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SOCIETE
GÉOLOGIQUE
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géol. , 2e série , tome Vïîf.
PARIS. — IMPRIMERIE DE L. MARTINET,
IMPRIMEUR DB LA SOCIÉTÉ GROT.OCIQUR DE FRANCE, RUB MIGNON, 2,
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DE LA
SOCIÉTÉ
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DE FRANCE.
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1850 a 1851.
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AU LIEU DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ,
RUK DU VIEUX-COLOMBIER ,
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DE FRANGE.
Séance du h novembre 1850.
PRÉSIDENCE DE M. EUE DE BEAUMONT,
Par suite des présentations faites dans la réunion extraordi-
naire au Mans , le Président proclame membres de la Société :
MM.
Victor Rqswàg, place du Lycée Louis-le-Grand, 2, à Paris,
présenté par MM. Charles d’Orbigny et de Loriére.
Don Eusebio Sanchez, directeur des mines, à Àlmadenejos,
Sierra -Morena (Espagne), présenté par MM. Michelin et de
Verneuil.
Le Président annonce ensuite six présentations,
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le ministre de l’instruction publique, Rap-
port fait à V /Icadérnie des inscriptions et belles-lettres , au
nom de la conmdssion des antiquités de la France , par
M. Lenormant, le 16 août 18/10; in-/i, 35 p. Paris, chez
Firmin Didot.
De la part de M. le ministre de la justice , Journal des sa-
vants, juin à septembre 1850 ; in-/i.
De la part de M. Damour, Relation de la dernière éruption
du Vésuve , arrivée en février 1850, suivie d’un exposé des
phénomènes quotidiens observés sur ce volcan depuis 18Æ0
jusqu’à ce jour par M. Arcangelo Scacchi (extr. des Compt.
rend, de l’Acad . roy . des sc . de Naples ,* traduit de l’ilalien
par M. Damour) -, in- 8 , 58 p», 1 pL
6
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850.
De la part de M. J. Delanoüe , G èo génie des minerais cala -
minaires de zinc , plomb et fer en gîtes irréguliers (extr. des
Compt. rend, des séanc. de V Acad, des sc., t. XXX, 17 juin
1850) -, in-4, l\ p. Paris, 1850, chez Bachelier.
De la part de M. Delesse : 1° Sur le porphyre amygdaloïde
cVOberstein (extr. des Ann . des min., he sér., t. XYI) -, in-8,
20 p. Paris, chez Thunot et Compe.
2° Sur la uariolite de la Durance (extr. des Ann. des
min., he sér., t. XVII) \ in-8, 15 p., 1 pi. Paris, 1850, chez
Thunot et Compe.
De la part de M. Elie de Beaumont : 1° Divers Mémoires de
géologie ; in-8, 676 p., 8 pl.
2° Note sur la corrélation des directions des différents sys-
tèmes de montagnes (extr. des Compt . rend, des séanc. de
T Acad, des sc., t. XXXI)*, in-h , lh p. Paris, 1850, chez
Bachelier.
De la part de M. de la Roquette, Notice nécrologique sur
M. Hommaire de Hell (extr. du Bull, de la Soc. de géogr.,
juillet 1850)* in-8, 32 p. Paris, 1850, chez Martinet.
De la part de M. Constant Prévost, Remarques à V occasion
d'un Mémoire de M. Elie de Beaumont sur la corrélation des
différents systèmes de montagnes (extr. des Compt. rend, des
séanc. de V Acad, des sc., t. XXXI, sept. 1850) • in-Zi, 28 p.
Chez Bachelier.
De la part de M. Raulin, Minas de Almaden , etc. (Mines
de Almaden : de la constitution géologique de leurs dépôts) ,
par don Casiano de Prado-, in-8, 76 p. Madrid, 18Zi6, chez
Eusebio Aguado.
De la part de M. Thurmann, Lettres écrites du Jura cl la
Société cV histoire naturelle de Berne ; in-8, 16 p. Berne, 1850,
chez Haller.
De la part de M. Ch. Gomart , Note sur des os fossiles trou-
vés dans Valluvion ancienne , près de Saint-Quentin (. Aisne) ;
in-8, h p.
Delà part de M. Guiet, Essai de géologie rationnelle ; in-8,
h p , 2 pl. Montfort (Sarthe), 1850.
SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1850.
7
De la part de M. le docteur A. Mougeot, Notice sur le Cau-
lopteris Lesangeana (G. Lesaing) , fougère fossile, arec des
observations sur le même végétal (extr. des Ann. de la Soc.
d'émulation des Vosges, t. YII , 1849)} in-8 , 16 p., 2 pl.
Épinal, chez yeuye Gley.
De la part de M. Alexis Perrey : 1° Mémoire sur les tremble-
ments de terre ressentis dans la péninsule turco hellénique et
en Syrie (extr. du t. XXIII des Mém . cour, et Méni. des sav.
ètrang. de U Acad, roy . deBelgf ; in-4, 73 p. Bruxelles, 1848.
2° Note sur les tremblements de terre ressentis en 1849,
suivie d'un supplément pour 1847 et 1848 (extr. du t. XVII,
n° 3, des Bull, de VAcad. roy. de Belg in-8, 22 p.
Bruxelles, 1849.
3° Sur F observation des tremblements de terre, par M. R. Mal-
let (traduit par M. A. Perrey) (extr. de Y Annuaire météorol.
de la France, 1850)* in-4, p. 275 à 300. Versailles, 1850,
chez Beau jeune.
Statistique géologique et industrielle du département de la
Haute- Vienne , par M. Manès -, autographie, in-4, 61 p.,
1 carte. Châlon-sur-Saône , 1844, chez Landa.
De la part de M. le professeur Ansted : 1° Geology , etc. (La
géologie considérée comme une branche de l’éducation) -, in-8,
32 p. Londres, 1845, chez John van Yoorst.
2° Introductoiy , etc. (Discours d’introduction adressé aux
élèves du « King’s College » de Londres , classe des sciences
appliquées, le mardi 5 octobre 1847) (extr. du Civil en gineer
and architectes Journ.) • in-8, 12 p.
3° Syllabus, etc. (Abrégé de leçons sur la minéralogie, la
géologie et la géologie pratique, avec Appendice sur les ter-
rains carbonifères de l’Inde) *, in-8, 40 p. Londres, 1848, chez
Richard et John Taylor.
4° The gold-seeker's, etc. (Manuel du chercheur d’or)}
in-18, 172 p. Londres, 1849, chez John van Voorst.
5° An elementary, etc. (Cours élémentaire de géologie, mi-
néralogie et géographie physique)*, in-8, 584 p. Londres, 1850,
chez John van Voorst.
De la part de M. L. Bellardi, Monografia, etc. (Monographie
des Mitres fossiles du Piémont) (extr. des Mém. de T Acad. roy.
SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1850.
8
des sc. de Turin , sér. II, t. XI)*, in -4, 34 p., 2 pl. Turin,
1850, imprimerie royale.
De la part de M. Henwood, The metalli ferons deposits of
Cornwall and De von , etc.*, in-8, 512 p., 129 tableaux, 12 pl.
Penzance, 1848, chez Pope Vibert.
Delà part de M. Keilhau, Gaea Norvégien (Géologie de la
Norvège); 3e livrais., in-f°, p. 241 à 516, avec une carte géol.
delà Norvège en 2 feuilles. Christiania, 1850, chez Johann
Dahl.
De la part de M. Prestwich, On the geological, etc. (Des
conditions géologiques qui dé erminent la valeur relative des
strates aquifères des séries tertiaires et crétacées.
De la part de M. Àrcangelo Scacchi , Memorie geologiche
suila Campania ,* in-4, 131 p., 4 pî. Naples, 1849.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1850, 1er sem., t. XXX, n°« 24 et 25, et table-, 2e sein.,
t. XXXI, l à 18; in-4.
Annales des mines , 4e série, t. XY et XVI, 3e à 6e livrais,
de 1849 ; t . XVII , lre à 3e livrais, de 1850.
Bulletin de la Société de géographie , 3e série, t. XIII, n0<5 77
80, mai et août 1850.
L’Institut , 1850, nos 859 à 878.
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, 3e année, nos 21
à 24, mai et août 1850.
Annales scientifiques , littéraires et industrielles de l'Au-
vergne, t. XXIII , mars et avril 1850.
Aperçu des travaux de la Société des sciences naturelles de
la Charente-Inférieure , par le secrétaire, M. Sauvé-, in -8,
44 p. La Rochelle, 1850, chez Mareschaî.
Institut des provinces de France ,* Conseil général acadé-
mique à Orléans , avril 1846.
Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse , t. XXII,
nos 109 et 110.
Séances et travaux de I Académie de Reims , année 1849-
1850, nos 13 à 23.
Un Mémoire de la Société libre du commerce et de V industrie
de Rouen , du 7 mai 1850*, in-4, 8 p. Chez Pérori.
SÉANCE EU 4 NOVEMBRE 1850. 9
Société académique de Saint- Quentin, 2e séiv, t. VII,
1849.
Les Alpes , journal des, sciences naturelles, etc. Genève,
1850, nos 1 et 2, 4 et 8.
Philosophical Transactions qf the royal Society of London,
1850, part. 1.
Proceedings of the royal Society of London , 1849, nos 73 à
j 5 .
The quarlerly journal of the geological Society of London,
nos 22 et 23.
Report, etc. (Relation de la dix -neuvième réunion de l’Asso-
ciation britannique pour l’avancement des sciences, tenue à
Birmingham en septembre 1849). Londres, 1850.
Transactions of the royal Society of Edinhurgh , vol. XVI,
part, iv -, vol. XVIII \ vol. XIX, part, n -, vol. XX, part. i.
Proceedings of the royal Society of Edinhurgh, vol. II ,
nos 31 et 32, 1846-48 ; n° 35, 1849-50-, et nos 36 à 39,
1850.
The Athenœum , 1850, nos 1182 à 1201.
Proceedings of the Academy of natural sciences of Phila-
delphia , vol. V, n° 2.
JSeues Jahrbuch , etc. (Nouvel Annuaire de minéralogie, de
géognosie et de géologie, de MM. de Leonhard etBronn),
année 1850, cahiers 2 à 4. Stuttgardt.
Abhandlungen , etc. (Mémoires de l’Académie royale des
sciences de Berlin), année 1848.
Nonatsbericht , etc. (Bulletins mensuels de l’Académie
royale des sciences de Berlin), juillet 1849 à juin 1850.
Abhandlungen , etc. (Mémoires de la Société des sciences
naturelles de Gorlitz), vol. V, 2e cah., 1850.
Sitzungsbericht e , etc. (Bulletins des séances de l’Académie
impériale des sciences de Vienne : Classe des mathématiques
et sciences naturelles), année 1850, janv. et févr., 1er et
2e cah.
Württemb. natuiw. Jahreshefte (Brochures annuelles de la
Société d’histoire naturelle de Wurtemberg), 4e année, 1848,
10 SÉANCE DU h NOVEMBRE 1850.
3e cah.-, 5e année, 18/|9, 2e et 3e cah.-, 6e année, 1850, 1er
et 2e cah.
Memorie délia reale Accademia delle scienze di Torino ,
série 2, t. X, 18/i9.
Revista minera , 1850, nos 2 à 7.
M. Éiie de Beaumont fait hommage à la Société d’un volume
provenant de la bibliothèque de M. de Bîainville, et contenant
la seconde note qu’il a publiée sur la corrélation des divers sys-
tèmes de montagnes, laquelle n’existe pas dans la bibliothèque
de la Société.
Le trésorier présente l’état de la caisse du 1er janvier au
31 octobre dernier :
Il y avait en caisse au 31 décembre 1849. . 667 fr. 05 c.
La recette, depuis le Ier janvier 1 850 jusqu’au
31 octobre , s’élève à 16,886 »»
Total. . . 17,553 05
La dépense, depuis le 1er janvier jusqu’au
31 octobre, s’élève à 12,894 20
11 restait en caisse au 31 octobre dernier. . . 4,658 fr. 85 c.
M. Deshayes présente la note suivante, par M. Terquem, de
Metz :
Observations sur quelques espèces de Lingules ,
par M. Terquem.
L 'Index palœontologicus de M. Broun et le Prodrome de
M. d’Orbigny présentant un inventaire à peu près exact des fossiles
connus et déterminés , il est en quelque sorte permis de considé-
rer comme nouveaux ceux qui n’y sont pas indiqués.
Pour le genre Lingule , nous en voyons bon nombre mention-
nées dans les formations paléozoïques ; quelques unes apparaissent
dans le terrain keuprique ; aucune n’est indiquée pour le lias, une
seule l’est pour l’oolite inférieure ; enfin cinq sont décrites dans la
craie et les terrains tertiaires.
Nous croyons remplir une lacune en publiant trois Lingules
pi. I) qui appartiennent à la formation basique , et en rectifiant
SÉANCE DU II NOVEMBRE 1850.
11
une détermination qui ne nous a pas semblé devoir être conservée.
M. Voltz a trouvé dans le lias de Griesbach une Lingule qui
lui parut identique avec celle que Phillips a représentée dans son
ouvrage sur le Yoiksbire , et désignée sous le nom de Lingula
Beanii. Il fut d’autant plus porté à admettre cette détermination ,
que la figure donnée par Phillips manque de netteté, et que
l’auteur ne l’a accompagnée d’aucune description ; l’erreur princi-
pale repose sur ce que Yoltz n’a pas tenu compte de l’indication
de Phillips, qui place cette Lingule dans l’oolite inférieure et
non dans le lias.
Le département de la Moselle possède deux localités où se
trouve la Lingule de l’oolite, différente de celle du lias de
Griesbach; nous la publions, afin de rendre sensibles les carac-
tères qui les distinguent toutes deux.
Lingula Beanii. PI. I, fig. 7, «, ô, c.
— Phillips. Géologie du Yorkshirc , pl. Xï, f. 24.
Alt. : 21 mètres; lat. : 10 mètres; diam. : 8 mètres.
L. testa ovato-ohlongd , subinjlatd , coneentrlcè sfriatâ, latere pal-
leali rotundato, latere cardinali ohtuso\ umbonihus non proentinen -
tibus.
Coquille ovale-oblongue , un peu renflée, marquée sur toute sa
surface de nombreux plis d’accroissement; région palléale arron-
die ; région cardinale obtuse ; les crochets peu saillants.
J’ai trouvé cette coquille couchée à plat dans des lits très minces
de calcaire sub-compacte , au bas de la rampe , devant Maimbo-
tel (route de Briey à Longuyon) ; je Pai trouvée plus abondante
dans de gros blocs de calcaire gréseux provenant du F aller1 s-
earth des environs de Longwy. Ce fossile est disséminé dans la
roche , sans aucun ordre , en valves réunies ou étalées ; presque
toujours le test a disparu , et il ne reste qu’une impression brune
très nette.
Lingula Voltzii , Terquem. Pl. I, fig. 8, <7, b , c.
Alt. : 20 mètres; lat. : 13 mètres.
L. lesta subovatd , depressd , in mcdio lœvigatâ , s< a coneentrlcè
terierrimèque striata , lateribus subcostatis , latere pallcali truncato
subrotundatOy latere cardinali acuminato , umbonihus subacutis .
Coquille ovale , déprimée, lisse près du bord cardinal , le milieu
orné de fines stries concentriques , les côtés finement costeliés le
12
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850.
bord palléal tronqué et arrondi sur les côtés , les crochets presque
acuminés dépassant le bord cardinal.
Cette espèce se rencontre à Griesbach (basse Alsace), dans un
calcaire gréseux qui fait partie du calcaire brun (calcaire à pinni-
gène), considéré maintenant comme constituant la dernière assise
basique ; il est recouvert par le calcaire ferrugineux, et repose sous
l’oolite ferrugineuse.
Lingula Longo-vicicnsis , Terq.
Alt. : 7 mètres ; lat. : 4 mètres.
L. testa elongato - ovatâ , sabdepressâ , concentricè tenerrimèque
striata , ferè pcllucidâ , umbonibus proeminentibus.
Coquille ovale-oblongue , légèrement déprimée, marquée de
rides d’accroissement sur toute sa surface; test mince , presque
transparent, brillant, brun dans le milieu, et blanc dans tout son
pourtour, ou parfois complètement blanc; crochets peu saillants.
Cette espèce se trouve en très grande quantité, par valves isolées,
dans des blocs calcaires de la partie moyenne du lias; elle accom-
pagne les Mon o tis subs tria ta , Ammonites commuais , bif rôtis , Requin-
nus. Très rarement sa grandeur varie ; cependant quelques échan-
tillons atteignent une hauteur de 10 millimètres sur une largeur
de 5 millimètres.
Gorcys , Rodange , près de Longwy.
J’ai trouvé quelques rares échantillons près du village de Vaux,
où l’on avait pratiqué des fouilles pour chercher la couche de fer
oolitique, et encore à Chanderbourg ; il est probable qu’on la ren-
contrera dans toutes les localités où se présente Y Ammonites com-
muais (Holandrei, d Orb ).
Lingula metensis , Terq. PI. 1, fig. 9, a, b , c, d.
Alt. : 10 mètres ; diam. : 5 mètres.
L. testa elongato-ovatâ , depressâ , medio lœvigatâ , lateribus t e ner-
vi mè stria tis - latere palleali rot un data , la tare cardinaii subaculo ,
angustato.
Coquille ovale-oblongue, fortement déprimée vers la région
palléale , la plus forte épaisseur se trouvant non loin des crochets;
test très mince, lisse, brillant, d’un brun noir; stries d’accroisse-
ment du milieu à peine visibles à la loupe , les côtés en possédant
deux ou trois plus distinctes; bord palléal arrondi , spatuliforme ;
région cardinale rétrécie , subacuminée. Une des valves porte deux
Fij
1-6
7
8
9
10-11
Sphœmlites calceoloides,
Liuêula Beanii ,
Voltzu,
_ metensis,
Ceromya striato • punclata.
Des Moulins.
Phillips.
Terquem..
Terquem.
Buvignier
lmp. Kaeppelin.17. Quai Voltaire, P.'"
Humîert Lith
SÉANCE DU /| NOVEMBRE 4 850.
13
cotes parallèles peu sensibles, parlant des crochets , et atteignant
le bord palléal , où elles divergent un peu ; les noyaux montrent
que ces côtes sont bifurquées ou munies d’un sillon médian.
Cette espèce se trouve dans le calcaire à gryphée arquée , dont
elle caractérise les derniers lits; elle y est disséminée, les deux
valves réunies, dans une position perpendiculaire à la direction
des couches.
Dans la carrière qui domine le village de Vallière , près de
Metz.
IM. Martins fait la communication suivante :
Note sur les roches 'volcaniques du bassin de Commentry (Al-
lier') , et la transformation de la houille en anthracite qui
s’observe au contact de l’une d’elles , par M. Ch. Martins.
Le plateau granitique du centre de la France a été le théâtre
de nombreuses éruptions volcaniques, qui se sont succédé en
faisant surgir du sein de la terre des roches différentes , à la fois
par l’aspect géologique qu’elles ont pris en se consolidant , et par
leur composition physique ou chimique. Les monts Dômes, le Cantal,
ie Puy, forment trois centres d’éruption, entourés chacun d îlots
volcaniques qui vont en diminuant de nombre et de grandeur à
mesure qu’on s’éloigne des groupes principaux : ce sont les der-
niers efforts de la force éruptive dont F énergie s’affaiblissait gra-
duellement à partir du point où elle a manifesté sa plus grande
puissance. Nulle part cette disposition n’est aussi remarquable
qu’aux environs du Puy-de-Dôme. Si Ton poursuit ces îlots vers
Ile nord, sur la grande carte géologique de MM. Dufiénoy et
Elie de Beaumont, les derniers se trouvent aux environs de
Manzat et de Loubeyrat (Puy-de-Dôme). Depuis, mon ami, M. Le-
coq, professeur d’histoire naturelle à Clermont, a découvert une
protubérance basaltique près de Menât, entre Riom et Néris.
Le but de cette note est de montrer que l’action ignée ne s’est
point arrêtée là et de signaler quelques roches volcaniques mo -
dernes qui ont fait éruption encore plus loin vers le nord, préci-
j sèment sur le bord du plateau granitique , là où il descend dans
les plaines du Cher. Parmi ces roches, les unes ont percé les grès
I et les couches de houille du petit bassin de Commentry ; les autres
ont fait éruption sur ses bords. Leur nature minéralogique et leur
| |âge n’étant pas les mêmes, nous les décrirons séparément.
SÉANCE DU fi NOVEMBRE 1850.
4 h
Basalte scoriacé cellulaire de Cerclier.
A un kilomètre au N.-E. du bourg de Néris , si renommé par
ses eaux minérales , et à 360 mètres environ au-dessus de la mer,
le petit château de Cerclier s’élève au sommet d’une éminence
dont la forme n’a rien de caractéristique. Mais si l’on examine la
roche que les tranchées des chemins vicinaux ont mise à décou-
vert , et celle qui fait saillie autour du château , on reconnaît
qu’elle est bien différente du granité porphyroïde qui l’entoure.
C’est un basalte d’un brun rougeâtre, plein de vacuoles de forme
elliptique et de grandeur fort variable , allongées généralement
dans le même sens. La roche est un peu décomposée , et passe à la
wacke. Il est difficile de fixer rigoureusement les limites de cette
butte basaltique. Le château en recouvre la partie saillante , et de
grasses prairies cachent tout le reste. Cependant elle est de peu
d’étendue; car à peine a-t-on quitté le granité porphyroïde, à une
centaine de mètres du château, qu’on le retrouve en descendant
vers le bassin houiller , dont les grès apparaissent au delà du ruis-
seau qui coule à 500 mètres de Cerclier.
M. Boulanger, dans sa Statistique géologique du département de
r Allier , a décrit, page 93, la roche de Cerclier, qu’il désigne sous
le nom de basalte uniforme de Cerclier. Sur la carte des bassins
liouillers de Commentry et de Boyet, qui accompagne son ou-
vrage, il donne à cet îlot basaltique la forme d’une ellipse dont
le grand axe serait dirigé du S.-E. au N. -O.
Basalte et spilites de Sainte- Agathe.
Quand on monte sur la grande route de Montluçon à Néris ,
on remarque sur la gauche, après avoir dépassé la tuilerie de
Sainte-Agathe , un étroit vallon ouvert dans le granité , et dans
lequel coule un petit ruisseau. A peine y a-t-on pénétré, qu’on
aperçoit sur le contre-fort qui regarde le S. -O. une surface ellip-
tique faisant saillie au-dessus du plan général de la pente ; cette
surface , qui se compose d’un grès argileux rougeâtre fort tendre ,
mêlé de fragments de roches, traverse le ruisseau, et se prolonge
jusqu’à la grande route, où elle semble se terminer. Des cailloux
roulés de granité occupent le fond de la vallée; mais sur la pente
de la colline on ne trouve plus que de gros fragments anguleux
d’une roche volcanique qui se présente sous deux aspects : tantôt
c’est un basalte ( Basanite , Cordier) celluleux analogue à celui de
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850.
15
Cerclier, quoique sa cassure soit d’un gris jaunâtre au lieu d’un
rouge brun ; tantôt une wacke contenant des amandes calcaires (1)
ayant quelquefois plus de 3 centimètres de longueur, et rem-
plissant la plupart des vacuoles de la roche. Cette roche appartient
donc au genre spilite de 1VI. Brongniart. Quand on fait le tour
du bourrelet elliptique placé sur la pente de la colline , on peut
recueillir une foule de ces fragments. La colline elle-même se
compose de granité porphyroïde.
M. Boulanger a vu cette localité, et la décrit en quelques
lignes (2). Il croit que les grès rougeâtres appartiennent à la pé-
riode du trias et se rattachent aux grès du même âge qu’on
observe dans le reste du département de l’Ailier. Il considère les
basanites et les spilites de Sainte-Agathe comme provenant de la
roche de Cerclier, et comme déposés par les eaux courantes au-des-
sous de la colline qui supporte le château de Pérassier. Il pense, dès
lors, que la roche basaltique de Cerclier avait fait éruption avant le
dépôt des grès triasiques , et que ses débris y ont été amenés pos-
térieurement. Malgré l’autorité de l’habile ingénieur, auteur de la
Statistique géologique de l’Ailier , je ne saurais me ranger à cette
opinion. Yoici mes raisons : 1° les fragments basaltiques de Sainte-
Agathe ne m’ont point paru arrondis et roulés comme les cailloux
granitiques qui sont au fond du vallon; 2° je n’ai point observé
de fragments basaltiques entre Cerclier et Sainte-Agathe , ni sur
les hauteurs, ni dans le fond de la vallée; 3° je n’ai point vu de
spilites à Cerclier, tandis qu’elles sont fort communes à Sainte -
Agathe. Je serais donc plutôt tenté de considérer cet amas de spi-
lites comme résultant de la dégradation d’un boursouflement ba-
saltique , que d’y voir un dépôt aqueux de fragments arrachés au
petit mamelon de Cerclier. L’isolement du dyke de Sainte-Agathe,
la régularité de sa forme elliptique sur la pente de la colline , me
confirment dans cette opinion. Les deux îlots basaltiques de Cer-
clier et de Sainte-Agathe se rattachent aux grandes coulées de
l’Auvergne par celui que M. Lecoq a découvert près de Menât.
Pépérino du ruisseau de la Banne.
Sur le bord oriental du bassin houiller, à l’E.-S.-E. de l’usine
(1 ) Ces amygdaloïdes sont du vrai calcaire faisant effervescence vive
et immédiate avec l'acide chlorhydrique, et montrant dans la cassure
un clivage nettement rhomboédrique. Ce dernier caractère les distin-
gue suffisamment de l’aragonite. — Note de M. Hugard.
(2) Statistique géologique du département de V Allier, p. 93 et \ 76.
16
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850.
de Commentry, au-dessous du château de Saint-Front, on trouve
sur la rive gauche du ruisseau de la Banne une roche faisant sail-
lie au milieu des arbres et de l'herbe qui couvrent la berge. C’est
un pépérino verdâtre très dur, formé d’une pâte de tufa , et em-
pâtant des fragments de wacke et des paillettes de mica. Certains
fragments contiennent de grandes vacuoles : en se décomposant, cette
roche devient plus tendre et prend un aspect d un brun jaunâtre.
MM. Ebelmen, Belesse,Ch. d’Orbignyet Hugard, qui ont bien
voulu l’examiner, ont été unanimes pour lui assigner une origine
volcanique. M. Boulanger, qui l’a marquée sur son excellente carte
du bassin de Commentry, la désigne sous le nom de dioritine (1) ;
mais ce nom ne saurait lui être conservé, puisqu’elle ne contient
pas d’amphibole.
Roche volcanique décomposée de Saint-Front.
Si des bords du ruisseau on se dirige vers la grande tranchée de
Commentry, en suivant le mur du parc de Saint-Front , on trouve
dans la coupe formée par une rigole d’écoulement, sous une couche
mince de sables quartzeux qui recouvrent la surface du sol , une
roche décomposée qui se rattache probablement à la précédente ,
dont elle est éloignée de ^00 mètres au plus. Cette roche forme un
dôme aplati dont la coupe est visible sur une épaisseur moyenne de
2 mètres. Sur un espace de 50 mètres environ, elle se présente
sous trois états difïérents : 1° roche se divisant naturellement en
parallélipipèdes irréguliers, dure, compacte, à grain uniforme,
cassure eonchoide, grisâtre, présentant tous les caractères d’un
tuf volcanique endurci ; 2° la même, moins compacte, mais remplie
de petites vacuoles, et même de grandes cellules allongées, remplies
d’une matière brune, onctueuse et tendre; 3° enfin elle se mon-
tre sous la forme de boules tout à fait analogues aux boules ba-
saltiques composées d’un noyau encore solide, de la grosseur d’un
œuf de poule, entouré de couches minces, fragiles, d’une consi-
stance et d’un aspect terreux (2). M. Boulanger a parfaitement
décrit cette altération ; il la signale encore, à 900 mètres au S.-E.
(1) Statistique géologique cle l Allier, p. 87.
(2) Ces sphéroïdes présentent tous les phénomènes de la décompo-
sition en boule du trapp et du basalte. Il n’y a aucune différence entre
les boules concentriques de Commentry et celles que j’ai vues sur les
basaltes près de Clermont , ou en Vivarais, et, cette année , avec mon
ami M. Ch. Maclaren, dans les escarpements de trapp du château de
Sterling, en Écosse.
SÉANCE DU !\ NOVEMBRE 1850,
17
delà grande tranchée, près du hameau de Champfromenteau ,
point où la roche se montre de nouveau sous cette forme inter-
calée entre des couches de schistes liouillers (1). Elle existe aussi
sur plusieurs points du bassin liouiller de Doyet, voisin de celui
de Commentry.
Si j’ai réussi à donner au lecteur une idée de la position relative
des points où la roche volcanique apparaît à la surface du sol
auprès de Commentry, il aura compris que ces trois points occu-
pent les angles d’un triangle situé au S.-E. de la grande tranchée
où l’on exploite la houille à ciel ouvert. Les deux plus éloignés,
Saint-Front et Champfromenteau, sont à 1600 mètres l’un de
l’autre. La roche décomposée de la rigole d’écoulement ou de
Saint-Front occupe un point intermédiaire distant de 400 mètres
des roches des bords de la Banne , et de 1100 mètres environ de
Champfromenteau. M. Boulanger avait déjà signalé depuis plu-
sieurs années ces trois affleurements de la roche , lorsque les tra-
vaux souterrains de la houillère de Commentry firent découvrir
dans les profondeurs du sol une roche nouvelle un peu décom-
posée, dont nous allons donner la description.
Roche volcanique ( Demi te altéré') de la houillère de Commentry
(, galerie de Saint-Edmond).
En poussant la galerie de Saint-Edmond dans Test de la grande
tranchée, les mineurs trouvèrent, en 1849, une roche au contact de
laquelle la houille était, disaient-ils, transformée en coke. M. Fau-
gières, garde-mine de l’arrondissement de Montluçon, voulut bien
m’instruire à IN élis de cette circonstance. Je m’empressai de sollici-
ter l’agrément de l’ingénieur en chef de la houillère de Commen-
try, M. Mouny. Je l’obtins aisément et descendis dans la mine le
5 juillet 1849. A 700 mètres environ de la grande tranchée, et à
60 mètres au-dessous de la surface du sol, je vis que le toit de la
galerie nouvellement, ouverte butait contre une roche. Les schistes
houille rs étaient relevés contre elle de 30 à 55 degrés et plongeaient
vers le sud. La roche était blanche, avec des taches de rouille, pé-
nétrée d’eau, et se laissait pétrir avec les doigts et couper au couteau
avec la plus grande facilité: on eut dit une masse de plâtre ou
d’argile humide. Séchée au soleil , elle devint d’un gris bleuâtre,
assez dure, d’une texture grenue, semée de petites taches, et ressem-
blant à un trass semi-compacte. Au contact de cette roche, sur une
(1) Ibid., p. 88.
Soc. yéoL , 2e série, tome Y1II.
48
SÉANCE DU II NOVEMBRE 1850.
longueur de 8 mètres environ, la houille était métamorphosée ;
elle formait une bande composée d’une série de prismes, en géné-
xal pentagonaux ou hexagonaux, semblables à ceux du basalte. Ces
prismes avaient de h à 6 centimètres de hauteur; ils étaient per-
pendiculaires à la surface de la roche et à celle des couches de
houille non altérée qui reposaient au-dessus. Chacun de ces prismes
est recouvert d’une couche d’oxyde de fer, due probablement à la
décomposition du sulfure de fer ; leur dureté, leur couleur ocreuse
contraste avec celle de la houille non altérée ; la cassure est plane,
et offre un faible éclat métallique qui rappelle celui de la plomba-
gine ; la poussière ne tache pas les doigts. Projeté dans le feu , ce
combustible rougit sans produire de flamme ; certains fragments
éclatent avec bruit en se brisant. Sa pesanteur spécifique , déter-
minée par M. Hugard, est de 2,58.
Domite altéré de la galerie de Saint-Edmond,
avec houille transformée, au contact, en anthracite.
1. Domite altéré. 2. Anthracite prismatique. 5. Houille en couches.
A ma sollicitation, M. Jacquelain a bien voulu soumettre ce
produit à quelques essais. Le résultat de son examen est qu’il
rentre dans la classe des anthracites ; comme eux, il ne donne à la
distillation ni goudron ni autre matière huileuse, tandis que les
houilles, en pareille circonstance, fournissent des huiles essen-
tielles, du goudron et du gaz éclairant. Par la calcination à une
température élevée, 100 kilogrammes donnent 212!it ,5 d’un mé-
lange gazeux composé de :
Litres.
Hydrogène 116,875
Oxyde de carbone. . 74,375
Acide carbonique. . 21,250
212,500
SÉANCE DÜ k NOVEMBRE 1850. 1-9
Ces résultats sont d’accord avec ceux que M. Jacquelain avait
obtenus en étudiant sous le même point de vue les anthracites de
Svvansea, de Sablé et de Vizille (1).
L’analyse de l’anthracite de la galerie de Saint-EdmOnd a pré-
senté cette autre circonstance remarquable, qu’en la chauffant au
rouge blanc dans un tube en porcelaine convenablement disposé
pour recueillir le gaz, il y a eu, depuis le commencement jusqu’à
la fin de l’opération , dégagement d’hydrogène , d’oxyde de car-
bone et d’acide carbonique. Ce qui mérite d’être signalé , c’est que
l’oxygène de l’oxyde de carbone et de l’acide carbonique d’une
part, et de l’autre l’hydrogène recueillisse trouvent exactement
dans les proportions pour former de l’eau. Si l’eau préexistait
dans l’anthracite, ajoute M. Jacquelain, il en serait tout autre-
ment : l’eau se vaporiserait dès la première impression d’une tem-
pérature aussi élevée, d’où résulterait inévitablement une diffé-
rence dans la composition des gaz du commencement comparés à
ceux de la fin de l’expérience.
Ces faits intéressants font présumer avec un très grand degré
de probabilité que notre anthracite prismatique est le résultat
d’une transformation de la houille , profondément modifiée dans
sa constitution chimique parla température d’une roche ignée, à
l’abri de l’air, et sous une forte pression : cette transformation
chimique est analogue à celle qu’éprouvent les houilles grasses
distillées en vase clos. Déjà, en 18à0, M. Jacquelain avait émis
cette opinion sur l’origine des anthracites (2). La composition de
celle que nous avons trouvée au contact d’une roche volcanique
est, pour ainsi dire, la confirmation géologique de sa théorie. La
présence des éléments de l’eau dans cette anthracite s’explique par
l’énonne pression de 60 mètres de houille , sous laquelle s’est
opéré le métamorphisme ; l’eau n’ayant pu se dégager à l’état de
vapeur, elle s’est décomposée sous l’influence d’une haute tempé-
rature en ses deux principes, l’hydrogène et l’oxygène.
La roche de la galerie de Saint-Edmond se trouvant à 60 mè-
tres au-dessous de la surface du sol et à peu près au centre d’un
triangle formé parle pépéri no du ruisseau de la Banne et les roches
volcaniques décomposées en boule de Saint-Front et de Cliamp-
froinenteau, ma première idée fut que la roche souterraine faisait
partie de la même masse que les trois affleurements signalés par
(1) Études sur la composition élémentaire de quelques anthracites
[Annales de chimie et de physique , t. LXXîV, p. %00, 1840).
(2) Mémoire cité, p. 21 1 ,
20
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850.
-M. Boulanger. Nous allous voir qu’il n’en est probablement pas
ainsi. Déjà au premier aspect, M. Ebelmen avait trouvé que la
roche de la galerie de Saint-Edmond rappelait le domite du Puy-
de-Dôme, et une analyse qu’il a bien voulu en faire, à ma prière,
a pleinement confirmé cette opinion.
Yoici les résultats de cette analyse mis en présence de ceux que
M. J. Girardin a obtenus en opérant sur le domite léger du Puy-
de-Dôme (1).
Silice
Roche de la galerie
de Saint-Edmond.
59,52 . . . .
Domite loger
du Puy-de-Dôrn
. . . 51,00
Alumine
22,08 . . . .
. . . 24,00
Chaux
2,31 . . . .
Magnésie
1,19 . . . .
. . . 7,82
Potasse
6,65 . . . .
. . . 4,66
Soude
0,25 . . . .
Peroxyde de fer. . . .
o 04
. . . 8,34
Oxyde de chrome. . .
0^66 . . . .
Oxyde de manganèse.
. » ....
. . . 0,64
Eau ...
^ 5,50 . . .
... »
Perte
» ....
... 1,48
100,40
100,00
M. Hugard a trouvé que la pesanteur spécifique de la roche de
Saint - Edmond était de 2,11; celle du domite léger, d’après
M. Leeoq, est de 2,33.
La roche de la galerie de Saint-Edmond, ajoute le savant chi-
miste à qui nous en devons l’analyse, se distingue de celles qui
affleuraient à la surface du sol, près du ruisseau de la Banne, par
la présence de l’oxyde de chrome et par la faible proportion de
l’oxyde de fer qui est fort abondant dans les roches superficielles.
11 est donc rationnel de penser que celles-ci ne forment pas une
masse continue avec la roche profonde qui constituerait ainsi un
filon isolé. L’aspect de cette dernière rappelle le domite du Puy-de-
Dôme, et l’analogie de composition qu’elle présente avec lui est des
plus frappantes. Deux circonstances expliquent très bien les diffé-
rences des deux roches : celle de Commentry, plongée dans les en-
trailles de la terre et maintenue à l’abri de l’air, était un peu décom-
posée par l’eau , les gaz et les substances minérales avec lesquels
elle se trouvait en contact. Le domite du Puy-de-Dôme, exposé à
(1) Journal de pharmacie , t. XIV, p. 602, 1828; et Annales des
mines, 2e série, t. Y, p. 302, 1820.
SÉANCE i)C k NOVEMBRE 1850.
21
l’air libre dans des localités sèches, a dû subir des modifications
différentes depuis le moment de sa consolidation : en effet, le sim-
ple bon sens dit que deux roches identiques, mais tendres et atta-
quables par les agents extérieurs, dont l’une se trouve depuis des
milliers de siècles au sommet d’une montagne, tandis que l’autre
est depuis le même laps de temps enfouie à 60 mètres sous la sur-
face du sol dans une couche de houille et détrempée d’eau chargée
de principes étrangers, doivent nécessairement présenter des dif-
férences. On peut répéter cette observation sur toutes les roches
qui se trouvent dans les galeries de mines, comparées avec celles
qui sont à l’air libre.
D’autres considérations purement géologiques viennent d’ail-
leurs confirmer le témoignage de la chimie sur l’analogie du do-
mite et de la roche de la galerie de Saint-Edmond. Le groupe
domitique , composé des puys de Gromanaux , de Dôme, du
Petit Suchet , du Clierzou , et du Grand-Sarcouy, et du puy de
Chopine (î), est distant seulement de 55 kilomètres de la roche de
Commentry. M. Lecoq a lait remarquer (2), et l’on peut vérifier
cette assertion sur la carte qui accompagne son mémoire sur les
puys feldspathiques , que ces montagnes sont alignées sensible-
ment suivant une ligne droite qui va du S.-S.-E. au N. -N. -O. Si
l’on prolonge cette ligne , dont le puy de Dôme et le puy de
Chopine forment les extrémités, dans la direction du nord, elle
vient aboutir précisément au petit bassin houiller de Commentry,
et, par conséquent, à la roche domitique que nous avons décrite.
Nous la considérons donc comme l’indice d’une éruption trachy-
tique avortée ou comme la partie supérieure d’un puy que les
forces volcaniques affaiblies n’ont pas eu la puissance d’élever
au-dessus de la surface du sol. Peut-être aussi les masses de houille,
de schistes et de grès qui remplissaient ce bassin ont-elles opposé
à la poussée de bas en haut un obstacle quelle n’avait pas à vaincre
sur le plateau dénudé des environs de Clermont.
J’admets avec M. Lecoq quatre époques principales dans la pé-
riode volcanique de l’Auvergne (3): 1° les trachytes et leurs con-
glomérats; 2° les filons tracliytiques ; 3° les basaltes en coulées
et en filons; Zf5 les volcans modernes. Le petit bassin houiller
(1) Voyez H. Lecoq, Recherches sur l’origine et la constitution des
pays feldspathiques des monts Dômes ( Annales scientifiques et indus-
trielles de V Auvergne, février 1828, p. 65).
(2) Le Mont-Dore et ses environs, p. 90.
(3) Ibid p. 52.
22
SÉANCE DU I\ NOVEMBRE 1850.
de Commentry nous offre les traces les plus éloignées vers le
nord de la première ou de la seconde époque, savoir : le domite de la
galerie de Saint-Edmond. Le mamelon basaltique de Cerclier, les
spilites de Sainte-Agathe, et le pépérinodu château de Saint-Front
correspondent à la seconde ; mais la troisième , celle des volcans
modernes, 11e paraît pas avoir étendu son action jusque-là.
Roche porphyrique de Ferrières et granité porphyroïde de l’usine
de Commentry.
Pour compléter l’histoire des roches éruptives du bassin de
Commentry, je dois encore parler d’un dyke supportant le château
de Ferrières, qui se trouve à l’extrémité septentrionale du bassin.
Ce dyke est un porphyre pétrc-siliceux , micacé. M. Boulanger
qui l’avait encore désigné sous le nom de dioritine (1) , nous
apprend qu’il forme un fdon vertical qui a traversé la houille
sans l’altérer ; car elle est aussi flambante au contact que dans les
parties de la couche éloignées de la roche. Enfin , MAI. Bufrénoy
et Elie de Beaumont (2), ainsi que AI. Boulanger (3), ont montré
que les couches qui remplissent ce bassin sont relevées par un
dôme de granité porphyroïde sur lequel l’usine est bâtie, et qu’une
galerie traverse sur une longueur de 672 mètres. Ils sont d’accord
pour considérer ce granité porphyroïde comme postérieur au dé-
pôt du terrain houiller.
Au contact de ces deux roches , le pétro-silex micacé et le gra-
nité porphyroïde, la houille n’est point altérée. On ne saurait,
néanmoins, en rien conclure contre l’origine ignée de ces roches;
car, sans sortir du plateau central de la France, nous trouvons
deux faits de houille modifiée au contact de roches pyrogènes, l’un
se rapportant au bassin de Brassac (à), et l’autre à celui de l’Ar-
roux (5), que M. Bufrénoy a fait connaître il y a déjà longtemps.
Depuis l’époque 011 Ash (6) a décrit le premier exemple de
(1) Statistique géologique de V Allier , p. 87.
(2) Explication cle la carte géologique de la France , t. I, p. 639,
fig. 42.
(3) Atlas , coupe suivant la ligne AB de la carte du bassin.
(4) Explication de la carte géologique de la France , t. I, p. 640.
(5) Considérations générales sur le plateau central de la France
[Annales des mines , 2e série, t. 111, p. 331, et Explication de la
carte géologique de la France , t. 1, p. 648).
(6) Ueber die V erbindung der Kohlenfoetze mit Basalten in
Schottland (Crell, Chemische Annale n, t. I, P* 248, 1792).
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850.
23
ce genre, on en a cité beaucoup, surtout en Angleterre et en
Écosse. M. Léonliard (1), dans son ouvrage sur le basalte, et
JV1M. Conybeare et Phillips (2), dans leur Description géologique
de V Angleterre , en rapportent un grand nombre.
En résumé, le petit bassin houiller de Commentry , dont la lon-
gueur est de 10 kilomètres sur 3 de largeur moyenne, situé sur le
bord septentrional du bassin central de la France , présente des
roches éruptives correspondant à quatre époques différentes :
1° Le granité porphyroïde qui a relevé les couches houillères
vers le nord, et sur lequel est assise l’usine de Commentry.
2° Le porphyre pétro- siliceux micacé de Ferrières.
3° La roche de la galerie de Saint-Edmond , correspondant à
l’époque des puys domitiques des environs de Clermont.
â° Les protubérances basaltiques de Cerclier, les spilites de
Sainte- Agathe , et le pépérino du ruisseau de la Banne, contem-
porains des coulées basaltiques de l’Auvergne , auxquelles ils se
relient par les phénomènes des environs de Menât.
Après cette communication, M. Rivière dit qu’il a examiné
les roches apportées par M. Martins, et qu’il n’en est aucune
qu’on puisse appeler trachyte ou domite \ que cette dernière
roche ne fait d’ailleurs jamais pâte avec l’eau -, que celle présentée
sous ce nom par M. Martins lui parait plutôt une roche de for-
mation aqueuse, mais composée de détritus de roches ignées.
La houille carbonisée dont a parlé M. Martins, et qui ne pré-
sente pas à M* Rivière les caractères d’un véritable coke, a pu
avoir été modifiée par les embrasements de la mine de Com-
mentry, et si les terrains sont relevés, c’est par l’effet de la faille
et non par le voisinage de cette roche.
M. Martins répond que la houille n’a certainement pas été
carbonisée par le fait des embrasements récents , car la zone
carbonisée est précisément adhérente à la roche ignée, et sur
une petite épaisseur. Quant auplongement des couches, il est
régulier, vers le sud, dans la contrée, mais sur une pente
légère -, l’inclinaison devient, au contraire, considérable près de
ces roches.
(1 ) Die Basait Gebilde, t. II, p. 369.
(2) Outlines of thé geology of England and JV aies, p. 437 à 447,
1822.
SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 18ÔÜ.
U
M. Bourjot cite à l’appui de l’observation de M. Martins une
tête de filon basaltique qu’il a observée à Menât, et qui, sur
une longueur d’environ 200 mètres, a transformé les schistes
en une sorte de tripoli.
M. Deville dit qu’il est regrettable que M. Martins n’ait pas
trouvé une roche mieux caractérisée, comme domite, que celle
qu’il vient d’examiner, d’autant plus que l’inspection compara-
tive des deux analyses que M. Martins a transcrites sur le ta-
bleau prouve que, par sa composition chimique, elle diffère
complètement de celle analysée par M. Girardin sous le nom de
domite.
M. d’Archiac communique l’extrait suivant d’une lettre de
M. de Tchihatcheff , datée de Gonstantinople le Ier octobre
1850 :
Je m’étais proposé de déterminer cette année l’étendue de la
formation crétacée dans les parties nord et centrale de l’Asie Mi-
neure et les limites géographiques qui la séparent des dépôts
nummulitiques qu’on y avait compris jusqu’à présent. J’ai d’abord
reconnu que la ligne de démarcation tracée avant moi dans la
Bithynie, entre le terrain paléozoïque et la formation crétacée,
n’était pas exacte, et que l’on avait attribué une extension beau-
coup trop considérable aux roches anciennes en les représentant
comme occupant la presqu’île qui sépare le golfe de Nicomédie
de la mer Noire. En réalité, une partie de cette surface présente des
dépôts que caractérisent des Inocérames de la craie, et le terrain
paléozoïque ne forme qu’une bande très étroite le long du littoral
asiatique du Bosphore. Sur la rive opposée , il est également fort
peu développé de l’E. à FO., et j’ai déterminé exactement sa limite
occidentale par rapport au bassin tertiaire de la Tlirace. Dans ces
derniers dépôts j’ai recueilli des fossiles intéressants, entre autres
des poissons qui ne me paraissent pas avoir été signalés dans le
voisinage immédiat de Constantinople. Je repassai ensuite en Asie
Mineure , et traçai , à partir des environs d: Angora , plusieurs
coupes parallèles dirigées S. N. jusqu’au littoral , dans le voisinage
de Samsoun. De ce point je me proposais de revenir à Constanti-
nople en longeant la côte , pour étudier les lignites crétacés d’Eré-
gîi , mais les fièvres qui se déclarèrent dans ma petite troupe , et
auxquelles je n’échappai pas moi-même , me firent remettre à l’été
prochain cette partie de mes explorations.
25
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850,
Dans une seconde lettre datée du 15 octobre, M. de Tchihat-
chefF annonce qu’il a constaté à Kastamouni (Paphlagonie), à trois
jours de marche de la côte , des traces de Nummulites dans un
conglomérat compacte , à grains fins, faisant partie de la vaste
formation de grès, de conglomérats et de gypses qui a été l’objet
de beaucoup d’incertitudes et de discussions , à cause de l’absence
de fossiles et de l’obscurité de ses rapports géologiques. Ainsi se
trouve confirmée la position que M. de Tchihatcheff avait assignée
à ce système de couches , relativement à la formation nummuli-
tique.
Le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Goquand :
M. Goquand adresse les lignes suivantes en réplique ci une
note de M . Raulin sur R âge des sables de la Saintonge et du
Périgord et de plusieurs minerais de fer tertiaire de V Aqui-
taine, insérée dans le. tome Yï, 2e série, du Bulletin.
Si dans ma note sur les minerais de fer du département de l'Avey-
ron, du Lot, de Lot-et-Garonne, du Tarn , de Tarn- et- Garonne et
de la Charente-Inférieure ( Bulletin , 2e série, tome VI ), je n’avais
déclaré: « 11 est bien entendu que nous ne parlons ici que de la
» généralité des gisements de minerais de fer et de ceux principa-
» lement qui, se trouvant à divers niveaux sur le plateau central,
» sont indépendants du bassin tertiaire de la Gironde ; » si je n’a-
vais ajouté : « que des minerais de fer existaient à divers niveaux
» dans les terrains tertiaires, et que j’en connaissais à Rusfrel ex-
» ploités au-dessous des gypses -, » j’aurais été moins surpris des
réclamations de M. Paulin.
M. Paulin considère comme éocènes les gypses de Sainte-Sabine,
auxquels j’ai assimilé ceux de Yarren, que j’ai trouvés discordants
avec les minerais de fer superficiels. Comme calcaire jurassique,
j’ai suivi l’opinion de M. Dufrénoy relativement à leur âge. C’est
peut-être un tort, et il me serait difficile de le réparer. J’ai en vue,
en décrivant les environs de Yarren, de démontrer la complète in-
dépendance des minerais de fer par rapport aux autres étages
tertiaires, ainsi que leur non-recouvrement, et non point de tracer,
pour le bassin de l’Aquitaine , des horizons sur l’invariabilité des-
quels je soupçonne M. Paulin d’avoir conservé et peut-être même
d’avoir exprimé des doutes.
Les argiles et les graviers superficiels avec minerais de fer qui
se trouvent étagés à des niveaux différents sur toute l’étendue du
26
SÉANCE DU k NOVEMBRE 1850.
plateau central , et qui du plateau central descendent dans le
bassin de l’ Aquitaine, dans l’Angoumois, dans le Quercy, dans le
Berry, etc., constituent-ils des dépôts indépendants, sont-ils con-
temporains des sables des Landes, au milieu desquels existent les
mêmes minerais de fer? Voilà la question que j’avais à résoudre
dans mon travail. Je faisais remarquer : 1° que ces dépôts n’étaient
pas recouverts ; 2° qu’ils s’affranchissaient des limites que les escar-
pements du plateau centrai avaient imposées au bassin tertiaire
de l’Aquitaine et que les eaux de celui-ci n’ont point dépassées.
Or les minerais de l’Alemance, de Fumel, de Duravel, de Mont-
brun, des Arques, de Gourdon, de Cressensac, les gîtes de Varren,
de Bruniquel, de Sept-Fonds et d’autres que j’ai cités à l’appui de
mon opinion, ne passent point latéralement à la mollasse duFron-
sadais, comme l’avance M. Raulin, mais ils constituent une série
de dépôts indépendants du bassin tertiaire de la Gironde ; car ils
recouvrent les gypses de Varren, et dans les environs de Tournon,
ce que M. Raulin appelle un passage latéral à la mollasse duFron-
saclais et au calcaire blanc du Périgord est, à mes yeux, une con-
fusion complète entre deux dépôts qui n’ont de commun que la
couleur de leurs argiles.
En effet, dans les exemples qu’il cite sur la roule de Bordeaux
à Angoulême, sur le grand chemin de Tbenon à Bergerac, et sur
la route de Caliors à Tournon, M. Raulin démontre que dçs cal-
caires lacustres sont supportés par des argiles rouges, des poudin-
gues à ciment ferrugineux, des sables et des marnes diversement
nuancées. Si , pour le classement du terrain tertiaire de la Pro-
vence, on ne choisissait pourpoint de repèreque les argiles rouges,
on serait exposé à de singulières méprises. Car, outre les trois ou
quatre dépôts distincts d’argiles rouges dans le seul étage lacustre
de Vitroiles et du Tholonet, on trouve encore des argiles rouges
dans l’étage inférieur à lignites , des argiles rouges dans l’étage à
gypse, des argiles rouges dans l’étage des mollasses, et des argiles
rouges dans l’étage des cailloux roulés du Rhône et de la Crau ; or
il n’est venu à l’esprit d’aucun géologue d’asseoir des limites d’a-
près la couleur des roches, et d’admettre, par exemple, que les
argiles rouges du plateau de Puyricard, qui sont une dépendance
du terrain marin, et qui ne sont pas recouvertes, passent latérale-
ment aux calcaires lacustres de Venelles, bien que les uns et les
autres soient contigus et aient à leur base des argiles rouges.
L’argument de M. Raulin, pour prouver le passage latéral de
la mollasse du Fronsadais aux minerais de fer exploités dans la
vallée du Lot, et, par conséquent, à ceux du plateau central, donc
SÉANCE DU î\ NOVEMBRE 1850.
27
en dehors du bassin tertiaire de l’Aquitaine, est celui-ci: « il y a
» sur la rive gauche du Lot , à la base de la mollasse éocène du
» Fronsadais, des argiles et des sables grossiers ferrugineux , ab-
solument semblables à ceux qui sont en regard sur la rive droite.
» Pour ma part, ajoute l’auteur, je n’ai trouvé et je ne trouve au-
» cun motif qui puisse m’empêcher de les croire contemporains. »
Cet argument, comme on le voit, est une opinion et non une dé-
monstration, car il ne détruit pas le fait de discordance des gypses
de Varren avec les minerais de fer, ni l’existence de cette dernière
en dehors du bassin de la Gironde , dont ne s’échappent pourtant
pas les étages inférieurs éocènes. Il fallait prouver que les argiles
rouges du Fronsadais, dans les environs de Tournon, étaient la
continuation des argiles ferrifères de l’Alemance et que celles-ci
étaient distinctes des minerais du bois de Mouchan et des "sables
des Landes, que M. Raulin consent à faire pliocènes. Or il n’y a
qu’à étudier en face de Libot, sur la rive droite du Lot, et sur la.
rive gauche, à Saint-Witte, à Marc, à Fontauxel, à la Roque, sur
les bords du ruisseau la Garane , les mêmes dépôts ferrifères ex-
ploités, pour s’assurer qu’ils se lient sans discontinuité aux gise-
ments du plateau central et surtout à ceux des Arques, de Cressen-
sac, de Gourdon , de Yert et de Montbrun , et pour voir qu’ils
n’ont rien de commun avec les argiles rouges, mais non ferrifères,
de Tournon, de Nujejoult et de Puycalvary dont ils sont séparés
par une arête secondaire. Il y aurait lieu à se demander comment
il se fait que les argiles et les graviers de Libot et de la Garane qui
touchent presque aux argiles de Tournon, mais qui ne sont pas
recouverts, sont les seuls gîtes de minerais exploités, et l’on sait avec
quelle profusion s’y trouvent les hématites géodiques et les fers
hydroxydés pisolitiques, tandis qu’à deux pas delà, les argiles
rouges, supportant les calcaires lacustres et que M. Raulin assimile
à celles de Libot , sont à peine colorées par l’oxyde de fer et ne
retiennent plus un seul atome de fer exploitable. Ainsi, ce que
M. Raulin appelle un passage latéral n’est pas même un contact
et n'est qu’une véritable indépendance entre deux terrains. Mais
il y a plus : les argiles rouges inférieures au calcaire blanc du Pé-
rigord, renfermassent-elles des minerais de fer, ne seraient et ne
pourraient être les mêmes que celles des bords du Lot ; car l’assi-
milation proclamée par M. Raulin est une hypothèse, la discor-
dance des argiles ferrifères avec les autres du terrain tertiaire est
un fait, et leur insubordination, par rapport aux limites du bassin
de l’Aquitaine, qui est emprisonné en dessous des escarpements du
plateau central, est un autre fait tout aussi incontestable.
28
SÉANCE DU II NOVEMBRE 1850.
Quant à la théorie des nappes d’eau successives qui auraient
afflué dans l’estuaire tertiaire de l’Aquitaine et qui se seraient
déplacées graduellement du N.-N.-E. au S.-S. -O. en s’éloignant
du plateau central, j’en laisse le mérite à l’auteur qui l’a imaginée
pour justifier la présence d’un étage miocène en dehors du bassin
de la Gironde. Mais faudrait-il encore qu’elle nous expliquât
pourquoi les assises éocènes , celles de Blaye, par exemple, plus
anciennes que la mollasse du Fronsadais, ne sont pas représentées
sur le plateau central , où on devrait les retrouver pourtant ,
puisque le déplacement des nappes d’eau était graduel et successif.
Il est vrai que M. Raulin étaie l’insuffisance de sa théorie par
les raisons suivantes. Suivant lui , les propriétés particulières
bien tranchées dans les minerais qui proviennent des divers
étages ne permettent pas de les confondre entre eux ; ceux de
l’étage pliocène des sables des Landes donnent du fer tellement
cassant, que les maîtres de forges, malgré la distance, n’hésitent
nullement, pour améliorer leurs produits, à faire venir le minerai
du Périgord, qui lui , au contraire , donne du fer de très bonne
qualité. On voit bien que M. Raulin ne s’est jamais livré à l’ana-
lyse des minerais tertiaires de l’Aquitaine; il aurait compris,
et la chose est facile à comprendre , que les gîtes des Landes
étant moins riches en minerais que ceux de l’Alemance , les
qualités supérieures ont été plus vite épuisées. 11 en est ainsi pour
les gîtes des Arques et de Cressensac, qui , après avoir alimenté
pendant un certain nombre d’années des hauts fourneaux et des
forges catalanes, n’offrent plus guère en ce moment-ci que de!
qualités médiocres que repoussent les maîtres de forges , ou qui
donnent des fers cassants quand on les traite. Je pourrais, à cet
égard, citer une foule d’analyses dont l’exposé serait déplacé ici.
Je me contenterai de renvoyer M. Raulin aux registres officiels du
laboratoire de l’Ecole des Mines. Je dirai cependant que les mi-
nerais de l’Alemance, premier choix, que l’on embarque à Libot,
pour les transporter dans les Landes où le minerai est rare ,
s’échangent contre des charbons de bois de pin , qui remon-
tent ainsi le Lot et donnent aux bateaux des chargements en
retour. M. Manès, dans une notice déjà ancienne, mais qui
aura échappé à l’attention de M. Raulin, a très bien expliqué
cet état do choses en praticien qui s’y entend, seulement avec
des arguments autres que ceux tirés de la qualité des mine-
rais. Il n’y a au surplus qu’à étudier sur place les haldes de
Fumel, des Arques, de Montbrun et de Puycelsy, pour y voir
classés par catégories distinctes les minerais de qualités diverses .
SÉANCE I)U h NOVEMBRE 1850,
29
donnant les unes des fers doux et les autres des fers aigres ; et la
preuve que le triage seul influe sur les qualités, c'est que l’analyse
ne dévoile ni arsenic, ni soufre , ni phosphore dans les minerais
du Périgord, pas plus que dans ceux des Landes.
M. Raulin critique ensuite le chiffre de 20 mètres que j’ai
donné à l’élévation des Landes au-dessus du niveau de la mer, et
il ajoute qu’il ne sait pas ce que je veux dire par là. Comme j’ai
emprunté ce chiffre au Mémoire de M. Dufrénoy (page 33A du
travail de ce savant) , c’est à ce travail que s’adresse la critique
de mon honorable contradicteur. Ce n’est donc pas à moi de la
relever, et de lui dire que ce savant a entendu désigner l’altitude
moyenne de la région plate des Landes , exactement comme on
désigne par un chiffre que je n’ai pas présent à la mémoire la
hauteur moyenne de la plaine de la Crau, qui cependant, vers la
Durance, est bien plus élevée que vers les Martigues.
Une dernière partie de la réplique de M. Raulin a trait au
gisement de la jGmve où ont été découverts des mammifères
dont j’ignorais complètement le nom, et qui seraient les Palœo-
tlieriuni magnum , medium , crassum et minus du gypse éocène
de Paris. Si ces déterminations m’eussent été connues, je n’eusse
pas assimilé les argiles rouges de la Grave avec les dépôts cail-
louteux de Créon , de Saint-André-de-Cubzac et de Biaye, dont
M. Raulin fait la base de son diluvium, et que je range dans
le même horizon que les fers de l’Àlemance , les landes de
Mortagne , de Saujon , de la Seudre , de l’Àunis et de l’An-
gouniois; car, je le répète, en traitant de l’âge des dépôts des
minerais de fer des vallées du Lot et de l’Aveyron , je n’ai point
eu la prétention de bâtir la classification complète du bassin ter-
tiaire de l’Aquitaine , et moins encore de dire que tout ce qui avait
couleur rouge appartenait à un seul et même étage, puisque j’ai
démontré qu’à Varren les argiles rouges avec minerais de fer
étaient distinctes des argiles rouges gypsifè res , et que je n’ai point
déplacé les argiles rouges de Tournon, inférieures au calcaire la-
custre, pour les introduire dans les argiles ferrifères de l’Alemance.
Comme Al. Dufrénoy, à qui j’ai emprunté les détails relatifs à la
Grave , ne cite point le nom des espèces de mammifères qui y ont
été découvertes (1), j’ai cru , à tort, que les argiles rouges de cette
localité étaient le prolongement des landes avec minerais de fer
(1) La question de la répartition des mammifères n’est point encore
assez précise pour qu’on puisse décider, en dernier ressort , de l’âge
30
SÉANCE DU I\ NOVEMBRE 1850.
que j’ai eu l'occasion d’étudier, principalement dans la Saintonge
et sur les bords de la Seudre. Or, comme il est évident pour moi
que les minerais de l’Alemance , ceux des Landes et ceux de la
Saintonge sont de l’âge des cailloux et des lignites de Latour-du-
Pin , où des Tortues et le Mastoclon àngustidens ont été trouvés;
que le même Mastodonte et Y Elcphas primigenius ont été décou-
verts par Nesti , et signalés par M. de Blainville dans les dépôts
subapennins du vald’Arno ; comme une molaire d’Elépliant a été
recueillie par moi dans les sables ferrifères de Saint-Mesme, près
Cognac ; comme, dans une excursion récente que j’ai faite dans la
vallée du Rhône, à Vienne, et dans la plaine de la Grau, j’ai eu
occasion de recueillir des fers perpxydés géodiques au milieu des
argiles rouges qui alternent avec les cailloux roulés, je n’ai pas
hésité, et je persiste encore à considérer tous ces dépôts comme
contemporains , et l’erreur commise par rapport au gisement de la
Grave n’enlève rien à la force de mes arguments, à savoir que la
généralité des dépôts de minerais de fer exploités sur les bords de
l’Aveyron et du Lot, que les sables des Landes et de la Saintonge
sont de l’âge des cailloux de la Bresse et des dépôts ossifères du va!
d’Arno , et conséquemment de l’époque pliocène. J’abandonne à
M. Raulin les argiles rouges des autres étages, et je termine ma
réplique par la phrase suivante, que j’emprunte à mon premier
travail : « M. Raulin, pour le bassin de la Gironde, et par rapport
» aux sables et cailloux ferrifères, a reproduit la même confusion
» qui pendant longtemps avait porté le plus grand nombre des géo-
» logues à ne voir dans les cailloux de la Bresse que le produit des
» alluvions anciennes , mais postérieures aux terrains tertiaires. »
M. Raulin fait la réponse suivante :
Si Y Essai de classification que j’ai proposé pour les terrains ter-
tiaires de l’Aquitaine n’avait été attaqué par M. Coquand dans
son mémoire inséré au tome VI du Bulletin , j e me serais, par des
d’un terrain suivant la détermination souvent fautive des ossements.
Ainsi Y Elcphas primigenius a été cité par MM. Nesti, Targioni et de
Blainville au val d’Arno, avec le Mastoclon angusticlens , qu’on trouve
dans l'étage miocène. Malgré la présence du Palœotheriuni minus à
Gargas, le plus grand nombre des géologues ne considère pas moins les
gypses d'Aix comme tertiaire moyen. Enfin Y Ursus cultridens est cité
à la fois dans le dépôt subapennin du val d'Arno et dans l’étage miocène
de Sansan et de la Bavière.
SÉANCE DU h NOVEMBRE 1850.
31
raisons faciles à apprécier, probablement abstenu de relever les
erreurs que celui-ci renfermait à ma connaissance, brièvement
d’abord dans le même recueil, et plus largement ensuite dans les
Actes de V Académie de Bordeaux , pour 1850, où avait paru ma
première publication. M. Coquand ne produisant pas de nouveaux
faits pour défendre sa première attaque, je pourrai être fort bref.
Connaissant dans le S. -O. de la France des dépôts ferrifères de
plusieurs âges, j’ai dû, comme je le fais encore aujourd’hui, m’éle-
ver contre la prétention de M. Coquand, de ranger dans le terrain
pliocène tous ceux de l’Aquitaine, c’est-à-dire, de la plaine com-
prise entre le plateau central et les Pyrénées.
11 n’est aucun géologue qui n’admette que les gypses de Sainte-
Sabine se trouvent dans la mollasse du Fronsadais , et tous, à l’ex-
ception de M. Dufrénoy, rapportent maintenant cette dernière au
terrain éocène. Quant aux gypses de Varren, que je ne connais pas,
je n’en ai jamais rien dit.
Pour les argiles et graviers superficiels avec minerais de fer du
Quercy, M. Coquand pense qu’ils constituent une série de dépôts
indépendants du bassin tertiaire de la Gironde ; les trois coupes que
j’ai données dans le Bulletin , et les sept antres que j’y ai ajoutées
dans les Actes , suffisent pour démontrer le contraire; je n’ai pas à
revenir sur ce point et à suivre M. Coquand dans sa digression sur
la Provence. Dans les environs de Tournon et de Libos, la région
ferrifère de la Lémance est à un niveau souvent inférieur à celui
des hautes collines tertiaires, et il n’y a pas plus d’arête secondaire
formant deux bassins séparés, qu’il n’y en a dans le même pays
entre Libos, qui est sur les sables ferrifères, et Villeneuve-sur-Lot,
qui est sur la mollasse, ou bien entre Biron, sur les sables ferri-
fères, et Monflanquin, sur la mollasse et le calcaire d’eau douce
éocènes.
Relativement au déplacement des nappes d’eau successives, j’ai
lieu de m’étonner que M. Coquand revienne sur ce point; car dans
les Actes , dont je lui ai remis un exemplaire, j’ai démontré le pas-
sage latéral du calcaire grossier marin éocène de Blaye à des sables
et argiles rouges avec cailloux, et d’apparence d’eau douce, qui
forment la partie inférieure de la mollasse du Fronsadais , et par
conséquent l’existence du terrain éocène, même inférieur, sur une
grande largeur, depuis la région miocène voisine de la Garonne,
jusqu’au plateau central, ce qu’au reste j’avais établi en coloriant
un fragment de la grande carte géologique de la France, que
M. Dufrénoy avait eu la bonté de m’adresser, et que je lui ai
renvoyé dans les derniers jours de 18A8,
3 2
SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 5850.
Quant à la qualité des minerais de fer des divers étages ter-
tiaires de l’ Aquitaine, le peu que j’en ai dit m’a été communiqué
par M. Manès, ingénieur en chef des mines à Bordeaux, qui s’est
beaucoup occupé des questions industrielles, dont je ne me mêle
nullement, et j’ai tout lieu de le croire exact.
Maintenant qu’il est établi que les argiles de la Grave, près de
Libourne, renferment des mammifères éocènes, M. Coquand re-
nonce à l’assimilation qu’il a établie avec celles des landes de la
Saintonge et des bords de la Seudre. Libre à lui d’en agir ainsi,
parce que ces dernières sont rouges et ferrijères ; mais pour moi.
qui ai vérifié et établi le passage latéral des unes aux autres à l’aide
de plusieurs coupes, je conserve la première opinion.
M. Coquand, paraissant toujours admettre que les dépôts ferri-
fères du Périgord et du Quercy ne sont pas recouverts, je crois in-
dispensable de reproduire ici le passage suivant de la note que j’ai
insérée dans les Actes :
« Il y a un haut plateau désigné dans le pays sous le nom de
» Plai/w de Bord , et situé au S.-E de Domine, sur la rive gauche
» de la Dordogne (et à 3 lieues au N. O. de Gourdon), près de la
» route de Sarlat à Cahors, par Catus ; cette localité nous a donné
» encore une confirmation éclatante de l’exactitude de la position
ü que nous avons assignée aux sables du Périgord à minerais de
» fer, par rapport aux dépôts d’eau douce de ce pays.
» En quittant la Dordogne au pont de Domine, pour se diriger
» vers Catus, on voit d’abord, au-dessous de ce bourg, la partie
» inférieure de la craie formée par un calcaire blanc noduleux,
» grossier, à stylolites ; comme les couches vont en se relevant assez
» rapidement vers le sud, on ne tarde pas à arriver sur le terrain
» jurassique supérieur, formé par des calcaires compactes légère-
» ment grisâtres, en couches de 1 à 5 décimètres, séparées par de
» petits lits marneux, et diversement inclinées et contournées. Ce
» terrain atteint vite des hauteurs considérables, et les coupures
» de la route y font voir, sur plusieurs points, des poches remplies
» de sables plus ou moins argileux, rouges ou jaunes, à nodules
» et fragments de fer hydroxyde. Au col du Batut, on retrouve la
» craie blanche noduleuse, inférieure, qui forme le bas plateau de
» Maraval. On monte ensuite, à la Basse- Yentouline, sur les as-
» sises plus supérieures du terrain crétacé consistant en calcaires
» grossiers jaunâtres, renfermant de nombreux polypiers. Leur
« surface est couverte d’éboulis de sables argileux rouges, renfer-
» niant des blocs, souvent de plusieurs mètres cubes, d’un grès
» quartzeux grossier, très dur, verdâtre, et d’autres blocs moins vo-
SÉANCE DU fl NOVEMBRE 1350.
33
» lumineux, mais extrêmement abondants, de grès ferrugineux
» brun rougeâtre, ainsi qu’une très grande quantité de fragments
» plus petits de fer hydroxyde, compacte et concrétion né y pins ou
» moins arénifère, brun jaunâtre. En montant à la Haute- Ven-
» touline, on voit en place de beaux sables argileux grossiers, mi-
» cacés, jaune rougeâtre, qui ont une grande épaisseur, et qui
» sont, sans aucun doute, le gîte originaire des grès répandus sur
» les pentes. Le plateau, enfin, est formé par un dépôt de meu-
» lières ayant plusieurs mètres d’épaisseur, et donnant une multi-
» tude de gros blocs sur la bordure clu plateau. Ces meulières sont
» le plus souvent très compactes, légèrement bleuâtres, avec grains
» de Cfiara en assez grande abondance dans certains blocs ; d’au-
» très fois, elles sont cariées et jaunâtres ou rougeâtres à l’exté-
» rieur.
» Ce plateau intéressant montre, comme on voit, de la manière
» la plus incontestable, la position des sables du Périgord à grès
» ferrugineux et fer hydroxydé, au-dessous des meulières du cal -
» caire d’eau douce blanc de Périgord , comme à Cendrieux , situé
» à â myriamètres au nord-ouest de Domine. Si M. Coquand, dans
» ses nombreuses explorations, avait eu occasion d’aller, soit au
» signal de Cendrieux, soit dans la plaine de Bord, l’examen
» d’une de ces deux localités aurait suffi pour lui démontrer dans
» quelle erreur il tombait en voulant rapporter au terrain plio-
» cène les dépôts sableux et ferrifères de la bordure nord-est de
» l’Aquitaine ou de la Saintonge, du Périgord et du Quercy, »>
Aussi, en terminant cette courte réponse, je dis encore : « Dans
» le bassin tertiaire de l’Aquitaine, il y a pour nous des dépôts
» ferrugineux appartenant à plusieurs étages bien distincts. Ce
» sont : 1° celui de Tournon, qui forme la base de la mollasse éo-
» cène du JFronsadais, et auquel il nous semble impossible de ne
» pas rapporter ceux des bords de la Lémance, dans le Périgord ;
» 2° ceux des Landes, qui appartiennent très probablement au
» terrain pliocène, et auxquels on doit rattacher ceux de Mouchai!
» et de Lembége; 3 enfin, les poudingues ferrugineux de l’Entre-
» deux-Mers, qui sont postérieurs, et que nous rapportons au
» diluvium.
» Les gîtes ferrifères de l’Aquitaine ne peuvent donc être englo-
» bés dans un étage unique, indépendant des étages tertiaires
» inférieur et moyen, le terrain pliocène. La superposition dé*
» montre qu’il y en a de plusieurs époques : les uns éocènes,
» d’autres pliocènes, et d’autres diluviens. L’uniformité de carac-
» tères minéralogiques ne peut servir de point de départ pour leur
Soc. géol., ‘2e série, tome VIII. 3
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
n
» identification et leur classification. Peu de géologues, du moins,
» seraient disposés à partager cette manière de voir. Quanta nous,
» qui admettons sans difficulté que des causes semblables ont pu
» produire des effets semblables à diverses reprises, il nous est
» impossible de partager les opinions exclusives de M. Coquand.
» On éviterait la confusion, dans les classifications de terrains, en
» se laissant guider , non point par un caractère minéralogique
» commun a plusieurs choses distinctes , mais bien par les caractères
» de superposition et palêon téïôgiques. »
Séance du 18 novembre 1850.
PRÉSIDENCE DE M. ÉLIE DE BEAUMONT.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le
Président proclame membres de la Société :
MM.
Benoit, employé des Douanes, à Besançon (Doubs), pré-
senté par MM. Coquand et Pidancet.
Cordier fils aîné , ingénieur mécanicien , à Angouîème
(Charente), présenté par MM. Coquand et Bayle.
Maynard (Pierre-Félix), docteur en médecine, à Moncontour
de Poitou (Vienne), présenté par MM. Viquesnel et Descloi-
seaux.
De Nanclas (Edgar), propriétaire, à La Valette (Charente),
présenté par MM. Coquand et Bayle.
Smith de Jordanhill (James) , à Helenshurg, près Glascow
(Ecosse), présenté par MM. Ch. Maclaren et Ch. Martins.
Sir Walter Treyelyan , à Wallington, Morpeth (A ngleterre),
présenté par MM. Ch. Maclaren et Ch. Martins.
DONS FAITS a LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa-
vants , octobre 1850.
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
35
De la part de M. Joach. Barrande, Graptolites de Bohême
(extr. du Système silurien de la Bohème) ; in- 8, 7 k p., h pl.
Prague, 1850, chez l’auteur.
De la part de MM. Milne Edwards et Jules Haime , A mono -
graph of the British fossil corals , part. lre. — Corals f rom
the tertiary and cretaceous formations; in~4, 71 p., 11 pS. et
texte. Londres, 1850. À l’imprimerie de la Soc. paléonto'gr.
De la part de M. Ch. Lyell , On craters , etc. (Des cratères
de dénudation, et Observations sur la structure et la formation
des cônes volcaniques) (extr. du Quart. loiirn. of the geol.
Soc. of Lond. , vol. YI, part. !re) ; in-8, 28 p. Londres,
1850.
De la part du gouvernement britannique, Memoirs , etc.
(Mémoires pour la description géologique du Royaume-Uni,
« — Décade III) ^ in-4, 10 pl. et texte. Londres, 1850. Chez
Longman, Brown, Green and Longmans.
De la part de M. William King, A monograph, etc. (Mono-
graphie des fossiles permiens d’Angleterre) $ in -k, 258 p.,
28 pl. et texte. Londres, 1850. A l’imprimerie de la Soc.
paléontogr.
Comptes rendus des séances de lJ Académie des sciences ,
1850, 2e sem., t. XXXI, nos 19 et 20 ; in-4.
L’Institut , 1850, nos 879 et 880} in-4.
Bulletin de la Société de géographie , 3e série, t. XIV,
n° 81 , septembre 1850 $ in-8.
Annales scientifiques , littéraires et industrielles de l’ Au-
vergne, t. XXIII, mai et juin 1850; in-8.
Annales de la Société d’agriculture , sciences , arts et com-
merce du Puy , t. XIV, 2e sem. 18/19; in-8.
Annales de la Société d’ émulation du département des
Fosges , t. VII, 1er cah., 1848; in-8.
The Athenœum , 1850, nos 1202 et 1203.
Sitzun gsherichte , etc. (Bulletins des séances de l’Académie
impériale des sciences de Vienne : — Classe des mathématiques
et sciences naturelles) , année 1850, mars à mai , cahiers 3
à 5.
Statulen , etc. (Statuts de la Société géologique de l’intérieur
de l’Autriche); in-8, 16 p. Gratz, 1844.
SÉANCE DE 18 NOVEMBRE 1850.
36
Bericht , etc. (Bulletins de la Société géologique de Finie-
rieur de F Autriche). Gratz, 1817 à 1850, à cah.
Steiermarkische Zeitschrift (Journal de Styrie). Gratz, 1836
à 1844, 10 cah.
Stat ni en , etc. (Statuts de la Société des sciences naturelles
du duché de Nassau)} 16 p, Wiesbaden, 1819.
Jcihrhucher, etc. (Annales de la Société des sciences natu-
relles du duché de Nassau), 6e cahier. Wiesbaden, 1850.
Nettes Jahrbuch , etc. (Nouvel Annuaire de minéralogie, de
géognosie et de géologie, de MM. de Leonhard et Bronn\
année 1850, 5 cah. Stuttgardt.
Bulletin de la Société impériale des naturalistes de Moscou ,
1819, n° 4; 1850, n<» 1.
Arsberaettelse ■ etc. (Rapports annuels sur les progrès de la
technologie pendant les années 1812, 1813, 1811 et 1816,
présentés à l’Académie royale des sciences de Stockholm par
M. Pasch) ^ 4 cah. in-8, de 58. 37, 70 et 58 p. Stockholm,
1819.
Arsberaettelse , etc. (Rapport annuel sur les travaux et dé-
couvertes relatifs à la botanique pendant les années 1813 et
1811, présenté par M. Wikstroem): 2 vol. in-8, ensemble de
818 p. Stockholm, 1819. Chez Norstedt et fds.
Arsberaettelse , etc. (Rapport annuel sur les progrès de la
chimie pendant l’année 1817, présenté parM. Svanberg) in-8,
171 p. Stockholm, 1819.
Nagra reflexioner. , etc. (Réflexions sur l’étude delà chimie
et l’état actuel de cette science : Discours prononcé à l’Aca-
démie royale des sciences de Stockholm, le 11 avril 1819, par
M. Svanberg)-, in-8, 31 p. Stockholm, 1819.
Kongl . vetenskaps , etc. (Mémoires de l’Académie royale des
sciences de Stockholm, pour les années 1817 et 1818, lre part.) ;
in-8.
Ofversigt , etc. (Comptes rendus des travaux de l’Académie
royale des sciences de Stockholm), 1818, nos 7 à 10 $ in-8.
Proceedings of the Academy of natur al sciences of Phila-
delphia , vol. Y, nos 3 et 1 ; in-8.
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
37
M. de Verneuii offre à la Société , de la part de l’auteur, un
ouvrage intitulé : A monograp/iy of the permian fossils of
En g! and , par M. King, et rappelle qu’il en a déjà parlé ici
comme d’un ouvrage impatiemment attendu, et qui accompli-
rait en Angleterre, à l’égard des dépôts placés entre le terrain
lîouilier et le trias, ce qu’avaient commencé pour la Russie
l’ouvrage de MM. Murchison, de Keyserling et de Verneuii, et
pour l’Allemagne celui de M. le professeur Geinitz.
M. King comprend sous le nom de système permien le tower
new ved sandstone , le mari slate , et le magnesian Hmestone
d’Angleterre. Voici prés de dix ans qu’il en recueille les fos-
siles pour en faire l’objet d’une étude spéciale , et il n’a rien
négligé pour s’éclairer et s’entourer de tous les matériaux et
documents utiles. Aussi est-il parvenu à présenter un tableau
général comprenant 277 espèces réparties dans 114 genres. De
ces 277 espèces, 143 se rencontrent en Angleterre et en Ir-
lande, 100 sont propres à ces deux contrées, tandis que 73
sont exclusivement russes, et 61 exclusivement allemandes.
M. de Verneuii rappelle qu’il y a quelques années les dépôts
dont il s’agit ici étaient encore l’objet de controverses , quant à
leur classification. Certains auteurs , mettant en relief l’appari-
tion à cette époque d’animaux respirant l’air en nature, tels
que les Sauriens, qu’on n’avait jamais trouvés plus bas, unis-
saient ces dépôts à la série secondaire, dont ils en faisaient la
base, tandis que d’autres, envisageant la physionomie générale
de la faune, les considéraient comme plus en rapport avec le
terrain paléozoïque.
L’ouvrage sur la Russie où cette question fut traitée in ex-
tenso , et la découverte de squelettes de Sauriens dans les
schistes carbonifères de Sarrebruck, ainsi que celle d’empreintes
de pas de ces mêmes animaux dans les roches carbonifères, et
même dans les roches dévoniennes des Etats-Unis, ont beau-
coup éclairé cette discussion, que termine définitivement l’ou-
vrage de M. King. Ce savant, en effet, rappelant l’opinion émise
par MM. Murchison , de Keyserling et de Verneuii , s’y range
entièrement, et croit, comme eux, que par l’ensemble de ses
restes organisés, et surtout par ses Brachiopodes , le système
permien doit plutôt être rangé dans le terrain paléozoïque que
38
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
Hans le terrain secondaire, bien que, ainsi qu’on devait s’y
attendre, il offre quelques points d’union avec le trias.
M. Michelin annonce à la Société la perte qu’elle vient de faire
par le décès de M. Defrance, le doyen des géologues français,
et l’un des fondateurs de la Société.
M. Damour voudra bien se charger de rédiger une note bio-
graphique sur notre vénérable confrère.
M. de Verneuil annonce à la Société la perte regrettable
qu’elle vient de faire dans la personne d’un de ses membres
étrangers les plus distingués, M. Troost. Bien qu’avancé en
âge , M. Troost avait conservé une ardeur de travail , un amour
de la science qui faisaient oublier ses années, et lui attiraient
la sympathie des jeunes adeptes des sciences naturelles en Amé-
rique. Professeur depuis plus de vingt-cinq ans à l’université
de Nashville, capitale du Tennessée, il s’était acquis à tel point
l’estime et la considération de ses concitoyens, que les journaux
du pays, qui annonçaient sa mort, étaient bordés de noir en
signe de deuil. Tous les jeunes géologues étrangers ou améri-
cains qui parcouraient l’Union se faisaient un plaisir d’aller
visiter ce Nestor de la géologie et ses magnifiques collections.
Tous étaient reçus et logés chez lui. M. de Verneuil aime à se
rappeler la visite qu’il lui fit, en 1846, avec MM. Daîe Owen et
Norwood, aujourd’hui géologues très distingués, la cordiale
hospitalité que tous trois y reçurent, et ces causeries toujours
inspirées du feu sacré de la science, où le bon vieillard lui ra-
contait les divers épisodes de sa vie aventureuse. Au commen-
cement de ce siècle , M. Troost quittait la Hollande pour Î’île de
Java. Arrêté dans son projet, il vint chercher fortune en Amé-
rique, et fit d’abord partie, avec MM. Maclure, Lesueur et Say,
de cette communauté qu’un utopiste, homme de bien, M. Robert
Owen, fonda à New-Harmony, en Indiana. La communauté de
New-Harmony dura peu et succomba aux causes de mort que
recèle en soi toute doctrine communiste non fondée sur le
sentiment religieux et la renonciation individuelle aux biens
terrestres. M. Troost alors accepta une place dans la jeune uni-
versité de Nashvil le, dont il fut un des membres les plus émi-
nents. Ce fut là qu’il publia la plupart de ses travaux. Nommé
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1&Ô0. 39
géologue de l’Etat de Tennessée, il fit six ou sept rapports sur
les richesses minéralogiques de cette belle contrée , alors en
partie sauvage \ et comprenant dés l’abord l’importance des
animaux fossiles en géologie, il en forma une magnifique col-
lection. Il publia les formes les plus intéressantes dans un des
volumes de la lre série de nos Mémoires, et dans quelques
autres recueils scientifiques des Etats-Unis. C’est particulière-
ment en Encrines que sa collection était remarquable, et la
mort est venue le surprendre au moment où il allait publier une
monographie des Crinoïdes d’Amérique , qui renfermait la des-
cription de 80 espèces, dont il a donné la liste dans le journal
scientifique de Silliman. Ses collections, qui renferment aussi
un cabinet de minéralogie d’une très grande richesse, seront,
dit-on, achetées par l’université de Nashville.
M. Bourjot donne lecture de la note suivante :
Note sur le gisement des schistes bitumineux à impressions de
végétaux de Ménat , sur la chaleur présumable dfun dyke
basaltique , non venu au jour au point ou une partie massive
de ces schistes a été transformée en tripoli par la chaleur
souterraine : considérations générales sur ce sujet ; par
M. Bourjot.
La localité de Menât est trop connue comme le point d'un dépôt
de schistes renfermant un très grand nombre de végétaux fossiles
et des poissons à l’état de pyrites, pour que j’entretienne la Société
d’un sujet déjà élucidé. La note que je vais lire a pour but de cor-
roborer la communication que notre confrère, M. Ch. Martins,
a faite à notre dernière séance, en montrant que l’effort de Faction
souterraine qui sillonnait intérieurement le massif central de la
France, à F âge de l’éruption des basaltes et des domites, qui ont
dû se suivre d’assez près, est venu mourir vers le N. -O. de la ligne
du Puy, dans le fond de la houillère de Commentry. Vers le N.-E.
du plateau on connaît un dyke basaltique formant à jour un petit
dôme à 2 kilomètres du bourg de Couches, à 500 mètres du gise-
ment des arkoses chromés des Ecouchets. De ce côté , comme on
le voit, ce dyke a agi seul, et loin de plus de 60 lieues de l’aide de
ses confrères de l’Auvergne. Or le gîte de Ménat se trouve à peu
près au point intermédiaire entre les derniers volcans éteints de la
SfiAlfcE DE 18 NOVEMBRE 1850.
h0
chaîne volcanique et Commentry , mais en appuyant lin peu au
N. -E. Mais à Menât l’effort a été basaltique. M. JLecoq a signalé,
en effet, vers le haut du bourg de Ménat, et un paysan me le dé-
signait à moi-même cette année, une tête de dykc de basalte,
sous le nom de pierre noire. Examinons l’action d’un autre dyke
de basalte qui n’a pas fait sa pointe au jour, mais en doit être peu
distant, et qui a converti en tripoli le dépôt feuilleté d’argiles
légères du ravin du bas Ménat. Ce schiste recuit conserve les
empreintes de feuilles et même de poissons, quand ceux-ci ne se
sont pas trouvés pris dans de la pyrite de fer. 11 est devenu l’occa-
sion de deux petites exploitations, et un marchand droguiste en
couleurs de Clermont vient d’acheter à la commune , moyennant
O, 000 fr., le droit de fouiller sous le sol même de la route et il
espère avoir fait une bonne spéculation , tant ce tripoli acquiert de
finesse et de qualité sous la meule.
Je mets sous les yeux de la Société un échantillon n° 1 , avec
impression de feuilles : ici le schiste est cuit. Le n° 2 montre le
schiste à l’état intact de toute action focale. Le n° 3 est un poisson
qui , pris dans un bloc de pyrite, dont il a été la cause d’attraction
moléculaire , est passé à l’état d’oxyde de fer. Dans ce point où il
a été pris les schistes ont éprouvé la plus forte action de chaleur,
et déjà une sorte de demi-vitrification arrivée au premier degré,
ou de boursouflement scoriacé.
La masse exploitable ouverte le long du ravin peut avoir
Ô0 mètres de côté et en long. Ou s’étend- elle du côté des champs?
C’est ce qu’on ne sait pas encore. Le passage des schistes modifiés
à ceux qui ne le sont pas est presque brusque ; seulement, au con-
tact, les schistes cuits sont blancs, et leur état feuilleté bien con-
servé. Si l’on remonte le ravin creusé dans la masse même , on
arrive à peu près à 200 mètres à la fin du dépôt, qui s’appuie sans
aucun intermédiaire sur le gneiss feuilleté et décomposé formant
le fond et les bords de ce bassin étroit, qui avait sa décharge,
comme un étang très long, vers la petite vallée dans laquelle coule
le ruisseau, tributaire de la Sioule. C’est à ce point élevé où les
schistes ont été un peu redressés et sont toujours émergés hors de
l’eau du ravin , que les botanistes paléographes peuvent faire de
faciles récoltes en impressions de feuilles et en poissons, pris mal-
heureusement, le plus souvent, dans la pyrite de fer. Cette année
encore , notre confrère , M. Pomel , a ramassé de nombreuses
empreintes de végétaux. Il faut laisser à son habileté reconnue le
soin de déterminer cette flore , qu’il rapporte à la première vue à
l’étage pliocène inférieur.
SÉANCE DU 18 NOVE?
RE 1850.
4i
Le changement d’état de ces schistes, leur changement de colo-
ration, due à une chaude qui a fait passer le fer pyrite ux à l’état
d’oxyde de fer, ne peut s’expliquer, comme le changement de
houille en coke à Commentry, que par l’action d’une autre tête
de dyke basaltique qui, prenant ces schistes en dessous, n’est pas
venu lui-même au jour. Mais quel degré de chaleur pouvait avoir
et communiquer un dyke pâteux de basalte , un courant ascension-
nel de cette matière pyroxénique, qui, par refroidissement, prend
une compacité, une sonoréité notables, et une énorme résistance
aux destructions atmosphériques? Cette température devait être
faible, si l’on juge par Faction du dyke de Commentry sur la
houille, sur celle du dyke caché, sur des schistes de Ménat , sur
celle des calcaires argileux tertiaires de la tour de Boulade, de Ger-
govia, sur celui d’une cheminée basaltique , ainsi que sur diffé-
rents fragments de calcaire lacustre à peine modifié (il n’est qu’un
peu plus blanc, et un peu plus compacte), que je recueillais sous
l’énorme masse basaltique delà Denize, près le Puy-en-Velay.
J’ai trouvé le même eff et peu sensible des coulées basaltiques sur
les argiles tertiaires à la tour de Boulade, à Gergovia, que je voyais
très bien cette année sur la tranchée de la route qui conduit tout
près du domaine de l’abbaye de Doue , habitée par notre très hos-
pitalier confrère, M. Bertrand de Doue. Dans les argiles tertiaires
du bassin du Puy, en effet, les modifications n’atteignent pas de
grandes épaisseurs : pour la houille et les argiles, à quelques déci-
mètres au plus ; pour les schistes de Ménat, sur une profondeur qui
ne doit pas excéder l\ à 5 mètres, en notant que ces schistes étaient
un dépôt lacustre d'une ténuité extrême, et très richement chargé
de parties carbonisées par la voie humide, et facilement carboni-
sables au feu.
Le granité, au contact avec la pâte basaltique qui l’entraînait
en fragments, ne perdait pas sa dureté, son homogénéité; son
feldspath ne cuisait pas, comme le prouve un bel échantillon de
leptynite granitôide à cassure nette que je trouvai au centre d’une
rondelle d’un prisme énorme de basalte, que je dus me procurer
(n° 5) à l’aide de la masse et du bras vigoureux d’un ouvrier car-
rier. De semblables fragments de granité leptynique se trouvent
empâtés dans les deux dykes basaltiques autrefois injectés dans la
masse argileuse tertiaire du bassin du Puy, et qui aujourd’hui, iso-
lés, forment les deux rochers si singuliers de Corneille et de Saint-
Michel, sur le dernier desquels est bâtie la charmante chapelle
romano-byzantine de ce nom. A peu de pas de l’entrée de la cha-
pelle, on trouve une remarquable incrustation de granité; il y en a
SÉANCE DU d8 NOVEMBRE 1850.
42
plusieurs à toute hauteur, et la roche feldspathique n’a subi
aucune altération. Par contre, je montre ici un morceau de gneiss
passant au granité , à éléments séparés , comme tout le granité du
Limousin, profondément effrité dans sa portion feldspathique, et
qu’autrefois je ramassai à la porte de la fabrique de porcelaine
de M. Alluaud, à Limoges; il avait fait évidemment partie des
matériaux de la chemise d'un four à porcelaine.
Les argiles de Gergovia, et notamment celles de la tour de Bou-
lade, ont à peine éprouvé un changement de coloration et de so-
noréité au contact du culot basaltique, qui, lui aussi, est resté
enfoui dans la profondeur sans sortir à jour.
De tout ceci on peut inférer que la coulée basaltique contenait
moins de calorique intrinsèque, que n’en renferme un four à por-
celaine, qui, d’après l’ouvrage de M. Brongniart sur les arts cé-
ramiques, s’élève pour le dégourdi , à peu près à 432°, et celui
pour le grand feu, à 1,138°, moins donc encore que nos feux
d’aciéries qui, me disait M. Bigaud, peuvent accumuler 1,400°
du thermomètre centigrade. Seulement cette chaleur était suffi-
sante pour sublimer les métaux et les silicates. Comme les py-
roxènes, le fer spéculaire est commun dans les domites et dans les
laves modernes de Lipari et de Stromboli.
Les mésotypes ont été aussi sublimées par cette chaleur des bar
saltes qui en contiennent des efflorescences cristallines dans leur
parties bulleuses.
Les basaltes, en arrivant au jour, avaient moins de chaleur que
n’en donnent la houille et le charbon de bois brûlant en tas ; et la
mine de houille de Commentry, là où elle est embrasée, a plus
d’action calorifique sur les schistes terreux qui la couvrent, qu’elle
change en grès lustré, que les dykes qui ont sillonné ses profon-
deurs. N° 6- Wedgwood donne à son pyromètre le point 580°
de zéro au rouge naissant. M. Péclet ( Traité de la chaleur ) donne :
Au rouge 649°
Et au rouge orange. . . 899°.
Mais nous trouvons que la chaleur du basalte coulant était
moins forte que le grand feu des fours à porcelaine, et à peu près
égale au dégourdi vers Ù30°, c’est à-dire, à quelque chose comme le
rouge brun, ou, pour comparaison technique, ne devait donner de
lumière que celle très faible qui s’échappe d’une masse de laitier
déjà parvenue au bout de la halle; que cette chaleur devait se per-
dre rapidement lorsque la masse venait au jour, ou encore mieux
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850. k 3
en traversant des masses d’argiles tertiaires imprégnées d’eau si
elles étaient émergées. Alors s’explique le prompt retrait prismati-
que des masses basaltiques, avec cette remarque que la cristallisa-
tion par retrait s’est mieux faite dans l’épaisseur du sol humide, ou
peut-être dans l’eau, que la masse traversait, qu’à l’air libre.
Sur à peu près 100 prismes basaltiques plantés pour garde-fous
de la route, que je me suis amusé à compter et à noter dans leur
forme, j’ai trouvé, ce qui était déjà connu, les proportions sui-
vantes :
Hexagone régulier. ... 1 1 1 ^
— irrégulier. . . 5)
Pentagone 7
Tétragone 4
Heptagone 2
:: 16 : 7 : 4 : 2.
En résumé, et comme conclusion de ce travail , nous croyons
que les coulées basaltiques domitiques, non plus , et peut-être
moins encore les dykes granitiques, porphyriques, les serpentines,
ophites, etc., n’ont eu qu’une influence bien faible au contact (je
l’ai vu vingt fois pour les granités, sur les pliyllades satinés de la
Vendée, et jusque dans une rue de la très déserte ville de Bour-
bon-Vendée ; dans les Vosges, à Plombières), et à peu près nulle à
distance , que le métamorphisme en grand, celui du lias métamor-
phique des Alpes, comme nous le montrait M. Sismonda, au-des-
sus de Moutiers, avec ses bélemnites spatliisées en blanc, dans un
lias converti en marbre rose ; que le même lias changé en grès
aux environs d’Avallon, tandis que, dans le four à chaux, à peine
change-t-il d’aspect, que les masses de marbres de Carrare et de
Serravezza, piquées de sublimations sulfureuses et de mercure sul-
furé, ont dû leurs modifications à des causes émissives de chaleur plus
grandes que des dykes de basaltes, de domites, de trachytes, déjà
refroidis au passage de leurs cheminées, à plus forte raison de gra-
nités et de porphyres , probablement presque froids à leur arrivée
au jour. Je ne nie pas non plus absolument l’action à courte dis-
tance d’un dyke de porphyre, pour les pièces 9 et 9 bis.
Je montre que dans la forêt de Darney, près la forge de là H utte,
il existe un amas mince de quartzite et de grès bigarré , çà et là
marqué de jaspe rouge non loin d’un dyke ; en recherchant bien, je
trouvai la tète d’un dyke de porphyre qui a certes modifié le grès
bigarré qui fait, le sol de cette forêt, et l a rendu lustré, compacte,
et faisant feu au briquet. Cette très légère circonstance est devenue
SÉANCE DE 18 NOVEMBRE 1850.
44
agréable aux fumeurs des usines, en alimentant leur provision de
pierre à briquet, fort rares dans toute la contrée, recouverte, jusqu’à
Epinal et Plombières, de grès bigarré, sableux et friable.
Les schistes de Ménat ont éprouvé un redressement. J’ai trouvé
que la direction du plongement était du N. 7U O. au S. 7° E.
En haut du ravin , à 50 mètres plus bas, ils sont presque à l’état
horizontal, et là ils ont été recuits.
Ainsi le phénomène de cuisson et le phénomène de renversement
ne sont pas en rapport l’un avec l’autre , comme on aurait pu le
croire, et je ne trouve aucun rapport entre le redressement supé-
rieur des schistes non recuits et le point inférieur qui a été modifié
par le feu souterrain.
Les basaltes, en sortant de terre, ou en s’approchant de la surface,
n’auraient donc eu qu’une force très faible de redressement, et il
faut attribuer à d’autres causes que les éruptions basaltiques des
grands changements dans le relief du sol.
Mais il faut assigner les causes ci-dessus à des effluves calorifiques
sorties de la terre lors de la fracturation du sol, et donnant des tem-
pératures qui devaient dépasser 1 2 à 1 ,500 degrés, et ce n’est que se-
condairement que, dans certains cas, les dyhes se sont fait jour par
les fentes produites, ou au moins sur les mêmes lignes de fractures,
de sorte que les métamorphismes des masses calcaires primordiales
et secondaires, et la dolomitisation, seraient des phénomènes cl’un
ordre plus vaste, plus grand que l’intrusion des roches éruptives
du centre à la périphérie, quoique ces deux actes d’une même ac-
tion, la fracturation de l’écorce terrestre, aient pu s’aider toujours,
s’accompagner quelquefois.
M, Yiquesnel communique le mémoire suivant de M. Four-
net :
Lettre à M. Viquestiel membre de la Société géologique de
France, sur les tej'rains anciens et secondaires du Languedoc,
par M. J. Fournet, professeur de géologie à la Faculté des
sciences de Lyon.
Lyon ,Me 24 octobre 1850.
Mon cher ami ,
L’intérêt tout spécial que vous avez pris, dès l’année 1844 (1),
(0 Voy. Bulletin geo/., 2e sér., t. I, 1844, p. 786, et t. VI, 1849,
p. 625.
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
à mes premières études sur les terrains des environs de Nefliez
(Hérault) , me détermine à vous rendre un compte sommaire des
résultats définitifs auxquels nous sommes parvenus, M. Graff et
moi , dans notre exploration du mois d’octobre courant.
Vous le savez déj'i, plusieurs années ont été consacrées à, des
recherches faites, soit isolément par chacun de nous , soit en com-
mun , et la cause de cette consommation de temps a été la pru-
dence que nous devions apporter dans un exposé qui tend à bou-
leverser plusieurs systèmes préconçus à l’égard de l’importance
de certains fossiles, qui est appelé à détruire quelques hypothèses
sur les soulèvements , et qui doit enfin jeter un jour nouveau sur
la géologie d’une partie de la France. Par cela même que les
questions mises en jeu étaient plus graves, c’était pour nous un
devoir d’autant plus impérieux de ne rien livrer au hasard , et
maintenant qu’il 11e nous reste plus aucun sujet de doute , nous
osons espérer que vous voudrez encore une fois être notre inter-
prète auprès de la Société.
Pour mieux faire saisir l’objet de notre travail, pennettez-nous
d’émettre, au préalable, un aperçu général au sujet de l’ensemble
placé sous nos yeux.
La station de Nefliez est située sur le flanc d’une chaîne orientée
de l’E.rN.-E. à l’ü.-S.-O., commençant à 10. avec les rampes de
la Montagne-Noire, près de Sorèze , et se rattachant à l’E. avec
les dépendances des Cévennt s.
Cette chaîne , mesurée entre le bassin de Saint-Ferréol et l’Hé-
rault , près de Clermont-de-Lodève, donne une longueur d’environ
30 lieues. Elle présente , entre autres subdivisions essentielles, la
Montagne-Noire proprement dite, l’Espinouze et l’Escandorgue ;
d’ailleurs son altitude à l’Espinouze, à peu près sur le milieu de
l’étendue totale, étant de 1280 mètres, c’est assez dire qu’elle doit
figurer au rang des hautes arêtes dépendantes du massif de la
France centrale.
Ces premiers détails feront comprendre que nos prétentions
n’ont pas dû s’élever jusqu’à la connaissance complète d'un pareil
ensemble; elle était même inutile pour notre objet spécial, qui
consistait à décrire les environs de Neffîez. Cependant, pour ne rien
laissera désirer, nous avons encore fait plusieurs coupes et relevés
d’un ordre plus général, en partant, autant que possible, des terrains
primordiaux pour aboutir aux formations jurassiques, ou num-
mulitiques, ou tertiaires, de Caunes, de la Caunette, de Fouzilhon
et de Nefliez
Les résultats de ces coupes ont établi : 1 l’indépendance réci-
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
/|()
proque des terrains gneissiques de l’Espinouze et des terrains de
transition juxta-posés en adossement.
2° Ces terrains de transition s’épanouissent au fur et à mesure
que l’on avance de l’E. vers 10.. et ce développement fait immé-
diatement comprendre que leurs subdivisions doivent montrer
quelques modifications minéralogiques sur les divers points de
leur étendue. Cependant ces modifications ne sont pas poussées
au point de rendre méconnaissables les couches qui les ont subies ;
il reste des assises normales qui peuvent servir de guide , en sorte
que le raccordement général est facile.
3° A l’exception de quelques accidents locaux, nous avons trouvé
partout une orientation ainsi qu’un redressement uniformes , en
ce sens que la direction des terrains de transition est constamment
de l’E.-N.-E. à l’O.-S.-O., comme celle de la chaîne dont ils con-
stituent une partie essentielle ; en outre , leur pendage a lieu sous
un angle généralement fort , c’est-à-dire d’environ à0° , plus ou
moins, vers le S.
Zi" Enfin , sur cette zone dite de transition , sont superposés les
terrains houiller, permien , triasique et jurassique , toujours avec
les mêmes allures , avec des discordances si peu prononcées , ou
même avec des liaisons quelquefois si intimes , qu’il devient très
difficile d’établir, entre plusieurs de ces formations , des disjonc-
tions parfaitement motivées.
Nous venons d’annoncer quelques modifications du terrain de
transition dans le cours de son extension de l’E. vers l’O. , c’est-à-
dire , de Neffiez vers Caunes. Il en est résulté que , par un de ces
coups de fortune dont nous ne saurions assez nous féliciter, la sta-
tion de Neffiez a présenté la plus grande contraction , les roches
les plus multipliées , et une accumulation de fossiles telle que peu
de localités étrangères peuvent en offrir une pareille. C’est là qu’il
nous a été donné de puiser à pleines mains cette réunion remar-
quable qui nous autorise à jeter le doute sur les subdivisions pro-
posées pour les formations analogues des autres contrées. D’ailleurs,
dans cette même station , les terrains plus récents se trouvent
portés au jour, tandis que sur le reste de l’extension de la chaîne
ils demeurent plongés sous l’épais manteau nummuli tique ou ter-
tiaire; et, sous ce rapport encore , les environs de Neffiez se prê-
taient à des considérations dont l’importance ne devait pas nous
échapper.
Les causes de cette exubérance géologique sont multiples. Les
éruptions basaltiques de l’Escandorgue , ainsi que les émissions de
porphyre quartzifère des bords de la Lène , de la Tongue et de la
SÉANCE M) 18 NOVEMBRE 1850.
hl
Peyne, sont sans doute entrées pour beaucoup dans le phénomène.
Elles ont surexhaussé les formations secondaires; elles ont peut-
être aussi donné naissance à des espèces de hauts-fonds, sur lesquels
les récifs madrépôriques des temps anciens ont pu s’implanter avec
tout leur cortège de mollusques et de crustacés divers. Mais ces
émissions ne suffisent pas pour rendre raison de l’ensemble des
faits. Si donc , au lieu de s’en tenir à ces phénomènes locaux , on
envisage l’ensemble de la structure géologique de la contrée, on
découvre bientôt , entre les deux promontoires opposés et primor-
diaux du Yigan et de Clermont-cle-Lodève , l’entrée d’un vaste
golfe, par lequel les eaux des mers houillères , triasique et juras-
sique ont pénétré jusqu’au cœur de la France centrale. L’ébauche
de ce golfe remonte indubitablement au delà de l’époque houillère,
puisque les produits de celle-ci en tapissent çà et là le fond. Or c’est
assez près du goulet de cette ancienne échancrure que se trouve
Neffiez. On conçoit donc que des courants qui débouchaient de ce
côté ont pu y déterminer de temps à autre des créations aux-
quelles une position moins spéciale ne pouvait se prêter. D’ailleurs,
et quoi qu’il en soit de ces considérations , les exceptions n’infir-
ment en rien nos conclusions générales , car nous démontrerons à
la fin de notre travail que des dépôts de fossiles de transition sont
enchevêtrés les uns dans les autres , de telle manière qu’il n’est
plus possible d’accorder aux subdivisions silurienne , dévonienne
et carbonifère . établies d’après les terrains anglais, ni la généra-
lité d’application , ni la propriété de caractères qu’on leur prêtait.
Après avoir fixé les prémisses, passons à l’exposé des principaux
caractères de chacune des formations dont il vient d’être fait men-
tion.
Terrains primordiaux .
L’Espinouze domine tout l’ensemble que nous avons parcouru.
C’est un vaste et haut plateau aux flancs rapides, hérissé de quel-
ques dentelures sur ses bords , mais dont le dos plus ou moins
ondulé est couvert de prairies tourbeuses , de quelques forêts de
hêtres séparant des espaces cultivés.
Essentiellement composé de granité et de gneiss, il offre tous
les caractères des roches du Pilât. Cependant des traces d’érup-
tions syénitiques viennent compliquer cette constitution , et elles
peuvent rendre raison des rudiments de métamorphisme que le
terrain de transition présente çà et là , près de son contact avec les
masses primordiales.
/iB
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
Au surplus, les gneiss de 1 Espinouze , quoique fortement plis-
sés, montrent encore quelques indices de la direction générale de
la chaîne , mais avec des inclinaisons qui sont le plus souvent
inverses de celles des systèmes de transition et secondaires.
Terrains de transition .
Les terrains de transition appliqués contre les masses précédentes
sont formés par un ensemble de schistes et de calcaires disposé de
manière à constituer un premier gradin , profondément découpé
en forme de montagnes aux cimes généralement arrondies , dénu-
dées, et d’une triste monotonie. Leurs rampes constituent la région
des châtaigniers et des chênes verts; la vigne est cultivée dans les
concavités les plus profondes.
La direction de ces schistes suivant une ligne E.-N.-E. à
O.-S.-O. , ainsi que leur friabilité, due à une schistosité impar-
faite, à des replis et à des clivages multiples, se combinent avec
le surcroît de résistance offert par les calcaires, de manière à don-
ner le secret de la marche des érosions, qui ont entaillé dans cette
zone diverses vallées longitudinales, et notamment celle clans la-
quelle sont placées les villes montagnardes de Saint-Pons, Olar-
gués, Hérépian et Bédarrieux. L’énorme épaisseur de cet ensemble
fait aussi comprendre pourquoi la route commerciale de Mont-
pellier à Toulouse est établie, non pas sur les plaines languedo-
ciennes, mais suivant l’axe , et dans l’intérieur d’une chaîne d’un
difficile accès dans le sens transversal. Elle y a trouvé à la fois une
dépression à fond presque plat, une ligne droite, et divers centres
d’une industrie active.
Il s’agit actuellement de passer de ces considérations orographi-
ques à celles qui sont relatives à la composition , et pour cela il
convient de faire observer au préalable que la masse dominante
consiste en schistes, dans lesquels sont noyés les calcaires. Ceux-ci
constituent d’ailleurs des bandes complexes, en ce qu’elles sont
divisées par des retours schisteux. Ces bandes, dont l’épaisseur est
sujette à varier, prennent quelquefois la forme de lentilles, et
s’effacent même complètement sur certains points. Cependant en
faisant abstraction des assises insignifiantes, et en considérant
comme un seul tout celles qui ne sont pas séparées par des assises
schisteuses trop puissantes , on peyt les réduire à quatre masses
principales , dont les caractères sont assez tranchés pour offrir
quelque prise aux spécifications minéralogiques.
Ces roches alternent de la manière suivante :
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
49
A. Première série schisteuse très puissante. La roche est géné-
ralement peu métamorphique, le plus souvent d’un vert sale,
quelquefois rubéfiée, rude ou lustrée, ou même simplement ardoi-
sée , mais rarement capable de fournir une ardoise de qualité suf-
fisante pour la toiture. Dans cet ensemble, on trouve déjà quel-
ques quartzites verdâtres ou d’un blanc sale et à grain très fin.
B. Première série calcaire , dont le type se montre à Saint-
Pons. Ils sont massifs ou schistoïdes, cristallins, blancs, ou colorés
en rose ou en gris, de manière à fournir quelques marbres assez
beaux. On en retrouve les analogues auprès de Soumentre , entre
Yailhans et Bédarrieux.
C. Deuxième série schisteuse analogue à la première.
Z). Deuxième série calcaire , plus essentiellement caractérisée
par son état schisteux , presque fibreux, et par sa couleur grise.
Entre Faugères et Dérépian , ces calcaires sont précédés par une
puissante assise de cargnieules brunissantes et de dolomies blan-
ches, bulleuses, et dont la désagrégation sableuse a valu à la dé-
pression longitudinale, où elle domine, le nom de vallée des
A ré nasses. Cette masse est d’ailleurs séparée des calcaires voisins
par une série schisteuse peu puissante en comparaison de l’en-
semble.
Les deux zones calcaires qui précèdent forment avec les schistes
un système tellement épais que l’on pourrait être tenté de le re-
garder comme constituant un terrain de transition ancien, et cela
d’autant mieux que la rareté des fossiles, qui se réduisent à des
débris deCrinoïdes, donnerait au besoin quelque poids à cette
séparation. Mais cette manière de voir aurait contre elle la liaison
intime, ainsi que la similitude de composition avec les parties su-
perposées. En effet, si l’on continue à cheminer du N. vers le S.,
ou autrement dit, si l’on s’élève dans l’ordre des dépôts, on ob-
serve encore les alternances suivantes :
E. Troisièmes schistes analogues aux précédents ; mais ceux-ci ,
sans solution de continuité aucune, cèdent peu à peu la préémi-
nence à des quartzites qui, jusqu’alors, s’étaient montrés très clair-
semés. Ces quartzites sont encore verdâtres, ou d’un gris sombre,
d’un grain très fin, presque compactes, et d’une grande dureté.
Ils sont accompagnés de quelques conglomérats peu grossiers, de
schistes fortement carbures . qui semblent indiquer des apparitions
anthraeiteuses; enfin diverses empreintes végétales complètent ce
prélude de la formation houillère.
Ces schistes avec quartzites renferment auprès de Nefïiez des
gâteaux de marnes turbinées (Tophus thrbinatus de Linné), espèce
Soc. g (fol.. $e série, tome Yïïî 4
50
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
de Ludus dont la partie scîiisteuse est tourmentée de la manière la
psus singulière par la cristallisation d’un ciment calcaréo-ferrugi-
neux , affectant la forme dite en tête de clou arrondie. Leur centre
est assez ordinairement occupé par de magnifiques Trilobites de
diverses espèces, parmi lesquelles on distingue un Âsaphus gigan-
tesque, associé à des Graptolites. Quelques uns ne renferment que
des Orthis.
F. Troisième zone calcaire , que l’on peut subdiviser en trois
parties, de la manière suivante :
1° Assise inférieure très puissante, mal stratifiée, cristalline,
grise et bitumineuse. A Neffiez elle est riche en Crinoïdes et en
Polypiers. On y trouve aussi quelques coquilles fossiles.
2° Assises moyennes de couleur rouge veinée de blanc , et don-
nant à Gaunes les beaux marbres du Languedoc, connus sous les
noms à? incarnat et de cervelat. A Félines-d’Hautpoul , comme à
Neffiez, on y trouve des bancs subdivisés par de minces lames
schisteuses, contournées de manière à se mouler autour de noyaux
ellipsoïdaux, qu’un examen plus attentif fait bientôt reconnaître
pour des Goniatites. Si à cet état se joint une certaine compacité,
avec une teinte d’un rouge vif, on a le beau marbre griotte. Ces
assises rouges sont d’ailleurs généralement riches en fossiles, tels
que Encrines, Orthocères, Cyrthocères, Polypiers, Productus, etc.
Une assise grise sous-jacente se distingue à Neffiez par ses jolis
fossiles pyritisés, puis convertis en hydrate de fer. Ce sont des Go-
niatites , Térébratules, Spirifer, Orthocères.
3" Assise supérieure grise et très bitumineuse, quelquefois très
épaisse et mal stratifiée , donnant à Caunes un marbre gris veiné
de blanc. A Neffiez , où elle est schisteuse, avec îlots calcaires , on
y trouve en abondance le Productus giganteus , des Spirifers, Bel-
lérophes, Evomphales , etc., etc.
G. Dernière apparition schisteuse. Elle est caractérisée par des
teintes ordinairement foncées, soit à cause de la prédominance des
parties carburées, soit à cause de la rubéfaction de l’oxyde de fer.
Ces schistes renferment çà et là des nœuds pyriteux dont la décom-
position vitriolique , suivie de réactions sur les éléments calcaires
des parties enveloppantes , donne naissance à des cristaux de gypse.
Près de Neffiez , ces mêmes schistes contiennent , en outre , des
bancs d’un calcaire noir, se délitant en boules, et offrant une
remarquable agglomération de fossiles, tels que Orthocères, Grap-
tolites, Cardioles, Encrines, Térébratules, etc. Ces bancs pren-
nent, d’ailleurs, vers la Combe d’Izarne, une grande extension, en
demeurant toujours très fossilifères, et, pour le signaler en passant,
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850. 51
ils offrent un des exemples les plus manifestes de cette oblitération,
sur laquelle nous avons fixé l’attention dès le début.
H. 1° Les schistes et calcaires schisteux précédents sont sur-
montés par un dépôt de quartzites différant de ceux dont il" a été
fait mention dans les subdivisions précédentes, en ce qu’ils sont
blancs , durs , à grain fin. Ils constituent une série de bancs minces,
généralement bien stratifiés, et contenant des Enclines. Cet en-
semble sert de support à la dernière nappe calcaire , qui elle-même
est encore subdivisée par de nouveaux retours de ces quartzites
blancs. Ainsi l’un a successivement :
2° Un calcaire grisâtre et finement cristallin , quelquefois dolo-
mitique, sans stratification et sans fossiles, pas même des Enclines.
Mais vers le haut, et du côté de Vailhans, on y trouve, au con-
traire , une nombreuse suite de ces productions organiques , telles
que des Çyathnphyllum , d’autres Polypiers , des Encl ines , et beau-
coup de coquilles fossiles qui ne sont pas encore déterminées.
3° Un second quartzite blanc ou rougeâtre , qui est un véritable
grès souvent désagrégé à l’état de sable. Les parties restées solides
montrent çà et là des Enclines.
Zi° Second calcaire très puissant , presque sans stratification , en
un mot analogue à celui du n° 2 ci-dessus. Il présente de nom-
breuses perforations circulaires, qui ne sont autre chose que les
vides laissés par des Polypiers détruits par les agents atmosphé-
riques, circonstance dont il est facile de s’assurer à l’aide de quel-
ques rapprochements qui conduisent à des Polypiers intacts.
5° Dernier quartzite dit de Roquenègre , à cause d’un caractère
particulier qu’il présente dans cette localité. Ce caractère consiste
dans le développement de globules ferrugineux, pisolitiques , et
dont la présence rend cette masse essentiellement variolitique. Le
quartzite en question devient d’ailleurs très fossilifère vers l’ouest
de Neffiez , où il couronne les Petit et Grand Glauzy.
6° Dernier calcaire, dont la physionomie est assez particulière
pour mériter une plus ample description dans notre travail d’en-
semble , dont nous ne donnons ici qu’un extrait. Ce calcaire est
surtout remarquable par ses fossiles, et aussi parce que, avec lui. se
termine la longue série des terrains de transition.
Terrain boitiller .
Parmi les détails dans lesquels nous venons d’entrer au sujet
delà constitution des terrains de transition , on a du remarquer
ceux qui concernent les préludes de la formation houillère. Ces
52
SÉANCE BL J 18 NOTE MURE 1850.
préludes , principalement condensés vers les parties supérieures de
la série , sont indiqués par les schistes fortement carbures, et quel-
quefois presque anthraciteux, par quelques conglomérats, et sur-
tout par des grès à empreintes végétales semblables à celles des
grès qui séparent les bancs de bouille. On comprend donc que le
terrain houiller doit succéder immédiatement, et c’est ce qui arrive,
en effet, à Neffiez. Bien plus, les directions et les inclinaisons sont
semblables de part et d’autre , quoiqu’il y ait en même temps une
certaine discordance dans la stratification , en ce sens que le ter-
rain de transition est généralement moins incliné que le terrain
houiller. Cette circonstance ne doit d’ailleurs nullement surprendre;
car, dans l’ensemble de Neffiez, si fortement éprouvé par les érup-
tions porphyriques et basaltiques, quelques fractions du terrain de
transition présentent de9 dérangements du même ordre, et dont le
peu d’importance ressortira des documents que nous fournirons
dans notre travail d’ensemble. Pour le moment , il suffit de savoir
que le terrain houiller peut être divisé en deux parties, l’une infé-
rieure et l’autre supérieure.
L’étage inférieur débute en certains points par une couche de
Schistes rouges, sur lesquels repose le banc de combustible dit du
Caylus, et celui-ci est à son tour surmonté par un banc puissant
d’un grès grossier essentiellement quartzeux , déjà assimilé au
millstone-grit des Anglais. Les empreintes végétales sont généra-
lement rares dans les schistes de cet étage; celles qui ont été déter-
minées par M. Ad. Brongniart sont :
Calamites Suckowii.
Sigillaria sulcata .
Ncvrop teris à petites feuilles.
L’étage supérieur contient les assises de combustible du Bous-
quet , lesquelles sont incluses entre des grès , des conglomérats et
des schistes particuliers. Les empreintes végétales sont :
Sigillaria lœvigata .
- — hexagona .
— Menardi.
JSevrop tais tenu folia .
Sph en o p teris e l ega ns .
C'y clop teris or b icu l mis .
Pecopteris Grandini (très abon-
dant au Bousquet).
— aquilina.
O cio n top teris Sch lot h eirn i i .
L epidodendrum confluons ,
Rameaux de Lepidodendrum .
Lyc i,vec doule’ au Sen,e
Æ
\Asaphus. . .
/Division du cal-'
I caire noir à Go-
niatites pyriti-
sées.
Division des schis-
tes noirs avec
\ îlots calcaires.
Cardium palmaturn{Oo[dîass)
Trois espèces de Goniatites,
dont une p. irait êire te Gonia
\ files simplex (de Buch),
Produclus giganteus
L Produclus edelbergensis ( Phi 1-
\ lips).
' Produclus semi reliculalus
\ (Mai tin).
J Grand Cynlhophyllu m assez
F cylindrique et semblable à la
' Caninia gigantea{ Michelin).
\Evomphalus aculus
TERRAINS ETRANGERS
caractérises par ces fossiles,
d’après M. de Yerneuil.
G. | Calcaires bitumi-1
neux se délitant
en boules en cer-
tains points.
Deux espèces d’Orthocères. Une
petite, striée en travers, pa-
raît être le O. serai cinc-
tus (Munster). Une autre,
li-se. est appelée quelquefois
O. gregarius (Sow.).
G' aptolylhus ludensis
Cardiola inlerrupla . . . . . .
H.
Calcaire supé-
rieur, no 6 de la
division H.
Favositês spongiles
Leptœna , très voisine du L.
Murchîsoni
Valve à' Orlhis, qui ressemble
à une espèce «le la Sarthe.
Orlhis, voisine d’une espèce des
Asturies.
Orlhis , voisine d’une espèce
d’Espagne.
Dévonien d’Europe et d’Améri-
que.
Silurien (Llandeïlo-flags),
Tout le genre Asnphus est indi-
qué comme silurien (Llan-
dcilo - flags). Ces Graploly-
thus et Asnphus ont été trou-
vés depuis les déterminations
de M. de Yerneuil.
Caractéristique du dévonien de
J’Eifel et de l’Oural ou plutôt
dans la chaîne des monts Ti-
mauns et la Nouvelle Zemble
Toutes du t\pe dévonien du
Hartz et de l’Eifel.
Caractéristique du carbonifère
inférieur.
Caractéristique du carbonifère.
Caractéristique du carbonifère.
Calcaire carbonifère inférieur
de Sablé.
Carbonifère.
Toutes deux du silurien supé-
rieur eu Bohême et à Caen.
Silurien.
Silurien; cependant en Bavière
elle existe dans des calcaires
prétendus dévoniens , mais
sur lesquels je conserve des
doutes.
Dévonien et si'urien supérieur.
Dévonienne, en Bretagne et en
Espagne.
Dévonien.
Dévonien.
Dévonien.
Il suffit d’un coup d’œil jeté sur ce tableau pour reconnaître que
les données stratigraphiques des environs de Neffiez ne concordent
SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1850.
6 1
pas avec les indications fournies par les fossiles d’après les autres
localités. Mais ici finit notre tache de géologues, et nous devons
laisser aux paléontologistes le soin de reprendre une question qui,
ainsi qu'on le voit, est de nature à porter l’atteinte la plus grave
à toutes les conceptions basées sur leurs données.
M. de Verneuil reconnaît tout l’intérêt qui s’attache au
tableau des terrains des environs de Neffiez , tel qu’il est pré-
senté par M. Fournet. Il fait remarquer que les trois membres
inférieurs de la série se succèdent dans l’ordre généralement
adopté pour les terrains anciens. Ainsi mettant à part la queue
de Trilobite rapportée avec doute au genre Cryphœus , l’étage E
lui paraît appartenir au terrain silurien inférieur, les calcaires
à Goniatites de la division F au terrain dévonien , et les schistes
et calcaires noirs à Productus de la même division au terrain
carbonifère. Ce qu’il y a de nouveau, c’est la superposition au
terrain carbonifère des étages G et H. Cette anomalie aux règles
généralement adoptées offre un sujet d’étude des plus intéres-
sants, et attirera sans doute vers Neffiez plus d’un géologue et
d’un paléontologiste.
M. Desbayes fait observer que, d’après M. Fournet, le trias
se lierait d’une manière complète soit aux terrains inférieurs,
soit au terrain jurassique, et cependant il n’y a aucun fossile
commun } il existe donc certainement une limite paléonto-
logique.
M. Rivière pense que M. Fournet n’a pu que bien difficile-
ment classer les terrains suivant la superposition qu’il indique :
les formations inférieures n’existent que par lambeaux, qui ap-
partiennent tantôt à différents terrains schisteux, tantôt aux
terrains houillers anthraciteux.
Quant au trias, le môme membre fait observer que M. Four-
net est en contradiction avec MM. Élie de Beaumont et
Dufrénoy, qui n’admettent pas son existence en cette localité.
Il est, en effet, impossible de saisir une limite stratigraphique
entre le terrain jurassique et les roches rouges rapportées par
M. Fournet au trias. Cette limite ne pourrait donc être établie
que par les fossiles, et ceux-ci manquent entièrement à la par-
tie inférieure de ce terrain.
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
62
Séance du 2 décembre 1850.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉYOST , vice-prés Ulent .
M. Deville, secrétaire, dorme lecture du procès-verbal de la
dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance,
le président proclame membres de la Société :
MM.
Philippe Parlatore, professeur de botanique, à Florence
(Toscane), présenté par MM. Ed. GollombetCh. Martins.
Léon Fargues de Taschereau, professeur de physique au
lycée de Saint-Omer (Pas-de-Calais), présenté par MM. Constant
Prévost et Hébert.
Le Président annonce ensuite deux présentations.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de MM. Malaguti et Durocher, Recherches sur
V association de V argent aux minéraux métalliques et sur les
procédés à suivre pour son extraction (extr. des Ann. des
mines , 4e sér., t. XVII, 1850) 5 in-8, 390 p. Paris, 1850,
chez Carilian-Gœury et Vor Dalmont.
De la part de M. Fournet, 1° Aperçus sur diverses ques-
tions géologiques (extr. des Proc.-verb. des séances de la Soc .
d’agric. de Lyon , 1849)*, in-8, 18 p. Lyon, chez Barret.
2° Note sur les terrains des environs de Nef fiez et de Rou-
jan (Hérault) (extr. des Proc.-verb. des séances de la Soc.
d’agric. de Lyon , 1849), par MM. Graff et Fournet-, in-8, 3 p.
Lyon, chez Barret.
3° Note sur les globes de feu (extr. des Proc.-verb. de la
Soc . d’agric. de Lyon , 1850) 5 in-8, 9 p. Lyon, 1850, chez
Barret.
4° Note sur quelques résultats d’une excursion dans les
Alpes , faite en août et septembre 1849 (extr. des Ann. de la
Soc. nation, d’agric ., d’hist. nat. et des arts utiles de Lyon ,
1850)*, in-8, 8 p. Lyon, 1850, chez Barret.
SÉANCE DU î 2 DÉCEMBRE 1850.
63
De la part de M. Alcide d’Orbigny, Prodrome de paléonto-
logie stratigraphique universelle des animaux mollusques et
rayonnés ; in-18, vol. II, 128 p. Paris, 1850, chez Vor Masson.
Delà part de M. Scarabelli, Intorno aile armi, etc. (Note
sur les armes antiques de pierre dure recueillies prés d’Imola)
(extr. des Nuov. annal, delle scienz. natur. di Bologna) j in-8,
11 p., 1 pl.
De la part du gouvernement britannique, Geological survey ,
etc. (Description géologique du Royaume-Uni, cartes nos 17,
18, 55, 56, 59 à 61, 71 à 76 et 79, et coupe horizontale, n° 18).
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1850, 2e sem., t. XXXI, nos 21 et 22.
L'Institut; 1850, nos 881 et 882.
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée -, n° 25, 3e année,
septembre 1 850.
Mémoires de la Société d' agriculture , sciences , arts et belles-
lettres de Bayeux , t. IV, 1817 à 1849-, in-8.
Annales de la Société d} agriculture , sciences , arts et belles -
lettres du département d’ Indre-et-Loire , t. XXIX, n° 1, oct. à
déc. 1819 -, in-8.
The Athenœum , 1850, nos 1201 et 1205.
The American Journal of science and arts , by Silliman,
2e sér., vol. IX, nos 26 et 27, mars et mai 1850-, vol. X,
n° 28, juillet 1850.
Kongl. vetenskops , etc. (Mémoires de l’Académie royale des
sciences de Stockholm pour l’année 1818, 2e partie).
Ojversigty etc. (Comptes rendus des travaux de l’Académie
royale des sciences de Stockholm), 1819, nos 1 à 10.
Arsberattelse , etc. (Rapport annuel sur les progrès de la
chimie pendant l’année 1818, présenté à l’Académie royale des
sciences de Stockholm, par M. Svanberg).
Sak-och. Namn-Register , etc. (Table des matières et des
auteurs mentionnés dans les rapports annuels de Berzelius à
l’Académie royale des sciences de Stockholm, de 1821 à 1817) $
in 8, 312 p. Stockholm, 1850, chez Norstedl et fds.
M. Alcide d’Orbigny fait hommage à la Société du 2e volume
du Prodrome, etc., contenant les fossiles des terrains jurassi-
ques, crétacés et tertiaires, et annonce la prochaine publica-
f>/| SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
tion du 3e volume, qui comprendra les terrains tertiaires et
une table de &0,Q00 noms de fossiles.
M. Viquesnel donne communication d’une lettre qui lui est
adressée par M. Fournet, de Lyon, et qui peut se résumer de
la manière suivante :
M. Sisinonda vient d’annoncer à M. Fournet que, parmi les
résultats de sa dernière excursion dans les Alpes, il faut citer la
découverte d’un .échantillon renfermant tout à la fois une Béleni-
nite et un échantillon de Fougère. Ce fait est aussi intéressant que
les Graptolites siluriens sur le même échantillon que les fossiles
carbonijbres de Neflsez. Dans cette dernière localité, la stratifica-
tion est trop simple , trop normale, pour qu’il soit possible d’ex-
pliquer le retour des Graptolites par un plissement des couches.
D’ailleurs, la nature des roches fossilifères s’opposait à l’admission
de cette hypothèse : ainsi les couches inférieures contenant des
Graptolites et des A s a plias se composent de schistes; les couches
supérieures à Graptolites sont calcaires; comment un plissement
pourrait-il changer les schistes en calcaires? M. Fournet termine
en annonçant un envoi prochain de fossiles qu’il a recueillis en
double, pour M de Verneuil. Les paléontologistes pourront se con-
vaincre de visu de la différence des gangues qui empâtent les Grap-
tolites inférieurs et supérieurs.
M. Marti ns communique la lettre suivante de M. Desor :
Lettre sur V unité du phénomène erratique , adressée a MM, Ch.
Martlns et Ed. Collomb , par M. E. Desor.
Cambridge (États Unis), ce 15 juin 1850.
Les discussions qui se sont élevées récemment au sujet du syn-
chronisme des dépôts quaternaires m’ont vivement préoccupé, et
je profite d’un moment de loisir pour vous soumettre quelques ré-
flexions sur cette importante question, qui ne peut manquer d’avoir
une grande influence sur nos études ultérieures. Il y va, en effet,
de l’unité du phénomène erratique ; en d’autres termes , il s’agit
de savoir s’il y a eu une ou plusieurs époques glaciaires. Cette ques-
tion, à laquelle personne de nous ne songeait il y a quelques an-
nées, s’est présentée à l’occasion du diluvium suisse, avec ossements
d’Eléphants et autres mammifères fossiles. Ce dépôt est- il antérieur
ou postérieur à l’époque des glaces? Voilà toute la question ; et de
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
65
la manière dont vous y répondrez dépend, à mon sens, le sort de la
théorie glaciaire. Un dépôt semblable se trouve en Alsace au-dessous
du lœss, et M. Ed. Gollomb n’hésite pas à déclarer que, dans les
Vosges et la vallée du Rhin , ce dépôt est antérieur aux grandes
glaces. Il admet même deux dépôts antérieurs aux glaces dans la
vallée du Rhin, l’ un composé de cailloux des Alpes, et l’autre de
cailloux des Vosges. Le lœss lui-même serait contemporain des
moraines; il serait le résultat de la boue du grand glacier suisse,
dont les eaux s’échappaient en grande partie par la vallée du Rhin.
Mais ici se présentent plusieurs difficultés , dont la principale est
celle-ci : le lœss renferme des ossements de mammifères identiques
avec ceux des dépôts de cailloux sous-jacents que l’on rapporte- à
une période antérieure. On se demande , dès lors , comment il est
possible qu’un phénomène aussi important que l’extension des
glaces n’ait pas modifié la faune de l’Europe à cette époque ? M.Jüd.
Collomb me répond en citant d’abord l’opinion de M. A. Braun,
qui pense que les Eléphants et autres pachydermes du lœss ne vi-
vaient pas pendant le dépôt de ce terrain, mais sont les débris d'une
faune antérieure qui aurait été détruite par le froid de l’époque er-
ratique. C’est l’ancienne idée de MAL C. Schimper et Agassiz, qu’on
appliquait autrefois aux Mammouths de la Sibérie, mais qu’on a
été obligé d’abandonner depuis qu’il est démontré que, dans le nord
de l’Europe et de l’Amérique, les Mammouths et les Alastodontes
sont de beaucoup postérieurs à l’époque du polissage des roches.
M. Ed. Collomb lui-même n’est pas satisfait de cette explication, et
il se demande si les pachydermes du diluvium n’auraient pas pu
continuer de vivre dans les plaines d’Alsace , tandis que les vallées
vosgiennes et la plaine suisse étaient ensevelies sous les glaces?
Admettons, pour un instant, que cette explication soit fondée,
en tant que cela concerne la vallée du Rhin , encore faudrait-il
expliquer comment il se fait que les mêmes débris se trouvent , en
Suisse, dans des dépôts très superficiels. Là, du moins, ils n’ont pu
survivre , attendu que toute la Suisse , à l’exception des plus hauts
sommets , est supposée avoir été envahie par les glaces. C’est là , à
mes yeux , une difficulté insurmontable.
Je ne puis , au reste , vous cacher que l’idée d’une séparation de
l’erratique m’est antipathique. Il y avait, vous en conviendrez,
quelque chose d’imposant dans cette hypothèse glaciaire , qui rap-
portait les phénomènes erratiques des Alpes, des Vosges, de l’An-
gleterre , de la Scandinavie et du nord de l’Amérique à une seule
cause agissant simultanément dans ces différentes contrées. En
admettant plusieurs époques glaciaires , vous détruisez l’unité du
Soc. géol. , 2e série, tome VIT! 5
66
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
phénomène , vous lui ôtez son caractère d’universalité (son prin-
cipe catholique), qui faisait sa force. Le phénomène alpin et celui
des Vosges se réduisent à de petits phénomènes locaux, qui n’au-
raient pas même modifié la faune et la flore des environs. Par
bonheur, il nous reste le phénomène du nord , dont la simul-
tanéité dans les deux hémisphères ne me paraît pas susceptible
d’être révoquée en doute. Aussi bien, dussiez-vous prouver qu’il
n’y a que des phénomènes isolés dans le centre de l’Europe repré-
sentant autant d’époques différentes , — ce à quoi vous seriez fata-
lement conduits si vos conclusions sur l’âge du lœss du Rhin sont
fondées, — que, pour ma part, je n’en maintiendrai pas moins
que les roches polies du nord sont le commencement de l’époque
erratique.
Mais est-il nécessaire que nous nous retranchions chacun dans
notre domaine comme dans une citadelle? Je ne le pense pas, ni
surtout ne le désire. J’ai retiré , pour ma part , tant de profit scien-
tifique de l’échange de nos idées, que j’aime à me persuader que
nos observations pourront encore, à l’avenir, s’éclairer mutuelle-
ment. Ecoutez-moi donc un instant.
Après avoir si longtemps examiné l’ensemble du phénomène
erratique du point de vue alpin ou vosgien , essayons un instant de
l’envisager du point de vue Scandinave et américain , et de con-
clure du grand au petit au lieu de procéder toujours du diminutif
au gigantesque. Voici donc comment la question se présente au
point de vue du nord. Dans l’Amérique septentrionale, aussi bien
que dans le nord de l’Europe, le phénomène le plus ancien de l’ère
erratique dont nous ayons connaissance , ce sont les roches polies.
Elles se retrouvent au-dessous de tous les dépôts meubles , soit
argiles, sables, graviers ou drift grossier. Personne n’a jusqu’ici
signalé un seul de ces dépôts comme antérieur au burinage , bien
que certains dépôts d’argile quaternaire de ce pays-ci aient été, par
erreur, décrits comme tertiaires. La majorité des dépôts quater-
naires , même ceux qui reposent immédiatement sur les roches
polies, sont stratifiés, attestant ainsi qu’ils ont été, sinon trans-
portés, du moins arrangés par les eaux. Ces mêmes dépôts renfer-
ment, en outre, des coquilles marines jusqu’à une hauteur de
600 pieds en Norvège, et de 500 pieds dans ce pays-ci. En revan-
che, on n’y trouve pas d’ossements de mammifères. Les Masto-
dontes de l’Amérique , de même que les Mammouths du nord de
l’Europe, se trouvent, comme vous savez, dans les dépôts les plus
superficiels, et n’ont, par conséquent, pu faire leur apparition
qu' après le retrait des eaux. La, succession des phénomènes est donc
SÉANCE BU 2 DÉCEMBRE 1850.
67
ceci : 1° polissage et burinage des rochers (probablement avec
transport des matériaux dans un état informe) ; 2° envahissement
de la mer et stratification de ces mêmes matériaux; 3° retrait de
la mer et apparition des mammifères terrestres.
Comparons maintenant cette succession de phénomènes avec
celle qui aurait eu lieu dans les Alpes, suivant votre théorie. Le
point de départ de l’ère quaternaire n’est pas le polissage des ro-
ches, mais un dépôt de cailloux et de gravier stratifié, qui n’a
d’analogue nulle part : l’extension des glaciers survenant ensuite
se serait étendu sur tout le massif des Alpes, des Vosges, et une
partie du Jura, mais sans en altérer la faune: de plus, les glaciers
auraient cheminé par-dessus ces amas de gravier et de cailloux,
sans même les déranger. Ils se seraient maintenus de la sorte jus-
qu’à la fin de la période erratique, dont ils représenteraient le der-
nier terme au lieu d’en être le commencement.
Cependant, si nous admettons que l’agent qui a façonné les ro-
ches de l’Amérique et de l’Europe était une vaste nappe de glace,
c’est-à-dire le résultat d’une cause météorologique générale, je ne
conçois pas qu’elle ait pu s’étendre en Amérique jusqu’à l’Ohio, et
en Europe jusqu’en Silésie et jusqu’en Westphalie, sans influencer
aussi le climat des Alpes, des Vosges et des autres montagnes de
l’Europe centrale. On est ainsi naturellement conduit à rapporter
l’extension des glaçons alpins et vosgiens à la même époque que
ceux de Scandinavie. Cela paraît en effet si naturel, que personne
jusqu’ici n’avait songé qu’il put en être autrement. Dans l’autre
théorie, non seulement l’extension des glaciers Scandinaves et
américains n’aurait pas influencé les Alpes et les Vosges; mais,
ce qui est plus extraordinaire, ces deux systèmes de montagnes (en
vrais sectaires ) aurait eu pius tard leur propre phénomène gla-
ciaire, qui aurait été également sans aucune influence sur le nord.
On ne nous dit nulle part à quelle phase du phénomène Scandi-
nave l’extension des glaciers alpins et Scandinaves aurait corres-
pondu.
Il est évident que, si telle est la succession des phénomènes dans
les deux pays, toute tentative de les comparer entre eux devient
inutile. La différence est du tout au tout, et nous n’avons pas plus
de raison de rechercher leur synchronisme que nous n’en avons
de rattacher la nagelfluhe des Alpes au diluvium Scandinave. Et
cependant, quand je me promène sur les rochers moutonnés, polis
et cannelés de l’île Royale, dans le lac Supérieur, ou bien que
j’examine ceux non moins curieux de la Nouvelle-Angleterre,
quand je les trouve en tous points semblables à ceux de la vallée
68
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
de l’Aar et du Rhône; quand je retrouve les dos arrondis du
Grimsel en cent lieux divers, le long des côtes américaines comme
dans les fiords de la Norvège , je ne puis m’empêcher de croire
qu’ils sont l’effet d’une même cause agissant simultanément en
Suisse, en Scandinavie et en Amérique.
Qu’est-ce donc qui vous contraint à revenir sur vos opinions
d’autrefois, et à souscrire tout d’un coup au divorce entre le nord
et le sud, la Scandinavie et la Suisse? Quels sont vos raisons, vos
arguments? Quand j’y regarde de près, je trouve qu’ils se rédui-
sent en substance à ceci : c’est que le lœss du Rhin est superposé
au diluvium à ossements, et parce que, pour vous, le lœss est un
dépôt glaciaire (ou du moins contemporain des glaciers), vous en
concluez que le diluvium, qui est inférieur, doit être anté-gla-
ciaire. Mais parce que le lœss a l’air d’avoir été formé par des
eaux surchargées de limon, s’ensuit-il donc que ce limon suppose
nécessairement et toujours un glacier comme point de départ.
M. d’Archiac lui-même n’a-t-il pas prouvé que le lœss de la vallée
du Rhin se rattache directement aux anciennes alluvions de la
Seine et du nord de la France? Or, ici du moins, vous n’avez pas
de glacier à votre disposition pour fournir le limon, qui cepen-
dant existe. S’il est un dépôt auquel le lœss soit comparable, c’est
le limon du lac Erié, et surtout le limon des terrasses duMississipi
à Memphis, Natchez, etc., dans lequel on trouve une faune ana-
logue de coquilles terrestres et fluviatiles associée à des débris de
Mastodontes et autres grands mammifères. Vous conviendrez éga-
lement que, sans sortir d’un glacier, les eaux du Mississipi sont
assez chargées de limon pour avoir pu déposer de puissants dépôts
de lœss dans une foule de localités. Si, par suite d’une catastrophe
quelconque, un lac ou une lagune venait aujourd’hui à se former
sur le passage du Mississipi, il est probable qu’à moins d’être très
profonde elle se trouverait comblée en assez peu de temps. D’après
les observations des officiers de la marine américaine, la quantité
de limon qui est entraînée par le Mississipi à Memphis est de
2,137,061,97ù pieds cubes : 100 pieds cubes d’eau en contiennent
12,7. Je ne puis m’empêcher de penser avec M. Lyell que la
vallée du Rhin formait, à l’époque où le lœss s’est déposé,
un lac semblable qui , après avoir été comblé , a ensuite été sou-
levé d’une manière inégale, et, de la sorte, a permis au fleuve de
s’y creuser son lit actuel , absolument comme cela a eu lieu avec
le lœss du Mississipi. Quant à l’abondance de limon, les fleuves
d’Amérique sont là pour nous dire qu’un glacier n’est pas une
condition sinequâ non des eaux boueuses. Dans ce cas particulier,
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
69
je n’ai cependant point d’objection contre la supposition d’un gla-
cier fournissant les eaux du lœss. Mais est-il nécessaire que ce soit
un glacier monstre? Un modeste glacier, comme celui du Rhin
actuel, ne pourrait-il pas à la longue produire le même résultat.
Partisans des causes actuelles, ce n’est certes pas vous qui contes-
terez l'efficacité du temps. D’ailleurs, ne voyons-nous pas de pa-
reils effets se produire sous nos yeux? Je suppose que les dépôts
récents du Rhône, en amont de Villeneuve, sont assez semblables
à du lœss. Jusqu’ici ils n’ont comblé qu’un espace de quelques
lieues; mais, avec du temps, ils finiront peut-être par combler le
lac de Genève. Car, comme l’a dit Laplace, le temps qui nous
manque ne manque pas à la nature. Supposons maintenant que,
après avoir été complètement comblé, le bassin du Léman se trouve
soulevé de quelques cents mètres, le Rhône, grâce à l’augmenta-
tion de sa pente, ne tarderait pas à se creuser un lit dans cet atter-
rissement, et, au lieu du Léman aux eaux limpides, vous auriez
un fleuve limoneux coulant entre des falaises de lœss semblables à
celles du Mississipi ou à celles du Rhin. Je ne vois, pour ma part,
pas d’autre manière d’expliquer les hauteurs si variables des fa-
laises du lœss sur les divers points de la vallée du Rhin. Je ne puis
admettre que le lœss ait été déposé par un fleuve, comme le veut
M. Ed. Collomb, par la raison toute simple qu’un fleuve de douze
lieues de large n’est plus un fleuve ; c’est un lac ou un estuaire, et,
par conséquent, les matériaux qu’il dépose sur son pourtour doivent
se trouver partout à la même hauteur. Si de nos jours leur niveau
est différent, c’est une preuve que le relief delà contrée a changé.
J’ajouterai que le débit de l’ancien glacier de l’Aar, tel qu’il a été
calculé par M. Ed. Collomb (en prenant pour base les observations
de M. Dollfus et les miennes sur le débit actuel de l’Aar), n’est pas
suffisant pour alimenter un fleuve tel qu’aurait été celui que vous
supposez avoir coulé dans la vallée du Rhin à l’époque du lœss, ainsi
que cela résulte de la comparaison avec le débit actuel du Missis-
sipi. Suivant votre calcul, l’ancien glacier de l’Aar devait débiter
2,066 millions de mètres cubes d’eau en vingt-quatre heures (à peu
près 75,000 millions de pieds cubes). Or, d’après les observations
récentes faites à Memphis par les officiers de la marine améri-
caine, le Mississipi débite en moyenne 57,165 millions de pieds
cubes dans les vingt-quatre heures. Et pourtant, la largeur du
fleuve en ce point n’est que de 3130 pieds. A proportion égale, un
fleuve de douze lieues de large exigerait par conséquent un débit
au moins cinquante fois plus considérable que celui que vous
donne votre calcul. Je ne puis donc admettre que le dépôt du
70
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
lœss exige nécessairement un fleuve gigantesque, ni que ce fleuve
découle nécessairement d’un vaste glacier.
J’arrive maintenant à votre second argument, la présence de
moraines sur des dépôts que vous considérez comme du diluvium
à ossements. Si vous exceptez le lœss de la vallée du Rhin, que je ne
puis encore consentir à paralléliser avec les moraines, je vous
demanderai si vous avez connaissance d’une seule localité, dans
r intérieur des montagnes, soit dans les Alpes, soit dans les Vosges,
où de véritables moraines reposent sur des dépôts à ossements.
Qu’est-ce qui empêche, par exemple, que les dépôts des vallées in-
térieures des Vosges, que M. Ed. Collomb parallélise avec le dilu-
vium , ne soient des moraines profondes , lesquelles , comme vous
savez, sont souvent stratifiées? Je regrette que M. Ed. Collomb ne
m’ait pas donné ses raisons d’une manière plus précise.
Restent les blocs erratiques. Ceux-là du moins, me direz-vous,
reposent en bien des endroits sur le diluvium à ossements (1)? Or,
s’il est vrai qu’ils soient les témoins d’anciens glaciers, les dépôts
sous-jacents, par cette même raison, doivent être plus anciens. La
conclusion, j’en conviens, est rigoureuse. Je conviens également
qu’il y a là une difficulté pour ceux qui sont d’avis que tous les
blocs erratiques ont été transportés par des glaciers. Mais, ainsi que
je vous le disais dans une précédente lettre, c’est là un point sur
lequel je suis devenu plus sceptique que jamais. 11 y a longtemps
que nous sommes convenus que les blocs situés au sommet des
Oesars n’ont pu être déposés que par des glaces flottantes. Je pense
qu’il en est de même des blocs épars à la surface des plaines de
l’Allemagne, et, quant aux innombrables blocs de ce pays-ci, je
n’en ai vu que bien peu dont le transport, ou du moins la position
actuelle, ne puisse s’expliquer par des radeaux de glace. Reste à
savoir jusqu’à quel point ce mode de transport peut s’appliquer à
la Suisse. Sans partager l’opinion de M. Murchison, qui, comme
je le vois par une récente communication, prétend que même les
blocs de Monthey ont été transportés par des radeaux de glace, je
ne serais pas surpris si l’on venait à démontrer quelque jour que
ceux de In plaine suisse n’ont pas été déposés directement par le
glacier. Vous n’ignorez pas que les traînées de blocs sont bien
moins distinctes et continues dans la plaine que sur les flancs des
montagnes. — Aussi bien , si les blocs erratiques étaient aussi
(l) Autour des Alpes les blocs erratiques reposent sur un diluvium
sans fossiles qui recouvre le diluvium à ossements. ( Voy. \q Bulletin y
2e sér., t. VII, p. 590.) Ch. M.
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850. 71
essentiels à la théorie glaciaire que certaines personnes le pensent,
autant vaudrait- il l’abandonner d’emblée.
Le grand argument en faveur de la théorie glaciale est et sera
toujours la roche striée. Je suppose que sur ce point nous sommes
tous d’accord. Maintenant, vous prétendez que le diluvium de la
Suisse ne recouvre jamais des roches striées, et vous en concluez
qu’il doit être antérieur. Le fait serait en effet concluant s’il était
démontré. S’il ne s’agissait que de faire valoir des arguments ,. je
pourrais peut-être vous opposer un raisonnement non moins con-
cluant en disant : le diluvium renferme des os de Mammouth (d’iîn
animal qui, dans le nord de l’Europe et de l’Amérique, est par-
tout postérieur aux polis) , par conséquent le gravier qui contient
ces ossements doit être également postérieur aux glaciers. Mais la
question ne s’en trouverait pas plus avancée pour cela. Notre but
n’est pas de faire étalage de notre dialectique, mais de résoudre
un problème, et d’éviter, si c’est possible, un schisme entre gens
qui ont combattu jusqu’à présent sous le même étendard. Pour
cela, il faut qu’il nous soit permis d’examiner franchement notre
position respective. Or permettez-moi de vous dire que la vôtre
ne me paraît pas aussi forte que vous semblez le croire, par cela
seul que vous vous fondez sur un fait négatif. N’est-il pas vrai
qu’il suffirait d’un seul exemple de roches striées au-dessous du
diluvium pour culbuter tout votre système? Le fait que le diluvium,
ou ce que vous appelez ainsi, est composé de graviers qui ont subi
l’action de l’eau, devrait vous rendre circonspect. Ne se pourrait-
il pas, en effet, que le même courant qui a arrondi les grains de
graviers ait également oblitéré les stries de la roche sur laquelle il
repose; et cela n’expliquerait-il pas d’une manière satisfaisante pour-
quoi les stries y sont moins fréquentes que sur les flancs des mon-
tagnes où le gravier diluvien ne s’élève pas? Vivant à 2000 lieues
de la Suisse, je n’ai plus le droit de parler de ses phénomènes avec
la même assurance que si je pouvais aller m’y promener demain.
Je crois cependant me rappeler avoir observé, dans plusieurs loca-
lités, le long du Jura (entre autres près de la Neuve-Ville, et aussi,
à ce qu’il me semble, près de Boudry) , des roches striées recou-
vertes par des dépôts stratifiés. C’est un point qui vaudrait bien
la peine d’être vérifié. Je m’estimerais heureux si mon scepticisme
pouvait engager quelques uns des glacialistes à reprendre la ques-
tion de ce point de vue. Et puis, ne serait-il pas désirable de pos-
séder enfin quelques notions précises sur le caractère, l’étendue et
les limites exactes de ce malencontreux terrain qu’on appelle l’al-
luvion ancienne? N’est-il pas étrange que pendant dix ans que
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
72
nous avons parcouru la Suisse, dans tous les sens, à la recherche
des phénomènes erratiques, il ne se soit trouvé personne qui ait
voulu entreprendre l’étude détaillée de ce terrain? Tout le monde
semblait en avoir peur, comme si l’on eût pressenti qu’il recelait
quelque principe fatal à la théorie glaciaire. Et cependant il faut
que la lumière se fasse ; il faut que quelque hardi investigateur se
mette à l’œuvre sans s’inquiéter des conséquences. En attendant,
aussi longtemps que vous, ou M. Collomb, ou M. Escher, ou
quelque autre observateur compétent , ne m’aurez pas démontré ,
d’une manière positive, et par une série d’études spéciales, que les
terrasses d’Aubonne et les dépôts des environs de Genève sont
réellement antérieurs à l’époque glaciaire , aussi longtemps je
m’abstiendrai de souscrire à la double époque glaciaire à laquelle
vous êtes fatalement conduit. Tout en m’opposant de toutes mes
forces à ce schisme, je ne puis me dispenser de rendre hommage
au génie logique de M. d’Archiac, qui a le premier entrevu ce ré-
sultat, et qui, avec une rare indépendance, n’a pas craint de le
proclamer. Voyez, au contraire, comme les choses s’arrangeraient
bien plus simplement si ma supposition, à l’égard du diluvium et
du lœss, se trouvait fondée. Admettant comme base l’unité du
phénomène erratique, il en résulterait que tous les dépôts errati-
ques qui renferment des ossements de mammifères terrestres sont
postérieurs au phénomène glaciaire. Et comme ces dépôts, quelle
que soit leur composition, sont généralement stratifiés, pourquoi n’en
conclurait- on pas que le sol de la Suisse, comme celui de la vallée
du Rhin et des plaines du nord de l’Europe et de l’Amérique, a
subi l’action des eaux postérieurement au retrait des glaces, et
après que le climat s’était suffisamment amélioré pour permettre
aux éléphants de vivre sur ce sol naguère couvert de glace? Dans
cette hypothèse, le parallélisme entre la Suisse et la Scandinavie
se trouve rétabli, le nord et le sud s’harmonisent, et tout est pour
le mieux dans le meilleur des mondes glaciaires, à condition, bien
entendu, que vous trouviez des stries sous le diluvium suisse.
M. Ed. Collomb fait la réponse suivante :
JSote sur le moment cV apparition des anciens glaciers à la
i surface du sol dans V Europe centrale. Béponse à la lettre
de M. Desor sur V unité du phénomène erratique , par
M. Ed. Collomb.
M. Desor demande , dans sa lettre, s’il y a eu une ou plusieurs
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850,
époques glaciaires ; si les phénomènes observés dans le nord sont
contemporains de ceux observés dans les Alpes et dans les Vosges ;
si les traces d’anciens glaciers remarquées dans l’Amérique du
Nord ont été produites à la même époque que celles qui existent
dans l’Europe centrale. M. Desor, qui a fait de nombreux travaux
et des observations très intéressantes sur le phénomène erratique
dans ces différentes contrées , a été amené à conclure que , sur les
deux continents, les anciens glaciers ont fait leur apparition au
commencement de l’époque qu’on a désignée sous le nom de qua-
ternaire ou diluvienne , avant les dépôts de transport qui renferment
des restes de Mammouths et de Mastodontes.
Nous , au contraire , tout en étant d’accord sur les phénomènes
de détail que nous avons étudiés ensemble dans les Alpes , nous
différons avec M. Desor relativement à leur moment d’apparition
à la surface du sol. Par suite de nos' observations sur les terrains
de transport récents de la plaine du Rhin et des vallées des Vosges,
nous nous sommes cru autorisé à conclure que les anciens gla-
ciers n’avaient joué leur rôle de grande extension qu’à la fin de
cette même époque , après tous les grands dépôts de matériaux
mobiles qui renferment des ossements de pachydermes et autres
mammifères éteints.
Les différentes questions posées par M. Desor sont fort difficiles
à résoudre dans l’état actuel de nos connaissances , surtout si l’on
y comprend les deux continents , l’Amérique et l’Europe : aussi
notre réponse n’embrasse pas des régions aussi étendues ; elle est
beaucoup plus locale. Nous nous bornons à citer les faits que nous
avons eu l’occasion d’observer dans les Alpes , dans les Vosges et
dans la plaine du Rhin , et nous en tirons des conclusions qui ne
s’étendent pas au delà de ce rayon. Nous avons déjà répondu indi-
rectement à M. Desor, en communiquant à M. Constant Prévost
une petite note sur la même question (1).
Nous sommes, du reste , d’accord avec M. Desor sur un point,
c’est que le phénomène glaciaire , quelque important qu’il soit ,
n’est cependant qu’une phase de la période en question. M. Desor
place cette phase au commencement et nous à la fin.
Cette période a donné lieu , dans la plaine d’Alsace, à des dépôts
considérables. Si on les juge d’abord en masse , sans tenir compte
des détails, on voit sur une étendue de plus de 100 lieues dans
(1) Cette note, communiquée à l’Académie des sciences (séance
du 18 novembre 1850), a été insérée par extrait dans les Comptes
rendus.
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
lh
le sens de la longueur, de Bâle à Mayence, et même au delà , et
sur une largeur moyenne de 10 à 12 lieues, une grande plaine
arrosée par le Rhin , et entièrement composée de matériaux mo-
biles de galets, de graviers, de sable, de limon consolidé, qui ont
nivelé le terrain et formé son relief actuel. Ces dépôts ne sont pas
limités à la plaine , ils pénètrent dans l’intérieur des vallées des
montagnes, ils en comblent les dépressions et les parties basses,
ils se divisent en plusieurs assises , comme nous le verrons tout à
l’heure.
En Suisse , ces mêmes dépôts , situés dans le périmètre com-
pris entre les Alpes et le Jura , ne présentent pas la même sinir-
plicité d’allure , et ne peuvent se prêter à des conclusions aussi
rigoureuses. En Alsace , ils sont développés sur une grande
échelle, ils sont étalés sur un vaste plan horizontal; les super-
positions des différentes assises y sont nettes et tranchées ; les
anciens glaciers n’ayant pas recouvert cette plaine de leur rabot
destructeur, puisqu’ils sont restés renfermés pendant leur période
d’existence dans l’enceinte des montagnes qui bordent le bassin,
n’ont pas bouleversé , dérangé , ni dénudé ces différents dépôts. En
Suisse , la difficulté devient très grande lorsqu’on veut établir des
rapports exacts dans la chronologie de ces diverses assises ; les
anciens glaciers ayant fait leur apparition à la surface du sol à une
époque qui correspond à la fin de tous ces dépôts , comme nous
allons chercher à le démontrer et comme M. Agassiz le pensait,
et ayant couvert à peu près tout le sol helvétique , il s’ensuit que
les dépôts meubles appartenant aux étages inférieurs doivent avoir
été plus ou moins démantelés ou déplacés par leur formidable
puissance dynamique ; il devient alors fort difficile d’établir des
rapports exacts dans leur ordre chronologique de superposition.
Aussi nous restons , pour le moment, dans les limites du bassin
du Rhin compris entre les Vosges et la Forêt-Noire : nos conclu-
sions ne s’étendent pas au delà.
Dans les environs de Mulhouse nous avons vu, d’après les
coupes de M. Koechlin-Schlumberger /( Bull ., 2e série, t. VI,
p. â80), que ce terrain se compose de trois assises d’âge et de pro-
priétés bien distinctes :
1° L’inférieure de cailloux et de graviers d’origine exclusive-
ment alpine ;
2° La moyenne, composée aussi de cailloux et de graviers
exclusivement vosgiens ;
3° La supérieure , de lœss ou lehm , d’origine alpine.
La puissance du dépôt n° 1 l’emporte de beaucoup sur les deux
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
75
autres; dans les sondages, à Mulhouse, après avoir traversé les
dépôts nos 3 et 2, on trouve encore des galets alpins à 100 pieds de
profondeur, avant d’arriver au calcaire ou à la mollasse tertiaire,
Le dépôt vosgien n° 2 ne se distingue pas du précédent sous le
rapport du volume des matériaux ; il se compose de sable grossier
et de galets ou cailloux arrondis qui s’emploient pour les pavés,
et qui atteignent rarement la grosseur de la tête. On ne les dis-
tingue que par la qualité minéralogique des roches vosgiennes ;
ce sont des granités , des syénites , des porphyres , des schistes argir
leux dont l’origine est facile à apprécier.
Le dépôt n° 3 se compose de lœss oi\ lehm , qui est bien connu ;
ce limon argileux est parfois chargé de particules très fines de
mica ; sur quelques points le sable quartzeux très fin devient pré-
dominant; souvent il est imprégné et même légèrement agglutiné
par des particules calcaires en poudre blanche farineuse, qui se
ramifient dans la masse comme des filaments entrecroisés, et qui
paraissent s’être développés postérieurement. Ce lehm forme au-
jourd’hui les meilleures terres végétales de la contrée. Sur les
points où ce dépôt manque, et où les sables et graviers des nos 1
et 2 subsistent seuls à la surface du sol, comme nous en voyons
un exemple dans la plaine de l’Ochsenfeld, entre Mulhouse et
Thann, la terre est frappée de stérilité.
Dans les environs de Strasbourg , M. de Billy a reconnu le même
ordre de superposition; il nous écrit, à cette occasion : « La partie
» supérieure du terrain est occupée par le lehm , qui , dans sapar-
» tie moyenne , contient un assez grand nombre de coquilles flu-
» viables ; on y a aussi trouvé quelques ossements de mammifères ,
» je crois du genre Cerf. Le lehm repose sur un sable rougeâtre,
» mêlé de quelques galets , et qui résulte évidemment de la désa-
» grégation du grès vosgien. Le diluvium alpin occupe la partie
» inférieure. »
Si nous passons sur la rive droite du Rhin, les coupes du terrain
sont d'accord avec celles de la rive gauche. A Oos, près de Bade-
Bade , au débouché d’une vallée latérale , on retrouve le dépôt
alpin à la partie inférieure , puis un dépôt de cailloux provenant
de la Forêt-Noire , le tout recouvert d’une masse de 10 à 12 mètres
de lehm.
De son côté, M. A. Daubrée, qui s’est livré dernièrement à un
travail étendu Sur les allumions anciennes et modernes d'une partie
du bassin du Rhin ( Bull ., 2e série, t. VII, p. 432), dit : « Aux
» environs de Bâle , le gravier du Jura est nettement superposé
» au gravier alpin, partout où l’on peut observer une relation entre
76
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 18Ô0.
» ces deux dépôts. » Plus loin il dit : « Le diluvium des diverses
» rivières du versant méridional de la Forêt-Noire est aussi super-
» posé au gravier du Rhin... La superposition du diluvium des
» Vosges au diluvium alpin s’observe aussi en divers points. \>
Relativement au lœss, M. Daubrée ajoute (p. ùà2) : « Dans de
» nombreuses localités , on peut constater que le lœss est super-
» posé au gravier diluvien des Vosges, de la Forêt-Noire, des
» Alpes, du Jura et du Kaiserstuhl; de plus, il existe souvent une
» séparation très nette entre le limon et ce gravier. Le lœss s’étend
» moyennement à plus de 60 mètres au-dessus de ce gravier. »
Notre lelim se distingue de celui de quelques autres contrées
en ce qu’il ne renferme point de gros blocs dans son intérieur ; le
lehm des environs de Lyon renferme « des blocs erratiques d’un
» volume quelquefois considérable qui se sont trouvés inclus dans
» celui des buttes de Montessuv, de Saint-Irénée et de Sainte-Foy-
» lez-Lyon. » (Drian, Minéralogie (las environs de Lyon, in-8, 18Ù9.)
Celui d’Alsace n’offre pas cette particularité. M. Kœchlin-Schlum-
berger nous écrit à ce sujet :
« Le lehm que j’ai vu dans la vallée du Rhin, depuis Ferette,
» au pied clu Jura, jusqu’au Kaiserstuhl, et des flancs des Vosges
«jusqu’à ceux de la Forêt-Noire , ne contient aucun bloc quel-
» conque, ni roulé, ni autre. La seule chose que j’aie remarquée
« dans notre vignoble, c’est qu’il s’y trouve à de rares intervalles
» des galets isolés , très arrondis , qui ne dépassent pas la grosseur
>» du poing , et sont le plus souvent au-dessous de cette dimension.
» Ces galets sont de nature alpine , et me paraissent provenir des
» dépôts considérables qui se trouvent au delà d’Altkirch , où le
» lehm sur son passage a pu les enlever ou les entraîner ; mais je
« dois répéter que ces galets sont une véritable rareté , et ce n’est
» qu’à mes très fréquentes promenades de ce côté que je dois de les
» avoir reconnus. »
M. Daubrée dit, de son côté (p. à37) : « Nulle part, dans les
>> terrasses de la plaine du Rhin , je n’ai trouvé de blocs erratiques,
>> comme on en rencontre dans le bassin du Rhône, aux environs
» de Lyon. Cette absence concorde avec l’observation faite par
» M. Guyot, que les blocs erratiques du bassin du Rhin ne dé-
» passent pas l’alpe du Wurtemberg. » (Guyot, Note sur le bassin
erratique du Rhin , Bull, de la Soc. des sciences nat. de Neuchâtel ,
mai et décembre 18à5.)
Voilà donc une différence bien constatée : notre lehm ne con-
tient point de blocs erratiques, ni à sa surface, ni dans son inté-
rieur; il est en entier composé de menus débris, de sable fin , de
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
77
limon , de boue consolidée ; à Lyon , il renferme de gros blocs.
M. Fournet , à l'occasion de notre dernière notice , nous écrit:
« Je suis d’accord avec vous sur les points capitaux de synchro-
» nisme : ainsi le lehm correspond aux moraines anciennes; c’est
» un dépôt glaciaire transporté au loin par les cours d’eau ; mais
» tous les lelnns ne sont pas pour moi glaciaires , c’est pourquoi je
» souligne ce mot. Ainsi nous avons des lehms provenant des
» marnes jurassiques du voisinage , et ici le transport n’est pas loin,
» mais bien auprès. Notre lelim contient aussi de gros blocs, et
» souvent des cailloux ; j’ai donc de la peine à arranger cela avec
»> une eau tranquille et profonde, et je préfère des courants violents.
» En résumé , je crois que vous avez posé un principe général dont
» il faut maintenant aborder les détails pris sur une grande échelle.
» Vous voyez donc qu’il n’y a pas mésaccortl entre nous ; mais je
» réclame seulement des détails indispensables dans un phénomène
» aussi complexe. »
Dans la partie nord des Etats-Unis, autant que j’ai pu en juger
dans l’excellent résumé de M. d’Archiac, et d’après les observa-
tions de M. Desor, de gros blocs se trouvent intercalés dans les
differents clrijts, ou reposent à leur surface. Cette circonstance ferait
supposer que ce drift se trouve dans les mêmes conditions que les
dépôts analogues suisses et lyonnais ; il aurait été soumis, soit pen-
dant , soit après son établissement , à une action d’une énergie suf-
fisante pour transporter au loin de gros blocs , phénomène qui n'a
pas laissé de traces dans les plaines d’Alsace ; c’est donc une cause
de complication écartée.
Des observations précédentes, faites sur différents points du
bassin assez éloignés les uns des autres, et par plusieurs observa-
teurs, nous croyons pouvoir proposer la section suivante (pl. Il),
transversalement à la hauteur de Strasbourg, et qui résume l’état
des choses dans la contrée , relativement aux formations qui nous
occupent.
Quant à sa section longitudinale, elle répond d’elle-même à
l’observation de 1V1 . Desor, qui pense avec M. Lyell, « que la vallée
» du Rhin formait , à l’époque où le lœss s’est déposé , un lac qui ,
» après avoir été comblé , a ensuite été soulevé d’une manière
» inégale , et de la sorte a permis au fleuve de s’y creuser son lit
» actuel. »
Suivant les mesures prises des limites de hauteur que le lehm
atteint dans la vallée du Rhin , on trouve les renseignements sui-
vants dans l’ouvrage de M. d’Archiac : entre les Vosges et la
Forêt-Noire, le lehm s’élève au plus haut à Ù50 mètres; puis,
78
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
entre Heidelberg et Heilbronn, on le retrouve à 260 mètres; en-
suite, aux environs de Bonn, il tombe à 65 mètres. La pente de
sa surface serait par conséquent de 385 mètres , sur une longueur
approximative de 100 à 120 lieues, soit 0,00081 à 0,00096, un
peu moins de 1 sur 1000.
Il n’est pas absolument nécessaire d’admettre un changement
ou soulèvement postérieur dans le relief du sol pour discuter ces
différentes altitudes du lehm. A sa plus grande hauteur, à
450 mètres, il a pu pénétrer dans l’intérieur de quelques vallées
vosgiennes ; mais la légèreté du dépôt et son extrême mobilité ne
lui auront pas permis de résister aux courants contraires descen-
dant des montagnes ; il aura été bien vite balayé. Cette pente ex-
clut l’idée de l’existence d’un lac qui aurait couvert la contrée, et
nous ramène à l’opinion de M. Braun, qui considère ce dépôt
comme le résultat du travail de sédimentation d’un grand fleuve
descendant des Alpes, fleuve chargé de particules flottantes comme
nos torrents et nos rivières à la suite d’un orage. M. Dauhrée con-
clut de ses nivellements sur le gravier diluvien des Alpes que le
courant actuel est plus rapide que celui qui a présidé à la forma-
tion de la plus grande partie de la plaine.
Avec une pente aussi faible , surtout dans le sens transversal ,
où elle est considérée comme nulle, il n’est pas nécessaire non plus
de supposer au fleuve une largeur permanente de 10 à 12 lieues;
le pied des Vosges, comme le pied de la Forêt-Noire , pouvait
être successivement submergé , suivant le caprice des eaux , qu’au-
cune barrière ne retenait. Si l’on admet l’existence d’un ancien
glacier de 20,000 kilomètres carrés de surface, et M. Desor lui-
même en a constaté partout des traces , on est amené à conclure
que les eaux de fonte d’une pareille masse devaient donner lieu à
un fleuve gigantesque , surtout pendant les mois les plus chauds
de l’année, et si ce fleuve se trouvait chargé du même limon, des
mêmes boues, résultant de l’usure des roches par le frottement de
la glace, il devait déposer une masse considérable de sédiments ,
dès le moment où il perdait son régime torrentiel et s’étalait dans
les plaines presque horizontales de l’Alsace.
Dans ses modestes conditions actuelles, le Rhin renferme en sus-
pension dans ses eaux une masse considérable de limon. D’après les
déterminations de M. Daubrée , « la quantité totale de limon
» qui a passé à Kehl, du 16 janvier 1848 au 16 janvier 1849, est
» d’environ 1,222,455 mètres cubes, soit un cube de 104 mètres
» de côté; pendant les 15 et 16 janvier seulement, cette quantité
» a atteint 118,320 mètres cubes par jour. » (P. 434.) Il est à re-
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
^9
marquer que, avant de passer à Kehl, le fleuve a préalablement
déposé la plus grande partie de son limon dans les lacs de la Suisse,
tandis qu’à l’époque dont nous nous occupons, ces mêmes lacs
étaient couverts par l’ancien glacier; ainsi, toute proportion gar-
dée, ce transport de sédiments devait être beaucoup plus considé-
rable qu’il ne l’est aujourd’hui.
M. Desor émet aussi la supposition que le dépôt du lehm a pu
s’opérer sous l’influence d’un phénomène dont le point de départ
serait venu du nord, phénomène qui serait contemporain ou ne
serait que la suite ou la continuation des grands dépôts de sable
du nord de la Prusse. Dans cette hypothèse, il faut nécessairement
admettre un changement considérable dans le relief de toute cette
partie du continent, changement qui aurait permis aux eaux de
cette époque de remonter dans la vallée du Rhin et de pénétrer
jusqu’aux environs de Bâle. Mais cette supposition n’est pas ad-
missible, non seulement à cause de la pente dont nous venons de
parler et qui s’applique aux dépôts inférieurs aussi bien qu’aux
supérieurs, mais encore en raison de la nature minéralogique du
lehm, puisque tous les observateurs s’accordent pour donner à
celui-ci une origine alpine , et le considèrent comme identique
avec les sédiments et les boues entraînées aujourd’hui par les
rivières des Alpes.
Quant aux fossiles qu’il renferme, on a constaté, dans le système
inférieur, la présence du Mammouth, du Rhinocéros, du Bœuf,
du Cheval, du Cerf, etc.; puis, dans le système supérieur, des
restes des mêmes mammifères, et, de plus, une grande quantité de
coquilles fluviatiles et terrestres. Ces coquilles ne sont pas ordinai-
rement déposées dans des lits particuliers ; on les trouve disséminées
dans toute la masse du dépôt, il y a donc une différence , sous le
rapport zoologique, entre le lehm et les dépôts qui lui sont infé-
rieurs; ces derniers ne renferment pas de coquilles, et le premier
en renferme beaucoup , et, suivant M. Alex. Braun , ces coquilles
appartiennent à des espèces dont les analogues se trouvent rare-
ment dans le pays, mais qu’on rencontre maintenant dans le nord
et dans les lieux froids et humides des hautes régions.
D’après les détails qui précèdent, nous sommes suffisamment
fixés sur la nature et les principales propriétés des terrains de la
plaine ; pénétrons maintenant dans la montagne, et voyons si les
phénomènes qui y ont laissé des traces peuvent se mettre en rela-
tion chronologique avec ce que nous venons de voir. Si nous en-
trons dans une vallée des Vosges, nous remarquons que les atter-
rissements récents qui comblent et encombrent quelquefois leur
80
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
fond, qui remplissent et nivellent toutes les dépressions du soi, se
composent, comme dans la plaine, de matériaux mobiles, de cail-
loux, de sable, de graviers, de gros blocs dont l’origine est toute
locale ; ils proviennent tous des vallées mêmes où on les trouve ; les
graviers et les cailloux des Alpes ni le lehm n’ont pénétré dans
l’intérieur des vallées vosgiennes; mais au lieu des trois systèmes
que nous avons vus dans la plaine, nous n’en trouvons que deux.
Le système inférieur paraît avoir tous les caractères d’une forma-
tion torrentielle ; les matériaux en sont tous roulés, usés, frottés ;
ils sont distribués de telle sorte qu'on ne peut guère en rapporter le
mode de transport à autre chose qu’à des torrents animés d’une
grande force d’impulsion, et beaucoup plus puissants que ceux qui
coulent aujourd’hui dans le fond des vallées. Ce système inférieur
de la montagne est la suite, la continuation de l’assise moyenne
de la plaine ; c’est la même nappe de cailloux roulés qu’on peut
suivre, sans solution de continuité, depuis les bords du Rhin jus-
qu’au fond des vallées des Vosges.
Le système supérieur, au contraire, se compose de tous les dé-
bris résultant de l’action des anciens glaciers; ce sont des moraines
transversales barrant les vallées et placées par échelons de distance
en distance , des dépôts latéraux qui s’allongent au pied des es-
carpements, puis des blocs erratiques alignés horizontalement ou
déposés en écharpe sur le flanc des montagnes , phénomènes doiit
les détails ont été souvent décrits.
Ainsi, la différence entre la plaine et la montagne consiste, en
ce que, dans la première, on ne trouve nulle part de traces qui
puissent faire supposer que les anciens glaciers soient intervenus
directement dans le mode d’arrangement des matériaux , tandis
que, dans la montagne, nous trouvons partout, dans les vallées des
Vosges comme dans les Alpes, des traces qui prouvent l’existence
d’anciens glaciers, des moraines, des blocs erratiques, des roches
striées dans les conditions les plus favorables à l’hypothèse gla-
ciaire, et, par les relations chronologiques qui existent entre ces
terrains, nous en avons conclu qu’il y avait synchronisme de for-
mation entre le lehm de la plaine et les moraines des montagnes.
On n’a peut-être pas attaché assez d’importance aux phéno-
mènes complexes produits par les glaciers lorsqu’ils font sentir
leur influence à de grandes distances. Les traces qu’ils laissent sur
le sol sont de deux sortes : les unes sont, pour ainsi dire, immédiates
et circonscrites dans des limites nettement définies ; elles se retrou-
vent sur les lieux mêmes qui ont été autrefois occupés par les an-
ciens glaciers; les autres ne sont qu’une conséquence du même
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
81
phénomène, elles ne se retrouvent plus sur le même emplacement,
mais à une grande distance, dans les plaines ou dans les lacs qui
entourent les pays où les glaciers ont pris dans les anciens temps
un grand développement. En d’autres termes, les glaciers actuels
exercent une action locale très énergique par la faculté qu’ils pos-
sèdent de transporter des matériaux volumineux, de les déposer
sur un point donné, puis de niveler et d’user les roches sur les-
quels ils reposent. D’autre part, leurs eaux de fonte qui alimen-
tent les grands fleuves sont chargées de sédiments, de boue, que
les cours d’eau transportent à distance et déposent dans les lacs ou
dans les plaines.
Le phénomène local s’opère par une voie sèche , et le phénomène
lointain par une voie humide ; ils sont synchroniques. Les mo-
raines sont le résultat du transport parla voie sèche, et le lelnu le
résultat du transport par la voie humide.
En admettant les faits qui précèdent, nous pouvons concevoir
que les terrains récents qui couvrent toute la plaine du Rhin ne
se sont point formés en une seule fois ; ce ne serait pas à un phéno-
mène unique qu’il faudrait en rapporter l’origine.
Le phénomène qui a donné lieu au transport des matériaux
de l’assise inférieure avait son origine dans les Alpes ; les débris
arrachés à ces montagnes étaient transportés dans la plaine ; on les
retrouve à plus de 100 lieues de leur gisement primitif. Ce trans-
port, dont le moteur paraît avoir été purement fluviatiie, devait
avoir une puissance très grande, puisqu’il a pu, avec ses graviers
et ses galets, combler et niveler toute la grande vallée du Rhin.
Puis, lors de la formation de l’assise moyenne, le phénomène
alpin perd de son énergie; les moyens de transport lointain cessent
pour ainsi dire de se manifester, ils se modifient et se localisent;
les débris qui couvrent la plaine d’Alsace n’appartiennent plus aux
Alpes, ils sont exclusivement composés de matériaux provenant
des montagnes les plus rapprochées de l’axe du système ; les Vosges
sur la rive gauche, la Forêt Noire sur la rive droite, et le Jura, en
amont du bassin, sont les seuls tributaires.
Cet état de choses ne paraît pas avoir une durée comparative
bien longue ; le dépôt vosgien est beaucoup moins puissant que le
dépôt alpin inférieur; il ne tarde pas à être remplacé par un phé-
nomène qui prend derechef son centre d’activité dans les Alpes.
Le Rhin prédomine de nouveau par sa force locomotive sur ses
affluents latéraux, mais il ne charrie plus de galets ni de graviers ;
il inonde la plaine de la masse de ses eaux boueuses ; le lehm se
dépose et se consolide dans tout l’espace compris entre les Vosges
Soc, géol.7 2e série, tome YIIl. 6
82
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
et la Forêt Noire ; ce travail de sédimentation se poursuit jusque
dans les environs de Bonn. 11 recouvre toutes les formations pré-
cédentes, y compris l’îlot volcanique du KaiserstuLl.
Dans notre note précédente, nous avons conclu au synchro-
nisme du lehm et des moraines vosgiennes, parce que, dans le
même temps où le Rhin charriait les détritus des grands glaciers
des Alpes et inondait la plaine par le volume extraordinaire de ses
eaux boueuses, les vallées vosgiennes assistaient à l’établissement
de leurs glaciers; leurs moraines étaient en voie de formation. Ces
deux dépôts, le lehm et les moraines, étant superposés à tous les
dépôts antérieurs, nous nous sommes cru autorisé à dire qu'ils
étaient les représentants du dernier terme de la série.
Ils ont été précédés, dans ces contrées, par un état de choses
étranger au glacier ; les eaux y jouaient un rôle prépondérant, rôle
qui s’est traduit sur le sol par ces immenses nappes de 100 limes
de longueur formées de cailloux et de gravier qui n’ont rien de
commun avec des moraines profondes. Les eaux ont ensuite cessé
d’agir comme violent moyen de transport ; elles sont devenues
boueuses, parce que, dans le même temps, les montagnes deve-
naient le domaine des glaciers.
Ces phénomènes ne sont en définitive que le résultat de l’éro-
sion et de la dénudation atmosphérique des roches, mais dont le
produit a changé suivant la nature de la pellicule extérieure qui
couvrait les montagnes. Si elles se trouvent couvertes d’un man-
teau de neige ou de glace permanente, les agents atmosphériques
n’exercent point sur elles la même action que si elles sont revêtues
de végétation ou complètement nues. Dans le cas des glaciers, les
gros matériaux arrachés aux montagnes ne sont pas transportés à
de grandes distances ; ils s’arrêtent sur un point donné; les menus
débris seuls voyagent au loin. Dans le cas contraire, tous les dé-
bris provenant de la démolition naturelle des roches sont soumis,
pour ainsi dire, au même traitement ; ils s’étalent dans les plaines
et se classent suivant leur volume ou leur pesanteur spécifique,
proportionnellement à la force du moteur qui les anime. Ainsi,
notre système inférieur de la plaine, et celui de l’intérieur des
vallées des Vosges, datent d’une époque où les anciens glaciers
n’existaient pas encore.
M. Desor ne croit pas devoir admettre ces conclusions ; il pense
qu’elles auraient pour conséquence fâcheuse de localiser, de dé-
truire l’unité du phénomène des anciens glaciers. L’étude que
M. Desor a faite de la faune de ces terrains dans l’Amérique du
Nord et en Scandinavie l’amène à des conclusions contraires à
llnll. t/c la Sac Gèol. irifer Yerneuili.
’ g J Terebratula cuboides et elongala.
’ \ Cyalhophyllum ananas. — Columnaria.
y î Bactrites. — Gonialiles amblylobus.
| Cardium palmatum.
N° 1. C’est Ja grauwacke ancienne du Rhin et du Harz.
N° 2. C’est un calcaire qui ne paraît contenir que des tiges de Cri-
noïdes.
(Ces deux étages ont leurs couches inclinées vers le sud, tandis
que tous les autres pendent au nord, chose qui n’est peut-être pas
sans importance pour ceux qui veulent placer là la limite entre les
terrains silurien et dévonien).
N° 3. C’est l’étage à Calcéoles. A la base existent des masses calcaires
surmontées par des schistes qui contiennent en bas une quantité
immense de Calceola sandalina , et plus haut le Phacops latifrons.
Ces couches sont riches en fossiles, mais ne contiennent pas une
seule espèce que je n’aie trouvée au même horizon dans le Harz
ou en Westphalie, près de Olpe et de Bigge.
N° 4. C’est l’horizon des Strigocéphales.
N° 5. Ce sont les mêmes couches que celles de Corneli Munster, près
d’Aix-la-Chapelle ; elles ne paraissent pas se retrouver de l’autre
côté du Rhin. Peut-être cependant sont-celes couches de Bensberg.
N° 6. Répond tout à fait aux calcaires de Grund et de Elbingerode,
dans le Harz, et à celles de Brilon, en Westphalie. Les couches de
Gérolstein, dans l’Eifel, sont plus anciennes.
N 7°. Ce sont les schistes à Goniatites de Büdesheim et de Needen
près Brilon; il faut y rapporter aussi les calcaires noirs d’Altenau,
les calcaires ferrugineux de Dillenburg, Brilon, Wetzlar et Wal-
deck, ainsi que le Domanik-schiefer de la Petchora, décrits par le
comte de Keyserling. C’est dans cet étage que se rencontrent le
Cardium palmatum , les Goniatites amblylobus et retrorsus, etc.
et le genre Bactrites.
En continuant le voyage de 1\I arien bourg à Pliilippe ville , on
voit encore une formation schisteuse très puissante, qui appartient
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850. 89
assez probablement aux schistes à Cypridines et à Clymènes de la
Westphalie ; je laisse à d’autres le soin de déterminer ce point.
M. de Verneuil ajoute quelques observations qui ont pour
but de faire bien comprendre l’intérêt que présente cette coupe.
Ce qui lui paraît le plus important, c’est qu’elle fixe la place
des calcaires rouges et schistes à Goniatites et à Cardium
palmatum qui occupent un niveau plus élevé que les calcaires
de l’Eifel proprement dits, c’est-à-dire, ceux de Gerolstein , si
bien connus par leurs fossiles. M. de Verneuil rappelle que
cette opinion lui avait déjà été exprimée par M. Girard, profes-
seur à Marhurg (1) . Le développement géographique de ces cal-
caires, auxquels se rapportent probablement les marbres rouges
ou griotte des Pyrénées et de la Montagne-Noire, quelques
couches des environs de Neffiez (Hérault), ainsi que les schistes
domanik des monts Timans, au nord de la Russie, méritait une
attention particulière , et l’on doit se réjouir de voir leur posi-
tion stratigraphique définitivement fixée. M. de Yerneuil rap-
pelle queM. Murchison a considéré depuis longtemps les schistes
à Posidonomya Becheri comme la base du terrain carbonifère,
et que les observations récentes de M. de Dechen, en Westpha-
lie, ont complètement confirmé, sur ce point, l’opinion du géo-
logue anglais. Le n° 8 de M. Roemer ne doit donc pas faire
partie de l’énumération des diverses assises du terrain dévonien.
Ces couches sont très développées dans le Harz et y contien-
nent beaucoup de plantes qui ont été décrites à tort comme
provenant du terrain de transition, c’est-à-dire, d’un terrain
antérieur à l’époque carbonifère.
Le même membre lit la lettre suivante, qui lui a été adressée
par MM. J.-W. Foster et J.-D. Whitnev :
Boston, 5 novembre 1850.
Monsieur,
Le gouvernement des Etats-Unis, en nous chargeant, il y a deux
ans, de compléter l’exploration des gîtes métallifères du lac Su-
périeur, nous ordonna d’y joindre en même temps un aperçu de
l’ensemble des formations de cette partie de son territoire. Con-
(1) Bull, de la Soc. géoh , 2e série , vol. YII , p. 222,
90
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
naissant tout l’intérêt que vous et vos savants collègues de la So-
ciété géologique de France prenez aux recherches géologiques de
ce pays-ci, nous prenons la liberté de vous adresser aujourd’hui
une esquisse des principaux traits de cette remarquable région, en
attendant que nous soyons à même de vous soumettre le rapport
officiel et détaillé de nos recherches. La première partie de notre
rapport, qui est près de paraître, embrasse la géologie de la ré-
gion des gîtes de cuivre, dont l’exploration fut terminée en 18/4.9.
Dans la campagne de cette année, notre attention a été particuliè-
rement dirigée sur l’étude des roches anciennes avec leurs mines
de fer et les rapports de ces roches avec les dépôts de la série pa-
léozoïque (1).
Bien que le district qui nous est assigné n’embrasse qu’une pe-
tite portion du grand bassin silurien de l’Amérique du Nord , nous
y avons reconnu la plupart des groupes géologiques de la série de
New-York, que nous avons poursuivis sur un espace de plus de
100,000 milles carrés. Nous avons reconnu que le grès du lac Su-
périeur est la continuation directe du grès de Potsdam. Nous avons
en outre constaté B existence d’une série de dépôts métamorphi-
ques inférieurs au grès de Potsdam. Ces dépôts, qui renferment les
plus riches gîtes de fer du continent, sont caractérisés par l’absence
de débris organiques, ce qui nous a engagés à les désigner sous le
nom de système azuïcjue , sans prétendre les paralléliser d’une ma-
nière absolue avec aucun des groupes de l’ancien continent. Ils
n’ont rien de commun avec le système taconique de M. Emmons,
dont ils diffèrent par leur structure aussi bien que par leur posi-
tion intermédiaire entre la base du silurien et les roches graniti-
ques les plus anciennes, puisque les recherches les plus récentes
ont établi d’une manière à peu près certaine que le système taco-
nique de M. Emmons est composé de roches siluriennes métamor-
phosées.
L’ensemble des formations qu’embrasse notre district se trouve
résumé dans le tableau suivant :
f a; pat tenant ( Granité compose de quartz , feldspath et mica , de
à < quartz, feldspath et hornblende , el de quartz
denx époques. \ et feldspath.
(1) Nous avons été assistés dans nos recherches par plusieurs géo-
logues expérimentés, entre autres, M. James Hall, le paléontologiste
de New-York, et M. E. Desor. Ce dernier s'est plus particulièrement
chargé de l’étude des terrains de transport, et se propose de vous trans-
mettre prochainement lés résultats de ses recherches
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
91
Formation \
MÉTAMORPHIQUE, j
Système
I Schistes micacés, amphiboliques , chloriteux et
l talqueux ; quat rzites; calcaire saccharoïde ; cou-
i elles de fer oligiste et de fer oxydulé.
azoïqup. ' Les roches ignées qui leur sont associées sort
j composées de quantités variables de feldspath et
j de hornblende , et se trouvent en couches, filons
\ et même en dômes.
Formation
AQUEUSE.
Système silurien.
Terrains
de transport.
f Conglomérat de roches ignée-;.
{ Grès de Poîsdatn.
i Grès calcifère,
| Calcaire île Tienlon.
I Groupe de fludsou-River.
/ Groupe de Clinton.
\ Groupe de Niagara.
i I es roches ignées qui sonl associées aux grès de
! l’otsdam sont d’une composition très variable. Elles
[ sont en général interstratifiées avec le grès , et elles
\ ont éié soulevées par le trapp ciistalliu , qui forme
un axe de soulèvement.
( Couches de gravier, aigile et sable.
| Blocs erratiques.
Position géographique. Le district que nous avons été chargés
d’explorer comprend cette portion de l’Etat de Michigan qui est
connue sous le nom de « Péninsule supérieure du Michigan, » et qui
est située entre le lac Supérieur, au nord, la rivière de Sainte-Marie
à l’est, le détroit de Mackinau, le lac Michigan et la Baie-Verte, au
sud, et la source de plusieurs des affluents supérieurs du Mississipi
à l’ouest (Chippeway, Sainte-Croix , Wisconsin , etc.). Sa surface
est égale à ( 6,000 milles carrés. Au point de vue de la géo-
graphie physique, cette région est de la plus haute importance,
formant en quelque sorte la limite climatologique entre le nord
et le midi. D’un côté, se trouve ïa région boréale avec ses forêts
de sapins et ses marais; de l’autre, la zone tempérée avec ses
plaines d’une fertilité inépuisable. L’exploration d’une région pa-
reille ne pouvait manquer d’intérêt géologique, si l’on admet que
la physionomie d’un pays est intimement liée à sa constitution
géologique.
Position de la presqu'île supérieure relativement aux terrains pa-
léozoïques . L’examen de la presqu’île supérieure était surtout im-
portant au point de vue des formations paléozoïques. Les études
géologiques entreprises dans les différentes parties de l’Union,
soit par ordre des Etats, soit sous la direction du gouvernement
fédéral, avaient révélé l’existence d’un vaste bassin silurien, pro-
bablement supérieur en étendue à tous ceux qu’on connaissait jus-
qu’alors. Les limites de ce bassin avaient été tracées par les géolo-
gues de l’Etat de New- York, le long du Saint Laurent et du lac
Ontario, d’où les géologues du Canada les avaient poursuivies jus-
qu’à l i haie de George et sur les îles du côté septentrional du laç
92
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
Huron. De son côté, M. Üwen avait tracé les limites de dépôts
semblables à ceux du silurien inférieur dans les Etats de Wis-
consin et de Jowa jusqu’au Mississipi ; mais les géologues de
l’ouest ne les avaient pas décrits sous les mêmes noms dont on
s’était servi dans l’Etat de New-York, ni cherché à les paralléliser
avec les groupes siluriens de ce dernier pays. Pour connaître
l’étendue totale de ce vaste bassin silurien, il restait, par con-
séquent, à tracer ses limites entre le littoral septentrional du lac
Hu ron et le district exploré par M. Owen, c’est-à-dire, dans la
région occupée principalement par la presqu’île supérieure du
Michigan. Il s’agissait de déterminer si la formation entière se
continue d’une manière non interrompue le long du littoral
septentrional du lac Michigan, en d’autres termes, s’il n’y a
réellement qu’un grand bassin silurien, et, dans ce cas, de déter-
miner, par une comparaison attentive des fossiles et des carac-
tères lithologiques des couches successives , les changements que
les groupes du système de New-York ont subis sur un développe-
ment de plus de 1000 milles.
La première difficulté se présentait à l’occasion des dépôts
du lac Supérieur. Le développement extraordinaire que les forma-
tions arénacées atteignent sur plusieurs points du littoral de ce
grand bassin, et leurs rapports complexes avec les terrains ignés,
ainsi qu’avec les riches mines de cuivre qu’ils renferment, leur
donnaient un caractère en quelque sorte exceptionnel, et, comme
le bassin tout entier se trouvait isolé du grand bassin silurien par
un noyau granitique occupant le sommet de la Péninsule, plusieurs
géologues y virent une raison suffisante pour rapporter les grès du
lac Supérieur à une époque plus récente. De là, la différence d’opi-
nion sur l’âge de ce dépôt, que les uns rapportaient à l’étage silu-
rien, tandis que d’autres étaient tentés d’en faire du nouveau grès
rouge.
Tel était l’état de la question lorsque le gouvernement des Etats-
Unis nous confia la tâche de compléter l’étude géologique de la
presqu’île supérieure.
Jge du grès du Lac Supérieur. L’âge du grès du lac Supérieur
constituait l’un des problèmes les plus importants ; aussi y avons-
nous consacré une attention toute spéciale. Quelles que soient les
particularités que ce grès présente sur plusieurs points du littoral, il
n’est pas douteux que, si au lieu de passer immédiatement du Sault
de Sainte-Marie à la pointe de Keweenaw, où la formation affecte
ses caractères les plus exceptionnels, les géologues avaient pu lon-
ger les rives du lac de manière à suivre les affleurements suc-
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
93
cessifs des couches arénacées le long des Portails ( Pictured Rocks),
le contraste eût paru bien moins frappant entre les conglomérats
de Copper-Harbor et les grès homogènes de la sortie du lac au Sault
de Sainte-Marie. L’àge de ces derniers grès eux-mêmes n’était pas
déterminé lorsque la discussion commença. Ce ne fut qu’en 1847
qu’il fut constaté par les géologues du Canada , d’accord avec ceux
de l’Etat de Michigan, que ces grès plongent sous le calcaire silu-
rien, le long du fleuve Sainte-Marie.
Prenant ces grès (dont l’horizon se trouvait ainsi déterminé)
pour point de départ, nous avons constaté leur présence tout le
long du littoral méridional, sur un espace de 100 milles, jusque
près de l’embouchure de la rivière aux Carpes. Ici des collines de
quartz très escarpées, dont la direction est de l'est 10° N., à
l’ouest 10° S., gagnent la côte et occasionnent une interruption.
Mais cette solution de continuité est limitée à un espace relative-
ment très restreint d’environ 10 milles; encore cet espace n’est-il
pas entièrement dégarni, car on y trouve sur plusieurs points des
lambeaux isolés de grès, dans les endroits où la configuration des
roches sous-jacentes était de nature à les abriter.
Il est évident qu’un accident semblable ne devait ni ne pou-
vait à lui seul justifier une séparation entre les dépôts, d’ailleurs
tout à fait semblables, de la portion occidentale du littoral et ceux
de la portion orientale, que nous savions maintenant appartenir à
la base du silurien inférieur. Tout concourait, au contraire, à
faire envisager les premiers comme la continuation directe de ces
derniers et la solution de continuité comme l’effet d’une dénuda-
tion locale.
L’observation directe ne devait pas tarder à confirmer nos vues
à cet égard. Pendant l’été de 1848, l’un de nous découvrit près
de la rivière des Esturgeons, qui débouche dans la baie de l’Anse,
un dépôt de calcaire renfermant des fossiles qui furent rapportés
sans hésitation, par M. Hall, aux dépôts siluriens inférieurs (grès
calcifère et calcaire de Trenton). L’année suivante, un dépôt de
calcaire tout à fait semblable , associé à des grès très calcifères ,
fut observé dans le voisinage des Portails , reposant ici en strati-
fication concordante sur les couches de grès. Le passage de ceux-ci
aux calcaires y est, en général, très insensible, et, dans beaucoup
de cas, il est à peu près impossible de dire où l’un finit et où
l’autre commence.
Conglomérats du lac Supérieur. Quant aux conglomérats du lac
Supérieur, nous pensons qu’ils sont le résultat de causes locales.
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
94
Ils sont, en général, composés de fragments arrondis de trapp,
cimentés par un sable rouge, qui lui-même pourrait bien être
d’origine volcanique. Avec ccs amas de conglomérats, se trouvent
interstratifiés d’énormes dépôts de trapp, de 3000 à 4000 pieds an-
glais d’épaisseur, inclinés dans le même plan, et présentant des
ligues de pseudo-stratification en rapport avec ceux des couches
adjacentes. Nous avons observé jusqu’à dix-sept de ces alternances
sur l’espace d’un mille. Nous avons, en outre, remarqué que, taudis
que la démarcation est toujours distincte entre la partie inférieure
des bancs de trapp et la couche de grès avoisinante, il n’en est pas
de même à la partie supérieure, qui passe fréquemment à l’état
amygdalo'ide : dans ce cas, Sa limite des deux roches est souvent
obscure. En outre, les fissures de trapp sont souvent remplies de
grès, et celles de grès contiennent, à leur tour, des galets de trapp
amygdaloïde , ce cpii prouve que les deux roches sont d’origine
contemporaine.
Nous ne pensons pas qu’on puisse expliquer ces rapports com-
pliqués autrement que par la théorie d’éruptions sous-marines que
M. Murchison a proposée pour les dépôts semblables qui sont
associés avec le nèw rcd sandstonc , en Angleterre. Dans le
bassin du lac Supérieur, l’action volcanique s'est manifestée sur
deux lignes à peu près parallèles, l’une s’étendant de l’île Royale
à la baie de Neepigon , l’autre du sommet delà pointe Keweenaw
à la rivière de Montréal, et, plus loin, s’échappant, sans doute,
d’un grand nombre d’ouvertures. Ces laves sous-marines se sont
étalées à chaque éruption par-dessus les dépôts sédinu maires avoi-
sinants, de manière à les recouvrir horizontalement d’un dépôt de
matière ignée, De pareilles éruptions n’ont pas pu s’opérer sans
causer une agitation considérable des eaux, et l’on conçoit que les
courants de cette époque aient été suffisants pour produire ces dé-
pôts de conglomérats qu’on trouve associés aux bancs de trapp.
L’ensemble de cette formation , composée ainsi de lits alterna-
tifs de roche ignée et de roche sédiinentaire déposés tous deux
horizontalement, a été subséquemment soulevé par l'éruption des
trapps cristallins, formant un axe anticlinal régulier. Sur le flanc
nord de cet axe, les roches plongent sous un angle de 50°, mais
cette inclinaison va en décroissant d’une manière rapide, et, à la
distance de 5 milles, les couches redeviennent à peu près horizon-
tales. Sur le flanc méridional, l’inclinaison, qui d’abord est de
70 degrés, devient presque imperceptible dans l’espace de 2 ou
3 milles. Entre la pointe Keweenaw et l’île Royale, les grès décri-
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
95
vent une immense courbe qui constitue le bassin du lac actuel ,
dont la plus grande' profondeur est d’environ A 00 ou 200 mè tres
au-dessous du niveau de. l’Océan.
JNous considérons, par conséquent, les conglomérats de la pointe
Keweenaw comme le résultat de causes locales qui n’ont pas
influencé les dépôts siluriens en dehors du bassin du lac Supé-
rieur.
Dépôts siluriens sur le versant méridional de la presqu'île supé-
rieure du Michigan, La position des dépôts de grès, sur le versant
méridional de la péninsule, et leur identité avec ceux des bords du
lac Supérieur, furent reconnues par l’un de nous dès 1 8 A 8. En tra-
versant la péninsule du nord au sud, le long de la ligne représentée
dans la coupe ci-jointe (voy. page 96), il trouva, sur les bords de la
rivière Menomonee (qui se jette dans la Baie-Verte), le grès re-
posant en couches horizontales sur les tranches d’une formation
schisteuse et quai tzeuse, de la même manière que cela se voit au
lac Supérieur, près de la rivière aux Carpes. Le grès est à son tour
recouvert par des couches de calcaire appartenant aux étages les
plus anciens de la formation silurienne, et reposant en stratifica-
tion concordante sur les couches arénacées.
Cette dernière région a été l’objet d’un examen plus détaillé
pendant la dernière campagne, et nous sommes à même aujour-
d’hui de tracer h s limites des eoaches siluriennes sur tout le pour-
tour de la péninsule ; nous y avons reconnu la succession suivante
(voyez la coupe) :
lü A la base du dépôt se trouve partout le grès de Potsdam.
Le long du Menomonee , il remonte jusqu’à plus de 100 milles
dans l’intérieur, et se rencontre à des niveaux de 130 mètres
et au delà, indiquant, par conséquent, comme dans le bassin du
lac Supérieur , une épaisseur considérable. On n’y a trouvé
jusqu’ici aucun indice de fossiles, mais sa structure est en tous
points semblable à cille du grès des Portails.
2° Le grès est recouvert, en nombre d’endroits, par un calcaire
siliceux et caverneux, qui paraît être identique avec le dépôt des
Etats de l’ouest décrit par M. Ovven sous le nom de calcaire ma-
gnésien inférieur. En descendant vers la Baie-Verte , à environ
25 milles de l’embouchure du Menomonee, ainsi que sur les
bords de l’Esconaba , ce calcaire alfecte un caractère plus homo-
gène, formant des bancs très réguliers et renfermant plusieurs
espèces fossiles caractéristiques du grès calcifère.
3° Ce calcaire est recouvert par le calcaire de Trenton avec tous
96
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
= — -lin! !\ — 608
Nord.
Schistes
avec
des couches
de fer oligiste.
-400
« 03
Z S*
a, *
c’ 65
2. 3
Grès de Poisdam.
•Grès calcifère.
Calcaire de Trenton.
GREEN BAY
(groupe de la rivière
de Hudson).
Calcaire de Niagara.
231 LAC MICHIGAN.
. Niveau
de l’Océan.
“ 47o
— Grès.
THUNDER CAPE. ILE ROYALE. I.aC SUPÉRIEUR. POINTE DE KEWEENAW. BAIE DE K.EWEENAW
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
97
scs fossiles caractéristiques fl). Il forme le littoral Je la Baie Verte
sur une étendue considérable, occupant le long du Menomonee
une largeur de 15 milles.
U° Au calcaire deTrenton succèdent les dépôts de Hudson-Hiver,
occupant dans la petite baie d’Enoch (faussement appelée baie de
Nock ou baie de Noquet) une largeur de 10 milles. Plus au sud, ces
dépôts ont dû occuper la largeur totale de la Baie Verte, cette baie
étant simplement le résultat d’une dénudation dans ce terrain, qui
est ici d’un caractère marneux (l’analogue des marnes bleues, ou
<> Cincinnati bluc limestone »), et par là même très ante à se désa-
gréger.
5° Le groupe de Clinton, sous la forme de schistes verts, avec
les mêmes empreintes extraordinaires et les mêmes fossiles qu’ils
renferment dans l’Etat de New-York , se retrouve sur plusieurs
points de la côte orientale de la Baie Verte, où il repose directe-
ment sur le calcaire de Hudson-Hiver.
6 ’ Le calcaire de Niagara est la formation la plus étendue et la
mieux exposée. Elle constitue la seule roche visible le long de la
côte septentrionale du lac Michigan, et forme également la côte
orientale de la Baie Verte et les nombreuses îles éparses entre
l’extrémité N.-E. du Wisconsin et l’entrée de la baie d’Énoch. Au
fond de la Baie Verte, ce calcaire repose immédiatement sur le
groupe de Clinton. Le calcaire del’île de Mackinaw, quoique d’un
aspect un peu différent, et caractérisé par sa structure bréchiforme,
n’en appartient pas moins par ses fossiles au groupe de Niagara,
dont il forme les assises supérieures.
Vous voyez, par conséquent, qu’à l’exception des schistes d’Utica
et du grès de Médina, tous les étages siluriens, compris entre le
grès de Potsdam et le calcaire de Niagara, se trouvent représentés
sur le flanc méridional du noyau granitique qui sépare Je lac Mi-
chigan du lac Supérieur. Sur la côte septentrionale du lac Huron,
dans le voisinage des îles Drummond et Saint-Joseph , et surtout
là où la rivière Sainte-Marie traverse la formation silurienne,
celle-ci se trouve resserrée dans des limites très restreintes, et les
affleurements sont réduits à des zones étroites, mais ils s’élargis-
sent et se déploient de plus en plus à mesure qu’on les poursuit à
l’ouest. La même formation, qui, sur les bords de la rivière Sainte-
Marie n’a guère que 5 à 6 milles de largeur, atteint, sur l’Esconaba,
(l) Les étages connus sous les noms de Chazy et de Birds-eye li-
mestone, n’ont pas été observés le long de la Baie Verte, mais ils se
retrouvent, bien caractérisés, dans l’île de Saint-Joseph.
Soc. g col. y 2e série, tome VIH. 7
9S
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
la largeur de 25 à 30 milles. C’est, par conséquent, à la sortie du lac
Supérieur que les affleurements des coucîies sont îe plus contrac-
tés, occupant le sommet de la grande courbé du système silurien,
et formant en quelque sorte la clef de voûte qui unit les dépôts de
l’est à ceux de l’ouest.
Le bassin du lac Supérieur fait partie de ce même grand système,
puisqu’on retrouve les grès de Potsdam sur tout son pourtour, et
que, d’après les recherches de M. Owen, ils s’étendent même, sans
interruption, depuis le fond du lac jusqu’au IVIississipi. 1! paraî-
trait, par conséquent, que, durant cette époque, le noyau grani-
tique de la péninsule supérieure du Michigan formait une grande
île dans la mer silurienne, séparée du continent primitif par un
large détroit (sûund) dont les contours ont dû coïncider sur bien
des points avec ceux du littoral actuel du lac Supérieur.
Le bassin du lac Supérieur ne paraît cependant avoir fait partie
de l’Océan que pendant les premières périodes de l’époque silu-
rienne, puisque, comme nous l’avons vu plus haut, on n’y trouve
pas de roche plus récente que les calcaires les plus inférieurs (cal-
caire de Trenton et grès calcifère). Ceci conduit naturellement à la
supposition que le retrait des eaux a dû être occasionné par le
soulèvement des roches trappéennes de la pointe Keweenaw et de
l’ile Royale, ce qui placerait l’époque de ce soulèvement durant
la période silurienne ancienne. A partir de ce moment, le lac Su-
périeur aurait cessé de faire partie de la grande mer silurienne,
et la presqu’île supérieure du Michigan, de simple île qu’elle était,
serait devenue le littoral de l’océan paléozoïque.
Formation cizoïqiu \ Avant que la région du lac Supérieur fût
explorée, on supposait généralement que le grès de Potsdam re-
posait directement sur le granité. Nos recherches, d’accord avec
celles de M. Logan, ont démontré qu’il existe, entre le granité et
le grès de Potsdam, une série de roches, d’un caractère particulier,
indistinctement stratifiées, dépourvues de fossiles et en stratifica-
tion discordante avec les formations paléozoïques (1). Entre les
(I) Dans notre rapport au commissaire des terres publiques, daté du
28 septembre 1848, et transmis au Congrès le 14 décembre, nous
avons exprimé notre conviction que le grès du lac Supérieur forme la
base des couches paléozoïques, et qu'il repose à peu près horizontale-
ment sur les tranches des schistes. Cette opinion a été confirmée par
Ai. Murray, qui détermina la position de ces roches sur le littoral
septentrional du lac Huron. (Voir le rapport de AL Logan, du ^jan-
vier 1849, et le Bulletin de la Soc. géol., vol. VII , p. 208.)
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
99
dépôts les plus supérieurs de cette formation et les couches les plus
inférieures de la formation paléozoïque, se trouve une limite bien
tranchée, un de ces temps d’arrêt où le géologue peut penser à
son aise et déterminer avec certitude sa position.
Dans le Canada, les roches de la formation azoïque ont été
rapportées par M. Logan à deux groupes, composés tous deux de
schistes , dont les supérieurs reposent en stratification discordante
sur les inférieurs. Rien de semblable n’a été observé dans la
presqu’île du Michigan ; mais, d’après M. Mather, il paraîtrait que
le groupe supérieur, qui présente un grand développement entre
le cap du Tonnerre ( T/mn do -Cape) et la rivière aux Pigeons, vient
buter horizo/italcincnt contre le granité de cette partie de la côte
septentrionale, montrant ainsi qu’il s’est déposé postérieurement à
l’éruption du granité. Si de ce point du littoral septentrional nous
passons à la côte opposée (voir la coupe), nous y retrouverons
les me mes schistes au fond de la baie de Keweenaw, où ils pré-
sentent de nombreux plissements , qui semblent avoir été produits
par les roches de trapp qui les accompagnent. Le grès de Potsdam,
qui les recouvre, n’est ni plissé ni métamorphisé , et l’on n’y dé-
couvre rien qui rappelle cette lamination si fréquente dans les
schistes sous-jacents ; le grès ne s’élève pas à plus de 115 mètres de
hauteur, tandis que les schistes et les granités atteignent une élé-
vation de Ù00 mètres.
En traversant la presqu’île suivant la ligne représentée dans la
coupe, on ne rencontre pas moins de trois axes granitiques, au-
dessus desquels les schistes sont plus ou moins plissés. Ces mêmes
Schistes sont accompagnés de bancs considérables de minerai de
fer, en particulier de fer oligiste. Nous n’avons connaissance d’au-
cune autre contrée où ce minerai se trouve en aussi grande abon-
dance que dans les schistes azoïques de cette région. Il forme fré-
quemment à lui seul des collines et des dômes de 100 à 200 pieds
de hauteur. Le minerai est, en beaucoup d’endroits, à peu près pur
et très massif ; dans d’autres, il affecte une structure rubannée, des
bandes de fer oligiste alternant avec des bandes de jaspe rouge.
Quant à l’origine du minerai de fer, comme les. limites de cette
notice ne nous permettent pas d’entrer dans une discussion appro-
fondie, nous nous bornerons à faire remarquer que nos obser-
vations nous ont révélé une analogie frappante , sous tous les
rapports , entre les gîtes de fer du lac Supérieur et ceux de la
Scandinavie.
Soulèvements. Nous avons reconnu dans le bassin du lac Supé-
rieur trois soulèvements, indépendamment des oscillations sécu-
1.00
SÉANCE I)U 2 DÉCEMBRE 1850.
laires de la surface du globe. Tous trois sont antérieurs à la fin de
l’époque silurienne inférieure , savoir :
1° Le soulèvement des masses granitiques dans les environs de
la rivière aux Pigeons , sur le littoral septentrional du lac Supé-
rieur. Ce soulèvement , le plus ancien de tous , est antérieur au
dépôt des schistes azbiques qui reposent horizontalement sur
ses flancs. 2° Le redressement des schistes azoïques du littoral mé-
ridional, formant une série de coteaux orientés de l’E. 10° N. à
l’O. 10° S. 3° Le soulèvement des collines de grès et de conglo-
mérat de la pointe Keweenaw et de l’île Royale , avec leurs bancs
de trapp interstratifiés, suivant la direction N.-E., S. -O.
Les deux premiers systèmes sont, sans contredit, les plus anciens
de ce continent. Ils n'ont rien de commun avec le soi-disant sys-
tème méridien le plus ancien de M. Hitchcock; non seulement
la direction de ce dernier est tout à fait différente, mais il est pro-
bable , en outre , qu’il a affecté des roches beaucoup plus récentes,
s’il est vrai , comme tout semble l’indiquer, que les White-Moun-
tains sont composées de roches siluriennes métamorphosées.
Résumé. 1° La formation silurienne du nord de l’Amérique,
depuis la Nouvelle-Angleterre jusqu’au Mississipi, forme un seul
bassin continu. 2° Le grès du lac Supérieur est partout la base de
la formation paléozoïque, et se rattache directement aux dépôts
de même nature connus dans l’Etat de New-York sous le nom de
Potsdani sandstonc. 3” Le grès du lac Supérieur a éprouvé, durant
son dépôt, des perturbations locales dont le résultat a été la
formation de conglomérats alternant avec des coulées de trapp. La
masse totale a été ensuite redressée, sur un espace circonscrit, par
l’éruption des trapps , avec lesquels se trouvent associés les filons
de cuivre natif. 4° Les couches siluriennes reposent en stratifica-
tion discordante sur les tranches des schistes et quartz dont le
redressement est antérieur à l’époque silurienne. 5° Les schistes et
quartzites , caractérisés par l’absence de toute trace d’êtres orga-
niques, doivent être envisagés comme les roches sédimentaires les
plus anciennes du continent américain , depuis qu’il est démontré
que le système laconique est composé de roches siluriennes altérées.
Ces schistes renferment les dépôts les plus considérables de fer
oligiste dont nous ayons connaissance.
Vous nous obligerez en communiquant cet aperçu à la Société
géologique de France , si vous le jugez digne de son attention.
Après cette lecture, M. Marcou présente les observations
suivantes :
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
101
Réponse a la lettre de MM. Foster et Whitney
sur le lac Supérieur, par M. J. Marcou.
Je demande à la Société la permission de faire quelques obser-
vations au sujet de la lettre de MM. Foster et Whitney.
Le fait capital de la note Sur la géologie de la péninsule supé-
rieure du Michigan , par MM. Foster et Whitney, est la détermi-
nation de Page relatif des grès du lac Supérieur. Cette question est
une de celles qui ont le plus tenu en suspens les opinions des divers
géologues qui se sont occupés de l’Amérique du nord, et je crois
de quelque utilité de rappeler les diverses opinions émises à ce
sujet.
En 1828, le commandant II. -W. Bayfield, de la marine
royale anglaise , rapporte, dans son mémoire Sur les contours géo-
logiques du lac Supérieur ( Transactions "of the literary and historical
Society of Québec , vol. I, p. 19), les grès du lac Supérieur au
vieux grès rouge , les regardant comme les premières couches de
formations sédimentaires reposant immédiatement sur le granité.
Ainsi, comme on le voit, l’opinion de MM. Foster et Withney n’a
rien de bien nouveau; car il est reconnu que les premières couches
de Volet rèd ne sont autres que le Potsdam sands forte de M. "Vanuxen.
Depuis, plusieurs géologues, et notamment MM. J. Hall,
C. Jackson et Dale Gvven , ont pensé que les grès du lac Supérieur
n’étaient pas aussi anciens, et ils les ont rapportés au nouveau grès
rouge du continent et de la Nouvelle-Ecosse. L’absence complète
de fossiles dans ces grès est une difficulté qui a été exploitée par
chacune des deux opinions, et de laquelle on ne peut rien. tirer;
car l’on connaît la pauvreté de la faune du Potsdam et du new-recl
sandstone de l'Amérique anglaise.' Avec les caractères lithologiques
seuls, tout est en faveur du neiv réel: couches minces, schistoïdes,
avec alternances d’argiles sableuses, nombreuses ripple marks ,
dureté , couleur ; de plus , association des trapps basaltiques ren-
fermant les mêmes minéraux que sur l’ Hudson, près de New-York,
et qu’au cap Blomidon, dans la baie de Fundy. Dans ces deux
dernières localités , on a reconnu positivement que la formation
était du new réel sandstone (voir, à ce sujet, l’excellent mémoire de
M. Dawson de Piéton, dans le Quarterly journal of the geol. Soc.
of London, vol. IV, 18^8, p. 50). Quant aux caractères du Potsdam
sandstone , ils sont tellement opposés à ceux du new-red de New-
Haven , qu’il suffit d’avoir passé une heure , soit sur la rive occi-
dentale du lac Champlain , soit à Potsdam , aux Mille-Iles ou aux
102
SÉANCE PU 2 DÉCEMBRE 1850.
cataractes de Montmorency et de Incli an- Lavette, près de Québec ,
pour ensuite ne jamais confondre les caractères minéralogiques et
de stratification du Pots dam avec le new-red ; il me paraît donc
impossible de comparer pétrograph iquem en t le grès du lac Supé-
rieur et du Sault-Sainte-Marie au Potsdam sandstone.
Reste maintenant la position stratigrapliique du grès du lac
Supérieur. Ce caractère, qui est, sans contredit, le plus impor-
tant de tous , a manqué et manque encore maintenant , malgré les
assertions qui ont été avancées par plusieurs géologues. MM. Foster
et Whitney disent que « ce ne fut qu’en 18Ù7 qu’il fut constaté
par les géologues du Canada, d’accord avec ceux de l’Etat de Mi-
chigan, que ces grès plongent sous le calcaire silurien , le long du
fleuve Sainte-Marie. » Il me semble qu’une découverte aussi im-
portante aurait dû être constatée d une manière plus positive ,
d'abord en fixant l’endroit de la rivière où l’on voit ce plongeinent
supposé, puis en donnant une coupe de la localité. MM. les géo-
logues canadiens Logan , Murray, etc., et, à leur exemple,
M M. Foster et Whitney, se contentent de dire : on a constaté le
fait ; mais je demanderai d’abord où ce fait a été constaté dans la
rivière Sainte-Marie. Est -ce entre le Grand-Détour et l’île Saint-
Josepli? près du Camp des Matelots? sur Y île du Store? ou aux
rapides de Neebish ? Ensuite je demanderai quel est celui d’entre
ces messieurs qui a vu ce plongeinent, et, déplus, je le prierai d’en
donner une coupe exacte. J’ai parcouru, en 18ù8,deux fois la
rivière de Sainte-Marie, précisément dans ce but de trouver les
relations stratigraphiques des grès du Sault-Sainte-Marie avec les
couches de File Saint-Joseph et de Maçkinaw, et je n’ai rien
trouvé de pareil. MM. Hall , Jewet de Lockport, le docteur Jack-
son et Agassi z , qui ont recherché aussi ce fameux plongeinent,
n’ont pas été plus heureux que moi; de sorte que, jusqu'à de
nouvelles preuves, je ne puis admettre le plongeinent dts grès du
lac Supérieur sous le calcaire silurien, d’après MM. Whitney et
Foster, le long du fleuve Sainte-Marie.
L’identification des couches paléozoïques de la péninsule supé-
rieure du Michigan avec celles de l’Etat de New-York me paraît
renfermer quelques erreurs de la part des deux auteurs de la lettre
à 31 . de Verneuil. D’abord, ces deux géologues regardent les argiles
qui sont dans la baie d’Enoch (lac Michigan) comme étant syn-
chroniques des dépôts de Y Hudson river y or, jusqu’à présent, on
n’a pu constater, nulle part ailleurs que dans les environs d’Albany,
ce groupe de l’ Hudson. M. Hall n’a pu reconnaître ce groupe dans
rpqest de l’Etat de New- York, oi\ sur Je laç Ontario, de sorte qui}
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850. 103
paraît bien peu probable qu’on puisse le découvrir à 80Ü lieues du
seul point où il ait jamais été constaté.
La détermination des calcaires de l’île de Mackinaw, comme
appartenant, par ses fossiles, aux assises supérieures du groupe de
Niagara , me paraît tout à fait erronée. Comme jusqu’à présent
personne n’a, je crois, donné l’âge véritable des assises de Macki-
naw, j’entrerai dans quelques détails à ce sujet. En suivant le
rivage à l’est de Mansion- Bousv, on trouve au niveau de l’eau des
couches renfermant un grand nombre de fossiles , et surtout des
Polypiers. Ces fossiles sont identiques avec ceux de Y Ohio fa//, près
de Luuisviüe , et ne laissent aucun doute sur l’âge des calcaires de
Mackiuaw, qui, pour moi, sont la partie supérieure du cliff
linu’stono fies géologues de l’Ohio, ou le dévonien d’Europe. Les
Polypiers les plus communs que j ’aie rencontrés à Mackinaw sont les
Zaphrontis gi geint en, Raf. , et Znphrrntis çornicula , E. et JL, si
communs à jeffersonville , sur les chutes de l’Ohio ; Y E mont/ a
tfemisphenca, E. et IL, aussi très caractéristique de l’ Ohio fa/l ; et
enfin j’ai recueilli sur les glacis du fort de Mackinaw le Cyatho-
phylUm* hrliantnidçs , Goldf. , espèce qui n’avait pas encore été
rencontrée dans l’Amérique du nord, et qui est un des fossiles les
plus caractéristiques du dévonien de l’Eifel, Ainsi je crois qu’il
n’y a plus de doute sur l’âge des calcaires de Mackinaw, qui n’ont
pas un. seul fossile de commun avec le groupe de Niagara.
Les petites îles placées entre Mackinaw et l’île Saint-Joseph
appartiennent toutes au terrain dévonien , et il en est de même de
i île Saint-Joseph ; de sorte qu’il ne reste plus guère de place entre
le Sault-Saiute-Marie et l’ile Saint-Joseph pour que MM. Foster et
Whitney puissent y placer tout le silurien , se superposant, d’après
eux, sur les grès du lac Supérieur. Pans leur note, les deux géo-
logues du Michigan admettent un étranglement des couches silu-
riennes dans le voisinage de la rivière Sainte-Marie; mais cet
étranglement devra beaucoup se contracter encore, puisque je leur
montre le dévonien jusqu’à 1 île Saint-Joseph ; déplus, je ferai
remarquer que les couches sont presque horizontales à l’île de
Mackinaw, au Grand-Détour, à l’île Saint-Joseph, où les couches
plongent à l’O.-S.-O., sous un angle de 10 à 15°. Tous ces faits
sont très difficiles à arranger , en admettant un pipngement des
grès du lac Supérieur sous les calcaires siluriens de la rivière de
Sainte-Marie, excepté dans une partie de l’île de Brummond, qui
est déjà dans le lac Muron.
Je ferai aussi quelques observations relativement au soulève-
ment granitique de la rivjère aux Pigeons, que MAL Foster et
SÉANCE OU 2 DÉCEMBRE 1850.
IO/i
Whitney regardent comme ayant été le centre des dépôts azoïques,
et comme formant le soulèvement le plus ancien du continent
américain. Dans la coupe que ces deux géologues ont jointe à leur
mémoire , on trouve effectivement un noyau granitique sur le
prolongement de la montagne du cap du Tonnerre , et iis ont
placé le trapp basaltiforme qui forme cette montagne comme ve-
nant buter horizontalement contre le granité de cette partie de la
côte septentrionale. Je ferai d’abord remarquer que , sur le pro-
longement de la presqu’île du cap du Tonnerre, entre les baies
Noire et du Tonnerre , il n’y a pas trace de granité , par consé-
quent, M. Mather n’a pu y observer ce butement horizontal,
probablement MM. Foster et Wliitney ont mal interprété les
observations de M. Mather, et, sans avoir vu par eux-mêmes les
localités , je trouve qu’il est très hasardeux d’aller y établir le plus
ancien soulèvement de l’Amérique du nord. Comme j’ai parcouru
en plusieurs sens cette région , je vais donner quelques détails à
ce sujet.
A partir du fond du lac Supérieur, et en suivant la côte septen-
trionale jusqu’à l’embouchure de la rivière aux Pigeons, on
a un massif formé de roches amphiboliques , de porphyres quart-
zifères et d’amygdaloïdes , avec dykes de trapp, présentant une
très grande analogie avec la partie de la côte du lac qui s’étend du
Gros-Cap, près de son embouchure , jusqu’à la factorerie de Miclii-
picoton. De Michipicoton , en suivant la côte, jusqu’aux Petits-
Écrits , les roches, tout en ayant les plus grandes analogies avec les
précédentes, ont un caractère moins métamorphique ; elles sont
par massifs mieux dessinés , et renferment une quantité considé-
rable de syénites à épidotes; malgré ces différences, je regarde ces
deux groupes, que je désignerai par groupe du fond du lue et
groupe de Michipicoton et du Pic , comme ayant été formés antérieu-
rement à toutes les autres roches qui se trouvent sur les bords sud
et nord du lac Supérieur. Sans préciser, dès à présent, l’àge de ces
deux massifs, je suis conduit à penser, d’après mes observations,
que leur soulèvement n’est pas antérieur au blue limestone ou silu-
rien inférieur, et qu’il n’est pas postérieur au terrain carbonifère,
» et même je pencherais plutôt à le regarder comme contemporain
I du soulèvement des Aiieghanys , qui, comme on le sait, a eu lieu
| à la fin de l’époque carbonifère. Les grès du lac Supérieur se
sont déposés horizontalement sur ces massifs, et ont été soulevés
par les trapps cuprifères de la pointe Keevenaw, de la rivière Onto-
nagen , de l’île Royale , de Princess-Location , de la pointé Gour-
ganne , des îles Saint-Ignace et de Michipicoton. Cette éruption de
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
105
trapp a produit les phénomènes métamorphiques les plus intéres-
sants , tant sur les couches du nouveau grès rouge que sur les
roches anciennes des deux groupes du fond du lac de Micliipicoton
et du Pic, qu’elles ont quelquefois pénétrées, comme entre la
rivière des Deux-Iles et la Poche-Percée , au cap Gargantua et à
l’île de la Tortue. Quant à l’âge relatif de l’éruption des trapps du
lac Supérieur, je le répète, je le regarde comme synchronique de
la chaîne de trapp qui s’étend d’Annapolis , de Digby, aux caps
Split et Blomidon , dans la Nouvc He-Ecosse, opinion déjà émise
par le docteur Charles Jackson , dans son mémoire intitulé :
Remarks ou the geologf , mineralogy and mines oj lake Superior
( Proceedings of the cimerican association for the advancement of
science; second meeting. 18/i.9, p. 283). Ce mémoire de M. Jackson
et son rapport géologique sur le lac Supérieur , envoyé à Washing-
ton depuis deux ans , renferment les données les plus précises sur
le district des mines de cuivre du Michigan , et très peu de choses
y ont été ajoutées par MM. Foster et Whitney, autrefois les deux
assistants de M. Jackson , et qui n’ont fait que continuer les
observations commencées par ce savant minéralogiste.
M. À. Gaudry fait la communication suivante :
Note sur la dolomitisation des calcaires autour de Stolberg
(Bas-Eifel), par M. Albert Gaudry.
J’ai à signaler à la Société un nouvel exemple de la dolomitisa-
tion des calcaires. Déjà souvent ce phénomène a été décrit par
MM. Eiie de Beaumont, Dufrénoy, et plusieurs autres géologues ;
mais les observations ont surtout porté sur les calcaires en contact
avec les roches de grands épanchements, tels que les mélaphyres
et les ophites. Dans le Bas-Eifel , près de Stolberg , le métamor-
phisme s’est produit au contact des liions métallifères , et il s’y est
produit d’une manière si nette, si incontestable, que son étude m’a
semblé digne de F attention de la Société.
A Stolberg , il y a une relation presque constante entre les do-
lomies et les gîtes métallifères. Cette relation est si connue des
mineurs que là où se sont présentées les dolomies ils ont toujours
fait la recherche du minerai , et rarement leur attente a été trom-
pée. Mais autant ce voisinage des dolomies et des minerais est
facile à constater d’une manière générale , autant sont rares les
points où se présente d’une manière certaine la démarcation fixe
qui sépare les gîtes , les dolomies et les calcaires juxta-posés. Or.
106 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
dans une mine de la Société de l’ Alliance , j’ai constaté les faits
suivants (voir figure ci-dessous) :
Inclinaison de 00° vers le N.-O.
Les couches appartiennent à l’étage dévonien. Elles constituent
un calcaire noir fossilifère , souvent recouvert par des lambeaux
de terrains liouillers. Elles reposent sur des grau \ aekes, où j’ai
trouvé les mêmes fossiles et les mêmes dispositions de couches qu’à
Daim, dans le Jlaut-Eifel, et au Rammelsberg , dans le Hart/,.
Ces grauwackes sont rapportées par plusieurs géologues au terrain
silurien , par plusieurs autres au terrain dévonien inférieur.
Cette superposition établie , je reviens au calcaire lui-même. Ce
calcaire est en couches inclinées de 65 à 80°, le plus souvent
de 60°. Ces couches plongent vers le N.-E. ; elles courent du
S. -O. au N.-E., comme toutes les chaînes du soulèvement du
Hunsdruck. Ces couches sont coupées par un filon de galène, de
blende et de calamine; le filon forme avec elles un angle de 78°;
il est donc presque perpendiculaire à la direction des couches. Or,
de chaque côté du filon, du côté du toit et du côté du mur, s’étend
une bande de dolomie variant en épaisseur de 2 à 50 mètres. Sur
quelques points, cette bande vient à manquer, et alors le calcaire
dévonien est en contact avec le filon ; mais c’est là une exception
rare, et si l’on considère la dolomie d’une manière générale, on
la trouve parallèle au gîte métallifère. Par les galeries d’allonge-
ment, et surtout par les galeries de traverse , on peut constater
facileniept ce parajléljsme , et on voit en même temps le passage
SÉANCE DU 2 DÉ CE 1>I BUE 1850.
107
du calcaire non altéré au calcaire cîolomitisé. La Société a sous les
yeux des fossiles provenant du calcaire dévonien non altéré, et les
mêmes espèces provenant du calcaire dolomitisé. D’après mes ana-
lyses personnelles , ces derniers fossiles sont même dolomitisés.
Il y a bien ici un fait incontestable de métamorphisme sur une
petite échelle ; car, si la dolomie était une couche subordonnée au
| calcaire dévonien , sa direction serait la même que celle de ce cal-
caire, et, au contraire, elle lui est presque perpendiculaire.
iVJ. Rivière, qui a une connaissance approfondie des mines de la
Prusse rhénane, pense que le filon dont il est ici question pour-
rait appartenir à la série des amas calaminaires de Stolberg. Con-
sidérant e s amas comme formés de haut en bas par voie sédi-
i mentaire, il suppose que la dolomie aurait été formée par suinte-
| ment de matière magnésienne ; lors de l’introduction lente de cette
! solution magnésienne, il y aurait eu épigénie d’une partie du cal-
caire. Cette hypothèse n’est pas admissible en présence des faits ;
car, lors même que l’on voudrait regarder les amas de Stolberg
comme formés de haut en bas, il faudrait faire une exception en
faveur du filon dont je parle. C’est non seulement mon opinion,
mais encore celle de M. Piot, ingénieur distingué, qui dirige une
importante concession dans le pays. D’ailleurs je vais plus loin.
À Stolberg, comme à la Vieille-Montagne, j’ai examiné avec un
grand soin les amas de calamine dits sédimentai t es. Ils ne contien-
nent ni fossiles ni cailloux roulés ; leur stratification n’apparaît
sur aucun point, et tôt ou tard les recherches ont toujours montré
leur continuité avec le sous-sol. J’ai même visité, près de Stol-
berg, une mine profonde dans laquelle on vient d’attaquer un
filon dont la direction est la même que celle d’amas calaminaires
autrefois exploités à ciel ouvert. Le filon n’est évidemment ici que
le prolongement indéfini de ces amas, considérés jusqu’ici comme
superficiels.
Ainsi les gîtes de Stolberg , et celui-là surtout, qui fait le sujet
de cette note, n’ont pas été formés de haut en bas par voie sédi-
mentaire : ainsi, par là même, les dolomies ne pourraient avoir
eu pour origine un suintement venant des couches supérieures,
mais uniquement un métamorphisme qui devient ici incontes-
table.
M, Delesse présente le mémoire suivant :
108
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850,
Recherches sur V association des minéraux dans les roches qui
ont un pouvoir magnétique élevé , par M. Delesse, professeur
honoraire à la Faculté des sciences de Besançon.
Bans les roches qui ont un pouvoir magnétique élevé, telles que
les serpentines, les mélaphyres, les basaltes, les trapps, les amyg-
daloïdes, etc., les minéraux qui forment la pâte de la roche, et
ceux qui se sont développés dans cette pâte, sont tout différents des
minéraux qui remplissent les filons ou les amygdaloïdes, et, en ou-
tre, ils sont généralement pins riches en fer.
Il est facile de s’assurer de l’exactitude de ces faits en passant
rapidement en revue les minéraux qui constituent chacune de ces
roches et en étudiant leur mode d’association.
Pour éviter de trop longs détails je ne parlerai pas des fiions mé-
tallifères, qui sont souvent étrangers aux roches qu’ils traversent;
on pourrait cependant leur appliquer aussi les remarques qui vont
suivre : il sera donc seulement question ici des filons ordinaire-
ment non métallifères dont la formation résulte de la nature même
de la roche, et qui se retrouvent à peu près dans toutes ses va-
riétés.
La séparation des minéraux de la pâte et des minéraux des filons
est très nette dans la serpentine; commençons donc par l’étudier
dans cette roche , et pour fixer les idées , prenons comme exemple
la serpentine des Vosges, qui est très bien caractérisée, et qui peut
nous servir de type (i). Nous trouvons que sa pâte est presque
entièrement formée de serpentine commune, qui contient ordinai-
rement du grenat , du jer chromé , du fer ox) clalé , de la pyrite
de fer ; quelques-uns de ces minéraux, et en particulier le fer
chromé et oxydulé, peuvent être disséminés en veines , mais ils
sont généralement dans la serpentine commune , rarement dans
la serpentine noble.
Certains minéraux silicates, tels que le di a liage et la ehlorite ,
ont aussi un mode de gisement mixte, et se trouvent tantôt dans
la pâte et tantôt dans des espèces de filons dont les limites ne sont
pas arrêtées d’une manière nette.
La serpentine commune est d’ailleurs traversée par un très grand
nombre de filons ou de veinules dans lesquelles il y a de la ser-
pentine noble , du chrysotil, de la chaux carbonate ç, quelquefois de
la némalite , de la brucite , et accidentellement de la dolomie .
(i) Annales des mines, 4e sér., t. XVIII, p. 309.
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
109
Or, si nous considérons d'un côté les minéraux qui s’observent
seulement dans la pâte , et , d’un autre côté , les minéraux qui
s’observent seulement dans les filons , il est facile de reconnaître
qu’ils sont très différents. De plus, si nous comparons d’abord les
composés silicatés, nous voyons que la serpentine commune contient
au moins 7 à 8 p. 100 d’oxyde de fer, et le grenat 10 p. 100, tan-
dis que la serpentine ncble ou le chrysotil n’en contiennent que
quelques centièmes ; les autres composés oxydés ou sulfurés de la
pâte, le je r chromé , le fer oxydulé , la pyrite de fer, sont d’ailleurs
très riches en fer, tandis qu’au contraire la nénialite , la brucite et
la chaux carbonate e , n’en contiennent pas, ou seulement des traces.
Le (Hallage contient environ 7 p. 100 d’oxyde de fer, et la
chloritc 6 p. 100; chacun de ces minéraux renferme donc moins,
ou, au plus, autant d’oxyde de fer que la serpentine commune et
que le grenat , mais il en renferme beaucoup plus que la serpentine
noble : de même que leur gisement est mixte, leur richesse en oxyde
de fer est par conséquent intermédiaire entre celle des silicates
magnésiens de la pâte, et celle des silicates magnésiens des filons.
Les minéraux qui se trouvent seulement dans la pâte de la ser-
pentine sont donc riches en fer, tandis que les minéraux qui se
trouvent dans les filons ne contiennent pas, ou presque pas de fer.
Si maintenant nous passons à d’autres roches, nous pourrons
généraliser ces remarques ; prenons, comme exemple, le porphyre
amygdaloïde d’Oberstein (1) ; il est presque entièrement formé par
une pâte contenant du fedspath labrador , et quelquefois un peu
à'augite; cette pâte contient, en outre, du jer oxydulé , qui est
souvent titane , de la pyrite de jer et du jer carbonaté, qui peut être
calcarifère.
Dans la roche, il y a d’ailleurs des veinules, des filons, et sur-
tout un grand nombre d’amygdales qui renferment an contraire du
quartz , de la chaux carbonatée, de la chloritc ferrugineuse \D clés si te,
de M. Naumann (2)], une assez grande variété de zéolithes y on
y observe aussi accidentellement du cuivre natif, de Y hydroxyde
de manganèse terreux, et, dans quelques cas fort rares, de Y hy-
droxyde de fer en aiguilles cristallines engagées dans du quartz,
ainsi que de la gœthite et du jer oligiste.
La chaux carbonatée se trouve aussi dans la pâte ; mais comme,
(1) Annales des mines , sér., t. XVI, p. 511.
(2) Naumann, Elemente der Minéralogie , 2e édition , et Lehr -
burh der Gengnosie .
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
ilÔ
lorsqu’elle est visible, on ne l’observe jamais que clans des amyg-
dales, on peut penser, par analogie, qu’elle est alors dans des
amygdales microscopiques ou dans les pores de la pâte.
Ce qui vient d’être dit du porphyre d’Oberstein s’applique du
reste aux mélaphyres en général, dont il n’est qu’une variété;
seulement , dans les mélaphyres proprement dits , il y a moins
d’amygdales, et on y trouve assez souvent de l 'épi dote.
Dans les autres roches que je vais énumérer, on rencontre encore
les mêmes minéraux, et bien qu’ils diffèrent par leurs caractères,
et surtout par leurs proportions , des minéraux des mélaphyres ,
ils sont cependant associés de la même manière.
Ainsi la do 1er i te contient une proportion à’augite beaucoup plus
grande que le mélaphyre , tandis que la proportion de pâte est
devenue très petite, la structure cristalline deladolérite étant très
développée. Son labrador peut d’ailleurs être remplacé par de la
népheline , comme cela a lieu dans la dolcriic néphélinicpie ; mais,
dans ses amygdales, on retrouve à peu près les mêmes minéraux
qu’à Oberstein.
Le basalte a la même composition minéralogique que la dolé-
rite , seulement sa pâte est beaucoup plus abondante, et il con-
tient, en outre, du péridot , et quelquefois de la hornblende.
Dans ses amygdales , il renferme encore tous les minéraux qui
sont dans les amygdales du porphyre d’Oberstein , une plus grande
variété de zéolithes , et accidentellement la variété de carbonate de
fer qu’on désigne sous le nom de sphœrosiderite.
Dans Yanamésite, qui est une dégradation du basalte , la pâte
constitue presque toute la roche, et dans les amygdales des ana-
mésites de la Hesse, il y a souvent du sphœrosiderite , de même
que dans la pâte.
Dans le trapp , qu’on peut regarder comme une variété du mé-
laphyre ou du basalte ayant une structure cristalline peu déve-
loppée, les veinules et les amygdales contiennent les mêmes
minéraux que précédemment, et de la pre Imite , de la datholithe,
de la stellite , ainsi que du cuivre et de Y argent à l’état natif; ces
métaux donnent même lieu à des exploitations très importantes au
lac Supérieur et à la Nouvelle Ecosse (Etats Unis d’Amérique).
Les laves proprement dites sont le plus généralement formées
par une pâte magnétique grenue, dans laquelle se sont développés
des cristaux de labrador oud’ a m phi gène , d ’augite et de fer oxydulé,
qui est fréquemment titane.
Ordinairement on n’y observe pas d’amygdales, et leurs cellules
sont restées vides; cependant, quand elles ont été remplies, c’est le
SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1850.
111
plus souvent par de la chaux carbon a té e et par quelques zéolithes $
ou bien par du soufre, du bitume , de l’oxyde et des sels de cuivre ,
des sulfates de chaux , d’ alumine , etc., c’est-à-dire par des sub-
stances qui ne contiennent pas de fer.
Toutes les roebes volcaniques qui viennent d’être énumérées
peuvent être regardées comme appartenant à une seule grande
famille , et pour mieux fixer les idées dans les recherches qui nous
occupent nous raisonnerons seulement sur le porphyre amygdaloïde
u’Qberstein, dont les minéraux sont d’ailleurs très variés.
il est facile de constater que, dans ce porphyre d'Oberstein , de
même que dans la serpentine, les minéraux qui s’observent seule-
ment dans la pâte sont encore très différents de ceux qui s’obser-
vent seulement dans les filons, les veinules et ies amygdales.
En effet, comparons d’abord les composés silicatés : nous avons
la pâte elle-même, qui est formée par un silicate complexe dont la
composition ne correspond pas à un minéral défini , mais dans
lequel il y a environ 10 pour 100 d’oxyde de fer; Yaugite, qui
ne contient guère moins de 15 pour 100 d'oxyde de fer, ne se
trouve également que dans la pâte.
Les composés silicatés les plus habituels des amygdales sont,
au contraire , le U 16 DÉCEMBRE J 850.
125
les climats sont extrêmes, plus ils sont favorables à l’extension
des glaciers, mais il croit avoir démontré, au contraire,
que la condition climatérique la plus favorable au développe-
ment des glaciers est que la température oscille autour de
zéro, en faisant le moins d’écarts possible.
M. Fauverge est convaincu que la différence entre les gla-
ciers insulaires, littoraux et de l’intérieur des continents, dont
a parlé M. Grange dans une communication fort remarquable,
est due à la différence qui existe entre les diverses vallées qui
les contiennent et non entre les divers climats.
M. Damour donne lecture d’une notice nécrologique sur
M. Defrance.
M. Desbayes communique la note suivante de M. Buvignier,
de Verdun, sur le genre Ceromya (Agass.).
Sur le genre Ceromya, Agassiz , par M. Buvignier.
Le genre Ceromya a été établi par M. Agassiz pour des co-
quilles qui avaient été confondues avec les Isocardes. M. Desbayes
y a réuni les Gresslyes du même auteur, et l’a caractérisé d une
manière plus complète ; mais la charnière et le ligament étaient
encore inconnus. Nous pouvons compléter aujourd’hui les carac-
tères cle la coquille au moyen d’une valve gauche du Ceromya
s tria to -pu n c ta ta (pl, I, fig. 10, 11 ( Lutraria , Munster, Gresslya ,
Agassiz) de notre collection , et d’une valve droite de Ceromya
te nui s tri a (Myopsis, Agassiz? Lutraria , Munster) de la collection
de M. Terquem, de Metz.
En ajoutant aux caractères indiqués par M. Desbayes ceux qui
sont établis par nos observations, le genre Ceromya pourra être
défini de la manière suivante :
Animal inconnu.
Coquille ovale ou cordiforme, très inéquilatérale (inéqui-
valve, la valve droite un peu plus grande que la gauche?), cro-
chets plus ou moins grands, rapprochés, opposés. Test très mince.
Impressions musculaires peu saillantes, la postérieure arrondie.
Impression palléale largement sinueuse du côté postérieur ; une
côte sinueuse remontant obliquement de l’intérieur sur le bord
cardinal de la valve droite. Charnière simple et sans dents , for-
mée sur la valve gauche par une expansion du bord cardinal qui se
prolonge au-delà du plan des bords de la valve ; elle est entaillée
126
SÉANCE 1)U 16 DÉCEMBRE 1850.
en arrière du crochet , el les bords de V entai lie sont relevés de ma-
nière qu’ils f garent presque deux dents divergentes : cette expan-
sion s’insère dans l’intérieur de la valve droite qui en porte une
autre très petite , et a la partie antérieure seulement. Ligament étroit ,
allongé, fixé a la valve gauche , dans une fente extérieure située ci
la base de l'expansion dentiforme postérieure , et a la valve droite
sur le bord cardinal lui-même qui est légèrement cannelé.
La cannelure du bord cardinal paraît produite, au moins en
partie, par la juxta-position de la côte sinueuse intérieure, mais
nous n’aurions pu le Vérifier sur l’échantillon de M. Terqueffi,
sans nous exposer à le briser.
D’après la position de la charnière, lorsque le ligament a cessé
d exister, tant que les deux valves n’ont pas été séparées et dé-
boîtées, tout dérangement des valves, tendant à reculer la valve
gauche vers la région dorsale, est tout à fait impossible, tandis
qu’au contraire, le plus faible choc, le plus léger mouvement, le
poids seul de la valve gauche, suffirait pour la faire glisser à l’in-
térieur de l’autre. Il résulte de là que, si la coquille est réellement
inéquivalve, on ne pourra jamais trouver d’individus dont les
deux crochets soient placés d’une manière entièrement symétri-
que, tandis qu’au contraire, en la supposant équi valve, on ne
pourra rencontrer cette disposition que sur les individus qui réu-
niront la double condition de n’avoir éprouvé, entre la destruction
du ligament et leur fossilisation complète, aucun choc, aucun
mouvement, et de s’être trouvés dans une position telle, que le
poids de la valve gauche l’ait appuyée contre la charnière de
l’autre valve : concours de circonstances qui ne doit pas s’etre ren-
contré souvent. Or, parmi le petit nombre d’individus du genre
Ceromya qui existent dans nos collections, il y a un C. exantrica
Ag. et deux C . striato-piuictata , dout les crochets sont tout à fait
symétriques. Nous avons sous les yeux une autre Gresslye de
M. Terquem dont la valve gauche dépasse inférieurement le bord
inférieur de la valve droite, d’une quantité égale à l’abaissement
du crochet gauche.
Ces quatre individus ne sont peut-être pas suffisants pour faire
considérer les coquilles de ce genre comme équivalves; mais ils
peuvent faire révoquer en doute le caractère opposé qui leur a été
attribué jusqu’à présent. C’est pourquoi nous croyons utile de sou-
lever cette question et de la signaler à l’étude des observateurs.
Les observations de M. Agassiz, ainsi que celles de M. Deslnyes,
dans son Traité élémentaire , avaient déjà prouvé la différence
considérable de la Gresslrae tde la Lyonsia ; néanmoins, l’auteur de
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1 850.
■127
ia Paléontologie française a persisté, clans son Prodrome , à ranger
dans ce dernier genre toutes les Gresslyes, en admettant cependant
le genre Geromya , qui porte exactement les mêmes caractères.
L’erreur du naturaliste dont nous parlons devient plus évidente
encore par les faits que nous venons d’exposer, et d’après lesquels
les Gresslyes ou Céromyes constituent un genre parfaitement dis-
tinct de tous ceux qui sont actuellement connus. Il ne sera plus
permis de le confondre avec la Lyonsia , puisque leurs coquilles
sont équivalves et qu’elles ne portent jamais d’osselet à la char-
nière. Elles ont le ligament externe et non à l’intérieur, comme la
Lyonsia et les autres genres de la famille des Ostéodesmes.
Le même membre met sous les yeux de la Société le dessin
d’une très belle Sphérubte (pl. I, fig. 1-6), découverte par
M. Sæmann, dessin dont Fauteur, M. Humbert, fait hommage
à la Société pour son Bulletin.
M. Desbayes présente à ce sujet les observations suivantes :
Observations sur le Sphærulites calceoloides, Des Moulins ,
par M. Deshayes.
Notre collègue, M. Sæmann, vous a communiqué, il y a quel-
ques années, de beaux individus de Sphérulites et d’Jiippurites
dans lesquels une partie de la structure intérieure de ces coquilles
singulières a été mise à découvert avec une grande patience. Ces
pièces ont servi à constater une fois de plus les faits que nous avons
publiés il y a bien des années, et à appuyer les conséquences qui
en sont la suite. M. Sæmann a persévéré dans ses recherches, et
il a communiqué, il y a quelques mois, à plusieurs d’entre nous
un magnifique exemplaire du Sphærulites calceoloides , Des Mou-
lins. 11 en a fait exécuter un moulage en plâtre, qui sorti des
mains de l’habile M. Stahl, peut remplacer Tunique et précieux
original. Dans cet exemplaire, M. Sæmann est parvenu à isoler les
valves l’une de l’autre, à les vider complètement, et à mettre en
relief quelques uns de leurs caractères les plus importants. Malheu-
reusement, toutes les parties constituantes de la coquille ne sont
pas également bien conservées; mais d’autres pièces ont déjà fait
connaître ce qui manque à celle-ci, de sorte que, pour nous du
moins, tous les caractères des Sphérulites sont suffisamment con-
nus, indépendamment des moyens artiliciels que nous avions em-
ployés autrefois pour en obtenir la reproduction.
Nous avons cru le nouvel échantillon de M. Sæmann trop im*
128
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
portant pour négliger de le mentionner devant la Société, et nous
avons pensé qu’il serait utile, dans la question qui s’agite depuis
bien des années, au sujet de la classification des Rudistes, d’en re-
produire une figure réduite. C’est cette figure que nous avons l’hon-
neur de vous soumettre ; nous la devons au crayon habile de
M. Humbert, qui, dans un excès de zèle bien louable, et animé
du pur intérêt de la science, veut bien en faire hommage à la
Société.
Il n’est pas nécessaire, sans doute, de donner une nouvelle
description de l’espèce qui fait le sujet de nos observations : celle
de M. Desmoulins est bien suffisante, et nous y renvoyons le lec-
teur. Nous insisterons seulement sur ceux des faits qui sont restés
inconnus au savant observateur : il ne pouvait les deviner, car il
n’eut jamais sous les yeux d’échantillons aussi complets ; s’il en eût
connu, il se serait fait des Rudistes une opinion toute différente de
celle qu’il a publiée.
La valve supérieure a un peu la forme d’un grand cabochon ; sa
cavité intérieure ne correspond eu aucune façon à la forme exté-
rieure; cette cavité est, en effet, très aplatie. En arrière, le bord
est renversé en haut, les lames d’accroissement ont de ce coté une
direction tout à fait différente de celle du reste de la circonfé-
rence. Nous verrons tout à l’ heure en quoi il importe de ne pas
négliger ce fait, qui semble d’abord de peu de valeur. A la partie
submédiane et un peu postérieure de cette valve, s’élèvent,
de chaque coté et obliquement, deux grandes apophyses subpyra-
midales, dont l’une, celle de droite, est aplatie, triangulaire, cour-
bée dans sa longueur, et supportée par un pédicule très large et
épais, limitée en dehors par Une espèce de gorge, sur l’arête de
laquelle viennent aboutir un grand nombre de sillons irréguliers
qui parcourent dans toute sa hauteur la surface extérieure de cette
apophyse. Du côté gauche, une apophyse analogue à la première,
mais plus petite, plus transverse, présentant une obliquité un peu
différente , est supportée par un pédicule plus étroit ; elle est lar-
gement dégagée à la base, et cette base est réduite en un véritable
col, au moyen duquel l’apophyse est complètement séparée de la
charnière. La surface interne de cette apophyse est concave, la
surface externe est convexe, et elle est profondément sillonnée
dans toute sa hauteur, comme la première.
En arrière de ces deux apophyses, on remarque la troncature
qui résulte de la fracture de deux grandes dents cardinales qui, se
trouvant engagées dans la valve inférieure, ont été brisées au mo-
ment de la séparation des valves.
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
m
La valve inférieure est au moins trois fois plus grande cjue la su-
périeure ; sa cavité, quoique profonde, est réellement peu consi-
dérable en proportion de la taille de la coquille; elle est assez ré-
gulièrement conique ; elle présente en arrière, et de chaque côté,
deux arêtes presque parallèles qui divisent la cavité générale en
deux portions inégales : l’une, antérieure, très grande, occupée
par l’animal; l’autre, postérieure, plus petite, était destinée à re-
cevoir un ligament puissant ; mais cette partie de la coquille n’est
point entière, ainsi que l’ont prouvé les échantillons précédem-
ment communiqués à la Société par M. Sæmann. Les deux arêtes
dont nous venons de parler sont les débris d’une large cloison dont
la reproduction ne s’est point opérée dans l’individu que nous dé-
crivons. Dans l’épaisseur de cette cloison sont contenues deux
grandes cavités dans lesquelles sont reçues les dents cardinales de
la valve opposée. Une grande partie des parois de cette cavité a
été dissoute, et les dents cardinales, soudées sur les parois externes,
n’ont pas été détachées; on en voit encore en place les débris. De
chaque côté de la grande cavité, à droite et à gauche, formant des
plans très inclinés, on remarque une grande impression muscu-
laire superficielle, subtriangulaire ; l’une d’elles, celle du côté gau-
che, est bornée en avant par une crête saillante. La surface de ces
impressions est sillonnée irrégulièrement, et on les reconnaît faci-
lement pour ce qu elles sont par leur analogie avec les impressions
semblables dans les autres mollusques acéphalés. Lorsque l’on rap-
proche les valves, on reconnaît la remarquable coïncidence de la
surface externe des apophyses saillantes avec les impressions mus-
culaires de la valve inférieure. La plus grande impression de la
valve supérieure s’adapte parfaitement à celle de la valve infé-
rieure : leurs formes sont semblables ; il est donc de la dernière
évidence que Frisage des apophyses de la valve supérieure est de
rapprocher des surfaces sur lesquelles doivent s’implanter des
fibres musculaires d’une puissance énergique, et qui, pour agir,
11e devaient pas être d’une extrême longueur, comme il serait ar-
rivé si, les apophyses n’existant pas, les muscles eussent été obli-
gés de s’allonger d’une valve à l’autre, en suivant des plans aussi
inclinés que ceux que présente la cavité intérieure de la coquille.
Toute la différence qui existe entre les impressions musculaires
des Rudistes et celles de la plupart des autres acéphalés dimyaires
consiste dans l’allongement considérable de ces impressions dans
la valve supérieure ; en s’avançant ainsi vers celles de la valve op-
posée, elles rendent plus directe l’action des muscles qui avaient à
lutter contre l’effort d’un ligament très puissant.
Soc. géol . , 2e série, tome VIII 9
13.0
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
Il est impossible de concevoir une coquille bivalve, appartenant
à un mollusque dimyaire, si elle n’a pas un ligament pour mou-
voir ses valves. Les muscles sont destinés à les rapprocher, et si
un ressort n’était disposé à les ouvrir constamment, ces muscles
se relâcheraient vainement, la coquille 11e pourrait plus s’ouvrir,
à moins qu’une force venant du ciel , placée en dehors de l’ani-
mal et de sa coquille, ne soulevât cette valve une fois abaissée. Il
ne peut en être ainsi ; il faut donc admettre l’existence d’un liga-
ment. Nous en avons démontré la présence à l’aide du moulage
de pièces d’une très belle conservation. Ce que M. Des Moulins a
nommé appareil accessoire dans les birostres n’est autre chose que
la représentation de la cavité occupée par ce ligament.
On a objecté que les dents cardinales sont engagées dans des
gaines trop étroites pour permettre le basculement d’une valve
sur l’autre : à cela nous répondrons que l’on s’est complètement
mépris à cet égard, car les interstices laissés entre les dents et
leur cavité réciproque ont été assez considérables pour permettre
l’introduction des matières étrangères qui ont rempli les coquilles
au moment de leur enfouissement, et cet intervalle, dont la valeur
est d’environ 1 millimètre pour une coquille de la grandeur de
celle dont nous parlons, est plus que suffisant pour favoriser l’en-
trebâillement très petit, et cependant assez grand pour admettre,
dans le manteau de l’animal, le liquide ambiant.
Nous avons une autre preuve du basculement des valves l’une
sur l’autre; elle nous est justement fournie par l'inclinaison re-
marquable des lames d’accroissement sur le côté postérieur de la
coquille. Dans la valve supérieure, ainsi que nous l’avons vu, ces
lames se redressent en haut et forment une sorte de bourrelet
arrondi; dans la valve inférieure, les lames d’accroissement suivent
une direction semblable, et le bord, de ce côté, est creusé en une
gouttière dans laquelle est reçu le bourrelet de la valve opposée.
Il est évident que si les valves ne devaient pas basculer l’une sur
l’autre, si elles devaient se soulever parallèlement l’une à l’autre,
la disposition dont nous parlons n’aurait pas été nécessaire, les
lames d’accroissement se seraient maintenues, en ce point, hori-
zontalement, comme sur le reste de la circonférence.
Des faits intéressants que présente l’échantillon de M. Sæmann
et que reproduit le dessin de M. Humbert, il résulte quelques
conséquences importantes : c’est en les exposant que nous termi-
nerons cette note.
1° Les Sphérulites appartiennent à la classe des mollusques acé-
phales dimyaires, ainsi que le constatent irrévocablement les rap-
SÉANCE Dll 16 DÉCEMBRE 1850.
131
ports des impressions musculaires des deux valves, quelle que soit
du reste la forme extraordinaire de celles de la valve supérieure;
2° Les valves des Sphérulites sont puissamment articulées en
une charnière dans laquelle se montrent deux grandes dents car-
dinales pyramidales, reçues dans de grandes cavités coniques de
la valve opposée ;
3° Un ligament intérieur très puissant étant en antagonisme avec
les deux muscles latéraux fait mouvoir les valves, et détermine
entre elles un faible bâillement comparable à celui si peu consi-
dérable des cames, des huîtres, et de presque tous les mollusques
acéphalés. Nous devons, en effet, rappeler à ce sujet combien est
faible l’entrebâillement nécessaire aux animaux en question, pour
recevoir en une suffisante quantité le liquide dont ils ont besoin.
Ces conséquences, nous les avions déjà tirées des faits que nous
avons observés, il y a environ vingt-cinq ans, lorsque nous nous
sommes occupé, pour la première fois, de la structure des Kudistes
et de leur classification. Tous les faits qui, depuis cette époque,
sont venus à notre connaissance, ont complètement justifié notre
opinion; nous les avons puisées, ces justifications, jusque dans les
ouvrages des personnes qui se sont le plus constamment opposées à
notre manière de voir,
M. Bayle appuie les conclusions de M. Deshayes , et dit que
la collection de l’Ecole des mines possède un échantillon qui
démontre, mieux encore que celui qui est représenté sur le
dessin, la justesse de ces observations.
Le secrétaire lit l’extrait suivant d’une lettre de M. Alfred
Caillaux :
Seravezza , 20 juin 1850.
Je profite d’une occasion favorable pour faire part à la Société
de quelques observations que j’ai faites en Toscane sur l'étendue et
la position du calcaire n uni muli tique. Jusqu’ici il n’avait été re-
connu que dans un très petit nombre de points et dans des situa-
tions telles qu’on le considérait comme supérieur au macigno ;
mais, comme nous le verrons plus bas, tout porte à croire qu’il
occupe une position inférieure. C’est aux environs du mont Amiata
que j’ai pu l’étudier en détail.
Appelé à les visiter, tant sous le rapport industriel que scientifi-
que, j’ai pu y reconnaître, outre la présence du calcaire nummuli-
tique, un grand nombre de phénomènes qui jusqu’à présent n’ont
SÉANCE Dli 16 DÉCËMBBÈ 1850.
m
pas été décrits en Toscane. Les mines de cinabre, les émanations
gazeuses, la forme de la masse granitique récente qui constitue le
noyau du mont Amiata, les exemples de métamorphisme, les érup-
tions basaltiques, fournissent une grande série de faits qui certai-
nement enrichiraient la science. Je n’ai pas eu le temps de termi -
ner le long travail que j’ai commencé à cet égard, et je regrette
que de nombreuses occupations m’empêchent de pouvoir préciser
l’époque à laquelle il pourra être achevé.
Pourtant j’ai déjà fourni la description des mines de cinabre qui
se trouve dans les Annales scientifiques de Bologne , à la suite d’un
Mémoire sur les mines de cuivre dans les serpentines.
Le mont Amiata forme une masse à peu près conique, quand on
l’observe dans son ensemble, qui se redresse majestueusement au-
dessus des terrains environnants. Les couches secondaires et ter-
tiaires viennent s’appuyer sur elle et s’étendent tout à l’entour dans
les provinces siennoise, grossétane et dans la Romagne ; elles sont
composées de haut en bas :
Du terrain pliocène formé de couches sableuses et d’argileâ
grises, dites subapennines, qui, vers Acqua-Pendente et aux envi-
rons, passent au-dessous des tufs et couches volcaniques qui consti-
tuent une immense étendue autour des cratères de Beïsaca et de
Mezzano ;
Du terrain miocène qui forme une grande partie du vallon de
la Fiora, et, à S. Prugnano, est en partie recouvert par de remar-
quables travertins ;
Du calcaire albérèse et du macigno qui formaient un étage du
terrain étrurien de M. Pilla, de regrettable mémoire ;
Du terrain crétacé de M. Savi , qui aujourd’hui , d’après les
récentes observations de M. Murchison, semblent devoir faire partie
du terrain éocène ;
Du calcaire nummulitique ;
Et enfin d’un puissant étage formé de couches diverses, dont
quelques unes, ammonitifères, contiennent des fossiles qui ressem-
blent plutôt à des Orthocères qu’à des alvéoles de Bélemnites.
Le calcaire nummulitique dont je viens plus particulièrement
parler est parfaitement dessiné aux environs de Castellazzara ,
petit pays situé à l’extrémité d’un des contre-forts du mont Amiata.
Les montagnes sur lesquelles est construit Castellazzara forment
un chaînon qui se dirige N. 68°. Vers l’O., il est brusquement
interrompu et s’arrête pour laisser passage aux eaux de la Fiora,
au delà de laquelle il se relève pour constituer la sommité du mont
Labbro et une infinité d’autres moins élevées qui en forment le
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
m
prolongement dans l'intérieur de la province siennoise. Yerâ i’Ë.,
on la voit s’abaisser peu à peu et s’enfoncer, avec les terrains supé-
rieurs qui en forment les contours externes, au-dessous des tufs
volcaniques de Pitigliano, puis enfin se relever aux environs et an
delà de Yiterbe. Considéré isolément, le chaînon de Castellazzara
présente un aspect des plus pittoresques. D’une couleur blanchâ-
tre, dépouillé de végétation et couvert de hêtres seulement dans
ses replis et ses anfractuosités, il se redresse presque verticalement
au-dessus des montagnes arrondies qui forment les rives du torrent
voisin le Siele, et qui , par leur couleur jaune et brunâtre, non
moins que par leurs contours, contrastent avec lui d’une manière
frappante. Ce chaînon est principalement composé de deux cal-
caires très puissants: l’un supérieur et nummuiitifère ; l’autre in-
férieur et dans lequel il m’a été impossible de rencontrer la moin-
dre trace de Nummulitc ; ou bien encore, l’un supérieur avec silex,
l’autre inférieur sans silex.
Le premier calcaire se présente sous forme de couches de l’épais-
seur de 2 mètres au plus, mais généralement de 1 pied, repliées et
contournées, mais pourtant pas suffisamment pour perdre les traces
de leurs direction et inclinaison générales, que l’on peut, au con-
traire, très bien déterminer. Dans la partie supérieure, les couches
sont gris-foncé, lamelleuses, d’aspect cristallisé ; plus bas, elles
sont plus spécialement gris -clair et grenues; toutes sont dures et
sonores, et présentent dans la cassure une infinité de points spatlii-
ques. Le silex ne se trouve pas dans les couches supérieures, mais
à une certaine profondeur dans l’épaisseur du terrain ; il y forme
des noyaux ordinairement allongés, ellipsoidaux, aplatis parallè-
lement au plan des couches et de formes fort irrégulières. Ces cou-
ches alternent avec des bancs schisteux, minces, rougeâtres et ver-
dâtres, qui atteignent au plus l’épaisseur de lm,25, et qui, dans
la partie inférieure, ne sont plus déterminées que par une ligne
fort mince. Les plans des couches calcaires, qui alternent avec ces
schistes sont recouverts d’un enduit vert-bouteille, pour ainsi dire
caractéristique. Au-dessous de la partie qui renferme le silex, les
couches sont plus puissantes, plus serrées les unes contre les autres,
et se relient par un passage insensible au calcaire inférieur. Quel-
quefois elles prennent l’aspect d’une brèche à petits fragments qui
renferme de petits noyaux quartzeux, des fragments anguleux cal-
caires et d’un schiste talqueux verdâtre que j’ai retrouvé partout
où j’ai eu occasion d’observer ce terrain. M. le professeur Mene-
gliini et M. Savi ont eu la complaisance de se charger de la dé-
termination des fossiles que j’ai recueillis dans ce calcaire, mais il
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
13 h
est facile d’y voir l’immense quantité de Nummulites global aria
qu’il renferme. On y distingue plusieurs espèces de Nummulites,
dont la plus grande que j’aie vue avait 1 centimètre environ de
diamètre.
Elles se trouvent abondamment dans les couches supérieures, et
les noyaux siliceux en sont souvent pétris. Tous les points spatlii-
ques sont presque exclusivement formés par les débris spathiques
des mêmes fossiles.
Les assises schisteuses présentent un grand nombre d’espèces de
Fuco'ides, et j’y ai rencontré une coquille que M. Meneghini prit
à la première inspection pour un Inocérame, et que j’avais aussi
considérée comme telle. Enfin , le calcaire contient un grand
nombre de fragments d’Encrines, de pointes d ' Echini, et une mul-
titude de débris organisés microscopiques. Quoique tous ces fossiles
soient si abondants à l’entour du mont Amiata, ils n’avaient pas
été reconnus jusqu’à présent.
Le calcaire nummulitique passe à un second calcaire inférieur,
gris et sonore, d’apparence et de structure dolomitiques, disposé en
couches puissantes sur la surface desquelles apparaissent une mul-
titude de points irréguliers qui semblent dus à la présence de dé-
bris de corps organisés; je n’y ai pu découvrir autre chose qu’un
fragment qui semblerait devoir appartenir à une Hippurite, mais
qui ne paraît pas suffisamment développé pour qu’on puisse l’affir-
mer. Ces couches sont serrées et compactes.
Ces deux calcaires ainsi réunis se trouvent compris entre deux
étages de couches bien distincts.
Le premier, qui leur est superposé, est représenté par les schistes
du macigno, ainsi que toutes les couches subordonnées, telles que
les grès avec empreintes carbonisées, les calcaires de l’albérèse
avec Fucoïdes, etc.
Le second, qui leur est inférieur, est composé de haut en bas de
la manière suivante :
Banc d’argiles schisteuses, couleur lie de vin, de l’épaisseur de
16 à 20 mètres, remplies d’une infinité de débris organisés presque
microscopiques, ét ayant à leur base un massif siliceux ou phtani-
tique, composé de couches siliceuses rougeâtres ou ronge foncé,
ou noirâtres, affectant de nombreux replis, de 5 à 6 mètres de
puissance ;
Un massif schisteux bariolé, de l’épaisseur de 10 mètres;
Calcaire compacte dendritique avec noyaux de silex;
Calcaire gris, à couches réglées peu épaisses.
Cès derniers calcaires appartiennent à la formation jurassique.
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850,
135
Par conséquent le calcaire nummulitique décrit plus haut se
trouve à Castellazzara, compris entre le macigno qui le recouvre
et des calcaires qui font partie des étages jurassique et triasique,
et qui sont situés au-dessous de lui. Quoique la présence du cal-
caire nummulitique en Toscane fut connue en quelques points,
comme à Mosciano près de Florence , on l’avait généralement
considéré comme situé au-dessus du macigno. M. Pilla se servait
de cette situation comme d’une des bases sur lesquelles il appuyait
l’existence de son terrain étrurien. M. Savi admettait également
la même relation entre le ccdcaire nummulitique et le macigno
d’après les observations faites à Mosciano.
Mais Mosciano n’est qu’un point, et les Apennins, le Modénais,
le mont Amiata, forment une série de faits bien suffisants pour
prouver le fait général de superposition du macigno, et faire croire
qu’à Mosciano il y a eu quelque renversement comme on en ren-
contre si fréquemment en Toscane.
De plus, si l’on parcourt les monts Pisans, et si l’on jette un coup
d’œil sur la description qui en a été faite par M. le professeur
Savi, on reconnaît bientôt que ce qu’il appelle caldaria screziata
n’est autre que le calcaire nummulitique, et comme à ce calcaire
il attribue une position inférieure au macigno, il en résulte que
l’on a encore là un nouveau point qui démontre et la position et
l’étendue du calcaire nummulitique en Toscane.
Enfin, à Monte-Rolondo et dans plusieurs autres localités on ob-
serve les mêmes faits.
A San Casciano on observe encore le même calcaire, mais dans
une situation différente. Depuis longtemps on connaît la pietra
milliard de ce pays, et M. Leymerie l’indique comme contenant
une infinité de Nummulites. Outre ces Nummulites, les bancs cal-
caires alternent avec des couches schisteuses pleines de Spatangues
et de Térébratuies d’aspect ancien. Cette roche est recouverte et en-
tourée par les dépôts subapennins, qui lui donnent l’aspect d’une
oasis au milieu d’argiles grises. Elle est sableuse, jaunâtre, et dif-
fère, quant à l’aspect, des calcaires que nous avons décrits plus
haut. Dans le vallon de Casciano on voit apparaître les mêmes
couches phtanitiques que nous avons vues à Castellazzara, qui ont
été observées par M. Savi dans les monts Pisans, de sorte qu’il
n’y a pour moi aucun doute que la roche de Perlascio à San Cas-
ciano n’occupe la même position, relativement aux terrains infé-
rieurs, que le calcaire nummulitique en général, et, malgré son
aspect di fièrent, elle paraît en être le prolongement.
Cette position générale que j’attribue, en Toscane, au calcaire
136
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
numniulitique, s’accorde parfaitement avec celle qui a été obser-
vée dans les Alpes et dans les Apennins, et reconnue par tous
les géologues.
Ces calcaires sont-ils indépendants du macigno? Plusieurs faits
tendraient à me le faire croire.
Dans la contrée du mont Amiata, on voit le macigno reposer, â
la fois, et sur le calcaire numniulitique et sur les couches animo-
nitifères de San-Casciano. A Perlascio, si réellement la roche dé-
crite plus haut, et rangée par M. Pilla au nombre des couches
miocéniques, appartient au calcaire numniulitique, comme tout
porte à le croire , celui-ci se trouverait entre le subapennin et
les couches jurassiques. Enfin, si on observe attentivement les
schistes ou galestri , qui à Castellazzara recouvrent le calcaire num-
niulitique, et qui forment la base du macigno, il n’est pas rare
d’y rencontrer des blocs anguleux nummulitiques, souvent creusés
comme s’ils avaient été longtemps soumis à l’action de vagues ou
de cours d’eau. Ces blocs se trouvent empâtés au milieu des
schistes, dont les feuillets en dessinent parfaitement les contours;
ne semble-t-il donc pas que le calcaire numniulitique était déjà
formé, ses assises consolidées et relevées, quand les schistes étaient
à l’état boueux, pendant qu’ils acquéraient leur structure feuille-
tée, et qu’ils étaient en voie de formation?
Cette indépendance semblerait donc démontrée.
L’étude des fossiles que pourra désormais fournir la Toscane
viendra se joindre à celle que l’on a faite dans les autres parties
de l’Europe et en Italie, et ce beau pays pourra fournir sa part
dans la solution de la question relative à la place que l’on devra
définitivement attribuer au calcaire numniulitique dans l’échelle
des terrains.
Une collection de fossiles pourra être bien reçue par la société,
et à mon prochain voyage au mont Amiata je m’empresserai de
faire ample récolte dans le but de la lui envoyer.
Je profite de l’occasion pour me mettre à la disposition de la
société, dans le cas où elle aurait besoin de quelques renseigne-
ments que je puisse lui fournir; comme aussi, si quelque membre
se disposait à faire un voyage de nos côtés, je serais heureux
qu’il voulût bien mettre à profit ma bonne volonté.
Le secrétaire communique la note suivante de M. À. Toschi :
Imola , 26 juillet \ 850.
La Société ayant bien voulu, en 1846 et en 1849, insérer
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
137
dans son Bulletin quelques notices géologiques sur les environs
d’Imola , je crois de mon devoir de continuer à enrichir, autant
qu’il est en mon pouvoir , l’histoire naturelle de mon pays , en
lui adressant quelques remarques relatives aux forages artésiens
dans la Romaine.
Si la surface des couches tertiaires qui forment le versant N. de
l’Apennin n’eut point été sillonnée par une multitude de fleuves
et de torrents, qui, tous parallèlement les uns aux autres, vont
déboucher dans la mer Adriatique, rien ne serait plus facile que de
conclure théoriquement (d’après le gisement très régulier de ces
couches, et d’après la concordance de stratification) la convenance
des puits artésiens dans toute la grande plaine de la Romagne. Mais
tous ces cours d’eau qui descendent de l’Apennin en suivant à peu
près la ligne de la plus grande obliquité des couches (c’est-à-dire
perpendiculairement à la direction N. 80° O. , S. 80° E. de l’Apennin
même) ont tous formé de grandes vallées d’érosion, comblées en-
suite par des déblais modernes, qui changent tout à fait l’état des
choses par rapport à l’infiltration des eaux destinées à alimenter
les jets artésiens. De là une distinction à faire, très fondamentale,
entre les points de la plaine de la Romagne qui se trouvent sur le
prolongement de ces vallées d’érosion, et les autres points qui
gisent entre deux fleuves, et qui, par conséquent, ont devant eux
la série non interrompue des couches tertiaires.
Dans ce dernier cas, la coupe théorique de ces terrains donne
le profil représenté parla ligne pointée a} b , c, d, c , sans qu’il y ait
aucune interposition de déblai moderne entre le dépôt b , c. d , des
sables jaunes, et celui d, , de l’alluvion ancienne.
A. Alluvion moderne.
B. — ancienne.
C. Sable jaune.
D. Marnes bleues.
E. Gypse.
F. Terrains du mocigno.
Si l’on creuse donc un puits dans la plaine qui s’étend dans la
direction d, e, on aura la chance de rencontrer sur les couches
alternantes de la marne bleue toutes les eaux engagées dans le
sable jaune depuis b jusqu’à d, outre celles qui seraient descendues,
dans l’alluvion ancienne , depuis d jusqu au point du forage. Etant
158
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
alors donnés l’angle de plongement des couches (qui est de 3° N.
10° E.) et la distance horizontale (q) du point choisi pour le forage
au point du premier affleurement des couches marneuses, on pourra
en conclure la profondeur/; qu’il faut donner au forage même pour
atteindre la surface plus élevée des marnes bleues qui retiennent
les eaux. C’est par la simple formule p~q tang. 3°, qu’on aura la
valeur numérique plus ou moins approchée de cette profondeur ;
et si l’on retranche de ce nombre p l’expression de la différence de
niveau entre le point du forage et celui du plus proche affleure-
ment des marnes, on pourra évaluer d’une façon approximative le
jaillissement du jet artésien.
D’un autre côté, si l’on considère les points de la plaine placés
vis-à-vis des vallées d’érosion, on aura la coupe a, /z, c, zzz, où l’on
voit le dépôt del’alluvion moderne poussé vers la montagne jusqu’à
ce qu'il s’appuie sur les marnes bleues, après avoir entièrement
recouvert toute l’alluvion ancienne, les sables jaunes, et même une
partie de ces marnes. C’est à ce riche dépôt moderne qu’on doit
rapporter le phénomène étrange de voir dans la basse plaine de la
Romagne les lits des fleuves et des canaux soutenus par de hautes
digues bien au-dessus du niveau de la campagne; et c’est à
eette circonstance hydraulique que sont dus les désastres trop
fréquents de ruptures de digues et de débordements. D’ailleurs il
n’est pas difficile de se rendre compte d’un tel fait, quand on réflé-
chit qu’il n’y a peut-être pas une roche qui se laisse détruire plus
aisément par les eaux torrentielles que le sable coquillier et les
marnes déboisées de la période pliocène.
Or, si l’on demande la chance qu’il y aurait de rencontrer des
eaux jaillissantes en sondant dans la direction d’une telle vallée
d’érosion, on est en mesure de répondre qu’il faut renoncer entiè-
rement à l’espoir d’avoir des eaux infiltrées dans le sable jaune,
puisqu’il n’existe plus , étant entièrement masqué par l’alluvion
moderne. On percera bien par un trou de sonde la même série de
terrains qu’on trouve dans les endroits hors de la vallée d’érosion
(c’est-à-dire l’alluvion ancienne, le sable jaune et la marne bleue),
mais à ce point-là on ne trouvera pas les eaux du sable jaune. La
seule chance qui reste, c’est que, du point du forage au point n
de la limite de l’alluvion moderne, il y ait une distance assez
grande pour que l’infiltration ordinaire des eaux qui s’y opère
soit suffisante pour produire des courants d’eau à la surface des
couches marneuses. Tdais pour que ces courants (s’il y en a) soient
capables d’alimenter des jets jaillissant au-dessus du niveau du
sol, il faut en outre que le niveau des points d’infiltration des
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
139
eaux soit bien au-dessus de celui de la vallée où Fou creuserait
le puits. Mais comme les points d’infiltration sont dans le même
dépôt moderne où l’on exécuterait le forage, on n’obtiendrait cette
différence de niveau qu’à line distance très grande, c’est-à-dire, qu’il
n’y aurait aucun espoir de bonne réussite dans les puits, si ce n’est
en s’approchant beaucoup de la mer Adriatique. Cela s’accorderait
d’ailleurs d’une manière frappante avec le fait très connu des puits
de Venise, qui reçoivent les eaux des terrains mêmes de l’alluvion
où ils sont ouverts, et cependant elles y sont heureusement jaillis-
santes. En effet, l’état géologique des choses est, par rapport aux
points de la plaine de la Romagne qui se trouvent dans la direction
d’une vallée d’érosion , le même qu'à Venise , ville placée aux
dernières limites de la grande vallée du Pô.
Donc, inconvenance parfaite (sauf les exceptions possibles) de
creuser des puits artésiens dans toutes les villes de la Romagne
placées sur la voie Æmilia, ou à peu de distance, lorsque ces mêmes
villes sont comprises ou placées dans la direction d’une vallée
d’érosion. Impossibilité absolue (démontrée par le fait, comme on
le voit ci-dessous) d’obtenir des eaux en sondant dans les marnes
bleues affleurant supérieurement à la voie Æmilia.
A l’appui de ces considérations, et dans le but d’enregistrer dans
les annales de la science tous les faits qui nous sont connus, nous
résumons ici un tableau tiré presque entièrement des études ré-
cemment publiées par notre savant collègue et ami, M. J. Scara-
belli, ainsi que nous fîmes en 18it6 par rapport aux ossements
fossiles découverts dans les environs d’Imola et décrits par le même
auteur.
Tableau des forages artésiens existant aujourd’hui en Romagne.
LOCALITÉS.
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OBSERVATIONS.
met.
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Fantuzza. . . .
52.t»o
+ 1,52
15
445 hectolitres d'eau par 24 heures. |
Vainiina. . . .
70,54
15
Imparfait.
Villa-Fontana.
114 »
76 »
— 1,50
15
Trouliléespardu sable et des marues coulantes. g
Sala
15
|
Cioceltû. . . .
114 »
o,
20
Quantité très faible.
Riissi
58 »
— 2,50
20
Assez grande.
Ravenna. . . .
70 »
-j-0,40
55
Eau ferrugineuse.
!
• - -■ • |
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
HO
Sondages exécutés sans succès dans les marnes bleues
supérieurement à la voie Æ milia.
À la Franzona profondeur. 76m,5
Près de Bergullo 76‘n,9
Dans les collines de Bologne. . . . 4 06m,4
M. deLoriére donne communication d’un extrait des procès-
verbaux de la session extraordinaire delà Société, au Mans,
en 1850.
Par suite de cette communication , M. Hébert appelle l’atten-
tion de la Société sur le terrain observé à la Jonnelière, et au
sujet duquel deux opinions contradictoires ont été émises à la
session extraordinaire du Mans. Dans l’une de ces opinions,
ce terrain serait la base de X oxjord-clay , dans l’autre, ce serait
Xoolite inférieure de Bayeux. La première s’appuie sur la
présence, immédiatement au-dessus des couches en litige, de
l’oxford-clay proprement dit-, elle est soutenue, en particulier,
par M. Triger, dont les observations doivent mériter une grande
considération, en raison même du but qu’il se propose en les
exécutant. La seconde se fonde sur une liste de fossiles recueillis
en cette localité et reconnus, par M. Aie. d’Orbigny, identiques
avec ceux de Foolite inférieure. M. Hébert ne saurait avoir la
prétention de juger une question qu’il n’a point étudiée sur
les lieux ; il n’aurait même pas soumis à la Société ses doutes
et la difficulté qu’il éprouve à admettre cette dernière opinion,
si elle n’eût été évidemment traitée avec plus de faveur que
l’autre dans le compte rendu que M. le secrétaire de la session
extraordinaire vient de présenter à la Société.
M. Hébert dit que les doutes qu’il éprouve tiennent, à la fois,
et à des considérations stratigraphiques et aux fossiles eux-
mêmes. Nul plus que lui n’apprécie les services rendus à la pa-
léontologie, en général, et en particulier à celle des terrains
secondaires de France parles travaux de M. Aie. d’Orbigny. Il
pense que c’est à ces travaux que l’on doit de pouvoir classer
presque tous les étages jurassiques avec la plus grande facilité, à
l’aide du seul genre Ammonite , si nombreux en espèces pendant
cette période. Chacun a pu, avec les descriptions et figures en
main, vérifier les déterminations, et s’assurer par lui-même de
SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
441
la spécialité de la presque totalité de ces espèces à un étage
particulier. Le même travail n’existe point encore pour les
Gastéropodes et les Acéphalés -, il est donc prématuré d’établir
sur des espèces appartenant à ces classes les mêmes conclu-
sions que sur les Céphalopodes . 11 y a plus, on sait, dés à pré-
sent, que ces conclusions ne seront pas les mêmes, et il cite
pour preuve un des fossiles recueillis à la Jonneliére et déposés
sur le bureau parM. deLorière-, c’est la Lima proboscidea , Sow.
Ce fossile, si abondant dans l’oolite inférieure de toutes les par-
ties de la France, de l’Angleterre et de l’Allemagne, est très
commun dans l’oxford-cîay inférieur, dans toute la Normandie.
C’est un fait reconnu par M. Aie. d’Orbigny, qui le mentionne
dans son Prodrome , tandis que jusqu’à présent aucun fait sem-
bla b le ne s’est présenté pour les Ammonites. A côté de la Lima
proboscidea , sont, sur le bureau, deux autres espèces, qui, avec
la première, paraissent constituer les fossiles les plus communs
dans les couches en litige, ce sont : 1° une Trigonie, qu’il est
bien difficile de séparer de la T. cardissa , Ag. (' T . elongata ,
Sow.) 5 2° une Nucléoîite bien voisine, si elle n’est identique
avec elle, de la Nucleolites clunicidaris, Phill. -, or, c’est précis
sèment à la base de i’oxford-clay que ces trois espèces se trou-
vent réunies avec le plus d’abondance.
Sous le rapport de la stratification, comme il est constaté
que des couches oxfordiennes reposent sur le terrain en litige,
il faudrait donc que la grande oolite, si puissante, si constante
dans tout l’ouest de la France, manquât complètement dans
une partie du département de la Sarthe. Ce fait, qui certaine-
ment n’est pas impossible, est cependant tellement grave qu’on
ne saurait fournir trop de preuves pour en établir la démon-
stration.
Plusieurs observateurs ayant, à ce qu’il paraît, assimilé le
terrain de la Jonneliére, ou des couches avec lesquelles il se
trouve en rapport, à l’oolite de Mamers, M. Hébert croit de-
voir rappeler quelle est la série des couches jurassiques aux
environs de cette ville, des exploitations nouvelles lui ayant
permis de voiries superpositions avec plus de netteté peut-être
qu’on n’avait pu le faire jusqu’alors. Cette succession est l’ob-
jet de la communication suivante :
l/j2 SÉANCE DU 16 DÉCEMBRE 1850.
Note sur V étage oxfordien inférieur des environs de Mamers ,
par M. Hébert.
A un kilomètre et demi de Mamers, des carrières sont ouvertes
dans la grande oolite, proprement dite, l 'oolite à fougères de M. Des-
noyers. Les caractères de cette oolite sont bien connus par la
description de M. Desnoyers {Ann. des sc. natur., 1825), et par
celle qu’en ont donnée les auteurs de la carte géologique de la France
{Expi., t. II, p. 209 à 211). Les fossiles y sont rares ; il y a surtout
absence complète des Ammonites et des grosses Pboladomyes, qui
abondent dans les couches suivantes.
Immédiatement au-dessus de la grande oolite, ou, du moins,
séparées d’eile par une assise peu puissante et non visible en ce
moment, se trouvent :
1° Une couche d’argile sableuse, d’un noir bleuâtre , exploitée
pour la fabrication des tuiles, au lieu dit Bon-repos, à 3 kilomètres
de Mamers. Cette argile renferme des blocs argilo-calcaires.
2° Une marne jaune argileuse, avec calcaire argileux, en ro-
gnons et en concrétions ramifiées.
Ces deux assises, épaisses de quelques mètres seulement, et dont
la nature contraste si fortement avec le calcaire oolitique qu’elles
recouvrent, se lient, au contraire, très bien avec les couches qui
sont au-dessus. On y rencontre, avec une certaine abondance, les
Ammonites Bukeriœ, Sow. , et macrocephcdus , Scliloth. il n’est pas
rare d’y trouver des individus adultes de cette dernière espèce,
entièrement ronds et lisses comme une boule, et d’un diamètre de
25 à 30 centimètres. Les Pboladomyes commencent à se rencontrer
dans ces assises argileuses.
3° Viennent ensuite une série de couches de calcaire argileux
où abondent le Dysaster cllipticus , les Térébratules et les grosses
Pboladomyes, et qui, à 10 kilomètres de Mamers, à Courgains,
se terminent par un calcaire argileux rempli d’oolites ferrugi-
neuses, exactement semblable à celui qu’on exploite à Estrochey,
prèsCiiâtillon-sur- Seine, au minerai de fer sous-oxjordien de Clucy,
près Salins. Cette couche est caractérisée dans ces trois localités
par les mêmes fossiles, dont quelques-uns, comme les Ammonites
coronatus, anceps, Jason, lui appartiennent presque exclusivement,
et dontd’ autres, comme le Dysaster e II ip tiens, Y Ammonites Bakeriœ ,
la lient intimement avec les couches sous-jacentes. Cette liaison
n’existe pas moins d’ailleurs entre les caractères minéralogiques.
k° Cette série se continue à Marolles, à à ou 5 kilomètres de
SÉANCE DU 16 décemeke 1850. 143
Courgains. En ce lieu, les couches les plus inférieures sont carac-
térisées par Y Ammonites athlcta, Phili ; elles ne contiennent plus de
grains de fer oolitique. Elles sont surmontées par une série de
lits de sable argileux et de grès calcaire alternant ensemble, dont
une carrière ouverte au lieu dit la Çorhinière , montre la coupe
suivante :
4° Terre végétale.
2° Sable argileux
3° Grès calcaire 0m,3
4° Sable argileux 4n\2
5° Grès calcaire 0°\3
6° Sable argileux dont l’épaisseur
n’est pas connue.
Le sable argileux ne paraît pas contenir de fossiles, mais les
deux bancs de grès calcaires en sont pétris. On y remarque prin-
cipalement les Ammonites Lamberti , Sow., perarmatus , d’Orb.,
modiolaris , Lwyd, lenticularis , Phili. , qui, à l’exception de
Y A. modiolaris , ne se retrouvent point dans les couches infé-
rieures.
Toute cette série, à commencer par l’argile noire de la base ,
appartient à l’oxford-clay inférieur, à Y étage c. allô vie n de M. d’ür-
bigny; Y Üstrœa dilatata ne s’y montre pas encore. Toutefois on
commence à Marolles, à voir apparaître en abondance Y Ammonites
perarmatus qui se trouve là avec Y A. Lamberti , et établit avec
l oxford-clay supérieur la même liaison qui existe entre les diverses
assises de l’oxford-clay inférieur.
Malgré ces liaisons incontestables, on peut néanmoins établir
des horizons assez bien marqués dans cette série de couches, et ces
horizons sont extrêmement faciles à reconnaître dans toute celte
contrée. Je les caractériserai de la manière suivante en partant de
la base :
1° Argiles à Ammonites macroccphalus , Schloth. (1).
2° Calcaiie argileux à Dysaster ellipticus.
3° Sables argileux et grès calcaire avec A. perarmatus et Lam
berti.
L’oxford-clay inférieur des environs d’Alençon appartient aux
deux premières divisions, que M. JBiavier, dans sa description géo-
(4) Cette assise n’est pas toujours visible, précisément à cause de
sa nature qui la fait céder à la pression des couches calcaires qui la
surmontent, et qui alors, sur les pentes, se trouvent souvent en contact
avec la grande oolite,
SÉANCE DU 6 JANVIER 1851 .
iiiii
logique du département de l’Orne, avait déjà reconnues et par-
faitement distinguées. J’ai essayé de préciser et d’étendre davan-
tage ces divisions. Je les crois très utiles et très exactes pour le
département de l’Orne, pour l’arrondissement de Mamers, et pro-
bablement pour tout le département de la Sarthe ; mais doit-on
les généraliser? c’est ce que l’observation seule peut nous appren-
dre. Et, à cette occasion, qu’il me soit permis de dire que jamais
le besoin des descriptions locales exactes n’a été plus grand, car
elles seules peuvent nous éclairer sur la valeur des généralisations.
M. D’Archiac demande quelle est la relation de ces couches
avec celle à Pholadomya carinata .
M. de Lorière répond que cette dernière leur est immédiate-
ment supérieure.
M. Boubée a remarque que dans la lecture des procès-ver»
baux de la session du Mans on a souvent donné le nom de
silurien aux terrains de schiste micacé. Sans vouloir entrer
dans le fond de la question, M. Boubée croit devoir présenter
ses réserves contre cette dénomination appliquée à ces roches.
M. Rivière annonce à la Société qu’ayant eu l’occasion d’exa-
miner récemment les schistes bitumineux d’Àutun, il s’em-
presse de reconnaître que cet examen lui a démontré que c’était
à tort qu’il avait autrefois considéré ces schistes comme supé-
rieurs au terrain houiller, car ils alternent positivement avec
les grés houillers de la localité.
Séance du 6 janvier 1851.
PRÉSIDENCE DE M. ÉLIE DE BEAUMONT.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance , dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le
Président proclame membres de la Société :
MM.
Desoignie (D. Adolfo) , ingénieur des mines de la compagnie
royale asturienne à Aviles, à Oviedo (Espagne), présenté par
MM. G. Schulz et L. Salmean.
SÉANCE DU 6 JANVIER 1851 .
Ua
De Elorza (D. Francisco Antonio), colonel, directeur en
chef de la fonderie royale de Truvia, à Oviedo (Espagne),
présenté par MM. G. Schulz et L. Salmean.
Guilhaud (Jules), propriétaire, à Champagne-Mouton (Cha-
rente), présenté par MM. Félix Garran et Mauduyt.
Meugy, ingénieur des mines, à Lille (Nord), présenté par
MM. Élie de Beaumont et Ch. Deville.
Wisse (Sébastien), ingénieur constructeur, rue Jacob, 12,
à Paris, présenté par MM. Cordier et Charles d’Orbigny.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa -
vants , décembre 1850, in -4.
De la part de M. Bianconi, De mari , etc. (Dissertations sur
la mer qui a jadis occupé les plaines et Ses collines de l’Italie,
de la Grèce et de l’Asie-Mineure, etc,, et sur l’âge du terrain
que les géologues appellent marnes bleues) -, in-4, 132 p.
Bologne, 1846.
De la part de M. de Koninck, Sur Ici géologie de la Bre-
tagne. — Extrait d’une lettre adressée à M. de Koninck par
M. de Verneuil (extr. dut. XVII, n° 10, des Bull, de V Acad,
roy. de Belgique ), in-8, 6 p.
De la part de M. de Kokscharoff : 1° Du Bagrationit , nou-
velle cristallisation minérale , in-8, 14 p., 1 pl. Saint-Péters-
bourg , 1847.
2° Du système de cristallisation de V Ouralvrtite , in-8,
25 p., 3 pl. Saint-Pétersbourg, 1848.
3° Ueber Brookit , etc. (Des cristaux de Brookit de l’Oural)
(extr. des Ann. de la Soc. minér. de Saint-V étersb ., 1848-49),
in-8, 16 p., 1 pl. Saint-Pétersbourg, 1849.
De la part de M. J. Ponzi, Sulla storia , etc. (Mémoire sur
l’histoire physique du bassin de Rome , pour servir d’appendice
à l’ouvrage sur le sol physique de Rome de M. G. Brocchi)
(extr. des Annali di scienz. matem. e fi sic. public, in Borna,
juillet 1850), in-8, 24 p., 1 pl. Rome, 1850.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1850, 2e sem., t. XXXI, nos 25 à 27.
Soc. géol., série, tome VIII.
10
m
SÉANCE DU 6 JANYIER 1851,
U Institut, 1850 , nos 885 et 886; 1851 , n° 887,
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée; n° 27, 3e année,
novembre 1850.
Annales des mines , tie sér., t. XVIII, 1850, he et 5e livrai-
sons.
The Àthenœum , 1850, nos 1208 et 1209; 1851, n° 1210.
M. le Trésorier présente 1 état de la caisse au 31 décembre
1850.
Il y avait en caisse au 31 décembre 1849. . 667 fr. 05 c.
La recette, depuis le 1er janvier 1850, a été
de 19,404 40
Total. . . 20,071 45
La dépense , depuis le 1 er janvier 1850, a été
de 18,311 80
Il reste en caisse au 31 décembre 1850. . . 1,759 fr. 65 c.
Les nominations des diverses commissions, pour l’année 1851,
faites par le Conseil , dans sa séance du 2Zi décembre dernier,
sont successivement adoptées par la Société.
Ces Commissions sont composées de la manière suivante :
1° Commission de comptabilité , chargée de vérifier la gestion
du Trésorier: MM. Viquesnel, Damour, Hébert.
2° Commission des archives , chargée de vérifier la gestion
de l’Archiviste: MM. Graves, Ch. Martins, Hugard.
3° Commission du Bulletin : MM. Angelot, Damour, de
Yerneuil.
l\° Commission des Mémoires: MM. d’Archiac , Viquesnel,
Deshayes.
On procède ensuite à l’élection du Président pour l’année
1851.
M. Constant Prévost , ayant obtenu 77 suffrages sur 115,
est élu Président pour l’année 1851 .
La Société nomme ensuite successivement :
Vice - Présidents : MM. d’Omalius d’Halloy, Dufrénoy,
Ed. Hébert, Cordier,
SÉANCE DU 6 JANVIER 1851'.
w
Secrétaire pour C Etranger : M. Ch. MaRTINs.
Archiviste : M. Bourjot.
Vice- Secrétaire : M. Hugard.
Membres du Conseil : MM. Eue de Beaumont, Delafosse ,
de Verneuil , Deshayes, Bayle.
Il résulte de ces nominations que le Bureau et le Conseil se
trouvent composés de la manière suivante pour l’année 1851 :
Président.
M. Constant Prévost.
V ice- P résidents.
M. d’Omalius d Halloy,
M, Dufrénoy,
Secrétaires .
M. Ch. Deville ,
M. Ch. Mautins.
M. Ed. Hébert ,
j M. Cordier.
P ice-Secréta ires
M. Delesse ,
M. Hugard.
7 resorier .
M. Éd. de Brimont.
Archiviste .
M. Bourjot.
Membres du Conseil .
M. Michelin,
M. Viquesnel,
M. Angelot,
M. d’Archiac,
M. d’Orbigny (Alcide) ,
M. d’Orbigny (Charles),
M. Damour,
M. Elie de Beaumont,
M. Delafosse,
| M. de Verneuil,
| M. Deshayes,
j M. Bayle,
148
SÉANCE DU 13 JANVIER 4 851.
Séance du 13 janvier 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de !a dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président annonce ensuite une présentation.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le Dr Jules Teissier, Du service hydraulique
en France , de son importance et de son avenir , 3e livr., in-8,
p. 471 à 678. Nîmes, 1850, chez Balivetet Fabre.
De la part de M. Lardy, Naturgeschichtliche Uni risse , etc.
(Esquisse d’histoire naturelle géognostique et minéralogique),
in-12, 51 p. Lausanne, 1850.
De la part de M. Ch. T. Jackson, Report, etc. (Rapport sur
la description géologique et minéralogique des terrains miniers
de l’État de Michigan), in-8, 844 p., 15 pi. Washington,
1849.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1851,1er sem.,t. XXXII, n°l.
L’Institut , 1851, no 888.
Bulletin, de la Société de géographie , 3e série, t. XIV,
n° 83, novembre 1850.
Mémoires de V Académie des sciences , belles lettres et arts
de Lyon ; classe des sciences , t. II} classe des lettres , t. II,
1850.
Natiuwissenschaftliche Abhandlungen , etc. (Mémoires d’his-
toire naturelle, réunis et publiés par M. G. Haidinger),
vol. III, in-4, 483 p., 33 p. Vienne, 1850, chez Braumüller.
Berichte , etc. (Rapports sur les communications faites par
les amis des sciences naturelles de Vienne, réunis et publiés
par M. G. Haidinger), vol. V, nos 1 — 6, juillet à décembre
1848-, nos 1 — 3, janvier à mars 1849} vol. VI, nos 1 — 9,
avril à décembre 1849, in-8.
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851. 1$9
Jahrbuck, etc. (Annuaire de l’Institut I. R. géologique),
Vienne, 1850, lre année, n° 1, janvier à mars, in -à.
Proceedings of the Acadcmy of natural sciences of Phila-
delphia , vol. V, n° 5, in-8 .
The Athenœum , 1851, n° 1211.
M. Constant Prévost adresse ses remerciements à la Société
pour l’honneur qu’elle lui a fait de l’appeler à la présider cette
année.
M. Élie de Beaumont fait hommage, de la part de M. le
Dr Jackson , de son ouvrage sur les affleurements des minerais
de cuivre de l’Ohio, etc., et donne quelques détails sur les
progrès récents de la géologie, dont le champ s’étend aujour-
d’hui, en Amérique, jusqu’au rivage N.-O. du lac Supérieur.
M. d’Archiac communique les passages suivants d’une lettre
de M. A. Boué, datée de Vienne le 10 octobre 1850 :
Vous avez appris les fêtes qui ont été données pour célébrer
l’anniversaire séculaire de la naissance de Werner, le 26 septembre,
à Freiberg, ainsi qu’en Autriche, dans chaque chef-lieu déminés,
savoir : à Vienne , à Klagenfurt , etc. Ici il y a eu à la Monnaie
une séance , présidée par M. Iïaidinger , une course au pied du
Schneeberg, visite aux mines, coulage d’un buste , etc.
Le consul autrichien de Beyrouth vient de nous faire un envoi
de poissons fossiles du Liban , et M. Heckel a découvert dans
l’Autriche supérieure une nouvelle espèce de la même classe. Les
figures des plantes tertiaires de Radobog , en Croatie , au nombre
de 198 espèces, et celles de Soltska, en Styrie, au nombre de 131,
décrites par M. Unger, vont paraître dans le 2e cahier du 2e volume
des Mémoires de C Académie des sciences de Vienne. Le Species
plantarum fossilium (1 vol. in-8) et les douze tableaux paléophyto-
graphiques ont été publiés cet été. M. Constantin d’Ettingshausen
fils , qui a fait une étude spéciale des feuilles , a exécuté aussi un
travail sur les végétaux des mêmes localités , et sur ceux de
Parschlung.
Que dites-vous des UO espèces siluriennes supérieures trouvées
par M. Barrande dans un silurien inférieur séparé du supérieur
par/iOOO pieds de roches tout à fait différentes, et dans lesquelles
on ne rencontre pas une seule de ces espèces?
1*50
SÉANCE DU i 8 JANVIER 1851.
A la suite de cette lecture, M. Barrande fait la communica-
tion verbale suivante sur Je terrain silurien du centre de la
Bohême :
Pour faire comprendre le fait annoncé par M. Ami Boue, je dois
exposer en quelques mots les principaux traits qui caractérisent le
terrain silurien du centre de la Bohême.
Ce terrain, considéré géographiquement, forme un ovale allongé,
dont la longueur est d’environ 1 kilomètres, et dont la largeur
varie de 30 à Ih kilomètres. L’axe de figure du bassin a la direc-
tion E. -f" 28° N. (magnét.). Dans le bassin ainsi défini, on
reconnaît d’autres bassins à peu près concentriques, dont les con-
tours correspondent aux limites des formations siluriennes succes-
sives , suivant l’ordre des âges , et dont les diamètres se réduisent
très rapidement.
Si nous faisons une section idéale en travers du bassin , toutes
les formations se présentent d’une manière régulière et symétrique,
par rapport à l’axe, ainsi qu’on le voit sur la figure. On remar-
quera d’abord qu’elles ont une stratification concordante dans
toute l'étendue verticale du terrain. En second lieu, si l’on fait
abstraction de quelques perturbations locales, toutes les couches
offrent une inclinaison symétrique et synclinale relativement à
l’axe du bassin. Cette inclinaison varie de 25° à 90°.
Avant d’aller plus loin , je dois dire que j’ai adopté les dénomi-
nations employées par sir Roderick Murcliison dans ses divers tra-
vaux sur les terrains siluriens. Ces termes ont été suffisamment
définis, et ils s’appliquent exactement à mon terrain , dans l’accep-
tion qui leur a été donnée.
Te reconnais dans le système silurien du centre de la Bohême
deux divisions principales , que je nomme division supérieure et
division inférieure. Chacune de ces divisions se compose de divers
étages , que je désigne par les lettres alphabétiques, à partir de la
base granitique jusqu’au sommet. La division inférieure comprend
quatre étages : A, B, C, D, et j’en distingue aussi quatre : E, F,
Gy H, dans la division supérieure.
Considérées chacune comme un tout, ces deux divisions corres-
pondent parfaitement à celles que sir Roderick Murcliison a d’abord
établies en Angleterre , et qu’il a successivement reconnues, avec
MM. de Yerneuil et le comte Keyserling, en Russie et en Scandi-
navie On sait, d’après les travaux des géologues américains et
le parallèle établi par mon ami M. rie Yerneuil , que ces deux divi-
sions principales se retrouvent aux Etats-Unis. 11 y a donc com»
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851, 151
plète harmonie dans le monde silurien, relativement à cette grande
coupe.
A notre point de vue, le fait principal, sur lequel repose la dis-
tinction des deux divisions siluriennes que nous adoptons en
Bohême, consiste, là comme ailleurs, dans la nature des faunes
différentes qui caractérisent chacune d’elles. En outre, par suite
de circonstances purement locales, nos divisions inférieure et supé-
rieure se distinguent également par leurs caractères pétrographi-
ques. La division inférieure se compose de roches de nature argi-
leuse ou siliceuse , à l’exclusion presque absolue du carbonate de
chaux. Au contraire, la division supérieure nous présente presque
uniquement des roches calcaires, formant une grande masse, qui a
pour hase et pour couronnement des dépôts de schistes argileux ,
relativement très peu développés.
La limite entre nos deux divisions est tracée d’une manière très
nette par une masse de trapps provenant d’un déversement de
matière plutonique, qui a envahi toute la surface de notre bassin,
et que nous figurons dans notre profil. Ces trapps forment la base
continue de notre division supérieure, autour de laquelle nous
reconnaissons leur affleurement sans lacunes. Ils alternent avec des
schistes à Graptolites , argileux , noirs, feuilletés, et qui , par l’ab-
sence presque complète du mica , contrastent avec la plupart des
roches schisteuses de notre terrain , surtout avec celles de notre
division inférieure. Au milieu de ces schistes caractérisés par vingt
espèces de Graptolites , nous voyons apparaître le calcaire sous la
forme de sphéroïdes isolés , cl’abord très rares et petits , successi-
vement plus gros et plus rapprochés , et s’agglomérant enfin à une
certaine hauteur, pour constituer des bancs calcaires entre lesquels
les couches argileuses finissent par disparaître entièrement.
On conçoit aisément que le déversement des trapps au fond du
bassin de la Bohême a dû anéantir d’un seul coup tous les êtres
qui vivaient alors dans cette mer. Aussi voyons-nous disparaître
entièrement la faune de notre division inférieure , dont nous ne
retrouvons aucune trace, ni dans les schistes à Graptolites, ni au-
dessus, dans toute la hauteur de notre t i vision supérieure.
Une faune nouvelle se manifeste dans les schistes à Graptolites,
et elle se développe très rapidement dans les calcaires. Kl le diffère
complètement de celle qui vient d’être anéantie , et qui consistait
presque uniquement en Trilobites, analogues à ceux des Caradoc *-
sandstones et Llandeilo-flags , formations représentées en Bohême
par mon étage des quartzites 1), Outre les formes nouvelles de Tri-
lobites caractérisant mon étage calcaire inférieur E, on voit appa-
152
SÉANCE DU lo JANVIER 1851.
raître une multitude de Céphalopodes, Gastéropodes, Brachio-
podes, Acéphales, etc., classes à peine représentées dans ma divi-
sion inférieure. En un mot, il y a un contraste aussi complet que
possible entre les faunes des deux divisions principales de mon
terrain silurien.
Il était nécessaire de bien établir et de faire bien concevoir ce
contraste, avant de vous exposer le fait auquel M. Ami Boué fait
allusion dans sa lettre.
Reportons-nous à la base de ma division supérieure, à cette
masse de trapps qui a éteint d’un seul coup la vie animale dans la
mer silurienne de Bohême. Si nous descendons dans les formations
de la division inférieure , nous trouvons immédiatement au-des-
sous des masses trappéennes les nombreux représentants de la
faune trilobitique de mon étage des quartzites D, savoir : des
Tri nucléus , Ampyx , lllœnus , Asaphus , Remopleurides , etc., égale-
ment répandus dans toute l’étendue verticale et sur toute la sur-
face horizontale de cet étage.
Il existe cependant aux environs de Prague deux gîtes symétri-
quement placés par rapport à l’axe du bassin, et qui se distinguent,
par deux circonstances remarquables, de tous les autres gîtes fos-
silifères de l’étage D.
1° Ces gîtes consistent dans des couches de schistes à Graptolites,
exactement semblables à ceux que nous avons signalés à la base de
notre division supérieure. Ils renferment les mêmes sphéroïdes
calcaires isolés , et dans l’une des localités ils alternent avec des
trapps de même apparence que ceux dont j’ai parlé. Sous les rap-
ports pétrographiques , ils représentent donc exactement tous les
éléments de la formation constituant la base de ma division supé-
rieure. Mais il faut remarquer que ces gîtes sont placés verticale-
ment à une profondeur considérable , au-dessous de la limite des
deux divisions. D’un côté, j’évalue cette profondeur à environ
1200 mètres; de l’autre côté, elle est un peu moindre. Le profil
montre d’ailleurs que ces couches adventices de schistes à Grapto-
lites, dans l’étage D, sont intercalées d’une manière parfaitement
concordante avec les formations normales de cet étage. On doit
donc reconnaître que ce sont des dépôts réguliers, mais très res-
treints dans leur étendue horizontale , qui ne paraît pas dépasser
800 à 1000 mètres. La position de ces deux gîtes nous porte à les
considérer comme les affleurements opposés d’une grande lentille,
dont r épaisseur maximum peut avoir 100 mètres.
2° Sous le rapport paléontologique , ces enclaves de schistes à
Graptolites nous présentent le contraste le plus absolu , par rap-
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
153
port aux formations soit subjacentes, soit superposées de l’étage D.
Elles n’offrent aucune trace quelconque de la faune de cet étage ,
et tous les fossiles que j’y ai recueillis, environ 40 à 50 espèces,
sont identiques avec ceux qui caractérisent la base de ma division
supérieure , c’est-à-dire notre étage calcaire E. Ils consistent en
Graptolites, Polypiers, Bracliiopodes , Acéphales, beaucoup de
Céphalopodes, et un petit nombre de Trilobites.
Il est donc constaté que les représentants de la faune de ma divi-
sion supérieure ont apparu en Bohême, à deux époques différentes,
séparées par un long espace de temps, mesuré par un dépôt d’en-
viron 1200 mètres de puissance.
On ne peut expliquer ces apparitions successives et distinctes
que par deux suppositions. La première consisterait à admettre
deux créations locales d’êtres semblables, aux deux époques en
question. Cette interprétation des faits nous paraît peu vraisem-
blable. Nous aimons mieux considérer les deux apparitions suc-
cessives de la même faune comme des immigrations ou colonies
provenant d’un centre de diffusion extérieur à notre bassin. Sui-
vant toute apparence, l’immigration aurait eu lieu par l’extrémité
N.-E. , taudis que d’autres considérations nous portent à croire
que la faune propre à l’étage des quartzites D aurait été introduite
en Bohême par l’extrémité S. -O. Ce contraste dans l’origine con-
tribuerait à faire concevoir la différence totale des formes qui
caractérisent les faunes de nos deux divisions.
Il est aisé de concevoir les considérations importantes auxquelles
donnent lieu les faits que je viens d’exposer.
Pendant que l’étage D se déposait en Bohême, et enveloppait
dans ses couches les dépouilles d’une faune trilobitique très riche,
très variée et très caractérisée , il existait ailleurs , probablement
vers le N.-E. de l’Europe , une autre faune toute différente , celle
de mes colonies et de ma division supérieure. Si nous découvrions
un jour les formations déposées dans la région de ce centre de dif-
fusion , nous serions naturellement porté , d’après les idées reçues,
à les considérer comme contemporaines de la division supérieure
de Bohême, tandis qu’en réalité, une partie considérable de ces
dépôts correspond, sous le rapport des dates, à ma division infé-
rieure. Le fait des colonies que je viens d’exposer tend donc à mo-
difier les conclusions habituelles de la science jusqu’à ce jour. Il
ne m’appartient pas d’aller plus loin , après avoir livré ce fait à
vos méditations. Je me bornerai à poser les deux questions sui-
vantes, sur lesquelles j’appelle l’attention de la Société géologique :
m
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
1. Jusqu’à quel point les ressemblances ou identités paléontolo-
gues peuvent-elles démontrer que des formations géographiquement
isolées les unes des autres sont contemporaines ?
2. Jusqu'à quel point la dissemblance entre les jaunes de bassins
isolés et éloignés correspond-elle à une différence dans l'époque des
dépôts dans lesquels elles ont été ensevelies?
J’ai déjà indiqué la distinction de quatre étages dans ma divi-
sion silurienne inférieure , savoir : A , B, C, D, à partir de la base
granitique sur laquelle repose tout le système.
Les deux étages A et B présentent un énorme développement,
par rapport à l’ensemble du terrain. Leur surface dépasse la moi-
tié de celle du bassin entier, et bien que je n’aie pas encore pu
évaluer exactement leur puissance, je ne crois pas pouvoir l’esti-
mer à moins de 7 à 8000 mètres pour les deux. Les formations
qui composent ces deux étages sont tellement liées par la nature
des roches et par des transitions presque insensibles , qu’il est très
difficile de fixer la ligne qui les sépare. J’ai cependant cru devoir
adopter ces deux divisions, à cause du contraste que présentent
les masses principales considérées vers les limites extrêmes de
l’étendue verticale.
Les roches de l’étage A sont d’abord des schistes semi-cristallins
reposant sur le granité et le gneiss , et alternant avec des schistes
argileux très compactes, nommés Urthonscldefer par les géologues
allemands. Peu à peu, on voit apparaître dans ces dépôts argileux
de petits fragments de roches roulés et arrondis. A mesure qu’on
s’élève, ces fragments prennent un volume plus considérable, qui
dépasse parfois la grosseur du poing , et , comme ils deviennent en
même temps très fréquents, les roches qui les renferment sont de
véritables conglomérats. On distingue parmi ces galets des mor-
ceaux de schistes divers , et plus fréquemment des cailloux de
nature siliceuse, provenant des filons de quartz existant dans les
gneiss, et très abondants vers la partie S. -O. du bassin. L’étage B
est composé principalement de ces conglomérats alternant avec des
bancs de schistes argileux. 11 ne présente aucune des roches semi-
eristallines signalées dans l’étage À.
La surface occupée par les étages A et B nous offre des masses
puissantes de roches plutoniques, telles que porphyres et trapps,
tantôt intercalées dans la stratification constamment concordante,
tantôt sous la forme de dykes ou de filons, traversant les masses
sédimentaires.
Toutes mes recherches n’ont abouti à la découverte d’aucun
SÉANCE Dü 13 JANVIER 1851.
153
fossile dans les étages A et B. .T’ai donc adopté pour l’un et l’autre
la dénomination d’étages azoïques , proposée par sirRoderick Mur-
chison pour des formations placées dans de semblables conditions ,
vers la base de la division silurienne inférieure, dans diverses
régions. Ce terme, d’après la définition de son auteur, ne doit pas
signifier que les formations auxquelles il est appliqué sont absolu-
ment dénuées de toute trace organique , mais seulement qu’il a
été impossible d’y découvrir des fossiles jusqu’à ce moment. C’est
là le sens que j’y attache en Bohême.
L’étage protozoïqueC, reposant sur la masse azoïque, est constitué
par une formation de schistes argileux verdâtres, dont la puissance
n’est jamais au-dessous de 300 mètres, mais s’accroît beaucoup
d’un côté du bassin par l’introduction de masses porpliyriques in-
tercalées. Les schistes de cet étage renferment la faune primor-
diale de la Bohême. Elle est presque uniquement composée de
Trilobites, parmi lesquels je distingue 7 genres et 25 espèces, dont
quelques unes ont été extrêmement prolifiques. Les seules classes
représentées avec les Crustacés dans cet étage sont les Bracliiopodes
et les Echinodermes , savoir : les premiers par une Orthis , et les
seconds par deux formes qui paraissent appartenir à la famille des
Cystidées.
La faune primordiale de la Bohême offre un caractère très re-
marquable. Les Trilobites qui la composent ont généralement le
thorax très développé, et au contraire le pygidium très petit, pré-
sentant rarement plus de deux segments. Cette faune, dont les
principaux genres sont les Paradnxi des , EIV psocephalus , Conoce -
ph ali te s , San , etc., est aussi représentée en Scandinavie et en An-
gleterre. Elle paraît beaucoup moins développée dans ces deux
régions , et jusqu’à ce jour elle n’a été signalée dans aucune autre
contrée du monde silurien.
Je ferai remarquer, en passant , que cette faune primordiale de
Bohême ne saurait être considérée comme appartenant au système
cambrien , car elle n’a jamais été signalée dans la région d’où ce
système tire son nom. En outre, elle se trouve intimement unie
en Suède à la faune de la division silurienne inférieure, dont elle
ne saurait être séparée.
L’étage D, que je nomme aussi étage des quartzites, forme la
partie la plus élevée de ma division inférieure. Il se compose de
diverses formations dérochés siliceuses et argileuses, la plupart
fossilifères et très riches en Trilobites Sa puissance verticale varie
de 2 à 3000 mètres. D’après l’ensemble de sa faune, il paraît cor-
respondre à la fois aux Llandeilo~flags et aux Caradoc-sandstonès
156
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
d’Angleterre, car on y trouve les grands Asaphus , les lllœnus ,
Trinucleus, Ampyx , etc., avec de grands amas de Cystidées et di-
vers fossiles qui paraissent propres à cette hauteur géologique ,
dans les Iles Britanniques, la France, la Russie, la Scandinavie et
l’Amérique du Nord.
C’est au milieu de l’une des formations de cet étage, que j’ai
indiqué l’existence des colonies appartenant à la faune de la divi-
sion supérieure de mon terrain.
M. Constant Prévost l'ait observer que le fait signalé par
M. Barrande est tellement étrange, dans l’état actuel de la
science, que, bien qu’il vienne à l’appui des opinions générales
qu’il s’efforce depuis longtemps de faire prévaloir, il hésiterait
à l’accepter comme définitif, si les connaissances géologiques de
l’auteur n’offraient les garanties désirables contre toutes les
causes d’erreurs de gisement. En acceptant donc comme cer-
tain que les couches de 100 mètres de puissance, désignées
sous le nom de colonies par M. Barrande, sont bien intercalées
dans le système silurien inférieur, il y voit un exemple remar-
quable de synchronisme entre deux formations marines diffé-
rentes, ayant produit des alternances comparables à cell
présentent , dans les mines de Coalbrooke-Dale , par exemple,
les bancs de calcaire à Productus et à Polypiers de formation
marine , avec les couches de schiste , grès et charbon à em-
preintes de végétaux terrestres de formation fluvio-marine.
Ces faits prouvent également la co-existence de faunes diffé-
rentes, et l’apport alternatif de leurs débris sur un même point
par des causes variables, telles que des courants; ils font voir
que l’on ne peut conclure de la disparition de certains fossiles
et de l’apparition d’autres, ni la destruction générale, ni la
création des êtres qu’ils représentent aux époques que semblent
indiquer les faits géologiques encore si peu nombreux ; ils
doivent faire présumer et démontrer même que de grands
systèmes de couches contemporaines peuvent être paléontologi-
quement tout à fait différentes, tandis que, d’un autre côté,
des terrains successifs pourraient être identiquement caractéri-
sés par les mêmes fossiles.
M. Delanoüe demande à M. Barrande s’il pourrait étei Ve
ses conclusions aux terrains contemporains des autres contr
\
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
157
par exemple, aux terrains que M. Murehison regarde comme
inférieurs au silurien , ou au taconic system des Etats-Unis.
M. Barrande répond que ses conclusions s’appliquent seule-
ment à la Bohême \ que, du moins, ses observations ne portant
que sur les terrains de cette contrée , il ne préjuge rien pour
les autres pays.
M. Rivière demande, 1° si les gneiss et les granités sont
parfaitement séparés des schistes 5 2° si les galets dont a parlé
M. Barrande sont bien des galets ou des conglomérats.
M. Barrande répond à la première question, que, d’une
manière générale, les régions gneissiques sont bien distinctes
des régions schisteuses, mais qu’on aurait quelque peine à
poser la limite de superposition-, qu’il y a cependant des loca-
lités où les deux natures de roches sont parfaitement tranchées
et peuvent être obtenues sur un même fragment, au point de
contact.
Quant aux galets dont il a parlé, ce sont des cailloux roulés,
de grosseur très variable, et composés, en général, de quartz
provenant de filons dans le gneiss.
M. Constant Prévost demande à M. Barrande s’il pense que
la saillie granitique qui circonscrit aujourd’hui le bassin soit
antérieure ou postérieure aux roches stratifiées 5 cette question
serait décidée si , parmi les galets que renferment ces dernières,
il s’en trouvait de granitique:-
M. Barrande croit, sans l’affirmer positivement, que les
granités sont postérieurs à la formation schisteuse.
M. d’Omalius d’Halloy demande si le fait de diffusion, qui
est d’ailleurs extrêmement intéressant, serait appuyé par
d’autres exemples?
Il ajoute que ce fait étant bien constaté peut s’expliquer de
trois manières différentes : par un point d’apparition locale ,
d’où la diffusion comme vient de l’établir M. Barrande j par la
destruction partielle des espèces due W des accidents géologiques,
d’où nouvelle population venant de différents lieux ; enfin par
l’effet du refroidissement de la terre, lequel, ayant donné â
l’influence solaire une importance de plus en plus grande sur la
température climatérique , a pu déterminer la disparition de
certains êtres et l’émigration de certains autres vers l’Equateur.
Î5B SÉANCE DU AS JANVIER 1851.
M* Barrande, répondant à la question posée d’aburd par
M. d’Omalius , dit que le fait de diffusion dont il vient d’entre-
tenir la Société ne lui semble pas isolé. Il y aurait quelque
chose d’analogue dans le terrain jurassique où l’on trouve des
espèces vivant, au N.-O., dans i’ooiite inférieure, et, au S.-E.,
dans l’oolite supérieure. Il a tout lieu de penser aussi, d’après
les renseignements qui lui ont été fournis en Angleterre, qu’il
se passe quelque chose de semblable, de l’Irlande à l’Angleterre,
du silurien inlérieur au silurien supérieur.
M. Barrande ne se dissimule pas que ces faits, une fois bien
constatés, devront sans doute modifier en quelques points les con-
clusions tirées actuellement des études paléontolcgiques. Quant
aux divers modes d’explication que vieni d’énumérer M. d’Oma-
lius, sans entrer dans cette division qui est trop importante
par elle-même pour être abordée incidemment, M. Barrande
se contentera de dire qu’il admet, avec le préopinant, qu’une
foule de causes peuvent avoir amené des disparitions d’espèces :
ainsi les bouleversements locaux, les éruptions plutoniques,
les éjections de matières étrangères, les épidémies, etc. Pour
celle qui se déduirait du reiroidissement séculaire du globe,
sans nier absolument l’hypothèse de la chaleur intérieure,
M. Barrande fait observer qu’on peut s’en dispenser en admet-
tant qu’indépendamment de toutes les circonstances extérieures,
les espèces portent en elles-mêmes une cause intrinsèque qui
amène leur disparition, de telle sorte qu’il n’y aurait qu’une
certaine vitalité accordée à chaque espèce.
M. de Wegmann communique l’extrait suivant de deux
lettres de M. Boué, datées de Vienne, le 13 et le 30 décembre
dernier.
J’envoie à la Société un dessin d’un glacier du Tyrol avec mo-
raines latérales et médianes, fait par M. de Hauslab , en 1817
(Voy. Bull. 18AÙ, v. I, 2e sér., p. 160, et Mémoires de V Académie
de Vienne , 1848, cali. 2, p. 143). Ce dessin fait partie d’un atlas
pour l’étude de terrains , dont se servent ici nos ingénieurs géo-
graphes.
M. le docteur Schmidtl nous a présenté un résumé d’une des-
cription toute nouvelle des grottes d’Adelsberg, de Magdalena et
de Planina. Cette dernière, dans laquelle coule le Poik, est
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
159
énorme et sept fois pius profonde que celle de Petdelsberg ; il y a
un lac et des cascades de dix pieds. Le docteur Sclimidtl a con-
struit exprès un bateau, et s’est embarqué pour parcourir cet enfer :
mais il a rencontré çà et là des obstacles par suite des éboulis Du
reste' les grottes sont très hautes, et il s’y trouve des sables ayant
des altitudes de plus de 30 toises. Les berges de ces canaux sont
coupées tellement à pic, qu’on ne peut aborder que difficilement.
L’eau est assez profonde. Dans certains endroits les stalactites des-
cendent si bas, qu’il faut se coucher dans le bateau pour passer
dessous. Dans d’autres, les éboulis ont une élévation de 80 à 100
pieds, et même davantage : l’eau passe dessous, et l’aventureux
voyageur est obligé d’enjamber ces îlots en grimpant, et traînant
après soi son bateau.
M. le docteur Sclimidtl y a fait des observations de température
et de zoologie. M. Fitzinger y a trouvé, décrit et figuré sept es-
pèces de protées, différentes surtout par la foi me de la tète et le
nombre des vertèbres cervicales et dorsales. Ils vivent par milliers
dans ces grottes, et sont probablement ovipares (?). Son mémoire
se publiera, avec les figures, dans nos Mémoires académiques,
vol. 111, 1851. M. Kollar a également trouvé là, et décrit, des
crustacés sans yeux. Peut-être l’Académie publiera-t-elle le vo-
lume de descriptions du docteur Sclimidtl avec des plans et des
vues de l’intérieur ; car le vade niecuni pour Adelsberg est une
vieillerie sans valeur scientifique. Les touristes vont se précipiter
sur Planina. Déjà la commune fait établir des ponts, pour facili-
ter la visite de ce labyrinthe de 2 à 3 lieues de longueur.
Le docteur Hornes travaille à ses fossiles tertiaires de Vienne;
ii a reçu de Bordeaux un envoi et y trouve les plus grandes ana-
logies. H procède par monographies de genres, et a entamé les
Cônes. La Touraine lui offre aussi des ressemblances étonnantes.
Ce qui nous manque ici, c’est cette admirable collection de fossiles
du comte Munster, si regrettablement confinée à Munich, où elle
est en quelque sorte perdue pour la science. M. Schafliàutl seul
paraît s’en occuper. Personne , malheureusement , en Allemagne
ne collecte plus sur l’échelle d’un Munster et d’un Schlotheim.
Il nous faudrait des chaires de paléontologie dans quelques univer-
sités ; les seules qui existent sont des chaires particulières à Heidel-
berg et à Freiberg. M. de Iiauer donne cependant quelque chose
à notre école des mines. Fn attendant, nous avons à vendre ici le
second échantillon du Zeuglodon du docteur Koch, dont le pre-
mier (et jusqu’alors unique) a été par lui vendu au roi de
Prusse pour la modique somme de 10,000 thalers, quoique cet
160
SÉANCE I>IJ lu JANVIER 1851 .
échantillon soit infiniment médiocre. Celui-ci est très complet ;
toute la tête s’y trouve ; la longueur totale de l’animal occuperait
tout l’espace compris entre votre pont des Arts et l’édifice de l’In-
stitut. Quelle bête! et quelle cuisine exigeait une pareille taille.
Le monstre était pourvu de deux grandes nageoires, pattes de
devant, et de deux très petites pattes de derrière. Ses dents étaient
énormes, son col court, et sa queue gigantesque. Ces débris étaient
enfouis dans une marne calcaire marine tertiaire d’Alabama,
éocène, d’après le docteur Koch; opinion qu’il faut prendre ad
referendum j comme tous les protocoles. Maintenant où trouver le
Crésus qui voudra donner des milliers d’écus sonnants pour cette
carcasse ?
Bans les rapports de la Société de géogaphie de Berlin, j’ai lu
avec quelque intérêt, un résumé sur la géologie du nord du Por-
tugal, par Forrester. Avez- vous cet Ensaio geologico de dis tri cto
de alto Douro , par le docteur Jos . Pinto Rebello?
Le professeur Zippe a commencé ses leçons de minéralogie à
l’université de Vienne ; il est Mohsien ; son second cours sera l’ap-
plication technique de la minéralogie , et le troisième la géologie.
Le professeur Schrotter a fixé le poids atomique du phosphore
par un appareil assez volumineux pour prévenir toutes les erreurs,
et a lu hier un mémoire fort curieux sur les limites des tempéra-
tures basses et hautes, auxquelles toute affinité cesse; de telle sorte
que le chlore condensé gît impunément à côté du phosphore, tous
deux grelottant de froid, sans explosion possible. Ces expériences
sont sans doute aucun, en suivant la manière dont s’y prend
M. Schroetter. M. Dumas a tort de les révoquer en doute. Le bore et
l’iode peuvent se substituer de même au chlore, à 60 ou 80° sous
zéro (je n’ai malheureusement pas la mémoire des chiffres) ; au-
cune affinité ne se manifeste. De même à de hautes températures il
y a une limite où l’affinité cesse aussi. On comprend combien
ces recherches sont curieuses, puisqu’elles pourront conduire à
fixer les degrés limites de température en plus ou en moins, qui
déterminent ou ne déterminent pas les affinités mutuelles pour
toutes les substances chimiques entre elles, prises deux à deux,
etc. , etc.
MM. Gust. Rose et Mitscherlich ont passé l’été à visiter le
Vésuve et surtout l’Etna.
L’Académie publie un almanach, avec la bibliographie de
chaque membre, et non pas leur biographie, comme on me Fa
fait dire, à tort, dans le Bulletin .
J’ai lu à l’Académie un Mémoire sur l’arrangement des collée-
SÉANCE M 13 J ANVIER 1851. 1.0 (
lions ; je réunis le monde éteinl au monde vivant , et je trouve
que cette réunion vaut mieux que le système suivi actuellement
dans les musées. On saisit mieux l’ensemble des formes organiques
d’un coup d’œil.
J’ai publié, dans le vol. IIÏ des Mémoires in-U° de notre Aca-
démie, un travail sur les lois naturelles éternelles , leur simplicité,
leur unité, et le passage insensible des formes, surtout dans la mi-
néralogie, la géologie et la paléontologie.
Je vais rendre compte , le 3 janvier, de trois tombes que j’ai
rencontrées, en 18^8, en Albanie.
L’Institut géologique va publier un 2" cahier de ses Annales
pour 1850.
MM. de Hauer, Simony, Czjzek, Ehrlich travaillent à leur rap-
port sur les travaux de l’été passé.
M. Morlot a publié dans les Naturhistorische Abhandlungen de
la Société d’histoire naturelle un Mémoire sur le diluvium erratique
de Pitten, au sud de Tienne et dans son bassin, et a figuré des blocs
avec les rainures glaciaires caractéristiques. Ce que j’en ai vu est
très curieux. Il croit que le glacier venait du Schneeberg et allait
jusque vers Pitten. Il pense que le loess provient de ces anciens
glaciers. Il y trouve non seulement X Hélix arbustorum et hispid. ,
mais encore X Hélix diluvii ou striata , indication climatérique.
M. Unger a lu un Mémoire sur le Glyptostrobus , genre de
plante fossile tertiaire. Ses douze tableaux- paysages de paléonto-
logie fossile botanico-zoologique sont prêts. Il n’a plus que quel-
ques pages d’explication française à y ajouter.
M. Heckel a lu un Mémoire sur les poissons fossiles dont le
développement organique , suivant les temps géologiques , est en
rapport direct avec le développement graduel de l’embryon des
poissons actuels.
Le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Duro-
cher :
Nouvelles remarques sur le tégument des T ri! obi te s ,
par M. J. Durocher.
Les assertions qu’a émises ou renouvelées M. Marie Rouault, à
l’occasion d’une note que j’ai eu l’honneur de présenter à la Société
géologique (t. VII du Bulletin, \i. 307), m’obligent à une réponse que
je vais faire succinctement. Dans cette réplique j’exposerai quelques
Soc. gêoL , 2* série, tome VIT! . I I
162
SÉANCE DU 15 JANVIER 1851,
nouveaux faits , qui viendront confirmer la justesse de mon point
de vue et détruire les allégations de M. Rouault. Outre les deux
notes insérées aux pages 322 et 370 du tome YII du Bulletin ,
M. Rouault en a annoncé une autre ; mais la livraison du Bulletin
dans laquelle il doit la publier n’a point encore paru au moment
où j’écris ces lignes.
Mon éloignement de Paris ne me permet point d’examiner ac-
tuellement les échantillons de Trilobites que renferment les diverses
collections de la capitale ; mais si l’on analyse les résultats mêmes
de l’examen auquel s’est livré M. Rouault. on reconnaît le peu de
fondement de ses conclusions. En effet , dans l’énumération qu’il
donne des Trilobites provenant d’Angers, il avoue que sur 6 Ogy-
gies 4 offrent de la pyrite de fer, sur lesquelles 3 avec abondance ;
sur 41 Illœnus , il en cite 12 , c’est-à-dire plus des 2/7es qui en
renferment. Or admettons ces résultats : il me semble peu logique
de prétendre qu’un fait est exceptionnel ou purement accidentel
lorsque pour les Ogygies il a lieu 4 fois sur 6 , et pour les Illœnus
1 2 fois sur 41 . Constatons d’ailleurs un progrès : d’abord M. Rouault
prétendait {Bull, de la Soc. géol ., tom. IY, tableau annexé à la
page 318) que les Ogygies, les Illœnus , etc., ne présentaient jamais
de fer sulfuré; aujourd’hui il est parvenu à en voir sur les 2/3 des
Ogygies d’Angers , et sur plus des 2/7es des Illœnus de la même
localité. Quant aux autres gisements, il n’a pas jugé à propos de
faire une énumération comparative.
Le nombre des échantillons que je puis examiner sous ce point
de vue est beaucoup plus restreint ; néanmoins , indiquons les ré-
sultats auxquels je suis conduit. Parmi les genres de Trilobites que
Al. Rouault a cités comme n’ayant point eu de test calcaire , et
comme étant dépourvus de pyrite de fer (t. W àu. Bulletin, p. 318),
je prends les trois principaux genres qui se trouvent dans les
schistes de l’ouest de la France, savoir : les genres Ogygie, Illœnus
et Nilœus. Il y en a dix échantillons provenant de diverses loca-
lités, qui ont été recueillis par moi ou acquis par la Faculté de
Rennes : sur ce nombre, cinq au moins, ou la moitié, offrent dis-
tinctement de la pyrite de fer. De ce que l’on n’en voit pas sur les
autres échantillons, on ne peut rien conclure ; car, ou bien ce sont
de simples empreintes , ou la pyrite peut avoir disparu par sulfati-
sation, et souvent elle a laissé un dépôt ocreux pour témoigner de
sa présence originaire (1). Il y a des échantillons où l’on reconnaît
(1) Les Calymènes sont souvent aussi dépourvues de pyrite.
*63
SÉANCE DU 13 JANVIER J 851.
très bien que le test a subi la transformation en fer sulfuré • et
même sur certains Illœnus (genre auquel M. Rouault n’accorde
qu’une enveloppe charnue), on peut mesurer l’épaisseur du tégu-
ment pyritisé ou devenu ocreux, épaisseur qui paraît être un peu
plus grande sur les anneaux du thorax que sur le bouclier cépha-
lique, et qui atteint en certaines parties près d’un demi-millimètre :
à la vérité cette épaisseur pouvait être moindre dans l’origine ,
car le volume du tégument a pu ne pas rester le même quand il a
été remplacé par la pyrite de fer, et surtout quand celle-ci a subi
une décomposition partielle ou totale. Néanmoins , je demande
si un animal fossile , qui n’aurait eu dans l’état de vie qu’une
enveloppe charnue , pourrait offrir aujourd’hui une semblable
apparence ; c'est seulement dans des cas très rares que les dépôts
sédimentaires auraient pu en conserver les restes sous forme
d’empreintes.
J’ai cité une Ogygie ( Asaphus Buchii ) sur laquelle ôn voit encore
des traces du tégument calcaire : M. Rouault a soulevé à ce sujet une
discussion qui me semble inutile. Cet échantillon, sur lequel on a
omis l’indication de son gisement, provient probablement de l’An-
gleterre, mais peu importe ; car les Ogygies qui peuplaient les an-
ciennes mers de la France occidentale ne pouvaient avoir un test
corné , tandis que , en Angleterre , ces animaux auraient eu une
enveloppe de nature calcaire.
M. Rouault me reproche de ne point avoir tenu compte de cer-
tains caractères qu’il appelle improprement physiologiques : ils sont
relatifs à des déformations que les fossiles ont pu subir. 11 croit
avoir observé que les Trilobites ont été déformés d’une maniéré
inégale , les uns un peu plus , les autres un peu moins. Les faits
relatifs à ces déformations me paraissent être variables, et par leur
nature même échapper à une appréciation rigoureuse : nous man-
quons, en effet, de termes de comparaison qui nous permettent de
juger avec certitude jusqu’à quel degré et de quelle manière un
fossile, soumis à des pressions croissantes, par suite d’une sédimen-
tation longtemps prolongée , puis exposé à l’action des forces qui
ont infléchi les couches en divers sens, peut résister à ces différentes
causes d’oblitération. Lescorps organiques, lors même qu’ils avaient
un tégument calcaiie, ont pu éprouver certaines déformations sans
que la rupture s’ensuivît nécessairement : les Térébratules , par
exemple, dont la coquillè devrait offrir normalement une symétrie
et une régularité parfaites , les Bellérophons et beaucoup d’autres
coquilles nous présentent divers genres d’oblitérations. D’ailleurs
SÜtNCE l>l) 13 JANVIER 1 S 5 1 .
t 04
le tégument des Trilobites, bien qu’étant, en général, dénaturé
calcaire , devait , comme l’enveloppe des principaux crustacés ac-
tuels, renfermer avec le carbonate de chaux une proportion de ma-
tière organique plus grande que la coquille de la plupart des mol-
lusques marins ; et cette proportion , qui pouvait varier entre
certaines limites, a dû contribuer à faciliter les déformations qu’ont
subies les Trilobites.
M. Rouault a cherché à diviser les fossiles contenus dans les
schistes de la Bretagne en deux groupes , suivant qu’ils se déta-
chent avec plus ou moins de facilité de la roche où ils sont en-
châssés : on pourrait demander pourquoi les fossiles , primitive-
ment doués d’un test corné ou charnu , auraient exclusivement le
privilège de pouvoir être isolés de la roche qui les entoure ; mais
ce mode de division des fossiles est sujet à des exceptions tellement
nombreuses, qu’on ne peut y attacher de l’importance. M. Rouault
a signalé lui-même plusieurs de ces cas exceptionnels, et il a tâché
d’en donner une explication plus ou moins plausible ; mais une
explication analogue ou d’un autre genre pourrait tout aussi
bien s’appliquer aux autres cas, et il me semble inutile de m’y
arrêter.
Je ne chercherai point à réfuter d’une manière détaillée les dé-
veloppements théoriques dans lesquels est entré M. Rouault , et
dont l’étrangeté a dû choquer tous les géologues un peu versés dans
l’étude de la chimie. Suivant cet auteur, j’aurais critiqué ses idées
avec légèreté ; or, est-il besoin de longs détails pour montrer qu’on
ne saurait admettre des théories basées sur des principes tels que
les suivants , savoir : « que Y acide phosphorique , que l’acide carbo-
nique ont plus d’affinité pour l’oxyde de fer que pour la chaux
(Mémoire de M. Rouault, Bull, de la Soc. géol ., t. IY, p. 317); '>
des théories dans lesquelles on veut expliquer l’aspect lustré de
certains schistes par la présence supposée d’une humeur visqueuse,
analogue à celle qui est exprimée du corps d’une limace , quand
on la comprime avec le pied (t. VI du Bulletin , p. 69); des théo-
ries où l’on prétend que le sulfure de fer n’a pu se produire qu’en
présence du carbonate de chaux , et le sulfate de baryte que là où
il y avait de la matière organique.
Dans la plupart des cas où M. Rouault a imaginé ces supposi-
tions singulières, il était possible , sans faire violence aux principes
de la chimie , d’expliquer les faits d’une manière simple , ration-
nelle et conforme aux données que l’on possède sur les transfor-
mations qui s’effectuent au sein de la terre. Ainsi, pour se rendre
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
165
compte de ia substitution de la pyrite de fer au tégument des crus-
tacés, il suffit d’admettre que, soit au moment où le sulfure de fer
s’est formé , soit un peu auparavant , des eaux contenant , soit de
l’acide carbonique, soit un acide organique, ont dissous le carbo-
nate de chaux, et ont formé des vides qu’a remplis la pyrite. Mais
la présence de ce carbonate ou l’existence de vides larges et régu-
liers , comme ceux produits par la dissolution d’un test calcaire ,
n’étaient pas indispensables au dépôt du sulfure de fer, car on en
distingue fréquemment dans les petits interstices de la masse schis-
teuse où étaient enfouis les Trilobites.
Quant au dépôt du sulfate de chaux et du sulfate de baryte sur
quelques Trilobites, il peut aussi s’expliquer très simplement : on
conçoit , en effet , qu’une portion ou la totalité de la pyrite de fer
qui s’est substituée au carbonate de chaux a pu subir une sulfati-
sation ultérieure , et cette supposition est très vraisemblable ; car
l’examen de beaucoup d’échantillons où l’on voit un mélange
d’ocre et de grains pyriteux non décomposés nous en fournit des
exemples. Or, du sulfate de fer s’étant formé, si de l’eau tenant en
dissolution, dans un cas de la chaux, dans un autre de la baryte ,
s’est trouvée en contact avec lui , d’après les lois de Berthollet, il
a dû nécessairement se produire un dépôt de sulfate de chaux ou
de sulfate de baryte.
Quant à l’origine de l’aspect lustré de certaines roches, c’est un
sujet sur lequel il est difficile d’émettre une opinion à priori ; per-
sonne encore n’avait tenté de l’attribuer à l’impression fugace que
laisse l’humeur exprimée d’un corps charnu. C’est là une manière
de voir toute nouvelle, dontM. Rouault peut revendiquer l’hon-
neur sans conteste , mais du moins aurait- il dû apporter quelques
raisons à l’appui.
D’ailleurs, je m’empresse de rendre justice au zèle , aux soins
minutieux avec lesquels cet habile et persévérant explorateur a
étudié divers gîtes de fossiles ; toutefois il a émis à ce sujet des
prétentions qui ne me paraissent pas fondées. Ainsi il semble s’at-
tribuer la découverte de l’existence de fossiles dans les terrains
sédimentaires de la Bretagne , quoique cette existence fût connue
depuis longtemps; seulement, aux gîtes de fossiles qui avaient déjà
été remarqués, il en a ajouté quelques nouveaux ; il a montré aussi
que les Trilobites sont plus multipliés qu’on ne le pensait dans
quelques couches de schiste ardoisier , et il a enrichi la liste des
fossiles propres à certains dépôts de pierre calcaire , dont quelques
uns étaient déjà connus comme passablement riches. Mais de là il ne
166 SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
résulte pas que les terrains de transition de la France occidentale
contiennent dans toute leur étendue des fossiles assez nombreux
ou assez bien caractérisés pour qu’on puisse les classer d’une ma-
nière complète , en n’ayant égard qu’aux caractères paléontolo-
giques,
Mr Rouault paraît croire aussi avoir établi le premier l’origine
sédimentaire des grès-quartzites de la Bretagne : mais les divers
géologues qui ont publié des mémoires sur l'ouest de la France ,
tels que MM. Dufrénoy, Elie de Beaumont , Boblaye , Rivière ,
Frapolli, de Fourcy, et bien d’autres, n’ont jamais attribué une
autre origine à ces roches , ni prétendu qu’ils fussent complète-
ment dépourvus de fossiles.
Je ne prolongerai pas plus loin cet examen des idées émises par
M. Rouault; je regarde ses observations sur le tégument des Trilo-
bites comme inexactes , et comme n’ayant point le caractère de
généralité qu’il leur assigne. Les conséquences théoriques qu’il en
a déduites ne me paraissent admissibles sous aucun point de vue,
d’abord, parce qu’elles ne sont point basées sur des faits généraux,
clairs et précis; ensuite, parce qu’elles sont en désaccord avec les
principes de la chimie. Désormais, jusqu’à ce que j’aie publié,
dans l’ordre convenable, la série de mes observations géologiques,
je m’abstiendrai de réfuter les assertions de M. Rouault.
Après cette lecture, M. Marie Rouault annonce qu’il répondra
à M. Durocher, s’il y a lieu , lorsque ce dernier aura publié la
série de ses observations.
Il espère que, dans ce travail, M. Durocher ne négligera
pas de démontrer comment les faits cités dans la note insé-
rée dans le Bulletin , tome VII, page 381, et ceux reproduits à
l’égard des Ogygia et des Illœnus d’Angers, infirment les
conclusions auxquelles M. Marie Rouault est arrivé dans ce
travail.
Il ne doute pas non plus que M. Durocher n’indique où il
a vu que M. Marie Rouault a traité la question des schistes
lustrés^ quant à lui, il ne peut se le rappeler.
Il est aussi deux faits, entre autres, sur lesquels M. Duro-
cher s’est prononcé d’une manière non équivoque dans les
quelques lignes qui terminent sa note insérée dans le Bulletin 9
séance du h mars 1850 , et M. Marie Rouault désirerait que
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851. 167
M. Durocher les appuyât de démonstrations matérielles et
logiques.
M. Marie Rouault y tient d’autant plus que M. Durocher
ne les a avancés que pour appuyer la réfutation qu’il faisait des
idées émises antérieurement par M. Marie Rouault, qui croit
qu’en pareil cas tous les faits produits doivent être rendus
évidents.
Le premier de ces faits est celui à propos duquel M. Du-
rocher dit, tome YII du Bulletin , page 309, que les schistes
ardoisiers de Chateaulin lui paraissent correspondre à ceux
d’Angers et de la partie méridionale d’Ille-et-Vilaine.
Or, pour M. Marie Rouault, qui croit pouvoir établir que les
schistes ardoisiers du nord de ce dernier département (ceux de
Gahard, Vitré, etc.) sont les mêmes que ceux du sud, il est
conduit, par ces faits, à conclure que, si les schistes de Cha-
teaulin correspondent à ceux d’Angers et du sud d’Ille-et-
Vilaine, ils doivent également correspondre à ceux du nord,
que nous venons de citer, ce que M. Durocher n’admet pas.
Le deuxième fait, non moins important, sur lequel M. Marie
Rouault insiste beaucoup, pour que M. Durocher démontre
matériellement devant la Société, avec indication des lieux , où
il a puisé ses documents, ainsi qu’il le fait lui-même dans
toutes ses communications , est le suivant : Dans sa note insé-
rée au Bulletin de la Société, séance du 19 mars 1849, à la
page 381, M. Marie Rouault, au sujet des grès de Rretagne,
et contradictoirement aux idées précédemment émises par
M. Dufrénoy, qui avait associé ces grés au schiste ardoisier, et
en leur assignant une place inférieure à ces schistes, dit, en
parlant de ces grés : « On rencontre cette roche siliceuse sur
une très grande étendue de pays, autour de Rennes. Elle a été
diversement modifiée, et présente aujourd’hui des solutions de
continuité très marquées. En traitant de quelques unes des
causes qui ont agité le sol de cette contrée, j’espère justifier
l’idée que j’émets ici , à savoir que cette roche (pour tous les
points où je l’ai observée) constitue une seule et même forma-
tion postérieure au terrain dévonien de cette région déjà re-
connu. )>
168
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851 .
En réponse à ce fait, M. Durocher dit, dans sa note du
h mars 1850, à la page 309 du tome VII du Bulletin : a Les
diverses espèces de Calymene, à’Ogygia, et de la plupart des
Trilobites de la Bretagne , se rencontrent presque toujours dans
les schistes, rarement dans les grés qui les accompagnent et
qui en sont contemporains. »
Or M. Marie Rouault, dans la note citée plus haut, à la
page 380, en parlant de ces grés, avait dit : « Cette roche, qui
est un grés régnant à la fois et en stratification discordante sur
les deux groupes que nous venons de citer (schiste ardoisier
silurien et calcaire et schiste dévonien), et contenant des fos-
siles rares, mais qui lui sont propres, constitue évidemment
une formation particulière. »
Il devient donc dés lors évident qu’il y a entre eux désac-
cord sous un double point de vue, premièrement sous celui
des fossiles contenus dans les grès et les schistes , deuxième-
ment sous celui des rapports à établir entre ces roches : c’est
à-dire que, tandis que M. Marie Rouault considère les grès
comme appartenant à un étage postérieur et très distinct du
schiste ardoisier, et admet que les faunes de ces deux étages,
nettement tranchées , ne comptent pas une espèce commune ,
pour M. Durocher, au contraire, les grès sont contempo-
rains des schistes, et les fossiles sont les mêmes partout;
en d’autres termes, les grès du nord sont contemporains des
schistes du nord, différents des schistes du sud, auxquels se
rallieraient les grés de cette partie méridionale du départe-
ment, ce que ne peut admettre M. Marie Rouault, qui croit
avoir suffisamment démontré, dans ses communications du
3 octobre 18A9 et 17 juin 1850, que les conclusions qu’il a
émises dans ces deux séances et toujours également différentes
de celles de M. Durocher, conclusions qu’il a rendues plus
précises par de nouveaux faits, sont plus fondées, et il désire
que M. Durocher justifie ce qu’il a avancé à titre de réfuta-
tion.
Le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Dau-
brée :
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851,
169
Note sur une caverne à ossements récemment découverte à
Lauw (Haut-Rhin) , par M. A. Daubrée.
Dans la colline à laquelle est adossé le village de Lauw, près
de Massevaux (Haut-Rhin), on vient de découvrir, en exploitant
une carrière, une vaste caverne et un dépôt de limon à ossements,
sorte de dépôt qui jusqu’à présent n’avait pas été rencontré en
Alsace.
Le calcaire jurassique des environs de Lauw, qui appartient à
l’étage de l’oolithe inférieure , constitue un groupe de collines
peu élevées qui sont juxta-posées aux terrains anciens de la
chaîne des Aosges. La stratification de ce calcaire se dirige sui-
vant N. 20° E. S. 20° O., de même que la chaîne, et plonge
de 30° à àÜ° vers O. 20° S. , c’est-à-dire vers la plaine.
Dans la colline de calcaire jurassique dont il s’agit, au bord de la
Dollern, petite rivière qui en baigne le pied, il existe plusieurs ori-
fices de cavernes qui sont connues depuis longtemps comme des re-
paires de renards. A un niveau , élevé d’une dizaine de mètres
au-dessus de la rivière, et à proximité des ouvertures déjà connues,
on a découvert , au mois de mars dernier, un nouvel orifice , qui
correspond à une vaste caverne. La galerie d’entrée de la nouvelle
caverne dont il s’agit a des formes extrêmement irrégulières. A la
suite de chambres assez vastes, il se trouve des étranglements si
étroits que c’est avec beaucoup de peine qu’un homme peut y pas-
ser, d’autant plus que le sol lui-même présente des ressauts très
brusques. De la galerie d’entrée partent quatre galeries transversales,
dont l’une, dirigée suivant la stratification, a été suivie sur 80 mè-
tres de longueur, sans que l’on soit arrivé à son extrémité ; l’une de
ces galeries est en communication avec les cavernes inférieures.
La forme fragmentaire de cette caverne , dont j’ai fait un plan
approximatif, paraît montrer qu’elle a été ouverte par un mouve-
ment du sol, lequel est probablement la conséquence de la dislo-
cation qui a redressé les couches comme on les observe aujourd’hui.
Des blocs très volumineux, de plusieurs mètres cubes, détachés du
toit et des parois , se sont écroulés les uns sur les autres; plus rare-
ment il en est qui sont restés suspendus, retenus qu’ils étaient les uns
par les autres à la manière de voussoirs irréguliers. Les principales
galeries ou déchirures sont dirigées suivant le sens de la stratifica-
tion ou perpendiculairement à cette direction.
Si la colline de Lauw, au lieu d’être boisée sur presque toute sa
170
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851,
surface, était décapée partout comme elle l’est au bord de laDol-
lern , où l’on connaît cinq entrées de galerie , on verrait très pro-
bablement que les excavations aperçues jusqu’aujourd’hui font
partie d’un labyrinthe bien plus étendu, car les renards qui pénè-
trent par ces entrées peuvent sortir par des issues encore inconnues ;
aussi les habitants ont-ils justement désigné la colline dont il s’agit
sous le nom de Hoehlenstein (roche à cavités).
Les parois de la caverne principale sont enduites d’une couche
de stalactites et de stalagmites , mais on n’y observe ni limon ni
ossements fossiles ; çà et là on rencontre seulement quelques débris
de la nourriture des animaux qui l’habitent aujourd’hui.
A l’entrée de cette caverne principale, c’est-à-dire de 6 à 10 mè-
tres au-dessus de la rivière , on trouve un limon jaunâtre , très
chargé de concrétions calcaires, dans lequel on rencontre beaucoup
d’ossements épars et ordinairement brisés, soit dans le limon même,
soit au milieu d’incrustations de carbonate de chaux. Ce limon
s’est déposé dans les dépressions du calcaire jurassique sous-jacent.
D’après MM. Lereboullet et Scliimper, qui ont examiné une partie
des ossements déjà recueillis, ces ossements appartiennent princi-
palement au genre Ours ; quelques uns sont des débris de Loup, de
Renard et de Sanglier.
Le limon à ossements est recouvert de 1 mètre d’épaisseur, par
du sable dépourvu d’ossements , au milieu duquel se trouvent de
nombreux tubercules calcaires semblables à ceux du loess. D’après
l’élévation du limon au-dessus des eaux courantes, il est assez
évident que ces ossements ont été enfouis antérieurement au ré-
gime actuel.
Il est ensuite donné communication de la note suivante, par
M. Cornuel :
Note sur deux portions de mâchoire fossile rapportées à un
Gavial , et recueillies dans le terrain crétacé inférieur du
département de la Haute-Marne , par M. J. Cornueî.
Wassy, 29 septembre 1850.
J’ai trouvé, dans le calcaire à Spatangues ou néocomien du ter-
ritoire de Wassy, deux tronçons provenant de la partie rostrale ,
l’un de la mâchoire supérieure , et l’autre de la mâchoire infé-
rieure d’un animal vertébré que je crois être un Gavial. Ces deux
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
171
tronçons, qui, sauf un léger glissement latéral, sont respectivement
dans la position qu’ils avaient lorsque la tête était entière-, me
font, vivement regretter de n’avoir pas été prévenu assez tôt pour
pouvoir recueillir les pierres qui devaient contenir les autres dé-
bris de cette tête. Quoi qu’il en soit, je donne ci-dessous le
dessin des fragments dont je viens de parler, non pour décrire
l’espèce, puisque la majeure partie des caractères manque , mais
pour mettre les paléontologistes à même d’établir une comparaison
avec les sujets mieux connus du même genre.
Fig. 1 (1/2 gr. nat.).
Fig. 2 (1/2 gr. nat.). Fig. 3 (1/2 gr. nat.).
La figure 1 représente les deux pièces vues latéralement, 1/2 de
grandeur naturelle , et à moitié engagées dans la pierre.
Celle des deux qui occupe le haut de cette figure est cassée obli-
quement en avant, ce qui, vu en perspective, en fait paraître les
contours irréguliers. Une seule dent y est visible d’un côté, et
même un éclat s’en est détaché, de sorte que la cavité den-
taire est à découvert, et qu’il n’y a que la pointe qui soit restée
entière. — L’os maxillaire s’est écaillé au-dessus de cette dent,.
Une autre dent a été couchée dans l’alvéole opposée et se trouve
rompue vers sa base, de manière à présenter sa cassure au bout
du tronçon, sous la forme d’un anneau. Le reste est engagé dans
172
SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
la pierre, qu’on ne saurait fouiller, à cause de sa dureté, sans
courir le risque de briser les dents de l’autre tronçon.
Celui-ci, qui occupe le bas de la figure, a subi, à son extrémité
antérieure, une cassure de forme un peu convexe. 11 laisse voir
sept dents de la même rangée, alternativement grandes et petites,
et qui, en allant de gauche à droite ou d’arrière en avant, sont:
la première, grande, mais dont il ne reste que la base avec une
cassure transversale oblique ; la seconde, petite ou moyenne, cas-
sée dans le sens de la longueur et un peu inclinée dans l’alvéole ;
la troisième, grande, avec une très petite cassure oblique à la
pointe; la quatrième, petite, cassée dans le sens de sa longueur ;
la cinquième , très grande , cassée obliquement à la pointe ; la
sixième, entière et très petite ; et la septième, grande, cassée à la
pointe, divisée à la base, sortie de son alvéole, et couchée sur le
bord de l’os. Au-dessus et en arrière de celle-ci on en remarque
deux autres tombées aussi de leurs alvéoles et couchées horizon-
talement. L’une des deux est tellement mutilée qu’il n’en reste
qu’un tronçon annulaire. La seconde, entière et un peu aplatie à
la base, a été remise à la place qu’elle occupait sur la pierre, dont
elle s’était détachée.
L’autre rangée ne laisse voir qu’un éclat de dent fendue en long
et un peu obliquement.
Deux autres portions de dents détachées sont couchées et enga-
gées dans la pierre, l’une de côté et l’autre par bout, à peu près à
égale distance des deux mâchoires.
Les cassures que presque toutes les dents ont subies ont eu lieu
lorsque l’on a détaché l’échantillon du reste de la roche dont il
faisait partie.
La figure 2 représente les deux tronçons de mâchoire vus par
leur extrémité postérieure, et indique, ainsi que la figure suivante,
la quantité dont ils ont dévié l’un de l’autre. Une dent très endom-
magée, et dont on voit la cavité interne, s’y montre en place, mais
à moitié sortie de son alvéole.
La figure 3 s’applique aux mêmes pièces vues par l’extrémité
antérieure. En la comparant à la figure 1 , il est facile d’en com-
prendre les détails.
La tête proprement dite et les extrémités antérieures de la mâ-
choire manquant, je ne puis faire ressortir que les caractères sui-
vants :
1° Similitude presque complète dans les détails de la partie ros-
trale ou moyenne des deux mâchoires ; similitude entière dans les
contours extérieurs de l’une et de l’autre
SÉANCE Dl! 1 3 J ANVIER 1851.
t?3
2° Forme extérieure de chacune d’elles, demi-cylindrique.
3° Forte saillie des maxillaires à la partie interne de chaque
mâchoire, ce qui donne à l’une et à l’autre un diamètre vertical
presque égal à son diamètre horizontal.
4° Maxillaires de chaque mâchoire non adhérents et au con-
traire très distincts l’un de l’autre.
5° Alvéoles profondes, allongées, et paraissant communiquer
l’une avec l’autre par des étranglements dans les intervalles qui
séparent les dents ; de sorte que ces alvéoles auraient une disposi-
tion moniliforme, autant qu’on peut en juger par l’état du sujet.
6° Dents droites ou un peu arquées , et dont plusieurs ont la
cavité dentaire vide et exactement fermée à la base.
Stries longitudinales partant de la pointe, et occupant à peine
le tiers de la longueur totale des grandes dents ou la moitié de la
longueur de la partie qui est en dehors de l’alvéole.
J’ai cherché à déterminer l’espèce à l’aide de l’ouvrage de
Cuvier ( Recherches sur les ossements fossiles, 4e édition, atlas in-4,
1836). Mais les figures de ses planches 234 à 238 ne m’ont fourni
que des analogies insuffisantes. Ainsi , je n’y ai pas trouvé
d’exemple de maxillaires non adhérents l’un à l’autre et fortement
proéminents à l’intérieur de la mâchoire , ni de dents libres dans
des alvéoles larges, profondes et allongées. Je me suis aussi de-
mandé si ses figures 8, 9 et 10, planche 223, 4 à 11 et 38,
planche 224, ne devaient pas faire rapporter au genre Dauphin
ce que je considérais comme appartenant à un Gavial. Mais alors
où seraient le vomer, les inter-maxillaires et la ligne de suture de
ceux-ci avec les maxillaires? L’inégalité des dents, leur forme et
celle des parties dentaires des mâchoires m’ont fait rejeter cette
dernière idée.
N’ayant pas à ma disposition d’autres éléments de détermina-
tion, l’étude des Crocodiliens fossiles étant fort peu avancée, et
n’ayant trouvé d’ailleurs ni vertèbres ni écailles de l’individu
dont je viens de m’occuper, je me suis principalement attaché à
constater les faits. Quant à la dénomination, faut-il la prendre
dans un genre déjà connu , comme le Steneosaurus , le Strcpto -
spondylus , etc.? L’espèce est-elle nouvelle, ce qui me ferait pro-
poser le nom de vassiaccnsis P c’est ce qu’il me paraît prudent de
laisser à décider. #
M. Hébert fait observer que, si la mâchoire décrite par
M. Cornue! appartenait à un véritable Gavial, le fait serait in-
téressant , car il ferait remonter ce genre au delà du terrain
17A SÉANCE DU 13 JANVIER 1851.
pisolitique où M. Pomel a déterminé le plus ancien Gavial
connu.
M. Michelin dit que, dans les terrains oolitiques, on a signalé
des Steneosaurus , et que M. Cornue! n’affirme point que la
mâchoire en question appartienne à un Gavial proprement dit.
Le secrétaire communique la note suivante de M. d’Hombres-
Firmas :
Notes sur les géodes pleines d'eau de St- Julien- de- V 'ilgalgue ,
offertes à la Société géologique par M. d’Hombres-Firmas.
Mais, 15 décembre 1850.
J’avais parlé dans d’autres écrits (1) du fer sulfuré de Saint-
Julien-de-Valgalgue , à 7 kilomètres au N. d’Alais, qui alimenta
longtemps une fabrication considérable de couperose, avant que
les chimistes nous eussent appris à fabriquer ce sel artificiellement
et à de meilleures conditions pour le commerce.
On trouve aussi à Saint-Julien et aux environs, vers le N. et le
N.-N.-E., dans les formations inférieure et moyenne oolitiques,
du fer oligiste en assez grande quantité, et encore plus abondam-
ment du fer hydraté qu'on exploite depuis quelques années pour
les hauts fourneaux d’Alais. Ces dernières sortes de minerais ap-
partiennent aux concessionnaires, et je ne m’occuperai pas ici de
leurs bonnes qualités ni de la quantité qu’ils en tirent ; quant au
fer sulfuré, j’ai ouï dire qu’une compagnie avait traité avec les
propriétaires, et que ses agents se livraient à des recherches sui-
vies pour en obtenir un autre produit et créer à Saint-Julien une
nouvelle industrie ; il ne m’appartient pas de la dévoiler; je veux
seulement indiquer la nature des gisements dans lesquels sont les
géodes que je me propose de faire connaître.
On remarque dans les tranchées faites en exploitant les mine-
rais des intervalles remplis par une terre fine, rougeâtre, ocre use,
que des courants ont charriée, et qui datent peut-être de la forma-
tion des amas de pyrites. C’est dans cette argile, comme au milieu
des masses ferrugineuses, qu’on observe les géodes sous la forme
de sphéroïdes, ou de rognons de 0m,10 à 0m,15 de diamètre pour
la plupart, mais il y en a de beaucoup plus grosses; j’en ai mesuré
une de 0m,88 de tour.
(1) Recueil de mémoires , t. III, p. 3 , t. VI , p. 1 1 3 et 293.
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
175
Elles ne sont pas tapissées intérieurement de brillants cristaux,
comme celles d’Alzon , que j’ai décrites, mais quelques unes con-
tiennent de l’eau depuis leur formation , ce qui m’a paru remar-
quable , quoique ce ne soit pas sans exemple : on l’entend cla-
poter en les secouant et on peut la recueillir en les cassant sur
une jatte.
Les géodes qui se détachent, roulent et demeurent assez long-
temps exposées à l’air et au soleil , perdent l’eau quelles conte-
naient et qui transsude à travers leur enveloppe ou filtre par d’im-
perceptibles fissures.
Celles , au contraire , qu’on prend dans leur gisement , que l’on
casse ou que l’on perce avec précaution , sont aux trois quarts
pleines d’eau; trouble d’abord par suite de l’agitation qu’on lui a
causée , elle dépose bientôt un peu de terre calcaire , mêlée d’ar-
gile , d’ocre , et de quelques grains de sable siliceux ; elle devient
limpide et paraît pure , mais le goût et les réactifs y décèlent du
sulfate de fer.
Les particules terreuses reconnues dans ces géodes n’ont pu
toujours se cristalliser, soit à cause de leur mélange, soit à cause
de leur minime quantité, mais j’ai vu des échantillons avec de
petits rhombes de chaux carbonatée, et d’autres renfermant des
lamelles de chaux sulfatée, bien transparentes. J’en ai dont l’en-
veloppe de fer hydraté est doublée intérieurement d’une couche
épaisse de fer sulfuré et leur centre est vide ; tandis que d’autres
de ces rognons, avec la même croûte noirâtre bien distincte , sont
remplies entièrement de fer sulfuré d’un aspect métallique lors-
qu’on les casse, mais qui s’effleurit lorsque l’humidité le pénètre.
Pour expliquer l’origine des géodes de Saint-Julien, de celles
en particulier qui renferment de l’eau, je supposerai qu’à mesure
que les immenses dépôts ferrugineux de cette localité se solidi-
fiaient, le tassement des masses, ou le dégagement de l’air, y lais-
saient des interstices communiquant entre eux par des veinules ou
même d’assez larges fissures, et qu’une certaine quantité de ma-
tière identique encore fluide s’y était insinuée. Dans ce cas, les lois
de l’affinité ont attiré vers les parois de ces petites cavités les
parties susceptibles de se réunir ; elles ont ainsi formé l’enveloppe
des géodes, laquelle a acquis d’autant plus d’épaisseur que les
creux étaient moins grands , l’eau plus chargée de minerais et ses
communications plus faciles. Nécessairement, lorsqu’elle a été
dépouillée des substances qu’elle avait entraînées , cette eau est
restée renfermée au centre.
Si mon explication ne paraît pas suffisante, personne, du moins,
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851,
1 70
n’aura i’idée d’attribuer les géodes de Saint-Julien à la péüifica
tion d’un corps organique et l’eau à sa décomposition.
Séance du 20 janvier 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch, Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite de la présentation faite dans la dernière séance,
le Président proclame membre de la Société :
M. Morot, professeur d’histoire naturelle à l’Ecole normale,
à Paris, rue d’Ulm , 45 , présenté par MM. Delafosse et Hébert.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. Bouchard-Ghantereaux, Mémoire sur un
nouveau genre de Brachiopodes , formant le passage des formes
articulées a celles qui ne le sont pas , in- 8, 10 p.
De la part de M. Th. Davidson, Notes , etc. (Notes sur un
examen des espèces de Térébratules fossiles de Lamarck) (extr.
des Annals and Magazine ofnat. hist. for june 1850), in-8,
22 p., 3 pl.
De la part de M. Ami Boué : JV a s kann und muss , etc.
(Quel est le meilleur emploi à faire des fonds destinés par l’Aca-
démie des sciences de Vienne à des voyages de géologie et
d’histoire naturelle) (extr. des Bull, des séances de V Acad,
imp. des sc. de Vienne , oct. 1849), in-8, 12 p.
— Ucber die âusseren , etc. (Des formes extérieures de la
surface du globe et de leurs causes) (extr. des Bull, des séances
de V Acad. imp. des sc. de Vienne , nov. 1849), in-8, 20 p.
— Ueber die physische , etc. (Sur la possibilité physique de
tracer des routes ordinaires et des chemins de fer dans la Tur-
quie d’Europe) (extr. des Bull, des séances de V Acad. imp.
des sc. de Vienne , 1850), in-8, 8 p.
— Ueber die Géologie , etc. (Sur la géologie de la surface
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851 .
177
terrestre, considérée relativement à la distribution de la tempé-
rature des aérolithes et des mers) (extr. des Bull, des séances
de V Acad. imp. des sc. de Vienne, janv. 1850), in-8, Kl p.
De la part de M. Johann Czjzek, Erlauterungen , etc.
(Éclaircissements sur la carte géologique des environs de
Vienne), in-8, 177 p., h pl. Vienne, 18Zi9, chez Braumüller,
De la part de M. Cari Ehrlich , Ueber die nordôstlichen , etc.
(Sur les Alpes du nord-est. Matériaux pour servir à la con-
naissance de la partie de l’Autriche située au-dessus de l’Enns
et de Salzbourg), in-8, 9à p. Linz, 1850, chez Jh. Wiinmer.
De la part de M. le comte Feclor de Karacsay, Carte coloriée
du pays de Monténégro , 1 feuille colombier.
De la part de M. W. Haidinger, Die Aufgabe , etc. (ïndica-*
tions sur les travaux de l’Institut I. R. géologique à exécuter
dans l’été de 1850) (extr. de Y Annuaire de B Inst. 1. R. géol .,
lre année) , in-8, 11 p., 1 pl. Vienne, 1850.
De la part de M. Morlot : Erlauterungen , etc. (Éclaircisse-
ments sur la carte géologique des Alpes du nord-est), in-8,
212 p., 1 pl. Vienne, 18Zj.7, chez Braumüller et Seidel.
— Ueber die ' geologischen , etc. (Sur la constitution géolo-
gique de l’Istrie , comparée à la Dalmatie et aux contrées avoi-
sinantes de la Croatie, de la Carinthie inférieure et du cercle
de Goerz) (extr. du Bull, des Amis des sc. natur. de Vienne ,
2e vol., 2e cah., I8/18), in-Zi, 62 p., 3 pl. Vienne, 18Zi8.
— Erlauterungen , etc. (Eclaircissements géologiques sur la
8e section de la carte de l’état-major général autrichien pour
la Styrie et rillyrie), in-8, 86 p. Vienne, 18/|8, chez Brau-
müller et Seidel.
- — Uebersicht , etc. (Coup d’œil sur la constitution géolo-
gique de la partie de la Styrie située au sud de la Drau) (extr.
du Bull, des Amis des sc. natur , de Vienne , Ve vol., mars,
18/i9 ) , in-8 , 10 p.
— - Andeutungen , etc. (Indications sur la constitution géolo-
gique de la partie méridionale de la Slyrîe inférieure) (extr. du
Bull, des Amis des sc. natur. de Vienne , VIe vol., décemb.
18A9), in-8, 10 p.
— Geologische , etc. (Carte géologique des environs de Leoben
et de Judenbourg), 1848, in-f°.
Soc. géol., 2e série , tome VIII.
42
178
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
— Geologische , etc. (Carte géologique des Alpes autri-
chiennes, deVienne à Munich, d’après les travaux de MM. Boue,
de Buch, Gzjzek, Haidinger, etc.). 1 feuille colombier.
De la part de M. Paul Partsch, Die Betheiligung , etc. (In-
structions d’une commission de l’Académie impériale des
sciences de Vienne pour un voyage de circumnavigation) (extr.
du Bull, des amis des sc. natur. de Vienne , mars 1850) ; in-8,
18 p.
De la part de M. J. Allan Broun, Report , etc. (Bapport au
général sir T. Mac Dougaîl Brisbane, Bar\, sur la publication,
dans les T ransactions of the royal Society of Edinburgh , des
observations faites dans son observatoire à Makerstown) • in-/!,
17 p. Édimbourg, 1850, chez Neill et Ce.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1851, 1er sem., t. XXXII, n° 2.
L’ Institut , 1851, n° 889.
Annales scientifiques , littéraires et industrielles de V Au-
vergne, t. XXIII, sept, et oct 1850.
Annuaire de V Institut des provinces et des congrès scienti-
fiques. Paris, 1851 • in-8.
Institut des provinces de France. — Bulletin bibliographique
des Sociétés savantes des départements , lre année, 1er vol.,
n° 1 . Paris, 1851 ; in-8.
The Athenœùm , 1851, n° 1212.
M. Martins rend compte verbalement des principales idées ex-
primées par M. le général Hauslab dans le mémoire suivant,
présenté à la dernière séance, et dont il avait pris préalable-
ment connaissance.
Recherches sur V origine de l'état actuel du globe terrestre, ou
son clivage comme cristal (partie d’une série de Leçons sur
la géographie physique et géologique faites de 1 836 à 1841 ) ,
par M. le feldmarschall-lieutenant de Hauslab.
Après avoir examiné les lois que paraît présenter le globe ter-
restre à sa surface et au-dessous de cette dernière, nous allons
essayer de remonter de ces lois à leurs causes, en suivant toujours
la même marche du connu à l’inconnu.
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
179
Deux bassins sont toujours séparés par une digue, et chaque
vallée n’est qu’une série de bassins. Dans une suite de vallées pa-
rallèles à ces bassins, on observe que les digues entre ces derniers ,
dans l’une d’elles , existent aussi en tout ou en partie entre les bassins
qui sont parallèles aux premiers dans les autres vallées. Or ces digues
se prolongeant d’une vallée à l’autre, ou n’y reparaissant que
sous une forme rudimentaire, sont placées le plus souvent sur une
même ligne; de manière que si l’on a une digue en A et en C dans
deux vallées, on peut d’avance en attendre une en B, dans la
vallée intermédiaire entre A et B ; s’il n’y en a pas, on y trouvera
au moins un étranglement, ou bien le cours d’eau y offrira une
cascade, des rapides ou au moins des tourbillons produits par des
rochers cachés sous l’eau. Expliquons notre pensée par des
exemples.
Dans la basse Autriche, où la direction des crêtes de montagnes
est constamment du S. -O. au N.-E., on observe trois lignes paral-
lèles entre elles et à cette direction , et passant sur un grand nombre
de digues et d’étranglements. La première, partant de Moeclling, va
à Aflenz et Bruck et au défilé de Therl, en offrant, entre autres, les
défilés derrière Moedling, à la Grotte d’Antoine dans la vallée de
Sainte-Hélène, entre Pottenstein et Fabrafeid, entre Bernitz et
Oed, sur le cours de divers petits torrents; puis en deçà du col,
entre le mont Sclmeeberg et les montagnes de Buchberg, les gorges
profondes du Hôllenthal, le col entre le Sclmeeberg et le mont
Wachsriegel et le défilé de Aleuberg. La seconde ligne part du
mont Bisamberg au-dessus de Vienne, et s’étend au mont Hoch-
Schwaben en Styrie. Sur celui-ci se trouvent l’étroit passage du
Danube entre le Bisamberg et le Leopoldiberg, la gorge entre Ma-
riabrunn et Burkersdorf, celle entre Alland et Klausen, ainsi que
les défilés d’Araburg, de Brandhof et de Mariazell. Une troisième
ligne se prolonge de Greifenstein sur le Danube à Mariazell, et
offre aussi divers étranglements ou des gorges, comme près de
Heinfeld et de Hohenberg.
De cet exemple, sur une petite échelle, passons à un autre sur
un espace de terrain plus considérable, pour démontrer la vérité
de notre proposition sur toutes les échelles.
Si nous tirons une ligne depuis l’Asie Mineure, près de File
de Marmara, jusqu’aux environs du débouché du Bosna en Bosnie,
nous remarquons sur cette ligne S .-E. , N. -O. , des ruptures, des dé-
filés ou étranglements nombreux, comme entre File de Marmara
et les deux continents voisins, près de Soflon sur la Maritza (où
des falaises de roches cristallines schisteuses sont les rudiments
180
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
restants d’un défilé ancien), sur le cours de l’Arda, du Stanimak,
à Doubnitza, à Trn, à Kourvihan sur la Morava, à Krouschevatz,
à Zvornik, etc. Si nous tirons au contraire une ligne E.-O. du
Bosphore à Douratzo en Albanie, nous y trouvons encore une
série de semblables accidents, parmi lesquels il suffit de mention-
ner ici le défilé sur le Karasou au-dessous de Newekoub, celui
du nord de Demirhissar sur le Strymon, celui sur le Karasou
macédonien, ceux de Dibre sur le Drin et Sateska, ainsi qu’à l’0.
du Gabar Balkan. Pour pouvoir tirer de pareilles lignes , il faut
d’abord trouver deux points où deux lignes sont coupées perpendi-
culairement a leur direction. Ainsi, par exemple, le Bosphore et le
grand sillon du Drin dans le district du Dibre sont dans ce cas,
puisque la direction de leurs digues est E. et O., et celle de leur
coupure N. et S. (abstraction faite dans ce moment des fractions
angulaires). Ce premier cas est celui de deux bassins placés sur
une même ligne ; mais s’ils sont chacun sur une ligne différente
leur jonction par une ligne ne pourra avoir lieu qu’au moyen
d’une digue placée plus ou moins à droite ou à gauche de chacun
d’eux, et plus ou moins inclinée vers l’un ou l’autre de ces côtés,
ce qui fera nécessairement varier la direction de la digue pour
la porter de l’E. à l’O. plus ou moins vers le N. ou le S.
Lorsqu’on a reconnu une fois de pareilles lignes d’accidents
dans une contrée, on remarque que leur nombre , loin cl’etre illi-
mité, est très restreint , et que la configuration du sol ne s’y prête
même qu’à l’établissement d’un certain nombre déterminé de
lignes, hors lesquelles tous les essais semblables sont rendus impos-
sibles par l’absurdité des résultats qu’ils donnent. Ayant prévu
ainsi les objections qui pourraient naître dans l’esprit du lecteur,
nous allons continuer à tirer de pareilles lignes sur une grande
échelle, tout en commençant par un exemple qui prouve que
ces lignes ne sont pas toujours conformes à la direction des chaînes.
Si le cas de conformité est assez fréquent, il y en a aussi d’autres
où ces lignes coupent la direction des chaînes, même à angle
droit. Ainsi, par exemple, l’Espagne nous offre une série de
chaînes s’étendant, en parlant généralement, de l’E. à FO., et
comprenant de grandes rivières dans des sillons longitudinaux.
Or si nous traçons à la règle une ligne du détroit de Gibraltar au
cap Ortegal, nous y trouverons une série de digues coupant la
direction des chaînes. Parmi ces dernières, nous nous contente
rons de mentionner les défilés sur le Guadalquivir près de Car
mone, entre Cordoue et Seville, celui de Méricla sur le Guadiana,
celui du Tage à Alcantara, celui du Duero à Torre et celui du
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851 .
181
Minho à Test d’Orense, qui détermine la jonction du Sil et du
Minho. Nous ajouterons, en passant, que tous ces points étant des
obstacles naturels, ils ont été employés comme partout ailleurs et
toujours par la stratégie, ce qui les a rendus le théâtre des plus
grands combats. Ce seul exemple suffirait pour montrer l’impor-
tance militaire de la géologie, et l’ignorance de ceux qui s’imagi-
nent que le géologue de bonne école n’a pas le mot à dire dans la
géographie militaire et politique.
Dans l’Amérique méridionale, nous trouvons sur une ligne E. -O.,
environ sous le 7° de latitude S., une série d’étranglements, qui
produisent des rapides ou des cascades sur les fleuves, sans que la
direction de cette ligne coïncide avec celles des chaînes. Il suffira
de nommer sur cette ligne les rapides de la Madeira (affluent de
la rivière des Amazones) près de Balsamao, la cataracte des trois
Barras sur le Tocantin, et , entre ces deux, les rapides du Ta-
pajoz.
Si nous tirons une ligue depuis le grand promontoire africain
dans la régence de Tunis à la Norvège, nous y trouverons d’abord
les ruptures entre l’Afrique et la Sardaigne, entre cette île et la
Corse, entre celle-ci et la Ligurie ; or les sondages de la Méditer-
ranée donnent précisément sur cette ligne une série de profon-
deurs moindres qu’à l’E. ou à l’O. de cette dernière. Sans parler
des Alpes occidentales et de leurs accidents, la chute du Rhin à
Schaffbouse, les défilés au débouché du Necker, du Mein et du
AVeser viennent se placer sur cette ligne, tandis que plus au nord
elle tombe sur le plateau bas et sec de la grande bruyère du Lune-
bourg, sur l’îlot singulier et isolé de Helgoland, sur le détroit de
mer entre le Jutland et la Norvège, et enfin sur la côte découpée
de la Norvège septentrionale.
Si nous recherchons une ligne semblable encore plus étendue,
nous la trouvons entre le cap Finistère en Espagne et V Himalaya,
Ses accidents sont la grande séparation des Pyrénées et des Alpes,
certains accidents orographiques de la France centrale, le défilé
du Rhône près de Yienne, la perte du Rhône, une bonne partie
des Alpes occidentales, plusieurs grands défilés des rivières sur le
versant méridional des Alpes, tels que ceux de l’Adige et les mon-
tagnes de cinq Eglises en Hongrie, celles de la Syrmie, la chaîne
méridionale de la Transylvanie avec le profond défilé de l’Aluta,
le Babadagh aux bouches du Danube, l’îlot d’Ilan Aghassi, au-
devant du delta de ce fleuve, les montagnes de la Crimée, l’en-
trée de la mer d’Azof, le Caucase, le reste de la digue séparant le
bassin méridional de la mer Caspienne de ces deux bassins sep-
182
SÉANCE BU 20 JANVIER 1851.
tentrionaux, la chaîne de Balk, l’Hindoukoutch et les défilés par
lesquels l’Indus sort du pays de Cachemire.
Dans le tracé de ces lignes il ne J aut pas toujours se tenir à un
alignement mathématique, car la nature, ou ses forces, au lieu de
s’y astreindre strictement, paraît en avoir dévié, au contraire, le
plus souvent en produisant plutôt des lignes légèrement ondu-
lées d'accidents que des lignes absolument droites. De plus , cha-
cune de ces grandes lignes est accompagnée de lignes parallèles
semblables, qui en sont plus ou moins rapprochées, et sont ali-
gnées localement en plus ou moins grand nombre sur une éten-
due plus ou moins considérable. Chacune de ces grandes lignes
n'est donc réellement que la ligne médiane d'un j ai sceau plus ou
moins grand de lignes parallèles , ce qui donne par l’entrecroi-
sement la figure d’une étoile. Ainsi , par exemple , les premières
lignes subordonnées que nous avons détaillées dans la basse
Autriche ne sont que des lignes parallèles à la grande ligne des
Alpes occidentales jusqu’à l’Oural; la ligne poursuivie en Turquie
de l’E. à l’O. n’est qu’un appendice parallèle à la ligne du cap
Finistère à l’Himalaya; la ligne de Gibraltar au cap Ortegal est
dans une dépendance semblable de la grande ligne de Tunis à la
Scandinavie, et ainsi de suite.
En Europe , nous avons quatre grandes lignes, savoir : celle de
Tunis par la Corse à la Scandinavie, ou du S. au N. ; 2° celle du
cap Finistère à l’Himalaya, ou de 10. à l’E. ; 3° celle de Candie à
l’Irlande, ou du S.-E. ou N. -O. ; enfin celle de l’Atlas à l’Oural sep-
tentrional, ou du S. -O. au N.-E. Les deux premières lignes sont
perpendiculaires l'une à l’autre, tandis que les deux autres par-
tagent en deux parties égales les espaces compris entre les deux
premières, et d’autres lignes de moindre importance viennent
compléter cette rose de lignes d’accidents.
Si nous poursuivons ces lignes d’accidents en Europe, tout au-
tour de la sphère terrestre, nous trouverons que le prolongement
de la seconde ligne passe de l’Himalaya par d’autres montagnes
élevées à Bornéo et dans la chaîne de la côte orientale de la Nou-
velle-Hollande, en laissant sur un de ces côtés, sur une ligne pa-
rallèle, la presqu’île de Malacca, Java et Sumatra ; c’est, en un
mot, la digue qui lie le plus directement la Nouvelle-Hollande à
l’Asie. De la Nouvelle-Hollande, notre ligne va passer sur la
Nouvelle-Zélande, sur l’île de Pâques, sur un coin avancé de
l’Amérique, près du Cbimborazo, sur la chaîne de Carracas, sur
la Trinité et les Açores, d’où elle va rejoindre le cap Finistère.
Si nous plaçons sur ce grand cercle, que nous appelons la ligne
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
183
de V Himalaya et du Chimborazo , un second cercle coupant le premier
à angle droit, nous observons sur ce dernier les points suivants,
savoir: le Chimborazo, les montagnes du Mexique, les montagnes
Rocheuses avec la côte de toute l’Amérique septentrionale qui
leur est parallèle ; le détroit de Behring, les chaînes de la Sibérie
orientale passant au sud du lac Baikal près de Kiatclia, l’Altaï,
l’Himaiaya, les montagnes de Bombay dans l’Indostan, un point
au N. -O. de Madagascar (dont les montagnes, atteignant llùOO
pieds, sont néanmoins parallèles à notre arc de cercle), les monts
de JNieuwefeld, de 10000 pieds de hauteur, dans le cap des Ca-
ire s, le cap Moro de Santa-Martha, au Brésil; les cataractes ou
rapides des fleuves de la Plata, du Paraguay, du Parana et de
leurs affluents, le bassin élevé du lac Titicaca, la chaîne des Andes,
rillimani près de Jaen, et le défilé de Maranova.
Un troisième cercle , à angle droit sur les deux précédents, passe
sur les points suivants, savoir : les Alpes, les îles de Corse et de
Sardaigne, le milieu de la Méditerranée, qui se trouve ainsi
former deux grands bassins, le promontoire de la régence deTunis,
les montagnes du Fezzan, celles au S. du lac de Tsclian, l’intersec-
tion de cette ligne avec la précédente dans les montagnes Cafres
de JNieuwefeld, l’Océan austral, près de l’île Korguelenland, une
seconde intersection de lignes ou de nœuds de montagnes dans
la Nouvelle-Hollande, où les montagnes Bleues se trouvent placées
parallèlement à notre ligne en avant de l’angle d’intersection des-
dites lignes, le grand Océan, dans un point à l’O. du détroit de
Behring, une troisième intersection de notre ligne actuelle avec la
précédente, le Spitzbergen, la Scandinavie, le «Tutland, etc., etc.
Ces trois lignes circulaires, tracées sur le globe, forment entre
elles un octaèdre irrégulier par suite de la forme irrégulière de la
sphère terrestre , le point du milieu de cette dernière ne pouvant
coïncider avec celui de l’octaèdre. Chacun des triangles irréguliers
de cet octaèdre peut se partager en huit autres au moyen de lignes
d’accidents de moindre importance, ce qui nous donne quarante-
huit triangles irréguliers.
Partout où ces lignes se croisent , il se produit, pour ainsi dire,
des nœuds de digues. De plus , sur chacune de ces lignes ou sur
chaque entrecroisement, on ne trouve pas toujours en réalité une
chaîne de montagne, mais toute chaîne du globe n’existe jamais que
dans le voisinage d' une de ces lignes ou d'un de ces entrecroisements.
En d’autres termes , chaque arête de notre octaèdre ne détermine
pas la place d’une chaîne , quoique chaque chaîne ait pour cause
première une de ses arêtes. Si dans une ruine les simples proémi-
SÉANCE DU 20 JANVIER 185 J .
184
nences du sol, produites par des murs disparus, doivent être ajou-
tées aux restes des murailles seulement en partie détruites et aux
places vides, pour donner une idée de la structure originaire d’un
édifice , de même notre cristal a perdu des pointes et des parties
d’arêtes, de manière à ne pouvoir produire des chaînes continues ;
mais celles qui existent ne sont qu’une conséquence des arêtes
moins entamées ou restées plus intactes. D’ailleurs il est tout
naturel que des courants aqueux passant entre deux lignes paral-
lèles d’aspérités détruisent très peu celles-ci, tandis qu’ils entame-
ront fortement d’autres lignes parallèles croisant les premières et
s’opposant à leur direction ; aussi trouve-t-on sur la surface ter-
restre des lignes plus ou moins distinctes , et ce cas a lieu tantôt
sur les uns de nos faisceaux de lignes, tantôt sur d’autres, suivant
les destructions éprouvées relativement.
D’après ce que nous avons dit plus haut, il s’ensuit que chaque
grande digue est composée d’une série de lignes parallèles, que les
grands cercles tracés autour du globe ne sont que les moyennes
directions de ces faisceaux de lignes ou de digues , et que , tracées
toutes sur la sphère , on obtient une série considérable d’espaces
triangulaires sphériques limités par toutes ces lignes d’entrecroi-
sement.
Choisissant maintenant sur nos grands cercles les trois points du
Chimborazo , des plus hautes Alpes et de l’Himalaya , nous pou-
vons effectuer avec eux une construction de géométrie descriptive
de la manière suivante : Faisons une coupe du globe passant par
ces trois points, puis plaçons perpendiculairement sur cette coupe
une autre coupe passant seulement par FHimalaya et le Chimbo-
razo , et faisons une troisième coupe passant par les Alpes de ma-
nière à être perpendiculaire aux deux précédentes. Ces trois coupes
nous donneront trois ellipses, jouissant chacune de propriétés par-
ticulières, et produisant huit triangles sphériques de forme inégale,
tandis que les trois axes de ces ellipses , chacun perpendiculaire
sur l’autre, font le squelette de notre octaèdre , et le point central
d’intersection de ces trois axes sera le centre de ce dernier, qui est
loin d’être celui du globe entier. Nous arrivons ainsi à l’idée que
la terre est loin cVétrc un corps également dense , comme l’ont voulu
supposer la plupart des physiciens , malgré les anomalies locales
du pendule ; mais qu’au contraire sa masse la plus compacte , son
premier embryon est plus voisin de sa surjace d’un côté que de l’autre ,
comme cela se voit encore dans les comètes, que bien des astro-
nomes ne considèrent que comme des planètes en progression de
formation. Or notre masse octaédrique se trouverait, d’après noire
SÉANCE DU 20 JANVIER 185'i .
185
construction géométrique, bien plus près du pôle arctique que du
pôle opposé, ce qui expliquerait la grande masse des continents
vers le premier, en opposition à l’énorme enveloppe aqueuse vers
le pôle antarctique. En effet , la partie australe du globe se serait
solidifiée la dernière , et les dernières parties vaporeuses de notre
terre à l’état de comète auraient formé les eaux océaniques.
D’une autre part, nous observons, conformément à cette suppo-
sition dans notre octaèdre, que ses plus petits triangles correspon-
dent aux plus grandes masses continentales , comme les parties de
la surface les plus voisines du premier noyau solide terrestre, tan-
dis que les plus grands triangles tombent sur l’hémisphère en
grande partie couvert d’eau (plusieurs planches servent de preuves,
mais ne peuvent pas être envoyées pour le moment).
Cette hypothèse paraît de plus étayée par les observations et les
anomalies locales du pendule ; car, d’après elle , le globe terrestre
ne serait ni sphérique, ni ellipsoïde , mais une masse formée petit
à petit par aggrégation et avec une surface irrégulière à bombe-
ments , et surtout avec une densité bien moins égale qu’on ne le
semble admettre communément. Au même point de vue, la
libration de l'axe de la terre obtient un nouveau facteur dans cette
excentricité de la masse terrestre relativement à son volume , et
l’on comprend par combien de phases la libration a pu passer ainsi
avant d’arriver à ses limites actuelles. Mais le déplacement du
centre du globe une fois rendu probable et possible d’après les
lois reconnues de l’astronomie, on pourrait y trouver l’explication
de beaucoup de phénomènes astronomiques , physiques et même
paléontologïques , parmi lesquels nous ne mentionnerons que la
place actuelle et la variation ancienne probable des lignes iso-
thermes , les mêmes rapports des lignes magnétiques isodynami-
ques en apparence si étroitement liées aux précédentes, les varia-
tions en apparence existantes encore pour ces lignes , certaines
observations sur les pôles magnétiques, certains dépôts de végétaux
et d’êtres organisés des régions chaudes dans la zone polaire bo-
réale , les différences de température et de milieux ambiants ayant
déterminé une variété de successions de différentes formes végétales
et animales, etc. (1).
(I) Obs. de M. Boué : Si notre savant avait raison avec son hypo-
thèse d’octaèdre , on ne pourrait guère s’empêcher de remarquer que
l’octaèdre, le cube et le rhomboèdre sont les formes primitives des
métaux, et surtout que le métal le plus répandu, le fer, cristallise en
octaèdre, comme cela se voit même dans les fers météoriques.
186
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
Histoire particulière de la configuration de la surface terrestre
d’après cette hypothèse.
Pour plus de simplicité , nous ne considérerons que les huit
grands triangles sphériques principaux de notre construction géo-
métrique, et nous négligerons les autres triangles secondaires qui
n’ont qu’une importance bien moindre pour notre but.
Pour nous entendre, donnons des noms à nos huit triangles :
celui entre les Alpes, le Chimborazo et le détroit de Behring sera
le triangle nord atlantique ou N. A. ; le triangle entre les Alpes,
l’Himalaya et le détroit de Behring sera le triangle sarmato-mon-
gol ou S. M. ; le triangle entre le Chimborazo , les Alpes et le
cap de Bonne- Espérance sera le triangle sud atlantique ou S. A. ;
le triangle entre les Alpes , le cap de Bonne-Espérance et l’Hima-
laya sera le triangle arabique ou A. ; le triangle entre le Cap, l’Hi-
malaya et la Nouvelle-Hollande sera le triangle de l’In dos tan ou I. ;
le triangle entre l’Himalaya, la Nouvelle -Hollande et le détroit
de Behring sera le triangle chinois ou Ch. ; le triangle entre la
Nouvelle-Hollande, le détroit de Behring et le Chimborazo sera le
triangle océanique ou O. ; enfin le triangle entre la Nouvelle-Hol-
lande , le Chimborazo et le Cap sera le triangle austral ou Au. (1).
Ces lignes, considérées comme digues, forment des concavités
ou bassins triangulaires. En effet , supposant un cristal à surfaces
planes enveloppé dans une sphère liquide, cette dernière matière
présentera plus de profondeur sur le milieu des surfaces que sur
les arêtes du cristal ; mais comme nous sommes accoutumés à nous
figurer sur la terre une attraction verticale sur une surface plane
au lieu d une attraction convergente sur un sphéroïde , la repré-
sentation de la place du fluide autour d’un cristal revient à celle
d’un fluide couvrant les surfaces concaves d’un cristal, ou, en d’au-
tres termes, les phénomènes d’un cristal à surfaces planes recou-
vertes d’une sphère fluide seront les mêmes que celui d’un cristal
à surfaces convexes recouvertes par un fluide à surface plane. Donc
nous pouvons considérer nos triangles tout à fait comme des bas-
sins dont les pourtours sont plus ou moins intacts ou détruits par
suite des mouvements du fluide enveloppant.
(l ) Remarque de M. Boué : Je ne puis résister à faire remarquer que
la distribution des races humaines, des animaux et des végétaux, pa-
raîtrait être en rapports frappants avec cette hypothèse de huit trian-
gles ; l’organique doit s’appropriera l’inorganique, et cela étayerait
aussi la théorie.
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851. 187
Ce dernier a dû avoir des mouvements par les raisons péremp-
toires et mathématiques suivantes :
1° A cause de la rotation du globe , le fluide a dû se porter in-
cessamment des pôles à F équateur, ainsi que de l’est à l’ouest ,
comme tout le monde le reconnaît.
2° D’après les lois de la pesanteur, le fluide a dû toujours tendre
à gagner les parties les plus basses de la surface terrestre ; or les
ruptures des digues ne devront pas avoir eu lieu sur les points d’in-
tersections des digues , mais entre ces nœuds , parce que les digues
y ont été plus basses que sur les arêtes d’entrecroisement.
3° Si une digue est courbe et placée de manière qu’un courant
vienne à l’entamer dans une direction à angle droit de sa surface,
la force destructive la plus grande se montre dans ce point, tandis
qu’ailleurs il se produit bien moins de ruptures. Si une digue est
droite le courant a une direction courbe ; la rupture se fait per-
pendiculairement à ces deux lignes.
û° Quand deux courants viennent à se toucher, le courant de
la plus grande masse détourne le courant de la plus petite masse ;
or les triangles ou bassins auraient eu les plus grands courants, vu
qu’ils contenaient le plus d’eau.
5° Plus la surface des eaux aura baissé (1) , plus les courants
auront été affectés ou arrêtés par les inégalités du fond des mers.
En conséquence, tant que les eaux auront été hautes ou profondes,
les courants auront dû s’y mouvoir presque en ligne droite dans
leurs bassins ; mais quand elles ont baissé , leur cours aura dû
être serpentin (par les stries des faces plus ou moins démantelées) ;
et , plus tard, lors des eaux basses, il aura dû se former dans les
courants des tourbillons et même des remous de 10. à l’E. , comme
de l’équateur vers les pôles.
Pour faire saisir les changements éprouvés peu à peu dans ces
courants , nous avons construit six planches représentant la sur-
face terrestre à six époques différentes , et illustrant notre modèle
de carton du globe terrestre sous la forme cristalline de quarante-
huit triangles sphériques irréguliers.
La première planche doit donner une idée de l’état suivant des
courants : comme l’équateur passe presque au milieu du triangle
sud-atlantique , la rotation de la terre y aura produit dès le prin-
cipe un courant E.-O. en même temps qu’un autre courant sera
(1) L’auteur ne s’occupe pas dans cet instant des causes de cet
abaissement, savoir : les bombements delà terre, la formation des
chaînes et les affaissements.
188
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
parti du triangle austral pour joindre le précédent à l’équateur, et
sera passé presque dans le milieu de la digue entre le Chimborazo
et la Nouvelle-Hollande, Le courant E.-O. en aura été détourné
et aura été contre le côté oriental ou l’arête orientale du triangle
chinois ; il aura longé la digue s’étendant de la Nouvelle-Hollande
an détroit de Behring, et aura rencontré celle entre l’ Himalaya et
le détroit de Behring ; mais en même temps il sera arrivé du
triangle austral dans le triangle chinois un autre courant entre
l’Himalaya et la Nouvel le -Hollande , et ces deux courants réunis
auront fait rupture par l’Himalaya. Jusque-là , les effets des cou-
rants partant des petits triangles septentrionaux ont dû. être assez
peu sensibles , ou n’ont pas été capables de produire de grands
mouvements.
Du triangle austral serait parti un courant qui est allé dans le
triangle arabique , aurait passé au N. entre le cap de Bonne-
Espérance et les Alpes, et entre cette dernière chaîne et le Caucase,
le nœud des Alpes aurait partagé ce courant; tandis que le courant
au N. de l’Himalaya, repoussé un peu au S. par un courant arcti-
que , se serait joint au précédent, et réunis ils auraient tourné au
N. entre la Scandinavie et les Alpes.
Dans le triangle nord atlantique, ce courant méridional aurait été
refoulé par le courant arctique jusqu’à ce qu’il soit venu du triangle
austral , par le triangle subatlantique , un courant qui aurait re-
poussé le précédent un peu vers le N. pour lui faire passer la digue
entre le Chimborazo et le détroit de Behring, ainsi qu’au N. des
monts Alleghanys.
Les courants mentionnés avec leurs directions et déviations
motiveraient la place des chaînes ( ou plutôt bombements ) sui-
vantes : l’Himalaya, les montagnes Bleues dans la Nouvelle-Hol-
lande, l’Atlas, la direction de la péninsule italique, les Alpes et la
ligne orographique s’étendant de là à l’Irlande.
On voit que les plus hautes crêtes des plus grandes aspérités de
la surface terrestre auront été modifiées par ces courants sans être
parallèles pour cela; cependant, malgré ce non-parallélisme, leur
place a été motivée par une seule et même cause. D’une autre part,
d’après ce que nous avons dit sur les effets de creusement produits
par les courants au pied des falaises, on trouve déjà motivées les
profondes concavités au pied des chaînes de lTiimalaya et des Alpes,
ainsi que la forme pointue de l’extrémité méridionale de l’Afrique.
Dans la seconde planche nous supposons les eaux plus basses, et,
par conséquent , des courants plus brisés ou moins continus. La
grande masse du courant principal S -O. aura passé au S. des
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
189
montagnes du Mexique , au S. de l’Himalaya et au N. des Alpes.
La structure et les contours généraux des Alpes auraient été ainsi
motivés.
Toutes les grandes pointes des continents sont tournées vers
le S., parce que les courants venant du triangle austral ont du
donner lieu à des courants bien plus forts que ceux partant des pe-
tits triangles arctiques , qui n’ont été capables que de produire
quelques petites pointes tournées au N.
Dans cette époque se trouvent surtout la grande rupture entre les
deux Amériques, la séparation entre les Alpes et les hautes chaînes
de lTIimalaya , la direction de la mer Rouge et de la mer Adria-
tique, ainsi que le golfe Persique, le grand passage entre les Alpes
et la Scandinavie.
Dans la troisième planche , on part de la supposition d’un abais-
sement encore plus grand des eaux, et de l'existence d’un nombre
encore plus considérable d’obstacles au mouvement des courants.
Le grand courant E.-O. aurait passé alors par le détroit de Panama
et le pays de Guatimala , par l’archipel Indien , au S. de l’Hiina-
laya , au S. des Alpes , entre ces dernières et les Pyrénées : par le
détroit de Gibraltar, et en même temps par le désert de Sahara.
A cette époque, le courant venant du pôle arctique avait déjà une
telle influence qu’il allait dans le bassin chinois , et qu’il devenait
prépondérant dans l’Atlantique. Les courants de cette époque au-
raient motivé la place et la structure de la plupart des hautes mon
tagnes, environ jusqu’à la limite supérieure des arbres forestiers,
telles que l’Oural, les Kiols en Scandinavie, etc. , etc.
Une quatrième planche présente un état de choses plus compli-
qué : le courant N. y acquerrait une prépondérance encore plus
décidée ; la masse principale des eaux se serait portée au S. du
Chimborazo, au S. de Bornéo, au N. du cap de Bonne-Espérance,
c’est-à-dire au S. de l’équateur ou dans son voisinage. Nous y
voyons les courants s’onduler, et être accompagnés de remous. Un
grand courant septentrional couvrait les plaines de la Sibérie pour
déboucher par la mer Noire, la mer Méditerranée et le détroit de
Gibraltar, en même temps que pour couler du N.- O. au S.-E. il
employait l’Adriatique, la mer Rouge et le golfe Persique, c’est-à-
dire les sillons déjà existants. Dans cette époque on remarque aussi
les grands creusements, qui ont eu lieu d’abord de l’E. à l’O.,
puis en se repliant, en sens contraire, de l’O. à l’E. C’est alors que
furent produites par le nœud du Chimborazo ces immenses plaines
où coulent le fleuve des Amazones et ses nombreux affluents , et
qui s’étendent de là par le Paraguay jusqu’en Patagonie.
190
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
Dans une cinquième planche , l’eau est supposée baissée jusqu’à
la limite actuelle de la végétation des céréales et des arbres frui-
tiers. Alors le courant principal E.-O. passait au S. -O. du Chim-
borazo, au S. de Bornéo , et entre la Nouvelle-Hollande et l’Asie ,
et en s’approchant de l’équateur ; puis il se tenait au S. du cap de
Bonne- Espérance, et regagnait l’Amérique. A cette époque les
tourbillons ont commencé, et ont modifié la côte N. -O. de l’Amé-
rique septentrionale ainsi que le golfe du Mexique. C’est aussi
l’époque des mers intérieures salées ou méditerranées qui se sont
écoulées petit à petit par leurs digues les plus basses pour gagner
des lieux d’un niveau encore inférieur , et , par conséquent , aussi
quelquefois pour se déverser dans les mers arctiques. C’est ce qui
a motivé les plaines de la Sibérie, ainsi que les fleuves qui en des-
cendent dans la mer Glaciale.
La sixième planche représente la plus grande partie du continent
hors des eaux, et la formation incessante des terrains tertiaires ré-
cents d’eau douce ou surtout des alluvions ; c’est donc l’époque des
lacs d’eau douce et une période de passage à l’état actuel des choses,
ainsi qu’au commencement de l’état présent des courants marins.
D’autres planches démontrent les phases semblables par les-
quelles ont passé l’Europe , la monarchie autrichienne , et enfin
l’archiduché d’Autriche, avec d’autant plus de détails qu’on s’oc-
cupe d’une plus petite étendue de la terre.
Si nous considérons les parties continentales du globe dans le
sens vertical aux diverses époques géologiques précédentes , nous
obtenons un nombre égal d’autres planches.
Lorsque les plus hautes aspérités du globe ressortirent seules des
eaux , il n’y avait que de petites îles formées par les pointes de ces
montagnes ; or , comme la nature de la végétation est en rapport
avec la hauteur, il est résulté que bon nombre de sommités, main-
tenant couvertes de glace, devaient présenter une fois une végéta-
tion totalement différente de celle qui accompagne leurs neiges
aujourd’hui.
Pour les cimes de montagnes qui, dans la série des temps géolo-
giques, ont gagné continuellement en hauteur absolue , il est clair
qu’elles ont dû passer par les différents climats ou températures
qui , d/abord , n’y auraient plus supporté la culture des céréales ,
puis celles des arbres forestiers , et enfin la croissance des plantes
alpines ; mais on sait , d’autre part , que ces cas doivent avoir été
rares.
Pendant les différentes époques géologiques , les eaux courantes
ont dû modifier considérablement la configuration des aspérités du
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
191
globe , et lui imprimer un type particulier pour chaque époque.
En effet, plus la pente parcourue par les eaux courantes est forte,
plus les rigoles d’écoulement découpent fortement le sol , et vice
versa. Ainsi, tant que les pentes d’écoulement étaient peu consi-
dérables, vu le peu d’élévation des continents sur les eaux, celles-
ci ont dû bien plutôt laisser sur le sol des traces de lavage que
d’écoulement ; mais dès qu’il y a eu de véritables montagnes , les
traces de ce genre d’action ont dû prédominer de manière que la
configuration des continents à montagnes élevées, comparée à celle
des continents très peu élevés, répond environ à la différence entre
la figure ridée d’un vieillard et la figure pleine d’une jeune fille.
Supposons le noyau solide du globe formé par la concrétion de
substances gazeuses à la manière des comètes, ou comme quelques
physiciens ont voulu voir se former les aérolithes ; supposons les
parties solides et inégales du globe dans des enveloppes liquides et
gazeuses , et supposons des actions galvano- chimiques ayant lieu
dans ce magma chaotique comme dans la galvanoplastie.
Le dépôt sera modifié localement et à différentes époques, quant
à sa quantité , par la profondeur diverse du liquide , et il se pro-
duira donc plus ou moins de parties solides, comme il se dévelop-
pera plus ou moins de gaz.
La formation des parties solides aura lieu d’après les lois sui-
vantes : 1° Comme toute précipitation cristalline lente d’une so-
lution chimique a lieu contre les parois du vase qui la contient,
notre magma aura déposé ces matières sur son fond ou sur l’iné-
gale surface du noyau terrestre. 2° Dès que le fluide aura produit
sur ce dernier des destructions , il y aura contenu en simple sus-
pension des matières qui se seront déposées mécaniquement d’après
les lois de la pesanteur. 3° Les dépôts cristallins auront été épais
où le fluide aura été profond , et mince où il l’aura été peu. U° Ils
seront épais sur des surfaces planes et minces sur des surfaces in-
clinées. 5° Aussi longtemps que le fluide sera fortement en mou-
vement , il n’y aura eu que peu de dépôts ; mais dès qu’il y aura
eu quelque repos il s’en sera formé , ce qui revient à dire que les
dépôts auront été plus minces pendant une époque ou dans un lieu
de mouvement . que pendant une période ou dans un lieu de repos.
6° Dans les endroits où les courants auront joui de leur force prin-
cipale , il n’y aura pas eu de dépôt ; car à mesure qu’il s’en serait
formé , il aurait été enlevé : au contraire , dans les lieux où il n’y
aura pas eu de mouvement auront eu lieu des dépôts considérables
par voie de cristallisation comme par la voie mécanique.
Ici se présente la question : Sous quel angle peut se former un
192
SÉANCE Dü 20 JANVIER 1851 .
depot? Un dépôt de cristallisation, comme le tartre, a lieu même
contre les côtés verticaux d’un vase; nous ne devrions donc pas
nous étonner de trouver des roches en feuillets très inclinés, dans
une position verticale , ou même associés ensemble en boules à
couches concentriques, si toutefois il était permis d’assigner à ces
roches une origine de cristallisation semblable.
Supposons un fluide tranquille dans un bassin concave , un
dixième de parties solides suspendues dans le liquide, et ce dernier
divisé en un nombre infini de lignes verticales, le dixième de ma-
tières solides se déposera à l’extrémité inférieure de chacune de
ces lignes ; mais ces dernières étant inégales, il s’en déposera plus
sous les lignes du milieu que sous celles du bord. Or , s’il y a des
personnes qui ne veulent pas admettre qu’un pareil dépôt ait lieu
sur toutes les parties du bassin, par quelle force veulent - elles
donc, si ce n’est par glissement, faire prendre à des masses a , b , c
et c, d , j la position d’un xl
Si l’inclinaison de la surface est forte , certes le glissement aura
lieu ; mais quand la pente est faible, le dépôt restera en place. Or,
dans tous les ouvrages de terrassement , l’angle d’inclinaison pour les
ouvrages de terre est celui de Zi5°, et pour les ouvrages de sable celui
de 35°. Comment accorder ees faits prouvés par l’expérience jour-
nalière avec les assertions des savants, qui placent le maximum
d’inclinaison d’un dépôt mécanique sous un angle bien moindre ?
Si , d’un autre côté , on suppose le dépôt se formant sous une
eau courante, on aura plus de moyens d’obtenir des séries décou-
ches tout aussi inclinées, si ce n’est plus, ainsi que des strates con-
tournés déposés sur des portions de couches en partie détruites ,
comme cela se voit dans toutes les alluvions des rivières. Ainsi peu-
vent s’obtenir beaucoup des coupes débouchés que présente la
géologie, et dont l’explication fait travailler trop souvent outre
mesure le cerveau des géologues qui ne savent pas contrôler assez
leur imagination.
Quand les eaux recouvraient tout le globe solide , les êtres y
étaient réduits à des habitants des mers; mais dès qu’il y a eu des
îles, les plantes ont paru: bien plus tard arrivèrent les animaux
terrestres, les arbres à feuillages et les plantes alpines, lorsqu’il y
eut d’assez hautes montagnes. Plus le niveau de la mer, comparé à
celui des terres, s’abaissa, plus la limite supérieure de la végétation
descendit sur tout le globe.
Lorsqu’il n’y avait que des îles au milieu des mers, ces dernières
ne présentèrent que les formes des pays bas ; mais par la suite de
l’écoulement des eaux, ces parties continentales furent découpées
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
193
ensuite sous la forme des cimes des montagnes de moyenne hau-
teur ; enfin leur base mise à sec, il y eut sur la terre des montagnes
de moyenne hauteur entières , c’est-à-dire que les cimes étaient
déjà dépourvues des bois qui garnissaient encore leurs flancs et
étaient couvertes de gazons. Par suite de l’action des vents et de la
décomposition des roches, ces pointes s’émoussèrent , et furent
remplacées par des aplatissements où végétèrent des plantes
alpines. Enfin, plus tard, les cimes perdirent cette couverture, der-
nière protectrice de la végétation, la pluie emporta la terre végé-
tale , et il se forma des pointes de rochers qui se trouvèrent bientôt
en partie au-dessous'de la ligne des neiges perpétuelles.
Quant au climat tempéré ou meme chaud qui a dû régner dans
de hautes latitudes boréales à une époque géologique reculée,
d’après certains végétaux fossiles, on peut essayer l’explication
suivante : Pendant l’été, il fait moins chaud sur la terre que sur
la mer, tandis qu’en hiver, c’est tout le contraire. En été les lignes
isothermes s’approchent du pôle sur les continents et elles s’en
éloignent sur la mer; en hiver c’est tout l’opposé. Ainsi, par
exemple, les hivers de Norvège sont environ ceux de la Crimée.
Une cause puissante de cette température, assez élevée dans les
latitudes boréales, doit être le grand courant Atlantique, qui
amène ses eaux chaudes tropicales jusque sur les côtes extrêmes
boréales de l’Europe et de l’Amérique.
A rinfluence de cette cause doit être jointe la direction diffé-
rente qu’avait ce courant lors des premières époques géologiques,
ou le manque d’obstacle que présentent les terres actuelles non
encore formées alors. Le courant devait nécessairement passer
plus près du pôle boréal. Ensuite il ne faut pas oublier que dans
ces temps reculés il n’y avait que des îles, par conséquent des cli-
mats insulaires tempérés par l’entourage de la mer.
De plus, la lumière solaire avait à traverser une atmosphère pro-
bablement très différemment composée que n’est la nôtre, soit par
sa composition chimique, soit par la plus grande quantité de va-
peurs aqueuses qu’elle devait contenir, ou la plus grande étendue du
liquide soumis à l’opération de l’évaporation. Ainsi, si déjà ces va-
peurs devaient tendre à élever la température des latitudes froides,
la lumière devait y avoir une réfraction différente de ce qu elle
est actuellement, et des glaces ne devaient pas exister où on les
voit accumulées aujourd’hui.
D’une autre part, la lumière et le magnétisme paraissant int -
mement liés, les phénomènes magnétiques pouvaient être bien dif-
férents de ce qu’ils sont maintenant, et même des plantes pou-
Soc. géoL. 2e série, tome VIII. 13
SÉANCE I) U 20 JANVIER l85l.
194
vaient jouir, au moyen d’aurores boréales de presque plusieurs
mois de durée, de la lumière nécessaire à leur végétation dans des
latitudes boréales.
Enfin il faut toujours se rappeler qu’à ces époques la terre était
plus près de son ancien état de comète qu’ actuellement, surtout à
sa surface ; or ce calorique, rayonnant du globe vers les espaces,
devait être déjà une cause puissante de modification et d’intensité
dans les phénomènes de la lumière et du magnétisme. Ainsi
nous arrivons à entrevoir très clairement les causes proba-
bles d’anomalies paléontologiques, sans que nous puissions encore,
vu l’état de nos connaissances, suivre tout le fil des effets de ces
causes. Il faut donc se garder de recourir à des hypothèses con-
traires aux lois astronomiques ou physiques avant d’avoir exploité
convenablement toutes les connaissances déjà acquises sur la phy-
sique du globe.
Remarques additionnelles de M. Boue.
Vous avez donc là un troisième mode d’envelopper notre
terre dans de grands cercles, etc. Sickler {J de en zu einem vulca-
nise lien Erdglobus , Weimar 1812, 8e carte), de Bueh et d’autres
naturalistes avaient commencé avec des cercles de volcans, puis est
venu M. Elie de Beaumont , ensuite la théorie de Boucheporn , et
enfin Pissis. M. Elie de Beaumont dans son dernier travail, non
encore achevé, sur la cristallisation du globe, traite le sujet tout
à fait abstraitement et arrive à un nombre bien considérable de
triangles sphériques et de pentagones, tandis queM. de Hauslab se
restreint aux formes existantes dans le règne minéral, rejette les
autres de la géométrie théorique et s’arrête à 48 faces triangu-
laires sphériques irrégulières. Du choc de ces idées sur un même
sujet devra sortir quelque chose qui fera avancer la science d’une
manière ou d’une autre.
M. Gasialdi présente, de la part de M. Scarabelli, la note
suivante sur l’existence d’un ancien lac dans le val Senio (1).
('!) Cette note a été lue, en '1847, à la réunion extraordinaire
d’Épinal ; elle n’a pu être imprimée dans le compte rendu par des
raisons financières.
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
195
Note sur V existence d’ un ancien lac dans la vallée du Senio ,
en Romagne , par M. Scarabelli.
Imola , juin 1847.
Ce n’est pas une chose nouvelle que de rencontrer des souvenirs
traditionnels répandus parmi les habitants de certains pays où le
sol présente quelque caractère frappant sous le point de vue de sa
composition ou de sa forme extérieure. Souvent même de sa-
vantes recherches , entreprises sur une vague tradition populaire ,
ont conduit les naturalistes à la découverte de faits très importants ;
et tout en admettant qu’il y a toujours à se méfier de pareilles tra-
ditions, il faut convenir que maintes fois elles présentent un appui
à la recherche de quelque vérité cachée. Ces vieux récits du peuple
sont toujours dignes de fixer pour un moment l’attention du géo-
logue , ne fùt-ee que dans le but de constater leur origine entiè-
rement fabuleuse. Ce fut dans l’espoir de pouvoir démêler, pal-
mes observations, quelque chose de réel au milieu d’un vague
appareil traditionnel , que j’entrepris une longue série de courses
dans la vallée du Senio . Désirant faire connaître la topographie de
ce pays et les accidents détaillés du sol, j’ai dressé une planche
(pl. IY) qui me permettra d’être plus concis dans ma description (1).
Le chef-lieu de cette vallée de l’Apennin est Casola-Vahenio ,
gros bourg d’environ 1100 habitants. C’est parmi ces derniers
qu’est répandue la tradition qu’à la place même occupée mainte-
nant parle bourg il a existé jadis un lac, dont les eaux couvraient
toute la haute plaine qui de là s’étend jusqu’à Rico la. Ce lac était
formé par les eaux du Senio , rivière qui coule, de nos jours , tout
près du bourg, et qui, autrefois, aurait rencontré une barrière
insurmontable formée par de très puissantes couches de gypse.
Ces eaux ainsi soutenues auraient rempli un bassin dont le fond
horizontal présente encore une étendue en longueur d’au moins
6 kilomètres. On ajoute de plus que les Etrusques , coupant la
montagne , ont ménagé une issue à cette énorme masse d’eau ;
depuis ce temps rien n’aurait plus changé de ce que l’on observe
à l’époque actuelle.
(1) Je n’avais pas encore reçu le Bulletin (mai 1847) lorsque je
rédigeai cette note; ainsi je n’ai pas pu me conformer entièrement à
Y avis du Bulletin. Je ferai observer que le rapport de l’échelle dont
je me suis servi dans les figures est de , et que la position géo-
graphique de Casola-Valsenio, rapportée au méridien de Paris, est de
44° 1 4' longitude E., et 9° 19' latitude N.
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851 ,
100
Or voici le résultat de mes études.
Casola-V alsenio est situé sur la rive gauche du Sehio (fig. 1) ,
aux bords d’un escarpement abrupt qui s’élève à 35 mètres au-
dessus des eaux de la rivière , dans une gorge ouverte au milieu de
couches de mollasse. La localité est vraiment pittoresque, mais les
bâtiments du côté S. du bourg sont dans une position très dange-
reuse à cause de l’éboulement qui pourrait survenir d’un instant
à l’autre. Le bourg se trouve en même temps à l’extrémité supé-
rieure d’un plateau élevé , qui, côtoyant toujours la rive gauche
du Senio , s’étend, plus ou moins large, jusque vis-à-vis Bugame.
Là il se termine en rencontrant la chaîne des gypses, qui, quoique
très élevée sur ce point, présente une profonde échancrure au fond
de laquelle passe le torrent (fig. 3). Tout ce plateau est largement
ondulé ; il est recouvert d’une riche végétation , et il se trouve
bordé par des collines à pentes douces et à sommets arrondis.
Une couche d’un mètre d’épaisseur, composée de galets et de
gravier mêlé à du sable , s’étend indistinctement dans la plaine
au-dessous du terrain végétal, et parfois elle est cachée sous des
éboulis. Ce dépôt caillouteux et à stratification horizontale se
compose des mêmes éléments charriés de nos jours par la rivière,
savoir: calcaires, macigno, ophiolites et jaspes, roches qui sont
traversées par la rivière dans sa marche , ou qui lui sont amenées
par les eaux des affluents. Parmi ces cailloux, je n’ai point décou-
vert de fossiles, et les habitants même m’ont assuré que ce serait
en vain qu’on en chercherait. Cela dépend peut-être de la nature
du dépôt qui, étant détritique, s’oppose à toute bonne conservation
des fossiles. Au contraire, tout près de Rivola, dans l’endroit figuré
en b sur la coupe CD (fig. 3), on voit de petites Lymnées mêlées
à des Cyclostomes. Ces fossiles sont renfermés dans un calcaire
légèrement bitumineux placé au-dessous du dépôt caillouteux ,
reposant immédiatement sur le gypse sous forme d’incrustation.
Du côté opposé, sur la rive droite du Senio , on voit paraître, seule-
ment par lambeaux , de hauts plateaux correspondant à celui que
je viens de décrire ; cela a lieu à Bugame et à la Lama. C’est que
les montagnes qui longent le Senio de ce côté, étant trop escarpées,
n’ont pas permis aux eaux d’y déposer leur charge. On voit par
là que sur cette plaine a dû nécessairement exister autrefois une
puissante nappe d’eau, provenant des mêmes lieux qu’ aujourd’hui,
car aujourd’hui elle entraîne encore des matériaux identiques avec
ceux qu’elle déposait alors. D’ailleurs étant démontré que , outre
l’existence de coquilles lacustres, ce dépôt d’origine ancienne gît à
un niveau plus élevé d’environ 20 mètres que celui qui se forme
SÉANCE 1)L 20 JANVIER 1851,
197
actuellement dans le lit de la rivière, il faut conclure que les eaux
citaient jadis réellement gênées dans leur cours par quelque ob-
stacle ; bref, qu’elles formaient un lac. Je crois, de plus, que le
gypse fut le seul rempart qui pouvait s’opposer à l’écoulement
libre du Senio , car c’est en arrivant à la base de la roche gypseuse
que le plateau s’appuie et se termine. Avant de parler de cette
roche et des circonstances qui l’accidentent, je dirai par quelle autre
roche on arrive au gypse , ou , en d’autres termes , quelle est la for-
mation qui la supporte.
Le Senio , dès son origine sur le versant N. de l’Apennin {monte
Gazzolano ) jusqu’à Casola , rencontre, dans sa marche au milieu
des montagnes , une longue série de schistes sablonneux et mar-
neux, de grès (macigno) tantôt compactes, tantôt schisteux, quel-
quefois avec des couches subordonnées de calcaire à Fucoïdes.
Cette masse de terrain, très tourmentée à cause du soulèvement de
la haute chaîne des Apennins, prend un aspect plus régulier à
mesure qu’elle s’en éloigne. En effet, sa stratification ondulée, ren-
versée, brisée, qui dans l’Apennin attestait l’effet voisin d’une
force intérieure très puissante , ne représente ici , avec sa grande
uniformité et sa faible inclinaison (30° à 35°), que le dernier effort
d’un mouvement propagé à distance. La direction même des
couches, en quelque lieu méconnaissable, commence à se montrer
très nettement à la distance de plusieurs kilomètres au-dessus de
Cas ola-Valsen io ; elle oscille alors entre N. -O., S -E. et N. 80° O.,
S. 80° E. Les montagnes des environs de Casola-Valsenio sont
composées de couches de grès marneux , cendré ( mo lassa ) , peu
solide et d’une faible épaisseur. Entre elles on trouve de petits lits
d’argile marneuse subordonnés , avec traces de Fucoïdes. A mesure
qu’on s’avance suivant le cours même de la rivière vers la partie
supérieure de la formation , cette argile augmente , tandis que le
grès, de son côté, perd de sa consistance et se réduit peu à peu en
sable.
On voit par là que les causes qui présidaient au dépôt du terrain
de mollasse venaient s’affaiblir graduellement pour être remplacées
par celles qui faisaient plus tard déposer les argiles.
Dans cette énorme série de couches appartenant à des roches de
différentes espèces, je n’ai jamais rencontré de fossiles bien déter-
minables qu’à Sogliano , San-Marino , et à Bologne , localités
où ce terrain se rencontre dans des circonstances géologiques sem-
blables et aussi avec un grand développement. Les fossiles que j’y
ai trouvés paraissent appartenir au miocène, et sont :
108
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
Lamna ( odontaspis ) contortidens ,
Agass.
Oxyrina isoscelica , E. Sismonda.
— xiphodon , Agass.
Carcharodon me gain don, Agass.
- — crassidens , E. Sismonda.
— polygyrus , Agass.
Echinolampas Laurillardi , Agass.
Cerithium crassum , Duj,
— bicinctum , Brocc.
Turbinolia
Ostrea virginie a, Lamk.
Pecten
Après les marnes et les grès marneux, toujours disposés en cou-
ihes régulières avec une direction constante N. 80° O., S. 80° E.,
il y a (fig. 2) un petit espace de terrain couvert par des blocs de
gypse de toutes grandeurs , tombés probablement du haut des fa-
laises, lorsque les eaux du lac venaient battre contre le pied de la
bande gypseuse. Ce terrain est composé d’argile non fossilifère qui
paraît conserver la même allure que les grès, et supporte immédiate-
ment les blocs de gypse. Elle est d’abord en couches assez minces,
mais qui augmentent bientôt d’épaisseur, jusqu’à atteindre 10 mè-
tres vers le milieu de la formation ; en effet, la puissance totale de
celle-ci est de 1 00 mètres environ , quoique l’on n’y compte guère
que douze couches. La direction est la même que celle des grès ,
c’est-à-dire N. 80° O., S. 80° E., et son plongement N. est de 35°.
Un observateur placé sur la route de Casola-Valsenio à la Villa ,
et regardant vers le N., est frappé d’une vue magnifique qui lui
permet de saisir d’un coup d’œil l’ensemble de la chaîne des gypses
dans le sens même de sa direction , formant une crête élevée au-
dessus des collines environnantes , et brusquement échancrée près
de Rico/a. Le gypse formant cette bande de terrain , prolongée,
presque sans solution de continuité, vers Bologne d’une part, vers
Brisigliella et Pollen ta de l’autre , est parfaitement cristallisé, soit
en petits , soit en gros cristaux , mêlés ensemble , avec structure
granitique, et donnant lieu quelquefois, par leur réunion inverse,
à la variété dite à jer de lance. La sélénite y est en assez grande
abondance ; on y a trouvé aussi la variété fibreuse, mais non en
place. Il ne m’est jamais arrivé de rencontrer des fossiles dans cette
roclie , cependant Al . Bianconi assure qu’il y a vu des fragments
de bois ( Storia naturale dei terreni ardenti , § 88).
Un calcaire compacte, cendré ou jaunâtre, se trouve souvent en
petites masses irrégulièrement répandues dans la masse gypseuse ;
quelquefois ces masses prennent la texture porphyritique à cause
des petits cristaux de gypse qu’elles empâtent, et enfin souvent
on en rencontre qui sont complètement passées à l’état de gypse.
Ce calcaire est probablement le même que celui signalé par
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
199
M. Bianconi comme intercalé au milieu des gypses. Le fer sulfuré
et le soufre même se rencontrent à Brisighclla et à Pollenta , enclavés
dans la chaux sulfatée ; nous signalons ici la présence de ces sub-
stances auxquelles nous reviendrons à propos de leur origine pro-
bable.
Ce serait le cas maintenant de se demander quelle est l’origine
de ce gypse et quelle est la place qu’il occupe dans la série des
terrains ; malheureusement , mes observations et mes études sont
trop bornées pour me permettre d’aborder cette question. Je me
bornerai donc à manifester l’opinion que je partage parmi celles
qui ont été émises par les géologues , en l’appuyant par des faits
nouveaux .
Le gypse de notre pays, quoique développé sur une grande
échelle et encaissé au milieu de roches de sédiment non modifiées,
est pourtant, selon notre manière de voir, le produit d’un méta-
morphisme causé par des émanations gazeuses sulfuriques, venant
de l’intérieur et agissant sur de puissantes couches calcaires. Cette
métamorphose peut être suivie , dans toutes ses périodes , sur les
différentes espèces d’échantillons calcaires empâtés dans les gypses ;
d’ailleurs, on peut la voir s’étendre aux couches d’argile qui
reposent sur le gypse dans le territoire de la république de San-
Marino. Cette argile, appelée scagliosa par M. Bianconi, contient
beaucoup de sulfate de chaux dans sa composition, même en cris-
taux isolés, et renferme en outre des pyrites globulaires. Cette ar-
gile , à cause de son contact avec le sulfate de chaux , devait être
elle-même traversée et modifiée par les vapeurs sulfuriques, et
dut lui céder le carbonate de chaux qu’elle contenait , pour qu’il
fût réduit en sulfate. Ainsi s’explique l’abondance du gypse dans
les argiles écailleuses , qui , comme je le disais plus haut , en
renferment de nombreux cristaux.
J’ai observé aux lagoni de Monte-Ccrboli en Toscane, et à la
soif a tara de Pozzuoli , une semblable sulfatation du calcaire, sul-
fatation qui s’opère sous nos yeux et qui peut donner, sur une pe-
tite échelle, une explication des anciens phénomènes métamor-
phiques. Le soufre remplissant les fentes du gypse à Brisighelia ,
Cesenatlco et autres localités, les pyrites qu’on trouve dans l’argile,
sont encore autant de témoins de la présence de l’acide sulfurique,
cause du métamorphisme.
De son côté, la stratification du gypse étant si évidente, qu’on
peut la suivre de Tossignano et Rivola jusqu’à Montc-Mauro sans
changer de couche, prouve évidemment la disposition préexistante
du calcaire originaire. En effet, cette disposition ne pouvait pas
200
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
s’effacer par suite d’un métamorphisme semblable à celui que je
viens de supposer, tout à fait différent du ramollissement igné.
Cette stratification du gypse en couches concordantes avec le grès
(fig, 2) ne semble indiquer qu’une seule formation géologique,
qui serait le miocène. Si M. Bianconi a réellement vu du calcaire
à Fucoïdes au milieu du gypse, il paraît plus logique (en attendant
de nouvelles observations) de faire remonter la présence de ces
fossiles dans le terrain tertiaire, plutôt que de faire descendre dans
l’époque secondaire ceux que nous avons signalés plus haut comme
faisant partie de la formation gypsense.
Quelques observations faites dans les mêmes localités indiquent
un phénomène qui paraît tenir aux mêmes causes que le méta-
morphisme et vient à l’appui de l’opinion manifestée plus haut.
Sur la surface des couches gypseuses, aux environs des hameaux
des Crivellari et de Monte- Mauro , on voit d’abondantes incrusta-
tions siliceuses, formées de quartz concrétionné, à teintes claires,
cendrées, contenant de nombreuses empreintes et des nodules de
Cyclostomes et de Paludines. Je ne m’occuperai pas ici de ce dé-
pôt et des fossiles qu’il contient; ces détails prendront place dans
un mémoire auquel je travaille. Je me bornerai, pour le moment,
à soumettre au jugement des géologues ce qui se rapporte aux
causes de son origine.
Tous les dépôts de ce genre sont dus, comme on sait, à l’action
d’eaux thermales tenant en dissolution de la silice; mais cette
dernière , pour être dissoute en grande abondance, exigeant une
température élevée , il s’ensuit que le dépôt de quartz concré-
tionné des Crivellari doit son origine à des sources chaudes, pro-
venant d’une grande profondeur et jaillissant par des fentes ou des
crevasses communiquant avec l’intérieur de la terre. Ces issues,
percées à travers les couches de gypse, ayant permis récemment
aux eaux thermales de déposer les concrétions siliceuses, ne pour-
raient-elles pas avoir livré autrefois passage aux courants sulfu-
riques qui métamorphosèrent les couches calcaires ? Je suis ici tout
à fait de l’opinion de M. Duroeher, qui voit, dans les sources ther-
males affleurant au milieu du gypse, la dernière manifestation d’un
phénomène de métamorphisme. Mais revenons aux faits.
Au-dessus des couches de gypse vient immédiatement la marne
bleue subapennine (fig. 2) qui , fort riche en fossiles caractéris-
tiques, et disposée en stratification discordante, marque très-bien
sa place dans les terrains de la période pliocène. Je ne répéterai pas
ce qui est connu de tout le monde au sujet de ces marnes ; mais
il y a une circonstance dans son gisement (considéré relativement
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
201
aux gypses) qu’il faut faire connaître, puisqu’elle se lie d’une ma-
nière directe avec le bassin lacustre dont nous avons parlé. La
hauteur atteinte par les marnes bleues qui se déposèrent sur les
couches de gypse déjà soulevées est très considérable, et bien plus
grande que celle du liant du plateau, qu’on voit au delà du gypse.
Cette remarque suffit à elle seule pour faire voir que les gypses ont
été vraiment un obstacle à l’écoulement du Senio , et quelle est
l’époque à laquelle ce même obstacle fut enlevé.
En effet , si l’ouverture dans la bande des gypses de Rivola eût
existé lorsque la mer pliocène déposait les marnes, cette mer même
aurait envahi et recouvert toute l’étendue du plateau élevé qui restait
à un niveau relativement plus bas; elle y aurait, par conséquent,
déposé les mêmes marnes et les mêmes fossiles qu’ailleurs. Mais on
ne voit dans le bassin aucune trace de la permanence de cette mer.
Il faut donc conclure que la mer s’était déjà retirée, et que les
marnes avaient été mises à sec lorsque les eaux du lac se déchar-
gèrent. Cette issue des eaux, qui date d’une époque assez récente,
ne se forma pas, comme on pourrait le croire, tout d’un coup, par
l’action d’une de ces forces énergiques mises en jeu par la volcani-
cité du globe ; il me semble, au contraire, que les observations faites
sur place conduisent plutôt à reconnaître dans la force d’érosion
des eaux la cause plus vraisemblable de cet événement. A la vérité,
quand on regarde la sinuosité affectée par les couches de gypse sur
leurs têtes a a a a (fig. 1), sinuosité due à une forte dégradation,
postérieure au soulèvement des couches, ouest amené à l’attribuer
aux eaux du lac qui, au commencement, s’échappèrent sans doute
avec une grande vitesse, et formèrent dans cette gorge une veine
contractée, capable en conséquence d’une grande force d’érosion.
Une autre circonstance , qui a dû favoriser le plus le travail de
destruction fait par les eaux, consiste dans la nature même de la
roche gypseuse, qui n’est pas compacte ethomogène, mais contient
des substances étrangères, telles que l’argile, le calcaire, etc. Ajou-
tons à tout cela que le gypse repose, comme je l’ai dit ailleurs,
sur des couches d’argile facilement délitable, qui, enlevée peu à
peu par les eaux, laissa sans base les couches gypseuses, qui, dès
lors, durent nécessairement tomber.
On s’aperçoit encore de l’action des eaux par la présence d’une
caverne (fig. 3) ouverte sur la rive droite du Senio , et creusée à
la jonction de deux couches de gypse, à la hauteur à laquelle
durent rester pendant longtemps les eaux du petit lac. Cette ca-
verne, qu’on appelle du Rc Tiberio , et sur laquelle on a débité tant
202
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
de fables, est très vaste et très pittoresque. Elle ne renferme aucun
fossile, et maintenant elle sert uniquement de repaire à des chauves-
souris et à des hiboux.
M. Delesse annonce, de la part de M. de Dechen , que le
Naturhistorische Verein des Rheinlandes und Westphalens
tiendra une assemblée générale, le 10 et le 11 juin prochain,
à Coblentz. Les séances auront lieu dans la salle du collège à
9 heures du matin. Les membres de la Société géologique
seront admis à prendre part aux séances en présentant leur
|iom au Président. Le 10 juin on se réunira au Naturhistorische
Verein du duché de Nassau.
Le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Ley-
merie :
Observations sur quelques terrains de la Provence , par M. A.
Leymerie , professeur de géologie à la Faculté des sciences
de Toulouse.
Toulouse, le I 3 janvier 1851.
Les notions que j’avais puisées chez les géologues qui ont écrit
sur la Provence m’avaient fait penser qu’il devait y avoir entre
les terrains qui constituent ce pays et ceux des Pyrénées de très
grands rapports. J’étais même arrivé en dernier lieu à considérer
au moins une moitié de la chaîne pyrénéenne comme appartenant
au bassin provençal, idée qui, au reste, était venue à l’esprit de
quelques autres géologues. Désireux de vérifier cette vue sur les
lieux et de chercher dans les couches peu modifiées des départe-
ments des Bouches-du-Rhône et de Vaucluse des caractères distinc-
tifs qui pussent me servir à débrouiller certaines parties très
obscures des Pyrénées, j’ai fait, aux vacances dernières, un voyage
dans ces deux départements et dans le Var. Cette partie de la F rance,
grâce aux travaux de MM. Mdtkeron , Rcnaitx, Coquand , etc., est
actuellement bien connue, eX je n’ai pas la prétention d’en traiter
ici d’une manière générale. Mon seul but, dans cette courte note,
est de faire connaître à la Société quelques idées qui me sont ve-
nues en présence de ces terrains, que je ne connaissais jusqu’à
présent que par des descriptions.
La plus importante de ces idées est relative aux couches
tertiaires inférieures à la mollasse. La Société a pu voir par elle-
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851 .
203
même, lors de la réunion extraordinaire qui eut lieu en 18Ù2, à
Aix , combien ces couches sont développées et caractérisées aux
environs de cette ville. Elle a vu qu’immédiatement au-dessous de
la mollasse existe, à Aix même, un étage gypseux très remarquable
par ses fossiles, au sein duquel se trouvent des exploitations impor-
tantes. Cet étage lui-même est superposé à une grande formation
qui a été désignée par M. Matheron, dans son ensemble , par le
nom de terrain a lignite. C’est sur la détermination de ce terrain
surtout que je désire appeler l’attention de la Société.
Je ferai observer d’abord que ce puissant massif se laisserait
diviser très naturellement en deux étages, dont l’un, l’étage supé-
rieur, composé lui-même de plusieurs assises de marnes, le plus
souvent rouges, et de calcaires stériles, serait facile à distinguer par
ses propriétés minéralogiques, par l’absence du lignite et par quel-
ques coquilles terrestres et d’eau douce. Le véritable terrain à li-
gnite qui gît au-dessous, dégagé de ce terrain marno-calcaire,
serait bien plus nettement caractérisé, et le nom que je viens de
rappeler exprimerait alors une propriété réelle et presque constante.
Je soumets, au reste, en passant, cette idée aux géologues du pays.
Dans cette manière devoir, les terrains tertiaires inférieurs delà
Provence offriraient trois étages, savoir :
Le terrain gypseux ;
Le terrain des marnes rouges avec leurs calcaires;
Le terrain à lignite;
chacun de ces étages étant susceptible d’être subdivisé en assises
distinctes.
On sait que le ternie supérieur de la formation crétacée en Pro-
vence est constitué par les calcaires à hippurites (presque iden-
tiques avec ceux des Corbières) . C’est donc au-dessus de ces calcaires
que doivent reposer les couches inférieures du terrain à lignites.
C’est ainsi, en effet, que les choses se passent, et j’ai moi-même
vérifié le fait en deux localités bien connues de la Société, savoir,
à l’auberge delà Pomme, au S. de Fuveau, et en deux points diffé-
rents des Martigues. Le passage, car il n’y a ici aucune transition
brusque, se fait par quelques couches déjcà un peu ligniteuses, où
l’on trouve, ainsi que M. Matheron l’a fait connaître le premier,
un mélange de coquilles marines et de coquilles d’eau douce
jointes à de nombreux foraminifères, parmi lesquels existe une
espèce d ' Alvéoli ne réniforme, assez grosse. On a cité à tort, je crois,
des Nummulitcs dans cette petite assise ; on a pu prendre pour
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
20 Ix
telles les Alvéolines précédentes ou un autre foraniinifère, qui a ia
forme extérieure de Y Orbitolites concava (petite), et qui offre une
disposition intérieure à menus filets concentriques.
La présence de ces couches à foraminifères, qui semblent établir
un passage entre le terrain crétacé et le terrain tertiaire, me fit
penser sérieusement, pour la première fois, à un rapprochement
entre le terrain à lignites de la Provence et le terrain à Numinu-
lites des Pyrénées; je dois dire cependant que cette idée m’était
déjà venue à l’esprit avant mon départ, par la communication que
me fit mon confrère et ami, M. Noulet, d’un fait très intéressant que
je vais faire connaître. 11 s’agit de l’identité bien reconnue, par lui
d’abord, et plus tard par M. Matlieron, qui vint l’an dernier nous
faire une courte visite, entre plusieurs espèces du terrain lacustre
inférieur aux Nummulites de la montagne Noire et des coquilles
qui, d’après M. Matlieron, caractérisent les couches inférieures du
terrain à lignites de la Provence. Sur sept espèces de Montolieuet
de Conques (Aude) que nous possédons, M. Noulet et moi, quatre
se trouvent dans les Bouches-du-Rhône. La grande Physe notam-
ment, qui joue le rôle de fossile caractéristique dans le calcaire
lacustre sous-nummulitique, n’est autre que \& Physa gallo- provin-
ciales (Matlieron). Les autres espèces communes sont : Physa Gar -
donensis (Math.), Physa Michaudii (Math.), et Planorbis pscudo-
rotundatus (Math.). Les trois espèces particulières à la montagne
Noire vont être décrites et publiées par M. Noulet, qui s’occupe
avec un grand soin des fossiles d’eau douce de nos contrées, dont il
possède une riche et intéressante collection.
En possession des deux faits qui viennent d’être signalés, con-
sidérant d’ailleurs l’énorme puissance du terrain à lignite, je
m’habituai peu à peu à regarder ce terrain comme étant parallèle
au terrain à Nummulites de la montagne Noire, et cette idée s’éta-
blit définitivement dans mon esprit lorsqu’à mon retour à Tou-
louse je pus relire dans les comptes rendus de l’Académie des
sciences les notes de M. Gervais sur les ossements fossiles d’Apt
(Vaucluse), parmi lesquels cet habile disciple de M. de Blainville
a reconnu les espèces principales du gypse de Montmartre, à l’ex-
clusion des espèces miocènes du Gers et du Loiret. Les principales
de ces espèces parisiennes qui se rencontrent à Apt, dans un bel
état de conservation, sont :
Palœothcriuni magnum. J A noplo thorium commune.
— crassum. j Xi phodon gracile.
— medium. I
SÉANCE Di 20 JANVIER 185i.
205
Or ce gîte est évidemment une dépendance (je l’ai vu moi-même)
du terrain gypseux d’Apt, qui est identique, incontestablement,
avec celui d’ Aix. Le terrain gypseux de la Provence correspond donc,
ainsi que les géologues provençaux l’ont toujours pensé, au gypse
de Paris, et, par conséquent, le terrain à lignites doit représenter
les couches éocènes les plus inférieures. Bien plus, si l’on a égard
à son développement très considérable et à la grande puissance
du système des marnes rouges qui le sépare du terrain gypseux,
on aurait réellement des raisons pour penser qu’il comprend encore
quelque chose de plus que le terrain éocène de Paris et de Londres,
et que les couches les plus inférieures correspondraient à la lacune
signalée, par M. Elie de Beaumont, entre la craie et l’argile plas-
tique, c’est-à-dire au type intermédiaire méditerranéen que j’ai
appelé épicrétacé.
Le parallélisme que nous admettons entre le terrain à Numinu-
lites et le terrain à lignites est d’ailleurs très facile à expliquer.
En effet, le premier de ces deux terrains disparaît momentané-
ment entre l’Aude et Nice. Or que voyons-nous dans cet intervalle?
Un puissant dépôt lacustre qui se lie, pour ainsi dire, au terrain à
Hippurites par des couches fluvio-marines, où des foraminifères
commençaient à se développer. Dès lors n’est-il pas rationnel
d’admettre l’existence d’un ancien lac d’eau douce, au sein duquel
se faisait le dépôt du terrain à lignites, tandis que, de part et
d’autre, les Nuinmulites et les fossiles marins qui les accompagnent
se déposaient dans la mer.
Ayant reconnu récemment que les gites d’Aurignac, de Man-
cioux et de Saint-Michel (Haute-Garonne) étaient contemporains
de celui de la montagne Noire, l’ascension du Mont-Perdu m’ayant
appris, d’un autre côté, que cette montagne, ainsi que le Cylindre
et le Marboré appartenaient à la même époque ; il en résulte, entre
tous ces terrains et le terrain à lignites de Provence, un rapproche-
ment à coup sûr inattendu, mais qui n’en est pas moins à peu près
certain.
Un mot maintenant sur le terrain crétacé.
Ceux qui n’ont pas vu le calcaire à Chaîna ou à Caprotina en
place se figurent que le fossile que l’on emploie pour le caractériser
est susceptible de s’y montrer en une partie quelconque de son
épaisseur. Il s’en faut qu’il en soit ainsi. Les Caprotines n’existent
que dans une assise supérieure assez mince. En général, la masse
du calcaire en est dépourvue, et la hase de cette puissante forma-
tion se trouve même caractérisée par un autre fossile, qui est le
Sp a tangas refusas .
206
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
Guidé parles excellentes indications de M. Rénaux, qui connaît
si bien le département de Vaucluse et les contrées environnantes,
il m’a été facile de voir moi-même qu’il en est ainsi, à l’aide d’une
magnifique coupe naturelle, qui existe entre Orgon et Roque-Mar-
tine, dans la direction d’Eyguièi es. Le calcaire riche en Caprotines
qui, à Orgon même, offre la consistance de la craie, ne forme
qu’une croûte d’une vingtaine de mètres au-dessus de la formation,
qui offre là une puissance énorme. Presque toute la masse consiste
en une série de couches peu épaisses de calcaires blanchâtres ou
blonds, fréquemment accidentés de bleu et de jaunâtre, ordinai-
rement un peu marneux, où l’on ne voit plus la moindre trace de
Caprotines. Ces calcaires manquent même, en général, de fossiles
quelconques, excepté cependant quelques couches blondes, où l’on
trouve des baguettes de Cidaris et des Térébratules plissées. Tou-
tefois, vers la base de ce puissant massif, existe une assise grisâtre
un peu plus marneuse qu’à l’ordinaire , où abonde le Sp a tangas
retususj accompagné de 1 ’Exogyra subsinuata et d’autres fossiles
marins.
On voit donc que le calcaire à Chanta , tel qu’on se le représente
quand on ne l’a pas vu en place, n’est réellement là qu’une excep-
tion (1). Ce fait, qui est général en Provence, et le grand déve-
loppement du calcaire dont il s’agit, pris dans son ensemble, me
font vivement désirer que les géologues du Midi lui donnent un
nom général, ia dénomination de calcaire à Chaîna devant être
réservée pour la partie supérieure. Je me permettrai même d’indi-
quer le nom de calcaire provençal , à cause du rôle de premier ordre
que joue ce terrain dans la constitution et dans l’orographie de
cette partie de la France. Si cette idée paraissait susceptible d’être
admise, le terrain néocomien du Midi se trouverait divisé ainsi
qu’il suit;
Calcaire à Chama. .........
Calcaire provençal proprement dit. [ Calcaire provençal.
Calcaire à Spatangues J
Couches marneuses à Ancyloceras , Crioceras,
Spatangus retusus , Bélemnites aplaties, etc.
Au-dessus de cette formation reposent, d’une manière on peut
(1) Il en est à peu près de même dans les Pyrénées où le calcaire à
Chama est aussi très développé.
SEANCE DU ‘20 JANVIER i 8 5 J .
207
dire indifférente , et souvent discordante, les argiles aptiennes,
caractérisées principalement par YEæogjra si nu a ta , cpie j’ai re-
trouvée partout ici comme dans l’Aube et dans l’Yonne, et comme
M. Itier l’a vue aussi à la perte du Rhône, à la base de la formation
du grès vert, sous le gault. J’ai vu ces argiles à Apt même, aux
Martigues, à Cassis, et toujours elles commencent un système
nouveau, qui est évidemment le grès vert pris dans son ensemble.
Je rappellerai à cet égard que la découverte intéressante faite
dans l’île de Wiglit, et mise en lumière avec tant de soin par M. le
docteur Fitton, des fossiles néocomiens dans la partie inférieure
du lowcr-greënsand , ne doit aucunement nous faire renoncer à
notre type néocomien, si utile à la géologie de la France. Pour le
bassin de Paris, une concession de cette nature serait fâcheuse sans
doute, cependant on pourrait encore la concevoir jusqu’à un cer-
tain point; mais elle est réellement impossible pour la Provence
et le Comtat, où la séparation est aussi nette et aussi tranchée que
possible.
P. -S. J’ai découvert à Cassis une couche à Ich thyosarcolites , où
ces fossiles sont très abondants. Elle gît entre les argiles inférieures
(aptiennes) des falaises et les grès supérieurs qui correspondent au
terrain d’Ucliaux. Cette couche, très caractérisée, surtout daus le
haut de la colline située au N. -O. de la ville, entre la route de
Marseille et le vallon de la Bédoule, vient affleurer sur le bord
même de la route de la Ciotat, et je ne sais par quelle fatalité elle
a échappé à l’attention si attentive des géologues provençaux.
M. Barrande fait la communication suivante :
Dans la séance du 13 janvier dernier, j’ai eu l’honneur d’ex-
poser à la Société la section idéale du bassin silurien du centre de
la Bohême, et j’ai indiqué les motifs qui m’ont déterminé à divi-
ser la série verticale des formations de ce terrain en huit étages,
savoir : quatre (A, B, C, D) dans la division inférieure, et quatre
(E, F, G, H) dans la division supérieure. En faisant abstraction
des deux étages A et B, formant la base du système immédiate-
ment au-dessus des granités, et composés de roches paraissant
jusqu’ici dépourvues de toute trace organique, chacun des six
autres étages est caractérisé par une faune particulière. Ers diverses
faunes, dans chaque division, sont assez tranchées pour n’offrir
qu’un petit nombre de fossiles communs entre deux étages consé-
cutifs. Il arrive même, dans la division inférieure, qu’aucune
espèce de l’étage fossilifère C ne passe dans l’étage superposé D, et
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
-08
à peine trouve-t-on un seul genre de Trilobites représenté à la
fois dans l’un et l’autre. Ce contraste , absolu sous le rapport pa-
léontologique , s’explique aisément par un grand déversement de
porphyres, qui a dû anéantir d’un seul coup toute la faune de
l’étage C. Cette faune , que je nomme primordiale pour la bohème,
se compose presque exclusivement de Trilobites, tels que Para -
eloxidesy SaOy Ellipsocephalus , Conocepltalus , etc., parmi lesquels
se trouvent deux Cyslidées et une Ort/iis. Les Trilobites de cet
âge se distinguent de ceux qui caractérisent les étages superposés
par le grand développement relatif du thorax et l’exiguïté du
pygidium.
Il est à remarquer encore qu’en bohème les schistes renfermant
les débris de la faune primordiale sont séparés des couches fossili-
fères de l’étage superposé D par une masse de porphyres et de
roches métamorphiques d’une puissance de 1000 à 2000 mètres,
ce qui suppose une longue période de temps entre les deux appa-
ritions les plus anciennes de la vie animale dans cette région.
Ces diverses circonstances m’ont conduit à rechercher si l’ordre
de succession des premiers êtres, si apparent dans le bassin silu-
rien que je décris, se retrouve dans les autres contrées du même
âge.
J’ai déjà fait remarquer à la Société, en janvier dernier, que
les faunes de mes étages C et D sont représentées en Scandinavie
et en Angleterre. La faune primordiale est jusqu ;ici inconnue dans
la division silurienne inférieure de Russie , de France , d’Irlande,
et de l’Amérique septentrionale.
En ce qui touche la Scandinavie, divers savants, parmi les-
quels nous citerons Hisinger , sir Roderick Murchison, et notre
ami de Verneuil , nous ont appris que les schistes alunifères ren-
fermant les Paradoxides et Ole-nus ^ représentants de la faune pri-
mordiale, forment la base des formations fossilifères de cette ré-
gion. Nous ignorons encore s’il existe là, comme en bohème,
une séparation sensible entre les êtres primordiaux et la faune
seconde , composée , comme dans toutes les contrées siluriennes,
de Trinucleus, Ampyx , Asaphus , Illœnus , etc., etc., caractérisant
mon étage des quartzites D. Cette question reste % résoudre ; mais
le contact des deux faunes dans la Scandinavie , lors même qu’il
serait un jour bien constaté, n’infirmerait pas les résultats des ob-
servations faites en bohème , et de celles que j’ai à vous exposer
sur l’Angleterre.
Durant le séjour que je viens de faire à Londres, sir Henry de
la bêche, directeur du Géologie al Siurey, MM . Salter, beete-Jukes,
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
209
et le professeur Ramsay, attachés à cette savante institution , ont
eu la complaisance de me communiquer tous les documents à leur
disposition, et relatifs à l’objet de mes recherches. A l’aide de ces
documents officiels, j’ai été assez heureux pour constater qu’en
Angleterre les faunes siluriennes les plus anciennes se succèdent
dans le même ordre qu’en Bohême. Cet ordre se retrouve, en effet,
dans deux régions géographiquement isolées dans la contrée clas-
sique silurienne, savoir : le pays de Galles et les collines de
Malvern.
1° Le pays de Galles, successivement exploré par sir Roderick
Murchison, le professeur Sedgwick, Daniel Sharpe, Beete-Jukes,
Selwyn, et le professeur Rainsay, présente un grand développe-
ment des formations de la division silurienne inférieure. Ces for-
mations sont dans un grand désordre apparent , à cause des boule-
versements réitérés qui ont eu heu dans cette région, en connexion
avec l’introduction d’immenses masses plutoniques. Une longue
étude des localités, combinée avec des mesures géodésiques pré-
cises, et la découverte d’une sorte de système de failles gigantes-
ques et de couches très reconnaissables servant d’horizons de re-
pères, ont récemment fait disparaître toutes les irrégularités qui
avaient d’abord embarrassé les observateurs. L’ordre de superpo -
sition et la puissance de toutes les formations ont été constatés de
la manière la plus satisfaisante par les géologues du gouvernement.
Pour l’objet qui m’occupe , il suffira de mettre sous les yeux de
la Société le profil idéal résumant les documents qui m’ont été
communiqués. Le voici :
Soc. aèol
2e série , toms VIII
I i
aux otages az"tques
2iü
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851
Division silurienne
r supérieure
Division silurienne inférieure du pays c e a c . (>n discordance.
SÉANCE DU 20 JANVIER 1851.
214
La division inférieure repose sur une base azoïque consistant
dans les grès de Barmouth et de Harlech , jusqu’ici sans fossiles.
Sur ces grès repose le groupe trappéen , composé de schistes en
partie fossilifères, entre lesquels se trouvent des masses beaucoup
plus puissantes de trapps et de porphyres, soit contemporains,
soit d’un âge postérieur. Des couches (A) de schistes noirs de ce
groupe trappéen, reposant immédiatement sur les grès de Bar-
mouth , ont été depuis longtemps signalées par le professeur
Sedgwick comme contenant des Lingules, alors considérées
comme les seuls fossiles primordiaux de cette région. Ces bancs
à Lingules, souvent cités sous le nom de Lin gala becls , ont été
rapprochés avec plus ou moins de raison des grès à Obolus de
Russie , et aussi des grès de Potsdam en Amérique.
Le fait important au point de vue de mes recherches, le fait
qui n’avait point été mis en lumière jusqu’à ce jour, c’est que les
couches à Lingules du pays de Galles sont précisément celles dans
lesquelles ont été découverts les Olenus , durant ces dernières an-
nées. Les Paradoxides ont été trouvés dans des schistes un peu plus
élevés du même groupe , avec quelques traces indéterminables de
Graptolites. Ce sont jusqu’ici les seuls fossiles connus du groupe
trappéen , sauf quelques fragments douteux rapportés provisoire-
ment au genre Eurypterus. Les restes des Olenus et Paradoxides
sont, au contraire, très bien caractérisés. Ils représentent ici la
faune primordiale de Bohème dans son véritable horizon géolo-
gique , c’est-à-dire immédiatement au-dessus des masses azoïques.
Iis sont aussi , comme en Bohême , sans contact et sans mélange
avec la faune seconde , qui apparaît au-dessus du groupe trappéen
dans le groupe de Bala ou Llandeilo , et se propage en remontant
dans les grès de Caradoc. Cette faune seconde représente , dans
toute cette série verticale, la faune de mon étage des quartzitesD.
On peut remarquer , en passant , que toutes les formations, à
partir des grès de Barmouth, sont concordantes entre elles,
jusqu’aux grès de Caradoc , offrant une discordance prononcée. Ce
fait, probablement local, n’a pas été observé dans les formations
correspondantes de Bohème. 11 en est de même de la discordance
que montre le profil idéal ci-dessus, entre la division silurienne
supérieure et les mêmes grès de Caradoc.
2° La région silurienne des collines de Malvern a été d’abord
décrite par sir Roderick Murchison , et depuis lors elle a été étu-
diée de nouveau par les géologues du gouvernement. Dans le se-
cond volume des Mémoires du Geological Survey , le professeur
Phillips en a donné une coupe , montrant l’ordre de superposition
SÉANCE DU 'à FÉVRIER 1851.
212
des formations appartenant aux deux divisions. On y voit, à la
base, des grès sans fossiles , sur lesquels reposent des schistes noirs
caractérisés par plusieurs espèces d ' Olerius, seuls représentants de
la vie à cette époque. Ces schistes sont recouverts par des masses
trappéennes, au-dessus desquelles se trouvent immédiatement des
roches considérées comme constituant le groupe de Caradoc. Les
diverses formations de la division supérieure se succèdent ensuite
dans leur série verticale accoutumée.
Il est aisé de reconnaître, dans ce profil, le meme ordre que je
viens de signaler dans le pays de Galles. D’après la nature des
roches, les grès azoïques des collines de Malvern correspondent
aux grès de Barmoutli et de Harlecli , et, comme ces derniers, ils
servent de base à un groupe trappéen, avec schistes noirs inter-
calés. Cet ordre stratigraphique est en parfaite harmonie avec la
présence des Ole nus dans les schistes recouvrant les grès azoïques.
Malheureusement la faune seconde n’est pas représentée dans cette
coupe , où le groupe de Llandeilo ne se trouve pas, par suite, sans
doute, de circonstances locales. Tous les autres étages du système
silurien étant en place et dans l'ordre classique , le manque de l’un
d’eux ne saurait empêcher de reconnaître la concordance de cette
coupe avec celle du pays de Galles et avec la section idéale du
bassin silurien de la Bohême.
En résumé, l'Angleterre nous offre deux contrées siluriennes,
géographiquement isolées, dans lesquelles la faune primordiale de
Bohême est représentée dans une position géologique exactement
semblable, c’est-à-dire occupant l’horizon le plus bas où l’on ait
bien constaté jusqu’ici l’existence de restes organiques. Cette faune,
presque totalement composée de Trilobites dans toutes les régions
où elle est connue, renferme cependant presque partout quelque
représentant de la classe des Brachiopodes, comme une Orthis en
Bohême, et une Unguia dans le pays de Galles, en Angleterre.
Séance du 3 février 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le Président annonce ensuite une présentation.
SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1351.
r 3
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa-
vants , janvier 1851.
De la part de M. Éd. Collomb, E \ie du Mont-Blanc et
du col du Géant , 1 feuille colombier. Paris, 1851.
De la part de M. Francis de Castelnau , Expédition dans
les parties centrales de U Amérique du Sud, exécutée par ordre
du gouvernement français , pendant les années 18A3 à 18/17,
sous la direction de M. Francis de Castelnau , IIIe vol., in -8,
Zï8Zi p. Paris, 1851, chez P. Bertrand.
Comptes rendus des séances de r Académie des sciences ,
1851 , 1er sem., t. XXXII, nos 3 et A.
U Institut, 1851, nos 890 et 891.
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, n° 28, 3e année,
déc. 1850.
The Athenœum , 1851, nos 1213 et 121/1.
M. le Président donne lecture de la lettre suivante de M. le
ministre de l’instruction publique.
Paris, le 18 janvier 1851.
Monsieur le président, j’ai Plionneur de vous informer que,
par un arrêté en date de ce jour, j’ai décidé que l’allocation de
mille francs, qui a été allouée à titre de subvention, en 1850, à la
Société géologique de France , lui serait continuée en 1851 , pour
aider à la publication de X Histoire des progrès de la géologie , par
31. d’Archiac.
Je regrette vivement que la situation du crédit alloué en 1851,
pour encouragements aux Sociétés savantes, ne me permette pas
de satisfaire au vœu que vous exprimez dans votre lettre du
15 décembre dernier, de porter à 2,000 fr., comme en 18^7, la
somme que je mets aujourd’hui à votre disposition ; les réductions
opérées sur ce crédit rendent toute augmentation impossible.
Vous voudrez bien, monsieur le président, faire déposer comme
par le passé, dans les bureaux de mon ministère, les dix exem-
plaires du nouveau volume qui aura été publié de l’ouvrage de
31. d’Arch iac.
21 li SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1851.
Agréez , monsieur le président , l’assurance de ma considération
très distinguée.
Le ministre de V instruction publique et des cultes ,
Em. Parieu.
M. Michelin fait hommage à la Société de deux échantillons
de chaux carbonatée provenant de Fonds, près Ghalonnes
(Maine-et-Loire).
M. Walferdin donne lecture de la note suivante :
Sur la mesure des plus grandes profondeurs de la mer et sur
leur température. Nouvel hydrobaromètre , par M. H. Wal-
ferdin.
Des expériences rigoureuses et souvent répétées (1) ont prouvé :
D’une part , que le moyen le plus sûr de garantir des effets de
la pression les instruments thermométriques destinés à indiquer
la température à de grandes profondeurs consistait à les renfer-
mer, ainsi que je l’ai fait, dans des tubes de verre d’épaisseur pro-
portionnée à la pression qu’ils ont à supporter, et convenablement
scellés à la lampe d’érnailleur ;
D’autre part, que mes thermomètres à déversement étaient à
l’abri de toute cause d’erreurs autres que celles qui peuvent pro-
venir des effets de la pression ; et ils en sont complètement ga-
rantis par le procédé que je viens d’indiquer.
Après avoir obtenu ce double résultat, je me suis occupé de la
recherche de moyens d’une application facile, qui pussent indi-
quer avec certitude les plus grandes profondeurs de la mer, quelle
que soit la déviation qu’éprouve la ligne de sonde dans ces sortes
d’expériences.
C’est en soumettant un de mes appareils à déversoir directe-
ment à la pression, au lieu de l’en garantir, que je le rends propre
à donner la mesure de celle qui est exercée par la colonne d’eau
qu’il doit supporter, et, par conséquent , de la profondeur à la-
quelle il est mis en expérience.
_ ■
(1) Notamment, pour mes thermomètres à minima , par MM. Bra-
vais, Martins et Lottin, dans l’expédition du Nord ; et, pour mes ther-
momètres à maxima , par M. Arago et moi , dans les observations que
nous avons faites au puits de Grenelle, avant le jaillissement de la
nappe souterraine.
SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1851.
215
Pour bien faire comprendre l’application de cet appareil au cas
dont il s’agit, je crois devoir rappeler une expérience que j’ai
signalée depuis longtemps dans un mémoire où j’ai examiné les
causes d’erreur qui peuvent entacher les observations thermomé-
triques faites sous de fortes pressions, suivant la nature des instru-
ments employés (1).
Si l’on prend un thermomètre ordinaire à mercure dont la cu-
vette , de 5 à 6 millimètres de diamètre , ait été soufflée sur la tige
et non rapportée, et si l’on place cette cuvette entre le pouce et
l’index de manière à la couvrir, elle ne tarde pas à se mettre en
équilibre avec la température qui lui est ainsi communiquée, et
le niveau du mercure se maintient dans la tige à une hauteur
correspondante à cette température. Mais la comprime-t-on en-
suite en la pressant avec les doigts seulement, on voit alors le
mercure s’élever sensiblement dans la tige lorsque cette dernière
est suffisamment capillaire.
L’ascension du mercure dans la tige ne provient plus, dans ce
cas, d’un accroissement de température, mais de la pression
exercée sur les parois de la cuvette , et l’on fait ainsi descendre
ou monter le mercure à volonté, suivant que l’on com; rime ou
que l’on cesse de presser la cuvette de l’instrument.
Au lieu de se servir d’un thermomètre ordinaire, emploie-t-on,
pour la même expérience, un de mes thermomètres à maxima à
déversement, rempli de mercure jusqu’à l’extrémité de la pointe,
il est évident que le mercure qui, dans le thermomètre ordinaire,
montait dans la tige sous l'effet de la pression, va, dans le thermo-
mètre à maxima , se déverser par la pointe; que le déversement
aura lieu dès que la pression commencera, et qu’il continuera tant
qu’elle s’accroîtra. Quand elle diminuera, au contraire, le mercure
descendra dans la tige, ayant de moins qu’au point de départ ce
que le maximum de la pression a fait déverser.
C’est exactement ce qui se passe, lorsque, dans une observation
sous-marine, l’instrument est librement exposé à la pression de la
colonne liquide qu’il doit traverser, et lorsqu’il revient à la sur-
face.
La méthode , pour apprécier le résultat aiusi obtenu, est des
plus faciles à appliquer à bord d’un navire. Si, avant l’expérience,
l’instrument a été rempli de mercure jusqu’à la pointe, à la tem-
pérature de la surface de la mer, il suffit, après l’expérience, de le
(1) Bulletin de la Société géologique, t. XI, 1839.
216
SÉANCE DU 3 FÉVRIER 1851.
replacer à la même température, pour lire sur l’échelle de la tige,
par la quantité de mercure manquant, l’indication de la pression
exercée.
Il ne faut pas perdre de vue que , dans les expériences sous-
marines, on n’a généralement à observer que des abaissements de
température, et que c’est le thermomètre à minima qui a pour but
de les indiquer spécialement. Ainsi , le thermomètre à maxima ne
fonctionne plus ici comme tel , mais seulement comme instrument
barométrique donnant la mesure de la pression qu’il a subie.
On voit que l’effet qui se produit en petit et sous un effort peu
considérable, pour le thermomètre ordinaire, dans l’exemple que
j’ai cité en premier lieu, se reproduit en grand , pour le thermo-
mètre à maxima à déversoir, lorsqu’il est exposé à une forte pres-
sion ; on voit également que cet effet est dû à l’élasticité du verre
dont la cuvette de l’instrument est formée.
Le verre, en raison de son élasticité, obéit d’autant plus sûre-
ment à la compression, que, sous l’eau, celle-ci s’exerce successi-
vement et dans tous les sens. La cuvette se comprime, se déforme
lentement; sa capacité se trouvant ainsi diminuée, le liquide se
déplace, et le déversement a lieu sans que l’instrument se brise ,
comme on le croit ordinairement : quelque énorme que soit la
pression exercée par la colonne d’eau , si l’appareil a été convena-
blement construit, il est à l’abri de toute rupture tant qu’il y a
déversement.
11 n’en serait pas de même du thermomètre ordinaire, fermé
sans espace vide dans sa partie supérieure ; une fois que le mer-
cure y serait parvenu, la cuvette se romprait infailliblement,
quelle que fût l’élasticité du verre.
Il est à remarquer, en outre, que lorsque l’instrument revient
à la surface , la pression diminuant graduellement, la cuvette re-
prend exactement la forme qu’elle avait d’abord.
Ces faits m’ont été démontrés par une suite d’expériences ré-
pétées sous différentes pressions. Je citerai, entre autres, l’obser-
vation faite le 18 août 1840, à Grenelle, par M. Arago et moi.
« Six thermomètres à maxima à déversement, garantis de la
» pression , avaient été placés à 505 mètres de profondeur, et ils
» ont indiqué , avec un accord remarquable , une température
» moyenne de 26°, 43. » ( Comptes rendus des séances de V Académie
des sciences , tome XI, page 707.)
Mais un septième instrument avait été en même temps mis en
expérience sans être à l’abri de la pression, et au lieu de 26°, 43, il
a indiqué 39°, 50.
SÉANCE DU 3 FÉVR1IR 1851.
217
La pression exercée par 50,5 atmosphères avait ainsi occasionné
un surcroît de déversement égal à la valeur de 13°, 07, c’est-à-dire,
pour l’échelle arbitraire de l’instrument dont il s’agit, à un nom-
bre de divisions correspondant, en moyenne, à plus d’un quart de
degré par atmosphère.
Il résulte de ce qui précède que , pour les observations sous-
marines, le thermomètre à minirna à déversement, garanti delà
pression , donne rigoureusement l’indication de la température à
toute profondeur, et que le thermomètre à maxima, ou du moins
un instrument construit d’après le même principe et disposé de
manière que la cuvette soit soumise directement à la pression,
rapporte la mesure de la profondeur à laquelle les deux instru-
ments ont été mis en expérience : quelle qu’ait pu être la déviation
de la ligne de sonde , le dernier instrument n’indique jamais que
la pesanteur de la colonne d’eau qu’il a supportée , c’est-à-dire la
profondeur réelle à laquelle il est parvenu.
J’ajouterai toutefois que, lorsque le résultat est constaté , il y a
à faire, pour l’instrument à mcixima ainsi employé, une correction
en plus facile à calculer d’après le décroissement de température
qu’a indiqué le thermomètre à mi ni ma garanti des effets de pression .
J’ai pris le thermomètre à maxima à déversoir comme type de
l’instrument que je propose d’employer pour déterminer les plus
grandes profondeurs de la mer, parce que , la théorie de sa marche
et de sa construction étant bien connue maintenant, il m’a paru
faire concevoir assez nettement l’application du principe dont je
me sers pour la mesure des pressions sous-marines.
Ramené à une moins grande marche que le thermomètre à
maxima , qui peut, comme on sait, donner facilement, à la lecture
directe, des centièmes de degré ; légèrement modifié dans sa partie
supérieure et établi dans des proportions en rapport avec sa nou-
velle destination , cet instrument n’est évidemment plus un ther-
momètre à maxima ; il n’a de commun avec ce dernier que le
principe du déversement, et, sa cuvette étant convenablement
construite, il peut supporter, sans se briser, plusieurs centaines
d’atmosphères.
C’est un instrument entièrement nouveau , un hydrobaromètre
qui indique de lui-même, sans rouage et sans appareil emprunté à
la mécanique, les profondeurs dans l’intérieur de la mer, par la
mesure directe de l’augmentation de la pression , comme le baro-
mètre nous indique , par la diminution de la pression , les hau-
teurs à la surface du sol et dans notre atmosphère.
218
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
Séance du il février 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite de la présentation faite dans la dernière séance, le
Président proclame membre de la Société :
M. Zienkowicz (Victor- Augustin) , ingénieur civil , à Pagny-
sur-Meuse, par Void (Meuse), présenté par MM. Élie de
Beaumont et Dufrénoy.
Le Président annonce ensuite une présentation.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1 851 , 1er sem., t. XXXII , nos 5 et 6.
L’Institut , 1851 , nos 892 et 893.
Bulletin de la Société de géographie, 3e série, t. XIV, n° 81,
déc. 1850.
The Athenœmn , 1851 , n«s 1215 et 1216.
Neues Jahrbuch , etc. (Nouvel annuaire de minéralogie, de
géognosie et de géologie, de MM. de Léonhard et Bronn);
année 1850, 7e cah.; année 1851 , 1er cah.
De la part de l’Institut Smithsonien , Smithsonian contribu-
tions , etc. (Documents Smithsoniens pour la science, vol. Ier.
— Anciens monuments de la vallée du Mississipi) , par MM. E.
G. Squier et E. H. Davis ^ in-1, 306 p., 50 pl. et 207 fig.
dans le texte-, publié par l’Institut Smithsonien. Washington,
1818.
— Reports , etc. (Comptes rendus de l’Institut Smithsonien ,
relatant ses plans, ses opérations et sa situation financière,
jusqu’au 1er janvier 1819) • in -8 , 72 p. Washington, 1819.
M. Michelin demande si M. d’Archiac a des preuves que
Y Ananchytes tubcrculaia s’est trouvée dans le terrain nummu-
litique, attendu que l’extrait qui précède ses tableaux, dans le
IIIe vol. de Y Histoire des progrès de la géologie , n’en fait
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
*219
pas mention. — M. d’Àrchiac renvoie à la page 1Ù7 de
MM. Agassiz et Desor, où il a pris cette indication.
Le secrétaire communique la lettre suivante de M. Gharrel.
Vouziers , 1 7 janvier 1851,
J’ai l’honneur d’informer la Société géologique de France que
je viens de découvrir, à 1 kilomètre de Vouziers, dans une terre
d’où l’on extrait de l’argile à faire des briques, et que je possède ,
des débris d’éléphant fossile ; ces débris consistent en beaucoup de
fragments, un os complet, et des restes d’ivoire.
Voici la description du terrain dans lequel l’animal était en-
seveli.
D’abord, à la base on trouve un calcaire argileux ; ce calcaire
renferme des Encrines et des Astartes , que l’on peut considérer
comme des marnes à l’état solide, affectant la forme propre à la
grande oolithe. Ce calcaire a été brisé par l’effet d’un soulèvement
(très probablement celui qui, relevant le bassin de la mer juras-
sique, a rejeté les eaux de celle-ci dans l’Océan).
Au-dessus de ce calcaire argileux, existe un lit d’argile d’une
épaisseur de 25 centimètres au plus, qui est lui-même suivi d’une
couche de même hauteur, composée de sable, de pyrite de fer et
d’une matière verte en très petits grains.
Au milieu , on trouve des débris très pulvérisés de coquillages
entre lesquels j’ai pu reconnaître des fragments de Térébratules,
d’Huîtres carénées, de Baculites, etc. , beaucoup de petits fragments
de bois pétrifié, plusieurs dents (genre Squale) et jusqu’à un frag-
ment du palais d’un poisson.
Enfin, à cette couche succède un lit d’argile d’un blanc tirant
sur le jaune, d’une hauteur qui varie entre 10 et 30 centimètres et
dans laquelle étaient couchés les restes de l’éléphant.
A cette hauteur, les débris marins ont cessé et ont été remplacés
par des quantités considérables de petites coquilles fluviatiles ap-
partenant à deux espèces, dont l’une ressemble à laPlanorbe ter-
restre, et l’autre au genre Hélice.
Le secrétaire communique la lettre et les documents suivants,
qui sont adressés par M. de Caumont, au nom de l’Institut
historique des provinces.
Nous avons l’honneur S’adresser à la Société géologique de
France plusieurs exemplaires du programme des questions qui
220
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851,
seront discutées au sein du Congrès; nous serions heureux de voir
les membres de la Société géologique prendre part à ces discussions,
et poser, s’ils le croyaient utile , d’autres questions géologiques à
résoudre.
Je suis très flatté d’être, dans cette circonstance, l’interprète du
bureau du Congrès des délégués, et j’ai l’honneur d’être avec une
considération distinguée , etc. A. de Caumont.
M. Viquesnel lit le rapport suivant sur la gestion de M. le
trésorier en J 850.
Compte des recettes et des dépenses effectuées pendant
Vannée 1850 pour la Société géologique de France ,
présenté parM. Ed. de Brimont, trésorier.
RECETTE.
DÉSIGNATION
des
chapitres de la recette.
Jl. Produits ordinaires
des réceptions. .
§ 2. Produits extraord.
des réceptions. .
|3. Produits des publi I
cations <
i Recettes diverses. . <
§ 5. Solde du compte
précédent
NATURE DES RECETTES.
16
I Droits d’entrée et de diplôme. . . .
i ( de l’année courante. .
! Cotisations < dcsannéesprccédentes.
) ( anticipée*
| Cotisations une fois payée»
, de Bulletins
\ de Mémoires
• Vente de cartes coloriées. . . . .
I de l’Histoire des progrès de
[ la géologie
. . , t Renies >ur l’Etat, 5 o/°.
Arrerages de | jj 3 /°
Allocation de M. le ministre de l’in-
struction publique
Recettes imprévues
Remboursement de frais de mandats.
Recettes extraordinaires relatives au
Bulletin.
Reliquat
1849.
Totaux des recettes. . . .
en caisse au SI décembre
prétues
au budget.
440
8.f>00
2,000
300
300
600
800
20
1,000
1,557
32
1,000
100
25
16,724 »
667 05
Totaux de la recette et du reliquat rn
caisse 17,391 05
RECETTES
effectuées.
500 »
7,985 >
3,930 .
270 70
1,200 .
750 »
1,040 »
28 »
938 50
1,585 »
32 >
1,000 »
93 »
14 70
37 50
19,404 40
667 05
20,071 45
60
1,930
900
150
240
8
28
3,316
515
*
29
61
30
7
10 30
12 50
633 60
COMPARAISON.
La Recette présumée était de. 17,091 o5
La Recette effectuée est de 20,071 4$
]! y a augmentation de Recette de- , , , ...... a. 680 4o
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1861.
221
DÉPENSE.
oiPEXJE»
prévue*
•u budget
OÉPEHSE*
effectuée».
B
*
G
S
90
S
<
Diminution.
1,800
•
1,800
■
9
A
»
•
300
>
SOO
•
9
»
A
A
800
A
800
■
9
g
A
A
ICO
»
100
»
9
9
g
A
1 ,250
•
1,292
90
42
90
A
A
450
g
462
60
12
60
•
»
200
9
255
95
55
95
t
A
200
9
165
35
■
%
34
65
150
9
170
»
20
9
A
A
150
9
67
»
»
9
83
A
200
A
164
t
1
9
S6
A
(300
a
397
20
•
9
202
80
60
■
•
»
»
9
50
A
5,000
B
6.147
55
1,147
55
A
A
B
920
70
t
A
279
30
2,600
B
2,472
80
A
A
127
20
1.500
•
1,500
■
•
1
•
A
100
B
•
»
9
1
100
A
25
•
Si
35
7
35
D
A
450
•
1.247
90
*797
90
>
A
100
#
15
50
A
A
84
50
1 17,225
1
•
18,311
80
2,08'»
25
997
45
DÉSIGNATION
de»
chapitre» de ta dépense.
$1. Personnel
§2. Frai» de logeaient.
§ 5. Frai» de bureau. .
$ 4. Encaissement». . . J
S 5. Matériel
§6. Publication»
§7. Placement de capi-
taux
$8. Dépense» imprév..
NATURE DES DÉPENSES.
. ( son traitement
” | travaux auxiliaires. . .
Garçon de bureau ! *es ‘
^ I gratification
Loyer, contribution», assutances.
Chauffage, éclairage
Dépense» diverse»
Port» de lettre»
Impressions d'avis, circulaire» , .
Change et retour de mandats . .
Mobilier
Bibliothèque
Collection»
„ .. .. t texte et planches. . .
bulletin ( . r
♦ port
Histoire des progrès de la péolog
! achat d’exemplaires,
dépense* supplémentaire
coloriage de cartel
Achat de Rente» sur l'Etat. . ,
Avances remboursable». . . .
COMPARAISON.
La Dépense présumée élait de.. 17,226 »
La Dépense effectuée est de i8,3n 80
Il y a augmentation de Dépense de 1,086 80
— sa . aaa
RÉSULTAT GÉNÉRAL ET SITUATION AU 31 DÉCEMBRE 1850.
La Recette totale étant de 20,071 l\b
Et la Dépense totale étant de i8,3n 80
11 reste en caisse audit jour 1,769 65
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
MOUVEMENT DES COTISATIONS UNE FOIS PAYÉES ET DES PLACE-
MENTS DE CAPITAUX.
Recette
(antérieurement à i85o.
pendant l’année i85o....
Totaux. . . .
Legs Roberton.
PLACEMENTS EN RENTES.
>67 fr. de renies 5 0/0 acquise
lérieureinent à i85o. . . 36,591
3a fr. de rentes 3 0/0 achetées
pendant l’année 1848
(conversion d’un bon du
Trésor) 4pb
28 fr. de renies 5 0/0 acquises
pendant l'année i85o.. 1,247
NOMBRE
(DES COTISATIONS.
|
VALEURS
fr.
e.
8a
24j6oO
»>
* 1
1,200
w
86
a5, 800
»
12,600
»
fr. C. i
1
i 38,4oo
!
;
1
))
80
38,334 70
9°
1,617 fr. de rentes. — Excédant de la recette sur
la dépense
65 5o
MOUVEMENT DES ENTRÉES ET DES SORTIES DES MEMBRES
PENDANT L’ANNÉE 4 850.
Au 34 décembre 4 849, les membres maintenus sur les
listes officielles comme devant contribuer aux dépenses de
4 850 s’élevaient au nombre de 499, dont :
424 membres payant cotisation annuelle Y .
78 membres à vie j
Les réceptions, du Ier janvier au 34 décembre 4 850
sont montées à
En plus, 4 membres à vie
Total. . .
A déduire pour cause de décès, démissions, etc. . . .
Le nombre des membres inscrits sur les registres au
4*r janvier 4 854 , s’élève à. .............. . 503
499
28
534
28
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851. 223
Rapport sur la gestion du trésorier pendant l’année 1850.
Messieurs ,
La commission nommée par le Conseil pour la vérification
des comptes du trésorier, et composée, comme l’année der-
nière, de MM. Damour, Hébert et moi, m’a chargé de vous
présenter le résultat de ses investigations.
Nous sommes heureux de vous annoncer que les recettes se
sont élevées à peu prés au chiffre qu’elles atteignaient antérieu-
rement à 1848. Cependant, si l’on compare entre eux les élé-
ments qui composent les recettes de plusieurs années, on re-
connaît qu’il nous reste encore quelques efforts à faire pour
remonter à l’ancien niveau de notre prospérité. Le tableau sui-
vant va nous servir à vous démontrer cette assertion.
1
! 1
2.
3.
4.
1
i
!
6‘ i
7.
8.
9-
Exercices.
Recettes annuelles
non compris
le reliquat en caisse
de l’exercice précédent.
Recettes annuelles
modifiées.
Cotisations
de l’année courante,
et anticipées (1).
Cotisations arriérées.
Nombres des membres.
Nombres des cotisations
une fois payées.
Rentes
sur
l'État.
Noms
des
Trésoriers.
1843
1
21,124 75
18,725
»
9,652 »
2 425 »
414
40-
995 »
Viquesnel.
1844
20,131 95
15,525
))
9,469 75
985 •
434
56
1,147 »
Id.
1845
19,558 65
15,950
»
10,772 90
958 »
475
68
1,345 »
Id,
l1846
17,674 95
15,575
»
10,284 »
757 »
501
75
; 1,484 »
Damour.
1847
20,141 »
16,475
»
10,410 »
1,080 »
522
80
1,531 50
Id.
1848
12,594 80
1 1 ,225
»
7,340 «
990 »
496
80
j 1 ,557 »
Id.
1849
16,943 75
15,850
»
7,620 »>
2,274 90
499
82
1,605 »
|
de Brimont.
! 1850
19,404 40
16,275
D
8,285 »
5,950 »
503
86
1,617 »
Id.
(1) Les chiffres portés dans la 4e colonne se composent de deux élé-
ments pris dans deux exercices différents. Par exemple, la somme
de 8,285 relative à l’année 1 850 se compose : 1° des cotisations de
l’année courante, soit 7,985; 2° des cotisations applicables à 1850,
mais payées en 1 849 , soit 300.
SÉANCE BU 17 FÉYR1ER 1851.
: m
RECETTE.
La recette présumée, non compris un reliquat en caisse de
667 fr. 05 c., a été portée au budget pour une somme de
16,724 fr. La recette effectuée s’est élevée à 19,404 fr. 40 c.
Elle présente donc, sur les prévisions, une augmentation de
2,680 fr. 40 c.
Les recettes totales annuelles contenues dans la deuxième
colonne du tableau ci-dessus ne peuvent conduire à aucune
appréciation rationnelle. Elles ont besoin de subir des modifi-
cations pour devenir comparables entre elles. En effet, ces
résultats généraux comprennent :
1° Les cotisations une fois payées qui sont immédiatement
placées en rentes sur l’Etat, et dont l’importance est très va-
riable. Elles n’ont rien produit en 1848, tandis quelles sont
montées quelquefois à 2,100 fr., 3,600 fr., et même ix 4,800 fr.
2° L’allocation que le ministère de l’instruction publique
nous a payée chaque année, depuis 1847, pour contribuer aux
frais de notre publication de Y Histoire des progrès de la géo -
logie.
3° Le produit de la vente de l’ouvrage précité, qui a com-
mencé à figurer dans la recette à partir de 1847.
En supprimant des recettes totales annuelles les trois arti-
cles que nous venons de citer, on arrive en chiffres ronds aux
résultats consignés dans la troisième colonne du tableau. La
somme trouvée par ce moyen est de J 0,275 fr. pour l’exercice
de 1850. Elle dépasse les chiffres des années précédentes, â
l’exception toutefois des années 1843 et 1847.
Sans doute , un tel résultat est très satisfaisant -, mais nous
vous faisons observer que nous le devons à une rentrée consi-
dérable de cotisations arriérées, et sur laquelle nous ne devons
pas compter à l’avenir. La cinquième colonne du tableau dé-
montre que de 1844 à 1847 les cotisations arriérées ont pro-
duit une recette annuelle ordinairement inférieure à 1,000 fr.,
tandis qu’en 1850 elles ont fourni une somme quatre fois plus
forte.
La quatrième colonne du tableau ci-dessus, contenant les
cotisations de l’année courante, donne, à notre avis, une échelle
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851 .
225
exacte qui permet de mesurer le degré de prospérité de la
Société. C’est seulement lorsque cet article de recette aura re-
pris son ancien niveau que nous pourrons affirmer que nous
avons regagné le terrain perdu en 1848. Il a donné en 1850
un produit de 8,285 fr., soit environ 8,300 fr. La moyenne des
trois années 1845, 1846 et 1847 est à peu prés de 10,500 fr.,
par conséquent supérieure de 2,200 fr. au résultat obtenu en
1850.
Les colonnes six, sept et huit du tableau font connaître le
nombre des membres portés sur les listes de chaque exercice,
et l’accroissement simultané du nombre des cotisations une fois
payées et des arrérages de rentes sur l’Etat. Nous ne pousse-
rons pas plus loin les considérations que peut suggérer l’examen
du tableau-, nous allons, après ces réflexions préliminaires,
passer en revue les divers articles des recettes.
§ I et II. Produits ordinaires et extraordinaires des réceptions .
Sur les cinq articles dont se composent ces deux paragraphes,
trois articles offrent une augmentation :
Art. 1er. Droits d’entrée et de diplôme. . . 60 fr.
Art. 3. Cotisations arriérées 1,930
Art. 5. Cotisations une fois payées. . . . 900
Total des augmentations. . . 2,890 fr.
Les deux autres articles présentent, au contraire, une dimi-
nution :
Art. 2. Cotisations de l’année courante. . 515 fr. » c.
Art. 4. Cotisations anticipées. .... 29 50
Total de la diminution. . . . 544 fr. 50 c.
En définitive, les recettes comprises dans les deux paragra-
phes dépassent les sommes prévues au budget de 2,345 fr. 50 c.
Art. 1er. Le nombre des réceptions s’est élevé à 23 en 1848,
à 22 en 1849, et à 32 en 1850. La moyenne autrefois était
de 42.
Art. 2, 3 et 4. Les rapports avec l’étranger sont restés à
peu près suspendus en 1848 et 1849. Leur rétablissement en
Soc. géol., 2e série , tome YITî. 1 5
*296 SK A NC, R DU 17 FÉVRIER 1851.
1850 explique l’accroissement considérable survenu dans les
cotisations arriérées.
Art. 5. Une seule cotisation une fois payée avait été prévue
au budget. Il en est rentré quatre, dont le montant a été placé
en rentes sur l’État, conformément aux statuts de la Société.
Ç III. Produit des publications.
Trois articles de ce paragraphe ont éprouvé de l’augmenta-
tion -, un seul a subi une diminution.
Art. 6. Vente de Bulletins 150 fr. » c.
Art. 7. Vente de Mémoires 210 »
Art. 8. Vente de caries coloriées. ... 8 »
Total des augmentations. . . 398 fr. » c.
à déduire pour diminution :
Art. 9. Vente de P Histoire des progrès de la
géologie 61 50
Il reste pour augmentation sur le § III. 336 fr. 50 c.
Art. 6. Les achats de volumes du Bulletin par les membres
de la Société qui désirent compléter leur collection a produit
une somme de 258 fr. Les abonnements par les libraires mon-
tent à 180 fr., et contribuent, comme à l’ordinaire, pour une
part considérable dans le chiffre total de la vente. Us étaient au
nombre de 16 en 1818 , de 20 en 1819, et de 16 en 1850.
Art. 7 et 8. L’augmentation que présente la vente de Mé-
moires et de Cartes coloriées est due en grande partie au réta-
blissement des communications avec l’étranger.
Art. 9. Nous avons essayé, l’année dernière (1), d’apprécier
les conséquences que peut exercer sur les finances de la Société
la publication de V Histoire des progrès de la géologie. Nous
sommes heureux de vous annoncer que les événements sont
venus confirmer nos espérances.
La faible diminution observée sur cet article résulte du re-
tard involontaire apporté à la publication du tome III. Si ce
(1) Voir notre rapport sur les comptes de 1849, Bull., t. VII,
pages 252 et suivantes.
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
•2*27
volume avait paru, comme on l’espérait, à la lin de novembre,
il aurait certainement comblé, et bien au delà, la différence de
67 fr. 50 c. Vous verrez tout à l’heure que, malgré cette cir-
constance, la vente a failli dépasser de beaucoup les prévisions
du budget.
La vente de l’exercice expiré porte sur 297 exemplaires j
elle a produit 938 fr. 50 c., savoir :
r 1 4 exempl. vendus aux
\ membres. . 70
rp yj gf F
1 ' ) 13 exempl. vendus aux
{ libraires ... 91
62 exempl. vendus aux
membres. . . fr. 155 »
15 exempl. vendus aux
libraires. . . 54 50
151 exempl. vendus aux
membres. . . 377 50
42 exempl. vendus aux
libraires . . . 190 50
297 exempl. ayant produit fr. 938 50
161
209 50
568 i
En outre des 297 exemplaires qui ont été payés en 1850, il
en est sorti de nos magasins, pendant les derniers jours de l’an-
née, un nombre dont le prix, supérieur à 500 fr., n’a été soldé
que dans le courant du mois de janvier.
La vente de 1847, 1848 et 1849 comprend 467 exemplaires,
et a fourni une recette de 1,920 fr. 50 c. Si l’on y ajoute celle
du dernier exercice, on trouve que la vente totale monte à
764 exemplaires, ayant produit une somme 2,859 fr., et se
compose de la manière suivante :
T. 1er.
T. II.
i 34 ex.
vendus aux membres. 170 / .
* * j 119
id.
libraires. 845 (
J 254
id.
membres. 635 (
!ParLj 90
id.
libraires. 392J1’027
, 208
id.
membres. 520 )
Parti 59
id.
libraires. 267 j 787
764 exempl. ayant produit
fr. 2,829 »
228
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
Report. . . fr. 2,829 »
À quoi il faut ajouter une somme de 30 fr.
payée par anticipation sur les volumes non encore
publiés, ci 30 »
Total de la vente des deux volumes jusqu’au
31 décembre dernier . fr. 2,859 »
Les allocations ministérielles s’élèvent à
5.000 fr. 5 mais nous devons considérer la
somme de 1,000 fr. du dernier exercice comme
applicable à la publication du tome III. Il reste
4.000 fr. relatifs au tome Ier et aux deux par-
ties du tome II, ci fr. 4,000 »
Total de la recette relative aux deux premiers
volumes fr. 6,859 »
La dépense occasionnée par la publication de
ces deux volumes (voir notre dernier rapport déjà
cité) monte à fr. 8,586 25
Différence. . . fr. 1,727 25
Cette différence entre la recette et la dépense se trouverait
réduite à 1,200 fr. si les règles de la comptabilité permettaient
de comprendre, dans les comptes que nous examinons, les
ventes de la fin de l’année, dont le prix a été encaissé dans le
courant du mois dernier.
La totalité des dons faits par la Société s’élève à 443 exem-
plaires, savoir :
( A des membres qui ont acquitté la \
T. Ier | cotisation de 1847 329 ?369 exempl.
VA des sociétés savantes. . . . 40 J
| lre part. A des sociétés savantes. . 40 )
* *)2e part. A des sociétés savantes. . 34) ^ exempl.
Total des dons jusqu’au 31 déc. dernier. 443 exempl.
§ IY et § Y. Recettes diverses et solde du compte précédent.
Les sept articles qui composent ces deux paragraphes pré-
sentent des différences insignifiantes, qui se balancent par une
diminution de 1 fr. 80 c.
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
229
liés umé.
En définitive les augmentations de la recette s’élevant à
3,316 fr., portent principalement sur les cotisations arriérées
et les cotisations une fois payées. Les diminutions, montant à
635 fr. 60 c., proviennent en grande partie des cotisations de
Tannée courante.
DÉPENSE.
La dépense totale a été prévue au budget pour 17,225 fr. }
la dépense effectuée s’est élevée à 18,311 fr. 80 c., et présente
sur la première une augmentation de 1,086 fr. 30 c.
§1, §11 et§ III. Personnel, frais de logement et frais de bureau.
Les prévisions relatives au § Ier ont été réalisées-, celles qui
concernent les deux autres paragraphes ont été dépassées de
96 fr. 30 c.
De tous les articles compris dans ces paragraphes, l’article 8
est le seul qui présente une diminution. Cette amélioration est
due à l’empressement qu’un certain nombre de membres ont
mis à prendre en considération les avis du trésorier et à affran-
chir leurs lettres adressées à la Société. Il est à désirer que
chacun de nous contracte cette habitude qui, en nous imposant
un bien faible sacrifice, aurait l’avantage de décharger la Société
d’une dépense assez importante.
§ IV. Encaissements .
Art. 10. Nous avons exposé, dans notre dernier rapport, les
modifications successives qui ont été apportées à l’ancien mode
de recouvrement et les différents procédés actuellement en
usage. Les résultats obtenus cette année démontrent l’excel-
lence de la voie suivie par votre trésorier. Malgré l’importance
des sommes recouvrées, les frais de change, évalués à 150 fr.,
ne montent qu’à 67 fr., et présentent une diminution de 83 fr.
Si l’on tient compte des remboursements de frais de mandats qui
280
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851 .
figurent à l’article lh de la recette, on trouve que la dépense
se réduit en définitive à 52 fr. 30 c. Cette dépense se compose,
en presque totalité, de différences entre le change de Paris et
celui de trois places étrangères. Les encaissements par les mes-
sageries, qui forment le reste de la dépense, ne s’élèvent qu’à
9 fr. 60 c.
Nous entrons dans ces détails pour vous montrer que les
membres résidant hors de Paris, soit en France, soit à l’étran-
ger, contractent l’heureuse habitude d’adresser directement au
trésorier, et sans frais pour la Société, le montant de leurs
cotisations. Il en est encore quelques uns qui n’ont pas adopté
cet usage. Nous ne saurions trop, dans l’intérêt de nos publica-
tions, leur recommander d’entrer dans cette nouvelle voie et
d’épargner à la Société des frais inutiles (1).
§ Y. Matériel.
Les trois articles de ce paragraphe ont subi une diminution
dont l’ensemble est de 288 fr. 80 c.
Art. 11. La presque totalité de la dépense relative dM mobi-
lier a servi à l’établissement du calorifère qui chauffe la salle des
séances et la chambre du Conseil.
Art. 12. La diminution concernant la bibliothèque provient
de l’ajournement à l’année courante de reliures d’ouvrages qui
auraient dû être exécutées en 1850.
Art. 13. Le crédit ouvert aux collections n’a pas été entamé.
§ YI . Publications.
Deux articles de ce paragraphe ont dépassé les prévisions du
budget . trois autres sont restés au-dessous. Un seul des arti-
cles a atteint le chiffre fixé. Les augmentations portent sur les
suivants :
(1) Les membres résidant à l’Étranger sont priés d’adresser au
trésorier des mandats pris chez des banquiers; les membres qui habi-
tent en France sont priés d’adresser des mandats pris à la poste,
chez les receveurs généraux ou chez des banquiers.
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851. 231
À il. 1 4. Bulletin 1,147 fr. 55 c.
Art. 19. Coloriage de cartes 7 35
Ensemble. . . . 1,154 fr. 90 c.
à déduire les diminutions :
Art. 15. Port du Bulletin. . 279 fr. 30c.\
Art. 16. Histoire des pro- j
grès de la géologie. . . 127 20 > 506 50
Art. 17. Mémoires [dépenses \
supplémentaires'). . . 100 » /
Il reste pour augmentation sur le § VI. 648 fr. 40 c.
Art. 14. L’excédant de la dépense du Bulletin tient aux
deux causes suivantes :
1° Développement donné au Bulletin bibliographique faisant
partie du tome V. Ce travail de compilation, que les auteurs
croyaient faire tenir dans cinq ou six feuilles d’impression , rem-
plit neuf feuilles et demie, et coûte près de 1,100 fr., non
compris les frais de port, qui dépassent 160 fr.
2° Extension insolite donnée aux planches, cartes, etc. Cette
nature de dépense ne forme ordinairement que la dixiéme partie
de la somme totale consacrée au Bulletin. Elle s’est élevée à
1,146 fr., c’est-à-dire presque au double de la proportion ac-
coutumée.
Les dépenses relatives aux tomes V et VI ont été complète-
ment soldées -, celles qui concernent les 38 feuilles du tome VII
distribuées aux membres sont également payées j les feuilles
suivantes de ce volume qui n’ont pas encore paru restent à la
charge de l’exercice 1851.
Avant de passer à l’article suivant, nous croyons devoir vous
faire connaître que des plaintes assez fréquentes sont arrivées
sur la lenteur de la publication du Bulletin. On s’accorde à
demander que les communications soient livrées à la publicité ,
comme par le passé, au plus tard deux mois après qu’elles ont
été faites en séance. Il n’est aucun membre du Conseil qui ne
comprenne la nécessité de faire droit à ces justes réclamations -,
nous sommes heureux de vous annoncer que , grâce aux efforts
de notre secrétaire actuel, toutes les publications seront pro-
chainement au courant, L’arriéré était considérable et portait
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
232
sur plusieurs volumes inachevés. Nous venons de vous rappeler
que les tomes Y et VI sont terminés 5 vous recevrez prochaine-
ment la fin du tome YII , comprenant la séance extraordinaire
du Mans \ la table, rédigée par M. Raulin, sera distribuée un
peu plus tard -, enfin votre secrétaire , bientôt débarrassé de
tout l’arriéré , n’aura plus à s’occuper que des publications de
l’année courante. De son côté, la commission du Bulletin s’em-
presse de lever les petites difficultés qui peuvent de temps en
temps entraver le cours régulier de l’impression. Elle sait qu’en
agissant avec promptitude elle sauvegarde tout à la fois les inté-
rêts de notre Société, et ceux de la science et des auteurs. Des
mesures d’une exécution plus rapide ont été prises par elle tout
récemment pour seconder votre secrétaire dans ses efforts.
Ainsi , messieurs , les réclamations de nos confrères sont à la
veille de recevoir une complète satisfaction.
Art. 15. La diminution que vous remarquez sur le port clu
Bulletin est la conséquence naturelle du retard qu’a éprouvé
la publication du tome YII, dont une partie se trouve ajournée,
comme nous venons de le dire, à l’année 1851.
Art. 16. La totalité des dépenses relatives à Y Histoire des
progrès de la géologie concerne le tome III de cet ouvrage. La
publication de ce volume, qui n’a eu lieu qu’en janvier dernier,
loin de présenter une diminution , aurait offert une augmenta-
tion, si elle avait été achevée avant la fin de l’exercice. Le prix
total du tome III s’élève à 3,769 fr. 95 c. L’allocation du minis-
tère de l’instruction publique qui figure à l’article 12 de la
recette réduit cette dépense à 1,000 fr. En définitive, il
reste à la charge de 1851 une somme de 2,769 fr. 95 c.
Art. 17, 18 et 19. Les trois articles relatifs aux Mémoires
ne donnent lieu à aucune observation.
§ YII. Placement de capitaux .
Art. 20. Les achats de rentes sur l’Etect ont dépassé les
prévisions de 797 fr. 90 c. Cet accroissement de dépense résulte
du placement des cotisations une fois payées qui figurent, au
nombre de quatre, à l’article 5 de la recette.
Le tableau ci-dessus démontre que le nombre de ces cotisa-
SÉANCE DE 17 FÉVRIER 1851.
233
lions, qui montait en 1843 à hO seulement, s’éléye à 86 à la
date du 31 décembre dernier. Parmi les membres qui les ont
acquittées, huit sont aujourd’hui décédés.
§ VIII. Dépenses imprévues ,
Art. 21. Ces avances remboursables offrent une diminution
de 8 h fr. 50 c.
Résumé,
En définitive, les augmentations, s’élevant ensemble à
2, 084 fr. 25 c., portent principalement sur le Bulletin et les
placements de capitaux; et les diminutions, montant à
997 fr. Z|5 c., concernent en grande partie les articles 12, 15,
16 et 18.
CONCLUSIONS.
Nous avons essayé , messieurs , de vous présenter le tableau
exact de l’immense amélioration que l’exercice 1850 a apportée
dans la position financière de la Société. L’importance de la
recette a permis d’acquitter les dépenses exigibles à la date du
31 décembre dernier. Le reliquat en caisse, montant à
1,759 fr. 65 c., est suffisant pour solder toutes les publica-
tions qui restaient inachevées au commencement de l’exercice
où nous venons d’entrer. La totalité des recettes que fournira
l’année 1851 sera donc applicable aux publications qui vont être
entreprises. Nous nous faisons un plaisir de reconnaître que
votre trésorier, par son intelligente activité, a puissamment
contribué à obtenir ces heureux résultats , et que les écritures
et les pièces de la comptabilité n’ont été tenues, à aucune époque,
avec plus d’ordre et de clarté. Nous devons aussi payer un
juste tribut d’éloges à votre agent, dont les fonctions, devenues
plus pénibles par suite de la publication de Y Histoire des pro-
grès de la géologie , sont remplies avec la même ponctualité
qu’autrefois.
L’actif de la Société se compose des mêmes éléments dont
nous avons donné l’énumération dans nos derniers rapports. Il
SÉANCE i)L 17 FÉVRIER 1851.
234
se trouve accru par les acquisitions en rentes sur l’État exécu-
tées en 1850, par les dons d’ouvrages qui vous sont adressés
chaque jour, et par le nombre toujours croissant des volumes
de vos publications diverses, qui assurent à la Société des re-
cettes réalisables chaque année.
M. Martins donne lecture du mémoire suivant de M. Scara-
belli :
i Sur la jormalion miocène ( terrain tertiaire moyen) du versant
N. -E. de U Apennin, de Bologne à Sinigaglia , par M. Sca-
rabelli.
Pendant que MM. Orsini et Spada s’occupaient dans leurs
pays de l’étude des terrains qui composent le versant N.-E. de
l’Apennin, et que, poussés par des observations plutôt géognostiques
que paléontologiques, ils soupçonnaient l’existence de la formation
miocène près d’Ascoli et dans les Abruzzes (. But /. de la Soc. géol.
2e série, t. 2, p. Ml) moi, par une série de faits géognostiques et
paléontologiques à la fois, j’étais conduit à une pareille conclusion ;
c’est-à-dire, que j’étais amené à regarder comme appartenant à la
susdite formation une bande très large de terrain qui s’étend de
Bologne jusqu’à Sinigaglia, et qui , selon toute probabilité, va se
joindre à celle constatée près d’Ascoli par MM. Orsini et Spada.
Cette bande est bordée du côté de l’Adriatique par les marnes
bleues discordantes, tandis que de l’autre elle atteint presque la
hauteur de la crête de- l’Apennin , où elle s’appuie , ou sur le
rnacigtw éocène (1) ou sur des calcaires jurassiques. C’est donc à
dater de ce temps-là que j’ai fait de l’étude de cette partie de
l’Apennin l’objet presque exclusif de mes travaux. Mes études ont
été poursuivies avec d’autant plus d’ardeur que je voyais encore de
nos jours se reproduire dans les ouvrages de géologie, qui parlent
de cette portion de l’Italie, des erreurs qui tiennent, ou à des obser-
vations faites pendant que la science était encore dans son enfance,
ou à des observateurs qui , ayant donné trop de valeur à certains
faits rencontrés tout près de leur pays, ont cru en pouvoir généraliser
(1) Je me range du côté de M. Murchison pour reconnaître dans
le macigno et Y a Ibérèse des géologues toscans les représentants de la
formation éocène, ainsi que M. E, Sismonda l’avait annoncé au Con-
grès scientifique de Naples.
SÉANCE 1)U 17 FÉVRIER 1851.
235
l’explication aux faits du même ordre qui se reproduisaient dans
tout autre endroit, sans s’être d’ailleurs donné trop de peine pour
s’assurer si ces faits eux-mêmes se reproduisaient là avec un aspect
semblable.
Ainsi , par exemple , si l’on se rapporte à ce que M. Brocchi a
dit sur le rocher au-dessus duquel est posée la petite capitale de
San-Marino , on apprendra faussement qu’elle est bâtie sur du
sable jaune subapennin consolidé [Conchiologia fossile, t. 1, p. 206)
De même, mon honorable ami M. Bianconi, qui a, à la vérité, très
soigneusement étudié le gypse affleurant près de Bologne , et les
argiles scagliose qui l’accompagnent, n’aurait pas dit, je crois,
que le gypse cristallisé en jer de lance est chez nous une roche
compacte ( Storia naturale dei terrent ardenti , p. 67 ) , s’il eût
bien regardé le gypse de cette espèce, traversé par la rivière du
Senio à Rivola , qui se compose d’une série de couches très
puissantes et dont la stratification ne saurait être plus régulière $
si les géologues eussent parcouru petit à petit tout le pays occupé
par le gypse, de Bologne à Sinigaglia , ils n’auraient trouvé, je
crois , aucune différence géognostique entre le gypse cristallisé de
mon pays, et celui de Sinigaglia, amorphe avec phyllites. De même
l’argile et le calcaire renfermés chez nous dans le gypse équi-
vaudraient à l’argile et au calcaire qui accompagnent le gypse
presque partout en Italie.
C’est donc en me flattant que le résumé de mes observations
géologiques sera de nature à inspirer quelque intérêt à mes ho-
norables confrères que je les soumets aujourd’hui à leur juge-
ment.
La formation miocène de cette portion de pays que je vais
décrire se compose d’un ensemble de roches tel , que si on
voulait les ranger par ordre de leur maximum de puissance , elles
seraient ainsi disposées: mollasse , argile , gypse , calcaire , conglo-
mérat.
Cependant on voit que , s’il a plu à la nature dans ses détails
de réunir ces roches dans tel ou tel autre lieu avec des successions
différentes , de les modifier, et même de les surcharger de miné-
raux exploitables, toujours est-il que dans son ensemble elle a
suivi un ordre constant, qui nous permet d’avancer ( avec l’espoir
de le prouver ensuite) que notre formation miocène, résumée
dans un seul tableau, de haut en bas, se présente avec la succession
suivante de roches :
236
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
( Mollasse,
1er Groupe < Conglomérat ,
( Mollasse.
Argile ,
Calcaire,
Gypse ,
Roche sulfifère.
3* Groupe | Mollasse.
1er Groupe. — La mollasse que vous verrez , par les coupes ci-
jointes (pl. IV), figurer à la fois dans la partie supérieure et infé-
rieure de la formation, précisément comme cela se remarque dans
les Abruzzes (coupe présentée par MM. Orsini et Spada, Bulletin ,
2e sér., t. II, p. â08) est composée de petits grains de quartz ag-
glutinés par un ciment argileux très abondant, qui , quelquefois ,
est remplacé par une pâte calcaire. C’est en parcourant la route
de Bologne à la Porretta, qu’on peut remarquer les deux espèces
à la fois , celle qu’on exploite à Praduro et Sasso , peu solide et
grossière, et l’autre, plus compacte, qu’on emploie pour la bâtisse
décorative au Vergato. A San Marino , au milieu de la ville , il y
a une carrière ouverte dans une variété de mollasse qu’on pour-
rait dire plutôt un véritable grès calcaire , si des considérations
géognostiques, qui prouvent que ce dépôt est très circonscrit,
n’empêchaient d’admettre une distinction dans des observations
d’ensemble. Lorsque la mollasse n’est pas assez compacte (ce qui
a lieu plus particulièrement dans ces couches supérieures), elle
contient très souvent (Sogliano , Pesaro ) beaucoup de ces rognons
à texture concentrique , qui sont formés par les éléments mêmes
de la roche. Cette texture , en outre, fut l’objet de sérieuses inves-
tigations de la part de M. Paoli [Ricerchc sul moto molecolare dei
solidi ). Si, au contraire , cette espèce de mollasse argileuse n’a pas
eu de circonstances favorables pour se prêter à de pareilles con-
densations de substance (ce qui semble être arrivé, quand elle était
à gros grains), nous la voyons alors quelquefois se carier d’une
manière remarquable, lorsque les agents atmosphériques la pous-
sent à la dégradation ( Perticaja ) . Et qu’on ne croie pas ces obser-
vations dépourvues d’intérêt , car elles peuvent maintes fois nous
aider à distinguer la mollasse du macigno , avec lequel on peut
la confondre , lorsqu’une de ces roches est peu compacte , et
l’autre ne contient pas de fossiles.
La couleur de la mollasse varie d’un lieu à l’autre, mais il pa-
raît que cela n’arrive que d’une manière uniforme partout, et je
dirais presque suivant les âges relatifs des couches.
2e Groupe
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 4851..
287
Ainsi, la couleur jaunâtre que nous voyons prédominer dans
toutes les couches plus récentes du groupe supérieur de la mol-
lasse se change en jaune clair ou en gris cendré à mesure qu’on
descend dans les couches pins anciennes , tandis que la couleur
cendrée seule paraît appartenir au groupe inférieur.
Mainti nant, si nous passons à la stratification de la mollasse,
nous trouverons qu’il y a autant de façons différentes de couches
qu’il y a d’espèces ou de variétés de mollasse. Tantôt ce sont
des couches très puissantes qui forment à elles seules des crêtes
en saillie, au-dessus des collines environnantes [San-Marino ,
Monte-Bello , San- Léo), tantôt c’est une série nombreuse de
schistes arénacés ou argileux d’une épaisseur variable qui don-
nent au pays un aspect plus régulier, et quelquefois même plus
riant ; et cela à cause de cette riche végétation qui se plaît dans
ces montagnes à pentes douces et à sommets arrondis.
De même , l’inclinaison de cet ensemble de roches, que nous
comprenons sous la dénomination de mollasse, varie très souvent
à cause des dislocations fréquentes qu’on y remarque : mais on ob-
serve , en général , que ce sont les couches plus anciennes qui pré-
sentent les inclinaisons les plus fortes.
Le plongement des couches est variable aussi ; mais pourtant j’ai
remarqué (et cela dans toutes les assises de la formation) qu’il
n’existe que deux seuls points auxquels se rallient tous ces diffé-
rents plongements. L’un regarde la mer Adriatique ( Bologne , Imola ,
Faenza ) , l’autre, en sens contraire, se dirige vers la crête de l’Apen-
nin ( Sogliano , San-Marino , Ancônd). Cela prouve que , lors du
soulèvement de la formation, il s’engendra au milieu d’elle une
sorte de plissement longitudinal qui força ses bords de se relever
vers l’axe de l’Apennin d’un côté, et vers l’Adriatique de l’autre.
Et maintenant , si l’on veut chercher la cause de cette dernière
disposition , il suffit de porter les yeux sur la carte géologique
d’ItalieparM. de Collegno, pour voir que c’est précisément kAncôna
que le soulèvement a mis au jour le terrain jurassique, qui devait,
par conséquence, entraîner avec lui la formation miocène, et en-
gendrer en elle un plongement analogue.
D’après ces plongements des couches de la mollasse, nous pou-
vons en conclure que la moyenne de toutes les directions prises
entre Bologne et Ancône est du N. 50" O. au S. 50° E. Cette
direction, en outre, qui est suivie dans toutes les oscillations lo-
cales par toutes les assises de la formation , m’autorise le plus à
insister sur toutes les conséquences géognostiques auxquelles je
crois devoir entrer dans le courant de cette note.
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
ns
Te ne puis pas me passer, en parlant de la mollasse, de vous
rappeler que c’est au milieu d’elle que l’on rencontre le lignite
exploité à Sogliano et à Montegelli , lieux qui (comme San-
Marino , San- Léo, la Perticaja ) seront toujours parcourus avec
intérêt par les géologues qui aimeront à se former une idée de
tous les membres de notre formation miocène , et qu’un heureux
hasard a mis à découvert chez nous.
Et puisque j’en suis arrivé aux fossiles renfermés dans la mol-
lasse du premier groupe, il faut qu’avant de vous en présenter la
liste générale, je vous fasse remarquer que j’ai préféré ranger, dans
ce catalogue , les espèces fossiles d’après les localités où elles ont
été recueillies, et cela pour laisser à chacun le loisir d’apprécier
les faits comme il voudra.
Fossiles de la moliasse, ou plutôt du grès calcaire de San-Marino.
( Lamna [Odontaspis) contortidens , A g.
i Oxyrhina isocclica , E. Sismonda.
1 — xipliodon , Ag.
Dents de l Carcharodon megalodon, Ag.
1 — crassidens, E. Sism.
f *— polygyrus , Ag.
y Spherodus cinctus , Ag.
Echinolampas Laurillardi , Ag.
Lucina transversa .
Fragments de Pecten.
Fossiles de la mollasse de Sogliano qui recouvre le lignite.
Pecten scabrellus , Lam.
P o lia legumen , d’Orb.
Conus s tri a tul us , Brocc.
Mitra plicatula, Brocc.
Terebra duplicata , Lam.
Ranella lœvigata , Lam.
Natica olla% Marc, de Serres.
Fossiles qui accompagnent le lignite.
Opercules de mollusques.
Ossements aplatis, probablement de Tortue.
Portion de mâchoire d ' Ant/iracotherium, Cuv.
Planorbis .
Paludine.
Cerithium cr assura , Dujard.
SÉANCE LU Î7 FÉVRIER 1851.
m)
Cerithium bicinclum , Brocchi.
?
Natica mille pun data, Lam..
— alla, Marcel de Serres.
Ostrea virginica , Lam.
Dentalium ?...
Fossiles des couches inférieures au lignite.
Turbin ali a.
Fossiles recueillis à Sogliano , sans indication bien certaine des
localités, et peut-être confondus avec des espèces pliocènes.
Buccinum polygonum , Brocc.
— obliquatum .
Cancellaria cancellata , Lam.
Murex
Conus Virgin ali s.
Pleurotoma oblonga.
Pectunculus insubricus , Brocc.
Schizaster canali férus, Ag.
Astre a
Cardium aculeatum ?, Linn.
Psammobia ?
Fossiles du Bolonais.
Lutraria rugosa?i Lam,
Apiocrinites ellip tiens.
Dents de poissons.
Ostrea maxilla , Brocchi.
Murex trunculus , Linn.
Fossiles de Sinigaglia que l’on trouve dans l’argile marneuse
à Phyllites et à Ichthyolites, qui alterne avec du gypse (1).
Pecten duodeci m-lamellatus ? , Bronn.
Nucula concava?, Bronn.
Chama arietina, Brocc.
Cardita intermedia ?, Lam.
Corbula cuspidata , Bronn.
Atlantide
Schizaster canali férus , Ag.
(1) J’espère présenter incessamment, à la Société, le catalogue des
plantes, poissons, insectes, etc., qui ont été recueillis dans ce dépôt
par feu M. Procaccini, dont les héritiers ont bien voulu me vendre la
riche collection , peu connue d’ailleurs et mal étudiée.
SÉANCE Dll 17 FÉVRIER 1851 .
210
La mollasse de ce premier groupe renferme, à San-Marino ,
deux ou trois couches subordonnées d’un conglomérat composé
presque en totalité par des roches calcaires anciennes, auxquelles
se mêlent des cailloux d’un gris compacte. Ce même conglomérat,
de huit à dix mètres d’épaisseur, contient, à Sogliano , quelques
cailloux serpentineux , et se trouve intercalé (fig. U.) entre une
couche de calcaire qui lui semble superposée et une autre de
gypse qui, à en juger par sa position, giserait inférieurement.
Ce fait , si on pouvait le bien constater, serait le seul qui pré-
senterait cette anomalie de séparation entre le calcaire et le gypse
qu’on ne voit pas ailleurs.
2e Groupe. — Au-dessous de la mollasse, et en stratification con-
cordante, il y a une espèce d’argile, qu’il nous faut bien suivre dans
toutes ses relations avec les autres roches et minéraux sous-jacents ;
car nous verrons qu’elle n’est que l’indice de tous les événements
qui se sont passés au-dessous d’elle, soit qu’on la regarde du côté
de sa composition et des minéraux qu’elle renferme, soit qu’on y
étudie les roches qu’elle tient subordonnées, et toutes autres causes
qui l’ont accidentée.
Je ne reviendrai pas ici sur les caractères de cette roche ,
après tout ce qui en a été dit par mon honorable ami, M. Bian-
coni, lorsqu’il lui a donné le nom de Argilla scagliosa. Seule-
ment je désire faire observer que c’est précisément d’elle que
j’entends m’occuper ici , parce que mes observations ( toutes
nouvelles qu’elles paraîtront peut-être ) me conduisent à la ren-
fermer dans la formation miocène , seule position qui puisse
nous rendre compte de tous les minéraux quelle contient,
comme de toutes les differentes circonstances de gisement et de
composition qui l’accompagnent. En effet , sans vouloir m’enga-
ger tout à fait dans une discussion qui, en définitive, ne ferait que
porter sur des observations locales, faites par M. Bianconi , et
dont l’explication se trouve dans des causes locales aussi , je dirai
que cette espèce d’argile, là où elle n’a pas été refondue par la
mer pliocène, ou tourmentée par des injections serpentineuses,
est toujours stratifiée régulièrement, et que ces couches, quelque-
fois d’une teinte rougeâtre , servent d’appui à la mollasse en pleine
concordance de stratification {San - Mari no , Montc-Bcllo , etc.,
fig. 1, 2, 3, 5). En preuve de cela, il y a souvent subordonné
à l’argile des couches calcaires avec fucoïdes qui sont en stratifi-
cation concordante avec la mollasse superposée (fig. 5.), ce qui
n’arriverait pas si l’argile qui renferme ce calcaire n’était elle-
même disposée en strates réguliers et concordants.
SÉANCX DU J 7 FÉVRIER 1851. 2 Al
On s’étonnera peut-être de la présence de ce calcaire dans
la formation miocène; moi - même , j'ai longtemps douté de
l’exactitude de mes observations; mais, quand j’ai vu que ce
calcaire était superposé au gypse (à San-Marino , à Sogliano ,
à la Perticaja ), ou qu’il y était mêlé dans Vitriolais , et que ce
même gypse, à son tour, reposait sur des mollasses avec fossiles
tertiaires (à Rivola , fig. 6), j’ai dû abandonner toute idée de
système préconçu, et j’ai dû me convaincre que les Fucoïdes ne
pouvaient plus être regardés comme caractéristiques du terrain du
Macigno , dès qu’on les voyait remonter aux terrains tertiaires
moyens. Une telle découverte, en outre, se rattache d’une ma*
nière frappante aux observations de M. Pareto, insérées dans les
Mémoires de la Société géologique , lresér.,t. I, p. 125. « Ce calcaire ,
dit-il en parlant du calcaire qui accompagne le gypse près deTor-
tone, qui ressemble à certaines parties du calcaire secondaire, à
Fucoïdes , avec aspect ruinijorme , est dans une position qui ne permet
pas de préciser quelles sont réellement ses relations de gisement. »
De même, en revenant à notre argile, on s’aperçoit en parcou-
rant les différents mémoires qui parlent du gypse d’Italie, qu’elle
se présente partout aux alentours de cette roche avec des caractères
presque uniformes, quoiqu’on l’ait nommée de différentes ma-
nières. « A Gudiasco , c’est toujours M. Pareto qui parle, il existe
certaine marne grisâtre avec des cristaux minces de chaux sulfatée
qui repose sur le gypse spathique et sur un banc d’un gypse gris-bleu ,
presque compacte ou à petits grains. »
C’est donc seulement près des injections serpentineuses, comme
je l’ai dit plus haut , que cette argile est modifiée de mille ma-
nières différentes , et que les rares couches de calcaires subor-
donnés (lorsqu’il y en a) sont réduits en morceaux, et comme
empâtés au milieu d’elle (. Bombiana , fig. 1). Et si M. Bianconi,
d’après ces données, a cru pouvoir en conclure que l’argile scagliosa
était une roche d’épanchement {JLstoria naturelle , p. 78) ayant rela*
tion avec la serpentine et le gypse qui, eux-mêmes, renferment du
calcaire à Fucoïdes , nous aurons occasion de démontrer ( à part
les faits présentés par les roches éruptives, qui trouvent une facile
explication) que le gypse n’a peut-être avec les roches serpenti-
neuses d’autre relation que celle d une contemporanéité probable,
et que, si le gypse contient des blocs de calcaire , cela tient à un
métamorphisme incomplet de la part de ce même calcaire qui
le produisit.
Dans presque tous les lieux où l’argile se présente, elle contient
dans sa composition beaucoup de chaux sulfatée ( U2 parties sur
Soc. géol.j 2* série . tome VIII. 16
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
242
400, environ) et elle renferme , plus ou moins répandues, les
espèces minérales suivantes :
Barytine fibreuse.
Gypse lenticulaire.
Pyrite cristallisée ou fibreuse.
Aragonite fibreuse.
Soufre globuliforme.
Bitume compacte ou coulant.
Marceline incrustante (1).
Dans les localités enfin où les roches serpentineuses se sont fait
jour au milieu de l’argile , il y a des filons de cuivre pyriteux
( Bisano près de Lojano ), du cuivre carbonate, etc. La présence de
toutes ces substances minérales sulfurées au milieu de l’argile nous
fait croire à une origine commune dont nous tacherons de chercher
la cause plus loin, quand nous nous occuperons du dépôt de soufre.
Maintenant il suffit de les avoir mentionnées.
(1) Celte espèce recouvre comme un enduit de petits fragments de
calcaire à Fucoïdes, qui, à l'intérieur, n’ont souffert aucune altération.
Sa composition, en outre, n’est pas constante. Celle analysée par
M. Santagata ( Ann ali dc.lle scie?ize naturali , série 1re, t. Il, p. 199)
est composée de
Protoxyde de manganèse 28
Protoxyde de fer 23
Eau 21
Silice 14
Alumine 8
Carbonate de chaux 3
Carbonate de magnésie 1
Perte 2
100
Celle analysée par mon ami M. Taffinari a donné :
Carbonate de chauxv ...... 0,97
Carbonate de magnésie 6,25
Silice 12,50
Eau 20,50
Peroxyde de manganèse. . ..... 31,25
Peroxyde de fer 27,24
Perte 1,29
100,00
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
213
Une espèce d’argile, avec tous les caractères extérieurs de la
scagliosa , mais dont la composition m’est encore inconnue , alterne
à Sinigaglia (Plâtrière de la Canuta) avec des couclies de marne
fossilifère et des mollasses gypseuses. Je pense que l’argile de
ce pays est dans les mêmes relations stratigrapliiques que celle de
San-Mat ino, Perticaja , etc., parce que, après beaucoup d’alternan-
ces, on la voit enfin, à la partie inférieure de la série, superposée à
un calcaire, que je suppose équivalent au calcaire à Fucoïdes ; de
même que j’estime le premier groupe de la mollasse contemporain
de la mollasse gypseuse de Sinigaglia.
La roche qui vient ensuite, au-dessous de l’argile, est quelque-
fois le gypse, quelquefois le calcaire marneux avec Fucoïdes , qui ,
après s’être annoncé subordonné à l’argile avec ses petites couches,
se développe ici sur une plus grande échelle , et se place quel-
quefois comme intermédiaire entre l’argile et le gypse. Cependant
l’absence ou la présence de ce calcaire ne sont pas dues, à ce
qu’il paraît , au simple hasard, mais elles résultent au contraire
d’un ensemble de circonstances dont il faut bien tenir compte. En
effet, il n’y a pas de calcaire superposé au gypse là où celui-ci est
à son maximum d’épaisseur et de cristallisation ( Bologne , hnola ,
Rico la , etc. ). Au contraire , il y a du calcaire superposé au gypse
dans les lieux où ce dernier a moins d’épaisseur et où il est argileux
ou amorphe (. Sogliano , Fa e ta no, Monte BelLo ). Cette loi, que l’on
remarque dans la distribution du calcaire , manquera peut-être
quelquefois, mais on ne la trouvera jamais dans un ordre inverse ;
et, d’ailleurs, nous la verrons liée avec la différente distribution de
la roche sulfifère, qui a sa place marquée au-dessous du gypse.
La couleur du calcaire est presque toujours le blanc jaunâtre ;
il n’y a que l’espèce ruiniforme , d’ailleurs peu répandue , qui se
présente avec des veines ferrugineuses [Monte F alto gno près de San
Léo). Les couches du calcaire sont toujours fendillées en tous sens ;
mais on y remarque cependant une allure constante et principale,
qui établit sa direction et son inclinaison en tout semblables à celles
de toutes les autres assises de la formation.
Les empreintes de végétaux sont les seules traces de fossiles qui
paraissent au milieu de ce calcaire , et parmi celles-ci il n’y a que
quelques espèces de Fucoïdes qui soient bien déterminables. C’est-
à-dire le F. intri catus , le F. Targioni. Ces espèces sont celles qu’on
rencontre le plus souvent , quelquefois en nombre prodigieux
[Monte Gelli , al Giardino , Monte Maggio). Quelques autres espèces,
très rares d’ailleurs, méritent d’être étudiées soigneusement.
Au-dessous de ce calcaire, et là, où il n’a pas été atteint en
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851,
nh
totalité par le métamorphisme et changé en gypse , on voit cette
dernière roche prendre un développement considérable , soit par
sa puissance totale, soit par l’épaisseur de ses couches. Rivold ,
sur les bords de la petite rivière du Senio , et Monte-Mauro ,
sont les localités où le gypse-sélénite paraît avec son maximum
d’épaisseur et dans un état parfaitement cristallisé.
Treize ou quatorze couches seulement de cette substance suffi-
sent à elles seules pour composer entièrement cette assise, qui, étant
traversée à Rivola par le Senio , donne plus de facilité pour saisir
ces rapports avec les roches inférieures. A Faclano , territoire de la
république de San-Marino , c’est la même variété de gypse qui
affleure au milieu des argiles subapennines, avec cette cir-
constance de plus, que là, les cristaux de gypse sont plus petits et
mêlés à quelque peu d’argile. Au contraire, le gypse qui forme le
toit de la pierre sulfifère exploitée avec tant de succès à la Per-
ticaja n’est pas cristallisé , et pourrait être pris au premier abord
pour une argile compacte. 11 y a pourtant çàetlà, au milieu de ce
gypse, des rognons blancs saccharoïdes de sulfate de chaux qui par-
fois est cristallisé dans les fentes et les géodes. De même la pierre
à plâtre de Sinigaglia ( sorte de mélange de gypse , de sable et
d’argile) n’offre pas la sélénite , si ce n’est dans les fentes perpen-
diculaires qui traversent le dépôt. Cette observation est, selon moi,
de quelque importance, parce qu’elle nous fait voir qu’il y a eu
une production de gypse postérieurement à la consolidation du
premier.
En résumant donc tous les faits géognostiques présentés par
notre gypse cristallisé ou amorphe qui se déroule en ligne presque
droite de Bologne à Sinigaglia (à part celui de ce dernier pays, qui
est d’une autre origine), on peut dire de lui ce que M. Frapolli disait
à l’égard du gypse du flarz (Bull, de la Soc. géol ., 2e sér., p. 833) :
« Le gypse a toujours les caractères cl' un clcpôt en couches : il est
» toujours stratifié , et sa stratification est toujours parallèle avec la
» stratification des dépôts dans lesquels il est enclavé. La direction et
» l’inclinaison de ses couches sont toujours conformes aux lois géné-
» raies qui dominent dans le pays. Elles occupait toujours la position
» quelles devraient occuper si la roche dont elles se composent n’était
» point du gypse mais bien du calcaire , et du calcaire appartenant
» à la formation qui le renferme. Ce n’est que dans des points
» très restreints que la stratification du gypse manque réellement ;
» mais, si l’on a soin de bien étudier tout un massif gypseux , on
» parvient presque toujours à en découvrir les traces d’un côté ou de
» Vautre.
SÉANCE DU 17 FËYR1ER 1851.
Ub
On n’a pas encore ramassé de fossiles au milieu de la sélénite ;
en revanche elle a donné un certain nombre de minéraux , tels
que :
Pyrite cristallisée.
Célestine cristallisée.
Aragonite fibreuse ou octaèdre.
Bitume solide ou coulant.
Calcaire marneux, siliceux ou gypsifère.
Silex avec cristaux de gypse, ou concrétionné compacte.
De ces minéraux , dont nous avons vu quelques uns se ré-
pandre dans l’argile , il n’y a que les deux dernières espèces qui
méritent de fixer notre attention , soit par leur développement
qui les fait élever au rang de roche, soit par leur nature , en ce qui
se rapporte à la roche gypseuse qui les recèle. Dans le Bolonais, à
Tossignano près et Irnola, à Rivola , etc., il est très facile d’apercevoir,
enclavés au milieu du gypse et en voie de décomposition, de gros
blocs calcaires, qui s’annoncent à la surface des couches par des
taches blanc-jaunâtre , irrégulièrement disposées. Ce calcaire le
plus souvent présente les mêmes caractères minéralogiques que celui
à Fucoïdes que nous avons signalé plus haut , mais cependant sans
qu’on y ait rencontré encore des empreintes de ces végétaux , cir-
constance très explicable d’ailleurs, si l’on tient compte de l’exi-
guïté de ces empreintes qu’un moindre degré de métamorphisme
aurait pu effacer. Les passages minéralogiques dont jouit ce cal-
caire sont aussi remarquables. De la variété compacte on passe
graduellement à un véritable gypse calcarifère , et de celui -ci , par
nuances, il y a transition à un calcaire siliceux , se liant à son
tour avec du vrai silex.
Cette substance se trouve en deux différentes circonstances de
gisement, mais qui visent à une origine commune : l’une, au
milieu du gypse , interceptant des cristaux nombreux de sulfate de
chaux ; l’autre , au-dessus des couches gypseuses, formant un en-
duit concrétionné , quelquefois de ZrO centimètres d’épaisseur. C’est
dans ce cas qu’il n’est pas rare de voir ce silex (au Crivellari , près
du Senio ) renfermer des Paludines et des Cyclostomes. Je ne connais
pas de mon fait la geyserite ; mais, par l’ensemble des caractères
possédés par notre silex , cette dénomination pourrait bien lui
convenir. En effet, si l’on tient compte de sa couleur blanc de
lait , blanc-jaunâtre, cendrée , sa faible translucidité, et son mode
de gisement, on trouvera très convenable de lui attribuer une
origine pareille à la geyserite. Seulement j’ajouterai une observa-
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
2/|6
ti o o , c’est que la variété de silex renfermant les cristaux de
gypse doit être considérée comme contemporaine du gypse lui-
même , car ces cristaux n’ont pas les arêtes et les angles émous-
sés. Au contraire , la variété compacte , reçélant des coquilles
d’eau douce, se montre, à n’en pas douter, postérieure aux
couches de gypse , puisqu’elle les recouvre en s’étendant à leur
surface. Or je crois très explicable la présence du silex au
milieu , et même au dehors du gypse , en supposant que des sources
d’eau douées d’une haute température, et tenant en dissolution de
la silice, ont traversé le dépôt du gypse dès qu’il se produisit, et
que ces eaux ont jailli encore longtemps après. Ces sources ther-
males venant de l’intérieur de la terre se sont- elles fait jour par
les mêmes issues qui donnaient le passage aux vapeurs sulfuriques,
cause probable du métamorphisme du gypse? Moi , je le crois, et
cela d’autant plus que nous avons encore, de nos jours, dans les
nombreuses salses de notre pays, une manifestation toujours vi-
vante de ce genre de volcanicilé qui affecta jadis l’Apennin.
C’est au-dessous du gypse (comme je le disais plus haut) que
se présente constamment la pierre sulfifère ; et , si nous avons
constaté la présence de ce minéral dans les roches qui lui sont
superposées , c’est que la cause qui le produisit était de nature à
manifester ses effets, même à travers un dépôt tout entier.
La roche imbibée de soufre varie, dans sa véritable composition,
selon les localités, et selon les localités mêmes elle est plus ou
moins exploitable avec chance de succès : tantôt c’est un schiste
sablonneux , contenant quelque peu de soufre , qui la compose
( Polenta et ses voisinages) ; tantôt elle est formée par un calcaire
marneux gypsifère surchargé de soufre ( Perticaja ). Dans ces lieux
elle est de plusieurs mètres d’épaisseur, et, comme partout, elle suit
toujours les allures du gypse qui en est le toit.
Le soufre y est quelquefois bien cristallisé, dans les fentes, avec
de la célestine et de la chaux sulfatée. Les pyrites aussi n’y font
pas défaut, de même qu’il y a du bitume solide ou coulant.
Je n’oublierai pas de signaler ici une circonstance géogno-
stique qui accompagne le dépôt de soufre ; c’est qu’on le rencontre
peu ou point (de même que le calcaire avec Fucoïdes recouvrant
le gypse) dans les localités où le gypse a trop d’épaisseur, ou est
à l’état de sélénite. Yoici de quelle manière je me rends compte de
ce phénomène.
Supposons qu’il se soit formé dans le sein d’une grande mer un
dépôt considérable de calcaire d’une épaisseur variable , selon les
localités, et que, selon les parages aussi il soit, en Certains^ cas ,
SÉANCE DU 17 EÉVKIEH 1851.
U7
plus ou moins argileux ou compacte. Qu’arriverait -il maintenant
si au-dessous de ce dépôt calcaire se manifestait , pendant une cer-
taine période, l’action d’une quantité donnée de vapeurs sulfuri-
ques, soit à travers les fentes des terrains inférieurs, soit même
dans la jonction des couches, tout le long de ce dépôt? Il est cer-
tain que , si c’est là le cas d’un métamorphisme , la gypsification
du calcaire se ferait en raison directe de sa pureté et inverse de
son épaisseur. Et comme ces deux extrêmes nous les avons suppo-
sés variables, selon les localités, tandis que nous avons assigné
des limites certaines d’intensité et de durée pour la cause métamor-
phosante , il s’ensuivra de cette double combinaison une série de
phénomènes bien distincts entre eux , savoir :
A. Dans les lieux où le calcaire aurait eu trop d’épaisseur, il se
pourrait que la cause métamorphosante se fût épuisée avant d’avoir
atteint ses couches supérieures.
B. Dans les lieux où le calcaire se serait trouvé d’un très faible
degré d’épaisseur ou de pureté , la cause modifiante aurait été suf-
fisante , ou plus que suffisante , à la production du gypse.
Dans la première hypothèse (A) , on aurait du calcaire superposé
au gypse.
Dans l’autre (B), on aurait tout simplement du gypse bien cris-
tallisé , ou bien du gypse amorphe avec du soufre condensé à sa
base.
Par ce moyen, si je ne me trompe, on se rendrait compte de
la loi que l’on entrevoit , en général , sur la différente distribution
du calcaire, et de cette autre loi que présente la distribution du
dépôt de soufre subjacent au gypse.
De même, si, au-dessus de ce dépôt de calcaire que nous avons
supposé modifié de bas en haut par des vapeurs sulfuriques , nous
avions eu un autre dépôt d’argile (précisément comme cela arrive
dans la formation miocène), elle aurait été atteinte à son tour
(quoique d’une manière plus faible) par les mêmes causes modi-
fiantes, et elle aurait été métamorphosée selon sa nature. Cela
posé, il n’y a rien d’étonnant, à mon avis, si l’argile superposée
au gypse contient dans sa composition une si grande quantité de
sulfate de chaux , et si elle enveloppe du soufre , des pyrites , de la
célestine, de la barytine et autres substances minérales que nous
avons vues figurer dans toutes les assises de ce groupe. Et , par
ces mêmes effets du métamorphisme, on explique aussi la présence
du calcaire au milieu du gypse avec tous ses passages minéralo-
giques.
11 nous reste à présent à exposer notre opinion sur le dépôt de
SÉAISCE DU 17 FÉVRIER 1851.
ns
gypse de Sinigaglia. Ce gypse, par sa structure et par les fossiles
qu’il renferme, diffère tout à fait des autres gypses dont nous
avons fait mention , et il s’offre à nous comme le résultat de la
sédimentation du sulfate de chaux , qui s’est opérée au sein des
eaux. Ce gypse, quoique de sédiment, présente cependant certains
faits géologiques et minéralogiques qui se rapprochent de ceux
présentés par la sélénite, de manière qu’il sera toujours malaisé
de séparer géologiquement les deux dépôts l’un de l’autre, quelle
que soit d’ailleurs l’opinion que l’on adopte à leur égard.
Le gypse fossilifère de Sinigaglia alterne plusieurs fois avec des
marnes fossilifères et des argiles scagliose , au-dessous desquelles ,
à la base de la série des couches , existe un calcaire marno-siliceux,
que pour cela même nous considérons comme équivalent du cal-
caire àFucoïdes. Le soufre, quoique pulvérulent, y existe dans les
cavités et les fentes du gypse, de même qu’il y a la célestine, le
bitume et les pyrites. La sélénite remplit seulement certaines
fentes perpendiculaires qui paraissent postérieures à la consolida-
tion du dépôt. Or, me tromperais-je en appliquant à ces faits
le même principe d’explication dont j’ai fait usage pour la
sélénite?
J’admets que les mêmes vapeurs sulfureuses qui , en d’autres
endroits, par le métamorphisme, engendraient du gypse, réagis-
sant sur du calcaire, ont ici commencé leur action, lors de la
sédimentation d’un dépôt sablonneux et marneux. Les vapeurs sul-
furiques, dans leur passage au travers de l’eau, ne sont-elles pas à
même de transformer en gypse les petites molécules de calcaire
qu’elle contient, en produisant même une précipitation de soufre?
Je le crois. En outre , la grande quantité d’empreintes de pois-
sons (particulièrement de Lebias erassicaudas , Ag.) que l’on
trouve dans le dépôt de Sinigaglia nous portent à croire que la vie
de ces animaux était abrégée par des causes extrinsèques qui se
trouvaient, selon toute probabilité, dans ce liquide.
Enfin la sélénite qui se trouve dans les fentes, avec d’autres
minéraux sulfurés, paraît être l’effet de la même cause qui
agissait pendant et après la consolidation du dépôt tout entier.
Les rapports géognostiques de cette assise avec les autres terrains
trouveront place lorsque nous nous occuperons des rapports de
l’ensemble de la formation miocène avec les mêmes terrains.
3e Groupe. — Si l’on porte les yeux sur la figure 6, expression
fidèle d’une coupe naturelle des terrains qui longent le Senio,
comme sur les 3e, Ue et 5e, on ne tardera pas à apercevoir que c’est
encore la même mollasse qui paraît au-dessous du gypse en strati-
SÉANCE DU J 7 FÉVRIER 1851,
249
fieation concordante. Jen’aipas besoin de décrire ici cette mollasse,
car elle est tout à fait semblable à celle du premier groupe, dont
j’ai déjà eu l’honneur d’entretenir la Société (voir Sur l'existence
d’un ancien lac dans la vallée du Senio , note envoyée à la réunion
extraordinaire d’Épinal, en 1847). Seulement j’ajouterai ici que
les fossiles recueillis par moi-même dans la mollasse de l’Imolais
sont très rares et se réduisent aux suivants.
iCarcharodon crassiclens , E. Sismonda.
— angustidens , A g.
Lamna contnrtidens , Ag.
Empreintes d’un grand végétal (?).
Buccinum
Telline
Arthemis ex oie ta? , Lam.
A Sogliano :
Pecten scabrellus , Lam.
Pectunculus glycimeris .
Troc h us
L’épaisseur totale de ce groupe est très considérable, et là où la
mollasse s’appuie sur le macigno (ce qui arrive à peu près vers la
moitié du versant N. -E. de l’Apennin, à Marra di , Firenzuola] ,
elle fait avec lui un passage graduel, soit minéralogiquement, soit
géologiquement.
Rapports de la formation pliocène avec la miocène et les autres
terrains plus anciens.
11 est très aisé à celui qui a parcouru le versant N. -E. de T Apen-
nin, de Bologne à Ancône, de saisir les rapports stratigraphiques
entre la formation miocène et celle des sables et des marnes sub-
apennines. Ces marnes ne s’élèvent au-dessus du niveau de la mer
actuelle que de 300 mètres environ, et elles se sont déposées sur une
assise, quelle qu’elle soit, de la formation miocène, pourvu qu’elle
eût été soulevée auparavant ou mise à découvert par la dégradation.
Cette dernière circonstance surtout mérite l’attention du géologue,
car elle peut nous faire connaître, dans notre pays, quelles senties
vallées d’érosion qui se sont creusées avant l’époque pliocène, ou
bien après. Ainsi nous voyons (fig. 2) la marne bleue s’appuyer en
stratification transgressive au gypse et au calcaire de Faetano , de
même que nous la voyons en stratification discordante sur les gypses
250
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
de Rivola (fig. 6). Enfin, comme il est démontré par toutes les li-
gures de la planche, nous voyons les marnes subapenniues s’intro-
duire au milieu des contre-forts de l’Apennin , partout où des
dépressions du sol permettaient à la mer pliocène d’y entrer.
ïl faut un œil bien exercé pour distinguer à distance les argiles
miocènes des pliocènes et leurs limites respectives, surtout dans
les lieux où les deux argiles sont en contact entre elles, et où, par
la fusion des marnes miocènes, se sont engendrées les marnes plio-
cènes. Cependant le peu d’élévation qu’atteint la zone fossilifère
de la marne bleue sera toujours un point de repère pour le géo-
logue, de manière que, s’il y avait encore mélange des deux
argiles, il trouverait toujours des fossiles à la base de ces collines,
tandis qu’au sommet il n’en trouverait guère. Je ferai observer en
concluant que si quelques uns des fossiles appartenant à la forma-
tion miocène remontent aussi à la formation pliocène, toujours
est-il que chez nous les deux formations sont distinctes entre elles,
carilyeut un soulèvement qui précéda le dépôt des marnes sub-
apennines, en marquant de cette manière la fin de la période
miocène.
Ce n’est pas ainsi que la chose se passe quant aux rapports qui
existent entre la formation miocène et les terrains plus anciens.
Dans les localités où la mollasse s’appuie aux couches de grès
éocène (macigno), je ne me suis pas encore aperçu qu’elle en soit
distincte par une stratification discordante, et, par conséquent,
qu’elle ait une différente direction. Dans ce point de contact de
deux formations, le passage minéralogique de l’une à l’autre cache
le vrai point de leur jonction ( Marradi , Firenzuohi ), en sorte que
le géologue peut se trouver sur l’une ou sur l’autre formation sans
s’être aperçu d’avance où l une finit et où l’autre commence.
Cependant près de Sinigaglia, où la formation miocène, et
principalement le gypse, s'appuient sur le calcaire rouge avec
ammonites (Monte délia Rossa), bien que je n’y aie pas remarqué
une direction différente entre les deux terrains, pourtant on ne
peut guère se tromper sur leur âge respectif.
Dans le Bolonais ( Porretla ) il paraît que les argiles uvec le cal-
caire à Fucoïdes reposent en stratification discordante sur le ma-
cigno , qui est en ce heu très redressé par le soulèvement, et se
montre avec un faciès tout caractéristique et bien différent de
celui qui est propre à la formation miocène.
Quoi qu’il en soit de la liaison ou de l’indépendance qu’on pourra
reconnaître par la suite entre la formation miocène et l’éocène,
il sera toujours constaté qu i! y a eu, à plusieurs reprises, dans
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851,
251
l’Apennin, des éruptions serpentineuses, dont une (la dernière) se
fit jour à travers la formation miocène, en la soulevant dans la
direction N. 50° O., S. 50° E., après avoir causé en elle, selon
toute probabilité, tous ces effets de métamorphisme que nous
avons cm y reconnaître.
M. Rivière présente ensuite les observations suivantes : 11 ne
pense pas, en premier lieu, que les filons décrits par M. Scara-
belli puissent être composés de véritable serpentine, cette roche
n’affectant jamais ce genre de gisement-, 2° fauteur du mémoire
semble penser qu’un obstacle à ce que les cristaux de gypse se
fussent formés dans le calcaire serait l’impureté de ce même
calcaire. M. Rivière fait observer qu’une foule d’expériences
établissent, au contraire , que le gypse , comme d’autres sub-
stances, peut se déposer en très beaux cristaux dans un milieu
très impur et très chargé.
M. Rarrande fait la communication suivante Sur une décou-
verte de fossiles faite dans la partie inférieure du terrain silu-
rien de Russie , par le docteur Pander.
Durant le mois de janvier dernier, sir Roderick Murchison m’a
communiqué , à Londres , une lettre du colonel Helmersen an-
nonçant, sans autre détail, que M. le docteur Pander, de Saint-
Pétersbourg, venait de découvrir une faune paléozoïque nouvelle.
Dès le même jour, j’ai écrit au docteur Pander pour le prier de
me faire connaître en quoi consistait cette faune, jusqu’ici incon-
nue, et quelle position géologique elle occupait dans la série verti-
ticale des formations. Ce savant m’a répondu immédiatement et
m’a donné, avec la plus grande obligeance , les renseignements
qu’une lettre peut contenir sur une découverte de cette nature.
Il y a joint un profil idéal du terrain exploré, aux environs de
Saint-Pétersbourg, et le croquis de quelques fossiles que je vais
mettre sous les yeux de la Société, en même temps que je lirai
le texte de la lettre que je suis autorisé à communiquer.
« Je m’empresse de vous répondre ; lors même que cette commu-
nication ne satisferait pas vos espérances, vous connaîtrez du
moins les résultats généraux. J’ai maintenu, pour les fossiles, les
anciennes dénominations, quoique beaucoup d’entre elles doivent
252 SÊÀjNCE DU 17 FÉVRIER 1851.
être changées. J’ajoute un profil des couches que je désigne par le
nom de groupe.
Profil idéal des environs de Saint-Pétersbourg, communiqué à M. J. Barrande,
par M. le docteur Pauder.
G. Calcaire à Trilobites, Orthocèrcs, Leptæna, Oi this, etc., etc.
F. Couche argileuse.
iD.l. Grès vert, à Ichthyodontes , avec Bcrychia, Cytheriua , Ungulites, Lingula ,
Obolus, etc.
E. Schistes argileux intercalés, à Gorgonia.
D.O. Grès à Ungulites, avec Obolus, Orbicula, etc,... — e c Schistes argileux.
B. Argile à Platysolénites..... — c c c Grès.
A. Argile phytamorphique.
N. B. Les couches argileuses mentionnées dans le texte, comme existant dans le grès
vert D. 1. à Ichthyodontes, n’ont pas été tracées sur le profil par le docteur Pandcr. J. B.
» Je vous envoie le croquis de quelques uns des fossiles les plus
caractéristiques, outre ceux qui sont déjà connus. Vous verrez,
d’après le profil idéal , que les couches qui renferment les restes
organiques récemment découverts sont connus depuis long-
temps et ont été incorporés, quoiqu’à tort, dans le système
silurien. Le système silurien, caractérisé par ses fossiles les plus
anciens, tels que les Leptæna , Or this, Agriostus, Tri nucléus, etc.,
commence dans notre contrée avec le calcaire. Ce calcaire est
l’équivalent des Llandeilo-Jlags et Ca racl oc- San dsto n es , des grès les
plus inférieurs de Bohême, etc. Les formations placées au-dessous
de cette roche n’ont été jusqu’ici découvertes qu’en Russie, à moins
qu’on ne veuille peut-être leur assimiler, sous le point de vue gé-
nétique, le grès à Fucoïdes de Scandinavie.
» La couche la plus basse, l’argile bleue, évidemment un produit
de la décomposition du gneiss, et dans laquelle on n’avait anté-
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851. 258
rieurement découvert aucune trace organique, peut se subdiviser
en deux parties.
» La partie inférieure À, que je nomme phytamorph ique , renferme
seulement les traces d’une flore qui a disparu. La partie supé-
rieure, ou argile à Platysolénites, ne contient que des fossiles du
règne animal.
» L’argile inférieure pliytamorphique est traversée par des feuil-
lets parallèles, très minces, qui constituent une parfaite stratifica-
tion en diverses directions, indiquant clairement un soulèvement
de cette masse. Ces feuillets se composent d’une substance brune,
ferrugineuse, qui contient environ 50 pour 100 d’un détritus vé-
gétal, sans forme distincte, et que je nomme pliytàmorphe .
» Sur cette masse repose une argile homogène (B), généralement
non stratifiée, dans laquelle cependant des bancs horizontaux ou
inclinés de grès (c,c, c), renfermant beaucoup de mica et d’oxyde
de fer, permettent fréquemment de reconnaître la stratification.
Ces bancs de grès ont une épaisseur variable d’un demi-pouce
jusqu’à plusieurs pieds. Des fossiles que je nomme Platysolénites
caractérisent cette formation. Ce sont des tubes creux, blancs
comme neige, siliceux, ronds ou ovales, mais le plus souvent
aplatis, ayant une longueur de 2 à 3 lignes, et une demi-ligne de
largeur. Ces fossiles sont très nombreux.
» Sur l’argile à Platysolénites repose le grès à Üngulites (D), qui
est subdivisé, y compris les schistes intercalés, en trois parties
distinctes d’après les fossiles dominant dans chacune d’elles.
» La première , à partir du bas , est le grès à Üngulites propre-
ment dit. La seconde est le schiste à Gorgonia ; la troisième est le
banc à Ichthyodontcs ou grès vert.
*» Le grès à Üngulites (D, D) est caractérisé par ses fossiles, nom-
més aussi Obolus (Eichw.), Aulacotrcla (Kutorga), et par les deux
Orbiculesque M. de Verneuil a désignées par les noms de O. Buchii
et O, reversa . = Schizot) eta (Kut.).
» Les schistes intermédiaires sont caractérisés par un corail corné :
Gorgonici jlabellijormis (Eichw.), qui se trouve en nombreux exem-
plaires étendus entre les couches schisteuses.
» La troisième subdivision , la plus importante en ce moment,
consiste en une couche composée de grains de quartz, et colorée par
des grains verts, semblables à ceux qu’on voit dans les grès de l’ar-
gile bleue. Ce grès vert perdant peu à peu son quartz et l’oxyde de
fer, et devenant plus riche en chaux , passe au calcaire silurien
superposé, dans lequel apparaissent des Leptœna , Orthis, Trilo-
2Ôà SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
bites, etc., dont aucune trace n’avait été observée dans les couches
inférieures.
» Le grès vert est le gîte d’une faune qui lui appartient exclusive-
ment. Les Ungulit.es et Sçhizotrcia s’y montrent de nouveau, avec
divers genres de la même famille, tels que Lingula , Acrotreta, etc.;
malheureusement toujours en fragments. En même temps appa-
raissent Obolus antiquissimus et siluricus , des formes semblables
aux Cythérines, et enfin une immense quantité de dents de pois-
sons, premières traces des vertébrés, mais disparaissant de nouveau
à la base du véritable calcaire silurien. Ces dents, quoique sem-
blables parleurs formes à celles de certains Placoïdes, Ganoïdes ,
et même de divers poissons aujourd’hui vivants, s’en distinguent
complètement par leur structure microscopique. Si l’on voulait
absolument classer ces anciens poissons parmi les formes de nos
jours, ils ne montreraient de l’analogie qu’avec les Cyclostomes.
» Au-dessus de ce sable vert , ou même dans son étendue , on
trouve des couches d’argile dans lesquelles les dents de poissons
deviennent beaucoup moins nombreuses, tandis qu’on voit appa-
raître quelques Lcptœna , Ort/iîs , entre autres Orthis parva , et
des tiges de Cystidées. Un peu plus haut, toutes les traces de
poissons disparaissent, et les fossiles contemporains Si p ho notre ta ,
Acrotreta , etc., ne se rencontrent qu’en individus isolés dans le
calcaire superposé (G) , dans lequel commence le règne des Tri-
lobites , Orthocératites, etc. »
J’ai quelques observations à présenter à la Société au sujet de
la lettre que je viens de lire. Mais, avant de commencer, je ferai
remarquer que le profil donné par le docteur Pander est en par-
faite harmonie avec celui qui a été tracé et expliqué avec beau-
coup de détails, dans le bel ouvrage sur la Russie, par sir Roderick
Murcliison , de Yerneuil et le comte Keyserling. On retrouve,
en effet, dans l’un et l’autre tous les mêmes éléments stratigra-
phiques indiqués , mais pour la plupart avec des noms un peu
différents, à cause des nouvelles dénominations introduites par le
docteur Pander (voir Russie et Oural , vob I, p. 26 et suivantes).
L’argile bleue et les grès à Ungulites sont décrits dans cet ouvrage
comme les formations les plus basses du système silurien dans la
contrée de Saint-Pétersbourg.
I. Le docteur Pander a d’abord rendu un service signalé à la
science , en découvrant des traces de la vie organique dans les ar-
giles formant la base de la division silurienne inférieure, aux en-
SÉANCE DU 17 FÉVRIER 1851.
255
virons de Saint-Pétersbourg, et qu’on avait longtemps considérées
comme azoïques. Les traces organiques les plus anciennes dans la
contrée explorée consistent dans la présence d’une substance vé-
gétale, amorphe, formant 50 pour 100 de certains feuillets minces
qui traversent la masse argileuse, et indiquent sa stratification. La
présence d’une telle substance végétale, dans cet état, et à cette pro-
fondeur géologique, offre une grande analogie avec l’existence de
couches de houilles reconnues en Portugal, aux environs d’Oporto,
par M. Daniel Sharpe, dans la division silurienne inférieure, au-
dessous d’une formation renfermant les Trilobites de la faune se-
conde, c’est-à-dire Asciphus , Illœnus , Placoparia , Calymene Tris -
tanij etc. Cette faune est précisément celle qui est représentée
dans la masse calcaire couronnant la section ci-jointe. 11 me sem-
blerait que la découverte de la substance phytamorplie remonte
déjà à plusieurs années, car, dans l’ouvrage sur la Russie que je
viens de citer, la présence de Fucoïdes dans l’argile bleue est
mentionnée comme un fait communiqué par le même docteur
Pander. Or, comme la lettre de ce savant n’a fait aucune men-
tion de ces Fucoïdes, je suis porté à croire que c’est la même ma-
tière végétale actuellement nommée phytamorphe.
Quant aux fossiles nouveaux, nommés Platysolénites par M. le
docteur Pander, nous ne connaissons , jusqu’à ce jour , rien qui
puisse leur être comparé, et la description très succincte, donnée
dans la lettre que j’ai eu l’honneur de vous lire, ne permet pas
de reconnaître la classe à laquelle ces corps peuvent être rap-
portés.
Là se bornent celles des découvertes du docteur Pander qui
ont étendu nos connaissances de la vie organique au delà des li-
mites jusqu’alors supposées dans cette région silurienne.
IL La découverte incomparablement la plus importante du
même savant se rapporte à la formation des grès verts, dans les-
quels on avait depuis longtemps recueilli des Brachiopodes nom-
més : Obolus , Ungulites , Orbicula , Lingula , Schizutreta , etc. Ces fos-
siles avaient été successivement indiqués ou décrits par Eichwald,
de Verneuil et Keyserling, et plus récemment par le professeur
Kutorga. Personne n’avait soupçonné dans ces couches l’existence
de vestiges de poissons, que le docteur Pander vient d’y décou-
vrir. Ces restes de vertébrés consistent en dents microscopiques,
dont je mets quelques échantillons sous les yeux de la Société.
Leur extrême exiguïté témoigne combien les investigations du
docteur Pander ont dû être attentives et minutieuses. Au premier
aspect, ces formes paraissent être, comme l’annonce Fauteur de la
25*3 SÉANCE Dl! 17 FÉVRIER 1851.
découverte, des dents de poissons. Cependant, comme je ne suis
point en état de confirmer par des connaissances spéciales la dé-
termination du docteur Pander, je dois me borner à la donner
sous sa garantie, jusqu’à ce que d’autres savants, compétents en
cette matière, aient pu nous faire part de leurs observations.
Admettant, selon toute vraisemblance, que ces fossiles micro-
scopiques, de formes si variées et de structure toute nouvelle, sont
des dents d’une famille inconnue de poissons, je considère ce fait
comme ayant la plus haute importance en lui-même, et en se-
cond lieu comme arrivant au moment le plus opportun pour la
science.
La Société sait qu’on avait annoncé la découverte de vestiges de
poissons, en Angleterre, non seulement dans les schistes de Wen-
lock, à la base de la division silurienne supérieure, mais encore
à une grande profondeur géologique , dans le groupe de Llan-
deilo, c’est-à-dire dans la division inférieure. D’après les informa-
tions que je viens de prendre à Londres, auprès de M. Salter, il
n’est rien de certain dans ces faits trop précipitamment publiés.
Il paraîtrait que les palais de poissons, attribués aux schistes de
Wenlock, ont été trouvés uniquement à la surface du sol, et pour-
raient provenir du calcaire de montagne existant dans le voisinage.
Quant aux prétendus restes de poissons dans les Llandeilo-Jlags , ils
ont été récemment reconnus pour des fragments de polypiers.
Ainsi se sont évanouis les faits sur lesquels se fondait l’existence
de vertébrés durant les temps les plus anciens de la période paléo-
zoïque. Si, comme nous l’espérons, la découverte du docteur Pan-
der se confirme, elle rétablira, sur une base solide , la croyance
que les poissons ont existé pendant le dépôt de la division silu-
rienne inférieure.
III. La Société a pu remarquer que le docteur Pander indique
un soulèvement reconnu par la disposition des couches d’argile,
formant la base du terrain silurien aux environs de Saint-Péters-
bourg. Cette indication est trop peu étendue pour qu’on puisse
comparer et rattacher ce soulèvement aux systèmes établis. Sui-
vant le profil idéal ci-joint, la dislocation des couches serait peu
considérable, et serait presque également sensible sur toutes les
formations superposées, depuis l’argile ph y tamorphique jusqu’au
calcaire qui recouvre le terrain. On sait qu’en Angleterre il existe
une semblable concordance entre toutes les formations de la divi-
sion inférieure, depuis la base azoïque jusqu’au groupe de Llan-
deilo. Mais on a constaté une discordance de stratification entre
le groupe de Llandeilo et celui de Caradoc, qui le recouvre. Il
SÉANCE ï)l» 17 FÉVRIER 1851.
257
existe tuie seconde discordance entre le groupe de Caradoc et les
schistes de Wenlock, formant la base de la division inférieure.
L’équivalent des grès de Caradoc et de la division supérieure tout
entière manquant aux environs de Saint-Pétersbourg, on ne sau-
rait établir aucun parallèle , sous ce rapport, entre les deux pays.
Les dislocations indiquées par le docteur Pander avaient été aussi
observées par les savants auteurs de l’ouvrage sur la Russie. Nous
les trouvons figurées dans divers profils pris aux environs de Saint-
Pétersbourg, et elles sont l’objet du texte dans les pages 30 et 31
du volume cité.
IV. Les faits que nous connaissons uniquement par l’exposé
sommaire du docteur Pander lui ont paru assez importants pour le
porter à établir un nouveau groupe ou système géologique , indé-
pendant du système silurien. Sans prétendre mesurer en ce mo-
ment toute la portée de ces découvertes et la somme de leur in-
fluence sur la science lorsqu’elles auront été convenablement
développées et étudiées , il me semble qu’au point de vue actuel il
n’existe pas de motifs assez puissants pour autoriser à tronquer
par sa base le système silurien, aujourd’hui si bien établi par son
illustre auteur, sir Roderick Murchison.
Avant toute autre considération , je dois faire remarquer que le
docteur Pander , en admettant que la formation calcaire des envi-
rons de Saint-Pétersbourg représente toute la division silurienne
inférieure, a commis un oubli. C’est qu’au-dessous des groupes
de Caradoc et de Llandeilo, dont il a justement reconnu l’équiva-
lent dans son calcaire, il existe un autre groupe très distinct, et
caractérisé par une faune particulière. Ce groupe constitue l’étage C
de la Bohême, représenté en Angleterre par le groupe trappéen ,
car l’un et l’autre renferment exclusivement la faune que je
nomme primordiale dans mon terrain , c’est-à-dire les Para -
doxides , O le nus , Sao , etc. Cette faune primordiale se retrouve
dans une position constante immédiatement au-dessus de la base
silurienne azoïque, non seulement en Bohême, dans le pays de
Galles et les collines de Malvern , en Angleterre, mais encore en
Scandinavie. Elle manque jusqu’ici en Russie ; mais qui pourrait
affirmer que des recherches ultérieures ne constateront pas sa pré-
sence dans la masse argileuse , dont la profondeur est inconnue?
Dans tous les cas, il est clair que , dans l’état actuel de nos connais-
sances , on ne saurait admettre que le calcaire des environs de
Saint-Pétersbourg représente toute la division silurienne infé-
rieure.
Ce calcaire est lié d’ailleurs avec la formation sous-jacente par
Soc. géol 2e série , tome VIH 17
258
SÉANCE DU Ï7 FÉVRIER 1851.
la présence de diverses formes . de - Lcptœna et Orthis , qui se trou-
vent dans des couches d’argile intercalées, suivant le docteur Para-
der, dans les grès verts à Ichthyodontes. il nous serait donc diffi-
cile de concevoir pourquoi la base du calcaire devrait être la
limite du système silurien vers le bas. Nous n’apercevons parmi
les Brachiopodes de toute la hauteur des grès que des formes habi-
tuelles dans les formations siluriennes, comme les Lin gui a , Orbi-
cula , etc. S’il existe, en outre, dans cette région , quelques genres
encore peu connus, et composant la famille des Siphonotretœ de
Kutorga , nous savons aussi que plusieurs sont représentés dans le
terrain classique silurien d’Angleterre, où ils ont été reconnus par
iVJ. Morris. Ces formes coexistantes en Russie, avec quelques
autres appartenant peut-être exclusivement à ce pays, établissent
cependant des relations trop naturelles pour permettre d’isoler les
grès, et de les séparer de la période silurienne. On se rappelle que
des connexions de même nature, reconnues dans le pays de Galles
entre la division silurienne inférieure et le groupe provisoirement
nommé système cambrien , ont suffi pour décider les géologues
anglais à englober ce dernier dans le système silurien.
Quant aux poissons nouvellement découverts , et qui forment le
caractère le plus saillant de la faune des grès verts, il me semble
que leur présence , même bien constatée , 11e rompt pas les liens
dont je viens de parler entre ces grès et le calcaire. L’existence
admise , à tort, d’une espèce de poisson dans les schistes de Llan-
deilo, en Angleterre, 11’avait suggéré à personne l’idée d’ériger ce
groupe en système indépendant. Doit-on donner plus d’impor-
tance à un fait du même ordre constaté en Russie? Je ne le pense
pas, malgré la grande multiplicité des fragments qui doivent re-
présenter les poissons dans cette dernière contrée.
D’après ces considérations, je ne crois pas qu’il existe , dans la
faune des grès , des caractères différentiels assez tranchés pour de-
venir la base d’un nouveau groupe, distinct du système silurien.
Cette formation me paraîtrait devoir tout au plus constituer un
étage local d’une valeur analogue à celle des divers étages de
Bohême ou d’Angleterre.
Les fossiles que l’on trouve au-dessous des grès , savoir : les
Platjsolénites , et la substance de nature végétale, dite phytamorphe
par le docteur Pander, sont encore trop peu connus et trop peu
variés pour constituer, soit une faune , soit une flore indépendante.
Je ne pense pas que le savant qui les a découverts leur ait donné
une part considérable dans les motifs qui l’ont engagé à proposer
son nouveau système. Je ne m’arrêterai donc pas davantage sur ce
SÉANCE DU 'à MARS 1851,
259
point, Je terminerai en rendant un hommage bien mérité à ia libé-
ralité scientiligue du docteur Pander , qui , avant d’avoir publié
lui-même ses découvertes, a bien voulu me permettre de vous
communiquer ces faits intéressants. Cette libéralité l’honore à vos
yeux autant qu’aux miens, et je suis persuadé que la Société me
permettra d’exprimer sa reconnaissance au savant qui vient d’en-
richir la science par des observations si nouvelles , et dont nous
ne pouvons pas encore évaluer toute la portée.
Après cette communication, M. de Yerneuil fait observer
que le soulèvement dont il est question dans le travail de
M. Pander avait déjà été signalé par MM. Murchison, de Yer-
neuil et Keyserling dans leur travail sur la Russie 5 cet accident
leur a paru tout à fait local et n’être nullement suffisant pour
devenir la base d’un nouveau système.
Séance du 2> mars 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance,
le président proclame membres de la Société :
M. Michelot (Paul), ingénieur des ponts et chaussées, à
Paris, rue de la Chaise , , présenté par MM. de Yerneuil et
Ch. Deville.
M. Abich, conseiller aulique, à Tiflis (Perse), est admis, sur
sa demande, à faire de nouveau partie de la Société.
Le président annonce ensuite trois présentations.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
Le Société reçoit :
De la part de M. le ministre de la Justice, Journal des sa-
vants, février 1851.
De la part de M. Cotteau, 1° Etudes sur les Echinides fossiles
SÉANCE bV 3 MAÜS 1851.
260
du département de V Yonne, 5e el 6e livraisons, Auxerre, 1851,
in-8.
— 2° Note sur la Phoîadomya acuticostata , Sow. , et la Pho-
ladomya semicostata, Ag. (extr. du Bull . de la Soc. des scienc .
et hist. nat. du département de V Yonne, t. II), in-8, 7 p.,
1 pl.
— 3° Notice sur la carte agronomique et géologique de V ar-
rondissement d’ A vallon , par M. Belgrand, in-8, II p.
De la part de M. Gruner, Mémoire sur le gisement et le mode
de formation des minerais de manganèse des Pyrénées , suivi
de quelques considérations sur le rôle des sources minérales
dans la formation de certains minerais (extr. des Ann. des
mines , 4e sér., t. XVIII, 1850), p. 61 à 102, in-8.
De la part de M. Robineau-Desvoidy , 1° Mémoire sur les
crustacés du terrain néocomien de Saint- Sauveur- en-Puisaye
(Yonne') (extr. des Ann. de la Soc. entomol. de France , 2e sér.,
1840), in-8, p. 95 à 141, 2 pl.
— 2° Notice sur les sauriens du kimmeridge- clay de Saint -
Sauveur-en-Puisaye, in-8, 3 p.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1851, 1er sem., t. XXXII, nos 7 et 8.
L’Institut, 1851, nos 894 et 895.
Mémoires de la Société libre d’ émulation du Doubs , IIIe vol.,
t. III, 1849, 5e et 6e livrais.* Besançon, 1850.
The Athenœum , 1851 , nos 1217 et 1218.
Transactions of'the Cambridge philo s ophical Society , vol. IX,
part. 1, 1851.
De la part de l’Académie impériale des sciences de Vienne,
1° Denkschriften , etc. (Mémoires de l’Académie impériale des
sciences de Vienne ; classe des sciences mathématiques et natu-
relles)*, Ier vol., texte et planches; IIe vol., lre et 2e livrais.,
in-4. Vienne, 1850.
— - 2° System a helminthum , par M. Ch. Maurice Diesing,
vol. I, in 8, 680 p. Vienne, 1840, chez Guill. Braumüller.
— 3° Généra et species plantarum fossilium , par M. F. Unger,
in-8, 627 p. Vienne, 1850, chez Guill. Braumüller.
Jahrbuch , etc. (Annuaire de l’Institut I. R. géologique),
Vienne, 1850, 1er année, n° 2, avril et juin, in-4.
SÉANCE Dü 3 MARS 1851,
261
Jahresbericht , etc. (Compte rendu annuel de la Société
d’histoire naturelle de Halle). 2e année, 1849-1850. Berlin,
1850, in-8.
M. d’Archiac communique, de la part de M. Bellardi, la liste
suivante des fossiles de la formation nummulitique de l’Egypte,
qui se trouvent dans le Musée minéralogique de Turin.
Liste des fossiles nummulitiques d’Egypte de la collection du
Musée royal de minéralogie de Turin , par M. L. Bellardi.
Nanti lits regalis , Sow.
Bulla Fortisii , Brong.
— Clot-Beyi , Bell.
— , sp. indét.
Turritella imbricataria , Lamk.
— fasciata , Lamk.
— • œgyptiaca . Bell.
Natica patula, Desh.
— sigaretinaf Desh.
— longa , Bell.
— , sp. indét.
— , sp. indét.
— , sp. indét.
— , sp. indét.
— , sp. indét.
Ampullarici subcarinata , Bell.
Nerita conoidea , Lamk.
Bulimus Osiridis , Bell.
Plcurotomaria sp. indét.
Nerinœa Serapidis, Bell.
Rostellaria Api si dis, Bell.
— affinis , Bell.
— planulata , Bell.
*— , sp. indét.
— digona , Bell.
columbata , Lamk.
— fis sur cil a, Lamk.
— multiplicata , Bell.
Fusus clavatus , Brocc.
— goniophorus , Bell.
— œgyptiacus , Bell.
Pyrula nexilis ?, Lamk.
— , sp. indét.
Harpa elegans , Desh.
Cassis Des'hayesi?, Bell.
- — niloticus , Bell
Cyprœa Levesquei , Desh.
Siliquciria lima , Lamk.
Ostrea , sp. indét.
— , sp. indét.
— multicostata , Desh.
— fiabellula , Lamk.
I — - ventilcibrum , Goldf.
| — , sp. indét.
| — cymbula , Lamk.
] — crassissima , Bell.
1 - — subarma ta, Bell.
I — , sp. indét.
| *=— symmetrica , Bell.
Placunomya.
Pecten hctero-costatus , Bell.
— - , sp. indét.
— , sp. indét.
— , sp. indét.
— , sp. indét.
Pcctunculus , sp. indét.
*— , sp. indét.
Spondylus rarispina , Desh.
Modiola lithophaga , Lamk.
— cordata? , Lamk.
— barbata P, Lamk.
Chaîna sulcosa? , Desh.
Cardiurn, sp. indét.
— , sp. indét.
— , sp. indét.
- — obliquant?, Desh.
Venericardia , sp. indét.
— imbricata ?, Lamk.
— , sp. indét.
— acuticostata ?, Lamk.
— - multicostata , Lamk.
Ferais , sp. indét.
SÉANCE DU 3 MARS 1851.
Veniez ni ti dul a?., Lamk.
-r- , sp. indét.
— ■ suïcataria , Desh.
— , sp. indét.
incrassata P, Lamk.
Cyrena?, sp. indét.
Cyprin a tiiniida , Nyst.
— scutellaria?. Desh.
Arthemis, sp. indét.
Astarte longa , Bell,
Lucina , sp. indét.
— Gsiridis, Bell.
— Apisidis , Bell.
— Ford si an a P, Defr.
— Menardi ?, Defr.
— orbicularis , Bell.
— , sp. indét.
— contofla , Defr.
— Bell.
— affinis , Bell.
— cycloideci , Bell.
— inflata , Bell.
• — sp. indét.
Lucina sinuosa , Bell.
Tel lin a Bencdcni , Nyst.
— reticulata , Bell.
— , sp. indét.
Lutraria? , sp. indét.
Ao/e/z uniradiatus , Bell.
Corbula , sp. indét.
Thracia , sp. indét.
— , sp. indét.
Clavagella grandis, Bell.
Sep tari a.
Serpula, sp. n.
— , sp. indét.
Spirorbis.
Balanus œgyptiacus , Bell.
Herni aster cubicus , Desor.
— obesus , Desm.
Eupatagus elongatus , Ag.
Conoclypus Osiris , Des.
Echinolampas Hoffmanni , Des.
— Beaumojiti , Ag.
— . Blainvillei , Ag.
— Kleinii ?, Desm.
Après cette communication, M. d’Archiac fait remarquer que,
sur 118 espèces que renferme la liste précédente, 33 sont nou-
velles, Al sont encore indéterminées, 6 sont propres jusqu’à
présent à l’Egypte, 37 sont communes au terrain tertiaire in-
férieur et moyen du nord-ouest de l’Europe, et 1 paraît se
retrouver dans le terrain tertiaire supérieur. Parmi les Nummu-
lites du même pays que M. Bellardi lui a envoyées en même
temps, se trouvent les /V. discorbina , Schloth., iV. Ramondi
Defr., id., var. minor,N. nummiformis , Schafh., et une espèce
douteuse -, un caillou roulé renferme exclusivement les iV.
rnnndi et biaritzana , d’Arch.
Enfin parmi les polypiers M. J. Haime a cru reconnaître;
Astrocœnia Caillaudi, Milne Edw. et J. Haime, Archives
du Muséum , t. V, p. 65 ^ Astrea Caillaudii , Michelin, pl. 63 ,
fig. 5 , qu’on trouve aussi à Nice et dans les Corbiéres -,
Stylocœnia emarciata , Milne Edw. et J. Haime, ^/?/*. ac.
t. X, pl. 7, fig. 2} Astrea emarciata , Lam., qui est
commune à Grignon et se rencontre aussi à Nice ;
SÉANCE DU 3 MARS 1851 . 263
Puis une Astrocœnia et une C/adocora , probablement nou-
velles, mais indéterminables.
Il y a aussi un crustacé qui paraît être le Cancer ’ Paufino-
Wurtembergensis , H. v. Mey.
M. Nicaise fait la communication suivante sur le terrain cré-
tacé des environs de Blidah.
Notice sur les terrains schisteux et crétacés du petit Atlas
( rive gauche de la Chiffa ) , par M. Nicaise , conservateur du
Musée de Blidah (Algérie).
Les terrains composant le petit Atlas, ainsi qu’on peut le voir
sur le croquis ci-joint, sont : les schistes ardoisiers , les calcaires,
les marnes argileuses, les grès crétacés, le travertin moderne et
les terrains de transport ou d’alluvion.
Coupc transversale du petit Atlas, rive gauche de la Chiffa,
A Terrain de transport et d’alluvions.
B Tuf travertin.
C Marnes argileuses.
D Calcaire argileux et marneux.
E Grès crétacés.
F Schistes ardoisiers.
Le schiste ardoisier , désigné sur le croquis lettre F , est
bleuâtre, quelquefois verdâtre, d’une assez grande dureté; ses
couches plus ou moins inclinées vers le sud. Ces roches, qui n’ont
présenté jusqu’à ce jour aucuns débris fossiles, sont traversées en
certains endroits par des veines nombreuses de quartz blanc et par
SÉANCE DU 3 MARS 1851.
264
quelques liions de cuivre pyriteux, ayant pour gangue le fer car-
bonate spathique et la dolomie cristallisée. Entre les couches de
ces schistes on en rencontre d’autres formées de quartzite très dur*
dont la puissance varie de 0m,50 à 10 mètres.
Les calcaires marneux , désignés lettre D, sont blanc-grisâtres,
bleuâtres, d’une assez grande dureté dans quelques endroits, très
friables dans d’autres, en couches contournées, affectant la forme
des terrains jurassiques , traversés par de nombreuses veines de
chaux carbonatée cristallisée , se dirigeant dans tous les sens , et
par des filons composés de cuivre gris, de fer carbonate et de
baryte sulfatée. Ces filons, qui coupent verticalement les roches
calcaires et sont dirigés E. et O. , sont exploités par la Société
des mines de Mouzaia.
Les marnes argileuses, désignées lettre C, sont blanchâtres ou
grisâtres, et contiennent quelques coquilles fossiles, parmi les-
quelles on distingue les Ténus à 8 plis, les Peignes, etc.
Le travertin moderne , désigné lettre B , se rencontre sur tous
les points du petit Atlas et particulièrement dans la coupure de la
Chiffa , où il présente des masses assez puissantes ; ces travertins
sont très poreux et laissent voir dans leur intérieur de nombreuses
empreintes de feuilles et de fruits et des coquilles terrestres assez
bien conservées (l’Hélice tronquée, l’Hélice commune).
Les terrains de transport ou d’alluvion , désignés lettre A , sont
composés tantôt de sables plus ou moins fins, tantôt de cailloux
roulés provenant de débris de roches analogues à celles dont il est
parlé plus haut. Enfin les grès crétacés, désignés lettre E , sont dis-
posés par couches presque horizontales, et forment le portlt cul-
minant du mont Nador , près IMédéah; ce s grès sont durs, d’un
aspect ferrugineux , à pâte fine, quelquefois oolitlïique , renfer-
mant quelques espèces fossiles , parmi lesquelles on reconnaît plu-
sieurs variétés de Peignes, des Cames, des Huîtres et quelques
débris de Polypiers.
Cette note , quoique très abrégée , peut donner une idée de la
série des terrains qui composent le petit Atlas. Lors de mon arri-
vée en Algérie, j’aurai l’honneur d’adresser à la Société un mé-
moire détaillé sur la géologie cl’une partie de la province d’Alger
et des notes sur les gisements métallifères de cette contrée.
M. d’Archiac fait observer, à ce sujet, que déjà plusieurs
géologues, entre autres MM. Rozet, Renou et Fournel, ont
traité avec étendue la géologie de cette portion de l’Atlas.
SÉANCE DU S MARS J 851.
26ô
M. de la Pylaie donne quelques détails sur une voie romaine,
placée sur une tourbière, qui repose elle-même sur une flaque
d’eau.
Le même membre annonce avoir recueilli, prés de Gourtenay,
des ossements humains dans une couche meuble qu’il considère
comme du diluvium.
M. Abich , en mettant sous les yeux de la Société une vue
générale du grand Ararat, ajoute les détails suivants :
La vue (pi. V) qui accompagne la présente notice a été prise à
l’aide d’un petit théodolite. Les distances relatives de tous les points
essentiels pour saisir exactement les formes et les contours des
masses ont été levées au moyen d’angles verticaux et horizontaux
et tracées immédiatement sur les lieux. La vue place l’observateur
sur la cime du petit Ararat, et le regard, fixé sur le grand Ararat,
se trouve exactement dans le sens d’une ligne dont la direction, de
S.-E.-N.-O., est celle de l’axe d’un système volcanique elliptique
dont les deux centres sont occupés par les deux Ararat. Le système
en question s’élève sur une pente doucement inclinée vers le N.-E. ,
que forme le gradin naturel entre la haute plaine de Bajazed,
n° 17, et celle de l’Araxe, n° 16, 793 et 1479 mètres.
La position relative et la configuration des deux montagnes en
question sont les résultats d’un ordre de phénomènes bien diffé-
rents entre eux , qui se sont succédé les uns aux autres dans une
période , selon toute probabilité , très longue. L’efïet combiné de
ces phénomènes a produit dans le grand Ararat une montagne qui
affecte dans sa partie supérieure la forme d’un segment de cône
légèrement courbé. Ce cône, creusé au milieu, et tronqué vers le
N.-E., s’ouvre du côté de la plaine de l’Araxe, en faisant voir la
profonde vallée de Saint-Jacques sous forme d’une cavité de cratère
immense (1).
L’Ararat, vu du côté de l’Araxe, présente un dos de montagne
qui impose par sa largeur et par les grands et sauvages traits de
l’enfoncement cratériforme qu’il renferme. Cette vue de la mon-
tagne de face contraste singulièrement avec la forme régulière
d’un cône pointu et fermé de tous côtés , telle que la vue de la
montagne en profil la fait saisir, de la manière la plus satisfai-
sante, de la cime du petit Ararat.
(l) La nomenclature tatare a bien saisi les traits physiques carac-
téristiques de l’Ararat , en l’appelant Jgri-dag, c’est-à-dire montagne
courbée ,
2C)6
SÉANCE DU 3 MARS 1851.
La vallée de Saint-Jacques imprime au grand Ararat le type
d’un magnifique cratère de soulèvement. La structure intime de la
montagne y est mise à nu, et les roches tracliy tiques pétries de
pyrites, que l’on y trouve tantôt disposées en couches irrégulières,
tantôt en massifs de conglomérats grossiers, ne laissent pas de doute
sur la nature purement volcanique du mont célèbre de Noab.
Toutefois ce n’est pas dans la vallée de Saint-Jacques qu’il faut
chercher de véritables coulées de laves ou des cônes de scories et de
cendres , comme ceux qui hérissent le fond et les parois de la
vallée del Bove, sur l’Etna.
Dans toute l’étendue du Maranco d’Argouri jusqu’au pied du
glacier qui occupe le fond de la Caldera (2800 mètres, n° 12) ,
immédiatement au-dessous de la cime neigeuse de l’ Ararat , rien
n’affleure au jour qui rappelle un volcan de nos jours.
Les phénomènes éruptifs sur F Ararat, qui se distinguent par leur
grandeur et leur analogie avec ceux de nos jours, sont tous posté-
rieurs à la formation des massifs et des conglomérats trachytiques
du noyau de la montagne ; leur apparition remonte évidemment à
l’époque des derniers mouvements de dislocation, qui s’exercèrent
sur la partie centrale du système entier (y compris le petit Ararat),
et lui rendirent sa forme actuelle de cratère.
Les éruptions modernes, qui ont couvert F Ararat d’une forma-
tion bien récente de coulées de laves trachytiques et doléritiques,
se firent jour de préférence sur une bande qui traverse le système
dans la direction de son axe longitudinal. Par cette disposition
géologique, deux grandes régions éruptives, l’une diamétrale-
ment opposée à l’autre , se sont établies sur le versant septentrional
et méridional de F Ararat; celle qui est au N. embrasse une mon-
tagne conique très surbaissée et régulière, et tellement adossée à
la partie centrale de F Ararat, qu’elle fait partie essentielle du sys-
tème entier. Toute cette partie latérale de l’Ararat, qui porte lé
nom de Kipgoell , paraît être un produit d’éruptions laviques suc-
cessives. Elle se termine en plaine , doublement bombée , d’une
hauteur absolue de 3248 mètres environ. La régularité de cette
plaine, pour la plupart couverte d’un gazon, avec une riche flore
alpine , est interrompue par les résultats d’une immense éruption
de laves, qui eut lieu au milieu de la plaine. Des remparts gigan-
tesques de laves et de scories entourent le point d’émission de
cette grande coulée de lave trachytique, qui resta suspendue sur
le versant oriental de la montagne au deuxième tiers de sa hau-
teur. Deux vastes cavités cratériformes, tout près du point d’émis-
sion de cette lave, paraissent d’énormes enfoncements, qui ont
SÉANCE DU 3 MARS 1851.
267
lieu dans la voûte du Kipgoell. Ils mettent à nu, en profil natu-
rel, une succession de grosses couches de laves compactes, alter-
nant avec des masses scoriées et boursouflées. Ces deux cratères
remarquables se trouvent peut-être dans une dépendance néces-
saire de l’ éruption susdite , comme d’une autre qui fit sortir d’une
large crevasse , dans le flanc septentrional du Kipgoell , la grande
coulée de lave qui présente aujourd’hui les amas boisés de blocs
gigantesques de trachyte du Gorgan , faisant saillie, sous forme
d’un promontoire allongé, au pied du Kipgoell. Deux autres ca-
vités cratériformes, également adossées à la base de ladite mon-
tagne, trahissent une intime relation avec l’origine de tous ces
monticules et coulées de lave doléritique , qui se sont répandus
vers le N.-E. et avancés très loin dans la plaine de l’Araxe.
La région éruptive sur la pente méridionale de FArarat est
celle que la vue représente.
L’activité éruptive a ouvert ici , dans les flancs du grand Ararat,
une large crevasse , une fente d’éruption qui commence immé-
diatement au-dessous de la cime, en poursuivant sa direction vers
le S.-E. Dans la partie supérieure du cône de FArarat, cette
fente a laissé ses traces dans une sorte d’enfoncement sous forme
d’une niche allongée et croissante en largeur, en partant de la cime
vers la base. A la base de cette niche , le pied du cône fait insen-
siblement passage à une sorte de plaine doucement inclinée, qui
forme la voûte d’un grand terrain bombé , comparable, sous plu-
sieurs rapports, au plateau du Kipgoell, et pourvu également
d’un enfoncement cratéri forme considérable. Une prolongation laté-
rale de ce terrain bombé , dont le noyau consiste en trachyte à
gros cristaux de feldspath vitreux , affecte la forme d’une im-
mense coulée dont les extrémités tombent à pic et font voir des
parois de trachyte compacte , douées d’une structure grossièrement
prismatique. Les points désignés sous les nos 5 et Zj, sur la liste des
hauteurs, se rapportent à ce promontoire trachytique et détermi-
nent son inclinaison.
JJ endroit du campement supérieur, sous le n° 3 , se trouve au
pied de l’extrémité inférieure de ces masses de trachyte, qui sont
enclavées des deux côtés par des coulées de laves qui prennent
leur origine dans des hauteurs beaucoup plus considérables, sur
les flancs du grand cône. Une longue série de cônes cl' éruption s’est
établie sur la bande éruptive qui communique avec la niche
d’enfoncement susdite. Plusieurs de ces cônes font voir leurs cra-
tères réguliers , qui ont vomi de longues coulées de laves : ce sont
de véritables cônes de cendres , de scories , et de lapilli , et le plié-
268
SÉANCE DU 3 MARS 1851.
nomène du mouvement de la lave coulante y paraît fixé , encore
aujourd’hui , dans les masses contournées et scorifiées avec une
clarté et une fraîcheur étonnantes. D’autres monticules coniques,
qui font partie de ce groupe allongé de produits éruptifs, se com-
posent purement de masses scarifiées et boursouflées , en imitant
exactement, sur une échelle plus vaste, la disposition de cônes
sur une ligne , comme ils se trouvent figurés sur la planche lre de
mes Vues illustratives (1), dans laquelle j’ai cherché à reproduire
et à fixer, pour ainsi dire, un des états éphémères sur le plateau
du cratère du Vésuve en 183 A. Tous ces cônes et ces monticules
sont les effets contemporains d’une éruption latérale gigantesque ,
dans le sens d’une crevasse d’une longueur de plusieurs milles
géographiques, dont l’extrémité inférieure est marquée par la
position du grand cône de scories et de cendres nommé Karnyaryck
(n° 11), que l’on n’aperçoit pas dans la vue en question.
Les grandes traînées de lave qui sillonnent les flancs du cône de
l’Ararat, à droite de la vue, appartiennent toutes à des éruptions
latérales contemporaines qui se manifestèrent indépendamment
de l’activité des cônes alignés à gauche , et suivirent une autre
direction dans la région la plus élevée de la montagne. Un point
d’éruption principal, le même qui est indiqué sous le n" 7 de la
liste des hauteurs , s’aperçoit de face sur la vue. C’est un cône
d’éruption très caractéristique , dont les niasses déchirées et
noires font saillie à travers les neiges perpétuelles. Les coulées de
laves, sorties de ce point comme des autres, qui restent cachées
sous la calotte de neige et de glace, en face de la plaine de l’Araxe,
se présentent comme des digues gigantesques qui descendent de la
cime de l’Ararat vers la plaine. Pourvues d’une dépression canali-
forrne dans le sens de leurs axes longitudinaux, ces digues se divi-
sent en plusieurs ramifications qui se touchent mutuellement, et
se répandent en s’élargissant sur les parties inférieures et moins
escarpées de la montagne.
La ligne rouge ponctuée correspond à la route que j’ai prise à
différentes reprises dans mes excursions vers la cime de l’Ararat.
C’est la même route qui a été suivie par le colonel Chartrow,
en 1850.
Toute cette partie de la pente qui se trouve au milieu des deux
(1) Ces deux bords se dessinent sur la neige comme deux longues
traînées noires divergentes qui partent de la cime de l’Ararat; ils re-
présentent un alignement d’énormes blocs de trachy-porphyre rési-
nite noir, qu’il faut escalader pour arriver au point 8.
SÉANCE DU o MARS 1851 .
269
grandes régions éruptives ci-mentionnées offre un terrain plus uni,
moins couvert d’inégalités, et facile à être traversée à cheval
jusqu’au point n° 3. D’ici, l’on fait mieux de prendre le dos
du grand promontoire trachytique que de traverser, d’une ma-
nière très pénible, les arêtes tranchantes et aiguës des énormes
coulées de lave , de trachyte résinite noir, à gauche, pour arriver
au point n° 5. Deux routes se présentent à ce dernier point pour
gagner la cime du cône ; elles correspondent aux deux bords de la
grande niche d’enfoncement mentionnée plus haut, et bien visible
à la simple vue.
Repoussé, dans ma première tentative de montera l’Ararat,
le 16 août à trois heures de l’après midi, au point du bord
droit de cette niche n° 8, par un de ces orages momentanés qui
s’engendrent si fréquemment, et de préférence, sur le versant
méridional du système de l’Ararat, j’ai eu le même sort, pendant
la nuit du 23 août 18/tü , dans ma seconde tentative, à l’endroit
du bord gauche que la vue indique , à une hauteur plus considé-
rable que celle du petit Ararat. La violence de l’orage , qui com-
mença vers minuit, s’unissait aux phénomènes électriques les plus
immédiats et les plus intenses, durant lesquels l’échange , entre
l’électricité atmosphérique et celle de tous les corps voisins, était
tellement fort , que des lueurs électriques, sous la forme de pe-
tites flammes phosphorescentes, furent longtemps observées, sor-
tant des extrémités de plusieurs instruments métalliques , et volti-
geant au-dessus des pointes des bâtons ferrés, aussitôt qu’on leur
donnait la position verticale. Une forte averse de neige, qui se
continua pendant toute la nuit jusqu’à dix heures du matin, cou-
vrit le cône entier de la montagne d’une couche de grésil de plus
d’un pied d’épaisseur. La route que l’on avait prise pour traverser
les blocs aigus de la lave trachytique résineuse noire de l’arête sus-
dite fut rendue tellement impraticable, qu’il fallut descendre, en
glissant sur les pentes escarpées et neigeuses des talus de terrains
meubles qui conduisent de la hauteur des bords de la niche indi-
quée , dans le vaste espace de son intérieur, hérissé de petits gla-
ciers. La troisième tentative de parvenir à la cime du grand Ara-
rat, en prenant, le 3 septembre 18âû, la route de Kipgoell, sur le
versant septentrional du grand cône, ayant manqué à cause de la
déclivité des pentes arrondies, couvertes déglacé, je suis revenu la
quatrième fois sur mes pas, en dressant, le soir du 28 juillet 18Ô5,
mon camp à peu près au point nü 7 de la vue. Un massif trachy-
tique, sous forme d’un immense fdon, fait saillie ici. 11 esUtra-
yersé par plusieurs pentes et crevasses longitudinales , à l’aide
•270
SÉANCE m 3 MARS 1851.
desquelles on parvient à une partie plus élevée de la pente du cône,
où l’on recommence à rencontrer, au lieu de rochers en place , un
terrain meuble, composé de débris de roches très altérées par les
effets de décomposition.
Des rochers très semblables à ceux qui forment la partie cen-
trale de l’Ararat affleurent dans cette localité, comme dans l’inté-
rieur de la grande niche d’enfoncement susdite. C’est évidemment
la fréquence de la pyrite ( fer sulfuré ) dans cette roche , dont la
décomposition agit sur la destruction de la dernière, et influe par
ces effets sur l’absence de la neige dans cette hauteur. Les exha-
laisons sulfureuses que l’on ressert dans cette localité sont des
phénomènes collatéraux, et suites naturelles de cette même dé-
composition, dont les effets destructifs peuvent être examinés dans
l’intérieur de la vallée de Saint-Jacques dans toute leur puis-
sance.
Après avoir traversé la distance entière du point n® 7 jusqu’à la
cime de l’Ararat en six heures, j’atteignis le point n°9, le 29 juil-
let 18Ù5, à midi.
La cime de l’Ararat , comme il a été dit déjà plus haut, corres-
pond à la partie la plus élevée du bord occidental du grand cra-
tère de soulèvement.
Ce bord a le caractère d’un dos à surface doucement arrondie
et ondulée, munie d’une série de plusieurs collines très basses,
dont l’une touche immédiatement à l’autre , et qui se trouvent
alignées sur un plan commun, peu incliné vers le N. -O. Les deux
collines qui occupent une place moyenne sur ce dos indiqué, et
qui sont, par leur hauteur absolue, les plus propres à représenter la
véritable cime de l’Ararat, sont représentées dans la vue. Ces deux
points, dont celui qui est à gauche fut visité par Parrot, se dispu-
tent tellement le rang de la véritable et dernière cime de l’Ararat,
que les opérations excellentes de M. Tedoron , compagnon de
voyage de M. Parrot, ont renoncé à la tâche de fixer rigoureuse-
ment une différence de hauteur entre les deux collines, que l’œil,
placé en face de la montagne, n’est pas à même d’apprécier (1).
Le col qui sépare le cône du grand Ara rat de celui du petit ,
représenté sous le n° 2, forme un dos extrêmement plat, qui
renferme une plaine parfaitement horizontale , dont le diamètre
est un demi-kilomètre à peu près.
Les écueils qui font saillie dans l’avant-fond de la vue appar-
tiennent à la roche centrale du petit Ararat, très analogue à l’an-
(1) Voyez Reise zum Ararat , par Parrot.
SEANCE DU 17 MARS 1851.
îl\
désite des Andes de l’ Amérique méridionale. Les débris pierreux
qui abondent sur la cime du petit Ararat proviennent du délabre-
ment de cette roche, qui s’opère continuellement sous l’influence
des agents atmosphériques.
L’arrière- fond du dessin fait voir, à gauche du grand cône , le
gradin de la plaine de Bajazed, traversée en partie par les laves
doléritiques du système volcanique duTantoureck des Arméniens ,
à 10 de la ville de Bajazed ; plus loin s’observe la chaîne de col-
lines porphyriques qui séparent les bassins de l’Euphrate et de
l’Araxe. Le système trachytique de l’Agli-Dagh domine , au delà
de cette chaîne , la large vallée du Mouradtchad avec les eaux
chaudes du n" 21. Immédiatement au côté gauche du cône du
grand Ararat se présentent , l’un après l’autre , les magnifiques cra-
tères de soulèvement trachytique du Sor-Dagh et d’Aslanly-Dagh,
au delà desquels la vue se limite par les hauteurs volcaniques ar-
rondies du Synak et du Parly-Dagh, n° 27, qui entourent le lac
alpin Balykgoell, n° 28. La cime la plus éloignée, visible dans
cette direction , appartient au Kocsoc-Bagh.
A droite du grand cône de l’ Ararat , la vaste plaine de FAraxe ,
n° 16 , unie comme le fond d’un lac , est faiblement indiquée; à
perte de vue se tracent les contours , presque horizontaux , de la
plaine de laves doléritiques et basaltiques , entre l’Alaghez et le
fleuve Arpatohai.
Séance du 17 mars 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
delà dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance , le
Président proclame membres de la Société :
MM.
Lecoq (Henri) , professeur d’histoire naturelle à Clermont-
Ferrand (Puy-de-Dôme), présenté par MM. Constant Prévost
et Ch. Martins ;
Nicaise (Charles) , conservateur du Musée de Blidah et
secrétaire du comice agricole d’Alger, à Blidah (Algérie),
présenté par MM. Constant Prévost et de Yerneuil ;
272 SÉANCE DU 17 MARS 1854.
Pügüàard , ancien élève de l’École polytechnique de Copen-
hague, rue Richelieu, 12, présenté par MM. Élie de Beau-
mont et Ch. Deville.
Le Président annonce ensuite deux présentations.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. Ch. Martins, Essai sur la nature et l’ori-
gine des differentes espèces de brouillards secs (extr. de X An-
nuaire météor. de la France, année 4 850), in-h , p. 207 à
228. Versailles, chez Beau jeune.
De la part de M. Constant Prévost, Plusieurs notes extraites
des Comptes rendus des séances de P Académie des sciences ,
de septembre 1850 à mars 1851, in-/i, hh p. Paris, 1851,
chez Bachelier.
De la part de M. Puggaard, Moens géologie , etc. (Géologie
de Pile de Moens), in-18 , 287 p., 12 pl. Copenhague, 1851,
chez C. A. Reitzel.
De la part de M. le Dr de Haldat, De l’influence de l’expé»
rience sur le progrès des sciences et des ai'ts , in-8, 16 p.
Nancy, 1850, chez Vagner.
De la part de M. le Dr Lortet, Pénétrations et impressions
observées sur les galets de certains conglomérats et nagelfluhes
(extr. des Ann . de la Soc. nation . d* a g rie. , d’hist. nat. et des
arts utiles de Lyon , 1851), in-8, 11 p. Lyon, 1851, chez
Barret.
De la part de M. le Dr Ch. Robin , Rapport à la Société de
biologie par la commission chargée d’ examiner les communi-
cations de M. Souleyet relatives à question désignée sous le
nom de Phlébentérisrne (extr. du t. II des Compt. rend, et
mém. de la Soc. debiol., ann. 1851), in-8, 132 p. Paris,
1851, chez Baillière.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1851 , 1er sem. , t. XXXII, nos 9 et 10.
L’Institut, 1851, nos 896 et 897.
Bulletin de la Société de géographie , 4e sér., t. I, n° 1,
janv. 1851.
SÉANCE DU 17 MARS 1851. ' 273
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, n° 29, 4e année,
janv. 1851.
Annales de la Société nationale d’ agriculture , d’histoire na-
turelle et des arts utiles de Lyon , 2e sér., t. I , année 1849.
Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse , n° 111 ,
t. XXIII, 1850.
Mémoires de la Société des sciences , lettres et arts de Nancy .
1849.
Précis statistiques sur le canton de Betz , arrondissement
de Senlis [Oise) , et sur le canton de Noyon , arrondissement
de Compiègne [Oise) (extr. de Y Annuaire du département de
l’Oise de 1851 ) 5 2 yoh in-8 : l’un de 178 p., 1 carte ; l’autre
de 232 p., 1 carte.
The Athenœum, 1851, n08 1219 et 1220.
Philosophical Transactions of the royal Society of London ,
1850, part. 11.
— Fellows , etc. (Liste des membres de la Société royale de
Londres au 30 novembre 1850).
The quarterly journal of the géologie ai Society of London ,
no 24, vol. VI, nov. 1850.
Thirty-seoenth annual Report , etc. (Trente-septième Rap-
port annuel de la Société royale géologique de Cornouailles).
Penzance, 1850.
M. Viquesnel communique l’extrait suivant d’une lettre de
M. Boué.
La considération théorique que la terre ou sa surface peut con-
duire à l’idée que la terre est un cristal polyédrique , et non un
corps sphérique , a été détaillée, surtout par de La Metherie, dans
le Journal de physique , vol. XVII, p. 251; vol. XLII , p. 132;
vol. XLIII , p. 355; vol. XLVIII, p. 66; vol. LXXI , p. 172 et
382; vol. LXXI, p. 17; vol. LXXVIIl,p. 241; vol. LXXXI,
p. 288, et dans sa Théorie de la terre en 1795, et ses Leçons de
géologie ; par Oken ( Lchrhuch der Na turph ilosoph ie , 1809, p. 149-
154), et par Rob. Jameson (. Mem . LF'erner. nat. hist. Soc. Edinb .,
1814, vol. II, p. 221). Si ce dernier croit voir des surfaces de cli-
vage et des faces de cristaux dans les couches des montagnes et
leurs formes extérieures , il est curieux de lire ce que Oken a écrit.
Voici son résumé :
Soc. géol,, 2e série, tome VIII .
18
SÉANCE DU 17 MARS 1851
274
« La terre n’est pas un sphéroïde ; elle ne s’est pas formée par
l’agrégation de cristaux , mais elle est elle-même un cristal po-
lyédrique. La stratification des couches n’est que son clivage, et
celles-ci, ainsi que leur inclinaison, déterminent la forme fonda-
mentale du cristal. La direction et l'inclinaison des couches a lieu
d’après des lois cristallographiques déterminées , et ne sont point
une suite de la force de projection. Pour cela les deux propriétés
des couches ne peuvent pas être les mêmes sur toute la terre , mais
seulement sur une certaine étendue. De pareils parallélismes ne
peuvent avoir lieu que sur les côtés opposés du noyau terrestre.
La terre a été produite par le moyen de plusieurs axes de polarité
ou lignes centrales de cristallisation. Les parties de la terre au-des-
sus des eaux sont les arêtes, les angles et les faces du cristal Les
chaînes sont les arêtes , les massifs de montagnes les angles , et les
plaines les faces. Les recherches pétrographiques n’ont pas encore
déterminé l’espèce de polyèdre à laquelle appartient la terre. La
terre est un réseau régulier de crêtes, d’angles et de faces cristal-
lines représentées par les chaînes équatoriales méridiennes et celles
qui réunissent ces dernières diagonalement , ou par la verticale.
La longueur des degrés des méridiens ne se règle pas d’après leur
distance de l’équateur. Il doit y avoir sur toute la terre des degrés
de différentes longueurs , suivant que les mesures s’étendent sur
des arêtes bu des faces de la terre. La longueur d’un degré du
méridien ne peut être le principe d’une mesure générale , mais
bien le pendule seulement sous l’équateur au niveau de la mer ;
au moins cette mesure serait suffisante pour des milliers d’amaées,
car elle ne pourrait varier qu’en deçà de cette limite de temps.
Les vallées sont les résultats de la condensation de la masse ter-
restre par la perte de l’eau de cristallisation ; ce sont les fentes des
couches. Les montagnes ne sont que des lamelles du cristal ou des
parties cristallines éclatées. L’eau est incapable d’avoir produit les
premières vallées, etc., etc. »
J’ai communiqué à l’Académie d’ici mon observation de trois
trombes sur le lac de Janina. Après s’être élevées, ces trombes ne
sont point descendues du ciel, mais montées de C eau en t air, le
ciel étant pur, sans nuages et sans vent, temps très lourd et chaud.
Les particules d’eau avaient une rotation spirale de LE. à LO.,
avec une marche linéaire S.-IN . C’était évidemment un phénomène
électrique. Les entonnoirs étant en partie vides vers le milieu , j’ai
pu voir cela étant sur la montagne. Voici environ leurs formes :
SÉANCE T) U 17 MARS 1851. *275
Point de l’obsci valeur.
Mon mémoire est imprimé. Je compare les trombes aux
orages, etc., éclair descendant et montant aussi.
M. Bertrand Geslin met sous les yeux de la Société, en
même temps qu’un très bel échantillon iï Acidaspis Buchii ,
trouvé à Poligné , un fossile dont la nature parait encore dou-
teuse, et qui appartient aux mêmes formations des schistes
d’Angers.
M. Marie Rouault dit avoir trouvé un fossile semblable dans
les couches de Yitré, et qu’il a considéré comme un polypier.
M. Michelin possède aussi des échantillons d’un corps sem-
blable, auquel il n’avait pas cru pouvoir encore donner un
nom j il pense néanmoins qu’on peut le rapprocher du Miche-
linia compressa , qui existe à Tournay.
M. Barrande, autant qu’il peut conclure d’un examen super-
ficiel , trouve la plus grande analogie entre le fossile dont il
est question et une grande Gystidée qu’il a trouvée en Bohême.
M. Michelin objecte, à cette opinion, que dans les Crinoïdes
les plaques sont simples et lisses.
M. Barrande répond que ce caractère n’est pas général, et
qu’il existe des Cystidées dans lesquelles les plaques se recou-
vrent les unes les autres.
M. de Yerneuil dit qu’il partage l’impression de M. Barrande,
et que l’agencement des plaques dans ce fossile lui semble rap-
peler celui des plaques des Cystidées. Il ajoute que les Cystidées
se trouvent, en général, dans les couches de cette époque (silu-
rien inférieur).
Le trésorier présente le budget de la Société pour l’année
1851, arrêté par le Conseil, dans sa séance du 1/i mars courant.
Le budget est également adopté par la Société.
27 0
SÉANCE DU 17 MARS 1851
Budget des Recettes et des Dépenses pour 1851 ,
présenté par M. Ed. de Brimont, trésorier.
RECETTE.
DÉSIGNATION
O n3
RECETTES
RECETTES
SOMMES
des
i §
NATURE DES RECETTES.
prévues
au budget
effectuées
admises
chapitres de recette.
K ^
W
«
delS50.
en 1850.
pour 1851.
$1. Produits ordinaires
1
Droit d’entrée et de diplôme
( de l’année courante. .
440 .
500 »
500 .
2
8,500 .
7,985 »
8,500 .
3
■ Cotisations. . < desannées précédentes.
2,000 »
3,930 »
1,500 .
§2. Produits extraord.
4
( anticipées
300 .
270 00
300 .
des réceptions . .
5
| Cotisations une fois payées
300 .
1.200 »
600 »
6
\ / Bulletin
600 .
750 »
000 .
§3. Produits i
j 7 *
f 1 Histoire des progrès de
des publications. <
^ Vente de . . / la géologie
1,000 ■
938 50
1,300 »
1 8 i
\ i Mémoires.. . • • • •
800 .
20 .
1,040 .
28 .
1,000 ,
20 .
v cartes coloriées. . . .
/
: io j
ii i
| Arrérages de J '««« V" VÈ'^
1,557 .
32 .
1,585 .
32 .
1,585 .
32 .
12
Allocation de M. le ministre de l'instruc-
S 4. Recettes diverses. . /
tion publique
1,000 D
1,000 .
1,000 .
13
Recettes imprévues
100 .
93 .
100 ,
f
14
Remboursement de frais de mandats. .
25 .
14 70
25 ,
\
, 15
Recettes extraordinaires relatives au
1
Bulletin
50 .
37 50
50 .
16,724 »
19,404 30
17,112 ,
§ 5. Solde des comptes
de 1850
16
Relinuat en oaUne nu Al
a
150
B
25
B
32
35
25
»
450
B
1,247
90
700
B
100
B
15
50
100
B
17,225
•
18,311
80
18,775
B
DÉSIGNATION
de»
chapitre» de dépenfe.
$ 1. Personnel
§ 2. Frais do logement.
§ 3. Frais de bureau. .
§ 4. Encaissement. . .
§ 5. Matériel
% 6. Publications. . .
§ 7. Placement de ca-
pitaux
| S. Dép. imprévues. .
1
2
3
4
4 bis
5
6
|
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
21
NATURE DES DEPENSES.
t son traitement. ....
Agent. I travaux auxiliaires.. .
f gratifications
Garçon de bureau, j dation* '. '. !
Loyer, contributions, assurances .
Chauffage, éclairage
Dépenses diverses
Ports de lettres
Impressions d’avis, circulaires, etc.
Change et retour de mandats. . . .
Mobilier
Bibliothèque
Collections
Bulletin . . v ches
1 port
I Histoire des progrès de la géologie. . .
J r achat d’exemplaires . . .
f I dépenses supplémentai-
/ Mémoires, . e res
s j menus frais et coloriage
! \ de cari, es. . . .
Achat» de rentes sur l’État. . .
Avances remboursables
RÉSULTAT GÉNÉRAL.
La recette étant de 18,871 fr. 65 g.
Et la dépense de 18,775 »
La différence serait de 96 fr. 65 c
M. Nicaise communique les résultats suivants d’explorations
faites par lui durant le voyage de circumnavigation de la frégate
V Artémis e , pendant les années 1837, 1838 et 1839.
2/8
SÉANCE BU 17 MARS 1851.
Notices géologiques sur quelques points visités par la frégate
l’Artémise, pendant, son voyage autour du monde ( années
1837, 1838 et 1839) , parM. Nicaise, alors sous-officier de
marine, chargé des collections d’histoire naturelle à bord de
cette frégate, maintenant fondateur et conservateur du Musée
de Blidah (Algérie).
Ile Pyrarne ouMehun , dans le détroit de Bab-el-Mandel [mer Rouge),
L’île Pyrame , située presque au milieu du détroit de Bal-el-
Mandel , est élevée d’environ âO mètres au-dessus du niveau de la
mer ; quelques buissons rabougris et des touffes d’herbes éparses
composent sa végétation. Sa formation est due particulièrement
aux éruptions volcaniques qui ont traversé et soulevé les récifs de
polypiers et de madrépores dont les hauts-fonds de la mer Bouge
paraissent exclusivement formés.
Les masses éruptives désignées lettre A de la coupe de l’île sont
composées de :
1° Wacke cellulaire endurcie, noirâtre, enveloppant des cristaux
de feldspath vitreux ;
2° Wacke cellulaire endurcie, brun rougeâtre;
3° Wacke à structure compacte ;
U° Et enfin de wacke cellulaire , brun rougeâtre , avec cristaux
de calcaire spathiqué noirâtre.
Les masses traversées et soulevées , B , se composent d’un con-
glomérat et gallinace formé de nombreux débris de coquilles et
de madrépores à l’état fossile et assez bien conservés.
Parmi ces fossiles on reconnaît :
La Cardite Jason,
Le Peigne citrin ,
La Vénus treillissée ,
Le Madrépore fungite ,
Le Madrépore astrée ,
Le Madrépore caverneux ,
Etc., etc.
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
279
Dans certaines parties de File, les roches éruptives et celles tra-
versées et soulevées sont recouvertes par un sable siliceux G mé-
langé de débris de coquilles et de polypiers jetés par la mer.
Environs de Mascate , province de l’Yemen {Arabie).
Les roches à base de talc et de serpentine constituent la masse
dominante des montagnes situées sur le bord de la nier, entre
Mascate et Muttra; elles présentent des couches très puissantes
inclinées de l’O. à l’E. , et sont sillonnées par de nombreuses
veines de dolomie compacte blanche. Les points culminants de
ces montagnes se terminent par des arêtes vives et par des pics
aigus . d’où l’on aperçoit de profonds ravins stériles et sans eau , se
dirigeant dans toutes les directions.
A trois lieues dans l’intérieur des terres , près de la maison de
campagne de l’iman , les roches de serpentine disparaissent et
font place à d’autres , composées d’abord de pétro-silex talcifère
verdâtre, schistoïde, puis de calcaire primordial bleuâtre et
blanchâtre , aussi à structure schistoïde ; ces roches , qui sont tra-
versées par un jaspe phylladifère rouge, mélangé de pétro-silex
gris , paraissent avoir subi l’effet d’un affaissement.
Coupe prise près de la maison de campagne de l’iman de Mascate.
A Jaspe phylladifère rouge.
B Pétro-silex talcifère, verdâtre, schistoïde.
C Calcaire primaire, blauc et gris.
D Alluvions.
Ile d’Ormuz {golfe Per si ([ne ) .
Cette île est formée d’abord de roches de serpentine , puis de
dolomie et de gypse, surmonté d’une masse puissante de soude
muriatée ou sel gemme.
Les roches de serpentine, A, qui paraissent- former le terrain le
280
SÉANCE DU J 7 MARS 1851.
plus ancien de cette localité, sont tout à fait semblables à celles
des environs de Mascatc.
Les roches de dolomie, B, se présentent sous différentes for-
mes ; dans quelques endroits elles sont scliisto'ides et renferment
de nombreux cristaux de calcaire spathique noir; dans d’autres
elles forment des masses puissantes sans aucunes traces de stratifi-
cation. Ces dolomies , dont la couleur est grise ou noirâtre , enve-
loppent des amas de gypse compacte grisâtre , empâtant des grains
de quartz blanc , des pyrites de fer cristallisées en dodécaèdres , et
du soufre natif laminaire.
Les masses de sel gemme , C , sont superposées à la dolomie et
au gypse; leur puissance varie de 10 à 150 mètres. Ce sel, qui est
le plus souvent blanc et laminaire , présente des sommets à pic
qui s’aperçoivent de très loin.
Dans cette partie de l’île , et particulièrement auprès des ruines
de l’ancienne Ormus , les masses de sel sont recouvertes par une
terre argileuse rougeâtre, D, de plusieurs mètres d’épaisseur.
Nota. En parcourant l’île d’Ormus, on rencontre, à la superficie
du terrain et à 'plus de 12 mètres au-dessus du niveau de la mer,
des blocs énormes de roches serpentineuses presque entièrement
recouverts d’Huîtres , d’ Arches et de Cames , le tout à l’état fos-
sile. Ces coquilles se retrouvent vivantes sur les rochers qui bor-
dent le rivage.
Les roches dont il est parlé dans cette notice sont déposées dans
les galeries du Musée de minéralogie au Jardin des plantes.
M. d’Archiac communique, de la part de M. P. de Tchihat-
cheff, le résumé des résultats de son voyage, cette année, en
Asie Mineure.
Mémoire sur les terrains jurassique , crétacé et nummulitique
de la Bithynie , la Galatie et la Paphlagonie , par M. Pierre
de Tchihatcheff.
Depuis que j’ai eu l’honneur d’entretenir la Société d’une partie
des résultats que m’avaient fournis trois années d’explorations en
Asie Mineure, un nouveau voyage que je viens d’effectuer dans
cette intéressante contrée m’a mis à même de compléter mes re-
cherches par de nouvelles observations, dont quelques unes peut-
être ne paraîtront pas indignes de sa bienveillante attention.
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
281
Dans mon mémoire (1) sur les dépôts sédimentaires de l’Asie
Mineure j’avais essayé de déterminer l’extension que pouvaient
avoir dans cette péninsule les terrains nummulitique et crétacé,
en me basant particulièrement sur des caractères paléontologiques ;
de même j’avais signalé, dans cette contrée, l’existence du terrain
jurassique au S. -O. de la ville d’Angora (Galatie). Le voyage que
je viens de faire a eu particulièrement pour objet de savoir si ,
dans les parties encore non explorées ou imparfaitement connues
de la Bithynie , de la Galatie et de la Paphlagonie , les terrains
susmentionnés ont quelque développement, ou bien s’ils s’y trou-
vent remplacés par d’autres formations. Or, j’ai été assez heureux
pour découvrir, non seulement de vastes dépôts crétacés dans la
partie septentrionale de la Bithynie, et des dépôts nummulitiques
dans les régions centrales de la Paphlagonie, mais encore d’ajou-
ter un nouveau dépôt jurassique à celui que j’avais déjà signalé
dans la même province (2). C’est par l’examen de ce dernier que
je commencerai , et l’esquisse d’une carte géologique que je joins
à ce travail en facilitera l’intelligence (voyez pl. VI).
Terrain jurassique.
Sur la lisière S.-E. de la Bithynie s’élève une longue chaîne en
formé de croissant, dont la concavité est tournée au N.*0. Son
extrémité occidentale, qui porte le nom de Kurmalu-Dagh (3),
se rapproche du golfe de Nicomédie, et n’est séparée du lac Sa-
bandja que par le fleuve Sangarius ; l’extrémité N.-E. est désignée
par le nom de Boli-Dagh , ou mont Boli , et sépare le bassin où est
située la ville de ce nom (A) de celui où se trouve la ville d’Uskub.
(1) Yoy. Bulletin de la Soc. géol. de France, 2e sér., t. VII, p. 388,
séance du 15 avril 1850.
(2) La Galatie.
(3) Le mot dagh signifie , comme on le sait , en turc , montagne ,
mont.
(4) La ville de Boli, où je me suis arrêté quelque temps, et qui
probablement occupe les environs de l’antique Bithynium , est au
nombre de ces localités de l’Asie Mineure qui , malgré leur proxi-
mité de la capitale de l’empire Ottoman , sont encore complètement
inconnues. Aussi, dans son excellent ouvrage intitulé: Histoire des
découvertes géographiques , M. Vivien de Saint-Martin a pu dire,
avec raison (Asie Mineure, vol. II, p. 466): «L’intérieur de la
» Bithynie, comprise entre l’embouchure du Sangarius et le Bosphore,
» formant le canton de Khodja Ili , n’a encore jamais été visité var
282
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
Enfin la partie centrale de la chaîne est désignée par le nom de
mont Abbas (Abbas-Bagh). Ces trois chaînes ne forment qu’un
seul rempart continu, que nous désignerons par le nom collectif
de mont Abbas. Dirigé en amphithéâtre du N.-N.-E. à i’O., et
ayant une largeur moyenne de 10 à 15 kilomètres, il est séparé au
S.-E. et au S. par la vallée de Boli d’un autre rempart égale-
ment très allongé, d’Alla-Dagh (mont de Dieu).
La chaîne du mont Abbas a cela de fort remarquable, qu’elle
appartient à trois âges géologiques differents. Son revers septen-
trional, ainsi que nous le verrons plus tard, est composé de
dépôts numihulitiques , sa partie centrale de terrains paléozoïques,
et une partie de son revers méridional de dépôts donthâge est fort
difficile à déterminer directement, mais qui se rattachent si inti-
mement à ceux qui, plus au S., sont caractérisés par Y Ammonites
biplex , Sow., qu’il est impossible de les en séparer et de ne pas
les considérer comme faisant partie d’un lambeau isolé de terrain
jurassique, exactement semblable à celui que dans mes précédents
voyages j’avais signalé au S. d’Angora, et conséquemment à peu
de distance à l’E. de celui dont il s’agit. Ce lambeau formerait un
oblong irrégulier, allongé du N. -O. au S.-E., et limité au N., au
N. -O. et à l’O. par des terrains paléozoïques , à l’E. par le domaine
trachytique de l’Alla-Dagh, et au S. et S.-O. par les vastes dépôts
lacustres du bassin du Sangarius; il aurait du N.-E. au S.-O. envi-
ron 80 kilomètres de longueur, sur une cinquantaine de largeur.
La limite septentrionale de ce domaiue jurassique s’appuie sur le
revers méridional de l’Abbas-Dagh , dans le voisinage de la ville
de Mudurlu, tandis que l’ extrémité S.-E. est à peu près marquée
par la ville de Nalahan, située à environ 150 kilomètres à l’Q.
d’Angora.
La surface de cette région ainsi délimitée est plus ou moins
montagneuse ; elle est traversée par les embranchements méridio-
naux du mont Abbas, et la prolongation occidentale de rAlla-Dagh.
Ces massifs sont séparés par des vallées étroites , dont les princi-
pales sont : la vallée arrosée par le torrent Boli , et celle que tra-
» aucun voyageur . » En effet , cette contrée , située presque aux portes
de Constantinople, est laissée en blanc sur la belle carte de M. Kie-
pert ; elle est cependant assez peuplée et renferme beaucoup de vil-
lages, ainsi que le prouvera ma carte de l’Asie Mineure, que je suis
occupé à rédiger en ce moment, mais dont la publication n’aura lieu
qu’après que j’aurai visité encore une fois les contrées qu’elle dok re-
produire sur une grande échelle.
i
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
288
verse l’Alansou. La physionomie générale 'du pays est plus ou
moins pittoresque; les montagnes sont le plus souvent revêtues de
belles forêts, qui contrastent quelquefois avec la nudité des val-
lées dont le fond est presque toujours couvert d’épais dépôts dilu-
viens.
La nature de la roche qui compose ce domaine est assez variée.
Tantôt ce sont des calcaires blancs, sableux , rappelant à s’y mé-
prendre les calcaires à ïnocérames de la Bithynie , tantôt des
marnes de teintes diverses, ou des grès compactes, à grain très fin,
disposés en dalles, dont le plongement dominant est au S. 10° E.,
sous un angle de â0°. Ces grès forment des deux côtés de la vallée
de Mudurlu des zones obliques tracées avec une admirable régu-
larité. Les couches y plongent au N. -N. -O., sous un angle de 70°,
ce qui n’empêche point que, dans plusieurs endroits, des couches
presque horizontales ne se voient à côté de strates verticaux. A
peu de distance au S. de Mudurlu se trouve la prolongation occi-
dentale de la chaîne de l’Alla-Dagh , sur le revers méridional de
laquelle on voit la roche se présenter sous la forme de marnes jau-
nâtres, compactes, homogènes, à cassure conchoïde, divisées en
dalles minces qui se trouvent empilées les unes sur les autres, et
font exactement l’effet d’un immense tas de petites planches de
bois. Toutes ces dalles sont disposées horizontalement, ou bien
légèrement inclinées au N. et N.-E., et se trouvent en contact
avec des rochers trachy tiques, tandis que, plus au S. , et par con-
séquent à une plus grande distance de ces foyers éruptifs, on
voit des marnes semblables associées à des grès présenter le plus
grand bouleversement dans leur stratification , ce qui semblerait
prouver que les éruptions trachy tiques que l'on observe dans le
terrain qui nous occupe n’ont pas été toutes simultanées , mais
ont, au contraire, des rapports d’âge fort différents avec les roches
qui se sont successivement déposées pendant la formation de ce
terrain.
La lisière méridionale du domaine jurassique est marquée par
la vallée d’Àllansou, qui n’est séparée du grand bassin lacustre
du Sangarius que par une série de hauteurs dirigées de FO. à l’E.
Ces hauteurs, comme celles qui bordent la vallée au N., sont ré-
gulièrement sillonnées par des couches de grès noir alternant avec
des marnes grises , feuilletées, et formant des bancs inclinés au N.
ou au S. -O. Ces roches se colorent quelquefois de teintes rouges,
jaunes et bleues, ce qui donne à la contrée cette physionomi
particulière qui rappelle le type si caractéristique des dépôts de
grès rouges dans les régions du Kizil-lrmak, avec cette différence,
SÉANCE Bü 17 MARS 1851
284
toutefois, qu’au lieu de ces surfaces nues et arides qui distinguent
les régions susmentionnées, la vallée d’Allansou est revêtue d’une
riche végétation , dont la verdure forme avec les teintes vives des
rochers un contraste des plus pittoresques. A mesure qu’on avance
dans la vallée d’Allansou de FO. à F E., pour se rendre à Nalahan ,
les montagnes des deux côtés offrent des exemples de plus en plus
nombreux d’une violente perturbation dans la stratification. Les
grès et les marnes à teintes vives passent à un calcaire blanc
crayeux, alternant avec des calcaires siliceux et des marnes foncées,
et forment des couches plissées et tordues avec une variété si ad-
mirablement symétrique , que de loin on croit voir les flancs et les
sommets des montagnes chamarrés d’arabesques et de festons, et
hérissés de tourelles et de palissades.
C’est dans le voisinage de Nalahan que ces montagnes renfer-
ment des empreintes d’ Ammonites biplex , dont la présence m’a
décidé à ranger dans la formation jurassique toute la série de
roches qui composent la contrée, depuis le revers méridional de
la chaîne d’Abbas jusqu’à la vallée d’Allansou inclusivement, qui
sépare ce domaine jurassique du bassin lacustre du Sangarius.
Ainsi, dans l’état actuel de nos connaissances sur l’Asie Mineure,
le terrain jurassique s’y présente sous la forme de deux lambeaux
isolés, placés à peu de distance l’un de l’autre, et séparés phr le
domaine trachytique de l’Alla-Dagh (1) et le grand bassin lacustre
que traverse le cours supérieur du Sangarius. La portion du ter-
rain jurassique que je viens de signaler offre la plus grande analo-
gie avec celle dont j’ai déjà eu l’honneur d’entretenir la Société
dans mon mémoire sur les dépôts sédimentaires de l’Asie Mineure,
et qui est caractérisée par Y Ammonites tortisulcatus , d’Orb., A. ar -
duennensîs) d’Orb., A. tatricus , Puch., et A. biplex , Sow. C’est
cette dernière espèce seule que j’ai trouvée dans la portion du
domaine jurassique qui nous occupe.
Quoi qu’il en soit, il paraîtrait que les dépôts jurassiques que
j’ai signalés dans l’Asie Mineure appartiennent à Y Oxford-clay;
mais il ne faut pas perdre de vue que les fossiles sur lesquels re-
pose cette classification sont loin de désigner d’une manière bien
(l) C’est Y Olympus gcilaticus, ou Mans Ormenium des anciens. Je
viens d’explorer dans toute son étendue ce magnifique rempart, dirigé
de l’ouest à l’est. A l’exception de son extrémité occidentale , compo-
sée, comme nous venons de le voir, de roches jurassiques, toute la
chaîne de l’Àlla-Dagh n’est qu’une masse énorme de trachyte qui m’a
fourni d’intéressantes observations.
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
285
tranchée l’étage oxfordien. En effet, si d’un côté, dans beaucoup
de localités, et entre autres dans les Alpes orientales et les Car-
patlies , X Anunonites tatricus et X A. tortisulcatus sont, selon
M. Hauer (1), au nombre des fossiles caractéristiques de l’assise
oxfordienne, de l’autre X Ammonites tatricus a été trouvé en
France dans le lias supérieur et dans le terrain néocomien; il en
est de même de X Ammonites biplex , qui, selon M. Fraas (2), dans
le midi de l’Angleterre, est tout aussi caractéristique pour le
Portland-stone que pour X Oxford-clay. Ainsi, sans désigner les dé-
pôts jurassiques de l’Asie Mineure comme rigoureusement oxfor-
diens, on pourrait se borner, pour le moment, à les signaler
comme appartenant à ce grand type du jurassique méditerranéen ,
qu’a si bien fait ressortir M. Y, Thiollière (3) dans son travail sur
les terrains jurassiques du bassin du Rhône.
Terrain crétacé .
Dans la région septentrionale de la Bithynie , le terrain crétacé
se trouve si largement développé, qu’il s’avance presque jusqu’à la
proximité immédiate de Constantinople , en bordant à l’E. la
bande paléozoïque du Bosphore, comme le terrain nummuli-
tique (à) borde cette dernière à l’O. du côté de la Thrace. En
effet, après avoir franchi l’embouchure du Bosphore pour longer
le littoral septentrional de la Bithynie, on s’est à peine éloigné
du canal d’une soixantaine de kilomètres, que l’on voit percer
partout une roche calcaire blanche très différente des calcaires et
schistes noirs dévoniens qui encadrent le Bosphore des deux côtés.
Fréquemment interrompus par des éruptions trachytiques, ces
calcaires blancs forment , sur plusieurs poi nts du littoral, et nom-
mément au N.-E. du village Kilichly (5), des falaises abruptes;
c’est un calcaire blanc, quelquefois cristallin, éclatant sous le
marteau comme de la dolomie, divisé en bancs puissants, soit ver-
ticalement redressés, soit inclinés au N. sous un angle de 70°
(1) Leonhard, Nettes Jahrbuch , 1850, p. 734.
(2) Ibid., p. 174.
(3) Bulletin de la Soc . géol. de France , 1847, 8 novembre.
(4) Ainsi que je le prouverai dans un travail que j’aurai l’honneur
de soumettre très prochainement à la Société , sur le bassin de la
Thrace.
(5) A huit heures à l’est de l’embouchure septentrionale du Bos-
phore.
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
286
à 80°. Ce calcaire devient crayeux et friable près de la petite ville
de Cliilé (située à treize heures de marche du Bosphore), et y
forme également de beaux rochers le long du littoral , ainsi que
sur l’espace qui s’étend entre Chilé et Sungurlu (situé à sept heures
de marche à l’E. de Chilé). Aussi , à mesure que l’on s’avance le
long du littoral bithynien , les calcaires prennent de plus en plus
le caractère d’une roche crétacée alternant avec des grès et des
marnes bleuâtres et blanches feuilletées; cependant toutes ces
roches y présentent toujours un redressement plus ou moins vio-
lent dans la disposition de leurs couches , dont le plongement
dominant est au N. et N. -O. Maintenant, lorsqu’ après avoir longé
le littoral jusqu’à Sungurlu, on le quitte pour entrer dans l’inté-
rieur du pays, et que l’on fait de N. au S. une coupe transversale
de la Bithynie, depuis la côte de la mer Noire jusqu’à l’extrémité
orientale du golfe de Nicomédie, on se convainc que tous ces
dépôts calcaires qui bordent le littoral de la mer Noire, non seu-
lement prennent de plus en plus un habitus éminemment crétacé,
à mesure que l’on s’éloigne de la côte , mais encore perdent in-
sensiblement dans la disposition de leurs couches toute apparence
de perturbation. Aussi les roches trachytiques qui , sur le littoral ,
se trouvent si fréquemment en contact avec les roches crétacées,
disparaissent tout à fait dans la partie centrale de la région. La coupe
ci-jointe (n° à), faite de Sungurlu (1) jusqu’à la ville de Nicomé-
die (2), sert à mettre au jour la relation intime qui existe entre
[]) Le village de Sungurlu se trouve à une heure au sud du littoral
de la mer Noire, et à sept heures à l’est de Chilé, ce qui donne pour
Sungurlu environ vingt lieues de distance du Bosphore. Sungurlu est le
chef-lieu du district nommé Avé. Comme tant d’autres localités de
cette partie de la Bithynie , Sungurlu ne se trouve point sur la carte
de M. Kiepert , ce qui n'est pas étonnant; mais ce qui donne un
exemple curieux de l’ignorance complète où l’on s’est trouvé jusqu’à
aujourd hui , je ne dis pas sur les contrées éloignées de l’Asie Mineure t
mais même sur une région située pour ainsi dire à la porte de la ca-
pitale,c’est que le nom estropié du district A vé figure sur la carte pour
désigner une ville Agvé qui n’a jamais existé. C’est à peu près comme
si un voyageur arrivant en Normandie et entendant prononcer le nom
de cette région , allait immédiatement placer sur sa carte une ville
nommée Normandie.
(2) Nommée aujourd’hui Ismit, qui donne également son nom au
golfe sur l’extrémité orientale duquel cette ville est située.
En plaçant sur notre carte la ville de Nicomédie dans le domaine
crétacé, nous nous empressons de répondre à l’objection que pourrait
faire naître ce que , dans notre Mémoire sur les dépôts sédimen taires
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
287
les falaises calcaires du littoral septentrional de la Bithynie et les
dépôts à fossiles crétacés qui occupent toute la partie centrale de
la presqu’île bitbynienne jusqu’au golfe cl’Ismit.
En effet, plus on s’avance au S., plus on voit les couches cal-
caires associées aux grès et aux marnes perdre de leur inclinai-
son, et ne former que tout au plus un angle de 15°, en conservant
presque toujours le même plongement au N. et N. -O.
Près du village d’Aptypacha, situé àtrois heures et demie de mar-
che auS.-E. de Sungurlu, sur la route qui conduit à Ismit, les cal-
caires marneux blancs, presque horizontalement stratifiés, ou bien
n’ayant qu’une légère inclinaison au N. 10° O., renferment une
immense quantité d’ Innceramus (1), appartenant tous à une espèce
très voisine de Ylnaceramus Crispii , Mant. Aces Acéphales se
trouvent associés , quoique en nombre moins considérable : Rete-°
pora? Ananchytes ? fragments d’un Echinoderme indéterminé;
articulations deCrinoïdes; Ammonites , voisin (Y A. varians, Sow. ;
Terebratida , voisine delà T. semiglobosa , Sow. ; [Orbicula?) ; plu-
sieurs bivalves indéterminables.
Toute la contrée depuis Apty pacha jusqu’à Euhtyogiau, qui en
est éloigné de trois heures et demie, est parfaitement caractérisée
de l’Asie Mineure , nous avions dit relativement à la délimitation
des dépôts nummulitiques , signalés par nous sur le littoral méridio-
nal du golfe de Nicomédie , et que, pour cette raison, nous avions
nomm è domaine de Nicomédie. Mais nous rappellerons les réserves ex -
presses sous lesquelles nous nous étions permis cette délimitation , en
disant qu’ayant reconnu l’existence de dépôts nummulitiques sur le
littoral susmentionné, qui jusqu'ici avait été à tort considéré comme
exclusivement paléozoïque, nous n’étions pas à même de donner pour
le moment la circonscription rigoureuse de ce dépôt, et nous nous bor-
nions simplement à le désigner sous le nom de domaine nummulitique
de Nicomédie, à cause de la proximité de cette ville. Depuis la lec-
ture de notre mémoire, nous entreprîmes l’exploration de la presqu'île
do Bithynie, et ce fut alors (dans le courant de l’été passé) que nous
constatâmes, que non seulement la ville de Nicomédie était située
dans le domaine crétacé , mais que cette formation embrassait presque
la totalité de la péninsule bithynienne, péninsule qu’avant notre ex-
ploration on avait considérée comme composée en grande partie de
roches paléozoïques.
Il s’ensuit naturellement que l’ancienne dénomination par laquelle
nous avions désigné provisoirement le dépôt nummulitique du littoral
méridional du golfe de Nicomédie ne peut plus être conservée, puis-
qu’elle impliquerait contradiction.
(1) La détermination de tous les fossiles cités dans ce mémoire est
due à l’amitié de notre savant confrère M. d’Archiac.
288
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
par Xlnoceramus dont il s’agit; mais plus au S., à mesure que l’on
s’approche de Nicomédie, les fossiles deviennent de plus en plus
rares; en même temps, les calcaires marneux qui les renferment
se trouvent remplacés par des schistes marneux, couleur lie de vin,
non fossilifères, associés à des grès solides micacés, de teinte grise
et à grain tellement fin, qu’on les prendrait pour une roche homo-
gène ; de plus, ces grès et les calcaires qui les accompagnent par
places subissent quelquefois des modifications très notables dans
leur stratification, car les couches sont très fortement redressées
et plongent indifféremment au N. 20° O. et à l’E. 15° S., mais à
mesure que l’on descend vers la plaine d’Ismit, les strates repren-
nent leur horizontalité ou bien n’offrent que le plongement habi-
tuel au N. -O. sous un angle de 10 à 15 degrés.
Tout près d’Ismit, les hauteurs sont presque exclusivement
composées de grès rouges, jaunes, gris, très compactes et passant
à une brèche solide ; or, on voit empâtés dans ces grès des frag-
ments de schistes de couleur lie de vin, que j’ai déjà mentionnés
comme intimement liés avec les calcaires à Inocérames, tandis
que la brèche à son tour renferme des fragments de calcaires gris
qui ne sont qu’une variété des mêmes calcaires fossilifères ; il en
résulte que les grès comme les brèches, qui ne forment qu’une
série avec les calcaires à Inocérames, ne sont que les membres de
la même formation, ou tout au plus que les assises supérieures de
cette dernière.
Ainsi, nous voyons que la coupe faite au travers delà Bithynie,
depuis la mer Noire jusqu’au golfe d’Ismit, conduit à admettre
que les grès, les brèches et les marnes feuilletées qui, à l’extrémité
méridionale de cette coupe , sont la continuation des calcaires à
Inocérames qui en constituent les parties centrales, ne forment
qu’une portion intégrante du même terrain, malgré les modifica-
tions locales dans leurs caractères stratigraphiques. Cette conclu-
sion se trouve confirmée par l’examen de la lisière méridionale
des montagnes qui terminent notre coupe au S., c’est-à-dire sur
le golfe de Nicomédie.
En effet, lorsqu’on s’avance à l’est de la ville d’Ismit en suivant
le pied des hauteurs qui bordent au N. la belle plaine de Nico-
médie, on voit que toutes ces hauteurs, qui ne sont que les sail-
lies méridionales par lesquelles se termine le grand massif de la
Bithynie que nous venons de couper du N. au S., sont générale-
ment composées des grès rouges précédents , alternant avec des
marnes feuilletées et des calcaires blancs, à la vérité non fossili-
fères, mais en tout semblables aux calcaires caractérisés par les
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
289
Inocérames. À cinq heures environ à l’est de Nicomédie, cette
chaîne de montagnes s’avance vers le lac de Sabandjaet en forme
la rive septentrionale où de nombreuses dénudations mettent par-
tout à découvert des couches régulièrement stratifiées de grès
rouges, de marnes blanchâtres feuilletées et de calcaire blanc à
cassure conchoïde ; ces couches sont tantôt inclinées à l’E. , au
N. -O. , au N.-E. et au N., sous des angles qui varient de 15 à 14
degrés. Maintenant, si du bord septentrional du lac de Sabandja
on continue à se diriger à l’E. jusqu’à la ville d’Adabazar et au
Sangarius, dont cette ville n’est éloignée que d’une demi-heure ,
on voit les mêmes grès alternant avec des calcaires marneux pré-
senter les mêmes conditions stratigraphiques , et ce qui est bien
plus important, c’est qu’à deux heures au N.-E. de l’extrémité
orientale du lac, et par conséquent à huit heures seulement de
Nicomédie, on voit dans ces calcaires reparaître les Inocérames
déjà mentionnés ; preuve bien évidente que dans la coupe N. -S ,
comme dans celle que nous venons de faire de l’O. à l’E. (1), nous
avons toujours la même succession de grès, de marnes et de cal-
caires, tantôt caractérisés par des Inocérames crétacés, tantôt com-
plètement dépourvus de fossiles. En continuant la coupe dont il
s’agit, à l’est d’Adabazar, on arrive, après huit heures de marche,
au village d’Handek , placé en quelque sorte sur la limite S.-E.
du domaine crétacé de la Bithynie; car, près de ce village (2), le
domaine crétacé se trouve interrompu dans cette direction par des
roches paléozoïques et tracliytiques formant une bande étroite qui
s’avance vers le nord sans toutefois atteindre le littoral septentrio-
nal de la mer Noire où le terrain crétacé de la presqu’île bithy-
nienne , que nous venons de décrire , continue à composer la côte
et va se confondre avec les dépôts du même âge que j’ai déjà si-
gnalés dans les environs d’Erégli(3).
De cette manière, l’existence d’un vaste domaine crétacé, suffi-
samment caractérisé par ses fossiles, se trouve constatée depuis les
environs d’Erégli jusqu’au delà de Chilé, c’est-à-dire jusque dans
le voisinage immédiat du Bosphore , ce qui donne une ligne cô-
tière de près de 250 kilomètres de développement ; de plus, nous
avons fait voir qu’à l’exception d’une bande étroite d’environ
12 lieues de long sur une quinzaine de large, le terrain crétacé oc-
(1) Depuis l’extrémité orientale du golfe de Nicomédie jusqu’au
Sangarius, dans les parages d’Adabazar.
(2) Éloigné d’environ huit heures de marche à l’est de Nicomédie.
(3) Yoy. Mémoire sur les dépôts sédimentaires de l’Asie Mineure.
Soc. géol., 2e série, tome VIII . î9
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SÉANCE DU 17 MARS 1851.
cupe toute cette partie de la Bithyme, enclavée, comme presqu’île,
entre La mer Noire et le golfe de Nicomédie.
Terra i n n il m ni u l i tiqu e .
En faisant une coupe de FO. à FE. de l’extrémité orientale du
golfe de Nicomédie jusqu’au delà du Sangarius, nous avons vu
qu’elle traversait partout des dépôts crétacés et ne rencontrait les
domaines paléozoïque et tracbytique qu’à quatre heures environ à
l’est du Sangarius, c’est-à-dire dans les environs du village de Han-
dek. Or, si l’on continue cette coupe dans la même direction, on
trouve que les deux sortes de roches sus-mentionnées ne consti-
tuent qu’une bande d’environ huit lieues de largeur, qui sépare le
domaine crétacé du domaine nummulitique. En efïet, lorsqu’on
se dirige de Handek (1) vers la ville d’Uskub, on n’a pas plutôt
franchi la contrée montagneuse et pittoresque occupée par les érup-
tions trachytiques , qu’à trois heures environ au S. -O. d’Us-
kub (2) , on voit, clans la belle plaine où se trouve cette ville, affleu-
rer des couches presque horizontales d’un grès jaunâtre à petits
grains, contenant plusieurs Pecten dont, à la vérité, je n’ai pu ob-
tenir aucun exemplaire déterminable, mais qui cependant ont tous
un faciès éminemment nummulitique ; d’ailleurs, ces grès se rat-
tachent immédiatement à d’autres dépôts limitrophes, dont l’âge
ne peut laisser aucun doute ; car, à cinq lieues au S -E. d’Uskub,
sur le chemin qui conduit à Boli à travers la montagne de ce nom,
on voit, au pied même de son revers septentrional, des rochers
considérables tout pétris de Nummulites ( Numnuilina Ramondi ,
Defr. ; N. scabra , Lamk. ; N. Lucasiqna , Defr. ; N. spira ? d e Roissy.)
La roche qui renferme ces Nummulites est un calcaire siliceux,
extrêmement dur, et tellement différent dans son aspect et ses pro-
priétés oryctognostiques des roches qui figurent dans le terrain
nummulitique de l’Asie Mineure, que sans les fossiles qui les ca-
ractérisent, on ne se serait jamais avisé de le ranger dans ce ter-
(1) Je n’ai pas besoin de signaler l’impossibilité de retrouver sur
aucune carte la plus grande partie des noms de villages et de bourgs
cités dans ce travail , car il s’agit d’une contrée inconnue à nos carto-
graphes.
(2) Uskub occupe très probablement la place de la célèbre Pa ndas ;
ce misérable bourg renferme une foule de beaux restes d’antiquité qui
attendent encore les explorations des archéologues. Le naturaliste ne
peut consacrer à ce genre d’étude le temps qu elles réclament.
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rain. A mesure que Ton gravit le montBoli, toute trace organique
disparaît et les calcaires siliceux se trouvent insensiblement rem-
placés par un calcaire bleu, schisteux, tellement analogue aux
calcaires paléozoïques et surtout à ceux des environs de Constan-
tinople, qu’il devient difficile de ne pas admettre que les dépôts
nummulitiques constituent seulement une lisière le long du pied
septentrional de cette chaîne, et que le noyau ainsi que le revers
méridional du Boli-Dagh forment une seule masse de roches paléo-
zoïques qui , non seulement composent une partie de la vallée où
se trouve la ville de Boli, mais s’étend encore à l’est de cette der-
nière jusque près de Kérédi, où reparaissent les dépôts nummuli-
tiques. Kérédi, qui se trouve à l’extrémité N. -O. de la Paphlago-
nie, est situé dans une vaste plaine que borde au N. le magnifique
massif trachytique de la chaîne de i’Alla-Dagh. Les roches érup-
tives percent dans la plaine jusque près de la ville où elles dispa-
raissent sous un calcaire sans fossiles, associé à des grès jaunes,
friables, qui renferment les espèces suivantes: Nummulina Ra-
mondï , Delr. ; Alveolina subpyrenaica^ Leyin. (ou longa , Czj.?);
A. indét.; Orbitolite voisine de ï O. complanatt 7,Lamk. ; Miliolites;
Lucina ambiguct , Befr.; L. indét. ; Sponclylus indét. ; autre bivalve
indéterminée.
Les grès nummulitiques de Kérédi se trouvent associés à deux
roches dont il serait impossible de déterminer l’âge, si les principes
d’analogie, et surtout leur relation intime d’un côté avec ces grès,
et de l’autre avec les conglomérats de Kastamouni, dont nous par-
lerons tout à l'heure, ne nous autorisaient à les considérer comme
faisant partie de la même formation. La première de ces roches
est un calcaire gris, à texture compacte , homogène et à cassure
conchoïde, qui forme de beaux rochers dans les environs de la vilie ;
la seconde est un conglomérat qui compose non seulement le mont
Kérédi au pied duquel se trouve la ville de ce nom, mais encore
une grande partie des montagnes dont est bordée la vallée au tra-
vers de laquelle passe la route de Kérédi à Baïndir. Ce conglomé-
rat forme une brèche très solide dans laquelle se trouvent empâtés
des fragments d’un calcaire gris bleuâtre, soit cristallin, soit ho-
mogène, d’un calcaire siliceux jaunâtre, analogue à celui qui ren-
ferme les fossiles nummulitiques susmentionnés, de marnes rouges
et bleues, compactes, semblables aux marnes de Nalalian caracté-
risées par l 'Ammonites biplex , enfin des morceaux de quartz ; mais
parmi tous ces fragments divers, on n’en voit aucun de trachyte ,
roche qui cependant n’est pas rare dans la contrée limitrophe. A
cinq heures à l’est de Kérédi , non loin du lac de Karagol , les
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brèches se trouvent associées à des manies noires compactes et ren *
ferment des fragments de trachyte.
Toutes ces brèches et tous ces conglomérats alternent avec des
grès rouges et donnent à la contrée une physionomie qui rappelle
les environs de Yuzgat, de Sivas, etc., en un mot, et toutes ces
régions de l’Asie Mineure caractérisées par les dépôts de grès
rouges avec ou sans gypse, que j’avais déjà proposé (1) de ranger
dans le terrain nummulitique , où je les maintiens aujourd’hui
avec plus de conviction que jamais. A mesure qu’on s’éloigne
de Kérédi au N.-E. , les conglomérats et marnes disparaissent
pour faire place aux calcaires qui présentent un grand développe-
ment dans les parages de Baïndir. Au N.-E. de cette ville et entre
autres près du village Kulélikoi (situé à quatre heures de Baïndir),
le calcaire gris passe à un calcaire jaunâtre ou à des marnes blan-
ches sableuses, à cassure conchoïde. Ces roches sont toutes très ré-
gulièrement stratifiées , les couches quelquefois verticalement re-
dressées, mais plus souvent plongeant O. 10° N. ou à 10. 46° S.,
sous des angles de 60° à 45°. Ces dépôts ne renferment aucun reste
organique, mais à peu de distance N. -N.-E. de Kulélikoi elles pré-
sentent un grand nombre de Nummulites ainsi que d’autres fossiles
dont l’extrême abondance caractérise tout particulièrement la belle
vallée de Gôkagatch traversée par le petit torrent du même nom,
qui débouche du côté gauche dans l’Ulousou(2), non loin du vil-
lage Abbas. Yoici les fossiles recueillis dans cette vallée : Numnm-
lina Ramondi , Defr.; N.spira , de Roissy; N. scabra? Lamk.; Orbi-
tolites complanata , Lamk.; Alveolinci longa , Czj . ; A. indét. ; Fulcella
jalcata , var. e, , Goldf.; Pecten tripartitus? Desh. ; P. indét.; Car -
diurn , nov. spec.
A mesure que l’on avance dans la vallée en descendant le tor-
rent de Gokagatcli, les montagnes présentent des deux côtés un phé-
nomène fort intéressant. On voit toutes ces masses obliquement
rayées se terminer vers leur sommet par une large corniche dont
la teinte plus claire sert à la détacher davantage des montagnes
qu’elle couronne. Yue d’en bas, cette corniche paraît également se
distinguer de ces dernières par sa stratification horizontale ; cepen-
dant, lorsqu’on gravit les flancs des montagnes pour en examiner
de près la région supérieure, on est tout étonné d’y trouver non
(1) Yoy. mon Mémoire sur les dépôts sédimentaires de l'Asie
Mineure.
(2) L’Ulousou, selon les localités, porte également les noms de
Mamctmlu-sou et de Tchérkcss-sou*
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seulement une faune complètement différente de celle qui carac-
térise la région inférieure, mais encore de découvrir que la masse,
qui paraissait n’être composée que d’une succession de bancs ho-
rizontaux, est au contraire formée de minces couches tordues et
plissées en tous sens avec des plongements dominant au N. et
au S., sous des angles de 80° à 60°. Ainsi, toutes ces masses qui
encadrent si régulièrement l’extrémité supérieure des montagnes
nummulitiques de la partie inférieure de la vallée de Gokagatch,
et dont l’épaisseur est d’environ 130 pieds, sont des dépôts lacustres
ou d’eau saumâtre , pétris de Lymnées , de Planorbes , de Palu-
dines, etc. Ils présentent à peu près la coupe indiquée fig. 5.
Le dépôt lacustre de la vallée de Gôkagatcli a encore cela de
très remarquable, qu’il est peut-être le seul dans toute l’Asie
Mineure qui présente un caractère semblable dans ses conditions
stratigraphiques.
Au reste, ce phénomène, même dans la vallée dont il s’agit, ne
paraît être que purement local, car, à mesure que l’on descend le
Gokagatchsou vers son embouchure dans le Hamamlusou , les dé-
pôts lacustres offrent de plus en plus une stratification horizontale ;
ils envahissent en même temps les dépôts nummulitiques, en sorte
que dans les parages où s’opère la jonction entre les deux cours
d’eau susmentionnés , les montagnes des deux côtés de la vallée
ne sont composées que de bancs horizontaux de calcaire lacustre.
Ce qui caractérise particulièrement ces montagnes, ce sont les
formes fantastiques des rochers qui hérissent leurs flancs et qui se
trouvent tantôt découpés en champignons gigantesques, tantôt
creusés en niches ou en voûtes, tantôt taillés en colonnes ou en
éventails. Toutes ces formes bizarres paraissent dues à l’action des
eaux , car des deux côtés de la vallée les surfaces des rochers pré-
sentent une foule de phénomènes de polissage et d’érosion tels
que l’action des vagues les produit encore aujourd’hui sur nos
côtes.
Les dépôts nummulitiques qui , dans la partie inférieure de la
vallée de Gokagatch, finissent par disparaître complètement sous
les dépôts lacustres , se manifestent de nouveau tout le long du
Hamamlusou, qui, dans les parages de sa jonction avec le Gôka-
gatclisou présente tout le caractère d’un torrent alpin se précipi-
tant avec rapidité au milieu des falaises qui le bordent des deux
côtés, et continuant son cours impétueux au milieu d’une vaste
campagne très accidentée , dont l’aspect rappelle les plus beaux
sites de la Suisse. Si la vallée de Gokagatch , qui , comme nous
l’avons dit, débouche du côté gauche dans l’étroite vallée du
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Hamamlu, constitue une localité extrêmement intéressante pour
le géologue , une autre vallée voisine , qui débouche également
dans celle de l’Hamamlu , mais du côté droit , n’offre pas moins
d’intérêt et d’importance : c’est la vallée arrosée par l’Aratch ,
dont l’embouchure se trouve à peu de distance au N. de celle du
Gokagatch, mais qui coule de l’E. à l’O., tandis que la direction
du dernier est du S. -O. au N.-E.
La vallée d’Aratch est encadrée entre de belles montagnes ri-
chement boisées et toutes pétries de fossiles nummulitiques. Dans
certains endroits , et entre autres à une heure à l’E. du village
d’Aratch, d’énormes bancs ne sont composés que d’ Ostrcagigan-
tea , d’autres presque exclusivement de Nummulites et d’Alvéo-
lines. Au lieu du redressement très violent des couches que pré-
sentent les dépôts susmentionnés dans la vallée voisine de
Gokagatch , celle d’Aratch est surtout caractérisée par l’horizonta-
lité parfaite des strates. La roche est un calcaire blanchâtre sou-
vent désagrégé, mais quelquefois cristallin, comme dans le vil-
lage même d’Aratch , où la surface de la roche , élégamment
ornée par les losanges et les plaques globulaires des Nummulites
et des Alvéolines, se prêterait admirablement au polissage, et
façonnerait une pierre d’un aspect vraiment magnifique.
Voici les fossiles que j’ai recueillis dans la vallée d’Aratch :
Nummulina Ramondi , Defr.
— Lucasiana, id.
— lœyigata , Lamk.
— spira, var. e, de Roissy
Orbitolites papyracea , d'Arch.
— submedia , id.
Alveolina longa ?, Czj.
— subpyrenaica , Leym.
Operculina , peut-être une var.
maxima de V O.granulosa,
Leym.
Ostrea gigantea, Brand.
Pecten tripartitus , Desh.
— indéterm.
Cardium , n. sp.
— nn/nmuliticum, d’Arch.
— porulosum ?, Lamk.
— indéterm.
Crassatella , voisine de la C. secu-
ris, Leym.
Venus incrassata, Sow.
Natiea sigaretina , Desh.
Moule voisine de la Corbula gal-
lica, Lamk.
Geritliium Tchihatcheffi , d’Arch.
A environ 80 kilomètres de son embouchure, ' la vallée d’Aratch
se termine , au N.-E., par un plateau assez élevé, sur lequel se
trouve le village Tachbounar. Ce plateau est composé de calcaire
noir cristallin , qui a la plus grande analogie avec le calcaire pa-
léozoïque des environs de Constantinople ; il est régulièrement
stratifié , et les couches plongent au S. 40° E. , avec une inclinai-
son de 60“. Le plateau de Tachbounar forme une bande assez
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étroite qui s’allonge du S.-S.-E. au N.-N.-O. , et sépare le bassin
d’Aratch de celui de Kastémouni, tous deux nummulitiques. Cette
bande étroite de roches paléozoïques ne parait être qu’une saillie
locale du rempart de LUcass-Bagii, qui, plus au S., forme le bord
méridional des deux bassins susmentionnés. La saillie dont il
s’agit était probablement un cap qui s’avançait dans la mer nuin-
mulitique dont rilcass-Dagb formait le rivage. Aussi, à mesure
que l’on s’avance dans la vallée d’Aratcli , et qu’on se rapproche
du plateau de Taçhbounar , on voit s’accumuler les galets de
roches paléozoïques, qui peut-être représentent les premiers dépôts
fournis par le littoral de cette partie de la mer nummulitique.
Le plateau de Taçhbounar peut avoi-r environ h lieues de lar-
geur de t’O. à l’E. On descend par son revers oriental dans la
vallée de Kastémouni , dont l’aspect frappe vivement l’esprit du
géologue, en le transportant comme par enchantement dans ces
vastes et énigmatiques régions des grès et marnes rouges, qui
jouent un rôle si important dans toute l’Asie Mineure ; mais ce
qui donne à la vallée et aux environs de Kastémouni une véritable
importance aux yeux de l’explorateur de ces contrées, c’est d’y
trouver enfin la solution d’une question qu’il a été tant de fois
dans le cas de s’adresser sans pouvoir obtenir de réponse satisfai-
sante, savoir à quel âge appartiennent tous ces dépôls de grès et
marnes qui se reproduisent sans cesse en Asie Mineure, et toujours
sans la moindre trace organique. Or, si des motifs d’analogie ont
pu lui faire décider cette question en faveur de l’âge nummuli-
tique, l’examen de la contrée de Kastémouni donne à son hypo-
thèse le caractère de la certitude. En efï'et, à l’exception des gypses,
qui manquent à la contrée de Kastémouni, tout y rappelle les dé-
pôts rouges susmentionnés. Aussi éprouvai-je un sentiment de joie
d’autant plus vive qu’elle était inattendue, lorsqu en examinant à
la loupe plusieurs de ces conglomérats et grès de la vallée de Kas-
témouni j’y -découvris- la Naninmlina Ramandi et l’ Orbilnlitcspnpy-
racea.?' Ces fossiles sont particulièrement très abondants dans les
conglomérats compactes composés de petits grains de quartz blanc,
hyalin ; ils se retrouvent également dans les grès jaunes, rougeâtres
ou bleuâtres.
Ces roches forment des couches plus ou moins puissantes, hori-
zontales ou très légèrement inclinées au S. -O. Une autre circon-
stance qui donne beaucoup d’intérêt à la contrée de Kastémouni ,
c’est de pouvoir y recueillir des indications précieuses sur l’âge des
serpentines et des trachytes de cette région de l’Asie Mineure ; or
les conglomérats et grès de Kastémouni, renfermant des fragments
SÉANCE DU 17 MARS 1851 .
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de ces deux roches, prouvent quelles sont antérieures aux dépôts
nummuli tiques. Les fossiles deviennent beaucoup plus rares à me-
sure que l’on s’avance au S. de Kastémouni, en se dirigeant vers
la chaîne paléozoïque de rilcass-Dagh (1) ; cependant ils ne tardent
point à reparaître en très grand nombre sur la pente qui conduit
vers la belle vallée de Karadéré , qui longe le pied septentrional
de cette montagne.
Ainsi nous venons de signaler dans la partie méridionale de la
Paphlagonie un vaste dépôt nummulitique qui , localement inter-
rompu par des éruptions trachy tiques et des lambeaux de roches
paléozoïques, s’étend depuis la ville d’Uskub jusque bien au delà
de celle de Kastémouni, et présente dans cette seule direction,
c’est-à-dire du S. -O. au N.-E., une étendue d’à peu près 300 kilo-
mètres. La limite méridionale de ce domaine est marquée d’une
manière parfaitement distincte par les deux longues chaînes de
l’Alla-Dagh et de l’Ilcass-Dagh, chaînes échelonnées sur une ligne
qui court également du S. -O. au N.-E. Quant à la limite septen-
trionale , malgré trois années d’exploration , je n’avais pas pu trou-
ver encore le temps nécessaire pour l’accomplissement de cette
tâche, et j’espère m’en acquitter dans le courant de l’été prochain.
Cette tâche est d’autant plus importante pour la connaissance de
la répartition géographique des terrains de l’Asie Mineure , que
depuis que j’ai été à même de constater qu’une partie du littoral
septentrional de cette contrée est occupée tantôt par des dépôts cré-
tacés (comme entre Chilé et le Sangarius), tantôt par des terrains
nummulitiques (comme dans les parages d’Erégli), il devient im-
possible de dire d’avance à laquelle de ces deux formations appar-
tient la partie du littoral paphlagonien qui correspond aux dépôts
nummulitiques que je viens de signaler dans la zone méridionale
et centrale de cette région. La découverte en Asie Mineure de tous
ces dépôts locaux appartenant aux terrains jurassique, nummuli-
tique et crétacé , ainsi que la nécessité de séparer l’un de l’autre
les deux derniers terrains confondus jusqu'aujourd’hui dans une
seule formation imparfaitement désignée , rend de jour en jour
plus difficile et plus compliquée la besogne du géologue consacré
à l’étude sérieuse de cette intéressante contrée; il n’y trouve plus
cette simplicité et cette uniformité qui permettent de conclure
avec une certaine confiance du connu à l’inconnu; placé sans cesse
au milieu de nouveaux lambeaux de terrains dont rien ne peut lui
(1) C’est VOlgasdagh de nos cartes, situé au nord de la ville de
Tosia.
SÉANCE DU 17 MARS 1851 =
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faire deviner d’avance l’extension ou le développement , il se voit
obligé de les suivre pas à pas dans leurs allures capricieuses, sans
se laisser rebuter par les difficultés et les embarras qu’on ne
rencontre que dans l’Orient, et qui ne sauraient être appréciés
que par ceux qui ont été dans le cas de les éprouver.
Après cette communication M. Viquesnel fait observer que
M. Hommaire de Hell avait signalé la présence du terrain
nummulitique à Chilé 5 néanmoins ce terrain n’est pas men-
tionné dans la note de M. de Tcliiliatcheff.
M. d’Archiac répond que cette note n’est qu’un abrégé très
sommaire des recherches de M. de Tchihatcheff, qui, sans doute,
donnera plus tard des détails plus circonstanciés.
M. d’Archiac donne lecture du travail suivant de M. de
Tchihatcheff.
Dépôts nummulitiques et diluviens de la presqu'île de Thrace ,
par P. de Tchihatcheff.
Les travaux les plus récents sur la T urquie d’Europe ont suffi-
samment constaté l’existence des dépôts nummulitiques jusque
dans le cœur de la Thrace, à l’extrémité S.-E. de laquelle se
trouve Constantinople. Le cap Karabournou, situé sur le littoral
méridional de la mer Noire , à environ 5 lieues au N. -O. du Bos-
phore, a déjà été signalé par MM. Hommaire de Hell et Viques-
nel comme appartenant à cette formation , dont M. Viquesnel a
également indiqué le développement à FO. du méridien de ce
cap. Ces résultats, fort intéressants, ne pouvaient que nous
engager à les compléter. Or la presqu’île de Thrace n’avait été
examinée jusqu’à présent que sur des points situés le long des côtes,
et elle n’avait pas été traversée par des courses faites de la Pro-
pontide à la mer Noire , pour résoudre deux questions impor-
tantes, savoir : si la formation nummulitique signalée à Kara-
bournou s’étendait à travers toute la presqu’île de Thrace et at-
teignait à l’E, les environs immédiats de Constantinople et au S. le
littoral de la Propontide ; et quelles étaient l’extension et les limites
des roches paléozoïques dont on connaissait depuis longtemps
l’existence des deux côtés du Bosphore. J’entrepris la solution de
cette double question en y consacrant le peu de temps que la
saison avancée laissait encore à ma disposition après mon retour
de l’Asie Mineure , au mois d’octobre dernier.
29S
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
Le résultat de cette rapide exploration tend à prouver que les
dépôts nummulitiques signalés jusqu’à présent à environ 6 lieues
à l’O. de Constantinople (1), touchent presque aux portes de la
capitale et ne sont séparés du Bosphore que par une bande étroite
de roches paléozoïques. B’ un autre côté, les dépôts lacustres, déjà
connus sur le littoral septentrional de la mer de Marmara, ne
sont que superficiels et reposent sur une formation probablement
nummulitique , ou, dans tous les cas, crétacée. Enfin une lisière
étroite de dépôts quaternaires avec lignites recouvre ce terrain sur
le littoral de la mer Noire. La découverte de nombreuses localités
fossilifères vient à l’appui des considérations que j’aurai l’hon-
neur de développer, en bornant mes études , ainsi que je l’ai déjà
indiqué, à cette partie de la Thrace qui se trouve limitée au N.
par la mer Noire , au S. par la Propontide, à l’E. par le Bosphore
et à l’O. par une ligne tirée du lac de Derkos au golfe de Bouyouk
Tehékmédjé, ou Ponte grande. Cette région ainsi limitée forme
un ovale très irrégulier, dont l’axe vertical, tracé de la Propontide
à la mer Noire , peut avoir environ 8 lieues, tandis que sa lon-
gueur, de l’E. à l’O., c’est-à-dire du Bosphore au méridien du lac
de Derkos, comprendrait à peu près 10 lieues.
La surface de cette région est hérissée de hauteurs aplaties, de
médiocre élévation, et sillonnée de vallées peu profondes. Rigou-
reusement parlant , la distribution de ces hauteurs ne présente
point de systèmes d’alignement ou de groupement bien caracté-
risés ; aussi ce que nos cartographes indiquent dans cette partie de
la Thrace comme line chaîne de montagnes, qu’ils tracent le long
du littoral de la mer Noire sous le nom (tout à fait inconnu dans
le pays) de petit Balkan , n’est que la continuation du massif de
collines qui , depuis le littoral de la Propontide , s’étend unifor-
mément et en ramifications variées jusqu’à celui de la mer Noire.
Le seul caractère qui puisse faire distinguer le soi-disant petit
Balkan du reste des hauteurs qui hérissent la contrée, c’est sa
physionomie végétale , car lorsqu’on traverse cette partie de la
Thrace, du S. au N., c’est-à-dire en allant de la Propontide au
Pont-Euxin , on parcourt une contrée également mamelonnée
et accidentée, sans franchir aucune crête qui , par son altitude ou
par sa direction constante, se détache du reste des hauteurs; seu-
lement , à mesure que l’on approche du littoral du Pont-Euxin ,
les hauteurs se revêtent de beaux taillis verdoyants, et la contrée
perd de plus en plus son caractère habituel de nudité et d’aridité,
(1) Au cap Karabournou.
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
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caractère si fortement prononcé des environs immédiats de la ca-
pitale, et cjni rappelle à ira certain degré la campagne de Rome
ou même celle de Jérusalem. Toute cette partie déboisée et nue,
qui comprend à peu près une bande de 6 à 7 lieues de largeur,
du S. au N., est plus ou moins dénuée des ressources d’irrigation
naturelle ; elle n’est traversée que par de petits ruisseaux dont le
lit demeure à sec pendant l’été, ou qui, n’atteignant point le
littoral de la Propontide , forment à leur embouchure des ma-
récages plus ou moins étendus. D’ailleurs beaucoup de localités
souffrent du manque d’eau potable, d’autant plus que celle des
puits que l’on a essayé d’y creuser est généralement d’un goût
saumâtre. C’est, entre autres, le cas dans le village Saint-George,
dont tous les habitants sont obligés d’aller chercher l’eau sur une
hauteur assez éloignée, où l’on est parvenu à creuser le seul puits
utile à la contrée. Au reste, il faut observer que la mauvaise qua-
lité des eaux de cette région caractérise particulièrement le do-
maine des dépôts nummulitiques , lacustres et quaternaires, tandis
que dans celui de la formation paléozoïque on parvient presque
toujours à atteindre, à une profondeur peu considérable , une eau
parfaitement bonne.
Sous le rapport de la constitution géologique, la contrée qui
nous occupe présente les formations suivantes : 1° roches érup-
tives ; 2° roches paléozoïques ; 3° dépôts nummulitiques , lacustres
et quaternaires.
Bien que ces derniers soient l’objet principal de notre mémoire,
et qu’ils jouent le rôle le plus important dans la région dont il
s’agit , il ne sera cependant pas superflu, avant de les aborder, de
dire quelques mots des autres formations.
Des éruptions trachy tiques et basaltiques occupent les deux
côtés de l’embouchure septentrionale du Bosphore, depuis les
environs de Bouyoukdéré jusqu’à ceux de Fanaraki et de Kilia,
où , après avoir décrit un demi-cercle du S.-E. au N. -O., le do-
maine éruptif tourne au S. , et vient rejoindre par une ligne brisée
son point de départ susmentionné. Ce lambeau trachytique occupe
un espace qui n’a qu’environ 2 lieues du S. au N., c’est-à-dire
depuis les environs de Bouyoukdéré jusqu’à la mer Noire , et
même n’atteint pas cette étendue dans sa direction de l’E. à l’O.
A l’exception d’une bande étroite de dépôts quaternaires , qui près
du village de Kilia bordent la zone des roches' éruptives du côté
delà mer Noire, les roches éruptives du Bosphore se trouvent
partout ailleurs en contact avec les roches paléozoïques qui enca-
drent des deux côtés le pittoresque détroit, tandis que du côté
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
3uO
opposé, c’est-à-dire sur la rive asiatique, les roches éruptives
continuent à former également l’extrémité septentrionale du
canal.
Ainsi que le domaine éruptif, celui de la formation paléozoïque
se trouve borné de toute part d’une manière fort tranchée , et ne
forme qu’une bande , comparativement très étroite , le long de la
rive européenne du Bosphore, bande qui correspond à celle qui,
du côté opposé, encadre également la rive asiatique du canal, et
qui, plus à l’E., va se perdre dans la Bithynie sous les dépôts cré-
tacés, comme en Europe elle disparaît à peu de distance à l’O. du
Bosphore sous les dépôts nummulitiques, lacustres et quaternaires
de la Thrace. Ainsi les dépôts paléozoïques ne forment qu’un seul
lambeau isolé des deux côtés du canal ; sur la rive asiatique ce
lambeau a son plus grand développement ; cependant il n’y pré-
sente guère au delà de 50 kilomètres de largeur de l’O. àl’E.,
puisqu’à peu de distance à FE. du cap Karabournou (en Bithynie),
les roches paléozoïques disparaissent sous des dépôts parfaitement
caractérisés par les fossiles crétacés que j’y ai découverts dans mon
dernier voyage. Sur la rive européenne , le domaine paléozoïque,
ainsi que je Fai déjà fait observer, offre un développement encore
moins considérable , car la lisière qu’il forme le long du canal ne
s’en éloigne nulle part à plus de 6 lieues à l’0. ; elle n’a cette
largeur que sur un seul point, et particulièrement près du vil-
lage de Saint-George, jusqu’où le domaine paléozoïque s’avance
en formant un demi-cercle , pour se recourber immédiatement au
N.*E. et auS.-E., et se rapprocher de plus en plus de la rive
européenne du Bosphore, le long duquel il ne constitue souvent
qu’une bande d’une lieue de largeur. On peut parfaitement se re-
présenter le domaine paléozoïque du Bosphore comme une île
baignée d’un côté par la mer crétacée, et de l’autre par la mer
nummulitique , puis traversée du N. au S. par le canal. Cette île
ne présenterait , dans sa plus grande extension , de l’0. à l’E. ,
qu environ 120 kilomètres de longueur, sur une cinquantaine de
kilomètres de largeur (du N. au S.).
Il me suffit d’avoir signalé d’une manière très générale les
limites du domaine paléozoïque du Bosphore , sans entrer dans
les détails relatifs à sa constitution géologique : la partie située
en Asie a déjà été traitée dans une communication précédente
(séance du 15 avril 18à9). La portion située dans la Thrace offre
d’ailleurs moins d’intérêt, étant, à ce qu’il paraît, complètement
dénuée de traces organiques.
Les dépôts nummulitiques , lacustres et quaternaires , et surtout
SÉANCE DU M MARS 1851. 301
les premiers , occupent la partie la plus importante de la région
dont nous parlons.
A une heure seulement des murs de Constantinople se trouve ,
non loin du littoral de la Propontide , le petit village Makrikoi ,
dont les vastes et nombreuses carrières permettent d’étudier la
constitution géologique de la contrée. En examinant les dénuda-
tions artificielles de Makrikoi , on y voit se succéder les diverses
assises qui constituent les dépôts diluviens et les dépôts lacustres,
et qui offrent la plus grande variété sous le rapport de leur puis-
sance. Une des dénudations les plus instructives offre la coupe
indiquée pl. YI, fig. 6.
Les dépôts n° 6 sont composés de calcaire blanc ou jaunâtre,
tantôt à texture homogène et à cassure conchoïde , tantôt grenus
et peu solides, à cassure saccharoïde et à surface crayeuse et
friable , ce qui est surtout le cas des couches qui forment les assises
supérieures , et fournissent par conséquent une pierre de construc-
tion moins estimée : aussi est-on obligé (du moins à Makrikoi)
d’aller la chercher à une profondeur plus considérable , et comme
les dépôts diluviens (2, 3, 4, 5) forment souvent à eux seuls une
masse de 40 à 50 mètres de puissance , les galeries destinées à ob-
tenir la variété de pierre que l’on recherche atteignent quelque-
fois près de 100 mètres au-dessous de la surface des dépôts dilu-
viens. Tandis que toutes les assises exploitées à ciel ouvert sont
pétries de Cyrènes et de Mactres, malheureusement toutes à l’état
de moules, et plus ou moins indéterminables, les assises infé-
rieures, que l’on exploite par des galeries, paraissent présenter des
fossiles tout à fait différents, quoique en très petit nombre, et qui,
par la double raison de leur position et de leur rareté , sont diffi-
ciles à obtenir et étaient restés inconnus jusqu’à ce jour. Ce ne
fut qu’après beaucoup d’instances et de promesses que je parvins
enfin à me procurer quelques échantillons que les ouvriers me
rapportèrent du fond des galeries.
C’étaient des empreintes de poissons extrêmement remarquables ,
que M. d’Àrchiac, auquel j’eus l’avantage de transmettre mes col-
lections, soumit aussitôt à l’examen judicieux de M. Valenciennes,
examen dont les résultats se trouvent consignés dans la lettre sui-
vante, que l’illustre ichthyologiste adressa à notre savant confrère.
« J’ai examiné avec le plus grand soin les poissons que M. de
Tchihatcheff a rapportés de la Thrace , et afin de m’en rendre
compte je les ai décrits avec beaucoup de soin , après avoir noté
tout ce que les débris de chaque squelette pouvaient m’offrir de
caractéristique. Je n’ai trouvé aucune des espèces de Thrace re-
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
802
présentée même par une espèce voisine au Monte-Bolca; une seule
rappelle F Asterodermus d’Agassiz; mais je crois, comme je vais
vous le dire, que sir P. Grey Egerton a eu raison de l’en dis-
tinguer.
» Voulant aussi avoir une idée de leur ressemblance avec ceux
des deux localités du Liban, qui ont fait le sujet d’un mémoire
de Botta et d’une monographie de M. Pictet , de Genève, je n’ai
pas été peu surpris de trouver une identité complète : ainsi M. de
Tchihatcheff a rapporté Y Euripholis sulcidens et E. Boissieu , figu-
rés et décrits par M. Pictet. Ce cartilagineux avait été figuré et
décrit par M. Egerton (Quarterly journal oj the geological Society ,
p. 225, pi. V) ; seulement les nageoires que M. de TchiliatchefT a
recueillies sont plus grandes que celles de l’échantillon représenté
par le naturaliste anglais. Le Clupea hrevissima de Blainville , es-
pèce connue depuis longtemps dans le Liban et des plus abon-
dantes , se trouve aussi à Makrikoi ; l’exemplaire de M. de
Tchihatcheff est d’une parfaite conservation; enfin il n’est pas
jusqu’au poisson , que je considère aussi comme devant former un
nouveau genre , et que j’appellerai Strymonin sirica , qui ne se re-
trouve également dans les poissons du Muséum rapporté? du Liban
par M. Botta.
» Maintenant vous savez qu’au Liban M. Botta a distingué deux
sortes de calcaires, l’un supérieur, l’autre inférieur : le premier est
un calcaire tendre du Sahel-Àalma ; l’autre plus dur d’apparence,
siliceux, du Haekal. Eh bien, je trouve cette association de cal-
caires dans les échantillons de la Thrace. La Strymonin sirica est
sur un calcaire tendre tellement semblable à celui du Sahel-
Aalma de Botta , qu’on croirait ces deux morceaux détachés du
même bloc ; les autres , au contraire , sont dans une roche plus
analogue à celle du Hakel. M. Pictet paraît avoir recueilli ses
poissons dans la même roche, tandis que M. Botta a pris Y Euripholis
dans le calcaire tendre.
» Enfin tous les géologues sont d’accord pour faire de ces roches
des couches de la craie à Hippurites et à Bicérates ; mais M. Botta
a rapporté une seule coquille bivalve, qui est une Telline, telle-
ment voisine de la Tellina elcgans de Grignon et de Mouchy,
qu’il faut ou faire descendre la Telline ou faire remonter les
poissons.
» J’allais oublier de citer les crustacés de la famille desSalcio-
ques , que l’on retrouve encore au Liban , et dont on voit un indi-
vidu sur un des échantillons de Makrikoi. »
L’identité entre les poissons de Makrikoi et ceux du mont Liban
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
803
doit donc faire ranger les uns et les autres dans la même forma-
tion ; mais malheureusement l’âge des dépôts du Liban dont il
s’agit est loin d’être à l’abri de toute incertitude , en sorte que les
deux formations nummulitique et crétacée sont encore à se les
disputer.
Le Liban n’a donc pas acquis l’autorité nécessaire pour pronon-
cer sur ses congénères de la Thrace. Aussi , dans l’état actuel de
nos connaissances , et sans vouloir préjuger la question, je me bor-
nerai à observer que l’affleurement des couches nummulitiques ,
qui , comme on le verra plus tard, se présentent à peu de distance
au N. de Makrikoi , à mesure que les dépôts lacustres s’amincis-
sent pour disparaître complètement, pourrait faire présumer que
les couches à Ichthyolites ne sont que les assises de la même forma-
tion nummulitique, mises au jour par l’absence des dépôts lacustres
qui les masquent à Makrikoi. Dans les autres carrières situées dans
la contrée limitrophe de Makrikoi , et toutes dans le voisinage
immédiat de la capitale , connue celles de Yidos , de Kalfatkoi, de
Baluklii , etc. , Ls travaux se font à ciel ouvert , et les dépôts cal-
caires dont la surface seule est encore entamée ne sont composés
que de moules de Cyrènes et de Mactres, A Yidos, les dépôts di-
luviens sont moins puissants qu’à Makrikoi. L’une des carrières de
Yidas présente quatorze couches horizontales de calcaire à Cyrènes,
sur une épaisseur totale de 7 à 8 mètres ; les deux bancs supérieurs
sont les seuls qui aient chacun un mètre de puissance ; les autres
n’ont que de 6 à 7 centimètres. Parmi les Mactres dont est pétri
le calcaire lacustre de Yidos, j’ai recueilli deux exemplaires de
Spondyles, cjue M. d’Archiac a reconnus être des Spondylas sub -
sp in os us , fossile provenant originairement, sans doute, des assises
nummulitiques.
A Baloukli , les carrières composées de calcaire blanc crayeux
ou compacte renferment également une quantité innombrable de
moules de Cyrènes. Les beaux cimetières grecs de Baloukli, qui
s’étendent à l’ombre de superbes platanes , sont encore dans le
domaine des dépôts mari no-lacustres , localement recouverts par
un diluvium très épais, en sorte que ce domaine embrasse proba-
blement la pointe occupée par le nouveau sérail , et se prolonge le
long des murs de Constantinopl e jusqu’au commencement dufau-
bourgd’Eyub, où l’on voit affleurer les roches paléozoïques.
Si l’on quitte les carrières de Makrikoi, de Yidos, de Balou-
kli, etc., pour suivre le littoral de la Propontide, on voit fré-
quemment percer à travers les dépôts diluviens les calcaires et les
grès lacustres qui , le long de la mer, forment souvent des falaises
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
304
considérables. Près de Saint-Stéfano (à trois heures de Constan-
tinople), celles-ci constituent des masses puissantes de grès, com-
posé de grains de quartz fortement agglutinés, parmi lesquels on
aperçoit quelquefois de petites Lymnées silicifiées. Un conglomé-
rat à ciment calcaire alterne çà et là avec ce grès , qui reste cepen-
dant la roche dominante , et forme à lui seul , tantôt des masses
indistinctement stratifiées et surgissant à une certaine distance de
la côte , tantôt des remparts plongeant verticalement dans la mer,
dont ils ne se trouvent séparés que par une plage étroite , souvent
balayée par les vagues , et hérissée de fragments et rognons siliceux
rappelant ceux de la craie ; ces rognons mamelonnés sont tous per-
forés par des mollusques litliophages , tels que des Pétricoles et
des Mytiliis encore vivants , ou n’ayant laissé dans les cavités que
leurs coquilles.
Entre Saint-Stéfano et le golfe du Petit-Pont (Kutchuk-Tchék-
médjé), le littoral de la Propontide présente également des falaises
composées de grès et de calcaires siliceux ; près du village Kutchuk-
Tchékmédjé, ces roches forment des couches horizontales qui
continuent à se montrer le long de la côte jusqu’au village Am-
barli , situé à six heures de Constantinople. Près de ce village , les
grès et calcaires siliceux renferment des troncs siiicifiés de plantes
dicotylédones, dont j’ai remis quelques exemplaires à M. Ad. Bron-
gniart, qui a eu l’ extrême bonté d'en entreprendre la détermina-
tion. Quelquefois ces roches sont colorées d’une teinte rougeâtre,
et les couches , presque toujours horizontales , présentent locale-
ment une légère inclinaison au N.-E. Enfin , en continuant à lon-
ger le littoral jusqu’au golfe du Grand-Pont, on voit les falaises
et les rochers disparaître peu à peu , et les dépôts diluviens com-
posés de sable et de galets masquer toutes les dénudations ; cepen-
dant, ainsi que nous l’avons vu, l’examen du littoral, depuis la
porte des Sept-Tours jusqu’au golfe du Grand-Pont, constate
une succession presque non interrompue de dépôts lacustres ,
caractérisés, soit par des coquilles, soit par des végétaux. Nous
avons vu , de plus qu’à Makrikoi , le seul point où des dénu-
dations artificielles permettent d’apprécier la nature des roches à
une profondeur un peu considérable , les dépôts lacustres paraissent
reposer sur le terrain à Ichthyolites, que je considère, provisoire-
ment et à titre d’hypothèse probable , comme faisant partie de la
formation nummulitique. On peut donc présumer que ce que les
dénudations de Makrikoi ont permis de reconnaître se retrouverait
également sur d’autres points du littoral de la Propontide , où le
regard du géologue ne peut plonger dans l’intérieur du sol.
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
305
Maintenant, lorsque parvenus jusqu’au golfe du Petit- Pont
nous quittons la côte, et nous nous dirigeons au N. pour couper
transversalement la péninsule de Thrace, et joindre par une ligne
droite la Propontide au Pont-Euxin , nous voyons reparaître à la
surface même du sol les dépôts nummulitiques , avec les caractères
les plus précis. En effet , à peine a-t-on franchi quatre lieues au N.
de Pembouchure du golfe du Grand-Pont , que dans les environs
du petit village Hcidinkoi on trouve les fossiles suivants (1) :
Cladocora granulosa , Miln. Edw. et J. Haime, Nummulina Ra~
mondi , Nummulina , nov. sp., Orbitolites Fortisii , d’Arch., O. ra-
dians, id., Pecten plialœna , nov. sp., P., nov. sp., Spondylus sub -
sjnnosus, d’Arch., S. thracius, nov. sp., Trochus , indét., Emargi-
nula , indét.
Si les dépôts nummulitiques se montrent déjà à Hadinkoi, on
en voit de semblables s’avancer tout aussi près du golfe du Petit-
Pont , et en s’approchant de Saint-George le géologue reconnaît
partout les représentants de la faune nummulitique. Ce village
(à 6 lieues environ au N.-O. de la capitale) a d’autant plus d’im-
portance qu’il renferme de nombreuses carrières très favorables
aux recherches. Comme Makrikoi, Saint-George pourvoit Con-
stantinople des matériaux nécessaires aux nombreuses construc-
tions qu’on y exécute. Les travaux s’y font à ciel ouvert; les
carrières , loin d’offrir , comme celles de Makrikoi , de puissants
dépôts diluviens , présentent la pierre exploitable presque à la
surface du sol; la dénudation de la roche, dans sa hauteur, n’a
guère été poussée au delà de 2 mètres; et, sur cette épaisseur,
on a le plus souvent traversé quatre bancs , dont les deux supé-
rieurs n’ont chacun que 8 à 10 centimètres de puissance. Ces bancs
sont généralement horizontaux , ou bien légèrement inclinés au
S. -O. La roche est un calcaire blanc, le plus souvent friable,
de texture grenue. Elle renferme beaucoup de Pecten et de Spon-
dylus : Pecten , nov. sp. , Spondylus asiaiicus , d’Arch., S. Pétri ,
nov. sp.
A ces acéphales, qui constituent la majorité des fossiles de
Saint-George, s’associent çà et là une espèce de Venus , représentée
seulement par un moule de très grande dimension , ainsi que :
Nummulina Ramondi , Defr., Orbitolites Fortisii , d’Arch., O. sub -
media , id. , articulations de Pentacrine analogue à celle de Bia-
(1) La détermination des fossiles mentionnés dans ce mémoire est
due à l’amitié de notre savant confrère, M. d’Archiac, à l’exception
de celle des polypiers dont M. J. Haime a bien voulu se charger.
Soc. géol., 2e série , tome VÏIT, 20
306
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
ritz ; empreintes de feuilles dicotylédonées ; carapace d’un crus-
tacé remarquable que M . d’Arehiae a nommé Raniria Tchihatchcffi
(ReinipesP).
Maintenant que nous croyons avoir prouvé que de quelque
point du littoral de la Propontide que l’on remonte vers le N.,
on ne tarde pas à trouver des dépôts numinulitiques qui y compo-
sent la surface même du sol, tandis que, sur le littoral sus-men-
tionné, ils se trouvent probablement recouverts par des dépôts
lacustres, nous pouvons continuer notre coupe à travers la pres-
qu’île de Thrace , pour joindre la Propontide avec le Pont-Euxin.
Nous choisirons à cet effet , pour point de départ , le village
d’Hadinkoi, situé, comme nous l’avons dit, seulement à 5 lieues
au N. du littoral de la mer de Marmara, et nous nous avancerons
progressivement vers celui de la mer Noire. Depuis Hadinkoi
jusqu’au lac de Berkos , qui touche déjà au littoral de la mer
Noire, on voit percer fréquemment des masses de calcaire siliceux,
de calcaire crayeux , de conglomérats et de grès avec des traces de
polypiers numinulitiques ; cependant ces traces organiques y sont
très rares ; eu revanche, on n’a pas plutôt atteint la rive méridio-
nale du lac , à peu près à deux heures à l’O. du village de Berkos,
que le géologue se voit au milieu d’une belle faune nummulitique,
moins remarquable, à la vérité, par la variété des genres et des
espèces (qui sont très peu nombreux) que par l’abondance extrême
des individus. Le lac est bordé au S. par une chaîne de collines
boisées, composées de bancs généralement horizontaux , et seule-
ment localement inclinés au S.-E. La roche est tantôt une marne
blanche ou un calcaire grisâtre, tantôt un grès jaunâtre. La plage
qui sépare le lac de ces hauteurs est plus ou moins étroite , héris-
sée de cailloux et de blocs, et presque toujours inondée pendant
l’hiver ; elle est toute jonchée de coquilles que la roche désagré-
gée y abandonne par milliers, ainsi que de gros troncs d’arbres
siliciflés ; la présence de ces restes végétaux constitue surtout une
particularité très remarquable, vu l’extrême pauvreté qui, comme
on sait, caractérise la flore nummulitique.
Malheureusement mon excursion dans la Thrace n’avait été
organisée que d’une manière tout à fait accessoire, et je dus re-
mettre à mon prochain voyage l’examen de ces restes végétaux, qui
à eux seuls mériteraient de devenir l’objet de recherches spéciales.
Parmi les fossiles que j’ai recueillis, et dont la grande majorité
consiste en Huîtres et Polypiers , se trouvent : Phyllocœnia Ver -
neuilli , J. Haime, Astrœci burcligalcnsisy Miln. Edw. et J. Haime,
Pecten , voisin du P. triparti tus , Desh., Ostrea gigantea , Brand.
SÉANCE DU 17 MARS 1851
307
On voit qu’à l’exception de Y A stras a burdigalemis , qui est de la
formation tertiaire miocène, tous les autres fossiles sont éminem-
ment nummulitiques.
La chaîne de hauteurs qui bordent la rive méridionale du lac
Derkos continue, à l’E. de ce lac, à s’avancer le long de la mer
Noire jusqu’au domaine paléozoïque du Bosphore. Le revers sep-
tentrional de cette petite chaîne est recouvert de dépôts très consi-
dérables, qui masquent complètement, du côté de la mer, les
hauteurs nummulitiques, et qui constituent à eux seuls une série
de collines très récentes qui bordent immédiatement la plage sa-
blonneuse de la mer jusqu’au delà de Kilia, et conséquemment
jusqu’à l’embouchure du Bosphore.
Bar leur composition , ces collines se rattachent si intimement
aux vastes dépôts diluviens de sable et de galets, qui, comme
un manteau épais , revêtent toute cette partie de la Thrace , et
nommément les environs de Constantinople, qu’il devient impos-
sible de les en séparer, et de ne pas les ranger dans l’époque qua-
ternaire. Comme le diluvium de toutes ces régions, les dépôts
dont sont composées ces collines sont extrêmement pauvres en
restes organiques ; cependant, outre quelques Clausitia et Papa
qu’ils renferment , et qui paraissent très voisins , sinon identiques,
avec les espèces qui habitent encore la contrée, les collines dont
il s’agit présentent des dépôts considérables de lignite, qui non
seulement ont un intérêt scientifique, mais encore offrent une
certaine importance industrielle, Ces dépôts présentent une suc-
cession de profils naturels tout le long du littoral de la mer Noire,
depuis l’endroit où l’on y débouche, en venant de Derkos, jus-
qu’eUix hauteurs qui conduisent à Damuzdéré, ce qui donne à
cette ligne entière une longueur de près de 6 lieues de l’O. à l’E.
A l’aide de ces coupes naturelles fort intéressantes, on peut étudier
les relations entre les dépôts de lignites et les diverses roches qui
les accompagnent, et en constituent alternativement le toit et le
mur. Je joins ici quelques uns des plus instructifs de ces profils,
qui se trouvait échelonnés le long de la plage , en procédant de
l’O. à l’E.
La première coupe ( fig. 1 ) se présente non loin du rivage
d’Àkbounar, à trois lieues environ à l’est de Derkos. On y voit les
dépôts de lignite («) réduits , pour ainsi dire , à leur plus simple
expression : ce sont des bandes ou des veinules horizontales ou
légèrement recourbées, de quelques centimètres d’épaisseur, tra-
versant, à de certains intervalles, une colline exclusivement com-
posée d’un sable (b) jaune, incohérent, qui a la plus grande ana-
ao8
SÉANCE DU 17 MARS 1851,
iogie avec celui dont sont formées les dunes de nos plages marines,
A mesure qu’on s’avance à l’est d’Akbouuar vers le village Ahat-
chlv, les dépôts lignitifères présentent une plus grande variété,
tant sous le rapport de leur puissance , que sous celui de leur
composition. Quelquefois le combustible traverse , sous forme de
minces cordons, des masses de sable jaune (6), comme l’indique
la figure 1 , et alors la puissance de ces bandes n’a pas au delà de
5 centimètres; d’autres fois le lignite forme des couches d’un déci-
mètre et même d’un mètre d’épaisseur, et se trouve associé à des
strates horizontaux de marnes (x), qui en constituent tour à tour
le toit et le mur, ainsi qu’on le voit dans la figure 5. Là où le
lignite est réduit à de faibles cordons, il n’est composé que d’une
substance charbonneuse feuilletée, à lames très minces, tandis que,
dans les dépôts qui acquièrent un mètre d’épaisseur, le lignite
forme autant de dalles fendues en parallélogrammes, et représen-
tant des troncs d’arbres très fortement aplatis, qui tantôt conser-
vent parfaitement la texture ligneuse, tantôt offrent les caractères
de la houille à pâte homogène et à cassure conchoïde, d’autres fois,
enfin, ne présentent qu’un magma composé de petits fragments ou
parcelles ligneuses et charbonneuses. Partout où la texture cellu-
leuse est bien conservée, ces lignites paraissent révéler le caractère
des conifères. Près du village Ahatclily, la puissance des argiles
(x, d), particulièrement de celles inférieures aux lignites, augmente
considérablement ; elles forment des zones colorées de teintes di -
verses et alternant quelquefois avec des grès; souvent les sables ( b )
manquent complètement. "Vers l’extrémité orientale de la ligne
côtière, caractérisée par les dépôts à lignites, ces derniers acquiè-
rent le plus grand développement sous le rapport de la variété et
de la puissance des roches, qui leur servent de mur et de toit
(fig. 6); aux marnes on voit s’associer des grès jaunes rubanés;
des calcaires marneux rouges , avec quelques empreintes de gra-
minées , ainsi que des calcaires siliceux , nous rappellent des cal-
caires de transition, et servent en quelque sorte de prélude aux
masses basaltiques placées à l’extrémité orientale de#la ligne cô-
tière dont il s’agit, c'est-à-dire dans les parages où se dresse une
batterie turque , sur les flancs d’une hauteur basaltique , vers la-
quelle on s’élève en quittant la plage pour se rendre à Domuzdéré.
Sur plusieurs points de la ligne côtière que nous venons de dé-
crire, on voit les lignites disparaître complètement et les grès seuls
remplacer les autres roches. Dans les parages d’Akbounar ( à une
heure et demie de marche à l’est de ce village), ces grès revêtent
des formes tout à fait bizarres : on y voit des hauteurs entièrement
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
309
composées d’un grès compacte à petits grains, taillé en forme de
tubes mamelonnés s’anastomosant, et constituant ainsi un énorme
réseau dont les mailles irrégulières tantôt se dressent verticalement,
tantôt se déploient en surfaces horizontales. Les tubes ou stalactites
sont quelquefois creux. 11 ne serait pas impossible que ces dépôts
singuliers dussent leur origine à l’action des eaux thermales incrus-
tantes. Le cap basaltique sur les flancs duquel se trouve la batterie
turque sus-mentionnée ( à une heure environ à l’ouest du village
Kilia ) marque la limite orientale des dépôts lignitifères de ce lit-
toral septentrional ; des grès et des sables parfaitement identiques
avec ceux que nous avons signalés dans les dépôts lignitifères
continuent seuls encore à longer la côte jusqu’aux parages de Kilia,
où bientôt ( à une heure et demie à l’est de Kilia), le domaine des
roches éruptives envahit le littoral et constitue F embouchure sep-
tentrionale du Bosphore. Les sables jaunes et les grès précédents
se recourbent vers l’intérieur de la contrée, à mesure que, quittant
le littoral de la mer Noire, on s’avance vers Domuzdéré, et l’on
voit alors que ces sables se rattachent immédiatement à l’épais
manteau diluvial étendu sur tout le domaine paléozoïque du Bos-
phore. Une des considérations qui semblent prouver l’identité
géologique entre les dépôts à lignites de la côte et les vastes dé-
pôts diluviens qui masquent souvent le domaine paléozoïque du
Bosphore , c’est la grande analogie qui existe entre les éléments
constitutifs des uns et des autres. En effet, si, d’un côté, les lignites
ne se reproduisent point dans les dépôts diluviens du Bosphore ,
d’un autre, les argiles plastiques bleues et blanches que nous avons
signalées, sur le littoral de la Thrace , comme intimement liées
avec les lignites , se trouvent très largement développées sur plu-
sieurs points des dépôts diluviens du canal. Une des localités les
plus remarquables , sous ce rapport , est la plaine de Bouyoukdéré,
à laquelle le magnifique groupe d’arbres connu sous le nom de
Platanes de Godefroy a valu en Europe une célébrité tradition-
nelle.
Les hauteurs qui bordent cette plaine au N.-E. se rattachent
au pittoresque massif du mont Kabatacli , dont les épais taillis de
châtaigniers ombragent le splendide hôtel de l'ambassade de
Russie, que j’ai habité pendant trois années; quoique le mont
Kabatach lui-même soit exclusivement composé de schistes et de
calcaires paléozoïques , les hauteurs qui le flanquent du côté de la
grande prairie de Bouyoukdéré ne sont formées que de masses
d’argiles plastiques passant insensiblement aux conglomérats in-
cohérents et aux sables marneux qui constituent essentiellement le
310
SÉANCE DU 17 MARS 1851.
diluvium du Bosphore. Cette argile est à Bouyoukdéré l’objet
d’une exploitation considérable, et on l’utilise pour la fabrication
des poteries et des briques. Les carrières qui fournissent les maté-
riaux nécessaires ont déjà mis à nu des coupes de 15 à 20 mètres
de hauteur, qui présentent partout des masses d’argile plastique
reposant sur les roches paléozoïques , et se confondant insensi-
blement avec les conglomérats et les sables qui leur servent de
toit.
Lorsqu’en s’éloignant de cés carrières de la plaine de Bouyouk-
déré, on suit attentivement les dépôts de conglomérats et de
sables diluviens, on les voit peu à peu envahir les argiles, et
finir par reposer immédiatement sur les roches paléozoïques , en
sorte que les argiles de Bouyoukdélé ne se présentent que comme
des dépôts locaux , formant, pour ainsi dire, de petits îlots plus ou
moins isolés : aussi, sur une foule de localités du domaine diluvial
du Bosphore , ces mêmes argiles reparaissent- elles à l’état rudi-
mentaire plus ou moins prononcé , et toujours intimement liées
aux dépôts de conglomérats et de sables au milieu desquels elles
se trouvent intercalées. Cette identité parfaite des argiles plastiques
du Bosphore avec celles du littoral de la mer Noire, où elles sont
associées à des dépôts de lignite, acquiert encore plus de valeur
par l’examen des phénomènes exactement semblables qui se re-
produisent de l’autre côté du canal, sur le sol de l’Asie Mineure.
Or, le littoral asiatique des Dardanelles présente, sous ce rapport,
deux localités remarquables : l’une , c’est la contrée limitrophe de
la ville de Lamsai, où des dépôts de lignite se trouvent exactement,
comme sur le littoral de la mer Noire, intercalés entre des couches
de grès et de marnes plastiques ; l’autre localité , c’est la ville de
Tchanakkalessi, qui nous offre le véritable pendant des dépôts
d’argile de Bouyoukdéré ; car , dans les deux endroits , la même
argile qui à Lamsai, comme sur la côte de la mer Noire, se pré-
sente associée aux lignites, reparaît, au contraire, sans la moindre
trace de ce combustible , et acquiert un développement très
considérable. Comme à Bouyoukdéré , l’argile est exploitée à
Tchanakkalessi sur une échelle considérable , et même c’est à
cette circonstance que ce château des Dardanelles doit le nom
qu’il porte, car Tchanakkalessi veut dire littéralement château des
poteries (1).
Ainsi, sur le littoral septentrional de la presqu’île de Thrace ,
comme sur le Bosphore ou sur la rive asiatique des Dardanelles ,
(l) Tchanah , vase de terre cuite ; halé, château.
SÉANCE DU 17 MARS 1851,
311
ce sont toujours les mêmes éléments qui constituent ces immenses
dépôts de matières détritiques, soit incohérentes , soit agglutinées,
à l’état de brèche , de poudingue ou de conglomérat, quelquefois
accompagnées de marnes plastiques et de grès, qui , à leur tour,
tantôt renferment des lignites, tantôt en sont complètement dé-
pourvues
Un dernier trait de ressemblance entre tous ces dépôts de sables
et de conglomérats, accompagnés ou non de marnes ou de lignites,
c’est la découverte de troncs d’arbres silicifiés dans les conglomé-
rats et sables qui recouvrent les environs immédiats de Constanti-
nople. J’ai fait cette découverte non loin de la grande route qui
conduit de Péra à Bouyoukdéré. Ce sont des troncs d’arbres
dicotylédones, que M. Brongniart , à ma prière, a bien voulu
étudier.
En terminant ce travail, qu’il me soit permis d’y ajouter encore
un mot sur les résultats que l’on peut en tirer relativement à la
question si souvent débattue de l’époque géologique pendant la-
quelle a dû s’opérer l’ouverture du Bosphore de Th race.
Lorsque l’on considère que du côté de la Th race le Bosphore se
trouve en quelque sorte bordé par des dépôts nummuli tiques tous
horizontalement stratifiés , et sans la moindre trace de fragments
de roches éruptives , avec lesquelles ils se trouvent presque en
contact, on ne peut s’empêcher d’en conclure que si l’ouverture
du canal a été occasionnée par l’action de ces mêmes roches, ou ,
en général , par un agent volcanique quelconque , cette action n’a
pu se manifester qu’au térieurement aux dépôts nummulitiques
dont il s’agit. 11 est vrai que les observations de M. Hommaire de
Hell, et surtout celles de notre savant confrère M. Viquesnel -, ont
constaté un redressement très sensible dans les couches nummuli-
tiques du cap Karabournou, placé à 5 lieues à l’O. du Bosphore,
et conséquemment à une distance plus .grande de ce dernier que les
dépôts nummulitiques que nous avons signalés presque aux portes
de la capitale. Mais ce double phénomène que présentent les dépôts
nummulitiques de la presqu’île de Thrace dans leurs conditions
strati graphiques n’est que la reproduction d’un phénomène
semblable, très fréquent en Asie Mineure, ainsi que je l’ai dit dans
un mémoire précédent sur les dépôts sédimentaires de cette con-
trée : il résulte de ce phénomène que, pendant la longue époque
de la formation nummulitique , les éruptions tracliytiques sont
venues y signaler tour à tour des phases de repos et de perturbation,
ce qui fait que dans des localités limitrophes les dépôts nummu-
litiques sont les uns postérieurs et les autres antérieurs au même
312 SÉANCE DU 17 MARS 1851.
foyer éruptif placé dans leur proximité. Or, si le redressement des
couches, et surtout la présence des fragments trachytiques
prouvent , à l’égard du cap Karabournou , une antériorité incon-
testable à l’égard des roches trachytiques qui ont pu avoir opéré
l’ouverture du Bosphore , les phénomènes contraires que présen-
tent les dépôts nummulitiques situés plus près de ces roches érup-
tives établiraient pour ces dépôts une postériorité également in-
contestable relativement à la catastrophe dont il s’agit.
Quant à l’objection puisée dans l’absence du calcaire des steppes
au S. du Bosphore , ce qui , en effet , semblerait prouver qu’à
cette époque , très récente , le Pont-Euxin formait un bassin clos ,
un argument semblable perd beaucoup de sa valeur quand on ré-
fléchit à la connaissance imparfaite que nous avons encore de cette
contrée , où chaque jour de nouvelles découvertes prouvent in-
contestablement que bien des choses ont paru manquer, non parce
qu’elles n’existaient point , mais bien parce qu’on ne les y avait
pas encore vues.
M. Viquesnel reconnaît avec plaisir que, parmi les faits nom-
breux décrits dans les deux mémoires de M. de Tchihatcheff,
il en est plusieurs qui viennent confirmer quelques unes des
observations faites antérieurement par feu Hommaire de Hell
et par lui-même , et dont il a rendu compte dans la séance du
6 mai 1850 (voyez Bull., 2e sér., t. VII, p. Ù91 à 520). Il ne
partage pas certaines opinions émises par l’auteur et se réserve
de les discuter plus tard , si , au retour de sa prochaine explora-
tion en Orient , notre intrépide confrère croit devoir y persister.
Il termine en faisant observer que l’existence du terrain crétacé
de Kila et celle du terrain nummulitique de Chilli et du littoral
voisin , découvertes par Hommaire de Hell , sont restées incon-
nues à M. de Tchihatcheff, ou du moins ne sont pas mention-
nées dans les deux mémoires.
M. Constant Prévost fait hommage à la Société d’une bro-
chure dans laquelle il a réuni diverses notes lues par lui à
l’Académie des sciences , dans les séances du 9 septembre 1850
au 3 mars 1851.
Au sujet d’une note de M. Faye, contenue dans ce recueil
et provoquée par les communications de M. Constant Prévost,
M. d’Archiac croit devoir faire observer que les géologues ne
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
313
sont pas restés étrangers à la discussion des questions d’astro-
nomie et de cosmogonie qui intéressent l’histoire de la terre $
il rappelle, en particulier, qu’il a traité ces questions avec beau-
coup de détail dans le premier volume de Y Histoire des progrès
de la géologie , et qu’il s’est servi des mêmes arguments que
M. Faye pour combattre des théories qui ne paraissent pas
fondées.
Séance du 7 avril 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance,
le Président proclame membres de la Société :
MM.
Le prince Lobanow de Rostow, aide de camp de S. M. l’em-
pereur de Russie, à Saint-Pétersbourg, présenté par MM. Cor-
dier et Charles d’Orbigny 5
De Galdo (Manuel José), professeur d’histoire naturelle à
Madrid, présenté par MM. le colonel G. Yerdu et de Brimont.
M. Mary, ingénieur en chef des ponts et chaussées, rue de
Madame, 50, à Paris, est admis, sur sa demande, à faire de
nouveau partie de la Société.
Le Président annonce ensuite deux présentations.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa-
vants, mars 1851 • in -4.
De la part de M. Michelin , Description de quelques nouvelles
espèces d’ Echinides et d’une nouvelle espèce de Crinoïdes (extr.
de la Rev. et Mag. de zool. , janv. 1851 , n° 2) -, in-8, l\ p.,
2 pî. Paris, 1851 , chez Schneider.
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
31 à
De la part de M. Alexis P erre y, Liste des tremblements de
ferre ressentis en 1849 (extr. des Mém. de I Acad. des sc .,
arts et belles-lettres de Dijon , 1850) ; in-8 ., 23 p. Dijon ,
chez Tricault.
De la part de M. À. Catulio, Lettera geologica del prof.
Antonio Catulio al célébré eau aller e Impey Rodrigo Murchi-
son , etc. (estr. dai Nuov. ann. delle scien. natur . di Bologna ,
di gennajo 1851) • in-8, 15 p., 1 pl.
Comptes rendus des séances de R Académie des sciences ,
1851 , 1er sem., t. XXXII , nos 11 à 13.
U Institut, 1851, nos 898 à 900.
Annales des mines , 4e sér., t. XVIII, 1850, 6e livraison
de 1850.
Bulletin trimestriel de la Société des sciences , belles-lettres
et arts du département du Var , XVIIIe année, nos 3 et h.
Toulon, 1850.
Noua acta Academiœ C. L. C. naturce curiosorum , vol. XXII,
pars II. Breslau et Bonn, 1850.
The Athenœum , 1851, nos 1221 à 1223.
M. de Verneuil lit l’extrait suivant d’une lettre du colonel
Helmersen.
Saint-Pétersbourg, 4 6 mars 1851.
En 1849 et 1850, j’ai souvent visité la côte occidentale de
l’Esthonie , et surtout les environs de Baltiskliport et de Hapsal.
L’étude de notre terrain silurien supérieur dans les environs de
Hapsal m’a beaucoup intéressé. J’ai principalement porté mon
attention sur les couches qui font le passage du terrain silurien
inférieur de Reval et du pont Baltique au terrain silurien supé-
rieur. L’année passée j’ai examiné la grande zone dévonienne entre
Kokenliusen , sur la Duna, et Yoroneje. Je m’occuperai bientôt
de la rédaction de ce voyage , et aussitôt que le mémoire sera im-
primé, je l’enverrai à la Société géologique. M. Pander est très
occupé de la découverte qu’il a faite de dents microscopiques de
poissons dans les couches les plus basses du terrain silurien infé-
rieur de notre pays. M. Eichwald vient de publier une première
livraison de son grand ouvrage : Paléontologie russe , qui se com-
pose de quatorze planches, et d’un volume de texte en russe. Cette
première livraison traite du terrain tertiaire.
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
315
Notre Société, géographique prépare une grande expédition
scientifique pour le Kamtschatka. On s'occupe en ce moment de
la rédaction du programme et du choix des savants qui doivent
faire partie de l’expédition. M. Charles de Ditmar, deDorpat, jeune
géologue très instruit et plein de zèle , partira au mois de mai aussi
pour le Kamtschatka , indépendamment de l’expédition de la
Société géographique. Il s’occupera de paléontologie , et j’espère
qu’il nous enverra beaucoup de fossiles. 11 doit en trouver en
traversant toute la Sibérie, depuis Tobolsk jusqu’au port d’Ayan.
Ce qui dans ce moment m’intéresse le plus, ce sont les fossiles
et les échantillons de roches que le capitaine de la marine,
M. Boutakoff, a recueillis sur les bords du lac Aral. A juger
d’après cette collection, une grande partie du plateau nommé
Oust-Ourt, entre la mer Caspienne et l’Aral, se compose de cou-
ches crétacées et éocènes. Les Nummulites n’y manquent pas, non
plus que les poissons, et quelques Acéphales du bassin de Paris.
Il faut dire , cependant , que les dents de Lamna et autres poissons
fossiles se trouvent sur la pente occidentale de l’Oust-Ourt, vers
les bords de la mer Caspienne.
Le voyage de feu M. Lehmann à Boukhara et à Samarkand,
que j’ai rédigé sur les journaux de ce savant voyageur, est sous
presse, et paraîtra bientôt. Il contiendra assez de géologie pour
fixer l’attention de ceux de vos collègues qui s’intéressent aux dé-
couvertes qui se font en Asie.
Le petit mémoire que je vous prie de présenter à la Société géo-
logique n’a que peu d’intérêt pour elle. J’y décris un puits artésien
à Reval , travail qui a parfaitement réussi , et je propose d’en faire
autant à Saint-Pétersbourg , où nous avons une disposition de ter-
rain très analogue à celle qui constitue le sol de Reval.
Le trésorier présente l’état de la caisse du 1er janvier au
31 mars 1851.
Il y avait en caisse au 31 décembre 1650. . L759 fr. 65 c.
La recette, depuis Je 1er janvier 1 851 jusqu’au
31 mars , s’est élevée à 5,570 50
Total. , . 7,530 15
La dépense, depuis le 1er janvier jusqu’au
31 mars, s’est élevée à 3,271 20
Il v a en caisse au 31 mars 1851 4,258 fr. 95 c.
S16
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
M. de Roys fait la communication suivante :
Note sur le transport de matériaux dans le bassin du Rhône ,
ci Ventrée de son delta , par M. A. de Roys.
La Société a reçu, il y a un an, une note de M. Daubrée sur
le transport de matériaux qui s’opère journellement dans le lit du
Rhin. Ces études sont d’une utilité incontestable , et signalent la
puissance des causes qui modifient encore le relief de notre sol ;
nous demandons la permission de présenter quelques observations
sur le transport de matériaux qui s’opère dans le lit du Rhône ,
à l’origine du delta de ce fleuve , le plus important de ceux qui
baignent la France. Il résulte en effet des éléments du travail
présenté , il y a dix ans , à la Chambre des députés , sur l’amé-
lioration de la navigation intérieure, que le débit de ses eaux,
à l’étiage, atteint à Avignon un cube total de 2270 mètres par
minute, ce qui dépasse la somme du débit de la Seine, de la Loire
et de la Garonne réunies. Au pont de Beaucaire, situé précisément
au sommet du delta, ce débit dépasse 2700 mètres par minute, à
Fétiage.
Pour arriver à connaître à peu près la quantité de matériaux
fournis annuellement par le fleuve , il nous a paru indispensable
de distinguer les époques d’eaux moyennes, où le fleuve présente
toujours une remarquable limpidité , de celles des fortes eaux et
des inondations, où ses eaux sont fortement chargées de matières
limoneuses. On peut en moyenne évaluer les dernières à Zi5 jours
par an. Il reste donc 320 jours pour les eaux moyennes ou basses.
Pendant cette dernière période , la hauteur des eaux, au pont de
Beaucaire, varie entre l’étiage et une hauteur de 3 mètres au-
dessus. En moyenne, la profondeur d’eau peut être évaluée à
2m,50, la vitesse à 5 mètres par minute. La longueur totale du
pont entre les culées est de ù50 mètres; déduisant 18 mètres pour
les trois piles , et 32 mètres pour le chemin de lialage , la digue
au milieu du Rhône et les enrochements des piles , il reste un
débouché total de ZiOO mètres , en sorte que le débit du fleuve ,
pendant les eaux moyennes, est 5000 mètres cubes par minute.
Malgré leur limpidité, les eaux du Rhône, outre une très faible
proportion de sels en dissolution , roulent une petite quantité de
matières limoneuses : on peut en juger par la rigole d’irrigation
construite par la Compagnie du canal de Beaucaire. Cette rigole
s’embranche sur le canal à l’écluse de Nourridier, à 7 kilomètres
de la prise d’eau. Malgré un aussi long trajet avec une vitesse
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
517
presque nulle , malgré l’emploi des eaux pour l’arrosage des pro-
priétés voisines , le curage de cette rigole donne tous les ans une
masse considérable de sédiments. En laissant déposer l’eau prise
dans le Rhône, dans des vases clos, il m’a paru qu’on devait éva-
luer la quantité des matières tenues en suspension à 4 ou 5 déci-
grammes par litre. Ce résidu, dont la pesanteur spécifique est de
2,6 à 2,7, se compose peur un quart de calcaire et pour les trois
quarts d’argile un peu sableuse. Ainsi la quantité de matière solide
transportée par les eaux, même limpides, est, en volume, le mil-
lième de celui de l’eau, soit 5 mètres par minute, 7200 par jour,
et 2300000 par an , pour les 320 jours d’eaux moyennes. Le
sable pur, très micacé, et le gravier au fond du lit du fleuve , sont
en outre roulés par voie mécanique, et pendant toute cette période
ne s’élèvent guère au-dessus du fond de l’eau. Nous pensons qu’on
peut évaluer le volume du sable et du gravier ainsi transportés
au tiers environ du chiffre ci-dessus, et fixer le total à 3000000 de
mètres cubes.
Dans les autres 45 jours les eaux du fleuve s’élèvent fort au-
dessus du niveau des eaux moyennes. Ainsi , dans l’inondation de
novembre 1 8fr0, on peut évaluer la profondeur moyenne à 7'\50
au moins; la vitesse, sous le pont, dépassait 12 mètres par minute.
Nous pensons pouvoir fixer en moyenne, pour ces 45 jours, la
profondeur réduite à 6 mètres, la vitesse à 10 et le débouché à
420, les enrochements et la digue étant alors recouverts. Le débit
est donc alors de 25200 mètres cubes, soit environ cinq fois celui
des autres 320 jours.
La terrible inondation de 1840 rompit les digues et se répandit
dans toute la plaine jusqu’à Aimargues , qui appartient au bassin
du Vidourle. Elle a couvert environ 20000 hectares de terrain.
Les marais indiqués sur la carte de Cassini sous le nom de marais
de Bellegarde ont été entièrement comblés et convertis en terres
de première classe. La commission chargée de l’évaluation des
pertes a constaté que plus de 4000 hectares avaient reçu un dépôt
limoneux, s’élevant quelquefois à plus d’un mètre de hauteur, et
ne descendant presque jamais à moins d’un décimètre. Pour être
certain de ne point exagérer, nous nous arrêterons à ce chiffre ;
4000000 de mètres cubes ont donc été déposés sur cette plaine en
20 jours, par les deux tiers au plus des eaux du fleuve, puisque son
lit demeurait rempli , et que , les chaussées de Boulbon ayant été
également rompues, la plaine de Tarascon était aussi inondée.
6000000 de mètres cubes de sédiments ont donc passé devant
Beaucaire en 20 jours, soit 300000 par jour. Le débit des eaux au
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
518
pont, d’après les chiffres que nous avons donnés plus haut, était
de 37800 mètres par minute, auxquels il faut ajouter plus de
12000 mètres pour celles qui couvraient la plaine de Tarascon ;
en tout 50000 par minute , ou 72000000 par jour : ce qui donne
quatre millièmes pour la proportion de sédiments dans les eaux
chargées.
Nous pouvons d’autant mieux appliquer cette proportion aux
grosses eaux moyennes du fleuve que, pour l’inondation de 18/10,
nous sommes resté au-dessous de la vérité. En l’appliquant au dé-
bit moyen de 25000 mètres par minute que nous avons obtenu
pour ces û5 jours, le transport annuel pendant cette période s’élè-
verait à environ 6000000 de mètres cubes, et pour la totalité de
l’année à 9000000, et pourrait par conséquent former un solide à
base carrée de 300 mètres de côté, soit 9 hectares de superficie et
de 100 mètres de hauteur.
Ce chiffre paraîtra sans doute considérable si on le compare à
celui qu'a obtenu M. Daubrée pour le Rhin, au pont de Kehl. Si
cependant on réfléchit à la courte distance qui sépare ce point du
lac de Constance, où la majeure partie des détritus entraînés par
les eaux a dû se déposer, au peu d’importance des affluents qu’il
reçoit dans ce trajet, on s’étonnera, au contraire, que la différence
soit si peu considérable. Si l’on a égard au volume des eaux, on
trouvera que, malgré des circonstances aussi défavorables, le Rhin
charrie proportionnellement à peu près moitié de ce que trans-
porte le Rhône. Nous pensons que dans la lettre de M. Desor il y
a une faute d’impression, lorsqu’il dit (VfIIe vol. , p. 68) que la
proportion du limon charrié par le ississipi est de 12,7 pieds
cubes pour 100 pieds cubes d’eau, ce qui ferait plus du huitième
en volume, à peu près le tiers en poids. Si, comme nous le présu-
mons, il faut lire 1000 pieds cubes d’eau, la teneur moyenne du
Mississipi serait plus du triple de celle des grosses eaux du Hhône ,
ce qui nous semble déjà bien considérable.
Cette masse de matériaux que le fleuve fournit annuellement à
son delta est employée à exhausser la partie déjà existante et à
l’agrandir encore. Ce prolongement s’opère aux deux embouchures
principales, mais d’une manière peu sensible à celle du bras secon-
daire , tandis qu’elle est encore très remarquable à celle du bras
principal. Pendant toute la durée du moyen âge , on construisait
près de l’embouchure des tours ou petits forts pour empêcher les
pirates barbaresques et les contrebandiers d’y pénétrer. Plusieurs
de ces tours existent encore et constatent que depuis dix siècles, au
plus, le prolongement du delta s’élève à plusieurs lieues. M. Surell,
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
319
ingénieur 7 chargé de la navigation du Rhône, et dont le nom est
honorablement connu dans la science, a recueilli les chiffres exacts
de son accroissement depuis le commencement du xvme siècle, et
a bien voulu me communiquer les résultats suivants : pendant les
dix années, de 1700 à 1710 , rallongement annuel a été, en
moyenne, de 55 mètres; pendant une période décennale finissant
en 1775, il a été de ù5 mètres, il était réduit à 35 mètres en 18/jO.
On sait qu’un courant littoral entraîne en grande partie les trou-
blés au moment où ils arrivent à la mer et les range le long du
rivage ; il en résulte que la saillie formée par leur dépôt à F em-
bouchure du grand bras augmentant chaque année , son péri-
mètre devient plus considérable. La quantité de détritus amenés
étant à peu près constante , à mesure que ce périmètre augmente
la largeur du dépôt doit diminuér, et telle est la cause de la pé-
riode décroissante constatée par M. Surell.
Si la b auteur du delta n’augmentait pas vers son origine en
même temps qu’il anticipe davantage sur la mer, la pente s’affai-
blirait de plus en plus, et la vitesse du courant deviendrait bientôt
insuffisante pour entraîner les matières en suspension jusqu’à la
mer. Evidemment une partie considérable de ces matières doit
être employée à exhausser le lit et les bords du fleuve. C’est en
effet ce que prouvent toutes les observations. iNous avons déjà dit,
il y a neuf ans, cpie le fatal système d’endiguement du fleuve, pra-
tiqué depuis huit cents ans en Languedoc , n’avait permis à la
plaine de Beaucaire de s’exhausser que dans les rares occasions
où, dans les inondations, les digues ont été rompues. Aussi les
terres demeurées en dehors des digues s’élèvent à 2 mètres au
moins au-dessus de celles qui sont protégées. L’écluse de Charen-
cone, à deux kilomètres de Beaucaire, étant bâtie en remblai, on
voit que le niveau de la plaine, à ce point, se trouve à peu près à
la même hauteur que le fond du lit du fleuve. La rupture des
digues est généralement causée par cet exhaussement qui finit par
rendre leur hauteur insuffisante. Quelques constructions romaines,
probablement du ue ou me siècle, découvertes par les travaux faits
en 18à2 pour réparer la brèche Saint-Denis, à U kilomètres en
aval de Beaucaire, prouvent que cet exhaussement a été d’environ
U mètres en seize cents ans, ce qui donne 2 millimètres et demi
par an. A Fourques, il est seulement de 2 millimètres, et diminue
graduellement jusqu’à Fembouchure. il en est résulté en 18Ù0 un
effet assez remarquable : les eaux qui avaient envahi la plaine de
Beaucaire s’y maintinrent à une hauteur considérable, à cause
des obstacles qu elles rencontraient. Près de Saint-Gilles, elles
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851 .
320
atteignirent la hauteur des digues qu’elles rompirent en les dé-
passant , et rentrèrent en partie dans leur lit ; le reste continua de
suivre la plaine, et envahissant l’étang salé du Repausset, à Aigues-
mortes, y apporta des coquilles et des poissons d’eau douce dont
les débris se sont mêlés dans les sédiments avec ceux des animaux
marins , ses habitants ordinaires.
Nous avons dit que l’inondation de 1840 avait achevé de com-
bler , en grande partie , les marais de Bellegarde dits de la Casta-
gnète. Ces marais formaient, avec ceux de Saint-Gilles, une série
peu interrompue jusqu’à la mer, à peu près parallèlement au petit
bras du Rhône. Leur prolongement jusqu’à Beaucaire présente
un phénomène assez remarquable. Pendant les chaleurs et les sé-
cheresses de l’été, le sol se cou vre par places d’efflorescences salines,
de chlorure de sodium très pur, qui brûlent toute espèce de végé-
tation partout où elles se montrent. Ne doit-on pas voir dans ces
marais et ces terres salines une série d’anciennes lagunes séparées
alors de la mer par un cordon littoral parallèle sans doute au petit
bras du Rhône , dont les traces ont disparu sous l’exhaussement
graduel du delta? Cet exhaussement a fini par combler, en grande
partie , les lagunes complètement isolées alors de la mer. Le chlo-
rure de sodium dissous autrefois dans leurs eaux, n’ayant pu s’écou-
ler, est ramené à la surface par l’effet de la capillarité , lorsque les
chaleurs ordinaires de l’été dessèchent fortement le sol.
Les sondages multipliés que la construction des norias et des
puits a nécessités sur un grand nombre de points de la plaine de
Beaucaire ont toujours présenté, à une profondeur de 8 à 10 mè-
tres , une couche de gravier semblable à celui que le fleuve roule
encore aujourd’hui. Ce gravier est composé de galets presque ronds
très aplatis , tandis que les galets alpins sont presque exactement
des ellipsoïdes de révolution. Cette couche, avec de nombreuses
alternances de sable, a une profondeur inconnue. Au-dessus on ne
trouve, jusqu’à la surface du sol , que le limon alluvial du fleuve
avec quelques petites assises de sable. Quelques inondations causées
par le grossissement des affluents supérieurs, tels que l’Isère, ont
déposé sur les parties des vallées qu’elles couvraient toutes les ma-
tières argileuses, et ne contiennent plus qu’un sable très fin et très
micacé qu’elles apportent sur le sol. L’inondation de 1841 trouva
les brèches des digues mal affermies. Elle les rompit facilement ,
et ne couvrit le sol qu’à une hauteur inférieure de lm,30 à celle
de Tannée précédente. Elle jeta sur une partie de la plaine une
épaisseur de 40 à 50 centimètres de sable. Dès qu’il est desséché ,
ce qui arrive très promptement , surtout lorsque soufflent ces vents
SÉANCE DU 7 AVRIL 185 i .
321
impétueux si fréquents dans le pays, il s'enlève jusqu’à 15 ou
20 mètres de hauteur. Il se fixe par les plantations et autres obsta-
cles, et s’élève promptement à des hauteurs assez considérables,
qu’on nomme montilîes dans le pays. L’inondation de 1841 avait
répandu dans la plaine une multitude de graines de saules, osiers
et peupliers qui avaient germé avec une promptitude extrême. Le
propriétaire du domaine de Thieuloy, qui avait espéré protéger
ses terres contre l’invasion de ces sables mouvants , conserva une
ligne de ces plants de quelques mètres de largeur. En quatre ans il
s’était formé une montille de 7 à 8 mètres de haut. Son successeur
ayant fait couper tous les arbres, elle a disparu en moins d’un an.
C’est ainsi que se sont formés, par l’action des vents du nord, si
impétueux et si fréquents dans ces contrées, les monticules de
sables des pinèdes au bord de la mer.
L’exhaussement du lit du Rhône à Beaucaire n’a pu s’opérer
sans que la vallée supérieure ne s’élevât également. On trouve
effectivement à Yallabrègues des constructions que l’on croit
remonter au xie siècle, enterrées aujourd’hui de 2m,50. Au-
dessus du Pont-Saint-Esprit , nous avons vu des preuves de cet
exhaussement autour de plusieurs constructions. Partout il nous
a semblé qu’on ne pouvait l’évaluer à moins d’un millimètre et
demi à 2 millimètres par an au bord du fleuve, toujours plus
élevé que le pied des falaises, ainsi que M. Rozet l’a autrefois
remarqué pour la Saône. Un fait pourra donner une idée de
la quantité de matières transportées par certaines inondations.
Le 19 septembre 1846, peu de jours après la clôture de la ses-
sion de la Société géologique à Alais , un orage effroyable éclata
sur la montagne de Portes, la Grand’Combe et toutes les vallées
contiguës; la pluie ne cessa de tomber pendant plus de vingt
heures. La Sèze déborda. Le Gardon d’ Alais, qui était alors très
bas, commença à grossir le 20 à deux heures du matin, et en trois
ou quatre heures, atteignit une hauteur de 7 mètres au-dessus de
son niveau de la veille. Le parapet du boulevard qui protège la
partie basse de la ville fut emporté sur une longueur de 60 mètres,
et les eaux se répandirent par cette brèche dans la grande rue et
toute la vieille ville. La partie du boulevard qui est au pied du
rocher de la citadelle fut couverte de 50 à 60 centimètres d’eau
qui n’avait pas de courant. Nous pûmes y constater, trois jours
après, un dépôt limoneux de plus d’un millimètre d’épaisseur; dans
la plupart des maisons envahies, le dépôt, au rez-de-chaussée,
s’élevait à plus d’un centimètre. Les eaux de la Durance trans-
Soc. géol,, 2e série , tome VIII,
SÉANCE DU 7 AVRIL 4851.
$22
portent, même dans leur état normal, une masse considérable de
détritus. La célèbre plaine caillouteuse de la Grau est arrosée en
partie, depuis deux cents ans, par le canal de Craponne. Dans
quelques unes des magnifiques prairies que cet arrosage a pro-
duites, la terre végétale atteint 15 centimètres de puissance. Il y
en a déjà 8 à 10 dans quelques parties du plateau de diluvium
alpin, au-dessus d’Avignon, arrosées depuis quatre-vingts ans par
le canal Grillon. Nous devons ajouter que cette terre n’est pas en-
tièrement produite par le dépôt des eaux , car elle contient envi-
ron 30 pour 100 de matières organiques. Le dépôt naturel n’en
contient que k à 5 pour 100. Ainsi l’acide carbonique, l’azote de
l’atmosphère et l’hydrogène de l’eau ont fourni à peu près le quart
de cet exhaussement du sol.
On peut parvenir à une évaluation approximative des détritus
qui se déposent annuellement dans les vallées des cours d’eau dé-
pendant du bassin du Rhône. La portion de ces vallées habituel-
lement couvertes par les inondations est environ le dixième de la
surface totale du bassin qui a été évaluée à 150000 kilomètres
carrés. Elle est par conséquent de 1500000 hectares. Si l’exhaus-
sement annuel est d’un millimètre, le total formera 15000000 de
mètres cubes, qui, réunis aux 9000000 fournis par le fleuve à sou
delta , donneront une masse totale de 2^000000 enlevés tous les
ans aux portions élevées du bassin, qui ne forment guère que la
moitié de sa surface. Si elle était uniformément répandue sur les
75000 kilomètres carrés, la dénudation annuelle serait un peu
au-dessous d’un tiers de millimètre ; mais évidemment elle est
inégalement répartie, en raison de la rapidité des inclinaisons, de
l’état de gazonnement ou de culture des berges dans les hautes
vallées.
Nous n’avons rien à ajouter aux détails donnés par M. Daubrée
sur la formation des atterrissements en graviers dans le lit du
Rhône, et la position des galets dans ces atterrissements. Elle est
parfaitement conforme à ce qu’ii a décrit pour le Rhin. Formés
d’un seul coup par une inondation autour d’un obstacle, les sables
mouvants s’arrêtent à l’aval , et si l’inondation suivante ne les dé-
truit pas pour les reformer ailleurs, quelques buissons de peu-
pliers, d’osiers ou d’aulnes germent sur ce sable pendant les eaux
basses, et déterminent le dépôt de nouveaux sédiments. Plusieurs
de ces atterrissements ont ainsi pris en peu d’années des dimen-
sions considérables, et sont devenus des îles importantes.
Nous ne pensons pas que les sondages, dans le delta, soient
séaK'OR du y av ni s, 1851,
828
parvenus à l’ancien fond de la mer. Cependant nous croyons pou-
voir conclure, d’après les profondeurs du littoral de la Méditerra-
née, au-dessus et au-dessous, que la puissance moyenne de ce
dépôt de l’époque actuelle est de 60 mètres. La superficie totale
étant au plus de 60000 hectares, en déduisant ce qui appartient
au Vidourle, il en résulte cpie ce delta si important a dû se former
en moins de cinquante siècles. Nous avons cru devoir donner cet
aperçu comme une preuve de la puissance que conservent encore
les causes physiques qui agissent sur le sol de notre planète, et qui
tendent à en modifier le relief.
À la suite de cette lecture, M. Deville annonce qu’il suit en
ce moment, en qualité de secrétaire de la commission de V An-
nuaire des eaux de la France , instituée par M. Dumas près
le ministère de l’agriculture et du commerce, des expériences
qui ont pour but de déterminer, en môme temps que les quan-
tités de pluie tombées dans les diverses régions, la proportion
de matières meubles entraînées mécaniquement par la Seine et
par la Loire, à différents points.
Le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Cor-
nuel :
JS ote sur les galets de roches anciennes qui existent dans
U arrondissement de Wassy [Haute-Marne) , parM. J. GornueL
Wassy, 26 mars 1831.
Dans un article très sommaire sur le terrain de transport de
l’ arrondissement de Wassy ( Mémoires de ta Société géologique de
France , lre série, tome IV, page 270), j’ai dit que les débris erra-
tiques de roches anciennes étaient rares dans cet arrondissement ;
qu’ils consistaient en quelques galets de quartzite, de grès lustré
et de syénite de la grosseur d’un œuf ou du poing, et en morceaux
de granité porpliyroide rose, de granité micacé, et de diorite
schistôide?; et que j’avais même vu, auprès de Narcy, un mor-
ceau roulé pesant au moins 15 kilogrammes, qui m’avait paru être
du trapp compacte.
Je considérais alors ces débris comme appartenant à l’époque
diluvienne , parce que je n’en avais jamais rencontré qu’à la sur-
face du sol , et qu’ils me semblaient répartis indistinctement sut
les affleurements et les lambeaux de différentes couches.
324
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
Le“s observations que M. d’Archiac fit à leur égard, dans son
Histoire des progrès de la géologie, de 1834 à 1845, tome II,
page 161, me déterminèrent à pousser plus loin mes investiga-
tions, et bientôt les faits que je vais rapporter vinrent frapper
mon attention.
Des tailleurs de pierre, qui construisaient la halle de Wassy,
refendaient à la scie un gros bloc d’oolitlie vacuolaire provenant
des carrières de Chevillon. Vers le milieu de ce bloc, qui était, du
reste, parfaitement homogène, et n’avait jamais subi de fissures,
la scie éprouva tant de résistance qu’on fut obligé de retourner la
pierre pour la scier par l’autre bout. Les deux parties étant sépa-
rées, on en retira un galet irrégulier d’eurite quartzifère de
32 millimètres de longueur et de 22 millimètres de largeur, qui
est aujourd’hui dans ma collection. L’état de la pierre, la manière
dont le galet y était enchâssé , les parcelles d oolithe qui y sont
encore adhérentes , tout indiquait qu’il était arrivé dans la masse
de la roche , lors de la formation du calcaire oolithique de Che-
villon, que l’on considère jusqu’à présent comme appartenant à la
partie supérieure du troisième étage jurassique, et qui est à plus
de 110 mètres au-dessus du niveau de la rivière de Marne. Les
nombreux ouvriers de l’atelier de construction n’avaient jamais
rien remarqué de semblable.
Peu de temps après, je recueillis , dans une couche tendre de
calcaire à Spatangues ou néocomien d’une carrière de Wassy, à
peu de distance d’Attancourt , un petit fragment de phyllade ou
schiste argileux gris de 33 millimètres de longueur et 25 milli-
mètres de largeur, et à la surface duquel s’est fixée une petite Ser-
pule [Scrpula gordialis ? Schloth.) de l’époque néocomienne.
A peu près à la même époque , je trouvai, à la même carrière,
dans une marne jaunâtre qui fait partie du même calcaire néoco-
mien , un morceau de phyllade micacé d’un gris foncé ou noi-
râtre , ayant plus de 7 centimètres de longueur, 6 centimètres de
largeur, et 36 millimètres d’épaisseur, et à la surface duquel adhè-
rent quelques restes organiques serpuliformes qu’on ne distingue
qu’à la loupe , et qui sont évidemment aussi des fossiles néoco-
miens. Ce fragment, que j’ai partagé en deux, était anguleux et
peu usé, ce qui indique qu’il provient d’un morceau plus gros qui
se sera divisé dans le trajet.
Enfin un ouvrier des minières m’a remis un galet oblong de
quartz blanc sub-compacte, à cassure écailleuse, de 9 centimètres
de longueur, qu’il venait de trouver dans le sein même de la
couche de fer oolithique néocomien exploitée sur le territoire de
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
32j
Wassy, à une hauteur de 40 mètres environ au-dessus du lit de la
Biaise. Après avoir lavé ce dernier galet, j’ai remarqué qu’il adhé-
rait à sa surface assez d’hydroxyde de fer et de grains oolithiques
de ce minerai pour prouver que son transport avait eu lieu pen-
dant que le dépôt du fer néocomien était en voie de formation.
Ce qui ajoute encore à cette preuve, c’est que la surface du galet,
qui était originairement blanche, a été imprégnée par la matière
ferrugineuse , qui lui a communiqué sa couleur jusqu’à un milli-
mètre et demi de profondeur. De plus , la couche de minerai n’a
pas subi de dénudation en cet endroit, puisqu’elle y a pour toit la
partie inférieure de l’argile à JPlicatuies ou aptienne, dont les fos-
siles sont bien en place et n’ont pas subi de remaniement.
Ainsi il devenait désormais constant pour moi que des débris de
roches anciennes, eurite, phyllade et quartz, avaient été amenés
dans les environs de Wassy, à une distance de plus de 120 kilomè-
tres des premières montagnes des Vosges, à la fin de la période
jurassique et pendant la période néocomienne.
Il ne s’agissait plus que de savoir si ceux des galets que l’on
trouve sur le sol arable avaient le même âge géologique. N’ayant
pas conservé ceux que j’avais avant l’année 1839, j’en ai recueilli
dix-neuf autres, dont un de grès blanc à grains fins , un de grès
blanc moins fin, avec quelques petites mouchetures de couleur lie-
de-vin, un de grès très fin et très dur entièrement de couleur lie-
de-vin , seize de quartz, les uns blancs, les autres gris, d’autres
rouges, et d’autres enfin blancs à l’intérieur, et d’un jaune fauve
à la surface. Deux proviennent de Wassy, deux de Vaux-sur-
Blaize, et quinze de Trémilly. Le plus gros pesait 4 kilogrammes
250 grammes. Muni de ces échantillons, j’ai fait une sorte d’en-
quête pour l’arrondissement, en profitant de mes fréquentes rela-
tions d’affaires avec les personnes qui se livrent à l’agriculture.
Quoique ces galets ne soient pas communs, ils sont bien connus
dans la partie basse de l’arrondissement de Wassy; car les labou-
reurs et les moissonneurs en rapportent chez eux pour faire des
poids de balances ou des jouets d’enfants, ou pour river les clous de
leurs chaussures. Ceux de nos laboureurs qui ont visité les Vosges
comparent, avec raison, ces cailloux aux galets de la Moselle.
En coordonnant les renseignements qui m’ont été fournis pour
chaque commune , je suis arrivé à ce résultat : que l’on ne connaît
pas de galets de roches quartzeuses sur les territoires entièrement
formés par le terrain jurassique ; qu’il n’y en a que sur ceux où
existent nos couches crétacées inférieures; que le gisement de ces
SÉANCE BU 7 AVRIL 1853 .
galets s’élève à mesure que ces dernières couches s’élèvent elles-
mêmes; que, lorsque les couches néocomiennes sont réduites à
des ont li ers ou lambeaux isolés, ce n’est plus que sur ces lambeaux
ou autour d’eux que l’on peut trouver les galets ; et qu’enfm ceux-ci
n’existent pas dans les vallées , si ce n’est parfois dans le lit des
torrents et ravins qui prennent naissance dans le terrain delà craie
inférieure , ou dans des détritus crétacés.
Ces cailloux roulés paraissent être plus abondants, ou, pour
mieux dire , moins rares à la surface de l’argile ostréenne que par-
tout ailleurs. Il y en a, du reste , de toutes dimensions au-dessous
de ceux dont je viens de parler, car on en trouve qui n’ont que la
grosseur d’une noisette , d’un haricot ou d’un pois. En un quart
d’heure j’en ai recueilli onze de ceux-ci , dont neuf de quartz
blanc laiteux, et deux de quartz rougeâtre, sur l’argile ostréenne à
l’O. de Trémilly. .Te suis porté à croire que, gros et petits, la
plupart proviennent du dépôt de sable ferrugineux non fossilifère
qui surmonte cette argile. Je le pense ainsi, parce qu’il y en a
auxquels adhèrent encore des parcelles d’un enduit ferrugineux
qui a du se former au milieu du sable , et que , s’ils provenaient
d’une couche fossilifère , quelques uns auraient dû servir de sup-
port à des fossiles néocomiens, et en conserver des restes.
De gros galets de quartz ont été trouvés aussi dans des minières
en entonnoir de la côte de Bermont , territoire de Noncourt , à
plus de 100 mètres au-dessus du fond des vallées voisines. Comme
le minerai de cette localité est le fergéodique néocomien remanié
pendant la période diluvienne , on pourrait penser que ces galets
appartiennent au diluvium. Mais il est plus probable qu’ils vien-
nent du sable ferrugineux inférieur qui accompagnait le dépôt
primitif du fer géodique, et qui l’accompagne toujours dans beau-
coup d’endroits où le remaniement n’a pas eu lieu ; et que, plus
lourds que les sables de la couche qui les recélait , ils ont été re-
pris par les eaux diluviennes, et précipités, avec les parties les
plus pesantes de l’hydrate de fer géodique , dans les cavités du ter-
rain jurassique.
Ainsi , en résumé, je considère maintenant les galets de roches
anciennes disséminés dans cette contrée comme y ayant été trans-
portés à la fin de la période jurassique, et surtout pendant la pre-
mière partie de la période crétacée.
Tout porte à croire qu’ils proviennent des montagnes des Yosges,
qui étaient probablement plus élevées qu elles ne le sont à présent,
et qui n’étaient pas séparées du sol de la Haute-Marne par les
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
327
vallées actuelles. Ils auraient été charriés principalement lorsque
le dépôt des sables néocomiens s’opérait.
Observation. — On a trouvé, dans l’ arrondissement de Wassy,
des fragments de petites meules en granité à mica noir, provenant,
sans doute, de moulins à bras, et des boules qui ont du être em-
ployées dans les arts. On y rencontre aussi quelquefois des instru-
ments gaulois en silex , tels que haches ou casse-têtes et pointes de
dards , les uns achevés , les autres ébauchés. Une petite hache en
feldspath verdâtre a même été recueillie récemment à Trémilly.
Mais la confusion n’est pas possible entre ces objets et les galets
naturels qui font le sujet de cette notice. Quant aux éclats de silex
pyromaque et aux morceaux plus ou moins entiers de cette sub-
stance, qu’on voit de temps en temps à la surface du sol, je n’en
ai pas parlé , parce qu’on ne peut pas non plus les confondre avec
les galets , et qu’il est probable que ces morceaux de silex ont la
même origine que les anciens instruments que je viens de citer.
M. Levallois fait la communication suivante :
Remarques sur /’Ostræa costata et sur /’Ostræa acuminata,
considérées comme fossiles caractéristiques , par M. J. Le-
vai lois , ingénieur en chef des mines.
L’un de nos plus regrettables confrères, feu M. Aoltz, a publié,
dans le Ier volume des Mémoires de la Société d’histoire naturelle
de Strasbourg, sous le titre de Notice sur le Bradford-clay de Boux-
(ailler et de Bavillers, un travail ayant pour objet d’établir les ca-
ractères zooiogiques qui distinguent entre elles les deux assises
argileuses appartenant à l’étage oolitique inférieur, et qui ont été
nommées par les Anglais Bradjorcl-clay et f aller’ s-earth (1). M.Yoltz
est arrivé à cette conclusion : 1° que Y Ostrœa costata (Sow.), qui
pour lui n’est autre chose que l’espèce qu’il avait nommée Ostrœa
Knorrii, dans une publication antécédente, est caractéristique pour
le Bradford-clay , en ce que ce fossile y est très abondant , tandis
qu’il manque absolument dans le fullcr’s-earth ; 2° que Y Ostrœa
acuminata (Sow.), excessivement rare dans le Bradjorcl-clay , est,
au contraire, très abondamment répandue dans 1 e, j aller’ s-eartli,
en sorte que l’abondance de ce fossile peut encore servir à carac-
(l) Terre à foulon,
328
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
tériser l’argile à foulon; et l’on sait, en effet, que l’expression de
marne à Ostrœa acuminata est, pour ainsi dire, consacrée comme
synonyme de fuller’s-earth. Je me propose aujourd’hui de faire
voir, par des exemples pris dans les départements de la Meurthe et
de la Moselle, où j’ai eu l’ocasion de faire de nombreuses obser-
vations, que cette double conclusion ne saurait être désormais
maintenue dans la science.
Sans doute, M. Voltz avait procédé rigoureusement, car il avait
comparé deux séries nombreuses de fossiles recueillis par lui-même
dans des localités qu’il considérait comme des types du Bradford-
clay et du fuller’s-earth , et sa conclusion n’était que le résultat de
l’élimination qu’il avait faite , entre ces deux séries , des espèces
qui sont sans valeur caractéristique, en raison de leur indifférence,
de leur banalité , s’il est permis de s’exprimer ainsi. Mais , dans
mon opinion, les circonstances des gisements n’avaient pas été
exactement appréciées , ou elles avaient été mal à propos générali-
sées. C’est ce que je vais tâcher de démontrer en m’occupant
d’abord de Y Ostrœa acuminata . Mais il est nécessaire, avant tout,
de donner une idée de la constitution de l’étage oolitique infé-
rieur en Lorraine.
Constitution de l'étage oolitique inférieur en Lorraine.
L’étage oolitique inférieur, compris entre les marnes supra -lia -
siques et les marnes oxfordiennes , est presque exclusivement com-
posé de bancs calcaires , qui s’accusent de loin par leur couleur
blanche. Les dépôts argileux ne s’y trouvent qu’avec une très
faible épaisseur et sans continuité. L’ensemble de ces bancs cal-
caires peut se diviser en deux groupes : l’un embrassant la moitié
inférieure, où les Entroques abondent et où la structure oolitique
est peu développée ; l’autre embrassant la moitié supérieure, où
la structure oolitique est tout à fait prédominante , tandis que les
Entroques ne s’y montrent plus qu’ accidentellement. Le groupe
inférieur, que j’appelle proprement groupe de l3 oolite inférieure,
par le faciès de ses roches et par l’ensemble de ses fossiles, qui rap-
pellent ceux du calcaire des Moutiers (Calvados), répond à l’infe-
rior-oolite des Anglais. Le groupe supérieur, que j’appelle groupe
de la grande oolite , répond par ses caractères pétrographiques au
great-oolite. 11 répond aussi , si l’on veut, dans ses couches su-
prêmes, au jorest-marble et au corn-brash y mais ces couches, en
vérité , n’offrent point en Lorraine de différences essentielles pour
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
329
motiver leur séparation du great-oolite. La limite entre les deux
groupes de couches calcaires, que je viens de définir, est très difficile
à tracer lorsqu’ils sont en contact immédiat , sans interposition de
bancs argileux ; mais heureusement que l’orographie vient ici
puissamment en aide , comme on va le voir.
L’étage oolitique inférieur constitue , en effet , dans la partie
occidentale des départements de la Moselle et de la Meurthe ,
qu’il traverse d’un bouta l’autre dans la direction N. -S. environ,
une terrasse qui , limitée au N. par la frontière luxembourgeoise,
et à l’E. par une ligne d’escarpements que l’on peut suivre sans
discontinuité de Longwy à Neufchâteau , en passant par Metz et
Nancy, s’enfonce à l’O. sous la chaîne qui est formée par l’oolite
moyenne , comme on le voit dans le diagramme ci-dessous.
A — Coral-rag.
B — Oxford-clay. — c Gryphæa dilatata. — d Ostiæa cosluta. - e TereLratula
varians
F — Grande colite. — g corn-brash. — h Forest-marLIe. — i Great-oolite. —
i' Argile à Oslræa acuminala et à Clypeus palella.
K - Fuller’s-earth.
L — Inferior-oolitr. — m Calcaire à polypiers.
N — Marnes suprà-liasiques. — o Minerai de fer oolitique.
Cette terrasse a plus de 20 kilomètres de largeur dans la partie
moyenne du département de la Meurthe, entre Pont-à-Mousson
et Nancy ; mais elle se rétrécit vers les extrémités.
Or, lorsqu’un observateur suit la ligne d’escarpements dont je
viens de parler, par exemple entre Nancy et Metz , ou les nom-
breuses vallées qui l’interrompent , il est frappé par la vue d’une
380
SÉÀNCÜ DU 7 AYK1L 1851 .
sorte de muraille qui couronne ces escarpements ainsi que les
flancs de ces vallées, se détachant par sa couleur blanche de la
formation des marnes suprà-liasiques sur laquelle elle repose :
c’est là ce qui compose le groupe inférieur, celui de l’oolite infé-
rieure proprement dite. Très souvent la partie basse du groupe ,.
où se trouvent les calcaires les plus argileux et les plus ferrugineux ,
est couverte de bois et échappe ainsi au regard ; mais le haut de
la muraille, consistant en rochers blancs taillés à pic, se montre
presque sans discontinuité sur une hauteur habituelle de plus de
10 mètres. Ces rochers constituent donc un excellent repère, au-
quel on a souvent lieu de recourir ; aussi y avait-il nécessité de
distinguer par un nom particulier le calcaire qui les compose. Et
comme il a pour caractère général et le plus saillant d’être saccha-
roïde et de renfermer une grande quantité de polypiers, parti-
culièrement du genre Astrée, les géologues lorrains l’ont appelé
calcaire a polypiers (1).
Vient-on à franchir cette ligne d’escarpements, on reconnaît, dès
qu’on a atteint le bord du plateau qui les surmonte en forme de
terrasse inclinée vers 10. de 1 /200e environ, on reconnaît, dis-je,
que les calcaires n’ont plus le même aspect : la structure oolitique
y est très développée ; les Entroques ont à peu près disparu. On est
dans le groupe supérieur, celui de la grande oolite, dont les
couches ou les sous-divisions successives, s’échelonnant suivant la
pente de la terrasse (qui est le gisement propre de ce groupe),
vont ensuite se perdre sous les marnes oxfordiennes.
Ce qui vient sanctionner le classement que j’ai fait du calcaire
à polypiers dans le groupe inférieur, et par suite les relations oro-
graphiques que je viens d’établir, c’est qu’il se trouve de temps en
temps, au-dessus de ce calcaire, au bord du plateau, une couche
argileuse dont la position correspondrait ainsi parfaitement au
fuller’s-earth des Anglais. D’ailleurs ces rochers de calcaire blanc,
taillés à pic , qui couronnent, en Lorraine , les flancs des vallées
ouvertes dans les marnes suprà-liasiques, je les ai observés égale-
ment en Franche-Comté, sur la route de Vesoul à Belfort, depuis
la première de ces villes jusqu’à Calmoutiers; et M. Thirria, dans
sa Statistique de la Haute- Saône, les rapporte, comme je le fais
(l) Je me hâte de dire que le calcaire à polypiers de la Lorraine
ne doit pas être confondu avec celui qui a reçu plus anciennement ce
nom dans le département du Calvados. Celui-ci appartient, comme on
sait, à un horizon plus élevé: il se trouve au-dessus du great-oolite
SÉAJSCü DU 7 ÀYR1JL. 1851.
331
ici, à Y inferior-oolitc , dans lequel il fait précisément un sous-
groupe dénommé calcaire à polypiers. Enfin M. Elle de Beaumont
indique du calcaire à polypiers dans le calcaire à Entrorques des
environs de Pouilly-en-Àuxois , en l’assimilant à celui qui porte
le meme nom dans le département de la Moselle (1).
Mais si, à l’aide des relations orographiques que je viens de
signaler, il est facile , dans les vallées , de tracer la limite des deux
groupes qui composent l'étage oolitique inférieur , la difficulté
existe tout entière lorsque celui-ci se développe en plaine. Dans
ce cas, et sauf la présence du fidler s-earth , qui, comme je l’ai dit,
n’existe en Lorraine que par places, il pourra arriver, à moins
que l’attention ne soit particulièrement éveillée sur le danger de
la méprise , il pourra arriver qu’on passe sans s’en apercevoir des
calcaires de l’oolite inférieure à ceux de la grande oolite. Et si
alors on vient à tomber sur quelque dépôt argileux , comme il en
existe aussi dans le groupe de la grande oolite ( mais seulement
aussi par places et non d’une manière continue), on sera conduit à
le considérer comme le représentant du faller’ s-earth , tandis qu’il
appartiendra , en réalité , à un horizon géologique plus élevé.
1° Gisement de l' Ostrcea acuminata.
Cela posé, et pour revenir au gisement de Y Ostrœa acuminata ,
il me paraît que les circonstances que je viens d’indiquer se pré-
sentent précisément dans la localité des Géniveaux (Moselle), l’une
de celles que M. Voltz a citées pour ce fossile, et celle qu’il a
principalement considérée comme offrant le type du fidler1 s-earth.
La tranchée des Géniveaux se trouve à 13 kilomètres de Metz,
sur la route de Paris; elle commence au pont qui traverse le val-
lon de Mance (2), lequel coupe la route dans la direction N. -S.
et finit aux premières maisons du village de Gravelotte qui est
bâti sur le plateau. La différence de niveau entre ses deux points
extrêmes est de 60 mètres environ , sa longueur étant de 1 kilo-
mètre.
Or le calcaire saccharoïde, le calcaire à polypiers ci-dessus dé-
fini, lequel fournit habituellement d’excellents matériaux pour
l’entretien des routes , est précisément exploité pour cet usage tout
à côté du pont. Voilà donc un horizon bien déterminé. Vient-on
(!) Description de la carte géologique de la France , t, 11, p. 371
et 431.
(2) Carte du dépôt de la guerre , feuille 36.
332
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851»
maintenant à s’élever au-dessus de cet horizon en montant la
rampe , les premières couches qui se décèlent à l’observateur con-
sistent en un calcaire-lumachelle tout pétri d 1 Ostrœa ocuminata .
Au-dessus viennent des bancs d’un calcaire à grains fins qui ren-
ferme des fragments de test de Pinnigènes , et à ceux-ci succèdent
enfin de véritables calcaires oolitiques. C’est au-dessus de ces der-
niers que commence le système argileux des Géniveaux , lequel
règne ensuite jusque sur le plateau de Gravelotte.
On voit par cette description que l’argile à foulon n’apparaît
pas ici au-dessus du calcaire à polypiers, soit qu’elle manque en
réalité , soit qu’elle échappe à la vue en raison de son peu d’épais-
seur habituelle. Et l’on comprend que, préoccupé de l’absence
de ce meilleur des critérium pour distinguer le great'oolitc de Yin-
fcrior-oolite , on ait pu confondre dans ce dernier groupe les bancs
calcaires indiqués dans la tranchée des Géniveaux , et par suite
rapporter au fuller’ s-car th le système argileux qui les recouvre.
Mais l’étude attentive de ces bancs ne permet pas de s’arrêter à
cette manière de voir; car X Ostrœa acuminata , dont est pétri le
premier, la lumachelle, est une coquille qui exclut X inferior-oolite;
de telle sorte que cette lumachelle ne peut pas être placée, dans la
série stratigraphique , plus bas que la grande oolite , ou , tout au
plus (ce qui conduit à la même conclusion), plus bas que l’argile
à foulon, dont elle serait alors l’équivalent géologique, mais à
l’état de pierre. Il faut reconnaître, du reste, que les bancs calcaires
de la tranchée , quoique reproduisant dans leur ensemble les as-
pects de la grande oolite , n’en présentent cependant pas l’aspect
le plus normal. Mais si , parvenu au village de Gravelotte, on des-
cend le versant S. -O. du plateau, en continuant à cheminer sur la
route de Paris , on y retrouve la même argile signalée sur le ver-
sant N.-E., et là on la voit directement appliquée sur la grande
oolite la mieux caractérisée, laquelle, d’ailleurs, est exploitée au
bas de la côte, dans le vallon sec qui traverse la route entre Gra-
velotte et Rézonville. Ainsi se trouve donc bien établi ce que
j’avais annoncé : que l’argile des Géniveaux ne doit pas être rap-
portée au fuller’s-earth, mais qu’elle appartient à un niveau géo-
logique plus élevé, puisqu’elle recouvre des bancs de grande
oolite.
Je ne conclus cependant pas , pour cela , que cette argile doive
être assimilée au Bradforcl-clay , car il serait fort possible qu’elle
ne fût qu'intercalée entre deux assises de great- oolite. Voici au
surplus quels sont ses caractères :
L’argile des Géniveaux est bleuâtre dans sa partie inférieure et
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
333
brime vers le liant. Elle est remplie d’une grande quantité de pe-
tites pierres amorphes, qui sont disposées en alignements paral-
lèles et figurent ainsi de véritables strates. On observe en outre ,
vers la base du dépôt , des bancs continus et plus épais , dont la
composition d’ailleurs est analogue à celle de ces petites pierres.
Celles-ci consistent en un calcaire formé d une pâte de même
couleur que l’argile qui les renferme , et sur laquelle pâte se dé-
tachent, en jaune, de petites oolites ellipsoidales, que Ton peut
comparer à des grains de froment pour leur couleur aussi bien que
pour leur forme.
Cette argile est très riche en fossiles , parmi lesquels les plus
abondants (les trois premiers ont été cités aussi comme tels par
3VÏ. Voltz) sont les suivants :
Ostrœa acuminata (Sow.).
Lima gibbosa (Sow.).
Avicula echinata (Sow.).
Terebratula ornithocephala (Sow.).
Terebratula bisuffarcinata [SchloÛi.) — T. perovalis (Sow.).
J’y signale aussi, quoiqu’elle soit moins commune , mais parce
quelle accompagne habituellement, dans d’autres gisements ana-
logues, les deux Térébratules que je viens de nommer, une autre
coquille du même genre , mais qui est piissée.
J’ai tenu à faire toucher du doigt, pour ainsi dire, par une
description détaillée, les relations strati graphiques de l’argile des
Géniveaux, parce qu’en raison de la conséquence capitale que j’en
veux tirer, quant à la valeur caractéristique de Y Ostrœa acuminata ,
je ne pouvais pas me borner à une simple affirmation. Mais il est
juste de dire que ces relations avaient été reconnues depuis long-
temps par M. Victor Simon, de Metz (1), dont l’opinion a été
adoptée par M. Elie de Beaumont, dans l’explication de la carte
géologique de la France.
Au surplus, le département de la Meurthe m’avait déjà présenté
d’autres exemples non moins décisifs à l’appui de cette consé-
quence .
Le bourg de Thiaucourt, à 16 kilomètres O. de Pont-à-Mous-
son (2), est flanqué au coteau, très renommé en Lorraine pour ses
bons vins, qui borde la rive gauche du Rupt-de-Mad. Ce coteau,
(1) Description de la partie de la formation oolitique qui existe dans
le département de la Moselle.
(2) Carte du dépôt de la guerre , feuille 32.
SÉANCE DU 1 AVRIL 1851.
m
dont la hauteur peut être de 35 mètres, a une pente très roule;
et cela permet d’embrasser d’un seul coup d’œil, en quelque sorte,
toute la série des couches ; circonstance la plus favorable, et qui
ne se présente pas aux Géniveaux, pour être à l’abri des illusions
stratigraphiques.
Les plateaux bas qui constituent les presqu’îles que le Kupt-de-
Mad dessine par ses inflexions, en aval de Thiaucourt, sont occupés
par le calcaire à polypiers. Or celui-ci s’observe au bas de la côte
des vignes, près du moulin-bas , où il forme de gros rochers blancs,
aux formes abruptes. L q juller’s-earth n’apparaît pas au-dessus;
mais une source abondante, qui sort des fentes de ces rochers,
n’en trahit pas moins l’existence d’une couche argileuse à ce ni-
veau. A tiers-côte environ, on aperçoit des bancs bien horizon-
taux, stratifiés en assises extrêmement minces , tout délités, et qui
déjà par cet aspect indiquent que l’on doit être sorti du groupe
inférieur. Et ces bancs, en effet, sont constitués par un calcaire
oolitique d’un blanc jaunâtre, à grains miliaires avec ciment rare,
et très fissile ; c’est-à-dire qu’il reproduit les caractères les moins
équivoques de la grande oolite. Plus haut encore , le coteau est
constitué par des couches argileuses, ainsi que j’ai pu le reconnaître
dans une excavation pratiquée au ni dieu des vignes , et d’où l’on
avait tiré de la terre bleuâtre renfermant de petites pierres à struc-
ture oolitique , toutes pareilles à celles que j’ai signalées aux Géni-
veaux. Enfin la constitution argileuse se manifeste parfaitement
le long du chemin de Thiaucourt à Jaulny qui couronne le coteau,
et au haut duquel il existe une chambre cT emprunt , d’où l’on ex-
trait la terre nécessaire pour l’ amendement du vignoble. Cette
chambre présente un front de 2 mètres de hauteur environ , sur
quoi la partie inférieure est occupée par de l’argile gris-bleuâtre ,
tandis que dans le haut la terre est plus généralement brune ou
d’un jaune clair.
Cette argile, et particuliérement la jaune , est toute remplie de
pierres amorphes de même couleur, formées de grosses oolites et
renfermant de nombreux fossiles. La désagrégation que les élé-
ments atmosphériques font éprouver à ces pierres en détache
d’une part les coquilles et de l’autre de la grenaille oolitique que
l’on trouve éparse partout sur le sol ; mais, une fois cet effet produit,
la sorte de squelette qui reste de ces pierres forme des matériaux
très résistants et d’un très bon usage pour l’ entretien des routes.
Il est facile de faire, dans cette localité-là, une très ample ré-
colte de fossiles. Mais celui qui frappe l’attention entre tous par
sa grande abondance , c’est Y Ostrœa acuminata ; en sorte qu’il est
SÉANCE DU 7 AVRIL 4851.
335
bien établi, comme je l’avais annoncé, que, dans le coteau de
Thiaucourt comme aux Géniveaux , l’argile à Osîrœa acuminata
repose sur des bancs de great- oolite , et qiv ainsi elle ne peut pas
être rapportée au fuller’s-earth.
Les autres fossiles qui se trouvent là en abondance sont î
Cljpeus patella (Ag.).
Pholadomia.,.. (de plusieurs espèces).
Terehratula ornithocephala (Sow.).
Terebratala bisuffarcinata (Schloth.)
Et j’y ai recueilli en outre :
A n thophyl l um decipicns (Goldf.).
Pedina arcnata (Ag.).
Nucleolites clunicularis (Ag.).
Avicula cchinata (Sow.).
Lima gibbosa (Sow.).
Pectcn
Ostrœa Marshii (Sow.).
Terebratala (plissée).
Pleurotomaria
Trigonia
Ammonites Parkinsonii (Sow.).
Belemnites giganteus (Schloth.).
L’énumération que je viens de faire des fossiles qui sont associés
en abondance à Y Ostrœa acuminata , dans le coteau de Thiaucourt,
montre que ce sont les mêmes qui accompagnent aussi cette
coquille aux Géniveaux ; car, s’il peut y avoir doute sur la vraie
détermination des deux Térébratules qui ont été nommées T. or~
nithocephala et T. bisuffarcinata , et bien que les Pholadomies
n’aient même pas été déterminées, toujours est-il qu’il ne peut
exister d’incertitude sur l’identité de ces coquilles considérées
dans les deux localités dont il s’agit (1). Et, quant au Cljpeus
patella , cet écbinoderme se retrouve sous un autre nom, sous
(t) Les deux Térébratules en question se retrouvent dans la même
position géologique près du village d’Amanviller (7 kilomètres N. de
Gravelotte), où il existe de vastes carrières de grande oolite , et plus
généralement sur tout le plateau de grande oolite qui s’étend au N.
entre Gravelotte et Malancourt. Et, à Amanviller comme à Thiau-
court, elles sont accompagnées de la même Térébratule plissée que
j’ai signalée aux Géniveaux.
SÉANCE DE 7 AVRIL 1851.
336
celui de Galeritcs patella , dans la liste des fossiles des Géni veaux
qui a été donnée par M. Yoltz ; en sorte que l’assimilation est bien
complète entre les dépôts argileux de Thiaucourt et des Géniveaux,
aussi bien au point de vue zoologique qu’au point de vue pétro-
graphique, comme on avait déjà pu s’en convaincre en rappro-
chant les descriptions de ces deux dépôts.
J’ai déjà fait remarquer, à l’occasion des Géniveaux , qu’en
montrant que l’argile à Ostrœa acuminata de cette localité n’est
pas le f aller’ s-earth, mais qu’elle se trouve à un niveau géologique
plus élevé , je n’entendais pas conclure pour cela qu’elle dût se
rapporter au Bradford-clay , et qu’elle pourrait bien n’être que
subordonnée dans 1 e grcat-oolitc ; la même observation s’applique
à la localité de Thiaucourt. Mais je n’entends pas davantage
conclure que Y Ostrœa acuminata ne se trouve jamais dans le
fuller's-earth , non seulement dans d’autres parties de la France
ou en Angleterre, mais même en Lorraine. Cependant je dois dire
que je n’en ai vu qu’ exceptionnellement dans les points où j’ai pu
étudier l’argile à foulon : points qui sont en très petit nombre, du
reste ; parce que cette argile n’ayant qu’une faible puissance , il est
toujours difficile de constater bien positivement son existence.
Dans le département de la Moselle, le juller’s-earth existe incon-
testablement dans une marnière située sur le chemin qui mène du
village d’Aumetz aux importantes minières de ce nom. Or, il con-
siste là en une argile bleuâtre renfermant de petits lits de calcaire
de même couleur, mais non oolitiques, et qu’on ne saurait con-
fondre avec les calcaires intercalés dans l’argile des Géniveaux.
La coquille qui y est particulièrement abondante est Y Avicula
bramburiensis (Sow.) ; elle est accompagnée de grosses Pliolado-
mies ; mais je n’y ai pas vu d’ Ostrœa acuminata.
Le f aller’ s-e art] i s’observe encore sur le chemin d’Aumetz à Ser-
rouville, où il est directement appliqué sur le calcaire à polypiers.
C’est encore une argile bleuâtre avec de petites pierres d’un jaune
grisâtre , qui se distinguent aussi de celles des Géniveaux en ce
qu’elles ne sont pas oolitiques. On y trouve de grosses Pholado-
mies , les mêmes que dans la marnière d’Aumetz , et peut-être
quelques Ostrœa acuminata.
Dans le département de la Meurthe, le point où j’ai le mieux
observé l’argile à foulon , c’est la carrière de pierre de taille de
Rogéville (à 12 kilomètres O. -S. -O. de Pont-à-Mousson), ouverte,
comme c’est d’habitude dans ce département, dans le sous-groupe
du calcaire à polypiers , et située à l’O. du village , vers le sommet
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
3S7
d’un petit vallon dirigé du S. au N. (i). Or \e fui 1er ’s-cctrth, que
l’on voit là reposant sur du calcaire à polypiers , pendant que la
carrière est couronnée par le plateau de grande oolite bien carac-
térisée , avec Clypeus patella , qui s’étend au S.-E. vers Rosières-
en-Haye, présente une épaisseur de lni,ùO, consistant en un banc
d’argile jaunâtre de 0m,50, recouvert par un autre banc de 0m,90
d’une argile d’un gris très foncé , légèrement schisteuse. L’un et
l’autre banc sont tout pénétrés de grenaille oolitique, et l’on
trouve, en outre, dans l’argile grise, des masses cylindroïdes fort
dures, appelées culots par les ouvriers, et dans lesquelles cette gre-
naille semble s’ètre, pour ainsi dire, concentrée. Je n’y ai pas
trouvé une seule coquille, et je n’en ai pas vu davantage dans
l’ argile bleuâtre qui couronne les carrières de pierres de taille de
Norroy et de Jezainville, près Pont-à-Mousson , et qui représente
évidemment aussi l’argile à foulon.
La présence de cette argile a été reconnue par l’un de nos con-
frères, M. Zienkowicz, dans le canal de la Marne au Rhin, à
1:0. de Liverdun; et les seuls fossiles que j’aie trouvés là , en une
certaine abondance, sont des Pholadomies et une Térébratule
analogue à la T. perovalis (Sow.). Cependant j’y ai recueilli une
Ostrœa acuminata.
A ces exemples j’en pourrais ajouter d’autres, qui viendraient à
l’appui du fait que j’ai annoncé, à savoir : que dans les points où
l’existence du fullcr’s-earth est bien incontestable, Y Ostrœa acu-
minata ne se trouve qu’ exceptionnellement et en petite quantité.
J’ajoute , par contre, que si cette coquille apparaît quelquefois
au-dessous du niveau géologique marqué par les argiles à Clypeus
patella des Géniveaux et de Thiaucourt, on la rencontre aussi
bien à un niveau plus élevé, et jusque dans les couches tout à fait
suprêmes de l’étage oolitique inférieur, celles qui correspondraient
au corn-brash .
2° Gisement de l'Ostrœa costata.
La localité que M. Voltz a particulièrement considérée pour
établir sa proposition : que le Bradford-clay serait caractérisé par
Y Ostrœa costata , est celle de Bouxwiller, dans le département du
Bas-Rhin. J’ai expliqué d’ailleurs, en commençant, que Y Ostrœa
costata (Sow.) n’était autre, pour M. Yoltz, que l’espèce qu’il
avait nommée lui-même antécédemment Ostrœa Knorrii , et qui
(1) Carte du dépôt de la guerre , feuille 52.
Soc . géol.y 2e série , tome YIIL 22
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
est précisément celle que l’on trouve à Bouxwiller. C’est doue
l’ Ostrœa Knorrii que j’ai ici en vue sous le nom d’ Ostrœa costota ,
et cela indépendamment de la question de savoir si c’est avec rai-
son que ces deux espèces ont été identifiées., ce dont il y a lieu de
douter.
Cela posé, reportons-nous au diagramme ci-dessus, qui montre
la disposition relative des deux étages oolitiques inférieur et
moyen, et supposons qu’un observateur, partant du bord de l'es-
carpement que forme le calcaire à polypiers , chemine vers l’ü.
en descendant la pente de la terrasse qui va s’enfoncer sous la
chaîne corallienne. Il verra se présenter successivement, comme
je l’ai déjà indiqué, les différentes couches qui composent le
groupe de la grande oolite, depuis les plus anciennes jusqu’à celles
qui touchent à l’argile d’üxford, couches que I on peut définir
dans leur ensemble en disant d’une manière générale qu’elles sont
composées de calcaires blanc-jaunàtres très oolitiques. Or, lors-
qu’on est parvenu aux deux tiers environ de la plaine, on voit
ces roches faire place , parfois assez brusquement, à des argiles de
couleur grise, au milieu desquelles les bancs calcaires n’apparais-
sent plus que comme des accidents rares, lesquels bancs, d’ailleurs,
sont aussi de couleur grise, très argileux et nullement oolitiques.
Et il en est ainsi jusqu’à l’extrémité de la plaine , et fort haut en-
core dans la côte qui la limite, jusqu’à ce qu’on atteigne le cor al-
rag.
Voilà donc une ligne de démarcation naturellement tracée entre
les deux étages oolitiques inférieur et moyen, ligne à l’E. de la-
quelle il n’y a que des roches de couleur claire, calcaires et ooli-
tiques , tandis qu’on ne trouve à l’O. que des argiles grises. Et
cette limite est d’autant plus naturelle qu'au changement pétro-
graphique signalé correspond un changement beaucoup plus
saillant encore dans la physionomie du pays, si bien que les deux
régions qui y correspondent ont reçu deux noms différents : La
Haye, pour la région calcaire et sèche ; La JVa'wre, pour la région
argileuse et humide.
Les bancs calcaires qui terminent le groupe de la grande oolite
sont importants à considérer d une manière particulière, précisé-
ment parce qu’ils marquent le point où finit l’étage oolitique in-
férieur pour faire place à l’étage moyen ; et ce seraient ces bancs-
là qui correspondraient , par leur position , au corn-brash des
Anglais. Mais je répète ici que les calcaires, qui composent essen-
tiellement le groupe de la grande oolite en Lorraine , présentent ,
contrairement sans doute à ce qui se passe en Angleterre, un
séAKCE DU 7 AVRIL 4.851 . ' SM)
ensemble de caractères si uniforme, qu’ü n’y a pas de motif réel
pour en séparer les couclies supérieures, en les particularisant
sous les noms de forest-marble et de corn-brash. Cela est êi vrai
qu’il existe sur le plateau de Yilley-Saint-Etienne, ainsi qu’à
Jaillon (et en beaucoup d’autres points), c’est-à-dire à quelques
pas seulement des argiles de l’étage moyen , de grandes carrières
d’où l’on extrait de la pierre de taille, consistant en une oolite
miliaire que l’on pourrait confondre avec telle autre provenant de
la partie basse du groupe , touchant au juller's-earth. Que si donc
on veut introduire dans la géologie lorraine les dénominations de
forest-marble et de corn-brash , ainsi que l’a fait M. Husson dans
son utile travail : Esquisse géologique de V arrondissement de Tout ,
il faut, au moins, qu’il soit bien entendu qu’il ne s’y attache
qu’une idée de position , et que ces mots ne sont qu’une expression
abrégée pour indiquer les couches les plus élevées du groupe de la
grande oolite , celles qui avoisinent le plus 1 oxford-clay.
Cette réserve une fois faite , voici quels sont les caractères que
présentent, dans le département de la Meurthe , les couches du
corn-brash .
Le corn-brash occupe une hauteur d’environ k mètres. 11 est
généralement composé de petites pierres amorphes plus ou moins
entremêlées de marne ocreuse , et tout son ensemble a une cou-
leur d’un roux sale qui le distingue assez nettement, et des cou-
ches qu’il recouvre (le forest-marble) et qui sont d’une couleur
blanc jaunâtre beaucoup plus franche, et des couches oxfordiennes
qui lui sont superposées et où la couleur grise commence à se
manifester* Ces petites pierres consistent elles-mêmes en un cal-
caire gris jaunâtre, à oolites difformes (comme les définit M. Hus-
son); elles sont généralement dures et d’un bon emploi pour
l’entretien des routes. Les fossiles qu’on trouve en abondance dans
le corn-brash sont la Futigia orbulites ( Lamouroux ) et le Pecten
vagans (Sow\). J’y ai vu aussi quelques Ostrœa costata , quelques
Ostrœa acuminata , et un Clypeus patelin.
Or, lorqu’on quitte le corn-brash pour entrer dans le système
des argiles grises qui constituent la région de la Woivre, les pre-
mières de ces argiles, qui ne sont encore que d’un gris pâle et un
peu nuancé de jaune , se signalent immédiatement par la grande
abondance des Térébratuies plissées qu’elles renferment et qui se
rapportent à la Terebratula varions ^Schloth.); il s’y trouve aussi
bon nombre de T . spinosa (Schloth.), ainsi que d’une Térébratule
lisse, T. bicanaliculata (Schloth.). J’ai recueilli à ce niveau une
SÉANCE DU 7 AVRIL J 85 ! .
840
Ostrœa qui ne peut être confondue ni avec la costa ta , ni avec la
dilatati 7, ainsi que X Avicula echinata (Sow.), une Trigonia très
analogue à la T. costata , et enfin un polypier eonoïde , le Mont -
livciltia trochoides (Miln. Edw. et J. Ha.), suivant la détermination
que M. Haime a bien voulu en faire. Les bancs plus résistants qui
interrompent la continuité de ces marnes consistent les uns en
calcaire très marneux , gris jaunâtre , avec quelques petits grains
de mine de fer extrêmement pauvre, les autres en un calcaire te-
nace, gris bleuâtre , mais qui passe au jaune dans les parties ex-
posées à l’air, les uns et les autres parfaitement semblables à cer-
tains bancs calcaires qui se trouvent beaucoup plus haut , en plein
oxjord-clay , et que l’on peut mettre en parallèle avec le calcareous -
grit des Anglais. Le calcaire tenace dont je viens de parler est
même propre , comme certains de ceux-ci , à donner de la chaux
hydraulique; et il a été effectivement exploité pour cet objet, à
l’occasion des travaux du canal de la Marne au Rhin , dans un ra-
vin situé au S. de Donnnartin-lès-Toul.
Quand on vient à s’élever davantage , les argiles à Terebratula
varians se foncent aussi davantage en couleur ; mais bientôt cette
coquille, sans disparaître pour cela, s'efface devant la très grande
abondance d’un autre fossile, dont on peut ramasser en peu d’in-
stants des centaines d’exemplaires : c’est une petite Ostrœa , celle-
là même qui se trouve en abondance à Bouxwiller, et qui y est
indiquée sous le nom d "Ostrœa costata (Sow.). En continuant
encore à monter, et sans que les caractères physiques de l’argile
paraissent en rien changés, on atteint les couches à Gryphœa di-
lata ta , mais dont les premières présentent cette coquille en mé-
lange avec des Ostrœa costata et des Terebratula varians. La hau-
teur comprise entre le corn-brasli et le niveau où apparaît pour la
première lois la G. dilatata est de 15 mètres environ. Les roches
solides sont plus rares dans la partie supérieure , et elles ne consistent
guère qu’en plaques d’un calcaire gris ou bleu , vraies lumachelles
très résistantes (et qui, en raison de cela, sont quelquefois utilisées
pour l’entretien des routes), toutes remplies à' Ostrœa costata et
de Terebratula varians .
Yoilà donc la position de l’argile à Ostrœa costata parfaitement
constatée. Elle est supérieure au corn-brash dont elle se sépare
nettement, et elle est immédiatement recouverte par l’argile à
Gryphœa dilatata avec laquelle elle se fond insensiblement ; en
sorte qu’elle appartient à l’étage oolitique moyen dont elle occupe
la partie basse , comme l’occupe le Kelloway-rock chez les Anglais.
SÉANCE DU 7 AVRIL 1851.
m
L’argile à Ostrœa cos ta ta ne peut donc pas être rapportée au Brad-
ford-clay, et elle n’appartient même pas à l’étage oolitique infé-
rieur, comme on l’ admettait jusqu’ici.
Sans doute on peut contester (parce que ce n’est guère là qu’une
question d’appréciation) sur la position que j’ai assignée , et que
je crois pourtant avoir suffisamment justifiée, à la ligne de démar-
cation des deux étages ; mais il faut bien remarquer que ma con-
clusion principale est indépendante de la solution de cette ques-
tion. Ce qu’il y a de fondamental, en effet, c’est ce fait stratigra-
phique iiicontestable : que l’argile à Ostrœa costata est supérieure
aux derniers bancs calcaires à structure oolitique et immédiate-
ment recouverte par l’argile à Gryphœa dilatata ; et , dans toute
hypothèse , ce n’est pas là la position du Bradford-clay.
Ainsi il est bien démontré que X Ostrœa costata ne peut pas
servir à caractériser le Bradford-clay . Mais s’ensuit-il que cette
espèce puisse être donnée comme caractéristique du Kelloway-rock ?
C’est ce que je n’oserais affirmer, parce qu’il serait possible que
les circonstances du gisement ne fussent pas les mêmes à Boux-
willer que dans le département de la Meurthe. D’ailleurs, je ne
prétends pas dire non plus que l’ Ostrœa costata ne se trouve pas,
dans ce département , dans les couches que l’on peut considérer
comme correspondant au Bradford-clay . J’en ai, tout au contraire,
rencontré dans presque toutes les divisions du groupe de la grande
colite, mais jamais en abondance comme dans le Kelloway-rock .
La couche qui , dans le département de la Meurthe , peut être
véritablement nommée à Ostrœa costata , m’avait échappé dans
mes premières explorations , et je ne l’ai connue que lorsqu’elle
m’a été signalée par M. Husson, pharmacien à Toul, observateur
plein de zèle et de sagacité. Toutefois le fait qu’il m’annonçait était
tellement en opposition avec les faits admis, que j’ai cru devoir aller
le vérifier sur place ; et c’est ce que j’ai pu faire facilement, guidé
par M. Husson lui -même. J’ai constaté en trois points les relations
stratigraphiques ci-dessus annoncées, à savoir : près de Toul, dans
une petite tranchée pratiquée pour le tracé du canal de la Marne
au Rhin et au lieu dit Gare-le-Coup , ainsi que près de Bouvron.
Cette dernière localité est d’ailleurs bien connue pour la strontiane
sulfatée fibreuse , légèrement azurée , qui y a été découverte , en
1788, dans une marnière d’où l’on extrait de la terre pour la fa-
brication de la tuile. J’ai trouvé en abondance dans cette marnière
la Terebratala varians en même temps que quelques Ostrœa
costata y en sorte que ce gisement, comme celui de la plupart des
argiles exploitées pour le même usage dans les environs de Toul ,
SÉANLÜ DU 7 AVRIL 1851 ,
342
appartient à la base de l’oxford-clay, à ce que I on pourrait ap-
peler, avec M. Husson , le Kelloway-rock , sans attacher trop d’im-
portance à ce nom.
Conclusion .
En résumé :
1° L’argile à Ostrœci acum in ata des Géniveaux (Moselle)
recouvre des bancs de grande oolite et il en est de même dans le
coteau de Thiaucourt (Meurtlie);
D’où il suit que le nom de marne à Ostrœci acuminata ne peut
pas être conservé pour désigner le fullcr’s earth.
2° L’ Ostrœa costcita , aux environs deToul , ne se trouve en
abondance qu’à un niveau supérieur au corn-brash , dans la partie
inférieure des argiles oxfordiennes;
D’où il suit que ce fossile n’est point du tout, dans cette partie
de la France , caractéristique du Bradford-clay.
M. Hébert annonce avoir observé , aux environs d’Ëtampes,
au-dessus de la couche regardée jusqu’à présent comme la
limite supérieure des sables de Fontainebleau, un banc de sable
rempli de coquilles marines parfaitement conservées, que re-
couvre ensuite le calcaire de Beauce dont les plateaux de la
contrée sont formés (1).
La coupe générale de cette contrée est approximativement
la suivante :
•I . Terre végétale.
2. Calcaire de Beauce j
3. Calcaire siliceux et silex /
4. Lit mince à Potamides Lamarkii , Brong. . J
5. Banc de sable rempli de coquilles marines. .
6. Marne calcaire avec Paîudines, en quantité
innombrable, et Potamides Lamarkii. .
7. Sable blanc \
Grès non coquillier qui paraît cesser lorsque?
le banc coquillier commence ^
Masse principale des sables j
(1) Ce dépôt de coquilles marines pourrait bien être celui que M. de
Tristan avait signalé, il y a plus de trente ans, probablement d’une
manière vague; car il ne reste d’autres traces de ce renseignement
que la mention qui en est faite dans la description géologique des
environs de Paris. (Vov. Recherches sur les ossements fossiles , éd. 1 822,
t. II ? p. 509
15°», 00
lM,00
0m,40
6Gn\00
SÉANCE m 7 AVRIL 1851 », 3A8
8, Banc coquillier marin de Jouarre. . . . . . 3“, 00
9. Calcaire marin d’Étrechy
La marne calcaire à Paludines (n° 6) contient seulement deux
fossiles : 1° Paludina Dubuis sorti , Bouillet, en très grande
abondance; 2° Cerithium Larnarkii ( Potcunides , Br.). Ces deux
fossiles caractérisent principalement le lit inférieur des meu-
lières de Montmorency, et on les trouve avec abondance immé-
diate nient au-dessus des sables de Fontainebleau, auprès de
Montigny et d’Herblay.
Le banc marin (n° 5) dans lequel M. Hébert a recueilli envi-
ron 20 espèces, renferme en très grande abondance plusieurs
de celles que Ton trouve déjà dans le banc coquillier inférieur
(n° 8), entre autres les suivantes : Cerithium plicatum , Lamk.,
Cytherea incrassata , Desh., Cerithium Larnarkii , Br., une
Cardite que l’on trouve dans les faluns bleus de Gaas (bassin
de l’Adour), et qui a été donnée par M. de Basterot sous le
nom de Veneticardia intermedia , Brocc., nom qui appartient à
une coquille de l’Àstesan qui en est très distincte. Les bivalves
de cette couche sont tellement bien conservées, tellement bien
en place, que dans certains points elles ont presque toutes le
ligament intact, ce qui a lieu, par exemple, au-dessus de
l’Église d’Ormoy, à une lieue, au S., d’Étampes.
Cette Cardite et quelques autres espèces qui se trouvent éga
îement dans le bassin de l’Adour, et dans cette assise supérieure
des sables de Fontainebleau, s’ajoutent à celles que l’assise in
férieure de ces sables avait déjà de communes avec le même
bassin , pour constituer un groupe qui lie d’une manière intime
les sables de Fontainebleau avec le terrain miocène de l’ Aqui-
taine,
Les espèces principales de ce groupe ont cela de remarquable,
qu’elles se rencontrent par milliers dans nos sables et dans un
état de conservation tel , qu’elles ont certainement vécu aux
lieux où on les rencontre aujourd’hui.
M. Hébert termine en disant qu’il aura occasion de revenir
sur ces observations dans une communication plus générale,
qu’il se propose de faire prochainement à la Société,
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851
m
Séance du 21 avril 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le
Président proclame membres de la Société :
MM.
Aimé Buffet, à Paris, rue Saint-Germain-des-Prés, 2, pré-
senté par MM. de Francq et de Verneuiî ;
De Bousquet, à Paris, rue d’Anjou Saint-Honoré, 17,
présenté par MM. Bertrand- Geslin et de Yerneuil.
Le Président annonce ensuite une présentation.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. Gotteau , Études sur Echinides fossiles du
département de V Yonne, 7e et 8e livraisons, in-8. Paris, 1850,
chez Baillière.
De la part de M. Delafosse, Mémoire sur une relation im-
portante qui se manifeste , en certains cas , entre la composition
atomique et la forme cristalline ,* et sur une nouvelle appré-
ciation du rôle que joue la silice dans les combinaisons miné-
rales (présenté à T Acad, des sc. en I8/1O), in-8, Kl p. Paris,
chez E. Thunot et Compe.
De la part de M. Th. Davidson, A monograph of british
oolitic and liasic Brachiopoda , part III , in -h , 6Æ p., 13 pl.
Londres, 1851, chez Adlard.
De la part de M. Ch. Lyell, Address , etc. (Discours pro-
noncé à la réunion annuelle de la Société géologique de Lon-
dres, le 21 février 1851), in-8, 60 p. Londres, 1851, chez
Richard Taylor.
De la part de M. de Helmersen, Ueber den artesischen , etc.
(Sur le puits artésien de la batterie de l’ouest près Revel) (extr.
des Bull, phys . matliém ., t. IX, n. h ; de X Acad, des sc. de
Saint- Pétersb.f in-8, 7 p.
345
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851,
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1851, 1er sem., t. XXXII, nos 14 et 15.
U Institut, 1851 , nos 901 et 902.
Bulletin de la Société de géographie , h* série, t. I, n° 2,
févr. 1851.
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, n° 30, 4e année,
févr. 1851.
Mémoires de la Société cV Agriculture , des sciences , arts et
belles -lettres du département de V Aube , t. XY, t. Il, 2 sér.,
nos 9 à 14, année 1849, et 1er et 2e trim. 1850.
Congres scientifique de France; dix-septième session , tenue
ci Nancy, en septembre 1850, 2 vol. in-8, de 540 et 548 p.,
5 pl. Paris, 1851, chez Deraelie.
Mémoires de la Société nationale des sciences , de V agricul-
ture et des arts, de Lille; année 1849. Lille, 1850.
The Athehœum , 1851, nos 1224 et 1225.
Le secrétaire donne lecture d’une lettre de M. Bardin.
Paris, le 21 avril 1 851 .
Monsieur le président,
Je suis auteur et propriétaire d’une collection de reliefs topo-
graphiques dont plusieurs me paraissent de nature à intéresser la
Société géologique. Ces modèles sont géométriques , c’est-à-dire
qu’ils sont exécutés à l’échelle et d’après les levers exacts, mérite
auquel leur exécution soignée ajoute de l’intérêt.
J’ai l’honneur de vous proposer de faire un échange de ces re-
liefs contre les publications dont la Société peut disposer.
Veuillez prier un ou plusieurs de vos collègues de visiter ma
collection , et de rendre compte à la Société de la convenance et
de l’utilité de 111a proposition.
J’ai l’honneur, etc.
Bardin ,
Ancien élève de l’Ecole polytechnique , etc. ,
rue du Cherche-Midi , 23.
Il est ensuite donné communication de la lettre suivante de
M. Cornuel.
Wassy, le 26 mars 1 851 .
Monsieur le président,
J'ai l’honneur d’adresser à la Société une note sur des galets de
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
m
roches anciennes trouvés dans la Haute-Marne. Dans le cas où la
Société désirerait constater par elle-même la nature et l’origine
probable de ces galets, je suis tout prêt à lui en faire parvenir,
sur la demande que voudrait bien m’en faire un de MM. les
secrétaires.
Veuillez agréer, etc. Cornuel.
M. Raulin rappelle que le green-sand des départements des
Ardennes et de la Meuse, aux environs de Novion , de Grandpré
et de Varennes, renferme également, dans sa partie inférieure
et sur la bordure extérieure de la bande qu’il constitue , des
cailloux roulés de quartz, dont la grosseur dépasse parfois celle
d’une noisette; ces cailloux proviennent sans aucun doute des
nombreux filons de quartz qui traversent les terrains anciens
de l’Ardenne, situés à près de 60 kilomètres en ligne droite du
dernier de ces trois bourgs.
M. Daubrée communique les mémoires suivants :
Note sur la présence de zircons dans les granités et syénites
des Vosges et sur celle de V or dans la Moselle , par M. A.
Daubrée.
Le sable qui résulte de la désagrégation naturelle du granité
d’Andlau (Bas-Rhin), étant soumis au lavage, donne un résidu
noir dans lequel domine le fer oxydulé titanifère. En examinant
ce sable au microscope, j’y ai reconnu de petits zircons en cristaux
incolores et transparents qui se distinguent nettement du quartz
par leur forme. Cette forme est habituellement celle d’un prisme
carré terminé par un octaèdre carré dont les faces sont placées sur
les angles du prisme. Quelques cristaux ont une forme plus com-
pliquée, et présentent à chacune de leurs extrémités un dioctaèdre
que termine un octaèdre carré plus obtus, il se trouve aussi des
zircons rougeâtres , mais ils sont plus rares qne les zircons inco-
lores.
Ces zircons ont une grande ressemblance avec ceux que M. Du-
frénoy a signalés dans les sables aurifères de la Californie, de la
Nouvelle-Grenade, de l’Oural et du Rhin,
Dans le sable granitique d’autres localités des environs de Barr
(Bas-Rhin), j’ai rencontré des zircons semblables.
(1) Annales des mines , 4e série, t. XVI , p, 111..
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
3A7
Ce même minéral est aussi assez abondant dans le fer oxydulé
titanifère que l’on peut recueillir dans le lit des ruisseaux qui sil-
lonnent la syénite du Hohwald , dans la vallée d’Andlau.
Ce qui montre que le zircon , loin d’être un accident rare dans
les granités et les syénites des Vosges, y est très fréquent, c’est
qu’en lavant du sable de la Moselle recueilli aux environs de Metz,
j’y ai trouvé , au milieu de fer oxydulé titanifère et de grains de
fer hydroxydé oolitique , des zircons incolores semblables à ceux
du versant oriental des Vosges. Selon toute probabilité , ces zir-
cons proviennent de la région cristalline de la chaîne.
Dans ce même sable de la Moselle j’ai trouvé de petites pail-
lettes d’or de même aspect que celles du Rhin. Ce métal n’avait
pas encore été signalé dans la vallée de la Moselle. Les recherches
ultérieures pourront apprendre si cet or provient des roches cris-
tallines des Vosges ou du quartzite , qui est abondamment dissé-
miné en cailloux dans les alluvions anciennes et modernes des
bords de la Moselle. En tout cas la proportion trouvée dans ce
premier essai, qui est d’une paillette dans AO kilogrammes, est
extrêmement faible ; car cette teneur est cent fois moindre que
celle du gravier du Rhin de richesse moyenne, c’est-à-dire ^que
le travail d’une journée ne donnerait pas de l’or pour la valeur de
3 centimes (1).
Expériences sur la production artificielle de l’apatite , de la
topaze et de quelques autres minéraux fluo réfères , par
M. A. Daubrée.
Dans un travail précédent, dont l’Académie des sciences a bien
voulu voter l’insertion dans le Recueil des Mémoires des Savants
étrangers, j’ai montré comment on peut obtenir en cristaux l’oxyde
d’étain et l’oxyde de titane, en décomposant, par la vapeur d’eau,
les chlorures de ces métaux. Ainsi la théorie, qui fait dériver cer-
tains gîtes stamiifères et titanifères de la décomposition de chlo-
rures et de fluorures d’étain et de titane, se trouve confirmée d’une
manière satisfaisante par l’expérience.
L’apatite, fort rare dans les filons de plomb, de cuivre, d’ar-
gent et de la plupart des métaux, est, au contraire, très habi-
tuelle dans les gîtes de minerai d’étain. Guidé par la généralité du
fait, j’ajoutais, dans un mémoire antérieur, que l’apatite doit pro-
(1) Mémoire sur la distribution de l’or dans la plaine du Rhin, et
sur l’extraction de ce métal. Annales des mines , 4e série, t. X, p, 3.
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
348
bablemenl aussi son origine à l’arrivée du fluorure ou du chlorure
de phosphore. ïl était d’autant plus intéressant, pour la théorie
des gîtes métallifères, de vérifier expérimentalement cette seconde
assertion, que l’apatite est un composé complexe qui n’a pu être
encore obtenu dans les laboratoires, même à l’état amorphe. Or,
cette fois encore, si on réalise par l’expérience les conditions que
l’étude géologique a suggérées , on obtient avec la plus grande
facilité de l’apatite artificielle.
ïl suffit pour cela de faire passer sur de la chaux caustique, sou-
mise dans un tube de porcelaine à la chaleur du rouge sombre,
un courant de vapeur de perchlorure de phosphore. A la suite
d’une réaction cpii est accompagnée d’une incandescence des plus
vives, il se forme du chlorure de calcium et du phosphate de chaux
tribasique. Une partie du chlorure de calcium reste libre, une
autre partie se combine au phosphate et donne un chloro-phos-
phate insoluble dans l’eau et dans l’acide acétique, qui a exacte-
ment la composition de l’apatite naturelle. En examinant au mi-
croscope ce chloro-phosphate, on reconnaît qu’il a cristallisé sous
forme de petits prismes hexagonaux ; il a donc, non seulement la
composition, mais aussi la forme cristalline de l’apatite naturelle ;
sa densité est de 2, 98, c’est-à-dire un peu moindre que celle de
l’apatite naturelle, ce qui résulte sans doute de ce que cette der-
nière renferme toujours, au lieu de chlorure de calcium, du fluo-
rure de calcium en quantité prédominante; or, ce dernier a une
densité beaucoup plus forte que le chlorure correspondant.
Si, au lieu d’opérer sur de la chaux caustique, on emploie de
la chaux éteinte, on obtient aussi de l’apatite. La chaux carbonatée
naturelle (craie), chauffée dans les mêmes conditions, fournit éga-
lement de l’apatite.
La magnésie, traitée de la même manière que la chaux, donne
un phosphate de magnésie anhydre et cristallise sous une forme
qui dérive du prisme rhomboïdal droit. Mais ce phosphate ne re-
tient pas de chlorure à l’état de combinaison. Cette différence entre
la magnésie et la chaux peut expliquer pourquoi l’apatite magné-
sienne manque dans tous les nombreux gisements où l’on a signalé
l’apatite ordinaire ; la wagnérite ou apatite magnésienne n’a été en
effet rencontrée jusqu’à présent que dans une seule localité, dans le
Saltzbourg.
L’alumine et l’aluminate de soude, traitées comme la chaux,
ne donnent pas de composé correspondant à l’apatite.
La silice, chauffée au rouge en présence d’un courant de chlo-
rure de phosphore, se décompose avec une grande facilité et four-
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
349
nit du chlorure de silicium qui se dégage avec du chlorure de
phosphore. La facilité de cette décomposition de la silice par le
chlorure de phosphore paraît fournir un moyen commode pour
préparer le chlorure de silicium.
D’après les considérations théoriques que j’ai exposées précé-
demment sur l’origine de la topaze, j’ai été conduit à essayer et à
former ce minéral par un procédé analogue à celui qui fournit
Lapatite. De l’alumine bien pure et calcinée a été soumise, à la cha-
leur rouge-blanc, à l’action d’un courant de fluorure de silicium.
Après deux attaques de cette espèce, l’alumine avait augmenté en
poids de 74,17 pour 0/0. Le produit renferme du fluor, et déplus
ce fluor y est à un état de combinaison que n’attaque aucunement
l’acide sulfurique concentré et bouillant. Par ce seul caractère, le
composé dont il s’agit présente une grande ressemblance avec la
topaze dont il renferme les quatre éléments. Une première analyse
quantitative faite de ce produit a indiqué qu’il est très voisin de la
topaze, s’il ne lui est pas identique ; sa densité, qui est 3,47, est la
même que celle de la topaze naturelle.
La topaze prend aussi naissance en présence de l’eau à une tem-
pérature élevée, ainsi qu il résulte d une expérience faite sur le
diaspore, hydrate d’alumine naturel, qui ne perd complètement
son eau qu’à une température voisine du rouge sombre.
Jusqu’à présent on n’avait pu imiter ni la topaze, ni aucun des
silicates fluorifères de la nature.
Un aluminate de soude renfermant un équivalent de chacun de
ses deux éléments se transforme par l’action du fluorure de sili-
cium en un silicate d’alumine et de soude qui renferme du fluor.
Dans ce produit, qui est décomposé par l’acide sulfurique con-
centré, le fluor paraît être combiné dans un état analogue à celui
où il se trouve dans les micas ; on sait, en effet, qu’une partie des
micas, surtout après qu’ils ont été fondus, sont attaquables par
l’acide sulfurique.
De la magnésie anhydre, soumise à l’action du fluorure de sili-
cium se change en un silicate fluorifère, à structure fibreuse; ce
composé a la même densité que le chondrodite, avec lequel il pa-
raît avoir une grande analogie chimique.
Le chlorure de tungstène, en présence de la chaux, donne du
chlorure de calcium et du tungstate de chaux qui est de la schée-
lite, mais qui est amorphe.
Ainsi deux des minéraux caractéristiques des amas stannifères,
l’apatite et la topaze, prennent naissance, comme l’oxyde d’étain
cristallisé lui-même, dans la décomposition de chlorures et de
«150
SÉANCE ÎHJ 21 AVRIL J 851.
fluorures, et par un procédé qui diffère de ceux employés jusqu'à
présent pour limitation des minéraux. Toutes ces réactions
viennent successivement confirmer la théorie de ces gîtes métal-
lifères telle que je l’ai proposée en IBM, théorie qui consiste à les
considérer comme engendrés par la décomposition de chlorures et
de fluorures volatils émanant des profondeurs.
Les expériences dont les résultats viennent d’être exposés amè-
nent encore à reconnaître ce que l’étude des gisements avait fait
pressentir, savoir que dans le métamorphisme de certaines roches
cristallines les fluorures et les chlorures paraissent aussi avoir joué
un rôle important. Telles sont, par exemple, les roches à topaze
de la Saxe, celles de Yillarica, au Brésil, où la topaze est pénétrée
de fer oligiste et de rutile ; telles sont aussi les roches métamor-
phiques de localités plus nombreuses qui sont caractérisées par la
présence de l’apatite, comme celles du Zillerthal, du Saint-Go-
thard, de l’Ilmen, et de diverses localités des Etats-Unis et de
Ceylan.
Recherches sur la présence de V arsenic et de V antimoine dans
les combustibles minéraux , dans diverses roches et dans Veau
de la mer , par M. A. Daubrée.
Certaines substances, lors même qu’elles ne se trouvent qu’en
très faible quantité dans les roches, sont intéressantes à connaître,
non pas seulement au point de vue théorique de la distribution
des corps simples dans l’écorce terrestre, mais à cause du rôle que
ces corps peuvent jouer vis-à-vis des êtres organisés. Aussi je pense
que la rencontre dans les roches d’un toxique aussi actif que l’ar-
senic mérite quelque attention.
En recherchant des fossiles animaux dans le calcaire houiller de
Yillé (Bas-Rhin), où jusqu’à présent on n’en a pas rencontré, j’ai
observé dans cette roche un grand nombre de petits grains cristal-
lins d’un gris métallique, qui ne sont autre chose que du fer ar-
senical.
Cette dissémination de l’arsenic dans le calcaire houiller m’a
engagé à rechercher la même substance dans la couche de houille
que l’on exploite à 12 mètres au-dessous. Les deux variétés prin-
cipales de cette houille renferment effectivement de l’arsenic
dans les proportions de 0§r,169 et 0sr,M5 par kilogramme. En
outre cette houille renferme de l’antimoine et des traces de cuivre.
Ce premier résultat m’a conduit à rechercher l’arsenic dans
d’autres combustibles minéraux. La houille de Sarrebruck, les
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851 .
351
lignites de Rouxwilier et. de Lobsann (Bas-Rhin), ont été reconnus
renfermer de l’arsenic en quantité qui a été dosée. Les proportions
d’arsenic renfermées dans ces trois combustibles ont été trouvées
respectivement égales à 0§l',03, 0si’,037 et 2sr,09 par kilogramme;
c’est dans le lignite ordinaire de Lobsann que cette teneur remar-
quablement élevée a été rencontrée.
Cette forte teneur en arsenic dans le lignite de Lobsann coïn-
cide avec cette circonstance, que le terrain tertiaire, auquel ce lignite
est subordonné, renferme aussi un gîte de minerai de fer si riche
en arsenic qu’il en est inexploitable.
Une houille de Newcastle d’une pureté remarquable a donné
seulement des traces d’arsenic avec une quantité dosabîe d’anti-
moine. En résumé, tous les combustibles essayés renferment de
l’arsenic et, en outre, de l’antimoine.
Pour la recherche de l’arsenic et de l’antimoine, les combus-
tibles minéraux ont été attaqués par quatre à cinq fois leur poids
d’acide azotique à quatre équi valents d’eau, que l’on a ajoutés gra-
duellementen faisant bouillir. Après l’attaque, le touta été évaporé
à siccité, puis mis en digestion avec de l’acide sulfurique concentré
et pur, la liqueur, étendue d’eau et filtrée, a été introduite dans
l’appareil de Marsh. L’arsenic a été recueilli sous forme d’anneaux,
de taches, ou condensé dans une dissolution de nitrate d’argent,
d’après le procédé de M. Lassaigne. Tous les réactifs employés
ont été reconnus être tout à fait exempts d’arsenic.
D’après les chiffres trouvés pour les deux variétés ordinaires de
houille de Villé, la couche de houille du petit bassin dont il s’agit
qui s’étend avec une épaisseur d’un mètre sur environ 204 hec-
tares contient à elle seule plus de 9526 quintaux métriques. La
couche de lignite reconnue à Lobsann, qui s’étend sur 8 hectares
avec une épaisseur de 0m, 60, paraît renfermer au moins 1300 quin-
taux métriques d’arsenic.
En trouvant une aussi forte proportion d’arsenic dans cer-
taines couches sédimentaires, il était naturel de poursuivre la
recherche de ce corps en examinant les deux sources dont dérivent
les principaux matériaux des terrains stratifiés : d’une part, les
roches éruptives, de l’autre, l’eau de l’Océan.
En opérant sur 100 grammes de basalte du Kaiserstuhl, j’ai re-
connu d’une manière incontestable dans cette roche l’arsenic et
l’antimoine. Il s’y trouve par kilogramme 0sr,01 d’arsenic et 0s?, 03
d’antimoine ou, par mètre cube, 30 grammes d’arsenic et 90gram-
mes d’antimoine.
Il était probable que, s’il existait dans l’eau de la mer de l’acide
352
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851 .
arsenique, cet acide devait se concentrer dans les sels insolubles
qui se précipitent par évaporation. Aussi pour simplifier ai-je fait
la recherche de l’arsenic sur des incrustations d’une chaudière de
machine à vapeur du paquebot XHéroclia , qui navigue entre le
Havre et Malaga, et qui s’alimente avec de l’eau de mer. J’ai opéré
sur un kilogramme de ces croûtes que j’ai traité en vases clos par
l’acide sulfurique concentré et bouillant, afin de recueillir, s’il y
avait lieu, l’arsenic qui pouvait se dégager à l’état de chlorure.
L’acide sulfurique en excès a été en partie neutralisé par la potasse,
préalablement essayée à l’appareil de Marsh, afin de s’en débarras-
ser par cristallisation à l'état de sulfate de potasse. Quant à l’acide
arsenique ou à l’arséniate de potasse qui pouvait se trouver dans la
liqueur, il devait, en raison de sa grande solubilité, se concentrer
dans les eaux- mères. Celles-ci, fortement rapprochées et jetées dans
l’appareil de Marsh, ont donné une quantité d’arsenic qui s’élève
au 0,000001 du poids de la substance employée. Les recherches
dont les résultats viennent d’être exposés suffisent pour apprendre
que l’arsenic est très répandu, lion seulement dans les minéraux
métalliques variés, comme on le sait depuis longtemps, mais aussi
dans diverses roches où il est habituellement accompagné d’anti-
moine. Cette dissémination rend compte de la présence de l’arsenic
dans les dépôts ferrugineux de nombreuses sources minérales où
M. le professeur Walchner l’a le premier signalé. Le phosphore,
que les végétaux vont chercher dans la terre végétale pour le faire
passer dans le corps des animaux , n’est peut-être pas renfermé
dans les roches dont il provient originairement en quantité beau-
coup plus notable que l’arsenic ; car ce n’est que dans ces derniers
temps que l’on a pu constater la présence de phosphates dans beau-
coup de roches et de minéraux, quoique la présence des phosphates
dans les végétaux démontrât h priori que le phosphore doit se trou-
ver très répandu dans les matériaux de la croûte terrestre. Si des
recherches ultérieures ne constatent pas la présence de l’arsenic
dans les végétaux, il faudra reconnaître que la plante, en se nour-
rissant et en s’assimilant le phosphore, élimine l’arsenic qui est
ainsi relégué par l’action vitale dans le règne inorganique.
Après cette lecture M. Deville fait observer que l’arsenic, dont
M. Daubrée vient d’annoncer la présence dans les eaux de la
mer, a été aussi depuis quelques années signalé dans celles d’un
très grand nombre de sources minérales. M. Tripier l’avait dé-
couvert le premier dans les eaux de Hammam-mas-Koutin , en
SÉANCE ÜU 21 AVRIL 1851.
353
Algérie 5 depuis lors, plusieurs chimistes, et eu particulier
M. Chevallier, ont recherché ce corps dans les eaux minérales ,
et principalement dans les dépôts laissés par les sources ferru-
gineuses.
M. Delesse dit qu’en Allemagne des recherches analogues
ont amené au même résultat.
M. Daubrée ajoute à ses précédentes communications qu’il a
reconnu, par des lavages exécutés avec soin sur des sables des
Vosges , que le granité et la syénite de cette chaîne contiennent
presque tous des zircons en quantités microscopiques.
M. Deshayes offre à la Société, de la part de l’auteur,
M. Davidson , son ouvrage sur les brachiopodes d’Angleterre.
Le même membre communique la note suivante de M. Bu-
vignier :
Note sur un genre nouveau de mollusque acéphale fossile ,
par M. Ain. Buvignier.
Genre Isodonte , Lsodon ta , Buvignier.
Une coquille bivalve d’une taille médiocre se rencontre assez
fréquemment dans la belle et riche localité de Vieux-Saint-
Remy (Ardennes), localité justement réputée par la bonne conser-
vation des fossiles, qui, quoique appartenant à des couches très
anciennes , celles du terrain oxfordien , sont cependant en aussi
bon état que ceux des terrains plus récents. C’est à cette circon-
stance que les paléontologistes doivent la connaissance plus exacte
des caractères intérieurs de coquilles classées jusqu’ici d’après la
forme extérieure : telle est celle pour laquelle nous proposons un
genre nouveau. On sait combien il est rare de rencontrer, dans les
terrains anciens , des coquilles bivalves, équi valves et symétriques
portant en arrière un sinus palléal : aussi , comme dans celle-ci
cette particularité ne se montre que dans les rares individus de la
conservation la plus parfaite , M. Deshayes , à qui elle est connue,
l’a rangée, dans sa collection, parmi les Cardiuin. Abstraction faite
du caractère de la sinuosité palléale, c’est dans ce genre, en effet,
qu’elle trouvait le plus naturellement sa place; cependant, par sa
forme générale , elle aurait pu se rapprocher aussi de quelques
0 y rênes , et même de ces Donaces subéquilatérales, et plus épaisses
que les autres, pour lesquelles Lamarck a institué son genre Cap sa.
Soc. géol, , 2e série , tome VIII . 33
SÉANCE Dé 21 AVRIL 185] ,
I U
La coquille pour laquelle nous établissons un nouveau genre ne
peut entrer clans aucun de ceux que nous venons de citer. Elle
est ovale, très transverse, étroite, et régulièrement équilatérale :
les valves réunies sont parfaitement closes; leurs bords sont sim-
ples; le supérieur et l’inférieur sont parallèles; les crochets sont
petits et opposés; la charnière se compose de deux dents cardinales
divergentes, et égales sur la valve gauche, et d’une seule dent
conique sur la valve droite; elles rappellent assez celles d’un cer-
tain nombre de Cardium , quoiqu’elles ne se recourbent pas en
crochet. Il y a une dent latérale de chaque côté; ces dents sort
égales et semblables ; elles sont très grandes et saillantes en dedans ;
dans la valve gauche, elles sont séparées du bord par une fossette,
tandis que, dans la valve droite, elles sont droites, saillantes per-
pendiculairement sur le bord cardinal , de manière à pénétrer
dans les fossettes de la valve opposée. Le ligament est extérieur,
supporté sur des nymphes courtes et peu saillantes. Les impressions
musculaires sont petites, circulaires, égales et fort écartées; elles
sont bordées du côté interne par un épaississement notable. L’im-
pression palléale, après avoir suivi le bord inférieur, dessine en
arrière une sinuosité sub-triangulaire dont le sommet s’avance
jusque près du niveau des dents cardinales.
D’après ce qui précède , les caractères du genre peuvent se ré-
sumer de la manière suivante :
Caractères génériques ,
Testa œquivalvis , subœquilatera. Carda valvœ dextrœ dentibus
duobus obliquis , clivaricatis symetricis fossula trigona separatis et
dentibus duobus lateralibus lamellosis subsymelricis , a b ore cardinali
fossulis longitudinalibus separatis , prœedita.
Carda valvœ sinistrœ dente conico trigona intra duas fossulas
obliquas , dentibus lateralibus duobus lamellosis , erectis , subsymetri-
cis ab ore cardinali non separatis formata. Ligamentum externum .
Impressioncs musculares parvœ , circulaires, profundœ, impressio
p aile a lis postice cmarginata .
Coquille équivalve subéquilatérale. Charnière composée sur la
valve droite de deux dents triangulaires, obliques, divergentes,
symétriques, séparées par une petite fossette triangulaire , et de
deux dents latérales lamelieuses , subsymétriques, se détachant du
bord cardinal , dont elles sont séparées par une fossette allongée.
Sur la valve gauche, une seule dent cardinale centrale triangu-
laire, séparée par deux fossettes obliques et deux dents latérales
iÊAîte’É ne 24 avril 4 $54.
155
tameileuâés , redressées perpendiculairement sur lë bord* et se
confondant avec lui. Impressions musculaires petites, profondes,
circulaires ; impression palléale profondément sinueuse en arrière.
Ligament extérieur très court.
Il est évident, d’après leurs caractères, que les coquilles de
notre nouveau genre ne sont point des Cardium , puisqu’elles ont
un sinus palléai qui n’existe jamais dans ce genre; elles ne sont
pas non plus des Cyrènes ou des Cyclades ; par la même raison elles
se rapprochent des Donaces , mais elles n’en ont pas la forme , et
leur charnière en est différente dans sa constitution essentielle.
Leur charnière se rapproche assez de celle de certaines Mactres ;
mais ces dernières ont le ligament intérieur. Il y a donc nécessité,
pour un ensemble de caractères offrant de nouvelles combinaisons,
de créer un genre nouveau. Ce que nous venons d’exposer conduit
naturellement à juger de la place qu’il doit occuper dans la série,
et c’est dans le voisinage des Donaces qu’il devra se ranger.
Une seule espèce est connue :
Isodon ta Des h aycsia .
Coquille ovale, transverse, étroite, bombée, à crochets petits et
courbés, opposés, le côté antérieur un peu plus long et plus étroit
que le postérieur. Celui-ci limité par un angle assez vif descen-
dant obliquement du crochet à l’angle inférieur et postérieur des
valves, bords simples et tranchants, surface extérieure finement
striée transversalement.
Elle se trouve assez fréquemment à Yiel-Saint-Remy, dans les
couches moyennes du terrain oxfordien ; elle a 2U millimètres de
diamètre transverse, 15 millimètres de hauteur, et 12 millimètres
d’épaisseur.
M. Raulin , après la lecture de la note de M. Buvignier, dit
qu’il a le premier découvert cette coquille, en 1835, dans les
mêmes minières des environs de Launoy (Ardennes), où elle est
très commune, et qu’il en a, dès l’année suivante, donné des
échantillons à M. Deshayes, qui lui dit de suite qu’elle devait
constituer un genre particulier et nouveau. M. Raulin ajoute
que M. Aie. d’Orbigny, qui en a eu des échantillons de son côté,
vient, dans le second volume de son Prodrome de paléontologie
(étage oxfordien), publié dans les derniers jours de 1850, de
désigner cette coquille sous le nom de Sowerbya crassa , l’éle-
o&Ô
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
vant ainsi également au rang de genre. Les courtes phrases ca-
ractéristiques françaises du genre Sowerbya et de l’espèce pou-
vant suffire aux naturalistes pour reconnaître la coquille , sur-
tout lorsqu’ils la possèdent provenant des localités indiquées
dans le Prodrome , comme c’est le cas pour les individus qui
ont servi à la description qui vient d’être lue, M. Raulin croit
que le nom proposé par M. d’Orbigny doit être préféré , puis-
qu’il a une priorité réelle de plusieurs mois. Le travail de
M. Buvignier ne peut maintenant avoir d’autre but que de
compléter et de rectifier, s’il y a lieu , la trop courte description
de M. d’Orbigny.
M. Deshayes répond que le genre Sowerbya ne lui paraît pas
avoir été décrit suffisamment pour qu’on puisse en rapprocher
sûrement aucune coquille. D’après cette description incomplète,
le genre Sowerbya aurait, d’ailleurs, un ligament interne,
tandis que le fossile nommé par M. Buvignier possède un liga-
ment externe, et se rapproche des Donaces.
Le secrétaire donne lecture de l’extrait suivant d’une lettre
de M. Boué.
Vienne , I 4 avril 4 851 .
Comme il y avait jadis très peu de Sociétés en Autriche, on
cherche , à présent que la peur des Sociétés savantes paraît s’ètre
calmée, à rattraper le temps perdu. Chaque province a à présent
sa Société centrale d’agriculture. Une Société d’agriculture et une
bibliothèque ont été fondées àCzernowitz, en Bukowine. 11 existe
une Société d’histoire naturelle, depuis octobre 1 849, à Herman-
stadt , et il y a , en outre , une Société statistico-géographico -histo-
rique à Schâssburg, dans le même pays, depuis 18^2. En Hongrie,
on fonde à présent à Pesth une Société géologique. Une autre, sous
le nom de Société wernérienne pour la géologie de la Moravie,
va se constituer le 22 août à Rrünn. Les naturalistes vont fonder
une Société d’histoire naturelle à Tienne, celle des Amis des
sciences naturelles étant devenue une Société géologique, et s’étant
fondue avec l’Institut géologique impérial , qui a maintenant loué
pour vingt-cinq ans le grand palais du prince Razoumowski, jadis
ambassadeur russe ici. Pour le coup l’Institut a là du vacuum à
remplir , et avant qu’il soit converti en solide il se passera du
temps. Ils ont déjà un chimiste pour les essais chimiques. Ils
ont publié un second numéro de leurs Annales , in-8° ; le troisième
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851. 357
est sous presse, et iis retournent cette année dans les Alpes. Il y a
une Société d’histoire naturelle à Prague, sous le nom de Lotos ,
depuis deux ans, et l’on va y fonder une Société géologique. L’In-
stitut agronomique de l’archiduc Charles, à Ungarisch-Altenburg,
a été converti en un Institut impérial , avec le fameux M. Pabst
comme directeur, depuis le 15 novembre 1850. En Croatie, à
Agram, la Société d’agriculture s’active. MêmeàLaibach etàKla-
genfurt il y a plus de vie dans la Société agricole et scientifique.
M. Simony est le directeur du musée de Laibach. Morlot est tou-
jours à Gratz , et commissaire de la Société géologique de l’inté-
rieur de l’Autriche. A Salzbourg, il est possible que, si l’on bâtit un
nouvel hôtel de ville, on songe aussi au musée, qui paraît être dans
un trou. Ici, à Tienne, nous aurions le plus grand besoin d’un nou-
veau musée d’histoire naturelle, les belles collections impériales
étant dispersées dans divers étages et locaux , et de même pour la
bibliothèque d’histoire naturelle de ce musée.
J’ai consacré un chapitre entier à ce sujet dans une brochure
toute récente, sous le titre Ben ganzen Zweck undhohen Nutzen der
Géologie , etc., c’est-à-dire le but entier et la haute utilité de la
géologie en général , et en particulier pour les Etats autrichiens
et ses peuples. Vienne, 1851; in-8° de 126 pages. Je vous en
enverrai un exemplaire; j’y parle aussi de la France et de ses
Sociétés. — Unger a enfin paru avec ses 12 Tableaux botanico-géo-
logiques ; 50 francs. — Il vient de publier un nouveau Mémoire,
avec l\h planches, sur la flore éocène de Sotzka (Styrie), dans la
fin du 2e volume des Mémoires de V Académie. Tous recevrez cela
par mon entremise; mais l’œuvre des tableaux appartient à Unger
et non à l’Académie , donc il n’y faut pas songer. — Unger a remis
750 dessins de plantes de Radeboy, Parschlug, Sotzka, toutes ter-
tiaires, et l’Académie continuera à les faire paraître. — Ettingshausen
fils va sur ses brisées, et publie sur le même sujet dans X Institut
géologique impérial. Unger place toujours à côté des feuilles et fruits
fossiles les feuilles et fruits des plantes existant actuellement, aux-
quels les premiers se rapportent pour le genre ou l’espèce. — F. de
Hauer fait toujours de la paléontologie ; il a publié les fossiles des
Alpes vénitiennes de M. Puclis ( Mémoires de V Académie , vol. II ).
Dr Sclimidl imprime, aux frais de l’Académie, des planches et un
ouvrage sur les cavernes de la Carniole, où il a fait des voyages en
bateau sous terre de plusieurs heures , et très périlleuses. Il a visité
dernièrement, pour le compte de la ville de Trieste, le gouffre de
la Recca, qui s’approche sous terre de Trieste, à la distance de
358 SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
1800 toises , et dont on voudrait amener l’eau pour abreuver cette
cité.
Mémoire sur le terrain paléozoïque des environs de Rennes ,
par M. Marie Rouault, pensionnaire de la ville de Rennes (1).
Parmi les espèces nouvelles que nous avons découvertes dans le
terrain paléozoïque des environs de Rennes, et qui peuvent nous
aider à l'établissement des rapports qui doivent exister entre des
points qui quelquefois se trouvent à de grandes distances, il en
est qu’on ne saurait trop tôt faire connaître , et de cet ordre sont
les suivantes.
FOSSILES DU TERRAIN SILURIEN.
ÉTAGE DE SCHISTE AHD01S1KR FOSSILIFÈRE.
CRUSTACÉS. — FAMILLE DES TRILOBITES.
Genre Calymene , Brongniart.
Calymene Salteri , Marie Rouault.
Cette espèce se rapproche plus de C. Arago que de toutes les
autres ; mais elle se distingue de celle-ci par des caractères trop
tranchés pour qu’on puisse les confondre.
Nous avons fait connaître, chez C. Arago , que l’un de ses
caractères distinctifs était d’avoir le pygidium comparativement
très court , de plus que cette partie caudale de l’animal ne se pré-
sentait segmentée transversalement qu’à son axe, tandis que les
parties latérales n’étaient que granulées ; nous avons aussi fait re-
marquer sur ces plèvres l’existence d’un sillon parallèle au bord
marginal , qui tend à les diviser en deux parties, et que celle qui
est plus au centre avait la forme d’un triangle dont le sommet est
tourné vers l’extrémité postérieure de l’animal.
Chez Calymene Salteri , nous observons une disposition très ana-
logue; seulement nous remarquons , 1° que, toutes proportions
gardées, cette partie de l’animal (le pygidium) est plus longue;
(1) Cette communication n’est que la description détaillée des es-
pèces fossiles que M. Marie Rouault a mises sous les yeux de la Société
dans la séance du 17 juin 1850
SÊArsCK DU 21 AVRIL 1851,
35«
2° que le nombre des segments à l’axe est plus grand, étant ici de
dix à onze, tandis que sur C. Arago il n’est que de sept; 3° enfin
que le sillon qui sur les plèvres détermine le bord marginal, qu’il
sépare des pièces trianguliformes internes, est plus profond , et
que ce bord est nettement segmenté sur tout son pourtour.
31 résulte de ce dernier caractère que, chez cette espèce, le py~
gidiurn, très développé en longueur, est formé de cinq parties bien
distinctes, dont trois sont segmentées (une médiane, l’axe, et deux
marginales formées parle bord), lesquelles sont séparées par deux
pièces ayant la forme de triangles, et qui sont simplement et très
finement granulées.
Localités : Vitré, La Hunaudière.
Calyrncne Verneuili , Marie Kouault. Prionocheilus Verneuili , id.
L’imperfection de nos échantillons, en ne nous offrant pas d’une
manière suffisante les caractères qui distinguent les animaux de
ce genre , et en nous en présentant d’autres , qui alors n’étaient
communs à aucune des espèces qui le composent , nous firent rap-
porter celle-ci à un groupe nouveau. Mais les études que M. Bar-
rande a faites en Bohême sur des individus plus complets, d’une
espèce très voisine de ce fossile, ne laissent aucun doute pour son
assimilation au même genre.
Cette espèce , que nous avions signalée à Poligné , se trouve
aussi à Gahard.
Dalmannia (division des Phacops), Emmrich.
Dalmannia Vetillnrti , Marie Kouault.
Cette espèce, qui a été longtemps confondue, d’abord avec les
Calymene , ensuite avec Phacops Dawningiœ (ce qui nous avait,
conduit à la rapporter à ce dernier) , s’en distingue néanmoins, et
se rapproche davantage de Dahnannia s o ci ah s , Barr. Elle se
distingue de cette dernière par ses angles génaux et l’extrémité
de son pygidium , qui sont arrondis.
Nous dédions cette belle espèce à notre excellent ami M. Marcel
Yétillart.
Localités ? Vitré, Gahard, Angers, Bain, Lacouyère, etc.
360
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
Genre Placqparia.
Placoparia Tourne mini , Marie Rouault. Calymene Tournemini , ici.
Par suite de l’étude que Corda a faite sur une espèce de Bohême
très voisine de celle-ci , cet auteur a été conduit à créer ce genre
nouveau. Aucun doute ne peut être émis à l’égard des rapports
génériques qui existent entre ces deux espèces ; mais les caractères
que nous présentent, à l’endroit du thorax, la figure que donne
M. Barrande de celle de Bohême, ne nous permettent pas, jusqu’à
présent, de les confondre.
Localités : Titré , Gahard , Angers.
Genre Ogygia, Brong.
Ogygia Desmares ti v part. Brong. O. Brongniarti , Marie Rouault.
Cette espèce, qui a été pour nous l’objet d’une étude toute par-
ticulière à l’époque où elle n’était connue que par l’échantillon
fort incomplet qui se trouve à la galerie de géologie du Muséum
de Paris, et n’avait encore été rencontrée qu’à Angers, se ren-
contre également ailleurs. Nous avons dans notre collection, 1° un
magnifique échantillon de cet animal qui nous a été offert , avec
d’autres fossiles, par M. Hardouin , membre du conseil général
d’Ille-et-Tilaine, le tout provenant des mêmes carrières d’Angers;
2° le moulage d’un individu de la même espèce qui nous a été
adressé par M. Caillaud, directeur du Muséum de Nantes , et qui
a été trouvé à La Hunandière (Loire-Inférieure); 3° enfin un troi-
sième exemplaire que nous avons trouvé dans le schiste ardoisier
de Vitré. Tous trois sont entiers , et viennent confirmer de la
manière la plus complète les conclusions auxquelles nous nous
étions arrêté lorsque nous avons fait la reconstruction de cet ani-
mal , dont les proportions que nous avions trouvées , et qui se jus-
tifient ici , sont à pour la longueur et 5 pour la largeur.
MOLLUSQUES. — CEPHALOPODES.
Genre Orthoceras, Breynius.
Orthoceras Hi singer i , Marie Rouault.
Coquille unie dont 1 angle n'est que de 5 degrés au plus, et dont
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851 , 361
les loges présentent en longueur trois fois celle d’G. gregacius,
Murcli. , siphon central.
Localités : Poligné , Titré , La Hunandière.
O) thoceras Tallavignesi , Marie Rouault.
Voisin du grcgarius, il en diffère par son angle, qui est de plus
de 5 degrés, et inférieur à 6, et par le développement en longueur
de ses loges, qui, en ce sens, présentent le double de celles de
l’espèce que nous venons de citer.
Localité : Poligné.
PTÉROPODES.
La présence dans l’étage du schiste ardoisier de Bretagne de
deux genres de cette classe est une chose nouvelle et qu’il importe
de faire connaître ; ce sont les genres Çonularia et Theca,
Genre Çonularia , Sow.
Çonularia Mayer i , Marie Rouault.
Cette espèce, malgré la mauvaise conservation de nos échantil-
lons, qui nous empêche d’en indiquer la forme, se fait remarquer
surtout par les stries fines et très nombreuses qui en couvrent toute
la surface , et dont la direction est dans le sens de la longueur de
la coquille. Ces stries, quoique très fines, ne sont pas interrompues
par les plis irréguliers et non continus qui transversalement sil-
lonnent la surface de cette espèce.
Localité : Poligné.
Genre Theca , Hall.
Theca vitriœa , Marie Rouault.
Cette espèce se distingue de T, trentonensis , Hall., par sa forme
plus allongée et par ses angles , qui nous semblent plus nettement
déterminés.
Localité : Vitré.
GASTÉROPODES.
Genre Bellerophon, Montfort.
Bellerophon Lhmssieri , Marie Rouault
Coquille presque globuleuse, à cause du développement très
362
SÉANCE 13 U 21 AVRIL 1851 «
progressif que prend son dernier tour de spire vers la fin. Ce dé-
veloppement très marqué donne à ia bouche de grandes propor-
tions, et par suite, comme les tours de spire sont très embras-
sants, à l’ombilic une faible largeur. Enfin la bouche a une grande
hauteur, et, sous ce rapport, entre cette espèce et B. bilo-
b citas , Murcli. , avec qui elle se rapproche davantage, sur un
diamètre égal de 34 millimètres pour les deux coquilles, nous
constatons la différence suivante : sur cette dimension la bouche
entre pour 15 millimètres dans l’espèce d’Angleterre , et pour plus
de 20 millimètres dans celle de Bretagne. La largeur, dans celle-ci,
est également plus grande , et diminue plus brusquement en s’ap-
prochant de l’ombilic.
Localités : Bain, Vitré.
Bellcrophon Ali xi , Marie Rouault.
Petite espèce de forme comprimée, cà carène tranchante, s’im-
primant sur le côté ventral en déterminant un pli saillant à l’in-
térieur et par suite un angle rentrant à la partie inférieure de
l’ouverture buccale. Nous comptons trois tours de spire sur des
individus dont le diamètre n’est que de 1 centimètre.
Localité : Vitré.
ACÉPHALES.
Genre Lyonsia , Turton .
Lyonsia britannica , Marie Rouault.
Coquille inéquilatérale de forme amygdaline faiblement angu-
leuse à ses extrémités, peu épaisse, large, un peu plus en arrière
qu’en avant, légèrement plus allongée de ce côté, crochets peu
marqués , bord parfaitement arrondi dans tout son pourtour.
La surface de cette coquille, très uniforme, légèrement renflée
vers son milieu, est couverte de stries concentriques nombreuses
et très fines, un peu plus marquées vers le bord.
Longueur : 30 millimètres environ ; largeur : 20 millimètres;
épaisseur : 12 à 14 au plus.
Localités : Poligné, Montneuf.
Genre Redonià, Marie Rouault.
Sous ce nom nous désignons un genre de mollusques bivalves
qui nous semble devoir être très voisin des isocardes, mais qui
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851. 068
s’en sépare par des caractères tellement tranchés qu’il est impos-
sible de pouvoir les confondre avec aucun des genres connus.
Ainsi que nous l’avons dit dans Une note précédente , que tous
les mollusques qui se trouvent dans le schiste ardoisier de Vitré,
là où le test de ces fossiles a été constamment remplacé par de la
pyrite, on ne peut en étudier les caractères que lorsque cette der-
nière a disparu; mais alors cette étude ne peut être faite que sur
les moulages restés de ces mollusques.
En effet, c’est ce qui nous reste dans le plus grand nombre des
échantillons que nous possédons de cette localité , et les seuls do-
cuments que nous ayons pour établir ce genre nouveau sont dans
cet état ; mais la netteté avec laquelle ces moulages nous présentent
les caractères de la coquille est telle que , sur aucun d’eux , il 11’est
possible de s’y méprendre.
Les caractères les plus saillants des espèces de ce genre nous sont
offerts par les moulages internes de la coquille, à cause de leur
manière d’être , parce qu’ils sont plus entiers et de meilleure con-
servation : aussi est-ce sur eux que nous allons insister le plus.
Moulage interne. A la première vue on reconnaît que les co-
quilles, que ces moulages rappellent, étaient équivalves, très iné-
quilatérales, plus longues que larges, et que la plus grande
largeur varie de place et de proportion suivant les espèces. Les
sommets sont crochus , fortement recourbés , mais vers la partie
postérieure de la coquille, de sorte que le ligament dut être com-
plètement à découvert. Ces empreintes de la cavité des crochets
sont tellement développées en longueur, que, dans l’une de nos
espèces, en §e dirigeant en arrière, elles contournent les impres-
sions musculaires qu’elles dépassent, et sembleraient même ici s’être
prolongées au delà du bord postérieur de la coquille.
Nous sommes peu rpqseignés sur les caractères de la charnière ;
une dent cardinale, jusqu’à présent, nous est accusée par son im-
pression très déyejpppée comme ayant existé à la yalye gauche, et
se serait logée uue fossette pratiquée entre deux autres dents
de la valve droite, et dont celle postérieure aurait eu aussi un très
grand développement > quant à celle qui aurait existé en avant,
elle paraîtrait avoir eu une forme très allongée.
Ce qui rappelle ici les impressions musculaires postérieures
(celles antérieures nous sont encore inconnues) indique que ces
impressions avaient eu une profondeur telle que, pour de sem-
blables mollusques, ce caractère est encore sans exemple. Les mou-
lages de ces impressions nous sont rendus ici par deux tiges placées
sous les crochets que ces derniers contournent en partie, et d’après
364
SÉAINLE DU 21 AVRIL 1851.
la longueur que nous offrent ces tubercules , qui représentent en
relief quelle avait été la profondeur de ces impressions, nous
sommes conduit à supposer que la coquille devait avoir eu là une
épaisseur aussi grande qu’à l’endroit des croehets. Or, comme ces
derniers contournent et embrassent de très près ces tiges qui rap-
pellent la profondeur de ces impressions, nous arrivons à conclure
que, dans ce genre de coquilles (pour les espèces qui nous sont
connues au moins), malgré leur développement prodigieux, en
tout ou en grande partie , les crochets devaient se trouver noyés
dans l’épaisseur du test de la coquille, tandis que par leur cavité
interne ils nous accusent un développement considérable.
A l’appui de cette opinion (celle relative au peu d’apparence des
crochets à l’extérieur), opinion que nous croyons fondée, nous ap-
porterons le témoignage qui nous est offert par quelques moulages
externes que nous possédons de ces mêmes fossiles, et dont la con-
servation malheureusement laisse trop à désirer. Ici nous consta-
tons néanmoins que, dans toute sa partie postérieure, la coquille,
très enflée, avait une forme parfaitement arrondie , et se terminait
assez brusquement, presque à la manière de Modiola lithophaga.
Ces empreintes externes nous font voir, en outre, que ces co-
quilles étaient couvertes de lignes d’accroissement assez marquées,
nombreuses, et parallèles au bord, qui était complètement lisse.
Redouta Dcshayesiana , Marie Pouault.
Redonia Deshayesiana , un peu plus grand que nature.
S*
Fig. 1. Moulage interne place' sur son bord anterieur, vu du côté de la valve gauche.
Fig. 2. Le même, vu du côté du bord ventral.
Cette espèce se distingue par sa forme allongée ; elle est très
inéquilatérale, plus large en avant, très épaisse, et sa forme, par-
faitement arrondie au côté postérieur, s’amincit graduellement de
l’arrière à l’avant ; crochets très développés en longueur ; les
SÊÀHCE DU 21 AVRIL 1851.
365
moules, restes de leur cavité interne, en s’abaissant de manière à
mettre complètement à découvert le ligament, et à cacher entière-
ment la lunule en se prolongeant vers la partie postérieure de la
coquille de manière à faire croire qu’ils en dépassent le bord. Ces
crochets, qui ne se distinguent pas sur les moules externes dans
ceux de l’intérieur, se recourbent en contournant de très près les
impressions musculaires dont la profondeur était très grande.
Le bord de la coquille est lisse , parfaitement arrondi du côté
postérieur, s’amincit en avant, où il est légèrement rentrant à la
partie inférieure , et les lignes d’accroissement qui couvrent toute
la coquille sont nombreuses et très marquées.
Les plus grands individus que nous possédions de cette espèce
donnent les proportions suivantes : longueur, 30 millimètres;
hauteur, 13; épaisseur, 13.
Localités : Vitré, Gahard, Montneuf.
Reclonia Duvaliana , Marie Rouault.
Rcdonia Duvaliana, un peu plus grand que nature.
f*
Fig. i. Moulage interne placé sur son bord ventral, vu du côté de la valve gauche.
Fig. 2. Le même, vu du côté du bord postérieur.
Coquille trianguliforme très inéquilatérale, un peu plus longue
que large, et dont le plus grand développement, sous ce dernier
rapport, est du côté postérieur. Elle est épaisse ; ses crochets, dont
l’extension est moins grande que dans l’espèce précédente, sont
encore très marqués ; ils sont crochus et s’abaissent vers la partie
postérieure de la coquille, où ils arrivent presque à la hauteur des
impressions musculaires en masquant complètement la lunule.
Impressions musculaires rendues sur les moules internes par des
tubercules cunéiformes très volumineux , marqués d’une dépres-
sion du côté supérieur et d’un étranglement à leur base par un
sillon circulaire.
D’après les moulages d’assez bonne conservation que nous pos-
sédonsde cette coquille, nous reconnaissons qu’elle était très épaisse
à l’endroit des crochets et vers le bord postérieur, que les bords
inférieur et antérieur étaient tranchants et relevés en dessous de
SÉANCE LU! 21 AVRIL 185 î .
ce côté, enfin qu’elle est couverte de stries d'accroissement assez
marquées.
Nos plus grands échantillons nous donnent : en longueur, 25 mil-
limètres; hauteur, 20 millimètres ; épaisseur, 17 millimètres.
J’ai l’honneur de dédier cette espèce à M. Duval , Directeur de
l’École de médecine de Rennes.
Localités : Vitré, Gahard, Montneuf.
Area Rouaultiana , Nyst; Area d’ Orbignyana^ Marie Rouauit
Cette espèce, que nous avons signalée comme se trouvant à
Vitré , se rencontre également à Poligné ; il en est de même
pour les espèces suivantes : Nucula Duvaliana , Marie Rouauit;
Nucula Desglandi , id. ; Nucula Morreni , id, qui, indiquées comme
existant à Poligné, se trouvent aussi à Vitré.
Nucula Laigneli , Marie Rouauit.
Petite espèce, longue de 4 à 5 millimètres, large de 4 environ,
et épaisse de moins de 3. Cette jolie petite coquille se fait remar-
quer par sa forme presque équilatérale, par ses crochets sensible-
ment recourbés l’un vers l’autre, placés au milieu de la longueur
de la coquille, et ne s’inclinant ni en avant ni en arrière. Elle
se distingue encore par les dents de sa charnière, que nous croyons
être au nombre de seize au moins, dont huit en avant et autant en
arrière. Enfin elle est couverte de stries concentriques, qui sont au
nombre de trente, lesquelles sont parallèles au bord de la coquille,
qui est tranchante, lisse et parfaitement circulaire.
Localité : Vitré.
BR ACHIOPODES.
Genre Orthjs, Dalmann.
Or f /iis Berthoisi , Marie Rouauit,
Signalé à la Couyère ; existe aussi à Vitré.
Qrtliis Filicerœi , Marie Rouauit.
La forme de cette petite espèce est presque circulaire. L’aréa est
néanmoins assez développé en largeur; la valve dorsale très con-
vexe à l’endroit du crochet, qui est très marqué, celle ventrale de
forme plus aplatie ; toutes deux sont couvertes par des stries larges
SÉANCE DU 21 AVRIL '1 85 j . â67
et très saillantes, dichototnées près du bord et non arquées sur les
côtes.
L’empreinte de la valve dorsale est marquée de deux impres-
sions en relief, nettement séparées et dirigées vers le crochet, où
elles n’arrivent pas.
Celle de la valve ventrale, très compliquée, nous présente une
double pointe au milieu, nettement dégagée dans tout son pour-
tour, et près de laquelle arrive, de chacun des côtés, une pointe
de forme très aiguë. En arrière, en s’avançant sur la coquille, se
trouvent deux mamelons bidentés du côté de la charnière, séparés
par une impression longitudinale, et chacun de ces mamelons tend
à se séparer en deux parties par un sillon transversal qui passe
sur le milieu de leur longueur.
Localité : Vitré.
Orthis Dan joui, Marie Rouault.
Coquille difficile à caractériser, à cause des déformations qu’elle
présente constamment, mais fort importante par son gisement.
Elle se trouve associée au tertre gris de Poligné, dans de l’ampé-
lite, avec des débris de Graptolites et d’autres restes organiques de
conservation trop imparfaite pour que, jusqu’ici, nous ayons pu en
faire l’étude.
Malgré ses déformations, nous avons pu constater sur cet Orthis
les caractères suivants. Coquille de forme orbiculaire, peu
épaisse, ornée de stries rayonnantes, assez nombreuses et très mar-
quées, larges à leur base et non dichotomées, non arquées sur les
côtés.
Le diamètre de la coquille varie entre 10 ou 15 millimètres.
Localité: Poligné.
Genre Leptæna, Dalmânn.
Leptæna Polleti , Marie Rouault .
Petite coquille très transverse, longue de 6 à 7 millimètres, et
large de 12 à lù; couverte de stries rayonnantes, très fines et très
nombreuses. Valve dorsale convexe vers son milieu. La valve ven-
trale nous est inconnue. Cette jolie petite espèce rappelle L. Duva~
lii , Dav., pour la forme, qui est identiquement la même et n’en dif-
fère que par sa taille, qui est beaucoup moindre, et par ses stries,
qui sont toutes égales entre elles.
Nous dédions cette jolie espèce à la mémoire du fondateur de la
368
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851 *
collection, non terminée, de géologie de l'arrondissement de Vitré,
qui se trouve dans la Bibliothèque de cette ville , et dont la mort
prématurée est une perte bien regrettable pour la science comme
pour le pays.
Localité : Vitré.
Genre Spirifère.
Spirijer? David i , Marie Rouault.
Cette coquille, de forme très élégante, est très transverse, et le
crochet de sa valve dorsale est peu apparent. L’aréa , que nous
n’avons pu découvrir, nous reste inconnu.
La ligne qui forme le bord de la coquille, en avant de la partie
médiane, est presque droite; puis, s’arrondissant de chaque côté et
rentrant ensuite sur elle-même en formant un arc rentrant , cette
ligne que forme le bord vient ainsi gagner les extrémités de la char-
nière, qui par ce fait sont de forme très allongée. La coquille est
couverte en outre par des plis rayonnants et très ténus, distants et bien
déterminés. On en compte trente-six sur toute la surface de chaque
valve ; ils sont croisés par des stries concentriques fines et peu
distinctes. Le sinus est peu apparent : c’est peut-être le résultat de
la compression?
Largeur de la coquille, 70 millimètres; longueur, 35 millimètres.
C’est aux marques d’estime et d’amitié que veut bien nous donner
l’illustre artiste, auteur de Guttemberg , que nous essayons de
répondre par cette dédicace.
Localités : La Hunandière, Angers, Gahard, Montneuf.
ECHINODERMES.
Parmi les formes organiques qui doivent se ranger dans les
classes inférieures, nous signalerons surtout l’espèce suivante.
Nous rapportons ce corps fossile à la famille des Cystidées? en
le désignant sous le nom générique de :
Genre Calix, Marie Rouault.
Corps ayant la forme d’un cylindre creux, se terminant à la
partie que nous considérons comme étant l’extrémité inférieure par
une diminution très brusque du diamètre, et prenant sensiblement,
par son diamètre très réduit, la forme d’une tige très courte. Cette
espèce de cornet, de forme très allongée, dont la largeur n’est que
six St s i>u 21 avril 1851. S 69
dè 2 centimètres et demi à 3 au pins, tandis que dans sa hauteur
oïl en compte plus Je 12, est formée d’un test riche aujourd’hui en
sulfure de fer, dont l’épaisseur n’est que dé 1 millimétré à t milli-
mètre et demi environ. La surface de ce corps est couverte de tuber-
cules très irrégulièrement espacés, dont le développement varie
beaucoup. Toute cette surface entre ces tubercules est en outre mar-
quée de points renfoncés très nombreux et très ténus. D’autres im-
pressions semblables qui se trouvent à la face interne la tapissent
également. Ces impressions, de forme elliptique, ne pénètrent pas
très avant le test, de sorte que nous sommes certain que celles de
l’une des surfaces ne répondent pas à celles de l’autre, enfin qu’elles
ne sont symétriques ni dans leur forme particulière , ni dans leur
disposition générale, si ce n’est que parfois elles semblent rayonner
autour des tubercules; mais ce n’est pas constant. Il résulte de ce
double fait, de la forme et de la disposition de ces impressions,
qu’il nous semblerait difficile de pouvoir les assimiler aux loges des
Zoopliytes.
L’extrémité supérieure de ce corps paraît un peu plus évasée,
plus mince, et avoir été susceptible d’une plus grande flexibilité.
Calix Sedgwicki , Marie Rouault.
De forme cylindrique, plus large à la partie supérieure, se ter-
minant brusquement à la partie inférieure par une espèce de pé-
doncule très court; le testa 1 millimètre et demi au plus d’épais-
seur ; couvert sur toute sa surface de tubercules dont la hauteur
varie entre 1 et 3 millimètres, et d’une largeur variant également
de 2 à U millimètres. Dans le sens de la longueur du fossile, ces
tubercules présentent leur plus grand développement; toute la
surface externe et interne est imprimée de points en creux très
ténus, irrégulièrement disposés et peu profonds.
Localités: Vitré, Gahard.
Parmi les autres fossiles difficiles à déterminer, se trouve une
espèce dont la forme est conique, très évasée, et que, sans aucun
caractère précis, nous considérons comme pouvant être rapportée
aux Zoophytes. Enfin quelques traces d’Encrines , trois genres au
moins, y sont représentées.
Localités : Vitré, la Couyère.
ÉTAGE DU GRÈS ARMORICAIN.
Voir la note préliminaire précédente sur ce sujet, qui, résumant
Soc. géol ., 2e série, tome VIII. 24
370
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
notre communication du 5 octobre 18/i9, suffit ici, puisque
nous ne pouvons donner à cette publication toute l’extension que
nous aurions désiré lui voir prendre.
SILURIEN SUPÉRIEUR.
Grès coquillier de Gahard.
Ce grès, que nous croyons devoir comparer à celui de May,
près de Caen , bien que nous ne connaissions ce dernier que par
les rares échantillons que nous en avons vus , nous parait devoir
être rapporté au terrain silurien supérieur.
Dans ce grès coquillier de Gahard nous avons découvert les fos-
siles suivants :
CRUSTACÉS. FAMILLE DES TRIL0B1TES.
Genre IIomalonotus , Koninck.
Homalonotus Brongniarti , Marie Rouault. Asaphus Brongniarti ,
Deslongchamps.
Nous avons déjà fait connaître l’existence de cette espèce en
Bretagne en la ramenant à son véritable genre , dans une note
insérée au Bulletin de la Société géologique , année I8à9, et des
traces non équivoques nous en accusent encore l’existence ici.
Localité : Gahard.
Homalonotus Barrandei , Marie Rouault,
Cette espèce, voisine de la précédente à quelques égards, s’en
sépare nettement par des caractères saillants. A la tête, la glabelle
est de forme carrée, légèrement arrondie en avant, presque globu-
leuse , et non marquée de plis sur les côtés.
Le pygidium se fait remarquer : 1° par son axe , qui dépasse le
bord marginal, en s’élargissant à son extrémité , pour se terminer
d’une manière obtuse ; 2° par le peu de développement que pré-
sentent les plèvres , sur lesquelles on ne compte que quatre seg-
ments , tandis que le nombre de ceux qui s’observent sur le lobe
moyen est de dix ; 3° enfin par la profondeur des sillons longitu-
dinaux , qui , postérieurement , ne sont pas limités par le bord
marginal. La différence entre ces deux espèces est donc ici :
que dans la première, H. Brongniarti , la glabelle, peu sail-
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851 .
371
îante, se rétrécit d’arrière en avant, et est en outre marquée de
deux plis sur les côtés; qu’au pygidium les sillons longitudinaux
contournent Taxe , qui est dépassé par la réunion des deux plèvres ;
enfin que , sur ces derniers comme sur le lobe médian , on compte
le même nombre de segments, qui paraît être de dix , et qui gé-
néralement sont peu marqués.
Genre Dalmannia, Emmrich.
Dalrnannia incerta , Marie Rôuault. Asaphus incertns ,
Deslongchamps.
Cette espèce, qu’avec raison M. Deslongchamps a rapportée
avec doute au genre Asaphus , doit être rangée parmi les Phacops ,
section des Dalrnannia. Elle nous présente les caractères suivants :
Tète semi-circulaire, terminée en avant par une pointe obtuse for-
mée par l’aplatissement du bord de chaque côté , en avant de la
glabelle seulement.
Glabelle se rétrécissant d’avant en arrière, marquée de trois sil-
lons latéraux d’autant plus profonds qu’ils sont plus voisins du bord
occipital, le plus antérieur de ces sillons est légèrement oblique.
Joues trianguliformes , sur lesquelles se trouvent les yeux , qui ,
très volumineux, sont couverts sur leur pourtour d’une réticulation
fine et très abondante.
La ligne jugale se distingue à peine sur nos échantillons on
remarque seulement qu’ après avoir longé postérieurement la cor-
née par une courbe circulaire qu elle décrit en s’étendant sur la
joue, elle vient gagner le bord un peu en avant de l’angle gênai.
Les angles génaux sont de forme très arrondie.
Thorax. Il ne nous reste que sept segments de cette partie de
l’animal , et les caractères qui nous sont offerts ici n’ont rien de
particulier.
Localité : Gahard.
Genre Elæsiacomia , Corda.
Plœsiacornia Kieneria , Marie Rouault.
Nous croyons devoir rapporter à ce genre , formé en Bohême
par Corda, trois petites pièces ovoïdes marquées de deux sillons
transversaux presque parallèles entre eux, se dirigeant dans le
sens du diamètre le plus court , et qui, partant de l’un des bords ,
ne s’étendent pas assez pour gagner l’autre, ni pour se réunir.
SÉANCE EL M AVRIL 1851.
872
Ces petites pièces, que nous considérons comme étant des py.
gidium d’un Trilobite, nous présentent les plus grands rapports
avec l'échantillon figuré par M. Deslongchamps dans ses planches
des Trilobites ( Mémoire sur les grès quartzeux des environs de
May), fig. 2, b , et qu’il a désigné sous le nom d’ Asciphus brévia ai-
da tus; seulement nos échantillons sont beaucoup plus petits et
comparativement plus larges. Enfin nous ne savons jusqu’à quel
point ces mêmes petits corps peuvent encore se rapprocher (quoi-
que beaucoup plus grands) de ceux que M. Murchison a figurés
pl. III, fig. 17, dans le SU. syst . , et qu’il rapporte avec doute au
genre Agnostus.
Localité : Gahard.
MOLLUSQUES. — CÉPHALOPODES.
Genre Orthoceras, Breynius.
Orthoceras senti partîtes , Sow. — Gahard.
Orthoceras Cazanovei , Marie Rouauit
Corps de la coquille annelé d une manière peu parfaite , les
renflements, qui sont de un par loge, sont quelquefois peu mar-
qués , et lorsqu’ils le sont, la partie la plus saillante ne répond pas
toujours au milieu des divisions loculaires. Le diamètre de la co-
quille augmente d’une manière très sensible ; son angle est d’en-
viron 10 degrés.
Cette espèce est voisine d’ O. ibex , Sow., mais en diffère par
l’augmentation plus rapide de son diamètre.
Localité : Gahard.
Orthoceras gre garnis , Sow.
Nous croyons devoir rapporter à cette espèce les échantillons
que nous avons trouvés dans le grès de Gahard , et auxquels nous
donnons ce nom, à cause des grands rapports que nous leur trou-
vons avec la figure 16, pl. "VIII, du SU. syst. de M. Murchison.
Nous remarquons une différence, mais qui seule encore ne nous
semble pas devoir être prise en considération : c’est là suivante.
Sur le seul de nos échantillons où nous apercevons le siphon, nous
observons que ce dernier est süb-central , tandis que dans l’espèce
d’ Angleterre. il est exactement indiqué an centre.
SÉAM'.E m 21 AVRIL 1851.
37 B
GASTÉROPODES.
Genre Bellerophojst , Montfort.
BcUa ojjJw/i Trcali y Marie Rouault.
Petite espèce lisse, à tours de spire très embrassants, ne laissant
voir qu’une faible partie de celui qui est recouvert. Deux tours de
spire composent la coquille. Carène tranchante à convexités laté *
raies peu marquées , et sans traces aucune de plis dorsaux.
Cette espèce se rapproche plus de B. Troosti , d’Orbigny, que
de B . carinatus , Murchison , par sa forme plus enflée et par ses
tours de spire , qui se recouvrent d’une manière plus complète ;
mais elle se distingue de l’espèce d’Amérique par sa carène
plus tranchante , par le nombre de ses tours de spire , qui est
moindre, et par sa taille beaucoup plus petite; et de l’espèce bri-
tannique par sa forme plus aplatie , par le nombre de ses tours de
spire , qui est moindre , et qui se recouvre presque complètement
dans notre espèce.
Hauteur de la coquille, 12 millimètres; largeur près de la
bouche , 7 millimètres.
Localité : Gahard.
Genre Cyktolitus , Conrad.
Cyrtolitus Boblayei , Marie Rouault.
Nous ne possédons qu’un seul échantillon de cette espèce, et
encore est-il fort incomplet. Néanmoins il nous offre assez de ca-
ractères pour nous permettre de le décrire, et de reconnaître qu’il
ne peut être assimilé à aucune des espèces connues.
Coquille petite , non enroulée , simplement arquée , épaisse.
Carène tranchante. Bouche trianguliforme ; les angles latéraux
sont légèrement arrondis , et au milieu , du côté ventral de la
coquille, s’observe un pli saillant.
Cette espèce présente les plus grands rapports avec C. trente -
nensis , Hall., pour la forme; mais elle s’en distingue par un moins
grand développement en longueur, et une augmentation plus ra-
pide dans le diamètre, enfin par sa forme plus arquée.
Localité : Gahard.
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851,
3 / /l
MOLLUSQUES. ACEPHALES.
Genre Anatina, Lamarck,
Anatina Duretian a , Marie Rouault.
Coquille très inéquilatérale , enflée , large postérieurement ,
s’amincissant d’une manière assez brusque vers le bord, à la partie
ventrale , et graduellement en avant. Crochets assez développés ,
larges, crochus, et un peu recourbés en arrière. La coquille est très
déprimée sous le ligament, et cette dépression se maintient presque
la même jusqu’à l’extrémité inférieure ; le bord de la coquille est
droit.
Cette espèce est voisine d 'Anatina ( Pholadomya ) Munsteria ,
Arch. et Vern.; mais elle en diffère d’abord par une diminution
d’épaisseur beaucoup moins brusque en gagnant le côté antérieur,
enfin par une différence beaucoup moindre en largeur entre les
deux parties antérieure et postérieure de la coquille.
Longueur, 55 millimètres; hauteur, 23; épaisseur 18.
Nous dédions cette belle espèce à notre excellent ami et hono-
rable compatriote M. Duret.
Localité : Gahard.
Genre Cypricardia.
Cypricardia Ludovicana , Marie Rouault.
La forme de cette jolie coquille est presque carrée , légèrement
arrondie à ses extrémités, marquée en avant de la charnière d’une
dépression qui longe le bord jusqu’à la partie antérieure. Les cro-
chets, très développés en largeur, se recourbent légèrement en
arrière, en s’inclinant l’un vers l’autre, et leur relief, tout en se
réduisant vers son milieu surtout, en s’étendant sur la coquille, se
maintient sous forme de carène obliquement dirigée en avant, et
qui vient finir à la base du bord antérieur. Du côté postérieur, ce
relief ne diminue qu’en s’arrondissant légèrement sur toute sa
surface. Enfin, à partir du sommet des crochets, cette coquille est
couverte de plis ondulés d’accroissement; ils sont très ténus vers
la partie supérieure, et leur largeur augmente à mesure qu'ils sont
plus voisins du bord.
Cette espèce est très voisine du C. cymbœliformh , Sow., et
du C. elongata , Arch. et Vern. ; mais elle en diffère par sa
forme moins oblique , par ses crochets moins recourbés et plus
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851. 375
larges , et la forme moins vive du pli carénai , qui , partant des
crochets, se dirige vers la base du bord antérieur.
C’est à ma bonne mère que je suis heureux d’offrir ce faible
tribut de ma gratitude pour toutes les privations que, d’accord
avec mon excellent père , à l’effet de me venir en aide dans mes
études , ils se sont constamment imposées.
Localité : Gahard.
Cjpricardict Davidsonici , Marie Rouault.
Cette espèce se fait remarquer par la simplicité de' ses caractères.
Elle est presque carrée , courte, et comparativement peu enflée.
Ses crochets, légèrement développés, se recourbent en arrière, et
leur relief, eu s’étendant sur la coquille, ne se maintient pas iso-
lément sur une grande étendue ; de plus, ses stries concentriques,
assez nombreuses, sont peu marquées, et divisées en zones par
d’autres qui, de distance en distance, sont plus saillantes. Elle
diflère de la précédente par sa taille plus courte, ses formes plus
rondes, et ses stries concentriques plus nombreuses et moins mar-
quées.
Localité : Gahard.
Cypricctrdia Mariana , Marie Rouault.
Coquille courte et très épaisse , marquée d’une dépression très pro-
fonde, qui commence au-dessous, du côté postérieur du crochet, et
va, en augmentant de largeur et de profondeur, gagner le bord infé-
rieur de la coquille, qui, là seulement, est comprimé. A part cette dé-
pression, le renflement que les crochets, qui sont peu prononcés en
longueur, donnent à la coquille, est tel que cette dernière a une
forme presque ovoïde. Elle est couverte sur toute sa surface de stries
concentriques très serrées et de la plus grande ténuité.
Cette espèce ne peut être mise en rapport avec aucune autre.
Longueur, 20 millimètres; hauteur, 12; épaisseur, 12.
.Te dédie cette intéressante espèce à ma bonne sœur Marie .
comme une preuve de vive sympathie.
Localité : Gahard.
Genre Arca, Linné.
Area Martini ana , Marie Rouault.
Petite espèce, dé formé très allongée, épaisse, et dont les crochets
376
SÉANCE 1)U 21 AVRIL 1851.
sont légèrement recourbés en arrière. La plus grande largeur de
la coquille est du côté postérieur, qui se termine presque carré-
ment. Les crochets, très écartés, se prolongent sur la coquille, vers
les deux extrémités inférieures du bord, par deux arêtes vives, et
l’espaçe ainsi compris, qui seul constitue l’épaisseur de la coquille,
a la forme d’un triangle à base très large.
Longueur, 10 millimètres, au plus ; hauteur, 6 environ, et autant
en épaisseur.
Je fais hommage de cette curieuse espèce à M. Martin Montalant
d’Angris, pour l’empressement avec lequel il m’est venu en aide
dans l’exploration de ses exploitations
Localité : Gahard.
BRACHIOPODES.
Genre Térébratule, Lwyd.
Terebratula Thebeaulti , Marie Rouault.
Petite espèce de forme arrondie, épaisse, couverte de seize plis
rayonnants, dont deux appartiennent au sinus, et sur les deux
valves qui sont très renflées; de tous ces plis, celui du milieu ar-
rive du bord jusqu’à la charnière. Cette espèce se distingue de
T. Bidentn , Murch., de laquelle elle est très voisine, par sa taille
plus petite, la plus grande largeur de son sinus, et le nombre plus
grand de ses plis.
Localité : Gahard.
Genre Qrthis, Daim.
Orthis Monnieri , Marie Rouault.
Cette espèce, par le rapprochement très marqué des deux divi-
sions qui naissent de l’impression interne du crochet de la valve
dorsale et qui s’étendent sur la partie médiane de la coquille, se
montre en général assez différente des exemplaires de l’espèce
qui se trouve dans le grès de May, et que l’on croit devoir rappor-
ter à Orthis rechix , Ban*., et qui nous paraît plutôt devoir se rap-
procher de celle de Gahard. Celle-ci, à cause de son abondance,
nous a permis de reconnaître que ses caractères, d’abord différents,
se modifient, et nous possédons maintenant, provenant du grès
coquillier de Gahard, tous les intermédiaires nécessaires pour justi *
lier ce rapprochement que nous faisons entre les échantillons de
rçs deux localités.
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
377
FOSSILES DU CALCAIRE ET DU SCHISTE DÉVONIEN.
CRUSTACÉS. — ORDRE DES OSTRAPODES. FAMILLE DES CYPROÏDES.
Nos dernières recherches dans le terrain dévonien du nord
d’Ille-et-Vilaine nous ont valu la découverte de deux genres se rap-
portant à cette famille, et dont l’un d’eux est complètement nou-
veau pour la science. Tous les deux rentrent dans le groupe des
Cytherina. Ce sont :
Genre Beyrichia, M’Coy.
B e/ri chia Hardouiniana , Marie Rouault.
Nous ne possédons que deux valves séparées de cette jolie espèce,
et sur lesquelles nous constatons les caractères suivants : Valves
oblongues, dont le plus grand diamètre est dans le sens de la lon-
gueur, et présentent, suivant le bord ventral , une dépression
très sensible, laquelle longe ce dernier dans toute sa longueur et
lui donne une forme très arrondie. Ces valves sont marquées, sui-
vant leur largeur, de deux sillons profonds qui séparent le relief
de ces valves en trois parties distinctes, et chacune de ces parties
est caractérisée dans le sens de sa longueur par des mamelons très
saillants. Nos échantillons sont trop incomplets pour nous permettre
aujourd’hui de préciser le nombre de ces tubercules, qui n’est pas
inférieur à deux, sur chacun de ces reliefs.
Nous sommes heureux de pouvoir témoigner ici à M. Hardouin ,
membre du conseil général d’Ule-et-Viilaine , et l’un des fonda-
teurs de la Société géologique de France , notre gratitude pour
l’empressement avec lequel il nous a offert les précieux éléments
paléontologiques qu’il avait recueillis dans les ardoisières d’An-
gers.
Localité : Izé.
Genre Leperdhia, Marie Rouault^
L’espèce à l’aide de laquelle nous établissons ce genre semble-
rait au premier aspect devoir rentrer dans celui des Cytherina ;
mais l’existence de certains caractères que nous avons constatés
sur ces fossiles ne nous permet pas de l’y assimiler.
Ce genre se distingue par les caractères suivants : Coquille for-
mée de deux valves rén i formes , plus longue que large, très iné-
«jui valve? inéquilatérale par plus de largeur en arrière, et relevée
373
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
en avant. Les deux valves sont lisses et unies à la partie supérieure
par une charnière linéaire ; la droite est beaucoup plus développée
en largeur que la gauche, et l’excès qu’elle présente en ce sens en
se repliant constitue une espèce de carène qui joue le rôle du bord
ventral de la coquille, tandis que son bord propre vient rejoindre
celui de la valve gauche au quart environ de la largeur totale du
fossile, de sorte que celle-ci, la valve gauche, dans le pourtour
latéral de la coquille, n’entre que pour 3/8rs à peu près, et la valve
droite pour 5/8es, et ce n’est qu’aux deux extrémités de la coquille
que le bord de la valve gauche arrive à peine pour concourir à en
former la partie tranchante.
Sur la valve gauche, près de la partie médiane de son bord infé-
rieur, règne un renflement de forme oblique, qui se dirige dans le
sens de la longueur, et près de la charnière, un peu en arrière, s’ob-
serve un mamelon très saillant qui ne se retrouve pas sur la valve
droite. Ala charnière, où l’on n’aperçoit aucune trace de ligament,
on remarque que le bord de la valve gauche domine légèrement
celui de la valve droite.
C’est à la mémoire de l’ancien doyen des tailleurs de Rennes,
qui, pendant les années 179ù et 1795, sans passion et avec une
intégrité au-dessus de tout éloge , a rempli les fonctions de pre-
mier magistrat dans cette ville , que nous rendons hommage en
donnant le nom de cet illustre compatriote à ce nouveau genre
que le sol de la Bretagne offre encore à la science.
Lc.perdithi britannica , Marie Rouan lt.
Leperdilia biilauuica très grosse.
fs.
J
Figure 1. — Coquille placée sur sou bord ventral, se dirigeant de droite à gauche et le'gè-
rement inclinée sur sa valve droite.
Figure 2. — La même, ouverte et place'e sur son bord poste'rieur.
Figure 3. — Coupe latéral montrant quels sont les rapports qui existent entre les deux
valves dans leur développement en ce sens.
Figure 3 bis. — La préparation de nos échantillons, pour en exécuter les dessins, nous a
valu la découverte d’un caractère important. Nous avons reconnu qu’à la rencontre
SÉANCE OU 21 AVRIL 1851.
379
des bords des deux valves, la forme et lu direction pour chacun d eux sont differentes.
Le bord de la valve gauche, a, en s’amincissant, plonge à l'intérieur de la coquille
lorsqu'elle est fermée el pt éseule à l’extérieur un sillon bien déterminé, que vient
remplir, par son côté interne, le bord de la val ve droite, b, dont la forme à l’extérienr,
légèrement arrondie, présente un certain relief (fig, 1 \
Coquille lisse, oblongue, réniforme et plus large en arrière ; très
inéquivalve par le plus grand développement de la valve droite, qui
se replie à la partie ventrale pour former la carène de la coquille,
marquée d’un renflement longitudinal près du bord inférieur de la
valve gauche, et d’un mamelon sur cette dernière, près de la partie
postérieure de la charnière. Charnière droite située un peu à droite.
Longueur, 12 à 13 millimètres; largeur, 8 à 9 millimètres.
Localités : Gahard , Izé.
FAMILLE DES TRILOBITES.
Genre Homalonotüs, Koninck.
Homalonotüs Hausmanni , Marie Rouault. Asapfms Hausmanni ,
Al. Brongniart.
Homalonotüs Hausmanni,
D’après un moulage qui nous a e'té adressé par M. Caiilaud , directeur du Muséum de
Nantes. Extrémité postérieure du pygidium. Réduit aux 4/oe« de sa grandeur naturelle ;
provenant du calcaire d’izé.
Dans la note que nous avons communiquée à la Société, le 1 9 mars
de l’année dernière, parmi les fossiles que nous avons mentionnés
dans cette note, s’en trouvait un dont nous signalions l’existence
dans le calcaire d’Yzé comme appartenant au genre Homalonotüs .
B 80
SÉANCE 1)1' 21 AVRIL 1851.
Les nouvelles recherches que nous avons faites depuis, à cet en-
droit, nous ont produit de nouveaux débris du même animal, et
qui n’ont pu que confirmer l’idée première que nous avions émise
à l’égard de sa position générique.
Depuis, M. Caillaud, directeur du muséum de Nantes, nous a
adressé le moulage de la partie postérieure du pygidium d’un très
grand individu de cette espèce.
Si la réunion de tous ces documents ne peut suffire pour nous
donner une idée précise de tous les caractères distinctifs de ce fos-
sile, elle nous permettra au moins d’en indiquer les principaux et
de reconnaître en même temps l’identité qui nous paraît devoir
exister entre celui-ci et l’une des espèces qui se trouvent comprises
dans la description qu’Alex. Brongniart a donnée pour son A. Haus-
manni .
Nous sommes fondé dans cette idée d’abord par les rapports qui
existent entre la description donnée par Brongniart pour rani-
mai que nous venons de citer et nos échantillons, ensuite par l’in-
dication que M. de la Bêche, dans le Manuel géologique, donne
de l’existence du fossile décrit par Brongniart , dans le calcaire
de Néhou, localité où nous savons que se trouvent des échantillons
en tous points comparables aux nôtres.
Par l’étude de nos échantillons , nous constatons sur cet ani-
mal la réunion des caractères suivants : 1° que sur cette espèce,
ainsi que cela s’observe sur tous ses congénères, la trilobation est
peu ou point apparente sur le thorax ; 2° que ce caractère est
moins douteux au pygidium et qu’il devient de plus en plus
marqué à mesure qu’on s’avance vers l’extrémité postérieure;
3° que lesplèvrcsde cette partie de l’animal, ainsi que le lobe .moyen,
sont marquées de sillons transversaux, dont la profondeur aug-
mente avec l’age, et est telle qu’elle détermine sur les individus
adultes une segmentation dont le relief égale au moins celui des
segments du thorax ; que la forme très arrondie et non bifur-
quée de ces segments dit pygidium se maintient jusqu’auprès du
bord; 5° qu enfin le nombre de ces segments est de dix sur les
côtés et de treize sur l’axe.
À cela nous ajouterons que les deux derniers segments des plè-
vres sont séparés de leur partie correspondante du lobe moyen,
à l’endroit des sillons longitudinaux , tandis que là les autres
Segments sont simplement coudés, et que ce coude qu’ils forment,
ainsi que la profondeur des deux sillons longitudinaux, diminue
en s’avançant vers le thorax , où l’un et l’autre de çe§ çarac
cessent d’exister *
SÉANCE DU ’2l AVRIL 1 S 5 J .
381
8i nous calculons les proportions auxquelles a pu atteindre rani-
mai, dont nous figurons une portion du pygidium réduite ici aux
U/5es de sa grandeur naturelle, nous arrivons à reconnaître qu’en
longueur il a égalé les espèces de trilobites les plus grandes. En
effet, si nous cherchons à rétablir dans son entier cette partie de
l’animal, dont, nous n’avons ici qu’une portion , en considérant
surtout qu’à l’endroit des plèvres il ne nous reste que cinq segments
au lieu de dix, qui est le nombre constaté ailleurs, et que la lar-
geur de ces segments augmente à mesure qu’on s’avance vers la
partie antérieure , nous trouvons que , dans son entier, cette partie
de l’animal ne devait pas offrir en longueur moins de 11 centi-
mètres.
Or, d’un autre côté, sur toutes les espèces connues de ce genre,
nous constatons que le pygidium, lorsque comme ici il ne se pro-
longe pas par une pointe, ne forme guère que 1/Z|., et souvent
même pas, de la longueur totale de l’ animal.
Celui auquel a appartenu la portion figurée ici (portion réduite
aux U/5es de la grandeur naturelle) n’a pu par conséquent , dans son
entier, en longueur, offrir beaucoup moins de Ixk centimètres.
Localité : Izé.
Honialonotus Lcgraverendi , Marie Rouault.
INous établissons cette espèce à l’aide de deux pygidium très
petits dont la longueur est de 10 millimètres et la largeur de
20 environ.
La forme de ce pygidium est parfaitement circulaire. Les plè-
vres, à l’endroit le plus large, égalent en ce sens près de deux fois
le diamètre de l’axe. Le nombre des segments est le même que
dans l’espèce précédente, 10 sur les plèvres et 13 sur le lobe mé-
dian; seulement nous remarquons la différence suivante : que dans
l’espèce que nous décrivons, la proportion en largeur étant plus
grande, quoique séparée par des sillons , ces segments sont plus
serrés les uns contre les autres, moins coudés à l’endroit dessillons
longitudinaux, et un seulement se montre séparé de sa partie cor-
respondante à l’axe. Enfin l’axe, dans cette espèce, arrive juste au
bord marginal, qu’il recouvre entièrement, mais sans le dépasser.
Dans H. Hausnumni , au contraire, le bord marginal contourne
le lobe médian qui ne s’avance pas plus que les extrémités des seg-
ments des plèvres.
Localité : Y/é,
SÉANCE Bïî 21 AVRIL 1851.
882
Genre Phacops, Emmrich.
Phacops Michelini , Marie Rouault»
Par la grande ressemblance que nous avait présentée cette espèce
avec Phacops ( Cryphœus ) calliteles, Green, nous avions été conduit
à les réunir ; mais un examen plus attentif vient de nous faire con-
naître que ces espèces diffèrent entre elles d’une manière suffisante
pour qu’on ne les considère plus comme n’étant que de simples va-
riétés, mais bien plutôt des espèces différentes et nettement séparées.
Celle-ci nous présente les caractères distinctifs suivants : La glabelle
en avant n’est que faiblement dépassée par le bord inférieur du bou-
clier et le troisième lobe latéral de cette partie médiane de la tête
de l’animal ; le plus voisin du bord occipital est réduit presque à
l’état rudimentaire, n’étant plus représenté ici que par une espèce
de ligne en relief, tandis que les deux qui le précèdent, peu dis-
tants l’un de l’autre, sont très développés.
Le thorax nous est complètement inconnu. Quant au pygidium,
il nous présente son axe formé de onze segments et les plèvres de
six, dont une, la dernière, n’est que rudimentaire et séparée de
sa partie correspondante au lobe médian.
Le pourtour de cette partie caudale de l’animal est orné de onze
expansions spiniformes, légèrement aplaties, qui naissent du bord
externe et se dirigent plus ou moins en arrière. Celle du milieu
répond à l’axe, quelle semble prolonger; les autres, divisées par
cinq pour chaque côté, sont en regard des cinq premiers segments
des plèvres , tandis que la part du sixième paraît se trouver dans
la pointe du milieu qui, alors, résulterait de la fusion des der-
nières latérales.
Localités : Gahard, Izé.
Genre Cyphaspis, Burmeistei .
Les échantillons qui nous ont permis de constater l’existence de
ce genre en Bretagne sont insuffisants pour nous permettre de faire
une étude détaillée de l’espèce qui ici le représente. Mais l’impor-
tance de cette découverte nous oblige dès à présent à faire con»
naître les caractères distinctifs de ce fossile.
Cyphaspis Gaultier} , Marie Rouauit.
Tète longue de 6 millimètres sur 10 de large, couverte sur toute
sa surface par une granulation très distincte, Glabelle à peu près
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
383
sphérique, détachée par un sillon circulaire des joues qui l’en-
tourent presque totalement en s’unissant en avant; joues très déve-
loppées en hauteur, mais loin d’atteindre celle de la glabelle, sé-
parée du bord par un sillon très marqué ; les yeux manquent, mais
on remarque que la place qu’ils ont occupée est très près de la
glabelle. Bord circulaire épais ; les ongles génaux de forme angu-
leuse ne paraissent pas s’ètre prolongés beaucoup.
Nous avons l’honneur de dédier cet intéressant fossile à
M. Gaultier, maire de Louvigné-du-Désert , en souvenir de l'em-
pressement avec lequel il s’est plu à nous venir en aide dans l’ex-
ploration de cette contrée.
Localité: Galiard.
Genre Proetus, Steiniger
Prœtus Huhayi , Marie Rouault.
La tête de cette espèce seulement nous est connue; mais les
caractères qu’elle nous présente ne permettent de l’identifier avec
aucune de ses congénères. Elle se distingue par sa forme très
convexe, par sa glabelle très saillante qui se fond avec les joues.
Joues limitées seulement vers les bords par un sillon très profond
sur tout le pourtour extérieur et peu marqué du côté occipital.
Les yeux se font remarquer par leur faible développement en lar-
geur et leur forme conique, qui va en s’élevant en pointe presque
à la hauteur de la glabelle. Le sillon qui sépare le bord marginal,
ainsi que nous l’avons dit, est très profond, et ce dernier, dont la
forme est parfaitement arrondie, est couvert de stries fines paral-
lèles à sa direction. Ce bord, légèrement relevé en avant, se pro-
longe en pointes assez marquées àjl’ endroit des angles génaux. Sur
toute la surface de cette tête, le bord externe excepté, on distingue
une granulation fine et abondante.
Nous sommes heureux de pouvoir donner ici à M. Huhay une
preuve de notre gratitude pour les nombreux témoignages d’estime
et d’intérêt que nous en avons reçus.
Localité: Gahard.
MOLLUSQUES. GASTEROPODES.
Genre Macrocheilus , Phillips.
Macrocheilus Ch ar mêlai si , Marie Rouault.
Très petite espèce, longue de 9 millimètres. Le dernier tour de
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
38 k
spire, à lui seul, en prend 7, sur lesquels l'ouverture de la bouche
entre pour 5. Cette coquille est courte, formée par quatre tours de
spire ; bouche évasée et large ; columelle ondulée ; spire très courte,
chaque tour recouvrant la moitié de la largeur de celui qui le
précède. Cette espèce se distingue de M. ( Buccimun ) arculeatUm ,
Schlotli., dont elle se rapproche le plus par sa bouche, beaucoup
plus grande par sa forme, plus courte par sa très petite taille, et
le nombre de ses tours de spire, qui est moindre : quatre au lieu
de six.
Localité : Gahard.
Genre : Pleurotomaria , Defrance.
Pleurotomaria Bachelier /, Marie Rouault.
Coquille très allongée, turriculée, formée de douze tours de
spire dans nos échantillons les plus adultes, et qui présente en
longueur, de l’extrémité de la spire à celle de la columelle, 35 mil-
limètres. Le développement en largeur de la coquille est compris
dans un angle de 25 degrés seulement. Bouche ronde ; columelle
lisse, non ombiliquée; tours de spire de forme très arrondie, cou-
verts de stries d’accroissement interrompues par la bande du sinus
et arquées en sens inverse de chaque côté de cette dernière. Bande
du sinus saillant au-dessus des tours de spire, déprimée au milieu
et sensiblement relevée sur ses bords.
Cette espèce se distingue de P. [Miuchi sonia) arigula , Phill.,
par la forme très arrondie de ses tours de spire , et de P. ( Mur -
chisonia) bilineata , cl’Arch. et Vern. , par une forme plus turri-
culée, et de toutes deux par le relief de sa bande du sinus et la
longueur de sa spire.
Localités : Gahard, Izé.
Pleurotomaria Chauvi ni , Marie Rouault.
Nous ne possédons qu’-un seul échantillon de cette espèce, dont
la conservation laisse beaucoup à désirer, il nous présente néan-
moins des caractères qui lui sont propres et qui ne permettent pas
de le confondre avec l’espèce précédente, dont il se rapproche
beaucoup. Il s’en distingue par sa forme plus allongée et par la
bande de son sinus qui est très en relief, de forme convexe et com-
primée par deux sillons latéraux.
Localité : Izé.
St AS CE BU 21 AVRIL 1851 .
§85
Genre Capülus , Montfort.
Capulus Haliotis , d’Orb.; Nerita Haliotis , Murchison.
Localité : Gahard.
Capulus Hericarti , Marie Rouault.
Coquille de forme très irrégulière, aplatie, carénée et très allon-
gée, lisse ; sommet presque recourbé sur lui-même, voisin de Ca-
pulus ( pileopsis ) tri loba tus , Gold. s il en diffère par le peu de relief
de sa carène, qui, peu saillante, n’est point accompagnée par des
sillons qui caractérisent cette dernière \
Localité ; Gahard,
Capulus Delahayei , Marie Rouaull.
Coquille globuleuse à tours de spire peu nombreux et fondus
dans le dernier ; surface lisse, marquée seulement de stries d’ac-
croissement très ténues. Cette espèce est voisine de C. castratus ,
Barr., et C . amplicatus , Gold., mais elle se distingue de cette
dernière surtout par l’absence des côtes qui caractérisent celle-ci et
ses lignes d’accroissement, qui sont plus fines.
Localité : Gahard,
Genre Bellerophon, Montfort,
Bellerophon Saemanni , Marie Rouauh.
Espèce globuleuse à ombilic faiblement ouvert, laissant à peine
apercevoir les tours de spire recouverts. Carène nulle, remplacée
par une dépression canaliforme peu profonde, couverte sur toute
sa surface par de nombreux plis longitudinaux peu saillants et
très réguliers, plus espacés au milieu, traversés par des plis trans-
versaux (stries d’accroissement) légèrement recourbés à l’endroit
du sillon dorsal, qu’ils traversent en y formant un angle dont le
sommet est en regard de celui de la coquille. Tours de spire se
recouvrant presque complètement, ce qui n’empêche pas la bouche
d’être presque aussi haute que large. La longueur de la coquille
étant de 25 millimètres, la largeur de la bouche est de 20, et sa
hauteur d’environ 18. Cette jolie espèce diffère de B. clathra-
tus , d’Orbigny, par sa bande carénale qui est ici en creux et dé-
pourvue des trois sillons élevés indiqués à cet endroit sur l’espèce
que nous venons de citer. Celui du milieu manque complètement.
Soc, géoL, 2e série, tome Yllï 2-5
SÉANCE Î)C tï Av» IL 1851.
et ceux des cotés sont remplacés par des sillons réels que bordent
deux plis saillants très ténus; enfin elle s’en sépare encore par la
hauteur de l’orifice buccal. Elle se distingue aussi de B. JVi-
tryahus , Koninck, dont elle se rapproche encore par l’étroitesse
de son ombilic et par sa bande carénale, qui est en relief dans
cette espèce de Belgique, et en creux sur celle de Bretagne.
Localités : Gahard, fzé.
■ Bellerophon Delnnouei , Marie Rouault.
Coquille très comprimée et très ombiliquée ; carène tranchante
comprimée latéralement ; tours de spire embrassant la moitié de
celui qu’ils recouvrent ; surface couverte par des stries d'accroisse-
ment arquées, nombreuses et très marquées; bouche trianguii-
forme, à sommét très élevé, marquée d’un pli rentrant à sa base.
Cette espèce peut atteindre 30 millimètres de diamètre sur 6 à 7
d’épaisseur. Elle se distingue de B. carenatus par son ombilic
moins ouvert, et surtout par les stries nombreuses et très marquées
qui la recouvrent, et par sa bouche trianguliforme et non en cœur.
Enfin elle diffère aussi de B. acutiis , Murch., par sa moins grande
épaisseur, par ses stries et par la compression latérale de sa carène.
Localités: Gahard, îzé.
PTÉROPODES.
Genre Conularia, Miller.
Conularin Gervillei d’Arch. et Yern.
Localité : Gahard.
Conularin Nobloti , Marie Rouault.
Le seul échantillon que nous ayons rencontré de cette espèce ne
présente pas, dans son entier, assez de caractères pour que nous
puissions en indiquer la forme, mais ceux qui nous sont offerts ici
sont suffisants pour nous faire voir que, dans ses détails, cette espèce
est différente de toutes celles déjà connues. Nous remarquons que,
pour la forme, cette espèce pourrait se rapprocher de la précédente,
mais elle en diffère par ses stries transversales qui, ici, sont sim-
ples, ondulées dans leur direction, se relevant à l’approche des
angles de la coquille, dont le sommet est rentrant, et que, là, les
extrémités de ces stries viennent plonger en se surbaissant. Ces
stries, qui partent des si lions formés par la dépression que pré-
SÈAISCË DU 21 AVRIL 1851.
587
sêrïtèiié lés angles de la coquille, sè relèvent en s’étendant sur les
lobes qui sont ainsi formés par cette dépression, s’abaissent en s'é-
tendant sur le plan qu’elles traversent, et se relèvent avant d’en
avoir atteint le milieu; puis, en continuant leur direction de la
même manière que nous venons de le dire, mais en sens inverse,
elles vont gagner l’angle opposé. Ces stries ainsi ondulées, très ré-
gulières, plus fines et plus espacées que dans l’espèce qui précède,
portent sur le versant de leur relief un sillon d’une ténuité extrême,
et des plis, également très fins, sont perpendiculaires au plan des
premiers et parallèles alors à celui de la coquille.
Localité : Gahard.
MOLLUSQUES. — ACEPHALES.
Genre Cypricardia, Lamarck.
Cypricardia Cordieri , Marie Rouault ; P kolas Cordiez i} id.
Cette jolie espèce, que le défaut de termes de comparaison nous
avait fait confondre avec les Pbolades, par les rapports qu’elle pré-
sente dans sa forme avec certaines espèces de ce genre, nous semble
plutôt devoir rentrer dans celui où nous la plaçons aujourd’hui.
Elle nous présente les caractères suivants : Coquille très inéqui-
valve et très allongée, étroite et peu épaisse. Les crochets sont peu
apparents. Du sommet de ces derniers partent deux renflements
peu marqués, se dirigeant presque en sens inverse pour gagner le
bord inférieur de la coquille à ses deux extrémités. Celui qui se
dirige en avant est très oblique ; l’autre est presque perpendiculaire.
Tout l’espace compris entre ces deux arêtes est occupé par des
stries rayonnantes fines, nombreuses et très serrées, croisées par
d’autres plus fines encore , et qui ne s’aperçoivent plus sur les
autres parties de la coquille, qui sont couvertes seulement de plis
rayonnants plus distants et plus marqués que sur le milieu.
Cette espèce rappelle seulement par sa forme générale Cypri -
cardia (soten) vetusta , Goldf., mais elle en diffère notablement
par son ornementation.
Longueur, 30 millimètres ; hauteur, 10 ; épaisseur, fi à 7.
Localité : Gahard.
Genre Cardium, Linné.
Cardium Hugardi ,, Marie Rouault.
Coquille très inéquilatérale, tiianguliforme, et dont le sommet
très élevé est aux crochets. Elle est très épaisse vers le milieu ,
»£ à Di. 21 a vi.it 1851.
588
carénée pat un pli très anguleux et oblique qui fait renti er toute la
partie antérieure, et donne à cet endroit de la coquille l’apparence
d’une yaste et profonde échancrure au milieu de laquelle se trouve
le bord dorsal tout entier. Les crochets, peu marqués, sont légère-
ment recourbés en avant, et toute l’étendue de la coquille est cou-
verte de stries d’accroissement nombreuses et très marquées. Le
bord postérieur est légèrement comprimé et à peu près circulaire
dans toute son étendue , depuis la partie postérieure jusqu’à la
partie antérieure, où là il plonge à l’intérieur de la coquille. Cette
espèce présente quelques rapports avec C. dimidiatum , Gold. ;
mais elle en diffère par sa forme moins oblique et par le plonge-
ment qu’exécute son bord dorsal qui, dans l’espèce que nous ve-
nons de citer , ne se montre que simplement aplatie ; enfin elle
s’en distingue encore par sa plus grande largeur.
Longueur de la coquille prise à l’endroit le plus large près de
la partie inférieure du bord: 17 millimètres de hauteur, du bord
ventral au sommet des crochets, 25 millimètres.
Localité : Gahard,
Cmclium Picteti , Marie Rouan It.
Coquille plus large encore que la précédente , à crochets plu»
développés et aussi plus recourbés en avant ; la dépression que
présente le bord dorsal est moins marquée, et la coquille, moins
épaisse, est couverte de stries très fines et très nombreuses; la
forme circulaire de son bord ventral est allongée de manière à
augmenter sa largeur, qui n’est que de 15 millimètres, tandis que
la hauteur est de 25.
Localité : Gahard,
Genre Nucula, Lamarck.
Nue u la ? Vù'letina , Marie Rouault
Grande espèce très inéquilatérale et très épaisse, ce qui lui donne
une forme ovoïde allongée; ses crochets, peu prononcés, sont
comme comprimés et rejetés en arrière. Toute la surface de la
coquille est couverte de stries d’accroissement assez marquées, et
pas une dépression ne s’y manifeste ; le bord ventral est presque
droit et se recourbe brusquement aux deux extrémités pour gagner
la partie supérieure de la coquille.
Longueur, 30 millimètres; hauteur, 17 ; épaisseur, 18,
Localité : Izé,
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
mù
Nucula Gahardiana , Marie Rouault.
Coquille oblique , presque trianguliforme , un peu allongée en
avant, anguleuse à l’extrémité antérieure et arrondie postérieure-
ment, bord ventral circulaire. La coquille est très enflée, et les
crochets sont courts, volumineux et crochus. Les valves sont cou-
vertes de stries d’accroissement nombreuses et très marquées ; elles
présentent en outre, dirigée en avant, une dépression oblique,
d’abord peu sensible sur le milieu de la coquille, mais qui le de-
vient de plus en plus en s’approchant du bord, où elle est très pro-
fonde.
Cette espèce présente quelques rapports avec N. speciosa , mais
elle en diffère par sa forme moins allongée et par ses crochets, qui
sont moins enflés sous le rapport de la forme en général. Elle se-
rait peut-être plus voisine de N. abbreviata , Gold., mais elle s’en
sépare par un nombre moins grand de stries d’accroissement et
par la dépression que notre espèce présente en avant, et qui, obli-
quement dirigée, semble partir des crochets pour venir gagner le
bord inférieur. Ce dernier caractère est aussi offert par N. pigma,
mais d’une manière moins prononcée qu’ici.
Longueur, 13 millimètres; largeur, 9; épaisseur, 7 à 8.
Localités : Gahard, Izé.
Nucula Rauliniafia , Marie Renault,
Coquille très transverse, longue de 25 millimètres, large de 10
environ, peu épaisse ; crochets peu saillants, placés presque au mi-
lieu ; extrémité antérieure des valves très anguleuse, celle posté-
rieure légèrement arrondie. Du crochet et en avant part une
côte très saillante qui vient rejoindre l’extrémité antérieure du
bord. Elle est très comprimée en avant des crochets et déprimée en
arrière. Toute la surface de cette curieuse espèce est couverte par
plus de 50 lignes concentriques très profondes. Sa forme très allon-
gée et presque équilatérale, jointe à la réunion des autres caractè-
res qu’elle présente, ne permet guère d’établir ici de comparaison»
Localité : Gahard.
Genre Mytilüs, Linné
Mytilus Rathicri , Marie Rouault,
Coquille oblique, très inéquilatérale et très large en avant. Cro-
chets reportés en arrière , longs et crochus : bord déprimé en ar-
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851.
oVO
rière , circulaire à la partie ventrale et en avant , droit et rentrant
sous les crochets. Valves très enflées, mais d’une manière oblique,
du sommet des crochets à la base du bord antérieur ; couverte sur
toute sa surface de stries concentriques distantes et ondulées. Cette,
espèce rappelle, pour la forme, M. cuspidus , Münster, mais en dif-
fère par ses stries ondulées, et de M amygdalium , Phill. ,de laquelle
elle se distingue par le plus grand développement de ses crochets
et par la forme de ses stries concentriques qui , dans notre espèce ,
sont moins nombreuses et plus marquées.
Longueur de la coquille, 15 à 16 millim.; largeur en avant, 9 à
10 millim.; épaisseur, 8 millim
Localités : Gahard, Izé.
Genre Avicula, Klein.
Avicula Albertiana , Marie Rouault.
Très jolie petite espèce. Le seul échantillon que nous en possé-
dons ne présente que 7 millimètres de long sur 5 de large. Coquille
inéquivalve très inéquilatérale. Charnière droite n’atteignant pas
en avant la limite du bord antérieur. Valve droite très enflée, dé-
primée d’une man ière sensible vers le milieu de sa partie inférieure,
ce qui détermine à cet endroit un retrait au bord ventral ; elle est
très comprimée à la partie supérieure des deux côtés du crochet.
Crochet large , très développé et très crochu. Toute la surface de
cette petite espèce est couverte par des stries d’accroissement très
marquées dont le nombre s’élève à plus de trente.
Cette coquille se rapproche un peu de A. rugosa , Münster, par
la disposition de ses stries, mais elle en diffère notablement par sa
forme plus large et moins oblique.
Nous dédions cette jolie coquille à notre jeune et studieux ami
M. Albert-GeofFroy-Saint-Hilaire.
Localité : Izé.
Avicula Gastaldiana , Marie Rouault.
Coquille obiongue, très inéquilatérale, plus large en avant, sen-
siblement déprimée au bord ventral vers le côté postérieur. La
valve droite est enflée, peu déprimée , même à l’endroit du bord
dorsal ; crochet peu saillant. Cette valve est couverte de stries
fines, séparées de distance en distance par d’autres très profondes.
Cette espèce diffère de l’espèce précédente par ce dernier caractère,
par sa forme plus allongée, et, toute proportion gardée, par un plus
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851. *9l
grand développement en largeur dans sa partie antérieure , enfin
par ses dépressions qui sont moins sensibles.
Longueur, 20 millim.; la plus grande largeur, 12
Localité : fzé.
A vieillit Duciosiana , Marie Rouauit.
Coquille inéquilatérale, très large, plate , bord dorsal aussi long
que la coquille. Crochet peu saillant et dominant la charnière. Val-
ves couvertes de stries rayonnantes et concentriques peu mar-
quées ; bord circulaire à la partie ventrale, déprimé postérieure-
ment.
Cette espèce ne diffère d’A. textura , Phili. , que par son crochet
qui, ici, dépasse la charnière d’une manière assez marquée, et par
une dépression assez prononcée au côté postérieur près de ee dernier.
Localité : Gahard.
Aviculn Lejeatiiana , Marie Rouauit.
Cette coquille est bien certainement l’une des plus curieuses du
genre par sa forme parfaitement circulaire par ses stries d’accrois-
sement très irrégulières , soit dans la distance qui les sépare , dis-
tance qui quelquefois est très marquée, soit dans la direction que
ces stries suivent et cjui varie beaucoup sans toutefois cesser d’ètre
concentrique.
Il résulte de cette disposition que la surface de cette coquille a
un aspect vraiment chiffonné. Ce qui ajoute encore à la singula-
rité de cette espèce , c’est la symétrie des caractères que nous pré-
sente son oreillette antérieure. Cette partie de la coquille est courte,
se terminant en avant par un bord rentrant ; elle est marquée dans
toute sa longueur par un sillon assez profond qui longe le bord dor-
sal et d’où naissent des stries arquées très régulières, lesquelles
sont parallèles au bord antérieur. Ces stries vont s’unir à celle si
peu symétrique qui couvre la coquille. Le crochet est peu marqué
et ne dépasse pas le bord dorsal.
Cette espèce, qui ne peut être comparée à aucune de ses congé-
nères, nous présente en longueur comme en largeur 15 millim .
Nous en faisons hommage à notre ami et dévoué compatriote
M. G. Lejean.
Localité : Gahard.
«ÉANCE DU 21 AVRIL 1851 .
$2
Genre Pterinea.
Pterinea Osiasia , Marie Renault.
Grande coquille très oblique et très développée en avant , peu
épaisse , marquée de nombreuses stries concentriques assez dis-
tantes et plus larges que profondes.
Cette espèce est représentée dans notre collection par un échan-
tillon trop incomplet pour nous permettre d’en faire une étude
plus détaillée; il suffit néanmoins pour nous faire reconnaître que
cette coquille est voisine, quant à la forme, de P . Pentricola , Goidf.,
dont elle ne diffère que par ses plis d’accroissement qui sont moins
nombreux et plus distants.
Sa longueur ne paraît pas être inférieure à 50 millim. , et sa
largeur à 35.
Localité : Gahard.
BRACH1ÜPODES.
Genre Productus, Sow,
Productus Twamlyii , Dav*
Le seul échantillon que nous ayons rencontré de cette espèce s
quoique incomplet , présente si bien les caractères qui ont servi à
la caractériser, qu’il n’y a aucun doute à émettre ici sur l’identi-
fication.
Localité : Gahard
Genre Chonetes, Fischer.
Chonetes Pechoti , Marie Rouault.
Indiquée à Gahard, se trouve également à Izé. Cette espèce ,
dont les plis sont très irrégulièrement dichotomés , n’en présente
que U 2 sur les individus les plus adultes. La valve dorsale de cette
coquille est très convexe , et celle dorsale répond à celle-ci par sa
concavité.
Longueur, 12 millim. au plus ; largeur, 12 ; convexité, 6.
Localités : Gahard, Izé.
Chonetes Boulengeyi , Marie Rouault.
Cette espèce , aussi indiquée par nous à Gahard , est associée à
celle ci-dessus à Izé. Elle est plus grande que la précédente, et, à
égalité de taille , elle s’en distingue d’abord par une plus grande
SÉANCE DO 21 AVRIL 1851, 393
largeur et ensuite par un nombre plus considérable de stries rayon-
nantes ; la coquille est aussi moins épaisse et moins convexe. Ces
plis se divisent avec une espèce de régularité sur les individus les
plus adultes. Ce caractère se manifeste par stations différentes.
Présente en longueur 11 millimètres, et 16 en largeur; la con-
vexité de la coquille n’en atteint pas 5 ; enfin le nombre des plis du
bord est de près de 60.
Localités ; Gahard, Izé.
Genre Leptæna, Dalmann,
L. M urchisoni , d’Arch. et Yern. ; L. Fischeri } Yern
L, Du te r tri Yern., et L. Gaultier /, Marie Rouault,
Indiqué comme se trouvant à Gahard, existe également à Izé.
L .? Leblancii Marie Rouault.
Cette espèce , dont la forme est très transverse et très convexe ,
rappelle sous ce rapport le X. lapis ( Strophomena lapis) : Brom. Elle
s’en distingue par sa forme encore plus globuleuse et par un
système de points renfoncés qui couvrent une grande partie de sa
surface dans le voisinage du bord de la coquille. Ce caractère pourra
peut-être aider plus tard à faire rentrer cette espèce dans le genre
Pro duc tus.
Nous dédions cette curieuse espèce à notre ami M. Aug. Le
Blanc , comme une preuve de vive sympathie.
Localité : Izé.
Leptæna clathrata , Marie Rouault.
Très petite espèce, de forme presque aplatie , couverte de 26 à
28 plis rayonnants, résultant du dédoublement des premiers exis-
tants. Ces plis sont croisés par 6 lignes d’accroissement en relief et
placés à des distances à peu près égales , ce qui constitue sur cette
coquille une réticulation des plus parfaites.
Longueur de la coquille, 8 millim.; largeur, 11 ; relief, moins
de 2 millim.
Localité % Gahard.
L . Lwydi , Marie Rouault
Cette espèce est bien l’une des plus curieuses du genre par l’heu-
reuse disposition des caractères qu’elle nous présente.
SÉANCE MJ 2 1 AVRIL 1851.
391
C’est une coquille de moyenne taille, un peu plus large que lon-
gue, à bord parfaitement circulaire en avant. Elle est plane et cou-
verte d’environ 36 à 38 plis rayonnants très anguleux, et qui sont
(vus à loupe) couronnés dans toute leur longueur par une ligne de
petits tubercules très ténus et disposés de la manière la plus régu-
lière. L’espace qui sépare ces espèces d’arêtes , vives et crénelées ,
est comparativement très large et d’une forme parfaitement arquée
en creux. Ces gouttières, de forme cylindrique, qui partent du
sommet de la coquille en s’élargissant progressivement pour venir
gagner le bord, sont traversées dans toute leur longueur par des
stries excessivement fines, profondes et très rapprochées, et les es-
paces qui les séparent sont tellement ténus, qu’entre les mamelons
qui sont au sommet des arêtes , bien que ces mamelons soient très
près les uns des autres , 6 à 7 de ces stries trans verses y sont com-
prises. Tous ces caractères s’observent parfaitement sur des indivi-
dus dont la longueur ne dépasse pas 3 millimètres, et sur les arêtes
rayonnantes desquels on compte jusqu’à 18 petits mamelons.
Nos plus grands échantillons nous présentent en longueur
15 millim. sur 20 de large.
Localité : Gahard.
L . Lonsdcilêi , Marie Rouault.
Cette espèce , rie forme légèrement aplatie, présente sa valve
ventrale convexe et sa valve dorsale concave ; mais cette concavité
n’existe que le long du bord qui se rabat sensiblement surtout son
pourtour. La largeur de cette coquille est très grande par rapporta
son étendue en longueur. Sa charnière se termine presque à angle
droit à ses extrémités ; elle est couverte de stries rayonnantes assez
marquées et abondantes. Le plus grand exemplaire que nous pos-
sédions de cette espèce nous présente 16 millimètres de longueur
sur 2à de large. Elle se rapproche de L. funiculata, Dav., par les ca-
ractères de sa surface, mais en diffère par un moins grand dévelop-
pement en longueur, et par les angles de sa charnière, dont laforme
est moins anguleuse. Elle présente bien aussi quelques points de
ressemblance avec alternatn , Yern., avec lequel on ne peut la
confondre à cause de sa taille plus petite et sa largeur relative plus
grande.
Cette coquille, dont nous ne pouvons pas préciser aujourd’hui le
gisement, provient d’une roche calcaire recueillie non loin de la
route de Rennes à Fougère « et au nord de Saint-Aubin du Cor-
SJ&ÀNCK DU 21 AVRIL 1851. 395
mier. Elle se trouve associée à Phacops (Cryphæus) Michelini , Spi~
r/fer Rousseau , Terebratüla J'VUspnii et Chonetes Pechoti.
Genre Orthis, Dalmann.
Les espèces O. striatula , Scldoth., et O. Voisini , Marie Rouault,
indiquées à Gahard, se trouvent aussi à Izé.
Orthis orbicularis , Yern. et d’Arch., à Gahard.
Genre Spirifer, Sow.
■V. he ter oc U tus , Defr. ; A. Bouc hardi , Murch., et Y Rousseau ,
Marie Rouault (Y. subspeciosa , Yern.), indiqués à Gahard, existent
également à Izé
Spirifer Gree/ii , Marie Rouault.
Petite espèce très transverse et très épaisse, dont l aréa, assez
développé, est ramené sur lui-même par la courbure que présente
le crochet à la valve dorsale Cette valve est marquée d’un sinus
très profond et dont la largeur devient très grande vers le bord.
Le crochet est, comme nous l’avons dit, très recourbé, ce qui dorme
à la coquille une forme parfaitement arrondie. De chaque côté du
sinus on compte huit plis anguleux nettement séparés. La valve
ventrale, de forme également ronde, reproduit à sa surface et d’une
manière aussi marquée, mais en sens inverse, les caractères que
nous venons d’indiquer sur celle dorsale.
Sur aucun des échantillons, que nous possédons en assez grand
nombre, de cette espèce, mais dont la conservation laisse à désirer,
nous n’apercevons de stries d’accroissement. Cette espèce a cela de
commun avec S. Rousseau , qui n’en présente que chez les individus
adultes, où ces stries sont peu distinctes, si ce n’est près du bord, et
au nombre de deux ou trois sur chaque valve, où elles sont très mar-
quées ; mais elle se sépare de ce dernier par sa forme plus large et plus
ronde, par le nombre de ses plis, qui est moindre : huit de chaque
côté du sinus au heu de dix, que présente l’autre espèce; enfin par
le crochet de sa valve dorsale, qui est moins développé.
Longueur, 12 à 14 millimètres ; largeur, 34; épaisseur, 11.
Localité : Izé.
S. Homaliusi , M%arie Rouault.
Cette coquille est remarquable par sa forme très trausverse et
par les extrémités de sa charnière, qui sont très anguleuses: elle
306
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851,
est épaisse vers le milieu et s’amincit d’une manière très marquée
dans le sens de la largeur. Sa valve dorsale est marquée d’un sinus
large et profond, au milieu duquel se trouve un pli saillant, et, de
chaque côté, on en compte 10 bien distincts. La valve dorsale a
le crochet peu développé, très recourbé, et qui vient se joindre à
celui que forme la valve ventrale, de sorte que l’aréa est invisible.
La valve ventrale répond à celle dorsale, tant par son relief que sous
le rapport des autres caractères, et toutes deux sont couvertes
par un nombre très grand de stries imbriquées, dont la direction
en zigzag est déterminée par l’élévation et la profondeur des plis
et des sillons qu’elles traversent en décrivant leurs circonvolutions.
Par ce caractère elle se rapproche de S. Rojasi , Yern., mais par
tous les autres quelle présente, et surtout par sa forme très trans-
verse, elle s’en écarte beaucoup. Sous ce dernier rapport, celui de
la largeur, elle peut être comparée à S, Strangwaysi , du même
auteur, mais ce caractère est le seul qui permette de les comparer.
Longueur, environ 20 millimètres; largeur, U0 ; épaisseur, 18-
Localité : Gabard.
Spirifer Baptistai , Marie Rouault
Cette espèce se distingue par sa forme arrondie et sa faible lar-
geur. Elle présente, sur sa valve dorsale, qui est très bombée, un
sinus très profond et presque lisse des deux côtés. Le crochet est
très recourbé. Nous ne connaissons pas l’autre valve de cette co-
quille , qui nous présente les plus grands rapports avec S. trisul -
catus , Koninck. Seulement elle en diffère par l’absence des deux
sillons parallèles au sinus qui se voient sur l’espèce carbonifère de
Belgique.
Localité ; Izé,
Spirifer fValferdini , Marie Rouault.
Voisine de Y heteroclitus , cette espèce s’en distingue par une
plus grande largeur, par son aréa beaucoup plus développé en lar-
geur et dont la forme est arquée, enfin par le sinus qui, très pro-
fond, relève à angle droit les deux valves pour une valeur d’un
tiers environ de la longueur de celle ventrale. 31 en diffère encore
par un nombre plus grand de plis rayonnants : ici on en compte
sept de chaque côté du sinus.
Longueur de la coquille, prise du sommet du crochet, 15 milli-
mètres; largeur, 18,
Localité : Gabard
SÉANCE DU 21 AVRIL 1851 .
2y7
Genre Terebrâtula, Lwyd.
T. reticuluris , Wahl.; T. Wahlember'gii , Goldh, indiqués â
Gahard, se trouvent aussi à Izé.
T. JVilsonii , d’Orb. — Gahard, Izé.
T, aspèrci? — ■ Izé.
71 elo/igata, Conrad. — - Izé. j-
7. Bouchardiy Dav. — Izé.
T. Conradi , Marie Rouault.
Cette espèce de forme presque circulaire, un peu allongée, sen-
siblement aplatie, et dont le crochet de la valve dorsale est peu
saillant, le sinus large et profond n’occupant que les deux tiers de
la longueur de la coquille marquée de trois plis très saillants , et
dont celui du milieu est le plus en relief. La valve ventrale nous
est inconnue.
Longueur, 23 millimètres; largeur, 20.
Localité : Gahard
Terebratula Blctckî , Marie Rouault
Cette belle espèce se fait remarquer par sa forme très allongée
et par les caractères tranchés qu’elle nous présente. C’est une co-
quille longue, mais plus en apparence qu’en réalité. Elle est marquée
d’un sinus d’une profondeur extrême, qui longe la valve dor-
sale depuis le sommet du crochet jusqu’au bord ; puis , les deux
côtés de la coquille , ramenés l’un vers l’autre en dessus , donnent
au dos de cette espèce une forme bicarénée très caractéristique
A l’endroit du sinus, la longueur des valves s’étend bien au delà
du bord qui les limite de chaque côté , et les lignes d’accroisse-
ment, qui seules, à l’instar de ce qui s’observe sur T. conccntricctj
couvrent toutes les surfaces, subissent l’influence de cette disposi-
tion : c’est-à-dire que ces lignes, très voisines à leur point de
départ près de la charnière , s’écartent peu à peu les unes
des autres en décrivant une courbe de plus en plus ouverte ; puis
revenant sensiblement sur elles-mêmes à l’endroit où elles traver-
sent l’une des carènes que nous avons citées, s’écartent de nouveau
en quittant cette carène, jusqu’à ce qu’elles soient arrivées au
milieu du sinus qu’elles parcourent alors. Et delà, revenant peu
à peu sur elles-mêmes, elles reprennent, mais en sens inverse , la
marche qu’elles ont suivie pour arriver à ce point.
Cette espèce . par la disposition de ses stries concentriques , par
éÉÀNCfe DU VA AVB1L 185 L
È9È
son crochet, et tous ses caractères du reste, devra rentrer dans le
groupe formé par T. concentnca , etc., et que M. Aie. d’Orbigny a
désigné sous le nom de spirigera.
Cette espèce a de très grandes dimensions : nous avons des
échantillons dont la longueur n’était pas inférieure à 40 millimè-
tres, et le développement de la largeur ne nous semble devoir
rien céder à cette proportion.
Localité : Izé.
Genre Lingula, Bruguière.
Lingula Murchisoni , Marie Rouault.
Petite espèce dont la longueur est de 10 millimètres et la lar-
geur de 6. Son épaisseur, assez marquée près de la charnière ,
s’amincit d’une manière un peu brusque de chaque côté et par une
pente qui devient de plus en plus douce à mesure qu’on s’approche
davantage du bord antérieur ; mais cet amincissement progressif
ne détruit pas la forme très arrondie de la coquille. Elle est un
peu plus large en avant, et ses extrémités se terminent d’une ma-
nière circulaire ; toute sa surface est couverte par de nombreuses
stries d’accroissement, dont la courbe répond à celle du bord.
Cette espèce présente quelques rapports avec L. atténua ta , Mur-
éhison, mais elle s’en distingue par une moins grande différence de
largeur entre ses parties extrêmes. Elle ne peut pas non plus être
confondue avec L. minima , du même auteur, à cause de la formé
très carrée que présente celle-ci à l’endroit de son bord antérieur.
Localité : Galiard.
Genre Orbiccla, Lamarek.
Orbicula Avriliana , Marie Rouault.
Très petite espèce, légèrement ovale, ne présentant en longueur
que 8 millimètres, et 7 en largeur ; son épaisseur est de 3 milli-
mètres environ ; sa surface est parfaitement lisse sur les deux valves,
et le sommet de sa valve dorsale, de forme conoide, est très sur-
baissé et n’est éloigné de la charnière que de 1 /5e au plus de la lon-
gueur totale de la coquille.
Localité : Galiard.
Orbicula Alexandrin a , Marie Rouault.
Aussi petite que la précédente, cette espèce s’en distingue comme
dé toutes celles connues par les caractères suivants : Forme très oi -
SÉANCE DU 5 MAI 1851.
à#
Lieuiaiie; présentant 8 millimètres en largeur comme eu lon-
gueur. Valve dorsale conique., dont le sommet, sensiblement au
milieu, est élevé déplus de 4 millimètres au-dessus du bord de la
coquille et marqué d’une très petite ouverture vers le milieu.
Nous dédions cette intéressante espèce à notre ami et studieux
collègue M. Alexandre Rouault.
Localité : Gahard.
Séance du 5 mai 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séahcé,
le président proclame membres de ia Société :
M. Emilien Renou, ancien élève des Ecoles polytechnique et
des mines, rue Saint-Bié, à Vendôme (Loir-et-Cher), présenté
par MM. Elie de Beaumont et Ch. Deville.
Le Président annonce ensuite une présentation.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa-
vants , avril 1851.
De la part de M. de Boucheporn, Cartes géologiques des
départements de la Corrèze et du Tant , chacune en 4 feuilles
grand aigle. Paris, 1848.
Explication de la carte de la Corrèze , in-8, lxi et
102 p.; — LL du Tarn , lxi et 114 p. Paris, 1848; imprimerie
nationale.
De la part de M. A. Buvignier, Carte géologique du départe-
ment de la Marne , par MM. Buvignier et Sauvage; 6 feuilles
grand-aigle. Paris, 1850.
De la part de M. Michelin, Rapport au nom de la Commission
spéciale instituée par M. le ministre de T instruction publique ,
pour étudier les questions qui se rattachent a T administration et
SÉANCE DU 5 MAI 1851 .
400
a U enseignement du Muséum d'histoire naturelle , parM. Corne ;
in-4, autographe, 8 4 p. Paris, 1851.
De la part de M. le docteur Tessier-Rolland, Histoire des
eaux de Nîmes et de V aqueduc romain du Gard ; t. III ,
Ire part., in-8, 396 p., 1 pl. Nîmes, 1851; chez Ballivet et
Fabre.
De la part de M. E. Thirria, Mémoire sur les similitudes
qui existent entre les minerais de jer en grains de la Franche-
Comté et ceux du Berry , et sur les particularités qui peuvent
conduire à expliquer le mode de formation des gîtes de ces
minerais (exti\ des dnn. des min., t. XIX, 1851)-, in-8, p. 49
à 88.
Saint-Gervais-les - Bains et le Mont-Blanc ; aperçus topo-
graphiques, pittoresques et scientifiques; in-18, 86 p. Paris,
1851 ; chez Camus.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1851, 1er sem., t. XXXII, nos 16 et 17.
Annales des mines , 4e sér., t. XIX, lre livraison de 1851.
U Institut, 1851, nos 903 et 904.
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée; n° 31, 4e année,
mars 1851.
Annales scientifiques , littéraires et industrielles de V Au-
vergne, t. XXIII, nov. et déc. 1850.
Séances et travaux de V Académie de Reims , année 1850-51,
n° 1, trim. d’oct. 1850.
The Athenœum , 1851, nos 1226 et 1227.
The q u arterly journal of the geological Society of London ,
n° 25, vol. VII, févr. 1851.
N eues Jahrhuch , etc. (Nouvel annuaire de minéralogie, de
géognosie et de géologie, de MM. de Leonhard et Broun),
année 1851, 2e cah.
M. Michelin fait hommage d’un exemplaire du rapport auto-
graphié, fait par la Commission chargée d’étudier la réorgani-
sation du Muséum d’histoire naturelle.
M. Deshayes remet, de la part de M. Buvignier, la note sui-
vante :
Je disais, dans ma note sur îe genre Céromye(p. 126), que la
SÉANCE 3>U 5 MAI 1861 * 401
crainte de briser un échantillon qui ne m'appartenait pas m’avait
empêché de vérifier si, comme je le supposais, la cannelure du
bord cardinal était formée par la juxta-position de la côte oblique
interne.
N’éprouvant pas la même crainte pour les échantillons de ma
collection, j’ai pu, au moyen d’un individu appartenant, je crois,
à l’espèce signalée par M. Deshayes dans les terrains oxfordiens
des Ardennes, et que, pour cette raison, je nommerai Ceromya
Deshayesia , compléter la note lue à la séance du 16 décembre
dernier.
La cannelure du bord cardinal de la valve droite est formée non
pas précisément par la juxtaposition de la grosse côte oblique in-
terne, mais par celle d’une petite côte supplémentaire portée sur
la côte principale, et se terminant au point où celle-ci s’éloigne
du bord cardinal. Cette cannelure correspond à la partie la plus
profonde du sillon externe de la valve gauche, près du crochet.
Au delà, le bord de la valve droite est simple, et le sillon de la
valve gauche, tout à fait superficiel, ne sert plus qu’au jeu de
l’autre valve.
11 résulte de là que le ligament des Cérornyes n’est pas plus
allongé que ceux des Pholadomyes, des Panopées et des Glyci-
mères, que M. Deshayes range avec elles dans une même famille.
Sur l’échantillon de M. Terquern (pl. 1, fig. 10), la cannelure
de la valve droite paraissait prolongée jusqu’à l’extrémité du bord
cardinal. En étudiant plus attentivement cet échantillon depuis
que j’ai réussi à dégager le mien, j’ai reconnu que lorsqu’on l’avait
scié, la partie intrante de la valve gauche avait été coupée et était
restée adhérente au bord de l’autre valve, ce qui produisait tout à
fait l’apparence du prolongement de la cannelure ligamentaire.
Quant à la charnière de la valve gauche du C. Deshayesia , elle
ne diffère pas de celle du C . strialo-punctata. Seulement la partie
externe du bord cardinal, celle qui pénètre dans l’autre valve, se
relève un peu plus, de manière à former une gouttière un peu plus
prononcée. Dans cette gouttière, destinée au jeu de l’autre valve,
on remarque près des crochets et en arrière de l’expansion den-
tiforme, qui est en partie brisée, le sillon destiné à l’insertion du
ligament.
M. de Bouclieporn fait la communication suivante :
j’ai l’honneur de présenter à la Société deux cartes géologiques
départementales , celles du Tarn et de la Corrèze , exécutées par
Soc. geoL , 2e série , tome VI IL 26
SÉANCE DU 5 MAI 1851 .
â02
nous il y a une dizaine d’années , mais publiées seulement en 18à9
par l’administration des travaux publics. Depuis lors, un voyage
lointain et les préoccupations d’autres études m’avaient empêché
de déposer encore aux archives de la Société ces petits ouvrages,
qui ne méritent d’y figurer d’ailleurs qu’à titre de renseigne-
ment.
Qu’elle me permette de profiter de cette occasion pour lui faire
part de quelques observations qui me sont suggérées par le rapport
de certains résultats de mon voyage avec de très intéressantes
communications qui lui ont été récemment adressées sur Fâge du
phénomène erratique. MM. Ch. Martins et Gastalcli, d’une part,
et M. Ed. Collomb , de l’autre , ont publié le résultat d’observa-
tions qui tendent à placer le terrain erratique de l’Europe centrale
au-dessus des dernières alluvions à ossements de mammifères tro-
picaux , et par conséquent à faire considérer l’époque de son dé-
pôt comme ayant immédiatement précédé la nôtre. D’un autre
côté, j’ai constaté par mes yeux , en Amérique , des faits qui mon-
trent que le terrain erratique des Etats-Unis, ou ce que dans les
pays à langue anglaise on nomme le drift7 est surmonté par deux
terrains d’époques distinctes, antérieures toutes deux à l’ère ac-
tuelle.
Ces deux faits , rapprochés Fini de l’autre , ont une éloquence
que je ne puis m’empêcher de faire ressortir, parce qu’ils tendent
non seulement à constater, mais à agrandir encore cette sépara-
tion , cet intervalle géologique entre le phénomène erratique d’Eu-
rope et celui des Etats-Unis, dont j’avais prévu l’existence eh 1843,
et que les faits sont venus confirmer depuis avec plus de force que
je n’avais osé l’espérer.
Une raison particulière m’engage à appuyer sur cette observa-
tion^, que nous développerons un peu plus loin; cette raison, la
voici. Depuis la publication de mon ouvrage de géologie générale,
en 1844, je me suis abstenu d’occuper la Société d’aucune com-
munication relative aux questions de théorie ou de classification
qui y ont été fréquemment agitées dans ces dernières années. Atti-
rer sans cesse l’attention vers un même point de vue, parce qu'il
est le nôtre, n’entre guère dans les habitudes de mon esprit; et
cette apologie continuelle de ses propres idées, dont quelques sa-
vants aiment à se donner la facile satisfaction , me paraît peu
digne d’un ami sincère et désintéressé de la vérité. J’ai toujours
estimé d’ailleurs qu’une idée systématique nouvelle, jetée dans la
publicité avec les développements nécessaires, devait faire son
chemin par elle-même, et attendre tout du temps, de l’observa-
SÉANCE BU 5 MAI 1851. â08
lion, et de ce concours de toutes les opinions impartiales qui finit
par constituer la vérité ou condamner F erreur.
Mais il arrive un point où le silence semble une désertion de
ses propres principes , un aveu de leur insuffisance , et où Ton croit
devoir à la science et à soi-même de venir au moins une fois té-
moigner que, loin d’y renoncer, loin de croire à leur affaiblisse-
ment, on leur voit puiser, au contraire, dans le progrès des obser-
vations, une force de plus en plus grande. Je faisais cette réflexion
en prenant dernièrement connaissance du deuxième tome d’un
ouvrage qui, publié sous les auspices de. la Société géologique,
pourrait tirer de cette circonstance, jointe au mérite de son auteur,
une sorte d’importance particulière , et rester aux yeux de quel-
ques personnes comme une mesure exacte de l’état actuel de la
science et des esprits, s’il pouvait être donné à l’opinion d’un seul
suivant de représenter plus que la valeur d’une voix isolée , dans
des questions qui ne reconnaissent, en définitive, d’autre juge que
l’opinion générale. Quoi qu’il en soit, à la page Zffil du tome II
de V Histoire des progrès de la géologie , par M. le vicomte d’Ar-
cbiac , je viens de me voir péremptoirement et irrévocablement
condamné : à propos des terrains quaternaires et du phénomène
erratique , l’auteur prononce sur l’ensemble de nos opinions géo-
logiques; et ces opinions, pour lesquelles il semblait avoir eu au-
trefois quelque bienveillance, ne lui paraissent plus dignes au-
jourd’hui d’arrêter même l’attention, parce qu’il n’y voit point
implication complète de difficultés fournies par l’ensemble des
observations faites jusqu’aujourd’hui , difficultés dont aucune
autre théorie , suivant l’aveu du savant auteur, n’a pu encore
rendre un compte satisfaisant. Cette sorte d’arrêt est rendu contre
nous sans autre discussion , sans motif réellement saisissable auquel
une réponse puisse s’attacher, ce qui ne m’a point surpris, du
reste , car c’est contre cette seule arme des vagues et insaisissables
objections que notre système de géologie a eu à combattre depuis
six ans. JN’y opposer jamais que le silence, ce serait paraître accep-
; ter peut-être cette sorte de jugement négatif, et cependant nous
ne l’acceptons aucunement ; c’est ce qu’en attendant de nouvelles
publications nous avons tenu à déclarer au moins une fois.
Je ne suis point venu, cependant, faire à cette occasion une apo-
logie de mon système géologique; je ne suis venu présenter que
quelques faits et quelques observations sur cet intéressant sujet du
phénomène erratique et de sa place dans le classement des for-
: mations; mais qu’il me soit permis de faire remarquer en passant
I au savant auteur de X Histoire des progrès de la géologie que' mon
llOli sêaKcê îjü 5 maî 1851,
livre est écrit en 1843> et qu’il serait juste ? charitable même, de
juger son auteur , non point précisément sur la lettre de cette
époque, mais sur ce qu’il aurait pu écrire en 1850 , en lui concé-
dant ce droit imprescriptible de mettre les détails et l’application
de son système au niveau du progrès des connaissances. Le champ
de l’observation est immense et s’agrandit tous les jours ; un sys-
tème de géologie ne peut tout deviner ni tout prévoir, et c’est
déjà une grande force pour lui, si , parmi les faits nouveaux , il en
avait prévu quelques uns; d’autres lui feront modifier quelques
détails , cela est inévitable ; mais là est aussi son épreuve , car si
les principes sont bons, l’application ne peut que gagner en jus-
tesse par les progrès de nos connaissances et par les changements
qu’ils amènent. C’est ce que j’aurais pu montrer, je le pense , si la
pression d’autres études et d’une publication prochaine sur
d’autres généralités de la science ne m’avait empêché jusqu’ici
de refondre mon premier travail, d’y ajouter les détails et les mo-
difications dont M. d’Archiac paraît regretter l'absence. J’en dirai
ici quelque chose, en ce qui concerne le sujet restreint qui nous
occupe , celui des terrains récents. Mais faisons observer d’abord
qu’il existe dans la science deux sortes d’incertitudes, celle des
faits et celle des théories ; la clarté des uns doit inévitablement
précéder celle des autres, et l’on ne peut juger à fond une théorie
d’après des faits incomplètement connus ou classés d’une manière
incertaine. Or, si je consulte la partie de l’ouvrage de M. d’Àr-
chiac qui embrasse ce qu’il nomme les terrains quaternaires ,
j’y vois régner bien réellement l’incertitude dont je parle; car
il y a là réunis, sous une même dénomination et dans un même
groupe, des terrains certainement d'âges divers , et dont le classe-
ment ne paraît encore assuré ni pour l’auteur lui-même, ni, je
crois, pour aucun géologue. Nous autres, glacialistes en particu-
lier (ceux du moins qui ne se bornent pas à la théorie des causes
actuelles) , ne pourrions , sans manquer à toutes nos convictions,
ranger dans une seule époque le phénomène erratique et ses stries
glaciaires avec les dépôts à ossements de mammifères tropicaux ,
associer les coquilles polaires avec le palmier, l’Ours des cavernes
avec le Lion et l’Eléphant. Il y a là, pour nous, entre ces deux
époques et avec l’époque actuelle , deux lignes de démarcation
bien tranchées , mais dont l’ordre chronologique est difficile néan-
moins à constater et à reconnaître. En 1843, malgré l’incertitude
des observations , et en avouant cette incertitude , nous avons été
forcé de faire un choix ; nous nous sommes arrêté à celui qui de-
vait nous paraître alors le plus probable. A cette époque , nous
SÉANCE DU 5 MAI 1851.
liOb
considérions tous, par exemple, le lehm de l’Alsace comme con-
temporain des alluvions à ossements de mammifères tropicaux;
on n’avait pas encore eu l’idée d’y découvrir des coquilles arcti-
ques , et il devait paraître naturel de placer tout ce que l’on réu-
nissait sous le nom de terrain diluvien ou quaternaire à la suite de
la fusion des grandes glaces, que nous admettions dès lors avec le
petit nombre encore des géologues.
Depuis , les faits se sont compliqués ; on a trouvé des coquilles
arctiques dans des dépôts qui paraissent des plus récents :
M. Ed. Collomb, qui , dès la fin de , voulait bien m’écrire
pour me faire part de son opinion au sujet de cette chronologie ,
MM. Martins et Gastaldi, et d’autres observateurs encore, présen-
tent des faits qui semblent devoir décider la question dans un autre
sens et tendre à faire considérer le phénomène erratique de
l’Europe centrale comme le plus récent de toute la géologie. Eh
bien , verrons-nous là une destruction de nos principes ? 3Non , sans
doute , et tout au contraire. Nous ne demandons qu’une chose ,
c’est que la question se décide , et il s’agira seulement pour nous
d’une simple interversion entre deux époques consécutives, l’une
glaciaire, l’autre tropicale, et destinées toujours à contraster si
fortement par leur voisinage. Mais je dis plus, je dis que j’accep-
terai ce changement avec satisfaction , car il tend à établir d’une
manière infiniment plus tranchée cette distinction des deux pé-
riodes glaciales d’Europe et d’Amérique, à laquelle j’attache la
plus grande importance, parce qu’elle formera, nous le pensons,
l’un des faits les plus puissants sur lesquels puisse s’étayer notre
système , car il nous semble exclure presque inévitablement tous
les autres. Ce n’est point, en effet, comme le pense M. d’Archiac,
parce que le refroidissement du nord de l’Amérique ne pouvait
convenir à la position de notre pôle européen que nous avons fait
la séparation des deux époques; c’est le classement des grandes
lignes de montagnes qui nous a conduit à placer un des pôles non
loin des côtes des Etats-Unis et à prévoir dès lors que l’époque
glaciale de ce pays devait être antérieure à l’époque glaciale euro-
péenne. Et ceci nous amène tout naturellement à extraire de notre
rapide voyage dans cette contrée quelques faits propres à éclaircir
l’intéressant sujet dont nous parlons.
Les observations des savants américains s’accordaient et se sont
toujours accordées à rapporter le terrain erratique des Etats-Unis
à une époque antérieure aux alluvions à ossements de Mastodontes.
Dans l’état de la question cela n’était point suffisant pour nous ;
mais une coupe des terrains de New-York envoyée à la Société par
SÉANCE DU 5 MAI 1851.
406
M. Desor me fit concevoir qu’il pouvait y avoir quelque chose de
plus, et ayant l’occasion d’un voyage en Amérique je résolus d’en
profiter pour étudier par moi-même la superposition de ces ter-
rains récents. Or, voici ce que j’ai vu.
Cette accumulation de blocs anguleux, souvent énormes, for-
més des roches les plus dures et les plus lointaines, entassées pêle-
mêle avec du gravier terreux ; ce que l’on nomme , en un mot , le
drift des environs de New-York, que plusieurs géologues ont si
bien décrit, est terminé supérieurement, aux environs de cette
ville et près d’Albany, deux points où j’ai pu surtout l’étudier, est
terminé, dis-je , par une sorte de surface de niveau assez grossiè-
rement aplanie , car souvent des blocs font saillie au-dessus d’elle,
mais qui n’en est pas moins très distinctement accusée. Au-dessus
de cette surface on voit s’étendre des argiles qui forment avec le
terrain inférieur un contraste parfait par leur stratification régu-
lière, la finesse de leur grain, et qui présentent toute l’apparence
d’un dépôt formé dans les conditions les plus paisibles et les plus
normales. Ces argiles, qui près de New-York, à la colline de
Brooklyn, par exemple, n’ont guère plus d’une dizaine de mètres,
atteignent aux environs d’Albany une puissance considérable ; je
leur ai vu 60 ou 80 mètres au-dessus de la surface supérieure du
drift, et M. Marcou, que j’ai été assez heureux pour rencontrer
dans mon voyage, m’a assuré qu’il avait encore en quelques points
une épaisseur beaucoup plus grande. On y trouve des coquilles,
mais non d’espèces actuellement vivantes, et des restes de cétacés.
Cette argile elle-même se termine généralement par une surface
plane en grand , quoique souvent dénivelée par la facile altérabi-
lité de la roche , et au-dessus de cette seconde surface de termi-
naison se montrent çà et là des lambeaux de l’alluvion à ossements
de Mastodontes, à coquilles semblables aux coquilles récentes,
terrain morcelé, remplissant des anfractuosités et des fonds de
vallées, mais porté aussi en certains points, comme à Brooklyn, à
une hauteur considérable au-dessus du niveau de la mer.
Voici , du reste, la coupe d’un escarpement observé sur les hau-
teurs de Brooklyn , qui présente les trois terrains en question ; les
deux supérieurs sont , en d’autres points de la contrée, beaucoup
plus largement développés : ils ne sont, pour ainsi dire, qu’en
rudiment , mais ils présentent cette heureuse particularité de mon-
trer la succession complète.
SÉANCE DU 0 MAI 1851.
A 07
Coupe du terrain erratique et des terrains .supérieurs à la colline de Brooklyn,
près de New -York.
A» Drift à énormes blocs de granité, grès et porphyre.
B. Argile fine, stratifiée, marine,
C. Àlluvions de gros galets, à coquilles récentes et ossements de Mastodontes.
Cette coupe est , sans doute , très voisine de celle que M. Desor
a envoyée en 1848 à la Société. Je dois avouer, toutefois, que je
n’ai pas été assez heureux pour rencontrer les dérangements de
stratification que ce savant annonçait, et qui constateraient bien
plus clairement encore la division des époques; mais il suffit
d’avoir examiné en quelques points la pureté de la puissante for-
mation d’argile superposée au drift , la régularité de sa stratifica-
tion opposée à l’incohérence de celui-ci , enfin le caractère de ses
fossiles , dont le drift est dépourvu , pour être convaincu qu’elle
constitue une formation tout à fait séparée, produit de conditions
climatériques d’un tout autre ordre. Quant à la troisième forma-
tion, celle du gravier à ossements de Mastodontes, son indépen-
dance a été constatée par un si grand nombre d’observations, qu’il
est inutile d’y appuyer.
Ainsi , aux Etats-Unis, le drift ou terrain erratique, l’argile fine
à débris de cétacés et le gravier à Mastodontes, forment trois
anneaux distincts de la chaîne géologique , trois terrains d’âges
divers , parmi lesquels le terrain erratique est le plus ancien ; sa
place est donc exactement celle que j’avais marquée en 18â3.
Quant à la vaste étendue de ce terrain, sa puissance, la dimension
des blocs, je n’ai rien à ajouter à ce que d’autres observateurs en
ont dit, si ce n’est que, tout prépare qu’y fut notre esprit, son
attente a été de beaucoup dépassée. L'imagination se confond de-
vant la durée des temps nécessaires à la fragmentation et à l’entas-
SÉANCE DU 5 MAI 1851.
ZâOS
sement de tant de blocs, et l’attention se perd à suivre [la trace
continue des roches polies et énergiquement striées depuis la
pointe de la Nouvelle-Ecosse jusque par delà les chutes du Niagara
et la région des lacs. Beaucoup de blocs aussi sont striés, et ce sont
en général les plus durs , ceux qui ont le mieux résisté aux frotte-
ments subséquents, phénomène inverse de celui qui serait produit
si des courants étaient la cause réelle du sillonnement. Si quelque
chose, du reste, pouvait ajouter à l’évidence propre des stries sur
les rochers en place comme trace d’anciens glaciers , ce serait ,
sans nul doute , la disposition du sol : là , en effet, point d’obsta-
cles qui, se resserrant sur le passage des blocs, auraient pu les con-
traindre à se frayer une voie par frottement; ce sont généralement
de vastes plaines ou des vallées largement évasées , dont toutes les
parties indistinctement sont sujettes à ces vâstes traces de polissage
et de sillonnement.
Quelle que soit la place définitive qui soit assignée au phéno-
mène glaciaire de l’Europe centrale, on conçoit donc, d’après ce
que je viens d’exposer, qu’il sera toujours géologiquement séparé
de celui d’Amérique, ainsi que l’exigeait notre système; et plus
son époque sera rapprochée de l’époque actuelle, plus la distinc-
tion dont je parle deviendra tranchée. D’aucune manière ce que
l’on a nommé t unité du phénomène erratique sur l’ensemble du
globe n’est aujourd’hui une hypothèse possible à soutenir.
Puisque j’ai entrepris ce sujet, je pense qu’il ne sera point hors
de propos d’ajouter encore quelques mots sur les difficultés géné-
rales de la question erratique et du terrain quaternaire ; car il ne
suffit pas de plaider sa propre cause , de travailler dans l’ordre de
ses idées, il faut encore travailler autant qu’on le peut à la clarté
et au progrès de cette partie si utile de la science , qui consiste
dans l’étude et le classement des faits. J’ai dit que , groupées dans
un même ensemble , les observations relatives à ces terrains les
plus récents présentaient quelque confusion ; et il le faut bien ,
puisqu’on n’a pu décider encore lequel du terrain erratique ou du
diluvium à ossements de mammifères éteints était le plus récent.
Maintenant , si la question vient à se décider dans le premier sens,
il est à craindre qu’en interprétant certaines observations , on ne
vienne à contester l’unité d’àge du phénomène erratique dans
l’Europe elle-même. Là est le danger, il ne faut pas se le dissimu-
ler ; et c’est pourquoi il importe de nettement poser les bases, de
bien établir les principes de l’observation, et d’en restreindre les «
conséquences aux déductions strictement rationnelles. Nous dirons,
SÉANCE DU 5 MAI 1851.
409
à ce sujet, notre pensée : l’une des causes de la confusion dont
nous parlons me parait être dans la base défectueuse que 'l’on a
prise , et en particulier dans la manière d’interpréter une observa-
tion très importante de M. Keilhau, près de Christiania , rappor-
tée en 1843 par M. Daubrée , et souvent citée par M. d’Archiac
dans son résumé des terrains quaternaires. Elle consiste en ce que
des roches striées sont recouvertes d’un sable coquillier à 70 mètres
au-dessus du niveau de la mer, et qu’à cette hauteur des Balanes
sont encore attachées à ces rochers. C’est là une observation, je le
répète, très importante , mais qui , par cela même , aurait besoin
d’être beaucoup plus nettement détaillée quelle ne l’a été, surtout
en ce qui concerne la disposition des Balanes par rapport aux
stries , et aussi en ce qui concerne l’âge véritable de ce gravier ;
elle pourrait avoir alors, en effet, une grande valeur et une grande
utilité. Mais ce qui me paraît essentiel à dire , c’est que , selon
nous, M. d’Archiac a tiré des faits de cet ordre une déduc-
tion beaucoup trop absolue , en concluant que le phénomène
des stries est antérieur à tous les terrains quaternaires. Nous ne
croyons pas qu’en thèse générale on soit fondé à faire du phéno-
mène de striage une sorte d 'horizon géologique ; car, s’il est évident
que la roche striée est toujours antérieure au gravier qui la re-
couvre , il n’est pas moins évident que le burinage des stries est
postérieur, comme fait , à l’instrument qui a servi à l’accomplir.
Or, supposons qu’un vaste glacier vienne à s’étendre sur une allu-
vion sableuse d’âge quelconque , il arrivera que, dans son mouve-
ment , il fasse servir cette même alluvion à buriner des stries sur
la roche sous-jacente. La conclusion à tirer de ceci est trop claire
pour que je m’y arrête ; elle indique tout simplement qu’à moins
de mettre à néant la théorie glaciaire , même comme hypothèse,
le phénomène des stries ne saurait servir de base chronologique
que dans des cas très particuliers. Aussi verrions-nous avec le plus
grand intérêt l’observation de Norvège reprise avec beaucoup
d’attention , et décrite avec détail et figures , pour être comparée ,
ensuite, comme résultat, avec celles des deux versants des Alpes.
Si l’on songe combien il y a d’incertitude à juger de l’âge d’un
terrain par la ressemblance de quelques coquilles avec celles de
nos jours, on comprendra nos doutes sur la question de savoir si,
comme on l’a supposé, les couches de gravier des côtes de Nor-
vège, élevées au-dessus de la mer, appartiennent réellement à
l’époque actuelle. Nous en doutons, quant à nous, extrêmement.
Que s’il venait à être prouvé , cependant , que ces plages élevées
SÉANCE DU 5 MAI 1851,
MO
coquillières sont réellement de notre époque , ce serait là un fait
d’un ordre particulier , sans rapport direct avec le phénomène
erratique ni avec le classement des terrains quaternaires. La théo-
rie en serait difficile ; les imaginations fécondes pourraient s’y
exercer; je ne saurais, quant à moi, l’aborder, car je n’en vois
aucun moyen rationnel. Mais je ne laisserais point faire cependant
de ce fait problématique une objection contre nos théories con-
cernant les faits antérieurs et réellement géologiques ; car, quelle
que soit la raison que vous adoptiez vous-même comme possible ,
qui m’empêchera d’en revendiquer le bénéfice et de l’admettre ,
fût-ce même celle des soulèvements lents , si fort à la mode au-
jourd’hui; car ces sortes de moyens peu compromettants sont à
l’usage de tous les besoins, de toutes les théories? Dira-t-on, en
effet, qu’une des causes qu’on leur assigne est en opposition avec
mes vues? Mais on ne leur en assigne aucune. On fait élever ou
descendre les terrains, suivant le besoin local, sans s’arrêter à en
chercher des causes ni des raisons , et l’on appelle cela expliquer
les faits ; et l’on écrit que je ne les explique point moi-même dans
ma théorie, où j’ai la bonhomie de chercher à tout des causes,
des causes rationnelles et géométriques.
Qu’on se rassure, du reste; je n’ai nulle intention de faire abus
à mon profit de cette idée nouvelle des soulèvements lents sans
inflexion des couches; ce n’est point là de la géologie à notre
usage. Ce n’est pas non plus le lieu de dire toute notre pensée sur
ce moyen de théorie sans cause explicite, dans son application au^.
fait réel des niveaux inégalement élevés. Mais quant à notre opi-
nion sur les faits eux-mêmes, la voici. Nous croyons d’abord, et
le disons hautement , que toutes ces plages ou portions de terrain
horizontales élevées au-dessus du niveau de la mer, dans des pays
non volcaniques, sont toutes réellement antérieures à F ère actuelle,
et quelquefois très antérieures. Maintenant , quant à leurs niveaux
échelonnés, voici ee que je dirai. Lorsque dans le travail du mi-
neur ou dans l’étude des terrains moins récents on rencontre ces
changements brusques de niveau sans inflexion des couches , on
n’hésite point sur le phénomène , on le nomme une faille . Or les
lois de la géologie sont unes et constantes ; les failles existent dans
les terrains récents comme dans les plus anciens , ainsi que le mon-
trent d’ailleurs une si grande partie de nos vallées; et nous le di-
sons avec la plus grande conviction , partout où des terrains stric-
tement nivelés s’abaissent par étages, par terrasses i sans inflexion,
il rfy a point à hésiter, ce sont des failles. Ces failles, nous les avons
SÉANCE DU 5 MAI 1851,
Zill
géométriquement expliquées, plus complètement, je crois, et
aussi simplement que dans aucun autre système qui nous soit per-
sonnellement connu; nous avons montré, en même temps, qu’en
raison des circonstances de leur inclinaison et de leur parallélisme,
elles ne pouvaient appartenir qu’à un phénomène à1 effondrement,
et que le soulèvement n’y avait aucune part. Le même raisonne-
ment est entièrement applicable à ces niveaux échelonnés que l’on
nomme terrasses dans les formations récentes , ainsi qu’à tous les
faits du même genre ; et nous sommes inévitablement conduits ,
pour expliquer les plages élevées coquillières , à cette seule cause
simple , complète , universelle , conséquence directe de notre théo-
rie , et dont toute la géologie nous révèle l’application , savoir \
le changement de la courbure des mers, et l’ altération locale de
leur niveau à chaque période géologique, par suite du déplace-
ment de l’axe terrestre.
Je ne veux point terminer cette discussion , déjà longue cepen-
dant , sans répondre encore par avance à une question qui pour-
rait nous être adressée. On pourrait nous dire : Mais que sera donc
pour vous le terrain nommé diluvien, s’il vient à être prouvé qu’il
est antérieur à l’époque des blocs erratiques , et qu’il n’est pas le
produit de la fusion de vos grandes glaces ? Je répondrai : Le terrain
diluvien n’est pas un fait isolé dans la géologie ; le grès rouge au
pied de toutes les montagnes anciennes de l’Europe , le nagelfluh
dans les Alpes, la grande alluvion des plateaux qui règne sur
toute la pente des Pyrénées, en sont quelques exemples. Pour
nous, toutes les fois qu’un massif montagneux a passé d’une lati-
tude un peu élevée à une latitude tropicale , et surtout lorsque ce
phénomène a été accompagné d’une élévation des mers environ-
nantes , il a dû en résulter une débâcle entraînant les blocs et le
gravier précédemment retenus par les neiges ou les glaces , et la
puissance ultérieure des torrents tropicaux a fait le reste. Or, c’est
ce qui a pu précisément avoir lieu à la suite de la troisième époque
tertiaire (terrain pliocène), qui renferme, dans nos contrées, une
dore très analogue à celle de notre temps , et pendant laquelle nos
classements assignent au centre de la France une latitude de 42° ;
à l’époque du dernier diluvium cette latitude devait être de 10°,
et ce passage serait parfaitement suffisant pour expliquer la couche
de cailloux alpestres , par exemple , qui forme la base du diluvium
de la vallée du Rhin , et qui , une fois charriée par la débâcle ,
peut-être longue en durée , qui accompagnait la fusion progres-
sive des neiges et des glaces , aurait été recouverte de cailloux des
412 SÉANCE DU 5 MAI 1851.
Vosges par Faction subséquente et normale des torrents tropi-
caux.
Je ne donne en ceci , on le conçoit , qu’un aperçu , essayé pour
satisfaire à une éventualité de classement sur lequel l’observation
toute seule doit prononcer. En proposant notre théorie , que nous
n’avons jamais songé d’ailleurs à revendiquer comme une œuvre
uniquement à nous, mais que nous avons donnée comme une idée
particulière déduite des grandes lois établies par les géologues , et
surtout des beaux travaux de iM. Eüe de Beaumont ; en proposant,
dis-je, cette théorie , nous ne pouvons avoir eu l’ambition de de-
vancer l’observation et de fixer la science, mais d’offrir pour l’ex-
plication des jaits en eux-mêmes un principe fécond et géomé-
trique , mais applicable a Vorclrc des faits, lorsque seulement cet
ordre aura été fixé par le concours d’observations incontestables et
par la discussion : ce sera là son épreuve progressive. Combien de
parties douteuses restent encore dans le classement et dans la grande
étude des faits ! Le savant auteur de Y Histoire des progrès de la
géologie le sait mieux que personne , lui qui a traité d’une manière
si supérieure et éclairé si vivement l’ensemble d’une des questions
les plus controversées , celle du terrain nummulitique. Celle des
terrains quaternaires est certainement beaucoup moins certaine et
plus complexe ; aussi avons-nous été étonné de lui voir condam-
ner presque dédaigneusement tout un système pour un ordre de
faits sur lequel l’observation ne s’est même pas encore accordée.
Nous espérons qu’il reviendra de cette prévention ; nous l’espérons,
parce que son opinion personnelle nous tient à cœur; mais de
toute manière nous n’avons pas cru pouvoir nous abstenir de pro-
tester contre ce genre de jugement , et témoigner que nos convic-
tions , loin de nous abandonner , se fortifient.
Au surplus, ayant travaillé , non point pour nous , mais pour la
vérité , nous aurons la patience de l’épreuve ; nous attendrons avec
calme et sécurité la marche des esprits. Les géologues qui , par-
leurs infatigables et courageuses observations en tant de contrées,
contribuent tous les jours à fixer et à mettre en lumière les
grandes lois de la géologie ; ceux qui , en outre , portant dans cette
investigation une connaissance particulière des fossiles, et, comme
MM. Agassiz, Murchison, de Verneuil, d’Archiac, d’Orbigny,
Deshayes, Brongniart, etc., comparant leur distribution sur de
vastes espaces’ et dans de vastes étendues de l’échelle géologique,
y établissent aussi de grandes et importantes lois ; tous ces savants
amènent peu à peu , nous le pensons, la scienée vers notre point
SÉANCE DU 5 mai 185:1 .
41 S
de vue : car, lorsqu'une fois il sera clair comme le soleil que Feu-
semble des roches stratifiées est divisé en tin nombre limité d’épo-
ques possédant chacune dans ses fossiles et dans sa flore un carac-
tère particulier, et attestant ainsi une climatologie différente de
l’époque qui l’a précédée et de celle qui l’a suivie ; quand on
verra ces caractères , se prolongeant sur d’immenses espaces, accu-
ser de profondes révolutions sur l’ensemble de la surface terrestre,
associés avec le soulèvement linéaire des montagnes et l’affaisse-
ment linéaire des vallées , un grand pas alors sera fait vers cette
théorie des déplacements de 1 axe terrestre, aujourd’hui hardie
et presque imaginaire, mais qui un jour paraîtra tout simplement
au niveau de ces grands faits.
M. d’Àrchiac fait observer qu’en appréciant en 1850 les
opinions émises en 18 44 par M. de Boucheporn , il a pu et dù
se servir des progrès que les questions avaient faits entre ces
deux époques 5 il croit d’ailleurs l’avoir fait avec d’autant plus
de convenance qu’il a eu soin de spécifier, p. 431, que le travail
de M. de Boucheporn était antérieur aux observations sur
lesquelles il s’est appuyé pour sa critique.
Au sujet de la même communication , M. Ed. Collomb donne
quelques détails sur le terrain erratique de l’Alsace, qui se
compose de trois dépôts dus à trois phénomènes différents ;
le dernier, le lehm , se continue par les circonstances actuelles.
M. Dollfus craint que l’observation des faits ne s’adapte pas
entièrement aux théories. Au reste, préoccupé uniquement
des moyens de présenter les faits tels qu’ils sont, il a reproduit,
au moyen du daguerréotype, les détails des principaux glaciers
de la Suisse. — M. Dollfus met, en effet, sous les yeux de la
Société un grand nombre de très belles épreuves au daguerréo-
type, qui représentent les grands glaciers de la Suisse.
M. Gastaldi dit que dans les vallées du Piémont on distingue
le terrain pliocène, puis un diluvium grossier charrié parles
torrents, enfin le terrain des moraines. — - Il n’y a, à propre-
ment dire, qu’une époque glaciaire.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
kl à
Séance du $ 9 mai 1851,
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
delà dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite de la présentation faite dans la dernière séance, le
Président proclame membre de la Société :
M. Ville (Ludovic), ingénieur des mines à Tlemcen (Algé-
rie), présenté par MM. Elie de Beaumont et de Verneuil.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M« Fournet, Sur la Commission hydrométrique
du bassin du Rhône [lu a la séance dé inauguration de R Union
agricole du bassin du Rhône) • in-8, 8 p. Lyon, chezBoitel.
De la part de M. Ch. Martins, De la tératologie végétale
et de ses rapports avec la tératologie animale. Thèse présentée
à la Faculté de médecine de Montpellier ( concours pour la
chaire de botanique et histoire naturelle médicales ) • in-li, 72 p.
Montpellier, 1851, chez Jean Martel.
De la part deM. Loriet, Pénétrations et impressions obser-
vées sur les galets de certains conglomérats et nagelfluhs
(extr. des Ann. de la Soc. nat . d’agric., d’hist . nat. et des
arts utiles de Lyon , 1851)* in-8, 11 p. Lyon, 1851, chez
Barret.
— Comparaison graphique et mathématique des continents
de V ancien monde [présentée a V Académie de Lyon , le 10
décembre 1850)*, in-8, 26 p., 1 pi. Lyon, 1851, chez Dumou-
lin et Bonet.
— On the slaty rocks , etc. (Des roches schisteuses de Sichon,
et de l’origine des sources minérales de Vichy) (extr. du Quar-
terly journ. oj the geolog. Soc. of LoncL , vol. VII, 1851)-,
in-8, 11 p.
— ■ Review , etc. (Examen des travaux de M. Barrande, pré-
liminaires de son grand ouvrage Du système silurien de la
Bohême) -, in-8, 3 p.
SÉANCE Dü 19 MAT S 851.
H5
— - Notice f etc. (Notice sur la structure géologique de Y Es-
pagne , pour l’intelligence d’une esquisse de la carte générale
de la Péninsule, de M. de Yerneuil) -, in-8, h p.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1851, 1er sem., t. XXXII, nos jg et 19.
U Institut, 1851, nos 905 et 906.
Bulletin de la Société de géographie , he sér., t. I, n° 3,
mars 1851.
The Athenæum , 1851, nos 1228 et 1229.
Wurtte'nb. nalurw. Jahreshejte (Brochures annuelles de la
Société d’histoire naturelle du Wurtemberg). 7e année, 1851,
1er cah., in-8.
The American journal of science and arts, by Silliman,
2e sér., vol. nos 29 et 30, sept, et noy. 1850- vol. XI, n° 31 ,
jany. 1851.
M. Yiquesneî demande que le Conseil soit convoqué avant la
prochaine séance au sujet de la détermination à prendre pour
la réunion extraordinaire.
M. Buvignier accompagne de la lettre suivante l’envoi de la
carte géologique du département de la Marne.
La carte géologique du département de la Marne a été com-
mencée en 18àà, d’après une délibération prise l’année précédente
par le conseil général, qui chargeait de ce travail M. Sauvage,
ingénieur des mines à Mézières, et moi. Elle était déjà très avan-
cée lorsque, au commencement de 1846, mon collaborateur ayant
quitté le service ordinaire des mines pour occuper dans les che-
mins de fer des fonctions cpii exigeaient l’emploi de tout son temps,
je dus achever seul ce qui restait à faire.
Tout était terminé au commencement de 1847 ; mais n’ayant
pas obtenu immédiatement de M. le préfet le tracé des nouvelles
voies de communication qu’il avait dû demander aux divers ingé-
nieurs du département, ce ne fut qu’au mois de juin 1848 que je pus
remettre la minute au lithographe, et le tirage et le coloriage n’ont
été terminés que vers la fin de l’année dernière. Quant au texte
explicatif, il ne paraîtra pas avant deux ans, car je ne commen-
cerai à m’en occuper qu’après avoir achevé celui de la Meuse, qui
me retiendra encore cinq ou six mois.
C’est ce retard dans la publication du texte qui me détermine à
joindre à l’envoi de la carte quelques détails sur la manière dont
416 SÉANCE DU 19 MAI 1851»
elle a été exécutée et sur nos principales observations, bien qu’il
n’y ait guère lieu à en faire de nouvelles dans des terrains aussi
souvent explorés que le bassin de Paris.
La carte de la Marne a été publiée par le département à l’échelle
de go-jüïï sur l’autographie de la carte de l'état-major, ce qui n’a
pu se faire qu’avec l’autorisation du directeur du dépôt de la
guerre, et il ne l’a accordée que pour 200 exemplaires. L’autogra-
phie comprenant la topographie des parties limitrophes des dépar-
tements voisins, nous en avons complété les indications géologiques
au moyen de ma carte de la Meuse, de notre carte des Ardennes,
de la carte de l’Aisne, de M. d’Archiac, et de celle de Seine-et-
Marne, de M. de Sénarmont. Les deux premières forment, avec
celle de la Marne, un travail d’ensemble. Nos raccordements se
font presque aussi exactement avec M. de Sénarmont, quoique
nos divisions ne soient pas tout à fait les mêmes. Nous avons adopté
celles établies par M. d’Archiac dans la carte de l’Aisne. Nous ne
nous raccordons cependant pas toujours avec celle-ci d’une ma-
nière aussi satisfaisante. Cela tient en partie à ce qu’elle n’a pas
été publiée à la même échelle que la nôtre ; mais il y a deux ou
trois points où les différences ne peuvent être attribuées à cette
cause. Elles ne sont peut-être pas cependant assez importantespour
mériter l’attention de la Société, et je n’en parlerais pas si je ne
craignais que les personnes qui , cl’ici à la publication de notre
texte, remarqueraient ces dissidences entre notre travail et celui
d’un géologue aussi éminent, ne fussent portées à nous juger défa-
vorablement.
Dans les vallées dont le fond est formé par les alternances de
sable et d’argile de l’étage à lignite, ces couches, lavées et entraî-
nées par les eaux, ont souvent laissé sans appui les assises supé-
rieures, qui se sont éboulées en couvrant de leurs débris les affleu-
rements des terrains inférieurs, qui n’apparaissent plus au jour,
si ce n’est dans les endroits où les éboulis sont moins épais, et
dans ceux où ils ont été ravinés. On est alors exposé à des erreurs
nombreuses, si l’on n’opère pas par la méthode que nous avons
constamment suivie pour la carte de la Marne comme pour celles
que nous avons exécutées antérieurement, et qui consiste à suivre
pas à pas les limites des diverses formations. Ainsi, dans la vallée
de l’Orillon, où M. d’Archiac n’indique que le calcaire grossier,
les éboulements de cette formation masquent presque constam-
ment les sables de l’étage inférieur, qui se montrent de temps en
temps au jour, et sont exploités en plusieurs points à une hauteur
assez considérable sur les versants, et remontent dans le fond de
SÉANCE DU 19 MAI \ 851 .
417
la vallée jusqu’à peu de distance en aval de Colion. Sur le plateau
à l’E. de l’Orillon, les terrains supérieurs au calcaire grossier ne
dépassent guère au N. la ligne qui serait tirée deDravegny à Orey-
Poulard. 11 y a seulement, au-dessus de Longueville, un petit lam-
beau isolé de sables moyens très riches en fossiles.
La précipitation avec laquelle je vous ai adressé la carte, sans
prendre le temps de rappeler des souvenirs de six ou sept ans, ne
m’a pas laissé voir une faute qui m’avait déjà échappé en corri-
geant les épreuves de coloriage. Je veux parler des sables supé-
rieurs de Rouchères, dont la limite est tracée sur la carte, mais
auxquels on a oublié d’appliquer la teinte qui les représente.
Dans la vallée du Surmelin, M. d’Archiac a arrêté le calcaire
grossier un peu au-dessous de la limite du département de la
Marne. Cette formation remonte un peu plus haut dans cette val-
lée ; mais nous n’avons pu l’y découvrir que bien au-dessous d’Or-
bails, quoiqu’on l’ait citée plusieurs fois dans cette localité. Si elle
y existe, il faut qu’elle y soit bien peu développée, pour que nous
n’en ayons aperçu aucune trace malgré le soin avec lequel nous
avons exploré, sur les deux versants de la vallée, la limite supé-
rieure de l’étage à lignite. Cette dernière formation constitue le
fond de la vallée. Elle y existe à Baulne et au moulin Malagay, où
M. d’Archiac n’indique que le calcaire grossier. Il a sans doute été
induit en erreur par une petite butte située presque au niveau du
moulin, et formée par un éboulement du sable à Kcnericardia pla-
nicostata. Mais les mêmes sables se retrouvent un peu plus haut,
reposant sur des argiles grises et violacées qui recouvrent des ex-
ploitations de sables blancs et jaunâtres sans fossiles. La Vencricar-
dia et les autres fossiles qui l’accompagnent, entraînés par les eaux
pluviales, recouvrent les affleurements des assises inférieures.
Dans les environs de Montmirail, qui, ne faisant pas partie du
département de l’Aisne, n’ont pas dû être explorés avec le même
soin par M. d’Archiac, nous avons retrouvé dans le fond de la
vallée l’étage inférieur, qui y est fréquemment caché par des allu-
vions. Les sables moyens et le calcaire grossier existent aussi sur
les deux versants, et cette dernière formation remonte dans le fond
de la vallée à 10 kilomètres à l’E. de Montmirail, au lieu de se
terminera cette ville, comme l’ont écrit plusieurs auteurs.
JNotre carte indique, au mont Août, un lambeau de l’étage
inférieur. Les membres de la Société qui assistaient à la réunion
d’Epernay ont cru y voir de la meulière. S’il y a erreur sur notre
carte, je m’empresse de déclarer qu’elle ne doit être attribuée
qu’à moi. Le mont Août était un des points qui nous restaient à
Soc. geo!. , 2e série, tome VIII, 27
Al 8
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
explorer lorsque M. Sauvage cessa de prendre part au travail. Quoi
qu’il en soit, je doute que l’on puisse rapporter à la meulière les
pierres que l’on exploite au mont Août ; ces pierres se trouvent en
cailloux roulés, arrondis ou ovoïdes, entiers ou brisés, à arêtes vives
suivant des surfaces conchoïdales. Elles sont faciles à briser, com-
pactes ou légèrement grenues, blanches à la surface, blanchâtres,
jaunâtres ou fauves à l’intérieur. Ces cailloux sont disséminés dans
des argiles d’un gris bleuâtre qui m’ont paru avoir plus d’analogie
avec les argiles de l’étage inférieur qu’avec celles des meulières.
Cette argile est recouverte de terre jaune à fragments siliceux ;
quant aux cailloux, dont je vous communiquerai mes échantillons
par la première occasion, ils ne m’ont pas paru avoir plus d’ana-
logie avec les silex de la craie qu’avec la meulière. Certaines par-
ties happant à la langue rappelaient cependant la texture des silex
altérés. Si la meulière recouvre les plateaux les plus rapprochés
du mont Août, les argiles de l’étage inférieur s’élèvent presque au
niveau de ces plateaux, et atteignent, sur les versants, une hauteur
égale à celle du mont Août, et leur prolongement jusqu’à cette
butte aurait même pu, en vertu de la pente des couchesa s’y trou-
ver à un niveau plus élevé. Si ces argiles ne sont pas indiquées sur
la butte de Toulon, la hauteur la plus rapprochée du mont Août,
c’est que cette butte a éprouvé des éboulements considérables qui
ont amené la meulière bien au-dessous du niveau auquel s’élève
habituellement la craie.
Dans la légende de la carte, une correction mal faite a, par une
confusion que je ne puis m’expliquer, transporté au titre calcaire
pisolithique un point de doute que je voulais mettre à l’avant-der-
nière ligne de l’article concernant cette formation, après le mot :
recouvre. Il doit s’appliquer aux rapports indiqués comme possibles
entre le calcaire pisolithique et le terrain lacustre de Rilly. Cette
possibilité (notez bien que je ne dis même pas : cette probabilité)
nous semblait résulter des faits suivants. Dans les environs de Ser-
miers, de Montchenot, de Yillers-Allerand, il existe entre les sables
inférieurs et les terrains à lignites une marne blanchâtre ou jau-
nâtre, à nodules calcaires, concrétionnés, subcristallins ou terreux.
Dans la position où elle se trouve, elle est évidemment la même
que celle de Rilly, dans laquelle on rencontre en veines irrégu-
lières, en amas ou blocs concrétionnés, le calcaire à coquilles
lacustres; seulement la matière calcaire concrétionnée se trouve
ici moins divisée. Cette marne jaunâtre, à nodules concrétionnés,
se retrouve, mais moins puissante, à l’E. de Rilly. On la retrouve
de temps en temps sous les éboulis des assises supérieures, sur le
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
/il 9
versant sud de la montagne de Reims, à Ambonnay, àRouzy,etc.,
et je crois même sur la rive gauche de la Marne, dans les environs
d’Oger. Dans ces localités elle est plus mince, et repose directe-
ment sur la craie qui, à son contact, est souvent plus dure, com-
pacte, sonore et quelquefois un peu jaunâtre.
Cette marne est recouverte en plusieurs points (à Yillers-Â lie-
ra nd , à Mailly) par un banc de calcaire grenu, presque écailleux,
composé de grains anguleux souvent aplatis, réunis par un ciment
tufaeé plus ou moins dur, selon les localités. Ce banc est tout- à
fait semblable à un de ceux qui alternent avec des bancs de marne
jaune ou grise à la base du calcaire pisolithique des Vertus. Cette
coïncidence de marnes très ressemblantes reposant également sur la
craie (sauf à Rilly et à Montclienot, où elles en sont séparées par des
sables, et recouvertes par un banc calcaire d’une texture particu-
lière et d’une épaisseur à peu près égale dans les localités les plus
éloignées), nous avaient porté à croire que ces couches pouvaient
être identiques, et que par conséquent les sables et les marnes de
Rilly pouvaient être le prolongement et le développement des
assises inférieures du calcaire pisolithique.
Cette opinion ne nous paraissait cependant pas assez solidement
assise pour que nous ayons cru devoir réunir ces terrains sur la
carte. J’allais faire de nouvelles explorations pour voir si je ne
devais pas faire cette réunion sur les épreuves que je corrigeais,
lorsque je reçus le numéro du Bulletin contenant le compte rendu
de la séance du 5 juin 1848. Le mémoire de M . Hébert me parut
avoir résolu la question, et me décida à laisser les épreuves telles
qu’elles étaient.
Depuis, en relisant plus attentivement ce mémoire, il m’a sem-
blé que les arguments n’en étaient pas aussi concluants qu’ils me
l’avaient paru d’abord ; mais je crois qu’il ne serait pas convenable
de discuter aujourd’hui une question sur laquelle je n’ai pas, quant
à présent, d’opinion arrêtée.
Je mentionnerai ici une erreur que nous avons commise dans
la carte géologique des Ardennes. Peu familier, â cette époque,
avec l’étude des terrains tertiaires, nous n’avons pas reconnu la
nature des blocs siliceux et de la marne blanche du plateau de
IVlarlemont, a la cote 296. Nous n’avions pas soupçonné alors
qu’un lambeau de meulière pût se trouver aussi éloigné des dépôts
tertiaires aujourd’hui existants. Les nombreux blocs de meulière
qui existent dans les vallées des environs prouvent que ce dépôt
n’était pas isolé et qu’il se rattachait au grand plateau tertiaire.
j’ajouterai encore, pendant que je parie des terrains tertiaires,
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
â*20
que, d’après les analyses de M. Sauvage, les glaises vertes du cal-
caire lacustre ne sont pas des argiles dans l’acception véritable du
mot. Dans ces roches, la magnésie remplace en grande partie l’alu-
mine des argiles ordinaires.
Dans la partie inférieure des terrains crétacés, nous avons con-
staté que la gaize, que nous avions désignée dans la géologie des
Ardennes et sur la carte de la Meuse sous le nom de craie tuffeau,
est comprise entre cette formation et le gault.
Dans les terrains d’alluvion, nous avons observé un déplacement
de rivière, analogue à celui que j’ai déjà signalé à la séance du
15 août 18âû (t. I, p. ûOO). En suivant la trace des alluvions à
galets calcaires et à ossements d’éléphants, qui couronnent les pla-
teaux de l’Aisne, on les voit remonter par la vallée de l’Ante jus-
qu’au grand bassin d’alluvion de Vitry et de Saint-Dizier, de sorte
qu’ils ont dû être déposés par l’Ornain, la Saulx, la Marne et les
autres rivières qui se réunissent aujourd’hui à celles-ci entre Ser-
moize et Vitry, et qui s’échappaient par la vallée de l’Ante, dans
la direction de Sainte-Ménéhould, avant qu’une coupure ouverte
dans la craie tuffeau de Vitry eût produit la vallée actuelle de la
Marne.
M. Hébert dit que les silex dont il vient d’être question sont
les mêmes que les meulières du plateau de la Brie. Quant à la
question de l’âge relatif du calcaire lacustre de Rilly et du cal-
caire pisolithique, il persiste dans l’opinion qu’il a précédem-
ment exprimée.
M. Martins lit la lettre suivante de M. Desor.
Aote sur Uexistence de coquilles marines des mers actuelles
dans le bassin du lac Ontario [Canada) , jusqu’à l’altitude
de 310 pieds , par M. E. Desor. (Extrait d’une lettre adressée
à M. Ch. Martins et datée de Boston le 12 février 1851.)
Jusqu’ici on n’avait constaté la présence des coquilles marines
que jusqu’à Montréal et au lac Champlain ; personne n’en avait
observé plus loin à 10., et certains géologues en avaient conclu
que la mer qui déposait ces coquilles n’avait pas pénétré plus
avant dans les terres, et par conséquent qu’elle n’avait pas envahi
le bassin du lac Ontario. Je voulus en avoir le cœur net. Consé-
quemment. après avoir terminé mes travaux officiels au lac Su-
5 É A MCE i)ü 19 MAI 1851.
421
périeur, je pris la route du lac inférieur avec l’intention d’ex-
plorer les dépôts quaternaires dans le bassin du lac Ontario et le
long du Saint-Laurent. Je longeai d’abord la rive septentrio-
nale du lac, et de là je descendis à Montréal, d’où je gagnai le lac
Champlain. On venait d’ouvrir un chemin de fer entre l’extré-
mité du lac Champlain et la ville d’ Ogdensbourg, sur le Saint-
Laurent. Cette route allait me fournir l’occasion d’observer la
succession des terrains quaternaires sur une étendue considé-
rable et à des niveaux très différents. La route traverse d’abord
une plaine assez unie jusqu’à la rivière Champlain, d’où l’on
monte assez rapidement jusqu’aux environs de Chateaugay, où se
trouve le point culminant, à 1050 ou 960 pieds au-dessus du
lac Champlain. Les dépôts quaternaires ne sont pas très puissants
dans cette région, et la roche silurienne se montre à découvert sur
de grands espaces. Par contre, ces dépôts acquièrent un dévelop-
pement considérable sur la pente opposée, du côté de l’O. Entre
Chateaugay etMalone, le chemin de fer traverse d’épais dépôts de
limon empâtant de nombreux blocs et passant sur divers points
à un sable stratifié , qui paraît dépourvu de fossiles. Ce fut à la
station de Moira, à l’O. de la ville de Malone, que je rencontrai
les premières coquilles, dans une sorte de sable blanchâtre repo-
sant sur un limon très hétérogène. Je ne trouvai ici qu’une seule
espèce, le Tellina groenlandica , mais dans un état de parfaite con-
servation, les deux valves réunies, ce qui ne me laisse aucun doute
qu’elles ne fussent en place. Cette même espèce se retrouve aussi
sur divers autres points, entre Moira et Ogdensbourg, particulière-
ment dans les environs de cette dernière ville, où la coupe du
chemin de fer entame les sables quaternaires jusqu’à la profondeur
de 25 pieds. A la base se trouve un dépôt d’argile bleue très adhé-
sive, et au-dessus un sable limoneux brunâtre, passant parfois à
un limon caillouteux. C’est à la limite entre les deux dépôts que
les coquilles sont le plus abondantes.
Ainsi donc, voilà les dépôts marins avec leurs fossiles les plus
caractéristiques qui remontent la vallée du Saint-Laurent jusqu’à
Ogdensbourg, s’étendant en même temps à Moira, jusqu’à là milles
dans l’intérieur. Mais c’est l’altitude du lieu qui est surtout impor-
tante. D’après le profil du chemin de fer construit parM. l’ingénieur
Schlatter, la station de Moira, où je recueillis la Tellina groenlan-
dica ^ est à 220 pieds au-dessus du lac Champlain, soit 310 pieds
au-dessus de la mer, et par conséquent à 80 pieds au-dessus du
niveau du lac Ontario, qui n’en est éloigné que de 50 milles. Ce
fait établi, on est naturellement conduit à en conclure que toutes
422
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
les parties de ia vallée du Saint-Laurent, qui se trouvent au-des-
sous de ce niveau, ont dû être envahies simultanément par les
eaux marines de cette époque, et par conséquent que les vagues de la
mer venaient baigner les falaises du Niagara, qui, alors comme
de nos jours, servaient de barrière aux eaux du lac Erié. Mais,
me direz-vous peut-être, si les eaux marines s’étendaient jusqu’au
Niagara, qui est-ce qui nous empêche de supposer qu'elles n’aient
franchi cette barrière et envahi également le bassin du lac Erié?
Il y a un an, je n’aurais peut-être pas pu répondre à cette objec-
tion; mais, ainsique je vous le disais dans une précédente lettre,
nous savons maintenant par les recherches de mon ami Whitlesey
que les limons et sables du lac Erié, bien qu’assez semblables à
ceux du Saint-Laurent, sont des dépôts lacustres, puisqu’on y
trouve des coquilles d’eau douce, c’est-à-dire du loess. Et comme
il n’existe pas de dépôt marin au-dessous de ce loess, j’en conclus
que ce dernier doit être contemporain des dépôts marins du Saint-
Laurent et du lac Ontario.
La coupe ci-jointe représente d’une manière approximative la
1 1 Loess.
L L Laurenlien.
F Falaises du Niagara.
position des deux terrains, et par conséquent les niveaux relatifs
des eaux douces et des eaux marines. Il y a longtemps que les géo-
logues américains ont reconnu que ces dépôts à coquilles marines
sont plus récents que le drift des lacs supérieurs, et plusieurs
d’entre eux les ont pour cette raison désignés sous le nom de second
drift. D’un autre côté, il est évident que ces dépôts diffèrent à
plusieurs égards des alluvions modernes, et comme ils appar-
tiennent à une période où la distribution des terres et des eaux
était fort différente de ce qu’elle est de nos jours, j’ai proposé de
les désigner à l’avenir sous un nom particulier ; et, considérant
qu’ils sont surtout développés dans le bassin du Saint-Laurent,
nous avons adopté le nom de laurenlien ou terrain laurenlien. Je
m’estimerais heureux si ce nom, qui a été approuvé par la plu-
part des géologues de ce pays-ci , pouvait obtenir la sanction de
SÉ AM CE DU 19 MAI 1851.
423
la Société géologique de Fiance. Dans une de mes précédentes
communications, j’ajoutai quelques remarques sur le parallélisme
de ce terrain avec les dépôts quaternaires d’Europe. Gomme alors,
je suis d’avis que les dépôts de Norvège, dans lesquels on rencontre
des coquilles jusqu’à 1000 pieds de hauteur, d’après Keilhau ,
ainsi que ceux de Suède avec leur Azar, sont les analogues de notre
laurentien américain. 11 me restait des doutes à l’égard du till
d’Ecosse, à cause de sa structure informe, et parce qu’à cette époque
on n'y avait signalé aucun fossile. Mais ayant appris depuis, par
les mémoires de M. Smith de Jordan Ilill, qu’il renferme des co-
quilles d’espèce récentes (1), et que ces mêmes espèces se retrouvent
dans des dépôts d’argiles au-clessous du till, je ne doute plus que
ce ne soit le même horizon , le till grossier, avec ses cailloux et
galets striés, empâtés dans le limon, n’étant, selon toute apparence,
comme les dépôts semblables de Brooklyn, près de New-York,
qu’une forme locale du laurentien. Les dépôts du N. de l’ Alle-
magne, qui sont distinctement stratifiés et renferment des coquilles,
doivent, à bien plus forte raison, rentrer dans la catégorie des
dépôts laurentiens. Reste à savoir maintenant s’il existe quelque
part en Europe un dépôt analogue à notre drift proprement dit,
ou ancien drift , tel qu’il existe sur les bords du lac Supérieur et
dans les plaines de l’Ouest, et dans lequel on n’a jusqu’à présent
rencontré aucune trace de fossiles.
M. Deville fait la communication suivante :
Mémoire sur les roches volcaniques des yl titilles.
La connaissance exacte des éléments lithologiques me paraît
être une condition indispensable pour entreprendre la description
rationnelle de toute contrée où dominent les roches de formation
ignée. Le géologue qui, en présentant l’histoire d’une telle contrée,
(1) Les coquilles du till ou Boulder clay sont des espèces arctiques
dont la plupart ne vivent plus dans les mers d’Écosse ; elles sont en
général placées au-dessus de l’argile à blocs, dans la couche du lami-
na te d clay. Les coquilles modernes vivant encore actuellement dans la
mer voisine se trouvent sur des terrasses et dans des bancs de sable
supérieurs à l’argile qui renferme les espèces arctiques. Voyez sur ce
sujet les travaux de MM. Smith de Jordan Hill, Edward Forbes et
Ch. Martins, mon mémoire sur les traces glaciaires aux environs
d’Édimbourg (Edi/ib. uew philosophical Journal , 1851).
SÉANCE DE 19 MAI 1851.
■424
se bornerait à énumérer superficiellement l’aspect et les caractères
extérieurs des roches, ferait, il me semble, une œuvre aussi in-
complète que le stratigraphe qui, dans la description des terrains
sédimentaires , négligerait de faire intervenir la détermination
exacte des espèces fossiles , ou l’indication précise de la direction
et du plongement des couches. Je me propose donc , dans l’étude
des îles volcaniques des Antilles, d’éclairer, comme je l’ai déjà
tenté pour les îles de Ténériffe et de Fogo, la description géologique
proprement dite par l’examen chimique des roches assez variées
qui les composent.
J’ai commencé ces études par les roches de la Guadeloupe; c’est
File que j’ai visitée avec le plus de soin , et elle présente d’ailleurs,
à peu d’exceptions près, toutes les variétés de roches que Fou ren-
contre dans les autres îles de l’Archipel. Ce premier mémoire est
consacré au système de la Soufrière.
Je n’ai pas ici pour but d’entrer dans le développement des ques-
tions géologiques qui se rattachent à ce groupe de montagnes , et
qui seront traitées dans des mémoires spéciaux. La carte de cette
portion de File , que je mets sous les yeux de la Société , et que j’ai
dressée d’après une triangulation, exécutée par moi-même en
18/i2, donnera une idée exacte de la disposition du massif dont il
s’agit. Je ne veux aujourd’hui qu’indiquer les traits dominants de
ce massif au point de vue de sa composition.
Le cône de la Soufrière est, comme le pic de Ténériffe, et
comme les puys domitiques de l’Auvergne , dont il ne diffère que
par la forme échancrée de son sommet, entièrement formé par
une masse de roches solides , sortie tout d’une pièce et à pentes
très abruptes. Aussi n’est-ce que dans la petite plaine qui entoure
son pied qu’on rencontre les débris de ses projections fragmen-
taires, qui ont à peine pu s’arrêter sur ses flancs. Le cône occupe
sensiblement le centre d’une cavité légèrement elliptique , domi-
née par des crêtes qui forment autour de lui un cratère de soulè-
vement d’une médiocre étendue , mais parfaitement dessiné.
Les roches qui constituent le cône et le cratère de soulèvement
sont très distinctes. La dernière est une dolérite basaltoïde , dont
la couleur, à l’état normal, est le gris foncé ou noirâtre, mais qui
devient rougeâtre par décomposition superficielle. Sa pesanteur
spécifique moyenne est de 2,90â. L’examen à la loupe et le triage
mécanique y font reconnaître du feldspath labrador en cristaux ,
dont la longueur atteint rarement 3 millimètres, mais présentant
très nettement le double miroitement caractéristique des feldspath s
du sixième système, de Faugite en petits cristaux d’un noir bril-
SÉANCE DU 19 MA! 1851.
m
lant, de très petits grains assez rares de péridot , enfin du fer oxy-
dulé, dont la présence rend la roche extrêmement magnétique.
Les deux analyses suivantes s’appliquent : la première à la roche
d’un vert noirâtre qui constitue, au sommet du morne l’Echelle , le
point culminant du cirque de soulèvement; la seconde à une
roche analogue , mais à surface légèrement rougeâtre , provenant
d’une localité voisine.
Densité : 2,907.
Densité : 2,904.
Silice (1)
. 48,71
48,68
Alumine
. 20,00
19,34
Potasse
Soude
0,381
. 3,08 j
4,51
Chaux
. 10,95
12,83
Magnésie
2,70
3,55
Protoxyde de manganèse.
2,94
3,24
Protoxyde de fer
. 11,25
7,85
100,00
100,00
La première de ces roches contenait, avant dessiccation, 0,89
pour 100 d’eau; la seconde, dont la surface était légèrement alté-
rée, 1,52. On voit que ces deux échantillons ont une composition
sensiblement semblable. La différence sur les proportions d’oxyde
de fer s’expliquent par cette circonstance que la première roche a
été analysée avant la séparation du fer oxydulé, tandis que, pour
la seconde, on en avait préalablement extrait 3,50 pour 100.
En définitive , cette roche est parfaitement caractérisée comme
dolérite.
Il n’en est pas de même de celle qui constitue le cône central.
Quoique parfaitement homogène dans toute sa masse , il serait
difficile, dès l’abord, de la caractériser par une dénomination pré-
cise. Elle peut, néanmoins, se ranger assez bien parmi les roches
queM. Abich a appelées trachy-clolérites : sa pesanteur spécifique,
qui est de 2,75, s’y prête bien. Elle tient du trachyte par ses ca-
ractères extérieurs : fendillement , aspect légèrement grenu , ru-
desse au toucher, et cette analogie est confirmée par la présence
de pierres ponces , en relation évidente avec elle ; d’un autre côté,
si l’on examine à la loupe les nombreux feldspatlis incolores, fen-
(1) La première de ces analyses a été faite au moyen de l’acide
fîuorhydrique, la silice étant dosée par différence; dans la deuxième,
l'attaque a été faite par le carbonate de soude, et les alcalis dosés par
différence.
SÉANCE DU 19 MAI 185 J »
/|26
dillés, qui se détachent sur sa pâte grenue noirâtre , on leur recon-
naît le miroitement et le clivage du labrador, et l’analyse chi-
mique conduit à la formule de ce feldspath.
Voici, en effet, les résultats de cette analyse, faite au moyen de
l’acide chlorhydrique, qui dissout entièrement le minéral, et vé-
rifiés par une attaque au carbonate de soude, pour la détermina-
tion de la silice :
Oxygène.
Silice. . . .
54,25
28,18
6,4
Alumine. . .
29,89
13,96
3,2
Potasse. . . .
0,33
0,06 's
Soude. . . .
Chaux. . .
3,63
11,12
0,93 |
3,12
> 3,38
1,0
Magnésie. . .
0,70
0,27 )
99,92
La densité des cristaux est de 2,697. Les caractères physiques
s’accordent donc avec la composition pour faire rapporter ce feld-
spath au labrador. Le léger excès de silice s’explique, sans doute,
par la difficulté qu’on éprouve à séparer, par le triage, des petits
fragments du feldspath les grains de quartz qui s’y trouvent mêlés
comme nous allons le dire.
Si l’on vient maintenant à faire l’analyse de la roche prise en
masse, on lui trouve la composition suivante :
Silice 57,95
Alumine 15,45
Potasse 0.56
Soude 3,03
Chaux 8,30
Magnésie 2,35
Protoxyde de manganèse. . 1,40
Protoxyde de fer 9,45
98,49 (I).
Elle contient donc sensiblement plus de silice que n’en peut
donner le labrador. Et cette circonstance semble d’autant plus
singulière, qu’à côté de ce feldspath on distingue des pyroxènes ,
de très petits grains de péridot et de fer oxydulé , mélange qui
devrait, au contraire, abaisser la teneur en silice. Frappé de cette
(1) Cette roche ne perd pas sensiblement d'eau par la calcination.
Une portion de la perte dôit porter sAir le fer, qui est à l’état d’oxy-
dule magnétique.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
h'1 7
singularité, j’examinai avec le plus grand soin les petits fragments
feldspathiques triés pour l’analyse ; j'y reconnus en petite quantité
des grains parfaitement liyalins, quoique amorphes, et qui se dis-
tinguent, par cette circonstance , des fragments feldspathiques
polyédriques. Au chalumeau , ces petits grains sont inaltérables,
et l’analyse de 2 décigrammes environ que j’ai pu m’en procurer
par le triage m’a donné 88 pour 100 de silice, le reste étant un
peu d’alumine et de chaux , provenant sans doute de mélange.
Pour m’assurer de ce fait par un essai plus décisif, je fis l’ana-
lyse mécanique d’une roche provenant d’une autre partie de la
même île , et présentant les deux mêmes minéraux , mais avec de
plus grandes dimensions, et le minéral hyalin, en grains amor-
phes, ici légèrement violacé, a donné plus de 90 pour 100 de si-
lice , le reste se composant d’alumine et surtout de chaux.
Dans quelques vallées de la Guadeloupe et de la Martinique,
on trouve le sol formé d’un détritus rougeâtre , mélangé de très
nombreux dodécaèdres de quartz , dont la présence s’explique
ainsi facilement : les roches avoisinantes présentent le quartz en
abondance.
Enfin l’analyse d’une ponce recueillie à la base même de la
Soufrière et celle d’une obsidienne trouvée dans une vallée voi-
sine, faites, comme la précédente, par la double attaque à l’acide
fluorhydrique et au carbonate de soude , ont fourni les résultats
suivants :
Ponce de la Soufrière.
Obsidienne des Habitants.
Silice .
. . . . 69,66
74,11
Alumine
. . . . 9,69
10,44
Potasse
9 >2
1,15
Soude
. . . 3,32
4,84
Chaux
. . . . 3,32
2,12
Magnésie. ....
. . . . 3,18
0,44
Protoxyde de manganèse. . traces
0,78
Protoxyde de fer. .
. . . . 8,39
6,25
99,08 100,13
Ges deux roches n’agissent pas sensiblement sur l’aiguille ai-
mantée , et contiennent, principalement la dernière, une propor-
tion considérable de silice.
On voit, en définitive, que la roche qui constitue le cône de la
Soufrière présente une double singularité : elle doit être rangée
parmi les trachytes, tant par ses caractères extérieurs que par son
passage visible à la pierre ponce, et elle a cependant pour base le
SÉANCE DU 19 MAI 1851 .
128
labrador, qui est le feldspath caractéristique des roches dolériti-
ques ; et en même temps que ce feldspath , le moins silicate de la
série, elle contient du quartz en excès. Ce fait vient donc se ranger
à côté de celui, signalé d’abord par Berzélius, de la présence de
l’oligoclase dans les granités de la Suède. Je dois ajouter que
M. Dufrénoy, en traitant par l’acide chlorhydrique les cendres
rejetées par la Soufrière, avait reconnu que cette opération frac-
tionnait ces cendres en deux parties, dont l’une, soluble, ne diffé-
rait pas beaucoup de la formule du labrador, mais contenait du
fer, et dont l’autre, à très petits grains hyalins, lui avait paru se
rapprocher de la composition d’un feldspath saturé de silice. Cette
partie insoluble contenait sans doute les grains quartzeux dont il
vient d’être question.
Il est naturel de se demander quelle est l’origine de ce quartz.
Quoique parfaitement transparent , il est impossible d’y découvrir
aucune forme cristalline ; néanmoins, sa densité est sensiblement
semblable à celle du quartz hyalin. Chaufïé au rouge-blanc, il ne
donne pas de perte sensible, et ne change pas d’aspect. On ne peut
donc pas le considérer comme le résultat de l’altération du feld-
spath, comme l’hydrophane signalé par M. Beudant dans les
roches de la Hongrie ?
Faut-il admettre qu’il ne consiste qu’en fragments de quartz
empruntés à une roche sous-jacente, granitique ou porplivrique,
par exemple, et qui n’auraient pas été entièrement fondus dans la
nouvelle pâte par l’action volcanique?
Je pencherais plutôt à considérer ce quartz amorphe, répandu
dans une roche volcanique d’origine récente, comme un résidu
laissé après la cristallisation des minéraux qui composent la roche.
Ce serait adopter, en la généralisant, l’ingénieuse idée de M. Dela-
fosse, qui assimile la dissolution des minéraux (1) par la silice à
une haute température, à celle des sels ordiuaires par l’eau. Cette
théorie s’applique remarquablement aux obsidiennes. Augmentez,
en effet, la proportion du dissolvant, et vous passerez de la roche
que nous venons de décrire à l’obsidienne avec laquelle elle est en
relation, et qu’on peut, à ce point de vue, regarder comme une
eau mère qui viendrait à se solidifier rapidement. Ajoutons que
dans le même groupe de la Soufrière on trouverait un fait qui
viendrait à l’appui de cette sorte de liquation qui aurait fait mon-
ter à la surface l’excès du dissolvant. A peu de distance, mais pres-
(!) Et probablement surtout des minéraux alumineux.
SEANCE DU 19 MAI 1851 .
429
que au niveau de La mer, il est sorti des laves modernes, d’une
densité égale à 2,96, et dont la composition n’offre que 45 pour
100 de silice, une proportion notable de magnésie, et pas la
moindre trace de potasse. À TénérifFe, les faits se prêtent aussi
très bien à cette explication ; en effet, les ponces qui ne se trou-
vent point dans cette île à une hauteur inférieure à celle de Piedras-
Blancas, ou de 2650 mètres, et les obsidiennes dont les points
d’éruption sont très supérieurs au plateau des Canadas, contien-
nent moyennement, d’après les analyses de M. Abicli et les mien-
nes, environ 60 pour 100 de silice, et n’ont qu’une densité de 2,48.
Les laves du Portillo, dont le niveau est sensiblement inférieur et
dont j’ai déjà fait remarquer (1) la composition et l’aspect inter-
médiaires entre le trachyte et le basalte, contiennent 57 pour 100
de silice, et ont un poids spécifique de 2,67, tandis que la lave de
Guimar, sortie à 800 mètres environ au-dessus du niveau de la
mer, et qui l’atteint bientôt, est chargée de péridot et offre une
densité de 3,009 et 46,8 pour 100 de silice.
Il y a des volcans cpii donnent, à des hauteurs diverses, des
produits remarquablement semblables. L’Etna, entre autres, pré-
sente cette circonstance d’une manière frappante. J’ai analysé, en
effet, deux échantillons des laves de ce volcan, qui m’avaient été
obligeamment remis par M. Elie de Beaumont. L’un, appartenant
à la coulée de 1833, avait été pris au point même où elle déborde
le cratère supérieur, à 3300 mètres de hauteur ; l’autre, provenant
de la lave de 1669, avait été pris à son entrée dans la mer. L’ana-
lyse de ces deux échantillons a fourni presque identiquement les
mêmes résultats. Le pic de Fogo offre quelque chose d’analogue ;
mais il faut observer que ces volcans ne produisent ni ponce, ni
obsidienne, et ces différences dépendent probablement du degré de
fluidité que peut acquérir la masse en fusion dans l’intérieur.
En terminant ce mémoire, je résumerai en quelques mots les
essais que j’ai faits sur l’obsidienne dont il a été parlé plus haut. Je
me suis assuré que celle-là et plusieurs autres, provenant d’autres
localités, se transforment en ponces plus ou moins parfaites à la
simple chaleur d’une lampe d’émailleur, et au point de ramollis-
sement. Ce phénomène de boursouflement est brusque et dure
seulement quelques secondes. La ponce provenant de l’obsidienne
de la Guadeloupe est d’une légèreté telle, qu’elle cède à la moin-
(1) Voyage géologique aux Antilles et aux îles de Ténèrijje et
de Fogo , t. ï ; p. 167,
ABO SÉANCE DU 19 MAI 1851.
dre pression, et se disperse au moindre souffle. La roche n’a subi
qu’une perte de 6 millièmes de son poids. Le verre vu en masse
est presque noir; la ponce est soyeuse et parfaitement blanche;
mais si on la refond de nouveau à un feu de forge, elle reprend
sa teinte foncée.
Je donnerai, dans un autre mémoire, les résultats de recherches
sur les relations qui existent entre la composition des obsidiennes,
leur état physique, et la rapidité de leur transformation en ponce,
ainsi que le degré de porosité qu’elles peuvent ainsi acquérir. Je
ferai seulement observer aujourd’hui que l’accroissement de vo-
lume qui en résulte, et que je me propose de mesurer exactement,
est tel, qu’il subirait de concevoir une température, relativement
assez faible, appliquée pendant quelques minutes à une masse
d’obsidienne solide dans le cratère d’un volcan , pour déterminer,
par le seul fait de ce changement de volume, et sans l’intervention
d’un gaz étranger à la roche, une éruption de ponces et de cen-
dres volcaniques.
M. Coriiuel adresse à la Société le travail suivant :
Catalogue clés coquilles de mollusques entomostracés et fo *
raminiféres du terrain crétacé inférieur de la Haute -
Marne , avec diverses observations relatives à ce terrain ,
par M. J. Cornuel.
Lorsque j’ai dressé la liste de fossiles qui accompagne mon mé-
moire sur le terrain crétacé inférieur du département de la Haute-
Marne ( Mémoires de la Société géologique de France j lre série,
tome IV), il n’existait encore aucun ouvrage français un peu
étendu sur la faune de cette partie de la série géologique. Je puis
maintenant remplacer cette liste d’une manière utile pour la
science , en prenant pour guides deux publications importantes
qui ont paru depuis, et qui sont la Paléontologie française de
M. Alcide d’Orbigny, et le mémoire de M. Leymerie sur le dé-
partement de l’Aube , fait avec la collaboration de M. Deshayes
pour les fossiles , et publié dans les tomes IV et V du recueil
. précité.
Plusieurs raisons me font penser que le catalogue qui va suivre
ne sera pas sans utilité, surtout en le présentant divisé en autant
de listes qu’il y a de dépôts fossilifères distincts. D’abord il y a des
espèces que M. Leymerie n’a pas rencontrées, et qu’il est bon
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
431
d indiquer. Ensuite M. d’Orbigny a presque toujours procédé par
groupes de couches , ne pouvant pas s’astreindre à le faire par
couches séparées , en raison de la différence de constitution géolo-
gique des divers bassins crétacés qu’il avait à étudier; de plus, il
n’a commencé à s’occuper des espèces de la Haute-Marne qu’à la
page 364 du premier volume de son ouvrage , et il ne les a pas
indiquées toutes dans ses citations de localités. Enfin, ce n’est que
par les fossiles que l’on peut bien comparer les dépôts crétacés in-
férieurs; et M. le docteur Fitton a fait voir tout le parti que l’on
peut tirer de ce mode de comparaison , tant par l’intéressante com-
munication qu’il a faite, en 1844, à la Société géologique de
France ( Bulletin , 2e série, tome Ier, page 438), que par son beau
Mémoire publié dans le Journal de la Société géologique de Londres ,
août 1847, IIIe volume.
Bans mes listes, je suivrai, pour les noms de genres et d’espèces,
l’ouvrage de M. Aie. d’Grbigny, qui est le plus étendu que nous
ayons sur les fossiles crétacés, tout en craignant que cet auteur n’ait
prématurément marqué les limites géologiques des espèces, et en
regrettant qu’il ait cru devoir modifier la nomenclature au point
de reléguer dans la synonymie beaucoup de dénominations adop-
tées depuis longtemps dans le langage paléontologique. Aussi rap-
pellerai-je, à la suite de certains noms donnés par lui , ceux qu’ont
proposés MM. Deshaves et Leymerie , pour les espèces figurées
dans le Mémoire sur le département de l’Aube.
Je ne placerai ici que de courtes observations au sujet de cer-
tains dépôts , la description pétrographi que des couches se trou-
vant dans mon Mémoire cité plus haut, et dans la notice qui y
fait suite, et auxquels je renverrai en en rappelant la page avec la
lettre du paragraphe. Seulement, pour faire mieux remarquer
l’apparition et la disparition des animaux dont les têts se sont
fossilisés, je suivrai l’ordre naturel des couches, de bas en haut,
au lieu de l'ordre inverse , c’est- à-dire de haut en bas, que j’avais
primitivement adopté.
Les relations qui existent entre le sol crétacé inférieur de la
Haute-Marne et celui des départements de l’Aube et de l’Yonne
seront indiquées par une sorte de synonymie, dans laquelle je ren-
verrai à ce qu’en ont écrit M. Royer {Bulletin de la Société géolo-
gique, lre série, tome IX, page 428), Thirria {Annales des mines ,
tome XV, année 1839), Leymerie Ç Mémoires de la Soc. géol . ,
lre série, tome IV), et Lajoye {Bulletin de la Soc. géol., I1*® série,
tome X, page 21 ).
SÉANCE DU 19 MAI 1851,
Zi 32
À la suite de chaque nom de fossile on trouvera un des signes
suivants , employés par M. Leymerie , et dont voici Texplication :
rr. = Très rare,
r. = Rare,
ar. == Assez rare,
ac. = Assez commun,
c. = Commun,
cc. = Très commun.
A la fin de la ligne seront des chiffres indiquant le numéro de
chaque couche dans laquelle le même fossile a été rencontré.
i. Indication des couches et de leurs fossiles.
1. Marne argileuse noirâtre.
(Cornuel : R, page 253. — Royer : partie inférieure des marnes, n° 8.
— Leymerie : limon ou argile grossière, p. 339. )
Je n’ai encore pu recueillir dans cette couche, où les fossiles
sont rares et mal conservés , que la
Trigonia rudis, Park. (T. palmala, Desh.). — r. 1, 3, 12.
2. Fer géoclique .
( Cornuel : Q, page 251 . — Royer : minerai de fer, n° 8. — Thirria :
fer hydroxydé en plaquettes géodiques, page 26. — Leymerie:
oxyde de fer souillant le dépôt de sable, p. 339. )
On n’a encore trouvé dans ce dépôt que les fossiles suivants :
Trockus striatulus , Desh. — r. 2, 5.
Panopœa Carteroni, d’Orb. — r. 2,7.
Crassatella Robinaldina , d’Orb. — r.
Trigonia long a , Ag. {T. Lajoyei ,
Desh.). — r. 2, 5.
Pinna Robinaldina , d’Orb. — r. 2, 1 2.
La marne brunâtre qui s’enchevêtre dans le fer géodique à Mo-
rancourt , et qui est comme une suite de la marne argileuse noi-
râtre et le prélude de la marne calcaire bleue ( Métn ., page 249), ne
m’a encore donné que les
Pholadomya Agassizii, d’Orb. — ar.
2, 5, 12.
Corbula striatula, Sow.— ar. 2, 7, 12.
Isocardia.... ( nov . species). — ar, 2, 5,
12, 13.
Astarte formosa, Fitt. — rr. 2.
Crassatella Robinaldina, d’Orb.— rr.
2, 5.
Pectunculus marullensis ? Levin. — r.
2, 5.
3ull de la Soc Gêol de France.
VUE DU GRAND ARARAT
prise -de la .cime -'du. Petit Ararat en AoûL 18 44 .
Pl.V,
Synacr Fordag
î7 Koesôdai
Olacier
Cône d éruption
Cône d'éruption
: 9 8
SÉANCE DU 19 MAI 1851. /j38
Area Cornueliana, d’Orb. — ar. 2,
5, 12.
Pinna Robinaldina, d’Orb. —r. 2, 12.
Terebratula prœlonga? Sow. (jeune).
— ac. 2, 5.
Ostrea..,. (indéterminée). — r. 2, 12.
Ostrea citée ici est plus courte, plus élevée et plus fortement
plissée que Y Ostrea Boussingaultii , d’Orb.; elle reparaît dans la
couche rouge.
3. Sable et grès ferrugineux inférieurs.
(Cornuel : P, page 250. — Royer : sable jaune ou de couleur cendrée,
n° 8. — Thirria : sable siliceux à gros grains, d’un jaune ocracé,
passant quelquefois à un grès tendre, page 26. — Leymerie : sable
quartzeux, 339. )
Pas de coquilles fossiles.
4. Sable blanc.
(Cornue! : O, page 249. Royer : sable blanc , n° 8. — Thirria :
sable blanc micacé et à grains fins, page 26. — Leymerie : sable
offrant très souvent la couleur blanche, page 339. )
Pas de coquilles fossiles.
L’observation dè M. Leymerie, que ce sable est souillé çà et là
par des veinules de lignite, se vérifie maintenant dans la sablière
du parc de Trémilly et dans celle qui est voisine de ce parc.
La marne argileuse noirâtre , le fer géodique , la marne qui lui
est subordonnée , et les sables ferrugineux et blancs ne se présen-
tent pas simultanément dans toutes les localités. ïls fonctionnent ,
comme l’a dit M. Royer, n° 8, page 430, ou comme des dépôts
qui concouraient à niveler la surface inégale du terrain sous-ja-
cent. C’est ainsi qu’ils manquent souvent sous le dépôt qui va
suivre , ou qu’on n’y trouve que l’un ou l’autre des sables ou tous
deux réunis, ou seulement le fer géodique et la marne argileuse
noirâtre, ou le fer géodique seul , ou enfin un des sables et le fer.
La marne calcaire bleue dont je vais parler, quoique plus con-
stante, laisse encore, en quelques endroits, le calcaire à Spatan-
gues en contact avec le fer géodique ou avec la roche jurassique.
5. Marne calcaire bleue et calcaire à Spatangues.
(Cornuel : N, page 248 ; M, page 245. — * Royer : marne calcaire bleue
et calcaire à structure grossière, n08 6 , 7 et 8. — Thirria : marnes
bleuâtres ou jaunâtres et calcaires marneux, marno-compactes ou
compactes, page 25. — Leymerie : calcaire à Spatangues et ses
Soc. géol, 2e série, tome VIII. 28
SÉANCE DU 19 MAI 1851,
hU
marnes, page 339. — Lajoye : lits de calcaires et de marnes argi-
leuses, fissiles, jaunâtres, n° 5, page 23.)
Ces deux parties ne constituent qu’un même dépôt , la couleur
n’étant qu’un caractère d’autant plus secondaire que, dans certains
endroits , la marne prend la teinte jaunâtre et le calcaire la teinte
bleue. Sans modifier le détail des descriptions qui en ont été don-
nées, on peut généraliser en disant que la partie inférieure de cet
ensemble est une marne calcaire plus ou moins homogène, et que
la partie supérieure est un calcaire plus ou moins bien constitué.
Les fossiles de la marne calcaire bleue et du calcaire à Spatan-
gués étant ici absolument identiques , je n’en dresse qu’une seule
liste, qui s’appliquera indistinctement à chaque partie du dépôt.
CEPHALOPODES.
Belemnites dilatatus, Blainv, — rr. 5.
— subfusiformis? Rasp. — rr. 5.
— pistUif'ormis, Blainv. — rr. 5.
— Cornuelianus, d’Orb {B. subqua-
dralus, Rœrri., d’Orb., sup-
plément). — ar. 5.
Naulilus pseudo-elegans , d’Orb. - c.
5, 13.
Bec de Naulüus (1). — rr. 3.
Ammonites Leopoldinus, d’Orb. - ar.
5.
— ci-yptoceras , id. — rr. 5.
- — Caslellanensis, id. — rr. 5.
— radiatus, Brug. — ar. 3.
— bidichôtomus , Leym. — rr. 5.
— neocomiensis, d’Orb. — rr. 5.
— Carter oni, id. — r. 5.
Crioceras Cornuelianus , id. — rr. 3.
GASTÉROPODES.
Turrüella angulata , d’Orb. — r. 5.
Scalaria canaliculata, id. — r. 3.
Eulima albensis, id. — ar. 5.
Nerinea Royer iana, id. — rr. 3.
- — matronensis, id. • — rr. 5.
— - bifurcata, id. — rr. 5.
Acteon Dupiniana , id. — ar. 5, 7.
— af finis, id. — ar. 5.
— - marginata , id. ( Auricula mar-
ginata, Desh). — ar. 5.
I Acteon albensis, id. — ar. 5, 12.
! Binginella lacryma, id. (an nova
species). — ar. 5.
j Natica lœvigata, id. ( Ampullaria lœ-
vigata, Desh.). — ac. 5, 12.
— bulimoides, id. ( Ampullaria bu-
limoides, Desh.). — ac. 3.
— Cornuehana, id. — r. 5, 12.
Trochus striatulus, Desh. — ar. 2, 5.
Solarium neocomiense, d’Orb.— ar. 5.
Turbo Mantellii , Leym. — ar. 5.
— elegans, d’Orb. ( Lütorina ele-
g ans, Desh.) — ar. 5.
Pleuroiomaria neocomiensis, d’Orb. —
ac. 3.
Rostellaria Dupiniana, id. — ar. 3.
— Robinaldina, id. — c. 5.
Pterocera Moreausiana, id. — ar. 5.
— Dupiniana, id. — ar. 5.
— speciosa, id. — ar. 5.
— pelagi, id. — ac. 5.
Cerühium terebroides, id. — ac. 5.
— Philippgii, Leym. — ar. 5.
— Beaudouini, d’Orb. — r. 3.
— albense, id. — r. 3, 12.
— Clementinum, id. — r. 5.
— neocomiense, id. — r. 5.
LAMELLIBRANCHES.
Panopœa irregularis, d’Orb. — r. 5.
— • Cottaldina, id. — r. 3.
— neocomiensis, id. ( Pholadomya
(1) Probablement du Nanti las pseudo-elegans jeune , ce Nautilas
étant la seule espèce qu’on ait trouvée jusqu’à présent dans ce dépôt.
SÉANCE î)tf 19 MAI 1851.
neocomiensis, Leym.), — cc,
5, 12, 13.
Panopœa rostrata , id. — ac. 5,
— recta, id. — r. 5.
Pholadomya elongata, Mu est. — ar.
5, 12.
— Agassizii, d’Orb. — ar. 2, 5, 12.
Mactra matronensis, id. — rr. 5.
Analina Agassizii, id. — ar. 5, 12.
— Cornueliana , id. — ar, 5.
— subsinuala, id. — ar. 5.
Periploma Robinaldina, id. — rr. 3,
12.
Fistulana dilatata, id. ( Gastrochœna
dilatata,Desh.). — ar. 5, 12.
Donacilla Couloni, id. — - rr. 5.
Arcopagia concenlrica, id. — ac. 5, 12.
Tellina Carleroni, id. ( Tellina angu-
lala, Desh.). — rr. 5.
Venus Brongniartina, Leym. — ac. 5.
— Ricordeana, d’Orb. — ar. 5.
— matronensis, id. — rr. 3.
— obesa, id. — rr. 5, 13.
— Dupiniana, id. — ar. 5.
— Robinaldina, id. — ar. 5, 12.
— Cornueliana, id. — ar. 5.
— Galdrina, id. — ar. 5, 12.
• — Cottaldina, id. — ar. 5.
— vendoperala, id. — ( Lucina ven-
doperana, Leym.). — ac. 5,7. :
• — vassiacensis, id. — r. 5, 12.
Corbula carinata , id. — [C. neoco -
miensis, d’Orb., t. IIÏ, p. 761).
— ac. 5
Cardium peregrinosum, id. — ac. 5,
7, 12, 13.
— imbricalarium, id. ( Lucina im- '
bricataria, Desh. — ar. 5. j
— subhillanum, Leym. — ac. 5, 12.
— impressum, Desh. — ar. 5.
— inornatum, d'Orb. — rr. 5. j
Isocardia neocomiensis, id. ( I. prœ- '
longa, Desh.). — ar. 5.
Opis neocomiensis, id. (1). — ar. 5,12. j
.m
Astarle gigantea, Desh. — ar. 3,
— » Moreausa? d’Orb. — rr. 5, 13,
— Reaumontii, Leym. — ar. 5.
— - transversa, id. (A. neocomiensis ,
d’Orb., t. III, p. 759). — ar. 5.
— numismalis, d’Orb. — ac. 5.
— strialo-costata, d’Orb. — ac. 5.
— disparilis , id. — ac. 5.
— • elongata, id. (A. oblongala ,
Desh.). — r. 5.
— lalicosta, Desh. — ar. 5, 7, 12.
Crassatella Cornueliana, d’Orb. (2)
(. Pandora ? œquivalvis, Desh.).
— ar. 7, 5, 12.
— ■ Robinaldina, id. — rr. 2, 5.
Cardita neocomiensis, id. — r. 5.
— quadrata, id. — r. 5.
Cyprina rostrata, Fitt. (C . neocomien-
sis, d’Orb., t. III, p. 759. —
C. bernensis, Leym J. — r. 5.
Corbiscordiformis, d’Orb. ( Venus coi'~
diformis , Desh. — ar. 2, 7,
12, 13.
Lucina Cornueliana, id. — ac. 5.
Trigonia longa, Ag. (T. Lajoyei,
Desh.). — ac. 2, 5.
— carinata, id. (T. harpa , Desh.).
— ar. 5.
— caudala, id. — ac. 5, 7, 12.
— divaricala, d’Orb. — ac. 5.
— ornala, id. — ac. 5, 12.
— rudis , Parle. [T.palmata, Desh.).
— ar. 1, 5, 12.
Nucula impressa, Sow. — ar. 5, 7,
12.
— - simplex, Desh. — ar. 5, 12, 13.
— scapha, d’Orb. ( Leda scapha,
d’Orb., t. III, p. 761). — ar.
5, 7, 12, 13.
Pectunculus marullensis, Leym. — rr.
2, 5.
Area Gabrielis, d’Orb. ( Cucullœa Ga •
brielis, Leym.). — ac. 5, 13.
— Moreana , id. — rr. 5.
(1) M. d’Orbigny n’a figuré que le jeune de cette espèce; car il lui
donne 7 millimètres de largeur, tandis qu’il en a été trouvé un indi-
vidu dont la largeur est de 32 millimètres.
(2) Cette espèce est inexactement dessinée dans la planche 264,
fig. 8, de la Paléontologie française, Terrains crétacés. Si j’en juge
d’après deux individus ayant les deux valves, il y a un ligament ap-
parent et moins d’épaisseur. Les deux valves se réunissent en gouttière
depuis les crochets jusqu’à l’extrémité postérieure ou anale.
&36 SÉANCE DU 19 MAI 1851.
Area securis , id. ( Cucullœa securis ,
Leym.). — ac. 5.
— Raulini, id. — rr. 5.
— Cornueliana, id. — ar. 2, 5,12.
Pinna sulcifera, Leym. (1). — ar. 5,7.
Mylilus œqualis , d’Orb. ( Modiola bi-
parlüa, Sow. in Leym.). — ar.
5, 13.
- — Carier oni? id. — rr. 5.
— Cornuelianus, id. — ar. 5,12,13.
— matronensis , id. — r. 5.
— simplex , id. {Modiola simplex ,
Desh. — ar. 5.
— lanceolatus, Sow. — rr. 5, 13.
Lithodomus oblongus, d’Orb. — ar. 5.
— amygdaloides , id. ( Modiola
amygdaloides, Desh. — ar. 5.
— Archiaci, id. ( Modiola Archiaci,
Leym.). — ar. 5, 12.
Avicula Collaldina, id. — rr. 5.
— Cornueliana, id. — ar. 5.
— pectinala, Sow. ( Avicula subra -
diata, Desh. — ar. 5.
Gervilia anceps, Desh. (2). — ac. 5.
Perna Mulleli , Desh. — ac. 5, 13.
Inoceramus neocomiensis , d'Orb. —
rr. 5.
Lima Carleroniana, id. — ac. 5.
— Royeriana, id. — ac. 5, 7, 12.
— undata, Desh., et L. comata,
Desh. — ar. 5.
— Tombeckiana, d’Orb. — rr. 5.
— Dupiniana , id. — rr. 5.
— neocomiensis, id. — ar. 5.
Pecten Leymerii, id. ( Hinniles Ley-
merii, Desh-). — ar. 5, 7.
— Goldfussii, Desh. — ar. 5.
— Archiaciana, d’Orb. — rr. 5.
— crassitesta, Rœm. — rr. 5.
— Robinaldinus, d’Orb. — ar. 5, 12.
! Pecten Carteronianus, id. — ar. 5.
— Cottaldinus, id. — ar. 5, 12.
• — Coquandianus, id. — ar. 5.
— strialo-punctatus , Rœm. — ar.
5, 13.
Janira atava, d’Orb. — ar. 5.
— neocomiensis, id. — ar. 5.
Spondylus Rœmeri, Desh. — rr, 5.
— striatocoslatus , d’Orb. — rr. 5.
Plicatula asperrima , id. — rr. 5, 13.
— Rœmeri, id. — rr. 5, 7, 13.
— placunea, Lamk. — ar. 5, 13.
Ostrea macroptera , Sow. — ar. 5, 7,
13.
— Couloni, d’Orb. ( Exogyra sub-
sinuata, Leym.). — cc. 5, 6, 7.
— Tombeckiana , id. — ac. 5, 13.
— BoussingœuUii , id. {Exogyra
subplicala , Rœm. in Leym.).
— ar. 5, 7, 12, 13.
Anomia lœvigala, Sow. — rr. 5.
Rhynchonella depressa, d’Orb. ( Tere -
bralula rosir ata, Leym.). —
ac. 5.
— lata, id. — ar. 5, 13.
Terébralula tamarindus,Sow. (et une
variété qui est la T. subtriloba ,
Desh.). — ac. 5, 13.
— pseudo-jurensis, Leym. — ar. 5.
— prœlonga, Sow. — ar. 2, 5.
— faba , id. — r. 5, 15.
— sella, Sow. — r. 5, 13.
— semistriata, Defr. {T. suborbicu -
laris , d’Areh., et T. birngu-
laris , Desh. in Leym.). — ac. 5.
Terebratula reticulata, d'Orb. — ar.
5.
— oblonga, id. — ar. 5.
— neocomiensis, id. — rr. 5.
Thecidea telragona, Rœm. (3). — rr, 5.
Nombre des espèces indéterminées . — 4 Turritella , 1 Scalaria ,
1 Bulla , 1 Natica , 2 Pleurotomciria , 3 Cerithium , 1 Dentalium ,
2 Panôpœa , 1 Fistulana , 3 Venus , 1 Isocardia , qui se trouve aussi
dans la marne du fer géodique, ainsi que dans la couche rouge et
il) Cette espèce atteint une longueur de 240 millimètres.
2) Dans l’âge adulte, cette espèce atteint 275 millimètres dans sa
plus grande dimension.
(3) Je prends les noms de cette espèce sur la planche 522 de la
Paléontologie, n’ayant pas encore le texte qui en contient la descrip-
tion.
SÉANCE DU 19 MAI 1851, 437
l’argile à Plicatules citées plus bas ; 1 Mylilus) 2 Avicula , 1 Pecten ,
2 Spondylus (1).
6. Marne argileuse jaune .
(Cornuel : L, page 245.)
Cette marne forme le passage du calcaire à Spatangues à l’argile
ostréenne, à laquelle il y a d’autant plus lieu de la réunir que sa
couleur jaune ne paraît pas se maintenir uniformément partout,
et quelle prend souvent celle de cette argile. Considérée isolément,
elle est d’ailleurs très peu fossilifère. Je n’y ai encore trouvé que
trois échantillons de Y Ostrea Couloni, d’Orb. ( Exogyra subsinuatai
Leym. ), portant quelques rayons divergents sur la valve supérieure,
et constituant une variété de l’espèce.
7. Argile ostréenne (2) avec ses alternats et lumachelles.
(Cornuel : K, page 243. — Royer : argile grise avec bancs de calcaire
argileux, n° 6. — Thirria : argiles marneuses, marnes et calcaires
lamellaires ou marneux, en couches alternantes, page 24. — Ley-
merie : argiles ostréennes et lumachelles, page 334. — Lajoye :
couche épaisse d’argile rouge bleuâtre ou grisâtre, avec plaques
, subordonnées de calcaire lumachelle bleu ou brun, n° 4, page 22.)
Les fossiles de ce dépôt sont :
FORAMINIFÈRES.
(Mém. de la Soc. géol., 2esér., t. III.)
Nodosaria clava, Cornuel. — rr. 7.
Denlalina monïle, id. — ar. 7,
— antenna, id. — r. 7.
— intermedia, id. — r. 7.
— chry salis, id. — r. 7.
Marginulina crassa, id. — ac. 7.
— mutabilis, id. — ac. 7.
— id., var. interrupta, Cornuel. —
ac. 7.
Marginutina gracilis, id. — r. 7.
— lata, id. — ar. 7.
Planularia longa, id. — rr. 7.
— reticulata, id. — c. 7.
— costata, id. — c. 7.
Cristellaria lituola, id. — c. 7.
— excentrica , id. — c. 7.
— volula, id. — r. 7.
Operculina angularis, id. — - ar. 7.
Textularia spica, id. — rr. 7.
— elongata, id. — rr. 7.
(1) Je ne parle pas des polypiers et des radiaires, bien qu’il en ait
été trouvé un certain nombre d’espèces dans ce dépôt et dans la couche
n° 13, surtout à Saint-Dizier. Ils peuvent donner lieu, plus tard, à
une notice spéciale.
(2) J’ai emprunté ce nom è Y Ostrea Leymerii , Desh., qui est très
commune dans cette argile. Lorsque j’ai décrit le terrain crétacé in-
férieur de la Haute-Marne, on n’y connaissait que cette Ostrea. les
autres portant alors les noms d "Exogyra et de Gryphœa.
438
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
ENTOMOSTRÀCÉS.
( Mém . delà Soc. géol., 2e sér.,
t. I et III.)
Cythere amygdaloides , Cornuel., et
ses six variétés cylindracea ,
piriformis , arcuata , brevis ,
lata et punctulata. — ce. 7.
— acuta, id., et sa variété recta. —
rr. 7.
— auriculata , id., et ses variétés
semi-marginata et simplex.
— ac. 7.
— sculpta , id. — ar. 7.
— - inversa , id., et sa variété imitans.
— rr. 7.
MOLLUSQUES.
CÉPHALOPODES.
Conoteuthis (nov. spec .) fl). — rr. 7.
Nautilus Requienianus, d’Orb. — rr. 7.
GASTÉROPODES.
Acteon Dupiniana, d’Orb. — r. 5, 7.
Cerithium matronense, id. — r. 7.
LAMELLIBRANCHES.
Panopœa obliqua , d’Orb. — rr. 7.
— Carleroni, id. — rr. 2, 7.
Prevosti, id. ( Pholadomya Pre-
vosti, Desh.). — ar. 7, 13.
Venus Roy ssii, id. ( Lucina Roy ssii, j
Leym.). — r. 7, 12.
— vendoperata, id. ( Lucina vendo-
perana, Leym.). — ac. 5, 7.
I Corbula siriatula,Sovf. • — r. 2, 7, 12.
Cardium peregrinosum , d’Orb. — r.
5, 7, 12, 13.
- — Voltzii, Leym. — ac. 7.
— Cotlaldinum, d’Orb. — ac. 7.
Astarte laticosta, Desh. — r. 5,7, 12.
— Fittoni, id. — r. 7.
Crassatella Cornueliana, d’Orb. (Pan-
dora?, œquivalvis, Desh.). —
rr. 5, 7, 12.
Corbis cordiformis, id. ( Venus cordi-
formis, Desh.). — rr. 5, 7,
12, 13.
Lucina Rouyana?, id. — rr. 7.
Trigonia caudata, Ag. — r. 5, 7,12.
Nucula obtusa, Fi tt. (N. Cornueliana,
d’Orb., t. III, p. 759. N. pla-
nata, Desh.). — ar. 7,12,13.
— impressa, Sow. — ar. 5, 7, 12.
— scaplïa, d’Orb. ( Leda scapha,
d’Orb. , t. III, p. 761.). — rr.
5, 7, 12, 13.
Pinna sulcifera, Leym. — rr. 5, 7.
Lima Royeriana, d’Orb. — rr. 5, 7,
12.
Pecten Leymerii, id. ( Hinniles Ley-
merii, Desh.). — r. 5, 7.
Plicalula Rœmeri, id. — r. 5, 7, 13,
Ostrea macroptera, Sow. — ar. 5, 7,
13.
— Boussingaultii, d’Orb. ( Exogyra
subplicata, Rœm. in Leym ).
cc. 5, 7, 12, 13.
— Couloni , id. ( Exogyra subsi-
nuata, Leym.). — rr. 5, 7.
— Leymerii , Desh. — cc. 7.
Nombre des espèces indéterminées . — \ B alla, 1 Natica ? 1 Ros-
tellaria, 1 Dentalium (le même que dans le dépôt précédent), 1 Pho-
ladomya , 1 Anomià , 1 Pecten ou Hinnites, qui paraît être différent
du Pecten Leymerii.
Les fossiles sont principalement dans les parties moyenne et
supérieure de l’argile ostréenne et dans ses alternats de calcaire
marneux. Ses lumachelles sont composées de petites Ostrea Bous-
singaultii , d’Orb. ( Exogyra subplicata, Rœm. in Leym.). Quant
aux foraminifères et aux entomostracés, leur place est indiquée
dans les mémoires qui en contiennent la description.
(I) Cette espèce est plus droite, plus longue et plus étroite que 1©
Conoteuthis Dupinianus , d’Orb.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
â39
À la base de ce dépôt d’argile, à l’E. de Wassy, et à l’angle que
forment par leur jonction le chemin de Yilliers-aux-Bois et le
sentier du même nom, j’ai découvert, dans le fossé du chemin, de
grandes plaques lenticulaires de sulfate de strontiane fibreux (Cé-
lestine fibreuse), de couleur bleu de ciel, et composées de fibres
transversales parallèles. Ces plaques, disposées horizontalement,
ont lx centimètres dans leur plus grande épaisseur. Elles sont ordi-
nairement partagées, perpendiculairement aux fibres, par un
feuillet de la même substance, à structure lamellaire ou fibro-
lamellaire. Lorsque cette dernière disposition se présente, les
échantillons du minéral ressemblent à une brosse double et à soies
très serrées. Tantôt les fibres se détachent avec l’ongle, et tantôt
leur cohésion est telle que l’ensemble de ces petits prismes est
susceptible d’un clivage très net perpendiculairement à leur axe.
D’après une analyse faite au laboratoire de FEeole normale, la
partie fibreuse a donné :
Sulfate de strontiane 63,5
Id. de chaux 22,1
Id. de baryte 0,1
Hydrate de peroxyde de fer. . 12,7
Perte 1,6
Total 100,0
8. Grès et sables piquetés et picotés .
9. Argile rose marbrée .
10. Sable et grès jerrugineux supérieurs .
(Cornuel : ï, H, G, pages 242, 241 et 240. — Royer : argile pana-
chée ou bigarrée, accompagnée de grès de toutes les nuances,
depuis le blanc jusqu’au brun foncé, n° 5. — • Thirria : alternances
d’argile rose et de sable siliceux, page 23. ■ — Leymerie : argiles et
sables bigarrés, page 330.)
Ces trois parties du terrain crétacé, rappelées ici dans leur ordre
naturel, et décrites comme dépôts uniques par MM. Royer, Thir-
ria et Leymerie, n’ont pas donné jusqu’à présent une seule coquille
fossile.
ïl y a des localités où l’argile paraît être sablonneuse.
À la butte de Sommancourt, des travaux de déblai ont tranché
les grès et sables piquetés sur une épaisseur de 8 à 9 mètres.
À Wassy, sur le haut du chemin de Yilliers-aux-Bois, on en a
entamé la partie supérieure, qui y est rubanée horizontalement
de blanc et de rouge brun on. lie de vin» |
h 40 SÉANCE DU 19 MAI 1851.
1 1 . Fer oolithique .
(Cornuel: F, page 238. — Royer: minerai de fer oolithique, n° 4.
— Thirria : minerai de fer, page 21 . — Leymerie : minerai de fer
oolithique, page 331. )
Je n’ai trouvé dans cette couche que ce seul fossile :
Unio Martinii, Fitt. — rr. 11.
12. Argile rougeâtre durcie ou couche rouge.
(Cornuel : E, page 237. — Leymerie : cordon de nodules ferrugineux
rouges fossilifères, rognons de sanguine fossilifère, page 332.)
Le nom assez simple de couche rouge est celui qui a prévalu
parmi les géologues et les collecteurs du pays.
Dans une partie dès minières actuellement exploitées entre
Wassy et Bailly-aux-Forges, cette petite couche, qui n’est pas
constante, renferme des morceaux plus ou moins durs de calcaire
argilo-ferrugineux ou de calcaire avec carbonate de fer, de couleur
rougeâtre et rubigineuse. Ces morceaux, dont les plus gros ont une
longueur de 30 à ù0 centimètres et une épaisseur de 10 à 12 centi-
mètres, sont en contact avec le fer oolithique. Ils ont été formés,
par voie de sédiment, à la place où on les trouve, et n’ont subi
aucun remaniement, non plus que les concrétions tuberculeuses
qui les représentent dans certains endroits des minières de la
Grange-au-Ru. Les plus tendres contiennent des fossiles de cou-
leur jaune chamois, rougeâtre ou ferrugineuse, dont le test, qui
est spathique, paraît être du carbonate de fer, car ils rayent le
spath calcaire. Yoici la liste de ces fossiles:
GASTÉROPODES.
Acteon albensis, d’Orb. (an nova spe-
cies?). — rr. 5, 12.
Natica lœvigata, id. ( Ampullaria læ-
vigata , Desh.) — c. 5, 12.
— Cornueliana, id. — ar. 5, 12.
Trochus albensis , id. — rr. 12.
Cerühium Cornuelianum , d’Orb. —
ar. 12.
— albense , id. — rr. 5, 12.
LAMELLIBRANCHES.
Panopœa neocomiensis, d’Orb. (Pho-
ladomya neocomiensis, Leym.).
— ac. 5, 12, 13.
Pholadomya elongata, Munst. — rr.
5, 12.
— Agassizii, d’Orb. — rr, 2, 5, 12.
Mactra Carter oni , id. (an nova
species, un peu moins longue).
— r. 12.
Anatina Agassizii?, id. — ar. 5, 12.
— Robinaldina, id. — ar. 5, 12.
Periploma neocomiensis, id. — ar. 12.
— Robinaldina, id. — r. 5, 12.
Fislulana dilatata, id. (Gastrochœna
dilatala, Desh.). — rr. 5, 12.
Lavignon minuta, id. — Pholadomya
rhomboidalis?, Leym.). — rr.
12.
Arcopagia concentrica, id. — ac. 5, 12.
Venus vassiacensis, id. — r. 5, 12.
— Roissyi , id. ( Lucina Roissyi,
Leym.). — r. 7, 12,
— Galdrina, id. — ar. 5, 12.
— Robinaldina, id. — ar. 5, 12.
Corbula striatula, Sow. — ac. 2,7,12.
Cardium peregrinosum , d’Orb. —
rr. 5, 7, 12, 13.
SÉANCE DU 19 MAI J 851. !\l\ 1
Cardium subhillanum, Leyra. — - ar.
5, 12.
— Cornuelianum, d’Orb. — ac. 12.
Opis neocomiensis, d’Orb. — r. 5, 12.
Astarte carinata, id. (A. acuta, d’Orb.,
t. 3, p. 759). — r. 12.
— sinuata, id. (1). — ar. 12.
— laticosta, Desh. — ac. 5, 7, 12.
CrassatellaCornueliana, d’Orb. {Pan-
dora?, œquivalvis , Desh.). —
ar. 5, 7, 12.
Corbis cordiformis, id. {Venus cordi-
formis, Desh.). — r, 5, 7, 12,
13.
Trigonia caudata, Ag. — ar. 5, 7, 12.
— ornata, d’Orb. — ar. 5, 12.
— rudis, Park. {T.palmata, Desh.).
— rr. 1, 5, 12.
Nucula obtusa, Fitt. (N. Cornueliana,
d’Orb., t. III, p. 759 ; IV. pla-
nata, Desh.). — ac. 7,12, 13.
— impressa, Sow. — ac. 5, 7, 12.
— simplex, Desh. — rr. 5, 12, 13.
Nucula scapha, d’Orb. {Leda scapha,
d’Orb., t. III, p. 761). —
rr. 5, 7, 12, 13.
Area marullensis, d’Orb. — rr. 12,13.
— Dupiniana?, id. — rr. 12.
— Cornueliana , id. — ar. 2, 5,
12.
— Carleroni, id. — r. 12.
Pinna Robinaldina, id. — ar. 2, 12.
Mytilus Cornuelianus, id. — - rr. 5,
12, 13.
Lithodomus prœlongus? , id. — ar. 12.
— Archiacii, id. {Modiola Archiacii,
Leym.). — ar. 5, 12.
Gervilia linguloides, Forb. — ar. 12.
Lima Royeriana, d’Orb. — ar. 5, 7,
12.
— Cottaldina, id. {L. elegans, Duj.
mLeym.). — r. 12, 13.
Pecten Cottaldinus? id. — rr. 5, 12.
Ostrea Boussingaulln , d’Orb. ( Exo -
gyra subplicata, Rœin. in
Leym.). — r. 5, 7, 12, 13.
Nombre des espèces indéterminées. • — 6 Turritcllct, 1 Seal aria,
1 Globiconcha , 2 B alla, dont une est cylindrique et se trouve déjà
dans l’argile ostréenne; k Natica , 1 Turbo , 1 Solarium , 3 Rostel -
laria , 1 Cerithium , 1 P kolas, 2 Solen , 1 Periploma , 1 Capsa , voi-
sine de la Capsa elegans , d’Orb. , des Venus, 1 Cardium, 2 Isocardia ,
dont une lisse se trouve aussi dans la marne subordonnée au fer
géodique dans le calcaire à Spatangues et dans l’argile à Plica-
tules, et dont l’autre est ornée de côtes ; 1 Cardita , voisine de la
C. neocomiensis , d’Orb. ; 1 Mytilus , 1 Avicula , 1 Janira , 1 Ostrea ,
celle qui s’est déjà montrée dans la marne subordonnée au fer
géodique, et 1 Anomia.
13. Argile à Plicatules .
(Cornuel : D, page 234. — Royer : argile verte ou bleuâtre, n° 3. —
Thirria : argile grise alternant avec de minces couches de sables ;
argile verte alternant avec de l’argile jaunâtre, grisâtre ou bleuâtre,
page 20. — Leymerie : argiles bleuâtres, à Exogyra sinuata , par-
tie inférieure des argiles tégulines, pages 316 et 318. — Lajoye :
lit de grandes Huîtres ou Exogyres, n° 3, page 22. )
C’est l’argile aptienne de M. Alcide d’Orbigny.
(1) Cette espèce, dont j'ai trouvé la charnière, me semble être du
même genre que la Crassatella Cornueliana , d’Orb., de sorte que
l’une des deux devra sortir du genre auquel on l’a rapportée.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
M2
[/indication de M. Lajoye prouverait que nos couches numé-
ros 8, 9, 10, 11 et 12 n’existaient pas dans l’Yonne ou y seraient
si peu puissantes, qu’elles n’y auraient pas été remarquées jusqu’à
présent, et en outre que l’argile à Plicatules y serait très peu
développée.
L’argile à Plicatules ou aptienne de la Haute-Marne contient
deux faunes, non pas complètement, mais très notablement dis-
tinctes. Dans la plupart des minières, à peu près à un mètre au-
dessus du fer oolithique, on remarque un lit d 'Ostrea aquila , d’Orb.
( Exngyrci sinuatn in Leym.) Ce lit se trouve dans un petit ravin à
l’O. de l’ancienne abbaye de Saint-Pantaléon, voisine de Saint-
Dizier, et au bord de la rivière de Marne, sur la rive gauche, au-
dessous du barrage de Saint-Dizier, où il paraît être plus épais.
Depuis la base de l’argile jusqu'à la partie supérieure de cette
couche à Ostrea aquila , et surtout dans la couche elle-même, les
fossiles sont presque exclusivement les Gastéropodes et les Lamelli-
branches, dont les noms vont être indiqués dans la liste suivante,
sauf le Conoteuthis Dupinianus , qui les accompagne, et les Nautilus
pseudo-cle^ans et Ammonites Deshayesi , qui s’y montre aussi, mais
très-rarement. Au-dessus, ce sont les Céphalopodes ( Ammonites ,
Toxoceras et Ancyloceras'] qui dominent presque exclusivement.
On ne doit cependant pas pour cela se bâter de faire deux listes de
fossiles, parce qu’on trouve encore de loin en loin quelques bi-
valves, et notamment quelques Ostrea aquila dans la partie supé-
rieure.
Dans le voisinage de la couche à Ostrea , il y a parfois de petits
rognons creux, d’une substance qui paraît être du sulfate de stron-
tiane compacte.
Au milieu du dépôt, on trouve, à peu près à un mètre l’un au-
dessus de l’autre, deux rangs de concrétions siliceuses et siléo-
ferrugineuses avec quelques céphalopodes fossiles et des empreintes
de plantes marines.
Voici la liste générale des fossiles de l’argile à Plicatules:
Brong. et dentatus, Sow. in
Levm.). — rr. 13, 16.
Ammonites Millelianus? (ou peut-être
nova species ). — ar. 13.
— cesticulatus ?, Leym. — rr. 13.
— bicurvatus, Midi. — rr. 13.
Ammonites Nisus, id. — ac. 13. j — Deshayesi , Leym. (1) — ce. 13.
— interruptus, Brug. (A. Deluci, j — raresulcatus, id. — rr. 13.
CÉPHALOPODES.
Conoteuthis Dupinianus, d’Orb. —
ar. 13.
Nautilus pseudo-elegans , id. — rr. j
5, 13.
(I) Cette espèce dépassait de beaucoup les proportions que lui ont
SÉANCE DU 19 MAI 1851,
MS
Ammonites Cornuelianus , d’Orb. —
ar. 13.
— Royerianus, id. — rr. 13.
Toxoceras Royerianus, id. — ar. 13.
— Emericianus ? , d’Orb. — rr. 13.
— Cornuelianus , id. (1). — ar. 13.
Ancyloceras varions, id. (2). — ar 13.
GASTÉROPODES.
Scalaria Dupiniana? t d'Orb. — rr.
13.
Vermetus Rouyanus, id. — rr. 13.
LAMELLIBRANCHES.
Pholas Cornueliana, d’Orb. — ar. 13.
Panopœa Prevostii, id. ( Pholadomya
Prevosli, Desh.). — rr. 7, 13.
— neocomiensis , id. ( Pholadomya
neocomiensis, Leym.). — ac.
5, 12, 13.
Fistulana matronensis , id, — r. 13.
Venus obesa , id. — r. 5, 13.
Cardium peregrinosum, id. — rr. 3,
7, 12, 13.
Astarte Moreausa, id. — rr. 5, 13.
Cyprina inornata, id. — rr. 13.
Corbis cordiformis, id. ( Venus cordi-
formis, Desh.). — rr. 5, 7,
12, 13.
Nucula oblusa, Fitt. (N. Cornueliana,
d’Orb., t. III, p. 759; N. pla-
nata, Desh.). — rr. 7, 12, 13.
— simplex, Desh. — rr. 5, 12, 13.
— scapha, d’Orb. ( Leda scapha,
d’Orb., t. III, p. 761). — rr.
5, 7, 12, 13.
Area Gabrielis, id. ( Cucullœa Gabrie -
lis, Leym.). — rr. 5, 13.
— marullensis , id. — rr. 12, 13.
— carinata?, Sow. — rr. 13.
Mytilus œqualis, d’Orb. ( Modiola bi -
partita, Sow. in Leym.). —
ar. 5, 13.
— lineatus, id. — r. 13.
— Cornuelianus, id. — rr. 5,12,13.
— lanceolatus, Sow. — rr. 5, 13.
Perna Mulleli, Desh. — rr. 5,. 13.
Lima Coltaldina, d’Orb. ( Lima ele -
g ans, Duj. in Leym. . -- ar.
12. 13
Pecten Robinaldinus , id. — ar. 5, 13.
— slriato-punctatus, Rœm. — ar.
5, 13.
— inter striatus, Leym. — ac. 13.
Spondylus complanatus , d’Orb. — - •
ar. 13.
Plicatula asperrima, d’Orb. — ar.
5, 13.
— Carteroniana?, id. — rr. 13.
— Rœmeri, id. — ar. 5, 7, 13.
— placunea , Lamk. — c. 5, 13.
— radiola, id. — rr. 13.
Ostrea macroptera, Sow. — ac. 5, 7,
13.
— Tombeclîiana, d’Orb. — ar. 5,
13.
— - Boussingaullii, id. ( Exogyrasub -
plicata, Rœm. in Leym.). — ar.
5, 7, 12, 13.
— aquila, id. Exogyra sinuata, in
Leym ). — cc. 13, 14.
— canaliculata, id. ( Exogyra par-
vula, Leym.). — ar. 13, 16.
données MM. Leymerie et d’Orbigny, car, au lieu d’un diamètre de
32 millimètres, j’ai recueilli un échantillon dont le diamètre excédait
170 millimètres.
(1) Il serait possible, a dit M. d’Orbigny, que, lorsque cette espèce
sera connue entière, elle rentrât dans le genre Ancyloceras.
Bien que je n’en aie pas d’individu entier, il résulte néanmoins, de
l’examen des échantillons que j’ai recueillis, que c’est bien un Ancy -
laceras.
(2) Il y a plusieurs espèces nouvelles d’ Ancyloceras dans cette
couche ; mais elles sont difficiles à déterminer, parce qu’on ne trouve
que des portions isolées. Ce qui augmente la difficulté, c’est qu’il y
en a dont la colonne (partie entre la spire et la crosse) est très longue
et ressemble à un tronçon de Toxoceras , et d’autres dont la colonne
est très courte , ce qui tend à les faire confondre avec les Crioceras »
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
hhïx
Rhynchonella lala, d’Orb. — ac. 5, 1 3.
Terebratula tamarindus, Sow. — rr.
5, 13.
— Moreana, d’Orb. (1) — ac. 13.
Terebratula sella , id. — cc. 5, 13.
Terebratella Astieriana, id. ■ — ac.
13.
Nombre des espèces indéterminées . — 5 Ammonites , 1 Crioceras ,
des Ancyloceras , 1 Isocardia , qui existe aussi dans la marne du fer
géodique, dans le calcaire à Spatangues et dans la couche rouge ;
3 Cyprina , 1 Mytilus , 1 Lima et 2 Pecten .
14. Sable et grès jaunâtres.
(Cornuel C, page 232. — Royer : sable quartzeux, partie inférieure
d’un vert pâle et jaunâtre, n° 2. — Thirria : sable siliceux jaune,
passant, en quelques points, à un grès très dur, et sable un peu ar-
gileux reposant sur le terrain néocomien, page 18. — Leymerie :
sable couvrant les plateaux néocomiens?, et sable blanc, veiné de
jaune, de la sablonnière du Bois-Gérard?, page 318. — Lajoye :
sables jaunes micacés, n° 2, page 22. )
Le sable blanc jaunâtre n’est exploité maintenant à Louvemont
que sur une épaisseur de 2m,60. Les ouvriers lui attribuent une
puissance totale de 3m,90 à 4m,25 ; mais ils en laissent la partie
inférieure, à cause de l’eau qu’elle contient et qui en empêche
l’extraction. La même localité fournit aussi du sable dont la couleur
est le jaune terreux; mais, en étudiant sa position relativement à
l’autre, je me suis convaincu que le changement de couleur ne
provenait que de la disparition de la couche supérieure par dénu-
dation, et du contact avec le diluvium et les agents atmosphériques.
Le grès de Valcourt, auquel passe le sable blanc jaunâtre, m’a
donné deux fossiles, qui sont :
Ostrea aquila, d’Orb. [Exogyra si- \ Ostrea Rauliniana?, id. — rr. 14,
nuata in Leym.). — rr. 13, 14. | 16.
Le dernier, indiqué avec doute, est de petite taille et à l’état de
moule. Il porte l’empreinte de petites dents ou cannelures verti-
cales au bord interne des valves, ce qui me l’a fait rapporter au
jeune de Y Ostrea Rauliniana , dont il a, du reste, la forme. Après
celle-ci, il n’y en aurait pas de plus voisine connue que Y Ostrea
arduennensis , d’Orb.
(1) Si cette espèce doit être admise, sa description n’est pas com-
plète. M. d’Orbigny la rapporte au gault; mais on la trouve dans
l’argile à Plicatules de la Haute-Marne.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
M5
15. Sable vert .
( Cornuel : B, page 231 . — Royer : sable quartzeux, partie supérieure,
n° 2. — • Thirria : sable siliceux vert, page 18.-— Levmerie : grès
et sable vert, page 315 à 317.)
Dans les sablières actuelles de Louvemont, ce sable commence
par 1 mètre de sable gris, que sa couleur sépare nettement du pré-
cédent, et, au-dessus du sable gris, se trouve le sable vert propre-
ment dit, sur une épaisseur de 3m,50 , ce qui donne une puissance
totale de ùn,,50, à partir du sable blanc jaunâtre.
A la base de la côte noire de Moelins, le sable vert contient des
masses subordonnées de véritable grès vert.
Dans cette dernière localité, on voit la partie supérieure en con-
tact avec le gault, tandis qu’à Louvemont, on sait où est la base ;
mais le sommet est dénudé. ïl en résulte qu’on ne peut pas se faire
une idée exacte de l’épaisseur totale du dépôt. ïl doit cependant
y avoir peu à ajouter aux chiffres qui précèdent pour en apprécier
la puissance moyenne.
Je ne possède encore de cette couche que :
Osfrea ardwemiewsts?, d’Orb.—- ar. 15. | Terebralula fala?, Sow. — rr. 5,15.
Toutes deux sont à l’état de moules, et ne se présentent pas
partout.
16. Gault.
(Cornuel: A, page 231. — Royer: gault, n° 1 . — Thirria: gault,
page 16. — Leymerie : partie supérieure des argiles tégulines,
pages 311 et suivantes. )
Ce n’est que dans le département de la Marne, au point où il
disparaît sous la craie, sur la ligne de Cliavanges à Yitry, que le
gault est complet. 8a puissance y excède 130 mètres, ainsi qu’on
le sait d’après deux forages qui y ont été exécutés.
Les fossiles trouvés par moi, ou à ma connaissance, dans la par-
tie de ce terrain qui s’étend dans la Haute- Marne, sont :
CÉPHALOPODES.
Beîemnites minimus , List. — c. 16.
Ammonites interruptus, Brug. {A. De-
luci, Brong., et denlalus, Sow.
in Leym ). — ac. 13, 16.
— Raulinianus , d’Orb. — r. 16.
— mammillaris, Schloth, — r. 16.
Ammonites Lyelli , Leym. — ac. 16.
— latidorsalus , Mich. — ac. 16.
— versicostatus, id. — ar. 16.
— - Dupinianus, d’Orb. — ar. 16.
— Beudanti , Brong. — ac. 16.
— Delaruei, d’Orb. — r. 16.
Hamiles punctatus , id. — ar. 16.
— attenuatus , id. — r. 16.
MO SÉANCE DU 19 MAI 4854.
Hamites alterno-tuberculatus , Leym .
— - ar. 16.
— > Eaulinianus, d’Orb. — rr. 16.
GASTÉROPODES.
Scalaria CAemeniina , d’Orb. — r. 16.
Solarium moniliferum, Mich. — r. 16.
— dentalum , d’Orb. ( Delphinula
dent ata, Desh.). — rr. 16.
Solarium ornatum, Fitt. — rr. 16.
Roslellaria carinella, d’Orb. — ar.
16.
— Parkinsoni, Sow. — ar. 16.
Pterocera bicarinata, d’Orb. ( Floslella -
ria bicarinata, Desh.). — ar.
16.
Cerithium subspinosum, Desh. — r.
16.
— trimonile, Mich. — r. 16.
Dentalium decussatum , Sow. ( D.ellip -
ticum, Sow. in Leym.). — ar.
16.
Espèce indéterminée.
LAMELLIBRANCHES.
Cardita tenuicosta, d’Orb. ( Venericar -
dia tenuicos’a, Fi' t.) — ar. 16.
Nucula Mariæ , id. {Leda Mariæ,
d’Orb. t. III, p. 764). — r.
16.
— subreourva, Phi 11. ( Leda subre-
curva, d’Orb., t. III, p, 764).
— ar. 16.
— albensis , d’Orb. — r. 16.
— ovata, Mant. — ar. 16.
— bivirgata, Fitt. — ar. 16.
— pectinala, Sow. — ar. 16.
Area nana, d’Orb. ( Cucullœa nana,
Leym.). — ac. 16.
— carinata, Sow. — ac. 16.
Inoceramus concentrions, Sow. — cc.
16.
Pecten Dutemplei, d’Orb. — ar. 16.
Ostrea llauliniana, id. — r. 14, 16.
— èanalicnlata, id. ( Exogyr apar-
vula , Leym.). — ac. 13, 16.
1 Ammonites.
II. Limites de la formation du grès vert inférieur, ou lower
* GREEN S AND , A l’e. DU BASSIN DE PARIS.
M. Alcide d’Qrbigny ( Paléont . jrcinc. ., Terrains crétacés , tome I,
page A2à) dit qu’aucune espèce d’Ammonites ne passe des marnes
ou de l’argile à Plicatules, la partie la plus supérieure des terrains
néocomiens, aux couches les plus inférieures du gault ; et (page U 2à)
qu’il n’a jamais rencontré aucune espèce du gault dans les couches
néocomiennes.
Cependant, sans parler de F Ammonite de l’argile à Plicatules,
que je n’ai citée qu’avec doute sous les noms à’ Ammonites Mille -
tianusj j’ai trouvé dans cette dernière argile une espèce qui ne
peut être rapportée qu’à F Ammonites bicurvatus, Mich., et un indi-
vidu de F Ammonites interruptus , Brug. , espèces que M. d’Orbigny
n’indique que dans le gault, et même, la dernière, dans ses cou-
ches supérieures. On ne peut pas attribuer cette circonstance à
un remaniement, d’abord parce que je n’en ai pas remarqué d’in-
dices pour F argile à Plicatules, et ensuite parce que le remaniement
enlève d’une couche inférieure pour transporter dans une couche
supérieure, tandis qu’ici il faudrait admettre un effet inverse.
D’ailleurs M. d’Ürbigoy mentionne (tome 3, page 763) le My~
tilus lineatus , d’Orb., et la Plicatula radiohu Lamk. , comme
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
447
existant dans l’argile à Plicatules ou aptienne, et dans le gault.
V Ostrea ccnialiculata , d’Orb., se trouve aussi dans tous les deux,
bien que cet auteur ne la cite que comme propre aux couches supé-
rieures du gault et aux couches inférieures du terrain turonien.
Son existence, à l’époque du dépôt de l’argile à Plicatules est d’au-
tant plus certaine qu’outre les individus que j’y ai trouvés isolés,
j’en ai un qui a les deux valves, et qui est fixé sur un Ammonites
Cornuelianus , d’Orb.
Il est donc constant qu’il y a passage de quelques céphalopodes
aussi bien que de quelques gastéropodes et lamellibranches, des
couches néocomiennes dans le gault. Cette circonstance n’empêche
pas la faune du gault d’être, dans son emsemble, très distincte de
celle du terrain néocomien.
M. le docteur Fitton a établi, par la comparaison des fossiles,
que toutes les couches du grès vert inférieur du bassin de Paris,
y compris le terrain néocomien proprement dit, ne sont autre
chose que le lower green sand d’Angleterre. Ce savant place la
limite supérieure du lower green sand , en Angleterre et en France,
au point où commence le gault. Il ne peut rester de doute, chez
nous, qu’au sujet des sables et grès jaunâtres et du sable vert (nos 14
et 15 ci-dessus), en ce sens seulement qu’ils paraissent former le
passage entre le terrain néocomien et le gault proprement dit.
M. Levmerie, à qui ces sables (14 et 15) apparaissaient moins con-
tinus dans l’Aube qu’ils ne le sont dans la Haute-Marne, les a
considérés comme subordonnés à ses argiles tégulines. Or, comme
ce n’est que la partie supérieure de celle-ci qui se rapporte au
gault, il en est résulté une certaine confusion dans ses descriptions
et dans ses listes (pages 31â à 322); et cette confusion, qu’il a seu-
lement atténuée en distinguant les fossiles de la partie supérieure
de ceux de la partie inférieure, ne lui a pas permis de placer la
limite supérieure du terrain néocomien ailleurs qu’au point où
finissent ses argiles et sables bigarrés (dépôts nos 8, 9 et 10 ci-
dessus).
Quant à l’argile à plicatules n° 13, partie inférieure des argiles
tégulines de M. Leymerie, à laquelle M. Alcide d’Orbigny a donné
le nom d’argile aptienne, elle doit rester définitivement classée
dans le terrain néocomien, bien que les tests de céphalopodes s’y
trouvent ordinairement à un niveau plus élevé que les coquilles
des autres mollusques. Il n’y aurait pas plus lieu de l’en distinguer
que de séparer du lower green sand d’Angleterre les deux groupes
à Crioceras , nos VI et VIII, décrits par M. Fitton. Au surplus, le
tableau suivant, qui contient le résumé numérique des mollusques
hl |8 SÉANCE DU 19 MAI 1851.
fossiles déterminés qui ne se sont encore présentés que dans une
seule couche, et de ceux qui se reproduisent dans plusieurs couches
différentes, indique nettement les limites de la formation entière.
Bien qu’il doive varier par les additions successives des espèces qui
ne sont pas encore déterminées et de celles qui restent à découvrir,
il est à croire que les inductions à tirer de son ensemble ne chan-
geront pas.
SÉANCE DU 19 MAI 1851
M9
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
/l50
On voit, par ce tableau, que le dépôt n° 5 est le plus riclie en
espèces de tout le terrain néocomien, et que la petite couche n° 12
est celle qui a le plus de rapports avec lui pour les mollusques
fossiles.
M. le docteur Fitton, qui a examiné les terrains des environs de
Wassy, n’a pu dire avec certitude si les couches nos 1, 2,3, ù, ap-
partenaient aussi au lower grccn scind , ou si elles se rapportaient
aux sables d’Hastings, qui font partie du wcalden. Mais le tableau
précédent me semble résoudre la question, puisqu’il y a des fossiles
néocomiens dans les couches 1 et 2 ; et j’en aurais sans doute cité
un plus grand nombre si j’avais connu plus tôt la localité où la
couche n° 2 est fossilifère. Ainsi, il est certain que toutes nos
couches, depuis le n° 1 jusqu’au n° 13 inclusivement, appar-
tiennent au terrain néocomien ou lower green snnd , et qu’il ne
peut plus y avoir d’incertitude qu’au sujet de nos sables nos là et 15.
La Perna Mulleti , qui caractérise les deux couches les plus basses
du lower green scind de l’île de Wiglit et la partie supérieure du
calcaire à Spatangues à Soulaines (Aube), à Trémiily et à Sonnne-
voire (Haute-Marne), infirmerait en partie l’opinion de M. Ley-
merie au sujet du synchronisme du terrain néocomien et du terrain
wealdien. Si ce synchronisme existe, ce n’est que pour nos couches
marines 1, 2, 3 et l\.
J’ai indiqué la marne argileuse noirâtre comme étant Je premier
dépôt de la série néocomienne de l’E. du bassin de Paris ; et, con-
trairement à l’opinion de M. Thirria, j’ai rapporté à une formation
antérieure l’oolithe vacuolaire et les calcaires gris verdâtre qui
la renferment. Les raisons de cette séparation sont assez longuement
déduites dans pion mémoire, pages 27ù à 277, et dans ma notice,
pages 280 et suivantes, pour que je m’abstienne de revenir ici sur
ce sujet. Du reste, l’oolitlie vacuolaire, qu’on nomme aussi oolitlie
du Barrois, et qui est exploitée à Vecqueville, Chatonrupt, Che-
villon etCliancenay (Haute-Marne), et à Savonnières en Perthois,
Brauviïliérs, Juvigny, Comble, Brillon et Ville-sur-Saulx (Meuse),
ne me paraît pas devoir être identifiée avec celle d’Arsonval (Aube).
Celle-ci, que j’ai vue en place, est autrement constituée, et appar-
tient à la partie moyenne du Portland stone , tandis que celle-là a
sous elle le troisième étage j urassique tout entier.
M. Fitton n’a pu décider si l’oolitlie vacuolaire se rapportait ou
non au calcaire de Purbeck. Pour se prononcer, il faudrait en
reviser rigoureusement les fossiles, et les comparer avec soin à ceux
de ce dernier calcaire. Je doute que ces deux dépôts soient iden-
tiques ; mais il reste à savoir s’ils seraient synchroniques.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
451
îlï. Coquilles caractéristiques des couches.
II y a des genres dans lesquels des espèces présentent tant de
passages de l’une à l’autre que, quand on en voit un grand nombre
d’individus, on se prend à douter de la valeur des caractères qui
leur sont assignés dans les descriptions. Le doute ne cesse même
pas pour certaines espèces d’époques différentes, parce qu’il semble
rationnel que, dans la paléontologie, on tienne compte des effets
de la diversité ou de la succession des temps et des influences phy-
siques, et qu’ alors on se demande si, outre les variétés contempo-
raines de l’espèce, analogues, par leurs limites, à celles qu’on
trouve dans la nature actuelle, il n’y en a pas d’autres encore plus
prononcées, et résultant de ce que beaucoup d’espèces auraient
parcouru, avant de s’éteindre, les conditions extrêmes de leur
existence et de leur variabilité. En d’autres termes, la paléonto-
logie a-t-elle tout dit en nous donnant, ci priori , comme exclusive-
ment propres à un terrain, toutes les espèces fossiles comprises
entre les limites géognostiques de ce terrain ; ou bien, réservant la
question des limites des formations , ne doit-elle pas discuter
d’abord la valeur des caractères spécifiques, en dehors de la con-
sidération des gisements , pour arriver ensuite à distinguer les
espèces exclusivement propres à une époque géologique, celles
qu’elle peut tenir d’une époque précédente, celles quelle aurait
transmises à une suivante, et les differentes manières d’être sous
lesquelles chaque espèce a vécu? La science ne me paraît pas assez
avancée sous ce dernier rapport pour cpie l’on adopte comme carac-
téristiques d’un terrain certaines espèces considérées isolément et
sans avoir égard, soit à leur degré d’abondance, soit à l’ensemble
de celles qui les accompagnent.
C’est surtout quand il s’agit de différencier les couches d’un
même terrain qu’il est difficile d’indiquer les fossiles véritablement
caractéristiques, une espèce qui ne s’est montrée que dans une
couche pouvant être tôt ou tard rencontrée dans une autre , ou
bien se trouver à un niveau différent dans un autre pays. Quoi
qu’il en soit, pour bien distinguer paléontologiquement les cou-
ches du terrain crétacé inférieur de l’arrondissement de Wassy, le
meilleur moyen est de citer les espèces fossiles , dont elles recèlent
un grand nombre d’individus. Voici, sous le rapport numérique,
ce que certaines d’entre elles ont de plus remarquable.
La marne calcaire bleue et le calcaire à Spatangues (ri° 5) (1)
(1) Cette dernière dénomination est tirée de la présence du $pa~
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
à 52
ont pour principal fossile Y Ostrea Couloni , d’Orb. ( Exogyra sub-
sinucita , Leyin.) et ses variétés, savoir : la subsimiatn et la falci -
Jormis, Leyin., dans toute l’épaisseur du dépôt, la variété dors ata,
Leyin., vers le haut, et la variété aquilina , Leym., dans la partie
la plus élevée. Les espèces les plus communes après celles-là sont :
le Nautilus pseudo-dedans , d’Orb., la Panopœa neocomiensis ,
d’Orb., la Rhynchonclla dcprcssa , d’Orb. , et la Terebratula semi-
striata , Defr. (1).
L’argile ostréenne (n° 7) se fait remarquer par son Ostrea Ley -
merii , Desh., et par une très grande abondance d 'Ostrea Boussin-
gaultii , d’Orb. ( Exogyra subplicata , Rœm. in Leym.).
L’argile à Plicatules (n° 13) est caractérisée, dans sa partie infé-
rieure, d’abord par Y Ostrea aquila , d’Orb. ( Exogyra s irma ta, var.
lata et elongata , Leym.), ensuite par la Terebratula sella, Sow.,
la Plicatula placunea , Laink. , le Pecten interstriatus , Leym., et
même la Terebratella Astieriana, d’Orb., et, dans sa partie supé-
rieure, par Y Ammonites Deshayesi , Leym., et Y Ammonites Nisus ,
d’Orb.
Enfin , les espèces les plus nombreuses du gault de la Haute-
Marne sont: le Belcmnites miniums , List., Y Ammonites interrup tus,
Brug. , Y Ammonites Lyelli, Leym. , Y Ammonites Beudanti, Brong.,
et Y Inoceramus concentrions , Sow.
Je n’ai pas rappelé ici les foraminifères et les entomostracés de
l’argile ostréenne, bien qu’ils se trouvent au même niveau depuis
Saint-Dizier jusqu’à Trémilly, parce que ces petits corps sont dif-
ficiles à observer, et qu’il pourrait s’en trouver dans d’autres
couches.
tangus retusus, maintenant Toæaster cornplanatus, Ag. Si le nom
primitif de ce fossile change, il restera encore un véritable Spatangus
pour caratériser ce dépôt; mais il est moins commun que le Spatangus
retusus.
(1) Un gisement remarquable de polypiers a été découvert dans cette
partie de la série, à Saint-Dizier. Plusieurs de ces polypiers se trou-
vent aussi à Bettancourt-la-Ferrée.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
453
IV. Puissance du terrain crétacé inférieur {lower grecn s and )
des environs de Wassï.
A Louvemont, la cote 184 de la nouvelle carte de France est
prise sur le haut du sable vert , ci. . . . 184™, 00
En retranchant, pour l’épaisseur de ce
sable et du sable jaunâtre sous-jacent. . . . 8m,50, ci 8™, 50
La hauteur est réduite à 175™, 50
La base du fer oolithique étant à 5 mètres
environ au-dessus de la’cote 141 , prise au pont
jeté sur la rivière de Biaise , à Louvemont ,
on doit retrancher 141 -j- 5 ou 146m,00
La différence qui représente l’épaisseur
du fer oolithique de la couche rouge et de
l’argile à Plicatules est de 29™, 50, ci 29m,50
La cote 200, à l’O. de Wassy, sur la route de Mon-
tier-en-Der, est à 4 mètres environ au-dessus de la base
du fer oolithique ou du sommet de l’argile marbrée
rose et des sables qui l’accompagnent , ce qui donne
200 — 4, ou 196”, 00
La cote 160, aussi à l’O. de Wassy, à la
bifurcation des chemins de Voy-le-Comte et
du Pont-Varin, étant prise sur la couche su-
périeure du calcaire à Spatangues, ci. . . . 160™, 00
Il reste pour l’épaisseur des couches, de-
puis et y compris les sables et grès ferrugi-
neux supérieurs et l’argile marbrée rose jus-
qu’à la marne argileuse jaune inclusivement. 36™, 00, ci 36™, 00
Enfin, un mesurage direct, fait au val Collard, entre
Wassy et Magneux, m’a donné, depuis le dessus du
calcaire à Spatangues jusqu’à la base des sables ferrugi-
neux inférieurs avec fer géodique , en un point où on
les voit en contact avec l’oolithe vacuolaire altérée. . . 10™, 50
Total 84™, 50
Ainsi, au centre de la région qu’il occupe dans le département
de la Haute -Marne, le terrain néocomien, ou lower green 'sand9
a une puissance de 84™, 50, y compris les sables jaunâtre et vert,
ou de 76 mètres si ces derniers sables doivent en être retranchés
pour être réunis au gauit.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
45 h
Eu faisant le total des épaisseurs indiquées pour la coupe
figure 3, planche A de mon mémoire , on trouve 82m,98 depuis le
bas delà marne argileuse noirâtre jusqu’au haut du sable vert,
ou75mj73 en ne comprenant pas ces sables, ce qui donne de très
faibles différences. Je ne m’étais donc pas trompé dans l’apprécia-
tion de la puissance de la masse totale. Relativement aux mesures
que j’ai indiquées pour chaque dépôt, on en trouve l’origine en
se reportant au texte du mémoire. 11 est certain , du reste, que les
épaisseurs varient , les unes en plus , les autres en moins , suivant
les localités, que les couches inférieures et les sables varient plus
que tout le reste , et que l’ensemble de la formation s’amincit du
côté du S.-E. , où était l’ancien rivage.
M. Thirria a évalué à 70 mètres environ la puissance du terrain
néocomien dans la Haute-Marne; mais son élévation est trop
faible , parce que , en faisant partir ce terrain du haut de l’argile à
Plicatules , il le fait descendre jusqu’au-dessous de l’oolithe vacuo-
laire.
M. Leymerie (pages 338, 344, 363 et 364) donne les évaluations
suivantes pour son terrain néocomien du département de l’Aube :
Argiles et sables bigarrés avec minerai de fer (nos 8, 9, 10,
11 ci-dessus) Maxim. 2üm Moyenne 12m
Argiles ostréennes (nos 6 et 7 ci-
dessus) — 40 — 25
Calcaire à Spatangues, marne et
sables (nos 1, 2, 3, 4 et 5 ci-dessus). — 12 — 10
Totaux Maxim. 72,n Moyenne 47m (1 ).
Le total des épaisseurs moyennes, 47 mètres, égale à 0m,50 près
ce que j’ai indiqué plus haut pour le même ensemble de couches
dans la Haute-Marne ; car 36 mètres -J- 10m,50 — 46ra,50.
M. Leymerie ayant réuni l’argile à Plicatules , les sables verts
et le gault, sans faire nettement ressortir la démarcation indiquée
par les sables et sans donner de mesures partielles, M. le docteur
Fitton, qui a mis une partie de la coupe du lowcr green sand de
l’Aube en comparaison avec celles du lowcr grc en sand d’Angle-
terre , n’a pu y distinguer la limite du gault. Cette erreur, invo-
lontaire et presque inévitable, ferait supposer que les couches
crétacées inférieures au gault ont beaucoup plus de puissance dans
l’Aube que dans la Haute-Marne, tandis qu’il n’en est rien, l’ar-
(1) Il a cru devoir indiquer 50 mètres au lieu de 47 mètres dans sa
coupe théorique, planche B de son mémoire.
SÉANCE DU 19 MAI 1851.
455
gile à Piicatulcs et les saines ne paraissant pas avoir ensemble plus
de développement dans le premier que dans le second de ces dé-
partements.
Y. Renseignements pour l’exploration des couches fossilifères.
Gomme le terrain crétacé de la Haute-Marne est très couvert,
et qu’il faut du temps pour le bien étudier, je crois devoir signaler
aux explorateurs étrangers quelques gisements principaux , en les
invitant à tracer leur itinéraire sur la nouvelle carte de France.
Le calcaire à Spatarigues donne beaucoup de fossiles à tests spa-
tbifiés à Bettancourt-la-Ferrée , auprès de Saint-Dizier ; mais on
n’y collectionne avantageusement que lorsque les ouvriers font des
fouilles pour extraire le fer géodique qu’il recouvre, A Wassy, où
il ne contient guère que des moules et des empreintes , on ne re-
cueille facilement que YOstrea Couloni , d’Orb. , qui y a conservé
son test , et que l’on trouve auprès de la tuilerie et dans le voisinage
du pont de Magneux. Sous le rapport de la constitution géognos-
tique, c’est aux carrières de Trémilly, derrière le parc et sous
l’Orgisset, qu’il se présente le mieux. L’ Ostrca Couloni est très
abondante dans le grand fossé que traverse la route , entre la borne
départementale et le village de Soulaines (Aube).
L’argile ostréenne s’observe assez bien à Saint-Dizier , sur la
rive droite de la Marne , au-dessous des vignes qui avoisinent le
moulin, et à Wassy, dans un ravin voisin de la forêt, au N. du
chemin qui conduit à Bailly-aux-Forges.
En été, on visite avec succès la partie inférieure de l’argile à
Plicatules à Saint-Dizier, en aval du barrage de la Marne , sur la
rive gauche , «au-dessous des graviers et presque à fleur d’eau.
La base de la même argile , et parfois la couche rouge , sont
mises à découvert dans les minières de fer oolithique de la Grange-
au-Rupt et du chemin de Bailly, sur le territoire de Wassy.
La partie supérieure de cette même argile est exploitée à la
côte Fanot, commune de Louvemont, et aux tuileries de Bailly-
aux-Forges ; mais à Bailly ce n’est que par les ouvriers des tuile-
ries qu’on peut recueillir des fossiles.
Les sables jaunâtre et vert sont faciles à étudier à la sablière
de l’ancienne Marne , route de Saint-Dizier à Valcourt , à la base
de la côte noire de Moëlains , sur le haut du coteau de Louve-
mont.
Enfin, le gault peut être exploré aux terriers de Valcourt, d
Montier-en-Der, de Droyes, etc., où il est exploité pour la fabri-
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
45&
cation de la tuile. A la côte noire de Moëlains, il présente un bel
escarpement que l’on peut aborder en été, en suivant la rive
gauche de la rivière de Marne. On y recueille des fossiles, surtout
en cassant les mottes éboulées; mais ils sont beaucoup moins bien
conservés que ceux d’Epothémont, Gérodot et autres localités du
département de l’Aube.
Wassy, le 29 avril 1851.
Séance du 2 juin 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉYOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Le président annonce ensuite six présentations.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. d’Hombres-Firmas, Recueil de mémoires
et d'observations sur divers sujets; suite des mémoires et ob-
servations de physique , de météorologie , d' agriculture et
d'histoire naturelle , 6e partie , Mélanges; in-8, 404 p., 5 pl.
Alais, 1844 à 1851, chez la veuve Veirun.
De la part de M. Lory, Recherches sur la composition miné -
rcilogique et chimique des roches dans les Alpes du Dauphiné
(extr. du Bull, de la Soc. de statistique du département de
l'Isère ) -, in-8, 23 p. Grenoble, 1851, chez Maisonyille.
De la part de MM. Ch. Marlins, Haeghens et Bérigny,
Annuaire météorologique de la France pour 1851, par
MM. Haeghens, Ch. Marlins et Bérigny, 3^ année ; in -à, 391
et 316 p., 3 pl. Paris, 1851, chez Gaume frères.
Delà part de M. de la Bêche, The geological observer
(L’Observateur géologue)-, in-8, xxxii et 846 p. Londres,
1851, chez Longman.
De la part du gouvernement britannique, Geological
survey , etc. (Carte géologique de la Grande-Bretagne) ; 1 carie,
en 3 feuilles, petit format.
SÉANCE Dü 2 JUIN 1851.
457
De la part de M. Lorenzo Pareto, Sopra alcune alternative, etc.
(Mémoire sur quelques alternances de strates marins et fluvia-
tiles dans les terrains de sédiment supérieur des collines sub-
apennines) (extr. du Giorn. Toscano di scienze mediche , fisi -
clie e / lalur ., 1. 1, n° 4 , année 1843) 5 in-8°, 15 p., 1 pl.
— Cenni, etc. (Aperçus géologiques sur la Ligurie maritime) -,
in-8, 105 p., 1 carte. Gênes, 4846, chez Ferrando.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences 9
1851, 1er sem. , t. XXXII, nos 20 et 21.
L’Institut y 1851, nos 907 et 908.
A finales scientifiques , littéraires et industrielles de V Au-
vergne , t. XXIY, janv. et féyr. 1851. Clermont-Ferrand.
The Athenœum , 1851 , nos 1230 et 1231.
ISach mciterien , etc. (Table, par ordre de matières, de tous
les volumes publiés de 1822 à 1848, du Bulletin de correspon-
dance de la Société d’agriculture du Wurtemberg)*, in-8, 92 p.
Stuttgardt, 1851.
M. Martins fait hommage de Y Annuaire météorologique de la
France pour 1851 .
M. Damour offre à la Société géologique diverses substances
minérales, savoir :
Un échantillon d’anthracite provenant de la Tarlarie chinoise.
Un échantillon de houille de la même contrée.
Une roche feldspathique provenant des collines de Sun-Kian-
Foo (Chine).
Une pierre meulière très poreuse, semblable à certains
échantillons qu’on trouve aux environs de Paris. Elle a été
recueillie sur un monticule qui s’élève au milieu de l’immense
plaine de Tché-Kiang (Chine).
Ces échantillons lui ont été envoyés, sans autre indication,
par M. de Montigny, consul de France à Shang-Haï.
M. Deshayes offre à la Société, de la part de M. Humbert, un
dessin lithographié (pi . VII) des fossiles récemment décrits {ante,
p. 353 et 400) parM. Buvignier, et destiné au Bulletin de la
Société.
Le même membre met sous les yeux de la Société le moule
d’un genre nouveau, proposé par M. Morris, sous le nom de
Pachyrisma.
â58 SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
Le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Raulin.
Fragments relatifs aux terrains tertiaires parisiens ,
par M. Victor Raulin.
Dans le tome II de Y Histoire des progrès de la géologie qui parut
à la fin de 1849, M. d’Arcliiae ayant fait quelques critiques, et
nous ayant même appelé , en quelque sorte , à donner des éclair-
cissements à l’égard d’opinions que nous avons exprimées, soit dans
les notes ou mémoires , soit sur les cartes que nous avons publiés,
nous ne voulons pas tarder plus longtemps à répondre à ses obser-
vations. Nous ferons naturellement autant de chapitres qu’il se
rencontrera de sujets différents à traiter.
1° Sur la dénomination de bassin de Paris. — M. d’Archiac n’a
pas prononcé notre nom dans sa critique ; cependant nous croyons
ne pas pouvoir nous dispenser d’exposer notre manière de voir
sur ce sujet, parce que c’est par là que doit véritablement com-
mencer toute discussion sur les terrains tertiaires parisiens.
Nous ne pouvons partager les idées émises par M. de la Bèclie (1)
et par AI. d’Archiac, page 463. Pour certains dépôts tertiaires, la
dénomination de bassin est, à n’en pas douter, tout à fait impropre :
ainsi , dans le S. -O. de la France , ce qu’on appelle généralement
bassin de Bordeaux n’est véritablement que le fond du grand golfe
de Gascogne, aujourd’hui exondé, lequel, pendant plusieurs des
périodes tertiaires, communiquait même avec la Méditerranée par
un détroit placé entre les Pyrénées et la montagne Noire. — Pour
les terrains tertiaires parisiens il en est autrement. Nous sommes
loin de vouloir nier que, pendant les périodes éocène et miocène, les
dépôts se soient faits dans des nappes d’eau communiquant large-
ment avec celles où se faisaient les dépôts du Hampshire , du bas-
sin de la Tamise ainsi que des Pays-Bas ; mais d’après le relief de
la craie au-dessous du terrain tertiaire (dont nous avons commencé,
il y a près de dix ans, une carte que nous espérons pouvoir terminer
prochainement) , et la disposition des assises de ce dernier, il est
évident que la communication avait lieu par des bas-fonds , de
véritables lagunes seulement, et non par des mers profondes.
En n’examinant que superficiellement , on pourrait certainement
être porté à rejeter l'expression de bassin de Paris. En effet, à ne
considérer que la carte géologique de la France , il est impossible
de se refuser à admettre que les dépôts tertiaires de la région corn-
ai) Manuel géologiquex p. 249.
BvJJ. % h doc Créai de France.
2eVeTMM.
1 oies de M. A. Bv.viim.er.
. X ■ ■ ■'} • Ceroiriya . Dcsiiâyesea , Buy. Oxi. sup ,
8... 12 . ' Iso.donta .Deshaye sea, ici- Oxf, sup
Humbert ciel.
Imp . Lemerçier,Po-râ
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
459
prise entre l’Ardenne, les plateaux de la Lorraine et de la Bour-
gogne , le Plateau central et la presqu’île de Bretagne , n’aient été
en communication directe, pendant les périodes éocène et miocène,
entre l’Ardenne et le Cotentin , avec ceux des Pays-Bas et du
S.-E. de l’Angleterre, et, entre le Plateau central et la Vendée,
avec ceux du S. -O. de la France. La surface tertiaire du N. de la
France n’apparaît plus alors que comme un élargissement, un
renflement du détroit qui mettait en communication la nappe
d’eau de l’Europe septentrionale (mer d’Allemagne et Baltique)
avec celles de la région occidentale et méridionale (golfe de Gas-
cogne et Méditerranée).
Mais un examen profond montre bien vite tout ce qu:il y a de
fondé et de vrai dans cette dénomination de bassin de Paris . En
effet , dans une zone assez large de la région tertiaire, circonscrite,
à l’E., au S. et à FO., comme nous l’avons dit, et limitée au N.
par la Manche , le terrain crétacé sous-jacent s’élève beaucoup
au-dessus du niveau de la mer actuelle, à 321 mètres dans le
Perche (ligne du Mellerault), à 280 mètres dans le pays de Bray,
à 200 mètres dans le Boulonnais (ligne de l’Artois), à 280 mètres
dans la Thiérache , à 290 et 315 mètres dans le Sénonais et la
Puisaye , à Zi25 mètres dans le Sancerrois. Ces pays, sans avoir
pendant les périodes tertiaires des hauteurs absolues et relatives
semblables, étaient cependant déjà des parties élevées, car les
dépôts tertiaires s’y montrent avec une très faible épaisseur, de 10
à 15 mètres en moyenne , qui ne peut être attribuée à des dénu-
dations postérieures. — Ce n’est qu’à l’intérieur d’une ligne passant
par LaFère, Beiins, Nogent-sur-Seine, Gien, Romorantin, Blois,
Chartres, Bouviers, et rejoignant en ligne droite la première de
ces villes , que les dépôts tertiaires ont une épaisseur considérable
et se trouvent en couches régulières; ce n’est que dans cet espace
qu’ils se sont accumulés dans des eaux profondes.
Ce n’est véritablement que de Laon à Blois que la craie se
trouve soit peu élevée au-dessus du niveau actuel de la mer, soit
au-dessous de celui-ci. Dans cette partie seulement de la région
tertiaire du N. de la France la surface de la craie présente une
dépression allongée du N.-E. au S. -O. entre ces deux villes , une
cuvette, un véritable bassin circonscrit de toutes parts , dans le-
quel les dépôts tertiaires atteignent une épaisseur d’environ
250 mètres à Soissons, de 270 mètres à Paris, et de plus de
80 mètres à Orléans.
Quant à l’épithète par laquelle les dépôts tertiaires de ce bassin,
et aussi l’ensemble de ceux de la France septentrionale, pourraient
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
m
être désignés, nous préférerions certainement celle de Neustricns ,
tirée du nom que nous avons restitué à cette grande région natu-
relle ; mais nous ne voyons aucun inconvénient à leur conserver
celle de Parisiens , employée par tous les géologues , et plus signi-
ficative pour les étrangers , qui , pour la très grande majorité , ne
connaissent pas beaucoup plus la Neustrie que les Français ne se
rappelaient les Silures avant les travaux de M. Murcliison. — Si
la plus grande partie du terrain tertiaire du S.-E. de l’Angleterre,
qui ne constitue pas un véritable bassin , peut être désignée indif-
féremment par les noms de la ville principale (Londres) ou du
fleuve principal (la Tamise), il ne peut en être de même pour le
S, -O. de la France , puisque la région située entre le Plateau cen-
tral et les Pyrénées comprend les trois bassins hydrographiques
de la Charente , de la Gironde et de l’Adour. — Nous croyons
aussi que, dans le N. de la France, en substituant le nom de la
rivière principale (la Seine) à celui de la plus grande ville (Paris),
on s’éloignerait beaucoup de la vérité , et Von n’indiquerait pas une
surjace qui a des limites tracées par la nature elle-même. — En
effet , la surface de la dépression, une dans son ensemble, du bassin ,
que nous venons d’indiquer, se trouve aujourd’hui appartenir à
deux bassins hydrographiques, celui de la Seine pour les quatre
cinquièmes , et celui de la Loire pour le cinquième méridional.
Paris , au contraire, a l’avantage de se trouver à très peu près dans
la partie centrale , non seulement de ce bassin , mais aussi de toute
la région tertiaire, telle que nous l’avons délimitée en commen-
çant.
Nous n’admettons donc nullement que l’expression de bassin de
Paris est impropre à tous égards.
Partisan des opinions de Cuvier et Brongniart sur la présence
successive et à plusieurs reprises des eaux marines et douces dans
le bassin de Paris proprement dit , nous admettons dans cette partie
centrale l’existence de six formations alternativement marines et
d’eau douce, et d’une septième , marine dans une partie, d’eau
douce dans une autre. La première formation marine, pour nous,
comprend le calcaire pisolithique, que nous regardons toujours
comme distinct de la craie, même la plus supérieure, par sa strati-
fication et par sa faune essentiellement tertiaire , et l’étage des
sables de Bracheux, que nous ne pouvons considérer, avec
M. d’Archiac, comme postérieurs aux sables à lignites. La
deuxième formation marine comprend les sables glauconifères
marins à Nerita conoidea, le calcaire grossier et son fidèle compa-
gnon , les sables de Beauchamp. La troisième formation marine
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
461
renferme les marnes à Huîtres et les sables de Fontainebleau. La
quatrième est constituée par les faluns de la Touraine. Quant aux
formations d’eau douce, la première comprend les sables à lignites ;
la seconde le calcaire siliceux de Saint-Quen, les marnes gypsi-
fères et les meulières de la Brie. La troisième renferme les meu-
lières de Montmorency et les calcaires de la Beauce. La quatrième
enfin, synchronique delà quatrième formation marine, est consti-
tuée par les argiles quartzifères de la Sologne.
2° Sur la classification des sables glauconif ères marins. — M. d’Ar-
chiac trouve, page 599, que la plus artificielle qui ait encore été
proposée est la nôtre , qui consiste à les séparer de la formation
essentiellement d’eau douce de l’argile plastique , pour les réunir
à la formation marine du calcaire grossier. Nous avons été con-
duit à cette association plus encore peut-être par l’observation des
faits que par des idées théoriques , auxquelles , cependant , nous
attachons de l’importance.
Les sables glauconifères marins reposent sur un système de
sables renfermant des fossiles peu abondants , et en grande partie
d’eau douce , dont ils se séparent nettement ; c’est du moins ce que
nous avons observé partout où nous avons pu voir la [partie supé-
rieure des sables à lignites. Dès notre première excursion géolo-
gique un peu lointaine, en 1835, la colline de Laon mettait ce
fait en évidence pour nous; l’année suivante nous en étions égale-
ment frappé à la descente de Fresles, près de Beaumont-sur-Oise ;
depuis , en dressant notre Carte géognostique du Plateau tertiaire
parisien , nous avons constaté assez fréquemment cette séparation,
tant dans les vallées de l’Aisne et de l’Oise qu’entre Beaumont-sur-
Oise et Gisors. Lorsque nous avons pu apercevoir dans les mêmes
localités la partie inférieure du calcaire grossier, nous l'avons au
contraire vu se lier aux sables glauconifères, et par un passage de
composition, et par sa stratification. Nous n’avions toujours vu
jusqu’en 18Z|3, et nous ne voyons encore aujourd’hui dans ces sables
que l’aurore de la formation marine du calcaire grossier, dont les
sables de Beauchamp constituent pour nous le déclin.
3° Extension de quelques assises tertiaires entre la Seine et l'Eure ,
au JV.-O» de la vallée de la Vaucouleurs . — La description de ce
pays, d’une part, n’a été que très sommairement donnée par
M. Passy en 1832, et, d’autre part, son coloriage est incomplet ou
indistinct , dans quelques points , sur notre carte. Les omissions
tiennent uniquement à la difficulté de représenter sur une carte à
l’échelle de s-0 04oT¥ des assises qui ont à peine quelques mètres
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
im
d’épaisseur (1). Le peu de netteté des teintes, dans quelques par-
ties où elles ne forment que des bandes extrêmement étroites,
tient au coloriage par impression lithographique, dont notre carte
était un premier essai , présentant inévitablement des imperfec-
tions. Aussi M. d’Arcliiac a-t-il commis quelques légères erreurs
dans la distribution de certaines assises, dans le bassin de Paris,
à l’égard de cette portion ; mais, nous devons le dire, c’est nous
qui en sommes en partie cause , puisque nous avons eu le tort de
ne pas publier de notes explicatives sur les parties de notre carte
qui n’avaient pas encore été décrites avec détail par les géologues.
Nous ne dirons rien par rapport à l’argile plastique et au cal-
caire grossier, qui y sont suffisamment bien représentés.
Les sables de Beauchampse voient sur plusieurs points des flancs
de la vallée de la Vaucouleurs et de ses ramifications ; mais nous ne
les avons aperçus nulle part en aval de Mantes, dans les coteaux de
la rive gauche de la vallée de la Seine. Pans la vallée de la Yesgre,
à Tliion ville , au S. de Houdan , ils sont bien caractérisés, et ren-
ferment des grès; mais nous n’en avons pas vu la moindre trace
dans les collines qui bordent la vallée de l’Eure.
Le calcaire de Saint-Ouen est suffisamment bien indiqué aussi
pour que nous n’en eussions rien dit, s’il ne se continuait au N. -O.
de la route de Bannières à Pacy-sur-Eure, à laquelle M. d’Archiac,
page 566, le croit limité. Nous l’avons rencontré sur trois points
des coteaux qui bordent la vallée de la Seine : au Chenet, près
Blaru, au S. de Yernon; au bord de la forêt de Bizy, dans la
tranchée delà route de Yernon à Pacy-sur-Eure ; et enfin sur le
coteau à l’O. de Mestreville, à moitié chemin de Yernon à Gail-
lon. Dans ces trois localités il présente des caractères entièrement
semblables à ceux qu’il possède dans les environs de Paris. Dans
(1 ) Nous devons signaler, dans une autre partie de notre carte , une
omission due à la même cause. Comme elle se trouve dans un pays
bien connu des géologues, aucune erreur n’était possible. C’est dans
la partie méridionale, entre l’Yonne et le Loing, où la couleur bleue
des marnes gypsifères et meulières de la Brie a été supprimée, et
l’ensemble de la deuxième formation d’eau douce représenté par la
couleur violette affectée spécialement au calcaire de Saint-Ouen. En
préférant la couleur de cette dernière assise, nous avons songé à ex-
primer ce fait, que sur ce point la formation ne constitue plus qu’un
ensemble essentiellement calcaire, dans lequel il est assez difficile
d’établir des subdivisions.
SÉANCE DU 2 JUIN J 851 . 463
la dernière, la plus occidentale , de nombreuses carrières montrent
la coupe suivante :
Éboulis de sable argileux jaune rougeâtre, à gros grains de Mètres*
quartz \
Calcaire compacte jaune, en lits de 0m,3, alternant avec des
couches de marnes blanches et verdâtres 3
Calcaire blanchâtre, tantôt cellulaire, tantôt compacte, en-
tièrement semblable à celui de Saint-Ouen, contenant en
abondance des Char a , Lymnœa , Planorbis , Paludina
et 2 Hélix %
M. d’Archiac, page 537, pose à Cliaufour, sur la route de Bon-
nières à Pacy-sur-Eure , la limite occidentale des sables de Fon-
tainebleau bien caractérisés. Pour nous, ces sables s’étendent jus-
qu’à Heudebouville , à l’E. de Louviers. Ils recouvrent partout les
meulières de la Brie , qui sont exploitées surtout à Sainte-Colombe
et à Houlbec-Cocherel ; ils sont sans silex , souvent à grains fins et
d’une grande pureté , et renferment parfois de gros blocs de grès
exploités au N. de Saint-Julien-de-la-Liègue , et jusqu’au delà de
Heudebouville.
M. d’Archiac, page 527, n’indique pas les meulières de Mont-
morency, à PO. du plateau cjui vient se terminer par les trois
pointes avancées de la forêt des Alluets, de NeauphleJe-Cliâteau
et de la forêt des Quatre-Piliers. Celles-ci couronnent pourtant la
longue crête qui s’étend de Neauplile à Septeuil par Goupillières;
et à l’Q. de la vallée de la Vaucouleurs elles se trouvent aussi sur
deux points de la longue crête qui continue la précédente jusqu’à
Pacy-sur-Eure, d’abord au Tertre-Saint-Denis, et ensuite à la Coli-
chonnerie, au S.-E. de Gravent. Elles existent encore à la Ville-
l’Evêque, et surtout au N. des Gâtines-d’Oulins, deux points d’une
crête plus méridionale qui continue celle de la forêt des Quatre-
Piliers jusqu’à Ivry -la-Bataille.
4° Sur les dépôts argileux et sableux superficiels du plateau ter-
tiaire parisien et des plateaux crétacés environnants . — Ce qui
nous a attiré le plus de critiques de la part de M. d'Archiac , c’est,
page 569, le parti que nous avons pris à l’égard des dépôts sableux
qui recouvrent les hautes crêtes de calcaire grossier du Soissonnais
et du Laonnais , et le plateau de meulières inférieures de la Brie ,
et surtout, pages 533 et 541 -à, à l’égard des dépôts tertiaires formés
en grande partie des éléments insolubles ou non clésagrégeables des
assises enlevées (du terrain crétacé), tels que les silex , les sables et
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
m
les argiles (1), dépôts qui recouvrent les plateaux crayeux au N.,
à l’O. et au S.-E. du massif formé par les diverses assises tertiaires,
épaisses, superposées, et à allure régulière, que nous avons dési-
gné sous le nom de plateau tertiaire parisien.
Les opinions émises par les géologues présentent de grandes
divergences par rapport à la place de ces dépôts dans la série des
terrains. Les auteurs qui les ont étudiés exclusivement sur les pla-
teaux crayeux et en dehors du plateau tertiaire , frappés de l’irré-
gularité de leur allure, n’ont guère hésité à les ranger dans le dilu-
vium ; le plus souvent, par suite de ce classement, ils ont pris pour
des blocs transportés les grès et poudingues , qui , sur beaucoup de
points de ces plateaux, sont véritablement dans leur gîte originaire.
MM. Dufrénoy et Elie de Beaumont, qui ont sillonné dans
tant de directions la grande plaine du N. de la France, ont été
extrêmement loin dans la carte géologique de la France, sous le
rapport des distinctions à établir pour ces dépôts, au moins dans
certaines parties de la région. Après avoir considéré comme se
rapportant au terrain miocène tous ceux qui se trouvent au S.
d’une ligne tirée de Troyes à Evreux et Caen , ils ont cru devoir,
au N. de deux lignes tirées de Caen à Evreux et d’Evreux à Mé-
zieres, leur appliquer des teintes indiquant, dans des localités
même fort rapprochées, tantôt le terrain éocène , tantôt le terrain
miocène, et tantôt enfin le terrain pliocène. Le tome III de ['Ex-
plication de la carte géologique de la France , qui doit traiter des
terrains tertiaires , n’ayant pas paru , les géologues ne connaissent
pas encore les raisons qui ont porté les auteurs à établir autant de
subdivisions dans des dépôts assez semblables en apparence. Ils n’ont
pu qu’être fort étonnés de voir, soit aux alentours de Montdidier
(Somme), les trois teintes dans un espace de 1 myriamètre de
rayon, soit dans le pays de Thelle, plaine de dénudation dilu-
vienne qui s’étend vers le N. , de Beaumont-sur-Oise au delà de
Gisors, la teinte du terrain miocène, lequel, composé tout diffé-
remment , ne forme que les sommités de quelques hautes collines
du plateau du Vexin français situé au S.
Quant à nous, il ne nous était pas indispensable d’embrasser la
question dans son ensemble pour la grande plaine du N. de la
France; nous avions seulement à prendre un parti pour le centre
compris seul dans le cadre de notre Carte géogno s tique du plateau
tertiaire parisien. Après avoir constaté la liaison des argiles et sables
(1) D’Archiac, Mém. de la Soc. gèol . de Fr 2e sér., t. II, p. 5.
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
46 5
des divers étages de ce dernier avec les dépôts qui nous occupent,
nous n’avons pas su trouver une ligne de démarcation. Ne tenant
pas habituellement compte de la couche diluvienne qui se trouve
partout, nous avons été fort embarrassé. Nous ne pouvions pas,
principalement sur les plateaux de craie, mettre la couleur de
celle-ci, puisqu’elle est recouverte par des dépôts souvent assez
épais; et cependant il fallait en mettre une. Nous avons pris alors
le parti, qui peut paraître au premier abord un peu étrange, de
leur appliquer, dans les différentes parties du plateau tertiaire ou
des plateaux crayeux environnants, des teintes diverses qui, avec
l’expression du doute le plus souvent (?), les rapportent aux diffé-
rents étages des roches arénacées tertiaires parisiennes, soit les sables
inférieurs de l’argile plastique, soit ceux de Beauchamp, soit enfin
ceux de Fontainebleau. Ce parti aurait peut-être été goûté davantage
des géologues si nous n’avions eu le tort de ne donner que quelques
lignes bien insuffisantes d’explication en 1843, après la publication
de notre carte, soit dans les Annales des sciences géologiques , soit
dans la Revue générale de V architecture et des travaux publics de
M. Daly.
Les dépôts éocènes et miocènes accumulés dans la grande dépres-
sion centrale du golfe crétacé parisien formaient primitivement
une surface plus basse ou à peu près aussi élevée que les parties
adjacentes crétacées qui ont été recouvertes seulement par les
dépôts peu épais qui nous occupent. Des changements de niveau
produits à diverses reprises ont exhaussé ou abaissé certains points.
Aujourd’hui la partie comprise entre Biois et Etampes, et située au
S. -O. d’une ligne tirée de Chartres à Montereau, possède des alti-
tudes peu considérables et fait encore continuité avec les plateaux
crayeux adjacents plus élevés. Mais la partie située au N.-E. de
cette ligne, et qui va en relevant beaucoup d’Etampes jusqu’à
Laon, est au contraire séparée des plateaux crayeux par un large
fossé à talus intérieur rapide, formé par le bord du massif tertiaire
et à pente extérieure très douce, formée le plus souvent par le fond
de l’ancienne dépression crayeuse. Les bords de la grande lentille
tertiaire ont été démantelés et les matériaux emportés lors du cata-
clysme diluvien ; cette partie N.-E. forme ce que nous appelons
le plateau tertiaire parisien. La surface de ce plateau, par suite des
dénudations antérieures à l’époque actuelle, est elle-même divisée
en plusieurs plateaux secondaires ou terrasses échelonnées l’une
au-dessus de l’autre, et venant se terminer dans leur partie septen-
trionale par un escarpement au-dessus de la suivante. La première,
qui fait suite à la plaine de la Sologne et de la Béance, est formée
Soc. géol., 2ie série, tome VIîï. 30
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
à66
par les calcaires de la Beauce et les meulières de Montmorency ;
elle vient jusqu’à la Seine entre Montereau et Mantes. La seconde,
‘formée par les meulières de la Brie, est limitée par la Marne et
l’Ourcq, à peu près de Paris à Reims. La troisième, constituée par
le calcaire grossier, s’étend jusqu’aux limites du plateau tertiaire
parisien à Gisors, Clermont, Noyon, Laon et Reims. Toutes ces
terrasses sont constituées par des roches arénacées et argileuses,
en très grande partie meubles, surmontées par une assise solide,
calcaire ou siliceuse.
Au pied de la pente formée soit par les terrains tertiaires sur le
contour du plateau, soit par les diverses assises solides dans son
intérieur, s’étendent donc des plaines ou des terrasses plus basses.
Les unes comme les autres présentent très souvent, près de la sur-
face, des roches arénacées ou argileuses, semblables à celles qui
forment la partie inférieure de la pente du plateau ou de la ter-
rasse située dans le voisinage. Ce sont des lambeaux, des témoins
des couches meubles qui recouvraient et nivelaient ces surfaces
avant les dénudations diluviennes. Les roches solides du plateau
ou de la terrasse, et les témoins qui sont à la surface, comme
presque toute la surface de la terre, sont recouverts par des dépôts
véritablement diluviens , formés par les éléments plus ou moins
remaniés des couches meubles supérieures. Sur les terrasses de
la Brie et du Soissonnais, ces parties remaniées arénacéo-argileuses
ne se distinguent pas toujours très facilementde la partie inférieure,
souvent de même nature, des dépôts régulièrement stratifiés et
bien en place; mais, sur les plateaux crayeux, les dépôts tertiaires
qui paraissent s’etre déposés dans des eaux fort peu profondes
présentent à peine des traces de stratification, et le plus souvent
il est presque impossible de les séparer de la partie superficielle
diluvienne. Le parti que nous avons pris alors pour notre carte a
été d’étendre, à la surface des plateaux et des terrassés, la teinte des
lambeaux inférieurs, à toutes les parties remaniées à la vérité,
mais non placées dans des positions qu’elles n’auraient pas occu-
pées dans leur gîte primitif.
Nous ne nous flattons pas, en procédant ainsi, d’être arrivé à
représenter exactement ce qui existe dans la nature, mais nous
avons cru nous en éloigner le moins possible, et nous avons espéré
éviter cet inconvénient, que nous avons signalé, de représenter
dans le même pays, par deux et même par trois teintes différentes,
le terrain en place et ses parties remuées, infiltrées, mais à peine
déplacées, soit pendant celles des périodes tertiaires postérieures à
son dépôt, soit à l’époque diluvienne. Des teintes, uniformes
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
46.?
comme les depots à silex clés plateaux crayeux, indiqtienl ceux qui
s’étendent de Château-Tandon à Troyes, de Montdidier à Rouen 5
et de Chartres à Rouen. Les points d’interrogation (?) qui suivent
le plus souvent la lettre caractéristique de chacune de ces couleurs
indiquent suffisamment qu elles ne représentent pas, soit les sables
inférieurs, soit les sables de Fontainebleau incontestables, lies
teintes également uniformes représentent les dépôts sans silex qui
sont à la surface des deux terrasses septentrionales du plateau ter-
tiaire. Nulle part ainsi nous ne nous sommes vu dans la néces-
sité de mettre sur le même plateau deux teintes différentes, excepté
seulement sur la rive droite de la vallée de la Seine, de l’embou-
chure de l’Epte à Rouen, où la teinte des sables de Fontainebleau,
des plateaux de la rive gauche, se juxtapose à celle des sables infé-
rieurs des plateaux de la rive droite.
Nous allons terminer par l’exposition clés principaux motifs
qui nous ont engagé à mettre une teinte de préférence à une autre
sur chacune des portions de la zone crayeuse et sur les différentes
terrasses clu plateau tertiaire qu’elle circonscrit.
Pour le plateau de Château-Landon à Troyes ou Sénonais,
entre ce premier bourg et Villeneuve-la-Guyard, on voit sortir de
dessous les calcaires de la seconde formation lacustre des argiles
et des sables, avec cailloux roulés de silex qui appartiennent aux
formations éocènes plus inférieures, et dont il est impossible cl’étâ-
blir la discontinuité avec les dépôts qui s’étendent jusqu’à Troyes.
Ceux-ci, dont les silex sont souvent non roulés, présentent cepen-
dant, sur beaucoup de points où l’épaisseur est plus considérable,
des cailloux roulés et même des poudingues siliceux et des grès.
Ces dépôts sont encore analogues à ceux qui se trouvent à la base
du même calcaire lacustre, sur tout le bord du plateau tertiaire,
de Montereau jusqu’au delà de Sézanne. Nous leur avons appliqué
la teinte de l’argile plastique comme à ces derniers, à l’égard des-
quels nous n’avons pas cru devoir nous écarter de l’opinion géné-
ralement admise, pour en adopter une autre que nous trouvons
encore contestable, quoiqu’elle émane de nous-même (1).
Pour le plateau de Montdidier à Rouen, il y a liaison de ses
dépôts, tout semblables à ceux du Sénonais, avec ceux de la pre-
mière formation d’eau douce; de nombreux lambeaux bien carac-
térisés de cette dernière existent sur une multitude de points,
dans la basse Picardie, à l’E. du pays de Bray, et dans le Vexin
(1) Bull, de la Soc. géol. de Fr ., t. IX, p. 288. 1838.
SÉANCE DU 2 JUIN 185 J .
A68
normand etîe pays de Thelle, au S. -O., tant dans les parties éle-
vées que sur la pente extérieure du large fossé dont nous avons
parlé. Cette liaison ne nous a pas permis de donner à ces dépôts
une teinte autre que celle de la formation d’eau douce sableuse
qui est au-dessous du calcaire grossier; ce dernier constitue dans
toute cette partie, depuis la Seine, à rembouchure de l’Epte, jus-
qu’à l’Oise, à la Fère, le talus opposé rapide du plateau tertiaire.
Nous avons donc appliqué à toute cette surface la teinte de l’argile
plastique.
Pour le plateau de Chartres à Rouen, on voit sortir de dessous
les calcaires et les meulières de la troisième formation lacustre, de
Bonneval à Chartres et Gallardon, des argiles et des sables avec
silex non roulés, qui renferment des grès et des brèches siliceuses,
et appartiennent à l’étage des sables de Fontainebleau.' Ces dépôts
se poursuivent avec des caractères analogues dans le Perche, fort
loin vers 10. A Gallardon, le plateau tertiaire commence, en s’éle-
vant, à se séparer du plateau crayeux ; l’assise dessables de Fon-
tainebleau augmente d’épaisseur et prend alors les caractères
qu’elle possède habituellement dans le bassin proprement dit; ces
sables constituent encore les petites crêtes qui s’avancent jusqu’à
Pacy. A l’F. de toute cette ligne, de la rive gauche de l’Eure et
aussi de la Vesgre, le pays d’Ouche présente jusque fort loin les
mêmes sables peu épais avec de nombreux silex et des dépôts argi-
leux par places. Sur la large crête située entre la Seine et l'Eure,
au N. de Pacy, les meulières de la deuxième formation lacustre
sont recouvertes par dessables fins, souvent avec des argiles et des
sables à nombreux grains de quartz cannabins, qui ne nous ont pas
paru pouvoir en être séparés, et qui se montraient déjà sur beau-
coup de points des crêtes qui sont au S.-E. de Pacy. Ces sables
se présentent sur le plateau à i’O. de l’Eure et de Louviers ; sur
la rive droite de la Seine, de l’embouchure de l’Epte jusqu’au
delà de Rouen, ils forment une bande de 5 à 10 kilomètres de
largeur qui, par la présence des nombreux grains de quartz, se dis-
tingue nettement des argiles sableuses à cailloux de silex qui re-
couvrent l’intérieur du plateau et que nous avons vues se rattacher
aux sables de l'argile plastique. Telle est l’explication de la double
coloration appliquée à la bordure S. -O. du Vexin normand. Ici la
différence de composition minéralogique nous a fourni des carac-
tères suffisants pour être certain que si la ligne de démarcation
n’est pas aussi tranchée, et ne passe pas exactement par la limite
des deux teintes, cependant elle est très réelle et n’en est pas éloi-
gnée. C’est certainement là, au premier aperçu, une des singuia-
SÉANCE DU 2 JUIN 1851. 469
rites de notre carte ; M. d’Archiac ne paraît pas l’avoir remarquée,
ou du moins il ne l’a pas signalée.
Quant à la terrasse septentrionale tertiaire qui s’étend de l’Epte
jusqu’à Reims, et qui est formée supérieurement par le calcaire
grossier, elle présente à sa surface de grandes nappes de sable un
peu argileux, souvent avec blocs de grès, au-dessous de laquelle,
sur les points les plus bas (Saint-Germain en Laye, à 33 mètres)
comme sur les plus élevés (forêt de Saint-Gobain, à 220 mètres), se
trouvent dans toutes les parties une multitude de lambeaux des sables
de Beauchamp. Les sables superficiels n’étant autres que ces der-
niers, légèrement remaniés, nous n’avons fait aucune difficulté de
leur en donner la teinte.
Pour la terrasse orientale de la Brie, qui est formée par les meu-
lières de la deuxième formation lacustre, qui va en s’élevant de
Melun (à 74 mètres) à Epernay, et qui est continuée par le Tar-
denois auN. delà vallée de la Marne jusqu’à Reims (à 280 mètres),
ce que nousjvenons de dire de la précédente s’applique entièrement
à celle-ci , avec cette différence que les nombreux lambeaux sableux
appartiennent à l’étage de ceux de Fontainebleau. Nous avons
étendu leur couleur à la nappe dont ils ont fourni les matériaux.
En donnant cette explication, nous n’avons nullement la pré-
tention de faire approuver de tous les géologues le parti que nous
avons pris, que nous prendrions encore pour le bassin de Paris,
et que nous prendrons très probablement pour les dépôts meubles
analogues de l’Aquitaine ; nous avons seulement voulu exposer le
moyen que nous avons jugé le moins mauvais pour sortir de la
difficulté.
Les argiles quartzifères de la Sologne s’avancent au N. beau-
coup plus que ne l’indique M. d’Archiac ; elles ne sont pas
restreintes au bassin hydrographique de la Loire. Elles existent
dans la partie méridionale de celui de la Seine, dans la Beauce, sur
: le prolongement de la terrasse constituée par la troisième forma-
tion lacustre. Des bords de la Loire elles s’avancent en nappe con-
tinue jusqu'à Montargis, ainsi que dans les alentours de Beaumont
en Gâtinais et de Pithiviers, qui sont compris dans le cadre de
notre carte. Il y en a même plusieurs lambeaux isolés près d’An-
gerville, de Méréville et jusqu’à la Ville-Sauvage, à 5 kilomètres
au S. -O. d’Etampes, à 1 Zi 9 mètres d’altitude. Si elles n’ont pas
été indiquées en 1843 sur notre carte où elles n’occupent que peu
d’étendue , c’est parce que nous ne nous rappelions plus les avoir
vues en 1836, à une époque où nous ne nous doutions pas de leur
contemporanéité avec les faluns de la Loire. Mais après avoir vu
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
h 70
la Sologne en 1 8^3 , nous ne les avons pas omis sur la petite carte
des environs de Paris que nous avons donnée dans Patrie^ en 1 8àà.
L’opinion de MM. Desnoyers et Dujardin sur le synchronisme des
argiles quartzifères (sables) de la Sologne et des fahms de la Loire,
que nous avons adoptée, l’a été également par M. d’Archiac, mais
c’est par erreur qu’il donne à entendre (p. 187) que les couches sa-
bleuses avec cailloux roulés de quartz et de silex, d’une partie de la
Sologne, sont antérieures au calcaire lacustre de l’Orléanais, et
paraissent représenter les faluns. Les sables avec silex, très rare-
ment roulés, sont seuls inférieurs au calcaire d'eau douce, et les
argiles sableuses à cailloux quartzeux, sans silex, sont seules supé-
rieures et contemporaines des faluns. C’est aussi par erreur qu’il
est dit, page 517, que ces dernières remontent vers le S., sur la rive
gauche de la Loire, jusqu’au delà de Sancerre ; elles ne dépassent
pas Bannay, situé à 7 kilomètres plus bas au N.
5° Sur le système de soulèvement du Sancerrois . — M. d’Archiac,
pages 530 et 550, regarde comme douteux que cette dislocation du
sol soit postérieure au calcaire lacustre de la Beauce; il préfère la
croire antérieure, c’est-à-dire ayant suivi immédiatement le dépôt
dessables à silex du Perche, contemporains de ceux de Fontaine-
bleau. Le seul fait sur lequel s’appuie son opinion, c’est la constante
régularité de la troisième formation lacustre.
Certainement, et nous avons eu bien soin de le dire dans notre
mémoire, nulle part le calcaire lacustre, non plus que les argiles
sableuses de la Sologne, n’entre dans la composition du Sancerrois.
Mais de la disposition de ces deux étages, par rapport à ce pays,
et de vues générales sur la succession des formations marines et
lacustres dans le bassin de Paris, il nous semble que l’on peut arri-
ver à des déductions qui militent en faveur de notre opinion,
adoptée au surplus par M. Elie de Beaumont, plutôt que de celle
de AI. d’Archiac.
Dans la portion du bassin de Paris située entre la Loire, au-
dessus d’Orléans, et le Cher, le terrain miocène est essentielle-
ment formé à la partie inférieure par des dépôts arénacéset argi-
leux ; ce n’est que sur des points isolés, souvent éloignés les uns
des autres, que se trouvent par-dessus les calcaires lacustres de la
Beauce, qui ne constituent que des dépôts locaux, plus ou moins
restreints, qui paraissent avoir rempli quelques dépressions. Aucun
de ces dépôts calcaires n’existe à la surface du Sancerrois à la vérité,
mais aucun d eux non plus ne vient le border de manière à repo-
ser transgressivement sur les assises qui le constituent.
De la Loire au Cher, les calcaires lacustres font défaut, tant au
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
471
pied septentrional, de Briare à Viefzon, qu’au pied méridional, de
Pouilly-sur-Loire à Bourges. Ceux du vaste bassin de la Beauce
se perdent au S. d’Orléans, sous les argiles sableuses de la Sologne,
même avant d’atteindre la Sauldre et la limite méridionale de
celles-ci. Ils sont groupés aux deux extrémités, à Châtillon-sur-
Loire et Boulleret, à l’E., et à Mehun-sur-Yèvre au S. -O. Dans
les premières localités, les sables à silex qui les supportent, en s’y
liant de la manière la plus intime, sont eux-mêmes horizontaux ;
si, à l’exemple des calcaires, ils n’existaient que dans ces mêmes
localités, on serait tout aussi fondé à les regarder comme posté-
rieurs au relèvement du Sancerrois.
Les argiles sableuses de la Sologne, au contraire, présentent dans
leur disposition des faits qui ne permettent pas de supposer avec
vraisemblance qu’elles ne soient pas postérieures au bombement
du Sancerrois. En effet, elles forment une nappe continue qui
vient l’embrasser exactement à l’E. , au N. et à l’O. sur près des
deux tiers de sa circonférence.
La non -existence des calcaires lacustres dans le Sancerrois ne
constitue, pour nous, qu’un caractère négatif, dont la valeur est
bien faible, comparée seulement au caractère positif fourni par la
disposition des argiles sableuses de la Sologne.
Abordant maintenant la question de la succession des dépôts
marins et d’eau douce d’une manière générale, ce n’est pas, il nous
semble, faire une hypothèse gratuite que d’admettre qu après une
révolution générale ou locale qui aurait amené les eaux de la mer
dans un golfe-bassin, il ne serait pas besoin d’une nouvelle révo-
lution pour que celui-ci, au bout d’un temps plus ou moins long,
put se transformer en un lac d’eau douce. Des ensablements et des
envasements successifs pourraient facilement élever les bas-fonds
qui obstruent l’entrée du golfe et le fermer complètement, en même
temps que des eaux douces, affluant en abondance, pourraient rem-
placer graduellement les eaux salées. La mer ne pourrait venir de
nouveau s’établir sur cette surface qu’à la suite d’un affaissement
soit lent, soit brusque du sol. Si l’abaissement était lent et général,
la mer pourrait reprendre une configuration assez analogue à celle
qu’elle possédait avant l’envahissement des eaux douces ; si au
contraire l’abaissement était brusque, comme celui qui résulterait
d’ime dislocation de l’écorce 'terrestre, la mer pourrait occuper
un emplacement fort différent dans le golfe-bassin et y pénétrer
même par une autre partie de la circonférence que la première fois.
Si, partant de ces principes, nous cherchons à reconnaître ce qui
s’est passé dans la partie méridionale du bassin de Paris pendant
SÉANCE DU 2 JUIN 185 1.
à 72
la période miocène , nous voyons qu’il s’y est déposé trois assises
bien distinctes, les sables marins de Fontainebleau, les calcaires
lacustres de la Beauce , puis les falims marins de la Loire et les
argiles très probablement d’eau douce de la Sologne. Les deux
assises inférieures se poursuivent régulièrement dans tout ce qui
constitue essentiellement le bassin de Paris ; elles se lient l’une à
l’autre principalement sur leurs bords , et leur distribution géo-
graphique est absolument la même. La mer dans laquelle s’est
déposée la première avait incontestablement communiqué avec
celles du N. de l’Europe. L’assise supérieure, au contraire, dans
sa partie marine, ne forme qu’une série de dépôts qui s’éloignent
peu de la vallée de la Loire , de Blois à la mer. Les dépôts sont
aujourd’hui morcelés; mais aucun géologue ne doute qu’ils n’aient
été déposés dans un long golfe étroit , dont le débouché dans la
mer occidentale était situé entre Vannes et Napoléon- Vendée.
D’une part, il est évident qu’il s’est produit dans le bassin de
Paris , pendant le dépôt de ce qu’on y appelle le terrain miocène,
une révolution qui a séparé ce dernier en deux membres distincts,
qui a fermé définitivement la communication avec la mer du
Nord , et qui a ramené les eaux de l’Atlantique dans la partie
méridionale de cette région pour la première fois depuis le dépôt
de l’étage inférieur du terrain jurassique. Aussi doit-on (laissant
ici reproduire notre opinion par M. d’Aïcliiac lui-même) « tenir
» compte de la disposition des faluns par rapport au calcaire la-
» custre , qu’ils recouvrent par places. Il y a eu entre ces deux dé-
» pots d’origine si différente un phénomène remarquable, sans
» doute d’abaissement, qui a fait succéder les eaux marines aux
» eaux douces dans le bassin de la Loire , tandis que celui de la
» Seine était émergé. Or ce fait suffirait pour motiver d’une ma-
» nière rationnelle la division de la formation moyenne de cette
» partie de la France en deux sous-périodes distinctes, dont l’une
» comprendrait les grès supérieurs et le calcaire lacustre supérieur,
» et l’autre les faluns seulement. »
D’autre part, il est encore évident que, pendant la formation
du terrain miocène , après le dépôt des sables de Fontainebleau et
avant celui des faluns , une dislocation de l’écorce terrestre a pro-
duit le relèvement du Sancerrois, lequel est parallèle , à très peu
près, à la dépression et à la vallée de la basse Loire dans deux de
ses principales parties , d’Orléans à l'embouchure de la Vienne,
et d’Angers à Nantes.
Y a-t-il plus de probabilités pour que ces deux riclements de
l’écorce terrestre, produits parallèlement dans un même pays,
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
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élévation du Sancerrois et affaissement de la vallée de la Loire ,
soient séparés l’un de l’autre par l’épaisseur du calcaire de la
Beauce , comme le pense M. d’Archiac , ou bien pour qu’ils soient
contemporains, et tout simplement deux effets d’une cause unique?
Si nous avions encore des doutes lorsque nous avons lu notre mé-
moire à la Société à la fin de 18AA, il nous en reste beaucoup
moins aujourd’hui après avoir rédigé ce qui précède. Nous préfé-
rons adopter l’opinion contraire à celle émise par M. d’Archiac.
Une remarque doit nécessairement suivre. En admettant que
le système du Sancerrois, dirigé E. 26° N. (et sur le prolongement
duquel se trouve le pays élevé de Levroult, au N. de Châteauroux,
qui sépare la Sologne de la Prenne), soit immédiatement antérieur
aux faluns de la Loire , nous ne sommes nullement porté à révo-
quer en doute l’existence, dans le bassin de Paris, d’un mouve-
ment du sol immédiatement postérieur aux sables de Fontaine-
bleau. Si tous les sables à silex qui recouvrent le terrain crétacé
dans le Perche , et qui ont atteint 321 mètres près du Al ellerault ,
appartiennent bien à la partie inférieure du terrain miocène , il se
pourrait que la dernière élévation de ce pays , opérée , à notre avis,
suivant une ligne dirigée E. 36° S., de Trun à Bonneval, se fût
produite immédiatement avant le dépôt du calcaire lacustre de la
Beauce.
6° Sur la composition et la disposition des terrains tertiaires qui
bordent la vallée du Cher, de Montluçon à Vierzon . — Dans le résumé
qu’il a donné, p. 659, de notre notice sur la disposition des ter-
rains tertiaires des plaines de l’Ailier et de la Loire , et des discus-
sions dont elle a été l’origine entre M. Pissis et nous, M. d’Arcliiac
n’a pas émis d’opinion personnelle , sans doute parce qu’il n’a pas
jugé la question suffisamment éclaircie. N’ayant jamais eu qu’un
seul but dans nos travaux , celui d’arriver à la connaissance de la
vérité, nous croyons utile et opportun de publier quelques obser-
vations faites depuis longtemps déjà et qui se rattachent à cette
question, soit de la continuité des dépôts tertiaires du Plateau
central avec ceux de la grande plaine du Nord de la France, soit
de leur dépôt dans des dépressions entièrement isolées.
Les terrains primitifs constituent essentiellement le Plateau cen-
tral; au N. de la ligne de leurs plus grandes altitudes, leur sur-
face a présenté plusieurs dépressions allongées du S. au N., dans
lesquelles se sont accumulés des dépôts tertiaires. Ces parties,
basses encore aujourd’hui, constituent les plaines de la Loire et de
l’Ailier, qui se réunissent en une seule dans la partie septentrio-
nale, au point où les dépôts tertiaires cessent de former des nappes
SÉANCE DU 2 JUIN 1851,
hlh
épaisses continues, et, plus à FO. , la plaine beaucoup moins
grande du Cher, dont les dépôts, peu épais, commencent autour
de Montluçon, et se réunissent, près de Saint-Âmand, à ceux des
plaines du Berry.
À la suite d’un voyage fait en septembre 1842, nous avions
dans notre notice (1) péremptoirement démontré : 1° que les dé-
pôts tertiaires des vallées de F Allier et de la Loire, au-dessus du
confluent de ces deux rivières, s’étaient fait dans un même bassin ;
la nappe d’eau remplissait une grande dépression bifurquée du
Plateau central qui s’avançait dans la vallée de l’Ailier jusqu’au delà
de Brioude, et dans la vallée de la Loire jusqu’à Roanne, et l’on
pourrait même dire jusqu’à Saint-Rambert, au delà de Montbri-
son ; et 2° que ces dépôts, primitivement horizontaux de Decize à
Brioude, dans la vallée de l’Ailier, par exemple, avaient éprouvé
un dérangement considérable, qui a porté la partie méridionale
à des altitudes beaucoup plus considérables (à 810 mètres) que la
partie septentrionale (à 214 mètres).
Dans un voyage fait en septembre 1843, antérieurement aux
longues discussions cpie nous avons eues avec M. Pissis, nous
avions voulu rechercher si les terrains tertiaires de la plaine su-
périeure du Cher, ainsi que nous le supposions, présentaient une
disposition analogue. JN’ayant pas jugé utile de faire intervenir
dans la controverse établie les résultats auxquels nous étions arrivé,
leur publication s’est trouvée ajournée jusqu’à une future occasion,
qui nous semble se présenter aujourd’hui.
Les plaines de F Allier et de la Loire pénètrent de 175 kilomètres
dans le Plateau central, et la hauteur des parties encaissantes, au
S. de Moulins, dépasse de plusieurs centaines de mètres la surface
supérieure du terrain tertiaire ; sur plusieurs points la différence
va même au delà d’un millier de mètres, comme dans le voisinage
du parallèle de Clermont. La plaine supérieure du Cher offre des
caractères semblables au S. de Saint-Amand ; mais plaine et cein-
ture montueuse sont taillées sur de très petites proportions. La
plaine ne pénètre guère que de 40 kilomètres dans le Plateau
central, et la hauteur des parties adjacentes de celui-ci excède
rarement de 100 mètres la surface du terrain tertiaire.
De divers points de l’intérieur de la plaine cette disposition
peut être parfaitement saisie. Ainsi dans la partie méridionale, de
la colline qui est au S.-Ë. d’Argentière on distingue parfaite-
ment, sur la rive droite du Cher, au-dessus de la prairie , deux
(1) Bail, de la Soc . géoM de Fr., t XIV, p. 577. Juin 1 843.
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
Ù7b
terrasses: une supérieure, formée par le terrain primitif et occupée
par des bruyères ; et une inférieure, formée par le terrain tertiaire,
qui porte de nombreux villages avec des cultures et des arbres, et
qui s’élève à moitié de la hauteur de la précédente. Dans la partie
septentrionale, à Saulzais-ie-Potier, ainsi que sur les collines situées
au S., on se trouve dans une plaine unie, découpée seulement par
des vallons plus ou moins profonds , qui s’étend à perte de vue
vers le nord, et qui est limitée à l’E., au S. et à l’O. par un pla-
teau également bien uni à TE., mais un peu montueux à FO.
Bourges et ses alentours sont situés dans les plaines du Berry ; le
Plateau centrai très éloigné a disparu, et la vue s’étendrait jusque
sur le bassin proprement dit de Paris, sans la haute crête du San-
cerrois, dont l’élévation, ainsi que nous l’avons établi, est posté-
rieure au dépôt de la plupart de ses terrains tertiaires — Au
premier aperçu, la plaine du Cher, au-dessus de Saint-Amand,
paraît une grande anse, un véritable fiord , dans lequel se seraient
faits aussi les dépôts tertiaires qui constituent en si grande partie
la plaine du Berry. L’examen détaillé des terrains tertiaires auquel
nous allons nous livrer maintenant va démontrer la réalité de cette
supposition .
Les terrains tertiaires de la plaine de P Allier, ayant été l’objet
de nombreux travaux, nous avons pu en 1843 ne nous occuper que
de leur disposition ; pour ceux de la plaine supérieure du Cher,
qui sont à peu près inconnus, nous croyons utile d’en donner une
courte description.
Les terrains tertiaires du Berry, dans le voisinage de la vallée
du Cher, reposent sur des terrains d’âge et de nature fort diffé-
rents , qui n’ont certainement pas du être sans influence sur
leur composition dans les diverses parties : de Néris à Montluçon
c’est principalement sur des granités et des micaschistes ; le trias
et le lias ensuite s’étendent jusqu’à Saint-Amand; au delà vien-
' lient les calcaires de l’oolite inférieure. De Levet à Bourges et
Allouis les roches sous-tertiaires sont les calcaires compactes de
l’oolite moyenne, les calcaires et marnes de l’oolite supérieure, et
enfin les sables de l’étage moyen du terrain crétacé.
En descendant du plateau de Néris, formé par un granité jau-
nâtre, à petits grains, on voit sur la route de Montluçon des ro-
ches stratiformes qui plongent d’environ 30° à i’O.-S.-O., et qui
ne sont probablement que des granités feuilletés par désagrégation.
Plus bas on retrouve les granités , qui rendent le vallon assez es-
carpé et rocheux, et qui forment des coteaux , souvent escarpés,
qui dominent de toutes parts les terrains tertiaires. Plus bas se lrou«
476
SÉANCE DU 2 JUIN 1851 .
vent, par-dessus, des sables granitiques assez grossiers, rougeâtres,
et un peu plus loin, à 3 kilomètres avant Montluçon, on voit sur
une assez grande épaisseur un poudingue assez friable, de couleur
violette, à cailloux de roches primitives, gneiss et surtout granité.
En descendant à Montluçon on se trouve au milieu de coteaux à
pentes douces, formés d’argiles rouges et vertes, renfermant quel-
ques cailloux de quartz et laissant échapper de petites sources fer-
rugineuses. Ces argiles sont recouvertes par des sables grossiers
jaunes à cailloux de quartz, au-dessus desquels encore, sur plu-
sieurs points, existe un diluvium à fragments de roches primi-
tives.
A Montluçon on traverse la large plaine à blocs diluviens du
Cher; pour aller à Argentière on monte sur un plateau bas, au
milieu de sables argileux rouges couronnés par des sables jaunes,
mais d’une faible épaisseur. Au S.-E. d’ Argentière , au-dessus
d’argiles rouges à grains de quartz , on exploite sur 3-4 mètres ,
pour moellons , des roches argileuses endurcies , à gros grains de
quartz, renfermant quelques cailloux de quartz ; ces roches, en
masses considérables non stratifiées, sont rouges avec quelques
taches blanches , et quelquefois à texture bréclioïde par le mélange
de parties ferrugineuses. Elles se montrent en allant à Aulde , et
sous l’église de cette commune. Le vallon au bas est profond, et
les micaschistes qui en forment le fond lui donnent un aspect sau-
vage ; en remontant on retrouve les argiles endurcies rouges à
gros grains de quartz , et par-dessus les sables jaunes à cailloux de
quartz. Le valion de Chazemais présente des micaschistes rou-
geâtres dont les strates très inclinés sont dirigés du N. -E. au S. -O.;
puis, sous le bourg, il y a des argiles rouges ferrugineuses qui se
rencontrent dans le vallon suivant. Ces roches argileuses, tant
plastiques qu'endurcies, nous paraissent être un des produits de la
décomposition des roches primitives ; elles sont entièrement sem-
blables à celles qui constituent très souvent les terrains tertiaires
au voisinage du Plateau central , tant sur son bord septentrional
dans le Berry, que sur la bordure S. -O. dans l’Angoumois et le
Périgord.
En descendant dans la plaine de Saint-Yitte , et en remontant,
on voit des argiles vertes avec quelques nodules calcaires , des ar-
giles à grains de quartz par-dessus , puis des sables grossiers assez
purs, jaunes , contenant de nombreux cailloux de quartz, et for-
mant la surface. Ces argiles et ces sables ont la plus grande ana-
logie avec ceux de la plaine de l’Ailier, entre Gannat et Yichy, et
ceux de la Sologne et du Gâtinais ; nous sommes disposé à les
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
477
croire contemporains. A 2 kilomètres au S. de Saulzais-le-Potier,
par-dessous, on tire des argiles plastiques blanchâtres, employées
dans des tuileries et peut-être des poteries. Dans le vallon au N.,
les argiles à grains et à cailloux de quartz ont une grande épaisseur,
et ce n’est que dans le fond seulement que l’on aperçoit les argiles
vertes avec quelques rognons calcaires. La descente d’un vallon à
2 kilomètres avant le hameau de Poizieux montre , dans la tran-
chée de la nouvelle route, une belle coupe du terrain tertiaire tout
entier. On y voit sur 20 mètres d’épaisseur environ :
Argiles grises assez sableuses, à grains de quartz, con-
tenant, à la partie supérieure, des cailloux généra- Mèires.
lement nuçaires de quartz blanc 8 — 10
Calcaire d’eau douce blanchâtre en bancs irréguliers,
assez puissant, parfois bréchoïde, passant inférieure-
ment à des marnes blanches, à nombreux lits de
rognons d’un calcaire compacto-grenu , blanchâtre
ou compacte brunâtre, avec des veines de silex blond. 3 — 4
Argiles vert jaunâtre alternant avec des lits de marne
blanche à rognons calcaires et quelques lits d’ar-
gile à grains de quartz 3
Argiles rouge violet, quelquefois un peu endurcies, al-
ternant avec des lits d’argile verte et empâtant infé-
rieurement des Gryphées et des Bélemnites du lias. 3
Au-dessous se trouve le lias, composé par des alternances d’ar-
giles et de calcaires gris renfermant en abondance le Gryphœa
circuata. En descendant de Poizieux , qui est, sur des argiles gris
jaunâtre à grains de quartz , on voit des calcaires compactes gris
jaunâtre, avec polypiers grenus, qui forment des bancs puissants
exploités sur le plateau. Avant Saint-Amand on trouve les calcaires
argileux gris coquiiliers du lias , et par- dessous le trias, qui s’élève
à 15 mètres environ au-dessus de la prairie du Cher, et qui est
formé par des sables et des grès grossiers micacés, stratifiés, jau-
nâtres, alternant avec des bancs d’argiles grises et vertes.
Après avoir traversé la plaine unie du Cher, formée par le di-
luvium à fragments de roches primitives , on monte sur une pente
recouverte par les éboulis des argiles jaunes à silex oolithiques
blonds, qui forment le plateau au S. de Meillant. En descendant à
Bruère on trouve les calcaires oolithiques blancs , avec veines de
silex oolithique blond , qui sont exploités sur une épaisseur de 8 à
10 mètres. La route passe sur le flanc de la vallée du Cher, et montre
après le ruisseau d’Alichamp des marnes blanchâtres à nodules de
calcaire d’eau douce; en remontant de 10 mètres on se trouve
SÉANCE DU 2 JUIN 1851,
m
sur le plateau, qui présente des bancs puissants, autrefois exploités
sur 1 mètre d’épaisseur , d’un calcaire compacte, cellulaire, gri-
sâtre, contenant parfois une grande abondance de petits Planorbes.
En descendant un peu, à 9 kilomètres de Levet on voit, par-dessous,
un calcaire marneux, friable, jaunâtre, épais de 6-7 mètres. A
A kilomètres avant Levet, il est compacto-terreux , jaunâtre, avec
parties spathiques, et repose sans intermédiaire visible sur les cal-
caires compactes, jaunâtres, jurassiques, qui sont exploités çà et là
pour la route , et recouverts en partie par des terres argileuses
jaunes. Dans la forêt de Lissay, il y a sur quelques points, des argiles
jaune rougeâtre et des grèves calcaires non roulées, exploitées sur
3 mètres. Plus loin on voit des bancs puissants d’un calcaire piso-
lithique blanc , recouvert par des calcaires compactes blanchâtres
en lits assez réguliers de 0IQ,1, et appartenant à l’étage moyen du
terrain jurassique ; de nombreuses exploitations y sont ouvertes à
3 kilomètres avant Bourges.
Aussitôt après avoir traversé la vallée de l’Yèvre, on remonte
sur les argiles et marnes grisâtres à lumachelles et Exogyra vir-
gala , qui forment une plaine unie à la surface de laquelle se trou-
vent, à Basse-Goutte (Bois-Gerisse), une vaste poche d’argile brun
jaunâtre avec fer hyclroxydé exploité, et autour de Mehun-sur-
Yèvre les calcaires d’eau douce que nous avons déjà décrits.
La nature des roches formant le sol sous-tertiaire a souvent,
comme on voit, une influence marquée sur la composition des ter-
rains tertiaires superposés; sur les granités et les micaschistes ces
derniers sont essentiellement formés par des argiles , des sables et
des cailloux roulés provenant de la destruction des premiers ; au N.
de Saint-Amand, sur les calcaires jurassiques à rognons de silex,
les sables renferment une grande quantité de ces derniers ; sur les
calcaires compactes jurassiques il n’y a plus guère que des calcaires
d’eau douce , au moins sur la route de Saint-Amand à Bourges et
Yierzon.
Dans l’anse que formait jusqu’au delà de Montluçon la nappe
d’eau douce du Berry, on voit les matériaux, grossiers dans le
fond, devenir de plus en plus fins à mesure qu’on s’approche de
son entrée ; et en avant de celle-ci, dans la grande nappe, les ma-
tériaux de sédiment cessent , et sont remplacés par des matériaux
de précipitation chimique, les calcaires. 11 nous semble assez pro-
bable que cette anse était le point d’arrivée d’un cours d’eau du
Plateau central dans la nappe d eau douce du Berry.
Dans la haute plaine du Cher , ainsi qu’on a pu le voir par la
description précédente, les terrains tertiaires sont loin d’avoir une
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
479
épaisseur aussi considérable que dans celles de l’Ailier et de la
Loire; par suite , dans un bon nombre de vallons profonds, les
terrains inférieurs se montrent, et lorsque de grandes vallées tra-
versent, elles interrompent même complètement aujourd’hui la
continuité des assises tertiaires, ainsi que cela a lieu, surtout à
Saint-Amand; mais, comme partout du N au S., non seulement
de Néris à Saint-Amand, mais même jusqu’à Vierzon, dans les
plaines du Berry, les terrains tertiaires forment toujours les points
culminants, et les terrains sous-jacents les dépressions, on peut être
assuré que les premiers ne sont que les restes d’une nappe unique
autrefois non interrompue.
Lorsque remontant le Cher de Vierzon au delà de Montluçon,
on examine l’allure des terrains tertiaires par rapport au niveau
de cette rivière , on voit que ces derniers vont en s’élevant vers le
S., soit dans la plaine du Berry, soit dans l’anse de Montluçon,
mais un peu plus rapidement que le thalweg. Ainsi la différence,
qui n’est que de 40 mètres à Vierzon , est de 60 mètres à Saint-
Amand, et de 120 mètres à Montluçon. Sans nivellement, on pour-
rait donc déjà conclure que les choses se passent dans la vallée du
Cher comme dans celle de la Loire. Rien toutefois n’y dénote
l’existence d’une gibbosité analogue à celle si remarquable que la
plaine de l’Ailier présente au Puy de Barneyre.
Nous avons fait en 1843 un nivellement barométrique entre
Vierzon et Montluçon; mais aujourd’hui celui-ci est devenu inu-
tile , par suite de la publication des feuilles de la nouvelle carte de
France relatives à cette partie. C’est donc à cette dernière que
nous empruntons, comme de beaucoup préférables par leur grande
exactitude, les hauteurs dont nous allons faire usage.
Bans la liste suivante des altitudes des terrains tertiaires nous
avons intercalé, comme points de comparaison, celles du cours du
Cher dans quelques localités :
Mètres,
Le Cher à Vierzon 98
Calcaire d’eau douce à Àllouis, au N. de Mehun-sur-Yèvre. 1 40
Argiles à minerai de fer de Basse-Goutte ( Bois-Gerisse) ,
entre Mehun et Bourges 160
L’Yèvrc à Bourges. 126
Bord du plateau de calcaire jurassique et cathédrale de
Bourges 156
Plateau de calcaire d’eau douce de Levet 180
Argiles jaunes à silex oolithiques du terrain jurassique, du
grand bois de Meillant au N -O. de Saint-Amand. . 219
Le Cher à Saint-Amand. 155
SÉANCE DU 2 JUIN 1851 .
h 80
Mètres.
Plateau de sables jaunes à grains de quartz de Poizieux. 217
Plateau d’argiles blanchâtres et de sables jaunes à cail-
loux de quartz, à 2 kilomètres au S. de Saulzais-le-
Potier 254
Plateau d’argiles rouges et de sables jaunes à cailloux
de quartz, au S. de Chazemais 296
Le Cher à Montlaçon. , 202
Bas plateau de sables granitiques grossiers , rougeâtres ,
avec conglomérats friables de roches primitives, entre
Montluçon et Néris 319
Plateau granitique de Néris 432
Les terrains tertiaires dans lesquels est excavée la vallée du Cher
présentent leur surface supérieure d’aborcl faiblement relevée de
VierzonàSaint-Amand; puis, lorsque ces terrains s’engagent dans
le Plateau central, le relèvement devient un peu plus considérable;
c’est ce qui peut être vérifié à l’aide du tableau suivant :
LOCALITÉS.
Altitudes. S
Différences.
Distances. j
Pentes
en
degrés.
Pentes
par
mètre.
Allouis, pics de Mehun-sur-Ycvre
Forêt de Meillant, au N.-O. de Saint-Amand.
Foret de Meillant
Bas plateau entre Montluçon et Néris
Allouis
Bas plateau entre Montluçon et Ne'ris. ....
140m :
219
219 !
519 i
1
79m
j 100
J 179
t
48,COOm
52,000
100,000
5' 40"
6' 40"
6' 10"
ni i 1 1 .
1 ,G5
1,92
1,79
Les terrains tertiaires de la liante plaine du Cher sont, comme
on peut le voir, loin d’atteindre des altitudes comparables à celles
que présentent ceux de la vallée de l’Ailier ; mais il est bon de re-
marquer que c’est à peine si l’extrémité de l’anse s’avance jusqu’à
une ligne menée parallèlement au grand axe de la gibbosité du
Puy de Barneyre, orientée E. 7° 1/2 N., et passant par le pied sep-
tentrional de celle-ci. Il est cependant digne de remarque que,
suivant des lignes parallèles à ce grand axe , les terrains tertiaires
atteignent, dans la plaine du Cher, des altitudes à peu près sem-
blables à celles de la plaine de la Loire. Ainsi :
Grand boisdeMeillant. 219 | Béard 214
Montluçon. . . . 319 | Dompierre. ... 289
De ce fait, on ne paraîtrait peut-être pas avancer une chose dé-
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
481
nuée de fondement en disant que la cause qui a produit la gibbo-
sité du Puy de Barneyre a fait sentir son influence jusqu’au bord
septentrional du Plateau central.
En résumant ce que nous venons d’exposev dans ce dernier
chapitre , nous croyons pouvoir poser les conclusions suivantes :
1° Les terrains tertiaires de la haute plaine du Cher ont été dé-
posés dans une grande anse , un véritable fiord, de la grande nappe
d’eau douce du Berry. (Cette nappe d’eau , au commencement de
la période miocène , communiquait largement avec le bassin pro-
prement dit de Paris ; et, postérieurement à l’élévation du Sancer-
rois, elle pourrait bien ne plus avoir été en communication directe
avec lui que par Gracay, entre Mehun et Vatan.)
2° Postérieurement à leur dépôt, ces terrains ont éprouvé un
relèvement général du N. au S., semblable â celui qui a affecté
ceux de la plaine de la Loire.
Par suite de cette communication, M. Martins présente les
observations suivantes sur le dépôt de silex entre Chateau-
dun et Chartres. Dans ces vallées, celle du Loir en parti-
culier, il y a un diluvium de silex de la craie provenant
des collines voisines. Sur ces hauteurs, les sables et les silex
de la craie forment une couche épaisse qui ne paraît pas com-
posée de matériaux transportés. Là on trouve des poudingues
formés de silex agglutinés par un ciment siliceux et contenant
des fossiles de la craie-, quelquefois, par suite des dénudations
du sol, ces poudingues sont isolés et simulent des blocs erra -
tiques , quoiqu’ils soient parfaitement en place. Prés de Bon-
neval, ces poudingues passent peu à peu à l’état de grés siliceux
très dur, exploité pour le pavage et d’un aspect différent de
celui des grés de Fontainebleau. A l’E. de Bonneval , on re-
connaît clairement que ces grès sont inférieurs aux calcaires
d’eau douce de la Beauce. En suivant ce terrain vers Chartres,
ces poudingues disparaissent à moitié chemin entre Bonneval
et Chartres, et les sables de Fontainebleau, qui se montrent
entre Chartres et Maintenon, lui ont paru différents et supérieurs
aux grès de Bonneval qui sont intimement liés aux silex de la
craie au milieu desquels ils forment des lentilles isolées. Un
autre motif fait croire à M. Martins que ces poudingues siliceux
et ces grès sont différents de ceux de Fontainebleau : c’est qu’il
Soc. géol ., 2e série, tome VIII. 31
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
482
les a vus reposer en Bourgogne sur la plupart des étages juras-
siques, autour d’Avallon sur le lias, à Ghatel-Censoir et à
Clamecy sur le corallien, etc., etc.
M. Lier communique quelques détails sur la sortie de masses
boueuses aurifères par des fissures, dans la chaîne de l’Estrella,
et l’exploitation de ces boues par les Romains.
Après celte communication M. Gastaldi fait observer que les
dépôts boueux qui viennent d’être décrits par M. Itier rappel-
lent parfaitement le dépôt de la Bessa, auprès de la Serra,
dans la plaine du Piémont; ce dépôt a été aussi exploité
pour or.
M. Yiquesnel, par suite des communications précédentes, se
trouve amené à dire que les rivières de la Turquie d’Europe
passent généralement pour charrier des alluvions aurifères. Il
doit à l’obligeance de l’ancien directeur de la monnaie à Con-
stantinople, M. Duz Oghlou, décédé en 1847, les renseigne-
ments suivants. — On savait depuis longtemps que des Juifs de
Salonique parcourent tous les ans les valiées de la Macédoine,
et paient avec des marchandises l’or recueilli en cachette par
quelques riverains, et que cet or, expédié secrètement de
Salonique à l’étranger, et notamment en Autriche, échappait
aux droits dus à lÉiat. La direction des mines chargea en 1888
M. Paulini, ingénieur des mines d’Autriche, attaché au service
de la Porte, de rechercher si les sables aurifères étaient assez
riches pour être exploités sur une grande échelle. Cet officier
supérieur des mines, ayant observé dans la vallée du Galliko
(l’ancien Echidorus) et le long du fleuve des buttes de sable
lavé de 1 mètre à 1 mètre 1/2 de hauteur, fit avec l’augette
ordinaire plusieurs essais infructueux. A force d’argent et de
promesses accompagnées de menaces, il finit par découvrir des
laveurs et les déterminer à travailler à ses frais. Les essais ies
plus heureux qui ont été tentés sous ses yeux ont eu lieu à
Moutoul, village situé à 2 ou 8 lieues à l’E. de Kelketz.
Les chercheurs d’or se servent d’une auge de grande dimen-
sion dont la table est creusée de cannelures qui représentent à
peu près un Y. lis opèrent le lavage dans le courant de la
rivière avec une grande dextérité ; dans l’espace de huit ou dix
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
m
minutes, ils trouvent les paillettes à l’endroit où les cannelures
diagonales se réunissent pour former le jambage inférieur de la
figure. Les aliuvions actuelles sont trop pauvres pour être ex-
ploitées • c’est toujours au-dessus du niveau qu’atteignent les
eaux de la rivière que les laveurs ont soin de prendre leurs
matériaux, et de préférence dans les angles de la vallée qui ont
été reconnus comme étant les parties les plus riches. Le dépôt
aurifère se compose de sable, de cailloux de quartz, de débris
de roches feldspathiques, etc., et contient des cristaux de fer
titané. Il est souvent à l’état de grès et de conglomérat, et,
dans ce dernier cas, l’or se trouve ordinairement dans le ciment
qui encroûte la surface des blocs roulés. Ce dépôt recouvre non
seulement le fond de la vallée du Gàlliko, mais encore certaines
collines. L’époque la plus favorable est à la suite des grandes
pluies qui entraînent les parties les plus légères et augmentent
la richesse des parties qui ont résisté à leur action dynamique.
En été, les eaux ne sont plus assez abondantes pour que l’on
puisse continuer les lavages.
Le même dépôt existe dans la val'ée du Strymon , qu’on
désigne aujourd’hui sous le nom de Strouma ou de Kara-sou.
Nigrita, où existent des eaux thermales , situé h h ou 5 lieues
de Sérès, paraît être la localité la plus riche. Le manque d’eau a
forcé M. Paulinide transporter à dos de cheval des sacs remplis de
matériaux qu’il a fait laver dans le Strymon. Il a calculé qu’une
dépense de 6,000 piastres turques (environ 1,350 francs) pour-
raitdonnerun produit représentant une valeur de 16,000 piastres
(environ 3,600 francs).
Cet ingénieur des mines a reconnu la présence de l’or dans
la vallée du Kara-sou (l’ancien Næstus), aux environs de Névre-
koub (1). Il se trouve dans le sable provenant des détritus de
roches cristallines, et qui contient du fer oxydulé titanifère en
(1 ) Névrekoub est situé sur le cours d’un petit affluent du Kara-sou,
-environ à 1200 mètres du fleuve, et non pas, comme l’indique la
carte, sur une rivière s’écoulant vers la plaine de Drama. Le Kara-sou
de Névrekoub prend ses sources dans les environs de Razlouk; le
Kara-sou de la plaine de Sérès (Strymon) vient du bassin de Radomir.
Il ne faut donc pas les confondre.
SÉANCE DU 2 JUIN 1851.
m
assez grande abondance pour alimenter des fourneaux à la
catalane.
En résumé, l’or se trouve ordinairement à l’état de paillettes,
et rarement de pépites, dont les plus grosses ont une valeur de
2 à 3 ducats. La direction des mines a fait une tentative d’ex-
ploitation sur une grande échelle du dépôt aurifère -, mais elle
y a promptement renoncé : les frais généraux n’étaient pas
couverts par les produits. L’exploitation est abandonnée à l’in-
dustrie particulière moyennant unë certaine redevance.
A ces renseignements ci-dessus, donnés de mémoire par feu
M. DuzOgblou, M. Yiquesnel ajoute les suivants. — Les habitants
de Balouk Keui, village situé à 2 lieues à l’E. de Féred, certi-
fient que des laveurs d’or étrangers à la localité viennent ,
presque tous les ans, exploiter les sables du principal ravin
creusé dans des grès tertiaires et dont les eaux s’écoulent dans
la Maritza (ancien Hebrus).
Maintenant il resterait à rechercher quelle est la roche qui
renfermait originairement l’or répandu dans les dépôts sédi-
mentaires de la Macédoine et de la Thrace, et quel est l’âge de
ces divers dépôts. On ne peut s’occuper pour le moment que
de la première question. L’association habituelle des paillettes
d’or avec le fer oxydulé titanifère semble indiquer que les deux
minerais proviennent de la même source. Le fer titané de la
Turquie se trouve dans les schistes cristallins, dans certaines
roches trachy tiques et pyroxéniques mais son principal gise-
ment est, sans contredit, la syénite, qui occupe dans le Rhodope
des surfaces assez étendues. Cette dernière roche est sujette à
se décomposer sous l’influence des agents atmosphériques-, les
torrents et les eaux pluviales opèrent le lavage des parties
altérées \ les travaux des hommes facilitent le procédé employé
par la nature. Le minerai recueilli de cette manière est traité
dans des usines aux environs de Samakov, de Nevrekoub, à
Pravista (Provatcha des Turcs), etc., etc. L’existence de la
même roche dans la chaîne côtière de la mer Noire a permis
d’établir des fonderies à Samakov de Bulgarie, qu’il ne faut pas
confondre avec la ville du même nom située dans une plaine
entre le Rilodagh et le mont Vitocha.
SÉANCE DU 1(5 JUIN 1851.
485
On sait que les roches trachy tiques de la Turquie d’Europe
renferment, comme celles de la Hongrie, des minerais de di-
verse nature. Il serait possible qu’elles eussent contribué à
enrichir les dépôts aurifères de certaines localités.
Séance du 16 juin 1851.
PRÉSIDENCE DE M. CONSTANT PRÉVOST.
M. Ch. Deville, secrétaire, donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée.
Par suite des présentations faites dans la dernière séance,
le Président proclame membres de la Société :
MM.
Bré ville (Eugène) , propriétaire, place Saint- Sauveur, 29,
à Caen (Calvados), présenté par MM. de Lamothe et Fei-
gnoux ;
Carlet, conducteur des travaux dans les ponts et chaussées,
à Châtillon-sur-Seine (Côte-d’Or), présenté par MM. de
Ghristol et de Brimont 5
Gigot, ingénieur en chef des ponts et chaussées, à Dijon
(Côte-d’Or, présenté par MM. de Ghristol et de Brimont 5
Piette (Édouard), étudiant en droit, rue Jacob, 12, à
Paris, présenté par MM. Bourjot et Ozenne-,
Piette (Henri), étudiant en droit, rue Jacob, 12, à Paris,
présenté par MM. Bourjot et Ozenne.
Le docteur Saint-Père, aide naturaliste à la Faculté des
sciences, à Dijon (Côte-d’Or), présenté par MM. Constant Pré-
vost et Ch. Deville.
DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ.
La Société reçoit :
De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa-
vants, mai 1851 5 in -4.
De la part de M. Ch. Sainte-Glaire Deville, Voyage géolo-
gique aux Antilles et aux iles de Ténèriffe et de Fogo ; 4e li-
vraison, in-4, p. 69 à 132, 281 à 312, 7 ph
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
486
De la part de M. le Dr Grange, Premier rapport de M. le
Dr Grange sur les causes du goitre et du crétinisme et sur les
moyens d’en préserver les populations (extr. des Archiv. scient.,
XIIe cahier) -, in- 8, p. 657 à 715.
— Rapport sur les recherches de M . le DT Grange relatives
aux causes du crétinisme et du goitre et aux moyens d'en pré-
server les populations (extr. des Comptes rend, des séanc. de
V Acad, des scienc . , t. XXXII, 1851), par M. É lie de Beaumont j
in-4, 8 p. Paris, 1851, chez Bachelier.
De la part de M. Alcide d’Orbigny, Paléontologie française.
Description zoologique et géologique de tous les animaux
mollusques et rayonnés fossiles de France : Terrains crétacés ,
livraisons 151 à 168} Terrains jurassiques , livraisons 58 à 66.
In-8.
De la part de M. Pidancet, Note sur quelques uns des phé-
nomènes que présentent les failles du Jura ; in-8, 24 p., 1 pl.
Besançon, chez d’Outhenin Ghalandre fils.
De la part de MM. Pidancet et Lory, Note géologique sur la
Dole (extr. des Mém. de la Soc . libre dé émulât, du Doubs ) ;
— Mémoire sur les relations du terrain néocomien avec le
ter raiiC jurassique, dans les environs de Sainte-Croix [Jura
' vaudois ) et dans le mal de Travers ,* — l\ote sur le phéno-
nornène erratique dans les hautes vallées du Jura (extr. des
Compt. rend, de P Acad. des scienc ., t. XXY, 1847) • in-8,
15 p., 1 pî. Besançon, 1847, chez d’Outhenin Ghalandre fils.
De la part de M. F. -J. Pictet, Notice sur les fossiles décou-
verts, pendant Pété de 1850, dans les Alpes bernoises , par
M. Emile Meyrat (extr. de la Bibl. univ . de Genève , nov. 1850),
de M. F. -J. Pictet-, in-8, 15 p. Genève, 1850, chez Ramboz
et Cie.
Comptes rendus des séances de V Académie des sciences ,
1850, 2e sem., t. XXXI, tables-, 1851, 1er sem., t. XXXII,
nos 22 et 23.
L'Institut , 1851, nos 909 et 910.
Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, n° 32, 4e année,
avril 1851.
Résumé des observations recueillies en 1850 dans le bassin
SÉANCE DU 16 JUIN 1851. 4 87
de la Saône , parles soins de la Commission hydrométrique de
Lyon ; in -8, 8 p., 1 pi.
Mémoires de la Société de physique et d’ histoire naturelle de
Genève ; t. XII, 2e part. Genève, 1851.
The Atkenœum , 1851, nos 12o2 et 1233.
Verhandlungen , etc. (Mémoires de la Société d’histoire na-
turelle de la Prusse rhénane et de Westphalie, publiés par M. le
professeur Budge), VIIe vol. Bonn, 1850* in-8.
De la part du gouvernement des Etats-Unis. Anaccount , etc.
[Mémoire sur des observations magnétiques faites à l’observa-
toire de l’université de Harvard, à Cambridge (Etats-Unis)]
( extr. des Memoirs of- the Amer. Acad. ) , par M. Joseph
Levering-, in -h, p. 85 à 160. Cambridge, 1845.
— Report , etc. (Rapport au ministre de la guerre, accom-
pagnant un rapport et une carte pour l’étude du Nouveau-
Mexique par le lieutenant J. W.Adbert^ in-8, 132 p., 24 pl.,
1 carte. Washington, 18/18.
— Monograph, etc. (Monographie des Squaîides fossiles des
Etats-Unis) (extr. du Journ. of the Acad, of natur. scienc. of
Philadelph. , 1848) , par M. Robert W. Gibbes; in-4, 26 p.,
7 pi. Philadelphie, 1848, chez Merrihew et Thompson.
— New species , etc. (Nouvelle espèce de Myliobates du
terrain éocène de la Caroline du Sud, avec d’autres genres non
encore observés aux Etats-Unis) (extrait du Journ. of ihû
Acad, of natur. scienc. of Philadelph., vol. I, n. s., 1849),
par M. Robert W. Gibbes-, in-4, p. 299 et 300, 1 pi.
— Geographical memoir , etc. (Mémoire géographique sur
la haute Californie, pour servir à l’explication de la carte de
l’Orégon et de la Californie), par M. John Charles Frémont ;
in-8, 67 p., 1 carte. Washington, 1848, chez Wendell et
Van Benthuysen.
— Additional , etc. (Observations additionnelles sur une
nouvelle espèce vivante d’hippopotame de l’Afrique occidentale
( Il ippop o ta ni us liberiensis ) (extr. du Journ . of the Acad, of
natur. scienc. of Philadelph., vol. I, 2e sèr.), par M. Samuel
George Morton ; in-4, 11 p., 3 pl. Philadelphia, 1849, chez
Merrihew et Thompson.
— Message , etc. (Message du Président des États-Unis aux
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
488
deux chambres du trente et unième congrès, décembre 1849),
partie III-, in-8, p. 371 à J 215, 16 cartes et planches. Was-
hington, 1849.
De la part de l’Etat du New-Hampshire, First annual re-
port, etc. (Premier rapport annuel sur la géologie de l’Etat du
New-Hampshire), par M. Ch. T. Jackson ; in-8, 164 p. Con-
cord, 1841.
De la part de l’État de New-York, Geological map of the
state of New -York, by législative authority ; 1 feuille grand
aigle. New-York, 1842.
— Geological map, etc. (Carte géologique des États du
centre et de l’ouest de l’Union américaine), par M. James Hall ;
1 feuille grand aigle. New-York.
— Saturai history of New-York. — Part. VI. Palœon~
tology, vol. I, by James Hall-, in-4. New-York, 1843. —
Part. V. Agriculture , byE. Emmons ; in-4. New-York, 1848.
— Sixty second annual report , etc. (Soixante-deuxième
rapport annuel des régents de l’uniYersité de l’État de New-
York, fait à la Législature le 1er mars 1849)* in-8, 392 p.
Albany, 1849.
— Annual report , etc. (Rapport annuel de l’inspecteur des
sources d’eau salée de l’Onandaga, fait à la Législature le
12 janvier 1850)* in-8, 40 p. Albany, 1850.
De la part de l’État de la Virginie, Report , etc. (Rapport sur
les progrès de la description géologique de l’État de la Virginie
pour l’année 1840), par M. William B. Rogers ; in-8, 132 p.
Richmond, 1841.
De la part de 1 État de la Pennsylvanie, Report to the Légis-
lature of Pennsylvania , containing a description of the Swa -
tara m inin g district , par M. Henry K. Strong -, in-8, 61 p.,
1 carte. Harrisburg, 18397
De la part de M. le gouverneur du Canada, Message de
S. Exc. le gouverneur général, avec Rapports sur une explo-
ration géologique de la province du Canada , présenté à la
Chambre , le 27 janvier 1845; in-8, 156 p., 3 pi. Montréal,
1845.
— Exploration géologique du Canada. — Rapport des pro-
grèspour V année 1844 ; in-8, 119 p. Montréal, 1846.
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
489
M. Deville offre, de la part de M. Pidancet, les deux mé-
moires mentionnés ci-dessus dans la liste des dons reçus dans
la séance d’aujourd’hui.
M. le Président communique une lettre qui lui est adressée
par M. de Christol , et par laquelle ce géologue se met à la
disposition de la Société, dans le cas où elle déciderait que la
session extraordinaire de 1851 se tiendra à Dijon.
La Société , après cette lecture et les explications données
par plusieurs membres , décide que la réunion extraordinaire
de 1851 aura lieu à Dijon , le dimanche 14 septembre.
M. Michelin annonce à la Société la perte qu’elle vient de
faire dans la personne de M. Requien.
M. d’Archiac présente un extrait d’un mémoire de M. Bel-
lardi, intitulé : Catalogue raisonné des fossiles nummulitiques
du comté de Nice , par L. Bellardi, avec la collaboration de
M. le professeur E. Sismonda pour les Échinodermes, de
M. d’Archiac pour les Foraminiféres , et de M. J. Haime pour
les Polypiers. Ce mémoire est accompagné de nombreux échan-
tillons de fossiles. L’auteur sollicite, pour ce mémoire, une
place dans le prochain demi-volume des Mémoires de la So-
ciété.
Ce mémoire est renvoyé à la Commission des Mémoires.
M. Elie de Beaumont donne lecture des deux lettres suivantes,
qui lui ont été adressées par M. le colonel Acosta.
Guaduas, 4 0 septembre 4 850.
Monsieur ,
Je viens de faire une excursion vers le groupe de montagnes de
Ruiz, qui, comme le Tolima, est couvert de neiges perpétuelles,
et j’ai été témoin du travail immense de démolition qui s’opère,
principalement par l’action des eaux chargées d’acide sulfurique,
sur les trachytes amphiboliques qui forment la grande masse de la
branche centrale de cette Cordillère. Vous trouverez ci-joint
(pl. Y1ÎI ), sous le n° 2, la coupe résultant de mon nivellement
barométrique, depuis la pression de 7àOmm,7, sur le bord de la
Madelaine, avec une température de 35°, jusqu’à celle de 447nuu,6
et une température de 3°, où j’ai trouvé la limite inférieure de
f
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
m
la neige perpétuelle à cette latitude (5° N.) et dans le mois le
plus chaud de l’année (août). J’ai marqué aussi la constitution
géologique de la pente orientale de ce rameau, la seule que j’aie
vue. Elle est fort simple et très facile à déterminer, même en
voyageant rapidement.
Vous vous rappelez sans doute ma notice , insérée dans le
compte rendu de l’Académie des sciences du 27 avril 1846, sur
les courants de boue qui inondèrent une vaste étendue des bords
delà Madelaine au mois de février 1845. J’ai voulu voir les traces
encore existantes de cette catastrophe et remonter à son origine.
J’ai trouvé que les sables et boues de l’inondation, déjà conso-
lidés, ne sont autre chose qu’un conglomérat trachytique de la
même nature que celui qui constitue, sur la rive gauche de la
Madelaine, une zone de 150 kilomètres de long sur 25 de largeur
moyenne, depuis la rivière Guarino, au N., jusqu’à celle de
Tuello, au S., que j’ai parcourue et examinée.
J’ai été frappé de l’identité des phénomènes anciens eL mo-
dernes. Ainsi la rivière Lagunilla (qu’on peut comparer en
moyenne à Y Oise) a changé plusieurs fois de cours. Le lit le plus
ancien est entouré de hauts parapets de conglomérat trachytique,
accumulés sur la rive gauche, qui est la plus basse. Bans un autre
lit que la rivière abandonna à la suite de nouvelles descentes
de boues, une forêt prit naissance, composée d’arbres aujourd’hui
vieux de plusieurs siècles. Le Lagunilla suivit son cours actuel
pendant de longues années, mais, en 1845, il revint en partie dans
son ancien lit. Les boues, les blocs de roches cristallisées et les gla-
çons qu’il entraîna alors, abattirent les bois, brisèrent les arbres, et
couvrirent les maisons et les champs. Une partie de la rivière suit
aujourd’hui l’ancien cours. Aussitôt que dans une gorge les arbres
s’amoncelaient , formant obstacle , les boues s’étendaient des deux
côtés jusqu’à ce que, par la force d’impulsion des courants, la
barrière était percée et enlevée, mais seulement en partie, laissant
des protubérances qui, plusieurs années après, étaient couvertes
par d’autres inondations, en sorte qu’on peut observer souvent
8 à 10 coulées de boues tracliytiques poudingiformes, superposées
dans les différents étages des coteaux, et le phénomène est plus
apparent dans les parties basses de la plaine où les courants avaient
déjà perdu une partie de leur force, et où il était moins difficile
de les arrêter ; c’est donc sur les bords de la Madelaine que les
conglomérats ont pris la forme de buttes plus élevées (100 mè-
tres). Cependant, la force des courants de boue était même alors
assez considérable pour traverser la Madelaine en ligne presque
SÉANCE DU 16 JUIN 1851. 491
droite, et former des buttes au bord opposé. Voyez sous le n° 3
la coupe que j’ai dessinée {perron de Providencïà ) en face d’un des
anciens lits du Lagunilla. Je prépare une description détaillée de
ce terrain remarquable; peut-être serai-je assez heureux pour
trouver des fossiles que je me propose de chercher avec persévé-
rance. Jusqu’à présent je n’ai vu que des tiges de dicotylédones
comme celles qui sont incrustées dans les boues de la dernière
coulée. Excepté dans un seul cas où les bois sont un peu carbo-
nisés, on ne remarque, dans les matières végétales, aucune altéra-
tion de tissus dépendant d’une haute température. Dans la der-
nière coulée les boues étaient froides et les glaçons flottèrent
jusque sur la Madelaine, à une distance de 50 kilomètres du point
de projection. J’ai mesuré le plus grand des blocs de roche diori-
tique que les boues du Lagunilla ont entraîné jusqu’à 2 kilomètres
environ du pied de la Cordillière , et il a près de 500 mètres
cubes.
Mais, quelques lieues plus au S., clans la plaine, et surtout dans
les environs des cours d’eau {ri os Recio , Totale , la China , C/d palo)
et de tous les ravins et dépressions de terrain , on voit des millions
de blocs erratiques plus petits, depuis 1 décimètre jusqu’à U et
5 mètres cubes, de trachytes et de syénites dispersés et peu rou-
lés, reposant sur le conglomérat trachÿtique , qui les entraîna
lorsqu’il était à l’état de bouillie. La retraite des boues après sic-
cité a fait apparaître des blocs qu’on ne voyait pas à l’état de cou-
lée , et alors ils restent à la surface de la terre, et peuvent même
la couvrir presque entièrement, comme il arrive dans les environs
du village qu’on nomme Piedras. Souvent il survient de grandes
pluies, qui ont du aider à mettre à découvert les blocs enveloppés
dans la boue; mais lorsqu’il se passe plus d’une année après la
coulée , la pâte prend une consistance de travertin ou tuf sonore,
et devient peu perméable à l’humidité', et par conséquent aride.
Ce qu’il y a d étonnant, c’est qu’aucuu des habitants de ces villages
bâtis sur la boue solidifiée d’anciens éboulements n’a jamais soup-
çonné l’origine de ce vaste terrain, qui occupe une surface au
moins égale à celle du département du Rhône, bien que d’an-
ciennes traditions attestent les fréquents déluges de boue sur ces
parages.
Voici maintenant ce que j’ai observé sur le haut de la mon-
tagne. Des trachytes en place intacts (andésites et phonolites).
De tous les côtés jaillissent des sources d’eaux froides saturées de
sulfate de fer avec excès d’acide sulfurique , qui forment des lacs
dont le fond, composé d’une concrétion d’un beau rouge, donne
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
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aux eaux une belle apparence de rouge-hyacinthe. Les trachytes
qui ont été traversés par les vapeurs ou par les eaux acides sont
décolorés, et on les voit souvent conserver leurs formes ; mais quand
on les touche ils tombent en poussière blanche (sables trachytiques
sans amphibole), qui sont exactement les mêmes qui, réagglutinés
après avoir coulé à l’état de bouillie , forment le terrain tufacé
de conglomérat trachy tique plus ou moins grossier qui s’est ré-
pandu inégalement sur les bords de la Madelaine. Ces sables tra-
chytiques, répandus par les vents qui régnent toujours avec une
grande violence sur le sommet du Ruiz , paraissent d’une éton-
nante fertilité. Dans la branche orientale des Andes, composée de
grès siliceux, on ne voit pas, comme ici, les forêts arriver jusqu’à
près de 400 mètres des neiges perpétuelles. Une espèce de Lapinus
à grappe pyramidale de fleurs bleues, entourée du plus beau ve-
lours blanc, s’élève jusqu’au bord de la neige. La région de Pajo-
nales n’est jamais exclusive : trois espèces d’Espelitias molinas,
broméliacées, et beaucoup d’autres familles de phanérogames,
ont leurs représentants à une hauteur où il n’y a qu’une végétation
uniforme de graminées dans la branche orientale des Andes. Les
arbres, quoique couverts de mousses , ne sont pas courts et rabou-
gris; leurs tiges sont, au contraire , en général, droites et longues
de 8 à 10 mètres. J’envoie à M. Adolphe Brongniart des tiges, des
fleurs et des fruits de la pomme de terre et de l’arracacha sauvages,
que j’ai cueillis à 3759 mètres de hauteur. A cet état la pomme de
terre ne donne pas de tubercules ; mais, du reste, elle est identique
avec la même plante cultivée. Plusieurs oiseaux chantants font leur
nid et trouvent un abri contre le froid dans l’épais feuillage de ces
bois touffus. J'ai vu aussi les traces récentes du tapir et du cerf
dans les sables qui bordent la neige.
La question de l’existence des glaciers dans nos contrées reste
parfaitement éclairée par mon voyage. Les glaçons qui parcoururent
en quatre heures 50 kilomètres, depuis 5000 mètres de hauteur
jusqu’à 300, sur les bords brûlants de la Madelaine, pendant
l’inondation boueuse de 1845, provenaient d’un véritable glacier
éboulé en partie , et dont on voit encore les tranches de glace de
plus de 4 mètres d’épaisseur, la moraine latérale droite ayant
cédé. Ce glacier est dirigé vers le N. -O. ; il a ses stries d’accrois-
sement , d’énormes crevasses , et des blocs à la surface de la glace,
qui est ternie par le névé ; on aperçoit aussi la moraine frontale.
Je suis convaincu qu’une branche de ce glacier descendait autre-
fois au N., dans le fond de Lavallée par où se fit le dernier ébou-
lement de 1845, car on remarque les roches striées des deux côtés.
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
m
Mais ce qu’il y a de plus remarquable, c’est que, vers l’E. du Ruiz ,
à plus de 300 mètres au-dessous de la neige, on voit les traces
d’un autre glacier sur une pente nue où il n’y a jamais eu de
vallée. La glace a sillonné les parties saillantes de la roche trachy-
tique, tantôt en stries et cannelures, tantôt en entourant les
pointes isolées , et formant les figures les plus bizarres par les éro-
sions qui les ont produites à diverses hauteurs ; mais dans toutes
on peut remarquer Faction de la glace et des cailloux de haut en
bas. Je vous envoie les parties polies et striées de la roche encais-
sante , les galets striés en même temps que les traehytes : n° 1, à
leur état normal; n° 2, déjà décomposés, mais non remaniés;
n° 3, boue ou conglomérat de la plus récente inondation ; n° h , boues
ou conglomérats des plus anciennes coulées.
Dans son tableau des terrains , un excellent observateur ,
M. Brongniart, avait écrit : « Les traehytes forment des monta-
» gnes assez régulièrement coniques et en forme de dôme , tantôt
» isolées (c’est le cas duTolima), tantôt réunies en groupe (c’est le
» cas du Ruiz). Dans ce dernier cas, elles présentent quelquefois
» des sommets aplatis , et soit sur leurs flancs , soit dans les vallons
» qui les traversent , des escarpements presque verticaux. »
Vous verrez par l’esquisse dont je les accompagne que c’est pré-
cisément le cas du Ruiz. Mais ces déchirements qui sillonnent les
flancs de cette montagne sont ici nécessairement la suite de la
désagrégation de la roche, qui a changéùle place, descendant vers
la plaine à l’état de bouillie. Ne pourrait-on pas trouver dans
d’anciens phénomènes analogues l’explication de l’origine des
conglomérats trachytiques que M. Beudant a signalés comme ac-
compagnant toujours les roches trachytiques en Hongrie?
J’ai mesuré une base de 1200 mètres avec le plus grand soin,
et j’attends que les sommets du Ruiz soient découverts pour véri-
fier une opération trigonométrique qui me donne l’altitude de
cette montagne et de celle de Tolima. Alors je pourrai dire posi-
tivement s’il y a eu un changement de hauteur depuis le com-
mencement de ce siècle, où M. de Humboldt et Caldas exécutè-
rent la même mesure dans les environs de ïbagué et de Bogota.
Cependant l’existence prouvée d’anciens glaciers qui aujour-
d’hui ont disparu, l’immense étendue du terrain erratique prove-
nant de la Cordillière , et répandu maintenant dans la plaine ,
sont déjà des données qui peuvent éclairer la question. Il faudra
donc ajouter aux autres propriétés de l’acide sulfurique celle
d’être un des plus grands niveleurs de la nature , physiquement
par la désagrégation des roches qui constituent le noyau de la
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
494
Cordillière , économiquement parce que tous les propriétaires qui,
anrès plusieurs années de travail, ont amassé une fortune dans
leurs familles, voient perdre le fruit des labeurs de quelques géné-
rations dans une inondation de boue qui détruit les maisons, les
récoltes , les troupeaux , et rend stérile la terre pendant une longue
suite d’années.
Un mot, avant de finir, sur la nature volcanique de ce groupe ,
que je n’ai pu examiner que du côté de l’E. et du N , où je n’ai
rien aperçu qui me fasse croire à l’existence d’un cratère an -
cien ou moderne. C’est du côté de FO. que se trouvent la Solfatare
et les eaux thermales à une température élevée , et c’est de ce côté
qu’on assure avoir aperçu des fumées , et même la lumière très
vive en 1842. C’est un point que je tâcherai d’éclaircir.
J’oubliais de vous marquer que la différence de niveau entre
l’endroit où débouche le Lagunilla de la Cordillière sur la plaine
et les bords de la Madelaine (distance, 25 kilomètres) n’est que
de 66 mètres, et que la vitesse des courants de boue peut s’évaluer
par la circonstance qu’on a vu échapper à la mort quelques per-
sonnes fuyant à toutes jambes devant l’inondation, tandis cpie ceux
qui voulurent échapper latéralement furent noyés. La force d’im-
pulsion des boues lancées de la hauteur de près de 5000 mètres a
été si grande dans toutes les époques, qu’elle a suffi pour couvrir
de blocs erratiques (quelques uns de plusieurs mètres cubes) la
plaine jusqu’à 25 kilomètres, et pour traverser et arrêter le grand
fleuve de la Madelaine, comme en s’en aperçoit en voyant les traî-
nées de conglomérat trachytique en forme de coteaux sur l’autre
rive de la Madelaine, en face et dans la direction des cours
d’eau qui débouchent sur la rive droite , tels que Buello ,
O pi a , etc., etc.
Je suis persuadé que la plupart des blocs erratiques que M. Wisse
a observés avec tant d’habileté dans son voyage de Quito à Bogota,
et dont il a dressé une belle carte, sont attribuables à des phéno-
mènes pareils à ceux que je viens de mentionner.
Je ne veux pas terminer sans vous faire remarquer qu’on n’a
jamais observé ici, dans les boues, les petits poissons caractéris-
tiques des éjections boueuses des environs de Quito ( Pimelodus
cyclopuni ), ni la haute température qui distingue le Buah de Java.
Je n’admets dans le Ruiz d’autre action chimique que celie de
Facide sulfurique, il est aisé d’imaginer que d\ normes quartiers
de roche désagrégés, couverts de neige et suspendus sur les abîmes,
doivent perdre l’équilibre, et se précipiter en avalanches de neige,
de terre, et que le tout, mêlé dans des valions étroits et à pentes
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
m
rapides , doit arriver dans la plaine à Fétat de bouillie , et avec
une grande force de projection , entraînant des blocs tracliytiques
du haut de la Cordi Ibère , et des blocs de diorite et de syénite de
la base. Je n’ai pas cessé d’entendre le bruit sourd des éboulements
les deux nuits que j’ai passées dans le haut et près de la neige. Les
guides m’ont assuré que, dans la saison des pluies, ces bruits
sont plus fréquents. Le Lagunilla, le Rio-Recio et toutes les autres
rivières sont d’une couleur jaunâtre dans les parties élevées de
leur cours, près de leurs sources dans le Ruiz.
En terminant par la pensée le groupe tronqué du Ruiz , pour
lui donner la figure d’un dôme dont l’élévation surpasserait alors
de beaucoup celle du Cliimborazo, on trouverait dans la partie qui
manque l’origine des 37,000 millions de mètres cubes de conglo-
mérat trachytique , et des blocs erratiques qui se sont répandus
dans la rive gauche de la Madelaine sur plus d’un degré de lati-
tude , en donnant à ce terrain seulement une épaisseur moyenne
de 10 mètres.
Extrait de la chronique manuscrite du père Simon ,
écrite en 1625, 6e not., 2e partie, chap. h 1.
« Le dimanche 12 mars 1595, à onze heures du matin, on en-
tendit trois coups de tonnerre sourds, qui retentirent à plus de
30 lieues autour de Tolima, la montagne s’étant ouverte sur
l’espace de plus d’une demi -lieue du côté de l’E. C’est là
qu’ont leur source deux grandes rivières, le Lagunilla et le Guali
(c’est donc au Ruiz qu’on doit rapporter l’événement, puisqu’il
donne naissance à ces rivières). Les matières lancées descendirent
par les canaux de ces fleuves avec beaucoup d’impétuosité. Les
eaux avaient l’apparence d’une masse de cendres et de terre qui
dévastaient tout le terrain qu’elles couvraient , surtout le Lagu-
nilla, qui jeta à plus d’une demi-lieue des quartiers de roche,
entre autres un aussi grand que le quart d’une maison (c’est celui
que j’ai mesuré). Les eaux et les boues, qui s’étendirent plus
d’une demi-lieue en largeur, jusqu’à la Madelaine , avaient une
forte odeur de soufre, noyant les troupeaux qui se trouvaient sur
son passage dans les 5 lieues de distance, jusqu’à la Madelaine.
Tout cet espace est resté sans végétation jusqu’à ce jour (pendant
trente ans). »
Avant 18à5, je n’ai trouvé d’autre tradition authentique d’inon-
dations de boues que celle que rapporte le père F. Pedro Simon.
Si pendant les deux cent cinquante années écoulées de 1595 à 18Zi5
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
496
il n’y a pas eu d’autres éboulements considérables, il faudrait
donner à ce conglomérat tout à fait moderne , qui n’a pas été sou-
levé , et qui repose sur le terrain diluvien , un terme de plusieurs
milliers d’années pour sa formation , ce qui recule de beaucoup le
temps du dernier cataclysme. Les boues de 1845, dans les endroits
où elles avaient primitivement 3 à 4 mètres, n’en ont plus que
1 à 2. La nappe n’a pas l’étendue totale du terrain , et il
faudrait des centaines de pareilles inondations pour élever un des
coteaux de conglomérat tracliy tique que j’ai examinés sur la
plaine.
J’ai vu dans le haut même du Ruiz, près des anciens éboule-
ments , les sables tracliytiques réagglutinés par un ciment ferrugi-
neux , et beaucoup de concrétions de fer (limonite) provenant de
la décomposition de l’amphibole probablement.
Je viens d’apprendre que M. Degenhardt avait trouvé du côté du
N. -O. du Ruiz, en venant d’ A ntioquia, des sources sulfuriques, à une
hauteur de 3800 mètres sur la mer, par où le Guali prend origine.
J’ai trouvé à la même hauteur, au N. et au N.-E., dans le versant
où se sont opérés les éboulements qui sont plus récents, des
sources de sulfate de fer avec excès d’acide. Je vous enverrai une
bouteille par la première occasion , et je prierai M. Lévvy d’en
analyser une autre à Bogota.
Le secrétaire donne ensuite lecture de la note suivante :
Note sur un fragment de mâchoire de Gavial du terrain
jurassique du département de la Haute-Marne , par M. J.
Cornuel.
En décrivant une portion de museau d’un petit Gavial du cal-
caire néocomien de Wassy (Bulletin, séance du 13 janvier 1851),
je donnais, sur les alvéoles dentaires, les indications suivantes :
« 5° Alvéoles profondes , allongées et paraissant communiquer
» l’une avec l’autre par des étranglements dans les intervalles qui
» séparent les dents ; de sorte que ces alvéoles auraient une dispo-
» sition moniliforme, autant qu’on peut en juger par l’état du
» sujet. »
Maintenant, ce caractère peut être mieux défini à l’aide d’un
autre fossile, plus dégagé que le premier, et découvert tout ré-
cemment dans le kinimcridge-clay de Mussey, à deux lieues au sud
de Joinville. C’est aussi un tronçon de mâchoire de Gavial, qui
Ajl.de /a Soc. o\W. Je France.
2cjrri.~ , T.vm pj. v/rr, p,„P- ±r,;)
SÉANCE DU 1(1 JUIN 1851.
497
correspond à celui de Wassy par la place qu’il occupait dans la
mâchoire entière de l’animal auquel il appartenait. Les contours
de ses deux sections ou cassures transversales, antérieure et posté-
rieure, sont les mêmes que ceux que représente la figure 2 que
j’ai donnée pour le fossile néocomien. 11 ne diffère guère de celui-
ci que par sa grosseur, ayant au gros bout 55 millimètres de dia-
mètre vertical, et 61 millimètres de largeur ou diamètre horizontal.
Il en résulte que les deux individus devaient être d'espèces très
voisines l’une de l’autre, si même ils n’étaient pas l’un le jeune et
l’autre l'adulte de la même espèce, quoique d’époques géologiques
différentes.
Yoici, au surplus, la description du fossile jurassique de Mussey ;
les figures le représentent de la moitié de la grandeur naturelle.
Fig, 2.
Figure 1 . — Le tronçon de mâchoire vu par la partie interne.
a a. Deux sillons profonds, destinés à recevoir les dents, et rem-
’ plis en partie par de la marne endurcie.
Soc. géol.y 2e série , tome VIII.
32
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
b. Une dent encore nouvelle, vue par bout.
c. Une dent cassée au sommet et couchée dans le sillon.
d. Portion d’une autre dent.
e. e, c . Trois pièces osseuses, subfibreuses, non entières, à cel-
lules allongées et perpendiculaires à l’os de la mâchoire, ayant
dû servir de support à de grosses dents, et dont deux ont été
inclinées par la pression qu’elles ont subie. Ces trois pièces,
maintenant assez frustes, seraient analogues à celle figurée
dans Cuvier [Os sein . foss.y pl. 235, fig. 12, 4e édit., in- 4).
/’ f. Deux cassures longitudinales qui ont fait rentrer les bords
externes des maxillaires. Celui de ces bords qui a été déformé,
ayant resserré l’entrée du sillon dentaire, a contribué à y
maintenir les trois pièces e, e , e, dont les semblables ont dû
sortir plus facilement de l’autre sillon, où l’on n’en voit qu’une
trace auprès de la dent c.
Figure 2. — Le même tronçon vu par le bout le plus long.
<7, a. Les deux sillons, ayant 1 4 millimètres de largeur et 25 mil-
limètres de profondeur.
b. Reste de la base d’une dent dont la cassure est oblique et irré-
gulière.
c. Bord externe du maxillaire, séparé du reste par une cassure.
d. Pièce irrégulière, qui se maintient dans toute la longueur du
fossile en diminuant progressivement vers le petit bout.
e . e. Bords internes des maxillaires, très proéminents et inclinés
par la pression latérale qu’ils ont éprouvée après l’enfouisse-
ment.
Figure 3. — Le sillon dentaire de la figure ! , vu par bout, au point
où se trouve la dent b.
b. Cette dent un peu déformée, fendue longitudinalement, et
dont une moitié est enlevée de manière à laisser voir la forme
de sa cavité.
c. Bord externe du maxillaire séparé du reste de cet os par une
cassure.
Figure 4. — L'autre sillon dentaire de l’extrémité antérieure, vu aussi
par bout, avec ses bords fracturés.
a. Base d’une pièce osseuse comme celles e , , e , fig. 1 . Cette
pièce, tronquée, puis partagée verticalement, paraît n’avoir
pas été adhérente aux parois du sillon.
b. Bord externe du maxillaire, qu’une pression latérale a fracturé
et fait rentrer, et qui, à son tour, paraît avoir cassé la partie a.
Dans la figure 2 , la pièce d , vue par bout et presque à moitié
sortie de sa place, a un de ses angles extérieurs enlevé sur toute sa
longueur. Elle n’a pas d’analogue dans le sujet néocomien précé-
demment décrit et qui a été moins tourmenté ; sa forme est la
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
km
même d’un bout à l’autre. Elle diminue en largeur, d’arrière en
avant, dans la proportion de 100 à 03, c’est- à dire un peu plus
que le fossile entier, qui ne diminue que dans le rapport de 100
à Sk , ce qui indique qu’elle devait se terminer à peu de distance
en arrière de l’extrémité antérieure du museau. Si c’était un os
nasal, il devrait être moins allongé et aussi être accompagné d’un
congénère ; et, si l’on admet que celui-ci se soit tout à fait déta-
clié, on ne voit pas qu’il y ait eu assez de place pour les recevoir
tous deux. D’un autre côté, cet os est bien irrégulier et bien dis-
symétrique pour être un voilier. Et cependant on ne peut guère le
considérer comme étant le résultat d’une cassure longitudinale de
la partie inférieure d’un des maxillaires, tant sont nets et réguliers
les bords internes de ces deux os principaux.
La figure 2 fait voir que ces maxillaires sont inégaux. Leur in-
égalité est encore plus remarquable à l’extrémité antérieure du
fossile, où l’un des deux a 49 millimètres sur 27, tandis que l’autre
n’a que A3 millimètres sur 22. Ne serait-elle pas due à une lésion
ou à une maladie qui, en occasionnant un développement anor-
mal, aurait déterminé la formation d’un os surnuméraire d?
Quoi qu’il en soit, en comparant le fossile de Mussey à celui de
Wassy, on trouve sur l’un les principaux caractères de l’autre, et
l’on constate en outre les suivants, qui complètent et rectifient
celui que j’ai rappelé au commencement de cette note , et qui
s’appliquent surtout à l’âge adulte :
1° Pas d’alvéoles dentaires séparées.
2° Sur chaque maxillaire, dents implantées dans un sillon uni-
! cjue, continu, profondément creusé en gouttière, et ayant ses parois
latérales seulement un peu ondulées, de manière à ne présenter
qu’un faible rétrécissement dans l’intervalle qui séparait chaque
dent de la dent voisine.
3° Ondulations des parois de chaque sillon paraissant alterner
avec celles de l’autre.
4° Dents coniques, droites ou un peu arquées. Les petites ayant
une cavité interne qui est d’abord fermée à la base et qui s’ouvre
ensuite à mesure qu’elles se développent. Les grandes, supportées
par un pivot osseux, inséré dans le sillon et non adhérent à l’os
maxillaire (autant qu’on peut en juger par la figure A).
Wassy, le 28 mai 1 851 .
Le secrétaire lit la communication suivante :
500
SÉANCE DU J 6 JUIN 1851.
Réplique aux remarques de M. Durocher sur V origine du
granité , par M. Th. Scheerer.
Dans le t. IY (2e série, p. à68) du Bulletin j’ai publié les bases
de ma théorie sur la formation du granité, contre laquelle M. Du-
rocher a ensuite soulevé diverses objections ( Bulletin , t. IV,
p. 1018). Une réplique de ma part a été insérée dans le Bulletin
(t. VI, p. Gàà), et M. Durocher y a répondu, l’année dernière
(. Bulletin , t. VII, p. 276). Je demande à la Société la permission
de répondre à mon tour à M. Durocher, ce que je ferai d’ailleurs
en peu de mots.
1° M. Durocher croit pouvoir expliquer comme il suit, et d’une
manière satisfaisante, la formation du granité. ïl admet que la
masse du granité fondu s’est refroidie en restant homogène jusqu’à
la température de fusion du feldspath, qui est environ de 1500°;
yers cette température , subitement et presque simultanément , se
sont séparés les différents minéraux du granité (feldspath, mica,
quartz, etc.), bien qu’ils ne fussent pas encore solidifiés ; la solidi-
fication de ces minéraux, qui étaient l’un à côté de l’autre à l’état
fluide, a eu lieu très peu de temps après et non pas dans l’ordre
de leur fusibilité, mais dans l’ordre de leur tendance à la cristal-
lisation ; en sorte que le feldspath et le mica ont principalement
cristallisé les premiers , la silice restée libre s’étant solidifiée en-
suite et ayant donné le quartz. Pour expliquer comment la silice
a pu retarder sa cristallisation au milieu des minéraux qui se for-
maient, jusqu’à une température inférieure de plus de 1000 a 1 500°
à son point de fusion , il établit alors une distinction entre la sur-
fusion et la viscosité qui , d’après lui , seraient deux phénomènes
tout différents. Ce qui n’était pas possible à la surfusion devient
possible à la viscosité (1).
(!) M. Durocher donne les définitions suivantes : « En vertu du
» premier (du phénomène de surfusion), une substance peut conserver
» sa parfaite liquidité à une température inférieure de plusieurs degrés
» à son point de fusion ; en vertu du second, des substances diverses,
» chauffées jusqu’à leur liquéfaction, puis abandonnées à un refroidis-
» sement spontané dans les mêmes circonstances, mettent des temps fort
» inégaux à se solidifier; celles qui tendent à cristalliser deviennent
» solides les premières; celles qui constituent des masses amorphes
» restent longtemps dans un état plastique analogue à celui de la poix,
» et intermédiaire entre l’état liquide et l’état solide [Bulletin, t.VII,
» p. 276). » M. Durocher paraît croire que le quartz solidifié aurait
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
501
Je laisse à des observateurs impartiaux le soin de se prononcer
sur la vraisemblance d’une pareille théorie ; je dois cependant
faire remarquer qu’à l’appui de son hypothèse M. Durocher admet
comme un fait connu que la silice fondue peut s étirer en fils jus-
qu’à une température inférieure à celle de la chaleur rouge. Mal-
heureusement les ouvrages de physique ont jusqu’à présent négligé
d’enregistrer une propriété aussi remarquable, et, pour ma part,
j’avoue qu’elle m’est entièrement inconnue.
2° M. Durocher, qui est forcé par sa théorie d’admettre que la
solidification et la cristallisation du granité ont eu lieu d’elles-mêmes
et en quelque sorte par magie, ne trouve pas que les faits que j’ai
opposés à cette théorie soient des objections suffisantes. Assurément
les éléments d’une démonstration mathématique manquent pour
cet objet, mais il y a différentes manières d’arriver à la vérité.
M. Durocher connaît, pour les avoir vus, plusieurs des pays de
l'Europe dans lesquels les roches anciennes sont le plus déve-
loppées, et il est assurément trop bon observateur pour que les di-
vers faits qui s’opposent si complètement à sa théorie aient pu lui
échapper ; ces faits frappent les yeux de tous les géologues qui ont
étudié les roches anciennes ; par conséquent il est à peine néces-
saire d’ajouter de nouveaux exemples à ceux que j’ai cités antérieu-
rement : cependant je demande la permission d’en mentionner un
seul.
J’ai déjà fait observer {Bulletin , t. YI, p. 5à7 ) qu’on trouve
à Modum, en Norvège, d’énormes lames de mica, dont quelques
unes jouissent de la propriété singulière d’être composées d’un
prisme hexagonal, de couleur verdâtre, qui est enveloppé par un
autre prisme également hexagonal, mais jaunâtre ou brunâtre.
Ce mica est répandu dans une grande masse de quartz , et sa
masse est extraordinairement petite relativement à celle du
quartz ; car assurément elle est loin d’atteindre un centième de
cette dernière (1). Comment donc ce mica a-t-il pu se séparer à
un certain moment de l’énorme masse de quartz qui l’enveloppait?
Si l’on admet que, dans les roches granitiques, la structure de la
roche et la séparation des divers minéraux résultent de la cristal-
d’abord formé une masse amorphe, une sorte d’opale qui aurait ensuite
donné lieu au quartz cristallisé du granité. Dans sa théorie, il ne faut
pas d’ailleurs s’arrêter à une hypothèse de plus ou de moins.
(1) C’est de cette masse de quartz qu’on extrait, depuis de longues
années, le quartz nécessaire à la fabrication du smalt de Modum. La
quantité extraite , qui est de beaucoup inférieure à celle qui reste
encore, est au moins de 50,000 quintaux.
502 SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
lisation et sont l’œuvre de quelques instants, on peut se demander
pourquoi les obsidiennes, les scories des hauts fourneaux, etc., ne
donnent pas lieu également à des masses analogues au granité : la
rapidité plus ou moins grande du refroidissement devrait en effet
avoir peu d’influence pour empêcher la séparation et la cristalli-
sation à un certain moment dans la substance fondue. 11 me
semble tout à fait superflu d’insister plus longtemps sur l’extrême
faiblesse de cette partie de la théorie extra-vulcaniste.
3° AJ. Durocher, en exprimant l’avis que les sulfures et les sulf-
arséniures métalliques qui ont cristallisé au milieu de minéraux
beaucoup moins fusibles, de quartz, de feldspath, etc., ne s’y sont
pas formés par voie de fusion, s’engage dans de graves difficultés.
Leurs cristaux se trouvent dans des roches qui ont une structure
granitique. Il est impossible qu’ils se soient formés à un moment
où la roche encaissante était déjà complètement solidifiée. Pour
expliquer la plasticité des masses granitiques, si nous tenons à ne
pas nous lancer dans des hypothèses vagues, nous avons trois moyens
à notre disposition : 1° la chaleur, 2° l’eau, et 3° l’action combinée
de la chaleur et de l’eau. La chaleur, M. Durocher la rejette dans
ce cas : quant à la chaleur et à l'eau sur l’action desquels est basée
ma théorie, il veut naturellement encore moins les adopter ; il ne
lui reste donc que l’eau. M. Durocher, qui trouve que les granités
ont une trop petite quantité d’eau pour satisfaire à mon hypothèse,
serait donc forcé ici d’admettre qu’une formation granitique a
pris naissance uniquement par voie humide. Assurément la chimie
moderne a fait voir qu’un grand nombre de corps pouvaient être
produits aussi bien par une action ignée que par une action
aqueuse ; mais puisque M. Durocher admet qu’une formation gra-
nitique est possible, non seulement par le feu, mais encore par
l’eau, pourquoi donc n’admettrait-il pas, comme je le fais, qu’elle
est aussi possible par le feu et par Veau réunis ?
k° M. Durocher attribue une grande importance à ce qu’il y a
des trachytes dans lesquels se trouvent des grains de quartz. Il
cherche à démontrer par là que l’action ignée seule a pu produire
des roches granitiques ou semblables aux granités. Cependant,
bien qu’il y ait de ces trachytes dans les Andes, nous ne les avons
pas vus couler et nous ne pouvons pas savoir s’ils se sont formés
absolument dans les memes circonstances que les laves modernes .
S’il y a des trachytes dans lesquels il se trouve du quartz séparé
chimiquement (1), je pense que ces trachytes sont tout à fait ana-
(!) Je regarde comme mélangées mécaniquement les parties du
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
503
logues aux véritables granités, et, quant à moi, je les regarde
comme formés, de même que ces derniers, sous une forte pression
et par l’action combinée de la chaleur et de l’eau.
5° Parmi les objections qu’on peut faire contre la théorie qui
attribue au granité une origine purement ignée ou vulcaniquc ,
j’ai cité la présence de minéraux pyrognomiques. La gadolinite,
par exemple, est un de ces minéraux ; on sait que lorsqu’elle est
chauffée jusqu’au rouge sombre, elle donne tout à coup un vif
dégagement de lumière qui est accompagné de chaleur, comme
H. ilose Fa démontré ; après cela les propriétés se sont modifiées :
ainsi elle est insoluble dans les acides minéraux concentrés et
son volume a diminué de plus de 6 pour 100. Il eu est de même
pour l’orthite, pour l’allanite et pour plusieurs autres minéraux
qui ont été observés dans les granités du Nord. Mais si tous ces
minéraux pyrognomiques, qui étaient assurément solidifiés avant
le quartz, sont restés enveloppés par une masse fondue, ils doivent,
longtemps après leur solidification , avoir été soumis à une tempé-
rature élevée ou tout au moins à une forte chaleur rouge. Comment
expliquer alors qu’ils aient conservé leurs propriétés pyrognomi-
ques qu’ils perdent à la chaleur rouge sombre? Pour expliquer
ce paradoxe, M. Durocher a admis que les minéraux pyrognomi-
ques ont repris leurs propriétés dans le granité après sa solidifica-
tion ; il compare ce fait à ce qui arrive au soufre et à l’acide ar-
sénieux, qui passent de la transparence à l’opacité en changeant
de poids spécifiques. J’ai cependant fait remarquer ( Bulletin ,
t. VI, p. 650) qu’il était difficile d’admettre cette hypothèse, car
ces minéraux auraient dû augmenter leur volume de 6 pour 100
après la solidification du granité. Dans ses nouvelles remarques sur
ma théorie ( Bulletin , t. VU, p. 280), M. Durocher paraît main-
tenant convaincu que ces minéraux n’ont aucunement perdu
leurs propriétés pyrognomiques par suite du refroidissement très
lent du granité; il ajoute que , lors même qu’il en serait ainsi, il
n’en résulterait pas une difficulté insurmontable. — Quant à moi,
je pense le contraire, et il me semble que les minéraux pyrogno-
miques gênent beaucoup plus M. Durocher qu’il ne veut bien
l’avouer.
6° M. Durocher fait, à la fin de sa publication, plusieurs ob-
jections à ma théorie; mais je me contenterai de répondre, aussi
quartz qui, dans un granité réchauffé par une action volcanique,
seraient restées sans se dissoudre dans la masse, parce que celle-ci
n’aurait pas été suffisamment réchauffée.
50& SÉANCE DU 16 JUIN ,1851*
brièvement que possible, à celle de ces objections qui me parait
la plus importante.
A la page 281, M. Duroclier dit : « Si l’eau s’était comportée,
» dans la formation des granités, comme le suppose M. Sclieerer,
» si elle était restée en combinaison jusqu’à une température infe-
» rieure au rouge, on ne voit pas pourquoi elle n’aurait pas pro-
» duit des minéraux zéoli tiques, comme on en trouve dans les
» trapps, dans les basaltes et dans beaucoup de roches volcaniques
» modernes. » Il me semble que la réponse à cette objection est
facile : car les zéolithes (si tant est qu’ils soient contemporains
des roches dans lesquelles on les observe) devaient principalement
se former dans les roches qui satisfaisaient aux conditions sui-
vantes : 1° d’avoir peu de quartz ; 2° de contenir une quantité
suffisante de chaux, et 3° une certaine quantité d’alcalis. Par suite
on ne pouvait espérer de les trouver dans un granité normal qui
est très riche en quartz, et, au contraire, très pauvre en chaux;
au contraire, dans la syénite zircorînienne qui ne contient pas de
quartz et qui a une quantité notable de chaux, il y a des zéolithes
et même ils sont assez abondants. M . Duroclier dit, plus loin :
«< Il serait inexact de prétendre que les masses plutoniques dans
» lesquelles il entre de la magnésie et de l’oxyde de fer contien-
» lient toujours de l’eau; car l’ampliiboîe, où l’on trouve souvent
» jusqu’à 25 pour 100 de magnésie, ne contient habituellement
» pas d’eau en quantité notable. Le diallage, qui est si riche en
» magnésie, en renferme parfois, lui-même, moins de 1 pour 100. »
L’eau, considérée comme base isomorphe de la magnésie, du
protoxyde de fer, du protoxyde de manganèse, etc., se trouve
seulement dans les composés renfermant ces oxydes fixes, mais sa
quantité dépend de la quantité même de la silice, ainsi que de la
quantité plus ou moins grande des bases. Elle joue en quelque
sorte le rôle d’un remplaçant des bases plus fortes, lorsque ces
dernières viennent à faire défaut. Par suite, l’eau basique qui se
trouve dans les amphiboles, les augites, etc. , est nécessairement
en quantité très variable, mais toutefois elle remplace les quantités
de M g o, F e o, M n o, etc., qui viennent a mancpier, de manière
que 3 Ho se substitue à Ro. La teneur des amphiboles et des
augites en eau, que l’on peut appeler substituée, varie depuis
moins de 1/2 pour 100 jusqu’à plus de 5 pour 100 (1). Du reste,
les analyses de M. Delesse ont démontré que l’eau peut se substi-
(i) Poggendorff Jnnalen, t. LXX, p. 545 et suivantes. Liebig ,
Poggendorff und fV ohler Handworterbuch der Chemiey t. IV, p. 175.
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
505
tuer non seulement à Mgo, Feo, Mno, mais encore à des bases
alcalines telles que Ko et No, en donnant des composés isomor-
phes ou plutôt h o ni œo morph es (1), et ce fait joue un rôle impor-
tant dans ma théorie du granité.
Quoique j’aie déjà publié un grand nombre de recherches sur
le rôle de l’eau dans le règne minéral (2), je suis loin de regarder
les résultats obtenus jusqu’à présent comme suffisants, et j’ai en-
trepris d’éclaircir ce qui reste encore incertain par une nouvelle
série de recherches ; c’est dans ce but que, secondé dans ces der-
niers temps avec beaucoup de zèle par mon préparateur M. R.
Richter, je m’occupe , depuis environ trois années, de l’analyse
des divers silicates qui contiennent de la magnésie et de l’eau :
70 analyses environ sont complètement terminées, et je crois
avoir été récompensé des soins et des peines quelles m’ont
demandés, car elles confirment ma manière de voir de tout point
et avec une rigoureuse exactitude. Je puis annoncer dès à présent
que les proportions atomiques, qui sont la pierre de touche des
idées que j’ai émises sur le rôle de l’eau, justifient ces idées par
des chiffres irrécusables. J’espère pouvoir présenter bientôt à la
Société l’ensemble des résultats remarquables que j’ai obtenus.
Page 182. « Pourquoi ne voit-on pas dans les granités propre-
» ment dits des cavités arrondies, bulliformes , comme celles des
» roches volcaniques, cavités annonçant l’interposition de la va-
» peur d’eau au milieu d’une masse pâteuse? »
Réponse : Par la raison toute simple que la formation de cavi-
tés suppose une pression plus faible que celle que les granités ont
généralement éprouvée à l’époque de leur cristallisation. Une masse
pâteuse de granité, qui du fond de la terre se fait jour à travers
des couches épaisses, recouvertes souvent par une puissante nappe
d’eau, sera moins propre à la formation de cavités qu’un torrent
de lave qui s’écoule d’un cratère et qui est en contact immédiat
avec l’atmosphère. Entre ces deux extrêmes il y a un grand nom-
bre de cas intermédiaires. Tout géologue qui connaît les granités
de la Scandinavie ne mettra pas en doute l’absence complète de
cavités dans ces granités.
Peut-être ces cavités pourraient-elles s’observer si le sol de la
Scandinavie n’avait pas été profondément dénudé par l’action
(1 ) Liebig, Poggendorff und /U ohler Banda’ or ter b u ch der Chernie9
t. IV, p. 16 i.
(2) L’indication de mes diverses publications sur ce point se trouve
dans Herdmann Journal, t. L, p. 449.
506
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
réitérée et puissante de la glace et de l’eau, action qui, pour l’eau,
continue encore de nos jours (1).
Plus loin, M. Durocher dit : « 11 m’est impossible d’admettre
» que le quartz des granités, que les minéraux silicatés, à peu près
» dépourvus d’eau, ayant bien peu d’affinité pour elle et y étant
» insolubles à la température ordinaire, comme le feldspath, le
» mica, l’ amphibole , acquièrent , à la température du rouge
» sombre, une solubilité assez considérable, pour que U à 6 parties
» d’eau puissent dissoudre 9 1\ à 95 parties du magma granitique,
» c’est-à-dire pour qu’une partie d’eau tienne en dissolution
» 20 fois son poids de silicate. »
J’admets et j’ai cherché à appuyer cette opinion sur différentes
raisons : que la silice et les silicates avec eau, lorsqu'ils sont chauf-
fés dans un espace clos et sous une très forte pression, fondent ou
se ramollissent à une température plus basse que celle à laquelle
cela aurait lieu sans l’aicle de cette eau interposée entre leurs
atomes, qui cherche à s’échapper sans qu’il lui soit possible d’y
parvenir.
Pour admettre cette action de l’eau, il est cependant nécessaire
de démontrer qu’il existe une affinité chimique suffisante, tant
entre l’eau et la silice, qu’entre l’eau et les silicates. 11 ne paraît
pas, tout cVaborcl, vraisemblable de dire que, par exemple, un
magma de soufre et d’eau, étant chauffé dans les circonstances
ci-dessus indiquées, fondra à une température plus basse que le
soufre seul; car le soufre et l’eau n’ont l un pour l’autre qu’une
affinité extrêmement faible ; mais il en est tout autrement avec
d’autres corps. Ainsi, par exemple, il suffit d’une très petite quan-
tité de soufre pour abaisser de plusieurs centaines de degrés le
point de fusion du fer ; cela a lieu sans qu’il soit nécessaire de
supposer, comme M . Durocher, cpie k à 5 parties de soufre ont
dissous 9à à 95 parties de fer ; l’or amalgamé , l’argent amal-
gamé, etc., se comportent de même.
Il reste à savoir maintenant si l’eau possède à une température
élevée une affinité pour la silice et pour les silicates cpii soit suffi-
sante pour autoriser à établir une analogie avec les exemples qui
(l) Les traces encore visibles de ces actions diluviennes peuvent
seules donner une idée de leur puissance, et, assurément, on ne va
pas trop loin en leur attribuant la configuration d’une partie des côtes
de la Norvège, ainsi que la formation de golfes, d’îles, etc. Voir à cet
égard la description que j’ai donnée : Poggendorjf Annalen, t. LXVI,
p. 269; et Neues Jahrbuch von Leonhardt , 1849, p. 257.
SÉANCE DU 16 JUIN 185] .
507
viennent d’être cités. Or, à ce sujet il importe d’observer : 1° que
M. Scliafliântl est parvenu à dissoudre de la silice par de l’eau
dans la marmite de Papin, et que cette silice s’est déposée en cris-
taux de quartz par le refroidissement de la dissolution ; 2° que
M. Wôhler a complètement dissous de l’apophyilite dans de l’eau,
à une température de 180° à 190° et sous une pression de 10 à 12
atmosphères; et 3° que plusieurs silicates retiennent l’eau avec
laquelle ils sont combinés avec tant de force, qu’à une chaleur
rouge sombre ils n’en perdent pas une trace, et qu’il est nécessaire
pour la chasser complètement d’avoir recours à une température
voisine du rouge blanc , bien que la pression ne soit aucunement
augmentée »
D’après ces faits, je laisse à apprécier si la raison est du côté de
M. Durocher quand il dit {loc. cité) : « Cette théorie d’une fusion
» aqueuse du granité me semble bien peu compatible avec les lois
» de la physique et de la chimie. »
Pour éviter tout mal-entendu , qu’il me soit permis , en ter-
minant, de dire quelques mots sur la valeur que j’accorde
moi- même, à ma théorie, aussi bien qu’aux autres théories
géologiques. Je suis loin de croire que la théorie vulcanique
que M. Durocher défend avec tant de vivacité soit complète-
ment vaincue, pas plus que je ne regarde comme entièrement
victorieuse la théorie plutonique que je soutiens moi-même.
Une pareille conclusion est entièrement impossible dans l’état
actuel de la science. Chaque fois qu’on a proposé une théorie
géologique, on a pu en proposer une ou plusieurs autres, et il en
sera toujours ainsi, tant qu’on ne cherchera pas à appuyer ces
théories sur des principes prouvés mathématiquement.
Pendant un certain temps on a pu croire que, dans la géologie,
les théories neptuniennes avaient complètement abandonné le
champ de bataille pour le céder aux théories vulcannienes, qui
paraissaient , au contraire , ridicules à nos ancêtres. Maintenant
les théories neptuniennes qu’on croyait mortes commencent à
reparaître et à donner signe de vie, ce qu’on doit surtout aux
recherches ingénieuses de M. Bischoff. J’ai cherché moi-même à
concilier autant que possible ces deux sœurs ennemies, en deman-
dant l’eau aux neptunistes et lui faisant jouer un rôle dans les ro-
ches fondues. Cette idée a été tantôt bien accueillie et tantôt re-
poussée, mais elle ne me paraît pas avoir été jugée défavorable-
ment par M. Elie de Beaumont; je ne prétends pas d’ailleurs
qu’elle soit inattaquable et vraie d’une manière absolue. M. Du-
rocher, au contraire, paraît attacher une importance beaucoup
508
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
plus grande à la théorie qu’il a proposée, et il semble croire jus-
qu’à un certain point qu’elle est le dernier mot de la science. Une
théorie géologique ne saurait cependant pas être considérée comme
absolue ; mais elle devient vraisemblable lorsque autour d’elle se
groupent un nombre suffisant de faits; son degré de vraisemblance
peut se mesurer aux épreuves qu’elle est en état de supporter à
mesure que la science fait de nouveaux progrès. Les différentes
circonstances géologiques, géogéniques et pétrographiques ne
doivent donc pas être étudiées seulement dans l’intérêt d’une
théorie préconçue; mais la science doit commencer par s’enrichir
de faits à l’aide desquels il sera peut-être possible, par la suite ,
d’arriver à dire le dernier mot sur toutes les théories géologiques.
M. Viquesnel fait les communications suivantes :
Extrait cV une lettre sur les environs de Constantinople ,
adressée à M. Degousée par M. À. Viquesnel.
Monsieur et cher confrère ,
Avant de partir pour Constantinople , où vous êtes appelé par
le gouvernement ottoman pour étudier la question des puits arté-
siens, vous désirez avoir des renseignements sur la constitution
géologique du sol qui avoisine la capitale de l’empire. Je m’em-
presse de satisfaire à votre demande; mais, avant d’entrer en ma-
tière , penne ttez-moi de vous rappeler ‘que vous trouverez sur ce
sujet d’excellentes indications dans les publications faites à diverses
époques par MM. Boué, de Verneuil, Strickland et Hamiiton, etc.
(voir les titres de ces écrits dans le tome il et le tome llî de Y His-
toire des progrès de la géologie). H est à regretter que Tabstnce
momentanée de M. de TchihatchefF vous prive de l’avantage de
recevoir de lui-même les détails étendus et très intéressants que
cet intrépide explorateur de l’Orient a communiqués à notre So-
ciété, le 19 mai dernier, dans un mémoire qui sera prochainement
livré à l’impression (1) , et qui traite spécialement du cercle de vos
prochaines explorations.
Je suppose que vos recherches s’étendront fort peu au delà du
bassin hydrographique dont les eaux alimentent la rivière qui
forme, à son embouchure dans le Bosphore, le magnifique port de
Constantinople ; je me contenterai donc, dans cette lettre, de dé-
fi) Voyez Bull,', p. 297, t. VIII, 2e sér.
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
509
crire la surface du sol comprise dans ces limites naturelles. La
rivière qui l’arrose (le Cydaris) se compose de deux branches prin-
cipales : l’une prend d’un village situé sur sa rive droite le nom
de Ali-Bey-Sou, l’autre celui de Riahat-Uanê-Sou ; la Corne d'or
commence au point où s’opère leur jonction. Les Francs appellent
ordinairement cette petite rivière : les Eaux douces d'Europe ; c’est
sous ce dernier nom que je la désignerai dans cette lettre.
Terrain de transition. — Le terrain paléozoïque occupe à lui
seul la plus grande partie du bassin : à l’E. il est profondément
coupé par le Bosphore , et reparaît de l’autre côté du canal sur la
rive asiatique; au N. il constitue en presque totalité l’axe des
basses collines formant le prolongement oriental de la chaîne cô-
tière de la mer Noire; à l’O. il est recouvert par le dépôt nummu-
litique, dont les assises composent le bourrelet de collines placé à
la limite occidentale du bassin hydrographique ; enfin au S. le
terrain paléozoïque forme le versant septentrional de la colline de
Constantinople, et se prolonge plusieurs lieues à l'O. -N. -O. de
cette ville. Ainsi la rivière des Eaux douces d'Europe coule sur le
terrain de transition ; les petits affluents qui prennent leur source
dans le terrain nummulitique font seuls exception à cette règle.
La roche dominante aux environs de Fera est le schiste argi-
leux ordinaire, de couleur grisâtre, qui ne renferme aucune assise
de qualité convenable pour être taillée en ardoises. On l’a exploité
dans une carrière à ciel ouvert , à deux lieues de Péra, dans la
vallée des Eaux douces ; les matériaux de construction qu’on en
tire, imprégnés de pyrite, s’altèrent rapidement à l’air. Le schiste
argileux passe à la grauwacke et à des grès (traumate de M. Cor-
dier) composés de grains de feldspath et de quartz , de paillettes
de mica , et plus ou moins cimentés de schiste argileux. Le grès
devient souvent très grossier , et ses éléments prennent un déve-
loppement assez volumineux pour lui mériter le nom de conglo-
mérat. On le voit, sous ce dernier aspect, former entre la vallée
des Eaux douces et Péra plusieurs bancs qui alternent avec des
variétés de grès plus ou moins fins et des schistes argileux.
On observe dans ces roches des filets accidentels de quartz et
de chaux carbonatée ; elles sont aussi quelquefois pénétrées d’in-
filtrations siliceuses, calcaires ou ferrugineuses. Les fdets acciden-
tels de quartz et les pénétrations siliceuses se montrent principa-
lement au contact ou dans le voisinage des roches pyroxéniques
injectées dans le terrain (vallon situé entre Péra et l’école de la
marine, Béchiktach , sur le Bosphore) ; les infiltrations ferrugi-
neuses, assez fréquentes dans la colline de Haskeui et ailleurs, ré-
510
SÉANCE DU 46 JUIN 1851.
sultent de la décomposition des pyrites disséminées dans les cou-
ches; enfin, comme exemple d'infiltration calcaire, je citerai une
variété de grès à grain fin (tramuate de M. Cordier) chargé d’une
grande quantité de schiste argileux , micacé, pyritifère, calcarifère,
et parsemé de filets irréguliers de chaux earbonatée, qu’on exploite
au fond d’une petite vallée, à une lieue au N. de Péra.
Les autres roches subordonnées sont le calcaire et le quartz i te.
Cette dernière ne forme que des couches rares et d’une faible im-
portance. Le calcaire se montre rarement dans les environs de
Péra; mais il se présente en couches nombreuses dans les collines
de Térapia, de Buyukdéré et de Iéni-Mahaiè. Il est ordinairement
compacte, solidement agrégé, et d’un gris noirâtre; plus rarement
d’un gris clair ou blanchâtre. Certaines couches se composent de
lits alternatifs de 1 à 10 centimètres d’épaisseur, diversement co-
lorés, et offrant les nuances précédentes. On remarque souvent
dans ce calcaire rubané une singulière disposition : des zones
d’une épaisseur parfaitement régulière se composent de noyaux
ovoïdes ou sphériques, reliés entre eux par un ciment d’un calcaire
moins pur que celui des parties ovoïdes; ces zones, séparées par
des lits d’un calcaire à grain fin, se répètent un grand nombre de
fois. Cette variété de calcaire est assez répandue ; on l’exploite dans
plusieurs localités (colline de Térapia, route de Péra à Buyuk-
déré , etc.).
M. Hamilton a trouvé à U milles de Péra, dans un ravin
au-dessus de Àrnaout-Keui , des fossiles à l’état de moules et d’em-
preintes qui avaient été déjà signalés par Fontanier (Voyage en
Asie mineure ) et par le général Andréossy (1). IYJJVL de Verneuil,
Boué, Hommaire de Hell , de Tchihatcheff et moi nous en avons
cherché vainement aux environs de Péra , de Térapia et de Buyuk-
déré. Bien des fois j’ai cru reconnaître des formes d’êtres organi-
sés dans le calcaire zonaire ; mais un examen attentif détruisait
aussitôt mes espérances. Malgré mes recherches, je n’ai vu qu’un
seul fossile; il se trouvait dans un moellon de calcaire noirâtre,
engagé dans le pavage d’une ruelle , près de la tour de Galata. 11
est donc probable que les fossiles cités par M. Hamilton sont beau-
coup moins abondants dans le terrain paléozoïque que ne semble
le faire croire la description du géologue anglais , ou du moins
(i) Strickland , Transact. geol. Soc. oj London , 2e sér., vol. V,
p. 385. M. Hamilton a trouvé les mêmes fossiles, sur la côte d’Asie,
à la montagne du Géant.
SÉANCE DU 16 JUIN 1851,. 511
qu’ils se trouvent concentrés dans certaines couches privilégiées
que je n’ai pas eu l’occasion d’observer.
Les couclies du terrain de transition , fortement redressées et
disloquées , offrent ordinairement un plongeaient compris entre la
verticale et 45°, et descendent rarement au-dessous de 30°; elles
présentent plusieurs directions. Cette question doit avoir pour vous
un grand intérêt; en conséquence, je vous donne ici le relevé de
mes observations en mai 1847, que je transcris sans tenir compte
de la déviation de l’aiguille aimantée; il vous sera facile de faire
la correction :
1° Une direction E. -O. = N. 90° E. — Vallon de l’École de la marine.
2° Trois directions N. 80° E. — Même localité; vallée des Eaux
douces, au bas de la colline de Haskeui ; sommet de la colline
de la même vallée, à une lieue au N.-E. de Haskeui.
3° Une direction N. 60° E. — Vallon de l’École de la marine.
4° Cinq directions N. 45° E. — Caserne du grand Champ«des-Morts,
près de Bektachli ; escarpement à 1 /4 de lieue de cette caserne
à Bektachli; vallée des Eaux-douces, au bas de la colline de
Haskeui; même vallée, en la remontant; colline de la même
vallée, à une lieue au N.-E. de Haskeui.
5° Deux directions N. 30° E. — Vallon de l'École de la marine, au
contact d’un filon d’une variété de porphyre pyroxénique (1 );
même vallon et au contact d’un bouton de porphyre pyroxé-
nique.
6° Une direction N. 25° E. — Versant septentrional de la vallée des
Eaux douces, à une lieue au N.-E. de Haskeui, au contact d’un
filon de quartz qui partage cette direction.
7° Une direction N. 1 0° E. — - Colline d’Eyoub, près de Constantinople.
8° Deux directions N. 45° O. — Escarpement à Béchiktach, au contact
du porphyre pyroxénique; vallée des Eaux douces, au bas de la
colline de Haskeui.
9° Une direction N. 80° O. — Un quart de lieue au S. de Haskeui.
Ces neuf directions différentes , observées dans les couclies du
terrain de transition , peuvent être ramenées à deux lignes princi-
pales : l’une dirigée, en moyenne, N. 80° E.; et l’autre, en
moyenne, N. 37° 1/2 E. En tenant compte delà déviation de l’ai-
guille aimantée on arrive , pour le premier cas , à une ligne très
voisine de l’E.-N.-E. ; et, pour le second, à une ligne très voisine
du N. -N.-E. Excepté la direction N. -O., toutes les autres ne sont
que des écarts des deux lignes principales. Quant à la direction
N. -O. elle est tout à fait anormale; elle se montre, en premier
(1) Cette variété est la mimosite de M. Cordier.
512
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
lieu , dans la nouvelle tranchée formant escarpement à Béchiktach,
et au contact immédiat d’un bouton de porphyre pyroxénique ; à
quelques pas de distance , les couches reprennent la direction
N. Zt5° E., qu’elles suivent dans le voisinage ; en second lieu, elle
résulte d’un plissement que j’ai remarqué dans la vallée des Eaux
douces, et dont je parlerai tout à l’heure. Si l’on compare les
deux directions dominantes observées dans les couches avec celles
que présente le relief du sol , on reconnaît que la ligne E.-N.-E.
est bien accusée dans quelques points des rives du Bosphore et de
la côte de la mer de Marmara,* à l’O. de Constantinople, tandis
que la ligne N. -N. -E. se reproduit dans les parties méridionale et
septentrionale du Bosphore , reliées entre elles, près de Térapia ,
par un coude infléchi environ du N. -O. au S.-E.
Le plongement des couches dont je viens de donner les diverses
directions a lieu dans plusieurs sens. Le tableau suivant met en
regard de chaque direction les pendages qui s’y rattachent, et
vous permet d’embrasser l’ ensemble du phénomène que présente
le dérangement des couches :
l°Une direction E.-O. — N. 90° E. Un plongement. .vertical.
I Un plongement. .N. 10° O.
2° Trois directions. . . . .N. 80° E. j Un plongement. . S. 10°E.
( Un plongement. .vertical.
3° Une direction N. 60° E. Un plongement. .N. 30° O.
! Deux plongements verticaux.
Deux plongements S. 45° E.
Un plongement. . non observé.
5° Deux directions N. 30° E. Deux plongements O. 30° N.
6° Une direction N.25°E. Un plongement. . non observé.
7° Une direction N. 10°E. Un plongement. .0.10° N.
8° Deux directions N. 45° O. Deux plongements S. 45° O.
9° Une direction N. 80° O. Un plongement. .S. 10° O.
Les plongements en sens inverses , qui accompagnent les deux
principales directions , peuvent conduire à penser que les couches
ont éprouvé un plissement latéral; et en effet, en parcourant la
surface du sol comprise entre Péra et la vallée des Eaux douces,
on reconnaît sur plusieurs points l’existence évidente de cet acci-
dent, qui s’est produit dans le sens horizontal, et qui a quelque-
fois été accompagné d’une faille. Des effets de perturbation plus
compliqués paraissent également avoir eu lieu ; ainsi, dans la val-
lée des Eaux douces, au pied méridional de la colline de Haskeui,
et non loin du schiste argileux autrefois exploité, les couches
offrent, sur un point, les deux directions N. 80° E., et N. h5° E.,
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
513
et à quelques pas de là la direction N. â5° O. On dirait que, par
suite d’un plissement opéré dans le sens vertical , les strates relevés
suivant la perpendiculaire viennent buter contre le plan des mêmes
strates également très redressés.
Les roches du terrain de transition éprouvent à leur surface
une altération qui pénètre à une profondeur plus ou moins
grande , et qui paraît tenir quelquefois à d’autres circonstances
qu’à l’action des agents atmosphériques ou à la décomposition des
éléments constituants ou accidentels qu’elles renferment. On ob-
serve dans maintes localités des couches de schiste, de grauwacke
et de grès (traumate de M. Cordier) colorées en rouge, en jaune, en
vert , ou complètement décolorées , et cl’un blanc plus ou moins
pur ; elles se trouvent enclavées au milieu de couches de même
nature, qui ont conservé leur teinte habituelle. Ces changements
de couleur se montrent souvent au contact des lambeaux argileux
de terrain diluvien ou quaternaire qui recouvrent par places le
terrain de transition ; mais ce fait ne peut pas être généralisé, car
très souvent les couches n’ont subi , sous leur manteau diluvien ,
d’autre altération que celles qui s’en trouvent dépourvues.
Terrain à Num nullités. — Les détails que je pourrais ajouter à
ceux que j’ai consignés dans ma Note sur V emplacement du Bos-
phore, etc. (voir Bull., 2e série, t. VII, page 51à), concernent des
localités placées en dehors du bassin qui vous intéresse. S’il vous
était possible de prendre communication du dernier mémoire de
M. de TcliihatchefF, vous y trouveriez des renseignements qui
vous feraient connaître des points plus rapprochés de Constanti-
nople.
Terrain tertiaire pliocène. — Voir le dernier mémoire de M. de
Tcliihatchelf, et les publications de MM. Boué et de Yerneuil.
Terrain diluvien ou quaternaire. — M. de Tchihatchefï donne
des détails très étendus sur ce dépôt (voir son dernier mémoire ;
voir aussi la Turquie d’Europe , de M. Boué). Dans l’intérieur du
bassin hydrographique dont je m’occupe , le terrain diluvien forme
plusieurs lambeaux à la surface du terrain paléozoïque (voir ma
Note sur l' emplacement du Bosphore , etc.). Laroche dominante est
une argile impure contenant des grains de quartz et de feldspath
plus ou moins kaolinisés, ordinairement colorée en rouge sombre
ou brunâtre ; elle passe à la mollasse , et paraît formée des détritus
des roches sous-jacentes. Quelquefois elle est bariolée de teintes
jaunâtres , verdâtres ou blanchâtres. Elle prend surtout cette bi-
garrure dans les localités où le terrain de transition présente le
même phénomène de coloration. Dans ce cas il est difficile de
Soc . géol &e série , tome VII I. 33
51/i SÉANCE DU 16 JUIN 1851
préciser le point exact de séparation entre les deux dépôts d’un âge
si différent.
L’argile acquiert quelquefois une grande ténacité ; elle passe à
un grès tantôt fin, tantôt grossier, à cailloux roulés de quartz , de
couleur rougeâtre ou grisâtre ; les cailloux roulés deviennent quel-
quefois assez gros pour former un conglomérat (route de Péra à
Buyukdéré).
Roches pyrogènes \ — Des roches éruptives recouvrent, à l’entrée
septentrionale du Bosphore et des deux côtés du canal , une sur-
face irrégulière qui , sur le littoral européen , peut être évaluée
environ à 2 lieues de longueur, sur une largeur à peu près
égale. Lorsqu’on suit la route de Fanaraki à léni - Mahalè ,
on marche sur les roches pyrogènes et sur leurs conglomérats
depuis le premier village jusqu’à la descente qui précède le se-
cond : elles forment donc, sur ce point, l’extrémité orientale de
la chaîne côtière. Le terrain paléozoïque commence à cette des-
cente; entre léni-Mahalè et Buyukdéré il est percé de plusieurs
dykes et filons de roches éruptives. Mais sur les collines placées
entre Buyukdéré et Péra les injections cessent d’être apparentes;
pour en trouver les traces , il faut descendre au fond des ravins
qui découpent le petit bassin hydrographique de la rivière des
Eaux douces, ou suivre le littoral du Bosphore. Il est probable
que des recherches minutieuses en feraient découvrir un grand
nombre.
M. de Verneuil a donné la description de plusieurs variétés de
roches éruptives et de leurs conglomérats , qu’il a observés en cô-
toyant en barque les rives du Bosphore , depuis son entrée dans la
mer Noire jusqu’à Buyukdéré; je ne m’occuperai ici que de celle
qui pénètre, sous forme de filons ou de boutons, dans les environs
de Péra et de Buyukdéré , et qui , prenant un grand développe-
ment sur le rivage de la mer Noire , forme les rochers des îles
Cyanées, de Kila, de Fanaraki , etc. Dans ces dernières localités, la
roche, ordinairement à pâte finement celluleuse, contient des cris-
taux de feldspath à éclat vitreux paraissant se rapporter au labra-
dor, des cristaux de pyroxène augite d’un vert noirâtre, et du fer
oxydulé. Elle prend quelquefois l’éclat smalloïde de la rétinite.
M. Cordier lui donne, ainsi que M. Boué, le nom de porphyre
pyroxénique ; d’après la nomenclature de Brongniart et de MM. les
professeurs de l’école des mines, elle rentre dans le mélaphyre, et
pour M. Abich c’est une variété de ses dolérites.
La couleur normale du porphyre pyroxénique est le vert noirâtre
ou le gris foncé; en passant à l’état de wacke , la roche prend une
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
515
teinte verdâtre plus ou moins claire; elle renferme accidentelle-
ment des plaquettes brunâtres d’argile calcarifère qui ont été for-
tement chauffées, des noyaux aplatis de silex argilifère jaspoïdc
vert clair, des traces de terre verte, des nodules et des filets de cal-
cédoine translucide. Les conglomérats sont beaucoup plus déve-
loppés que le porphyre pyroxénique ; c’est dans leurs masses qu’on
observe la plus grande partie des variétés les plus remarquables,
par leur coloration. Les fragments empâtés contiennent souvent
des parcelles terreuses vertes semblables à la terre de Yérone.
Cette dernière substance se montre surtout aux surfaces extérieures
des fragments, et les enveloppe d’un enduit continu, d’épaisseur
variable : beaucoup de noyaux en sont uniquement composés.
Les boutons de porphyre pyroxénique des environs de Péja
passent à une wacke plus ou moins imparfaite, à pâte grossière,
d’un gris verdâtre, contenant en abondance de petits cristaux de
pyroxène augite d’un vert noirâtre, et de très rares cristaux de
feldspath. Le filon observé près de l’école de la marine est une
variété de la même roche que M. Cordier désigne sous le nom de
mimosite.
Note sur la collection cle roches recueillie en 1846 , par feu
Hommaire de Helf sur le littoral européen de la mer Noire ,
par M. A. Viquesnel.
À l’époque où j’ai présenté la description sommaire de la col-
lection recueillie en Asie par Hommaire de Hell (1), je n’avais
pas encore pu étudier la collection que notre malheureux confrère
avait faite en côtoyant le rivage de la mer Noire , depuis l’entrée
du Bosphore jusqu’aux bouches du Danube , et qu’il avait adressée
directement au Muséum d’histoire naturelle. Le savant professeur
de géologie attaché à cet établissement a bien voulu mettre les
échantillons à ma disposition , et me permettre de les comparer
avec ceux que j’ai rapportés de la Roumélie. Je m’empresse de
vous communiquer le résultat de mes recherches. Cette note a
donc pour but de compléter le tableau des travaux géologiques
exécutés par Hommaire de Hell pendant le cours de son dernier
voyage , et dont ma première notice ne comprend qu’une partie.
Ayant parcouru moi-même une certaine étendue de la côte
(1) Voyez Bull., 2esér., t. VII, p. 491.
516
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
européenne explorée par notre collègue, je peux , à l’aide de mes
observations personnelles, donner plus de développement à la
description des terrains sédimentaires et des roches pyrogènes,
remplir quelques lacunes , et discuter l’âge relatif de plusieurs
dépôts.
Terrains sédimentaires . - — L’étude des roches et des fossiles fait
reconnaître sur le littoral européen de la mer Noire l’existence
des horizons géologiques suivants : 1° schistes cristallins ; 2° terrain
crétacé; 3° terrain nummulitique ; 4° terrain tertiaire analogue à
celui des steppes de la Russie; 5° terrain diluvien ou quater-
naire.
Cette énumération , qui ne comprend pas encore les roches py-
rogènes , suffit pour démontrer que l’exploration de Honnnaire de
Hell fournit de précieux documents sur plusieurs terrains dont
aucune carte géologique n’avait encore signalé la présence sur
cette partie du littoral.
Terrain des schistes cristallins. — Il se compose de roches géné-
ralement caractérisées par le talc. Le talcite paraît être la roche
dominante, et comprend plusieurs variétés. On y remarque le tal-
cite plrylladiforme, tantôt pur, tantôt mélangé de feldspath ou de
quartz, et passant au quartzite talcifère. Il contient quelquefois
des glandes de quartz, de quartzite ou de pétrosilex, les unes
aplaties, les autres ovoïdes et offrant l’apparence de cailloux rou-
lés. La protogine stratiforme se montre quelquefois en masses
assez importantes pour que le talcite paraisse leur être subor-
donné.
Le point de la côte le plus rapproché du Bosphore où notre con-
frère signale les schistes cristallins est le cap Kouchovaki . situé
entre les deux caps de Kaléangtchiki (Kaléondjik de la carte) et
de Malhatra; le point le plus éloigné se trouve au fond du port
d’Inada; dans l’espace intermédiaire, ils disparaissent souvent
sous des dépôts de différents âges. Pour éviter des répétitions inu-
tiles, je me contente de donner, pour le moment, cette simple
indication ; des détails plus étendus sur leurs retours sporadiques
trouveront naturellement leur place dans la description du terrain
nummulitique.
Plusieurs coupes que j’ai faites en 1847 à travers la chaîne cô-
tière de la mer Noire, combinées avec celles de M. Boué, servi-
ront , dans une autre occasion , à fixer les limites continentales
des schistes cristallins.
Terrain de transition. — Le terrain paléozoïque n’existe pas sur
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
517
le littoral de la mer Noire ; les échantillons recueillis sur la rive
occidentale du Bosphore rentrent dans la description que renferme
la note précédente. Parmi ceux qui proviennent de la rive asia-
tique on distingue : 1° un calcaire phylladifère verdâtre, et un
calcaire lamellaire blanc mélangé d’une matière pliylladienne co-
lorée en vert clair ; ces deux roches , prises au pied du mont Géant,
sont subordonnées au calcaire compacte gris noirâtre qu’on y ex-
ploite pour faire de la chaux ;
2° Une pliyllade calcarifère colorée en noir par une substance
bitumineuse , et formant quelques lits minces dans le calcaire
compacte noirâtre ;
3° Plusieurs roches anormales recueillies à Anatoli-Kavak , sa-
voir : un agrégat de quartz et de pyrite cuivreuse, enduite sur
quelques points de malachite ; un agrégat de calcaire grisâtre et
de nodules taîqueux verdâtres , avec cristaux de pyrite de fer :
cette roche accompagne le minerai de cuivre ; enfin un agrégat de
calcaire blanc et de galène argentifère lamelliforme d’un gris
bleuâtre .
Terrain crétacé. • — La présence du terrain crétacé n’a été con-
statée par des fossiles que sur deux points du littoral de la mer
Noire : l’un, situé près de Kila, à 2 lieues à l’O. du Bosphore,
a été découvert par Hom maire de Hell (voir la description de ce
gisement, Bull., 2e série, t. VU, p. 50 â); l’autre, placé au fond
du port d’Inada ou Limnio, environ à 100 mètres à l’O. de la
Quarantaine , a échappé aux investigations de ce voyageur.
Dans cette dernière localité, la partie inférieure du terrain
crétacé se compose d’un grès grossier poudingiforme , composé de
petits fragments du talcite sur lequel il repose, de cailloux roulés
de quartz hyalin , de débris de coquilles et d’Orbitolites que ci-
mente une pâte calcaire très abondante ; au-dessus viennent :
1° un calcaire compacte argilifère et arénifère passant au grès;
2° le même calcaire , avec paillettes de mica et Orbitolites ; 3° un
passage de ce dernier au macigno ; /j° un macigno à grain fin ferri-
fère , dont certains lits sont formés d’Orbitolites siliceux , que réu-
nit un ciment rare de grains de quartz, d’argile et de calcaire;
5° alternance des couches précédentes ; 6° une thermantide ou
argile micacée schisteuse endurcie par la chaleur et adossée au
porphyre pyroxénique. Le pendage est compris entre 20° et /f0°.
Parmi les fossiles que j’ai recueillis à Inada, AJ. d’Archiac a
reconnu Y Orbitolites concava , Lain., qui forme presque à elle seule
la masse des roches n"s 2 et k- Cette espèce, très distincte de
Vü. conica , d’Arch. (O. bulgariça , Boué), avec laquelle on l’a
518
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
confondue , constitue , comme on sait , une petite couche vers la
partie inférieure des grès crétacés de Ballon (Saillie).
J’ai pris sur le rivage, à l’E. de la Quarantaine, une autre coupe
qui paraît faire suite à la précédente : 1° aphanite verdâtre pas-
sant à l’ophite de JYL Cordier (rnélaphyre de Brongniart) parla
présence de petits cristaux de feldspath blanc; 2" brèche calcaire
d’un gris noirâtre passant au macigno, composée de fragments de
calcaire argilifère et arénifère, de macigno et d’aphanite; 3° ma-
cigno et argile endurcie renfermant des lits minces d’un calcaire
compacte argilifère , à cassure esquilleuse, d’un gris noirâtre;
U° conglomérat dont les éléments sont formés de porphyre pyroxé-
nique , d’ aphanite et d’ophite (rnélaphyre) ; 5’ alternance des
roches précédentes.
L’aphanite placé à la base de cette coupe présente en grand la
structure stratiforme. Cette roche passe, dans le voisinage, au por-
phyre pyroxénique (rnélaphyre), Mont elle estime variété, et paraît
être arrivée au jour pendant le dépôt du terrain crétacé. Les maté-
riaux incohérents résultant de ses éruptions sous-marines ont pro-
duit des grès pyroxéniques faciles à confondre avec la roche pyro-
gène massive, lorsqu’ils ne sont pas mélangés de substances étran-
gères. Des exemples fréquents de cette variété de grès se trouvent
au N. d’Inada.
La coupe suivante , prise par Hommaire de Dell à quelques pas
de la précédente, avec des échantillons à l’appui, présente des
détails qui viennent confirmer mes observations : 1° roche d’un
gris bleuâtre (mon aphanite) sans stratification visible , mais pas-
sant insensiblement à une roche stratifiée (grès pyroxénique) d’une
couleur plus claire : cette dernière contient des cailloux roulés
(ma brèche calcaire); 3° grès micacés à grains très fins alternant
avec des lits d’une roche calcarifère très dure ; U° grès feldspath ique
et pyroxénique brunâtre , alternant avec des argiles schisteuses
brunâtres sans consistance ; 5° conglomérat stratifié et composé de
fragments de roches pyroxéniques. On voit que cette coupe offre
les plus grands rapports avec celle que j’ai prise dans la même
localité.
Hommaire de Hell n’émet aucune opinion sur l’âge de ce der-
nier dépôt; les seuls fossiles qu’il y ait observés sont des corps cy-
lindriques allongés, n’offrant aucune trace d’organisation inté-
rieure , semblables à ceux qu’on trouve dans beaucoup de terrains
sédimentaires, et qui, au N. de la Quarantaine, se brisent en
tronçons de 1 à 3 centimètres de longueur. Les couches n’offrent
ici aucun rapport de composition , soit avec celles de Kara-Bour-
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
519
non, qui renferment des cailloux roulés de porphyre pyroxénique
mélangés avec des fossiles nummülitiques , soit avec celles des
localités plus voisines, qui seront décrites tout à l’heure. Il me
paraît donc naturel de les rapporter provisoirement au terrain
crétacé et de les considérer comme superposées au groupe qui
caractérise l’ Orbitolites concava , Lam.
J’ai observé entre Aktobol et Brodivo , hameau situé à 2 lieues
à FO. de la première ville , des lambeaux d’un dépôt arénacé
renfermant des lits minces de calcaire compacte, et probablement
contemporain de celui d’Inada. Dans ces localités, les couches
reposent également sur des roches pyrogènes , qui semblent se lier
avec elles, et qui les traversent de la manière la plus évidente.
Je parlerai encore ici de deuxlocalités où se trouvent des roches
d’un âge problématique , et dont je ne saurais assigner avec certi-
tude la place dans l’échelle géologique.
Dans l’espace qui s’étend entre le cap Kaléondjik et le cap
Malliatra s’élève, à une hauteur approximative de 120 mètres, la
colline de Koudoumitcli, qui sert de séparation entre la petite
vallée du même nom , placée à sa base occidentale , et la grande
vallée du Kalamitch , s’ouvrant à sa base orientale. Cette colline se
compose de quartzite grisâtre (quartz sédimentaire de M. Cor-
dier), de grès quartzeux et de conglomérat à éléments de quartz.
Des filets de quartz blanc s’insinuent entre les couches , suivent le
sens de la stratification, et passent au quartz d’un gris bleuâtre qui
forme la plus grande partie du dépôt. On y observe souvent des
veinules d’un gris noirâtre, composées de peroxyde de fer, qui en
s hydratant déterminent des phénomènes de rubéfaction, et faci-
litent la dégradation de la roche. 11 en résulte des fentes, des trous
et des surfaces rugueuses , dont notre confrère compare l’aspect
tourmenté à des scories de forge. Les couches , brisées en maint
endroit, offrent des traces de bouleversement et des directions et
inclinaisons très variées ; mais quelques masses principales plon-
gent de 55° vers la mer, et suivent la direction N. 60° (probable-
ment N. 60° E. de la boussole). Le journal de voyage de Hom-
maire de Hell ne donne aucun renseignement sur l’âge probable
de ce dépôt; on peut provisoirement le rattacher aux couches
arénacées d’Inada.
Enfin il ne me reste plus à parler que des grès à Fucoïdes for-
mant, au N. de Missivri, l’extrémité orientale de la chaîne du
Balkan. Mais comme ils sont fréquemment recouverts de lambeaux
de terrains plus récents, je procéderai, à leur égard, comme je l’ai
fait ayec les schistes cristallins; je me contenterai de donner ici
520
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
leur composition , et je renvoie les détails qui les concernent au
paragraphe du terrain nummulitique , dans lequel se trouvent in-
diqués rémunération successive des différents terrains, et l’espace
qu’ils occupent le long du littoral.
Ce groupe se compose de macigno, d’argile schisteuse, de mar-
nolite et de calcaire compacte grisâtre. Les seuls fossiles observés
dans ces couches sont des empreintes de Fucoïdes.
Autrefois la présence des Fucus suffisait pour classer dans le ter-
rain crétacé les rocliês qui les renferment ; mais, depuis qu’il a été
constaté que les Fucoïdes se trouvent souvent au-dessus des Num-
mulites, ils ne peuvent plus servir à déterminer à priori un hori-
zon géologique. Le terrain crétacé existe dans le Balkan, ainsique
l’attestent les fossiles caractéristiques rapportés par M. Boue; de
son côté, Hommaire de Hell cite, au N. de la chaîne, un calcaire
dont il n’a pas pris d’échantillons, mais auquel il donne, dans ses
notes de voyage, le nom de calcaire de Kara-Bournou, si riche
en fossiles nummulitiques ; malheureusement il n’a pas pu établir
clairement, comme on le verra plus loin, les rapports de position
entre ce calcaire et le groupe à Fucoïdes du cap Emona (Eminch).
L’âge de ces dernières couches doit donc rester indécis jusqu’à ce
que de nouvelles observations viennent le fixer d’une manière
définitive : provisoirement on peut les laisser dans le terrain cré-
tacé.
Terrain nummulitique. — Ce terrain se compose ordinairement
de calcaire , tantôt grossier, tantôt compacte et de couleur blan-
châtre ou jaunâtre. La roche devient souvent un véritable conglo-
mérat coquillier, off rant peu de résistance lorsque les fossiles sont
faiblement cimentés. Elle est rarement pure , et contient souvent
des grains de quartz et de l’argile en assez grande quantité pour
former un grès riche en calcaire. A l’O. du cap de Kara-Bournou,
la falaise qui borde le rivage présente des couches lenticulaires
solidement agrégées de calcaire grossier et de grès passant au con-
glomérat, et subordonnées à une bande qui se compose de calcaire
argilifère tendre blanchâtre, de grès, de marnolite grisâtre et d’ar-
gile calcarifère.
Passons maintenant à l’énumération des localités où se trouve
le terrain nummulitique, en nous dirigeant le long de la côte,
d’abord de l’E. à l’O., ensuite du S. au N. Pour préciser l’étendue
des divers lambeaux appartenant à ce terrain, je suis forcé de
mentionner tout à la fois et les points du littoral où se montrent
ces lambeaux et les différents dépôts qui les séparent. Ce para-
graphe contient donc le tableau sommaire de la constitution géq-
SÉANCE DU 16 JUIN 1851. 521
logique de la côte, qu’il sera facile de reproduire sur la carte en
le prenant pour guide.
Aux roches pyrogènes du Bosphore et des îles Cyanées succède
le dépôt à Lignite de Kila, qui s’étend jusqu’aux environs du cap
Kara- Bournou et sur lequel je me propose de revenir dans une
autre occasion. ( Yoir, en attendant, les détails donnés sur ce sujet
par Mr de Tchihatcheff, antè , p. 297.)
La description du cap de Kara-Bournou et de la falaise qui se
prolonge à l’O., publiée dans le Bulletin (voir 2e série, t. YII ,
p. 51 à) me dispense d’entrer dans aucun détail sur cette inté-
ressante localité. Je me contenterai d’ajouter ici quelques consi-
dérations sur les fossiles qui ont été recueillis sur ce point par
Hommaire de Hell , et que M. d’Archiac a bien voulu nous
communiquer, en attendant qu’un travail plus complet, destiné à
accompagner l’ouvrage de feu notre confrère , en fasse connaître
toutes les espèces. « M. J. Haime, qui a jeté un coup d’œil sur les
» polypiers (anthozoaires) de la collection recueillis au cap Kara-
« Bournou, y a reconnu des formes qui rappellent singulièrement
» celles de la faune nummulitique, entre autres un Agaricia , que
» l’on ne peut distinguer de VA, Murchisoni de l’Inde, un Trocho-
\> cyatlius très voisin du T. sinuosus , et une espèce de Ceratotrochus
» qui paraît se retrouver aux environs de Nice. On y trouve de
»> plus une grande quantité de Cladocorci , dont une espèce, l’une
» des plus abondantes, paraît être le C. granulosa , déjà cité à
» Biaritz et que M. de Tcliihatclieff a rapporté d’Hadin-koi, au
» centre même de la Thrace, au S. de Kara-Bournou; mais des
» formes très voisines de ces dernières, se trouvant fréquemment
» aussi dans des couches tertiaires plus récentes, il serait préma-
» turé de rien conclure à leur égard avant d’en avoir fait un
» examen plus attentif et sur de très bons échantillons.
» Toutes les coquilles à l’état de moules plus ou moins incom-
» plets, fait observer M. d’Archiac, proviennent de la même cou-
» che que les polypiers précédents, et dont les caractères minéra-
» logiques sont constants. Ces moules ne paraissent pas appartenir
» à des espèces connues, et semblent se rapporter aux genres Cy-
» prine, Astarte, Crassatelle, Corbis , Cardinal , Spondyles, Pecten ,
» Térébratule, Rotelle, Pleurotomaire, Turritelle et Fuseau. Les
» Nummulites sont très rares dans ces calcaires jaunâtres; celles
» que Hommaire de Hell a trouvées en grande quantité, et qui sont
» voisines de la N. Ramondi, étaient dans une couche arénacée
» très distincte des calcaires précédents, où se rencontrent aussi
» quelques rares individus de Serpula spirulœa , un Pigaulus?
522 SÉANCE DD 16 JUIN 1851.
» une baguette de Cidnris , une patte de crustacé et des Mil-
» liolites. »
La falaise précédente est interrompue , à une lieue à T O. du cap
Kara-Bournou , par une plage de sable d’une demi-lieue , et dont
la surface , couverte de dunes et de petites flaques d’eau, se trouve
coupée par le ruisseau qui sort du lac de Derkos. Au delà de cette
dépression la côte est bordée par une falaise de terrain quaternaire
se prolongeant jusqu’aux rochers connus sous le nom de Flamour-
Tèpè. Ce dernier cap, composé de calcaire, appartient probable-
ment au terrain à Nummulites, qui apparaît un peu plus loin;
dans l’intervalle existent des collines de sable et d’argile. Au delà
de ces collines , le terrain nummulitique est représenté par des
couches alternatives de marne, de grès calcarifère, et de conglo-
mérat coquillier à petits éléments , composé de débris de poly-
piers, de coquilles et de Numumlites. M. d’Archiac y a reconnu
la N. Ramondi. Les couches offrent une inclinaison comprise entre
5° et 10°, et des traces de failles dont l’une mesure une hauteur
verticale de 8 mètres. Sur plusieurs points les strates ont été brisés,
et plongent en sens inverse ; l'ouverture conique résultant de la
rupture a été remplie de détritus argileux.
Ensuite se présentent des dépôts quaternaires , formant des col-
lines, soit à pentes douces et précédées d’une plage de sable, soit
ravinées et taillées en escarpements , dont les dégradations offrent
quelquefois une disposition qui rappelle des sculptures mauresques.
Ils sont interrompus par la colline de Koudoumitch , précédem-
ment décrite , et reparaissent encore à l’O. de cette dernière; mais
ils sont bientôt remplacés par le terrain nummulitique. Les cou-
ches inférieures visibles se composent de calcaire gris argilifère
alternant avec de la marne friable , de calcaire blanc coquillier
grossièrement congloméré , et passant vers le haut à la variété
compacte; ses couches supérieures sont formées de calcaire jau-
nâtre compacte très solidement agrégé, tantôt pur, tantôt silicifère.
L’inclinaison varie de 1° à 2°.
Cet ensemble de couches constitue des falaises qui , en s’éloi-
gnant de la vallée de Koudoumitch , ne présentent plus que les
calcaires inférieurs précédents , recouverts d’argile et de sable
(probablement quaternaires). Bientôt il se relève vers l’O. sous un
angle de 18°, et forme quelques récifs dans le voisinage du cap
Kouchovaki.
Les schistes cristallins se montrent pour la première fois sur la
côte, au cap Kouchovaki , sur une étendue de 50 à 60 mètres, et
sur une hauteur de 8 à 10 mètres. Ils sont recouverts comme d’un
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
523
manteau par du calcaire grossier et du calcaire blanc coquillier,
renfermant des débris du talcite sous-jacent , et percé de cavernes
et de trous qui servent de retraite aux vautours. Sur le bord de la
mer, et à une certaine distance des talcites, les couches calcaires
prennent une inclinaison de 12°; au sommet du cap , elles sont
presque horizontales , et plongent en sens inverse sous un angle
de 1° à 1°,5. On y remarque aussi quelques bouleversements.
Parmi les moules de fossiles provenant de cette localité, M. d’Ar-
ciiiac a reconnu les genres Cardium , Spondylus, Hypponice , Natica ,
Plcurotomaria , Cyprœa , mais dont les espèces ne sont pas déter-
minables.
Vient ensuite la vallée de Armen-Déré (ruisseau des Arméniens).
A 1*0. de cette dernière , les mêmes couches horizontales sont
percées, à différentes hauteurs, de nombreuses cavernes, se termi-
nent en coin , et pénètrent les unes dans les autres. Les falaises cal-
caires s’arrêtent à une gorge; à son approche, leur stratification
présente un redressement vers FO.
Les schistes cristallins apparaissent au delà de la gorge, et plus
loin sont encore recouverts de calcaire presque horizontal ; ils des-
sinent sur la côte plusieurs petits caps , entre lesquels s’étendent
des plages de sable. La coupe prise au cap Malhatra les montre
plongeant sous un angle de 35°, et flanqués d’une grosse masse cal-
caire, dont le pied, battu par les flots, est dominé par un sommet
qui surplombe la mer. L’entrée d’une caverne placée à une cer-
taine hauteur se distingue, dans le calcaire, à la jonction des deux
terrains.
Notre collègue reconnaît au delà du cap la vallée de Gaston ,
où n’existe aucun village , et trouve à sa paroi occidentale les
schistes cristallins que recouvre le calcaire coquillier. En se rap-
prochant de Midia , situé à l’embouchure d’un ruisseau, il voit le
calcaire se redresser en couches presque verticales, puis les schistes
cristallins former des escarpements ; enfin, non loin du village, le
calcaire alternant avec de la marne s’étendre à leur surface , et
prendre une inclinaison de 12°. Le voyageur jette ici un coup
d’œil en arrière , et dit qu’à partir de la vallée de Koudoumitch
les collines augmentent en hauteuY jusqu’au cap Malhatra, et
prennent graduellement le caractère de montagnes : depuis ce cap
l’élévation de la chaîne s’accroît encore jusqu’à Midia.
Entre ce dernier village et le cap Servis (Sévras de la carte) si-
tué à 3 milles, existent de petites collines dont la base présente
4Îes escarpements calcaires à strafef légèrement inclinés , et dont
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
52/1
les couches se redressent brusquement près du cap. Au delà d’une
gorge, les schistes cristallins reparaissent, constituent le cap Servis
tout entier, et cle là s’étendent sans interruption jusqu’au fond du
port d’Inada.
Les différents lambeaux calcaires dont je viens de préciser la
position sur la côte paraissent tous appartenir au terrain nummu-
litique. Les fossiles constatent sa présence sur plusieurs points , et
les détails du journal de voyage tendent à lui rapporter les points
intermédiaires. Mais les échantillons recueillis au N. d’Inada ne
contiennent plus cle Nummulites, et les notes du voyageur ne se
prononcent pas toujours sur l’âge des dépôts sédimentaires que
nous allons mentionner.
Je ne fais que rappeler ici la position des grès crétacés d’Inada.
Des roches pyrogènes de diverse nature , et dont il sera question
plus loin, occupent presque sans interruption l’espace compris entre
le cap Kouris, situé à 2 milles d’Inada, et le cap Baglar-Altoun ,
près de Sizéboli. Sur cette grande étendue de côtes on observe :
1° au delà de la pointe de Yassiliko, du calcaire en couches ondu-
lées presque horizontales, offrant des inclinaisons de 3° à à0.
2° A une lieue et demie de Yassiliko, le même calcaire horizon-
tal, formant la base du plateau de Haratcli et de petites collines
qu’on aperçoit au delà du plateau. Il est possible que ces deux
gisements appartiennent encore, d’après le journal de voyage, au
terrai n nummulitique.
3° Dans la baie d’Atliinan (Afnada des Grecs), des grès tendres,
reposant sur une argile vaseuse, et recouverts de grès à concré-
tions bizarres , semblables à celle du grès qui accomgagne le dépôt
à lignite de Kila (voyez le dernier mémoire de M. de Tcliihatchefï,
page 309). Les mêmes roches paraissent aussi exister à Sizéboli ; du
moins on en trouve parmi les matériaux de construction de cette
ville.
Un calcaire en couches horizontales se montre à FO. de Bour-
gas. Entre cette ville et Ankhialou (Aliioli) on observe quelques
affleurements calcaires et des escarpements composés d’argile
(probablement quaternaire). Les deux caps situés dans l’intervalle
qui sépare les deux villes présentent de petites falaises, qui se com-
posent d’un grès quartzeux à ciment calcaire assez abondant , et
renferment des fossiles à l’état de moules, notamment des indivi-
dus très nombreux de la même espèce, et des corps cylindriques
sinueux et ramifiés. Hommaire de Ilell considère ces coquilles
comme identiques avec certaines espèces du terrain tertiaire, qu’il a
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
525
recueillies en Bessarabie et qui ont été décrites parM. Aie. d’Or-
bigny (1). Je reviendrai plus loin sur ce sujet. Le même terrain
existe à l’extrémité de la presqu’île d’Ankhialou. On trouve aussi
dans cette dernière localité des masses de sable irrégulièrement
cimenté.
Le fond des trois baies placées entre Ankhialou et Missivri
offrent de petits escarpements argileux; les caps qui les séparent
se composent d’une roche calcaire (probablement le grès calcari-
fère précédent).
L’extrémité orientale de la chaîne du Balkan , dirigée de l’O. à
l’E., s’étend jusqu’au bord de la mer, au N. de Missivri. En face
de cette ville commence le terrain à Fuçoïdes, formant la base de
la chaîne, et dont j’ai donné la description à la fin du paragraphe
destiné au terrain crétacé.
Ces couches suivent, vis-à-vis de Missivri, la direction N. -S.,
et plongent de 10° vers l’O.; plus loin elles se dirigent N. 40° E.,
et leur pendage est de 16° ; ensuite elles présentent des brouillages,
des failles et des inclinaisons variées. Elles forment , au pied des
montagnes mamelonnées qui constituent cette partie orientale du
Balkan , un plateau étroit taillé en escarpements, et s’élevant de
10 à 12 mètres au-dessus de la mer. En avançant, on voit cette
plate-forme se recouvrir d’un calcaire grossier passant au calcaire
oolitique, renfermant des moules intérieurs de coquilles, et que
Hommaire de Flell identifie avec celui de la Bessarabie. Ce cal-
caire, en couches horizontales, finit par former lui-même des
falaises de 8 à 10 mètres baignées par les flots, et disparaît au cap
le plus voisin de Missivri. Les couches à Fuçoïdes composent le
cap Emona (Emineh de la carte), présentent des directions varia-
bles comprises entre N. 50° E. et N. 65° E., et plongent sous un
angle de 42" à 60°. Au N. du cap , elles se dirigent N. 70° à 80°
E., et plongent au S. un peu E. Au delà d’une petite pointe, elles
reposent sur un grès passant au conglomérat qui forme des récifs.
Plus loin viennent des couches d’argile friable contenant une assise
d’une roche désignée dans le Journal de voyage, sans description
et sous un numéro qui ne se trouve pas dans la collection. A côté
de ces couches argileuses qui inclinent dans tous les sens, existe
un dépôt de sable grossier sans consistance et bouleversé, qui pré-
sente, près d’un cap, la direction N. 70° E., et plonge de 8° à
l’E. 70° S. Le calcaire dont il a été question plus haut (voir le
(4) Voyez Les Steppes de la mer Caspienne , Paris, 4 844, t. III,
p. 445.
526
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
paragraphe relatif au terrain crétacé ) accompagne le sable
grossier. C’est là le terrain qui ne se trouve représenté par aucun
échantillon et que Hom maire de Hell identifie avec celui de
Kara-Bournou, en faisant remarquer que la présence des couches
arénacées friables établit entre les deux lambeaux une différence
dans leur composition. Les bancs de calcaire suivent ici, comme
ceux du dépôt à Fucoïdes, la direction N. 70° E., et plongent de
15° à l’E. 70° S. ; par conséquent elles semblent passer par dessous.
Si la superposition immédiate avait été constatée, elle établirait
nettement l’âge relatif des deux groupes : on vient de voir que
l’observateur se contente de dire que les roches nummulitiques se
trouvent à côté des couches argileuses dont il ne précise pas les
rapports; il pourrait donc exister sur ce point une faille à laquelle
serait due la superposition apparente. C’est pour ce motif que
j’ai laissé provisoirement le groupe à Fucoïdes dans le terrain
crétacé.
On retrouve les calcaires dits de Kara-Bournou, auprès d’Aspro
(Akdéré des Turcs), dirigés N. 65° à 70’ E., et généralement incli-
nés de 15° à 16° vers l’E. 65° à 70" S.; plus rarement vers FO. 65°
à 70" N. Ensuivant le rivage, on les voit encore affleurer en
couches tantôt inclinées, tantôt horizontales, et dans les inter-
valles se trouvent des calcaires tertiaires récents , qui ensuite con-
stituent le rivage du golfe de Varna et de Raltchik.
L’exploration géologique du littoral par Hommaire de Hell
s’arrête à cette dernière localité.
Terrain tertiaire supérieur ou pliocène. — La formation miocène
ne se trouve pas représentée dans la collection, à moins qu’on ne
doive lui rapporter h s fossiles mal caractérisés des environs d’An-
khialou (Ahioli), que notre collègue compare à ceux de la Bessa-
rabie. Parmi les coquilles à l’état de moules, qui proviennent de
cette localité, il en est dont les formes rappellent assez bien, à
M. d'Archiac, celles de la Mactra Vitaliana, d’Orb,, ou peut-être
de la M. Fabreana , d’Orb. Voici en quels termes l’auteur de la
Paléontologie française termine sa description des nombreux fos-
siles recueillis par Hommaire de Hell dans un précédent voyage
en Bessarabie (1).
« Si je cherche, par la comparaison, à rapporter ces terrains
» tertiaires aux couches bien déterminées en France, plutôt par
» 1 e faciès d’ensemble des espèces que par les identiques (puisque
» je n’en ai pas trouvé), je pourrais croire que les terrains tertiaires
(i) Les Steppes de la mer Caspienne, Paris, 1 844, t. III, p. 491.
527
SÉANCE DU 16 JUIN 1851,
» de Bessarabie, de Podolie et cîe Volhinie, sont contemporains
» de nos falhuns de la Touraine et de Bordeaux ; du moins leur
» composition générique ne paraît-elle pas se rapporter au cal-
» caire grossier du bassin parisien. »
D’après le Journal de voyage, les lambeaux rapportés au terrain
tertiaire de la Bessarabie commencent à se montrer entre Bourgas
et Ànkliialou (Àhioli) ; on en trouve encore entre cette dernière
ville et Missivri , et au N. d’Aspro. (Voyez ci-dessus les détails
relatifs à ces diverses localités.)
S’il y a incertitude sur la classification des dépôts arénacés et
calcaires que je viens de citer, il n’en est pas de même des suivants,
qui renferment les_ fossiles de l’étage décrit par M. de Verneuil
sous le nom de calcaire des steppes de la mer Noire.
Hommaire de Hell a rapporté de Varna du calcaire compacte
et un grès calcarifère coquilliers ( Car di uni , Modioîes , Palu-
dines, etc.). Il a recueilli à Baltchik, au delà de Varna, un
calcaire tendre tachant les doigts comme la craie; un calcaire
compacte; un calcaire grossier friable, espèce de conglomérat
coquillier : ces diverses roches sont riches en fossiles , surtout en
bivalves, parmi lesquelles je citerai une Mactre et une Cyrène.
Enfin on trouve encore près de Baltchik un calcaire grossier
blanchâtre , et un grès calcarifère contenant des Hélices parfaite-
ment conservées , des Cyclades , des Paludines et une patte de
crustacé, probablement du genre Astacus. Les mêmes fossiles se
trouvent à Varna dans la même roche qu’à Baltchik.
Il existe donc dans les deux localités deux groupes bien distincts :
l’un caractérisé par des coquilles vivant dans les eaux saumâtres,
l’autre par des êtres vivant dans les eaux douces.
La formation pliocène paraît former tout le littoral entre Varna
et Baltchik,
Terrain diluvien ou quaternaire. — Les dépôts de diverse nature
appartenant à cette époque se montrent de distance en distance le
long du littoral de la mer Noire. J’ai déjà indiqué les principaux
gisements et leur étendue en parlant de la distribution géogra-
phique du terrain à N uni muli tes. Il me reste encore à donner
quelques détails sur leur composition.
Le terrain diluvien est souvent formé de sable , de gravier et
d’argile jaunâtre, grisâtre ou rougeâtre. Le sable est quelquefois
agglutiné par un ciment calcaire, et se montre en lits minces et
peu suivis subordonnés à l’argile. Des traces de dérangement sont
assez fréquentes dans les falaises et les basses collines que forme
ce dépôt entre le lac de Derkos et la vallée de Kalamitch,
528
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
On observe à l’entrée de cette dernière vallée une protubérance
composée de blocs de quartz et de grès provenant de la colline de
Koudoumitch ; les plus gros fragments, tantôt arrondis, tantôt à
angles vifs, ont un mètre cube. Le ruisseau de Kalamitch con-
tourne à FO. la protubérance , et se perd dans les sables. Plusieurs
autres ruisseaux de la côte présentent le même phénomène , du
moins en été, et ne mêlent pas directement leurs eaux à celles de
la mer.
Sur la côte méridionale du golfe de Varna, et au pied du cal-
caire tertiaire , s’élèvent des masses de sable qui parviennent à
une hauteur de 25 à 30 mètres au-dessus du niveau de la mer, et
renferment des coquilles marines vivant encore sur la côte voisine,
mêlées de coquilles fluviatiles.
Je terminerai l’examen des terrains stratifiés par les réflexions
suivantes : M. de Tchihatclieffa placé dans le terrain quaternaire
le dépôt à lignite de K ila ; d’après cette opinion, qui ne me paraît
pas suffisamment motivée , il faudrait y placer aussi les grès à
concrétions bizarres de la baie d’Atliman et ceux de Sizéboli.
Hommaire de Hell ne s’explique pas sur l’âge de ces dépôts;
quant à moi, je suis porté à les classer dans l’étage supérieur du
terrain tertiaire. J’attends, pour me prononcer, que la découverte
de fossiles vienne trancher la question d’une manière définitive;
M, de Tchiliatcheff cite bien des Clausilies et des Pupes qu’il
considère comme fossilisées, il peut avoir raison; mais dans les
endroits où je les ai vues (route de Belgrad à Agatchili) , ces co-
quilles se trouvent répandues en immense quantité à la surface du
sol; quelques unes même adhèrent encore aux plantes rares qui
végètent sur le sable. Malgré d’actives recherches, je n’ai pas pu
en découvrir une seule enfouie dans les couches arénacées. J’ai
conclu, de ee dernier caractère négatif, que les Clausilies et les
Pupes ne se rencontrent pas sur ce point à l’état fossile, et c’est
pour ce motif que je n’ai signalé leur présence dans aucune occa-
sion.
M. de Tchiliatcheff se propose de se livrer à de nouvelles obser-
vations sur le terrain à lignite. J’ai la conviction qu’il lèvera
prochainement tous les doutes qui, à mon avis, existent encore
sur l’âge de ce dépôt; je serai heureux de pouvoir me rallier à
l’opinion de notre savant collègue.
ROCHES PYROGÈNES.
Les roches d’origine ignée recueillies par Hommaire de Hell sur
SÉANCE DU 16 JUIN 1851 .
529
le littoral de la mer Noire sont : 1° une roclie granitique ; 2° le
porphyre dioritique ; 3° le porphyre pétro-siliceux ; l\° l’aphanite,
l’opliite et l’ophitone ou mélaphyre ; 5° le porphyre pyroxénique
(autre variété de mélaphyre); 6° le basalte.
Roche granitique. — Elie se compose de feldspath orthose , de
mica noirâtre, de quartz et de talc, et renferme un peu de fer
spéculaire. 11 y en a deux variétés : l’une, à gros grain , se trouve
en grands blocs au cap Chechten-Bournou (Zaitan-Bouroun de la
carte), situé entre Atliman et Sizéboli ; l’autre, à grain moyen, se
montre un peu plus loin sur une étendue de 100 mètres, et forme
la paroi méridionale d’une petite gorge. Considérée minéralogique-
ment , c’est une pegmatite un peu décomposée d’un gris rosâtre ;
mais si l’on cherche à établir ses rapports avec les roches de la
chaîne côtière, on ne sait si l’on doit la rattacher, soit à la proto-
gins, soit à la syénite, si développée à Samakov de Bulgarie, et
dont j’ai dit un mot dans la séance précédente, à l’ocasion des
dépôts aurifères de la Turquie. La roche granitique est enclavée
dans le porphyre pétro-siliceux , qui s’y présente en liions ; elle est
flanquée au N. par le porphyre pyroxénique.
Porphyre dioritique . — Des cristaux allongés d’amphibole d’un
vert sombre se détachent sur la teinte d’un gris verdâtre clair d’une
pâte feidspathique , et donnent à cette variété de diorite un aspect
porphyrique. Cette roche a été prise parmi des blocs et des cail-
loux roulés sur le bord de la mer, au cap Rezveh (Resveli-Bouroun
de la carte), placé entre Inada et Aktobol ; elle est très probable-
ment enclavée dans le porphyre pétro-siliceux et le mélaphyre,
qui constituent le littoral compris entre ces deux localités.
Porphyre pétro-siliceux. - — Je donne ce nom, d’après la nomen-
clature de M. Cordier, à des roches d’une teinte rosâtre, composées
de feldspath grenu à grain fin , et renfermant des mouches ver-
dâtres d’une substance indéterminable. Il est possible que je
réunisse dans ce groupe des roches minéralogiquement semblables,
mais différentes par les circonstances géologiques qui les ont for-
mées. Ainsi, au cap Chechten-Bournou, que je viens de citer, le
porphyre pétro-siliceux pourrait être une variété à petit grain de
la roche granitique qu’il traverse de ses filons. Hommaire de Hell
dit que dans cette localité il prend l’apparence d’une stratification
verticale très irrégulière , qui s’efface souvent et se trouve rem-
placée par des divisions verticales. Dans le voisinage , et au con-
tact du porphyre, existent des conglomérats de roches pyroxé-
niques à texture arénaeée, rappelant celle d’un grès grossier dont
les bancs auraient été bouleversés. Le conglomérat renferme des
Soc. géol. , 2e série , tome YUL 34
530
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
noyaux J armant des traînées , et offrant la couleur rose du porphyre ,
dont ils n offrent d’ailleurs ni le grain ni la contexture . Cette ré-
flexion de notre collègue, que je souligne, est parfaitement juste ;
car ces noyaux sont par leurs caractères minéralogiques de véri-
tables tracliytes. J’ai cru devoir la citer, parce que notre collègue
n’a pas trouvé de trachyte en place sur le littoral, et que je n’en ai
pas observé dans les parties de la chaîne côtière que j’ai traversées.
Ces noyaux seraient-ils des fragments de porphyre métamorphosés ?
Ou bien la roche porphyroïde que Hommaire de Hell signale, au
S. du cap, comme intercalée dans le conglomérat et présentant une
division prismatique et une disposition rayonnée, appartiendrait-
elle à la leucostite ou porphyre tracliytique? Malheureusement
notre confrère ne donne pas la description de la roche prisma -
tique , et aucun échantillon ne permet de remplir cette lacune.
Le porphyre pétro-siliceux apparaît encore au cap Rezveh déjà
nommé, par conséquent, à 8 ou 10 lieues au S.-S.-E de la pre-
mière localité. Je l’ai vu moi-même à peu près sur le même point,
en me rendant d’Inada à Aktobol. Il affecte une disposition strati-
forme verticale au milieu du mélapliyre. La coloration si différente
dans ces deux roches annonce à l’instant leur présence et leurs
retours nombreux et pour ainsi dire successifs.
Je ne sais si une étude plus approfondie conduira à des conclu-
sions plus précises sur cet essai de classification ; pour le moment,
je me contente de faire observer que la roche granitique, le por-
phyre dioritique et le porphyre pétro-siliceux présentent un aspect
particulier, qui tient peut-être à des phénomènes dont les résultats
ont été désignés par M. Fournet sous les noms d’endomorphisme
et d’exomorphisme.
Apluinite , ophite et ophitone ou mélaphyre. — Ces trois variétés
de roches pyroxéniques passent de l’une à l’autre et constituent
un groupe parfaitement caractérisé, qui commence à Inada,
s’étend le long du littoral, et s’observe notamment au cap Rezveh,
aux environs d’Aktobol, etc. Si elles se trouvent en contact immé-
diat avec l’étage inférieur du terrain crétacé (înada) et le porphyre
pétro-siliceux (cap Rezveh, etc.), il est à remarquer qu elles ne
constituent qu’une bande généralement étroite sur le rivage de la
nier, et qu’elles sont arrivées à la surface du sol à travers les
schistes cristallins formant à l’O. la plus grande partie de la chaîne
côtière.
Le feldspath que renferment ces variétés de mélaphyre appar-
tient à un feldspath du sixième système. Lorsqu’il éprouve un
commencement d’altération 5 il prend une teinte rose qui passe
SÉANCE DU 16 JUIN \ 85J .
5S1
ensuite au rouge. Les surfaces de la roche exposées à l’air se re-
couvrent d’une pellicule jaunâtre tirant sur le jaune orange ;
souvent la décomposition pénètre plus avant, et donne à la pâté
un aspect terreux et une teinte uniforme jaune orange, sur laquelle
se détachent les cristaux de pyroxène augite d’un vert noirâtre.
En étudiant les falaises situées au N. de Saint-Stéfano , j’ai re-
connu qu’elles se composent d’une série de dykes juxtaposés et
entourés de conglomérats éruptifs. 11 est facile de s’assurer que le
mélaphyre est sorti par une multitude d’orifices , et que les pro-
duits pyrogènes forment des masses étendues, mais composées dé
pièces et de morceaux soudés ensemble.
L’aphanite acquiert souvent un grand développement et affecte
une apparence de stratification dont les assises, plus ou moins in-
clinées, deviennent assez fréquemment verticales. Eile a une ten-
dance à se décomposer en boule. Lorsqu’elle est profondément
altérée , elle ressemble , soit à un grès argilifère , soit au schiste
argileux. J’ai eu l’occasion d’observer ces diverses circonstances
sur la route de Saint-Stéphano à Aktobol ; de son côté, Hommaire
de iïell a étudié avec soin, à la pointe de la colline d’Aktobol,
une coupe très intéressante , dans laquelle on voit le méiaphyre
se mouler sur les contours très irréguliers d’une roche à strates
verticaux, et appartenant soit à l’aphanite, soit à un grès pyroxé-
nique formé de détritus remaniés. Quoi qu’il en soit , cette
coupe vient à l’appui de mon opinion et prouve que les éruptions
du mélaphyre n’ont pas été simultanées sur ce point du littoral.
Sa sortie à Inada est postérieure au dépôt de l'étage inférieur
du terrain crétacé, et ses débris se stratifient dans les couches qui
me paraissent recouvrir les précédentes et appartenir encore au
même terrain secondaire. (Voyez ci-dessus les coupes que j’ai
données. )
Porphyre pyroxénique * — Bans ma lettre à M. De go usée , que
je viens d’avoir l’honneur de vous communiquer, j’ai décrit la
composition de cette roche et ses gisements aux environs de Con-
stantinople. Il me reste encore à faire connaître quelques détails
résultant des observations de Hommaire de Heil. INotre collègue
a recueilli une collection complète des roches pyrogènes si variées
du Bosphore et du littoral de la mer INoire. Parmi les échantillons
pris entre Sariéri et Bouméli- Kavak, on remarque des variétés
d’un gris clair, qui contiennent un pende pyroxène, présentent un
caractère indécis, mais font encore partie du mélaphyre , et se
rapportent soit au porphyre pyroxénique, soit au groupe précé-
cédent, D’autres échantillons, complètement décolorés et offrant
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
532
la blancheur du kaolin, attestent que des gaz acides se sont dé-
gagés entre Rouméli-Kavak et Buyuk-Liman ; jusqu’à présent, on
n’y a pas découvert, du moins à ma connaissance, de gisement
d’alunite. L’étude des lieux pourrait seule conduire à reconnaître
à quelle variété ces échantillons se rapportent. Quelques noyaux
renfermés dans les conglomérats paraissent se rapprocher davan-
tage de la leucostite que des roches pyroxéniques : ce sont peut-
être des fragments de la variété d’un gris clair dont je viens de
parler. Ces détails se rapportent évidemment aux roches signalées
en 1837 par M. de Yerneuil. (Yoyez 2?«//.,lresér., t. Vïlï, p. 269.)
Le porphyre pyroxénique , accompagné de conglomérats , se
trouve encore au cap Rezveh et non loin d’Aktobol, et prend sou-
vent dans ces localités l’aspect smallo'ide de la rétinite. Enfin, je lui
rapporte la roche d’un gris foncé avec petits cristaux de pyroxène ,
qui forme, au N. de la roche granitique déjà citée, un massif consi-
dérable à pentes escarpées.
J’ai dit dans une note précédente que les premières éruptions
du porphyre pyroxénique ont précédé le dépôt du terrain à Num-
mulites. (Yoyez Bull., 2e sér. , t. YÏI, p. 514.)
Basalte. — Beux échantillons de cette roche, contenant en
abondance de petits cristaux de péridot et passant à la péridotite,
ont été recueillis parmi des blocs, sur le bord de la mer Noire,
au delà de l’axe du Balkan et au N. du village d’Emona (Emineh).
Le véritable basalte est très rare en Turquie; M. Boué, qui a
parcouru dans tous les sens les provinces européennes de l’empire
ottoman , ne l’a observé nulle part. Dans mon dernier voyage
(1847-1848), je ne l’ai vu en place que sur un seul point situé sur
la route de Rodosto à Tchorlou, à une lieue au 8. -S. -O. de cette
dernière ville, qui en a tiré ses matériaux de construction et de
pavage ; mais j’en ai trouvé des blocs isolés et assez nombreux sur
le rivage de la mer de Marmara, entre Constantinople et Erékli,
et dans les vallées tributaires de l’Erghéné, sur la route de Lulé-
Bourgas à Malgara.
Le basalte de Tchorlou forme une grosse proéminence qui tra-
verse les couches du terrain pliocène.
M. Christopher Puggaard, ancien élève de l’École polytech-
nique de Copenhague, communique la notice suivante :
Sut la géologie de Vile de Môen.
La petite île de Moen , située dans la Baltique au S. de la
SÉANCE Du 16 JEIN 1851.
533
grande île danoise de Sélande, mérite l’attention des géologues.
La partie orientale de cette île s’élève jusqu’à làl mètres, hauteur
supérieure à celles qu’on trouve dans les autres îles du Danemark,
et se termine vers l’orient par un escarpement de plus de 125 mè-
tres , qui offre au géologue la plus magnifique coupe naturelle
qu’on puisse voir. Cet escarpement , connu sous le nom de Môcns -
Klint , consiste en craie blanche surmontée d’argiles et de sables
tertiaires très modernes, terrains qui sont bouleversés de la ma-
nière la plus extraordinaire , et qui donnent ainsi des preuves de
révolutions très évidentes de cette partie de l’écorce du globe, sur-
venues dans une époque très moderne.
Ces bouleversements des terrains ont déjà, il y a longtemps,
attiré l’attention de M. Forchhammer et de M. Lyell. Mais la dis-
position des terrains est si complexe qu’il faut une étude prolongée
sur les lieux pour reconnaître les détails intéressants de ces boule-
versements , et bien comprendre la manière dont ils se sont opé-
rés. Dans le but de vérifier ces questions , j’ai fait des études dé-
taillées sur la géologie de l’île de Moen , dont je présente ici les
résultats les plus importants.
I. Terrain crétacé .
Le terrain crétacé de Moen consiste exclusivement en craie
blanche à couches intercalées de silex noir. La craie est blanche ,
d’une texture terreuse très fine , et ne contient d’autres matières
étrangères que les rognons et couches très fréquents de silex, ainsi
que des mamelons de pyrite et de cèles fine, dont la dernière ne se
trouve que dans une seule localité. Les nombreux fossiles se trou-
vent généralement dans un très bon état de conservation, quelques
uns même avec leur couleur naturelle , jamais roulés (mais sou-
vent brisés par les révolutions postérieures des couches) ; enfin
tout prouve un dépôt lent et tranquille de cette craie dans une
mer profonde , où les mouvements mécaniques des vagues ne se
faisaient pas sentir, tandis que les forces chimiques et vitales y
prédominaient.
Les principaux fossiles de la craie de Moen sont les suivants (à
l’exclusion des bryozoaires et des coraux , qui ne sont pas encore
bien examinés) :
Spongia annulas , nob.
S. h ieroglyp h ica , nob.
Achilleum resonans , nob.
A. globosum, Hag.
Scyphia rétif ormis , Roem.
Ventricularis radiata , Mant.
Choanites Kœnigii , Mant.
Turbinolia excavata , Hag.
hU
BÉANCE DU 16 JUIN 1851 .
Pentacrinus Agassizii , Hag.
P. Klœdenii , Hag.
P. Bronnii , Hag.
Apiocrinus ellip tiens, Mill.
Ale cto fn y s t ic a , Hag.
Asterias quinqucloba , Goldf.
Cidaris vesiculosa , Goldf.
Cyphosoma granulosum , Goldf.
Galcritcs vulgaris, Lamk.
G. albogalera , Lamk.
G. abbreviata , Lamk.
Anarichyies ovata, Lamk.
✓7. conoidea , Goldf.
y/, hemisphœrica , Brong.
Spatangus suborbi cularis, Defr. ?
Terebratula cornea , Defr.
J1, puni i la , Sow.
7\ pulchella , Nils.
71. Humbolddi , Hag.
y. grctcilis , Schloth.
y. plicatilis , Bonn,
y. pi s uni, Sow.
y. subpli cata, Mant.
y. Mantcllicuia , Sow.
y. G/.v/7, Hag.
y. Fnujasii , Rœm.
y. striatula, Mant.
Thecidca vcrrniculnris , Schloth.
Cran i a cas ta ta, Hcen.
G. tuberculata , Nils.
G. parisiensis , Defr.
Ostrea semiplana , Sow.
O. hpminis, Hag.
O. vesicularis , Lamk.
Exogyra Miuisteri , Hag.
Chaîna , sp.
Lima Hoperi, Mant.
X. Goldfussii , Hag.
L. Forchhammeri , Hag.
L. semisulcata , Nils.
L. de eus s a ta, Münst.
Z. granulata , Nils.
Z. pseudo-cardium , Reuss.
Pecten costangularis , Lamk.
Z. trisulcus , Hag.
P. nid dus, Mant.
P. injlexus, Hag.?
P. lœvis, Nils.
P. membranaeeiis , Nils.
P. Nilssoni , Goldf.
lnoccramus Cuvicri , Sow.
7. Bran gnard , Bronn.
Z concentrions, Park.
AA cula pccdnoides , Reuss,
P irma cretacea, Schloth.
Area, sp.
Venus , sp. ?
Patella cons trie ta, Hag.
Rostellaria anscrina, Nils.
Fasciolaria Rœnwri, Reuss.
Nanti lus, sp.
Ammonites natficlcliensis , Sow. ?
Scaphites s tri a tus, Mant.
Baculites Fnujasii, Lamk.
B de in ni tes mucronatus , Schloth.
Serpula cauteriata, Hag.
A. sublorquata, Münst.
<$’. heptagona, Hag.
.S’, un pli cota, Hag. -
.S', umbilicata , Hag.
•S. co nie a , Hag.
Pollicipes maximus , Sow.
P. solidulus , Stemstrup.
A p ty chus, sp.
Oxiphinci angustidens , Reuss.
Cette liste des fossiles de la craie de Moen e laisse pas de doute
sur Page de ce dépôt , qui se retrouve avec les mêmes caractères
minéralogiques et presque les mêmes fossiles dans le reste du Da-
nemark , le nord de l’Allemagne , la France et l’Angleterre ; mais
dans le Danemark ? et spécialement dans la partie méridionale de
l’ile de Sélande, ce dépôt de craie blanche est couvert par des
couches crétacées , distinguées par des caractères tant minéralogi-
ques que zoologiques, et connues sous le nom de terrain dan i en.
SÉANCE DU 16 JUIN 1851,
585
Dans File de Moën , on ne trouve aucune trace de ces couches
daniennes ; la craie blanche est immédiatement couverte par les
couches tertiaires d’argile et de sable. Dans le Stevens-Klint , au
contraire, escarpement oriental de la partie voisine de Sélande,
ces couches tertiaires sont séparées de la craie blanche par une
épaisseur d’environ 16 mètres de terrain danien, La craie blanche
de cet escarpement est d’abord recouverte par une couche mince
d’argile schisteuse. Puis vient une couche d’environ 0m,6 de
calcaire dur, compacte, jaunâtre , appelé calcaire de Faxo, parce
qu’il atteint à ce village une épaisseur de plus de 30 mètres. Ce
calcaire est principalement composé de coraux qui ont vécu sur les
lieux, et contient en outre des fossiles nombreux, en partie carac-
téristiques pour le terrain danien , en partie communs à celui-ci
et à la craie blanche. Dans l’escarpement de Stevens, le calcaire
de Faxo est surmonté par un calcaire dur, grisâtre, composé de
fragments de coquilles et de coraux , et appelé liimsteen ; les cou-
ches de cette pierre , alternant avec des couches de silex impur
grisâtre, sont disposées d’une manière ondoyante sur la surface
presque horizontale des couches antérieures, disposition analogue
à celle du sable dans les dunes , et indiquant le mouvement vio-
lent des vagues qui ont déposé les fragments dont ce calcaire est
composé.
Cette dernière circonstance, ainsi que les différences minéralo-
giques et zoologiques (1) entre la craie blanche et le terrain da-
nien, me font penser que ces différences sont dues principalement
à un soulèvement du fond de la mer lors du dépôt des couches
daniennes , tandis que la craie blanche a tous les caractères d’une
formation faite à une grande profondeur. Aussi les couches ter-
tiaires superposées à la craie portent-elles les marques de dépôts
peu profonds. Toutefois il est bien remarquable que les couches
daniennes manquent totalement dans l’île deMpen, ce qui peut
s’expliquer par l’action de violents courants de mer, qui, vers la fin
de l’époque danienne, ont balayé la surface de la craie de Moen ,
et qui ont emporté les coraux et les coquilles qui y vivaient pour
les déposer plus au nord, formant ainsi les couches ondulées du
Liimsteen.
(I) Ainsi le calcaire de Faxo contient de nombreux coraux, Area ,
Chaîna , Myiilus , Gastéropodes, Nautiles, Crustacés, qui, dans la
craie blanche, sont très rares au manquent absolument, tandis que
les fossiles fréquents dans celle— ci ne se trouvent que rarement dans
le calcaire de Faxo.
536
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
IL Terrain tertiaire.
Le terrain tertiaire, superposé à la craie de Moen, consiste en une
alternance de couches d’argile et de sable qui contiennent des
cailloux et des blocs roulés d’origine Scandinave ; sa partie infé-
rieure est composée principalement d’argiles , tandis que les sables
en forment la partie supérieure. Généralement ces couches se ré-
pètent sur tous les points de l’île dans le même ordre, et l’on peut
regarder la coupe suivante comme indiquant l’ordre normal de
bas en haut (voy. la coupe, fig. 2, pl. IX.) :
a!. Partie supérieure de la craie, généralement brisée, consistant
en un agglomérat de fragments anguleux de craie et de silex.
b. Couche d’argile arénacée olivâtre ou brunâtre, renfermant
souvent des fragments anguleux de craie , de manière à former
une espèce de brèche.
c. Sable blanc ou jaunâtre (environ 3 à 6 décimètres) subdivisé
généralement en de très minces couches à fausse stratification,
semblables à celles qui se forment sur les côtes par le brisement
des vagues.
d. Argile plastique bleue ou violacée, quelquefois d’une couleur
très foncée , épaisse de 3 à 6 mètres et non subdivisée en couches.
e. Couche de sable subordonnée.
f. Argile arénacée jaune ou ocracée, généralement plus remplie
de cailloux et de blocs que les couches précédentes ; l’épaisseur
de cette argile peut monter jusqu’à 12m,5, sans subdivisions.
g. Couches alternantes de sable, de gravier et de cailloux roulés,
semblables à celles qui se forment sur les côtes, et qui se déposent
encore aujourd’hui au pied de l’escarpement, sur le sommet du-
quel ces couches se trouvent élevées à la hauteur de plus de
125 mètres; l’épaisseur atteint 19 mètres. — L’épaisseur totale de
ces couches tertiaires varie de 9 à 28 mètres; l’épaisseur des
simples couches est aussi très variable, de manière que la même
couche est tantôt très mince, tantôt très épaisse, ce qui arrive gé-
néralement aux dépens des autres couches. Par les caractères de
stratification qu’offrent les couches de sable, tant inférieures (c)
que supérieures (g), on ne peut pas douter que ces couches aient
été déposées dans des profondeurs peu considérables, ce qui coïn-
cide bien avec la supposition ci-dessus exprimée d’un soulèvement
du fond de la mer vers la fin de l’époque crétacée.
Les dépôts tertiaires reposent en stratification concordante sur
la craie , et ont participé de toutes les révolutions de celle-ci ;
même dans les endroits où les couches de la craie sont plissées et
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
537
bouleversées de la manière la plus extraordinaire, on voit les
couches tertiaires suivre parallèlement la surface de la craie , et
en imiter tous les mouvements. C’est spécialement la couche de
sable inférieur (e) qui est d’une grande utilité pour établir ce fait
important , et qui montre les courbures en surplomb les plus sin-
gulières, et en général les couches inférieures sont naturellement
plus affectées par ces révolutions que les couches supérieures ; mais
même ces couches incohérentes de sable et de cailloux se voient
en beaucoup d’endroits redressées, plissées et coupées par des
failles d’une netteté étonnante. De cette conformité des couches
tertiaires et crétacées on voit que les révolutions dont ces terrains
sont affectés ne sont survenues qu’après le dépôt des couches su-
périeures.
Or les dépôts tertiaires de Moen , ainsi que du Danemark en
général , ont un aspect très moderne. Malheureusement on n’y
trouve que très rarement des fossiles : ainsi , dans l’île de Môen ,
ce n’est que dans une seule localité que j’ai pu ramasser des débris
de coquilles dans la couche de sable inférieure (c) ; parmi ces débris
peu reconnaissables était la Tellina solidula. Ces mêmes couches
d’argile et de sable recouvrent la plus grande partie de la surface
du Danemark , et ont été examinées avec soin par le professeur
Forchhammer; en d’autres endroits il y a trouvé des fossiles plus
parfaits, qui lui font regarder ces dépôts comme appartenant au
newer pliocène de M. Lyell. Ces couches doivent donc probable-
ment être rangées à côté de celles d’Angleterre décrites par
M. Forbes (1) comme glaciales , et regardées par ce naturaliste
comme contemporaines des dépôts pliocènes de la Sicile. On voit
donc que les révolutions survenues dans l’île de Moen sont de la
date la plus moderne , on pourrait presque dire de l’époque ac-
tuelle, puisque les conditions physiques et climatériques, sous les-
quelles les dépôts supérieurs d’argile et de sable ont été formés, se
sont probablement continuées longtemps encore après l’époque des
révolutions , et puisque ces couches se distinguent à peine de celles
déposées aujourd’hui dans la mer voisine.
III. Blocs erratiques.
C’est ici le lieu de parler des cailloux roulés et des blocs
erratiques dispersés dans les couches glaciales et à leur surface.
(1) Memoirs of the geological survey of Great B ri tain , vol. I,
p. 336.
538
SÉANCE DU 46 JUIN 1851.
Ces débris ne se trouvent jamais dans la craie blanche de Moen ,
tandis que toutes les couches glaciales en sont remplies ; toute-
fois ils paraissent devenir plus nombreux et d’une grandeur
plus considérable dans les couches supérieures, et les très gros
blocs se trouvent presque toujours sur la surface même. Ces blocs
superficiels ont presque tous des angles plus ou moins prononcés ,
pendant qu’une de leurs faces est généralement plus lisse , ou quel-
quefois polie et striée; même sur de très petits blocs, dans l’in-
térieur des couches, j'ai eu lieu d’observer ces accidents. Evidem-
ment les surfaces polies et striées de ces blocs appartiennent
au phénomène si étendu dans la Scandinavie, et connu sous le
nom de stries diluviennes ; la composition minéralogique des blocs
et des cailloux ne laisse pas non plus de doute sur l’origine Scan-
dinave de la plupart d’entre eux. Je crois qu’il est aujourd’hui
généralement reconnu que les phénomènes erratiques de la Scan-
dinavie ne ^peuvent pas être expliqués par le moyen des glaciers,
mais qu’il faut pour cela recourir aux glaces flottantes, qui encore
aujourd’hui , sur les côtes de la Baltique, transportent de grands
blocs d’un lieu à un autre. Quant aux roches striées, il n’y a pas
de doute que des glaçons chargés de pierres , et mis en mouve-
ment par les vagues se brisant contre les écueils de la côte, peuvent
polir et strier la surface de ces rochers, ainsi qu’il a été observé
sur les côtes de la Suède par M. Forchhammer (1).
Il y a présentement une remarque importante à faire sur les
grands blocs superficiels; c’est qu’ils se trouvent ordinairement
groupes (2) d’une certaine manière sur les sommets des collines,
ou sur un de leurs flancs , ou bien aussi d’un côté des vallées et
point de l’autre , et qu’en général ces blocs sont beaucoup plus
nombreux dans les parties élevées de l’île que dans les terrains
bas. Ce groupement des blocs erratiques me fait penser que la
plupart d’entre eux ont été transportés à leurs places actuelles
après les révolutions dont les collines de Moen sont le produit.
Ainsi le transport de ces grands blocs de la Scandinavie coïncide-
rait bien avec l’époque du transport des blocs erratiques des Alpes,
qui, autant que je sache, reposent en quelques lieux en discor-
dance sur les couches diluviennes, dépôts, sans doute, contempo-
rains des couches glaciales du Danemark. J’ai déjà remarqué que
(1) Poggendorffs Annale n , vol. LVIII, p. 609.
(2) Dans la Suède on remarque, selon Murchison, la même distri-
bution des blocs erratiques qui se trouvent groupés sur les sommets des
Osai*. ( Geological proceedlngs , 4 846, II, p. 349.)
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
639
les couches glaciales de File de Moen paraissent avoir été déposées
à une profondeur peu considérable ; on pourrait donc penser que
les révolutions qu’ont subies ces couches devraient nécessairement
les avoir élevées au-dessus de la mer. Mais je crois que le boule-
versement des couches glaciales et crétacées a été principalement
causé par un affaissement du fond environnant de la mer, de ma-
nière que la profondeur de celle-ci, dans les parties les plus affais-
sées, est devenue égale à la hauteur actuelle des sommets de File
de Moen au-dessus du fond de la mer Baltique , c’est-à-dire d’en-
viron 190 mètres. On comprend, de cette manière, pourquoi les
blocs erratiques deviennent plus volumineux après cette cata-^
strophe, puisque la profondeur plus-considérable de la mer per-
mettait le passage de plus grandes montagnes de glace, qui,
échouant sur les sommets et sur les flancs des collines sous-marines
de Moen, y déposaient par groupes leur fardeau de blocs; aussi
les révolutions de .oen devaient-eiles être accompagnées de se-
cousses violentes des montagnes Scandinaves, par lesquelles beau-
coup de blocs ont été détachés pour être plus tard transportés par
les glaçons.
IV. Disposition relative des terrains.
Je parlerai à présent plus spécialement de la disposition des
couches de File de Moen et des bouleversements extraordinaires
qu’on peut observer dans l’escarpement oriental de l’île , accidents
qui sont d’autant plus remarquables que l’escarpement voisin de
Stevens n’en montre pas la moindre trace. Ce dernier présente
l’aspect monotone et la surface plane commune aux falaises de
craie en général, tandis que l’escarpement de Moen , découpé par
des ravins nombreux et étroits , taillé en des pics et des crêtes ,
surmonté de collines fortement ondulées et couvertes par de
magnifiques bois de hêtres, donne au géologue, regardant même
de loin ce beau promontoire, l’idée des révolutions qu’il ne tardera
pas à reconnaître en examinant de plus près.
La coupe ci-jointe (pl. IX) donnera une idée approximative de
la disposition des terrains qu’on observe dans l’escarpement de
Moens-Klint. Cette coupe, dressée sur la même échelle pour les
hauteurs et les longueurs, est en beaucoup de lieux une copie fidèle
delà nature , tandis que dans d’autres lieux elle est plus idéale,
mais toutefois fondée sur de nombreuses observations. La direction
générale de la coupe est du S. au N., parallèlement à la direction
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
540
de l’ escarpement ; seulement aux nos XVïIet XX 111 -XX la direc-
tion de la coupe est changée en celle de S.-E. — N. -O., pour
mieux montrer la disposition des couches.
L’escarpement de Moens-Klint a une longueur d’environ
18000 mètres. Sur cette étendue ce n’est qu’aux deux extrémités
qu’on voit le terrain crétacé couvert par le terrain glaciaire, dans
une position à peu près horizontale. Dans l’espace intermédiaire
on voit les couches redressées , courbées et plissées de toutes les
manières, en S, en Z, en demi-cercle ou en fer-à-cheval , ou bien
coupées par des fentes accompagnées de failles énormes, et entre-
lacées de la manière la plus singulière. C’est vers le milieu de
l’escarpement, à l’endroit appelé Dronningestol , que la confusion
atteint son maximum, et qu’on trouve la plus grande hauteur
(120 mètres). Après ces remarques, on comprendra que Y inclinai-
son des couches soit très variable; elle change d’un pointa un
autre, et passe souvent subitement de la position horizontale à la
verticale ; et ce qu’il est important de remarquer, c’est que géné-
ralement les couches sont moins inclinées ou presque horizontales
au sommet de l’escarpement, tandis que la pente augmente tou-
jours avec la profondeur, de manière que la même couche se
montre horizontale au haut , et verticale ou courbée en surplomb
en bas.
Ces plissements des couches crétacées et glaciaires , ces failles
coupant ces terrains de haut en bas ont contribué puissamment à
produire la surface fortement ondulée de la partie orientale de
Moen , comme on le voit clairement dans les nombreux ravins
qui sillonnent l’escarpement. Ces ravins dépendent, en effet, tous
de la disposition des couches, et peuvent être divisés en deux
groupes : les ravins de plissement et ceux de déchirement. Les ra-
vins de plissement (voir la coupe , n"s III, Y, VI, IX, XI, XVII)
ont les couches des deux côtés inclinées vers le fond du ravin ; on
voit, dans ces ravins, les couches d’argile et de sable se courber
des deux côtés , de haut en bas , parallèlement à la surface des
montagnes de craie entre lesquelles le ravin est creusé ; on voit la
pente toujours augmenter vers le fond, et souvent dépasser la
verticale , de manière qu’une partie de la craie est en surplomb ,
et repose sur les couches glaciaires , mais toujours en stratification
concordante. Dans les ravins de déchirement (voir la coupe,
nos I, II, IY, VU, VIII, X, XII, XIII, XIY, XVIII, XIX, XX),
c’est d’un côté seulement que les couches glaciaires sont parallèles
à la craie ; du côté opposé , ces couches sont brusquement coupées
SÉANCE DU Î6 JUIN 1851.
541
par une faille, et plongent souvent au-dessous de la craie, qui repose
ainsi sur ces dépôts modernes , mais en stratification discordante .
Ces failles ne sont pas toujours faciles à reconnaître , puisqu’en
beaucoup de lieux elles sont presque parallèles aux couches, surtout
là ou celles-ci sont fortement inclinées ; par l’effet de ces failles
on voit des couches d’argile et de sable intercalées dans la craie
comme des filons (voir la coupe, au Bronningestol et au n° XXI) ;
souvent les couches redressées, tant au-dessous qu’au-dessus de la
couche intercalée, semblent être parallèles à celle-ci; et, sans uu
examen minutieux, on serait porté à croire qu’en effet l’argile et le
sable alternaient , même à plusieurs reprises , avec la craie (voir la
coupe n° XVI1X-XX). En examinant de plus près on trouve que,
sur la ligne de faille, la craie reposant sur l’argile est bréchiforme,
remplie de fragments anguleux de silex , et entremêlée d’argile
avec des cailloux de granité roulés, constitue, enfin, une véritable
brèche de frottement. Aussi on voit souvent que les extrémités des
couclies , sur les deux côtés de la faille , sont courbées en sens op-
posé le long de celle-ci , montrant ainsi clairement la direction
du mouvement qui a eu lieu, accident qui s’observe en quelques
ravins sur une très grande échelle (coupe nos X, XIX, etc.), et
qui affecte surtout les couches supérieures de la craie , ce qui
prouve qu’à l’époque du mouvement ces couches étaient dans un
état plus mou que les couches inférieures.
Il reste maintenant à parler de la direction des couches et de
l’influence quelle exerce sur la configuration de la surface de l’île.
En premier lieu, je dois faire remarquer que la direction des couches
est presque aussi variable que leur pente , et qu’on trouve souvent
des passages d’une direction à une autre , souvent aussi des en-
trecroisements de diverses directions , de manière que la disposi-
tion des couches est également irrégulière dans le sens horizontal
et dans le sens vertical. Malgré cette irrégularité, on peut pour-
tant, dans cette petite île et spécialement dans sa partie orientale,
distinguer plusieurs directions prédominantes, qui s’observent eri
partie dans la coupe horizontale des couches de craie et de silex,
que l’action des vagues a produite au pied de l’escarpement orien-
tal, en partie dans les ravins et les crêtes de ce même escarpement,
ainsi que dans l’étendue des vallées et des collines de l’intérieur,
et dans la forme générale de l’île et des eaux qui l’environnent.
Les collines de la partie la plus élevée de L’île de Moen sont sou-
vent d’une pente très forte et de formes très prononcées, et elles
sont séparées par des enfoncements très profonds , ce qui fait
d’abord présumer que, quoique la surface de l’île soit en gé-
5 Üâ SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
péral de sable et d’argile , elle n’est pas le produit de l’actioii des
courants d’eau , mais des soulèvements et des affaissements du sol.
Ce qui vient à confirmer cette opinion, ce sont les nombreux éboule -
menls qui se trouvent en partie alignés au fond des vallées longi-
tudinales, en partie dispersés sur la surface du terrain, sans ordre
apparent; mais, en examinant de plus près, on trouve que ces
éboulements, dont la profondeur varie de lm,5 à 9m,à, sont tous
disposés sur certaines lignes plus ou moins droites et parallèles
entre elles : ainsi on ne peut plus douter que ces lignes d’éboule-
ments n’indiquent les directions des plissements des couches ou des
failles. Ces mêmes directions observées dans l’île de Moen se re-
trouvent aussi dans beaucoup d’autres parties du Danemark , et
dans la forme et l’étendue des détroits et des fjords de ce pays ; par
l’examen de l’île de Moen, je me suis convaincu qu’en général les
formes superficielles du Danemark dépendent beaucoup plus du
gisement des couches et des révolutions qu’elles ont subies qu’on
n’aurait pensé dans un pays presque partout formé d’argile et de
sable , terrains dont on est trop porté à attribuer la disposition à
l’action exclusive de l’eau ; du reste, je ne doute pas que les bou-
leversements du fond de la mer Glaciale aient produit de violents
courants, qui ont aussi contribué à donner à la surface du Dane-
mark sa conformation actuelle.
Avant d’indiquer les diverses directions que j’ai observées dans
File de Moen, je ferai remarquer que, selon toute apparence, elles
appartiennent toutes à la même époque géologique, c’est-à-dire à
l'époque post-glaciale, et qu’elles sont probablement presque
contemporaines. Mais, par la manière dont ces directions s’entre-
croisent, et par les traces plus ou moins effacées qu’elles ont lais-
sées sur la surface, on peut néanmoins distinguer l’âge relatif de
ces directions; il est naturel de supposer que des bouleversements
aussi violents ne sont pas le produit d’un mouvement instantané,
mais de convulsions réitérées pendant une série d’années. Déplus,
je ferai observer que, outre les directions principales, on trouve
de nombreuses traces de directions secondaires, qui sont à peu près
perpendiculaires aux premières : ces dernières se remarquent sur-
tout dans certains enfoncements et lignes d’éboulements, cjui croi-
sent les directions principales , mais deviennent quelquefois pré-
dominantes.
Voici les directions principales et secondaires, en commençant
par celles qui me paraissent relativement les plus anciennes :
1° E.-S.-E. — O.-N.-O. est la direction prédominante de l’île,
et détermine l’étendue de sa moitié orientale, tandis qu’une direc-
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
548
tion S. -S. -O. — N.-N.-E., presque perpendiculaire à la première,
prédomine dans sa moitié occidentale. La première direction est
aussi celle des soulèvements granitiques de la Seanie, ce qui a
fait penser à M. Forchhammer que des chaînons granitiques se
continuant sous le sol du Danemark avaient déterminé cette di-
rection de notre craie.
2° S.-S.-E. — N. -N. -O. est la direction prédominante de la
partie N.-E. de Lîle : c’est la direction de sa cime la plus élevée ,
le Aborrebjerg (làl mètres). Cette direction (environ N. 29° O.)
ne diffère que peu de celle du mont Te n arc, qui, selon M. Elie de
Beaumont, a été soulevée après le diluvium, époque qui, à mon
avis, coïnciderait bien avec les révolutions de File de Moen.
Comme direction secondaire et contemporaine à celle-ci, je re-
garde celle de E.-N.-E. — O. -S. -O., sur laquelle de très nombreux
éboulements sont alignés, et qui , s’entrecroisant avec la direction
principale, produit sur un endroit de l’escarpement oriental un
promontoire très abrupte. Ce promontoire (le Taler ) doit son ori-
gine à une courbure très brusque des couches de la direction
N.-N.-O. à celle de E.-N.-E., et est divisé en trois pics par trois
failles de la dernière direction, failles énormes qui produisent
dans ce lieu une étrange confusion des couches crétacées et gla-
ciaires , dont les premières reposent en grande partie sur les der-
nières (voir la coupe, nos XVIil-XX).
3° S. -N. est la direction d’un enfoncement très marqué qui
sépare la partie orientale de File de la partie occidentale, et qui,
même après que la contrée eut été peuplée, a été couverte par la
mer. Elle est aussi la direction générale de l’escarpement oriental,
ainsi que de la péninsule de Jutland, des Belts et du Sund; ces
derniers détroits paraissent être d’une date très moderne ; au moins
on trouve dans les mythes Scandinaves des traces obscures d’une
catastrophe qui aurait séparé i îie de Séiande de la Seanie. Per-
pendiculairement à cette direction on trouve , dans la partie orien-
tale-de Moen, des enfoncements très profonds de FE. à FO., qui
divisent la seconde cime de File, le Kongsbjerg , en trois sommets
escarpés.
J’ai déjà fait remarquer qu’on trouve quelquefois des passages
d’une de ces directions à une autre. On observe un tel passage en
suivant l’escarpement oriental du S au X..; d’abord, dans la partie
méridionale , la direction des couches et des failles est celle de
E.-S.-E. — O.-N.-O.; puis, sous le Dronningestol, il y a une
étrange confusion des directions se croisant les unes les autres :
c’est la direction Sc-S.-E.— N.-N.-O. qui commence à paraître.
SÉANCE DU 16 JUIN 1851.
5M
Plus vers le N., il y a un intervalle (nos XV-XYI) où la craie
disparaît sous les couches glaciaires; mais dans le Hylledals-
Klint elle paraît de nouveau plissée d’une manière extraordinaire
(n°XViI); elle prend ici la direction S. -N., qui, au promon-
toire du Taler, se change brusquement en O.-S.-O. — E.-N.-E.
Plus au N. on retrouve la direction de S.-S.-E. — N.-N.--0. , pré-
dominante dans cette partie de l’île ; ici la craie disparaît de
nouveau sous les argiles et les sables (n° XXII de la coupe), pour
ne plus se montrer que sur un seul endroit de la côte septen-
trionale de l’île.
Les bouleversements des couches de l’île de Moen me paraissent
être produits par une pression latérale très violente. Cette pression
latérale est, sans doute, l’effet du refroidissement et de la con-
traction générale de l’écorce du globe. Or cette contraction ne
pourrait pas s’effectuer sans l’affaissement de certaines parties de
l’écorce , pendant qu’au même temps d’autres parties sont soule-
vées ou restent dans leurs places , ce qui produit le même effet rela-
tivement aux parties affaissées. J’ai fait remarquer plus haut que
les couches de Moen sont généralement horizontales ou peu incli-
nées en haut, mais qu’elles deviennent de plus en plus inclinées
vers le bas, disposition que je regarde comme une preuve que
ce sont les parties basses qui se sont affaissées , et non pas les par-
ties hautes qui se sont soulevées. Pour cette raison , je suppose
que les révolutions de Moen ont principalement consisté en un
affaissement du fond de la mer environnante, accident par lequel
les parties le moins affaissées devaient former des collines sous-
marines. Cette catastrophe a, sans doute, été suivie par une éléva-
tion continentale lente, dont le soulèvement actuel de la Scandi-
navie n’est que la continuation. Par ce soulèvement, les collines
de Moen, ainsi que celles du Danemark en général, émergèrent
peu à peu du sein de la mer, couverte alors par des glaçons char-
gés de blocs erratiques. A cette époque , je crois que l’escarpement
de Moens-Klint a été taillé dans la craie, offrant toujours de nou-
veaux points d’attaque aux vagues provenant de la Baltique, alors
unie par le golfe de Bothnie à l’océan Arctique; mais vers la fin
de cette époque l’action des vagues paraît être devenue insuffisante
pour pénétrer dans la craie aussi loin qu’ auparavant , affaiblis-
sement qu’on doit peut-être attribuer à la séparation de la mer
Baltique et de l’océan Arctique. Cet affaiblissement de l’action
des vagues a, selon moi, produit le talus de craie in situ se trou-
vant au pied des murs escarpés et taillés à pic qui forment le som-
met de l’escarpement.
LM. Kaeppeïin ,« Riris .
RÉUNION EXTRAORDINAIRE
A DIJON (çôte-d’or) ,
Du 14 au 18 septembre 1851.
Séance du 14 septembre .
A midi, les membres de la réunion se sont rendus à la Fa-
culté des sciences, où un vaste amphithéâtre a été mis à leur
disposition. Ils ont été reçus par M. le recteur et M. le doyen
de la Faculté.
A une heure, M. Constant Prévost, en sa qualité de prési-
dent de la Société géologique, ouvre la séance. Les membres
de la Société présents â la réunion sont au nombre de 27. Ce
sont :
MM.
Bachelier ,
Beaudoin ,
Bertrand-Geslin ,
Canat,
Christol (de) ,
CoLLOMB ,
COTTEAU ,
Desplaces de Charmasse ,
Dumortier ,
Féry ,
Four ,
Gaudry (Albert),
Lory,
Michelin ,
MM.
Moreau (d’Avallon),
Pidancet ,
Prévost (Constant) ,
Rathier,
Raulin ,
Renoir ,
Royer (Ernest) ,
Sæmann ,
Saint-Père ,
Studer ,
Transon ,
Verneuil (de),
Yiquesnel.
Aux membres de la Société s’est joint un grand nombre de
personnes qui ont pris une part active aux courses et aux
discussions. On peut citer :
MM.
Ambly (d7) , ingénieur des mines ;
Brangé , conducteur des ponts et
chaussées ;
MM.
Brullé, professeur à la Faculté des
sciences de Dijon ;
Drouot , ingénieur en chef des
min6s;
Soc . géol.y 2e série , tome VIII.
35
REUNION- EXTRAORDINAIRE A DIJON
546
Dudrumel , maître de pension ;
Lavalle , docteur ès sciences, di-
recteur du jardin botanique de
Dijon ;
Lucan , docteur médecin ;
Nodot, directeur du Musée d’his-
toire naturelle de Dijon ;
Perrey, professeur à la même Fa-
culté;
Ritter , ingénieur des ponts et
chaussées ;
Royer fils.
Ruelle , ingénieur des ponts et
chaussées ;
Tournouer , garde-mines ;
Vallot, professeur en retraite de
la même Faculté.
M. Constant Prévost annonce l’organisation qui doit être
faite d’un bureau pour la session extraordinaire. On procède à
l’élection.
Sont nommés : Président , M. Studer-,
Vice -président , M. Michelin-,
Secrétaire , M. de Christol^
Vice- secrétaire , M. Cotte au.
M. Studer monte au fauteuil et adresse à la Société ses
remercîments : il accepte l’honneur de présider la session
comme un témoignage du désir que la Société géologique de
France a toujours manifesté de resserrer ses lufns de confra-
ternité avec les membres des divers pays de l’Europe.
Sont présentés comme membres de la Société :
MM.
Boutiot, greffier au tribunal civil de Troyes (Aube), pré-
senté par MM. Clément Mullet et Michelin ;
Brangé , conducteur des ponts et chaussées, à Dijon, pré-
senté par MM. de Verneuil et de Christol -,
Lavalle, docteur ês sciences, directeur du jardin botanique
à Dijon, présenté par MM. de Christol et de Verneuil -,
Louvet, maître de pension , à Bemalard (Orne), présenté
par MM. Bachelier et Sæmann ;
Le docteur Maissiat , professeur agrégé à la Faculté de mé-
decine, à Paris, présenté par MM. Michelin et Constant Prévost \
Pênuelas (Lino), ingénieur des mines, à Carthagène (Es-
pagne) , présenté par MM. Paillette et de Verneuil \
Eugène Peron , conservateur du Cabinet d’histoire naturelle,
à Gray (Haute-Saône), présenté par MM. Four et Renoir.
DU î h AU 18 SEPTEMBRE 1851. 5Z|7
M. de Ghristol propose d’adopter pour les courses géologiques
le plan suivant :
La Société pourra diviser ses excursions en deux catégories :
1° les excursions dans la montagne, qui feront connaître les
terrains le plus anciennement formés aux environs de Dijon \
2° les excursions dans la plaine , qui feront voir la série ooli-
tique supérieure , le terrain crétacé et le terrain tertiaire.
Le premier jour, la Société se transportera à Malain ; de
Malain, elle ira voir le gneiss et le grès de Beaume-la-Roche ,
objet de nombreuses contestations -, à l’entrée du souterrain de
Blaisy, elle passera en revue les marnes irisées, les couches à
Gryphées et le calcaire à Entroques.
Le deuxième jour, la Société pourra se rendre à Plombières
et de lâ à Velard ; dans cette course elle verra la série des assises
oolitiques, superposées au calcaire à Entroques, et comprenant
l’oolite inférieure, la grande oolite et l’oxford-clay inférieur.
Le troisième jour, la Société visitera les environs d’Is-sur-
Tille ^ dans cette excursion, elle verra l’oxford-clay supérieur,
le coral-rag et un calcaire marneux qui, selon quelques géolo-
gues, appartient au kimmeridge.
Enfin , le quatrième jour sera consacré â parcourir la
plaine j on rencontrera les couches kimméridiennes et port-
landiennes, une assise douteuse rapportée, par M. Pàyen, au
néocomien, le terrain crétacé à Inocérames, et le terrain ter-
tiaire moyen , riche en minerai de fer.
Cet ordre d’excursions est approuvé par la Société.
M. de Ghristol dépose sur le bureau des exemplaires de la
Géologie de la Côte-d'Or , publiée en 1838 par M. Payen.
Le Comité central d’agriculture de la Côte-d’Or a fait nouvelle-
ment réimprimer ce travail, et il a chargé M. de Ghristol d’en
faire distribuer des exemplaires aux membres de la réunion,
La Société vote des remercîments au Comité d’agriculture.
M. Ganat fait la communication suivante :
Dans le département de Saône-et-Loire , en avant de la bordure
de montagnes jurassiques qu’on appelle la côte châlonnaise , et
qui est une continuation de la Côte-d’Or, il existe un terrain corn-
hllS RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
posé cle sables rouges agglutinés , avec silex , qui n’a été signalé
par aucun géologue , quoique son développement assez considé-
rable, ses rapports avec les autres terrains et ses fossiles le rendent
très digne d’attention. Je suis porté à le considérer comme un
représentant de la série crétacée dans notre pays , où des forma-
tions de cette époque n’avaient point encore été indiquées.
Des lambeaux de ce terrain sont disséminés tout le long de la
côte châlonnaise. Je l’ai reconnu près de la limite N. du départe-
ment, au S. de Rully : là il est recouvert par le terrain tertiaire de
la plaine , et n’est visible que dans des excavations. Il paraît se
trouver à Mellecey et à Germolles. On le voit bien à Rosey, au
lieu dit les Marquerons , où il est traversé par la route, et occupe
une étendue de 1 hectare seulement. Il est très développé depuis
Buxy jusqu’à Saint-Gengoux.
La cause de ce plus grand développement peut tenir à une par-
ticularité que présente cette partie de la côte chalonnaise, appelée
la côte de Buxy : les couches jurassiques, au lieu d’être inclinées à
l’E., vers la plaine, comme dans la Côte-d’Or et dans la première
partie de la côte chalonnaise , y sont renversées vers l’intérieur de
la chaîne , et les premières couches que l’on rencontre en abordant
la montagne sont les marnes irisées et le lias : cet effet peut être
dû à des dislocations plus récentes que celles qui ont produit le
relief de la Côte-d’Or ; les pointements de granité de Bissey, Culles
et Saint-Gengoux, voisins de la plaine, sont liés à cet accident.
En longeant la côte du N. au S., à partir de Buxy, on voit sur
la gauche une série de collines formées par ce terrain à silex ; elles
sont élevées de 60 à 70 mètres au-dessus du dépôt tertiaire de la
plaine, qui s’étend horizontalement à leur pied , et vient s’inter-
poser entre elles et la côte jurassique. Le village de Jully est bâti
sur l’une de ces collines. Plus loin elles se rapprochent de la côte,
et le terrain à silex se superpose aux calcaires jurassiques dans les
environs de Chenoves, Saint-Boil et Culles. Il surmonte le massif
situé au N. de Saint-Gengoux, et y atteint une hauteur d’au moins
370 mètres au-dessus de la mer, ou de 150 mètres au-dessus de la
plaine ; les silex ruissellent du haut des escarpements jurassiques.
Il revêt ensuite le vaste amphithéâtre de montagnes au centre du-
quel est la ville de Saint-Gengoux ; il monte à 320 mètres sous le
château de la Rochette. Il se prolonge dans la direction de Saint-
Martin-de-Croix , où je ne l’ai pas suivi. On le trouve dans la val-
lée de la Guye , située en arrière de la côte.
Il existe encore auprès de Tournus, dans le vallon de la Na-
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851. 5 Z| 9
touse, en avant de Dulphey et de Vers, sur une étendue de 1 ou
2 kilomètres ; on le voit bien dans une sablonnière placée près de
la route de Saint-Gengoux , et dans une excavation située plus
au N. Il s’élève à 60 ou 70 mètres au-dessus de la plaine, et repose
sur les couches jurassiques.
Partout où des coupures récentes permettent d’observer la na-
ture du terrain , on le voit sous forme d’un sable ferrugineux très
rouge, cohérent, homogène, massif; la stratification est indis-
tincte. Les silex qu’il contient sont de forme et de dimensions va-
riées; ils sont disséminés sans ordre dans la masse , ou disposés par
amas irréguliers comme des filons obliques. Ils affectent parfois
les figures bizarres des priapolites. Leur surface est tantôt arrondie,
tantôt rugueuse, avec des inégalités, des saillies, ou bien elle pré-
sente des faces planes et des arêtes vives. Leur pâte est translucide,
avec une enveloppe corticale opaque. Us sont souvent fragmen-
taires, ce qui est dû sans doute aux influences atmosphériques;
car leurs cassures paraissent quelquefois extrêmement récentes ,
comme si elles étaient produites journellement. Ils se présentent
dans quelques endroits en masses considérables , par exemple à
Saint-Boil et aux Filetières , où l’on voit des blocs anguleux d’un
mètre cube ; leur structure n’est pas celle d’une brèche ou d’un
conglomérat ; elle est conditionnée.
Les fossiles de ce terrain sont rares ; je n’en ai trouvé qu’un
seul, engagé dans un silex, près des Filetières; j’en dois quelques
autres aux persévérantes recherches qu’un amateur zélé, M. Henri
Batault, a faites au Mousseau , commune de Saint-Boil. Ce sont
des Spatangues ( Spata/igus cor-anguinum ), des Inocérames ( Inoce -
ramus Lamarkii ?), et un autre fossile non déterminé.
Cet exposé est le résultat d’une exploration incomplète faite il y
a trois ans; je me propose de reprendre cette étude interrompue.
M. Pidancet demande comment ce terrain a été considéré par
M. Manès , l’auteur de la carte géologique du département de
Saône-et-Loire.
M. Canat répond qu’il paraît avoir été mal connu deM. Ma-
riés ; qu’il est colorié sur sa carte comme tertiaire, là où il est en
rapport avec le terrain de la plaine, et comme jurassique, là où
il repose sur les couches oolitiques.
M. Constant Prévost fait observer que l’existence de fossiles
de la craie dans le terrain dont il est question ne suppose pas
nécessairement qu’il appartienne aux formations secondaires ;
550 RÉUNION EXTRAORDINAIRE À DIJON ,
ii est possible que ce ne soit qu’on dépôt tertiaire formé par la
destruction d’un terrain de craie, il a visité récemment, dans
File de Wight , un terrain de sable ferrugineux, avec silex et
fossiles crétacés, qui repose horizontalement sur des couches
verticales de craie. Les silex paraissent peu roulés. Nul doute
que ce sable ferrugineux de File de Wight ne soit tertiaire. S’il
en était de même de celui observé par M. Canal, le rapproche-
ment à faire entre ces deux terrains supposés analogues offrirait
de l’intérêt.
M. Canat répond que les silex du terrain qu’il a décrit ne pa-
raissent nullement roulés.
M. de Charmasse rappelle que, lors de sa réunion à Autun,
et dans son excursion à la montagne de Drevin, la Société
géologique a reconnu des silex avec fossiles de la craie, empâtés
dans le basalte , à 500 mètres au-dessus du niveau de la mer.
Un membre demande à quel étage du terrain tertiaire ap-
partiennent les couches qui entourent horizontalement les colli-
nes du terrain à silex.
M. Canat répond que ce terrain est celui de la Bresse, consi-
déré par les uns comme tertiaire supérieur , et par d’autres
comme plus récent ou comme quaternaire. Il y a trouvé, près de
Chàlon, des coquilles fluviatiles, examinées par M. d’Archiac, et
reconnues par lui identiques avec des espèces vivantes. Les tra-
vaux du chemin de fer ont fait découvrir dans le même terrain,
notamment prés de Chagny, des ossements d’éléphants, dé
bœufs, de chevaux, de rhinocéros, etc. On lui a apporté, prove-
nant de la tranchée de Corcelles , un morceau de dent de masto-
donte qui a été déterminé par M. Pomel. Les restes de masto-
dontes qu’on trouve dans le terrain de la Bresse sont rares com-
parativement aux restes d’éléphants : suivant M. Pomel ils y
seraient accidentels et proviendraient d’un terrain plus ancien.
M. de Christol dit qu’on trouve des dents de mastodonte dans
le minerai de fer pisiforme du terrain tertiaire de la plaine, aux
environs de Dijon, et qu’il avait considéré ce minerai comme
plus ancien que les argiles et les sables de la surface.
M. Canat objecte que le fer pisiforme se trouve partout dans
les couches les plus superficielles et les plus récentes aux envi-
rons de Châlon.
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
551
Après la séance, la Société se rend à l’Arquebuse, pour
examiner le jardin botanique confié aux soins de M. le profes-
seur Layalle , et le musée municipal d’histoire naturelle dont
M. Nodot est le directeur.
Les membres de la Société admirent particulièrement la
magnifique suite de fossiles du terrain secondaire rassemblés
par M. Nodot. M. Nodot montre plusieurs ossements de la
grotte de Fouvent (Haute-Saône), marqués par des traces
évidentes de dents d’Hyènes 5 il tire de ce fait la conclusion que
les Hyènes ont accumulé ces ossements dans les cavernes.
M. Beaudoin rappelle qu’il a signalé depuis longtemps une
caverne à ossements du Châtillonnais , renfermant des osse-
ments d’Ours, sans traces de débris d’Hyènes. « On ne peut
)> donc, ajoute M. Beaudoin , attribuer à des Hyènes l’accumu-
» lation des os dans cette caverne. »
M. de Christol fait observer qu’on ne saurait révoquer en
doute que beaucoup d’ossements arent été rongés par des Hyènes.
Les ossements de la grotte de Fouvent, mais surtout ceux des
cavernes de Lunel-Viel (Hérault) en sont des preuves évidentes.
De l’absence des débris d’Hyènes dans certaines cavernes , on
ne peut conclure que dans d’autres cavernes les ossements
n’aient point été apportés par ces animaux. Comme l’a expli-
qué M. Buckland , les accumulations des ossements dans les
cavernes ont été dues à plusieurs causes différentes.
Séance du 15 septembre.
La séance est ouverte à huit heures du soir sous la prési-
dence de M. Studer.
M. le secrétaire étant indisposé, M. Nodot, sur la prière
de M. le président, donne le compte rendu de l’excursion
faite dans la journée, à Plombières et à Yeîard. Ce compte
rendu ne sera transcrit que dans le procès-verbal de la prochaine
séance, à la suite du compte rendu de la course à Beaume-
Îa-Roche. Cette interversion a été adoptée parce que les
couches de Plombières étant moins anciennes que celles de
552
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
Beaume-la-Roche, il faut, pour se conformer à l’ordre géolo-
gique, commencer par la description de cette dernière localité.
M. Nodot lit la note suivante :
Note sur les causes de la perforation des calcaires de la
formation jurassique , parM. L. Nodot, directeur du Musée
d’histoire naturelle de Dijon.
Les cavités des pierres, qui ne proviennent pas des perforations
produites par des Pholades ou de la disparition des corps organisés
qu’elles contenaient, ont existé dès la formation de la roche, au
moment même où les éléments qui la composent ont été préci-
pités au fond des eaux, soit sous forme de nappe homogène, soit
sous forme de globules oolitiques, soit enfin sous forme de masses
floconneuses.
Si l’on examine ce qui se passe, sous nos yeux, dans les lacs et
dans les sources qui déposent des travertins, des tufs calcaires, ou
des globules oolitiques, on aura bientôt la certitude que les choses
se passent comme elles ont du se passer au fond des mers, à l’épo-
que reculée des dépôts jurassiques. Conséquemment, s’il existe,
dans ces dépôts modernes, des cavités (irrégulières, affectant les
formes les plus variées, nous devons trouver les mêmes effets dans
les assises les plus anciennes qui ont eu une origine analogue.
Bancs compactes cl homogènes de la formation jurassique. —
Ces assises , assez homogènes dans leur composition , offrent une
solidité plus ou moins grande : ce sont des argiles, des marnes et
des calcaires. Dans ces deux premiers dépôts, il n’existe jamais de
vacuoles ou de tubulures vermiformes. Les corps organisés qui s’y
rencontrent sont généralement bien conservés, et les fissures qu’on
y observe sont évidemment le produit du retrait de la matière, ou
le résultat de la dislocation du sol.
Quant aux calcaires, qui seuls nous occupent en ce moment, ils
offrent un aspect bien différent, selon les assises que l’on considère.
Ils sont généralement très solides et très homogènes. Quelques uns,
comme certains bancs de la grande oolite, du calcaire schistoïde
de F oxford-clay (dans la Côte-d’Or du moins), ne présentent pas
de perforations tortueuses, pressées les unes contre les autres,
comme cela se voit dans le forest-marble et le portland-stone ; cepen-
dant ils sont tous plus ou moins fendillés en sens divers, par le
retrait de la masse, comme les argiles et les marnes ci-dessus
mentionnées. Celles de ces assises qui se trouvent le plus fendillées,
DU lk AU 18 SEPTEMBRE 1851.
558
comme le calcaire à Entroques, la grande oolite, le cornbrash et
le coral-rag, sont aussi le siège de quelques grottes, et aussi le plus
souvent traversées par des boyaux plus ou moins tortueux, par où
s’écoulent les eaux pluviales. En outre, les corps organisés fossiles
que ces roches renferment ne sont pas conservés; ils ont disparu,
laissant une cavité tapissée de chaux carbonatée cristalline ; quel-
quefois c’est de la silice qui a pris la place de ces fossiles ; d’autres
fois enfin, la cavité reste absolument vide : alors ce sont des nids
et non de véritables trous venniformes contournés en tous sens.
Calcaire ooli tique. — Les oolites présentent dans leur structure
un aspect très différent :
1° Quelquefois elles sont composées de couches concentriques,
avec ou sans corps organisés, au centre, faisant noyaux d’attrac-
tion ;
2° D’autres fois, elles sont compactes et très homogènes ; ce sont
de véritables masses floconneuses, d’un volume plus ou moins con-
sidérable.
Quand les oolites sont à couches concentriques, elles sont tou-
jours spliéroïdales , forme qui prouve qu’elles ont été ballottées en
divers sens, au sein d’une eau constamment agitée.
La pâte qui enveloppe les oolites diffère considérablement selon
les bancs que l’on observe ; quelquefois elle est marneuse, comme
dans la grande oolite ; d’autres fois elle est lamellaire, et les oolites
semblent soudées entre elles par un ciment cristallin, comme dans
le cornbrash, le çoral-rag, etc.
Si maintenant quelques corps gazeux se dégagent au moment où
se forme ce dépôt oolitique, les petits solides qui le composent, en
se précipitant, enveloppent quelquefois ces huiles d’air qui forment
alors des cavités plus ou moins étendues, dont les plus petites sont
bientôt remplies, en tout ou en partie, par des infiltrations de
chaux carbonatée spathique. C’est ce qui se voit fréquemment
dans le calcaire à Entroques, le cornbrash, dans l’oolite du coral-
rag, et aussi dans les calcaires pisiformes de l’époque actuelle.
Tous ces calcaires peuvent donc aussi renfermer des cavités plus
ou moins spacieuses, de vastes grottes, de boyaux tortueux, par
où s’écoulent les eaux pluviales ; mais cette multitude de tubulures
venniformes proprement dites, jamais. Ce seront encore des nids
rares, ou des places précédemment occupées par des corps orga-
nisés fossiles; mais il n’y aura pas, non plus, de ces tubulures cy-
lindriques, parallèles entre elles, et qui traversent verticalement
toute l’épaisseur des assises , comme cela se voit dans la plupart
des calcaires compactes d’eau douce de l’époque tertiaire , ces ca-
RÉ UNION EXTRAORDINAIRE A DIJON
554
'ôtés ayant été produites par le dégagement de gaz provenant de
la décomposition des végétaux entraînés au fond de la vase.
Calcaire floconneux . — Nous donnons ce nom minéralogique
aux calcaires qui , dans la formation jurassique , sont appelés
forest-marble et portla/icl-stone.
L’aspect de ces roches diffère beaucoup de celui de toutes les
assises que nous avons signalées plus haut. On a donné à quelques
parties de leur masse le nom de calcaire bréchiforme ; cette déno-
mination nous paraît vicieuse en ce que, ne s’appliquant pas à
toute l’étendue de la masse du dépôt, elle entraîne une idée
fausse.
Le forest-marble est ordinairement le siège des plus vastes
grottes ; en outre, il est traversé par une multitude innombrable
de boyaux tortueux , par lesquels les eaux pluviales s’écoulent
comme à travers un crible. Ce calcaire est extrêmement fendillé
en tous sens , soit naturellement par le retrait de la pâte , soit par
l’effet des gelées; c’est ce qui lui donne en général l’aspect d’un
vieux mur en ruine. Sa cassure est conchoïde ou esquilleuse, sa
pâte très compacte ; le plus souvent elle est translucide sur les bords,
quand on regarde à contre-jour des lames minces ou les vives
arêtes des échantillons. Sa couleur est généralement blanc jau-
nâtre, quelquefois rosée, très uniforme. Le plus souvent ce cal-
caire se trouve traversé par une infinité de taches brunes, rou-
geâtres, tortueuses, de formes très variées, nettement circonscrites
dans leur pourtour, confluentes et comme enchevêtrées les unes
dans les autres.
Ces taches sont souvent d’une consistance infiniment moins
grande que la pâte ambiante ; elles sont produites par un calcaire
marneux, pénétré d’une quantité très variable d’oxyde de fer.
Quelquefois cette substance est remplacée par de la chaux carbo-
natée cristalline ; d’autres fois enfin jl n’y a rien : c’est alors un
vide, une sorte de trou vermiforme extrêmement contourné, à
surface irrégulière, plus ou moins rugueuse, mamelonnée, et dont
les interstices, entre ces sortes de proéminences, forment des ca-
vités très anguleuses ; particularités qui empêchent d’utiliser ces
pierres, provenant des parties supérieures de nos montagnes près
Dijon, à autre chose qu’à charger les routes et à orner les jardins,
tandis que les assises plus profondément situées sous le sol et dont
les taches offrent une plus grande solidité, comme à la Doué près
Beaune, peuvent être le sujet de vastes exploitations comme marbres
d’ornement d’un bel effet.
Enfin on voit encore, dans la plupart des échantillons, des
DU 14 AU 18 SEPTEMBRE 1851.
555
masses le plus souvent arrondies et quelquefois anguleuses, ce qui
leur donne l’aspect d’une brèche, variant, pour la grosseur, d’un
millimètre à 5 centimètres, et se dessinant quelquefois très nette-
ment sur le fond plus obscur de la pâte. Ces sphéroïdes, qui ont
été, regardés à tort comme des oolites, n’offrent jamais dans leur
structure de couches concentriques comme dans ces dernières.
Pour nous, ce sont ces corps que nous considérons comme étant
des flocons, en ce sens qu’ils ne se sont pas formés à la manière
des oolites proprement dites ; ils n’ont point été ballottés dans la
masse des eaux comme ces dernières; une cause quelconque a dé-
terminé le rapprochement moléculaire de la substance qui les
compose et ils se sont précipités au sein d’une mer parfaitement
tranquille.
Dans la Côte-d’Or, le forest-marble renferme en abondance
ces corps inconnus que l’on nomment stylolites. Pour nous, ce ne
sont point des êtres organisés : les mêmes stries, les mêmes con-
tournements des bâtons qui les constituent se retrouvent exacte-
ment les mêmes dans tous les calcaires à pâte compacte que l’on
observe dans tous les étages qui composent l’échelle géologique.
Le forest-marble ne renferme pas de fossiles, du moins dans
la Côte-d’Or et la Haute-Saône, où nous Pavons observé ; ou plu-
tôt, ceux-ci y sont extrêmement rares et semblent n’y être qu’ac-
cidentellement ; leur test est complètement passé à l’état de spath
calcaire, et alors ils se lient si intimement avec la pâte, qu’il est
absolument impossible de les en séparer; enfin, dans quelques
localités, à Fouvent-le-Bas (Haute-Saône), le forest-marble ren-
ferme une grande quantité de petits cubes de fer bisulfure d’un à
deux millimètres de côté ; mais la masse totale offre exactement
le même aspect, pour les fractures, pour la couleur, et aussi la
même translucidité , sur ses arêtes , que celui de notre départe-
-inent.
Tous ces caractères démontrent de la manière la plus évidente :
que la pâte du forest-marble s’est déposée au sein d’une eau par-
faitement tranquille et sous l’influence d’agents chimiques puis-
sants; par conséquent, cette pâte, n’ayant pas été remaniée par
l’agitation du liquide, devra offrir tous les caractères que nous
venons de décrire :
1° Avoir une grande homogénéité dans sa masse ; être d’une
grande pureté, ce qui entraîne la translucidité de ses bords.
2° Il devra se trouver des endroits où, cette pâte n’ayant pas
subi une forte pression, les flocons dont elle est composée auront
conservé leurs formes primitives, plus ou moins globuleuses, et
556 RÉUNION EXTRAORDINAIRE À DIJON,
leur structure ne devra point offrir de couches concentriques,
comme cela se voit dans les oolites proprement dites.
3° Souvent entre ces flocons, irrégulièrement placés les uns sur
les autres, il sera resté un vide , de formes diverses et offrant des
angles creux très variés.
lx° Une matière d’une autre nature que celle de la pâte aura
pu pénétrer après coup, ou peut-être même presque en même
temps, dans les cavités ci-dessus mentionnées, et aura formé les
taches qui se montrent si abondamment dans ces calcaires.
5° La chaux carbonatée cristalline aura pu également tapisser
après coup quelques unes des cavités restantes, par les attractions
moléculaires que les eaux amènent toujours dans toutes les roches
calcaires de la formation jurassique.
6° Les êtres organisés n’auront pu que très accidentellement se
développer dans le milieu où ils se sont trouvés, ce qui a dû les
rendre très rares à l’état fossile, pendant et après la formation du
dépôt.
7° Quelques uns de ces fossiles, très exceptionnellement, auront
pu encore se conserver quand ils auront été à l’abri de ces in-
fluences, ce qui a eu lieu évidemment pour ceux que l’on ren-
contre dans les vides laissés entre les masses de flocons dont nous
avons parlé; ils auront pu même y rouler accidentellement. Ces
fossiles sont presque libres dans ces cavités, d’une conservation
parfaite ; ils appartiennent au genre Rhynchonella et Pteroceras.
8° On ne devra jamais rencontrer de corps organisés au milieu
des nodules ou flocons , par la raison que ceux-ci n’étant pas
des oolites, ils n’ont pu s’être formés au pourtour d’un noyau fai-
sant centre d’attraction.
9° Enfin, les eaux chargées d’acide carbonique, en traversant
c es roches fendillées en tous sens, avec la plus grande facilité, ont
d issous les parties les plus tendres de ces calcaires, et ont spéciale-
ment agi sur les taches tortueuses dont nous avons parlé ; elles
les ont littéralement percées en arrondissant les angles saillants.
Ainsi, si l’on regarde avec soin les pierres percées du sommet
de nos montagnes, on verra la preuve la plus évidente de ce que
nous avons avancé; elles portent toutes la trace, non équivoque,
d e l’action chimique des eaux acides ; elles sont comme dissoutes
à leur surface, et les nombreuses cavités qui les traversent en tous
sens offrent des formes cylindroïdes , à surfaces rugueuses, dont
les parties les plus résistantes forment une multitude d’aspérités
saillantes. Enfin, c’est aussi dans ces calcaires que la presque tota-
té des grottes de notre département sont creusées ; il est admis
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1853.,
557
généralement que ces grottes doivent leur existence aux mêmes
causes, et qu’elles ne sont que des effets semblables, sur une plus
grande échelle, à ceux produits sur les taches irrégulières du
forest-marble.
Calcaire portlandien. — Tout ce que nous avons dit pour le
forest-marble se retrouve et s’applique aux calcaires portlandiens ;
seulement sa pâte est moins pure, plus terreuse ; elle n’est presque
jamais translucide sur ses bords. Les flocons y sont beaucoup
moins considérables, étant, pour l’ordinaire, plus intimement liés
à la masse de la pâte, qui semble avoir subi une plus forte pression.
Cependant à Mantoche (Haute-Saône), il est des parties où ces flo-
cons sont tout à fait séparés , sont de formes plus ovoïdes , plus
oblongues, et n’offrent jamais de parties anguleuses.
Les trous yermi formes y sont généralement cylindriques, quand
les eaux chargées d’acide les ont traversés ; dans le cas contraire,
ils sont très irréguliers et remplis d’une marne jaunâtre; leurs pa-
rois sont alors, comme dans notre calcaire mentionné plus haut,
anguleuses et rugueuses.
Quant aux fossiles , les bancs fréquemment percés n’en con-
tiennent pas ou presque pas, et celles de ces assises qui n’offrent
pas de vacuoles en sont abondamment pourvues. 11 est très rare
que ces fossiles aient conservé leur test; ils n’existent qu’à l’état
de moules.
On a signalé dans le calcaire portlandien des trous occasionnés
par des coquilles perforantes : nous croyons que cela a pu avoir
lieu souvent dans ces roches ; mais nous n’en n’avons vu aucun
exemple dans les départements de la Côte-d’Or et de la Haute-
Saône, où ces calcaires sont développés sur une très grande échelle.
En un mot, tout est semblable entre ces deux roches, forest-
marble et portland-stone , au point qu’il est presque impossible de
reconnaître dans les collections auquel des deux appartiennent la
plupart de ces échantillons de calcaires.
Ainsi donc, et pour nous résumer, nous disons qu’il existe deux
espèces de calcaires oolitiques :
1° Le calcaire oolitique à couches concentriques ;
2° Le calcaire floconneux Ou à oolites massives ;
Que les roches percées ne se rencontrent, dans la Côte-d’Or et
la Haute-Saône, que dans des calcaires floconneux, le forest-marble
et le portland-stone ;
Que les vacuoles ou trous tortueux étaient, dans l’origine, des
tachçs plus tendres, ou des cavités existant entre les flocons, qui
558 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
ont plus tard été corrodées et élargies par les eaux chargées
d’acide ;
Enfin, que la présence des trous vermiformes dans les calcaires
indique toujours qu’il n’existe pas, ou qu’il n’existe que très acci-
dentellement des fossiles dans ces roches : en effet , les débris de
Ces fossiles n’ont pu résister aux influences chimiques sous les-
quelles ces calcaires se sont trouvés, soit au moment de leur for-
mation, soit plus tard.
Tous ces faits sont attestés par une série d’échantillons mis sous
les yeux de la Société et offrent des preuves incontestables à l’ap-
pui de cette théorie.
A la suite de la note de M. Nodot, M. Albert Gaudry fait
la communication suivante Sur quelques tubulures dont V ori-
gine a été rapportée à des dégagements de gaz , et qui
pourraient être dues à la filtration des eaux.
Nous pensons que plusieurs accidents attribués jusqu’ici au
développement des gaz pourraient être rapportés à une cause
très différente : à la filtration ou à l’interposition des eaux
dans les roches nouvellement formées. Le phénomène de la
filtration et le phénomène du dégagement des gaz ont néces-
sairement produit des cavités dans un ordre inverse l’un de
l’autre : le premier a dû les former de haut en bas \ le second
a dû les former de bas en haut. Mais, les cavités étant une fois
constituées, il sera souvent diificile de savoir à laquelle de ces
deux causes il faut les rapporter \ là est la source d’erreurs qui ,
nous le pensons, pourraient avoir été commises sur ce point.
Parmi les cavités, attribuées à l’action des gaz et que nous
croyons pouvoir rapporter à la filtration des eaux , nous ran-
geons une partie des tubulures vermiculées dont les roches de
travertin sont remplies.
En effet, lorsqu’une roche calcaire se dépose, c’est que le
bicarbonate de chaux dissous dans les eaux se transforme en
carbonate neutre -, et chaque fois qu’une partie de bicarbonate
passe à l’état de carbonate neutre, elle abandonne un équivalent
d’acide carbonique -, donc , plus une eau précipite son calcaire
rapidement, plus elle contient d’acide carbonique. Or, cette
eau filtre à travers les couches en voie de consolidation, elle
DU 4 4 AU 18 SEPTEMBRE 1851. 55V)
séjourne dans ces couches, et par son acide carbonique elle
attaque les parties des roches qui sont le moins denses, le
moins serrées dans leurs grains. Ces circonstances ont dù et
doivent encore se présenter dans les travertins qui semblent se
distinguer des calcaires compactes par la rapidité même de
leur formation , et ainsi elîes peuvent être la cause d’une partie
des tubulures dont ces roches sont remplies.
D’ailleurs, si la filtration n’a pas entièrement formé quelques
unes des tubulures , nous pouvons dire qu’elle les a au moins
agrandies. En effet, les parois de ces tubulures, observées atten-
tivement, présentent les traces d’un suintement qui tantôt les a
corrodées, tantôt les a recouvertes de concrétions.
Parmi les cavités attribuées au dégagement des gaz et que
nous rapportons à la corrosion des eaux de suintement , nous
citerons encore les tubulures de Meudon. Ces tubulures qui,
par leur apparence spéciale, ont justement attiré l’attention
des géologues, se présentent dans la couche de craie dure
dont est surmontée la grande masse de craie tendre en exploi-
tation. Elles ne sont point en communication avec la surface
du sol, et ainsi elles ne peuvent, comme la plupart des tubu-
lures des autres pays de craie , être attribuées à un phénomène
de l’époque actuelle. Leurs formes sont très variables : quel-
ques unes d’entre elles ont jusqu’à 1 pied de diamètre, et la
plupart contiennent de la craie décomposée. Quel gaz, quel
animal perforant, pourraient, comme on l’a pensé jusqu’ici,
former d’aussi grandes cavités? Peut-on davantage les consi-
dérer comme des vides laissés par des animaux qui se seraient
décomposés sur place et auraient disparu ? L’absence de tout
débris et de toute forme organique écarte cette supposition.
Si, au contraire, on compare les tubulures de Meudon avec les
cavités que produit journellement la corrosion des eaux dans les
calcaires à texture homogène 5 si , pour en donner un exemple,
on les rapproche de ces mille accidents bizarres que l’action
dissolvante des eaux a rassemblés dans les calcaires de l’Ar-
dèche, on ne pourra s’empêcher de croire qu’elles ont été for-
mées, dans les âges géologiques, de la même manière que se
forment aujourd’hui des cavités semblables.
D’ailleurs ces tubulures renferment dans leur intérieur de la
560
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
craie à moitié décomposée et qui semble un indice du mode
suivant lequel elles ont été creusées.
En outre , il faut noter qu’elles sont placées dans des couches
dont l’endurcissement semble indiquer une filtration. Sur quel-
ques points les eaux de suintement auront perforé le calcaire
au moyen de leur acide carbonique -, sur d’autres points elles
l’auront endurci , en déposant entre ses molécules du carbonate
de chaux.
A la suite de la communication de M. Albert Gaudry, une
discussion s’engage sur les causes de la perforation des roches.
Les membres de la Société s’accordent à les regarder comme
très multiples : les unes sont dues à la corrosion des eaux, les
autres à des retraits ou peut-être à des dégagements de gaz,
d’autres à des remplacements de matières organisées, d’autres
encore à des animaux perforants, peut-être même à des Hélix,
comme M. Prévost l’a fait remarquer depuis longtemps pour
certaines circonstances exceptionnelles.
M. Gotteau annonce qu’il vient de publier le catalogue mé-
thodique des Echinides recueillis dans l’étage néocomien du
département de l’Yonne.
Il communique à la Société les observations suivantes :
Les Echinides mentionnés dans le catalogue que je viens de pu-
blier constituent àl espèces réparties dans là genres; ce nombre
est considérable si on le compare à la petite quantité d’espèces
qu’on avait jusqu’ici recueillies dans les terrains néocomiens de
l’Yonne. Cet étage n’est «cité que trois fois dans le catalogue
raisonné de M. Agassiz, et M. Alcide d’Orbigny, dans son Prodrome
de paléontologie stratigraphique , ne cite que 12 espèces qui en
proviennent.
Les àl Echinides que j’ai signalés sont, sans exception, spéciaux
au terrain néocomien ; aussi peut-on les considérer tous comme
fossiles caractéristiques. Dans chacun des étages de l’Yonne, j’ai
déjà constaté le même fait relativement aux Echinides, et ce ré-
sultat, bien que partiel et local, ajoutant une preuve de plus au
système paléontologique de M. d’Orbigny, tend à démontrer que
la loi qui a procédé à la distribution des êtres, dans les couches de
la terre, a été plus stricte encore pour les Echinides que pour les
Mollusques, et, qu’à de rares exceptions près, on peut les considérer
DU l/l AU 18 SEPTEMBRE 1851 . 561
presque tous comme caractérisant les étages au milieu desquels on
les rencontre. Parmi les L\ 1 espèces recueillies dans l’ Yonne,
19 seulement ont été décrites, et, par conséquent, 22 sont nou-
velles. Quelques unes de ces dernières présentent de l’intérêt au
point de vue zoologique.
t Le genre Hcmicidciris (1) qui, deux fois seulement, avait été
signalé au-dessus du terrain jurassique , m’a offert deux espèces
nouvelles.
Le genre Codiopsis , dont je ne connaissais qu’une seule espèce
spéciale à l’étage cénomanien, m’a fourni une très jolie petite es-
pèce, parfaitement distincte du Codiopsis doma par la saillie très
apparente de ses aires ambulacraires et surtout par la granulation
qui recouvre la partie supérieure du test (2).
là espèces représentent la famille des Gassidulides ; le genre
Nucleolites compte, à lui seul, 7 espèces, dont à sont nouvelles (3).
A la suite des Nucléolites vient se placer une espèce dont la forme
est remarquable et que j’ai cru devoir rapporter au genre Clypeus ^
qu’on avait jusqu’ici considéré comme spécial à la formation ju-
rassique; du reste, cette espèce, par sa forme allongée, son sommet
excentrique et la ténuité de son test, s’éloigne des véritables Cly-
peus , et devra peut-être constituer un genre nouveau, intermé-
diaire entre les Clypeus et les Nucleolites ( k ).
Le genre Pygurus m’a offert h espèces, qui toutes sont extrême-
ment rares; 3 étaient déjà connues, une seule est nouvelle; son
sommet fortement excentrique, sa face postérieure prolongée en
forme de rostre, la séparent d’une manière tranchée du Pygurus
Montmollini , avec lequel on serait, au premier abord, tenté de la
confondre (5).
Parmi les Spatangoides, les Taxas ter sont nombreux ; j’ai cru
devoir séparer du Toxastcr complanatus une espèce que j’ai dési-
gnée sous le nom de Toxaster Ricordeanus . Ce Toxaster , plus épais,
plus renflé, et dont la face postérieure est sensiblement carénée,
caractérise les couches supérieures de l’étage néocomien, et ne se
rencontre jamais avec le véritable Toxaster complanatus.
(1) Hemiciilaris neocomiensis} Cott.; H. Robinaldina , Cott.
(2) Codiopsis Lorini , Cott.
(3) Nucleolites Ârchiaci, Cott.; N. Robinaldinus , Cott.; N. ovijoî -
"mis , Cott.; N. Salvicnsis , Cott.
(4) Clypeus Paultrii , Cott.
(5J Pygurus Orbignyanus , Cott.
Soc. géol.y 2e série, tome VIII.
36
562
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
M. Michelin fait, au nom de M. Scipion Gras, ingénieur en
chef des mines, à Grenoble, la communication ci-après :
La découverte d’une mine de mercure, dans ie département de
l’Isère, est trop importante pour ne pas appeler l’attention de la
Société géologique.
La localité où l’on a reconnu la présence du mercure sulfuré
est située à h kilomètres environ O. de La Mure, au sommet d’un
grand ravin nommé Combe-Guicliard , et qui prend naissance à
l’extrémité N. du territoire de Pruinères. Le terrain est composé
de couches d’un calcaire gris à cassure compacte, quelquefois sub-
lamellaire et de schiste argilo-calcaire appartenant au lias su-
périeur. On y trouve fréquemment des Ammonites et des Bélem-
nites, parmi lesquelles on distingue les Ammonites Walcotii ,
Sow. , Ammonites fipibriçitus , d’Orb. , et B elc limites Bruguieranus ,
d’Orb. Les couches sont très tourmentées, et l’on observe qu’en gé-
néral leur direction est à peu près du N. au S. Non loin de là on
aperçoit au-dessous du calcaire des affleurements de grès à an-
thracite et des indices de ce combustible.
Depuis deux ans ou faisait des recherches dans cette localité;
uniquement dans le but de poursuivre de petits filons de cuivre
gris, riche en argent. Ce sont ces travaux, continués en 1850 par
MM. Planet et Budillon, qui ont amené la découverte du minerai
de mercure, dont on connaît maintenant deux gîtes bien distincts
Le premier, sur lequel on a établi deux galeries, a été découvert
en septembre 1850, dans un endroit appelé le Merle , un peu au-
dessous de la naissance de la Combe-Guichard. 11 consiste en une
couche de calcaire altéré, caverneux , mêlé d’argile ocreuse , dont
l’épaisseur moyenne peut être évaluée à 0m,50. Cette couche , qui
n’est pas nettement séparée du terrain environnant, renferme des
nids et de petits filons de cinabre intimement unis à du zinc car-
bonaté et à du zinc sulfuré. On y rencontre aussi des rognons de
bournonite argentifère présentant souvent des indices de cris-
tallisation. Le minerai de mercure est d’un rouge vif, surtout
quand il n’est pas resté longtemps exposé à l’air et à la lumière ;
mais sa poussière est d’un rouge orangé peu intense. Une partie
chauffée au chalumeau se décolore promptement sans changer ni
de forme ni de volume. Un essai très simple prouve que ce n’est
qu’un minerai de zinc coloré par du cinabre et renfermé dans
une gangue calcaire. Le minerai rouge, attaqué par un acide , se
dissout en faisant effervescence , et en laissant un résidu siliceux
plus ou moins abondant. Il n’est pas rare d’observer dans la masse
563
DU l/l AU 18 SEPTEMBRE 1851.
du minerai', à côté de parties d’un beau rouge, d’autres parties qui
ont la même forme, la même disposition et qui sont noirâtres. Cette
modification de couleur paraît due à une décomposition partielle
du cinabre. Jusqu’à présent les essais ont donné des résultats très
variables ; dans quelques opérations on a obtenu près de 5 pour 1 00.
Le laboratoire des mines n’étant pas encore complètement orga-
nisé à Grenoble, il a été impossible d’avoir une analyse complète.
Le seçopd gîte mercuriel a été découvert peu de temps après le
premier, et n’en est distant que de 150 mètres. Il se trouve à
l’endroit où la Combe -Guichard est traversée à sa naissance par le
chemin allant des Fraches à Simane. Ici le minerai et les sub-
stances qui raccompagnent sont nettement encaissés, et l’on voit
clairement quelle est leur disposition par rapport aux couches en-
vironnantes. Ils constituent plusieurs petits filons parallèles et très
rapprochés, qui ont en général moins d’un décimètre d’épaisseur,
à l’exception d’un seul dont la puissance est d’un mètre. On en
compte quinze dans un espace dont la largeur totale n’excède pas
5m,50. Ces filons sont dirigés de l’O, 10° JN. à l’E. 10° S., avec une
inclinaison de 60 à 70° vers la région N. Leur masse principale
est composée de chaux carbonatée, de dolomie, de quartz et de fer
carbonate spatliique, dans lequel on trouve disséminés de la bour-
nonite, du carbonate de zinc, du cinabre, du zinc sulfuré et de la
galène. On y observe aussi fréquemment de l’oxyde de manga-
nèse , sous forme de poussière noire superficielle. On voit que les
substances minérales contenues dans ce gîte sont beaucoup plus
variées que dans le premier. Cependant la composition du minerai
de mercure y est exactement la même. Je me suis assuré, en effet,
que les parties rouges étaient aussi formées de carbonate de zinc
coloré par du cinabre ; en sorte que ce dernier minéral paraît ac-
compagner constamment le zinc à l’exclusion de toute autre sub-
stance : j’ai constaté ce fait remarquable , qui peut-être ne souffre
pas d’exceptions, même sur de petites taches rouges isolées dans le
sein d’une gangue de calcaire pur. Les travaux de recherches con-
sistent en deux excavations à ciel ouvert qui ont mis en évidence les
affleurements des fiions.
Déjà on s’occupe de la construction d’un fourneau, et I on es-
père, avant la mauvaise saison, mettre dans le commerce plusieurs
millions de kilogrammes de mercure fluide.
Il y a environ soixante-dix ans, M, Schreiber fit exécuter
sur la commune de Saint-Arey , contiguë à celle de Pruinères,
des fouilles, dans le but d’explorer un gîte renfermant des rognons
de sulfure de zinc et de plomb associés à du mercure sulfuré. Cette
5 6/| RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
tentative n’eut pas de succès; on ne put y découvrir du cinabre ,
et elle fut abandonnée après le percement d’une galerie de A2 mè-
tres de longueur. Par conséquent, aucun échantillon de cinabre
provenant de ces fouilles n’a été présenté à qui que ce soit.
La découverte des gîtes de la Combe-Guichard dans une loca-
lité vierge d’anciens travaux, et à une distance de près de A kilo-
mètres de l’endroit où M. Schreiber avait entrepris sa galerie,
est donc due à MM. Planet et Budillon, explorateurs actuels.
M. E. Royer donne lecture de la note suivante :
Quelques personnes ont révoqué en doute l’existence de failles
dans la partie du bassin de Paris à laquelle appartiennent les dé-
partements de l’Aube, de la Haute-Marne et de la Meuse. M. Ley-
merie, dans sa Statistique géologique et minéralogique du départe-
ment de l'Aube (p. AO, Al et 2A2, pl. I, fig. A), paraît peu disposé
à en admettre, et dans le mémoire sur le terrain crétacé du même
département qu’il a publié dans les Mémoires de la Société géologique
de France (lresér., t. IV, p. 353 et pl. XVII, fig. 3), il a attribué à
des érosions ou à des dénudations certains faits qui sont , suivant
moi , dus évidemment à des failles. Si ces dérangements sont
moins apparents dans nos pays plats et uniformes, éloignés des
centres d’actions souterraines , que dans les montagnes ; s’ils y
sont moins nombreux ; s’ils y sont plus difficiles à découvrir et à
constater, ils n’en existent pas moins. Depuis plusieurs années je
travaille à une carte géologique du département de la Haute-
Marne. En parcourant le terrain , j’ai reconnu quelques failles
dans le nord de ce département; je les ai étudiées avec soin. J’ai
l’honneur de présenter à la Société géologique des fragments
de cette carte où j’ai indiqué ces failles; je n’ai point l’intention
de les décrire aujourd’hui ; je veux seulement en constater l’exis-
tence. Ces failles ont diverses directions et il est difficile de les
rapporter à un ou plusieurs des systèmes de soulèvement classés
par les géologues ; voici les principales :
1° Faille de Narcy. Elle prend naissance dans les bois de Trois-
Fontaine-l’Àbbaye, appartenant au département de la Marne,
passe à Cousance, Narcy, et paraît se terminer vers Chevillon.
Cette faille a mis en contact le gault avec le portlandien ; je ne l’ai
pas poursuivie au nord jusque dans la craie proprement dite, en
sorte que tout ce que je puis dire aujourd’hui de son âge, c’est
qu’elle est postérieure au gault; elle est sinueuse. Sa direction
moyenne est N.-N.-E.
DU IA AU 18 SEPTEMBRE 1851 . 565
2° Faille de Chatonrupt. Elle commence près de Rochecourt-
sur-Marne, en face du point où s’efface celle de Narcy, dont elle
n’est probablement que la continuation; elle se prolonge jusqu’à
Joinville, où elle est cachée par les alluvions de la Marne; il est
probable qu’elle cesse à la rencontre de la faille de Ferrière que
je vais citer ; elle met en contact le portlandien et le néocomien.
Sa direction est la même que celle de la faille de Narcy.
3° Faille de Ferrière. Elle commence à Joinville, passe à Fer-
rière et vient disparaître dans les bois situés entre Flameréeourt
et Bouzancourt. Sa direction est N. -O.
U° Faille de Blécourt. Elle commence près de Tlionnance près
Joinville, passe au-dessus de cette ville, à Blécourt, Leschères, et
vient s’atténuer près de Marbéville , dans le voisinage de la faille
de Lévigny. Elle est à peu près parallèle à la faille de Ferrière,
et en est très rapprochée ; elles mettent en contact le portlandien
et le néocomien ; l’espace compris entre elles s’est affaissé.
5° Faille de Lévigny. Elle commence près des fermes d’Heu ,
sur le plateau situé entre la Marne et le Rognon, passe à Soncourt,
Biaise, Rizaucourt, Maisons, Lévigny, Eclance et Trannes, dans
le département de l’Aube; elle a affecté les terrains coralliens,
kimméridiens, portlandiens, néocomiens, et a mis dans le dépar-
tement de l’Aube le portlandien en contact avec les argiles ap-
tiennes. C’est cette faille qui a occasionné la falaise de portlandien
que M. Leymerie attribue à une profonde dénudation ( Mémoires
de la Société géologique, lresér., t. I V, p. 353, etpl. XVII, fig. 3 ; et
Statistique du département de l’/lube , pl. J, fig. à). Je ne l’ai point
poursuivie au delà de la rivière d’Aube, mais il est probable
qu’elle y existe encore et qu’elle pénètre dans le gault. Sa direc-
tion est à peu près E.-O., inclinant légèrement vers le N.
D° Faille de Clairvaux. Elle commence près du village de La-
chapelle , et peut-être à Sexfontaine; elle passe à la ferme de
Tinne-Fontaine, aux forges de Clairvaux et à Champigneule, dans
le département de l’Aube ; je ne l’ai pas poursuivie au delà, mais
il serait possible qu’elle, se prolongeât beaucoup plus loin, et que
les phénomènes que M. Leymerie a signalés à Bar- sur-Seine et
Merrey (p. 2A1 et 2A2 de la Statistique minéralogique et géologique
du département de l’Aube ), et qu’il attribue plus volontiers à un
changement dans les caractères minéralogiques des roches, soient
dus à cette faille, qui aurait été aussi la cause de la direction
insolite de la vallée de l’Arce. Sa direction est N. -E.-O.
Indépendamment de ces failles principales, il en existe d’autres
moins importantes, savoir : une à Mertrud, dont on retrouve la
566
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
trace à Vaux-sur-Blaise ; une à Cirey-sur-Blaise, qui vient se ter-
miner à la faille de Lévigny, près de Rizaucoürt ; une à Poissons,
et deux près de Thonnance-les-Moulins. Parmi ces failles, celle de
Narcy est des plus remarquables : on voit d’un côté le portlandien
surmonté de l’oolite du Barrois qui en fait partie, puis par le néo-
comien, former une falaise longue et élevée; de l’autre, tous les
terrains postérieurs à l’oolite du Barrois, c’est-à-dire le néocomien
proprement dit, les argiles ostréennes et aptiennes, le grès vert et
le gault venant s’appuyer contre la paroi portlandienne, à un ni-
veau inférieur et plongeant dans la faille; il n’est pas possible
de se méprendre sur ce phénomène : là supposition d’une falaise
par une érosion n’est pas admissible, puisque souvent le terrain
qui forme le côté inférieur et déprimé se présente au haut de la
falaise formée par le côté supérieur ou soulevé.
Au midi du département, quelques failles, encore peu étudiées
par moi, offrent aussi un grand intérêt. Entre Langres et Prothoy
il s’en présente notamment deux : une à Longeau et la seconde à
la ferme de Suxi, où elle a été reconnue autrefois par M. Elie de
Beaumont , qui toutefois ne lui a pas attribué sa véritable direc-
tion. Ces deux failles pénètrent dans lé département de la Haute-
Saône, où M. Tliirria a signalé des lambeaux de la seconde
[Annales des mines , t. 3Y, 1839, pl. 1, faille d’Angicourt). Celle
de Suxi se prolonge jusque dans le centre des Vosges, où elle se
rattache à ce magnifique dérangement du sol signalé par M. Elie de
Beaumont comme un cratère de soulèvement au fond duquel sont
situés les lacs de Gérardmer, Longemer et Retournemer; celle de
Longeau pourrait bien se relier au même phénomène. La faille
de Suxi est d’autant plus intéressante, qu’elle semblerait limiter
vers le N., au moins dans la Haute-Marne, le soulèvement de
la Côte-d’Or ; en effet, quelques unes des failles qui brisent le sol
dans les environs d’Is-sur-Thil, Selongey et Montsaujeon, parais-
sent s’arrêter à cette faille de Suxi qui est, dans une autre direction,
oblique par rapport à elles, et qui serait probablement d’un autre
âge.
M. de Christol met sous les yeux de la Société divers fossiles
qu’il a découverts en 1828 dans les terrains siluriens de Cler-
mont-l’Hérault. M. Michelin reconnaît parmi ces fossiles des
Bilobites, qu’il croit identiques avec les Bilobites de la Bretagne,
M. deVerneuil confirme cette opinion et reconnaît dans d’autres
fossiles des Fucoïdes , que , jusqu’à présent, on n’avait point
567
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
observés en France, et qu'il croit entièrement identiques avec
des Fucoïdes observés par lui dans les terrains siluriens infé-
rieurs d’Amérique.
« Ces fossiles, dit M. de Christoî, ont été recueillis par M. Du-
mas, actuellement professeur à Sa Faculté de médecine de Mont-
pellier, et par moi. Leur gisement est entre Clermont-l’Hérault
et Mourèze. Ils sont très nombreux dans des éboulements de
schistes argileux; ils sont étalés et couchés à plat sur des sur-
faces planes au-dessus desquelles ils sont en relief. Au-dessous
des schistes argileux qui les contiennent, sont des pbyllades
et des quartzites grenus, que je rapporte aux assises supérieures
du terrain de transition inférieur. »
La séance est levée à onze heures et demie.
Séance du 16 septembre.
La séance est ouverte à huit heures du soir sous la présidence
de M. Studer.
Sur l’invitation de M. le président, M. de Christoî rend
compte, dans les termes suivants , de l’excursion qui a eu lieu
dans la journée à Beaume-la-Roche.
Excursion au bassin de Beaume-la-Roche .
Cinquante personnes, dont la moitié étaient membres de la
Société, ont pris part à cette excursion.
Elles ont été guidées dans les diverses localités par MM. les
ingénieurs Ruelle, Drouot, Ritter, d’Ambly, et par M. Brangé,
conducteur des ponts et chaussées.
En dehors de l’importance qu’ont donnée à Beaume-la-Roche
la coupe récente et les beaux travaux des ingénieurs du chemin
de fer, cette localité est depuis longtemps signalée dans la
science.
En 1813, M. Leschevin , ingénieur des ponts et chaussées,
a publié, dans le Journal des mines (XXXe volume, 1er se-
mestre), une description du bassin de Beaume-la-Roche, avec
une carte et plusieurs planches. Dans ce travail il rapporte
568 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
que depuis Yauban un très grand nombre de projets avaient
été proposés pour établir, sur divers points de cette région,
l’angle de partage du canal de Bourgogne. Il signale l’îlot gra-
nitique qui est placé au centre du bassin , et tout à l’entour
duquel se relèvent les couches. Il sépare le calcaire à Gryphées
du calcaire à Bélemnites, et pour la première fois il donne le
nom de calcaire à Gryphées à l’assise inférieure des calcaires du
lias. Jusque-là ce nom avait été réservé pour des couches de
terrains beaucoup plus anciens. « La dénomination , dit M. Les-
» chevin , qui convient le mieux au calcaire coquillier le plus
» ancien de ce pays, est la dénomination de calcaire à Gryphées
» et non celle de calcaire à Cornes d’Ammon, qui lui a été
» donnée depuis quelques années. Partout j’ai vu la Gryphée
» entrer presque seule dans la composition des couches calcaires
» les plus voisines du sol primitif, et n’admettre la Bélemnite
» et l’Ammonite que dans les couches les plus élevées. Celle-ci
)> môme se trouve dans des couches où la première ne se ren-
» contre plus. »
Dans le tome Ier des Mémoires pour servir à une description
géologique de la France , M. de Beaumont cite (d’après la
notice de M. de Bonnard, sur quelques parties de la Bourgogne,
Annales des mines , tome X, p. 427) les îlots granitiques de
Malain , Mémont et Rémilly ; il signale aussi les bouleversements
que présentent les couches autour de ces îlots granitiques.
Enfin, en 1838, M. Payen, dans sa Géologie de la Côte-
d'Or , indique les faits fondamentaux du bassin de Beaume-la-
Roche.
Les premiers dépôts que la Société ait eu à étudier ont été
un lambeau de gneiss, et, auprès de ce gneiss, l’îlot granitique
placé au centre du bassin de Beaume-la-Roche. On a pu obser-
ver quelques unes des failles à parois striées et des autres dislo-
cations qui l’avoisinent. Plusieurs membres pensaient que cet
îlot granitique pouvait remonter à l’époque du contournement
des gneiss. Mais M. de Christol a fait observer que l’une des
failles était sensiblement parallèle à la chaîne de la Côte-d’Or,
et appartenait à la série des accidents signalés par M. Elie de
Beaumont dans la ligne de fracture s’étendant de Bourbonne-les-
Bains aux environs d’Autun.
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851. 569
Sur la question de savoir si la disposition des couches autour
de Î’îlot granitique a été due à un soulèvement ou à un affaisse-
ment, les membres de la Société ont été très partagés. Les uns
l’ont attribuée à un phénomène de soulèvement ayant exercé
une poussée de bas en haut. Les autres, au premier rang
desquels s’est trouvé M. Constant Prévost, ont admis un
affaissement des couches autour de l’îlot granitique, qui serait
resté immobile à l’instant de leur dislocation.
Prés de l’îlot granitique est une assise épaisse de grés, su-
perposée au granité. Ce grés est stratifié, friable, très peu
feldspathique, n’ayant qu’un ciment argiloïde , dû à des par-
celles de feldspath altéré , renfermant quelques cailloux de
quartz et ne présentant pas de mica, ou en présentant si peu,
qu’il faut chercher longtemps pour en découvrir quelques pail-
lettes.
Ce grés a été signalé par M. Leschevin sous le nom de psam-
mite : d’après ce géologue, il se trouverait toujours au contact
du granité.
Il est la continuation de la couche d’arkose qui , en d’autres
localités, devient si feldspathique et si solide; qui, en Bour-
gogne, a été décrite par M. de Bonnard, et que la Société a
depuis longtemps observée à Autun, à Avallon et à Semur.
Notre regrettable confrère, M. Huot, a considéré ce grés
comme appartenant à l’inlra-lias. M. Payen l’a distingué en
deux parties : le quadersandstein et le grès des marnes irisées.
M. Rozet, de son côté, a séparé l’arkose de Bourgogne en
deux couches : l’une inférieure aux marnes irisées et qu’il rap-
porte au grés bigarré, l’autre supérieure aux marnes irisées et
qu’il rapporte au grès du lias.
La Société a été partagée sur l’age de ces grés. M. Pidancet
a fait observer qu’il leur trouvait une identité complète avec
certaines assises du grès bigarré du Doubs : d’après son opinion,
il n’y aurait pas lieu à séparer le grés de la Côte-d’Or du grés
bigarré. Au contraire, d’après M. Drouot, ce grès serait trop
différent des grès bigarrés par sa friabilité et par son absence
presque absolue de mica pour pouvoir être assimilé à cette
assise.
Au-dessus des grés, sont les strates des marnes irisées que
Ô70 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
*a Société a parcourues sur divers points. Elle n’a point eu le
temps d’aller étudier sur place les gypses et les dolomies
intercalés dans cet étage ; mais des matériaux amassés
autour de différents puits d’extraction lui ont présenté des
fragments de ces gypses. Elle n’a pu de même juger des
couches de l’infra-lias que par les matériaux amenés au jour
par les puits d’extraction.
En allant de la tête du souterrain à Beaume-la-Roche, la
Société a vu le calcaire à Gryphées arquées -, dans les blocs
isolés de ce calcaire, plusieurs membres ont recueilli des
fossiles.
En sortant du village de Beaume-la-Roche, la Société a vu
un escarpement évalué à 200 mètres par M. Payen, et composé
de calcaire à Entroques. Cet escarpement se prolonge au loin
vers le S. , et il forme la paroi E. du bassin. Il présente une
faille très remarquable. Au nord du village se trouve un che-
min à pente extrêmement rapide et au bas de ce chemin est la
source de Beaume-la-Roche, coulant du nord au sud. Du
côté E. de la source, on marche sur le calcaire à Entroques-,
du côté gauche et au même niveau , on trouve le calcaire à
Gryphées, qui forme la base de la paroi 0. du bassin, sur-
montée par le calcaire à Entroques.
Ainsi le calcaire h Entroques se trouve à l’ouest de la faille
à un niveau plus élevé de 200 mètres que le niveau du cal-
caire à Entroques placé à l’est de la faille.
En gravissant les talus presque abrupts formés par la mon-
tagne de Blaisy, au-dessus de la tête du souterrain , les mem-
bres de la Société ont pu continuer à suivre la série des assises
dont ils avaient déjà vu la première partie avant d’arriver à
Beaume-la-Roche. (Voyez la coupe géologique de la montagne
de Blaisy et de la roche Malain , pl. X. )
Ils ont d’abord constaté la superposition du calcaire à Bélem-
nites sur le calcaire à Gryphées.
Au-dessus du calcaire à Bélemnites sont des marnes dans
lesquelles ils ont recueilli quelques fossiles caractéristiques.
Plus haut, ils ont constaté la zone du calcaire noduleux fer-
rugineux, signalé en 1813 parM. Leschevin, et plus tard par
M. de Bonnard. Ce calcaire correspond à la zone de YOstrea
DU \tl AU 18 SEPTEMBRE 1851. 57l
( Grfphœa ) cymbium , coquille très rare sur ce point , mais
abondante sur d’autres points de la Côte-d’Or.
Au-dessus de cette zone sont de puissantes assises marneuses,
devenant quelquefois sableuses et contenant des bancs de grès.
Ces assises paraissent correspondre à la base de la série ooli-
tique inférieure de l’Angleterre et de plusieurs autres contrées.
M. Gaultier, conducteur des ponts et chaussées, indique, dans
la coupe du souterrain de Blaisy publiée par lui en 1848, un
banc de calcaire à Posidonici intercalé au milieu de ces assises.
Au-dessus sont les escarpements du calcaire à Entroques
déjà vus par la Société à Beaume-la-Roche. Ce calcaire n’est
pas seulement digne de l’attention du géologue par la beauté
des escarpements qu’il a formés, et parla netteté de son horizon
géognostique -, il est encore précieux pour l’ architecte, auquel
il fournit de magnifiques matériaux de construction.
Enfin, sur le plateau de la montagne de Blaisy, la Société a
vu une couche marneuse, rougeâtre, riche en madrépores, et
caractérisée par X Ammonites interrnptus , Brug. ( A . Pcirkm-
soni , Sow.).
M. Féry a développé la coupe du souterrain de Blaisy, pu-
bliée par MM. Ruelle, Ducos et Jullien. Cette coupe avait
été confiée par l’administration à M. Féry, afin de faciliter nos
explorations. (Voyez la coupe précitée.)
Du haut du plateau, M. Brangé a indiqué des couches de
l’oxford-clay et du coral-rag, qui s’aperçoivent au niveau du
calcaire à Entroques. Il faut un coup d’œil exercé pour recon-
naître ces couches presque toujours fortement disloquées. D’une
manière générale, on peut dire que les terrains situés à l’E.
d’une ligne allant de la source de Beaume-la-Roche à Pont-de-
Pagny, sont différents des terrains placés à l’O. : à l’O. ,
on voit le granité, l’arkose, les marnes irisées, le lias et le
calcaire à Entroques qui couronne les sommités-, à l’E., on voit
les diverses couches oolitiques, depuis le calcaire à Entroques
jusqu’au coral-rag.
Après le compte rendu de la course à Beaume-la-Roche,
M. der Christel, afin de donner la suite des terrains superposés
à ceux qui précèdent, reprend le compte rendu fait par
M. Nodot sur la course à Plombières et à Velard.
Ô72 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
Exclusion du 15 septembre , a Plombières et à V elard.
Quarante-huit personnes, parmi lesquelles on pouvait compter
tous les membres de la Société venus à Dijon , ont pris part à
cette excursion.
Avec l’autorisation de M. l’ingénieur Ruelle et sous la
conduite de M. Brangé, la Société a pu explorer la tranchée
du chemin de fer voisine de la station de Plombières.
Cette tranchée a présenté à la Société les assises du cal-
caire oolitique qui forme la base de la grande oolite. Ce cal-
caire est singulièrement remarquable par les grains oolitiques
dont il est composé. Quelques géologues ont pensé qu’il pou-
vait correspondre au great oolite des Anglais. II repose, comme
nous le verrons plus loin , sur les couches à Ostrea acuminata.
Au-dessus du calcaire oolitique est un lit d’environ 2 déci-
mètres d’épaisseur, existant habituellement à cette hauteur
et assimilé au Bradford-clay de l’Angleterre.
Au-dessus de cette assise est le forest-marble. Le forest-
marble forme dans la Côte-d’Or un horizon géologique constant.
MM. Royer, Rathier, Drouot, de Charmasse l’ont considéré
comme le prolongement de couches semblables observées par
eux dans les départements voisins. Ce calcaire est blanc gri-
sâtre; il est très compacte et susceptible d’être poli comme
le marbre; sur quelques points il devient rougeâtre, et vers
sa partie inférieure il offre souvent un aspect bréchiforme. Cet
aspect est dû à des noyaux oolitiques, sans couches concen-
triques apparentes, et comme fondus dans la pâte. M. Pidan*
cet croit la roche dolomitique dans certaines parties compactes
que la Société a eues sous les yeux. Le forest-marble est carac-
térisé par le pittoresque que donnent à ses escarpements ses
découpures et ses divisions ruiniformes. M. Royer a fait ob-
server que, dés 1829, il avait été frappé de l’aspect de murailles
démantelées que présentent, dans la Haute-Marne comme dans
la Côte-d’Or, les escarpements formés par cette assise. M. de
Ghristol a ajouté que Huot a signalé , en Angleterre et dans
la Meuse, cette particularité si remarquable dans la Côte-d’Or:
c’est que le forest-marble présente une multitude de fausses
fissures de stratification, plus ou moins rapprochées de la
DU 1 k AL i 8 SEPTEMBRE 1851. 57$
verticale. M. de Christol attribue à ces fissures verticales, croi-
sant la stratification, l’aspect ruiniforme des assises du forest-
marble.
De Plombières , la Société s’est transportée par la grande
route au viaduc de Nevon , qu’elle a traversé -, et elle a suivi le
vallon de ce viaduc pour se rendre à Yelard par les hauteurs
de la rive gauche de l’Ouche.
A vingt minutes environ du viaduc , la Société a vu un cal -
caire jaunâtre , qui offre de grandes taches de couleur bleue ,
et est composé d’oolite miliaire. Il forme les assises puissantes
dont est couronné le sommet des montagnes de Plombières,
des deux côtés de la vallée. Il figure une sorte de corniche qui
va graduellement en s’abaissant des deux côtés de la vallée ,
jusqu’à la terminaison de cette vallée à Dijon. De distance en
distance il présente des escarpements, et sa direction est indi-
quée par de nombreuses carrières où il est exploité. Les car-
rières de Dijon , près l’ancienne Chartreuse, sont ouvertes dans
cette assise qui fournit ainsi beaucoup de matériaux de con-
struction pour la ville. Enfin nous pouvons ajouter à la descrip-
tion de ce calcaire, qu’il renferme beaucoup de Pholadomyes et
de Limes, circonstance qui le distingue du forest-marble, pres-
que complètement dépourvu de fossiles.
M. Payen a rapporté les assises formées par ce calcaire à
son oolite supérieure, son oolite moyenne correspondant au
forest-marble, et son oolite inférieure correspondant au calcaire
oolitique. Elles seraient différentes du corn-brash et le corn-
brash correspondrait à un calcaire dur qui lui serait supérieur.
Contrairement à l’opinion de M. Payen, M. Nodot, dans un
rapport adressé au maire de Talant , à l’occasion d’une recherche
de source, a donné à ces assises le nom de corn-brash.
Au-dessus de ce calcaire la Société a reconnu une couche
renfermant la Terebratula digona , Y H emicidari s Luciensis
et d’autres fossiles caractéristiques du corn-brash. M. Payen
a indiqué cette couche comme se trouvant tantôt plus haut ,
tantôt plus bas dans l’oolite miliaire, et môme comme se
répétant plusieurs fois. M. de Christol dit qu’il ne l’a jamais
trouvée qu’à la partie supérieure de l’oolite.
MM. Michelin, Sæmann et Albert Gaudry ont reconnu une
Ô7A RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
identité complète entre cette assise et l’assise à Terebratula
digona de Ranville.
M. Beaudoin a dit que le banc à Terebratula digona formait
dans tout le Ghâtillonnais un horizon très caractéristique : il est
placé entre le calcaire compacte, nommé forest-marble , et
l’qolite miliaire, nommée corn-brash.
M. Royer a trouvé une parfaite identité entre les couches à
Terebratula digona que la Société avait sous les yeux et les
couches du corn-brash de Chaumont (Haute-Marne).
Après trois quarts d’heure de marche à partir du banc à
Terebratula digona , la Société est arrivée au sommet d’une
colline voisine de Velard. Par suite de l’examen des fossiles,
Ammonites plicatilis (A. bip! ex , Sow.), Terebratula insignis ,
de nombreux spongiaires, etc., et d’après les ressemblances du
faciès, MM. Beaudouin etPidancet en ont rapporté les couches
au terrain argovien.
Du sommet de cette colline, MM. Nodot et de Christol ont
signalé au loin des couches rougeâtres qui appartiennent à la
zone oxfordienne inférieure, renfermant le minerai de fer.
M. Brangé a indiqué plusieurs points de cette zone qui don -
nent lieu à des exploitations de fer en grains.
A la sortie du village de la Gude, M. le professeur Lavalle
a constaté l’existence d’un travertin renfermant de belles im-
pressions de feuilles. On n’a pu reconnaître si ce travertin était
tertiaire ou de l’époque actuelle.
Sur la route de la Gude à Plombières, M. Brangé a montré
des couches bien caractérisées de la grande oolite et du forest-
marble que la Société avait déjà vues au commencement de la
course. Mais sur ce point le forest-marble a un plus beau déve-
loppement, et la grande oolite offre cette circonstance impor-
tante , qu’on la voit reposer sur le calcaire à Ostrea acumi-
nata . Ce calcaire, souvent marneux, a été considéré par
M. Payen comme correspondant au fuller’s earth des Anglais.
Il forme, selon la remarque que M. Beaudoin en a faite, un
horizon invariable.
En rentrant à Plombières , la Société a pu voir auprès du
pont de la ville les couches du fuller’s earth recouvertes par la
grande oolite. Cette assise, dans sa partie moyenne, présente
DU ïh AU 18 SEPTEMBRE 1851. 575
de nombreuses chailles ou concrétions siliceuses } M. Brangé
a montré que, dans sa partie supérieure, elle forme un calcaire
rougeâtre, nommé pierre de Prémaux, du nom d’une localité où
elle est exploitée principalement pour les monuments funèbres.
Ici s’est bornée l’excursion de la journée. Ayant de rentrer
dans la ville, quelques membres, au nombre desquels se trou-
vaient MM, Ritter, Lavalle et Pidancet, ont été visiter le ter-
rain de transport qui se voit dans la tranchée de l’embarcadère
de Dijon. Ce terrain, dans lequel on remarque des blocs de
calcaire non roulés, de plusieurs mètres cubes, mêlés à quel-
ques blocs roulés , a été indiqué dans le temps comme pouvant
être glaciaire. D’après M. de Christel, les preuves en faveur
de cette opinion ne paraissent point suffisamment appuyées.
En résumé, dans les courses des deux jours précédents, la
Société a constaté les superpositions suivantes :
Gneiss et granité.
Arkoses.
Marnes irisées , avec gypse et dolomies.
Calcaire à Ostrea ( Gryphœa ) arcaata.
Marnes à Bélemnites.
Calcaire noduleux , ferrugineux, correspondant à la zone des
Ostrea ( Gryphœa ) cymbium.
Assises marneuses ou sableuses, dans lesquelles est intercalée une
couche à Posidonia.
Calcaire à Entroques.
Couches marneuses, rougeâtres, renfermant Y Ammonites interrup -
tus, Brug. [A. Parkinsoni , Sow.).
Couches à Ostrea acum inata , assimilées par plusieurs géologues
au fuller’s earth des Anglais.
Calcaire oolitique qui peut correspondre au great oolite des Anglais.
Calcaire marneux , rapporté par quelques géologues au Bradford-
day.
Forest-marble ou calcaire compacte.
Couches de calcaire à Terebratula digona , etd’oolite miliaire, qui,
selon plusieurs géologues, correspondent au corn-brash.
Couches ferrugineuses exploitées sur plusieurs points pour leur
minerai , et correspondant au kelloway’s rock des Anglais.
Couches du terrain argovien (oxfordien supérieur), caractérisé par
Y Ammonites plicatilis.
(Voyez aussi la coupe géplogique de la momagne de Blaisy,
pl. X.)
Il est probable que la Société n’aura point à discuter sur
576 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
l’exactitude de ces superpositions , car elles ont depuis long-
temps été établies par des observateurs habiles, et, sur les
lieux, les membres de la Société ont semblé les admettre sans
hésitation.
Mais il reste deux points importants à étudier :
1° Quelle est la valeur relative de ces divisions? sont-elles
artificielles ou naturelles?
2° Leur analogie avec les couches de l’Angleterre est-elle
tellement prononcée, qu’il faille, à la distance où nous sommes
de ce pays , conserver à nos couches les dénominations locales
qui leur ont été données?
Le rapport de M. de Christol étant terminé, M. le président
annonce que la discussion est ouverte.
M. Pidancet communique à la Société les observations qu’il
a faites dernièrement sur les grés bigarrés des environs de Dole ;
il trace sur le tableau plusieurs coupes de ces grès : « Ces grés,
dit-il , sont recouverts par le muschelkalk bien caractérisé
(Encrimis Uliijormis ). Ils reposent sur le granité, comme
ceux de la Côte-d’Or } leurs bancs alternent avec des couches
argileuses, renfermant des empreintes de Voltzia brevifolia.
Ils ne sont ni moins feldspathiques, ni plus micacés que
ceux de Beaume-la-Roche. Ils présentent la même friabilité ,
les mêmes galets quartzeux, le même ciment argiloïde, en
un mot, les mêmes caractères minéralogiques. » M. Pidancet
conclut de ces observations que le grès de Beaume-la-Roche,
visité dans la journée par la Société, appartient, comme le
grès des environs de Dole , à l’étage des grès bigarrés. D’ail-
leurs, il n’a vu dans le Doubs, au-dessus du muschelkalk,
aucun grés que l’on puisse considérer comme le prolongement
de la couche de grès de Beaume-la-Roche. Il lui paraît peu
probable que cette couche, si étendue dans la Côte-d’Or et dans
les contrées voisines, ne se soit point prolongée dans le Doubs.
Il pense qu’on a été porté à séparer du grés bigarré le grés de
Beaume-la-Roche, uniquement par la raison que le muschelkalk
ne le recouvre pas.
M. Drouot, ingénieur en chef des mines, à Chaumont, pré-
sente, au sujet du grès observé par la Société dans la carrière
de Malain, les remarques suivantes :
DU 1 h Al 18 SEPTEMBRE 1854, 577
Ce grès est composé de grains de feldspath plus ou moins altéré
et de quartz hyalin blanc avec de rares et petites paillettes de
mica. 11 est eii couches à peu près horizontales, reposant sur un
gneiss noirâtre, quelquefois très schisteux, et passant à un granité
porphyroïde à gros cristaux de feldspath ortliose. Dans la carrière
même, ce grès n’est pas recouvert , mais un peu à 10., dans la
tranchée du chemin de fer, on le voit sous les marnes irisées bien
caractérisées.
D’après ces faits, M. Drouot pense que le grès de Malain est de
même formation que celui qui se montre très fréquemment dans
le département de Saune- et-Loire, et qu’il a étudié récemment
sur plusieurs points, notamment dans le voisinage du gîte
houiller de Forges, commune de Saint-Martin d’Auxy, canton de
Buxy , arrondissement de Chalon-sur-Saône , ainsi que dans la
vallée de la Dheune où se trouve le canal du centre , principale-
ment entre Saint-Léger-sur-Dheune et Couches , arrondissement
d’Autun. Ce grès a été depuis longtemps décrit par M. de Bonnard,
inspecteur général des mines , qui lui a donné le nom d’arkose.
( Notice géognostique sur quelques parties de la Bourgogne , Annales
des mines , t. X, 1825, p. 193.)
L’étude de ces localités offre sous le rapport géologique le plus
grand intérêt.
Aux environs de Forges, on voit le terrain houiller à peu près
vertical et pris dans un pli du terrain de granité et de gneiss. Ce pli
a été formé par le granité indépendant qui se montre à l’O. Il
est recouvert par le grès arkose. Les couches renfermées ne sont
point parallèles à la direction du pli.
A Forges et dans le voisinage des montagnes du Charollais,
comme à Malain, le grès arkose est en couches à peu près horizon-
tales. Près de Forges , il n’est pas recouvert, mais dans un grand
nombre d’autres localités , même à quelques centaines de mètres
de distance , notamment dans un ravin , à l’ouest du hameau
de la Prêle , commune de Saint -Alicaud , il est surmonté de
marnes irisées bien caractérisées, avec lesquelles il se lie intime-
ment par un passage insensible avec concordance de stratification,
et même par des alternances.
M. Drouot pense que ce grès ne doit pas être assimilé au grès
bigarré, comme le propose M. Pidancet, attendu qu’il n’a aucun
des caractères du lambeau de grès observé par Al. Pidancet, non
loin de Dole dans le département du Jura.
D’après la description même qu’en donne AI. Pidancet, ce der-
Soc. géol.y 2e série, tome VIII, 37
578
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
nier grès présente les couleurs qui ont motivé le nom de grès bi-
garré. Il est en couche inclinée et recouvert par le muschelkalk.
Si l’arkose représentait le grès bigarré , il ne se lierait pas inti-
mement aux marnes irisées, puisque, bien que le muschelkalk
n’existe pas dans le voisinage de Malain , ni dans le département
de Saône-et-Loire , les deux formations auraient été séparées par
l’intervalle de tranquillité pendant lequel le terrain calcaire s’est
déposé.
L’argument fondé sur la différence d’inclinaison et sur la dis-
position des gisements des deux formations n’a pas moins de valeur
que ceux précités. Il convient d’entrer à ce sujet dans quelques
détails.
Le terrain houiller du canal du centre est recouvert par des
grès présentant les caractères des formations arénacées qui, au voi-
sinage des Vosges, se trouvent au-dessous des marnes irisées, bien
que l’identité n’en ait pas été constatée par l’étude? des fossiles.
Ces grès ont une inclinaison sinon égale à celle du terrain houil -
ler, du moins tout à fait analogue, surtout eu égard à la plus
grande distance des roches éruptives. Dans les mêmes localités, les
couches de l’arkose sont à peu près horizontales, quoique brisées.
Elles se trouvent très souvent en lambeaux, rangées à diverses
hauteurs sous forme d’escaliers.
Le pli du terrain de granité et gneiss, renfermant le terrain
houiller des environs de Forges, se montre sur une longueur d’en-
viron 7 kilomètres, savoir : depuis le hameau des Bordenets,
commune de Marcilly-lez-Buxy, au N. , jusqu’aux environs de
celui des Bidaux, commune de Saint-Micaud, au S. ; mais dans
cet intervalle , il est recouvert en partie par l’arkose , principale-
ment de chaque côté du ruisseau le Bernem. La largeur de l’ou-
verture de ce pli varie de 50 à 200 mètres. Le terrain houiller qui
affleure est bien caractérisé. 11 renferme de nombreuses empreintes
végétales et une couche de houille qui, en 1845 et 1846', a été
explorée et même exploitée près du hameau de Forges.
Au S. , 20 1 E. de ce hameau , au voisinage du gneiss de l’E ,
dans lepli dont il s’agit, on remarque des couches d’un grès argileux
de couleur bigarrée, grisâtre , rougeâtre et verdâtre. Ces couches
sont dirigés N. 10° E. avec une pente d’environ 85® vers 10. Les
plus voisines du gneiss sont formées d’un poudingue à galets de
gneiss ou de quartz. Elles paraissent appartenir à la formation des
grès qui, dans le bassin du canal du centre, se trouvent entre le
terrain houiller et l’arkose,
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
579
Le terrain de granité et gneiss qui renferme dans un de ses plis
le terrain houiller de Forges, ainsi que les grès de couleur bigarrée
précités, constitue toute la partie occidentale et la ligne de faîte des
montagnesdu Charollais, depuis Charrecey (canton de Givry) j usqu’à
Cliamplecy (canton de Charolles) . Il est caractérisé : 1° par son feld-
spath rosé, couleur de chair ou blanchâtre, grenu ou lamellaire,
rarement lamelleux ; 2° par du mica argentin qui, probablement
comme le feldspath, doit sa couleur à son altération. Cette sorte de
mica n’est pas seule; il y en a d’autres, gris brun , rougeâtre ou
verdâtre. Le quartz ne présente pas de caractères remarquables. Les
parties granitoïdes passent insensiblement aux parties schisteuses,
de sorte qu’il serait impossible de tracer, même sur une carte très
détaillée, les limites du granité et du gneiss de cette formation.
Le granité indépendant qui a soulevé et plissé le terrain de gra-
nité et gneiss est composé : 1° de mica noir brillant dont la cou-
leur ne paraît passer au vert que par suite d’altération ; 2 1 de
feldspath orthose lamelleux, blanc et diaphane lorsqu’il n’est pas
altéré , mais le plus ordinairement rosé , présentant souvent des
cristaux de 5 à 6 centimètres de longueur qui donnent à la roche
la texture porphyroïde ; 3° enfin de quartz hyalin en grains irré-
guliers, blanc diaphane ou rougi dans le voisinage du mica. Ce
granité est quelquefois à grains fins, mais il ne présente pas de
parties schisteuses dans l’intérieur de ses masses ou montagnes.
C’estpour cela qu’il est nommé granité indépendant par opposition
à la dénomination de granité et gneiss donnée à la formation pré-
cédente.
Dans leur voisinage, ces deux formations se mélangent et passent
insensiblement de l’une à l’autre. Le gneiss, dans lequel le mica
brun ou noirâtre domine alors, prend une texture porphyroïde
par suite de la présence de gros cristaux de feldspath orthose, et,
le feldspath augmentant en proportion dans la pâte, la roche passe
âu granité indépendant. Quelquefois ces cristaux de feldspath
peuvent se détacher de la masse du gneiss; c’est ce qui a lieu dans
la partie méridionale du pointement de Bissey-sous-Cruchaud ,
canton de Buxy.
Ce passage du granité indépendant au terrain de granité et
gneiss se montre encore ailleurs que dans les montagnes du Cha-
rollais. On peut l’étudier avec la plus grande facilité à Sampigny,
canton de Couches, notamment sur la rive droite de la petite ri-
vière la Cozance. Le chemin qui suit la vallée traverse un soulè-
vement qui a relevé en escalier la partie occidentale des terrains
de marnes irisées et de lias. Au milieu, le granité indépendant se
580 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
montre recouvert par le gneiss sur lequel reposent les terrains se-
condaires.
Sur le versant orientai des montagnes du Charollais, le granité
indépendant se montre au jour à environ U00 mètres à l’est du
terrain houiller enfermé dans le pli du terrain de granité et de
gneiss. Il commence au pied du plateau sur lequel est bâti le
hameau de Martrat , commune de Marcilly-lez-Buxy , et se pro-
longe au S. , au delà de la limite du département. La ligne de
séparation de ces deux formations cristallines passe un peu à Test
du bourg de Mont-Saint-Vincent, et paraît suivre la vallée de
l’Arconce , dans laquelle elle est recouverte par le terrain d’allu-
vion. Elle disparaît sous les terrains secondaires , au S. , près du
village de Mornay. La direction de cette ligne de séparation est à
peu près parallèle au cours des rivières la Bourbince et la Dlieune
coulant dans le voisinage, ainsi qu’à l’axe de la chaîne du
Charollais. Elle va à peu près N. 40° E. Les montagnes de l’ouest
sont de gneiss, celles de l’est sont de granité indépendant, Les
premières sont beaucoup plus élevées que les secondes. On conçoit
facilement qu’il doit en être ainsi , puisque c’est le granité indé-
pendant qui a soulevé le terrain de granité et de gneiss dont il est
surmonté.
A l’E., le granité indépendant butte entre les formations secon-
daires (le lias et les calcaires oolitiques) qui ne sont pas relevées
à son approche, mais bien en couches à peu près horizontales.
Cette circonstance porte à penser que ce granité a surgi lorsqu’il
était déjà solidifié.
Le grès arkose repose en quelques localités sur le terrain de
granité et gneiss, en d’autres sur celui du granité indépendant. Il
a subi de nombreuses dislocations postérieurement à sa formation,
bien que ses lambeaux soient demeurés horizontaux. Ainsi , par
exemple , il constitue le plateau sur lequel est bâti le bourg du
Mont-Saint-Vincent, à 603 mètres au-dessus du niveau de la
mer , tandis qu’aux environs de Saint-Micaud , il se trouve à
275 mètres seulement.
Ces dispositions s’expliquent facilement en admettant que les
divers terrains ont été élevés ou abaissés par des mouvements pos-
térieurs aux premiers soulèvements, mais en suivant les fissures
normales à la surface de la terre et produites par ceux-ci.
L’arkose a été déposé immédiatement après l’apparition du gra-
nité indépendant. A en juger par ce qui a lieu dans le départe-
ment de Saône-et-Loire , son existence paraît due à cette appari-
tion même. Le terrain des marnes irisées représente la période de
DU 1/j AU 18 SEPTEMBRE 1851.
58?
tranquillité qui a suivi. C’est donc à ce dernier terrain qu’il faut
rapporter l’arkose et non pas à celui du grès bigarré , puisque ce
dernier est séparé du précédent par le muschelkalk qui représente
une période de tranquillité.
A la suite de la communication de M. Drouot une discussion
s’engage entre M. Drouot et M. Pidancet; MM. de Christol ,
de Charmasse, Raulin y prennent part.
M. Layalle fait remarquer qu’ayant poursuivi plusieurs fois
le prolongement des couches d’arkose de la Côte-d’Or, il a été
conduit jusqu’au terrain houiller d’Épinac. D’après lui, les
observations n’ont peut-être point assez précisé le rapport des
arkoses avec le terrain houiller, pour donner la certitude que
ces arkoses ne se lient point aux dépôts de combustible.
Une discussion s’engage pendant quelque temps sur la zone
de X O sire a cymbium. M. de Christol dit que XOstrea ( Gry -
phœa) cymbium , très rare d’ailleurs dans la Côte d’Or, se
trouve dans une ‘couche supérieure au calcaire à Bélemnites.
Quelques membres semblent considérer cette coquille comme
pouvant appartenir à la base de la série oolitique. M. Beaudouin
fait observer que, dans les couches de l’oolite inférieure, on
trouve une espèce très voisine de XOstrea cymbium. Malgré
la ressemblance, il la croit différente de cette espèce. M. Sæ-
mann ajoute qu’une espèce voisine de celle-ci, X Ostrea cal-
ceola , qui appartient aux couches supérieures du lias , a sou-
vent amené des confusions.
A la suite de cette discussion, la Société aborde la question
de la délimitation des étages.
M. Nodot fait observer que c’est lui qui le premier, dans la
Côte-d’Or, a adopté les dénominations anglaises, appliquées
déjà dans d’autres parties de la France par M. Thirria.
Sur la prière de M. de Christol, M. Cotteau entre dans quel-
ques explications sur la valeur qu’il croit devoir attribuer aux
subdivisions des couches de la grande oolite. M. Cotteau
assure que , n’ayant à cet égard d’autre opinion que celle de
M. Alcide d’Orbigny, il ne peut mieux faire que de reproduire
sa classification. B inscrit cette classification sur le tableau et
donne les raisons par lesquelles il s’accorde avec M. d’Orbigny
582
RÉUNION EXTRAORDINAIRE À DIJON ,
à réunir dans un même étage, sous le nom de bathonien, la
grande oolite, le forest-marble et le corn-brash.
M. Beaudouin pense, comme M. Gotteau, qu’il faut supprimer
les dénominations particulières jusqu’à présent employées, et
qui ne sont qu’artificielles; il ne voit dans l’oolite que deux
horizons certains : Xoæford-clay et 1 ë fut 1er’ s earth.
M. de Christol dit que depuis longtemps il n’attache qu’une
valeur conventionnelle aux trois divisions réunies par M. d’Or-
bigny dans son étage bathonien. Les divisions de grande oolite,
de forest-marble, de corn-brash, ne doivent être conservées
que comme des points de repère , indiquant d’une manière spé-
ciale les divers points de la série oolitique.
M. Constant Prévost pense qu’en général il y a danger à
identifier des dépôts formés dans des localités éloignées les unes
des autres. Les subdivisions ne se retrouvent même point dans
des localités voisines, et il lui semble impossible qu’un même
dépôt se continue sur une grande surface avec les mêmes fossiles
et les mêmes caractères minéralogiques.
M. Pidancet dessine sur le tableau plusieurs coupes, par
lesquelles il établit la similitude des couches de Beaume-la-
Boche et du département du Doubs.
MM. Drouot et Boyer insistent également sur la similitude
des couches de Beaume-la-Boche et de la Champagne.
M. Beaudouin lit le mémoire suivant :
Mémoire sur le terrain Kelloway-oxfordien du Chdtillonnais ,
par M. Jules Beaudouin (1).
Parmi les divers terrains qui composent le sol du département
de la Côte-d’Or se trouve un groupe qui, sous beaucoup de rap-
ports, mérite une étude spéciale et détaillée; je veux parler du
groupe Kelloway-oxfordien.
En effet , outre l’intérêt purement scientifique que les terrains
de ce groupe peuvent offrir à la géologie, ils sont pour la localité
de la plus haute importance sous le rapport de l’industrie , car ils
alimentent presque à eux seuls les nombreuses usines à fer du dé-
y
(1) Ce mémoire est extrait de la Description gécAogïque clé Vùr-
rondissement de Châtillon , dont M. J. Beaudouin a seulement publié
la première partie.
DU là AU 18 SEPTEMBRE 1851. 58S
parlement. Je me propose dans ce travail de n’envisager la ques-
tion que sous le point de vue purement scientifique.
Les terrains qui font l’objet de ce mémoire présentent une masse
puissante qui se rencontre sur plusieurs points, mais particulière-
ment au nord du département. Elle acquiert dans cette dernière
partie un développement important qui permet d’y trouver des
types parfaitement caractérisés : pour cette raison, je choisirai le
Çhâtillonnais comme objet de cette étude.
.Le département est, pour ainsi dire, limité au N. par une fa-
laise qui forme sur la plaine , s’étendant à son pied , une brusque
saillie, ayant en moyenne une élévation de 95 mètres. C’est un
de ces remparts naturels qui protègent la capitale de la France et
qui ont été si bien décrits par MM. Dufrénoy et Elie de Beaumont.
La hauteur moyenne au-dessus du niveau de la mer du plateau qui
couronne cette falaise, et qui s’incline au N. -O. vers le dépar-
tement de l’Aube est de 320 mètres à son pied , et à une distance
moyenne de 2000 mètres s’étend en s’inclinant un peu au S. une
plaine légèrement ondulée et d’un relief très régulier. (Voyez la
coupe n° 1 faite à l’est de Chàtillon-sur-Séiiiê , pl. X. )
Tel est l’aspect extérieur qu’offre topographiquement le groupe
Kelloway-oxfordien : la falaise , composée d’une masse puissante
de marnes et de câlcâires marneux, constitue sa partie supérieure;
la petite plaine inclinée qui esta son pied, et qui n’en est vérita-
blement que la base, composée de marnes et de calcaires ferrugi-
neux, forme sa partie inférieure.
Ces deux parties, qui sont entre elles en stratification concor-
dante , reposent de la même manière sur une masse puissante de
calcaires, qu’on peut rapporter au corn-brash, au forest-marble ou
même au great oolite des Anglais. La partie supérieure se confond,
par ses couches les plus élevées , avec le terrain corallien. Il est
difficile de trouver la limite de ces deux terrains, bien que, par
leur ensemble, ils se distinguent parfaitement l’un de l’autre.
Le groupe entier , qui conserve ses caractères à de très grandes
distances, présente une légère inclinaison du S.-E. au N. -O., ainsi
d’ailleurs que les terrains entre lesquels il se trouve compris.
Il est, de tous ceux qui composent dans le département la série
jurassique, celui qui est le plus riche en fossiles. La vie y a pris un
développement remarquable et s’y est manifestée sous les formes les
plus diverses : toute la série des divisions du règne animal s’y
trouve représentée, depuis les zoophytes jusqu’aux sauriens qui y
ont acquis une taille gigantesque ; le règne végétal y a aussi laissé
de nombreux débris de conifères; mais, ce sont surtout les mol-
584 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
lusques qui dominent par leur nombre, et parmi eux les acéphales.
Ces mollusques tous marins , se composent, ainsi qu’on le verra
plus loin, d’animaux pélagiques, subpélagiques et littoraux. Leurs
débris offrent un état de conservation qui éloigne l’idée d’un,
transport lointain , et qui dénote au contraire qu’ils ont dû vivre
dans les lieux où on les trouve. Certaines coquilles, qu’on rencontre
encore avec les deux valves fixées aux calcaires qui formaient
alors le fond de la mer Kelloway-oxfordienne, viendraient au be-
soin lever toute espèce de doute à cet égard. Quant aux mollus-
ques, les espèces du groupe entier, beaucoup plus nombreuses dans
la partie inférieure que dans la partie supérieure, s’élèvent presque
au chiffre de 400 et conservent entre elles les proportions sui-
vantes :
Annélides
Céphalopodes. . .
Gastéropodes. . .
Acéphales
Radiaires
Zoophytes
Quant au mode de minéralisation de ces fossiles , il varie , ainsi
qu’on le verra plus loin, suivant les espèces et suivant les couches
qui les renferment.
De” même que les deux parties du groupe Kelloway-oxfordien
diffèrent, ainsi que je l’ai dit plus haut, sous le rapport du
relief topographique et de la nature minéralogique , de même
aussi elles se distinguent sensiblement entre elles sous le rapport
paléontologique. Pour ces raisons qui vont être développées, j’éta-
blis dans le groupe entier deux divisions naturelles qui , malgré
certains rapports communs, se distinguent cependant d’une manière
facile l’une de l’autre. Ces divisions , d’ailleurs parfaitement indi-
quées par la nature, paraissent correspondre assez exactement à
certaines coupes établies sur d’autres points par divers auteurs. Je
forme donc cette division de la manière suivante :
i' Terrain des marnes et calcai-
res gris cendré, avec couches
de spongiaires.
! Terrain des marnes et calcai-
res, avec minerai de fer ooli-
tique.
Après avoir donné dans ce qui précède des observations géné-
rales qui s’appliquent au groupe entier , je vais passer aux détails
Groupe
KELLOWAY-
1XFORDIEN.
f 2° Sous-groupe supérieur,
\ 1° Sous-groupe inférieur,
585
DU 14 AU 18 SEPTEMBRE 1851.
particuliers à chacun des sous-groupes, en adoptant , pour cette
description, la marche la plus naturelle, c’est-à-dire en commen-
çant par les parties inférieures.
§ I. Sous-groupe inférieur . — Terrain des marnes avec minerai
de fer ooli tique.
Je regarde les terrains suivants comme les analogues de ce sous-
groupe , toutefois quelques uns avec une certaine circonspection ,
ainsi que l’indiquent des points de doute :
Kelloway-rock et oxford-clay inf. — Auteurs anglais. — A ngleterre.
? Marne argileuse de Dives. — Auteurs divers. — Normandie.
Assise oxfordienne ferrugineuse. — • Cotteau. - — Yonne.
Marne inférieure avec minerai de fer. - — Sauvage et Buvignier. —
Ardennes.
Marne moyenne avec minerai de fer oolitique. — Thirria. — Haute-
Saône.
Fer oolitique sous-oxfordien. — Marcou. — Doubs.
Marnes oxfordiennes et kelloway-rock. — Thurmann. — - Suisse.
Dépôts littoraux à oolites ferrugineuses de l’oxford-clay. — Gressly.
— Canton de Soleure.
? Pisen-oolite du Brauner-Jura. — Quenstedt. — Allemagne.
Ce sous-groupe se compose d’une masse de marnes et de calcaires
très peu homogènes, d’une dureté très variable, à cassure terreuse,
à cohésion quelquefois très faible , laissant souvent en relief les
oolites ferrugineuses qu’ils renferment, et presque toujours tachant
les doigts. Leur couleur, également très variable, est cependant en
général jaune rougeâtre dans la partie supérieure , gris bleuâtre et
même noirâtre dans la partie inférieure. Ils sont obscurément di-
visés en strates, tantôt très minces, tantôt d’une certaine épaisseur.
Ils renferment en plus ou moins grande abondance des oolites fer-
rugineuses , confusément et irrégulièrement mélangées dans leur
masse. Ces oolites sont de forme ovale et aplatie , composées de
couches concentriques ; leur volume est peu variable , les plus
grosses ayant un millimètre dans leur plus grand diamètre : un
très petit nombre est attirable à l’aimant.
Sans établir de divisions dans ce sous-groupe , on pourrait ce-
pendant distinguer sa partie inférieure (les assises bleu noirâtre )
de sa partie supérieure (les assises jaune rougeâtre); car, outre la
différence de couleur qui est assez constante, les premières offrent
dans leur ensemble une disposition plus massive, des strates moins
distincts, des fossiles moins nombreux , parmi lesquels, quelques
586
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
uns seulement leur sont particuliers. En outre, on y trouve fré-
quemment des débris de grands végétaux monocotylédonés à l’état
charbonneux , et quelquefois du jayet. Ces assises inférieures ren-
ferment aussi en certaine proportion des sulfures de fer, qui, lors-
qu’ils sont exposés à l’influence des agents atmosphériques , pas-
sent tà l’état de sulfates et facilitent ainsi par leur décomposition
la désagrégation des marnes et des calcaires qui les renferment.
Les fossiles du sous-groupe sont en général à l’état de moule in-
térieur et de la même matière que la gangue qui les enveloppe.
C’est particulièrement le cas, à quelques exceptions près, des am-
monites, des gastéropodes, des acéphales et des zoophytes; les ra-
diaires offrent toujours, comme ailleurs, leurs parties solides avec
une apparence spatliique : les bélemnites conservent constamment
leur texture rayonnée. Quelques fossiles se présentent, mais dans
dés circonstances particulières, à l’état d’hydrate de fer; les diffé-
rents ossements des sauriens et des poissons ont conservé leur
substance osseuse , et leurs dents présentent toujours leur émail
dans l’état de conservation le plus parfait.
Les principaux fossiles du sous-groupe inférieur sont les sui-
vants (1) :
SAURIENS .
Jchthyosaurus commuais, Conyb. (dents, côtes, vertèbres, humérus).
M. F.
Plesiosaums.. . ., Conyb. et de la Bêche; plusieurs espèces? (mâ-
choires, vertèbres, côtes, fémurs, phalanges). M. F.
Teleosauriis ...., Geoff.-Saint-Hilaire (mâchoire). P. F.
Mégalo s auras... ., Buckland (dent). T. R.
POISSONS.
Pycnodus gigas, Agass. (dents, palais). M. F.
Strophodus mag/ms , (dents). M. F.
Squalus. . . . (mâchoire, dents). P. F.
INSECTES.
Moules formés dans des trous creusés par des larves dans une tige
de végétal. T. R.
(4) Le plus ou moins de fréquence des individus de chaque espèce
étant une circonstance utile à constater, je prendrai soin de l’indiquer
par les signes suivants : très fréquent, T. F.; fréquent, F.; moyenne-
ment fréquent, M. F. ; peu fréquent, P. F. ; rare, R. ; très rare, T. R.
587
DU lâ Au 18 SEPTEMBRE 1851.
GRUSTAGÉS.
Lithodes (pinces). T. R.
8 autres espèces non déterminées (pinces, articles de pattes, cara-
paces). M. F. if
ANNÉLIDE3.
Serpula vertebralis , Sow. R,
1 3 autres espèces.
CÉPHALOPODES.
Aptychus. \ 0 espèces , presque toutes nouvelles.
N au ti lus granulosusy d’Orb. P. F.
3 autres espèces.
Ammonites , 28 espèces, dont :
réfractas , Haan. R.
— Christolii, nobis. R.
— cr en a tus, Brug. M. F.
— Bakeriœ, Sow. P. F.
— Sutherlandiœ, Murch. P. F.
— Goliatlms, d’Orb. P. F.
— Lamberti, Sow. R.
— caudatus , Sow. T. F.
— lurmlçiy Ziet. P. F.
— caUoviénsis , Sow. P. F.
— macrocephalus , Schloth., P. F.
— pustulatus, Haan. R.
— bipartitus , Ziet. P. F.
— coronatus , Brug, F.
— Duncani, Sow. M. F.
— oculatus, Phill. P. F.
— anceps , Rein. T. F.
— Constantii , d’Orb. P. F.
— Eugenii , Rasp. R.
— athleta , Phill. P. F.
— BabcanuSy d’Orb. R.
Belemnites h as ta tus, Blainv. T. F.
— Puzozianufy d’Orb. R.
— k S auv an a us lis y d’Orb. R.
— r Moretiiy nobis. R.
3 autres espèces.
GASTÉROPODES.
25 espèces dont un grand nombre n’est pas décrit, et parmi les-
quelles :
Melania striata, Sow. R,
. Çerithium pris moideum, Buvig. P. F.
588
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
ACÉPHALES.
Terebratula, 36 espèces, dont :
— incons tan s , Sow. T. F.
— lagenalis , Schlotb. P. F.
— reticularis , Schloth. M. F.
— pola, de Buch. M. F.
— impressa, Bron. P. F.
— senticosa, Schloth. P. F.
— Burei , nobis. T. R.
Ostrea dilata ta, Desh. M. F.
— gregaria , Sow. M. F.
— - Marshii , Sow. P. F.
Plusieurs autres espèces.
Pectcn , plusieurs espèces, parmi lesquelles :
— fibrosus , Sow. M. F.
— vagans, Sow. P. F.
— Collineus , Buvig. R.
Lima , plusieurs espèces, parmi lesquelles:
— probosciclea, Sow. F.
Trigonia cos ta ta, Park. P. F.
Isocardia mini ma, Sow. M. F.
— elegans , Desh. R.
Lyonsia, v. scripta, Sow. P. F.
Beaucoup d’autres espèces appartenant aux genres : Plicatule, Avi-
cule, Gervillie, Spondyle, Inocérame, Perne, etc.
RADIAIRES.
Beaucoup d’espèces, parmi lesquelles :
Ci davis coproides , Agass. P. F.
— spatula, Agass. M.F.
Dy s aster bicordatus , Agass. F.
Holoctypus depressus, Agass. P. F.
P y ga s ter te nui s , Agass. R.
Laganum ( Pygurus , Agass.) Marmontii , nobis, P. F.
Millericrinus B ea union tian us , d’Orb. F.
— aculeatus, d’Orb. P. F.
— Nodotianus . d’Orb. M. F.
— subechinatus , d’Orb. P. F.
Âsterias jurensis , Munst. R.
20OPHYTES.
Plusieurs espèces, parmi lesquelles :
Tragos tuberosum, Goldf. M.F.
Le sous- groupe inférieur , dont je viens d’indiquer seulement
les principaux fossiles, a une puissance moyenne de 10 mètres ap-
BU Iti ALI 18 SEPTEMBRE 1851, 580
proximativement. Je donne à la fin de ce travail le détail des dif-
férentes couches qui le composent.
§ II. Sous-groupe supérieur. — Terrain des marnes et calcaires
gris cendré , avec couche de spongiaires.
Je regarde les terrains suivants comme pouvant être les analo-
gues de ce sous-groupe ; je conserve néanmoins , comme pour le
sous-groupe inférieur, des doutes à l’égard de quelques uns :
Oxford-clay sup. — Auteurs anglais. — Angleterre.
? Argiles de Dives (part. sup.). — Auteurs divers. — Normandie.
? Assise oxfordienne sup. ) n v
. c r [ — Lotteau. — Yonne.
Assise oxfordienne moy. j
Roches marneuses et siliceuses. — Sauvage et Buvignier. — Ar-
dennes.
Terrain à chailles. — Thirria. — Haute-Saône.
Marnes oxfordiennes. )
Terrain argovien. . . j
Polypiers spongiaires du terrain à chailles. — Gressly. — Argovie.
Oxfordien supérieur. — Thurmann. — Suisse.
Spongiten loger. — Quenstedt. — Allemagne.
Marcou. ■ — • Jura salinois.
Ce sous-groupe diffère essentiellement, sous plusieurs rapports,
de celui dont je viens de parler. A leur partie supérieure, les
marnes et calcaires de ce dernier perdent à peu près leurs éléments
ferrugineux et prennent une couleur plus claire ; ils passent ainsi
insensiblement, et quelquefois brusquement, à un calcaire blanc
grisâtre, plus ou moins compacte et rarement siliceux, qui ren-
ferme plus d’oolites ferrugineuses , et qui , lorsque le fer s’y ren-
contre accidentellement , ne le présente qu’à l’état de sulfure
cristallisé. Ce calcaire , qui appartient au sous-groupe supérieur ,
est disposé tantôt en bases plus ou moins irrégulières, tantôt en
masses confuses de nodules ou rognons de différents volumes, juxta-
posés et faiblement soudés entre eux par une marne friable. Il est
recouvert par une masse puissante de marnes et de calcaires mar-
neux gris bleuâtre , alternant souvent ensemble , et qui vont se
perdre, à leur partie supérieure, dans le groupe corallien.
Le sous-groupe supérieur, qui peut offrir une puissance ap-
proximative de 100 mètres, renferme beaucoup moins de fossiles
que le sous-groupe inférieur ; quelques uns lui sont communs
avec ce dernier et plusieurs lui sont spéciaux. A ce point de
vue , comme sous le rapport minéralogique , on peut le diviser
en deux parties : Tune, la plus inférieure, comprenant les calcaires
590 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
noduleux avec beaucoup de fossiles; l’autre se composant d’une
masse de marnes et de calcaires marneux avec très peu de débris
de corps organisés. Mais je n’établis ici cette division que pour
faciliter mon travail, car l’une et l’autre partie ne peuvent se séparer
dans la nature et appartiennent bien évidemment au même sous-
groupe.
jo Partie inférieure . — Les calcaires à nodules ou rognons,
d’une puissance de quelques mètres seulement, sont caractérisés
par la présence d'un banc qui renferme en abondance des polypiers,
des spongiaires de plusieurs espèces et quelquefois d’un très grand
volume. C’est cette partie qui correspond sans aucun doute au ter-
rain argovien de M. Marcou, par tous les caractères qu’elle pré-
sente (1). Dans le Cliâtillonnais, les éponges ne se rencontrent que
dans une seule couche , tandis que dans le canton d’Argovie et les
environs de Salins on trouve des nappes de ces polypiers sur plu-
sieurs couches du même terrain. Ce banc à spongiaires est d’ailleurs
un horizon géologique très sûr par la constance de sa position , sa
nature et sa manière d’être. On le rencontre en affleurement à la
surface du sol à une distance moyenne de deux kilomètres, au
sud du pied de la falaise calcaréo-marneuse , où il forme une
bande peu large. C’est ainsi qu’on le voit affleurer au nord-est
de Gérilly, un peu au nord d’Etrochey, au sud-est de Montliot,
près de la ferme de la Grange-au-Clerc, près celle de la Clias-
saigne, un peu au sud de Mosson, au nord-est deBrion, au nord-
est de Layer, au sud de Courban, au nord de Louême, d’où il paraît
se diriger sur le département de la Haute-Marne. Dans la plupart
des localités que je viens de citer , la terre arable (2) qui recouvre
(1) Je dois à l’obligeance de M. J. Kœchlin, de Mulhouse, des dé-
tails intéressants sur la manière d’être de ce même terrain en Alle-
magne et en Suisse, où il l’a observé. D’ailleurs, en le voyant cette
année dans le Châtillonnais, il n’a pas hésité à le reconnaître.
(2) Je ne puis négliger ici une remarque que j’ai faite au sujet des
terres dont la couche à spongiaires forme le sous-sol ; je veux parler
de l'abondance vraiment extraordinaire avec laquelle s’y produit
X Euphorbia faicata. C’est à un point tel, qu’entre Louême et Cour-
ban, certains champs en jachère paraissent porter une vériîable ré-
colte de cette plante. Cette particularité pourrait être due à la per-
méabilité comparative du sous-sol, jointe à la grande divisibilité de la
terre qui le recouvre; circonstances qui peuvent ne pas se rencontrer
au même degré dans les terrains voisins. Quoi qu’il en soit, la grande
fréquence de X Euphorbia faicata m’a toujours décelé, dans le Châtil-
lonnais, la présence de la couche à spongiaires.
t)U 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
591
la couche à spongiaires est peu profonde , et la charrue amène
à la surface une très grande quantité de pierres qui sont presque
toutes des polypiers plus ou moins encroûtés de calcaire. Ils sont
quelquefois en si grande abondance, qu’on les ramasse en tas,
comme dans le Wurtemberg, pour en débarrasser les champs.
Les nombreux fossiles renfermés dans cette couche à spongiaires
ont conservé , pour la plupart , leur test dans toute sa fraîcheur ,
mais adhèrent souvent à la gangue : quelques uns, qu’on rencontre
dans des lentilles marneuses accidentelles, sont dans un état de con-
servation parfaite qui permet de les comparer , sous ce rapport ,
aux fossiles tertiaires les plus beaux. Parmi les espèces que ren-
ferme cette couche, plusieurs sont tout à fait caractéristiques et la
font toujours reconnaître ; je les indique par le signe * dans la
liste des fossiles du sous-groupe que je donne plus bas.
2° Partie supérieure . — La couche à spongiaires est immédiate-
ment recouverte, ainsi que je l’ai dit plus haut, par une masse de
marnes et de calcaires marneux qui présente une puissance ap-
proximative de 100 mètres. Elle varie peu dans son ensemble et
offre peu d’accidents minéralogiques. On y rencontre quelquefois
de beaux cristaux de calcaire métastatique , ainsi que des boules
calcaréo-marneuses, en général d’un petit volume, et dont le centre
est occupé par un faible noyau d’hydrate de fer, ou par un débris
de corps organisé. On pourrait regarder ces boules comme étant,
mais en diminutif, les analogues de celles qu’on appelle chailles
dans d’autres localités. Du reste , je dois dire que l’élément siliceux
est peu abondant dans ce terrain ; il est très faiblement répandu
dans les bancs calcaires subordonnés ; mais il devient plus abon-
dant à mesure qu’on se rapproche du département de l’Yonne, où
on le rencontre en proportions notables dans certaines localités.
Cette masse puissante renferme très peu de fossiles. Une partie
de ces fossiles est à l’état de moule intérieur; une autre partie a
conservé le test, qui alors est presque toujours recouvert d’orbieules
siliceux. Comme espèce caractéristique, je citerai une grande huître
qui paraît être nouvelle , et qui forme par places de véritables
bancs très faciles à reconnaître.
Quant aux fossiles du sous-groüpe supérieur , leur ensemble
diffère de celui du sous-groupe inférieur ; cependant beaucoup
d’espèces sont communes à l’un et à l’autre. Dans le premier, on
ne rencontre aucun vestige de sauriens, qui semblent avoir disparu
tout à fait; les poissons y sont très rares; ds sont seulement repré-
sentés par le genre Picnodus , qui y a laissé quelques dents isolées ;
592
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON
les crustacés également sont très peu abondants. Pour les mollus-
ques, les principaux sont les suivants :
ÀNNÉLIDE8.
Serpula vertcbralis, Sow. R.
— plusieurs autres espèces.
CÉPHALOPODES.
A p ty chus, 2 espèces.
Ammonites cordatus, Sow. F.
— plicatilis , Sow. F.
- — oculatus , Phill. P. F.
* — » canaliculatus, Munst. M. F.
* — Henri ci, d’Orb. P. F.
* — Eucharis , d’Orb. P. F.
Bclemnitcs hastatus , Blainv. M. F.
— Sauvanausus , d’Orb. R.
* — Royerianus , d’Orb. M. F.
GASTÉROPODES.
Un petit nombre d’espèces, parmi lesquelles :
Melania striata , Sow. P. F.
Cerithium prismoideum , Buvig. R.
ACÉPHALES.
* Tercbratula bucculenta, Sow. P. F.
* — pectunculuSy Schloth. F.
* — tctragona , Rœmer. T. F.
* — - coarc ta ta, Sow. M. F.
— Burci, nobis. P. F.
— indcntata, Sow. P. F.
* Terebratella Fleuriausa , d’Orb. R.
Ostrea gregaria, Sow. R.
* — denticUlata9 Rœmer. T. F.
* Pecten subtextorius , Munst. P. F.
Lima proboscidea , Sow. M.F.
Trigonia costa ta, Park. P. F.
* — clavcllata, Park. P. F.
Isocardia minium , Sow. R.
* Opis arduennensisy d Orb. R.
Quelques autres espèces appartenant aux genres . Plicatule ,
Spondyle, Nucule, Arche, etc.
RAD1AIRES,
Cidaris coproides , Agass. P. F,
593
DU 14 AU 18 SEPTEMBRE 1851.
* Cidaris Blumenbachii, Munst. P. F.
* — marginatus , Goldf. M. F.
* coronatus , Goldf. R.
Holoctypus depressus , Agass. P. F.
Millericrinus , 2 espèces paraissant nouvelles.
As le ri ns jure nsi s, Munst. P. F.
* — scuta ta, Goldf. R.
ZOOPHYTES.
40 espèces de polypiers, dont un grand nombre de spongiaires.
* Scyphia obliqua , Goldf. M. F.
* — pertusa, Goldf. P. F.
*, — paradoxa, Munst. M. F.
* Ceriopora angulosa , Goldf. F.
* _ striata, Goldf. F.
Je termine ce travail par une coupe générale qui le résume ?
pour ainsi dire, quoiqu’elle embrasse le groupe entier; cependant,
en raison de Fimportance pratique du sous-groupe inférieur, je
crois utile d’entrer, au sujet de ce dernier, dans des détails que je
néglige pour le sous-groupe supérieur. La partie de la coupe qui
concerne les marnes avec minerai de fer oolitique, et qu’on pour-
rait presque appeler technologique, est établie en moyenne d’après
plusieurs coupes partielles, prises dans les exploitations d’Etro-
cliey, pour la partie supérieure, et dans celles du nord-est du
Châtillonnais, pour la partie inférieure.
Soc. gêol ., 2e série , tome VIII.
38
GROUPE KELLOWAY - OXFORDI EN,
594 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON 7
Coupe générale du groupe K elloway-oxfordien .
NATURE DES ASSISES.
('Puissante masse de marnes et
de calcaires marneux alter-
nant ensemble; avec cal-
caire métastatique et petites
boules calcaréo-marneuses.
Assise calcaréo - marneuse
avec couches à spongiaires.
Calcaire à nodules ou rognons
sans minerai oolitique.
Marne jaunâtre, passant quel
quefois aucalcaire marneux
avec minerai de fer oqliti-
que. Exploité.
Marne calcaire jaunâtre près
que sans minerai, mais en
renfermant quelquefois des
lits très minces. Non ex-
ploité.
Calcaire très dur, un peu sili- Peu de fossiles,
ceux, avec cavités remplies
d’hydrate de fer pulvéru-
lent. Non exploité.
FOSSILES.
Ammonites plicalilis.
Melania striata.
Trigonia clavellata.
Oslrea, grande espèce.
Ammonites Iienrici.
Terebratula pectunculus.
Terebratula tetragona,
Scyphia paradoxa.
Ceriopora angulosa.
Ammonites cfinaliculalus
Ammonites plicalilis.
Terebvatella Fleuriausa.
Belemnites hastalus.
Lima proboscidea.
Mêmes fossiles que ci-
dessus.
[Marne jaune grisâtre, pas-
sant quelquefois au calcair e
marneux, avec un peu de
silice ; très peu de minerai
disséminé. Non exploité.
IMarne et calcaire marneux,
jaune grisâtre, avec minerai
oolitique disséminé et en
lits surbordonnés. Exploité.
iMarne grisâtre, passant sou-
vent au calcaire, avec un
peu de minerai disséminé à
la partie inférieure. Non
exploité.
[Marne gris bleuâtre , avec
minerai disséminé. Non ex-
ploité.
■Marne bleu noirâtre, avec
minerai oolitique noir dis-
séminé. Exploité.
Minerai oolititiqne rougeâ
tre, très peu mélangé de
marne. Exploité.
Marne noirâtre et friable ,
avec minerai disséminé,
médiocrement abondant.
Exploité.
Marne calcaire noire. Non
y exploitée.
LOCALITÉS.
PUIS-
SANCE.
Falaise régnant dans'
\
toute la partie nord
1 Métrés, j
de l’arrondissement
} 96,00
de Cbâlillon.
1
Çéiillv.
Étrochey.
Mouliat.
Masson.
Lonème, etc.
Mêmes localili
ci-dessus.
Sainte-Colombe.
Étrochey.
Mouliat, etc.-
Mêmes localités que'
ci-dessus.
Mêmes localités que'
ci-dessus.
Peu de fossiles.
Beaucoup de fossiles : sau-
riens, poissons, crustacés.
Nautilus granulosus.
Mêmes localités que
ci-dessus.
Mêmes localités
ci-dessus.
que
Mêmes fossiles
dessus.
que
Crustacés.
Végétaux.
Fossiles peu nombreux.
Très peu de fossiles.
Grands Aptychus.
Terebratula Bureii.
Ammonites coronatus.
Ammonites calloviensis.
Mêmes fossiles que ci-
dessus.
Mêmes localités que'
ci-dessus.
Étrochey.
Veuxbaulles.
Mêmes localités que'
ci-dessus.
Veuxbaulles.
Boudreville.
Mêmes localités que'
ci-dessus.
1,00
pie)
[ 5,00
1,55
0,82
0,55
1,00
1,30
2,00
0,60
0,40
0,60
1,00
Mêmes localités que \ q vq
ci-dessus. j ’
Total de la puissance du groupe entier j 109,8
DU là AU 18 SEPTEMBRE 1851.
595
Je crois utile de joindre, en forme d’appendice, au mémoire
qui précède, quelques considérations sur un terrain confondu
assez généralement, et qu’il est facile en effet de confondre avec le
sous-groupe inférieur, quoi qu’il soit d’un âge bien différent : je
veux parler de certaines argiles marneuses qui renferment plus
ou moins de minerai oolitique et qu’on exploite avec avantage.
Ces argiles, d’un brun rougeâtre, d’une puissance moyenne de 2 à
3 mètres, sont disposées en masse et ne présentent pas la moindre
trace de stratification. Elles contiennent les mêmes fossiles que les
marnes avec minerai de fer oolitique; mais elles ne les présentent
pas en général aussi intacts , à l’exception cependant de quelques
uns qui sont passés à l’état de fer hydraté. Elles ne sont jamais re-
couvertes et reposent tantôt sur les calcaires du groupe oolitique,
tantôt sur les marnes avec minerai de fer elles-mêmes. Dans ce
dernier cas, celles-ci offrent, au point de contact, une surface
corrodée qui présente en relief les fossiles et les autres corps durs
qu elles renferment.
Cette masse d’argiles rougeâtres sont le résultat d’un remanie-
ment par les eaux diluviennes des marnes avec minerai de fer;
aussi accompagnent-elles presque constamment ces dernières,
lorsque celles-ci n’ont pas entièrement disparu. Leur position
respective est aussi également digne de remarque : les marnes
ferrugineuses, qui sont en place, ne se rencontrent pour ainsi dire
jamais au sud des argiles rougeâtres. La disposition du minerai
lui-même mérite de fixer l’attention : dans les marnes du sous-
groupe inférieur il se présente en masses lenticulaires plus ou
moins étendues ; dans les argiles rougeâtres, au contraire, on le
rencontre en lits à peu près horizontaux. Cette particularité, que
je rends sensible par les figures 5 et 6 (pl. X), suffirait seule au
besoin pour distinguer ces deux terrains.
J’ajouterai que le minerai des argiles rouges est beaucoup plus
pur, plus dégagé des matières étrangères que celui des marnes
ferrugineuses; aussi est-il très recherché de l’industrie, qui même
aurait quelque peine à s’en passer. Cette circonstance est due en
grande partie au lavage que les eaux diluviennes ont préalable-
ment fait subir au premier, lavage auquel ne peuvent guère sup-
pléer les moyens imparfaits employés aujourd’hui (1).
Je ne saurais trop insister sur la distinction à établir entre les
(1) Dans la partie de mon ouvrage, consacrée à l’industrie minérale,
je traite avec détail cette question ainsi que celles qui se rattachent
à la recherche, à la préparation et à l’emploi des minerais de fer.
596 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
marnes avec minerai de fer et les argiles rougeâtres ; car ces deux
terrains appartiennent, ainsi que je Fai dit, à des époques bien
différentes : le premier rentre dans la période jurassique, et le se-
cond, dépendant de la période diluvienne, se rattache aux derniers
phénomènes qui ont agité la surface du globe.
Description de quelques espèces fossiles particulières au sous-groupe
inférieur du groupe Kelloway-oxfordien du Châtillonnais .
Ammonites Christolii , nobis. — PI. X, fig. 1 et 2.
Caractéristique. — Testa inflatâ , subtrigonâ : infractibus involutis ,
latiSy compressis : ultimo tribus locis obtusè angulatis inœqualiter
dilatcito ; 18 costis lœvigalis, in dorso continuas, bi vel trifurcatis
transversim ornato : dorso lato , convexo : umbilico angusto , irre-
gulariter angulato : aperturâ strictâ , quasi rostro alto et posticè
recurvo ornatâ : septis externè 5 lobatis.
Dimensions . — Diamètre vertical, c’est-à-dire passant par la
dernière côte et le centre de l’ombilic, 20 millimètres; diamètre
horizontal, 18 millimètres; épaisseur du dernier tour, 12 milli-
mètres; élévation de l’extrémité supérieure du bourrelet, formant
la bouche, au-dessus de l’avant-dernier tour, 11 millimètres.
Forme et détails. — Dans son ensemble la coquille est irrégu-
lièrement triangulaire , renflée , non carénée , ornée en travers
de 18 côtes lisses , arrondies, partant du pourtour de l’ombilic et
passant, sans s’interrompre, sur le dos, où elles sont le plus pro-
noncées. Y ers le tiers interne de la largeur, elles se bifurquent et
quelquefois se trifurquent ; la dernière côte seule ne se divise pas.
La spire, très embrassante, est irrégulière : le dernier tour, à
son premier tiers, quitte la courbe régulière, pour former une
saillie subanguleuse qui se reproduit également , mais d’une ma-
nière plus obtuse à son second tiers, et enfin à son extrémité près
de la bouche. C’est cette disposition particulière du dernier tour
qui donne à l’ensemble de la coquille sa forme subtriangulaire ;
car, avant ce dernier tour, elle est tout à fait globuleuse (voyez
la fig. 2). Les gibbosités correspondent sur Pombilic, qui est très
étroit, à des angles rentrants qui lui donnent une forme irrégu-
lière et anguleuse très prononcée.
Le dos, régulièrement arrondi, est convexe et ne présente, à
aucun âge, de traces de sillons ni de carène.
La bouche est formée par un rétrécissement partant de la der-
nière côte et large, au sommet, de 3 millimètres; elle se termine
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
597
par un bourrelet saillant, se prolongeant à la partie supérieure en
une espèce de rostre recourbé en arrière ; le test s’abaisse ensuite
brusquement sur T avant-dernier tour, et, légèrement convexe à
l’extérieur, ne laisse qu’une faible ouverture semi-lunaire. Vue
de face, la bouche offre, par cette dernière disposition, l’apparence
de deux Aptychus réunis par leur bord interne et présentant leur
face convexe.
Les cloisons sont symétriques et présentent extérieurement cinq
lobes, c'est-à-dire, deux placés de chaque côté du lobe dorsal. Les
découpures sont peu compliquées.
Comparaisons. — Dans le très jeune âge, cette espèce peut être
confondue avec beaucoup d’autres de forme globuleuse ; mais ,
adulte, elle ne se rapproche que de X Ammonites refractus , Haan.
Elle se distingue très facilement de celle-ci par la gibbosité qu’elle
présente au premier tiers du dernier tour, par la continuité des
côtes sur la ligne médiane du dos, par les détails de sa bouche et
par sa forme générale qui est plus globuleuse.
Observations. — Cette espèce est très constante dans ses formes ;
elle n’offre de légères variations que dans ses côtes, qui sont plus
ou moins prononcées, probablement suivant le sexe auquel appar-
tiennent les individus. Sur le moule intérieur, ces côtes sont beau-
coup moins sensibles que sur le test, qui est assez épais pour la
taille de la coquille ; elles disparaissent même entièrement au
pourtour de l’ombilic.
Localités . — Cette coquille, assez rare, que je dédie à M. le
professeur Jules de Christol, appartient au sous-groupe inférieur
du groupe Kelloway-oxfordien. Je l’ai recueillie dans les minières
d’Étrochey et de Moisey, près Châtilîon-sur-Seine.
Belemnites Moretii , nobis.
Caractéristique. — Belemnites testé elongatâ , compressa , anticè
vise clilatatd, posticè acuminato-inçurvatâ , posticè-infrà sulco brevi
et angusto : aperturâ compressa, paululiim ovali : alvei angulo 18°.
Dimensions. — Pour l’individu adulte :
A
A
l’ouverture,
la naissance de l’alvéole. .
j grand diamètre. . .
( petit diamètre. . . .
( grand diamètre. . .
(petit diamètre. . . .
Longueur totale,
Longueur, de la pointe à la naissance de l’alvéole.
36 millim.
31
30
27
250
134
Forme et détails. — Rostre lisse, allongé, comprimé dans toute
598
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
sa longueur et particulièrement à son extrémité; droit, mais légè-
rement arqué vers la pointe, qui, s’inclinant en dessous, devient
excentrique et paraît presque mucronée. Un sillon très court et
peu prononcé, partant de l’extrémité, se remarque à la partie
ventrale. La coupe transversale du rostre dans toutes ses parties
est parfaitement ovale.
Cavité alvéolaire . — Occupant la moitié supérieure de la lon-
gueur du rostre, elle est tout à fait conique et légèrement inclinée
vers le ventre; son angle d’ouverture est de 18 degrés.
Comparaisons . — Cette espèce, par ses formes, se range natu-
rellement dans le groupe des Acuarii de M. d’Orbigny. Par sa
taille et un peu par la forme ovale de sa coupe, elle pourrait res-
sembler au Bclemnites gi gantais , Schloth. ; mais elle s’en distingue
par son sillon ventral, par l’absence de sillons latéraux et aussi
par l’angle moins ouvert de sa cavité alvéolaire. Cette dernière
espèce est d’ailleurs considérée comme particulièrement caracté-
ristique de l’ooiite inférieure. L’espèce que je décris a, comme le
Belemnites excentricus, Blainv., la cavité alvéolaire un peu inclinée
vers la région ventrale, à peu près le même angle d’ouverture â
cette cavité et l’extrémité postérieure du rostre excentrique et in-
clinée en dessous; mais elle s’en distingue facilement par sa
grande taille d’abord, par les rapports proportionnels du rostre
avec la cavité alvéolaire, par son léger sillon ventral, par l’absence
de sillons latéraux, et enfin par ses coupes toujours parfaitement
ovales et jamais tétragones.
Localités. — Cette espèce se trouve à Etrocliey, près Cliâtillon-
sur-Seine, dans les marnes à oolites ferrugineuses du groupe
Kelloway-oxfordien. Elle y est assez rare ; j’en possède plusieurs
fragments ; mais un individu presque complet m’a été communi-
qué avec obligeance par M. le colonel Moret, auquel je dédie
l’espèce.
Terebratula Bureii , nobis. — Fig. 3 et t\.
Caractéristique, — Testâ iliscoideâ , compressât ptUribus costis
spinosis regulariter ornatâ : marginibus acïiiissimis : valvâ dorsali
subcarinatâ.
Dimensions. — Longueur, 8 millimètres; largeur, 8 millimètres;
épaisseur, h millimètres.
Forme et détails. — La forme générale du contour, abstraction
faite du crochet, est un arc régulier de deux tiers de cercle, sous-
tendu par une corde, ne passant pas par conséquent par le centre,
et qui serait représentée par le bord cardinal.
DU ÏI\ AU 18 SEPTEMBRE 1851.
599
La valve ventrale ne s’élève que fort peu au-dessus du plan
passant par les bords ; elle ne présente qu’un léger renflement,
dont le point le plus saillant se trouve près de la charnière, et qui,
de là, va en s’abaissant régulièrement vers les bords. Ceux-ci, qui
sont tranchants sur les côtés et sur le front, offrent, à ce dernier
point seulement, une très légère dépression correspondant au
bourrelet peu sensible de la valve dorsale. Le bord cardinal est
presque une ligne droite.
La valve dorsale présente un léger bourrelet qui, partant du
crochet, se prolonge, en se perdant insensiblement, vers le front
où il disparaît complètement. Les ailes latérales gagnent les bords
en laissant de chaque côté du bourrelet, et à sa naissance seule-
ment, une légère dépression, régulière et peu sensible. Le crochet
est court et l’ouverture est moyenne. L’aréa est un peu courbée,
moins longue que le bord cardinal, offrant quelques côtes très peu
prononcées et recouvertes en partie par le bord cardinal lui-même.
Le deltidium est peu sensible.
Les deux valves sont ornées de nombreuses côtes très finement
dessinées, qui partent, avec beaucoup de régularité et de symétrie,
du natis et du crochet; elles se prolongent jusque vers les bords,
sur lesquels elles font saillie, et qui, par suite, offrent l’apparence
cl’une fine dentelure. Ces côtes, dont les plus saillantes sont natu-
rellement celles qui partent du crochet ou du natis, se multiplient
promptement par insertion et non par bifurcation. Elles présen-
tent sur toute leur longueur de petites saillies épineuses : ce sont
des anneaux d’accroissement très régulièrement disposés et très
rapprochés les uns des autres, qui, à leur passage sur les côtes, se
redressent en forme d’épines.
Comparaisons. — Cette espèce, présentée à M. Deshayes qui
n’a pas hésité à la considérer comme nouvelle, se rapproche des
Terebratula loricata, Scliloth., et Terebratula Menardi , Lamk.;
mais elle s’en distingue facilement par le léger bourrelet de la
valve dorsale; les deux espèces que je viens de citer offrent, au
contraire, un sinus dans cette partie du test. D’un autre côté, ces
dernières présentent une aréa aussi longue que le bord cardinal ,
tandis qu’il n’en est pas de même dans l’espèce dont il est ici
question.
Localités. — Cette Térébratule, que j’ai trouvée à Yeuxhaulles
(arrondissement de Châtillon), appartient aux couches inférieures
des marnes avec minerai de fer du groupe Kelloway-oxfordien. Je
la dédie à M. le docteur Bourée père, dont les études ont rendu
d’éminents services à la localité.
600
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
M. Royer lit la note suivante sur les terrains coralliens et
oxfordiens de la Haute-Marne :
Aperçu sur les terrains corallien et oxfordien delà Haute-Marne ,
par M. E. Royer.
M. J. Beaudouin vient de donnera la Société géologique une des-
cription du terrain oxfordien du Châtillonnais ; il ne sera peut-être
pas sans intérêt de la faire suivre de quelques mots sur la compo-
sition du même terrain dans la Haute-Marne, et, comme le terrain
corallien forme avec l’oxfordien un ensemble géologique, raperçu
que je vais donner comprendra aussi le corallien.
La falaise qui est constituée par la tranche des couches oxfor-
diennes , et qui passe au nord de Châtillon , pénètre dans le dé-
partement de la Haute-Marne près de Latrecey ; elle passe à Châ-
teau-Villain , au nord de Chaumont, à Andelot, et entre dans le
département des Vosges à LifFol-le-Grand ; dans ce parcours les
terrains oxfordien et corallien varient dans leur ensemble, c’est-
à-dire qu’en partant du Châtillonnais pour aller vers la Lorraine
on trouve que ces deux terrains se modifient insensiblement, tout
en conservant cependant des parties semblables sur toute la ligne.
J'ai déjà dit précédemment quelques mots de ces différences dans
la constitution de l’étage moyen jurassique ( Bulletin de la Société
géologique , 2e série, t. II, p. 705 et 706); je vais donner aujour-
d’hui quelques développements. Pour mieux me faire compren-
dre, je commencerai par énumérer, en allant de haut en bas, les
diverses assises ou subdivisions que l’on peut observer dans le co-
rallien et l’oxfordien de la Haute-Marne. Je désignerai ces subdi-
visions par des dénominations auxquelles je n’entends point attri-
buer d’importance , et que l’on remplacera par d’autres si
l’observation le demande.
1» Calcaires a Astartés. — Ils sont composés, à leur partie supé-
rieure, de calcaires marneux, oolitiques, grisâtres, avec grandes
Nérinées, et d’un petit banc de poudingue, au-dessous de calcaires
à cassures conchoïdes en bancs minces. M. Leymerie a appelé la
partie supérieure calcaires rocailleux ; elle repose immédiatement
sous les marnes kimméridiennes auxquelles elle pourrait se ratta-
cher ; cette subdivision est très constante et uniforme dans son
allure ; on l’observe partout à la base des marnes kimméridiennes,
à Bar-sur-Aube, Rouvres, Colombey-les -Deux-Eglises, [Biaise ,
Marbéville, Cérisières, Gudmont, Honjeux, Domrémy, Annonville,
Thonnance-les-Moulins, Germay et Lézéville.
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
601
2° Oolite corallienne supérieure. — > Cette division, composée de
calcaires blancs, oolitiques , parfaitement caractérisés par leurs
oolites miliaires, cannabines et parfois avellanaires, et leurs nom-
breuses Nérinées, n’est pas générale : dans le centre du départe-
ment, entre les villages de Lamothe, Sexfontaines et Yignory ,
elle acquiert un assez grand développement, et donne lieu , à La-
mothe et à Curmont , à l’exploitation de bons matériaux de con-
struction ; à mesure que l’on avance vers l’Aube , on voit ses bancs
diminuer d’épaisseur et disparaître avant d’arriver à Clair vaux ;
dans la direction opposée ils s’affaiblissent aussi ; on n’en voit plus
que quelques parties dans la vallée, de la Marne , et ils n’existent
plus sur le Rognon ; au delà peut-être on en retrouverait des rudi-
ments.
3° Calcaires coralliens compactes. — Ces calcaires sont les plus
constants du terrain corallien ; leur texture est variable, compacte,
à pâte fine, ou bien légèrement oolitique ; les fossiles y sont rares,
ou très empâtés ; dans leur hauteur, il y a des parties à bancs très
épais, d’autres à bancs minces ; il y a aussi une partie plus ooli-
tique, à oolites très fines : on l’exploite à Saucourt. A Clairvaux,
Laferté, Yillars, Longcliamp, Maranville et Montherie, ils con-
stituent à eux seuls le terrain corallien (non compris le calcaire à
Astartés). A Lachapelle ils commencent à être recouverts par
l’oolite corallienne supérieure, qu’ils conservent sur eux jusqu’au
plateau qui sépare la Marne du Rognon. A Clairvaux, Laferté,
Yillars, Lonchamp, Maranville, Monthérie, Juzennecourt, Sex-
fontaine, Ormoy et Oudincourt, ils reposent sur les marnes oxfor-
diennes, auxquelles ils passent par des bancs marneux. A Soncourt,
commence à leur base la division des calcaires coralliens grisâ-
tres inférieurs. Enfin, au delà de la vallée de la Marne, à Buxières,
Youecourt et Yié ville, commence à son tour l’ oolite corallienne
inférieure, qui, dans le plateau qui sépare la Marne du Rognon et
au delà de cette dernière rivière, se trouve constamment sous les
calcaires compactes; ces calcaires continuent à s’observer à Buxiè-
res, Youécourt, Provenchères, Saucourt, Doulaincourt , Pau-
taines.
4° Oolite corallienne inférieure. — Cette oolite est blanche , à
texture lâche, grumeleuse et empâtée; ses bancs sont épais, les
uns très fossilifères, les autres moins, ceux-ci plus nettement ooli-
tiques. Les fossiles sont surtout de nombreux polypiers et des Di-
cérates. Elle passe aux calcaires compactes par des bancs jaunâ-
tres, oolitiques et quelquefois marneux. Cette division n’existe
que dans l’est du département ; elle constitue le sommet du pla-
602
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON
teau qui sépare la Marne du Rognon, entre Yiéville, Roocourt,
Rochefort, Roches et Doulaincourt, puis de celui qui est à l’est
de cette dernière rivière, où l’on peut l’observer à Reynel, Busson,
Leurville, Chambroncourt et Allianville.
5° Calcaires coralliens grisâtres inférieurs. — Ces calcaires, qui
ont les caractères que l’on attribue ordinairement au terrain coral-
lien, forment la base de ce groupe ; leur texture est grumeleuse et
pétrie de polypiers empâtés et rarement libres ; leur stratification
est confuse, et souvent on ne discerne pas de bancs ; ils présentent
souvent des rochers à pic et des falaises; ces calcaires n’ont pas une
allure constante et semblent s’être développés par places et peut-
être en partie aux dépens de la marne oxfordienne supérieure.
En partant de FO. , on commence à les voir à Soncourt, puis à
Yiéville, Riaucouit, Rochefort, Blancheville, Andelot, Montot,
Roches, Rimaucoürt, Reynel, Manois, Yeseignes et Lafauche ; ils
deviennent marneux à leur base en passant aux marnes oxfor-
diennes.
6° Marnes oxfunliennes supérieures . — Dans l’O. et le centre
du département on observe à la base du terrain corallien une as-
sise marneuse qui passe au corallien par des bancs de plus en plus
calcaires. Cette marne ne contient que dé très rares fossiles; elle
forme une dépression qui se remarque très facilement dans les
pentes. Cette assise s’observe à Yille, Laferté, Yillars, Juvancourt,
Silvarouvres, Rennepont, Maranville, Cirfontaines, Monthérie,
Lavilleneuve, Juzennecourt, Sexfontaine, Ormoy, Oudincourt,
Soncourt, Yignory et Youécourt ; arrivée à la vallée de la Marne,
elle paraît diminuer de puissance, et l’on peut remarquer que
c’est au point où commence le calcaire corallien grisâtre inférieur
que cet affaiblissement a lieu, soit que ce soit en effet par une dimi-
nution de puissance, soit que le calcaire corallien soit réellement
l’équivalent ou le remplaçant de cette assise, ou de sa partie supé-
rieure, qui serait ainsi continuée par des marnes, là où les polypiers
manquaient, et par des calcaires coralliens là où ils abondaient.
À Soncourt, à la base du calcaire corallien grisâtre, les marnes
de cette assise sont grumeleuses et participent à la nature coral-
lienne en prenant des polypiers ; on peut encore voir ces marnes
à Youécourt, au delà de la vallée, puis à Yiéville, mais en les
poursuivant vers le Rognon, par Rochefort et Blancheville, on ne
peut plus en constater l’existence. J’ai appelé cette assise marnes
oxfordiennes supérieures; ce que je viens d’en dire ferait penser
qu’il serait plus rationnel de les regarder comme la base du terrain
corallien.
BU lh AU 18 SEPTEMBRE 1851.
603
7° Marnes oxfordiennes moyennes. — Cette division commence
à la partie supérieure par des calcaires et se termine à la base par
des marnes. Les calcaires sont d’un blanc jaunâtre ; leur texture
est compacte et assez fine ; les fossiles y sont rares ; celui qui peut
servir à les caractériser est X Ammonites Babeanus , d’Orb. Les
marnes sont d’un gris bleuâtre. Cette division s’étend sur les ter-
ritoires de Lanty, Denteville, Silvarouvres, Maranville, Cirfon-
taines, Aizanville, Vaiidfémont, Braux, Saint-Martin, Autre ville,
Buxières-lez-Villars, Eufigneis, Gillancourt, Lejonchery, Sarci-
court, Meures, Annéville, Oudincourt, Soncourt, Yiéville et Roo-
court. On exploite dans les calcaires de bons matériaux de con-
struction à Maranville, Cirfontaines et Soncourt- à Yiéville et
Roocourt il existe, sur les calcaires, une marne oolitique à oolites
libres qui sert d’horizon , puis des calcaires également oolitiques.
Les marnes occasionnent dans les pentes une dépression très ap-
parente dans le centre du département, depuis Autreville jusqu’au
delà de Roocourt. A l’O. , dans les plateaux qui flanquent les
vallées de l’Anjou et de l’Aube, cette dépression s’affaiblit, soit
par une diminution de puissance des marnes, soit parce que les
calcaires deviennent plus marneux et ne font plus saillie sur le sol.
A l’E., au delà de Roocourt, en allant vers la vallée du Rognon, cette
division diminue de puissance et devient de plus en plus difficile à
discerner : au sommet, les calcaires devenant oolitiques, ainsi que
je l’ai dit, et n’étant plus ou n’étant qu’à peine recouverts par les
marnes supérieures, touchent aux calcaires coralliens et peuvent
être confondus avec eux; à la base les marnes s’affaiblissent aussi,
et, d’un autre côté, les calcaires de la division inférieure devenant
marneux eux-mêmes, et ne pouvant plus servir à l’horizon, elles
se confondent de plus en plus avec les marnes inférieures.
8° Marnes oxfordiennes inférieures ( non compris les marnes
ferrugineuses). — Comme la précédente, cette subdivision com-
mence par des calcaires à la partie supérieure, et se termine à la
base par des marnes ; les calcaires sont d’un blanc grisâtre ; les
fossiles y sont plus communs que dans la subdivision précédente.
L 1 Ammonites biplex ou plicatilis de M. d’Orbigny y est abondant ;
c’est là seulement que je l’ai vu acquérir de grandes dimensions,
et prendre les trois formes amenées successivement par l’âge, qui
le rendent si remarquable (1) : cette espèce à grandes dimensions
(1)M. d'Orbigny, dans la Paléontologie , terrains jurassiques (t. I,
p. 509, et pl. 191 et 192), a décrit cette espèce sous les noms de
plicatilis et biplex. La description de M. d’Orbigny n’est pas com-
60 h
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
peut servir à caractériser cette assise. Les marnes sont d'un gris
bleuâtre ; elles contiennent de rares fossiles ; les plus abondants
sont de petites Ammonites pyriteuses. Elles sont plus puissantes
que les précédentes; à leur base elles passent, par des marnes
plus fossilifères, aux assises ferrugineuses. Cette subdivision est la
plus constante, au moins quant à sa partie marneuse, de toutes
celles qui constituent le terrain oxfordien ; elle s’étend sur toute
la ligne et forme la partie la plus avancée de la falaise. Cette zone
passe par Montigny-sur-Aube, Latrecey, Créancey, Châteauvillain,
Orges, Bricon, Montsaon , Buxières- lez - Villars , Lejonchery,
Meures, Annéville, Bologne, Vraincourt, Viéville , Roocourt,
Briaucourt, Rocliefort, Blancheville, Andelot, Yignes, Signéville,
Rimaucourt. Manois, Saint-Belin, Veseignes, Lafauche et Liffol-
le-Petit. Dans la vallée de la Marne, à Bologne et Vraincourt, les
calcaires sont assez solides pour être exploités pour les construc-
tions ; en s’éloignant vers l’O. , ils deviennent plus marneux ,
mais cependant ils ne cessent pas de couronner les marnes ; ce sont
eux qui forment l’arête de la falaise, depuis les environs de Châ-
teauviliain jusque dans le Châtillonnais ; en allant vers l’E., on
les voit encore, jusque vers Chantereine et même Andelot, former
une protubérance dans les pentes, mais au delà, à Saint-Blin,
Veseignes et Lafauche, soit, comme je l’ai laissé entrevoir précé-
demment, que les calcaires à Ammonites Babeanus, et les marnes
moyennes disparaissent, soit que les calcaires à Ammonites biplex
deviennent marneux, la falaise ne forme plus qu’une seule pente;
on ne trouve plus de calcaires qui puissent représenter les uns ou
les autres que tout à fait en contact avec le corallien inférieur qui
forme l’arête supérieure.
9° Marnes oxforcliennes ferrugineuses , ou terrain kellovien. —
Cette subdivision est composée, à sa partie supérieure, de marnes
bleuâtres, et, au-dessous, de marnes jaunâtres ou brunâtres, pé-
tries de minerai de fer oolitique , lesquelles reposent sur le corn-
brash , ou dalle nacrée des Suisses. Les marnes bleuâtres font suite
aux précédentes, dont elles diffèrent seulement par l’abondance
des fossiles, notamment des articulations d ’E naines. Les marnes
plète ; le dernier âge indiqué par lui est celui où la coquille prend
d’énormes côtes. Depuis sa publication, j’ai trouvé à Viéville et à
Vraincourt, dans le même terrain où M. d'Orbigny avait recueilli
avec moi les individus qu’il a décrits, des échantillons où la coquille,
après les grosses côtes, revêt une troisième forme composée de nouveau
de petites côtes avec rétrécissement de la coquille.
DU 1/j AU 18 SEPTEMBRE 1851.
605
jaunâtres ferrugineuses contiennent un très grand nombre de fos-
siles, surtout d’ Ammonites. La localité de Latrecey, sur les confins
de la Côte-d’Or, est surtout remarquable sous ce point de vue ;
les marnes oxfordiennes ferrugineuses ne sont pas uniformes sur
toute la ligne ; puissantes et exploitées à Latrecey, elles le sont
moins à Créancey, Châteauvillain et Orges, moins encore àBricon
et Montsaon; elles reparaissent à Villers-le-Sec et deviennent
plus importantes à Laliarmand , Marault et Bologne. Entre la
Marne et le Rognon, et du Rognon à la limite du département,
vers Liffol-le-Petit , elles ont peu d’épaisseur; elles en acquièrent
au delà.
Je n’ai point trouvé dans la Haute-Marne le terrain argovien
de M. Marcou dont M. Beaudouin a entretenu la Société géolo-
gique, et dont il a retrouvé l’analogue avec les fossiles spongiaires
dans les environs de Cbâtillon. M. Beaudouin ayant poursuivi
l’assise à polypiers spongiaires jusque sur le territoire de Louesmes,
sur la limite de la Côte-d’Or et de la Haute-Marne, il serait pos-
sible qu’elle pénétrât dans ce dernier département; mais, dans tous
les cas, elle n’y serait plus qu’à l’état rudimentaire, car, quoique
j’aie parcouru le territoire de Latrecey, voisin de la Côte-d’Or,
localité très riche en fossiles du terrain oxfordien ferrugineux ou
kellovien, je n’ai point vu cette assise à polypiers.
Telles sont les diverses divisions qui s’observent dans le coral-
lien et l’oxfordien de la Haute-Marne, et qui donnent à ces deux
terrains des faciès différents, suivant qu’elles existent ou qu’elles
manquent ; je vais résumer ces notes partielles, et, en m’aidant de
quelques coupes, indiquer le relief du sol qui résulte de ces divers
faciès. J’ai désigné et je continuerai à désigner chaque division
par quelques uns de ses caractères ou de ses fossiles, sans que j’en-
tende pour cela attacher à ces caractères ou à ces fossiles plus
d’importance qu’ils n’en ont réellement. Les quatre coupes de la
planche (pl. X), prises chacune sur un point différent de la Haute-
Marne, et traversant, suivant la pente des couches, les terrains
corallien et oxfordien, indiquent assez bien les principaux reliefs
de ces terrains.
Dans les plateaux qui environnent les vallées de l’Aube et de
l’Aujon, la division des calcaires coralliens compactes existe seule;
cette division, passant aux marnes oxfordiennes supérieures qui la
supportent, par des calcaires de plus en plus marneux, ne forme
pas de falaise; les deux divisions suivantes des marnes oxfor-
diennes supérieures et moyennes étant peu puissantes et ayant
dans toute leur hauteur une constitution assez uniforme, n’impri-
606
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
ment pas non plus au sol de formes accidentées. Ces trois divisions
arrivent à leur affleurement sur les plateaux, loin de la grande
falaise qui termine le terrain oxfordien. Cette falaise est donc for-
mée par la division oxfordienne inférieure seule qui a un plus
grand développement (1) : c’est ce qu’indique la coupe n° 1, prise
dans les plateaux qui flanquent la gauche de la vallée de l’Aube,
de Montigny-sur-Aube à Clair vaux.
Plus à l’E. , entre la vallée de l’Aujon et celle de la Marne,
apparaît l’oolite corallienne supérieure. Le relief du sol est un peu
plus accidenté, cependant les terrains corallien et oxfordien supé-
rieur n’arrivent encore à leur affleurement que loin de la falaise ;
mais de leur coté les calcaires à Ammonites Babeanus de la divi-
sion oxfordienne moyenne ayant pris plus de puissance et étant
moins marneux, ont résisté davantage à la décomposition, et leur
affleurement arrive sur la crête de la falaise qui se trouve ainsi
composée des deux divisions moyenne et inférieure. C’est ainsi
qu’est constituée la ligne de coteaux que l’on aperçoit des murs
de la ville de Chaumont, bornant l’horizon à 5 ou 6 kilomètres
au N. -O., et qui porte le nom de côtes cl’ Alun. La coupe n° 2,
prise de Montsaon à Colombey-les-Deux- Eglises, indique cette
disposition.
Entre la vallée de la Marne et celle du Rognon la constitution
du plateau est bien différente : l’oolite corallienne supérieure
n'existe plus; les calcaires coralliens compactes se sont amincis;
au-dessous d’eux apparaît l’oolite corallienne inférieure , qui
semble avoir accaparé une partie de la puissance attribuée ailleurs
au corallien compacte et surtout à l’oxfordien ; son affleurement
ne se trouve que sur le plateau. Sous l’oolite corallienne infé-
rieure apparaît à son tour le corallien grisâtre inférieur , présen-
tant çà et là des rochers abrupts et souvent perpendiculaires, et
formant l’arête supérieure de la falaise. La division des marnes
oxfordiennes supérieures se retrouve à peine au-dessous de ces
rochers ; la division moyenne est également moins puissante, mais
cependant elle est encore assez bien caractérisée. La falaise est
donc composée ici, au-dessous de son arête corallienne, de toutes
les divisions oxfordiennes; la division inférieure en occupe la
majeure partie, mais on voit aux ondulations du haut de la pente
(1) Cette manière d’être du terrain oxfordien se continue, je crois,
à FO., dans le Châtillonnais, et c’est dans ce que j’ai appelé le terrain
oxfordien inférieur que M. Beaudouin a établi ses groupes oxfordiens
supérieurs et inférieurs.
DU lll AU 18 SEPTEMBRE 1851. 607
que les deux autres existent encore : la coupe n° 3, prise de
Chantereine à Donjeux, représente cet aspect.
Enfin, à l’est de la vallée du Rognon, la disposition précédente
est à peu près la même; seulement F atténuation des divisions ox-
fordiennes supérieure et moyenne est plus complète ; on ne peut
plus constater leur existence : les calcaires de la division inférieure
paraissent toucher au corallien inférieur qui forme l’arête de la
falaise, laquelle a une pente uniforme. La coupe n° à, prise de
Veseigne-sous-Lafauclie à Chambroncourt, indique cette dernière
forme.
Telle est donc la disposition de c£s deux groupes de terrains
dans le parcours que fait leur zone à travers le département de la
Haute-Marne. En comparant les quatre coupes que je viens de
donner, on observera qu’à l’O. le corallien est moins puissant
qu’à l’E., que le contraire existe pour l’oxfordien, et que ces deux
terrains se partagent à peu près l’espace horizontal ; mais qu’à l’E.
l’oxfordien diminue de puissance, tandis que le corallien en ac-
quiert, et que l’espace horizontal est accaparé par cette raison par
le corallien, au détriment de l’oxfordien. On remarquera en même
temps que les deux extrémités de cette série, c’est-à-dire le coral-
lien compacte et Foxfordien inférieur, sont à peu près constantes;
que l’augmentation de puissance du corallien est due à l’appari-
tion de nouvelles divisions, tandis que la diminution de puissance
de Foxfordien est due à la disparition d’une partie de ces divisions.
On voit aussi cpie, dans l’ensemble des deux terrains, corallien et
oxforclien, la composition et la texture calcaréo^marneuse com-
pacte et schisteuse dominent dans FO., tandis cpie la composition
et la texture calcaire ooli tique et grumeleuse prennent le dessus
dans l’E. : par suite, d’un côté les pentes sont allongées, les formes
arrondies, les vallées larges; de l’autre, les plateaux sont moins
ondulés, les pentes sont plus rapides et présentent çà et là des
formes abruptes, les vallées sont étroites et souvent sinueuses.
Séance du 18 septembre .
Il avait été décidé que la Société ferait une excursion à Béze
et aux environs de cette localité. Une pluie qui est tombée sans
discontinuer a mis opposition à ce projet.
La séance est ouverte à midi , sous la présidence de M. Stu-
der, et dans le lieu ordinaire des réunions, à la Faculté des
sciences.
608
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
M. de Gliristol donne le résumé suivant de l’excursion- faite
la veille à Is-sur-Tille.
La Société, à laquelle vingt-cinq personnes étrangères étaient
venues se joindre, s’est rendue directement à Is-sur-Tille.
Avant d’arriver aux grandes carrières, elle a remarqué, dans un
chemin creux , des marnes et des calcaires marneux , renfermant
la Phasianella ( Melania ) striata et des baguettes de Cularis
Blumembachii. MM. de Ghristol , Nodot et Lavalle avaient été
reconnaître ces couches quelques jours auparavant, et ils les
avaient rapportées à la partie supérieure du terrain oxfordien.
M. Cotteau a pensé que l’on pouvait les rattacher au coral-rag.
M. Beaudouin a fait observer que ces couches ont un grand
développement dans tout le Châtillonnais , où elles reposent
sur le terrain argovien, et des échantillons de polypiers, trou-
vés par plusieurs membres, lui ont fait supposer qu’au point
même où était réunie la Société on retrouverait celte super-
position.
Le calcaire marneux à Cularis Blumembachii se lie par
sa partie supérieure avec les calcaires du coral-rag. Ges calcaires
sont exploités dans de vastes carrières.
Il serait impossible, a fait observer M. Gotteau , d’hésiter
sur l’âge de ces calcaires, en présence de leur couleur blanche,
de leur texture oolitique et saccharoïde, de leurs débris fos-
siles, parmi lesquels se reconnaissent la Rhynchonella co-
rallina , d’Orb. {Terebratula corallina , Leym.) , le Pecten
mœqüico status , Sow., la Trigonia Meriani , Agass., et un
Hippopodium voisin de V Hippopodium corallinum , d’Orb.
M. Royer a ajouté que ces assises ne peuvent se distinguer
de l’oolite corallienne supérieure de la Haute-Marne , et doivent
lui être assimilées.
Au-dessus des exploitations de calcaire corallien, M. de
Christol a montré un calcaire jaunâtre, marno-compacte et
fissile, qui renferme la Thracia supra jureusis, d’Orb. ( Tellina
incerta , Thirria). M. Studer a rapporté cette assise au terrain
séquanien de M. Marcou-, MM. Gotteau et Royer l’ont rapportée
au calcaire à Astartés, qui, pour M. d’Orbigny, fait encore
partie du terrain corallien.
Dans les environs de Marsannay la Société a vu plusieurs
DU l/l Ali .18 SEPTEMBRE 1851. 6(K>
minières de fer, ouvertes récemment dans l’oxford-clay. L’une
de ces exploitations a présenté, de haut en bas, la coupe
suivante :
1° Terre végétale , rougeâtre. . . 0ra,40
2° Calcaire marneux 1m,60
3° Minerai en poussière 0m,80
4° Calcaire rougeâtre marneux. . 0m,40
5° Minerai dit en roche. . . . 1n\10
Chaque membre de la Société a pu recueillir une nombreuse
série de fossiles oxfordiens dans les déblais amassés autour des
exploitations. Parmi ces fossiles, nous citerons : YOstrea di-
latata , P Ammonites coronatus , VA. cordatus , VA. perar/na-
tus , VA. plicatilis [bip le a: , Sow.), la Pholadomya pinnata , le
Cidaris coproides .
Cette assise ferrugineuse a depuis longtemps été considérée ,
par M. Payen , comme formant toujours , dans la Côte-d’Or, la
base de l’oxfordien.
Prés de Marsannay, M. Beaudouin a remarqué plusieurs
points qu’il rapporte au terrain argovien. A Marsannay même,
la Société a aperçu du calcaire kimméridien pétri d 'Ostrea
[Exogyra] virgulct .
Le rapport de M. de Christol étant terminé , M. le président
annonce que la discussion est ouverte.
M. Beaudouin entre dans quelques détails sur les couches des
terrains oxfordiens étudiés par la Société dans ses diverses ex-
plorations. Il résume ses observations au moyen du tableau
suivant :
^ I Curul-rag. . . | Calcaire Blanchâtre, etc | Is-sur-Tille.
Masse puissante de marnes et de calcai- \ Is-sur-Tille;
res marneux jaunâtres , avec Cidaris > nu peu à
Blumenbachii, Melania striata , etc. ) Marsannay-le-Bois.
Calcaire blanc jaunâtre , se divisant en >
fragments arrondis, avec Ammonites j Rive gauche
biplex , Terebralula insignis , et une \ de la rivière aux
grande quantité' de spongiaires. (Ter- t environs de ia Cude.
raiu argovien de M. Marcou.) J
Calcaire rougeâtre, avec minerai de fer .
oolilique, renfermant une grande 1
quantité de fossiles, parmi lesquels :
les Ammonites cordatus et coron a-
tus , la Grypliœa dilata ta, les Cida-
ris coproides et spallltata, etc. , . .
Calcaire à oolite miliaire f Plusieurs points des
( environs Marsannay-le-Boi
Oxford-clay
-q ■ supérieur.
e "
Oxford clay
inférieur
et Kelloway’s *
rock.
2 yCorn-brash? . |
610
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
M. le professeur Lavalle met sous les yeux de la Société des
cristaux artificiels $ il fait au sujet de ces cristaux la commu-
nication suivante :
Quelques faits relatifs à la formation lente des cristaux dans
les liquides contenant en dissolution des sels métalliques ,
par M. Lavalle.
Jë me contenterai dans cette note d’exposer eii quelques para-
graphes et de résumer sous forme de propositions les faits que des
expériences, suivies avec persévérance pendant plus de quatre
années (18^6 à 1850), m’ont permis de considérer comme bertains.
1° Tout cristal qui se forme lentement tend à prendre et forme
bientôt en effet, si son accroissement dure quelque temps, une
forme tabulaire.
Dans ce cas, si le fond du vase est un plan, le cristal se trouve
toujours placé de telle sorte qu’une de ses faces repose sur ce plan.
Cette face inférieure prend un développement beaucoup plus con-
sidérable que les faces adjacentes, de telle sorte que lorsque le
cristal s’étend de 1/2 en largeur, il s’élève â peine de 1/20 en
hauteur (il y aurait à voir s’il n’y a pas une relation, soUs ce rap-
port, entre la rapidité avec laquelle croît le cristal suivant ses
différentes dimensions et les dimensions respectives du liquide
dans lequel il est plongé : mes expériences ont toutes été faites
dans des assiettes peu profondes).
2° Si le cristal présente une face parallèle à la face inférieure,
cette face supérieure s’accroîtra exactement de la même manière
que la face inférieure.
3° Dans certains sels, la rapidité de cristallisation augmente avec
le volume du cristal ; dans d’autres cas il en est autrement.
U° Si un nouveau cristal vient à se former sur un gros cristal
préexistant, ce nouveau cristal sera presque toujours disposé de
telle sorte que toutes ses parties seront parallèles aux parties homo-
logues du gros cristal.
5° Si un cristal adhère sur le vase sur lequel il repose et qu’il
en soit détaché de temps en temps, cette face inférieure ne reçoit
de molécules qu’à son contour, et le cristal, soulevé de plus en
plus, présente une cavité régulière au centre de cette face.
6" Un cristal quelconque, se formant sur le fond d’un vase auquel
il n’adhère pas, se soulève sur ses bords, qt il se forme à la face
inférieure un angle rentrant parfaitement évident et qui peut
611
Dü ïh AU 18 SEPTEMBRE 1853 .
être considéré comme formé par la réunion de plusieurs cristaux.
(Voyez la figure 1 qui représente la face inférieure d’un cristal
d’alun formé dans cette circonstance : on y voit un angle rentrant à
6 faces très évidentes.)
Fig. 1.
7° Si l’on tronque un seul angle d’un octaèdre régulier d’aluii et
qu’on le place sur la face artificielle ainsi formée, on voit* par suite
de f accroissement, une face se former à la place de l’angle opposé
correspondant; les autres angles restent aigus. (Voyez la figure 2.
Les parties appartenant au cristal avant l’expérience ont été laissées
en blanc. Les dépôts nouveaux sont ombrés.)
Fig. 2.
8° Si l’on dissout un cristal de manière à faire disparaître tous
ses angles et toutes ses arêtes, et qu’on le replace dans le liquide,
on remarque qu'il se produit identiquement de la même manière ,
de sorte que ses plans, ses arêtes et ses angles correspondent rigou-
reusement aux mêmes points OÙ ils se trouvaient auparavant.
9° Dans ce cas, si la cristallisation est rapide, il se forme sur le
gros cristal une multitude de petits cristaux, et chacun d’eux est
orienté, par rapport au grand cristal, de manière que toutes les
faces et tontes les arêtes correspondantes de ces différents cristaux
sont parallèles entre elles et avec celles du cristal préexistant.
10° Si l’on enlève un fragment d’un cristal en voie de formation,
cette perte de substance se répare rapidement et le cristal est bien-
tôt redevenu complet.
11° Si l’on brise un prisme en un grand nombre de fragments,
chacun des fragments reproduit les pyramides qui lui manquent
et devient bientôt un cristal complet.
12° Si Ton brise un cristal quelconque en un grand nombre de
fragments, chacun d eux reproduit un cristal entier organisé sur
les portions restantes des faces du cristal primitif .
13° Même dans les vases les plus grands que j’aie emplo yés, j’a
vu que toutes les molécules salines qui se déposaient pouvaient être
employées à l’accroissement d’un seul cristal placé dans un point
612 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
du vase, de telle sorte que la sphère d’action de ce cristal semblait
s’étendre à toute l’étendue du liquide. Ce fait se produit si la
cristallisation est très lente.
14° Si la cristallisation est rapide, il se développe des cristaux
dans tous les points du vase, mais on observe que la quantité de
matière déposée sur le cristal antérieurement formé est souvent
aussi considérable en poids que celle qui a formé tous les autres
cristaux, et est toujours beaucoup plus considérable que 11e l’indi-
querait l’étendue de sa surface.
15° Si pendant l’accroissement d’un cristal la nature du liquide
ambiant vient à varier, le cristal tend à prendre la forme cristal-
line propre au second liquide, et ce phénomène se reproduit toutes
les fois que le liquide varie.
16° Pour arriver à cette nouvelle forme, le cristal passe par
toutes les formes intermédiaires entre la forme première et la
forme secondaire, de telle sorte qu’il suffit de l’arrêter à un moment
donné pour avoir la forme transitoire que l’on désire. (Yoyez les
figures 3, h et 5 représentant la coupe de cristaux d’alun octaédrique
qui ont continué à croître dans une solution d’alun cubique.)
Fig. 5. Fig. 4, Fig. 5.
17° H n’y a dans ce cas ablation d'aucune molécule. Ce n’est
que par des additions de molécules nouvelles que s’opère ce tra-
vail, et la forme première se retrouve tout entière au centre du
cristal définitif (fig. 3, 4 et 5).
18° Cette addition de molécules s’opère suivant une loi qu’on
peut formuler ainsi î
1° Tout point du cristal primitif qui pourra faire partie de sa
forme définitive ne recevra aucun dépôt de molécules.
2° Toute face ou toute arête qui se trouvera dans le même cas,
soit dès le début, soit par le fait des premiers dépôts, ne recevra non
plus aucune molécule nouvelle avant l’entier achèvement du cristal .
19° Dans tout cristal en voie de se transformer ainsi il y a deux
ordres de faces, les unes qui feront partie de la forme définitive,
les autres qui appartiennent à la première forme. 11 ne se dépose
de molécules nouvelles que sur les secondes.
DU là AU 18 SEPTEMBRE 1851,
613
20° 11 résulte de ces dèrniers faits que si la nature des deux
liquides est assez différente pour donner naissance à des produits
physiquement et même chimiquement différents, on aura un
cristal régulier, formé d’une substance au centre et d’une autre
substance à la circonférence. (Voyez fig. 6 et 7. ) Ce phénomène est
rendu évident par les azotates acides et les azotates neutres de
plomb. On peut obtenir des octaèdres réguliers , dont le centre ,
formé d’un octaèdre tronqué sur les angles, sera composé d’azotate
de plomb acide , et dont les pyramides qui formeront les angles
seront composées d’azotate de plomb neutre, l’un étant transparent
et l’autre se trouvant opaque. C’est ainsi qu’on a obtenu le cristal
représenté figure 7.
Fig. 6. Fig. 7.
M. Raulin donne lecture de la note suivante :
Coupe géologique du terrain jurassique du departement
de la Côte-d'Or, du Vannage à Dijon , par M. Vor Raulin.
M. Leymerie a donné dans la Statistique géologique de l’Aube
une coupe qui part des terrains tertiaires du bassin de Paris, en se
dirigeant au S.-E. perpendiculairement à la direction des couches,
et qui montre successivement toutes les assises du terrain crétacé
et les deux étages supérieurs du terrain jurassique ; nous avons
pensé qu’il ne serait pas sans intérêt de la prolonger dans le dé-
partement de la Côte-d’Or jusqu’à Dijon , au bord du bassin ter-
tiaire de la Bresse.
Notre coupe (pl. X) part du Vannage, près de Riceys, dans la
vallée de la baignes, rejoint la vallée de la Seine à Saint-Marc-sur-
Seine, à près de 2 myriamètres au-dessus de Châtillon-sur- Seine,
et finit par suivre à peu près la grande route de Troyes à Dijon.
Le pays traversé appartient à deux séries différentes de bassins
orographiques, hydrographiques et géologiques.
Sous le rapport orographique, il y a une ligne culminante et
deux versants : l’un au N. -O., qui fait partie du bassin septen-
trional de la France et méridional de l’Angleterre , et l’autre au
S.-E. (la Côte-d’Or), qui dépend du bassin de la Bresse. La ligne
culminante est près du vallon de Saint-Seine, et peut être repré-
sentée par deux points situés à 4 k , 5 de distance, sur ses deux bords.
REUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
Le versant septentrional parisien est long et à pente très douce,
le devenant encore davantage dans le département de l’Aube ;
celui de la Bresse est trois fois plus court et à pente plus rapide,
comme on peut le voir par le tableau suivant :
• Sous le rapport hydrographique , il y a une ligne de partage
des eaux et deux versants: l’up, au N. -O., appartient au bassin
de la Seine et de l’Atlantique jj’autre, au S.-E., dépend du bassin
du Rhône et de la Méditerranée. La ligne de partage ne coïncide
pas avec la ligne culminante orographique ; elle est située à A ou
5 kilomètres au N. -O., le bassin hydrographique du Rhône em-
piétant ainsi sur le bassin orographique septentrional parisien.
Sous le rapport géologique, la coupe de M. Leymerie, qui part
des terrains tertiaires au N. -O., montre successivement le terrain
crétacé complet, et les étages supérieur et moyen du terrain juras-
sique. Dans le département de la Côte-d’Or, la nôtre montre les
étages moyen et inférieur du terrain jurassique et le lias. Les
étages s’y divisent en deux catégories : ceux qui se continuent d’un
bout à l’autre de la coupe, tant à la surface que souterrainement,
et ceux qui ne se trouvent qu’aux extrémités. Le lias et l’étage
jurassique inférieur rentrent dans la première; l’étage moyen
appartient à la seconde, et ne se montre qu’aux deux extrémités.
Dans le département de la Côte-d’Or, les observations suivantes
peuvent être faites dans le voisinage de la ligne que suit notre
coupe :
Le kiinmeridge-clay ne se montre pas dans le département de
la Côte-d’Or à l’extrémité de la coupe ; mais, à un demi-kilomètre
de la limite, la colline qui est au-dessus du Vannage en présente
un lambeau qui a environ 10 mètres d’épaisseur, et qui est constitué
par les alternances habituelles de marnes grises à Exogyrci virgula
et de calcaires marneux.
DU 1/î AU 18 SEPTEMBRE 1851.
615
Le coral-rag ne s’avance qu’à 5 ou 6 kilomètres de la limite des
départements. Comme dans l’Yonne, il est formé à sa partie supé-
rieure par des calcaires compactes ou oolitiques jaunâtres , à
Nerinea hrun.tr utan a, etc., à la partie inférieure par des calcaires
terreux ou oolitiques, blancs, tendres, en général peu fossilifères.
L’ensemble des deux assises a environ 80 mètres d’épaisseur.
L’oxford-clay forme la terrasse qui porte sur son bord l’église de
Larrey, et qui domine la plaine de Laignes. La partie supérieure
est formée par des calcaires compactes blanchâtres renfermant de
petits lits de marne grisâtre et peu de fossiles. La partie moyenne
présente des alternances de marnes grises et de calcaires com-
pactes un peu marneux, grisâtres, caractérisés par les Ammonites
hiplex , Gryphœn dilata ta, Trigonia c lave lia ta , P/ioladomya , etc.;
la base, presque exclusivement argileuse, se trouve jusque dans
la plaine. La partie inférieure, dont l’épaisseur est à peine
de 10 mètres, est constituée par des argiles grises et jaunes
avec des lits irréguliers de marnes endurcies, renfermant toutes
deux de nombreux grains de limonile oolitique , exploitée sur
divers points comme minerai. Parmi les fossiles qui sont abondants
se trouvent les Ammonites cor datas, Lima prohoscidea , Terehratula
varians, etc. Cette partie inférieure forme un lambeau à la surface
de l’étage jurassique inférieur, entre Poinçon-les-Larrey et Bissey-
la-Pierre.
Entre l’oxford-clay et le fuller’s earth se trouve un ensemble de
roches calcaires visibles depuis le pied de la terrasse oxfordienne
jusqu’à Dijon. De la terrasse au vallon de Saint-Marc-sur-Seine,
le système bien complet se compose de trois assises : des calcaires
oolitiques jaunâtres ou blanchâtres ( corn-brash ) à la partie supé-
rieure ; des calcaires compactes fendillés , blanchâtres ( jorest -
marble ), au-dessous; enfin, une grande assise de calcaire com-
pacto-oolitique à fossiles, de couleurs blanchâtres ou jaunâtres
avec taches bleuâtres ( great oolite) , exploitée sur un grand
nombre de points. L’épaisseur totale de ce système calcaire dé-
passe 100 mètres, et l’assise inférieure y entre pour plus de
moitié. Entre Saint-Marc et le vallon de Saint-Seine , et même
celui de Val-Suzon, la route passe sur le plateau d’Ampilly-les-
Bordes et de Chanceaux, qui est assez ondulé, et* qui ne présente
par suite de dénudations que l’assise inférieure, même parfois
incomplète; elle est formée par des calcaires compacto-grossiers
jaunâtres à oolites, ou compacto-oolitique grisâtre à fossiles. De
Val-Suzon à Dijon, le système est complet et a près de 150 mètres
d’épaisseur. Le flanc méridional du profond vallon de Val-Suzon
616
RÉUNION EXTRAORDINAIRE À DIJON
montre, à partir d’une hauteur de 15 mètres au-dessus du ruisseau,
des calcaires compactes jaunâtres à pisolites, devenant roses et grisâ-
tres plus haut; puis des calcaires compactes un peu grenus, grisâtres,
formant une assise extrêmement épaisse occasionnant de grands
escarpements rocheux sur plusieurs points dans les bois ; le bord
du plateau, enfin, présente des calcaires grossiers et grenus, jau-
nâtres ou compacto-oolitiques grisâtres, que l’on exploite sur
U mètres. En descendant devant Talant , on voit les mêmes cal-
caires, et, au-dessous, une grande carrière de 5 mètres montre un
calcaire grossier et oolitique massif, jaunâtre, à fossiles. A la
porte de Dijon, il y a des calcaires le plus souvent compactes,
roses et jaunâtres, à pisolites.
L’oxford-clay forme la surface du sol sur beaucoup de points,
entre Val-Suzon et Dijon, notamment autour de Darois et jusqu’à
Talant. On voit sur les calcaires grossiers et grenus jaunâtres pré-
cédents des calcaires assez semblables , violacés , renfermant quel-
ques lits marneux de même couleur, et par-dessus des calcaires
compactes tubulaires légèrement grisâtres , qui renferment quel-
ques lits marneux , et qui ont environ 20 mètres d’épaisseur.
Au-dessous de la grande oolite vient le fuller’s eartli, qui se
montre dans la vallée de la Seine depuis Nod jusqu’au-dessus de
Chanceaux. Dans les environs d’Aisey-sur-Seine , de Brémur et
d’Ampilly-les-Bordes, traversés par la coupe, ce sont des argiles
vert jaunâtre ou grisâtres , avec des bancs irréguliers de calcaire et
de nombreux Ostrea acuminata , Terebratula intermedia , Gervilia
acuta , etc. Dans les dépressions du plateau, au N. -O. de Saint-
Seine, Y Ostrea arum inata se trouve encore en abondance dans les
mêmes roches. A "Val-Suzon, on voit jusqu’à 15 mètres au-dessus
du ruisseau des alternances de marnes verdâtres et de calcaire
compacto-grenu jaune ou gris. A Plombières, près de Dijon, les
mêmes alternances renferment le Pholadomya Vezelayi , si carac-
téristique.
Le calcaire à Entroques ( injerior oolite ) se montre dans la val-
lée de la Seine depuis Aisey jusqu’à Chanceaux , ainsi qu’au bord
du grand vallon de Saint-Seine. La descente de la route, au S. de
Brémur, montre un calcaire grossier et oolitique jaunâtre , puis
de gros bancs de calcaire grisâtre à Entroques d’abord , avec des
polypiers saccharoïdes plus bas, et enfin à la base des calcaires
grossiers et grenus jaunes un peu ferrugineux. Les mêmes gros
bancs de calcaire grisâtre à Entroques se retrouvent au bas de la
montée, à 5 kilomètres au S.-E. de Saint-Marc-sur-Seine. Dans
le vallon de Courceau , à 2 kilomètres au N. -O. de Chanceaux , il
DU t h AU 18 SEPTEMBRE 1851. 6 l7
y a jusqu’à mi-côte de gros bancs de calcaire compacto-grenu gri-
sâtre à Pecten , qui renferment inférieurement de petits lits mar-
neux. Au vallon de Saint-Seine, ce sont des calcaires compacto-
grenus grisâtres, avec polypiers grenus roses et des calcaires
grossiers et grenus grisâtres ou jaunâtres, coquilliers, en gros bancs
à la partie inférieure. Cette assise doit exister encore à Val-Suzon,
mais elle s’élèverait à peine à quelques mètres au-dessus du ruis-
seau. L’épaisseur moyenne du calcaire à Entroques est de 20 mètres
environ.
Le lias enfin se montre dans deux endroits seulement : dans la
vallée de la Seine, autour de Saint- Marc-sur-Seine , et dans le
profond vallon de Saint-Seine. A Saint-Marc , on ne voit que
l’assise supérieure formée par des argiles et marnes noirâtres
schistoides , gris verdâtre à la surface , qui se voient sur une hau-
teur d’environ 70 mètres, qui constitue leur épaisseur totale ; car,
suivant M. Beaudouin, l’étage moyen à Gryphœa cymbiuni se trou-
verait au niveau de la prairie. Le vallon de Saint-Seine est aux
trois quarts excavé dans le lias. La partie supérieure est formée
par des marnes noires, en grande partie masquées par les éboulis
du calcaire à Entroques. Assez bas se trouvent des marnes verdâ-
tres renfermant des bancs de calcaires grossiers et grenus , et de
lumachelles, et enfin, à 15 mètres au-dessus du ruisseau, des
calcaires grossiers et grenus un peu ferrugineux , qui appartien-
nent, ainsi que les précédents, à l’étage à Gryphœa cymbiuni . Le
sol calcaire est argileux et formé probablement par l’étage infé-
rieur à Gryphœa arcuata.
De cette description il résulte , comme nous l’avons dit en com-
mençant, que le lias et l’étage oolitique inférieur se poursuivent
dans toute la longueur de la coupe , tandis que l’oxford-clay ne se
trouve qu’à l’extrémité N. -O., sur une longueur de 17 kilomètres,
du Vannage à Bissey-la-Pierre , et à l’extrémité S.-E., sur une lon-
gueur de 12 kilomètres, de Dijon jusqu’au delà de Darois. Quant
au coral-rag, il ne se montre qu’à l’extrémité N. -O. jusqu’à 6 ki-
lomètres du Vannage.
Après avoir ainsi décrit les diverses assises qui se montrent dans
notre coupe , nous arrivons à déterminer leur disposition. Pour
cela, il suffit d’en prendre une bien caractérisée et de la poursuivre
dans toute la longueur de la coupe , soit directement , soit lors-
qu’elle s’enfonce au-dessous du niveau des plus profondes vallées ,
par l’examen de l’allure des assises qui la recouvrent. Le calcaire
à Entroques nous semble préférable , parce qu’il a des caractères
bien tranchés et faciles à saisir , parce que son épaisseur est peu
618
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON
considérable , et parce qu’on peut le suivre à découvert d’une ma-
nière continue sur les trois cinquièmes de la longueur de la coupe.
A l’extrémité N. -O. , à la limite de l’Aube, on peut connaître son
niveau d’une manière approximative, en supposant qu’au-dessous
du Vannage les épaisseurs de l’oxford-clay , de l’ensemble calcaire
inférieur et du fuller’s earth sont les mêmes qu’à Larrey et à Nod
A l’extrémité S. -E., à Dijon, il suffit de supposer que le même
système calcaire y a une épaisseur semblable à celle qu’il possède
entre Val-Suzon et Darois. On arrive ainsi à trouver que, d’après
la nouvelle carte de la France, la surface supérieure du calcaire à
Entroques atteint les altitudes suivantes :
Mètre».
Le Vannage — -§0
Bissey-la-Pierre 140
Brémur 250
Saint-Marc-sur-Seine ( 1 kil. au S.-E. ). . 389
Bellevue 345
pourceau 420
Saint-§eine . 545
Val-Suzop. ... 415
Dijon. . 125
On voit au premier aperçu que les assises vont en se relevant
considérablement du Vannage à Saint-Seine, pour ensuite s’abais-
ser à Dijon. Les assises sont disposées de telle sorte qu’il y a une
ligne anticlinale qui passe par le vallon de Saint-Seine , et qui
coïncide ainsi avec la ligne culminante orographique. De chaque
côté, les couches plongent soit au N -O., jusqu’aux terrains ter-
tiaires du bassin de Paris, soit au S.-E., jusqu’au terrain tertiaire
de la Bresse. Les assises qui se continuent d'un côté de la ligne
anticlinale à l’autre, et qui constituent la partie la plus élevée,
sont le lias et l’étage oolitique inférieur.
En examinant plus attentivement, on découvre à Saint-Marc-
sur-Seine une seconde ligne anticlinale qui , beaucoup moins en
saillie que la précédente , n’en est pas moins très sensible pour
l’observateur qui parcourt attentivement la grande route entre
Châtillon-sur-Seine et Clianceaux.
En construisant la coupe géologique (pl. X) avec toutes les don-
nées précédentes, on trouve que la surface du calcaire à Entro-
ques forme une suite de lignes droites dont le tableau suivant
donne les diverses pentes :
DU ïh .ATJ 18 SEPTEMBRE 1851.
619
LOCALITÉS.
Altitudes. |
Différences. |
Distances.
Pentes.
Bissey-Ia-Pierre.
Mctr. 1
-60 i
140 i
' Métr.
[ 200
1
Kilom
17
40' 25"
Bissey-)a-Pierre
Brémur.'
140 i
250 J
1
| 110
12
31' 35"
Brémur
Sûinl-Marc-sur-Seine (1 kilom. au S.-E.). ......
250 !
589 J
1
| m.
9
55'
Bellevue.
545 J
i
| 44
4
57' 50"
Saint-Seine
545 '
i
J 200
26
26' 20"
Saint-Seine . . «
Dijtin. . .
545
125 i
!
1
| 420
1
23
lo 2' 50"
Nous n’avons pas aperçu la moindre trace de faille sur la ligne
que nous avons parcourue; il n’y a qu’une simple flexion des cou-
ches. Gette flexion est bien peu de chose, puisque l’angle anticlinal
de Saint-Seine, celui que font les plans des couches de chaque côté
de la ligne anticlinale , est de 178° 30' 50", ne différant par con-
séquent d’une ligne droite que de 1° 29' 10" : d’un côté, 26' 20",
et de l’autre, 1° 2' 50".
N’ayant fait que suivre une ligne à peu près perpendiculaire à
la direction des couches , nous avons déterminé les points par les-
quels passent les lignes anticlinales, sans pouvoir recueillir de don-
nées sur la direction précise de ces dernières. Pour la ligne prin-
cipale, celle de Saint-Seine , cjui forme le faîte, il nous semble à
priori extrêmement probable qu’elle a une direction fort voisine,
soit de celle que possède le plateau formé par l’étage jurassique
inférieur, qui réunit les Vosges au Morvan, de Bourbonne-les-
Bains à Arnay-le-Duc , suivant une ligne orientée Ul° E. , soit
de celle du soulèvement de la Côte-d'Or , fixé par M. Elie de Beau-
mont E. Z4 0° N.
Pour la seconde ligne anticlinale , celle de Saint-Marc-Sur-
Seine, nous l’aurions supposée à peu près parallèle à la précédente
en l’absence de données ; mais M. Beaudouin nous en a fourni une
précieuse en nous disant qu’il avait constaté une élévation analogue
des couches auprès de Leuglay. L’église de ce village se trouve
éloignée de 20 kilomètres à l’E. 45° N. du point anticlinal de Saint-
Marc. Cette direction est géologiquement parallèle aux précé-
620
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
déniés. Pour peu que le point anticlinal fut au S. de Leuglay, il y
aurait parallélisme réel avec le système de la Côte-d’Or.
Ces deux lignes anticlinales ne sont pas les seuls dérangements
que les couches aient éprouvés dans le département de la Côte-
d’Or, au voisinage de la ligne que suit notre coupe. M. Beau-
douin (1) cite une faille qui occasionne des pertes d’eau dans les
vallées de la Laignes, au-dessus de Yaugimois; de la Seine, entre
Châtillon-sur-Seine et Buncey ; de l’Ource, entre Brion et Crépan ;
de l’Aube à la Chaume. La direction d’une ligne qui irait de la
vallée de l’Ource à celle de la Laignes est N. 25° E. Il se pour-
rait que les pertes du ruisseau de Lucey entre l’Ource et l’Aube,
et de celui de Vaubon entre Arc-en-Barrois et Langres, signalées
par M. Elie de Beaumont (2), fussent sur un prolongement de
cette faille vers le N.-E.
M. Payen, dans un mémoire sur la géologie de la Côte-d’Or (3)
qui vient d’être réimprimé (à), a aussi indiqué six failles affectant
des directions variées par rapport à la Côte-d’Or ; mais nous
n’avons pas à nous en occuper, parce quelles se trouvent au N. de
Dijon et à l’O. de Beaune.
A Malain, à l’O. de Dijon, il y a une ligne de dislocation bien
évidente signalée par M. Payen , étudiée par les géologues de la
Bourgogne, figurée dans la Coupe du souterrain deBlaisy, et visitée
il y a quelques jours par la Société. Elle est constituée sur ce
point par une ligne anticlinale et une faille qui coïncident égale-
ment avec la ligne culminante orographique.
Du sommet de la côte traversée par le souterrain de Blaisy, on
voit successivement, jusqu’à l’entrée orientale de ce dernier, le
calcaire compacto-grenu, grisâtre ou jaune, avec nombreuses En-
troques blanches, exploité sur le plateau, et formant un cordon
rocheux de 15 mètres environ de hauteur jusqu’au delà de Baume-
la-Roche. Au-dessous, il y a une ligne de sources, et la pente,
assez rapide, en prés et champs, est formée par le lias, qui présente
supérieurement, sur plus de 60 mètres , des assises sableuses ou
bitumineuses, schistoïdes, noires, à Bélemnites, avec quelques
lits de calcaire marneux vers la partie moyenne ; au-dessous vien-
(1) Description géologique de V arrondissement de Châtillon ,
1844, p. 38.
(2) Explication de la carte géologique de la France, 1848, t. II,
p. 388.
(3) Revue des deux Bourgognes , 1838.
(4) Journal d’agriculture de la Cote-ct Or , 1851, p. 145.
621
DU l/l AU 18 SEPTEMBRE 1851.
nent, sur environ 25 mètres, des alternances de marnes schistoïdes
et de calcaires marneux et ferrugineux jaunes ; au-dessous, enfin,
viennent de nouvelles argiles schistoïdes noires, qui ont 75 mètres
d’épaisseur ; par-dessous se trouve le calcaire à Gryphœa arcuata
et Belemnites cliwcitus , épais de 10 mètres , qui est un peu cris-
tallin, noirâtre, en couches irrégulières dans des marnes grises, et
dont la partie supérieure est exploitée sur 3 mètres pour chaux
hydraulique, à environ 25 mètres au-dessus de l’entrée du sou-
terrain. Au-dessous, il y a des grès plus ou moins marneux ayant
10 mètres d’épaisseur, et que l’on rapporte encore au lias. Vient
ensuite l’étage des marnes irisées présentant successivement des
calcaires magnésiens , terreux , jaune verdâtre, puis des argiles
noires ou vert blanchâtre ou vertes , à rognons de gypse grenu ,
gris, blanchâtre ou rougeâtre, et veines de gypse fibreux, et enfin
une assise de gypse assez pur, dans laquelle est percée l’entrée du
souterrain. Cet ensemble a 25 mètres d’épaisseur. Dans la tranchée
jusqu’au viaduc de Malain, on voit par-dessous des argiles schis-
teuses noirâtres, devenant gris verdâtre à l’air, et renfermant des
nodules de gypse. Ces argiles, qui ont 7 à 8 mètres d’épaisseur,
passent inférieurement à des sables et à des grès assez durs, gros-
siers, verdâtres et jaunâtres, en couches très irrégulières, parfois
fins, avec lits d’argile verte. Tout à fait à la base, il y a quelques
argiles vertes quartzifères. Cette argile arénacée, qui n’a que 10 à
12 mètres d’épaisseur, est considérée par plusieurs géologues
comme représentant les grès bigarrés ; mais nous ne voyons pas
pourquoi elle ne serait pas plutôt la base des marnes irisées à
l’état arénacé, par suite de la superposition immédiate à des roches
granitoïdes. Au-dessous, en effet, dans le vallon du viaduc, se
trouve le gneiss qui est granitoïde ou schistoïde, gris rougeâtre, à
mica noir, parfois porphyroïde, à grands cristaux de feldspath
rougeâtre, et dont les strates, parfaitement visibles, plongent de
50 à 60° au S. 20° E.
Le sol, jusqu’à l'entrée du souterrain de Malain, est formé par
les mêmes sables et grès recouverts d’éboulis de calcaire magné-
sien, et de calcaires noirâtres, grossiers, ou grenus, à Gryphœa
arcuata y Belemnites clavatuSy Pecten œquivalvis, etc.
Immédiatement avant, par suite de la ligne anticlinale et de la
faille, on voit les sables et grès précédents, qui plongent de 27' 20" à
l’O. 30° N., butter contre les calcaires compactes ou eompacto-
oolitiques jaunâtres, avec bancs noirâtres à Entroques, de la
grande ooli te et du forest-marble, qui plongent de 15ü au S. 30°E.
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON
62:>
Ainsi, sous la ligne anticlinale de Malain, les gneiss paraissent
dans son voisinage, et, de chaque côté, il y a plongement des
couches, très faible du côté du bassin septentrional, très considé-
rable comparativement du côté opposé aussi l’angle anticlinal
est-il d’environ 165°, différant ainsi d’une ligne droite d’un peu
plus de 15° ; d’un côté, 27' 20", et de l’autre côté, 15°.
Au S.-E. de la faille, la grande oolite et les assises supérieures
constituent une série de mamelons isolés rocheux, à pic au N.-E.,
dirigés E. 24° N., formés par la colline du bois dePerrigny, celle
de l’ancien château de Malain, et la roche de Malain traversée
par le petit souterrain. Quant à la colline du signal de Malain,
qui atteint 608 mètres , et qui forme le point culminant orogra-
phique, elle est très probablement au N.-E. de la faille.
La direction de ces collines, prolongée vers 10., passe parle
vallon qui est au bas de Sombernon à 0\5, et par la colline qui est
à 0k,5 au S. de Pouilly en Auxois. Vers l’E., elle va traverser
notre coupe à 14 kilomètres au S.-E. de Saint-Seine, à un léger
vallon qui est au S.-E. de Darois, entre la colline du Chêne
d’Observe qui atteint 479 mètres, et une autre qui atteint
435 mètres, vallon qui va déboucher au Suzon devant MeSsigny,
et où nous n’avons reconnu aucune trace ni de ligne anticlinale
ni de faille.
Ainsi, entre Dijon et Châtillon, il y a au travers de l’étage ju-
rassique inférieur une série d’accidents, doués d’un certain paral-
lélisme dont l’intensité va en décroissant à mesure qu’on s’éloigne
du bassin de la Bresse. Ce sont :
La ligne anticlinale et la faille de Malain,
La grande ligne anticlinale de Saint-Seine,
La petite ligne anticlinale de Saint-Marc-sur-Seine ,
La faille de Châtillon-sur-Seine.
De l’examen seul de notre coupe on pourrait déjà conclure que
les assises de l’étage jurassique moyen du bassin de la Seine n’ont
très probablement jamais communiqué avec celles du bassin de
la Bresse dont elles sont séparées aujourd’hui par une distance de
100 kilomètres, et qu’elles ont été déposées dans deux bassins dif-
férents, contrairement à ce qui avait eu lieu pour le lias et l’étage
jurassique inférieur. L’étude de la grande carte géologique de là
France vient confirmer cette position. En effet, on y voit l’étage
moyen du bassin de Paris dépasser à peine à LE. et au S. une
ligne passant par Neufcliàteau, Chaumont, Châtillon-sur-Seine et
DU 44 AU 18 SEPTEMBRE 1851,
628
loyers, et celui du bassin de la Bresse être à peu près limité au
N. et à l’O. par une ligne passant à Port-sur-Seine, Prautlioy et
Dijon,
Il nous paraît résulter de l’ensemble de ces faits qu’immédiate-
ment après le dépôt de l’étage jurassique inférieur il s’est pro-
duit, des Vosges au Morvan, une élévation du sol sous-marin qui a
obstrué l’une des deux communications qui existaient entre le
bassin de Paris et ceux du sud de la France , élévation qui aurait
été produite suivant Une direction géologiquement parallèle à celle
du système de soulèvement de la Gôte-d’Or et antérieurement à
ce dernier, si l’on n’arrivait pas à reconnaître que les deux phé-
nomènes n’en constituent qu’un seul dont la date serait un peu
antérieure à celle qui lui a été primitivement assignée.
A la suite de cette communication , M. Moreau fait observer
qu’aux environs d’Avallon plusieurs failles existent dans les
terrains du lias. Gomme les failles indiquées par M. Raulin,
elles së dirigent du N.-E. au S.-O., et rayonnent autour du
massif granitique qui setnble leur imprimer une direction
unique.
M. Fodr annonce que des marnes oxfordiennes et kimmé-
ridiennes ont été employées par lui, avec succès, pour l’amen-
dement des terres.
Il met sous les yeux de la Société divers échantillons.
M. le président Studer donne lecture de la lettre suivante de
M. Favre :
Lettre adressée par M. le professeur Faure à M. le professeur
Studer.
Genève, le 6 septembre 1851.
J’ai un bien vif regret de ne pouvoir me rendre à la séance
extraordinaire de la Société géologique, mais j’arrive d’un voyage
dans les Alpes de la Savoie^ et je ne puis m’absenter de nouveau.
Après la rédaction de mes notes, je crois que je pourrai donner
une coupe détaillée de toutes les montagnes qui occupent l’espace
compris entre Genève et le revers méridional dit mont Cenis ; mais
en attendant, permettez- moi de vous soumettre deux ou trois ré-
flexions qui m’ont été suggérées par les observations que j’ai faites
dans ce voyage.
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
62/4
1« Sur le terrain anthraxifèrc de la Tarcn taise. — Après l’avoir
examiné avec soin , je pense que les dépôts charbonneux ne se
trouvent que sur deux horizons, et pas sur trois, comme plusieurs
géologues l’ont annoncé, c’est-à-dire que je crois qu’il y a en Ta-
rentaise deux terrains anthraxifères , mais je pense qu’il n’y en a
pas trois.
2° Sur les serpentines. — J’ai examiné ces roches avec beaucoup
d’intérêt dans les environs du mont Iseran. Elles sont en couches
disposées d’une manière concordante avec les terrains qui leur
sont supérieurs. Ce sont évidemment des roches altérées à un très
haut degré qui ont produit la serpentine , et cette localité m’a
confirmé dans l’opinion que j’ai publiée en 18â9, en revenant du
Tyrol, où j’ai eu le plaisir de vous accompagner, savoir, que la
serpentine n'est pas une roche d'éruption , mais qu elle est le pro-
duit d’une action métamorphique très développée (1).
3° Sur la présence de la craie blanche clans les Alpes de la
Savoie , ou plutôt à la jonction des Alpes et du Jura . — Je ne
vous donnerai ici qu’un abrégé d’un mémoire qui sera, je pense,
inséré dans la Bibliothèque universelle de Genève. On sait que
la chaîne du Jura vient rencontrer la chaîne des Alpes dans les
environs du village des Échelles, au sud de Chambéry. A l’est
de ce village on trouve une montagne qui s’étend de Saint-Thi-
bault-de-Bouz à Corbeil, et qui est séparée de la chaîne du Gra-
nier, placée plus à l’est encore, par une espèce de plateau acci-
denté, nommé les Déserts d'Entremont , et par une vallée assez
profonde qui porte le même nom ; c’est là que l’on voit la craie
blanche. J’ai eu le plaisir d’être accompagné et dirigé dans cette
course par M. l’abbé Yalet, qui m’a indiqué, avec une obligeance
parfaite, les localités les plus importantes qu’il avait déjà souvent
parcourues.
Le village des Déserts est placé sur la craie blanche elle- même ;
elle est assez analogue à celle des environs de Paris, quoique peut-
être sa pureté soit moins grande et que parfois même elle prenne
l’aspect d’un calcaire jurassique. Cette craie contient beaucoup de
silex : dans certaines parties ils sont blonds ou noirâtres ; dans la
partie inférieure ils sont crayeux, comme s’ils étaient décomposés
ou qu’ils eussent été formés d’une manière incomplète. Les princi-
paux fossiles trouvés dans cette localité sont les suivants :
(t) Bibliothèque universelle y Archives, 1849, t. X , p. 187.
BU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
625
Belemn itc lia mucronata .
Turrilitcs.
Un fragment d’ Ammonite, indéter-
minable quant a l’espèce.
înoccrainus la tus P, Munst.
— problcnmticus, d’Orb.
— Golcljusianus , d’Orb.
Sponâjliis spinosus ?.
Ostrca vesicularis .
Ananchytes ovatci, Lamk.
JWcraster c or-an gui au ni.
— une autre espèce.
Serpula.
Turbinolia .
Les Ananchytes ovata sont assez bien conservées pour ne laisser
aucun doute sur leur détermination. Voilà donc la craie blanche
parfaitement constatée par ses caractères minéralogiques et par ses
fossiles; quant à sa position géognostique, elle repose, du côté
occidental de l’espèce de triangle occupé par cette formation, sur
un poudingue ferrugineux à ciment calcaire, dont l’épaisseur est
très faible. Ce poudingue contient des Inoceramus concentrions ;
c’est donc du grès vert. Il repose sur un calcaire rougeâtre très
siliceux, contenant beaucoup de débris de coraux, mais dans
lequel je n’ai pu trouver aucun fossile déterminable. Il occupe la
partie supérieure du calcaire a Cap rotin a ammonia; c’est peut-être
le calcaire à Pteroceras Pelagi ou l’équivalent du terrain aptien.
Ainsi, du côté de l’ouest, la position de la craie est tout à fait nor-
male, mais il n’en est pas ainsi du côté nord. En effet, en exami-
nant le ruisseau qui descend du village du Désert à Entremont ,
on voit que la rive gauche est formée par des couches oxfordiennes
qui se relèvent contre la rive droite, tandis que celle-ci est occupée
par la craie blanche dont les couches paraissent plonger sous les
couches oxfordiennes. Evidemment il y a là une faille qui a
amené les couches de l’étage jurassique moyen au même niveau
et même à un niveau supérieur à celui de la craie blanche.
Le point culminant des collines de craie se nomme la Pointière ;
il est occupé par une roche qui ne présente plus les caractères de
la craie ; elle est beaucoup plus dure et forme un escarpement,
tandis que la craie a des formes arrondies. Cette roche est un cal-
caire siliceux blanc, contenant des silex; par son apparence, elle
m’a rappelé le calcaire pisolitique des environs de Paris, tel qu’on
le voit dans les carrières de Montain ville ; cependant je n’ai trouvé
aucun fossile dans cette formation, qui n’est recouverte par aucun
terrain, car le calcaire nummulitique qui devrait le dominer
manque dans ce district de montagnes.
U y a peut-être un peu de hardiesse à vouloir identifier cette
roche avec le calcaire pisolitique, en s’appuyant seulement sur
l’apparence ; mais en voyant dans les fossiles et dans la nature de
la craie tant d’analogie avec celle des environs de Paris, on ne
Soc. géol.y 2e série, tome VIII. 40
626
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
peut s’empêcher de prendre une certaine confiance dans les carac-
tères minéralogiques. Au reste, si ce calcaire siliceux ne représente
pas le calcaire pisolitique, on ne peut nier qu’il ne soit l’équi-
valent de la craie endurcie qui occupe, dans le bassin de Paris, la
partie la plus élevée de la formation crétacée.
En résumé, cette formation de craie blanche recouvre, dans les
environs d’Entremont, un espace triangulaire dont les côtés ont
près d’un kilomètre de longueur; elle repose sur le grès vert,
présente une puissance de 150 à 200 mètres, et l’on peut y recon-
naître les divisions suivantes : la craie avec silex crayeux et boules
ferrugineuses occupe la partie inférieure; la partie moyenne est
formée par la craie marneuse et schisteuse qui contient peu de
silex ; les fossiles y sont abondants dans la partie basse. La partie
supérieure est formée de calcaire siliceux ayant 6 à 10 mètres
d’épaisseur, qui doit être l’équivalent de la craie endurcie ou du
calcaire pisolitique.
Cette formation se retrouve plus au sud, d’après M. l’abbé
Valet. On la voit près de la Rochaire, sur la rive gauche du Guier-
Vif, pas loin des Echelles et à l'ouest du grand Som, au lieu
nommé la Bergerie, près de la Grande-Chartreuse. M. Valet et
moi, nous avons également examiné la craie blanche dans le haut
plateau, nommé Herbettaz ou Arpettaz, placé sur la chaîne du
Granier : là encore la craie est traversée d’une manière bizarre par
une faille.
RL l’abbé Chamousset est, si je ne me trompe, le premier qui ait
parlé de la présence de la craie blanche dans les Alpes de la Savoie ;
il en a entretenu la Réunion helvétique des sciences naturelles à
Genève en 18à5. Depuis lors, M. Murcliison a trouvé des fossiles
de la craie, près de Thones, dans des calcaires où j’en avais souvent
cherché avant lui, mais avec moins de bonheur. La craie d’Entre-
mont est une formation bien mieux caractérisée que celle décrite
par M. Murcliison; on pourra en obtenir de nombreux fossiles, et
elle est accompagnée de deux terrains qui sont dignes d’attirer
l’attention des géologues, et que l’on reconnaîtra peut-être pour
être, l’un le terrain aptien, l’autre le calcaire pisolitique.
M. Studer confirme les faits annoncés dans la lettre de
M. Favre j et il cite à l’appui des faits semblables constatés
par lui et consignés dans sa Géologie de la Suisse.
M. Raulin lit la note suivante sur les terrains de la Bresse :
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
627
De la Bresse et de la disposition de ses terrains tertiaires
supérieurs , par M. Vor Raulin.
Introduction. — Entre la chaîne du Jura, à TE., l’extrémité
méridionale de la chaîne des Vosges au N.-E., la Côte-d’Or et
les montagnes du Charolais et du Beaujolais au N. -O. et à l’ü,,
se trouve une grande plaine limitée dans la partie méridionale ,
du N.-E. au S. -O., par les derniers prolongements des Alpes
entre Pont-de-Beauvoisin et Valence.
Cette plaine est allongée du N.-E. au S. -O., de Vesoul par
Gray, Dole, Dijon et Beaune jusqu’à Chalon-sur-Saône. De cette
dernière ville, elle est dirigée du N. au S. , et renferme successive-
ment les villes de Louhans, Mâcon, Bourg, Villefranche, Trévoux,
Lyon, Vienne, la Tour -du- Pin , Saint-Marcellin et Tournon,
jusqu’au delà de Valence.
La Saône, le principal cours d’eau de cette plaine, y coule
longitudinalement, d’abord du N.-E. au S. -O. et dans la partie
médiane jusqu’à Châlon, en recevant l’Oignon, la Tille, le Doubs
et la Eure. De Châlon , la Saône coule au S., constamment sur
le bord occidental de la plaine, en recevant la Seille, puis, grossi
de l’Ain, le Rhône qui la continue dans la même direction, et
reçoit lui-même l’Isère qui coule en dernier lieu au pied des
Alpes, et enfin la Drôme qui débouche de ces montagnes.
La longueur de cette plaine est de 350 kilomètres, de Vesoul à
l’enibouchure de la Drôme. Au-dessus de Dole, sa largeur est de
h 0 kilomètres, puis de 60 jusqu’à Louhans. De cette ville à Lyon
et Vienne, elle est de nouveau réduite à à0 kilomètres ; elle re-
prend ensuite subitement une largeur de plus de 60 kilomètres.
Cette plaine, dans la partie comprise entre le Doubs et le Rhône,
de Dole à Louhans, Bourg et Lyon, porte le nom de Bresse. La
portion comprise entre ces deux dernières villes possède pourtant
une dénomination particulière : c’est la Bombes, petit pays cou-
vert d’étangs. La partie septentrionale faisait partie de la Bour-
gogne ; la partie méridionale dépendait du Dauphiné.
Le Jura, le pied méridional des Vosges, la Côte-d’Or et la par-
tie orientale des montagnes du Charolais et du Beaujolais jusqu’à
Lyon, sont formés par des assises jurassiques appartenant le plus
souvent à l’étage inférieur. De Lyon à Valence, les terrains pri-
mitifs du plateau central s’avancent jusqu’au Rhône; le pied des
Alpes, au S.-E. de l’Isère, est constitué par le terrain crétacé mé-
diterranéen.
628 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
La grande plaine de la Bresse est formée par des terrains ter-
tiaires qui sont généralement rapportés aux deux étages supérieurs ;
au terrain miocène les marnes et calcaires d’eau douce de Vesoul
à Gray et Auxonne, et les mollasses marines du Pont-de-Beau-
voisin et des bords de l’Isère. Les dépôts plus récents qui forment
tout le reste de la plaine, considérés comme diluviens jusqu’à la
publication des Recherches sur quelques unes des révolutions du globe ,
par M. Eiie de Beaumont, en 1829, sont maintenant rangés
dans le terrain pliocène.
Appelé par quelques afïaires à Charolles l’année dernière, nous
profitâmes de notre séjour dans ce pays pour parcourir la Bresse,
proprement dite, de Lyon à Châlon. Pendant les quelques jours
qui viennent de s’écouler, je me suis séparé pour aller visiter la
partie septentrionale ; c’est le résultat de ces deux excursions dans
la partie située au N. du Rhône , combiné avec les observations
déjà publiées sur ce pays, qui va être soumis à la Société.
Composition du terrain pliocène. — La partie située au N. du
Rhône est une plaine fort peu élevée au-dessus du niveau de la
Saône, et dans laquelle, par suite, les vallées et vallons ont une
profondeur très faible, de 10 à 20 mètres en moyenne. Au-dessous
de Villefranche seulement, le sol de la Bresse venant à s’élever
davantage, la vallée de la Saône devient plus profonde, ainsi que
quelques uns des vallons qui y débouchent ; c’est surtout à partir
de Neuville que les coteaux se rapprochent de la rivière et l’en-
caissent.
Des étangs se trouvent çà et là ; mais dans la Dombes ils sont
extrêmement nombreux, surtout depuis la route de Trévoux à
Bourg jusqu’au bord du plateau limité à l’E. et au S. par les val-
lées de l’Ain et du Rhône, de Pont-d’Ain à Meximieux et Lyon.
Nous allons indiquer la nature du sol en partant des bords du
Rhône, et en remontant successivement au N. jusqu’aux limites
de la région , dans les environs de Vesoul.
Environs de Lyon. — Sur la rive droite de la Saône, en montant
au-dessus de Vaise par la route de Clermont, on voit au bord du
plateau un dépôt de cailloux de quartz souvent plus gros que le
poing , endurci à la surface, et donnant alors un banc de pou-
dingue massif, très irrégulier, caverneux, de 5 à 6 mètres d’épais-
seur moyenne. Au N. -O. de la ville , sur le quai du Rhône , le
faubourg Sainte-Claire présente des escarpements verticaux de
15 à 20 mètres, formés par le terrain tertiaire qui est flanqué
contre la protubérance primitive, visible à l’O., sur la Saône;
c’est un sable jaunâtre un peu solide, contenant une immense
DU IA AU 18 SEPTEMBRE 1851.
629
quantité de cailloux de quaitzites blancs ou jaunes, de la grosseur
du poing. Il y a des alternances très irrégulières de bancs très incli-
nés et ondulés: les uns fins, les autres, avec des cailloux, donnant
des pouclingues par leur consolidation. En montant dans le dépar-
tement de l’Ain, on voit bien sur la route les bancs irrégulière-
ment endurcis, à cailloux atteignant jusque la grosseur de la tête ;
sur le plateau, il y a des limons jaunâtres employés pour une tui-
lerie. A Neuville et à Trévoux, d’après M. Elie de Beaumont, les
coteaux très rapides et les falaises escarpées montrent sur une
grande épaisseur un sable jaunâtre agglutiné avec des cailloux
roulés qui renferment, dans la partie supérieure, un poudingue
peu cohérent.
De Lyon à Bourg. — Sur la grande route après Rillieux, le sol,
qui ne présente déjà plus que de légères ondulations dépassant à
peine 18 à 20 mètres, est formé par des terres brun rougeâtre, à
cailloux pyraires et pugilaires. Dans les dépressions, on exploite
un sable jaune renfermant en grande abondance les mêmes cail-
loux, parfois delà grosseur de la tête ; il présente çà et là, comme
aussi à la surface du sol, des blocs presque anguleux, d’un quart à
un demi-mètre cube, de calcaire compacte gris, provenant sans
aucun doute des terrains crétacés ou jurassiques des Alpes, et
d’autres plus petits de granité et de gneiss gris à gros grain avec
mica brun. Plus loin, il y a des étangs, quelques briqueteries, et
les parties élevées ne présentent que peu de cailloux à la surface
du sol. A Saint-Marcel et au delà, les dépressions présentent à
0m,3 au-dessous de la surface du sol, des cailloux qui atteignent
presque la grosseur de la tête, et qui sont employés par lits avec
la brique pour les parties inférieures des constructions. A la sortie
de Villars, on tire pour la route, sur 3 à A mètres dans les sables
jaunes sans stratification , dés cailloux de quartzites blancs ou
jaunes, de la grosseur du poing et même de la tête. La coupure de
la route, à la base du monticule de Saint-Paul, montre sur plu-
sieurs mètres des sables argileux jaune fauve, renfermant des
cailloux parfois de la grosseur de la tête et des blocs d’un dixième
de mètre cube, d’un granité verdâtre à gros grains. A 6 kilomètres
avant Bourg, des coupures de 5 à 6 mètres laissent encore voir les
cailloux qui atteignent rarement la même grosseur, et accidentel-
lement un volume triple.
Bourg. — D’après M. Bernard, dans le sondage poussé jusqu’à
AO mètres de profondeur, on n’a traversé que des alternances de
sables, d’argiles et de marnes purs ou mélangés, de couleurs va-
630
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
liées, ne renfermant pas de cailloux, mais seulement des graviers
en partie calcaires.
De Bourg à Cuiseciux.' — Les mêmes cailloux se tirent autour de
la ville pour les routes et pour les constructions. Vis-à-vis de
Tréfort, il s’y mêle, provenant du terrain jurassique, des fragments
arrondis de calcaire compacte jaunâtre, rose ou gris bleuâtre, avec
grains cristallins et nombreux débris de coquilles spatbiques. La
route s’engage alors dans des vallons de 15 à 20 mètres, dont les
pentes montrent des cailloux dépassant encore la grosseur du
poing ; mais un peu plus loin il n’y en a plus. Le vallon dans
lequel coule le Solnan montre la coupe suivante dans sa moitié
supérieure, l’assise la plus basse se trouvant à 5 ou 6 mètres au-
dessus du Solnan :
Argile jaune verdâtre, à lits calcaires in-
terrompus 3 mètres.
Sable jaune, un peu argileux 1
Argile sableuse grise, avec bois passant
au lignite 1,50
Argiles jaunes, avec lit d’argile jaune et
verte , contenant de petits nodules cal-
caires quelques mètres.
Peu après , à Coligny, la route arrive sur le calcaire jurassique,
qu’elle ne quitte plus jusqu’à Saint-Amour etCuiseaux.
De Cuiscaüx à Châlon. — On descend d’abord un peu en voyant
des argiles bigarrées, rouges, jaunes et grises, puis on arrive
dans la plaine formée par des sables argileux jaunes, avec couches
d’argile sableuse grise, recouverts par des argiles gris verdâtre et
jaunes à nodules calcaires. A 5 kilomètres après un petit ruisseau,
le coteau, qui a 15 mètres , montre :
Sables un peu argileux, micacés jaunes , formant le plateau.
Argile sableuse noire, formant une couche de 1 mètre, avec
bois passant au lignite.
Argiles vertes et jaunes.
Peu après, il y a une tuilerie dans un vallon , et à l’entrée d’un
bois un trou laisse voir :
Argile sableuse jaune fauve, formant le sol.
Sable argileux jaune.
Sable pur, légèrement grisâtre, micacé , exploité.
Ces mêmes sables sont tirés dans plusieurs autres petits vallons
DU 1 h AU 18 SEPTEMBRE 1851.
631
jusqu’aux Gallands; la seconde moitié de la distance, qui sépare
Cuiseaux de Louhans, ne montre rien. Au delà de la ville et de
la Seille , on remonte d’environ 20 mètres, et* devant Branges
on retrouve les sables argileux jaunes et les argiles gris verdâtre.
De Saint-Etienne à Ouroux , les sables jaunes se montrent encore
dans les grandes prairies, à 7 kilomètres avant Châlon.
Environs de Châlon. — D’après M. Manès , ce terrain est formé
de cailloux roulés , employés pour les routes et le pavage des villes,
et souvent réunis par un ciment marneux , de marnes grisâtres à
Planorbes et lignite servant à faire des briques et des tuiles ; il
y a des bancs silico-ferrugineux de fer en grains disséminés dans
l’argile, avec Paludines et Unios, qui ont été exploités pour le
Creusot : d’une part, à Colonges et Remigny, entre la Saône et
Cliagny, et, d’autre part , à Saint-Etienne-en-Bresse , Saint-Vin-
cent, Savigny-sur-Seille et Beaurepaire, entre Châlon et Louhans,
à l’E. de la Saône. — Le sondage de Châlon , poussé jusqu’à
159 mètres de profondeur, n’a présenté de cailloux que jusqu’à
38“, 50 de profondeur; au-dessous on n’a plus rencontré que des
alternances de sables, d’argiles et de marnes, purs ou mélangés, de
diverses couleurs, renfermant seulement çà et là quelques lits de
petits graviers.
De Châlon h Dijon. — Le plateau, en sortant de Châlon, ne pré-
sente que des terres argilo-sableuses jaunes; mais en montant à
Corpeau on voit des argiles rouge violet, veinées de grisâtre, qui
s’élèvent au bord de la plaine formée par des argiles sableuses
jaunes, à cailloux de quartz de la grosseur du poing , appartenant
sans doute au diluvium vosgien de la vallée de la Saône. Un peu
plus loin on trouve les argiles sableuses gris bleuâtre , qui devien-
nent jaunâtres par leur exposition à l’air , et qui renferment de
petits nodules calcaires. De Beaune à Dijon le chemin de fer en-
tame souvent des argiles sableuses jaunes, qui contiennent une
grande quantité de galets, surtout calcaires, atteignant peu souvent
la grosseur du poing. — D’après M. Canat, les dépôts caillouteux
viennent à peu près se terminer à la Seille ; on y a trouvé des
dents de Mastodon angustidens à Trévoux, près de Tournus, et
dans la tranchée du chemin de fer, à Corcelles.
De Dole à Senrre et Dijon. — D’après M. Elie de Beaumont , à
Nevy, au S. de Dole, il y a de grandes masses de sable plus ou moins
argileux et solidifié , contenant sur quelques points des cailloux
roulés qui donnent un poudingue en partie dur ; la plupart sont
de quartzite schistoïde blanc, de jaspe roqge et de grauwacke ana-
63?
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON ,
logue à celle des Vosges; les cailloux de granité sont très petits et
peu nombreux. I)ç Dole on descend un peu , et après avoir tra-
versé le canal on se trouve dans la plaine basse à terres brunes plus
ou moins jaunâtres, sans cailloux, qui deviennent plus jaunes avant
Chemin. Dans le bois, après Pourlans, on voit un sable jaune assez
pur sous les terres argilo-sableuses jaunes sur lesquelles on descend
à SeurreA Après avoir traversé la large prairie de la Saône, on
monte, au-dessus de Pouilly, aux grandes tuileries, qui tirent sur
3 mètres, au bord du bas plateau, des sables argileux jaunes purs
lin peu micacés, devenant plus argileux, et passant aux terres ar-
gilo-sableuses jaunes de la surface du sol. Peu après , dans un val-
lon, des lits argileux intercalés donnent une petite source. À 2 ki-
lomètres après Broin , les sables jaunes présentent des nodules
ferrugineux superficiels, et un peu plus loin ils sont très beaux. A
h kilomètres après Cîteaux, à la sortie de la forêt, ces mêmes sables
sont tirés sur 2 mètres avant Corcelles. Pendant les \h kilomètres
suivants, le sol, qui va en s’abaissant constamment, est formé par
des terres argilo-sableuses au-dessous desquelles, sur beaucoup de
points, il y a des grèves et des galets calcaires d’alluvion. D’après
M. Payen , dans le S. -E. du département de la Côte-d’Or, la par-
tie inférieure est formée par un grès friable jaunâtre à grains fins,
renfermant des couches de sable fin et d’argiles blanches, jaunes
et bleuâtres; la partie supérieure est une couche d’argile jaune
avec fer hyclroxydé en grains pisaires, donnant un minerai sou-
vent fort riche et d’excellente qualité, exploité pour la fonte fine
dite de Comté.
De 'Montmirey-Chd terni à Dijon. — Du village on descend dans la
plaine, où l’on tire sur 2 mètres de beaux sables jaunes purs, au-
dessous de sables jaunes argileux de même couleur, à nodules fer-
rugineux. Autour de Champagney, on retrouve les sables jaunes
qui renferment de petits cailloux de quartz; en redescendant
dans Nilieu pour regagner la route à Cléry, ils sont argileux
très jaunes, et donnent des terres argilo-sableuses jaune fauve. La
route traverse de grandes prairies jusqu’à Pontaiiler et la Saône,
au delà de laquelle on voit apparaître les calcaires d’eau douce
miocènes, qui se poursuivent par Vonges jusqu’au delà de Binges.
Ces calcaires , autour de Vonges, sont recouverts par des argiles
sableuses jaune rougeâtre; des tuileries emploient des argiles
sableuses rouges. A 5 kilomètres avant Binges, la forêt présente
dans les fossés, sous plusieurs mètres d’épaisseur, des argiles sa-
bleuses jaunes, parfois verdâtres, à nodules ferrugineux abondants.
DU l/l AU 18 SEPTEMBRE 1851,
633
De ce point à Dijon, pendant 18 kilomètres, le sol est formé par
des terres brunâtres recouvrant le plus souvent des grèves calcaires
d’alluvion qui ne laissent pas voir le terrain inférieur.
Département de la Haute-Saône. — D’après M. Tliirria, le terrain
pliocène s’y avance depuis les limites de la Côte-d’Or jusqu’à Ye-
soul , et son épaisseur varie de 2 à 15 mètres; il est composé de
couches alternantes : 1° De sables argileux grisâtres, jaunâtres et
rougeâtres , passant quelquefois à l’état de grès ferrugineux friable
brun, ou de poudingue ferrugineux avec des nodules et plaquettes
ferrugineuses, des cailloux de quartz et des galets du calcaire sili-
ceux des drailles. 2° D’argiles onctueuses , jaunâtres , rougeâtres
ou verdâtres, rubanées, avec des veines grisâtres, employées pour
la poterie à Gray. Des parties ferrugineuses renferment des amas
irréguliers de fer liydroxydé en grains pisaires conditionnés, iso-
lés, rarement réunis ; elles sont entremêlées de sable , de petits
cailloux de quartz et de fragments de calcaire compacte. 3° De
conglomérat de calcaires compactes ou marneux ressemblant à
ceux de l’étage jurassique supérieur, à ciment argileux tendre, ren-
fermant parfois des grains ferrugineux. Ces conglomérats, dont
les fragments varient de la grosseur d’une noix à celle du poing ,
sont le plus souvent superposés aux argiles à minerai de fer.
Résumé. — Le terrain pliocène de la Bresse, formé sur les bords du
Rhône par des dépôts sableux et caillouteux à gros blocs, ne ren-
ferme plus, lorsqu’on s’avance au N. , que des cailloux dont la
grosseur va en diminuant graduellement jusqu’au delà de Bourg
et de la Seille, où il n’y en a plus. Dans la partie médiane, il n’y
a que des dépôts sableux et argileux , avec quelques couches de
gravier peu gros. Enfin des dépôts faits dans des eaux tranquilles
peu profondes, des minerais de fer, se trouvent déjà aux environs
de Louhans, dans le département de la Côte-d’Or, et surtout dans
celui de la Haute-Saône, entre Gray et Yesoul.
Disposition du sol et du terrain pliocène. — La Bresse, ainsi que
nous l’avons dit en commençant , est une grande plaine allongée
du N. au S., enchâssée entre des parties plus élevées : le Jura d’un
côté , les Yosges , la Côte-d’Or, le Charollais et le Beaujolais de
l’autre. Elle présente des altitudes à peu près semblables, soit dans
la partie médiane, soit sur les bords; pourtant on aperçoit bien à
la disposition générale de la surface que la partie où coule la Saône
est la plus basse. En effet, le tableau suivant présente, dans la par-
tie septentrionale une pente vers l’E. ; dans la partie médiane , la
portion la moins élevée est au centre ; dans la partie méridionale
enfin la pente est à l’O.
68/i
RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON,
BORD OCCIDENTAL.
CENTRE.
BORD ORIENTAL.
m.
A l’E. de Fontaine-Fran-
çaise 248
A TE. de Dijon 220
Beautie 250
Le Villars, à l'O. de Cha-
lon 219
A l’O. de Pont-de-Vaux. 216
|Le Molard, à l’E. de Mâ-
con 205
Plateau de Trévoux. . . 281
'■ - - -
m.
A l’E. d’Auliey 247
A l'O. de Longchamp. . 227
A l’O. de Charette. . . . 195
Grande Faye. ...... 216
Chérinat, à l'O. de Pol-
liat 226
Voli 508
m 8
Moulmirey-Château. . - 220 ]
Fonlcnav 2201
A l’O. de Lons-le-Saul- j|
nier 225 j
A FO. de Coligny 240 i
A l'O. de la Reyssouse. . 241 J
La roule à FO. de Loyes. 512|
La Bresse est beaucoup moins élevée au-dessus du niveau de la
mer que les régions environnantes, qui atteignent, dans son voi-
sinage immédiat, des altitudes doubles et souvent quadruples. Le
tableau suivant, en même temps qu’il donne les altitudes des prin-
cipaux points de la partie médiane de la Bresse, présente aussi,
dans deux colonnes latérales, celles des points culminants des ré-
gions voisines. Les altitudes correspondantes sont sur des lignes
dont la direction change, car à mesure qu’on avance au S. elles
passent du N. -O. — S.-E. à l’O. — E., de manière à être toujours
perpendiculaires à la ligne médiane de la Bresse.
DU là AU 18 SEPTEMBRE 1851
635
RÉGIONS SEPTENTRIONALES
RÉGION MÉRIDIONALE
ET
PLAINE DE LA BRESSE.
ET
ORIENTALES.
OCCIDENTALE (JURA).
Plateau de Langres.
Près de Combeau-Fon-
m.
A 2 kil. au N. de Raze, m.
Chaîne du Lomont, à 10
laine
340
près de Vesoul 270
kil. E.-S.-E. de Cler-
val. .
823
Près de Langres. ....
478
Forêt de Bellevaivre , à
A 6 kil. au N. de Rou-
10 kil. au S.-E. de
Dampierre 242
lans-le-Grand
470
A 10 kil. au N.-O. de Se-
A 6 kii. à PO.-S.-O. de
Colline de Besançon. . .
493
îongey
470
Gray 251
Côte-d’Or.
Signal de Malain
608
Cirey, à 8 kil. à'PO.de
A 4 kil. au S.-E. de
Pontailler 242
Quingey
585
À 11 kil. au N.-O. de
Franxault, à 6 kil. au S.
Mont Poupet, à 4 kil.
Beaune
607
de Si-Jean de Losne. 196
au N. de Salins. . . .
853
Charollais.
Colline au-dessus de No-
Charette, à 6 kil. à PO.
lay
546
de Pierre 194
A o kil. aij.S. de Chaire-
Le ftleix-Chanlriaux , à
Pont du Navoy,à 10 kil.
c°y- • •
5 kil. au S. -O. de Saint-
à J’E. de Château-
Germain du- Bois. . . 220
Châlon
654
A ci kil. au N. de Sainl-
Réry, à 2 kil.au S.-O. de
Boisde Crolard, à 13 kil.
Gengoux-le-Royal. . .
464
Louhans 200
au S.-S.-E. de Lons-
le-Saulnier
695
A o kil. au S.-S.-O. de
A 1 kil. au N. de Mont-
Senecey-le-Grand. . .
478
pont 211
A 5 kil. à PO. -N.-O. de
Veyriat, à 3 kil. à PE. de
Lugny
582
Saint-Julien -s ur-Reys-
A 18 kil. à PO.-S.-O. de
Mâcon.
759
souse 225
1 kil. à PE. de Polliat, à
PO.-N.-O. de Bourg. . 230
Culsiat, à 6 kilom. au
N.-N.-E. de Trefort. .
771
Beaujolais .
A 4 kil. au N.-N.-E. de
Beauregard,à 8 kil. à PO.
Colline de Ceyzeriat. . .
594
Beaujeu
850
de Bourg 249
A 4 kil. au N.-E. de Cha-
Villars 295
A 5 kil. au S.-E. de
melet
872
Poncin. .......
554
A 5 kil. au N.-E. de
Margnolas, à 6 kil. à PO.
A 8 kil. au S.-E. de
Duerne
921
de Moiitluel 326
Saint-Rambert. . . .
1050
Les altitudes du tableau qui précède sont extraites de la nou-
velle carte de la France, tant pour les régions montueuses que pour
la plaine de la Bresse elle-même. Le terrain pliocène forme une
nappe continue depuis Lyon jusqu’à Gray. Lorsqu’on fait abstrac
tion de quelques ondulations tenant sans doute à des dénudation
postérieures, au voisinage de la grande vallée du Doubs, on voit
sa surface d’abord faiblement inclinée vers le S. , de Gray au Meix-
Chantriaux. De ce point elle va en s’élevant , d’abord doucement
jusqu’à Polliat, puis ensuite plus fortement jusqu’à la vallée du
Rhône, à l’E. de Lyon. Le tableau qui suit montre parfaitement
cette disposition :
686 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A DIJON 5
O
O
1 5j, 25i.
Rhin p (Bas-). Zircon dans le granité
d’Andlau, p. 346. — Arsenic et an-
timoine dans la houille et le lignite,
p. 35o.
Rhin ( Haut -). Sur les anciens glaciers
des environs de Mulhouse, p. 72. —
Sur une caverne à ossements, p. 169.
Sæmann. Observations, p. 58 1 .
Saône [Haute-). Causes delà perfora-
tion des calcaires jurassiques, p. 552.
— Ossements de la grotte de Fouvent,
Rhône. Sur le transport des matériaux
à la partie supérieure du delta,
p. 3 16.
Rqemkr. Coupe du terrain dévonien de
Couvin (Belgique), p. 87.
Rolault ( Marie). Sur les Trilobites et
les terrains de transition de la Bre-
tagne, p. 167. — Description des
fossiles du terrain paléozoïque des
environs de Rennes ( Ille-et-Vilaine),
p. 358. — Observation, p. 275.
Rover. Sur des failles dans le départe-
ment de la Marne, p. 564. — Sur les
terrains corallien et oxfordien de la
Haute-Marne, p. 600.
Roys (de). Sur le transport des ma-
tériaux à la partie supérieure du
delta du Rhône, p. 3r6.
Rudisles. Sur le Sphéruliles calcéo-
loïdes, p. 127.
Russie. Sur le terrain silurien inférieur
de Saint-Pétersbourg, p. 25 1. —
Sur les fossiles siluriens de Saint-
Pétersbourg, p. 261. — Nouvelles
géologiques, p. 3i4.
p. 55.1.
Saône-et- Loire. Sur le granité, le gneiss,
le terrain houiller et l’arkose de
Buxy, p. 576. — Sur un terrain de
ET DES AUTEURS,
651
sable rouge à silex crétacés, p. 547*
Sarthe. Sur ie terrain jurassique des
environs de Mamers, p. i4o.
Savoie. Craie blanche près de Cham-
béry, p. 624.
Scarabelli. Sur les terrains et un an-
cien lac de la vallée de Senio dans la
Romagne, p, 195. — Sur le terrain
miocène de Bologne et Sinigaglia,
p. a34, pl. IV.
Schkeker. Réplique à M, Durochersur
T
Tchihatcheff (de). Terrain à Num-
mulites de la partie septentrionale
de l’Asie Mineure, p. 24. — Sur les
terrains jurassique, crétacé et mim-
ai uü tique de l’Asie Mineure septen-
trionale, p. 280, 1 pl. — Sur les
terrains nummulitiques et diluviens
de la T h race, p. 297.
Terquem. Sur de nouvelles Lingules de
la Moselle, p. 10, pl. I.
Terrain crétacé de la Côte-d’Or,
p.636. — du littoral delà merNoire,
dans la Turquie d’Europe, p. 517.
— de la partie septentrionale de
l’Asie Mineure, p. 280.
Terrain crétacé supérieur de Chambéry,
p. 624. — de Moën, en Danemarck,
p. 532.
Terrain dévonien de Couvin ( Belgique),
p. 87.
Terrain diluvien de la Thrace, p. 297
et 483. — du littoral delà merNoire,
dans la Turquie d’Europe, p. 526.
Terrain erratique. Sur l’unité du phé-
nomène qui lui a donné naissance,
p. 64- — - Considérations générales,
p. 4<>i. — de Moën, en Danemarck,
p. 532.
Terrain ho ailler de Buxy (Saône-et-
Loire), p. 676. — du Languedoc,
p. 5i,
Terrain jurassique de la Côte-d’Or,
p. 55s, 5jo, 582, 608, 6i3, 637. —
Gisement des Oslrea costaia et acu-
minata en Lorraine, p. 327. — Sur
les terrains oxfordien et corallien de
la Haute-Marne, p. 600. — des en-
virons de Mamers, p. i4o. — du
Languedoc, p. 55. — de la partie
septentrionale de l’Asie Mineure ,
p. 280.
Terrain moderne à coquilles marines,
du bassin du lac Ontario, p. 420.
Terrain néocomien de la Provence ,
l’origine du granité, p. 5oo.
Seine-et-Oise. Fossiles marins à la
partie supérieure des sables à Êtam-
pes, p. 342.
Serpentine. Sa présence sur deux points
de la côte de l’Arabie, p. 279. — Au
mont Iseran (Savoie), p. 624.
Sismond a. Fougère et Bélemnite dans
un échantillon des Alpes, p. 64.
Sondages artésiens dans la Romagne ,
p. i37.
p. 202. — SesÉohinidesdansl’Yonne,
p. 56o. — Galets dans celui de la
Haute-Marne, p. 523 et 346.
Terrain à Nummulites de la Toscane,
j». 1 3 1 . — du littoral de la mer Noire,
dans la Turquie d’Europe, p. 520.
— de la Thrace, p. 297. — de la par-
tie septentrionale de l’Asie Mineure,
p. , 24, 280. — Fossiles de celui
d’Egypte, p. 261.
Terrain permien en général, p. Trj.
du Languedoc, p. 53,
Terrain primitif. Gneiss et granité de
la Côte-d’Or, p. 568.
Terrains pyrogènes des environs de
Constantinople, p. 5o8. — du litté-
ral de la mer Noire, p. 5a8. — à l’en-
trée de la mer Rouge, p. 278.
Terrain silurien. Fossiles de celui de
Rennes, p. 275, 358. — de l’Angle-
terre, p. 207. — de la partie centrale
de la Bohème, p. i5o. — des envi-
rons de Saint-Pétersbourg, p. a5i.
— du district métallifère du lac Su-
périeur, p. 89, 101.
Terrains tertiaires. Fragments relatifs
à ceux du bassin de Paris, p. 453. —
Fossiles marins à la partie. supérieure
des sables d’Elampes, p. 342. — de
la vallée du Cher supérieur, p. 473.
— Schistes bitumineux de Ménat ,
p. 3g. — de la Bresse, p. 55o et 627.
— de la Côte-d’Or, p. 636. — Age
des sables de la Sainlonge et du Péri-
gord et de plusieurs minerais de fer
de l’Aquitaine, p. 25 et 3o. — de la
Provence, p. 26 et 202, — de Moën,
en Danemarck, p. 532. — de Bolo-
gne, p, 234. • — du littoral de la mer
Noire, dans la Turquie d’Europe,
p. 526. — de la Thrace, p. 297.
Terrain tertiaire à silex d’Eure-et-Loir,
p. 481. — de Saône-et-Loire, p. 547.
Terrains de transition de Bretagne ,
652
TABLE DES MATIERES ET DES AUTEURS.
p. 167. — du Languedoc, p. 44> $9
et 64. — • des environs de Constanti-
nople, p. 5o8.
Terrain iraciiytique de l’Ararat, p. a65.
— de. Ruiz, dans la Nouvelle-Gre-
nade, p. 4^9- — de lu Guadeloupe,
p. 423.
Terrain Iriasique de la Côte - d'Or ,
p. 569 et 57 6. — inférieur de Dole
(Jura), p. 5/6. — du Languedoc,
p. 54. — Arkoses de Buxy (Saône-
et-Loire), p. 576.
Terre. Sur l’origine de son état actuel
ou son clivage comme cristal, p. 178.
— Sur sa forme polyédrique, p. 273.
Toscane. Elude et position de son cal-
caire à Nummulites, p. i3i.
Toschi. Sur les forages artésiens dans
la Romagne, p. 137.
Trésorier. Rapport sur sa gestion en
i85o, p. 223.
Végétaux fossiles du terrain houiller
et du terrain permien de Neffiez
(Hérault), p. 52. — Fougère et Bé-
lemnile sur un échantillon des Alpes
occidentales, p. 64.
Verkeuil (de). Sur le terrain per-
mien, p. 37. — Sur les travaux de
M. Troost, p. 38. — Observations,
p. 61, 89, 275.
ViQUESNEL. Rapport sur la gestion du
trésorier en iS5o, p. 223. — Sur des
Wat.ferdin. Sur la mesure des plus
grandes profondeurs de la mer et sur
leur température, p. 214.
Trilobites. Nouvelles remarques sur
leur tégument, p. 161. — nouveaux
de Bretagne, p. 167. — des environs
de Rennes, p. 358, 070 et 579.
Trombes sur le lac de Janina, en Tur-
quie, p. 274.
Troost. Indication de ses travaux,
38.
Turquie d'Europe . Sur le terrain de
transition et les roches pyrogènes des
environs de Constantinople, p. 5o8.
— Sur une collection de roches dulit-
toral de la mer Noire, p. 5i5. —
Terrain crétacé, p. 517. — Terrain
nummulitique, p. 520. — Terrains
pliocène et diluvien, p. 52 6. — Ro-
ches pyrogènes, p. 528. — Terrains
nummulitique et diluvien de la
Thrace, p. 297. — Sur des sables
aurifères, p. 483. — Trombes sur le
lac de Janina, p. 274»
sables aurifères de la Turquie d’Eu-
rope, p. 483. — Sur le terrain de
transition et les roches pyrogènes des
environs de Constantinople, p. 5o8.
■ — Sur une. collection de roches du
littoral turco - européen de la mer
Noire , p. 5i5. — Terrain crétacé,
p. 517. — Terrain nummulitique,
p. 520. — Terrains pliocène et dilu-
vien, p. 526. — Roches pyrogènes,
p. 528» — Observations, p. 297, 5i 2.
Whitkey et Foster. Sur les terrains
siluriens du district métallifère du
lac Supérieur, p. 89.
Y
Yonne. Êchinides du terrain néocomien, p. 56o.
Z
Zircon dans le granité d’Andlau et les sables de la Moselle, p. 346.
FIN DE LA TABLE.
ERRATA .
{Nota. Dans la table du tome VII le calcaire pisolithique du bassin de
Paris est rapporté au terrain tertiaire, tandis qu'il aurait dû l’être au
terrain crétacé, conformément à la classification adoptée par M. Hébert
dans ses communications. )
Pages. Lignes.
1 1? 1 7 et 55, au lieu de : mètres. Usez : millimètres.
12, 9 et 29, au lieu de: mètres, Usez: millimètres.
27, 16, au lieu de: Libot, Usez: Libos.
27, 25, au lieu de: Nujejoult, Usez: Najejoult.
27, 25 et 5i, au lieu de: Libot, lisez: Libos.
01, 5, au lieu de : largement, Usez : longuement.
55, 9 en remontant , au lieu de : Lembège, Usez : Lembèye.
io5, 4 en remontant , après Sainte-Marie, mettez un point et ajoutez:
« De plus, je crois que le silurien n’existe pas clu tout,
dans la rivière de Sainte-Marie.
123, 01, au lieu de : alternatives, Usez : périodes alternatives,
266, 11, au lieu de : Maranco, Usez: Baranco.
455, 21, au lieu de: sables ferrugineux et blancs, Usez: sables ferrugi-
neux et blanc.
435, 22, au lieu de: fonctionnent, comme l’a dit, lisez: fonctionnent
comme l’a dit.
455, 22, 2e colonne , au lieu de: ar. 2, 7, Usez : ar, 5, 7.
456, 4o, 1 re colonne, au lieu de: ar. 5, 12, Usez: ar. 5, 10.
437, 3 de la ire note , au lieu de : Ils peuvent, Usez: Ils pourront.
439, 25, au lieu de : piquetés et picoiés, Usez : piquetés ou picotés.
44°, 4 de la 2e colonne, après Anatina Robinaldina, au lieu de : ar. 5,
12, Usez: ar. 12.
44 1, 3o, au lieu de: géodique dans le calcaire, Usez: géodique, dans le
calcaire.
442? 2, au lieu de: n’existaient, Usez: n’existeraient.
442, to, att lieu de : Ce lit se trouve, Usez : Ce lit se retrouve.
442, 1 g , au lieu de : qui s'y montre aussi, Usez : qui s’y montrent aussi.
443, 2 de la 2e note, au lieu de : qu’on ne trouve, Usez: qu’on n’en trouve.
446, 26, au lieu de : page Usez : page 422.
45 1, 36, au lieu de : espèces fossiles, dont, Usez : espèces fossiles dont.
453, 12, i3 et i4, placez une virgule après chacun de ces mots : différence,
oolilhique,... Plicatules.
454? 1 4 5 au ^eu de: élévation, Usez : évaluation.
455, 1, au lieu de : les sables ne paraissant, Usez : les sables verts ne
paraissant.
609, 2 en remontant , au lieu de : coproides, Usez : copeoides.
: ■ : . - . . " <■ ■ 1
‘ V, ’iri'iy
. ,
■ . . ■ ;