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BULLETIN
DE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE.
Troisienie S^rie*
TOME X.
BUREAU DE LA SOClfiTfi,
(elections do 12 MAI 1844.)
fresideiil. Vice-Presidents.
Scnitateurs. Secretaire.
M. le baron Koussin , amiral et pair de France.
M. le baron Delessf.rt, menibre de I'lnstilut.
M. Auguste DE Saiht-Hiiaire, membre de I'lnslltut.
!M. Mermilliod, de|iute.
M. L. A'lTiEw , ^eographe.
M. NoEr. Desvergers.
Liste ties Presidents honornires de la Societe, depiiis son
ongine.
MM.
Le marquis dc Laplace.
Le maiquis de P^storet.
Le \icomtede Chateai-brund.
Le rointe Chabkoi. de Yoi.vic.
Becqufy.
Le baron Ai.ex. de Humeoldt.
Le coinle Chabrol de Crousol.
Le baron Cuvier.
Le baron Hyde de NEDvittE.
Le due de Doudeauvii.le.
J.-B. Eyries.
Le comte de Riohy.
MM. DuMONT d'Urvii.le. Le due DtCAZES. Le comte de Montalivet. Le l)aron de Baraste. Le lieiilenant-general Pei.et.
GUIZOT,
De Salvakdy.
Le baron Tcpinier.
Le comte de Las Cases.
VlLLEMAIW.
CcNiM Gridaine.
Correspondants etrangers dans Pordre de lew nomination.
MM.
Le doclein- J. Mease, a Pbiladelphie. H. S. Tannfr. a Pbiladelpbie. W. WooDBRiDct, a BdsUjii. Le It-col. Edward Sabine, a Londres. Le colonel Poinsett, a \Va>bingtou. Lecol. d'Abrahamson, a Copenbague. Le prol'esseur Schumacher, a Altona. De Navarrete, a Madrid. Le docteur Reinganum. a Berlin. Le capit. sir J. Franklin, a Londres, Le docteur Rlchardson, a londres. Le professfur Rafn, a Copenbague. Le capitaine Graah, a Copenbague. AiNSWoRTH, a Edindjourg. tecon^ciller Aurien BAi.Bi,aVieniie,
MM. LecomteGRABERGDEH£Ms6,a Florence- Le colonel Long, a Philadclphie. Sir Juliii Barrow, a Londres. Le capitaine Macokochie , ;i Sidney. Le capitaine sir John Ross, a Londi es. Le conseiller de Macedo, a Lisbonue. Le professi'ur Karl Ritter, a Berlin. P.-S. DU Ponceau, a Pbiladcljibio. Le capitaine G. Back.. F.I)cnoisDEMoNTrERECx,aNeufcbalel. Le cap. Jolin Washington, a LoiiJres. Le col. Ferdinand Visconti, a Naples. P, UE Angelis , a Buenos-Ayres. Le docteur Kriegk. a Francfort. Adolpbe Krmah, a Berlin.
i'Ar.l.i,
r,MPiiiMhnii-; lu; iiouiKjOc.rcE lii iiAKriMci,
rill- I,,.M,|. ■M).
BULLETIN
DE LA
r r
SOCIETE DE GEOGRAPHIE,
Troisieuie Serie.
2^iimc premier.
CHEZ AUTHHSBERTRAND,
I.IBRAIRE DE LA SOClilt DE C EO G li A P I! l E ,
RUE HAUTEFEUILLE, n" 23.
1844.
COMMISSION GENTRALE.
COMPOSITION DU BUREAO
(Election dii 5 Janvier 1844.)
President. M. Rocx de Rocbei.li.
f ice- Presidents. MM. Baron Roger , Dadssy.
Secretaire-general. M. Bertbelot.
Section de Corresponclance.
MM. |
Bajot. MM. C. Moreau. Callier. Noel-Desvergers. Corbelet. D'Orbiguy. Desjardins. Texier. Dubuc. Thomassy. Jaubert. Warden. Lafond. Section tie Publication. |
|
MM. |
Albcrt-MontemonJ. D'Avezac. Denaix. Guigiiiaiif. Jomard. Baron de Ladoucette. |
MM. De Larenaudiere. De Montrol. Le vicomte de Sanlarem Ternaux-Compans. Le baron VValckeuaer. |
Section de Comptahilite. |
||
MM. |
Ansart. Le colonel Coraboeuf. Eyries. |
MM. Tsambcrf. De la Roquelle. Tivien. |
Membres adjoints de la Commission centrale. |
||
MM |
. Cortambert. CoulhauJ. De Froberville. |
jNLVL Gay. lonbert des Mottelettes, |
Comite charge |
de la publication du Bulletin. |
|
MM |
. Albert-Montemont. Ansart. D'Avezac. Berlbelot. Callier. Cochelet |
MM. Daussy. Jomard. De la Roquette. Roux de Rochelle. Texier. Thomassy. |
M. Chapellier, notaire, tresorier de la Societe, rue Saint-Houore , 370. M. Noirot, agent-general et bibliothecaire de la Societe, rue de I'Univer- tile , 11" a'i.
BULLETIN
DE LA
f f
SOCIETE DE (iEOGKAPHIK
JANVIER 'i^hh.
PREMIERE SECTION.
MRMOlIiES, KXTRAITS, ANALYSES KT ItAPPORTS.
SUR LES GLAGES DU POLE ALSTRAL.
EXAMEN d'uNE NOTICE DR IM. LE U"^ HOMBRON SUR CE SUJET ,
PAH M. DAIJSSY.
M. le D' Ilombron , chirurgien-major de V Astrolabe , dans la dernlere expedition command^e par M. Du- mont d'Lrville, a donne , dans le n° de noveuibre des Annales mariiunes , un article intitule : yJpercu topogra- phiqiie siir les terres et les glaces australes. Voulant combattre quelques unes des propositions avanc6es par M. Ilombron , je crois convenable de donner ici ^'article lui-meme, afin que Ton puisse avoir sous les yeux les raisons pour el contre cliacune des opinions..
( 6 ) APERgU TOPOGRAPHIQUE
SljR I,ES TERRES ET LE8 GL.VCES AISTRALES ,
PAR M. LE D^ lIOMimON.
« Le rapide cxpos6 dc travaux aussi considd-raljles que ceux que les Anglais viennent d'achever, entraine une redaction trop resserree pour que les di^tails ne soicnt point negliges , et que celte n(5gligence ne nuise pas a I'appreciation des faitg. Je m'abstiendrai done de toute critique, car il ne serait point juste d'altrihuer a la volonte de I'auteur I'obscurile qui rcsulte simple- ment de la reduction qu'il a fait subir a son sujet , en le ramenant aux proportions dun rapport. Je me bor- nerai a extraire dc ce travail plusieurs faits clairs et saillants, qui contiennenl, selon moi , quclques v6ri- t6s importantes.
» Ce qui rcsulte tout d'abord de celte narration , c'est que les banquisos travers6cs par M. le capilainc Ross , en \Shi, ne ressemblent point compl6tement a cclles qui bornerent ses dernieres tcnlalives aux paralh^les peu (^levds qu'avaient deja si laborieusement sillonnes Bransfield , d'Lrville et \Mlkes. Dans ses premiers rap- ports, M. Ross parle de banquises qu'il ^tait parvenu a traverser. Or celle qu'il rencontra dans sa toute recente et derniere pointe vers les hautes latitudes n'ont et6 francbios ni par lui ni par ecs pi'edecesseurs. II im- porte de signaler ce fait a. Tcquitc du jjublic, parce qu'il prouvc ([n'ii v a banquisc et banquise^
( 7 ) » Sans doute M. Ross neparailrail plus 6toniie au- jourd'hui que les Francais el les Am^ricalnseussentpu rencontrer reellement, et decrire des banquises aussi formidnbles. La premiere banquise qui se soil olTerte a M, Ross se trouvait par 66" hh' de latitude S. et 17^° 16' de longitude orientale. La topographic de ce point de la circonlerence du pole S. ne ressemble nuUement , ainsi que nous allons le voir dans le cours de cet ar- ticle , a celle des lieux ou les Francais attaqu^rent deux fois la ceinture de glace du pole antarctique : M. Ross « y penetra sans avoir a regretter aucune avarie, » Apres y avoir parcouru quelques milles , on put con- » tinuer a marcher vers le S. sans grande diflicult^. )j Dans la matinee du 9 , apres avoir fait plus de » 200 milles dans la banquise , il entra dans une mer » parfaitement libre. » En eflfet , pour parcourir 66 lieues en quatre fois vingl-quaUe lieures , il faut faire constammcnt 16 a 17 lieues de minuit a minuit pendant quatre jours, ce qui suppose dans une ban- quise une liberte deja assez satisfaisante. Le 9 f(^vrier 1838 , les corvettes francaises V Astrolabe et la Zelee , se trouvant dans la banquise par 62° 30' de latitude S. et 40° 30' de longitude 0. , ne jouissaient point d'une aussi grande liberte d'action ; car, bien qu'ellcs fussent aidees du seul auxiliaire eflicace dans cette circonstance, je veux parler dun vent tres fort, elles employerenl neuf heures pour faire une demi-lieuo. Le 9 fevrier 1841, par 78" 4' de latitude S. et 191° 23' de longitude E. , r Erebus et le Terror furent eux-memes dans une semblable position : « ils se virent arretes par une dan- » gereuse banquise , a travers laquelle ils eurent la plus » grande peine a se frayer un chemin , ct d'oii » peut-elre ils nc fussent jamais sortis sans les forh3s
(8) )) brises qui vinrent i leur secours. » II est Evident que la premiere des banquises oil pendtri^rent les Francais dilTc^rait beaucoup de la premiere banquise traversee par les yVnglais : cclle-ci n't^tait que la partie cphomere des champs de glaces qui cntourent on hiver rarcliipel de Balleny du cole du N. Ln vaste golfe se developpait dans le S.-S.-E, de celte banquise, et livra au capitaine Ross , si ce n'est une issue completcment dd-gagee , au moins un passage jfl-atica- ble , sem6 d'obstacles, il est vrai , mais pouvant etre surmont^s a I'aide des moyens qui sont a la disposi- tion de la faiblesse liumaine.
wj'ai cru devoir entrcr dans ces details a cause d'une phrase ambigue de I'un des premiers rapports de
M. Ross ; la voici textuellement : « Cette ban-
» quise ne me sembla pas aussi formidable que I'ont
» representee les Francais et les Ainericains »
J'aime a me persuader, a dit I'honorable M. Daussy, dans une des seances publiques de la Sociele de geo- graphic de celte annee (1), que cctte reflexion n'a point ele inspir^e par un esprit de critique ; jc le de- sire aussi , carjc ne suppose que des intentions nobles et elevees a un homme aussi distingue que M. le capi- taine Ross.
» Le voyage de M. Ross confirmc I'asscrtion suivante, qui , pourmoi, est deja un axiome : Ton ne peut cs- perer atteinch'c les hauls paralleles anlarcliques quo sur les points de la circonf^rence du pole ou les terres se refoulent fortement vers le S. Telle est la pro- position que nous allons tacher de dcmontrer.
(i) Ce fut daiis cette scaiicc ijiie la Sociele de geograjiliie de IVii is dticriia uiic iiicdaillL' d'or a M Hi)s>
( ^J)
» Dans le N., les terres se cleveloppent siir une im- mense etendue, et le bassin de la mer polaire boreale en est entierement environne ; cependant les naviga- teurs pdsn^trerent dans sesphis etrolts canaux , et par- vinrent , par ces defiles, a des hauteurs considera- bles. Dans le S. , la rencontre de la lerre interdit tous progres ulterieurs, et il serait inutile de tenter a penetrer dans les nombreuses issues dont le con- tinent antarclique est certainement coupe en mille sens divers. D'oii provient cette difference ?
))0n ne saurait compter, dans les I'egions australes, ainsi qu'il est permis de le faire dans les mers sopten- trlonalcs (1), sur des debacles fixes; iln'y a point la de couranfs reguliers aides quelquefois d'une temperature douce, et entrainant hors des canaux les glaces qui encombrent la terre. Les courants du N. sont le resul- tat force de la topographic de la mer Glaciale ; au con- traire , I'immense Ocean qui entoure le pole S. , la sterilile des fleuves du continent austral , sont autant de cii'constances peu favorables a la conservation des
(l) " Ll'S navigateurs du Gioenlanil (flit Scoresljy jeime) lencoii- trent celte formidable barriere (la banf|uise") , dus leiir arrivee, au inois d'avril; des causes iiatiirelies rt'iuij^nent a mesuie (jue la saiaon s'avauce. Quelque vaste , haute et cuMipacle qa'elie jmisse eire , on la trouve geneialement separee de li terre, et paila;;reala fin de juiu ; voila pourqiioi, nialgre les diFticultes et les peisies (pie Ion eprouve pour entrer dans ees parages de pedie, on en sort ordinai- reinentsaiis iiieonvenienl partieulier.
» Ce sont (les Faits sinjjuliereinent eiiri(-ux, et oertaiiiement digne3 de consideration , i° que la glace euveloppe en hivcr toute la cote du Spitzberj;, et abandonne au inois de juiii son rivage occidental ; 2" que I'Ocran soil navigable, ])ies(|ue tmis les ans, depuis le 6*^ et le lo" n)('ri<lieii E jusqu'a 80" de latitude N " (Page 188. )
" Vers le uiois de jiiiu, les (jlac'es ne soul plus visibles; la nier est
( »o )
courants qui lendraient a s'dlablir dans une direction arrClee. Leur existence y depend done surloul des vents. Mais quoi de moins capable de dispcrsor les glaces que celte capricieuse intermitlence de Fincon- stance des vents? ce que I'un repousse, I'aulre le ra- in^ne. La mer du Nord re(^oil, d'un tres grand nom- bre de fleuves iaiporlants, un volume d'eau 6norme; les debouquements creus^s a Iravers les terros de I'Europe , de I'AnK^rique el de I'Asie , donnent passage aux eaux qui s'y accumulent; ce sont des trop-pleins sans cesse parcourus par des courants constants et d'aulanl plus rapides , qu'ils passent d'un espace plus grand dans un detroit plus relreci. Aussitol que I'ete recliauffe les continents environnanls, les glaces se rompent, les marees complelent leur demolition, ct les courants les entrainent. En aduietlant meme qu'une succession d'ann6es froides vous retienne dans ce nial- beiireux pays, I'espoir ne vous est point enlcve ; et quelle que soil I'inhospitalite de la saison, la torre vous offre encore en ete quelques productions utiles ; mais, dans le S. , lout est glace, tout est invariable conime Talmospbere qui entoure celte partic isolee de noire planete; tout y semble appartcnir a un autre globe. Autant les glaces sont mobiles dans le N., au- tant elles sont fixes dans le S. De la limpossibHile de p^netrer a travers les canaux ramifies au milieu des
aiiisi enlieroincnl navi;;iil)lo jiisqii'' ilans la vasle ('■teiiduc de l.i iner (III Nonl et (le rociiaii Atlaiitifinc. » (I'age 193.)
II ajoiUe |)Ims loin : « Cetlc propriety Jc la glace est de l.i plus haute iiiipoi t nice jiDm le navi/jaleur ; loisf|u'il la conn.iil, die h\i ins|)in' In eonfiaiicc et le rend r.i]i.il)li' di; perscverer sans r('s<Tve, parce (|u'il ralcidp sur iiii rcl^iiir aise. " [ Annalcs des Voyacjea ,, ti)inc V. )
(11 )
terres polaires antarcliques, el rinvarlabillle des ban- quises compactes; de la le seul espoir fond(^ de n'at- teindre de tres hautes latitudes qu'en suivaiit la capri- cleuse configui'ation de la limite N. de ces terres et de CCS glaces. Groupons maintcnant tous les fails qui con- firment ces remarques.
)) J. En 18/il , M. Ross penetra dans un vaste golfe dont la terre Adelie dans I'O., celle de Palmer dans I'E., paraissent etre les caps extremes vers le N. La terre Victoria forme Ic cole 0. de cet angle lentrant, sur une elendue de 8" 30' du N. au S. : Cook, Bellin- ghausen , Biscoe, avaient deja penetre dans cetle espece de m^diterranee sans y avoir renconti'6 d'archipeL Notons bien ce fait, car elles en eussent rendu les abords bien plus ditriciles et pcut-etre impossibles. Ce fut,eneffet, au fond de cette profonde enceinte de glace que Cook fut arrets, en 1774, a 71°, par des montagnes de glace, qui n'etaient autre chose qu'une terre et ses glaciers. Ce fut aussi a 2 ou 3° a I'E. du point ou Cook etait parvenu a la latitude de 71°, que Bellinghausen rencontra a son tour une infrancbissable barriere ; il se trouvait alors par 70°. II essaya de pour- suivre sa route a I'E., mais il fut ramene au N. Les caps Pierre I"^ et Alexandre 1", decouverts par ce ma- rin distingue , ne sont que dos dcpendances de la Icrre de Grabam (ou mieux de Biscoe), vejs le S,, et la suite, au N., des terres de Cook, et de celles que M. Ross n'a pu suivre a I'E., mais qui se ratlachent a la terre de Victoria. Ces terres forment le cole E. de Tangle rentrant qui conslituc un golfe de 123° 30' d'ouverture au N., en considerant les terres d'Adc^ic et de Grabam comme les limiles de celle grandc re n tree.
( 1^ )
» L oxpedilion anglaise retourne en 1842 vers le Ihi'ix- tre de ses premieres d^couvertes , elle chcrclie a en faire la reconnaissance dans I'O , et a en constater la position insulaire ou continentale ; mais elle I'encontre la banquise a 300 milles plus au N. que I'anncie pre- ccdento, par62'» 28' de latitude S,, el lZi6''de longitude E. Sans doute la saison peu avancc^e (18 d^cembre) contribua beaucoup a cette prompte rencontre des glaces; mais, quelle que soit la saison, elle ne pronos- tique jamais d'lieureux succ6s , car les banquises ne s'avancent autant danslc N. qu'appuy(^es sur des terres (l-tendueselles-memes vers les basses latitudes. M. Ross I'eprouva bientot : il Iraversa 300 milles de banquise , el fut arrel6 par c/es glaces si epaisses , qiCil Jut impos- siblp de faire un pas de plus; ce ne fut qua I'aidc des I'aibles progres de I'ele, el a force de persev^fance , que les navires francbirent le cercle antarctique le 1" Janvier. lis sortirent des glaces le 2 fevrier 18/|2 , sans avoir pu voir la terre. La banquise qui les en tint eloignes etait une de ces banquises compactes ou fixes qui s'appuient sur des lerres peu elolgnees. Ce sont probableraent celles qui conlinuent, vers le S.-E., la cbaine de la lerre Adelie, ct, au N.-O. , celle de la terre de \ ictoria.
» B. De rO. et a I'E., el des 68° aux 28° de longi- lude 0., le continent austral descend jusqu'a 62° 50' de lalitudc S. environ, et les glaces, flanquees d'ar- chipels eleves , s'avancent vers le IS', jusqu'au 58° pa- rallele. Sur aucun point de la circonference du pole, ' les terres el les glaces ne saillent autant vers le N. Ce I'ul dans cet espace que Bransfield, Powell et Pabiier, d'Lrville, \\ilkes, el Ross tout recemmenl, lirenlsuc- cessivcmenl crincr(i\al)lcs cflorls puur n'alleindrc cc
( 13 ) pendant que 64" et 65" dc latitude. Bransficld fut arret*- par 65" de latitude S. et par 50" de longitude 0.; Po- well et Palmer tent<^rent vainement de s'elever dans Ic S. des iles Orkney ; d'Urville fut conduit , par la ban- quise des 63'' de latitude et 47° de longitude O., au milieu des memes iles; M. Wilkes ne fut pas plus heu- reux en chercbant a s'elever, comme d'Lrville, sur les traces de Weddell ; M. Ross, enfin, croisa la route de son heureux compatriote , et trouva unebanquise me- nacanle ou ce dernier aurait parcouru une nier par- faitement degagi^-e d'obstacles.
» Au-dela des PovYcll , vers I'E., d'L'rvilie est arrete , malgr^ de glorieux et inutiles efforts poi r ti'iompher de cette formidable banquise ; il ecbappe au danger imminent qu'il avait alTronte; il suit encore la ban- quise a I'E., mais il est ramene dans la direction des iles Sandwicli australes.
» Les iles Powell et Sandwicli , comme les Shetland , ne sont que des fragments avanc^s de terres plus con- siderables qui, bien certainement , n'en sont point tres 6loign6es , si Ton en juge par la saillie au N. des terres de Palmer, de Louis-Philippe, dc Joinville ; par la solidity et I'imposante masse dc la banquise rcncon- tree par Bransfield , d'ljrvdle, Wilkes et M. Ross lui- meme , sur ce point de la circonference du pole.
» Lc 24 decembre 1842 , M. Ross traverse la latitude de I'ile Clarence, la plus E. des Shetland australes, et, « le lendemain 25 , il etait arrete par unc banquise » solide. » Le 26 se passa a cherchcr un passage en c6- toyant cette banquise a I'O. « Le 28 on signala la terre )) au S.-S.-O.; mais la cote etait bordee de bancs de « glace de dimensions si extraordinaires, qu'il fut ini- )) possible d'approcbcr la terro dc plus pres quo 3 ou
( n )
» h milles. » Le 4 janvicr 18/|3 , Ics navires anglais avaient atteint la limite dc 6/i° 30' de latitude S., et ils nepurent s'avancer au-dela. II venait de faire la recon- naissance de la coteE. et S.-E, de la lerre Louis-Phi- lippe, dent Dumont d'Lrvillc avait deja reconnu la cote N.-O. en 1838.
» AI. Ross eut evidemment a luttcrdans cetle circon- stance contre la ineme disposition dcs glaccs qui arr§- t^rent Bransfield en 1820, a quelques milles plus S., et quelques cenlaines de milles plus a I'E.
» Le 22 Janvier 1838 , la route de d'frville est bar- r^e par une banquise compacte au 63" 26' de latitude S., et 47" 7' de longitude O.; la direction de ces glaces etait N. et S.-O.; elles allaient, d'un cote, rejoindre la banquisede Bransfield, et, de I'autre, les iles Powell. Les instructions de d'Lrville lui enjoignaient de re- connaitre les lieux parcourus par Weddell : aussi put- il conslater par lui-meme I'exactitude de cettc derniere circonstance.
» Par 65° de latitude S., M. Pioss prend la route sui- vie par Weddell a son retour des hautes latitudes aus- trales; la, malgre les plus grands efforts, il ne pent avancer au-dela de 65° 15' de latitude S.; il rencontre, comme d'l rville , une banquise impenetrable ou A\'eddell aurait trouve une mcr libre ; seulement il se trouvait alors a une trcntaine de licues plus au S. que le celebre navigaleur fran^ais. A son arrivce dans ces parages , M. Ross avail ^te arr6t6 a 180 milles plus au N. que Bransfield en 1820, eta 90 milles environ plus au N. que d'Lrville en 1838; mais ces faibles diffe- rences dans la configuration du profil de la banquise n'en modifient que la portion la moins compacte , la plus isol^e do lout appui solido ot fixe; elles depcn-
( 15 ) denl de la niobilile des vents. Ces oscillations conti- nuelles, tout en modifiant les contours de la banquisc, tout en Ics faisant avancer ou reculer d'un ou deux de- gr^s, n'en alteient nuUement I'enoi'me (t impene- trable masse que le mouvement continuel des gla- ciers (1) et les debris des avalanches tendent sans cesse a grosslr, surtout pendant la saison d'ele.
» C'. En continuant toujours a I'E., au-dela des lies Sandwich , existe encore un retrait considerable des terres vers le S. , ainsi que le constaterent , a diverses epoques , Cook , Bellinghausen , Biscoe et , tout der- nierement, la route de M. le capilaine Ross. Les li- mites de ce golfesont, au N., d'unepart , les Sandwich; de I'autre, les terres d'Enderby ; ce qui comprend un espace de 69° environ.
» Bellinghausen et Lazarell", arrives par 52' 15' de latitude S. , cinglent I'espace de /lOO milles sur le pa- rallele de 60°; puis, pouvant enfm piquer au S., sous le meridien de Greenwich, ils atleignent 69" 30', oil les glaces les font peu a pen rebrousser chemin vers le N. jusqu'a 60".
)) Biscoe arriva en vue du meme archipel ( des Sand- wich) le 27 novembre 1830. Les glaces le forcerent aussik courir a I'E., et ce ne fut qu'a 9° de longitude 0. qu'il put croiser le parallele de 600. Le 21 jan\ier, il etait parvenu a 66° 16' de latitude S., [>ar le meridien , de Greenwich. La, comme ses predecesseurs , il trouva la mer plus libre , et atteignit 68" 51' S. ; mais il ne s'e-
(i) Les recentes observations de MM. Maiiins et Brnvais , ct de plusieurs amies savatils, ont constate la continuelle piojjressidii des {{lacicrs de la paitie supeiieuie dts inoiitajjnes vims la liniito iiilc- r'lPUie des idaces.
IG )
leva plus; il sc mainlint seiiloDioiit entre 06 et 68", et docouM'il la lerre d'Enderby par 60" 2' de latitude S. el A2" de longitude E. II lit dc vains efforts pour s'en approchcr; car, a parlir dece point, il fut plus que jamais ramcne insensiblemcnl au N.
» Ce fut a 1 degr6 1/2 plus E. que Cook dut renon- ccr a pen^trer plus avanl au S., lors de sa premiere navigation dans les mers auslrales, en 1773; il etait aitssi parvenu a 68'.
» EnTin , le 28 fevrier, M. Ross prit la route du S.-E, , repassa le cercle antarclique le 1" mars, par 7" 30' de longitude E., essaya dc penotrer au S., en se tenant a egalc distance des routes suivies par Weddell et Bellin- ghauscn. Mais les glaces lui opposerent bienlot un obstacle insurmontable ; il fut arrele par 68", comme Biscoe.
)) D. De I'extremite O. de la terre Enderby a I'cxtre- mite E. de la terre Adelie , cxiste un front de terre et de glace qui, comme nous venons de le voir, ramena toujours au N. tous les navigateurs , et qui, moins avance danscette direction que le prolongementdeja ob- serve dans I'Atlantique auslralo , court invariablement de rO. a I'E. entre Gli" 30', et 07° de latitude S. Ce rcmpart a 99° 30' d'elendue du levant au couchant. II est form6 des terres Enderby, Sabrina , Clarie , Adelie. La presence de ces terres interdit lout progres vers le S., au-dela de 66° de latitude australe. Leur direc- tion constantc ot uniforme prete a la glace un appui trop regulier, et par consequent Irop bien li(§, pour que Ton puisse jamais supposer qu'elles laisscnt, un jour, un passage libre cnlre elles.
)) Ce fut le 28 Janvier 1840, a 8 licures 20 minutes du matin, par 0/r 30' do latitude S., ot 129" 5/i' do
( 17 )
longitude E., que d'Urville d6couvril « cette muraill » de glace parfaitement verlicale sur ses flancs , el ho- » rlzontale a sa cime , elevee dc 120 a 130 pieds au- » dessus des flots , » a laquelle il iniposa le nom de Clarie. Cette terre , ensevelie sous les glaces, rappelle l«s enormes falaises de glace de 150 pieds qui arrete- rent les progres de M. Ross , au fond du grand golfe ou il avaitpenc^tre en 1841. «Le Bl Janvier, a trois heu- res du matin, dit d'Lrville, quoique j'eusse pique au S., nous ne trouvames plus qu'une fonnidable chaine de grosses iles de glace, et , plus loin, au S.-O. , nous retombames sur une veritable banquise qui regnait desormais aussi loin dans I'O. ct le N.-O. que la vue pouvait s'etendre du haul des mats (1). »
» Le 19 Janvier, par 65" de latitude S., les corvettes l^ Astrolabe et la Zelee se trouvferent en vue de la terre Adelie. Le 21 , a 8 ou 10 milk-s de la cote , les Frangais puient contcmpler cette terre de 200 ou 300 toises d'e- levation. Le 23 , on voulut continuer a la prolonger vers I'O., mais une banquise des plus compactes , ap- puyee probablenient dans 10. sur les terres qui font suite , dans I'E. , a la terre Clarie , s'opposa a la marche des batiments. La Constance et la violence des vents d'E. s'oppos^rent aussi a ce qu'on suivit la terre Adelie vers I'E, oii , phis tard , M. Ross fit d'infructueuses tentatives pour s'elever dans le S. ou reconnaitre la cote qui fait suite a cette terre , et a celle appelee par lui terre Victoria.
» Ainsi le trace general de la circonference des terres polaires auslralos a la limite N. des glaces pr^'sente deux angles saillants et deux angles rentrants qui en
(i) Eslrait dps .liinali-^ iit/ni'imf!;. { Jiiill' t tS^u. )
I. JAWIKR. 2. 2
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embrasseni tniilo I'etenduo. Ce ful toujours an fond des angles rentrants, on sur lout autre point de leur f^tendue, (jue los lentatives pour atteindre les j)lus hautes latitudes curcnt le p'us de succes, ainsi qu'il resulte du relev6 des voyages ox(icutes autour du pole austral. Mais co qui n'esf pas moins frappant, c'esl la ressemblance des obstacles rencontres et des resullats obtenus dans Ics mfinics parages : il serait , je crois, difficile de trouver dans ces fails la preuve de I'in- constante mobility des glaces au pole S.
» Je considdre celte disposition generale des glaces auslrales comme invariable: aussi ne puis-je partager I'opinion de M. Ross, s'il est vrai qu'il ait emis I'opi- nion qu'il n'eut point rencontre les obstacles qui re- tarderent et arrOtei'enl sa marcbe, lors de sa dernifere tentative vers le pole S., si les vents d'O. eussenl plus constamment soullle. La debacle qu'il en eut altendue ne se fut point ed'ectuee. L'action des vents d'O., en ete , se borne , dans ces parages , a refouler a I'E. les glaces du canal de Bransficld , et a les resserrer sur la grande bande de glaces compactes qui , des terres po- laires, s'etend a I'archipel des Powell et a celui des Sandwicb. Au reste, jamais les vents d'O. et de S.-O. ne soutricnt avec plus de perseverance qu'au cap Horn (>t le long de la cote d'Amerique ; mais , a mcsure que Ton s'eloigne de ce detroit et du continent americain , leur frequence et leur force diniinucnt ; leurs cffels sur Ics glaces sont done grandcnicnt conipenses par les venis d'E., de IN., de N.-E. et de N.-O., tous pas moins comrauiis que les vents d'O., au large de I'At- lantique austral, depuis le parallele de 30° jusqu'a la lisiere des glaces.
)) Dans cet examen des travauxg^ograpbiques exdcu- tes aux extremitcs de I'lK^imisphc'-re S. , je n'ai cite ni
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Morell ni Wetldell. Le preniior de ces navigateurs a une reputation de conteur si bien etablie , qu'il serait ridicule d'en appcler a ses ecrils. Quant a Weddell , ni lo raisonnenient, ni I'experience encore ne plaident en sa taveur. La posterite sera plus riche un jour en observations que nous ne le sommes aujourd'hui , elle jugera peut-etre plus favorablement le capitainc Wed- dell ; mais en attendant cette grande sanction du temps, tout en s'abstenant de nier absolument les resultats de ses travaux, on ne doit pas s'empresser d'adinettre la relation de ce marin comme fait incontestable. Encore une fois , la saine physique , rt surtout I'experience acquise jusqu'a cejour, s'y opposentegalement ; lesplus sages theories de I'homme peuventelre prises en defaut, mais I'experience nous conduit tot ou lard a la verity. »
Les deux laits principaux que Ion tire de cette no- tice sont : 1° La disposition generale des glaces australes est invariable.
2° Le trace general des terres polaires australes pre- sente deux angles saillantset deux angles rentrants; et si nous cherchons, dit M. Hombron , oii sont silues ces differents points, nous trouvons, pour le premier de ces angles saillants , le front de terre et de glace qui s'e- iend de Textremile de la terre Enderby a I'extremite de la terre Adelie; et , pour le second , les terres dont les lies Powell et Sandvsich, comme les Shetland ne sont que des fragments peu eloignes, si on en juge par la saillie au N. des terres de Palmer , de Louis-Phi- lippe , de Joinville et par la solidite el I'imposanle masse de la banquise rencontree j)ar Bransfield, d'Ur- ville, Wilkes et Ross lui-meme sur ce point de la cir- conference du pole.
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Ces deux propositions reposent evideinment , I'une ell'autre , sur la supposition que le capitaine AVeddell en a impose lorsqu'il a dil avoirpenetreen 1820 jusque par 74° de latitude, etanl alors sous le 37« m^ridien a rO. de Paris. Combatlrc ces propositions, c'osl clone di^fendre la mdmoire de ce celcbre navigatcur, dont le recit frappa toulcsles imaginations lorsqu'il fut puhlie, et sur laveracite duquolon n'avait jamais eleve le moin- dre doute ; ce devoir est doux a rcmplir , car il est plus agr^able d'avoir a deiendre un homme conlre une ac- cusation qui altaque son lionneur, que de soutenir 1 'opinion con tr aire.
M. Hombron, en comparant la mcr Glaciale boreale avec les regions quienvironnent le pole austral, observe que vers le N. , de nombreux et vastes flcuvcs verscnt an- nucUement dans la merun volume d'eaudnormo qui doit tendre adetacberet a enlraincr los glaces, tandisqu'au pole S. tout est glace , tout est invariable comme I'atmo- spbere. M. Hombron n'a pas remarque que, ce que les eaux fontauN., un agent moins regulier sans doute, mais beaucoup plus puissant , peut bien le faire dans le S. : je veux parler des volcans. Une grande parlie des terres (jue Ton a reconnues dans ces parages presentcnt un aspect volcanique. Balleny vit la fum6e s'elever du sommet d'une Jlc qu'il decouvrit par 66" S. et par 164" E. Celte terre , dit-il , est cvidemment volcanique, ainsi que le prouve I'espeee de pien-c ou plutot de lave qu'on en rapporta. Le 12 Janvier 1841, le capitaine Ross niit pied a terre sur une ile volcanique silu6e par 71° 56' S., et 1G8" 47' E.; il observa , par 77° .'^2' S. et 164" 40 E., un volcan en ignition, ct plus loin un autre volcan eteint.
DanslaNouvelle-Gf^orgie, le capitaine Brllinghausen
( 21 ) reconnut , par 52° 18' S. et 25" 0., une lie volcanique dont le sommet lancait de la fumee.
Dans ies Nouvelles-Slietland , I'ile D(5ception ofl'ro un crat^re parfaitement caracterisc ; le pclit rocher Brid- geman exhale continuellement des lum^es epaisses, dit M. d'Lrville. La nouvelle ile decouveile parle capi- taine Ross, dans sa derniere campagne , par 6!l° 12' S. et 59" 9' O. , est d'origine volcanique, elle offre un cra- l^re parlailement forme et eleve de 1,067 metres au- dessus de la mer. Tout nous prouve done que le pole austral est Iravaille par la puissante action des volcans, et alors la dislocation des glaces doit ctre sans doute plus rare que vers le pole boreal , mais aussi beaucoup plus ^nergique , en sorte que de vastes etendues demer peuvent setrouver a certaines epoques entierement li- bres, puis se refenner ensuite pour des annees, et peut-etre meme des siecles.
Nous admcttonsvolontierscequeM. Hombron regarde comme un axlome,«que Ton ne pent esperer atteindre Ies hauls paralleles antarctiquesque sur Ies points de la circonf^rence du pole oii Ies terres se refoulent vers le S.. )) II n'est pas besoin , en efTet, de d^montrer que tant que Ion emploiera la navigation pour s'approcher du pole , on ne pourra lefaire que la ou il n'y aura pas de terres. Mais ce qui me parait etre tres contestable , et sur quoi cependant s'ajipuie M. Hombron dans sa description topographique des terres australes , e'est que la oil un navigateur a ete arrets par une barriere de glace infranchissable, cette banquise soit necessairement appuy^e sur des terres. Je sais que M. Hombron admet qu'il y a banquises et banquises , Ies unes qui se laissent penetrer, et Ies autres qui op- posent un obstacle insurmontable ; ce sont res der-
( 22 ) nitres sculeinent qii'il regaicle coiuine pL-rmanentes. Mais cst-ce qu'une masse dc glaces , que de nombreux liivcrs auraicnt rendue conipacte et impenetrable, ne pourrapas, par suite d'aclion volcaniquc, eprouver une dislocation qui pormclU! ;'i dos navigateurs plus favorises de la punetrcr ? U'ailleurs pout-on rcpon- dre jusqu'a quelle distance de la cote une elendue considerable de glaces pouna s'elendre , ou memo pourra etic entrainee par Ics courants, el former ainsi, quoique isolee de toute terre, une barriere in- francliissable? Ne sail-on pas que dans le N., la ban- quise qui defend I'abord do la cote orienlale du Groenland s'en detaclic quelquelois , et , tout en pr6- senlant vers I'E. une barriore infrancbissable, laisse enlre la cote et elle un espace donl le capilaine Graah a prolite pour remonter au IN.
Cook, dans son voyage au pole S. , reiiconlra , par 55" environ , une immense plaine de glace; un grand nombre d'lles de toutes formes et de toutes grandeurs se montraient par derriere aussi loin que lu vuc pou- vait s'etcndre; quelques unes plus eloignees , elevees considerablement par lji>s vapeurs de I'borizon , res- semblaient en effet a des montagnes. Pendant trente lieues , In lldsolutioii suivit cette cote de glace, entrant dans cliaque baie ou ouvertiire pour trouver un pas- sage au S. : parloul la glace elait fermee. Ne [jouvail- on , pas d'apres cela , supposer que c'l^tait la la verita- ble banquise ? Lc capitaino Cook , lui-meme , crut d'abord que c'etait la terre ; il revint ensuite de cette opinion en examinantcespretendues collincs, et les dif- ferents aspects qu'elles olTraient a traversla brume ; mais plusieurs oificiers persisterent a croire qu'ils avaient \u la terre de ce c6t<^, jusqu'a ce quo , deux ans apr^s,
( 23 ) la Resolution naviguat pi'c^cisement sur le ineme en- droit sans trouver ni terre ni glace. Ainsi ce qui avail toute I'apparence ci'une banquise fixee a la lerre n'e- tait qu'une masse flottante.
En 1836, le capilaine Biscoii trouve une barriere de glace qui le repousse malgr6 tous ses efforts et I'oblige a courir au N., dans les memes parages ou, en 1830, le capitaine Bellingbausen avail navigu(^ au S. du 60°, et ou le capilaine Ross passa, en 18/|2, encore plus au S. ; le cajiitainc d'Urville lui-meme , lorsqu'il fut arrele , en 1838 , par une banquise formidable qui menacait dele retenir a jamais, et donl il ne put se de- gager qu'avec les plus grands efforts, ne fut-il pas per- suade qu'il avail atteint la limite des glaces fixes ? Si , cinq ans plus tard, le capitaine Pioss put naviguer pen- dant 200 lieues, en passant a 30 lieues au S. de la ligne qui avait arrele M. d'Urville, et au S. aussi des lies Sandwich ou Cook , Bellingbausen et Biscoe avaient tente vainemenl de p^nelrer vers le pole, ne peut-on pas conclure de la que la banquise avait change de place ? D6s lors on doit convenir que les glaces polaires ne sont point invariables, a moinsqu'on ne prelende que la banquise qui a arrele M. d'Lrvilleau S, desilesPowell, les capilaines Cook , Bellingbausen el Biscoe au S. des lies Sandwich, n'etait pas la veritable banquise. Mais n'est-ce pas alors un veritable cercle vicieux que de vouloir prouver que la banquise qui enceinl ie pole austral est immobile, en posant pour principe que tout ce qui est reconnu mobile n'est pas la banquise ?
La topographic des glaces australcs est done essen- tiellement variable et ne peut s'appliquer qu'a une epoque determin^e; quant a celle des terres, qu'il faut bien se garder de supposer liee n^cessairement avec
( 2Zi ) celle cles glaces, nous poiivons la resumer ici d'apr^s les rcsultals des dernieres reconnaissances. Dansla par- tic dc la mer polaire comprise entrc le pole et la Nou- velle-Uollande , nous voyons les decouverles de Biscoe , de d'L rvillc , de Wilkes et de Ross se rapprocher assez. pour que Ton puissc conjecturcr avec quelque proba- bility que dans le segment de sphere compris entre les hO' et 180' meridiens de longitude orientale , el limite au N. par le 60* parallele et au S. par le 80° , se Irouve une vaste dtendue de terre , donl le point le plus orien- tal el le plus proclie du pole qui ait 6te atteintse trouve par environ 180' E. et 78' S. , et le point le plus occi- dental par ho" E. 6166° S. Ces terres renferment-elles le pole iui-meme ou ce point est-il occupe par la mer ? voila ce qu'il est impossible de decider aujourd'hui. Si, d'un autre c6t6 , nousconsid^rons un autre segment compris entre les meridiens de 25° et 90" de longitude occidentale el born6 au N. par le 55* parallele et au S. par le 70" , nous trouverons dans cet espace unc suite d'iles, Nouvelles-Shelland , Powell , Sandwich , donl rien n'indique la junction avec un grand continent; la terre Louis-Philippe vient d'etre reduite ])ar Ross a la dimension d'une ile de mediocre elendue ; la terre de Graham reste seule sans avoir 616 tourn^e ; mais pour la joindro d'une maniere continue avec la terre Victoria , il faul donner un peu trop aux conjectures. Tout I'cspace entre ces deux groupes se trouve sans doute convert dc glaces 6normes accumuldes par les siecles; mais est-il dcmontr6 que ces glaces ne soient pas susceplibles de se s^parer 6tant ebranldjes par une cause puissante, et de livrer passage a de hardis navi- gateurs favorises par des circonstances qui ne se re- trouvenl pcut-etrc qu'a des inlorvalles seculaircs , c'cst
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ce qu'on ne saurait , je crois , ni affirnier ni nier. Nous concevons tres bicn que Weddel, ayant trouv6 un chemin libre a travers les glaces en raison de circon- stances analogues a celles que nous supposons, ait 6te porte a etablir comma etat general ce qui n'etait qu'un accident ties rare et ait bati son systeme d'une mer libre vers le pole : c'est justement ce svsleme qui me prouve sa sincerile. Mais, d'un autre cote, si nous examinons sur une carte polaire les routes des dilTe- rents navigateurs qui ont cliercb^ a approclier du pole , nous verronsCookatteindre a 67° S. par 37°de longitude E. , Biscoe a 68" 51' S. par 10" E. , Bellingbausen a 70" par 3" O., lioss a 71° 1/2 par 15° O. , ct nous serons naturellenient amends a regarder la route de Weddell , qui atteignit jusqu'a "h" 15' sous le meridien de 37° 0., comme la suite naturclle, ct on dirait presque neces- saire , de cet etat de chose.
Si on considere en outre que de I'autre cote du groupe de la terre de Graham, Cook a p^ndstre jusqu'a 71° 10' S. sous le meridien de llOo O. , et Belling- bausen jusqu'a 70" sous le meridien de 95", ne sera-t-on pas port6 a penser que I'espace que nous avons signals entre les deux groupes des terres australes pourrait bien etre occupe entierement par la mer, presque toujours couverte de glaces enormes , mais susceptibles cependant de se disloquer et de livrer passage au navi- gateur assez beureux pour se trouver dans ces parages a cette epoque? Ceci n'est sans doute qu'unc conjec- ture , mais ellene me parait pas insoutenable, et elle a I'avantage de ne pas etre oblige de supposer la mau- vaise foi d'un homme qui a toujours joui de la reputa- tion la plus honorable. P. Daussy.
( 26 ) M. le capilaine Beaufort, hydrographe de Taralraul^, ayanlblen voulu nous envoyer la carte polaire sur la- quoUe se trouve tracee la route du capltalne Ross dans sa dernii^rccxpedllion , en 1843, ainsi qu'une carlo des ilcs South Shetland , qui donne avec plus de details les portions de cotes reconnues dans cette expedition au S. des terras Louis-Philippe ct Joinville , nous avons fait tracer la route generale sur la carte polaire de la Soci6te et copier la partio de la seconde qui contient les nou- velles decouvertes. Ces deux cartes sont jointes a ce Bulletin. \\ I).
Carte gciwrale des possessions neerldiidctises dans le grand nrckipel Indien ;
Par M. le l.:ii(,n G. F. VON DF.UFKF.DKN \)V. illNOKiiSTEN .
(Aniionce aiialyliijiic , [lar M. Daiissy.)
M. le baron \ On Derfelden , que la Sociel6 comple parmi ses membres, lui a envoye sa grande carte de I'archipel Indien. In seniblable travail devait neces- sairement elre annonce avec quelquos details dans le Bulletin , et c'est a mon grand regret que j'ai et6 oblige par mes occupations de tant tarder a m'acquitter de ce devoir, dont j'avais ete cliarge par la commission centrale. Je vais tacher d'y satisfaire aujourd'hui.
Je ne chcrcherai pas a disculer ici les raisons que M. ^ on Derfelden a pu avoir d'adopter de preference itlle ou telle d(^termination ; mais je ferai connailrc en quoi consiste cet important travail et les fondements sur Icsquels il est base. Le Mdmoire analytique que M. Von Derfelden a joint a sa carte rend cette tache facile , ol la seule diiricultc' qu'ellc presente tionl au
, C\>»A .n /77.1 et /---^ .
_ S.Woe rn i8Ji tl i83s .
. ,f r,u,//,- «/ iH3S.jH:\., rftS4o .
ff'ine^ <■„ iHJ3, iH:l., tSJo-ef ' j!iV 7fivw iiiinr /iirr //'t//ii\r .eon/ i-.iy fiiir mi /r.iif ^.m^ futfAiirva- it ftj ritfe nelluit'tfu'ii^en tn jSiif, iSia tt iSu .
( 27 ) peu d'etendue que nous pouvons kii consacrer dans le Bulletin , CO qui nous force a resumer encore ce qui est une analyse deja tres succincte.
La carle de M. Von Derfel den se compose de 8 feuil les, savoir : h au N. du 6*^ degre de latitude meridionale ot ll au S. Les meridiens qui separentces diverses feuilles sontlOS", M7et 129'^ de longitude a IE. de Greenwich. En etahlissant ainsi la separation des 8 feuilles de la carte, on a cu I'avantage d'obtenir les grandes terres de Sumatra, Java, Borneo et Celebes, presque sans coupure ; on peut ainsi ou les reunir en une seule carte ou les conserver separeraent.
L'6clielle est de 5 centimetres par dcgre , et la pro- jection est celle de Mercator. Comme la latitude ne s'etond pas au-dela de 9" au N. de I'equateur et de 12" au S. , le changement d'echelle que donne cette pro- jection est a peine sensible. M. Von Derfelden a pro- file des parties de ces feuilles qui se trouvaient non oc- cupees par des terres , pour donner sur une echelle plus grande des details imporlants sur divers points leves plusparticulierement par des olTiciers hoUandais.
Nous allons, en sui\ant le Memoire de M. Von Der- felden, indiquer pour chaque feuille les principaux materiaux dont il s'est servi.
Pour Sumatra , outre le trace de cette ile qui se trouve sur la premiere feuille de la grande carte , on voit encore sur la feuille 5 une carte particuliere du gouvernement de la cole O. de Sumatra. Ce gou- vernement est divise en deux residences, Padang el Ayer-Bangis. M. Von Derfelden a pris pour points de depart les positions de Natal, d'Ayer-Bangis et du cap Indrapcera , donnees par Horsburgli. Pour Padang, ii porte ce point 3' plus a I'E. , d'apres les observations
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et les releves de M. de Vive/., qui , en 1836 , a lev^ la carte des hautes terrcs de Padang. Le mont Ophir, que Iloisburgh, d'apres Goldiiigham, place par 100 ' 0' Zi8" E. de Greomvlch, a ete place par99' 55' pour mcttre en rapport les contrees situees a I'E. d'Ophir avec la posi- tion de Padang.
Pour linterleur de Sumatra, on a fait usage d'une carte dressee par MM. ^lullor et Helbach en 183/1, clle s'elend de 100°al03° AS', et donnelecours des rivitires deSiakelde Kampar; on a employe aussidiverscs cartes manuscrites communiquees par le Depot des colonies. M. \ on Derl'elden reconnatt toulefois que la plus grande partie du trace de ces contrees, situees auN. del'dqua- teur, ne repose que sur des combinaisonsde reconnais- sances militaires et d'itineraires.
II n'en est pas de meme a I'egard des pays situes enlre I'equateur et Padang : ces contr6es ont il6 rele- vees par M. de Perez, qui a fait connaltre en detail la cote maritime cntre Tiko ct Padang , I'Agam , les Kotlas, le Tanna-Datar, etc.
Pour les parties centrales situees entrc I'equateur et 0° 50' de latitude S. , a I'E. de la residence ouestde Sumatra et d'Indragiri , on s'est servi de la carte de MM. Muller et Hclbacli , qui fait connaitre beaucoup mieux que preccdemment les rivieres de Siebayang et do Kwanlan oulndragiri : il est maintcnant av(ir6 que cette derniere sort du grand lac de Sinkara pour se Jeter dans la mer, a la cote orientale de Sumatra.
M. Von Derfelden prdvient que deux districts assez elendus a I'E. de Padang, celui de Tingablas et de Kotla- Sambilang, n'ont point 6te explores, et qu'il existe tres peu de donn^cs certaines sur les contrees centrales situees a I'orientdcs possessions nccrlandaises. Pour les
( '^9 ) cotes dc Jainbi et criuch-agiri , il a fait usage des re- leves du capltaine de valsseau Machielsen , executes en 1832 , a bord de la corvette V Amphltrite. Le r^sultat de ce travail se trouve donii6 a part sur una plus grande ecbelle dans la feuille 5.
Pour les deux residences de Palembang et de Lain- pon , on a fait usage de plusieurs releves manuscrits , dont les principaux sont : une esqidsse dune parlie de Lanipnng et P<ilei)ihang , par /es e/iip/oyes Francis et Dubois , et Tindigene Jcescrp , en 1818 et 1819 ; une carte de la pavtic nieridionnle de Suntatra , par Dubois, en 3 feuilles , 1824, et une carte de la partie meridioiiale de Sumatra , par le resident de Benkoelen , Perploeg.
La cote orientale de Sumatra au N. de I'equateur a ete tiree des cartes anglaises.
Residence de Rio. — Le trace de cetle residence insulaire , situee a I'E. de Sumatra , est fonde princi- palement sur les releves du capitaine de la marine royale E. Lucas, executt^s en 1820, et ceux des lieu- tenants de vaisseau Stoltze, Rambaldo et Westphal ; mais, en resume, cette province maritime forme un dedale d'iles encore Ires imparfaitement connues.
Residence de Banka. — On a pu consulter pour cette partie plusieurs cartes manuscrites du Depot des colo- nies, ainsi qu'une carte de la residence de Banka faile en 1832, et communiquee par M. Van der Vinne , secretaire de la Societt^ des sciences de Banka.
Borneo , residence de la cote Quest. — On a fait usage pour cette partie de la carte manuscrite Inestimable du major G. Muller, relev^e en 1824 ; elle s'etend depuis Batang-Loepar, a I'E. du golfe Datoe, jusqu'au cap Tanjong-Slmbar, et pour I'interieur jusqu'a Sintang. Le golfe Datoe et la cole de Tanjong-Paloo , qui jus-
( 30) qu'ici ctaicnt tres mal figures sur k-s carles, ont et^ rclev^s par cet habile ingi^nieur, non seulenient topo- graphiquement, mais aussi hydrogrophiquernent. Ces travaux ont (it6 confirmes par les obscnalions postc!;- rieures du lieutenant-colonel Ilenrici , qui, d'apresdes relev<^s exacts, a dresse iinc grando ct belle carte ma- nuscrilc en 16 feuilles, dont M. \ on Derfelden a eu communication. Cette carle a indique une correction de 10' a fairc aux longitudes de M. I\luller. Les coles seplentrionales de Borneo ont etd; tiroes des cartes an- glaises; les iles Natunas'et Anambas ont etc tracees d'apr^s les relev^s qui en ont ele falls en 1831 par la corvette francaise la Favni-ite. Quant aux iles Carimala, on a fait usage des releves du lieutenant de marine F.-A. Fokke, executes en 18-23.
Besidence <le la cote lucridionnle et orientale fie Borneo. — Les details concernant les parties S.-E. dc Borneo sont tir^sd'une grande et belle carte manuscrile contenant les releves de M. IIale\\jn, ancien resident de Benjar-Massing. On remarquera que I'ile Bekompay, form^e par les rivieres de Benjer et du Petlt-Dayak, et qui est un domaine particulier du gouvernement n6er- landals, parait, ainsi que les autres provinces de cette residence, pour la premiere foissur une carte de Borneo. LemajorMuller.dans une lettreadress^c, le9aoutl8"25, au gouvcrneur general , disail : « Je peux dt'-clarer que toutes les cartes de la cote orientale qui sont venues a ma connalssance sont extrcmemenl fautives, et que sur les lieux on trouve a peine quelque l<^g^re trace de ce ■que les gt^ograplics nous pr^senlenl sue le papier. »
M. Muller avail releve toute cette cote sans interrup- tion ; mnis , ayant et6 massacre par les indigenes, toutes les cartes et les journaux de ses explorations de
( 31 ) cette parlic si pen comuie tie Borneo onl etc pcrclus.
Jaua. — Le trace dc Tile de Java est la reduction fiddle de la grande carte oITiciclle inss. de Java appar- tenant au Depot de la guerre ; cette carte est en h leuilles a I'echelle de 1/500000% II n'exisle encore de releves trigononielriques de Tile de Java que pour quelques unes de ses parties; neannioins la carte ofTi- cielle, quoique n'etant qu'une compilation, contient tout ce quia ete reconnu jusqu'ici , tant hydrograplii- quement que topograpliiquement, par ordre du gou- vernemenl des Pays-Bas.
Celebes. — La cote ocrldentale est tracee d'apres les cartes marines anglaises ; a I'egard de la presqu'ile S.-O. et des cotes qui s'etendent du golfe deMandhar au cap Laykan, le trace est appiiye sur les positions sui- vantes :
Pointe Lero (baie de Parepare, d'apres les obser- vations du lieutenant de marine J,-B.-J. Vander Meulen). lat. k' 0' 31" S. long. 119° 49' 20 E.
Piade de Macassar 5" (3 32 S. 119 30 51 E.
Cap Laykan (d'apres une moyenne entre les observa- tions du capitaine Jager et la carle du capilaine Ede- ling) , lat. 5" 39' S. long. 119° 36' E.
Pour les cotes qui s'etendent de la baie de Boni aucap Lassoa ; elles ont ete trac^cs d'apres les cartes manus- crites des releves neerlandaisexf^cutes en 1824. II est a observer que sur toutes les carles , Boni est porte beau- coup tropN. : ilest tres probable qu'on a confondu Boni avec Palopa , qui est egalement un chef-lieu et la resi- dence du souverain deLoehoe, a peuprespar 2° 55' ou 2" 50' de lat. S. , tandisque Boni, capitale du royaume de ce nom , est situe par h" 32' de lat. S.
Les coles orientales de la presqu'ile S.-E. de Celebes
( ^^ )
out etc enti^rcmenl reconnues en 1832 par le lieute- nant de marine \ osmaer ; c'est d'apres ce travail qu'elles ont ete Iracoes sur la carte.
L'intericur dc Celebes est tres peu connu. M. V. D. espere en avoir corrige la geograpliie 1° en pla(;ant Ic grand lac Tamparang Labaja dans sa veritable posi- tion ; 2° en employant un relevd manuscrit des dis- tricts du N. ; 3'' par des details puisds dans difTerents journaux at memoires manuscrits.
Goiiverneinent des Molucques. — Ce gouvernement est divis6 en h residences , savoir : Menado , Ternatc , Aniboine et Banda.
Ili'sulence de Menado. — On n'a eu pour cetle partic que Ics cartes anglaises et les releves executes en 1828 par Dumonl d'Lrville.
liesidence de Ternate. — La partie hydrograpliique a ete basce sur les releves du capitaine Jager et des lieu- tenants Brenwald et Ligtvoet, el priiicipalcnicnt sur les observations de MM. de Freycinet , Duperrey et Dumont d'Lrville.
Residence d" Amhoine. — Les iles de Boeroe et d'Am- bolne ont ete tracees d'apres les observations de d'En- trecasteaux, Duperrey et d'Lrville.
Les observations du capitaine Duperrey ont servi pour la cote N.-O. de Ceram, La bale de Selema ou Sarvay a dt6 trac^e d'apres le lieutenant Brenwald. La cote du S.-E. a pour base une carte du lieutenant KolfT. II est a remarqucr, dit M. \ . D. , que I'ile de Ceram a une figure tout-a-fait inexacte sur los cartes d'Arrowsmilh et d'Horsburgb, et que I'anciennecartede Valentyn, quand on la corrige d'apres les observations modernes , prc^sente un trace bien plus regulier. Residence de Uainhi. — Collo division du gouvei'ne-
(33 )
mentdesMolucquesa6t6 Iracee d'apr6s les observations et les relevf^s des lieutenants KollTet Modera. On a aiissi employe les releves du lieutenant A. de Boer, a bord de la corvette la Sirene, en 1832.
ISouveUe-Guinee. — Les cotes septentrionales ont ete trac^es d'apres les cartes de Krusenstern et d'Ar- rowsniith et les reconnaissances des Francais sous d'Entrecasteaux , Duperrey et d'Urville. Les cotes S.-O. jusqu'au cap Walsh onl ete rcduites d'apres les grandes cartes manuscrites des lieutenants KollTet Modera.
Ce dernier a communiqu(^ a M. V. D. un trace ap- proximatif fait sur les lieux d'apres les informations donnees par les indigenes, d'une partie dc la cote situee a 10. de la baie OGroe Langoeroe ou du Triton, et comprenant les baies de Bitsjaroe, Argoeni , etc.
M. V. D. , au lieu de faire faire a la cote 0. de cette grande lie une vaste baie au N. de la baie du Triton , afin de \enir rejoindre le cap appele Kalamun , Kasa- mouw, Koestcemba, ou Van-den Bosch, a peu pres a la hauteur de I'ile Adie, suppose que ce cap est place sur une grande ile qui fait elle-meme partie d'un groupe separe par un vaste canal tie la cote de la Nou- velle Guin(^e et s'etendant depuis 3" 15' jusqu'a /j« ii3' de latitude meridionale; il donne a ce groupe le nom d'Archipel d'Orange-Nassau. M. V. D. se fonde sur ce quelaterre sur laquelle se trouve le Cap Van-den Bosch est indiqu^e comme insulaire sur les anciennes cartes, (it que M. le lieutenant de Boer, qui a fait le releve de cette partie de la cote en 1832, tout en reunissant ce cap a la Nouvelle Guinee , dit dans son mt^moire :
« Cette haute presqu'ile est peut-etre s(^paree de la terre ferme (Nouvelle Guinee), car en naviguant Je long de la cote , on a eprouvci de tres forts courants I. jvwiii; 3. o
( u )
tenant du N.-E. (1) , ct d'ailleurs la ccile diminue scn- siblement de hauteur vers le N., au point de la perdre entiorement de vue. »
Nous obscrvcrons ici que los rcleves de la dernierc ranipagne de /'yJstro/nhc scinblcnt coniredire cctte sup- position; M. d'l rville , en effet , a suivi la cote depuis i'enlree de la baio Macluer jusqu'au-dela de la baie du Trilon; sa route passerait sur la pr^tendue lie Van-den Bosch. II a vu une terre a peu pres continue dans toutc coltepartic; il est vrai que de I'ile Adie a la baie du Triton , la cote se rcnfonce beaucoup , mais clJe a et6 apercue prcsque partout, et s'il y existc quelquos ou- vertures de canaux elles doivent etre asse/ petites. Mous remarqucrons au reste que los longitudes dcs points deloulc cctte partieainsi que cellos des ilcsBanda ot Arrou obtenuos par /'^stro/abc. presentent gencrale- ment une diflorence de 12' vers TO. avec celles adoptees jiar M. V. D. Cependant le point de depart de M. d'lr- ville etait Amboine qu'il suppose, commc M. V. D. , par 125° 49' 27". En outre le cap S.-O. de la Nouvelle Guincede M. d'Urvillequi repond a peu pres pour la la- titude au Cap KatoemiEn deM. V. D.,aulieu d'etre plus oriental comme tous les autres points cnvironnants de la carte de M. V. D. , est au contraire plus O. de 10' envi- ron, cequi change entierement la configuration de cette cote. M. Dumoulin, ingenieurhydrographe del'expedi- tion de I'Astrolabe, dans le volume d'hydrographie du voyage, pag. 279, dit, il est vrai, que dans la serie d'ob- servations qui s'etend do la rade d'Amboinc a cello de Batavia et dans laqucilc se Irouve comprise la recon- Tiaissanccde la Nouvelle-Guinec, les longitudes, quoi- quc bonnes , meritent moins dc confiance que celles des
(i) M. V. D. remarquo qu'il v a N.-E. dnn.s le inaniisrrif. m,)i< que lie floit ctre v.nr (luilc ilu r()pi>i<', ct (|u il liim.iil y >ivoir N.-O.
( 35 J autres series; cependant nous ne croyons pas que la difference de 12' puisse etre attribute a ces irr^gula- rites; ct nous pensons que si M. V. D. avail eu connais- sancedecesobservationsavanlla publication desa carte, il en aurait probablement fait usage pour la corriger.
lies Balf, Loinbock, SumbaiVa, Sandalliout et Mnnge- raay. — Cette chaine d'iles est tres raal connue et ioutes les cartes sont remplies d'erreurs : M. Vou Uerfelden a employe pour en corriger quelques unes les observations du capitaine Macliielsen en 1834 sur la cole septenlrionale de Bali el sur celle Kangeang siluee au N.-O. de Sumbawa et celles des capitaines Jager el Dibbetz et du lieutenant Modera , ])our la cole N. de Sumbawa et pour Tile de Mangeraay.
Timor. — La carle generale manuscrite des recon- naissances executees en 1825 et 26 a bord du brick le Doiirgn , par le lieutenant de la marine neerlandaise 1).-II. Rolff, donne un trace de la cole N. de Timor , qui est tr^s different des releves de la meme cote par MM. de Freycinet elDuperrey. M. VonDerfelden, raal- gre la juste confiance qu'il a dans le navigateur hollan- dais, n'a pas cru devoir adopter son trac6 , qui ne lui a paru qu'un dessin figuratif et non un releve en forme. Celle partie au resle n'enlrait pas dans le plan ni dans les instructions de M. Rolff, attendu que celle cote n'est pas comprise dans les possessions necrlandaises,et que le but reel de son cxpedilion etail la Nouvelle-Guin^e et les lies Banda. II reconnail meme une erreur sur la baic de Delly, qui, d'aprfes un plan du lieutenant Brenwald , n'aurait que deux milles du N. au S. , tandis que sur la carte de M. Rolff elle en aurait hull.
M. Von Derfelden ado])te done le trace de MM. de Freycinet el Duperrey, depuis Roepang jusqu't\ la pointe Lame sur la cote N.
( 36) Pour la position du cap N.-E. , il acloptc pour lati- tude S* 26', a peu prcs moyenne entre la determina- tion (le M. de Frejcinet, 8° '20' 15", etcellc de M. Kolll', 8" 30', et pour longitude 127° 5' E. , d'apres M. de Freycinet.
Telle est I'analysc Ires succincle des materiaux qui ont scrvi a M. Von Derfelden a conslruire sa carte, J'ai principalernent eu pour but de citer les travaux des officiers hollandais qu'il a pu consulter en manuscrits, altendu que, sur les points qui ont 6te ainsirelev^s, sa carte a tout Ic merite des travaux sp6ciaux. C'esl pour cela aussi que je crois devoir citer ici les annexes qu'il a placees sur lespoints non occupesde sa grande carle; car ce sont des travaux qui n'ont point encore ete ])ublies , el qu'on devra toujours consulter lors- qu'on voudra faire des cartes de ccs conlrees. De nouvelles observations pourront par la suite faire re- connaitre quelques erreurs dans les combinaisons que M. Von Derfelden a du faire pour tracer les parties peu connues de sa carte, quelque sagacile qu'il ait raise a les faire ; mais ces plans de details resleront toujours invariables. Voici quelles sont ces annexes :
Gonvernernent de la cote O. de Sumatra. — On voit precedemment quelles sont les bases de cette carte.
Fiade d'Ayer-Jkuigis. — Cette rade a ete lev6e par M. OslhofT, en 1835, avec beaucoup de soin.
lies des Cocos. — Ce groupe d'iles, qui fait partie des possessions neerlandaises , a ite leve en 1829 par ordrc du gouvernement.
Jambi et Indragiri. — Ces deux petites cartes sont une reduction lidele des rcleves de cclte parlie de la cote orientalc de Sumatra, executes en 1832 par le capitaine de vaisseau J. -P. Machiclsen , a bord de la corvette V yitnphi trite. Le but dc cette expedition otait la
( 37 ) destruction des principaux repaires dcs pirates malais qui infestaient ces parages ; on a, a cet effet, reconnu toutes les rivieres du pays , dont les cartes ont 6te dres- sees separement en plusieurs feuilles.
Carte du detroit de Bio. — Elle est reduite de la grande carte manuscrite dress6e par le capitaine E. Lucas, d'apres ses relev^s hydrographiques ex^cut^s a bord du brick V Irene en 1820.
Elablissenient neerlandais dans Vile de Bintang, jvsi- dence de Rio. — C'est la reduction de la carte manu- scrite du lieutenant ingenieur Schonermark.
Batavia et ses environs. — Reduction d'un tr^s grand planmanuscrit en plusieurs feuilles, relev^ en 1826 par I'inspecteur adjoint des ponts et chaussees J. Tromp.
Baie de Batavia. — Le trace de cette esquisse est fonde sur plusieurs cartes manuscrites. La plupart des cartes de cette baie sont erronees , surtout pour le contour de la baie.
He Onrust. — Reduction de la grande carte manu- scrite dressee d'apres un relev^ de cette ile fait en 1826.
lie Madura. — Les cotes du N. et celles de I'E. sont tiroes principalement du releve bydrographique qui a 6te ex^cut^ par le lieutenant de marine A. Fokke, en prenant toutefois pour la longitude de I'ile Gilly- Lawak Mh" 5' 30" d'apres le capitaine Macliielsen, au lieu de 114° 7' que donne M. Fokke. La position des ' pointes Klampies, Tanjong-Zoolong et des Bufiles a ete prise d'apres M. Duperrey.
Les coles de I'O. et du S.-O. , depuis la riviere Arosbaya jusqu'a Ayer-Ponlie a I'E. de la baie B^lega, ont 6te tirees de la carle qui se trouve dans I'atlas de M. Tombe, 1805, etqui a 6l(^ reduite par ce voyageur, a quelques corrections pres , de la grande carte ma-
( 38) nusci'ite dressee en 1804 par I'ingenieur Loiiaux,
Cole N.-O. lie Borneo, d'apres Midler. — Ln para- graphe d'un rapport de M. Mullor fera jugcr de I'lm- porlance dc celle carte :
« A quelques lieues au N.-O. du golfe et des lies Paloo , se trouve le cap nomine Tanjong-Iraai ou Tanjong-Battod.
D Ce cap n'a encore 6te marqu^ sur auciinc carle, et n'a pas ete apercu des navigatcurs , le pays etant sans 6levatlon aucune dans cet endroit, cl les valsseaux D'Tpprocliant pas assez pros de la cole. »
On pent encore ajoutcr que la baie de Datoe a 6le jusqu'ici tr^s mal figuree sur les carles , et que celle de M. Muller reunit toules les conditions d'exaclilude de- sirables.
Emnrons de Pontianak. — Les environs de ce chef- lieu de la cote 0. de Borneo sont tires d'une grande carte manuscrite de MM. Tobias el Francis.
Danau-Soemhah ou Donan-Mahiya et a litres lacs de I'intericiir de Borneo. — Cotto carte presenlc les resul- tats d'un releve de M. Mailer ; celui du lieutenant- colonel Ilenrici en differe quelque peu.
Baie de Boni. — Cette carte est une reduction de cellcs ou sont marques les rijleves n«!!erlandais executes en 182/1.
Grand lac de Celebes. — Beduction de la grande carte manuscrite du relev6 qu'en ont fait MM. Tobias et Francis.
Goenong-Tello a Celebes. — Esquisse liree des re- connaissances les plus recentcs repriisentees sur les cartes anglaises et neerlandaises gravees et manuscrites.
Partie orientale de la residence dc Mcnado , a Celebes.
( 39 ) ■ — D'apres les loleves tie lexpedilioii Irangaise sous le comrnanclement de M. Duinont d'Lrville.
Cotes S.-E. lie Celebes , cVapres les i-elevi's de M. J.-J\. Vosmaer en 1832 et 183/j. — Celte reduction presente les resultats des deux expeditions de M. Vosmaer, de sorte qu'on s'est servi des corrections qui resultent du second voyage, les coles ajant alors 6te reconnucs Irigonometriquenient ct d'une maniere plus scrupu- leuse que lors de la premiere expedition en 1832.
lies Ambon on Jnibolne. — Le trace des cotes est fonde sur les observations des derniers navigateurs fran^ais, leur consciencieuse exactitude ni'ayant 6te demontr(^e, dit M. Von Dertelden, par le texte qui ac- compagne leui^s cartes. Pour les parlies centrales, on a employe des carles manuscrites en grand nombi'e et plusieurs carles gravees.
lies de Banda. — C'est la reduction d'une grande carte manuscrite des principales iles de Banda , dressee par le colonel M.-S. de Man. La graduation est fondee sur une observation du capitaine Jager, qui place le volcan Goenong-Api par h° 30' de latitude S. el 130° 3' 30" de longitude E.
lie Halmahera [Gilolo) et plans de Bitjoli ,' Galela et Mabo. — Cette carle n'estqu'une esquisse, attendu le peu de connaissances positives qu'on a sur cette ile. M. V. D. a employe , pour obtenir le trace le plus exact possible, des plans manuscrits contenant les rele" ves du lieutenant de marine Ligvoel pour Galela e Bitjoli ou Wossa, les reconnaissances des navigateurs frangais, etprincipalement celles de M. Dumont d'Ur- ville en 1828, les observations du capitaine Jager ex6- culees a bord de la fregate Maria Reigersbergen en 1804 et 1805, publiees par Ic prolesseur Schi'o- der, etc, , etc..
(40)
lie 1 eiiKile. — Le detail topogiapliique de linterieur est fait principalement d'apres la carte manuscrite <<ressee par le capitaine ingenicur Erouwer en 1823, maisen rassiijcllissantaux observations de M. Diimonl d'Lrville qui montient, dit M. V. D. , que celte He doit etrc orientee a peu pr6s N.-E. etS.-O., et non pas N. ct S. coniine I'indique M. Brouwer.
Nous lerons reinarquer a noire lour que les rel6vc- ments de M. d'Urville, en 1828, n'ont ete pris qu'a une grande distance ( 18 ou 20 millcs ) et que par conse- quenl on n'a pu en conclure que la position du sommet et non la configuration. Dans le dernier voyage de noire celehre navigateur, il amouille aTernate,eta pu tracer une carte exacte de celte lie; elle n'est pas encore pu- bliee , niais nous avons pu nous assurer que la confi- guration de cetle ile est ronde, el non pas inclin^e du N.-E. au S.-O.
yirchipcl cV Oranpe-Nas.tnii. — M. V. I), donne ici la reduction d'uno grande carle manuscrite qui presentc les releves du lieutenant A. de Boer, commandant la corvette la Sirene en 1832. La partie meridionale decet archipel, a seule ele reconnue.
Nous avons deja remarqu6 que cet archipel pour- rait bien ne pas exister, et n'elre que la cote 0. de la Nouvelle-Guinee. Nous ajouterons ici que la partie de cote que M. V. D. donne comme le S. de I'archipel d'Orange-Nassau, a ete reconnue en 1839 par rjstro- /abeel la carle a d^ja ele grav6e ; nous avons remarque avec surprise des differences considi^rables entre ce tra- vail etcelui de M. de Boer. Ainsi la difference de longi- tude entre le fort Dubus el le cap Catenoem est, d'apres M. d'Urville, de 1° 15', tandis que d'apres le lieutenant de Boer, elle serait de 1° 39'. La longueur de I'ile Adic est
{ M ) sur la carte francalse de 24 milles, et sur la carte hol- landaise de 30. Nous croyons avoir des ralsons de re- garder les travaux de V Astrolabe, dent la mission elait speclalement hydrographique, comme meritant toute confiance; maisnous deniantlerons d'aprescela ce que nous devons penser de ceux des ofliciers hollandals.
Detroit de la Princesse Marianne. — Le plan de ce de- troit , d^couvert en mai 1835 par le lieulenant de marine M. Langenberg Kool , a ete reduit d'apres les gi'andes cartes qui en ont ete dressees a rechelle de 1/100000'". Comme I'honneur de la decouverte de la parlie septentrionale de ce dotroit, que I'oncrut alor.s une riviere, et que Ton nomma Dourga, appartient aux lieutenants de marine Rolff et Modera, qui I'ont faite en 1826 et 28, M. V. D. a donn6 leurs releves de cette partie pour servir de comparaison a la reconnai- sance complete du detroit en 1835.
A la suite de celte analyse de la carte , M. V. D. a donne dans son Memoire;
1" Un tableau general des latitudes et longitudes qui lui ont servi, avec Vindication des autorites ;
2° Une notice des principaux rapports , m^moires , notes geogra plaques el carles manusoriles ou gravt^es qu'il a employes ;
3° Enfin un tableau statistique des divisions territo- riales et administratives de I'lnde Neerlandaise , com- prenant les residences , les regences ou divisions prin- cipales , et les districts ou sous-divisions.
Ces tableaux ajoutent un nouvel interet a la carte et au memoire de M. V. D. , qui ne peuvent manquer d'etre consultes avec fruit par tons ceux qui voudront s'occuper de la geograpliie du grand archipel Indien.
Avant de terminer celte notice, nous ferons observer
[ h-2 )
que la derniere expedition dc M, Dumontd'Lr\illelour- nira des donnees pr^cieuses pour la rectification de plusieurs parties de cetlc carte. Nous avons dejaremar- que quelques dilTercnces sur la cote 0. de la Nouvelle- Guinde ; mais il n'y a encore qu'une petite parlie de ces int^ressanls travaux qui soit publiee. On trouve, il eslvrai, dans le volume d'hydrographic , publie par ^ incendon-Dunioulin , hydrograplic de I'expedilion , une table des principales positions geograpbiques , determin^es pendant le voyage des corvettes i'^Jstro- I ibe et la Zelec; mais outre que ces positions, deduites uniquement du calcul des chronometres, pourront su- bir quelques modifications par la redaction des cartes, nous devons avouer avec peine qu'on trouve dans cette table tant de fautes d'impression qu'on ne peut pas y accoi'der une confiance entiere. Nous y avons ce- pendanl remarque de norabreuses dilTerences avec la carte de M, V. D. Nous croyons devoir atlendre avant de les signaler que Ics cartes soient publiees , et nous nous contenterons de donncr ici , d'apres le rapport qui a ete fait a I'Acad^mie des sciences par M. Beau- temps-Beaupre, sur les resultats de cette expedition, la liste des cartes qui pourront servir a rectifier quel- ques parties du grand travail de M. VonDerfelden.
Cartes de dwerscs parties deVarchipel indien, levees dans V expedition de /'Astrolabe et de la Zelee, sous le commandeDient de M. DuMONT d'Lrville.
Carle d'une partie du passage des Moluques ,
— des lies Banda ,
— des lies Ceram , cl des lies voisines,
— des lies Arrou,
— de la bale du Triton ,
( 43 ) Carte de la bale S.-O. de la Nouvelle-Guinee,
— g6n^rale de la cote S.-O. de la Nouvelle-
Guinee ,
— de I'ile Bourou ,
— de la partie mendionale de Celebes , - — du detroit de liaiica,
— des detroits de Diirion ot de Singhapour,
— d'une partie de la cote Occident, de Borneo,
— d'une portion de la cote N. de Borneo et des
lies Balarabangan et Banguey,
— d'une partie de I'archipel Holo ,
— des detroits de Bassilan ,
— de la partie S.-E. de la cote de I'ile Borneo ,
— d'une partie de la cote de Java pr^s Sa-
marang,
— de la partie N.-O. de I'ile de Java,
— d'une partie de la bale Lampong.
^\i^PlI-v d'une lettre adressee aU, d'Avezac^«/-M. C. T. Lefebvue , lieutenant de vaisseau de la marine royale.
Gaire , le 2 iiovemliio 1843.
Quand j'arrivai en Abyssinie je ne trouvai plus
Dillon pour me donner la poignee de main de bien- venue; Petit luttait contre la mort; on n'avait pas en- core pu le tircr du bas pays , et la pas d'esperance de sanle. Je pris une grande responsabllite , cello de le faire transporter a deux jours de distance dans une region 6levee , ou I'air frais en meme temps que loger devait le sauver s'il r^sistait au voyage. Ma tentative tut heureuse, et bientot il enlra en j^leine convalescence.
(44) II fil alors do la bolanique pour donner suite aux notes de Dillon , et tous ses travaux d'histoire naturelle ac- quirent un grand prix par les dcssins qu'y joignit M. Vignaud, Six mois s'^taient a peine ecoulcis depuis men retour dans la contree que j'etais appclci a explo- rer que Schafncr , sergent d'artillerie fort intelligent, et qui, comme M. Michel (1) d'Abbadic, avail le desir d'etre soldat dans I'armee abyssine , succoraba a une dysenterie, au moment ou il etait en clicmin pour porter de la poudre a Oubi6 et recevoir dc lui le com- niandement d'un petit district. Au milieu de ces tribu- lations, les travaux ne discontinuaient pas; j'explorais les terrains calcaires de I'Enderta , jo descendais a la plaine de Sel , etc. A la fin de 18/il , I'etude de detail etait finie ; restait une course qui pouvait alors etre fructueuse , parce que nous pourrions relier lout ce que nous verrions d'une maniere gen^rale a ce que nous avions vu dans les plus minutieux details. Nous partimes pourle Choa ; maisM. Vignaud, qui, pendant que nous etions au Ouodgerate , etait alio a Adoa pour renouveler nos finances un peu cpuisees, se trouva separo de nous par la guerre civile du Tigr6. M. Petit et moi suivimes la route des Portugais , c'cst-a-dire la fronti^re E. de I'Abyssinie actuelle, inventant chaque jour un expe- dient pour echapper aux populations qui croyaient chacune de nos plantes et chacun de nos cailloux un raorceau d'or ou un talari. Nous restions cependant deux ou trois jours dans un pays , mais annongant tou- jours que nous venions nous etablir pour y demeurer, moyen silr pour etrelibredepartir pendant que chacun 6tait a son champ ou a son travail. Nous fimes notre
(i) C'cst le prpnoin sous lequel M. Arnaud d'Abbadie est desigiui •■n Abyssinic. 'A...
( A5 ) entree en Choa, lorsque la commission anglaise venait fl'etre congediee. Le roi nous accueillit on ne peut mieux, et pendant que je le suivais dans une expedition aux frontieres du Gouraguie et de I'Ennarea, le docteur Petit resta a faire de I'liistoiro naturelle dans la pro- vince de Tegoulelle, chez une sceur du roi, I'Ozoro Te- keukeule. Quand I'expedition revint, le roi se rendit a Ankober, et j'y allai avec mon compagnon de voyage pour y passer les fetes de Paques et mettre en oi'dre le journal d'une course oil Ton marchait depuis le matin jusqu'a la nuit, et quelquefois meme pendant la nuit; j'avais cependant recueilli des echantillons de min^- raux, fait des coupes geologiques, ddtermin^ par releve- ment et par des hauteurs d'etoiles le cadre de ma carte, pris mes hauteurs barometriques , et enfin appori6 quelques plantes a M. Petit,
Au mois de mai , j'allai prler le roi d'agreer mon conge : il me demanda quelle etait la route que je vou- lais choisir , afin de faire disposer des guides : je lui re- pondis que je voulais allor par les Ouello , Lalibela et Sokota, tandis que le docieur Petit desirait prendre la route du Godjame. II me dit qu'il ne fallait pas nous separer, que la route 6tait difficile , meme pour des Abyssins, a plus forte raison pour nous ; qu'il pouvait repondre de tout dans son pays; mais que passe la frontiere , la guerre civile etait sur toutes les routes; que ce que nous avions de mieux a faire 6tait de tra- \erser rapidement le Nil pour nous I'ofugier dans I'asile (leDima, jusqu'a ce qu'il nous vint une escorte de lias Aii. Le soir, il nous fit envoyer deux toiles et deux mules, et le lendemain il nous regut en nous disant qu'il allait a Angolala , ou nous eussions a le suivre; que nous prcndrions l;'i notre guide pour aller
( 46 )
chcz Abba Mall, cbef du pays voisin de Debra Li- banos. Au jour convcnu , nous partimcs ct flmes a noire aise notrc voyage dans le pays G alia. Nous eilmes une r6ceplion splendide d'Abba Mali et du chef do Debra Llbanos. Le pays de Metta est plus dangereux el plus difficile a traverser ; nous passons cependant le Nil sans accident et comme par miracle; nous arrivons a Dima lout d'une traite ; chacun en est 6tonne, car les habitants du pays n'osent pas sortir des villes d'asile, ct Bicbana , de meme que toutes les villes sur noire pas- sage , a 6te abandonnee. Nous passames une semainc a Dima, sortant chaque jour a mule pour faire des relevements ; lorsque les carapagnardsm'apei'cevaicnt, ils me dcmandalcnt si les mallieurs du pays allaienl cesser. Le camp de Ras Ali se Irouvait lout pres de la route que nous devions suivre; d'un autre cote, les re- voltes pillaienl le reste du pays pour faire subsisler leurs troupes. II paraissait done impossible de passer entre les pillards du Ras et ceux duGodjame sans avoir une escorte du parti le plus fort. Mais aller chez Ali lui demander celte escorte (itait chose dangereuse; la route n'etait pas facile; y aller les mains vides etait imprudent el surlout inutile; or toutes nos I'cssources de cadeaux avaient 616 epuisees au Choa, puis au pas- sage du Nil; voila ce ii quoi jepensai , ct nous tcntames raventurc. Le Ras etait aEneupsie, et scs troupes ne pouvaientguere marauder qu'a une journee de chemin sans redouter les habitants, qui cux-memesne devaienl gu6rc s'approrhor qu'a doux journees dans la crainle des maraudeurs; un cspace libre devait done oxisler a la limite , et la nous nc devions rencontrer personne sur le passage. Le 30 mai , a 5 heures du matin , au moment on chacim nous croyail ('•t;)))lis a Dima pour
( hi ) y passer I'hiver, et ou quelques amis, auxquels nous avions rendu des services dans Ic Tigre , faisaient pre- parer de la biere et de I'liydromcl pour nous bien re- cevoir, notrc tente Cut abatlue et nos mules chargees. Nous sortlmes rapidement de la ville et nous nous di- rigeames sur DebraOuerk, autre ville d'asile, mais dont le saint est raoins fort et moins respecte que celui de Dima. On pretend que la piete scule arrule les en- treprises des malfaiteurs qui avaient intention de piller Debra-Ouerk , tandis que Dima sc defend elle-meme par la grande puissance de son saint , que Ton a vu arreterdes cavaliers dans leur course, et lesfaire mourir au moment ou ilsetaiont pres de penetrer dans la ville. Nous dimes que nous allions passer quelques jours aux envu'ons de Debra-Ouerk pour revenir aussitol a Dima. Au bout de trois heures de route nous etions dans I'en- ceinte do I'cglise, ou nous attendions d'avoir trouve un logement soit par hospitality , soit en payant. Notre attente fut courte , car les gens du Godjame sont excel- lents pour les etrangers , et malgre les devastations conlinuelles de la guerre qui amenaient la pauvrete . on ne manqua pas de nous fournir a souper. Pendant la nuit nous vimes les feux de Ras Ali , et nous mimes une vigie pour nous pr^venir si au point du jour on brulait le camp , signal de depart qui nous avertirait dc demeurer en place. Mais tout 6tant reste dans I'ordre, nous fimes charger nos mules et donnames ordre de fouelter# car c'etait une longue et perilleuse journee que nous avions a faire jusqu'a la ville do K«5raneo : nous avions a traverser le pays des Yofites, ceb'bre en tout temps par les brigandages qui s v exer- cent, et le hois deOnamata. Nous trouvamos la route completcment deserte ; mais en passant rEunallcliii.
( AS ) nous vlmes le cadavre cl'iin liomme uouvcllemcnt assas- sino; cela donna un pen plus de celerity a la marclie dc nos honimcs, et cependant nous ne pilmes arriver a K^raneo; la nuit nous surprit auprus d'une ^glise en ruines dans le pays d'Onamala , apres avoir pass6 plusieurs fois I'Azouri. Nous campamcs dans cette 6"lise, cl le lendcmain matin, apr^s deux heures de marche , nous atteignimes la ville de R6ran6o, situde sur le bord du plateau , au sommet d'un ravin qui mone au Nil. De la, il nous fallut tiois heures pour arriver aMota, grande ville commerrante qui pr(^c6de la dcscontc du plateau vers le Nil , a I'ondroil du pont cass6. Tout le monde se rassembia autour de nous sur la place du marche, en se demandant si nous n'avlons pas un philtre pour avoir ainsi traverse le pays , lors- qu'ici unchef qui avait sous ses ordres hOO soldats n'o- sait pas aller rejoindre Ras Ali. On commenca cepen- dant a essayer de nous voler, et Ton enleva quelques elTets attaches sur une mule; mais sur notre recla- mation le chef les fit rendre, C'est dans Fenceinte de I'eglise que nousallames nous loger.
Le 3 juin, dans la matin6e , nous quiltames Mota apr^s avoir fait des aumones et distribue des medica- ments a plusieurs malades , en sorte que nous 6lions accompagnes de quelques gens bien disposes, et nous pouvions esp^rcr qu'aucun accident ne viendrait trou- l)ler notre passage du Nil. Nous allions alors tout a noire aise , relevant les sinuosites du ravin , notant les noms des pays qui le bordent, la vegetation el la nature des terrains. C'est ainsi que nous atteignimes Sabera- Deldeye, <l(»nt vous aurez vu ailleurs une foulc de des- criptions; lout a c6t6 du pont casse se trouve un syco- more a I'ombre duquel mon compagnon de voyage se
f ^9 ) mit a ecrire ses notes , tandls que je faisais passer les effels el les collections de Tautre bord , surveillance que ma quality de marin ni'avait devolue. A peine la moitie de mon operation 6tait-elle finie, que je le vis se lever et appeler son domestique de confiance pour descendre avec lui jusqu'a I'endroit ou passent les mules , c'est-a-dire a Irois portees de fusil du pent , annoncant qu'il voulait traverser en cet endroit, ou la rive plus plate lui 6vilerait une escalade a laquelle elaient obliges ceux qui faisaient leur passage aupr^s du pont casst!; : les Abyssins chercherent a le deloui'ner d'un pareil projet , en lui disant que le lieu ou il vou- lait ti'averser le fleuve 6tait rempli de crocodiles.
Je I'engageai fortement a suivre le conseil des habi- tants, ou du moins a attendrc que j'eusse fuii de transporter les bagages , pour que je vinsse le faire passer ensuite , comme je I'avais dcja fait, chez Mari- Sabaro, au pays de Metta. II m'engagea a me hater et j^romit de m'attendre ; mais cinq minutes apres , un Abyssin vint me prevenir que le m^decin (^tait passe , et que j'eusse a me d^pechcr aussi , moi , car il se fai- sait lard. A peine achevait-il ces paroles , qu'un cri d'alarme vint me frapper. Je courus au fleuve , sautant de roche en roche, jusqu'a ce que j'arrivasse sur la rive, ou je Irouvai les domestiques criant ct courant de tous cotes ; il etait impossible d'en tirer une parole. Je quittai vite mon vetement pour m'clancer et fouiller le fleuve ; mais les domestiques me retinrent. Je restai comme un homme qui r6ve ; les Abyssinsdisaient : Ccsi
le Djene. Et I'eau coulail pas meme une trace pour
dire c etait la
Si le deuil est peniblc a porter lorsqu'on est cnloure d'amis et que le coeur est distrait par I'appel des autres
1. JANVIKB. h. k
( 50 )
affections, jugez tie I'olat de I'ame lorsqu'une tombe se referme siir un ami si loin do la patrie ! Encore unc mort, et tout notre travail sera perdu !
Enlin nous giavimes le ravin du Nil, el vers la nuil. au moment oil un violent orage se declarait , nous vinmes planter noti'etente aupr^sd'un village du district d'Andabeut , province du Begcmcder. Mes pcns^es se reportaient alors vers M. \ignaud, auquel j'avais (icrit de sc rendre a Gondar pour y dessiner les monuments. En quatre jours nous arrivaraes a la capitale de I'Ab) s- sinie, et je descendis cliez I'alaka Abta-Selass6, le cbef de la mission, qui a visile Rome avec M. de Jacobis. Je lui demandai des nouvelles de mon dernier compa- gnon : il n'en savait pas de rdcentes ; mais il avait en- tendu dire qu'il etait a Axum deux mois auparavant. J'envojai chez I'aboum, pensant que ses domestiques, qui sont du Tigre , seraient mieux instruits : un d'eux vinl chez moi, et m'annonga que M.Vignaud etait parti pour la France... Je terminal rapidementquelques tra- vaux de geographic , et m'empressai de me rendre a Adoa, ouje trouvai une letlre du ministre qui me rap- pelait. Je fis immidiatcment mes preparalifs pour exe- cuter cet oixlre, et le 17 juillct, la vcille de mon depart de cette ville, vintla nouvclle queM. Vignaud etait i)arti de Soakim,eitrememenlmaIadeetlaissantpeu d'espoir degudrison. A Messoah, j'eusdes nouvelles de Djeddah, annongant qu'il ^tail mort apr6s avoir recu les soins de M. Serkis pendant une dizainc de jours, et rempli les dcrniers devoirs de la religion avec le p6re Antonio, missionnaire espagnol , qui se trouvait la dans ce mo- ment.
Quand j'arrivai a Djeddah, M. Fresnel me dit qu'il avail rccueilli les collections do geologic el les dessins
(H )
de M. Vignaud, et qu'il avail remis le tout a M. Dc- goutin , agent consulaire de Messoah , allant au Caire , pour les remeltre au consulat general d'Egypte.
Enfin nie voici au Cairo , oil je me depeche de faire faire des caisses pour mes bagages, qui, avec leur inauvais emballage , ont bien pu supporter le climat de la mer Rouge , mais qui auraient fort a souffrir de celui de I'Europe, si je ne les mettais en niesui'e de defier la pluie et I'insouciance des matelots.
C.-T. Lefebvre.
ExTUAiT d'une lettre de M. C. T. Lefi;bvre h M. Jomard,
DicDihrr de r Institiit.
Toulon, 20 decemljie i84^i-
Monsieur,
Si I'Etbiopie tout enti^re doit exciter hautement
le coup d'ceil des gouvernements a cause de sa posi- tion pros de la mer Rouge et pros de I'Egypte, de la fcrtilite de son sol et du caractere de ses habitants , la partie habitee par les Galla doit surtout occuper les g6ographes, parce que c'est de la que devront partir desormais les nouvelles decouvertes en Afrique; c'est seulement par la qu'on arrivera aux sources du Nil Blanc, et a desresultats imporlants en science comnie en etablissements coloniaux et religieux.
Les Galla , essenticllement cultivateurs , ont partout choisi les plaines pour y fixer leurs demeures ; ils n'ont abandonne aucun plateau, aucune vallec fertile , et n'ont etc arreles que par les terrains defavorablos a la
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cavalerie, ou s'^laienl rel'iigi^s les chreticns lors de
^'invasion de Gragne, et par ceux qui, trop arides pour
]a culture, tHalent occupies par les peuples pasteurs.
Ainsi leurs limiles au nord ont etc les haules chaines
du Somen ot du Lasta , a Test les deserts des Adal , au
sud les pays malsains des Cliangalhudu cote de I'ouest
j'ignore leur Irontiere ; naais c'est lu surtout qu'on
doit les chereher , car c'est de ce c6t6 qu'on les Irouve
foriii(is en nations, et ou seulement on pourralt esp(5rer
de decouvrir leur origine , tandis que les Galla de Test
peuvent etre consideres comrae des sentinelles avan-
c6es , et se sont confondus avec les nations dont ils
avaient le contact. Ainsi , par exemple , les provinces
du Gouragui6» de Gouma et Sidama, avaient adopts le
christianisme i I'^poque ou les empereurs d'Ethiopie
faisaient leur residence a Hierere ; et , avec de nou-
velles idees , ils durent perdre les traditions histori-
ques. Ce ne fut que lors de I'invasion de Gragne que
le peuple civilis6 fut remplac^ par les Barbares ; mais-
eeux-ci, a la mort du conqu^rant, rest^rent disperses,
quoiquc toujoursmaitresdu pays qu'ils avaient conquis,
et bientot tout souvenir sepcrdit; les iddes religieuses
qui demeurerent sont peut-etre trop vagaes pour en
tirer une conclusion qui fassc connaitre leur point do
depart.
Voici ce qu'un chef me disait un jour sur lescroyan- ces des Galla :
« II y a un Dieu unique,
» L'homrae est sorti de la poussiere (Oromo soupe » nomatate). »
Lorsque je deraandar s'il y avait des livres galla, il me r^pondit :
« Un jour le livre est descendu du ciel , mais unc
( 53 ) » brebis I'a mange , et le livre est devenu de la graisse, » (Malas oLiaka bouee , saa lone iguate mox'a t6 e » ourmone malas ni mora). »
C'est pom-quoi Ton consulte la graisse des brebis pour connaitre Tissue d'une affaire ; le signe est favo- rable si le peritoine est parfaitement pur et sans tache; 11 est nefaste s'il y a des slries sanguinolentes.
La question des llvres est une question que j'ai re- petee bien souvent et a des gens intelligents , surtout depuis que j'ai appris que la Societe oi'ienlale poss6- dait un alphabet galla ; mais on m'a toujours ri au nez en doutant que je fisse une question serieuse.
On pourrait avoir le cceur net de la chose en allant au Gouraguie , ou les meilleures bibliolheques ont <^te conserv6es ; car on y trouverait probablement une his- toire galla et des dictionnaires ethiopiens , parlant <le cette langue ; de meme que j'en ai un qui donne quelques significations du phenicien , de I'hebreu et du copte. Ce serait peut-etre aussi la meilleure route pour aller a Caffa, qui doit etre aujourd'hui le but des voyageurs qui veulent renconlrer les sources du Nil- Blanc , et peut-etre celles d'un fleuve important qui se dirige vers I'ocean 6thiopique.
Dans une note que Ton me fit I'honneur de publier dans le Bulletin de la Societe de geographie , j'avais ecrit que le Guibd prenait sa direction vers I'O. , et devait etre la source principale du Nil , mais je m'elais (rompe. En reconnaissant que les versants de Caffa ne pouvaient pas conduire leurs eaux au Nil-Bleu , je n'avais pas alors pense au vcrsaut de IE. qui suit le fleuve jusqu'a ce qui! suit de\ie au S. par la chaine qui fail suite a celle du Gouraguie. La marche de ce <;ours d'oau , apres elre sorli entre Caffa el Djinna , est
( 5A ) a travors les pa\s de Nonno, BiloK^iic, Aniayane, Djindjero, Agabja\ne, Adiya et Maiko; a parlir de la, il court ail sud. Je no sais pas Ic nom des peuples au milieu desquels il passe.
Mais les ruontagnesdeCafladonnent lieu a une riviere plus large et plus pn>fonde encore que le Guibe : c'est laGodjobe, sur laquelle on navigue en pirogue. Son conrs a et6 suivi pendant longtcnips par un uiarchand de CafTa, nomnie Irbo , qui kii doiino un millc do lar- geur lorsqu'clle arrive dans la plaine des Changalla , quelquo icmps avant de so jeter dans lo Nil Blanc , quo mon Galla sait parfaiteraenl distingucr du Nil-Bleu. II ajoule qu'une autre rivierevenantdel'est, et fournie par uno cbaine tres elev6e que Ton aperqoit de CafTa, viont joindrc son cours a celui de la Godjobe , et qu'a la jonc- tion ello fonne un lac ou bassin oil se jetlent plusicurs potltes rivieres galla.
A trois jours de sa source , la Godjobe traverse aussi un lac qui est dans le pays de Sidama , el que Ton ne passe jamais sans s'elre confess^ , parce qu'on y peril souvenl. J'avais (!!crlt le nom de ce lac ; mais il est un peu efface, et je n'ai pas encore pu le lire d'une ma- niere certainc.
Mainlcnant , doit-on considerer la Godjobe comme source du Nil-Blanc ? Rien de plus facile alors que d'y arriver (si toutefois Ton est mieux muni en argent que je ne I'^lais, car sans cadeau Ton ne peut faire un pas dans les pays galla). Doit-on, au contrairc, romonter la rivi6re qui vieiit de Test ? Le voyage doil toujours se faire par le plaloau galla; le pays est plus sain , et Ton s'expose moins en tout cas qu'en voyageanl choz les n^gres, toujours en guerre avec les races blanches ot mulalres, qui los font oscla^es.
( 55 )
D'apros la vegetation , les points les plus elevds de Caffa auraient 9,000 |)ieds de hauteur absolue ; les vall(5es en auraient 5,000, Le Narea est moins eleve ; car sur les plateaux qui I'entourent , on ne trouve ni genevrier ni bruyere. Ces arbres sent remplaces par le zegba , qui ressemble au c^dre , mais qui atteint des dimensions beaucoup plus grandes, et aun boisplusdur et moins noueux; il croita 7,000 pieds d'elcvation etne se trouve ni plus liaut ni plus bas, d'apres les rc^sultats d'un grand nombre d'observations barometriques.
Arrive d'hier seulement a Toulon, j'ai trop a faire pour contlnuer d'^crire les autres i-enseignements que je m'^tals pi'opose de vous adresser, et je n'ai pu mettre ici I'ordre que j'aurais desir^
C.-T. Lefebvre.
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DfecoiVEiiTE (III Idc Torrens dans hi NouvcUe-HoUande ;
par M. Evi\K.
Nous avonsdeja donne, clans lo Bulletin du mois dc mai 1842, p. 33, le ri^cit d'une excursion faito en 1841 par M. Eyre, pour aller par terre de la baie Denon au port du Roi-George; nous avions emprunto cet article a la Litermj Gazette; nous nc connaissions alors aucun autre <^crit de ce voyageur. Au mois de mai dernier, la Society de geographic de Londres a dccerne a M. Eyre une de ses nuklaillcs , ct a donnt'; dans son joui'nal les diverses letlres qui on I ete recues de lui, et dans lesquelles ii rend compte de ses re- cherclies. Nous y voyons signal^e surtout la decouverte du lac Torrens, dont M. Eyre estimo I'^tendue a plus de ZiOO milles, Lne lettre de Simrnonds, un de nos membres etrangers, conticnt I'annonce suivante :
« On m'apprend que ring6nieur en chef d'Ad6- laide, I'honorablc E.-C. From, a commence, le h juilletde cette annee (18/i3), un voyage de decou- verte vers le Nord. Le gouverncur general et quelques personnages do distinction I'accompagnaient. L'objet de cette expedition est de determiner la position g6o- graphique du lac Torrens a I'E. et au N. »
Nous avons done dtc port6 naturellement a recher- cher dans les divers rapports de M, Eyre, jiublics par la Society de geographic de Londres, ce qui concerne ce lac, et nous croyons qu'on le lira avec plaisir dans le Bulletin. Nous commencerons par quelques details rc- latifs aux diireronts vovages de M. Eyre.
La possibilile de coiuluiro par terre des troupcaux
( 57 ) delaNouvelle-Gallesdu S. a retahllssement d'Adelaide, fonde dernierement sur le golfe Saint- Vincent, etait regarde comme tres douteuse;peu depersonnes etaient dispos^es a risquer Icurs proprietes dans iin pared trajet : M. Eyre et MM. Hawdon et Bonney furent les premiers qui oserent tenter cette entreprise. M. Eyre partlt de Sydney le 8 novembre 1837, et, a cause des detours qu'il lut obliged de faire, il n'atteignit Adelaide que le 13 juillet 1838. 11 avail avec lui six liomines seulement , et ils amenerent a cat ^tablissement un troupeau de 300 betes a cornes.
Le 5 decembre suivant , M. Eyre quitta de nouveau Sydney avec 1000 moutons et 600 bceufs , et les con- duisit a Adelaide , oii il arriva le 23 fevrier 1839. Dans lecourantde 1839, M. Eyre fut engage dans deux expe- ditions de decouvertes. Dans \a premiere , il quilta Adelaide le 1" mai pour reconnaUre le pays qui se Irouve au N. de cet etablissenient. II fut absent pen- dant neuf semaines, et parcourut dans ce voyage 220 niilles, examinant toule la conlree comprise entre le golfe Spencer et le Murray, jusqu'a environ 36 milles au N. du mont Arden , qui est sitae au fond du golfe. Son expedition se composait de dix cbevaux et de deux cbariots.
Dans la seconde, M. Eyre repartit le 5 aout du port de Lincoln; il fut absent pendant neuf semaines, qu'il employa a parcourir la cote depuis le port Lincoln jusqu'au port Bell, distance de 230 milles; puis de la baie Streaky il gagna le fond du golfe Spencer, ce qui fait encore 220 milles. Ce fut pendant ce voyage qu'il eut la premiere vue de cet immense lac auquel il donna le nom du colonel Torrens. Ccs deux expedi- tions furent entreprises aux frais do ^L Eyre scul.
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Les opd'rations de IS/jO ct /|1 , que I'on peat rcgartler comnie une seule expedition, lurent entrcprises sous les auspices du gouvernement local, qui y contribua par Ic don d'unc somme de 100 livres sterling , dc diverses provisions , et le pr6t de deux chevaux. Les colons de I'Australie meridionale y contribuerent aussi parle pretde cinq chevaux et la solded'une parliede la depense. Sept autres chevaux et le reste deladepense, qui se raonlait tr(^s haul, lurent fournis par M. Eyre, Toutes les cartes dc scs routes ont etc remises par hii au gouvernemcnt de la colonic. Le 18 juinlS/iO, ilquilta Adelaide pour essayer de peneti'er dans I'int^rieur. II s'avanca jusqu'au lac Torrens, en suivlt les bords pen- dant pri;s de /lOO inilles; mais, se trouvant enlermi dans une esp^cc de cul-de-sac , aitendu que ce lac a la forme d'un fer a cheval , etle pays etant de jilus en plus aride , il revint au port Lincoln. De ce point, apris plusieurs tcntatives infructueuses qui ne le decoura- g^rentpas, il parvinl a atteindre le port duRoi-Gcorge, ayant parcouru ainsi une distance de 1,300 milles. C'estdccedernicrvoyage que nous avons rendu complc dans le Bulletin de mai 18/i2. Nous allons extraire maintenant des rapports de M. Eyre ce qui est relatif au lac Torrens.
Ainsi que nous I'avons dit plus haul , M. Eyre avail quitle Adelaide le 18 juin 1840 ; le 3 juillet suivant il arrivait au mont Arden , ou il avait 6tabli un depot de vivres ; il ecrivit de ce point la lettre suivante :
« Le 6 juillet, accompagnci d'un jeunc naturel , jc j)arlis a cheval pour rcconnaitre le lac Torrens ct le pays situii au nord dc notre depot, laissantau camp les autres personnes qui m'accompagnaient, J'arrivai sur li's bords du lac Torrens apr6s trois jours dc marche, el jo me convainquls (|ue c'elait un bassin d'une im-
( 59 ) mense etendiie qui, sur une largeur variable de 15 a 20 millcs, presenlait une longueur de ZiO a 50 milles, depuis son cxtremite sud jusqu'au point qu'on aper- cevait le plus au nord lorsqu'on etait sur un sommct des monts Flinders , situe a environ 90 milles au nord du mont Arden. Le lac est entoure d'une bande de sable couverte de planles marines, et on remar- quait de distance en distance , sur Ics bords , des in- crustations salines. Les eauxs'6tendent sur une surface tres vaste, mais elles paraissent peu profondes.
» La nature moUe de la partie decouverte du lit du lac, partie qui a 3 ou A millcs de largeur depuis le bord ext^rieur du bassin jusqu'a I'eau , ne m'a pas per- mis d'approcher et de gouter cette eau pour veri- fier si elle 6tait salee ; mais je n'en doute nuUemcnt, car la portion du lit que nous voyions 6tait revetue d'une couclie (^paisse de particules salines. U n'y a ni arbres ni buissons d'aucune esp^ce aupres du lac sur le point oil nous I'avons vu , et nous n'a- vons pu trouver ni herbes ni eau douce pour nos clievaux. Le lac Torrens est borne , du cote de I'ouest , par une terre elevee, qui parait etre la continuation du plateau tabulairc que Ton trouve a I'ouest du fond du golfe Spencer; je pense qu'il doit recevoir beaucoup d'eau de ce cote, ainsi que toutc celle qui vient des monts Flinders vers lest.
)) En quittant le lac, je jjassai quelques jours a exa- miner le pays situe au nord de notre depot. Sa nature parait peu variee ; des plaines sablonneuses et arides formentlesniveauxinfcrieurs,etlesmontagnes qui sont la continuation dos monts Flinders sontformees dc quartz et de pierres ferrugineuses. Ces monlagnes dcviennent moins elevees et plus dclachees a mesure
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qu'on avance ; des vallees pierreusesles sdparent ; tout le pays prcnci un aspect plus aride, s'il est possible, et los sources, qui etaiont precc^demmenl assoz nombreu- scs dans les monlagnes, se rencoiilrenl plus rarcincnt et plus avant sur les hauteurs. Apres de longues et laborieuses rechercbcs, je finis par trouver a 90 milles au nord du mont Arden un lieu ou 11 etait possi- ble d'etablir un depot dc vivres et d'oii je pourrais partir pourpenelrer plus vers le nord. Apr^s une ab- sence de seize jours, je rejoignis mes gens sousle mont Arden, le 21 juillet.
))Dans ma premiere visile auiacTorrens.j'avais pensf^ que son ecoulcment se laisait par le nord; mais actuel- lement je suis porte a croire qu'il a lieu par le sud et par I'extremite du golfe Spencer. »
Dans une autre lettre du 8 octobre , M. Eyre disait: « Apr6s avoir quillenotre depot aupres du mont Arden, la nature aride el sablonneuse du pays entre ce point et le lac Torrens nous t'orga a longer la chaine des monts Flinders. Notre marche fut ndcessairement lente a cause de I'in^galile du terrain et de la raret6 des sources qu'il fallait chercUer. A mesure que nous avancions, les monlagnes s'inclinaienl vers lest et di- minuaient de hauteiu' ; elles cesserent enfin lout-a-fait par 29° 20' de lat. S., et nous nous trouvames dans un pays tresbas etplal, forme de vaslesplaines pierreuses , entremeldes de sables; ces plaines ne presentaient ni eau. 111 gazon , ni arbres, et quelques ])lanles sa- lines vegetaient en petit nombre sur ce sol. A travers ce pays plat et nivelti on lemarquait dans diflerenles direclions quelques pctites t^ievations de 50 a 1500 pieds lie hauteur, lerniinees loules par un plateau , et pre- scutanl invariableuient des bonis abruples; ces eleva-
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lions sont torm^es d'une lei re ciayeuse et recouverles dans la pai'tie superieure de pierres et de sable. II sembleralt que ces plateaux ont etc foi-mes par laclion des eaux, qui en auraient creuse les flancs, de nia- niere a ne laisser subsister que ces iVagaients detacbes. Apr6s avoir traverse celte region aride dans trois di- rections dilTerentes , nous trouvames que celte contree basse, qui forme la terminaison des monts Flinders , etait enti6rement enlouree par le lac Torrens , qui, commen^ant non loin du fond du golfe Spencer, fai- sait un immense circuit de plus de 400 milles , avec une largeur de 20 a 30 milles , recevant les eaux des monts Flinders, et les entourant sous la forme d'un fer a cheval.
)) La plus grande parti.e de I'immense plaine quicon- lient le lit de ce lac est sans doute a sec, mais elle consiste en un nK^-lange de sable et de vase d'une na- ture si molle qu'elle rend tout-a-fail impossible d'at- teindre I'eau que Ton apergoit a quelques milles du bord exterieur du bassin. Je n'ai ])u qu'une scule fois y arriver; c'elait dans un petit bras du cote du nord- ouest: I'eau etait aussi salee que celle de la raer. Le lac , dans la parlio E. et S. , est born6 par une cole sablonneuse elevee , sur laquelle croissant quelques plantes salines et quelques buissons , noais sans aucuiie autre vegetation; I'aulre cote, autant que nous avons pu en juger , presenle le meme aspect ; et lorsque nous monlames surlesmontsFlinders, d'oula vueetaitexlre- memenl etendue , et d'oii Ton apercevaitle cote oppose du lac, on ne distinguait ni a I'ouest , ni au nord, ni a Test, aucune espece d'elevation , et tout le pays pa- raissait un vaste desert bas el aride. Nous donnames au plus baut sommet ou nous sommcs monies le nont
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de mont Sca'le ; il oslsilu6 par 30° SO'do lat. S. , et jiar environ 138" 40' delongil. E. de Greenwich (13G° 20' E. dc Paris).
))D'apres la forme du Jac, il dtail Evident qu'il nous elait impossible de p6notrer dans I'intf^rieur avant de nous etrc portes tr6s loin vers Test ou vers I'oiicst pour eviler le lac etle vastc desert dontil est entoiire. Comme I'exp^dition 6tait deja en route depuis trois mois , nos vivres 6taient tellement diminues qu'il ('>tait necessaire de les renouveler; il nc nous restait done que deux partis a prendre, ou de revenir vers le sud a Adelaide, ou de gagner la baie Streaky a I'ouest , et d'envoyer dc la au port Lincoln pour faire des vivres. Je me d6- cidai pour celle dernidro route.
)) Avant d'arriver au mont Arden , nous eumes plu- sieurs jours de pluie, sans cela nous n'aurions pas pu tenter d'aller vers I'ouest ; mais 6tant desormais surs de trouver de I'eau sur la route de la baie Streaky, j'envoyai deux de mes chariots , sous la direction de mon sui'veillant , par la route que nous avions deja suivie.et, accompagne de M. Scott, je me dirigeai sur le port Lincoln, avec le troisieme. Dans la route du raont Arden au port Lincoln nous traversames une con- trive g^neralement l)asse, couverle de buissons 6pais, au milieu desquels on rencontrait, a de longs inter- valles, quelqucs ])iecos couvertes d'lierbes, et ^a et la des somniels de roches;c'est auj)r^s de ceux-ci que Ion Irouvait ordinairemcnt de I'eau ou nous pouvions nous desaltcrcr, ainsi que nos chevaux, jusqu'ace que nous arrivames dans les pays deja explores ; et apres avoir traverse de belles vallees , bion arros(Ves et tr^s pro- pices pour les troupeaux , nous atteignimes enfin lo port Lincoln Ic 23 oclobre. »
( «'i )
NOTE
sur line ancienne carte inaniiscrite historiec de la collection de Gitillaiiine Barbie dit Bocaire .
P/Va M. D'AVEZAC.
Dans I'etude des monuments gdiograjihiques du moyen-age , I'un des premiers soins dont on ait a se preoccuper, c'est evidemment de collij^cr les monu- ments eux-memes; et parmi ceux-ci , les plus^curieux a recueillir (parce que cliacun d'cux constilue prcsque toujours un exemplaire autographe et unique , dont la perte serait irreparable) ce sont les cartes manuscriles dressecs par les artistes alors connus sous la denomi- nation de cosmographcs , lesquels y consignaient le bilan figuratif des notions acquises de leur temps.
Nous venons signaler ici un nouveau document a inscrire sur la lisle des monuments de cetle espece : nous voulons parlcr d'une carte historiec faisant partic de la collection de feu notre confrere Guillaume Barbie du Bocage.
C'est une peau de parchemin rognee en parallelo- gramme dc 0'°,90de long sur 0'",56 de haul , a I'un des bouts duquel est rest^ adherent un appendice de 0'",0i) de long sur 0",20 de liaut , qui parait repondre au cou de I'animal; en cet endroit est perce un trou , qu'un effort de traction soit accidentel , soil pkitot frequem- ment repete , a considerablement agrandi par unc d^chirure qui separe , sur la longueur, tout I'appen- dice en deux lani^res , rattachees a leur extr^mite par un cordon; a I'opposite , le bord de la corlc porle la
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trace dos clous qui, suivant loute apparence., le fixaicnt a un rouleau tie bois. On pourrail ponser, il'apr^s ces indices, que la carte devait elre appendue a la nui- raille au moyen dun clou pass6 dans le Irou dont nous venons dc parler, et que dans celle situation le rouleau de bois auquel elle dtait attachee par le bas scrvait a la mainlenir dtendue. Sans prelendre nicr qu'ellc ait et»i quelquefois ainsi placee , nous cro\ons devoir expliquer autrement la destination du rouleau de bois et du Irou que presente I'appendice : avec un pcu d'attention on i-econnait qu'au lieu dun seul Irou il y avait plusieurs fc-ntes etagees, dans lesquelles devait passer succcssivenient un ruban ou unc petite lani^re souple qui servail a niaintenir la carte lorsqu'clle etait eru'oulee aulour du cylindre de bois; nous poss^dons nous-nieme un petit manuscrit cabalislique araLe et un manuscrit hebraique du livre d'Esther, qui nous offrent des cxeniplesdeinonstralifs de cette disposition. Ces details peuvent paraitre minulieux; mais ils ont une importance que Ton pourra appr^cier tout-a- riieure.
Le cadre de la carte que nous d<icrivons renlerme la Mediterranee avec toutes ses dependances, et une parlie de I'ocean Atlantique , depuis le N. de I'Ecosse jusqu'au S. du Pvio de I'Or sur la cote d'AIVique, avec Madere et les Canaries , mais non Ics A<;;ores. Tous les rivages sont dessines avec soin, et la nomenclature y est abondante, les noms pi'incipaux etant ecrits a I'encre rouge et le reste a I'encre noire. Des. pavilions armories (lottent sur les villes les ])lus considerables, dont un certain nombre est figur^ par des groupes do maisoris et de tours surmonlees de domes ou de clo- chers : G6nes et Venise presenlent sous ce rapport un
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developpemonl extraorcllnairc. Dans rinlericiir ilcs terrcs, les noms sont rares, les indications Ires vagues. Ausud de I'Allas on voitdegrandes tentes aux coideurs vives et tranchees, sous lesquelles se montre lo buste des rois les plus puissants, avec accoinpagnement d'une legende exjilicative en langage roman tres incor- rect. Au centre de quelques Etats sont figures des ocussons armories, en Espagne notamment , ou I'ecus- son est tenu par un monarque debout, ayanl en lete une couronne dor ouvcrtc et fleuronnee.
Le cj'lindre sur lequel s'enroulait la carte etait fix*' a I'extreinite orientale , a la droite du spectateur ; I'aji- pendice repondant au cou de I'animal se trouve done a gauche, a rexlreniile occidentale de la carte, A la commissure de la carte et de cet appcndice , on aper- goit, entre deux doubles filets, deux lignes d'c^criture presquc cnlierement elTac^es, mais dont les mots en- core lisibles constatent que la se trouvaient consignes le nom de I'auteur, celui de la ville ou la carte a etc execulee, ct enfin la date precise de sa confection. Le trou dont il a ete question plus haut, ou plutot la de- cbirure qui I'accompagne, traverse celte legende, qui a d'ailleurs principalement soulTcrt de I'usure caus6e par un long frottement, et du ravage des insectos, au point que I'emploi des reactlfs appropries n'a pu faire revivre aucune des portions effacees de rinscriplion. Toute la carte, au surplus, quoique tres lisible dans ses parties principales , est dansun elat dc conservation mediocrcment satisfaisant , ct les bords odrent en di- vers endroits des decliiriu'cs regrcltables , quoique fa- ciles a reparer.
T.a reunion dc ces circonslances mo Irappa , des le jircniioi- aspect, conune un caraclere special di^ja I. ja>\ii:k. 5. 5
( 66 ) gravd dans mon esprit, comme un souvenir de co memc document , que j'^tais pourtant certain de n'a- voir point encore vu. Ma m6moire ne lartia point a retrouver le mol de celte impression singuliere , et je fus immediatement port6 a croire quej'avais sous les yeux une carte qui existait il y a une quaranlaine d'annees dans un monastere d'Espagnc , ct qui n'avait encore ele signaloe que par ces indices pr^ciseraent qui venaient me frapper.
A une dcmi-lieue de Valence, sur la route de Bai'- celonne , dans un des sites les plus d^licieux de la magnifiquecampagne si vantee sous le nom de Iluerla, Ferdinand-lc-Calholique avail fonde, dans les dernieres ann^es dc son regne , de concert avec Germainc de Foix, sa seconde 6pouse , un convent de Ilicronymites sous I'invocation de saint Michel , appele en conse- quence San-Migtiel de los Reyes; une blblioth^que precieuse de manuscrits du xiv' ct du xv* siocle y fut rcunie , et le compilatcur Sebastian Mifiano , dans son Dictionnaire geographique et slatistiquc de I'Espagnc, M
donne a cesujet I'indication suivanlo : « II s'y conserve f
» aussi une carte plate hjdrographique , cxeculee au » commencement du xv* siecle , alors que le reste de » I'Europe ignorait encore I'usage de ces carles, si » utiles a la navigation. » Oil Mifiano a-t-il pris celte indication, que son guide principal , Antonio Ponz, ne lui avail point fournie ? Sans doule dans les letlres de Joaquin Lorenzo Villanueva, qui, apr6s avoir decrit la carte calalane consei'vee a la chartreuse de A al-de- Cristo pres S6gorbe , ajoule immedialement :
« Je rae souviens d'avoir vu , dans- la bibliolheque » du monaslere de San-Miguel de los Reyes, une autre » de ces cartes plates hydrograpliiques, fori endom-
( <57 ) » magee ; la date de sa redaction se Irouvait justemcnt » a I'endroit ou un Irou y avail 6te pratique, a ce qu'il » senible, jjour I'appendre a la muraille. Mais, d'apres » la ressemblance qu'elle offre dans tout son ensemble » avec celle de la Chartreuse, je conjecture que c'est » une pi'oduclion de la meme epoque ; les legendes. » qui sont presque enti^rement ronianes, semblent » meme ecritesde la meme main; preuvede la diligence » de nos mariniersaux xiv" et xv'siecles. » Alnsila cir- constance materielle de I'exislence d'un trou a I'en- droit meme ou se trouvait indiqu^e la dale du monu- ment , se presenle a la fois dans la carte de San-Miguel de los Reyes et dans celle de la collection Barbie du Bocage , et Ton pourrait se croii'e autoris<i a penser que celle-ci n'est point differente de la premiere. Mais on ne peut former a cet ^gard qu'une simple conjec- ture , et il faudrait meme admetlre que Villanueva se serait m^pris en rapportant la facture de ce document au commencement du xv* siecle , car celui que nous examinons est 6videmment d'une Epoque moins an- cienne.
Ainsi que nous I'avons dit, I'inscriplion qui porlait la df>te est elTac^e , tout ce qu'on en peut lire se r^duit il ceci :
« Kijo j in la nobile citnti ill mi., na aito
•I xi jesu xpo amcni, »
Force nous est done de recherclier aillcnrs des indices proprcs a nous mettre sur la voie d'une determination precise de I'epoquc a laquelle il convient de rapporter la redaction du monument. Les ecussons et los dra- peaux armories nous ofl'rent i cet i^gard une ressource prccieuse a laquelle il est naturel de rccourir.
;, 6S >
Pour no riL'gligor ni dlssimuler aucun dcs argnnicnls (le cctte espc'ce qu'il est possible de puiser dans la carle elle-memc, nous croyons devoir consigner d'abord ici le re]ev(!! complet des indications de cette nature qu'ellc nous fournit pour aider a notre investigation. iMais , avant toutes choses , nous ferons une remarque g^n6- ralc sur I'ordre selon lequel so presentent , dans Ics portulans comme celui-ci , les noms geograpbiques qui y sont inscrits : un coup d'ccil attentif ne tarde point a fairc reconnaitrc que tous ces noms sont malerielle- ment disposes, sauf quelques rares anomalies, en uno seule serie commencant au N.-O. de la carte et se lerminant au S.-O. , ces noms se succ(^dant le long des cotes en lignes toujours ccrites dans Ic meme sens, c'est-a-dire dans une direction normale a la courbe com- plexe dcs rivages, et sur le c6i6 droit de cette courbe.
La rose des vents, repetee a diverscs places sur la carte, scmble donner elle-meme la clef de cette dispo- sition par la maniere dont les letlres indicatives de.s rumbs v sont inscrites ; car elles ne sont point assises sur dcs lignes paralleles enlrc clles, en face du spec- tateur qui cousidere la carte immobile devant lui, sui- vant nos habitudes actuelles , le nord en haul et I'oriont a sa droite : cos loltros au contrairc sont assises sur les rayons de la rose , ct pour les lire le spectateur est oblige de faire tourner devant lui cette rose do la droite vers la gauche, son roil relevant la serie des vents dans lo sens inverse, c'est-adire de la gauche vers la droifo.
Voici , dans I'ordre ou elles sont ccrites, les indica- tions de la rose dcs venls , la maniere de les lire, et lour s\non\mio acluelle; au lieu de lollres, une aiguille est consacrdc a designer le Nord , une croix gi-ecque rOriont :
I
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) |
|
i |
Tramontana. |
Nord. |
G |
Greco. . . . |
Nord-Est. |
♦ |
Levante. . . |
Est. |
S |
Sirocco. . . |
Sud-Est. |
0 |
Ostro. . . . |
Sud. |
L |
Libeccio . . |
Sud-Ouest. |
P |
Ponente, . . |
Ouest. |
M |
Maestro. . . |
Nord-Ouest. |
Pour lire la carte entiire suivant I'ordre observe pour I'ecrire, il faut, commc nous I'avons dit toul-a- I'heure, comniencer jiar Tangle Nord-Ouest et finir par Tangle Sud-Ouest; si Ton fait abstraction dcs iles, on aura en une seule serie non interrompue toute la no- menclature des rivages depuis le point le plus 6leve ties cotes occidentales d'Europe jusqu'au point le plus meridional des cotes occidentales d'Afrique , en par- courant successivement les contours dc la France et de TEspagne sur TOcean , puis sur la Mediterranee , en- suite les cotes d'ltalie , celles d'lllyrie , celles de la Grece , pour entrer dans la mer Noire , en suivre la rive occidentale , penetrer dans les Paluds-Meotides, en ressortir, relever la rive orientale du Pont-Euxin , rentrer dans la mer Egee , contourner I'Asie-Mineure , la Syrie , TEgypte , toute la cote barbaresque en reve- nant vers TO. jusqu'a TOcean , et descendre enfin la cote d'Afrique vers le S. jusqu'au cadre de la carte. Quant a la partie insulaire, le groupe des lies Britan- niques trouve naturcllement sa place au commence- ment, celui des Iles Atlantiques a la fin de cette nomen- clature; mais pour les iles de la Mediterranee, on est force d'en intercaler la description dans des coupures plus ou moins hcureuses de celle des rivages corres- pondanls.
( 70) Au surplus, noire desscin n'ilant pas de Iranscrire ici la nomenclature donl nous avons voulu seulement indiqucr la disposilion gen^rale , nous ne suivrons point rigoureusemcnt I'ordre que nous venons d'ex- poser, notre point de vue actuel ayant pour objet Ics Etats politiques bien plutot que leurs rivogcs. Co que nous avons intention de consigner ici, e'est le blason des ecus ct des banniores, la designation des figures dont la carte est orn6e, la transcription des Idgcndes expli- cati\es : de ces trois ordrcs tl'indications, la pre- miere est quelquefois renduc extremement difficile, et mfime impossible , par I'etat materiel de la peinlure , devenue m^connaissable par I'altc^ration ou la dispa- rition complete des coulcurs : partout , notamment ou I'argent melallique avail ete appliqu6 , I'oxidation lui a substitu6 une teinle grisatre qui a reagi sur les cou- leurs qui lui etaient superposees. La confusion qui en resulte est surtout remarquable sur les lies Britan- niques, par lesquelles nous avons a commencer notre relev^.
Trois ecussons , I'un en losange sur I'lrlande , les deux autres cai'res sur I'ficosse et I'Anglelcrre , sont indecliiffrables ; le gris noiratrc , baveux et confus , qui en marque la place, nous revele que le champ en etait uniformement d'aigent. Avec beaucoup d'alten- tion , on entrevoit sur celui d'Anglelerre la trace d'une croix de gueules, et en redoublant d'efforts on par- vient a croire possible Texistcnce d'une croix semblable dans I'ecu d'Irlande. Quant a celui d'Ecossc , on aper- coit quelques vestiges de vermilion, sans possibilile aucunc de deviner a quelle figure il etait applique , mais avec la certitude cependanl qoe ce n'etait point une croix.
( 71 ),
En France, on voit le dessin figuratif de trois grandes villes, ayant chacune leur drapeau, savoir : Paris, qui porte d'or plein ; une seconde ville dont le nora parait oubli^ et que Ton peut supposer repr^senter Tours , avec le pavilion d'azur charge d'une fleur de lis d'or; et Avignon, ou flotte une banni^re de gueules a deux clefs d'or passees en sautoir. Un quatrieme dra- peau, d'azur a la fleur de lis d'or, s'eleve aussi pres du nom de Narbonne.
EnEspagne, un grand ^cusson, tenupar un person- nage couronn^, occupe le centre de la Peninsule ; il est ecartel^, aux premier et quatrieme grands quarliers, contre-ecartele en sautoir, le chef et la pointe d 'or a trois pals de gueules pour Jrogon; sur les flancs, d'argent a I'aigle eployd de sable pour Sicile; aux second et troi- sieme grands quartiers, contre-dscartele aux premier et quatrieme d'argent au lion de gueules pour Leon, aux second et troisieme de gueules au chateau d'or pour CastiUe. — La figure d'une eglise signale Saint- Jacques de Compostelle; colle d'une ville se voit a Valence et a Barcelonne. Sur la premiere floite un drapeau ecartele aux premier et quatrieme d'argent plein, aux deuxi^me et troisieme de gueules a deux fasces , dont le metal reste indetermin^ , attend u que , sans etre blanches, elles n'ont point une leinte jaune assez prononcee pour qu'on les disc d'or. Sur Barce- lonne flotte 6galement un pavilion ecaitel^ aux pre- miers et quatrieme fasce, a ce qu'il semble , de qualre pieces , disposees dans I'un des quarliers de couleur a m^tal , et dans. I'autre de metal a couleur : le mt^al , incertain comme a Valence, la couleur de gueules; aux second et troisieme quartiers le champ est fran- chement d'argent, a la croix de gueules.
( 72 )
En Portugal, on remarquo la figure de doux \illes , I'une pour LiSBONNfi , I'aulrc pour Porto-Gallo ; sur toules deux est aibor^e unc banniere d'argent a cinq tcussons pos<is en sautoir, a la bordure de gueules; les emaux et autrcs details que nous ne blasonnons pas ne sent point exprini6s.
Panni les grandes iles de la Medilerranee, Mnyorqiio est pcinte tout entiere d'or pale de gueules; au centre de la Sardaigne est un ^cu carrii d'argent a trois pals de gueules ; au centre de la Sidle, I'ecu ecartele en sautoir d'Aragon et de Sicilc.
A I'origine de I'ltalie , Gi.M.s et VuMsii sont reprti- senlees, ainsi que nous I'avons dcja dlt, par des dessins beaucoup plus grands et plus conipliquos que lous les autres , la mer elle-raeme baignant de flots d'azur 6tin- cel^s d'argent le pied de leurs edifices, au-dessus des- quels se deploicnt leurs pavilions respcclifs. Mais tandis que celui de Genes montre clairement sa croix de gueules en champ d'argent , celui de Venise ne laisse plus apercevoir aucun vestige reconnaissable du lion de Saint-Marc.
A'u N. du Danube , quatre ligures de villes sont ac- compagnees des noms de Santovito, Baochi, Lio et Caaiadia , se succedant d'O. en E. , sans aucun pavilion. Sur le Danube meme , trois figures de villes sont de- signees par les noms deZALRA, CIVITATI BvDA , Ct CIVI-
TATi BiciNA , avec qualre jiavillons, dont deux pour Bude, tous les quatre scmblables, offrant un champ fasce de gueules et d'argent de six pieces, les cinq der- nieres adextrecs d'azur.
Sur la rive illyrienne de lamer Adriatiquc, Singula nous montre son drapeau de gueules au sautoir d'or , paili d'argent. A Zara nolle un pavilion d'or charge
( /;^ )
d'un besantd'argont crois6 de gueulos. Ragosi osl dis- tlngud'e par une figure de ville sur laquelle est arbore un pavilion ticartele d'azur etd'argent. Puis on voit sur Dorazo un pavilion do guoules a I'aigle a deux teles eploye d'or ; du moins nous semble-t-il que telle est la signification du dessin grossier que nous y apercevons.
En Gr^ce, disons plutot en Turqulc, comraencent a se presenter a nous les pavilions musulmans , tous ou presque tous charges du croissant caracterislique , mais diversifies entre cux de couleur , peut-etre par la seule fantaisie du peintre, Dans tousles cas, ce croissant est constarnment toume , c'est-a-dire ayant scs cornes dirig^es vers le mat de pavdlon : nous faisons ici cette observation une fois pour toutes, afin de nous dispenser de le repetcr en blasonnant successivement tous les drapeaux ou il est figure. Nous dirons ainsi tout sim- plement que Salonichi porle d'argent au croissant de gueules; Christojwli , de gueules au croissant d'or; Coslantinopoli , d'or au croissant de gueules ; Moncasiro, sur la mor Noire , de gueules au croissant d'or.
Puis nous arrivons a Cafa , qui arbore encore le pavilion genois, d'argent a la croix de gueules; et de la nous passons en Asio. Nous retrouvons a Locopa la banniere d'or au croissant de gueules; mais a Sauas- topo/i , le champ de gueules a la barre d'or accompa- gnee de deux croissants tournes, du meme. A Tribi- sonda ct a Jerisonda flotte un etendard de gueules a la croix d'or. Puis recommenccnt les croissants : Lerio porte d'argent au croissant de gueules; Lalll , do gueules au croissant d'or; Sinopi encore d'argent au croissant do gueules. Puis vicnt Castel/i, portant, sur un champ dc gueules, non plus un croissant d'or , mais ccllccspece d'eloilc connue sous la denomination dr
( n )
sceau cle Salomon. Immcdialemcnt apres , Pondirat porle d'or au croissant dc gueules, et Carpi da gucules au croissant d'or. Enfin , nous retrouvons a Scutari I'elendard de gueules a la croix d'or.
Dans I'archipel , Chio est peinle tout enti6re d'ar- gcnt a la croix de gueules ; plus loin Rhodes est peinte 5 son lour de gueules a la croix d'argent.
En reprenant, sur la M6diterran6e, les rivages de I'Asie-Mineure, nous y trouvons successivement3/Mm, qui porte de gueules au croissant d'or ; Sntnlia , qui porte d'argent au croissant de gueules; et enfin lo Corco , dont Ic pavilion d'azur n'olTre plus d'autre ves- tige des croiseltcs d'argent dont il <itait scm6 , que d'inappreciables parcelles de mdtal qui se laissent en- core deviner plutot qu'apercevoir.
En Syrie , nous rencontrons a Damas une figure de ville surmont»^e d'un drapeau d'or au croissant de gueules. Trois autres figures dc villes, sans aucun pa- vilion, nous slgnalont Jkrusai.em, Betania et Nazaret. Non loin de la est roprdsente le mont Sinai avcc le monastere de Sainte-Catiieri>e, accompagncs de cette legende : « Mont Sinai donde Dio donao la lege a » Moises es lalcappela ( sic ) de la biata Santa Ciate- » rina martora » , c'est-a-dire, mont Sinai, ou Dieu donna la loi a Moise , et la chapcllc de la bienheu- reuse sainte Catherine martyre.
Entrant en Egyjjte , nous trouvons d'abord.'aux deux cotes du Nil, la figure de deux grandes villes, I'une pour Lo Cairo ue Babilona , I'autre pour Alesanbria, et au-dessous une grande tcnte reluisante d'or, d'azur et de gueules, sous laquollo est dessinci dc profil le buslc d'un prince coilTe dune sortc de turban , avec cclte Idgcnde : « Aqucsto proovencia singorigia lo gran
( 75 ) » soldano de Babilonia, infin a la casa santa de Jero- » salem , » c'est-a-dire , le grand sultan de Babylone ( <^l'i^g>'pte ) gouverne ce pays-ci jusqu'au saint temple de Jerusalem.
Sur la cote barbaresque , une flamme de gueules au croissant d'or est arboree uniform^ment aux quatre ports de Caroberio , Carlo , Cwita-Luco et Bonandria , qui se succedent d'est en ouest; plus loin, sur ceux de SiU'ca et P. Magra , flotte , au bout d'un mat de pa- vilion , une sorte de double banderolle blanche frang^e a ses exti-emites , travers^e de deux ou trois raies dont la couleur n'est pas indiqu^e. A Tripoli, nous trouvons a la fois la figure d'une grande ville et un grand pa- vilion (icartele , au premier et quatrieme contrecartel*^ de Castille et de Leon , au second et troisieme conli-e- cartele en sautoir d'Aragon et de Sicile : on voit que I'ordre des quarticrs est ici inverse de celui que nous avons observe en blasonnant I'ecu peint au centre de I'Espagne. L'ile de ferlji porte simplement d'or au croissant de gueules. A Tunissi se retrouve la figure d'une grande ville, surmontee d'un pavilion d'argent au croissant tourn^ d'azur, adextr^ de meme. Sur Bona flotte un pavilion dont le champ de gueules est charge d'une figure d'or assez difficile a determiner, et qui nous paralt ressembler a une arbal^te. A Mongia , qui est Bougie, et a Orana, so reproduit uniforme- ment la figure d'une grande ville, surmontee aussi uniform^ment do la grande banni(ire d'Espagne telle que nous venons de la signaler a Tripoli. Enfin , a I'ex- tremite de ce littoral. Septa et Tanger arborent cole a cote le drapeau de Portugal.
Dans I'ocean Atlantiquc , on remarque , parmi los ilos Canaries , celle de Lansa/of, jiGintc tout enlierc
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ilargonl a la cioix de gueulcs. Madero osl appelcc cle ton noin modernc in Matera.
Dans rint^rieur de I'Afrique , au sud de I'Atlas , sc succedcnt d'ouest en est les figures de huit grandes villas dispos6es sur deux rangs , savoir, le long de I'At- las, C1VITA.-C111BER, CaviTAT-BuDA, Tasich, et Calbaidi; et le long du bord inferieur de la carte, Civita-Te::at, Civita-Meca, Nuchi, etSuDEcui. Entre ces deux rang^es de villes sont peintes trois grandes tentes , sous cha- cune desqucUes est profile le buste d'un monarque coilTe du turban ; la premiere de ces figui'es, a gauche, est seule barbuc; imni(idiateinent au-dessous est ccrite celte l(igendc : « Aquista proovencia singorigia aquesto » rei de Genia, luqualle tieni la mina de lu or, mollo » poteros, » c'esl-a-dire, cetle contree a pour seigneur ce roi de Guinee , lequel possede la mine de Tor, ct est tres puissant. — La seconde tente, placee a peu pres sous le meridien de Bougie , est accompagn^e de la legende que voici : « Aquesta proovencla singori- )) gia questo rei de Nubia lo quale de continoi fa » gucra cum lo rei de Organia, » c'est-a-dii-e , cette contree a pour seigneur ce roi de Nubie , lequel est continuellement en guerre avec le roi d'Organa. — Enfin la troisieme tente, placee sous le meridien de la grande Syrte , est acconipagnee d'une derniere le- gende , ainsi concue : « Aquesta proovencia singorigia » aquesto I'ei appellato rei de Ilorgania »,c'est-a-dire , ce pays est gouverne par ce roi-ci, appcle roi d'Or- gana.
Voila le releve completdes indications quele docu- ment gdographique soumis a notre cxamen presente pour nous aider a on delcrmincr la date ct en carac- leriser la faclurc. Quelqucs imperfections s'y rcncon-
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trent qui nc doivent point rious arrelcr; I'onussion de certains details dansl'ecu de Portugal , le chainp d'ar- gent laisse en Sardaigne a I'ecu d'Aragon , Ic nonibre incomplet des fasces dans celui de Ilongrie , la substi- tution meme de fasces aux pals d'Aragondans les ecus de Barcelonne et de Valence (cc qui peut tenir a une simple inversion du mat de pavilion ) ; ce ne sont la que des negligences ou des meprises qui ne peuvcnt offi'ir de difliculte serieusc a un ojil exerce.
Des difficultes plus reelles rc^sultcnt de la coexistence relative de certains pavilions bienconnus, celui de Gfencs par excmple sur Cafla, en memo temps que celui d'Espagne sur Oran , Bougie ct Tripoli. On sail que Caffa , poss(^de par les Genois depuis plus de deux sie- cles , leur fut enlevee par les Turks Ic 6 juin 1/175 ; mais on sait aussi que les Espagnols ne prirent Oran que le 18 mai 1509, sous la conduile du cardinal Fran- cisco Ximenez de Cisneros; que Bougie ne fut prise par Don Pedro de Navarra , comte d'Alvelto, que le 8 Janvier 1510 , et Tripoli le 25 juillet suivant. Sans nous livrer ici a des hypotlieses plusou moins plausi- bles pour rexplication conjecturale de cette dilliculte , bornons-nous a poser en principe que la date la plus recente est la seule a laquelle il y ait intcret de s'attacber jDOur determiner la limile chronologique au-dessus de laquelle on ne doit point remonter, dans Fappreclalion de I'age du monument : or, de I'existence de la ban- niere d'Espagne sur Tripoli , il resulle forcement que notre carte est posterieure au 25 juillet 1510 ; voila u \ fait certain , qu'auc.une explication ne saurait ucarler ni modifier.
Quant a la limitc infcrieure en-dcga de ]af[uolle i! sorait deraisonnable de cliercbcr In dale de cdle cmlc.
( 78 ) nous ci'oyons la Irouvor suflisamnicnt indlquee par cc mcme ecu d'Espagnc qui \ient do nous fournir la liniite superieun.'. Malyie la defiance avec laquolle on doit admellre los arguments nil^gatil's, nous n'hesitons pas a considerer I'absence dcs armes d'Autriche dans I'ecus- son dont il s'agit, comme unc preuve manifeste que cet (icusson a ete dessine anterieurenicnt a I'avene- nient de Charles-Quint. La carte est done cllc-meine anterieure au 23 Janvier 151G, dale a latpielle Charles- Quint succeda a Ferdinand-le-Catholique.
Et niaintcnant , si nous reportons notre attention sur I'endroit ou se trouvait jadis ecrite la date de la carte , il nous sera perinis d'altaclior unc vaieur signi- ficative aux deux caracleres xi qui se laissent encore apcrcevoir comme derniers chifCres du milliisime ef- face; nous pensons done que ce millesime doit nalurcl- leraent se rcslituer en 1511. Telle serait en defmilivc I'annde precise de la redaction.
Les legendes romanes que nous avons transcriles nous paraissenl concourir, avec la jjlijsiononiio genti- rale du document, pour le faire classer parrai les pro- ductions de I'ecole catalane ; ce n'est toutefois ni dans les Etals de Terre-Ferme de la couronne d'Aragon , ni a Mayorque ou en Sardaigne que nous le croyons re- dige ; i'citude pal^ographique du mot qui dcsigne le lieu de confection nous semble exiger que ce nom soil lu Mesina , bicn que la syllabe mediano, surtoul la Jeltre s , n'ait laissc que dcs vestiges douteux ct difli- cilemenl percepllbles; le dialecte des legendes, mOle de formes italiennes et de formes espagnolcs, nous a parumililer aussi pour ccltc attribution.
Bornons la cettc Notice ; nous on avons assoz dit pour determiner la place qui doit olre assignee a la
( 7i) ) carte qui en fait I'objet, a la suite des monuments geo- graphiqucs du moyen-age, ct Ic degre d'interet qu'elle pr^sente. Notre tache ne doit point s'^tendre au-dela.
•A
Paris, ce (i decembre 184.^.
MoNSiEun LE President ,
Ay an I et6 dans le cas dc consulter la belle carte liy- drographique de la baie de Naples et de ses environs , ex^culee par le Bureau lopographique de cette capi- tale , sous la direction du savant M. Ferdinand Fis- conti, aujourd'hui nomme general inspecteur des insti- tuts d^ education militaire et da bureau lopographique, et qui a enrichi la bibliotheque de la Societe de geogra- phie d'un exemplaire de ce magnifique travail, je me suis apergu que la valeur des chiffres des sondes n'avait pas 6te exprimee , et me suis , en consequence , adresse a M. F. Visconli , pour obtenir cet element.
Je viens de recevoir la reponse du savant general . qui me marque que cette valeur est en pas et dixiemes dc pas , chaque pas etant la millieme partie du mille nautique dcGOau degre (nonagesimal) : ainsi le^a^ sera exactement de 1™, 85185, c'est-a-dire que bl^ pas ega- lentprociscmcnt 100"" ( le metro legal de France ).
J'ai pense , monsieur le Prt!!sident, que cette note pourrait devenir utile par la suite, pour les personnes qui consulteraient la carte en question, et c'est dans ce but que j'ai pris la llberte de vous I'adressej-.
Je suis avec le plus profond respect, monsieur le President ,
Votre tres humble cl tres dc\oue serviteur,
CoiMi n.
( 80 ) ()Lvn\r.i-s oFFrnTS a i.a soci/^tk. Scnnce du 5 Jani'ier 1844. I.\ir .1/. J. (!e licrfoii : Essai siir la topograpliio do Tvr. Paris, 1843, 1 vol. in-8.
Par la Sofiete asiatujue de Loiidres : Journal ol" the Roval Asiatic Society, n" xiv, Londres, 1843.
Par Id Socicte philosopkique ainericnine : Proceedings ol'
the Philosophical Society. IMiilaJelphia, 1843, 1 v. iii-8.
Paries cditetirs : Recueil de la Sociele polylcchnique,
novenihrc. — Kulleliii de la Soclete maritime , 0° ca-
hlor. — Journal des Missions evangellques, deccmbre.
Seance du 19 jaiwicr 1844-
Par r Acndetiue iinperiale des sciences de Saint-Peters- boiu-i'- : Memolres de rAcademic, 6' s6rie; Sciences malhematiques, physiques ct nalurelles, tome V, 1", I"" et S"" llvraisons. — Memoires presenles a rAcademic par divers savants, tome IV, 5' livraison. — Recueil des actes des stances publiques do I'Acad^mie, 1 vol. ln-4.
Par M. ylshbel Sinilk : Map of Texas compiled IVnni surveys recorded in the land oilice of Texas , and other oflicial surveys , hy John Arrowsmllh, London, 1841, Ifeuiile.
Par M. Gabriel jMfond: Voyage aulour du monde. Rlcrs du Sud , do la Chine et archlpcl de I'lnde , 1 15% 116% 121"^ et 122° llvraisons.
Par les editeiirs : Nouvcllcs annales des voyages , deccmbre. — Annales maritimes et colonlalcs , de- ccmbre. — Piocuell de la Soclete poly technique , d^cembre. — Memorial encyclopedlque , deccmbre. — Journal de I'lnslitut hlstorlque , deccmbre. — Journal des Missions evangellques, Janvier. — l/lu-ho du monde savant.
BULLETIN
PE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE
F/;vRiKn lS!ih.
PREMIERE SECTION*
Ml^.MOianS, rXTRAITS. AIVALYSFS F,T HAPPOHTS.
R^sumA d'lin -voyage a In iner Caspienne , pvn M. no^niMHE de hell.
Le voyage que je viens d'executer dans la Russie meridlonale embrasse toutes les contrees qui s'eten- dent depuis le Danube et les Carpatlies jusqu'a lamer Caspienne, etjusqu'au pied du vcrsant septentrional du Caucase. Le but do mes explorations a ete a la fois historique , geograpliique et scientlfique , et j'ai tache par des observations positives d'ari'iver a la solution de differentes questions de physique du globe dont se sont longuement occup^s et les geographes des temps anciens et les savants des temps modcrnes.
Apres avoir prelihiinairement etudie le Bospliore de Constantinople etquelqucs parties du littoral dela mer de Marmara et des cotes mf'ridionales dp la mer Noire.
I. FUVRIKR. 1. 6
( 82 ) je suis arrive a Odessa, ville qui est devenue le point de depart de toutes mes excursions. Je n'entrerai pas dans tous les details des nombreux voyages dont j'ai sillonn^ pendant quatre ans les provinces m^ridionales de la Russie ; je me contenterai de faire connaitre soramai- rement la nature des questions que j'ai trait(^es. Ce r«^sume suflira d'ailleurs a la Society , et la mettra par- faitement a meme d'appr^cier quelle peut etre I'im- portance de mes travaux et de mes rechcrches-
Je commencerai d'abord par la partic historique et g^ographique. L'histoire et la situation actuclle des divers peuples etrangers au sol de la Russie a natu- rellement excite toute mon attention. Certes, a cet igard, nul pays ne saurait pr(!!senter des etudes plus curieuses et une vari^te de families humaines plus in- teressantes. La, sur pr^s de six cents lieues d'etendue, se rencontrent toutes les races de I'Europc et de I'Asie . chacune avec ses moeurs , ses usages , son caract^re national, Allemands, Russes , Grecs, Armeniens, Bul- gares, Moldaves, Cosaques, Tatars, Kalmouks, Tur- comans , Persans , Indiens et Circassiens , vous y trou- vez tons les types ; et tous ces peuples , si divers d'origine et de religion, presentcnt , sous le rapport statistique , historique, moral et pittoresque , un spec- tacle eminemment remarquable.
Parmi les populations de la Nouvclle-Russie dont nous nous sommes occupo, nous citerons en premiere ligne les Tatars Nogais de la mcr d'Azow, tribu musul- mane perdue au milieu de la race slave , dont nous avons essa\ ^ de faire connaitre I'origine et l'histoire en nous aidant de leurs propres traditions ; puis los colo- nies allomandes , grecqucs, aa'meniennes et juives. •lent nous avons etudi^ la situation avcc desdoruments
( 83 ) autlientlques recueillis sur les lieux inemes. Nous avons ensuite insiste longuement sur le commerce de la mer Noire , ainsi que sur les ressources industrielles et agricoles de la Piussie meridionale , en indiquant avec soin la nature et I'iiriportance des relations eu- ropeennes et asiatiques qui viennent converger vers cette mer Noire si admirablement situee , et qui a servi pendant tant de siecles de principal v^hicule a toutes les productions de I'Asie centrale. A ces questions s'est naturellement rattachee la navigation des fleuves, et nous avons successivement examine le raouvement commercial du Pruth, du Dniester, du Dnieper, du Don et du Volga.
En sortant de la Nouvelle-Russie parl'orient, nous avons trouve sur notre route les Cosaques du Don, dont les institutions republicaines , Strange anomalie au milieu d'un pays d'esclaves, ont inspire pendant long- temps de sinenses inquietudes a I'empire moscovite. Nous avons visite la contree du Don a quatre reprises differentes , et nous croyons poss^der leur histoire po- litique , statistique et commerciale aussi complete que possible. L'oi'igine de ce peuple guerrier a donne lieu a une foule d'hypotheses. Nos observations physiolo- giques et nos etudes jetteront, nous I'esperons, quelque nouvelle lumiere sur une question qui a occupy un grand nombre d'historiens.
Du Don nous avons 6te joindre les rives du Volga . au point de contact des deux gouvernements d'Astra- khan et de Saratof. La, au milieu du desert, nous avons trouve Sarepta , le premier jalon qui ait ^te plante par la civilisation europeenne parmi les hordes nomadcs du Volga et de la Caspienne. L'etablissement de cette colonic de freres Moraves forme sans contredit une de >
( 8/i } pages les plus curieuses de I'liistoire de ces contrtios recul^es. Nous devons a I'obligeance des autorit^s su- p^rieures de la ville tous les renseignements possibles sur la fondation et les nombreuses vicissitudes qui, de- puisl765, ont accidcnte son existence. Enfin , apres avoir visite les colonies cosaques du Volga , nous arri- vames dans rancicnne capitale du Raptscback, une des grandes citds commercialcs du moyen-age. A Astra- kban nous attendaient naturcllcment d'importantes Etudes. L'bistoire commerciale de cette ville, la naviga- tion ancienne et actuelle de la mer Caspienne , les ^changes mercantiles entre I'Europe et I'Asie , I'in- fluence de la Russie sur le commerce de I'Orient , puis les grandes pecberies du Volga et de I'Oural, devln- rent tour a tour le but de nos investigations et de nos rocberches.
A Astrakban, j'organisai notre voyage a travers les steppes de laKalmoukie russe. Nous avions a parcourir tout le littoral de la mer Caspienne jusqu'a I'cmbou- cbure de la Kouma, qui devait etre le point de depart du nivellement que je eomptais efiectuer entre la mer d'AzoAV et la mer Caspienne. De 1^, en nous dirigeant vers I'occident, nous comptions traverser toutes ces contrees desertes qui s'etendent en suivant le Manitscb jusqu'aux frontieres du pays des Cosaques du Don. Ici plus de traces de civilisation et de colonisation euro- p^enne; pendant plus d'un mols, nous campames sous la tente , vivant de la cbasse de notre faucon ; et sur prfes de solxante lieues de distance , nous eiimes a por- ter avec nous de I'eau douce puisne au Volga. Nous arrivames ainsl jusqu'aux sources du Manitscb, oil le manque absolu d'eau et de paturage pour nos cba- meaux de transport nous forrant de revcnir sur nos
( 85 ) pas , nous primes la resolution de nous diriger mim(^- diatement vers le Caucase. Ce pi^nible voyage nous fit falre connaissance avec toutes les tribus nomades de cette partie de I'empire russe. Nous fumes a meme d etudier largement tout ce qui se rattache a I'histoire politique , intellectuelle , morale et religieuse des Kal- mouks , la horde la plus remarquable de ces steppes. A Wladimirofka, sur la Kouma, nous retrouvames la civilisation europeenne, representee par des vignobles, des fabriques de vin de Champagne et de belles plan- tations de muriers. Nous passames ensuite a cote de I'emplacemont de la cel^bre IMadjar, dont il ne reste plus le moindre vestige , et deux jours apres nous nous trouvames aux eaux minerales de Piatigorsk , au mi- lieu du Caucase , depuis longtomps le theatre d'une des luttes les plus opiniatres qui soient consignees dans I'histoire. Nous pen^trames jusqu'au dernier fortin de la vallee de la Podkouma , en recueillant tous les ren- seignements de nature a donner quelques notions bien exactes sur la guerre du Caucase , et I'importance po- litique et geographique de cette grande chaine de mon- tagnes qui isole compl4tement les provinces transcau- easiennes du reste de I'empire. En quittant Piatigorsk , nous traversames le pays des Cosaques de la nier Noire , tristes debris des celebres Zaporogues que Cathe- rine II eut tant de peine a reduire , et qu'elle fmit par coloniser sur les rives du Kouban pour les opposer au\ invasions des montagnards.
Enfm , api'es avoir longe les cotes orlentales de la mer d'Azow, nous retournames a Odessa par la voie de Taganrok, d'Ekaterinoslaw et de Kherson.
L'annee suivante, I'exploration de la Crinieo et celle de la Bessarabif? devinront les complements indispon-
"( 86 !
sables de mon voyage a la mer Caspienne et au Cau- case. La Tauride a ^t^ dans ces demicrs temps vlsit6e par un grand nombre de savants ; mais la plupart de ces voyageurs se sont exclusivement occupes ou de science ou d'antiquites. Nous avons cherch^ a faire disparaitre une lacune, en donnant des id^es positives sur r^tat actuel de la Crim^e et en faisant connaitre son commerce , son industrie , son agriculture et son importance , soit comme point politique , soit comme point commercial.
En Bessarabie , province moldave incorporee aux possessions russes en 1812, nous avons recueilli tous les documents relatifs a rhistolrc modorne du pays, les renseigneraents statistiqucs sur la population moldave, les colonies bulgares , cosaques , bohemiennes et alle- mandes , cnfin toutes les notions concemant les em- bouchures et les iles du Danube , et les villes de com- merce situ^es sur ses rives.
Quant a la partie scientifique de notre voyage , notre but principal etait la solution de la celcbre question de la fermoture du detroit de Constantinople et de I'an- cienne communication de la mer Noire avec la mer Caspienno. Cette 6tude nous anaturellemcnt conduit a I'examen geognostique de tous les terrains qui com- posent le sol de la Russie meridionale, a I'examen des flouves , rivieres , lacs et salines , et a d'importantes considerations sur la geographic g^n^rale du pays. Nous avons du egalement executor un grand travail geodesique dela mer Caspienne a la mer d'Azovv pour determiner non seulcment la difference du niveau . mais encore la configuration du terrain entre les deux bassins. Ce travail a d^ja (^te le sujot dun memoire lu a I'AcadtMnie des sciences par M. Arago o\ inscre dans
( S7 ) ies Comptes-rendus de rAcadeinio. Nos etudes se trou- vent complet^es par una carte a la fois geognostique et statistique, qui comprend tousles pays situes entre le Danube et la mer Caspienne , et dans laquelle nous avons donne des indications entierement neuves sur Ies contrees occupees par Ies peuples nomades et Ies co- lonies etrangeres. A la prochaine stance, j'aurai I'hon- neur de soumettre a la Societe une premiere epreuve de cette carte, avec une notice relative aux observations astronomiques et aux itineraires qui m'ont servi a la tracer. En tcrrninant ce resumd de mes voyages, je dois exprimer a la Societ^-dont j'ai i'lionneur d'etre mem- bre , combien je serais heureux si mes travaux pou- vaient obtenir son approbation. Je tiendrais d'autant plus a sa pr(^cieuse bienveillance que je compte proba- blement faire , dans le courant de I'annee prochaine , un nouveau voyage dans Ies contrees qui s*etendent au midi et a Test de la mer Caspienne.
Notice sur la carte de la Russie meridionale, faisant par- tie de la relation de mon voyage a la mer Caspienne.
La carte que nous aurons sous peu I'honneur de presenter, corapletement achevee, a la Societe de geo- graphic, comprend toute la partie de la Russie meri- dionale qui s'etend dcpuis le Danube et le pied des monts Carpathes jusqu'au littoral de la mer Cas- pienne, et jusqu'au-dela du versant meridional du Caucase. Notre cadre renferme ainsi 27" de longitude et 7° de latitude (1). Toutes ces contrees, sauf lespar-
(i) Du :i2<" au 49' Ae lonfjiiude et du 4i' au 49' 'le latihuic
( 88) ties inaccessibles tin Caucase, nous Ics a\ons parcoii- rues, sillonn6es dans tous Ics sens, a pied, a cheval, ou en voiture , pendant I'espace do cinq ann^es; et nous avons recueiili tous les documents , fait toutes les observations de nature a rectifier et a complt-tor nos connaissances si peu positives sur la geograpliie physi- que et historique de cespays, dont une grande portion se trouve encore liabitee par des hordes nomades. Les difficuhes ont cte grandes; nous avons eu a lutter con- tre toutes sortes deprivations, de fatigues et de dan- gers au mihcu des deserts de la mer Caspiennc ; mais nous avions pour but la recherche de la verite, et ce but a ete pour no s le plus ferme et le plus prticieux des encouragements.
Les bases premieres de notre travail ont et6 natu- rellement les observations astronomiques les plus re- centes et les^lus authontiques. Nous nous empressons ici de faire nos remerciements anotre savant coll^gue^ M. Daussy , dont les recherches et les conscien- cieuses discussions nous ont ^t6 d'une si grande assistance. A ces observations sont venus se joindre nos itineraires, qui nous ont permis de faire d'im- portantes rectifications, et de donner un nouveau de- gr6 de certitude aux determinations de longitude et de latitude. Pour la Moldavie et la Valachie nous avons eu a notre disposition 6 observations ; pour la Bessarabie 10; pour la Podolie et la Rhivie h; pour la Nouvelle-Russie et la Crimce 32; pour le pays des Cosaques du Don 2 ; pour les gouvernements du Cau- case, d'Astrakhan, deSaratof 36; en tout 90. Nous avons en outre compart tous les travaux hydrographiques des marins russes et etrangers avec nos propres obser- vations , et nous avons ainsi determine la ligne de
( 89) configuration de la mor Noire et de la mer d'Azow.
En quittant les frontieres de la Turquie pour entrer en Russie , on rencontre sur sa route la Bessarabie, importante province sur laquelle la g^ograpliie ne pos- sede que Ics renseignements les plus inexacts. Outre les notions tres detaill^es que nous donnons dans notre relation, sur le regime des fleuves et des rivieres et sur les differentes iles du Danube , nous avons en- richi cette partie de notre carte de I'indication de 83 villages bulgares , de 19 villages alleinands, d'une colonic Suisse , de 8 villages cosaques et de 3 villages de Ziglianes. Quant a toutes ces ramifications imagi- naires des Carpatbes, dont les geograpbes ont couvert le sol de la Bessarabie, nous les avons fait disparaitre, pour les remplacer par un relief topograpbique con- forme a la verity et a I'aspect exterieur du pays.
Dans la Nouvelle-Russie, limitropbe de la Bessa- rabie, nos additions deviennent encore plus impor- tantes. Nousy avons fixe I'emplacement de 153 villages allemands, de 7 etabbssements armeniens, de 9 vil- lages juifs , de 2Zi villages grecs (1) et de 76 villages appartenant a des Tatars, autrefois nomades- La to- pograpbie du pays a ete ^galement pour nous I'objet de recbercbes toutes particuberes. Nous avons pris la bauteur de tous les points du littoral de la mer Noire et de la mer d'vizow, ainsi que celle des differents pla- teaux Stages les uns au-dessus des autres, dans la di- rection du nord. Nous joindrons a notre carte le profil matb^matiqucment exact des celebres cataractes du
(r) Aucuiic carte russe ii'a |iisf|u'a c |uui f.iit iiiuntlc.n de tons fes etablissnncnts etra.),n.,.s si i ,.|..,itiuU |,.,„i la miogiapliie poli- tique du pays.
( 90 ) Dnieper, ainsi que la pento des difTerents fleuves qui viennent ddboucher dans les raers de la Russie meri- dionale.
Dans le gouverneinent du Don, nous avons indiqu^ le campement de 15,000 Kalinouks nomades, incor- por6s aux Cosaques depuis environ soixante ans. Pour nos Etudes topographiques , ellcs se sont sp^cialement dirigees sur les parties qui s'etendent entre le Don et le Volga, c6l6bres par les projets de canalisation de Pierre-le-Grand , et sur le cours et les steppes du Ma- nitch , riviere presque inconnue , le long de laquelle nous avons execute notre nivellement par stations, pour d(!!terminer la dilTerence de niveau et la configu- ration du sol entre la mer d'Azovv et la mer Caspienne. Nous arrivons ainsi dans les vastes deserts compris entre les bassins des deux mers cities ci-dessus. Ici ab- sence complete de renseigncments cartographiques et historiques : depuis les limites du gouvernement du Don jusqu'au Volga et a la mer Caspienne , les cartes russes, elles-memes, les plus etendues, ne nous ap- prennent absolument rien , et les erreurs les plus fla- grantes ont et6 accreditees jusqu'a ce jour par tous ceux qui ont public des cai'tessurces parties orientales de I'Europe : nos travaux ont fait disparaitre toutes ces lacunes. A force de perseverance et d'explorations multipliees , nous sommes parvenu a assignor les campements d'hiver et d'et6 , a toutes les tribus no- mades du Volga , de la mer Caspienne , du Manitch , de la Kouma et du Terek. Pour les Ralmouks seuls, nous avons tracd les lignes de partagc de plus de 1000 mvriametres carrcs. Viennent ensuite 3,838 fa- milies turcomanes , 8,432 tentes de Nogais, et puis qiielqiies autrcs petites tribus musulmanes, debris do
( 91 ) Tancien khanat d'Astrakhan , ilont nous avons egalc- ment incliqu6 la position et la marcUe des emigrations annuelles. A toutes ces indications enti^rement nou- velles se joignent celles des nombreux lacs sales, des sa- bles et de tons les accidents de terrain qui peuvent in- teresser la topographic. Nous croyons ainsi avoir fourni a la science geograjihique toutes les notions qu'elle peut exiger sur les contrees qui s'etendent au nord de la grande chaine du Caucase.
Un autre complement a notre carte est le Caucase proprement dit. Ici nos travaux se bornCnt a des re- cherches scientifiques sur la constitution physique des montagnes et a I'etude de documents qui nous ont 6te fournis sur les lieux. C'est en nous basant sur ces der- niers que nous avons trac6 la delimitation entre les differentes tribus du Caucase.
Notre travail se termine enfin par les indications g^o- logiques qui nous appartiennent entierement. II suflira de Jeter un coup d'oeil sur notre carte pour connaitre immediatement la nature des differents terrains qui composent Ic sol de la Russie meridionale, et pour comprendre les habitudes nomades de toutes ces po- pulations asiatiques sur lesquelles la civihsation eu- ropeenne a ete jusqu'a ce jour impuissante.
Telle sera, messieurs, la nouvelle carte de la Russie meridionale, dont nous esperons pouvoir, avant un mois, faire hommage a la Societe de geographic, qui a toujours si noblement encourage les voyageurs qui viennont lui apporter les fruits de leurs laborieuses explorations.
H. HoMMAIKE DF. Hi:M,.
( ^2 ) NOTICE
Sur le dessecheinent de la mer ue Haarlem , contenant un expose rapide de la parlie /listorifjiie et hydrnnUcpie, ainsi (iiie dii probVeine touchant les tnachines hydniu- liques a applupier atix epuisenieuls , par M. J.-G.-W, Merkes.
( Ailicle cuminunifm'- pai M. JOMARD (i).)
I.
Sur rttiit jhnsr et ucttwl de la mcr tie Haarlem et du projel de dessecheinent.
La mer de Haarlem n'existc , pour ainsi dire , que depuis le commencement du xvi' siecle ; n'ayant en- core, enl'ann^c 1506, tout au plus, que A, 000 arpcnts du Rhin de supcrficie.
D'apres une carte, que Ton trouve dans la chronique liollandaise, de Simon van Leeuwen, on marchait alors a sec de Rhynzaterswoude a HUlegom.
En 1531 , la mer de Haarlem contenait une supcr- ficie de 6,585 arpents (5,607 hectares.)
En 1537, les geometres Maarlen Cornelisz , Symon Meeusz et Jacob Synionsz nivelerent la dilTdrcnce du grand reservoir d'cau de Rhynlnnd , savoir, la mer de Haarlem avec la mer dii i\ord , et trouverent une diffe- rence assez marquante, surtout avec le reflux ou ma- rine basse : le premier proposa I'ann^e suivante, 1538, de conduire les eauxde la mer dc Haarlem, souterrainc- ment, a travers les dunes, par le moycn de tonneaux;
(i) l'cii(l;iiil line cxruisioii i ii llollamle, on iS/)! ,j'ni < ii I occa- sion d'examiner le reinarquable iiavail du dcssechenienl de la mer de lla;ii'lcni, et j'ai sigiiale a inoii relour r<-Ionnaiiti' aciivitc avoc la- <Hiell<' maiiliail ccltc f;ratidp opcialion. AyanI demariilr a M. le liaron Vail Capcllcii dcs nnies a cc siijct, il a bicn voulii in'a.lrcssei icll<; .Xotirc. .1 — 1'.
( 05 ) mals les grandes d^penses rendirent ce projet inexecu- table.
Uepuis le 26 mars 1571-1572 on executa, comme premiere ^preuve , mais sur vme trop petite ^chelle , una coupure a travers les dunes, a h'ahvy/c , laquelle lut ouverte le l"avril 1572 , mais peu apres ensablee.
En 1591 , la superficie de la mer de Haarlem s'6tait deja agrandie jusqu'a environ 10,000 hectares, et c'est principalement vers la fm du xvi= si(!;cle que les villages de Fifhuizen^ Nieiiwerkerk , de Ryck et plu- sieurs hameaux ont ete engloutis.
En 16/il, Jan Jdriannz Leeghwater, ou simplement Jan Adriaansz , ingenieur et constructeur de moulins, donna un projet complet sur le dessechement de la mer de Haarlem, sous le titre : Het Haatienimer-Meer- Boek. Leeg/uvater \ou\ut employer 160 moulins a vent pour ce dessechement. La mer avait alors une superfi- cie d'environ 1Z|,000 hectares, et son projet montait a 3,600,000 florins dcsPays-Bas (7,560,000 francs).
II existe a present une 13* edition de I'ouvrage de Leeglnvater , de I'ann^e 1838 , commentee et enri- chie de notes et d'observations , jusqu'aujourd'hui, par M. JF.-J.-C. imn Hasselt.
En 1727, lorsque la 10° edition de I'ouvrage de Leegliwvater parut , le celebre ingenieur Cornells Felsen ecrivit ses Ohservtitions tonchant I'etat actiiel da Hanr- lemmer-Meer, dans lesquelles il fit triompher le pi'ojet de leeglnvater, en demontrant les eri-eurs de son an- tagoniste Caleveldt.
Cette mer avait deja atteint presde 17,000 hectares.
Cette meme annee, les geometres Balstra, Cnu/uins et iSappen presenterent de nouveau un projet de de- rivation, avec ecluses, du cote de Katwyk, ainsi que dc dessechement d'un grand fragment de cetle mer.
( 9A ) Lesdits inirt'n'u'urs prouvt-rent, dans uii ni^moiie de 1742, que lamer de Haarlem gagiiah tous les ans envi- ron 60 hectares, ayant englouti depuis doux siecles plus de 10,000 hectares.
lis redlg6rent un memoire siiivi d'linprojet dedess^- chement et d'uue estimation (montant a la somnie de (i, 600, 000 florins des Pays-Bas) , oil ils prouverent que le retrecissement du reservoir de Rhynland, moyen- nant des ameliorations dans les canaux de decharge pour la mer du Nord, n'^tait qu'avantageux , au lieu d'y voir du danger, corame on le pretendait.
En '17/i2, Co/irar/us Zuitbag van Koesfelt , celebre medocin a Leide , publia un nouveau projet de desse- chement , qui differe avec les precedents sous le rap- port de I'cndiguement, comptanty apporter de grandes economies. II comptait avoir besoin de 120 moulins a vent pour 6lever I'eau, et calcula son projet, y coui- pris les ecluscs a Kalwyk, etc.dc h a 5,000,000 de florins en bloc.
En 1745, la mer de Haarlem avait attcint une su- pcrficie da pen pros 17,000 hectares, tel que Ton voit ces empictements dans la petite carte de I'ou- vrage de Lecs^hwatcr, 13' edition, page 0.
Cette carte marque les empietements successifs des annees 1531, 1591, 1610, 1047, 1087, 1740, et depuis ce temps les bords se sont encore considerublemenl ^tendus.
Le projet de dessechement que Goiidrinan et Klin- kdtberg presentircnt dansun memoire, de 1769, mon- tait a 9,000,000 dc florins des Pays-lias.
Dans un memoire de 1771, Dionysitis van de ^Vyn- persse , charge dun rapport sur tout ce qui avait ete propose depuis 1767, demontra les immenses avan- tagt s dun proui]it dessechement, aver iino longue de-
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rivation dans la mer du Nord, a Kalwyk, comme me- sui-e inevitable.
Depuis 1772 jusqu'a 1797 on n'a fait que depenser des sommes immenses a rentretien des rives de la mer de Haarlem, sans maitriser, en proportion de ces sacri- fices, le mal que ses eaux ne cessaient de causer.
En 1802 , il parut un ouvrage, dun interet majeur , de j4.-P. Twent, intitule : Bedenkingen en Aaumerhin- gen over den Waterstaat van Rhjn/and en over eene Uit- watering te Katwijk, Get ouvrage reveilla le projet de derivation dans la mer du Nord. Sur la proposition du directeur-g^neral des ponts et chaussees, C. Brunings , une commission formeo de MM. F.-JV. Conrad, J. Blan- ken Iz, et Kros, fut chargee d'examiner I'etat des cho- ses,et elle s'enacquitta avec bonheurdans des comptes- rendus Lmprimes, du 16 mars et du 2 avril 1802, ou il fut prouv6 que I'ecluse a Katwigk etait executable sans danger, et, en consequence, un arrete du gou- vernement, du h mai 1804, ordonna que la derivation h Katwjk serait rea/isee.Le projet, estim^ a 725,698 flo- rins des Pays-Bas, fut execute : la premiere pierre fut posee le 21 aout 1805 , et I'ouverture du canal eut lieu le 21 octobre 1807, avec un succes satisfaisant.
L'utilite de cette grande ceuvre etait manifeste; cc- pendant on regrettait de ne pas avoir donne, de suite, au canal de d^iivation, une plus grande capacite aver une rectification, comme I'avait desire ladite commis- sion; travail qui avait ete ecarte par des motifs d'eco- nomie, mais qu'en 1838-18Z|0 on a du ordonnor.
Apresce bel ouvrage, le celebre ingenieur ^. Blan- ken I- fut charge ofTiclellement , en 1808, de retou- cher les projets de dessechcmcnt et den presenter de
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nouvcau une estimation; cpllo-oi monta k 8,000,000 df llorins.
La Soclc^te do Haarlem, le baron dii Tour, Ic baron i>an Lyndeii, Roil, Repelaer van Driel ot Engelman con- tribuercnt par leurs talents a la realisation da projet de dessecliement, mesure d6sonnais indispensable.
Le baron F.-G. van Lynden i)an Uemmcn ecrlvit, en 1821, son ouvrage , intitule : Verhandeling over de droogniating van de Haarlenimer-Mcer , accompagne de quatre cartes et une planche; CEUvre consciencieuse, dictee par un vrai patriolisme et amour du bien public. II y demontre que le dessecliement , a peu pres tel que Leegliwaicr I'avait projete, 6tait le seul re- made u lant de maux.
Son projet de dessecliement, executable en 21 mois, monlait a 7,000,000 de llorins.
Ce bel ouvrage, avec celui de Lcegfuvater, dispense de la lecture de beaucoup de brochures et memoires qui ont ete ecrits sur cette matiere.
Enfin le gouvernement comprit que le desseclie- ment de la mer de Haarlem est une de ces entreprises larges et g^nereuses auxquellcs los ])rinces doivcnt etre jaloux d'attacher leur noin; etvoulant mettre fin a cet etat de clioses, do plus en plus oiiereux et pericli- tant , nomma uno commission , |>ar son arr6t6 du 7 aoiit 1837 , pour lui soumettre , avant le l"novembre de la memo annee, un rapport sur I'etat du projet, avec une estimation ; la connnission remplit sa mis- sion, dans un comptc rendu, du 2Z| oclobre 1837. Cette commission se composa alors comme suit : President : //. FAvyl;. Membres : Jonkheer W -P. Bar- nacrl van Bergen ^ M.-G. Beijcrink , C.-J. de Bruyn
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Kops , Jonkheer L,-A. Gevaeits, P.-F. Griiuvis, Jonk- heer D. Hooft, Iz, D. Merit z , P.- A. du Pui.
Le pi'ojet de dessechement est lvalue a 8,000,000, en comprenant le Spieringineer dans Tendiguement, ainsi que ZiOO hectares a expropiier.
Le dessechement se ferait par 79 mouhns a vent et 3 machines a vapeur, chacunc de la force de ZiO chevaux. Mais nous verrons plus loin que , pour ce qui concerne les enginsliydrauliques, on afaitsubir quelques modi- fications salutaires a ce projet.
C'etait dans la session de la deuxi^me chambre des fitats-Gen^raux, du 12 decembre 1837, que le projet de loi touchant le dessechement de la mer deHaarlem, concu en 5 articles, fut present^ avec un nieraoii'e ex- plicatif.
Apres un mur examen et quelques debats, la loi a passe , dans la session du 2 avril 1838 , avec une im- mense majority de voix.
Le 6 mai 18A0, la premiiire main a 6t6 mise aux ou- vrages pr^pai'atoires du dessechement, en presence des hautes autorites de la province.
La rectification et I'elargissement da canal de deri- vation vei's Katwyk viennent d'etre acheves en 18^0.
Par la loi relative au dessechement de la mer de Haar- lem, on se reservait qu'un examen ulterieur ferait deci- der si I'^puisemcnt des eauxs'op^reraitpar desmoulins a vent et des machines a vapeur a la fois, ou uniquement par ces dcrnieres. Un arrets du 21 novembre 18Zi0, n° 27, ordonne que ce dessechement sera eflectue par la impt'iir, comme force motrice.
La commission se composa, en 18Zil, commo il suit :
President : Jonkheer D.-F. Gevers unii Endegeest. Membres : Jonkheer W.-P. Ihnnncrl ihiu lioigen , I. pfivniEK. 2. 7
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J\l.-(r. beijeriiick , i.-J. da linnn Knps- , II. fuvyk , IV. -K. I'cin Cemiep, Jonkliecr L.-A. Gcvacrts, P.-F. Crimvis, Jmiklioer D. Hoosl , Iz, G.-P. luin Oii- teren, A. Lipkenx, G. Simons, P. -J. Ackennans , J.-G.- If". Merkes,J. Ewyk (Amannensis).
li.
Qitelqucs annufatiuiis poitr- faci/itcr l' intelligence dii projet
en e.recntioH.
Pour bien jugor du ])rojct que I'ou execute dans ce moment , il taut absolumcnt considerer la mer do Haarlem en rapport avec Ics riches polders y attenants du Rkynland et de Woevden. Aussi verrons-nous plus loin que, vu I'encaissement du Rhrnland, par rap- port a la hauteur dcs eaux de la mer et des rivieres, I'ecoulemenl vers la mer du Nord ct du Nord-Ouest peut y porter obstacle pendant des jours entiers.
Mynland et Woerden, avec leurs prairies endigu6es ou polders , lacs , mares ct marais , ont une superficie de 123,500 hectares (dont 15,200 de mares dessechees, el 10,000 hectares en losses et canaux) : la hauteur ou cole moyenne est de 0,"'60 a 0"',70 — AP (1). Ordinairement, a 1 metre — AP, le vcen (tourbier) commence , et , par consequent, a pen pr<l>s 0",/iO de bonne terre argileuse formant Tc^corce sup(5!rieure; ensuite , a f\ met. — AP, profondeur moyenne de la mer do HacuJeni , on atteint la couclie de terre glaise , excellenle pour I'agriculture.
Aussi, les nlvellcmenls, sondages ct rouillesde 1751, sont peu diffeiYnts de ccs resultats ; car on trouvait
(i) AI'. s'ecrit par abrevinlion pom- .■^Dc/ov/duKc/ic Pfil., f^t.Tiil l<* \trn de lY-rhellc Ci,' Amsterdam , |>l,in liorizontnl ct dc <;omp;ir:iis()n , s'arupnlaiit nvci- la liaulPiir nioycmie ties canx de la incr.
( ^ )
_|ue le niveau (maoiveld) des terrains attenants a la raer de Haarlem (itait gc^jn^ralement de 0'",65 — AP , que I'argile ou la terre grasse se trouvait a 3"", 75
AP. ; quo Ics tcx-res consistaient , jusqu'a cette coucho
argilcuse , en une matiere tourbcusc , mSlee de sable , de 0'",55 a 0'",94 de hauteur ; puis, 1"\90 a 2 ",33 toui'bier ou tourbe vaseuse.
Ces rdsultats font voir quo le terrain n'est pas favo- rable pour I'assiette des endiguements, qui demandent beaucoup de soin, de precaution, des talus fort doux et executi^s sans precipitation dans le travail, pour que le relrecissenient (inklinking) des terres puisse se former. Les opinions sont partagees au snjotdes terres que la mer de Haarlem a rong^es , depuis des siecles , sur ses bords. On pense assez gentisralement que les eclusesde d(^cliarge de Hnlflvegen, KatwykeiSpareii'lam, forniant les trois grandes communications avcc 1'} et la mer , pendant des temps orageuxet des vents violents du S.-E., en auront nourri la mer, ainsi que D et le Spaanie , qui semblaient porter quelques traces de ces depots ; mais il en est restc unc bonne partie dans le lit meme de la mer de Haarlem , y formant cette cou- che d'argile si 6mlnemment vegetable.
Une autre question, assez naturoUo, a souvent ete agitee , savoir : si cette etendue d'eau n'avait aucune communication souterraine avec la mer du Nord, a travers les dunes, qui forrnent la une assez etroite se- paration entrc celte«?r/et la mer de Haarlem, comme rntre elle et 1'} , Ton a pense aussl qu'il pourraity avoir des sources abondantes, dlfficiles a tarlr. In pheno- mene assez g^n^ralement observe et constat^ , pour re- ronnaitre cessortes de sources, est que , dans ces en- (li'oits, il rosloflo grandes o;ivertnr(^s fwaklion) dans la
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glace qui n'a pas «^t6 prise ; mais cela n'ayant pas lieu ici (puisque la mer de Haarlem forme, pendant im hiver un peu ripoureux , une seule ^lace unie) , cetle crainte n'est aucuncment iondc^e; ensuite le sol ayanl <it(^ liablte, longtcmps avant sa submersion, Ton n'y connut jamais ces sources , et depuis il n'a pu s'en pratiquer, puisque I'eau n'est pas saumatro. Quand meme aussi , apres le dessechement , il surviendrait quelques sources , elles ne seront jamais assez considc^- rables pour ne pas etre dpuisecs de suite au moyen des canaux d'^coulement qui traverseront cette mer, et par les machines a vapeur restant en perma- nence.
La prevention que le dessechement , op6r6 avec ra- pidite, pourrait causer un df^gageraent de gaz ou miasmes , provoquant I'insalubrite, est encore peu fondee , parcc que cette cau ne baissera que fort peu par jour et que le terrain a d^couvert avant le temps de s'assainir, la v6g^tation y sera tr6s prompte ; il pourrait en etre autrement si toute la mer de Haar- lem se montrait spontan(^ment dessech6e et dans son 6tat de nudit^. Puis on reserve Ics parties les plus basses pour former et alimenter les canaux transver- saux et lateraux (verkavelingen) destinj^s a favoriserles communications agricolcs et commerciales, ou meme les poissons pourront se r^fugier.
Le reflux ou la mar^e basse ordinaire a Kntwyk , descend a 0'^,80 — AP. ; souvent meme, avec des vents d'E. , a plus d'un metre sous ledit point de com- paraison , tandis que le flux ordinaire ou la maree haute monte a 0",70 4-AP.; et dans des cas extraor- dinaires , accedes vents dti N. et du N.-O., jusqu'a
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2 met. ot plus au-dcssus du jilan de comparaison, ou le zero d'AP.
Le reflux ou la mar^c basse ordinaire, sur IT, >is-^- vis la mer de Haarh-w , descend a 0"',34 — AP., el avec des vents d'E., a 0",23 — AP.; le flux ou la haute maree ordinaire y montc de 0'",10 a (T'.lO H-AP, et avec des vents du IN. et du N.-O., environ de 2 met. +AP.
Souvcnt les vents causent des anomalies assez mar- quantes, par exemple, en hivcr, on obsei've souvent sur I'J la basse maree a 0,Zi5 met. — AP. Les oura- gans du 6 decembre 1815 , du 29 novembre et 25 d^- cembre 1836, venant du S. et du S.-E. , refoulaient les eaux de VY et de la mer du Nord, au point que les eaux y descendaient deplus d'un metre sous le re- flux ordinaire ; il arriva que les trois ecluses de f\<(1- njk , de Halfwegen et de Sparendn/n , qui servent pour decharger les eaux surabondantes du grand r(^- servoir de Rhpdand , continuerent de decharger les eaux pendant plus de 24 heures consecutives. En gene- ral , c'est le vent qui contrai'ie ou favorise de beaucoup 1 ecoulement des eaux, a raison de sa direction et de son intensity.
La hauteur commune du lac ou rdiservoir de Rhynlaud, pendant Thiver, est de 0'",29— AP. , et pendant I'^l^, 0"',80 — AP.; done lamoyenne est de 0'",5ii — AP.
Cette hautour est encore sujette a des variations fre- quentes; car pendant blendes hivers on a observe celle hauteur, a 0'",/i53 — AP. ; du 20-25 juin 1838, elle etait de 0"',59 — AP. ; en dectnnbre , elle est souvent a O'.AO — AP.; en septcmbre 1826, lors d'une longuo s6cheresse , cette hauteur etait moyennement , pen- dant tout le mois, de 0",92 —AP.
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11 \ a 2t)0 inuulins a \t'nt qui rejeltciit Its eaux sui- abondantes de Rhynland siu* son grand r^senoir.
L'entretion annuel de chaque moulin , avec le trai- tcment du conducteur on ineunier, s'<^value de 600 a 750 florins.
Le lit de la mer de Haarlem est !\ met. — AP.; la hauteur de I'cau , ou cote moyenne d'et6 (zomerpeil) de la mer dessechde, sera A'", 90 a 5 met. — AP.
Si nous disons que le lit de la mer de Haarlem est a h mi!'t. — AP. , nous entendons par la sa plus grande prolondeur; puisqu'une grande partie de cette mer est en pente, n'ayant, par la, pas plus de 3 met. de pro- londeur movenne.
L'endiguementde la mer do Haarlem a une longueur d'a peupr^s9 lieuesr= 50,000 m^t. Le canal de deriva- tion (voye7 la coupe sur la carte, ci-annex6e, du des- s^cliement actuel) a une largeur moyenne de 45 met. au niveau du AP; au lit, cette largeur est de 29 m^t. , la profondeur moyenne d'eau est de 3 met. ; de ma- ni^re que le lit dudit canal sera k peu pr^s de 3"", 70 — PA. La Crete de la digue, entre le canal et la mer de Haarlem est moyennement a 2"", 20 H- AP , et a une largeur moyenne de h met, , avec une pente du c6t6 de la mer, de 5 fois la hauteur, et du c6t6 du ca- nal, de 2 fois la hauteur.
Les vaisseaux peuvcnt faire voile sur le canal ou etre hal^s. La navigation sera au moins aussi prompte et moins dangereuse que sur cette mer, ou I'eau est sou- vent fort houleuse, et la navigation peu siire pour les vaisseaux de petites dimensions.
Lenouveau canal de derivation, ser^ Kativyk, a, en tout, une longueur d'cnviron 9,000 m6t. La moiti^ de cetlp longueur a une largeur de /lO m^t. et de 31'", 2
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au lit. Ij"aulre moitie, aboutisftant a la incr, a iin« largeur de 52 m^t. et de 43"', 2 au lit.
La profondeur de tout le canal est de 2°', 2,
Get ouvrage peut etre considtVre comme une grandc amelioration pour la d(^cliarge des eaux par les Aclases de Kativjk. Auparavant , cette derivation etait form^e par Ic Rhynbiirgsche vliet , de trop peu de capacite. La rectification de ce canal, tcrminee en 1840, est d'une influence majeure et eminemment avantageuse pour le nouveau reservoir r^tri^ci du Rhynland.
La mer de Haarlem , telle qu'on la desseche ac- tuellement (voyez la carte ci-jointe), y compris le Spir' ringnieer , contient 181,000,000 de met. caiT^s de superficie ; alnsi, prenantla profondeur de Zi mfet. (la- quelle surpasse de beaucoup la moyenne, que nous up supposions, plus haut, que de 3 met.) ; ce serait une masse d'eau a d^charger de 724,000,000 de m6t. cubes.
Le maximum de lexces de la pluie nicnsuelle sur r^vaporation , s'est elev6 , durant 98 ann^es d'observations a 0'",1657. En y ajoutant , pour la filtration, 0"',0343 , on pourra evaluer a 0'",2 >/ 181,000,000 (36,200,000 met. cubes) , le maximum de la cbarge d'eau, dans un seul mois; et comme il in-i- porte de lib^rer les terrcs mois par mois , et meme jour par jour, des eaux surabondantes, les moyens de de- charge seront proportionnes a ce maximum.
On a observe , comme moyenne dune quantite d'^preuves, que cliaque moulin a vent I^ve 60 met. cubes d'eau a la hauteur d'un metre par minute.
Encore I'exp^rience a-t-elle demontre que Ton no doit compter que sur 60 jours entiers par an, poui- Ic travail du moulin a vejil; dour on a pour I'annce ,
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24 heures X 60', X (30 jours, X 60 m^i. cubes, = 5,18/1,000 m^t. cubes d'eau , ^lev6s a la hauteur d'uu indtre.
Ordinaireinent on calcule, d'apr^sl'experience, que les moulins a vent ont besoin, pour la decharge an- nuelle dcspolders,de 30 jours entiers de 24 heures; et, vu que c'est la la raoitie du nonibre entierde jours re- quis qu'un moulin a vent est ccns6 pouvolr travailler, on dovra compter, commc resultat pour le desseche- ment annuel (drooghoudlng) par un moulin avent.sur 3,000,000 m^t. cubes d'eau, a la hauteur d'un mfetre.
IIL
Etat actueldu probleine, toxichant les machines hydraiili- ques a appliqiier aiix epuiseincnts des eaux de la m<'r de Haarlem.
La difficulte du probl^nie touchant le dess^chement de la mcr de Haarlem ne consiste pas uniquement dans les ipuiscments de ses eaux ; il faut , avant d'arriver au dessechement , aplanir d'autres diffi- cultes.
II n'est pas exact (ce que quelqucs ecrivains ont al- legud) de dire : « que I'execution de ce projet a tou- jours ete suspendue parce qu'on n'a pas trouv6, paries machines hydrauliques connucs, ni la puissance nile produit qui peuvent en assurer les succ^s avec assez d'^conomie (1). »
Une nation qui a d^ja desseche plus de 80,000 hec- tares a diff^rentos epoques ne devait certainemcnt pas
(i) Memoire sur le dvncchcmcnl dc In tner de HnarUin , pai lilau- rhet, Amsterdam, chcz A.-J.-V. Tetroode, 1827, paj;. 5.
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reculei' devant cette entreprisc , tant gigantesque qu'elle soit en effet; il ne lui manquei'a pas ties en- gins hydrauliques capables d'^puiser les eaux de la mer de Haarlem avec une ^conomle convenable.
Les frequents dessechements , dans ce pays, ont fait connaitre quelles machines meritent la preference et reunissentle mieux les conditions d'economie, de sim- plicity, de force et de stabilite ou permanence ; mais avant tout cela il a fallu songer auxmoyens pourmal- triser ces memes eaux dans la suite, ajires leur epui- sement , vu que la mer dessech^e se trouvera comme une cavit^ ouentonnoir, constamment entouree d'un grand reservoir d'eau, dominant de k metres le ter- rain de la plaine dessechee.
II fallait done , independamment de I'epuisement , un ebdiguement solide et impenetrable; des canaux de derivation d'une capacity convenable, pour servir de reservoir et recevoir les eaux , ainsi que pour la navigation ; il fallait proportionner les eduses et tons les moyens de dediarge.
Les causes raisonnables qui ont retarde si longtemps I'execution du projet de dessechement se trouvent , en grande partie, dans la difiiculte de concilier tant d'in- t^rets, de couvrir les frais enormes qu'entraine cette grande ceuvre ; les guerres incessantes qui ont agite le sol n^erlandais ont souvent aussi retarde toute ten- tative a cet egai'd.
II a ete offert a la commission pour le dessechement de la mei' de Haarlem un grand nombre d'engins hy- drauliques , dont beaucoup , certainement, reunis- sent des qualites eminemmcnt recommandablcs ; on en aurait fait usage, si depuis le dessechement de la grande mare, le Zuidplas, en 1838, et tant d'autres ,
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lexperionce ne nous avalt pas inontre la direction a prendre; il serait imprudent den devier ; I'arrct^ du '2\ novembre 18^0 prescrit quo I'^puisemont des eaux, pour le dess^chement do la mcr do Ilaarlom, so fora par la ^>apeur; quant aux machines livdrauliques , aux- quellescette force rnotrice sera appliqu^c, on dcvaitdon- ner probablement lapref6rence aux pompes.lesquelles semblcnt s'adapter mieux aux circonstances locales et promettent, la ou il faut clever les eaux a une liauteur assez considerable, non seulement un effet plus grand qu'avec les -vis (rji-chimede (vyzels) et les roues a pa- lettes ( schepraderen ) , mais encore une grande dco- nomie dans le chaufFage , parce qu'on pout faire usage des machines a vapour a simple effet , qui , comme il est g^nt^ralement reconnu, exigent moins do combustible (pour un r^sultat donn6)que les machines a double effet.
II serait inutile do donnericiles analyses de plusieurs engins hydrauliques pr^sentes a la commission ; car, <]uelqiie ing6nieuses que paraissent ces productions et quelque remarquables que soient les avantagesqu'cUes semblent promettre, il estcependant evident que, sous ies rapports du produit, de la force, de I'economie etdc la stability, ces machines sont bien inferieures aux grandes machines a vapour appliqueesauxpompes (1),
'l) En faisant usage dc la vh d' Archimede ou ties roues a palettes, il sera preferaMe de les applitjucr a des m.icliiiies a vapeurdc fjrandc ti)rce et a di)id)le effet. Comiiii! il est jjrohaMe que les 6 machines a yapeur, rcstant en permanence apres le dessechement, nauront pas toujoiirs a fon( tionner pour epuiser les eaux de pluie ou ile source, on tacliera deles appliipier a des srieries ou autrrs t.diiiques.
Les machines a vapeur serout eonslruitcs dans le pays.
( 107 ) quand la couslruclion est faite d'apres les progi'es dc I'art, c'est-a-dlre quand la clialeur leur est judicieuse- ment adaptde avec le moins de parte possible, telles que Ton en voit, entre autres, dans le comt^ de Cornouailles. II est d'ailleurs prouv6 qu'avec de pa- reilles machines a vapeur, la consommalion dc la houille, pour un effet detei-mine , diminue en raison dc ragrandissement du cylindre a vapeur (stoomcy- linder) ; du moins cette observation s'est confirmee jusqu'a la dimension de 80 pouces anglais = 1,"'93; puis, des machines a vapeur de cette grandeur donnent 270 met. cubes d'eau, a la hauteur d'un metre, avcc la consommation de 1^,3 de houille.
Au reste , I'usage en grand de beaucoup d'engins hydrauliques peut seul decider , et convaincre de leur importance et de leur valeur ; car il serait peu pru- dent de faire adopter des constructions mecaniques , non 6prouv6es d'avance sur une grande echelle , et seulement d'apres un petit modele.
Revenons sur quelques principes ou donn^es que la commission a adoptes provisoirement, savoir :
1° Que des macliines a vapeur de grande puissance, appliquees aux pompes , semblent presenter le plus d'^conomie ;
2° Qu'il sera etabli sur chacun des trois endroits ou il faudra epuiser, savoir: au Zuider-spaam, au Lutkc ■ rueer et vis-a-vis Katwyk au Kager-meer, 2 machines a vapeur, done 6 en tout, chacune de la force de 200 chevaux* ;
3" Ou'en se servant de roues (schepraderen) ou i>is d 'Archimede , il semble preferable d'y appliquer des machines a vapeur a double ofTet, parce qu'on a ob- serve que Ic mouvement circulaire produit par les ma-
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chines a simple cffet n'est pas aussi regulier que I'exige rusa!j;c de ccs engins liydraullques, qui deman- dont une vitesse uailorme pour donner dc bons rd- sultats.
h° En faisant usage dcs roues a palettes, il faudra les appliquer sur I'axe do la machine, pour qu'cllcs puissent, sans parties intormediaires , elre mises en mouvement , ct, comme I'axe, faire 10 tours dans une minute, etc.
Terminons cette Notice par quelques donn^es et r6- sultats de calculssur le temps qu'il faudra approxima- tivemcnt pour le dess^chement , avec une comparaison entre les moulins a vent et les machines a vapcur.
a. D'apres les cxemples dans d'autres terrains dess^ches (droogmakeryen) , situ^s comme la mer de Haarlem, il faudrait 114 moulins a vent, apr^s le des- s^chement, pour on oxtraire annuellement les eaux de pluie et de filtration, en supposant la cote, pendant r^t^ (zomerpeil) , a 5 met. — AP.
h. En comptant qu'une machine a vapeur fonc- tionnc seulement 29 jours par mois, il faudra la force totale de 1084 chevaux appliquoe aux pompos, ou la force de 1238 chevaux, appliqueo aux vis cV Archiinede ou aux roues a palettes, pour la dechargedes eauxsur- abondantes, dans les cas les plus defavorables.
c. Avec les Hi moulins a vent, il faudrait a pcu pres 4 ans pour dessecher la mer dc Haarlem.
d. Se servant de 6 machines a vapour de la force dc 200 chevaux chacune ct un systomo de pompcs bion etabli , il faudrait seulement 14 mois.
e. En appliquant a cos m6mes machines a vapcur des vis d' Archiinede ou dos roues a la hollandaisc, au lieu dc pompes, il faudra pour I'epuiseraent cntier, a
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(109)
pell prfes 2 ans ; parce qu'alors I'eau dovant etre el6- \&c en deux plans, on ne pourra (itablir les trois ma- chines inf^rleures qu'apres I'dpuisement de la moiti6 do la mei' de Haarlem.
J'. La construction de chaque moulin a vent , etant ^valu«^e a 26,000 florins dos Pays-Bas, et I'entretien an- nuel, etc., a 750 florins, le dessechement, par ces engins, monterait a 3,741,622 florins des Pays-Bas.
g. En comptant les 1000 kilogrammes de houille a 111 florins, puis la graisse et petits entretiens de cha- que machine a vapeur, par semaine, largement a 50 florins , le dessechement , par les 6 machines a va- peur, avec pompes, pourra s'effectuer pour 1,218, 629 florins, et, en y appliquant des 7^w d'Jrc/iirnec/e ou des roues a la hoUandaise, pour l,67G,Zi28 florins.
J.-G.-W. MliRKES,
Major Ju yenie, aide-Je-caiii|) de S. M. le roi «Ics Pays- Kas , mernbre de la Coniiiiission pour le dessechement de la mcr de Ilaailem.
J<a Uaye, ce 3o octohie 1842.
VoYAGfi DE M. SciiOMBURGK au.v sources du Takiitii en 1842.
(Kxtiait dn journal de la Socirte royale de ge'ographie de Londres , par M. DAUSSY ).
M. Schomhurgk continue toujours ses explorations de la Guiane. En 1842 il a rcconnu les sources du Takutu et remonte cette riviere, qui se jette dans le Piio-Branco, aupres du fort portugais de San-Joaquim. Nous allons presenter ici un extrait du recit qu'il a
( no \
donne de cctto expedilion a la Socictu dc gt'Ograpliio! (le Londrcs.
M. Schomburgk partit, le 24 mars, du village indion lie Pirara, dont il avail precedemmcnt d6tormin6 la position. 11 emmenait avec lui , cette fois , trois Euro- peens : M. Frejer , qui devail laider dans ses travaux ; ^I. Goodall, dessinatcur, et M.Richard Schomburgk, c[ue le gouvcrnement prussien avail cnvove pour faire (les collections pour le Mus6e royal de Prusse.
11 descendit le Pirara, qui so jelle dans la riviere Mahu , 15 milles a 10. du village de Pirara ; la , un accident arrive a un de ses chasseurs Ic forca de le renvoyer a Pirara, avec M. Freyer, de la collaboration duquel il fut prive. II descendit cnsuite le Mahu Jus- qu'a sa jonction avec le Takutu , confluent dont il de- termina la position par des observations de hauteurs merldiennes d'etoiles, et au moyen de deux chrono- melres, de 3° 55' 8" N. et 1™ 36- {W 16") a TO. de Pirara. II remonta alors cette riviere, qui, quoiqu'in- fericurc en largeur au Mahu, garde son nom, apres sa jonction avec celui-ci , jusqu'a ce qu'cllc se jette dans le Rio-liranco. Les bords de cette riviere sonl couverts de bois ; quelquefois cependant les savanes s'elendent jusqu'a la rive etforment des falaises de 40 a 50 pieds au-dessus du niveau de I'eau, a cctto (!'poque de la sai- son. M. Schomburgk s'arreta pendant quelques jours, par 3° 21' 37" i\. et 20' 58" 0. de Pirara, pour atlendre M. Freyer, qui no put le venir rejoindre ; et dans cette station il detemiina les hauteurs dos montagnes vlsi- bles a I'hori/.on.
Le 11 avril, il se remit en route, ( ontourna a 10. les inonts Canuku, dont le Curatavvuiburi, haut d'cnviron 2,000 pieds (610 metres) , forme IVxlremite. Ce vovagc
( I'll )
ttait (J'autant plus pcnible que la chaleur etait exces- sive et s'^levait au soleil a 126 ou 128° Fahr. (52 a 53° cent.). Plusieurs fois arrete par des rapides , on iut oblige de dechargerle canot pour le faire passer ces points dangereux.
Le 12, I'expedition se trouvait par 3° 12' 53" de lat. N. et26milles, 6, a 10. de Pirara; en ce point on ren- contra les premiers blocs de granitqiie Ion aittrouv6s sur les rives du Takutu ; de nombreux rapides se suc- coderent ensuite.
Le 111, apres avoir passe entredesfalaises, hautes de 50 a 60 pieds etformees d'unconglomerat de cailloux ronds de quartz, de differentes grosseurs, M. Scliom- burgk nionta sur une butte isolee , baute d'environ 130 pieds, et situee a 1 mille, sur la rive droite de la riviere. La vue qu'on avait de ce point, dit M. Schom- burgk, etait admirable ; les objets les plus remarquables otaient la chaine des monts Canuku, au N.-N.-E. ; vers 1 E.-S.-E., les trois sommets de Saei^acri, montagne dont la forme bizarre se reconnait a 30 ou hO milles a la ronde; ensuite un certain nombre de pitons isoles au milieu des vastes savanes qui s'^tendent vers le S.-S.-E., a partir du Saeraeri, pendant 30ou/iO milles. Le sommet le plus eleve des monts Cursato se mon trait un pcu a I'E. du S. et, tres loin vers le S.-O. , on aper- cevait a I'borizon les montagnes de la Lune (Kai-irite, des Indiens Wapisianas) . Lne montagne remarquable, en forme de dome, que je reconnus pour celle que j'avais nommee Taquiara , dans mon premier voyage , mais que les Wapisianas appellent Mariwctto, parais- sait dans le S.-S.-O., a environ 5 ou 6 milles. Quatre monts isoles s'ctendaient depuis cette montagne , vers- le S.-O., c[ le TakuUi paraissait couler au milieu.
( 112 )
Lc 15 , au passage d'lin rapido, deux di>s Indicns qui marcliaionl dans I'oau pour pousser lc canot fmcnt blesst^s au piod par un poisson a pointes cache dans le sable; cela forca a s'arritor ce jour-la; mais, lc 19, on attcignlt un village indlcn ou M. Schomburgk trouva des messagers qui lui avaient 616 envo\6s de Pirara ct qui lui apportaicnt un supplement de provisions. II s'arr^^ta quelqucs jours dans cc village , et au moyen d'op^rations trigonomtHriques , faitcs dans la savane environnante, il deterniina la position relative des tnonts Canuku et Cursato. Cette derniere cliainc n'a pas plus de 5 milles de long, ct son sommet est 6\e\& de 3,000 picds (915 metres) au-dessus dc la rivi6ro. M. Schomburgk fit aussi des observations magntHiques dans cettc station , dont il d(^termina la position par S" /i9' 40" N. et 20 milles, 13 a I'O de Pirara.
M. Schomburgk donne la description des Indicns de cette partie de la Guiano. Lcs ^Vapisianas sont, dit- il , plus grands que les Macusis ; leur tete est petite en proportion de leur corps et leur col court. Le gras de la jambe est plus saillant ct le ne/. plus droit que chez les Macusis ; ils sont aussi moins industrieux que cesdcrniers, et leur langage est dlfTt^rent et ressem- ble a celui des Pauixanas, qui bordent leur territoire au S.-O.
Leurs maisons sont baties en forme de coupole ou de dome et sont couvertes avec des feuillcs de palmiers, principalement de I'espece appel^e Mauritia ou Ita, qui est tres abondantc dans les savanes. Ces huttes circu- laires ont environ 25 ou 30 picds (8" , 7 ou 0"',2 ) ' de diam^tre et sont habittVs par plusieurs families. L'entree est la soide ouverture qu'on v trouve ; olio est t'ermcc pendant la nuit par une porte faite i\v leuilles
( 113) de palmier. II n'y a aucune division pour s6parer ce qui appartient a chaque famille ; quolques picrres for- mant un foyer sont les seules marques des droits d'une famille a un point particulier. Trois pieces do bois at- tacli6es aux poteaux montants, au moyen de cordes en bois ou de lianes, travcrscnt la hutto a 5 ou 6 pieds de hauteur ; cllos scrvcnt a pcndre les hamacs et k d6poser les arcs et les flechcs.
Commechaquo famille considere que c'est lo devoir des autrcs de nettoyer la maison, il n'est pas besoin de dire qu'aucunc ne le fait, et que les ordures y sont accumul6es de la mani6re la plus dd'goiltante. La fu- m6e de quatre ou cinq feux ne trouvant pas d'autre issue que les 6troites crevasses qui sont dans le toit, circule en 6paisse colonne , tout autour do la hutte , et affccte les yeux de ceux qui ne sont pas habitues k la vie des Indiens. Des volaiiles, que Ton trouve dans la plupart des ^tablissements indiens , d'innombrables perroquets et d'autres animaux domestiques se dis- putent encore la possession de cettc hutte. Mais le plus grand d^sagr6ment vicnt d'un grand norabre de chiens a demi alTam^s, qui sont toujours prets a mordre les jambes des Strangers. Une nu^e de mou- ches, et enfin cet insecte qui s'insinue partout , la chique, compl^tcnt la somme des agreements que ren- contre I'etranger a son entree dans une telle ruche : aussi m'etais-je fait une regie , lorsque je ne pouvais pas avoir une hutte pour moi scul , de dormir sous la tente, ou meme en plein air.
Le Wapisiana })ortc sescheveux courts, et je n'en ai
jamais vu dont la chevelure pendlt sur les ^paules,
conime cela arrive souvent chez les Macusis. Ceux qui
peuvent nourrir 2)lusieurs femmes pratiquent la polv-
1. FtvniEK 3. 8
( 114 )
ganiie ; mais cc n'est pas aussi frequent que chez. les Warraus et les Acca^vais. Au restc, leurs usages dif- terent peu de coux des Maciisis et des Indiens de la Guianc en general.
Le 23, M. Schoufiburgk quitta ce point; mais on fut ()blig«^ d'abandonner le canot et de faire porter le ba- gage par les Indiens. Aprcs une route a travers une lorfit ^paisse, ou les palmiers ^taient nombreiix , on rencontra une Imtte babit^een ce moment par une fa- milled "Indiens Macusis,vcnusdu Rio-Branco.M. Scbom- hurgk reconnut avec plaisir parmi cux deux liommes fjui I'avaient accompagne dans son voyage a travers les inontagnes de I'Or^noque. Plus loin, on trouva encore une autre famille, dans laquelle se trouvait un jeune idiot, dont on avait grand soin; car, parmi les In- diens, CCS individus sont regardcs comme sacr<^s.
Le 2Z| , M. Schomburgk s'arreta pour faire une sta- tion sur le mont Kuipati, dontle sommet, nu et isol6, lui permcttait de lier ses travaux avec des points qu'il avait determines prec^demmont , et en meme temps pour laissor a ses chasseurs Ic tomps de pour- suivre une troupe de daims qui avaient 6te vuc dans les en virons et qui devait fournir un supplement n^- cessaire aux vivres qui commencaient a diminuer,
Le 25 et le 26, on traversa plusieurs savanes et quel- (|ues montagnes isol^es.
Le 27, en approcbant des monls Tuarutu, on entra dans unbois ; et passant a travers un d6fil^, on se trouva au milieu de monts eleves d'environ 600 pieds , oii c'est a peine si on pouvait reconnaltre une trace , en sorte qu'on fut oblig(^ de se tenir aupres les unsdes au- tres pour ne pas s'6garer. On passait allornativoment dun bois a une savane et d'une savane a un bois , tantol
( 115 )
s'^levant sur le penchant d'une montagne, tantot cir- culant au milieu d'immenses blocs de granit. Apr^s avoir ainsi traverse plusieurs bassins et visit6 les bords de la riviere Manatiwau, qui se jette dans le Takutu, on arriva a un ^tablissement des Indiens Wapisianas , nomm6, d'apres les montagnes environnantes , Tua- rutu. M. Schomburgk s'arreta quelques jours dans cet 6tablissement pour y faire des observations et pour al- ler a la recherche d'un n^gre qui s'^tait d!gar6, et qu'il eut le bonheur de retrouver lorsqu'il etait presque en- tiferement ^puise.
Plusieurs Indiens des environs vinrent ici visiter nos voyageurs. Le lieu ou Ton se trouvait alors 6tait parmi des montagnes ; au N. s'elevait le sommet du raontTua- rutu , t^lev6 de 1800 pieds (5/i9 metres) ; le plus elev6 apres celui-ci ^tait a 1150 pieds ( 336") au-dessus du Takutu. La chalne du Tuarutu a environ 10 milles de longueur, et est formee de masses irregulieres qui ren- ferment des savanes et des monticules de granit. Lno plaine ou les bois et les savanes se succ^dent et ou Ton trouve des buttcs de 150 a 200 pieds au-dessus du Ta- kutu, s^pare les monts Takutu des monts Ossotshuni , petite chaine de 11 milles de longueur qui court N.-E. et S.-O.
Le Ix mai, I'expedition atteignit le village indien de Maripa, dont le chef offrit a M. Schomburgk de le gui- der aux sources du Takutu, ou il avait 6te peu de temps auparavant. Le 6, on se trouva encore une fois sur les bords du Takutu, qui avait la 10 a 12 pieds de largeur. Apres avoir suivi son cours pendant plusieurs milles, on atteignit enfin sa source , aupres de laquelle on fit des observations qui la placent par 1° 5' de lat. N. et 19' a I'O. (loPirara.
( 110 )
De ce point, le Takutu coule vers le N.-E. et recoil
du mont Vinuduna, situ6 par a peu pr^s 1" 55' de lat.
N., une autre riviere dont le volume d'eau est presque
aussi grand; 11 se dirige alors vers le N.-O. , a travers
des savanes entromelees de bois. Apr^s avoir depass^
les monts Tuarutu et a I'E. decette chaine, il recoit les
eaux du AVatlwau, presque aussi fort que lui. A partir
de ce point, il court 10 a 20° a I'E. du N., au nidieu
de savanes arides , dont il reroit les ruisseaux ; par
3° 35' N. et 24 milles a I'O. de Pirara, il se joint au
Maliu. Apres la jonction de ces deux rivieres, le cou-
rant prend une direction S.-O. , recoit a sa droite la
riviere Zuruma ou Cotinga, et tombe enfin dans le
Rio-Branco, a quelques centaines de metres au-dessus
du fort San-Joaquim, par 3° i' IG" de lat. N.
Le cours entier du Takutu, depuis sa source jus- qu'a sa jonction avee le llio-Branco , est d'environ 200 milles.
Le 7 mai , M. Schomburgk se mit en route pour re- venir a Maripa ou il fit des observations raagndtiques , et dont il d^termina la position l" bW 37" N. et 24' a rO. de Pirara.
II fut oblig^ de laisser dans ce village le patron de son canot qui s'etait bless^ au pied ; mais, au milieu d'Indiens amis, il n'avait aucune inquietude sur lui. Le chef du village avcc plusieurs habitants accompagne- rent I'expedition jusqu'a Tenette, en sorte qu'elle se composait de 50 individus, y compris les femmes et les enfants. Dans sa route , M. Scliomburgk prit en- core de nombrcux rel^vemcnts sur les diverses mon- tagnes qui bomaicnt son horizon, ainsi que des angles horaires pour determiner la longitude. Le 12 , a midi, il observa une dos plus fortes trombes qu'il eOt jamais
(117 )
vues: les feuilles, les morceaux de Lois, le sablu , et tout ce qui se trouvait sous son action formaient une colonne de 200 a 300 pieds ( 60 a 90 metres) de haut; les Macusis appellent ce phenom^ne « Uranan » et di- sent qu'il est frequent.
Le 12 au soir, on campa au bord d'une petite riviere par 2° 19' de lat. IS. et 5' a I'O. de Pirara.
Le 13 , on atteignit le point le plus eleve entre le Ta- kutu et le Rupununi; le premier etait a 12 mUles de la station, et le second a 6. La hauteur n'etait pas de plus de 150 pieds (46"") au-dessus du niveau de ces deux rivieres. On trouva ensuite le village indien de Cau-Urua situe par 2° 28' 25" N. et 1' a I'O. de Pirara. M. Schomburgk alia visiter le Rupununi, qui n'est ^loigne de ce village que de 1 mille 1/2; il le trouva de la force a peu pres de la riviere de Pirara ; ses eaux ^taient noires et son lit creus^ dans le roc. Les Indiens disent que sa source est dans une savane a une jour- n6e de marche au S. Ifh S.-E. II est a remarquer que les eaux du Takutu et du Rupununi sont noires dans la partie superieure de leur cours et blanchatres dans la partie inferieure. La meme chose a ete observ^e par rapport a la Demerara , et je ne doute pas , dit M. Schombm'gk , que meme le gigantesque Orc^noque n'ait ses eaux noires aupres de sa source. La cause de cette particularite , que j'ai remarquee dans toutes les rivieres de la Guiane, est loin d'etre connue. M. de Humboldt a ete porte a restreindre ce fait aux rivieres qui coulent entre les paralleles de 5" N. et 2° S. ; mais les eaux de la Demei-ara , de la Barima , etc. , dans une latitude beaucoup plus septentrionale , sont aussi noires vers leurs souixes que celles du Takutu etdu Ru- pununi.
( 118 )
Le 14 , on arriva d un petit tl-tahllssement indlen situ6 au pied des monts Pinighette, le point le plus <^leve de cette petite chaine , a environ 800 a 900 pieds de haut (2/|0 a ^TO™) ; sa direction est N.-E. 1/4 N., et sa longueur de 2 milles.
Le 15 , on passa entre les monts Pinighette et les monts Manette au milieu de savanes basses, et en- suite a 1 mille au S. 15° E. du mont Duruau , dont le plus haut sommet peut avoir 2,500 pieds (762'") de haut.
Le 16 , on arriva a Tenette , ou on esperait pouvoir reprendre les canots ; mais la riviere etant encore plus basse qu'au premier passage , on fut oblig6 d'y renon- cer et d'engager des Indiens pour porter le bagage a Pirara , ou on arriva enfm le 21 .
Voyage de M. Schomburgk dans la Guiane, en 1843. ( Communique par M. SIM.MOND- )
Le chevalier Schomburgk partit de Georgetown, au mois de f6vrier 1843 et ai'riva, le 24 mars, a Pirara, oil I'attendaient les raembres de I'exp^dition. D63 que leurs pr^paratifs furent termines, ils quitt^rent tous ensemble , le 30 avril , ce village, naguere si florissant et si populeux, mais alors si d6sol6, et ou Ton ne comptait plus qu'une seule famille.
Deux grands bateaux regurent les voyageurs et leur bagage sur le Rupununi, au milieu des exclamations de surprise des Indiens Wapisianas, qui n'avaient ja- mais vu de si vastes canots.
M. Schomburgk continue onsuite son voyage a tra-
( n» )
vers les monts Carawami, ets'arrete quelques jours a Watu-Ticaba ; puis, le h juin, il s'tiloigne des savanes, entre dans les lorets iiuinenses et presque iinp(!!ne- trables de I'interleur. « Les parties mar^cageuses du terrain produisent une prodigieuse quantity de cacao, de I'espece connue sous le nom de theobroma. Les In- diens de notre suite etaient singulierement friands de I'enveloppepulpeuse de I'amande, dont le goiit vineux est fort agreable. » Cependant ils n'avaient aucunc connaissance des qualites de la semence , qui possede un arome delicieux, et ils parurcnt tres etonnes en voyant M. Scbomburgk en cueillir un grand nombre , les concasser, et obtenir d'excellent chocolat. « Nous ne vimes partout que des milliers de cacaotiei-s, le 5 et le 6 juin , et il est a regretter que leur fruit , si estime ailleurs , ne serve ici de pature qu'aux coclions sauva- ges , aux singes et aux rats. »
Le 8, notre voyageur arriva a un etablisseraent d'ln- diens Taruma, pres de la riviere Cuyuwini. « La niort avait etendu ses i-avages sur le village voisin des Ato- rais; en 1837, on y comptait 200 ames ; la petite ve- role et la rougeole ont reduit ce nombre a 30 seule- ment.
M. Sclioinburgk descend ensuite le Cuyuwini , et entre dans TEssequebo, le 21 juin; il passe quelques jours cbez les Indiens Taruma, et observe une variety de la famille leguminosce dont la racine ou tubercule parvient a une enorme grosseur. « Ces tuberculesn'a- vaienl pas encore atteint toule leur maturity , maisleur gout etait a peu pres semblable a celui du yam et de la patate douce. Les Indiens Taruma les nomment cu- yupa. S'il etait possible de les acclimater on Europe, je ne doute pas que nous n'eussions a nous feliciler du
( 120) cette addition a nos plantes utiles. » M. Schomburgk s'engage a donner un petit nombre de ces ciiyupa aux personnes qui lui promettront de s'occupor soigneu- sement de leur culture.
Les voyageurs quittent leurs canots a I'embouchure de rUrana, qui se jette dans I'Ess^quebo ; ils conti- nuentlcur voyage parterre, traversent une chalne de montagnes, etarriventle 13 juillet devant les sources de rOnororo, tributaire de I'Esequebo; plus loin, a une distance de 100 pieds environ, ils rencontrent les sources du Caphiwuin ou Apiniau. « L'elevation dc la chaine est ici de 2,000 pieds; elle sdpare les rivieres qui courent au sud dans I'Amazone, et ocllcs qui se jettent dans I'Essi^qu^bo, au N. et a I'O.
» Apr^s avoir march^ quelques milles , nous en- trames dans un village maopityen. Nous y remar- quames la construction singuliere de deux maisons : la plus grande avait 86 pieds de diametre et une 616- vation proportionnee. L'une et I'autre dtaient surmon- t6es de deux toits, a la facon des pagodes, et la fum6e s'^chappait par I'ouverture qu'ils laissaient entre eux. Les Indiens nous rcQurent amicalement, et nous en- trames dans le plus vaste de ces edifices, qui renfer- mait alors tout ce qui reste de la Iribu si puissante au- trefois des Maopityens ou Mawachwas. Cette peuplade est aussi remarquable par les traits caracteristiques du visage que par une queue de 10 a 12 pouces de long qui descend jusqu'au bas du dos, etse termine en une toulTo de cheveux retenue par une feuille de palmier qu'embellissent dcsbrins de coton rouge et des plumes de perroquet. »
€ e village est fort pau vre; les habitants sc nourrissaient d'un detestable paindc farinc do casave et deboispourri reduit en poudre,d'un goilt amer et naus^abond.
I
( 121 )
Ce nefut que par I'appat de quelques riches presents qu'on parvint a obtenir des guides. L'expedition se di- rigea alors vers le lerritoire des IndiensPianaghotte et Drio, situe aupres de la rivifere Curum ou Curuwini. « Cettepartie du voyage n'etait pas sans danger. Nous avions a descendre le Caphiwuin, dont les cataractes sont si nombreuses ; plusieurs ont kO ou 50 pieds de hauteur perpendiculaire. »
Le 29 juillet, M. Schomburgk parvint au confluent du Caphiwuin et du Wanama, dont les eaux reunies forment la riviere Kaphu. Les vivres commencaient a manquer , ethuit jours devaient s^^couler encore avant que Ton put atteindre une habitation.
line semaine entiere se passa lentement dans les an- goisses de la faim , et la longue solitude des rives de- scries du Wanama, que le chevalier ne cessait pour- tant de remonter. Le 5 aout, il apercut deux canots qui semblaient venir a sa rencontre. Mais aussitot que les Indiens qui les montaient eurent vu les siens, ils fi- rent force de rames , gagnerent le bord, et prirent la fuite dans le plus grand dc^sordre. On s'efi'orga de les suivre : leurs habitations 6taient abandonn^es, et Ton n'y trouva qu'un peu de pain dont les guides maopi- tyens s'emparerent avec une sorte de furcur.
M. Schomburgk entre ici dans des details d*unint6- r6t saisissant. II raconte les nouveaux dangers qu'il eut a courir de la part des perfides Maopilyens. Ces mis6rables voulaient I'assassiner. Ileureusement pour lui, les Indiens Wapisianas lui resl^rent fideles , et I'aidercnt a s'emparer de trois chefs maopityens qui demeurcrent en son pouvoir, tandis qu'une partie de ses gens battait le pays, a la recherche des crainlifs Pianaghottos. Au bout dc quatorze jours d'allente,
( 122 )
quelques Indiens Zuramates apporttirent dos vivrt's tlans le camp des voyageurs.
Le chevalier se dirige vers le nord, remonle I'lriau, et se trouve dans la deplorable necossite d'abandonner sa pr^cieuse collection d'objets relatifs a riiistoire na- turelle et a I'ethnographie. « Quelque chose me disait, ajoute-t-il m^lancoliquement , que jo ne les reverrais plus; mais j'etais conlraint de m'en separer: mes li- deles Macuses pouvaient porter a peine mon bagagc indispensable, n
II passa a gue la riviere Iriau qui se dechargc dans le Wanama, ct apres une marche penible a travers des marais el de hautes collines, il parvint, le 21 aoiit, a une petite riviere qui coule dans la direction du N.-N.-O. vers le Corentyne. Peu de temps apres , il reccvait I'amicale hospitalite des Indiens Drios, et leur chef lui promettait d'envoyer quelques hommes a la recherche des objels abandonnes,
Le village qui venait d'accueillir notre voyageur est situe aupres de la source do la riviere Cutari, ou bras occidental du Corontyne. La partie orientalo, nommee Curuni ou Curuwini, so prolonge 30 millos de plus a Test; les Cocoipilyens ou Indiens-Aigles habitent ses bords. Ceux-ci ontpour voisinsles Marons, sur les rives du Meikoro , I'un des bras du Marowini. Ces diverses peupladcs cntretiennent ensemble des rapports de commerce et d'amitie.
Le 0 septembre, M. Schomburgk se rcmettait en route, sans avoir retrouv^ sa collodion, mais toujours suivi de ses bons Indiens Macuses. Au bout de six jours de navigation sur le Corentyne, on n'avait encore fait que 15 milles, tantcetle riviere ctaitetroilc et obstruee. lluit autros jours s'ecoulerent, el Ton n'apcrcevail au-
( i23 ) cune trace d'habitations. Chaque homme recevait pour seule ration 6 onces de farine pour vingt-quatreheures.
D'un autre cot^, les canots faisaient eau, et on en 6tait r^duit a boucher les trous avec des morccaux de vetements. Ce fut done avec des transports de joie que toute la troupe enlra, le 2li septembre, dans I'Esse- qu^bo, qui leur promettait la fin de leurs souffrances.
Cependant ils 6taient encore a quatre jours de dis- tance d'un etablissement caribe , et ils ne possedaient que 4 ou 5 livres de farine a partager entre quinzc individus. Le 1" octobre , la derniere distribution eut lieu ; 2 onces par personne ; dix heures plus tard, ils embrassaient le chef caribe.
M. Schomburgk arriva heureusement, le 13 octobre, a Georgetown , « en remerciant la Providence du se- cours qu'elle avait daigne lui accorder. »
DtsCRiPTiON ric la riviere de Camerooiis et de la bale d' Atnhoises , par le capitaine Allen , commandant le bateau a vapeur le JVilherj'orce.
( Extrait du journal de la Societe royale de geographie de Louilres, volume xni, par M. DAUSSY ).
Quoique dans le petit voyage que je viens de faire dans la riviere de Cameroons , nous n'ayons pas et6 a plus de 40 milles de la mer, cependant le but que je m'etais propose a 6t6 atteint : c'etait de reconnaitre la nature et I'etendue de cette riviere dans son cours principal, et avant qu'elle ne se divise; c'est ce qui a lieu a 8 milles seulement au-dessus de la ville de Bell , et a nioins de 20 milles de la mer. La veritable rive
( 124 )
gauche de la riviere descend meme jusqu'a eel ela- blissement, qui est elev6 de50pieds (15'",2) au-dessus de la mer.
Le bord de la riviere consiste en un conglomc'rat recent , contenant des particules de quartz de la gros- seur d'une noix , quelques petits fragments de uiica blanc et des masses de gri^s rougeatre , dont quelques unes ont A pieds de longueur ; le tout est liti par une argilc d'un brun clalr. La stratification est hori- zontale, et I'epaisseur des couches varie de quelques pouces a plusieurs pieds ; on ne peut y decouvriv au- cune trace d'etres organises. Les fragments de gr^s qui forment une partie de ce congloni(!;rat sent composes de particules de quartz soudees par un oxide de fer ou par leur adherence naturelle ; quelquefois le mi- nerai defer est combing chimiqucment avec la matiere argileuse et forme des masses compactes.
L'inlluence du fer sur I'aiguille aimant6e devait etre encore plus forte a la base de la falaise , ou le gres elait plus compacte et paraissait conlenir une plus grande quaatile de fer; mais au sommet meme, elle etail assez grande pour produire des inclinaisons differentes a quelques yards (metres) de distance.
La rive opposee consiste en un plateau de roches visible a mer basse ; il correspond au gr^s compacte qui forme la base de la falaise , ce qui porte a croire que, dans I'origine , les rives qui encaissaient la riviere s'etendaienl jusqu'ici des deux cotes; aujourd'hui celte j)arlie est basse et couvcrte de manglicrs , ainsi que le sont toutes les iles jusqu'a 25 milles de la mer. Ces iles paraissent augmenler et forment un peiil delta , qui finira par combler cette embouchure, et la terre regugnera ainsi cc qui lui a et6 enlev6 par la mer dans
( 125 ) quolque convulsion produlte par les actions des volcans qui ont leurs centres dans la chaine de montagnes voisine.
La belle baie de Cameroons est formee par la reu- nion des embouchures de plusieurs cours d'eau. EUe doit son nom aux Portugais , qui nomm6rent son ex- tremite cap Cameroons, a cause de la grande quantity de petites chevrettes qu'on y ti'ouva. Ce nom a et6 etendu a la principale riviere qui y debouche; mais les nnturels, suivant leur usage, lui donnent le nom des pays qu'ellc traverse : ainsi devant la ville de Bell, onl'appelle Madiba-ma-Dualla ; plus haut, Madiba-ma- Wuri , etc. Quoique ce soit une belle riviere, elle n'est pas comparable au Niger. Sa largeur moyenne, au-dela des mangliers, est d'environ 600 yards, autant que j'ai pu y penetrer. Dans la saison seche , sa profondeur varie de 2 a 20 pieds , quoiqu'elle ait rarement plus de 8 pieds; mais dans les grandes eaux il y a assez d'eau pour qu'un bailment d'une certaine force puisse la remonter. Cependant, d'apr^s le recit de quelques naturels intelligents, la navigation serait obstruie par des roches a Banem situe a environ 90 milles de la mer ; mais au-dela de ces roches la riviere continue, suivant mon pilote , pendant plusieurs journ^es , quoiqu'il avou&t qu'il ne la connaissait pas.
La riviere Camei'oons a deux affluents sur la rive droite , I'un le Yabiang, que j'ai remonte en partie ; I'autre a environ 25 milles au-dessus de la ville Wana- Makembi ; ils ont , dit-on , tous deux leurs sources dans des rochers de 50 pieds de haut, ou du moins ils en toiTibent. II y a aussi un petit cours d'eau qui tombe dans la crique Ebonjeh, et qui vientde Dnka-Bakin, environ l\ heures plus haut.
( 126 )
On a (juelquelois suppos*^ qu'en outre da la Camc- roons, une autre grande riviere, nomm^e Malimba , tombait dans ce bassin ; mais toutes les personnes que j'ai interrdgees se sont accordees pour me dire que ce n'«5tait qu'une crique deriv^e de la riviere Qua-Qua, qui vieut de Test. Mon pilote me disait que cette riviere a j)lus de mangliers, mais moins de largeur que celle de Wuri ou de Dualla , et qu'elle est obstru^e par des rocbcs a peu pres a la meme distance de la mer. 11 ajoutait que le roi de tout le pays de Qua-Qua reside dans uno ville nommee Longassi , qui se trouve sur la riviere a 80 milles environ de son embouchure.
II parait done resulter des temoignages que j'ai re- cueillis (juil existe une rangee de montagnes qui s'etendent a Test a partir des monts Cameroons, ou da moins qu'il se trouve a environ 100 milles dc la mer un plateau 6leve, car les naturels parlent dc quatre gi'ands cours d'eau qui tous tombent de rocbcrs bauts de 50 picds.
En outre des deux rivieres ci-dessus mentionnees, la Dualla et la Qua-Qua , plusieurs criques se d^chargenl aussidans ce bassin; ce sont celles nommeesBomano, Mongo et Bimbia , qui viennent principalement des bautes montagnes qui bordent ce bassin a I'ouest.
A rexceplion d'un seul jeune bomme qui ne parlait que par oui-diro , tous les principaux conmaercanls de ce pays m'ont assure qu'il n'y avait pas de communi- «'alion ]iar eau du Cameroons au Rio del Rey ou riviere Uumby ; I'cau , suivanl lour temoignage constant, s'ar- rete a Balung , a 30 milles environ au-dcssus dc la ri- viere Bimbia, oil Ton rencontre de bautes montagnes, desrocbers et dessources. II v a beaucoup d'(^lephants dans les bois. Les babilants dc Mong«) ol dc Babing tra-
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vprsent les monlagnes, et vont par Ekombach et Ebon- jeh a Balondo siir la riviere de Rumby; ou, en prenant une auire route. d'Ebonjeh a Bamboko , situee au pied de la montagne du cote de I'ouest. Les communi- cations sont aureste tr^s dlfficiles enraison dela nature montueuse et boisoe du pays qu'on traverse; il doit elre 6leve , car on dit qu'il est froid. La riviere Rumby se termine , dit-on , a Balondo.
Quoique M. Lilley , commercant anglais qui residait la depuis dix ans, me dit que la riviere Cameroons 6tait tres saine , cependant quelques symptomes de fi^vre s'etant montres u bord du W iJbeJ force , je me hatai de me rendre dans la baie d'Amboises , ou ils dispa- rurent bientot ; nous trouvions aussi I'avantage de pouvoir nous y procurer des provisions fraiches, que nous n'aurions pu avoir ni a Cameroons ni a Fer- nando-Po. Les instructions de I'amiraute et I'opinion favorable que javais de la salubrite de cette baie m'engagerent a I'examiner avec soin.
Elle est situee a la base d'une montagne haute de 13,000 pieds (3,962"'), qui porte sur les cartes lo nom de mont Cameroons, maisquo M. John Grazilhier, qui fit un voyage au vieux Kalebar en 1699 (1), dit elre appelee par les Portugais Tierra Alia de Ambozes. Les ilos qui se trouvent dans cette baie sont nommees , dit-il , par les Portugais, Ambozes; par les Anglais, Arnboises, et par les Francais, Amboizes. Le seul nom auquel j'aie trouv^ quoique ressemblance avec ccux-ci sont celui de Ambas ou Dameh , que les natu- rels donnent a Tile exterieure.
La partie la phis elevee de la montagne est appel^c
(l) A^lliy V()Yn{;p>, \n\. ill, |):ij;(' i ii).
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par les natui'cls Mongo ma Lobah , mais la partie qui se trouve en dedans du cote do la terre est nommde Mo- kolima Pako. Ln pic isole , situe aupr^s de la baie et haul d'environ 5,000pieds (l,52/io>), se nomme Mongo m'Etindeli. Quoiqu'a quelque distance cctte belle raonlagne paraisse s'elever en pentc continue depuis la incr, cependant quand on la voit de plus [)r6s on aper^oit qu'elle est forin^e par une succession de collines ct des vallees interm^diaires dont le sol est tr^s riche; ces collines sent couvcrtes jusqu'aux deux tiers de la hauteur de magnifiques arbres forestiers, le surplus est couvert d'herbes qui deviennent de plus en plus rares en s'approchant du sommet, ainsi que I'indique la couleur rougc-brun descendresvolcaniques qu'on reuiarque aupr^s du sommet. L'origine volca- nique de toute celte conlree est fortement indiqut^e par les scories et les nombreuses coulees do laves qui at- teignent jusqu'a lamer.
D'apr^s r^tat actuel de la surface, il doit s'6tre 6coul6 de nombreuses ann6es depuis que ce pays est en ropos, quoiqu'il y ait lieu de penser qu'il laisse apcrcevoir quelquefois lesfeux qu'il renferme. M. Lilloy m'assura qu'il avait vu des flammes aupres du som- met; mais cela pouvait provenir de I'babitude qu'ont les habitants de mcttre le feu aux herbos, dans la sai- son sechc, pour chasser les animaux sauvages ; copen- danl plusicurs des princlpaux habitants de Bimbia me d^clarerent qu'environ trois ans avant mon arrivee , c'est-a-dire en 1838, « le feu Otait sorti de terre ; » et ils disaient : « C'cstDicu qui I'a fait; » (^tablissant par la une distinction avoc ce qui elait produit par la com- bustion des herbes. '< Ils I'avaienttous vu ; vt a Mongo, ils avaient scnti la lent' Irnnblor comnH* im bateau a
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vapeur. Le peuple craignait de p6rir. » Ce Fait reuni avec le noni rle la montagne : — Mongo inn Lohah , montagne de Dieu , — peut faire supposer qu'on re- trouve la le Chariot des Dieux, d'Hannon le Carthagi- nois. II dlt en edet : « Nous decouvrimes a la nuit une contiee pleine do foux ; dansle milieu etait un feutres ^lev^, plus grand que le reste , et qui semblait toucher les etoiles. Lorsquele jour vint, nous decouvrimes que e'etait une grande montagne, nomm^e le Chariot des Dieux. ))
Si on en juge paries fumees qui s'elevaient de beau- coup de points, jusqu'a une grande hauteur sur la mon- tagne, la population doit etre nombreuse. An bord de la mer , il y avait un grand nombre de villages , dont j'ai visito plusieurs. Quoique Grazilhier disc d'eux quo ce sont los plus mediants noirs de toute la Guinee , je les ai cependant trouves civils. lis faisaient autrefois le commerce des esclaves avec les Hollandais ; aujour- d'hui ils n'ont de relations qu'avec les peuplcs 'de Bimbia.
La base de la montagne, a I'O. de Mongo m'Etindeh, est appoleo Bamboko ; la partie au S. de Bakwdoh et derrlerc Bimbia, a I'E. de la montagne, so nomme Ba- tongo.
A Bimbia, il y a de nombreux villages, batis sur un bel amphitheatre , dont le fond est forme de roches. L'entr^e de la i-iviere est abi'itee par une petite ilo, et presente un excellent mo uillage pour les batiments qui font le commerce de I'huile de palme ; mais il y fait tres chaud , et le vent de terre souffle par-dessus des marais. Les habitants recueillent I'huile de palme avec l)eaucoup d'activit^ ; ilsmedirent qu'ils en avaient une grande quanlite et qu'ils attendaiont avec impatience I. fAvrier. 4. s)
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(jiielques marcliands blancs pour Ja lour vcndro. lis sont , ainsi quo les habitants dos iles do la baic, dc la nation Dualia; landis quo coux qui sont an bas do la montagnc sont d une autre race, et sont connus par lours voisins plus civilises sous le nom d'bonimos des bois.
11 ) a dans la baie d'Amboises trois petilos ilos dont Tetendue et la fertility sont en raison inverse do la po- pulation. La plus grande, Mondoleh, qui a l/2niille do long seulement, est situiSjc dans la partio S.-E. de la baie; elle est haute ot rocheuse; mais son sommet est de niveau, et le sol, forme do basalte decompose, est d'uno rlohessc admirable ; ses flancs abruptes sont couverls de tres beaux bois. II ne se trouvc maintonant sur cette lie que dix hommes avee leurs families, quoique , si elle 6tait bien cultivi^e, elle pourrait on nourrir cinq fois autant. On y rencontre a mi-hauteur de la cote trois ou quatre sources d'eau qui , quoique faiblos , conlent n^anmoins toujours , a ce que Ton dit. Le point oil Ion debarque est mauvais, mais on pourrait lamoliorer.
L'ile extericure , Dameh ou Ambas , est petite et presque entierement arido ; les pontes do rochcs et les sommots sont converts do broussaillos ot de gazons. Ce n'est en realite qu'une 6troite bande derochos, 6levee a son extremitc^ exterieure. Mais quoique la nature ne leur fournisse aucun moyen de subsistance, cepen- dant 3 ou 400 personnes y ont fixe lour demeure. Eiles echangent avee les habitants du continent les produits abondants de la mer contre des plantains et des vams. Ellos ont aussi un bon nombrc de chevros ot de cochons qui paissont sur les cotes escarp^es do i'do. Le soul |ioint (\c I'ilo oil los canots puissont accos-
I
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t(M' est (lilllcile, a cause des rochcrs ardus ot de la houle continuelle. On pounait cepcndant , sans beaucoup de peine, y etablir iine jetee. Si je ne me trompe, il V a pen de sources dansl'lle, et elles etaient a sec lors- quc je les vis : c'est pourquoi les habitants sont obli- ges de recueillir I'eau de pluie, et dans la saison seche ils doivent en aller clierclier sur le continent.
L'ile Bobia , appelec aussi ile Pirate, a cause des pi'6tendues dispositions naturelles des habitants, est plus aride encore que I'lle Dameh. Elle paralt etre le reste d'une plus grande ile, et les nombreux frag- ments detaches ct battus par la mer qui sont autour d'elle prouvent cpi'elle a ete autrefois beaucoup plus etendue.
II est probable quelle ctait jadis unie au continent ; la structure des falaises a pic qui se trouvent vis-a-vis, et qui n'en sont separees que par un canal ^troit et peu profond, le temoigne assez. Ce promontoii^e a meme du s'etendre jusqu'a Dameh, cjui est sur la. mfime ligne. La destruction de cette cote continue en- core , ainsi qu'on le voit par d'cnormes fragments de rochers qui se trouvent a la pointe N. de l'ile, et que je crois s'etre detaches depuis ma visite, en 1833. Quoique cette ile soit beaucoup plus petite que les deux autres , sa population est nombreuse. Chaque point de sa surface inegale ou il a ete possible d'etablir une cabane, en porte une. Elle est a pic de tous les cotes , et on ne pent arriver au sommet qu'en escaladant ce qui parait etre une espece de jetee de basalte : c'est un passage effrayant, oil on ne pent aller que un a un et qu'un enfant pourrait d^fendre. Les habitants doi- vent probablement a leur position inexpugnable la re- putation qu'ils ont parmi lours voisins. Leiu- aspect est
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ftToce, quoique leur caractero soil froid ; je n'ai jamais
entendu citer de leur part un fait authcntlque dc pira-
terie a proprement parler. Leur position a probable-
incnt produit en eux un esprit dindependance et la
determination de resistor a roi)pression. Le chef dc
Bimbia se plaignait a moi qu'ils ne ^ oulaient pas re-
connaitre son autorit^, ni satisfaii'c a des demandes
que je ne trouvais pas, en elTet, aussi justes qu'il Icpre-
tendait. Ces insulaires sont les principaux peclieurs de
la baie , et dans le beau temps elle est couverte de leurs
canots ; c'est ce qui les met a meme d'obtenir sur le
continent les oLjots et les provisions dont ils ont bo-
soin.
Lemouillage est excellent dails toutes les parties de la baie , tant sous le rapport de la qualite du fond que de la profondcur ; et quoique la cote ne soil pas abrit^e et qu'il y ait une houle continuelle , je ne crois pas que le vent soit jamais asscz fort pour mettre un batinient en danger , et le debarquement est moins mauvais que celui de I'Ascension. Les vents les plus frequents sont ccux du S.-O., auxquels la baie est en- tiercmont ouvertc. Les mois les plus mauvais sont, je crois, julllot et aout; mais on s'abrite alors dei'riere I'ile Mondoleli. Le bois, les vegetaux et les vivres s'y trouvent en abondance, et ces derniers au quart du prix qu'on est oblige de les payer a FeiTiando-Po. On peut avoir de I'eau excellente aupres de Kieh, mais seulemcnt de mer basse , attendu qu'elle sort au pied d'un roclier; mais en creusant au-dessusde la marque de haute mer, on peut obtenir une aiguade tr^s com- mode. Le d^savantage que prd'sente cette cote, oppo- see aux vents, est grandement compense par la purete dr- l;i briso de mrr qui passe pnr-dessus rAtlantique,
( 133 ) La cote, dansles environs, n'a ni mangliers ni marais, et comme le vent de terre passe par-desssus de bautcs montagnes, il est frold et rafraichissant. Je pense que la bale d'Amboises est la position la plus saine de la cote d'Afrique. Quoiquenous nousy soyonstrouv^s pendant la saison pluvieuse, nous avons eu rarement plus d'un orage ou d'un tornado en 24 lieures. Le reste du jour, le temps «!!tait tres beau, et nous avons 6te plusieurs jours sans pluie.
Note sur /a culture des limoniers aux lords du [ai- de Garda;
Par M.le baton ROGER.
Le lac de Garda est situe entre les trois provinces de Verone , de Mantoue et de Brescia; il touclie au Tyiol par le cercle de Rovoredo. Sa longueur de Riva, au N.-N.-E. , vers Pescblera, au S.-S.-O., est de Z|8 kilome- tres. Sa profondeur varie beaucoup ; dans quelqaes parties elle atteint prtis de 300 metres. Ses eaux , d'une grande purete , d'une admirable transparence , nouris- sent une immense quantity d'excellents polssons , ob- jet d'un commerce consid«^rable. La navigation, tres active, n'y est pas sans quelqae danger, par suite de riiregularito des vents et de leurs changements su- bits.
Dans sa partie meridionale , vers Desenzano et Pes- cbiera , le lac a pres de 16 kilometres de largeur ; au- tour de cette vaste et belle masse d'eau, les sites sent pen accidentes; les terrains, assez verdoyants, sont bos et
( m )
monotones; les cultures n'ollrent rien dc icniarqua- ble. Mais bientot, en remontant Ic lac x'rs le nortl , Ics rives s'elevent rapidenient ; il n'y a plus guere de place pour les champs cultives : des coteaux denudes. puis aussitot de verltables montagnes herissees, abrup- tes , s'avancent, s'etablisscnt jusque dans les eaux memes du lac , qui va toujours en se retr^cissant jus- qu'a son extremity ; de grands amoncellemenfs de ro- cliers crevasses et susj^endus send)lent, paries traces de leurs pr^cedentes erosions, menaces, a chaque instant, de nouveaux ct formidables dechirements. Cette na- ture apre , sauvage , presente au navigaleur des aspects tr^s pittoresques el des plus imposants.
Mais I'ceil de I'c'tranger en est distrait par un spec- tacle assez bizarre, et qu'on ne s'explique pas bien. Au pied des rocliers exposes au solcil , partout oii une plage plus on moiiis etroitc , partout oil des restes d'eboulements ont permis d'etablir des habitations ou des cultures , on voit sc dresser verticalement dans la verdure une iacroyablo quanlite deligncsblancbes,dont on ne comprend d'abord ni la nature ni ladestination. De loin, relVet est presque celui d'innombrables pieces de toile qui seraient etcndues sur les pres d'une blan- chisscrie. Lorsqu'on s'approche, on reconnait que ce sont autant de piliei's ou poteaiix en ma^onncric, con- struits devant des rangees d'arbres de mediocres di- mensions. Ces arbres sonl des limoniors. Ces piliers sont destines a supporter des abris en planches etquel- quefois en tuiles , a I'aide d(>squels on recouvre les li- moniers pour les preserver , I'hiver, des rigueurs du climat. En elTet , dans cette saison , le froid \ est sou- vent assez vif, tandis que, durant I'f^te , au long de ces hautes murailles naturelles , la chaleur est extr^me- ment ardentc.
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Les liinonicrs sunt plantt^s en llgiic, a 3 ou k lucUos de distance les uns des aulros; ilsne dej)assent gu^re, en hauteur, 7 a 8 metres. La tcrre est solgneusenient cultiv^e ct amendee. Entre deux arljres , un pen on avant et en ari'iere , est constrult un pilier en niaron- nerie qui supporte, pendant I'liiver, une esp6ce de toi- ture mobile etunabri en planches ducotedu nord. Ces precautions, dont il ne reste pas de traces dans la belle saison, suilisentpour garantirdu froidlesliaioniers, qui reprennent ensuite une vigoureusc v(5;getation. Je les ai vus.au mois d'aout, converts d'une prodigieuse quantite de flours ot de fruits. Comme lesteiTains sont presque toujours en pcnte , derri^rc une rangee d'arbres , il en existe ordinairement plusieurs auti^es , et toutes sont separees entro elles par autant de rangees do pi- liers ou de supports : c'est ce qui produit le singulier elFet dont les etrangers sont si fort etonnf^s a la pre- miere vue. Du reste , ces arbres, abrites une partie de I'annee, sont presque les seuls qu'on trouve snr les bords du lac, si ce n'est des oliviers qui croissent ^a et la entre des rochers , lorsque la pluic ou la main de Thomme y a accumule assez de terro.
Dans los localitesqui se trouvcnt aux expositions le moins favorables , comme, par exemple , vers I'extre- mit^ du lac , aux environs de la petite ville dc fl/Va , j ai vu des rangees de limoniers plantes dans des espe- ces d'encaissements en murs qui ne s'^event que tres ])eu au-dessus du sol, et qui concourent, avec lespiliers ordinaires , a recevoir des abris plus complets pour mieux garaintir les arbreS contre le froid. Au moyen de cette disposition un pen plus compliqutJse , on entre- ticnt la quelques orangers aussi bien que des limoniers. (.oiuinc la torro so soniil ainsi j)romptement (ipuisee ^
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noa SLulciiienl uii a boia dc laaicador, aiaisencoru on la renouvolle on partie tous Ics trois ou quatre ans.
Quoique artificlellc a quolques egards , I'etrange culture que je decris n'cst pas exceptionnelie et, pour ainsi dire, de luxe, commc on pourralt lecroire; c'cst, au contraire , la culture la plus ordinaire et presquc la seule sur une partie des bords du lac. Tous les ter- rains susceptibles de recevoir celte destination sont avideniment recherch6s et soigneuscnient convertis enjan/iNs de liinons , ainsi qu'on les appelle dans le pays. Quclles que soient les depenses que ce precede necessite , les avantages en sont trc^s considerables. On lvalue a plus de 100,000 le nonibre de ces arbres, et I cur prodiiil ])i'ul a pres d'un million de francs.
Le lac de Garda fournit des Unions , en immenses quantit^s, a Milan et dans loute I'ltalie septentrionale, ou il s'en fait une prodigieusc consommalion. Le Ty- rol , Vienne et une partie de rAllemagne tirent de la tout leur approvisionnenient ; c'est , en un mot , pour cette contree un objcl do production et de coiumerce d'une importance majeure.
En I'^rance , a Ilyei-es, a Grasse, les citronniers et surloiit les orangers donncnt des fruits sans qu'il soit besoin d'employer les moyens preservatifs usites au lac de Garda; mais les localiles qui jouissent de ce pr6- cieux avantage sont fort rares. Pourquoi les precedes dont jc viens de rendre compte ne seraient-ils pas mis en usage avec succes sur quelqucs points de nos departements meridionaux ou, pour coaserver des plantations de citronniers et d'orangers , il suffirait de les preserver du froid pendant quelques saois chaque annee? Ces arbres y seralent d'un bon rapport, car leurs friills se vendraient a un prix plus cl(\r (|u'en Italic, .le arcstiinerais heureux (I'aNoii pa provcxpier
( IS" )
des essais qui coiistateraient peut-ulre la possibilite de dolci- notre pays d'uiie nouvoilo brancUc d'hidustrie agricole.
Si cette culture ne reussissait pas asscz complete- ment pour couvrir ses frais, ct pour donner les memes benefices qu'au lac de Garda , au moins pourrait-elle etre pratiquee avec succ^s dans les jardins , connne objet de luxe et d'agrement. Enclioisissant des exposi- tions abritees et tres chaudes , en preservant du froid les plantations avec plus de soins encore qu'a Puvn , en cliaulTant, s'il en etait bosoin , en creant enfm des orangeries avec des chassis de fer etdes vitres , on par- viendrait a conserver, meme dans le voisinage de Pa- ris, des orangers et des citronniers qui, pendant I'ete, se trouveraient en pleine terre et en plein air. C 'est par un proc^d^ analogue que Ton entretient les espaliers d'orangers dans une partie de I'ltalie septentrionale , notamment auxiles Borromee et aux jardins de Monza. Dans ces jardins il existe aussi des orangers, qui sont rentres dans des serres durant la saison froide : lors- qu'on les met dehors , lours caisses sont enfonc^es et entierement cachees sous la terre. Ces arbres decorent ainsi les parterres dime I'acon tres agreabie , sans qu'on apercjoive rien de lour culture artificielle. I ne telle disposition merite d'etre imitee.
Je ci'ois, pour lennincr, devoir rectilier une erreur que reproduisent tous les livrcs qui traitent de la geo- graphie du lac de Garda : a les en croire , les rives de ce lac sontpeupl^os dedeliricux hois d'oi'angcrs , c'est surtout ce qui ni'y avait attire. Mais la verite est que ces sortes d'arbres n'oxistent absohuncnt qu<> dans les jdirlins (Ic linions (pic j'ai decrits. 11s ne jiounaionl re-
( 138 ) sister aux rigueurs du cliinat , sans les artiliccs el los soins (lont est I'objet cettc Interessante culluro (1).
NOTE
surles crues prematurees du Nil en 1S/|H.
On a lu dans Ic N° 114 du Bulletin unc note sur uno crue preinatur6e observee dans le Nil, au Cairo , au commencement de mai 1843. Les habitants assuraicnl n'en avoir jamais vu d'exemple a cettc cpoque de I'an- nee. L'accroissement qui eut lieu alors en trois jours tut de plus de 7 k\rat ou doigts ou 0"',22 (2). Lne autre circonstance remarquable est que les eaux de cette crue extraordinaire n'etaient pas vei'tcs , comme le sont habitucUement les premieres crues regulieres : ce fait a paru presque aussi surprenant aux hcdjitants du Caire que l'accroissement lui-meme.
A} ant demande de plus aniples details a la personne qui m'avait donne la premiere information , M. le D' Chedurau, cl en aieme temps a M. le D'^ Perron , di-
(l; l';ir ime exn;;(M;iliiiii lout (jjiposi'i: . .1 Iimijjlt, dans son -Ijii- iiiltiiie du royaiiine loitihurdo-veiAlien , ouviiijjo (racluit par .M. Vir- t ir licntiu , preleiiil que <;etie culliiie ne pent i-ionpHiitr sur les bonis rlu iac do (rarda qn'au niojen de veiilal)li!S serrcs eulii-retiient tloscs \ l.iiidis iju'il ii'y existe, cii {jcucral , (jue dcs ahiis iiiohdcs , Il'jjcis ct Irt-s iiicoinplets. I'ar une seconde crrmir, \\ suppose loujours qu'il s'agit d'oraiigers ; ccs arbres, au coiitrain' , y sont asscz raies, tt la cidture s'appiifpie presque exclusivenieul aux linioniirs.
(2) La couilee a ei(^ evalut'e, selou .N{. I'cnoii, au biiKaii des ira- vaux publics, a o'",]75, noiubre rond, ahsliaction faite tie (juelijiies )iillliindlics. Lnrs de rexpcdilion d l'2{;yplu, la coudce vuljjaiie legale, i\ It i; (Iran (iiXi pjk-bt'lailj), a ete iiiesuieo sur U\ pied de o'",/!";), (I iiiiu o'","/) , fliilfi'cs ou ji' soupconnr unc lrans|iiisitiiiii.
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recteur de I'ecole mt^sdicale duCaire, j'ai recii ua com- plement d'observations qui mc paiait dlii;iu; d'etre connu. La marclie de la crue , cette annec , a etti en- core plus anormale qu'on ne le croyait; en outre de la crue precoce du 5 au 6 inai , il y en a eu deux autres , I'une auparavant, le 14 fevrier, et lautre ensuite , le 11 juln. Onsaitque cen'estguere que dans le commen- cement du mois de juillet que la crue so fait sentir au Caire.
M. le D" Perron a forme un tableau , jour par jour, de r^tat du fleuve, rapport^ aux trois calendrlers , eu- rop6en, copte etarabe, comprenant vlngt-quatre jours, du 7 juillet au 30. J'en ai rccu un de M. (Ihedulau , commencant au 29 join, fmissatit au l/i juillet. J'ai form^ de I'un et de I'autre un tableau general , com- plete jusqu'au 5 aoiit , et precede de dix-neuf jours d'observation remontant au III fevrier. Mais comme ce tableau general est trop etendu jKJur entrer dans lo Bulletin , je me bornerai a en resuiner les resultats. Ce tableau presente le niveau du Nil en 18Z|3 , com- part au niveau en 1842. On voit d'abord quo, constam- ment, il aete plus olove de 2 coudees 18 doigts au mini- mum qu'en 1842, ot de 4 coudeeslO doigts au maximum, excedant consideraI:)lo. La bauteur absoluo du Ml a ete de 8 coudees 17 doigts au luinimium, le l"' juillet , et de 12 coudees 12 doigts (12 •. 1/2) le 30 juillet. J(! vais extraire maintenant do la loitre (!> M. lo D' Perron (1) les notes authentiques qu'il a rocuoillies d'apr^s les registres du cheykh Aly-el-Mounady , c'est- a dire le crieur. Ci'est ce personnage qui a sous son au" torit^ les crieurs du Cairo , charg(^s d'annoncor, cha- que matin , 1 etat du (leuvo dans los dl\ors quailiors de
fl) S.lill c|iirli|iir. 1 (Il ilii-.ilifiii^ Av (l.ilc nric-Haii r-i.
[ uo )
la vlUe. Cette criee solennelle a lieu tous les jours tle- puis Ic moment du tioctdh ( la goutto ).
JoMAUD.
Extrait de la lettre de M. Ic D"^ Pi:rko\.
»( Le mardi 14 Moliarrem 1259 ( correspondant
» au 8 Emchyr, mois copte , annce 1559, et au 14 f6- )) vi'ier 1843 ) , le Nil, dont la profondeur des oaux au » Mekyas etait de 12 coudees, s'accrut de 2 kyrat , ou » un 12« de coudee ( 0"',0625 ).
)) Les eaux du fleuve diminuerent cnsuite , et le 10 » Reby-el-Tliany suivant (jeudi 10 mai 1843 , et 3 Be- )) clicns , mois copte, 1559) le niveau du .Nil etait, )) mesure du Mekyas , descendu a 8 coudees 9 kyrat. )) Le 11 Reby-el-Tliany (11 mai ou 4 Becliens) , les )) eauxcrurent de 2 kyrat, et le niveau se -trouva etre a » 8 coudees 11 kyrat. La crue se continua encore pen- » dant deux jours , et les eaux s'elev6rent on lonl de )) 7 k\rat et une fraction, ce qui represente au moins » 0",22; le Nil se trouva alors a 8 coudees 16 kyrat et )) imc fraction
)) Apres la crue du mois de mai, le ileuvc, porte a 8 )) coudees, resta sansmouvementde hausseetde haisse » jusqu'au dimanclie 12 Djemady-el-Awel 1259 ( cor- )) respondant au 10 juin 1843 , et au 4 Baounah, mois » copte ) ; mais le lendemain 13 Djemady-el-Awel )) ( 11 juin ) , il etait accru de 4 kyrat; le 14 Djcmady , )) il etait encore accru de 5 kyrat ; le 15 , de 4 autres » kyr&t; le 16 (14 juin) de 2 kyriit ; le 17 , de 1 kyrat )) encore; le samedi 18 (16 juin), de 1 kjrat; et enfm » dans la nuit du samedi 18 Djemady-el-AAvel au di- » manche 19 , qui etait la luiit du noctnh , il y cut en- » core une auji,nicntation de 1 kyrat. (les crucs succes-
( 141 ) )) sivcs , non interrompues pendant sept jours de suite, )) mais avec des variations de quantite , amen^renl » une masse d'eau de 18 kyrat d'epaisseur, ce qui )) porta la prol'ondeur des eaux a 9 coud^es 10 kyrat.
)) A com])tev du 21 l)jcniady-el-A\vel, surlende- » main du iiuctali , le llcuve decrut peu a peu jusqu'a )) ce qui! eut perdu une nappe d'eau de 12 kyrat d'e- )) paisscur , et il en resta la, c'est-a-dii'e a 8 coudees 1) 22 kyrat. Toutelois, les premieres diminutions, cellcs )) qui se succdderent sans interruption , n'apportferent » une perte que de 10 kyrat; les deux autres kyrat fu- » rent perdus ; I'un le 2 Djemady-el-Tliany, I'autre le 3 » (30 jiiin et 1" juillet ; 2li et 25 Baounah ) ; les trois )) jours jirecedents avaient ^te sans decroissance ; mais )) a partir du 0 Djemady-el-Tliany ( 7 juillet ) jus- » qu'au 3 Redjeb ( 30 juillet ) , le mouvement de la )) crue ne s'interrompit plus, (^e mouvement eut lieu » avec une regularite romarquable , ce qui pour les )) habitants de I'Egypte est d'un bon augure.
» Le niveau du Nil , compare a ce qu'il etait I'an )) passe aux memes epoqucs , aux memes jours , est, )) pour cctte annec-ci, bien plus dleve : non pas que , )) a]>solument parlant , la quantile d'eau arrivee soit )) plus grande que celle qui etait arrivee Fan dernier )) a ces memes epoques , mais parce que le niveau du )) fleuve,cette annec, n'cstpas descendu aussibas qu'il » etait avant la crue de I'anndje passee. Ainsi, avant la )) crue accidentellc du 10 juin 1843 ou 12 Djemady-el- )) Awel , le niveau du Nil etait a 8 coudees 16 kyrat , )) et , I'an passe , a cette meme epoque , avant le noc- )) ta/i , il etait a 8 coudees seulement. Puis survint )) I'augmentation de 18 kyi'at, puis la decroissance; et, » en definitive, au jour d(> I'accroissement r^gulier
( 1/J5 ) )' lu.ii iiilciiompii , (|iii coinmonra Ic 9 l)jenia(l\-ol- » Tliany (7 juillot) , le Ml dc 18/|3 ik-passait coliii do ). 18/|2 dc 2 coiid(ieset2()k\i;it....))
KOTE
.viir /(' Sahaiu (I).
Maintcuanl ({ue la France a des relations au midi d'Oran jusqu'a A'yn-Madhl, el que Biskara, du cote du levant, est le but d'une expedition , il est temps peut- ctre de songer a tirer parti dc ces premieres connais- sances pour leur donner de I'extension du c6t6 du Sahara. Le probleme du Saliara est peut-titre un des ])lus importants, comme un des plus curieux ii r^- soudre. (le n'est, selon moi , qu'une idee precon- ruc qui a pu laire naitrc et durcr I'opinion que cct espacc immense n'est qu'une mer do sable. Le Sahara, c'est-a-dire un ospacc comprenant une tres grande partie de I'Afriquo se})tentrionale , doit etre, et est, en eflet , parsen)e d'oasis , c'est-a-dire de cantons bois(!!S, ou arroses et ferliles. A commenccr parl'Kgvpte, il n'y en a pas moins de six sur une ligne a pcu pres parallelo au cours du Nil : I'oasis de Thebes a 60 licues, I'oasis dite Dakliel , Farafreh , El- Hayz et Zabou, a 30 ou /|0 liouos; onlin, plus a I'ouest,
(l)()ii ponriiiir (iilicr, sui cc ciiri( iix Mijel, il.ins de tres {jr.imJs ilevcloji|ii iiiciiN ; rii.iis on ii'.i VdiiKi (louiicr Jci (ju'uiie courte in- tlicalioii trts {jeni'rale , le but i-lanl .sciilciiRiit tl'appeler I'allrnllon sur la pns-il)ilit(' <ln tioiiver <les points de refucp dans le desert a propos des expeditions proj.'tees dai;s le Slid de I'Aljjerie. Les per- sonnes an tait de In {ipof;i-.iphie de I'Afi ique septenliionale y snpplee- I lint racileiiient. J, [)
( 143 ) a 100 lioues clii Cairo , I'oasls de Syouah ct, aupres, I'oasis do Santarjoli. EnNubie, pai-allolcmont aussi ail cours du flcuve , il y en a trois ou quatre , savoir : A)n-Chob , Solymch , El-Eguya , etc. ; plus au sud, on pout regardcr Ic Rordolan , etquantito d'autres points cultivos coinnie autaiit d'oasis. Nous no connaissons encore, au niidi de la Cyrenaiquc et do la Tripolitaino, que los oasis d'Audjelali, de Febabo au sud, de Mara- deh, deGbraat, de Bilnia, do Tibbo, de Ghadames, de Izbia et de Ag-dass ou Agades. H y a encore dans le sud-ouest et le sud de Gbraat luie oasis de Wergelab et une autre de Tabou , avec des ruisseaux.
Nous no connaissons presc[ue rienentre la region du Nil et le meridien du Fezzan ; niais le Fczzan lui- meme n'ost peut-etre autre cbose qu'une vastc oasis ; on en jioun^ait dire autant duBorgou, duDar Soulayb. On peut citer apr^s cela , dans I'ouest , Asben , Ayn- Salali, Agably , Mabbrouk, El-Araouan , Telig et Tau- deny , Tagazza , Ticbyt, Ouadan ou Iloden ( ou il a dii exister jadis un comptoir portugais ) , et un nonibre inconnu do pults avec plus ou moins de \egetation autour de cos puits. Enfin , entro Telig ot Ticbyt, on croit qu'il y a eu inio foret de deux journecs de cliemin de longueur.
Maintonant , rappelons-nous ce passage de Strabon : (( Sui\ ant toutes les relations , et d'apros le rocit que )) nous a fait a nous-meme Cn. Pison , ce continent » ressomble a une peaude pantboro, car il est conime » moucbete par d*;:; antons babitc^s cju'isolent des » terrains arides et deserts. Les Egyptiens appellent (I ces cantons des Aliases. » Liv. ii, page ISO , traduc- liou francaise (1).
(ijOil lit, llv. Nvii, |in.;;:" 8>i : « l,;i Liliv, Ic-ii'ilc <'n jji .Tii<Ie p.ii-
( Uh ) (ies niouchetures ne sont t^videnimeul autre cliosc que les oasis du Sahara. Si Strabon parlait ainsi , c'est appa- romincnl que les ancicns connaissaient I'int^rieur de rAlViquo niieux qu'on no Ic croit conimun(''ment. Mais comment se fait-il que nous, nous ne connaissions encore a Toccident du meridien do Tripoli quo poudc points scndjlables, quand los Ilomains sa>aient I'exis- tcnced'un tres grand nondjre':' La reponse a cette ques- tion no me parait pas fort endKurassante. Le Sahara est dcvenu le domaine ( en grande partie ) do celle des tribus arabcs qui, dedaignant Ic genre de civilisation des Mauritanies , ont pr6f6r6 la liberte , I'indopen- dance de la vie pastorale , les profits do la \ lo guorriijre , et qui , en outre , se sont em|)ares du nionopole du connnorce entre I'AiVique centralo oules belles vallees du Dbioliba et du Senegal d'un c6t(^ , ctles bords de la Mediterranee de I'autre, c'est-a-(Ure de toutle conniierce avec TEuropo. Elevant dans lours camps une in)mense quantit<^ de chameaux, les Ara])es ont ou le inovon de dominer los caravanes , do los uiultlplior, de les diri- ger partout. Et tandis que leurs compagnons d'armes, soit peu aprcs la conquete , soit plus lard, s'etablis- saient dans les villes romaines, dans les riches contreos marltimes, etjusqu'cn Europe, les Arabes nomades , eux , se faisaient une autre sorte d'existence tout-a-fait disparate avec celle dos autres conquerants ; ils se creaienl, pour dire ainsi, nn empire particuliorque per- sonne ne pouvalt leur disputor , pas memo losindig(>nes de I'Atlas. Maures, Numides, Berbferes, Scho>viah, Mo- zabis, lous les autochthones en un mot, (^taient trop
» lie, taut a riiUcrieur que sur k-s cotes di; I'Occaii , est cl:iir-scm<'(' •) (le cantons peu etendiis, liabitds [)rest|iie tons par une pupulntiun
H iioni.ulc. 11
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accoulumos a la \ie muree pour dispulcr le desert aiix cavaliers arabes. Toutefois, plusieurs races des natifs ont pii se joindre aiix nomades, ou rester en posses- sion des puits et des oasis , ct s'occuper aussi du com- merce en caravane. Telle est peut-etre I'origine des puissantes tribus des Touat et des Touarik.
Quoi qu'il en soil , il ne faut plus demander d'ou vient que nous connaissions encore peu de points liabi- tes ou lertiles entre I'Egypte et la Nubie d'une part, ctle Senegal, Tounbouctou, Bornou et le Fezzan de I'autre part. Les Arabes ont garde, et garderont tant qu'ils le pourront le secret de leurs oasis , de leurs puits dans le desert, de tous les lieux ou il y a de I'eau et de la vegetation; qui pourrait s'etonner du mystere qu'ils font aux voyageurs de la situation de ces lieux de refuge ?
II est done evident que nous n'en aurions jamais une connaissance exacte , si nous restions dans les voies ac- tuelles , et s'il fallait sen tenir aux recits des Arabes. De la , en quelque sorte , la necessity de tenter une forte reconnaissance, et, plus tard , une expedition en regie. Ce qui est certain, c'est que plus nos troupes d'Alg^rie s'avancent dansle Sud, plus le desert semble reculer; ce fait parle de lui-meme.
Je pense que le premier point a rechei'clier serait Agably, ou au moins Ayn-Salah, et cela,parce que la position en est detei-minee astronomiquement (1). Ainsi,d'Ayn-Madhyron iraita Ayn-Salah, qui n'en est
(i) Ce point est a peu pres sous le uieridien d'Ayn-Madliy ; I'ob- servation est du major Lninfj : c'est celle dont j'ai fait usage dins la carte du Voyaqe de Rcni Caillie; elle est le seal debris ( mais il est precieux) des travaux de I inforlune I.aing dans son \oyaf;e a Touri" linnrtou.
I. FivRir.H. 5. 10
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^)eiit-olr(' qu'a 125 lloucs ; puis a Agabh ; (11 ik' rainlrait pas , pour la premicire fois , aller plus avant) ; ensuite on ferait le cercle , et Ton reviendrait par Uis- kai'a ou par la fronti^re tunisicniie.
Mieux encore, il faudrait partlr de cette frontl^re , allor vers Tchossa , puis vers Tugurt, se porter ensuite a Touest a Agably ; enfin i-entrer en Alg^rie par Ayn- Madliy.
On se servirait utilement des Beni-.Vlozab pour cette reconnaissance.
II est evident qu'a Ayn-Salah ct Agably , points de concours de plusieurs lignes coinjnerciales du S.-E. et du S.-O. , on apprendrait une foule de renseignements sur les points du volsinage, commc sur les points plus elolgn6s, qui seraient en relation avee Tounbouc- tou et Djenn6, ou avec le bant Senegal, Ic royaume de Casson, etc. Plusieurs voyages sembiables et cons^cu- tifs feraient enfin connaitre en tout ou partle ce vaste espacc, et rectlfieraient les Idees tout-a-lail fausses, sc- ion luoi, repandues sur le Sabaia.
Ce qui contribuerait certalnement au succcs de ces reconnaissances et des explorations g(?(ograpblques se- lait la connaissance plus etcndue et pratique des idio- mes de I'Atlas , c'est-a-dlre de la langue berbere , du dlalccte mozabi , etc. La Socl6t6 de g(^>ograpbie aura sans doute a se f(^liclter d'avolr aid6 a ce resultat en publlant pour la premiere fois des Dlctlonnaires de la langue parlee sur le mont Atlas. II restera niaintenant a radnilnlstration de I'Algt^rie a prendre des mesures pour en r^pandre la connaissance ct facditer alnsl les voyages de decouvertes. J. — D.
( JA7 )
Exlrail (C luie leUre ndressee par M. Ic hmvn Aij;xa.m)iuc DE Humboldt a M. FRiiDiiRic Lacroix.
( (ii)iMiiniiii(|ii(' |>;ii M Fii. La(;ii()IX. )
I'll rliii, 4 niais I 844-
« Nous avons dellussie des notions bien curieuses sur rOxus; il parait letrouver par la bifurcation son an- cienne direction \ers lamer Caspiennc. Les eaux sont di'ja dans lancien lit pres du \ieux Ourgbendji , reste si longteinps a sec.
)) M. Psarcbine , avec lequel j'ai ete a Orenbourg et dans la steppe de Kbirguises lorsque jc fis I'expedi- tion pour rcnipeieur de Russie , dit que les eaux sont arrivecs en 1837 et plus tard jusqu'a cinq journees de distance seulemcnt du golfe Balkan de la Cas- pienne. C'est un fait de geograpbie tres curieux, et cntierement en rapport avec ce que j'ai expose dans le second volume de I'Asie centrale sur I'ancienne etendue du golfe Scytbique dont le Cara-Bougane est un faible reste.
» Je vlens d'obtenir de I'empereur lafondation d'un etablissement particulier pour le magnetisme terrestre et toutes les brandies de la meteorologie , sous le nom d'observatoire de pbysique. La direction en sera confine a M. Kupfer , qui vient de parcourir toute la ligne de nos stations magnetiques de I'Asie bor^ale.
)) P. S. Dans ma carte de I'Asie centrale , le signe de Nouveau Ourgbendji a ete place par erreur sur la rive gaucbe de I'Oxus, au lieu de se trouver au bord du lac situe au nord de Kbiva. »
( U8 )
ExTnAiT (Vune lettre de M. Albi:rt Gallatin, adressee A M. JoMARD, membre da i'lnstifut.
New-York, le /f) jiiiii 1843.
Je profite de I'occasion de M. Cathenvood pour pre- senter a la Societ6 de g^ograplue une carte manuscrite des contrecs cntrc le Mississipi et I'Ocean Pacifique , depuis le 32" jusqu'au AO*^ dcgr<^ de latitude, dont je m'etals servi et dont j'ai parl6 dans men essai sur les Tribus aborigines. (Synopsis of Indian Tribes, p. 1/jO- ^/l2.). C'est jusqu'a present re que nous avons deplus exact pour les « Rocky Mountains )) et les pays adja- cents, et ellc a servi de base aux cartes publiees en Am^rique depuis I'an 1835. Je dois observer Depen- dant que la grande compagnie anglaise (Hudson's Bay company) a de nieilleurs rcnseignements que nous pour tout ce qui est k I'Ouest des a Rocky Mountains )> et au Nord du 45' degie de latitude ; et que la riviere designee sur la carte sous le nom de Badger's Creek , qui prend sa source a I'Oucst du lac d'eau Sal(^e (Tim- ponago), el dont le cours est vers I'Oucst entre les ll/i"" et 118" degr^s de longitude (Ouest de Greenwich) parait se perdre dans les sables ou dans un lac sans issue , au lieu de tomber d'apres la carte dans la riviere Ovvybee, un des affluents de la rividre Columbia. Ce qu'll y a de plus interessant dans cctte carte, ce sont les voyages de J. Smilli, et les preuves de la grande ('itendue du desert de sable, entre le Rio-Colorado et la clialne maritime des montagnes de la Callfornie. Ce desert, le seul de ce genre dans rAm(!!riquc septentrio- nale, n'avalt 61^ traverse que dans la latitude de la joiiction du Rio-GUa avec le Rio-Colorado (32° 36'),
( no )
d'abord par le pere Lafon, recemment par le D' Coul- ter dont il faut comparer le voyage (R, geogr. Soc. Lond, 1835, part. I.) avec cette carte. Tout ce qui etait au Nord entre le Rio-Colorado ot les monts Califor- niens etait Terra incognita : seulemcnt des misslon- naires (Escalante) venus du Rio-Norte etaient parve- nus jusqu'aux rives orientales du grand lac Sale, que nous a fait connaltre Humboldt, et qui parut pour la premiere fois sur sa carte du Mcxique sous le noni de Timponago, nom que Wasbington-Irwing a mal a pro- pos cbange pour lui donner le nom du capitainc Ron- neville qui ne I'a jamais vu, et qui n'a voyage dans les Rocky Mountains que 12 ou 15 ans apres que le lac avait ^t^ retrouve et visite par Ashley, Chouteau et une foule de chasseurs Americains. Mais c'est J. Smith (depuis tue par les Indiens) qui a traverse en 1826 et 1827, le desert d'abord sous la latitude de 35", et a son retour, depuis I'Ocean Pacifique jusqu'au lac Timponago, sous la latitude de 38° a hQ° : sa route est tracee sur la carte. La limite septentrionale du grand desert est a peu pres sous la latitude hi"; il a, la, envi- ron huit degres de longitude de largeur, et seulemcnt deux sous la latitude de 32" 30' ; il se prolonge environ cent milles anglais, plus au Sud, des deux cotes du golfe de Californie
Signc, Albert Gallatin.
ExTRAiT de deux lettres adressces par M. LJi D'' Mo>ta- CNK, A M. JoMARD, uienibre de rinstilut.
Paris , le r5 jaiiviir ' i^ (4 •
Monsieur, I II kill asscz curieiix vient d'etre constate. 11 lute-
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resse a Ja lois la geogriipliic, Ja science ethiiulogiqiu' ct riiistoire naturelJe. En attendant que le temps me per- inette de m'occuper des recherchcs que \ous avez bien voulu m'indiquer, pour m'assurer si les anciens avaient eu quelque connaissance du plienouiene nouvcau que vient d'obsei'ver M. Duponl, a\ocat fort distingud, de rile de France, et si c'est par suite de ccttc connais- sance qu'ils ont nomme Mare Erythrccum le goHe Ara- bique, je me I'ais un de\oir de vous communlqucr les principaux passages de la relation (1) des clrconstances dans lesquellos cette dccouverte a ete laite ; jc \ais lais- ser parler .Al. Uupont lui-meme :
« Le 8 juillet dernier j'enlrai dans la mer Rouge, par le d^troit dc Bab-el-Mandcb, sur le paqucbot a vapeur V Atalanta, appartenant a la compagnie des Indes. Jc demandai au ca])itaine et aux ofliciers, qui depuis longtemps naviguaient dans ces parages, quelle etait I'origlne de cet antique nom de mer Erj tbrcie, de incr Rouge ; s'il etait du, comme le pretendent quel- ques uns, a des sables do cette couleur, ou scion d'au- tres a des rochers. Nul de ces messieurs ne put me r^pondre. lis n'avaient, disaient-ils, rien remarque qui justifiat cette aj)pellation. J'observais doncmoi-meme a mesure que nous avancions. Mais, soit que tour a tour le batiinent se rapprocbat de la cote Arabique ou dc la cote Africaine, le rouge nc m'apparaissait nulle part. Les borribles montagnespelees qui bordent les deux rivagcs elaient uniformement dun brun noi- ratre, sauf la presence, en quelques cndroits, d'un volcan eteint qui avait laisse de longues coulees blan- cbes. Les sables etaienl blancs; les recifs de corail
(i) CtUe relation est adressee a M. Isidore Geoffroy Saiiit-Hil.iiro, fjui me la Iransinise aver la subslanrp reiueillir p.ir M, niipnni
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etaienl Ijlancs de iiic'iiiL'; la mci- du plus beau bleu c^l'uk'cn. J 'avals renoiice a decouvrir mon etymologic.
)) Le 15 juillet, le brulanl soleil d'Arabie m'eveilla brusqucment en brlllant tout a coup a rhorizon, sans crepiiscule, ct dans toute sa splendeur. Je m'accoudai machinalement sur une fenetre de poupe pour y clier- cber un i-este d'air frais de la nuit, avant que I'ardeur du jour I'eut devore : quelle nc fut pas ma surprise de voir la mer teinte en rouge, aussi loin que I'oeil pou- vait s'^tendre deri'iere le navire. Je courus sur le pont et de tousles cotes je vis le meme phenomene.
wJ'interrogeaialorsde nouveaules ofTiciers; lecbirur- gicn pretendit qu'il avait deja observe ce fait, qui ^tait, selon lui , produitpar du frai de poisson, flottant a la surface de la mer. Les autrcs dirent qu'ils ne se rappe- laient pas I'avoir vu auparavant. Tous parurent surpris que j'y attacliasse quelque interet.
)) S'il fallait d^crire I'apparence de la mer, je dirais que sa surface etait partout couverte d'une coucbe serr^e, mais peu epaissc, d'une matiere fine, d'uii rouge-briquc un peu orange. II me sembla (et je le dis alors) que c'etait une plante marine : personne ne fut de mon avis. Au moyen d'un seau attache au bout d'une corde, je fis recueillir par I'un des matelots une certaine quantity de la substance. Puis, avee une cuil- lere je I'introduisis dans un flacon de verre blanc, avec un peu d'eau de mer, pensant qu'elle se conserverait ainsl. Le lendemain la substance 6tait devenue d'lni violet fonce et I'eau avait prls une jolie teinte rose. Craignant alors que I'immersion ne hatatla decompo- sition au lieu de rempeclicr, je vidai le contenu du ilacon sui- un linge de coton ; I'eau passa a travers el la snl)slaiicc adbeia an lissu. Ku secliaul cUc devint
( 152 )
verte (J). Je dois ujouler quo le 15 jiiillet, nous etions par le travers de Ja ville t^gyptienno do Cosseir; que la mer fut rouge toute la journi^e; que le Icndemain 16, elle le fut de memc jusque vers midi, lieure a laquolle nous nous trouvions en face de Thor, petite ville Arahe dont nous apercevions les palmicrs dans unc oasis au bord de la mer, au-dessous de la chaine de montngnes qui descend du Sinai jusqu'a la plage sablonneuse. Le meme jour, un peu apros midi, le rouyc dispanit et la surface de la mer redevint blcue commo auparavant. Le 17 nous jetions Tancre a Suez.
» La couleur rouge s'est consequonnnenl monlrec depuis le 15 juillet vers 5 heures du matin, jusqu'au 16 vers 1 heure apres midi , e'est-a-dirc pendant 32 heures. Orpendant cet intervalle, le paquebot filant 8 nceuds a I'heure, a parcouru un espace do 256 milles ou 85 lieues et un tiers. »
^ ous venez de lire, monsieur, I'interossant recit de M. Dupont. Je dois ajouter que M. Isidore GeolTroy Saint-Hilaire m'a confie, pour I'examcn, la substance rapport6e par ccvoyagcur. J'en ai fait uncdtude appro- fondie en la soumettant au pouvoir amplifiant d'un excellent microscope compose, et j'ai rcconnu, a mon grand ^tonnement, qu'elle appartenait a un de ces fetres ambigus dont la place n'ost pas encore bien fix^o dans nos classifications, et que les zoologistes et les botanistcs revendiquent tour a tour et peut etre avec
un droit egal.
I)' Montagm;.
i) L'nclion (le l.i liiiiiiiie |iiorliiil (jnliiKiircmrnt rcltc v.'iria'.inii cli' cfniltui I lit'/ lotUcs le> al{',ncs que r.Tiaclrrise la couleur iDUjje.
15;^
■j.S j;iiivier.
La substance rapport^e de la nier Rouge par notrc voyageur avait du necessalrement perdre par la desslc- cation quelques uns des caracteres propres a faire dis- tinguer I'algue qui la constilue des especes et des genres voisins.
Des longues et perseverantes reclierclies auxquelles je me suis livre pour arrlver a la verite , recherches en partie sugger^es par vous , monsieur, en partie par le sujet lui-meme sur lequel j'avais a m'eclairer, il re- sulte ( et mon memoire, que je ne ferai pas longtemps attendre, le prouvera, j'espere, suffisamment) , l°que le phdnomene dont j'ai eii I'honneur de vous cntretc- nir n'est pas nouveau ; 2° qu'un naturaliste tres juste- ment cdl^bre I'avait deja observe avant M. Dupont , et a pen pres aux memes lieux, mais qu'aucun bota- niste avant moi n'a tenu compte de sa d^couverte ; 3° qu'cn consequence il a pu , mieux que moi, qui n'avais sous les } eux que des cadavres , pour ainsi dire , apprecier les conditions d'existence et les carac- teres de la substance colorante examinee au micro- scope a I't^tat de vie; h° qu'il en a fait un genre d'algue nouveau de la tribu des oscillatoriees , ce a quoi j'avais d'abord 6te conduit moi-meme en nommant ce genre Erjthroneina ; 5" enfin , que la dillerence principale qui distingue son observation de celle de M. Dupont consiste dans Timmense etendue de la surface sur la- quelle celui-ci a vu se developper le pbenomene que le premier n'a observe que dans des limites ])caucoup plus restreintes. D' iVl.
( 15A )
OiiJiiTS u.VPPORTivs (III dernier vora^/i (iii.r rn'cs da Bakr-
el-Abiad \\).
Lesvoyageurs europeens qui ont parcouru on der- nier lieu les rives superieuresdu tleuvcBlanc , M. d'Ar- naudainsi que i\I. Tliibaut ctM. Sabatier, onl recueilii un certain nombre d'objets curicux , appartonant aux diflf^rentcs pcuplades, el qui fonl connallro leurs mceurs, leurs costumes, leurs usages, leur Industrie. L'interct que peuvent presenter ces objets, quoique d'un travail grossier, saugmcnte bcaucoup des rap- ports qu'ils prescntcnt avcc des analogues qui ont ct(^ en usage parmi Ics anciens Kgyptiens" et qu'on ren- contre , soit en nature dans les hypogees de la The- baide, soit points ou sculpl^s dans les monuments. On pourrait en effet mettre a cote les uns des autres, cer- tains instruments, certains meubles qui ont sor\i aux Egyptiens de I'ere pharaonique ot les ustensiles sem- blables servant aux riverains du fleuve Blanc, jusqu'au 5° degre de latitude, par exemplc les coussinels en bois pour rcposor la tele , les armos offensives ol les ai-mes defensives.
Les objets materiels que recueillent ou cherchent a recueillir les voyageurs dans les pays lointains , peuvent so partager en dix classes (2) : 1" cinsse , images re- presentant la physionomie des indigenes; "1" , objets ct ustensiles propres a procurer et prepax^er la nourrilui'e ; 3% objets relatifs au vetement ; 4% objets relatifs au lo- gementet aux constructions; 5', Economic domestique; 6% objets propres a la defense de I'homme, armos et ar- mures; 7°, objets relatifs aux arts divers et aux scien- ces; 8% instruments de musique; 9% objets de culto ;
(1) CeU(! note abrc'{;ee est iniir-|>eiii.l:inle dc l,i lisle des collKClioiis (Vliistoire iiaturcllc.
(2) Ces classes soiit (listiit)iu''<'s dans I'lirdie des licsoins iliIiiitIs d' I li<iiiinic.
( 155 )
10", ma^urs ct ustiges. Ce nest pas lo luni d'entrer ici dans aucun detail (1); il sulfit d'ajouter que tons les ob- jets etbnographiques pcuvent se ranger dans Tunc de ces categories. Les objetsrt^ccmment rapportes des rives dii Nil Blanc correspondent a toutes ces divisions , excepte a la premiere et a la quatrienie ; encore les dessins que M. d'Arnaud a recueillis comprennent les portraits des naturels, de maniere que la collection se trouve pour ainsi dire complete sous le rapport etlinograj^hi- que. Nous citerons ici un certain nombre d'objets seu- lement : la distance de ces lieux, ou les Europeens ont p^netre pour la premiere fois, et d'ou on les a rap- portes avcc bonbeur, fera excuser I'aridlte dune simjile enumeration.
La 2" c7rt.sv>v?presente des instruments aratoires qui m6- ritent d'etre mentionn^s; ce sont des colliers en fer, de forme tubulaire,d'unpoids6norme, destines probable- ment a charger le cou des bceufs ou des taureaux; le jougest travaille avec une certaine Industrie ; on remar- que des pics, deshoyaux en fer et autres outils pour I'a- griculture, despierres a Iriturer le grain, avec rouleau.
3'= ciasse. Parmi les articles rolatifs au costume , ou reraarque, non sans etonnement, I'usage des perru- ques; elles sont analogues a celles qu'on rencontre dans les hypog^es de Thebes ; on remarque diverses sortes de coiffures composees avec des cheveux d'bomme el du poil d'animal , d'autrcs en colon tresse, teintes en ocre rouge ; on distingue des couronnesen poil pour les guerriers,deschapeaux en paille,surmontes de plumes: ily a aussi des coiffures en paille tressee. Les san- dales sont sembhiblcs aux sandales antiques des hypo-
(i) Voir Lf'tlre sur I'utilite iles imiscus fUinnijiajihiijUL'S cl stir I'iin- intlancf ife leiir ctcatin)\ dau^ /c; I'^tal-, ruropccnf ijii! p(>s<ir(lcitt (Ics rolnnii-'i^ rlc, pai IMi.-l'r. on Siiiroi.ii. P.iiis, l)ii|ii,il, iu-8", i843.
( 156 )
gees, encore en usage en Nubie; les celnluies de leiume, les pagnes sont de plusieurs especes , tlssus , en etolTes diverses, en jonc ct sluiples herbages. Les colliers sont en corail , en fruits, en graines , en dents , en i'er travaille, et plus ou moins riches.
Dans la h" clusse. Ton corapte di>erses sortes d'usten- siles domestiques fabriques en bois, en fer, en corne de buflle, en terrc cuite , en paille , en jonc. Avec les Irois premieres malieres sont confectioiuies des taboui-ets, des cuilltjres; avec les deux derniercs, des nattes, des plateaux , des panicrs ti'esses, fort jolis et d'une forme elegante. On remarque des cribles , des passoires, des haches , des coussins , des chasscraouches en queue de \ache, de pctits sieges en bois , tres legers et d'une piece quoique a trois pieds, le si^gc du inek, etc.
6' classe. Les arnaes et les arnmres sont les objets les plusremarquablosdeleur industrie. On ignorait jusqu'a cejour que les Africainsdecescontr^esexploitassent et travaillassenlle fer en grand ct aussibien; le fer est doux et susceptible d'un beau poli. — Amies offensives. On distingue les piques , les poignards , les lances, les arcs, les sabres, les casse-tetes, les massues, les batons fcr- les, les lances surtout, dont le fer bien travaille a jus- qu'a 1 metre de long et de tr6s bonne qualite ; la lance entiere a 3"' 1/2 a Ani en tout ; elles sont en tres grande quantite. Les sabres sont petits , arques, d'une forme bizarre, precisement la meme qui se remarque sur les monuments egyptiens. Les arcs sont dun bois aussi elaslique qu'il est dur et solide. Les casse-tetes, en forme de baton, sontterminesen pointe,de bois dur ex- tremement lourd, ou en Ijois d'^bcne et autrcs; les Heches sont travaillees avec asscz d'art, ainsi que les car- f{uois : CCS fleches sont souvent garnies de poison et co poison est mortel. — J vines offensives. Lesbouclierssonl
( 157 ) etroits , rectangulaires et arques, comnie on en voit sin- les monuments egyptiens , en peau d'hij^popotame et autres peaux , et de plusieurs dimensions ; il y a des brassards, des trombachs on casse-tetes ferres"; on re- marque aussi des sifllets de guerre en diverses matieres et des cornes servant au meme usage.
Dans la 7" classe , les ustensiles les plus nom- breux sont des instruments de peebe ; ils suffiraient a nous reveler le genre de vie des riverains du baut Nil , si M. d'Arnaud ne nous avait pas dit dans sa relation que tous ces peuples sont livres a la pecbe. Ce qui at- tire surtout I'attention, ce sont des flotteurs de grande proportion (jusqu'a un metre de long) construits avee un bois d'une legerete extraordinaire. II y a des filets, des hamecons tres varies, en bois eten fer, les barpons egalement ; il y a encore d'autres instruments de pe- cbe , des pagaies , des instruments particuliers pour la cbasse aux crocodiles ; des scies et des instruments de cbai-pente , des rouleaux et des vanneaux pour le grain, des coussinets a porter les fardeaux , des cbaines de fer en tissu a petites mailles bien travaillees.
La 8'' classe , consacree a la musique, comprend la lyre a cinq cordes, la meme que celle de Nubie ; il v a peu d'articles appartenant a la musique projjrement dite ; on ne peut guere que citer des instruments de percussion, telsque le tambour egyptien vulgaire (c'est une peautenduesurl'ouverture d'unpotdeterre cuite), de grands vases ou pieces creuses auxquelles sont ajus- t6es des cornes ; des clocbettes , des sifflets en plu- sieurs matieres , des grelots en fer , des castagnettes.
9° classe. Les idees religieuses de ces peuples sont fort grossiei'es ; on sait par M. d'Arnaud quelles sont leurs superstitions par rapport aux astros, a certains rljres el autros objets d(> lour cube ; il ) a aussi des
158 )
itloles en bois . des leliclics clill'onnes ; ils oiil des f^i'is- gris et des amulcttes.
10" classc. Parmi ies objets qui so rapporlcnt aux racEurs et aux usages , on aime a dlstinguer Ics jeua: , parcequ'ils sont oixlinairenionl caracteristiques : on re- marque chez ces peuples deux ol)jets qui rappollcnt Ies jeux dc la Grece, Ic disque et Ic ceste, instruments du pugilat. C'est, au reste, une observation assez g^nerale, en Orient, que Ies peuples, memo Ies moins avances, ont des exercices g\mnastiques.
Nous trouvons ici Ics batons <le cJief an fer cl en bois, insigncs de commandement, rappelant par la forme ceux de I'ancienne Egjpte; des bracelets en ivoire , tr^s massifs, d'autres en fer, des ornements pour le bas de la jambe, de grand cercles, anneaux ou cou- ronnes en poil, des anneaux en cuivre. Cc qui abonde peut-etre le plus, de toutes clioses , ce sont los ])ipos de grandes dimensions, dont le bout est souvent une calebasse colossale , le fournoau une tcrre cuite, ct la tige un roseau : le fourneau a quelqucfois plus d'un decimetre ct demi. Entre autres objets de parurc, il y a des colliers composes de tout petits anneaux en ivoire, seuls ou meles d'^maux provenant sans doute du commerce. On i-eraarque aussi d'^norines anneaux cvlindriques . en ivoire , dont I'usage est difficile a deviner. Beaucoup d'autres objets plus ou moins cu- rieux et bien travailles, meritcraient ici d'etre men- tionnes, mais allongeraient trop cette note qui suffit a montrer, d'une part,le degre de civilisation materielle des habitants du Nil superieur, et de I'autrc, le soin ([ue M. d'Arnaudet ses compagnons de voyage ont mis a observer I'industrie et Ies usages des indigenes.
J.— I).
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GrdDiiiuiife et Dictionnaire abreges de la Inngiie berbeie , cninijuses par feu Venture de Paradis. — 1 vol. in-Zi* ( lormant la premiere partie du 7"= volume des Meiuoires de la Socicte de Geographic. )
En 1803, M. Laiigles , I'un des fondateurs de la Societe , et qui , en sa qualite de consei'vateur des ma- nuscrits de la Bibllotli^que imperiale , avait connais- sance du Dictionnaire et de la Grammaire berberes de \ enture, deposes par Yolney a la Bibliotheque, en pu- blia des extraits a la suite du voyage de Hornemann. Les voyageurs en Afrique et tous les orientalistes con- curent des lors le desir et I'espoir de voir publier I'ou- vrage original in eutenso, Des les commencements de la Societe de Geograpbie (1822), la proposition tut faite d'imprimcr dans les Meuioires la grammaire et le dictionnaire de Venture. Plusieurs membres de la Commission centrale, a differentes reprises , renouve- lerent cette proposition. L'occupation do I'Algerie par unc armee francaise vint donner une nouvelle im- portance et une grande opportunity a cette pul)li- cation.
Enfin , au mois de septembre 1839 , le conserva- toire de la Bibliotbeque royale confia a la Societe de Geographie, sursa demande, les trois volumes manus- crits de Venture avec autorisation de les publier, et la Societe pria un de ses membres , M le cbevalier Jau- bert , de suivre cette impression. Celui-ci en fit faire une copie exacte. La meme annee , M. le ministre de la gueire , et en 1843, M. le ministre du commerce, voulurent l)ien accorder leur appui ;'i la Societe pour
( 160 ) subvenir ;ui\ Irais de la publicalioii , ol cV'St alors que 1 impression commenca a I'lmpiimerie I'ojale; tel est le travail qui vient d'etre tcrmine.
On peut regarder cet ouvrage commc le premier en ce genre qui ait vu le jour. II sera honorable pour la France d'avoir, la premiere, fait connaitre les ele- ments de celte langue berbere, parlee non seuloment par les indig6nes du mont Atlas, mais par plusieurs peuplades de la Barbarie , ct par des tribus du desert , depuis rOcean Atlanlique jusqu'a I'Oasis d'Ammon (1) . La connaissance de I'idiome berbfere peut done faci- liter les progr^s de nos armes en Afriquc , aussi bien que I'extension des connaissances geographiques , et meme des relations commcrciales.
La Socid'te de Gdograpliie aura ainsi a se feliciter d'avoir donn^ ses soins a la publication d'un livre aussi neuf qu'important , ct qui etait , sinon oubli^ , du moins sans utility depuis plus d'un demi-si6cle.
M. Jaubert ne s'est pas borne a donner le texte de Venture. Au Dictionnaire francais-arabe-berbere , il a ajoute un Vocabulaire francais-berbere , ainsi qu'un avertissement. Enfm la Societi^ a joint a I'ouvrage une suite d'itin(!!raires dans I'Afrique septentrionale , re- cucillis sur les lieux mCmes par Ventm-e en 1788, •alors qu'il s'ot;cupait de la composition de son ou- vrage. J- — L).
(i) Voy. Meinoires de la Sociele de Geographic, tome IV, pages 3o ct suivantcs.
( 161 )
DEUXIEME SECTION.
Actes de la Societe.
KXTR.VIT UKS I'ROCES-VERBAi: X DES SEANflES.
Prissidence de M. Roux de Rochelle.
Seance dii 5 jniwier 184/i.
Le pi'oces-verbal de la derni^re stance est lu et adopte.
M. de La Roquette, qui remplissait les fonclions de secretaire de la Societe a la derniere assenabl^e g6n6- rale,donne communication du proces verbal de cetle seance.
Les Societes philosophique americaine de Phila- delphie , geograpbique et asiatique de Londres , re- mercient la Societe de Tenvoi de ses Bulletins, et lui adressent la suite de leurs publications.
M. A. Delessert ecril de Calcutta pour demander a la Societe d'etre conserve au nombre de ses corres- pondants; il espere pouvoir lui adresser d'utiles ren- seignements sur les pays qu'il se propose de visiter pendant le cours de ses voyages dans les diflerenles contrees de I'Asie.
M. le D' Vizer, noble Hongrois , ^crit de Comorn , qu'il s'empressera de faire hommage a la Societe de 1. k/cvru'R. 6. 11
( 162 )
soil ouvragc sur Ja Cosmologie , aiissitot qu'il aura paru. Devout: depuis plus de Irente annocs a des tra- vaux scientifiques ct litteraires, il a public un grand nonil)re d'ouvrages ou opuscules, et il serait tres flatte d'appartenir a la Society. Sur son d6sir, M. Jomard propose que le nom de M. Vizer soil inscrit sur la liste dos candidats pour una des premidres places de cor- respondant etranger.
M. Simonds , directeur du Colonial Magazine, adresse a la Societe un precis du voyage que vient de terminer M. Schomburgk sur les limites de la Guyane anglaise. Cette communication est renvoyt^e au comit6 du Bulletin , sur la proposition de M. de La Roquette.
M. Coulier adresse une Note relative aux chilTres de sondage, exprimes sur la carte hydrographique de la baic de Naples, publi^e par le Bureau topograj)luque de cette capitale , sous la direction de M. le colonel Visconti. Renvoi de cette Note au comite du Bulletin.
M, le baron Roger lit une Notice sur des documents relatifs a la S^negambie qui lui ont eteadress6spour la Society par M. I'abbe Boilat, vicaire de Saint-Louis du Senegal. La collection de ces documents se compose de 5 cabiers relies et assezvolumineux. Le 1" a pour titre : Mcpurs et coutnnies des Maiires du Senegal ; Ics 2* et 3* Contiennentdcs Notes en langue des Maiaes du Senegal ; le h' renferme les Prieres puhliques des Mahometans du Senegal ; le 5'^ est une esp^ce d'Album in-Zi°, plus in- l^ressant peul-elre que les preci^dents. Cette collection est renvoy^e au comil6 du Bulletin et a la section de pu- blication.
MM. Jomard et d'Avezac donnent lecture de deux lettres de M. Lefebvrc sur son voyage en Abyssinie.
( 163 ) Cette double communication est renvoy^e au comite du Bulletin.
La Commission centrale proc^de au renouvellement de son bureau pour I'annee ISZii, et elle nomnie au scrutln pour en faire partie :
President. M. Roux de Rochelle ,
V.-Presld. MM. le baron Roger el Daussy.
Secretaire. M. Berthelot.
M. Jomard , en qulttant la presldence, remercie la Commission centrale des marques reltdrees de con- fiance qu'elle a bien voulu lui donner ; 11 presente un court apercu de la situation actuelle de la Soclete et de la publication du dlctlonnalre berbere.
M. Roux de Rochelle , nomme president , se rend pres de M. Jomard I'lnterpr^te de ses collogues et lulexprime, en leurnom, de sinceres remerclements pour le z61e qu'll n'a cesse de montrer pour les Interets et les travaux de la Soclete.
La Commission centrale compose ses trois sections v.i son comlle du Bulletin alnsi qu'll suit :
Section de Correspondancet
MM. Bajot , Calller, Cochelet, Desjardins, Dubuc , Jaubert , Lafond , C. Moreau, Noel Desvergers, d'Or- bigny , Texler, Thomassy , Warden.
Section de Publication.
MM. Albert-Mont^mont, d'Avezac , Denalx , Gul- gnlaut, Jomard, baron de Ladoucette , de la Renau- dlere , de Montrol , vlcomle de Santarem, Ternaux- Compans, baron ^^'alckenaer.
( 164 )
Section de Comptabilite.
MM. Ansart, Coraboeuf, Eyries , Isambert, de La Roquette, Vivien.
Comite (III Bulletin.
MM. Albort-Mont(^mont , Ansart, d'Avezac, Berthe- lot , Callier, Cochelet , Daussy , Jomard , de La Ro- quette , Roux de Rochelle , Tcxlcr, Thomassy.
Seance du 19 Janvier 1844.
Le proces-verbal de la derniei'e stance est lu et adopte.
L'Academie iraperiale des sciences de Saint-Peters- bourg adresse a la Soci6l6 la suite de ses publications pour I'annee 1843, •
M. Jomard donne communication d'unc lettre que lui a adressee M. le D' Montagne , sur un ph6nom6ne observe dans la mer Rouge , le 15 juillet 1843, par M. Dupont, avocat dans I'ile Maurice. La merlui j)arut lout-a-coup telnlc en rouge ; elle etait couverte d'une substance fine, de celle couleur ; M. Dujiont en recueil- lit une ])('tile quantity pour I'analyser; et en ])0u de temps cllcpassa successivcnientdu rouge au violet fonc6 et au vert. Si ce plienom^ne a ete connu des anciens , n'expliqueralt-il pas la denomination qu'ils avaient donnde a cette mer ?
Plusieurs membres rappellent les observations qu'ils ont faites eux-memes sur la nature de ces substances colorantes; et la lettre qui a donne lieu a cette discus- sion est reiivoy^c au comite du Bulletin.
M. Inmard aimonco qu'il cxistc, soit dans les papicrs
( 165)
que conserve la famlUe de Venture , soil dans les ma- nuscrits de la Biblioteque royale , des notions int^res- santes sur les Etats barbarcsqnes , recueillics pendant son sejour a Alger, Tunis et Tripoli ; il signale surtout des itineraires qui conduisent dans I'inlerieur de I'Afrique. Ces fragments, si la Societe les publiait, seraient tiaturellement aleur place a la suite du travail de Venture , relatif a la langue des Berb^res. Sur la proposition de M. Jomard , la section dc publication est invitee a prendre connaissance de ces documents.
La Commission centrale procede a I'election des membres de la Commission speciale du prix annuel pour la d^couverte la plus importanle en geographic , et elle nomme au scrutin , MM. Daussy, Eyries , Jo- mard, de Larenaudiere et Walckenaer.
Sur la proposition de M. Jomard , il sera nomme , dans la procbaine seance , a une place vacante de membre adjoint.
Seance du ^ fevrier 18^4.
Le proc^s-verbal de la derniere seance est lu et adopte.
LTnstitut bistoinque et g^ograpliiquc de Piio-Janeiro adresse a la Societe un exemplaire tie la Flore du Bre- sil, en 11 volumes in-fol.
La Societe royale geograpbique de Londres envoie le dernier N" de son Journal.
M. do La Roquotte odVo , dc la part do j'auleur, M. Delacroix, I'Annuaire des voyages pour IS/i/i; il est pi'i^ d'en rendre compte.
M. .Inniard oonununiquo une lottrr (!<' M. Vibi-ii
( 1(36 )
Gallatin, contenant des indications int(^ressaiiles sur une carte manuscrite des conlrecs situees entre le Mis- sissipi et I'ocean Paciliquc , et il depose sur le bureau une copie de cette carte envoy 6e par M. Gallatin pour la collection de la Soci<!!t6.
La Commission centrale vote des remerciements aux auteurs et aux donateurs, et ordonne le di^pot de ieurs ouvrages a la bibliotheque.
Le nn"^mc membre communique une nouvelle lettre de M. le D"^ Montague , annonrant qu'un naturaliste avait deja observd le phcnomenc remarque I'annee derniere dans la mer Rouge par M. Dupont; qu'il avait examine la substance colorantc a I'etat de vie ) enfm qu'il en avait fait un genre d'algue nouveau de la tribu des oscillatorit^es , determination qui etait aussi celle du D"^ Montagne.
M. Jomard, au nom de la section de publication, fait un rapport sur les Itineraires de I'Afrique septen- trionale avec des notes sur I'Atlas et le Sahara , re- cueillis par Venture deParadis, et il propose I'inser- tion de ces documents dans les memoires de la Societe , a la suite du Dictionnaire et de la Grammaire bcrbers du meme auteur.
Cette proposition est adoptee par la commission centrale, et renvoy^e, sous \r. rapport de la depense, a la section de comptabilite.
M. le baron Roger lit une Notice sur le lac de Garda , sur les cultures de limoniers qu'il a ro- marques sur ses bords, et sur les essais du merae genre que Ton pourrait faire dans quelques departe- ments de la France. Cette Notice , extraite des obser- \alions que rauteur a fail^s ponrlant son flernier
( 1^7 ) voyage en Italic , est renvoy6e an comit6 du Bulletin.
M. Hommaire de Hell presente uu aper^u de ses voyages dans la Russie meiidionale et dans les steppes voisines de la mer Caspienne , et il ofTre a la Soci^tt^ les trois prexnieres livraisons de la relation de ces voya- ges. Cette communication est renvoyd;c au comite du Bulletin.
M. Ansart lit un extrait d'luie lettre de M. Lebas , membre de I'lnstitut, sur son voyage en Orient, et sur I'imperfection des cartes de ces contrees.
Seance du 16 fevricv 18/i/i.
Le proces-\crbal de la derniere seance est lu et adopte.
M. Jomard communique plusieurs extraits de sa correspondance d'Egypte ; il aimonce que le gouverne- ment egyptien se propose de publier un journal scien- tifique sous le litre de Le Loknian egyptien , et dont le plan est ainsi concu : astronomie , cosmograpliie, geo- grapbie , meteorologie , physique , histoire natui-elle , agriculture et horticulture, arts et metiers, medecine et chirurgie.
M. de La Roquette , au nom de la section de comp- tabilite , presente un devis de la depense pour I'im- pression des Itineraircs de Venture , et annonce que r^tat des fonds permet de publier ces documents, a la suite du Dictionnaire et de la Grammaire berbers du meme auteur. Ces conclusions sont adoptees.
M. de Frobervllle lit une Notice sur le progr^s des decouvertes geographiques a Madagascar. — Ren- voi de cette communication au comite du Bulletin.
M. Claude Gay estnomme, a runanimite, menibrr •tidjoint de la Commission rfntrale.
( l<i« )
.\[. Borthelot donno des renseignenients siir la Flore do Rio-.lanoiro , dont riiistltnl liistorlquo et g^ogra- pliiqvio du Bresil \icnl dadresscr un ox(Mnplairo a la Societe ; il re^oit de M. lo Prosidont i"in\itation d'en faire le sujet d'une note pour etro inser^e dans le Bulletin.
OTJVRAGES OFFERTS A I. \ SOCIKT)':.
Seances des 2 et 16 fcvrier 18/|4.
Par rjnstitnt historique et gcographitiiic du Bresil : Florae fluniinensls seu doscriptlonuni plantarum prae- fectura flumlnensi sponte nascentium. 1 vol. dc textc in-Zi, et H volumes de planches in-fol.
l^ar M. le minis t re de P agriculture et du cninnierce : Documents sur le commerce cxterieur , n°* 118 a 131, in-8.
Par M. Homniaire de Hell : Les steppes de la mer Caspienne , le Caucase , la Crimee et la Russie meri- dionalc , voyage plttoresque, historique et scientili- que , J" a i" llvraison.
Par M. Albert Gallatin : Map of the Rocky -Moun- tains, 1 feuille ms.
Par M. F. Lacroix : Annuaire des voyages et de la geographic pour Tannic 1844 , 1 vol. in-12.
Par M. le baron d' Ilonibres : Suite des M^moires et observations dejihysique et d'histoire naturelle, broch. in-8.
Par M, Laf'ond : Voyages aulour du monde. — Mer du Sud , de la Chine et archipels dc I'lndc. 123" , 124% 12 5" et 126'' livraisons.
(La suite des ouvrages ojferts an prochain nuuiero. )
BULLETIN
DE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE
MARS 18/j/j.
PREMIERE SECTION.
MRMOIItES, KXTRAITS, ANALYSKS !■ 1 llAPl'OinS.
LE NIGER, LE NIL, LE GIR,
pai M. C.-G. REICHARD. ( TiMiluit (le 1 .illeinnnd par J. ImiIo;^*' npl)ilpii. )
Le Niger, le N// , le Gi'r , celebres r'niiTcs clans I'histoire de la geographic, sont depuis dix-huit slecles d'une haute hnportance pour le savant comme pour le commerce du monde. Quels efforts de I'esprit et du corps elles ontcoutes pour explorer Ic mystere de leur cours , depuis leur orlgine jusqu'a Icur fin I Que de dangers ontafTrontesetaffrontent encore avecl'emprcs- sement le plus courageux des hommes recommanda- blcs , isoles on en troupe, armes et non amies, qui tantot sc sont livres avcc precaution ou imprudcm- mcnt a des nations artiiicieuscs , mechantes, vindica- tives, ou bicn ont bi'av6 un climat meurtrier pour les habitants du Nord , quelquos uns afin d'agrandir ie I. MAns. 1 . 12
( 170 )
domaine de la science et d'obtenir la palinc d'unc des decouvertes les plus linportantes pour la tieographle , la plupart pour uii Init luercantilo , afin d'ou^rir au commerce unc carrlere nouvelle et lucrative 1 C'est a cette perspective que Ilouditon , Mungo Park, Ilorne- mann , llontgen , Scetzen , Tuckey , Bun khardt , Belzoni , Oudney, Toole, Laing, Clapporton , et une foule d'liommes utiles, ont sacrifie lour vie. Kt cepen- dant ils n'atteignirent pas le but, quoiqu'ils s'en fus- sent approches.
C'est au Pentateuque que nous devons la premiere mention du ISil. Les Israelites Ic nommaient tantol lenr, tantot Anhar Mizraiin , tantot Schikhor. Mais Herodote est le premier qui so soit occup6 dc ses sources; car il raconte ace sujet , liv. II. chap. 32 et 33 , le voyage des Masamons. On a conclu de ce recit que les lacs rencontres et le grand lleuve plein de crocodiles vu par ccs Africains , etaient le Mil , qui , d'apr^s ce que Ton sait . vcnait dc trv;s loin dans I'ouest.
Quant au jSigir, ni Herodote ni le siecle qui I'a suivi ne I'ont connu ; cette decouverte etait r^servee aux armcs romaincs. Plus tard , on supposa que ce fleuvc ctait le ISil, dont on devait, d'aprc>sla tradition, cher- clierla source Ires loin dans I'ouest; et ccpendant Ton ignorait compl^tement la structure dc I'intt^rieur de I'Afrique. Toutcs sortcs de descriptions fabuleuses de son cours furentpubliecs ; c'est ce que firent Mela , et encore plus expllcitement Pline ; Ptolemee, au con- traire, distingua soigneuscmcnt les deux rivieres.
La destruction dc 1 'empire romain empecha toutes les rccherclies ulterieures ; alors les fureurs de I'isla- misme entraverent tniit( s los communications aver
( i7J ) I'Europe, mirent (in a tous Ics Elats do I'AfriqiK^ septontrionalc , ct inctamorphosercnt tellcmont los nations , qu'aujourd'hui encore on ne pent decouvr lenr origine qu'avcc difficulte.
Au lieu des^ recits des ecrivalns classlqiios , on a ceux des Sarrasins, Ijicn plus embrouilles quo ccux des anciens. Edrisl parle de deux Nils, de celui d'E- gypte , et du 7V7///^ Nigionun. Quelques siecles plus tard, Loon I'Africain, se presenlant comme tomoin ocu- laire , soutient hardinient que le Niger de Tomboctou roule de Test a I'ouest; Marniol repete d'apres lui cette assei'tion , ct Labat s'eiroi'ce slnc6reinent de la confirnier. ^ crs la raeme epoque ou Joan Leon ecri- vait, les Portugais avaient ogalemcnt pris des informa- tions sur ce sujet et reru beaucouj) de rcnseignements meilleurs que les siens , toutefois encore obscurs. Mais cociconcerno particulioremont la geographic moderne, et j'y revicndi-ai plus tard. Le principal cbjet de cos considerations est de recherchor, a I'aide de tous les passages des anciens oil il est parle du Niger ct du Gir, quels sont les fleuves connus aujourd'hui aux- quels cos noms ont ete donnes jadis. II en surgira na- turellement un resultal qui no sera pas tr^s satisfai- sant pour un grand nombre de glossateurs modernes.
Le nom de Nigir, de memo signification que celui de Niger, ne se rencontre que chez trois autcurs clas- siques : Pline , Ptolennee , Agathem^re, qui I'ecrivent ISiger, 'Niyctp et N;-yip. Cost chez les deux premiers qu'il faut emprunter des details precis pour determiner la position geographique de ce fleuve. Mais, afin de faire bien comprendre ce qui tient a lensemble de cette ma- tter e , il est necessalro de citcr on onlicr chaqun pas- sago on il on est qnosfuin . do los analyser, ot de ies
( I7"2 ) comparer los iiiis aux aulrt's. Pliuo , en tiahanl (^li>.\ , ch. i) ties fleuves de la Mauiitanic qui se jeltcnt dans I'oc^an Atlantlque , s'exprlme ainsi:
« AJox anincin, qiieni vacant Flt : ah eo ad Dyrin [/loc r/iitii Jtlauti nonicii esse eorii/ii lingtia cnni'enit) ditcenta M. p. intoveniente flnmine cid nonien est\ ior. — Sneto/iiii.t I'didiniis [quern coiimdem villi nius) primus roiiitinnnini duciini tiausgressiis qiioque Atluntein aliquot tiiillinni .-:jjatin,prodidit de e.icelsilate quiUe/u ejus, quofcele/i. (Puis \iennent des remarques relatives a la botanique de ce niont.) — Ferticem al(is,etiaiii a'stnle^opetiri ui{>ihus. De- cii/uis se eopervenisse castns, el ultra ad /hnini)i,(pd Niger Docaretnr, per solitudiues idi^ri pulveris eminentibns inter- /luiii relut crust IS cautibus, Inca inluibitabiliafervore, quari- qiuiui la'benio tempore , expert ur». Quiproximos iiduibitcni snitus ,refertos elephantorum ferarumque et scrpeutium omni "Caere, Caiia rios appella ri. — Et satis superquede Atlante. r>
Su(!!tonius fut consul randoRonie 819, souslc regne
do IScron. (-e fut done cntre les sources du /'ut (Plithut
de Ptolem6e , IV, 1; Phut dc ,loseplie, Jaliquites juda'i-
niics, 1,6), aujourd'liui Tensift, ot de V//sauta [Juntis
do Polybc citdparPiiiio, AuidosAa Sc\lax), aujourd'hui
Morbeya ou Omutirabikh , dans I'cspace intermediaire
oil coule Ic f'^ior ( Diur dc Ptol^mee) , qu'il olToctua ce
passage, dans lo canton a Test de Maroc, ou dans la
partie meridionale de la ])rovlnce de Tedia , ou I'Atlas
estassez 6troit, niaisd'aulant plus escarp6 etplus liaut.
Cost aussi la, surlo vorsant oriental, que so trouvont
les sources dos rivieres qui arrosont les provinces de
Drah et de Tardet. On \olt dans Pline (liv.N , rli. h ) ,
que Suetonius , apres avoir fianchi I'Atlas, entra aus-
sitot en Getulic.
« Tota Gcctidia ad f'unen ISicnix . qui Africnm ab
( 173 ) Ethiopia (Uriiiiit. » Ainsl le IMgerne couluit qu'en G6- tulie ; 11 ne se prolongeait pas au-dela de ce pays. Les Romains entendalent par Ethiopie les portions du Sa- hara contlgues au Di'ah et au Tafilet , ce qui iiiontre qu'Us ii'avalent aucune idee de I'etendue iiiiniease de ce desci't. Pllne ne dit pas jusqu'ou Suetonius est alio sur les bords du Niger, nials 11 est tres probable qu'll poussa jusqu'a Mavln ( Malunoua deLeon), que I'au- tcur ronialn cltecomme une vUle de Getulle, sltuee dans un canton desert, et que Leon place avec ralson dans la province de Sedjclmessa; 11 est egalement vralsem- blable que les Piomalns , qui , dans les expeditions ou ds ne rencontralcnt que tres peu de I'esistance, n'e- talent nuUcnient amis des denil-mesures , oecuperent toutcs les parties du pajs qu'lls reconnurent fertiles. Or, on n'en trouve de traces , surtout dans ces climats brulants , que le long des rivieres.
Mais comnie 11 est bon d'avoir une connalssance plus approfondie de la Cietulle, ecoutons Pline (llv.V, 8) : « Interiori autem ainbitu Afiicce ad niei idiein versus , superque Gmtidos, iiiten>enieiitibas deseiiis^piiini onminin Libya'gyptu^deindeLeaccethiopes habitcint. Super eos JEthio- puni gentes Nigi-ita\a (pio dictum est flumine ; Gymnetes,
Pliarusii, etjani Occanuir, attingentes Pcrorsi.Ab Jus
omnibus iHislte sohtudines Orientem versus usque ad Ga- ramantes, Augylasque et Troglodytas ; verissima opiuione
eorum,qm desertis Ajricce duasMtJdopias superponunt
ad orientem occasuiiupie versos. IMgri /Initio eadcm no turn qu(C iSilo: calaniuni et papyruni eteasdem gigiut aniinan- tes, iisdemque tcniporibus augescit. Oritur inter Taieleos jlLthiopas et OEcalicas. Hojuin oppiduin Alai'in quidain M)/i.tiidi/iibus imposuerunt , Atlantes juxta eos , etc. »
Les auteurs le plus justement reputes pour la geo-
( t"4 ) graphie ancienne (1) recoiinaissent quo la (jctulio est la contree au-dela de TVtlas on sont sltuees los pro- vinces maui'ltanicnnes de Sus , Drali ot Tafilet (jadis Segelmas) , et arrosees par le Drah , le Ziz , le Glr , et par pluslcurs autres rivieres. Copendant il y a aussi des Getules plus a Test, jusqu'aux Syrtes ; ils ha- bilcnt parmi les Nuinides et les Garamantes, sui\ant Strabon (p. 820) ct Florus (IV, 12, § 111). Malsleur demeure primitive ^tait celle dont il viont d'eti'C ques- tion. Ptolemee iadiquc tr6s clairenient la position de
la G^tulic (liv. I\ , 6) : Ynwizai OS TOt~; fxi-j ISIauOiTavcai; h
Agathem^re (lit la memo chose avcc les memos expres- sions : « Au-dossus des deux Mauritanies est situ6e la G6tulie. )) Cette contree avait done la Mauritanie c6sa- rienne au nord , et la Mauritanie tingltane a I'ouest : elle occupait done remplacement des provinces de I'ompire do Maroc situees au-deli de I'Atlas. Strahon (pag. 335) dit positivcment en d'autros tcrmes : ((Au- dessus (au-dela) de la Getulie , et dans une situation parallele , est le pays des Garamantes. »
Cos mots indiquentla memo position que celle qui est donnee par Ptolemee et par Agatliomere.Pomponius Mela (liv. I, ch. /i) dit egalement : «.Natio multiplex fre- quenscjue GcetiiU Tiimpriinum ab oriente Garamantes. n
()) Mainieri, lo* partie ( Afrique ) , 2' spcti<ni , p. ,'559,, etc. D'Aii- ville excliit Sus , ct iloiiiie aux Golulcs la province dc Sah en Mauri- tanie. Toiitcfois, ce nest pas ce (jui results; du texie des anteurs t'lassiques. La province de Zab et le lacSchalt appartenaient ineinc a la Mauritanie Sititensi;i , cuinme on le voil d.Tn-; I'rnropo et d.nis Ammicn. I'line ne nonimc presrpie aueun lieu ilc ce canton, et Ptolemee place trcs loin de la (jctulic le l)as:.in du Gir qui arrosc le ZaI).
( 175 ) Et Salluste (Bell. Jug., 19) : « GietidoruDi magna pars et Numi(Ue ad fluiiien usque Miducharn sub Jugurtha erant. » lis habitaient done aussi le territoire ou le Mul- louia fait la liinite cntre le royaume de Fez ctlAlgerie, comnie autrefois entre les deuxMamitanies.Ptolemee ne dit ricn de plus sur lesbornes de la Getulie,mais il ajoute a cc mot uTToxEiTat , etc.jla particule conjonctive os im- mcidiatement apres avoir determine la situation du ISiger, xat 0 Ni'ysip... et le Niger va du mont Mandron au mont Tliala : la il donnc naissance au lac Nigritis , qui est par 15° de longit. et 18" de lat. II dit aussitot apres : xai Trpofffisvapxrouj... Or en partant des deux points determines au septentrion , qui sont aux naonts Sa- gapola et Ousargala , il n'y a dans Test qu'un seul point determine au lac de Libye , qui est par 36" de long, et 16° de lat.
Ou faut-il cherclier les monts Mandron , Thala , Sa- gapola et Ousargala ?
Le Mandron est une portion du prolongementde 1' At- las ; au sud de I'empire deMaroc , la chaine principalo file a I'ouest , vers le cap Glier. Du point ou I'Atlas tourne a I'ouest, un rameau se detache et court au sud et au sud-ouest , en envoyant plusieurs rivieres a 10- cean. Ptolemee avait dit plus liaut : to Mav^Jpov epo?, etc. (le mont Mandros , duquel coulent les riviei'es depuis le Salathus jusqu'au Massa).
Dans le periple de la cote occidentale, il place Ic Salathus entre le Subus et le Nuius , c'est-a-dire le Sus ctle Oued-Noun. Riley, en sortant du Sahara, suivitla cote, puis, apres avoir passe le Oued-Noun, traversa le lit de quelquesauti^cs rivieres ou il n'y avait pas d'eau . pt arriva a Salamah ou Selemah, ville situee sur une riviere egalement a sec : on v reconnait evidemmentlo
( 17<5 ) Sa/tit/iiis ch'itasdelholemce etla riviuie dii inemenom. Le Massa n'ost pas encore decoiiveit. Lenioiit Mandron est done cclui que tous les csclaves ehretlens, delivres deleurcaptivitc, et sortant du Sahara , voient dans le lointain a droite , depuis les bords du Oued-.\oun jus- qu'a ceux du Sus , lorsqu'ils marcbent vers Mogador. Les passages suivants aident a determiner la position du .Mandron : « 'EXaacrova 6i haiv... il \ a aussi de petites peuplades qui occupcnt la Getulic (bi cote de la nur, telles que les Autolahc, les Sirangajet les Mausoli, jus- qu'au mont Mandron. » Plus loin : « Kai pera^u fjh toZ
Mavoooi. ct entre les nionts Sagapola et Mandron, il y a
les Salatlii, les Dapbtbita% les Zamazi, les Arocc;B et les Tecpani, jusqu'aux Nigrites elbiopiens. » N'a-t-on pas la les villes suivantes : Salamatb , Tefetneb , Azamor, iMaroc , Tefza (1) , encore florissantes de nos jours , rangees sulsaiil Tordrc oii dies doivent letre ? Elles bonl de lenipire de Maroc.
Malntenant passons au mont Sagapola. II est plac6 au nord du Mandron , et par consequent fait 6galement parti(! de I'Atlas , puisque Ptolemee dit : X^' ov o SoC?o? rrsTorpb; pn (emboucbure du Subus... 9... 25). Ce serait le Sanbaga d'Al)oulfcda, que Ptolemee semble etendrc done uu peu plus vers lesud; niais c'est uii(> partie du
(i) A \<i verilc' , Pti)leiii('e a coiiiuiis lino rneur tics |i;ii(loiitKil)Ie (hiiis la (iisposllioii (;r*Hr|iM]ilii(jiie dcs iioiiis (le ces villrs, sur Icsfiticllcs il ii'aviiit |).is d'cli'nieiits de dcleriiiination , narce (|iril en:!)!.!!!? les IIOIIIS imiiijunes ; h i'exceplioii de S.ilatlms, il traii-poi te l(;s aiures c'li Lyliic, au lieu de les iiiotire en Mauritanie ( iv. i ). Mais il est presuinajjle que dans oetle partie ineridionale de la Maurilanie , ii)al;;i<' les liinitcs natunlles, des villes {je'tuliennes ont pxisu' pariiii lelles i|iii ( laiciit |)ii>|)i fiiieiil iiianiiS(|ti(\s ; il iii est dc iiu'miic au- I'jind'liui.
( 177 ) liaiit Atlas merne. Celui-ci est a roiiost du Nigir. A Test, estle montThala, vis-a-vis du Mandron, et I'Ousargala vis-a-vis du Sagapola : done le Thala est au sud de I'Ou- sargala. II n'y a rien dc positif a dire sur le Thala ; 11 est dans un canton si recule dans le Sahara , que Ton n'a pu trouver aucunrenseignenient sur une montagne ou une chahie de ce nom : c'est pcut-etre une ville sur une montagne , ce qui lui a valu d'etre di^signe par le mot i^jo;. Qulconque a la moindre hahitudedesrecher- ches dont nous nous occupons comprendra alsement que ce mont Thala ne pent etre le Tala de Salluste (B. J. 75), et de Strabon (831), le T he/e.p te dcs itineraires, dans la Numidic orientale, et situe a 100 milles g(^o- graphiques du premier.
Main YO(i.iarga/a est incontestablemcnt le Goi/ar^ala de Jean Leon (p. 5 et 465), le Faiechm d'Edrisi, VOur- gala de Shaw et de tons les modernes. Bien que nous n'ayons pas encore une determination geographicjue tres precise de sa position, on peut cependant, d'apres Ptol^m^e et Shaw, le placer avec assez d'exactitude par 32° de latitude, au sud-ouest de Touggourt ; ilestalors a peu pros sous le meme jiarallele que Sagapola,et au sud de la pi'ovince de Zab , ou pi u lot dans sa partio meri- dionale. II parait aussi , d'apres Edrisi, que le terri- toire dc Vourgala a ete considerable et a embrasse toute une region montagneuse qui aura emprunt6 son nom de la ville.
De plus, Ptolemee a place la riviere de Darat sous ce parallele : Trpb; ut-ar.u^oiav , etc. (et I'unlque lieu de- termine dans le sud (pres du lac de Libye) : il y a deux determinations sur la riviere de Darat : 26° de long., 17" de lat.; 2'i long., 17 lat. ); mais la traduction la- line a au conliairo 21" do long.. 17" dc lat.; 21 long.,
( 178 ) 13, 30 lat. ). D'apres les chiirres grecs , la ligne indi- queo court de I'ouest a Test , tandis que d'apres ceux clu latin, elle va du nord au sud. Le dessln il'Agatlio- da-uion est conrorme a cette derniere disposition , ct fait en consequence venirdu sud un affluent du iNiger, ce qui ne pouvait pas etre le sentiment de Ptol6m^e. Le Darat , ou Daras , dont Pline fait mention , est , suivant une explication extrcmoment simple, surtout puisqu'il est cit6 comme voisin du Niger on Getulic, le Drah (Dara, Darha) de Jean Leon (p. 451 et 563j ; ct par les determinations cities plus haut, la ligne indiqude, n'im- porle quelle ait une direction de Test a I'ouest ou du uord au sud, pourrait avoir eu pour objetdemarquer le cours de cette riviere dans I'interieur ; ce cours , de memeque celui des aulres ri\ieres de la Getulic, ay ant 6l6 donne d'unc manidre confuse au geographe.
Les Melanogetules t^laicnt repandus cntre le Saga- pola et rOusargala. Ptolemee s'exprime ainsi sur ce
sujet : (( Ka'c ib ({Qvc;) twv MfXotvoyaiToOXwv ct la nation
dea Getules noirs qui occupe la conlree cntre les monts Sagapola et Ousargala. » On voitcncoro aujourd'liuidans ce pavs le melange de la couleur blanche et de la noire a tons les degres; iln'est pas neccssaire'pourcelad'aller a 300 milles geographiques plus au sud jusqu'au Jo- liba. Les habitants du Drah sont presque noirs , ainsi que nous I'apprennent Jean Leon et levoyageur Scha- biny.
Pline ne se borne pas a donner une determination generale , il nous fait connaitre plusieurs noms de penples qui lui etaient parvenus par les relations des guerrrs de Suetonius ct de scs successeurs , et par les t-critsdu prince Juba , tres inslruit dans la geographie de re pa}s. On les retrouvc sans grande dilliculte , surtout a I'aide dc louvrage de Jean Leon. Les Cannrii
( 179 ) (V, 1) qu'il place dans les I'orets voisincs de la Gt-tulie, car Suetonius n'alla pas au-dela, liabitaient done Ics cantons les plus fertiles de I'Atlas : ainsi 11 faut les chcrchcr du cote , et nieme si pres de la cote qu'ils pus- sent occuper aussi les iles Canaries , dont I'une etait nommee d'apres eux. Plus d'un temoignage montre que les iles Fortun^es, si renonimees par leur fertilite, «^taient habitees par des peuples mauritaniens et gelu- liens. Ptolemee cite une des iles de I'ouest en la nom- mant : « Hpaj (H>(ou)... I'ile (du Soleil) de Junon , qui s'appelle aussi Jutolala.n Elle a ete chercli(^e parmi les Piipiirnria' inxnia' de Pline , parce qu'il les place a part, quoiqu'il indique confusenient Icur distance du conti- nent; elles ne peuvent etre que Madere et Poi'to-Santo: ainsi I'ile de Junon serait ]\Iadere, la plus considera- ble des deux ; elle aurait ete peuplee par les jiutolalcE , venus de la cote voisine. Ceux-ci sont les niemes que les Aiitololes do Pline et V Antolola civitns de Ptolemee. Je dis venus de la cote , puisque Ptolemee place cette ville dans la division de la cote de sa I'egion du Nigir, ou de la cote de lOcean au sud de rembouchurc du Suhus (Sus) : c'ost pourquoi je pense que cette ville cotiere, avec son teiritoire, est Aquilon ou Agulon, ou Aquelon, avec un cap du nieme nom par 26° 1(3' de latitude. Cenom rappelle, et Ion enpeutconclure, que les habitants de cette ville etaient aussi des Canariens, et ceux-ci une tribu getulienne. Les philologues qui s'occupent de I'etude des langucs ont trouve de leur cote que la langue des Guanchcs , Iiabitants primitifs des Canaries, aujourd'hui eteints, etait la meme que celle des Bcrberes repandue dans toute I'Afrique sep- tentrionale , ct divisee en quatre dialectes principaux peu dilTerents les uns des autres. Done Pline a raison
( 180 ) dc nommer les .tntolala- uii peuplc ;;eUilioii ; et Ics Berb6rcsqui liabitent le haut Atlas, aliisi que la parlie inonlagneiisc ties provinces a I'ouest de ce inont jus- qu'au territoiro de Tunis, sont inconteslablement les descendants des Getulieus.
Ailleurs, Pllne parle des Nigriice (V, 8), ainsi nom- nies dapres la riviere, suivant son propre temoignage, et non d'apresla couleur noire dc leur poau ; jiar con- sequent, ils deuKHiraicnt lelong du Aiger: c'est ce que disent aussiStrabon, Ptoleniee et Agath^niere. Slrabon les place avec les Pharusiens , Ptoleniee un peu au nord du Aiger^ ensuite Pline noninie les Libncgyp/ii , les Leucfethiopes , les Gyninetes , les Phariisii et les Pe- rorsi , comnic ceux qui babltaient au-dessous des AV- gritcc ou dans leur voisinage, t"l (jul aj)parli'naicnt a la Gctulie. Les deux premiers peuples, que les autres g^o- graplies connaissent aussi , out des noins composes , et par consequent nc forment pas des tribus speciales; ils etairnt d'origine moderne , provcnant de niaria- ges enlrc des families noires et des blancbes : aussi ces noms disparurcnt avec les dominations romaine et grecque, quoique les peuples melanges soient rest(5s jusqu'a present. 11 nc iaut done pas supposer ici que les anciens aient coniui la \eritable Etbiopie ou le Soudan.
On a cru, d'apr^s une meprise 6tymologique, que le mot gynuietes signifiait des honnnes nus ; mais yupvylj ( genitityup^rirs;) veut dire un velite ou bomme arme ci la legere. Toutefois, ce nom pent avoir ete un simple jeu dc mots de la pari des conqucranls ; il sc relrouve cbcz Jean Leon (p. ^60), kqiiel])ar]ed'une tribunom- mee l)t'iii-Gniuni , liabilant un canton siu' le Gir a 50 milles Italiens de Segelmessa. Les Roniains peu-
( 181 ) \ent avoir mctamorpliose ce mcldc (jjninetcs, vt cru qu'ilsavaient trouvc! son crigine, ])ulsquece pouple ge- tulien ne consistait qu'en vclitos. Quoi qu'il en pulssc eti'e , le mot goimii ct Ic lieu ou, apres mille ans, nous retrouvons cette trlbu , sont loujours ties temoignages importants poui' I'identite des noms ancien et mo- dcrne.
Les PItanisii de Pline ot de Mela ( Pluuirnsi de Stra- bon , Phoritsi et Phaiiriisl de Ptoleniee ) so retrouvent dans une \ ille dont les ruines subslstent encore , sous le nom originaire de PharaoJi, dans I'Atlas, sur le che- inin de Taiilet a Fez, et a 6 ou 7 journd'es de route de la premiere de ces villes. Les Perovsi , relegues vers la cote, nc peuvent plus etre expliques de nos jours , et vralsemblablement sont entierement fondus avec d'au- tres jieuples. En revanclie , on decouvre les Dlausoli de Ptoleniee dans les Mouselniiiis ou Mouselemins, qui mfenent une vie aussi errante que les anciens Ge- tuliens : ces Dlausoli , places par Ptolemeo pr6s des Aittolola' Qi des Siraiiga' , absolunient inconnus, sont ainsi Iransporles loin de chez eux.
Enlin , Pline indique avec une grande precision les peuplos ou les licux entre lesquels le Niger prcnd sa source : c'est entre les Tarcici q\. les OEvaUcw, dont la ville de Mavinetaitsituee dans un canton isole. Par I'e- pithete d'.'Ethiojxts , il les range parmi les peujiles noi- ratres de la Getulie. Nous les renconlrons sous ce memo nomde Tercalti chez Jean Leon (p. 5) panni les villes de cepavs; on lit Farcala (p. /i60) an nombre des lieux decrils plus en detail: ainsi on pourrait deman- der si c'est le meme. Dans la carte dressee d'apres I'ouvage de JoanLcon, on volt Tarca/n, et a cot^, Tar- qiinlce [xtpuH : ainsi i'arccld parait elre r.ne fautf d'ini-
( '82 ) pression ou (I'l'dlluro dans lo manuscrit. Dc pari-illos inrulc'litesserencontrentchcz Jean L6on. Mais cot autcur place Farcala sur unc petite riviere a 100 millcs italicns tie I'Allas et a 00 de Segclmessa , ot la carte le inot a Toiiest dii Ziz et du Gir. II y a done dcs motifs sudi- santsdelercgardercomnielc /"n/r/c/jpuisquonletrouve vers la source des rivieres de la Getulie. Mainlenant la ville de Mavin peut servir a decouvrir Ics OEcdIinv, un peu enigmatiqucs. Jean Leon decrlt (p. /|50), sous un noni p(Mit-f'tre plus correct , Maniomi comnic uno ville gramlf , peuplee et forte qui appartient a Segcl- messa. On peut done aussi en toute surete prendre le nom (X'OEcalica' pour cclui de la peuplade (jui occu- pait le terrltoire de Segclmessa. .Mavin elait alors uno ville si iniportante qu'elle parut remarquabic aux Re- mains. Plus loin, nous parlerons encore de ces (^ca- licie parmi les villes que Ptolemee place sur le Nigir. Pline ne nous dit ricn sur la fin du JNiger, parce que lesRomains nc jugerent probablemcnt pas quo I'ondut s'en occuper a cause des deserts inbabilables on cette riviere continuait son cours : ce point resta livre a leurs conjectures ou a colics d(> quclques uns de Icurs savants.
En revancbe , Ptolemee nous a donnc une topogra- phic bien plus ample des plaincs du Nigir. II partage tout le pays baign^ par cette riviere en quatre divisions (Tpr;,uaTa):«. Ic long dc la cote; b. autour(iT£,'.i)du Nigir; c. au-dessous(07rc. ) ; d. au sud dc cette riviere. Ainsi par I'expression u->, , on pent entendre le nord. II est tres probable quil sesl lui-meme fait cette division : ainsi des positions faulivcs ont pu s'y glisser d'aulaiil plus aisemoul. \ oyons maintenant , ])armi les vingt- quatro \il[('S qiTil nommo, qucllcs soni crllcs que nous
( 183 ) sommes en Olut de ledouNor et do reconiuiilre coinjiK," exlstant encore,
a. Le longde la cole. — II a\;iil cirja Iraite ccUcpartie dans le periple oil il a parle A'Autolola civUas et de Salathits cU'ilas; nous Ics connaissons done. Mainte- nant on remarque Ta<j^ana dans linterieur du cote du mont Mandron. Cette position nous doit convaincre que c'ost Tagavost, dans la province de Sus, le seul lieu sur lequel on puisse etablir une comparaison.
b. yJutotir du Ni'glr, — Je trouve Thaloubalh dans le Tafilet : c'est la capitale actuelle de la province de Se- gelniessa; la ville de cenom etait detruite et abandonnee d^s le temps de Jean Leon. On ne pent soutenir avec quelquefondement que Tafdet , bien qu'elle ait eterc- batie , et augmentee dun palais parce qu'on y a trans- porte la residence du souverain, n'ait pas existe anpa- ravant. Mcdakhat , vraisemblablenient Mfl;:^///:/^, dans le Gir, a 50 milles (italiens) de Segolmessa , suivant Jean Leon (p./l62) ; Touccabath , le Touggedout des cartes.
c. Sous on aunorddii N/gir. — Posside: ffean Lt'on parle (p. /|65) dun canton de Beni-Besseri avec trois cha- teaux au pied de I'Atlas, et dontles villages obeissaicnt aun seigneur de Doubdou. Thige : c'est Toudegn, sur la riviere du nieme nom , Todgn de L^on (^60) . Tagama ne pcut etre que le Tagamadert des cartes : il est sur la rive gauclie du Drab.
a, Au sud (In ISigir. — Salouca : la carte de Ptolemee le place sur le Nigir niemc. Mais cette position est d'A- gatliodajmon , car Ptolemee ne dit rien de plus precis qu'au sud de la riviere ; on est tentc de prendre ce lieu pour 5'<'i,'e/wd?j.?(7,dontle nom serait abrege. Jean Leon le faitderiver (p./i57)de Sigillutn Messce: on peutapprecier cette remarque pour ce quelle vaut. On ne pent nier
( m )
quelque rcsscinblancc cntic co nometcclui dc Snlone; di^ plus, suivant Ptolenioe, cctto \illc est an siul du Ni- gir : or, Sege.'messa est cfTcctivenicnt au sud <lu (iir ot sur le Zi:- , clrconstance qui vicnt a I'appui dc la con- jecture. Enfin il y a une sinillitudo ('vidente enlrc Ic noni des OEcaliccc ou OEca/ices de Plinc et Sege/oiessa; ct si celui-ci est aussl avere que le premier, Plineauraitem- plojclc norndelapeuplado pourlavllle, ctle vrainoin aurait ete corrompu. Cc quil y a do bien certain, cost queles OEca/uri'hah'ituwntiwcsdu Niger. Taniondocann est peut-etre Ic T/inmageroud dcs cartes , sur le Drah. On peut encore ajouter T/innme/ifn ,qm est du bassin du GirdePtolemcc , puisque Jean Leon parle(p. 459) d'un chateau dc Hoii'i c/er/gi, situe a ISmillesdeSegelmessa, et ball par les Arabes; on no peutnon plus s'onipecher derattribuer a la Getulie, puisque I'aualogie des noms f stcncore plus grande. — Doitdoiini : nous venons d'ap- I rendre dc Jean Leon que les Beni-Besseri etalent sou- mis au seigneur dc Doiibdoii ; ainsi Doudoum est iacile a expliquer.
Or, si parmi les \ingt-qualro villcs du Nigir , pres de la moitie est deja reconnaissable , ct si sur cette rnoitic la plupart, comme Antololn , Salathus, Tagana, Pessiile , Thige, laga/im , Thiiinclithn , Doudoum , sont detcrminees avcc certitude , ct si toutes ont ete trou- >ces en Getulie , on acquiert par la I'assurance posi- tive que Ptolexnce , de meme que Plino , donne a ce pa\s le Nigir et tous les licux quil haigne ; mais le dessinateur des cartes, qui a plac(^lenomdc Getulie dans un espacc absolument separ6 du Nigir , comme si c'e- lalt lui canton lotalement dilTercnt , n'a ])as compris Tauteur d'apres kqutl il lia\ail]alt.
11 me parait egalement neressairc do faire une re-
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marque sur i'embouchure du Dara , que Ptol6in6e suppose dans I'Occ^an ; il i'indique dans le periple a 15" de latitude : ainsi a peu pr^ssousle meme parallele que la partie meridionale du Nigli'. De nos jours, jjersonne ne sait rien d'une embouchure de fleuve au point de- signe par Ptolemee ; on nc trouve meme, sur les cartes les meilleures et les plus recentes des Anglais et des Fran^ais ou les cotes sont dcssinees soigneusement depuis 25 jusqu'a 28° de latitude nord, aucune trace de riviferc, ni aucune coupui'e dansic rivage, g6n6rale ment rocailleux , qui puisse au moins faire supposer une emboucliure dans cet intervalle oil elle devrait se trouver. Les recits de Brisson, d'Adams, de Rilev et des autres vo\ageurs qui, en soriant deresclavage, ont pris leur route dans I'ouest du Sahara pour passer I'Oued- Noun , non plus que les recits des Maures , ne fournis- sent rien dont on puisse tirer une solution certaino. Jean Leon, qui (p. Zi51) depeint le Dara comme sem- blable a une mer, au temps des pluies d'hiver, ne dit rien de son embouchure. Elle n'est cepcndant pas de I'invention de Ptolemee , puisqi:e i'line parle (liv. V, chap. 1) du Dara parmi les fleuves cotiers , et ajoule qu'il nourrit des crocodiles. Peut-etre cette embou- chure a-t-elle ete tellemcnt obstruee par les sables, que de la mer on n'en peut plus apercevoir de traces. Revenons maintenant au Nigir. La carte de Ptolemee marque qu'il recoit quatre affluents, mais le texte n'en dit I'ien ; ils sont done de la creation d'Agathoda^mon ou de quiconque a pris cette licence. Toutefois , il est evident que quand la carte fut dessinee, on savnit que plusieurs rivieres qui coulaient en Getulio descendaienl de I'Atlas, et le cartograp'ie aura eu I'idee de faire de toutes des affluents du Nigir. Mais la geographie nio- I. MARS. 2. 1,3
( 186 ) flerne sait, avec plus d'exactitucle, que les trois priiici- pales rivieres, le Drah, le Ziz ot le Gir, ont chacune leur cours separe. Ptolemee parle de deux lacs, le ISi^riles dans I'ouest et le Lijb/n dans Test; c'est ce qui r<5sulte de ses ddtcrminalions geographiqucs. II no dil rien du cours de la riviere de Niger, ni si lo lac so dirige a Test ou a I'ouest; mais des mots jroisr t/,v NiyiiiTr,^ JiWiV, et de ce que rtolcniec place ce lac a I'ouest, on a voulu d^duirc que la riviere coulait de Test a I'ouest. Toute- fois les mots cites ne d^cident rien ; la carte montrc une riviere allant du mont Mandron au lac Nigrites, et pouvant donner naissance a celui-ci ; mais comme elle fmit sur la carte par arriver au lac de Lybie , on pour- rait tout aussi bien en conclure que le cours est de Touest a Test; cependant il ne faut pas oublier, et je le repelc , que cela est ainsi seulemcnt sur la carte, puisquo Ptoh'-mee ne dit pas que le Niger entre dans le lac de Lvbie; il se borne a declarer qu'une position de- terminie au sud , dans lest de la Getulie, sc trouve sur ce lac. En definitive, il est inutile do discourir da- vantage sur ce sujct, la geograpbic moderne nous mon- trant les cours d'eaux en Getulie sous un aspect tout different. II en resulte, ainsi que de toulesles descrip- tions, qu'excepte le lac ou sc jettc le Drab, et qui n'ap- partient pas a cette contree, aucun autre ne peut avoir 6te dans la pensee de Ptolemee , puisque le lac Nitrites tirait son nom de ceiui de la riviere, qu'on n'en ren- contre aucun dans I'ouest, et que bors le Drab, toutes les rivieres coulent au sud-cst vers le desert. Or Jean Leon nous apprenant que de tous ces cours d'eau les principaux sont le Ziz et le Gir, qui se dirigent vers le desert, et que cbacun se terminc dans un lac ou maraisparticulier, nous sommosforcesd'enreconnaitre
( 187 ) un pour le l\/g/r : or, qui ne choisirait celui qui porte le nom de G/r, si proprc a faire decider en sa faveur? Aloi's I'autre riviere formerait le lac de Lybie. Ptolemee a doime au Nigii- une longueur considerable, quoique non determinee : ainsi on pourralt supposer, non sans fondement, que le Gir parcourt ini espace plus grand , et que son lac est sitae beaucoup plus au sud que les ouvrages geograpliiques ne I'indiquent. Ailleurs, Pline, qui donne des details sur le Nigir, se tait surl'elendue de son cours, ce qu'il n'aurait pas fait si cette riviere eiil ete comparable a des flcuves gigan- tesques , tels que le Nil , le Joliba et le Senegal. Ce que dit cet auteur sur la junction de ce cours d'eau avec le Nil nest, comme il le declare, qu'une simple conjecture.
Maintenant deux questions se presentenl : 1° Com- ment est-il arriv6 que, des le temps de I'antiquitc!! clas- sique , on ait enonce la supposition cjue le Niger com- miniiquat avec le Nil ? 2° Pourquoi , dans les temj^s modernos et jusqu'a ce moment , a-t-on regaide le Joliba, decouvert par Mungo Park, comme le Niger des anciens, etlui en a-t-on impose le nom? Cesdeux questions ont une connexion si inlinie , qu'en r(^pon- dant a I'une , on donne la solution de I'autre.
En remontant a I'antiquite, nous trouvons dans Pline (liv. V, cb. 9) un passage ou est exposee tres clairement une indication qui a donne naissance ei I'o- pinion relative a I'identite du Niger et du Nil :
« JSihis incertis 01 tiis fontibiis it per (Icscrtd e( aiflenlia , ct inimenso lonqittidiiiis spntio aiubnlniis^faniaqnetnutuin. . . cognitus , sine bell is , qiue ca'teras onmes terms iin'encrc Originein [iit J(tba rcrjjotnil ofjidrcrr) in inoiitc ir.f'eriaris Mauritania' , non pram/ Occaiio hnbct , lacit profiniis stn-
( 188 ) gnante ,(jtiein vocant Ail idem. Ibi pisces reperiuniur ctla- hefce , coraciiii , siliiri , crocoflilus qiioquc Iitde ob argu- ment um hoc I\iii ortus credit us , Ccvsarecc in Iseo dicatus, ab eo spectatur hodie. Prceterea obsen'atuin est , prout in Mauritania nives imbresi'e satiaverint , ita NUiim incres- cere. Ex hoc lacu profusus indignatnr fluere per arenosa et squalentia, condltcpie se alinuol dierum itinere. Max alio lacu majore in Cwsaricnsis Mauritaiuce gente Massocsylum erumpit , et hominum cwtus velali circtiDispicit , iisdein animalium argumentis; itcruin arenis receptus , conditur rursiis XX dierum desertis ad proxinios /Ethiopas ; atcpie ubi iieruin senserit honiinem , prosilit Jbnte (ut verisimile est) illo, quern iXigrin -vocavere. IndeAfricam ab /Ethiopia dispescens , etiamsi non protiniis populis , feris tamen et belluis frequens , sih'arunique opi/'cx , medios J£.thiopas secat, cognoniinatus Astapus, quod illaruin gentium lingua signi/icat aquam e tenebris profluentem , etc.)) Et ailleurs (liv. VIII, ch. 21). « Jpud Hesperios /Ethiopas fons est Nigris , ut existiinavere , A Hi caput , ut argumenla qua' diximus persuadent. » Ce qui se rapporto au passage d^ja cite precedemment.
L'un etlaulre prouventque Pline avail puise ses opi- nions dans les ecrits de Juba, et comme, toutes lesfois qu'il est question de la communication desdeux rivieres, il ajoute francliement : LtJuhapotuit exquirere^ — ut i)e~ risimile est , utplerique existimai'ere, — ut argwnenta qua; diximus persuadent, il sc borne done a adoptermodeste- ment le sentiment de Juba, sans pouvoirciter a I'appui despreuvesqu'ilaurait acquisespar lui-meme, ctdonnc ainsi a entendre que cola pourrait etre autrement. Ces motifs sont simplcment : la coincidence du deborde- raent du Nil avec la saison des pluies dans la Mauri- tanie, I'identite des vcgetaux et des animaux. II n'v a
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consequemment pas de recit positlf d'un temoin ocu- laire de cette communication, comme il ravoue au commencement, disant que Ton ne sait quelquecliose sui- la source mysterieuse du Nil que par la tradition, et que Ton n'a I'ien appris par los gucrres avec les peu- ples de ces contrees. L'idee de I'identlte des deux fleu- ves, deduite de motifs si insuffisants , porta les erudits du temps a cliercher leur source dans les deux Mauri- lanies , et a conduire le cours de leurs eaux a travers les deserts de sable qui leur etaient entieremont in- connus, jusqu'aux contrees du Nil superieur, sur Ics- quelles ils avaient des connaissances plus precises. lis savaient Lien, vraisemblablement , d'apres le recit d'Herodote et d'apres I'expedition de Meroe , que le Nil venait de tres loin dans I'ouest ; c'est aussi le senti- ment d'Avienus [Descripdo Orbis terra' , v. 1053) :
S'llis iilj orcasu vaslnni decunere IN'iliiiii,
qui regarde cette opinion comme generalement con- nue. Les anciens savaient aussi que le Nil sort de lacs auxquels il donne naissance : de la leur lac Nilides ou Niichul (Mela, III, 9; et Orose, liv. 1,2). Suivant le temoignage d'Hadji-IIamet , rapporte par Riley, le lac Tchad porte aussi le nom de Nii , qui serait I'abre- viation de NuchuL Mais les anciens n'ayant nulle idee de la largeur immense et de la nature du Sahara entre la CetuUe et les pays du Nil superieur ; et de plus regardant comme tres proche de la Getulie Vt- thiopie occidentale ou Soudan , et meme les sources propresdu Nil, suivant ce qu'on avait appris a Hero- dole, et que bous devons en partie reconnaitre dansle lac Tchad , ils ne pouvaient conccvoir I'impossibilite physique d'une telle communication ; ilscroyaient done
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que les deux livieres etaiont beaucoup j)lus rappio- ch(^cs I'uno (Ic I'autre quo ne nous Ics montreni les decouvcTtcs gt'Ograpliiques i'aites de nos jours ; ils or- iiL-renl ces idees liardics, ot d'autant plus admirables a leurs yeux qu'clles «itaionl plus exlraordiuaires , de descriptions poetiques , de disparitions , de reeippari- tions , de satisfaction de rotrouver des hommes, etc. , afin de donner du relief a lours conjectures et de les rcndre plus croyables. Enlin Pline fait si bien , ({u'il s'embrouille dans le tissu qu'il ourdit, et se perd dans une riviere imaginaire, VJslnpits (Nil d'Abyssinie), ou du raoins qu'il rcgardeleN'il veritable et le plus conside- rable comme un affluent decelui d'Abyssinie. On remar- que cependant quo cotte composition poelique soinble se fonder surquelque chose que nous avons appris quoique tres iniparfaitoment : au sud du lerriloiro de Zab et dans la subdivision nominee Ouacb-ig, coule une riviere assez grande qui traverse I'ancienne villede Tong^onrt {Teg- gort de Jean Leon, p. 6, et Tc/cho/t, p. ZiO/i ; I'ltviumiulti de Ptolemee) ; elle disparait en quelques cndroits, con- tinue son cours sous terre avcc un bruit que Ion en- tend , cnsuite reparait , el se reunit a I'Ain-Djoddi , principale riviere du Zab ; elle appartient au bassin de I'Ain-Djoddi, et prend sa source dans I'ouest du canton d Ouadrig : les auteurs anclens, el Ptolemee meme , qui s'etait procure des renseignements certains surcetlecontree, savaiciit quelque chose de cette riviere singuliero; il la place avcc beaucoup do ralson dansle sysleme de son (ur; car en donnant des details sur ce
dernier, U dlt : "o- xat oia/.iTruv, xaiwiajav, iJTrb yv' Evt^^-'' '"'"*"
"SiiJoocriv... etc. (etla riviere qui disparait, et qui, suivanl ce que I'ou laconte, apres s'etre cachee sous terre, reparait comme une rivi< ro dilTerentc, olc.) II semhio
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qae,du temps de Pline, les armes romaines n'avaient pas encore pen^tre jusqa'a cette rlvi6re, aulrement "n n'aurait pas fait uiie application aussi erronee de cc plienomene au Niger ou au Nil. II sera encore question de cette rlviei-e a propos du bassln du Gir.
Ptolemee , qui, pres de cent ansplustard, avail re- cueilli des notions plus claires de I'interieur de I'A- Irique, s'est completcment abstenu de ces descriptions fantastiques , et a laisse son Niger ce que la nature du terrain I'a fait, une riviere de pays aride. Mais il ne sail rien encore de rimniense Sahara au ccEur de I'Afrique; car il remplit sa Libye interieure , qui est cet espace , trop retreci par lui puisqu'il place le A /gir et le Gir trop au sud d'une quantity de peuples dont quelques uns peuvent etre encore reconnus surlalisiere orientale du grand desert a I'ouest du Nil. Ce sont les Mi/iiaci (au- jourd'hui Mi/iii) ; les Do/opes (Dob-el-Dolib) ; les Na- riosbes i^Nasboiisan) ; les Amiice [.Irnien) ; les Nabalhrie \El-Naheli)', les Gongahi' [Gondjar<i). Lesautres etaient probableinent , comnie ceux qui viennent d'etre nom- ines, des villes ou des oasis voisines des Garamantes et des Getules. II transporte sous I'equateur les limites de I'Ethiopie, de la position m^ridionale de laquelle il doit avoir eu un pressentiment, et nous donne par la inie id(^e beaucoup plus exacte de I'interieur qu'on nc parait journellement vouloir la trouver dans son livre. La seule errcur qui tombe a sa charge consiste principa- lement dans sa graphique fautive : il diminuela latitude du Nigir et du Gir de 10 jusqu'a 15 degres, et place le lac Nigrites dans I'ouest, au lieu de le placer dans Test.
L'interieur de I'Afrique resla intact et ne recut nul eclaircissement pendant toute la duree del'obscurit^ du
I 192 J moyon-iige , jusqu'au moment uii Eclrisijela une nou- velle liimicre surlc Soudan. On no irouve cliezluinullu Irace de cetto anclenne opinion, si lonf,nemps propague, de la communication du iNiger classique avec leiNil. En ofTct, bienqu'il path d'un Ai/us Ai^'rorum que Ton peul reconnaitrc a tout liasard])0ur lo Joliba, cependantce serait prendre une peine inutile que de chercher I'em- bouchurc de ce fleuved'apves son nom inconnu. Aboul- fedane ditpas unmot soit duJNigcr, soitdu Joliha; tou- tcf(.is, dans son Afrique, il place le desert de Sahara entre la Libje et le pays des Noirs, qui sont lesnegres du Sou- dan , mais ne sont nullement les Aigritcc des anciens. Enfin parut Jean Leon I'Africain, quiprononga le nom de Nigritie (p. I\). II la limitc a Test par le royaume de Gaoga, a I'ouestpar celui de Gualata ("NValet de Park) ; il la fait toucher au nord a la Libyc, au sud a I'Ocean ; ensuite il continue ainsi : « Le Niger traverse le milieu » de cctte contree; il sort d'un grand lac du desert de )) Seu qui est situe a Test, court a I'ouest, et tombe dans » rOccan. Nos geographes pr(^tendent que le Niger est » un bras du Nil qui se perd sous terre , el forme ce » lac dans I'endroit ou il reparait, Quelques unsdisent B qu'il sort du flanc occidental de certaines montagnes, » et en coulant a Test devient un lac ; mais cela n'est )) pas vrai; car j'ai navigue sur ce fleuve pour aller du » royaume de Tombutlo a ceux de Ginea et de Melli , » qui sont plus a I'ouest. — Les plus beaux royaumes » desNegres sont sur le Niger.)) Dans un autre endroit, Jean Leon dit : « Au-dela de Cabra, le Niger coulc a )) I'ouest. )) — 11 se vantc (p. 7) d'avoir ^te dans quin/.c royaumes du pays des Negres « ... C'etaient Gualata , » Ginea ( Jennd ) , JMelli, Tombutlo, Gago , (ui- »bcr, Agadez, Cano. Casena ((-achena) . Zanlara .
( 193 ) » Guangara , Borno , Gaoga, iNoulja. La plupart » etaient situes sur le Niger; ils etaient distants I'lin dc Ml'autre, et dix Etaient separes I'un de I'autrc par un )) desert de sable ou par le fleuve Niger. »
Nous avons ici le Niger nomme comme fleuve navi- galile du Soudan ou de la Nigritie , et ce nom d(^signe lepaysdes Negres ou coule cette riviere. On nc lit dans aucun ecrivain classlqiie le noni de A7j;'^/yV/(7 ; chez Jean Leon , il commence a avoir la signification de pays des Noirs, c'est-a-dirc des Negres. La position des controes que ce voyageur enum^re s'est assez bien maintenue, sauf les cbangements apport^s par le temps : il a dit la verite , et on peut a tout risque le croii'e, puisqu'il a vi- sile toute cette region. Mais quelle meprise manifeste d'attribuer a la riviere de Tombutto un cours imagi- naire al'ouest.jusque danslOcean, tandls que d'autres auteurs avaient precedemment affirme le contraii'e, lui donnant ainsi un dementi; enfm il soutient qu'il a na- vigue de Tombutto a Ginea en allant a I'ouest. Tres vraisemblablement sa memoire I'aura mal sei'vi, car ila 6crit son livre de souvenir. Ainsi cette erreurnenuitpas beaucoup a la cioyance qu'il merite pour la totality de ses autres r^cits, puisqu 'ils ont ete fr(^quemment attestes par lesvoyageurs modernes. Mais qu'est-ce qui peut I'a- voir induit, et c'est la le point principal , a donner a cette riviere de Tombutto un nom entierement Stran- ger auxpcuples de ces contrees? Je pense que cela peut s'expliquer d'une rnaniere tres simple : il aura obtcnu quelque notion des principaux travaux geograpliiques des Arabes et des Sarrasins , qui avaient beaucoup ap- pris et beaucoup conserve des anciens auteurs classi- (fues, et y avaient joint la tradition longtemps propagec, d'apres Pline. sur la jonclion du Niger cl dn Nil. En as-
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surant qu'im fleuve coulait a rouest , ,I«uii Lt^un aura voulu riifuter ropinion goneralement repandiie sur la communication des deux rivieres : il racontc done qu'il avail rencontre un grand fleuve dans la Nigritie; que ce fleuve coulait a I'ouest ; qu'il s'y etait embarqud ; qu'il I'avait trouv^ , pour la grandeur, comparable au Niger de Plolem6e; ct sans faire aucun elTort de rai- sonnement , il n'aura pas hesite a lui donner Ic nom de Niger. Cependant , s'il eut un peu refldchi, il eilt dil remarquer a I'instantque Pline ot Ptolemee , en par- lant des lieuxou le Niger pi-end sa source , n'ont donnd aucune description qui convienne au Soudan. Quand il faisait son voyage, il ne se sei-ait nullement occupe de la fin ou de remboucliure de la riviere de Tombutto , autrement il ne lui serail pas si aisemont arrive de la prendre pour le Niger classique. Mais qui sail si Leon a eu reellement cette idee , et si tout ce tissu d'opinions n'a pas ete I'ouvrage des moines qui le convertirent au cbristianisme , et sous la tutelle desquels il resta ? II n'osait avoir d'autre sentiment que le leur. Cependant, commeil a consent! a etre leur organe, il est juste qu'il soit charg^ de leur faute.
Dcpuis cette epoque, le Niger de Jean Leon passa chez tous IcsEuropeens pour le Ni/us A^igroruni des Arabes, et afm de pouvoir mettre en harmonic leur description confuse avec le temoignage de Pline, que Ton n'etail pas en elat de refuter, et sans se livTcr a aucune recherche ultericure sur le Niger de Pline , qui , suivant ce que I'onpouvaitjuger, etait le mcmcquecelui de Ptolemee, Marmol et Labat, ploins de respect pour la decision de Jean L6on,rembelJirent,elce dernier trouvameme dans Ic Niger de ce geographc le Sc^negal et la Gambie. Les Portugais . de meme que les autres nations livrecs a la
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navigation maritime, n'apprirent pas la vt^i'il^, quoique de temps en temps ils recuelllissent plusieiirs bons ren- seignements,4nais ils ne pouvaientles ajuster aux tradi- tions generalement adoptees. Auciin indigene ne savail la moindre chose d'un Niger devenu Tohjet de la curio- sitd universelle : il etait done nature] que de toutes parts il s'ensuivitdes meprises de noms : Jannequin , qui en 1637 fit le voyage du Senegal, entendit parler d'un bras du Niger de Tomboctou, qui allalt se jeter dans le golfe de Guinee ; niais il ne trouva personne dispose a le croire. Les opinions diverses des savants, qui tou- jours se croisaient davantage , rendirent la chose de plus en plus embrouillee, et ni Ortelius, niCluverius, ni Cellarius, nid'Anville, par le manque absolu de temoins oculaires, ne parvinrent a I'eclaircir. Le nouveau fleuve resta ainsi enigniatique jusqu'a I'epoque ou Park nous fit connaitre a moitie le vrai cours du Joliba, et donna une nouvelle impulsion auxrecherches. Alors le sentiment de I'identite du Niger et du Nil triompha : les Anglais , avec la meilleure volonte , meme en sacrifiant de fortes sommes, et sans sc soucier de I'origine du nom de Niger donne a ce fleuve, s'empresserent, avec une confiance imperturbable , d'assigner a ce pretendu Niger le cours qu'il devait suivre , la plupart cherchant celui qui faisait accorder les opinions des anciens avec la geographic des Arabes , puisque Jackson lui avail barre absolument , par une chaine de montagnes, son chemin vers I'Ocean.
Ainsi Rennel eut recours a I'evaporatlon ; Dudley et plusieurs autres le pousserent vivement vers le Nil ; Seetzen le fit communiquer avec le Zair , et plus sa conjecture etait singuliere , puisqu'elle etait la moins
( 196) vraisemblable , mieux elle Tut accuelllio. Moii hypo- these, conciie en 1802, imprimoe dans la Monatliclie rorrespomletiz de cctte ann^e et dans le cahier d'aoilt des Ephemerides geogvaphiqiies dc 1803, liypoth^se I'ondee sur la nature de la structure dc rinterlour de I'Al'riquc du cote du golfe de Benin, assoz connue a cetteepoque,surson atmosphere, etsurlcsphenom^nes periodiques des regions intertropicales , sur les rela- tions de voyageurs qui s'accordaient la plupart en ce point, trouva des approbateursen Allcmagne (1) el en France ; mais en Angleterre cllc rencontra une forte opposition, qui eutRennel pour chef, et qui coiita la vie au pauvre Park et a tous ses compagnons dc voyage (2) ; eniin pour complaire a I'idee extraordinaire dc Seetzen, on sacrifia la vie du capitaine Tuckey, un des plus habilcs marins de la Grandc-Bretagnc, ainsi que celle de trois cents hommes tres utiles. Mais dcpuis que I'expedition de Denham et de Clapperton , et surtout celle de ce dernier, qui a p(5n6tre dans I'interieur en venant du sud , ont fait connaitre que Ton ne devait plus revoquer en doute I'embouchurc du fleuve dans le golfe de Benin, quelques Anglais, par exemple Robertson et Mac-Queen, commencerent aetre convain- cus de la difference des deux rivieres. Ce point est maintenant confirme et prouve de la mani^re la plus positive par les monlagnes que Clapperton et ses compagnons ont rencontrees. Au norcl de cctte cbaine coule le Yeou , qui, avec ses bras, et ainsi que le Schary , plus fort avec ses affluents , tombe dans le
(l) Kani aMssi , dans sa Geoyrnplii': physique ^ liouva (iiii; r'l'lait riiypolliuse la plus conforiiie a l,i nalun; des clioses.
(•2) Park voidait r. nioiiliT la rivit-ipde Brnin ; rainiraulL- el Hcniicl <'j opposcrent.
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lac Tchad dont I'eau est douce. Au sud , passe le Quarra ( Joliba ou Gulby ) , recevant toutes Ics miferes dont les uonis , exccpte colui de la riviere do Sackatou , sont encore inconnus. Mais la dispute no cessera pas encore; des cluunpions robustes le tireront de I'enfoncenient ou il se trouve , car il est deja enlre dans la vaste plaine au-dessus de Benin , le feront re- monter, et le conduiront par-dessus les montagnes dont il vient d'etre question, soit au Schary, soit, apres avoir fait le tour des sources les plus meridionales de celui-ci , a la riviere qui doit sortir du Tchad , conime bras principal, et former le Nil : tant est profondement enracinee I'idee de I'identite du fleuve de Jean Leon et du Niger de Pline ! Afin de se persuader que la chose nest pas possible a cause de la direction des monta- gnes que Ton connait avec plus d'exactitude , il faut examiner celles-ci avec plus d'attention.
A la pointe qui dans le golfe de Guinee est vis-a-vis I'ile de Fernando-Po , entre I'embouchure du Piio-del- Rey a I'ouest et du Piio-dos-Cameroens a lest, pointe nommee cap des Cameroens , commence une chaine de sommets tres elev^s d^s ce point. Les Portugais les nommerent jadis haute terre des ^mbozes ; ils se pro- longent au nord et au nord-est entre les fleuves qui viennent d'etre nommes. La cimc la plus proche de la cote a une elevation de 13,000 pieds anglais au-dessus de la raer ; a peu pres a 11 milles geographiques au nord-est s'elance le Rumby-Pik , qui est plus haut ; et ci 7 miUes geographiques au nord-ouest de celui-ci , le Qua-Mountain , moins eleve , indique un a])aissement vei's les teri-es basses de I'ouest; par derriere , dans le nord-est, s'elevent des montagnes encore plus hautes et formant une chaine. (les cinies sont situees , suivant
( 198 ) le rel^venient du capitaine anglais \ idal , par 27° dc longitude E. de Tile de Fer et 5° de latitude N. La rela- tion de Clapperton nous montre les montagnes d'ou le Tchad reroit scs affluents du sud ct de louest , comme situ^es entre 29 et 35" E. de I'ile de Fer et entre 8 et 9" N. Les voyageurs disent que derritjre ces mon- tagnes, c'est-a-dire au sud , ils en apercurent de plus hautcs (1). Or.le grand fleuve des Camcroens, auquel on peut attribuer une longueur de 50 a 70 milles geo- graphiques , prenant sa source sur le tlanc du sud ou du sud-est des monts Anibozes, qui dans I'interieur se rattaclient aux montagnes du Congo, il faut , confor- mement aux lois de la geographic physique , suivant lesquellesles montagnes, et surtout les montagnes nei- geuses, s'enchainent entre ellcs , que les Ambozes se joignent aux montagnes dc Clapperton entre les 30 et 33''delongitudc,puisqu'clless'enapprochentaquelques milles pres. De plus, les montagnes de I'Abyssinie d'ou sortent le Bahr-el-Azrek , avec scs affluents meri- dionaux, doivent fder a I'ouest par les cantons dc Narea et de Kaffa qui sont tres eleves. Le Toumat , le Malek et une quantity de grandes et petites rivieres plus occidentalcs, que Ptolemec a nommces, et qui sont citees avec les lacs du Nil dans 1' •■imjjnspnsmatis ( Hud- son, Cieo'^^raplii gra-ci minores , t. IV, p. 39) portent Icurs eaux au Bahr-el-Abiad. Or, le Schary est incon- testablemcnt une de ces branches plus occidcntales du Nil, et par consequent ces monts se joignent sans interruption avec les hauteurs situees entre Kano et
[ l) Suivant Denliain, il y a une ciiiii.' fourcluie plus luiuU' de 3,5o(> iiieds que la lerrassn du Mandara,tiaule dc pins ile 3,noo pieds; il la nuniuK; MandiFy ; clle so prrd dans les nuagps. L'cli'vation dc i.i tcrrasKf du Mandaia nr doil sentendir rpir dn Ihmi oil clail Drnliani
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Sackatou , et ccmposent la partie Ja plus ^leveo des monts Komri ou de la Lime. On ne doit done pas supposerune chose aussi impossible que le passage d'un grand fleuve par-dessus, ou , si on veut , a travers des montagnes extremoment liautos, ct tres vraisembla- bleuient neigeuses, surtout quand la grande plaine do Benin , que ce ileuvc a dcvant lui, lui ofFrc unc libre issue, et ne lui oppose pas le moindrc einpechement. De toutes ces considerations il resultc , aussi clair que le jour, que le Nigir ou Niger des anciens n'a abso- lument rien de commun avec le fleuve decouvcrt de nos jours dans leSoudan, et que Jean Lt^on, voulant se tirer d'embarras , aura atti'ibuc a celui-ci le noni si cele- bre de I'autre , sans comprendre le moins du monde ce que les auteurs classiques en avaient dit. Done , tout le monde civilise , decu par une interpretation inexacte, s'estdonne, durantplusicurssiecles, une peine ti'es Inutile pour chercher une jonction d'un INiger, qui n'etait pas celui de Pline , avec le Nil , et pour combattre cette opinion avec cbaleur. Je me compte aussi parmi les dupes de la deception , lorsqu'en exposant mes conjectures j'ai, sans discussion , sup- pose que le pseudo-Niger 6tait le veritable. Comme je suivais simplement ses traces , je ne croyais pas devoir remonter a la baute antiquite , et etablir des comparaisons avec les auteurs classiques. Ainsi il est bien temps et il est digne des hommes qui s'occupent de la geographic comparee ancienne et moderne, d'a- bandonner totalemcnt le nom de Niger , si longtemps employe mal a propos pour designer le fleuve decouvert recemment.
Lne autre riviere est egalement rentree dans son lit primitif et veritable ; elle apparticnt au systeme by-
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drograpliique de rAfriqiio intt'rieuro , ot a quelquos rapports avec la Getulie et le Niger. Lcs raodcx'iics i'a- vaient egalcment delog6e de sa place : c'est le Gir de Ptoleniee.
Ce geograplic , apres avoir determine la \ali('C des GaramaiUcs et quelques montagnes qui lui appartien-
neiit , coniluit le Gir dans sa Lybie : Trorauo? S\
« au milieu du pays coulent de tres grandcs rivie- res : le Gir entre le mont Ousargala ot la val- lee des Garamantes, ou le point de ce ilcuve observ6
est par h"!" long. 16 lat.
II forme le lac Chclonides, dont le milieu est par. ..... 49 — 20 —
Larivi^^re qui, suivant ce qu'on ra- conte , disparait, puis, apres s'etre cachee sous terre, reparait couime une rivi6re diffei'ente; son cxtremite
occidentale est par 50 — 15 —
Sa partie orlentale donne nals- sance au lac INoutha. . . , . 50 — 15 — » La Table de Peulinger montre ( segment vi ) le Gir sous le nom de Girin , sousTacape , et prolonge a Test. On sail que cette table ne va pas beaucoup au-dela des bornes des provinces dc I'empire romain , excepts en Perse et dans I'lnde.
L'anonyme de Ravenne parle du Gir (llv. Ill , 3) : (( In qiid Garcnnantinm patrid , non /orioe ah Ocenrin, flui'ius Ger dilatissiine currit. In (int'i jxilrid Ganir/tan- tiu'ii sunt montes , qni Nauvnvon appcllantar. In qtUi patrid sunt Incus ^ anus ant dici/nr Lycumede, alins Au- dita. Qui Mthiopes rnpcs viontinni hahilnre describuntur, propter iinmensa nc validissinia cniintatn. Ad frontem aiileni ejiisdcin Garanianlinni pntria est nrida , dcserin ,
( 201 ) tuonfaitri, qitcv rlicitiii- Mctrnuirydes , Nassaninnes , Leto- phagidtijiie Bfegnies. In qua pntrid nunquaiii civitates fiiissc legiDiits. . . »
Si nous coniparons les noms de Ptolemee avec ceux des autres auteurs , pour Ic Nig'ir , nous trouvons les bassins des deux rivieres places sousle meme paral- lele , et le Gir a Test du Nigir ; ensulte nous voyons que le mont Ousargala , qu'il a donne comme le point ou se termine a Test le bassin du Nigir, est designe ici comme extrernite occidentaledu bassin du Gir. La borne orientale de celui-ci est la vallec des Garamantcs, qui, selon Ptolemee, s'elendaitde la limite orientale dela Nu- midiejusqu'au Fezzan;confinait,dansle nord,a la pro- vince tripolilaine et aux cotes occidentales de la Grande Syrte, ainsi que le niarquent FAnonyme deRavenne (1. c.) ;Herodote,IV,17Zi;Slrabon,p.731, 385 et358;Pline,
IV, Zi; et avec eux tousles autres plus ou moins. Ptolt-m^e, dans le passage ou il renfermelesGaramantes entre les sources du Bagrada etle lac Nuba, semble seul contre- dire les autres ; ce passage sera appr(icie plus tard. Une des villes meridionales des Garamantes etait Garama , leur capitale (Ptolemee IV, 6; Pline, IV, h), et leur ville la plus au nord-ouest, Cydainus (Pline V, 5) , Cadariiusii de Ptolemee, IV, 2, qui I'a transplantee, avec plu- sieurs autres lieux, dans la Maurltanie cesarienne; Cidaina de Procope [Edifices , VI, 3), Gadames de nos jours. Les auteurs classiques n'indiquent nullement que les Garamantes alent eu des possessions perma- nentes plus au sud que le Fezzan ( Phazaida de Pline
V, 5) , et s'y soient complclemont etablis. Des conjec- tures contrairos, enoncees avec beaucoup d'e^loquence, lu'obligent d'ajouter d'autres preuves de cette v^rit^ .
I. MiRS. 3. ih
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d"ailleurs d^ja reconnue g^n^ralement , etde faire dis- paraltre ces objections sp^cieuses.
Pline (liv. V, 5) parle ainplement et positivement de la conquete du territoire des Garamantcs par Cornelius Balbus : « Intervenit ad solitiidines AJricce supra minorem Syrtini dictas, versa PJiazania , ubi geiiteni Phazanioriun iirbesqiie Alelen et Cilhibam siibegiiints. Item Cydaiiiiini e regione Sabratw. — MateJgw oppulum Garamnntum.... omnia romanis sitperata , et a Conielio Balbo triumphata. — psiim in triumpho pvceter Cydamum et Garanwm , omnium aliarum gentium uibiunnpie nomina ac simulacra duxisse, qua; icre hoc ordinc : Tabidium oppidum; Ni- terisnotio; Negligeniela oppidum; Bubeium nntio -vel oppidum; Enipi natio; Thuben oppidum : IK'itibrum , Hapsa , oppida ; Discera natio; Debris oppidum; flu- men Aathabur; Thapsagum oppidum; Nannagi natio; Boin oppidum; Pege oppidum ; flumen Dasipari. Mox oppida contiiiua, Barncum , Buluba, Alasi , Balsa, Gu/in, Maxola, Zizama , 3Jo/is Gyri... »
Dans ce grand nombre de villes , toiites n'appartien- nent pas au Fezzan actuel, Parmi cellos dont Ton peut reconnaitre le nom , plusieurs se trouvent pres de la cote et du Nil , etjusque dansles oasis; on ne peut pas d^finir dans une semblable region , rcmplie d'oasis , comme on leferait pour des contrecs ferlilcs, quelle fut I'extension des limites au nord eta Test; ces royaumes furent partiellemont ou s^par^ment occupes par des Getulcs, des Libyons, des Numides et d'autros Iribus nomades ; les villes conquises d'taient vraisemblable- menl loutes au pouvoir des Garamantes. Voici celles que je puis distinguer : d'abord Cydamus (Gadames) el Ga- rama doja nominees; Cillaba (Zilla, Zella, Zuila) ; Able ( Hadji- Mil ) : Mafelgo' (Medesiol ) ; Tabidium
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(Dabezzai, dans la partie orientale de la grande oasis); Negligemela (Nedgebel-Begle , an sud-est de Siouah) ; Debris (Terbou) ; T/inpsngmn (Tessava) ; Boiii (Bon- jem , sur la fronliere du nord ot sur le chemin deMor- zoiik a Tripoli); Bdrncum (Bi'ak) ; Galla (Galouas ou Gliclvas) ; Moiis Gyri ( peut-etre le Gira metropolis de Ptolemee sur una montagne baign^e par le Gir et le Syra actuel , qui, du temps de Jean Leon, s'appelait encore Gir (p. 463) . Pline nomme avant ce lieu les Hnin- manienies, a douze journees de route a Test de la grande Sjrte. Les voyagcui's modernes ont trouve la une ville de Ilamra , dans la partie septentrionale du Fezzan.
Ptolemee nous ouvre aussi une perspective dans ce pays, en nommant Ma sue Ids , qu'il transporte alav6- rifeen Marmarique, maisquc je jiourrais prendre pour Monrzouk , avec autant deraison du moins que Mnsouf- fiii , dans les monts Garian , oil doivent se trouver des inscriptions dont on n'explique pas le conlenu; Saba ou Saba' (Seba ou Scbblia, ville entour^e de murs et situee par 37" 3' 8" de lat.). Tout aupr^s il place les sources du Cjnips (Ouadi-Quaam) , qu'il a tr^s inexac- texnent prolonge au loin vers le sud, de sorte que Ton supposerait qu'il avoulumarquerune riviere du meme nom , mais totalement dilTerente de la riviere cotiere ; Sammaiiiycii (Samnou) , et pr6s de la Zyges (Zygen) , sont dans le nord-ouest du Fezzan , quoiqu'il les ait at- tribues a sa Libya exterior, ce qui rend plus vraisem- blable I'opinion suivant XaqiKAXc Masnchis estMourzouk.
Si d'autreslieux ne peuvent soutenirun examen plus s^v^re , il faut , en r^unissant toutes les circonstances precedemraent alleguees , et surtout celle qu'aucun n'est situe au-dessus du Fezzan actuel, ou le pays com- mence a etre moins peuple et encore raoins garni de
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l)ourga(ies , il taut, dis-je, avoucrquc la contreeproprc dcsGaramanles n'a pas pu s'ctendre au-dela du Fezzan. Mais, objectera-t-onpeut-etre d'un Ion triomphant , sur la carte de Ptol^m^e , les Garamantes sont rdpandus dans toute la longueur du bassin du Gir jusqu'au 10' degre de latitude. La rei'uratlon de ccttc dilTiculte se trouve dans le texte meme du geographe. II ne marque pas les bornes des Garamantes par des expressions par- ticulieres quand il parle d'eux comme d'une des na- tions les plus considerables , et se borne a noter la longueur de leur pays de I'ouest a Test , et dans la suite des villes , souslarubrique : uAutourdes sources du Ciinvps, » il enumere celles des Garamantes, parmi lesquelles Gai'ama, la capitale, est situee par Zi3° de longitude et 21" 30' de latitude, suivant la traduction latine ; mais dans le grec il y a 36° longitude et 28° la- titude. Quelle incertitude ! Cependantladiitcrmination du texte grec doit etre la plus exactc , puisque Ghenna a m trouv6 par 34° 15' long, et 26° 5' lat. , et ainsi s'en rapprocbe davantage. II resulte de ce fait et de ce que Garama est le lieu le plus meridional du pays et sur sa fronti6re, que cctte contrde doit etre porte^e beaucoup pluspres de la cote; et comme les Garamantes, ainsi que I'histoire de Tacfarinas nous I'apprond ( Ta- cite, Annales , IV, 23) , s'avancaient assez vers cettc cote, il n'y a pas d'erreur, ou dumoinspasune grande, cliez Ptolemee , quand il place ces peuples aux sources du Cynips : seulement , suivant tout ce qui a ete observe plus liaut , il aurait pu indiquer qu'ils etaient voisins de Mia cote etroite de la Syrte occup6e par lesRomains; il en a use de meme envers le Bagrada , de sorte que les l*cteurs qui ne I'ont pasbien compris se sont crus obli- ges de figurer dm \ rl\iere5 de ce iiom. Or Ptolemee
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transporte conipleteinent le Gir et ses villes, sans rilor le nom de cetle province , au snd , parnii cellos des Garamantes, dont aucunene sc trouve dans le Fezzan, et encore moins dans les cantons pen habites ou entie- rement deserts qui sont phis meridionaux que ce pays, mals dont plusiours, au contraire , se rencontrent dans d'autres territoires tout diderents , coinme ce sera de- montre; de plus, 11 laltdescendrejusqu'a 15°de]atltude le Garaniniiticn I'filiis dwiis, qui appartient Incontesta- blementau Fezzan, apeu pros dans lesmontsdeTibestl, le point le plus au sud-est sur la frontlere de ce pays, comme s'U cut voulu le lul donner do ce cote pour limite , quolque le texte no le dlse pas express6- ment ; 11 a par la induit Agathod.'Gmon a tracer le noni des Garamantes dans toute I'etondue du bassln duGlr, ce qui est inexact. Malntenant quiconque ne s'est pas lait un systeme d'avance crolra-t-11 pouvoir elendre le pays des Garamantes jusqu'au lac Tchad et au Bour- nou dansle Soudan? voudra-t-il le prouver, apres avoir soigneusement examine tous les arguments que nous venons d'exposer, et qui sont tires des propres paroles desancienset de la nature des choses , et apres s'etre forme une theoriefondee sur des conjectures, sans faire aucun rapprochement entre I'analogle des noms , qui est cejjendant si necessaire dans ce cas? On y a aussi cherche et cru trouver un motif de reconnaitre que les Touarlks, composantune partletr^s considerable d'une trlbu prlncipale, dont la langue , qui est le berbcr, et les moeurs r^gnent dans toute I'Afriquc septentrionale, sont une portion de la descendance des anciens Cana- riens ouGuanches, des Getules , des Numldlens, des Garamantes, des Llbyens , etc.; et comme 11 est avere qu'ils s'etendent jusque dans le Soudan, qu'ils ont des communications avec ses villes coramercantes , on a
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pens6 que Ptol6in(^e nous a consent quelques particu- larites dcsquelleson peut conclure quele territoire des Garamantes so prolonpeait jusqu'au Soudan , ct que par consequent le Gir doit otre cherche dans cette con- tree. Ptolemec , lorsqu'il traitc de la nianlorc cxacte de calculer le chemin que Ton a parcouru, raconte, d'a- pi'esMarindeTyr, que SeptimiusFlaccus, etantcnl/d)\e avec son arniee, pour aller de Garama au sud, einploya trois raols; de plus , que Julius Matcrnus , apprc- nant que Ics Garamantes avaient fait unc invasion en Ethiopie , etait alle de Lcptis Magna , en suivant egale- nient la direction du sud, dans lepays d'Agisymba en fitliiopie , ou on avait vu des troupes de rhinoceros ; le voyage avait dure quatre mois. Ce pays scrait done celui qui environne le lac Tchad , et ou Denham a fait la meme observation : I'Agisyniba ne peut ainsi etre que la contree a I'ouest , au sud et a Test de ce lac ; par consequent elle correspond au Bournou , au Ba- gherm6, etc. Ptolemee avoue que cette grande distance ne lui semble pas croyable, parce que I'Ethiopie n'est pas assez eloignee des Garamantes pour que Ton soit oblige de roster Irois mois en route entre les deux pays, et aussi parce que les deux peuples , savoir, les Gara- mantes et les Ethiopiens , obeissaient a un meme roi. Mais , indopondamment de ce que les conquetes ne furent que passageres , Ptolemee a tres grand tort de blamer le rccit de Alarin", puisque ses doutes ne sont fondesque sur des latitudes cntii^rement errondes, qui lui font trop rapprocher les Garamantes et le Gir du pays d'Agisymba. II est parfaitemcnt dcmontre que Marin avait raison , par le voyage de Denham et Clapperton, qui ont parcouru 1,120 milles anglais en 56 jours; en efTet , une arm<^p qui irait He Garama an
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lac Tchad par la meme route , et qui , sur 99 jours de marche a travers le desert et les sables brulants , ne prendrait que 26 jours de repos, franchirait cet es- pace a peu pres dans un temps egal.
Ptolemee ayant, par sa manlere de decrire , alnsi que je I'ai observe plus haut, place , en contradiction avec ses chifTres , le bassin du Gir a I'ouest des Gara- mantes, nous venons naturellement au pays de Zab (Zaab) et a celui de Vadrig, situe plus au sud. Shaw les decrit I'un et I'autre; Edrlsi et Aboulfeda aussi en font mention. Procope nomme le premier (1) et i-e- marque qu'on I'appelle egalemcnt Mauritanln prima. Jean Leon, qui ecrit ce nom Zeb, donne a ce pays cinq villes. Ces deuxcontrees sont arrosees par rAin-Djiddi, riviere considerable qui coule principalementde I'ouest a Test, et regoit plusieurs affluents. Au nord s'etend I'Atlas oriental avec le mont Auress, VJurasius de Pro- cope (2), V Jiidiis de Ptolemee (3). Au sud se developpe le Sahara, oii se prolongent aussi d'autres chainesqui nous sont entierement inconnues. Au nord-ouest du bassin de cette riviere , il y a une autre vallee fermee par des hauteurs; c'est celle du Schott (Schat) lac sal6. ' auquel des rivieres affluent egalement de toutes parts. Lne route de la Table de Peutinger part de Thelepte (Ferreana) [li) , et va a I'ouest , a travers le pays de Zab , en passant par les stations suivantes : Thelepte , XLViii , ad Majores xxviii , ad Medias xxv, Bad/as xxiii, Thabudeos xxiv, Gemellas xxxiii, ad Piscinam. En tout 181 m. p. On retrouve dans Thabudeos le Thabudis de
(l) Guerre des Fandales, liv. II , chap. 20. (a) Idem, liv. I , chap. 8.
(3) Liv. IV, chapitre3. '4) Sbaw , p. 1.69 fie rpfl Iranc
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Ptol(^mee. qu'il a transport(^ pres des sources du Ba- grada, par consequent au nord dc I'Audus , quoique le cheuiin passe au sud. Cost de la probablement que provient le double Bagrada. Ainsl ce Thabudisdoit etre le Tooda de Shaw, sur un des aflluents septentrionau\ de I'Ain-Djiddi : seulement Shaw I'a plac6 trop au sud. L'ad Pi.scinnin nous fait arriver a I'extremiti orientale du Schott. Le cheniinva ensuito jusqu'a l.ambese, que Shaw a rctrouv6 a Tezzout dans de belles mines, avec de nombreuses inscriptions qui indiquent son noni. Nous devons done revenir a cette ville, dont la position pent etre asscz exactemontdetorminf^e paries routes ro- maines et par le recit du judicicux voy ageur anglais. \ oici la suite des stations qui y menent : xvni Mesarjilia, vi nd Aquas JlercuUs , \\ ad Calccum Hcrcid/s , ix ad iluo fla- inina , ix ad Symniachiim , xv ad Basi/icani Diadiiineni, et Landtese sans distance indiqude. Ce nombre laisse en blanc fait supposer, comme cela a toujours lieu sur cette carte, dans des cas semblables, qu'il est assez faible, par exeniple vii ou vni, ])ar consequent en to- ta]lte7/i ou 75 ni, p. C'est ce que rendent tr^s vraisem- blable le detour du chemin a ad Piscinam , et sa posi- tion a Textrc^mite orientale du Schott, ou Ton peut presumer qu'il y avait une pecherie , ou un d'tablisse- ment poursaler le poisson , vraisemblance que favorise singulierement la distance tant de Thelepte que de Lavihesc. Quant a la question de savoir si la seconde portion dece chemin , et en general la valine du Schott, appartenait en tout ou enpartie au Zab, c'est ce qui est assez incertain ; il^arait qu'autrefois elle appartenait avec 7jube a la Mauritanie c(^sarienne ou a la Sitifensis. Nous rotrouvons dans cv Zab et ce Vadrig une quan- lite considerable de\i lies f| lie Ptolt^nieo place aux sources
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tie son Bagrada et sur le Gir. Parnii cellcs que 1 on pcutexpliquer, onremarque:^V//r(^'Y/-c/, au nord du Gir; Mai j in, que Shaw, sur sa carte , a transporte au sud de \ Ain-Djiddi, dans IcVadrig; /jV////'(7, vers les sources du Cynips ; Baclense, au sudderAin-Djiddi, dans le Vadrig; Biitiuus surle Bagicula , (Bordsji etBordja) aunord du Djiddi(l); Dmickitcc on Danchisaj: Ptolemee dit qu'au- dessous du Girs^iris inoiis , a peu pres cliez les Gara- mantes , il y a les Mnccoi , les Dnnchi.sce , les Calilcv , jusqu'au lac Niiha; Engusah, suivant Shaw, a 5 milles niaritimes a Test de Vergala; les Calitae peuvent etre la trihu touarique noniniee Kellevi, Relarik, Rel- takghei , etc., dont la position n'est pasdonn^e, mais on peut piesumer qu'elle est dans ces cantons; Geba , au nord du Gir; Lei>ti, sur la rive septentrionale de I'Ain- Djiddi ; Gir.i metropolis, sur I'Ain-Djiddi ; S/ra, suivant Shaw, le Gir de Jaan Loon; Lyn.rainn et Lynaainatce sur le Gir, ou plutot dans son voisinage (n-po? aOrw) , ce qui est coniorme a I'Anonyme de Ravenne; Lyjena , suivant Shaw, sur le Serkah , riviere prenant sa source au Serkah et au mont Auress, coulant du nord au sud, et se jetant dans le Gir; Thabudis, que nous avons vu precedemment sur le meme chemin, ville episcopale selon la ISotitia Aiii/udice,- Thiiciinath ou Uziniath (ttoo? auTfo) , Dousan (Shaw) , Deusen (Jean Leon), a I'ouest ; Thuppa egalement. Tut sur le Serkah, suivant Shaw, pr^s du mont Auress ; Tucriuituda egalement , Ttig- gtirt suivant Sliaw, a 30 milles maritimes au nord d'Engousah dans le Vadrig, sur une riviere quiseperd dans la terre, puis revient au jour (2); Jean Leon nomme ce lieu Techort.
(1 ) J. l-ei>ri , p. 5.
(2) Voyez le ([ui a cte Hit |)iece(li'mmpTit.
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Ptol(!!mee nomine encore , dans la Mauritanie c6sa- rienne, une couple de villes, et dans la Libye quelques pcupladcs qui appartlennent a cc bassin , y compris aussila vallee du Schott , savoir : Tuhuiia: c'est le Tu- buna vllle episcopale dc la Notilin Nuniidia' , le Tubu- nia de Victor , le Tubnniensis dans les ConcU . Zenon , Aug, le Tiibntiis (ablatifpluriel)de laTable dePeutinger sur le chemin do Sitifi , lo Tubnah de Shaw , le Tobna d'Edrisi et d'AbouHeda , sur le versant meridional du petit Atlas , sur le Buniazuse, riviere qui se jette dansle Schott ; — Fescetlira ou Vesceter suivant Shaw : Biscarra, capitale actuelle du Zab , ou de son temps il y avait une garnison turque ; le Pescara de J. Leon ; — enfm Lsargnln-Moiis , deja cite comme le point extreme des limites de la G^tulie , est \ urgala dans le Vadi'ig , ville batie sur une montagne.
Enfin,d'apr6s les considerations enonc^esprecddem- ment , on retrouve ^galcmentle lac Nuba, dont Ptol6- m^e seul fait mention : il le place A Test du Gir par 15" de latitude , et ajoute qu'il est produit par la riviere qui se cache et qui cnsuite rcparait ; dans les determi- nations geographiques , ce nom est ecrit Nulha; en~ suite le mot Aiiba revient encore deux fois, et Ton voit la station de Niibcc : on reconnaitra biontot que Nuba est le veritable nom. La Table de Peutinger donne sur le chemin de Sitifi aux cantons meridio- naux une station sous la denomination de Salince Nubo {ne)neiises ; elle est eloign^e (voir plus haut ) de XVI m. p. de Vaccis , station precedente , et de xxv m. p. de Tuboiiis , station suivante. Avec ce Tubotiis , qui est le Tubunn des autres auteurs , nous nous sommes retrouves pr^cedemment dans la valine du Schott ; ce lieu , 4tant une saline, doit avoir dt(^ situe sur un ter-
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rain salant , et il n'y en a pas d'autre ici que celui qui est le long du lac Schott : Tubnnis en est precisement 6loigne de xxv m. p.; par consequent , le surnom de I\ubo/tensis porte a conjccturei' avcc certitude que le lac se nommait Niibo ou A'uba , ce qui est la meme chose , et que le peuple Nithce dolt designer ce lieu. II est done evident que Ptolemee a voulu parler du lac Schott, quolqu'il n'alt pas connu exactcnient sa veri- tahle position ; de sorte qu'il le croyalt a Test du Gir, ou que d'apres des relations peu authentiques 11 Ten eloignait. Le chemin ouvert par les Ronialns a travers le pays de Zah et la vallee du Schott, alnsi que la connaissance que Procope avalt de cette contree, nous revile que les Piomains ont du la faire parvenir a un etat aussl Florissant que des cantons plus proches de la cote; c'est ce que Ton conclut des ruines qui, dit-on, se trouvent partout , et dont Shaw a entendu parler. Nul voyageur europeen n'a encoi^e penetre jusque la, et cependant on y recueillerait des renselgnements interessants.
II ne nous rcste plus qu'une remarque a faire , c'est que rAhi-Djiddi a r(!tellement jadis port6 le nom de Gir : en effet , 11 conservait ce nom dui'ant I'exarchat , a r^poque ou I'anonyme de Ravenne vivalt ; et de plus nous lisons dans Alhoufeda : Al-Zeb est terriloriuni iiin- ginini et fliivins Garrar sh>e lira in regione Al-Magreb cuj(islongitu(loZ()° ;^0', latitude 31° 30' ; et Jean Leon lui donne, de meme qu'au Niger, le nom de Gir (1). C'est
(i) Peut-etre dans I'ancienne lan{;ue berbere le motde Gir signifiail- il riviere. Dans les dift'erents vocabulaires que j'ai consulles, eC qui a la verite ue contiennenl que les mots usiiels des divers ilialecles de ri'lle langiie , je ne I'ai point irouve.
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aussi cc qui a induit des savaiils tels que Shaw a re- connaltre cettc riviere pour le Gir de Ptolemee. II est egalement manlfcste par tout ce qui precede que les Chelonidte palwles de Ptolemee ne sont , ainsi que Shaw I'a remarque , que le marais de Mel^ig forme par V Jin Djeddi.
Plusieurs des sujets eclaircis dans ces rechercht s ont deja ete traites d'une maniere satisfaisante par des savants , d'apres des principes evidents et incontesta- bles. Dautres, au contraire , et c'est le plus grand nombre , se sont constamment eloignes de la verite; lis semblent , d'une part, avoir porte leur attention sur tous les points qui dans Ics descriptions et les rela- tions souvent deta'dlees des anciens sont d'accordentre eux et avec les recits des modernos ; mais d'un autre cote ils semblont n'avoir pas assez pris en considera- tion les dilTerences, pas assez pese chaque expression : par consequent ils n'ont pas pu examiner les choses sous leur veritable aspect. Comme de cetle maniere on ne trouvait pas ce qu'on cherchait , on cut re- cours aux suppositions souvent les plus temeraires , et Ion imputa aux anclcns des choses auxquelles ils n'avaient jamais songe. Quand en procedant de cette maniere on n'a pas distingu6 convenablement ce que Pline expose comme fonde sur des falts averes, d'avec ce qu'il ne presente que comme conjectural, on a cru ne trouver aucune Impossibilite a ce qu'U ait connu une riviere dont ni lui ni ses contemporains n'ont pu avoir la moindre notion. Avec un trait de plume son ]\iger et la riviere interieure si clairement designee par Ptolemee comme ayant son embouchure dans les sables, ont ^tc pris pour le Niger de Jean Ldon. De mi'mc quand on s'etonne de ce que Pline , en parlant
( 213 ) du pays des Garamantes, ne cite aucun des lieux que Ptolemee a indiqiies dans le voisinage du Gir, on oublie que CO dernier auteur avail dans I'idee un canton tout different; qu'il ignorait qu'il se nommat Zab; mais que dans la nomenclature des villes il le distingue assez clairement du pays des Gamarantes, car il place celui- ci autour des sources du Cynips, dont il prolonge le cours. En general , plus le tissu des suppositions etait ourdi avec art, plus il trouvait de faveur aupres du grand noiubre.
Le temps m'apprendra si , appuye sur des preuves aussi manifestes , men sentiment , que je me suis etu- die a puiser uniquement dans les passages des anciens cites textuellement , aura le bonheur d'obtenir le suf- frage des savants. Si les esprits reflechis se sentent con- vaincus par mes raisonnements , ils ne negligeront pas de se prononcer de toutes leurs forces contre Tabus du nom de i\"/'4>er applique a un fleuve qui appartient uni- quement a nos derniers temps, et de le bannir entiere- ment de la geographic moderne.
Ces considerations etaient deja redigees par ecrit au printemps de I'annee 1S31 , apres que j'eus ter- minelasecondepartie de mon '/7i:snun/s ropoi;nip/iicii<i pour le grand atlas du monde ancien. A linstant ou il allait etre public , je lus dans le N" 157 de VJllgemeine Zeituna la nouvelle suivante , datee de Londres : (( Les iVeres Lander, apres 6tre parvenus a ^ ouri , se sont embarqucs en ^bateau sur le Niger ou Quorra . comme on le nomme dans ce pays, et ont descendu ce fleuve jusqua ce qu'ils soient arrives a la mer dans le goU'e de Biafra. Le bras par lequol ils ont gagne I'O- cean se nommo Rio-Nun ou Riviere de Brass : c'est la
( 214 ) premiere riviere que Ton rencontre en venant du cap Formoso. » (Ici M. Rcichard raconte la m^savcnture des voyageurs. )
Youri ^tant situe au-dessus de Boussa, le lieu voisin de celte derniere ville oii Park echoua, doit otrc navi- gable , puisque les deux voyageurs ont passe sans encombre. Clapperton alia de Badagri a Sackatou, ou il mourut le 13 avril 1827 ; cette ville est situee au nord du Quorra. I n des freres Lander qui etnit avec lui, rcvint dc Sackalou a Badagri , a la virile par un cbemin un peu different; lous deux durcnt traverser le Quorra, cela est Evident, quoiqu'il n'en soit fait au- cune mention dans la nouvelle de Londres. Le temps apprendra si cette omission provient de la perte, peut- fitre pretendue , du journal dc Lander ; et si elle nest pas command^e par I'interet et la politique du com- merce anglais pour que I'entree des pays de I'interieur, decouverte a si grands frais , ne soit pas livr^e aux autres nations. Mais enfin les jeunes voyageurs, sui- vant les traces de Park , ont remonte le Quorra jus- qu'a Youri, puis de la I'ont descendu jusqu'a la mer. II est satisfaisant pour le mondc savant de voir que cette 6nigme qui occupait les esprits depuis quatre cents ans a ^te resolue par le nieme peuple dont les suppositions aventureuses et mal raisonnees avaient si fort embarrasse la matiere , et qu'il a ^te contraint de reconnaitrc par sa propre experience I'exactltude des hypotheses, fond(^es en raison, qui avaient assigne ^ ce fleuve, depuis longtemps, son cours naturel (1).
Lobenslcin , jiiin i83q. \\.
(i) Lc Mf-moire, dejacile p. 196, dans l('f|U(;l Reirlmid avail dovinr rembouchurp du Kouara , a ele public dans les Annates des voYaqes. i. V, p. a32.
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M^MOIBES sur les progres des decouvertes geographiqiies dans rile de Madagascar ,
Par M. Eugene de FHOBERVILLE
AVANT-PROPOS.
Un jeune orientallste qu'une ardeur immoder^e de travail vient d'enlever a la science , dont il aurait un jour et^l'orgueil, disait avec raison que I'ile de Mada- gascar attendait encore son Marsden et son Pvafiles (1). Cette remarque sera vraie longtemps encore ; long- temps encore la geographic generale sera reduite a speculer sur des relations surannees ou mensongeres avant que soit comblee la lacune causee par le defaut derenseignementsmetbodiques sur Madagascar. Ajou- tons que, dans I'etat actuel de nos relations avec cette ile , des travaux analogues a ceuxque nousdevons a Marsden et a Raffles sont a peupres impossibles par une foule de raisonsquitiennent a I'etat social du peuple madecasse autant qu'a la nature du pays lui-meme. On sait, par la funeste experience qu'en ont laite plusieurs voyageurs distingues , qu'un fleau elTrayant garde les abords de cette contr^e , et que I'Europeen studieux n'a que peu d'espoir d'ecbapper aux mortelles atteintes de la fie- vre qui defend Madagascar, aussi bien des investigations de la science que des invasions de la guerre. Au-dela d'un littoral empeste , Ton rencontre un gouvernement soup^onneux et sanguinaire qui s'oppose par tous les
(l) K. .I.icqucl. Bihiinllteque n/a/nvf, p. 8n ; extrailc ilii Nouveau inunial iisiatiqiie.
( 516 ) movens a la rnarche du \oyageur. Toutc lutte est inu- tile ; il faut c6(ler devant cette opiniatrc et impassible resistance, et s'en aller mourir sur la cote. Quel savant, fut-il robuste au physique comme au moral , voudrait tenter une entreprise aussi chanceuse? Quel voyageur ne reculerait pas devant cette suite d'obstacles dange- reux et sans cesse renaissants ? Que Ton considei'e d'ailleurs I'immensite du vide qu'il s'agit de com])lcr dans la science , et Ton se convaincra que le Marsden ou le Rafiles de Madagascar n'est pas encore n6.
A I'appui de notre opinion, nous croyons devoir parler ici de I'ouvrage que les missionnaires anglais ont public sous le tltre d'llistoire de Madngnscar (1) .Certes, personne mieux que ces d6vou(^s ministres de I'Evan- gile n'a et6 en position d'obscrvcret de recueillir des faits sur la geograplile et les moeurs de cette contree ou ils ont s^journe plus de dix ans; et cependanl leur livre, redige par un ecrlvain distingue, autcur lui- mfime de Recherches justement estimees sur la Polyn6- sie , est loin d'etre satisl'aisant : c'est I'histoire , non de Madagascar, mais d'une province dc I'ile, et a ce titre , il n'a droit a etre place qu'au nombre des memoires qui serviront a une future description g6n6- rale de la grande ile africaine.
A moins de circonstances imprd'vues , et , nous nous batons de le dire , fort improbables , telles par cxemple qu'une exp<^'dition scientifique entreprise sous les aus- pices et aux frais d'un gouvernement europeen, untra- vaild'cnsemblencpourra etrc aborde. Jusque la, nous n'aurons rien de mieux a fairc que d'appeler la publi-
f l) Hislorv of Ma(la{»ascar compiled chiefly from original ilocu- mentsbyrhi' Hcv. Williiim F.lli>; Lonrlon l838. 2 vol. in-8.
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cation de fragments inedits oublies dans dus porte- fouilleset menaces d'unefacheuse destruction. Lenom- bre des ouvrages imprimes oii Fon puise ordinairement des renseigneiTients sur Madagascar , s'eleve a peine a dix; cependant celui des manusrrlts veritablement amportants est au nioins vingt fois plus considerable , et leur existence n'a rien de siirprenant.
A I'epoque oil le commerce des esclaves etait encou- rage par I'administration de I'lle de France , une foule de traitants parcouraient Madagascar. Coshommes actil's et intrepides pen^traicnt partout ; ils prenaient sur les contrees qui leur fournissaient leur marchandise des notes informes sans doute , mais fort iivteressantes pour la g^ographie. L'objet de leurs expeditions ne- cessitant une connaissance approfondie de la popula- tion, des limites, des ressources et des moeurs des cantons qu'ils visitaient , ils s'informaient avec soin de toutes ces particularites et les notaient dans leurs jour- naux de voyage. Nous avons eu I'avantage de rccueillir plusieui'^ ecritsde cettenature. Ilsnebrillent, il est vrai, ni par le style ni par rortliograplie ; mais ils contien- Tient des observations pleines de justesse, et I'enoncia- tion de fails dont la veracite nous a ete demontree par un controle severe. Combines avec d'autres relations, ils nous ont ete souvent si utiles pour I'eclaircissement de certains doutes, que nous ne saurions assez ap- puyer sur I'interdt que presenteraicnt la reunion et la publication de ceux qui nous sont inconnus, ou dont nous ne connaissons que les titres.
Les memoires que nous offrons a la Society de geo- graphic n'ont suroment pas la valeur des relations que nous desiions voir publier ; co sont do simples essais, bien imparfails encore , que nous recomman- I, Mvns '). 15
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(Ions a sa l)ion\eillance accculuinco , el doui \oi<i lo- riginc ct lehut.
Occiipe depuis Fannt'C 1837 a rolligor dcs doon- ments rclatifs a Madagascar, nous avions scnli loiii d'abord la nocossite de nous ('•clairor sur la niarclie des d^couvoitos gt'Ographiqncs dans ccttc ilo , de rcclior- cher la source dc corlalncs contradictions qui jetaicnt de I'incertitude surl'liistoire des premieres navigations dcs Portugais dans la mcr des Indes, et de rel'uter en- fin des errcuvs choquantes que Ton renccntre dans plusieurs ouvrages serieux sur ec sujet. Notre tra- vail dcvant proc6der clironologiquenient , nous avons examine en premier lieu les assertions des auteurs qui ont attribue aux anciens la connaissance de Ma- dagascar. Tel est I'objet du fragment (jue nous jm- blions aujourd'liui. Puis nous avons aborde les ren- seignements que possedaient les Arabes sur les lies de rarcbipel Madecasse , et que nous ont transmls leurs g(iograplies. N'ajant pas I'avantage de lire les tcxtes origlnaux, nous nous en sommcs tenu aux traduc- tions qui en ont ete publiees , aux analyses et aux notes ded'Herbelot, dc llartma.n , de de Guignes et de M. Quatrem<ere. Nous clterons en outre les fragments d'lbn-Said, et d'autres auteurs arabes, dont nous de- vons la traduction a Tobligeanco de M. W Noel, ancien consul de France a Zanzibar.
Les details plus precis que nous a transmls Marco Polo nous ont servl dc transition pour entamer I'his- toire (car jusqu'ici ce mot eut ete impropre) de la decouverte dc Madagascar par les Portugais. Osorius, Faria y Souza , (lastagneda , Barros, etc., ont ete nos guides, el il iioiis a stunble etrange qu'aucun geo- grapliw iiioflrnic ii ;iit soiige a recourir (<mi| d'alxnd a
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Icurs omrages, au lieu do copier les iiidigestes compi- lations du xva'' siecle. Des secours precieux nous ont ite offerts pour cette partic de notre travail : M. Ter- naux-Compans , avoc cette liberality que tout Ic monde connait, et le docte historien des decouvertes portu- gaises , dont nous avons si souvent mis a contribution les judicieuses investigations, M, le vicomte de Santa- rem , ont mis a notre disposition des livres et des por- tulans anciens qui nous ont, pour aiiisi dire, servi de phares dans le cours de nos recherclies. — Grace a ces inappreciables monuments de lagloirc des Portugais , la construction d'unc carte bydrographiquo do I'ile Saint-Laurent avec les noms imposes par les decou- vreurs a 6te possible , et la part des Fran^ais , qui les y ont suivis de pr^s, a jiu etre constatee. Cost par la comparaison seule de ces vicilles cartes que Ion pourra relrouver I'origine des bevues commises par les copistes posterieurs , bevues dont on so fera unc idee lorsqu'on verra, par excmple, que le nom d'Jugodfld, ville ou village porte sur toutes les cartes duxvn" siecle , n'est, sur les premieres cartes connues, autre chose qu'un lieu d'aignnde {^ii<iiiailn). Du rcste , il r^sulte de cette comparaison des cartes portugaises un fait des plus curieux : c'est que les erreurs graves qui nous avaient frap])e dans les nioins ancicnnos n'existent pas dans cellos qui so rapproclient davantage de I'e- poque de la d<^couvcrte, lour exactitude etant en raison directe de leur ancionnoUJ. Si ce foit remarquable n'est pas I'effet du liasard, quels resultats n'amenerait pas I'examen de cartes plus anciennes que celles-ci, sinon des originaux eux-memes ! Le soin avec lequel les pre- miers capitaines de mer exdculaient les relevements des cotos iiduvollos antoriso a pensor quo rosquisso hydro-
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graplilquc dcssini'O d'aprt-s Ics onlros dc Trislain (I>t Cunha (150(5), se rapprochait ])Uis do la \(iit{'' que toutcs les cartes gravies avant celle de Flacoiirt (105(5), qui avouo s'elre servi dos fravavix cn'octiK's par los Por- tugais pour Ics parties de 1 ile que ses explc rateurs n'ont pas visitees.
Environ un si(!;cle aprt's les Portugais, nous vovons Jes Neerlandais s'arreler a Madagascar. lis ne font quo reconnaitre les points decouverts par ceux-la , niais ils en dcnncnt de bonnes relations. Nous les avons rap- portees dans notre travail, en faisant rcmarquer le bou sens naif de leurs obsenations.
Arrive au temps ou les Frani^ais s'etablirent au Fort- Daiq^hin, nctre plan se modifiait et s'agrandissait con- siflerab lenient; car nous ne pouvions presenter la rela- ion des deccuvertes accomplies depuis cette t'-pofpie sans faire en nieme temps lliistoire de nos tentatives de colonisation, auxquelles elles sont inlimement liees. Le point de vue geographique pcrdant ainsi une grande partie de son interet, nous nous sommes decide a le subordonner a celui de riiistoire. Cette ncuvellc direc- tion a notre travail necessita des etudes preparatoires dont la duree depassa les bornes que nous nous etions imposees. Les renseignements devenaient sarns doute plus nombreux que dans les siecles pr^c(!!dents , mais ils ne concernaient que des loealites. Nous rcncon- trions parfois des lacuncs, des falls incxplitjues qui exigeaient des recbercbes minuticuses , ou, fautc de jalons, nous risquions souvent d'errer. Nous sentimes bientot rimpossibilitc de continuer avec fruit un travail pour lequel les materiaux manquaient en grande par- tie , ct nous nous dcterminames a le suspendre jusqua
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ce que dc nouvellcs lecliorclics nous eussentniis sur la voie des details qui manquaient a nos auteurs.
Depuis lors , diversos communications intcL-ressantes nous ont ote failes. M. Louis Bouton, socretaire do la Socictc d'liistoiio naturelle dc Tile Maurice; M. Anju- bault , conservateur de la Bibliotlieque du Mans ; M. E. Miller, I'habile helli^niste auquel on doit un excellent supplement aux Petifs gt'oiTu plies ^rccx , et plusieurs autres savants, nous ont fait jiart de docu- ments anciens qui sont venus s'enchasscr, pour ainsi dire, entre des renseignements que nous possedions ■d^ja , mais qui, sans leur secours, fussent rcstes sans valeur. Car telle est la nature de ccs sortes de pieces : s^jjarees, elles sont presquc inintelligibks; reunies, elles s'^clairent, s'expliquent, se forliiieiit reciproque- raent, et acquierent un prix inestimable aux yeux de la science.
C'est surtout a M. le minislre de la marine fjue nous avons de grandes obligations. M. I'amiral de Mac- kau , a Texemple de son predecesseur, M. I'amiral Pioussin , a bien voulu nous autoriser a compulser les Archives de son departement, el le savant conservateur de ce riclie d^pot, notre collegue M. d'Avezac, a mis ^ nous faciliter ncs i-echercbes une obligcance pour la- quelle nous le prions de recevoir ici nos sinceres re- merciments. Nous avons eu le bonlieur d'y decouvrir une foule de documents dont nous soupconnions bien I'existence, mais que nous avions vainement cliercbes jusqu'alors. Nous y avons rencontre aussi des pieces tout-a-fait inconnues , qui constatent nos droits sur ce pays inmiense etjettent un jour nouveau sur I'histoire de nos (^tablissements dans dilTerentes parties do Tile. On s'etcnnei-a peut-etre qu'au srin de cette admirable
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collection , et apr<!?s la plus ample iiiuisson do laits lils- toriques et p;eograpiiiques, nous ayons encore a former des veeux. Tel est pourtant le sort do recrivain qui cherclie la verite : I'espace qu'il a parcouru lui parait toujours moins vaste que celui qui s'etend devant lui. Nous nous sommes convaincu , par la leclorc des do- cuments inedits qui nous ont ete recemnient commu- niques, du nombre considerable de mK^moires ecrits par des Noyagcurs particulicrs, et que le hasard seul pent aujourd'liui iaire retrouver. Tout travailleur ar- dent et consciencieux comprendra ce que de telles re- flexions ont en mcirK" temps de penible et de stimu- lant, et Ton nous pardonnera , en favour de notro zele ,, les erreurs dans lesquelles rabsence ou I'insuflisance de ronsoignoments aura pu nous faire toml)er.
Get apercu des difficultes qu'eprouvcnt les recber- clics sur Madagascar ])ourra servir a cxpliquer pour- quoi les ouvragcs modenrjos qui ont trait6 de cette lie sont si pen satisfaisants. Le cbarlatanisme de librairie s'y deploie journellement avec d'autant plus d'effron- terie, que les critiques sont rares et en general peu suresd'elles-momes. «Lesdictiennaires geograpbiques, disait Voltaire, ne sont que des erreurs par ordre alpha- b^tiquo. » Ne pout-on pas appliquer ce mot a maintos publications, iWlas pllloivArjiies oai/iiistrccsPCc scrait un cbapitre diverlissant que celui ou un auteur conscien- cieux s'attacberait u relever les inventions dont four- millent cos sortcs de livres , destines par leur nature a une immense et deplorable cireulation. Pour ne parlor que de Madagascar, on pt-ul voir dans des ouvrages im- primes a grands frais des vignettes i-eprt^sentant des costumes de guerriers madecasscs, copiecs de gravuros vepr^sentant les J(iga.s (Ui ro\aunie d'Jngn/a (dansle?
pltUichos (Ic De Bry, loprotluites dans celles de VH/s- fo/'re dcs voyages, par I'abb^ Pi-cvost (i) ) ; — des hippo- potanios ciTrayants etonm^s d 'avoir a nager pour la premiere lois dans les rivieres de Madagascar ; — une vue de Tintingue, fabriquee dc souvenir (nous tenons ce fait de I'cditeur hii-meme), et puliliec comme pris<' tl'apres nature dans une illustrnlu>ii , puis copiee et re- pubbee dans une autre, avec de nolal)les obangemenLs poiu' €viter la contrefaron ; — cnfin de pretendus com- bats ou k's Madecasses portent I'uniforme des monta- gnai'ds ecossais, — Est-il besoin de dire que le texte est digne des images, et que Ton y trouvc de monstrueux anacbronismes et des bevues, dont la moindre est d<? faire combattre un peuple contre lui-memc , sous deux noms qui lui sont donnes indistinctemcnt ?
M. Eyries a pris la ])cine dc refuter quclqucs asser- tions reproduites a satiete depuis dix ans par des geo- ^raphes tres sericux , et dont les ouvrages sont repandus au loin. II appartenait a notro savant ct rcspectal)lc <loyen de replacor a leur juste valeur des contes faits a plaisir et presentes avec empbase a la credulite des Iccteurs inexperimentes ; c etait une tacbe digne de r^crivain qui a dote les Annales dcs voyages et la Bin- graphie unU'ersctle d'une suite d'articlcs critiques ou viennent et viendront puiser des d'crivains qui veulent passer pour crudits., et n'aiment point les xecbcrches difficiles el fatigantes. — On est surpris du peu de soin •que les auteurs des precis et des dictionnaires de geo- grapbie eleinenlaire apportent a la redaction du cba- pitrc qui concerne Madagascar ; les erreurs y sonl presquc aussi nombreusrs quo les mots. Citons , par
( 22Zi ) exeiijple , ce N^juveati luauuel des aspirants au baccalun- reat es-'etlies qui decrit Madagascar en ces tormes : « L ne dcs plus grandes iles du inonde , st-paree dc » rAfrlquc par le canal de Mozainljique ; elle n'a pas de » villes considerables, raais deux hons ports : Saint- » Vincent a I'ouest, el le Port-au-Prince a Test; et » trois caps : Saint-Sebastien au nord, Saint-Romain » au sud et Saint-Andr6 a I'ouest. » 11 serait difficile de s'enoncer avec plus d'assurance ; nous proposons ce- pendant a I'editeur IV/ra/wwi suivant: deux bons ports, lisez dijc bons ports ; — Saint-\ incent, lisez Bontbetok ou Narrinda; — Port-au-Prince, lisez Uiego-Suarez ou Port- Louki ; — Saint-Sebastien, lisez Cap rTAiiibre; — Saint- lloinain , lisez Suinte-Mnrie.
Nous esperons que la Society nous pardonnera cette digression, qui montre jusqu'a quel point la fable a envahi le domaine de la v^rite, et nous terminons en exbortant de nouveau les personnes qui possedent des meuioires sur Madagascar a les publier ou a en donner connaissance a la Societe. Ce sera , nous le croyons , un moyen efficace de detruire ramoncellement d'er- reurs et de mensonges qui couvre la geographic de cetle grande et belle ile.
Paris, le i/i fevrier i844
phi:mii:p, mEmoihe.
t'lLE DE MADAGASCAR A-T-ELLE ixi CO»UE DES A>CI£XS?
Les commcntateurs des geographes grecs et latins resolvent affirmativement cette question , et leur opi- nion a et6 adoptee par un grand nombre d'ecrivains sjui ont mioux ainie s'en rapporter a unc decision dont
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ils netaient pas responsables , que de recberclier si elle etalt bien ou nial fondee. Cependant , malgre le respect que nous inspirent les grands noms do Merca- tor, d'Ortelius, do Saumaise , de Bochart, de Sanson, deDebsle, ot ceux dune foule d'autres savants qui tlennent le second rang, ce point de geograpbie an- cicnne nous pai-ait digne d'un nouvel examen.
La diversite d'opinions toucbant la Madagascar des anciens est telle cbez cos auteurs , qu'il devient impos- sible de porter un jugement sur leur plus ou moins de vraisemblance , si Ton ne veut faire table rase de leur erudition et s'isoler do leur inlluence. Les uns disent que cette ile est la Menntliias de Ptolemee ; les autres , que Pline la designe sous le nom de Cerne; ceux-ci croiont qu'elle correspond a lile Phehol du pseudo- Aristote , ou a la 7rt/jro^««^ celobre ; ceux-la, quelle pourrait bien etre V Atlanlide de Platon; il en est meme qui la retrouvent dans File du niai'cband groc lambulus. — En resume , le nom de Madagascar se trouve accole a celui de toutes les iles de la mer Ery- tbree que I'imagination des anciens avait creees , ou qui , situees aux limites de leurs connaissances geogra- pbiques, ne leur ^taient connues que par detresvagues renseignements.
Au milieu de ce dedale de contradictions, il faut, pour arriver a la verit6, se frayer pruderament une route jusqu'aux textes eux-memes, et se degager en les commontant de toute m^tbode exclusive. C4"est un ^cueil dont nous nous sommes defi^ avec grand soin. Un mode d'investigation bistorique souvent excellent dans une partie de la science devient vicieux dans une autre. Le premier devoir du commentateur est, a noti-e avis, de s'attacber a reconnaitre la nature du docu-
( 226 ) monl qu'il scul orlaircir, afiii dc \\'\ ii])))lic}uor quo la inethodo d'eliicidation qu'il comporto. L()rs(|irun do- cument ()riy;inal sc presente conuno ]o ri'siillat, soil d'unc observation attentive et 6clair6e, soit dune suite dc temoignac;es pen dilTerents entre eux , on j)eut sans risquos emplover une nitHliode severe et en quehpie sorte niallieniatique ; niais lorsqu'il ofl'rc des contra- dictions, lorsquil parail s'ap])uver sur des traditions decousues , et surtout lorsqu'il coneerne hs iiniilcs d'une science, toujours obscures ou an nioins dou- teuscs , il est prudent , il est raisonnable de nc sc scr- vir que dc la nietliode conjecturale , et dc faire pcu de cas de celle qui marche acconipagnee dc tout I'arsenal d'une argumentation niathematique.
La question quinousoccupe comporte cos deux pro- cedes. Nous pensons toutelois (pie lusage du eompas et des cbilTres, quelque seduisant qu'il soit, doit y etre fort mod^re.
Passons sans autre preanibule a I'examen des textes anciens ou nous rcncontrons le nom des iles que nous avons citees plus liaut.
Rlentithias. — L'ile de Menutliias ayant etc le plus souvcnt designee comme la Madagascar des anciens, il convient d'en parler d'abord. L'eclaircisseinent de ce fait n'aurait qu'un interet secondaire, si Ton n'y rat- tacbait pas la question tres importantc des limites de la navigation des anciens sur la cote orientale de I'A- frique. Cette consideration nous a force d'entrer a ce sujet dans plus de details que nous ne I'avons fait quand il s'est agi de Cern6 , dc Taprobane , et des autres iles oil les modernes ont cru reconnaitre Madagascar. Nous avons dii rendre notre lra\ail aussi com])]i'l iiuil nous a ''tc j)(»ssil)](' . puisrpn' li' l>nl piiiliciiliri qiK^
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nous nous proposons touciie a iin point aussl intcivs- sant de I'histoire do la geograplilc.
Ptolemee place Monutliias ( MtvouGiot^ ) par 85° dc longitude et 12" 30' de latitude australe , au nord-est (lever d'etedu soleil) du promontoiro PrasuDi, situelui- meme par 80° de longitude et 15° de latitude australe. R/uipta , dernier marcli6 que visitassent les navires grecs , etait situe plus au nord par 71° de longitude et 7° de latitude australe au fond d'un golfe oil Ton ren- contrait de nombreux i^cueils et ou regnait unc cha- leur intense.
A ne considerer que I'indication de Ptolemee et sa quatri^me carte de I'Afrique, ou Ton voit, a la position qu'il assigne {\ Menuthias , la petite portion d'une ile dont le reste se pei'd dans un des cot^s dc I'encadre- ment, on pourrait , en faisant toutefois une large part a I'errcur en longitude , supposer, comme Font fait Oi'telius (1) , Mercator (2), les Sanson et Delislc (3) , que Menuthias est ici Madagascar. Le cap Saint-Andre serait le point que Ptolem(!!e aurait designe dans sa carte. Mais, avec un peu d'attention, on s'apercevra facilenient que Ptol(!(mee apporte contre cette hypo- these un argument dontle judicieux d'Amille a montre toute la force. \ oici en quels termes notre geographe
(i) « IIa!c insu'a ab incolis Ma(ln{Tiiscar ab Hispanis S. Laurentii, olim Menuthias Ptob Cerno forte Plin: ilicitur. <> — Orteliu'i. Africro tabula nova; Antverpi;i', 1670, ilansle Tlieatniin orbis lerrarum^ '574.
(2) Insula Meiiiitliiu^, (lit Merratoi- il.ins ses annotations snr I'to- li'inee , (/((/ci magna aclinoduin est (^iiimirum nitie iitiiic esl Mailaijas- car) et I'tolcniieo incoijiHtn , verhiinile est ejus iion medium seil proximiim contlneiili termbium a Ptoloimto dcsignari ^ idea et sigiium iju% in mails littorc constitui. «
(3) Dans It.ius (Mitcs <le rAI'iicnu' aii' iijiinc.
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s'exprinie dans son Memoirc stir la /iter lirj three (1). « Le promontoirc , sous le noni LVJroinnla , que » Ton voit rango clans PlolemiJ'e comme (!;tant le plus » oriental de rAfriquo, en s'eioignant alnsi du dotiolt )) qui sert d'entroe au golfe Arablque, no saurait etre » que le cap qui porte aujourdhui le noni de Garda- » fuy. Au-dela de ce cap, la plus reculee des vllles que » connaisse I'antiquite sui* cette bande marilinie ot » sous le nom de llhapta , est determin^e par Ptol6- » mee plus m^ridionale de 13° que le proniontoire » nomine Aromata , avee la circonstance conforme » au local d'etre en position divergcnte du niidi vers » lecouchant, a I'^gaixl dupromontoii-e. La difference » de 13° dans la hauteur n'est pas donnee arbilraire- » ment; elle est fondoe sur Testimc qu'en avail i'aile un » navigateur , comme Plol<^mee s'cn cxplique positive- » ment dans le chapitre xiv de ses Prolcgoinenes. Or la » hauteur du cap Gardafuy , bicn connue de nos jours, » par environ 11° 1/2, donne lieu de conclurc que » celle de Rhapta cstpar 1° 1/2 de latitude meridionale. » Si Rhapta, dans Ptoleniec, passe la ligne de 7°, c'est » pour avoir trop rccul6 dans le sud Ic pix)montoirc » Aromata , en ne laissant quo 6° d'intcrvallc , ;iu lieu » de 11 1/2, entre ce promontoire ct la ligne equi- )) noxialc; et il n'ost pas a craindre quo la goographio » actuelJe soit dementie sur ce point , et sur beaucoup » d'autres, par celle de Ptolemee. In fleuvc, dans les » divers bras duqucl , vers son embouchure , on con- )) nait aujourd'hui plusieurs villes, rencontre precis<5- » ment la mor a la hauteur que prend la position dc » Rhapta,
(i) Tire, lie l\'frn<Icniif (Its i)isc. et bclles-lellrcs, (. XXXV, 1770. VnvP7 au'si sa GroqrnpJiic nnr,.nhr<'g<'r. 1. III. p. (i.3.
( '2-20 )
)) Un autre promontoire plus rccule, sous le nom » de Prasiini (comme s'il avait et6 appel(^ Cdp-Vert') » est le point lo plus austral de Tanciennc g^ographie; » et en consequence de Femplacement qui convicnt a » Rhapta , il y a tout lieu de reconnaitre la pointe de )) terre qui a pris des navigateurs porlugais le nom de » cabo Delgndo , par environ 10° sud.
» L'ile Menuthias , moins reculee vers le midi de >) plusleurs degres dans Ptoleniee, ne pent ainsi se » rapporter qua cclle de Zanzibar, la principale des » trois iles actuellement connues , vis-a-vis du conti- » nent; et il ne conviendrait pas de se rendre trop )i rigoureux a I'^garddePtolem^e sur une circonstance » particuliere qui est d'6carter Menuthias au-dela do )> ce qu'on connait d'espace entre Zanzibar et le con- » tincnt. Les geographes qui , dans leure cartes, ont )) transporte Menuthias a Madagascar, par un exc^s » d'eloignenient, pouvaient Otre retcnus par I'analyse » d'espace convenable, a partir comme on a fait ici de )) Gardafuy , puisqu'en ces memes cartes ils recon- » naissent ce cap pour etre V Arouiata. Ptoleniee ne » donnant que 18° de difference dans les hauteurs » d'Aromata et de Menuthias , nous avons toutefois » connaissance d'un intervalle de 24°, depuis Gar- » dafuy jusqu'a la terre la plus septentrionale de Ma- » dagascar. — Enchcrir sur les espaces donnes par )) Ptolemee, au lieu d'y voir des positions generale- » ment trop 6cartees , c'est peu connaitre le fond de » sa geographic et le vice dominant du principe ou 11 » etalt de prendi'e 500 stadcs pour mesure suffisante » a ce que vaut un dcgre de grand cercle , quoiqu'il » soit aver^ que ce degri en rcnfcrme 600 , et meme » 700 , selnn differentes longueurs de stades. Oue di^s
( no )
)) liommcs d'une prolonde erudition, tols que Saumaise )) et Bochart, aient pris Menuthias pour Madagascar, » la misprise doit moins surprcndre do Icur part que de » celle des autcurs de cartes gecgrapbiques, parce que » la discussion que dcmandentlos ouvrages dece genre » est plus proprc qu'une autre elude a fairc considerer » les objets d'asscz pres pour Ics fixer plus precise- » inent. J. Vossius, dans ses notes sur Mela , remarque » bien que Menulbias n'est point Madagascar, et que )) ce doit etre Zanzibar ; mais les fondements de son » opinion me sent inconnus (1). »
L'exainen du tes,te de Ptolemee suffisait done seul pour demontrer que la situation de son ile Menu- tbias ne convient point a celle do Madagascar. Mais cbercbons en dehors de cet auteur quelques lumieres nouvelles sur ce sujet.
II existe deux autres temoignages anciens relatifs a Menuthias (2) : I'un de Marcien d'Ueraclee , dont I'ou-
(i) Cellarius {Notiticc orlils antiqui. .. Lips., lv3i-32, lili. iv, c. 8, p. 965) trouvait reinplareii.ent Je Mi'tiulliias trop (lifficile a fixer. « Nnn iiitci pono me liisce litilms ( dil-il) tanlum dico, iiiliil velcrcs tic niagnitiuliiie insulae, quae in Mailagascar prene incoinparaI>ilis est; e! loiigius fere abe-t a littore , ipiain vclcri'S introrsus navi{;al)aiit , (iiiiim Meiiulliias tioii prociil fuerit a promoiitorio. Zan/.ibar, (|uani- vis propini|uior sit continiTiti : [)ro[>iu5 taiiien abest ah a;qiia'ore ciiiain Moniithias Ptoliminei , cui latitiidincni aiisdali'in xii et diinidii graduuni tiiimit. Quiliin t clijjal utruiii viilt, aut siih^litu.it .di.iiii , ciii positio Moniitliiadis comiiiodiiis roiiveniat » — D'Aiiville a paifai- teiiient res<du la diffuMillt- qui airete ici Cellarius. — Pinedo, dans ses notes siir Klicnne He I'yZHiice, sc rcousait <'{»aleiiienl : u .. Ncc iiicam senteiuiaiii rxpecles (dil-il). Kjjo ciiiin in hiijus nirjdi rebus scipmr Arcesilaiii niliil nffirinantetii, Quis enirn inler lot ili ci epaiilcs senlcii- lias verilatem late.ntmn iiivetiiet? •
(2) On ne trouve dans Klicnne de I'jzanoe que le noin do Mciiu- 'tbias, aver relic brieve et iiisuflisanle ind c.uion : fiisuhi .h'tllnpni'. Sli'plianns, (/.• /,'r//(7>(M; I'dil. di I'ine.lo , Ain^l.. i^'jS, |> \''i~.
( 23t } vrage est un resume concis de la geographic de Ptole- ni<!!e , et qui, a defaut d'autre merite , aurait celui de controler le texte de cc grand geograplie (1) ; I'autre, d'Arrien, autcur d'unperiple de la mer Ery three, sorte de routier commercial ecrit vers Ian 200 , au temps de Septinif^-Severe etde Caracalla ("2),
Marcien d'Heraclee , apres avoir suivi pas a pas la description que Ptolemee donne de la cote orientale d'Afrique, annonce que Menuthias nest pas eloignee du pioinoutoire Prasiirn (non longe a promontorio dis- tans (3) ). C'est la une assertion fort remarquable, car Ptolemee place cette ile a 5° du promontoire. Le coplste dilTere ici tellement de son modele , que Ton doit necessairement admcttre, ou que les Tables de Ptolemee ont ete alterees depuis la redaction du livre de Marcien, ou que celui-ci, mieux renseigne, les aura corrigees sciemmcnt , ou enlin qu'il aura commis une de ces inadvertances qui , a la faveur d'un mot trop ge- neriquc , dchappcnt parl'ois a Fauteur qui decrit un dessin ou une carte.
Quoi qu'il en soit , on presence do la precleuse rela- tion que nous a transmise Arrien, ou I'ecrivain que Ton d^signe ordinairement sous ce nom , il ne pent s'elever un doute sur le sens du passage de Marcien que nous venons de citer. L'auteurdu periple de la mer Ery three fait mieux qu'indiquer le peu d'eloignoment de Menu- thias , il la specific en nombre de stades. Voici quel est en substance son recit. Apres cnvii'on vingt et une
(i) Walckenaer , f^ies ite plusieurs personnatjes celibres; i S3o , I I, p. ii5.
(2) Voye/ a ce sujet ro|)iiiioii de M. Letronne, Journal Hes S<i- vnnts, 1825 , [). 263.
(3) Pi'iiple ;lc Mdiricn tP llcxirlcc : ('(lilioii ilc \I K. Mu' Kii, p. ■ii.
( 232 )
journeos do navigation , a parlir tUi promonloire Aromata, lesnavires, dont la course a varie du sud au siul-oiicst, quittent lo lieu nomme Noi'a Fossa , ct sc dirigoant au sud-ouost pendant doux jours et deux nuits, atteignent Tile de Meniithias, eloignoe dc trois cents stadcs (environ liuitlicuesct deniie) du continent. « Cctte lie basse et boisee [humilis ntqite depressa, 7>cs- tita arborihus) est arrosee par plusieurs rivieres. On y trouvc dilTerentes esp^ces d'oiseaux et des tortues de terro ; il n'y existe aucun animal feroce, oxcepte le cro- codile , niais il ne fait jamais de mal i pcrsonnc. Lcs habitants cmploient a la peclie des poissons et des tor- tues de mer des barques cousues, faites d'une seule pi^ce de bois ( paTrxa xat ftovo?uXo) (1) ; ils pechent aussi
(ij lluct , ji.ulint (In (■Diiiiiieice des Ethiopicns , dit que ces peu- ples se servaient de petits na-vires iegers: les uiis dune seule piece de bois, les aulres di' joncs tissus ou cousus ensemble, sans fer iii gou- droii. G'est dc cette maiiufarture, ajoute-t-il, que lihapta ^ ville d'Azanie, j»rovince d'Elhiopie , voisine de la luer, et le cap llhap- luin, out piis leur noui, d'uii mot jjiic (]ui sijjnifie coudre. Ces bateaux rtaieul pliauts »t cliaugeaicut de Hgure, ct lcs Etliiopicus les trans- portaient aisPHicnt loisqu'ils etaient rernonles jusquaux calaiacti s du Nil. ( Hist, du commerce el de la navigation des nncietis, cliap. xiv. ) Iliiet coiifund iii lcs barqties de Rhapla et les nacelles dont se ser- viiicnl les Klliiopiens sur le iNil. (MIes-ci, (I'apres le ten)oij;iKi{;e tie I'line, elaieiil en eFfet ployables (;j/ic'aa7t's ); on les portait sur lcs ppau'es cbaque fois (pi'on aiiivait aux cataracies ( lib. iv , c. 9), iiiais il est didicile de cioire que lcs bateaux de la cote ne I'usseiit pas consliuits plus solidenient. Les barijues cu usage sur la coteilu Zan- jjix'bnr sontcompnsccs d'une ^lande piece de bois qui serl de (|UiUc, a laipielle sont lic<!s, au uioyen de coidclles , les planches uiiuccs et etroites qui forn)ent la coque. Les attailies s<inl si nonibreusos 1 1 se croisent avec lant de n'cularile, qu'ou dirait une trcssc. Celte des- cription explique lant bicn que mal I'alliancc siiif^ulicre que fait Ar- rien des epillii-lcs p'onrTCt <"l fovojvla (|ui Scniblcnt s"e"-.tliiie rc.ipm- ^inenicnt.
{ 233 ) au moyen dc paniers d'osier qu'ils placcnt a maree basse devantles cavites durivage. Do Mcnuthias, on va en deux joiirs a Rhajita, ainsi nomme a cause de scs barques coitsues. C'est la derniere place commerciale de cetle cote , et Ton y trouve bcaucoup d'ivoire et d'^caille. »
Outre la courte distance qui s^paro Mcnuthias du continent, fait qui nous parait inattaquable, grace a la concordance que nous fournit Ic temoignage de Mar- cicn , on trouvera dans la suite du passage d'Arrien una preuve non nioins decisive de la non-identite de jcette ile et de Madagascar. Menutliias est basse et boisee, tandis que Madagascar offre de toutcs parts de liautes montagnes , remarquablcs surtout dans sa par- tie nord-ouest (1) la plus rajjprochee de I'Afrique, et cello oil auraient necessairement abord(^ les navires venant du continent. Quant aux crocodiles inoffonsifs, aux barques cousues et aux nasses pour la peche (2) , CCS details s'appliquent aussi bien aux lies voisines de la cote africaine qu'a Madagascar , et Ton ne peut en tirer aucun argument contre notre opinion.
Nous nous rosumons :
La comparaison des trois auteurs anciens qui ont parl6 de Menutliias demontre done de la maniere la plus evidentc cpie ccttc ilc n'cst pas Madagascar. La relation d'Arrien est explicito a cot egard , ct die se Irouve conArmee avec le plus grand bonlieur par le periple de Marcien d'lleraclee; PtoI(^inee soul, sans lo
(l) Voyt!/, \iM vHfs prises pendant rexiJOililioii ile la Frevoyt'iile <1ans les iiieis de I'lnde , sous le coiiiiiinndeinent de M. le capilaiiie 3e!ieiine, pi. 3''". — Owen, Nanalive of voyaijes to explore the sAoivs of .if flea, Avcibtii and Madoijascar ; t. II, p. i33.
(t) Vi)ve/. Salt , /'<nv/(/c r;/ ./<*! vs/i((C, trad IVane , tum I, p. (>G. I. MA US. 5, 1(5
( 'ri^ )
coiiliolr (Ic la nitiqiic, scrait rnpjml dun scnliment conlrairo, s'il netail ouvertcment coiitrcdil par son abr<!!viateur, ol si los jiulicleuscs corrections que d'An- villc fail subir aux positions qu'il indique , corrections pour lesquolles los prole!i;onienes dc sa geographic fournissont des donnt'cs irrccusablcs, ne faisaienl dis- paraitre jusqu'a Tombre d'undoute sur cette question.
Examinons maintenanl la source de I'erreur que nous venons de relutcr.
C'cst lY'dition latine de Ptolemeo , imprimec a Bale en 1540, qui naturalisa, pour ainsi dire, dans la science , lidentitc imaginairc de Mcnutbias et dc Ma- dagascar (1). Une note I'etablit en ces lermcs (2):
(i) Plusicurs pctits Iraitt'-s tic f;<=ogi apliio avai.Mil dt'-ja n'p.uulii cette trrciir, nitre auties le livre ilc Glaieanus iiM]irlii>(' pliisicui* fois sous Iv line til' tlcnrici Glareaiti Ihlvelii ])Ocl(C Ir.un'ali <lc (jco- (jrapltia liber uiius ; in- 12. Dans le chap, lx et dernier, ([ui traile ilc n-fjionibus extra Ptolomwwn ^ nous Irouvons le passajje suivant : « A<1 nieiiclifiii nostra aetate Madagascar pingitur in co loco ul)i Pto- loma?Uf Mcntuliiiim insulam. i>o-iiil,.." (i'.dit. deV.ni-p, ir>3(),i). 89) (2) Lib. IV, cap. 9. — Grace a I'oldigtance de M. Jomaiid, conser- vaieur au dcpartcincnt des cartes et plans de la UiljIiollKtpie rujale, nous avons pu examiner parmi les innond)raI>les lii lies.ses de la Col- lection {5eo{»rapIiique creee par sessoiiis ('ilaiic's, treute-tiois cdiliiins on reinipressions differentes de la Gvograjilue de PtoU'mi'e Nous en donnons la liste :
147.'), traduction latine, sans cartes; — 1478, av. c les cartes de l?uckin(k; — i.\?ii (? , Ptolemce. en vers italiens, par r>rrliii(<,!iieri , avec cartes; — 14S2, edit, rarissiine d'Clni; — i4H6. etiil. latine J'lJIin; — 1490, rnf/. de Rome ; — 1 5n8, e«f/. de Uoiiin, avec la niap- peniondc de lluyscli ; — l5il, edit, laline de Veni>e: — l5l3, eail. de Stra.«l)0urf;; — i5i4, ead. dc ]Nureniber{^; — l52o, end. de Slras- },our{;; — l522, end. de Strasbourg ; — I 5:'4i cad. de Nnreni!)er{j ; — 1.533, lexte f,rec, in-',; — i53.5, edit, laline de Lyon ; — 1540, edit, laline de Colo{<,ne, in-8 , sansraitcs; — l54o, en</. de Hale. in-Fnl;
( 235 )
« Prasum promoiitorium ( ubi nunc Mclindaa re-
gnum) Monuthias (Madagascar insulam , sive in-
sulam Santi-Georgii nominant , licet accolae sunt ma- chometista?) (1). » Toatesles (Editions suivantos repe- tentlilteralcment cctte note ; faitdigne de remarquc et qui piouve jusqu'a quel pointl'esprit de routinepresidait ;i laieimpression des livresrcchercliesdii public, comnie I'etait alors la geographie de Ptolemee (2), Que le pre- mier annotateur , peu instruit des decouvertes que ve- naient d'accomplir les Portugais , ait risqui^, pour sa- tisfaire a I'avidite des lecteurs , un comnientaire donl il netait pas sur, cela se coniprend, a I'aspect des fa- buleuses cartes qui accompognent son edition. Mais que des homines tels queServet,Mercator, Bertius, etc., aient reimprim^ ses bevues avec le soin le plus minu-
— I 54 ' , eatJ. (le Lyon ; — I S.'i^ , cad. de FiAle ; — I 545, end. de tii'ile ;
— 1548, ciiil. de liale; — I 548, Trail, italienne de Maltinlo, Venisp ;
— i55o , ead. de Bale; — 1 552, edit, la tine de Bale; — i56i , Iradiie- tioii italienne de Ruscelli, Venise; — i562, edit, latine de Moleto , Vonise; — i574, tr.id. ital. de Biisrelli, Venise; — 1 584, edii. do Merrnlor, Cologne ; — 1598, trad. ilal. deCernoui. Venise; — i(!o5, edit, de Mercator Pt Monlanus; — l6i8, edit, de Bertius; — I ySo, edit, des eartes de Mercator, Amsteid.ini ; — '737, e'dit. lat. de Nti- rendjerjT; — 1 838, nonvelle edit., par Wilberf;.
(1) Marco Poll) avnit dit en parl.iiit des iialiitants de Madaj^ascar : «' // sunt Sarai'iuz, aorent Maomel ( .. .. lialientes lejieni aboininahi- km Maeliomeli). " E<lit. de la Soeiele de ge'of^rapliie, p. 232, 469.— Ln note dii Ptoletnee nous paraif piiisee dans ce voyapeur, dont la relation a en jiisi|n'an xvii"^ sieele iiiie si graiidc intluenoe snr la ."eo- ;;raphie des rejijioiis orientales.
(2) Outre les trente-lrois editions dont nous venons de donncr la lisle dans une note jue'cedente, il en existe encore dix-hnit autres , A' a\nhs\c Lexicon Inhlioijrnjducuin de S.-F.-(t. llofl'nian (t. Ill, p. 487 il suiv.),et une note de M. le viconile de Sanlarein, iiisi-ri'e dans >i»^. rt clierelies sui Anierie VesjiMee; I 84', p I7!vn(v(e,5,
( -236 )
licux, c'est cc que Ton iie sauralt oxpHqiuT, si I'on no sa\ait et lo prix elovc dcs li\res dans Ic xvi'' siecle, et le respect qu'inspirait alors tout ce qui sorlait do la plume d'un savant; deux causes pour lesquelles une nouvelle edition, sous peine de n'avoir point d'acoue- reurs, de\ait renrenner texluelleiuent toutes les anno- tions deja publiees. Des qu'une note etalt inipriniee, elle avail sa place marquee d'avance dans toules Ics editions futures; elle a\ait gagne son droit dc bour- geoisie, el pcrsonne , pendant un siecle, ne songea a lui ra\ir ce privilege. La moindrc attention eiit sulfi aux erudils du xvii'' si6cle pour se convaincre que si Menulhias etait Madagascar, Prasiiin nc pouvait etre prochede Melinde, puisque Ptolem«^e place le promon- loire dc Prasuiii au sud-oucst de Meniithias, et quau conlraire Melinde est et a toujours ili au nord-ouest de Madagascar (1). N'est-il pas d'ailleurs curieux do \()ir des savants justemenl celebres laisser subsisler dans la note que nous venons dc citcr le nom de Saint-Georges a cote dc celui dc Madagascar, tandis qu'ils savaient que les Portugais n'avaient donn«i a cette ile que le nom de Saint-Laurent? N'est-il pas sur- prenant de les voir accucillir avec faveur, ou du moins sans contestation , une geographic fantastique , ou Ton trouve , a cote dcs renscignemcnts contemporains, les absurdes relations du moycn-agc et les notions obs-
(i) On Iroiivc s^oiivpiit de iioiuhrcnses conliailic lions d.-insli'S notes iVinio nieuic ('(lilion de I'toleinee. La li admlimi ilidieniic dc Leo- naido Ceiiioli, entre aulrcs, en offre un exeniple : apres :ivoir conic; i ini'vitable I'ldsmn ;1/e/'iif/(.', I'annotaUiii, dans une Dcscrillloiic di Ittllo il mondc ti-rntio , dit (jue ce pioiiiontoire si rliinjtui il Motovi- liirlie. — On voil an■;^l (ii oiii luincnl iin dcsacrcird coniiilcl I'lilro les rartcs cl le Icxlc;.
( 237 )
cures oil systematiquos de rantlqiiite ; bizarre; pro- duction de ce siecle quifonda la doctrine; du libre exa- men d'ou sortirent les regies de la critique, et qui manqua comj^letement ici de 1 'esprit d'examcn ct de critique !
Des editions de Ptolemee, la note sur Mcnutliias a passe dans les cosmographies et les atlas, puis dans les ouvrages sp^ciaux rclatifs a Madagascar, enfin dans des niyriades de geographies elementaircs, oil ellc se perpetucra, sans doute, jusqu'a la fin des siecles.
Corahien il est regi'ettable que Bochart, Saumaise , Huet, etc., n'aient pas apporte dans cotte question dc geographic ancienne les luniieres de leur vastc erudi- tion. Entraines vers des discussions philologiques qui avaient pour eux plus d'attraits , ils sc sont Jiornes a y Jeter un regard fugitif et areproduire I'opinionde leurs devanciers. Saumaise n'y a consacre que deux lignes dans son immense travail sur Solin (1) , et Bochart une seule, dans sa Geographia sacra (2). Hardouin (3) n'est pas moins concis ni moins aflirmatif. Iluet, dans son Nistoire du commerce des anciens [li) , parle hrlcve- ment du trafic que faisaient les tthiopiens de la c6t8
(1) " I[)Si Menutliias ea est quain vulgo nominant iiiilljjeiKTC
Madagascar^ :i Lusilanis iiisi'la S Laiuentii iliciuir. " — CI. S;tliiin>ii ; PliniaiKV exercilationes, in Caii Jid'd Soliiii Polyhislora, p. 878.
(2) Muimthios (hodie S. Lauientii insula, vel Madaijnscar. »
— Sainuelis Bocharli ;0;jera omnia, LugJ.-Datav., iGga. — Gcojr. sacra, pars I, lilj. iv, cap. 27, col. 273. — « Menutliias, id est Mada- gascar, vel S. Lai'.ieiilii insula. " Pars II, lib. 1, cap. 87, ciil. 6^2.
(3) « Niillus dubito qnin Ii:ec Pliniana , sive Lycophroniana, sivc Dyonisiana Cernesil ea quain S. Laurentii vocitamus sivc Madagas- car : Menoulhias eailcin Ptolenia-i ; III), iv, c. 9 " — Caii Plinii se- cundi Ilistnria naluralis ciuii sclcrtis comwciilariis J. llarduiiii .. Paris, lii'inaire, 1828, 111), vr, cap. 3(i, p. 747.
(^) llUct, cliap. XIV.
( 238 )
orieiitale ti'Alriqut' ; luais il iie tlit pas uii iiiul do Me- iiuthias, quoiqu'U ait consulte le Periple <te la iiier Eijtiiree, et donn^ , d'apr^s cct ouvrage, quelques de- tails sur les barques cousues do Rhapta , dont il no cherclie m6me pas a fixer la position.
Cette moderation de paroles, chez des auteurs qui n'avaient pas pour habitude d'ecourter leurs comuien- taires, devait iaisser croire, ou que la question 6tait deja decidoe , ou qu'elle no valait pas la peine d'etre discutee.
IxmiiRAiRii de Riigtise a Constantinople (1) . (Communique par M. COCtlELET. )
Li(;ues de Fiance.
1" station. — De Raguse a Castelnovo , 6
Dans la Dalmatie.
2* — De Castelnovo a Cataro , 6
Dans la Dalmatie.
3* — De Cataro a Antivari , 6
Dans la liaute Ailjanie ; chemin assez beau, \ilie pelile.
h" — D'Antivari a Dulciguo , k
Dans la liaiile Albanie; Nille situee sur une petite riviere.
5* — DeDulcigno a Scutari ouScoudra, 8
Dans la liaute Albanie; ville grancle, forte et bien peuplee.
(i) Get itineraire est ancien. J'en ai ou connaissauce lorsque j'etais intendant en Illyric en i8og. II eiail destine aux courriers frantjais (jue les circonslances de la guerre sur terre et sur mer t'on-aient d'ex- pedier par Ra{juse a Constantinople. L'(;xactitiidi! rijjoureuse des noms des stations et des distances servira de point de comparai- son aux geographes , et c'est sous ce rapport qu'il nous a paru utile dr If puliiier.
( 230 )
Liencj (Ic France Le cliuniin cic Uulcigno u Scutari est (litticile. II y a dcs moiit.igDes (t !a riviere lie Baijaiika a traverser.
C slalion. — De Scutari a Alessio , 8
Le cheinin estencore plus tlifticile; il y
a des moritagnesa traverser, et ia riviere
Drin , communement appelee Driiiiliihi ,
pres remboucliure de laijuelle la villc est
situee.
7* — De Alessio a Albanopoli , 16
Le chemin est niontagneux et assez dif- ficile. La ville, (]ui communement s'ap- pelle Kroija , etait autrefois la capitate cl(,' TAlbanie ; elle fst situee sur le DriTi.
8* — De Albanopoli a Akrida ou
Ahrida , 18
Dans la Macedoine; ville grande, Ijien peuplee ; patrie de I'empereur Justinien , dont elle portait autrefois le nom.
9* — De Akrida a Moskopoli , 4
Dans la Macedoine; chemin difficile et montagneux ; ville agreable ct coniuier- oante.
10' — De Moskopoli a Petolia (on pro- nonce Betolia) ou Monastir, 8
Dans la Macedoine; chemin assez dif- ficile. II y a beaucoup de montagnes et dc foretsa traverser. Ville grande, forte, bieii peuptee, ancienne capilale du royaume des Peoniens ; elle est situee sur un^lac exlremement poissonneuxdont elle porte communement le nom ( Betolia ).
11"= — De Petolia ou Monastir a Prilipo , 8
Dans la Macedoine ; chemin monta- gneux. La ville que Ton appcllp coiiinui
( 2h0 )
Llfiies (Ic Fiance, nciiieiil I'eilepee esl stlutc sui uiie jjelile riviere.
12' Station. — De Prilipo a Rrupuli . 12
Dans la Macedoine; clieinin difficile. IJ y a .i traverser beaucoupde montagncs , de Forets et la riviere Vardari.
La ville est silue'c sur la riviere Psitiia ; elle est petite.
13"^ — ])e Rrupuli a Istib , 10
Daus la Maco'doine; le chcniin est Ir^s difficile a cause des haute s montagnes ct des forets qu'il y a a traverser.
La ville est siluee sur la riviere ^L^r- mari ; elle est petite.
Ill" — De Istib a Stazzaiiaa , 5
Dans la Macedoine ; le clieniin est assez beau. Lepays est ouvert.
La ville est situee sur la riviere Mar- inari ; clle est petite.
15* — Dc Stazzaizza a Palanka , 8
Dans la Macedoine ; le pays est inoiKa- gneux , le chemin aride.
La ville est situe'e sur la riviere Esker.
16' — De Palanka a Giustcndil (on le
prononce Kustcndil) , 6
Dans la Macedoine; chemin assezbeau; pays ouvert. Ville grande et forte , situee sur la riviere Esker.
17' — De Giustendil a Dusnizza (ou
Bousnizza) , 5
D.ins la Tlirare ; chemin assez beau; pays ouvert; ville petite.
18' — De Dusnizza (ou Bousnizza )
a Bagni , 8
Dans la Thrace; ilicmin ilif'ricile. La
( --^Al )
Lieues dt; France, ville est situce dans une jiluine pres) d'lme petite riviere ; mais il faut traverser des iiiontagiies pour y arriver.
19' Station. — Dc Bagni a Kusdere , 4
Dans 1,1 Thrace ; le chemin est assez Lean ; le pays ouvert; il n'y a a traverser (ju'une petite riviere sur laquelle elle est siluee. Ville petite , generalement lia- Litee par des Tatars qui s'y sont e'tablis.
•20"= — De Kuscler6 a Bazantzik , G
Dans la Thrace ; on I'appelle ordinaire- ment Tatar-Bazantzik a cause de plusieurs Kans taiars quiy ont ete relegues, et pour la distinguer de plusieurs autres villes portant le nieme nom. Chemin assez beau; campagne riche et agre'able. Ville petite, generalement habitee par des Ta- tars et des Turcs, qui sont presque tous palres.
21"= — De Bazantzik a Philippopoli , 6
Dans la Thrace; chemin beau; cani- pagne riche et belle. La ville est une des plus imporlantes de I'empire ottoman ; elle est tres ancienne , riche et conimer- cante. Elle est situee sur la riviere de Marizza, qui passe par Adrianople, et se jette dans la mer Egee.
22' — De Philippopoli a Pappazli , G
Dans la Thrace ; le chemin est beau ; il traverse des jardins delicieux. On en voit entierement converts de roses dont on fait 1 essence si renommee. La ville est petite, agreable, et situee sur une petite riviere qui se jette dans la Marizza.
Dc Pappazli a Kuijali , 5
Dans la Thrace; le i heniin est beau ;
23« —
( 242 )
Lieucs (le France.
In campayiie ruajjiiiliqup. La ville est pe- tite, mais agn-ablc; ellu ost sitiice siir unc petite riviere qui se jelte dans la Muriz^a.
2/1' slation — Do Kuijali a Usunzova , 6
Dans laThrace ; chemin beau; campa- gne riclie ct njjionlile. La \ille est {^rande, riche ct comniprrante ; elle est siture sur une riviere qui se jette dans la Marizza.
25* — De Usunzova a Miistapha-Paclui Kioprussu,ou Pont de Musta- plia-Pacha, 10
Dans la Thrace ;le chemin est heau; la campagne belle ct nche. La position est tres avantageuse : c'est sur ce poiit que I'ou traverse laMarizza pour arrivcr a Adrianoplc. A la tete de ce pout est la viile qui porte Ic nom de celui qui la tait construire; elle est petite et avantageu- sement situe'e.
26° — De Mustaplia-Pacha Kioprussu ou Pont de Mustapha-Pacha a Adrianoplc , '^
Dans la Thrace; Ic chemin est bean; la campagne riche et ayreablc. La ville est I'ancienne capitale de I'empirc otto- man et la residence des Sultans , nieme tres longtemps apres la prise de Con- stantinople; elle est forte , belle et riche ; elle est situee au confluent de trois ri- vieres qui se jettent dans la Marizza.
27° — D'Adrianoplo a Apsa (on pro- nonce llapsia) , 5
Dans la Thrace ; petite ville situee dans la plaine sur la route.
28' — Dc Apsa a Eskibaba , 5
Dans la Thrace ; le chemin est bean ,
( 243 )
Liiues de France, le ji.iys est ouvert, et la campagne belle. Ville |)etiie, mais afjieable.
29' station. - — ^ D'Eskibaba a Burgase , h
Dans la Tlirace ; ville giande , peuplee et riclie , renommee par ses fabriques ile poteries , faites avec des terres rouge et noire , que Ton tire des environs de la v.lle.
30' — De Buigase a 'Zorlou , 10
Dans la Thrace; cheinin beau , qu'on peut faire en une journee. Ville batie en bois et miserable; elle est a 6 lieues de la nier.
31^ _ De 'Zorlou a Silivrie, 10
Dans la Thrace; chemin assezbcau, que Ton peut faire dans une journee. La ville est belle , grande et bien peuple'e.
31' — De Silivrie a Ponte-Grande (on dit en langue du pays Buijuk 'Zekmetze ) , 6
Dans la Thrace; chemin beau. La ville est grande, peuplee et commercante. Lc pont est d'une belle hauteur et d'une lar- geur admirable.
32' — De Ponte-Grande a Ponte-Pic-
colo (ou Kutzuk-'Zekmetze) , 3
Dans la Thrace; chemin beau. Ville moyenne.
33' — De Ponte- Piccolo a Constan- tinople , 3
Dans la Thrace ; chemin beau et pave dans loute sa longueur jusqu'aux portes de Constantinople , oil on entre par la porte d'Adrianople, que les Turcs appel- lent Edirna-Kapussi.
( '2lih )
DEUXIEME SECTION.
Actes de la Societe.
KXTRAiT DlvS HROCES-VEKHAUX DliS SliANCES.
PftliSIDENCE DE M. RoUX DE RoCIIELLE.
Seance du 1" inatu ISii.
Le proc(^s-vcrbal dc la dernii^re stance est lu el adopts.
M. Gay, noinmd mcmbre adjoint dans hi (Icrnieio seance , adi'csse ses remerciements a la Comnilssioii centrale ct promet de concourir avec ih\e a ses travaux.
M. le chevalier de Baiboza , secretaire pcrpetuel de rinstitut historique ct g^ographique du Bresii , an- nonce, par sa lettre du 13 juillet 1841, que I'lnslitut a accueilli avec enipressement la recommandalion que la Societe lui a faite enfaveurdeM. Martin dcMoussy, un de ses membres, voyagcur au Bresii; il ajoutc que, sur sa proposition, I'lnslitut vienl de charger un comite special de lexauicn des cai'tes geographiques des di- verses provinces du Bresii , pour en former ensuite un atlas complet. Les encouragements du gouvernement permettront a I'lnstitut d'elever bientot ce monument gdographique a la gloire du Bresii.
Par une seconde lettre , en date du 3 mai 18Zi2 , M. de Barboza remercie la Societ6 de I'envoi de la col- lection do ses Memoires et de son Bullelin , et il hii
( 2/45 )
adrcssc un oxempiairo do la Flora fluininense , qu'il a obtenu du gouvernemcnt du Bresil pour sa biblio- th^que, ainsi que la suite de la Revista fiinie/isn/, pu- blice par I'lnstitut historique. M. le president de la Commission ccntralc rappelle que la caisse contenant ce precieux envoi est parvenue a la Societe dans sa derniere seance, ct qu'il s'est empresse d'adresser des remerciements a I'lnstitut du Bresil.
M. le lieutenant-general Zarco del Valle, directeur du corps du g^nie espagnol , adresse un exemplaire de la grande carte geographique et topograpliique de File de Cuba, en 6 feuilles, et exprime le d6sir d'entrcr en relation avec la Societe. La Commission ccntralc accueille ce desir avec empressement, ct decide que la collection de son Bulletin sera cnvoyee a la Direction du genie, a Madrid. M. Berthelot signale a cette occa- sion les travaux scientifiques qui se preparcnt en Espagne pour la triangulation et les loves de la carte de ce royaume.
M. Jomard communique I'extrait d'une lettre de M. le lieutenant-colonel Sabine , qui le charge d'offrir a la Societe, en son nom, le Rccueil des perturbations magnctiquos obsorvees en I8Z1O et 1841 dans les di- verses colonies anglaises , ct, au nom de M. Alexandre Simpson , la relation qu'il vient de 2:)ublier du voyage dc M. Th. Simpson , son I'rere , ct de M. Dease , aux terres aictiques.
M. Hommaire dc IIcU lit une notice sur la carte de la Russie Tn^ridionale, faisant partie de la relation de son voyage a la mer Caspicnne.
M. Lefebvre , rccommont de retour de son voyage en Abyssinie , lit un mcimoire sur la sitiiatic n politique do CO pavs.
( 246 )
M. Daussy communique une lottrc de M. dc Bovis, ofTicior tie la marine royale et membrc dc la Society , contenant la relation de son exploration du detroit de Magellan et dc son echouage sur Ic banc dc (ilallegos. La Commission ccntralc accucille avec inttiret ces trois derniercs communications et les renvoic au Comitc du Bulletin.
M. d'Avezac appclle 1 'attention de la Societci sur un Memoire de la Uei>ista trimensal de Rio-Janeiro, sur la question de la possession dcs tenes du Cap-Nord par les Portugais; Memoire qui , loin d'infirmer les droits dc la France, ne peut servir qu'a les confirmer.
Le meme membre signale cnsuitc, comme tres digne d'intcrct , un portulan de la Mediterrance qui fail partle dc la collection dc cartes laiss(^e par feu M. Guil- laumc Barbie du Bocage. M. d'Avezac est pri(i de re- meltre au Comite du Bulletin une Note sur cette com- munication.
Seance du 15 mars lS/|/i.
Lc proces-verbal dc la derni6rc seance est lu el adoptc.
S. Exc. M. lc comte de Cancrine adresse a la So- ciele I'Annuairc magnitique et meteorologique du corps des ingenieurs dcs mines de Russic, ainsi que le Recueil des observations m6t6orologiques failes a Kasan.
La Commission centrale I'c^oit en outre le don de plusieurs autres ouvrages; elle en ordonne lc depot a sa bibliotlieque, et vote des remerciements aux au- teurs.
M. .lomard coniuiimi((iie plusieurs des dessins qui
(
( 247 )
accom])agncnl la relation dit voyage scientifique tie M. do Tcliiliatcheff dans I'Altai oriental.
M. Desjardins annonce que M. le doctcur Zipser sc propose d'envoyer au musee de la Societd; une nouvelle serie de mineraux de la Ilongrie , et il exprime , au nom de ce savant , le desir d'etre porte sur la liste des candidats pour une place de correspondant Stranger. M. d'Avezac lit une notice sur une ancienne carte nianuscrite historice , de la collection de feu M. Guil- laume Barbie du Bocage. — Renvoi au Comite du Bulletin.
M. de Saint-Priest entretient I'assemblt'e d'un pro- jet de voyage et dc recherches scientifiques dans le Yucatan et dans I'Amerique centrale ; il en expose tons Ics avantages sous les rapports de la geographic , de riiistoire et des antiquites; il dcniande que la So- ci(he veuille bien s'int(^rcsser a la reussite de ce projet. M. Jomard lit luie notice sur une cai^te militaire ita- lienne du xv" si^cle , faisant partie de sa collection des anciens monuments de la geographic. — Renvoi au Comite du Bulletin.
M. Hommaire de Hell communique I'extrait d'une lettre adressee par M. le baron de Humboldt a M. Fre- deric Lacroix. Get extrait contient des renscignements sur une deviation du cours de I'Oxus et sur la fonda- tion d'un obscrvatoire de physique en Russic.
MKMBRES A.DMIS DANS LA SOCIKTl';.
Seance du 15 mars.
M. Pierre de Tcihiiatciieff , genlilhomme de la chambi'e de S. M. I'empereur de Russie. M. Charles Roum.
( 248 )
Ol'VRACES OFFERTS A LA SOCIKTE.
Seance dii IQ /'eerier 18/|/|. Par h's auleurs et editeurs : Journal de la Society rovale gcographiqiic dc Londres, tome XIII, partic 1", in-8. — Annalos niari times et coloniales , Janvier. — Nouvelles annales des voyages, janvior. — liullctin de la Society de geologie, tome XIV, feuilles 41-42, II* se- rie, tome I , feuilles 1 a 7, — Jom'nal asialique , de- cembi'e. — Annales de la propagation dc la foi , Janvier. — Bulletin dc la Socif^td; pour I'instruction elementairc , novcmbrc. — Bulletin de la Soci6t6 ma- ritime de Paris , 7" caliior. — Recucil de la Socicte pol) tecliniqiic , Janvier. — Bulletin dc la Societc in- dustriclle d'Angers , n"* 5 et 6, — L'Hcho du Monde
savant.
Seance du i" mars.
Par M. le lieutenant-general Zarco del f^alle : Carta geografica topografica de la isla de Cuba. 1824-1831. 6 feuilles.
Par I'yicademic de Dijon : Compte-rcndu des tra- vaux de I'AcadL^nie pour 1841-1842.
Par la Societe royale des sciences de Lille : iMtimoires dc la Socicte pour 1839 et 1841.
Par la Snciete rorale d\igriculture de I ersailles : Mc- moires pour 1841, 1842 et 1843.
Par la Societe d'agriculture de PEure : Rccueil des travaux dc cette Society. Tome III", 1842.
Par la Societe d'' agriculture de PJube : Memoircs , n°» 81 a 86.
Par la Societe (P agriculture dc P(o/ie/i : Ex I rait dc ses travaux, N»' 86, 87, 89 et 90.
Par la Societc d'a^riculture dc la Charente : Annales dc la Socicte; Janvier a oclobrc 1843.
^ I.a suite au proch tin nwuert).)
BULLETIN
DE LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE
AYRIL ISZiZl.
PREMIERE SECTION.
MKMOIUES, EXTRAITS, ANALYSKS KT ItAPPOHTS.
RAPPORT
an iiotn de la Commission du Prijc annuel
pour la decouverte la plus importante en geograjihii'
en 1841.
Oomniissaires :
MM. KvniHS, Wai-ckenaeii, LAiiENAtmiKRb:, Dahssv, .ioMAHi), rapporleiiy.
A I'epoquo on la Soci(!ite de geographic a fond(^ un prix annuel poui' la decouverte la plus importante en g^ographie (utile institution que , depuis , la Grande- Bretagne nous a emprunt^c) , Ton n'avait pas prevu toutes les circonstanccs qui pouvaient empecher de decerner le prix selon les rtigles de la justice et dans I'interet de la science. Le terpie auquel on devait re- monter avait et6 fixe a deux ans. L'exjjericnct! a fait I. AvmL. 1. 17
( 250 )
\oir que rintonalli' dv deux annties t'tail Iroj) coin I, et il a et6 porte a trois, soil pour laissor lo temps do connaltre les details iiidisjicnsaLles des d6couvertes, soit pour en constater rautlienticite , soil , cnfin, pour permettro aux voyageurs de les publier. I ne autre consequence utde est rt^sultec de rexpcricnce laite depuis rinstitution : c'est qu'il est juste de compter aux voyageurs toute la durec de leurs excursions. Ainsi , pourvu que le voyage ait commence , ou con- tinue , ou fmi , pendant I'annde pour laqucllc est d6- cernee la recompense, il est compris dans le concours. La double latitude qui resulte de ces regies permet a vos commissaires de ne rien exclure d'important ; au- trement, on serait circonscrit entre des limites trop etroites, et expose a priver du prix les decouvertes les plus merit oires.
Chaque annec , vos commissions pour le prix an- nuel ont cherche a bien ^tablir les titres divers qui recommandent les voyages a ['attention de la Societd, et ils ont rappele la condition du prix, savoir : qu'on ait decouvert un pays precedemment ignore, et que la decouverte soit assoz importante pour agrandir le domaine de la science. Cependant, un pays qui, jus- qu'ici mal connu , aurait 6te complctement explore par un nouveau voyageur , pourrait etre le sujct d'unc recompense, surtout si le voyageur avait determine avec exactitude la position dos lieux ou rectific des
erreurs graves.
Nous classerons les principaux voyages de I'annce 1841 donl la connaissance est parvenue jusqu'a nous, en deux categories. Dans la premiere, nous pla<;;ons ccux qui sc sont prolongcs tres peu ou point au-dela de ce terme, et dans la seconde , ceux qui , ayant ete
( 251 )
continues plus tard, peuvent etre, sans inconvenient, reserves pour le concours de 18/12. Parmi ces der- niers, nous nous bornerons a indiquer les pi'incipaux voyageurs actuellenicnt connus : MM. Ferret et Gali- nier, Sapeto, Bcke, Lcfebvre. voyageurs en Abyssinie ; M. Schomburgk , nouveau voyage dans les Guianes ; M. Allen , en Australie ; M. Botta, en Perse; MM. de Klia- nikoff, dans I'Oural meridional , et de Tchiliatcliefl", dans I'Altai oriental, etc.
Neuf autres voyages sont I'objet special de Texamen succinct que nous allons laire : dans I'Australie , M. Eyre ; en Ameriquc, M. Norman et les missionnai- res ; en Asie, MM. Ravvlinson , Coste et Flandin ; dans I'Europe oricntale, M. llommaire de Ilell ; ea AtVique, MM. Harris, Russegger etd'Arnaud.
M. Eyrehabitaitdepuisplusieurs ann^es I'Australie et avait dejafait d'importantes excursions, lorsqu'il entre- prit ses grands voyages dans I'intericur , qui ont dure pendant 1839, 18i0 et 1841. Lo 1" mai 1839, il quitta Adelaide pour explorer la contree du Nord; il recon- nut , pendant un voyage de 220 milles , Ic pays situ6 entre le golfe Spencer et la rivic^re Murray , jusqu'a 36 milles au nord du mont Arden. Rentre le 29 juin, il repartit et se dirigea sur le port Lincoln ; de la au port Bell, nouvelle course de 230 milles; puis, de Streaky-bay, il se rendit a la tete du golfe Spencer, autre voyage de 220 milles. Le 18 juin 18/iO, M. Eyre entreprit une nouvelle expedition pour I'interieur du continent. II s'avanca jusqu'au lac Torrens, explora ses rives sur une longueur de pres de ZiOO milles; la, enferme comme dans un cul-de-sac (tant la configu- ration du lac est bizarre et anomalc) , et trouvant le sol de plus en plus aride, il se dirigea encore une fois
( 252 ) siir Ic |)orl Lincoln ; il Inl ainsi Ir prcinior a oiniir iiM clu'iniii (liiftl (111 ^olle Spencer a ce port, dislancc (le 220 inilles. Du port Lincoln, il reussil, non sans (In m^'s grands obstacles, mais sans jamais so clC'cou- ragor, a gagncr le port du Roi-Georgcs, en parcouiant loute la cote dans un espace de 1,300 niillos; il arriva en fin , (!'puisi! dc fatigues, lo 7 juillet 18/iJ , a Albany (Australie occldentalc). M. Ejro a fait de ses deniers presque toute la dd'pense de ccs nonibreuses expil'di- tions, et il a reinis toutes ses cartes au gouvernement colonial; chacune de ses routes, portt'e sur la carte d'Australie , doit I'enrichir notablement. La Soci6t(^ g^ographiquc de Londres, qui a adjug6 a M. Eyre unc des niiidailles dont elle dispose, rend une justice 6cla- tante a son mdrite , a son courage et a son esprit en- Ireprenant, qualitt'-s qui distinguent Ic veritable voya- geur. Les diiricult(is considtl'rables et impr^vues quil a eues a vaincro, surtout par le manque d'cau , les dangers personnels qu'il a courus, lui et ses quatre compagnons de route, rehaussent la valeur de ce voyage int^ressant.
M. INorman (dc la Nouvelle-Orleans) a fait, en 1841, un voyage dans I'Yucatan, ce pays qui attire aujourd'hui les regards de I'arcbt^ologue par ses monuments eton- nants et a peine soupconnc's, comme faisaient autrefois et font encore les mines de Thebes, de Ninive ct de Persopolis. M. Waldeck fut un des premiers a dessiner exactemcnt et a publier les vestiges de cettc ancienne civilisation americaino, dont il n'est pas permis, jus- qu'a present, d'assigner I'dpoque, mais qui ne permet plusguerc dc donner a ces r(!'gionsle nom de Nouveau- Continent. Dans ces derniers temps , M. Stephens, Am(?ricain , et M. Cathcrwood, architecte anglais, ont
( 253 ) continue lexploralion do T Yucatan ; leuis Iravaux, rtiu- nis a ceux de MM. Waldeck , Friederichstahl , Norman otautrcs, jettei'ontquelque joursurle caract^re , slnon sur la date do res singuliers monuments , anterieurs a toute tradition. Ces derniers ont explore les mines de Zayi, Rabali, Uxmah, Ticul, etc. , et d'autrcs licux re- marquables par les vestiges d'antiquite. M. IN oilman a donne , entre autres, une nouvelle description dela ville antique de Chiclien , situee a 11 lieues vers le sud-ouest de Valladolid ; ses debins occupent un espace qui a plus de lOmilles de tour, et renferment de nombreux restes de temples et de palais qui etaient soutenus par d'in- nombrables colonnes. Un de ces temples avait plus de /iOO pieds de longueur et plus de 55 de haut;on y ti'ouve des restes de pyramides. Autant que la vue peut s'etcndre , on apercoit les mines de I'antique cite. M. Waldeck, dans son voyage, n'en a pas donne la description, et il parait que MM. Stepliens, Catlier- vood et Norman sont les premiers Europeens qui I'aicnt decrite et dessin^e. Ce lieu appclle les explorateurs fu- turs des antiquites americaines.
Nous apprenons avec int^ret les progres des eta- blissements des missionnaires catboliqucs dans I'Ame- rique du Nord, et en meme temps ceux de leurs explo- rations. Ce pays a ete Ic theatre de celles du P. de Smet; elles se distinguent par leur etenduc comme par le courage et I'activite qua deployes leur auteur; nous en avons connaissance par les Annales de la Pro- pagation dela Foi. Parti deSaint-Louis-du-Mississipi en avril 18A1 , il se porta , avec plusieurs religieux et une caravane, aux bordsdu Rio-Colorado ; ensuite, par une marche de deux mois, il attcignit les Rocky-Mountains (Monts Roclieux) et les montagncs qu'on appelle de la Rivicre-oH-l crit ; la (>st un point cidmiiinut (Tou les
( roh )
eaux s'^coulciit clans deux sens cliirerents : les unes vers I'ocean Allantique, les autres vers Ic Grand Ocean. Les Cofes-Noires ne sont pas elcvees de moins de 15,000 pieds au-dessus du niveau de la raer. De "West-Port aux sources de I'Eau-Sacree , la caravane parcourut 1,500 milles ; elle reconnut la Rivi6i*e Plate , la plus singuliero peut-etre de toutes les rividres con- nues par son pou de prolondeur avec une largeur immense , souvent de 6,000 pieds. Arrive en juillet a la ligne culminante de Far-JFest, le P. de Semt apercut I'immense Oregon , avec un vaste horizon ; puis U des- cendit vers le Grand Colorado de I'ouest, et ensuite la rinere a rOurs. II attoignlt enfin le fort Hall , apres quatre mois dun penible voyage, le 30 aoiit 18/11. II etait alors au point de reunion de la IrLbu des Tetes- J'lates, au camp dit du Grand-Visage. De la, il fit, pen- dant le reste de I'annee , plusieurs excursions : une de 320 milles au fort Colville , sur la riviere Columbia ; une autre au fort Vancouver, entrepot de laCompagnie de la baie d'Hudson , de 300 lieues ; c'est dans cet espace que se trouve le passage dit des Grandes-Dalles , ou s'en- gouffre unbras de la Columbia. En 1842, le P. de Smet est rcvenu a Saint-Louis , apres avoir ainsi accompli un voyage , par terre , aussi long que difficile , tout rempli de perils, et ricbe d'observations curieuses de geograpbie pbysique, de details de mceurs et d'histoire naturelle. La Societe connait depuis longtemps les travaux de geographic comparee de M. Rawlinson , en Perse. En 1841, ce savant voyageur a beaucoup avance celle de 1 Afghanistan ; il a decouvert dans le S.-E. de Kan- dahar, au pavs (lit Ghilziych, le site A' Aracliosia , ville qui date de I'epoque presque fabuleuse de S(^mirarais. Le lieu acluel s'appelle Ulan-Robal ou S/ia/iri-Zo/ta/c. La position est parfaitement determinee par les distances
( 255 )
que donnent Strabon, Pliiie ol Plolem^^o. Le iiom pri- iniiii d' ^rac/iosia etalt liarakhvvati, dont les Grecs out fait Jrachotos, et les Arabes, liakhaj ; les rulnos sont d'un caractere tres remarquable. Du reste , le lieu de Kandahar , qui etait I'ancicnnc Alcxandrinopolis , est bien distinct du site d'Arachosia. Le meme voyageur a retrouve pros de Zamin-Dawer les mines dune autre ville antique , qu'il croit pouvoir identifier avec le Tahora de la table de Peutinger, en rapport avec les Daile', aujourd'hui les Tajicks. Toute lavallee de I'llel- mond {Helmundits) est ricbe en sites anciens dignes d'etre reconnus. Beihrani, ville ancienne au N. de Ca- boul, cstV Ancienne A lexatidrin ad Caucasuni ; son nom de Fackout , dans le Zend-Avesta, cori'espond a celui tl'EucRATiDiA qu'elle prit d'Eucratides, lequel I'avaitre- batie. La Capissa de Pline repond au lieu appele Per- ivan-Dairah, ou s'est livre le dernier combat contre Dost- Mohammed. Caboul est sans aucun doute YOrtospana, Les reclierches du major Piawlinson dans le Sud lui ont fait reconnaitre la position de Pharsuga (d'Isidorc de Charax) dans Pishing, cclle de Mitsnnia (de Pto- lemee) dans Mustang, de Cnttabura dans Kheti ou Knt, et de plusieurs autres. Le nom A'Abiria, de Pto- lemee , correspond a la tribu d'Abira , en Sanscrit Abhira ( les bergers) ; il se retrouve dans Abile d'E- drisi , dans Rand-abil des geographes arabes, et dans Bilali, ville siiuee entre Relat et la mer. Le major Piaw- iinson retrouve encore Minpolis d'Isidore, ct lUiniiu- ^ord'Arrien, dans la ville de Binah, a I'E. de Herat, et dansBinader, chef-lieu de Gurmesir. Enfinle Troun- Dader des Byzantins se reconnait dans Dadar, silue au |)ied des defil6s de Bolan. Peu de voyageurs ont fait au- tant que U> major Rawlinson pour la geographic com- paralivr de rVsie moymie.
( 25(5 ;
Bien que lo \o\age do MM. Costc ct Flaiidln a Por- sepolis soit plus archeologique que geograpliiquc , il nest cependant pas indigne d'attcnlion sous ce dernier rapport, celui qui importe le plus a la Societe. Cos artistes ont , en elTet , le premier surtout , fait un grand nombre de relevcmenls topographiques dans I'emplacement des monuments et aux environs ; ils ont recucilli des itineraires qui serviront a perlectionner la carte de la Perse ; ils ont aussi relev6 la topographic d'une partie du cours du Tigre , cclle de Babvlone et celle dc Ctesiphon. M. Coste a rapport6 la route de Tabriz a Bagdad, celle d'Amaret a Kingevar, les sites de Chiraz , Firouzabad , INakchiroustan, Ista- khar ou Pcrsepolis, Teheran, Hamadan , Ourmiah, Kirmanschah, Ispahan, et d'autres encore. Ce voyage, qui a procure beaucoup d 'inscriptions pcrsepolitaines et en pehhi, qui a produit de beaux dessins, et a fixe les idees sur le syst6me et le style de 1 'architecture persepolilaine, sur cet ancien art persan qui etalt en- core imparfaitcment connu malgre les ouvrages re- marquablcs dc Kcr-Porter et Ouseley , ce voyage , disons-nous, comprend los trois anndes 1839, 1840 et 1841. Les voyageurs ont visite Mossoul; ils ont ete les precurseiu'S de M. Botta, qui vient dc fairo a JNinive de si brillantes decouverles. Les approches d'Erzeroum leur ont 6t6 interdites par la famine, et celles de Tiflis par la peste ; leurs courses n'ont done pas ete sans perils, ct ils ont et6 ^prouv^s presque comnie s'ils eus- sent eu a parcourir des regions ignorees.
Nous avons maintenant a parler d'un voyage plus important sous le rapport geographiquc , celui que !V1. Ilommaire de Hell a fait a la mer Caspienne el au Caucaso, el qui :i duir cinq ans. L'ouvrage que publi'
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ce voyagcur, sous le tilrc do Steppes de la iner Cas- pieiine, le Caiicose, la Criniee et la Riissie nteridionale^ est le fruit de ses longues excursions ; il embrassc pi'csque toutcs los parties de la science, la geographic positive, la geographic historique, mais surtout la geo- graphic physique et politique ; il est destine a jeter de nouvelles lumicres sur Ics contrecs oricntales de I'Europe. Le theatre de ses explorations est vaste ( 27' en longitude , 7° en latitude ) ; il embrassc Tespace entre les Carpathes et la mer d'Azow, la mer d'Azow et la Caspienne , la mer Caspienne ct le Caucasc jus- qu'au versant du sud , ce qui comprend presquc toute la Russie meridionale. L'auteur n'aurait certai- ncmcnt pu reussir sans I'appui des autorites russcs. M. Hommaire de Hell a suivi les rives des fleuvcs , des rivieres et de toutcs les eaux courantes peu connues, en observateur, en geographe , en g6olo- gue ; il a souvent etudie le regime des rivlei'cs et mesure le relief du sol, de mani^re apouvoir en tracer des coupes. Son attention s'est portce sur la popula- tion dc ces diff^rcntes contrecs , sur les races nomades ou fixees au sol, sur la physionomie et les autres carac- teres ethnographiques qui distinguent les diverses peu- plades , sur les moeurs et les usages des differentes peuplades ou tribus europ^ennes ct asiatiqucs, enfin sur I'etat de I'instruction, le commerce (1), I'industric et les autres branches de la statistique. C'etait pour lui un champ d'etudes aussi curieux, aussi vai'ie qu'e- tendu, que cette singulifere r(!!union d'une foule dc nations diverses dtablies sur Ic meme sol : AUemands,
(i) Les locliciches de JVl. ile Hell sur \c rommcifc dc la (MnuM- et ccliii do la mer Caspienne snnl faites pniir nn'ritcr r.Ulcnlion dc notic administraiinn.
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Sulsses, Bulgares, Boheinleus , Aruienicub, Juils, Co- saques, Tatars, ct encore I'aspect des campements (riiiver des nomades de plusieurs contrees d'Asie ou d'Europe. Au milieu de ces hordes, et dans la travcrsee des steppes, des deserts, il a couru plus d'un pt^-ril.
Si, de ces generalitcs, nous entrons dans le dc^tail de ses rechcrchcs, nous voyons qu'il n'a pas nt^gligt^ les questions speciales dont se preoccupent les g^o- graphes; telles sont : la jonction du Don et du Volga, la difference de niveau entre la mer d'Azow et la mer Caspienne , I'etude des cataractes du Dnieper, etc.; il u'a pas oublie non plus I'examen des rcstes de I'an- liquite , compares aux recits d'llerodote , Pline et Strabon.
riclativement a la premiere de cos questions, M. de Hell s'cst livr^ a quolques recherches dont le resultat conlirmc son opinion sur les nivcaux rospcctifs des mers Caspienne et d'Azow. II a reconnu, en effet, que cette difference est beaucoup moindre que celle qui resultait de I'observation barometrique de 1812 par Parrot, produisant 107", 50 en moyenne, ct meme que lamesurc paries distances zenithales, faite en 1839 par les academiciensdeSaint-Petersbourg, laquelle s'elcvait a 33'", 70, ou, au plusbas, a 25 metres. La mesuregeo- metriquc cxecutee par M. Ilommairc dellell, obtenue a I'aide d'un bon niveau a bulle d'air, est del8'",30; or, f'omme nous le disions tout-a-l'houre , ce rcl^sultat se confumc assez bien : d'abord par la situation de Ra- mischnia sur le Volga et de 1 'embouchure de la riviere llovla sur le Don , difference de moins de 16 metres; en second lieu, j)ar la pente de chacun de ces deux fleuves jusqu'a leurs mcrs respectives.
Le canal do jonction des mers Noiro et Caspienne,
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qui avail 6le commence des le temps de Pierre-le- Grand, n'a jamais pu arriver a son terme, parce que le seuil qui s^pare les deux bassins, tres rapproches en cet cndroit, est elev6 moyennement de 115 a 120 metres : aussi les travaux entrepris depuis par Cathe- rine II, et de nouveau en 1826, ont-ils 6te abandonnes. Ainsi se trouve ajourne indeliniment le trace de com- munication par la ligne de Ramischnia. II n'en est pas de meme de la ligne beaucoup plus courte entre Sa- ritzin et Piatisbanskaia, et qui est aussi la plus favora- ble a cause de la hauteur mediocre du point de par- tage. Quoi qu'il en soit , le travail dc nivellement, execute pendant deux annees par M. Ilommaire de Hell et fini en 18ill, ne pent manquer de devenir utile pour la solution de la question. II se compose de 1663 sta- tions sur une ligne de 502,000 metres.
M. Hommaire de Hell ne s'est pas borne a cette determination ; il a encore examin6 unc question ce- lebre, celle de la depression du fond de la mer Cas- pienne. Apres un grand nombrc d'observations, il est porte a croire que I'abaissement I'elatif des eaux a une tout autre cause que celle qui est generalement ad- mise , savoir, une depression du sol, resultant d'un fait geologique. Selon lui (et son opinion est tres admis- sible) , cette cause est simplement la reduction de I'espace occupe par la mer Caspienne, et, cette reduc- tion , il I'attiibue a la diminution des eavix du Volga, de rOural et de I'Emba , diminution causee elle-meme par le d(^boisement des nionts Ourals et le changement des rives du Volga; ces rives , aujourd'hui livrces a la culture, sont devenues, eneffet, pluscapables d'absor- ber les eaux phiviales. II cite a I'appui rcxcmpK> des chanliers de Casan , transportes a Astrakhan , d
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I opinion cle Pallas sm la relrailo dos oaiix dc la mcr Caspicnne, Quanl a I'lnpotliesc dc I'anciennc jonction de cette mor avoc la mer Noire , que raiUeur adniel comme possible, ct quipourrait, dit-il, se reproduire par le seul exhaussemcnt des caux a 24 ou 25 metres au-dcs- sus du niveau actuel , c'est un point qui appellerait I'exa- nieu des gt'-ologues. Quclque decision quils portent sur cette opinion , les observations jiositives de I'auteur sontdu plus bautinteret, et lui meritent la reconnais- sance des gciograplies et de tous les amis des sciences. Une carte importantc est result^e de I'exploration de ce voyageur. Les bases de cette carte sent : 1" les ob- servations astrononiiques les plus recentes ; 2° les tra- vaux bydrograpbiques de la marine russe ; 3° les itine- raires de I'auteur, qui a parcouru le pays dans tous les sens. On y trouvera deux coupes orograpbiques au liQ" ct au fiS' parallele , le profil des cataracles du Dnieper, et les indications geologiqucs. La carte est encore enri- cbie par I'indication des nombreuses colonies curo- pdiennes et asiatiques qui sont venues s'etablir sur le sol de la Russie m^ridionale, par celle des campements des Kabuouks, des nomades du Volga , du Terek , du Don, et par celle des Lacs Sales, cntrc lamer d'Azovv et la Caspienne. Enfin I'auteur a rectifie et simplifie le trace des monts Carpatbes , figures jusqu'ici sur les cartes un pen arbitrairemcnt.
M. lecapitaineW.Cormvallis Harris (1) comrnandait, enlSiil, en Abyssinie une expedition importantc, qu'on avait cruc d'abord destin6e apenctrer au sud, et le j>lus
([J Hi{!;hlantls of .'Etliiopin ilL'sriiljed during eijjliliMii iiiontlis icsi- flcnce of a Biilisli aiiibassy al iIk OIii i^li.iii court of Shoa , 3 voliimr^ in-B". I.oiidrcs , i844-
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qu'il oiit ct6 possible, c'est-a-diro ;iu sud et ;i I'outst dc Tajourah. Trente a quaranto porsonnes aconipagnaicnt le voyageui', muni d'ailleurs de moyens puissants. Lc hutctaitune anibassadc auprfjs du roi de Clioa. On doit aucapitaine Harris d'avoir procure dcs rcnsoigncnicnls nouveaux sur plusieiirs points intercssantsdans le sud de I'Abyssinie sur I'histoire dcs Gallas et sur un lieu asscz important appele Harrar, fi 14 journees dans le sud- ouest de Zeila : ce point est vers la tete du versant qui porte a la mer des Indes , et probablement du cours d'eau qui s'ecoule a Moukdischa (Mogadoxo). II s'est I'cncontr^ a Ankober, dans le Choa, avec notre com- patriote M. Rochet d'Hericourt. On regrettc d'autant plus que la mission speciale assignee a I'cxpedition I'ait empechee de se porter jusqu'a Enarea (ou meme plus avant ) , qu'elle etait pourvue de tous les moyens de succes, et meme d'artillerie.
On sait que M. le conseiller imperial des mines d'Autriche, Joseph Russegger, savant naturaliste et in- genieur, a ete longtemps occup6 des mines auriferes de la haute Nubie dependant des possessions du vice-roi d'Lgypte; la ne se sont pas homes ses travaux scienti- fiques:de I'annee 1835 a 1841, d a parcouru I'tgypte, les cotes del'Arabic, le Kordofan , laSyrie. Toutcs ses observations sont ou seront consignees dans un impor- tant ouvrage intitule : Foya^esen Europe , A sie et Afrique , comprenant un atlas de cai'tes g^ographiques et geo- gnostiques, les profds dcs montagnes et des planches de botaniquc et de zoologie. Sept livraisons ont paru a Stuttgard en 1842 et 1843 ; dies contiennent , outre les vues pittoi'csques , des cartes enrichies de details inte- i-essants et neufs , tires des propres observations de M. Russegger : son ouvrage promet d'etre savant et in-
( 262 ) structif (1). Si Ion romarquo rarement dans ce voyage ['exploration d'un pavs jusque la ignore. Ton est as- sure du nioins qu'il completera ou rectifiera les pre- cedents voyages dans les con trees parcourues par I'au- teur, a qui d'ailleurs Ton doit tenir compte de la grande ^tendue et de la duree de ses excursions.
Nous arrivons a un voyage qui est presque tout entier une conquete sur I'inconnu ; le theatre en est encore I'Afrique : c'est la region du Nil, ce bassin privilegie , qui est en possession depuis quarante-sept ans d'attirer tant d'explorateurs et de fixer tous les regards. L'ori- gine du Nil, on le salt , a toujours H6 un mystere; de tout temps , la decouverte de cette source a excite la curiosite , et nul encore parmi les Europeens n'y est parvenu. La solution de ce problemc et des causes de la crue periodique du Nil a occupe les philosophes de la Gr^ce, Thales , D^mocrite , Anaxagore , Agatliar- chides, et ineme les princes les plus fameux. Canibyse, Alexandre , les Ptolemees, Cesar, et N(^ron lui-meme , ontcherche la tete du I\i7. Caput A ili qiia'rere (CAaudien) ^taitchezlesRomains une expression proverbial e (2). Ce probleme a tente a son tour le vice-roi actuel d'Egypte. Des I'annee 1821 , Mohammed-xVly s'occupa d'un pro- jet de voyage qui avait ete concu en France , el dont I'execution dcvait etre confiee a M. Linant, voyageur eprouve. Les cv6nements politiques I'ayant fait ajour- ner alors , il a fait lui-meme un voyage on 1838 a Fa-
(l) On distingue riaimi les cartes {^L'O^^.iiostiques et les coupes "enlof;iques , celle du Liban ct de rAnli-liban , celle du Taurus et relic dti {'Kj^yptc. L'auteur doune un detail du eours du Toumat , une carle de la INubie riche de riclalls, une du Soudan oriental, el une de la Syie im'ridionale avec I'Arabie-Pcin'e. (2) Vi>y. une citation de Lurain , paj'^e 2G8.
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zangoro (1) ; puis il a envoye surle Nil, pendant 1839 ot ]esann6es suivantes, plusieurs expeditions nombreuses et armies, qui ont remonte lo fleuve sur la branche principale,appelee Bnhr-el-Ahiad, apartirdu confluent de Khartoum. Le premiei" voyage, execute en 1839 par le capitaine de la marine egyptienne Selim Binbachi , avec 300 liommes sous son commandement, fut une trfes utile reconnaissance , qui procura la desci'iption des bords du Nil jusque vers le 6° degre de latitude nord (5° 65') , avec de premieres notions sur les peu- plades riveraines. Un dcuxieme voyage fut entrepris : d'abord il n'a pas eu de i-esultat ; mais bientot le prince a ordonne une nouveUe excursion, qui, cette fois, est parvenue pr^'s du h" degre, et a fourni des notions precieuses tout-a-fait neuves sur le cours des eaux et sur les peuples qui habitent les deux rives du Nil-Blanc. Nous devons entrer ici dans quelques details pour faire apprecier I'importance des decouvertes faites par I'expedition.
Elle se composait de 250 liommes, avec onze barques armees de pierriers. Les observations avaient ete con- fiees a un Francais , M. d'Arnaud , qui ctait muni de bons instruments; c'estlememe quiavait dejavisite les sables auriferes de Fazoglo avec M. Lefevre le geologue, en 1838, a la suite du vice-roi; il devait etre seconde par M. L. Sabatier, de Beziers, et il etait aussi accompagne d'lbrahim-ElTendi (I'infatigable M. Thibaut). A partir de Khartoum, lieu plac6 au 16* degre de latitude ( 15" 31'), c'est-a-dire a pr6s de 500 lieues de la Mediterra- nee, les voyageurs ont parcouru surle Nil-Blanc une ligne de 518 li cues ; arrives au 9* degre 17' de latitude , rt au 26' hi' de longitude a Test de Paris, M. d'Arnaud
(l J Vciy BnlUlin , tome XII , |>. 2:') 3, el chides t/voijiapliifiucs ct /iii- toriques sur V Arabic, p. 249. Paris, in-8", iS'g.
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a roconmi un grand lac , on plulut dos marais a perte de vue. Au 9° dogr6 11' ct an 28' hi' de longitude, ct sur la rive droito , est remboucliurc du Saubat (on Sc- both) , appel(i aussi Telkliy ; sur la rive gauche est cellc d'une autre riviere. Au 7" dcgr6, nouvelles eaux stagnan- tes(l). Jusqu'au5° il n'apasapercudcmontagncs, etcc-
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pendant il avait deja depasse de beaucoup le parallMe attribue au Djebel-el-Koumri , aux niontagnes de la Lune. C'est au pays des Behrs , mais sous le mciridien du Kaire, et du 4" au 5* dcgr^ de latitude, qu'il a rencon- tre enfin un pays niontagncux de modique elevation. Le sol est granitique ; le noni de la montagno est Ballenia. Le fleuve n'y est point resserre ; au contraire , il prend la une grande largeur ; mais la profondeur est faible, etla navigation devient si difficile , quel'expedition adii s'arreter au h^ degre 42'; toulefois, d'apreslcs indigenes, le Nil-Blanc est navigable, dans les hautes eaux, la ct beaucoup plus au midi. Quant a son cours ulterieur, c'est-a-dire au sud du 4' degre 42', c'est encore une ques- tion si la source renionte versl'orient, oubiens'ilfautla chercher vers le couchant, comme on le croyait d'apri^s le rapport des Arabes , surtout depuis le fameux m6- moire de d'Anvillc ; mais il parait constant que , par les
(l) Ces marais scriiblent rappeler les lacs imtnenses (|ui avaie"t arrete les ceniurions envoye's par Neron , et dont ils dirent au retour qn'on nc pourrait jamais en Irouvcrla tin.Quelque vagues que soient les recits de Marin de Tyr sur les marais oh le Nil prend sa source, iiu pen au-deiti de iequateur ; ijuelque ineertilude (jui ie{;ne sur le veritable emplacement des Chelonides paliides et de Niiha pains des anciens, il est permis dc croire que les cnvoyes d'AIexandre, d Ever{;etes et de Neron nclaieut pas alles plus loin que ces marais du cf degre de latitude on ciux du •j''. L'crreur ou sont rcstes les aii- riens estdemontrecpar ces mots dcLiicaiiia I occasion desF,llnopien< qu'Alexain're, dil-il, emoya aux soiiiccs du //cui'c • ISii cm viiii:iii-:
CALENTEM.
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0* et 7* parallolcs , aucune riviere venant de I'ouest no pent etre considerdc commc la tete du Nil.
Sous le rapport de la population du pays , les details du voyage, actuellement connus, donnent des renseigne- nients curieux, neuis et precis. M. D'Arnaud la classe en quatre divisions tres populeuses , distinctes par les caracteres physiques et parlelangage : les Arabes, les Schlouks, les Dinkas , les Barry. La premiere, com- posee de six tribus, parle I'arabe ; les autres, conipo- s^es aussi de plusieurs tribus (dont les Nouers a peau rouge et cheveux lisses, les Kyks, les Heliabs, lesBliorr ou Behrslont partie) , parlent les dialectes appeles res- pectivement schlouk , dinka et barry. Les premiers , c'est-a-dire les Arabes, sont nomades; les autres peuples sont en partie cultivateurs et pecheurs, surtout pasleurs ; toutefois les Behrs sont plus adonnes a lagriculture et au commerce ; ils ont quelque industrie ; ils exploltent et travaillent le fer, et fabriquent des outils pour lagriculture (1); ils se distinguent par une stature co- lossale. (Lagrande population est confm^e par celle du Darfour, qui, selon le cbe\kli El-Tounsy, compte plus de 200,000 indlvidus en etat de porter les armes, ce qui supposerait plusieurs millions de personnes dans cette seule contr^e). Ces peuplades, qui entre- tiennent de nombreux troupeaux , ne se nourrissent pas de viande , mais de lait et de dourah ; les Behrs vivent de racines et de fruits; c'est principalement pour le lait et pour le commerce des peaux qu'ils entretiennent ces animaux : I'exp^dition a 6prouve quelle est la douceur de Icurs mcours et de leur ca- ractere. Les Schlouks sont les j)lus nombreux; leur population est tres dense ; leurs habitudes sont guer-
(l) Voir Rullrtm dv feviier i8^4- f'jjcls rappoi te>, etc.
I. AvniL, 2. 18
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rioros et leur luimcur violi'iilc. Si Ic k'inps K' pcr- niettait, nous pourrions cilor boaucoup d'aiilros iv- marqiics inleressantes faites par M. D'Arnaucl et sos compagnons do voyage, et des usages, dos traits do mcEurs singuliers, mais ce n'ost pas le lieu ; bornons- nous a faire remarquer que la valine du Nil superieur et le pays des Shangalas seniblent separcr deux races qui sont aux deux extremitcs de i'ecbelle ethnogra- pbique : a Test sont les bomnies d'une tres petite sta- ture , les pygmees de I'antiquite sans doute ; a I'ouesl , les homines de stature gigantesque. L'Afrique centralc est inaintenant ouverle a une multitude de recherches curieuses ou de decouvertes importantes, Le sultan de Darfour ne s'oppose pas a ce qu'on traverse son royaume pour penetrer dans le Borgou et le Begharme , et le jour approclxe oii Ion pourraretrouverlcs marais du Nil, Nuba pal us de la carte de Plolemee, ces marais dont parle Marin do Tyr, oh le Nil (disait un certain Diogene qui y etait parvenu) , on le Nil prond se.s sources un pen nu-dela de tequnteur.
A son retour en Lgvptc, M. D'Arnaud a lait Jiau- frage sur la quatriemc cataracte ; ses cilets ont peri , mais non ses journaux de voyage , ni ses observations meteorologiques et astronomiques; tous ses papiers sont conserves; il a rapporte, outre ses collections ethnographiques (1), les dessins delaphysionomlc des indigenes, les aspects du pays , et des vocabulaires. Sa carte generale , que nous poss^dons, est la reduction d'un grand nombre de cartes partielles, resultat de ses observations quotidienncs. Ses instruments etaient un cercle a reflexion , un chronometre Breguet , des hous- soles , barometrcs , thermomelrcs et hygrometres. Le nombre des observations de longitude et de latitude
(i) Voir Bulletin (l< Umui 1844.
( 267 ) ost d'environ quarante ; un petit nombre seulenienl ont c't6 calcuk^es.
CONCLUSION.
Nous croyons supcrflu d'ajouter a ce rapport de plus longs developpements ; nous avons fait connaitre les principaux voyages ex^cutdis pendant I'epoque mar- quee parle concours ; tous ont el^ plus ou moins utiles a la geographic ; mais les premiers rangs appartiennent a ceux qui ont agrandi le domalne de la science. H rcsulte de ce qui precede : 1° que la commission a distingue neuf voyages parmi ceux qui sont admissibles au concours , savoir : un dans I'AustraHe , deux en Ameinque , deux en Asie , un dans I'Europe orientale , trois en Afrique ; 2° que sous le rapport geograpluque proprement dlt, on doit remarquer les vovages de M. Eyre , de M. Hommaire de Hell , de M. Piussegger ct de M. D'Arnaud; 3° que, force de faire un clioix , on doit s'attaclier principalement aux resultats positifs des decouvertes consignees siu' des cartes actuellement'con. nues, ce qui s'applique surtout a M. D'Arnaud et u M. Hommaire de Hell; Ii" enfm que ces deux voya- geurs sont ceux qui paraissent remplir le mieux les conditions du programme. En consequence , la com- mission est d'avls que le prix de 1,000 fr. soit partage entre M. D'Arnaud, auteur de la carte de I'expedition du fleuve Blanc (1) , ct M. Hommaire de Hell , auteur
(i) Nous ineiitioniions aussi M. Sabalier cornine ayanl roopere aux observalions asirononii(|Uts failles par M. irAiiiautl. M. Saba- lier a vnit deja fait, quoi(|ue ii-es jinine , un voyage en Amerique, dans le haul Mississipi, et dans la iVfjion des lacs. Tinlin, il <sl juste de r.ippeler avec les plus grauds eloges la premiere expeditioa de Selim Buibachi , capilaine de fregaie de la marine egyptienne , parvenu le premier jusrpie vers le 6" degre de latitude. La Socicle a publie son interessante relation , el un taLleau cxtrait de son ilinei'.iire. (Voy. Piillflriis i]r jiullfl. a'liit el sp[iieinbie iS-Ja.)
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(Ju Voyage an.t stt'jipi't: de la incr ('aspiennt' , ;»cc«)iuj);)- gnt'' (I uiii- carte ;
El que (k'ux mentions honorables soient d^cern^es. Tunc a M. Eyre, pour son voyage en Australle m^ri- dionalc et notamment au lac Torrens ; Fautre a M. Joseph Russegger, conseiller des mines de I'enipe- reur d'Aulriche , pour son voyage en Nubie et en Svrie.
JoMARB, rapporteur. 19 avril 1844 (»)•
Episodk sur F en tenement da cacique Catiiiji dans r Jraiicanie ,
V .\ R M . CLAUDE G V V.
Parmi ces nombreuscs peuplades d'indigenes que la bravoure espagnole est parvenue a domincr ou a dis- perser dans les parties centrales du Nouveau-Monde , aucune n'a donne des preuves d'une plus audacieusc valeur que celle de ces fiers et orgueilleux Arauca- niens. Relegu^s a I'extremit^ sud de I'Amerique meri- dionale, adoss^s sur le versantouest de ces liautes Cor- dilieres , et traques en quelque sorte par les etablisse-
(l) Lucain, dans la Pliarsale , inliodiiit Cesar disant a Aclmieu^^ fjrand-pretre dii Nd :
Niliil est (|uod rinsccre malirii Quam fluvii causas per s.fcida taiita IalrTite« Ijjnottunque caput. Spc* sit tndii rerta vidcndi ' Niliarns fontes, helium riviie r('liii(|uaiii.
Achoreus K-poiid :
Quae libi noscpiidi Niium , Humane , cupido est Hapr Pliariis, Persis<|ue fuit, Rlacediimqui' (yiaunis, Niillaque non sctas voluit conferre fiituris Notitiani : 5rd Tinclt adhuc natuia laicndi.
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wienls et los lorloresses ties (Uiillons, ces inlrepidcs gueriiers ont su jusqu'a ce jour faire resjjecter Icur li- berie , defendre leurs fronti^res, ct conservcr uno iii- dependance que jamais la tactiquc ingenieuse de I'Es- pagnc ni sa politique de ruse et de perfidie n'ont pu entainer : aussi , seniblablesa ces societes qu'un fana- tisme religieux a rendues stationnaires, lo contact des Europecns n'a pu que faiblement agir sur I'enscndjle dc leurs mceurs , et la douce influence de la civilisation estxesteejusqu'aujourd'bui muette et immobile devant le prestige du patriotisme et la force de leur voloiUe.
Entraine dans ces loiutaines regions pour y executor <lestravaux sclentifiques, particulierement soutenu par la protection gen^reuse et eclairee du gouvernement chilien , j'ai pu visiter a plusieurs reprises ces sau- vages pays, m'avancer meme dans les tribus les pins reculees , et «^tudier jusqu'a un certain point le carac- tere physique ct moral de ce peuple de braves. L'en- terrement du cacique Catbiji, qui va faire le sujet de cette lecture , eut lieu au niois d'avril de 1835 dans les belles plaines de Guanegue.
Depuis quelque temps il n'etait bruit dans toute I'A- raucanle que de la pompeuse cercmonie que Ton de- vait faire a cet illustre delunt ; elle devait , disait-on , donner une idee assez exacte de celles iion moins brillantes que Ton faisait jadis lorsque les dissensions domestiques suscitces par les guerros de I'indi^tpen- dance cbilienne n'avaient pas encore porte la desola- tion et la famine dans cette belle coutree. La tribu dc Ciuanegue se trouvait alors dans une position tout ex- .ceptionnellc : placce aux pieds des grandes (iordi- lieres, entouree de lorets impenetrables , et n'ayant j)Our y arriver que des senticrs otroits , entrocoupc's de
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ravins ut diint; rucilecletcnse. It's habitants avaienl pii se soListralre aux ravages tlo ces dissensions , ct conser- vcr prosque intacts ces norabrcux Iroupeaux dc bes- tiaux qui font presque la seule richesse de Tendroit , et si ntVessaiies dans ces series dc circonstancos.
Desirant assister a eette curieuse reunion, jo m'era- barquai au mois d'avril sur Ic grand fleuve de Val- divia , accompagne de trois domestiques , de quelques soldats et d'un interprete intelligent que I'inton- dant avail mis a nion enti6re disposition. Nous re- iiiontames le fleuve jusqu'a Ariques, el de la nous nous achcminaraes vers un bois extrememenl ej)ais, d'un abord difficile et souvent impossible. Un sentier ^troit et tortueux nous permit dc le traverser, et nous conduisit dans les plaines de Guanegue , ou nous ar- rivames apres un voyage assez p6nible de cinq jours. La premiere maison que nous visitames 6tait ccUe de Liguenpan , frere du cacique decede. Assis devant le seuil de la porte , et a c6t6 de ses enfanls et de ses fcmmes , occupies a filer et a lisser des ponchos, ce venerable vieillard nous recut avec ce regard s6v6re et hautain qui devoilait reternel mepris qu'il avail pour les blancs. Aide du bras d'une jeune fille, il sc leva, et , tout courbe, il vint au-devant denous, que les ri- gueurs de I'usage avaienl retenus a une cerlaine dis- tance. II donna a chacun de nous un salut indivi- duel , et puis se laissant aller a cetle verve d'dloquence qui leur donne tant d'ascendant et fait un des plus grands merites de ces Indiens, il p^rora pendant plus d'une demi-hcure sur noire bonne arrivde , sur noire sant6 et sur celle de nos parents el amis ; et puis, apres 6lre enlre dans des details plus ou moins oiseux , il passa la parole a mon interprete, dont le tliscours. ton-
( 271 ) jours SUV union catloiice, nelut ul moins iusigiiifiaiit ni mollis tastidieux. Ce devoir ronipli , nous nous diri- gcames chez le fds du defunt , le fameux Puelpan. Ma premiere idee fut d'avei'tir mon interpr6te dc prendre assez de precautions pour epargner, autantque possi- ble , le souvenir du triste evenement qui motivait notro visite ; mais dans ce pays de mceurs simples el natu- rolles , la mort n'est que le passage d'une vie de mi- sere a une vie de bonlieur : aussi pas la moindre trace de douleur ne vint troubler notre bienveillantc et agreable reception,
Puelpan , comma principal cacique de la tribu , de- vait nalurellement nous donner I'liospitalite. II nous lit preparer une petite cabane, qui, quelque malpropre qu'elle fut, nous etait extremement agrdable , puis- qu'elle devait nous mettre a couvert de la pluie et de la rosee. Mais, avant de nous congedier, il nous fit asseoir devant un long banc place devant la porte, et bientot on servit a cliacun de nous un grand plat de viande que Ton venait de preparer a lour maniere. Pendant que nous mangions, de jeunes demoiselles pleines de malice et de vivacite se promenaient devant nous une cruclie a la main , et s'emj)ressaient de remplir nos verres aussitot que nous les vidions. La boisson qu'elles nous servaient etait du pulco , espece de biere faite avec des fruits dupays, etquelquefois avec du maisdont ceslndiensfont un grandusage. Puelpanvenaitdetemps en temps prendre part a ce modeste et sauvage re- pas. Son caractere flexible et enjoue avait imprime a la reunion une gaiete qui contrastait singulicremcnt avec I'air serieux et ebahi de quelques Indiens que I'esprit (le curiosilc avait attires dans cet endroit. Nous lestames inie partic de la soiree avoc notre genereux
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hole , et puis nous lihai's nous inslall<'i- dans la liutte que Ion \cnait de nous prt-paror.
Le surlendcniain, Puclpan uie lit a\Lillr qu on allait sc rendrc a la maison de son pere pour comnicncor ccttc pieuso lL luniultueusc ceremonie. Jo nionlai aussilot a clieval avcc Ics personnes qui macconipa- gnaliMit , el en lonte liato nous nous rendiincs clioz Ic cacique, entoure deja dim hon noinbre de gul- menosou nobles qui devaient former son cortege. Leur niise 6lalt aussi singuliere que curieuse : ils d'taient nu- pieds ; deux ponchos de couleurs varices et eclatantes couvraient le liaut et le has du corps, et leur figure , liorriblenient peinte et encadree par une rude et epaisse chevelure , etail surmontee d'un long chapeau garni de j)lunics, de fleurs et d'autres objets assez bi- zarrement travailles. Dans I'cnfance de la civilisa- tion, tout sainplifie, tout s'exagere. Les gouts, parccJa meme qu'ils sont simples et peu varies, prennentdans certains moments undegre d'expansion extraordinaire, et nous portent aoutrepasser singuliereuient leslimites de notre raison et de nos iiabltudes. Ce desir capri- cieux se faisant plus partlculierement remarquer dans le clioix et le nombre dcs ornements, devait necessai- rement exercer dans cette circonstance nne grandc influence sur I'esjirit de ces Indiens , et avait gagne egalement celui de leurs fcmmes et de leurs enfants , de ceux-la mfimes dont I'age semble les i'doigner de toute id6e reflechie.
An moment oii nous allions partir, il se presenta un autre groupe de Gulmenes , fieres sommites de cette paisible et laborieuse tribu. lis avaient porto encore plus loin la passion du luxe, puisqu'ils avaient peint de diflerentes couleurs leuj.s fougueux chevau^.
( 27r, ) et les iivaieut de plus onies d'uuo iulhiite do tlcurs , et quelquelois d'un collier de grands grelots , ce qui don- iiait a la cavalcade uii caractere aussi bruyant que va- rie. Ce lut au milieu de ces Indiens , ainsi affubles et ax"in(!!s de leurs longues lances, que je me rendis a I'en- droit de la ceremonie. Lecercueil place devant la porte etait simple et grossierement travaille ; il etait compose de deux canots places I'un au-dessus de I'autre , de maniere a se fermer, et contenaient le cadavre du mal- lieureux Catliiji. En arrivant , nous flmes , tous reunis et au grand galop , trois grandes courses autour du tombeau , et trois autres laterales en poussant d'epou- vantables liurlements. C'etait un temoignage de res- pect pour le defunt que nous repetames deux fois par jour, le matm en arrivant et le soir en nous separant, Ensuite nous vinmes nous placer alentour du mort pour y entonner ces sortes de cuyuntucuns ou discours cadences que deux interlocuteurs s'adressaient reci- proquement, et qui avaient pour but de faire ressortir les belles qualittis de la personne qui en faisait Ic sujet. C'etait, comme Ton voit, une veritable oraison lunebre de Catliiji que tous les individus, divises par ])etits groupes s'adressaient mutuellement , et qui , par une combinaison d'actions et de gestes , devenait ex- ti'emement animee et pittoresque. De grands verres de poulco que leur versaient les jeunes Indiennes ve- naicnt de temps en temps interrompre cette scene de douleur , et permettaient aux acteurs de rendre hom- mage a quelque divinite en jetant par terre et avant de boire mie petite partie de cette boisson, seul indice de demonstration religieuse que j'ai ete a meme d'obser- ver pendant les douze jours que dura cet cnterremenl. Pendajil que ces Indiens epanciiaient ainsi leurs re-
( 274 ) grels dans la \crM' cle Icurs discoius , le cacique sap- proclia till ccrcueil , tenant a la main une cordo ou titait attache un monlon a livrec noire ; il perora a pen pres uno deml-henre avoc toute I'exaltation d'un lionniie forlemont agite; et puis arracliant le cceur de son animal , il le presenta tout palpitant sur le cadavrc dc son malheureux pere. Lnc tcndre inquietude so laissait entre\oir sur son visage rembruni et baigne dc quelques larmes ; des paroles entrecoupees sortaient avec peine de sa bouchc treniblante ; et nous , le occur emu, nous diiines repondre a ces sentiments de dou- leur par dc grands cacbimis , ou toasts , qui se succd- daient avec une effrayante rapidite. Malgre raversion que j'avais pour cetteboisson du pays, je dus me faire violence et I'accepter; car un rcbis ciit etc uneinipiete pour Icur dicu, un outrage pour le defunt, et un man- que de ei^ilite pnur la personnc qui mc I'on'rait, et qui peut-etre ne me I'eut jamais pai'donne. l)u reste, sans manquer aux convenances , je pouvais seulcment y gouter, et puis jeter respcctueusement le reste sur la tonibe de Cathiji , ou bicn le passer a quelques uns de mes doraestiques que j'avais soin de faire placer tou- jours derrifere moi.
Lorsque Puelpan eut terminc son penible et dou- loureux devoir , six gulmenes de ses plus proches pa- rents furent le remplacer,munis cbacun d'un animal aussi a livree noire, et armc^s de leurs longues lances qu'ils plantercnt aux extremites des canots. Bicnlot ils rcnouvclerent ces memes scenes declamatoires que venait d'executer le bc^ros de la fete ; ils parlaiont lous a la fois; et a mcsurc qu'ils exprioiaicnt leur doidi or, oil \o\ail leur ligure s'animer , se decomposer, ot prendre cette contraction nuisculairc occasionnee par
( 275 ) le premier efl'et de la boisson. Un d'entre oux surtout , le fameux Liguenpan , se faisait rcmarquer par les avantages qu'il reunissait a s'altacher et a interesser son nombreux auditoire. Dou6 d'un supcrbe malntien, quoiqu'im peu courb^ par I'age , poss<^dant une elocu- tion facile et une eloquence grave , bien cadenc^e et agr(!'ablemcnt soutonue par un vrai talent raimique , il avait repris tous les feux de sa jeunesse, etpar ses dis- cours toucbants et patlietiques il avait imprime a la soci^te un mouvement de terreur et d'entbousiasmc clairement manifeste par de nombreux burlemcnts. Ce fut lui qui le premier arracba le cteur de son ani- mal, et, pousse par un exces de zele , et peut-etre de piet^, il le porta a sa bouche, et aspergea I'air et le ca- davre du sang encore chaud de son innocentc victime. Les autres gulmenes presents devant le canot suivirent en tout point son exemple, qui se propagea avec une egale furie dans toute I'assemblee , envieuse aussi de prouver ses regrets par de nombreux sacrifices. Dans moins dedeux heures plus de quarante animauxfurent ainsi immoli^s en I'lionnour de Catbiji , et leurs creurs suspendus a leurs lances accusaient avec une feroce verite le barbare prejuge de ce peuple de sauvages.
II y avait de^ja asscz longtemps que durait cette scene d'borreur et de carnage, lorsque Puelpan me fit approcber du cercueil, et commcnca a louer en cbantant le merite de Catbiji , ses belles vertus, et a cxprimer le bonbeur qu'il eprouvait de me voir au milieu d'eux. Sonlangage, d'aborddoux et affable, de- vint de plus en plus grave et serieux , et iinit par prendre cette V(^hemence que I'exc^s de la boisson rendait sinon dangereuse, du moins importune et fali- gante. fi'est alors que , me presentant un des (\ru\
( 27fi ) niouloiis qu il leualt attaches a uiie coiclf , il me dil tl'un ton iinpi'rioux dc lui arracher le coeur pour oUVir son sang aux niancs do son p6re. Malgre ma volonte bion calculee de nie souraettre a toutes les exigences <le COS Jjarbares , je ne pus cependant me del'endre d'un mouvonicnt de repugnance; et sans expliquerle inotil" de mon oniharras , jc chercliai a lui lairc com- prendre mon inhaljilotc , inou manque d'expiirience etiacrainte dc nepouvoir y reussir. Cette excuse bieu naturelle eut tros pcu de succes ; il 111 vcnlr uii de ses mozetons ou domestiques, et le cliargea de cette op(5- I'atlon sans doute penible , mais (|ue leurs super- stitions etleurs mceurs sauvages rendaient naturelle et agreablc ; aussi dans moins de deux minutes je tenais dans ma main cet organe encore cliaud et palpitant. Le cacique avait aussi le sien, et, places dovant le ca- davre qui nous separait I'un de I'autrc , nous com- mencames a eclianger a I'aide de mon interpretc une suite d« pelits dialogues d'aflliction que venaient ani- mer les nombreux toasts qui accompagnent ces sortes de ceremonies. Tristes,et cependant agites, nous repan- dions sur le cadavre le sang de noire victimc , lors- qu'un grand tourbillon de poussiere vu dans le loin- tain nous annonca Farrivce de quelque Irihu : c'clait ie cacique d'Alipen, avec tousles gulmenes etses conas ou soldats. On s'enrpressa aussitot daller a leur ren- contre , et pendant qu'ils etaient rctenus a une petite distanct! pour ecouter reciproqueniont leurs com])li- jnents de bienvenue, les conas mirent pied a terre et s'approcherenldu tombeau en sautant, en faisant i)raii- dir leurs lances ot poussanl di s luirlemcnts lerribles. Sur cette londx' on a\ait place a la bate une grandc quanlile de \ascs remplis de boisson , doni s'einj)are-
[ 577 ) i'onl Ic's coiias ; d apr^s les avoir portes pr^s de leurs chevaiix ot apres uiic nouvoUe ctiiremonic toutc mili- taire , ils burent cctte boisson et report^rent les vases a I'endroit ou ils les avaient pris.
Cette tribu n'avait pas encore tcrmlne les courses d'usagc , qii'une seconde tribu , puis une troisi^me , coinposees cliacune de plus de clnquantc personnes, se presenterent dans cette reunion, singulierenient agi- tee par le grand nombre d'arrivants. Puelpan s'apercut bientot que I'enceinte n'etalt pas assez grande pour contenir tant de monde ; et pensant qu'une plaine voisine serait beaucoup plus convenable , il se deoida a y faire porter les canots. Ce furent les gulnienes les plus respectables par leur position qui furent charges de ce pesant fardeau ; moi-nieme, je ne pus m'empe- cher, par deference poiu- mon bote , de m'associer a leurs genereux efforts, tandis que les autres gulmenes et conas, au nombre de plus de quinze cents, suivaient a cheval le convoi , en poussant des cris qui allalent se confondre avec les lamentations d'une troupe de femmes chargees de pleurer. Nous aiTivames bientot dans une belle plaine au milieu de laquelle fut depose le monument de cette funebre fete. Jamais paysage ne s'est dessine avec plus de luxe et plus d'effet : dans le bas on voyait un magnifique lac , borde d'arbres extremement touffuset parseme d'iles, couvertes d'une vegetation toute tropicale , et en avant les immenses Cordili^res a rocliers fortement accidentes et sur- montes de pics plus ou moins aigus et converts de leurs manteaux d'hiver. Le volcan de la Mlla - Rica dominait tous ces pics, comme un geant au milieu de pygmees , et animail le tableau par les epaisses fumi^es qui sortaicnl constammenl de son cratere.
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Mais cc qui i'aniinait encore davantago , c't^aient cos singuliers et variesJ ivertissenients aiixqiiels se li- vrait toulo colto po|nilace prise dopuis longleinps de boissoii. Monies loujours sur lours clievaux I'ou- giieux, ils se laissaient aller au penchant de leur in- clination ; les uns occupds a declamer avec une verve toujours croissante, les autres a faire exdcuter a leurs clievaux admirablement bien instruits ces danses , ces voltes et ces gambados qui ont lanl (.h' charmes sur I'osprit de ces naturels. ^ ers les cinq Leures , la c6re- monie se tormina par do grandes courses faitos en riionneur da dofunt , ol auxquolles priront part tons les Indiens, sans distinction d'uge , do classo , ni de condition.
Lo londoniain, nous fiunos, connne dc coiitunio, de- jeuner chez le cacique, ol ensuilo nous nous rendimos au Curu-Caliuin ou lieu de I'eunion. Presque tons les invites s'y lrou\aicnt deja, occupes a sacrifier on I'bon- neur du mort des animaux domestiques, ou a conti- nuer ces sortes de voltes extraordinairenient appreciees parnii eux. Plus do cinquante fonunos assises par terre et aulour do la lombo poussoront a noire arrivee de grands gemissements , et les continu6rent jusqu'apros avoir termlne nos six courses de rigueur. Depuis la voille, lo nombre des Indiens s'^tait considorablemont accru, otde temps on temps il arrlvait d'autrosgroiq)es qui venaient iniprimor un nouveau mouvement a celte bruyante c^remonie. Apres quelquos toasts portes en riionneur du del'unt, j'allai ni'asseolr sur un banc ou la vue s'etendait sur toute cette sc^ne de deuil. Les ca- ciques vinrent bientot m'y irouvor, los uns pour mo donnor de simples lomoignagcs d'oslimo el d'ainitie, les aulros ptuii meporlor tpii-lqui s presents , rpii ron-
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sistaicml on fruils , vianfle riiito, ot surtoul bcaucou|> de cette boisson dii pays dont ils sont si avides ; im d'entre eux nie presenta nieme un jeune veau destine a etre sacrifie. Quoiqu'un pen plus habitue!; h ces bar- bares c(!!remonies, ma repugnance otait toujours la meme , ct cc fut avec une 6gale anxiete que je m'appro- chai pour la seconde fois de ce canot. Le regard de mon Indien n'etait ni moins grave ni moins anime que celui de Liguenpan; sa voix haute et sa declamation noble et passionn^e pretaient une force toute particu- liere a sa sauvage eloquence, et donnaient a ses paroles d'amitlt^ un esprit de conviction qui m'eut facilement entrain^ si je n'eusse ete arrets par des antecedents contraircs. Mon interj^retc, place a cote de moi , repon- dalt avec une volubilite extraordinaire aux eloges que me prodiguait mon politique declamateur. Mais sa voix fut bientot etouffee par les terribles hourra d'une troupe de nouveaux arrives, cjui vinrent danser autour de nous et de la tombe. Dans ce moment je ne pouvais m'empecher de faire de bien tristes reflexions sur tout ce qui m'entourait : les cris ou plutot le glapisseniont de ces danseurs a figure hideusement peinte et cachee en partie par leur longue et epaisse chevelure , la vue de tant de sang repandu sur les canots, et do tons ces cceurs attaches sur les lances, les clameurs a peu pres continues des pleureuses, les bras et quclquefois la figure ensanglantee de tous ceslndienspris de boisson, les horribles mugisscments des victimes que Ton ne cessait d'immoler, Ic tableau cnfin de cette ceremonie qui tombait jusqu'au cynisme de I'orgie , tout cela a\ail frappe mon imagination de crainte et d'horreur, el me faisait conteinpler avec une sourde inquietude un spectacle oil I'ivresse la plus complete pouvait faire
( 280 ) oiiblier aux acteurs leur belle vorlii hospitaliero, el leur rappclcr cettc haine instinctive qu'ils out centre les blancs.
Les autrcsjours lurent employes ;i d'autres divertis- sements, que leur vive emotion savait varier a I'infini; mais en general c'etaient les exercices a cheval qui les preoccupaienl de ])reference, et ils s'y livraient avec tout i'enthousiasme dune jiassion illimitee , tantot par petits groupes , tantot en masse , et simulant alors des attaques, des batailles, et ex(^cutant avec une martiale ardeur les evolutions les plus bizarres et les plus difTi- ciles. C'est ainsi que, dans une retraite simulee, j'ai vu tous ces etonnants cavaliers se pencher presque in- stantan^ment sous Ic ventre de leurs clievaux, encore dans tout le t'eu de leur course , et nc presenter qu'une faiblc partie d'une jambe sur le milieu de leur selle. D'autres fois , ils Iranchissaient en sautant de grands et profonds fosses , ou bion des murs assez larges et plusou moins dev<^s, et ils donnaient a cet egard des preuves d'une solidite et d'une adresse d'autant plus extraordinaires , que, sous I'influence de leur boisson prise a I'exces, ils ne pouvaient agir ni avec prudence ni avec jugement. Aprt>s ces exercices, qui se r(!'p(^- taient assez souvent, tous ces Indiens venaient se n'-u- nir autour du lombeau , et recommencaient leurs cuyuntucuns avec leur vebemence accoutumee, cban- tant et buvant a longs traits ces grands vases de poulco que leurs femmes ou filles, toujours a c6t6 d'eux, ne cessaient de leur verser.
11 y avait deja douze jours que le Curu-Cabuin durait avec tous les caprices d'une civilisation ebaurhee, lors- qu'on se d^cida a aller enterrer le cadavre. (le rincnt encore les caciques rt les gulmenes les plus distingues
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qui furent cliarg(^s et honores cle ce devoir, et dans leur marclie fiere et arrogante ils ^taient suivis de toute la foule , au bruit de leurs tutucas et autres instruments plus oumoinsdlscordants. Place au liaut d'une colline, je contempiais avec une inqui^te curiosit(^ cette scene de gaiete et de m(!'lancolie , lorsqu'un cacique vint me chercher pour participer a cette procession , que la fougue des chevaux, le desordre des rangs et I'ivresse desconas ne laissaient pas sans dangers. Je ne pus me soustraire a cette invitation , et bientot je nio trouvai confondu pele-mele au milieu de tous ccs Indiens si bizai'rement costumes , et si fortement agites par suite de tant d'exercices et de tant de boissons. Leur regard severe et empreint de cette audace sauvage , rc^sultat d'une vie rude et turbulente, donnait a leur physio- nomie une expression d'elTroi que venaient augmenter leurs cris lugubres et presque continus. Arrlviis a I'el- tun ou cimctit?re, on placa le canot au milieu d'un grand i^ond circonscrit par la foule ; les parents du de- funt descendirent de cbeval, et vinrent j)rendre place aupres de ce canot, qui Tut bientot entour^ par trois duguls ou devins couverts de grands ponclios rouges. Dans ce moment , toute cette entliousiaste populace etalt sous rcmpii-c le plus serieux, regardant avec un recueillement presque religieuxle tombeau do Cathiji, qui allait dlsparaitre pour toujouis sous un monceau de terre. Ce recueillement, au milieu du silence le plus profond et dans un pays si sauvage, avait quelque chose de toucbant et de myst(^rieux; 11 semblalt denoter un mouvement de lame vers une pens^e rellgieuse , et contredisalt ^tonnammentrespeced'indilTc^i^cnce qu'ils avaient signalee, a cet ^gard, pendant toute la cerimonie duCuru -Cabuin. Les devins murmurerent d'abord a I. Avnii,. 3. 19
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voix basse des paroles sans douto maj^iqucs, puis en- toiin^rcnt un chant cadence de douleur qu'ils s'adres- saient reciproqucment, et donnaicnt ainsi lieu a une veritable trilogic , singuliercment animee par I'exalta- tion dc leurs gestes ct la vohenipiice de leurs discours. Lne dcrniere victimc Tut iiamolec sur la tonibc , et aprds y avoir d6pos6 son cocur, des viandes cuites et quclqucs cruclies de boisson, on la couvrit d'un grand canot, et chacun a son tour vint \ jeter une petite quan- tity de terre, pour y former an tumulus presque en tout semblable a ceux que les anciens elevaient sur leurs sepulcres.
Telle fut cette c^rdmonie de deuil et de pleurs , et que I'esprit sauvage des Araucaniens et leur conviction pour le depart d'un sejour plus heurcux ont chang^e en divertissements en lui donnant le caractere d'une grande fete , presque la seule qui soit chomee parmi eux.
Notice Gi-ocRAPHigrE sir le kourdistan.
La contrcc appel^c aujourd'luii Kourdistan par les Orientaux comprend la vaste <^tendue de pays que les anciens appolaicnt Grande ct Petite Medie , et le royaumc d'Assyi'ie jusqu'a Mossoul ou Ninivc. Le Kourdistan se divise en deux provinces appeloes, I'une le Kourdistan turc (I'Armenie majeure ) , IMt^die Atro- patene , le pays des Carduques , qui s'etend du Cau- casc a I'Euplirate , et qui est borni!; au sud par le fleuve Zab et le mont Zagros, ct I'autre le Kourdistan per-
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san , qui comprend le pays des Bactyaris et une partie de rirak.
Depuis que les relations entre I'Europe et la Tur-
quie ont pi'is plus d'etendue ct offrent plus dc s^curite,
les travaux des \oyageurs europ^ens ont consid^ra-
blement avance la connaissance de la geographie du
Kourdistan turc ; mais jusqu'ici les tentatives faites
pour explorer la cliaine du mont Zagros , la Suziane
et le Laristan pcrsan ont ete entravees par les plus
grandes difficultes. Les travaux du major Ravvlinson et
les voyages plus recentsdeM. Auguste Desbordesontce-
pendant fait connaitrc une partie do la contree situee
entre lemontZagrosetSchouster.Lapopulation,presque
entiei'enient composde de tribus ei'rantes de Kourdes ,
d'lliauts et de Backyaris, s'habituera peu a pcu a la
presence des voyageurs eurojseens. ]\lais a I'epoqueou
nous parcourions la Perse , en 1839 et iSZjO , tout le
pays compris enlre Rirnian-Schah et Scliouster etait
absolument interdit aux etrangers.
Quel que soit le point de vue sous lequel on consi- dere I'un et I'autre pays , le Kourdistan turc offre un bien plus grand interet que celui de Perse par son histoire ancienne , par son etat present et par le con- tact des provinces conquises par la Russie , et qui sont composees en grande partie d'liabitants enleves aux villes et aux villages dc la Turquie , a la suite de la guerre de 1829.
Sous le rapport de la geographie pliysique , I'oro- gi'apbie de celte contree a, des les siecles les plus recu- les, frappe I'imagination des pcuplcs. Quatre beaux fleuves descendant de ces plateaux eleves, vont porter la fertilite dans les dcscrls arides , ct jettent le tribut de leurs eaux a trois mers differentes. Le colosse de
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I'Ararat, couronnant la contr^o tie ses nciges eter- nellcs, restc encore dans la veneration dos habitants comme le premier point dii globe, oil la famille sauvee du deluge a pose le pied aux portes de I'arche ; et les moines armeniens assurent, dans leur naive croyance, que la nef sacr^e qui prot^gca la famille dcs premiers patriarches existe encore au sommet de la montagne, Ainsi, a\ant que les sciences physiques soient venues porter leurs instruments dans ces I'dgions, la tradition, d'accord avec la verity , les signalc comme le point culminant de cette partie de I'Asie. C'est , en effet , vers ces latitudes que le Taurus, ce baudrier de la terre, selon Fexpi^ession dos giographes anciens, vient se joindre au groupe du Caucase pour redescendre ensuitc vei's le sud, et aller se fondre dans les pla- teaux de TAlganistan. Tout le systemede I'orographie de I'Asie-Mineure derive de cette construction , qui se pr^sente sous les plus nobles traits, fomiant un rayon- nement de belles vallccs bien arrosees qui descendent par des etages successifs jusqu'au bord de la mer , et , ^a et la , des bassins isol6s renfermant des lacs sal^s , v^ritables mors interieures, elevees de 1,600 a 1,800 metres au-dessus de la mer Noire.
L'action des feux souterrains, principc de rcl(^vation extraordinaire de toutes ces plaines au-dessus du ni- veau dcs mers, se manifeste a chaque pas dans toute I'ctendue du pays , et les traces les plus r6ccntes des volcans modernes portent a croire que si la tradition des 6v6nements vulgaires s'etait perp6tu(!!e aussi bien que colle dcs faits de I'histoire sacr6c , les habitants pourraient dire que leurs ancetrcs out assist^ a do puis- santes eruptions volcaniques.
Ln pays dune nature aussi s6v^re doit eire habite
( 285 ) par des peuplesindoniptables ; c'est, en effet, le carac- t(l!re dominant de cette nation des Kourdes , descen- dants des Carduques,surlesquelsla puissance romaine, la tyrannic dc Mithridate , la politique d'Alexandre , la patience des dlx mille Grecs n'ont jamais pu exercer aucmie action de quclque duree.
Les guerres intestines , I'esprit d'indi^-pendance sau- vage ont seuls detruit I'unite de cette nation, qui n'est aujourd'hui soumise que de nom a la puissance des Osmanlis.
En parcourant le pays, on est frappe a chaque instant par les souvenirs vivants des traditions de la haute antiquite. On trouvo encore aux environs de Tre- bizonde ce miel v^n^neux dont I'usage fut si fatal aux soldats de Xenoplion ; les maisons des beys, toutes construites de grosses pieces de bois , avec des meur- trieres pour fenetres , rappcllent encore les tours des Mosynreci ; la coiffure exhaussee des montagnards res- semble a la cyrbazie des anciens Medes, et partout dans les villes on trouve quelque ruine, temoignage de I'antique splendeur de ce royaume d'Assyrie dont les derniers debris , exhumes a Ninive par un consul frangais , viennent etonner le monde savant par la per- fection du travail et I'ingenieuse apj)lication de la pein- ture aux bas-reliefs. Quelques pages d'un journal ecrit pendant un sejour dans les diverses provinces du Kour- distan , nous introduiront dans la vie actuelle des Kourdes , et peindront mieux que tout autre recit I'etat de la contree.
En partant de Tr6bizonde pour se diriger vers lest , le pays s'exhausse rapidement , et en deux jours de route on arrive au col elev6 de Kara Ka])an ( la portc noire) , eleve de I8O/1 metres au-dcssus du niveau de
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la iner; a parlir de ce point, on reste toujours a une hauteur qui varie entre 1800 ct 2,500 mt'tres clans toute I'etcndue de la Perse et de la Turquic , c'est-a- dire depuis Kars jusqu'a Persepolis, et depuis Is- pahan jusqu'a Kutaya, roxhaussemont extreme des plaines tempere la chalour de cos conlrees, et quand on s'avance vers le sud , on part de Schiras, oiile dattier ne croit point, ou I'orangcr a peine a venir en pleine terre (c'est cependant la latitude du Caire) , on passe, en Janvier, dans la neige le col de Derst-Argin , et, apr6s avoir dprouve un froid de 10 degres, on est pr(!!cipite en quelques heui'es dans une region ou le dattier porte des fruits et oii la temperature en hiver descend a peine a z6ro.
EnpartantdeTrcibizonde, toutleterrain environnanl est d'origine volcanique. Apres avoir reraonte le ruis- seau de Dermen-Dere jusqu'a sa source , on arrivQ au Koulabat-Dagh qui foi'mc la limite . entre I'ancien royaume de Pont et laColchide. Depuis le khan de Kara- kapan jusqu'au sommet du mont Koulabat , le terrain se compose de trachytes d'une couleur rougeatre , d'une nature poreuse. et sans homogeneity. Dans cer- taines parties le sol presentc un aspect teri'eux ct jau- natre qu'un examen attentif fait reconnaitre pour du trachyte , decompose probablement par suite de la desagregation des principes de son feldspath. Au som- met du Koulabat , on voit surgir un schiste vert qui repose sur le granite ; mais cette derniere roche ne se montre qu'au sommet , et lorsque nous passames , elle se trouvait irop cach^e par la neige pour qu'il fut pos- sible d'en examiner la formation.
Tout 1 'aspect de ce pays est triste et aride. Les vil- lages peu nombreux ([uo Ton rencontre se composent
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de ch^tives maisons en pierrcs , couvertes en terrasse , et dans lesquellcs les habitants vivent pele-niele avec leurs bestiaux. Tout Ic pays est trop peu fr6quent6 par les cai'avanes pour etre dangereux. Les bandits n'y trouveraient pas a exploiter leurindustrie. Les carava- nes qui viennent de Test pour se rendre a Trebizonde passent ordinairement par Gumuch-Hane (fabrique d'argent), ainsi nommee des mines plombo-argenti- feres, que Ton exploite.
Cette ville marche a un accroissement rapide , mal- gr6 le grand inconvenient que fera toujours eprouver pour I'exploitation de ces mines la disette de combus- tibles. Le charbon de bois qui sert a I'entretlen des fourneaux est apporte a dos d'ane de deux et trois journees de distance. La Porte a envoye, il y a peu de temps, des ingenieurs europeens pour examiner I'elat des mines i et d'apres leur rapport , on pourrait reti- rer du minerai une bien plus grande quaritite d'ai^gent qu'il n'en produit aujourd'liui.
Avantd'arriver a Baybouth, nous li^aversons un em- branchement de trois vallees qui sont toutes bornees par des montagnes a flancs verticaux. L'unc d'elles encaisse la i-iviere dc Tcharock , aussi appelee riviere de Baybouth, lefleuveBatliys desanciens. Baybouth est situ^e sur cette riviere. Ce fut jadis une ville conside- rable , mais aujourd'hui elle contient a peine 2,000 maisons, Un grand gisement de calcaire oolithique , qui sc trouve au couchant sur la rive droite de la ri- viere , a fourni aux habitants des materiaux abondants d'une roche facile a tailler et dune durete moycnne : aussi cette petite ville a-t-elle encore , malgre ses dii- sastres , un aspect de proprete et d'aisance peu com- mun.
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Les tribus qui font des excursions clans cette partie do I'Aiinenie ne sont pas coniplotcnKMit noniades ; leurs villages sont situes dans Ics plaines de Moucli et deBidlis. ]\Iais,au printcmps,ellespartcnt en omjiortant leurs tentes noires , ct enimenant leurs troupeaux et leurs enfanls , pour aller camper dans les bautcs val- ines de I'Euphrate. Cost pendant cetle saison que les liommes se livi-ent au brigandage , inais en amateurs et pour leur plaisir, car ils passent pour Ires bonneles et tres bospitaliors quand ils sont dans leurs demeures d'hiver. Se tenant a railVit de tons les ev6nements de quclque importance qui ])euvcnt amcner une rupture enlre les diiFerentes autorites, ils prolilent de cette circonstance pour declarer de leur propremouvement la guerre a Tun oua lautre parti. Les bostilitcsquidcpuis quelque temps existaient entre Khan-Mabmout et les pacbas d'Erzeroum et de Van dtaient en ce moment le pietextede leurs incursions. Quand ilsne ti'ouvent pas de resistance, ils se contentent d'emmenerles bestiaux; mais si la maison , si le village sur Icquel ils s'abattent fait la moindrc opposition , alors il nest pas de vio- lences dcvant lesquellcs ils reculont pour arriver a leurs fins.
Lne beure avant d'arriver a notre station , nous tra- versonsles ruincs dun village arm^nien nomme Azap; il est complc'temcnt desert, tons les babitants avant^te emmen^s par les Russes dans la province d'Erivan. On nesaitpas au juste le nombre de families qui ont emigre a la suite de cette guerre. Bien que les rapports olTiciels aient toujours dll que les chretiens etaient partis de bon gre a la suite de I'armee, los Armenicns qui res- tent demenlcnl cette assertion, et dlsenl que leurs corellgionnaires onl cede plus souvenl a une sorle <\v
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violence morale et a des promesses qii'oii a oubllees dfes qu'ils ont mis le pied sur le territoii'e de Russie. Ceci, du I'este , s'est fait en vertu de ces antiques lois de la guerre , qui sont restees en Asie ce qu'ellcs ^taient du temps des plus anciens peuplos. Lorsqu'une ville etait prise, les habitants, parques comme des trou- peaux, etaient envoy es pour remplir quelque nicopo/cs qu'il plaisait au vainqueur de fonder , ou pour aug- menterla population d'une capitale. C'est ainsi que les Armeniens , habitants de Malalia, apres avoir vu leur ville detruite par Constantin-Coj^ronyme , furent en- voyes en masse a Constantinople pour repeupler cettc capitale. Le roi de Perse, Schah-Abbas, emmena a Is- pahan une nombreuse colonie armenienne des bords de I'Araxc.
L'empereur de Russie , en voulant faire tout dun coup de la ville de Gumri une place de premier ordre, agit en cette occasion moins comme un monarque europeen que comme vainqueur asiatique. Le jour oil nous quittions le village de Zars, nous rencontrames sur notre route un convoi de ces families arm^niennes au nombre de 300, qui, peu satisfaites de leur sejour dans les Etats russes , preferaient rentrer sur le terri- toire musulman pour aller reprendre le chetif patri- moine qu'elles avaient abandonne. C'etaitun spectacle melancolique et touchant de voir ces pauvres gens ruines par la guerre venir de leur plein gre se remettre sous le joug musulman, n'ayantpas trouve dans leurs coreligionnaires les egards que meritaient leur posi- tion et la confiance qu'ils avaient montree. Chaque famille voyageait avec un araba , chariot massif traln^ par une paire de boeufs. Les femmes et les \ieillards ('•taieni assis sur la volUne, qui (itait couvcrte de tapis.
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Les bceufs qui Irainaiont le char poitaienl en luemc temps des sacsd'orge et de farine ; quelquos ustensiles do cuisine en airain, des armes , des vases de bois pour contcnir I'eau , Ics berceaux des enfants , la volaillo , les vetomcnls qui s6chaient; tout cela »^talt suspendu aux montautsduchar et a I'arri^re. Leshommesvalides et les jeunes gens, arni^s, les uns d'armos defensives , les autres d'instrunients d'agriculturc , comnic des faux et des faucilles , cheminaient a pied ; suivaient quclques clievaux et des vaches egalcmenl charges. Le soir, on faisait halte pres d'un ruisseau. Les femmes prcparaient le ropas , ct Ton dorraait a la grace de Dieu jusqu'au lendemain. Les Armeniens avaient fait huit journ^es de marche pour arriver ou nous les ren- contranies ; mais nous ne pilmes savoir positlvement de quel lieu ils vcnaient, ni comment ils avaient pu franchir la frontid^re.
Jamais spectacle ne ma domic uiio idee plus parfaite de ce que pouvaiont etrc les migrations des peuples dans les temps primitifs, ces invasions debarbares qui trans- portaient d'un bout du monde a I'autre leur race, leur langue , leurs usages, marcliant devant eux sans savoir au juste ou ils allaient, sejournant oii ils se trouvaient bien , sans dcmander le nom du lieu , et le designant entre eux d'apres quelque signe caractt^ristique ([u'ils avaient remarque. Ces Armeniens different essentielle- ment de ceux qui liabitent Constantinople. Ils ont la figure molns reguliere, le regard plus vif, la stature moins haute et le corps plus nerveux. Dans les villages de rint^rieur.les Armeniens qui sont voisins des Rourdes ne craignent pas derepousser I'agression desnomades.
Cette troupe nombreuse , que nous longeames pen- dant plusieurs hcures, allait camper sur los bords de
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I'Araxe , et se s^parer ensuite pour se disperser dans differents districts.
Quant aucaractere do Ja race kourde,il est ecrit d'une maniere indelebile dans leui's traits ; carces tribussont pcu melangt'cs , s'unissent gd;neralement entre elles , et ce n'est guere que dans les villes qu'elles s'allient avec les Turcs. Le teint des Koui'des est naturellement blanc ; c'est le soleil qui leur donne cette couleur basa- nee que la figure des fenimes retient encore plus que celle des liommes.
Le bey de Zars ne voulut pas nous laisser parti r sans nous faire accompagner par quelques bommes surs , qui pourraient nous donner un coup de main au besoin. Son fds, soil qu'en eflet il voulut nous ac- compagner, soit qu'il voulut proliter de notre depart pour donner un coup d'oeil aux environs, se mit a la tete de I'escorte. Six cavaliers dans le costume le plus pittoresque et le plus elegant se trouverent le lende- main matin ranges devant la porte. lis portaient pres- que tous un turban li^gereraent exbausse , une veste a longues mancbes , une large ceinturc qui contonait , outre leurs pistolets , tout I'attirail de la pipe, du tabac et du cafe. Quelques uns avaient de petits boucliersa la main , ornes d'une frange , ou en peau d'bippopo- tamc ou en cuir du pays garni de fer. Cette arrae dt^fensive est devenue chez eux plutot un oi^nement qu'un objct d'utilite. Depuis les anciens boucliers des Carduques, qui etaient d'osier double de cuir, et qui etaient assez grands pour mettre un hommc a con- vert, jusqu'a ceux que portent aujourd'hui les Kourdes, la forme n'a fait que diminuer. Les Kourdes n'em- ploient plus que rarcmcnt le bouclier dans ([uolques coinJiats a rarme blancbc.
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Avant de se inotlrc en route , les Kourdes coin- snencerent des evolutions sur le pre place devant la maison. lis se menacaicnt dc leurs sabres et cou- raient ventre a terre les uns sur les autres, se ti- rant prcsquc a bout portant des coups de pistolot , en arretant lours cbcvaux sur leurs jarrets. Ceux qui avaient des lances venaient caracoler autour de nous en faisant slfller leurs armes a nos orelUes assez pr6s pour qu'un faux pas de Icur clieval ou la inoindre inadvertance nous cut fait transpercer de part en part. Pendant la campagno dosRusses, les tribus kourdes se sont distinguees contre les Cosaques; rnais par suite de leur caractere cbangcant et de leur antipathic contre les Tui'cs , qu'ils I'Cgardent coninie des ennemis de leur independancc , des liordes nombreuses se sont mises a la solde de la Russie , et , lors de la prise de Bayazid , se sont port^es envers les habitants de cette place a toutes sortes de violences. Comptant sur I'agi- lite de leurs chevaux , les Kourdes , dans une attaque , se precipitent avec furie contre les ennemis en pous- sant un cri aigu qui ressemble au hourra des Cosaques ; puis , arrives a port6e de leurs armes , ils ax'retent leur cheval sur le jarret, et retournent en arriere pour re- commencer une nouvelle attaque. Ils sont armes de pistolcts toujours attach(^s a leur ccinlure par une longue courroie , et d'un sabre extremement courbe , puis de carabines qui sont presque toujours en mau- vais etat. Les plus pauvres ont des lances dont la hampe estfaite en bois du pays. Ils mettent bcaucoup de prix aux bois de lance qui sont faits de bambou ; ces armes leur sont appoi'tdes des Indes par Bassora et arrivent dans le Rourdistan en remontant le Tigre. Ce sont eux qui fabriquent leur poiuhc : aussi leurs armes sont-
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elles sujettes a f'aii'e long feu. Les voyageurs ne peuvent pas leur faire do cadeau plus agT(^able que de leur don- ner de bonne poudre de France. Quant a leur organi- sation en temps de guerre , elle est plutdt soumise au caprice de la multitude qu'a des lois regulieres. Bien que la puissance des beys soit b^reditaire , il faut a chaque d»^c6s que le pouvoir du successeur soit con- firme par un conseil des anciens. C'est dans une circon- stancesemblable que le fds dubcy deRevendize voyant sa nomination contest^e par les conseils des anciens du district, qui le trouvaient trop jeune pour commander a despeuplades aguerries, tii-a son poignard, et, s'ar- racbant un ceil qu'il jeta au milieu de la tente, leur demanda avec fierte s'il leur paraissait capable de com- mander. Ces peuples, indomptables dans leur pays et dans leurs montagnes , seraient incapables de porter la guerre bors de leurs frontieres. Les troupes de la Porte les ont toajours battus lorsqu'elles les ont ren- contres en plaine , mais il n'y a pas de nation qui en- tende mieux qu'eux la guei're de montagnes. Leur cavalerie est nombreuse et bien montee ; un cheval est la premiere ricbesse d'un Kourde. Les plateaux ou I'Eupbrate et le Tigre prennent leur source sont les plus rcnommes pour la race des cbevaux ; ils sont pe- tits, trapus, ay ant la tete forte et osseuse et une cri- niere tr^s longue. On ne saiu'ait se faire une idee de I'adresse de ces aniinaux pour courir dans les rochers, et de la confiancc des cavaliers , qui les lancent a fond de train dans des pentes rapides , les saisissent par la crini^re et , sans descendre de cheval , se glissent jus- qu'a terre pour ramasser lour djerid ou lour lance. Chez les tribus qui ne connaisscnt d'autre distinction que I'adresse dans I'excrcico des amies , qui poussent
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jusqu'a I'exces lour gout pour hi toilolte et les ha- billements coquets , on pourrait croire que la condition des femmes se ressent de ces moeurs chevaleresques , mais il n'cn est pas ainsi ; c'est meme une ])arlicida- rit6 remarquablc cliez les Kourdes que la beautd des hommos et la laideur des femmes. Ce sont ces der- ni6res qui sont chargees des travaux les plus penibles ; ce sont elles qui tissent les tentcs , qui recoltcnt le grain , qui s'occupent de tous les details d'emigration ou de campement. Comme tous les clievaux sont em- ployes par les cavaliers , on a dress6 les boeufs et les vaches a porter les fardeaux : ils servent 6galemcnt de raontures. On rencontre quclqucfois un Kourde arme jusqu'aux dents trottant sur un boeuf avec autant de fiertc que s'il etait monte sur le plus beau coursier. — Les Rourdes n'ont pas adopts cet usage si rc^pandu dans tout I'Orient de voiler les femmes : cela seul suf- firait pour les distinguer des Turcs. Toutes les tribus des contrees que nous parcourons passent pour etrc musulraanes ; mais elles nc le sont que de nom , et jamais on ne voit un Kourde aux heures de la pri6re faire ses ablutions et se prosterner du cote de la Mecque. Ils ont omprunte aux Turcs la polvgamie , sans cependant que cette coutume soit generalement pratiquee. II serait dilTicile de savoir en combien de tribus la nation Kourde est divisee; n^anmoins ils sont unanimes pour reconnaitre deux grandes sections ; ce sont: les Afcbars, qui occupcnt tout le versant meri- dional jusqu'au lleuve , nomme le grand Zab , et les Revendizes, qui babitent les provinces du centre. D'apr^s cet (itat de cboses, on doit comprendi'e que la Porte retire tr^s peu de produit des impols du Kour- distan. Les pachas de Mouch et do \ an doivent tou-
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chei^ ties beys des differentes tribiis line cerlaine rede- vance etablio sur Ic nombre dc tentes du Bcylik; mais les impots sont tres precaires et , sous le plus frivole pr^texte , Ics beys refusent de les payer.
Bayazid est la capltale de ce district; mais cette ville a ete presque entierement ruinc^e par la guerre. Tous les quartiers inferieurs, qui ^taient composes de mai- sons baties en terre, sont aujourd'bui completcment saccag^s ; les habitants ont disparu. On ne voit plus que de hideuses masures oil les cliiens errants et les clia- cals ont etabli leur tani^re. Ces quartiers, dit-on, ont ete pilles par les Kourdes , et les Armeniens qui y de- meuraient se sont retires sur le territoire russe. Les craintes de soulevement que Ton avait dans le Kour- distan avaient decide la Porte a reunir a Bayazid un certain nombre de troupes. Le caravanserail et ce qui restait d'un peu habitable parmi les maisons particu- li^res etaient occupes par un regiment de hni/am, qui etait constamment sur le qui vive, dans I'attente d'une attaque des Kourdes.
Au milieu de cesmiserablesdenieures s'6l6ve sur un rocher un palais , veritable chef-d'oeuvre d'architec- ture arabe. II a ete construit, il y a environ un siecle , par le jjacha , aieul du gouverneur actuel. II se distin- gue des autres edifices eleves par les Turcs , en ce que la solidite est egale a la richesse de sa decoration in- terieure. La premiere cour, destinec aux cawas et aux gardes , est ornee de colonnes arabesques soutenant des arcades en ogive. La grande cour du palais donne d'un cote dans les apparteraents secrets, dc I'autre dans le S^lamlek, oil le gouverneur donne ses audien- ces. Le tombeaudu fondateur, construit dans un angle de la cour, se Irouvp an milieu d'une enceinte qui en de-
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fend les approchcs. 11 est attenant a unc mosquee dont le dome tout en pierres de tallle couronne Tensemble de redificc.
Le salon dans Icquel nous fumes introduits en al- lant rendre visite au pacha est decore d'unc manl6re qui rappellc plus le gout persan que celui des T urcs. Ce sont des cornlclies en email , des fleurs peintes sui' desglaces, des arceaux a la forme bizarre et contour- nee , un plafond dans lequel se jouent mllle oiseaux fantastiques ; tout cela d'une conservation et dun bril- lant parfaits. Mais voici ce qui rappelle les Turcs. En sortant de ce salon d^licieux , on entre dans une grande piece qui n'a jamais 6te termin6e. De grandes poutres la traversent de part en part, et le sol est couvcrt de debris. Cettc pii;ce conduit dans une vaste salle autour de laquellc sont des estrades, ou etaient nonchalam- ment couches les irreguliers de la gardt; du pacha. C'est sa troupe a lui ; c'est elle qui a sa confiance , car il ne voit ])as dun l)on (jeil les Nizam du sultan. II sait que depuis longtemps le Grand-Seigneur tend a d^truire les gouvernements herc-ditaires.
La residence d'un colonel dans sa ville 6tait bien faite pour lui donner de I'ombrage. la Porte , du teste, dans ce moment-ci, ne se sent plus assez forte pour continuer les grands projets du sultan Mahmoud; et le pacha de Baj azld , s'il ctait menace , trouverait de I'appui cbez les Kourdes, et au l)esoin chez les Russes. Au fond de la salle , il \ a un grand puits avec une margcUe exactement comme une citerne : c'est la prison du palais. La salle est enti^rement taillee dans le roc , et il n'y a pas d'escalier pour y descendrc. On met aux prlsonniers une corde sous les aissellcs, el on les In- trcidnil dans lo piiils.
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Le chateau est situ6 au nord de la ville ; il est ap- puye a ime crete de roclier presque pei^pondiculaire , qui pouvait servir a la defense dans un temps ou I'usage de rartlllerie etait pcu repandu ; mais qui de nos jours rend ce chateau tres facile a prendre , commc font prouv(S les Russes en 1828, en mettant une hatterie sur la cote et en foudroyant le chateau. Sa constric- tion porte les caract(!'res du xu^ et du xin" siecle ; il a ^te dans les temps posterieurs renforce par des ouvrages qui sont plutot diriges centre la ville que contre les en- nemis du dehors. Si les ingenieui-s qui ont hati ce chateau en ont fait une place de peu de tenue pour nos jours, ils n'ont rien neglige du moins de ce qui peut faire valoir I'effet pittoresque de la situation. Sur chacun des pics du rocher s'^leve une tour haute et circulaire. Les muraillcs suivent les caprices de la montagne, et vont en serpentant se rattacher a de petits forts situes sur le sommet. A I'enti'ee du chateau se trouve une mosquee couverte par un dome , la seule qui existe a Bayazid. Tout ce terrain est tellement ac- cidente , il y a une telle incoherence dans les couches de roches , les flancs de la montagne sont tellement entrecoupes par des ravins profonds et des aiguilles per- pendiculaires, qu'il semblc qu'une grande catastro- phe terrestre a bouleverse le terrain , a une ^poque assez r^cente. C'est dans ce chateau que M. Amedee Jaubert, charge, d'une mission en Perse, fut ar- rete et detenu pendant plusieurs mois au fond d'une citerne qui ne recevait le jour que par la partie su- p«^rieure.
Nous visitamcs cette prison , et nous retrouvames encore le vieil Armenien qui avait nourri le c^l^bre orientaliste, et dont les demarches r^ilt^rees et infatisa- I. Avnii.. h. 20
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blcslui valurentunc liberty tardive. En sortant de celte prison , j'aporrus , non sans surprise, dans un couloir dtroit form(i par une muraille et le roclier , deux figures sculptecs dans le roc , qui me paraisscnt remonter a une tres haute antiquity ; ellcs sont d'un dessin lourd pt incorrect; mais on rctrouvc dansleur ensemble les rudiments de cette sculpture asiatiquo, dont il reste des types dans certains rochers de la JMt^die et de I'Assy- rie. L'une de ccs deux figures, celle qui marclie de\ ant, est coiff^e d'une csp^ce de casque dans le genre phry- glen ; elle est v6tue d'une robe tr6s ample , et tient verticalement dans sa main gauche un baton noueux : elle n'a pas de bai'be. Le personnage qui marche der- riere repr<!!sente un vieillard coiffe d'un casque a peu pr^s dans la meme forme que la precedente. II a re- lev6 sur les bras un pan de son manteau qui forme derriere son dos des plis regullers. Entre les deux fi- gures le rocber est excav6 , et forme une esp6ce de fenetre qui est surmont^e par un quadrup^de, une es- pece d'antilope dont les formes sont trfes difficiles a determiner a cause de Vital de vetustc^ trfes avanc6. Ces sculptures paraissent remonter a I'epoque ou toute la contr^e etait soumise aux rois d'Assyrie , ct ou ces montagnes (^jloigndes voyaient briller avoc calme le feu des Pyrees.
Nous laissons dans la vallce inferieure un petit vil- lage qui est un but de pelerinage pour les habitants de Bayazid : ils y reverent un marabout ou tombeau d'un santon , entour6 de six autres sepultures, qu'ils appcllent Yedi-Rardach (les Sept Fr6res). Ils con- tent a cette occasion une l(^gende sans fin, que je ne crois bas^e sur aucun (!!v6nement veritable. Ces sept crovants seraicnt morts victimes de la rage des Y(izidis,
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tribus qui sont repandues depuis ces lieux jusqu'au pays dcs Nestoricns, daiisle canton de Djulamerck.
Les Y^sidis sont pour los Turcs dcs etres capables de tous les crimes ; ils rc^v^rcnt , disent-ils , le demon , et ont un si grand respect pour cette puissance infer- nale , que I'^tranger qui parmi eux se permettrait d'en m6dire serait a I'instant meme hache parmorceaux. En ecoutant I'envoy^ du pacha , qui se delectait a nous dp- velopper tous los vices des Yt^sidis, je ne pouvais m'empeclier de d^plorer I'aveuglement des differentes sectes, qui sont d'autant plus ennemies qu'elles se rat- laclient a des croyances plus voisines. Je ne pouvais ajouter foi aux mauvaises qualitos que la rumeur po- pulaire pretait aux Yesidls , qui, disait-on , ne con- naissent pas meme le mariage et les liens de la parente. Ils n'ont ni pi-etres ni temples , mais s'assemblent de nuit dans desmaisons isolees, et adressent leurs pri^res a I'ange des ten6bres ; ils foulent aux pieds le Ko- ran. Enfm , on se plait a preter aux montagnards les ridicules pratiques que dans le moyen-age on con- damnait cliez les sorciers. Je priai bien le Koui'de de me montrer un Yesidi avissitot qu'il s'en presente- rait un a notre caravane. « Vous n'attendrez pas long- temps, dit-il, car j'en ai plusieurs parmi les gens de I'escorte. »
Je ne pus m'empeclier de m'^tonner de la tranquil- lite avec laquelle il me pai'lait de gens qu'il m'avait peints tout-a-l'heure comme des etres si feroces : Cast que , me dit-il , ceux des villes ne sont pas tout-a-fait si mediants que ceux des campagnes. D'ailleurs dans la guerre du Kourdistan , Mohamet lld^cliid-Paclia avait commence rextormlnation de cos tribus, ot s'il no I'a
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pas achev<^e , il a loUement cffrayi ceux qui reslent quils ne sc livrent plus qu'avec reserve a Icurs prati- ques maudites.Tous les villages yesidis qui sc trouvaient sur la route parcourue parMeli6met Recliicl-Paclia ont 6t6 completement extermin^s ; on a massacr^ hoiimies, femmes et enfants. Et je pense, disait mon guide, que le nombre de ces m6cr6ants que Ton a tuiis n'est pas moindre de iO,000. C'est ainsi que la devastation s'e- tend sur ces mallieureuses contrees. Cc que la guerre et les maladies epargnent , le fanatisme I'aneantit. Ce nombi'e n'est pas exagerc^.
La croyance de ces jjeuplcs parait sc rattacher a ces mj thes ri^pandus dans I'ancienne Assyrie relativemenl au bon et au mauvais principe , Arinianc et Ormoud. Lorsque I'lieresiarque Nestorius parcourut "cescontrees pour y repandre I'civangile de I'enfance du Sauveur , les doctrines du cbrislianismc se mclerent cbez eux aux croyances plus anciennes de la theogonie persane : aussi les Yesidis sont-ils plus disposes a la bienveil- lance envers les cliretiens qu'envers les Turcs, qu'ils regardent comme de feroces oppresseurs. Ccux-ci de- testent traditionnellement les Yesidis, parce que cc fut Y^side, second khalife de la dynastic dcs Ouimiades, qui tuaHassan ctHussein, enfants d'Aly,gendre deleurpro- ph^te. Depuis ce temps , il n'est pas de tourments que les Turcs n'aient fait cndurer aux ^ esidis pour leur faire expier ce forfait. Sans avoir pour le nom du Clirist une vc'nieration rcligicuse , ilslc prononcenl avec un certain respect. lis n'avouent pas que I'esprit du mal soit pour eux I'objct d'un cultc constant; mais , disent-ils, il faut redouter un pouvoir que Dieu a mis en contact avec les liommcs, (jui peut se jouer de notro faible nature , ot nous entralner dans un ablme
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de inaux. Les Yesidis se distlngucnl en deux castes ; en cela, ils resseuiblent un peu aux Druses. Les uns sont aj)pcles les illumines : c'est parmi eux que se trouvent les especes de pretres qui conservent le dognie de leur croyance ; les autres s'appcUent fakirs. C'esl une erreur de croire qu'ils affectionnent dans leurs ve- tements la couleur noire parce qu'elle leur donne un air plus terrible. Ils ne portent pas de costume diffe- rent de celui des autres Kourdes. La laine noire (^tant plus abondantc dans ces pays , leurs tentes , leurs man- teaux et leurs abas sont ordinaircment de laine noire, reliausses par quelques dessins de couleur rouge. Ils attachent une certaine importance a la forme de leur chemise, qui n'est pas fendue au collet comme celle des Turcs , mais qui a dans la partie superieure une ouverture ronde , ce qui pour eux presente un sens mystique.
« Un de leurs grands scbeiks, disent-ils, ou scbeikadi, comme ils I'appellent , vit , apr^s un jeune de quarante jours, descendre du ciel un cerclc d'or et de lumiire qui se posa sur son cou. » Cette ouverture circulaire de leur chemise est faite pour rappeler cet evenement. Ils pretendent n'avoir aucun livre pour leurs ceremo- nies religieuses ; mais les Turcs, qui les haissent et les redoutent comme sorciers, pretendent que les Yesidis descendants maudits de Y6side, possedent des arti- fices secrets pour se mettre en relation directe avec les mauvais genies. Ils pretendent en outre que ce n'est qu'a I'extei'ieur que les Yesidis i^econnais- sent los lois du mariage , et par consequent qu'il n'existe pas chez eux de famillc. Les informations que j'ai prises d^truisent cette assertion : les gens des deux castes se marient, et la polygamic est to-
( 302 ) leree parini vu\. .Ic n'ai pas obsci\e tlans ic caiac. tere des races une dlflercnce marqutie ontre ccux qui se donnent comme Y^sldis ct ceux qui se regardent coninio Kourdes musulmans. L'occupation dcs uns ct des auti-es est de garder les troupeaux. lis sont peu adonnds a la culture ; ils vivcnt principalemeut de chair et de laitage ; leur pain se fait de farine d'orge , dont la pate est etenduc sur une plaque de fer; on le prepare au moment du repas : en cola il ne dideront en rien des autres Kourdes. Ils boivent volontiers du vin ; et s'ils s'abstiennent de la chair de pore, c'est plutot par imitation que pour suivre une loi rigou- reuse. Leschretienseux-raemes,danscespays, s'abstien- nent de manger du pore , parce que les musylmans ont une telle liorreur de ces animaux qu'ils n'en tolere- raient pas menie le voisinage.
Que les Yesldispratiquent la circoncision , c'est en- coi'e un usage trop cnracineparmi les Asiatiques pour qu'on puisse en conclure aucune parentis entre eux et les musulmans. Longtemps avant llcirodote les peuples de ces contr^es praliquaient la circoncision. « Les Colchidiens, dit-il, les Egyptiens et les Illthio- piens sont les seuls peuples qui de tout lemps aient pratique la circoncision, » (Liv. II, 104.)
II est impossible d'obtenird'eux des renseignemcnts plus circonstancids , car ils sont soupconneux a I'e- gard des gens qu'ils ne connaissent pas. Grande est leur ignorance , et je suis convaincu que la plupart de ceux qui se donnent coinme Vesidis ne savent pas au juste en quoi ils se distinguent des autres. Les Turcs pre- tendent qu'ils ont une grande superstition dans la roiinc (le leur liabit, (|ui , selon eux, est Iradition- iicllc (Jiiaiid lis \culent preter uii sermcnt soiciiiirl ,
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dls baisent la inanche de leur habit. Les luanches de leur vetement'lnterieur sont fort longues , et traine- I'aient jusqu'a terre , s'ils n'avaient soin de los reunir et de les attacher par un nceud derriore leur dos. Jamais lis ne marchent sans arraes; elles consistent en un fu- sil accompagne ordinairement d'un seal pistolet , et en plusieurs poignards ou yatagans. Mais cela leur est commun avec les autres Kourdes cliretiens ou musul- mans. Pour leurs funerailles, ils different des musul- mans, en ce qu'ils enterrent leurs morts en quelque endroit qu'ils se trouvent , et dans une direction arbitraire. Les musulmans , au contraire , obeissent strictement a la loi qui ordonne d'enten-er les morts perpendiculairement a I'axe de la mosquee, laquelle est toujours dirigee vers la Mecque.
Tels sont les renseigneraents que je parvins a re- cueillir sur les tribus des Yesidis en parcourant les cantons qu'ils occupent de preference. II me reste la conviction que cette reputation do ferocitc^ que les Turcs se jilaisent a leur faire est completement usur- pee , et que le voyageur qui se presenterait chez eux avec des intentions francliement amicales y trouve- rait aussi bon accueil que chez les autres montagnards de quelque secte qu'ils soient. Le pays , du reste , prete plus que tout autre aux histoires tragiques et aux relations effrayantes. Pas une route n'etait trac(!!e devant nous ; nous marchions A I'aventure , roulant au mi- lieu des masses de rochers que nos chevaux fi'anchis- saient avec une adresse merveilleuse. Les evolutions de nos Kourdes egayaient seules la monotonie de la route. Les echos de leurs fusillades faisaient lever Icnte- ment des troupes d'oiseaux de proie qui planaient au- dessus de nos tetes en poussant des cris aigus. Nous
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etions desccndus dans uno vallee encaisst'c ou nous niarclilons depuis une heure , lorsqu'on arrivant sur la crele, je ius frappo de la bcaute du spectacle qui se prdsentait de\ant moi. Nous etions separd's du second plan de I'horizon par une vallee transversale , au fond de laquelle coulait une rivitjre. De I'autre c6t6 s'^lc- vait une montagne dont la cime etait couverte de neige , et dont les flancs etaient sillonn6s par de nom- breux torrents de laves, encore noires et arides, faisant contraste avecla verdure du sol qui n'avait pas ete atteint par I'explosion des feux souterrains. Cette montagne, que les habitants appellcnt Tandurck-Dagh (pout-etre du mot tandour, fourneau employe dans ccs contrees pour designer les fours souterrains qui tiennent lieu de cbeminee ) , s'^tend de Test a I'ouest en longcant la vallee. Du point ou nousetions, jereconnus sanshdsiter un des volcans les mieuxcaracterises que j'eusse encore vus dans ce pays. Le sol sur loqucl nous Etions , et que j'ai decrit plus baut, avait passe du calcaire au trapp ct a la sei'pentine. Ce lambeau de terrain avait bieniot disparu pour faire place au scbistc argileux calcaire. Mais quand nous eumcs francbi la vallee , en laissant a gauche une ruliic avec un village qu'on ap- pclle Kamerdji-Rale , nous nous trouvames en plein terrain volcanique. La base de la montagne est parse- mc*e de \iliages, parmi lesquels je remarquai celui de Temcrdjik et celui de kara-keni. Toute la base de la montagne voisine des eaux de la riviere est composee d'une lave compacte et homogene commc le basalte. Sa cassure est viti'euse et sa couleur noire ; elle conlient qa et la des aiguilles fines de pyroxene. Cette couche de lave repose sur un lit de scorics, de cendres ct de I'rnsimonts lioursouflcs par lo feu, commc s'ils eussent
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souffert une double eruplion. Mais ces traces de la par- tie ancienne du volcan sont rocouvertes par un lit tres ^pais de tcrre vegetale : c'cst sur cette couclie que, par- tant du sommet du volcan, des coulees de laves ont sil- lonne sa pente, et pr^sentent aujourd'hui I'aspectd'unc (Eruption trc^s recente.
D^sirant nous rendre dans la journee du lendemain a Toprak-Kale , nous etionsall^s coucher au village de Karavenk, situ6 aupied des montagnes que nous avions a franclilr. C.e hameau , compose d'une cinquantaine de huttes en terre , a cependant une egiise en pierres de taille , monument qui se fait remarquer dans un pays oil il est si rare de rencontrer des edifices un pcu considerables. Meliemet passe la soiree a reunir I'es- corte nombreuse qui doit nous accompagner le lende- main, autant pour nous montrer la route que pom- nous d^fendre centre les attaques. Vers le milieu de la nuit nous nous mettons en route.
La grande cliaine que nous avons a Iranchir separe le bassin de I'Euphrate, qui coule de Test a I'ouest, de celuidel'Araxe, etse dirige a Test. C'cst dans cette tra- vers^e que nous voyons combien il est important d'a- voiravecsoides domestiqucsdupays, babitues a camper etase couclier surleursmanteaux. Notre interpretes'^- tant trouve en retard, s'egara dans la montagne, etnous perdimes environ deux beures pour le retrouver. Le pic que nous avons a irancbir est un des points cul- minants de cette chaine que Ton appelle Acboulak ; le pic lui-meme est appele par les babitants Arzi-vouti- dagb.
Le nom de cette montagne est reste parmi les habi- tants comme une des plus antiques traditions qui se rallacbont aii\ origines(l(> In nalioii anncnienno. C'csl
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.311 uiUleu lie CCS montagnes que \lvaient ccs tribus con- nues sous le nom de Arevortl (Saint-Martin , Mem. sur V Armcnie) , ou enfants clu Soldi, qui suivont la religion de Zoroastre et qui refuseront conslamment dc se con- vertir au christianisme. Le culte de Mihr et d'Anaide fut longtemps pratique par les anciens Arm<^nions. t!ne province enti^re, que les anciens ont appel6c Acilisene, portait le nom de Anaetia, parce que le culte de la d^esse Anaide y etait particuli6reincnt en honneur. Jc dois.reraarquer que cette province, qui etait contigue a I'Euphrate , touchait a la portion de la Leucosyrie dans laquelle j'ai trouve les curieux monuments saces avec dcs bas-reliefs relatifs au culte de la deesse. Dans cette niontagne des Arzivoutis il existe , d'apres cc que m'ont dit les guides, des ruincs d'ancicns villages ([ui sont inhabites depuis un temps Immemorial ; mais au- cun d'eux ne put me dire si! existait quelque inscrip- tion ou quelquepierre travaill^e. Les guides paraissent craindre de traverser ces montagnes, qui sont, disent- ils, frequent6es par les Y^sidis. Ces derni6res tribus ne sont peut-etre autre chose que les descendants des en- fants du Soleil, sur lesquels nousn'avons que des ren- seigncments si fugitifs.
Au lever del'aurore, (juand nous pouvons recon- naitre les terrains , je m'apert^ois que la nature de la montagne a change, et que nous marchons sur un ter- rain de trapp presquc schisteux, qui, dans certains endroits, alterne avec la serpentine d'une maniere ires confuse. Bientot le calcaire identique a celui de Karavenk. reprend la j)lace de la serpentine, comme si le pic d'Arzivouti eut deplace le d6p6t calcaire dans son soulevement.
Le plateau sur lerjuei nous niarciious |>endant (jucl
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que temps eslcouvert d'une prairie ou des families no- mades vienncnt s'elablir apres la fonte des nelges pour faire paitre leurs troupeaux ; mais elles n'y cultivent pas. Apres une halte d'une heure , nous commencons a descendre dans une valine qui s'elargit peu a jieu , el dont les flancs sont egay^s pav quelques arbustes. Le calcaire gris veine fait place au calcaire grossier, que nous ne quittons pas jusqu'a Toprak-Kale. Cette ville est aujourd'hui dans le dernier etat de denument. EMc a 6te pendant longtemps I'apanage d'un bey kourde , dont le revenu principal consistait dans les droits qu'il extorquait aux caravanes lorsqu elles se rendaient de Pei'se en Turquie. Mais depuis longtemps la cbateau- fort n'a plus que son ancienne renoujmee; c'est une masure gardee par quatre vieux janissaires, et com- raandie par un jeune liomme , qui est le fds du paclia de Bayazid.
L'ancienne famille feodale a ete depossedee. L'eta- blissement de I'autorite du sultan dans la vallee sup^- rieure de I'Eupbrate , en separant les tribus du nord et du sud, a beaucoup affaibli la resistance que les Kourdes pouvaient lui olTrir dans certains cas; et, apres quatre cents ans de guerres, le gouvernement de la Porte pa- rait pouvoir s'etablir sans obstacles dans ces contrees.
Les montagnes, du temps de X^noplion, etaient ba- bitees par le peuple des Carduques, qui recurent les Dix-Mille comme des ennemis, et abandonnerent leurs babitations pour s'enfuir sur les montagnes avec leurs femmes et leurs enfants. Piien n'a cbange dans I'aspect du pays : ce sont toujours des villages inaccessibles , composes de quelques tas de pierres ou yaelas, vastes campcments dans lesquels les tentes des nomades en - tourent sjmetriqueuient la tenle du Bev, la seide au-
( SOS )
torite rcconnuc par cux. Tout, dans ccs >aelas, so passe comme dans un village independant. Lc mollah et le cadi se r^unisscnt avec le bey pour rendrc la justice , et pronoucent en dernier ressort sur toute esp6ce d'af- faires. Depuis la guerre acliarnee que le sultan a faite a ces montagnards en 1833 el 1834 , lesprincipaux bejs s'etaient souniis ; niais ils commenc^aient a remuer de- puis la mort de Mahmoud, excites qu'ils «^taient par les pretentions injustes dcs pachas a trois queues qui les entouraient, et surtout par les promesses de quelques agents qui vcnaient les soulevcr au nom de M6li6met- Ali.
Rien ne pouvait nous arreter a Toprak-Kale : c'etait le point extreme ou I'armee russe s'etait avanc6e ct dontelles'etait emparee. Les Armeniens, qui, en gene- ral, nous disaient assez francheinent leur maniere de penser quand ,les Turcs n'6taient pas la, n'ont pas paru fort enthousiastes de rexp(!!dition de 1828.
Apjes avoir franchi lc revers de la collino qui fer- mait le bassin de T6p6ris du c6t6 du sud , nous arri- vons sur un plateau dont la constitution est extreme- inent remarquablc sous le rapport geologique. A notre gauche, des collines arrondies, couvertes d'une vegeta- tion rareetchetive, se dirigent dunord au sud; adroite, notre route est born^e par un ton-ent de laves qui pa- rait sorti d'un dcs contrc-forts inferieurs du Tandourek- dagh. Ce ne sont plus cescoul6es de laves comme le sol de I'Asie-Mineure en prdsente des millicrs ; c'est un torrent de plusieurs lieues de longueur, qui a coniple- tement dess6ch6le terrain des environs. II se compose, comme un (leuve qui charrie des glaces, d'un nombre infini de blocs accumules les uns sur les autres, dans un (lesordre elFravanl : ct-s laves sont noircs, sonores ,
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ferrugineuses, brillantes a leur surface comme un lai- tier de forge; ellcs paraissent d'unc orlgine ti'c^s re- cente, car elles n'ont pas donne nalssance a la moin- dre vegetation. A peine si qiielques maigres gramens trouvent a se nourrir dans les fentes ct dans les nom- breuses crevasses que les laves ont iorraees. On voit des blocs tinormes cubanbplus de 10 m(!>tres, souleves en I'air et soutenus sur des fi-agnients plus petits ; leurs angles sent aigus, et leurs cassuresaussifraiclies etaussi vives que si elles etaient d'hier. Je trouve dans cette coulee des laves une grande analogic avec celles du Koula , en Pbrygio ; mais ici la coulee est bien plus considerable, les blocs plus voluniineux. Salargeurest variable; elle est au moins d'un quart de lieue dans sa partie la plus etroite. C'est au milieu de ces laves que les Kourdes nous montrerent les ruines de Dulgazin- kale-si, le chateau des Yesidis. Les coUines qui sont a notre gauche, a 1,200 metres environ de la coulee de laves, sont uncalcaire grossier, blanc, ct qui me parall du meme etage quele calcaire a gryphees quej'ai trouve aux environs de Bayazid. Ce calcaire , du restc , n'a recu aucune atteinte des feux souterrains, et est par- faitement intact. Le chateau de Dulgazin est situ6 a I'extremite du torrent de laves que nous avions suivi pendant vingt-quatre heures. Les montagnes qui bor- nent la vue a notre droite portent le nom de Hag-dagh; une vallee qui s'ouvre non loin du chateau donne naissance a une riviere qui porte lenom de Sohouk-sou (I'eau froide), et qui va se jeter dans le lac de Van. Tous ces plateaux sontcouverts d'abondants paturages, ou les tribus ou Taiff des Kourdes viennent s'etablir pendant I'^te.
Lc village deBerghiri, ounousfimos halte, etait jadis
( 310 ) comniande par un chateau , aujourd'hui en mines < qui se trouve a I'entree du village. Le costume des ha- bitants dc CO district dilTere de celui des Kourdes que nous avions vus jusque la. lis portent unc sorte de veste ou jaquette en poil de chevre noir avee des revers blancs, ct orn<^ de passementeries rouges. L'n panta- lon ou cliarvar, ti-6s serr6 sur la cheville, est fait avec uneetolTe decoton agrandes raiesnoires et rouges. Leur turban est 6galement fait d'unc 6tofTe de ces deux cou- leurs. II est pose surla tete d'une mani6re particuli^re, a peu pr(^s cpmme un cone renverse. lis sont abon- damment fournis d'armes de toute esp^ce, et leur tournurc n'a rien de rassurant pour le voj agour. Lne partie des habitants du village de Berghiri est de la secte y^sidi; I'autre partie est kourde; mais Ics uns et les autres vivent en bonne intelligence. II y a aussi quel- ques Armdnions , dont les fommes sont veluos dc la meme maniere que les musulmanes.
En arrivant au bord du lac de Van, on est happe de I'aspect majestueux que pr^sentc cctte mer interieure , dont les bords escarpes, sauvages et solitaires, ne por- tent aucune trace du voisinage des hommcs. Toute la cote septcntrionalc du lac est composee d'une chalne de montagnes trachytiques , dont Ics sommets se dessi- nent sur le ciel en pics aigus et dechir^s. L'liorizon se termine par la masseimposante duSepan-dagh, volcan eteint, mais compose uniquement de laves et de sco- ries de la meme nature que cellos des volcans contem- porains. Nous avions eu le projet de visiter les terrains volcaniques des bords du lac, etde tenter I'ascension du Sepan-dagh , qui passe aux yeux des habitants pour 1(; point culminant de la contree ; mais unc ncige abon- dante en cnuvrait le sommet, et nous ne Irouveimes
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point de guides qui voulussent nous conduire dans ces? regions 6lev6es et d'un acces tres difficile, meme dans la belle saison : Car, disent-ils, sous la neige qui per- siste pendant les trois quarts de I'ann^e se trouvent des fondrieres de cendres et de scories, oii Ton enfoncc jusqu'a mi-jambe , et des blocs aigus de ]>ierre, dan- gerous pour le voyageur inexperimente.
La cote scptentrionale du lac est pendant plusieurs lieues completement d^serte; raais vers Tangle nord- ouest se trouvent les ruines d'une ville armenienne. Elle est appel^e par les Armeniens Khelath, et appartient a I'ancienne pro\ince de Pernouni. On ignore quel en fut le fondateur ; mais d'apr^s ses monuments elle doit etre a peu pr^s contemporaine d'Ani.
Le tableau du lac de Van, magnifique par la gran- deur des lignes , est ccpendant incomplet par le man- que de vegetation. Cest le defaut general du paysage dans les contrees que nous pai'courons , defaut qui , a mon sens, est bien compense par la forme severe des montagnes et par les effets merveilleux de lumi^re sur les difTt^rents plans des rochers. II faut un sejour de quelque temps dans les contrees d'Orient pour que I'esprit s'identifie avec I'extreme sev6rit6 des lignes et les sombres aspects du paysage.
11 est rare de trouver ici comme en Europe des fa- briques isolees , semees sur le pcncliant des coteaux ; a peine rencontre-t-on sur sa route quelquescaravanse- rails en ruines , dont la structure puisse oITrir un faible int^ret. Dans ces pays de tout temps I'avages par des hordes errantes , les habitants sedentaircs se sont vus forces de se reunir en villages pour olFrir quelque re- sistance aux attaqucs dont ils etaient I'objet. On ne sait point ici ce que cost qu'une forme. On laisso eiv
( 312 ) friche les terrains arables qui sont trop eloignes des \illages pour quo le paysan puisse aller le matin a son travail et en revenir le soir.
Parmi les beys qui sc trouvaientcliczlepacba de Van, il y en avait plusieurs qui portalont le costume national des Rourdes. C'est ordinairement un manteau ou aba de laine blancbe dune extreme finesse avec des passe- menteries de soie rouge. Le ftz ou calotte est compost d'un feutre blanc de forme coniquo , autour duquel s'enroule un cliale blanc pour les scbeiks, et ray6 de diverses couleurs pour les simples montagnards. lis ont beaucoup de luxe dans leurs armes , qui se bor- nent ordinairement a une paire de pistolets et un sabre trfes recourb^. L'arc et la fleclie , qui ont dt6 si long- temps en usage parmi eux, sont aujourd'hui complete- ment abandonnes. Les arcs ctaient petits , fabriques avec de la corne et des cordes a boyau ; ils etaient re- vetus d'un enduit dore et orn6 d'arabesques. Un bon arc coute encore en Turquie de cinq a six cents pias- tres. II n'y a plus que les grands seigneurs qui s'a- donnent a I'exercice de cette arme. Le sultan Mabmoud y excellait. II y a plusieurs cbamps aux environs de Constantinople et dans les jardins du s^rai qui portent le nom de Oc-Meidan (la place de l'arc). Le sultan avait I'babitudc de fairc clever une colonne au lieu ou il avait loucbe un but difficile. La flecbe etait composee d'un roscau, plus ordinairement dune tige de bam- bou , que Ion tirait des Indes. Le carquois ne se por- tait pas sur I'^paule , mais (itait suspendu a la gauclie du cavalier. Une autre arme a peu pr^s abolic aujour- d'bui, et dans laquclle les Kourdes excellaicnt, etait le djerid. C'etaient de grands javelots de bois dur dontla pointe etait Ac fer et Iriangulaire. Le cavalier portail
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ordinairement trois djerid ronfermes dans un long 6tui de cuir. Celte arme correspond an javelot des an- ciens. Lc cavalier ne devait jamais abandonnor son djerid , ct apres I'avoir lance dans la melee , il devait s'y precipitcr lui-meme pour le reprendre. Quoiqne toutes Jcs amies olTensives du moyen-agc aient ete abandonnees, les Kourdesont conserve lusagc dubou- clier, arnie defensive qui aujourd'bui ne peut etre d'aucunc utllite reelle. Les plus beaux de ces boucliers sont fails de peaux d'elepliant el sont apporles de I'lnde. Ceux quon fabrique dans le pays sont en peau de bufilc et renforces de bandelettes de fcr. Le bas du bouclier est orne d'une frangc de laine rouge exacte- ment semblable a celle de certains boucliers grecs que Ton voit sculples dans les bas-reliefs. La reforme dans le costume ne s'eslpas etendue au-dcla des principaux officiers de la maison du pacba. Tout ce qui tient aux tribus kourdes a consei've son costume national.
La fondation de la vllle de Van remonte a I'epoque brillanle de la monarcbie assyrienne ; les bistoriens armeniens sontd'accord pour la regarder comme I'an- cienne Semiramocerte,bien que quelques geographes aient cm reconnaitrelidentite entre sa position et celle de I'anciennc Arlemiia , nom qua conserve un village sltue au sud-ouest de Van et dans Icquel on ne trouve point de traces d'anliquites. Selon Moise de Rboren, Semiramis auralt fonde cette caj)itale enrevenant d'une expedition contre Arab, roi d'Armenle.
La situation particuliere du grand rocher aurait at- tire I'attenlion de celte reine et I'aurait decidee a construire un chateau-fort qui jusqu'a nos jours a ete regarde comme un des plus redoutables de toute I'Ar- menie. Les traces nombreuses d'anliquites que Inn rc- I. Avnu.. 5. 21
( 314 ) marque dans les ruines du chateau do \ an remonlenl toutes a I'epoque des monarchies assyrienne ou pcr- sane. II ne paralt pas que les Remains ou Ics princes d'Arra^nie y aient ajoute de nouveaux ouvragcs. La ville anciennc dtant , d'apr6s Tusaj^c general dans cos contr^es, batle uniquement en terrc comme ceiles qui existent aujourd'hui , n'a laisse aucune trace, a tol point que ce n'est que par analogic qu'on peut con- clure qu'elle occupait la partie sud du rocher comme la ville moderne. J'ai ^ti frapp6 de la i-essemblancc de disposition enlrc la ville de Van ol la celebre ville d'Anazarba de Cilicie; I'une et I'autre remontcnt a pen pros a la memc epoque; et pr6s d'Anazarba, les habitants montrent encore une ruine qu'ils appoUent C-ham-Miram-Kalesi (le Chateau de Semiramis).
TEXIliK,
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DEliXIEME SECTION. Actes de la Societe.
KXTRAIT DKS I'ROCES-VEKI'.AIJ X DKS SEANCES.
Pri5sid£nce de M. Roux be Rochelle.
Seance die 12 ai'ri/ ISZiZi.
Le proc^s-verbal de la dorniere stance csl lu et adopte.
M. Cih. Robin, admis r^cemment dans la Society, adresse ses remerciments a la Commission centrale.
M. Francis Lavallee, vice-consul do France a la Havane, annonce qu'il a remis a MM. Pimentel et de la ToiTC les diplomes de leurs nominations , et que ces deux nouveaux membres se proposent de faire incessammcnt des communications a la Societe.
M. Jomard annonce , de la part de M. le general Visconti, un procbain envoi des nouvelles publications du D6p6t topograpbique de Naples.
Le meme membre met sous les yeux de la Society plusieurs des gravures que M. Catervood , arcbitecle , est sur le point de publier a Londres , et qui repr^- sentent les monuments de 1' Yucatan , que cet babiie artiste a dessin^s sur les lieux. II fait remarquer la dif- erence qui cxiste entre les dessins faits par des obser-
vateurs exacts el liubiles , tels que .M.M. Nebel, AVal- (!eck, Ste])lien , Caler\ood, etc., et ceux qu'on a\ait jiisque dans ces dernicrs temps de diirercntsvoyageurs (Strangers a I'arl du dcssin ; 11 ajoiile que les monu- ments de TEgypte ont donnti lieu, il y a quarante ans, a une observation scndjlable.
M. de Frobcrvillc i'ait don a la bibliotbeque de la Socidte d'une carte manuscrite du moyen-age , dessi- n^e sur parchemin par Oliva , et qui parait etre du xvi" siecle.
Le meme membre lit la premiere partie d'un Me- moire qu'il a fait sur la question de sa\oir si I'ile de Madagascar a ete connue des anciens. Cette communi- cation est renvoy^e au comite du Bulletin , et M, Jo- niard est prie de rendre compte de la carte du moyen-
M. Maisan ainionce son jirocliain depart pour I'Afrique oricntalo. Sur sa demande , la section do corresporidance est price de preparer des instructions giographiqucs pour cc voyage,
Sc'diice cj:tnionlinaire du 19 cwril.
Le proces-\erl)al di* la dcruirre seance est lu et adopte.
M. Demersay, admis reccmment dans la Societe , lui adrcsse ses remei-ciments , et lui demande des in- structions geographiques pour le voyage qu'il a le pro- jet de faii'e dans I'Amerique du Sud.
M. Ober Muller adresse a la Societe le specimen d'une carte en relief de I'Allemagne , imprimeo d'a- pres uu n(>u\eau procede qui lui |)('iniet d'cxecuter les cartes en reliei" avcc autant de correction et a ini |)rlx aussi niodere que les cartes planes. — M. .lonuird est prie d Cii rendre c'oin|)te.
( -"^l^ )
M. Joiuard preseiite, an iiom de la Sociele geogra- phique de Francfort, une carte du duclie de Nassau , dressee par M. A. Ravenstein, et coiisideree comnie la plus exacte qui ait paru jusqu'a present sur cette par- tie de lAlIemagne.
M. le vicomte de Santarem annonce que la Societo maritime de Lisbonne lui a t^moigne le desir d'ouvrir des relations avec la Societe de geographic, et il ap- pelle I'attention de ses collegues sur les publications interessantes dont s'occupe cette Societe. La Conamis- sion centrale accueille cette communication avec em- pressement , et prie M. de Santarem d'etre son inter- prete aupres de la Society maritime de Lisbonne.
M. Ch. Texier depose sur le bureau quelques nolos qu'ii a preparees sur Zanzibar,pour le voyage de M. Mai- san dans rvVfrique oi'ientale.
M. le rapporteur de la Commission du Prix annuel pour les decouvertes les plus imporlantes en geogra- phic , expose verbalement, au nom de la Commission, les titres de differents voyageurs a I'interet et aux en- couragements dela Societe. Quatre voyagesontete plus particulierement distingues par la Commission, pai-mi ceux qui sont susceptibles d'etre admis au concours.
La Commission centrale regie I'orde des lectures qui seront faites a la seance gen^rale du 26 avril.
Asaeinblee geiierale du SCi avril ISZiA.
La Societe de geographic a tenu sa premiere asscui- hUe generale de i^hh , le vendredi 26 avril , a I'llotel- de-Ville, sous la presidence de M. Eyries, membre de rinstitut , un de ses presidents honoraires.
M. le President adresse a I'assemblee une courte allocution surle but ctl'ulilitd des Iravauxdcla Societe, (i il [)r(''s(Mil(> la premiere partiedu lonie \ II duReeut^il
( 318 ) des Mcmoiros, conlenant uue Gramniairo ot iin Dic- tionnalre dc la langue berbcro, par leu \ ciUure , de Paiadis, ancieii secretaire -interpretc dii roi pour les langues orientales.
M. d'Avezac , remplissant les fonctions de secretaire en I'absencc de M. Noel Des Vergers, lit le proc^s- verbal de laderniere seance gencralc, et communique la liste des cartes et des ouvrages deposes surle bureau.
M. le President proclame les noms des nouveaux inembrcs admisdans la Societe.
M. Joniard, au nom d'une commission speciale, fait un rapport sur le concours au prix annuel pour ladecouvertelaplusimportante en gcograpliic. D'apres les conclusions de ce rapport , la Societe partage sa grande medaille d'or entre M. D. Arnaud, pour son voyage vers les sources du JNil-Blanc , ct M. Hommaire de Hell , pour sou voyage a la mer Caspienne; elle de- cerne, en outre, deux mentions lionorables, I'une a M. Edward Jolm Eyre, pour son voyage dans I'Australie meridionale , et I'autre a M. Josepli Russeggcr, con- seiller des mines de Tempercur d'Autricbe , j)0ur son voyage en Nubie, en Syrie et dans les contrees voisines.
M. le President remet a M. Hommaire de Hell Tune des deux mcdailles d'or, etlui adresse les I't^licilations de la Society sur les lieureux resultats de ses explo- rations.
MM. Gay , Hommaire de Hell et Charles Texicr lisent successivement des fragments de leurs voyages ; le pi'e- mier de ces fragments est un episode sur I'enterrement de Catliiji, cacique araucanien ; le second, un coup d'ceil sur le Caucase , ct Ic troisiemo unc notice geo- graphique sur le Kurdistan.
M. lloux doRoclielle, president de la commission
( 319 ) centrale, appelle Taltention dc Ja Socicto sur uii iiou- veau gdorama , d'une grande dimension , qui vicnt d'etre construit aux Champs-El} s^es jiarlessoins deM. Guerin, et il fait ressortir les avantages que presente un pareil ^tablissement pom' I'elude de la geograpliie.
L'assemblee , conformement a ses statuts , procedf
au lenouvelleraent des membres de son bureau pour
I'annee IShh-iShb et elle nomme au scrutin:
President. — M. le vice-amiral baron de Mackau .
ministre de la marine et des colonies.
M. Adrien Coclielet.
Vice-jjiesideitts, — ( M. Guigniaut , membre de I'ln-
( stitut.
( M. d'Avezac. Scriitateuts. —
( M. de la Roquette.
Secretaire. — M. Charles Texier.'
L'assemblee nomme egalcment MM. deFrobcrville et Gay aux deux places vacantes dans la commission cen- trale , par le deces de MM. Barbie du Bocage et Puillon- Boblaye.
La seance est levee a dixheureset demie.
MKMBRES ADMIS DA>S LA SOCIKTl':.
Seance du \'l avrd 18/i/i.
M. le 1)^ Alfred Demersay.
Seance generate du 26 avril.
M. Am^dee Tardieu , geographe du ministero des affaires etrangeres.
OUVRACES OFFtRTS A I. \ SOCI^TE.
Suite des Seances ilc mars 18Zi/i.
Par rinslitut hislorique et geograpldque du Bresil : Revue trimestrielle , n"* 11 et 12. — Supplement au
( 320 )
troisieme volume tlo colto revue. — Vies d'Alexandre et (le Bartheleir.y de Giismao, brocli. in-8°-
* Par hi Societe cV emulation ilii Jura : Travaux dc cetto Soci^te pendant les annecs I8/1O-/1I ct lS41-/i2.
Par jM. le colonel Sabine : Observations on Davs of unusual magnetic disturbance, made at tbc British colonial magnetic observatories under the depart- ments of the ordnance and admiralty; 1 vol. in-i°.
Par M. le capitaine Vetch : Inquiry into the means of etaljlishing a ship navigation betAveen the Mediter- ranean and Red seas, broch. in-8°.
Par M. Fontanicr : Voyage dans I'lndc et dans le golfe Persique par I'Egypte ct la mer Rouge ; 1" par- tie. 1 vol. in-8°.
Par S. F.. M. le comte Cancrine : Annuaire magn^- tique et meteorologique du corps dcs ingenieurs dcs mines de Russie. Annee 1841 ; n" 1 et 2. In-Zi". — Observations mdteorologiques faites a Kasan. 1835- 1836; 1vol. m-h".
Par M. Lajond : \ oyages autour du monde. Mers du Sud, de la Chine et archipel de I'Inde. 129= a 132' iivi-aison-
Pur M. Hippolyte Fluiy. Memoire sur la culture des caroubiei's dans I'ancien royaume de Valence, broch. in-8°.
Paries Fditeiirs : Annales maritimes et coloniales, f^vrier. — Bulletin de la Societe geologique de France, mars. ■ — L'Invcstigaleur, journal de I'lnstitut histo- rique, mars. — Boletin enciclopedico de la Sociedad economlca de amigos del pars. — Annales de la pro- pagation de la foi , mars ISlili.
BULLETIN
I)K LA
SOCIETE DE GEOGRAPHIE
MAI 18/i/i.
PREMIERE SECTION.
MRMOIUES, KXTRAITS, ANALYSJiS ET liAPI'OIiTS.
Notice sur la gcographie da Texas , sur la variete de ses productions , de ses animaux , de ses pi antes , et de sex richesscs naturelles et comi>ierciales , par M. yVsHBKi. Smith , memhre de la Societe de geographic.
La republique du Texas occupe un vaste territoii'e , qui comprend 12° de latitude depuislc 26° jusqu'au 38° nord, et 13° de longitude du 95° au 108° a I'ouest du meridien de Paris. La superficie est estimee a 318,000 milles Carres , et presente une grande variete de sur- face et d'elevation.
Le Texas est borne au nord et au nord-est par la ligne qui le s(^pare des Etats-Unis , fofmee principale- ment par les rivieres Arkansas, Rouge, et Sabine. II est borne a Test et au sud-est par le golfe du Mexique ; au sud-ouest et a I'ouest par le Rio-Grande, qui le s^pare dn Mexique.
I. MAI. 1. 22
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Sans tenir conipte d'une petite langue Je torre peu importante en apparence a rextr^mite nord-ouest, la fronti^re seplcntrionale du Texas est form6e par la branche prlncipale do I'Arkansas, qui coulo vers Test on traversant six dcgros do longitude; et rextromil6 sud du Texas est a remboucliurc du l\io-Grande.
On ne saurait einbrasser dans la memo description les divers jjays, climats, sols ct productions dos diffe- rentes parties du Texas. La region de I'ouestetdu nord- ouest se compose de plateaux 6le\^s et ^tendus, traverses par deschaines de raontagnes: elle abonde en produc- tions minerales, ainsi qu'en gras paturages et en terres propres a I'agriculture. Cette partie du Texas, destin6o avant peu a recevoir une population considerable, a ce- pendant peu attir^ I'attentlon jusqu'a ce jour. On doit attribuer cc resultat a I'eloignement oii est ce pays des grandes voies de communication et des centres de population , ainsi qu'a la presence destribus indiennes repandues dans toute la contr6e, a I'cxception des ^ta- blissements mexicains situes sur la rive orientale du Rio-Grande.
Apr^s quelques remarques g^n^rales sur la vaste por- tion do notre tcrritoire dont je vicns do parlor, je I'es- treindrai mes observations aux souls districts oil des etablissemcnts ont ele formes par dos Emigres, dont quelques uns sont venus d'Europe , et dont le plus grand nombre est arrive des Etats-Unis.
La region nord-ouest du Texas a 6te rareraent visitee par les blancs; elle est habilt^e par les Comanches et par d'autres tribus indiennes de la meme famille , qui cbassent le bison dans ses vastes plaines et dans ses vallees. ^ous parlerons plus loin de cos tribus impor- tantes.
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L'honneur de la d(!!couverte du Texas apparlient, comme Ic salt la Soci(^te de g<!'ograpliie , a I'intrt^pide et infatigable La Sale, et c'est dans co pays quo, long- temps apros, on tenta d'etablir le Champ d'Asile.
Les grands flouves la Trinite , le Brazos, le Colorado et un grand nombre d'autrcs cours d'eau moins remar- quables, mais non pas sans importance, coulent en- tierement dans les limites du Texas , se jettent dans le golfe du Mexique et indiqucnt par la direction de leurs eaux que le pays est un plan incline dont la pente est dirig^e vers le sud-est. Dans le Brazos et le Colorado , a la descente d'undes plateaux superieurs, il y a dele- geres chutes ; aucun fleuve du Texas n'en presente ce- pendant d'une hauteur remarquable.
La riviere Rouge , qui fait partie de la limitc septen- trionale du Texas, se jette apr^s un parcours d'environ 1,500 milles dans le Mississipi , sur le territoire des Ltats-Unis. Durant les fortes crues des mois d'hivcr, les eaux de la riviere Rouge viennent se confondre avec celles de quelques sources de la Trinite ; et en suivant le lit de cette riviere , elles vont rejoindre le golfe du Mexique. La riviere Rouge tire son nom de la couleur de ses eaux, rougies par les matierestcrreuses qu 'elles detaclient dansleur cours, quandle fleuve est grossi par les pluies d'hiver.
La Trinity a pr^'s de 700 milles de longueur; elle a 6te remontee , lors des hautes eaux , par de petits ba- teaux a vapeur,jusqu'a la distance d'environ AOOmilles. LeBrazos, dontle cours estestime a environ 1,000 mil- les, n'est pas si favorable a la navigation que la Trinit(^. Lne de ses branches traverse un lac sale , shui dans I'interieur des terres, et qui donne a ses eaux une sa- veur leg6rement saumatre.
( 324 ) Le Colorado a environ 800 milles de longueur ; mais sa navigation est intercepKie, a quelqucs milles do son enibouchuro, par Ics bois de d^rivo qui s'y trouvonl amonceles.
Le Rio-Grande, qui forme la fronli^re occidontale du Texas, prend naissance dans les memes regions que d'autres gi'andes rivieres. Les principales sont I'Arkan- sas qui, apres un parcours vers le sud-est, va se jeter dans le Mississipi ; la riviere de Pierre-Jaune (Yellovv- Slone), qui coule vers le noi'd-est et rejoint le Mis- souri; la riviere des Serpents, dont les eaux vont so riunir au Rio-Colombia qui, coulant vers le nord-ouest, se dechargc dans la nier Pacifique sous le 46° degre de latitude.
Le Colorado occidental se dirigeant vers le sud-ouest des montagnes rocheuses, va se jeter dans le golfe de Californie , pres du 32" degr6 de latitude. Le Rio- Grande, apres un cours d'environ 600 lieues dans la direction sud-est, debouche dans le golfe du Mexique sous le 26'^ degre de latitude. Ce fleuve a peu d'af- fluents , et a cause de la rapidite de son courant et de son peu de profondeur, la navigation en est quelque- fois interrompue*
Les sources de toutes les grandes rivieres dont nous venons de parler, se trouvant dans le voisinage les unes des autres , semblent indiquer que ce plateau est su- perieur a tous ceux du centre du continent am^ricain , bien que Ton trouve dans la chaine de montagnes du Mexique certains pics plus eleves. Lin voyageur qui vi- sita dernierement ce pays, m'a rapporte, qu'en efTet , la region nord-ouest oil se trouvenl les sources de ces rivieres , est un immense plateau dune grande cl^- \ation. coupe par de profonds ravins, sans arbres ,
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inais convert d'a}3ondaiils paturages. Je n'ai pas be- soin de faire observer a la Sociele que, parmi les ri- vieres dont j'ai du parler pour completer lagoograpliie du Texas, I'Arkansas , la Pierre-Jaune et la riviere des Serpents coulent entierement dans les limites des Etats- Unis , et le Colorado occidental dans celles du Mexique.
Les cotes maritimes du Texas depuis la baie Sabine jusqu'a I'emboucbure du Rio-Grande , ont une 6tendue d 'environ ZiOO milles. A mesure qu'on s'eloigne de la terre , la profondeur de I'eau augmente regulierement,
Le long du golfe, et pres de la cote se trouvent plu- sieurs lies dont quelques unes ont une etendue consi- derable. Cette cote e§t basse , unie , et tapissee de riclies herbages. En general , il n'y a point d'arbres , si ce n'est vers I'emboucbure des rivieres. Cependant , on \oit ca et 1^ sur le rivage des bouquets de bois, dont la verdure dgaie le paysage et rompt la monotonie d'un horizon lointain. La baie de Galveston , qui a une lar- geur de 20 milles, p6netre dans les terres jusqu'a une distance de pres de douze lieues.
Du c6t6 de la mer, la contr^e s'eleve doucement par de legers plis de terrain , et cependant elle presente , jusqu'a liO et meme a 80 milles de distance , a partir du golfe , une extreme uniformite. Le sol devient cnsuite onduleux, et plus on marche dans I'interieur des terres , plus le pays est accident^ : a mesure que Ton s'approche des sources des grands fleuves , on ren- contre des plateaux plus ou moins distincts , servant de degriis a des montagnes d'une certaine elevation. Ce sont des ^perons qui se detacbent de la grande coi-dil- Icu-e americaine, parallele a I'Ocean-Pacidque , et qui viennent pen a peu s'abaisser et se perdrc dans les plaines du Texas.
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IjC Texas fsl , eii geii(Jral, un pays do prairies « a eounlry prairie. » Les habitants doniient ce nom au\ terres sur rcmplacement desquelles il n'a jamais cxiste de forets , afin de les distinguer des terres qui ont 6t^ d(!;fricliees.
Les grands fleuves sont bordes , sur chaque rive , par des forets dont I'^tenduc varie d'un a plusieurs milles. Les lits des cours d'eau moins considerables sont en- caiss^s de la meme maniere dans de petits bois. Le pajs qui se trouve entre deux rivieres est ordinaire- ment une prairie ouvertc , couj)eo de bautes lutaics , vulgairement appelecs « ilots de bois. » Ces ilots \arient en (itcndue : quelques uns ont jusqu'a 500 hectares : ils sont souvent a plusieurs milles de distance les uns des autres, de sorte que le pays a I'apparcnce d'ilots d'arbres au milieu d'une mer de verdure. Les prairies, dans toute leur etendue , et presque jusqu'au boi'd de la mer, sont couvertes dun beau gazon , et 6maillees de fleurs qui se renouvellent toute I'annfic. Dans les parties les moins 6lev6es , qui sont celles du sud , la verdure est eternclle, et fournit en toute saison unc nouri'ilure abondante aux troupeaux domcstlques et sauvages qui paissent dans ces regions.
Le has pays est forme par unriche terrain d'alluvion, 6pals de plusieurs picds, reposant en divers endroits sur uii lit de marnc : on trouve peu de pierres a la sui*- face. Les petits cailloux, que Ton voit ordinairement sur le sol , ne se remarquent qu'au sortir du pays plat : ils augmentent en nombre et en grosseur , a mc- surc quel'on s'avance dans rinteriour, jusqu'a cc qii'on arrive anx masses qui lorment les monlagnes.
II IK I'aut appliqucr les obscr\ations que je \ais lairi- maintcnant qua la portion de pa\s de 200 a 300 milles
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de largeur , qui s'etend Ic long du golfe du Mexique , depuis la riviere Rouge et la Sabine au nordest jusque pres du Ilio-Grande au sud-ouest. II comprend le pays plat adjacent au golfe , le district du pays accidente , et le plateau qui commence aux chutes du Colorado et du Brazos. Les etablissements fond^s par les Texiens qui sont directement ou indii'ectement d'origine euro- peenne , sont situ(^s en g<^neral dans le pays plat d'al- luvion et dans le pays onduleux. Les cultivateurs blancs se sont cependant avanc^s jusque dans I'int^rieur des terres elcv^es, et aujourd'hui cette contr^e produit des c^i'eales et tout ce qui est necessaire aux besoins d'un peuple civilise.
Le pays que baigne la riviere Rouge ressemble , dans ses principaux caracteres et a quelques modifications pres , a la grande vallee du Mississipi. A I'exception de cette region , I'aspect du Texas oITre ce trait caracteris- tique, qu'on n'y voit pas de marais ni de lagunes ; et le voyageur qui marche vers I'ouest , en quittant la val- lee du Mississipi , n'est pas moins ^tonne du change- ment de paysage qui a lieu a son arriv^e au Texas, que du contraste entre I'atmosph^re humide d'ou il sort et le climat sec et doux de ce pays. On ne voit pas dans la contree quejed^cris , d'immenses marecages formes par des rivieres, comma ceux du Mississipi et de ses af- fluents, qui sont a certains endroits d'une largeur ex- cessive et qui , en se retirant , dans la saison chaude , laissent de grandes flaques d'eau stagnante,d'ou il s'e- leve des exhalaisons et des miasmes insalubres. Les rivieres de I'ouest coulent dans des lits profonds , res- serr^s entre des bords eleves. Get avantage , joint a la surface plane et unic de cette region qui ne presents pas d'obstacle aux brises de mer dont on jouit jusqu'a
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100 inilles cles cotes , a pour ellet <le inodifier le climat de la manlere la plus hcureuse et dc le rendre extre- nicmcnt sain. Je n'ai pas ici les documents niJicessaires pour estlnier la quantite dc pluie qui tombc au Texas dans le cours de i'anneo : je puis cependant etablir en giineral que le climat est sec , et que la douceur et la puret6 de ratniosphcre augmentcnt a mesure que Ton s'avance vers I'ouest. La pluie tombc en toutc saison : elle est toutcfois plus abondanle \ers la fin de I'hivev et aux approchcs de I'iquinoxe d'automne.
Le tliermometre s'eleve , durant la saison cliaude , jusqu'a plus de 33 degrees ccntigrades dans le milieu de la journee ; mais les brises du sud , qui regnent a cettc ^poque de Tannic et la plupart du temps pendant un mois entier sans la moindre interruption , rcndent la temperature plus douce et rempechent d'eti-e acca- blante. Ces brises commencent regulierement le matin avec le lever du soleil , croissent progressivement jus- qu'a deux ou trois heures , et tombenl avec le jour. L'agriculteur continue ses travaux, et le voyageur sa route a iravers les prairies, au milieu des plus grands jours du solstice d'6te ; et beaucoup d'habitants portent des vetements de draptoute I'anncie. Lesnuitssontasse/ fraiclies, et comme elles sont plus longnes en ett^ que dans des latitudes plus septentrionales , elles refroidis- sent plus complctementla lerre et I'air, de sorte qu'a\ec les brises du golfo elles contribuent beaucoup a dimi- nuer I'excessive chaleur. II est peu de climats dans les- quels on se ressente moins qu'au Texas des fatigues de la saison chaudc.
Les vents d'est et de nord-est sont plus apres : quand ils rognent, ils ont pour resultat de condenser I'atmo- spli^re et de disposer aux ficvres intermittenles. Du-
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rant les mois d'hiver, ils devlennenl plus Irequeiils , el pluslcurs fols pendant qiielqiies heures le tliennometre descend au degr6 de congelation. Dans I'hiver de 1837 a 1838, il tomlja au-dessous de zero, et les orangers de New- Washington dans la belle propriete du colonel Morgan , perirent commc ceux de la Floride et des Etats du sud de rUnion-Americaine ; neanmoins la racine dcs arbres etait conservee , et de vigoureux re- jetons pousserent a la naissance de la tige. On voit ra- renient de la neige dans cetle partie du Texas ; il en est de meme dans le pays plat et dans les districts du sud. La temperature moyenne des environs de Galves- ton est de '21° , et sur les bords de cette baie le rosier des quatre saisons produit , en pleine terre , de nou- velles fleurs tons les mois.
Pour une contr^e si meridionale, le Texas est tres sain; jamais pays, a son premier etablissement et au moment ou I'liomme le soumcttait a ses besolns , ne le prouva mieux que celui-ci. L'absence de marais et de lagunes , I'aspect uni et d^couvert du territoire , lais- sant constamment un libre cours aux brises du golle qui rarraicbissent I'atmosphere, sont les causes pre- mieres de cette salubrite. Je ne sacbe pas que la llevre typboide y ait jamais existe; on y voit peu de pleuresies, et les eci'ouelles sont rares. Ce climat est surtout favo- rable a la guerison des maladies de poilrine, et I'on a vu dcs malades , atteints de pbtbisie , renaltre sous le ciel du Texas. Dans le pays plat, on rencontre des in- dispositions bilieuses , accompagnees de fievx'es de di- verse nature ; et ces fievres s'aggravent quelquefois en automne, mais elles ne sont pas mortelles.
Les dyssenteries sont tr^s rares et les alTections clno- niques du foie sont encore luoiiis I'leqiii'iiti's ; i']\\\\i !vs
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maladies piopres au Texas sont gen^raleiuent simples et cMent sans difliculto a iiii hoii traitcment et a des soins convenablos. Los personnes qui s'abstiennenl d'exc6s et qui evitent de s'exposer sans precautions au soleil de midi dans la saison cliaude, jouissent d'une sante parfaite. Dans le pays ondule des prairies , les indispositions sont encore plus rares et plus i)6nigncs. L'ouest du Texas est un vrai jardin de santii. On peut citer egalement sur les cotes memes du golfe on des iles adjacentes, divers points comme Galveston, Saint- Louis, \elasco et beaucoup d'autres, qui peuvent ri- valiser de salubrity avec les parties les plus lavoris^es du globe.
On doit neamnoins s'attcndre, d'apres les ensci- gnements du pass6 , a cc que la fi6vre jaune vienne vi- siter le pays, dans les endroits oil une nombrcusc po- pulation et des causes locales sembleraient fournir les Elements necessaires ei son diveloppenient.
On a cherch6 a savoir si les Europecns ou les autrcs (Strangers, venus des latitudes septentrionales,pouvaient s'exposer sans danger au soleil du Texas. Les obser- vations faites pendant plusieurs annees prouvent qu'il n'y a aucune crainte a avoir dans le district du pays onduleux , mais les Strangers ne doivent pas s'etabhr dans les regions basses avant d'etre entiferement ac- climates.
Dans le pays onduleux et dans le Texas occidental , I'etranger ne se trouvera pas plus incommode par la chaleur, qu'il ne Test dans plusieurs parties de la France et des litats du nord de rUnion-Americaine , pendant
I'ete.
Les forSts du Texas fournissent des arbres propres a lous les usages : nous menlionnerons difTerentes es-
( ^^i )
peces de chenes , despins, des cedies, dos (irables , des peupliers blancs , des couibaris, des frenes, des oi'mes, des cornouillers, despacaniers, du bois d'Aro, des magnolias , des cotonniors, des gommiers, des noyers, des jii'uniers sauvages, des muriers, des p6- chers , des persimons.
II suffit de nomuier tons ces arbres pour se rendre compte de Icur cmploi. L'immense quantity de chenes verts , qui olTrent le nieilleur bois de construction pour la marine , est digne d'une attention speciale , et on la regarde commc une source importante de richesses pour le pays. Les autres especcs de cb6nes , le paca- nier etle noyer ajoutent encore aux moyens de subsis- tance que nous avons indiqud's , en servant a la nour- riture de troupeaux de pores. Plusieurs especes de bois sontpropres a I'ebiljnisterie. Le cedre est si abondant, qu'un vaisseau, le bi'ick Nord, fut entierement charge, il y a deux ou trois ans, d'une cargaison de ce bois pour un port de la Baltique : je ne sais d'ailleurs si les profits de ce commerce ont engag^ les armateurs a le continuer: quelques personncs ont craint qu'il ne s'en- suivlt plus tard une grande p(^nurie de bois dans le Texas; mais, ce qu'il y a de certain, c'est qu'il en existe d^ja une grande quantity , et si les bois sont peu nombreux dans la partie occidentale dont le climat est plus sec , ils abondent a mesure que Ton s'avance a lest du c6t6 de la riviere Rouge.
Depuis longtemps on a reconnu , dans les districts eleves du Texas , I'existence de mines d'or et d'argent. J'en ai vu moi-meme de riches echantillons , que Ton me donna commc provenant des montagnes dc Saint- Saba. Le minerai d'or est beau et semblablo a celui do quelques mines de la Caroline du nord et (hi Congo , au Bresil.
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Oil a clecuu\oil dans la riviire Saiut-Saba des mines abondantes de suUure de ploinb , alnsi (ju'unc uiiue considiirable de cuhn; prrs du Brazos sup^rieur; et pr6s du lac sale que traverse ce fleuve , on volt des lits de charbon. Le pays , accident^ et montagneux , con- tient aussi d'immenses lits de minerai do I'er et des carri^rcs do platre et de cbaux.
Pres du Colorado , on Irouvc a la surlace du sol dc grandes quantites dc silicates : cc sont surtout des cail- loux ronds de pierre a fusil, d'agale , de chalcedoine et de quartz.
On a d^couvert dans differentes parties du pays, des salines et des sources sulfureuses.
Dans I'ile Padre, a I'enibouchure du Nueces, il existe de vastes bassins, peu profonds, et assez semblables a des esp^ces de plats naturels que vient couvrir I'eaii du golfe , a I'dpoque des liaute^ marges. La cbaleur du soleil vaporise cette eau , et la terre reste alors cou- verle d'unecouclic de sel, epaisse dc plusieurs pouces. On tire de la , ainsi que des lacs sal^s de I'ouest du Nueces, une grande quantity de cot ingredient indis- pensable. II suffil presqu'exclusiveraent aux besoins du Texas : j'en ai fait personnellenient usage, et il est par- faitement salubre , mais je ne saurais dire s'il est aussi bon pour la conservation des aliments que les mt^il- leurs sels d'importation.
Le pays plat contienl trfes peu de mineraux ; et les autres parties de la contree , don I le sol offre au g6o- logue lescaract^resquirevelent Texistenee de quclques mines de diverse nature, n'ont encore 6t6 qu'im- parfaitement explor6es. La fertilite du sol presente une autre source de ricbessc, plus certaino encore que celle des metaux ; e'est cello de ragri('ultiir<\ I'ji cnf<M , olle
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est tellcment dans les gouts dcs lialjitants du pays , qu'oii ne dolt point s'atteiidre a I'cxploitation des mines ; a moins que des capitalistcs etrangers ne vien- nent eux-niemes s'occuper a les mcttre en valeur.
Comnie pays dc cultui'e , le Texas n'a point de rival. La longue duree de la belle saison et la surprenante fertilite du sol lui assurent le premier rang. Toutes les productions commercialesdu sud des Etats-Lnis, telles que le coton, le sucre, le mais et le tabac, y viennent dans la plus grande abondance et de la meilleure qua- lite. On y cultive egalement le riz , 1 'indigo et les pro- duits des climats cliauds. Jusqu'ici on ne s'est guere occupe que de la culture du coton et du mais; et Ton a fail peu de plantations dc Cannes a sucre : ccla tient aux d^penses premieres qu'il faudrait faire, pour etablir les macliincs d'extraction et de preparation. Celles qui existent sont situees sur la riviere Caney , oil la canne a Sucre croitplus facilement, miiritplus vite, et s'^lfeve plus haut que dans laLouisiane.
Les agriculteurs commencent leurs semailles dans les premiers jours de fevrier, et ils sement d'abord le mais; ils n'ont jaas a craindre la perte de leur recolte par suite des gel6es blanches d'aulomnc qui ne commen- cent pas avantla fin d'octobre ou le milieu de novembre, Le mais produit de trentc a plus de cent boisseaux par acre.L'exploitation du coton s'ouvre enjuillet;depuislors jusqu'au prinlemps suivant , on en recolte sans inter- ruption. Les automnes longs et sees , les hivers doux et sansneige sont specialement favorables a ce travail. La nourriture abondante que fournissent aux bestiaux les prairies , vertes dans toutes les saisons , permet aux planteurs de consacrer tous leurs soins a la culture du coton et des autres objets d'exportation poiu' les mar-
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c})6s Strangers. Le colon peul 6tre produit au Texas a moitit^ prix de colui dc la zone septenlrlonalc de la region a colon des Llats-Lnis. Dans le pa\s du Brazos , chaquchomnior(''colloplusde cinqccntslivrcs dc colon, pendanl une salson, el plus de mais cl d'autros ali menls qu'il n'en faul pour les besoins de laplanlatlon.
Lc Texas esl destine a j^roduire avant peu d'ann^es une grande parlie du colon , consomme dans d'autres pays. Sa qualllc sup(^rieure , sa longueur el la finesse de sesbrins lul donnentla preference ,dans les marches anglais , sur tous les colons des regions 6levees. II esl impossible de donner une notion exacle de la quantile de eel article , produit au Texas; allendu qu'unc parlie est embarquee sur la Riviere-Rouge , pour etre portee a la Nouvelle-Orlcans, ou elle est une seconde fois chargee sur des navires. En 1837 , ce produit fut nul ou presque nul. La production de I'annee derniere est eslim^e au raoins a 100,000 balles.
Le tabac , d'un parfum d(ilicieux, croll parfaitemenl dansle pays, et il formera bientot un objet imporlanl de commerce, a cause de la vogue qu'obtient I'usage de cette planle chez toutes les nations.
Le ble , le riz , I'avoine , Forge , le sarrazin , le lin , le clianvre , I'eussissenl parfaitemenl dans les lerres onduleuses el tilevees. Lepays plat ne paraitpas propice a certaines csp^ces de cereales qui croissent aux Elats- Lnis , et cependant quelques semences des bords de la Mi^dilerranee peuvent trouver au Texas le sol qui leur convient.
Toutes les cspeces de pois et de haricots, les melons deau cl les canlalous de la plus d<^licieuse saveur, les betteraves , caroltes, panals, navels, oignons , choux et autres planles polageres, commc les aspergos, les
( 335 ) salsills, etc., eroissent en abondance au Texas, et y sont de la meilleure qualite.
La tomate pousse naturellement dans les prairies, Le fralsier seuible trouver au Texas le sol le plus favo- rable a sa culture. Les fruits ne sont pas aussi gros que ceuxd'Europe , mais ils surpassent ces derniers par la d^licatesse du gout et par le parfum.
La poninie de terre se cultive avec succes dans les districts elev6s; pour en avoir une bonne quality dans le bas pays, il faut renouveler souvent les semences, avec celles que Ton tire des contrdes plus propres a sa cul- ture. Cependant cette plante est indigene au Texas ; mais la pomme de terre sauvage est d'une quality tr^s inferieure. Dans les bonnes teri'es , la patate et la pomme de terre donnent des r^coltcs de quelques centaines de boisseauxpar acre.
Despeclies excellentes, des figues, des oi^anges , des grenades, des coings et du raisin, et dans lesforets, des pacanes , des noix de persimon , du raisin indi- gene , differentes especes de prunes sauvagcs, des miires , plusieurs sortes de groseilles noires et d'autres petits fruits eroissent et miirissent fort bien. Dans les sites les plus expos(^s au froid , les orangers ont besoin d'une certaine protection centre les geleesblanclies.
De toutes les varietc^s de noix , la pacane qui vient des bords du Colorado est la plus estim^e. Lne espc^ce de raisin sauvage appele post onk grape fournit un fruit d^licieux que la culture ne pent manquer d'am^liorer encore ; deja quelques planteurs le cul- livent pour leurs tables.
L'experience tentee pour introduire des htats-Unis plusieurs especes de vignes , a fait penser que le sol du Texas serait propre a la transplantation dqs vignes
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Ltrang^res, et Ion faitaiijourd'luii des essais de culture, avcc des vignos et des olives importees du sud de la France. Copendant le Texas continuera sans doute a recevoir de rrancc les vins qii'il ocliangera centre les produits de son territoire.
L'education des vers a sole deviendra plus tard d'une ,!^randc importance. Le niurier nuilticaule , qui a cHe introduit au Texas, y croit a meneille, et le milrier ordinaire pousse sans plus de soins que les autres arbres indigenes des I'orets. Le ver a soic pent y subir ses diverses transformations , durant une grande partie de I'annee. 11 y a une esp6ce de ver a soio, naturclle au Texas , et Ton trouve ses cocons dans les forets oi'i abonde le murier sauvage.
11 existe aussi au Texas une sorte d'indigolier, donl on a cxtrait une bonne substance colorante ; maisje ne puis decider si cette plante pcut recevoir un degre de culture qui lui permotte de hitter avec cellc des Tndes-Orientales.
Ln volume ne suffirait point si je voulais mentionner avec un certain detail les nonibreu^cs productions el plantes de ce pays. Le cactus opuntia, surlequel on trouve I'insecte de la Cocbenille , pousse a I'etat sau- vage ; la vanille , I'arbrc a caoutchouc , des arbres et des plantes medicinales, et enlin des productions d'autrcs parties du globe y croisscnt aisemcnt, et le climat ainsi que le sol semblent leur etre aussi pro- pices que les regions ou ils sont nc^s.
Le coton , le sucre et le tabac , maissurtout lecoton, seront pendant longtemps les produits que le Texas tirera le plus abondamment de son sol pour Texpor- (atiou. Son rlimatnest pas assez chaud pour la rnlture
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du cafe, pour celle du bananier et d'autres plantes tropicales.
Le voyageur qui a visits d'autres pays est surpris , a son arrivee au Texas , de la grosseur des bcstlaux qui paissent en grand nombre dans les prairies. Cette su- p»!!riorito est probablenient due a la douceur du climat et a la verdure eternelle , qui fournit une nourriture abondante pendant toute I'annee.
Les besliaux n'ont besoin d'aucun soin , si ce n'est d'etre maintenus en troupes pour les empeclier do devenir sauvages et de s'egarer.
L'^ducation des bestiaux est unc opt^ration lucrative, et Ton peut , d'aprds des calculs moderes, en evaluer le rapport a 30 0/0 par an. On pourrait sans doute obtenir une excellente race en croisanllcs bestiaux du Texas avec ceux du canton de Durliam, Les individus produitspar ce croisenient auraicnt les dimensions des bestiaux du Texas et la perfection de formes du betail anglais.
Les pores se nourrissentparfaitement, dans les patu- rages du Texas , de glands , de noix , de racines et de fruits qu'ils trouventdans les prairies et dans les forets. Ces animaux ont ici une forme aussi belle que les races du Berkshire, celles d'Irlande, et de quelque autre pays que ce soit. lis sont abandonnes a eux- memes pour chercher leur nourriture ; mais peu de temps avant de les abattre on lesnouri'it avec du mais, afm de rendre leur chair blanche et ferme. On en lait ensuite des salaisons , et la sechcresse du climat du Texas rend faciles la preparation et la conservation de ces viandes dans presque loutes les saisons de I'annee. Des troupeaux de chevaux sauvages paissent dans les prairies; leurs petltos oreillos pointues, la beauts et I. MAI. 2. 23
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la finesse de \our robe indiqiienl suriisammont quils provlennent des chevaux introduils ;iii Moxiqiie par les Espognols a I'^poquc de la conqueto. lis sont bien conslitues, out une libre et longue respiration, les jambes fines ct les sabots tres durs. On les di-osse faci- lement a la solle; niais ils conservenl en general quel- ques vices qu'ils tiennent de leur vie crrante. Un me- lange de race amcricaine etde race mcxicainc produit une esp^ce de chevaux tr^s forts et du meilleur usage.
La capture d'un cheval sauvage par un ranchero mexicain est un exploit qu'un habile ^cuyer d'Astley ou de Franconi ne d^>savouerait pas.
Le ranclici'o , a cheval , s'elancc au mlieu du trou- peau , qui se disperse en galopant dans la prairie ; puis, balanrant au-dcssus de satete une longue cour- roic de cuir tann6 , terminee par un lacs ouvert ct un ncEud coulant , il la jette avec precision autourdu cou du cheval dont il a fait choix. II faut beaucoup de sang- froid et d'adresse de la part du chasseur pour rctcnir I'aninial qu'il a saisi.
On eleve des mules en grand nombrc : ces animaux sont propres a tous les usages des plantations , mais ils sont d'une taille inf^rieure a ceux du Kentucky.
Les inoutons trouvent une excellente nourriturc sur les plateaux des prairies elev^es. La chevre a 6td introduito dans le pays; ellc s'y midtiplie rapide- ment.
Le terriloiro du Texas , plus titcndu que ceJui do la France, couvert des plus abondanls et des nieilleurs her- bages, fournira des ptiturages naturels pendant de longues ann^es , jusqu'a ce que la population , deve- nup nombrouse , approprie le sol aux usages de I'a- griculture.
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L'lierbe muskut, qui couvre les immenses prai- ries del'ouest, vaut pour le gout et les qualites nutri- tives les meilleurs herbages clesanciens pays. Le scigle sauvage des forets qui bordent le Colorado et les autrcs cours d'eau de I'ouest , fournit aux bestiaux une nour- riture qui n'est pas inferieure a I'avoinc.
Dans le bas pays , quelques roseaux , et surtout le gama grafs , rcmplacent le foin et le seigle sauvage des contrdes de I'ouest. Le gama grafs est une plante succulente, et surtout nutritive; elle croit avec une telle rapidite qu'on peut la couper toutes les se- maines pendant I'el^. En 1830, je voyageai a cheval pendant plusieurs rallies dans un champ qui en 6tait convert, prd'S de la riviere de la Trinitc!;. La tige de cette plante s'elevait jusqu'a la hauteur de mes 6paules.
Le Texas, dans quelques ann^es, sera en 6tat de rivaliser avec I'Amerique du Sud pour le commerce du boeuf sale , des cornes, des cuirs et du suil", et il aura sur elle le grand avantage de la proximite des marches. D'aprcs le dernier rapport quej'ai vu, I'ile de Cuba a recu do la Plata 500,000 an-obes de bojuf sale, de 25 livres chaque. La navigation entre Galveston et Cuba n'est que de quatre a six jours, tandis qu'elle est de plusieurs semaines entre cette ile et la Plata.
Aucun pays ne surjiasse le Texas pour I'abondance du glbier. Des troupeaux immenses de buffalos cou- vrent les prairies au - dela des habitations. On en trouve encore quelques uns du cote de la bale de Galveston. Ces animaus servent a la nourriture des Indiens sauvagcs , dont les habitudes nomadcs et les migrations suivenl celles du buffalo , qui descend en hivor dans le bas pays pour y chercher des paturages, et qui sc retire dans linterieur et dans les districts
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elev^s, lorsqu'on voit venir I'^t^. Apr^s unc campagiie centre les Indiens en 1839, les troupes texiennes chassercntdevant elles cestroupeaux de bceiifs, (lvalues a pr(^s de 20,000, jusqu'a dix lieues de la ville d'Aus- tin. La chair des buffalos est excellente, et la valeur de leur peau est bien connue. lis fournissent aux Indiens, qui les tuent a I'aide de leurs arcs et de leurs fleches, une nourriluro et des vetements.
On voit des cerfs sauvages sur toules les prairies, Des coqs d'Indc , des poules de prairies , une grosse espece de becasses , des perdrix , des cailles , des rice- bird (esp6ce d'ortolan) , et d'autrcs encore s'y ti'ouvent en grand nonibrc. Pendant I'hiver, les baies du I'ivagc sent peuploes d'oies sauvages , de sarcelles et de ca- nards; durant le jour, I'oie vient se nourrir de I'herbe succulente des prairies , et retourno le soir a la mer. On voit de temps en temps le flamant d^ployer son riche plumage. Les cygncs frequontent les eaux des baies, et I'oiseau moqucur batit son nid pr6s des mai- sons et des plantations.
Parmi les gros oiseaux dont nous n'avons pas encore parle sont : le pelican, I'aigle, les grues blanches et grises, la fregate bec-de-cuillcr , le faucon , la cor- neille , etc. Des nuees de pigeons sauvages se rasseni- blent pendant I'hiver dans lesforets qui avoisinent les sources de la Trinitc ct d'autres cours d'eau du Texas.
Les abeilles sont nombreuses en beaucoup de re- gions, et produisent du miel et de la circ en grande abondance. Elles sont regardees par les indigenes romme les avant-courcurs de rilommc-blanc. Tousles cours d'eau renferment du poisson fort recherche, et Ton pent citer le brochet , le poisson rouge , la perche, la truito , le mulet , etc.
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Les eaux de la cote soiit riches en tortues et en huitres lie la plus grancle dimension et du raeilleur gout , en crabes et en chevrettes, qui sont exquises et en quantity in^puisable.
Le plus feroce des aniuiaux sauvages du Texas est le cougouai- ; mals on en voit peu , et il n'attaque I'homme que rarement; il s'y trouve aussi des ours, des loops, des chiens de prairie et des chats sauvages. Mais ce pays est moins infeste de betes feroces que ne le sont en general les pays neufs , dent les vastes forets leur offrent vm abri plus sur.
Ajoutons que les animaux dont il vient d'etre fait mention n'y sont jamais pousses par lafaim jusqu'a cette ferocite qu'on remarque en eux dans les rdjgions plus septentrionales , oii la terre se couvre de neige pendant I'hiver.
Parmi les animaux de plus petite taille se trouvent I'opossum, leputois, le lapin , I'ecureuil, etc.
En m'^tendant ainsi sur les opulents paturages dont la nature a dotele Texas, surles produits de ses forets, la fertilite de son sol, enfm sur les animaux sauvages qui s'y trouvent appropries aux divers usages de i'homme , je dois reconnaitre que plus tard , quand le pays sera completement liabite, beaucoup de ces objets n'auront plus qu'une valeur secondaire , que d'autres disparaitront entierement , et seront remplac^s par des productions importdes d'autres pays, et par des ani- maux deja reduits a i'etat domestique. Les volailles de basse-cour ont plus de valeur que tous les oiseaux des forets, et la vaclie et le cochon en ont plus que tous les animaux sauvages.
Quoi qu'il en soit , les productions indigenes du Texas sont dune importance incalculable pour faci-
( 342 ) iitcr la colonisatiou vt la pi'osporile uaissanle tlu pajs.
Le Texas possedo plusieurs ports dans Icsquols Teau est assez prolonde a la barre pour rccevoir dcs navlres de commerce d'uii tonnage considerable; mais dans aucun on nc saurait faire entrer un navire de guerre de moyenne classe.
Les meilleurs ports sont ceux de Galveston et de Saint-Louis, qui ont de treize a quinze pieds d'eau a I'entrec sur uno barre de sal^le.
La baie Sabine presente unc profondeur moins con- siderable a sa barre, qui est de vase moUo.
L'emboucbure du Brazos est obstruee par un banc de sable mouvant. Elle n'a pas plus de 5 a 8 pieds , ct sa surface est constamment agitee.
Plus loin dans I'ouest on \oit les entries des baies de Matagorda , Aramas et Corpus-Cbristi ; enfin, pr6s du Rio-Grande se trouve le Brazos de Santiago. Ces ports sont importants pour le commerce du Texas , mais aucun d'eux ne fournit plus d'eau et n'offre plus de facililc pour I'approche dcs batimcnts de guerre que celui de Galveston.
Les rivi6res du Texas, quoique d'une grandc lon- gueur, et roulant dans leur cours un volume d'eau consi- derable,ne pr^sententpas de grandcs commodites pour le commerce interieur. La Trinite a ete remontee pen- dant lesbautes eauxjusqu'aune distance de 400 milles, en comprenant dans ce cbiffre les detours du fleuve, par des bateaux a vapeur lirant quatre pieds d'eau. Elle conserve son elevation pendant I'biver ct le prin- temps ; en ete . les eaux sont basses commc celles des aiilres rivitres mcridionalcs.
Quandon considere I'etenduc et la bonte du sol dos lorels qui bordent la Trinite , on est convaincu des
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avantages quo 1 on pourralt tirer dc la navigation de CO fleuve. Le Brazos a ete rc'mont(^ par des bateaux a vapeur jusqu'au-dela de Washington, Mais ses eaux s'elevent promptement, elles s'abaissent de meme, et sa navigation est difficile.
Le Colorado est obstrue par un einbarras de bois de derive pr6s de son enabouchure, et sous les autrcs rap- ports il estcomme le Brazos. Mais la surprenante fertility du sol des rives de ce fleuve et des cours d'eau tribu- taires , fournira les moyens d'an^antir les obstacles qui s'opposent au commerce intdrieur.
Eu egard a la navigation seulement, le Bayou de Buffalo , en communication avec Galveston , est un des cours d'eau les plus importants du Texas.
II y a chaquejour de I'annee navigation sure et com- mode par les bateaux a vapeur avec Houston ; mais dans I'etat actuel des choses , cette ville doit etre con- sid^ree comme le point le plus int(!!rieur de navigation au Texas. On appreciera aisement la facilitt^ d'etablis- sement des chemins de lor , en songeant combien la surface dc cette conti^ec est unie. Les depenses seront peu considerables pour le nivcllement de la voie , et I'immense quantite de clienes verts que cc jiays pos- sede foui'nira d'excellents mat^riaux pour les assises des rails.
II n'entre pas dans mon plan de donner des details concernantles differences du sol et les diverses essences de bois qui offrent des ressources a I'agriculture , et caracterisent les districts varies du pays quejeviensde decrirc ; cllcs frappent les yeux et etonnent , car elles sont souvent pres les unes des autres. Et c'est pour Ic voyageur un interessant sujet dVtudes que de remar- querles varietes du sol, celles de la vegetation et I'as-
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j)C'Ct cles cours d'eau , dans les pays que traversent la Triiiite , San laclntlio, BufTalo , Bajou, les Brazos, ct dans beaucoup d'autrcs endroits dc la Repulilique. Je ne puis coinprendre dans ce travail aucune description dcs paysagcs du Texas , dont la beauts forme un des traits les plus romarquables du pays. Ce serait , en elTet, vouloir entrer dans Ic domaine de la po6sie que d'essaver de dd'crire la baie dc Salnte-Hyacinthe et celle d'Evergreen, residence de mon ami le gent^ral Baker. Cette vue est admirable ; des sentiers de velours vert bordent les eaux ; le rivage se ddcoupe ca et la , et Ton voit s'avancer des promontoires converts d'un gazon toujoui's frais; on suit des yeux le large chemin de coquillages blancs que les eaux deposent sur les bords de la baic ; File d'Evergreen est en face avec plusieurs autres iles ct peninsules. La rive opposee divcrsifie le paysage ; et plus loin, vers la gauclie, s'etcnd la vaste surface de la baie de Galveston , dont les eauxvont dans la direction de la ville , et se perdent dans un horizon loin tain.
Le pays, onduleux, avec ses longs sentiers en pentect ses collines varices, que couronnent d'elt^gants bouquets de bois , ravit les yeux du voyageur'; des quantitds de chevaux, de bceufs etd'oiseaux donnent a la contree une physionomie des plus anlm^es , et vivifient jus- qu'aux prairies les plus sauvages des regions ^loignees.
Je reserve pour une autre occasion quelques obser- vations sur I'etat des moiurs, les forces militaires des aborigenes , et aussi sur I'accroisscment de la popu- lation blanche, le commerce, la societe, ses jjrogres dans les arts , les innovations de la vie civilisde, enlin sur l(^s institutions et les lois du Texas.
AsiujKi. Smi rn.
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Analyse d'un oiwroge de M. Prescott, de Boston, sur In conquete du Mexiqne , et sur Vancienne civilisation de cet empire.
( Lue a la Societe de geogiaphie dans sa seance du i 7 inai 1 834- )
M. William Pi'escott, de Boston, s'etait deja plac6 dans les premiers rangs des litterateurs de son pays par son Histoire de Ferdinand et d'Isabelle, lorsqu'il a public en 18Zi3 I'histoire de la conquete du Mcxique , le plus memorable evenement de tous ceux qui sui- virent la decouverte du Nouveau-Monde.
L'auteur a commence son ouvrage par de nom- breuses et savantes observations sur I'ancienne civilisa- tion mexicaine ; il a voulu I'aire bien connaitre les con- tr6es ou Cortes allait porter ses ai^mes , les mceurs , les opinions de leurs habitants , leur culte , leurs lois , leurs progres dans Fordre social , et tous les faits i^e- mai^quables qui avaient precede la conquete. L'histoire de cette grande expedition vient ensuite ; et M. Prescott ne se borne pas a I'accomplir : il suit le concjuerant jusqu'a la fin de sa carriere, et nous montre quelle fut I'influence de cet bomme illusti-e sur les destinees de I'Amerique.
Sans suivre l'auteur dans tous ses developpements , nous enti'ons dans I'examen de son ouvrage , afin d'en faire appr^cier toute I'importance , et d'inspirer aux amateurs de la litterature appliqu^e aux sujets les plus eleves et les plus vastes , le desir de lire et de mediter une histoire , si grande par les objets qu'elle embrasse , ct si remarquable par le talent et le genie de I'ecrivaiu.
Les Astequesn'occupaionid'ahord (niimc potite partie
..lu Icniluirc ilu Mexique : k'ur (lomaine s ugraiidil dans les derniers temps de lempirc , et il s'eloii- dit d'une mor a I'autre , entre le golfe du Mexique ct Ic grand Ocean. La vallee ou est situi^e la capi- tale s'eleve d'environ 7,500 pieds anglais au-dessus du niveau de la mer; mais sa latitude entre le 19" et le 21° degi'6 maintient la douceur de sa temperature et contribue a son extreme fertility. Plusieurs lacs couvraient la dixi^me partie de cette grandc vallee. Mexico (^tait batie dans une ile du plus grand lac; Tezcucos'elcvait sur sa rive orientale, ot cette derniere ville etait la capitale des Tolti^ques , nation qui avait occupe le premier rang en puissance et en civilisation avant d'etre vaincueparles Asteques, qui s'emparerent de son pays et I'incorporerent a leur empire.
Les Tolteques avaient liabite ties regions plus sep- tentrionales avant dc venir s'etablir, vers la fm du vii" siecle, dans le territoire d'Analiuac. Cette na- tion, longtemps florissante , 6prouva ensuite tous les fldaux de la famine, de la peste ct dela guerre. Elle s'affaiblit et disparut insensiblement.il parait qu'ilen emigra une grande partie vers les regions de rAm6- rique centrale , qu'un petit nombre rest6rent dans leurs foyers , et qu'ils y 6taient encore lorsque , dans le xiii" siecle , la tribu barbare des Cbicliimeques vlnt des regions du nord-ouest occuper les territoires qui 6taient restes sans liabitants. Les Cliicliimeques furent bientot suivis par les nations plus policecs des Asteques etdesAcolhuans; ceux-cis'6tablirentaTezcuco, ou ils adoptcrent une partie de la civilisation des Tol- teques; les autres se fixerent a Mexico, et ils contri- bucrent a adoucir les mu?urs sauvages des Chlclii- ni6ques, qui sc melerent avec oux pour ne former qu'une sculc nation.
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Nous xi'avons pas a rappeler toutes les vicissitudes qu'eprouv6rent les AcoUiuans et les Astt;ques, jus- que vers le milieu du xv'' siecle, epoque ou Monte- zuma I" etendit scs conquetes sur le plateau eleve du Mexique , et prepara la grandeur des souverains qui luisucc^d^i'ent, et qui ne purent neanmoins preserver I'Etat de sa ruine et le d^fendre contre les armes des Europeens.
La couronne, cliez les Asteques et les Acolhuans , 6tait elective ; mais le roi etait clioisl dans la famille du monarque defunt: il jouissait du pouvoir legislatif , et I'exercice de ce droit etait tempere par I'etablisse- ment de tribunaux qui protegeaient les personnes et les proprietes , et auxquels on pouvait recourirdans tous les denis de justice. Les lois dtaient enregistrees et consignees dans des tableaux, converts des signes et des emblemes qui formaxent leur systeme d'ecriture.
Le meurtre et les grands crimes contre la societe entrainaient la peine capitale ; le vol etait puni , selon sa gravite, par la mort ou I'esclavage ; I'institution du mariagc etait protegee par des lois, des solennites et des tribunaux particuliers. Les Asteques avaient un code sur les esclaves , et ceux-ci se partageaient en difTerentes classes : celle des prisonniers faits a la guerre, et reserves oi'dinairement pour les sacrifices; celles des crimincls, des debiteurs publics, des per- sonnes que la pauvrete avait I'eduites a renoncer a la liberte, et des enfants qui etaient vendus par leurs parents eux-memes: le contrat de vente se passait en presence de quatre temoins. Un esclave pouvait avoir sa propre famille, ses proprietes, et meme d'autres esclaves; ses enfants etaient libres , et pcrsonue ne pou- vait naitrc esclave au Mexique.
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Les revenus publics (.Halent dc diverses natures. La couionne avail ses doinainos particuliers ; on porccvait dcs inipots sur les propriet^s , sur les produits dc la culture, sur ceux de I'industrie; ct ces tributs dtaient souvent pay^s en nature : c'etaient des armes, des vases d'or, des bracelets et d'autres ornements, des grains, des fruits, de la cocbcnille , des animaux, des four- rures , differents tissus, d'autres objcts de luxe ou d'utilit6 , et des prestations de services ou dc corv(ies pour les travaux publics.
On 6tablissait des garnisons dans les plus grandes villes ; les communications entrelcs lieux les plus eloi- gnes itaient maintenues par des courriers , qui se re- layaient les uns les autrcs a qiielques milles d'inter- valle , et qui parcouraient cet espace avec une extreme rapidity.
La profession des armes etait aussi Ixonoree que cellc des pontifes : on promettait un bonbcur 6lernel au guerrier qui tombait sur le champ de bataille. Les hos- tilit^s 6taient toujours prec6d(!!cs d'une ambassade qui exposait les griefs du souverain , et Ton proclamail ensuite une declaration de guerre. On avait ctabli dif- ferents ordrcs militaires pour animor 1 'emulation et recompenser les services. Lc monarque marcbait or- dinairement a la tete de son arm6c. Les guerriers avaient pour armes defensives un casque surmont6 d'un panache , un pourpoinl en colon oual6 et pique , assc/. epais pour etre impenetrable auxflecbes ct auxjavelots des Indiens. Leurs troupes se partageaicnt en plusieurs corps, dc hull mille hommes chacun , qui se divi- saient eux-memes en compagnies de trois a quatre cents hommos. L'armee avail son drapeau , et chaque division avail aussi une banniere. Les iiommes mar-
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chaient a I'ennemi en chantant et en poussant leur cri de guerre ; ils attaquaient brusquement , se rcti- ralent avec rapidity , avaient recours aux embuscades , aux surprises, aux escai-mouches, et chercbaientxiioins a tuer leurs enneniis qu'a faire des prisonniers. Des hopitaux avaient ete etablis dans les principales villes pour soigner les nialades et recevoir les soldats liors d'etat de servir.
Le systeme religieux des Ast6ques paraissait d6riv6 de deux sources differentes ; on y voit un melange de principes liumains et d'usages barbares qui semblent appartenir a deux nations incorporees I'une ul'autre et mettant en commun leurs destinees.
Les Ast^ques I'cconnaissaient I'existence d'un crea- teur et d'un maitre de Funivers , ayant sous ses ordres treize principales divinites , et plus de deux cents autres d'une classe inferieure. Le diou de la guerre 6tait le plus redoutable de tous , et scs autels etaient souvent arros^s de sang liumain, Lc dieu de I'air avait d'abord residt!; sur la terre : c'etait un etre bienfaisant qui avait enseigne aux homines I'usage des m^taux, les travaux de I'agriculture , Fart de gouvei'ner : son rfegne avait ^t6 Fage d'or dujiays d'Anahuac. 11 quitta ensuite cette contrt^e ; mais en s'cmbarquant dans le golfc du Mexique , il proinit qu'il reviendrait avec ses descen- dants , et cette tradition , devenue populaire , fut une des causes qui facilitei^ent Finvasion etles succes des Espagnols.
On partageait la duree du temps en quatre cycles ou periodes de plusieurs mille ans; et a cbacun de ccs termesla terre devait changer de face , la race humaine perir , le soleil s'eteindre pour se rallumer encore. Les Ast^ques iinaginaient trois etats difTeronts dans la vie
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I'uture : les mediants cxpiaient leurs fautes clans un lieu envelopp^ de t^nebres 6ternelles ; les hommcsqui avaient succombe a quclques maladies conservaient une existence indolente , sans plaisir ni peine ; les plus hautes places ctaient reservees aux b(^ros tu^s dans un combat ou immole^s en sacrifice : ils s'(^levaient vers le soleil , I'accompagnaicnt de leurs chants et de leurs danses; et apresquelquesannees leurs espritsanimaient les nuages et le chant des oiseaux; ils allaient jouir de I'eclat des fleurs et en respirer les parfuras.
A la mort d'un homme, s'il etait riche, plusieurs esclaves etaient sacrifies , son corps etait brul^ , et ses cendres, d^posees dans un vase, se conservaient dans sa maison. Quelques C(^i'emonies observ6es quand on donnait un nom aux enfants, se rapprochaient de celles du bapteme. Les pretres astequcs (!!taient initios a I'aslrologie , a la divination , et ils persuadaient au peuple qu'ils avaient dans leurs mains les clefs de I'avenir. L'ordre sacerdotal ^tait tr6s nombreux, etles rangs, les fonctions de sesmerabres Ctaient determint^s avec soin. Deux grands -pretres ctaient a la tete de toute I'institution ; leur dignity 6tait egale , et ils n'6- laient inferieursqu'ausouverain, qui agissait rarement sans leur avis dans toutes les affaii'cs importantes.
Nousne pouvonspas comprendre dans cotte analyse les details que I'auteur a rccueillis sur les dllferents rites religicux , sur les soins donn6s par les pretres a I'education , sur leur influence politique et morale. Les teocallis , ou temples des dieux , se partageaient en plusieurs (Stages , dont chacun c^tait plus t^troit que les etages inferieurs ; on montait par des escaliers jusqu'a la plate-forme qui couronnait I'edifice, et sur laquelle sV'levaiont encore une ou rieux tours: les images des
( 351 ) dieux y 6taient p]ac6es, et Ton vo\ait clevant ces tours la fatale pierre du sacrifice. On avail adoptt^ , deux cents ans avant la conquete espagnole , I'usage d'im- moler des victimes humaines. D'abord elles etaient peu nombreuses , mais ensuite on les niultiplia , et ces actes de cruaut^ et de fanatisme se repetaient dans la plupart des grandes solennites religieuses.
Les Mexicains avaient unc ecriture figurative, plus imparfaite et moins avancec que celle des anciens hie- roglyplics. Leurs signes abregeaient les images qu'ils voulaient rappeler : c'etait une espece de stenograpbie, qui pouvait s'aider du secours des explications orales et de la tradition. On ^crivait sur des etoffcs de coton ou de soie, sur des peaux preparees, et le plus souvent sur des feuilles d'agave. Les Espagnolstrouverent aleur arrivee un grand nonibre de ces nianuscrits ; mais on en considerait les caracteres comme des symboles ma- giques , on les condamnait aux flammes , et il n'en ecbappa qu'un petit norobre. L'art de decbiffrer ces signes se perdil insensiblement : on ne le connaissait plus guere un si^cle apres la conquete.
Cependant, les traditions du pays se conservaient en- core dans des hymnes et des cbants que Ton apprenait dans les ecoles. L'aritbmetique avait ses regies , eni- pruntees du nombre des doigts ; la mesure du temps se calculait sur celle de I'annee , que Ton partageait en dix-huit mois de vingt jours cbacun , et Ton ajou- tait a cc nombre total cinq jours de plus, afin de mieux faire correspondre I'annee solaire et I'ann^e civile. D'autres notions astronomiques sont comprises dans cet ouvrage ; mais nous avons du nous borner a faire un clioix.
L'agriculturo etait specialcment ])rotegee : le mais.
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la baiiane , le cacao , se recoltaient abondamment ; le maguey ou agave americaine donnait un breuvage ferment^ , et sa racine un aliment savoureux. Ce pays jouissait d'une grande quantilc dc fruits , ot sa flore ^tait une des plus riches et dcs plus varices. Les mines d'or, d'argent, d'etain , de cuivre, etaient explnit(^cs ; mais les Mexicains ignoraient I'usage du fer , dont la fonte et la mise en ceuvre exigent dcs proc(id6s plus difflcilcs. Leurs ai'ts mc^scatiiques avaient une grande puissance , et Ton s'^tonne du transport des masses cnormes qui servii-ent do materiaux pour leurs monu- ments.
Qut'lques remarques sur I'etat des arts, sur le com- merce , sur les usages domestiques, servent a comple- ter le tableau que I'auteur a fait de la situation ou se trouvaient les Mexicains avant I'epoque de la conquete ; il tcrminc cette partie dc sou ouvrage par d'autres con- siderations sur les Acolhuans, qui avaient regn6 a Tezcuco , et qui avaient joui d'une civilisation plus avanc^e que celle des Asteques avant de tomber sous leur domination
Aprfesavoir developpe,dans unesavante introduction, tous les faits, toutes les observations propres a faire mieux connaitre I'ancien empire du Mexique , M. Pres- cott parcourt toute la s^rie des dvdnements qui en si- gna\erent la conquete : ces exploits comprcnnent la principale ])artie de la vie de Fornand Cortes. L'auteur continue Ibistoire de ce hcros jusqu'a la fin de sa car- ri^re ; et revenant ensuite aux autres sujets dont il s'6- tait occup6 dans son introduction , il lait dc nouvelles recherches sur I'origine dc la civilisation mcxlcaine , ot sur ses analogies avec cello do plusicurs nations de lancion monde. Comnie cesdernioros remarques sont
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(^troitement liees aux premieres observations que I'au- teur avail faitos , nous croyons devoir les rapprocher egalement , et encliaincr I'une a I'autre ces deux par- ties de notre analyse.
On a souvent cherclie a se rendre compte de la ma- niere dont le Nouveau-Monde avail ele peuplc , el I'ou a eu recours a dilTerenls sysliimes pour donner cette explication. Les uns ont imagine que lot, deux hemi- spheres avaient ele autrefois contigus vers les extrc- miles du nord; d'autres ont repele I'histoirc de I'At- lanlide , situee dans la mer qui rappelle son nom. Us supposent aussi que les iles du Grand-Od^an nc sonl aujourd'hui que les sommiles d'un vastc continent en- seveli sous les eaux , et ils ont recours a plusieurs hy- potheses pour fairc arriver les animaux en AmeJiriquc. Quelqucs oiscaux ont pu traverser differenls espaces de rOcean , soil en se reposant d'ile en ile , soil en franchissant un bras de mer. Des hasards , des lem- peles, des accidents de navigation ont pu emportor quelques barques d'un continent a I'aulre , les unes vers le d^troit de Behring , les autres vers I'lslandc et le Groenland ; on est alle jusqu'a croirc que de nou- velles tribus detres animes pouvaienl avoir etc cr^ees depuis le deluge.
I.es habitants du Nouveau-Monde ont des traits ca- racleristiques qui les distingucnt de ceux de I'ancien : ils se ressemblcnl enlre eux par la complexion et I'or- ganisalion, par quelques usages, par des langues donl ia construction est la meme, quoique la nomenclature en soil dilTerentc. Quant a leur civilisation , quelle en est I'origine ? Est-elle indigene , ou est-elle emprunt(^e des nations de I'ancien monde ? Si elle est indigene , comment cxpliquor sa coincidence avec quelques unes 1. Mu 3. 24
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(Jos institulions ou des opinions do I'Asie orientale ; el si elle est emprunlee , d'ou vicnt roxtiome dillerence de langagc , et pourquoi n'a-t-on pas retrouve en Ame- rique quolques uns de ces arts simples et utiles qui , une fols connus , ne peuvent jamais elrc oublies ? L'au- teur nc cherclie pas a trancher cettc question ; mais il veut du moins aider a la resoudrc , en prescntaut et en faisant ressortir Ics rapports ou la difference des traditions, des opinions, des usages, que Ton a rc- raarques dans I'un et I'autre continent.
La tradition du deluge est generale ; elle a 6t6 r6- pandue partout , et on la retrouve cliez les nations les plus 6clairees et les plus barbares. Les Asteques croyaient qu'un liommc et une femme avaienl sur- ■iecu a I'ancicn monde ; le temple de Cholula passait pour avoir etc erige par une famille de geants qui avail echapp6 a I'inondation generale , et qui voulait clever cet edifice jusqu'aux nues. Quelques autres tra- ditions semblaient se rapproclier de celles de la Bible . et les premiers Europeens I'urent frappes de ces analo- gies. Peut-etre ils les jugcaient avec prevention , et leur donnaient une interpretation forcee; mais on pou- vait aussi en inf^rer qu'il y avait eu quelques relations primitives entre les pays oii de semblables idt^es s'etaient repandues , et Ton croyait surtout a la possibilitc d'une communication avec I'Asle , en remarquant la ressem- blance de quelques I'ites religieux et de plusicurs usages , qui auraient peu d'importancc s'ils etaient consideres isoleraent , mais qui en acquiercnt davan- tage par lour nombre et par leur ensemble.
On trouve dans le syst6mc chronologique des Aste- ques de nombreux rapports avec cclui des nations mongoles. Les figures d'animaux que les Asteques
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*^mploient ponr tlosigncrlcs jours se rapporlent u quel- ques uns des slgncs du zodlaqiie , quo loa connais- sait dans I'Asio orientale.
Les langues d'Amerlque paraissent avoir iinc com- mune structure depuis le pays des Esquimaux jusqu';i la TeiTe de Feu; mais les idiomes sont difTerents , ct ce no sent pas de simples varietes de dialcctcs; lis ont entre eux des distinctions radicalcs. La langue des Ot- tomies, qui habitent au nord do la vallee de Mexico , parait avoir de singulieres affinites avec le cliinois , ainsi que M. Du Ponceau en a fait la remarque dans uno savante dissertation.
L'hypothese d'une origine asiatiquc j^our la civilisa- tion mexicaine s'accorde avec les traditions qui la lent arriver du noi'd-ouest , et qui se sont retrouvees en Amerique cliez les nations les plus sauvages. Les Mexicains en avaient fait mention dans leurs tableaux liieroglypliiques , ou les difTerents degres de leurs mi- grations etaiont soigneusement indiques. Mais qui pourrait expliquer aujourd'hui tons ces signes? Plu- sieurs savants ont essaye de le faire , et n'ont encore obtenu que des probabilites. On a trouve, au nord- ouest de la Nouvelle-Espagne , vers lo cours du Rio- Gila , des ruines d'anciennes villes dans le stvle d'ar- chitecture des Asteques , et des tribus dont les dia- lectes et les consonnances vocales ont luie grande ressemblance avec le mexicain.
II y a entre les nations orientales de I'Asie ct les aborigenes du Nouveau-Monde des caracteres physi- ques qui les rapproclienl les uns des autres, tels quo la pro(!!minencc des os des jouos et les yeux obliquement dirig^s vers les tempes : ces traits sont ccux de la famille des Mongols , ct surtout des Tartares orien-
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tutix. Les rcstes d' architecture amerlcainc rappellenC plusieurs constructions orientiiles. Les conquerants detruisirent la plupart des monuments qui avaient un caractere religieux, et d'aulres furcnt demolis pour servir do materiaux a difTerents edifices; mais quel- ques unes de ces rulnes attestcnt encoi-e une grandeur que Ion peut comparer a celle des anclcnncs construe, lions de lEgyptc et de I'lnde. Ces monuments sont dcvenus rarcs au Mexique; ils le sont nioins a mesure que Ton suit vers le sud-cst la cliaine des Cordili(^res , (|ue Ion traverse la richc vallde 'd'Oaxaca , et qu'on p6n6tre dans les forets de Chiapa et dans celle du \ u" catan. On decouvre les ruines de Mitla , de Palenque , d'Lxmal , qui indiquent une industrie et une civilisa- tion plus avancees que tout ce qu'on avait d^couvert jusqu'alors.
Que lies sont les nations du vleux contifjcnt dontle style d'architecture ressemble le plus a celul des monuments de Clilapa et de Yucatan? Les rapports sont peu nombreux et pcu decislfs : c'est la forme p\- ramidale, le soin d'orienter ces edifices vers les points cardinaux, I'usage de couviirlcs murs d'liieroglyplies, destines peut-etre a rappeler les lois et les annales historiques de cliaque nation ; mais les embl^raes , les dessins ne sont pas les memes , la reprc^sentation des formes Immaines est dlfferente, et celles de I'Amerique centrale ont un caractere qui leur est propre. La de- pression du front est le signe le plus remarquable des tetes que Ton a figurees , soit que ce fussent les por- traits d'une auli'e race d'hommes, soit qu'on eut clier- ch6 par des moyens arliliciels , pratiques des Ic mo- ment de la naissance , a donner cette foi'mc a la tete des enfants.
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Le vieux clironiqueur de Tezcuco pense que ccs rui- iies appartiennent aux Tolteques , qui, dans le milieu du X" sieclo, emigrerent d'Anahuac, et se repandirent dans le Guatimala, dans les contrecs de Tehuantepec, de Campeclie et sur les rivages dcs deux cotes de ristlimc. Les notions d'aslix)nomie et de chi^onologie. et les institutions sacerdotales qu'on y a Irouvees res- semblent a celles des Astequcs , qui eux-memes les avaienl empruntees des Tolteques , plus avances dans I'ordre social.
En admettant une anclenne migration des Asiati- ques orientaux en Am^riquc , on doit supposer qu'elle remonte a des siecles tres eloignes , ou I'usage du fei* n'^tait pas encore connu en Orient, puisqu'on n'avait pas porte ce genre de connaissance dans le Nouveau- Monde, et oil les peuples des deux continents avaient pu suivr« dansleur civilisation unc marclie dlfTerente, quoiqu'ils conservassent entre eux quelques analogies d'institutions et de coutumes qui indiquaient une com- mune origine.
Toutcs les parlies de Touvragc de ^]. Prcscott , qui se rapportent a I'ancienne civilisation du fvlexique, vion- nent d'etre analysees, et nous arrivons a la conquete do cet empire par Fei-nand Cort6s. L'auteur I'a fait preceder de quelques remarques sur les deeouvertes ant^rieures, sur une expedition de Cordova dans le Yucatan, et sur les monuments d'art et d'industrie dont il fut frappc, Grijalva fit en 1518 unc reconnaissance plus etendue le long des cotes du Yucatan ; il s'avanca jusqu'au Rio-de-Tahasco, et remonta les rives du golfe du Mexlque jusqu'a Panuco , d'oii il revint dans I'ile do Cuba. L'un et I'autre capitaines n'avaicnt fait suv ie rivage aucun ctablisscment , lorsque Velasquoz , gou-
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Tcnicur do Cuba, resolut de soumettre ces contr«ies a la couronne de CaslUle , ot tiouva dans Cort6s un liomme digiie d'acconiplir un si grand desscin. Cor- tes fit, avantde partir, Ic denonibrcrucnt de ses forces; elles sc composaient dc 110 mariniers, 553 soldats ,au nombre dcsqucls ^talent 3"2 arbaktricrs ct 13 arque- busiers; il avail de plus 200 Indiens de I'ile de Cuba , 10 canons, 4 i'auconncaux et 16 chevaux. Ce Tut avcc de si faibles mo} ens qu'il cnlrcprit la conquete d'un puis- sant emjiirc.
Tous les 6venements de cette expedition sont succes- sivement decrils. L'auteur a puise aux raeilleurcs sour- ces , el il a compare entre elles toutes les cbroniques , en remontant surtout aux relations des ^crivains qui avaicnt pris part a la conquete , tels que Bernal Dias; a ceux qui etaicnt arrives iramediatement ajires au Mexique, cornme Ilerrtira, Las-Casas, Gomara ; a ceux onljn qui avaient fail , comme Clavigero et Lorenzana, de profondes recbercbes sur ces grandos epoques.
L'ile de Cozumcl, pros des cotes orientales du Yuca- tan , est le premier point reconnu par Cortes. II y ren- contre Aguilar, ancicn prisonnier espagnol , qui avail appris la langue maya , usitec dans le Yucatan , ct ce compatriole lui sort d'interprete. Bientot il on trouve un second dans la jeune Marina, qui lui est offerte en present par un cacique de Tabasco , ct qui connait la langue maya et celle du l\Iexique. Cost par leur inler- mediaire qu'il pcut etablirses premieres relations avcc les babitants.
Nous no suivrons pas, avcc l'auteur, tous les exploits qui signalercnt cette conquete : dc tclles relations se- raienl ctrang^res au genre d'eludes dc la Society dc gdograpbip ; el d'ailleurs nons nous en sommes spc-
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cialcment occupt^s dans d'autres Merits. Bornons-nous done a rappeler que , dans tout le cours de cette expe- dition militaire , Cortes fut a portee de recueillir les plus exactes notions sur la topograpliie de la Nouvelle- Espagnc ; sur la chaine des Cordili^rcs, qu'il eut a tra- verser entre les regions brulantes , voisines de la Vera- Cruz, et les grandes vallees de Tlascala ct de Mexico; sur quolques uns des volcans de cette contree, et notam- ment sur celui de Popocatepetl , dent la hautevu' est de 17,852 Y>ieds anglais au-dessus du niveau de I'Ocean. Plusieurs batailles contre les Tlascalans ayant et6 couronnees par une victoire decisive , Cortes, en fai- sant la paix avec eux , trouva bientot de fideles allies dans ceux qu'il avait eus pour ennemis , et ils I'accom- p agn^rent dans la plupai^t de ses expeditions ulterieures. Cortes , devenu maitre de Mexico , put bientot y ac- qu^rir d'exactes connaissances sur les productions va- rices des differ entes provinces de 1 'empire et de quel- ques autres parties de rAm^rique. Les jardins du pa- lais de Montezuma rcnfermaient une collection des plus beaux et des plus utiles vegetaux ; les animaux les plus sauvages occupaient une vaste menagerie ; de grandes volieres rassemblaient les oiseaux les plus rares et les plus recherch^s. On trouvait dans d'autres salles du palais de nombreux echantillons de mineraux, et des ouvrages precieux par la mati^re et par le travail. Cortes pouvait apprc^cier sous tous les rapports I'im- portance de sa conquete : il fit partir dans plusieurs directions quelqucs uns de ses capitaines, afin de faire reconnaitre la situation geographique, les productions, les mines , toutes les ressources des contrees environ- nantcs. Chacunc de ses entreprises etendait ses d^cou- vertes ou consolidait ses conquetes. Menace bientot
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par line imasion do Narvaoz , ii niarcha conlro lui , le \alnqiut, Ic lit ])risonnier, allira sons sa propre ban- iiiere les troupes (|iril venail do combattrc , et trouva uans Icur coojicration Ics raoyens d'obtcnlr d'autres succes.
JNoiis nc nous etcndrons pas sur lo retour de Cortes
a Mexico , sur la fin tiaglque dc Montezuma , blcsse a
inort par scs propres sujets , au milieu dune emcute
qu'il clicrchait a apalscr ; sur la necessite oil furent r6-
duits les Espagnols d'evacucr cctte capitale au milieu
de la triste nuif, ct sur la victoirc incsperee qu'ils rem-
porterent a Otumba. Cortes fit ensuite la guerre a plu-
bieurs tribus environnantes , il les vainquit : lui-meme
avail pour auxiliaircs d'autres peuplades indiennes ; il
s'aida de leurs secours, et revint avec une ax'niee nom-
breuse faire le siege de Mexico , ou Ton avait fait dc
nombreux preparatifs de defense. Les fastes de cette
sanglante expedition ont cte retraces par tous les his-
lorlens , et M. Prescott les a peints des plus vivos cou-
Icurs.
La reduction de cette place allait ouvrir i\ Cortes une autre carriere d'activite et d'illustration. Ce n'^tait plus le guerrier luttant avec une fei-raet6 inebranlable conlre ses nombreux ennemls : c'etait I'liomme d'l^tat, cliercbant a mettre en valeur toutes lesressources d'un empire souniis par ses armes. II lui roste a affermirla domination de I'Espagne sur cette vastc contree ou il ne trouve plus d'obstacles a vaincre, et il pourra suivre avec perseverance le cours dos decouvortos qu'il a si gloi'ieuscment commencecs. Cette secondc jiartic de la vie de Cortes a eu moins d'liistoriens : ellc netait plus entourec de toutes les pompcs de la victoire; n^an- moins olio est digne d'occupcr toute notrc attention.
( 361 ) et nous reprcnons ici avec plus de details ranalysc du bel et savant ouvi'agc de M. Pi'escott.
Lcs Espagnols n'l^taient rentr^s en possession de Mexico qu'opres un siege de trois mois , ou Ton avait eprouv^ de part et d'autre toutes lcs calamites de la guerre. Cette capitale , qu'il avait fallu reprendre pied a pied , ctait presque enti^rement detruite et avait perdu Ic plus grand nombre de scs habitants. Cortes voulut la relever de scs ruincs , et la nouvelle ville fut batie sur le meme emjjlacement que I'ancienne. La place Mayor occupa le terrain ou s'etait eleve le grand teocalli ; les idoles brisees servirent de materiaux pour la construction d'une eglise ; une fortcrcssc fut batie; et afin de la pourvoir d'artillerie , on coula des pi6ces de bronze, on cut des boulcts de pierre, on fit extraire du volcan de Popocatepetl le soufre qui devait entrer dans ia fabrication de la poudre : Mexico rassembla en quelqucs annees deux mille families espagnolcs , et il se trouvait trente mille autres families dans le quarller occupe par les Indicns. D'autres villos furent cr^ees dans les positions les plus favorables : Cortes fonda Zacatula, sur les bords de la mer du Sud; Coliman , dans le Michuacan ; Saint-Estevan , sur I'Adantique , pres de Tampico ; Mcdellin , dans le voisinage de V(ira- Cruz ; Antigua, sur la riviere de ce nom.
En faisant ses distributions de domaines , Cortes adopta le vieieux systemc de la repartition des Indiens cntre les nouveaux possesseurs du territoire; et quoi- que cet acte fut desavoud par la couronnc, il fut main- tenu , et I'interet particulier sut eluder lcs ordres qui le prohibaient. Les Tlascalans toutefols en furent cxemples , ])ar reconnaissance pour les importanls services qu'ils avaicnt rendus.
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Uouzc religieux IVanciscalns arn\6rcnt d'Espagne au Mexique en 1524, pour travailler a la conversion des Indiens , et pour continuer de faire abattre les idolcs , les signcs, les monuments, les images, qui paraissaient appartcnir a un culte detruit. Line partie des conqu6- rants s'etablit dans la riche vallee d'Oaxaca ; un plus grand nombre dans celle de la capitale. On poursuivit I'exploitalion des mines de Zacatiicas , Guannaxoto, Tasco, ct Ton transplanta dans les terres culllvables los diflerents vegetaux qui pouvaient s'y naturaliser. La cannc a sucrc Tut apportee des iles espagnoles : on avail dc'ju lindigo , le coton , et bientot on vit fleurir le peclier, lelimonier, I'oranger, la vigne , I'olivier, qui jusqu'alors etaient inconnus.
Cortes avait forme de nouveaux plans de d(5couvertes et de conquetes : il avait fait (^quiper une flottllle a Zacatula pour explorer les rives de la raer du Sud ; ses vaisseaux p(^rirent dans un incendie ; mais il prit sur-le-champ des mesures pour r6parer cette perte. Le but principal de son armement etait de decouvrir un delroit entre cette mer et le golfe du Mexique ; et une autre escadre , equip6e sur ce golfe , devait en recon- naitre 6galeraent les parages. La proximity des deux mers se trouvait constat^e par la decouverte de Balboa, et Ton etait a la recherche d'une communication entre elles. Cette importanle question occupail les savants et les navigateurs : c'etait le grand secret du detroit ; Cortes mettait tous ses soins a le pcnetrer , et ce fut encore dans cette vue qu'il fit equiper une nouvelle escadre, dont le comraandemont fut donne a Chris- toval de Olid, un de ses plus habilcs capitaines. Olid devait faire voile pour le pays de Honduras, y iilanler une colonic sur la cote du nord , et detacher ensuile
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quelques vaisseaux pour croiser le long do la cote me- lidlonale , et aller vers le Darien cliercher co detroit inystdirieux.
Une grande expedition pai' tcrre fut en meme temps confiee a Pedro Alvarado ; il devait descendre la pente m^ridionale des Cordilieres , etpdn^trcr dans les pays (pii s'^tendent au-dela du territoire d'Oaxaca. Cetle campagne sc tcrmina par la conquete du Guatimala. Trois ans aprfes la reprise de Mexico, Cortes avait sou- mis a la Castille quatre cents lieues de pays sur I'At- lantlque, et plus de cinq cents lieues le long de lamer du Sud.
Ce general apprit bientot qu'Olid chercliait a se rcndrc indepcndant dans le pays qu'il avait ete charg6 de coloniser; il voulut punircette defection, etcliargea Francisco de LasCasas, liomme adroit et r^solu , de se rendre allonduras, et d'arreter cetofficier. Las Casas fit naufrage et tomLa entre les mains d'Olid ; mais ayant r^ussi a exciter une insurrection contrelui, ils'empara tie sa personne , et lui fit trancher la tete sur la place du marclie de Naco. Cortes n'^tait encoi'e informe que du naufrage de Las Casas, et il croyait son dessein avorte, lorsqu'il partit lui-meme de Mexico, le 12 octobre 152Zi, avec un corps de cent cavaliers, de cinquante fantas- sins et de trois mille Indiens, pour se diriger sur Honduras. II s'arreta dans la province de Guaxacualco, et prit a Tabasco des renseignements sur la I'oute a suivre : on lui remit une carte des principaux lieux oii les Indiens do celte contree venaient faire leur com- merce d'ecliange; et a I'aide de cette carte, d'une boussole , et des guides qu'il pouvait renconti-er, 11 cntreprit de traverser les tcrres basses et marecageuses
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qui sotendcnt entre le Guaxacualco ct lo gollc do Honduras.
Les cours d'cau que Ton rencontra etaient si nom- breux qu'il falJait construirc do proche en proclie do nouvcaux ponts pour Ics IVanclilr; ct les dilTicultc'S du voyage furent bicnlot accrues par le manque do subsistances: les habitants fuyaient dcvant les troupes, apres avoir mislefeu alcursmaisons. Le premier village que rarniee rencontra fut Izlapan; die passa ensuite a quelqucs lieues de Palenque, dont il n'cst fait aucune mention dans les rccits de Cortes; elle eut a traverser line contrec humide , ou Ton ne trouvait que quelques points cultives ct dos forets de ccdres et de bois do tcintui'c; ses guides I'abandonnercnt, et la carte ct la boussolc pouvaient scules I'aidcr a sortir de ce laby- rinthe. Ses faibles provisions etaient consomniees, et un grand nonibrc d'hommes periront d'epuisenient et d'inanition. Biontot l(^s troupes rencontroront une riviere plus large ct plus prolonde que toutes celles qu'onavait travcrsees; mille arbres furent abattus dans les foi'ctspour y etablir un pont ; ct ce monument de travail et de perseverance subsistait encore longtcmps aprcs. De nouvclles difficult(is survenaient de jour en jour; I'armee rcdoublait d'efTorts pour francbir un sol fangeux et sans consistance ; enfin on arriva dans une fertile plaine couverte de mais, oil etait situe le clief-lieu d'unc peuplade indienne.
Les Espagnols roparcrcnt leurs forces dans colte station ct sc dirigcrent ensuite vers le lac Peten, qui appartcnait alors a ime trlbu de la nation Maya , eta- blie dans le Yucatan ; sa capitalc etait situee dans une ilc du lac, ct Ton en apercevait detr^sloin lesteocallis ct les grands edifires.
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Nous dcvons rappeler iinc interessante circonstancc de la vie de Marina , qui accompagnait CoxHes et qui lui servait d'interprete. Lorsqu'ontraversait la province de Guaxacualco , elley rencontra sa mere et sonfrere, pardonna a sa mi're qui I'avait autrefois vendue a des marchands, fut vivement attendrie a son aspect, et lui remit en present tous les joyaux qu'ellc avait sur elle. Cortes voulut , pendant I'expedition de Honduras, fixer lesoi't de cette jeunc ludienne , en lui faisant epouscr don Juan Xamarillo , et des biens lui furent assignes dans son pays natal , oil elle passa probablement le reste de ses jours. Depuis ce temps le nom de Marina disparait des pages de I'histoire ; niais il fut toujoui's cher aux Espagnols, qu'elle avait fidelement servis , et auxindiens, qui la trouverent sans ccsse compatissantc a leurs maux.
L'armee continuant sa marche eut a traverser la
Sierra-de-los-Peclernales ; elle essuya, en rentrant dans
laplaine, la saison des pluies, qui grossissaient les
torrents et les rivieres. On dut passer tres pres do
Copan; mais sansdoute on nc I'apercutpas, et Ion se
hatad'arriver a Naco, situ6 sur les bords du Golfo dolce.
Cortes se preparait a y entrer de vive force, lorsqu'il
appritpar ses 6claireurs la nouvelle de la mort d'Olid :
son autorite se trouvait retablie, et il fut recu par ses
compatriotes avecune vive allegresse. Tout le pays en-
vironnant fut examine avec soin ; Cortes passa un mois
a I'explorer ; il s'embarqua ensuite avec une partie de
ses ti'oupes , et apres avoir toucbe quelqucs jioints dii
littoral, il alia jeter I'ancre a Truxillo, principal eta-
blissement des Espagnols sur la cote de Honduras. Ce
guerrier voulait tenter une nouvelle expedition pour
soumettre la vaste province de Nicaragua, en eludior
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loutes les ressources, aller a la rocherclie ilu diilroil , dont il otail pr^occupd, s'avancer a Costarica, a \ e- ragua, et arborer enfin sa banniere sur Ics bords de la bale do Panama ; mais les nouvelles qu'il recut dc Mexico ravertlrentqu'il en <!;tait eloignc dopuis trop long- temps, et que, pour sauvcr cello capitalc , il dcvait v revenir sans delai. En cffet, des dissensions s'y elaienl manifestees d^s le moment de son d(§part : les troubles s'etaient accrus; on avail r^pandu le bruit que Cortes avait pc^ri dans les inarais dc Chiapa ; on avait memc celebro scs obsoques, etl'on avait dispos6de sesbiens, en partie pour lui falre dire des messes , enpartie pour acquitter ce que Ton nommait scs dettes envers I'Etat, Cortes se hata de regler I'adminislration des colonies de Honduras, et il s'embarqua pour Vera-Cruz avccun petit noinbre d'liommcs ; niais la tcnipole endommagea son navire et lelorrade rtntrer dans le port dc Truxillo. Unc seconde tentative ne futpas plus heureuse , il on fit une troisi^me , et s'embarqua le 25 a\ril 1526. Mais lorsqu'il cut gagno les parages de la Nouvelle- Espagnc , un coup de vent lui fitperdro sa route et Ic jeta sur File de Cuba. Enlin il remit en mer le 16 mai, et il arriva pros de Saint-Juan d'Llloa le liuitiemc jour de sa navigation.
Toute sa route a travers le Mexique fut une marclic trionipliale; on accourait de toutes parts pour Ic voir; il Tut rcru dans toutes los villes de la maniore la plus solennello, et rontra dans la capitalc au mois do juin 1526, vingt mois aprtjs son deparl.
Pendant son absence , ses enneinis avaient redouble leiirs intrigues en Espagno , pour le perdrc dans I'esprit do lacour, et Charles-Quint avait envoyi au Mexique Jui jugc (Ic irsidence pour examiner sa conrluite. F-os
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plaintes etaient devenues si multipliees ct si graves, qu'une commission fonnec u Madrid sousle titred'au- dience royale dc la Nouvelle-Espagne , fut chargce d'en prendre connaissance, et que le prc^sldent du conscil des Indcs (!;crivit a Cortes de venir se disculpcr. Cortes avaitdeja resolu de faire ce voyage avant d'en recevoir I'injonction ; il quitta Mexico pour se rendre au port de Villarica, ou il recut la nouvelle de la mort de son p^re , qu'il avait esp6r6 revoir bientot. Deux vaisseaux 6taient prepares pour son passage ; il prit avec lui le fidele Sandoval, Tapia , quelques autres cavaliers atta- ches a sa personne, il fit aussi cmbarquer plusieurs chefs asteques ou tlascalans, et emporta une grando collection de plantes et demint^raux, quelques animaux du pays , des oiseaux I'ares et au beau plumage , des vases, divers objets de parure , d'ameublemcnt , et lespluscurieuxproduits de I'industrie mexicaine.
La traversee fut heureuse , et Cortes arriva a Palos au mois de mai 1528. Colomb y avait debarque trente-cinq ans auparavant, a son retour de la decouverte du Nouveau-Monde , et Francois Pizzarre , le conquerant du Perou , y aborda pendant le s^jom^ de Cort6s. Ainsi les homnies qui avaient soumis a I'Espagne deux puis- sants empires se rencontrerent a Palos , I'un apres avoir accompli scs conquetos, I'autre lorsqu'il allait poursuivre Ics sienncs.
Sandoval mourut dans cette ville a la memo epoque. II etait ne a Medellin comme Cortes , et avait cte son compagnon fidele , celui dont Fhabilcte et le caractire lui inspiraient le plus de confiance , et qu'il employa constammcnt dans les occasions les plus dillicilcs. Les obseques de ce jeune guerrier , qui n'avaitv^cu que trente ct un ans, furent faites par les religieux de cc
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memo couvont do la Rabida oii C.olomb a\ail Iioum- un acciieil hospitaller.
Cortiis ccrivlt a la cour pour rinformcr de son arri- veo. Toules les preventions qii'on avait cues contre lui tHaient deja disslpocs, ct dans lous les lieux do son passage on lui rcndit les plus grands lionncurs. Chai'les- Quint etait alors a Tolede ; il accucillit Cortes avec bicnveillance , lui fit de nombreuses questions sur les paysqu'il avait souniisa la couronnc > le rcoutsouvent, etleconsultasur la meilleure mani^rc de gouvernerlcs colonies, sur les reglements a faire pour anieliorcr la condition des habitants, sur les moyens d'cncouragor jo travail et I'industrio. Le nionarquc saisit souvent I'occasion de donncr a Cortes des leinoignagcs d'es- time et de favour : lorsqu'il paraissait en public , il Ic placait a ses cotes ; le general ctant tombc maladc , rcmpereur alia le voir et lui rendrc des soins. II hi' confera, par un acte du6 juillot 1529, le titre de mar- quis de la vallee d'Oaxaca ; il joignit a ce litre lui t(!r- ritoire consid(^rable dans la memo contr6c , ct d'autres proprietes a Mexico , ct dans la valloe cnvironnantc ; ce don comprenait plus de vingt villes cu villages el vin2;t-deux inille vassaux,
Oa no rendlt pas a Cortes le gouvernement dii Mexique. C'etait lapolitlque de la couronnc d'cinplover unc classc de ses sujets pour etcndrc ses conquiiles, el line autre classe pour les I'cgir. Mais en refusant a Cortes radministration civile de la colonic , on kiicon- fiait le coinmandcment militairc ; on le iiomma capi- laine-gcneral do la Nouvclle-Espagne et des cotes de la inor du Sud ; il eul le didit d'y faire des decouvcrtes dont on lui accordail en proprielc la douzicinc partie, el d'etablir des reglenvnts dans los ft rrcsqu'il pourrall
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coloniser ; le gouvernement espagnol voulait le retlrer du premier theatre de scs exploits, ct lui ouvrir une nouvelle carri^re d'ambition , ou il put agrandir encore les domaines de la couronne.
Au printemps de I'annee suivante , Cort6s s'embar- qua pour la Nouvelle-Espagne avec sa seconde femme, ni^ce du due de Bejar, et avec sa mere, qui etait avanc6e en age ; il etait suivi d'un long cortege de pages et de serviteurs. II se rendit d'abord a Hispaniola, pour y attendre que le Mexique eut recu sa nouvelle organi- sation, et il alia ensuite y exercer ses fonctions de ca- pitaine-g^n^ral.
Des discussions avec le gouvernement civil lui ayant bientot I'endu penible le sejour do la capitale , il quitta Mexico pourne plusy revenir , et alia fixer sa residence dans la ville de Cuernavaca, assise sur la pente meri- dionale des Cordilieres , et dominant une plaine eten- due , qui 6tait la plus belle ct la plus florissante partie de ses domaines; il y introduisit la canne a sucre , des troupeaux de merinos , I'education des vers a soie ; il encouragea la culture du cbanvre et du lin , etablit des fabriques, tira de I'or des mines de Tehuantopec, ct de I'argent de celle de Zacatecas ; I'exploitation en etait alors facile , etlesmetauxprecieux se trouvaient encore pres de la surface du sol.
Avant son voyage en Espagnc , Cortes avait cnvoye une petite escadre aux Moluques, et cctte expedition eut quelques importants resultats; il se preparait a en former une seconde ; mais scs plans furent interrompus et la construction de ses navii'es fut negligee et alian- donnee pendant son absence. II equipa en 1532 ot 1533 deux autres flottilles pour des voyages de decou- vertes au nord-ouest ; on atteignit , dans une de ces
I. MAT. ^. 25
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navigations, rextremite lueridionale cle la Califoraie ,
et un debarquement y fut efloctue dans Ic port do la
Yera-Paz. Ln de ses vaisseaux , jetL" par le gros temps
sur Ics coles de la Nouvollc-Galice , fut captur(i par
Guzman, vieil ennemi de Cortes, ct celui-ci n'avanl
pu obtenir justice, alia lui-meme roprendre son navirc.
La il fut rejoint par la sccondc llottille qu'il avail fait
6quiper dans le golfe de Tcbuantcpcc. Scs vaisseaux
etaient pourvusde tous les objetsnt^cessaires a I'cHablis-
semcnt d'une colonic dans la region nouvcllement d^-
couverte , et ils y transportaient quatre cents Espagnols
et trois cents Africains ; mais cetle expedition fut mal-
heureuse. Cortes, en naviguant dansle golfe de Cali-
fornie, fut assailli par une violcnte tcmpolc, fut jete
sur des (!!cueils , ct regagna peniblcmcnt le port de
V6ra-Paz , d'ou il revint au Mexiquc apres une longue
absence. La colonic qu'il avail voulu fonder se trouvait
alors reduite a I'extri^mite par la famine et les maladies,
etil futbientot suivipar un petit nombre de malbeureux
qui avaient survecu aux desastrcs de celte entreprise.
Sans etrc decouragc par ccs revers , Cort6s songeait
encore a quclqucs dccouvertes dignes de lui, et dans
cetle vue il equipa trois autres navires dont il remil le
commandemcnl a Mloa. Cetle expedition , qui parlit
au niois de juillcl 1529 , elendit bcaucoup plus les pro-
gres de la geographic. Llloa ponetra jusqu'au fond du
golfe de Californie: revenant ensuite sur ses pas, il
longca toutc la cote de la Peninsule , en doubla la
pointe meridionale , ct remonta Ic long de ses rives
occidentales, jusqu'au 29° degre de latitude nord. Le
liardi navigaleur fit alors parvenir a Corttjs la nouvelle
de ses decouvertes , et il conlinuasa route vers le nord,
mais on n'entendit plus parler de lui , ct son silence no
permit pas de doulcrdc sa perlo.
. ( 371 ]
Ainsi se termin6i'ent les enlreprlses uiailliiaes laltos ou cUrigecs par Fernand Cortes; ellos lui avalent coutc trois cent mlllc castillans d'or; la mer du Sud avail ^ti reconnue , depuis la bale dc Panama jusqu'au Rio Colorado , qui coule au fond du golfe dc Californic, ct I'autre cote de cette presqu'ilc avait et6 decouvcrt jusqu' al'ile de Cedi'os.
Malgrd ses embarras pecuniaires, Cortes faisait encore de nouveaux efTorts pour etendi-e les limites de ses de- couvertes; et il se proparait a equiper une nouvello escadre de cinq vaisseaus, qu'il dcvait mettre sous le commandementde don Louis, son fils naturcl ; maisle vicc-roi Mendoza lui en refusa I'autorisation , et re- clama pour lui-meme le droit de faire des de^couvertcs etdes reconnaissances dansles contrees du nord-ouest.
Les embarras que Ton suscitait a Cortes le detcrmi- n^rent a faire un nouvcau voyage en Espagne : il dit adieu a son epouse, a sa mt?re , s'embarqua en 15/iO avec son fds aine , qui n'avait alors que huit ans , ct apres une hcureuse navigation , il prit terre dans son pays natal. Cortes fut bonoral^lement recu , mais plus froidement , et Ion se bornait a des marques de cour- toisie.
L'ann^e suivante , il s'embarqua comme volontaire, dans la memorable expedition de Charles-Quint centre Alger. Mais I'escadre fut dispersee par une violente tempetc : le vaisseau ou il se trouvait fit naufrage sur la cote d'Afrique , et 'jorl^s et son fils ne s'ecliappe- rent qu'a la nage. La valeur musulmane , aidco par les elements , triompba de ses ennemis ; et Ion tint un conseil de guerre dans Icquel on prit la decision d'aban- donncr I'entreprise et de retourner en Castillo. Cortes s'indignait de ccttc disposition ; il voulait s'obsliner au
( 272) si«ige, et tlemandait qu'on lui permit de r^duire la place : on prlt son ardeur pour un enthousiasuie ro- mancsque, et son conseil ne lut pas suivi.
A son retour en Espagne , le conquorant du Mexiquc adrcssa aa gouverncmont diverscs rt'clamalions aux- quellcs on n'eut point egard, Sa position avait cbangci; il etait trop ag(^ pour qii'on put attcndre de lui d'autros services importants; les conquerants du Perou occu- paient alors I'attention publique ; on csperait de nou- veaux tr^sors, et Cortes vit que la faveur do la cour s'atlachait plus a I'avenir qu'au pass6.
Au mois de fevrier 1544 , il adressa une nouvelle lettre a I'empereur , pour lui rappeler ses sacrifices , I'embarras dc sa situation , Ics dcttcs qu'il avait con- tractees , et ses plaintcs contre Ics ofliciers dc la cou- ronne qui riigissaient Ic Mexiquc. Trois annees de sol- licitatlons n'eurcnt aucun succes ; et Cortes ayant pris la resolution de retourner en Amerique , vlnt avec son fils a Seville , oil il desirait s'eniLarquer ; mais il lut attaque d'une dyssenterie qui epuisa rapidement ses forces : il prt^vit sa fin prochainc , et il s'y prepara. Cortes avait fait son testament depuls quelque temps; et son fils aine, Don Martin , age de quinze ans, deve- nait son heritier. II pourvut au sort dc ses autres en- fants, fit ses liberalites a d'anciens servileurs, donna d'abondantes cbarites , et disposa des biens qu'il avait a Mexico , pour y fonder trois institutions : un bopital , un college pour I'education des missionnaires, et un couvent de religieuses. Le h^ros arrivait avec calme a sa derniere hcure; et apr^s avoir confcsse sesfautes et I'ccu les sacrcmcnts , il expira le 2 ddcembrc 1547 , a I'agc de soixante-trois ans. On c6lebra avec pompe ses funcirailles , et son corps fut inbumd dans le monastere
( 373 )
dc Saint-Isidore. Don Martin , son fils, le fit transporter fn 1572 dans la NouvcUe-Espagne, et on le deposa k Tczcuco , pres des lombeaux de sa fille ot de sa mere. Les autorites de Mexico reclam^rent sa depouille en 1629 : die y fut successivement placee dans I'^glise de Saint-Francois , et dans un hopital que Cortes avait fonde. Ainsi , plusicurs villos avaient rcgarde comme un devoir de lui rendre les honneurs supremes, et Mexico gardait sa cendre depuis deux siecles , lors- qu'en 1823, au milieu d'un mouvcmcnt r^volution- naire , la populace fut sur le point de briscr son tom- beau.
Cortes n'avait pas eu d'enfants de son premier ma- nage : il en laissa quatre du second , un fils et trois (illes , qui firent les plus brillantes alliances : il laissait aussi deux fils naturcls; la mere de I'un d'eux etait Marina. La lign^e masculine do Cortes s'eteignit a la quatri^me generation ; et son titre et ses biens echu- rent aux femmes : une d'elles s'allia a la maison de Terranova , qui descendait du grand capitaine Gonzalve de Cordoue ; et un mariage subsequent fit passer ce noble et illustre hei'itagc dans la famille des dues de Mont^leone.
M. Prescott terminc la biograpliie de Cortes par d'interessantes remarques sur son caract6re, ses grandes qualites, son empire sur tout ce qui I'environnait, ses connaissances , les importations agricoles dont il eni'icliit le Mexique , sa proposition de soumettre a la Castille les iles a epiceries, ses projets de colonisation en Californie , et le nombre et I'imj^ortance de ses d6- couvertes.
L'analyse que nous venons de fairc ne pourrait pas rcmplacer la lecture de I'ouvrage dc M. Prescott, mais
(374)
clle pent iki luoins eu I'alre romarquci' le rati rile , cl jiiontror combiou I'historien a dii laire do rcchorches pour trailer dignement un si beau sujot. 11 nous est diiTiclle dc juger toujours avec prc^cision unc grande ct belie ccuvre , ^crite dans une langue clrangere : les qualilc's du style ^cliappent alors trop souvent; mais du molns Ic merite dcs pensees nc ccssc pas d'etre aperru ; cl lorsqu'elles sont grandes , nalurclles , et derivees d'une noble et vaste intelligence, cctle pre- miere base des qualitcs d'un ouvrage en fait ressortir toule I'iniportance , el attache vivement a sa lecture. Nous lelicilons M. Prescott du nouveau succ6s liisto- riqiie ctlillcraire qu'il vienl d'oblenir , el des lumieres qu'il a repandues sur les dilTerentes questions liees a un sujet si fecond et si grand.
ROUX DF. RocnELbE>
ExTRAiT dc Id Cojresjxindance dc M. VabbeVuM^.Ki. ( Coniinunique par 31. le baron Roger. )
Saint-Louis du Senegal , le 1 8 Fevrier i844. %
« Je m'estime heurcux que vous aycz cte content de nion preccJsdent envoi. Je in'occuj>e en ce moment de I'eunir des documents plus interessants ; ce sont des notes arabes sur I'emigralion dcs Maures au Senegal , sur I'histoire de leurs rois, sur Icurs mocurs, leurs fables , ct sur les distances cl la position dcs dilTe- rentes villes qu'ils parcourent dans I'intdrieur. Malhcu- reusement les grands voyages des caravanes n'ont lieu que dans la mauvaisc saison. Cctle fois, ayant plus dc
( 375 )
Iciiips , je metlrai , selon vos recommaiidations , une traduction en regard de i'arabe. »
• > '
((Notre petit etablissement (le college de Saint-Louis) prospere toujours; nous avons quarante-cinq Aleves qui nous donnent beaucoup de consolations sous tous les rapports. Je regarde cette annee comme le veritable commencement du collt^gc , car nos classes sont bien organisees. A la fin de I'annee je vous communiquerai le resum6 de tout ce que nos jcunes gens auront ap- prls. — Je me prdpare a en envoyer quatrc , au mois de mai, a Paris, pour etudior au s(?minaire. — Les trois qui se destinent a I'ecole des mineurs, et dont je vous ai d6ja parle , nous ofTrent de grandes esperances. lis ont ete confes a M. Iluart, qui les a menes jusqu'aux mines du Bambouck parterre; ils etudient la minera- logie sur les lieux memes. Je vous envoie la lettre que je viens de recevoir de M. Huart a leur sujel. Elle est datec de Bakel : je pense que vous la lirez avec interet, Ces trois jeunes gens m'ecrivent de I'inlerieur du pays, etme racontent les fatigues de leurs courses, d'un ton quimontre qu'ils dtisirent eti'e utiles a Icur patrie. Dans deux mois ils vont revenir en descendant sur les rives de la Gamble. »
ExTRAiT de la lettre de M. Huart a M. Vabbe Boilat.
(( Partis le 28 novembrc , nous nous sommes rendus a Boulcbane, capitalc du Bondou , ou les enfants ont ^te presentes a I'Almamy comme de futurs agents du gouvernement. Ce chef a beaucoup approuve cettc heu-
( 376 )
reusL' idee de noire gouvcrneur , qui , dans sa sollici- lude pour le S(!;nogal, ne se borne pas au present, mais s'occupc encore de I'avenir. Continuant notre route . nous avons traverse I'intiirieur du Bondou , dans la di- rection sud ; visitd successivement les mines de la Fa- leme , situees a Soinsandi-pal , Sainsandi-Sarracolet, aux deux \illap;esde Tomboura ct aux deux villages de Tom- houlo. Puis , nous avons pass6 cctte riviere et parcouru avcc soin cetlc partie du Bambouck , si riclio par ses mines, et que notre mission nous prescrivait d'etu- dier. Les mines de Yacueba , cellcs de Danibayayc ^ de Giiinde , dc Dambaynye n° 2, de Gasca et beaucoup d'autres moins importantes ont fixe notre attention. Nous avons pu sur les lieux faire opdrer les enfants eux-memes, leur montrer les vices de la manipulation ties indigenes , en subslituant la noire plus en rapport avec la nature du terrain, apres leur avoir fait d'abord remarquer le defaut de soins, de connaissances , et peut-etre d'intclligence qui ont prcsidd a I'^tablisse- ment des mines et au travail des galeries souterraincs. Nous n'avons pas ndgligc non plus les mines fal6- meeimes, moins riclics peut-etre, mais jiourtant d'un inleret nuijeur.
» Notre retour s'est cffectu6, nonpar I'interieur, pour 6viler un double cmploi, le connaissant d6ja, mais en longcant la Faleme , ce qui nous a servi a etablir un itineraire. L'inspcction scrupuleuse des lieux que nous proposons pour I'etablissement des futurs comptoirs , a complete notre campagne , et apres trente-trois jours (le marclie, nous sommcs rcvenus a Bake), etc. »
( 377 )
DEUXIEME SECTION,
Actes de la Societe.
EXTRAIT DE9 PROCES-VERBAUX DES SEANCES.
Pr^sidunce de M. Roux de Rocueu-e.
Seance du 3 mail^hh.
Le proces-verbat de la derniure seance est lu et adopte.
M. le vice-amiral baron de Mackau , ministre de la marine et des colonies , nomme President de la So-i ci^te dans sa derniere assemblee gen^rale , (^crit a la Commission centrale qu'il est sensible a cette flat- teuse distinction, et il I'assure du vif interet qu'il prend a ses utiles travaux.
MM. Cochelet et Guignaut, nommes vice-presidents, M. de Froberville, admis dans la Commission centrale , et M. Amedee Tardleu , nouveau mcmbrc de hi So- ciete , adressent aussi des remcrciements pour leurs nominations.
M. Ilommalre de Hell rend grace a la Societe de riionorable suffrage qu'elle vicnt d'accorder a ses tra- vaux en lul decernant une mcdaille d'or pour son voyage a la mer Caspienne.
M. Jomard offre , au nom do M. Dclaporte, un exem-
( 378 )
])laire de I'ouvrage que cct oriontaliste vient de puLlicr sous le litre de : Specimen de la latigiie hcihere.
Lc memo membra met sous les ycux de Tasscmbl^e un portrait de Chistoplie Colomb , qu'il a fait dcs- siner a Viccnce, d'apros un tableau atlribuci au Ti- ticn, ct qui dilTore de tous les portraits connus de ce celobre navigateur.
IM. le baron Roger communique dcs lettres ecrites du Senegal par M. I'abbe Boilat , qui annoncent le pro- cbain envoi de plusieurs documents , nolamment de Notes originales sur I'ancienne emigration des Maures dans ce pays ct sur leurs traditions historiques, ainsi que plusieurs itineraires dans rinterieur de I'Afrique. Ces lettres aussi sont relatives aunc reconnaissance des mines d'or du Bambouck, executee sous la dii'ccllon de M. lluart , par trois jeunes Sent'galais qui se destinent a I'ecole des mineurs. M. Iluart parait avoir retrouv^ presque toutes les localit^s signalees au commence- ment du xvui' sieclc , dans I'cxploration de Compa- gnon , que nous a conserv6e le P. Labat. Les indi- genes se livrent encore a I'cxploitation des mines par les procdd^s les plus grossiers ; cependant on parlc de galeries souterraines, ce qui serait deja un grand progres. — M. lc baron Roger estpri6 de donner com- munication de ces documents au comite du Bul- letin.
M. Eyries lit un M6moire ayant pour titre : Le Niger, le I\il , le Gii; par leu Reicliard , geographe alle- mand. — Cetle communication est renvoy(ie au co- mite du Bulletin.
Seance du 17 viai.
Lc procfes-verbal de la dernicre seance est lu et adopte.
]M. lo President rend compte du bicnveillant accueil
( 379 ) fait par madame la ducliessc d 'Orleans a la deputation qui a eu I'lionneur do lui presenter Ics dernicrs volu- mes des Memoires de la Soci^te. S. A. R, s'est entrete- nuc avec interet des progres de la geograpliie , des plus i-ecentes decouvertes , et de plusieurs voyages qui ont pour but de les entendre encore. Deja elle fait etu- dier la geograpliie a son fils ; le jeune prince aime cette etude , et son auguste mere fait esperer a la So- cicte qu'il en sera un jour le protecteur,
MM. les menibres du bureau de la Commission cen- trale se sont aiissi presentes chezM. I'amiral de Mackau, ininistre de la marine et nouveau president dela Society de geograpliie. II Icur a temoigne tout son empresse- ment a seconder les travaux d'une Societe a laquelle il avait deja appartenu des le moment de sa fondation.
M. le conseillcr d'Etat de Macedo, secretaire perp6- tuel de I'Academie royale des sciences de Lisbonne , remercie la Societe en son nom et au nom de cette Academie pour I'envoi de son Bulletin.
M. Vandermaclen ecrit a la Societe , pour lui offrir un supplement a la 2"= Edition de I'Essai de M. Heus- chling sur la statistique g^nerale de la Belgique , dont il lui a adresse precedemment un exemplaire.
M. Jomard offre a la Society , de la part de M. le comte Graberg de Hemso , ses Notices sur les progress de la geographic pendant les annecs 1842 et 18/13.
Le meme membro communique par extrait une lettre de M. d'Arnaud , en date du 22 mars dernier. Dans cette lettre , M. d'Arnaud rend comptc du voyage penible ct pdrilleux qu'il vient de faii-e dans le grand desert de Nubie, de Rorosco aAbouliamod, ainsi que de plusieurs autres excursions plus recentcs. II an- nonce que le vice-roi songe toujours a un nouveau
( 380 ) voyage a la recherche des sources du Nil-Blanc , ct qu'il s'occiipe de faire construire deux politsbatlnients a va- peur pour continuer a remonter le fleuve.
M. le vicomte dc Santarem fait un rapport sur les ti-avaux de la Societe royale maritime et coloniale de Lisbonne.
M. Roux de Rochellc fait Tanalyso d'un ouvrage de M. Pi'escott surl'ancicnne civilisation duMcxlque,sur sa conqucte et sur les decouvcrtes ulterleures do Fcrnand- Cortes.
Ces diverses communications sont renvoycics au co- mit(^ du Bulletin.
La Societe apprcnd avec douleur la mort de M. Du Ponceau, unde sos corrcspondants Strangers, et pre- sident dc la Society phllosophiquc amerlcalne de Plil- ladelphie. L'assembl(ie , vivement touchee de la perle d'un savant si recommandablc, demando que I'ex- pression de ses regrets solt consignt^e au proces-verbal.
UEMBRE ADMIS DANS LA SOCIliTi,
Seance du 17 mai IShh. M. Serajihin Lallier , capltaine au long cours.
OUVRAGES OFFERTS A LA SOCltXE.
Seance du 12 am/ IShh.
Par 31. le ministre de V agriculture et du commerce :
Documents sur le commerce extcrieur, n"' 132 a 144.
Par I'Jcademie de Rouen : Precis analytique de ses travaux pour 18/|3 , 1 vol. in-8.
ParM. Gabriel Lafond : Voyages autour du monde : mers duSud.dc la Chine ct archipcls do I'lndc, 137' a 1/|2' livraison.
( 381 )
Par les auteurs et editeurs : Nouvelles annalos des voyages , mars. — Annales maritimes et coloniales , mars. — Bulletin de la Soci^te geologique de France, 2° serie, t. I", feuillos 11 a 13. — Journal d'ediication populaire , bulletin de la Societi^ pour I'instruction ^lemcntaire, fevricr. — L'Investigateur, journal de rinstitutliistorique, avril. — Memorial encyclopedique, mars. — L'Eclio du monde savant,
Assemblee generale du 26 avjil ISili.
Par- 31. le directeur-general du Depot de la guerre : Nouvelle carte topographique de la France, levee par les officiers d'Etat-Major , et gravee au DejDot g^n^ral de la guerre , sous la direction de M. le lieutenant- general baron Pelet, feuilles 17, Cherbourg. — 30 Lisieux. — 63 Mortagne. — 'dh Beaugency. — 95 Or- l(^ans. — 112 Dijon. — 137 Chalons- sur-Saone. — 1/19 Saint-Claude , et 169 Belley.
Departements de laMarne, du Bas-Rhin etde Seine- et-Oise , extraits de la carte topographique de la France , 18 feuilles.
Carte generale de I'Algerie , dressee au Depot general de la guerre, f^vrier ISZi/i. 1 feuille.
Cartes des provinces d'Oran, d'Alger et de Constan- tino, dressees au Depot general de la guerre, fevrier \U!x , 3 feuilles.
Par M. le minis tre de la marine': Cartes hydrogra- phiques publiees au Depot gent^ral de la marine , do decembre 18A3 a avril 18/iZi. — N° 1,007, plandugolfo de Saint-Ti'opezou de Grimaud (departoment du Var). — 1,008, plan du golfe Jouan , du port do Cannes et de ses environs (departoment du Var). — 1,009, plan du port d'Antibes et des environs ( ddparlemont du
( 382 )
\ar). — 1,010, plan dos emiroiis do la C.iolal, de Cassis et de Port-Miou ( littoral dcs IJouchcs-du • Rhone). — 1011. Position des ilcs Saint-Felix ot Saint- Ambroise sur la cote du Perou. Position des ilcs Ilor- migas sur la cote duCallao de Lima (P6rou). — 1012. Plan des altdrages et du mouillage dc Scala-Nova. — 1013. Plan d'atteragc du Callao de Lima (Perou);
\ 0} age autour du monde ex6cut6 sur les corvettes de S. M. VUranie et la Physicienne, pendant Ics annecs 1817, 1818 , 1819 et 1820, par M. Louis dc Freycinet. Magnctisme terrestre , 1 vol. in-Z|.
Voyage autour du monde, execute pendant les annexes
1836 et 1837, sur la corvette de S. M. la Bonite , com-
mandee par M. Valllant. Ilistoire naturelle , Zoologie
par MM. EydouxetSouleyet, la^livraison. — Dotaniqnc
par 1\L Caudicliaud, 8' et O"" livraisons.
^'oyage autour du monde sur la fregatc la Melius , pendant les annees 1836-1839. — Atlas d'histoire na- turelle , 5' ot 6*^ livraisons.
Voyage au pole sud et dans rOcoanie , sur los cor- vettes VJs/ra/abe et la Ze/ee , pendant les amines 1837-1840. /lydrogrnp/i/e, tome 1". — Atlasd'histoiro nalLiroilo. Zoologie, 10" livraison. — Uotaniqnc , 7' livraison.
Campagnc de ciiTumnavigation do la frigate r.^/7<''- niisc , pendant les annees 1837-18/iO, tome 3.
E.\pos6 dcs operations geodesiques relatives auxtra- ^aux liydrographiquos execulos sur les cotes moridio- nales de France , sous la direction de feu M. Monnici', par M. Begat, 1 vol. \n-h.
Annuaire dcs marees dcs cotes de France, juinr IS/lO, 18/i2, 1843 et I8/1/1 , public au Depot do la marine, par .M. Clui/.allon , /| vol. in-18.
( 383 )
Par M. le r/i/nistre de I' Instruction intHiquc : \uyage en Orient par M. Leon deLaborde, dcuxllvraisons.
Description de I'Asie-Mineurefaite par ordre du gou- vernement francais, de 1833 a 1837, par M. Charles Texier.
Description de I'Arm^nic, la Perse et la Mesopota- mie, par M. Charles Te'xier.
Par 1M. le miiiistrc ties affaires etrnngeres : ^ oyagcs pittorosques et romantiqucs dans I'ancienne France , par MM. Nodier, Taylor etCailleux.
Par M. Hoinniaire de Hell : Les steppes de la mer Caspienne , le Caucase , la Crimee et la Russie nieri- dionalc , 5' livraison.
ParM. Ober iMnller : Hochkarte Aon Dcutschland.
Par M. Delaporte : Specimen de la langue bei'bere, 1 cahier in-f° lithographie.
Par M. Scrantzler : Apercu general geographique et statistiquc de I'empire de Russie, 18Zii, brochure 8".
Par JSl. lun'cnstei/i : Karte von Nassau un thellen dor angranzendcn Staaten bis Ilanau , Giessen , Olpe , Bonn und Creuznach, 1 feuille.
Seances dcs 3 et 17 mai 18/iZi.
Par M. le viinistre de Pagriculture et da commerce : Documents sur le commerce cxtericur, N"' Zi5 a 157.
ParM. Vandermaelcn : Essni sur la statistique gene- rale de la Belgique , par M. Ileuschling ; supplement a la 2"= (Edition. 1 vol. in-8.
Par M. le comte Gr-aberg de Hemso : Degli ullimi pro- gress! della geografia. 18/il et 18ii2 ; 2 broch. in-8.
Par M, Jl. yld. Camns : Discurso inaugural prc- nunciado para la solcmne apcrtura del curso de J8/|3- hh en la universidad literaria dc esta Corte. Madrid , 18/i3 , broch. in-8.
( 384 )
ParM. Brafais : l{a[)i^oi'l ii M. le maire do Lyon, sur les observations recucillies par la Commission liv- drometrique , par MM. Lortet ct Bravais ; broch. in-8.
Par les aiiteurs et editeiirs : Annales maritiracs el coloniales, avril. — Bullolln de la Society de geologie, avril. — Journal d'education populaire , mars. — L'Invcstigateur, journal de I'lnstitut historiquo , mai« — L'licho du mondc savant.
Errata du Bulletin d'avril i844-
p. 265 , ligne 20, confinee : liscz confirmee.
p. 3l5 , ligne 5, a fine, et 3i6 , 1. 2 , Catervood : lisez Cathervood, P. 3i8 , lifjne 2 , Venture , de I'aradis : lUez Venture de Paradis. //»(■</, ligne i5 , M. D. Arnand : liscz d'Arnaud.
BULLETIN
DE LA
r r I
SOGIETE DE GE(3GIIAPH1E
JUIN ISlih.
PREMIERE SECTION.
MEMOIRES, liXTRAlTS, ANALYSES ET liAPPOHTS,
ILE DE MADAGASCAR.
RKCHERCHES SUR LES SAKKALAVA ,
PAR M. V. l\OEL.
( Suite et fin. )
Apr^s le jugement des rois a leur mort, usage salu- taire que Ton est etonne de trouver, a des epoques si eloignecsl'une de Taulre , dans la patrie des Pharaons ot chez Ics incultes habitants de Madagascar, la cou- tume la plus remarquable chez les Sakkalava est sans contredit cclle du Fatlidraha ou de C identification da sang. Aucune dc leurs pratiques n'obvic avcc plus d'efiicacite a rimperfectioii de leurs lois civiles. L'on se rappelle , en elTet , sur cfuelles bases fragiles repose la sociele sakkalava : le pere peut renier tons ses I. JUIN. 1. 26
( ;i8(3 )
enfants indistinctcmoiit , et ccux qui ont (^'tc' repousses par lui n'onl d'aulrc moycn pour coiiquerir leur place clans la societe quo de se fairc adopter par iin etranger. Sans doule les premiers qui se firent IVeres de sang furent deux rnalhcureux auxguels la ressource dc I'adoption fit defaut.
La ceremonie du Fattidraha s'accomplit dc la ma- ni6re suivante : I'un des assistants reniplit uii vase d'eau douce (malietsaka n'oumi) et d'eau dc mer (rfinau); \ A mpittoukn- Fattidraha ou proclamateur du faltidrrdia met dans ce vase la poinlc d'une lance (sabofdia), dont ceux qui aspirenl a dcvenir iVeres empoignent la liampe a deux mains, a la hauteur de leur poitrine. L'Ampittofika-Fattrldr;dia s'accroupil alors aupres du vase, et celui qui la rempii y met successivement sept parcelles d'argent, sept grains dc poudre (poundi) , sept pierres a fusil (vatti-f;di) , sept balles, sepl os de bceufs (tuofda-aukena) , sept ca2urs d'herbes (tsoka-ahitsi) , sept grains de sable ])ris dans un trou de fourmis (allanga-ni-viltiki) , sept fragments de r^corce d'un arbre appele Mangara-Hara , sept morceaux de meu-mite (villanga) , et sepl pincecs de terre prises a cbacun des qualre points cardinaux (zourou-n'lani). Ces difft^rents objets se nomment Ics temoins de Videntifuntion du sang ( sahadani-falti- draha). Cbaque fois que I'un d'cux est depose dans Ic vase, rAmpittouka expliquc avec prolixil(!!, tout en frappanl a petits coups le fer de la lance avec un cou- teau , les devoirs particuliers dont cet objet est comme le signe mneniolechnique ou I'emljlime , et ])rofere rles menaces conlrc celle des parlies conlractanlcs qui oserail les enfreindre. Lorsque lous les temoins sonl dans le vase, rAinpiUofdva se resume ;'i peu prcs en
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ces termes : « 0 vous (anarco) qui vous liez a la face » des clieux et des lioninies des lourds liens du fatti- » draha , avant que votre sang coule dans les veines » d'un autre vous-meme, rappelez-vous bien le sens de » chacun de ces temoins. Get argent veut dire que vous » devez partagcr en freres les richesses que les dieux » vous envoient; cette poudre , cesballes et cespiei'res » a fusil doivent vous faire souvenir que les combats » et les dangers vous seront desormais communs; ces » OS de bceufs signifient que vous devrez vous livrer en- » semble a la joie des festins; le cceur de ces herbes, » que vous devrez errer ensemble dans les profondeurs » des forets , si un sort ennemi force I'un de vous a fuir » la societe des homines ; ce sable arrache au trou de >) la fourmi, vous dit que vous devez travailler ensem- » ble ; cette marmite , que vous devez manger le meme » riz sur la meme natte ; et cette terre prise aux quatre » points cardinaux, que chacun de vous doit suivre » partout son compagnon> quelles que soient la dis- )) tance et la direction ou I'auront pousse les destins. » Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept; tel est le » nombre de chacun des ttJimoins de votre alliance ; » c'est aussi le nombre des jours de la semaine et celui » des ann^es qui s'ecoulent avant que Ton recom- » mence a les compter; il vous indique que vous de- » vrez vous aider mutuellcment aussi longtemps que » les jours et les annecs y seront compris. Un , deux , » trois, quatre, cinq, six, sept; si I'un de vous viole )) ime seule des obligations du fattidrrdia , que son » existence soit hrisce (maitou) , el qu'il p(^risse )) comme un malfailcur, les mains li^es derric're le dos, » par le fer acere d'une zagaie semhlable a celle qui » recoil aujourd'hui ^os serments. »
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Cettc harangue teriuineo, luii dfs deux freies prend
If ct)utcau des mains do rAmpiltouka, s'en fait une
incision dans le creux de I'estomac , ct le passe a son
compagnon, qui accomplil la memc opi^ration. Chacun
d'eux prend alors une feuille d'arbre quelconque, la
plie en cornet, puise dans le vase aux ingredients une
certaine quantity du liquide qu'il contient, fail lomber
dans le cornet, avec le couteau, quolqucs gouttes du
sang de son compagnon , en opere le melange a I'aide
du meme instrument , en boit une partie et verse le
reste sur celui-ci en repetanl la formule sacramenlelle :
Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, si tu \ioles
Ics devoirs de notrc fraternite de sang, tu es mort
(fittou-mailou).
Les Sakkalava sont persuad(5s que celui qui cnfreint les lois du fattidrfdia ne saiu-ait prosperer ; ils sont egalement convaincus que , lorsque I'un des deux freres mcurt, I'autre meurt subitement , ou ne tarde pas a le suivre.
La circoncision des enfants (fizaratsi-n'tsiki) est chez les Sakkalava, comme I'indiquc son nom, I'occa- sion d'une fete importante. Elle a ordinairement lieu parmi les Antalates lors des solennitcs du Muoulad ce don de la naissance Mahomet , et parmi les autres Sakkalava a des epoques indetermin^es. Pendant que les parents se li\Tent a la danse , boivent outre mcsure et font bonne cherc, les enfants sont conduits a I'op^- ratcur ou ampizcu'atsi. Lorsque tous les enfants ont subi la doulourcuse operation , celui-ci rcmet leurs d^pouilles aux assistants, qui les introduisent dans leurs fusils en guise de bourre, et en font une d^charge ge- nerale. A ce signal atlendu impatiemmenl, les rejouis- sances recomraencent, et durent, comme toujours, jus- qu'a extinction de comestibles ct de boissons.
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Les Sakkalava restent strictcment renlonnes chez eux et s'abstiennent de toute affaire pendant certains jours qu'ils appellent fait. Chaque I'amille , cliaque individii a les siens qu'il chome scrupuleusement. Le nombre de ces jours est conside^rable parrai les classes superieures , surtout parmi les princes ; il n'est guere que de deux ou trois chez la plupart des Anakombo.
Chaque Sakkalava , en particulier, a egalement ses mets Ja/i, auxquels, dans ses idees, il ne saurait gouter sans s'exposer a une mort certaine. Le pore est fali pour beaucoup de personnes ; quelques aniniaux doi- vent a la seule couleur de leur robe I'exclusion dont ils sont frappes. Le chat tigre (karou) , par exeniple, est fa/i, et se voit, a ce titre, repousse de toutes les cases ; tandis que ses confreres au poil blanc et noir sontpartout adniis et fetes.
Les Sakkalava attachentune valeur superstitieuse aux moindres objets qui ont appartenu a leurs ancetres. lis suspendent a leur cou les plus portatifs, quand ils vont a la guerre, et sont persuades que ces sortes de reliques les rendent invulnerables. Ils placent ceux de ces objets qu'ils ne peuvent porter avec eux dans quel- que coin de leur case, et leur vouent un culte r6el. Les uns et les autres sont appeles ahott/i oufangafotidi , pr^servateurs.
Les tombeaux sont pour les Sakkalava I'objet do la plus profonde veneration. Ils les visitent frequemment, evoquent les manes de leurs peres, et les prient d'in- terceder pour eux aupr^s de Znnnhnri, singuliere divi- nite, dont, malgrenos efforts, il nous serait impossible " de donner une definition tant soit pen exacte. Cette action se nomme inidznurnu ami iii mza-fii, et, a notre avis, elle constitue la partie seripus(% inviolable, de la
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roligioii dcs Madecasses, si laiil 11 \ ;i quo les Alade- casses aient une roligion.
^ MT. Exercices corporeh.
Les Sakkalava scrnblonl avoir hoiiHuir do lout Ira- vail penible ct continu, lis ne sc meltent pas moins de deux ou trois cents pour faire la besogne d'une ving- ta'ne d'Europeens. Si, par exemple, ils transportont un arbre abatlu , toutes les parties en soal supporlees par le dos de quelqu'un d'entre cux; ceux qui ne peuvcnt coop^rcr au transport d'uncmanicrc aussi ac- tive s'agitent autour de Tarbre, liurlcnt de joic a clia- que mouvement qu'il fait en avant; ou , quand il ne va pas assez vite a leur grci, s'armcnt de ses branches ct Ten frappent en vocifcrant, comme pour lui com- muniquer une velocite magique, Au reste, quel que soit le genre de corv^es auquel les souraettent leurs chefs, il est impossible de travailler de meilleure grace qu'ils ne lefont. Jamais leurs chants ne sont plus vifs, leur allure plus ^chevelee, leurs danses plus furibondes et leurs cris plus joyeux que dans ces occasions. Mais toute cette ardeur n'est qu'un feu de paille , et ce n'esi qu'aprcs un long ropos que les plus intrepides se di- cidcront a roprondro dc nouveau la bechc ou la co- gnac.
La danse destravailleurs consiste siniplcment en gam- bades plus ou moins gracieuses. Les guerriers lancent quelquefois, cndansant, leurs armes a uiic hauteur prodigieuse, ct les saisissent a leur chute avec une adressc qui fcralt lionte a nos plus cilebres tambours- majors. Les danses dc caraclere sont I'apanage ex- ciusil'des domestiques, des esclavosol dosboulTons. Les
( 39J ) danseurs , plus uu inoins nombreux , sont armcs de leurs lusils, se niettcnt sur deux rangs , marchent en cadence, mais avec gravity, se croiscnt, abaissent ou el^vent leurs armes, sanspourtant se nienacer, et con- tiniient ces pi'omcnades insigniliantes, jusqu'a ce que le mailre leur crdonne de se rctiver. La danse caract6- ristie des fouimcs est a peu prfes lameme que la prece- dente ; elles tieniient dans leur main droite une longue baguette, et balancent legferement leur corps en clian- tant un refrain invariable. Les coryphees de la troupe sont souvent des bekatsi , espece d'etres degrades qui op^rent sur eux-memcs la castration , vivent avec les feiiiraes, en portent les vetenients, et dont le veritable sexe reste souvent un ^ternel probl^me. Le trait sail- lant de la danse des bouffons, pcrsonnages distingues par la clocliettc attacliee a leur cou, un cliapeau bi- zarre, et plus encore par leur dilTorinite naturelle, est un tatonnement seniblable a celui d'un honime qui chercherait quelque chose dans I'obscurite, et, en cer- tains moments indiques par la mesure pr(!!cipit6e de la musique, une sorte de convulsion, d'agitation febrile et voluptueuse dans tout le syst6me charnu, princi- palement de la partie subjacento aux reins. L'instru- ment au son duquel s'execulent ccsdanses est un tam- tam ( en sakkalava, liazou-lrdie ) ; le monotone dzedzi, la {•allika aux sons stridents et varies, et la flute , ne servent aux Sakkalava que comme passe-temps domes- tique aux heures prolongees de \qmy far nieiite.
Les cxercices dans lesquels les Sakkalava deploient le plus d'adresse , sont la chassc aux boeufs et le jeu du dzoiilouiiuihe. Ilsse rendent en ti^oupe dans les forets oil ces aniniaux vivent a I'etat sauvago, les cernent, et les saisissoni par les cornes ou par les jarnbrs au
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moven d'un lacet, au moment oii Us cherchent a se frayor un passage paiTni Ics chasseurs. La tradition at- tribue rinventlon de la chasse au lacel aux premiers \ oula-Mena. Le dzouloumdhe est le uieme esercice que celui de la chasse au lacet, raoins toutefois les dan- gers. Les joueurs, armes chacun d'unecorde loveedans leur main, se divisent en deux bandes, faisant face I'une a I'autre sur toute leur longueur. L'un d'cux jetteavec force, dans I'mtervalle qui separe les deux camps, en lui imprlmant un rapide mouvement de rotation, une roue formee par deux morccaux de bois croises l'un sur I'autre; tons, alors , jetlent successivement leur lacet , et celui qui arrete la roue dans sa course I'a- mene a lui et la jette aux autres joueurs.
§ \ III. Habitations , vetements , nourrititre.
Le logement des Sakkalava de Nossi-b6 se compose pour I'ordinairc de deux pieces, construitos separe- ment : la case a coucher et la cuisine. La premiere occupe un cspace d'environ 12 pieds de long sur 8 de large ; chacune des faces correspond a peu pres exac- tement a l'un des quatre points cardinaux , les deux pignons regardant le nord et le sud. La porte princi- pale est toujours vers le c6t6 droit de la pai-oi meridio- nale ; les issues particulieres , c'est-a-dire celles qui sont reservt^es a la famille , sont percees dans les au- tres parois, indistinctcment. Quatre poteaux do 3 pouces de diametre chacun et de 8 pieds de hauteur environ, Torment les angles de la case ; d'autres sont places entre ceux-ci , en plus ou moins grande quantite, sui- vant le nombre des portes particulieres que Ion veul avoir. Trois traverses (liiizou-lava) fixees aux pot^dux
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des angles avec des cordes et au moyeii d'entailles , comme toutes les autres pieces de la charpente , Ion- gent horizon talement cliacune des pai-ois dc la ease ; la traverse supcricure, ou sabliere haute, ainsi que I'entrait, sont a environ 8 picds du sol ; celle du mi- lieu, ou sabliere moyenne, a 5 pieds, et la sabliere de charabi-ee, sur laquelle repose le plancher (rapaka) , a 1 pied ou 1 pied 1/2. Les arbalitriers se fixent aux extremites superieures des quatre poteaux principaux ou coi'niers, en depassant d'un denii-pied le soniniet du pignon ; c'est dans I'espece de fourche formee par le croisement de ces deux pieces que se pose le fai- tage. Lorsque les pieces superieures dc la charpente (talan-douha) sont en place, les ouvriers s'occupent du plancheiage , qui se fait en placant des lambourdes de distance en distance sur les sabliei-es de chanibrc^e, et en les recouvrant de gaulcttes et de branches de ravinal avec leurs feuilles que Ion ti'esse avec soin, Les parois et la toiture se garnissent de la menie niani^re, mais avec nioins de solidity.
La cuisine est batie sur de moindres proportions et n'a pas d'aulre plancher que le sol. Ln trou creuse dans la terre pres de la porte principale sert de foyer (fata) ; une ^tagere (salaza) elevee au-dessus du foyer sert a faire boucaner le poisson. Les esclavcs couchent dans la cuisine svu' des nattes grossieres; les niaitres y prennent souvent leurs repas.
Les armes des Sakkalava sont appendues horizonta- lement a la paroi de la case qui fait face a I'entree ; ils dorment sur une espece de canape appel6 kibbane , ou sur le plancher, lequel est souvent recouvert d'une natte artistenient travaillee. La cuisine contient lous les instruments aratoii-cs et culinaires. Les families
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nombreuses occupout quolquel'ois \'uif;l logoin(M\ls se- pares , qui forment une sorte tie liameau gouvcin6 par le chef lie la famille.
Lcs maisons des chofs a Nossi-B6 ne sc distiiiguent des habitations ordinaires que par dos dimensions un peu plus grandes, et Ic soln plus partlculic'renient apportd a leur construction ; celle de la reine elle- meiTie n'est composee que de quelques maisons alTec- t^es a diflfercnts usages , et construites , comme les aulres , avec des places dc bois non 6quarries ct des branches dc ravlnals. Mais il n'en est pas de niemc a Mcnab^, Marouvouhai et Boueni, ou les maisons ordi- naires sontpresque toutes en bois et n'ont dc i'euillage qu'a leur partie superieure. Les maisons des grands dans ccs villes sont Ires spacieuscs et construites en planches 6paisses, taillees a grand'peine , mais Ires proprement, aumoyen du hachet madecasse. L'habita- tion d'Andrian Souli a Boueni (§tait composee d'un grand nondire dc cliambres reunles, chacune des- quelles avait 40 pieds de long sur 25 de largo et autant de hauteur. II y a sans doute loin crune con- struction semblable a I'habitation que les Sakkalava de Nossi-Bc out batie a la reine qui partage leur exil. Cettc habitation n'a de particulier que son entourage , especc de mur en bois forme par une reunion de poulres parfaitement jointes entrc elles et de 12 a 15 pieds de haul, qui enceignent un carr6 d'cnviron 60 pieds de cote. La portc de V Entourage de Cor (fefi- n'voCdamena) , commo I'appellent cmphatlquement les lideles de Tsi-Oumei-Rou , n'a pas plus de I pied et demi de large, ctle seuil, qu'il faut enjamber, sc trouve a pres de 2 pieds du sol. Le mode do fcrmeture de eel (Mroit passaije est curiiii\ . n),ii^ cxlreniement in-
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coniinodo pour lo \isitGur inollonsil ; il consiste en huit on dix poutrcs suspendues qu'il faut pousser for- tement d'en bas et ecartcr avoc effort lorsqu'on veut penetrcr dans linterieiu'. En temps de troubles, les poutres mobiles sont fixees solidement au seuil , et la porte n'olTre alors pas moins dc resistance aux efforts de I'assaillant que Ic reste de I'cnceinte. Outre les maisons de la reine, lEntom^age de lor, puisque c'est le nom convenu, renlci'me encore I'estrade oii cette princesse donne ses audiences particulieres, et oii ont lieu les assemblees I'oyales. Cette estrade est en plan- ches ^palsses et grossierement travaillees ; elle a 2 pieds de hauteur et n'est abrit(^e que ])ar une mechante toiture.
Les villages ou villes des8akkalavaont en g<^nei'alpeu de regularite. Les lieux que ces peuples aftcctionnent pour leurs habitations sont, dans I'interieur, les points les plus eleves des montagnes et des collines qu'ils entourent de fosses profonds et de hautes palissades , et, sur la cote , les plages de sable (fassa-n'dava) , dont la surface unie leur permet , au moment du danger, dc mettre promptement a (lot les pirogues qui doivcnt les soustraire aux poursuites de leurs enncmis. Les plaines ne contiennent guere que quolques miserables cases qu'habitent tenipoi'airement les esclaves employees par leurs maitres a la garde des troupeaux ou a la culture des champs.
Le vetement des Sakkalava de la classe moyenne et des classes superieures est compose de deux pai'ties ; la premiere est une toile en rabane ou en coton , dont ils s'enveloppcnt la partie inf^rieure du corps, et (ju'ils fixent autour des handles par le moyen dune ceinlnvv (fe-sTki). r.eltc (oile, ap|)elee vetemeni inlVMieur (sTki-
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ainbani) est quelquefois boidee dune fraugo en soio identique pour la foi ine ct les couleurs a cellos qui se iabriquent dans I'Onian et a Zanzibar, et dont les Arabes do ces pays vendont la niatiere aux Sakkrdava- Antalotes; les femmos do ceux-ci la tissent d'apros les procedcs usit^s a Madagascar. La soconde partic du vetement sakkalava , ou vetement superieur (siki-an- teti, sembou , et aussi lamba) , est une sorte de man- teau avec ou sans iVanges dont ils so drapent a I'es- pagnole, et dont I'etolTe en soie, en colon ou en rabanc varie de finesse , de couleur et de dossin , selon la ri- chesse, les gouts ou la qualite des individus qui le portent.
Lorsquc les Sakkalava se disposent a combatti'c , ils se debarrassent d'abord de leurs manloaux , et,pour plus de liberie dans leurs mouvemenls relevent devanl eux, apres les avoir r6unis entre leurs jambcs, les deux extreniites de Icur sTki-anibani qu'ils tordent en- semble et fixent a lour ceinturc. Ils se mettent aussi dans cet etat voisin de la nudity toutes les fois qu'ils Iravaillent la terro et qu'ils coopercnt a I'^rection des cases , au transport des arbres , et meme lorsqu'ils ne font que diriger ces travaux. Les esclaves des deux classes ont prosque toujours leur sTki-ambani arrange de cette I'aron , et portent rarement le manteau , que I'on pourrait considercr coranie le signe de la fran- chise. Les femmes libres ou esclaves ont pour tout vetement une chemise en rabanc ou on colon ol vni mouchoir dont elles se couvrent le cou. Au lieu do porter lovns onfanls sur leurs bras, comme les Euro- pecnnes, ou sur lours 6paulos, comme les femmos arabes, olios les logent onlro leur dos ot lour chemise, positioi) aussi commode pour les onlanls (juo pour los
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meres, lesqiielles ilemeurent ainsi librcs do leurs deux bras. Les colliers, les bracelets et les baguca, qui parent assez freqxiemment le cou, les bras et les doigts des liommes, sont des additions indisjiensables au cos- tume des femmes sakkalava. Les deux sexes consacrent une notable partie de leur temps a I'entretien de leur chevelure, qu'ils laissent croitre dans toute sa lon- gueur ; lis la partagent sur le sommet de la tete , et la divisent en milliers de petites tresses cjui tombont avee elegance sur leurs 6paules. Les Antalotes seuls et les osclaves provenant des marches du continent alVicain sont priv6s de cet ornement , les premiers parce que les maliomctans sont dans I'usage de se raser la tete , et les seconds parce que la nature laineuse et rebelle de leurs cheveux ne leur jiermet pas de suivre la mode sakkrdava.
La base de la nourriture des Sakkalava est leriz, dont nous ferons connaitre les nombreuses varietes en pai- lant de I'agriculture ; la viande de boeuf , plusieurs va- rietes de mais , le millet caffre , les patates douces et les ignames ; les Icntilles , les haricots , les feves et les ambi'evates viennent en seconde ligne , et sont pour eux une precieuse rcssource dans les temps de disette. Parmi les Fruits dont ils font la plus grande consom- mation , sont diverses vai'ietes de bananes auxquelles ils laissent rarement le temps de murir; I'ananas , la pasteque , la mangue , la vangassaie , la cltrouille et une mauvaise espece de melons. Ils se nourrissent en outre de la chair des moutons , des ch6vres , du pore , des makis , et de la grosse chauvc-souris ( i>espertilio vampyrus • en sakkalava fannlhi ) , et enfin de lait de vache , et de toute espece d'oiseaux, le corbeau, le- pervier et les autres oiseaux de proie exceptes.
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Los Sakkala\a tk-s cotos luangeiit Ixaucoiij) do pois- sonsqu'ilsprennent a I'haine^on, au filet ot au panior, et surtout heaucoup de testacy's ct dc crustac(^s qu'ils pechent a basse mer. Les poulcs , le riz , le niais , les brides et les citrouillcs se cuisent a I'eau dans des marmites en terre , ct ils assaisonncnt cos aliments avec du beurre et du sel ; les racinos nutrilivos ct cer- taines bananes se font culrc sous la ccndre. La viande so mange toujours rotie et saignanto , ct les fruits sonl ordinaircment consonniK^s r.vant Icur nialuiitf.
Les Sakkalava preiment lours ropas ^.ur uiio natte. Les mets sont contcnus dans des plats qu'ils achetent aux Antalotcs ou qu'ils fabriquent eux-memes, et quelquofois dans des feuilles de ravinals. Ils se servent ordinaircment dc lours mains pour manger; mais beaucoup de manages cmploiont a cet elTct des cuil- Idres en bois. L'eau est leur boisson ordinaire ; ils r6- scrvent pour los jours de fete les liqueurs fortes qu'ils fabriquent ct cellos que leur vcndent los Europoons. Les provisions d'oau sont contenues dans des troncs dc bambou , et ils se servent ordinaircment pour boirc de calebassos partagcics on doux. Lours repas ont lieu a des licures fort irregulieros ; ils passent souvent la plus grande partic do la nuit a causer de nouvelles politiqucs aupr6s do la maison des chefs, et dorment jusqu'a midi. Lorsqu'ils mangcnt , tous ob- servcnt Ic plus grand silence, et ne s'occupont qu'a salisfairc leur appctit. D^s que I'un des commonsaux est rassasic^ , il se 16vo sans la nioindre ccromonic , saluc, part, ou bien va s'asscoir dans un coin dc la case , ct attend pour entamcr la conversation que les autros aioiit cgalcmcnt satisfail loin- a]>i)olil. Qunnd un \iNiloin' aiii\o pendant lo repas, s'il n'a pas onxic dc
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proliter de la circonstancc , il no Tail que montrcr sa tele a la porte de la case , salue et passe son che- min ; s'il entre , chacun lui fait place et le laissc man- ger comme il I'entend et comme il pent ; niais il ferait injure au niaitre de la maison en s'abstenant de pren- dre part au repas, quclque maigre ou quelque avance qu'il fut.
g IX. Maladies.
Les maladies les plus repandues cliez les Sakkalava sont le kat/i et le koiitld. Lc hatti est une sorte de luroncle qui sort en plus ou inoins grand nombre ; le koulla ressemble a un abces ; le malade ressent avant d'cn etre allllge une douleur aigue dans toutes les articulations. Les ainpitahn- koulla traitent cette derniere maladie , ainsi que le hatti , par I'application du sue de certaines racines et (^corces. Le sefou est la maladie la plus commune apres celles que nous venons de mentionner : c'est une espece de croup. La lepre [dngou-nun ou talieni) est aussi assez commune. Lo kihboH houi est une plaie continue qui nait ordinaire- ment sur les jambes et ressemble a la partie dun membre sur laquelle on aurait applique un vcsica- toire. Les Sakkalava regardent cette maladie commo incurable ; toute la science de leurs medecins se borne a empeclier le mal de s'etendre. Le kizdvou est une maladie qui attaque I'epiderme, le detruit, et fait tom- ber les cils, les cheveux et la barbe. Les ampitdhn- kizdi'ou parviennent quelquefois a la guerir; mais si le malade n'est pas traite a temps, son corps entier se couvre de pustules , et il meurt ordinaircmont apres deux ou trois ans de souflrance. Le soi'iraka est uiic simple affection de I'epiderme, que les medecins sak
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kalava guerisscnt souvent, quand cllc nVst ])a.s tro]) ancienne : los parties attaquees sont tl'uu blanc mat (I6sagr6ablc a I'cEiL L't'lephantiasis ((Ijriddi) nous a paru avoir chez les Sakkalava les mfimes caractores que celui qu'on a observe en figypte, en Arabic ct rlans rinde. All rosto , quoique les victimes de cette torril)le maladle soicnt assez nombreuses aux iles Comores et dans cellos do la cote orientalo d'AlVique, clle est excessivement rare a Madagascar. Beaiicoup de Sakka- lava sont affliges d'hydrocMes ( voiuoutsl) d'une gros- seur extraordinaire , pour la guerison desquels la science de leurs mcdecins est impuissante. Lo soii- mindrn attaque le nez etlalevre superieure, qu'il ronge jusqu'aux os. L'epilepsic [(u-t'le \ii hoiiron ou iiuil de Voisemi) n'est pas moins frequente a Madagascar qu'en Europe. Les maladies v^n^riennes n'y sont non plus pas moins nombreuses que dans ce dernier pays, mais les chancres seuls (tsilimbaza) y sont dangereux; les gonorrhees [vania anipanroti/cn , morbus canis) sont si peu de chose aux youx dcs habitants, que beaucoup d'entre eux les laissent passer a I'etat chroniquc, et les gardent pendant toute leur vie sansle moins du monde s'en inquieter. La fievre intermittente [tdzoii) , ce flt^au si funeste aux Euroj)6ens qui sejournent sur les cotes i\e Madagascar, et aux Ilova (jue le commerce ou le service railitaire eloigne de leui's steriles mais salu- bres monlagnes, compte aussi de nombreuses victimes parmi ceux qui naissont dans son domaine. Sm' vingt indigenes de IJoutni ou du Mf'na-B6, cette maladie en enleve un ou deux; sur le meme nombre de Ilova ou d'Arabes, il n'en meurt pas moins de huit a dix, en- core ceux qui survivenl ont-ils presque toujours le foie attaque. La saison pendant laqueUe les fiovros r^gnent
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avec le plus d'intensite a Madagascar est I'^poque des foi'tes clialeurs et des jiluies ; elle est comprise entrc les mois de d(L'ceml5re et d'avril , el se nomme I'liivernage ou la raauvaise saison. Bicn qu'il y ait a Mayotte quel- ques niarais et des paletuviers, comme sur la cote N.-O. de Madagascar, les fi6vres y sont plus rares et out un caractere entierement difft^rent de cclui de la fievre madecasse. Les Europ^ens qui out contracts ccUe-ci ne perdent la paleur qui en est le stiginate que lorsqu'ils vont vivre dans un lieu sain , et encore sont- ils, meme dans ce cas , exposes a de dangereuses re- chutes. Quant a ceux qui restent dans le pays, apres avoir ecliappe aux preniiei's acces, ils s'habituent a la fievre, ils n'cn guerissent jamais. A Mayotte, au con- traire, les fievreux guerissent parfaitcment et repren- nent leurs couleurs sur les lieux memcs ou ils sont tombes nialades. Nous constaterons ici en passant un fait digne d'etre remarque, c'est que la mauvaise saison de Madagascar est justement la saison la plus saine a Mayotte , et celle que les habitants appellent consequemment la bonne saison.
^ X. Propriete territoria'e , agriculture, Industrie.
Les tei'res occupees par les sujets du meme souve- rain sont reputees la propriete exclusive de celui-ci, qui pent les leur retraire a son gr6. Toutel'ois la fai- blesse de la population sakkalava, comparee a I'eten- due du sol sur lequel elle est dissemini^e, et ses habi- tudes presque nomades, rendent I'exercice de ce droit pen redoutable au plus grand nombre : aussi I'ampan- dzaka-mandzaka ne s'en arme-t-il querarcment, el seu- iemcnt contre ceux dont les habitations avoisinenl de trop pres les terrains rovaux ou sacres.
I. juiN. 2. 27
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Le roi oonc6do dircctcruent ies terres aiix grands vassaux, cl ccux-ci partagent la portion de terriloiro qui leur est (iclnie ontrc Ies cliol's ainpaiid/.aka ou anatraudrian a leur devotion. Lcs families libres attach6es a ces derniers construisent un village au centre des terres qui leur ont ete alloueos. Les habi- tants exploitent les terres par corvi^es , ou plutot par contingents, Ic chef de \illage n'ayant pas le droit de forcer les honimes libres au travail , avant que le kab- bar ait jug6 lour cooperation n6cessaire au hien de la communaute. Le partage des r^coltos a lieu propor- tionncllement au nonibrc de travailleurs libres ou es- claves que fournit chaque faniille.
Les principaux produits du sol sont, a Boueni' Nossi- b6 et Mayotte, le riz , le mais, le coton, le tabac et les patates. Les vari^tes de riz quo Ion cultive dans ces pays sont :
Le vari-telou-vofila ( le riz qui dure trois niois) .
Le vari-lingo ( le riz liano ou qui viont dans les
lianes) . Le vari-vatou (le riz pierre ou qui vient dans les
terrains pierreux). Le vari-aranga (le riz sable ouqui viont dans les ter- rains sablonneux). Le vari tsi mat^ tsangourou-ni (ou le rizdont le plant
ne meurtpas?...) Le vari-tsi-lavou ( ou le riz qui nc tombe pas). Le vari-anghek6 (ou le riz aux grains serr^s). Le vari-be-ivou-ni (ouleriz tr^sl^gor). Le vari-lava (ou le riz long). Le vari-kalai (ou le riz mince). Le vari-be (ou le gros riz). Le vari-mandzatou (ou le riz qui centuple).
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Lc vari-maliia (on le rizniaigre).
Le varl-alatsa (oule rlz qui s'^gr^ne),
Le varl-bouta.
Le vaii-tolou avrra.
Le vari-kalanga.
Le vari-tera malande.
Le vari-vitou.
Lc vari-magounialaii.
Les vari6t6s que les Sakkalava cultivent le plus gene- ralement sont celles elites vari-be ot vfiri-kalai, parce qu'elles tiennent mieux sur pied et rapportent davan- tage. Cette derniere ct le vriri-mandzatau soul les plus estimees.
Le riz tolon-voula , comme I'indique son nom , met trois mois pour parvenir a sa maturite : on le seme dans les lieux bas a I'^poque dcs premieres pluies, c'cst-a-dire vers la fin d'aoiit , et il est en etat d'etre recolte au mois de novembre, qui est a Boueni r^poque des grandes pluies, Les riz \atou , tsi-lavou et le vari-be se sement en deccmbre dans les lieux hu- mides ct les marais. Les vari6tes tsi-mate-tsan-gofi- ron-ni , b6-Ivou-ni et lava se sement indifft^remment dans les mois de novembre ou de dccembre. Les riz mandzatou , maliia , kalanga , tera-malandi , aranga et bouta se sement a la fin d'octobre. L'on seme jjeu de riz lingo, parce qu'il tient peu sur pied et qu'aus- sitot mur il tombe et se perd.
A I'exception dcs inz lava, vatou ct tsi-lavou , qui mettent cinq mois a murir, toutes les vari^tes sont mures apr^s quatre mois.
Les Sakkalava ont trois especes de mais : le vazan- gombe, le ramaladi et le tsakoutsakou. La troisieme a (He import^c a Madagascar par les Europeens: les
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ej)is el los grains sunt cloux lois ])lus gios qiif ccux (les aulros qualitcs, et clle est recllement la nieillouro ; inals les habitants aiment mieux le ramaladi ct pr6- ferenl le rlz a loutes les especes de mais. lis vendent Ic ramaladi a moitie prix de cette premiere denree. Ceux du Menab6 pr^ferent au conlraire le mais au riz. Le tsakoutsakou demande trois mois pour murir ; le vazangombe et le ramaladi en mettcnt cinq.
Le colon de Boueni est d'mie bonne qualite : on I'y recolte en mai ct juin. Le tabac \ atleint une hauteur d'environ un metre. Apres avoir depouille ses leuilles de leurs cotes, on les tord comme pour en former une corde el on les fait sdcher au solell. Les Antalotes , les Comorois et les Souahilis machent ce tabac, quiserait probablement tres bon a fumer, s'il etait mieux pre- pare. On le sdme en mars et on le coupe en juin.
Les pays sakkala\ a fournissent en outre du fer, des boeufs, de la cire, de la soie, du gingembre , de la gomme-resine et de la gomme-copal , dc I'eb^ne , du sandal, ct une infinite de bois tinctoriaux, de construc- tion et d'ebenisterie.
La terre de Eoueni et du Mena-Be est si fertile, ellc est si liberale dc ses dons, que le cultivaleur n'a que de bien laibles elTorts a faire pour en tirer sa subsis- tance. La cannc a sucre , I'indigotier, le sesame , une foule innombrablc d'arbres a fruits , de plantes utiles , de legumes et de racines nourrissantes y viennent presque sans culture. La iente charrue et la lourde pioche sont inconnucs aux habilants de ces riches rontrees; une cspece dc levier en bois, arm^ a I'une de ses extremiles d'une petite bechc ((Ihrdi), leur tient lieu de I'une et de I'aulrc. Un petit hachet (famak*^) leur sert pour abatlre les arbres et pour faire du bois.
( liOb )
lis se donnent rarement la peine tie fumer les lerres appauvrles ; ils pr(5ftrent g^iit^ralement les abandonner ]iour des terrains vierges ou depuis longtemps en ja- cliere, dontlepaysne manque jamais. Quand, par un motif quelconque , ils conservent leurs anciennes plan- tations , ils les fument avec la cendre des lierbes et des Lroussailles qu'ils rassemblent en tas et auxqucUes ils mettent lo feu. Ils emploient dgalement le feu pour d^friclier les forets ; les racines des plantes sont arra- cbees a I'aidc du fibali ; les troncs calcines des arbres sont laiss^s debout, et Ion cultive le sol dans leurs intervalles. Pour dc'fricber les plaines qu'ils veulent ensemoncer, les Sakkalava y font simplement parquer leurs bceufs pendant quelque temps; les herbes foulees sous les pieds de ces animaux se melent a leur fu- niier, et le tout foinne avec la terre une boue grasse sur laquelle on seme le riz sans autre preparation. La semence , genec ou etouffee par des racines (^tran- geres, ne donne d'abord qu'une maigre recolte ; la seconde est plus abondante , et celles qui suivent ne laissent plus rien a desirer.
Quand le I'iz commence a pousser, les Sakkalava ar- raclient les pieds qui sont trop rapproches , pioclient la terre autour de ceux qu'ils laissent, et enlevcnt les bcrbcs qui pourraient nuire a leur devcloppement. La meme operation a lieu pour la culture du mais. Les pieds de riz et des petites especcs de mais sont espaces a 12 ou 15 pouces; les pieds de tsakoutsakou sont a une double distance les uns des autres.
Les fds de rafia et autres servant a la fabrication des etolTes appeUes pa gnes par lesEuropecns , s'obliennent on exposantau soleil, apres en avoir iirealablement cn- Irvo la pollicule , les feuilles qui rcnrcrincnl cetle utile
( AOG )
protluttloii. li nc icslo plus alors qu u Ics hunii.^clor et a sc'parer Ics lils avec les doigts ou avec un peigne. Les fcnimc'S unisscnt cos fils les uns aux autrcs par des noeuds jirosquc inipcrcoptiblos, et les dlsposcnt en ^cheveaux.
Les Sakkalava se servent , pour teindre en vert et en bleu fonc6, de rinfuslondcs feuilles dessd'chees do I'in- dlgotier (nOntsi). Deux ou trois lavages donnent la pre- miere couleur ; cinq ou six la seconde. L'infusion des feuillos de la nieme plantc niel6c a une infusion de feuilles de tamarinicr ouadu jus de citron, leur donne un bleu clair. Les baios de diversos varietes do paletu- viers (bonko), el celui d'un arbusle nomuie ardiiga , fournissent un rouge plus ou moins eclatant ; la racine du safran indigene (tamoutumou) donne une assez belle couleur jaune.
L'immersion des fils ou des etolTes a lieu au mo- ment oil la teinture commence a entrer en ebulli tion ; on les en retire quand elle est refroidie et on les fait s6cher au soleil. La meme operation se renouvolle jusqu'a ce que les objets a teindre aicnt la couleur voulue.
Le tissage, cbez les Sakkalava, no [)r6sente ricn de particulier comme precede. Le metier est tres bas, de sorte que rouvri6re doit rester assise a terre, sur une natte, les jambes (^tendues dans le sens de la cbaine. Le battant, les navettes, un petit instrument qui sert a saisir les fds qui se rompent, sont en bois d'(^bene ou d'un bois tresdur.
Parmi les pagnes que tissent les femmes des Anti- boueni,quelqucsunessontd'unegrandelinesse,d'autres sont reniar(juables par la vari6te des dessins et la com- binalson des couleurs. Mais les femmes de Saintc-Ma-
( 407 ) rie , cIduI uii coiilacl ties aiicieii avec Ics Europeons a d6velopp6 le gout, sont actuellement sans rivalcs pour la labrication de cet article.
Les Sakkalava se scrvent pour travailler le bois d'un lourd levier, dontl'un des bouts esttermine en ciseau; d'un hacbet (famak6) , d'un ciseau (fandraka) sem- blable a ceux de nos tailleurs de pierres; d'une tar- riere, d'un mailletet d'une petite scie a main (niessou- megnou). Le levier est employe pour creuser , le lia- cbetpour laconncr, etle ciseau pour sculpter. Les am- ])itetiki-kapila-hazou , ouvriers qui font toutes sortes de petits objets en bois, tels que plats, cuillercs, outils de tisserands , instruments de musique, etc ; les ainpa- nefl-ampin garetsi on armuriers, dont tout I'art consiste a confectionner le bois d'un fusil, ct a repai-er sa bat- terie tant bien que mal, ne se servent quo du bachet et d'un petit couteau qui leur sert apolir. Les ampitam ba-daka ou creuseurs do pirogues ne font guerc usage que du levier; les ampitetiki-laka ou constructeurs de jiirogues , dont les derniers ne sont a proprement par- ler que les manoeuvres , emploient ces diCferents outils tour a tour.
Les objets qui sortent des mains des artisans que nous venons do nommer sont quelquefois du dernier fmi. Les pirogues sont faites dun seul tronc d'arbre ou de planches epaisscs, laborieusement arrachees a plusieurs. Les plus petites contiennent deux ou trois personnes ; les plus grandes en contiennent de dix a quinzc. Quelqucs unes sont ornees de sculptures tr^s bien faites quoique d'un gout mediocre. Les voiles de ces faibles embarcations , sur lesquelles les Sakka- lava allaient naguere poi'ter la terreur dans I'archipel des Comores , sont des rabanes blanches , tres gros-
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si^res, iiiais tl iiiic solidite sullisaiik'; Ic balancier ct les bancs sont le plus souvent de simples branches d'arbre.
Les constructeurs de pirogues et leurs aides font aussi, accessoircinent , des cercuoils et des planches pom- ostrados a kabbar, I'orleresscs en bois ou toube, entourages de tonibeaux et cases royalcs. Les mon- tcurs de fusils font, a leurs momcnlsperdus , des bou- cliers, des bois de lances, de lihall , etc.
Deux sortes d'ouvriers travaillent les m^taux : les ampanefi -vi et les anipanefi-amperatsi. Les premiers fabriquent des armes et des insh-uments d'agriculture; les seconds confectionnent des baguos , des colliers , des bracelets, deschainettes et des talismans d'or, d'ar- gent et de cuivre. Les uns et les autres se servent de la forge. Leur marteau et leur enclume sont d'unc ex- treme petltesse : aussi ne peu\ent-ils rpi'a grand'poine forger les pieces de quelque volume, Les fers de lance, de javelot et les bijoux de prix sont les objets qu'ils travaillent avec le plus de soin. Le mc^canisme de leur soufflet de forge est curieux. Get instrument, dont le nom sakkalaya tafou-joura est une imitation parfaite du bruit qu'il fait en fonctionnant, est compose de deux troncs de bambous, que Ton plante a quelques centimetres dans le sol, apr^s les avoir nettoyes a I'in- terieur, de maniere a former des cylindres creux aussi parfaits que possible. Ln enfant comprime alternati- vement, au moyen d'un 6couvillon qu'il lient dans chaque main et qu'il fait jouer comme des pistons, I'aircontenu dans Fun et I'autre bambou, et le force a s'echapper par des conduits en fer ou en cuivre ailap- tes a la partie du tronc que le charbon avoisine.
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§ XI. Coiiiineice.
Quelqucs tribus d'lme race particuliere , losquolles se donnent a elles-memes le nom de Hova, mais que le reste des habitants de Madagascar d(^signe par un autre noni peu flatteur, furciit, dit la tradition, chas- sees duMena-be, qu'elles habiterent longtemps, et poursuivies par leurs enncmis jusque dans la partie la moins accessible des montagncs qui travei'sent I'ile du nord au sud. Lcs vallees du pays dans lequel les fu- gitifs s'arreterent etaient inliabltablcs, a cause des ma- rais qui les couvraient; le b^tail meme ne pouvait y vivre ; et les flancs des montagnes etaient si I'ocheux que les nouveaux habitants, loin de pouvoir les culti- ver , n'y trouvaient qu'avec peine, dans de I'ares en- droits, assez de tcrre jiour former de petits plateaux sur lesquels ils batissaient leurs clietives demeures. Forces par la repulsion des autres peu])les a liabiter ce sol ingrat, et devant de toute necessitc se procurer du dehors les choses les plus indispcnsables a la vie, ils se livrerent avec ardeur a Findustrie et au com- merce, et parvinrent a la longuo, a force de bravoure et d'adresse, a sortir de labjection a laquelle la haine des races rivales les avait condamnes. Lcs Hova etaient deja dans le xvii" siecle une nation puissante, dont la domination s'etendait, depuis longtemps sans doute , ]:)ien au-dela dos limites de la contree moiitagneuse et sterile qu'ils appclerent de leurnom Ankova. Andrian- dahe-foutsi n'avait pu les chasser ni d'Amboungou ni de la partie est du Mena-be; et quand les fds de ce prince conduisirent les armees sakkahna dans l(>s provinces de Boueiii , d'yVntsiaiiaka et d'/Vnkara , ils
( AlO )
lesliouNcrenl pailout mel6s a leurs ennciuis, el cpiou- v6rcnt de leur part la [)his \he r6sistancc.
Aiikova etalt, par la nature des besoins etde I'lndus- trie de ses habitants, ct par la facility avec laquclle ils pouvaiont sc rendre dans le MOna-bo, en descendant les lleuvcs, le phis conunodc debouche de co dernier pays. Des obstacles sans nombre, resultant dc la si- tuation trop interieure des marches sakkalava , atten- daient au contraire les capitaines marchands qui fre- quentaient les cotes arides de I'ouest; et les rares na- vires d'Europe ou d'Arabie qui apparaissaient a de longs intervalles a Mouroundava el dans I'ancicn port de Massalydj ne prenant gu^re ([ue des esclavos en retour desarniesafeu qu'ils apportaienl aux Sakkalava, ceux-ci se voyaienl forces d'echanger leurs bceufs, leur riz, leur niais, leur soie et leur niinorai de ler, contre leselolTcs, les bijoux, les amies, les instruments d'agri- culturc et les ustensiles de menage fabriques pav les Ilova. Aussi , loin de nuire au commerce de ces der- niers, dans le Mena-be , I'accroissement de la puissance des Sakkala\a , au commencement du xviii" siecle, ne lit que I'etendre en le rdigularisant.
Mais Tarrivce des Sakkalava a Boueni , 6v6nement qui eut lieu vers 1700 environ, porta un rude coup a la prosperity commercialc des Hova. Ce peuplc posse- dait alors lo pays d'Anlsianakactle sud de Boueni. La cote nord-ouest etait occupee en grande partie par les Hoimzdti, peuplade musulmane , que la tradition fait Miiir dc MeHnde (Malinda), ])0in- habiter unc petite ile situec a peu de distance de la baie de Bombetoc, el pai- les Mozdnghi ou Monztighi, tribu indigene que les emigrants de la cote orientale d'Afrique dstaient parvenus a la longue a con\ertir a I'islamisme. Lanii-
( /ill )
patliie cles naluiels coutre les inusulinaiis, la diilicLilto de conimercer avec dc pcUtes peuplades toujoui's en querelle, avaient, dctcinps immemorial, rapproch^ les Mozanglii et les Hounz.nti dcs Hova. Ceux-ci leur aclie- taicnt en ])loc les marcliandises apportees par les Arabes dans les ports de BouOni , les payaient avec les pro- ductions de la province dont ils se pourvoyaient d'avancc , ou avec les produits de leur Industrie, et les colportaient ensuitc , ])our les vendre en detail , dans toutes les contr(!'es dc Madagascar ou ils avaient acces. Le roi des Sakkalava du nord, Andrian-Am- bouni-arrivou , mit fin presque d'un seul coup a cct etat de choses si favorable aux Ilova : il los expvdsa de tout le nord de I'ile , qu'il ferma a leur trafic, et conc^da aux musulmans , moyennant un modique droit de transit sur les marcliandises d'origine etran- gere, le inonopole du commerce dans toute I'etendue descontrees nouvellement soumises aux armes des fds de I'or.
Soit que les Mozanglii et les Hounzati eussent des griefs coiitre les Sakkalava, soit que le fanatisme et I'orgueil les inspirassent seuls , ils n.e tarderent pas a rompre avec eux. Le chef qui gouvernalt a cctteepoque les deux tribus musulmancs, le sultan Manufi , profita pour attaquer les sujets d'Andrian-Ambouni d'un mo- ment ou ce prince se trouvait engage avec une partie de ses forces dans une expedition lointaine. La lutte ne parait pas avoir ete longue. Le sultan Manafi fut tue dans un dcs combats que lui livra le prince An- drian-Maliatindri-arrivou, et ce jeune homme litun si terrible massacre des musulmans , que le souvenir dc cet acte de cruaut6, auquel son nom fait allusion, a rendu sa memoire odieuse, nieinc parini l(>s Sakka-
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lava. Los Mozanglii qui purcnt echappor au It-r di' \'cn- nemi sc relugi6rcnt duns le port de Loiigani , loquel est silue a reinboucluirc du neuvc Madzainba ; ils y lurent attaques quolquc temps apres et d^faits de nou- veau. Mais cette fois les Sakkalava sc raontrerent moins iidmniains : Andiian-Anihouiii lour permit de s'etablir dans la baie de Bombetoc , ou s'6leva unc ville fortifi(!!e que Ics fondalcurs appi^li'-rcnt dc lour nom . Moznrigni , la vilte des Mozanghi.
La protection qu'Andrian - Ambouni accorda aux Mozanylii, et laccueil Jiienvcillant quii lit aux Arabes de rOman , de la cote oricntalo d'Arrique et de I'archi- pel des Comores engag^rent un grand nombre de marcliands de ces divers pays a se fixer a Mozangai , et la tranquillite du pays favorisant le succ6s de leurs en- trcprises commerciales , ils acquircnt en peu dc temps une importance que les Sakkalava virent grandir sans onibrage. Cependant les colons ara])os n'avaient pas dopoiiillo dans leur nouvelle palrie le fanatisni(» natal ; le souvenir des succes encore recents de lours conqia- triotes centre les Portugais cxaltail au plus baut dogre leur fierte militaire, et , lualgre le peu de forces dont ils pouvaicnt disposer, ils crurent possible de se soustrairc a la dependance dun people qu'ils taxaionl , lion sans quolque raison , dc polytheismc et de bar- baric.
La revoke des babitants de Mozangai cut le sort que devait altendre luit; aussi folic tentative ; ils lurent cbasses des niurs de cette ville , of uu noninie Hasunn , auquel ils avaient confere le litre de snitnn des inusul- mans ( Soultlian-el-Mousloniyn ) fut fait prisonnierpar les soldats d Andrian-Ainhoimi. Mais celte laoile vie-
( M3 ) toire jela le roi clcs Sakkala\a clans uii gi'and embai- ras, et la situation etait , on eftet , cmbarrassante. Ci' prince tii'ait des Arabcs son revenu le plus considerable et le plus net ; les Sakkalava etaient inaptes au com- merce qu'ils regardaient comine une occupation indigrie d'eux. Les indigenes , habitues a une vie presque sal- vage , joignaient a leur antique liaine contre les castes cominercantes dont ils avaient souvent 6te les dupes , un defaut d'intelligence qui ne laissait rien a esperer d'eux. Si le rtionarque altirait les Hova dans ses Etats, il se placait vis-a-vis de ce peuple ruse dans une sorte de vasselage commercial , et reconstituait gratuitement a leur profit les elements de leur puissance decbue.
Ces considerations firent sentir imperieuscment au roi le besoin qu'il avait des musulraans, et il congut et executa un projet qui donne une idee favorable de son habilete. L'eloignemcnt des Sakkalava dans I'inte- rieur des terres et la force do Mozangai , que sa posi- tion permettalt d'approvisionnor par mer, avaient seuls fait concevoir aux Arabes I'espoir d'ecbapper a leur domination. Andrian-Anbouni pensa done qu'il suffi- rait pour oter a ces derniers toute vell^ite de revoke a I'avenir, d'opposer une ville sakkalava a leur ville, une marine a la leur, et il fit batir a cet effet dans le fond de la bale de Mozangai , la ville de Bombetoc , dont 11 confia le commandement a sa fdle Andrian-jNUian- tanl-arrlvou. II put alors se montrer genereux envers des ennemls qui n'etaient pas a cralndre ; 11 rappela les fugitifs des dilTcrents points de la cote oil Us etaient alles chercber un aslle lemporairc , leur permit de se gouverner eux-memes et a leur maniere , et d'arborer un pavilion particullcr, maintint, moyennant une pe- tite part dans les benefices, un droit de 0 a 8 p. 0/0
( 4U ) qu'ils avaient mis pendant lour ri-voltc sur les mar- chandises appoi'ti^es a Mozangai par navires etrangers, rcndit la liberte a Hassan , et le conlinna dans sa di- gnity de sultan ou do muft\ des musulmans.
Dp la fondation dcBombt^toc date la prosperite coni- merciale du royaumc dc Boueni et sa ci^jl^brite a I'ex- t^riciir; le commerce des Arabes continua a se d6ve- lopper jusqu'a la mort de la reine Andrlan-MamOlou- gni-arrivou, ou A aliini , qui regna dc 1780 a 1810 en- viron. Mo/angai renferuiait alors jjIus de 6,000 Arabes et Indiens avecleurs families ; lesmarcbands de Surato y envoyaient cliaque annec plusieurs vaisseaux cbar- ges d'etolTes de soie , nommees ncoulis , et diverses sortes de toiles qu'ils tlicliangeaient pour des esclaves; de r^caille , dont les eaux d'Ankara et de Boueni abondent, des piastres et de petites chaines en or et en argent , que fabriquaient les liova. Les Arabes du golfe Persiquc , dos Comores et de la cote orientale d'Afrique apportaient a Boueni dos arnies a feu, des sabres, des poignards, do la poudre, des lamba de co- ton a franges de soie, de la poudre d'or et de la verro- terie ; ils prenaient en rctour des esclaves, du riz, dos peaux de boeufs, du bois d'alo^s, de la gomme copal et 6lemi , de I'ecaillo, do la cireet du miel. Les Arabes do Mozangai allaient debitor au loin , moycnnant unc commission de 10 pour 0/0, les marchandises que leur confiaient les marcbands Strangers. Ils se servaient pour connnercer dans I'intc^riour de cbaloupes au moven desquelles ils rcmontaient les rivieres jus- qu'auxlimites dos Sakkalava, et ramassaient, on cfl'ec- tuant leur retour par la memo voie, le riz et les autres produits destines a lexportation.
dependant les Hova roconqui'raicnt do jour en jour
( /4l5 ) leur anclenne im])ortance. Andiian - Arapouini etait parvenu, des le commencement dc ce sl^clc , a reunir sous son autorite leurs tribus desunies ; Valiini , qu'intimidaient I'attitude hostile de ceux de ses pa- rents qui gouvernaient en son nom dans la province d'Anaboungou , et les projets d'independance de Lam- bouini , roi tributaii'e d'Ankara , chei'cbait a capter par des presents annuel s ramiti(^ du loi d'Ankova. Bientotles provinces d'Ankai et des Anlsianaka furont conquises par les Hova , et le royaume de Boueni ne tarda pas a subiren grande partie le meme joug.
Les conquetes de Radama et de Ranavalou ont place le commerce de Madagascar sur des bases entierement nouvelles. C'est par la cote est de Madagascar que s'o- pere aujourd'hui lecoulement des produits (Strangers dans toute I'ile. Le mouvement de Mozangai et de Mou- rounsanga, qu'occupent les Ilova, est a peu de chose pr^s nul, depuis que la reine a etabli un droit d'an- crage de 75 francs sur les navires etrangers qui mouillent dans ces ports , plus un droit de 10 pour 0/0 sur los marchandises, a leur entree comme a leur sortie. Les operations commerciales qui se font a la baie do Bali , a Kiakombe , a Milandza , a Mouroundava et autres points de la cote encore independants, sont devenues inslgnifiantes par suite des guerres dont ces pays sonl continuellement le theatre.
Mais cet etat dechosesneparait pas devoir durer. La reine des Hova est vieille et usee par la debauchc; elle est montee sur le trone d'Andrian-Ampouini et de Radama au m(!!pris des usages de sa nation, et n'a d'ailleurs aucun h^ritier. Sa mort amenera necessairement des complications dont les Sakkalava sont disposes a tirer parti. Le brave Tsi-Miharou vient de chasser les Hova
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di' la province d'Ankara ; If loi du Mciia-be , Taliki- Andrau, le roi d'Ainboungou, Andrian-Souli, le coura- gcux champion de la liberie des Anti-Boueni, Naliikoti, Fiouzaona , tous ces guerricrs illustrcs n'atlcndent qu'un moment favorable pour marcher snr liiiUTiour, et saper dans ses fondoments mal assures la ])uissance chancclante des llova.
Quel role la France aura-t-elloajouer dans le dranie qui se prepare , et quelle influence notre colonic de Mayotte est-ellc appelec a exercer sur Favcnir commer- cial des pays sakkalava? Ce sont des questions que
nous lie saurions traiter dans un simple travail etlino- graphique avec I'etendue qu'elles coniportent. Nous nous arreterons done ici , en cxprimant le vceu que les interets de notre politique ne nous forcent jamais a s6- vir centre le peuple que nous avons cssaye de faire connaitre; peuple enfant et volagc , mais bon et gen6- reux, qui attend de nous les bionfaits de la civilisa- tion , et que, grace a Mayotte , cettc Make des mers de rinde que nous tenons de lui , il nous est si facde de prot^ger.
( h\l )
ExTRAiT (la coDiplc-rcndu dcs travaiLV de F Jcadcniie des sciences de Sainl -Petersbourg, pendant /'annee 18/i3 , par M. Fuss , secretaire perpelnel.
M. Peters nous a lu un memoire sur la latitude geo- graplilque de I'observatoire central de Poulkova , de- duite des observations de I't^toile polairc. La latitude de lobservatoire trouvee par ce moyen est de 59° IxQ' 18" 78, et I'erreur probable dece resultatne va pas au-dela de 0,0i d'une seconde.
M. Struve le jeune nous a communique dans un memoire la determination des positions g^ographi- ques de Novgorod, Moscou , Fuazan , Lipetsk , Yoro- n^je et Toula. Le voyage entrepris par I'auteur , I'annee derniere , pour I'observation de I'eclipse du soleil , et dans lequel il a parcouru 3,500 verstes en trentc - neuf jours, lui a fourni le resultat geogra- pliique qui fait le sujet du memoire dont nous par- Ions. Cc travail peut encore etre considere comme premier essai heureux de I'emploi des chronometres pour la determination exacte des longitudes dans de longs voyages par terre. En outre , le memoire de notre jeune astronome a cela de particulier , qu'on y trouve pour la premiere fois les valeurs respectives des chro- nometres qui ont servi au transport du temps, ou si Ton veut leur poids respectif , deduit de leur comparaison journaliere, precede qui est tres utile toutes les fois qu'il n'est pas possible de calculor ces valours par la determination reiteree de la longitude d'lui memc lieu.
M. KupfTer, qui, a I'Academie, doit etre considere I. JUiN. 3. 28
( 418 )
couiiiK' le representant cU; la physique du globe, a pr6sid6 , coinjne par le pass6 , aux travaux relatifs a la met^orologie et au magn^tisme terrestre , travaux qui s'ex^cutent dans toute I'etendue de I'empire , sur unc ^cliellc vraiment imposante : aussi M. RuplTer, outre une note qu'il a lue a rAcad(imie sur I'inclinai- son magnetique de Pekin , a-t-il, en sa quality de di- recteur en chef des obsorvatoiros magnt'tiques et m^teorologiques des mines , public , cette annee , le llecucil des observations faites dans ces etablisscments. Or, ces travaux purement mecaniques etmateriels une fois regies, notre academicien a dil naturcllement por- ter son attention sur le c6t6 scientifique de ses etudes de predilection : les m^thodes d'observations , par exemple ,'6tant encore, meme apr^s les vues nouvelles ouvertes par un genie tel que celui de M. Gauss , sus- ceptibles de bien des perfectionnements, M. KuplTer, adonne a ces travaux, s'est bientot vu arrets par le man- que d'emplacement convenable. A I'observatoire ma- gnetique central, I'urgence des observations courantes ne permet pasd'^tablir, pour quelque temps, d'autres instruments magnetiques, dont les aiguilles pourraient, par leur attraction, introduire de grandes erreurs dans les observations absolues. Des lors, rutillte d'un eta- blissement sp^clalement consacre a toutes les recher- ches qui se rapportent a la physique do la terre , sans entrer pr6cisement dans le systeme des operations journalieres , s'est pr6sent6 a son esprit, et il en a sugger6 I'idee a ses chefs eclaires, M. le general Tchf'fkine, chof dc retat-major des mines, eta M. le comte Cancrin , ministre des finances. Ce haut fonr- lionnaire , durant son long ministere , a dote la Russie d'un si grand nombrc d'institutions utiles qui immor-
( ^au )
lulisciont sa ni^moire dans les annales dcs sciences, qn'on nc doit pas etre etonne de le voir saisir avcc ar- detir cettonouvello occasion pour satisfaire aux bcsoins si varies des etudes physiques, dans la plus large ac- ception de ce inot , en fondant, avec i'autorlsation de S. M. I'empereur, un observatoire physique, dont nous ne pouvons micux (^noncer le caractere qu'en vous communiquant ici un extrait de la lettre par laquelle I'illustrc fondateur lui - merne a annonce a M. de Humboldt les intentions gracieuses de S. M. impe- riale.
(( Cet obser\atoire , ecrit M le comte Cancrin , sera place dans un batiment construit a cet efTet , avec les salles et cabinets necessaires. Un directeur, avec un con- servateur et un personnel subalterne suffisant , seront loges dans I'etablissement. Celui-ci sera muni des in- struments necessaires a la culture des principales branches de la physique , surtout dans ses rapports avecle travail des metaux, la m^canique et I'^lectricite, ainsi qu'avec la m(^teorologie et le magn^tisme terres- tre , qui , au reste , conserveront conime succursale I'obsorvatoire magnetique existant actuellement. L'^ta- blissement sera dot6 de facon a pouvoir se completer des instruments nouveaux indiques par le besoin de la science, et a satisfaire aux frais des experiences cou- rantes. En un mot, I'observatoire physique de I'lnsti- tut des mines , etabli sur une echelle large , mais de- nu6 de faste, sera a mfimede satisfaire au triple but : 1° d'6tendre par des rccherches approfondies les limi- tes de la physique et de ses applications utiles ; 2° de r^unir et d'utiliser pour la science les decouvertes et oxpc^riences partielles faites en physique dans I'^tendue •de I'empire ; 3° de propagor et de perfectionner I'dtude
( /|20 1
lie ci'ttc scicnco pur un cuius supriiciir , [)rincij)ale- mcnt a I'usagc des olevos de rinslilut des mines et d'aiilres personnessurfisaniment preparc^es. »
1\1. Dorn nous a livrt'' la cinquic-me parlic dc scin Recucil do luateriaux relatifs a I'liistoirc des pays cl des peuples du Caucase , renfermant des notices geo- grapliiques tiroes des liistoricns et geographes arabes, peu cxploites sous se rapport.
Notre statisticien, 1\1. Koppeii, a visite cette annee les gouvorneincnts de Riazan , dc Tambov , de \ oroneje , de Kliarkov , de Koursk , d'Orcl, dc Toula ct de Ka- louga. Ce voyage, avec ceJui qu'il fit en 1840, lui a fourni le sujet d'un ouvrage etendu, embrassant la par- tie centrale de la Russie europ^enne, et qu'il prepare pour la publication. Outre les materiaux recueillis ainsi par I'obstTvalion immediate, uncvaste correspondance, soit ofiicielle , soil priv6e, fait aflluerdans nos archives statistiqucs un grand nombre de renseignements ini- portants que M. Koppen se fail un devoir de compul- ser et de redigor avec son assiduity accoutumec. Cost ainsi qu'il nous a lu , cette annee , un mcmoire sur la distribution des habitants de la Russie , selon les con- ditions, dans les (lilTerenles provinces, et un autre sur la population non russe des domaines d'apanagc. II nous a communique de plus , dans une note , des ren- seignements fort curieux sur la partie du nord-est du gouvernement d'Arkhangel , d'apr^s Ic rapport d'un marchand d'OustSvssolsk , nommc^ Latkine , qui , le premier, a IVanchi les montsOurals a une latitude aussi elev(i!e ; et dans une scconde note , il nous a fait voir que les Karatai, pcupladedont parlent certains aulcurs orientaux , ct que Lepekhinc a encore visitec dans ses voyages, soul une liihu des Mordvas, et existent en-
( A21 ) core en tres pelit nombre dans le gouvernemont do Simbirsk.
Nous passerons sous silence I'lmporlante expedition scientifique de M. Middendorll, bien que nous ayons eu de ses nouvelles de Touroukhansk. Nous aimons mieux vous presenter plus tard un ensemble plus com- plet des resultats marquantsdont ce voyage d'explora- tion promel d'enrichir la science. II en est de laenie des courses penibles , non termln^es encore , de notre zoologue-preparateur Woznesenssky dans leslointains parages des mers du Kamtchatka et d'Okhostk. Mais nous ne saurions nous dispenser de dire quelques mots d'une exp<!(dition conimencee et lieureusement accom- plie dans le courant de cette annee , et qui a eu un but tout special.
La geograpbie matli(^matique d'un pays peut ctro avancee de deux mani^res dilTerentes, d'abord ])ar les leves trigonomt'triqucs . ensuite au moyen de la de- termination astronomlque des lieux. Line institution particuliere , le Depot militaire et topographique de i'^tat-major de Sa Majoste , organise ct survoille des operations trigonometriques d'une etendue imposante ; des travaux analogues, par rapport au littoral de la mer Baltique, ont etc entrepris et liabilenient execu- tes par le departement bydrograpliique du minislere de la mai'ine. Ce n'est que dans des cas exceptionnels, et lorsqu'il s'agit de recherches relatives a la figure des terres, que des operations trigonometriques peuvent ^tre du ressort de I'Academie et de son etablissenient astronomique. Or, nonobstant le developpement (pi'on a donne jusqu'a ce jour aux triangulations, celles-ci ne peuvent cependant s'etendre que sur one parlie seub'- ment du vaste empire , et il passera encore bien des
( 422 )
generations avanl qu un i<!;seau trigonometriquc con- llim \w. vienne embrasser laRussic europt^enne enticre. On volt done que sans I'appui dos determinations as- tronouiiques des lieux, la geographic de la plus grande partie de I'enipire inanquerait de fondement , et c'esl avec ralson que I'Academie , d^s sa fondation , a con- stammenl envisage comme une de ses missions prinei- pales , les travaux tendant a Favancement de la geo- graphie de I'empire. Aussi peut-elle le dire avec or- gueil :1a geograpliie matliematique de la Russie repose presque uniquement sur des operations dirig^es par elle. D^sormais, I'observatoire central doit etre le centre et le point de depart de toutes les operations de ce genre. Or, a cet efTet, il elait indispensable, avant tout , de bien determiner la position de cet etablisse- ment meme , par rapport aux points fixes de la terre. Sa latitude, que nous \cnons de citer, est a 1/10° de se- condepres ; mais sa longitude etail ad'ecteed'one incei'- titude de 3*. en temps ou de 45" en arc. II eiit ete de- place de vouloir augmenter la confusion pi'ovenant deja de I'acceptation de plusieurs premiers meridiens; il s'a- gissait plutot de fixer la longitude de Poulkova par rap- port au meridien de Greenwich, le plus ancien qui exisle, el que les astronomes de tous les payssont convenus do conslderer connne le vrai point de zero des longitudes lerrestres. Le transport du temps par do bons clii'ono- m6trcs paraissait etre le moyen le plus propre a cc but, vu la grande f'aciilte de communication qu'ol- iVaient les bateaux a vapeur. Lne jonction immediate entre Poulkova et Greenwich nous eilt , 11 est vrai , Ic j)lus promptement conduit au but ; mais la rarete des comn)unlcatlons directes entre ces deux lieux, el les longs intervalles de temps cnlK* les aiiivees el les
( ^-^-^ )
departs des pyroscaphes anglais, ont fait preferer de choisir un point intorm^diaire plus rapproch^ , savoir : Altona, dont d'aillcurs la longitude, par rapport ;'t Greenwich , devait elre supposee cxaCtement connuc parl'expedition anglo-danoise de 1824. L'Academicmit done sous les yeux de M. le ministre de I'instruction publique , son president, le plan d'une suite de voyages a faire sur les bateaux a vapeur de Lubeck, durant une saison enti^re, dans le but de determiner au juste, par le transport reiter^ du temps , la dilTei-ence de longi- tude entre les observatoires de Poulkova et d'Altona. 1! iut facile d'lnteressor a ceprojet aussiM. le ministre des fmances, et d'obtenir, par la puissantc cooperation des deux ministres , I'asscntiment de S. M. I'cmpereur a ce sujet , et les moyens n^cessaires pour le mettre en CBuvre. L'op^ration commenga done en mai de cette annee , et fut terminee, ajires dix-sept trajcts, au mois de septembre. L'appareil de I'exp^dition consistait d'abord en 35 cbronom^tres appartenant, soit a I'ol)- servatoire , soit a I'etat-major ou a I'amiraute , soit a des personnes priv(^es. L'astronome d'Altona, M. Schu- macher, eut I'extreme obligeance de mettre sur-le- champ a la disposition de nos astronomcs plusieurs beaux chronometres de son observatoire, et les artistes horlogers les plus distingues de tons les pays, tels que MM. Hauth de Saint-P^tersbourg , Ressels, d'Altona, Tiede de Berlin , Dent et Muston de Londres , ot Breguet de Paris, s'empress^rent a I'envi de suivre I'exemple donne par l'astronome danois , en envoyant a ce concours les productions les plus parfaites de leur art; de sorte que le nombre des chronometres au ser- vice de I'expedition s'^leva bientot a 86. M. Struve lui- meme se chargea do la direction du premier voyage.
( hn )
tant pour initier les jounes astronomes a la coiiduile dc cette iinportante operation que pour s'aboucher avec M. Schumacher, etarreter, de concert aveclui, les nonibreux details de I'opi^ration ; les trajets subs«i- qucnts furent confies a la direction dc MM. Struve le jeune et Sabler , secondes successivcmcnt par MM. Pe- ters, George Fuss, Savitch , Schidlovsky , LiapounolT et Woldscdt^ et par les astronomes danois , MM. Pe- tersen et Nehus.
Pour ne pas pcrdrc le fruit d'un voyage, dans le cas d'un retard accidentcl , deux stations auxiliaires furent etablies a Lubeck et a Cronstadt. M. Nehus, capitaine du genie au service danois, fut charg6 de la direction du petit observatoire temporaire de Lubeck, pendant toute la duree de I'expedition , tandis que MM. George Fuss et Savitch se relev^rent alternativcment a Cron- stadt pour y faire les observations necessaires a la de- termination du temps; il n'etait pas d'ailleurs hors de propos , a cette occasion , de reunir le principal port de I'cinpire directcmcnt avec I'obscrvatoirc central. La longitude de I'observatoire de Poulkova , telle qu'elle r^sulte definitivement des dix-sept voyages clirono- mtitriques , est de 1 h. 21' 32" 50 a Test de I'observa- toire d'Altona ; et cette d(^termination, n'etant affecttie que dune crreur probable de quclques centiemes de seconde, doit a juste titre etre consider(^e conime i^tant plus rigoureuse qu'aucune autre determination de longitude qui existe. En outre , notre expedition a prouve de la mani^re la plus irrecusable Fimmensc utilite qu'ofTrent les chronometres lorsqu'il s'agit de pousser au dernier degr^ d'exactitude les determina- tions geograpliiques, et cela meme dans le transport de ces instruments delicats a des distances trcs con-
( A25 )
sid^rables, aussi bien pai^ mer que pur terre. EUe a livre enfin une ^chelle infaillible pour I'appreciation de la valeur ou du poids respectif des chronomeU'os. Sous ce rapport , le premier prix appartient a M. Dent, k Londres ; le deuxiemc, a notre horloger de Saint-P6- tersbourg, M. Hauth; les cbronometres de MM. Kessel, Tiede et Muston occupent le troisieme, et ceux de M. Breguet le quatrieme rang. En general, le succfes brillant de cette expt^ditlon est du, en grande partie , a la haute protection qu'a daign<i lui accordcr S. M. le roi du Danemark . et a la cooperation empressee de son celebre astrononie , M. Schumacher. Ces disposi- tions bienveillantes nous font esperer la r^ussite pro- chaine d'une autre operation chronom^trique , indis- pensable pour completer notre teuvre , je veux dire d'une vei'ification soignee de la difT^rence de longitude entre Altona et Greemvich , le rdsultat de I'expedition de 182Zi s'dtant trouv6, pour la precision, inferieur au notre , et par consequent n'oflVant point les garanties d^sirees. M. Struvenous a dejapr^sent^ la relation com- plete sur I'exptJjdition chronometrique de 1843 , et I'A- cademie en a ordonnd la publication.
Nous pourrions encore ajouter bien des choses sur le vaste champ qui s'ouvre a prt^sent a la geographic de I'empire et auxrecherches ulterieuressur la figure de la terre , par la mesure des degr^s de longitude ; et bien que sous le premier rapport , il y ait deja un projet tout arrett!; pour I'annee suivante, ce serait toujours antici- per sur les travaux a venir que de vouloir on parler a prtl-sent. Nous aimons done mieux on remettre la rela- tion a notre compte-rondu prochaiii.
( /i2C )
DEUXIEME SECTIOrV.
Acted de la ^ociete.
HXlRVir DKS J'KOCES-VEKKAIJX DKS SKANCES. PrKSIDENCE Dli iVl. RoUX DE FiOCIIHLLE.
Seance (hi 7 jdiii l8/ii.
M. le aiareclial due de Dalmatie , ministrc d(! la guerre, 6crit a la Society que son intention est de pla- cer la Grammaire et le Dictionnaire berbers de Ven- ture (Jans les dilFerentcs bibliothoques de TAlgiirie , oii cct ouvrage pourra etre consult^ utileinent par les of- ficiers qui s'adonnent a I'^tude d'une langue si ini- portante pour nos relations avec les indigenes , ct il desire que la Sociote puisse mettre a sa disposition cinquanto nouveaux exeniplaires de cet ouvrage. La Commission centrale decide qu'ils seront immediate- ment envojes a M. le ministre de la guerre.
M. le comte de Monlalivet, intendant general de la liste civile , annoncc que, sur sa proposition , le Roi a bien voulu accorder a la Society une somme de 1,000 fr. , a titre d'encouragement pour I'annee 1844.
M. le vicorate de Santarem communique une lettre de M. Noel Desvergers dans laquelle il I'informc de Iheureux resultat do ses rcchorches dans les t^lablisse- incnts scientiliques de I'ltalic.
Plusicurs dons de cartes et d'ouvrages sent faits a la Soci^td. La Commission centrale vote des remercie- menls aux auteurs , ct ordonnc le depot de ces envois a sa bibliotlu'qiic.
M. ,I(»iii;u(l exprime le desir fpn- la carlo des Rocky-
( A27 ) Mountains offerte r^cemment a la Soci(!!te par M. Albert Gallatin puisse etre publico clans Ic Bulletin. Sur sa proposition, I'examen en est renvoye au comlt(^ clii Bulletin.
Plusleurs membres appellent I'attentlon de I'assem- bl6e sur les cartes en relief anclennes ct niodernes, et sur les cartes typograpbiques tie M. Duvcrger, qui se trouvent a rexpositlon de I'lndustrle.
M. Desjardlns communique un Recuell Inc^dlt de me- langes sclentlfiques , acconipagne d'un grand nombrc de desslns , par M. Ic comte de Rasoumowskl ; 11 desire que , sulvant les Intentions de I'auteur , recemment decide , ce Recuell puisse etre public , et 11 pense que plusleurs des fragments dont 11 se compose seralent de nature a interesser les lecteurs du Bulletin. — MM. Des- jardlns et Bortbelot sont pries d'examlner ce Recuell et d'en rendre compte a la Commission centrale.
M. Roux de Rocbelle continue la lecture de son .analyse de I'ouvi-age de M. Prescott sur le Mexique ; cette seconde pai'tle de son travail est surtout relative aux d^couvertes geograpblques de Fernand Cortoz. ^ Renvoi au conilte du Bulletin.
Seance du 21 juin 18/i4.
M. le mlnlstre de la guerre ecrit a la Soclete pour I;» remercler de renvoi qu'elle lui a fait de clnquante nouveaux exemplalres de la Grammalre et du Dlctlon- naire berbers de Venture , destines aux bibllotbequcs de I'Algc^rie.
M. le baron de Derfelden de Hindersteln adresse quelques observations sur 1 'analyse que M. Daussy a take de son atlas de rar< bipcl des Indes.
MM. les redacteiirs dun nouM'au lecuril sciciitin-
( tl2S ) que, public a Llreclit, en langue hollandaiso, ^crivent a la Society pour lui faire horaniage des premiers nu- meros qui viennent de paraitre.
M. Ilolthauson , de DusselsdorIT, adresse a la So- ci6te un nouvel atlas topographique et physique qu'il vient de publier. M. de La lloquctte est pri6 d'en ren- dre coinpte.
D'autres ouvrages sont aussi oITerts a la Socititt^.
La Commission contrale ordonne le d(^p6t de ces envois a la bibliotheque, et vote des rcmerciements aux donateurs.
M. d'Avezac lit un fragment sur I'histoire et les an- ciennes divisions tcrritoriales du nord de I'Afrique.
M. Joraard met sous les yeux de I'assemblee une petite carte du cours sujierieur du Nil et de I'Afrique orientale , par M. Mac-Queen.
M. Roux do Fioclielle est pri6 de faire une notice n<^crologique sur M. Du Ponceau , correspondant de la Societe , mort recemment a Philadelphie.
MEMBRE AUMIS DANS LA SOCIl'.TIi.
Seance du 7 jit in IS/i/i. M. Georges Beauerkei.ler, auteur de cartes en relief.
OUVRAGES OFFERTS A I.A SOCltx/:.
Seance du 7 jidn 18i/|.
Par M. ^/«f\6rtHr/ ; La Turquie d'Europe ou Obser- vations sur la gdograpliie , la geologic , I'liistoii-e natu- relle , la statistique, les mteurs , les coutumcs , I'ar- ch^ologie, ragriculturo , I'industric , le commerce , les gouvcrnements divers, le clerg(5, I'liistoirc et I'l^tat po- litique de cet empire , 4 vol. in-8.
Par M. Hmnmnire de. Hell : Les Steppes de la mer Caspienne, 7" livraison.
Par M. Cnreitc : Du commerce de I'Algerie avec I'A-
( 429 ) IVique centrale et les tlats l)arbaresqnos. Reponsea la Note deM. deLastcyrie, depute, sur le commerce du Soudan. Carte de TAlgerie dressee sur des materiaux entierement neufs , 1 feuille.
Par M. Marcel : Numismatique orientale. Tableau general des monnaies ayant coui's en Algerie , 1 vol. in-Zi.
Par M. Dubiic : Tableau politique , militaire, mari- time, colonial, financier de la Fi-ance en ISlih.
Par les auteurs et editeurs : Annales maritimes, avril. — Journal asiatique, avril. — Memorial cncyclope- dique, avril. — L'Eclio du monde savant.
Seance du 1\ juiii.
Par M. Holthausen : Tojiiscli Physikalischer atlas inlO blattcrn. Nacli den besten materialien , t- tc. 1 vol. fol.
Par M. La/ond :\oyage autour du monde, l/i3° a 154* livraison. — Malaisie et iles Moluques.
Par iiy. Jomard : Discours sur la vie et les travaux de G.-L.-B. Wilhem, broch. in-8.
Par M. Sumner : Lber den Zustand der Iridianer Nordamerika, broch. in-8.
Par M. Rueb : Bijdragen tot de Kennis der Neder- landsclie en Vreemde Kolonien , Bijzondcr betrekke- lijk de vrijlating der Slaven. N"' 1 et 2 , in-8.
Par M. Scoble : Observations sur le Rajiport de M. le due de Broglie sur I'esclavage , broch. in-8.
Par les Editeurs : Bidletin dela Soci(^te industrielle d'Angers, 3 N"'. — Recueil de la Societe polytech- nique , avril. — Memorial encyclopedique , mai. — Bulletin mensuel de la Societe d'abolition de I'escla- vage , h N"'. — L'tcho du monde savant.
TABLE DES MATIERES
coniBnuKs
DANS LE I" VOLUME DE \..\ 3' SERIE.
N"5 I a 6.
( Janvier a Juin i844- )
PREMIERE SECTION.
MliMOIRES, KXTRA.ITS, ANALISKS ET IIAPPOUTS.
Stir les ;;laies du pole austral. — Exainen tl'iine Notice Jc M. le
l)"^ llumbron surcesujet, par M. Daissy 5
Carte generale des possessions neerlandaises dans le grand ar- <:hipel Indien , par M. le baron Von Derfelhen de FlI^DEllS- TEIN. ( Auiionce analytirjue par M. DaI'SSY. ) 26
Jixtfait dune lettreadressee du Caire a M. d'Avezac parM. C.-T.
Lefebvhe, lieutenant de vaissi-aii de la marine royale. . 4^
Extrail d'une lettre de M. C.-T. Lefrbviik a M. Jnynard,
nienilire de I'lnstiliit 5t
Decouveile du lao Torrens dans la Nouvelle - Ilollande, par M. Eyre 56
Note sur une ancienne carte manuserite historiee de la col- lection de feu Guillauiiie Barbie du l?orr»ge, par M. d'A- vezac . 63
llesurne d'un voyage a la nier Caspienue , par M. HoMiMAritE he Hell 81
iXotice snr la carte de la Russie tneridiimale , faisant partie
tic. la relation du voyafje ii la nicr Caspienne, |)ar le nieme. 87
Notice sur le dessechenicnt de la men i/c Haarlem, contcnant un expose rapide de la partie historiquect hy(lrauli(|ue, ainsi (]ue du problenie toucliant Ics niaehines liydrauliques aappli- (juer aux epuiseuients, par M. J.-G.-W. Merkes. (Article <'omnriunique par M. Jomarh. ) gj
( A31 )
Voyajie ile M. Schomburok aiix souifes du Tiikutu en 1842. (lix- traitdu journal de la Sociele royaiegeojjiaphiijue de Londres, par M. Daussy.) 109
Voyage de M. Schombhrck dans l.i Guiane en i843. (Commu- nique par JVI. SiMMONDs. ) 118
Description de la riviere de Carneroons et de la baie d'Ani- boises,par le capitaine Allen, commandant le bateau a vapeur le fVilberforce. (Extrait du journal de la Soeiete royale geographique de Londres, volume xiii, par M. Daussy.). . ia3
Note sur la culture des linioniers aux hords du lac de Gardu ,
par M. le baron RoGEii l33
Note sur It's crues pre'matLirees du INil en i843, par M. Jo-
MARD 1 38
Kxtrait de la leltre de M. le Dr Pehhos sur le metrie sujel. . i4o
Note sur le Sahara, par M. J. — D 142
Extrait d'une b ttre adressee p:<r M. le baron Alexasdhe de
HimuOLDT a M. Fkedf.ric Lacroix , sur le cours de I'Oxus. . 147
Extrait d'une lettre de M, Albert Gallatin, adressee a M. Jo- MARD, annoncarit Tenvoi a la Soeiete d'une carte manuscrile des Kocliy-Mountains 1 48
Extrait de^ deux leltres adressees par M. le D"' Montaone a
M. JoMARD , sur un phenomene observe dans la iner Rouj^e. liq
Notejdes objets rapportes du dernier voyage aux rives du Bahr-
el-Abiad, par M. J.— D ,54
Sur la Gramniaire et le Dictionnaire abreges de la lanf^ue
berbere de feu Ventdre DE Parauis, par le meme. . . , 1 59
Le Niger, le Nil , le Gir, parM. G.-G. Reiciiarij. (Memoire com-
niuninue par M. EyrieS.) l6n
Memoire sur Ics progres des decouvertes geographiques dans
I'ile de Madagascar, par M. Eugene de Froberville. 2i5
llineraire de Raguse a Constantinople. ( Gouimuniijue par
M. CoCHELET. ) 238
Episode sur I'enterrement du carique Catbiji dans I'Araucanie,
par M. Claude Gay 268
Notice gcographique sur le Kourdistan , par M. Texier. . 282
Notice sur la geographic du Texas, sur la variele de ses pro- ductions, de ses animaux, de ses plantes et de ses ricliesses naturelles ^et commereiales , par M. Ashbel Smith , meinbre de la Soeiete de geographic 3s I
n
( /132 )
Analyse il'iiii unvi-.ige de M. Phescott , ile Roslnii, sin l,i conqut'Io tin Me.\i(|ne, et sur ranrieniie civilis:ilii)ii ilc ct;t dm|iire 345
Extrnit lie la corre<|ionil.>n( e do M. ral)l)c Hoilat. (Cummu-
niqno par M. le baioii Hogeii ) 3-_J
Extrait de la lettie de M. Hoaht h M. I'abbe Boilat. . . . 3^5
Recheirlies sur les Sakkalava , par M. V. Noel. ((<■ et dernier
ailitle. ) 385
Extrait du cornpte-rendu des travauxdc rAcademiedcs sciences
de Saint-Peteesbourg, par M. Fiss, secretaire perpeiuel. . 4'7
DEUXltME SECTION.
ACTES nP, LA SOCliXE.
Rapport an nom de la Commission du prix annuel poui- la de- couverte la plus iniportante en geographic en 1841 ; M. Jo- MARD, ra|)porteur 2^9
Pi oces-verbal de la seance gene'rale du 26 avril 1844 • • • ^'7
Proces-verbaux des seances de la Commission centralc , 161 , 244>
3i5, 377 et 426
M('nd)res adrnis dans la Scjcii'te 247, Bip, 38o et 4^8
Ouvrages offtrts a la Socicte. 80, i68 , 248, 819, 38o et 4^8
I
FIN l)K LA lABLE lltS-iUU^lillKS DU !•■' VOLUME.
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