-connus, savoir : les déceptions de Lyon avec l’eau du Rhône, qui reste trouble en été ; celles de Marseille avec l’eau de la Durance, qui exige des dépenses très-élevées en draguages et en dévase- — 184 — ments par chasses de fond dans les réservoirs ; enfin, celles de Nanies avec l’eau de la Loire, où les conduites sont fré¬ quemment obstruées par des chapelets de petites moules qu’engendrent les larves qui passent à travers les filtres. A Valenciennes, les crues fréquentes de l’Ercline et de la Selle rendent l’Escaut très-limoneux, sans compter le vire¬ ment par les déjections industrielles. A Lille, l’eau de la Deûle obstruerait beaucoup les conduites, à en juger par le fait suivant : lorsqu’on a voulu alimenter la cascade du jar¬ din Vauban avec l’eau de la distribution, on a démonté l’an¬ cienne conduite do 0m,25 de diamètre, dans laquelle on refoulait l’eau de la Deûle au moyen d’une forte locomobile, on l’a trouvée presque remplie d’une sorte d’éponge, moins dense que celle de la mer, mais paraissant douée d’une végétation très-active. A Dunkerque, on n’a pu recourir qu’à l’eau saumâtre du canal de Bourbourg, en communica¬ tion trop fréquente avec la mer. A Roubaix et à Tourcoing, l’eau de la Lys est, pendant l’été, si infectée par le rouissage du lin, qu’il serait impossible de s’en servir pour l’arrosage des voies publiques, au moment où cela serait le plus néces¬ saire. Dans le Nord, plus que partout ailleurs, les cours d'eau sont infectés par des déjections industrielles, et il importe, au plus haut degré, de n’y puiser que dans l’impossibilité de faire mieux, d'autant plus que l’insalubrité des eaux s’ac¬ croît, en été, à mesure qu’elles s’échauffent davantage. ïl est bien préférable, lorsqu’on trouve des sources suffisantes, dans un rayon qui n’est pas trop éloigné, d’amener leurs eaux fraîches et pures, qui constituent un si puissant instru¬ ment d’hygiène et de salubrité. Aussi, nous croyons devoir émettre l’opinion que toutes les villes encore dépourvues d’une distribution en eau po¬ table, doivent avoir la sagesse d’acquérir discrètement les sources existantes dans leur contrée, ou bien des terrains contigus, pour ne pas éveiller d’avides prétentions. Il peut — 185 — arriver, en effet, qu’elles soient obligées tout d’un coup d’y recourir, comme cela s’est produit à Valenciennes, où la majeure partie des eaux souterraines s’étaient maintenues bonnes pendant des siècles et se sont gâtées en peu d’an¬ nées, sur beaucoup de points, par suite d’infiltrations diver¬ ses, et notamment de celles provenant des déjections des industries intra-muros, en voie de développement. Distribution d'eau de Valenciennes. La contrée permettait de choisir entre divers groupes de sources. Nous avons appuyé l’adduction des trois sources précédemment proposées par une commission du conseil municipal, et situées dans la partie inférieure de la vallée de la Rhônelie, parce qu’il était possible d’acquérir une qua¬ trième source, située un peu plus haut dans la même vallée, et d’arriver ainsi à un volume largement suffisant. En outre, on pouvait trouver, en remontant encore davantage vers l’amont, d’autres sources susceptibles d’être acquises à l’a¬ miable ou par expropriation, dans le cas où le développement des consommations viendrait à dcpasser de beaucoup les pré¬ visions. L’analyse des eaux de toutes ces sources , faites par le savant chimiste de Valenciennes, M. Pesier, avait donné les meilleurs résultats. Les jaugeages, opérés après les trois années consécutives de sécheresse 1857, 1858 et 1859, four¬ nissaient évidemment un minimum presque absolu (1). En vue d’obtenir le plus grand volume possible, les prises d’eau ont été abaissées, dans la craie fendillée aquifère, jusqu’au point le plus bas qui pût permettre encore de faire d’arriver les eaux en ville par leur pente naturelle, après les pertes de charge dues à deux passages en siphon sous la Rhônelie. De cette manière, on n’a recueilli que des eaux provenant du meilleur des filtres naturels de notre région, et l’on a disposé (1) Les cours d’eau du département avaient perdu une partie de leur débit moyen, qui varia de la moitié aux deux tiers. — 186 des filtres artificiels en amont de barbacanes ménagées dans les culées de l’aqueduc, pour que les eaux provenant des parois latérales du déblai dans la susdite craie aquifère arri¬ vassent directement dans Paqueduc, sans avoir à siphonner par son radier non maçonné. Ces diverses dispositions ont si parfaitement réussi que, dans la présente année , dont la sécheresse est tout-à-fait exceptionnelle, on dispose à Valenciennes d’un cube plus élevé que celui constaté après la période précitée de 1857- 1858-1859, de sorte qu’on a encore, par jour, environ 120 litres par habitant. L’eau qui passe dans les fissures de la craie pour arriver dans un aqueduc, où elle est rapidement entraînée, nettoie peu à peu ces fissures des petits débris qui les obstruent, et le débit s’accroît progressivement. Tous les organes de la distribution, c’est-à-dire les réser¬ voirs inférieur et supérieur, les machines destinées à élever, dans le réservoir supérieur, l’eau arrivant par sa pente natu¬ relle dans le réservoir inférieur, la canalisation intérieure, ont été calculés de manière à permettre, d’employer, en douze heures, le plus grand cube qu’on pût espérer. Ces mêmes organes sont combinés de telle sorte qu’on puisse les utiliser encore dans le cas où l’on voudrait, dans l’avenir, amener et distribuer un plus grand volume d’eau, pour faire face à des besoins nouveaux. Le réservoir inférieur a été établi sous l’extrémité de la promenade de la place Verte, point culminant de la ville, et le réservoir supérieur a été construit latéralement, sous le grand cavalier militaire qui domine cette promenade, de sorte qu’on n’a perdu aucune surface utile, dans une ville à l’étroit dans son enceinte fortifiée. Ils sont susceptibles d’être % agrandis plus tard, s’il le fallait, dans les mêmes conditions. Leurs fondations ont exigé la consolidation préalable d'an¬ ciennes galeries d’exploitation de pierres blanches, décou- — 187 — vertes seulement après l’exécution de la fouille pour la cons¬ truction du réservoir inférieur, parce que quatre sondages de reconnaissance, faits en vue de l’évaluation de la dépense, étaient tombés sur des piliers. Ce travail était bien périlleux au début, non-seulement à cause de l’état de ruine imminent du ciel des galeries, mais encore parce qu’on pouvait redouter les effets de la charge effrayante du cavalier, d’une hauteur de neuf mètres, tout près des parois, minées de toutes parts, de la grande fouille, laquelle avait été descendue à onze mètres pour se procurer le double avantage de fonder sur le terrain ferme du fond des galeries et d’accroître grandement la capacité. On a été assez heureux pour éviter tout accident, grâce à l’intrépidité d'un surveillant, nommé Boissier, qui entraînait les charpentiers à sa suite partout où il fallait aller étayer avant d’exécuter les maçonneries de consolidation, au pourtour de la fouille d’abord, puis sous l’emplacement du réservoir supérieur. Nous avons demandé et obtenu que cet homme dévoué fût dignement récompensé par le conseil municipal. Les machines élévatoires ont été adjugées à M. Quillacq, habile constructeur à Anzin, qui a fourni d’excellents appa¬ reils, consommant très-peu de combustible. La distribution intérieure a été exécutée en conduites de fonte, avec les joints élastiques inventés par l’ingénieur de l’État belge, Delperdange, qui consistent en une bague de caoutchouc vulcanisé, qu’un collier de fer, fermé à l’aide d’un boulon, serre sur les parties saillantes des deux bourre¬ lets terminant deux tuyaux juxtaposés. Une commission du conseil municipal, composée d’un adjoint, constructeur en fer, et de trois chefs habiles de grands établissements indus¬ triels, auxquels on avait prié M. Pesier de vouloir bien se joindre, s’était rendue en Belgique et y’avait constaté le plein succès de nombreuses applications. A son retour, elle fit ressortir les avantages de ce système, qui procurait une — 188 — grande économie de fonte et de pose, une étanchéité parfaite et une flexibilité particulièrement précieuse dans une ville où le sous-sol est très-peu résistant. Son rapport établit : 1° que des bagues de caoutchouc, employées dans la distribu¬ tion d’eau de Bruxelles, pendant quatre ans et sous une pression de sept asmosphères, étaient parfaitement conser¬ vées ; 2° que la célérité de la pose ne laissait rien à désirer ; 3° qu'une conduite de joints Delperdange résistait, sans ma¬ nifester aucune fuite, à une pression de quatorze atmosphè¬ res; 4u qu’en recouvrant le joint d’un lut protecteur, de brai notamment, on acquerrait une grande garantie pour la conservation de la bague de caoutchouc et du collier de serrage de fer, dont la durée en bon état formait la seule inconnue; 5° que les avantages sous le rapport de l’élasticité devaient être pris en grande considération, à cause de la nature générale du sol à Valenciennes et des meilleures conditions de résistance aux coups de bélier ; 6° enfin, que les intérêts de la grande économie à réaliser suffiraient pour renouveler tous les joints, après neuf années seulement. En présence de ces conclusions, le conseil adopta le sys¬ tème et le droit de brevet que la commission avait négocié conditionnellement avec l’inventeur. Il était rendu évident en effet, par la durée connue des autres joints élastiques déjà usités, que l’on pouvait compter sur une durée beau¬ coup plus longue que celle des neuf années en question. On n’a eu qu’à s’en louer, tous les avantages espérés ayant été réalisés, notamment en ce qui concerne le petit nombre des fuites au début, tandis qu’il y en a toujours beaucoup lors de la mise en service des canalisations avec joints au plomb. On continue à appliquer le même système, depuis onze années, à toutes les extensions de la distribution inté¬ rieure, et l’on en est toujours aussi satisfait. Eu égard à la nature générale du sol de la ville, nous sommes convaincu qu’il eût été désastreux d’appliquer un système complète¬ ment rigide. — 189 — Les recettes actuelles, défalcation faite des frais d’entre¬ tien, procurent environ 4- pour 100 du capital engagé. Distribution d’eau de Lille. Depuis que l’industrie avait pris un grand développe¬ ment à Lille, les années de sécheresse occasionnaient une grande gêne, tout à la fois aux usines qui manquaient d’eau vers la fin de la journée, et aux maisons voisines dont les pompes ne fournissaient plus dans l’après-midi. La série des années très-sèches, 1857-1858-1859, détermina de telles souffrances que la nécessité de recourir à une distribution d’eau fut universellement admise. Mais l’opinion publique se divisa en deux solutions : les industriels soutenaient qu’il ^allait fournir aux usines les appoints dont elles avaient besoin, en recourant à l’eau de la Deûle, ce qui ferait cesser les appels de fonds excessifs et, par suite, l’interruption du service des pompes des ménages; la majeure partie de la population réclamait, de préférence, une distribution d’eau potable, en alléguant que c’était le seul moyen d’être mis à l’abri des abus de l’industrie et d’avoir partout de l’eau salu¬ bre Ce dernier argument était destiné à prévaloir, car, dans certains quartiers, l’eau a un goût très-désagréable de fer ou de soufre; ailleurs, elle est excessivement chargée de sels calcaires et contient des sulfates en proportion nuisible ; presque partout, on constate une grave altération par suite d’infiltrations diverses dans les terrains très-perméables en contact, et l’on sait que, dans ce cas, la présence des matières organiques offre les plus grands dangers pour la santé. Aussi, après trois années de débats, le conseil municipal opta en faveur de la distribution d’eau potable, au moyen des sources d’Emmerin dont on évaluait le volume à 5000 mètres cubes, à GOOO mètres cubes au plus, et, dès notre entrée en fonctions à Lille, nous fûmes chargé d’établir le projet de cette distribution. — Il était entendu que, lorsque les eaux d’Emmerin deviendraient insuffisantes, on irait — 190 — capter les sources alimentant le canal de Seclin, évaluées à 10 700 mètres cubes, ce qui permettrait de disposer, en tota¬ lité, de 17 000 mètres cubes au plus. Il nous parut impossible de rester dans ce programme, car 17 000 mètres cubes pour 155 000 Ames ne fournissaient que 110 litres par habitant, susceptibles d’être réduits de moitié si la population arrivait aux 300000 âmes que l’agran¬ dissement de Lille permet d’espérer dans un avenir peu éloigné. On devait donc craindre que, dans un nombre d’années trop restreint, on serait obligé de recourir à l’eau de la Deûle, pour faire face aux arrosages publics et pour fournir à l’industrie les appoints dont elle aurait besoin, ce qui au¬ rait entraîné : 1° une cause d’insalubrité résultant de la pro¬ jection sur les voies publiques d’une eau de rivière plus ou moins infectée par des déjections industrielles; 2° de nou¬ veaux réservoirs, de nouvelles machines, plus une double canalisation dans un grand nombre de rues, c’est-à-dire une dépense énorme et un surcroît déplorable de gêne et d’en¬ nuis pour la population, pendant la pose, les réparations et l’exécution des prises d’eau pour concessions. ( La suite au prochain numéro.) CHRONIQUE. Juillet. 82é&^orologie* 1 81 Î4. Année moyenu® Température atmosphér. moyenne. 19? 06 17° 72 — moy. des maxima. 24? 64 — — des minima. 13° 49 — extr. max., le 9. 34? 30 — — minima, le 6 . 9? 80 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 70|mm 173 760®"“ 322 — — extr. max. le 6 . 769 mir ‘71 — — — min. le 29. 754 ‘77 * Tension moy. de la vap. atmosph. .} | mm 22 1 | mm 08 Humidité relative moyenne %. . 65 ?,ra 00 69 “n •72 Épaisseur de la couche de pluie. . 50mm 87 60D?tn 71 — — d’eau évap. 172æra • 99 140mm 98 — 191 — La température atmosphérique moyenne de juillet 1874 fut de 1°.34 supérieure à celle de juillet année moyenne , et de 0°.82 à celle de juillet 1873. Elle ne fut dépassée qu’en juillet 1852 ( 22°.20 ) — 1859 ( 21°.06 ) — 1868 ( 20° 58 ) — 1872 (19°. 32). — Les minima et maxima moyens participent à cette élévation de la température, ce qui démontre que non- seulement il fit plus chaud pendant le jour, mais encore pen¬ dant la nuit. L’année dernière le maximun absolu n’avait été que de 32°. 2, cette année il fut de 34°. 3. Ce même maximum fut observé le 22 juillet 1868, depuis lors il n’a jamais été atteint. Il a été dépassé dans les années 1852 (35°. 0) — 1857 (35°. 0) — 1858 (35°. 5). La haute température de juillet peut être attribuée à la faible nébulosité du ciel et à la direction des vents dominants oso. La faible nébulosité du ciel, favorable à l’action directe des rayons solaires, indique la présence du peu de vapeur d’eau dans les hautes régions atmosphériques , ce qui explique la pression exercée sur la colonne barométrique dont la hau¬ teur moyenne fut au-dessus de la moyenne générale, et dont les oscillations restèrent dans des limites peu éloignées les unes des autres. La faible quantité de pluie recueillie en onze jours confirme encore l’état de sécheresse de la région des nuages. Si en effet des 50mm87 on retranche les pluies d’orage du 10 (21™m10j, du 21 (9mm30), et du 28 (ô“m22), il reste 14”m19 pour huit jours ou l“m77 par jour. Si de cette petite quantité d’eau pluviale qui est venue rafraîchir la terre momentanément, nous rapprochons la grande épaisseur de la couche d’eau évaporée , de beaucoup supérieure à la moyenne générale , comme nous le voyons plus haut, il est aisé de se rendre compte de la sécheresse de l’air, de la rareté des brouillards et des rosées. Le nombre des orages fut de sept, mais par suite de la faible quantité d’eau contenue dans l’air ils ne furent pas violents, ne furent pas accompagnés de grêle et ne causèrent aucun dégât. — 192 — Malgré la sécheresse de l’air pendant le jour, il y eut encore pendant les nuits et le matin dix -sept rosées et quinze brouillards qui furent très-favorables aux récoltes. Les caractères dominants du mois furent donc la sécheresse et la chaleur. v. meurein. MUSÉE ARCHÉOLOGIQUE DE LILLE. ©rfévrerfe du XVe siècle. — Le musée archéolo¬ gique de Lille vient de s’enrichir d’un reliquaire portatif, en vermeil, du commencement du XVe siècle, qui lui a été gra¬ cieusement offert par M. l’abbé Dehaisnes, archiviste du département. Ce curieux morceau d’orfèvrerie présente d’autant plus d’intérêt qu’il porte gravés, sur une de ses faces, le nom du possesseur, Jehan Nicolas , orfèvre , le nom de la personne qui le lui a offert ou du moins les reliques qu’il contenait, Madame Marie de France , enfin l’année et le jour où ce cadeau a été reçu, le jour de VAsenpcion Noire- Seigneur mil quatre cenl et quatorze. Personne n’ignore l’im¬ portance des pièces datées au point de vue de la classification générale. H. R. IVmiiisiitaticgeie. — Nous avons eu occasion de signaler, dans les précédents volumes du Bulletin , diverses décou¬ vertes numismatiques faites dans les armoires des habitants de Lille ; en voici une nouvelle que nous avons pu également acquérir, grâce à l’obligeance d’un amateur lillois, M. Rose. Elle se compose d’environ trois cents plombs de pain qui ont appartenu à une famille dont les représentants dans notre ville sont déjà anciens, la famille Danel. Ces plombs sont unifaces, ils se divisent en deux groupes portant tous deux, mais diversement entrelacées, les initiales L D. C'est un nouveau document à ajouter à la numismatique de la charité à Lille. H. R. Lille, lmp. Six-Horemans. *74-2338. 6e Année. — 9-10.— Septembre-Octobre 1874. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain crétacé . (Suite.) gault (Suite). 2° Formations marines. — Zone des sables à Ostrea aquila . — A Grand-Pré, dans le sud du département des Ardennes, cette zone (1) est représentée par le minerai de fer exploité : la base est sableuse tandis que la partie supérieure est argi¬ leuse et le tout a une épaisseur de 1 mètre; les principaux fossiles sont Ostrea aquila , et une grande huître plate rappor¬ tée à 10. Leymerii. Sur les bords de l’Oise et du Thon VO. aquila et VO. Ley¬ merii ont été découverts par M. Papillon, de Yervins, dans une couche de sable irès-glaconifère reposant directement sur le terrain jurassique (2). Il est probable que ce dépôt se prolonge au moins par place jusque près de Mondrepuits, car dans cette localité M. Taine a rencontré une 0. aquila roulée, dans l’Oise; mais vers le nord la zone disparaît recouverte qu’elle est par des terrains plus récents. Elle réparait sur le bord septentrional du Boulonnais (3), à Wissant, sous forme d’une argile noire épaisse de 3 mètres. Là elle ne repose pas directement sur le terrain jurassique ; à la faveur d’une forte marée, M. Barrois (4) a vu entre les deux, plu¬ sieurs couches d’argile noirâtre et de sable ferrugineux encore trop peu connues pour pouvoir être classées. L’ar¬ gile a 0. aquila n’est visible qu’au nord du Boulonnais; à l’Est elle manque, et la zone suivante repose directement sur les terrains primaires. Au sud, du côté de Desvres et de Samer, (1) De Lapparent. Bulletin soc. géol. de France, 2° série XXV, p. 285. (2) Piette. Bull. soc. géol., 2* s., XIX, p. 946. (3) Gaudry. Bull. soc. géol., 2® s. XVII, p. 30. — Lehon, id. XXI, p. 14. 4) Mém. de la soc. des sc. de Lille, 4e série, t. XI, p. *72. — 194 on rencontre des sables ferrugineux avec limonite géodique et argile blanche, qui ont beaucoup d’analogie avec les sables de Sars-Poteries. Au-delà du détroit les couches d’O. aquila et O. Leymerii acquièrent plus d’épaisseur. Zone des sables à Ammonites mamillaris. — Dans les Ar¬ dennes, à Grand-Pré, par exemple, cette zone est représentée par 1 mètre 20 de sable vert avec nodules de phosphate de chaux ; elle est très-développée dans tout le nord du dépar¬ tement, à Novion, à Macheromenil, etc., où elle est acti¬ vement exploitée pour les besoins de l’agriculture. Elle dis¬ paraît dans le département de l’Aisne, mais peut-être existe-t- elle à Wignehies (Nord), car on y a trouvé Y Ammonites mamil¬ laris. Dans le Boulonnais la zone est à l’état de sable et de grès vert, Y Ammonites mamillaris est à la base; vers la partie supérieure, il y a un lit de nodules de phosphate de chaux avec Ammonites interruptus . Sur la côte anglaise, à Folkestone, on voit aussi les sables verts à Ammonites mamillaris; ils renferment 0. aquila et passent insensiblement par le bas aux argiles sableuses à 0. aquila et 0. Leymerii. La couche de phosphate de chaux à Ammonites interruptus est à la partie supérieure. Ils ont 20 mètres d’épaisseur. Zone de l'argile à Ammonite lautus. — Cette argile qui constitue le véritable Gault est d’un gris noirâtre ; on l’emploie pour la poterie, surtout pour les poteries grossières. Ses principaux fossiles sont : Ammonites interruptus Nalica clémentina Inoccramus concentricus Nucula pectinala Trigonîa alœt'ormis auritus lautus splendens Elle est très-visible à Grand-Pré, dans les Ardennes, où elle a 30 mètres environ d’épaisseur ; mais vers le nord du dé¬ partement elle disparait ou se fond avec la couche précé¬ dente. Aux confins du département de l’Aisne, elle présente — 195 des caractères minéralogiques tout différents. Ainsi , à Rumigny, c’est une couche argilo-sableuse avec rognons de grès. Dans le département du Nord les couches de cet âge sont cachées par de plus récentes, mais elles n’en existent pas moins. Ainsi, il y a au musée de Douai quelques fossiles de la zon e (Ammonites splendens, Inoceramus concentrions. Tri - gonia alœformis), donnés par M. Clerc, inspecteur des mines et provenant d’un puits d’Anzin (1). L’argile du gault affleure de nouveau tout autour du Bou¬ lonnais ; elle a été exploitée à Saint-Pot, près de Wissant, où elle y a environ 10 mètres d’épaisseur; mais sur la côte anglaise, à Folkestone, on lui trouve une épaisseur de 40 mètres (2). Dans le pays de Bray qui forme la limite sud de notre ré¬ gion naturelle, l’argile du gault se reconnaît facilement à sa nature minéralogique et à ses fossiles ; elle y surmonte des sables et des argiles qui ont beaucoup d’analogie avec les sables et les argiles de Sars-Poteries. Zone de la gaize à Ammonites inflatus. — La gaize est une roche siliceuse, grise, renfermant une quantité considérable de silice soluble (3). Elle est très-développée dans le sud du département des Ardennes, près de Youziers et de Grand- Pré; elle y forme une région boisée, élevée de 100 mètres au-dessus des plaines voisines, qui, sous le nom d’Ar- gonne, est devenue célèbre dans la défense militaire de la France. La faune est un mélange de fossiles du gault et de fossiles de la craie glauconieuse. Cependant, il y a (1) Gosselet. Mém. soc. sc. de Lille, 111° série, VU, p. 293. (2) D'après des recherches récenles communiquées à la Société géo¬ logique du Nord le 18 novembre 18~4, M. Barrois pense que la partie supérieure de cette argile caractérisée par Am. inflatus , Am. Bou- chardianus Solarium ornalum , Inoceramus sulcatus, représente dans celle région la zone de la gaize. (3) 50 % — 196 — quelques formes spéciales, entr’autres Ammonites inflatus, lnoceramus sulcaius. Dans le nord du département des Ardennes, la gaize cesse de se montrer; M.Barrois croit la retrouver àÉtreaupont dans une roche arénacée visible au niveau de l’Oise et à Wigne- gnies (Nord), dans une petite couche de sable ocreux avec Nucula peclinala , Solarium moniliferum,Turritella vibrayana. D’autres fossiles, spécialement des gastéropodes, accompagnés de Vin. sulcaius, ont été extraits d’un sondage fait à Ecourt- Saint-Quentin (Pas-de-Calais). Dans le pays de Bray (1), la gaize à les mômes caractères que dans les Ardennes ; à Desvres (2) (Boulonnais), on trouve une petite couche d’argile grise, contenant 3,71 % de silice soluble. Zone de la meule à Trigonia dœdalea. — Dans le golfe de Mons, les sables de Sars-Poteries sont recouverts par une auti e roche siliceuse qui a reçu le nom vulgaire de meule (3). C’est un grès gris, essentiellement formé de grains de quartz et de glauconie cimentés par de la silice soiuble dans la po¬ tasse. Après une certaine exposition à l’air, elle devient lé¬ gère et happe à la langue. Le test des fossiles est souvent transformé en silice. Dans la partie occidentale du golfe, la meule est calcaire. Partout elle commence par un banc de poudingue et de cailloux roulés. La meule forme une cou¬ che qui s’étend sur le bord septentrional du golfe de Mons depuis Bracquegnies jusqu’à Condé. A Harchies, elle atteint son épaisseur maximum, 183 mètres. Ses principaux fossiles Trigonia dœdalea, Cyprina angulata, Cucullea carinata , Cardium Hillanum. Cette faune qui existe aussi dans les Blackdowns en Angleterre, est intermédiaire entre celle du (1) de Lapparent. ld. 2« série, XXV, p. 868. (2) Barrois. Bull. soc. géol. 3e série, II, p. 226. (3) Cornet et Briart. Description m. p. et géol. du terrain crétacé de la province de Hainaut. Mémoires couronnés publiés par l’Académie de Bruxelles, XXXIV. — 197 — gault et celle de la craie glauconieuse. Bien qu’elle diffère beaucoup de la faune de la gaize , on peut considérer ces deux zones comme conlemporaines, mais produites dans des circonstances différentes. Les diverses couches qui ont été réunies ici sous le nom d’Àssise du gault ont été profondément ravinés dans notre région; elles n’existent pour ainsi dire plus que par lam¬ beaux. L’étage de la craie les recouvre en stratification à la fois discordante et transgressive. LES CHATELAINS DE LILLE (1). ( suite.) Attributions des Châtelains. — Outre leur pouvoir adminis¬ tratif et judiciaire, les châtelains de Lille exerçaient des attributions militaires : ils durent commander, dans le prin¬ cipe, à tous les vassaux et arrière-vassaux du comte dans la châtellenie et aussi à toutes les troupes de la commune dont il était le banneret, signifer. Mais, vers le XIe ou le XIIe siècle, le comte de Flandre, qui avait intérêt à s’attacher les barons, fut amené à leur attribuer un pouvoir militaire qui fut enlevé au châtelain, et les échevins, vers le milieu du XIIIe siècle eurent, par eux-mêmes, le commandement des milices communales. En tout cas, les attributions militaires du châtelain cessèrent .à partir de 1301 , époque où la Flandre-Wallonne devient française pour un demi-siècle : car les gouverneur et commandants de troupes auxquels on donne à cette époque le nom de châtelains, ne sont plus des châtelains féodaux. Les châtelains de Lille, comme le prouve le serment qu'ils prêtaient entre les mains des échevins, devaient aide et pro¬ tection aux bourgeois de la ville; gardiens de leurs droits, ils (1) Un premier article sur l’important travail de M. Th. Leuridan a été publié dans le numéro du mois de mai, page 110. — Le livre de M. Leuridan est édité par Quarré, libraire à Lille. — 198 — devaient les défendre, même contre le bailli . l’officier du comte, à moins rd’une défense formelle de ce dernier. Les bourgeois de la ville n’étant justiciables que des échevins, le châtelain devait, s’il en était requis, unir ses forces à celles de la commune pour délivrer le bourgeois arrêté dans la châtellenie par une juridiction différente de celle de l’échevi¬ nage. De même quand on procédait à la vindicte communale, connue sous le nom d ’arsin, consistant à brûler la maison du forain résidant dans la châtellenie qui ne voulait pas se soumettre au jugement des échevins, le châtelain devait, par lui-même ou par un délégué, conduire la commune et la ramener sauve quand le fait était accompli. C’est au nom du châtelain que se publiait le ban qui appe¬ lait les bourgeois de Lille aux armes, quand il y avait péril pour la cité. Et le châtelain lui-même réunissait « à l’ost de la ville, » un certain nombre de ses hommes et de ses vas¬ saux de La Bassée , Le Plouich , Neuville-en-Phalempin , Wahagnies, Ostricourt, Atliches, Seclin, Martinsart et Wa- tissart, ainsi que des avoueries d’Annœullin, Bauvin, Pro¬ vin, Camphin-en-Carembault et Anecourt, Mons-en-Pévèle, Ennetières-en-Weppes et Sainghin-en-Mélantois. Le châte¬ lain prenait en personne le commandement de ces troupes et les conduisait bannières déployées, rejoindre l’armée. Il en fut ainsi en 1276 et en 1292. De son côté, la commune de Lille était tenue à des obliga¬ tions envers le châtelain. Elle devait l’aider à sauver « son corps et sa terre » dans toute l’étendue de la châtellenie, et à le défendre par les armes, mais seulement en des expédi¬ tions qui ne duraient pas plus d’un jour. La commune devait le soutenir contre tous ses ennemis, excepté contre le sei¬ gneur de la terre, le comte. En temps de guerre, s’il était dans la ville avec ses troupes, leur entretien était à la charge de la ville. Le châtelain jouissait d’une franchise, qui décla¬ rait non justiciables des échevins tous ceux de ses vassaux — 199 — qui tenaient de lui un fief d’une valeur d’au moins cent sous de revenu. Ainsi déterminés les rapports de la ville de Lille avec les châtelains n’eurent rien de pénible ; ils ne donnèrent lieu qu’à des démêlés sans importance. Avoueries des châtelains — On sait que les avoués, à l’époque de l’établissement de la féodalité, étaient de hauts personnages, chargés d’exercer, au nom des abbés et des communautés religieuses, les fonctions militaires et judi¬ ciaires que ces derniers ne pouvaient, en vertu de la sain¬ teté de leur caractère, exercer par eux-mêmes. Ils avaient aussi la charge de défendre le couvent. Les religieux avaient parfois choisi eux-mêmes leur avoué, dont l’office devint héréditaire; parfois les fondateurs d’abbayes s’étaient ré¬ servé cette fonction. Un grand nombre de faits ont prouvé que la plupart des communautés religieuses n’ont guères eu d’ennemis plus redoutables que ces avoués qui avaient la mission de les défendre. Le châtelain de Lille était l’avoué de l’abbaye de Phalem- pin, en vertu du droit que s’était réservé Saswalon, le fon¬ dateur même de l’abbaye; il était de plus l’avoué de plu¬ sieurs autres abbayes qui possédaient des biens dans la châtellenie, à Annœullin, à Bauvin et à Mons-en-Pévèle pour l’abbaye de Saint-Vaast d’Arras, à Provin-en-Carem- bault pour l’abbaye de Saint-Trond-en-Hesbaye, à Cam- phin-en-Carembault et àEnnetières-en-Weppes pour l’abbaye de Saint-Pierre-de-Gand , à Sainghin-en-Mélantois pour l’abbaye de Saint-Quentin-en-l’Isle, à Salomé pour l’abbaye de Saint-Bertin-de-Saint-Omer, à la maison de Heurtevent pour l’abbaye de Saint- Pierre-de-Gorze, à Ronchin pour l’abbaye de Marchiennes et en la terre de Ferrières à Watti- gnies pour l’abbaye d’Hasnon. Chacune de ces avoueries devait fournir au châtelain des hommes, des chariots et des chevaux chaque fois qu’il allait — 200 — à la guerre. C’est à lui qu’appartenait sur leur territoire, la connaissance, quant à l’exécution, du meurtre, du rapt, de l’incendie et du vol de grand chemin. S’il y avait, à l’occasion de ces crimes, duel judiciaire, le châtelain disposait du corps et des biens meubles du vaincu. Le châtelain intervenait avec l’abbé dans la déposition, le renouvellement et la réception des échevins des avoueries. Les bans de police étaient publiés en son nom comme en celui des abbés. Il prélevait la moitié des amendes. Tels étaient les droits importants que les abbayes avaient concédés au châtelain de Lille, afin d’obtenir qu’il protégeât leurs propriétés. Plusieurs faits, rapportés par M. Leuridan, établissent que ce seigneur féodal s’est trop souvent montré l’oppresseur plutôt que le protecteur de la châtellenie. Il en fut ainsi tout particulièrement pour l’abbaye de Saint-Christophe de Phalempin, village dont le châtelain Saswalon possédait l’autel paroissial qu’il faisait desservir par un prêtre moyennant une redevance pécuniaire. Au XIIIe siècle, le châtelain Guillaume du Plouich voulut sou¬ mettre les biens de l’abbaye et ceux qui y résidaient à sa juridiction. Ces prétentions furent renouvelées au XVe siècle, époque oùles privilèges judiciaires de l’abbaye furent violés, et où ses vassaux furent forcés de se rendre aux franches vérités , enquêtes juridiques que le bailli du châtelain réunis¬ sait bien plus pour profiter des amendes imposées à ceux qui n’y assistaient pas, que pour découvrir et atteindre les coupables d’un délit. Le fief de la châtellenie de Lille. — Le fief de la châtellenie de Lille, tenu de la Salle de Lille, comprenait : un 1° domaine ou gros du fief; 2° des tenures censières ; 3° des droits, des prérogatives et des charges , 4° des pairies ; 5° des hom¬ mages ou arrière-fiefs relevant du domaine. Le domaine renfermait, au XIVe siècle, les villages et hameaux de Phalempin, du Plouich, de La-Neuville, d’Atti- — 201 — ches, de Drumez et de la Tennardrie à Thumeries, de Wattines et de Theluch, de Carnin, d’Ennetières-en-Mélan- tois, du Transloy à Illies et d’Ostricourt, le comté de Herbes, la ville de La-Bassée, la Motte du châtelain de Lille, reste de l’antique château Du Bue, appelé aussi Motte-madame, huit bonniers de pâturage dans le marais de Fretin, des rejets à Loos sur la crête de la rivière d’Haubourdin à Lille, le tiers, à l’encontre du comte, de tous les plantes et rejets des llé- gards et voies de Seclin. Du domaine dépendaient de nombreux héritages cottiers, ou partagés entre plusieurs, qui étaient des tenures censières, pour lesquelles on percevait des rentes en argent, en avoine, en agneaux, oies, chapons, poules et poussins, en fromages, en cervoise et en corvées. Ces tenures étaient situées à Les- quinet dans les hameaux de Meurchin, Engrin et Enchemont. au Maresquiel, hameau d’Ennevelin, à Seclin et au hameau de Watissart, à Marcq-en-Pévèle, à Ferrières-en-Mélantois, hameau de Wattignies, à Pont-à-Marquette, à Wachemy, hameau de Chemy, au Plouich en-Weppes, hameau d’Au- bers, au Val-de-Fromelles, à Mouchin, à Lille, à Vendeville et autres lieux. Au nombre des droits et prérogatives du châtelain on doit ranger la juridiction sur le cours de la Marque, d’un droit de fouage sur le bois de chauffage (louée), qui passait au pont de Marcq, Bouvines, Tressin et Lempenpont; d’autres droits sur les bêtes qui pâturaient dans les marais d’Herrin, de Noyelles, de Wattignies, de Barges, de Fléquières et d’Em- merin, sur la mesure des weddes ou plantes servant à la teinture, sur les taverniers qui vendaient du vin aux fêtes et sur divers étalages. Le châtelain était chargé de détenir les prisonniers arrêtés dans les châtellenies par les serge:, ts du bailliage, tenant leur office du châtelain, et aussi tous ceux qui étaient condamnés à mort, au conjurement du prévôt de la ville. Il était chargé de fournir, outre l’exécuteur, tout — 202 ce qui était nécessaire pour l’exécution elle -môme, à l’ex¬ ception du gibet qui était établi par le comte. Il y avait, dans la châtellenie de Lille, un certain nombre de petits fiefs dont les possesseurs, égaux en droits, étaient appelés pairs, et qui reconnaissaient le châtelain pour suze¬ rain, bien que le comte conservât, sur les fonds attachés à ces pairies, le droit seigneurial du dixième denier à la vente. Les pairs devaient au châtelain le relief de leurs pairies qui était le revenu d’une année, la meilleure de trois, le service de guerre et de chevauchée, et le service de la cour, etc. Ces pairies, qui dépendaient du châtelain plutôt que de son domaine, étaient Barges à Wattignies, Maldringhem à Lomme, Fauquissart et les Mottes à La Gorgue, Gamans à Lesquin, et le royaume des Timaux à Fâches, à Fretin et aux environs. Le nom de cette dernière pairie , royaume peu célèbre dans l’histoire , vient des plaids ( mallum ) , avec le radical ti (d’où timaux), dans lesquels les échevins de cette petite contrée accomplissaient toutes les œuvres de justice sous la juridiction du comte représenté par son cha¬ pelain. M. Leuridan a retrouvé le premier l’origine de ce nom et de cette institution. Le fief de la châtellenie de Lille comprenait enfin un grand nombre d’arrières-fiefs, que le possesseur avait créés pour se donner des fidèles et des vassaux ; plusieurs centaines d hommages, parmi lesquels treize terres à clocher, rele¬ vaient de ce fief. A la mort du vassal, une nouvelle conces¬ sion de la part du seigneur devenait nécessaire, ainsi qu’un nouvel engagement de la part de l’héritier : le fief étant tombé, celui qui devait en jouir, avait à le relever. Comme prix de cette nouvelle investiture, on payait dix livres pour les fiefs-liges, cent sous pour les fiefs demi-liges, une somme moindre encore, parfois quelques sous pour les fiefs simples. (La suite prochainement.) 203 CATALOGUE DES LÉPIDOPTÈRES DU DÉPARTEMENT DU NORD, Par M. G. Leroi. Un zélé lépidoptériste lillois, M. G. Leroi, vient de pré¬ senter à la Société des Sciences de Lille un Catalogue des Lépidoptères du département du Nord. La Société, sur le rapport d’une commission, en a voté l’impression dans ses Mémoires, et, sous peu de temps, une des dernières lacunes qui existait dans le complet achèvement de notre Faune locale, va être heureusement comblée. Lorsque des recherches suffisantes auront permis un relevé de nos Hyménoptères et une révision du catalogue des Dip¬ tères de Macquart, trop ancien pour être regardé aujourd’hui comme suffisant, nous posséderons une énumération com¬ plète des principales divisions de notre règne animal, ouvrage que pourront nous envier la presque totalité des départements français. O M. Leroi compte dans le Nord 543 espèces de Lépidoptères, savoir : Rhopalocères (diurnes) . 71 Hétérocères (crépusculaires et nocturnes). 472 Dans ces chiffres ne sont pas compris les Microlépidoplères que M. Leroi n’a pas catalogués ; leur adjonction doublerait probablement le nombre de nos papillons, car MM. Sauveur et Pologne ont donné une liste des Tinéides de la Belgique qui comprend 490 espèces, dont nous devons posséder la plus grande partie. Le catalogue de M. Leroi n’a pas la prétention d’être entiè¬ rement complet ; il avoue lui-même qu’il laisse à désirer pour les nocturnes ; un siècle, dit-il, ne suffirait pas pour en établir la liste complète. Evidemment, M. Leroi ne compte pas assez sur ses propres forces ; avec le zèle que nous lui connaissons, il est très capable de compléter lui-même la besogne, et nous attendons un supplément nombreux, après de nouvelles chasses. — 204 Parmi les espèces qui méritent une mention particulière, nous appellerons surtout l’attention sur celles qui ne sont pas signalées en Belgique par le catalogue de M. de Selys : Lycœna cy liants , Satyrus arethusa , tous deux de la forêt de Mormal ; Sesia bembeciformis et empiformis ; Zeuzera arun- dinis ; Leucania turca et pudorina ; Asteroscopus nubeculosa et un grand nombre d’autres Noctuelides. Cette famille des Noctuelides est celle qui est le mieux représentée dans le catalogue, grâce à un genre de chasse fort pratiqué par M. Leroi et qui lui a donné les meilleurs résultats. Elle consiste à suspendre le soir aux branches des arbres, à l’aide d’une ficelle, des pommes séchées au foui*, comme en vendent tous les épiciers, après les avoir trempées dans une solution de miel et d’éther nitreux. L’odeur qu’elles contractent attire une foule de papillons de nuit qui s’enivrent en pompant la liqueur. On les fait tomber dans un flacon à large goulot au fond duquel une éponge imbibée d’ammo¬ niaque achève de les asphyxier. Cette chasse, qui a remplacé très-avantageusement celle dite à la miellée, a procuré à M. Leroi, en trois ans, plus de sujets qu’il n’en aurait capturé en quinze ans de chasse au filet ; elle donne des espèces très-rares qui ne se prennent jamais au vol et dont les chenilles sont presque introuvables. A. de Norguet. ASSOCIATION FRANÇAISE. CONGRÈS DE LILLE. La démographie du département du Nord (1) Par M. le Dr Bertillon. La population du département du Nord (dénombrement de 1872) est de 1,447,764 habitants; il résulte de ce nombre imposant que ce département qui, au point de vue adminis- (1) Nous empruntons cel article, en l'abrégeant, à la Revue Scien¬ tifique du 12 septembre 18“4. — 205 — tratif, n’est que le 8 7e de la France, et par sa superficie seu¬ lement le 93e, en constitue cependant plus de la «5e partie par le nombre de ses habitants. Cette population de près d’un million et demi qui place le département du Nord immédiatement après celui de la Seine par le nombre absolu de ses habitants, lui conserve aussi le second rang par rapport à la population relative, c’est-à- dire comparée à la superficie du sol. En France on ne compte plus, depuis le rapt de l’Alsaee-Lorraine, que habitants par kilomètre carré (et 70 avant la guerre), tandis que le dé¬ partement du Nord en a «55, presque quatre fois davantage. La Belgique, en général, en a 154, mais 259 dans sa pro¬ vince la plus peuplée, la Flandre orientale. Cette densité si remarquable de la population du Nord se complique d’une agglomération considérable de ses habitants dont le plus grand nombre demeuré dans des villes de plus de 2000 âmes : Tandis que sur 100 habitants on trouve en France 31 citadins et ©9 ruraux, dans le Nord on rencontre près de 57 citadins (56,6) et 44 ruraux. Division de la population selon Vorigine et le lieu de nais¬ sance. — Je commence par cette étude parce que son in¬ fluence sur les autres phénomènes que j’aurai à signaler est considérable. Dans la France prise en son ensemble, sur 100 habitants on en compte 85 qui sont nés dans le département où on les rencontre; mais il n’y en a que 78 dans le Nord. Il en reste donc «2 qui sont étrangers, au moins au département; parmi ces étrangers, il y en a î©,« qui ne sont pas Français. Ainsi, dans ce département, près de i /© de ces habitants sont d’une autre nationalité (presque tous belges et notam¬ ment belges flamands). En outre les 5/« français selon la nationalité, une fraction très -notable, mais que je crois indéterminée, est flamande selon la descendance et l’idiome. 11 résulte de là que la population du département du Nord — 206 est fort mêlée et que l’investigation statistique, obligée de confondre aujourd’hui en un seul ensemble l’étude d’une population si complexe, ne peut espérer aboutir elle-même qu’à des résultats complexes. On peut s’en faire une idée par l’étude de la population belge composée, comme le dé¬ partement du Nord, de gens parlant le flamand et d’autres le français. ù Pour montrer les différences considérables qui, au point de vue démographique existent entre ces deux groupes, M. Bertillon fait passer sous les yeux de l’assistance une série de cartes de la Belgique. Ces cartes sont diversement teintées suivant l’intensité de la mortalité à chaque groupe d’âge, suivant l’aptitude à la phthisie, suivant le nombre re¬ latif de réformés par défaut de taille, par diverses infir¬ mités, etc.: et dans chacune on distingue toujours du pre¬ mier coup d’œil, par l’intensité des teintes, le groupe des provinces flamandes de celui des provinces wallonnes (ou à langue française), si bien que l’auteur a pu terminer sa mo¬ nographie sur la Belgique dans le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales par ces mots : « Les Flandres belges gardent partout le triste privilège d’être les élus de toutes les misères humaines; la Flandre orientale notamment n’en laisse échapper aucune : aveugles, aliénés, criminels, conscrits illettrés, indigents. » Accroissement de la population. — Depuis le commence¬ ment du siècle (1801), l’ensemble de la population française s’est accru en ces 71 ans : en France dans le rapport de 1000 : 1330, et dans le département du Nord dans celui de 1000 : 1893 ; et pour chacun des sexes pris isolément : 1000 hommes au commencement du siècle sont devenus : en France, 1351 en 1872 (mais 1428 en 1866); dans le Nord, 1998 en 1872 (et 1916 en 1866). 1000 femmes au commencement du siècle sont devenues : en France, 1299 en 1872 (mais 1357 en 1866; dans le Nord, 1800 en 1872 (et 1727 en 1866). — 207 L’accroissement partout plus prononcé de la population mâle paraît être une règle générale pendant la paix. Elle a son origine dans l'excès des naissances masculines sur les naissances féminines (dans le rapport de 106 : 100), excès qui n’est pas entièrement effacé par la mortalité constamment plus prononcée des petits garçons pendant la première année de la vie. Mais les sévices de la guerre apportent une notable perturbation à cet accroissement. Ainsi, en 1801, par 1000 femmes en France, on ne trouve que 94S hommes et seule¬ ment 945 en 1821 ; mais en 1866, c'est-à-dire après qua¬ rante-cinq ans de paix relative, 1004 hommes. Cependant nos malheurs font rétrograder notre population mâle, et en 1872 il n’y a plus en France que 992 hommes pour 1000 femmes. Immigration étrangère. — Il convient dans cet accroisse¬ ment de faire la part de ce qui est dû à l’immigration étran¬ gère, si prononcée dans le département du Nord. Je ne puis renseigner que depuis 1851, époque où, pour la première fois, les dénombrements ont relevé cet élément démographi¬ que, et peut-être incomplètement. Quoi qu’il en soit, depuis 1851, 1000 étrangers domiciliés sur le territoire français (leur nombre absolu étant alors de 380,000) sont devenus i960, et cela en vingt ans , ce qui fait un accroissement de 48 par 1000 et par an, quand notre population française de 1851 à 1866 ne s’est accrue normale¬ ment que de 3/12 par 1000 et par an. Quant au département du Nord, l’accroissement par immi¬ gration étrangère a été encore bien plus sensible. En 1851, elle était de 80,876, et faisait 1/14 de la population générale ; par une crue continue, elle est arrivée en 1872 à 234,504, et fait I/O de la population totale ! Dans raccroissement général de la population du Nord, une bonne part revient donc à l'immigration étrangère ; nous pouvons déterminer cette part, au moins depuis vingt ans. Pendant ce temps, l’accroissement général a élevé la popula- 208 — tion de 1,158,285 à 1,447,764; soit comme 1000 : 1950; mais si dans cette crue on enlève ce qui est dû à l’immigra¬ tion étrangère, l'accroissement de la seule population fran¬ çaise est réduit à la moitié, au rapport 1000 : 1126. Conséquences sociales de V immigration étrangère. — Pour bien saisir l’importance et les conséquences pratiques de ce fait, il faut observer que l’immigration ne porte guère que sur la population pubère, de sorte qu'en tenant compte de cette observation ce n’est plus le sixième, mais au moins le quart des hommes de vingt à cinquante ans qui sont étrangers : ainsi, un quart de la population pubère du Nord est étran¬ gère. Et, qu’on le remarque, si l’on peut regarder seulement comme très-vraisemblable que cette population augmente peu la nationalité légitime, mais beaucoup l’illégitime; que le plus grand nombre emporte à l’étranger le petit ou gros capital qu’ils ont réalisé chez nous ; on peut en revanche regarder comme certain qu’en cas de guerre ces commen¬ saux se dérobent (légalement jusqu’ici) à la défense du ter¬ ritoire qui les a nourris, chance heureuse quand ils ne se servent pas des connaissances qu’ils y ont acquises pour en aider la conquête; c’est comme une préconquête amiable qui prépare et facilite l’annexion violente. A ces graves considérations j’en ai une autre purement démographique à ajouter, mais je ne puis que l’énoncer ici : c’est que cette immigration d’hommes faits, qui pour l’Amérique est une source inouie de richesse (1), est pour nous une cause qui contribue à ralentir encore notre trop lente natalité: En effet un peuple valide engendre vite aidant de travailleurs qu'il lui en faut pour répondre à l’appel quotidien du travail, à moins qu'il ne trouve dans l’immigration de quoi satisfaire à ce besoin. Ainsi font les Anglais qui, par leur seule natalité, four- (1) Voyez l’article Migration de l’auteur, clans le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales. — 209 — nissent à un accroissement de douze par an et par mille, et quinze en comptant leur immense émigration; ainsi ont fait les Français au Canada et dans des proportions encore bien plus formidables. L’arrivée de travailleurs tout faits, devient une concur¬ rence à la natalité : pour satisfaire aux appels du travail, il n’est plus nécessaire d’engendrer et d’élever tant d’enfants, les places sont, plus promptement, et à moins de frais pour le pays, occupées par des adultes. Cette immigration d’adul¬ tes pourrait donc être regardée comme un avantage et en serait un si le travailleur était, comme en Amérique, défini¬ tivement acquis pour le travail, pour la constitution de la famille et du capital, enfin pour la défense du sol qui le nourrit; mais c’est une perte, une cause d'affaiblissement, quand l’immigrant peut n’être qu’un passager, bénéficiant des bonnes chances, défaillant aux mauvaises, répondant aux appels du travail, à la distribution de ses produits, à la place des enfants que , sans lui , nous eussions engendrés , mais ne répondant pas aux appels du canon ! Natalité. — Bien que ce soit en partie (et à peu près pou moitié) l’immigration étrangère qui vienne satisfaire aux besoins du travail dans ce département du Nord, dont le sol et le sous-sol est un des plus fertiles qui soit au monde, la natalité elle-même se ressent de cette fertilité et si, par le fait de cette immigration, elle est loin encore d’égaler la natalité anglaise ou prussienne, ou seulement belge, ce¬ pendant elle dépasse très-notablement celle de la France en général. Il y a deux manières d’apprécier la natalité , soit en com¬ parant les naissances à la population en général, c’est la méthode ordinaire; nous la tenons pour mauvaise, parce qu’elle a pour effet d’atténuer d’autant plus l’apparente force reproductive d’nne nation que cette nation est plus féconde, car c’est alors que sa population renferme le plus d’impu¬ bères impropres à procréer et qui pourtant, dans le rapport, — 210 comptent comme les adultes ; l’autre méthode, que nous re¬ gardons comme mesurant vraiment la fécondité et comme la seule mesure conforme aux règles du calcul, consiste à comparer les nouveau-nés à la seule partie de la population qui est apte à les produire, c’est-à-dire aux pubères. On pourrait certainement y comprendre les hommes et les fem¬ mes, mais comme la fécondité des mâles a des limites très- étendues et fort indéterminées, qui n’ont d’autres mesures effectives que la fécondité de la femme démontrée par l’enfan¬ tement, nous croyons qu’il y a avantage à resserrer la me¬ sure de la fécondité d’un peuple, en lui donnant pour expres¬ sion le rapport des naissances aux femmes ayant l’âge ordi¬ naire de fécondité (soit de quinze à quarante ans). Cela posé nos tableaux, par leurs expressions figurées, ou par les, nombres qui y sont adjoints, montrent que, par année moyenne, pendant la période de dix ans, 1856-65 : 1° En ce qui concerne la natalité ordinaire , sur 1000 ha¬ bitants il y a eu. en France £6, «s naissances vivantes et 3$ dans le Nord ; le rapport, entre les deux natalités est tel que la natalité de la France étant 100. celle du Nord est 1*5 ; 2° En ce qui concerne la fécondité effective, celle des fem¬ mes de quinze à quarante ans, sans distinction d’état civil , on trouve que : 1000 femmes ou filles de quinze à quarante ans ont par an : — en France, 130 enfants vivants; dans le Nord, 174. Le rapport des deux fécondités est comme 100 : 135. Enfin, en distinguant les épouses des filles, on trouve que : 1000 épouses dont l’âge est compris entre quinze et qua¬ rante ans, ont par an : *01 enfants vivants en France ; 313 dans le Nord ; — 442 en Belgique et en Hollande. — Le rapport des deux fécondités est comme 100 : 144. Quoi qu’il en soit, cette natalité plus puissante du départe¬ ment du Nord aura pour effet, non-seulement l’accroisse¬ ment plus rapide de ses habitants, ainsi que nous l’avons constaté, mais aussi de lui donner une population enfantine 211 — relativement plus loulïue (quoique l’immigration des adultes diminue ce résultat) : ainsi, sur 1000 habitants, on en trouve seulement 275 au-dessous de quinze ans en France et 314 dans le Nord. Matrimonialité. — Même remarque que pour la natalité ; il y a deux méthodes : celle, ordinairement employée, qui consiste à comparer les mariages annuels à la population en général; mauvaise méthode, selon nous; et celle qui rap¬ porte les mariages annuels à la seule population mariable, c’est-à-dire défalcation faite des non mariables (impubères selon la loi : au-dessous de dix-huit ans pour les garçons et de quinze pour les filles; et gens déjà mariés). La matrimonialité comparée de la France en général et du département du Nord semble assez peu différente quand on se contente du rapport ordinaire des mariages annuels à la population en général. Ainsi, tandis qu’on compte 7/9 mariages en France par 1000 habitants, on n’en trouve que 7/S dans le Nord ; mais quand on ne fait entrer en ligne que les mariages et les ma¬ riables, on trouve pour la France 24/c; mariages par 1000 mariables de l’un et de l’autre sexe, et seulement •$*/* dans le Nord ; et alors, le rapport de la tendance au mariage étant de 100 pour le Nord s’élève à 10«,5 pour la France. Cependant, un point très-important, quand il s’agit de ma¬ riage, de la constitution de la famille, est l’ûge des fiancés ; ici nous dirons seulement le résultat général de cette re¬ cherche, dont les tableaux justificatifs seront sans doute pro¬ duits dans le Comple rendu officiel de la trojsième session. La probabilité du mariage, en général moindre dans le Nord, l’est surtout pour les femmes avant vingt-cinq ans, et c'est seulement à trente-cinq ans et après, qu’une femme a plus de chance de mariage dans le Nord. Quant aux hommes, à tous les âges leur probabilité de mariage est très-notable¬ ment moindre dans le Nord, mais surtout après trente ans, faible matrimonialité qui tient sans doute aux immigrants — 212 étrangers. Il résulte forcément de ce que nous venons de dire que, dans le département du Nord, il y a notablement plus de célibataires des deux sexes et moins d’époux. Mortalité par âge et par sexe. — C’est une étude qui a été particulièrement soignée par M. Bertillon, mais dont l’ana¬ lyse, même succincte, nous entraînerait trop loin. Les tables de mortalité qu’il a construites paraîtront dans les Comptes rendus. Nous dirons seulement, d’une manière générale, que la mortalité du département du Nord ressemble assez à celle de la France en général, la vie moyenne qui en résulte est d’environ quarante ans en France comme dans le Nord. La mortalité des enfants dans la première année de la vie y est un peu moindre et surtout celles des petites filles ; mais, par un retour fâcheux, celle de un à cinq ans y est plus forte pour les deux sexes. La mortalité des adultes y est à peu près la même, plutôt moindre pour les hommes, mais nota¬ blement plus marquée pour les femmes à l’âge de la parturi- tion ; au-delà de cinquante ou soixante ans, la mortalité est décidément moins élevée dans le département du Nord, propriété que ce dépari ement partage avec toute la région nord et nord-ouest de la France. En outre, M. Bertillon constate que la mortalité générale et surtout celle de l’enfance a notablement diminué dans le département du Nord. Il s’étonne de voir qu’un département où la population est aussi dense, aussi resserrée dans les villes, où il y a tant de fabriques, d’usines, de mines aussi exploitées, enfin une population ouvrière aussi nombreuse, ne fournisse pas un plus gros contingent à la mort. Mais il fait remarquer que ce qui explique en partie ce ré¬ sultat, c’est la richesse et la fertilité du sol qu’on lui a dit être possédé en partie par le cultivateur, et la salubrité générale de cette région de la France accusée par la mor¬ talité si faible des départements contigus au Nord (Pas de- Calais, Somme, Aisne, Ardennes), qui tous ont une mortalité bien moindre que le Nord lui-même, malgré la plus grande — 213 — richesse de son sol. Aussi, il conclut que ce département, malgré sa mortalité moyenne, a encore, comme la France entière, ainsi qu’il l’a établi dans sa Démographie figurée (1), beaucoup d’économies à faire sur la mort prématurée. Pour y parvenir, il faut d’abord en découvrir les causes, et rien n’y contribuerait plus efficacement que des enquêtes statisti¬ ques : Premièrement , distinguant les documents afférents aux populations de langue flamande, de ceux qui concernent les populations de langue française ; et secondairement , rele¬ vant, en même temps que l’âge et le sexe du décédé, sa pro¬ fession. L’enquête des décès, simultanément par âge et par profession , telle est, dit M. Bertillon, la source de tout savoir sur l’hygiène comparée des professions et des indications à venir; et pour le prouver, il met sous les yeux de l’assis¬ tance un des tableaux de sa Démographie figurée (LV et LVI), montrant pour chaque âge la mortalité par groupe professionnel en Angleterre. Ce tableau met en lumière les résultats les plus frappants et les plus inattendus concernant la mortalité comparée à chaque âge des magistrats et mem¬ bres du clergé anglais, celle des fermiers e Un jury de sept membres sera désigné par le ministre de l’intérieur, de concert avec moi , pour juger les ouvrages présentés. » La matière du concours devant changer chaque année, le jury sera modifié tous les ans. » L’année où les étrangers concourront, le jury sera com¬ posé de trois membres belges et de quatre membres étran¬ gers , de nationalités différentes. Le président sera belge. Je me flatte de l’espoir qu’il se trouvera dans les pays amis des savants qui ne me refuseront pas de venir s’asseoir à la table du jury de Bruxelles. » Ne voulaut pas ajourner à cinq ans l’exécution de mes intentions, je désire que, par disposition transitoire, la pre¬ mière remise du prix ait lieu pendant les fêtes de septembre de l’année 1878. Pour les quatre premières années, le prix sera décerné : en 1878 (concours exclusivement belge), au meilleur ouvrage sur l’histoire nationale ; en 1879 (concours exclusivement belge), au meilleur ouvrage d’architecture; en 1880 (concours exclusivement belge), au meilleur ouvrage sur le développement des relations commerciales de la Bel¬ gique; en 1881 (concours mixte), au meilleur ouvrage sur le moyen d’améliorer les ports établis sur des côtes basses et sablonneuses comme les nôtres. » Société des Sciences de îLHle. — La Société a tenn le 27 décembre sa séance publique. Elle a décerné les ré¬ compenses suivantes : Médailles d’or. — M. Paul Dallez, pharmacien à Lille : Etude sur les 7'urbellariés de nos eaux douces — M. H. Rigaux : mémoire d’archéologie: Belges , Romains, Francs , sur le territoire de Lille. — Médailles d’argent. — M. Désiré Nicolle : Moyens propres à rendre les bâtiments incombustibles. — M. Durieux, archiviste à Cambrai : Les artistes Cambrè- siens du IXe au XIXe siècle. — Mentions Honorables. — A M. Ch. Manso, typographe, deux poésies : la Photographie , le Ballon. — M. M..., une poésie Wissembourg . — 288 — Terrains traversés par la fosse Sainte- Pauline à Éleu-dit-Leauwet Fosse N° 3 de la Compagnie de Liévin PROFON¬ DEUR. DESIGNATION DE LA COUCHE. EPAIS¬ SEUR. FOSSILES. EQÜIVALENC1 ni. 30,45 56,75 59,65 83,50 87,90 97,86 120,58 131,03 141.33 142.33 149,08 149,08 Craie blanche avec silex en bancs. Craie blanche avec très-nombreux silex . 151,78 Craie grise, noduleuse, très-dure- (Meule, Tun, dur-banc des mi¬ neurs). Marne argileuse gris - bleuâtre. (Bleus). . ...... Marne très-argileuse gris-verdâtre. (Dièves vertes) ...... Marne argileuse blanchâtre. (Dièves blanches) . . . . . Marne très-argileuse gris-verdâtre (Dièves (vertes). . . . . . Craie blanche marneuse. (Dièves blanches). Marne argileuse grisâtre. . . . (Dièves grises) . . Marne glauconifère (Tourtia) . . Marne glauconifère plus sableuse, très-verte (Tourtia) . . . . Banc de cailloux roulés. Argile noire calcareuse, devenant grise en séchant , elle contient des grains de glauconie . . . Schistes houillers- m. 50,45 6,30 2,90 23,85 5,05 9,96 22,72 Ces couches ayant été traver¬ sées au moyen du système Chaudron , je n’ai pu en étudier les fossiles. Spondylus spinosus (Gold.) [ Odonlaspis raphiodon (Agass.) lOsmeroïdes Lewesiensis (Ag.) ’Rhynchonella Cuvieri d’Orb.) ) Inoceramus labiatus (Brong ) * Ostrea vesicularis (Lamk ) Craie à Micras 10,45 10,30 1,00 [6,75 2,70 Ammonites sp. Rhynchonella mantelliana (Sow.). Terebratula semiglobosa(Sow) Pecten Beaveri (Sow). Inoceramus striatus ? (Mant.) Inoceramus sp. Ammonites Rotomagensis. Pecten undulatus? (Nilss ) Epiaster ? Pecten asper(uam) Ostrea vesicuiosa (Sow). Terebratula biplicata (Sow ) » lima (Defr.) Terebratella Menardi (d’Orb.) » pectita (d’Orb ) Gastrochæna sp. Nucula ? Janira quinquecostata (Sow.) var. miuima. Pecten membranaceus (Nilss.) » acuminatus (Gein) » elongatus (Lam ) » subacutus (d’Orb.) » subinterstriatus(d’Arc. » serratus (Nilss ) Spondylus striatus (Sow.) Ostrea carinata (Lam.) » hippopodium (Nilss.) » lateralis (Nilss.) » haliotoidea (Sow.) Spongiaire indéterminable. Frondicularia sp. Chalk rock. Craie marneus Terebratulina gra Craie marneus] Inoceramus labial Id. Je n’ai pu recon tre exactement la mite entre la cfl marneuse et la c glauconieuse; je c qu’elle se trouv 120m58 à la base Dièves vertes. Craie glauconie à Ammonites Roto Id. Chloritic mail Ammon. la iclavii Marnes à Pecten per (Tourtia de M Sarrasin à Terelj tella Menardi (Tou de Montignies). Chs Barrois Lille, lmp. Six-Horemans. 75-195. BULLETIN SCIENTIFIQUE, HISTORIQUE ET LITTÉRAIRE DU DÉPARTEMENT DU NORD et des pays voisins ( Pas-de Calais, Somme, Aisne, Ardennes, Belgique. ) PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION DE MM GOSSELET, Professeur à la Falcultc des Siences de Lille et L'ABBÉ DEHAISNE, Archiviste du Département du Nord TOME VIL — 1875 LILLE Imprimerie SIX-HOREMANS 1875 7e ANNÉE — 1875 Amiens. Académie d’ — 16. Arras. Académie d’ — 241. Belgique. Académie royale de — 48, 73, 106, 145. Société entomologique de — 59. Cambrai. Société d’emulation de — 182, 220. Dunkerque. Société Dunkerquoise — 101. France. Association française — 21, 52. Lille. Société des Sciences de — 24, 46, 104, 180. Nord. Commission historique du — 24. Société géologique du — 24. Salnt'Qocntin. Société académique de — 39, 213. Valenciennes. Société d’agriculture de — 143. Vimereux. Laboratoire de — 19. Table des noms d'auteurs Barrois (Ch.) 82. Barrois (J-X21. Benvignat. 115 Berger. 182, 183. Blin. 42. Blin. 182 Bouchet. 102. Borre (de), 35, 121. Boussinescq 21, 104 Bruyelle. 48. Cafliaux. 143. Cellier. 143. Charles.. 138. Chon, 47. Corblet (l’abbé). 16. Corenwinder. 186. Crépin. 155. Crick 247. Debray. 1 14. Delaplace 40. Delplanque. 209. Demaze. 43. Dubois 16, 149. Dumoulin. 44. Dupont. 152. Durieux. 182, 183. Farez 238. Ferrus. 42 Flahault. 110. Foucard. 238. Galesloot. 246 Gard in. 241. Garin 43. Giard. 4,33.36,51127,213.. Gilkinel. 155. Gosselet. 47. Hennebert. 18. Helle. 133. Houdoye (fils). 248. Houzé de l’Aulnoit (Aimé). 46, 106. Houzé de l’Aulnoit (Alfred). 106. Houzeau de la Haye. 70. Hubert (Florence). 186. Jennepin. 134, 245. La Chapelle (de). 39 Lagneau. 53. Lecocq. 42, 213, 216. Lecocq (Mme). 43. Legros. 244. Lemaire. 42. Lelièvre. 86, 89, Leyder. 67. Matrot. 46. Meurein. 159, 252. Moreau 149. Mortillei (de). 56. Mpurlon. 154. Norguet (de). 29, 63, 104, 145. Ortlieb. 170. Pelermann. 146. Piot. 140. Plateau. 146 • Puyt (de). 71. Quetelet. 145. Raillard. 217. Ravisi (de). 226. Rameau, 244. Renard (le P ) 156. Rigaux. 47, 114. Sède (de). 242 Spring. 146 Taillar. 221. Telliez. 47. Terquem. 47, 21. Thorain. 245. Tranin. 22. Valérius. 147. Vallée-Poussin (de la) 157 Van Beneden. 149, 151. Van Drivai. 242. Vanderkiridère 89. Van Ryrselberghe 23. Violette. 46, 162, 243. Wargny 244. Wauiers. 146. Wïlbcrt.' 182, 184 Tables des Titres des /trtleles insérés, analysés ou cités. Air, Emploi de Y — chaud 147. Amphioxus. 149. Archéologie. Manuel d' — 12. Epi de faîtage en plomb. 115. Asscbe. Découvertes d’antiquité 163, 246. Beauvais (Guillaume) 102. Benezet. 44. Bétail. Races domestiques. 67.~ Betterave. Effeuillaison de la — 167. 186. Botanique. Chrysanthème des moissons, 133; Elodea canaden- /Jqq sis et Slraliotes aloides, 1 $ ; •• / Géonémie — du Nord de la France, 6, 29. Bronze. Epée de — à Lille. 114. Brun-Lavainne. 29.' Cambrai. Agrandissement de l’esplanade de — 183; Argente¬ rie de la ville de — 183; Décou¬ verte de monnaies romaines, 47. Cheval cornu, 135. Cuirassier (Retour du). 245 Cuivre dans les vinasses. 146. Cyclomèire 47. Danel Louis. 119, 160. Défense du territoire de la Gaule. 221. Dolmens. Peuple des — '56. Dubois. Pierre tumulaire d’Anne - 116. Dunkerque. Privilèges de — 101 : Documents pour l’histoire de - loi. Eaux courantes. Théorie des — 104 Education des jeunes enfants. 40. Equations. Résolution numéri¬ que des — 46. Ehtnoiogie belge, 89; — des populations du Nord de la France, 53. Etoiles filantes. 188. Franc. Cimetière — de Tugny. 216. Gallo-romaines. Habitations — à Lille, 114; à Assche, 163, 246; Monnaies à Cambrai, 47. Géographie historique de la Belgique, 140; Cartes — 97. Géologie. Esquisse géologique du département du Nord, 1, 36, 51, 91,' 138, 171, 190. Calcaire carbonifère, 152. Psammites du Condros, 154. 155. Roches érup¬ tives de Belgique et de l’Ar- denne française, 156. Papillon dans la houille, 121. Reptiles du terrain crétacé du Nord de la France, 73. Gomer (Louis de). 18. Henri III, duc de Brabant. 106. Horticulture. 71. Humique (Acide). 147. Insectes. Sitaris humeralis, 4. Coléoptères myrmécophiles du Nord, 25. Guêpes, 49. v. Lépi¬ doptères. Jean de Bologne. 183. Jersey. Constitution de — 16. Lamarle. 72. Lépidoptères. Catalogue des — des environs de Douai, 235. Cri¬ tiques sur le Catalogue des — de M. Leroy. 94, 127. Lycœa bœtica, 168. Papillon dans la houille, 12t. Leroy Onésime, 120. Lille. Découvertes archéologi¬ ques, 114. Météorologie. 110, 156, 187,249. Importances des observations des marées, pour la — 23. Musique. Enseignement de la — 160. Oiseaux. Pygargue, 219, Buse, 219, Oies d’Egypte, 219, Coccy- sus americanus, 149, Omalius d Halloy (d’). 24. Parenty. (L’abbé) 120. Pétrole. Origine du — 238. Pierre. Instruments de musique en — 217. Station néolithique de Tugny, 213. Physique. Théorie et perception des battements. 21 Percement du verre avec L’étincelle élec¬ trique, 22. Détermination des in¬ tensités lumineuses, 23. Cou¬ leurs subjectives, 146. Pomologle, 71. Roman de mœurs, 39. $t-Quentin. Siège de — en 1557. 43. Tératologie, 209. Tramways. 226. Tugny. Découvertes archéologi¬ ques à — 213, 216. Watteau. Peinture de Louis — 183. Zoologie. Embryogénie des Ne- mertes, 19. Limaces et arions, 84,159 Révision de la collection conchyliologique d’Hécart, 86. v Insectes, Oiseaux, Amphioxus Lille. lmp. Six-Horemans. 76344. 7e Année. — N« 1. — Janvier 1875. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain crétacé (suite) . Craie marneuse. — Cette assise se divise en trois zones. 1° Zone des marnes à Belemnites plenus . — Cette zone, encore peu connue, est représentée au cap Blanc-Nez par une couche de 0,n30 de marne verdâtre. Aux environs de Bavai, où elle atteint près d’un mètre d’épaisseur , c’est une marne gris -verdâtre ou bleuâtre avec Belemnites plenus , Ostrea diluviana , Terebratula obesa. Elle y repose sur les marnes vertes à Pecten asper dont elle n’a pas été suffisamment dis¬ tinguée. A Autreppe (Belgique), on y rencontre un grand nombre de dents de poissons et surtout de Ptychodus. La marne à B. plenus se voit aussi à Blangy dans la vallée de la Bresle et dans le pays de Bray. 2° Zone des marnes à Inoceramus labiatus. — Cette zone se présente avec deux faciès différents. Dans le Nord et dans l’Aisne elle est à l’état de marne très-argileuse, bleue ou verte, nommée Diève (1) parles mineurs; dans le Pas-de- Calais, la Somme et les Ardennes, c’est une craie blanche plus ou moins marneuse. ■» Les principaux fossiles Ammonites peramplus. A — Lewesicnsis. A — planulatus. A — Cunningtoni. Inoceramus labiatus. Spondylus spinosus. Au cap Blanc-Nez (2) la zone à ln. labiatus est formée par 30 mètres de craie nodulaire où abondent les Ammonites. (1) On réunit probablement sous ce nom une partie de la craie glauconieuse qui est aussi à l’état argileux. On en a la preuve à Carvin, où l3m de diôves appartiennent à la craie glauconieuse. (2) Chelloneix. Mém. Soc. des Sc. de Lille, 3 X, p. 211. sont : Terebratula semiglobosa. Terebratulina striata. Terebratulina gracilis. Rhynchonella Cuvieri. Discoidea minima. — 2 — Elle contourne le terrain jurassique du Boulonnais et peut parfaitement s’observer à Lottinghem (1) dans la tranchée du chemin de fer de Saint-Omer à Boulogne. A Nielles-les- Bléquin, on en voit la partie supérieure à l’état de marne blanche homogène. La zone à 1. labiatus se prolonge avec les mêmes caractè¬ res le long des affleurements dévoniens jusque près de Béthune. Au bord S.-O. du Bas-Boulonnais, la craie à 1. labiatus , semblable à celle du Blanc-Nez, affleure près de la station de Neuchâtel. Elle s’enfonce ensuite sous les assises supé¬ rieures pour passer sous la baie de la Somme et se relève au niveau de la mer au Tréport (2). Elle y forme un pli saillant dirigé du S.-E. au N. -0. et dans lequel est creusé la vallée de la Bresle. A partir du Tréport la craie marneuse se ren¬ fonce de nouveau pour reparaître au bas des falaises de Biville , Vassonville, Belleville-sur-mer, puis ploDge de nou¬ veau vers Dieppe. Ainsi, entre le Tréport et Biville , il y a un petit bassin synclinal de craie blanche ; mais à mesure qu’on s’enfonce dans l’intérieur des terres, on voit ce bassin dimi¬ nuer de largeur par suite d’un relèvement général vers le S.-E. (3). La zone à 1. labiatus se montre à mi-côte dans la vallée de l’Aulne, à Vatierviile et sur les coteaux au nord de la vallée de la Béthune â Neufchâtel. Quant aux coteaux sud de cette vallée, ils ne présentent que la zone à Belemnites plenus , qui y est portée à une altitude supérieure de 55 mètres à celle où elle est dans les coteaux nord par suite de la faille dont il a déjà été parlé Dans la plaine crayeuse de la Flandre et du Cambrésis, la zone à I. labiatus n’affleure pas ; elle n’a été reconnue que (1) Barrois. Isd. XI, p. 66. (2) De Mercey. Bull. Soc. Géol. 2e XXIII, p. 766. (3) Hébert. Bull. Soc. Géol. 29 XXIX, p. 446 et suiv. - 3 - par les puits et les sondages. Elle est à l’état de diève ; elle . a 17m à Lille, 46m à Seclin, 43ra à Orchies, 17ra à Valencien¬ nes, 38m à Carvin, 40m à Guesnain, 80m à Cambrai fl). Dans le golfe de Mons, la couche appelée diève par les mineurs appartient à la craie glauconieuse. La zone a 1. labiatus y est représentée par des marnes plus ou moins verdâtres ( Fortes toises) renfermant de nombreuses concré¬ tions siliceuses qui leur ont valu le sobriquet de verts à têtes de chat. Elle a de 3 à 6 mètres au levant de Mons (2) ainsi que sur le bord sud et sur le bord nord du bassin. A l’extré¬ mité orientale elle a 10 à 12 mètres à Bracquegnies, (3) où elle repose directement soit sur le territoire houiller, soit sur le gault; 20 mètres à Saint-Waast (4) et à Anderlues (5), où elle est fossilifère et recouvre la zone à Pecten asper. Dans cette région la base qui est devenue plus argileuse reprend le nom de diève ; mais elle continue à se distinguer des diè- ves de la craie glauconieuse par la présence des concrétions siliceuses. Celles-ci se voient encore à Baudour et à Mâco, près de Condé ; au-delà elles disparaissent. Les fortes toises d’Anzin n’ont plus les mêmes caractères et appartiennent à une autre zone. Les dièves affleurent dans la vallée de la Sambre et de ses affluents la Riviérette et les deux Helpes, formant le fond imperméable des riches prairies du pays. On la retrouve aussi sous une grande partie de la forêt de Mormal. C’est une marne bleue très-argileuse qui contient beaucoup de nodules de pyrite. Au Favril, où on l’exploite pour faire des drins, M. Barrois y a trouvé des traces d’Inocérame, proba¬ blement In. labiatus ; on l’a atteint par des terrassements derrière l’église de Maroilles. Aux environs de Landrecies, elle a de 20 à 30 mètres. A l’abbaye de Fesmy, on l’a ren- (1) Il est probable qu’il faudra déduire de ces chiffres la partie des Dièves qui appartient à la craie glauconieuse. (2) Cornet et Driart. loc cit. , p. 100;— (3) id. p. 92; — (4) id. p. 90 ; - (5) id. p. 88. - 4 — contrée sous 12 mètres d’argile diluvienne? et on a continué à y creuser jusqu’à 183 mètres de profondeur sans trouver le fend. C’est ïà un fait tout local. Les Elèves affi Durent dans les cantons du Nouvion et de La-Capelle, de Yervins, de Eavay, donnant naissance à des sources dont Iss eaux coulent soit à la Sambre, soit à l’Oise. L’humidité qu’elles produisent a développé dans ce pays la culture des osiers et l’industrie des paniers. SITARIS HUMERALIS Cet intéressant Coléoptère, dont les admirables recherches de M. Fabre nous ont fait connaître les curieuses métamor¬ phoses. se rencontre abondamment dans une localité voisine de Valenciennes, et j’ai pu, l’été dernier en recueillir plusieurs centaines d’individus. On trouve, de distance en distance, sur les bords de l’Escaut canalisé, entre la route d’Anzin et celle de Paris, des berges qui paraissent constituées par d’anciens sédiments déposés par le fleuve quand son cours n’était pas encore régularisé. Ces berges sont constituées par une argile sablonneuse for¬ mant des lits d’une faible épaisseur, alternativement jaunâtres et gris-bleuâtres, et renfermant de nombreuses coquilles terrestres et fluviatiles à demi fossilisées. La surface de ces berges est perforée d’une multitude de trous d’où l’on voit sortir, au printemps et pendant l’été, des abeilles du genre Anîkopkora. Pendant les mois d’août et septembre, l’aspect est complè¬ tement changé et devient tout à fait identique à celui que M. Fabre a observé et si bien décrit dans les couches mar¬ neuses et sablonneuses des mollasses de la Vaucluse ( Car- pentras. ) <*. A cette époque tout est silencieux dans le voisi¬ nage des nids, car les travaux sont achevés depuis longtemps — 5 — comme le témoigneraient au besoin les nombreuses toiles d’araignées qui tapissent tous les recoins et s’enfoncent en tubes de soie dans l’intérieur des galeries de l’IIyménoptère. N’abandonnons pas cependant â la hâte la cité naguère si po¬ puleuse, si animée et maintenant si déserte. A quelques pouces de profondeur dans le sol dorment jusqu’au printemps pro¬ chain des milliers de larves et de nymphes enfermées dans leurs cellules d’argile. Des proies succulentes incapables de défense, engourdies comme le sont ces larves ne pourraient- elles tenter quelques parasites assez industrieux pour les atteindre?... Voici, en effet, que la surface entière d’un talus à pic est tapissée de cadavres secs d’un Coléoptère ( Sitaris humer alis ) appendus aux réseaux soyeux des araignées. Et donnant la vie au milieu même de la mort parmi ces cadavres, circulent affairés des Sitaris mâles s’accouplant avec la pre¬ mière femelle, qui passe à leur portée, tandis que les femelles, fécondées, enfoncent leur volumineux abdomen dans l’orifice d’une galerie et y disparaissent à reculons. 11 est impossible de s’y méprendre: quelque grave intérêt amène en ces lieux ces Coléoptères qui dans un petit nombre de jours, apparais¬ sent, s’ accouplent, pondent et meurent aux portes mêmes des habitations des Anthophores. j> Nous raconterons prochainement les motifs intéressés qui guident le Sitaris et vous montrerons l’importance que l’étude de cet insecte peut avoir pour l’entomologie générale. Nous avons voulu seulement indiquer, dès aujourd’hui, la possi¬ bilité pour les naturalistes du Nord d’observer les métamor¬ phoses si bizarres signalées par M. Fabre. Il nous a paru aussi intéressant de signaler la similitude qui existe entre l’aspect de stations aussi éloignées que le)Vaucluse et le Nord, A Valenciennes comme à Carpentras, les galeries de YAnto- phora pilipes sont visitées non-seulement par le Sitaris mais par Y Anthrax surata et les larves d’une espèce d’anthinuène qu’il serait curieux de déterminer. A. Giàrd. NOTES SUR LA GÉONÉMIE BOTANIQUE DU NORD DE LA FRANCE Les notions que nous possédons sur la géographie bota¬ nique et l’histoire de la dispersion des plantes sont encore fort incomplètes. Il importe, pour obtenir quelques idées pré¬ cises à cet égard , de noter avec soin les variations que subit sous nos yeux le domaine de certaines espèces végétales , de signaler dans une contrée l’apparition de types nouveaux ou la disparition d’anciens habitants , en un mot de chercher à éclairer par ce qui se passe aujourd’hui ce qui a dû se passer autrefois. C’est dans ce but que nous avons à plusieurs reprises at¬ tiré l’attention des lecteurs du Bulletin sur deux plantes de la famille des Hydrocharidées, qui tendent à se répandre de plus en plus dans nos cours d’eau et dont la dispersion peut être suivie avec plus de facilité et de certitude que celle de tout autre végétal , parce que ces plantes sont dioïques , et que nous ne possédons de l’une et de l’autre qu’un sexe seulement. Je veux parler de YElodea canadensis et du Stra - tiotes aloïdes . En signalant l’année dernière (1) la présence de YElodea dans PArbonnoise, j’ajoutais que probablement on retrouve¬ rait cette plante dans le canal de la Deûle par où elle avait dû nous arriver en sortant de la Scarpe où elle est très-abon¬ dante. Le hasard m’a fourni cet été une démonstration indi¬ recte de l’hypothèse que j’avais émise. Ayant été appelé à examiner pour une expertise judiciaire la nature et l’état des eaux des marais de Wavrin , je fus très-surpris de trouver le lit de la rigole de dessèchement de ces marais entièrement tapissé par YElodea. J’interrogeai à ce sujet M. Flament, con¬ trôleur des routoirs de la commune , qui passe tous les jours plusieurs heures dans le marais, et qui est doué d’un esprit d’observation très-sagace et très-exercé. Il me dit qu’il n’y (l) Voir Bulletin, 18*73, p. 135 et 213. — 7 — avait guère plus de cinq à six ans qu’il avait remarqué l’ap¬ parition de cette plante. Bien que plusieurs fois par an on arrache YElodea dans la rigole , on peut dire que toute autre végétation y a presque entièrement disparu étouffée par cette herbe envahissante. Le marais de Wavrin communique avec la Deûle par une prise d’eau dont on n’use que de temps en temps pour assainir les claires en chassant les eaux de rouis¬ sage. C’est évidemment de cette façon que YElodea aura pé¬ nétré dans les fossés et remonté peu à peu dans la rigole de dessèchement qu’elle encombre aujourd’hui. Les botanistes ne peuvent que déplorer cette invasion, car la plupart de nos plantes palustres indigènes , notamment les nombreuses et intéressantes variétés de Potamots que renferment nos ma¬ rais , disparaîtront fatalement vaincues dans la lutte pour l’existence par l’Hydrocharidée du Canada. Plus modeste et moins redoutable, 1 eStratioles aloïdes con¬ tinue également à se répandre dans le département du Nord. 11 est aujourd’hui abondant dans un fossé du marais de l’Epaix près Valenciennes. Sa présence en ce lieu nous aurait fort étonné si nous n’avions appris que plusieurs pieds rapportés de Saint-Ghislain y ont été jetés , il y a quelques années, par M. Boutman , botaniste valenciennois. Il est probable que cette colonie prospérera et s’étendra de plus en plus dans un milieu si favorable. Plusieurs plantes terrestres peuvent aussi nous fournir le sujet d’intéressantes observations de géonémie botanique, et je souhaite vivement qu’un des zélés botanistes de notre ré¬ gion , abandonnant la routine des anciens amateurs et la manie des collections inutiles, nous fasse connaître les modi¬ fications qu’à subies ou que subit en ce moment la flore du département, quelles espèces disparaissent, quelles autres s’introduisent ou se transforment pour s’adapter aux condi¬ tions de milieu si variées, créées par l’industrie, les chemins de fer, etc. — 8 — Les nombreux herbiers qui ont été faits à Lille, à Douai, à Valenciennes, etc., depuis le commencement du siècle, pour¬ raient certainement fournir d’utiles documents pour un tra¬ vail de cette nature. 11 serait bon également de tenir compte des renseignements fournis par l’archéologie locale , les an¬ ciennes chroniques. Enfin les faits si curieux observés en divers endroits après la guerre de 1870, relativement à l’introduction de certaines plantes étrangères par les armées belligérantes , jetteraient peut-être quelque lumière sur la cause possible de Farrivée dans le Nord de plantes méridionales à la suite des armées d’Espagne ou d’autres conquérants à des époques plus reculées. Pour arriver à des résultats précis et laisser à leurs succes¬ seurs des renseignements qui acquerraient par la suite une immense valeur scientifique , nos botanistes devraient em¬ ployer le système préconisé par M. Preudhomme de Borre et déjà mis en pratique par plusieurs entomologistes et mala- cologistes belges. Cet éminent zoologiste , dont les idées sur la géonémie et l’éthologie sont des plus justes et des plus remarquables , a fait dresser et tirer à des milliers d’exem¬ plaires une petite carte de Belgique où sont soigneusement indiqués les bois, les cours d’eau, etc. Une de ces cartes est consacrée à chaque espèce d’insecte , même aux plus com¬ muns ou plutôt surtout aux plus communs , de façon à ce qu’on puisse en embrasser d’un seul coup d’œil la distribu¬ tion géographique. En même temps , la collection , dont ces cartes ne sont pour ainsi dire que la traduction , renferme pour chaque espèce très-répandue des types venant d’un grand nombre de localités diverses , ce qui permet de saisir l’étendue des variations de cette espèce déterminées par les conditions d’existence. Les anciens amateurs n’admettaient dans leurs collections que ce qu’ils appelaient des types bien nets, des échantillons bien accusés, de bonnes espèces, comme si chaque individu — 9 - dans la nature ne méritait pas la meme attention , comme si les variétés aberrantes n’étaient pas au contraire les objets les plus dignes des méditations du naturaliste penseur. Au lieu de récolter seulement les espèces qui ont atteint aujourd'hui leur état d’équilibre, les points culminants de la courbe spécifique , les botanistes qui aspirent à rendre de véritables services à la science devront surtout porter leur zèle de collectionneurs sur les groupes où l’espèce est encore instable, où les types sont en voie de formation, où le moindre changement dans le milieu entraîne une variation considérable dans les caractères. Tels sont les genres Salix, Rubus , Rosa Hieracium , Galîum, Myosotis , etc. % Occupé de recherches d’une lout autre nature, je prétends seulement indiquer aux spécificateurs dont les connaissances sont plus étendues et plus complètes que les miennes , une direction grâce à laquelle ils pourront acquérir de justes titres à la reconnaissance des philosophes, tout en ne perdant rien du plaisir très-véritable qu’il y a à se créer un bel et riche herbier. J’indiquerai seulement quelques faits, qui, je l’es¬ père, seront bientôt augmentés et éclairés par les nombreuses recherches de ceux auxquels j’adresse cet appel. Certaines espèces, originaires du midi de l’Europe, et dont les graines sont fréquemment apportées dans nos contrées avec celles de luzerne se développent néanmoins dans leur nouvelle patrie , fleurissent plus ou moins bien suivant que l’été est plus ou moins chaud, mais produisent des ovules, qui, le plus souvent, ne peuvent arriver à maturité. Telles sont les Centaurea solstilialis , Ammi majus , Rarkhaiisia setosa . Ces plantes n’étant pas vivaces ne peuvent s’implanter dans notre région par reproduction asexuée, comme le Stratiotes et VElo- dea dont nous parlions plus haut et qui demeurmt également stériles quoique pour un motif différent. A Montpellier, le Jns- siœa grandiflora , plante originaire d’Amérique, a conquis depuis longtemps son droit de cité. Elle se propage par dra- geons, ses fleurs ne produisant pas de graines sous le climat de la France méridionale. Mais cette propagation par voie asexuée, relativement facile pour un végétal aquatique comme ceux que nous venons de citer , devient presque impossible pour une plante terrestre. UEuphorbia Cyparissias , si abondante aux environs de Paris et dans la région ardennaise de la France et de la Bel¬ gique, n’existe plus que dans les jardins dans notre départe¬ ment. Elle y végète avec vigueur, se multiplie par drageons, fleurit bien; mais j’ai remarqué qu’elle ne produit jamais de graines. Très-rarement j’ai vu quelques ovaires se développer, mais les graines qu’ils contenaient n’ont pas germé. M. Decaisnes , professeur au Muséum,, affirme n’avoir ja¬ mais observé les graines de la Nummulaire ( Lysimachia Num- mularia). Cette plante, qui se multiplie facilement par sto¬ lons, nous est-elle venue ainsi d’une région plus chaude où elle porterait graine ou bien cette stérilité provient-elle des conditions où végète ordinairement la plante (fond des fossés, dessous des bois humides). On sait en effet que dans les en¬ droits ombragés , la Ficaire (Ficaria ranunculoïdes) ne porte pas habituellement de graines et se reproduit par bulbilles, tandis que dans les lieux secs, où d’ailleurs on la trouve très- rarement , cette renoncule recouvre la faculté de donner des ovules et un pollen normalement constitués, mais ne produit plus de bulbilles. Un certain nombre de plantes messicoles se sont intro¬ duites dans nos champs à une époque sans doute fort re¬ culée , probablement à l’origine de la culture des céréales. Ce sont : Centaurea cyanus , Agrostemma githago , Lolium temulentum , Agrostis spica-venti , Bromus secalinus , etc. Ces plantes semblent ne végéter convenablement qu'avec les gra¬ minées cultivées auxquelles elles sont associées. Elles sortent rarement des cultures et ne se maintiennent pas au dehors. D’autres jouissent d’une indépendance un peu plus grande, sans cependant s’implanter pour toujours dans les endroits qu’elles envahissent en quittant les champs cultivés. Telles sont, par exemple : Papaver Rheas , Papaver Argemone , Myo- surus minimus, Ranunculus arvensis , Thlaspi arvense , Chry- santhemum segetum, Veronica triphyllos. L’indépendance plus grande de ces végétaux tient, ce me semble , à ce que la nature du sol a sur eux plus d’influence que les voisins avec lesquels ils vivent. Myosurus minimus et Veronica triphyllos pousseront en compagnie du blé ou de la betterave pourvu que le sol soit sablonneux. Faut-il attribuer à cette influence de la nature du sol l’ab¬ sence complète dans nos environs de certaines plantes messi- coles très-répandues dans d’autres régions, comme Nigella da - mascena , Nigella arvensis , Delphinium consolida , Delphinium ajacis, les Adonis, certains Silene, le Calendula arvensis, etc. Cette question mériterait d’être approfondie. Peut-être, pour certains cas , du moins , l’absence de quelques-unes de ces plantes provient-elle uniquement de ce que les graines de la plante cultivée sont récoltées depuis longtemps dans le pays même, ce qui détruit toute chance d’introduction. Plusieurs plantes amenées par les cultures ont fini par con¬ quérir droit de cité dans leur nouvelle patrie. Nous avons fait connaître aux lecteurs du Bulletin (1) la dispersion du Géra¬ nium Phæum, qui paraît dépendre dans une certaine mesure de la culture du houblon. L’on peut trouver aisément d’au¬ tres exemples du même genre. La Veronica Persica {Ver. Buxbaumiï) n’est pas signalée dans le Catalogue des plantes du Hainaut dressé par Hecart au commencement de ce siècle. La Botanographie Belgique l'indique à Liège et à Yerviers d’après Lejeune. M. Normand, qui l’a trouvée le premier dans les cultures des environs de Valenciennes, m’a dit souvent que pendant de longues années elle y était très-rare. Cette plante abonde aujourd'hui autour U) Voyez Bulletin , 1873, p. 240. — 12 — de la ville , sur le bord des chemins , dans les champs, etc. On a d’ailleurs suivi son introduction en plusieurs points de la France : dans l’Ouest (Lloyd, Flore de l’Ouest), en Normandie, où pendant longtemps on ne l’a trouvée qu’aux environs d’Avranches; en Picardie, en Belgique, où elle s’est égale¬ ment répandue progressivement. Nul doute que dans quel¬ ques années cette plante disséminée sur tout notre territoire affectera entièrement les allures d’un végétal indigène. L ’Erysimum cheirant hoïdes , qui est aujourd’hui naturalisé dans les marais de l'Epaix près Valenciennes, est encore une plante échappée des cultures. (. A suivre). Giàrd. BIBLIOGRAPHIE. MANUEL ÉLÉMENTAIRE D’ARCHÉOLOGIE NATIONALE (Suite) r IV. — Epoque franque (1). L’époque franque s’étend du Ve siècle au milieu du VIIIe. L’architecture de cette période de temps devant être étudiée avec l’architecture du moyen-âge , nous ne parlerons en ce moment que des sépultures mérovingiennes. C’est à M. l’abbé Cochet, correspondant de l’Institut, que revient l’honneur d’avoir créé la science de l’archéologie sépulcrale des Francs. Les cimetières de ce peuple étaient ordinairement établis sur la pente des vallons, dans les terrains calcaires. Dans les parties hautes , les corps sont presque à fleur de terre ; à la descente du sol, ils s’abaissent parfois à un mètre de pro¬ fondeur. Quelques cadavres sont déposés dans des cercueils en pierre, munis d’un couvercle; mais le plus grand nombre (1) Nous donnons assez d’étendue à l’analyse du chapitre de M. l’abbé Corblet consacre aux sépultures mérovingiennes, afin de mettre nos lecteurs à même de pouvoir reconnaître les objets qu’ils pourraient trouver dans les cimetières de cette époque, qui sont assez nombreux en notre contrée. - 13 — repose en des fosses taillées dans la craie, où Ton trouve un sédiment noirâtre, reste des cercueils en bois. La tôte est presque toujours tournée vers l’orient, et les corps ordinaire¬ ment étendus dans une position horizontale, les mains alignées le long des côtes. Les armes sont invariablement placées au même endroit. Les débris funéraires qu’offrent ces tombes peuvent se diviser en trois catégories : les armes offensives et défensives, les habillements et ornements, les ustensiles et objets divers. Armes offensives et défensives. — Les armes qui se trouvent dans les sépultures de l’époque franque sont : 1° Yépée, arme d’élite qu’il est très-rare de trouver; 2° la hache ou francisque , signe caractéristique du guerrier éprouvé qui ne se rencontre que dans les sépultures des chefs ; 3° le scramasaxe , lame de sabre, étroite et peu longue, tranchante d’un seul côté et présentant deux rainures profondément gravées près du dos, qui est placée à droite du mort, la (.ointe en bas; 4° le c li¬ teau, tout à la fois instrument domestique et arme offensive, qui est ordinairement placé en travers du corps; 5° la lance , de longueur variable, placée aux pieds du mort, quand elle est accompagnée de la hache, et, quand elle est seule, près de la tête au côté droit; 6° Yangon, qui diffère de la lance en ce sens qu’il se termine par une pointe quadrangulaire à ailerons; 7° le bouclier, arme défensive, rare chez les Francs. Habillements et ornements. — 1° Tissus. C’est surtout dans les tombeaux de femme qu’on rencontre parfois des débris de ces riches habillements , de ces tissus d’or, de soie et de laine, dont parlent les historiens de l’époque mérovingienne. 2° Boucles. Les boucles sont de formes carrées, rondes ou ovales , et se présentent sous des aspects très-variés ; elles sont en fer ou en bronze, quelquefois en argent ou en alliage d'argent; la composition du bronze , bien différente de celle des Romains, admet le plomb et même parfois suppi ime l’étain ; étant étamé, elle a un peu l’aspect de l’argent, 3° FL — 44 — Iules. Aux environs de la poitrine se trouvent des fibules ou agrafes, destinées à rattacher les robes ou les manteaux. Leur forme est très-variée ; ce sont souvent des cercles de cuivre émaillé et recouverts de segments de verroteries de diverses couleurs, avec un appendice recouvrant l’ardillon, qui est de fer. 4° Plaques de ceinturon. Elles se composent d’une boucle destinée à fermer la ceinture, et d’une agrafe longue et ornée, à laquelle on donne le nom de plaque; en face, à l’autre bout du ceinturon , dont une partie était prise dans la boucle , on voyait souvent une seconde plaque , complément de la pre¬ mière. Les unes sont en fer, les autres en bronze: celles-ci, à l’abri de l’oxyde, sont mieux conservées et aussi plus ri¬ ches ; leurs dessins figurent des dents de scie , des chevrons, des croix , des serpents , des dragons. 5° Bourses. On trouve à la ceinture des morts des lames de fer, qui étaient des fer¬ moirs de bourses ou d’aumônières en cuir; elles sont parfois recouvertes de verroteries cloisonnées. 6° Boutons. Les bou¬ tons de bronze, qui représentaient des serpents, des dragons, sont parfois émaillés. 7° Boucles d'oreilles. Elles sont ordinai¬ rement en bronze et d’un diamètre considérable. Un bout aigu et recourbé s’emboîte dans l’autre qui est creux; près de cette seconde extrémité se trouve un bouton de bronze, rond ou carré, rempli de pâte de verre. 8° Bagues. Les bagues, qu'on trouve aux doigts des morts , sont en or , en argent ou en bronze , avec ou sans chaton de cuivre ou de verroterie ; on y voit parfois des croix de Saint-André, gravées en creux. 9° Colliers. C’est au cou des squelettes de femme et d’enfant qu’on recueille des colliers d’ambre et des perles de verre. Quand on ne retrouve qu’une perle ou quelques-unes dans une sépulture , on peut supposer qu elles ont servi d’orne¬ ment à quelque partie de l’habillement ou du costume mili¬ taire. Ustensiles et objets divers. — 1° Vases en terre. Aux pieds du mort , on trouve un vase en terre, parfois deux , qui con- tenaient de l’eau lustrale quand le mort était païen, de l’eau bénite quand il était chrétien. Ces vases sont d’une terre de couleur noire et parfois d’une teinte grise. Il y a aussi quel¬ ques vases de terre blanche ou de terre rouge non vernissée. Les décorations des vases les plus beaux consistaient en filets, chevrons, losanges , zigzags, brisures, damiers. Cette céra¬ mique, assez grossière, a un aspect barbare qui la différencie complètement de la poterie gallo-romaine. 2° Vases en verre. Les vases en verre , assez rares , se trouvent près de la poi¬ trine du mort. Le plus souvent, ils sont sans pied , ni anse; la plupart paraissent avoir été des coupes à boire. 3° Seaux. On ne retrouve guères que les cercles et les anses des seaux dont les douves étaient en bois. 4° Coffrets. On trouve en¬ core, mais bien rarement, des débris de coffrets en fer ou en bronze estampé, munis de serrure. Il y avait aussi des écrins en bois munis de plaquettes en os, avec des dessins en creux. 5° Balances. Des balances , composées d’un fléau et de deux plateaux en- bronze, plats et non concaves, ont été décou¬ vertes par M. l’abbé Cochet. Elles accusent peut-être la sépul¬ ture d’un agent du fisc ou d’un officier monétaire. 6° Peignes , Les débris de peignes en os ou en bois se trouvent près de la ceinture. 7° Ciseaux. On présume que les ciseaux, trouvés aussi à la ceinture, indiquent des sépultures de femme. 8° An¬ neaux. Dans toutes les sépultures mérovingiennes, qui n’ont pas été violées, on rencontre un grand nombre d’anneaux en fer, ronds, grossiers, ayant de 3 à 8 centimètres de diamètre, dont la destination n’a pas encore été déterminée. 9° Harna¬ chements du cheval. Avec les ossements de cheval , inhumés parfois au bout des fosses de guerriers francs , on trouve des anneaux, des boucles, des mors ou filets de brides, des fers de cheval, des sabots en fer, des clous, des brides et des éperons. 10° Objets divers. On rencontre aussi, dans les sé¬ pultures franques, des fiche-pattes en fer, des aiguilles de bronze , des pierres à aiguiser , des briquets en fer accom- - 16 — pagnés de pierres à feu, des chaînettes, des amulettes, des clefs, des clous, des épingles, des hochets, des pinces épila- toires, des cure-dents, des styles, des monnaies, etc., etc. Le plus célèbre des tombeaux francs est celui, découvert à Tournai en 1653, qui a fait l’objet d’une des plus remarqua¬ bles publications de M. l’abbé Cochet. (La suite prochainement) . SOCIÉTÉS SAVANTES. ACADÉMIE D’AMIENS Mémoires, 8e série, tome I. Ce volume contient un certain nombre d’articles dont nous parlerons brièvement parce que ce sont plutôt des disser¬ tations instructives et agréables que des travaux contribuant aux progrès de la science. Il faut cependant faire exception pour la très-courte notice de M. l’abbé Corblet, intitulée le Lieu de naissance de saint Thomas Becquet. Il y avait une grande incertitude sur la pa¬ trie du saint prélat : M. de Cardevaque, l’avait réclamé pour Bapaume, M. l’abbé Robitaille, pour la Normandie, M. Gra¬ ves, pour Marseille, etc. M. l’abbé Corblet, établit par la comparaison des plus anciens biographes et par le témoi¬ gnage même de Thomas Becquet, qu’il est né à Londres, d’un père normand. M. Ch. Dubois, avocat à Amiens, a fait une étude très-inté¬ ressante sur la constitution de Pile de Jersey. Jersey n’est pas une conquête de l’Angleterre c’est une ancienne pro¬ vince normande, restée fidèle à ses ducs devenus rois d’An¬ gleterre. Elle est de fait complètement indépendante. Les droits de la reine se réduisent à tenir garnison, au comman¬ dement des milices qui ne peuvent servir hors de l’île et à la nomination de quelques fonctionnaires. Le Conseil privé de la reine a droit de veto sur les lois votées par les Etats de Jersey ; mais malgré le veto les lois sont valables pour - 17 - trois ans et au bout de trois ans elles peuvent encore être renouvelées. Jersey est donc un Etat indépendant sous le protectorat de l’Angleterre. Elle nous offre le singulier spectacle d’une communauté de 60,000 âmes sans pouvoir exécutif. Il y a une assemblée des Etats comprenant les douze ministres anglicans, les douze jurés-justiciers, les douze connétables (maires) et, depuis 1856, quatorze députés élus ; elle est présidée par un officier de la reine, le bailli, qui dirige les travaux sans y participer. Les Etats font les lois et ils chargent une commission spéciale de faire exécuter telle ou telle de leur decision. La police, la voirie, les écoles sont confiées aux administrations municipales. Toutes les fonc¬ tions sont gratuites, pas de dette, pas d’armée, pas de fonc¬ tionnaires rétribués, partant pas d’impôts. Un léger droit d’entrée sur les boissons et un impôt direct sur les revenus supérieurs à 700 francs suffisent à payer l’entretien des ports et des chemins. A côté de ces institutions qui nous semblent un rêve dont nous envions la réalité pour nos petits-enfants, il reste des usages féodaux qui nous ramènent à cinq siècles en arrière, le droit d’aînesse, la corvée, le droit d’épave, le droit de mariage de dix-neuf pences si le tenancier mineur a pris femme hors de la seigneurie, le droit pour le seigneur de jouir pendant une année de la succession du tenancier quand elle est déférée à la ligne collatérale. Deux fois par an la Reine ou son représentant tient une cour féodale. Là sont cités les Seigneurs des 130 fiefs de Tîle (bons bourgeois enrichis dans les pêcheries de Terre- Neuve ou l’engrais des bestiaux,) qui appelés par ordre hié¬ rarchique viennent faire l’aveu et rendre l’hommage. Le Procureur général lit une sorte d’homélie sur la célébration du dimanche. Après quoi on lève l'audience et on va sur le quai, au Royal-Yacht Club-Hôtel, faire un excellent dîner aux frais de la couronne. — 18 — Il faut ce bon dîner pour nous rappeler que nous sommes en Normandie et non pas à Singapoor où M. de Puyraimond, ancien officier de marine, a conduit l’Académie pendant une de ses séances. Avec M. Daussy, on rentre dans le monde réel, trop réel hélas 1 car c'est le récit des batailles d’Amiens et de Pont- Noyelles; M. le comte de Gomer a parlé du Moyen-Age et de la Renaissance ; M. Narcisse Ponche, du travail de la laine; M. Edouard Dupont, pharmacien, des quinquinas ; M. Man¬ cel, du port de Saint-Valéry et de la baie de la Somme. Sous le titre trois versions et trois thèmes, M. Levavasseur a donné quelques préceptes pour traduire en poésie française ia poésie latine et réciproquement, M. de Beaussire a rendu compte d’une traduction en vers des poésies de Catulle, faite par M. Yvert, secrétaire perpétuel de l’Académie et M. De- caïeu a lu une épître en vers à Rachel. On doit à M. Hennebert des détails biographiques sur la famille de Gomer, qui habitait la Picardie et fournit de nombreux soldats à la France. Le plus célèbre fut Louis Gabriel de Gomer, né en 1718, maréchal de camp d’artillerie. Louis de Gomer s’enrôla à douze ans dans le régiment d’artillerie de la Fère, il fut fait officier pointeur à quatorze ans et commissaire extraordinaire à seize. Il prit part à toutes les guerres du temps et principalement aux sièges de Menin, Fûmes, Ypres, Tournai, Mons, Gand, Audenarde, Ostende, Nieuport, Namur, Berg- op-Zoum. Après la prise de cette ville il fut fait chevalier de St-Louis. Il était à Rosbach en qualité de commissaire provincial et finit par servir lui-même une pièce dont tous les servants avaient été tués. Lieutenant-colonel en 1759, il fut chargé de ramener en France le matériel d’artillerie qui avait servi à la guerre de sept ans. .A partir de cette époque il ne prit plus part aux opéra- 19 - tions de guerre ; mais il se consacra à des travaux sur l’ar¬ tillerie. En 17.74, alors qu’il commandait l’école d’artillerie de Douai, il perfectionna les mortiers ; il fat l’inventeur d’un nouveau système les mortiers à la Gomer , que Napo¬ léon Ier approuvait fort, mais les essais nombreux auxquels il avait dû se livrer l’avaient ruiné. L’Assemblée nationale en le mettant à la retraite (1791) lui accorda une pension de 10,000 francs qui cessa bientôt de lui être payée ; il mourut dans la misère. LABORATOIRE DE ZOOLOGIE MARITIME DE WIMEREUX Embryogénie des Némertes On trouve à Wimereux, sous les amas de rochers qui en¬ tourent la tour de Croï, des vers peu connus en général des personnes qui ne sont pas familières avec les études zoolo¬ giques : ces animaux qui appartiennent à la classe des turbella- riés, ressemblent, pour l’aspect général, à ces petits vers plats, noirâtres , à allure très-lente, à corps mou et peu consistant connus sous le nom de Planaires, qu'on rencontre en si grande abondance dans tous les fossés de nos environs; ils ne s’en distinguent extérieurement que par leur forme plus grcle et plus allongée , et par la taille parfois considérable qu’ils peuvent acquérir : l’une des espèces que l’on rencontre à Wimereux peut avoir jusqu’à un mètre de longueur. Ces animaux, nommés Némertes, présentent dans leurs formes larvaires des particularités très-remarquables : un giand nombre d’entre elles pondent des œufs qui donnen1, naissance à de jeunes némertes en tout semblables ù leur mère, à la taille près : ce sont, dès l’origine , de petits vers à allures lentes, dont le genre de vie ne s’écarte en rien de celui de l’adulte, et qui n’auront à subir, pour acquérir leur état définitif, qu’un simple phénomène d’accroissement. Mais , à côté de ce mode de génération si simple , on en rencontre un autre beaucoup plus compliqué : il est des es- — 20 — pèces dont les œufs, au lieu de donner naissance directe¬ ment à de jeunes némertes , produisent des organismes qui n’ont rien de commun avec la forme de l’adulte : ce sont des larves en forme de chapeau , d’une transparence parfaite , garnies d’élégants prolongements et de bandes sinueuses couvertes de cils vibratiles; on lesja désigné sous le nom de Pilidium. Leurs mœurs ne sont pas moins caractéristiques que leur aspect général : au lieu de ramper lentement sur le sable , elles nagent librement et s’agitent avec vivacité à la surface de la mer; en un mot, on les prendrait plutôt pour de jeunes méduses que pour des larves de vermiformes. Ces organismes singuliers vivent nn certain temps d’une vie indé¬ pendante. Ce n’est qu’après une période plus ou moins longue que commencent à s’effectuer les phénomènes de transfor¬ mation qui doivent donner naissance au jeune némerte. A l’intérieur du sac qui constitue le Pilidium se forment des bourgeons qui, en se soudant les uns aux autres, finissent par constituer un véritable némerte ; ce dernier, une fois formé, abandonne la larve qui lui a donné naissance pour vivre d’une vie indépendante. En résumé, nous avons ici un phénomène de génération alternante : le némerte produit par génération sexuée un animal qui ne lui ressemble en rien, et cet animal provisoire, cette nourrice reproduit à son tour par génération asexuée, par bourgeonnement, la forme pri¬ mitive dont il dérive. Ces faits, signalés déjà depuis assez longtemps , ont été revus par de nombreux observateurs. On connaît aujourd’hui avec précision tous les détails relatifs à ces différents phé¬ nomènes ; mais il est une question qui restait toujours une véritable énigme. Comment se faisait-il que , dans un même groupe d’animaux, l’on pût rencontrer deux modes de géné¬ ration si différents? Quels étaient les liens qui pouvaient unir les Pilidiums à ces vers auxquels ils ressemblent si peu? Pendant le séjour de plusieurs mois que j’ai fait dans le — 21 — cours de l’été passé au laboratoire de zoologie de Wimereux? j’ai eu l’occasion d’observer certains faits qui m’ont fourni la solution du problème : on rencontre assez communément sur la plage une espèce qui , ainsi que mes observations me l’ont appris , représente un stade de passage entre les némertes à Pilidium et les némertes à développement direct : il existe chez cette espèce remarquable, un véritable état de Pilidium, suivi d'un développement en tout comparable à celui des némertes à développement direct : l’état de Pilidium se passe tout entier dans l’œuf, et nous avons à l’éclosion un animal qui possède déjà la forme caractéristique de némerte. Cette espèce nous présente réunis, sur un seul individu, les carac¬ tères des deux modes de développement précédemment cités. Ce fait fondamental, joint à un certain nombre d’autres ob¬ servations qu’il serait trop long d’énumérer ici, m’ont amené à conclure qu’il existe pour tout le groupe des némertes un mode de développement typique, le même pour tous et dont dérivent les deux modes divergents dont il vient d’être ques¬ tion : le Pilidium n’est que le résultat de l’exagération d’un stade de développement par lequel passent toutes les némertes; la génération directe dérive au contraire d’une simplification graduelle du développement , simplification dont on retrouve du reste tous les termes intermédiaires. J. Barrois. CONGRÈS DE L’ASSOCIATION FRANÇAISE A LILLE. Sections réunies de physique et de météorologie. La section a nommé président d’honneur M. Van der Mensbrugge, professeur à l’université de Gand, et président M. Terquem, professeur à la faculté de Lille. M. Terquem a présenté à la section, outre ses recherches sur la transformation du vibroscope en tonomètre dont il a déjà été question dans ce recueil, des observations relatives à la théorie et à la perception des battements qu’il avait faites en commun avec M Boussinescq. Quand on produit simulta- — 22 — nément deux sons de même intensité, on démontre que Ton doit entendre un son unique dont le nombre de vibrations est la moyenne de ceux n et ri des deux premiers et dont l’intensité est variable. Elle présente par seconde un nombre de battements , c’est à-dire de maxima et de minima égal à n-ri. Mais qu’arrive-t-il quand les deux sons sont d’intensité différente? La solution de cette question présentait des diffi¬ cultés de calcul. Par une série de transformations , et en né¬ gligeant certaines quantités très-petites , ce qui est permis si les deux sons ne diffèrent pas beaucoup l’un de l’autre , on arrive à ce résultat que l'oreille doit percevoir un son unique dont l’intensité varie en même temps que la hauteur. C’est ce que prouve l’expérience , si on écoute avec une seule oreille les sons étudiés en faisant varier progressivement la hauteur de l’un d’eux, le nombre de battements va sans cesse en croissant , et l’on n’entend qu’un seul son dont la hauteur croît progressivement. Si , au contraire , on écoute avec les deux oreilles, il n’y a plus de trace de battements, et on a la sensation de l’intervalle qui sépare les deux sens; cela prouve qu’il n’y a réellement battement qu’autant que les mêmes fibres de l’oreille sont ébranlées simultanément par les deux sons , et qu’en outre les deux oreilles sont indépendantes l’une de l’autre au point de vue de la perception. MM. Terquem et Trannin ont également communiqué au. Congrès de Lille une note sur un procédé permettant de percer facilement les lames de verre à l'aida de V étincelle électrique de la machine de Holtz. On sait combien il est difficile, quand on veut percer des lames de verre un peu épaisses à l’aide de décharges électriques, d’empêcher cette décharge de contourner la lame de verre. On y arrive cependant, en mastiquant sur le verre des tiges métalliques entourées de cylindres de verre, préparation longue, fasti¬ dieuse, et qui n’est même pas toujours efficace. On réussit à coup sûr, en plaçant la lame de verre à % - 23 — percer dans un petit appareil que MM. Terquem et Trannin ont construit très-simplement. Cette lame y est placée entre deux autres lames de verre traversées par des tiges isolées, qui servent de' conducteurs ; en outre on interpose deux couches d’huile entre les lames de verre. Avec une macüine de Holtz à 4 plateaux, on peut ainsi percer des lames ayant un centimètre d’épaisseur. M. Trannin a lu une note déjà présentée à l’Académie des Sciences dans la séance du 22 décembre 1873. Il s’est appliqué à étudier la question de la détermination de l’inten¬ sité relative des sources lumineuses. Ce problème soulève de grandes difficultés à cause de la coloration différente des lumières. M. Trannin s’est proposé de comparer les diverses couleurs simples au point de vue de leur éclat. Les méthodes photométriques habituelles ne peuvent suffire à résoudre cette question, à cause du défaut de sensibilité de l’œil pour les couleurs simples. L’égalité d’éclat des deux sources dans une certaine étendue du spectre est accusée, dans l’appareil construit par M Trannin, par la disparition des franges d’interférence produites par le passage des rayons lumineux à travers diverses lames cristallisées ; la méthode est très ingénieuse, et doit permettre de résoudre une question, dont la solation n’avait pas encore été tentée. La construction de l’appareil qui a exigé un temps consi¬ dérable , vient d’être achevée , et sous peu M. Trannin pourra terminer cette étude. M. Van Rysselberghe , professeur à l’école de navigation d’Ostende, déjà connu du monde savant par son Météorogra- phe universel, a présenté des remarques sur V importance des observations des marées au point de vue météorologique. Le niveau moyen de la mer subit à chaque instant des variations intimement liées à celles de la pression atmosphérique. Les variations considérables de ce niveau moyen , nommées ras — 24 — de marée , précèdent toujours les tempêtes qui les ont pro¬ duites dans les régions tropicales. Or, toute dénivellation momentanée de la mer, si faible qu’elle soit, produit des vagues marées qui se propagent vers les côtes beaucoup plus vite que le phénomène qui leur a donné naissance. Donc l’observation attentive des variations du niveau moyen de la mer sur les côtes peut permettre d’annoncer à l’avance les tempêtes qui s’approchent. CHRONIQUE Société des Sciences de hille. — Cette Société a élu pour l’année 1875 : président , M. Viollette, professeur de chimie à la Faculté des sciences: vice-président , M. Van Hende, numismate ; secrétaire-général , M. Terquem, profes¬ seur de physique à la Faculté des Sciences ; secrétaire de cor¬ respondance , M Dutilleul, homme de lettres; trésorier, M. Bachy, agronome; bibliothécaire-archiviste , M. de Nor- guet, naturaliste. Commission historique du département du Nord. — La Société a réélu président M. de Coussemaker, membre de l’Institut; elle a nommé vice-président , M. l’abbé Dehaisne, ; secrétaire- archiviste , M. H. Rigaux. M. Vincent, chef de division à la préfecture , qui depuis de nombreuses années remplissait les fonctions de secrétaire-archiviste et qui avait été comme tel l’âme des travaux de la commission, a été nommé secrétaire-général. Société géologique du Nord. — La Société géolo¬ gique a renouvelé son bureau de la manière suivante : pré¬ sident , M. Ortlieb ; vice - président , M. Giard ; secrétaire , M. Savoye; trésorier-archiviste , M. Ladrière. Nécrologie. — Le département du Nord vient de perdre deux de ses plus anciens littérateurs : M. Brun-Lavainne , secrétaire en chef de la mairie de Roubaix, mort à l age de 84 ans , et M. Onésime Leroy, mort à Raismes, à 87 ans. Nous espérons pouvoir leur consacrer un article de bio¬ graphie. - • Une autre perte , qui ne nous est pas moins sensible, quoi qu’elle nous touche moins directement et qu’elle soit par¬ tagée par le monde savant tout entier, est celle de M d’Oma- lius d’Halloy. mort à Bruxel es, à l’âge de quatre-vingt-treize ans. Son premier travail datait de 1808 Lille , imp. Six-Horemans. 7e Année. — N° 2. — Février 1875. COLÉOPTÈRES MYRMÉCOPIIILES DU NORD Tous les entomologistes connaissent l’intérêt qui s’attache à l’étude des fourmillières au point de vue de la spécifica¬ tion, des instincts et des mœurs, bien plus admirables encore que celles des abeilles. Dans ces derniers temps, on s’en est beaucoup occupé sous un autre rapport non moins inté¬ ressant et qui avait échappé aux anciens observateurs ; nous voulons parler des habitudes de cohabitation qui existent entre les fourmis et un grand nombre d’autres insectes dési¬ gnés sous le nom de myrmécophiles. Leur liste s’accroît tous les jours, à mesure que les obsen vations des naturalistes se portent de ce côté. M. E. André vient d'en publier, dans la Revue et magasin de zoologie, le relevé le plus complet qui ait encore paru. Il comprend 588 espèces, savoir: Coléoptères: 542; Hémiptères : 20; Orthoptères : 3; Hyménoptères : 7; Lépi¬ doptères : 1 ; Diptères : 4; Thysanoures : 1 ; Arachnides : 3; Crustacés : 1. Bien entendu qu il y a une notable distinction à établir dans cette longn-e énumération de M. André La plupart de ces espèces ne se trouvent dans les fourmillières qu’indivi- duellement ou accidentellement, sans que leur genre de vie les appelle là plutôt qu’ailleurs. Ils y viennent en voisins, dans leurs courses à la recherche d’un abri ou de leurs ali¬ ments, comme beaucoup d 'Homalota et autres braché- lytres. comme les espèces habitant les arbres creux, le des¬ sous des écorces et des pierres. Faire de ces insectes de vrais myrmécophiles, c’est évidemment méconnaître leurs mœurs, pour le plaisir de grossir une liste. Les véritables hôtes des fourmis sont les insectes qui nais¬ sent dans les fourmillières, qui y demeurent à l’état de larve ou à l’état parfait, qui s’y reproduisent exclusivement à tout autre milieu, dans une température et avec des ali- 26 ments qui sont appropriés à leur nature. Il y a alors un contrat social qui unit les deux parties. Dans le plus grand nombre des cas, ce sont les étrangers qui en retirent un profit ; mais, sans doute aussi, il y a du côté des fourmis un certain avantage; ceci est positif pour les Claviger qu’elles paraissent affectionner beaucoup On les voit sucer les petits faisceaux le poils dont estmuni leur abdomen et d’où découle un liquide à leur goût. Pour aider aux recherches nouvelles qui pourraient être faites dans le département du Nord, nous allons donner un aperçu de nos coléoptères myrmécophiles en indiquant l’es¬ pèce de fourmis qu’ils fréquentent. Sur les 542 coléoptères européens mentionnés par M André, 304 habitent le Nord ; d’un autre côté nous pos¬ sédons 17 espèces de fourmis dont voici la liste d’après M. Lethierry ( Archives du Comice de Lille , 1866.) Formica rufa , (Linné) ; la grosse fourmi rousse des bois , dont les nids forment des monticules de menues brindilles. Formica sanguinea , (Latreille); rare; prise au bois d’Eper- lecques et à Raismes. Formica cunicularia, (Latreille) ; commune dans les champs et les herbages, fourmillières souterraines. Formica fuliginosa, (Linné) ; fourmi noire luisante, habi¬ tant surtout les troncs d’arbres cariés, quelquefois sous les pierres; elle forme de longues processions suivant invaria¬ blement le même sentier. Formica nigra , (Linné); très commune partout ; fourmil- lières sous les pierres et les pièces de bois. Formica aliéna, (Foerster); peu distincte de- la précédente, plus rare. Formica emarginala , (Latreille) ; sous l’écorce des arbres, dans les trous des murs ; pas commune à Lille. Formica {lava, (Fabricius) ; la petite fourmi jaune, très commune sous les pierres, dans la terre. — 27 — ZZT mmaa’ (Latrei,'e); rare’ habitft la *>rêt de Portera contracta, (Latreille) ; habite dans la terre entre m mu» * *5 Myt mica Icevinodis , (Nylander) Myrmica ruginodis, (Nylander). Myrmica scabrinodis (Nylander); de ces trois espèces voisines, la première seule est très répandue, elle est corn mune partout. ’ 1 com' Myrmica cœspitnm, (Latreille); surtout commune dans les lieux sablonneux, les dunes. nS UpPWla’ (Ny‘ander,; rare> forêts de Raismes et de tricourfïr r;atreUlei' (Ny'ander) ’ rare' Prise au bois d’Os- rabies. U" Jardiû de Lille ; Minières souter- »ur ces dix-sept espèces deux surtout sont très féconde» en botes étrangers : les Formica rufa et fuliginom Cent e peces environ de nos coléoptères du Nord sont indiaué comme ayant ete trouvés dans les nids de la première plus de deux cents dans les nids de la seconde. Ce sont en effet les nids les plus vastes: la Formica rufa construit d;,n!f ‘J**** creux Jm0Sa °CCUP° Parf°iS l0ut le lronc d’un arbre Ces observations ont surtout été faites en Bourgogne par M- Rouget et en Allemagne, par MM. Mæklin et Mærkeï a h or mica rufa fournit naturellement les insectes 3) vains, vivant à terre, dans les broussailles et les herbes beaucoup appartiennent à la tribu des brachélytres La f„n’ Z°m frnit les espèces '«»*<»<«. vivant s T es LCc t et dans les troncs cariés ccorces Après ces deux fourmis vient la Formica /lava qui cohabite — 28 sous les pierres avec beaucoup de coléoptères de mêmes mœurs. Toutefois, dans le Nord, la chasse sous les pierres donne de moins bons résultats que partout ailleurs. La cum- pacité du terrain, souvent détrempé, fait adhérer trop for¬ tement la pierre au sol et ne laisse pas l'intervalle nécessaire pour que les insectes non fouisseurs y trouvent un refuge. C'est surtout dans les sols meubles et secs des montagnes, ou dans les plaines sablonneuses que cette chasse est fructueuse. Quant aux Formica nigra, cunicularia, Mynni a lœvinodis très-communes citez nous, elles sont peu fréquentées dans le Nord. Voici la liste des principaux coléoptères réellement myr- mécophiles qui se prennent ici; sauf les trois derniers ils appartiennent tous à la tribu des brachélytres : Thyasophila angulata , avec Homœusa acuminata, y> Cratarœ gentilis , » Dinar cia Mœrkelii, » Dinar cia dent ata, » Atemeles emarginatus , » Alemeles paradoxus, Myrmedonia humeralis , » Myrmedonia limbata, » Myrmedonia laticollis , » Calodera mgricoUis, » 'Oxypoda vittata , » Ilomalota talpa, » ïlomalota flavipes, » Homalota anceps , » Homalota atrata, » Quedius brévia, x Othius myrmecophilus , » Stenus aterrimus , i Tricopteryx pygmcva , s Claviger foveolatus, y* Hetœrius sesquicornis , » la Formica ru fa. Formica fuliginosa. id. Formica rufa. id. Mgr mica ruginodis. Formica rufa. Formica flava. Formica fuliginosa. toutes les fourmis Formica fuliginosa. Formica rufa. id. id. id. id. id. id. Formica fuliginosa. Formica flava. Formica fusca et flava. — 29 — Il est à remarquer que, contrairement aux théories de la sélection naturelle, du mimétisme et autres, aucune de nos espèces myrmécophiles de France - ne marque de tendance à prendre la forme ou les couleurs des fourmis ; toutes, môme les hôtes les plus exclusifs, ont conservé intacte leur orga¬ nisation propre; parmi les mille preuves négatives qui s’a- moncèlent contre les doctrines du transformisme, c’est une de celles qui doivent de mieux frapper les esprits attentifs. A de Norguet. NOTES SUR LA GÉONÉMIE BOTANIQUE DU NORD DE LA FRANGE (Suite.) D’autres végétaux sont introduits par les cours d’eau. Tel est, par exemple, le Géranium Pyrenaiçnm qui aux environs de Valenciennes suit très-exactement le cours de l’Escaut. Les chemins de fer paraissent également avoir une grande influence sur les phénomènes de dissémination. UEpilobium spicatum est assez répandu dans la forêt de Mormal, où il se propage surtout dans les endroits où l’on prépare le charbon de bois. A Raismes il suit le chemin de fer des mines de Vicoigne; il est également très-répandu sur le talus du che¬ min de fer de Valenciennes à Douai, de Lille à Paris, etc. Il est souvent accompagné de Malva moschata. Cette dernière plante est très-commune sur les rochers d’Angres, où elle doit être fixée depuis fort longtemps. Les mélilots sont encore des plantes qui suivent la voie ferrée. Je citerai en particulier le Melilotus albus , qui est généralement rare dans notre région, mais qui abonde le long du chemin de fer depuis Caudry jusqu’à Busigny et au- delà des limites du département, Une des plus jolies plantes de la flore maritime, le Glau- cium flavum, se rencontre sur les talus du chemin de fer de Calais à Boulogne. Entre les rails sur le même parcours croit 30 — abondamment YEchium vulgare, qui abonde surtout à la station de Saint-Pierre. VEchium se trouve également sur la voie ferrée entre Lille et Valenciennes. On observe chez cette plante des faits intéressants de polymorphisme floral , et le type du nord, celui qui croît par exemple sur les hurets de la route de Mondiaux près Valenciennes me parait dif¬ férer par le faciès général du type des environs de Paris. Les linaires sont des plantes dont l’introduction dans nos régions paraît relativement récente. La Vulgaris suit les cours d’eau, les chemins de 1er, etc. La Spuria et P Elatine se trou¬ vent presque exclusivement dans les champs de pommes de terre, de blé, etc. La Cymbalaria qui nous vient d’Orient est loin de s’être diffusée d’une façon uniforme. Très-rare à Valenciennes où je n’en ai trouvé qu’un pied, elle abonde sur les murs de Condé , de Tournai et de quelques autres villes. La Linaria minor est une des plantes que l’on trouve le plus souvent sur le parcours des chemins de fer entre les rails. Les oiseaux sont encore des agents très-actifs de dissémi¬ nation. Tantôt ils entraînent dans leurs plumes les graines épineuses ou pourvues d’aigrettes, tantôt ils déposent parmi leurs excréments des graines dont ils favorisent ainsi la ger¬ mination. C’est ce qui a eu lieu comme on sait pour le gui. Pourquoi cette plante si commune sur les peupliers et les pommiers d’Angres, de Montignies, etc., ne se trouve-t-elle plus sur les arbres de la vaste forêt de Raismes. Faut-il attribuer cette singularité à l’absence dans la même forêt d’oiseaux se nourrissant des baies du Viscum ? Le Solarium dulcamara , le Galeopsis tetrahit qui couronnent souvent le sommet des vieux saules y ont été amenés de la même manière. Les oiseaux aquatiques et même les insectes aquatiques transportent sur leurs pattes ou d’autres parties de leurs corps certains végétaux tels que les Lemna, les Riccia , des spores de conferves, des graines de chara, etc. — 31 — La Wolfta arrhiza qui existe dans notre département, à Rost-Warendin, près de Douai, au marais de FEpaix, près de Valenciennes, n’v fructifie jamais Cette plante fleurit seule¬ ment sur la côte occidentale d’Afrique, d’où elle est sans doute originaire. Les Lemna cjibba , minor et Trisulca fleu¬ rissent bien plus rarement dans le Nord qu’aux environs de Paris et dans le sud de la France. Les plantes des vieux murs et des décombres pourraient donner lieu à des recherches intéressantes. Où croit sponta¬ nément le Cheiranthns Cheiri qui chez nous et en Belgique se trouve uniquement sur les murailles. D’où nous vient la joubarbe (Sempervivum tectorum ) qui végète dans les mêmes conditions. La Jusquiame, le Physalis, etc., plantes qui se rencontrent le plus souvent près des habitations, sur les ruines d’anciens monuments rf ont-elles pas été amenées là par les pratiques de la sorcellerie au moyen-âge ? Ces plantes reparaissent souvent dans un endroit où on ne les trouvait plus depuis longtemps, lorsque la terre vient à être remuée. Il en est de même du Datura de certains Verbascum , etc. N’a-t-on pas vu récem¬ ment en Grèce des fouilles entreprises dans des mines aban¬ données depuis plusieurs siècles, faire apparaître tout-à-coup une espèce de Glaucium dont on n’avait jamais constaté l’existence dans le pays ? A propos de ces flores semi-artificielles des vieux monu¬ ments, je rappellerai aussi les anciennes coutumes religieuses qui ont pu amener en certains points la culture de plantes dont on a peine à s'expliquer la présence. Je citerai entre autres stations de ce genre cel'e du Buxiis sempervirens et de la Melissa officinalis en un coin des rochers de Montignies- sur-Roc. Une étude qui fournirait certainement des résultats curieux, serait celle des diverses flores des fortifications des places fortes du Nord. Il y a à cet égard des différences surpre- — 32 — riantes entre Lille, Douai, Valenciennes, Saint-Omer, etc. L’Origan, si commun à Valenciennes, est rare à Douai. On trouve au contraire très-communément à Douai le Cirsium eriophorum , qui est cantonné dans un seul endroit à Valen- lenciennes (peui-être à cause de la préférence de cette plante pour le sol calcaire). Le Géranium Roberlianum est presque rare à Lille. On y trouve en revanche XAllium vineale, le Thalictrum , XHippuris, qu’on ne voit à Valenciennes que hors la ville et à une certaine distance de l’enceinte. D’où vient le Sedum album, si commun sur les murs de Douai et qui n’existe nulle part dans le pays à l’état franchement sponlatié ? Comment YOphioglossum vulgatum a-t-il pénétré dans les fortifications douaisiennes, où il a été trouvé en abondance par M. Gosselin, qui m’a conduit lui-même dans la localité ? Je signalerai en terminant ce rapide exposé de nos desi¬ derata géonémiques, l'étude eucore à faire de l’influence que peuvent avoir sur la végétation les eaux minérales de l’inté¬ rieur du département On ne sait absolument rien sur l’action des eaux sulfureuses. Il y a quelques données seulement sur la flore des eaux salées. Les eaux dites du torrent extraites des mines d’Anzin, forment dans les prairies qui avoisinent le bois d’Aubry, de petits ruisseaux au bord desquels crois¬ sent XApium graveolens et la Glyceria distans , deux plantes des bords de la mer. Leur présence avait déjà été signalée il y a quarante ans dans cette localité par M. Normand, qui n’avait pas saisi tout l’intérêt de sa découverte. L’eau de ces fossés nourrit un Pisidium qui, d’après M. Lelièvre, serait le Pisidium recluzianum , trouvé aux environs de Boulogne-sur- Mer, dans des eaux saumâtres. 11 y aurait là, on le voit, de très-purieuses recherches à entreprendre. Mon seul but, mon seul désir, en publiant ces réflexions et ces notes prises au hasard dans mes cahiers d’observations, est d’engager les jeunes naturalistes du pays à sortir de - 33 - l’ornière où ils se traînent trop souvent et à faire servir les connaissances qu'ils peuvent avoir en botanique descriptive à des recherches d’un ordre plus (levé. J’ai la conviction qu’ils n*y trouveront pas moins de plaisir que dans la satis¬ faction de leur goût pour les collections : ils auront de plus la joie de faire une œuvre durable, utile à la science et glo¬ rieuse pour leur patrie. A. Giard. A propos delà première partie de notre note sur la Géoné¬ mie botanique du nord de la France, nous recevons de M Preu- dhomme de Borre la lettre suivante qui présente trop d’intérêt pour que nous ne nous empressions de la faire connaître aux lecteurs du Bulletin : » Monsieur le Professeur, » Le n° 1 du Bulletin scientifique du département du Nord m’apporte un excellent article de vous , où vous voulez bien vous exprimer d’une manière trop flatteuse sur les méthodes que j’emploie pour arriver à approcher de la précision dans les observations servant à la géographie entomologique. Mais j’ai à ce sujet une rectification à vous demander, ne désirant pas que les idées d’autrui me soient attribuées. C’est à mon savant directeur, M. E Dupont, que revient l’invention de ce système de l’emploi de petites cartes de Belgique , pour pointer les espèces. Quant à moi , je n’ai en cela d’autre mé¬ rite que de l’avoir appliqué à l’entomologie, et peut-être bien aussi d’en avoir retranché ce que l’idée avait de trop absolu dans l’esprit de son inventeur. En effet M. Dupont désirait, désire peut-être même encore que ces cartes servent à consi¬ gner non- seulement toutes les observations de localités justi¬ fiées par la présence d’un exemplaire dans la collection, mais toute observation de l’espèce faite par moi ou même par d’autres entomologistes. C’est, suivant ma manière de voir, attribuer une trop grande autorité à ces dernières observa¬ tions, et risquer ainsi d’enlever à la méthode ce qu'elle a de 34 — plus méritoire, sa précision presque mathématique. D'abord, si on s’adresse indifféremment à tous les observateurs, on s’expose à des erreurs à n’en pas finir, résultant de fausses déterminations qu’on n’aurait, ni le temps, ni les moyens de contrôler. Mais le mal viendrait surtout de l’absence de mé¬ thode dans la façon dont 99 entomologistes sur 100 recueillent leurs insectes, c’est-à-dire sans noter immédiatement et attacher irrévocablement à chaque insecte le lieu de capture. Les collections se remplissent ainsi d'insectes, sur l’origine desquels les chasseurs (qui dit chasseur, dit hâbleur ), ont généralement assez d’aplomb et de confiance en leur mémoire pour dire immédiatement de quelles localités ils proviennent; mais j'avoue que je suis de mon côté trop sceptique pour les croire sur parole, du moment qu’ils n’ont pas l'habitude d étiqueter leurs exemplaires aussitôt qu’ils les ont pris. » Voilà pourquoi je me suis restreint à ne consigner que les observations rendues authentiques par la présence d’un exem¬ plaire étiqueté dans la collection du Musée. Si plus tard nos entomologistes , comme il est à supposer, adoptent pour la plupart la méthode des petites cartes ( qui ne coûtent que 4 cent.), ils arriveront peu à peu à comprendre la nécessité d’apporter plus de rigueur dans l’étiquetage de leurs collec¬ tions, et la science, lorsqu’il s’agira de coordonner des obser¬ vations, en trouvera partout qu’elle pourra recueillir avec sécurité ; mais tel n’est pas le cas aujourd’hui, et j’ai cru que celles que j’enregistre, devant former un type, un catalogue normal, devaient rester, autant que possible, exemptes d’erreurs, j> Je profite de l’occasion pour ajouter que l’étiquetage doit, à mon sens, pour être bien complet, renseigner aussi le jour de capture. Il n’est pas indifférent, au point de vue biologique, et bien que le procédé de coordination soit encore à trouver, il n’est pas indifférent, je pense d'avoir des matériaux qui, ✓ — 35 - pour une espèce a par exemple, apprennent que telle année, on en prenait dans telle localité Le 15 mai : 27 mâles et 0 femelles 20 » 34 » 21 » 25 » 19 » 52 » 30 » 3 » 24 » 5 juin: 0 » 12 » » Et dans une autre localité , à des dates différentes , ou dans des proportions un peu différentes » Puis une autre année, à d’autres dates, dont on pourra chercher l’explication dans les recueils des météorologistes observateurs. » Ce n’est en un mot que par la précision intelligente dans les observations et l’usage des méthodes de la statistique qu’on pourra arriver à élucider une quantité de rapports de causes à effets ; et qu’est-ce que faire de la science, si ce n’est mettre à la place du faux , de l’inconnu et de ce que les paresseux appellent le hasard, la notion positive des causes et de leurs effets? d Agréez , Monsieur le Professeur , l’assurance de ma considération très-distinguée . » A DE BORUE. » Nous engageons vivement non-seulemeut les entomolo¬ gistes, mais aussi les botanistes, les ma'acologistes, etc , à méditer avec soin et à mettre scrupuleusement en pratique les sages conseils de M. Preudhomme de Borre. Toutefois il ne faut rien exagérer, et notre éminent confrère va peut-être un peu loin quand il refuse absolument de tenir compte des recherches sans aucun doute moins précises de ceux qui l'ont précédé. En cette matière comme en tout autre chose il faut du discernement, et l’on doit connaître et savoir apprécier la valeur de ceux dont on accepte la collaboration. Jamais, bien entendu, même avec le nouveau système d’étiquetage, on ne pourra être sûr de la bonne foi et de l’habileté des observa- — 36 — teurs On peut seulement espérer qu’avec le temps et la multiplicité des recherches, les erreurs volontaires ou invo¬ lontaires disparaîtront dans les moyennes En attendant, il est facile de laisser à chacun sa responsabilité en indiquant pour toute trouvaille rare ou singulière le nom de l’observa¬ teur. C’est ce qu’ont fait MM. Lethierry et de Norguet dans leurs excellents catalogues entomologiques relatifs au dépar¬ tement du Nord, et il est à regretter que M. Le Roy n’ait pas adopté le même système pour son catalogue des lépidoptères qu’il aurait mieux fait d’intituler : Liste des épidoptères que fai observés dans le nord de la France. Il existe à Valen¬ ciennes , pour ne citer qu’une ville entre bien d’autres, plu¬ sieurs amateurs très-sérieux et très-consciencieux dont le concours lui eut été certainement assuré. Je nommerai seu¬ lement leur doyen M. Leflan qui fat naguère l’un des corres¬ pondants les plus zélés de l’illustre Duponchel et lui procura des renseignements très -intéressants sur les papillons de notre contrée. En résumé je crois qu’il faut utiliser avec prudence tous les matériaux malheureusement trop peu nom¬ breux qui sont à notre disposition : je pense qu’il est chimé¬ rique de compter aujourd'hui sur une exactitude rigoureuse et mathématique. Tout en nous efforçant d’atteindre cette perfection limite à laquelle nous n’arriverons jamais , effor¬ çons-nous de démêler dans les indications d’autrui ce qui mérite confiance et ne nous réduisons pas systématiquement à nos forces individuelles : le biologiste le plus habile et le plus laborieux ne pourrait pas, eut-ii la vie la plus longue que l’on puisse espérer, parvenir par ses seules observations à établir solidement l’une des grandes lois de la géonémie. A. G1ARD. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Terrain crétacé (suite). 3° Zone des marnes à Inoceramus Brogniarti. — Cette zone est encore essentiellement marneuse ; cependant, son carac- 37 — tère minéralogique est beaucoup plus variable. Ses princi¬ paux. fossiles sont : Inoccramus Brongniarti. Spondyius spinosus. Oslrea hippopodium. O. sulcata. Terebratula semiglobosa. Terebratulina gracilis. T. slriata Echinoconus vulgaris. La Terebratulina gracilis y est si abondante que la zone pourrait porter son nom si on ne rencontrait aussi très-fré¬ quemment ce fossile dans les couches inférieures. Au Blanc-Nez fl), la zone à In. Brongniarti est formée par 20 mètres de craie blanche noduieuse sans silex; sur les bords de l’Aa et du Bléquin (2) , c’est une craie verdâtre compacte sans silex, très-pauvre en fossiles, excepté à la partie supé¬ rieure, qui est marneuse, et où les Terebratulines ne sont pas rares On la retrouve le long des affleurements dévoniens de l’Artois, à Aix-Noulelte , par exemple. Dans la Picardie, elle n’a pas encore été distinguée de la zone précédente. Dans les puits des environs de Douai , elle comprend les couches désignées par les mineurs sous les noms de bleus , de faux-bleus , et quelquefois la partie supérieure des itères (3) ; son épaisseur est de 23 à 25 mètres à Guesnaiu et à Carvin, 8 mètres à Seclin et à Orchies (4), 18 mètres à Anzin , 16 à Vicoigne. A LE. du plateau crétacé de Lille, la zone à In. Brongniarti est formée de marne argileuse verdâtre, appelée marlette, alternant avec des bancs de craie plus solide. On la vuit dans cet état à Cysoing, à Baisieux, à Bouvines, à Tournai, où elle recouvre directement le calcaire à Terebratula biplicata avec ou sans interruption d'une petite couche de marne à Belem- ni tes pie nus ; à Flines-les-.Mortagne, à Wiers, à Condé. (1) Chellonneix, loc. cit. (2) Barrois, loc. cit. (3) A Carvin, on a trouvé, à la partie supérieure des dièves, \Tno- ceramus Brongniarti. (4) Dans ces deux localités, on doit y réunir la partie supérieure des dièves. — 38 — Dans le golfe de Mons (1), la zone à ln. Brongniarti est plus complexe. Elle comprend les deux niveaux suivants : 1° Rabots ou silex de Saint-Denis. — Silex gris en bancs compactes alternant avec de la craie sableuse glauconifère. Ils n’existent à cet état que sur le versant N. du bassin, où ils ont une épaisseur considérable et où on les exploite pour faire des pavés. Au centre du bassin, ils sont connus par des puits et des sondages , mais leur caractère se modifie. Ainsi, à Saint-Waast et à Bracquegnies , ils sont représentés par 20 à 39 m. de marne grise glauconifère renfermant des bancs de silex compactes et surmontés quelquefois d’une couche de silex caverneux ; à Anderlues, à TE. du bassin, ce ne sont plus que des rognons de silex disséminés dans une marne grise (10 m ). Il en est de même au levant de Mons (3 à 4 m.) et du côté de Bernissart (6 m. 50); à Ville- Pommereuil, ils ont, comme les dièves, une épaisseur exagérée (31 à 49 m ). A Macou, près Condé, le niveau est représenté par 5 m. de silex altéré, gris ou brunâtre (2). 2° Gris ou Craie de Maizières. — Calcaire sableux glauco¬ nifère, riche en fossiles et particulièrement en huitres, alter¬ nant dans le bas avec les couches de silex du Rabot. Son épaisseur varie de 1 à 8 m. La zone à Inoceramus Brongniarti reparaît à l’état de marnes alternant avec des bancs de craie au S. du golfe de Mons à Quiévrechaiü , par exemple , où elle a 7 m , et aux environs de Bavai, où elle recouvre directement soit le sarrazin, soit les marnes à B. plenus. Elle affleure dans les vallées de PHo- nelle, de la Rhonelle, de l’Ecaillon, de la Selle, et par la dis¬ position de ses couches alternativement argileuses et calcaires, elle y donne naissance à des sources importantes II doit en être de même dans la vallée de la Sambre; mais, à partir de là, elles se relèvent fortement vers l’O et à Prisches, Fayt, (1) Cornet et Briart, loc. cil., p. 88, 89, 92, 97, 99, 100. (2) Barrois. Bull. sc. du Nord, VI. 82. - 39 - Taisnières, on ne les trouve plus qu’à une altitude assez élevée au dessus de la vallée. On peut les suivre par Guise et Vervins jusqu’à Chappes , entre Rozoy et Rethel , et même jusqu’à Monthois près de Vouziers. SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE DE SAINT-QUENTIN Mémoires, 3e série, XI, 1874 Ce volume contient les travaux de juillet 1872 à juillet 1873, et la séance publique du 29 juin 1873. La Société académique de St-Quentin décerne des prix de poésie. Elle a décerné une médaille d’or à M. Francis Bellier de Versailles, pour une pièce intitulée Mer , Terre et Ciel, où il s est visiblement inspire des Harmonies poétiques de Lamar¬ tine, une médaille d argent grand module à M. Henri Galleau pour sa pièce A la Suisse , qui avait déjà ele recompensée d’une médaille d’argent par la Société des sciences de Lille en décembre 1872. il est vrai qu’à la même séance la Société de Lille récompensait une autre pièce du même auteur, Tour¬ ments d'un jeune poète, que la Société de Saint-Quentin avait eu à examiner au cours de la même année et qu’elle n’avait pas jugée digne de récompense. La Société académique de Saint-Quentin a encore accordé une médaille d’argent petit module à Mmc Mélanie Bourotle, pour une pièce intitulée A quelques femmes de France Pour en finir avec la poésie insérée dans ce volume , citons deux pièces, la Collégiale et la Nature , dues à M. Daudville, membre de la Société académique. Le concours littéraire avait pour sujet : L’histoire suffît-elle à l’enseignement moral des hommes? Le roman de mœurs a-t-il son utilité et à quelles conditions? Le lauréat récompensé d’une médaille d’argent, M. de La Chapelle, avocat à Cherbourg, trouve que 1 histoire contient plutôt des leçons politiques que des leçons morales, parce — 40 — que les personnages sont trop loin de nous Au contraire, « un bon roman est un tableau de la vie commune ; s’il est intéressant et bien conduit, j’y trouverai occasion de me reconnaître moi et les miens , la leçon sortira naturellement des faits. » Mais, si l’auteur est favorable aux bons romans , il condamne les mauvais, ceux surtout qui portent au déses¬ poir. « Les rêves d’une âme oisive et passionnée sont plus à craindre que les fantômes qui hantent les vieux châteaux. Werther a révélé une de ces maladies morales que l’obscurité et l’oubli arrêtent, qui grandissent, s’étendent à mesure que l’on s’attache davantage à les étudier. S’il est vrai que Goethe en écrivant s’est débarrassé des douleurs qui l'avaient ins¬ piré, on a droit de l’accuser : donner son mal à d’autres pour se guérir, c’est faire une action mauvaise ; le droit du poète ne va pas jusque-là. » L’auteur accorde une grande influence au roman « Si l’Angleterre , dit-il , arrive à organiser un bon système d’en¬ seignement et de secours aux pauvres, et à simplifier ses lois civiles, elle devra en grande partie ses bienfaits à l’auteur de Nicholas Nickleby, de Bleakhouse et d’Olivier Twi^t. » En approuvant ces conclusions favorables au roman , la commission a très-justement reproché à l’auteur de n’avoir pas suffisamment insisté sur l’influence délétère de beaucoup de romans français où l’on fait du criminel un héros , de la prostituée une martyre Une autre question proposée par la Société de Saint- Quentin a reçu une réponse qui a valu une médaille d’or à son auteur, M. Delaplace, instituteur communal à Saint-Mau¬ rice (Seine) : Traiter les questions qui se rattachent à l’édu¬ cation physique , intellectuelle et morale des jeunes enfants admis dans les établissements d'instruction primaire et secon¬ daire. Nous ne pouvons analyser ce mémoire, qui n’est lui- même qu’un résumé de préceptes; mais, entre autres bonnes — A\ pensées , il contient deux réflexions intéressantes sur les¬ quelles nous appelons l’attention de nos lecteurs : « En général, les instituteurs et les professeurs voyagent peu; ils vont chaque année dans leur famille : leurs excur¬ sions se bornent là ; de sorte qu’ils parlent souvent de ce qu’il n’ont jamais vu. Et cependant, comment entretenir les enfants, de la mer, d’un vaisseau, de falaises, si l’on n’a jamais vu ces choses ? Comment leur indiquer avec fruit le tracé d’une ligne de chemin de fer que l’on n’a vu que sur une cailc ? Comment leur enseigner la morale, le savoir- vivre, l'usage du monde, si l’on n’a étudié le monde que dans les livres et cherché la vérité dans les observations des au¬ tres? C'est pourtant ce que l’on fait tous les jours, sans se dou¬ ter que rarement l’étude est utile lorsqu’elle n’est pas accom¬ pagnée du commerce du monde; qu’il ne faut pas séparer ces deux choses ; que l’une nous apprend à penser, l’autre à agir; l’une à parler, l’autre à écrire; l’une à disposer nos actions, l’autre à les rendre faciles. Que l’usage du monde donne encore le moyen de penser naturellement, et l’habitude des sciences; que par une suite naturelle de ces vérités, ceux qui sont privés de l’un et l’autre avantage par leur condition, fournissent une preuve incontestable de l’indigence naturelle de l’esprit humain.» « L’Administration supérieure devrait accorder tous les ans, à titre de récompense, un permis de circulation à un certain nombre de maîtres. En agissant ainsi, elle stimu¬ lerait leur zèle, accroîtrait leur savoir, et les rendrait vraiment capables de répandre des idées justes, pratiques; de développer l’intelligence, d’élever le cœur et de former le jugement de la jeune génération.» Voilà pour b>s professeurs; voici maintenant pour les élèves : «Quoi qu'il en soit des punitions, et quelque raison qu’on ait d’en déplorer la nécessité, je crois que, dans l’intérêt de — 42 la moralité des enfants, un bon système de punitions est encore préférable au meilleur système de récompenses. Le but de l'éducation morale est d’amener les enfants à faire le bien pour le bien lui-même, sans aucune arrière-pensée. En récompensant matériellement la bonne conduite, le zèle de 1 enfant, on croit lui inspirer l’amour du bien, le stimuler au fidèle accomplissement de ses devoirs : cela paraît ainsi au premier abord; je pense, pour mon compte, que c’est plutôt l’amour des récompenses qu’on lui inspire. La récom¬ pense est pour lui un bien aussi, et un bien plus à la portée de son esprit que celui qu’elle rémunère ; il en viendra à confondre l’effet avec la cause, et à perdre totalement de vue celle-ci, trop abstraite pour ne pas céder le pas à celui-là, qui a plus d’attrait pour sa nature sensuelle. Ce ne sera donc plus que pour obtenir la récompense promise qu’il fera son devoir, et, toutes les fois qu'elle lui fera défaut, il se rel⬠chera de son soi-disant amour du bien, pour se livrer avec ardeur aux actes qui satisferont le mieux sa sensualité excitée. On croira élever un homme moral, et on n’élèvera qu’un vil égoïste. » Ce sont les réflexions d’un instituteur qui juge surtout d’après l’enseignement primaire. Mais quel long chapitre il y aurait à écrire pour signaler les effets fâcheux des concours dans l’enseignement secondaire et dans l’enseignement supé¬ rieur, au point de vue de la morale, de l’intelligence et même de la santé , effets d’autant plus désastreux que ce sont les intelligences d’élites qui en sont les victimes. Les travaux des membres de la Société sont nombreux; ils témoignent que l’activité intellectuelle est aussi grande à Saint-Quentin que l’activité industrielle. M. Ferrus a continué la traduction de Macbeth; M E. Lemaire, avocat, a lu une étude sur Tibère. Dans une lecture intitulée : les Gaulois , d’après M. Guizot, M. G. Lecocq émet l’avis que ce célèbre écrivain a mal jugé nos ancêtres. M. Blin a présenté quel- — 43 - ques observations sur la formation d’une société pour les logements d’ouvriers. M. Garin, médecin vétérinaire, rend compte de l’épidémie de la clavée qui a sévi sur les troupeaux de l’arrondissement de Saint-Quentin en 1870, 1871, 1872. Il montre qu’elle a été apportée par des bêtes étrangères ve¬ nant d’Allemagne et d’Angleterre , et qu’elle s’est propagée de proche en proche par la contagion , laquelle s’est opérée par virus fixe et point par l’air. Il ne croit pas à l’efficacité de la vaccination pour garantir le mouton de la clavée. M. Demaze, membre correspondant, a envoyé l'histoire de l’abbaye de l’Isle. Mme Lecocq a offert à la Société trois narrations allemandes de la bataille et du siège de Saint-Quentin en 1557. Toutes trois révèlent l’impéritie des chefs français qui se laissèrent surprendre par les Allemands. L’une, plus détaillée que les autres , donne des détails sur la marche de l’armée du duc de Savoie. Après avoir simulé une attaque contre Rocroi, le 30 juillet, il se dirigea à marches forcées vers la Somme, laissant Marienbourg à sa droite, a Le lendemain, il traversa un défilé très-étroit , surnommé le Trou-Féron , et campa près d’une forteresse appelée La Capelle. Continuant ses marches forcées, il passa par la ville de Guise, et put enfin investir, le 2 août, la ville de Saint-Quentin. » On peut s’étonner de voir l’armée allemande remonter de Rocroi sur Trélon pour en¬ trer en France C’est probablement qu’elle n’osa pas s’engager dans les forêts alors impénétrables des sources de l’Oise. Entre les bois de la Thiérache et ceux de la Fagne se trouvai^ le plateau calcaire et découvert de Marienbourg, Couvin , Cliimay, Trélon; mais, à l’O., les deux bois se rejoignaient, formant ainsi une ceinture autour de la plaine. A l’endroit où cette ceinture était la moins large , entre Couplevoie et Trou-Féron , on avait fait une percée correspondant à peu près au chemin actuel; c’est le passage que l’armée allemande était allé chercher sous la direction du duc de Savoie et du 44 — comte de Mansfeld. Plus tard, ce dernier fit établir une re¬ doute à l’entrée du défilé. M. Dumoulin, professeur au lycée, a lu la biographie d’An¬ toine Bénézet, né à Saint-Quentin , de famille picarde, le 31 juillet 1713, mort à Philadelphie, le 3 mai 1784. Ses parents étaient protestants; ils durent émigrer en 1715. Ils passèrent à Rotterdam, à Londres, puis à Philadelphie. Antoine Bénézet, dont l’âme était profondément religieuse, se fit recevoir de la société des Quakers; puis, renonçant au commerce, il se voua à l’instruction. Pendant quatorze ans, il fut professeur au col¬ lège fondé par William Penn; puis, persuadé qu’un autre pouvait aussi bien que lui remplir cette tache , il quitta sa chaire pour se consacrer à l’instruction des femmes. Il fonda une institution qui fut bientôt fréquentée par les jeunes filles des meilleures familles de Philadelphie. Plus tard , il ouvrit une école du soir où il instruisait les nègres. C’était le pre¬ mier essai de ce genre : jusqüe là , on accordait bien une âme aux nègres , mais on leur refusait toute intelligence , toute aptitude à l’instruction. L’expérience de Bénézet réus¬ sit. Après quelques années, il put déclarer que la race nègre possède une aussi grande variété d’aptitude intellectuelle que les blancs. Dès lors, il se consacra au soulagement de cette race déshéritée. Par des articles de journaux, des livres, des lettres parti¬ culières , par la conversation , par d’éloquents discours , il parvint à exciter un mouvement dans l’opinion publique. Les Quakers furent ses premiers disciples : ils émancipèrent tous leurs esclaves. Tout en restant simple maître d’école , Bénézet fut bientôt en relation avec tous les grands hommes de l’Amérique et de l’Europe. Il ne pouvait voir des malheureux sans chercher à les se¬ courir. Pendant la guerre d’Amérique , alors que la ville de Phb- 45 — ladelphie était occupée par l’armée anglaise et que les habi¬ tants, meme les moins pauvres, étaient réduits aux plus rudes privations, il déploya toutes les ressources de son génie cha¬ ritable pour allég r les misères qui l’entouraient; il consolait, il conseillait , il encourageait ceux qu’il ne pouvait secourir. Rien ne lui coûtait pour rendre un service : une femme qui lui est inconnue passe près de lui , elle paraît triste et découragée; il l’aborde et l’interroge; elle lui raconte qu’elle est lavandière, qu'elle ne peut plus nourrir ses petits en¬ fants, parce qu’elle a six sol.lats hessois à loger. Il court au quartier-général , force la porte qu’on lui refuse , pénètre dans le salon où se trouve le général allemand au service de l’Angleterre , s’assied devant l'officier supérieur au grand scandale de l’entourage , et raconte le simple fait avec une émotion si vraie qu'il émeut l’assemblée, et que le général hessois fait immédiatement droit à sa réclamation et demande comme une faveur l’amitié d’un si brave homme. Chez Bénézet , la charité était une force surhumaine qui prenait son point d’appui dans l’amour de Dieu. Il était pro¬ fondément convaincu, et cherchait à propager les doctrines qu’il avait embrassé avec tant d ardeur. Il publia plusieurs livres de controverses religieuses. Il exagérait même les pratiques de sa secte. Ainsi, il ne mangeait que des légumes, il frémissait à la pensée que les hommes tuaient pour se nourrir des êtres qui avaient été doués de sensibilité. Un jour qu’il entrait chez une de ses anciennes élèves au mo¬ ment du repas, il fut invité à se mettre â table « Ah! merci, dit-il en regardant le poulet rôti qu’apportait un domestique, je ne mange pas de mon prochain. j> Avec de pareilles idées, il ne pouvait aimer la guerre. Lors de l’insurrection des États-Unis, il chercha en vain ù dé¬ tourner le Congr s de recourir aux armes. C’est tout aussi inutilement qu’il avait écrit à Frédéric le-Grand pour l’en¬ gager à renoncer à la guerre. — 46 — Lorsque Bénézet mourut (17 mai 1784) , la ville de Phila¬ delphie prit le deuil. Tous les habitants, à quelque parti , à quelque rang, à quelque religion qu5ils appartinssent suivi¬ rent le convoi du pauvre maître d’école j. g. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE Dans sa séance du 22 janvier, la Société des sciences reçut une communication de M. Matrot sur la résolution numérique des équations algébriques par la méthode des différences. Cette méthode fournit un moyen parfaitement sûr et rigou¬ reux d’arriver dans tous les cas à la séparation des racines. On peut même , pour une équation à coefficients entiers, as¬ signer à première vue une limite théorique à l’étendue des calculs qu’elle exige. Elle est donc aussi satisfaisante pour la théorie qu’avantageuse pour la pratique ; aussi ne méritait- elle pas les critiques et les dédains dont elle a été l’objet, et qui, il faut le dire, étaient en partie inspirés par l’esprit poli¬ tique. Cette méthode avait été introduite dans l’enseignement par les programmes de 1852. L’opposition faite avec raison à certaines parties du nouveau programme, telle que la sup¬ pression du théorème de Stourm, s’étendit aux modifications heureuses qu’il avait apportées. Elle trouva un aliment dans les passions politiques du moment; aussi, lorsque le pro¬ gramme de 1852 fut révisé, ou plutôt abandonné, on biffa des études la méthode des différences. A l’occasion de la méthode des différences, M. Matrot dé¬ montra un théorème qui se déduit d’une remarque connue de Cauchy et qui donne une relation très simple entre le nombre des chiffres du plus grand coefficient et le nombre des figures qui peuvent être communes à partir de la gauche à plusieurs racines inégales de l’équation. Dans la séance du 4 février, M. Violletle a fait une com¬ munication intéressante sur la culture des betteraves porte- graines ; nous y reviendrons prochainement avec détail. — 47 — M. Aimé Ilouzé de PAulnoit a commencé la lecture d’un travail sur les causes du paupérisme à Lille. Dans la séance du 19 février, M. Malrot a fait un rapport sur le cyclomètre imaginé par M. Grille, de Roubaix. C’est un simple décamètre sous forme de ruban. D’un côté sont les divisions du mètre ; sur la face opposée sont inscrites les surfaces de cercle, dont la circonférence égale la longueur lue sur l’autre face; au-dessous se voient inscrits les côtés des carrés inscrits dans ces mêmes circonférences. Celte gradua¬ tion nouvelle est appelée à rendre de grands servi es dans l’évaluation des coupes de bois , tant au point de vue du vo¬ lume total que de l’emploi pour la charpente. M. Terquem a présenté à la Société un appareil pour percer les lames de verre à l’aide de l’étincelle électrique de la ma¬ chine de Iloltz (1). M. Cosselet a montré des haches en silex découvertes près de Lille, et à cette occasion donne quelques détails sur l'alti¬ tude des lieux où on trouve les silex travaillés (2). Pendant plusieurs séances, M Chon a entretenu la Société de ses impressions de voyage en Italie, et M. Telliez a fait une lecture sur l’Histoire de l’économie politique et son in¬ fluence sur l’état social. CHRONIQUE. Dcronvertc «le monnaies romaines. — M. Rigaux nous signale une découverte de monnaies romaines et gallo- romaines , faite aux environs de Cambrai, et dont il s’est rendu acquéreur. Elle se compose d’environ 700 pièces, en cuivre, de petit module, réparties principalement entre les règnes de Gallien, de Claude, de Quinlille, et ceux des em¬ pereurs gaulois Viclorin , Telricus père et Tetricus tils. Au point de vue numismatique , la trouvaille ne contient rien d’intéressant; au point de vue historique, plusieurs faits sont utiles à noter : l’absence de monnaies de Poslume, la quan¬ ti) Bulletin, Vil, p. 22. — (2) Bulletin, VI, p. 284. — 48 tité considérable de monnaies des Tetricus, enfin l’époque à laquelle ce dépôt a été confié à la terre, c’est à-dire le règne d’Aurélien. Cet enfouissement est-il une conséquence de la défaite des Tetricus et de leurs partisans par Aurélien ? C’est ce que l’étude de ce dépôt permettra peut-être d'élucider. nécrologie. — M. Adolphe Bruyelle , archiviste de la Société (L'Emulation de Cambrai, est mort le 24 février, dans sa cinquante- cinquième année, à la suite d’une courte maladie. . Les principaux travaux de M. A. Bruyelle sont: Monuments religieux de Cambrai avant 1789; Notices historiques sur les communes de l’arrondissement; Dictionnaire topographique du Cambrêsis; etc., etc. M. A Bruyelle était depuis 1847 membre de la Commission historique du Nord. La Commission historique du Pas-de-Calais a fait aussi une grande perte par la mort de M. l’abbé Parenty, membre hono¬ raire de l'Académie d’Arras. Académie eoyale de Belgique. — Programme du concours de la classe des sciences pour 1876 : 1° Perfectionner en quelque point important, soit dans ses principes, soit dans ses applications, la théorie des fonctions de variables imaginaires 2° On demande une discussion complète de la question de la température de l’espace , basée sur des expériences, des observations et le calcul , motivant le choix à faire entre les différentes températures qu’on lui a attribuées. 3° On demande une étude complète , théorique et, au be¬ soin, expérimentale, de la chaleur spécifique absolue des corps simples et des corps composés. 4° On demande de nouvelles expériences sur Pacifie urique et ses dérivés, principalement au point de vue de leur struc¬ ture chimique et de leur synthèse. 5° On demande de nouvelles recherches sur la formation, la constitution et la composition de la chlorophylle et sur le rôle physiologique de cette substance. 6° Faire connaître l’anatomie comparée de l’appareil uri¬ naire dans l’embranchement des vertébrés, en s’appuyant sur de nouvelles recherches organogéniques et histologiques. Lille, imp. Six-Horemans. ’75-’795. 7e Année. — 3. — Mars 1875. LES GUÊPES Comme quoi les guêpes ont découvert la fonction glycogénique du foie longtemps avant M. Cl. Bernard. Tout le monde sait que les guêpes se nourrissent de matiè¬ res sucrées. On les trouve à la campagne sur les fleurs et sur les fruits, quand ces derniers ont atteint leur maturité et perdu toute saveur acide. Pêches, prunes, abricots, pommes, poires, raisins, etc., sont fréquemment dégustés par ces ma- raudeuis voiaces et audacieux, avant de paraître sur nos tables, où souvent même nous devons encore faire la part de ces convives non invités. Parfois aussi on les rencontre sur le tronc d’un arbre blessé dont elles sucent activement la sève douceâtre concentrée par les feux du soleil d’automne. Puis, quand les productions naturelles commencent à leur faire défaut, elles pénètrent par bandes plus nombreuses dans les villes à l’intérieur des maisons choisissant de préférence celles des pâtissiers, des confiseurs, des épiciers où elles pillent effrontément les fruits secs, les confitures, le miel, le sucre, etc. Leur gloutonnerie les rend cruelles ; on les voit poursuivre les malheureuses mouches domesl: [ues qui leur font une concurrence bien inoffensive ; elles les forcent à rendre gorge et dévorent sans pitié leur s entrailles gonflées de liquides sucrés. Dans les villages, elles osent même s’attaquer aux abeilles, les guet¬ tant dans le voisinage des ruches, saisissant de préférence celles qui sont chargées de pollen, puis, séparant d’un coup de mâchoire l’abdomen de leurs victimes pour y chercher quelques gouttes de miel. Il est encore à la campagne une maison que les guêpes fréquentent assiduement: c’est celle du boucher, elles tou¬ chent un peu à toutes les viandes et cela n’a l ien d’étonnant puisqu’on sait que la chair musculaire, surtout celle des — 50 — herbivores renferme une certaine quantité de dextrine. Mais c’est surtout le foie du bœuf et du veau qui obtient de beau¬ coup leur préférence. Réaumur qui a signalé ce fait dans ses admirables Mémoires (*) , dit qu’il a vu des bouchers aban¬ donner aux guêpes le foie entier d’un bœuf ou d’un mouton. Ils se proposaient un double but en sacrifiant à la voracité des guêpes ce viscère bientôt dévoré ; d’abord ils faisaient comme on dit la part du feu et de plus en retenant dans la boucherie un escadron de Yespiens ils établissaient une po¬ lice sévère à l’égard des mouches bleues de la viande. ( CaUiphora vomitoria ), des mouches vertes ( Lucilia ), etc.; ennemis bien plus terribles par les œufs qu’ils laissent après eux et qui amènent si rapidement la corruption. D’où vient celte préférence des guêpes pour la glande hépatique ; on ne peut alléguer la mollesse du tissu, puisqu’à cet égard le cerveau, le poumon et bien d’autres organes mériteraient d’être placés au moins sur le même rang que le foie. C’est évidemment la présence du sucre en plus grande quantilé dans ce dernier viscère qui doit déterminer le choix de l’insecte. Le mode habituel d’alimentation de la guêpe . nous fait comprendre clairement l’unique raison qui la guide: la recherche du sucre dans un tissu animal quand les végé¬ taux ne lui fournissent pas la ration qui lui est nécessaire. Nous sommes en présence d’un de ces cas si nombreux dans la science où l’observation bien comprise et intelli¬ gemment interprétée aurait pu être le point de départ d'une grande découverte en provoquant l’expérimentaiion et en en faisant prévoir d’avance le résultat. Du reste, en y réfléchissant un peu, il est facile de voir que l’expérience n’a souvent dans la science que la valeur d’une preuve d’arithmétique et que le rôle initiateur appar¬ tient presque toujours à l’observation. L’expérience est, pour ainsi dire , déjà réalisée quand dans l’observation d’un phé- (1) Voy, Reaumur. Mémoires, t. vi. — 51 — nomène l’esprit de l’investigateur suppose que les conditions dans lesquelles il voit ce phénomène se produire ont été déterminées par lui. Il me semble que depuis quelques années on néglige trop les recherches éthologiques pour donner une importance exclusive à l’anatomie et à la physiologie proprement dites; il* serait peut-être temps de revenir un peu à ce que l'on a appelé la physiologie extérieure , c’est-à-dire à l’étude des mœurs des animaux et de leurs rapports mutuels. Cette étude peut, comme on vient de le voir, jeter quelquefois une cer¬ taine lumière sur des questions en apparence bien étrangères au but immédiat que l’on se propose : car tout s’enchaîne dans nos sciences de la nature et le développement d’un membre profite à l’organisme tout entier. A. Giaud. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. Craie blanche. On peut la diviser en deux sous-assises : la craie à micraster et la craie à belemnite. Craie blanche à Micraster: Elle se divise en trois zones qui contiennent un certain nombre de fossiles communs : Lima Hoperi. Echinocorys aiObus Terebratula semiglobosa. Spondylus spinosus. 1° Zone de la craie à Cornus. Craie blanche, marneuse, contenant de nombreux silex cornus tantôt empâtés irrégu¬ lièrement dans la masse, tantôt disposés en ligne, tantôt même formant des bancs continus. Les principaux fossiles de ce niveau inférieur sont: Micraster breviporus. Ostrea sulcata. Holaster planus. O, hippopodium. Scaphites Geinilzi. O. flabcllifor mis. Cette zone, que l’on pourrait aussi nommer craie à Micraster breviporus (ancien M. Leskei), couronne les falaises du Bou¬ lonnais. C’est elle que l’on voit en haut des grandes carrières — 52 - de Fiennes et on doit pouvoir la suivre par les hauteurs de Licques jusqu’à Setques, où on constate sa présence. Elle existe certainement, bien qu’elle n’a pas encore été signalée, au S. du Boulonnais, et le long des affleurements dévoniens de l’Artois. On la retrouve de l’autre côté de la plaine de Flandre reposant sur la craie marneuse du massif de Cysoing, où elle n’a guère que 1 m. à 0,50 c. d’épaisseur. Elle parait man¬ quer à Carvin ; au contraire à Guesnain, il y a 14 m. de craie grise avec silex et M Breviporus. Aux environs de Valencien¬ nes, on lui trouve une épaisseur de 15 m., elle a 8 à 9 m à Wiers et à Fondé, mais elle ne paraît pas s’étendre à l’E dans le golfe de Mons. Dans les cantons du Quesnoy et de Solesmes, où elle acquiert une épaisseur de 20 à 25 m., elle forme le flanc des vallées de la Rhonelle, de FEcaillon et de la Selle. Au SE elle s’enfonce sous la craie du Cambrésis ; ce¬ pendant on la voit reparaître auprès d’Esnes et de Lesdain. A Doignies entre Cambrai et Bapaume, on a atteint à 26 m. de profondeur (69 m. au-dessus du niveau de la mer), 13 m. de craie grisâtre avec silex, alternant avec des couches de marne bleue compacte. La craie à cornus passe sous les terrains tertiaires de Wassigny ; elle affleure dans la vallée du Noirieux et de l’Oise aux environs de Guise où elle constitue les collines aux quellesla ville est adossée. Elle est exploitée aux environs de Vervins et on doit pouvoir la suivre dans le département des Ardennes, car M. Meugy la cite près de Réthel, mais elle n’a pas été suffisamment distinguée. SOCIÉTÉS SAVANTES Congrès de Lille. Section d'anthropologie. Cette section a nommé pour Président le docteur Broca , professeur à la Faculté de médecine de Paris. - 53 — Parmi les nombreuses communications qui ont été faites à la section, bien peu concernaient le pays, il faut en excepter la Démographie du département du Nord que nous avons déjà insérée dans le Bulletin et YEthnogénie des populations du nord de .la France , par le docteur Lagneau dont voici le résumé : De l’ensemble des ossements humains des temps préhisto¬ riques recueillis dans le nord de la France et en Belgique par Schmerling, Spring, Boucher de Fertiles , MM. Ed. Dupont, Malaise, Soreil, Lejeune, Sauvage, Ilaignéré, de Caix de Saint- Aymour, le comte de Lavaulx, et étudiées par MM. deQuatre- fages, Broca, Pruner-Bey, Virchow, Hamy, il semble permis d’inférer que dès les temps paléontologiques, dès l’âge du mammouth et du renne, il existait entre le Rhin et la Seine des dolichocéphales comme les habitants de la caverne d’En- gis, et des sous-brachycéphales comme quelques-uns des habitants des grottes de Furfooz; que ces derniers paraissent avoir eu de grands rapports avec les habitants des montagnes et du plateau s’étendant au sud-ouest vers le centre de notre pays; enfin quune race dolichocéphale, au moins à l’époque de la pierre polie, paraît avoir occupé principalement les grandes plaines s’étendant le long de notre littoral septen¬ trional, sans d’ailleurs détruire les populations antérieures vraisemblablement de même race que celles du centre de notre pays. Parmi ces principales races des temps préhistoriques, les brachycéphales ont été considérés par divers éthnographes , par Roget de Belloquet, M. Van Derkender, comme devant être rattachés à la race Ligure, que MM. Nicolucci, Cari Vogt, Pruner-Bey, s’accordent à regarder comme étant brachycé¬ phales. Mais, d’une part, les Celtes, dont un dialecte a été parlé dans cette région, étaient également des brachycéphales de petite taille, ainsi que les mensurations prises par M . Broca et M. Guibert (de Saint-Brieuc) tendent à le prouver, confor- — 54 mément d’ailleurs â l’opinion de Desmoulins, de Bory de Saint-Vincent et d’autres ethnographes; d’autre part, au com¬ mencement des temps historiques, aucun document ne semble militer en faveur de l’origine ligure des habitants de cette région septentrionale L’origine celtique de ces brachycéphales paraît donc plus vraisemblable. Quant à certains dolichocéphales des temps préhistoriques, peut-être est-on autorisé à les considérer comme étant des Gaëls, Gâtâtes d’origine cimbrique ou kimmérienne, suivant Diodore de Sicile, qui les montre habitant le littoral septen¬ trional. et différant des Celtes par leur taille élevée, leurs che¬ veux blancs dans l’enfance, blonds à l’âge adulte, par leur peau blanche, leur carnation molle, caractères assignés par Tacite et maints autres auteurs à la race germanique. Ces Galates venus en conquérants avaient imposé leur nom aux Celles, occupant antérieurement le pays, ainsi que semblent l’indiquer certains passages de Dion Cassius, d’Appien et de Pausanias. De même que les Gaëls, Galates, de même que les autres peuples Cimbres et Kimmériens, les Belges, la plupart venus d’outre-Rhin, paraissent également se rattacher à la race germanique septentrionale. Parmi les peuples de la Gaule-Belgique correspondant à la région septentrionale de la France, on peut citer les Suessiones, les Bellovacs, les Remes, les Véromanduens, les Brittaniens, les Ambianiens, les Atrebates, les Morins, les Nerviens, les Ménapiens, anciens habitants des environs de Soissons, de Beauvais, de Reims, de Saint-Quentin, d’Abbe¬ ville, d’Amiens, d’Arras, de Boulogne et St-Omer, du Cam- brésis et des Flandres. Il semble vraisemblable qu’à cette race germanique se rattachaient les anciens habitants du Belgium mentionnés par César, les Bellovacs, les Ambianiens et quelques autres peuplades voisines. Pareillement les Bri- tanniens ou Bretons venaient des montagnes du Hartz, sui- — 55 — vant Denys le Periégète. Les Nerviens du Cambrésis et du Hainaut actuels étaient également de race germanique, cim- brique ou teutone, suivant Strabon, Tacite et Àppien. Quant aux Ménapiens, des Flandres actuelles, où se parle encore un dialecte germanique, Strabon et César nous disent qu’ils ont été chassés de la rive orientale du Rhin par d’autres peu¬ plades germaniques, les Usipètes et les Teuchtères. Depuis l’époque romaine, de nombreux immigrants, la plu¬ part également de race germanique, les Saxons, les Franks, se répandirent aussi dans cette région septentrionale de notre pays. En résumé, il semble ressortir de cet exposé ethnologique que depuis et peut-être avant l'âge archéologique de la pierre polie, deux races principales se sont incessamment croisées et constituent encore actuellement l’ensemble de notre popu¬ lation du nord de la France. L’une, la race celtique, caractérisée anthropologiquement par une tête plus ou moins globuleuse, sous-brachycéphale, par une face courte, ronde, par une chevelure de couleur brune, par une taille peu élevée, paraît anciennement avoir occupé la région septentrionale de notre territoire, comme elle en occupe encore principalement et presque exclusive¬ ment le centre et le nord-ouest. L’autre race, la vraie germa¬ nique septentrionale , caractérisée anthropologiquement par une tête allongée, dolichocéphale, par une face haute, longue, par une chevelure blonde, par des yeux bleus, par une peau remarquablement blanche, par une stature élevée, par une ossature volumineuse, paraît avoir eu des représentants dans notre pays, au moins dès l’époque néolithique, et avoii\con- stitué principalement les peuples Gaëls ou Galates, Belges, Cimbres, Germains, Saxons, Francs, successivement immi-' grés dans cette région septentrionale , en soumettant ou re¬ foulant la population antérieure de race celtique. Une communication de M. de Mortillet sur un sujet plus — 56 - général, la non-existence d'an peuple des dolmens, a aussi une telle application à certains monuments anciens du pays que nous en reproduisons in-extenso le résumé : « Grâce à de nombreuses recherches et aux travaux spé¬ ciaux de savants distingués de diverses nations, les dolmens nous sont très-bien connus. Malheureusement ces savants, s’enfermant trop exclusivement dans la question, en ont fait un tout indépendant et complètement isolé. De là est née l'idée d’un peuple des dolmens ! Peuple particulier, émigrant, et semant sur son passage, comme des témoins de sa mar¬ che, des monuments spéciaux, tout à fait caractéristiques, les dolmens. Ce'a posé, on a longuement discuté sur les migrations de ce prétendu peuple, les uns le faisant aller du nord au sud, les autres au contraire le faisant remonter du sud au nord. » Mes recherches, poursuivies avec le plus grand soin, m'ont prouvé que ce peuple spécial des dolmens n’a pas existé. C’est une supposition purement théorique. * Déjà la divergence d’opinion qui le fait aller suivant les uns du sud au nord, suivant les autres du nord au sud, mon¬ tre qii’il n’y a rien de bien clair, de bien net et de bien pré¬ cis dans la conception de ce peuple. s> En traçant la carte de la distribution des dolmens, on voit non-seulement des lacunes dans la ligne d’ensemble, — ce qui à la rigueur peut s’expliquer par un passage plus ra¬ pide ou le manque de matériaux convenables dans les pays où existent ces lacunes, — mais on reconnaît des groupes de dolmens dans des régions isolées, ne se rattachant nullement à la tournée générale. Tels sont, par exemple, les groupes de la Crimée et de la Palestine. Ces groupes isolés ne peuvent s’expliquer dans l’hypothèse d’un peuple spécial en migra¬ tion. » Dans des régions fort éloignées l’une de l’autre, comme la Bretagne et le Jutîand, on reconnaît au sein des dolmens — 57 — un développement de civilisation tout à fait analogue. Dans les deux régions, l’ensemble des monuments ne contient que de la pierre pure; pouitant, de part et d'autre, quelques-uns renferment déjà du bronze. Les dolmens des deux régions ont donc assisté à la môme évolution industrielle. Ils étaient indépendants les uns des autres pendant tout le temps, fort long, que s’est effectué cette évolution, qui probablement même n’a pas été synchronique, comme chronologie absolue, dans les deux régions. Il faut en conclure forcément que les constructeurs des dolmens, loin d'émigrer de l’un de ces pays dans l’autre, étaient sédentaires dans chacun d’eux. » Bien que dans leur ensemble les dolmens aient des ca¬ ractères communs, qui en font un grand tout, pourtant dans les détails ils varient d’une contrée à l’autre, ce qui montre qu’ils ne sont pas l’œuvre d'un seul et même peuple en mi¬ gration, mais bien l’œuvre de populations sédentaires, assez distinctes pour avoir des habitudes diverses. Ces variations sont même parfois très-rapprochées, très-voisines les unes des autres. Ainsi, la France seule en renferme plusieurs. Dans la Bretagne, les dolmens sont des chambres ou caveaux avec longs couloirs d’accès ; dans les environs de Paris, ce sont de longues et larges allées couvertes, précédées d’un vestibule très-court; dans la Lozère, l’Aveyron, le Gard, l’Ardèche, ce sont de simples caisses rectangulaires aux lar¬ ges proportions. » Enfin, la preuve la plus concluante de la non-existence d’un peuple particulier des dolmens, c’est la diversité des débris humains trouvés dans ces monuments. Parmi ceux des dolmens de France, nos collègues, MM. Broca, Prunières et Ilamy, ont reconnu de nombreux caractères ataviques rap¬ pelant les populations paléolithiques du pays. » » Les dolmens ne forment pas un ensemble spécial, un tout distinct; ils ne sont qu’une portion d’un grand ensem¬ ble, d’un grand tout. Le dolmen est une simple dérivation — 58 de la grotte sépulcrale, et l’ensevelissement dans les grottes est un usage qui s’est répandu chez des peuples nombreux fort divers. » L’ensevelissement à d’abord eu lieu dans la grotte natu¬ relle. Les grottes devenant rares et les morts toujours plus nombreux, on s’est mis à creuser des grottes artificielles, puis on en a fabriqué de toutes pièces, avec des matériaux rapportés, ce sont les dolmens. » Cette marche se reconnaît et se suit très bien en France. Dans le relevé général que j'ai fait de nos cavernes, j’ai re¬ connu au moins vingt-quatre grottes naturelles, fouillées et décrites par divers auteurs, 3yant servi de caveaux funéraires à l’époque robenhausienne ou époque de la pierre polie. Le mobilier qui s’y trouve est semblable en tout à celui des dolmens de la même région. Le rite funéraire employé est identique dans les deux cas. » De ces grottes naturelles, il faut rapprocher les grottes sépulcrales artificielles, constatées dans l’Aveyron, le Finis¬ tère, l’Oise, Seine-et-Marne, et surtout par M. Joseph de Baye dans la Marne. Là encore le mobilier et le rite funéraire sont semblables au rite et au mobilier reconnu dans les dolmens. La construction elle-même de la grotte artificielle a la plus grande analogie avec les dolmens du pays. Ainsi, dans la Marne, qui se rattache à la région des allées couvertes, à vestibules et entrées étroites, la salle mortuaire des grottes artificielles est précédée d’un petit vestibule, et l’entrée n’est qu’une étroite ouverture par laquelle il est difficile de passer. » Le Gard nous fournit des transitions encore plus carac¬ téristiques entre les grottes et les dolmens M. Aurès nous a montré à Aubussangues , une grotte sépulcrale naturelle,, appropriée et fermée à la manière des dolmens du pays M. Gazalis de Fondouce a décrit et figuré les sépultures hybrides de Cordes et du Castellet, commune de Fontvielle, 59 qui sont moitié grotte artificielle et moitié dolmen. Ces sé¬ pultures se trouvent creusées, à ciel ouvert, dans la roche en place et sont recouvertes de grandes dalles de pierre, sem¬ blables aux tables caractéristiques des dolmens. » Toutes les transitions existent donc, en France, entre les deux termes extrêmes, la grotte naturelle sépulcrale et le dolmen. Il y a passage insensible et évident de l’un à l’autre. î Le trait d’union le plus remarquable, le plus caractéris¬ tique, le plus concluant entre les grottes naturelles sépul¬ crales, les grottes funéraires artificielles et les dolmens consiste en une pratique particulière, toute exceptionnelle, l’enlèvement de rondelles d’os sur le crâne chez l’homme mort et même chez l’homme vivant Cette singulière et éton¬ nante pratique, découverte par M. le docteur Prunières, et bien constatée par M. le docteur Paul Broca, a été reconnue tout à la fois dans la grotte sépulcrale naturelle de l’Homme- Mort (Lozère), dans les grottes funéraires artificielles de la Marne et dans les dolmens de la Lozère. Le dolmen n’est donc qu’une des formes d’un usage sépulcral qui s’est répandu de proche en proche chez des peuples nombreux et divers. Il ne peut, par conséquent, servir à caractériser un peuple spécial. » SOCIÉTÉ ENTOMOLOGIQUE DE BELGIQUE La Société Entomologique de Belgique vient de faire paraître son dix-septième volume ; nous allons en rendre compte brièvement, comme nous avons fait des précédents. Il renferme peu de travaux originaux, deux de ses principaux Mémoires traitent d’insectes exotiques : ( Lépidoptères du Brésil, par M. Capronnier, Curculionides recueillis au Japon parM. Roelofs). M. Tournier, de Genève, a fourni une Mono¬ graphie des Erirhinides qui vient se joindre à beaucoup - 60 — d’autres travaux publiés récemment sur la grande et difficile famille des Rhyncophores, et M. Van Lansberge, de très- judicieuses considérations sur la classification des Lamelli¬ cornes coprophages. Le reste du volume, environ les deux tiers, est consacré aux bulletins des séances de la Société, dont les procès-ver¬ baux sont très détaillés. Nous nous bornerons à en extraire quelques remarques qui s’appliquent à notre Faune du Nord. Dans une bonne monographie des géotrupesde la Belgique, M. Preudhomme de Borre compte huit espèces ; nous n’en énumérons que sept dans le Catalogue des coléoptères du département du Nord. Cette différence provient de ce que le naturaliste belge adopte le Geotrupes spiniger de Marsham, démembrement de stercorarius , et qui se prend avec lui. Quoique la différence soit minime et que peut-être, si l’on élevait des pontes du stercorarius , on obtiendrait les deux formes provenant de la même souche, néanmoins, ayant compté dans notre catalogue le G. putridarius , autre démem¬ brement du stercorarius dont il ne diffère pas plus sensible¬ ment, la logique demande que spiniger soit compté aussi, et dans ces conditions, c’est une espèce de plus à énumérer dans la liste de nos coléoptères du Nord. Le compte-rendu d’une excursion faite à Baudour, en Hainaut, sur les limites de la France, indique quelques espèces de lépidoptères et de coléoptères qui peuvent être regardées comme nous appartenant; tels sont : la noctuelle Dypterygia pinastri, non comprise dans le récent catalogue Leroy ; H ar palus fuscipalpis, et Ophonus signaticornis , qui n’ont pas encore été rencontrés dans nos limites strictes. Signalons ici, puisque l’occasion s’en présente, un Bledius , pris récemment à Angres, au bord de la rivière, par M. Le- thierry, et reconnu par M. Fauvel comme appartenant à sa nouvelle espèce, Bledius defensus. Dans la séance du 3 octobre, une capture du Xylocopa Violacea a été signalée comme une chose très rare en Bel- - 61 — gique ; il y a une dizaine d’années, la même observation aurait pu être faite pour les environs de Lille, mais depuis quelque temps, nous voyons chaque printemps ce bel hymè- noptère voler communément dans nos jardins. Il n’est pas douteux qu’il ne passe souvent la frontière, Une grande discussion, qui ne paraît pas avoir encore abouti, a occupé plusieurs séances de la Société belge : Dans quelle mesure les collections publiques d'insectes peuvent-elles être exposées pour concilier toutes les exigences de leur des¬ tination ? Ce problème est très-intéressant pour le Musée d’Histoire Naturelle de Lille, riche en entomologie, et où la place va prochainement manquer pour l’exposition publique ; aussi nous nous permettrons de donner noire avis sur la question. En règle générale, un musée d’histoire naturelle, qui ap¬ partient à tout le monde, doit ouvrir ses richesses à tous. Les musées ne sont pas seulement des instruments d’étude, ils servent aussi à exciter la curiosité publique, à donner une idée générale des richesses de la nature, à élever l’âme par la contemplation du beau. Une autre raison milite aussi en faveur de l’exposition au grand jour, c’est la facilité de surveillance contre les ravages des anthrènes et autres insectes destructeurs. Les anthrènes craignent avant tout la lumière; les boîtes habituellement éclairées en sont presque toujours exemptes, tandis que les collections enfermées, livrées à elles-mêmes, sont infaillible¬ ment perdues en peu de temps. Malheureusement, à ce principe absolu viennent s’opposer deux exceptions qui le détruisent en grande partie. C’est d’abord le danger de la détérioration des insectes par la lu¬ mière, et en second lieu le manque de place. La première objection n’est réellement sérieuse que pour les lépidoptères. Il est certain que les papillons exposés jour¬ nellement à la lumière perdent tout leur charme, en perdant leur couleur, surtout dans les familles des nocturnes ; c’est — 62 — un inconvénient qu’il faut éviter en privant de jour les collec¬ tions de lépidoptères. La seconde objection est beaucoup plus générale ; il est peu de musées qui puissent offrir une surface de murs ou de vitrines capable de montrer une collection entomologique quelque peu importante. Dans ce cas, le meilleur moyen est d’avoir deux collections. De môme que le musée a un double but : exciter la curiosité et favoriser les éludes, qu’il ait aussi une collection double qui satisfasse à sa double des¬ tination. La première, visible toujours, sera composée des princi¬ paux types génériques et donnera une classification à grands traits, suffisante pour faire apprécier par le public l’ensemble ' des productions entomologiques de chaque ordre. * La seconde, enfermée dans des boîtes-tiroirs vitrées, for¬ mant meubles, contiendra toutes les séries classées et étique¬ tées ; ce sera la véritable collection ; elle pourra s’étendre à volonté et contenir autant d’exemplaires de chaque espèce que le voudra l’intérêt de l’étude. Les amateurs sérieux, munis de cartes délivrées par la direction, seront toujours admis à la voir, et une surveillance assidue emploiera tous les moyens de la préserver des para¬ sites destructeurs. Pour arriver à la perfection, il faudrait que le visiteur fut autorisé à ouvrir les boîtes et à tenir sous sa loupe tous les sujets ; car pour la détermination par comparaison, les deux tiers au moins des coléoptères, des hémiptères et des diptères doivent pouvoir être maniés et grossis sous toutes leurs faces, C’est là une complication au système, car dans ce cas, il faut que le visiteur soit accompagné ; l’expérience a prouvé qu’il y a danger à induire les amateurs en tentation. Pour les collections de provinces, ce cas se présentera rare¬ ment, et il n’est pas impossible d’y pourvoir en fixant des heures où un agent de la direction serait à la disposition des entomologistes. — 63 - Nous pensons que c’est là le seul système qui puisse satis¬ faire aux exigences de la destination des collections : être vues par le plus grand nombre, être conservées pour les adeptes. A. DE NORGUET. MUSÉES MUSÉE D'HISTOIRE NATURELLE DE LA VILLE DE LILLE. Le Musée d’Histoire naturelle de Lille continue à s’accroître tant à l’aide des dons des particuliers que d’achats, malheu¬ reusement bien restreints, comme l’est son budget. En 1875, on a reçu un premier envoi d’une commande faite en Amérique, comprenant cinq animaux : Linx d’Amé¬ rique, Loup d’Amérique, Moufflon de montagne, Anlilocapre, Renne. On a acheté un Renard blanc et deux Renards du pays, mâle et femelle. M. Pezon, directeur de ménagerie ambulante, a donné un Cynocéphale papion. M. Ilallais de Lille, lieutenant de vaisseau, a fait don d’un Fourmilier à deux doigts, et M. Leroi, inspecteur commercial du chemin de fer du Nord, de deux cornes de Buffle du port natal. Tous ces ani¬ maux ont été montés, à l’exception du Renne et de l’Anlilo- capre. On a monté aussi un Cerf muntjac et une Mangouste qui étaient depuis longtemps en peaux dans le magasin du Musée. Un Blaireau a été acheté pour en monter le squelette. La collection d’oiseaux s’est augmentée de deux pièces : un Phaéton donné en 1873 par M. le capitaine de gendar¬ merie Lebée, et une Grive blanche, don de M. Gauchy, à Lille. La collection des Reptiles a reçu des accroissements con¬ sidérables. 52 Serpents ont été donnés par M. le lieutenant Ilallais. M. Leroi a envoyé 6 Salamandres vivantes qui, après avoir été exposées dans un des aquariums du Musée, ont été placées après leur mort dans la collection des reptiles du pays. M. Pezon a fait don d’un Python de 2m80 qui estcon- — 64 — servé dans l’alcool, et on lui a acheté un autre animal de la même espèce qui a été empaillé. M. Chaperon, contrôleur des Halles centrales, a envoyé un Anarrhique loup. Les collections d’insectes et de Mollusques n’ont reçu aucun accroissement et, du reste, la place manque pour les développer. Cependant, on a pu coller et disposer dans les vitrines la collection des Echinodermes. M. Leroi, dont le dévouement pour le Musée est au-dessus de tout éloge, remet en état la collection de papillons. La collection tératologique, à laquelle les soins de M. Dareste ont donné quelque relief, a reçu un Chat à deux têtes, des Lapins à une seule oreille; M. Lamelin, pharma¬ cien à Solre-le-Château, a envoyé un Poulet à deux têtes et une Mâchoire inférieure de femme présentant une disposi¬ tion anormale des dents incisives. Parmi les reptiles rap¬ portés de Cayenne par M. Hallais, se trouvait un lézard à double queue. La collection géologique s’est enrichie de dons nombreux et importants. M. Décocq, ancien contrôleur à la manufac¬ ture des Tabacs, a donné une collection de fossiles de la craie de Lezennes qui est unique en son genre et a fait l’ad¬ miration des savants venus à Lille lors de la réunion de l’Association française. O M. Debray, conducteur des ponts et chaussées, a fait don des ossements et des instruments qu’il a recueillis dans les tourbières d’Aveluy et du littoral flamand. Cette collection, qui est la base de son travail couronné par la Société des Sciences, est une précieuse acquisition pour notre Musée. M. Charles Barrois, préparateur de géologie à la Faculté des Sciences, a aussi déposé dans les vitrines du Musée les fossiles du gault et de la craie glauconieuse qu’il a recueillis dans les départements de l’Aisne, des Ardennes et de la Meuse. C’est un précieux appoint pour la collection de géo- - 65 — logie régionale. Il y a même des pièces très-importantes, telles que des dents de Megalosaures et d’autres reptiles. On lui doit aussi une collection de roches des terrains tertiaires de l’Angleterre. M. Bourbier, directeur des travaux du chemin de fer de Guise, a envoyé une belle défense de Mammouth. Enfin on a acheté en Angleterre des Poissons dévoniens, des Encrines siluriennes et des végétaux houillers qui com¬ plètent les séries paléontologiques du Musée. L’administration du Musée a pris comme base de sa gestion les considérations suivantes : 1° Un Musée d’histoire naturelle est moins un spectacle offert à la curiosité vulgaire qu'un objet d’étude au même titre qu’un laboratoire de chimie, un cabinet de physique ou un amphithéâtre de dissection. Malheureusement, bien peu de Musées présentent ce genre d’utilité, moins peut-être à cause de leur organisation que par l’absence de visiteurs disposés à étudier. Celui de Lille, situé près de la Faculté, à côté d’un enseignement d histoire naturelle très -suivi, se trouve dans des circonstances beaucoup plus favorables. Il faut en profiter et disposer les services de la manière la plus commode à l’étude, sans oublier toutefois que le public qui vient au Musée les jours d’ouverture doit aussi s'y instruire et y apprendre par les yeux ; c’est même le meilleur moyen de faire pénétrer dans les masses le goût et les connaissances d’histoire naturelle ; 2° Un Musée de province doit être essentiellement régional, c’est-à-dire qu’il doit renfermer aussi complètement que possible rhistoire naturelle de la région et l’isoler du reste pour en faciliter l’étude. Comme déduction pratique de ces principes, la commission a décidé d'acquérir les animaux dont il est souvent parlé et qu’elle ne possède pas encore, tels que le Bison, le Bœuf musqué, etc., et de régler les aulias achats sur les besoins — 66 — des travailleurs. Ainsi un jeune naturaliste de Lille s’étant occupé des éponges, on a cherché à en réunir le plus pos¬ sible. On a résolu aussi de constituer des collections locales de la faune du pays. Cette oeuvre se trouvait singulièrement simplifiée pour les vertébrés par la collection Degland, qui offre en spécimens multiples toutes les espèces d’oiseaux d’Europe. Les Mammifères de la région ont été réunis dans quelques vitrines. Il en a été de môme des Reptiles ; mais on n’a pas encore pu s’occuper sérieusement des poissons. Quant aux invertébrés, tout reste à faire. 11 serait très-utile d’organiser la collection locale d’in¬ sectes, de manière à offrir à ceux qui débutent dans l’étude de fhistoire naturelle les principaux types qu’ils rencontrent à la campagne, sans qu'ils aient besoin de les chercher au milieu d’une collection complète de toutes les parties du monde. Cette collection à la fois élémentaire et locale pré¬ senterait encore cet avantage que l’on pourrait y disposer tous les insectes nuisibles à l’agriculture. C’est dans le même but de chercher à propager le goût de l’histoire naturelle, que la commission a décidé la création d’une bibliothèque de zoologie descriptive contenant : 1° des livres d’étude nécessaires à la détermination des objets qui existent au Musée et qui n’ont pas encore pu être nommés et classés, faute de ces ouvrages ; 2° des livres élémentaires qui seraient mis à la disposition du public comme dans une bibliothèque, de sorte que l’on puisse lire les descriptions d’animaux avec les sujets sous les yeux. C’est le moyen le plus certain de rendre à la fois utile le Musée et les livres. La commission d’organisation du Congrès de l’Association française pour l'avancement des sciences, a reconnu toute l'utilité de celte bibliothèque. Elle a consacré à sa fondation le reliquat des sommes mises à sa disposition pour l organi- •— 67 - sation du Congrès. Ce sera un souvenir permanent que la réunion de l’Association Scientifique laissera parmi nous. BIBLIOGRAPHIE PATRIA I3ELGICA. Élève du Bétail , par M. Leyder, Professeur à l’Institut agricole de Gembîoux. Nous ne pouvons pas entrer dans les détails techniques et économiques de l’auteur ; nous nous bornerons à emprunter à l’article ce qui concerne la distinction des races domes¬ tiques de Belgique, qui ont avec les nôtres tant d’analogie. D une manière générale, les races domestiques de Bel¬ gique se groupent en deux catégories bien distinctes sépa¬ rées par la Sambre et la Meuse. Dans les pâturages peu fertiles de la rive droite de ces rivières habitent des races de montagne agiles, sobres, rustiques, à la taille petite, à la constitution vigoureuse. Dans les contrées qui s'étendent au nord de ces fleuves et principalement dans les plantureux pâturages des Flandres, vivent des races à la taille élevée, aux formes massives , au tempérament lymphatique , >aux allures pesantes. C’est le résultat de la structure du pays qui, à la suite des sicèles par l’action cumulée de toutes circonstances ambiantes, ou comme disent les naturalistes du milieu, imprime son cachet à tous les êtres qui y vivent. Espèce chevaline. — 11 y a en Belgique deux grandes races chevalines: la race ardennaise et la race llamande, trop connues pour qu’il soit besoin de les décrire. Autour de la race llamande se groupent le cheval du Brabant, le cheval du Hageland, le cheval du Ilainaut, le cheval de la Ilesbaye, le cheval Namurois, le cheval Anversois. Le cheval Brabançon, plus ramassé, plus lourd, plus em¬ pâté que le cheval flamand . lui est encore inférieur par une coupe plus courte et par des aplombs défectueux ; le — 68 — cheval du Hageland (environs de Tirlemont) a les formes plus dégagées et plus légères. Les autres sont aussi moins pesants ; mais ce sont également des chevaux de gros trait. Le cheval du Gondros est dérivé de l'Ardennais ; mais il a plus de taille et plus d’ampleur ; on le désigne sous le nom de double Ardennais. Les ânes et les mulets jouent en Belgique un trop faible rôle pour qu'il puisse en être question. Espèce bovine. - a Toute notre région des plaines possède un gros bétuil que sa conformation et ses aptitudes rattachent à la grande famille des races bovines qui peuplent les con¬ trées basses depuis le Schleswig et le Holstein jusqu’à l’em¬ bouchure de la Seine. Apparenté à la race de Hollande dans la plus grande partie de la contrée, des degrés de transition insensibles le relient définitivement, par la population bovine des arrondissements de Dixmude et de Fûmes à la race fla¬ mande, qui a ses représentants les plus nombreux en France, dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais » Malgré son hétérogénéité, cette population bovine présente un certain nombre de caractères communs : taille au-dessus de la moyenne, charpente forte, corps haut monté, robe pie- noire. La race ardennaise est de petite taille, aux formes sèches, au squelette fin, à la tête haute, à l’œil vif, aux cornes de moyenne grandeur, la robe varie du rouge pâle au brun La vache ardennaise est bonne laitière, eu égard à sa taille ; le bœuf est un travailleur agile et vigoureux. Ces bêtes sont lentes à engraisser, mais elles donnent une viande excellente. Dans la Famenne, le Condros et PEntre-Sambre-et-Meuse, le bétail est plus grand ; il se rapproche encore de celui des plaines par sa robe pie-noire. Le bétail du pays de Herve mérite une mention spéciale : taille élevée, flancs creux et longs, robe pie-rouge, aptitude laitière remarquable. — 69 - Espèce ovine. — La population ovine diminue à mesure que Pagriculture se perfectionne, que la jachère est aban¬ donnée, que les propriétés communales sont aliénées. La Belgique possède trois races ovines bien distinctes : Le mouton flamand a la taille élevée, la charpente grosse, la tête grossière, les membres forts ; sa toison, entièrement blanche , pend en mèches longues et droites. Il donne beau¬ coup de suif et de viande, mais celle-ci est fade et flasque. k Le mouton campinois a les formes sveltes, le squelette fin, les pattes fines, la toison blanche de même que la tête ; la laine grossière et feutrée, plus courte que celle du mouton flamand. Le mouton ardennais, plus petit et plus trapu que le mouton campinois, a la tête et les pattes brunes ou rous- sâtres, sa laine est courte, sa viande d’excellente qualité. Le mouton hesbignon est intermédiaire entre les deux premiers, et le mouton d'Entre-Sambre-et Meuse tient le mi'ieu entre l’ardenna:s et le flamand. Espèce caprine. — La chèvre joue en agriculture un rôle peu important. On remarque que le nombre des chèvres paraît croître avec la densité de la population rurale et par¬ ticulièrement avec la proportion des journaliers par rapport aux autres habitants. Espèce porcine. — - Les races du pays ont presque partout fait place aux races améliorées par le cochon anglais. Tou¬ tefois, dans PArdenne on conserve encore la race ardennaise haute sur pattes, au dos voûté, au corps étroit, à la tête longue. C’est, dit l’auteur, parce qu’il faut au cochon de ces régions, mené dans des pâturages plus ou moins éloignés de sa demeure, des pattes plus longues que celles du cochon anglais et parce que l’éleveur ardennais, jaloux du maintien de la juste réputation des jambons qu’il produit, accuse le cochon anglais, et non sans raison,- de donner une chair moins ferme, moins colorée et moins savoureuse que le cochon dû pays. — 70 Espèce cuniculine. — - « On ne se doute guère de l’impor¬ tance considérable que ce petit animal est en état de procurer à une contrée. Aucune espèce ne peut être entretenue a aussi peu de frais : les déchets du ménage et du jardin, quelques brins d'herbe ramassés le long des chemins et des fossés lui suffisent à l’ordinaire. On pourrait donc affirmer que tout ménage pauvre a assez de ressources pour se livrer à l’élevage du lapin. Les Flamands ont depuis longtemps reconnu cette vérité et ils peuvent avec orgueil opposer aux ridicules et barbares concours de pinsons, pour lesquels se passionne l’ouvrier wallon, leurs concours de lapins, dans lesquels le sujet le plus gros, le plus dodu, le mieux portant, c’est-à-dire le meilleur producteur de viande, emporte la palme. Nous donnerons une idée du revenu que les campa¬ gnes flamandes trouvent dans l’usage de cette espèce, en disant que Londres reçoit chaque semaine , rien que du marché d’Ostende, environ 300,000 lapins. » Il est regrettable que M. Leyder ne soit entré dans aucun détail sur la zootechnie des oiseaux de basse-cour et des abeilles. Il serait intéressant pour les premiers de suivre l'introduction des races étrangères , pour les secondes de constater si les conditions de nourriture différentes offertes par les diverses régions n’agissent pas sur les caractères de l’insecte. Bornons-nous donc à constater à sa suite que la Belgique a exporté en 1870 : 16,755,913 œufs et que ses 140,632 ruches lui ont procuré en 1866 un revenu de près de deux millions. XX. — Culture maraîchère , par M. Houzeau de La Haye. Article parfaitement écrit, mais non susceptible d’analyse. M. Houzeau constate le développement de la culture maraî¬ chère en Belgique et s’en réjouit, car l’on obtient en légumes, — 71 — sur une môme étendue de terre, une quantité de matière nutritive bien plus considérable qu’en céréales. XXI et XXII. — Pomologie et Horticulture, par M. De Puydt, secrétaire de la Société royale d’horticulture de Mons. Dans le premier article, M. de Puydt rappelle que la pomo¬ logie expérimentale ou l'art de créer des variétés, est due à l’abbé Nicolas d'Hardempont, de Mous. Il suppose qu’il les produisît par la fécondation artificielle entre quelques va¬ riétés anciennes obtenues spontanément. Le professeur Van Mons, qui fut aussi un des pomologues les plus distingués de Belgique, avançait que si on sème les pépins d’un poirier sauvage ou d’une variété récente, puis ceux de la génération qui en sera provenue, on arrivera, en continuant et après la troisième génération, à obtenir infailliblement de beaux et bons fruits. À propos de l’horticulture, M. de Puydt indique les nom¬ breux voyages d’exploration de Jules Linden, Funck, Ghies- breght, Schlim, L. Van Houtte, Lebon, Devos, etc., qui enri¬ chirent nos serres chaudes d’une foule de plantes recueillies dans les contrées tropicales; les grands établissements hor¬ ticoles de Gand et de Bruxelles, les succès des horticulteurs belges dans les expositions, leurs travaux pour varier et perfectionner les espèces par des semis inielligents. A propos de ces articles et du précédent, on rappelle qu'il y a en Belgique deux écoles d’horticulture , l’une à Vilvorde, près des grandes pépinières de M. de Bavay, l’autre à Gent- brugghe, près Gand, dans le grand établissement horticole de M. Van Houtte. Celle-ci a principalement pour but la conduite des serres et des plantes d ornement. Nous n’avons pas à parler de l’article sur les parcs et jardins, par M. Bodigas, ni de celui sur les villes d'eau et l'hydrologie médicale, par M. Lausscdat. Ici se termine la — 72 — première partie de cette importante publication, que nous voudrions voir imiter pour notre département CHRONIQUE. Académie de Belgique. -- Le 16 décembre dernier, l’Académie a tenu sa séance publique. Après une lecture très-intéressante de M Caudèze sur les moyens d’attaque et de défense des insectes, M. de Mail! y a lu une notice sur Adolphe Quetelet. Puis on a proclamé le résultat du con¬ cours et des élections. M. Gilkinet, docteur en sciences natu¬ relles, a obtenu une médaille d’or pour un mémoire sur le polymorphisme des champignons. Une autre médaille d'or a été attribuée à une élude sur les roches plutoniermes de la Belgique et de l’Ardenne française, faite en collaboration par M. de La Vallée-Poussin, professeur à l’Université de Louvain, et Renard, professeur au collège de la Compagnie de Jésus à Louvain. Le prix quinquennal des sciences mathématiques et physiques a été décerné à M. Michel Gloesener, membre de 1 Académie et professeur émérite à l’Université de Liège. Ont été élus membres de l’Académie : M. Folie, professeur de mathématiques à 1 Université de Liège, M. Briart, ingé¬ nieur des mines de Mariemont, et M. Félix Plateau, profes¬ seur de zoologie à l'Université de Gand M.Ch. VanBambeke, professeur à J’Université de Gand a été nommé correspon¬ dant. Parmi les associés, on trouve le nom de M. Leverrier. Nécrologie. — Notre concitoyen, M. Lamarle, ingénieur en chef des Ponis et Chaussées, membre de l’Académie de Belgique, est mort à Douai, le 14 mars 1875. C’est un des nombreux Français qui ont accepté la mission de concourir à la fondation de l’enseignement supérieur en Belgique. Il fut nommé professeur à l’Université de Gand. Ses nombreux travaux de mécanique mathématique ainsi que ses belles recherches sur la théorie géométrique et analytique des surfaces lui ouvrirent en 1847 les portes de l’Académie. Il fut l'ami et le collaborateur de Piateau. Lille, imp. Six-Horemans. 75 801 . 7e Année. — N° 4 et 5. — Avril-Mai 1875. LES REPTILES DU TERRAIN CRÉTACÉ DU N.-E. DU DASSIN DE PARIS. Je signalais il y a un an (1) l'existence de quatre espèces de reptiles, trouvés dans le terrain crétacé du N -E. de la France, et conservés au Musée géologique de Lille. Les recherches que j’ai poursuivies depuis lors, m’ont procuré neuf espèces de plus Le gault (zone à Amin mammillaris) est particulièrement riche en débris d’animaux de cette classe, les gisements de Grandpré et de Louppy (Meuse), sont très-remarquables. ENALIOSAURIENS. Les travaux récents de Gegenbauer tendent à faire des Enaliosauriens une classe à part, intermédiaire entre les poissons et les reptiles : cette place leur avait déjà autrefois été assignée par de Blainville. Les Enaliosauriens caractéristiques de la période secon¬ daire, ont comme les poissons des membres, disposés en nageoires. Celle particularité de structure est sans doute très-impor¬ tante; il est cependant difficile d’admettre définitivement cette nouvelle classe, alors qu’Owen indique de si étroits rapports (2) entre les Plésiosaures et les Chéloniens , et que Huxley (3) réunit tous les reptiles aux oiseaux, sous le nom de Sauropsidés. (1) Rull. scient., Inst., litt. du département du Nord. Mars 1874 (2) Owen. Monog Palæonl. Soc., p. S9 et CO. (a; Huxley. Eléments d’anat, comp. des an. vertébrés. — 74 — Plésiosaures. Ces animaux étaient caractérisés par un cou grêle et long, plus long souvent que le reste du corps, et surmonté d'une petite tête à museau court. P . pachyomus (Owen). — Cette espèce décrite par Owen, avait été trouvée à Cambridge dans la craie glauconieuse à Amm. in fiat us (Upper green sand), ainsi que dans Pile de Wight, dans le gault inférieur (Lower green sand). Elle paraît assez rare en France. Nous en avons recueilli trois vertèbres dans les sables verts du gault à Amm. mammillaris de Grandpré (Ardennes) . P. latispinus (Owen). — Signalé dans le LoAver green sand de Maidstone (Kent), a été trouvé par nous dans les sables verts du gault à Amm. mammillaris, à Louppy [Meuse| (une vertèbre cervicale), à Grandpré (une vertèbre dorsale), dans le minerai de fer à Amm. milletianus. Polyptychodon. Ces animaux sont imparfaitement- connus; Owen (1) leur trouve des affinités avec les Plésiosaures ; nous les rangeons donc dans les Enaliosauriens , quoique leur place n’y soit pas fixée d’une manière positive, puisqu’on ne connaît pas encore leurs membres. Nous avons trouvé des dents du Polyptychodon interruptus (Owen) dans le gault à Amm. mammillaris à Grandpré et à Louppy. Pliosaures. Nous avons trouvé à Grandpré (sables à Amm. mammillaris) trois dents qui doivent appartenir à ce genre. (1 )Monog. Pal. Soc. Suppl. 3. 1858, p. 20. — 75 — Ces dents sont coniques, pointues, et cannelées longitudi¬ nalement. Les cannelures sont nettement visibles, mais de même que chez les Plésiosaures, elles ne se prolongent pa> jusqu’à' la partie supérieure, 'elles n’existent pas non plus près de la racine ; elles sont moins développées sur la partie externe convexe de la dent. Les dents des Pliosaures ne sont pas très-différentes de celles des Plésiosaures; elles sont plus épaisses, subtriédrales, et ont leur côté externe séparé de l’interne par deux bords un peu tranchants. C’est l’existence de ces bords tranchants, qui séparent le côté externe de l’interne, qui nous porte à considérer les dents du rault de Grandpré comme appartenant aux Plio¬ saures. Les Pliosaures n’ont pas encore été signalés à notre con¬ naissance, dans le Terrain crétacé; ces dents s’éloigneraient de tous les genres jurassiques décrits jusqu’ici par leur taille incomparablement plus petite : la longueur de la plus grande ne dépassant pas 0m,025. Ichthyosaures. Ces animaux avaient un corps pisciforme très-aHongé, une lourde tête à museau plat et long, un cou court. /. campylodon (Owen). — Les vertèbres de cette espèce sont très-communes dans le gault à‘ Amm. mammillaria du N.-E. de la France ; nous n’avons pas moins de 70 vertèbres de Grandpré, nous en avons aussi quelques-unes de Louppy et de Villotte. Nous avons trouvé à Grandpré une dent, en assez mauvais état de conservation, qui appartient probablement à celte espèce. L Ichthyosaums campylodon est également très-commun dans le crétacé d’Angleterre, depuis le Lower green sand gault inférieur) jusqu’à la craie glauconieuse à Holaster subglobosm (te Douvres. REPTILES. Les animaux de cette classe telle qu’elle est comprise par Hæckel, possèdent comme les animaux des groupes supé¬ rieurs, cinq doigts à chaque extrémité. Chéloniens Le s c i : 1 représentant de cet Ordre trouvé dans le terrain crétacé de notre région est toujours la chelone voisine de Ch. Benstedi (Owen) de la craie blanche de Lezennes, trouvée et décrite par MM Ortlieb et Chellonniex (1). Lacertiliens Les .Mosasaures sont les seuls animaux de cet ordre, tel qu’il est limité par Huxley, que nous ayons rencontré dans le terrain crétacé. Mosasaurus M. Camperi (Y. Meyer), Hoffmanni (Pictet): nous n’avons pas trouvé de débris se rapportant aux Mosasaures dans le terrain crétacé inférieur, mais ils sont communs dans la craie supérieure. Nous en avons recueilli plusieurs vertèbres à Ciply, nous devons à l’amabilité de M. Houzeau de Lehaie une fort belle série de dents de ces animaux provenant de la même localité. Ces dents sont pyramidales, un peu arquées ; leur face externe est plane ou légèrement convexe , et séparée par deux crêtes tranchantes de la face interne qui est arron¬ die ou plutôt en demi-cône. Cette description est loin d’être exacte pour toutes les dents de mosasaure, trouvées à Ciply par M. Houzeau de Lehaie; elles présentent une suite de variétés très-remarquable, entre lesquelles on trouve tous (1) Ortlieb et Chellonneix : Mém. Soc. Sci. Lille. — 77 — les passages. Ainsi, certaines de ces dents ont leur face externe rigoureusement plane, et se rapprochent ainsi de la description donnée primitivement par Cuvier; d’autres dents ont cette face externe légèrement bombée, chez d’autres elle est plus bombée encore, enfin nous possédons des dents où il est difficile de distinguer la face externe de la face interne, la convexité des deux faces étant presque la même. En géné¬ ral, ce sont les plus petites dents qui ont leur surface externe la plus bombée, c’est chez les plus grosses au contraire que cette face est la moins convexe. Cette grande convexité des deux faces des petites dents, tendrait à les rapprocher du Mosasaurus gracilis d’Owen, de la craie du Sussex; les dents de cette espèce diffèrent de celles du il/. Camper i par leur taille qui est moindre, et par le plus grand bombement de leur face externe. Nous 11e pouvons cependant considérer les petites dents comme appartenant à une autre espèce que les plus grandes, parce qu’on observe entre elles des passages insensibles. Les caractères tirés des dents ne suffiraient pas s’ils étaient seuls à établir le il/. Gracilis comme espèce distincte. il/. Maximiliani (Gold.) - — Goldfuss (1) a étudié d’une ma¬ nière très- détaillée un mosasaure du sable vert (craie supé¬ rieure) de New-Jersey; il lui a donné le nom de il/. Maximi¬ liani. Nous n’avons malheureusement pas ce travail entre les mains, et ne connaissons les dents de celte espèce que par ce qu'en dit Owen dans ses Fossil reptilia of the chalk forma¬ tions (p. 31). Les dents du Mosasaurus Maximiliani se distin¬ gueraient de celles du il/. Gracilis (Owen) et du il/. Camperi (V. Meyer), par la très-grande convexité de leur face externe, et par leur coupe transversale qui est polygonale. Parmi les dents de Ciply qui nous ont été données par M. Houzeau de Lehaie, s’en trouve une qui diffère beaucoup de toutes les autres par plusieurs caractères saillants. Sa face (1) Goldfuss. nova acta acad. nat cur. t. 21, p. 175. 78 — externe est extrêmement convexe, quoique peu développée ; les petites dents du M. Gamperi avaient leurs deux faces presque également convexes, les deux faces de cette dent sont au contraire très- inégales : l’externe très-bombée est beaucoup moins grande que l’interne. Nous croyons pouvoir rapporter cette dent au M. Maximiliani. Cette dent a de plus une coupe transversale très-nettement polygonale, les côtés sont au nombre de huit sur la face interne, de quatre sur l’externe. Quelques dents du Mosasau - rus Camperi présentent aussi d’après Goldfuss et Owen cette meme disposition polygonale, je l’ai observée également sur quelques échantillons de Ciply ; mais au lieu des côtes sail¬ lantes et bien limitées qui donnent à la dent que nous rap¬ portons au M. Maximiliani une coupe franchement polygo¬ nale, ce ne sont que des sortes d’angles obtus vagues et irréguliers, qui ne peuvent vraiment mériter à la dent le nom de polygonale. La surface de cette dent n’est pas lisse et unie, mais est sillonnée de plis longitudinaux, séparés par des dépressions ayant à peu près la même largeur qu’eux. Ces plis s’étendent sur toute la hauteur de la dent, ils sont plus nombreux à la base, et vont toujours en diminuant jusqu’au sommet, grâce à des anastomoses, à des soudures répétées. On remarque de plus à la loupe, l’exisience de petites stries transversales sur les parties émaillées voisines de l’arête antérieure. Nous pensons donc que cette dent appartient au Mosasau- rus Maximiliani, espèce qui n’avait pas encore été trouvée en Europe. Ornitlioscélidés Les reptiles de ce groupe présentent une large série de modifications de structure intermédiaires entre les reptiles et les oiseaux. Ces caractères transitoires du squelette des orni- thoscélides sont très-remarquables dans le bassin et' les mem¬ bres de derrière. — 79 — Dinosœuriens Ce groupe est caractéristique des terrains secondaires; les reptiles qui en font partie sont les plus gros animaux conti¬ nentaux connus jusqu’ici. Megalosaurus. Les premiers ossements qui ont permis de reconstituer ces remarquables animaux ont été découverts dans la Grande Oolithe de Stonesfield par Buckland, ils ont été étudiés pai* Cuvier et par Owen. Leur sacrum, comme celui . des autres Dinosauriens, présente un caractère très-remarquable ; cet os est formé de cinq vertèbres soudées, disposition qui se retrouve chez les vertébrés supérieurs, mais n’existe pas chez les autres reptiles. Nous avons recueilli une de ces intéressantes vertèbres dans le gault de Grandpré (zone à Amm. milletianus) elle nous paraît être une vertèbre sacrée. Une de ses faces articulaires est brisée, l’autre est plane, un peu concave même, la partie annulaire est polie ; enfin elle se rapproche par sa taille et par beaucoup de caractères de la vertèbre du sacrum du Megalosaurus Bucklandi , décrite et figurée par Owen (ftlonog. Pal. Soc. Part. III. 1856. PL 3, fig. 2). Cet ossement n’est pas le seul reste de Megalosaure que nous ayons trouvé dans le terrain crétacé du Nord de la France; trois dents que nous rapportons encore à ce genre, viennent confirmer son existence à cette époquo..Les Mega- losaures ont donc continué à vivre beaucoup plus longtemps qu’on ne le pensait ; ils vivaient encore à Grandpré et à Louppy, avec les Amm. mammillaris. Les dents sont fortes, comprimées latéralement et en forme de pointe de sabre ; elles sont courbées en arrière, et dentées en scie sur leurs bords. Les dents du Megalosaurus Bucklandi l’unique espèce reconnue par les naturalistes anglais, sont — 80 - très-voisines de celles que nous possédons, nous les croyons cependant différentes : le Mégalosaure du gault appartien¬ drait, d'après nous, à une espèce nouvelle. Les dents de ces deux espèces ont la même forme géné“ raie, et se rapprochent encore par plusieurs autres carac¬ tères importants ; mais tandis que chez le Megalosaurus Buculandi l’émail dentelé qui se trouve sur les bords, se continue tout le long de l’arête postérieure de la dent, et ne descend qu'à une petite distance du sommet du côté opposé, chez le Mégalosaure du gault au contraire, les dentelures de l’émail se continuent jusqu’à la base de la dent, aussi bien sur l’arête antérieure que sur la postérieure. Les dimensions des dents de ces deux espèces varient également : les plus grandes dents du il/. Bucklandi (IJ ont une longueur de 0,07 et un 'diamètre antéro-postérieur de 0.025 ; deux des dents que nous avons trouvées ont approxi¬ mativement les mêmes dimensions que celles du M Bucklandi , mais la troisième, dont la pointe est malheureusement brisée, mesure 0,029 de diamètre antéro-postérieur. Le Megalosaurus Bucklandi n’avait pas moins de 30 à 40 pieds de long d'après Owen, notre nouvelle espèce devait avoir des dimensions plus considérables encore. Hylœosaurus. Les Mégalosaures ne sont pas les seuls Dinosauriens que nous ayons reconnu dans le gault ; les Hylæosaures ont vécu également à cette époque en France. Ces animaux forment un genre assez voisin du genre précédent. H. armatus (Mant.). — La seule espèce connue a été trouvéé par Mantell dans le Wealdien ; elle atteignait une longueur de 25 pie !s. La peau de cette espèce était recouverte par des écussons osseux, non imbriqués. Nous avons recueilli un de ces remarquables écussons dans les sables verts à Amin, mammïllaris de Grandpré. U) Owen. Monog. Pal. Soc. PI. 12, fig. 4. - 81 — Ptérodactyliens. Les Ptérodactyles, si abondants en espèces à Solenhofen, semblent s’être perfectionnés pendant toute la durée du cré¬ tacé inférieur, jusqu’au moment de leur disparition : les espèces de l’Upper green sand de Cambridge décrites par Owen, étaient bien plus puissantes que celles de Solenhofen - Les rapports de ces reptiles volants aux oiseaux, semblent n’êlre que de simples rapports d’adaptation ; les liens qui unissent les Ornithoscélidès aux oiseaux de la famille des Ratitæ sont plus solides. P. giganteus. — Nous avons déjà signalé la présence de cette espèce dans la craie blanche de Lezennes. P. Sedgwickii. — Nous avons trouvé à Grandpré, dans les sables verts du gault à Amm mammillaris , six dents qui malheureusement sont toutes incomplètes ; aucune n’a con¬ servé sa racine. Ces dents sont droites, ou légèrement cour¬ bées d’avant en arrière, et sont aplaties de dedans en dehors; elles s’amincissent gradue, lement jusqu’à la pointe. L’émail qui les recouvre présente une sorte de plissement irrégulier, dû à la présence de petits plis longitudinaux, très- irréguliers qui se soudent et se divisent sans ordre, formant ainsi un réseau irrégulier à mailles longues et très-étroites des deux côtés de la dent. La largeur des plis est la même que celle des dépressions comprises entre eux. La coupe transversale des dents est elliptique, mais il y a une carène aigue qui sépare les deux faces. Ces dents se rapprochent beaucoup du Pterodactylus Sedg- ivickii décrites par Owen (1) ; la seule différence est la carène qui sépare les deux faces de nos dents, et dont Owen ne signale pas l’existence dans les dents qu’il décrit. Ces dents appartiennent donc peut-être à une espèce nouvelle, mais il faut cependant remarquer que les fossiles du gault de Cam- (1) Owen. Monog. Pal, Soc. Supp. I. 1857, p. 6. — 82 bridge sont souvent, d’après Owen, assez mal conservés, celte carême a donc pu être usée sur ses échantillons. Une dent du Pterodaclylus compressirostris que nous avons découverte dans la craie glauconieuse à Am. inflalus de Folkestone, et qui est dans un bel état de conservation, présente à sa base tous les caractères assignés par Owen à cette espèce, ellipse régulière avec faces arrondies des deux côtés et sans carène; mais en avançant vers la pointe, on voit la dent présenter graduellement les caractères qui distinguent les dents de Grandpré, c’est-à-dire la double carène. Nous pensons donc que le Ptérodactyle de Grandpré doit être considéré comme le même que celui de Cambridge. Nous n’avons pas recueilli de dents de Ptérodactyles à Louppy, mais nous y avons trouvé une pièce qui n’est pas moins remarquable, une vertèbre cervicale parfaitement conservée. Cette vertèbre est identique à celle décrite par Owen (Monog. Pal. Soc. Supp. I. 1857, pl. 2. Fig. 12, 13), elle appartient certainement au Pterodactylus Sedgwickii ou au P. Fittoni Ces deux espèces sont très-voisines, leur taille est la même, la première ne se distingue de la seconde que parce que ses alvéoles sont plus rapprochées. Comme nous ne possédons qu’une vertèbre et des dents nous ne pouvons déterminer spécifiquement le Ptérodactyle que nous avons trouvé dans le terrain crétacé du N. E. de la France. En comparant les os des ailes de ces espèces avec ceux des Ptérodactyles de Solenhofen, Owen en conclut que leur envergure n’avait pas moins de 22 pieds. Pendant l’époque du Gault, le bassin de Paris élait donc habité par des reptiles bienpuissants, et assez nombreux : le tableau suivant présente la liste des espèces que nous y avons reconnues, on verra que des assises entières du terrain cré¬ tacé n’ont pas encore fourni un seul reste de reptile dans le bassin de Paris. Ch. BARROIS. - 83 - >> j a U O 1 w f s * ! G P h* CO i s «• ' < H g 1 e= 3 i— 3 / ® 3 « < S i * 5 ^ f < es o es: H J G < O t/3 =3 25 H -J '. < ' N cr o C a 03 N CU U en o > CTS ü * CO _a N O £&< eu "H. O O es >3 -C 3"“» CL « • « -J • • 3* • eu g • • • G. a- s O o G S -< • • -J J * • • O J-3 s O c- • •a> -o •aT • • •03 •03 ■ ce c_ O en G C O >. O I_ « eu en 3 E- 3 3 en o 53 eu 3 c 3 • o CO a eu 3 • ■a _o G U ‘EL CO Cm 03 B • eu £ 3 cd 03 C O T3 • 3 3 £_ O co 3 -C G 3 03 S- 3 1 >> - — > eu >* G G CO o O >> Æ o Æ a. S O en eu C *— « o N O) “03 s- eu •a c 3 s— O c 3 03 C o. C S ’E 5e i3 o s CO en 3 Sm G C_ G 03 3 G CO G « 1 o o en 1 3 G "eu en tJ3 -G O O U S S CO G —3 g £ U G CO a 6- G cd co O æ >. B en 3 03 C ce fcc fcr. en 3 03 CO •O O t- 03 G^. eu CO -UC 03 ’gs fcc *3 a» CO Ces espèces font actuellement partie de la collection géologique du Musée de Lille. — 84 - SUR QUELQUES ESPÈCES INTÉRESSANTES DES GENRES ARION ET LIMAX Arion leucophaeus Norm. — Lorsque j’ai rencontré cette espèce pour la première fois , j’avoue que je me suis trouvé dans une grande perplexité; mais je n’ai, à aucun moment, songé à la rapporter à titre de variété à VA. fuscus Müll., comme l’a fait Moquin-Tandon, qui évidemment n’a pas conuu cette limace à l’état de vie. Voici la description sommaire que j’en ai prise sur le vif. Dans l’extension, sa couleur est d’un gris vineux, parsemé de petites taches noires, plus apparentes sur le bouclier qu’ail- leurs, avec une bande latérale brune de chaque côté, tant sur le bouclier que sur le dos. Plan locomoteur d’un très-beau blanc, mucus limpide. Au repos, le dos paraît en entier d’un gris vineux , et se fait re¬ marquer par une carène médiane bien distincte , qui existe dans toute son étendue, formée par une série de granulations pâles tranchant parfaitement avec la couleur du dos. Dans cet état, mes exemplaires mesuraient 8,n/m de large, beaucoup plus par conséquent que VA. fuscus. La largeur de Panimal à l’état de repos , son plan locomoteur d’un beau blanc, et surtout la carène du dos, qui manque totalement chez VA fuscus Müll. , sont des caractères spécifiques plus que suffisants pour empêcher de confondre ces deux espèces, et ne permettent même pas de les réunir à titre de variétés. Conservé dans un liquide, VA. leucophaeus présente une cer¬ taine similitude avec VA. fuscus dans la disposition des des¬ sins; voilà son seul point de contact. J’ai observé cette espèce sur les rochers de Montignies-sur- Roc, dans les bois d’Angres et d’Audregnies ; j'en ai trouvé un exemplaire dans un jardin à Saint-Ghislain et jusque dans le mien , à Anzin. — Pour ces derniers , il est possible qu’il y ait eu introduction accidentelle. - 85 — Moquin-Tandon considère YArion flavus Müll. (intermedius Norm ) comme une espèce incertaine. Loin d'être incertaine, cette espèce, par la présence d’une limacelle complète, méri¬ terait peut-être la création d’un nouveau genre. M. Normand donne une excellente description de cette espèce. J’ai parfaitement trouvé une petite limacelle bien complète sur deux exemplaires que j’ai sacrifiés; j’ai examiné dans le même moment quantité d’il fuscus Müll , même plus adultes, chez lesquels je n’en ai pas trouvé trace. Chez VA. ru fus, je n’ai trouvé que des granules isolées. J’ai rencontré YArion flavus dans les bois de Raismes e^ d’Eth, et jusque dans les fortifications de Valenciennes. Les Umax brunneus Drap, et fulvus Norm. sont aussi des espèces incertaines pour Moquin-Tandon. Ces deux espèces qui, pour moi, sont synonymes, me paraissent tout aussi bonnes, si pas meilleures, que Umaxmaximus, variegatus, agrestis et toutes les espèces généralement admises. Umax parvulus Norm. — Bien avant de m’occuper des Mol¬ lusques, j’avais observé, en recherchant les coléoptères et les hémiptères aquatiques , cette petite limace , que j’étais sou¬ vent tenté de prendre pour une petite sangsue (tant la var. fulvus Norm. y ressemble) Voici la description que j’ai prise de cette espèce amphibie , la plus aquatique de nos limaces : Le Umax parvulus est totalement d’un brun noirâtre uni¬ forme , même sur le bouclier et le dessous du corps ; toute¬ fois l’on aperçoit une petite tache fauve ou claire sur le côté gauche vers la base de la cuirasse , due à la présence de la limacelle, ou plutôt qui indique la présence de celle-ci. Cette tache est surtout apparente sur les jeunes individus; elle dis¬ paraît en général totalement sur les adultes r( parvulus Norm.) y persiste plus rarement du moins dans nos environs (brun¬ neus Drap.). Cette espèce, qui est très-effilée dans l’extension, ressemble f - 86 - à une petite sangsue ; son bouclier est obtus postérieurement; les stries du bouclier, très-apparentes dans la partie médiane de celui-ci, forment des sillons assez profonds quand l’animal est en marche. Le brunneus Drap. ( parvulus Norm.) devient plus grand que ne le dit Normand ; il atteint 25mm. J’ai observé cette espèce dans les marais de l’Epaix, Bouriain et Arnonville, dans les bois de Baismes et d’Angres. J’ai trouvé le type de Drap, à Vicoigne, le long de la route de Saint-Amand , sous des planches au bord des fossés des prairies. Sur les six espèces créées par Normand, deux me sont in¬ connues pour le moment : Limax fulvus et collinus ; je crois la validité spécifique des quatre autres suffisamment démon¬ trée. Ci-joint leur synonymie. 1° Arion leucophaeus Norm. 2° — flavus Müll. ( intermedius Norm ). 3° Limax arborum Bouch. -Chant. (scandens Norm.). 4° — brunneus Drap, (fulvus Norm ), on peut encore considérer L. fulvus Norm. comme une variété deL. brunneus Drap. . A. Lelièvre. RÉVISION DE LA COLLECTION CONCIIYLIOLOGIQUE D’HÉCART 's (Suite l). UAnodonla du Honneau à Angres est bien PA. scaldiana Dup espèce qui , malgré son nom, n’existe pas dans l’Es¬ caut. UAnodonta signalée sous le nom de ponderosa à Herbi- nies, près Le Quesnoy, est plutôt l’A. variabilis Drap, (pisci- nalis Nils); je possède cette dernière espèce de Villereau, près Le Quesnoy, où on la rencontre dans les fossés. Elle est re¬ marquable par la couleur de rouille de ses sommets, carac¬ tère que je crois particulier à cette espèce, et que j’ai ren- (1) Voir Bulletin.— Avril 1872, — 87 — contré chez tous les exemplaires qui m’ont passé par les mains. Dans YAnodonta anatina , variété minima, signalée par M. de Norguet d’après moi dans l’Escaut au Vert-Gazon , il faut voir YAnodonta Normandi Dupuy. (A. complanata var. Normandi Moq.-Tand.). Il est fort probable que VA. complanata du catalogue de M. de Norguet doit être rapportée également à la même variété , en y comprenant même la variété elongata signalée à Tournai dans ledit catalogue. Il doit en être de même de VA. complanata envoyée par M. Normand à M. Ortlieb et signalée comme provenant de l’Escaut. VA. Normandi Dup. existe un peu partout dans l’Escaut aux environs de Valenciennes, où elle est très-rare. Le Zonites nitens , signalé par M de Norguet dans son cata¬ logue d’après Normand, est à exclure. Cet amateur avait pris pour tel : Z. nitidulus Drap. Quant à Yîlelix sylvatîca signalé au bois d’Eth par M. Normand , ce n’était pas non plus cette espèce. D’après M. J. Colbeau, c’est tout bonnement une va¬ riété de Y Hélix nemoralis. Celte variété est de couleur de chair , à bandes d’un brun pâle, peu marquées, plus foncées par place et comme inter¬ rompues; la forme générale, ainsi que celle du péristome, la rapproche des II. hortcnsis Müll. et H . Sauveuri J. Colb. ( bandes d'un brun pâle , peu marquées). Aux espèces signalées par MM. Normand et de Norguet, il convient d’ajouter : 1° Zonites lucidus Drap, trouvé pour la première fois par M. A. Giard dans les remparts de Condé , lieu dit le Petit- Bois, et où je l’ai rencontré en grande abondance. 2° Pisidium Recluzianum Bourg, que j’ai rencontré abon • damment dans deux fossés à la lisière du bois d’Aubry. Dans le voisinage de ceux-ci, il existe un fossé d’eau saumâtre, provenant du torrent des mines d’Anzin, et sur les bords du- —'■88 — quel , outre Glyceria distans et Apium graveolens , croissent en abondance : le Triglochin palustris, les Atriplex , etc , et ce, en pleine campagne. Le Plantago major atteint parfois en cet endroit des dimensions gigantesques. Il m’a été impossible, d’après les descriptions, de pouvoir rapporter ce Pisidium à un autre type que le P. Recluzianum Bourg. En ce qui concerne les Pisidium , depuis ma première no¬ tice , j ai récolté des quantités de jeunes P. amnicum Mü 11. ; leur coquille est très-aplatie , les stries en sont fort irrégu¬ lières (les unes profondes , les autres superficielles). La dis¬ position des stries, l’aplatissement de la coquille, indépen¬ damment de la taille , ne peuvent nullement permettre de la confondre avec le P, Grateloupianum Norm ; la forme des deux espèces n’est , du reste , pas la même. 3° Le Physa acuta Drap, existe bien dans, le département; toutefois, je doute fort que cette espèce puisse être très- commune dans un fossé à Loos , à moins que celui-ci ne soit en communication avec une rivière, ce que j’ignore complè¬ tement, ne connaissant pas la localité. Le Physa acuta me fait 1 effet, du moins dans le Nord, d’être exclusif aux grands cours d’eau. Jusqu à preuve contraire, je l’y regarde comme excessivement rare ; j'en ai d’abord récolté un seul exem¬ plaire vivant dans le canal de St-Gbislain (Belgique), contre les murailles du pont conduisant à Douvrain, en juin 1874. J’en ai trouvé depuis quelques exemplaires morts dans l’Escaut à Fresnes. J’ai tenu pendant assez longtemps en vie mon exemplaire de St.-Ghislain et j’ai pu en comparer tout à mon aise l’animal avec celui du Physa fontinalis. En voici la description que j’ai pris sur le vif : Animal brun antérieurement, pâle dans la 1/2 ou les 2 5es postérieurs (le pied) ? qui est très-aplati et dépasse la coquil e. Celui-ci paraît caréné en dessus dans le milieu, avec Eextré- - 89 — mité de la carène foncée (brune) , ainsi qu’une légère marge sur les bords. ■ - Tentacules pâles à la base dans le 1/3 antérieur, qui est légèrement triangulaire, brunes dans le reste de leur étendue. Yeux apparents, situés à la base interne des tentacules dans la partie pâle. Dessous plus clair que le dessus, mais paraissant égale¬ ment brun antérieurement et pâle dans le dernier tiers. Digitations moins apparentes que dans le Physa fontinalis , et surtout moins longues. Chaperon à peine fendu, si pas entier. L’animal du Physa fontinalis L. est en général d’une cou¬ leur brune presqu’uniforme avec les tentacules totalement pâles. Son chaperon est fortement bifide, et forme par suite deux oreillettes bien distinctes. Il est impossible de confondre les animaux des deux es¬ pèces. Depuis l’année dernière, j’ai pris abondamment la Nerita fluviatilis Lin. à Saint-Ghislain, à l’état vivant, dans un fossé d’eau courante, longeant le canal, attachée aux pierres, etc. Sous cet état, elle est totalement noire en dessus. A. Lelièvre. ETHNOLOGIE BELGE Par M. L. Vanderkindère. Le deuxième volume de Patria-Belgica est intitulé : Bel¬ gique politique et sociale , c’est assez dire que nous lui ferons peu d’emprunts. Mais il commence par quelques articles encore scientifiques; tel est celui de M. L. Vanderkindère sur l’Ethnologie de la Belgique. Nous allons en parler en passant tout ce qui concerne les considérations générales et les populations préhistoriques dont nous avons entretenu tant de fois nos lecteurs. • — 90 — Il y a en Belgique, d’après l’auteur, trois éléments ethni¬ ques importants, la race brune ou mélanochroïque et deux rameaux de la race blonde ou xanthoroïque, l’un celtique, l’autre germanique. La race brune, à laquelle appartenaient anciennement les Ibères et les Ligures, et qui constitue encore le noyau des populations de l’Espagne, de Pllalie et du midi de la France, a laissé quelques traces en Belgique. C’est surtout dans la province de Liège que l’on trouve le plus d’individus à yeux noirs et cheveux foncés. L’auteur explique par l’influence de celle race vive, gaie, intelligente, sobre, adroite, mais sen¬ suelle, « l’originalité du caractère liégeois, un tour d’esprit presque méridional, une loyauté intarissable, le goût des gauloiseries les plus épicées : jamais une paysanne flamande ne se permettrait les plaisanteries scabreuses qui sont un jeu pour la botresse ; jamais non plus elle n’aurait cette promp¬ titude de répartie et cet entrain endiablé. » L’élément ethnologique celtique est représenté par les Wallons. Stature élevée, membres forts, corps et visage osseux, cheveux blonds, yeux clairs, figure allongée, nez saillant, fréquemment muni sur le dos d’une forte éminence, menton saillant, crâne allongé. Ce type wallon, dit l’auteur anglais Beddoé, (notes sur les Wallons ), est fondamentale¬ ment le même que celui qui règne dans le nord de la France, de Reims à Dieppe. L’élément germanique est représenté par les Flamands : chevelure blonde ou châtaine, yeux clairs, peau blanche, fine et rosée. On peut y reconnaître deux types : l’un à taille élevée, au visage allongé, aux pommettes peu saillantes, au nez grand, droit, quelquefois courbé avec la pointe dépassant les ailes, à carrure médiocre. L’autre à taille moyenne, au visage arrondi, aux pommettes saillantes, au nez gros, dont la pointe ne dépasse pas les ailes, à épaules larges. Les habi- tants des côtes appartiennent généralement au type élevé, tandis qu’à l’intérieur c’est le type moyen qui prédomine. Les premiers, les Flandri proprement dits, ou habitants du pagus Flandrinus , se rapprochent du groupe saxon d’Angle¬ terre. Ils doivent aussi probablement leur origine à des colo¬ nies saxonnes. On les trouve dans toute la région maritime, à l’est d’une ligne passant par Sluys, Ruysselede, Courtrai, Menin, Vervicq et dans les anciennes châtellenies de Bail - leul, Cassel, Bourbourg, Bergues. On y parle un dialecte particulier qui se sépare nettement du flamand du centre et se rapproche par certains points de l’anglais. On peut citer les formes mude , ton et liant comme terminaison caractéris¬ tique des noms de lieux. Le type moyen paraît issu des Francs qui envahirent le nord de la Gaule au Ve siècle. On peut reconnaître leurs éta¬ blissements aux noms de lieu en heim et en liem. Leur langue s’est perpétuée avec quelques modifications et devenait le flamand moderne, tandis que le haut allemand subissait une transformation considérable. Dans le nord, il y a un groupe un peu différent, celui des anciens Toxandres, qui habitaient le Brabant septentrional jusqu’à la Meuse. ESQUISSE GÉOLOGIQUE (Suite) 2° Zone de la craie glauconifère. — Craie grise plus ou moins mélangée de grains de glauconie. Certains bancs s’écrasent sous la pression des doigts; d’autres sont solides et même assez durs. On s’en est servi longtemps comme pier¬ res de taille. Elle a été employée à la construction et à l’or¬ nement des principales villes du département ; Lille, Valen¬ ciennes, Cambrai. Maintenant on lui préfère, avec raison, le calcaire grossier des environs de Paris qui est plus solide et conserve mieux les sculptures. Pour l’extraction de ces pierres on a établi de nombreuses carrières, la plupart du temps souterraines, les carrières de Lezennes, près de Lille, celles du Roleur, près de Valenciennes et celles que l’on a découvertes sous les fortifications mômes de cette ville, en établissant les réservoirs d’eau , les carrières d'Hordain, d’Avesnes-les-Aubert et une foule d’autres dans l’arrondis¬ sement de Cambrai. C’est souvent à ce niveau que sont creu¬ sés les nombreux souterrains de cet arrondissement. Quel¬ ques-uns sont môme probablement d’anciennes carrières ; pour les antres, quelque soit leur but, caves ou refuges, on a profité, pour les creuser, des bancs fragiles presque sableux qui dans toute cette région accompagnent la pierre de taille. La craie glauconifère renferme beaucoup de phosphate de chaux tantôt disséminé dans la masse, tantôt réuni en nodu¬ les ou en bancs. La zone de craie glauconifère contient un mélange des fossiles de la zone inférieure et de la zone supérieure; on y trouve réunis dans certaines localités M. cortestudinarium et M. breviporus. Quelques espèces lui sont presque spéciales dans notre région : Spondylus asper. Pecten Dujardini. Dans l’Artois, cette zone est peu glauconifère ; outre les fossiles précédents on y trouve assez abondamment Terebra- tula semiglobosa. On l’exploite à Setques près Saint-Omer, à Burbure, à Houdain, etc. Aux environs de Lille, elle se trouve à une faible profon¬ deur. Son épaisseur est de G à 7 mètres, dont la moitié supé¬ rieure est la pierre de Lezennes et la moitié inférieure, le Tun . On désigne sous ce nom deux bancs de phosphate de chaux. Le tun inférieur, dit aussi tun blanc , est un calcaire com¬ pacte, très~dur, épais de 0n\60 contenant 10 % d’acide phos- phorique et 1 1/2 % de silice soluble. Il repose sur la zone à M. breviporus . Le tun supérieur est séparé de l’inférieur — 03 par 2 à 3 mètres de craie très-glauconieuse tendre contenant par place du phosphate de chaux. Il est lui-même formé de nodules de phosphate de la grosseur du poing contenant 10 % d’acide phosphorique cimentes par un calcaire dur glauconieux. Après leur dépôt et leur consolidation, les no¬ dules de phosphate du tun supérieur ont été détachés, roulés, couverts de serpules et de spondyles et se sont ensuite trou¬ vés empâtés à la base de la craie grise qui les surmonte. Celle-ci. qui a à Lezennes une épaisseur de 3m,50, est exploitée comme pierre de taille. Au sud de Lille, où la craie à cornus, si elle ne manque pas, est au moins très-réduite, la pierre de taille n’a pas été suffisamment distinguée dans les sondages, mais le te appelé aussi meule forme un niveau constant. Il a lm,80 à Seclin, 3m^50 à Carvin, 2m,90 à Liéviu, 7m ,10 cà Courriôres. Il n’est pas signalé plus au sud. A partir de Lezennes et de Douvines, l’affleurement de la craie glauconifère s'enfonce sous les terrains tertiaires du bassin d’Orchies et va reparaître à Valenciennes. A Anzin les mineurs y distinguent les couches suivantes : 1° Donne pierre : craie grise tendre glauconifère se taillant et se sciant facilement . 2ra 50, 2° Vert : craie grossière remplie de matière verte, se délitant à l’air . lm » 3° Gris : craie fendillée contenant un peu de ma¬ tière verte . . 3m, t> La craie glauconifère ne se prolonge pas dans le bassin de Mons. Elle peut être observée vers le sommet des escarpements de la vallée de la Selle et au fond de tous les ravins du Cam- brésis. A Avcsnes-les-Aubert cette zone a G mètres. La partie supérieure est formée par un banc de craie glauconifère très tendre, que les ouvriers du pays nomment Tourteau . A Esne, près de Grévecœur, on voit ; — 94 — 1° Craie grise glauconifère tendre . lm ,30 2° Craie grise, dure, exploitée comme pierre de taille 3m » 3° Craie grise sableuse . lra » Elle affleure avec des inflexions variables dans le lit de l’Escaut; puis elle s’élève vers le Sud, passant de l’altitude de 57m à Noyelles sur l’Escaut, à 95Q1 à Yendhuile près du Ca' telet. On la voit dans le département de l’Aisne : à Guise, à la partie supérieure de la craie à cornus, il y a de la craie grise à Peclen Dujardini. M. Meugy signale la craie sableuse glauco¬ nifère près de Réthel et de Château-Porcien (Ardennes). NOTE CRITIQUE SUR LE CATALOGUE DES LÉPIDOPTÈRES de M. Le Roi. Quiconque entreprend une œuvre scientifique, doit s’at¬ tendre à la voir discuter et critiquer tôt ou tard. Ces critiques et ces discussions sont d’autant plus nombreuses et d'autant plus vives que le travail qui les provoque répond à un besoin plus pressant de la science. Les luttes scientifiques amènent sans cesse de nouveaux progrès. C’est ce qui nous détermine à publier dans le Bulletin, la lettre suivante qui nous est adressée par un entomologiste valenciennois. « Dans un article publié récemment dans le Bulletin scientifique du Département du Nord, M. Giard, parlant incidemment du Catalogue des Lépidoptères de M. Le Roi semble regretter que cet entomologiste n’ait pas cherché à recueillir des renseignements auprès d’autres amateurs, et notamment auprès des amateurs valenciennois. » Que M. Giard se console, nous n’aurions rien eu à ap¬ prendre à son savant concitoyen. Bien au contraire, M. Le Roi, nous fait connaître, rien que parmi les Diurnes une douzaine d’espèces que pas un collectionneur de Valencien- — 95 — nés n’avait réussi à découvrir jusqu’à présent, que pas un sans doute ne prendra à l’avenir, si M. Le Roi ne nous indi¬ que en détailles voies et moyens pour arriver à ces captures. Je n’ai jamais rencontré aux endroits signalés par M. Le Roi : Papilio Podalirius, Lycœna Adonis, id. Argus (1), id. Cyllarus, Melitœa Dictynna, id. Parthenie, Argynnis Dia, id. Satyrus Arclhusa, id. Mœra, id. Arcanius (2), Syrichtus Carihami, Hesperia Comma. » Parmi ces espèces, la plupart sont indiquées de la forêt de Mormal ; M. Le Roi déclare avoir peu chassé dans cette foret, si souvent explorée par les entomologistes valencien- nois. M. Thirifocq m’a assuré avoir pris jadis Nemeobius lucina au bois de Raismes, mais cetteespèce est en tout cas fort rare. D N’ayant pas chassédans les dunes, je réserve mon opinion sur Argynnis Niobe , mais la station me paraît singulière pour un papillon qui habite les régions montagneuses de l’Est et du Midi de la France. » En échange des précieux renseignements que M. Lo Roi pourrait nous fournir sur les lépidoptères énumérés ci-dessus, nous serions heureux de lui faire connaître la présence dans notre département de quelques espèces qui paraissent avoir échappé à son filet magique ; telles sont : (1) Peut-être y a-t-il eu confusion entre cette espèce et YAcgon qui se trouve dans la forêt de Raismes cl ressemble beaucoup à V Argus. (Giard). (2) N’y aurait-il pas une simple erreur de transcription dans le Cata¬ logue de M. Le Roi. Nous voyons en effet (p. 13) que le S. Arcanius est indiqué comme très-commun dans tous nos bois et le S. Janira comme spécial au bois de Bourlon et à la forêt de Mormal. Il suffirai peut-être de renverser les deux indications pour être dans la vérité. (Giard), — 96 — Thecla Betulœ, Lycœna Acis (2), Thecla Walbum (1), Htsperia Lincela (3), Lycœna Ægon, Spilolhyrus malvœ. HB. (alceœ Esp) (4). » Outre Syrichtus Alveolas , j’ai trouvé un autre Syrichtus qui me paraît très rare, et qui est peut-être Fritillum ou Carlhami. Jamais S. Carthami n'a été assez commun dans la forêt de Raismes. » Nous pourrions aussi donner quelques indications qui modifieraient singulièrement pour beaucoup d’espèces le degré de rareté, l’étendue de l’habitat, l’époque d’appari¬ tion etc. » Pour cette dernière indication, M. Le Roi s’est contenté modestement de copier des livres faits pour les environs de Paris où le climat n’est déjà plus le même et où, par consé¬ quent, les éclosions se produisent à des époques un peu différentes. 3> C’est encore cette extrême modestie qui est fatale à M. Le Roi, dans la partie botanique de son catalogue laquelle n’est qu’une nouvelle édition, malheureusement peu amé¬ liorée des anciens ouvrages du siècle dernier. i> Que signifient, des indications comme celles-ci, Chenille sur les plantes basses , le Carex, les Graminées , le Lathyrus, V Orobus, le Caille-lait , la Violette , VEpilobe ? Si certains Lépidoptères ont des noms vulgaires (Belle dame, Mars), cela ne les empêche pas d’avoir un nom latin (1) Nous avons indiqué quelques captures, d’autres espèces rares dans un article du Bulletin (T. V. 1873. pag. 167-168). (Giard). (2) Le Lycaen Acis est en effet très-commun dans les prairies humides des environs de Valenciennes. La chenille qui paraît avoir échappé à Berce, vît principalement sur le Melilotus Macrorhizus. (Giard). (3) Très-voisines de Linea dont elle diffère par la nuance d'antennes noire et non fauve à l’extrémité. (4) J’ai également recueilli cette espèce qu’il ne faut pas confondre avec le Syrichtus Malvœ L. ( Alveolus . H.) La chenille se trouve sur Malva moschata'eK aussi sur Malva Rotundifolia dont elle roule les feuilles, (Giard). — 97 Il en est de meme en botanique où par exemple, Convoi - vulus et Liseron ne désignent pas deux plantes différentes (voir p. 420 du Catalogue). » Dans tout son Catalogue, M. Le Roi, signale peut-être une seule plante, sous ses noms génériques et spécifiques (p. 14) et il a la mauvaise chance de tomber justement sur la Coronilla Varia qui n’existe pas dans le pays, pas plus, il est vrai, que le papillon mentionné à ce propos. d Si VApatura Iris savait lire, il serait sans doute bien étonné d’apprendre, qu’à l’état de chenille, il vit sur le sommet des grands chênes. » Quelle grimace ferait la chenille du Sphinx Pinastri , si on ne lui donnait que du sapin {Picea vulgaris) qu’elle ne mange pas, au lieu de Pin Sylvestre (Pinus sylvestris ), ou de Mélèze (Larix Europœa). » Mais je m’arrête, et je n’aurais même pas été si long, si M. Le Roi ne déclarait dans sa préface, que son catalogue ne laissait quelque chose à désirer que pour les nocturnes. D’ailleurs entre naturalistes, il faut dire franchement sa façon de penser et mettre en pratique îa parole de St-Augustin : Errores occidite homines diliqilc. A. L. amateur valenciennois. CARTES GÉOGRAPHIQUES DE LA FRANCE. Rien de plus mauvais, on pourrait dire de plus grotesque, que la plupart des cartes géographiques employées il y a quelques années pour l’instruction de la jeunesse française. On aurait pu croire qu’elles étaient faites par des personnes qui n’avaient jamais quitté le coin du feu et qui ne se dou¬ taient même pas des grands faits orographiques. Tantôt c’était une montagne qui était placée dans un pays complè¬ tement plat, tantôt c’était une plaine tracée à la place d’un pays montueux, ou si la montagne va de l’Est à l’Ouest — 98 — comme les Ardennes, on la dirigeait du Nord au Sud. Cela dérivait à la fois de l’ignorance des faits et d’un parti-pris théorique. Une idée des plus fausses et des plus funestes dans ses conséquences , avait germé dans la tête de quelques géographes et avait ensuite pénétré dans l’enseignement, la théorie des bassins hydrographiques. Ceux qui s’occupent de la quantité de pluie qui tombe et des crues qu’elle peut occasionner, ont besoin de savoir quels sont tous les tributaires d’un fleuve et quelle est la surface terrestre qui les alimente. Pour le commerçant, il peut aussi être utile de connaître les rapports des grands cours d’eau et de leurs principaux affluents , quoique la traction en chemin de fer tende de plus en plus à se substi¬ tuer à la navigation. On doit donc tenir compte de l’hydro¬ graphie, mais il y a loin de là à en faire la base, et surtout la base scientifique de la géographie. S’imagine-t-on qu’il y ait nécessairement relation de race ou d’intérêts entre les peuples d’un même bassin hydrographique. Quels rapports a le Picard de Guise, avec le Français de Pontoise et le Normand de Rouen? Y a-t-il une ressemblance ou une alliance d’intérêts entre le Cambrésien et le Gantois ? Donc au point de vue de la géographie politique et de la géogra¬ phie administrative, le système des bassins n’est qu’une entrave. Au point de vue physique, il est une erreur. On s’imaginait qu’entre chaque bassin, il devait y avoir une séparation bien tranchée, une chaîne de montagnes. Ainsi on mettait une montagne entre Prisches (bassin de la Sambre) et le Nouvion (bassin de l’Oise), bien qu’il n’y ait pas de différence de niveau supérieure à vingt mètres. Il y a telle prairie parfaitement plate dont les eaux se rendent à la fois dans l’Océan atlantique par l’Oise et la Seine, et dans la mer du Nord par la Sambre et la Meuse. Certainement l’eau ne remonte jamais une pente; mais la pente du pays n’est pas nécessairement celle de la rivière, 90 — celle-ci peut couler entre des rives plus ou moins escarpées et au sortir d’une plaine basse dont les berges sont inondées à la moindre crue, franchir une chaîne de montagnes par un étroit et profond défilé ; c’est ce qui a lieu pour la Meuse entre Mézières et Givet, et pour le Rhin entre Bingen et Bonn. La véritable base de la géographie physique, c’est l’oro¬ graphie, c’est-à-dire le relief du sol. On le figure sur les cartes de plusieurs manières : La plus simple et la plus claire pour qui sait la lire c’est l’emploi des courbes de niveau. Chaque ligne de niveau pré¬ sente avec la précédente une différence d’altitude de 1,2, 5, 20, 50 ou 100 mètres selon l’échelle de la parte. Ce système est employé pour les plans servant au tracé des chemins de fer, pour les cartes topographiques de l’Allemagne et de la Belgique. Mais en France on a trouvé que ce mode de repré¬ sentation n’était pas assez artistique ; on a préféré pour les cartes d’état-major des hachures qui sont d’autant plus pres¬ sées que la pente est plus rapide. L’effet artistique a été obtenu ; mais au point de vue pratique ces cartes laissent bien à désirer. En dehors des côtes marquées il est très- difficile de connaître la hauteur. Tant que nos cartes d’état-major sont restées dans les cartons, les très-rares personnes qui s’en servaient devaient, sous peine de paraître des esprits chagrins , toujours prêts à médire de ce qui est français , les trouver parfaites au point de vue de l’exécution comme au point de vue do l’exactitude topographique. Maintenant qu’elles sont plus répandues, que plus de personnes peuvent s’apercevoir de leurs défauts, il est permis de dire qu’il serait bon de les réviser. Malgré ses tâches, dont il ne faudrait pas du reste s’exagérer l’importance , la carte d’état-major français à l’échelle du 1/80,000, est une belle œuvre qui peut être très-utile et qui répandrait dans le pays de sérieuses connaissances de géo¬ graphie et d’orographie, si elle était dans un plus grand — 100 — nombre de mains. Mais anciennement elle était d’un prix inabordable. La feuille non collée coûtait sept francs, et pour avoir le département du Nord, il ne fallait pas moins de sept feuilles. Après la guerre, quand on comprit combien il était utile de répandre les connaissances topographiques, on a abaissé le prix des cartes à 4 fr. et on en a fait des reports sur pierre à 1 fr. C’était très-bien ; mais, hélas ! cela n’a pas duré, les reports ont été arrêtés et une petite partie de la carte de France peut être livrée à 1 fr. Outre la carte au 1/80,000, l’état-major français a fait paraître une carte au 1/320,000 qui est très-commode pour les recherches et peut donner une excellente idée du pays. Mais son échelle est encore trop grande pour qu’elle puisse servir comme carte d’ensemble et surtout comme carte d’enseignement. 11 n’en est pas de même de la belle carte d’Ehrard aux 1/800,000, présentée à l’Association française lors du congrès de Lille. Elle est en quatre feuilles et tirée en chromo-lithographie à quarante-deux teintes. Les glaciers, les montagnes, les plateaux, les vallées , les dunes, etc., sont indiqués par des couleurs différentes. A la vue de cette carte, on saisit parfaitement le relief du pays. Il est à espérer que, vu la modicité relative de son prix (20 fr.), elle se répandra dans les écoles et y portera des notions de saine géographie. C’est à la fois une œuvre d’art et une œuvre de progrès scientifique. Elle est exposée à Lille, à la Librairie de M. Quarrè, sur la Grande-Place. J. G. — loi SOCIÉTÉS SAVANTES. SOCIÉTÉ DUNKERQUOISE TOUR L'ENCOURAGEMENT DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES ARTS. Cette Société, dont le Bulletin s’est déjà occupé à plusieurs reprises, vient de faire paraître son dix-septième volume qui porte la date de 1871-1872, bien que plusieurs des travaux qu’il contient soient postérieurs à ces années. A part un mémoire de chimie agricole contenant des expé¬ riences de culture faites à Rosendael par M. Landron, une note de M. Terquem sur la télégraphie maritime de nuit, et des observations météorologiques du docteur Zandyck, il ne renferme guère que des notices d'histoire locale; voici les principales : • Privilèges que la ville de Dunkerque tient de sa coutume; ce document, communiqué par le docteur Zandyck et annoté par M. Bonvarlet, est un Mémoire produit par le Magistrat à la suite de quelque difficulté et envoyé au Ministre au mois de mai 1768. Il donne une liste résumée des immunités et pri¬ vilèges dont jouissait Dunkerque par la munificence de ses souverains, de 646 à 1763. Le commerce maritime y joue naturellement le plus grand rôle. Analectes et documents pour servir à V histoire de Dunkerque , publiés par M. Bonvarlet. <£ Encouragé par Texemple de savants distingués tels que MM. Leglay, deCoussemaker, Gachard et autres, dit en débu¬ tant M. Bonvarlet, j’ai pensé qu’une collection d’analectes eide documents serait favorablement accueillie. Destiné aux publications de la Société dunkerquoise, le corpus que je forme doit nécessairement se composer de pièces et de notes relatives à Thistoire de Dunkerque. Par sa nature, il se prêtera à toutes les combinaisons typographiques et pourra, ou se poursuivre indéfiniment chaque année, si la Société veut bien me continuer généreusement l’hospitalité de ses volu- — 102 — mes, ou se terminer brusquement sans inconvénient, dès que des travaux originaux viendront réclamer la place que je compte occuper, * Il ne faudrait pas chercher dans ces extraits des éclaircisse¬ ments archéologiques bien curieux; ce sont, pour la plupart, des résolutions du Magistrat ne remontant qu’à 1681 et dont beaucoup se rapportent à la période révolutionnaire de 1789 à 1814. Notice biographique sur Guillaume Beauvais , par M. Emile Bouchet. Ce savant numismate ne tient guère à Dunkerque que par sa naissance; il vécut presque toujours à Orléans et y mourut le 29 septembre 1773. Son Histoire des Empereurs romains par les médailles est restée classique et est le meilleur titre de sa réputation. Expériences agricoles et essais chimiques , parM. Landron. Les expériences de M. Landron ont porté sur un certain nombre de plantes étrangères. Il a constaté que le madia du Chili vient bien dans le sol sablonneux du Rosendael. Il fournit une huile comparable à celle de l’œillette, qui pour¬ rait recevoir dans les arts et l’industrie de nombreuses appli¬ cations. Par contre le sésame d’Orient ne lève pas dans le Nord ; V Eucalyptus globulus y est détruit par la gelée; le maïs géant ou caragua a fourni de fortes tiges, mais le grain n’a pas mûri. M. Landron parle ensuite de ses expériences sur la betterave, le sorgho, la carotte. C’est pour lui l’occasion d’étudier toutes les questions qui se rapportent aux plantes saccharifères. Il pense que le sorgho ne remplacera jamais dans le Nord la betterave ; mais la carotte pourrait être amé¬ liorée et serait alors utilisée avec profit dans les distilleries.' L’étude de ces trois plantes saccharifères a fourni à M. Landron l’occasion de digressions intéressantes sur la législation des sucres, sur l’emploi et le rôle des matières sucrées, voire même sur l’usage du tabac. 11 pense que si nous mangeons plus de sucre que nos ancêtres , c’est parce que nous mangeons moins de féculents, ou autrement dit moins de légumes. Cette substitution d’un régime à un autre est le résultat d’un changement profond survenu dans notre constitution. Et notre dégénérescence s’est produite sous l’influence de plusieurs causes : 1° les maladies de la civili¬ sation. L'auteur nomme ainsi des maladies qui amènent une altération profonde des tissus, et notamment des muqueuses; 2° l’abus du tabac. M. Landron pense que le tabac est un poison et croit fermement que le sucre est destiné à réparer en grande partie les maux faits par le tabac; mais il n’a pas l'espérance en détaillant les maux engendrés par le tabac de convertir ses contemporains; il croit, au contraire, que l’usage de la pernicieuse plante ira encore en croissant, et il en conclut un accroissement dans la consommation du sucre ; 3° la vie moderne avec ses excitations causées par les voyages, l’élude, les plaisirs, etc. Le sucre deviendra donc de plus en plus nécessaire à l’alimentation, ce qui est très-heureux pour les fabricants de sucre, mais ne laissera pas que de présenter quelques incon¬ vénients pour la santé. L’un de ses effets les moins incertains est de produire l’obésité, non pas, dit M. Landron, que le sucre engraisse par lui-même, mais en fournissant une quantité suffisante de matière carbonée à la combustion respiratoire, il permet aux matières grasses des aliments de s’emmaganiser dans le tissu adipeux. On yoit que le travail de M. Landron louche à bien d’au¬ tres questions qu’à l’agriculture. Comme presque toutes les Sociétés savantes, la Société Dunkerquoise distribue chaque année des primes de concours, le volume que nous analysons donne les résultats de celui de 1872. La partie scientifique n’a rien fourni ; dans la partie littéraire, une pièce de vers, V Invasion, a été honorée d’une médaille de vermeil, et un conte : A quoi souvent tient le — m - bonheur , d’une médaille d’argenl; les auteurs sont MM. Millien et Galleau, les deux plus infatigables coureurs de nos hippodromes poétiques. M. Maes, maître adjoint à l’école de Watten, a obtenu une médaille d’encouragement pour une géographie élémentaire de l’arrondissement de Dunkerque. Le volume se termine par un appendice détaché renfer¬ mant le récit de l’inauguration du monument historique érigé au sommet du Mont-Cassel, le 21 septembre 1873, par les soins de M. le docteur De Smyltère, opuscule qu’une abon¬ dante distribution a déjà fait connaître à tous ceux qui s’oc¬ cupent de l’histoire de notre région. A. de Norguet. SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE. M. Boussinesq a communiqué à la Société des sciences quelques résultats sur les ondes liquides, extraits d’un tra¬ vail considérable intitulé : Essai sur la théorie des eaux courantes : Ce travail s’imprime en ce moment dans le Recueil des savants étrangers de l’Institut de France ; il tiendra tout le tome XXIII du Recueil. M. Boussinesq divise les différentes espèces d’ondes liquides en deux grandes classes ; les ondes fixes, suite de renfle¬ ments et de dépressions que peut présenter un cours d’eau dont le liquide s’écoule sans que sa surface change sensible¬ ment d’un instant à l’autre, et les ondes mobiles, qui se présentent au contraire quand la vitesse du fluide et la forme de la surface en chaque endroit varient. Il distingue deux espèces d’ondes fixes : d’une part, celles dont l’existence ne tient pas à une forme ondulée du fond, mais seulement à la nature du mode d’écoulement qui leur donne naissance, et qui se produisent meme avec un fond plat ; d’auire part, les ondes dues à des accidents ou inéga¬ lités plus ou moins régulières du fond. Les premières se forment aux endroits où un régime tran- - 105 — quille du cours d’eau s’établit ou se détruit rapidement ; il ne s’en produit aucune aux endroits où s’établit ou se détruit un régime torrentueux. Les plus remarquables s’observent aux points où un régime tranquille fait suite à un régime torrentueux, surtout dans les ressauts allongés que produit un obstacle jeté en travers d’un torrent de pente modérée : l’eau y présente une série de renflements de plus en plus élevés, depuis la base du ressaut jusqu’au point, situé plus en aval, où le niveau atteint son maximum d’élévation ou du moins ne continue plus qu’à s’élever insensiblement. Les secondes sont particulièrement intéressantes à consi¬ dérer quand le fond présente un grand nombre d’ondulations régulières et égales se succédant sans interruption. La sur¬ face est alors sillonnée aussi d’ondes de môme longueur que celles du fond, mais dont les sommets et les creux ne corres¬ pondent généralement pas aux sommets et aux creux du fond, et dont la hauteur diffère aussi généralement beaucoup de la leur. Les ondes de la surface, en avance sur celles du fond d’une quantité d’autant moins grande que la pente moyenne du cours d’eau est plus grande elle-môme, peuvent passer à ieur aval si la pente atteint d’assez fortes valeurs. Quant à eur hauteur, insensible quand la pente moyenne du fond est Inférieure à un demi-mètre par kilomètre (ce qui est le cas de toutes les grandes rivières), elle devient beaucoup plus • considérable que celle des ondes du fond si la pente moyenne approche de celle 'pour laquelle le cours d’eau est sur le point d’être un torrent (trois à quatre mètjes par kilomètre) : pour des pentes plus grandes, elle diminue un peu ; en sorte que les torrents de pente modérée sont ceux dont la surface reflète le plus une série d’inégalités régulières de leur fond. Les torrents rapides en atténuent généralement un peu l’am¬ plitude. Quant aux cours d’eau tranquilles, ou de très- faible pente moyenne, leur surface reste unie, quelles que soien^ les ondulations de leur fond ; toutes les parties de la masse fluide y sont beaucoup plus solidaires les unes des autres, et - 106 — la surface ne s’y règle que sur la forme générale du lit, ou abstraction faite des particularités locales. Des inégalités irrégulières du fond peuvent toujours être regardées comme résultant de la superposition d’un nombre plus ou moins grand de systèmes d’ondulations régulières . et alors chacun de ces systèmes produit, sur la surface, les mêmes ondes que s’il était seul, la forme vraie de la surface résultant ensuite de la superposition de tous les systèmes d’ondes ainsi produits. Il faut remarquer que les ondes qui domineront dans cette forme générale ne sont pas toujours celles qui dominent au fond, mais sont plutôt celles pour lesquelles le produit de leur hauteur (telle qu’elle est sur le fond) par le degré de leur amplification à la surface, est maximum. Il serait trop long d’entrer ici dans les détails concernant les ondes mobiles qui se forment dans des circonstances incomparablement plus variées encore que les ondes fixes; elles contiennent un grand nombre d’espèces, depuis les rides que produit le vent à la surface d’une eau tranquille jusqu’aux raz de marée et aux crues les plus grandes des rivières. La Société des sciences a encore entendu une lecture de M. Aimé Houzé de l’Aulnoye sur Je paupérisme à Lille, et une de M. Casats sur le Code pénal. M. le docteur Allred Houzé de PAulnoye a présenté de nouvelles observations sur les opérations sous-périostées. Il a constaté qu’elles réussissaient parfaitement chez les enfants. ACADÉMIE DE BELGIQUE. Classe des Lettres. Il y a quelques mois, M. Wauters a lu à l’Académie royale de Belgique un travail sur Henri III , duc de Brabant, ce souverain dont l’histoire parle peu, et dont un chroniqueur — 407 — a pu dire : modeste comme une vierge , il était .tellement doux qu’on ne l’appela que le bon duc. Il n’avait guère que dix-sept ans lorsqu’il succéda à son père Henri II (1248). « >. O B •o ’S ° | GO COOt- r- CO 00 00 l— O a B C/3 B P _ — O lO lO r- t— r- O 05 O lo i'- r— CM — O o O O L " f* — • 05 O îO r- r— O 05 05 O lO IO r- t— r- CM CO lO r- CM O 00 O o CM CO lo r— cm lo oo oo ^ LO CM oo 00 LO LO O CM co -5* 05 OO ^ ■e-1 05 05 lO CO CM CO -r- co >o °S o o ^ ‘W LO co LO O O L- 43 fl a e B < lO 05 o L— t~— OC O CM oo oo -=-< CM ^ 00 LO v* O! — O CM **+ ^ CM Ol co co o ^ 05 O CM O O oo lO lO 05 CM O O OO lO lO LOOt- O O OO ^ O o o o r- lo •"Si ^ T* 00 —H oo cm r- oo o E «O 05 o COOOl" CM o •*r< ZO O 5 cL° H ers W— I O *— I «=; ■< ^ G G G G >"3 O a 0 3 ^ O a n i" CM 05 05 O 05 G ® 3 £ a G ftS > 03 O O r/3 0Z JO a . G JO ^T“< • • • • • • • • Il est permis d’inférer de cet article que c’est à peu près tout ce que l’on sait et tout ce que l’on possède relativement aux chevaux cornus ? . Telle était ma pensée avant que je n’eusse la bonne for¬ tune de mettre la main sur les deux pièces ci-jointes. Le 4 du mois courant, me trouvant au dépôt des tramways du Nord, rue de la Justice, le chef de dépôt remit à M. le directeur, qui voulut bien m’en faire don, une corne qu’un palefrenier avait enlevée de l’oreille d’un cheval, la veille ou l’avant-veille du jour où il avait dû entrer à l’hôpital, soit vers le 6 ou le 7 juin de cette année (c’est la plus grande des deux pièces ci-jointes. Elle est en tout semblable à celle décrite plus haut par Thomas Bartholin). Je m’empressai de rechercher cet animal. C'est une jument âgée de cinq ans, de race normande, sous poil gris pommelé clair, propre au trait léger, paraissant être très-gaie et en excellent état de santé. Elle portait sur la peau de l’oreille externe, à deux centi¬ mètres environ de la base et sur le bord, une autre petite corne naissante qui ne peut avoir qu’environ un mois. La peau à cet endroit n’adhère au fibro-cartilage conchi- nien que par un tissu cellulaire lâche qui permet son glisse¬ ment facile sur la partie qu’elle recouvre. J’enlevai cette seconde corne avec précaution; elle adhé¬ rait en dessous à un petit cône charnu, mou, ne présentant aucun noyau osseux ou induré, entouré à sa base d’un petit * bourrelet peu sensible à l’œil et au toucher. Il y a huit jours environ que j’ai enlevé la seconde corne, et aujourd’hui le petit cône se recouvre déjà d’une couche cornée. — 138 — Cette fois, je la laisserai croître pour l’observer. L’autre oreille ne présente rien de semblable. Ces cornes, dans leur texture, n’offrent rien qui les diffé¬ rencie des autres cornes. Si vous croyez, Monsieur, que ces pièces sont assez curieuses pour être mises au Cabinet d’histoire naturelle, je vous les donne volontiers (1); sinon je les adresserai à Alfort, pour qu’elles soient exposées au Musée de l’École. A. Charles. ESQUISSE GÉOLOGIQUE. 3° Zone de la craie blanche conchoïdale . — Craie blanche subcompacte, à cassure conchoïdale, avec ou sans silex, fréquemment exploitée pour la fabrication de la chaux grasse et pour les sucreries. Les fossiles ne s’y trouvent assez abon¬ damment qu’à la base. On peut citer comme les plus com¬ muns : Belemnites verus. Inoceramus involutus. — Manlelli. — insulensis. Micraster cor testudinarium. Micraster cor anguinum. Echinocorys vulgaris. Echinoconus conicus. Cidaris seplifera. — Mercigi. A Lezennes, près de Lille, on y a trouvé une faune très- riche en poissons et en reptiles, ainsi que des restes assez nombreux d’un crustacé du genre Clytia , voisin du Homard. M. Hébert a reconnu que le Micraster cor testudinarium ne se trouve qu’à la base, tandis que toute la partie supérieure de la zone est caractérisée par le Micraster cor anguinum. Du reste, cette partie supérieure est très-pauvre en fossiles. La craie blanche à cassure conchoïdale n’est pas connue (1) Ces curieuses productions sont aujourd’hui déposées, conformé¬ ment au désir de M. Charles, dans la collection tératologique du Musée do Lille. — 439 — au cap Blanc-Nez ; le point où on la voit pour la première fois au Nord, est à Saint-Martin-au-Laërt et à Yiezernes, près de Saint-Omer. On Ta retrouvée à Calais, à 73 m. de profondeur, puis à Guînes et à Ostende. Elle forme donc le fond du bassin tertiaire des Flandres. Au Sud, elle se relève sur le massif de craie marneuse de Cysoing ; ainsi on la rencontre sous une partie de la ville de Lille et on l'exploite sur le plateau entre Loos etLezennes : à Lezennes, elle est pure et sans silex; à Loos, au contraire, elle en renferme une assez grande quantité à la base. S’éten¬ dant ensuite au Sud-Ouest vers Béthune, elle se prolonge jusqu’à la faille de l’Artois. Au Sud de Lille, elle s’enfonce sous le bassin tertiaire d'Orcliies, pour reparaître à Valenciennes, en se relevant sur la craie marneuse des environs de Bavai : on l’exploite à Saint-Saulve. Les couches inférieures disparaissent à mesure qu’on s'avance vers l'Est dans le golfe de Mons ; les couches supé¬ rieures désignées par MM. Cornet et Briart, sous le nom de craie de Saint- Waast, s’y montrent seules. Elles reposent en stratification discordante sur les gris (craie marneuse). Il y a souvent entre les deux zones des ravinements considérables et la craie blanche commence par un dépôt de glauconie presque pure. Cette zone n’aftleure guère que près de Saint- Waast et de Givry, mais on la trouve soulerrainement tout autour du bassin. La craie blanche à cassure conchoïdale constitue toute la grande plaine de craie qui s’étend de Douai, Bouchain et Cambrai vers l’Artois, presque toute la Picardie, et à l’Est elle se prolonge dans les départements de l’Aisne et des Ardennes. A Noyelles, près de Guise, elle devient très-magnésienne (20 % de magnésie) sur un espace de quelques centaines de mètres. On attribue ce fait à l’action de sources minérales. 140 — GÉOGRAPHIE HISTORIQUE DE LA BELGIQUE par M. Ch. Piot. Dans ce travail qu’il serait difficile d’analyser complète¬ ment, attendu qu’il n’est lui-même qu’un résumé des vastes connaissances de l’auteur, M. Ch. Piot nous fait assister aux diversesmodificationsgéographiquespar lesquelles a passé le territoire de la Belgique depuis les époques les plus reculées jusqu’à nos jours. Nous suivrons les divisions admises par l’auteur en nous arrêtant spécialement aux époques ancien¬ nes qui sont aussi les moins connues. La Belgique actuelle est une petite partie d’un pays im¬ mense appelé la Gaule, elle était habitée par des tribus gauloises nommées collectivement Belgœ qui, plus d’un siècle et demi avant l’ère vulgaire, selon toute probabilité, furent expulsées par des Germains. Quand César entra dans ce pays, il y trouva établis : les Tréviriens et leurs clients, les Ner viens et leurs clients, les Atuatiques, les Eburons, les Ambivarites et les Ménapiens. Toutes ces peuplades étaient d’origine germanique, sauf les Ménapiens qui étaient gaulois, ainsi que le démontrent leur nom, la nationalité de leur colonie établie en Irlande et le texte de Strabon, lorsque cet écrivain fait l’énumération des peuplades germaniques établies dans le pays. Les marais des Ménapiens leur avaient permis de résister aux Germains, comme plus tard , ils résistèrent aux Romains. Ces peuplades germaniques, une fois entrées dans leur nouvelle patrie, reçurent le nom gaulois de Belgæ, à titre d'habitants de la Galba Belgica ou de Gaulois parce que leur pays était compris dans les Gaules, comme on donne aujour¬ d’hui la qualification de Français aux flamands du département du Nord. Pour la position géographique de ces peuples et de leurs successeurs jusqu’au commencement du moyen-âge, l’auteur admet l’assimilation des circonscriptions ecclésiastiques aux — 141 divisions de la géographie civile, mais avec cette restriction que des nécessités politiques ont pu amener des modifications à cette règle générale, particulièrement en Belgique où les émigrations des peuplades, leurs déplacements et les inva¬ sions des tribus germaniques ont été très-fréquents dans les temps anciens. Si nous prenons une carte de la Belgique et que nous suivons le cours des trois fleuves et rivières mentionnés en Belgique, à l’époque de l’invasion romaine, la Meuse, l’Escaut et la Sambre, nous trouvons les populations dont l’énuméra¬ tion a été faite plus haut, ainsi disposées. Sur la rive droite de la Meuse sont les Tréviriens avec leurs clients, auxquels il faut ajouter les Eburons, puisqu’ils ne possèdent qu’une bande de territoire sur la rive gauche de ce fleuve ; sur la rive gauche habitent les Nerviens qui s’étendent jusqu’à l’Escaut, les Atuatiques qui touchent à la frontière • des Nerviens, les Ambivarites au nord des Atuatiques, enfin de l’Escaut à la mer lesMénapiens. Quant aux clients des Nerviens, les Lévaques, les Centrons et les Gordunes vivent entre la Meuse et la Sambre, les Grudiens et les Pleumosiens sur la rive gauche de cette rivière. La lutte contre les légions romaines fut fatale à la plupart de ces peuples. Les Nerviens sont en partie anéantis à la bataille de la Sambre et leurs clients disparaissent complète¬ ment de l’histoire après César ; les Atuatiques sont décimés ou vendus à l’encan par les vainqueurs ; les Eburons sont massacrés jusqu’au dernier et leur pays livré aux flammes. Aussi les empereurs romains durent repeupler ces pays devenus déserts, soit en y transportant des prisonniers de guerre, Suèves, Sicambres, Francs, soit en autorisant l’éta¬ blissement de populations germaniques, comme les Ubiens ; des Tongrois et des Toxandres s’établirent d’ailleurs par force dans une partie du pays. Les Romains divisèrent la Gaule en provinces qu’ils subdi- — 142 — visèrent elles-mêmes en cités et en pagi. La Belgique dans ses limites actuelles appartenait à trois provinces différentes, savoir : à la première Belgique, à la seconde Belgique et à la seconde Germanie. Dans la Belgica prima on trouvait la cité des Tréviriens, dans la Belgica secunda les cités des Rémois, des Cambraisiens et des Tournaisiens, dans la Germanica secunda la cité des Tongrois. Dès le Ve siècle, les Francs Saliens établis dans la Toxandrie s’emparèrent de la Belgique. En 439 ou 442, Clodion, sorti de ses forêts, avec ses compagnons d’armes, conquit le midi de la Belgique et s’empara de Tournai et de Cambrai; c’en était fait de la domination romaine. A la mort de Clovis, ses Etats furent divisés entre Thierri qui eut le royaume de Metz comprenant toute la partie de la Belgique sise à droite de l’Escaut, et Clotaire qui obtint le royaume de Soissons dans lequel figurait la partie de la Belgique située à gauche de ce fleuve. Ces deux parties furent tour à tour réunies etséparées sous divers rois jusqu’au partage de l’an 566 où l’empire franc fut divisé en Austrasie compre¬ nant les provinces belges sises à droite de l’Escaut, et en Neustrie comprenant toute la partie située à la gauche de ce fleuve. Les descendants des gouverneurs de FAustrasie, Pépin le Bref et Charlemagne réunirent un moment en un vaste empire les pays conquis par les Francs; à la mort de Louis-le-Débon- naire, ses états furent de nouveau partagés, et FAustrasie échut à Lothaire. A dater de 900, cette partie de la Belgique, qui avait pris le nom de Lotharingie, resta étroitement unie à l’Allemagne, puis devint le duché de Lotharingie qui disparut lui-même insensiblement, ses grands feudataires s’étant rendus indé¬ pendants. A sa place surgirent les duchés de Brabant et de Limbourg, le comté de Hainaut, etc. La partie du territoire belge située entre la mer du Nord et — 143 — l’Escaut continua à appartenir aux rois de France qui la donnèrent à titre de fief héréditaire à des comtes particuliers, c'est l’origine du comté de Flandre. Nous arrivons à l’époque féodale, où les modifications deviennent de plus en plus nombreuses. Malgré le vif intérêt qu’elles présentent, nous sommes forcé de nous borner à cette analyse, car nous risquerions de ne plus être compris, tellement le bouleversement est considérable. Nous renvoyons donc, comme d’ailleurs pour les parties précédentes, au savant travail de M. Piot, et particulièrement aux excellentes cartes dont il l’a accompagné; mieux que toutes les explica¬ tions que nous pourrions donner, elles feront comprendre d’un seul coup d’œil au lecteur les nombreuses modifications géographiques qu’ont subies, depuis l’antiquité, le territoire belge et la partie du département du Nord qui touche à ce pays. H. R. SOCIÉTÉS SAVANTES. SOCIÉTÉ D’AGRICULTURE, SCIENCES ET ARTS DE VALENCIENNES. Nous résumons brièvement les deux derniers volumes de cette Société qui publie, comme on sait, des fascicules men¬ suels, sous le titre de Revue agricole , industrielle, littéraire et artistique. Les années 1873 et 1874 forment les tomes 26 et 27 de la collection. La Société terminait en même temps le troisième volume des Mémoires historiques sur V arrondissement de Va¬ lenciennes , et entamait le tome quatrième. Ce troisième vo¬ lume contient : le Beffroi et la Cloche des ouvriers en 1358 , par M. Caffiaux , et une Commune flamande , recherches sur les institutions politiques de la ville de Valenciennes , par M. Cel¬ lier, ouvrage récompensé d’une médaille d’or par la Société des sciences de Lille, à sa séance solennelle du 28 décembre 1873. Des cinq sections dont se compose la Société de Valcn- — 144 - ciennes , celle de l’agriculture est de beaucoup la plus active et la plus féconde, mais ses travaux tout spéciaux sortant du cadre que s’est donné le Bulletin, nous les passerons sous silence , ainsi que ceux des sections de l’industrie et de la moralité ; notons toutefois, à propos de cette dernière, qu’en 1873 cent trente-deux médailles ont été accordées aux servi¬ teurs bien méritants de l’agriculture ou de l’industrie , aux jeunes apprentis, aux traits de courage et aux ouvriers du lundi, qui y figurent pour trente-cinq récompenses. En 1874, les lauréats ont été cent vingt-cinq. N’est-on pas tenté de se demander ce qu’il faut le plus admirer, de la gé¬ nérosité de la Société valenciennoise ou de l’excellence d’un arrondissement qui fournit un tel nombre de prix de vertu ? Dans la section d’histoire, mentionnons un rapport de M. L. Legrand sur l’ouvrage de M. Caffiaux : Essai sur le régime économique , financier et industriel du Hainaut , que la Société des sciences de Lille a couronné en 1871. Ce rapport tout élogieux accentuait encore ce que l’ouvrage avait de hardi dans ses appréciations politiques ; il fut sérieusement critiqué par M. Grar , qui déclara nettement et sur preuves ne pou voir accepter des assertions telles que celles-ci , par exemple : c Ce n’est que de la révolution que date notre ma¬ gnifique développement agricole et industriel ; c’est du ren¬ versement de la royauté que date pour l’industrie, l’agricul¬ ture et le commerce une série de progrès correspondants qui ont mis nos populations au nombre des plus intelligentes, des plus ingénieuses, des plus riches et des plus dignes. » M. Grar leur oppose carrément ceci : La révolution arrêta le progrès dans sa source, par la guerre, l’émigration , les assignats et le maximum. Naturellement M. Legrand répon¬ dit, naturellement aussi M. Grar ne fut pas convaincu; il prépara une nouvelle réfutation , mais le terrain devenait brûlant ; l’accès de la politique étant interdit à la Société , il préféra , comme président , donner l’exemple et arrêter le débat. Nous n’irons pas plus loin que lui , tout en remar- — 145 — quant que cet échange d'opinions, révélé par les publications d’une Société , est d’un bon exemple. La discussion à armes courtoises est la vie des associations ; elles courent moins de danger par le choc bien entendu des polémiques que par la monotonie des opinions acceptées. La section des beaux-arts écrit peu, mais elle ne reste pas oisive; sa grande préoccupation paraît être de compléter la galerie historique destinée à recueillir les gravures , statues, tableaux ou portraits relatifs a l’histoire de Valenciennes ; la collection est déjà très-importante, mais elle est loin d’être achevée ; pour les portraits seulement , nous trouvons une liste de soixante-deux personnages nés dans l’arrondissement, et plus ou moins célèbres, qui manquent encore dans la ga¬ lerie. S’ils n’y viennent pas, ce ne sera pas faute d’artistes locaux , car Valenciennes a l’heureux privilège de fournir à l’art contemporain des représentants nombreux et éminents. En 1873, elle envoyait à l’Exposition de Paris quatorze ex¬ posants et vingt ouvrages; en 1874, seize exposants et trente- cinq ouvrages. C’est d’un bon augure pour la réussite du concours que la Société des sciences de Lille ouvre en 1877, en promettant son prix Wicar de cette année au meilleur tableau exposé à Paris par un artiste né dans le département du Nord. A. DE NORGUET. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. Classe des Sciences. Reprenant des travaux de l’Académie depuis le commen¬ cement de l’année, nous avons à signaler quelques études mathématiques de MM. Eug. Catalan, Houzeau et Van der Mensbrugghe. M. E. Quetelet a résumé en quelques chiffres les observations faites de 1833 à 1872 sur la température de l’air à Bruxelles, (1), et dans une autre note (2) a fait ressortir (1) T. 39 p. 92. (2) id. p. 368. — 146 — les analogies des hivers 1874-75 et 1859-60. Dans ces deux années, Décembre a été très-froid, Janvier très-chaud, Février très-froid. M. Walthère Spring a présenté un mémoire fort important sur la dilatation, la chaleur spécifique des alliages fusibles et leurs rapports avec la loi de capacité des atomes (1). Les rapporteurs ont été unanimes pour louer la méthode et l’esprit qui ont présidé à ces recherches. Elles montrent, conclut l’auteur, que les variations de la chaleur spécifique suivent les variations des volumes des corps par la chaleur. M. Plateau a repris ses études sur les couleurs accidentelles ou subjectives (2). Si on fixe pendant quelque temps un objet coloré et que l’on dirige ensuite les yeux sur un papier blanc on voit le même objet avec une teinte différente, c’est ce qu’on appelle la couleur subjective. On admettait que cette couleur était toujours complémentaire de la couleur de l’objet considéré. M. Plateau établit par expérience qu’il n’en est pas toujours ainsi, car le bleu amène souvent la sensation de PoraDger et non du jaune, de même le jaune produit souvent la sensation du violet et non du bleu. M. Plateau avait expliqué ce phénomène par une sorte de réaction de la rétine contre l’action de la lumière qui la frappe. Cette théorie, admise en France, avait été fortement combattue en Angleterre et surtout en Allemagne. M. Plateau, en modifiant légèrement ses idées, les maintient en ce qu’elles ont d’essentiel , l’activité de la rétine réagissant contre sa première impression. Le laboratoire de la station agricole de Gembloux a produit deux travaux de Chimie intéressants, l’un, dû à M. Pétermann (3) directeur de la station, signale la présence du cuivre dans le genièvre et dans les vinasses. Or celles-ci servent à l’engraissement des bestiaux qui alors peuvent absorber des (1) Id. p. 548. (2) Id. p. 100. (3) Id. p. 121. — 147 — quantités relativement considérables de cuivre; M. Pétermann en a retrouvé dans le fumier. M. Simon (1) directeur de la station agricole de Gand, a constaté que l’acide humique possède la propriété d’absorber l’azote de l’air et de former de l’ammoniaque ; il se produit en même temps de l’acide carbonique. Ainsi s’explique l'intervention favorable de l’acide humique ou autrement dit des matières organiques pour la nutrition des végétaux. M. Simon s’est aussi assuré que l’acide humique décompose le phosphate de chaux et rend l’acide phosphorique soluble dans l’eau, l’ammoniaque et l’acide acétique. Sur la théorie de l’emploi de l’air chaud dans les hauts- fourneaux , par M Yalerius (2). On sait que, depuis une quarantaine d’années, on active la combustion dans les hauts fourneaux avec de Pair préa¬ lablement chauffé, au lieu de faire usage, à cet effet, comme auparavant, d’air froid, c’est-à-dire à la tempéra¬ ture ordinaire. Au commencement de l’emploi de Pair chaud, on a pro¬ cédé avec beaucoup de réserve. On n’a d'abord chauffé Pair que jusqu’à 100 ou 200° G. Plus tard , on est arrivé à 300° et même à 350°, et Pon s'est arrêté là jusqu’en 1861. A partir de cette époque, on a chauffé Pair à 400, à 500 et même à 600°; enfin, depuis 1867, on emploie de Pair à 800°. L’utilité de Pair porté à cette haute température ressort très-bien du fait suivant rapporté par M. Gruner (3). Pour une production de fonte de 1 kilogramme , on n’a dû insuf¬ fler dans un haut fourneau que 3k,751 d’air chauffé à 718°, tandis que, dans un autre, il fallait 5k, 161 d’air chauffé seulement à 454°, 5. La consommation de charbon était (1) 1(1. p. 125. (3) Id. p. 370. (2) Revue universelle des mines , t. XXXII , p. 403; Liège, 1872. — 148 — donc moindre dans le premier de ces appareils que dans le second. Ainsi que M. Gruner l’a démontré dans le travail cité plus haut, l’emploi de l’air chaud, par le refroidissement qu’il occasionne dans la partie supérieure du haut four¬ neau, change le mode de réduction du minerai et procure ainsi une première économie de combustible. En outre, l’air chaud offre l’avantage de diminuer la quantité d’oxyde de carbone qui se forme dans l’appareil, ce qui réduit encore la consommation de combustible. Enfin, il procure un accroissement notable de température dans la zone de combustion, ce que l’on reconnaît à l’éclat plus grand des tuyères, à la fluidité plus complète des produits liquides qui sortent de l’appareil et à la couleur plus grise de la fonte qui jette plus de graphite pàr un refroidissement lent. Dans une note précédente (1), M. Valerius a montré que la température de combustion du carbone brûlé à l’air libre est de 1678°; la moitié du carbone se transforme en acide carbonique et l’autre moitié en oxide de carbone. A 2231° le mode de combustion du carbone change, ce n’est que jusqu’à cette température que l’on peut élever les produits de la combustion du carbone à l’air libre, sans provoquer un refroidissement, par suite de la dissociation d’une partie de l’acide carbonique, formé à des températures plus basses. Par conséquent 2231° représentent la plus haute température que l’on puisse réaliser dans la zone de combustion des hauts-fourneaux. M. Valerius en conclut, par un calcul basé sur les chaleurs spécifiques, 'que si on brûlait du carbone pur on devrait se servir d’air chauffé à 605°. La présence de cendres et d’eau formée a pour effet d’abaisser la tempéra- rature de combustion. Il faut donc insuffler de l’air à une température supérieure, à 605°. Mais il ne semble pas à M. Valerius qu’il faille beaucoup dépasser 800°. (1) T. 38, p. 654. — 149 — M. Van Bambeke signale un Dauphin, Delphims truncatus, pris à la Panne en décembre 1874. Il mesurait 2rn75. Une capture plus intéressante signalée par M. Dubois, na¬ turaliste au Musée d’histoire naturelle de Bruxelles (1), est celle du Coccysus americanus , oiseau de l’ordre des Zygodac- tyles voisin des Coucous, tué au bois de Lessinesle22 octobre 1874. Il se tenait près d’un ruisseau, faisant la chasse aux araignées, dont il se montrait très friand. Cinq individus de la même espèce ont déjà été pris en Angleterre et deux dans le midi de la France. Cet oiseau habite l’Amérique du Nord jusqu’au Canada; à l’approche de l’hiver il émigre vers le Sud et se montre alors même dans l’Amérique centrale et dans les Antilles. On doit supposer que les individus trouvés en Europe ont été enlevés par un coup de vent. Sur la corde dorsale de VAmphioxus, par M. Ch. Moreau (1). Nous empruntons au remarquable rapport de M. Édouard Van Beneden (2) l’exposé de la question et le résultat des recherches de l’auteur : « L’Amphioxus est le plus inférieur et partant le plus simple de tous les vertébrés de la nature actuelle. L’étude de son organisation et de son développement est une base indis¬ pensable pour arriver à la connaissance du type vertébré. Aussi, plusieurs naturalistes éminents se sont-ils appliqués à faire connaître l’histoire de cet organisme. Les recherches de Kowalewski sur le développement embryonnaire de l’Amphioxus et des Ascidies ont démontré les affinités qui relient l’Amphioxus aux Tuniciers, et l’abîme que l’on croyait exister entre les vertébrés et les invertébrés s’est trouvé comblé tout-à-coup. Les Vertébrés issus d’organismes voisins de l’Amphioxus actuel dérivent de l’embranchement des Vers, et les Acraniens, comme les Tuniciers, sont deux rameaux importants de l’arbre généalogique des vertébrés. » Parmi les organes les plus caractéristiques du type ver- (1) T. 39, p. 312. — (2) Ici. p. 251. — 150 — tébré se range la corde dorsale, ce cordon cylindroïde plein, formé d’an tissu résistant et élastique qui se trouve tendu dans toute la longueur du corps entre le système nerveux central, d’un côté, et les principaux organes de la vie végé¬ tative de l’autre. Cet organe qui persiste durant toute la vie chez les vertébrés inférieurs, qui, à lui seul, représente chez eux le squelette , apparaît transitoirement dans le cours de l’évolution embryonnaire des vertébrés supérieurs. Il offre chez tous les vertébrés, à partir des Cyclostomes, une uni¬ formité de structure vraiment remarquable : il est formé d’une enveloppe membraneuse appelée la gaine ou l’étui de la corde et d’un tissu propre, le contenu de la corde dorsale. — Les éléments qui entrent dans la composition de ce tissu sont partout les mêmes : une substance inlercellulaire homo¬ gène ou fibrillaire, élaborée par les cellules protoplasmiques qui, au début, constituent à elles seules tout l’organe, forme un réticulum dans les mailles duquel se logent les cellules de la corde. Ces cellules sont réduites à un noyau ovalaire entouré d’un peu de matière protoplasmique; elles renfer¬ ment un liquide homogène , incolore et transparent qui remplit la plus grande partie des mailles du réseau ; ce liquide n’est qu’un produit secondaire développé à leur inté¬ rieur par les cellules protoplasmiques primitives de la même manière que la graisse dans les cellules adipeuses. Le tissu de la corde ressemble à un parenchyme végétal. Si je ne me trompe, c’est en étudiant la corde dorsale du têtard de la Grenouille que notre illustre confrère M. Schwann reconnut pour la première fois la structure cellulaire d'an tissu animal. » Mais chez l’Amphioxus cet organe serait tout autrement organisé, si du moins l’on s’en rapporte aux données publiées jusqu'aujourd’hui sur la structure de la corde dorsale : M. Moreau démontre dans son travail que divers éléments du tissu de la corde de l’Amphioxus ont passé inaperçus jusqu’à présent, et que ces éléments sont de la plus haute importance en ce qu’ils permettent de ramener la corde dor- — 151 — sale de l’Amphioxus au type commun réalisé chez tous les autres vertébrés. » En commençant son rapport, M. Éd. Yan Beneden nous fait part des difficultés d’installation que rencontre l’ensei¬ gnement supérieur des sciences naturelles en Belgique : « Tous ceux qui ont vu de près l’Allemagne savent quelle étonnante activité règne dans la vie intellectuelle de ce pays ; tous ont remarqué la vogue dont jouissent, dans ce pays, les sciences en général et les sciences naturelles en particulier. Parmi les causes qui expliquent cette popularité, l’on peut citer le nombre des universités, l’admirable organisation de l’enseignement supérieur et la création des laboratoires, de ces instituts pratiques où les élèves s’initient de bonne heure, sous les yeux du maître, non-seulement aux résultats de la science, mais aux méthodes d’observation et d’expérimenta¬ tion. C'est là que l’élève apprend à observer, à discuter, à se critiquer lui-même et à juger les travaux des autres ; au lieu d’y recevoir un enseignement dogmatique, il y apprend à douter de la parole du maître, à se confier à ses propres forces et à mettre ses observations personnelles, basées sur une méthode sûre et soumise à une critique sévère, au- dessus des affirmations de l’autorité. En un mot, on y déve_ loppe cette liberté d’esprit qui est la condition indispensable de tout progrès. Les laboratoires sont les pépinières d’où sont sortis les maîtres d’aujourd’hui et où se forment en ce moment ceux de l’avenir. Ce ne sont pas seulement les pro¬ fesseurs, mais aussi les disciples qui fournissent aux revues des travaux de valeur, et je pourrais citer telles publications faites par des jeunes gens aux études, qui marqueront dans l’histoire des sciences biologiques. Les gouvernements alle¬ mands, qui attachent du prix au développement intellectuel du pays, ont la sagesse de ne reculer devant aucun sacrifice quand il s’agit des intérêts de la science ; nous avons vu créer des laboratoires purement scientifiques qui ont coûté 000 et 800,000 francs, et cette année même la Prusse augmente de — 152 — plus de 2,000,000 de marcs le budget annuel de l’enseigne¬ ment supérieur. j> En Belgique, après plusieurs années d’instances et de démarches, nous avons obtenu des fonds pour organiser des laboratoires. Pour ma part, j’ai pu disposer d’une somme de 5,000 francs pour acheter quelques microscopes et les ins¬ truments les plus indispensables aux recherches microsco¬ piques ! Plusieurs élèves sont venus travailler sous ma direc¬ tion ; mais faute d’espace, d’instruments, d’aides et d’argent, je me suis trouvé dans l’obligation, fort singulière pour un professeur, de devoir refuser à des élèves l’accès de mes leçons. » O La France en est presque au même état que la Belgique. Reconnaissons toutefois que la Faculté de Lille n’en est pas à refuser des élèves. Grâce au zèle de M. Giard, nous possé¬ dons, à Lille même, un laboratoire de zoologie où travail¬ lent régulièrement une dizaine d’élèves ; les plus avancés vont à Vimereux poursuivre leurs études sur les animaux maritimes. Cette année le laboratoire de Vimereux va offrir l’hospitalité à des travailleurs de la capitale. On pourra mieux apprécier son utilité et, il faut l’espérer, on ne lui marchandera plus les moyens d’existence. Les communications de Géologie sont nombreuses à l’Aca¬ démie de Belgique. M. Dupont, directeur du Musée d’histoire naturelle de Bruxelles, a repris ses études sur le calcaire carbonifère. Dans ce nouveau travail il s’est occupé de comparer l’étage carbonifère inférieur du bassin de Namur avec celui du bassin de Dinant ; il a dressé 14 coupes dirigées sensible¬ ment N. -S. et perpendiculaires au bassin. Ce sont celles de Tournai à Crèvecœur, d’Ath à Leuze, de Basècle à Blaton, de Feluy, de la Sambre près de Landelies, des Haies à Mont-sur-Marchiennes , de l’Eau d’Heure, de Loverval, de l’Eau Morte, de Malonne, de la Meuse, de Ligny à Rhisnes, — 153 — de Rhisnes à Namur, de Marche-les-Dames à Gelbressée. Il indique donc la constitution du calcaire carbonifère sur une zone de 110 kilomètres de longueur, s’étendant de Tournai au ruisseau de Ville-en-Waret, entre Namur et Andenne. Il en résulte des données d’ensemble qui tendent à assigner à cette zone un caractère d’unité bien tranché. Les couches se classent en trois groupes bien caractérisés qui se rapportent aux assises I, V et VI des environs de Dinant ; les assises II, III et IV y manquent complètement. L’assise I, qui possède dans le Ilainaut une épaisseur de 150 m., diminue vers l’E., et à Malonne, près de Namur, n’a plus que 20 m. d’épaisseur. Les niveaux pétrographiques distingués par M. Dupont sont les suivants : I a. Psammiies avec bancs de calcaire à crinoïdes. I b. Calcaire. I c. Schistes argileux fossilifères. I d. Calcaire à crinoïdes : Spirifer Mosquensis. Calcaire de Maffle. de Soignies, des Ecaussines, etc. I e. Calchiste noir fossilifère : Sp. Mosquensis , Chonetes variolaria. C’est le niveau qui fournit le calcaire à chaux hydraulique de Tournai ; calcaire d’Ath et de Mevergnies. I f. Calcaire à crinoïdes : Crèvecœur près de Péronne. V a. Dolomie à crinoïdes : Brugelette. V b. Dolomie pulvérulente et géodique : Casteau. Via. Calcaire gris, subcompacte, à grains cristallins:' Basècle. VI b. Calcaire noir : Marbre de Basècle. VI c. Brèche : Basècle-Carrières. VI d. Calcaire gris compacte, grenu bleu foncé, brechi- forme ou noirâtre : Blaton. VI e. Calcaire gris à filets spathiques. Ces divisions reproduisent avec plus de détail celles qui ont été indiquées dans Y Esquisse géologique insérée dans ce — 154 — recueil. Toutefois, dans Y Esquisse géologique on avait dis¬ tingué du calcaire de Tournai ou d’Ath celui de Brugelette, appelé aussi calcaire de Mevergnies. On avait même admis que la lacune qui correspond aux assises de Dinant, vient se placer entre ces deux calcaires. Or, M. Dupont a vu le cal¬ caire noir de Mevergnies intercalé entre le calcaire à cri— noïdes I d. et le calcaire à crinoïdes I f comme les couches noires schistoïdes de Tournai. Le nouveau travail de M. Dupont est un complément im¬ portant des remarquables études qu’il a publiées de 1860 à 1865 sur le même terrain. Le calcaire carbonifère repose sur un étage du terrain dévonien de plus de 600 m. d’épaisseur, les Psammites du Condros. Aucun géologue ne l’avait encore étudié en détail et l’on n’était pas renseigné sur les divisions que l’on pouvait y établir. M. Mourlon (1), naturaliste au Musée de Bruxelles, a tenté cette œuvre difficile, qui demandait une grande patience et une extrême habileté dans la recherche des fossiles. Il y a réussi dans les limites du possible. Il distingue quatre groupes : 1° Psammites à surface gaufrée et à erinoïde d’Esneux . . . 150m 2* Macigno noduleux de Souverain-Pré . 100ra S° Psammites à pavés de Montfort . 150m 4° Psammites d’Evieux à végétaux . 200™ Les fossiles sont trop rares pour pouvoir servir à caracté¬ riser ces couches. Les seuls qui soient communs, Spirifer disjunctus ( Verneuli ), Rhynchonella pleurodon , Strophalosia productoïdes se présentent à tous les niveaux. Cependant, les Psammites de Montfort renferment en assez grande quantité des empreintes de bivalve, Cucullœa Hardingii. Dans les Psammites d’Evieux, les débris de végétaux sont abondants ; on y trouve même quelques veines d’anthracite. (1) Bull. acad. Belg., t. XXXIX, p. 602. 155 — M. Mourlon s’est borné à publier ses observations sur la partie orientale du Condros, entre la Meuse et l’Ourthe. 11 faut espérer qu’il continuera cette étude et nous donnera prochainement des notions tout aussi exactes sur la partie occidentale de la région dans l’Entre-Sambre-et-Meuse Qu‘il me permette de m'unir aux deux académiciens rapporteurs pour l’engager à être moins sobre à l’avenir dans l’indication des valeurs de l’inclinaison et de la direction. Ce sont des éléments géologiques importants à connaître, bien qu’il ne faille pas en exagérer la valeur et croire que l’on peut, à l’aide du rapporteur, calculer sur les coupes l’inclinaison réelle des roches. Quiconque a publié des coupes à travers les roches redressées des terrains primaires, sait parfaitement que les inclinaisons se tracent à l’œil de manière à rendre à peu près l’effet que l’on a observé, en tenant compte de l’exagération que l’on est obligé de donner à l’échelle des hauteurs par rapport à celle des distances. Nous venons de dire qu’une des assises, les Psammites d’Evieux, contiennent des débris de végétaux. Ils ont été étudiés par M. Crépin, botaniste, membre de l’Académie de Belgique (1) et par M. Gilkinet, de Liège (2). Ces savants ne sont pas d’accord, et comme il nous est impossible de prendre partie dans la discussion, nous allons exposer brièvement leurs opinions respectives. L’une des espèces les plus abondantes est désignée par M. Crépin sous le nom de Psilophyton condrusorum et rap¬ portée à la famille des Lycopodiacées. M. Gilkinet la considère comme une fougère du genre Sphenopteris . Une autre plante, qui est sans conteste une fougère du genre Palœopteris , doit porter d’après M. Crépin le nom ( Yhibernica et d’après M. Gilkinet celui de Ræmeriana , discussion peu importante puisque ces deux noms paraissent se rapporter à la môme espèce. (1) Bull. Acad. T. 38 p. 356. (2) id. T. 39 p. 483. — 150 M. Crépin cite encore parmi les végétaux des psammites deux autres espèces de fougères Sphenopteris flaccida et Triphyllopteris elegans. Nous avons déjà annoncé à nos lecteurs que l’Académie de Belgique avait couronné un travail remarquable sur les roches éruptives de la Belgique et de l’Ardenne française par M. de La Vallée Poussin, professeur de l’Université de Louvain et le P. Renard, Professeur au collège de la compagnie de Jésus à Louvain, nous ne connaissons encore ce travail que pour le résumé qu’en ont fait les rapporteurs (1). Les roches étudiées sont : 1° La diorité quartzeuse de Quenast et de Lessines. C’est la roche désignée par tous les géologues sous le nom de porphyre. Il est regrettable que les auteurs se soient crus à l’exemple de Zirkel obligés de changer son nom; 2° Le Gabbro ou Euphotide d’Hozémont, formé de feïds- pathe plagioclase et de diallage ; 3° Les Porphyroïdes de Fauquez, de Rebecq-Rognon, de Pitet, qui seraient des roches sédimentaires métamorphiques. Leur composition minéralogique les éloigne complètement des roches de Quenast et de Lessines, dont on les avait jusqu’alors rapprochées ; 4° Les Arkoses de Clabecq, Lambecq, Tubize : ce sont des roches élastiques formées de grains de quartz et de feldspath plagioclase. Les auteurs les considèrent comme des couches sédimentaires contemporaines du terrain silu¬ rien, lesquelles dérivent probablement de roches éruptives du type dioritique déjà émises à la même époque. Si on en juge d’après les rapports, le chapitre consacré aux roches de l’Ardenne française est peu développé. Nous espérons que lors de la publication du Mémoire, les auteurs pourront lui donner plus d’étendue, car leur étude vient bouleverser toutes nos idées. Le beau porphyre du moulin (1) Bull. acad. T. 38, p 748. — 157 de Mairus devient une roche gneissique, la Diorite de forges de la commune se transforme en Àmphibolite; celle de Rimogne conserve seule son nom. MM. de Lavallée et Renard, en appliquant le microscope à l’analyse des roches, sont entrés dans une voie où ils n’avaient aucun précurseur en Belgique. On doit les en féliciter, car ces études micrographiques sont destinées ù rendre de grands services à la géologie en nous renseignant sur la nature et l’origine d une foule de roches encore peu connues. CHRONIQUE. Juin. Météorologie. ~ ITnée moyotme. Température atmosphér. moyenne. 16? 24 15? 94 — moy. des maxima. 20? 76 — — des minima. 11? 73 — extr. max., le 3. 29° 70 — — minima, le 18. 8? 30 Baromètre hauteur moyenne, à 0°. 759'”mM2 759“m749 — — extr. max. le 7. 765 mra 80 — — — min. le 15. 751 r?m 16 Tension moy. de la vap. atmosph. Qmm 44 /J Qmm 26 Humidité relative moyenne %. . 65 10 69’ 85 Épaisseur de la couche de pluie. . 'y "J mra '98 63 T >06 — — d’eau évap. 1 33'?“ 67 1 9gmm 52 La température atmosphérique du mois de juin fut supé¬ rieure à la moyenne ordinaire de ce mois et supérieure aussi à celle de juin 1874; la moyenne des maxima a été la même pour les deux années, la différence se trouve dans les minima de 1° . 2 moindres l’année dernière que cette année, les nuits furent donc plus froides. Cette élévation de température est due à l’action directe du soleil dont les rayons n’étaient pas souvent interceptés par les nuages, et à la prédominance des vents S.-O. et des courants supérieurs qui répandirent dans les couches élevées de l’atmosphère de grandes quantités de vapeur d’eau déce- — 158 — iées par la dépression barométrique; l'abondance de la pluie, dont la quantité recueillie en 17 jours a dépassé la moyenne de 14?™ 95 ; la fréquence des orages, 8. Malgré la fréquence de la pluie, les couches d’air en contact avec le sol furent moins humides qu’en juin, année moyenne, et la tension de la vapeur fut moindre ; ce qui rend compte de la réduction du nombre des brouillards, 19, et des rosées, 15; ainsi que de la plus grande quantité d’eau évaporée. Avec les pluies d’orage, il ne tomba de la grêle qu’une seule fois et les récoltes n’éprouvèrent aucune avarie ; elles eurent la chance heureuse de ressentir la bienfaisante in¬ fluence de ces pluies fertilisantes depuis si longtemps atten¬ dues, aussi leur état s’est-il considérablement amélioré. Juillet. 18“n. Année moyenne. Température atmosphér. moyenne. 17? 04 17? : 72 — moy. desmaxima. 21? 15 — — des minima. 15? 97 — extr max , le 1er. 56? 3 — — minima. le 13, 9? 4 Baromètre hauteur moyenne, à 0? 759mm 183 760' ?™352 — — extr. max. le 57 . 770mm 06 — - — — - min. le 10. 750mm 08 Tension moy. de la vap. atmosph. | Qmm 46 11 mm 08 Humidité relative moyenne % . 68* 0 69 79 4 àmà Épaisseur de la couche de pluie. 70mm 91 60 mm ’J [ • — — d’eau é vap. 131?™ 55 140 mm 9g Quoique le mois de juillet soit ordinairement le plus chaud de l’année, celui-ci reste de 0°.C8 au-dessous de la moyenne. Cet abaissement anormal de la-température doit être attribué à la fréquence des vents du N , à la grande nébulosité du ciel , aux nombreux jours de pluie , 25. Il débuta par un orage accompagné d’une pluie torren¬ tielle qui, en 45 minutes, donna une couche d’eau d’une épaisseur de 24?™32. Trois autres orages furent observés pendant le mois ; la grêle en faible quantité n’occasionna aucun dégât. - 159 — Le 12, il y eut une tempête S. 0. assez violente, et attei¬ gnant son maximum d’intensité vers trois heures de l’après- midi. La tension électrique fut grande pendant le mois , et outre les orages, il y eut deux jours d’éclairs sans tonnerre. Quoique l’humidité des couches supérieures de l'atmos¬ phère, décelée par la dépression barométrique, la nébulosité du ciel et la fréquence des pluies ait été supérieure à la moyenne, quoique les brouillards et les rosées aient été nombreux, l’air en contact avec le sol fut moins humide qu’en juillet année moyenne; ce qui, malgré les causes dé¬ favorables que nous venons d’indiquer, permit encore l’éva¬ poration d’une couche d’eau qui ne fut inférieure à la moyenne que de 9™m43. Les pluies du mois furent favorables aux céréales, aux prairies naturelles et artificielles, nuisibles aux pommes de terre qui, sous l’inhuence de l’humidité, furent de nouveau envahies par le peronospora infestans qui compromit la ré¬ colte des tubercules alimentaires si précieux. Pour ne pas entraver les travaux de la moisson qui com¬ mence chez nous, il était temps que les pluies cessassent. V. Meurein. Note snr les genres Liiunx et Arion ( Rectification ). Nous recevons de notre collaborateur M. Lelièvre, la lettre suivante que nous nous empressons de publier. C’est par une erreur de transcription que, dans mon article sur les Limaces paru dans le dernier numéro du Bulletin, le Umax fulvus Norm. est indiqué comme synonyme ou variété de L. brunneus Drap. Ainsi page 85, lignes 14 et 23 et page 80, lignes 19 et 20 il faut lire L. parvulus au lieu de L. fulvus. Cette erreur était d’ailleurs d’autant plus facile à rectifier que je déclare nettement (voir page, 86 ligne 13), ne pas con¬ naître le Umax fulvus. De nouvelles observations relatives à l 'Avion leucophœus la seule des quatre espèces de normand qui m’avait laissé des doutes me portent à considérer ce type comme le jeune ûge des formes brunes de l 'Avion ru fus. La forme générale et la — 160 — disposition des bandes est exactement la même dans lesdeux espèces. Des expériences d’éducation sont toutefois nécessaires pour élucider pleinement ce point litigieux. A. Lelièvre. Méthode d'enseignement musical de M. Danel. — Ayant , comme plusieurs de ses prédécesseurs, la pensée qu’il est utile de ne présenter au début de l’étude de la musique, dans l’éducation populaire, que des éléments déjà connus , M. Danel a pris ces éléments dans l’alphabet et en a fait une notation qu’il désigne sous le nom de provisoire. Les consonnes initiales du nom des notes do, ré, mi, fa, sol , la, si, c’est-à- dire, D, R, M, F, S, L, S, sont donc les signes de ces notes ; mais attendu que S signes de sol et S , signe de si , pourraient être confondus, il remplace, pour cette note, S par B. Tels sont donc les signes des intonations diatoniques. Ces signes sont ceux de l’octave moyenne de la voix; un point placé au-dessus des lettres indique une octave supérieure; un point au-dessous, une octave inférieure. S’il fallait repré¬ senter une octave suraiguë, on aurait deux points au-dessus des lettres, et pour une octave grave, on les mettrait au- dessous ; mais cela est inutile dans le chant ordinaire. A l’égard de la durée des sons, M. Danel en représente les éléments par les voyelles et diphthongues a, e , i, o, u, eu, ou, remplaçant seulement, pour plus de simplicité dans la nota¬ tion, eu par u surmonté d’un trait, et ou par la même lettre avec le trait au-dessous. Ainsi a est le signe de la ronde ; e, de la blanche; i , de la noire; o, de la croche; u , de la double croche ; eu, de la triple ; ou, de la quadruple. S’il s’agit de la durée réunie à l’intonation, la voyelle représentative de cette durée se joint à la consonne qui est le signe de la note, et l’on a ainsi les deux éléments réunis dans une syllabe. Par exemple, da est ut ronde, fo est fa croche, su est sol double croche, et ainsi du reste. Les voyelles iso¬ lées sont les signes des silences correspondant aux durées des sons. Enfin, pour représenter les signes modificateurs de l’into¬ nation des notes dont on fait usage dans la notation usuelle — 161 — de la musique, M. Panel a imaginé de prendre les consonnes caractéristiques des noms de dièze, bémol et bécarre ; ainsi z est le signe du dièze ; l , celui du bémol ; r, celui du bécarre. Réunissant ces lettres aux syllabes dont il vient d’étre parlé, M. Danel en forme des mots de trois lettres, tels que daz pour ut dièze, ronde; roi pour ré bémol, croche ; sur pour sol bécarre, double croche, et ainsi des autres combinaisons. . M. Danel appelle langue des sons le système de ses diverses combinaisons. Les exercices d’intonations se font sur les consonnes seules, sans considération de durée. Puis vient la réunion des deux éléments. Après cette dernière série d’exercices, M. Danel entre par un premier pas dans la notation usuelle, en remplaçant les consonnes initiales par les degrés de la portée et y plaçant les voyelles qui représentent les durées, et notant ainsi des mélodies populaires. De ce premier pas à la nota¬ tion tout entière, la transition est facile ; car les différences d’intonations étant représentées dans l’esprit des élèves par les degrés de la portée, il est facile de les conduire progres¬ sivement à la conception de l’identité de signification des lettres et des syllabes avec les éléments de la notation ordi¬ naire ; en un mot, du système de la langue des sons avec cette notation. « La méthode de M. Danel, a dit M. Fétis, est une simple combinaison de procédés ingénieux pour répandre l'instruc¬ tion et le goût de la musique dans le peuple : je la considère comme excellente pour le but qu’il se propose, et ce que j’en ai appris par l’expérience me prouve que le succès en est certain. Elle est bien une méthode d’enseigne¬ ment populaire, et en même temps elle place les individus dans la voie qui conduit à la connaissance d’un art plus élevé. M. Danel est un homme de sens qui ne s’exagère pas la portée de son système d’enseignement. Dans nos conversations, il m’a répété û diverses reprises que sa conviction est que l’éducation convenable pour les al tistes est celle qu’ils reçoi¬ vent dans les Conservatoires ; mais il faut pour le peuple des choses plus à sa portée et faciles à comprendre, parce qu’il a peu de temps à consacrer à l’étude. » Pour moi, depuis que j’ai vu celte méthode en pratique, — 162 — je ne mets pas en doute quelle reçoive, un jour, la plus large application dans l’éducation populaire de la France, d « Société ceutrale Si l’on s’en tenait à ces simples énonciations, il semble¬ rait que ce duché de la seconde Belgique dût être singuliè¬ rement restreint. Mais il ne faut pas perdre de vue que la seconde Belgique, outre une portion notable du littoral, comprend diverses places fortes ou forteresses, telles que Castellum Menapiorum , etc. » Malheureusement, pour la détermination de ces forteresses, nous sommes aussi pauvres en documents archéologiques que nous ne l’étions pour la partie historique. Le nom de Cassel indique bien une posi¬ tion fortifiée, mais on n’a pu restituer son enceinte ; Famars est la seule localité- du département du Nord qui ait montré quelques traces de fortifications composées de matériaux de toute sorte noyés à la hâte dans des bains de mortier, briques, marbres, débris de colonnes (1) ; mais Tournai, à deux pas de notre département, a conservé pendant long¬ temps des restes assez remarquables de ses fortifications romaines. (1) Ces traces de fortifications n’ont pas été mentionnées dans le travail de M. le président Tailliar. probablement à cause du doute qui règne, chez les historiens, relativement à la date de la destruction de Famars. — 226 - Voilà, pour la partie du duché de la seconde Belgique qui nous intéresse plus spécialement, les enseignements qu’on peut tirer des textes et des découvertes. C’est peu, mais heureusement, à côté de cette pauvreté, se trouvent dans d’autres régions de la Gaule, même assez rapprochées de la nôtre, d’incomparables richesses qui ont permis à M. le président Tailliar de fournir des détails du plus haut intérêt sur l’organisation de la défense nationale et de mener à bonne fin son œuvre importante, qu’on pourrait nommer la géographie militaire de la Gaule au Ve siècle. H. R. NOTICE SUR LES TRAMWAYS DE LA BELGIQUE Par M. Raillard, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées du département du Nord. Lors de l’établissement des tramways à Lille, M- Raillard, ingénieur en chef des ponts-et-chaussées du département du Nord, chargé, par Padmioistration du contrôle, de la cons¬ truction et de l’exploitation de ces voies, dut s’enquérir de ce qui se passe en Belgique. R a pensé, et il a eu pleinement raison , qu’en publiant tous ces renseignements qu’il avait réunis , il pourrait éviter aux villes concessionnaires de tramways bien des tâtonnements, bien des fausses manœu¬ vres et des déceptions. Il est impossible d’entrer ici dans les détails techniques donnés par le savant ingénieur, nous nous bornerons d’en extraire quelques paragraphes. Après avoir étudié la voie, l’entrevoie, le rail, les voitures en Belgique, M. Raillard donne quelques indications comparatives sur les tramways de Lille. No.us en extrayons quelques paragraphes : « Dans Pavant-projet présenté primitivement par la ville de Lille, on s’était borné à reproduire purement et simplement le rail creux adopté à Liège, avec son système de longrines, traverses et plaques de joints. Mais la compagnie que la ville — 227 — de Lille a substituée à son privilège a voulu innover, du moins en matière de tramways, et, par analogie avec ce qui existe sur les passages à niveau des grandes lignes de fer, elle a formé sa voix de deux rails et de deux contre-rails à patins, avec cette différence toutefois que les premiers portent un champignon complet et les seconds un demi-champignon seulement. Chaque rail et son contre-rail sont reliés entre eux par des boulons horizontaux qui, en meme temps, les fixent dans des feuillures ménagées sur des faces extérieures et supérieures de coussinets en fonte reposant, sans l’intermédiaire de lon- grines, sur des traverses auxquelles ils sont attachés par des tire-fond. Les dimensions transversales des coussinets sont telles que, quand le demi-champignon du contre-rail est tourné vers le champignon correspondant, il reste entre eux une ornière de 0m,030 pour recevoir les roues des boudins des omnibus à voyageurs, tandis que si l’on retourne le contre-rail bout pour bout, de manière à placer son demi-champignon vers le centre de la voie, la largeur de l’ornière se trouve portée à la dimension de 0m, 015, que l’on a jugée nécessaire et suffisante pour les voies mixtes où 1 on a l’intention de faire circuler, tout à la fois, les omnibus à voyageurs des tram¬ ways à boudins de 0m,015 d’épaisseur, et les wagons à mar¬ chandises des grands chemins de fer où les roues sont armées de boudins d’une épaisseur de 0,030.» M. Raillart regrette qu’on n’ait pas donné la préférence au rail unique à dépression dans laquelle pénètre le boudin des wagons. «Le rail unique à dépression a , à ses yeux , l’avantage très-précieux de se prêter à toutes les formes d’ornières les mieux appropriées à la sécurité et à la liberté des voitures ordinaires, et sous ce rapport, le rail de Lille ne saurait lui être comparé. Sans doute, avec l’ornière de 0ra,030 des voies affectées — 228 — exclusivement au service des voyageurs, le système lillois n’a pas grand inconvénient à ce point de vue, les roues de quelques rares voitures de fantaisie à jantes très-étroites pouvant seules y pénétrer. Mais il n’en est pas de même du rail à ornière de 0m,045 des voies mixtes. Si, en effet, on se reporte au dessin joint à la notice, on voit que la disposition adoptée crée une rainure dont la section figure un rectangle à parois verticales de 0m,070 de largeur, rétréci latéralement par le champignon du rail à son orifice supérieur, mais en y conservant une largeur de 0m,045. Cette rigole a une profon¬ deur de 0m,075 jusqu’au patin du rail dans les intervalles compris entre les coussinets et de 0m,040 sur les coussinets eux-mêmes. Il est facile de comprendre, d’après cela, ce qui devra inévitablement arriver quand la roue des nombreuses voi¬ tures ordinaires ayant moins de 0m,045 de largeur de jante, s’engagera dans une telle ornière. Si le cocher, par un mou¬ vement naturel, accélère l’allure de l’attelage en le dirigeant sur le côté, la roue se coincera ou se brisera, et il pourra même arriver que des voyageurs placés dans une voiture ouverte, lancée à toute vitesse et arrêtée ainsi subitement, soient projetés hors du véhicule. Lorsqu’une roue de voiture ordinaire s’emboîte ainsi dans une rainure à parois verti¬ cales, il n’y a pas d’autre moyen de la dégager que d’arrêter le véhicule, de le soulever verticalement et de faire passer la roue au-dessus de la rainure par l’intermédiaire d’une cale. On conçoit toute la gêne qu’un pareil état de choses est de nature à causer à la circulation publique. A ce point de vue, le système lillois ne vaut pas, à beaucoup près, le rail de Liège qui, comme on l’a vu, présente une forme rationnellement calculée de manière à pouvoir rece¬ voir l’épais boudin des roues des wagons des grands chemins de fer, sans gêner aucunement la circulation des voitures ordinaires. — 220 — La compagnie qui exploite les tranmays de Lille avait d’abord établi toutes ses courbes en rail et contre-rail, même celles qui n’avaient que vingt mètres de rayon. Mais l’expérience lui fit voir, au bout de trois mois, qu’il fallait absolument chercher à atténuer les énormes frottements que rencontraient ses voitures dans ces passages. Elle pensa alors à employer le procédé ancien et si connu qui consiste à mettre un rail plat dans les courbes extérieures, et elle fut amenée à appliquer de proche en proche cet expédient à toutes les courbes d’un rayon inférieur à trente mètres. Elle anéantit à peu près ainsi le frottement de glissement. Mais les frottements qui résultent du parallélisme des essieux et de la fixité des roues sur les essieux, ainsi que ceux qui sont produits par la force centrifuge, s’ils se trouvent également détruits sur la courbe extérieure, ne subissent aucune dimi¬ nution sur la courbe intérieure , dont le rail et surtout le contre-rail continuent d’être pressés par les segments des boudins des roues de ce côté qui plongent entre eux. En Belgique, on redoute tellement ces frottements que l’on renforce considérablement l’oreille intérieure du rail pour empêcher les fractures auxquelles ils pourraient donner lieu, et qu’on la surhausse afin d’éviter les déraillements qui pourraient être la conséquence, sous faction de la force centrifuge, du déplacement transversal de la voiture que rien ne retient sur la courbe extérieure. ✓ Le système lillois ne comporte rien de pareil, et, jusqu’à présent, ces modifications du rail n’ont pas paru nécessaires, attendu que les lignes en exploitation n empruntent que des voies très-larges où l’on a pu établir les courbes de raccor¬ dement avec des rayons minima de 25 à 26 mètres. Mais, lorsque le réseau pénétrera dans des rues étroites, où il faudra se résigner à parcourir des courbes de 15 à 16 mètres de rayon, il n’est pas certain que le système actuel puisse être maintenu, au moins dans ces passages. - 230 - En résumé, l’opinion de M. Raillard est que tout système de voie comportant une ornière à parois verticales doit être pros¬ crit dans la construction des tramways, à moins que l’on ne rétrécisse assez cette ornière pour que les roues des voitures ordinaires ne puissent y pénétrer, ou bien que les circons¬ tances locales ne permettent de séparer le tramway de la piste des voitures ordinaires par un obstacle matériel, tel qu’une clôture, une bordure de trottoir, etc. Aussi l’administration supérieure n’a-t-elle admis la com¬ binaison proposée à Lille pour les voies mixtes qu’avec hésitation et seulement à titre d’essai. On ne peut que désirer que ces essais de transport des wagons de marchandises soient prochainement tentés à Lille, puisque le concessionnaire des tramways de Liège ne semble pas disposé à aborder les difficultés qu’il rencontre. Il sera, en effet, fort intéressant de voir si l’expérience confirme, au triple point de vue technique, administratif et économique, dans les conditions spéciales où elle est conçue, cette extension des services que Y on peut demander dans les villes aux voies ferrées à traction de chevaux. » Dans une seconde note, M. Raillard étudie les courbes de raccordement des tramways et leur influence en ce qui touche le tracé de ces voies ferrées, principalement quand on les destine à recevoir les Avagons des chemins de fer à loco¬ motives pour le transport des marchandises. « On sait, dit-il, qu’un wagon de chemin de fer circulant sur une voie courbe éprouve, dans sa marche des résistances passives de trois sortes, produites par les réactions mutuelles qui s’exercent au contact des roues avec les rails qui des supportent et les guident. C’est d’abord un glissement des roues extérieures prove¬ nant de la différence des chemins parcourus par ces roues et par les roues intérieures, pour un même nombre de tours de roues, par suite du calage de chaque paire de roues sur son essieu. — 231 — En second lieu, le parallélisme constant des essieux d’un même wagon fait que les roues, qui sont fixées aux essieux, au lieu de rester tangentes aux rails, prennent la direction de la corde de la courbe, et ne se maintiennent sur les rails que par un nouveau glissement dans le sens du rayon de la courbe de la voie. Enfin la force centrifuge qui naît du mouvement circulaire et qui s’exerce dans le sens du rayon de la courbe, tend à appuyer la face latérale du boudin des roues extérieures contre les rails de ce côté et engendre un troisième frotte¬ ment. Toutes ces résistances croissent au fur et à mesure que le rayon de courbure de la voie diminue. » Pour atténuer la résistance due à la différence des chemins parcourus, la compagnie des tramways de Lille a rendu les deux roues mobiles autour de l’essieu qui parcourt la courbe extérieure. La seconde résistance qui résulte du parallélisme des essieux peut être réduite en donnant un léger élargissement à la voie ; mais il faut éviter que le boudin des roues qui pénètre dans l’ornière ne vienne à rencontrer la face opposée de cette ornière et à y exercer un second frottement. Si, pour vaincre cette résistance, on augmentait la force de la traction, le wagon se calerait dans l’ornière et on ne pourrait le faire avancer qu’en faussant l’ornière ou les boudins des roues, ou même les essieux. M. Raillard calcule quel doit être pour chaque rayon de courbure la largeur correspon¬ dante de l'ornière. Il montre qu’il serait impossible de faire circuler les wagons du Nord sur des tramways en courbe où l’ornière n’aurait que 0ra,045 de largeur et où le rayon de courbure ne dépasserait pas 25 mètres. « La troisième résistance, qui naît du mouvement circulaire sur les voies ferrées et qui provient de la force centrifuge, s’exerce, comme la précédente, dans le sens du rayon de courbure et de dedans en dehors. Elle tend à écarter le — 232 boudin des roues intérieures du rail du même côté, en pressant celui des roues extérieures contre le flanc du rail qui les supporte et en produisant un frottement dont l’inten¬ sité varie en raison directe du poids et du carré de la vitesse du véhicule et en raison inverse du rayon de courbure de la voie. Sur les chemins de fer à traction de locomotives, on pare à cet inconvénient en donnant au rail extérieur un surhaus¬ sement tel, sur l’autre, que la valeur de la composante du poids du véhicule, suivant son inclinaison, se rapproche le plus possible de celle de la composante de la force centrifuge dans la même direction. Ces relèvements sont difficiles à réaliser dans les rues des villes, car les courbes devant forcément se développer sur les bas côtés des chaussées, on se trouverait entraîné à des remaniements de pavage plus ou moins considérables et à la construction de certains ouvrages, afin de rétabür les lieux dans des conditions convenables pour ne pas gêner la circulation des voitures ordinaires et pour assurer l’écoule¬ ment des eaux. Mais on peut vaincre la difficulté, soit en ralentissant la marche et mettant les chevaux à la vitesse du pas de 5 kilo¬ mètres à l’heure qui, avec les rayons indiqués précédem¬ ment, n’exige que des relèvements de 0nl,005 à O\014 dont on peut faire abstraction, soit en remplaçant le rail extérieur par un fer plat sur lequel rouleront les boudins des roues, comme on l’a exécuté à Bruxelles, Anvers, Gand et Lille. Seulement ce dernier expédient, possible pour une com¬ pagnie de tramways qui a ses raisons pour se résigner aux inconvénients qui peuvent en résulter pour son matériel, ne serait peut-être pas accepté aussi facilement par une compa¬ gnie de chemins de fer à locomotives prêtant aux tramways un matériel sujet à fonctionner indistinctement sur ces voies spéciales ainsi que sur les grandes lignes, et exposé, par — 233 — conséquent, non-seulement à une usure considérable, mais aux conséquences redoutables que cette usure pourrait occa¬ sionner dans un train en pleine marche.» » En résumé, je crois, dit M. Raillard, qu’il résulte de toutes ces considérations que les minima exceptionnels à adopter pour les rayons de courbure dans le tracé des tramways, en employant tous les expédients indiqués précé¬ demment pour atténuer les résistances, doivent être évalués à : » 15 mètres pour les lignes destinées au transport des voyageurs ; » 50 mètres pour celles sur lesquelles on aurait l’inten¬ tion de transporter des marchandises au moyen du matériel des chemins de fer à traction de locomotives. » L’auteur ne se borne pas à poser ces conclusions, par de nombreux calculs, il détermine comment elles pourront être réalisées dans les rues et à l’angle de deux chaussées. Au moyen des tableaux insérés dans son mémoire, on pourra sur un plan de ville, apprécier avec facilité et promptitude la possibilité, au point de vue des courbes de raccordement, de l’exécution des tracés projetés. « En somme, ce travail met en relief cette vérité que, pour étudier un projet rationnel de tramways, il ne suffit pas de jeter un lacis de lignes rouges sur un plan de ville, et que l’extension, à ces voies ferrées, d’un service de mar¬ chandises effectué au moyen des wagons des chemins de fer à traction de locomotives, toute séduisante que paraisse, au premier abord, cette idée qui supprimerait les transborde¬ ments, est une chose bien autrement difficile à réaliser quâ concevoir. » Dans ce système, la question des rayons de courbure est une véritable pierre d'achoppement, et il faut bien observer que, si cette question soulève d’aussi sérieuses difficultés quand il ne s’agit que du tracé des lignes principales, on — 234 — rencontrera de bien autres obstacles quand il y aura lieu de détacher de ces lignes des embranchements qui devront pénétrer dans l’intérieur des usines, ou tout au moins amener les wagons à leur porte. Établira- t-on des plaques tournantes au milieu des chaussées pour offrir les embran¬ chements à angle droit aux voitures ordinaires et faire entrer normalement les wagons dans les usines? Ou bien greffera- t-on sur les lignes principales de longs rameaux sillonnant obliquement les chaussées et les trottoirs de larges ornières, qui seraient des plus dangereuses pour la /circulation ? » Il n’échappera pas, en effet, aux personnes qui auront parcouru cette étude, que telle ou telle de ces conditions, combinée avec les circonstances locales, suffira parfois pour faire tomber un projet paraissant, à première vue et aux gens peu versés en ces matières, aussi rationnellement conçu que fécond en applications pratiques, et celte circonstance se présentera plus souvent qu’on ne le pense, car les dispo¬ sitions créées pour un matériel destiné à ne parcourir que des lignes à grands rayons, ne peuvent que très-difficilement, et dans des conditions toutes particulières, s’approprier à une circulation sur des voies, comme les tramways, dont la caractéristique est l’emploi de courbes à très -courts rayons. » Dans ce cas, le service des marchandises ne pourrait se faire qu’au moyen d’un matériel spécial, dans le genre, par exemple, du matériel articulé que 'les Américains font cir¬ culer sur leurs grandes lignes de fer, et alors il y aurait lieu, avant de présenter aucun projet, d’examiner si le mouvement à desservir serait assez important pour motiver cette dépense jointe à celle des frais de transbordement, frais que d’ailleurs on pourrait réduire dans une certaine mesure en employant divers expédients, et, par exemple, en chargeant les mar¬ chandises dans des caisses qu’une grue ferait passer des wagons des grands chemins de fer sur ceux des tramways. Un service comme celui-ci, qui exigerait une manutention — 235 — nocturne, ne sera très-probablement pas appliqué à des marchandises de grande valeur, et se réduira au transport de la houille ou autres matières pondéreuses, qui se prêtent très-convenablement à ce mode de chargement. » Les voies ferrées à traction de chevaux sont destinées à entrer de plus en plus dans les usages des populations. Il ne suffit pas qu’elles servent aux voyageurs ; ce sera un grand progrès lorsqu’on pourra faire circuler les marchandises et que nos rues seront délivrées de ces lourds transports qui sont une cause incessante de bruit, de poussière et d’encom¬ brement Trop souvent les tentatives de ce genre sont arrêtées par des craintes mal fondées ou par l’échec de projets mal combinés. En mettant sa science et son expérience au service d’une telle idée, en posant nettement les conditions dans lesquelles elle peut être appliquée, M. Raillard a donc rendu un service dont on ne saurait trop le remercier. Si nous n’avons pas le privilège d’innover en fait de chemins de fer, imitons au moins ce qui se fait chez nos voisins. Peut-être, sous peu , toutes les routes fréquentées de Belgique seront elles desservies par des tramways? Ne serait-ce pas aussi la meilleure solution pouj beaucoup de lignes de chemin de fer d'intérêt local, qui préoccupent, à si juste titre, nos admi¬ nistrations? CATALOGUE MÉTHODIQUE ET RAISONNÉ DES LÉPIDOPTÈRES des environs de douai, par M. Foucart. Nous avons souhaité la bienvenue, il y a un an, au Cata¬ logue des lépidoptères du département du Nord, de M. Leroi, qui comblait une fâcheuse lacune dans le relevé général de notre entomologie, voici que vient s’y joindre un nouveau travail plus localisé, mais cependant plus complet puisqu’il comprend la nombreuse et importante tribu des microlépi¬ doptères que M. Leroi avait négligée. C’est le Catalogue — 236 — méthodique et raisonné des lépidoptères des environs de Douai , par M. Alfred Foucart. Nous ne pouvons mieux faire, pour présenter cet opuscule aux lecteurs du Bulletin , que de transcrire ici quelques phrases de l’introduction que M. Delplanque, le savant Direc¬ teur du Musée de Douai a placée en tête : Le Catalogue de M. Foucart nous fait voir à quels résultats peuvent conduire des recherches patientes et suivies, même quand elles sont limitées à une localité restreinte et placées dans des conditions peu favorables... M. Foucart a pu recueillir en quatre années seulement de chasses, mais de chasses incessantes, et par l’emploi de tous les procédés connus, 1082 espèces ou varié¬ tés, parmi lesquelles figurent 554 espèces appartenant à la catégorie si intéressante, mais d’une étude si difficile, des microlépidoptères. J’ai sous les yeux, ajoute M. Delplanque, le catalogue de M. Leroi, de Lille, les recherches faites pendant quinze ans par l’auteur de cet important et consciencieux travail lui ont permis d’enregistrer les noms de 543 espèces de papillons dont 32 seulement, les deltoïdes , sont rangées par M. Foucart dans les microlépidoptères. Restent donc 511 espèces tant diurnes que nocturnes, pour tout le département, déduction faite des microlépidoptères, le catalogue de M. Foucart en contient encore 525 pour une partie seulement de l’arron¬ dissement de Douai; ces chiffres parlent d’eux-mêmes et n’ont pas besoin de commentaires. Ainsi, d’après ces observations, un rayon de quelques lieues autour de Douai a fourni un nombre de papillons qui dépasse de 14 le nombre total enregistré jusqu’ici dans tout le dépar¬ tement ; c’est un résultat inespéré dont nous félicitons sin¬ cèrement M. Foucart. La comparaison de ces deux travaux offre quelqu’intérêt au point de vue de la localisation des espèces. Pour les diurnes nous observons un contingent un peu plus fort dans — 237 — le catalogue Leroi; il y a une dizaine d’espèces en plus. Ce sont des papillons des dunes du littoral, ou de la forêt de Mormal. Il est vrai que plusieurs entomologistes de Valen¬ ciennes contestent la capture de quelques-unes de ces der¬ nières. D’après eux, M. Leroi n’aurait pu les prendre dans leur forêt, puisqu' eux-mêmes ne les y ont jamais vues. C’est une querelle à vider entre ces Messieurs, nous n’avons aucun titre pour nous y mêler, cependant qu’il nous soit permis de faire à ce propos une observation. N’est-il pas imprudent dans l’examen critique d’un catalogue local, de nier la prise d’une espèce par cela même qu’elle n’a pas encore été ren¬ contrée, surtout quand il s’agit d’espèces dont le centre de diffusion n’est pas éloigné? N’est-ce pas supprimer d’emblée toutes les trouvailles fortuites et intéressantes? Nous ne savons si réellement M Leroi a pris dans la forêt de Mormal, Papilio podahrius, Lycœna adonis et alsas , Argynnis dia , Satyrus mœra, etc. Mais il est certain que ces espèces se prennent dans les Ardennes, dans les provinces belges de Namur et de Liège, aux environs de Paris et qu’on ne peut dire a priori qu elles n’existent pas dans la vaste forêt de Mormal, parce qu’aucun chasseur de Valenciennes ne les y a encore trouvées. Revenons au Catalogue Foucart; plusieurs espèces de diurnes, qui ne sont pas dans celui de M. Leroi, y sont indiquées : Lycœna bœtica et semiargus , Thecla Walbum el betulœ , Syric/tlus sao, etc. Parmi les nocturnes, signalons : Emydia grammica du bois de Faumont, Bombyx cratœgi et dumeli , Bryophyla ravala , Leucania conigera et straminea , Dasycampa rubiginea , Aplecta occulta, espèce nouvelle pour la Faune française, etc. M. Foucart signale aussi plusieurs aberrations remar¬ quables et des cas d’hermaphrodisme qui prouvent le soin avec lequel il étudie ses chasses et qui augmentent beaucoup l’intérêt de son catalogue, car dans l’énumération des espèces — 238 — d’un pays très-exploré comme le nôtre, on ne peut espérer rencontrer beaucoup de nouveautés et ce n’est guère que dans les variations accidentelles qu’on a la chance de trouver l’inconnu. A. de Norguet. QUELQUES TRAITS DE L’HISTOIRE DU PÉTROLE. Par M. Farez. Son origine et celle de la houille. Sous ce titre, M. Farez, ingénieur civil, a publié dans les mémoires de la société d’Agriculture. de Sciences et Arts de # Douai, une dissertation aussi spirituelle que savante et bien écrite. Il fait ressortir les avantages de l'huile de pétrole, non- seulement pour l’éclairage, mais aussi comme combustible : « Dans les expériences qui ont eu lieu à bord d’un navire de la flotte des États-Unis, la flamme avait un volume tel, qu’elle remplissait dans toute leur étendue les tubes de la chaudière, et chauffait la cheminée au rouge, à plusieurs pieds au-dessus de sa base. Le temps nécessaire pour engendrer la vapeur d’eau à une atmosphère et demie a été pour l’huile de vingt-huit minutes, pour le charbon de soixante minutes. Il n’a fallu que seize secondes pour l’extinction des feux en pleine activité. Un steamer peut tenir la mer sous vapeur, trois fois au¬ tant de temps avec moins de travail et plus de commodité en employant l’huile, au lieu de charbon, ayant à bord un même poids de combustible. Ces avantages sont immenses, et sont appelés sans aucun doute, à faire une révolution complète dans la génération de la vapeur. Les Américains ont placé à la tête de la Commission l’in- — 230 — génieur en chef de leur marine , et tout porte à croire que nous sommes à la veille d'une solution pratique. L’espace épargné par l’usage de l’huile dans un des grands steamers transatlantiques et occupé par du fret aux taux actuels , donnerait un excédant de recettes de soixante dix- sept mille francs pour une seule traversée. » Puis vient l’histoire de la découverte des sources de pétrole, où il y a aussi une de ces légendes qui accompa gnent toutes les grandes découvertes où le succès dépend de la persévérance : « Dans un puits voisin de Victoria, un certain John Schaw avait concentré pendant des mois toutes ses espérances, le puits était profond , et le travail devenait de plus en plus pénible, John Schaw était à bout de ressources et de forces, il était ruiné, raillé par ses voisins, les poches vides, ses vêtements en lambeaux. » Ce qui reste de ses bottes abandonne ses pieds ; il lui en faudrait une paire neuve pour manœuvrer la sonde dans l’eau et la boue , il s’adresse craintif à la boutique la plus proche ; refus du cordonnier, il ne vend pas à crédit. » Demain, c’est le pain qui va manquer au pauvre pion¬ nier... John Schaw, obligé d’abandonner son puits , donne un dernier coup, de sonde... Un son liquide arrive à son oreille, bouillonnant et sifflant à la sortie de sa prison sécu¬ laire ; le courant remplit le tuyau qui déborde , comble le puits, remplit une bûche qui déborde aussi. Tous les efforts pour contenir ce flot montant sont vains , il se jette comme une rivière dans le Black creek. » Le débit était de trois cent soixante livres par minute. A 1 fr. 40 l’hectolitre , c’était sept mille deux cent cinquante- sept francs par jour. Le bruit du puits jaillissant se répandit comme réclair, et le soir, l’heureux millionnaire recevait de tous ses voisins accourus, des avalanches de félicitations. Le cordonnier n’y manqua pas avec ses offres empressées de — 240 — service. John Schaw le repoussa, accompagnant son refus, disent les journaux du temps, d’un mot énergique.... » Il est pénible qu’il faille ajouter qu’une année s’était à peine écoulée (4 avril 1863) que Schaw trouvait la mort dans ce même puits qui avait fait sa fortune. » M. Farez donne ensuite des détails sur la façon de creuser O les puits et sur le procédé dont on fait usage pour modérer le débit très-considérable de l’huile minérale : « Lorsque l’huile a jailli pour la première fois de ce puits, la colonne liquide s’élevait à une hauteur d'une vingtaine de pieds au-dessus de l’orifice; et elle coulait à raison d’au moins cinq mille barils par jour. Pour arrêter le déborde¬ ment du pétrole, on a bouché le trou par lequel il s’effectuait au moyen d’un sac rempli de graines de lin au travers duquel on fit passer un tuyau de moindre diamètre que celui de l’orifice du puits. Comme la graine de lin se gonfle beaucoup au contact de l’huile, elle forme une cloison her¬ métique. On ferma le second tuyau avec un nouveau sac dans lequel on introduisit un deuxième tuyau plus petit que le premier, et, répétant plusieurs fois cette opération, on amena le pétrole dans un tuyau qui n’avait plus qu'un pouce de diamètre ; et l’on put, dès lors, en contrôler Pécoulement au moyen d’un simple robinet. C’est un procédé d’une exé¬ cution facile qui a parfaitement réussi et qui est maintenant employé sur toutes les exploitations. » L’auteur arrive ensuite à l’origine du pétrole. C’est encore une question très-contioversée par les géologues. La pre¬ mière condition pour la résoudre est de bien analyser les circonstances au milieu desquelles se rencontre le combus¬ tible ; c’est ce que M Farez a laissé un peu dans l’ombre. Le pétrole, dans l’Amérique du Nord se trouve dans tous les terrains, tantôt en nappe, comme les nappes d’eau de nos puits artésiens et de nos sources, tantôt dans les cavités et les fissures de la roche, particulièrement le long des failles, — 241 — ce qui a lieu également pour beaucoup de sources ; il est donc bien difficile de ne pas voir une grande analogie de gisement entre le pétrole et l’eau. Telle n’est pas l’opinion de beaucoup de géologues américains, qui considèrent le pétrole comme le produit d’une transformation particulière des végétaux, transformation de la môme nature que celle qui produit les bouilles gras>es. Les géologues français sont, au contraire, disposés à admettre que le pétrole est un pro¬ duit de sources, et que ces sources sont contemporaines des dépôts où on le rencontre ; leur produit liquide aurait été emmagasiné dans les roches en voie de formation et aurait pu s'y conserver sans communication avec l’air extérieur. Il faut, toutefois, reconnaître que cette explication ne résoud pas le problème et ne fait que reculer la difficulté. On peut se demander quelle était l’origine de ces sources de pétrole. Les uns y voient le résultat de la distillation da dépôts houillers plus anciens ; mais on ne peut l’admettre, car il y a du pétrole dans des terrains plus anciens que la houille. Aussi est-il préférable de supposer que le pétrole s’est formé dans le foyer incandescent de la terre, M. Ber¬ thelet ayant démontré que le pétrole peut résulter de la combinaison directe du carbone et de l’hydrogène. C’est l’explication qu’adopte M. Farez; mais il a le tort de vouloir aussi l’appliquer ù la houille. Il aura de la peine à convaincre les géologues que ce précieux combustible n’a pas une origine purement végétale. J. G. SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIE D’ARRAS L'Académie d’Arras a tenu, le 21 Août dernier, sa séance publique annuelle. Le discours d’ouverture par M. le Président Gardin rap¬ pelait le centenaire de la société et s’étendait surtout sur la — 242 - déplorable négligence que l’on apporte aujourd’hui aux choses de la pensée. Toutes les préoccupations sont pour le gain matériel: littérature, sciences, beaux-arts, tout cela n’est apprécié qu’autant que cela rapporte de l’argent, beaucoup d’argent. Ce n’est point avec de telles dispositions que les oeuvres de l’esprit reprendront parmi nous leur rang si élevé d’aulrefois. Au moins les Sociétés tendent-elles à réagir contre ces mau¬ vaises dispositions, et elles poursuivent leur but sans jamais se décourager. M. le chanoine Van Drivai, secrétaire-général, a présenté ensuite son rapport sur les travaux de l’année. Dans ce rapport, plein de mouvement et de verve, M. Van Drivai a rappelé, lui aussi, les belles fêtes du centenaire, il a constaté la présence active de plusieurs membres étrangers aux réunions hebdomadaires; il a analysé les travaux des membres titulaires et fait ressortir la vie laborieuse de la Société, qui prend part à tout ce qui se fait en France, et un peu à l’étranger, pour la culture des lettres, de l’histoire, des arts. M. Lecesne a présenté son rapport sur le concours de poésie. Une médaille d’or a été adjugée à M. H. Galleau. M. Van Drivai a donné ensuite le rapport sur le concours d’histoire. La Commission n’avait à juger qu’un seul mémoire, intitulé : Ville de Saint-Venant. Le rapporteur signale avec finesse les défauts de ce travail et en constate également les qualités. Une médaille d’argent, grand module, a été accordée à l’auteur, M. Eug. Béghin, à Béthune. M. le baron de Sède a lu une poésie intitulée du Berceau à la Tombe , poésie remarquable par la délicatesse du senti¬ ment et la facilité de la diction toujours élégante. (Extrait du Propagateur.) — 243 — SOCIÉTÉ DES SCIENCES DE LILLE La Société des Sciences de Lille a tenu, le 26 décembre 1876, sa séance publique. Le président M. Viollette, professeur à la Faculté des Sciences, a prononcé un discours qui est un savant exposé des principaux résultats que la chimie a réalisé dans l'in¬ dustrie, et des vues nouvelles que les progrès de celle science ont fait naître dans le domaine de la philosophie générale. « La nature, dit-il, dans son vaste laboratoire opère comme les chimistes pour former, à l’aide de substances simples, telles que l’acide carbonique, l’eau, l’ammoniaque, toutes ces substances si diverses que nous trouvons dans le règne végétal; il n’y a de différence que dans les appareils em¬ ployés. La nature opère dans la cellule végétale; le chimiste dans ses cornues et ses creusets, mais de part et d’autre, ce sont les mêmes éléments combinés, ce sont les mêmes forces en jeu, ce sont les mêmes résultats obtenus.» Le savant professeur venait en effet de rappeler lesrésultats obtenus par les travaux récents pour la reproduction des composés organiques. « Les principaux acides végétaux, un grand nombre d’hui¬ les essentielles, des matières colorantes, telles que l’alizarine, la purpurine , les principes gras constituant les huiles végé¬ tales et la graisse des animaux , des produits de désassimi¬ lation de l’économie animale tels que l’urée, l'acide hippuri¬ que ; des principes de la chair musculaire, tels que la sarco- sine; du cerveau, tels que la névrine; un des principes de la bile, la taurine, et d’autres encore, ont été obtenus ; rien n’empêche de supposer que, dans un avenir plus ou moins éloigné , on arrivera à la synthèse du sucre, du ligneux, de l’albumine et de la fibrine.» Peut-être l’enthousiasme du savant exagère-t-il les espé¬ rances légitimes, et le jour est-il bien éloigné, si même il — 244 — arrive, où le chimiste pourra faire de toute pièce de l’albu¬ mine et de la fibrine. Mais qu’importe pour la science le point qu’elle atteindra; elle sait que sa puissance a une limite et qu'elle aurait beau reproduire tous les principes qui constituent le corps de l’homme ou de l’animal, elle ne pourra pas y faire naître les phénomènes phycologiques de pensée, de sentiment et de volonté. «Ces phénomènes, dit M . Viollette, appartiennent à un monde dans lequel les sciences physiques n'ont pas a pénétrer. » Aussi, ses derniers mots sont-ils une hymne au Créateur. M. Terquem, secrétaire général, a lu un rapport sur les travaux de la société pendant l’année 1875. Puis sont venus les rapports sur les prix faits pour les sciences par M. Fla- ment ; pour l’histoire , la littérature et les beaux-arts, par M. Houzé de l’Aulnoy. * Médailles d'Or.— M. Rameau, en souvenir de sa généreuse donation à la ville de Lille — M. Rameau a donné à la ville de Lille une somme de 400,000 fr. pour construire des locaux destinés à des expositions d’horticultures, à des expositions artistiques et à des fêtes musicales. M. Wargny, fondeur en cuivre , pour les progrès qu’il a réalisés dans son industrie. — Fonte d’objets d’art et de pièces de grande dimension, entr’autres l’étambot destiné au croiseur de première classe de la marine fran¬ çaise, le Tourville. Cette énorme pièce, qui pèse vingt mille trois cents kilogrammes, est d’une exécution si difficile, qu’une des premières fonderies de Toulon y a échoué trois fois. C’est à la suite de cet insuccès que l’on a eu l'idée de s’adresser à M Wargny, qui, du premier coup, a réussi à fondre cette énorme masse de bronze. Le jury de l’exposition internationale, vient, pour ce fait, de décerner à M. Wargny, une médaille d’or, et une médaille d’argent pour le modèle en bois qui a servi au moulage. Médailles de Vermeil.— M. Legros, capitaine au 43e de — 245 — ligne. — Expériences sur la mesure du pas dans le but de déter¬ miner la relation existant entre la vitesse de la marche et la longueur du pas. Le travail de M. Legros, dil le rapporteur, peut servir de modèle non-seulement aux expérimentateurs qui voudraient approfondir la question étudiée par lui, mais encore à ceux qui voudraient résumer des séries quelconques de données expérimentales. M. Bureau, graveur à Lille : Œuvres artistiques. Médailles d'argent. — M. Thorain : indicateurs de niveau. M. Jennepin, instituteur à Cousolre : histoire de Cousolre, travail considérable ou l’auteur a consigné un grand nombre de faits puisés dans les archives de Lille et de Mons. Mme Florence Hubert, de Lille, pour deux pièces de poésies: Le Retour des Cuirassiers, une Nuit chez l Ouvrier. Nos lecteurs apprendront avec plaisir que sous le pseudo¬ nyme de Florence Hubert se cache la fennhe d’un ingénieur qui consacre sa science et ses veilles au développement d'une des principales sociétés savantes de Lille. Nous regrettons de ne pouvoir reproduire ces pièces em¬ preintes, comme Fa dit le rapporteur, d’une mâle sagesse et d’un ardent patriotisme. Citons-cn au moins quelques vers. C’était après la bataille de Reiscbofïen. Dans un château de Touraine , une mère se mourait d’inquiétude à la pensée de son fils, soldat dans un des héroïques régiments de cui¬ rassiers. Son jeune fils resté près d’elle était le confident de ses alarmes. Tout d'un coup le cuirassier apparaît. Laissé pour mort sur le champ de bataille, il est parvenu à s’échap¬ per et revient rassurer sa mère. Celle-ci s’éloigne un mo¬ ment, le jeune frère en profite pour dire à son aîné : J’ai compris, crois-le bien, que lu quilles l’armée, Non pas pour rassurer une mère alarmée, Non, — lu viens me chercher; — je ferai mon devoir. LE CUIRASSIER 11 faut que pour le camp nous parlions dès ce soir. 246 — Quand la mère rentre, rayonnante de joie, elle apprend qu’elle va les perdre tous les deux; elle se livre d’abord au désespoir, mais bientôt, calme, résignée, elle les bénit et s’écrie : Mon Dieu, pardonnez moi, car ma raison se perd 1 Vous seul, pouvez savoir tout ce que j’ai souffert; Que votre volonté, néanmoins, s’accomplisse; Et si vous exigez ce cruel sacrifice, Rendez-moi courageuse en face du devoir. Je sens que je les perds pour ne plus les revoir; Mais à me résigner, vainement je m’efforce; Hélas, je ne le puis, je n’en ai point la force ! Ma main n’est plus, d’ailleurs, digne de les bénir, Quand, devant votre arrêt, je ne sais que gémir, Me révolter.... Mon Dieu, faites qu’il me souvienne Que je suis, avant tout, une mère chrétienne ! Mon âme, désormais, soumise à votre loi, Cherchera le courage et l’appui dans la foi ; Protégez mes enfants, épargnez leur jeunesse; Puissent-ils être encore rendus à ma tendresse! Qu’ils reviennent un jour dans ces lieux abrités ! El maintenant, adieu, partez, mes fils, partez. J. G. CHRONIQUE. Antiquités romaines à Assche (Belgique). — M. L. Galeslool vient de communiquer à l’Académie de Bel¬ gique le résultat de nouvelles explorations faites à Assche, par M. Prosper Crick (1), et qui tendent à établir de plus en plus l’importance de cette localité pendant la domination romaine. Une quantité incroyable de tessons de vases de la nature la plus variée, parmi lesquels onze portant des noms de potiers et deux des graphites , cinq lampes en terre cuite, un petit Mercure enr bronze, des styles, des fibules, des bracelets en bronze, des aiguilles en os, diverses monnaies, voilà en partie le butin de cette année. (1) Voir Bulletin scientifique , p. 163. 1815. — m Mais, outre ce butin ordinaire des fouilles, M Crick a eu la bonne fortune de mettre la main sur un dépôt intéressant dont les explorations archéologiques ne fournissent que de plus rares exemples. Déjà, lors des recherches précédentes , il avait recueilli des débris de diverses figurines en terre, dite vulgairement terre de pipe; cette année, il a exhumé coup sur coup , du môme champ et dans un étroit espace , au-delà de vingt statuettes de chevaux, la plus haute mesurant 14 centimètres d