0-<7 •*■* ■ wwt >i>»w^pw' BULLETIN de i.a SOCIETE DE GEOGRAPHIE. Cpuatrieme Hfrio TOMS via i 'IMPOSITION 1)1 i.lKLAl DE LA SOCIETE poi r 1853-1856. President. M. Ii' ooiiti c-ainii al Laplace. „ , ., 1 MM. le general Aukiy. Vice-Presidents. \ _ " ( l.l.Al UK (lAY. i MM. Paci.in Talabot. Scrututeiu s. \ „ ... | Constant Prevost. Secretaire. M. Alfred Maury. COMPOSITION DU BUREAU DE LA COMMISSION CENTRALE pour 1854. President. M. Jomard. Vice-Presidents. MM, o*Avezac et de la Roqiiette Secretaire general. M. Cortambert. Secretaire adjoint. M. Y.-A. Malte-Brun. Section de C orrespondance. MM. A. d'Abbadie. MM. Imbert des Mottelettes Callier. Lafond. Cochelet. Lebas. DuQot de Mofras. Meissas. D'Escayrac. Noiil-Desvergers. Ferry. Poulaiu de Bossay. Section de Publication. MM. Albert-Montemont. MM. Maun. Danssy. Morel-Fatio. de Froberville. Prevost (Constant; Cay. de Santarem, Jacob;. Sedillot. Mauroy. Ternaux-Couipaui. Section de Comptabilite. MM. Ed. de Brimont. MM. Guigniaut. Ducbauoy. Isambert. Gamier. Lowenstefn. M Archiviste-bibliothecaire. Tresorier de la Societe. M. Meignen, notaire, rue Saint-Honore, 3;o. Membres adjoints. MM. n'Eichlhal. M. Michelot. Hecquard. 11. Nuii.it, a-eut de la Societe, rue Christine. 3. BULLETIN Dli LA SOCIETE DE GEOGRAPHSE. REDIGE PAR LA SECTION DE PUBLICATION ET MM. CORTAMBERT, SECRETAIRE GENERAL DE LA COMMISSION CENTRALE , ET MALTK-BRUN, SECRETAIRE ADJOINT. QUATRIEME SERIE. — TOME SEPT1EME. ANNEE 1854 JANVIER - JU1N. PARIS, CHEZ ARTHUS-BERTRAMi), L 1 B R A I R E DE LA SOCIETE DK GEOGRAPHIE, RUt Ki «TEFEUILLE, I*" II. 1854. LISTE DES PRESIDENTS HONORAIRES DE LA SOCIETE DEPUIS SON ORIGINE MM. Dc Laplace. De Pastoret. De C.HATEACBRIAXD. Ch abrol de Volvic. Becqukt. ALEX. DK HliMDOLDT. Chabrol de Crousol. Geor.;. •> Cl wer. Htde de N'eivillk. De Doudeauwu.e. MM. J.-B. Eyhii «. L'amiral de Ricwt. I li HOST d'UrVILI.E. Due Decazes. In' Montalivet. 1 1. Barak i t. Le general Pelet. Goizot. De Salyandy. TurmiER. RIM. De I.as Cases. VlLLEMAIH. Ccnin-Gridaine. L'amiral Roussin. L'amiral do MackaU. Le vice-amiral Halgan. Wai.c&enaer. Mor.E. Jomard. Le coutre-amiral Mathiiu. LISTE DES CORRESPONDANTS STRANGERS DANS L'ORDRE DE LEUR NOMINATION. MM. H. S. Tanner, a Philadelphia W. Woodbridge, a Bostuu. Le It-col. Edward Sabine, a Londres. Le docteur Reinganum, a Berlin. Le docteur Ricbardsow, a LondreS. Le professeur Rafn, a Cnpenhague. Aikswoktii. a Edinbourg. Le colonel Long, a Louisville, Ky. Le capitaine Maconochie, a Sydney. Le conseiller de Macedo, a Lisbonne. Le professeur Kart. Ritter, a Berlin. Le cap. John Washington, a Londres. P. de Angelis , a Buenos-Ayres, Le docteur Kriegk, a Francfort. Adululie Eruan, a Berlin. Le docteur Wappaijs, a Goeltingue. MM. Ferdinand de Luca, a Naples. Le docteur Baruffi, a Turin. Le lieut.-col. Fr. Coem.o, a Madrid. Le professeur Munch, a Cbristiauia. Legen. Albi 1 1 de la Marmora, a Turin. Fulgence Fuesnel, a Mossoul. Ch. Scheffer, a Constantinople. Le professeur Paul Chaix, a Geneve. J. S. Abert, colonel des ingenieurs-to* pographes des Etats-Uuis. Le professeur Alex. Bacue, surinten* dant du Coast-Survey, aux Etatt-Unii. LErsius (Richard), a Berlin. De Martics, a Municb. Kiepert (Henri), a Weimar. Petermann (Augustus), a LondreS. LISTE DES CORRESPONDANTS ETRANGERS QUI ONT OBTENU LA GRANDE MEDAILLE. MM. Le capit. sir J. Franklin, a Londres. Le capitaine Graah, a Copenbague. Li capitaine sir John Ross, a Londres. MM. Le capitaine G. Back. Le capitaine James Clark Ros», a Lon- dres. Pari*. — ImprimwU de L. Martinet, i»t Mignon, 9. BULLETIN DB LI SOCIETE DE GEOGRAPHIE. JANVIER 1854. Menioires, Notices, Documents originaux, etc. FRAGMENTS D'UN VOYAGE AU PARAGUAT EXECUTE PAR ORDRE DU GOUVERNEMENT, lus 4 l'assemblee CENERALE DU 23 DECEMBRE l853, ru M. ALFRED DEMERSAY (1). Considerations sur l'origine de la population du Paraguay. — Le» Indiens Payaguas. Au Paraguay, cornme dans la plupart des colonies europeo-americaines , une observation superficielle suffit pour constater, au sein de la population, la pre- sence d'elements heterogenes, pour y faire reconnaitre 1'existence simultanee de trois races separees par des (i) Ces fragments sont extraits d'un ouvrage en preparation, et qui paraitra sous ce titre : La Republique et lei Missions du Paraquay; description ge'ographique, situation politique, economique, reli- gieuse, et considerations historiques appuyees de documents inedite 3 vol. in- 8°, aver atlas et cartes. ( 6 ) differences profondes dans leurs caracteres zoologi- ques, leur origine, lours aptitudes et leurs instincts. I.i race guaranie, presque mongolique par son orga- nisation, autoi bllione, etmaltresse du sol an moment dc la decouverte, constitue le plus important de ccs elements ; viennent ensuile '.> race Inline ou conque- rante, sortie de l'Espagne, et la race negre, importee par eelle-ci des rivages dc I'Afrique. II est assurement plus aise dc se figurcr que dc decrire les melanges a lous les degres, les croisements nomhreux et prcscjuc infinis, qui ont da nailrc du contact de ces trois va- rietes de 1'espece humaine, vivant ainsi pele-mele depuis plusieurs sieclcs. Jo no m'y arrelerai pas: jc craindrais de repeler hors de propos dcs definition. trop connues (lj. Disonsde en passant, I'Afrique n'est jamais entree que pour line faible part dans la population du Para- guay, a laquelle elle a cependant fourni, a une autre epoque, son contingent d'esclaves. Mais la position medilerraneenne de la province, l'absence de commu- nications directes avec le littoral, ('obligation imposee aux habitants de tirer les negres de Buenos-Ayres, en dnublant leur valeur, ont tie tout temps fait obstacle :'i jeur introduction sur une large echelle. Apres la chute du gouvcrnemenl colonial, le docleur Francia, par la sequestration du pays, coupa court a l'impor- tation des noirs; et ceux-ci, en s'alliant avec leurs metis, et de preference avec les femmes indienncs, a I'm de procurer la liberie a leur descendance, n'onl (ii Personne n'ignore la signification *\r<. mots mulatrc, »ir'ti$, tjiiarleron, lalto-atras, etc. ( 7) pastarde" a se fonclredans la masse de la population (1). On y cbercberait en vain des negres de la cote (Bo- sales) (2). Toulefois la meme observation se repete dans des contrees voisines, ou j'ai ete frappe de l'en- tiere disparition du sang africain. Mais si l'effet est le meme, combien les causes sont differentes ! Tandis qu'au Paraguay il y a eu melange intime et fusion, sur les bords du Rio de la Plata il y a eu an^antisse- ment de la race importee : moins d'un demi-siecle aura suffi a cette ceuvre de destruction, que peu de mots vont expliquer. II faut en convenir, an risque de froisser quelques amours-propres, la cause de l'independance doit beau- coup a la race negre ; et les Hispano-Americains trou- verent en elle des elements puissanls de resistance a opposer aux troupes cnvoyees pour les reduirc. Au moment ou ils proclamerent leur separation d'avec la metropole, les Paraguayos, n'ayant rien a redouter de leurs esclaves, trop peu nombreux pour devenir un sujet d'inquietude, ne songerent point a modifier leur condition d'ailleurs assez douce, et les circon- stances ne les obligerent jamais a s'en faire un appui contre le dehors. L'idee de les affrancbir ne leur vint done pas. Mais clans les villes argentines, ou le notnbre des bommes de couleur, presque egal a celui des (i) L'enfant ne d'un pere esclave eft dune fern me lilire a suivi, de tout temps, la condition de la mere. On sait aussi que les Indiens n'ont jamais ete considered en droit, sinon toujours de fait, comme efclaves ; bien que linstitution des commandcries fut, au fond, une forme de srrvage a peine deguise. (2) II n'existe que deux bourgades peuple'es piesque exelusivement de negres Creoles en petit no'rhbre, et de mulatres de toutes nuances. ( s ) Manes, pouvait fairc craindre une repetition ties scenes de Saint-Domingue, et ou Ton elait en quele de soldats, on se bata d'en former des regiments qui, bientot fa- $onnes aux exigences de la discipline mililairc , apres avoir bravement combattu pour une cause qui n'etait pas la leur, achdvent de disparaitrc an milieu des revolutions qui, depuis la fondation des republiques de la Plata, rougissenl incessamment les eaux du grand jlewe. Spectacle dignc d'interet ! aussi est-ce avec l'in- tention d'y rcvenir que j'abandonne ce sujet, pour rentrer dans le cadre que je me suis trace. La race laline se personnifie dans cette poignee d'aventuriers intrepides sortis de la peninsule Ibe- ri<]ue, a la suite de Sebastien Cabot, d'Ayolas, et d'Alvar Nunez Cabeca de Vaca. Lorsque ces decouvreurs audacieux remonterent le Parana el le Rio Paraguay, en quete du roi d'ai'gent (Rev Plateano), ils trouverent les rives de ces deux fleuves au pouvoir d'un peuple puissant , partage en de nombiuuses tribus que beaucoup d'ecrivains ont a tort considerees comme autant de nations distinctes, et qui s'elendait presque sans interruption du 3/ie au 16" degre de lafftude sud , en couvrant les provinces de Corrienles, du Paraguay, et la partie meridionale du Bresil. C'etait la nation guaranie, dont le nora tient une large place dans 1'bistoire despeuples aborig6nes de ce demi-continent (1). Mais sur cette vaste etendue, (i) Nous ne donnons pas le parallcle de 16 degrcs comme l'ex- Ireme limile nord de celte nation, car on relrouve des traces de se* mirations dans notre hemisphere, sur les rives de I'Orenoque, d.uis le^ plaines de Cumana, tt jusque dans l'arcliipel des Antilles. II y a plus : des hordes paraissent s'etre detachees a diffe'rentes epoquei ( 9 ) lea Guaranis ne forraaient pas lih corps homogene, soumis a l'autorile d'un chef commun , ohcissant a une meme direction ; et ce fraclionnement en tribus souvent hostiles, le defaut d'union ou la rivalite des chefs, en aflaiblissant leur resistance , rendirent leur defaite plus facile a des hommes qu'aucun obstacle n'arretait dans des luttes conlinuelles avec la nature terrible du desert. On le sait, la force ne fut pas d'ail- leurs leur unique point d'appui , et de nombreuses unions avec les femraes indigenes, unions donl Mar- tinez de Irala fut l'ardent promoteur, constituent peut-etre le plus puissant levier de la conquete de ce brillant fleuron de la couronne d'Espagne. Tandis qu'a Buenos-Ayres la race latine, dedai- gnant de s'allier aux Indiens peu nombreux ou hos- tiles des Pampas, se conservait sans melange et pour ainsidire clans toute sapurete, ou se renouvclait seule- ment a l'aide des recrues fournies par l'Europe, au Paraguay elle etait contrairite, par les circonstances, a moins de hauteur et de fierte. Ce fut, en effet, une neces- site a la fois politique et physiologique, pour les hardis soldatsdes expeditions centrales de 1'Ameriquedu Sud, de s'allier a la race qu'ils allaient soumettre. D'un cote, leur nombre ne fut jamais en rapport avec celui de leurs ennemis ; et de i'autre, le chiffre des femmes qui ^migrerent dans l'inteiieur demeura, a toutes les epoques , dans d'insuffisantes proportions. En choi- du corps principal, pour se dinger vers l'ouest, et se fixer au pied des Andes boliviennes. II faudrait done prendre pourlimites extreme* en longitude le littoral de l'Atlantique, d'une part, et, de I'autre, let froutieres de I'empire des Iocas. ( io ) sissant des duo uses parmi les Indiennes, en declarant Espagnols les metis qui naqnirent de ces alliances, les con querents firent Cairo a la colonisation de rapides progres, car ils creerent dans leurs etablissementa, pour les defendre, un people nouvean, orgueilleux de ses anretrcs, jaloux de conserve lagloice, etd'etendre encore les immenses domaines donl il heritait. Tel est le point de depart de la population du Pa- raguay, qui conserve profondement gravee l'empreinte de son origine maternelle. II convient d'ajouter que les races americaines, en general, se pretent admira- blement a ces melanges in times avec le sang euro- peon. Ainsi, tandis que certains carac teres physiques du negre, par exemple 1'elat crepu des cheveux , la grosseur el la saillie des levies, persistent souvent au dela de la qualrieme generation, ceux de l'lndicn, ties aflaiblis des la premiere , disparaisscnt prosquc en- tierementala troisieme. Aussi, tontes les fois quo des circonslances analogues acelles dont je viens de parler se sont presentees, le memo fait remarquable d'assi milalion s'cst-il produit. Et ce resullat, si intercssanl pour l'ethnologie, on peut le constater geographique- ment : en ell'et, a mesure que Ton s'eloigno du litto- ral, relemcnt europeen diminue, et l'element indieu auumente, pour finir par dominer. C'est ainsi que, minorite sur les coles du Perou et du Chili, il devient majoriie a Cochabamba, a La Paz el a Chuquisaca ; mais nulle part, jc pense, colic predominance n'est plus saillante et mieux caracterisee que clans les plaines du Paraguay, ou la race des vaincus a pour ainsi dire absorbe celle des vainqueurs, a laquelle elle a impose son langage etses habitudes. C'est d'ailleurs. ( Jl ) comme on l'a fait judicieusemenl observer (1), c'est le propre des colonies d'origine latine, d'offrir de nombreux melanges des nations conquerantes avec les nations eonquises; tandis que la race du Nord , le sang anglo-saxon s'est conserve pur dans le nouveau monde, cbrwme dans l'lnde, sans se croiser jamais avec celui qu'il Stait appele a dominer. Cettc remarque n'a pas besoin de commentaires; et toules les explications que pourrait fournir de cette opposi- tion l'ctude des influences elimateriques, on l'examen des institutions civilcs et politiques, disparaissent de vant une cause qu'il faudrait appelcr la loi du sang, car, partout supericure aux lois sociales et a Taction des agents exterieurs, elle suffit a determiner le carac- tere primordial des races. Si le peuple guarani n'esl pas le people belliqueux par excellence, en depit de l'elymologie de son nom (2), il n'cst pas \rai non plus qu'il ail accepts sans com- battre Petal de dcmi-servitude que lui apportaient les Europeans, auxquels il fallut plus d'un siecle pour triompher de sa resistance. Mais, de nos jours, quel- ques iKitions lutlent encore pour leur independance , el, plusbeureuses, ont su laconserver. A cote deshordes insoumises du Grand-Cbaco, si remarquables par leurs belles proportions, an milieu meme des Guaranis, vit une pcuplade peu nombreusc, ennemie redoutee des (i) Benjamin Poucel, Des emigrations europeennes dans I'Ame- lique du Sud. Paris, i85o. (2) Guaiani, corruption probable du mot guarini, guerre, guer- riii. l\ ile Angelis fail deriver guarani de yua, peinlure, re, lachele, et de ni, signe du pluriel ; litleialement : les tachele's de peinlures. Coleccion de obras y documentos, etc. Buenos-Ay res, 1 836, t. I". ( 12 ) unes et des autres, dont les rangs s'eclaircissent cha- que jour, maisqui, pros de disparaltre, a legue intactes a la generation acluelle ses croyances, ses coutumes et les glorieuses tradilions de ses ancelrcs. A l'epoque de la decouvcrte, les Payaguas, tcl est le nom de cetle nation vaillanle, partages en deux tribus, les Cadigues et les Magachs (I), vivaient sur les rives et les lies nombreuses du Rio Paraguay, vers 21° et 25° de latitude. Ces residences n'avaient rien de fixe. Malices du fleuve, et jaloux de son empire, ils naviguaient depuis lelac des Xarayes (2), et faisaient de loinlaines excursions sur le Parana, jusqu'a Corrientes et Santa-Fe, d'un cote, et jusqu'au Salto-Chico, de l'autre. On a donne coramo etymologic assez ralionnelle du nom de ces Indiens les deux mots guaranis pai et aguaa, qui veulent dire « attache a la rame; » ce qui est tout a fait en rapport avec lcurs habitudes. Allant plus loin, on a voulu voir dans l'expression Paraguay, appliquec comme denomination a la riviere, avant de l'etre a la province, une corruption de Payagua, cor- ruption assez legere, et plus admissible, a coup sur, que beaucoup de celles dont toutes les langues offrent de si frequents exemples (3). Quoi qu'il en soit de celte supposition , que nous (i) Et par alteration, Sanguis et .igaces. Les Creoles appelerent •ussi ces derniers Tacumbus (Tacoumbous), du nom du district nu'il* habitaient. (a) Latit. nioy. du lac des Xarayes, 17" 5o'. (3) II existe, a 1'egard de I'origine du mot « Paraguay <> , d'autres versions que nous ferons connaitre. II serait sans interet, quant a present, d'en apprecier la ^aleur. (13 ) n'avons, pour le moment, ni le temps ni le desir de discuter, cette nation indomptable et rusee fut pen- dant deux siecles le plus redoutable adversaire des Espagnols. Les ecrivains de la conquete (1), l'ouvrage d'Azara , l'essai historique du doyen Funes, et de nombreuses pieces conservees dans les archives de l'Assomption, contiennent le recit de leurs entreprises audacieuses. On les voit attaquer successivemcnt les hordes du Chaco , les etablissements des Espagnols situes clans le voisinage de la capitale, les Portugais qui revenaicnt charges d'or de Cuyaba a Saint-Paul, et les Reductions des Guaranis ; mais il devaient succom- ber dans ces lultes inegales. Vaincus a leur tour, une derniere defaite que leur fit essuyer le gouverneur D'' Rafael de Moneda, vers 1741, les delermina a con- clure avec lui une paix qu'ils ont toujours fidelement gardee; moins, comme on serait tente de le croire, par suite d'un commencement de civilisation , ou de l'adoucissement de leur caractere, que par le senti- ment de leur propre faiblesse. Des cette epoque, la tribu des' Taeumbus s'est fixee aux portes de l'As- somption, ou elle a recu dans son sein, en 1790, cello des Sarigues, sans renoncer tout a fait, malgre cette (l) Nous nous conlenterons de ciler les suivants : P. Guevara, Historia del, Paraguay, Hio de la Plata y Tnruman, p. 31. Dl Martin del Barco centenera, La Argentina, etc., p. 43. Rui Diaz de Guzman, Historia Argentina del descubrimiento, po~ blacion y concjuista de las provincias del Bio de la Plata, ecrite en i 8 1 2, et publie'e pour la premiere fois a Buenos-Ayres en 1 835. L'ouvrage de Funes a pour titre : Ensayo de la historia civil del Paraguay, BuenoS'Ayres y Tucuman. 3 vol. in-8". Bueuos-Ayres, iSiG. ( 14 ) election de domicile, :'i sa \ie unmade. Les Payaguaa so dispersent souvent sur les bords du Dative, par fa- milies on par groupes. II nYsl pas rare den rencon- Irer pies tie Villa-Real, de Neembucu, ou deSan-Pedro, sur le Jejuj . Quel olait leur nombre dans la premiere moilie da xvi" si6cle? II est impossible de le dire avec certitude; mais les anciennes relations, qui paraissent ne pas meriter sur ce point le reprdcbe d'exageration qu'on leur a plus d'une fois ct a juste litre adresse, ne l'es- timent pas au dela de plusieurs mill i ers de combat- tants. Du temps d'Azara, la pouplade tout cntiere comptait a peine mille ames : de nos jours, elle n'en a pas deux cents. A quelle division cthnograpbiquc faut-il rattacher les Payaguas? Dans son ouvrage sur ['Homme americain, M. d'Or- bigny les a places parmi les nations du ramcau qu'il appelle Pampcen; et, s'il m'etait permis d'en parler, je dirais que mes propres observations viennent a l'appui de la classification adoptee par cet eminent naturaliste. Cette circonslance, en me permetlant d'omettre certains caracteres qui leur sont communs avec les nations voisines ; la crainte d'encourir les reproches qu'un voyageur illuslre adresse , avec sa modestie et sa rude franchise habituclles, a ceux qui tentent de decrire des sauvages (1) ; et plus que tout cela , (i) ■ Je ne uiYteiulrai pas beaucoup, pour e'viter leuum, el pour • ne pas resseinbler a ceux (jiii, pour avoir vu une dcim-douiaiur • d'ludieus sur l.i cote, en font une description peul-etrc plus com- • pletp (ju'ils no pourraieut faire d'eux-uiemes. Ajoulez a cela que je ( « ) 1'heure avancee de la seance, m'obligent a na traiter que les points essentiels et caracteristiques de l'orga- nisation de ces Indiens. Leur taille est remarquable. Elle surpasse incontes- tablement celle de la plupart des nations du globe. Magna corpora, dit Tacite en parlant des habitants de la Germanic Les mesures suivantes dc huit individtis pris au hasard justifieraient l'application de cetta epithete aux Payaguas. Ainsi 1'un d'eux, age de 20 ans, avait lm,8t. 18 — lm,74,3. » — lm,75. » — 1«>,77. Quatre d'un age mur. » — 1">,79. 0 — ln>,79. » — lm,79,5. » — lm,80. Moyenne : lm,78,lnim. En outre, un jeune garcon de 14 ans avait 1",63, ct un enfant de 7 ans, 1,38. Comme corollaire de cette premiere donnee , il n'est pas sans interet de faire remarquer que le mi- nimum de taille, fixe par la loi du recrutement en France, est de lm,56, et que la taille moyenne des consents declares propres au service, etablie pour les departements les plus riches, e'est-a-dire dans ceux qui reunissent les conditions les plus favorables a son developpement, ne depasse pas lm,6S2u,,n. » n'aime point les conjectures, mais les faits, ct que je n'ai pas autant » d'instruction et de talents que d'autres. ■ (Azara, Voyaqts dam i Amerique mtridionale, t. II, chap, x.) ( 40 ) Chez les fenimes, les proportions ne sont pas mains n\antageuses. Ainsi, Ix i'emmes de plus de 20 ans m'ont offert : La premiere lm,f)5. La seconde 1™,55. La troisieme lm,G0. Et la quatrieme 1»,62. Moyenne : l'»,58. On peut lirer plusicurs consequences de celledouble serie de mesures. En comparant la taille moyenne des Payaguas a celle de l'bomme on general , que les physiologistes s'accordent a fixer vers lm,66, on voit que la difference, lout a l'avantage des premiers, n'est pas inferieure a 12 cent. 1 millim. Si Ton prend ensuite pour points de comparaison les mesures observees par des voyageurs exacts, sur les peuples qui passent pour les plus grands de l'uni- Ters, sur lesPalagons par exemplc, on trouve comme moyenne donnee par M. d'Orbigny, lro,73 ; ainsi les Payaguas surpassenl encore de 5 cent. 5 millim. cetle nation a laquelle on a, de tout temps, allribue una slalure fabuleuse. La seconde consequence a deduire des tableaux precedents, e'est L'uniformile des resullals qui y sont consignes ; et cette uniformite a lieu pour les deux sexes. Ainsi, chez les homines, la difference entre la plus grand et 1c plus petit n'est que de 6 cent. 7 millim., etchezlesfemmes, elle ne s'e'levepasau dela de7cent.: d'ou il suit que non seulemont ces Indiens sont sup6- rieurs sous ce rapport uux Patagons, mais que chez eux lous les individus sont ties grands. Je l'avouerai, la rjiSme remarque a 6le faite a l'egard ( 17 ) d'autres races del'Amerique du Sud, etde patientes re- cherches out demontr<§ qu'entre la taille moyenne et la taille extreme, il y avait, en general, pour chaque nation, beaucoup inoins de differences qu'en Europe. On regarde l'etat de nature dans lequel vivent les In- diens comme la cause probable de ces differences presqueinsensibles. Acelte explication Ires admissible, ne conviendrait-il pas d'ajouter l'absence d'unions entre les Payaguas et les nations qui les enlourent, le soin avec lequel ils repoussent toule alliance etran- gere ? Faut-il y voir encore un argument contre ceux qui croient a l'abalardissement des races, et a la ne- cessity pour elles de se croiser avec d'autres, sous peine de deperissement? Le corps des Payaguas, toujours elance, ne presenle jamais d'obesite, excepte cbez les femmes. Les epaules sont larges ; et les muscles de la poilrine, des bras et de la parlie posterieure du hone, offrent un develop- pement en partie du a 1'exercice frequent tie la rame : car ils vivent dans leurs pirogues. En revancbe, cette pre- dominance del'appareil musculaire dans les membres superieurs fail pafaltre greles el eflilees les extremites inlerieures. La peau, lisse et douce au toucher, cumme celle des indigenes du nouveau continent, est d'une couleur brun olivatre, et il serait assez difficile d'en definir la nuance plus rigoureusement. Elle paralt un peu plus claire que celle des Guaranis, dont elle n'offre pas les reflets jaunatres ou mongoliques (1). (i) S'il parait demontre que les differences d'in tensile dans la co- loration du derme tiennent a des conditions primitives .1 'oryani .a- non, conditions propres .'i chaque race, il ne I'es^ pas moins que VII. JANVIER. 2. "2 ( 18 ) Les Pavaguas portent liaute lour lete volumineuse, couverle tie cbevcux abondants, longs, plats on legorc- menl bouclos. lis les coupent sur le dovant ('u rropt: no les peigncnt jamais, et les laissenl crc-ilre el rotom- bcr en desordre. Les jeunes gu 1 liers seuls les ras- sonililenl en par lie sur Foccipul, on ils les rclienncnt attaches a 1'aide d'une pclile corde louge, on dune lanierc decoupoe dans la peau d'un singe. Ainsi font les Guatos de Cuyaba, qui, pour lc dire en passant, so rappioi henl plus de celte peupladc que des Guaranis, a cole desqucls ils ont ele places dans Line savante classification (1). Les yeux pclits et vifs, legerement brides mais non rclcves a bangle exlerne, expriment la finesse et l'as- luce. be nez long, un peu arrondi, rappelle par ses lignes, la conformation caucasique. Les | < nnneltes ;ont a peine saillanlcs; la I6vre in- fcrieure depasse la superieure, ce qui donne a leur pbysionomic scricuse et froide, unc expression de fici lc dedaigneusc, en rapporl avee le caractere de ce peuple indomple. Les Pavaguas s'epilcnt. A l'cxemple des auties In- 1'insolation suffit «eule a produire une teinte plus on moins foneee de In peau, cliez Irs iodividus d'une uieme race qui s'exposeni a Tac- tion prolongee des rayons solaires; tanihs que des rirconstances oppose'es, loates cfaoses e'gales d'ailleurs, donnent lieu a des pjieno- merus contraires. Ici, a c6te de la reverberation des IVux dun soleil tropical par un reflecteur aussi puissant que le milieu sur lequel vi- vent les Payaguas, il y a 1 influenee d'une atmosphere cliaude et satun ed'liuiniiliie,un etai hyrjrometrique de Pair, qui peui expliquer, iusqu'a un certain point, I'intensiie moindre de la couleur de ces Indiens, comparte a eelle des Cuaranis. (i) D'Oibigny, ouvr. cit., p. 35o, t. II. ( 19 ) cliens, ils s'arrachent lcs sourcils et les oils, ofm de mieux voir. Sur les a u Ires parlies cl n corps, tlnns lcs deux sexes, le sysl6me pileux rosle toujours a Fetal rudimenlaire. La laille moyenne des fernines>, les chillYes que j'ai donne-s I'atleslent, egale an moins celle des Espagnolcs, el pourtant , comparee a celle des homines, cl le pre- scnte une difference en moins de 201 millimetres. Or, ce resultat, assez conforme a ceux f|ni se Irouvenl con- signed dans les ouvrages de HiJVl. Quelclel [i) et Isi- dore Geoffroy Saint-llilnirc (2), parail conlredire les observations failes par M. d'Qrbigny (3) sur d'aulrcs nations du rcmeau pampeen, chcz les(juelles les fem- mes onl des proportions relalivement plus grandes epie cellcs qui existent en Europe entre les deux sexes. S'il y a ici anomalie, par quelles causes e.sl-elle pro- duile ? A quelles circonslances locales, parliculiercs, I'altribuer? Nous posons ces questions sans chercber a les resoudre. Dans la jeunesse, les femmes, sans etre sveltes, sont bien proportionates, Mais elles engraissent de bonne beure; leurs traits se deforment. el bientot leur corps (i) Sur I'homnte et le developpement de sej facuttc's, t. II, p. 4*- Le savant direrteur de I'observaloire de Eiuxelles adinet coinme li- miies a I'arcioissemcnt de I liommc, Jm,722, et a celui de la femme, l^^jg : difference, 1^3 millimetres. (2) On lit celle phrase dans VUlstoire tjenrrale et particulicre da anomalies dc ionjnnhation, t. I", p. 236: <• Les fetnmes sont bpaucoup plus petites, proportion {-janh'e avec « les homines, dans les contrees oti ceux-ci alteiyneut une taille ties • clevee. » (3) Loc. cit., t. I", p. io5. ( 20 ) de\ient trapu et ramasse. En revanche, les pieds e( les mains conscrvenl toujours une petitesse remar- quable, quoiqu'clles marchent pieds nus, ct qu'clles nc prennent aucun soin de lour personne. J'ai retrouve' cette conformation delicate, cette distinction si cnviee des Europeennes, dans les nations du Chaco, qui sont, avec les Payaguas, les plus belles de l'Amerique, et peut-elre du monde entier. En vcrile, apres ce qui precede, on eprouve quelque embarras a rappeler les prejuges noinbreux qui onl poursuivi les peuplcs autochthones du nouveau con- tinent; prejuges dont le temps et la science ont fait justice. Cerles, nous sommes loin de l'epoque ou I'on disculaitgravement, a la suite de Thomas Ortiz, evequc de Sainte-Marlhe, et de Herrera, la question de savoir si les Indiens, nialgre l'excellence de leurs propor- tions, n'etaient pas des orangs-oulangs, c'est-a-dire une espece intcrmediairc entre 1'homme et les ani- raaux, et ou il fallait une bulle du souverain pontile , pour leur oclroyer le droit de cite dans l'espece hu- rnaine (1). [/opinion du P. Barthelemi de las Casas a prevalu, et grace aux voyageurs modernes, il ne reste rien des preventions injustes et des exagerations de Paw et d'Antonio Llloa. Mais passons. (i) Cette hulle celehre fut promulguee par Paul lit, le 9 juin 1 536, *ur les solicitations de deux moines, Fray Domingo* de Minaya, ct Fray Domingos de Betamos. Plus tard, an concile de Lima tenu en i583, la chose r'ui remise en question, et Ton discuta longuement pour savoir .-i les Americains possedaient I'inlelligence ni ■ -aire J la participation aux sanrements de I'Eglise. Cette fnis encore leur cause triomplia. (.24 ) Les femmes laissent Hotter leurs cbeveux sur les epaules, et ne les allacbenl jamais. Elles ont le sein bien place, et ses proportions n'offrent rien d'exagere avant le manage. Une fois meres, elles en allerent les formes, en les deprimant de haut en bas , a l'aide d'une ceinlure. Ainsi allonge, elles le donnent a l'en- i'anl, par-dessous le bras, ou par-tlessus l'epaule. Lorsqu'une jeune fi lie s'aperc,oit du signe certain de sa nubilile, elle en inslruit sa famille, el subit alors un tatouage qui attesle qu'elle est passee de l'enfance sterile a l'age fecond de la puberle. A l'aide d'une epine et du fruit du genipayer (1), on lui trace une raie bleuatre large d'un centimetre, laquelle commence a la racine des cbeveux, traverse le front, et descend perpcndiculairement sur le nez, jusqu'a la levre supe- rieure exclusiveinent. Au moment de son mariage, on prolonge cetle bande sur la levre inferieure j usque sous le menton. Sa nuance varie du violet au bleu- ardoise, et ses nuances son! indelebiles. Quelques femmes ajoutent a celle-ci d'autres lignes et des dessins traces avec la teinte enflammee de Yurucu; mais cette mode, generale il y a un demi-siecle, et qu'Azara decrit en detail, devient de plus en plus rare. . Les Payaguas vont nus dans leurs tentes [toldos) -, mais.lorsqu'ils serendent en ville, hommes et femmes portent une petite couverture ou mante de coton, qui les entoure a partir du creux de l'estomac jusqu'au- (1) Nandipq. h'Utucu ou rocou est une couleur rouge, que Ton obtient des fruits de 1'arbuste connu en botaniijue sous le nom de Bixa orellana. Cette matiere, precieuse par ses applications a 1'industrie, figure parmi le* pxpoitations de la Guyane franfaise. ( 22 ) dessous du geftou. Colic piece d'etofTe, qu'ils croisont sur Icui' corps a la maniero ilu c/tiripa clos Creoles, est un des ra res prod u its de Icur Industrie. Les ("emmes sont chargdes du soin de sa fabrication, pour laquelle clles emploient 1c soul secours des doigts, sans se servir cle navctte ct cle metier. D'aulrcs so contontcnt d'en- dosser urie chemisette sans col ni raanche, asset sem- blable an tipoy des Guaranis. Touteftois, l'usage des velcmenls semble leur devenir a tons de jour en jour plus fam'dier; el, parini ceux quej'ai vus vaguer dans les rues de rAssbmplion, aucun uc s'elait conlente, Comme autrefois, de se couvrir de peinlures, figurant des vestes et des culottes. Sous ce rapport, ie docteur Francia a su les plier aux exigences de la bienseance, et Ie gouvernement actucl paralt peu dispose a se re- lacber de la jusle sevcrite du diclateur. Quclqucs ahcienncs coutumes onl encore disparu : telle est celle qu'avaicnt les bomrries de porter suit le barbote (1), soil une petite baguette d'argent analogue Sd tembeta des Guaranis sausages ou CaaVguas. D'au- trcs ne sont reprises qu'a de rares inlervalles, ou a certaines epoqucs ; alors on voit reparaitre , en ces • (i) Muicenu Jc bois leger, arrondi, de dimensions variables, qui se place datia une ouveiluie praliquee a fa levre inferieiirc. Les lluio- coud»», les Lenguis, etc., -. c 1 1 1 1 1 1 c 1 1 r renorlcet' aaasi a tv& alfieux nincinciit autrefois ires usii6< Le tent belti est une baguette de gomroe jaune et transparente, < 1 c la dimension d'une grosse plume, destine a et re porteae l.i metne Ainiiiere niie le buibotf. Le tembvtd se terifiihe en poiute par Son ex- iii iniii: librt-i A I .iuiie. on >nude,nfei de la goimne Imniilc, une piece iiai.iveisoii- 'pii, par sa position daftS i inIim leur de la bomb.-, em- pet be la lia{;iifite ili s'echapper par lonverfttre d' l.i levie ( 23 ) jours solenriels, les longues aigrettes de plumes, fixees sur lo sommet rle lcur tele; lcs lalouages varies et de couleurs lrancliani.es; les dessins bizarres dont ils se couvraient le visage, les bras ct la poitrine ; les col- liers de verrolerie ou de coquillages ; enfin, les bra- celets d'ongles cle cerf, enroules autour des poignets et des malleoles. Mais la tradition de cclte ornamenta- tion compliquee, nous le verrons bientot, a ele reli- gieusement conservee par le paye ou medecin de la tribu (1). Les Payaguas vivent sur la rive gauche du Rio Pa- raguay, qu'ils ne quiltcnt jamais, pour allcr s'elablir du cole oppose, ou les IndicQS du Chaco, avce les- quels ils sont loujours en guerre, ne manqucraicut pas cle les allaquer. Leur bulte principale {tolderia) , elevee surle Lord du fleuve(2), consiale en une grande case allongce, haute de 3 a k metres, faite de bambous places sur des fourches et que Ton a recouverls do naltes de jone non tressees. Des depouillcs de jaguars, de capivaras, elendus sur le sul , scrvent de Ills,; des armes, des nstensiles de pcclie et de menage sont ac- croches aux perches qui Souliennent la frele loiture de l'habitation, ou gisent pele-mele avec des vases de lerre dans quelque coin. La poterie que i'abriquent ces Indicns est mal cuile, se brise faciiement, et ne doit resister que l'aiblement a Taction du feu. L'argile en est noiralre et assez gros- siere ; mais les foimes qu'ils savent lui cionncr et les (i) Pa-ye. (2) Olle nartie du nvaije est appelee el Banco. Elle scit de lieu de promenade le dimauche. ( 24 ) dessins dont ils la reveleni, denoieul de I'adresse el du gout. Us se servent encore habituellenuent de calebasses (porongbs), Ires communes dans 1<% pays, dans 1 < s- quelles ils rapp irlent de lavillo l'eau-de-vie de canne, dont ils font alms loutes les fois qu'ils en ont les moyens ; car ils ne connaissent d'aulre f»He, d'aulre distraction, que l'ivrcsse; et ils depensent de cette sorle tous les benefices de leur commerce avec les habitants de l'Assomption, auxquels ils fournissent le Lois, le poisson, et le fourrage de leurs chevaux (paslo). Autrefois, I'lndienivre etaitaccompagne,dans les rues, par sa femme ou par un ami, qui souvent parvenait a le ramener dans sa demeure, avant la perte enliere de 1 usage de ses jambes. Mais il est maintcnant de- fondu, sous des peines severes, de le laisser boire dans les boutiques [pulperias), et le Payagua muni de sa precieuse liqueur doit rentrer chez Jui, pour se livrer en toule liberie ii sa passion favorite. Avant l'adoplion de celle mesure, il se j)assait frequemment, Sur la voie publique, des scenes dont la decenee avail fort a rougir. II est juste d'ajouter quejamais, en cet etat, ils n'ont commis de plus graves debts, et que, depuis la paix qu'ils ont signec avec les blancs, rare- ment les autorites ont eu a s'occuper d'eux. La plu- part des jeunes gens et des femmes s'absliennent de boissons alcooliques ; les homines maries ont seuls le privilege d'en user largement, et ce gout, cbez eux conmie parlout, s'accroll et se developpe avec Page. L'industrie ties bornee des Payaguas conslitue ce- pendant leur unique ressource; car ils ne connaissent aucune culture, et ne recoltent ni mais, ni patates, ni (25 ) tabac. lis sont pecbeurs, passent leur vie sur 1'eau, et deviennent de bonne beure de Iresbabiles mariniers. Tanlot on les voit a I'arriere d'une pirogue s'aban- donner au courant en suivant leur ligne ; tantot, de- bout sur une file, ils rament en cadence, el font glisser l'embarcation avec la rapidite d'une flecbe. Longues de h a 5 metres, leurs pirogues sont creusees dans le tronc d'un Umbo, et se terminent aux deux extremites en pointe aigue. La largeur varie de 2 pieds efdemi a 3 pieds; el leur pagaie, aceree comme une lance, devient entre leurs mains une arme redoulable, a la- quelle il faut ajouler Fare, les flecbes et la macana. A la guerre, ils sont cruels, et ne font de quartier qu'aux femmes et aux enfants. Leur maniere de com- battre n'offre rien de particulier. Ils attaquent les Indiens du Cbaco , en fondant sur eux a l'improviste afin de les surprendre ; mais ils se gardent bien de s'eloigner des rivieres, car ils seraient facilement vain- cus en rase campagne par ces tribus si redoutables a cheval. Deja on l'aura pressenti, celle nation vit dans un etat de liberte absolue et de complete independance, vis-a-vis du gouvernemenl de la republique para- guayenne, qui ne lui impose ni taxe ni corvee. Loin de la, ilpaie aux Payaguas les services qu'il reclamed 'eux, soil lorsqu'il les envoie en courriers sur le fleuve, soil lors- qu'il s'en sert comme de guides dans les expeditions dirigees contre les bordes sauvages qui errent sur la l'ive droite. Le docteur Francia avait su tirer parti de leur concours, pour fermer le plus hermetiquement possible son malbeureux pays, en les cbargeant de la surveillance de la riviere, seule voie par laquelle il ( 26 ) fiit possible de s'en £chapper; etles Pay aguasnefi rent jamais dofaut, dit-on, a I'exicution des eonsignes ri- gourcuscs qu'il lour donna. Libres vis-a-vis du gouvemement, ils le sont aussi en Ire eux. Quoique reunis en communaute, ils ne re- connaisscnt ni chef, ni hiei archie. Jamais ils n'ont voulu se soumottre au christianisme, et tons lcs efforts de se,s aj)6lrcs ont echoue. Le seul personnaue de la iribu est le medecin ou paye, dont les fonctions ne reslent jamais \acanles, <:ar clles ne sont pas sans profit. Desireux de connailre et de pouvoir dessiner a mon aise, an milieu de lout le luxe sauvage de son accou- trement, celui qui etait charge de ce role, j'ohlins qu'il se rendrait, rcvelu des alliibuls de sa haute digoile, dans ma maison , en compagnie de quelques aulres Indiens. La piomessc d'une certaine quantity du pie- cieux hreuvagc et la perspective d'une soiree d ivresse avaient eu promptemeni raison de ses hesitations. Au jour dit, le paye vint me trouver avec un jeune gareon et deux femmes. C'clail un vieillard , com bo par les annccs, mais donl la physionomie n 'avail rien de repoussanl, malgre la deformation des trails, tou- jours precocc et si rernarquable cbez les indigenes. Ses cheveux , encore noirs, etaient relcnus sous une rcsille bordee de verrolerie. Une aigrette surmonlail la rcsille, et des plumes de nandii llottaicnt. derriere sa tele ; un collier de coquillages bivalves entourait son con , auquel pendail, comme trophee, un sifflct laille dans 1'osdu bras d'un ennemi. Enlierement nu sous sa chemisette sans col ni manches, faile de deux peaux de jaguar, il portait autour des malleoles des ( 27) chapelets d'ongles de capivrtras, Enfin, il tenait dons la main droite nne coufge allongee, el, dans la gauche, un long tulie de bois dur, que j'eus quelque peine a reconnailre pour une pipe. La scene s'ouvrit. Le .sorcier donna la pipe a son compagnon pour Tallinner, ct, 1 ayant reprise, il aspira plusieurs bouflees de fumee qu'il lanca bruyammeht dans la calebasse par l'orifice donl elle elait percee; puis, sans l'eloigner de ses levres, il so niit a crier tanlot lentement, lantotvite, en faisant entendre aller- native'ment les syllabes ta ta, et to to to, avec des re- doublcmcnts et des eclats de voix extraordinaircs, inexprimables. En meme temps, il se livrait a de vio- lenles conlorsions, a droite, a gauche, et execulail des sauts en cadence, tanlot sur un seul pied, tanlot sur les deux reunis. Ce manege ne dura pas longtemps, et, sous pretexte de fatigue, il ne tarda pas a s'arreter. II fallut une rasade pour le remellre debout, et son chant mono- lone recommence aussilot. Loisqu'il s'agit de !a guenson d'un malade, le me- decin ajoule a celles-ci d'autres jongleries. Elles sont spiriluellement racontees par le P. Guevara, dans I'ouvrage que nous avons cite vers le milieu de ce recit. Enbuite, le patient est mis a la diete, et Ton devine que le regime n'a pas la moindre part dans des cures qui rappoilent beaucoup de consideration, quelques privileges et les moyens de vivre dans ['abundance de toules choses. En revanche, en cas de mort, une cor- rection severe vient souvent punir 1'hoinme de I'art de l'impuissunce de sa therapcutiquc. Enfin, mes dessins ncheves, je levai la seance, a la ( 28 ) satisfaction g6n6rale de mes botes, et je les congediai, ,ij res avoir acbete" au paye sa pipe ot son sifflet. Faile de bois dur el pesant, celte pip£ esl couverte de grecques regulieres, gravees superficiellement, avec une assez grande perfection. Longue de 50 centime- tres, elle est ornee de clous dores, el percee d'un conduit , i. ( 38 ) Quant a la fillb dlbzer, que batit Salomon (1), M. de Saulej I'assirnile a Halfcbr on Asorde la Galilei, apparlendnt a la Iribu de lNcphlhali, d'apres la mention qu'en a faita lhisiorien Josephe [2j dothliid d'unc ville Ires fortiliee; mais esl-cv bien dti I'antique cile tie la Galileo que parle le livre des Hois? Saint Jerome et Eusebe (3) parlent de 1'Azor de Josue, niinine il'iin bourg ou d'une cile radicalemenl ruinee, tandis qu'il y en avail uue florissante (sans doule Azotus), pies d'Ascalon. C'est l'Asor de la tribu deJuda ou de Benjamin |4). Si I'antique Azor avait ele relahlie (5) du temps de Tiglat-Phalassar, roi d'Assyrie, comme on le pretend, ses habitants furent emmenes en caplisite; et si elle se retrouve encore avec une population imwnibiablc (cette exageralion est commune clans les Perils orien- laux) sous Naboukadratzor, roi de Babylone, c'est qu'elle n'avait ele que d<5mantelee precedemnient. Le prophete Jeremic (6) dltqu'elle fut encore detruite, et qu'il n'y resta ni portes ni verrous. Comment plus de viligt quatre siecles apres, M. de Saulcy en aurait-il decouvert de si grandes ruines ? N'est-ce pas plutot aux ruines de Dan, existant du temps d'Eusebe sous le litre de bourg, el du temps de Jerome sous celui de Vicidus, qu'il anrait du appliquerles ruines qu'il a vues? (i) III Rois, IX, i5. (i) Arch., VIII, (i, i. (3) Onomasticon. (\) Jostle, XV, a3, a5; II Esdras, XI, 33. Josephe, Arch., IX, i i , i . ■ \I.IX, 28. ( 39 ) Dan doit sa decheance a la fondation de Paneas, qui n'en 6tait qu'a A milles romains ou 6 kilom. Paneas fut appelee Cesaree, en l'honneur d'Auguste , par le tetrarque Philippe, fils d'Herode; elle recut de l'ac- croissement du roi Agrippa le Jeune, qui la dedia a Neron sous le nom de Neronias. II est sensible, en effet, que deux villes de quelque importance n'ont pas du subsister si pres l'une de l'autre Mais M. de Saulcy pretend (1) que c'est une absur- dite de confondre les ruines d'El-Souq (ou Ez-Zouk), avec celles de Dan, parce qu'il y aurait une distance enlreles deux points de 12 a 13 kilom.; c'est ce qu'il au- rait du exprimer soit par une carte des lieux, soit par les distances marquees sur son itineraire. Mais a ne voir que sa carte generale, il semble que l'extremite des ruines qu'il mentionne touche a la vallee de Tell-el- Qadhi , ou Ton place Dan. Car le pont El Rbadjar, qui reunit les deux parties de la vallee , en donnant passage a la riviere d'Hasbeya, n'est qu'a une demi- beure de marche au nord des deux points que nous venons de nommer. D'apres Zimmermann, Ez-Zouk n'est qu'a h milles geogr. de Banias, qui est aujourd'hui fort restreinte ; et certes, dans leur etat ancien, Cesaree et Dan se rappro- chaient bien davantage par leurs exlremites : le point El-Qadbi, qui n'est qu'a 2 milles geogr. de Banias, est trop engage dans la vallee marecageuse que traverse en cet endroit le bras principal du Jourdain, pour avoir servi de sol a une grande ville. II y a done les plus fortes raisons d'identite entre (i) II, 556. ( 40) lcs mines vues par M. de Saulcy a Souq ou Zouk, ct les mines de Dan ; celJes d'Hasor, plus rapprocheesdu lac, avaient depuis longtemps disparu, des avant le commencement de notre ere; danstous les cas, il faut sur ce point de nouvelles verifications. Noire voyageur parait d'ailleurs domine par une illusion biblique, quand il croit avoir \u a Cadish (anciennc Kades) ou Gali, les mines du veau dore ou d'or, 6le\e par Jeroboam a Dan, aux faux dieux, il y a trois mille ans. On est d'accord sur le nom grease de Dan, avec Dane ou Danos, et Daphne de Josephe (1). C'etait la limite de la Judee de ce cote ; on disait : de Dan, jusqu'a Bersabee, Beersheba ou Bethsamaie (2) (puits du Serment) , pour indiquer toute l'etendue de la Palestine : ce qui demande une explication. Un lieu du memenom ful donne par Josue, tantot a la tribu de Juda, tantot a oelle de Simeon (3) ou de Benjamin, ce qu'Eusebe et Jerome expliquent, d'abord par la prise de possession de la tribu de Juda, et par une retro- cession ulterieure du lieu aux autres tribus. C'e1 tait d'ailleurs un grand bourg, a 20 milles romains, au sud d 'Hebron (4). Mais il y avait aussi un Bersabee au sud de la Galilee. Le Ueuteronome (5), en disant que Dieu montra a Moise avant sa inort toute la terre de Gilead, jusqu'a (l) G. Jud., IV, I, i ; Arch., I, io, i; V, 3l; VIII, 8, 4- (a, II Samuel, ou Rois, XVII, n;et Onomasticon , hoc verbo et v° Lu'isa. (3) Josut-, XV, 28; et XIX, 2. (4) Onomasticon. — V. carte de Kiepert, clans lcs recherches de Robinson. (5) Deut., XXXIV, 1. (M ) Dan , indiquait par les premiers mots la partie sud de la Galilee cm le nord de la Samarie ; c'est ce que nous expliquerons plus bas. Dan etait appel^e Laisa, Lesce on Lesem, avant d'eti-e prise par les enfants du patriarche Dan, qui formerent une tribu, et s'y etablirent, en se divisant plus tard. Elle etait pres d'une des sources du Jourdain, mais il ne fautpas la confondre commc Bomfierius, avec Paneas, puisque Eusebe et Jerome la placent a h milles roinains de distance, sur la route de Tyr. Mais les sources sont multiples en cet endroit ; il y en a du cote de l'orient, celle de Pandas, et du cote de l'occident, celles de Dan (1), et on les confond a cause de leur voisinage. Josephe appelle expressement la source pres de Dan, le petit Jourdain, pour le distinguer de la branche principale (2) quiavait sa source 120stades plus haut. Jerome alteste (3) que le mot Jourdain se compo- sait de deux racines, Jar, qui signifie cours d'eau , PfiGpov , et qui s'applique a la branche principale , et Dan, qui est le petit bras. Mais Robinson (h) n'hesite pas a dire que cette etymologie est absurde, parce que Jordanes n'est que le mot hebreu larden grecise, nom qui ne reproduit pas celui de Dan ; il ajoute quele nom/a/Y/e/jremonte au temps d'Abraham, et est par consequent bien anterieur a 1'arrivee des fds de Dan dans le pays. Burckhardt, cependant, dit avoir appris sur les lieux que 1'ancien nom du Jourdain (i) Onomasticon, v* Dan et v° Laisa; et Josephe, Arch., I, io, I. (2) Arch., VIII, 8,4; — Guerre des Juifs, IV, 1, 1. (3) V" Dan, par addition a 1'article d'Eusebe; et Comm, sur Matlhieu, XVI, l3, (4) Note 3 (III, 35a). ( 43 ) eluitJur, el quo la source do Toll-el Qadbi elait appolee Dan. Ges^nius (1) parait otic lo premier qui ait sou- loiiu que los modernes comprenaiinl mioux l'bebreu ancien meuie que Jerome, qui la pourlant appris en Palestine, 11x00 ans auparavant eux, et qui le savait si bien, qu'il a traduit I'ancien Testament en latin. Les bebraisanls d'aujourd'kui persistent dans cette opinion, et soutiennent qu'il y a aussi dans I'historiteh Josepbe, des interpretations de l'ancien bebreu qui prouvenl qu'il ne le comprenail pas. C'est assuremenl une \n\\- lenlion bien extraordinaire que la science seule pent justifier; car Josepbe avait 6crit en bebreu l'bisloire de la guerre des Juifs; il e"lait d'unedes premieres fa- milies sacerdotales de Jerusalem; il avait sous lesyeux les arcbives du temple encore subsistant, et il cite bien des ouvrages perdus. Comment un pared bomme, si instruit des antiquiles judai(jues, n'aurait-il pas mieux compris l'ancionne langue que les savants mo- dernes, et se serait-il laissc dominer par la version des Seplante et par les Juifs bellenistes? M. de Saulcy no parait pas dispose1 a ceder sous ce rap|)orl a Gesenius, Robinson et autres { ou an, jusqu'a Damas, etaient en dehors de la Galilee. Les Danites s'elendirent de ce cote; mais quand ils furenl resserres du cote de la tribu de Nephthali, jus- qu'a Cades, ou etait la montagne du meme nom, ils durent demander a leurs coreligionnaires une place au sud-ouest. Pour ne plus revenir a la Galilee , dont Josepbe a fait une description plus ample que la Bible ellc- menie, il est une foule de positions qu'on ne peut encore fixer, telles que cclles de Garis, ville qui etait situee non loin de Sepphoris (1). Meme la ville de Jotapata, si celebre par la defense (i) Guerre des Juifs, III, 6, 3. J ( 45 ) heroique de Josepbe et des Galileans contre los Ro- mains, qu'il serait si convenable de placer a Safed , nous sommes obliges de declarer notre incertitude; car on ne peut ni la placer au plateau Yaraoun, au nord-ouest de Gischala, puisqu'elle appartenait a la Galilee iuferieure, du cote deTuran, ni a Kalat-Jeddin, sur un mamelon baigne par une riviere sans nom, qui se rend a la mer Pb^nicienne, ainsi que l'a pro- pose Kiepert , parce que ce point est trop pres de la liraile de la Phenicie, el trop au nord. On est aussi dans l'incertitude relativement a Se- lamin, peut-etre Sekenin , Capbarencho (peut-etre Kefr-Amar), — Sigof, — la roched'Acbabares, — Sepb, Jamnitb et Merotb. Peut-§tre Tibnin, point moderne fortifie au sud du Leontes, indique sous le nom de Toron, qui lui fut donne par les croises, et que Guillaume de Tyr (1), place a 10 milles de la cite iyrienne, d'ou son seigneur faisait des incui'sions sur le territoiie de cette ville, etait-il encore dans les limites de l'ancienne Galilee ? Mais, nous le repetons, ces paysn'ont pas encore ete" suffisamment explores. Pays au nord de la Galilee. Revenons a la source principale du Jourdain et au pays a Test de Banias, qui se raltachent encore par tant de souvenirs a la Palestine. L'bistorien Josephe dit que la source principale du Jourdain etait a 'J 20 slades de Paneas (2), ou Cesaree, (.) V, 5. (*) Guerre des Juifs, III, 10, 7. ( 40 ) (hint la position est bicn eonnue, el sc rctrouvo a Banias d'aujourd'hui. Cette distance de 120 stadcs on 22 kilom. 200 M., nous reporte bion loin de Paneas, oil se Irouve une ea- verne.el d'ou sort l'une des sources du Jourdain, celle dont nous avons deja parle. Si nous la prenons dans le sens de la vallee, qui s'elend an nord , entre la Ccelesyrie et les grandes penles do I'Anti-Liban f nous trouvons une ville junoderne assez importante, du noni d'Hasbeya, a 11 milles geogr. de Banias, ou 20 362 metres. M. Lyncb a donnc la latitude de cette ville a 33° 25' 18", c'est-a-dirc a 1 millc geogr. ou 2 kilom. environ plus au sud que la carle de Zimnnrmann. An nord-ouest, pres d'Hasbeya, du cole de la pelite cbaine qui separe cetle vallee de celle du Leontes, qui est a proprement parbr la Ccelesyrie, est une source qu'on peut considerer coinmc l'une de celles qui Torment principalement la riviere Hasbany ou le Jourdain supericur. A ce point, les deux rivieres ne soul separees que par un intervalle d'a peine 2 1/2 milles geogr., ou 4 500 melr. cntre Khanes-Snk et le pont de Burghasr. — Ceci explique l'erreur commise par Strahon , qui n'avait pas vu I'inlerieur du pays, et qui a confondu le Leontes et le Jourdain , quoique 1'tm aille se jeter au sud-ouest dans la mer de Phcnicie, et l'aulre au sud, dans le lac de Tiberiade cl la mer Moi le. Dans celte vallee, aussi du cole de I'oucst, est un village marque sur les carles de Riepert et Zimmer- mann , appele Ibel-el-Hwa, dans lequcl ils croient apercevoir l'ancienne ville d'Abela. ( w ) II y a une telle confusion dans la geographic de la Palestine a cause cle la repetition du nom d'Abela ou Abila, que Rt land n'a pu indiquer la position de chacune d'elles. La decouverte d'inscriptions a fait connaltre que l'une (cello de Lysanias) etait dans l'Anli-Liban, au nord-ouest de Damas. On parait aujourd'hui fonde a en separer Abela, puisque dans une lettre, un eveque du vi° siecle, don- nant les noms de ses collrgues au concile de Jerusa- lem , parle de Jordanos, eveque d'Abila , et d'un autre nom pour Abela; — d'un autre cole, Eusebe el Jerome, dans YOnomasticon (1), parlent d'un vignoble celebre de ce nom dans la Batanee. La vallee que nous decrivons est probablement cetle Batanee, donl aucun ecriyain ancien n'a determine les limites par rapport a la Trachonile, ou Trachonitis de l'historien Josephe, et a l'lturee, qui se confond avec l'Auranitide. Robinson a done propose de placer cette Abela a Ibel, et il pense (2) qu'il y a idenlite entre elle et Abel- Beth du Livredes Ro/'s (3) (en hebreu), ou Abel-Maacha (des Septante et de la Vulgate). On nu signale aucune ville antique a Hasbeya, malgre la biaute tie sa po- sition. M. Lyncb, qui a parcouru cette vallee, ne fournit a ce sujet aucun eclaircissement ; M. de Saulcy n'y eut pas manqu^, s'il n'avait pris une autre route pour se rendre de Banias a Damas. Vers le plus haul point de la vallee que nous de- crivons, est une autre ville de quelque importance, (i) V° AaTapw8. (2) III, App., p, i37. (3) XV, 20. ( 48 ) Rasheya, d'ou part one route qui se rend de la valine du Leontes ct de la Phenicie a Damas. Tout pres de la, selon iM. Callier, au revers de la montagne, un lac demi-circulaire. Rien ne conviendrait mieux que ce lac a la des- cription que donne Josephe de la source principale duJourdain, avec lequel un lac, nomine Phiale, entre- tenait une communication souterraine , ce qui fut verifie par Philippe le telrarque (1) , qui y jeta des objets que Ton retrouva flottantdans le Jourdain. Mallieureusement pour rauthcnticite de ce rappro- chement, il y a entre Rasheya avec son lac, el Banias, ou Cesar^e, qui est la source reconnue du petit Jour- dain, une distance de 19 milles geogr., environ 35 ki- lometres, sans compter les devours; alors il aurait fallu que Josephe plagat le Phiale a 200 stades et non a 120. La difficulte suhsiste done. Oil etait le Phials de Josephe? Etait-ce sur la route du nord ou sur la route de Test, pour ceux qui se rendaient de Cesarde- Paneas a Damas? Aureste, selon la carte de M. Callier, l'Hashany, qui forme le Jourdain supericur, n'aurait pas sa source meme a Rasheya et au lacvoisin, mais plus haul encore, a une l'ontaine, dans les defiles d'un pays montueux. Jusqu'alors les carles faisaient tomher les cours d'eau de ce haut pays, non dans le Jourdain, mais dans le Leontes, le grand fleuve de la Ccelesyrie, donl aujour- d'huiilssontseparesparun contre-i'ortderAnli-Lihan. Quoi qu'il en soit , et jusqu'a des eclaircisseinents nouveaux, il est difficile de ne pas considerer ce haut pays connne r^pondanl a Pandemia Trachouile, ou (i) Josephe, Guerre del Juifs, lit, io, 7. ( A9 ) Trachoriitide, qui contenait beaucoup de cavernes, et se fapprochait de Ja plaine de Damas. C'est par ce pays que les populations juives cora- muniquaient avec l'Abilene de Lysanias, nominee dans FEvangile de saint Luc, et qui figure plusieurs fois dans l'histoire de Josephe. Si l'on rejette, tnalgre l'autorile de MM. Callier, Berlou et Lynch, et l'etude des lieux, l'opinion qui place la plus haute source du Jourdain dans cette longue vallee, avec le lac Phiale, pour chercher ce lac et les 120 slades de 1'historien Josephe, sur la seconde route qui conduit au nord-est de Cesaree-Paneas, a Damas, par l'Auranilis on le Hauran, sur le revers oriental de l'Anti-Liban, il faudra examiner les argu- ments de M. de Saulcy, qui a suivi cette route. La se presente la monlagne appelee autrefois le Paneion, consacree au dieu Pan, d'ou sortait Tunc des sources du Jourdain, qui passe a Banias (Cesaree- Paneas), et va se joindre dans la vallee aux sources venant du cole de Dan , et a la hranche principale appelee Hasbany, qui descend du nord. Nous n'avons rien de plus a dire que MM. Robinson et de Saulcy, sur Cesaree-Paneas et sur cetle source du petit Jourdain. Vient ensuite, du cote de Test, le defile d'Ain-el- Hazouri, ou M. de Saulcy (1) retiouve un souvenir de la ville ou du royaume de Halzor, quoiquc nous soyons evidemment hors du terriloire de Nepbthali et de Dan, et par consequent de la Judee. (i) M. de S., IF, 555. VII. JANVIER, h. U ( 50 ) Dans la plaine de Merdj-el-Afoureh, au sud de !a route de Damns, noire yoyageur apercoit, quoique d'assez loin, un elang vaste, eu il place le lac Phiale.de Josephe. C'est, en effet, la distance d'environ 120 stades; mais Petal physique des lieux, la largeurde la chatne des montagnes qui separe cette plaine de la \allee de Banias et do Dan, s'opposent a ce que Ton se prete a la ficlion d'une communication soulerraine des eaux, Du moins, on ne rapporte aucun fait al'ap- pui. Mais cctle opinion s'appuie aussi des cartes de Riepert et de Zimmermann. Pour nous, en atten- dant la verification du fait du tetrarque Philippe, nous preferons la realile anx fictions. Dans le village de Medjdel eth-Chems, sur le revers oriental de I'Anti-Liban, M, de Saulcy croitvoir (I) le iirii-Cherns de la tribu de Nephthali. Le 110111 hebreu de Josue ('2.) est Belh-Schcmun ; des Septante, Bait- thaned; et de la Vulgate, Bethsame. Quel rapport y a-t-il entre ces noms et celui de Medjdel, qu'ailleurs, pour l'hisloire evangelique du lac de Tiberiade, on traduit par Magdala? La demi-tribu de Manasse, seule, parait s'elre elevee de ce cole, dans le pays deHauran, ou M. G. Robinson a Tail en J830, apres Burckardt, une excursion inte- ressaute; seulement I'ouvrage est bien pauvre pour la geographie comparee, el fori en arriere ties travaux de l'Americain M. Ed. Robinson. A Beit-Jenn, plus au nord, M. de Saulcy place i II, 56o. (a) XIX, 38. ( 51 ) 1'Abela , que V Onomasticon d'Eusebe et fie Jerome placent entre Pandas el Damas; nous ne voyous pas qu'aucun geograpbe ait adople eelte opinion, el l'au- leur n'y insiste pas. On a vu plus bant quo nous placons , avee M. Eel. Robinson, celle Abela dans la oalanee, pu vallee de I'llashany. ftl. de Sauley .Le livre ensnile a une longue discussion pour prouver que le pillage de Kel'h on Kafr Har.war, ou Haouar, pres duquel, snr une eolline, est une sorte de batiment carre (|ue les Arabes appellent Qobi- Nimroud, ou lombeau de Nimroud, represente une ville ancienne. Au milieu, du village meme, il trouve un stylobate de marbre blanc, avec une inscription grorque, oil se trouve le nom d'Atargate, deesse assy- rienne. II en conclut que c'esl 1 'em placement de /Ere-ad-Ammontem (/Enos),que les ilincraires anciens placent entre Damas et Neve. Savoir : Celui d'Antonin, n° /18, a. . 32 milles romains. Le meme itincraire, n° A0. . 33 La table de Peulinger. ... 28 — Et l'itineraire de Damas a Jerusalem , a 27 — 120 milles romains. Moyenne 30 mil. ou lillk. 1/2. A raison de l'anaiogie qu'il trouve entre /Ere ou /Enos, et Haouar, noire compatriote ne doute pas qu'il n'ait retrouve remplaeemenl de cotle ancienne ville. A la verite, il n'y a pas de rapport entre .E.:os et Ad- dontem; maisenti e Haouar et le village de Beitirna, ( 52 ) dit-il, sont un ravin ei une pclilc riviere appeli'-e par Zimmermann Moiedeb - Hcrane ; e'en est assez pour en conclurc, vu d'ailleurs qu'il y a sur ce ruis- seau un beau pont antique de deux arcbes, l'idenlite de ces deux points, Reste leur distance a Damas ; elle n'est que de 17 milles geogr. ou 30 kilom. : un quart an i nobis au-dessous de la moyenne des quatre ilineraires. Aussi Lapie.qui, dans son travail detaille sur les itineraires, public en commun avec M. Miller, a applique a la loca- lity d'Aabere, probablenient Haouar, Ie chiffre ii"2 du premier de ces itineraires, trouva un deficit de 17 milles romains. II faudrait plutot placer /Ere aMezraa de la carte de M. Callier, sur la riviere Beit-el-Djenn. D'Anville distingue /Enos de la localite d'Ad-Montem, et ne parle pas d'/Ere. Cetle discussion prouve que la proposition de M. de Saulcy n'est encore qu'une conjecture. II faudrait que le terrain fat fouille, et qu'on rapportat quelque in- scription au nom d'une des trois villes de l'itineraire, pour faire passer sur la difference enorme qui existe dans les distances. Au reste, M. dc Saulcy pense (1) que la carte de Zimmermann est ici tres defectueusc ; Haouar et Bcilima, a peine distantes l'une de ['autre d'un kilom., y sont beaucoup trop rapprocbees d'Artouz ou Arsoude, puisque selon lui, il y a quatre beures de marcbe de distance. Cela rapprocberait en efl'et beaucouj) Haouar el Bcilima de Beit-Jenn ou de Mezra. (■) H,574. ( 53 ) Notre compatriote, d'ailleurs, dit avoir trouve un grand troncon de colonne ct de belles pierres de taille, a Beitima, ce qui annonce une ancienne loca- lile. Pres d'Artouz meme, il signale (1) deux inamelons couverts de grands edifices ayant 1'apparence de manoirs feodaux. On est la a l'entree de la belle plaine de Damas; e'est ce qu'exprime la carte de M. Callier, et non la carte muette de M. de Saulcy. Nous en avons fini de l'Auranitis ou Haouran, im- parl'aitement decrit par M. G. Robinson. A Damas, le cimetiere musulman presente des sar- cophages, exactement conformes a ceux que notre voya- geur appelle les tombeaux des rois de Juda, en dehors de Jerusalem. Cette observation de sa part (2) ne diminue-t-elle pas beaucoup l'importance que lui- meme a attachee a ces tombeaux ? Comme il n'a sur Damas rien a dire de nouveau, il poursuit sa route vers Balbeck (Heliopolis), par la vallee duBarrada, la plus forte des rivieres qui arrosent la capitale de la Ccelesyrie et de l'ancien royaume des Arabes. M. Lynch remarque que Damas, loin d'etre au milieu d'une plaine, est situee a la base de l'Anti- Liban (3). En passant pres du pont romain qui ouvre le pas- sage des deux rives du Barrada, le commandant ame- ricain signale, sur la rive orientale et sur la hauteur, (i) H,576. (a) II, 578. (3) Journey, p. 48''. ( 54 ) tombc rreusees Hans le roc, et les mines d'un aqueduc remain, avec • ne inscription I. dine, doni il nc s'« ccupe pas autre i ml (1). .M. Callier avail indi- um'' eelte localile sous lc nom de Souq, et e'est la qu'on s'aceorde a placer les mines d'Ahila do Lysa- nias, chef-lieu d'une principaule. I no inedaille recem- uipiit deromeite a Fail eonnaitiv que T,\sanias (fils ie Ptolemce) en etail lout a la Feis letrarque el grand- prelro. M. de Saulcy ne pouvait martquer de la visiter J il a memo oopie I'inscriplion, qui est douhlo, et qui prouve qo'en effel c'etail ['emplacement de la villi! des Abileniens. Selnn celto inscription, « la route avail etc enlevee dans une erne du torrent, et, sous le regno des ettpereursMarc-Aurele, Antonin el \ ei us, elle fut rata* hlie par ordie du gouverneur de la Syne, et par les soins du commandant dc la \\ Ic legion. » — M. de S. a trOtfve, de plus, des restes d'une inscription greeque, mais trop mutilee, pour qu'on y ait leeonnu une date historiqufe. T.a description de M. de Saulcy est un service rendu a la science, quoique ['inscription latino no fat pas inconnue (9), etque les doules sur 1'exislencc, on co lieu, do I'Abila de Lysnnias fussent levos. Cost un point important pour la geographic, a cause des autres \illes de la Palestine qui portenl le memo nom. M. do Saulcy a d'ailleUrs signals une orreur asset impoi lanto dans la carte de Zimmei inann, relative a un affluent du Barrada. (0 PaGe i!M- (viv Robinson III, i j(j . en attribue la ileiouveite j M. !!.ml<>- Ho '. h urm \ I. 3oi, el .i Gcnesius mi Burckhttirdl ( 55 ) La distance d'Abila a Damas est ported par 1'itine- raire d'Antonin a 18 milles romains, ainsi quo dans la table de Peulinger. Sur la carte de M. Callier, elle est do 12 milles geogr., et, en comptant les detours occa- sionnes par les meandres du fleuve , d'environ 14, c'esl-a-dire de 26 kilom.; cela repond merveilleuse- ment aux 18 milles romains. M. de Saulcy repousse l'opinion de ceux qui placent Abila a Nabi-Abet. Ce village n'est qu'a 2 kilom. au nord-ouest de Souk, et certes une ville de l'importance d'Abila pouvait s'etendre de l'un al'autre. A Zebdany, plus haul vers le nord, notre compa- tible a signale des debris antiques, qu'il n'a pu exa- miner. M. Lvnch s'cst borne a menlionner la tradi- tion qui place en ce lieu le tombeau d'Adain, et, dans les monlagnes, l'endroit oil 1'arcbe de Noe" se serait arretee. II y a aussi a Zebdany une fontaine sacree, tres visilee par les musulmans. A Balbeck, M. tie Saulcy a n.trouve une inscription deja publiee par Bceckb, et qu'il complete, en consta- lant (1) que Zenodore (dout 1'histoire est racontee par I'historien Josepbe ) avait accjuis la telrarcbie de Lysanias, qu'il elait un des fils de Lysanias, et qu'il avait un frere du meme nom que leur pere cominun. C'est un point important pour 1'histoire, ei il en resulterait, ce qu'on ne savail pas historiquement, que, du temps de Til>ere, il a existe un Lysanias II, devenu tetrarque, comme son pere, de I'Abilene, (i) 11,6^4. ( ofl) quoique ce.tte print ipaute paraisse avoir ele donnee par les Remains au tetrarque Philippe. An village Ain-Hour, noire eompatriole signale ties excavations sepulerales, en assez grand nombrc pour conslater la necropole d'une ville antique. Excite par les souvenirs d'Heliopolis, M. de Saulcy s'est livre a de grandes investigations sur les antiqui- ty, et pense avoir decouvert la veritable position du temple du Soleil , avec le surnom de Balanios (1) , qui rappellerait l'alliance du culte de ce dieu avec celui de Baal. II ajoule une observation geographique assez cu- rieuse. On a publie dans le Magasin pittnresque une vue du village de Baalbeck, avec des barques elegantes et agitees, qui sillonnent la petite riviere de Ouadi- Nahle, laquelle, apres avoir arrose les ruines, se jetle dans le Nabr-Kasmieb (le Leontcs). Cette vue n'est autre que celle d'un village du Bosphore tie Constan- tinople. La riviere de Baalbeck n'est qu'un ruisseau. Nous n'avonspresque aucun renseignement sur les nombreuscs villcs qui ont du s'elever sur les deux ver- sanls du Liban et l'Anti-Liban, et dans la vallee du L^ontes, e'est-a-dire dans la Ccelesyrie. Malbeureuse- ment, nous avons pertlu V Histoire universelle, redigee en plus de 130 livres, par Nicolas de Darn as, contem- porain et bistorien d'Auguste el d'Herode I,r. Si cet ouvrage, dont on apprecie le merite par le precieux fragment recemmenl decouvert, existait, nous y trou- verions des documents geograpbiques egaux a ceux CO It, 63i, ( o7 ) que nous a donnes l'historicn Josephe sur les pro- vinces judaiques. M. de Saulcy rappelle que, selon la Bible, Salomon fut le fondateur deTadmor, qu'on croit etre la Palmyre du desert, rivale d'lieliopolis par ses mines. L'histo- rien Josephe a consacre cette tradition nationale (1); mais il est bien douteux que, dans une excursion aussi rapide que celle qu'il fit en Syrie, Salomon, malgre son opulence, y ait fonde les monuments qui ont brave les ages. Ces monuments sont tres probablement de l'6poque de Z^nobie, et posterieurs a ceux d'Helio- polis, qui,d'apres les inscriptions, datent de Septime- S^vere. Zimmermann place Balbeck a 33° 43' de long, orientale du meridien de Paris, tandis que Riepert, Callier et Lynch lui donnent 33° Z|9' a 50' du meme meridien. Nous ne nous expliquons pas cette diver- gence de 5 a 6 minutes. De Baalbeck a Beyrouth, M. de Saulcy n'a x'ien signale d'important pour la geographic Seulement, nous constatons que les noms des villages modernes, a l'exception de Zahleh , sont peu reconnaissables , ainsi que les cours d'eau, d'apres les noms nouveaux qu'il leur donne. Une carte topographique pourrait seule expliquer les differences. M. de Saulcy a fait une excursion sur le fleuve Lycus (Nahr-el-Kelb),lieu celebreparles bas-reliefs assyriens et egyptiens qui y etaient signales. Quant aux caracteres Egyptiens graves, dil-on, par ordre de Sesostris, notre compatriote n'hesite pas a (i) Arch., VIII, 6, I. ( 58 ) diro que lcs figures qu'on en ;i publiees sont (Je pure invention; c'esl une imposture arcbfiologique. Mais il ii'y on a pas moins des inscriptions latines, dont rune, consaeree a Marc-AureJe, atleste di s travaux laits stir le Lycus; de plus, M. deSaulcj croit a ICxistence d'uu stele assyrien, donl le texte a disparu, el de beau- coup d'autres qu'il d fieri t soigneusement (I). C'est par ' la que so lermine son ilineraire. Nous terrninerons nous-menus cet article par quelques observations sur la Phenicie. Pline place le Lycus enlre Leonton-polis el Palceby- ldos (2). Ptolemee semble memo lui donrier le nom de Leon ou Leonlos ; mais il est impossible de le cou- londre avec le grand fleuve Leontes, que Strabon a evldemtnent confondu a\ec le Jourdain (3). II est etonnant qu'une aussi petite riviere (jue le Lycus ail die prise pour un (leave navigable par ce prince des geographes; s'il en etait ainsi, il n'eut pas ele le Kelb des carles modernes. Josephe et les ecrivains bibli- ques n'en Ortt pas parle, ce qui semble prouver qu'il etait sans celobrile. Cependaul la profondeur de la rade ou cetle riviere se jette semble annuneer un fleuve rcmarquable. M. de Saule\ dit un mot des ins< riplions de Beil- Mcry ct de Deir-eJ Oalaab, trouve'es sur la riviere de Beyrouth. — Robinson y voit connne des temples sis au milieu des mines [h). Selon Lelronne, on y avail (i) II, 65oa65a. (a) Hist, nat., V, 20. (3) Liv. XVI, J 1 3, p. 216 de la trad. francais>', note .{ Je I.ciroiina. (4) i», 44 >• ( 59 ) deeouvert la trace d'un aqueduc, a 3 ou h lieues do la ville. On dit que cet eminent critique a ete trompe par line copie dcfectueuse de I'estampage du lexte, et que la pierre, vue de plus pres , ne permit pas d'adopter la logon si babilement concue par cet bel- leniste. Si mi critique aussi severe et aussi experiments que Letronne a ele trompe ou s'y est trompe, combien ne I'aul-il pas se defier des conjectures prodiguees clans les ouvrages des voyageurs (1) ! Berylus, appelee par Augusle Julia Felix, selon Pline, pourrait etre, selon Robinson, la Berolbai ou Berotbab de la Bible; mais V Onomasticon n'en parle pas. A Znleb, a Deir-el-Karnar, et a Jezzin,dans le Liban, il y a absence d'indicalions, quwque les anciens aient du y avoir des postes importants. M. de Bertou voit dans la riuere El-Barouck, qu'il appelle a son embouchure (pres de Sidon) El-Ewaly, le Sabbaticus des Hebreux, mentionne par 1'bistorien Josephe. Mais celle derniere riviere, remarquable par son inlermillence, est expressemont placee par col ecrivain (2) enlre Araea , qui avail apparlcnu au roi Agrippa, et Rapbaniios. Titus la Iraversa dans S8 rout-' de Bervte a Antioche, et nous savons qu'une \ille du noin d'Arce avail ele fondec, en meme temps que Si- don el Aradus, par un (ils do Cbanaan. Hierocles la (i) M. Pezetie vient d'envoyer au musee du Louvre un sarcophage de marbre blanc, trouve pres de Beirouth et que M. Ad. de Long- perreirregarde cornme un monument plie'nirien. (Athin. franf , i 354, p. 3-26-237.) (i) Guerre des Juifs, VII, 5, i. ( •< place entre Orlhosia ct Tripoli, selon Lapie (Itineraires) et d'Anville. On ne peul done la confondre avec l'Arce ou Ecdippus meniionnee aussi par Josephe (1); celle- ci est placee a Zib ou Aczib, a 9 niilles ro mains au nord de Ptolemais, dans Y Onomasticon. G'etail pro- bableinent l'un des cbefs-lieuxdes gouvernements con- stitutes dans ce pays, lors des conquetes de Salomon, entre la Galilee superieure et la Galilee interieure (2). Elle etait maritime, tandis que celle du filsde Chanaan etait dans le Liban. Le Sabbalicus est mis par 1'bistoritn juif, avec trop de precision, dans la Syrie, pres de Tripoli, pour qu'on puisse la confondre avec la riviere presdeSidon, qui n'est autre que leBostrenus. Au reste, les rappro- cbementsde M. deBerlou sont trop souvent fautilspour qu'il ait autorite dam> la geograpbie comparee ; son merile est ailleurs. M. de Lamartinc s'est aussi mepris, dans son I oyage en Orient, au sujet du liostrenus. En quiltant le cbateau de lady Stanhope, pour se rendre au nord, a Deir-el- Kamar, residence de l'emir Becbir, il I'rancbit un fleuve profond ; il s'agit eviclemment du torrent Barouck et du Bostrenus. Mais l'illustre poete lui a donne (3) le nom de Belus, inconnu de ce cole, et qui ne peut s'ap- pliquer qu'a la riviere de Ptolemais ou de Saint-Jean- d'Acre. Le memo ecrivain appelle Dptedin, le cbateau tor- tine de l'emir, qui est separe par un ravin de la ville (i) Guerre desJuifs,l, II, I. (a) Josephe, Arch., VIII, 2,3. (3) I, aa6. ( fll ) capilale des Druses appele Deir-el-Kamar ; ce ne pent etre que Bleddin de la carte de Zimmermann. Quant a la vllle des Druses, a laquelle il accorde genereusement une population de 10 a 12 000 ames, Zimmermann la reduit, avec vraisemblance, a 5 000. Nous remarquons ici que l'illustre voyageur a fre- quemment change les noms les plus connus de ces contrees, au point de les rendre presque meconnais- sables. II a neglige de verifier les voyagcurs et les cartes les plus modernes et les plus exacles. II appelle Djioun le chateau habile par lady Stan- hope, cetle niece celebre de Pitt, qui se relira dans le Liban et qui y mourut, en 1840, dans l'abandon, apres avoir essaye d'y jouer le role de prophetesse. — ■ Le voyageur G. Robinson appelle sa residence Mar Elias, et, en la quittant, il se dirigea aussi sur le Bos- trenus, qu'il appelle Awaly (1) ; l'Amerieain Ed. Ro- binson place cette residence au meme lieu, a trois heures de chemin au sud-est de Sidon; et on la trouve sous ce nom dans la carte de Kiepert. Nous devons reconnaitre l'impuissance ou nous nous sommes trou- ves de retrouver le Djioun de M. de Lamartine sur les cartes. Nous signalerons dans le Liban, sur les frontieres de la Phenicie, le chateau appele Kalat-es-Schukif , qui, malgre l'avantage de sa position, n'est signale que par le role qu'il a joue pendant les croisades de 1189 a 1*240, sous le nom de chateau de Bell'ort (2) : il domine un coude du Lalany ou Leontes, a la memo (i) I, 3o5. (a) Robinsou, III, 38o. ( 02 ) latitude que Uasbeya de la Balance. M. Lynch n'en (lit qu'un mot. Los points remarquables, au sud tin Lcoptfes, tels quo Tilnun et autre?, Dpqs paraissont ajtpatienir a la Galilee : imus on a\ons parle. II nous rcstera a rendie conipte ties travaux beau- coup plus iniporlants de MM. de Saulcy et Lynch sur le cours jusqu'ici inoonnu du Jourdain inleiieur, et sur la itior Morle. MOUVEMENT DU COMMERCE GENERAL FRANgAlS EN 1852. Resume par pays de destination et par pays de pro- venance. (D'apres le tableau (jeneial public par lad tin nist rai i du ties douanes.) PAYS EXPORT. UT05S. IMPORTATIONS I,, Europe. Baltique et nier Blanche. . , Mi i' Noire Suede Djorvege Danemarli Angleterre (y compris .M.ilir. |es ile- Ioniennes et Gibraltar) Associati n commerciale allcmaiule. Mm klenboura Si bwerin Vi lies bansentiqu.es II. movie T Ba Belgique. Suisse. . i j 3 i 2 I 349 55 iG 23 I 32 "9 639 97* I 2 5 og3 420 u - 5 635 Mi 578 5i5 944 536 248 6 I j -'I I .!).> 4-7 129 83, 832 126 887 296 francs. 29 83 1 55a 24 o3- 547 6 498 569 14902917 1 024 073 1 35 800 619 (' t i" 7 357 7^5 a3 885 on' 223 i'.r>7 708 149 85g 1 85 ( 63 PAYS. Portugal ( y comprls Madere, les iles du Cap-Veit et les Acores). . . . Espagrre (y compris les iles Ganaries et les iles Balearic' Autriche (v compris le royauine lom- bard-venitien ) Etats sardes et Monaco Tosoane Etats romains, Lucques Deux-Siciles Grece (y compris ses iles de l'Ar- chipel ) Turquie (y compns ses iles de I'Ar- ehipel) Afrique. Egypte . . . Etats barbaresques (Tunis, Tripoli et Maroc) Gote occidentale ( du Maroc a>i cap de Bonne Esperanee, non eqmpris le Senegal) Possessions anglaises (cap de Bonue- Esperance et ile Maurice) Autres pays (y compris Tile de Mada- gascar) Jsie et Oce'anie. 'Comptoirs anglais et Nou- velle-Galles du Sud. . . . I tides Comptoirs hollandais ( Java et Sumatra ) Philippines Cbine, Cocliinchine et div. iles de Oceanie , EXPOKTATIONS. 1MP0RTAT1OSS, Amerique. .=, ,, . ( Ocean Allantiiiue. . . Etats-lJmS i ,. - n -r ( Ocean 1'aciliqur. . . . Mr Guatemala. . . . Nouvelle-Grenade. Venezuela Bresil francs. 6268878 87 206 986 13872871 95 249 324 2 1 8a5 72 1 5 14 1 7.56 21 709 344 2 694 370 28910 711 9 166017 8 678 840 3 5gi 467 5 495744 104 55o 4 i33 493 699680 127537 200 55 1 263 o4o 83o 8 883 977 19013 1 56 1 3 1 8 o85 4 222 633 6 127 177 44885439 francs. 2 042 1 4 ■ 49 579 974 10 459 211! io6 8u9364| 1 8 287 4°3 2 191 54<3 33 061 o36 1 275 o5o 55 667 253 17 73i 387 1 1 533 061 17309446 45 682 2 596 259 4i 107904 6 588 5o3 1 652 738 932 019 190089 276 1 o56 6 707 (1 .- 658 827 2 191 294 5 086 485 •'3 324 3io ( «4 ) PAYS. EXPOnTAIIONS. Antilles i Uruguay (Montevideo) Ilio de la Plata (Buenos-Ayres). . . Equateur Perou Bolivia Chili. Haiti espagnoles ( Cuba, Porto Hico anglaises ( y compris le Ca- iiiil.i et la Guyane, la Ja- m:ii'que, la Trinite, etc.). danoises (St-Thomas, etc.). hollandaises (y compris la Guyane, Saint-Eustache, Curacao) Colonies fran raises. lie dc la Reunion Guyane francaise Martinique Guadeloupe dutt es possess ioiisfrancaiseshors a" Europe, Algeiie , ( Saint-Louis. Seneaal. { 0 0 ( Goiee Sainte-Marie de Madagascar, Mayo tte et Nossi-Be Etablissements francais dansl'Inde. . St-Pierre, Miquelon et grande peche. Epaves et sauvetages Totaux IMI'Ol: I ATKINS. francs. II 2l3 52 I 17 470 l48 IO,3 l48 2i 754 553 1 26 376 17 968 243 8 697 g38 1 8 569 970 880 069 7 544 880 5o 984 ,8763549 4 102 3 10 a5 607 925 20770 945 io4483 144 8 3i8 320 4 322 27O 272 89O 4g5 73o 6841 078 681 465 07 francs 8 016045 1 1 021 83q 578 337 3 370 63i n 1 299424 9411 440 17 820854 107046 27 89 4o a 1 488474 1 102 106 16 356 544 111 59 654 18 33a 91 1 5 175 369 2 675 507 99 862 12 871 665 964489. 1 65 io5 438 173 009 Dans le montanl ties exportations, les produits na- lurols figment pour 534 192 362 fr. , et les objets fa- briques pour 1 1/|7 272 709 fr. Dans les importations, le chiffre des matieres necessaires a l'industrie est de 896 399 544 fr., celui des objets de consommation de 541773 465 fr., dont 225 765 546 fr. d'objets na- turcls el 316 007 919 fr, d'objets fabriques. f 65 ) CEDRES DE L'ASIE MliNEURE ET VEGETATION DU MONT ARGEB. On s'imagine generalement qu'il n'y a des cedres du Liban que sur la monlagne de ce nom. M. Pierre de Tchihatcheff detruit completement cette erreur dans sa belle description de I'Asie Mineure. En re- montant le Zamanta-sou jusqu'a Farach (a l'extre- mite nord-est de I'Ala-dagh), et en francbissant les montagnes qui separent le Zamanla-sou du Seihoun, ce voyageur a traverse pendant plusieurs jours les plus belles forets de cedres qu'on puisse voir. II a observe, en parcourant le domaine du cedre, deux arbres associes constanunent a ce dernier, et donl l'un parait etre d'une espece nouvelle, et 1'autre est inconnu en Europe : le premier est un Abies, dont les feuilles sont semblables a celles de V Abies pectinaia, et qui est caracterise par des cones d'une longueur gigantesque ; 1'autre est le Juniperus drupacea. M. de Tcbihatcbefl" a presente a l'Academie des sciences, dans la seance du 23 Janvier !S54, une note sur la vegetation du mont Argee, en Cappadoce. Ce geant de I'Asie Mineure est forme de quatre plateaux, dont l'un, a Test, est de 2 1ZI8 metres, et les trois autres, au sud, ecbelonnes et conduisant au sommet de la monlagne, a 3 8/il metres au-dessus du niveau de la mer. La litnite de la vegetation frutescenle scrait a environ 2 600 metres de hauteur; mais on trouve une belle vegetation jusqu'a 3 000 metres. D'ici jus- qu'au sommet de l'Argee, le sol est mi, reconvert de VII, JANVIER. 5. 5 ( M ) neigcs cl de cendres; cependant on retrouve dans Us fissures des roclics sepl especes de plantes, et parmi celles-ci V Euphorbia de Nice et le Solidago virga a urea. E.G. CLIMAT DE LA COTE ORIENTALS DES ETATS-UNIS L'atmosphere de la cote orienlale des Elats-Lnis est d'imc extreme secheresse, conaparativement a celle de la cote europeenne situee vis-a-vis. On y habite sans danger ies bailments neufs; on place sans inconve- nient dans ces bailments les objcts qui craignent 1'lui- midite ; le linge receminent lave scclie en Ires peu de temps; enfin on a reinurque que crs cheveux blonds de la race anglaise, qui, en Europe, sont doux el soveux, deviennent roides et durs dans l'est de 1' Union. Cette secheresse du climat s'explique par la fre- quence des vents d'ouest : ces vents sont dominants en Amerique, comme en Europe; mais, dans celle derniere, its arrivent charges de l'h'iinidite dont ils se aontsatures au contactde 1'Ocean, landis qu'aux Elals- Lnis, ils n'arrivent a la cole allantique qu'apies avoir traverse tout le continent. E. C. ! ©,7 ) Convenes geograpkicfiies. ASIE. EXTRAIT DUNE LETTRE DE M. OPPERT , DATEE DE BA- BYLONE, LE 3 NOVEMBRE J853, ET ACCOMPAGNEE d'uNK CARTB DE CETTE VILLK 11RESSEE AU 200000' PAR CE voyageur. {Communique par M, de In Roq/tette.) « Je vous adresse ci joinle unc petite carte de Baby- lone, calquee en hate sur l'original que j'en ai fait, et la premiere de ee genre qui ait ete dressee. Extreme • ment exacte, elle est le resullat de cinq cents observa- tions aslronomiques, d'innombrablesmesurogesetd 'un grand nombre de recherches minutieuses que j'ai failes dans ces lieux pendant plus de deux ans. Je pre- pare en ce momenl une carte plus graude et plus detaillee de Babylone, dont l'echelle sera au j^dYo- » Je viens de terminer un assez long memoire sur lelendue de l'ancienne Babylone. Je crois avoir trotive que le stade babylonien avait 189 melres. Or, d'apres Herodote et Nabuchodoimsor, l'enceinte de cette ville etait longue do &S0 stades, ce qui donnerait une etendue de plus de 90 kilometres. Quelle cite gigan- lesque ! » Mission russe en Chine. — Les membres de la mission russe a Peking publient des Memoires ties interes- sants sur la Cbine. lis ont deja fait parallre deux volumes, ivdiges d'apres des docunaenls cliinois. Parmi ( «8 ) ics articles de ces memoires, on en distingue un sur l'art medical dans l'empire celeste, par M. Iatarinov, inedecin de la mission. AFRIQUE. Nowelles da doctear Vogel, — La Gazette generate alle- mande jtublie desletlresdu docteur Ed. Vogel, dateesde decembre 1853. D'apr6sces lettres, M. Vogel etail a Ted- jerry, entre Mourzouk et Bilma; on y fit une halte do plusieurs jours pour acheter des vivres, parce qu'on so trouvait a I'entree d'un grand desert presquecomplele- ment inculte, dont la traversee devait exiger dix jour- nees de marc he. L'hiver avait commence, c'est-a-dire que la chaleur s'etait peu a peu adoucie; mais cet agreable changement avait ete precede d'epouvantables ouragans de sable el de lourbillons, qui avaient si com- pletement eilaee loute trace de la route, que l'arriere- garde de la caravane, conduite par un beau-frere du pacha tie Mourzouk, s'etait egaree pendant trois jours enlicrs, et que la principale caravane out eprouve cerlainenicnt le meme sort, si elle n 'avait eu clans le prince de Bornou, qui s'etait joint a elle, un guide tout a fait experimente. Pendant le scjour de notre voya- geur a Gadrone, entre Mourzouk et Tedjerry, lagrande caravane de Bornou arriva, avec qualre ou cinq cents csclaves, dont la plus grande parlie se coniposait d(> jeunes fdles et de jeunes gaicons de dix a douze ans. Ce ful la premiere fois, ecrit M. Vogel, que j'eus une idee complete et juste de ce que c'cst que lVsclavage. L Je soussigne, Auguste Febvrier-Despointes, conire- amiral commandant en chef les forces navales fran- chises dans la mer Pacifique, agissant d'apres les ordrcs de mon gouvernement, declare prendre pos- session de l'ilede laNouvelle-Caledonieetde ses depen- dances, au nora de S. M. Napoleon III, empereur des Francais. » En consequence, le pavilion francais est arbore" sur ladite ile (Nouvelle-Caledonie), qui, a compter de ce jour vingt-quatre septembre mil liuil cenlcinquan trois, devient , ainsi que ses dependances, coionie francaise. » Ladite prise de possession est faiie eri presence de MM. les officio rs de la conelte a vapeur le Phoque el de MM. les missionii aires francais, qui out signe avecnous. » Fait a terre au lieu de Balade (Nouvelle-Caledo- nie), lesheure, jour, mois et an que dessus. » Ont signe : E. de Bovis, L. Candeau, A. Barazer, Rougeron, Forestier, J. Vigouroux, A. Cany, Muller, Butteaud, Mallet, L. Deperieis, A. Amet, L. de Marco, le contre-amiral commandant eri chef Febvfier-Desr poinles. » ( 75 ) « Cejourd'hui, jeudi, vingt-neuf sepleinbre mil libit cent cinquanle-trois. » Jesoussigne, Auguste Febvrier-Despointes, contre- amiral commandant en chef les forces navales fran- chises dans la mer Paeifique , agissant d'apres les ordres de mon gouvernement, declare prendre pos- session de 1'lle desPins, an nom deS. M. Napoleon III, empereur des Francais. » En consequence, le pavilion francais est arbore sur ladite ile des Pins, qui, a compter de cejourvingt- neuf septembre mil huitcenl einquante-lrois, devient, ainsi que ses dependances, colonie francaise. » L'ile continuera a elre gouvernee par son chef, qui relevera direclement de l'aulorite frangaise. » Ladite prise de possession faite en presence de MM. les missionnaires francais, des officiers du Phoque et du chef Ven de Gon, qui ont signe avec nous. » Fait a terre, en double expedition, haic de 1'As- somption, les jour, mois e; an que dessus. » Ont signe: E, de Bovis, A. Barazer, L. Candeau, A. Cany, L. Deperiers, Mallet, Muller, Chapuy, Gou- jon, A. Geile, A. Amet , le chef de file V. X., 1^ contre-amiral commandant en chef Febvrier- Des- pointes. » NOEVELLES DIVEHSES. II vient de se former a Constantinople unc Sociele orrentale, < 8° un resume des progres de 1'expedition jusqu'en novembre 1853. La telegraphic electrique fournit un moyen nou- teau et Ires sur de determination ou de rectification de la difference des meridiens, et le Bureau des longi- tudes s'est occupe depuis plusieurs mois de l'applica- tion de cet important moyen, deja mis en usage, dans le meme but scientifique, en Angleterre et aux Etats- Unis. M. Airy, l'illustre aslronome , vient d'annoncer qu'il a opere la jonction d'un fil partant de l'ohser- vatoire de Greenwich avec le cable sous-marin qui va de Douvres a Calais, et qu'il est prel, en ce qui le con- cerne, a commencer les observations astronomiques ( "8 } qui doivent fixer d'une maniere definitive la difference de longitude entre Greenwich et Paris. l)e son cote, le Bureau des longitudes, conjointo- ment avec I 'administration des telegraphes, a etabli depuis longtemps une communication entre l'Obser- vatoire de Paris et le Ministere de I'interieur; il ne reste plus maintenant qu'a prendre quelques disposi- tions administrates pour que la cominunicalion soit complete el directe entre les deux observatoires prin- cipaux de France et d'Angleterre. Le Bureau des longitudes a nomine une commis- sion chargee de surveiller l'execution des travaux. [Journal general de V instruction pubHque.) En 18/iS, par suite de l'eboulemcnl d'une inontagne a Madagascar, dans le pays des Sakalaves, on decou- vrit des ceufs et des ossements qui rcvelerent a l'orni- tbologie le plus grand volatile connu jusqu'a ce jour. Peut-etre ces objets, d'une dimension enorme, appar- tenaient-ils a ces oiseaux qui, suivant les naturalistes Picquot, Desjardins, et leurs devancicrs a Tile de France, furent Irouves d'abord par les premiers habi- tants des iles Mascareignes , puis quitlerent ces con- trees cpmmencant a se peupler. En '1850, deux ceufs et des fragments d'os furent envoves en France. I.e Museum d'bistoire naturelle de Paris s'empressa d'en faire l'acquisition. L'ctude a laquelle M. Geoffroy Saint-Hilaire soumit les ceufs et les ossements dont il s'agil lui fit recounaltre ic type d'un genre nouveau dans le groupc des rudipennes ou brevipennes, et il donna a l'oiseau le nom &' Epvomis. ( ™ ) M. Armange, capitaine au long cours, qui, dans ses loinlaines excursions, s'est deja souvent signale par son devouement aux inlerets de la science, et dont un rapport nous fournit ces diff&rents details , nous ap- prend dans quels termes, a l'un de ces derniers voyages, il a entendu sexpriuier de vieux Malgaches, qui essayaient de iui faire counprendre d'une maniere frappante l'enorme dimension et la force fabuleuse de YEpyornis. « Quand cet oiseau volait, disaient-ils , il ressemblait a un nuage. Tombait-il sur un boeuf! d'un coup de bee il le tuait, puis il 1'enlevait dans ses serres sur les plus bautes montagnes. » Les Malgaches assurent que eel oiseau existe encore dans I'interieur de Madagascar; il a cependantechappe jusqu'ici a toutes les recbercbes. Depuis la decouverte des objets trouves en 1848, el dont nous avons parle plus baut, leur proprietaire , s^duit par le caractere d'inleret tout nouveau qu'ils presentaient pour la science, a ordonne a grands frais des investigations reslees infructueuses, quoiqu'elles aient ete poursui- vies avec anieur et dans une assez vaste etendue de pays. « J'ai rec,u deux de ces ceufs, continue M. le capi- taine Armange ; l'un repr^senle un volume d'enviion un litre et demi de plus que ceux qui ont et^ acquis par le Museum. » [Id.) On £crit de Rome qu'un savant helleniste de la bibliotbeque du Vatican vient de faire une decouverte importante pour la topograpbie antique et l'explica- tion d'un passage de YOdyssee. En 1850, en demolissant une maison de la rue Gra- ( 80 ) ziosa , sur le monl Esquilin, pics de Sainte-Marie- Majeure, on decouvril six tableaux, dontcinq dans un etat parfaitde conservation. lis representaient les divers episodes du voyage d'Llysse. Ces peintures, detachees avec soin, sont maintenant au musee du Capitole. Apres avoir etudie ces tableaux, le savant a cru pouvoir, d'apres Interpretation d'un vers de YOdyssee, emettre l'opinion que la premiere peinlure, dont le sujet est 1'arrivee d'Llvsse chez les Leslrygons , re- presente les environs de Terracine. Ce vers (le lO/i* du vii* livre) et le tableau sont en effet d'accord avec la perspective que presente encore aujourd'bui ce port de mer. Ainsi se trouverait eclairci un point jusqu'a- lors fort obscur de la geograpbie antique ; car on ignorait jusqu'ici ofi se trouvait exaclement le port (les Leslrygons. [Revue de V 'instruction publique.) On a decouvert a Lignieres, dans le departement du Clier, un globe terrestre de metal, grave a la main et execute avec une perfection admirable. On y voit qu'il a ete fait a Rouen, mais rien n'indique l'annee, ni le nom de l'arlisle. II avait appartenu a M. l'abbe Lecuy, chef de l'ordre des rremontres a Paris; tombe dans la succession d'unc famille de Lignieres, il elait relegue depuis longtemps dans un grenier, lorsque la rcfonte des clocbes de l'eglise de cette commune, aj ant donne lieu a 1'achat de tous les vieux cuivres de l'en- droit, a fait apparallre ce beau travail. E.G. ( 81 ) Actes de la Soci£ie. EXTRA1TS DES PROCES-VERBAUX DES SEA1NCES. Seance du 6 Janvier 1854. prjSsidencI': de m. jomard. Le proces-verbal de la seance du 16 decc-mbre est lu et adopte, et il est donne communication de celui de la seance generale du 23 decembre. Le secretaire general donne lecture de la correspon- dence. M. le baron de Lagarde-Montlezun ecrit -pour an- noncer l'envoi d'un exemplaire de la traduction qu'il vient de faire, de l'anglais, du voyage agricole et bor- licole en Chine par Robert Fortune. M. le baron de Brimont depose sur le bureau cet ouvrage de la part l'auteur. M. Henri Riepert adresse des remerciements pour sa nomination de membre correspondant elranger, et fait bommage de plusieurs de ses cartes. On donne lecture de la lisle des ouvrages offerts. M. de la Roquette offre, de la part de M. le capitaine de vaisseau Inglefield, un opuscule sur les causes phy- siques du magnetisme terrestre etles aurores boreales. 11 presente ensuite un rapport verbal sur les ouvrages que M. de Barbosa Canaes, conservateur general des bibliotheques deLisbonne, demande aechanger contre le Bulletin. Sur la proposition de M. de la Roquette, appuy6e par M. d'Avezac, la Societe accepte cet ecbange, VII. JANVIER. 6. 6 ( 82 ) el decide qu'on enverra a M. dc Barbosa la collection du Bulletin. On procede au renouvellement du Bureau et de la Commission centrale pour l'annee 185/j; sont nom- mes : M. Jomard , president; MM. d'Avezac et de la Roqueite, vice-presidents; M. Cortambert, secretaire general ; M. Malte-Brun, secretaire adjoint. On elit ensuitc deux membres adjoinls de la Com- mission centrale; sont noinmes : MM. d'Eichthal et Michelot. M. Jomard communique une lettre de M. le doctcur Krapf, qui remercie la Societe, en son nom et au nom de M. Rebmann , de la mcdaille accordee a ces voya- geurs pour leurs decouvertes dans Tinter-our de l'Al'ri- que orientale. M. d'Avezac annonce un travail important i\a M. Guillain surla cote d'Afrique, depuis Mozambique jusqu'a la tner Rouge. M. Lou rm and exprime l'intention qu'il o de suivre desormais avec assiduile les seances de la Societe, auxquelles des travaux noinbrcux l'avaient empecbe d'assister reguliereinenl depuis long temps. 11 presente quelques observations sur le recent travail que M. Cor- tambert a consacre a la distribution geograpbiquo des Francais illuslres. II a remarque, dii-ii, dans la liste des geograpbes, l'omission du nom de M. Brue. M. Cortambert repond qu'il a, de lui meme, rcconnu cette omission et l'a reparee dans un second tirage. (83 ) Seance du 20 Janvier 185A. presidence dk m. jomard. Le proces-verbal de la derniere stance est lu et adopte. On donne lecture de la correspondance : M. Milu- tine, secretaire de la Societe imperiale geographique de Tiussie, adresse le compte rendu de la derniere assemblee generale de celte Societe. M. de la Roquetle communique l'extrait d'une lettre de M. Oppert, avec une carte manuscrite des mines de Babylone ; la Commission cenlrale exprime le vosu que cette carte soil inseree au bulletin. M. Achille Jubinal , depute de 1'arronclissement de Bagneres, adresse la premiere publication d<> la Societe academique des Hautes-Pyrenees, et demande a la Societe de geographic de vouloir bien faire a la biblio- theque de Bagneres le don des publications qu'elle croirait pouvoir lui offrir. Apres une discussion a la- quelle prennent part MM. Maury, d'Avezac, G. Lat'ond et Cortambert, la demande de M. Jubinal est renvoyee a la section de comptabilite. M. Cochelet ecrit pour s'excuser de ne pas prendre part aux travaux de la Commission centrale : les oc- cupations qui le rctiennent au conseil d'Etat l'empe- chenlde se reunir a ses collegues. On procede a la nomination de la Commission du concours au prix annuel pour la decouverle la plus impoi tante en geographie ; sont nommes : MM. d'Ave- zac, Daussy, Isambert, Jomard et Poulain de Bossay. On passe a la nomination de la commission du prix (84 ) d'Orleans pour l'importalion la plus utile a l'agricul- turc, a l'induslrie et a l'bumanite ; sont norames : MM. Gamier, Jomard etG. Lafond. M. Augustus Petermann est ensuite elu correspon- dant etranger, a la place vacante par le deces de M. le colonel Jackson. M. Amedee Barbie du Bocage est adinis membre de la Societe. M. Anatole Yaquez est presente comme candidal, par MM. Jomard et Cortambert, pour etre admis dang la Society. M. Albcrt-Montemont annonce que la section de publication s'cst reunie pour le renouvellement de son president et de son secretaire. Elle a nomine president M. Albert-Montemont, et secretaire M. Alfred Maury. M. Isambert, president de la section de comptabi- lite, se prepare a lire un rapport sur le budget de 1854. M. de la Roquette presente plusieurs observations, et pense que les elements de ce rapport n'ont pas ete suflisamment debattus par la section de comptabilite. Apres une discussion a laquelle prennent part presque tous lesmembres, M. Isambert lit son rapport, qui est approuve par la Commission cenlrale. Une nouvelle discussion, a laquelle prennent part MM. de Brimont, de la Roquette, Isambert , Jomard , G. Lafond et quelques aulres membres, s'eleve sur la question de savoir si le tableau du budget sera insere dans tous les exemplaires du Bulletin, on s'il sera envoye seulement aux membres de la Societe. La decision de cettc question est renvoyee a une autre seance. ( 85 ) OUVRAGES OFFERTS DANS LES SEANCES DES 6 ET 20 JANVIER 1856. OUVRAGES. EUROPE. Titres des ouvrages. Donateurs. Lettres sur I'Adriatique et le Montenegro, par X. Marmier. a vol. in-8°. Arthus Bertrand. ASIE. Le Japon. Histoire et description. Rapports avec les Europeens. Ex- pedition americaine. Par M. Edouard Fraissinet. i vol. in-8". Artuus Bertrakd. Voyage agricole et horticole de Robert Fortune en Chine, traduit de 1'anglais par M. le baron de Lagarde-Montlezun, I broch. in-8". De Lagarde-Montlezuw. Memoire sur la mission de Siam, par Mgr. Pallegoix. I broch. in-ia. Msr Pallegoix. MEMOIRES, RECUEILS ET JOURNAUX PERIODIQUES. Annates du commerce exterieur, novembre 1 853. MlN. DE l'aGRIC. ET DU COM. Jahresberieht des geographischen Bereins zu Frankfurt. i85a-53. SoC. GEOGR. DE FraxCFORT. Me'moiresde I' Academic imperiale des sciences de Saint-Petersbourg; sciences mathematiques et physiques. Tome V. 5e et 6C livr. I br. in-4° — Bulletin de la classe physico-mathematique. Tome XT. i broch. in-4*. — Bulletin de la classe historico-philologique. Tome X. I broch in-4°. Ac. imp. des sc. de St.-Petersbourg. L'Athenxum francais. — Revue de l'Orienl, Janvier 1 854- — Biblio- theque universelle de Geneve. Novembre 1 853. — Archives des sciences physiques et nalurelles. Novembre i853. — Journal des missions evangehques. Decembre 1 853. — Journal d'education populaire, Decembre i853. — The literary World. N° 36i. I.KJ EulTKVRI ( 86 ) MELANGES. Titres des ouvrages. Donateurs. Astronomical observations made by the Hcv. Thomas Calton. London, 1 853. i broch. in-4°. Soc. astron. de Londres. Prole'gomenes des tables astronomiqnes d'Oloug-Beg, traduction et commentaire par M. Sedillot. Paris 1 853. I vol. in~4°- M. Seiiii.i ot. The Theory of the physical causes of terrestrial magnetism, by com- mander loglefield. M. Ikc.i.efield. Catalogue des llvreS, tableaux, aquarelles et autres objrts d'art, donne par M. Achille Jubinal trf //>.'>+) CARTE 1)1, BABYLONE Dressee cad (855 nm e 00,600 f i.r AiA/iu/ir /iyii\.i-/ili: /wf.i/ni/J pnrMJ.Oppcrt \SSdM4i O / / J v S, .kiln o ~-— -— _ Jy 1 tillci/ntirt ihri , ■ ,v — — __ "W/W •'"."/'"■ ,. 0.. --- - Ohufc,. I ylt-tn/t'1- .tbtui ('tttr o h/itiiit IS UMiliisseA /i'W / #' / / 0^? \TelicrM, I ./,,„/„<■/, t, / / Borsippa 0 7 / <£)/lmi/iu>i etMutlil.r. H /. / \ RiiiD■ O.iiil. in cll.i dina 1. 1 iouminouna biallahi una la bilidouini el akhiri ■ma la iouliarrimouna ma narrama allaliou oua rasoulouliou oua la iadinouua dina el haqqi mina elladina aoutou el kitaba hatta ionalhou el djiziala aniddin oua houm sar'irouma. »C-a- nou- velles migrations venant du nord. Toutes les Iribus precedents (tribus liassan) ne parlent que l'arabe ; comme, avec cela, elles sont les dominatrices des autres, il est toutnaturel d'admettre, ain.si qu'elles le disent du reste, qu'elles sont arabes de race. A quelle epoque sonl-elles venues et d'ou viennent- elles? C'est ce que nous chercherons a decouvrir dans des etudes posterieures. Voyons maintenant les tribus appelees Zenaga, nom propre qui est devenu un qualificatif auquel on a atta- che le sens de tribulaire; a tel point qu'on appelle Zeuaga des tribus ne parlant pas cette langue , et qu'on ne donne pas ce nom aux tribus marabouts parlant zenaga, parce qu'elles ne sont tributaires de personne. Ce sont : 1° Les Rhahla, tribu tres nombreuse, dont certaines fractions sont tributaires des autres, celles-ci l'etant des Ouled-Ahmed-ben-Daman ; 2° Les Arouidjat ; 3° Les Sbiaal; hn Les Ouled-el-Far'i, qui ont si mauvaise reputa- tion, qu'on a fait sur eux ce dicton, fonde sur la res- semblance de leur nom avec le nom arabe de la vipere cornue (vipere ceraste), dont la morsure est mortelle : (dlaritel Fari ou ellefaaiqtelelFariou klielli el lefaai » : Si tu rencontres un Fari et une vipere cornue, tue le fari et laisse la vipere cornue. 5° Les Mradin, dont on dit : « II Mradin bla din qata- VII. FPVRIKR. 2. 8 ( 106 ) lin naseur ed din , » parce qu'on les accuse d'avoir as- sassine un famcux inarahoul de ce nom ; 6° Les Ouled-Aid ; 7° Les Zoumag; 8° Les Ouled-Abd-el-Ouahad ; 9° Ouled-R;ihmoun; 10° Les Zambouti, descendants d'esclaves affrancbis des Ouled-Abmed-ben-Daman ; 11° Les Bafor, qui passenl la saison secbe sur la rive gaucbe. 12° Vient enfin une tribu zenaga qui n'apasoublie sa langue et qu'on appelle les Nirzig. lis pretendent qu'ils elaient rnaitres du pays quand les Euiopeens parurent sur ces coles. Ce seraient eux par consequent qui auraient fait donner au fleuve le nom de Senegal. LcsNirzigsedivisenlendeux portions: lesTar'erdjent et les Dagbadj, portions turbulentes et pillardes, qui se liferent) comme ccla a souvent lieu dans les guerres intestines, des combats acbarnes oil les atrocites ne sont epargnees ni d'un cote ni de 1'autre. II y a quel- ques annees, les Tar'erdjent, ayant assassine le cbeikb des Dagbadj et craignant des represailles, nous firent des propositions d'alliance dans un moment ou la guerre avec les Trarza elait imminente. Viennent eniin les tribus de marabouts. Ce sont: 1° Les Oulcd-Diman, tribu nombreuse, sa- vanle, veneree, faisant un grand commerce de gommes qu'elle recolle dans un pays nomme Iguidi (1) et dont (i) Tous les auteurs ont re'pete les uns apres les autres: on recolle lisgommes dans trois foiets nonimees Sahel, Lebiar, el Fatakh. II n'y a pas de foretsde ce nom. Le mot sahel est un nom commun, dont Ut signification est bien eonnue en Alp,ene. Tout le monde dit le (107 ) on dit : « Sebaboum dib oudja bourn djoua. » II ne s'y trouve en fail de lions que des cliacals; on n'y con- tracte en fait de maladies qu'un bon appetit. On dit encore : « Diman fi ennassi tibroun on rirhoum kel fakhar. » « Fioum houm ioum aid ou lailboum kelnhaz. » « Fihouma imin el zonail ou r'irhoum kelisar. » « Les Ouled-Diman sont parmi les bommes comme un morceau d'or pur ; les autres ne sont que des mor- ceaux de pots casses. Leur jour est une fefe, leur nuit est un jour. lis sont la droile des Zaouia, les autres Marabouts en sonl la gaucbe. » II semblerait par la que la rnodestie ne figure pas parmi leurs nombreuses verlus. Leurs fractions sonl les Ou!ed-Sidi-el-Fadbli , les Ald-Aboum (ee mot Aid est le Ait des tribus kabvles, il represente le Beni ou le Ouled des tribus arabes) ; les Ouled-Baba-Abmcd , les Aid-Oudadj, les Aid- Koudj et les Hal-Abi-Tiab (ceux du pere converti), fraction bassan qui s'est faite marabout et s'est reunie aux Ouled-Diman. 2° Les Koumlailen, qui vont faire le commerce dans sahel (VAlijer. Ce mot a la meme signification au Senegal ; de plus, a cause de sa position occiilentale du saliel des Trarza, ce mot y a pris la signification de ouest. Ainsi la reponse des indigenes aux ques- tions des voyageurs a e'te celle-ci : les Daimancours recoltent les gommes dans les forets de I'otiest. Le second nom, Ubiar, est le mot el biar mal eciil, et ce n'est pas plus un nom propre quesa/ie/: dans la partie des forets de gomine exploitees par les Ouled-Diman, il y a des puits (el biar) si piolonds, que l'eau en est tiree par un chameau attele a une corde passant sur une poulie; le nom de cette parlie des forets de gomme est Iguidi. Quant au mot el Futakh, nous ne savons s'il y a reellement un lieu ainsi nomme. ( W ) le Cay or, doat les esclaves aliraeatent les marcbes de Sainl-Louis en beurrc, lail, ceuls, etc.. etque les autres Irailenl do Chretiens pour les insuller. 3° Les Tendr'a , grande tribu , renommee par la purete avec laquelle elle parlc le zenaga, et qui s'elend le long de la mer depuis Saint-Louis, oil die vend du laitage, jusqu a Portendik, oil elle vend des gommes aux Anglais. h" Les Ntabou, divises en Ntabou-el-Biodb (blancs), sur la rive droite, el Nlabou-el-Kbol (noirs), sur la rive gaucbe. lis ont oublie le zenaga. 5° Les Tacbedbit , cbez lesquels quelques vieillards savent seuls le zenaga. 6° Les Ald-R'madjik , Marabouts mediocres, mais parlanl tres bien le zenaga. Ce qu'on exprime dans le pays en disant qu'ils parleul comme les Berberes du nord (Kif-el-Braber-el-Tel) , c'est-a-dire comme les Cbellouab. lis ont la reputation d'avoir les premiers lacbe pied dans les aneiennes guerres des Zenaga conlrc les Arabes. lis se sont aussi atlire^ des plaisante- ries par la maniere inesquine dont ils s'acquittent des devoirs cle l'bospitalite. 7° Les Tagounanet , tribu ricbe el commercanle, possedant beaucoup d'esclaves. Quelques uns disent que ce sont des Cheurfa, mais ce litre leur esl conteste. 8° Les Asguiat, espece do Marabouts, marcbands de gommes, qui ne savent pas le zenaga. 9' Les Cbeurla-llal-Sidi-Iarl'. Leur pere, Sidi-larf, eherif compagnon d'Ali-Cbandoura, fut charge d'aller cbeicber au Maroc la troupe dont descendent les Bouidal. Quand il arriva dans le sud du Maroc, un plaisanl, pour faire un calembour sur son nom , lui ( ioi> ) clit : « la sidi iarf, ach tarf ? » Eh ! monsieur qui sait, que sais tu ? « Narf nnek clilabi. » — Ce que je sais, c'est quo tu es tin grossier Chlouah, un Berberc, un homme par- lant Ires mal l'arabe, repondit le cherif, qui s'apcrcut tout de suite, a la prononciat'.on du mauvais plaisanl, qu'il avail affaire a un barbare. En dessous des tribus hassan . de marabouts el de zenaga, il y a les Iribus deAhrathin, composees de mulatres, anciens esclaves affranchis ; ils prennent le nom de la fraction a laquelle ils appartenaient. Ainsi on dit les Ahrathin des Ouled-Abmed-ben-Daman. Ils prennent parti pour leurs patrons dans les guerres. On les designe sou vent par le mot Yolof-Pourogne. Nous avons enlendu dire que la plupart d'entre eux elaientde race serrere, nation negre dont on retrouve des restes dans le Baol, aux environs du cap Vert. Enfin vienncnt les esclaves negies que les Arabes et Zenaga acbetenl ou volent sur la rive gauche. On dis- tingue les esclaves nommes Abid-Nanema , qui sont nes dans la fainilln, qu'on ne vend jamais et pour les- quels on a certains egards; les Abid Teurbia, qui ont seulement ele eleves dans la lamille et qu'on vend rarement; et les simples Abid, qu'on achete et qu'on vend comme des bu?uls et dont on donne quelquefois vingl ou trente pour un beau cheval. L'esclave concubine s'appelle Djaria; si elle a un enfant de son maitre , on la designe par le nom de Om-el Ouled, et elle devient iibie. A'idou-el-Hadj. line tribu de Marabouts intercales dans les Trarza , les Aidou-el-Hadj, auxquels nous avons donne le nom ( HO ) baroque de Darmancours, nous vend ses gommes a line escale particuliere, a une demi-lieue de celle des Trarza. Son chef prend le litre de chems. Celte tribu parle le zenaga ; cette circonstance et son nom indi- quenl bien qu'elle est berbere. Les Aidou-el-Hadj du Senegal se divisent en Ouled- el-Mokhlar et Ha!-Deffar'-Aoubeq. line autre fraction , les Bou-Dir, etaient autrefois leurs tributaires; mais, etant devenus de bons Mara- bouts, ils vivent maintenant avec eux sur le pied de l'egalite. Les Aidou-el-Hadj sont tres commercants ; outre le commerce des gommes , ils envoient encore des cara- vanes dans le Cayor et jusqu'a la riviere de Salun. An nord du pays des Trarza, dans l'Adrar, se trou- vent aussi des Aidou-el-Hadj, gens renommes par leur savoir, qui habilent une oasis nominee Ouadan , Ires ricbe en palmiers. Ouadan veut dire les deux rivieres, et les habitants, Tiers de leur reputation ct de leurs richesses, disent qu'il s'y trouve en effet deux rivieres : une riviere de science et une riviere de dattes : « Ouadan moumilatian a leman oua tameran. » D'autres Aidou-el-Hadj babitent leTagant, oasis du pays desDouaicb, a six journees au nord de Bakel. Comme ceux-la se recrutent souvent de Douaicb con- vertis, ils ont pris d'eux un caractere guerrier et sont redoutables les amies a la main. Brak na. Chez les Brakna qui s'etendenl le long du fleuve, de Gae a Modinassa , l'element arabe domine plus que chez les Trarza ; aussi sont-ils plus cavaliers et plus ( 111 ) guerriers. On y trouve du reste les meuaes categories. Nous croyons inutile de dormer les noms des tribus. Les Brakna vendent leurs gomtnes a l'escale du Coq, a soixante lieues de Saint-Louis. Doudich . Les Douaich sont, comme l'indique le D initial de leur nom, qui n'est que l'abreviation de Aid, une tribu d'origine berbere. On dit dans le pays, et ils disent eux-memes, qu'ils sont les Zenaga les plus purs de ces contrees. Mais iis ont secoue lejoug, sont devenus de ties bons guerriers et d'excellents cavaliers. Ils l'em- portent meme a cet egard sur les Brakna et les Trarza. Ils possedent le tagant, et vendent des gommes a Bakel. Apres eux viennent, en allant vers le nord-est, les Ouled-el-R'ouizi, les Ouled-Embark, les Tiehit, les Brabich, etc. Au nprd des Trarza, se trouve la tribu des Ouled-bou-Seba. Toutes ces tribus ne sont connues que de nom. Din lee te zenaga. Comme echantillon du dialecte berbere nomme le zenaga , en voici la numeration : loan, chinan, karat' (le t final est le t arabe surmonte de trois points, il a la prononciation du th anglais, et est tres frequent dans le zenaga), akouz. chanimonch, choduuch, ichcha , ittem, touza, mereg (^dur). Le systeme est decimal : Ioun id mereg, chinan id mereg,... etc. Vingt se dit techinda; trente , karat' de" tmerin; quarante, akouz detmerin, et ainsi de suite; cent, tmati. Si Ton met ces noms de nombre en regard des mots correspondants bebreux et arabes, on reconnait des ( in ) analogies evideotes pour les nombres deux, cinq, six, liuit, neuf. D'autres analogies qui existent entre la con- jugaison berbere ei les oonjugaisons hebraf que et arabe portent a admettre les donnees d'Abou-el-Feda, a sa- voir, que la nation berbere est une nation semitique dont le premier berce'au aurait ete entre la Palestine et 1' Arable , et qui se serait repandue dans le nord de l'Afrique a la suile des conquetes de David. — Comme rapprocbemenl de noms assez curieux , Abou-el-Feda cite parmi les chefs de Immigration berbere. apres la mort de Goliatb , un nomine Zenbaga. David ayanl conquis l'Mumee, ne serait-ce pas la lc berceau de la race berbere? L'initiale dc ce mot Idiimcc, n'esl-ce pas cet id, aid, ait, idou, aidou, qui precede generalement les noms des tribus de cctle race ? Quoi qu'il en soit de ces questions , nous le repete- rons pour conclure : on pent admettre commc un fait constate que toules les populations blanches et mti- sulmanes, depuis le Senegal jusqu'a l'Oiied-Noun, el dt puis I'ocean Allaritique jusqu'au desert de Libye, sont , de memo que eelles des Etats barbaresques , un amalgame d'Arabes et dc Berberes, dans lequel ces i\cux elements se trouvent combines de toutes les ma- nieres possibles, couime on le voit clairement d'apres les quelques details que nous avons donnes sur les Trarza. Saint-Louis, le 2 avril 1853. L. Faidhehbe, (Japitaini; du {;enie. ( 113 ) Analyses, Blapports, H4x traits d'ou- vrages, IfeBangcs, etc. RAPPORT SUR LE VOYAGE AGRICOLE ET HORTICOLE EN CHINE DE M. ROBERT FORTUNE, 1'AR. M. VOULA1X DE BOSSAY. Messieurs , M. le baron de Lagarde de Montlezun vient de faire paraitre, ct M. le baron de Brimont a depose sur votre bureau, un volume ayant pour titre : Voyage agricole ct horticole en Chine. Ce volume est extrait de deux ou- vrages publics reeemment en Anglelerre par M. Ro- bert Fortune. Charge par la Societe d'horliculture de Londres de se rendre en Chine, M. Fortune partil en 18Z|3, explora cette contree pendant pies de Irois ans au point de vue de la bolanique et de l'lim liculture, et, de retour en Anglelerre, il puhlia la relation de son voyage sous le til re de : Trots annees (('excursions dans les provinces du nord de la Chine. En 18A8 , M. Fortune entreprit un second voyage d'apres les instructions qui lui avaienl ete donnees par le bureau de la Compagnie des hides; il devait rechercher en Chine tout ce qui se rapporte a la culture de l'arhre a the, ainsi qu'a la preparation du the, aux moycns d'introduire cette culture et celle preparation dans les etablissements anglais de l'lnde, puis reunir tous les renseignemenls qu'il pourrait se procurer sur L'agrioulture et I 'horticulture des Chinois. Le voyageur consacra ileux annees a parcouvir les ( lift ) principales provinces du Celeste Empire. II visita des contrees et des districls a tbe ou nul European n'a- vait jamais penetre. Le resultat de ce deuxieme voyage est cod ten u dans un second ouvrage qui a paru en 1852 et qui a pour titre : Les contrees a the de I'Inde et de In Chine. Tout en se livrant a ses reciierches speciales, M. For- tune a pu etudier les mreurs, les usages, les caracttues, et les a depeints en observateur consciencieux et veri- diquc. Ce n'est pas la partie la moins interessanle de son ouvrage; c'est cede dont j'aimerais surtout a en- tretenir la Commission centrales mais, il ne faut pas 1'oublier, en traduisant les extraits qui composent le Voyage en Chine, M. de Lagarde de Montlezun s'est conforme au desir exprime par la Sociele d'agriculture de Paris, et, d'apres le plan qui lui elait trace, il n'a du traduire que la partie purement agronomique. Dans l'ouvrage dont je viens vous entrelenir, ne chercbez pas, Messieurs, l'itineraire exact du voyageur, le recit piltoresque d'une longue exploration ; vous eprouveriez une grande deception. Ce n'est point un touriste, encore moins un poete qui jiarle : c'est un tres intelligent et tres consciencieux borticulteur. Par- tant, peu d'impressions de voyage, mais beaucoup de renseignements fort utiles, ce dont la Compagnie des Indes lui saura plus de gre, je n'en doute pas. Ce n'est pas, Messieurs, que M. Fortune se borne uniquemenl a parler de la culture des planles; on trouve aussi dans ses ouvrages de precieux et d'ingenieux apergus sur la climalologie comparee de diverses parties de la Cbine et des collines de rHimalaya , sur la composi- tion geologique des contrees ou l'arbre a tbe se cul- ( 116 ) tive avec le plus de succes. Mais ces renseignements rentraient dans le cadre qu'il s'etait trace et qu'il a si habilement rcmpli. Pendant cinq ans de voyages en Chine et dans l'lnde, M. Fortune a visile souvent les memes lieux ; plusieurs fois, apres de longues excursions, il a sejourne a Canton el a Chang-hai, a deux points du Celeste Empire tres eloignes l'un de l'aulre. Dans ces excursions in- cessantes , il a parcouru et explore de la maniere la plus lieureuse les provinces maiilimes de Canton, de Fo-kien, de Tchc-kiang, qui avaient deja ete visilees paid'autres voyageurs; il s'est avance dans la province deHwuy, qui produit le meilleur the vert et le produit en tres grande quaptite ; enfin, s'eloignant des cotes et des contrecs connues, le premier il a penetre jusqu'au dela du lac Po-yang, en traversant la ville de Tchao [Chow, suivant l'orthographe anglaise), a200millesde Ning-po ; IFae-pi/ig, ville de 150 000ames, a 300 milles de Chang-hai; puis Tunche , pres du Sung-lo, oii l'arbre a the a ete decouverl pour la premiere fois; ensuite, Tsong-gan; et il est arrive a Ho-kao [Ho-kow], sur le Kin-kiang, qui se jelte dans le lac Po-yang. M. Fortune sail voir, et tout ce qu'il a vu il le decrit d'une maniere attachante etde la maniere la plus utile sous le rapport du commerce. Voila ce qui recommande ses ouvrages a l'atlention du geographe et ce qui donne de l'interet a ses voyages, quand bien meme il n'aurait pas rap- porte des renseignements si precieux au point de vue agronomique. On doit, en efl'et, a M. Fortune les l'enseignements les plus posilifs sur la culture de l'arbre a the et sur la preparation des feuilles de cet arbre. ( 116 ) 11 existe deux varieles do l'arhre ;'i the : le Thca vi- rirlis et lo Then Bohea. Cotto derniere vai iete crolt spe- cialement dans les environs de Canton el dans les parties meridionalcs de la Chine. Le Then viridis , qui est do beaucoup preferable , crolt dans toutes les par- lies septonlrionales de I'Etnpir'e. Longtemps on avait cm que le the vert provenait des feuilles du Then vi- ridis et quo le Then Bohea servait a foil re le th6 noir; e'est une erreur. Avoc les memos feuilles, soit do I'uno, soit do l'autro variety, on peut faire du the vert on du the noir. La difference de coulour tient exclu- sivoment a la maniere de le preparer. C est entre le 27° et le 31° degre de latitude nord qu'en Chine les plantations do l'arbre a the [Thed -firidis) donnent les plus beaux et les meilleurs resultats. Quant a la pre- paration , le voyageur l'a degagee du prestige myste- rieuxqui l'environuail, et il a fait voir qu'elle se roduil a des procedes hien simples, b't qui partout peuvonl etre facilemont imiles. Mais, Messieurs, tout n'est pas bon a imiler dans la preparation du the par les Chinois. Pour donner au the vort uno tointe plus briHarite, ce que les Anglais appellcnt la fleur, ils emploienl un melange de bleu de Prusse et do pi St re auqucl ils ajoutent quclquefois du kaolin ; quelquofois encdre le bleu de Prusse est remplace par la racine de curcuma ou par Yhatis indigo ta. Co n'est encore qu'a la fin du xvmc sieclo qu'ils ont commence a employer le hleu do Prusse : ils se servaient precedemment de poudre d'indigo. Le bleu de Prusse et le plalre pulverises sont melanges dans la proportion de qualre parties de platre contre trois parties de bleu de Prusse. Cetle matiere colo- ( i 1 7 ) rante esl appliquee au tbe pendant la derniere periode du cbaufl'age, cinq minutes avant de retirer des bas- sines les t'euilles de tbe. On cmploie environ 250 grammes de ce detestable melange pour teindre 50 kilogrammes de tbe. Les ouvriers agilent et retournent ties vivement les feuilles avec les deux mains , qui ne tardent pas a de- venir toutes bleues. « En les voyant la ire , je pensais, dit M. Fortune, » que si quelques uns de nos compalriotes , buveurs » de tbe, avaient pu assisler a cette manipulation, leur » gout, a l'endroit des tbes colores, se serait, sans au- » cun doute, modifie, et je crois potivoir dire ameliore. » Un jour, a Cbang-bai, un Anglais, s'enlretenant » avec quelques Cbinois des conlrees a tbe vert, leur » demanda quel motif ils avaient pour teindre ainsi » leur tbe , et s'ils ne pensaient pas qu'il serait meil- » leur en le laissant dans son etat naturel. Ils lui re- » pondirent que sans doute cette leinture, loin de le » bonifier, le galait, et qu'en Cbine on ne se servait » jamais de tbes ainsi colores. — Mais, ajouterent-ils, » puisque les etrangers preferent une addition de » platre et do bleu de Prusse , qui donne a ce produit » une plus belle apparence , nous ne voyons aucune » difficult^ a leur en fournir, d'aulant plus que, d'une » part, ces ingredients sont fort bon mai'cbe, et que, » de l'autre, les tbes ainsi Iraites se vendenlplus cber. » Les precieux renseignemenls coutcnus dans les ou- vrages de M. Fortune sur la culture et la preparation du the , renseignements reproduils en entier dans le Voyage en Chine de M. le baron de Lagrenee, sont des- tines, je n'en doute pas, a appovter de grands cbange- ( "8) merits clans le commerce des thes. Si, apres avoir ete avertis de la maniere clont les Chinois proparent Jes thes verls destines a l'exporlation , nous persislions a les preferer aux thes naturels que consomment les habitants du Celeste Empire, nous meritorious, il faut en convenir, le litre de barbares qu'ils nous donnenl si liberalemenl. D'un autre cote, d'apres les essais fails sur les collines de l'Himalaya, l'Anglelerre pent espe- rer lournir a sa consommalion, et n'etre plus, pour celte denree, tributaire de la Chine ; et la France pout coucevoir la nifime esperance, quoique plus eloignee, depuis les experiences faites en Algerie, pres de Blidah, dans les gorges des montagnes du petit Atlas, par M. Liaulaud , chirurgien de la marine. Rl. Liautaud et lous ceux qui seront tentes de propa- ger la culture de l'arbre a the auront sans doute beau- coup a profiler des renseignemenls fournis par Rl. For- tune; mais, je le crains , ce qui arrelera l'essbr a donner a celte culture, ce sera le prix de revient qui laissera l'avantage au the chinois, n'en eut-ii pas d'autre, altendu qu'en Chine la main-d'ceuvre se pa\e au moins trois l'ois , souvent cinq fois moins cher que chez nous. Dans les possessions adglaiseS de l'lnde, la culture de l'arbre a the a fait de Ires grands progres, et l'ou n'en est plus a quehjues essais fails par i'cs particuliers. Rl. Fortune a coniple 500 000 picds d'arbres a Hie dans une seule ferine en 1850; et, grace a la grain e et et aux pieds d'arbres qu'il a apportes par ordre de la Compagnie des hides, la culture de l'arbre a the s'est prodigieusemcnt accrue depuis cetlc epoque vers los collines de l'Himalaya; en mdme temps, la preparation ( 419 ) s'est perfectionnee a l'imitation des ouvriers chinois qu'il a amenes et etablis dans celte contree. L'exportation annuelle du the chinois est de 95 000 000 de livres : 58 000 000 de livres sont exportes pour l'Angleterre, 19 000 000 de livres pour les Etats- Unis d'Amerique, lx 000 000 de livres pour l'Europe continentale, sans compter la Russie, qui tire directe- ment 5 000 000 de livres par la voie de terre. L'Angleterre consomme annuellement 36 000 000 de livres et reexporte le reste. Sa production annuelle en Chine doit atteindre le chiffre de 1 895 000 000 de livres, d'ou il resulte que l'exportation viendrait a diininuer ou meme a man- quer, ou hien elle viendrait a augmenter dans de tres grandes proportions, il n'en resulterait aucune baisse ni une hausse bien sensible dans le prix du the en Chine. Actuellement il vaut de 50 c. a 1 fr. 25 c. la livre. Arrive a Calculta, les meilleures qualites se vendent de 5 a 6 francs. Si les plantations de 1'Inde prosperent, comine lout porte a le croire, le the inrlien pourra probablement etre livre a 60 c. a Calcutta. Jusqu'ici, Messieurs, je ne vous ai entrelenus que de la culture du the. C'elait en effet l'objet princij)al de la mission du voyageur anglais et la parlio la plus im- portante de ses ouvrages; mais ce n'est pas la seule qui suit pleine d'interet. J'aurais du plaisir a le suivre avec vous dans ses occupations de bolaniste , a vous faire connaitre ses remarques sur la culture du colon et du riz, sur la sericiculture, sur l'arboriculture, sur la flore de lous les lieux qu'il a parcourus; mais je dois savoir meltre des bornes a ce rapport, n'oubliant ( uao pas que je parlc devant des geographcset nun devaat des membres des Socieles d 'agriculture ct d'hortieul- ture. Je dirai settlement qu'on doit a M. Fortune l'in- tioduction en Europe de plusieurs fruits, entre autres la peche Chang-hai, d'un asse/ grand nombre d'ar- bustes, principalement ties mahonia el des spir^es, de plusieurs espeees de pivoines en arbre qui sont venues enricbir la collection deja nombreuse de cette plante magnifique. Mais, dans ce genre, l'importation capitale est celle du Cupressus funebrte, delicieux arbre vert que nous avons pu admirer a Paris aux expositions d'borticulture de 1853. Messieurs, il y aurait de 1 'in justice a ne point parler avec eloge du travail de M. le baron de Lagarde de Monlkzun. Sa traduction est claire, elegante, el Ton sent si peu le travail du traducteur, qu'on pourrail croire le Voyage agricole et horticole en Chine original- rement ecrit en francais , s'il laissait moins a desirer sous le rapport de la composition. En cil'et, Messieurs, ce livie n'csl point, a proprement parler, un voyage; on n'y trouve rien de suivi; il ne contient que des extraits qui manquent souvent de liaison entre eux, et dans lesquels les memes choses soul repelces plusieurs fois dans des termes a peu pres idenliques. Neanmoins, tel qu'il esl, cet ouvrage est destine" a rendre de grands services en popularisant en France des connaissances que tout le monde ignorail avant les publications de M. Fortune, et que nous conlinuerionsd'ignorer si M.de Lagarde de Montlezun n'avait bien voulu se charger de les faire connailre. 3 fevrier 185/i. h FOULIIN I)B BOSSAY. f 124 ) COMPTK RImNDU des travaux DE LA SOCIETE IMPERIALE RUSSE DE GEOGRAPHIE. La Societe" imperiale russe de geographie a tenu, le 28 octobre (9 novembre) dernier, une assemblee g6- nerale , la premiere apres les vaeances d'ele, sous la pr^sidence de M. le Iieutenant-g6ti6ral MouraviefT. membre du Conseil de l'Empire , son vice-president. II. le vice-president a ouvert la seance par la lecture du comple rendu suivant des travaux de la Societe" pendant les six mois ecoules : « Messieurs , » A l'occasion de la r^ouverture de nos seances lia- bituelles, je crois devoir venir vous exposer en pen de mots les travaux de la Societe pendant les mois d'et£, ainsi que sa situation actuelle. » Pendant les vaeances, l'impression des diverses publicalions enlreprises par la Societe s'est poursuivie saus interruption, et il a ete expedie dons toutes les localites de l'Empire des programmes nouvellement rediges a Teffet de recueillir des notions sur lels objels concernanl l'elbnographie et la slatistique russes. Les correspondants de la Societe dans l'inte>ieur lui ont f'ourni, du 1" jtiin au 1" oclobre , tant a la suite de ces programmes que de leur propre inouvement, plus de 30 articles sur divers sujets. Plusieurs des manu- scrils sont encore, al'heure qu'il est, l'objet d'examens VII. f^vrier. 3. 9 ( 422 ) serieux, d'autres ont d6ja ele revus. Paruii ces der- niers, il s'en trouve un assez grand nombre qui meri- tent a tous egards d'etre inseres dans nos publications. A celte categorie se rattacbent surtout : la Description geographique des provinces sino-mandoues A hey-lmin- dzian et Tszirine, redigee par Rl. Sytcbevsky, et envoyee par la section siberienne ; la Description de la foret de Belovege , par Rl. Dalmalofl; la Description de diverses localises du gouvernement de Perm, par ie yeromouaque Rlacarie ; le Journal d'un voyage de Bakou a Astrakhan et a Saiiit- Petersbourg, de Rl. Spassky-AvlonomolT ; les premiers cbapitres d'un grand ouvrage de Rl. de Linclegi een, intitule : Description medico- topographique et statistique du district de Tchistopol ; un Apercu de statistique morale de la Finlande, par Rl. Baranovsky; une Dissertation de Rl. Afanassief, sur la vie d'outre- tombe , selon les traditions slaves ; et plusieurs aulres articles. En outre, la Societe a continue, cotnnie par le passe , a recevoir des notions etbnograpbi- ques , dont le nombre s'ust considerablement accru a la suite de la distribution d'une secondc edition, revue et augmenlee, du programme elbnograpbique ; ainsi que des notions meleorologiques , statistiques, sur le commerce inlerieur en general et sur le commerce du ler en particulier. Les programmes nouvellement dislribues par la Societe demandenl des renseignemenls sur lis eaux miner.des de la Ilussie, sur le commerce des pellcleries et sur des donnees propres a eclaircir 1'origine de la race inlerossante et jusqu'a present enigmalique des Oudines du Caucase. EnGn, dans le courant des memes mois d'ele, il a ete publie au nom de la Societe un appel pour qu'on lui fit ( 123 ) parvenir des dessins d'objets ethnographiques divers, pour servir a i'ormer un Album etbnograpbique de la Ilussie. Nous avons cleja recu , a la suite de cette in- vitation, plusieurs ofl'randes, parmi lesquelles un re- cueil de dessins lies exacts, du a M. Gareline, nierite une mention particulierc. Ces dessins, dune exacti- tude parfaite, representent les maisons et les ustensiles de menage des pa) sans des gouvernements de Kostro- ma, Yaroslaff et Vladimir. » Outre les articles que je viens de citer, la Societe possede encore plusieurs tra\aux scientifiques plus ou moins importanls qui lui ont ete envoy es anterieure- ment. Tels sont, par exemple, les articles de M. Ne- bolsine, sur le commerce de la Bussie avec I'Jsie Mineure; de M. Markcvilcb, sur V hydro grapliie du gou- vernemeal de Poltava; de Al. d'Arkas, sur Cusine de Lougansk ; de M. Abramuff, sur le climat de Berezoj) ; de M. Visclmevsky, sur la langue tchouvache. Tous ces articles paraitront incessamnienl dans les publications de la Societe, sur lesquelles il ne sera pas inopportun de communiquer ici les notions suivanles. Dans le courant de l'ele dernier, a paru la 8e livraison des Memoires, con tenant un travail de M. Nevoline sur les piatines et paroisses de Novgorod ; les 3e et h" iivrai- sons du Bulletin; la traduction allemande du 1" vo- lume des travaux de 1'expedition de I'Oural ; et Id traduction 1'rancaise du comple rendu de la Societe pour 1852. La t>e livraison des Memoires, donl l'im- pression se poursuivait sous la direction de M. D. Mi- luline, paraitra tres incessamment, et vous sera, selon toute probability, soumise a la procbaine seance. On a d6ja commence l'impression de la 10° livraison, ( m ) dont la redaction appartient a M. J. Arapeloil. Les Kvraisons iilterieures du Bulletin pour i'annoe courante soi out publiees en temps opportuo. Le 2e volume du Becueil ethnographique paraitra au commencement do l'annec pruchaine. Quant aux publications qui sont sous presse, mais dont l'epoque do l'apparition ne pent elre precisec, ce sont : le 2e volume des 'I'mvnu.i de V expedition deVOuml, en langues russe el allemande; le 2' volume du Becueil statistiqiie; la 1" partio des Monuments de In langue et de In litternture fusses popu- Inires, et le Code des notions climnlcriqucs fournics a la Societe, recueilli par M. Poroschine. Dans le courant de ce mois, la Societe se propose encore de proceder a l'impression de la 1" livraison de XApercu du com- merce inferieur, ouvrage pour lequel tous les inateriaiix necessaires se Irouvent deja reunis. Eniin, pour ce qui concerne la traduction de la Geogrnphie de Hitter, en- treprise par la Societe , la premiere des trois parties en est completement terminee, et est en ce moment soumise a l'examen dune commission speciale , nom- inee par le Conscil. » Parmi les entieprises cartograpbiques de la So- ciete , la publication qui se poursuil avec le plus de succes est celle de \' Alius du gouverncnwnt de Tver, dont la 2" livraison a paru dans le courant de l'ele. Les livraisons subsequentes seront publiees Ires in- cessamment, et lout I'ouvrage doit elre termine pour 1'ete procbain. Nous csperons aussi I a ire paraitre au commencement de 185A les cartes , dressees par M. klianvkoir, des environs du lac d'Issyk-Roul, et des points aslronomiques dans la partio nord-ouest de l'Asie centrale. Nous procederons en outre, sous pen, ( 126 ) a la publication des cartes de la region de la Petcbora, dressecs par M. de Krusenstern , et mises a la dispo- sition de la Society parson auguste president. Malheu- reusement, noire aclivite touchant la cartograpbie doit forcement souflrir de la perte douloureuse que nous avons eprouvee dans la personne de M. A. BolotofF, ce qui nous oblige a suspendre aujourd'hui, entre autres, la publication de la carte de la partie nord-ouest da l'Asie cenlrale , que la Societe avail cbarge notre bono- Fable collegue de preparer conjointement avec M. Kba- nykoff. Quatre feuilles de cette carte sont entieremenl acbevees; la einquieme est altendue de M. Kbanvkoffj mais la sixieme, a peine commencee par feu M. BolotoO', exige encore quelques corrections et additions. Le conseil de la Sociele a l'intcntion de prendre les me- sures les plus efficaces pour mener a bonne fin ce travail utile, ainsi que pour accelerer la publication de la Carte generate iV Asie, , commandee, conime on sail, a M. Fioriep a Weimar. » Oulre la continuation des publications commen- cees et la reunion des materiaux necessaires a cet efi'et, notre Sociele , vous le savez , considere coinme une de ses principales obligations l'envoi periodique d'ex- peditions scienliliques pour I'exploralion des diverses parties de la Russie. Dans le courant de l'ele dernier, nous avons termine une de ces expeditions, nous en avons commence une seconde, et nous avons adopte loutes les mesures preparatohes necessaires ]>our l'en- voi d'une troisieme. M. de Pacbt , maitre es arts de I'universile do Dorpat, auquel la Societe a confie I'exploralion geologique de I'espace situe entre le Volga, la Voroneje et le Don, s'est mis en roule a la ( 126 ) fin d'avril, et, de retour depuis quelques jours, il nous a presente un rapport general sur les principalis re- sultals de ses investigations. Notre collegue, M. Kou- torga , vous donnera lecture de ce rapport avant la fin de celle seance. Lne autre expedition , £quip6e par les efforts combines de la Societe et du ministere des domaines de l'Rmpire, pour 1'exploration des peehe- ries de la mer Caspienne, a commence ses operations an printemps dernier. Mallieureusement, il ne nous est encore parvenu aucun rapport de M. de Baer, chef de cette expedition. Quant a la grande expedition pro- jetee pour 1'exploralion de la Siberie orientale, nous a\ons lieu d'esperer que tousles obstacles qui s'oppo- saient jusqu'a present a son equipemcnt definitif, se- ront incessamment ecartes. Dans unc de nos pro- chaines seances , j'aurai 1'lionneur de vous donner un expose delaille des actes du conseil sous ce rapport, ainsi que dos r^sultats obtenus. Enfin, je crois devoir porter encore a voire connaissance la proposition du comite inslilue pour la publication de l'apergu du commerce interieur de la Russie, proposition d'apres laquelle le Conseil a resolu d'expedier, a la fin de l'annee courante , un explorateur special qui sera charge de recueillir des notions detaillees sur le mouvement commercial de nos foires les plus im- portantes. » Vous n'ignorez pas que, l'annee derniere , la So- ciete avait propose plusieurs problemes scientifiques , pour la solution desquels elle avait assigne des primes en argent. Le 4" juillct dernier avait ete fixe pour lerme de la presentation des solutions des problemes relatifs aux sections d'elhnographie et de g^ographie ( 127 ) mathematique. Mais ces premieres tentatives n'ont pas ete couronnees du succes desire : nous n'avons recu au terme fixe aucune solution; c'est pourquoi nous avons engage les sections a enoncer leur avis sur la question de savoir s'il serait plus utile de proposer les merries problemes pour one seconde epreuve, ou bien de les rcmplacer par d'autres. » Les relations de la Societe avec les habitants des provinces et les correspondants a I'etranger n'ont pas ete inlerrompues pendant les mois d'ete. Nous avons communique, entre autres , a tons nos collogues a I'etranger la traduction francaise du compte rendu de la Societe, et aujourd'hui nous leur cxpedions la tra- duction allemande du ler volume des travaux de l'ex- pedilion de l'Oural. » Les sections de la Societe, cliacune dans la sphere qui lui est assignee, poursuivent activement leurs tra- vaux pour alteindre le but propose. La section sibe- rienne nous a fait parvenir le compte rendu detailie de ses travaux, qui a ete insere dans la &e livraison du Bulletin. II resulte des renseignements fournis par la section caucasienne, que, dans ce moment, elle s'occupe principalement de la publication de la 2" Ht vraison de son Bulletin. » II a ete ensuite soumis a l'assemblee un compte rendu succinct presente par M. de Pacht, mailre es arts de l'universite de Dorpal , touchant ses explorations de la region devonienne entre la Voroneje, le Volga et le Don, execulees par ordre et aux frais de la Societe. Cette region embrasse, comme on sait , presque tout le centre de la Russie d'Europe et s'etend depuis la mer Blanche, a travers les gouvernements d'Olonetz, ( 128 ) deSaint-Petersbourg, deNovgorod.de Pskoff.et plus loin jusqu'a Yoroneje. Sur la carte connue (!«• Murchison, elle n'esl designee qu'en trails generaux. La Societe, jugeant necessairederetiuliur en detail, awiitileja oxpe- die dans ce but, en 1850, M. de Helmersen, membre effeclif, dans quelques uns des gouverncments appar- tenant a cette region. M. de Pacht a ete charge , en avril dernier, de completer et de terminer les explo- rations execulees par M. tie Helmersen. Ayant consa- cre les quatrc moistl'ele a I'execution dela commission qui lui etait conliee, M. de Pacht a expose, dans le compte rendu present*'' , les observations faites par lui tant sur la region devonienne elle-mome que sur les formations contigues, houilleres, jurassiques, cre- tacees, tertiaires, ainsi que sur la terre tranche (hu- mus) , et les pierres erratiques [silex): M. de Pachl a reconnu que ces dernieres s'etendaient infiniment plus loin au sud que ne le supposait Murchison. II a egalement recueilli. sur la terre Tranche de nos gou- vernemenls fertiles , beaucoup de donnees interes- santts , qui prouvent son idenlite avec les alluvions, c'est-a-dire avec ces masses poreuses transportees jadis par les tononts a leurs gisements actuels. A la fin de son compte rendu, 1'explorateur a presente les resullats les plus importants de ses observations sur la temperature des eaux et des puils prot'onds clans les localites qu'il a visitees. En ce moment, M. de Pacht s'occupe, avec M. de Helmersen, dela redaction d'un recueil general et detaille de tous les materiaux rassembles a ce sujet par ordre de la Societe depuis 1850. A la fin de la seance, M. V. Milutine, secretaire de (129 ) la Societe, a donne lecture d'un court apercu des de- couvertes geographiques les plus importantcs et des voyages executes dans toules les parties du monde dans le courant de l'annee 1852. LETTRE DE M. FA1UHERBE A MONSIEUR LE PRESIDENT DE EA COMMISSION CENTRAEE DE LA SOCIETE DE GEOGRAPHIE. Saint-Louis, le 12 mars i853. Monsieur, Me Irouvant au Senegal coinine chef de service du genie et ayant 1'intenlion d'j demeurer quatre ou cinq ans, je desirerais vivement profiler de ce sejour prolonge pour faire faire , si c'etait possible, quelques j>as a la geographic et a l'elhnologie de 1'Afrique sep- tentrionale. J'ai habile l'Algeriesix ans, dont deux tout a fait dans le sud , a Bou-Saada; j'y ai acquis une connaissance assez complete des mceurs et de la langue arabe ; j'ai ensuite parcouru la Kabylie pendant un an. Le desir de m'occuper de la geographie el de l'his- toire de 1'Afrique seplentrionale est un des principaux motifs qui m'ont fait demander la residence du Se- negal. J'ai deja trouve un sujet d'etudes tres interes- sant clans les tribus de la rive droite, qu'on a toujours designees sous le nom de Maures. C'esl un melange de tribus arabes et de tribus ber- ( 180 ) beres. On y parle deux langues : I'une est l'arahe ; c'est un dialecte presque idenlique avec celui de l'Al- gerie ; l'autre est un dialecte berbere, que j'eludie en ce moment et qu'on appelle zenaga. Les deux races vivent cole a cote dans des rapports singuliers dont elles n'offrent pas un seul exemple en Algerie. ou elles se loucbent partout. L'bistoire des fails qui onl amend cette combinaison des vainqueurs et des vaincus doit etre curieuse , et j'espere obtenir asscz de renseignemenls et de fables pour demeler un peu la vorile. Si vous aviez la bonte de me donner quelques con- seils, de m'indiquer quelles sont, dans l'etat actuel de la science, les questions a etudier, I I'un des plus grauds progres de la geo- grapbie et des principaux desiderata de la science, ( 160 ) consiste dans la determination mathematique de la position des lieux. M. Gallon a parcouru plus de 2000 milles a travers un grand nombre de difficultes et de privations, il a deploye un zele rare, une ardeur infatigable, et il a accompli tout ce penible voyage a ses propres frais. Loin de nrgliger l'etude des popula- tions, celle des mceurs et des coutumes, il a recueilli une foule d'observations de nature positive, qui nous permetlent d'avoir une idee juste du degre de civili- sation des Damaras ; degre encore bien bien peu avance et bien inferieur a celui des Ovampos et du pays de Benguela au nord, nieme des Namaquas et des rive- rains du fleuve Orange au rnidi; par exemple, il pa- ralt que les Ovaberero ou Damaras ne savent pas compter au dela de cinq. Cependant, ils forment une nation puissante par le nombre des babitants; le pays est fertile et four nit des bestiaux qu'on embarque a Walfisch-Bay pour Sainte-Helene. Quand M. Gallon a commence a penetrer dans I'interieur, le pays etait trouble par une attaque violente des Namaquas, qui livraient tout au pillage , et luaient les Damaras. D'aulres empecbements encore arretaient le voyageur; mais il eut le bonbeur de se procurer des interpretes, a la fois devoues et familiarises avec les idiomes da- mara et botlentot et d'autres encore, et il triompba ainsi d'un des plus grands obstacles que rencontrent les explorateurs des pays inconnus. Au inois d'aout, il etait a Barmen, au centre du pays, sur la riviere principale, le Swakop. Apres avoir acbeve ses observations a la Fontaine de l'Elepbant, il fit une exploration avec un chef bottentot jusqu'a Tou- nobis, point de sa course le plus a Test (long. 21° 0.). ( wo ) M. Galton, clans sa relation, fait remarquer que les lieux ont deux, trois et jusqu'a quatre noms difierents; il decrit, a\ec soin, le climat, les sables, les palurages, les rivieres, les savanes et, en general, la nature du sol, ou 1'ou remarque dans la conformation du terrain des singularity curieuses; enfiD, les epais bois epi- neux do ces contrees, qui sont un bien cruel lourment pour les voyagcurs. I'n trait curieux de geographic physique, c'est que les rivieres sont periocliques ; l'une d'ellcs, une fois, est reslee sept ans sans alteindre jusqu'a la ujer. Le con- traste est des plus saillanls entre le pays des Dainaras et celui des Ovampos, que visila ensuite Rl. Gallon, notaminenl a Ondonga, ou l'agriculture est florissante, ou les champs sont couverts de riches moissons; ajou- tons les magnifiques bois de palmiers , les gras patu- rages, les villages ou sembleut respirer l'aisance et le bien-etre. On nc connalt pas les embouchures de ceilaines ri- vieres du pays; M. Gallon deduit de judicieuses con- sequences sur leur cours, de la presence des hippopo- tames. Enfin, il donne les renseignemenls qu'il a re- cueillis des naturels sur les pays qu'il n'a pas visites; le plus interessant de tons est la region du lac N 'garni, decouvert, il y a pen d'annees, par MM, Livingston et Oswell; il a ele, d'ailleurs, en relation avec ce der- nier; a Tounobis, M. Gallon n'etait pas a plus de 120 mil les gcographiqucs du lac, et il avail le projet de s'y rcndre. On sail que la riviere appelee Zouga communique avec le lac N'gami a son extremite orien- tale, et recoit ellc-meme une autre grande riviere nominee Tso (ou Beribe , en sechuana) : or, selon les ( Kil ) assurances donnees par les indigenes a M. Galton, la Tso ue se jette pas dans les eaux du lac ; il en sort au contraire : M. Oswell, etant sur les lieux, doit avoir verifie ce point de geographic C'est ainsi, messieurs, qdela science fait de nouveaux et grands pas dans l'inteiieur de la lerre mysterieuse, et que, de proche en proche , les pionniers de la geo- graphic, partis, les uns du nord et les aulres du sud, et convergeant tous vers la ligne 6quinoxiale, finiront par se rejoindre, peut-etre en meme temps que ceux qui sont venus de l'Orient, c'est-a-dire les courageux missionnaires qui ont pris pour point de depart Mom- has dans lamer des Indes, et a qui Ton doit deja d'im- portants resultats que vous avez recompenses par vos medailles. Nous voici arrives a la principale decouverte de l'annee 1851 : c'est encore I'Afrique qui en a ete le Ihealre. On connalt trop hien, pour la rappeler ici, la mission qu'avaiteue du gouvernemenl anglais James Richardson, en 18/|9, homme parl'aitement prepare par son voyage a Ghadames ; il avail cependant senti le hesoin de s'associer deux compagnons de voyage, instruits dans les sciences naturelles et dans l'artd'oh- server, le docteur Overweg et le docteur Barth. Les deux premiers, helas ! ont succomhe sur le champ de hataille des decouvertes. M. Barth a resiste a toutesles fatigues, a toules les epreuves; isole du reste de la mission, il a tente et realise un voyage qu'aucun liuropeen n'a- vait fait avant lui. Le nom d'Adamawa etail inscrit sur les carles; mais nul ne savait s'il y avait la un Etat flo- rissant, une ville capitale, un centre de commerce. On ignorait quelle etait la population du pays; si elle ( 162 ) elail soumise aux Fellatab, ou si elle avait resiste a l'invasion de ces nouvcaux dominaleurs du Soudan. Le doctotir Barth partit de Konka, sur les bonis du lac Tchad, le 29 mai 1851; apres une marche de 155 milles geographiques, a travers les terres du Bor- nou, il atleignit Lba, premiere position d'Adamawa, lieu situe sous le parallele de 10° 20', a 35 milles ouesl du inonl Mendefi. Le voyageur ful frappe de la superbe vegetation du pays, de ses maguifiques prai- ries el des nombreux- truupeaux qui y paissent. Toute la contree porte l'aspect de l'aisance et de la riehesse ; les cabanes sonl baties plus solideinent que dans la ]>artie de I'Afrique plus au nord ; il est vrai que la sai- son pluvieuse y dure sept mois. Le pays est ties peu- ple, on y voit de grandes villes, toutes les trois ou qualre beures, outre les villages inlenr.ediaires babiles par les esclaves des Fellatab. Ces esclaves cxecutent tons les travaux, et le plus pauvre des Fellatab en a de deux a quatre sous son autorile. Yola est la capilale du royaume; le commerce consiste principalement en esclaves et en ivoire; on lire celui-ci de Baya, a douze journees au sud d'Yola , el oil les elephants sont en grand nombre. L'importalion rounut du sel, des ver- roteries et d'autres marchandises. On ne se sert pas de cauris pour les echanges, mais de bandes etroites d'eloffes de colon appelees gebbega. A b'l milles d'Uba est un grand marche, appele Saravv; c'est la princi pale \ille du nord du royaume. Jamais un chretitn n'avail mis le pied dans ce pays; (piand le docteur Barlh y j)assa, on l'accueillil avec toutes sortes de marques de respect, et comme unelre d'une espece superieure. Le 18 juin, le docteur arriva au point ou le Benue se (163 ) joint au Faro, et forme une riviere grande et impo- sante. Le lieu s'appelle Taepe (1). lie Benue (ou la mere des eaux) est la plus grande des deux rivieres; elle avait un demi-mille de large et 9 pieds 1/A de pro- fondeur, quand ledocteur la travcrsa pour la premiere fois ; au retour, elle avait cru de 7 pieds \!h : profon- deur totale pres de 1 7 pieds ; le courant porte a I'ouest et e6t tres fori; il se rend dans le Quorra ou Kouara. Le voyageur passa le Faro a gue, et le Benue dans une barque longue de SO pieds. On lui assura que la source du Benue est a neuf jours de marche d'Yola, au sud-est, et celle du Faro a sept jours, au rocher appele Lab id. Pendant la saison pluvieuse, les deux rivieres de- bordenl et l'inondation s'etend au loin ; elle est a son maximum a la fin de juillet, et garde ce niveau qua- rante jours durant. La crue est de 40 a 50 pieds; a pres quoi les eaux baissent. Les crocodiles y abon- denl; le Benue cbarrie de Tor. C'estle 22 juin que le docteur Barth entra dans la capitale. Aucune decouverte geograpbique de l'annee 1851 ne saurait le disputer, pour l'inleret et I'importance, a celle du docteur Bartb; il nous a revele l'existence d'un vaste pays, riche par la culture et par la popula- tion, ainsi que celle de deux rivieres qui s'unissent pour former le grand affluent du Quorra connu sous le nr»m deTchadda el qu'on ne connaissait guere que par son emboucbure ou jusqu'a Foundab ; il a par la pour (i; Ce point est situe par 9* 2' la(. ]»., 1^° E Greenwich, a 235 niilles geogrnphiques ile Kouka, et 4'5 uiilles N.-K. tin confluent de la Tchadda et du Kouara. ( IdA ) ainsi dire ouvort a l'Europe unc communication fa- cile avec l'Ocean. Sous le rapport purcment geogra- pliique, et quanl aux cours d'eau, cette decouverla n'est pas d'une moindre importance, et elle vieat cor- roborer une conjecture emise depuis longtemps sur lc veritable cours du Niger (1). M. Barlli a, de plus, adresse des renseignemenls dun grand intiiret sur les points qu'il n'a pas vus par lui-meme (2). II n'est pas de notre sujel de parler des conse- quences futures de cette decouverle , ni meme du voyage de M. Vogel, jeunc astronome, parti de Mor- zouk pour rejoindre l'expedition, qui etait malheu- reusemenl reduite a un seul mcmbrc par la inoit do Richardson et d'Overwcg; mais il convient d'ajouler que l\l. Bartli a resolu de retourner a Yola pour com- pleter son exploration, et cela apres avoir tenle d'at- teindre Tombouclou (3). Par le meme motif, nous no dirons rien du mission- naire Livingston, de M. OsAvell, son compaguon de voyage, de M. Anderson, qui fut celui de ftl. Francis Gallon, de iMM. Krapf et Rebmann, tons resles ou re- tournes en Afrique pour conlinuer les travaux quo noire Sociele a distingues les annees precedentes. Plusieurs d'enlre eux out d'ailleurs envoye en Europe (i) Voyez le Bulletin, annee i85i, t. II, p. 3a3, Remarques au sujet du voyaae du docteut Iiarlh dans VAdamaWa et ailleurs. ( •>) Un cheikh a dit a M. Barlfa qu'il avait fait le voyage du lac iSyassi en partant de Mozambique. (3) On apprend aujourd'hui meme (29 mars) l'heurcusc arriveedu docteuc Barih a Tombouctou, oil il est entre le 7 septembre 1 853, accompagnc par le fieie du cheikh, gouvcrneur de la villc. ( 165 ) de nouveaux documents qui seront lobjet d'un exa- mcn ulterieur. C'est ainsi, messieurs, que l'Afrique se devoile de plus en plus a l'ceil impatient tie l'Europeen, curieux de la connaitre enfin tout entiere. Le cercle de l'in- connu se retrecit pardegres; la carte d'Afrique, avant un quart de siccle peut-etre, ne fera plus voir de grand vide, et ces prodiges toujours nouveaux, que le myste- rieux continent, au dire de la docle antiquite, re- cele en son sein depuis un lemps immemorial, nous seront enfin devoiles. Qu'un hommage eclalant soit rendu a ces hommes intrepides, qui, a travels mille fatigues, au peril de leur vie, ont procure tant de brillantes decouvertes; gloire a eux ! et que les ombres des Mungo-Park, des Beaufort, des Laing, des Denbam, des Rene Gail lie, se rejouissenl de tous ces progres, qu'on leur doit aulant qu'a leurs successeurs actuels. Conclusion. — ■ La Societe de geographie de Paris, pleine d'admiration pour la Constance et le courage qu'a deployes le docteur Barlh, depuis Irois ans, dans son exploration des contrees centrales de l'Afrique, lui decerne sa grande medaille d'argent pour son voyage au pays d'Adamawa, et, en meme temps, un bommage de souvenirs et de regrets a la m^moire de James llicbardson, le chef de la mission, et a celle du docteur Overweg , morts tous deux victimes de leur devouement pour la cause des decouvertes. La me- daille, aujourd'bui decernee au docteur Barlh, n'exclut point son droit au grand prix annuel pour un voyage posterieur a 1851. La Societe decerne aussi sa medaille d'argent a ( 166 ) M. Francis Galton pour son exploration au pays ties Damaras, et elle vole un temoignage d'estime et de felicitation an voyageur Suedois Af, Anderson, dont le zele s'est associe a celui de M. Francis Galton. Jomard, Rapporteur. PRIX D'ORLFANS, POUR l'importation la pus utile a l'agriculture, a l'industrie ou a l'humanite. Rapport de la Commission spe'ciale : Conwiissaires, MM. Gabriki. Lafoud, Gahmer et Jomaiid, rapporteur. Messieurs, Le prix offert aux voyageurs par la Societe de geo- graphic pour l'importation la plus utile a l'agriculture, a l'industrie ou a I'huinanild , n'a pas ele assez connu dans 1'origine, et c'est sans doute une des raisons pour lesquelles ce prix n'a pas ele encore decerne; un autre motif etail la difficulle de remplir la condition la plus importanle , savoir : le succes de l'importation. Ce n'est pas assez en eQet d'avoir fail une heureuse decouverle, et meme d'avoir introduil en France ou dans nos colonies un vegetal utile, une plante textile ou tinctoriale , un animal nouveau juge susceptible de se domesliquer, ou bien encore un reinede ou une pra- tique salutaire; enlin, un procede etranger a la France et fait pour enrichir les arts ou l'industrie ; il faul encore que l'experience ait prononce sur les avantages de cette importation ; tel est 1'esprit dans lequel a ( 467 ) ete cree ce prix par le fondateur, telle est la condi- tion a laquelle il a charge la Societe de le decerner. Aujourd'hui que la nature de cette haute recom- pense est plus generalement connue, certains resultats fails pour interesser la Societe lui sont communiques assez frequemment ; on lui a fait connaitre plusieurs inventions, plusieurs acclimalations , plusieurs essais plus ou moins heureux. Vous avez accorde, messieurs, des medaillesd'encouragemenl a M. Charles Renard et ases trois collegues, delegues comme lui en Chine, par le commerce francais. Le premier avail deja rapporte d'utiles indications; cette annee, il a soumis a la Societe plus de vingt procecies chinois, dont plusieurs parais- sentneufs et avanlageux. Tous, il s'en faut, ne sont pas d'une egale importance. La plus interessante de cos communications est relative a la culture du riz de la Chine; M. Charles Renard s'est procure du riz des re- gions du nord ; I'analogie lie ce climat a\ec celui des Landes de Gascogne a permis d'etablir dans les Landes des rizieres qui paraissent avoir prospere; on a suivi la melhode Ires detaillee qu'avait puhliee, en 1847, M. Renard, et le rizrecolte a ele juge superieur a celuidu Piemont et de la Lombardie; ce peut etre un jour pour noire agriculture une cereale de plus. On sait d'ailleurs que le riz a reussi dans la Camargue, et que ce genre de culture appartient desnrmais a la France. Le me- moire que i\l. Charles Renard nous a communique sur la culture du riz en Chine est assez complet; il nous instruit sur la preparation de laterre, les engrais, I'ensemencement , le repiquage, I 'irrigation et la re- colte ; c'est un service rendu, qui, sans meriter le prix a nos yeux, a droit a une mention honorable et a un ( '68 ) rappel do mcdaillc, d'aulant plus quo le memoire renforme \ingt-sept aulros procedes donl plusieurs pourraient elre appliques a nos arts. M. Jules llier , a qui vous avez accorde aussi unc me- daille pour son voyage en Chine en IS/16, a importe* en France plusieurs plantes textiles, avec lesquellos on fabrique dans le celeste Empire des tissus aussi tins que solides; il est parvenu dcpuis a naturaliser et a ac- climatcr les especes suivantes : le Lo-ma, ou Cannabis gigantea, le Tsing-ma , ou Corchorus textilis , le Cliou- ma, ou Urtica riwea, et unc malvaccc du genre Sida, Les deux premieres ont etc semees a Marseille et a Mont- pellier au Jardin botanique, en 1847 et J8Z|S, et ont parl'aitemcnt reussi a donncr de la graine en abon- dance; elles ont atleinl une hauteur de 5 et meme de 7 metres (1). La troisierae plante a egalemcnt reussi a Montpellier; la reproduction do toutes les grain es a ete assuree. L'annee d'apres, 1849, a produit desresullats encore plus grands; les graines ont ete semees en toutes sortesd'expositions, aCastelnau, a Monlpellier, a Mar- seille, a Perpignan , dans les hautcs et dans les basses Alpes. Toutes les graines ont leve , les plantes ont resiste a un froid de — h degres. Le produit, sur un terrain d'un demi-are, a ete unc filasse assez line, souple et soyeuse, du poids de ill kilogrammes, cc qui ferait en proportion 2 800 kilogrammes par hec- tare; e'est aussi la proportion du poids de la graine recoltee. Le chanvre dit Lo-ma n'a pas moins bien reussi en Algerie. L'Urlua nivea {Chou-ma) a ete pro- pagee parboutur.es; il parail que dans les pays plus (1) Bapport a la Socie'tejdiagriculture de l'IU:i\mli, f$vrier i£alement plus foncee; elle s'eclaircit dans la plaine. Ainsi les Coles sont de veYl tables negres, tandis que les Bodos, les Dhimals et les Kocchs ont une peau beaucoup moins noire. Le type des populations a langue monosyllabique de l'Assam rappelle celui des tribus tamoules, quoique s'en distinguant par des caracteres assez saisissables. Leur stature est petite, leurs formes alhleliques, leurs physionomies farouches ; presque toutes portent les cheveux courts, ne laissant a Textremite du crane pous- serqu'une longue meche. Ellesn'ont point de barbe; le nezestepate, les yeux sont obliques, mais moins qu 'on ne l'observe chez les Chinois. ( 180 ) Le genre do vie el le caraclere moral servant encore a disiinguer les Iribus de race lamoule el cellos da race lartare et chinoisc. In savant oricntaliste el jiuli- cieuxobservatcuranglais,M. Hodgson, nousa fourni sur les premieres et notamment sur les Kocchs, les Bodos et les Dhimals, des renseignemenls precieux qui foul conlraste avec ceux donl. nous sommes redevables a Rl. William Robinson et a un oflicicr tie la Cotnpagnie des Indes pour les Iribus de la famille indo-cbinoise. Les Koccbs, les Bodos et les Dhimals constituent une population essenliellement agricole, donl les nieeurs sunt douces, donl la vie est active et industrieasc, les habitudes morales, les idees religieuses assez arrelees. Lour etat social offre cela de parliculier qu'il a la [,lus giande analogic avec celui des Aryas, les ancetres des Hindous, au moment oil ils vinrent s'etablir dans la vallee du Bengale. Tous les faits que Al. Hodgson a rc- cueillis sont an Ian I de souvenirs de la vie primitive, de la vie patriarcale de l'lnde el c'esl ce qui ajoule lant d'inlerel aux documents dont nous lui sommes rede- vables. La civilisation a tellement modilie 1'bomme, sur lout 1'bomme de notre race, la plus civilisable de toules, qu'il est precieux de recbercher ce qu'il a die a son origine. Qu'etaient les enfanls de la grande famille bumainc, avanlque, Iransportessur des points si divers, ils fussenl devenus des bommes? La Genese nous l'ap- prend pour la race semitique, les Vedas nous le di- .sent pour la race aryane , le temoignage du savant M. Hodgson va nous l'enseigner pour la race tamoule. Les indigenes qui sc sonl rclugies au nord-esl de l'Hin- doustan onl eu moins a soufl'rir de la poursuite des vainqueurs que les t rib us qui se rdirerent au sud. ( 181 ) Proteges par leurs monlagnes el leurs forets, ces peu- plos conserverent longtemps leur independance el se preserve-rent, par la, davantage de la misere qui ra- mene a la barbaric La partie seplentrionale du Bongale vers Dalimkot semblc etre demeuree jusqu'a la fin du xvme sieclc le siege d'un etat kocch, e'est-a-dire tout tamoule. En 1773 la Compagnic des I rides an- nexa a son lerriloire ce royaume qui, s'etendant du 25° au 27e degre de latitude nord, comprenail, d'un cote, la moitie oceidenlale de l'Assam et de l'aulre la moitie orienlale du Morang. La capilale de cet Etat, qui a aujourd'liui completement disparu de la carte, elait Kocch-Bibar(l). Les tribus indo-chinoises, qui vivent dans les mon- lagnes situees a l'orient des peuplades tamoules, sont plongees dans un etal do sauvagerie el dans des habi- tudes de cruaute etde malpropiele, donllesKocchs, les Bodos et les Dhimals sont fort eloigues. Si les uns sont les homines primilifs, les homines de la nature douce et bienfaisanle, les auttes sont ceux de la nature farou- che et sauvage. Tandis que les Iribus tamoules se sou- mettent a des observances dieleliques, sanclionnees par la religion, ayanl pour but de se preserver des maladies qui resultent de l'inlemperance et de la vo- racite, les autres mangent indistinclement lout ce qui (i) II a existe jusqu'a nos jours dans le midi de l'Hindoustan quelques etals exrlusivemcnt tamoules : tel est par exemple le petit royaume de Kodaga (dans les Ghates), dont les habitants parlent un idiome dravida particulier. On pent consulter sur I'ancieu royaume Kocch-Bihar, le eurieux ouvrage intitule : Tarikh-i-Asham (Uecil de 1' expedition de Mir-Djumlah au pays d'Assam, traduit sur la version hinuoustani de Mir-Hucaini, parTh. Pavie), Paris, !8{.'i. ( 182 ) leur tombe sous la main. Ainsi, les Bodos, les Dhimals el les Koccbs s'absliennent de la viande du boeuf, dn chien, du chat, ils ne man gent ni gronouilles ni rep- tiles. Mais un fait curie ux et qui monlre que l'abslen- tiou de ces aliments tient mainlenant pour eux a des idees dont ils onl oublie la nature et la portee, c 'est que les Koccbs, au lieu de regarder comme impurs les peu- ples qui ne sunt pas sounds aux memes observances qu'eux, les liennenl, au contraire, pour superieurs. Celle loi soinpluaire constitue a leurs yeux une sorte d'esclavage auquel ils sont condainnes el ils paraissenl envier le sort de leurs voisins, les barbarcs, qui se passent toules leurs lantaisies. Kn des jours de rude abstinence on a vu des raoines regrelter le sort de ceux qui n'avaient point a supporter la regie, mais au moins le religieux se console par le sentiment qu'il a du merite de son acte et de sa superiority morale. Le Koccb n'a pas celle consolation el un atlacbement aussi desinteresse a des pratiques traditionnelles ne prouve que mieux combiLii les usages restent im- muables cbez les races demeurees a l'abri du me- lange. LesGaros rechercbent, au contraire, les viandes des animaux dont s'abstiennent le plus les tribus lamoules. Les chats, les chicns, les grenouilles et les serpents sont pour eux la viande la plus delicate. Ils sont sur- tout tres Iriands des jeunes chiens, goilt que parta- «eaient jadis avec eux certains insulaires polynesiens. Les Nagas sont encore mi.ins scrupuleux; non seule- ment ils mangenl les chats, les chiens et les reptiles, mais ils devorenl jusqu'aux insectes, et ce regime ali- mentaire degoulant, joint au peu d'usage qu'ils font ( 183 ) de nourriture vegetale, engcntlre chez eux les plus affreuses maladies cutanees. [/agriculture conslitue, avons-nous dit, la seule oc- cupation des populations tamoulos du nord de 1'IIin- doustan, inais cette agriculture estextremement simple et verilablement primitive. Le mot qui rend chez ces peuples l'idee de culture, ne signifie rien autre chose qu' abattage de la foret. Culliver, en elTet, pour eux, c'est incendier on ahattre la jongle, et dans le sol, fer- tilise par les cendres, jeter quelques sentences. lis ne eonnaissent point d'aulies engrais et ignorent l'art des assolements. Aussi, quand le sol est epuise par la cul- ture d'une ou de deux annees, l'abandonnent-ils pour aller ouvrir un champ nouveau. Leur existence est done agricole etnomade a la lois. lis changent de cul- ture et de villages. Jamais les Bodos et les Dhimals ne demeurent plus de quatre a six ans dans les memes habitations. Souvent ils retournent a leurs anciens champs, si loulei'ois la jongle, dans ce pays de vege- tation vigoureuse, n'a point repris son domaine, ou s'ils n'ont point ete devances par d'autres colons ; mais ils ne reiiabitent jamais les huttes quils avaient aupa- ravant occupees. Leurs habitudes nomades sont telles qu'ds attacheraient a cette reinstallation une idee de malheur et de mauvais augure. La t'oret s'oflrant en- core a eux sans Jimites et son sol ne faisant jamais delaul a leurs besoins, ces tribus preferent generale- ment uneclairiere nouvelle a une qui a ete dejacultivee. Lne autre preuve de l'extreme altachemenl de ce& races a leurs habitudes antiques, c'est que, bien qu'en- vironnees de populations qui entreliennent d'im- menses troupeaux de buffles et de vaches, elles ne ( m ) cherchent point a en posseder cl so borncnt a nourrir, j)our lour alimentation, quelques animaiix domesti- ques, qui sont confies a la garde des jennes garcons. Les instruments aralohes des Bodos et des Dbimals consistent en tine hache qui lour sert a aba tire les arbres de la foret , en une sortc do serpe pour cooper le petit bois, et qu'ils emploient aussi a creuser la terro ; en un plantoir, baton de bois long de plusd'un metre , affile a son extremite ; enfin , quelquefois ils font usage de la beche. Les Koccbs , et specialement les Panikoccbs , tribu la plus pure de celle race, cul- tivenl la terre a la houe, avec bcaucoup plus de soin que ne le font avec la cbarrue lcurs voisins de soucbe arvane ; car ils sarclent leurs champs, usage qui est inconnu a ces derniers. Les Bodos et les Dbimals construisenl eux-memes leurs maisons , qui sont longues de 12 a 16 coudees et larges de moilie. A l'oppose de cbaque habitation est elevee une maison plus petite qui est destinee aux bcstiaux. Si la famille est nond)ieuse , une ou deux demeures supplementaires sont baties a cote de l'iia- bitation principale. Ce sont toutes des buttes dont les parois sont maconnees avec l'bcrbe des jongles, rete- nues et consolidees entre deux treillages de bois de bambou. Le loit est forme de la meme maliere, un peu moins solidifiee, et presenle un pignon fort eleve. La butte comprend deux cbambres: Tune est la cui- sine et 1'autre la cbambre a coucber. II n'y a ni ouver- ture j)our le passage de la fumee, ni baics.ni fenetres pour donncr du jour. La porte tienl lieu de tout. (Vest la , comme on voit, une construction loule patriar- cole; la lenle de 1'Arabe" ct la kil>itka tin Cosaque ( 'J85 ) sont des monuments d' architecture de memo force. Dix a quatorzc maisons ainsi failes composent un vil- lage. Lc mode de construction de ces Initios nous fournil encore un veriteble caraclere ethnologique. Jamais les Iribus de race tamoule n'assoienl lours de- meures sur une sorte d'echafaud ou de pilotis, systeme qui est , an contraire , fort usite chez les peuplades indo- cliinoises. Los Kocclis , les Bodos ct les Dhimals se vetent d'etoffes de colon que lours fommes fabriquent , et qui sont generalemcnt de bonne condition ; car ces coton- nados sont leintes avec l'indigo , la cocbenille et quel- quefois la garance. Jamais ils ne portent d'etoffes de laine. Les femmes bodos ont aussi quelquefois des vetemenls de soie. La chaussure de ces peuplades est une sorte de sandale de bois. Les Koccbs sont habilos airavailler les melaux, et ce sont eux qui fournissent aux Bodos et aux Dhimals les boucles d'oreilles et de nez, les bracelets et les anneaux qui sorvenl de parurc aux femmes. Les habitudes agricoles de ces diverses tribus sont tellemenl inveterees, que, malgre' rabondanco du gibier dans les forets qu'elles habitent , elles ont , a la difference des peuplades indo-cbinoises , peu d'apti- lude pour la chasse el la pecho , qui fournissent cepen- dant pour une bonne parlie a leur alimentation. Lour nourriture principale est , comme celle des Hindous , le riz. Les Bodos et les Dhimals ignorent jusqu'au nom du froment ot de l'orge. Ils ne connaissent pas davan- tage le ghui ou le beurre fondu , qui joue , sous le nom de g/uila , un si grand role chez les Aryas, Cela tient evideinmcnt a ce qu'ils n'onl point de bestiaux, ct VII. MARS ET AVRII.. 3. 1 3 ( 186 ) • est la mi indice de plus que les populations primi- tives I us important, limite par les monts Garos et le grand coude du Brah- mapoutre, a conserve le nom de Mechpara, c'est-a-dire pays des Mechs ou des Bodos; car les Mechs consti- tuent une tribu aujourd'liui fort reduite qui appar- tient a la mcine race que les Bodos. Encore quclques sieeles, et ces races auront disparu. Deja chez les Dhimals, les chefs appartiennent tous a un autre sang, tandis qu'il y a soixante ans, lorsque cette population constiluait encore dans le Morang, sur les bords du Raval, une nation dislincte, tous ses chefs elaient de sa raco. Les Bodos sont aussi gouver- nes par des Strangers. Nous venons de tracer le portrait des tribus ta- moules, repandues sur le vcrsant meridional de i'lii- malaya, dans les forels qui hordenl son premier elage. Passons maintenant a Test du Dhansri, et nous allons renconlrer les peuplades indo-chinoises au visage plat et etroit, donlnous avons oppose plus haut l'etat social a celui des populations lamoules. Parmi elles regnent une foule de dialectes, comme chez les descendants des indigenes de l'Hindoustan. Ces dialectes sont presquc tons monosyllabiqucs, et ils ont ele moins eludies que les idiomes dravidas, qui constituent en- core aujourd'liui des langues iinporlantes , et ont i m ) exerce sur l'hindoustani une influence notable. Malheureusement 1'histoire nous fait defaut pour les uns cl pour les autres. Si les Tamoules n'ont ni le- gendes, ni dogmes bien arrets, ni notions de l'etat futur, les populations des montagnes de l'Assam n'en ont [>as davantage. Les besoins de la vie physique ont absorbe toute bur activile, et bur existence guerriere a encore moins favoris£ la reflexion el le travail de l'esprit que cbez les Bodos et les Dhimals. Ainsi, chez ees derniers, les noms de n ombre ne s'e'levent pas au dela de 7 on 8, et si 200 est 1" nee plus ultra du cbiffre qu'ils puissent se figurer par la combinaison de ving- taines ou biza, qu/on juge de l'etat des idees cbez les montagnards assamais ! Qu'on ne croie pas, copendant, que l'etat que nous venous de ddcrrre soit encore celui des peuplades primitives du nord de I'lnde , les moins avancees dans l'etat social. Dans les epaisses forels du Nepal, a I'O. de la grande vallee, on rencontre clair-semees, et dans un etat bien plus primilif, des tribus appelees les Tckepang el les Kusoimda, qui sont, elles, restees a la condition de chasseurs. Elles viyent du gibier qu'elles luent avec leurs arcs et leurs fleches, et de fruits sauvages ; elles babitent sous des brancbages et ne savenl pas meme filer. Mais ces populations, a la couleur brun fonce, au ventre proeminent, a la tele allongee, a la bouche large et protuberante , aux poimnettes saillantes , aux veux petits, ne sauraient etre regard^es conime de la souche tamoule pure. Elles appart'n nnenl, soil a la famille lartare dont nous allons parler, soit plutdt a cettc race quasi negre qui preceda dans l'Uindouslan ( 195 ) l'etablissement des Tamoules, et, a plus forte raison, celui des Aryas. M. Hodgson, qui nous les a fait con- naitre, les regarde comme les descendants des indi- genes du Bhoutan (1). Les civilisations tibetaine et cbinoise ont , il est vrai, exerce quelque influence sur ces tribus sauvages, qui rappellenl les barbares des montagnes, que les anciens historiens de la Cbine nous presentent comme en lutte avec les colons fixes sur les bords du Hoang-bo. Mais les peoples etablis le long du fleuve Jaune exercerent sur les peuplades indigenes une influence plus assimilatrice que les Aryas et lr.s Tibetains. Les premiers babitanls du sol se fondirent de bonne beure avec les Chinois. Toutefois, an sud de la vallee du Yang-tse-kiang et dans 1'ancien royaume de Mingli, la civilisation, venue du nord, quoique ayant profon- dement penetro, a laisse encore subsister un langage natif, et dans les montagnes du Nang-Lin la race lo- cale s'est conservee dans toule sa purele et son inde- pendance (2). G'est a cette race qu'appartiennent les tribus de l'Assam, dont je vais maintenant vous entre- lenir. Ces tribus ne conslituenl pas de corps de nation, et paraissent avoir elk toujours distributes comme toutes les populations malaises par clans separes. Leur organisation offre assez d'analogie avec celles des (i) Journal of the Asiatic Society of Bennal, t. XVII, part. 2. (2) De meme le Yun-nan e'tait jadis un royaume Lao, et les Loins n'ont ele definitivement soumis qu'il y a deux siecles (Voy Lo<»an, article cite, p. 480, 4§ ' ■) ( 196 ) diverges tribus tie sangmalais, qui formenl une par lie de la population indigene do Sumatra '1 . La plus avancee a Test, la seulc Je ces tribus qu'on rencontre du cote ties populations lamoulcs, est celle des Garos ou Garous, qui vit dans Irs montagnes situees parallelemonl a la riviere Manass- Lcs Garos sont di- vises en un grand nomine de clans, ct ['extreme fertilitc de leur sol les arendus agriculteurs.lls cultivent lecoton et liennent des marches reguliers; inais, a part celle In- dustrie, tout respire cliez eux la barbaric la plus com- plete, lis n'ont d'autres velctnents qu'une ccinture an- tour des reins. lis rejeltent generalement leurs chc- veux en arriere, lcs fixant par une sorte d'ornement de metal, ce qui leur donne l'aspecl le plus farouche. D'aulres se coupent les cheveux ou se les roulent au- tour de la tele. Les femines sont pclilcs, trapues et horrihlement laides, malgre l'abondance d'anneaux et d'ornements dont clles parent leur con et leurs oreilles. Les homines sont aussi de petite taille, mais leurs formes sont herculeenncs. Les boueles d'oreilles des I'emmes sont tellement lourdes qu'elles finisscnt par amener le lobe jusqu'aux epaules, ce qui passo chez cette tribu pour une grande beaule. Les Garos font usage de fl6ches einpoisonnees ; ils celebrenl les funerailles de leurs parents par le mas- sacre de lous les etres inollensifs qu'ils peuvent ren- contrer. Malheur a qui tombc la nuit dans leur cm- tauscade; il doit apaiser lcs manes du defunt. Getle tribu brule ses morts, comme le font aussi les Kocclis, (i ) Voyez A general slclcli of Sumatra, par J. Logan, dans le Jour- nal of the Indian Archipelago. June i S4o • ( 197 ) mais ce n'est point ainsi qu'eux, stir les bords d'une riviere, lis elevcnt uae sorte d'echafaud ; ils placcnt dessus le cadavie, qui y demeure expose pendant quatre jours, dans line biere ouverle, ayant la forme d'un bateau, puis la combustion a ensuite lieu. Ci'tle methode d\ xposilion des morts rappelle les usages de la Polynesie, et il n'est pas le seul trait de ressemblance qui ratlache les tribus de 1' Assam aux insulaires du Grand Ocean. L'usage d'enlerrer caracterise, au conlraire, davan- tage la race tamoule. Mais les habitudes nomadcs des Boilos et des Dhimals les empechent d'attacher une grande importance aux tombeaux des leurs. Ils sc bornent a amonceler quelques pierres au-dessus de la fosse qui vient d'etre couverte; puis ils deposent a cote quelques aliments et un breuvage. La famille du de- funt est reputee impure pendant trois jours. Au bout de ce laps de temps, les parents se baignent el se rasent, se font asperger de l'eau sainte el celibrent le repas funebre. G'est a la suite de ce repas, qui est (er- mine par un sacrifice, que Ton va porter au mort un peu de boisson et de nourrilure : « Prends et mange, » dit le plus proche parent : « autrefois tu avais mange et bu avec nous, mais mainlenanl tu ne peux plus le faire ; tu as ete un des notres, tu ne le seras plus des- ormais ; nous ne viendrons plus vers toi , ne viens done plus vers nous. » Et alors loute l'assislance se retire en jelant sur le lombeau un bracelet de cordes que chacun porte au poing ; on va se purifier dans l'eau d'une riviere, puis on revient celebrer unnou- veau repas. Tels sont les rites funebres des Bodos et des Dbi- ( 198 ) mals. On ne retrouve pas chez les Garos la meme so- lennile. LesKliassiasou Kocyias habitenl au sud de l'Assam, dans les inonla^nes qui Sep are nt ce pays du Kachar et du Sailhet. Leur contree presente a peu pros la forme d'un parallelogram me irr^gulier, |>. 363. VII. MARS KT AVRII.. h . 1 h ( 202 ) kbonbao ou chef, tj n i juge et gou?erne ovec l'aide dc deux minislrcs. Dans les cas graves on proud Favis de loute la iribu. La dignile de kbonbao est h£reditaire. Cheque Iribu a son dialecle, et ccs dialecles different U-llcinent entrc eux, que deux individus de Iribus dif- ferentes ne peuvent sentendre qu'a l'aide dun autre dialecte qui leur est commun. Toutelbis, des unions onl lieu fiequemment entre ces tribus opposees. Un usage barbare qu'on retrouve chez eux, ainsi que cbez les Abung de Sumatra et cerlaines populations sau- vages de Borneo, et cbez les Koukkis de Tcbittagong, e'est qu'un jeune hornme ne peut se marier tantqu'il n'a pas coupe un certain nombre de tetes d'eune- mis (1). In caractere tranche ne permet pas de confondre les Nagas avec les autres Iribus de I'Assam. La forme de leurs lances, qui rappellent les barpons des Esqui- maux, et qui sont garnies de barbes ou de plumes, sert encore a les reconnaitre. Leur costume de guerre ajoute a leur aspect repoussanl et sauvage. Les lemmes tissenl el leignent le peu d'etoffes de coton dont ils font usage. Leurs demeures sont analogues a cedes des Garos. Ils out aussi leurs danses, dans lesquelles ils imiteut loutes les actions de la vie. La tlanse par excellence est cede qui precede les combats. Les lemmes, velues de bleu ou de noir et chargees de tous leurs ornemenls, exueutent une ronde, tandis qu'a l'enlour les homines agitent kurs aruies et font, en dansant, entendre une plaintive melodic Nous venons de passer en revue les principales tri- (i) Logan, A sketch of Sumatra, p. 363. ( '203 ) bus qui habitent au sud tie 1'Assam ; disons mainle- nant quelques mots de cellos qu'on rencontre clans les montagnes du nord : les Dophlas, les Abors et les Michmis. Les Dophlas resident dans la chaine < le montagnes qui s'etend de Koriapara au Subancbiri. lis sont divi- ses en un certain nombre de tribus, ayant cbacune son gam on chef. Quoique moins bideux, de peau moins foncee que les Nagas, ayant un accoutrement moins bizarre el qui denote plus d industrie, ils ne sont ni moins crueis, ni moins dangereux, et leurs habitudes de depredation les placent moralement au- dessous d'eux. Les Abors, allies d'assez pres aux Bor-Abors et aux Miris qui s'etendent sur la rive droite du Brahma- poutre, au pied de leurs montagnes, constituent une nation puissante el redoutee de ses voisins. Ils tor- ment un grand nombre de clans, regis par un gouver- nement republicain. Un trouve aussi quelques Abors dans la \allee cjui longe le Dbibong et le Dbihong. Les Abors ont tout a fait la physionomie tartare. Les deux sexes se coupent les cheveux court, se conservant seu- lement une large meche au sommet du crane. C'est un usage qu'on trouve chez une loule de peoples tar- tares et qui acbeve de deceler l'origine de ces sau- vages. La langue des Abors est la meme que celie des Miris; elle est tres forlement gutturale et appartient a la fanhlle monosy llabique. Les Abors sont armes d'arcs et de fleches. lis portent une sorte de manleau tisse avec le til que Ion retire de 1'ecorce de l'adal. Ge man- leau leur sert aussi de tapis pour s'asseoir, il esl em- ( 204 ) ploye, suivant 1'occurrence, comme pagne on comme oreiller. Chaque village abor corn p re n d une centaine de mai- sons, construites sur la pcntc dune colline, sur le versant pcu escarpe de quelques inontagnes. Le plan- cher est fait de bambous; il est supporle par des pieux fixes dans le sol, et c'est dans cette cspece de soubasse- ment a claire-voie qu'on logo le betail. An milieu du village est un grand bailment appele marang, qui sort de lieu de deliberation ct de salle de reception pour les etr angers. C'est la aussi que demeurent lcs celibataires, car l'usage ne permet pas a ceux qui no sont pas marics de construire des habitations separees. Tons les matins, a l'aurore, on s'en va au dortoir des celibataires reveiller les dormeurs incorrigibles et les appeler au travail. Cette institution a sans doute pour objet de presser les jeunes garcons d'entrcr dans les liens du mariage. Tant qu'un homme ,n'a point pris femme, il est toujours assimile a un enfant etgouverne comme tel. Les Madjmis ou Mictions sont allies d'assez pros aux Abors et presentent une organisation analogue. Leurs maisons sont egalement eleveessur des especes d'ecba- fauds. Ilssontcomme les Abors, fortbabilesaconstruire des ponts de bambous, mais, en general, leur etat social est moins avance. Les homines vivent dans une extreme salete, leur culture est miserable, ils nc connaissent ni le froment ni l'orge. Leur grande richesse consiste en betail, et c'est l'usage de chaque proprietaire d'amonccler pros de sa dcmcurc les cranes et les ina- cboires des animaux qu'il a lues, depuis qu'il a com- mence a en posseder. Je laisse a penser la singuliere ( 205 ) decoration que cette pile do cranes procure aux mai- sons des plus riches Miehmis. La religion des Miehmis est, comme celle de toules les Iribus precedentes, mi naluralisme voisin du feli- chisme. Ces peuples, vivant au milieu de jongles epais- ses , invoquent surtout les dieux des forets. Un malheur vienl-il a (rapper quelqu'un d'entre eux, on le regarde comme un chaliment celeste ; on suspend a la porte de celui qui est ainsi eprouve une brancjie d'arbre, ce qui met sa demeure en etal d'inlerdiction pour un temps , et Ton ne peut y rentrer qu'apres y avoir apaise le courroux des dieux, en leur offrant des poules, des pigeons et ties pores. Les Miehmis exposenl les corps de leurs morls sur des especes d'echafauds jusqu'a ce que leurs chairs se corrompent et se detachent des os. Cette coulume se relrouve chez les Pagai de Sumatra (1). Au sud desMichmis sont lesKhamtis, qui presentent plus qu'aucune autre race de 1'Assam le type chinois : e'est, comme les autres peuplades, une race d'hommes guerriers et cruels; mais ils se distinguent par une grande aclivite el heaucoup d'intelligence. lis out em- brasse le bouddhisme, el cette religion a du conlribuer a developper leur esprit. Ils sont du petit nombre des Iribus de 1'Assam qui connaissenl l'ecriture. Fort adroits, comme les Chinois, elans les arts mecaniques, ils ont ete pour les Anglais des voisins incommodes, et ceux-ci se suntvusl'orces de les expulser de leurpatrie. Les Rhamlis passent pour avoir emigre, au milieu du (i) J. Logan, A general sketch of Sumatra, deja cite. ( 206 ) siecle dernier, des montagnesqui entourentla source de l'lrouaddy dans la vallee qui sopare la rive droite du Brahmapoutre des mnnlagnes des Michmis. Dans la meme eonlree, sur I' autre rive da Brahma- poutre, soul les Singpous ou Singphous; ils occupent un espaee montagneux d'environ 1 /|00 milles anglais carres et d'une assez grande fertilite. Leur nomhre s'eleve a pen pres a 6 000. Les Singpous sont perfides , traitrcs et vindicatifs ; quelques uns ont embrasse le bouddbisme , comme leurs voisins les Khamtis; mais ils sont loin d'etre aussi industrieux et aussi aclifs. Chez eux tous les travaux sont executes par les femmes el les esclaves, et 1'induslrie est pen developpee. La langue de cette tribu est inonosvllabique et a beauconp d'analogie avec celle des Abors comme avec le barman et le lnanipuri. Les Singpous admettent la polygamie, ct ne dislin- gucnl pas entre leurs enfants nes de femmes de leur nation et ceux qu'ils ont eus d'epouses assamaises. Ils se divisenl en clans, design es oliacun par le nom de leur Gam ou chef. Guerriers et pillards , ils sont re- doutes de leurs voisins. Leur teint est de couleur bislree, leur corps allonge , leurs jambes courtes, leur air ruse. Les habitations de ce people sont des especes de longs hangars couverts d'herbe ou en bambou. Le planclier est eleve d'environ 1 metre au-ilessus du sol, et l'entree consiste en une sorte de porche assez vaste ou vivent leurs animaux domestiques. Ces maisons ont souvent jusqu'a 30 metres ile long et sont divisees on ( 207 ) compartiments , cliacun assigne a uiie famille. Les habitations des chefs sont quelquefois fort etendues et construites avec d'enormes charpentes. A la porte des maisons les Singpous suspendent los cranes des buffles qu'ils ont sacrifies a leurs divinites. La premiere d'entre ces dernieres est Ning-deota , le dieu des elements, dont le culle est mele a celui de Bouddha qu'ils nommenl Guduma et a celui d'bommes singpous deifies. II existe encore, dans l'Assam, d'autres tribus de la meme famille, mais je n'en parlerai pas. II me suffit de donner ici une idee de ce que sont ces sauvages de l'Asie , dont il y a un siecle on ne soupconnait pas l'existence. L'analogie des peuplades de l'Assam avec les Malays, d'unepart, etavec les populations polynesiennes, d'une autre, est un fait Ires significatif. En outre , on sail qu'il existe une connexion linguis- lique assez directe entre les langues des peuplades des i: onls Vindbya et de 1'IIimalaya , el celles de la Ma- laisie et de la Polvnesie. II est vrai que les langues monosyllabiques des tribus de l'Assam n'ont point ete assez eludiees pour qu'on puisse elre assure qu'elles ne se lient pas d'un certain cote a la famille lamoule. Quoi (}u'il en soil, on doit admetlre , avec M.J. Logan, que la race a laquelle appartiennent les debris actuel- lement connus des populations primitives de l'Hin- douslan s'etendait dans la peninsule transgangetique , et par consequent qu'avant l'arrivee des Aryas, la famille touranienne s'etendait du Gauge a l'arehipel de la Sonde. Cette race, que Ton peut appeler indo-malaise, a du ( 208 ; repousser a l'osl la race alfourouc ou papoue, avec la- quelle elle s'est parfois melee dans la Polyn£sie, et a laquolle etnil \raisemblablomcnt liee la race primitive negro del'IliiKlouslan, si taut est que Ton puisseadmeltre son existence. Aujourd'hui encore , dans les lies que les All'otirous occupaient jadis completcment, aux Mo- luques, auxPliilippines, et jusqu'a Borneo, ces peuples ne sont plus que ties clair-scmes, et ils se sont refugids dans les montagnes. Quelques tribus de la grand e lie de Flores ou deMang'arai onl un caraclere papou asscz prononce, et Ton trouve aussi une tribu de cette race a Sumbawa, dans le voisinage des nionts Timboro. Mais au dela ils disparaissent, etl'on ne les retrouvc plus que dans la peninsule nialaye, sous le nom de Semangs (1) > occupant quelques districts nionlagneux de Kedah , Perah ctKalantan. Les iles Andaman sont la conlrce la plus a l'ouest dont la population garde encore le type papou bien prononce , type qui presente une rcssem- blance frappante avec celui des indigenes de la terre de Van-Diemen (2). C'est, en cflcl, a cette meme race pa- poue qu'appartenaient ces insulaires, aujourd'hui pres- que tous extermines. Au nord-est, leur race se retrouvc (i) Voyez sur les Semangs 1'article du colonel James Low, dans le Journal of the Indian Archipelago, August i85o. Les Semangs paraissent etre de la meme race que eeux qui portent le nom de Panrjam sur la rote E. de la peninsule de Malaya. (2) Voyez le savant ineinoiie de M. (',. Windsor Earl, dans le Journal of the Indian Archipelago, January i85o, p. 6. Les insu- laires de Nicobar n'appartiennent nullement au contraire k cette race, et semblenl plut&l descendre de la souclie tamoule. (Voyez la notice de M. Cbopard, A few particulars respecting the Nicobar Islands, dans le Journal of the Indian Archipelago, May 1849, P' 37° et suivantes.) ( 209 ) tie la Nouvelle-Guinee aux archipels de la Louisiade el de Salomon. Dans les Nouvelles-IIebrides, ils se sont meles a la racemalaye-polynesienne, et se sont avances jusqu'aux lies Fidji. II ne faut pas , du reste , confondre les Papons avec les Australiens, qui consliluent un rameau different, et se dislinguent surtout par leur chevelure , qui n'est pas disposee par touffe conime celle des Alfourous, et est simplement epaisse comme celle des Hottentots. A partir du delroit de la Princesse Marianne, en remontant vers le nord , la population , d'abord exclu- sivcment papoue, se melange graduellement de Cera- meens , de Javanais et de Malays (1). Ces tribus indigenes, dont les debris errent encore au nord-ouest de l'Amerique septentrionale , ces peu- plades insulaires qu'ont rencontrees les navigateurs dans laPolynesie, l'Oceanie et l'Archipel indien, l'Asie nous en offre encore aujourd'hui les pendants. A une epoqtie ancienne , qu'il est impossible de rigoureuse- ment assigner, le centre et le sucl de cette par tie du monde etaient babites par ces races sauvages que la civilisation bindoue a repoussees devant elle.etque la societe cbinoise a rejetees aux extremites meridionales de son empire. C'estdans ces defiles presque impene- trables , qui separent 1 Hindouslan du Tibet el de la Cbinc, que se sont refugiees ces populations desbe- ritees. La elles subsistent encore, et elles subsisteront jusqu'a ce que la colonisation anglaise les ait a lout jamais effacees du sol. II en est des races d'bommes (i) Voypz De Boudyek-Rasliaanse, Foyagc dans les MoliK/ties, a la Nouvelle-Guinee et a Celebes, p. 64- ( 210 ) comme des races d'animaux , que la Providence cree et qu'elle ahandonne ensuite a la destruction. De meme que partout ou l'Europeen penetre , les animaux f£- roces disparaissent, les forets vierges sunt abattues , la nature abrupte et primitive fail place a la culture uniforme de nos champs ; partout ou une race plus forte, plus intelligent et plus aclive s'etablit dans un pays, elle depossede foreement les anciens habitants, elle les detruit , les disperse , quaud elle ne se les assimile pas. Qui pourrait compter combieo de races ont deja disparu, que de populations donl nous igno- rons l'histoire, l'exislence meme, out quitte noire globe, sans y laisser au moins leur nom pour trace! Le mouvement pcrpetuel d'erhigrations, de conquetcs elde destructions, est ee qui fail de la geographie une science si mobile, malgre' rinnnobilite apparenle du sol. Les peuples changent, les territoires se dislrihuent differemmenl, les Totals s'agrandisscnt Ou s'eteignent , les villes s'elevent ou sont delruites, la vegetation meme s'altere par Taction de l'liomme, et le climat subit le contre-roup de lous ces changements. Le geographe doit done chercher curieusemenl la trace des races qui ne sont plus , puisque le secret de leur existence cache lant de problemcs intercssants et inattendus. ( 211 ) NOTICE BIOGRAPHIQUE SDR M. LE COLONEL POINSETT, Memhre correspondant de la Sociele de geographic. LUE A LA SEANCE GENERALE DU 7 AVR1L 1854, PAR M. DE LA ROQUETTE, Vice-president de la Commission cenlrale. Messieuhs, Je viens vous entretenir aujourd'hui d'un de vos correspondants etrangers , que la Societe de geogra- phic a eu le malheur de perdre ilva peu d'annees, de M. le colonel Poinsett, homme non moins distingue par les postes importants qu'il a occupes dans la grande republique aroerica'me que par les services qu'il a rendus a sa patrie et aux sciences. Joel Roberts Poinsett , ne le "2 mars 1779, a Char- leston , chef- lieu de la Caroline meridionale , descen- dail d'une famille calviniste que la revocation de l'edit de Nanles forca d'emigrer de France en 1685. Comme la plupart des protestants francais qui abandonne- rent a cetle epoque leur palrie, les ancetres de Poin- sett chercherenl d'abord un asile dans les contrees de l'Europe ou Ton professail le meme culle; ce ne fut qu'en 1700 qu'ils passerent en Amerique. Le docteur Elisha Poinsett, pere de noire confrere, medecin honorable de Charleston , avait epouse a Londres Anna Roberts, parente de Jean Dollond , ( 212 ) celebre opticicn, invcnteur du telescope acbromatique, et elait ensuile rovenu dans la Caroline. Le jeune Poinsell recut d'abord do son pete, puis a l'Academie de Greenfield, dans le Connecticut, les pre- miers elements tie l'educalion, qu'il alia, en 1796, com- pleter en Angle terre.Scsprogresfuren l rapides.etilse fit surtout remarquerpar la facilite extraordinaire avec la- quclleilserendit familieres, non senleinenl les langucs classiques, mais la pluparl des idiomes inodernes; il ecrivait correctement et parlait couramment le fran- cais, l'espagnol, l'ilalien, 1'allemand el le russe. A 1'age de vingt ans , Poinsett fut envoye a Edim- bourg pour y eludier la medecine; mais l'aprete du cliinat el des occupations trop sedentaiivs avant allere snsante, naturellement delicate, le sejour dans un climat plus tempere lui fut present. II par tit en con- sequence pour Lisbonne , et revint l'annee suivante en Angleterre; pen apres il enlra a l'ecole mililaire de AVoohvich , et resolut de prendre une commission dansl'armee. .Mais son pere avail sur lui d'autres vues, et de retour dans la Caroline, Poinsett dut se livrer a l'etude des lois. Ce genre de travail, qui lui elait imposd, ne convenait ni a ses gouts, ni a son besoin d'activite; il y renonca bientot avec le consenlement de sa famille , et se decida a voyager. En 1801, il fit voile pour le Havre, resla tout un biver a Paris, et l'annee suivante pareouiuta pied une grande parlie de la Suisse; il visila ensuite l'llalic , Malte el la Sicile. En 1803, il fut temoin des inuliles efforts d'Aloys Picding contre rinfiuence et les armes de la France, et, apres avoir joui pendant quclques semaines sur les bords pittoresques du lac Leman , de ( 213 ) la Sociele de Necker, He madame de Stael et d'autres personnages dislingues, il traversa la Baviere et so rendit a Vienne. II venait d'y faire la connaissance du prince de Ligne , lorsque la mort de son pere et la nialadie d'une unique sceur qu'il ne devait plus revoir le rappelerenl aux Ltats-Unis. Aucun lien de famille nc l'altachait a son pays; il resolut de reprendre le cours de ses voyages. II coininenca par l'Angleleppe , se rendit ensuite a Saint-Petersbourg, ou il fit un se- jour de plusieurs mois, puis il descendit le Volga jus- qu'a Astrakhan, en compagnie de lord Rogslon, jeune gentilhomrae anglais de la famille de Yorke , avec lequel il visita le pays des Kalmouks, la Georgie et l'Armenie. La guerre qui existait alors ayant empeche les deux amis de voir Constantinople , ainsi qu'ils en avaient en le desir, i!s revinrent sur leurs pas en tra- versant la Prusse et la Russie. Ce fut aSaint-Pelersbourg que Poinsett apprit la mort de lord Rogston, qui , force par les evenemenls politi- ques, de rentier en Anglelerre, avait peri avec le navire sur lequel il avait fait voile pour Lubeck. Oblige de garder la cbambre par suite d'une inflammation de foie qu'il avait gagnee a Tiflis , Poinsett recut les temoi- gnages les plus empresses de la bienveillance de la noblesse russe et meme de la famille imperiale. Alexandre le visita plusieurs fois en personne , et s'eimelint souvent avec lui dans la plus grande inti- mite du commerce et de l'industrie des Etats-'Unis , et des moyens les plus eflicaces d'accroltre les relations entre les deux pays. II paraitrait mOrne, si Ton s'en rap- porle aux notes laissees par notre confrere, que l'auto- crate, etonnedes privileges des Americains etcles tlroits ( an) dont ils jouissaienl com me cilovcns , se serait eerie : « Je comprends parfaitement tout cela , et si je n'etais pas empereur, j'aurais ete republican). » II ollrii a Poinsett une commission tie colonel dans iarmee russe , proposition qui ne i'ut pas acceplee , comine on peut bien le penser. Dc Pelersbourg , Poinsett se uirigea SUE Paris , ou il ne lit pas un long sejoiu ; ballade de la Chesapeake lui faisant prevoir une guerre avec 1'Anglelerre, il re- tourna aux blats-Lms, se proposant de servir active- nient son pays. Mais les evenenients prirenl un autre cours, et il lui uoinnic par ie president Madison, charge d'allaires des Elals-Lnis dans I'Ainerique meri- dionaie. 11 se renuil d'abord a liio- Janeiro , comme simple vojageur, dans la crainle que sa mission ne renconlrut quelque difficulty s'ii la iaisait connaitre , et, apres s'elre concerle avec ie colonel Sumter, ne , comme lui, dans la Caroline nieridionale, et a cette epoque ministre pies la cour du iiresil, il prit passage a bord d'un navire anglais, arriva a limprovisle a Buenos-A)res, el annonca son caraclere olbciel. bien accueilli par les re\olutionnaires, et mal \u des roya- lisleset des Anglais, le di|)lomale americain evita avec soin d'intervenir dans les elections et dans les querelles des deux partis, et, apres avoir conciu un trade de com- merce, il partilpour le Chili el l'oceau Pacihque, ira- versa les plaines immenses des Pampas, puis les Andes, et arriva enlin sain et saul a Santiago. La aussi la revo- lution avail fail des progres, el le pays elail en proie a l'anarchie. Lie intimement avec Jose Carrera, un des homines les plus riches el les plus inlelligents du pays, et place a la lete de {'administration, Poinsett elail tenu ( 215 ) exaclement au courant de tout ce qui pouvait interesser les Etats-Unis, C'est ainsi que Carrera lui donna com- munication d'une leltre intercepted du gouverneur de San-Carios de Cbiloe au vice-roi du Perou, dans la- quelle on annoucait la capture d'un batimenl ameri- cain; et qu'il l'informa peu apres de la saisie de onze autres bailments de sa nation, releuus a Talcaliuano, dans la baie de la Conception. Quoique ses inslruc- tions, qui lui prescrivaienl de secourir les citoyens americains et de defendre leur propriete, ne 1'autori- sassent point a emplover la force des amies, Poinsett n'besite pas a prendre un parti energique ct decisif dans une situation aussi exceptionnelle. Avec l'appro- bation de Carrera, il se fait delivrer une commission clans I'arrnee chilienne, prele en ce moment a se me- surer avec les Peruviens, et a la lete d'une division dont on lui avait donne le commandement, il altaque et del'ait les envaliisseurs, qu'il disperse ensuite a la bataille de San-Carios. Puis, se separanl du principal corps darmee cbilien, et ne prenant avec lui que queiques batteries d'artdlerie legere, il se bate d'at- teindre Taicabuano, dispose ses pieces de maniere a commander la vilie, qui demande a capituler, et an- nonce bientdl aux capilaines ameiicains qu'ils sont libies. Cet evenement arriva le 13 mai 1813, lorsque la declaration de guerre contre l'Angleterre, faite deja dej)uis onze mois , etait reslee encore mconnue. En l'apprenant, Poinsett eprouva le plus vil desir de ren- trer dans sa patrie , mais il lut quelque temps sans pouvoir trouver une occasion favorable. Kile se presenla enlin : au relour du commodore Porter, qui venait de terminer une brillante croisiere ( 216 ) dans l'ocean Pacifique , Poinsett pril passage sur r Essex ;ma\s ce balimcnt, rencontre par deux navires anglais, le Phoebe ct le Cherub, clut so refugier sous les cations d'un fort cbilien. La garnison ayant refuse d'intervenir, il so determina a abandonner VEssex pour trarerser de nouveau le continent, ct, s'embar- quant sur un navire portugais en destination pour Madere, il regagna cle la les Etats-Unis. A son arrivee, la paix venait d'etre proclamee. Ce fut vers cetlc epoque que Poinsett fut elu mein- bre de la legislature de la Caroline meridionale ; il prit une part active aux ameliorations interieures qui l'u- rent adoptees, et tlirigea en personne la construction de la route montagneuse qui passe pour la meilleure de l'Union. Devenu, en 1821, membre du congres, ou il representail Charleston, il figura dans tons les debats de cette session el de la suivante, et se montra parti- culierement oppose a toute intervention en faveur de la Greco, ainsi qu'au tarif prolecteur. Lorsquc Iturbide se (it proclamer empcreur du Mexique, le president Monroe chargea Poinsett d'aller s'assurer de la situation de ce nouveau gouvcrnement et du degre do confiance qu'on pouvait avoir dans sa duree. II se rendit en consequence a Mexico, et l'opi- niou defavorablc qu'il s'etait formee de la tentative d'llurbide ne tarda pas a etre confirmee par les evene- menls.Peu de moisen effet apresl'accomplissement de la mission de Poinsetl, lo nouvel empereur fut detrone et banni, el, a son retour, apres une courte absence, il fut fail prisonnier et mis a mort. Poinsett publia, enl82/i, a Pbiladclpbie, ses Notes sur le Mexique , recueillies en 1822 el accompagnees d'un resume hislorique de ( 217 ) la revolution dont il avait suivi personnelhinent les differentes phases, II avait fait paraftre precedemment un Tableau statistiqite tie la vice-royaute du Perou, adresse par lui an secretaire d'Etat des Etats-Unis Ces deux ouvrages, qui renferment des informations geo- graphiqucs precieuses , furent offerts dans le temps par M. Poinsett a noire Societe, et lui raerilerent, en 1827, le titre de correspondant etranger. Quoique , dans l'election presidenlielle contestec entre le general Jackson et M. Adams, Poinselt se fut prononce pour le premier, il n'en fut pas moins nomine par son concurrent qui 1'avait emporte, mi- nistre a Mexico; le senal confinna cc choix et il se rendit immedialement a son posle. A son arrivee, le Mexique etait dans un elat presque complet de disor- ganisation et divise en deux principaux partis cpii, sous la denomination de democrates et de royalistes, se faisaient unc guerre acharnec. A la suite d'une in- surrection pendant laquelle beaucoup de sang fut verse, les democrates parvinrent a renverser Pedraza, chef des royalistes, et eleverenl Guerrero a la presidence. Plusieurs royalistes , parnii lesquels se trouvait ma- dame Iterrigari, veuve du dernier vice-roi du Perou, chercherent alors un asile dans la maison du repre- sentant des Etals-Unis. La populace en fureur de- manda qu'ils lui fussenl livres, menacant d'enfoncer les portes en cas de refus. Poinsett montra dans celte occasion une noble fermele; suivi de M. Mason, son secretaire de legation, et le drapeau de la republique ameiicaine a la main, il s'avance sur le balcon de son hotel, et, malgre quelques coups de fusil tires sureux par les revokes qui les prenaienlprobablement pour des vu. majis ET avrii,. .'». 15 ( 246 ) royalisles, il fait corneal Ire a ces furicux le caractere donl il est revetu , et par des paroles simples el ener- giques, il reussit a faire respecter son pavilion; la populace jc disperse , les malheureux proscrits sont sames. A son retour dans la Caroline meridionale , les ha- bitants, mecontents d'un acle du emigres qui leur semblait iiapper d'une maniere inegale les Etats me- ridionaux, s'etaient prononces non-sculement eonlre cet acte, mais encore conlre tousles aulres impots elablis par le gouvernemenl central , appelant nullifi- cation la mesure qu'ils comptaienl adopter. Poinsett, convaincu que celte mesure etait une rupture dcgui- see de l'union, reuuil ses amis, se concerle avec eux, el, decouvrant qu'une grande partie des homines les plus influents de l'Etat desappromaient la nullification, il organise un parti unioniste etparyient avec son con- cours a empecher le mal qu'il prevoyait. Apres ce dernier service rendu a son pays, Poinsett renlra dans la vie privee. En 1835, il epousa une dame amerieaine, mislriss Pringle, avec laquelle il se relira dans ses plantations de riz, situees aux environs de Georgetown , ou il se livra tout entier aux travaux de l'agriculture. Elu mcinbre du senat a une grande majorile, quoiqu'il cut a surmonler l'opposilion des adversaires poli- liques qui! avail vaincus nagueie el qui ne pouvaient cependant lui refuser leur eslime, il accepta plus tard de M.Van liuren, nomine president de i'Lnion, le posle eleve de secretaire d'Etal de la guerre. Ce fut pendant son administration el , grace a son contours aussi actif qu'eclaire, que s'elleclua le voyage d'explo- ( ?19 ) ration autour du monde du lieutenant, depuis capi- taine, Wilkes (1) ; on lui doit aussi l'etablissement de I'lnslitul national de Washington, dont quelques cir- constances particulates ont arrete jusqu'ici Je com- plet deveioppement. Le long sejour de Poinsett dans diverses contrees de l'Europe et les etudes auxquelles il s'elait livre, partieuiierement en France, le mirent en etat de pro- liter des ameliorations iutroduiles depuis quelques annees dans les arinees europeennes. C'est ainsi qu'il lit organiser aux Elals-Unis l'arlillerie legere dont les services onl tanl contribue aux sueees obtenus dans la guerre contre le Mexique , et qu il crea le corps des iugenieurs-topograpbes, qui a deja rendu tant de ser- vices aux sciences, et partieuiierement a la geographie de la grande repubiique, depuis qu'il est place sous la direction du colonel Abert, voire correspondaut. A l'expiration de la presidence ile M. Van Buren , en IbZiU, Poinsett cessa Je reinplir les 1'onclions de secretaire d'Elat de la guerre, et quitta Wasbington pour retourner avec sa iamille dans sa debeieuse pro- priety rurale. Depuis ce moment il vecut complelement eloigne des allaires publiques, ecrivanl cependant de temps a autre sur les evenemenls du jour, soil en se uiou- trant oppose a la guerre coulre le Mexique, quoiqu'elle eut ele declaree par les bommes avec lesquels it avait toujours agi de concert; soil en defendant la con- servation de l'union entre ies divers Etats de la repu- blique americaine, et en cbercbant surtout a empecber (l) La Sociele doit a la gene'rosite de M. le colonel Poinsett un bel exemplaire de la relation de ce voya;;e. ( 220 ) que la dissolution ilu pacte federal put etre allribuee a l'Elat ou la revolution avail pris naissance. Cheri de tons ceux qui l'entouraient, bonore par ses compati ioles el par les strangers qui le connaissaient, et respecte par Unite l'Amerique, Poinsett succomba a une aflVclion pulmonaire a Slatesbourg, dans la Ca- roline meridionale, le 111 decembre 1851. II allait ter- miner sa soixanle-treizieme annee. PARALLELE DE LA GEOGllAPHIE ET DE l/niSTOUUi , pah M. conr\MiiKnr. On a dit souvent que la geograpbie et la cbronologio sont ks deux yeux de l'bistoire, et e'est com me un des organes de l'histoire qu'on a generalement loue la geograpbie : on a montre son importance dans les connaissances humaines, on a exalte sa baute uti- lite, en disant que l'bistoire n'olhirait sans elle qu'un chaos unintelligible. Je veux prouver, dans cet bumble apercu, qu'une telle opinion sur le rang de la geogra- pbie est trop reslreinte ; que la geograpbie ne se borno pas a etre 1'ceil de l'bistoire, qu'elle est sa sceur, son emule, souvent sa compagne sans doute, mais qu'elle peut s'eloigner librement d'elle , parce qu'elle a son role propre, ses fonctions independanles; qu'enlin elle n'esl pas, comme on l'a dit dans presque toutes les classifications, une des sciences historiqiies, mais une science a part, d'un ordre parl'aitement distinct et nettement separe. ( 221 ) Delinissons chacune de ccs etudes, pour faire l>ieu comprendre leurs proprietes speciales. L'histoire est ]a connaissance des evenements pas- ses : clle deroule dans une narration plus ou moins inleressante les fails accomplis dans l'humanite, les phases diverses des htats, les revolutions des empires, les mouvements des peuples, la civilisation et les mceurs des nations dans les siecles ecoules ; elle nous instant des vertus de certains honimes, en nous invi- tant de les imiter ; elle nous offre le tableau des fautes, des crimes, des malheurs d'un grand nombre, pour nous apprendre a les eviter; elle nous channe, elle nous enlraine, elle nous touche par la peinlure saisis- sante des drames innombrables lies aux passions du cceur humain. La geographie est, avant tout, la connaissance du present : c'est la description de ce globe, notre beau domaine, qu'elle nous fait connaitre dans toutes scs parties. Elle nous le montre dans les aspects varies de sa surface, avec ce magnifique melange de reliefs, de prolondeurs, de plaines et d'eaux, que le Crealeur y a repandus comme a dessein , pour en faire un sejour salubre et delicieux; elle examine, clle enumere, elle indiquc avec exactitude les habitations des honimes ; elle dit les peuples et les tribus qui se partagent la Terre; les grands travaux donl le genie humain a cherche a modifier et a embellir sa demeure ; les di- visions artificielles et innombrables qu'il y a intro- duces pour l'adminislralion plus facile des territoires. Elle fait voir les moyens de communication qui unis- sent entre elles les populations; elle signale les ri- chessesdes diverses regions; elle depeinl le commerce, ( 222 ) I'indnstrie, onfin In part d'intelligenro de chaque sec- tion do la grando ruche de I'bumanito ; elle enseigne los gouvernements, les mceurs, les Inis actuelles des diffeVenles nations ; elle guide I'arl de la guerre dans s<>s redoutables travaux, et la politique dans toutes ses combinaisons. Elle conduit a travels lours explo- rations les voyageurs courageux, qui, a lour tour, renrichissont et la completent ; elle est olle-mfimo nn voyage goneral et pilloresque sur tout le globe, donl elle nous fait passor sous los yeux les paysnges si varies, los accidents naturcls si nombreux, les monu- ments bumains si ingenioux. Ajoutnns que la geograpbio decrit aussi los di(Te- rentes limitos qui ont marque" los Etals dans le coins des sierles, los lieux ou se sont passes les eve^iements raeonlos par l'bistoire, les routes qu'ont suivies les peuples dans lours marcbes diverses. Mais ce n'est pas une raison suffisante, solon nous, ])our qu'on la place dans les sciences historiques; c'ost nn cote Ires utile de la ge"ographie sans doute, niais ce n'en est ni le plus ossenliel ni le plus attrayant. Jo dirai plus : cette idoo inallieureuse, qu'on a cue longtemps, de ne con- siderer la iioograpbie que com me une annexe de I'liis- loire, de la subordonner a l'bistoire, et i\o ne faire faire generalement qu'un cours commun des deux sciences reunies, a porte un coup facbeux a la goo- gvapbie dans l'esprit de la jounossc francaise. Accou- limiee de ne voir dans le travail de la goograpbie bis- torique qu'une ar'ule nomenclature de noms propres, de limitos modifiees par los completes, les traites de paix et les manages, elle s'est imagine que loute la geographic etail une elude aride ; elle n'a pas compris ( 223 ) ce qu'il y a de vivant, de pittoresque et de vari6 dans cette science, et elle l'a releguee a peu pres au dernier rang de ses affections classiques. Certes, cela se con- coit sans peine, d'aprcs le but restreint auquel on l'a trop sonvent limitee. Prenons un exemple, afin de rendre cette explica- tion plus sensible. Que, pour la France, je suppose, on fasse voir successivement les divisions romaines de la Gaule; les differents royaumes des Francs, l'em- pire de Charlemagne, le demembrement de cet em- pire; en?uite les Etats feodaux, les acquisitions enormes de la puissance anglaise au xn°, au xiv° el au xve siecle; puis la reunion progressive des provinces a la cou- ronne, et les grands accroissements du terriloire sous Louis XIV, la Republique et l'Empire: ce tableau sera curieux sans doute, et il est indispensable pour accom- pagner I'histoire ; cependant il laissera le spectateur ou 1'auditeur assez froid peut-etre, etil paraitra certai- nement pale et decolore a cote de la narration emou- vante de toutes les choses quiont amene ces transfor- mations. Mais, si Ton commence par examiner la place, l'etendue actuelle de la France, et la disposition heu- reuse de ses limiles ; si Ton en suit les contours, en explorant pas a pas, comme un voyageur altentif et curieux, d'abord les dunes de la Flandre et de l'Artois, les falaises de la Nurmandie, les dentelures pittores- ques de la Brelagne, puis les plages basses de la Ven- dee et de la Sainlonge, les landes de la Gascogne, les lagunes du Languedoc et les sinuosites delicieuses des cotes de la Provence ; si, penetrant ensuite dans I'in- terieur, on deerit la charpente osseuse du pays, les ( 5-2/1 ) cimes elancees des Alpes, les cones dos Pyrenees, les hauteurs volcaniques de L'Auvergne, les masses allon- gees du Jura, les vallons boises des Vosges, et les belles vallces qui s'etendent au pied de toules ces monla- gnes, avec les pi aines ferules de la To u rain e, de la Beauce, de la Flandre ou de la Limagne ; si Ton de- peint le caractere ties divers bassins de nos fleuves, avec toutesces rivieres dontcbacunc a son inlerel par- ticulier, et qui vont, cointnc des arleres fecondanles, animer et enrichir de loutes parts notre beau lerri- toire ; si Ton expose la temperature, les pbenomenes almospberiques, les productions de cbaque zone, en s'etendant sur les cerdales, les fruits, les arbres ties forels, les troupeaux, la faune entiere, en fin sur la distribution geologique et mineralogique du sol; si Ton trace avec sagacile le reseau des communications que la nature et les bommes ont etablies, les canaux, les cbcmius tie fer, les lignes telegraphiques , qui re- lient merveillcusement toules les parties de l'Empire; si Ton fail comprentlre 1' administration tie notre pa- trie, ses ressources en tout genre, son agriculture, le mouvement de son commerce et de son Industrie; si, apres tout cela, on cntreprcntl un voyage complcl a travel's cbaque deparlement, examinant les monu- ments, les anliquites, les curiosiles, les habitudes, les costumes, les bommes celebres, les produits, les sou- venirs de toute sorte : ne penscz-vous pas que l'interftt sera plus grand, et que le jeune hoinme a qui sera presente ce tableau prendra plus de goilt pour la geographie que s'il n'en voit que le cote bistorique ? Non, la geographie n'est pas une dependance de I'histoire ; et il est malheureux, je le repete, qu'on ( 225 ) 1'ail subordonnee longlcmps a eelle-ci dans l'educa- tion publique. Mais les nouveaux programmes d'un ministre eclaire lui out heureusement donne enfin sa vraio place ; qu'ils soienl bien appliques, et la geogra- phie va fleurir dans notre pays, comme elle fleurit si brillamment dans plusieurs conlrees voisines. II n'est pas plus juste de la renfermer dans l'his- toire, qu'il ne le serait de la comprendre dans l'his- toire naturelle ou dans beaucoup d'autres etudes, aux- quelles elle ne lient pas moins directemcnt. Car un des caracteres de la geograpbie, c'est de se rattacher a presquc toutes les sciences, a presque lous les tra- \aux de l'homme, de leur preter son concours, et d'emprunter le leur. Combien de rapports n'a-t-elle pas avec l'astrono- mie, pour les positions rigoureuses qu'elle a besoin de connailre ! Avec la physique et la meteorologie, pour les climals et les temperatures dont elle nous entre- tient a cbaque instant ! Avec la zoologie, la botanique, la geologie et la mineralogie, pour les productions nombreuses qu'elle depeint ! Avec rcllmograpbie, pour les peuples qu'elle examine ! Avec la statistique et l'economie politique, pour la comparaison de la puissance, des richesses el des ressources des fitats! — Elle toucbe a la pbilosopbie , a la litterature, a la linguistique, en s'occupant des vno3urs, des usages, du genie et des langues des populations. Combien le com- merce et l'industrie n'onl-ils pas besoin de son se- coins pour le transport et l'ecbange des produits qu'ils livrent a la circulation ! La guerre, la lelegrapbie, les ponts et chaussees, la navigation, la geodesio, tous ces arts serieux sont intitnement lies a la geograpbie. Mais ( 226 ) les plus delirieux des arls , la poesie, la peinture, y trouvont aussi les elements de leurs plus inleressantes descriptions : les paysages lour a tour gracieux ou saiivages, les plus saisissanles bcautes de la nature, les tableaux les plus grandioses, sont puises dans la geographic. Les plus grands poetes, Homere, Virgile, Horace , ont tire de cette science un admirable parti. Yoila l'elude qu'on a accusee d'etre aride. Ah ! sa fecondite est telle, an contraire, qu'elle accable un esprit studieux; et, si Ton vent aborder toutes ses ri- cliesses, on se trouve comme ecrase devant uric tacbe si vaste. Vovez les imnienses et inlerminables travaux du savant Rilter !... Pour revenir a la comparaison epic j'ai enlreprise de la geographic et de I'liistoire, je crois pouvoir affir- mer que la geographic n'a pas nioins d'ulilile directe que l'histoire; qu'elle a peut-etre rneuie une applica- tion plus pratique et plus positive. L'histoire devient la regie du cceur humain, il est vrai, en nous offrant l'imagc des vertus et des erreurs des homines; elle ennoldit notre A me du souvenir des grand es choses; elle inspire des senlimenls eleves j elle montre la main de Dieu par tout present-: dans la destinee de I'humanite. Mais combien est frequente et fatale la pente qui, dans l'histoire, conduit a l'erreur! Les fails anciens, et meme les faits regents , sont dif- ficilesa controler. [/imagination s'egare aiseinent dans lc labvrinthe d'evenemenls raconles de lant do ma- nieres differenles, obscurcis par des traditions souvent bizarres, par I'ignorance des ecrivains. Si Ton n'est pas, dans leur expose, d'uue exacte verite, que de ( 227 ) dangers pour l'esprit ! Helas ! la plupart des fautes des nations sont provenues d'tine facheuse appreciation de l'liistoire. La geographie, vivant de faits actuels, positifs, fa- ciles a verifier tous les jours, n'offre pas les memes ecueils, et donne pen de prise anx ecarts de I'imagi- nation. Ses resultats sont surs. Elle met tout a sa vraie place; elle donne des idees justes sur les rapports des peuplos, et, nous enseijinant les points d'ou nous pou- vons tirer les objets de nosbesoins, ceux vers lesquels nous devons diriger les produits de nos arts, elle de- vient la regie des relations sociales qui bent les peu- pies entre eux. Elle n'a pas peut-etre surle cceur hu- inain une action pbilosopbique aussi profonde que l'liistoire; inais elle a cependant son rote eminem- ment moral et religion* : car, en pr^senlant le tableau dela magnificence do la nature, et de l'ordre, de 1'har- monie, des merveilles de 1'univers, ne nous inspire- t-elle pas un juste sentiment de respect et d'admiration pour l'Auleur des choses ? Que manque-t-il done a la geographie pour egaler parmi nous Fecial qui s'atlacbe a l'liistoire et aux sciences naturelles? II lui manque peut-etre un ecri- vain tout a fait a part, un de ces cachets litteraires qui entrainent'et enlevent le public. Elle compte , il estvrai, des savants du premier ordre , des esprils eminents , des auteurs d'un admirable m^rite : ainsi , Pelegante plume d'un Malte-Brun . d'un Walckenaer, d'un Humboldt (car l'illustre Allemand est aussi un habile ecrivain francais), a beaucoup conlribue a pro- pager le gout de la geographic dans notre palrie ; des geograpbes eminents que nous voyons ici, el ( 228 ) que je citerais si jc ne craignais de blesser Jour modestie , ont ecrit el eerivent tous les jours des mor- ceaux capitaux et excellenls. Mais, cnfin, le BuITon, le Bossuet de la geographic , n'cst peut-etre pas encore venu ; il n'est peut-etre pas vcnu celui qui, voilant la difficulty des noms proprcs sous le charme d'une pcinlure animee el rapide, doit revetir la des- cription du globe d'une pensee largo, juste et promote, de cette pensee d'aigle qui plane sur une science, l'eni- brasse d'un regard profond , et en eclaire toutes les parlies de la lumierc du genie, pour les faire saisir a tous les esprits etonnes et charmes. II est regrettable que les anciens, dans leur inge- nieuse mj thologie, n'aient pas cree une muse de la geographic, comme ils en ont cree une de l'hisloire et une autre de l'astronomie, deux muses qu'on a fait presider lour a lour a la geographie elle- meme. Ah ! si Ton avail imagine une muse de la geographie, il me somble qu'on aurait pu l'accompagner d'attri- buts delicieux. On ne l'aurait pas ornee, comme Clio, de la couronne de lauriers et de la trompelte, signes des victoires el de la bruvante renommee ; on ne lui aurait pas donne, comme a Uranie , une couronne d'eloiles et des instruments de malhemaliques', qui rappeJlent seulement les travaux savants et admirables, mais ardus, de l'elude du ciel. Je me la serais volontiers representee comme une jeune deesse , d'une bcaute douce, et un peu severe cependant, la tete pareo d'une guirlande elegamment formee de flours, de plumes delicales el de pierres varices, symboles des Irois regnes de la nature; jetanl un coup d'ceil intel- ( 229 ) ligent el profond sur l'espace , peignant d'une main habile les paysages et les contrees qu'elle decouvre au loin ; assise sur une hauteur lumineuse du voisinage de la mer, d'ou elle peut conlempler a la fois les deux principaux elements qui fonl l'objet de ses descriptions, ayanlaulour d'elle plusieurs des fruits de ses nobles tra- vaux , des cartes, des plans, des livres, un globe, des images des races humaines, quelques uns des instru- ments qu'elle emploie pourses exactes determinations, enfin divers produits de l'agriculture, du commerce et de l'industrie. Mais qu'ai-je besoin , messieurs, de vous depeindre cette muse que j'entreprends de vous decrire? Vous la connaissez mieux que moi. C'est vous qui, par vos grands et perseveranls Iravaux, lui avez donne ses attribuls , son caraclere, toute sa beaute ; c'est vous qui lui avez voue ce culte constant qui fait sa gloire et qui m'a inspire son eloge. Continuez done a lui offrir le tribut de votre zele eclaire, de votre savante acti- vile ; soyez surs que vos elTorts porteront leurs fruits, etquele public, suivanl les traces d'une sage adminis- tration qui a deja rendu pleine justice a votre science favorite, lui accordera enfin lui-meme aussi tout l'in- leret qu'elle merile. ( 230 ) NOTICE GEOGRAPHtQUE EX HISTOR1QUE so a LA NOUVELLE-CALEDONIE , Decretee colonie trancaise en octobre 1 853. PREMIERE PART1E. Description geographique. La Nouvelle-Calodonie appartient a la zone eijua- toriale; elle est situee presque sous Je parallele du centre tie l'Auslralie, a environ 10 degres a i'est de ce continent, et elle s'etend du nord-ouest au sud-est sur une longueur d'environ 75 a 80 lieues, et une iar- geur de 12 a 16, du 20° 10' au 22 50' de lalilu e me- lidionale, et du lolu 30' au lti/i' 82' de longitude orientale. On la reconuait de loin a sa forme allongee et a l'aridite du sonnneL et des flancs declines de ses mon- tagnes qui paraissenl former une chaine continue dans toule sa longueur. Ses abords sont ties difficiles, et ses cotes sunt entou- rees d'une immense chaine de recifs madreporiques , formant unesorte deceinlures'etendant ella depassant au sud jusqu'a dix lieues et dans la direction nord- ouest l'espace de cinquante lieues; cetie chaine, siluee a i'ouest a environ quatre ou cinq lieues du rivage, est beaucoup plus rapprochee sur la i die orientale. Ces re- cifs sont de temps en temps interrompus et peuvenl ( 231 ) dormer passage auxplusgros batiments ; la navigation est possible, surtoul pour les batiments a vapeur, entre les recil's et la grande lerre. L'atlerragepai- la cole orientale seinble, jusqu'a pre- sent, plus laule. On y trouve six ports i'requtmtes par lesnavnes de Sydney, qui viennenl y cliercber du bois de sandal dans la parlie meridionale de File , et du trepang dans la partie septentrionale. Ces ports sont, en allant du nord au sud, ceux de Balade, Puebo, Yenguene ou Hengueiie, Kuana, Kanalah, et haquety, le premier el les deux demiers sont les plus tre- quentes. Sui la cote orientale on ne connait, jusqu'a pre- sent, quun seui purl nomme par d'Entreeasleaux, Port 1 rompeur, el par ie capitaine Kent, Port Saint- Vincent ; il parait ne pas devoir ollrir uue grande pro- fondeur. Le prolongeuieuldes roches uiadreporiques qui s'e- tendenl vers le nord-uuesl, jusqu'a cinquante lieues de la poinle la plus septentrionale de l'ile sous le nom de Recijs francais ou &.Liilrecasteaux, eutoure plu- sieuis petites lies dout quelques unes sonl inbabitees : ce sont ies lies tiuon, qui portent le nom dun des coin- pagnons de d Enliecasleaux ; l'ile Surprise, l'ile Lebert, I ile de la lieeounaissance, l'ile Moulin, lile Boulabio, et 1 dot Boudioue, qui eommande le liavre de iiaiade situe pies de la poiute nord-est de Tile. A 1 est, les lies Beaupre, Loyalty ,• au sud-esl, la belle ile des Pins et quelques dots, sont les dependanees geograpbiques de la grande ile. in nous nounnons encore le rocber voleanique de l'ile Mat hew, que D union t d'lirville latlacbe augroupe ( 232 ) precedent, nous aurons fait connatlre les lies qui composenl I'archipel de la Nouvclle-Caledonie. Mais revcnons a i'ilc principale, que les indigenes nomment aussi Balade. Elle fut decouverte par Cook, le h septembre 1774, lorsde son second voyage, ct depuis elle a etc successivement visilee par d'Entrecasteaux, Kent, Dumont d'Urville, Laferriere, Dubouzel, Le- comte et un grand nombre d'autres inarins francais; en dernier lieu, en 1850, par M. le capilaine de fregale Jean d'Harcourl, qui y a fait executor sous ses yeux de beaux travaux hydrographiques, et plus recemment encore, en seplembro 1853, par M. le contre-amiral Febvrior Despointes, qui en a pris possession an nom de la France. La Nouvelle-Calcdonie a one forme allongee, el son inclinaison, du nord-ouost an sud-esl, est telle que sa direction generalc fait avec I'equateur un angle de 40 degres. Les monlagnes qui la traversent s'elevent graduellemenl vers I'est-sud-est, a environ GOO metres au-dessus du niveau de la mer ; une cime paralt meme atleindre 8 a 900 metres. Vers le sud , non loin du port Saint-Vincent, el dans la latitude de Kanalab, on a cru apcrcevoir pendant la nuit un volcan en activite, ce que rendrail d'ailleurs probable l'existence recon- nue de colonnes basalliques. Les juincipales rocbes sont le quartz, le mica, la steatite, les grenals, la mine de fer spcculaire, et l'amphibole verle ; les mission- naires ont rencontre une mine de cuivre , des gise- ments de fer, de cbarbon el une source minerale, el, d'apres la composition geognoslique du sol, on pense que Ton pourrait y lrouvei»des pierres fines et des metaux precieux. ( 233 ) Ces montagnes partagenl Tile en deux versanls ine- gaux, le versant sud-ouest ct le versant nord-est. Le premier est le morns etendu, les pontes sont plus abruj)les, et elles ne laissent cntre elles et la mer que des plain es peu considerables. Le second presente, au contraire des collines et des plaines qui descendent en amphitheatre vers la mer. Les sommets des montagnes sont arides et depouil- les; il n'en est pas de memo des nomhreuses vallees, qui paraissenl d'une ferlilite surprenanle. De holies cascades alimentent des ruisseaux et des rivieres qui coupent l'lle dans tous les sens. Quelques unes de ces dernieres, le Djahot par exemple, sont larges et pro- fondes , el, hien avant leur embouchure, out, au dire des missionnairos, la largeur de la Seine a Paris ; elles pourraient meme former, a leur embouchure, d'ex- cellents ports, ou des ancrages faciles, sans les roches qui semblent en defendre l'entree aux navires. L'ile olTre done plusieurs aiguades commodes. Pendant la saison seche les grands coins d'eau seuls ne larisscnt pas. Le Djahol, que nous signalons comme la principale riviere de l'ile, vient du sud-ouest ; il a son embouchure tin peu au nord-ouest du havre de Balade, et il est navigable pour les plus fortes embarcalions jusqu'a Bonde, village situe a plus de dix liouos dans l'int^- rieur. II recoit plusieurs affluents, se bil'urque avant d'arriver a la mer, et forme unc ile qui est occupea par une montagne Ires eleve'e. Al'embouchure meme de la riviere et a la distance de 12 milles , au nord- ouest du mouillage de Balade il existe une baie for- mee, d'une part, par les haules lerrcs do la Nouvelle- vii. mars j;t avru.. (5. 16 ( Mi ) Caledonie, el, le de 1'ile des Pins est anthropophage, mais il se defend de cette reputation, et il a l'air de mepriser ses voisins qui mangent les homines. Malgre ces de- monstrations exterieures, on voit cependant qu'il re- garde avecune especede eonvoitise la chair des blancs. II jette surlout des regards de concupiscence sur le gras des jambes; et j>lus d'une fois, an moment ou vous y pensez le moins, vous sentez une main passer legereinent sur votre mollel. Si vous dites a l'indiscret que vous prenez en faute : « Ce que lu fais est mal, » il repond, en se pincant les levres : « Oh! lelei : C'est bonl » Neanmoins nous n'avons eu jusqu'ici a leur reproclier aucune insulte. » (Anna I. de In prop, de la Foi, 1850, n° 129. leltre du R. P. Goujon.) Les productions de 1'ile des Pins sont les memos que celles de la grande ile voisine; mais les habitants ne- gligent Irop leurs plantations d'ignames et de Cannes a sucre pour exploiter le hois de sandal, qui abonde dans l'lle el qu'ils echangent aux armateurs anglais contre queltpies pieces d'etofl'es et d'autres menus ob- jets doiil ils sont fort avivles. Le sol paralt, d'ailleurs, plus sain que celui de la Nouvelle-Caledonie; il est fer- tile, propre a la culture du cafe, de la canne a. sucre ( 243 ) et des plantes legumineuses d'Europe ; il est enfin ar- rose par des sources fraiches et abondantes. Le port de l'Assomption, situe au sud de 1'ile, pro- tege des vents du large par la petite ile Kounou et l'llot boise Jlcmene, n'est pas le seul abri que presenle l'ile des Pins aux navires : il existe au nord un autre port, celui d'Ottzele, dans le voisinage de Gadji, residence actuelle du chef indigene. Mais les approches de ca dernier porl sont plus difliciles; la mer est tres parse- in ee de coraux, et la cote est ordinairement battue par un ressac incommoiie aux embarcations. DEUXIEME PARTItf. Notice historique et prise de possession. Tels sont les principaux documents que nous pos- sedonsjusqu'a ce jour sur la Nouvelle-Caledonie (1) ; nous allons maintenant faire l'histoire des rapports des nalurels avec les Europeens jusqu'a la prise de pos- session de l'ile. Nous y trouverons encore de nouveaux traits qui nous permellront de bien apprecier la na- ture du pays, el qui, tout en nous mettant en garde contre la ferocity de ses sauvages habitants, nous ap- prendront ce que nous devons esperer d'une serieuse lentalive de colonisation... La Nouvelle-Caledonie, se trouvanl sur le chemin de Sydney aux mers de la Cbine et de l'archipel In- dien, dul plus d'une fois servir d'escale et filre visitee par les navires qui se rendaient en Australie, ou que leurs ilineraires conduisaient a travers les arcbipels de (1) Les informations et les rapports officiels du gouvernement n'ont pas encore ete publies. V.-A. M.-B. ( '2/i h ) la Polynesia. Mais ses approcbes etaient rctlouteos tKs voyageurs. Flinders, et, apres lui, bien d'aulres ma- rins , avaieni fait naufrage sur les recifs qui l'enlou- rent. Le capitaine Kent, en 1793, avail bien francbi la terrible barriere occidenlale et decouverl le port Sainl- Vincent, ou il avail sejournc six mois; mais, s'il y avait trouve un excellent abri, il \ eut a peine asscz d'eau pour son petit navire. Les dangers de la navi- gation, le peu de ressources tie l'ile imparl'aitement connue, semblaient done en eloigner las navires. A peine si de loin en loin les entreprenants colons de Sydney venaient faire un commerce d'ecbanee contro du bois de sandal et tin trepang, sur la cole orientale dc l'ile; le risque de tomber entre deux peuplades ennemies, et d'eprouver le trisle sort que les nalurels reservent a leurs captifs, diminuait singulierement les cbances des relations comuicrciales avec la grande lie. Lorsquela France eut etabli une station navale dans les niers de l'Oceanie, les navires del'Ktat eurent plus d'une fois l'occasion tie visiter l'archipel Caledonien, et a chacune de ces visites la carle tie d'Enlrecasteaui fut beureusement modiliee on complelee par les travaux des babiles officiers de noire marine. lis purent sc coh- vaincre que les dangers que presenlaienl les approcbes de l'ile pour les navires a voile n'existaient plus pour les navires a vapeur, el que la cote orientale, mieux connue etd'un plus facile acces que la cote occidenlale, offrait six bons ports, auxquels on pouvait arriver par des passes que les rdcifs laissaient enlre eux; que, de plus, la navigation etait possible dans le bassin compris entre la cote et la ligne tie recifs sit nee au large. La Nouvelle-Caledonie devenail done moins ( m ) inabordable. D'autre part, les missionnaires etahlisaux lies Wallis avaient obtenu en pen de temps de si hcureux resultats dans leur picuse mission de regene- ration calbolique et de civilisation parmi les peuplades de la Polynesie, qu'ils resolurent de tenter un etablis- sement dans la Nouvelle-Caledonie , qui depuis long- temps etait l'objet de leurs conversations et de leurs pieuses esperances. Le 21decembre 1843, le Bncephale, commando par M. Laferriere, apres avoir jete l'ancre dans le port Balade, debarquait M. Douarre, eveque d'Amala, vi- caire apostolique de l'Oceanie occidentale, accompagne de deux pretres et de deux freres, qui, au noin du Christ el de la religion , prirent solennellemenl pos- session de l'ile. Pendant les premiers mois de leur installation, lea missionnaires no I'urent point inquietes; ils avaient, d'ailleurs, a l'aide de quelques petits presents, su ga- gner l'amilie du chef do la tribu au milieu de laquclle ils elaient venus se fixer. Ils durent d'abord pourvoir a leurs besoins. Les charpentiers du Bucephale leur avaient construit a Mahamata , dans le voisinage du port de Balade, une maison de bois ; ils avaient pour toutes provisions, pour cinq personnes, un baril de salaison et trois harils de farine. Jetes au milieu de peuplades cruelles, paresseuscs, imprevoyanles, ils ne devaient done attendre que peu de secours des naLu- rels. Confiants dans la Providence, ils se mirent a Tceuvie, ils creuserent un puils, se conslruisirent un four, enlourerent leur maison et leur jardin d'une forte haie palissadee. Au bout de quelques mois, ils furenl soumis a de rndes eprouves. leur maison lorn- (246) bait en mine, les bois en etaicnt vermoulus; ils la re- construisirent en pierre a une demi-licuc plus loin an sud, aBaiao. Cependanl les provisions s'epuisaient, le jardin cessa deproduirc, la recolle d'ignames leur man- qua, faulc de pluie; la faim se fit senlir. Ils acheterent dans le voisinage un champ d'ignames; mais, a peine, apres les avoir peniblement arrachees, coinnioncaient- ils a les emporler, que le chef qui les leur avail ven- dues envoja une troupe de bandits, qui la leur enleva sous leurs yeux. Bientot ils furent en proie ;iux hor- reurs de la faim, el nul doute qu'ils n'eussent suc- combe, si Dieu, qui veillait sur eux, ne leur eul envoye un secours inespere. In chef qui demeurait a quinze lieues de leur habitation leur avait donne, quatre mois auparavanl, un champ d'ignames pour gagner leurs bonnes graces, car il les regardait comme des etres surnaturels ayant grand pouvoir sur la pluie et le vent; ils allerent le trouver, et non seulement celui-ci leur fit porter la precieuse rc'colte clans leur barque, mais encore il y joignit quelques cocos, et si ces provisions ne ramenerent pas chezeuxl'abondance, au moins eloignerent-elles la famine. Le 28 septemhre 1845, patut la corvette le Rhin. Quelle fut la joie des pauvres missionnaires, lorsqu'ils virent arborer le drapeau national ! « Beni soit le na- vire de la patrie ! » s'eci'ie dans sa reconnaissance le pere Rougeyron, l'un d'entre eux. Le comniandant Berard et les officiers de son etat-major so monlre- rent pleins de devouement pour la mission, et, lors- qu'apres quelques jours de relache ils la quitterent, ils lui laissaient en abondarice des vivres pour une annee; ils avaient repare le batiment qui servait d'a- ( 247 ) sile aux missionnaires, cl eleve une modeste chapelle. Bientol les missionnaires purenl voir lever dans leur jardin les ehoux, les haricots et d'aulres pinnies pota- geres d'Europe; le sol etait fertile et pouvait done re- pondre aux soins et aux ti avaux agricoles des colons. Desormais a l'abri du besoin, les missionnaires pu- renl reprendre plus libreinent leurs travaux aposto- liques ; ils eurenl la consolation cle voir quelques Iribus disposees a ecouterla parole divine. Ils allaient a plusieurs litues de leur demeure, baptisant les en- fants, soignanl les maladcs, portant a lous de bonnes paroles; deja une nouvelle mission avail ele elablie a Irois lieues plus au sud, a Poebo, au milieu d'une peu- plade dont le chef avail, des l'origine, lemoigne tie bons sentiments ; et ils etaient en elat de venir en aide aux marins malheureux. Au mois de juin 1846, la corvelte la Seine vint donner sur les recifs qui entou- rent l'ile; les missionnaires eurent laconsolalion, dans ce malheur, de pouvoir recueillir tout l'equipage, et leurs provisions purent les nourrir. Malheureusement la guerre et la famine vinrent de nouveau desoler l'lle : « Que vous dirai-je de l'etat de nos chers Galecloniens? ecrivait le reverend pere Monlrouzier, a la date du 13aout 1846. Helasl ils sonttoujours bien a plaindre ! leur misere est extreme; pour vivre, ils sonl obliges de chercher sur les monlagnes de mauvaises racines, et sur la plage des coquillages bien coriaces. De plus, ils sont constamment en alerte, a cause de leurs ennemis, qui ne leur laissent ni treve, ni repos, qui ravagent leurs proprietes, et les tuent eux-inemes pour les manger. La peste vint ensuile enlever ceux que la fa- mine et la guerre avaient epargnes, et jeta la conster- ( 248 ) nation parmi les tribus. Ellc a frappd tant de victimcs, que des villages enliors sunt deserts j on a trouv^ dans certaincs cases des vases de ten*e pleins de laros a demi-cuits, el les personnes qui prepaiaient cos ali- ments etaient elenducs sans vie a cote do leur feu... Sans exagerer, il est mort presque la moitie do la po- pulation tin autre missionnaire parlo d'un quart) dans les divcrses -tubus que nous pouvons connailre. Les symptomesde rcpidomie sonl un violent mal de lete, qui produit une surdite, des douleurs vivos a 1'oslomac et do forts battements de cceur. » Los missionnaires avaient recti ia visile de plusieiirs bailments , entre autres de V Arc he-d' Alliance et du Spek, qui leur avaient apporte des provisions ct des objols d'ecbange, lorsque, a la suite de mauvais rap- ports faits aux nalurols, les dernieres bonnes disposi- tions do ceux-ci disparurent pour faire place aux plus borribles projets. Des marins europeens qui faisaient an port do Yenguone l'echange du bois de sandal representorent les Oul-oui (e'est ainsi que les naturels designaient les Francais) comme des bommes tabous , e'est-a-dire sa- cres, qui laisaient, par leur mauvaise influence, mourir les autres bommes. II n'en fallut pas davantage pour i'aire soupconner les missionnaires d'avoir attire le fleau ; a la supersti- tion vint so joindre l'amour du pillage , ot le 19 juillet ils vinrent attaquer rotablissemenl do Baiao, pros du port de Balado. Ils I'incendierent ; un des inalboureux missionnaires fut tue; les autres, epuises, mourant do faim, les vetemenls declares, parvinrent, an milieu dos plus grands dangers , conduits par un de leurs plus ( 249 ) jeunes catecbumenes, qui leu r etait reste fidele , a gagner l'etablissement do Poebo. Reoriis an nombre de treize , dans la maison de la Mission , la haiiie des na- tal r'els les y poursuivit , el ils y eusscnt, celte fois sans doule, peri, sans l'arrivee d'un navire francais , la Brillantc, qui, sous le commandement de M. Dubou- zet , se rendit d'abord a Balade , pins a Poebo, ou l'equipage, mis a terre , delivra les mallieiireux assie- ges ; mais cela ne se fit pas sans qti'il fallut livrer aux nalurels un combat er, regie. Les missionn aires se resolurent alors a abandonner File , el e'est ainsi qu'ecboua lenr premiere tentative : ils quittaient a regret les C.aledoniens , qui repous- saient si aveuglement les bienfaitsde la foi ; cependanl ils laissaienl quelques gerinesquidevaient un jour leur faciliter, a une epoque plus propice, leur reltfur dans le pays. Au milieu des lerribles epreuves auxquelles ils avaient ete soumis , ils eurent la donee consolation de voir que quelques-uns de leurs caleehumenes ne les avaient pas eulierement oublies. Le 21 aotil 18Zl7, la corvette la Brillantc rameuail a Sydney les missionn aires , landis que le brick de commerce, I 'Anonyme , conduisait aux iles Salomon Mgr. Douarre , eveque d'Amala ct vicaire apostolique de l'Oceanie orcidentale. Une annee ne s'etait pas ecoulee que nos pieux missionnaires , qu'aucun obstacle ne pouvait arretec, lentaient un nouvel etablissement , el , plus heureux cetle fois, apres avoir ete repousses de 1 "lie llalgan , la principale du petit archipel des iles Loyalty, ils abor- daient, le J 5 aout 18Z|8, a l'ile des Pins, daiis uri port silue au sucl de l'ile , el qui recut, a cause de la soleii- VII. MARS ET A.VRIL. 7. 17 ( 250 ) nile du jour, le noni de port de V Assomption. Bien accueillis par le chef de 1'lle , dont ils surent gagner les bonnes graces, ils s'y clablirent, et bientot les rela- tions les plus amicales les unirent aux naturels, qn'ils trouverent plus doux et plus intelligents que ceux de la Nouvelle-Caledonie. Cependanl ceux des naturels de cctte derniere lie qui avaient ete convertis par les missionnaires elaient, a Balade , a Baiao et a Poebo , conlinuellemenl expose* aux mauvais traitements pt aux persecutions de leurs sauvages compatibles; ils purent en informer les missionnaires, qui envoyerent chercher, a deux reprises differentes , les neophytes, que Ton elablit provisoire- ment a Fulana. La mission de l'Assomption elait en voie prospere , lorsqu'en 1850 le capitaine d'Harcourl, commandant la corvelte de l'Etat I 'Alcmene , vint, apres avoir visite les lies Pomoutou, des Navigaleurs, Wallis, relacher a Sydney. II desirait visiter la Nouvelle-Caledonie ; il demanda et obtint de Mgr. Douarre, pour guide et pour interprete, un here de Tancienne mission de Balade. Apres avoir releve diverses positions de celte grande lie, et nolamment reconnu loule la cote orientale , dont il fit faire le releve hydrographique par ses ofii- ciers, il jela l'ancre a Balade: il voulait tracer la carte de la pointe de l'lle. II fit expedier une chaloupe montee par douze homines d'equipage, un chef de timonnerie et deux officiers , MM. de Varennes el de Saint-Phal. On avait fourni rembarcalion de vivres pour une douzaine de jours, et, en cas de quelque surprise , on avail pris quatre fusils avic des munitions. Le point que Ton voulait explorer elait a dix lieues au .( 251 ) nord-ouest de Baladc. La crainte de tomber entre les mains des tribus feroces et antbropopbages empecba l'equipage de faire une dcscente sur la grande lie de Caledonie; mais, comrne on crut etre certain que quel- ques lies voisines a pen de distance etaient inbabitees, deslelendemain matin on y descendit, et sans defiance : ce fut la un grand malhcur. Les deux ofliciers etaient a peine a terre , qu'une troupe de queiques centaines de sauvages fondait sur eux lout a coup, en poussant les bourras les plus feroces. lis etaient armes de baches, de frondes, de casse-lete , de lances et de fleches. On avail eu a peine le temps de les apercevoir , que M. de Varennes tombait frappe a la lete d'un coup de hacbe. Deux matelots qui le relevent , et le portent au milieu d'une grele de traits sur l'arriere de l'embar- cation, expirent bientot cux-memes sous les coups qui pleuvent de loules parts. En vain on cbercbe dans celte lulte a mort, dans cette effroyable nielee, a degager les fusils et los munitions , on n'en a pas le temps; en vainlepilotede lacbaloupese fail jourautour de lui en frappant a droite et a gauche avec la barre du gouvernail, dont il s'etait arme ; en vain le second ofiicier, M. de Saint-Phal, jeune aspirant, a peine age de vingt ans, deja perce de coups, pare avec son epee, en queiques instants les sauvages font autant de vicli- mes qu'il y avail de matelots dans la cbaloupe. Quatre seulement essaienl de se sauver a la nage ; mais l'un d'eux est massacre sur la plage ou on l'attendait ; les trois aulres avaient fui dans des directions opposees. Weuf jours apres cette epouvantable bnucberie , l'in- quietude g;igna l'equipage de VAlcmene, deja tour- mente par de tristes pressentimenls; une cbaloupe ( 252 ) arnn'-e fut expediee pour avoir quelque nouvelle , et bientot on acquit la lugubre certitude du malheur que Ton oppiehendait. La premiere embarkation fut rc- trouvee inlacle, mais complclemenl devalisee , et pre- senlant les horribles et sanglants vestiges d'un combat a mort. Quclquos naturcls (pie Ton interrogea ne laisserent plus de doutes. Apres le massacre on avail eventre et vide les cadavres; puis immediatcmcnt les cannibales avaient procede a I'horrible festin, envoyant aux parents et aux allies one part de cette horrible boucherie; « trois malelots, ajoulait-on, qui s'etaient enfuis a la nage, avaient ete adoptes dans unc tribu voisine, mais qu'elaienl-ils devenus?» La cbaloupe revint trislement a bord, trainanl a la remorque une embarcalion vide... — Commandant , dil I'officier de V expedition , en abordant avec une conlenance morne et les yeux gros de larmes, voila tout ce que nous avons pu recueillir ! ! ! Le capilaine d'Harcourt tira des naturels la seule vengeance qui fut possible avec eux, apres avoir vai- nement essaye de les poursuivre, car ils | asserent a la nage des petiles lies dans la grande terre : il fit cou- j)er leurs cocotiers et detruire leurs plantations, leurs cases et leurs pirogues. Les habitants de JBalade, hommes, Centimes et enfants, qui etaient accourus a la nouvelle de 1'expedition, aide-rent nos malelots, et s'en relonrnerent ensuite cbez eux avec tout le bulin qu'ils purent emporler. Des lamheaux de vetemenls, des restes de cheveluie, des ossements epars, qui fu- rent retrouves sur le lieu de la catastrophe, rcunis dans deux caisses chargees de pierre, l'urenl conies a la iner; les trois malelots qui avaient eehappe au ( 253 ) massacre par la I'niie purerit rejoindre le batiment. Selon la mode la plus coquette du pays, ils avaicnt le visage point et les cheveux releves el attaches au som- met do la tete. La corvette /' 'Alcmene poursuivit tristementson explo- ration. Sur la carte de la Nouvelle-Caledonie , que dresserent ses officers', ils marquerent d'une croix le lieu ou leurs compagnons avaient ete massacres, et un passage qu'iis decouviirent eulre les terres, et qui se prolongeait dans l'ouest , au dela de la chaine de re- cil's, recti I le noin de detroitde Varennes (1). Ce passage est d'une importance ties graude, parce qu'il per- mellra aux navires venant de Sydney de se rendre directemenl au port Balade par la poinle septenlrio- nale de I'lle , tandis qu'auparavant il fallait arriver par l'ile desPins au sud, et longer loule la cote orien- lale, au milieu d'une mcr dangereuso et difficile. Lorsque i' ' Alcmene revint on France, le gouverne- ment s'occupait de la grande question de la colonisa- tion penitentiaire. Les Marquises n'avaient ni l'eten- due, ni la ferlilile, ni la situation goograpbique, qui constituent les conditions indispensables a la creation serieuse d'un grand elablissement maritime et colo- nial. A Taiti, ces conditions ne se renconlraient que tres incomplelement, malgre les avantages incontes- lables du port et du climat; d'aiileurs, la France n'exercail pas sur cetle lie les droits de la souverainele. Les documents que rapportait M. d'Harcourt sur la (l) Le refit du triste episode de V Alanine est presque litterale- ment emprunte a une lettre du R. P. Fonbonne, en date du i"" avril 1 85 1 . (Voyez les Ann. de la propag. de la Foi , u° i3q, nov, i85t, p 46,,.) ( 'iblx ) Nouvclle-Caledouie Gxerent sur cette grande ile l'at- tention de ceux qu'il avail charges d'eludier la ques- tion. En effet, sa fertility el son heurcux cliraat, qui lui permellaient de s'approprier les plantes et les cul- tures de la zone torrid e et de la zone temperee, son eloignemcnt de la mere patric, parurent offrir les conditions desirables. Conformement aux instructions qui lui avaienl ele transmises , le contre-ainiral Feb- vrier-Despoinles se dirigea sur la corvette a vapeur le Pkoque, en septcmbre 1853, vers la Nouvelle-Cale- donie; il trouva la Mission de la baie de 1'Assomplion dans un elat prospere. Le reverend pere Goujon y entretenait, ainsi qne ses pieux collegues , de bonnes relations avec les naturels, qui se montraient doux et intelligent. Le reverend pere Rougeyron elait venu s'^tablir de nouveau au port Balade : les Caledoniens avaient regrelte l'eloigneinent des missionnaires et les avaient rappelcs apres le depart de VAlemene', ils etaient done revenus, mais apres s'etre assures des bonnes dispositions de la tribu a leur egard. Apres avoir pris aupres des missionnaires quelques renseignements sur les dispositions des naturels, apres s'elre assure que le pavilion d'aucune nation mari- time ne flottait sur la Nouvelle-Galedonie , le contre- amiral Despointes prit solennellement possession de cetle lie et de ses dependances, y compris l'lle des Pins , les 24 et 29 septembre 1853 , au nom de S. M. Napoleon III, empereur des Francais. Les pro- ces-verbaux de prise de possession furent signes par les ofliciers du I'/ior/ue et les missionnaires. Le ebef de l'lle des Pins, nomine Yen de Gon, qui avail con- sent! a se placer sous la protection de la France, tut ( 255 ) appele a signer 1c proces-verbal, et dul conserver sou autorite. La Nouvelle-Caledonie appartient done aujourd'hui a la France, et, d'apres une decision imperiale, dont il est fait mention au Moniteur du 25 mars 1854, elle formera desormais avec Taiti et les lies Marquises un gouvernement maritime, a la tete duquel sera plac6 le commandant de la station de l'Oceanie. Chacune des iles aura , d'ailleurs, un gouverneur particulier qui relevera du chef de la station. Esperons done que de la prise de possession de la France datera pour la Nouvelle-Caledonie l'ere de sa prosperity et de la regeneration religieuse et sociale de ses habitants. V.-A. Malte-Brun. ( 25t> ) Analyses, llapportfs, B A I rails ri'ou- vragci, Melanges, etc. AFRIQUE OMENTA LE. LI I THE DE M. KttAPF A M. JUMARU , PRESIDENT H0N0BAIRE DK LA SOCIETE de geographic [Extro.it), Wanika-Rabbai-Mpia (intciii ur ] ) ete en etat de le faire qu'au mois do juin dernier, A cette epoque, j'ai appris d'un osclave, echappe du pays des Wakuafi, quelle espece de langage existe entre la Nigrilie ou les Hamites noirs de l'ouest et les Qrpb.no- Hamites ou Handles bruns a Test. Cesujet sera un pen eclairci par le yocabulaire que je viens d'envoyer a la Sociele des missionnaires a Londres, avec une courte description des moeurs et coutumes des Wakuafi, qui occupent la tete du Nil, laquelle doit etre cbercbee a la latitude du Kirenia, point que les Wakuafi conside- rent coinme le siege primilif de leurs ancetres. lis se nomuient eux-memes Loikol) ; le noin de Wakuafi ou Akabs est celui que leur donnent les gens voisins de la cole. » Combien il reste encore a decouvrir dans la terra incognita du continent afiicain ! Les Arabes de la cote orientale savent le desir qu'onl les Europeens de con- nailre les pays ignores de I'interieur; mais, au lieu de favoriser les decouvertes, ils cberchent ales empecber par des raisons poliliques ou par d'aulres motifs. Der- nierement, j'ai eteforlemenl blame en certain bautlieu de Zanzibar pour avoir donne des informations geo- graphiques au constd fiancais au sujet de la cote d'Usambara. Ce consul, M. de Belligny, personneaussi disiinguee par sa naissance que parses nobles procedes et son amour de la science, m 'avail seulemenl adresse quelques questions geograpbiques : les Arabes crurent y voir des yues poliliques ; ils ne peuvenl pas s'imagi- ner que la science seule puisse occuper l'esprit d'un Europeen et le conduire au dela du cercle etroil de son pays, en debors des interets materiels de sa nalion. » Pvenouvelant ici l'expression de mes sinceres re- ( 262 ) merclments et de mon respect pour votre SocieM6 et pour vous-mGme (votre noin m'etant fauiilier depuis longtcmps), » J'ai l'honneur d'etre, » Ties honore Monsieur, » Voire Ires obeissant serviteur, » J.-L. Kiupf, Dr pbil. » Missionnaire dc l.i Societe Clnirch missionary dans I'At'rique orienlale. P. S. D'Aden, 4 novembre. Quandj'ai 6critcettelettre, j'ignorais que j'en serais moi-meme le porteur jusqu'a Aden. Une maladie d'enlrailles, qui ni'asaisi dans mon voyage alkambani, pour avoir essaye de vivre de racines, de bourgeons, medes de poudre a canon, etc., join le au mallieur que j'ai eu d'etre vole de lout ce que je possedais, m'a force de quitter l'Afiique orienlale et d'aller chercher en Europe les soins de la medecine. LETTRE DE M. REBMANN A M. JOMARD, President honoraire de la Sociele de ge'ographie. Kisuludini, station des niissionnaires (a environ 1 8 rnilles de Mombas, dans I'interieur), 19 septembre 1 853. « J'ai l'honneur d'accuser reception de la m^daille dont votre honorable Societe a hien voulu me faire present; elle a ede remise dans mes mains le 26 juil- let dernier. Je n'apprecie pas soulement cette medaille comme une recompense du zele que vous m'attribuez ( 26S ) pour avoir travaille aux progres de la science geogra- phique, le veritable objet de mes i'requenles excursions dans l'interieur ayant ete" d'etudier les populations qui l'babitent plutot que ces conlrees uiemes. Toutefois, mon collaborateur le docteur Krapf el moi , depuis noire arrived sur la cote de Mombas, avons toujours reronnu que, si I'Afrique orienlale etait le cbamp de travail de l'eslimable Societe au service de laquelle nous sommes engages, la premiere cbose a i'aire elait d'acquerir des renseignements sur la nature el l'elen- due de ces pays et de coniinuniquer ces informations. Et commc aucun voyageur ex prof es so, ni aucune per- sonne occupee du commerce, n'avait jamais penetre dans ces regions, ce soin elait done devolu aux mission- naires. Ma decouverte du inont Kilimandjaro n'etait rien moins que preA'ue ou chercliee, elle a ete entiere- ment accidentelle , et je n'ai droit a aucune louange pour mon zele en faveur de la science geograpbique. » J'apprecie encore la medaille dont vous m'avez bonore, parce que la simple assertion d'un fait qui pouvait et devait etre reconnu, non seulement par un boinme a courte vue comme je suis, mais m&me par un homme moilie aveugle se trouvant aussi pres de ce point que je l'aiet^; parce que, dis-je, eclte assertion, ailleurs revoquee en doute, et meme attri- bute par plusieurs a une pure ambition, a ete admise par vous sans prevention; et que vous nous avez bonores comme des homines v^ridiques , qui onl simplement 1 apporte ce que , dans 1'accomplisse- inent dune mission infiniment superieure a celle de faire des decouvertes geograpliiques, ils n'esperaient pas de voir. Je n'avais jamais, en efl'et, songe a ren- ( 2(54 ) conlrer dps montagnes de neige duns cos regions. J'allais devant moi sans aucune autre -preoccupation geographique quo cello qu'aurait pu avoir tout geo- graphe : savoir quo, dans ios montagnes de Teita (donl on pent voir line partie d'ici meme). j'aurais a gravir le Lord ou la terrasse d'un plateau ; tandis que j'ai eu reel I em en t a gravir des montagnes dans le Toila, et que du cote do I'ouest, au lieu qu'elles supportent up plateau, j'ai ou a descendre aulant que j'avais monie auparavant; de Paeon (pie de Teita aJagga, j'ai marche stir one plaino non plus haute que celle de 1'osl de Toila, el j'ai vu la memo plaine s'etendant elle-memc a I'ouest de la montagne de neige. Lc bortl ou la terrasse du plateau de rAfriquc orienlale, au moms dans ievoisinage de Momhas, commence en fait avec les montagnes de Danika, sur losquelles nous habitons, qui sunt ;'i environ 15 milles de la cole et a 1 500 pieds environ ati-dessus du niveau de la mor; consequemment nous sommes ici a la meme hauteur que la montagne d'ou surgit brusquomont le Kili- mantljaro.a environ 3 degres tlans I'interieur, s'elovant au-dessus de la vasle plaine tmironnanle, et enloure dune multitude dc plus petites montagnes qui, sui- vant 1'expression de mon estime collogue, semblont des enfanls aulour d'un geant. Yoiia, honore Mon- sieur, un simple coup d'ceil jete sur l'Afiique orientate aussi loin que nous avons pu la voir, et nous delions, sans hesiter, tous coux qui suivr'ont hos penibles traces, parseihees d'epines, de le contredire s'ils le peuvent... » J'ai l'honneur d'etre, etc. « J. Rebmank. » ( 265 ) NOUVELLES DE L'ARRIVEE DU L)r BARTH A TOMBOUCTOU (1). LETTRE DE M. AUG. PRTERMANN. Des depeches et ties lettres parliculieres du doc- teur Barlh sont parvenues cc malin , annoncant qu'il est arrive sain et sauf clans la celebre ville de Tom^ bouctpu. On sait que le docleur Barlh, apres avoir perdu son unique compagnon de voyage, le docleur Overweg, se vit force a regret de renoncer au voyage qu'il avail projele de faire au sud-est , a leavers le conlinent, jusqu'a l'ocean Indien ; il prit en conse- quence la resolution heroique d'entreprendre seul le voyage de Tombouctou. « Comrae seul survivant de la mission ( ecrivait le docteur Barth avant son depart de Kouka) , et 1'accomplissement de l'entre- prise reposant absoliuncnt sur moi , j'ai senti mes moyens doubler et je me suis determine a pou.'ser jusqu'au bout les resultals deja oblenus; je pos- sede une quanlite suffisante de presents, en outre de 200 dollars, Zichameaux, h chevaux; ma sanle est dans les meilleures conditions; j'ai avec moi cinq dignes serviteurs, fideles, des longtemps eprouves et bien armes. Nous avons beaucoup de poudre et de plomb; j'espere qu'en redoublant de courage et avec pleine confiance dans le succes, je pousserai heureusement jusqu'a Tombouctou. » (i) On se serf ici de I'oriliographe vulgairement adoptee, niais il serail plus correct d'eerire Tuunliouclou ou Te;i-l)oktn6. VII. MARS ET WML. 8. 18 ( 266 ) Le docleur Bartb, homme incapable d'ostentation , est parli clc Kouka a la fin de novembre 1852, et s'esl porie d'abord sur Sakkatou par la route de Zinder et de Kaschna, la route de Kano etanl irnpraticable a cause de la guerre qui avait delate* dans ce pays entre les Bornuuans et les Fellalah. Les dernieres lettres recues de lui elaienl datees de Kaschna, le 6 mars 1853; cellcs qu'on a recues aujourd'hui de Tombouctou par la voie de Touat, portent des dates qui se suivent du 7 septembrc au 5 octobre dernier; mais aucune des dillerenles lettres qu'il a expedites, pendant six mois (de mars a seplernbre) , n'a encore atteinl l'Europe. Les details de ses marches pendant ce temps, comprenant tout lc voyage de Kaschna a Tomhouclou, sont done encore inconnus; il parait cependant que la direction generale de sa route, de Sakkatou a Tomhouclou, a ete d'abord ouesl-nord-ouest , et qu'il a traverse le Kouara nomine communement Isiger, au lieu appele Say, place importanle d'une grande etendue, et situee environ a 14 degres nord de latitude el 3° 45' de lon- gitude est de Greenwich, autrement a 150 milles geo- graphiques ouest-nord-ouest de Sakkalou. De ce lieu et de Libtako, il a expedie des lettres en Europe par la voie de Sakkatou. Libtako est une grande ville , situee environ a 14" 40' nord de latitude et a 0° 30/ longitude est. a 335 milles geographiqucs de Sakkatou, et 240 de Tombouctou. De Libtako a Tomhouclou, la direction generale du docleur Bartb a ete nord-ouest jusqu'a ce qu'il ait gagne Saraiyamo, grande ville a 60 milles au sud tie Tomhouclou et situee sur un af- fluent, on unc hranche du Kouara. II s'est embarque sur la prenuere riviere le 1" septembre ; die presen- ( 267 ) tail d'abprd rjnbeau cournnt d'eau large de 300 yards; ensuito il entra dans une serie compliquee de canaux etroils et sinueux , en partie couverls de roseaux et d'herbages jusqu'a une distance tie Z|0 milles en ligne droile de Saraiyamo. — Apres une navigation en zigzag trfcs fatigante, il est entre dans la branqhe principale, le Kouara, le h de septcmbre, aupres du village de Koromeh; la riviere elait d'un aspect magnifique, cou- verte d'une flotte nombreuse composee de navires et de barques de toutes grandeurs. Traversant le Kouara et entrant dans une crique, situee du cole du nord, le doeteur Barth a atleint Ka- hara, le jour suivant. Kabara nest qu'une petite ville de Z|00 maisons ou cabanes, mais qui a acquis une certaine celebrile coinmc port de Tonibouctou ; elle merite a peine ce litre , puisqu'on ue peut en ap- procber par eau que pendant quatre niois de l'annee, ou an plus cinq mois dans les crues exlraordinaires ; la crique sur laquelle elle est siluee est d'une profon- deur si peu considerable qu'a l'epoque de la visile du doeteur Barth , c'esl-a-dire dans la saison pluvieuse, la barque qui ne porlait que lui et ses effets ne put aborder, jusqu'a la place, que trainee, etavec uuegrande difficulte. Dans la crique I'eau alteignait a neine les genoux des bateliers. Les docks de Kabara consistent en un beau bassin ferine comrae un dock artificiel; ils ne conlenaient qu'un petit nombre de barques i l'epoque de 1'arrivee du doeteur Barlb. Koromeh, lieu nomine ci-dessus, el les lies de Day, entre ce lieu et Kabara, auraient plus de droits d'etre appelees le port de Tombouctou. Le 7 seplembre 1853, le doeteur Barlb est entre ( 268 ) dans la ville de TomLouctou , en grande ceremonic, escorle par le frere du cheikh El-Bakay, le gouverneur en chef, et par line suite nombreuse d'bpmmes mon- ies a cheval eta chameau, on Men a pied; il a etc bien accueilli ct salue joyeusenient par les habitants de la ville. On avait fait croire a ceux-ci que le mes- sager etait mi envoye du grand sultan de Stamboul; la veritable qualite du docteur Barlh n'elait connue que du cheikh lui seul, dont l'inlrepide voyageur avait et£ assez heureux pour obtenir la protection et la bien- veillance; celui-ci regardait coinmc prudent que le voyageur prit ce caraclere, a cause des dispositions ties fanatiques manifestoes par la grande masse du peuple durant le sejour du docteur Barth jusqu'au 5 oc- tobre. Le cheikh El-Bakay el son frere soul resles fideles amis du pretendu ambassadeur de Stamboul ; meme avec ce caraclere, le docteur Barth ne se consi- derait pas comme absolument a l'abri du danger, vu la multitude des pouvoirs poliliques qui exercent de l'autorite sur Tonibouclou, les habitants se composanl dediverses nalionalites. Ce sont d'abord les Sonray, for- mant la grande masse de la population, puis les Arabes de diverses Iribus, les Fellalah et les Touaricks , ainsi qu'un petit nombre de Bambaras el de Mandingo. II v avait par-mi les habitants un parti qui, loin d'etre favo- rablement dispose pour le docteur Barlh, demandait qu'il fut sacrifie ; tellemcnt qu'il fut necessairc pour lui d'observer les plus grandes precautions dans toutes ses demarches ct dans ses rapports avec la popula- tion, lleureusement pour le voyageur, il avail acquis Ja sincere ami lie" du ch< ikb , sous la protection imme- diate et dans la propre demeure duquel il vivait, ct ( 2(59 ) qui lui avait pro mis de le faire escorter surement a son retour a Sakkatou. Ces nouvelles seront satisfaisanles pour les amis du docteur Barth; mais, au moment ou il ecrivait. son etat de sanle ne l'etait pas an meine degre ; l'accom- plissement du voyage, du lac Tsad (1) jusqu'a Tom- bouctou, qui, en tenant comple des detours de la route, comprend au moins 2 000 milles, peut bien elre re- garde comme une rude epreuve pour les forces phy- siques de tout homine, a cause de sa seule etendue; mais, quand on y ajoute des fatigues de trois annees, les obstacles provenantde la saison pluvieuse, le pas- sage des rivieres debordees, les inondations, etc., au milieu desquels le voyage de Tombouctou a ete effec- tue, ainsi que les diflicultes, les peines et les dangers provenant du caractere fanatique des populations qu'il avait a traverser, on sera peu surpris de l'etat d'epuisement ou il elait, quand il a atteint Tombouc- tou ; telles ont ete les fatigues du voyage que deux de ses six cbamcaux sont morls en chemin, et que les autres sont arrives hors d'etat de servir. Et quant a Tombouctou , le s^jour dans celte ville n'a ete rien moins que propre a delasscr et remettre le docteur Barth de ses fatigues, etant oblige de se lenir enferme el comme au secret. Des altaques de la fievre ont affecte la saute du voyageur encore plus que l'affai- blissement cause par le voyage ; il est evident, d'apres ses lettres, que ses forces elaient alterces au moment ou il ecrivait : cependant l'espoir de les recouvrer ne l) C'est ainsi que le voyageur ecrit le uoui du lac Tsad, d'apres des renseiftnements nouveaux. E. J. ( "27° ) l'a jamais abandonne; et avec un courage et une perseverance remarquables , il a trace le plan de sa prochainc excursion a Sakkalou, an moment ou il expediait les lelties qu'on vient de recovoir. La ville de Tombouctou , donl la seule vue a fait l'ambition delaviede plusieurs cedebres voyageurs, est piacee par lc docteur entre 18° 3' 30" et 18° h' 5" de latitude nord, et a 1° h 5' longitude ouesl deGreenvvicli; sa forme est triangulaire, ses maisons sont b a ties, la plupart, en terre ou en pierre; plusieurs avec de belles et elegantes facades; Pinlerieur est dispose comme dans les maisons d'Agades, visilees par le docteur Barth en 1850 ; la population est estimee a 20 000 amcs. Le docteur a trouve que le marcbe de Tombouctou , vanle comme le centre de commerce des caravanes de l'Afrique seplentrionale , est moins etendu que celui de Kano, mais les marcbandises sont de qualite superieure et d'une valeur j>lus grande ; il a oblenu du cheikb un couiplol imanu (ou marid) pour tous les negociants anglais qui voudraient visiter Tom- bouctou; le pays oil celte ville est situee toucbe au desert de Sahara , et lui est semblable par la seche - resse et la steiilitc'1 du sol, excepte tlu cote du Kouara, oil le sol prend une ajijiarence j)lus fertile. Le mois tie seplembre est l'epoque culminante de ki saison pluvieuse; les pluies frequentes, quoique non torren- tielles, arrivent tous les deux ou trois jours. Le docteur Barth esperait quitter Tombouctou dans un mois, a parlir du 29 septembfe, pour retourner a Sakkalou; il est ties probable qu'il voyagera sur le Kouara infeiicur jusqu'a la ville de Say. II ne savait rien encore de l'expedition du docteur Vogel, parti ( 271 ) d'Angleterre en fevricr 1853, ni de celle du baleau a vapour destine a visiter les regions qu'il a deoou- vertes en 1851; on espere sincerement quo ces beu- reuses et encourageantos nouvellos lui seront parve- nues peu apres le depart de ses leltres et que de plus sa bonne fortune lui aura fait rencontrer ou I'une ou l'autre de ces expeditions. » Londres, 25 mars 1854. Augustus Petermann. EXTRA1T D'UNE LETTRE ADRESSEE PAR H. LE CAP1TAINE DU GENIE FAIDHERBE, COMMANDANT AU SENEGAL. A M. JOMARD. Saint-Louis, i5 fevrier 1 8 5 4 - Nous allons partir au commencement de mars pour l'expedition dePodor; aussi noussommes accablesde besogne. Cela ne m'empeche cependant pas de consa- crer une partie de ires nuits a un travail qui pourra etre ties utile au pays et qui est lout a fait dans mes gouls. Je fais un vocabulaire des langues senegalaises. II renfermera 2000 mots, les plus usuels, el 500 pbrases d'un usage ordinaire, en francais, en ouolof de Saint- Louis, en serere du Baol, en toucouleur (peul) du Fouta, en bambara du Kaar'ta, ea mandingue du Bambouk, en sarakole de Galam , en arabe senegalais (caracleres arabes et francais), en berbere senega- lais (idem) , en arabe regulier (caraeteres arabes seu- lement); e'est-a-dire , on toutes les langues que Ton parle de Saint-Louisa Segou ; plus une grammaire ( 272 j sominairo de chacune de ceslangues; quelques ren- seigncmcnts geograpbiques stir ces differcnts peuples et une carle; ce travail esl deja fait aux deux liers. Com me res ul la Is generaux de mes eludes sur ces langues, jc vous dirai que l'ouolof et le seiere sont deux langues identiques quaul aux grammaires. Los mols sont differcnts. Le bambara et le sarakole appartiennenla une meme famille. Le mandingue, le kassonke. ne sont que des dialectes barn bar as. Le peul ou loucouleur esl une langue magnifique qui n'a aucunc espece de rapport avec les langues ne- gres qui I'entourent. Ln des signesles plus frappants de cette difference , e'est que les pi Uriels y sont lout a fail differents des singuliers. Cette langue est tres ri- clie et au moins aussi douce que l'italien, etc. Signe L. Kaidheiibe. REGIT DE LA BATA1LLE D'ISLY, EECUEILLI AU SENEGAL PAR M. LE CAl'ITAINE DU GENIE EAIDUERIIE. On s'est quelquefois preoceupe de savoir ce que devaient penser les peuples de i'inlerieur de l'Afrique de nos conquetes dans le nord de ce continent. Les caravanes du Ma roc, de Tunis et de Tripoli, qui sil- lonnenl peniblement le desert, portent aux noirs. avec leurs marcbandises, des recits tardifs, et denatures par ['imagination et la mauvaise foi arabe, des grands evenements qui s'accomplissent dans le nord. ( 273 ) Voici uu curieux recitde la bataille d'lsly que nous avons trouve sur les Lords du Senegal. Ce fragment d'histoire a la maniere arabe est inti- tule : KliaLar el mchadjarati ellati ouaqaat baina el meslimina oua el nacara; c'est-a-dire : Nouvelles des demeles qui ont eu lieu entre les musulmans et les Chretiens. II commence parces niols : Dbabaroua ala el meslimina min aindi el djazairi oua kharadjour ala oudja etc. En voici une traduction : « Vainqueurs des musulmans d'Alger, les Chretiens se portercnt sur Oudja et s'emparerent de tous les musulmans qui s'y trouvaient. lis avaient Fait cliretiens quelques hommes des troupes de Mahi-el-Din (Abd- el-Kader). » Ces nouvelles etant arrivees aux oreilles de l'iman Moule-Abd-er-Rahman, il parlit de Mrakech (Maroc) pour Rabath, expedia un envoye a l'iman de Tafilet, l'iman el Hassan , caid, et a ben Amhaouch, caid d'Atamen, et mil a la tete de ses armees trois de ses fils : Sidi-Mohammed, Moule-Sliman et Moule-Ahmed. L'armee de Moule-Alnned etait d'un peu plus de 75 000 homines, et pourtant e'est le plus jeune des Irois freres, el son armee etait la moindre des trois. » lis marcherent au-devant des infideles et leur li- vrerent balaille. Les chreliens employerent centre eux les perfidies les plus insignes, mais sans succes. Ainsi, ils leur envoyerent une mule en hois qui etait pleine de poudre et de balles; les musulmans ne la regar- derent seulement pas, et pourtant il y avail sur son dos une ties grande ijuantite d'or. Ils envoyerent encore a Sidi Mohammed une figure d'hoinme en or, ( 274 ) et c'etait aussi une machine de guerre; Sidi-Moham- tned ne se retourna seulement pas sur elle. » Los armees etant rangees en balaille, on en vint aux mains; les musulmans lachcrenl pied et il s'en (it un grand carnage; il y en eut 9 700 de tues ( aveu extraordinaire, mais que \ient corriger la phrase suivanle ) ; lcs Chretiens avaient mis en avanl les musulmans qui elaient avec eux. On (lit ([lie 1'iman Mouleahd-cr-Rahman se mil en colfere contre son ills Sidi-Mohammed, et lui envoya l'ordre de revenir; Mohammed lui fit repondre de ne pas croire que les chretiens 1'eussent complclcmcnt baltu. » Le caid ben Amhaouch, qui a des armees telle- ment nomhreuses qu'on ne pent evalucr leur hombre qu'apres reflexion , se Irouvant en presence de Sidi- Moharamed , lui dit: laisse-nous f.iire avec les Chre- tiens jusqu'a ce que nous ayons tons peri jusqu au dernier. Sidi-Mohammed se facha contre lui et lui repondit : Tais-toi, ce n'esl pas la ta place, landis que c'est la noire a nous. » Son pere Moule-Ahd-er-Rahman lui envoya dire qu'il ne s'y prit plus comme il l'avait fail la premiere fois, mais qu'il eut soin de divisor son armee en trois corps, deux pour les ailes et le plus considerahle au centre. II fit airiM et les chretiens prirent la fuite. On en fit un grand carnage et ils furent presque tous tues. » Louangcs a Dieu inaitie des mondes! » Les musulmans cernercnl les chretiens et les tin- rent enfermes dans la ville d'Alger; leinir des chre- tiens (le gouverneur) envoya aussilot vers leur iman (le roi) pour le prier d'cnvoyer a son sccours une ( 275 ) artnee considerable. L'oflicier envoye sortit et parvint a passer. C'etait un muSulman qui s'elait fait chrelien; il vint trouver l'iman Sidi Mahi-ed-Din, et lui fit part de ce qui se passait. II lui annonca aussi qu'il fallait vingt-cinq jours pour recevoir de France les secours demandes; par le fait on n'en mil que quinze. » Mahi-ed-Din alia trouver Sidi-Mohammed , il lui fit part de tout cela et lui demanda un secours de h 000 homines ; apres lui avoir racont£ en detail loutes les affaires, il lui dit : donne-inoi encore h 000 Arabes, et Sidi-Mohammed lui repondit : je te renforcerai d'autant d'bommes que tu le voudras ; mais Mahi-ed- Din repondit : c'est assez comme cela, et il obtint ce qu'il avait demande. » Son armee etant ainsi augmentee, il 1'embarqua sur un grand nombre de navires et il observa la route par oil devaient arriver les Chretiens. Les musulmans restaient sur mer pendant la nuit el passaienl le jour a terre. lis rencontrerent enfin sept a huit baliments, s'en emparerent et les mirent au pillage. lis y trou- verent beaucoup d'bommes et Zi00 femmes. Quatre de ces femmes moururent de desespoir. Les musulmans prirent des richesses telles qu'un liorame ne peut pas les evaluer, mais Dieu seul. Mahi-ed-Din donna tout a Sidi-Mohammed, et celui-ci envoya -»a son pere le reVit de tout cela, et son pere lui dit de lui envoyer les femmes et les homines de condition, et on les lui envoya. » 11 se trouva parmi eux deux fils du roi des Chre- tiens. Moulc-Abd-er- Rahman donna l'ordrede separer les prisonniers et 1'on en envoya une partie a Fas et une partie a Mrakech. Et les chrdliens resterent bio- ( 276 ) ques a Alger, uu point qu'une poule se vendait trois soullanis d'or, et nn pelit pain, trois douros. El lour emir envoy a quelqu'un a 1'iman des musulmaus, Moule-Abd-er-Rahman, pour le saluer el lui payer la djezia (la continue, comine traduisent les Senegal ais) et lui demander qu'il laissal parlir les prisonniers. L'iman repondit : si les Chretiens so r tent de ines mains, ils sorliront par Souira. Linlidele repondit : non, parce qu'il y a a Souira des Anglais et que les Anglais sont nos ennemis. » El le roi des cbrelicns envoya de nouveau a 1'iman Abd-er-Rahman pour ravoir ses deux tils, en promet- tant de renvoyer lous les prisonniers musulmans, et en demandant un traite de paix, et l'iman y consentit. Les chretiens renvoyerent lous les musulmans qui etaient enlre leurs mains et, quand ceux-ci arriverent, on vit que les femmes avaient les mamelles coupees ! » Voila comment nos demeles avee Abd- el -Rahman sont racontes dans l'Afrique centrale; voila ce que croient naivement ces bons negres fraichement con- vertis et fanalises! On plaisanle en Algerie sur l'abus qu'on a quelquefois fait du bulletin ; avouons qu'en cela nos Arabes sont nos maitres. Nous avons enlendu, en I8/16, un Arabe marocain raconter ainsi la bataille d'Isly : « Sidi-Mohammed etait alle avec son armee faire une partie de chasse a quelque distance de son camp; le marecbal Bijou arriva en tapinois et lui prit son parasol el sa tente; quand Siili Mobammed revinl, il poursuivit les Fran- cais, mais ne put les alteindre. » Cette version qui transforme le marecbal Bugeaud en un simple voleur de parapluie, est vraiment le sublime du genre. ( 277 ) De ce qui se passe aujourd'hui sous nos yeux, con- cluons Lien qu'on doit niellre en grande suspicion, plus meme qu'on ne l'avait encore fait jusqu'ici, les documenls historiques arabes. Des Iiistoriens francais ont mis en doute la defaite des Sarrasins par Charles Marlei, parce qu'on ne trouve pas de traces de cet evenement dans los chroniqueurs arabes. Ces Iiistoriens n'eussenl pas attache aulant d'importance a cette consideration s'ils eussent vecu seulement un an en pays musulman. Rien n'egale l'impudente mauvaise foi des musul- mans quand les prejuges religieux sont en cause. Comment en serait-il aulrement d'une doctrine qui erige le mensonge en devoir et en general tous les crimes en ceuvres meritoires, quand il s'agit de l'in- leret de la religion; d'une doctrine qui annule la raison devant la foi? Quand je clisais a quelque Marabout senegalais : tu me connais ; m'as-tu vu mentir quelquefois? — - Jamais. — Me crois-tu capable de le faire? — Non. — Les Arabes mentent-ils, eux? — S'ils menlent ! a tel point que menteur et Arabe , c'est le meme mot dans notre langue ouohfe. — Eh bien , moi, qui te parle, j'ai vu ces evenements; j'etais la et je t'affirme que, loin d'avoir possede une flotle nombreuse, Abd- el-Kader n'a jamais eu une simple pirogue, par la bonne raison qu'il n'y en a pas en Algerie. Crois-tu maintenant qu'il ait pris une escadre de 8 fregates a vapeur comme celles que tu vois la en rade, avec leurs obusiers de 80? — Oui, parce que je suis musulman. — Mais pourtant, tu es Francais, toi, homme de Saint- Louis. — Moi, Francais! non, je suis musulman ! ( 278 ) Et c'est bien cela, pour le vrai musulman ; les divi- sions qu'etablissent entrc Us homines les differences de nationalities , de races ou de couleurs disparais- senl; les divisions poliliques du globe n'existent pas ou ne sont que des accidents passagers. lis voient les choses de la lerre d'un point de vue plus eleve : les hommes sont par eux classes en deux categories: les musuhnans, qui out loujours raison et qui iront tons en paradis quoi qu'ils fassept ; et les infideles, auxquels il faut nuire le plus qu'on peut, et qui seront tous brules elernellement quelque bons qu'ils soient. Ces gens-la en sont sur cette matiere absolument au meme point que les chretiens du moyen age. Les tor- tures individuelles qu'ils font subir aux malheureux Europeens qui tombent entre leurs mains, c'est l'in- quisition mise a la port6e de leur etat social. Dieu merci, ces idees atroces ne souillent plus l'Europe; il serait bien a desirer qu'on pul les extir- per de l'Al'rique. Un peuple qui, miserable comme il est, se pose sur la lerre comme l'ennemi de tous les autres, qu'il con- fond dedaigneusement sous la denomination d'infi- deles, doit etre, d'apres son desir meme, traite comme l'ennemi de l'humanite et traque comme une bete fauve. Les croisades contre le fanalisme intolerant, cruel et metlant obstacle aux progres de la civilisation et du commerce, seront to uj ours des entreprises louables aux yeux de toute religion eclairee et de la philo- sophic Certes, la persecution contre lesmusulmans soumis etdesarmes de l'Algerie , qui, dans les vilies suitout, ( 279 ) commencent a se preter aux tentatives de civilisation que nous mellons a leur porlee, serait odieuse, impo- litique et desapprouvee de tons. Certes, nous aurions tort de nous laisser influencer par le sentiment religieux clans les questions de po- litique europeenne , a regard de la Turquie et de l'Egypte, de ces Etats musulmans ou toules les religions trouvent une protection sufhsante , ou les gouverne- menls s'efforcent d'arracher du cctur de leurs sujels cetle haine absurde contre les Chretiens. Mais il serait deraisonnable et lache de supporter le mepris el lesmauvais traitements de ces hordes sauva- ges etferocesdu desert et de leurs neophytes noirs, de laisser leur doctrine s'etendre sous nos yeux, etetouf- fer les germes chretienset civilisateurs que les nations de I'Europe out deposes le long de la cole d'Afrique. Relevons les noirs idolatres inoffensifs que les Ara- bes foulent iiupiloyablement aux pieds, crions haro sur le Koran, qui seme en Afrique la haine parmi les hommes el substiluons-lui l'Evangile, qui secourt le Samaritain blesse. CONFEREiNGE MARITIME POUR L'ADOPTION D'UA SYSTiiME UNIFORME d'oBSERVATIONS METEOROLOGIQUES. Depuis longtetnps on songe a la necessite d'etablir un systeme commun de notations geogiaphiques, sans que, jusqu'a present, les savants aienlpu reussir a faire adopter leurs idees. Le recueil de la Societe de geogra- ( 280 ) phie de Paris retiferme a cet egard plusieurs plans ou documents qui n'ont pas laisse d'altirer l'atlenlion, en meme temps qu'ils revelaient les difficulty attacbees a I'entreprise (1). II est surtout difficile, mais non im- possible, de s'entendre sur un meridien eommun. On pourrait le faire dans une sorte de congres scientifique des principal es nations de 1'Europe. Les notations pour 1' altitude, pour les sondes marines, pour les mesures tberinometriques et barometi iques, pourraient egale- ment y etre adoptees. On est parvenu recemment a un pareil concert, pour les mesures sanilaires, comme on I'avait fait, a la fin du siecle dernier, pour I'etablisse- ment d'un sysleme metrique, Ibnde sur la grandeur absolue du meridien terrestre (2). II y a lieu d'esperer que le nouvel exemple qui vient de se produire Tan dernier aura d'heureuses consequences pour la reali- sation d'un plan que les savants appellent de tous leurs vceux : il s'agit de la conference maritime lenue a Bruxelles pour inlroduire, a la mer, un sysleme eom- mun d'observalions meleorologiques. La facilile avec laquelle cette tentative a ete realisee , le succes qu'elle proinet dans un avenir procliain, les resullats impor- tant qu'on a droit d'en attendre, tout nous engage a donner ici un apercu de la conference de Bruxelles. II n'est peul-etce pas inutile de dire, d'abord, que la (1) Voyez: Bulletin. .\'' serie, t. I, p. 206; et ?.e serie, t. Ill, p. 1 45; t. VII, p. 25 1 ; t. VIII, p. 81. Dans le premier de ces articles, je pro- posals d'ouvrir un congres a Berlin, Heme ou Bruxelles, lieux qui ne pouvaient eveiller aucune susceptibilite d'amour-propre national. (2) Btalgre les avantages inconiestables de ce sysleme, on ne compte guere queqnatre nations qui I'aient mis en pratique en lout on in partie: la France, le Piemont, I'Espagne, la Belgique. ( 281 ) reunion devait avoir lieu a Paris; c'etait 1'inlention du gouverneinent des htats-Unis, ou du moins elle etait exprimee dans one lettre d'initialive, ecrite ici aM. Ro- bert Walsh par M. le lieutenant Maury, directeur do l'observatoire cle Washington. Celte lettre exprimait le voeu que l'Aeademie des sciences prit cette affaire en main;mais, l'invifation etant indirecte, la commu- nication n'a pas eu de suite. Le gouvernement americain avail ele provoque, dans le principe, par une demarche du gouvernement an- glais, ayant pour but d'etablir un mode d'observalions meteorologiques commun entre les deux nations. Le premier repondit que, deja, les marins des Etats-Unis avaient recu des instructions pour faire ces observa- tions sur un plan uniforme; bientot surgit une idee plus etendue, plus liberale , c'est-a-dire celle de l'ela- blissement d'un systcme pared avec l'intervention de toutes les puissances maritimes. Quoi qu'il en soil, M. le lieutenant Maury, voulaut arriver promptement au resultat qu'il poursuit depuis longtemps, c.-a-d. au moyen d'ameliorer la navigation par la connaissance exacte des vents et des courants (l),a saisi une occasion favorable qui se presentait pour ouvrir une conference a Bruxelles, ville egalement voisinc de Londres et de Pa- ris. Sans retard, des delegues ont ete designes dans ces trois pays , aiusi qu'en Danemark, en Suede, en Norvege, en Pmssie , dans les Pays-Bas et en Portugal; (i) Tout le moiule connail les cartes des wills et courants que ce savant a publiees dans ces dernieres anue.'s, et dont on fait deja usage avec grand profit pour abreger la navigation entre New-York et Rio-Janeiro. ■ ■ ■ VII. MARS ET AVRIL. 9. 19 ( 282 ) en tout, dix pa\s, represented par doufce personncs, savoir : deux [tour la Belgique, deux pour la Grande- Bretagrie ot uno pour chacune des huit aulres na- tions (1). La premiere reunion a eu lieu le 23 aout et le derniere le 8 septenibre, de manierc que le resultat ne s'esl pas fait atten Ire, grace a l'aclivite, a la haute in- telligence ct au devouement de M. le lieutenant Maury. 11 aura contribue par la, puissannnent , a lever les obstacles qui peuvent s'elever encore contre la forma- tion des cougres scientifiques pour un objet determine, surtout pour ce qui regarde les notations en matierc de geographic : que M. Maury recoive, a cette occasion, nos felicitations et nos rernerciements. Ce qui va suivre est tire d'une publication recente laite a Bruxelies, en francais et en anglais (2), sous les yeux de M. Quetelet. Personne n 'ignore quu le sa- \ a 1 1 1 direcleur de l'observatoire royal de Bruxelies est 1'un des observateurs les plus assidus et les plus verses dans i'etude des fails meteorologiques et magnetiques el de tous les phenomenes qui se passenl dans l'al- mosphere; aussi, la reunion i'a-t-elle nomine son president a 1'unanimite. Le but que se proposait M. le lieutenant Maury, en provoquant cette conference, est clairement delini dans les phrases suivanles qui einanent de lui : « II est » adesirerque les marines de toutes les nations soient (i) 11 ne manquait a la Conference e. Les Anglais ont aussi trouve beaucoup de pierres portant des in- scriptions assyriennes , chaldeennes et en ecriture cuneiforme, et, ce qui est surlout remarquable , c'est qu'on rencontre quelquefois reunies sur la meme pierre des inscriptions composees dans ces trois langues. M. Rawlinson ne manquera sans doute pas d'envoyer en Europe toutes ces belles trouvailles. ( 293 ) AFRIQUE. NOUVELLES DE l'eXPEDITION DU DOCTEUR VOGEL. (lixtr. tie I \ Athenaeum .) Des communications du docteur Vogel, dat^es clu 13 novembre 1853, d'un lieu qn'il nomine Shimotetsen, sont parvenues a Londres. Le docteur Vogel et ses compagnons elaient arrives en bonne sante a cette place (qui paralt etre situee presde Bilma, dans le pays des Tibbous), apres une marche difficile eldangereuse d'environ trois semaines, depuis leur depart de Teg- gbery, le point le plus meridional du Fezzan. «La con- tree que nous avons laissee derriere nous, dit le doc- teur Vogel, est une affreuse region, ou Ton ne voit que clu sable et de noirs rochers de gres, sans aucune trace de vegetation sur une etendue de 600 milles, maisque nous avons beureusement traversee saus que notre sante en souffrlt et sans perdre un de nos cha- meaux. Ici, nos yeux ont ele recrees par les premiers arbres verts que nous ayons rencontres depuis notre depart de Teggbery ; nous y ferons une halte de trois jours pour donner a la caravane un repos general et nous procurer les approvisionnements de far i he et de beurre qui nous sont n£cessaires. Nous ne sommes plus actuellement qu'a dix-sept jours de marche des bords du lac Tchad. J'ai pu continuer ines observa- tions de la meme maniere que dans la premiere partie de notre voyage. Mes barometres m'indiquent que nous sommes toujours sur un plateau qui a une ele- vation moyenne de 1 300 pieds (anglais) au-dessus du niveau de la mer. C'est le grand plateau du nord de ( 294 ) l'Afrique, qui commence sur notre route a Sukna (Sokua) ei aux monlagnes Noires, et s'etend sur un niveau presque completement unit'orme jusqu'a notre station actuelle. II n'est entrecoupe qu'une seule fois, sous le 22* parallele de latitude nord , par une chaine de collines qui atteint la hauteur de 2 ZiOO pieds. (C'est probablement la chaine traversee par Oudney, Denham et Clapperton, a la passe d'El-Wahr.) Mais a Test du point oil nous sommes, dans le Tibesly, il doit y avoir de haules chaines de monlagnes , parce que le vent qui vient de cette direction est ires froid. » Le docleur Vogel se loue beaucoup de l'extreine bienveillance que Hayje-Akson, le prince de liornou, a teinoignee aux voyageurs, et des soins qu'il a pris pour leur surete et leur bien-etre; c'est sous sa protection qu'ils traversaient le desert, lis s'etaient aussi attire l'amitie du sultan des Tibbous. lis out pris avec lui des arran- gements pour la transmission, a travels son territoire, de leurs futures communications de l'Afrique centrale. VOYAGE DE M. ANDERSON. M. Charles Anderson qui annonce son arrivee au 2e degre 56' de latitude S. et a 20° lib' de longitude E. de Paris, par une lettre du 11 novembre, promet a l'Academie des sciences de Stockholm un rapport sur ses decouvertes en hisloire nalurelle. C'etail le compa- gnon <-le M. Francis Galton dans le voyage chez les bamarasj il paralt qu'il s'est tlirige au nord nord-est, en le quittant, et qu'il a fait h a 500 lieues depuis. ( 295 ) Actes dc la Soci£t£. EXTRAITS DES PROCES-VERBAUX DES SEANCES. Seance du 3 mars ISbh. PIuisiDENCE DE M. JOMARD. Le proces- verbal do la demiere seance esl lu et adopts. Le secretaire general donne lecture de la corres- pondance. M. Aug. Michelot adresse ses remerciments a la Commission centrale pour le titre de membre adjoint qu'elle lui a accorde. M. Amyot, libraire , annonce qu'il s'occupe de la publication procbaine des oeuvres de Napoleon III, en li volumes in-8°. M. Rupfl'er, direcleur de l'observatoire pbysique central de Russie, accuse reception du tome IV de la h* serie du Bulletin de la Societe. L'e tat-major du corps des ing^nieurs des mines de Russie adresse un exem- plaire des Annates de l'observatoire physique central pour l'annee 1850. M. le baron de Ilammer-Purgstal transmet un ar- ticle sur la coupole d'Arine ; la lecture de ce document interesse vivement l'assemblee, qui renvoie le memoire a M. Sedillot et vote l'insertion au Bulletin. M. Sueur-Merlin, ancien membre de la Commission centrale, fait bommage, au nom de feu M. le comte ( 296 ) de Cassini, d'un atlas compose de la carte ou sont in- diques tons les lieux de la France qui ont ele deter- mines par des operations geometriques ; M. Sueur- Merlin fait remarquer, dans sa leltre d'onvoi, que les feuilles de cette carte ont ete cboisies parmi les pre- mieres epreuves, et qu'elles sont parfailement con- servees. Des remerciments empresses sont votes au donatcur, ancien membre de la Societe. M. Gamier transmet une leltre de M. Hecquard , consul de France a Scutari (Albanie), et membre ad- joint de la Commission centrale, qui offre de donner des renseignements sur l'Albanie. La section de cor- respondance est invitee a preparer des questions, qui seront adiessees a M. Hecquard. II est donne lecture de la lisle des ouvrages offerls a la Societe. M. le president communique la lisle des rapports a faire sur les ouvrages offerts a la Societe; il raj)pelle a MM. les rapporteurs l'engagement qu'ils ont pris de presenter leurs coinptes rendus, et il insiste sur l'interet et la convonance qu'il y a a ne pas les faire atlendre trop longtemps. A l'occasion de l'ouvrage sur Ethicus, publie par M. d'Avezac et confie a l'un de MM. les rapporteurs, M. d'Avezac cite avec eloges des publications recem- ment faites sur le meme sujet par M. Petersen, de Ham- bourg, et par M. Cbarles Pertz, fils du savant edileur des Monumenta Germanice historica ; il signale, dans le livre de M. Cbarles Pertz, des apercus ingenieux sur l'existence reelle et la nationalite slave d'Etbicus Hister, et sur la legitimile d 'attribution a saint Jerome de la version latine publiee pour la premiere fois par t\ ( 297 ) M. d'Avczac. Le raeme membre parle aussi d'un cu- rieux travail de recensement et cle classement genea- logique tente, par M. Charles Perlz, de tous les ma- nuscrlts connus de I'autre cosmographie vulgairement designee sous le nora ftEthieus; mais il ne peul sou- scrire a la conclusion qui presenle les redactions les plus completes de cetle compilation comme des edi- tions successivement amplifiees des Excerptorum ex- cerpta qui conservenl de second e main le nom de Julius Honorius : il suffit, ajoute .Ai. d'Avezac, de metlre en regard les diverses recensions, pour etre frappe au contrairc du procede de mutilation, d'abreviation et de condensation dontles redactions successives portent en elles-memes les traces manifesles. La premiere seance generale de l'annee 185/| est fixee au vendredi 7 avril. M. Jomard fait un rapport verbal sur le concours au prix annuel, au nom de la Commission de ce prix. II s'agit des decouverles geographiques les plus remar- quables cle l'annee 1851 : M. le rapporteur mentionne les voyages de MM. Barth , Gallon, Rae , Kennedy, Inglefield, Hecquard, elc; la Commission conclut que la Sociele doit decerner la grande medaille d'argenl au docleur Barth pour son voyage au paysd'Adamowa, dans l'Afrique centrale, et la meme medaille a sir Francis Galton pour ses explorations clans la partie sud-ouest de l'Afrique australe. M. Corlambert entretienl l'assemblee de la perle que la Societe vient de faire dans la personne de l'amiral Roussin , l'un de ses presidents honoraires ; les profonds regrets de la Societe seront exprimes vir. mars et a vim,. JO. 20 ( 298 ) thms la notice annuelle dc la deuxieine asseinbl&i generale. Le memo membre annonce le relnur prochain en Fiance do M. de Monligny, consul a Chang-bai. I'llli.MDI .NCI- DE M. JOMARD. Seance du 17 mars 185/i. Le proces-verbal de la derniere seance est In et adopte. Le secretaire general donne lecture de la correspon- ilance. line circulaire de M. le ministre de l'inslruction publique annonce a la Societe qu'il est publie par les soins du ministere un Bulletin des Soeietes s uv antes , el il la prie d'envoyer, pour elre analyses dans ce Bulletin, deux exeniplaires des bulletins, meinoires, comples-rendus et autres travaux publics par elle, avec les programmes des prix qui auiont ele proposes. II demande, en outre, qu'on veuille bien lui faire parve- nir, a defaut des ouvrages de la Societe, s'ils sont epui- ses, une note exacte des dillVrents travaux qu'elle a publies depuis son origine. Ln programme du Bulletin, des Societes savanles est joint a cette circulaire. M. Anatole Vaquez ecrit pour remercier la Societe de l'avoir admis au nombre de ses menibres; il lui otfre le concours de son zele et de son devouemcnt. M. Sniytb, secretaire de la Sociele royale de Lon- dres, accuse reception du tome V de la Ue serie du Bui lei in. M. de la Roquette communique une lettre de M.Op- ( 299 ) perl, relative surtout aux mesnres des ancions Baby- lonians, a l'etendue de Babylone et a ('emplacement des jardins suspendus, que ce voyageur croit avec cer- titude retrouver sur la colline d'Amran. M. Cortambert communique l'extrait d'une lettre de ML Coulier, qui adresse a la Societe une note sur les couches saliferes du globe. M. Jomard annonce la mort de M. Beautemps- Beaupre, un des membres fondateurs de la Societe. La perte de ce savant geographe et hydrographe est vivement ressenile par l'assemblee. Une notice bio- grapbique lui sera consacree dans le compte -rendu annuel du secretaire general. M. le president fait connaitre l'ordre du jour de la seance generale qui doit avoir lieu le 7 avril. M. Jomard, au nom de la Commission du concours au prix d'Orleans, rend compte des rechercbes de cette Commission sur l'importation la plus utile a l'agiicul- ture, a l'induslrie et a l'humanite. Le rapporteur con- clut a ce qu'il soit decerne une medaille d'encourage- ment a M. de Montiguy pour ses envois de graines de la Chine, dont plusieurs ont reussi en France et en Algerie; d'un rappel de medailles a M. Cb. Renard, pour les procedes agricoles ou industriels qu'il a com- muniques, et a M. Jules Itier, pour les plantes textiles qu'il a naturalisees en France et en Algerie. M. Hippolyte Fortoul, ministre de l'instruction pu- blique, presente par MM. Jomard et de Pongerville, est admis dans la Societe. M. Demursay, presente par MM. Jomard et Gamier, est egalement admis. M. Sedillot rend compte de l'examen qu'il a fait de ( 300 ) la communication de M. de Hammer sur la coupole d'Arine. II joint a cctle communication une note qui sera inseree au Bulletin en meme temps que cello de M. tie Hammer. Le secretaire general lit le memoire de M. Coulier sur les couches saliferes du globe. M. Cortambert entretient la Societedes limites don- nees au Paraguay par des documents qu'il tient du general Lopez, president de cetle republique. Ces li- miles seraienl bien plus reculees qu'on ne le croit generalement, surtout vers l'ouest, on elles compren- draient lc Grand Chaco. M. Alfred Maury fait remarquer que les limites de plusieurs des republiques de l'Amerique meridionale sunt tres vagues et tres indeterininees. M. Demersay donne quclques developpements surle meme ?ujet, et dil qu'une extreme confusion regne dans Its frontieres des Etals du sud de l'Amerique. Le meme membre fait connaltre des nouvelles recentes qu'il a recues de M. Bonpland. M. Jomard annonce le depart prochain de Brest de In Sibylle, et d'autres batiments destines a explorer les mers du Japon. Seance general e da 7 avril 185 A. PRfeSIDKNCE DE M. LB VICE-AMIRAI. I.A PLACE. M. le president ouvre la seance par une allocution qui est accueillie tie rnssemblee avee le plus vif interet. On remarque, parrai les assistants, lesquatreChipois ( 301 ) qui out accompagne en France M. de Montigny, consul de France a Chang-hai, presenles par ce consul. Le proces-verbal de la derniere assemblee generale est lu et adopte. On communique la correspondance. M. Hippolyte Forloul, ministre de l'instruction pu- blique, adresse ses remerciments pour sa nomination de membre de la Sociele. M. Paulin Talabot ecrit qu'il oii're a la Sociele une somme de cinq cents francs, applicable a ['ameliora- tion du Bulletin, et surtout a la publication des carles qui presenleraient le plus d'interet. M. le colonel Fiscber offre, au nom de MM. de Moltke, de Vincke et Kiepert, el au sien, une carte de l'Asie Mineure en (3 feuilles, ainsi que les plans qui s'y rat- tachent. Sa lettre, pleine d'interet et de details sur la construction de la carle, est renvoyee a la Commission cenlrale. M. Alexandre Valtemare fait bommage d'un exem- plaire de la letlre qu'il a adressec au senat des Elals- Unis pour lui proposer l'adoption du systeme francais des poids, mesures et monnaies; lettre accompagnee d'un memoire de M. Silbormann sur les poids et me- sures, d'un autre de M. Luzani sur les monnaies, et d'une lettre de M. Mann, citoyen des Etats-Unis, sur le systeme metrique el decimal. M. Vattemare ajoute qu'il reitere a la Societe ses ofl'res pour les ecbanges inlernationaux; qu'il a en ce moment un nombre assez considerable de carles de l'Amerique et des Indes, et qu'il s'empressera de fournir celles qui pourraient manquer a la collection de la Sociele. M. le chevalier Marzolla, ingenieur topograpbe de ( 302 ) la guerre du royaume de Naples, envoie plusieurs di- scs cartes a la Societe, particulieivmeni des cartes de 1'Amerique et des provinces tin royaome tie Naples. M. Norton-Shaw, secretaire de la Societe googra- phique de Londres, accuse reception du tome V de la h' serie du Bulletin de la Societe de geographic el de diverse* notices envoyees par MM. Jomard * de la Roquette ct Cortamhert. M. Josej)h Henry, secretaire de I'lnstitution Smithso- nienne, accuse reception du tome III et du tome V de la h' serie. M. Drouyn de Lhuys, ministre des affaires etran- geres, exprirne son regret de ne pouvoir assisler a la seance, a cause des occupations multiplies qui le retiemient. M. Cadet, professeur au college de Soissons, et re- cemmenl admis dans la Societe, deinande des instruc- tions pour un voyage qu'il doit enlreprendre l'hiver prochain en Corse, dans le hut, surtout, d'ohserver les c'langs et les marais de la parlie orientale de cette ile. M. bk Bruiian, presents' par MM. de La Place et Jomard, est admis dans la Society. M. Pontelli fait hommage d'un portrait de Fernand Cortez, lithographic d'apres un tableau conserve a Mexico et auquel on altrihue la dale de 1527. On donne communication de la lisle des ouvrages oflerls. M. Jomard fait remarquer que, parmi ces ou- vrages, se trouvent : 1° Le grand travail pub lie tout recemment par M. Augustus Pelennann stir l'expedition acluelle de l'Afriquc cenlrale, accompagne dune leltre du meme a la Societe royale geographique de Londres, iulilulee ( 303 ) African discovery; — 2° une slatisliquc manusciile des Acores, ouvrage de M. de Moura et presenlee par M. de Montigny ; — 3° une notice de M. Jules Ilier sur la naturalisation des plantes textiles de la Chine. M. de la Roquette depose plusieurs ouvrages de la part de MM. Perrotin , le general Zarco del Valle el Bianchi. M. d'Avezac lit, pour M. Alfred Maury, une notice sur les populations primitives de l'lnde. M. Maury examine particulierement, dans ce travail, les popu- lations qui hahilaient vers le Brahmapoulre , dans les monts Garros etl'Assam, el qui parlenl, les unes, les langues derivees du Sanscrit, les aulres, les langues tamoules. M. Jomard, au nom d'une Commission speciale, fait un rapport sur le concours annuel pour la decou- verte la plus importanle en geographic II rappelle que ce sont les voyages de 1851 qu'il s'agil de juger cette annee : apres avoir signale avec eloge les voyages faits dans les mers arctiques par le docteur Rae, le capilaine Penny, lecapilaine Kennedy et le lieutenant Bellot, dont la perte est si douloureuse , ensuite ceux de M. le comte d'Escayrac et de M. Hecquard en Alrique, il a particulierement insiste sur l'importancc des decouvertes de M. le docleur Barth dans l'Ada- mowa et a la riviere Benoue, et sur celles de sir Fran- cis Galton dans 1'Afrique sud-ouest, aux pays des Damaras et des Ovampos. Sur les conclusions du rap- porteur, la Suckle decerne ses grandes medailles d'ar^i'iil a MM. Barth et Gallon. M. Jomard lit un second rapport sur le prix, dit d'Orlcans, ollert pour l'impoilalion la plus utile a ( 304 ) I'agriculture, a l'iiulustrie on a l'humanite. II conclut qu'il y a lieu de decerner : 1° une medaille a M. de Montigny, pour ses envois de graines de la Chine, donl plusieurs ont reussi dans le midi de la France, notam- ment lc chanvre et la canne a sucre du nord de la Chine; 2° un rappel de medaille a M. Charles Renard, pour avoir communique plusieurs procedes agricoles et industriels, ainsi qu'a M. Jules Itier, qui a naturalise quatre plantes textiles en France et en Algerie. j\J . de la lloquetle lit une notice biograpliique sur le colonel americain Poinsett, ancien corrcspondanl de la Societe, qui s'est distingue a la t'ois par les ser- vices politiquos rend us a son pays ct par des travaux geographiques esthncs, tels que la description du Perou et celle du Mexique. M. Cortamhert lit un Parallels de la geographic et de Vhistoire ; il cherche a prouver, dans ce travail, que la geographic n'est pas seulemcut un des organes de l'histoire; qu'on a tort de la classer communement dans les sciences historiques; que c'est une science a part, d'un ordre parfaitement distinct j il essaie de montrer tout 1'interet , toute l'importance de cette etude. M. Malte-Brun lit une notice historicjue et geogra- phique sur la Nouvelle-Caledonie. La Societe procede aux elections de son bureau pour l'annee 185/i-lK55. Soul noinmes : president, M. Hip- polyte Forloul, ministre de l'inslruction publique ; vice-presidents, MM. Guigniaul et Lelebvie-Durufle ; secretaire, M. Michelot; scrutateurs, MM. Duchanoy et Fabre. M. l'amiral I. a Place, en levant la seance et en quit- ( 305 ) tant ses t'onctions, prononce quelques paroles d'adieu profondement senties. Un grand n ombre de membres se pressent an lour de lui, et le remercient de son zele el de son devouement pour la Societe. Seance du 21 avril 1854. PRESIDENCE DE M. JOMA.RD. Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adople. On communique le proces-verbal de la seance ge- nerate du 7 avril. II est donne lecture de la correspondance. M. de Monligny adresse ses remerciments a la So- ciete pour la medaille qu'elle lui a offerte. M. H. Fortoul, minislre de l'instruction publique, ecril |)our remercier la Sociele de l'avoir nomme a l'unanimite son president annuel. Une leltre de M. Fabre, nomme scrulateur dans la seance du 7 avril, exprime le prix qu'il attacbe a cette nomination. M. Malte-Brun communique, de la part de M. de la Roquette, une leltre de M. Oppert sur les fouilles qui viennent d'etre l'aites a Kujundjuk (Kouyoundjouk) par les explorateurs anglais. Le secretaire communique la liste des ouvrages oflerls. Parmi ces ouvrages, se trouve la lre livraison de l'allas de France, par MM. Bazin et Cadet. M. Bazin, present a la seance , entre dans quelques explications sur ce travail. M. Jomard donne quelques details sur des antiqui- ( 306 ) tes romaines qu'on vienl du decouvrir dans la \allec de I'Yvette, au hamoau de Lozcrre, vers Palaiseau (le Palatiolum des Mcrovingiens); il exprime 1'opinion qu'un grand nombre de lieux occupes par les He-mains n'ont pas ele menlionnes dans les itineraires anciens. Ces antiquiles se composent de inedailles, tie tuiles a rebord, de meules, de vases, de bacbes el amies de for, etc. — Le in erne membre ajoule qu'apres avoir fait de longues recbercbes pour decouvrir le lieu qu'avait babite Nicolas Sanson vers le milieu du xviic siecle, alors qu'il etait retire a la campagne pits de Palaiseau, il a reussi a determiner celte demeyre du celebre geograpbe, et qu il a fait placer une pierre avec une inscription qui rappelle ce souvenir. M. le president demande a la Commission centrale de vouloir bien decider s'il est utile d envoy cr le bud- get de la Societe a tous les sousciipteurs du Bulletin, ou s'il suflil de l'adresser au.x menibres. Apres une discussion a laquelle prennent part MM. Jomard , Poulain de Bossay, d'Abbadie, d'Avczac et Cortambert, il est convenu que la section de comptabilile sera sai- sie de la question et epie la Commission centrale sera ensuite convoquee specialemenl pour donner une de- cision sur ce sujet. M. le president annonce que la section de corrcs- pondance a ele invitee a se reunir pour donner des instructions a MM. Faidberbe, de Sainl-Cricq, Hec- quard et Cadet, qui les ont demandees pour les ex- plorations qu'ils veulent faire dans diverses contrees. Les membres dela section de correspondance presents a Paris etant peu nombreux en ce moment, M. le pre- sident propose a la Commission centrale de designer ( 307 ) quelques membres pour s'adjoindre momentanemenl aux travaux de cette section : MM. Constant-Prevost , Maury, Michelot et Morcl-Fatio sont, en consequence, pries de participer aux travaux de la section de cor- respondance. M. Cortambert rappelle que M. Vattemare a fait des off res de cartes a la Societe : il demande quelle suite il faut donner a 1'invitation qu'a faite M. Vatte- mare aux membres de la Commission centrale d'aller visiter ces cartes et choisir celles qui pourraient con- venir a la bibliolheque de la Societe. Apres quelques observations de MM. Jomard, d'Avezac et Maury, la Commission centrale charge son bureau de prendre des renseignements. Sont presentes par MM. de Montigny et Jomard, pour faire parlie de la Societe, MM. Lockard, medecin a Cbang-bai; Guill. Ribeiro, vice-consul de France a Fayal (Agores) ; Ant.- Mar. d'Oliveira, chef du bureau sanitaire a Fayal. M. Fontanet, voyageur aux Antilles, est presente par MM. Jomard et Gamier. ( 308 ) OUVRAGES OFFEUTS DANS LES SEANCES DES 3 ET 17 MARS, 7 ET 21 AY1UL 1854. O U V n A G BS. EUROPE. Titres des ouvrages. Donateurs. Archives administrative* et legislatives tie la ville ile Reims, par Pierre Varin. I vol. in-4°. Mm. i>e i.'insiii. pl'UL. Carlulaire de l'abbaye de Savigny, suivi du pelit cartulaire tie lab- baye d'Ainay, par M. Aug. Bernard, i vol. in-j'. Id. Le mont Blanc, oil Description de la vue et des phenomeuea (pie Ton peut apercevoir du souimei du mont Blanc, par A. Bravais. Paris. I petite Lrocli. in-i 2. M. Annus BertraBD, AFRIQUE. Voyage au Soudan oriental et dans I'Afrique septentrionale, par M. Tremaux (eompte-rendu par M. le baron Aocapitaine). In-32. M. le baron Avoapitaire. Campagne de circumnavigation de la fregate Wlrlemhe sous le com- mandement de M. La Place. Tome VI. l vol. in-i8°. M. Arthus Bertrahd. Journal d'un voyage aux mers polaires, execute par le lieutenant de vaisseau de la marine francaise J. -P. Iielloi a la recherche de sir John Franklin en i85i et lSfo. Paris, lS54 • i vol. in-8°. M. Perrotik. Sir John Franklin, the sea of Spitsbergen, and whale-fisheries in the arctic regions, with map, by Augustus Petermann. l brocli. in-8°. M. Augustus Pbtermahk. MEMOIRES, RECUEILS ET JOURNAUX PERIOD1QUES. Annates du commerce exterieur. Janvier et fevrier 1 854 - Mur. i»E l'agric. et du com. Philosophical transactions of the royal Society of London, for the ( 309 ) Titles des ouvrages. Donateurs. year i853.Vol. 1 4 3, part. III. l vol. in-4". London, 1 853. Soc. R. pe Londres. The Journal of the royal geographical Society. Vol. XXIU. t vol. in-8°. London, 1 853. Soc. n. geogr. de Londres. The Journal of the Bombay hranch of the royal asiatic Society. Jan- vier I 853. SOC. R. ASIATIQUE. Annates de l'observatoire physique central deRussie, par A.-T. Kupf- fer, directeur de l'observatoire physique central, pour I'annee i85o. N0' 1 et II. Saint-Pctersbourg, i853. 2 vol. in-4°. — Con)pte-rendu annuel, par le directeur de l'observatoire physique central A.-T. Kupffer. ( Supplement aux Annales de I'observntoire physique central pour I'annee i85o.) I broch. in-4°. OfisERV. PUTS. CENTRAL DE RllSSlE. Bulletin de la Societe ge'ologique de France. Janvier et fe'vrier 1 854- Soc. geol. dk France. Journal de la Societe d'horticulture de Macon. Sept. et oct. 1 853. Soc. d'hort. pe Macon. Extrait des travaux de la Socie'te' centrale d'agriculture du departe- ment de la Seine-Inferieure. 129* et l3oc cahiers. Soc. centrale d'agric. de la S.-Inf. Bulletin de la Socie'te libre d'emulation de Rouen, pendant I'annee 1 85a-i 853. Soc libre d'emulat. de Rouen. Memoires de la Socie'te des sciences naturelles de Cherbourg. I" vol. 3e et 4° livraisons. Soc. des sc. nat. de Cherbourg. Journal asiatique, 5C serie, tome II. Societe asiatique. Precis analytique des travaux de l'Academie des sciences, belles- lettres et arts de Rouen pendant I'annee 1 852-53. 1 vol. in-8°. Acad, des sc, etc., de Rodkw. Bulletin de la Societe industrielle d'Angers et du departement de Maine-et-Loire 24° annee. 1 vol. in-8°. Soc. indust. d'Angehj. Bulletin des Socie'tes savantes, missions scientifiques et litteraires. Fevrier 1 854- — Journal des missions evangeliques. Janvier, fe- vrier et mars 1 854- — L'Athenaeum francais, n" 7, 8, 9, 10, II, 12, l3, 14 et i5 de i854- — Bibliotheque universelle de Geneve. Decembre ] 853, Janvier et fevrier 1 854 ■ — Archives des sciences physiques et naturelles. Decembre 1 85 3, Janvier et fe'vrier 1 854- — Nouvellps Annales des voyages et des sciences geographique*. ( 310 ) Titres des ouvrages. Donateuri. Janvier et fevrier 1 854- — Revue d* l'Orient. Mars et avril i 854- — Revue coloniale. Fevrier et mars 1 854- — Annales de la pro- pagation de la foi. Mars 1 854 - — Journal d'edncation popula'ne. Fevrier et mars I 854- ''Ks ^DffBBBS. MELANGES. Memoire sur la Glycerine et ses applications aux diverses branches de Tart medical. I petite Lroch. in-8". M. Cap. Uber das allgemeine Niveau der Meere. I petite Lroch. in-8". M. Kaiil LiTTnow. Le nouvcau guide de la conversation en francais et en turc, par M. T.-X. Bianchi. 2e edit, i vol. in-4". l'aris, i852. M. Bianchi. Memoir uber die Construction derKarte von Rlein-Asien uud tur- kiseh Armenien in 6 Blat, tvon v. Vim Ice, Fischer, v. Moltke, uud Kiepert. I vol. in-8°. Berlin, I 854- M. KiEPEnr. African discovery. A letter addressed to the president and council ol the royal geographical Society ol London, by Augustus Petermann. i broch. in-8". M. Augustus Petermann. Le prince Galitzin et le lieutenant de vaisseau Uellot. JSotices hiogra- phiques par M de la Roquette. i broch. in-8°. M. de la ROQOETTE. Letter to the honorable Hannibal ILimlin, chairman of the committee of commerce in the United-States senate, by Alexander Valtemare. t broch. in-8". M. A. Vattemahe On an isothermal oceanic chart, illustrating the geographical distri- bution of marine animals. By James 1). Dana. Iu-8°. M. J.-D. Dana. CARTES. EUROPE. Atlas special de la geographic physique, politique et historique de la France, par MM. Francois Hazin et Felix Cadet. P'livr. MM. Basin it Cadet. Great Britain. Distribution of the occupations of the people, (letisus of i85i, by Augustus Petermann. l feuille. M. A. Petehmann. Provinciadi Palermo, Napoli 1 8 5 3 , l feuille. — Provincia di Abruzzo citeriore, Napoli, i 853. l feuille.. — Provincial di Abrbzzo ulteriore 1 et 2. Napoli, 1 853. :>. feuitles. — Provincia di Molise. Napoli, ( 311 ) Titres des ouviages. Donateurs. 1 853. i feuille. — Sicilia, os.-ia Rcali Domini al ili la del Faro. Napoli, i 853. i feuille. M. Benedetto Marzoli.a. Kaite von den Nprdabhangen des Bulgar (Taurus) und Allah-l)agh (Anti-Taurus) zwischen Eregli, INihde und dem Kulek Bogas (Pylas cilicia?) nach der Aufname des majors Fischer, l845. I Feuille. M. Kiepert. ASIE. Carte du royaume de Siam, dressee sous la direction lie Ms1' Pal- legoix, eveque de Siam, d'apres ses itineraires et divers documents, par Charle, geographe, 1 854- i feuille. Mgr Pallegoix. Map of part of Bengal, the Himalaya and Tibet, to illustrate Dr J.-D. Hooker's routes, drawn by Augustus Petermann. London, 1 854- i feuille. M. Augustus Petermann. Rarte von Klein-Asien, entworfen und gezeichnet nach den neuesten und zuvei lassigsten Quellen, hauptsachlicb. nach den in den Jain en i838-i839, von baron von Vincke, Fischer und von Moltke, und i84i-i843, von H. Kiepert. Berlin, 1 844- 6 feuilles. MM. Fischer, de Vincke, de Molke et Kiepert. AFBIQUE. On account of the progress of the expedition to Centra! Africa, per- formed by order of Her Majesty's foreign office, under MM. Ri- chardson, Banh, Overweg et Vogel in the years l85o, 1 85 1 , i852 and 1 853. Consisting of maps and illustrations, with descriptive notes, constructed and compiled from official and private materials, by Augustus Petermann. London, 1 854- ' vo^ hi-f". M. Augustus Petermann. AMERIQUE. Expedition dans les parties centrales de 1'Ainerique du sud, de Rro de Janeiro a Lima et de Lima au Para; itineraires et coupe geo- logique, 1 i% I2eet l3e livraisons; ge'ographie, 1" livraison. M. de Castelnau. Stati-Uniti dell' America settentrionale, coi territorii recentemente annessi. Napoli, 1 854- > feuille. M. Benedetto Ma rzolla. ( 312 ) MKLANGES. Titles ties ouvvages. Donateurs. Portrait de [)" Fernando Cortes de Mourroy. 1846. I feuille. M. Leon dg Portblli. Royal geographical Ralendar for i854, by Augustus Petermann. I feuille. M. AUGUSTUS Pktermasn. Rarte der Umgebung von Angora, aufgenommen von Vincke. 1839. 1 feuille. — Plan der [Jmgegend von Koniali, aufgenommen von Fisrlier, l838. I feuille. — Plan der Stellung bei Biradsdiik und der Schlacbt von Nisib, zur Uebersicht der Regehcnheiten vom 1839, von Moltke. 1 feuille. — Plan von Afium-Kara-Hissar; Plan derUmgegend von Kiutaliia; Plan der Stadt Karaman und Umge- gend ; Situations-Plan der Stadt Brussa, aufgenommen von Fischer. — Plan von Mossul, Samsun nod Urfa, aufgenommen von v Moltke. — Plan von Amasia, aufgenommen von v. Vineke. — Plan des Schlosses Sayd-bei-Kalessi nebst Umgebung; 1'lan der Festung Maraaseh; Plan von Rum-Kaleb; Plan der Ebene von Mesere, aufgenommen von v. Moltke. MM. Fischer, pe Vikcke, de Moltke et Kiepert. ERRATA du numkro de feyrier 185/i. Page too, ligne 3 de la note en remontant: au lieu de : a ceux; lisez : et ceux. Page 117, ligne 2 en remontant : au lieu de : Lagrenee ; lisez; Lagarde. Page 139, commencement de la lettre de M. Oppert : on lieu de : Votre mission ; lisez : Notre mission. BULLETIN l)G LA SOCIETfi DE GEOGRAPHIE. MAI 1854. l&Iemoires, Notices, Documents originaux, etc. DE LA CULTURE DU RIZ EN CHINE, PAR M. RKNAIID, L'uu des dele'gius avec ses mille lieues de tour, source d'inepuisables ri- chesses nalurelles et minerales, encore abandonnees dans les mains de quelques hordes sauvages ; enfin, apres avoir reconnu l'ilot de Gaspard , le navire s'en- gage dans le detroit de ce nom, et Ton navigue alors dansdes eaux paisibles, au milieu d'un grand nombro d'iles et d'llots, pousse par une faible brise, et par les couranls, qui, a l'epoque de la mousson de N.-O., vous entrainent dans cette espece d'entonnoir de la mer de Chine dont la limite est l'ocean Pacihque. En cet endroit, on se trouve au centre de l'archipel Indien , dont le sol, deja si favorise de la nature, se trouve fertilise par les pluies journalieres de l'equa- teur. On a, d'un cole, la grande ile de Sumatra, si riche en epices , poivre , giroflc , muscades , mais , pi- ment ; en drogueries, camphre, cannelle, cubebe, sang- dragon, antimoine, benjoin , gambico , etc. Plus pres, on trouve Banca , avec ses mines inepuisables d'etain le plus pur , le plus eslime du globe ; en avant, on a Java, dont nous allons nous occuper, et enfin , d'un autre cole, Borneo et les Philippines, dont nous avons deja parle ; toutes ces iles produisent en abondance des bois de teinture et d'ebenisterie, des bois odoriferants et de construction, et, en outre, le cafe, le riz, le sucre, le tabac , l'indigo , etc. C'est encore au milieu de ces milliers d'ilots, dont beaucoup nous restent inconnus, que Ton trouve cette foule d'objets designes sous la denomination generale de produits des delroits : joncs , rotins , nacre de perle , ecaillo de lortue, corail , eponges, nids d'liirondelles salanganes, ailerons de requins , biches de mer, esto- macs de poissons, agar-agar, sagou , salpetre, cire, ( 322 ) cuiis , beaux, os , comes de buflle el decerf, non d'ank, betel, hois d'aigle , d 'aloes, de sandal, de fer de tek, poudre d'or, diamanls , etc., etc. Place sin- la dunette du navire, on ne se lasse paa d'admircr ces massifs de maagliers et de paleluviers qui de tons coles oinhragcnt la mer ; le plus profond silence regue sur cetle belle nature egayee par la presence des plus brillanls oiseaux , qui en nombre inlini peuplent ces rives enchantecs; on y remarque tout d'abord le lori rouge aux ailes irisees en violet, le kakaloes a I'aigrette jaune, les guepiers verls aux reflets metalliques, qui, par longues voices, traversent d'une lie a l'autre , tandis qu'au-dessus de voire t6le plane la majestueuse fregate et le paille-en-(|ueue au plumage rose. Si Ton reporteles yeuxvers la mer, on voit sousdes ber- ceaux de verdure glissersilenei.us'ineut. ridanl a peine I'onde, la legere emharcation des Malais, ces homines au teint basane, a l'ceil farouche, tour a tour pecheurs ou voleurs : ils sont a la recherche des toi tues qui sVn- dormenl a la surface de ces eaux paisibles; d'autres, plus au large, vunl reconnailre les bancs de coquilles de nacre. Les guetteurs a deuii mis, la lete ceinte d'un mouchoir, places al'avant, exposes au soleil bnMant, observent attentivement le fond de la mer que la Inn- pidile de l'eau leur permet de distinguer parfaite- ment: pas le moindre objet n'echappe a leur regard d'aigle, el, quand ils sont parvenus a trouver lit) banc de coquilles, les pros arm vent, el ces homines plongent tour a tour jusqu'a ce que le banc soil de- peuple. Ces coquilles sont ouvertes par ceux qui, lati- gues de plonger, se reposent, et le contenu esljete a ( 323 ) la mer : neanmoins quelques debris de ces animaux, adherant fortement a la coquille, entrent bientoten pu- trefaction; aussi ces bateaux repandent-ils au loin une odeur fort desagreable et qui les fait reconnaitre a une tres grande distance ; celte odeur se retrouve encore aux environs des haineaux habites par ces pecheurs ; pres de leurs babitations recouvertes de feuilles, on voil amoncelees ces belles coquilles de nacre, puis a cote, exposees au soleil, les carapaces des tortues dont les ecailfes precieuses se disjoignent a la cbaleur; plus loin sont etendus sur des natles les holotburies, les ailerons de requins , les estomacs de gros poissons et enfin des monceaux de frelins, qui, a demi pourris, sont melanges au riz bouilli,nouriiture principale des indigenes. Les bolothuries on limaces de rner sont des animaux d'un aspect repoussantet qui se meuvent difficilement; on les trouve a la maree basse altachees aux rocbers du rivage. Elles ont de cinq a six polices de longueur: on les separe en deux avec la lame d'un couteau, et elles perdent al'instant toute l'eaudont elles sont injectees. L'liolotburie dessecbee n'a guere que la moitie de son volume: c'est un mels que les Lucullus cbinois man- gent avec avidite, et ils en font, comme avec les nids d'birondelle, des potages Ires epais au milieu desquels surnagent les peaux roguenees de ces vilains animaux ; ils avalent ce mets, a la facon de notre macaroni ; en Chine, les bolothuries, suivant leur blancbeur, valent de 1 a 8 fr. le kilog. La pecbe du requin, qui n'a lieu que pourses ai- lerons, est aussi Ires fructueuse , et les indigenes s'y livrent avec d'autant plus d'ardeur qu'ils deharrassent ( fea ) la mer de leuis ennemis les plus redoutables; car il leur arrive souvent, dans lours plongeons repeles, de ne plus reparaltre, emportes parces voraces animaux; aussi, des que, de leur bateau ou du rivage, ils apercoi- vent a la surface de la mer l'aileron qui, ridant l'eau, trahil la presence du poisson, ils sautent dans uno em- barcation, et l'emerillon, enorrne hamecon que deguise mal un appal grossier, esttralne a l'arriere: le requin ne tarde pas a l'apercevoir, etil sedirige verl'embarcalion, qui ralentit sa marcbc, il flaire l'appat et I'engloutit en entier; les bommes font alors force de rames, et le monstre, malgre ses efforts, soit pour se degager, suit pour chcrcber a devancer l'embarcation, arrive au rivage oil il est bientot eclioue ; il redouble alors ses efforts, et malbeur a celui qui s'approche sans precautions, car il balaic et renverse tout ce qui l'en- loure; niais un coup de mcntok (espece de sabre ma- lais), en lui separant la queue, arrete les soubresauts; ils delacbcnt ensuile les ailerons et ils abandonnent son cadavre buileux aux oiseaux du rivage. Les aile- rons de requin sont encore fort recbercbes des Cbi- nois, et leur prix varie, suivant la qualite, de 1 fr. 50 a 6 fr. le kilogramme. Au milieu de tous ces inels extraordinaires, nous n'oublierons pas de mentionner les nids d'birondelles, et nous dirons aux nombreuses personnes qui ne les connaissenl point, que ces nids ne sont pas fails avec de la terre, que ce ne sontni les ceufs ni les petits que Ton mange, mais le nid Iui-meme. L'birondelle salangane (kirundo esculenta) est envi- ron d'un tiers plus petite que noire birondelle ; son plumage est bleuatre sur le dos et grisatre sous le venire. ( 325 ) On la Irouve au cap de Bonne-Esperance, a Bourbon, a Ceylan, en Cocbinchine, etc.; mais sa patrie reelle est l'archipel Indien; elle y abonde dans toules lea lies rochenses. Elle construit son nid avec une matiere gelatineuse qu'elle secrete et qui, selon toute probabilite, est lo residu des millions de moucherons dont elle senourrit ebaque jour; le volume de ce nid est generalement envi- ron le quart de celui d'un oeuf d'oie, il est Ires mince, et ne pese que 8 al5grammes.Quand on prend lesnida avant la ponte des ceul's, ils sonl de premiere qualite; mais quand les petils y ont ete eleves, et qu'ils sont ge- neralement souilles d'ordures et de duvel, ils torment la deuxieine qualite; enfin si les nitls retails a la bate, acres un premier nid enleve, sont composes d'une faible quantite de gelatine (car l'oiseau presse de pondre no prend pas le temps de chercher une nourriture abon- dante, et il melange a son nid une quantite de plumes qu'il s'arracbe a la poitrine, afin d'en augmenter le volume), alors ils forment done une troisieme qualite et il faut une grande patience pour parvenir a les net- loyer. A Canton, on voit de nombreuses boutiques ou des homines sont occupes a ce travail ; a cet effet, ils font tremper les nids quelques instants dans l'eau, puis avec une petite pince ils decomposent le nid en autant de portions que les milliers de parlies dont il a ete construit, et m^ttenl a part la gelatine blanche, puis la roussatre, enfin les plumes qui ne sont propres a rien. Les prix extrememenl eleves que les Chinois ac- cordent a ces nids engagent un nombre considerable d'individus a se livrer a leur recberche, et presque toujours c.'est eu courant les plus grands dangers ( 320 ) qu'ils parviemienl, au moyen d'echelles de bambous, a gravir les rochers les plus escarpes, le plus souvcnt places au bord tie Ja mer ; arrives au soinmel , ils disposent des cordes de rotinet se laissent glisscr dans les grottes profondes et obscur« s ou nicbenl ces oi- seaux, dont les nids sonl iixes par grandes quaulitcs aux vootes des grotles; mais inallieur a celdi qui fait nn faux pas, car son corps, lombant stir les anfractuo- siles ties rochers, arrive inutile dans la nier qui \ienl se briser et s'engouflrer avee fracas sous ces cavernes. Les Chinois qui, a tort ou a raison, accordent des vertus stimulantes aphrodisiaques a ces nids, placent ce inetsbien au-dessus de toules lours fricassees d'ceufs pourris, de chiens, chats, rals, vers a soie, scarabees aqualiques, etc. Aussi les prix en reslcut-ils toujours si eleves, que les riches seuls peuvenl goutcr de ce meis des dietix ; les nids de premiere cjualile \aleut 175 l'r. ie kilogramme ; ceux de deuxieme, de 100 a 125, et ceux de troisieme, de 15 a 50. Les importations en (ihiues'elevent chaque annec de 100 a 125 000 kilogrammes. Java en fournil la majeure parlie; en 1843, il en est sorli pour line valour do 1 272 6SZi florins, sans compter lout ce qui a tie Iraude et qui s'eleve a une valeur considerable. Quant a 1'agar-agar, c'est la glu produite par une planle marine [gigarlina tenax) ; les tiges delachoes du fond de la mer par le remous des vagues viennent comme de longs serpents Holler a la surface des eaux. Celle planle est commune au cap de lionne-Espei ance, ou personne ne songe a l'uliliser; mais dans les delrmts les jonques eu ebargent ehaque auneo de grandes quanliles. Cette glu sert en Chine a une foule d'indus- ( m ) tries; ainsi, on en enduit la g;ize et le papier des lan- tcrnes pour les rendre impermeables et inallaquables aux vers; elle sert aussi dans I'appret d'une foulo cle tissus : elle est melangee a la pate pour le collage de certains papiers ; et enlin, cuite avec du Sucre, elle forme line gelatine comestible, recherchee nonseule- ment des Cbinois, mais aussi dune grande quan- tity d'Espagnols fixes aux Pbilippines. Son prix est excessivement bas, de 15 a 20 IV. les 100 kilogrammes. Des inilliers de piculs en sont introduits en China chaque annee. Les navires surpris la nuit an milieu des detroits courent de reels dangers; car, de lous ces bateaux qui sillonnent la mer el de la lerre meme, vous avez ete observe, el des que la nuit est arriv.ee, toils ces homines reunis sautent dans ies embarcalions; ils approchent avec precaution, vous entourent de leur nombre infini, el, le kris a la main, ils montent a 1'abordage et assas- sinent 1'equipage ; ensuite ils commencent a piller et enlevcnt autani de choses que leur embarcation peut en contenir, puis ilscoulenl les navires. De celte ma- niere, il ne leste aucune trace de leur brigandage. Quelques navires de guerre, pris pour navires mar- chands, ont ete ainsi altaques : une corvette anglaise lut sur le point d'etre prise a l'abordifge, et un grand nombre de ces loibans vinrenl trouver la mort jusque sur le pout. Un autre commandant, plus sur ses gardes, lit Termer les sabords et laissa approcber les embarca- tions; puis, demasquant tout a coup ses batteries, il fit un feu si vif, qu'il en coula la majeure partie. Une cor- vette holiandaise a vapeur eul aussi son tour et se battit vaillamment pendant deux heures, c'est-a-dire ( 328 ) tout le temps qu'il lallut pour ralluiuer ses IVux eleinls et pouvoir marcher a la vapeur. En quitlant les detroits, on entre dans la mer de Java, dont les eaux jaunalres , cbargees du Union des grandes rivieres des iles environnantes, cbarrient une quantitede debris, arbtes, noix de coco, gousses de canne, etc. II nest pas rare meme de voir de pe- tits ilots flollanls balances par laboule ct qui provien- nent evidemment des nombreuses iles que les eaux de la mer minent continuellement ; un grand nombre de serpents d'eau veniineux surnagent aussi au milieu de ces debris. On prend connaissance de la terra de Java par le millier d'ilols qui entoureul la rade de Batavia, et Ton vient mouiller, a environ trois milles de terre , au milieu d'une flolte de n a vires, dont la plupart sunt bollandais; le pavilion national est tenu eleve depuis le lever jusqu'au coucher du soleil ; a peine a-l-on jete l'ancre , (jue de nombreux el grands oiseaux de proie, au plumage fauve et au col blanc, viennent disputer au goeland les debris jetes a la mer ; il n'est pas rare non plus de voir s'avancer jusque tres pres du navire d'enormes crocodiles qui se tiennent aux en- virons de l'embouehure du fleuve. On apercoit pkis pres de terre les corvettes du roi da Cocbincbine, qui viennent plusieurs lois l'annee a Ba- tavia, puis les jonques cbinoises et les bateaux de ca- botage dont le petit tonnage leur permelde se lenir dans des eauxmoins profondes. De la rade on ne voit pas la ville, qui est privee de monuments eleves et se Irouve cacbee par d'epais massifs de verdure; mais on a devant soi la belle plaine deBalavia, s'elevant graduelleuient ( 329 ) jusqu'a plusicurs lieues a la ronde, couverte tie pal— miers, d'arcks, de cocotiers , de bambous, qui s'elevent elegamment a de grandes hauteurs et se de- tachcnt des autres vegetaux qui couvrent la terre. Parmi celle nombreuse famille de palmiers, on distingue le curicux arbre du voyageur, dont les leuillcs symelri- quement placees forment un gigantesque evenlail. Ge palmier, originaire de Madagascar, a ele naturalise a Java par d'Entreeolle ; il y reustit a soubait. En quittanl le bord, on gouverne droit vers un tres petit pbare place a remboucbure du canal, qui s'avance an loin dans la mer. Ce canal, qui a environ deux niilles de longueur, traverse des terrains inondes cou- verts de paleluviers. Lorsqu'on s'y est engage, on longo les pros malais a la proue elevee, cbarges de rotins et de joncs, el qui sont amarres aux pieux ronges par les vers, dont sont bordees les murailles des quais; on debarque enfin presd'un petit poste de douane, qui ne laisse pas entrer une seule arme, pas meme le moin- dre pistolet, sans une autorisation speciale ; il vous Taut aussi, pour pouvoir demeurer dans l'ile, un |iermis de sejour qui s'accorde lorsque deux personnes de la ville se portent ^arants de voire conduite. Ai>res avoir traverse d'anciennes promenades aban- donnees, on arrive dans I'ancienne ville, dont il ne reste plus que quelques rues occupees par les maisons des negocianls et des marcbands qui n'y passent, pour le temps de leurs affaires, que quelques beures par jour; les Cbinois et les iMalais ont envabi de leur cot6 la majeure par tie des maisons europeennes, et y ont aussi de nombreuses boutiques ou fabriques ; a l'en- coignure de la grande rue qin conduit a la nouvello VII. MAI. 2. 22 ( 330 ) \illo, on trouve lfis sal los de ventea ;i l'oncan, veritable bazar ou Line quanlile de marcbandises sont mises en depot en attendant ['occasion favorable pour les vendrej plus loin, on Irouvc de vastes et jobs magasins renler- inaut unefoule d'objels de grand luxe, la plupart d'in- dustrie parisiennc, et aussi les curiosites en laque et porcelaine du Japon qu'un seul navirc bollandais pent aller cbercber cbaque annee au port de Nagasaki. Les magasins des Ghinois sont pourvus de nom- breuses armures: ki is, lances aux lames ilamboyantes damassees et empoisonnees , javanaises, malaises, borneennes, mentoks, dayaks, especes de sabres dont les poignees d'os ou de corne de buflle et sculptees sunt ornees de cbevelures bumaines, boucliers de rotin el de bois parsemes de meebes de cbeveux et de pein- tuns eclalantes, cuirasses et ceintures en tissus cba- marres de coquillages, coiffures de peau d'ours imi- lanl un masque dont les yeux sont de coquille de nacre, carabines au canon damasse et labriquees de toules pieces a Pontiauak, colliers de dents bumaines, amuleltes et une foule d'aulres sauvageries de ce genre. On y trouve encore les zagaies des Papous, dont les pointes sont de bois de ler ou d'os a denlelures aigues el sculptees en Tonne d'areles de poisson : ce sont des amies cruelles, qui, une iois qu'elles ont |)enetre dans les cbairs , ne peuvent plus se retirer; toutes sont revelues d'uu poison violent. Les sarbacanes sont ce qu'il y a de plus per- tectionne : le perl'orage est un veritable tour de lorce d'adresse, et Ion se demande conimeut, sans instru- ments de precision, ces sauvages peuvent arriver avec tant de regularity a perlorer un morceau de bois ( 331 ) d'unc telle durole et d'unc telle longueur : la sai ba- cane est une arme terrible, et les indigenes s'en servent avec line adresse remarquable, traversanl de leurs flecbes legeres a cinquante pas, de part en part, une noix de coco. On trouve encoi*e un grand nombre d'objets d'his- toire nalurelle:ce sont des oiseaux empailles, des teles rares d'aniniaux , eomme antilopes , babiroussas, sampy (vache sauvage), rhinoceros, bois de cerf, etc., quelques coquilles, et parnii cedes -ci d'immenses b^nitiers, dont quelques-uns ont plus d'un metre de diamelre ; des oiseaux de paradis provenant presque tous de la lerre des Papous et emballes par centaines dans des paniers de feuilles finement tressees; inais les moyens de conservation employes pour preserver ces animaux des insectes laissent loujours a desirer. Les armures, parleur bizarrerie, sont ordinairement cequi attire le plus 1'altention des etrangers; cbacun veut em- porter de quoi composer un trophee qui devra un jour orner son cabinet; mais les indigenes n'abandonnent pas ainsi leurs armures, et, pour avoir quelque chose sortant du commerce, il taut payer des prix Ires eleves. L'orang-oulang vivant se rencontre frequeinment, apport^ des son enfance de Borneo ou de Sumatra a Batavia. On se procure les pelits en tuant la mere au moyen de petites flecbes empoisonnees qu'on lance avec la sarbacane : les indigenes se placent a 1'affut au pied des arbres ou ces animaux ont l'habitude de venir, et, observant le moment ou la femelle tient ses petits dans ses bras, ils lui envoienl une de leurs flecbes. L'animal, legerement pique, ne sacbant d'oii lui vient le trail , ne s'en inquiete pas; il ar- ( 332 ) rache la Heche ties chairs ou elle est enfoncee, puis, la flairanl, la brise ontre ses dents et en laisse tomhcr a fcerre les eclals; mais bienlot le terrible poison a pe- netre clans le sang, et l'animal affaildi a hcsoin de se retenir aux branches de I'arbre ; bientot des tremblements s'emparent de tout son corps, auxquels succedent des mouvements convulsifs, et il ne tarde pas a se laisser tomber, cnlraiuant dans sa chute lea petils qui n'ont pas quitte leur mere, etsur lesquels so jeltentles indigenes qui, sortant de leur cacbette, s'em- parent des jeunes avec facilite. A Java, les jeunes orangs-oulangs se vendenl de 100 a 150 francs l'un, suivant leur age. Les campongs des indigenes el des Ghinois sunt pla- ces a quelque distance des rues commerciales ; les inaisons, couvertes de feuilles, n'ont qu'un rez-de- cliaussee. On y trouve des colonnades de beaucoup de genres et dont quelques pieces ont ete iabriquees par les indigenes, principalement des sarongs dont les Ja- vanais se serrentla taille ; on y voit aussi des |)oteries d'une terre rougeatre, poreuse, a grain fin, et dont les Tonnes sont generaleinent elegantes. Pour arriver a la ville nouvelle, on longe le canal de Ryswjk, sur les bords duquel est tracee une belle cbauss(ie ombragee par des arbres ; la, a toute beure du jour, viennent se baigner les belles Javanaises, que la religion mabomelane force a prendre des ablu- tions repelees: c'est un coup d'osil assez agreable pour l'elranger, qui, de sa voilure, distingue les gra- cieux contours de loules ces femmes, lesquellcs, du reste , paraissenl prendre pen de souci des regards indiserels des passants. { 333 ) La nouvclle ville est conslruile sur les bords des canaux Ryswyk et Mcuvlier, et s'elend sur la place de Weltervreden et de Konings-pleine. Les maisons, bien construites, d'une blancbeur eclalanle, sont es- pacecs an milieu de beaux jardins, oil croissenl une quantite d'arbres a fleurs naturels ou naturalises dans l'ile; la, les orangers, les manguiers, les girofliers, les muscadiers, avec l'arbre du voyageur, forment de riants contrastes de verdure. Les principales industries exercees a Balavia etdans le reste de l'ile sont: les sucreries, dont plusieurs cni- ploienl lesmacbines pcrfectionnees de Derosne et Cail, les indigoleries, les distilleries d'arak, les briqueteries, les chaufourneries , les teintureries. Viennent en- suite des tahriques de cbandelles, celles de carles a jouer, a l'usage des indigenes, qui ont adopte le jeu cbinois compose de vingt cartes a jouer tres etroiles. II y a ensuile des carrossiers, des selliers, des cordon- niers, des bijoutiers, des serruriers, des cbarpentiers, des cbaudronniers, des ferblantiers, des fondeurs, des patissiers, des boulangers, des conliscurs, des tailleurs, des niacons, des forgerons, des cbarrons, des peintres en batinaent, etc. Quelques-uns de ces etats sont exerces par des Francais, auxqucls les Cbinois et les indigenes, qui se monlrent d'une grande babilete clans tout ce qu'ds enlreprennent, livrent une concurrence acbarnee. Aussi, si nos coinpalriotes reussissent , ce n'esl qu'a force de perseverance et par le b'on gout el la bonne qualite des objels qu'ils livrent a la consom- malion. Les principales industries s'excrcenl, comme en Eu- rope, par des maitres ayant sous leurs ordres des ou- ( 334 ) vriers el quelquefois 'les condamnes, que le gouvernc- ment met a leur disposition moyennant la nourriture et une faible retribution qu'ils remettent a ces mal- heureux lorsqu'ils Boat satisfaits de leurs services. Nous dirons un mot sur les cultures et les industries qui nous ont paru offrir de l'inlcret, en commencant par decrire la fabrication de l'indigo. Indigo. L'indigo de Java prend chaque jour un grand de- veloppemenl, et, par la bonne quality qui en est livree au commerce, il tend cbaque jour a remplacer en Fiance lesgrandes importations d'indigo de Madras et de Calcutta ; mais nous avons appris de bonne source que le gouvernement songe a restreindre ces cultures, qui, cbaque annee, lendent a se substituer au riz, de plus en plus rare a Java. L'indigotier [Indign/era tinctoria) est un arbuste qui s'eleve, dans les bons terrains, de 1 metre a lm,50 de hauteur; a une petite distance, ces cultures ressemblent beaucoup a nos champs de luzerne. Cette plante pent supporter la plus grande secheresse, et elle continue a croltie, quoique exposee pendant plusieurs mois aux rayons dun soleil brulant. On seme ordinairement l'indigo a la fin de no- veinbre, et Ton recolte a la fin dejuin; a cette epoque le fruit est mur, et Ton peut recueillir la sentence, qui est ties petite et cylindrique, avcc une petite cannelure sur le cote. Les monies plants produisent quatre re- coltes. Pour extraire l'indigo de la plante, on s'y prend de la maniere suivante. On arrfite un cours d'eau pour y menager une chute , et 1'on construit deux ( 335 ) grand es losses d 'environ 2, metres de profondeur, sur A a 5 metres de large et 5 metres de longueur; l'une de ces fosses doit elre plus basse que 1'aulre. On jette dans la fosse superieure les tiges entieres de l'indi- gotier, que Ton a coupe au ras de terre, et, au moyen d'une petite rigole, on y introduil de l'eau ; on charge le tout de quelques pieces de bois, afin de submerger toutes les branches. Quand le soleil est cbaud, la fermentation s'opere en quatre heurcs ; si la temperature est moins favo- rable, il en faut davantage ; quelquefois on compte douze heures. Du reste, on reconnait que la fermen- tation est complete quand l'eau est d'un beau vert- pomme, et qu'en la transvasant d'un verre dans un autre, elle mousse facilement; alors on lache l'eau de la fosse superieure dans I'inferieure. Les branchages sont retires de la premiere fosse et amonceles, ils ne sont plus bons que comme engrais ou combustible ; au bout de quelque temps, si on les retourne, on trouve de beaux et bons champignons, que les in- digenes savent fori bien recueillir. On a installe au- dessus de la fosse inferieure une grande roue de bois, haute d'environ douze pieds, aux aubes etroites, auxquelles on a fixe des tubes de fer-blanc ; la roue est alors mise en mouvement au moyen de la chute d'eau , et, tandis que les aubes frappent l'eau, les lubes laissenl tomber de la hauteur de la roue l'eau qu'ils puisent au fur et a mesure de la rotation : une mousse abondante est bientot obtenue. On laisse ordi- nairement fonctionner la roue une heure; au bout de ce temps, l'eau, de verdatre qu'elle elait, est devenue d'un bleu fonce : alors, d'un petit bassin superieur. ( 330 ) on I ache uiiL' cerloinc quanlile d'eau de chaux, qui precipitc la par tie colorante dans Le fond de la fosse, puis on laissc reposer six hcures. Apres ce lemps, on laissc partir, an moyen d'une petite ecluse, toute l'eau limpide do la partie superieure do la fosse, &t Ton rcm- plit dcs seaux avec le depot; celui-ci est l'intligo, que 1'on Iransvase dans dcs chaudieres, et l'on fail bouillir. Apres 1' ebullition, on verse le residu dans unepoehe de loile placee au-dessus d'une espece de grand fillre en forme de lands, garni de loile dans loule sa surface; l'eau qui s'echappe du fillre est replacee de nouveau dans la poche de loile jusqu'a ce quelle s'echappe limpide. Alors on enleve le depot, on le met sous presse, et Ton en forme tie larges plaques. Cos gateaux sont portes dans dos hangars reconverts do toilures de feuilles tie bambou; cette pate esl coupee on polites briques carrees longues, qui sont ensuile pros sees dans un motile de bois qui leur imprime les ini- liales du propriclaire : ces briques doivent ainsi secher a l'oinbre. Depuis un temps immemorial, les indigenes tie I'ar- cbipel Indicn connaissont les proprietes do I'iiidigo- lier ; seulemenl ils nc savaicnt pas la maniere de lo solidilicr, et ils lo vendaient a 1'etat liquide enferme dans tie grands vases de torre. Les premiers relours qui furcnt fails en Europe en indigo solidifie vinrcnt do Manille, on 1784 : ce fut le pere Matias (Oclavio Augustino), nii a Nerin en Navarre, qui, le premier, introduisit la metbodc aux Philippines. L'intligo que la France tire actuellement ties Phi- lippines est de beaucoup inferieur a celui tie Java. Eabrique avec moins de soin, il est lourd, ses cassure.s ( 337 ) hiisseul voir de pelils points brillants; tandis quo 1'indigo dc Java esl leger, happanl a la langue, sa cas- sure est d'un beau mat regulier. La qualite de l'eau employee peut etre pour quelque chose dans cette fabrication. L'indigo, suivant la qualite, vaut de deux a trois florins la livre. Culture et torrefaction flu the a Java. Depuis peu d'annees, le gouverncur neerlandais a fail enlreprendre la culture du the sur une vaste echelle a Java, et a cet effet il a faitvenir des Chinois de Canton el de Fou-tcheou-fou, les uns verses dans l'art de la torrefaction, les autres dans la culture de la planlc. L'arbrisseau que Ton nomine the s'eleve de 1 metre a 1 metre et demi de hauteur; les feuilles sont lisses et brillantes; les fleurs sont blanches et de la dimension de celles de nos cerisiers. L'arbre a the demande un terrain leger. On com- mence a le seiner en pepiniere, puis on repique les plants dans une terreque Ton abien preparee,al metro etdemi de distance les unsdes autres, etc'eslseulement la Uoisieme annee que Ton commence a recueillir les feuilles : a Java, ou il n'y a pas d'hiver, on peut cueillir les feuilles loute l'annee. Pour faire du the noir, on expose les feuilles sur des corbeilles plates, a petit rcbord, a 1'ardeur du soleil, et pendant deux beures ; on les porle ensuite a l'ombro dans des hangars, ou elles restent environ six heures; puis on jctte dans une bassine de fonle chaulfee par un feu doux environ 2 kilogrammes de ces feuilles, on les ( 358 ) agite et on Ics retourne, en augmentant le mouvcment au fur et a mesure que le petillement et la crispation des feuilles ont lieu. Au bout de cinq minutes il est temps de les retirer; leur volume pendant ce temps a beaueoup diminue, et elles ont pris one teinte noi- ratre. Elles sont alors saisiespar Irois bommes qui se partagent la fournee et se placent sur un plateau tresse en bambou; ils en forment chacun une grosse boule, a laquelle ils impriment un mouvement de rotation, en oppuvant fortement , de maniere a enrouler toutes les feuilles; puis ils brisent cos boules et ils les jettent de nouveau dans la bassine, afin d'enlever le reste d'hu- midite. h kilogrammes de feuilles produisent 1 kilo- gramme de the. Le dernier sechage s'opere dans des especes de tamis que Ton place au-dessus de cendres chaudes; apres quoi le triage a lieu. Ces tlies sont emballes dans des caisses doublees de feuilles d'etain avec caracteres chinois, identiquement semblables a celles de Chine ; chaque caisse pese 25 kilogrammes et coiite a Java 30 florins. Mais le the recolte a Java a un gout enlierement different du the chinois. On ne pcut le boire a Batavia; mais il paratt que la traversee 1'ameliore, car il peut se veudie.non pas en Hollande, ou il v a tropde con- naisseurs, mais en Allemagne, oil certaines petites villes out commence a s'en servir comme remede ; ensuite on s'y est accoutume , et c'est sur ce marclie que se vendent les quelques cenlaines de mille kilogrammes de la recolte annuelle de Java. ( 339 ) Recolte de la cochenille. Les cochenilles sont de petits insectes du genre des pucerons et qui se nourrissent sur les feuilles des nopals. La culture des nopals est encore recente a Java ; elle se divise en deux parties : l'une en plein air, l'autre couverte. Les plants de nopals en plein air se composent de ceux qui sont trop jeunes ou qui, fatigues paries insectes, en ont ete debarrasses; on les laisse ainsi reposer et on leur donne le temps de prendre plus de vigueur. La partie couverte garantit la cochenille des pluies torrentielles qui, chaque jour, lombent pendant quel- ques heures a Java. Les plants sont espaces d'environ 2 metres et s'ele- vent jusqu'a sept et dix pouces de hauteur. Quand on veut transporter les cochenilles d'un en- droit a l'autre, on fait tomber avec les barbes d'une plume les insectes sur une feuille de papier, et Ton cboisit I'insecte femelle pres de pondre et qui se reconnalt facilement a ses proportions ; on l'e.nferme avec soin dans un petit cornet fait avec une partie de feuille de bambou, puis on fixe le cornet et I'insecte sur un plant de nopal, en traversant le corps de l'ani- mal par une epine, ce qui l'empeche de s'echapper, mais non de pondre. Au bout de quelques jours, les petits eclosent dans le cornet, et, imperceptibles a I'ceil nu, ils s'echappent par la moindre ouverture et se repandent sur la feuille voisine, ou Ton ne tarde pas a les reconnaitre au duvet blanc qui les couvre ; au ( 3A0 ) bout de quaranle jours, l'animal a atteint loot son developpemcnt. La cochenille, comma on lc sail, est originaive du Mexique ; elle est dans tin etal prospere a Java : aussi il n'est pas de sacrifices que le gouvernemcnt ne fasse pour encourager celle prdcieuse culture. La vanille, egalement originaire du Mexique, parall aussi devoir reussir a Java, cette terre favorisee , et des essais de culture ont deja prouve qu'elle y peut prosperer. Influx tries diverses ; mceurs, Dans les fonderies de cuivre ct cbez les cbaudron- niers, on fabrique les immenses cbaudieres pour les sucreries et les distilleries, et il y faut des ouvriers de divers metiers: on y met des Cliinois a la forge , et ils deploient une grande babilete. Les Malais sont de preference cliaudronniers on fondours. Pour fond re de ces grands robinels qui pesenl jusqu'a 50 kilo- grammes, ils cominencent a faire un modele creux en cire, dont ils adoucissent avec un fer chaud toutes les surfaces. Le modele ainsi fait est recouvert d'un sable fin d'une quiilile precieuse pour fabriqner les moules, que Ton fait secber d'abord au soleil, j)uis ab feu ; la cire, venant a fondrc, est versee dans un vase ; ce moule est ensuile recuit au grand feu. On jctte alorsdans uncreuset, et au meme moment, moi- tio rosette, moitie zinc, et quand le lout est bien fondu et melange, on fond la piece dans le moule que nous venons de designer; mais, pour l'cn retirer, il faut briser lc moule, qui ne peut ainsi servir qu'une seulo fois. ( 341 ) Lcs Javanais fabriquent eux-memes une partie des tissus de coton et de soie destines aleur usage. Les me- tiers que Ton rencontre dans la campagne sonl d'une simplicity Iropgrande pcul-elre, car ils consistent en un morccau de bois sur lequel s'enroule la cbalne, et ils reinplacent le battant par une espece de sabre de bois de fer avec lequel ils frappent le fil que la navetto vient tie passer. Ils ne font en soie d'autresdessins que des rayures el des carreaux. Ces eloffes, comme on le pense, sont failes imparfaitement, mais, par contre, d'une grande duree. Quant a l'impression, ils sont en- core plus en retard, et ils n'ont jamais su ce que c'e- tait qu'une plancbe a imprimer; ils y suppleent par les procedes suivants : lis tendent sur des cbassis leurs etoffes, et avec une plume de bambou, a laquelle ils ont adapte un petit reservoir de cuivre oil ils introduisentde lacirecbaude, ils tracent des- dessins imaginaires ; ils les plongent dans la teinture, qui se fixe aux parties non protegees par la cire. Pour oblenir une seconde couleur, ils dessinent de nouveau a la cire sur les endroits deja teints et les replongent de nouveau dans une autre teinture d'une nuance plus foncee; le tissu, passe en- suite a l'eau bouillante, perd la cire, qui lui donne un empois odorant auquel les indigenes ne se Irompent jamais. Les sarongs imites en llollande et en Angle- terre, quoique representant parfaiteinent leurs des- sins, ne peuventetrevendus qu'environle quart deceux qu'ils fabriquent eux-memes, et ce sont les indigenes les plus pauvres qui les achetent ; l'addition de la cire a la teinture contribue beaucoup a fixer les couleurs, qui sont inalterables. ( 3A2 ) Le costume dcs Javanais consiste en une veste da drap, ou, pourlc peuple, de colonnade imprimtle, et en un sarong, large eeharpe avec Jaquelle ils se ceignent la ladle , qui retombe jusqu'aux mollels el qu'ils relevent par devant afin de laisser la demarche libre; un mouchoir, donl les nceuds se trouvont reunis en avanl, leur enveloppe la t6te de maniere a ne laisser nullement parailre leurscheveux.qu'ils laissentpousser ties longs ; ils portent a la ceinture un kris, poignard incommode par la forme de sa poignee recourbee, mais dont la lame damassee, tantot en dents de scie , lanlot flarnboyante , fait des blessures cruolles, ce qui a rarement lieu chez ce peuple doue d'une grande douceur. Le kris d'un chef javanais est monte en or ; la poignee et le fourreau sont ciseles et ornes de pierreries ; ces armures passenl de generation en generation, et jamais le fils ne se departit pour aucun prix de eel heritage, fut-il dans la misere : ce sont les seuls titles de noblesse de toute la famille. Les femmes javanaises portent une l^gere camisole a manches courtes, sans aucun lien pour la taille, et une jupe ordinaiiement a carreaux, qui descend aux mollels; elles marchent, comme les homines, nu-pieds; elles ont les cheveux sur les epaules ties longs et flot- tants, ou bien elles les attachent sur le devant de la tfele avec un peigne de bois. Une curiosite que les elrangers vont voir a Balavia, e'est le campong, appele Maesler Cornells. La se trou- vait un pelit fort qui, lors de l'invasion des Anglais, se dislingua par une vigoureuse defense. Cel endroit, qui, dans le jour, sert de marche aux legumes et aux fruits, devient, a la chute du jour, le rendez-vous de tous les ( 343 ) indigenes des environs ; la, les bayaderes cbargees do colliers, d'anneaux, viennent, au son d'especesde tam- bourins el de flutes, danser avec accompagnement de la voix. Ces danses ne resseinblent nullement a nos danses europeennes ; elles consistent en mouvements lents de la partie inferieure du corps et en un fremisse- ment lascif qui fait retenlir les bracelets qu'elles por- tent aux pieds et aux mains. Les groupes sont ordinai- rement de cinq personnes, dont quatre femmes et un cavalier. Le cavalier, dont le role est assez insignilianl, se lient au milieu et se met a 1'ecart tour a tour. Les femmes se cacbent la figure deleureventail,lorsqueleur mouvement devient par trop lubrique. A cote de ces danses onvoit installes, ades tables placees en pente, de nombreux joueurs de des et de cartes, auxquels les Gbi- nois ne repugnent pas de se meler; les enjeux, il est vrai, ne paraissent pas etre ties considerables; car la plupart du temps on n'y voit que du cuivre. Derriere le marcbe, une seule maison est ouverle ; elle est tenue par un Cbinois vendeur d'opium, qui a afferme le droit de ce commerce. La il se fait un debit considerable de cette drogue, et c'esl par 15 dutes que Malais, Javanais et Cbinois viennent le macber. Pour cette somme, ils en ont juste de quoi fumer une pipe, c'est-a-dire gros comme un petit pois, qu'on leur pose sur une feuille de betel. Quand on pousse les portes des maisons environnantes, on trouve elendus sur des tables basses les lumeurs d'opium, qui s'enfer- ment et ne s'eclairent que par la lueur blalai\ie d'une petite lampe. Mais des tableaux d'un autre genre vous sont reserves ; car, un peu plus loin, dans une ligne de baraques etroites et lougues, on apergoit adossees aux ( 3AA ) murailles des rangees de lils ayant cbacun one mous- tiquaire el eclaires par une petite lartipe ; il y a 1ft etendus un pele-mele d 'homines ct de feimnes a demi mis, degoulants , chiquant le betel, fumant l'opium , buvant I'arak, el qui , lorsqu'ils veulent se retirer de la vug du public, soufllenl simplement leur lampe et laissent loinber leur mousliquaire. Les Eu- ropeens recjoivent la mille agaceries de ccs belles aux dents noires, aux levres sanguinolentes ; mais ces Irisies spectacles vous repugnent, et il faut etredans l'Oceanie pour comprendre que de tcls lieux de debauclie peu- vent etre toleres. I 3/i 5 ) Analyses, liapports, EHxtraits oi'ou- v rages, Melanges, etc. RENE CAILLIE ET LE Dr BARTH A TOMBOUGTOU (1). II y a environ trente ans qu'une nouvelle d'appa- rence un pen suspecte annonca l'airiveed'un Francais a Tombouclou. Cetle nouvelle excita la curiosite ge- nerale et l'allention du monde savant. On la nia d'a- bord en Angleterre, ranis bientol elle fut reconnue vraie partout, inline a Londi'es. De meme on avail doute precedemment de la veracite du reeit qu 'avail fait le matelot Robert Adams : il elait alle en 4810 jus- qu'a la ville fameuse. Un autre Francais, Paul Imberl, parti de Maroc, l'avait aussi visitee en 1670. Ces deux homines seulsy etaient parvenus avantReneCaillie, sauf eependant le major Gordon Laing, parti de Tripoli, qui le preceda de pen de jours el paya de sa vie eel honneur perilleux. Malheureuseuient rien ne nous est resle des papiers du major Laing; instruments, ob- servations, hors une seule, tout a peri dans les mains de ses bourreaux, lesTouariks, ces tarouches domina- teurs du Sahara. Depuis longtemps, les gouvei neurs de Tombouctou (i) L'orihographe de ce noin varie beaucoup, suivant la langue ile ceux (iui I'ecrivent: la manure la plus correcte de I'ecrire en francais serait Tounboctou on Ten-bouctou. vii. mai. 3. 23 ( 346 ) lenr out laisse prendre un grapd asccn:!ant, et il y a tout a croindre pour un Europeen voyageant dans le desert et qui tombe en lours mains. Rone Caillie les a vus a Tombouctou et a Cabra (port de cette ville), exigeant des droits de toules les barques qui descen- dant leDhioli-ba et pillant lesvoyageursayecimpunite. Le docleur Bartb ne pouvait ignorer aucune de ces circonstances, quand il prit. au mois de no- vembre 1852, la bardie resolution de visiter a son lour Tombouctou. 11 venait de perdre son unique compa- gnon de voyage, Cherweg, quand il se decida a faire ce voyage. On a vu plus liaut ( page 31) comment il avail ete oblige d'eviler Kano : la guerre allumee entre les Fellatas et les Bornouans lui en faisail une neces- sity. II a done passe par Kacbna pour se rendrt a Sakkatou, la capitale de l'empire Fellatali, lieu bien connu par la residence de Clapperlon. C'est bientot apres qu'il a visile des licux jusqu'alors ignores el at- teint le grand fl> uve Kouara, nomine communement Niger, inconnu dans cette partie de son cours; il pa rait l'avoir traverse au lieu appeie Say ; continuant sa course vers l'ouest, il a gagne Liblako, ville impur- lante de linterieur, puis il s'est dirige au nord-ouesl sur Saraiyamo, autre grande ville placee sur un cours d'eau que le voyageur eonsiderait, soit com me un af- fluent, soit comme une derivation du Kouara (il laissela question indecise) (1). De la gedjrigeap.t droit au nord, il a retrouve le grand fleuve a 60 milles de distance ; la est Kabra, le port de Tombouctou et d'abord Koro- (l) Ce cours d'eau est forme de plusieurs canaux pteins de sinuo- sit^s et difficileinenl navigables. ( 3Z.7 ) ineb (1). II requite des letlres d»i doeleur Bartli qu'il y aurait 40 milles de Saraiyamo a Koromeh. Ici rien ne contrarie les notions obtenues jusqu'a ce jour ; de plus, nous acquerons la cerlilude que le grand (leuve, encore appele a Tombouctou Kouara ou Dhioliba, continue jusqu'a Say, a la distance d'environ ZiOO milles sans in- terruption; du moins cela semble resulter de la con- struction de la route que M. Barth a suivie. Seulement on est surpris de l'incertitude ou il nous laisse sur la direction de ces cours d'eau etroits et sinueux qui rejoi- gnent Sarayamo au grand fleuve; cette question a ce- pendant line assez grande importance geograpbique; si c'est ui) affluent, le fleuve coulerait sur un lit pen eleve, ce qui s'accorderait mal avec un cours long de 1100 a 1200 milles geograpbiques jusqu'a la mer de Guinee au-dessous de ce point. Si, au conlraire, au lieu d'un affluent, c'est une brancbe, on se demande ou elle se rend. Puis, que penser d'un delta qui aurait son origine a une telle distance de l'Ocean, et sans exemple sur le globe ? De tout temps, depuis les voyages de Mungo- Park, comme depuis celui de Rene Caillie, on a ap- pele l'attention des explorateurs sur cette parlie du grand fleuve, ou plulot sur les divers cours d'eau situes entre Tombouctou et Boussa ; des images planent encore sur cette question de geograpbie, etle deruier mot sur le Niger n'esl pas encore dit. II semblerail meme que le doeteur Bartb ne partage pas l'opinion commune a ce sujet. En attendant une solution, il est permisde recbercberquellesconsequences resulleut de (l) Selou le Jucti.-ui Barlh, Koroineli, village silue au-dessou*, aurait plus de titres a porter ce noin de port. Voyei plus loin. ( 348 ) L' excursion remarquable que vient tic faire le docteur Barlb. Et d'abord, c'ost un devoir pour inoi plus quo pour personne de comparer son recit, tout sommaire qu'il est, avec celui que nous devons a Rene Caillie, sans eta- blir d'ailleurs aucun parallele entre les deux voyageurs. II ne s'agit plus sansdoute, commc il y a vingt-six ans, de soutenir l'autbenticite de son voyage contre les in- credules; tnais on peut reconnaitre avec quelque sa- tisfaction 1'accord qui se remarque entre les deux re- lations, sauf les differences resultant de l'epoque des deux voyages, l'un fait au niois d'avril, l'autreau mois de septembre. Si I'on objectait qu'il laut attendre la re- lation complete dn dernier voyageur, et qu'on ne la connait que par une lettre succincte, ecrite par M. A. Pclermann, je repondrais que celle-ci est liree de la correspond ance memc du docteur arrivee a Londres le 25 mars, et qu'un tel document me rite toule con- fiance, comme extrail liiteral des lettres du docteur Barth. La relation du docteur n'est pas pies de paraitre, et elle n'inlirmeia certainement pas ce qu'il a ecrit ofliciellement au gouvernement britannique. Voici en abrege l'extrait de la relation de Rene* Caillie, et, d'abord, les notes inscrhes sur la carte merne de son voyage (1). En naviguant sur le Dbioliba, d'l- saca a Kabra, il est parvenu a une sorte de bifurcation; a la premiere brancbe (de droile) est un grand bras di- rige a l'est-sud-est et passant a Houssa (sic)] lasuivanle (i) Voy. l;i Carte itineraire ilu voynfjeile M. Caillie a Jennr etTew- boctou, 1829, et Journal d'un voyaye « Temboctou, etc. I\tri<, i83o, t. II, p. ?.q-> ei suitanies. ( 3M> ) esl unc branche ties elroite et profonde qui va rejoin- dre, selon quelques-uns, le bras allant a l'est-sud-est, else pcrd, selon d'autres. Entrc ces deux brandies, le pays est marecageux a pcrle de vue. » Au nord de l'une et de l'autre (e'est-a-dire cnlre la bifurcation el la ville de Temboctou) (1), lepays est egalement note comine marecageux. Voici main ten an* comment, dans la rela- tion, il s'explique sur les abords de Tombouctou : je n'exlrais que ce qui est purement geographique. « Nous arriyames a l'endroit ou le fleuve se divise en deux brancbes : la plus forte peut avoir trois quarts de mille de large; elle coule lentement a l'E.-S.-E. ; l'autre prend son coins a l'E. quart N. E. ; elle est profonde et a trente-cinq a quarante pas de large ur. Vers une beure de I'apres-midi, nous arrivames au port de Cabra. Je n'apercus autour de moi que des marais inondes et couverts d'oiseaux aquatiques. Le bras est tres elroit sur ce point, et le couranl est plus fort que dans le grand bras ; je sup- posai qn'il pouvait bien aller rejoindre le Dhioliba a peu de distance ; car, en cet endroit, la brancbe in- cline a l'E. S'il en est ainsi, le fleuve fonnerait une grande ile marecageuse et tout inondee lors des de- bordemenls. » De ces immense^ marais, la vue se porle sur le village de Cabra, silue sur une petite montagnc qui le preserve de 1'inondaliou. On m'assura que, dans la saison des pluies, ces marais etaient couverts de dix pieds d'eau (ce qui me parut une hauteur enorme pour un espace aussi grand) , et qu'alors les grosses (i) Le nam a ete ecrlt ainsi dans la relation. ( 350 ) embarkations allaienl mouiller devanl Cabra. In petit canal conduit a co village; mais il n'y a que dcs em- barcalions moyennes qui puissent entrer dans le port. Si le canal elait neltoye des berbes et des nenuphars qui I'encombrent, les embarcalions de vingt-cinq tonneanx pourraient y remonter dans toutes les sai- sons ; mais c'est un travail trop penible j>our des negres. » Je m'embarquai sur une petite pirogue avec Jes Maures d'Adrar, pour aller a Cabra : les negres es- claves lirerent 1'embarcation avec une corde ; la perche aurait ete insuffisante. Vers trois beures du soir, nous elions enfin a Cabra, petite \ille siluee a trois milles au nord du grand port. » La petite ville de Cabra est ctroite ; les maisons sont construiles en terre et a terrasse, elles n'ont que le rez-de-chaussec. II y en a peu de bien baties ; ce sonl en partie des cabules, car les personnes riches liabitent de preference Temboctou, centre du com- merce. LesbabilantsdeCabrasontapeu presau nombre de mille a douze cents ; ils sont tous occupes a tra- vailler soit pour debarquer les nombreuses marchan- dises qui viennent de Jenne, soit pour les conduire a Temboctou. Le chemin qui conduit a cette ville est un sable mouvant qui rend la marche tres penible. » L'inondalion continuelle des inarais qui avoisi- nent le village de Cabra ne permet pas aux habitants de cultiver le riz ; le sol sablonneux dont ils sont en- toures dans toute la partie du nord s'oppose a la cul- ture du mil ; il est d'une trop grande aiidite. Je re- marquai sur le port beaueoup de grandes pirogues en reparation. ( 351 ) » Le petit port de Cahra s'e-tend ;'i Test et a l'otiest l'espace d'un demi-mille, sur une largeur de soixante- dix pas ordinaires environ. » Le 20 avril, a trois heures et demie, les gens de Sidi-Abdallahi-Chebir et moi, nous nous mimes en route pour Temboctou, en nous dirigeant au nord. Enfin nous arrivames beureusementa Temboctou, au moment ou le soleil toucbait a l'borizon. II y a je ne sais quoi d'imposant avoir une grande ville elevee au milieu des sables, et Ton admire les efforts qu'ont eu a faire ses fondateurs. En ce qui regarde Temboctou, je conjecture qu'anterieurement le fleuve passait pres de la ville; il en est maintenant eloigne" de huit milles au nord el a cinq milles de Cabra, dans la mfime direction. » (Le 21 avril). La ville petit avoir trois millesde tour; elle forme une espece de triangle ; les maisons sont grandes, peu elevees, et n'ont qu'un rez-de-cbaussee. Elle est situee dans une immense j)laine de sable mou- vanl sur lequel il ne croit que de freles arbrisseaux rabougris, tels que le mimosa ferruginea, Temboctou peut contenir au plus dix ou douze mille habitants, tons commercants, en y comprenant les Maures etablis. » Maintenant il faut rapporter quelques parties du recit du docteur Bartb et renvoyer pour le reste au Bulletin. « Rabara n'est qu'une petite ville de 600 maisons ou cabanes.mais qui a acquis unecertaine celebrite comme port de Tombouctou ; elle m^rite a peine ce titre, puisqu'on ne peut en approcber que pendant quatre moisde I'annee, ou au plus cinq, dans les crues extraor- ( 352 ) dinaircs ; la clique sur laquelle cllc est silude csl d'unc profondeur si peu considerable, que, dans la saison pluvieusc, la barque qui ne portait quo lui (lcdocteur Barlh) et ses elfels, ne pul aborder jusqu'a la place que trainee avec les plus grandcs difficultes. Dans la crique, l'cau atteignait a peine les genoux des bale- licrs. Roromeh et les iles de Day auraient plus de droit a etre appeleesle port de Tombouclou (1). » Le 7 seplcmbre 1853, le do< leur Barlh est entre dans la \ille de Tombouclou en grande cercmonie, escorte par le frere du cheikh el Bakay, le gouver- ncur en chef, et par line suite noinbreusc... II a ele accueilli et salue joyeusement par les habitants de la ville. On avail fail croire a ceux-ci qu'il elait un envoye du grand sultan de Slamboul. » La ville de Tombouclou est placee entre 18° 3' 30" el 18° h' 5" de latitude nord, ct a 1° /J5' longitude ouest de Greenwich. Sa forme est li iangulaire. Les maisons sont baties la pluparl en terrc ou en pierres, plusieurs avec de belles et elegantes facades La population est esliinee a 20,000 aines. Le marche tie Tombouclou, \ante comrnc le centre de commerce des caravanes de I'Afrique sepleulrionale, est moins elendu que celui de Kano... Le pays oil cetle ville est situec est sur les bords du desert de Sa- hara el lui est semblable par la secberesse et la steri- lite du sol, excepte du cote du Rouara, ou le .^ol prcnd une npparence plus fertile. » En quoi se renconlrent ou different ces deux recits, c'cst ce que je vais examiner. On voit d'abord que (i) Voy. Bulletin de mars et avril i85 j, |>. 270. ( 353 ) Rene Caillie, venanl do l'ouosl,n'a pas eu oonnaissance du flouve au-dessous de Kabra, el que le docleur Barlb, venant de I'est , n'a pas remonte au-dessus du meme point ; mais tousdeux onl parcouru le raeme terrain, du fleuve a Kabra et de Kabra a Tombouc- tou. Comma le docteur Barlh, Rene Caillie dit que les environs de la celebre ville sont d'unegrande sterilite, et qu'clle est sur la lisiere meme du desert. Vingt-cinq ans avant Barth, Rene Caillie avail re- connu que la ville a la forme d'un triangle. La ville a paru mieux batie au dernier voyageur qu'au premier, ce qui prouve au moins que celui-ci etait sincere , puisque les voyageurs sont suspects d'etre cnclins a l'exageration ; mais il est bien possible qu'apres vingt-cinq ans, la ville se soit embellie. Les deux voyageurs sontd'accord surce point « que le marcbe de Tombouclou n'est pas le plus important de la conlree » ; Caillie avail place celui de Djenne bicn au-dessus de celui de Tombouctou, comme le docicur Bartb met celui de Kano au-dessus. Tons deux sont encore conformes sur 1'influencc des Touariks a Tombouctou : on sait que Rene Cail- lie parle de campements touariks plac6s aupres de Tombouctou et sur le grand fleuve. La population n'est evaluec par Rene Caillie qu'a 10,000 babitants ; le docteur l'estime a 20,000 ames : celle difference n'esl pas absolumenl difficile a expli- quer. On a vu plus haut ce que disenL l'un et l'autie sur le site marecageux des environs de Kabra : leurs re- cits semblent se confirmer et se completer r6cipro- quemcnl; mais Caillie venait de l'ouest et dusudj le ( 35A ) docleur venait do Test et n'est pas alio phis loin. II avnit remonle le flenfve, et Caillio l'avait descendu ; le docteur sVst arrete juste au meme point que son pre- eurseur, du moins jusqu'au 5 octobre dernier, epoque des dernieres nouvelles. II n'y a point d'opposition dans leurs recils, malgre la difference des saisons : Rene Caillie etait arrive a Tombouctou le 20 avril ; le docteur Bailh y est cntre le 7 seplembre. Ou la difference est notable, e'est dims la situation personnelle des deux voyageurs : l'un est arrive dans la ville faineuse en pauvre pelerin, prive do toute pro- tection comme de toutes ressources, osanl a peine montrer sa misere ; 1'aulre a fait une entree solennelle, protege par le gouverneur local, escorte par une suite nombreuse et accueilli par la population comme repre- sentanl du chef supreme de l'islamisme. Malgre le fana- tismed'une partie des habitants, il a pu meltre a profit une residence de plusde cinquanle jours (I), pourfaire une serie d'observations scientifiques stir tout ce que son pred^cesseur n'a pu decrire ni meme apercevoir : je mots au premier rang de ces observations la deter- mination de la position geographique de Tombouctou. Le docleur lui assigne une latitude moyenne d'envi- ron 18° 3' et une longitude de /f 5' ouest de Paris. Ce n'est pas le lieu de comparer ces coordonnees avec cellos qui ont 6te admises par les savants et par les carlo- graphes. La discordance qu'on y remarqae n'a rien do fait pour etonner ; l'inforlune major Laing, par- venu a Tombouctou avec des instruments, etait le seul qui eutpu fournir desdonnees exacles, comme il l'a fail (i) C'est plus de trois fois autant que le sejoui de R. Caillie. ( 355 ) pour la position d'Ayn-Salah, oasis (ju'il avait traversee en chemin. Ses autres observations ont peri avec lui. On n'a done eu que les itineraires pour fixer cette position importante (1) ; ceux des Arabes estitnes en journees, sont bien vagues et m6ine contradictoires; aucun Europeen n'avait marclie sur les lignes de ces itineraires pour en conlroler les directions et fixer les valeurs des journees. Que d'incertitudes sur les unes et sur les autres ! Caillie seul avait suivi une ligne con- tinue, a peu pres du sud au nord depuisTime jusqu'a Tanger, e'est-a-dire dans un espace d'environ 26 de- gres : e'etait comme une soite de meridien sur lequel il avait note sans interruption toutes ses directions et les estimes de sa marclie, nolecs en milles. II n'a pas ete tres difficile, a celui qui a construit la carte de son voyage, de poser cbaque lieu a sa place approximative, d'apres la combinaison de toutes les donnees. II en estresulte pourTombouctou une latitude de 18 degres (2) . II m'ap- partient moins qu'a un autre de faire remarquer cette coincidence parfaite avec l'observation du docleur Bartb ; je ne discuterai done point une seconde fois la valeur des diverscs donnees, et je nierai encore moins la possibility d'une compensation entreles erreursop- posees. II n'en est pas de meme de la longitude, ele- ment bien autrement difficile a etablir que l'autre, (lj Tombouctou est situe dans le Taferour (Afrique centrale) au point le plus nor. I du grand fleuve, a peu pres comme Orleans, en France, est situe sur la Loire au point le plus septentrional de son cours. ^i) Voyez Remart/ues ge'oijraphiques et Recherches sur le voyage de M. Caillie clans I' Afrique centrale. In-8°, 1829, t. Ill du Journal (fun voyage, etcl ( 350 ) surtout par le trace de simples lignes itiueraires. On con$oit qu'unc longue ligne allant du sud au nord, formed d'une suite de lignes ties courtes, peut, sans changer sensiblement de longueur totale, \arier beau- coup de Test a l'ouest ; e'est ce qui est arrive quand, apres avoir conclu des marches de Caillie une latitude de 18 degres, j'ai estime", par le fait de la construc- tion, la longitude a 6 degres ouest; elle seraitseulement de h" 5' selon les dernieres nouvelles de Barlli. Reste a connaitre les elements monies de son observation ct a savoir s'il avail dans les mains les tables necessaires pour la calculcr. L'erreur commise sur la position da Bakel m'a toujours fait penser qu'on a\ait aussi porte Tombouctou beaucoup trop a l'orient; mais toutes les conjectures devront tomber devant une observation di- recte, telle que celle qu'a pu fairc le doclcur Barlh, arme de hons instruments, et habile observateur, soit qu'il ait fait usage du chronometre, des occultations d'etoiles, des eclipses de satellites ou des distances lu- naires. Pousserplus loin la discussion de celle question geographiqueseraitaujourd'hui chose pre^naluree, elje meborneraiaciterla position qu'assigneaTombnuctou, sur sa carte recente d'Alriquc, Henri Kiepert, l'un des meilleurs geographies de notre temps : Latitude, envi- ron 15° 55'; longitude, 3° 30' ouest de Paris; j'ignore s'il a ecrit quelque chose a l'appui de celle determina- tion ; il m'estdonc difficile d'en faire 1'examen. Toute- fois la carle de M. Kiepert reportc Tombouctou a Test dans l'interienr beaucoup plus qu'aucune autre, ct la difference est encore plus considerable pour la lati- tude, puisqu'il porte cette ville de 2° 8 a 9' plus au sud que le docteur Barth, et que la carte tie R.Caillie\C'est (357 ) aux gcographos qu'il appartientde choisir enlro loules ces donneos sur la longitude, et peut-elre convientil mieux d'attendre la publication des observations du docteur Barlb, qui, sans nul doule, seront preferees a toutes les approximations. Je n'ai plusqu'une remarque a faire sur la lettre de M. Petermann, redigee d'apres la correspondance du docteur Bartli. On a vuqu'ilclitdiiKouaraqu'onl'appelle communemenl Niger. II est possible que cette designa- tion appartienue a M. Petermann seul; mais l'opinion de cetbabile geograpbe n'en serait pas inoius a noter, comme annoncant une modification, un changementa l'idee qu'on s'est faite du corns du Niger depuis quel- que temps. L'identifier avec le Dhioliba m'a toujours paru cbose contraire aux passages des anciens ecri- vains, et bien avant qu'on eut decouverl leBenue, j'a- vais suppose a la Tcbadda une source tres reculee dans Test, de maniere a former le Niger, 1° de ce fleuve ; 2° de la partie inferieure du Rouara de l'emboucbure de la Tcbadda a la mer, et se dirigeant ainsi de Test a l'ouest, et non en sens contraire comme fait le Dbioliba. Qu'on me permelte en finissant une simple re- flexion. En comparanl la relation de Rene Gaiilie avec lerecil tire des lettresdudocteurBartb, je n'ai nul- lement entendu comparer les deux voyageurs, celui-ci forme dans les ecoles savantes, muni de bons instru- ments et babile a les manier; l'autre seul, isole, de- pourvu d'instrumenls comme d'une baute instruction scientifique, mais bommed'un jugementdroit, bomme d'intelligence et de sagacite. Par cette comparaison, quin'estpas un parallele, j'ai voulu montrer ce que peuvent, pour oblenir un succes qui a echappe a vingt ( 358 ) autres, la Constance, l'energie et le caractere dans une enlreprise dilllcile , ce que peut une ame forlement trempee, allant a l'accomplissemenl d'une resolution fenncment arretee, el cela a travels les plus grands ob- stacles qu'un homme puisse renconlrer. En donnant a M. Barth les grands et justes eloges auxquelsila droit, nous n'oublierons done pas I'adinirable devouement, le courage et la perseverance de Rene Caillie, el nous reconnaitrons que, si le modeste voyageur n'a pas tout vu et tout dit, il a consciencieusement observe, rap- porte des fails exacts, que le docteur allemand vienl confirmer par un temoignage irrefragable. Me sera-t-il permis d'ajoutcr une seconde reflexion ? La France possede en Afiique, depuis plusieurs sie- cles, une grande colonie ; le pavilion francais peut flotter de l'Ocean a la Faleme; les royaumes voisins sonl en bonne intelligence avec nous. D'un aulre cote, depuis vingt-quatre ans, nous possedons 1'Algerie, et deja meme plusieurs oasis du Sahara. Comment se fait-il que ces deux colonies n'aient pas encore essay e de se donner la main, en s'envoyant reciproquement, Tune a l'autre des missionnaires scientiliques , des pionniers de decouverles, des voyageurs courageux, des oiiservateurs capables, meme simplement des ue- gocianls inlelligents el instruits, s'associant aux cara- vanes qui circulcnt sans cesse a travers le grand de- sert? Jaini'S Richardson avail dans le principe drmande un Francais pour compagnon de voyage. C'est sur le relus d'une subvention qu'il lallait accorder a un voyageur bien connu, que Richardson s'est tourne d'un autre cote, et que deux Allemands, homines d'ailleurs d'un grand merile, lui ont ele assoi ies. ( 359 ) L'Afrique centrale, qui ne eompie pas un seul Fran- cais parmi les explorateurs, est traversee en tous sens par des Anglais, des Prussiens, des Allemands, des Suedois, des Autrichiens. Un meme jour, le 25 mars dernier, a vu annoncer a Londres l'arrivee du doc- teur Bartli a Tombouctou, et a Stockholm l'arrivee de M. Anderson (l'ancien compatriote de M. Francis Gal- lon) an 2edegre 56' de latitude sud (et 20° kb' de lon- gitude est de Paris), et voici, d'un autre cote, David Livingston, parvenu au \lxe degre de latitude sud ; sans parler desmissionnairesRebniann et Krajd THelvetien, faisant de grandes decouvertes dans l'Afrique orien- tale. Presque toules les nations de l'Europe, ho rims les Frangais, ont done des representants au cceur ou aux parties les plus reculees de l'Afrique. Ce n'est pas qu'il ne reste encore de belles palmes a cueillir. II est possible que le docteur Bartli descende leBenue (ou laTcbadda) et aille au-de\ant du batiment a vapeur qui va la remonter; puis, qu'il retourne en Angleterre par le Niger inferieur ; inais qu'un voya- geur, suivant les traces de d'Arnaud, de Knoblecber et d'Angelo Vinco, arrive a Tune des sources du Nil blanc, peut-elre jusqu'a une chaine donl le montKenia ferait parlie ; que de la il se porle sur le Ouaday, puis a la source du Cbari et le descende jusqu'au lac Tsad ; enfin qu'il reviennp en Europe par la voie de Tripoli, aujourd'hui bien connuc, et il se couronnera de gloire aux applaudissenients de toute l'Europe. P. S. Les nouvelles qui viennent d'arriver du doc- teur Vogel, en date du 3 Janvier, meritent de Irouver une place danscet apergu sur les decouvertes du doc- teur Barlb. On saitque M. Vogel, parti d'Angleterre en ( ;U)0 ) l'evrier 1853 ct de Tripoli en juillol, avail gngne Mor- zouk an niois de septembre. II est arrive sain el sauf an lac Tsad. En decembre, il ecrit an consul anglais a Morzouk que 1 'expedition a traverse heureusomenl le desert et est parvenue au Bornbu sans autre perte que celle de deux chamcaux. La revolution arrivee dans le Bornou, a la suite de laquelle le sultan a ete depose et remplace par son fVere Abd-el-Rahmun, n'a rien change aux bonnes dispositions en faveur de la mis- sion. Le doctcur Vogel a determine la hauteur du lac Tsad au-dessus du niveau de la iner; cllc n'excede pas 850 pieds, et celle de Kouka 900 ; celle du plateau qui est au nord-ouest du lac est de 1*200 pieds. M. Pe- termann, en publiant ces nouvelles, en ajoute d'au- Ires relatives an bailment a vapeur/a Pleiade, qui vient de partir de Kingston le 20 mai, pour rejoindre le batiment destine a explorer la Tchadda, maintenant stationne a Fernando-Po. Le capitaine Becroft, consul a Fernando-Po, est le chef de l'expedition ; le docteur Baikie, naturaliste , et le docteur W. Bleck, jeune elhnographe, raccoinpagnent. Le noinhre des Euro- peens embarques sera tie treize ; les Equipages seront uniquernent composes de noirs. Le navire apparlient a M. Mac-Gregor Laird, qui supporte les frais de l'expedition. L'expedition doit etre renduc a l'cmhou- chure du Kouara le ler juillet; elle le remontera avec une provision de charbon pour vingt a trente jours, a raison d'une marche de douze heures par jour, ce qui suflira pour la conduire jusqu'au lenne des eaux navi- gables de la Tchadda, sans etre obligee de s'arretei* pour couper du hois. M. Laird a calcule snrsoixante-quinze jours de crue ( 361 ) des eaux, a parlir ri.vis. Yille ppi i Sf»3. Messieurs , Des lettres du Cap et d'Augleterre m'onl informe receminentdc l'honorable distinction que vous m'avez accord ee en m'offrant la medaille de voire Sociele. Je suis sur le point de partir pour la cote de l'ouest ; votre medaille, probablement accompagnee d'une letlre d'envoi, est encore au Cap; je ne m'empresse pas moins de vous exprimer ma reconnaissance pour l'en- couragemenl quo voire bienveillance m'a adresse. J'attacherai toujours le plus grand prix a votre appro- bation des humbles efforts que je tente pour ouvrir l'AI'rique a la sympathic et a la civilisation des autres (i) Voye/. la carte qui accumpagne cctte lettre, a la tin do present nutnero. On a, sur cette carte, ainsi (pie dans la lettre, conserve icrupuleusement I'orthographe employee par M. Livingston. E. G. ( 365 ) parlies de la famille humairie. Cette recompense, lout a fait iuattendue, nous montre que nos efforts pour ameliorer les conditions de cette malheureuse contreo sont d'accord avec les inspirations des hommes eclai- res de lous les pays, Veuillez, Monsieur le President, expriiner mes remercimenls les plus reconnaissants aux membres de votre Societe et recevoir vous-meme l'assurance de ma sincere gratitude. Le voyage que j'enlreprends en ce moment a eu pour but la decouverte d'une localite salubre pro pre a l'e tablissement d'une mission ; le principal obstacle que nous ayons a redouter dans ces regions de l'Afri- que, c'est la fievre. Pour nous rendre en ce lieu, je n'ai pas sui\i noire ancienne route; mais, depuis Kamakama, j'ai conserve la direction du meridien ma- gn^tique (21 degres 0.) jusqu'a 10° 16' de latitude sud. La, tout mon monde fut atteint soudainement de la fievre, excepte un jeune homme qui soignaitles bceufs, tandis que je m'occupais de nos malades. Apres plus d'un mois de soins, quand je vis qu'on pouvait reprendre la route, nous nous dirigeames au nord. Nous avancions fort lentement, carle pays etait couvert de bois epais, et j'avais a la fois a remplir les fonctions de conducteur de chariot et de coupeur de bois. Une herbe baute de huit a dix pieds rendait les bceufs tres craintifs ; ils s'ecbappaient souvent et s'en- fuyaient quelquefois jusqu'a dix on quinze milles sans s'arreter. Le jeune homme fut lui-meme atteint de la fievre; mais deux Bushmen me secondaient active- ment, et, a force de perseverance, nous parvlnuies au voisinage du Chobe. Au milieu de nos embarras, j'ai ( 360 ) eprouve mi plaisir inexprimable ;i la vue dune vieille connaissance : cede connaissance e tail de la vigne, re- vetue d'une magnifique vegetation et des plus belles groppes pourpres. Les pppins do ces raisins sont de la grosseur de poiscasses, dune nature tres astringente, et ne laissant que pen de place a la partie aqueuse du fruit, qui forme lui-meme un ^rain assez fort. La contree voisine du Chobe offrait des vallees iuon- dees, semblables a des rivieres; apres en avoir tra- verse plusieurs, nous arrivames a celle qu'on nomine Sansbure, et qui presentait un obstacle tout a fait infranchissable a nos chariots. Elle etait profonde, avait un demi-mille de largeur, et renfermait des bippopotames. Je cbeicbais en vain un gue ; en ineme temps nos Bushmen nous abandonnercnt subi- tement. Tres desireux d'alteindre la population de Se- bituaue, je pi is avec moi un de mes malades les raieux retablis, nous traversaraea le Sansbure sur uu petit bateau, et nous marcbames au N.-N.-O. a la recherche du Chobe. La plaioe a travers laquelle nousavancions peniblemenl presentait, outre une couchede sixpouces d'eau, une herbe epaisse et elevee. Apres avoir fait environ vingt milles, nousroncontrames une immense foret de mseaux se prolongeant au nord-est, aussi loin que la vue pouvait s'elendre. Mais le jour suivant, avant marche au sud-ouest, nous trouvames enlin des arbres, et, du haul de l'un d'eux, nous eumes le plai- sir de voir un cours d'eau. Mais use barriere impene- trable de rosoaux se trouvait entre la rive et le courant, cltousnos efforts nepurent nous faireparvenir jusqu'a celui-ci : tanlotl'eau etait trop profonde dans lesherbes ( 367 ) pour qu'on y marchat a gue, tanlot il nous etait im- possible de courber les masses de papyrus liees entre elles par des plantes grimpantes; pour donner une idee de la nature de nos efforts et des difficultes, je dirai que nos veteinents, cependant ties forts, etaient completement dechires au genou, et que nos chaus- sures, excellcntes aussi, etaient en lambeaux, par suite d'une detestable espece d'herbes dont les exlremites superieures, pointues et dentees, nous dechiraient les mains. Obliges de revenir a l'immense foret de roseaux, courant au nord-est, que j'ai mentionnee tout a I'beure, nous parvinmes, le quatrieme jour de nos rechercbes, a y decouvrir un passage. Nous descen- dimes, l'espace de vingl milles, la riviere avec notre bateau, el nous arrivames a un village de Makololo. Notre visite surprit beaucoup les habitants, d'autant plus qu'ils considerent le Cbobe comme une barriere defensive complete contre leurs ennemis, et que per- sonne ne peul le traverser a leur insu. En retournant a notre chariot dans des pirogues, nous allames en droite ligne et ne parcourumes qu'environ dix milles; nos courses dans les herbes avaient ete de soixante milles. Maintenant tous nos embarras etaient aplanis. Plusieurs pirogues el environ cent quarante homines arriverent de la ville. Nos bagages furent promptement transportes a travers ce pays et la riviere, et, apres avoir marche au nord pour eviler les terres inondeis, nous tournames au sud-ouest et parvinmes a la ville. Le ills de Sebiluane se nomme Sekeletu ; c'est un jeune homine de moinsde dix neuf ans. II nousrecut avec les plus airnables demonstra lions d'affection. Je ( 368 ) void. us parcourir et examiner son pays; il diVnaii m'accompagner pour me garanlir des dangers a drain d re , mais ii no pouvait pas s'absenter pour lo moment : d'ailleurs on n'est jamais presse en Afrique. Je fus done oblige de rester quclque temps en place, d'autanl plus que des atlaques de fievrc vinrent me surprendre. Afin d'employer ce temps aulant que la fievre me le permettrait, je commencai a enseigner a lire. Le chef erait bien inquiet de penser qu'il fal- lait changer le fond de son cceur el se contcnter d'une seule femme. Une conspiration faillit lui ravir la \ie. Combien les plus legeres circonstances suffisent quel- quefois pour derangcr les plans les plus habilement concertos ! Je me Irouvais assis cntre le chef et I'assassin qui voulait le tuer, et je previns ainsi l'accomplisse- ment du crime. Le conspirateur, qui desirait s'assu- rer la souverainete, avait une petite hacheaveclaquelle il pensait frapper Sekeletu aussilot que celui-ci se le- verait apres une entrevue qu'ils avaient. Je me Irouvais assis entre ces deux hommes ; me sentant dispose a me retirer, car il etait tard, je dis a Sekeletu : « Ou a'llons-nous dormir celle nuil? — Viens, me repon- dit-il, je vais le le montrer. » Nous nous levames en- semble, et, comme mon corps couvrail le sien, le miserable ne put frapper. Des complices vinrent le soir meine tout reveler au cbef. Le conspirateur tut i'i mediatement amene et mis a morl. Tout cela se passa avec si peu de bruit, que je ne 1'appris que le lendemain, quoique je fusse dans une hutte voisine. Nous remonlames la riviere qui conduit aux Borotse ; nous avions cent soixante hommes et trente-trois ( auots. La riviere est appelee partout Leeambye ( 360 ) (c'est-a-dire la Riviere), et peut-elre est-ee son nom le plus exact, car il y a plusieurs Seshekes (1). Gc l>eau cours d'eau est large souvent de plus d'un mille. Les rives en sont bordees de forets. Beaucoup d'arbres ont des racines aeriennes qui descendent des branches et vont plunger dans l'eau. De nombreuses lies de trois a cinq milles de longueur se rencontrent dans la riviere et offrent un inagnifique aspect, car ce sont des masses de verdure arborescente parees des teintes les plus variees. Ledatlier et de hauls palmiers dominent lout cet ensemble, et leur feuillage penne se dessine delicieuscment sur l'azurdu ciel. 11 se trouve, dans le cours de la riviere, plusieurs cataractes de quatre a cinq pieds de hauteur, qui, avec divers cou- ranls rapides, rendent la navigation dangereuse. La plus grande est celle de Gonye ; un rocher forme un banc au-dessous de la chute et recoit les eaux du tor- rent. Une partie de la cataracle se precipite dans un abime, du fond duquel s'eleve un nuage de vapeurs ou se jouenl les couleurs de l'arc-en-ciel. Lorsque nous fumes parvenus a lb' degres de lati- tude, nous virnes les haules rives boisees s'ecarter de la riviere, et courir comme deux rangees de collines au nord-nord-est et au nord-nord-ouest, a vingt ou trcnle milles de distance; elles dessinent une vallee d'environ cent milles de largeur, qu'on appelle pays des Borotse , et qui est annuellement inondee, non jiar des pluies, mais par des eaux qui descendent (i) rNous avons uependant cm devoir conserve!-, dans lesquisse que nous donnons d'apres M. Livingston, le nam de Seslieke, que portait cette riviere Jans la premiere carte de MM. Livingston et Oswel. (Voy. le Bulletin d'betobre i852.) E, C. et V -A. M.-B. ( 370 ) dii nord et tin nord-ouest. Si la riviere s'eleve de dix pieds au-dessus des bassos eaux , la vallee est tout entiere submergee, excepte les petits tertres oiiles villes et les villages sont places; si lean monte deux pieds plus haul, les villes sont inondees. Le sol de quclquos- unes de ces villes, comma celui de lacapitale, ISariele, a ete eleve arlificiellement. L'emplacement de la plus grande ville qui ait ete elev^e dans ces conlrees, est maintenant une parlie du lit de la riviere. Santuru. cbef des Borotse, employa tout son |)euple, pendant plusieurs annees, a elever cet emplacement, qui, au- jourd'liui, a lout entier disparu dans la riviere, exceple quelques metres carres. La vallee est couverte de palu- rages excellents, formes de Ires grandes herbes; je remarquai de ces herbes qui avaient douze pieds de haul et la grosseur du pouce. On voit paitre de toutes parts des bestiaux de forte laille. Les villages sont assez nombrcux, rnais generalement petits. On ne rencontre pas d arbres, excepte ceux que Santuru avail fail trans- planter pour se procurer de I'ombrage. Les cbaines qui forment la vallee sont le commencement de plateaux eleves de deux a trois cent? pieds au- dessus du niveau de 1'inondation ; elles sont revotues d'aibres et contientient beaucoup de plantation? do cannes a sucre, de patates donees, d'ignames, de ma- nioc, de millet, de mais, etc. On cultive de grande? quanlites de ble (sorgho cafre) et de mais. Ces ce- reales, 1'abondance du lait fourni par des troupeaux nourris dune berbe succulente, et le poisson donl fourmille la riviere, rendent dans ce pays la vie extre- mement facile. Les hauteurs sonl los seules parties qui m'aient paru ( 371 ) offrir un sejour habitable ; cependant elles ne sont pas salubres; les exhalaisons de la vallee et de toutes les terres inondees du voisinage sont probablement la cause de la fievre, conlre laquelle il faudra lulter si Ton entretient des rapports avec les habitants de ee pays. II y a des montagnes elevees au dela de Mosiva- tunya ; mais Mosilikatse ne laisse vivre en paixaucune population de son voisinage. Apres avoir examine le pays des Borotse, je quittai nos hoinmes et j'allai au nord jusqu'au confluent de la Leeba ou Londa ct de la Leeainbye. Cette der- niere parait venir de Test, et la Londa vient de la ca- pitale d'un puissant fitat de ce nom. Si je voulais gagner Loanda, sur la cole occidentale, je pourrais employer le cours de cette riviere pour m'y rendre ; le confluent est a 14° 11' de latitude sud. D'apres ce que m'a dit un marchand porlugais, il y a bien pen de points de l'interieur que les cartes donnent avec plus de precision que ne pourraient en offrir les renseignements des indigenes. Le fait est que beaucoup de cartes portugaises sont entitlement com- posees d'apres ces renseignements. La carte construite parM.Oswel elparmoi renferme une ties bonne indica- tion des rivieres; mais, comme on pouvait s'y attendre, il s'y est glisse plusieurs petites erreurs. Tout le pays de Sebiluane devrait etre reporte plus a l'ouest: car, si mescalculs sont exacts, la station de nos chariots, au lieu d'etre a 26 degres de longitude est (de Greenwich), n'esl qu'a "23° 50'; mais nies calculs seront soumis a des calculateurs habiles, avant que je puisse les donner comme tout a fait corrects. L'esquisse ci-incluse vous permettra de voir de quelles autres ameliorations le ( 372 ) travail est susceptible. .Nous n'avons presenle que ce que nous avons vu, ct, jusqu'a ce que de nombreuses observations nous mellent a inline de fournir uno carte exacte de tout le pays, I'esquisse que M. Oswel et moi avons donnee l'annee derniere sera toujours un bon guide pour les explorateurs futurs : e'est le seul but que nous nous soyons propose. Le Loeti, aux eaux legerement colorees; s'unit a la Leeambye par 111" 18' de latitude sud; il vient de Lo- bale, qui paialt etre uno contree bien arrosee, siluee a l'ouest de ce confluent, In niarchand portugais rap- porte qu'il a trouve, dans cette direction, uu pays ou il eut a passer en un seul jour dix rivieres consi- derables. Mon voyage a dure six semaines. Je n'etais jamais reste aussi longtemps dans un contact continue) avec les paiens. lis out tous ele pour moi aussi aflcctueux el aussi prevenants qu'ilsle pouvaient. Cependant leurs cris, leurs cbants, leurs danses, leur habitude de turner le cannabis saliva, leurs querelles, leurs anecdotes grossieres, leurs imprecations, tout cela, endure pen- dant six semaines, m'a fait voir que ces enfants de la nature sont dans un etat de degradation morale fort au-dessousde la lie meme dela population de Lontlres. Hcureusement je puis dislrairecomplelement mon at- tention des bruits quiin'environnent; maisun liomme qui serait jete sans livre parmi ces indigenes, serait, au bout d'un an, ou misanthrope ou fou. Veuillez excuser la longueur de cette lettre et agreez, Messieurs, les sentiments de votre reconnaissant et humble serviteur. David Livingston. ( 373 ) EXTRAIT d'uNE LETT11E DE M. LE BARON ALEXANDRE DE HUMBOLDT A M. JOMARD, kV SUJET DES TRAVAUX DE M. KOHL (1). Potsdam, 25 avril 1 854- .... Je vous prie de recevoir avec bonte le porteur de cette lettre, M. Kohl, qui desire placer sous vos yeux nn immense travail graphique sur 1'histoire de la gro- graphie de l'Amerique , qu'il porle en Angleterre. M. Kohl est un hommc de talent, dont les voyages dans plusieurs parties de l'Europe ont ele traduits en an- glais. II a fait de solides et fortes etudes sur la geogra- phie dumoyen age, en remontant toujours aux sources memes. Vous lui montrerez, j'espere, toutes les choses que vous avez reunies; je suis lie d'amitie avec lui. Vous voudrez bien le proteger un peu a la Biblio- theque de l'lnslitut et a notre Societe de geographic... Alex, de Humboldt. (i) Voyez le proces-verbal ile la seance du 19 inai, page 386. ( m ) i vrnAii l)'uNE LKTTRE ])E M. DE MONTIGNY , CONSUL DE FRANCE A CHANC-IIAI F.T KING-PO, A- M. LE PRESIDENT DE LA SOCIETE DE GEOGIIAPHIE , AU SUJET DES PRODUITS DE L INDUSTRIE CIIINOISE (l). Paris, le 3o avril 1 854- Monsieur le President, Avec le secours de votre honorable Society, de grands bieni'aits peuvent fetre repandus parmi nos in- dustriels, nos agriculteurs ; el, tout en continuant a propager les lumieres, noire Societe, entrant dans une phase nouvelle, dotera la France des produils naturels el manufactures des autres conlrees. Ce n'est pas sans reflexion que je me suis adresse a vous, Monsieur le president, pour vous prier de repartir, au nom de la Socielu, des graines du nord de la Chine parmi nos Society d'horticullure , el de les faire ainsi experi- menter dans loute I'etendue de notre riche Ochelle cli- materique. Mes provisions ne m'ont pas trompe; avec votre puissant concoursj'ai obtenu, en meme lemps, la mulliplicile des essais el des resultats utiles. En venanl vous prier aujourd'liui de (aire, en faveur de notre Industrie, ce que vous avez dep'i si heureuse- ment Tail pour notre agriculture, j'ose esperer lancer i) Voyez le proces-verbal de la seance du 19 mai, page i85. ( 375 ) notre Society dans une serie de bons et utiles services a rendre au pays, services qui, tout en appelant sa gra- lilude et les sympathies de notre gouvernement, au- ront n6eessairement pour effet d'encourager les loin- tains efforts des nombreux agenls de France, ines collegues, repandus sur toute la surface du globe, en leur apprenant que ces efforts auront des resultats utiles. Ne pensez-vous pas d'ailleurs, Monsieur le pre- sident, que, si le but de la geographie est de rappro- cher les peoples, en les faisant connaitre les uns aux aulres , son plus bel apanage sera de pouvoir les aider a echanger leurs richesses diverses, en eclairanl leur commerce? Un exemple de cette nature, donne par la Societe de geographie de France, n'aura-t-il pas de prompts imitateurs, et, de ces efforts reunis, ne naitra-t-il pas une multitude de relations nouvelles et d'^clianges utiles? Je prends la liberty de soumettre ces pensees gros- sierement elaborees a voire haute experience. J'ai I'honneur d'etre avecleplusprofond respect, etc. De Montjgny. ( 376 | [loiivellcs geograpliiqucft. AFRIQUE. NODVELLES niiCI'.NTES I)E l'aFIUQUK CENTRALIS. Le gouvernemcnl anglais vicnl de recevoir dcs nou- velles recentes du docteur Vogcl, en date du 20 fevricr dernier; il ignorait encore l'arrivee du docteur Barth a Tombouctou : les dernieres nouvelles qu'on avait reeues de lui, en date du 3 Janvier, avaient ete ecritcs Ires a la hate. Le nouveau sultan Abd-el-Rahman 1'a bien rec,u. On sait qu'il est le frere alne du sultan Amur, prince faible gouverne par son vizir et qui vient d'etre estrone ; celui-ci a piri dans la lulte. Malheureuscment, le clieiif El-Fazy, de Zinder, qui etait l'agent de M. Barth, a peri egalement, et Ton pout craindre que les papiers du docteur n'aient ete perdus. La longitude de Kouka, si incertaine et si de- ballue enlre les geographes, a ete enfin determined avec precision par le docteur Vogel, a quelques milles pres, au moyen de quarante distances lunaires : elle est de 13° 22' est de Greenwich,, ce qui est plus a l'ouest de 1° 8' que la position assignee par Denbam el Clapperlon ; la latitude est de 12° 55' Ik". La hau- teur de Rouka, au-dessus du niveau de la mer, est de 900 pieds, et, au-dessus du lac, de 50 pieds. La route s'eleve depuis Morzouk,graduellemenl, jusqu'au passage de El-Wahr, ou elle atteint 2 050 pieds, puis elle descend, par degres, a 1 000 pieds, jusqu'a Bilma. ( 377 ) Lo desert dc Tintuma a 970 pieds d'elevalion, el, aux puils de Kashiferi, 920 pieds ; ensuite le plateau eleve qui existe entre ce point et le lac Tchad (Tsad) a une hauteur de 1 100 pieds, sur une largeur de /l0 milles. L'arbre du caoutchouc n'avait pas ete mentionne par les precedents voyageurs ; le docteur l'a trouve tres ahondant dans le Bornou ; les habitants ne connaissent ni la nature ni l'usage de cette sub- stance. Le docteur se preparait a envoyer, par la grancle caravane de la fin du mois de mai, epoque a' laquelle el!e part du Bornou , des collections d'his- toire naturelle , des cartes et des depeches. Quant a ses excursions suivanles, il projetait: d'abbrd l'explora- lion du lac Tchad, ensuite tin voyage a Yola ct a la riviere Benue ; enfin un voyage a Kanem et au Bahr- el-Ghazal. Sa sante et celle de ses compagnons de voyage elaient dans les meilleures conditions. Cette nieme semaine, on recevait a Londresdes letlres du docteur Barth, datces de Sakkatou et de Wurno; elles sont d'ancienne date, savoir : du Ix avril au 6 mai 1853, et arrivees, a ce qu'il parait, par la voie de Ghat. Le 6 mars, il elait encore aRaschna (Katsen'a, Kachena). La guerre entre les Feilalas et les paiens de Gober el Mariadi l'a retenu a Kaschna et l'a force de faire un detour. A moilie chemin entre Kaschna et Sakkatou, il a atteint le dangereux desert de Gundumi, qu'il a hardiment et heureusement franchi au moyen d'une marche forcee de vingt-six heures consecutives, elil estainsi parvenu sain el saul' au village de Gaiiasu, a environ 30 milles E.-N.-E. de Sakkatou. La se trouvait l'empereur Aliyu, ills de Bello, avec son annee. L'eni- pereurdes Fellatas se preparait a i'atlaque du Gober, vii. mai. 5. 25 ( 378) avcc une force considerable. Le docteur a eu de lui deux audiences; il a obtenu : premierement, la sccurile pour les negociants anglais dans lout 1' empire Fellata ; 2° la permission d'ezplorer Adamawa et les autres ler- riloires de l'empire. April's l'ecliange des presents, le sultan a remis au docteur Barth une letlre pour la reine d'Angleterre ; mais comine cette lettre n'etait pas convenablement ecrite, le docteur en a deinande une autre, ce que I'empereur a octroye sur le champ. Le docteur Barlh s'est porte ensuile a Wurno, a 10 rallies O.-N.-O. de Gaiiaau et a 15 milles E.-N.-E. de Siikkatou. Le nom de celte ville elail inconnu jus* qu'a present ; bien quelle n'ait que douze a treize mille habitants, elle est plus imporlante que la ville meme de ijukkatou; c'esl aujourd'hui la residence de I'em- pereur. Elle a ete fondee par le sultan Bello en 1831; les habitants les plus riches de Sakkalou s'y sont eta- blis. Le docteur Bartli y a trouve d'interessants docu- ments, ainsi que les ecrits laisses par Bello. Le com- merce du pays est aujourd'hui dans Its mains des gens d'Ahiret de Ghat. Les Zorqmaua forment la principale population de Sakkatou ; gens industrieux, qui travail- lent le fer et le cuir avec adresse, et font de beaux ou- vrages, donl le docteur a reeueilli des ecbantillons. M. Barth a fait une earle de tout le pays qui s'etend de Kano et Raschna, a I'est, jusqu'au Rouara, a l'ouest, et de Gober, au nord, jusqu'a Yauri et Zaria, au sud. La clialeur s'est elevee a 108 et 111 degres Fahrenheit a midi (42 et hll degres centigrades) . L'usage du cafe et celui du lamarin out enlretenu les gens de 1'expedition dans un parfait elat de sanle; de teinj>s en temps on ajoule au breuvage des oignons et du ( 379 ) poivre noir, etaussi, quand <>n peut s'en procurer, un pen de miel. On omet ici beaucoup d'aulres details qui ne man- quent pas d'interet, et d'ou ressort la preuve de la haute intelligence et du courage du docleur Barth. Jomard. MINES D OR KT DE CUIVRE DANS I. AFRIQUE AUSTRALE. Des nouvelles du Cap en date du 28 fevrier confir- rnent la decouverte de Tor dans le bassin du fleuve Orange. L'emigration s'organise pour profiler des premiers benefices de cette decouverte , qui semble appelee a I aire du Cap de Bonne-Esperance , a moitie chemin de 1'Australie et de la Californie , 1'un des centres commerciaux les plus iinporlants des posses- sions anglaises. Depuis une annee seulement on a decouvert , sur le territoire du Cap, des mines de cuivre, rapportanl de 60 a 70 pour cent, et dont les produits se vendent deja de 100 a 105 livres sterling le tonneau, a l'etat pur, et de 125 a 135 livres sterling, quand ils sont melanges avec l'or natif. On est, a Port-Natal, sur la voie de mines de cbarbon qui, selon toute probability, conduiront incessamment a rencontrer des gisements parfaitement exploitables. D'autre part, la culture de la laine grandit de jour en jour. Le coton, le cafe, la canne a sucre et la soie entrent deja pourquelque chose dans les exportations de Port-Natal. ( 380 ) VMERIQUE. VOYAGE Dlv M. WAGNER. l.ne lettre de M. Maurice Wagner, datee de Mira- valles (Ktat de Nicaragua) , fevrier 1854, annonce que ce voyageur allemand a tente 1'ascension du vol can de Miravalles le 1" fevrier; il ne put atlcindre le sommel le plus eleve, qui esl au IN.-E. : il atteiguil settlement la pointe N.-O. NOU VELLES DIVERSES M. le lieutenant Maury, noire savant correspondant, directeur de l'Qbservatoire de Washington, vient de composer un memoire oit il expose en detail les moyens de relier Terre-Neuve avec l'lilandc, par des fds elec- tiiqttes. Selon M. Maury, cette operation sera it facile. La distance qui separe les deux pays est de 1600 millea niaritimes; d'apres les mesurages laits, la profondeur de l'Ocean pres de Terre-Neuve est de 1500 brasses, et elle augnaente progressivement jusqu'aux coles occiden tales de l'lrlande, ou elle est de 2 000 brasses; le fond de la mer n'oppose aueun obstacle notable a la pose des fils, lesquels s'y trouveraient bors de l'at- leinle des ancres des navires et en toule surete, puis- qu'il a ete constate que les eaux sont fort tranquiiles a cette profondeur. Lc uaeme savant hydrographe a communique a l'Aca- demie royale de Belgique, dans la seance du lx fevrier, une note stir la depression barometrique observee a ( 381 ) la hauteur du cap Horn. La moyenne annuellc , dans 1'Atlautique, est, en pouces, de : 29.97, par les vents alizes de N.-E., 29.98, par les vents alizes de S.-E. ; el dans l'ocean Pacifique, de : 29,96, par les vents alizes de N.-E., 30,05, par les vents alizes de S.-E. ; tandis que, a la hauteur du cap Horn, on a pour moyenne barometrique 29°, 23, c'est-a-dire une de- pression d'environ | de pouce. Un telegraphe sous-marin ne tar d era sans doute pas a franchir la Mediterranee pour metlre l'Europe en communication avec l'Afriquc et l'Asie ; c'est par la Corse et la Sardaigne que doit s'etablir la commu- nication electrique. Le trajet de la Spezzia a l'ile de Corse est assez uni. Le cable qui doit elre immerge enlre ces deux positions, est deja termine a Greenwich; il mesure 110 milles de longueur el pese 800 tonneaux. II contient six fils conducteurs du fluide electrique, proteges par un conduit de gutta-percha et places au milieu d'un cable de chanvre, lequel est entoure de douze lils de fer galvanise et mis ainsi a 1'abri de la rouille. ( 3S-2 ) Aetes de la Societe. EXTRA1TS DES PROGES^VEftBAUX DES STANCES. Seance du 5 tttai 185A. PRESIDKNCE DK M. JOMARD. Lc proces-verbal de la derniere stance est lu el adopte. II est donne lecture de la corresponclance. M. Berville, secretaire perpetuel de la Societe pliilo- tecbnique, adresse des billets pour la procbaine seance publique de celte Societe. M. Viquesnel repond a la demande que le secretaire general lui a faite, au nom de la Societe, de vouloir bien joindre ses instructions sur l'Albanie a cedes que la section decorrespondance a preparees pour M. Hec- quard, consul a Scutari. II enverra ces instructions dans quelques jours. M. Lelebvre-Durufle reinercie la Societe du titre de vice-president que lui a eonfere l'election du 7 avril dernier. M. Isidore GeoOroy-Saint-Hilaire envoie le premier numero du journal de la Societe d'acclimatation, dont il est le president. On communique la liste des ouvrages offerts. On vote Fadmission des membres pr^sentes a la derniere seance : MM. Lockard, Ribeiro, d'Oliveira et FoNTAIVKT. Le secretaire general donne lecture des questions preparees par la section de correspondence pour ( 383 ) M. Hecquard. sur FAlbanie ; pour M. de Saint-Cricq, sur le Perou ; pour M. Cadet, sur la Corse. Ces in- structions seront inserees au Bulletin. M. Jomard presenle la premiere partie des instruc- tions que la section de correspondance l'a charge de preparer pour M. Faidherbe , qui se propose de voyager dans l'interieur de la Senegambie. La suite se compose des questions redigees pour M. Raffenel et pour M. Panat. M. Alfred Demersay apprend a la Societe1 que le Bresil vient de decider la creation d'une nouvelle pro- vince, celle de Parana, formee d'une partie de celles de Saint-Paul et de Sainte-Catherine ; il enlre dans quel- ques developpements sur la position avantageuse de cette province, ou pourront se troiiver reunies les pro- ductions des climals temperes et des climats intertro- picaux. M. Gamier donne des nouvelles de M. Berlhelot, ancien secretaire general de la Societe, et agent consu- lage de France aux Canaries. M. Gamier exprime le vceu que la Societe envoie son Bulletin a cet ancien et honorable membre de la Commission centrale, qui est dispose a continuer sa correspondance avec la Societe ; cette proposition est appuyee et renvoyee a la section de comptabilite, pourqu'il soit presente une mesure generale relativement aux agents consulaires. Le secretaire general donne lecture de la lettre que M. Fiscber a adressee a la Society au nom de MM. de Moltke, de Vincke, Riepert, et an sien , a I'appui de la carte de l'Asie Mineure, et ou il expose les moyens qui ont servi a la construction de cette carte. ( 384 ) Seance da 19 mai 1 85/j. PRESIDKNCE DE M. JOMAIU). Le proems -verbal dc la derniere seance est In et adopte. Le secretaire general donne lecture de la corres- pondance : M, Walckenaer, fils de l'ancien president de la So- ciete, rcmercie M. le president de hi Commission cen- Irale dc ['envoi qu'il lui a fait, pour lui el sa i'amille, an noin de la Societe, d'un certain nonabre d'exem- plaires du portrait de M. le baron Walckenaer, son pere, portrait inserc dans le Bulletin. M. Fontanet adresse une leltrc de rernerclments pour son admission dans la Societe. M. Grand-Pierre, direcleurde la Societe des missions evangeliques, adresse une lettre deM. le doctcur David Livingston, en date du 28 septembre 1853, accom- pagnee d'unc carte manuscrite, avec une lettre d'envoi de M. Fredoux, missionnaire l'rancais, elabli a Molito (Ai'rique australe) . La lettre de M. Fredoux ct les docu- ments provenant de M. Livingston seront inseres au Ballet in. M. Viquesnel adresse les notes epic le secretaire general, au nom de la section de correspondance, l'a prie de joindre aux instructions redigees par cette section pour M. Hccquard, consul de France a Scutari (Albanie). II annonce qu'a ces instructions pourront etre aussi ajoutees utilement les notes que se propose de donnerM. Perrey, prolesseur a la Faculle des sciences ( 885 ) do Dijon, occupe d'un travail eteudu sur les tremble- ments dc terre. II recommande a la bienveillance de la Societe le desir que ce professeur lui a exprime de voir adinettre sous le patronage de la Societe de geo- graphie unc circulaire relative a la demande de renseignements propres a l'bistoire des trernbleinenls de terre. M. Joniard communique une lettre qui lui a ele adressee par M. le baron Alexandre de Humboldt, pour recommander a la Societe les travaux de geogra- pbie bistorique de M. Kobl. M. Kobl assiste a la seance, et M. le president le presente a l'asseinblee.. Le meme membre communique ensuite un plan cbinois de Nagasaki etdes environs, apporte parM.de Montigny, consul de France a Cdiang-bai. M. de Montigny ecrit en meme temps a M. le presi- dent, pour le prier de faire adopter par la Societe de geographie, relativement aux objets de l'industrie chi- noise, une resolution analogue a celle qu'elle a deja prise pour les graines de ce pays et qui a eu de si beureux resultats; il desirerait qu'elle voulut bien transmettre aux chambres tie commerce des ecban- tillons de cctte industrie, qui seront prochainemenl deposes dans le local de la Societe. La Commission centrale accueille avec empressement la proposition de M. de Montigny. M. Cortambert communique l'extrait d'une lettre de M. Albert de Burg, president de la Societe d'emula- tion de l'Allicr, qui signale quelques-uns des bommes celebres nes clans ce departement, entre autres le na- turaliste voyageur Frangois Peron, et qui exprime le vceu de voir la Societe de geograpbie accepter I'ecbange ( 886 ) dc son Bulletin contre les publications de la Societe d 'emulation. La Commission centrale, consultee sur cette demande, ajournc sa resolution jusqu'au moment oil dcs travaux de cetle sociote lui auronl 6td commu- niques. M. Jomard annonce que M. Ferdinand Denis veut bien se charger de traduire la slatistique manuscrite dcs Acores par M. de Moura, qui a ete offerte a la Societe par M. de Montigny. II met sous les yeux un ouvrage de M. Squier, intitule Hour/urns interoceam'c Railway, sur un projet de communication (Mitre les deux oceans, a travers l'Amerique cenlrale. On communique la liste des ouvrages ofTerts. M. Jomard depose sur le bureau, de la part do M. le lieutenant de la marine americaine Maury, l'ou- vrage intitule The Amazon and the Atlantic Slopes of South America. M. V.-A. Maltc-Brun enlrelient la Societe de la re- duction qu'il a faile, pour le Bulletin, de la carle dc l'Adique centrale par M. Aug. Petermann. M. Kohl met sous les yeux de la Societe one carte generale des decouvertes successives faites en Ame- rique, depuis les premieres explorations jusqu'a nos jours. II lit une notice sur la distribution generale de ce travail graphique tout a fail neuf, ou les noms des voyageurs, les dates des decouvertes, le sysleme des couleurs disposees avec une melhode particu- liere, suivant les routes et les epoques, excitenl I'at- tention et l'interel de l'assemhlee. M. Kohl mentionne cnsuite succinctement les sources oil il a puise les ele- ments de cette carte historique, et il montre a la Societe une collection tres considerable de pieces, copiees ( 387 ) d'apres les cartes originales ou il a retrouve une men- lion quelconque d'une decouverle nouvelle en Aine- rique depuis les plus anciennes explorations. Ces cartes ont servide base a la construction de sa carte generate. M. Isambert, president de la section de comptabi- lite, exprirne, au nom de celte section, 1'avis qu'on peut adresser le Bulletin a clivers consuls et agents consulaires qui, par leur position, seraient a meme d'etre utiles a la Societe. La commission cenlrale adopte cette proposition, apres quelques paroles de MM. Jomard et d'Avezac, tendant a faire voir l'avantage de repandre le Bulletin le plus possible. M. d'Avezac annonce la publication toute recente d'une nouvelle edition 6'Ethicus histriote, par M. Wulke, a Leipzig. M. Jomard annonce que M. Rocbet d'Hericourt, membre de la Societe et consul de France a Djeddab, vient de mourir en Arabic L'assemblee se montre vivement affectee de la perte de ce zele voyageur. ( 388 ) OUTRAGES OFFEIITS DANS LES SEANCES DES 5 ET 19 MAI 18j4. O U V II A G E S. MfeMOIRES, RECUEILS ET JOURNAUX PERlODIQUES. Titles des ouvrages. Donateurs. Annales du commerce exterieur. Mars 1 854 - — Bulletin de la Soctete geologique de France. Mars et avril i854- — L'Investigateur, journal dc l'lnstitut historique. Fe'vrier i85|- — Journal des mis- sions evangeliques. Avril 1 854 ■ — Journal d'education populaire. Avril 1 854- — Annales de la propagation de la foi. Mai i 854- — Revue dc l'Orient. Mai I 854- — Nouvelles Annales des voyages. Mars 1 854- — Archives des sciences physiques el naturelles. Mars 1 854- — Bibliotheque oniverselle de Geneve. Mars 1 854- — L'Athehaeum francais. SS"5 16 a 19 de 1 854 - — Zeitscnrift fur Allgemeine Erdkunde. i'r it 20 cahier du 20 vol. — Proceedings of the Royal Society. N0 2. AoTEOns BX EnnEcns. MELANGES. Astronomie elementaire appliquec a la chronoloyie egyptienne. 1 854, hroch. in-8°. M. DE VlLMEHS DU TbRBAGE. ( 380 ) BIBLIOGRAPHIC GEOG11 APHIQUE. (Voyez aussi les ouvrages offerts a la Socie'te. ) EUROPE. Le Danube, la mer Noire, la mer Baltique, la Turquie ancienne et moderne, par M. H. Lebrun. Paris, i854, i'l-zj.0. La Russie contcmporaine, par M. Leouzon-Ledue. Paris, i854,in-i6. Der Orient and Enropa, von Callot. Leipzig, i854, in-8°. Notions of Russia and Turkey. Londres, i854, in-8°. Plan de la baie de Kronstadt, dresse par A. Vuillcmin. Paris, 1 854 • Murray's Handbook for. Travellers in Turkey. 3e edit. Londres, 1 854- Beitrag zur Geschichte der stadt Villingen, etr. — Donaueschingen, i854, in-8°. Geographic physique, politique, historique, etc., du de'partement de la Charente-Infe'rieure, par Dolivet. Hochefort, i854, in-8". Geogiaphie et statistique des communes de France, publiees par M. Th. Ogier. — Canton de St-Syinphorien d'Ozon (Isere). Notices historiqnes, topogr.iphiques et archeologiques sur l'airondis- sement d'Abbeville, par M.Em. Prarond. Tome Pr. Abbeville, i85^, gr. iii-iG. Etudes statistiques et topographiques suiTarroudisseinent deCorbcil. Corbeil, i854, in-8°. Topography of Isle of Wight. Londres, i854. ASIE. Voyage en Turquie et en Perse, execute pendant les annees 1846, 1847 ct 1848, par Xav. Hommaire de Hell, avec un atlas des planches par J. Laurens. T. 1". Paris, 1 854, 8r- >n-8°. Les Pelerins d'Orient. Lettres artistiques, historiques c-t statistiques sur un voyage dans les provinces danubiennes, la Turquie, la Syrie, la Palestine; par M. Felix Pigeory. Paris, 1 854 J in-80. Avec une carte, el un plan de Jerusalem. Travels in Siberia, by S. S. Hill. Londres, 1 854, 2 vo'- in-8". The history of the greatand mighty Kingdom of China, and the situation thereof; compiled by the Padre Juan Gonzalez de Men- doza, und now reprinted from the early translation of R. Parke. Edited by sir G. T. Staunton. — Public par la Societe Hackluyt. A1RIQUE. Evenings in my Tent; or Wanderings in the african Sahara, by the Rev. N. Davi>. Londres, i85.{, 2 vol. in-8". ( 390 ) AMEIUQUE. Voyage en Californie, par M. Anger. Paris, i854, in- id. Reise in Sud.um i ika. von E. \. Bibra. Manheim, I 8 5 4 •. in-8*. Minnesota and its Resources, by J. Wesley-Bond. New-York, 1 854 ■> in-8". A New and complete Gazetteer of the United States, by Thorn. Bal- dwin and J. Thomas I'hiladelphie, i854, in-8°. Travels in Rio de Janeiro, Buenos-Ayres, etc., by F. Gerataecker. T.ondres, t854, in-8°. OCEANIE. Me'moires historiques sur l'Auslralie, par Mgr. Rudesindo Salvado, iraduits de I'italien en t'r.incais, par M. I'abbe Falciuiagne, 1854. GEOGRAPHIE ANCIENNE ET IIISTORIQLE. Cosmographie d'Etliicus, par M. Peru. Berlin, i 853. — La memr, par M. Wutke. Leipzig, l 854 ■ Flavius Josephus tier Fiihiei nnd Irrcfulirer der Pilger im alten und neuen Jerusalem. MiieinerBeilage Jerusalem des Jtinerarimn Bur- digalcnse enthalten. Leipzig, i854, in 8°. Carte de la Gaule independanle et romaine, donnaut la division en i- provinces, dressee par Desbuissons. Paris, 1 854- NOTE SUR LES OUVRAGES OFFERTS A LA SOCIETF.. La section de publication sefait un devoir de rendre conipte des ouvrages que les compagnies savantes et les auteurs veulent bien offrir a la Societe. L'abon- dance des matieres 1'empecbe cependant de donner, clans le present numero, l'analyse de plusieurs ou- vrages donl differenls inembres ont fait 1'examen ; mais il paraitra des comptes rendusdans les numeros suivants, et l'ui! des premiers sera celui de V Histoire ct de la Description da J upon, par M. Ed, Fraissinet, livre auquel la tentative recente des Americains dans el empire donne un inlerel parliculier. E. C. ( 391 ) PROGRAMME DF,S PRIX PROPOSES PAR L\ SOCIETE. I. — Prix annuel pour la decouverte la plus importante en geographie. La Society offre sa grande medaille d'or au voyageur qui aura fait, en geographie, pendant le cours de l'an- nee 1852, la decouverte jugee la plus importante parmi celles dont la Societe aura eu connaissance ; il rece- vra, en outre, le litre de correspondant perpetuel, s'il est etranger, ou celui de membre, s'il est Francais, et il jouira de tons les avantages qui sont attaches a ces titres. A defaut de decouvertes de cette espece , des me- dailles d'argent on de bronze seront decernees aux voyageurs qui auront adresse pendant le meme temps a la Societe les notions ou les communications les plus neuves et les plus utiles au progres de la science. lis seront portcs de droit, s'ils sont etrangers, sur la liste des candidats pour les places de correspondant. II. — Prix d' Orleans. MMaille d'or de la valeur de 2 000 francs. Un prix de deux mille francs est offert au naviga- teur ou au vojageur dont les travaux geographiques auront procure, dans^e cours des anneesl853 et 185A, la decouverte la plus utile a l'agriculture, al'industrie ( 30-2 ) ou a ITiumariTi.5. La Society s'attachera do preference aux voyages accompagnes d'ilineraircs exacts on d'ob- servations geogra plaques. III. — Nivellements barometriques. Deux me'dailles d'or de la valeur de 100 francs chacune. Deux medailles d'encouragoment sont oflerles aux auteurs des nivellemenls barometriques les plus eten- dus el les plus exacts fails sur les lignes do partage des eaux des grands bassins de la France. Les memoires el profils, accompagnes des cotes et des elements de calculs, devronl etre deposes an bu- reau de la Commission ccnlrale, an plus tard, le 31 de- cembre J85Z1. Les fonds de ces deux medailles onl ele fails par M. Perrol, membre de la Societe. ERRATA DU NUMURO DE MARS-AYRU. 185/|. Pa(;e ?.59, li,°no 3, an lieu de : Mombas, tisez : Ukambani. I'.ijje 27), ligoe 8, ou lieu de: kharadjour, lisez .■ kharadjou 1. ; *^ s. ^ s i ^ s .:: "i ; • -c * £ 1, i &. £ c - 1 5 ; '"» > 14 c -3 1 § 1 ■5 ^. 4 z .J ■5 ** 5 1 ■< a ; 1 < ^ -5 i ~s M ,5.' * &• Nl ■* "< » ^ ^J ^ "£ - 5 < "■ . BULLETIN DK LA SOCIETE DE GEOGRAPHIE. juin 1854. Mcntoires, Notices, Documents originaux, etc. INSTRUCTIONS D0NNEES A DIVERS VOYAGEURS PAR LA SOCIETE DE GEOGRAPHTE EN 1854. I. INSTRUCTIONS POUR M. HECQUARD, Consul de France a Scutari (Alfoanie). Note tie M. Alfred Maury (1). L 'etude de la geograpbie ancienne de l'Epire pre- 6ente encore bien des lacunes, que peutseule combler une exploration attentive de la contree. Scutari est plac6 presque au centre du pays appele par les anciens lllyrie grecque ou Nowelle-Epire [Epirus Novo) , et occupe vraisemblablement l'emplacement do Scodra, (i) Les notes des divers auteurs ont ete discutees dans les stances de la section de correspondance et adoptees ensuite par la Commis- sion centrale. VII. JUIN. 1. 26 ( 39A ) mcntionne" par Tite-Livo et Ptolemee. II serait bon de s'assurer du veritable emplacement de la ville antique el de faire des fondles a Ten tour de l'ancien lac La- Leads, aujourd'hui lac de Scutari ; car 11 y avait des etablissements romains entre le fleuve Barbana , au- jourd'hui Boyana, et Clausula, ainsi qu'il resulte des indications de Procope et d'Etienne de Byzance. Au su<.l de Scutari se trouvaient les anciennes villes de Lisbus et de Pistus, donl l' emplacement n'est pas assi- gne d'une maniere certaine a Alessio et a Vaudone. II serait bon, en reunissant les tcmoignages de Tite-Live, de Polybe, de Diodore de Sicile, du Ptolemee et tie la table de Peulinger, de recbercher 1'emplacement certain de ces villes antiques. On fera bien d'explorer tout le cours du Drin, l'an- cien Drilo, qui parait avoir servi pendant quelquo temps de limile entre l'lllyrie grecque et l'lllyrie bar- bare. Les notions que Ton possede sur les populations anciennes de ces provinces sont extremement incom- pletes. Est-il encore possible actuellement de distin- guer les peuples qui babitent entre Je lac de Scutari et le Drin blanc, lesquels sont designes par les ancicns (Tbucydide, Tite-Live, Pomponius Mela, Ptolemee) sous le nom de Taulantiens, et ceux qui babitent au sud de Prisren, sur l'autre rive du Drin blanc, et que Polybe, Plutarque et Tite-Live nommenl Parlbiniens? II serait extremement important d'eludier loutes les populations du nord de l'Epire, afin de determiner dans quelles proportions se sont melees les races sla- ves, illyriennes et epiroles, de les comparer surtoul aux montagnards du Montenegro. ( 395 ) Si M. Hecquard peut pousser ses investigations un peu plus loin, il fera Lien de reconnaltre dans son parcours la Via Egnatia, qui allait a Iravers l'Epire et la Macedoine jusqu'a Byzance, et quipassait par Lych- nidus, aujourd'hui sans doute Okhrida, sur le lac du meme nom. La position deCavii, mentionnee par Tite-Live dans son XLine livre, n'est pas connue et doit etre cher- chee enlre le fleuve Genesus et le fleuve Panyasus, c'est-a-dire entre le ScomLi ou ToLi et le Cavaya. II en faut dire autant de Bulis, souvenl cite par les an- ciens, el notamment par Cesar, Tite-Live, Elienne de Byzance, Giceron, et qui etail bati sur la rive gauche du Genesus, sans qu'on puisse savoir au juste ou elle se trouvait. Une etude approfondie de ce qui peut resler de l'an- cien Epidamnus, colonie de Gorcyre, appele ensuite Dyrrachiunj, serait extremement interessante. C'elait le point de depart de la Via Egnatia, et ses autiquites n'oul guere ete explorees. M. Hecquard, s'il peut se transporter jusqu'a Durazzo, fera done bien de suivre la voie romaine, a partir de la, en se dirigeant vers Okhrida. Au nord d'Okhrida, il trouvera des localites ro- maincs dans la direction de Scutari, et il fera en sorte de reirouver les emplacements de Draudacum et d'OEneum. Dans son exploration du pays, il devra aussi visiter, si cela est possible, Dukagin, I'ancien Doracium Me- tropolis, qui a eu jadis une grande importance, et Ibali, l'ancienne Deabolis des Byzantins, la Dibolia de Pto- lemee. ( 306 ) M. Hecquard pourra etudier, non seulement an point rle vue ethnologique, mais encore au point de vue philologique, les diverses populations de 1'hpire septentrionale, et nolamment les Zingaris ou Bohe- miens, que les geographes disent s'y trouver en fort grand nombre. II a ete publie, en 1835, a Francfort-sur-le-Main, par le chevalier de Xylander, un ouvrage sur la langue des Schkipetars ou Albanais. Si notre confrere pou- vait se le procurer par un libraire de Trieste ou do \ ienne, il ferail bien de noter, sur la grammaire et sur le vocabulaire contenus dans cet ouvrage, les diffe- rences de locution, de mots et de formes verbales sui- vant les cantons. M. de Xj lander a neglige malheu- reusement d'indiquer les differenls dialectes qui pou- vent exisler. II est necessaire de reinplir celte lacune. La langue des Schkipetars comprend des mots ap- partenant aux families grecquc, latine, slave et turque. Ces derniers, qui sont en petit nombre, peuvent faci- lement etre distingues ; mais on ne sait pas si les mots de forme latine ont ete introduils par les Romains, ou derivent d'un ancien idiome voisin du grec de la fa- mille pelasgique, et dont le latin scrait lui-mdme en partie derive, les colons pelasges qui vinrent s'elablir en Italie ayant remonte de Grece par le nord du golfe Adrialique. La comparaison des diverses formes de mots pourrait mettrc a cet egard sur la voie (1). (i) Depuis la redaction de ces instructions, M. Halm a fail pa- raitre ses Albanesische Studien^ dins lesquelles il eclairc quelques- unes des ([uestions j)ioposces ii I'ex.iiiicn dc .M. Hecquard. Je le renverrai done a la lecture de ce savant ouvrage. A. M. ( 397 ) Le voisinage du Montenegro permettra de recueillir le vocabulaire de la langue de ce pays et de constaler ainsi la forme des mots d'origine slave qui ont penetro dans le scbkipetar. II serait utile, pour la question ethnologique, de sa procurer des portraits fideles des individus presentant au plus haut degre le type des diverses races de l'Epire. II existe en Epire clivers lacs. Quelles sont les causes de leur alimentation? -Juelle est la nature de leura eaux et leur profondeur? Quelques details sur le regime des rivieres, sur l'e- poque de la fonte des neiges dans les monlagncs qui separent l'Epire de la Bosnie et de la Macedoine, se- raient fort interessanls ; de meme M. Hecquard fera bien de s'attacher a marquer sur la meilleure carte qu'il se procurera les noms des rivieres secondaires qui ne sont pas indiquees dans nos cartes. Enfm, si notre confrere pouvait faire faire des fouil- les a Scutari, il rechercherait sur tout les inscriptions grecques et latines, les medailles, les vases el les pier- res gravees qui se rapportent a l'hisloire ancienne de la ville et pourraient nous dire ce qu'il faut croire de la tradition qui attribue la fondation de cctle ville a Alexandre le Grand. Aote de M. Ctittambert. M. Hecquard rendrail un grand service a la geogra- pbie actuelle de 1'Albanie en en I'aisant connaitre les divisions et subdivisions administratives, l'organisalion politique et religieuse. Tout ce qu'il pourra dire sur la statistiquc et la population de ce pays serait recu avec ( 398 ) reconnaissance par la Societe de geographic II emet- trait son opinion sur les limites precises qu'il faut assigner a I'Albanie et sur l'exlensiow qu'il convient d'altribuer a la denomination A'Epire. M. Hecquard est prie de donner aussi sur le Monte- negro tous les renseignements qu'il pourra fournir. II consullera avec fruit la carle de ce pays par Karacsay, publiee en 1842, et la carte manuscrite du Montene- gro par le prince Wassoewitches, carle dont nous lui envoyons un caique, et qui se trouve accompagneo d'une notice sur la haute Albanie , inseree dans le t. XV de la 2e serie du Bulletin de la Societe, p. 166. Note de M. Viquesnd. Gkoghaphie modekne. — Mes voyages en Albanie et en Epire reinontenl a 1836 et 1838; j'accompagnais nion savant ami M. Boue, inembre de l'Academie des sciences de Vienne (Autricbe). Ce geologue a publie la description generale de la Turquie d'Europe (La Turquie d' Europe, Paris, 18Z|0, lx vol. in-8°). De mon cote, j'ai publie deux memoires dans le Recueil des Memoires de la Societe geologique de France, (t. V de la 1" serie, 18/|2, et t. I" de la 2e serie, 1846). Le resultat de nos«voyages a intrnduit des reclificalions importantes dans la geographic de ces contrees; mais il reste d'enonncs lacunesa combler. Voici les ilinerairesque j'ai suivis : 1" de Novi-Bazar a Liskiup, par Ipek, Pristina et Katcbanik ; 2° de Novi- Bazar a Scutari, par le plateau de Souodol, Bojai, lo lacdePlava et les montagnes de Scbalia; 3°deSculari a Ianina, par Lescb, Tirana, Elbassan, Berat, Klis- ( 399 ) soura, Premiti et Ronitza; 4° de Ianina a Corfou, par Philates. Dans un autre voyage (en 1837) , M. Boue a parcouru sans moi : 1° la route de Novi-Bazar a Seralevo, par Sienitza, etc.; 2° celle d'Uskiup a Scutari par Prisren et les montagnes de la Myrdita ; 3° la route de Monas- tir a Prisren, par le lac de Presba, le lac d'Okhrida, Rrilchovo et Kalkandelen ; 4° la route de Ianina a Larissa, par Metzovo ; 5° celle de Kastoria a Okhrida, par le lac marecageux de Malik. M. le professeur Grisebach a suivi la route de Salo- nique a Scutari par Monastir, Uskiup, Prisren, etc. Ses recherches botaniques l'ont conduit au sommet de plusieurs montagnes; son ouvrage (Reisen (lurch Rumelicn unci nach Brussa, Gcettingen, 1841) re n ferine egaleinent des renseignements pleins d'interet. Enfin , M. le colonel Leake ( Travels in northern Greece, h vol. in-8, 1835) s'est rendu de Kastoria a Berat, par Goritza et les montagnes de Khopari et du Tomorilza. Tels sont les elements dont j'ai profite pour con- struire, sous la direction du colonel Lapie, les cartes qui accompagnent mes memoires. M. Grasset, consul de France a Ianina, m'avail pro- mis la description de son ascension au Tomoros; il n'a pu me la transmettre. M. le docteur Joseph Muller, auteur d'une brochure sur l'Albanie (Prague, 1844), m'a envoye le commencement de son itineraire de Scutari a Okhrida par la vallee du Drin noir, qu'aucun Franc n'avait, a ce que je sache, parcouru avant lui. Ce savant esperait venir a Paris ct me donner verbale- ment tous les renseignements dont j'avais besoin pour ( 400 ) faire usage do ses observations. Los cireonstances ne lui out pas pcrmis d'execuler son projet ct ni'onl prive dc maleriaux precieux. Si vous tracez sur une carte los ilineraires que je viens dc citer, vous verrez qu'ils dcssinent un reseau a lr6s larges mailles qu'il s'agirail do remplir. II paralt que, posterieurement a nos voyages, des observalcurs ont parcouru 1'Albanie et moissonne dc nouvcllcs decouverles. M. Bono public en ce moment le recuoil descs ilineraires el los renscignements qu'il a nouvellemont recuoillis (voyez \e$ Memoires deV Aca- demic des sciences de I ienne). II m'ecrit los phrases su'nanles : « Vous serez elonne do nie voir donner la » solution de plusieurs problomcs, tols que le cours de » l'Arzan, du Drnitza, du Drin, et celui dc cinq ou six » cours d'eau cie l'lschni. Nous avons eu le plus grand » tort de ceder aux imporlunitos do notre bbtaniste et » dc renoncer a notre excursion a l'ouest d'Ipek. II » lallait s'olcvcr a travers de vastes solitudes jusqu'a la » cinie des monlagnes qui dominent le lac do Plava. » De ce point, nous aurions eu la carte de 30 lieues de » pays a la rondo. Cest ce qu'a execute un Kalou- » guieri. Rougova est fixe avec lo nornbre de ses babi- » tanls; le Scbar, decril cinie par cime ; Dibre, de- » eliifi're. » Jc me contcntc do vous tracer l'exiguito dos con- naissances positives qu'on possede sur 1'Albanie , pour vous demonlrer que vos recbercbes, ch; quelque cote qu'elles se portent, vous fournironl uuo ample mois- son de fails nouvcaux. Cest avec une juste raison que M. Maury vous rc- commaride dc reconnoitre la Via Egnalia. J'ai essaye ( 401 ) tie placer sur ma carte les stations de cette route, de- puts Lychnidus (Okhrida) jusqu'a Thessalonique ; je n'ai jamais pu y parvenir d'une maniere satisfaisante. Cetle difliculle doit tenir a I'insuffisance de nos con- naissances sur le pays. G£ologie. — Les montagncs du lac de Plava, do Gouzinie et de Schalia , situees au N.-E. de Scutari, nous paraissent, d'apres leurs fossiles, appartenir a la craie inferieure et moyenne. Elles se composenl de calcairc compacte, de dolomie, de conglomerats, do gres. La roche dominante est le calcaire; la dolomie constilue des pitons dechiquetes, donl les formes rap- pellent celles de certaines valleos du Tyrol. A Gouzinie, entre ce village et celui de Schalia, nous avons trouve dans le calcaire des hippuriles, des sphe- rulites, des polypiers, une grosse coquille ressemblant a une isocarde. Pres de Dedagne, le meme calcaire renferme des polypiers, des nerinees de plusieurs es- peces et une coquille dont la coupe parait appartenir a la Tornatella gigantea. Ce dernier gisement est a quatre heures et un quart de Scutari; on y va par Ropilik, deux heures trois quarts ; Gradiska, Irois quarts d'heure ; Dedagne, trois quarts d'heure. II serait tres inleressant de casser beaucoup d'echanlillons et d'y rechercher les fossiles donl nous n'avons pu recueillir que des specimens pen determinables. line ou deux journees consacrees a cette localitefourniraient une collection precieuse. Des reeherches clans les environs de Scutari ameneraient la decouvorte de nouveaux gisements. La vallec dcSchkrel el de Dedagne est separcV de la ( Zl02 ) plaine du lac par un ricleau de monticules compose de conglomerat tertiairc ou peut-etre alluvial, donl los Cle- mens proviennent des inonlagnes voisines. En montant a la ciladello de Scutari, on trouvo des schistes argileux calcariferes , du calcaire argileux schisloide; le calcaire compacte forme le sommel do la colline. Ces roches nous paraissent appartenir a la formation cretacee. II serai t bon d'etudier l'ordre do superposition des couches et de noter les fossilcs qui se Irouvent dans chacune d'elles. Si Ton se rend de Scutari a Elbassan , on trouvo pres de Bouehalz un mamelon de serpentine qui perce dans des gres quartzeux. Le gres nous pa rait encore appartenir a la formation cretacee. C'est un fait a ve- rifier. La serpentine est une roche eruptive dont M. Bone a trouve d'enormes filons dans la vallee du Drin et sur la route qui conduit de Scutari a Prisren. (Yoyez les descriptions que donni ce savant voyageur dans son ouvage precite.) Les escarpemenls de Zadrinia soul calcaires ; nous les considerons comme crelac^s. On pretend que des gisements de poissons fossiles se trouvent dans la colline qui horde la rive occiden- tal de ITIisino et qui s'etend depths I'embouchure do cede riviere jusque pres du col du Gabar-lialkan. II y aurait des recherches a faire a partir des environs du fort d'Iscbm ou Ism; il faudrait determiner les rapports des couches a poissons avec celles du terrain cretace et des couches tertiaircs. Nous avons vu des huitres et des nerinees dans la calcaire de Luz-Han, qui presente une caverne d'ou sort un ruisseau d'eau sullureuse. ( 403 ) Un depot lacuslre, compost de gres, d'argile feuil- letee et de marne, s'est forme a la l)ase du calcaire au fond de la vallee de l'Hismo. On y trouve pres de Luz- Han un melanopsis tres remarquable. Un gres quartzeux s'est depose entre Tirana etle col de Gabar-Balkan ; horizontal en plaine, il redrcsse ses couches en approchant du col. Contient-il des fossiles? Nous n'en avons pas vu. En descendant le versant oppose de la monlagne, on trouve, environ a 50 pieds au-dessous du col, une couche composee de fossiles tertiaires et defragments arrondis de calcaire fossilil'ere, repandus dans une marne calcaire. Cette couche nous a paru passer sous les gres precedent* (a verifier) et reposer sur des mar- nes calcaires ou argileuses de diverses couleurs, qui contiennent des lils subordonnes de gres et de cal- caire marneux. Ce depot est tres interessant a etudier; il est independant du calcaire cretace contre lequel il est adosse. II faudrait rechercher s'il contient asa base des nummulites; nous avons cite, d'apres nos notes prises sur place, la presence de ce genre de fossile dans les couches inferieures visib/es; la perte de l'echan- lillon qui les renfermait laisse planer quelque doule sur ce fail interessant. Pres de Beral, le terrain a nuunnulite prend un grand developpement. On le considere maintenant connneretage inl'erieurdu terrain terliaire; a l'epoque ou nous ecrivions, on le rapporlail encore a la pai tie superieure du terrain cretace. II faudrait rechercher l'existence de l'etage tertiaire moyen et de l'etage su- perieur du meme terrain, et en tracer les limites. Voila de belles questions a etudier aux porles de ( m ) votre residence. Je n'ose aborder ici 1c chapitre ties grandes questions tlieoriques : dependant, si vos loisirs vous permcttent d'enlreprendre los longues et penibles recherches qu'exige lcur solulion, veuillez m'en pre- venir; je me ferai un plaisir d'entrer dans les explica- tions necessaires pour vous mcttrc sur la voie. Lc Museum d'hisloire naturelle de Paris recevrait avec plaisir vos envois de fossiles ct le catalogue rai- sonnc indiquant lcur provenance et les renseignements que vous pourriez ajouter. II. INSTRUCTIONS POUR M. DE SMNT-CRICQ, Relativement aux observations a fairc dans un voyage sui lc liaut Amazone. Aote de M, Cortambert. Si M. de Sainl-Cricq remonle, pourse rendre au Pe- rou, tout le cours de l'Amazone, ou s'il le descend a son relour, il devra signaler les avanlages que pourrait of- 1'rir le fleuve a la navigation des balimenls a vapeur, ou quels obstacles cclle navigation aurail a y rencontrer. II indiquera les epoques des crues tin fleuve ct lo temps le plus favorable aux communications. II deter- minera, s'il le peut, le debit des tleux grantles bran- dies, I'lJcayali et la Tunguragua, et tlira laquelle do ces deux brandies parait etrc le veritable commence- ment du cours tie l'Amazone. II fera connallrc, da nieme, l'abondance des eaux tie I'Apurimac el du Paro (appele aussi, sin queltpies cartes, Beni), qui se ( A05 ) reunissent pour former l'Ucayali, el il indiquera celle de ces deux rivieres qui lui parait etre le veritable cours superieur de l'Ucayali. II enoncera son opinion sur la vraie source de l'Amazone : est-ce le lac Morococha, corame parait le croire M. Herndon? II donnera enfin la longueur aussi exacte que possible du cours de ce fleuve, en ayant soin de dire les noms que lui appli- quent les indigenes dans les diverses parties de son cours : dans quelle etendue, par exemple, lui donne- t-on le nom de Maranon et celui de Solimoens? De grandes contradictions et de nombreuses incer- titudes regnent sur 1'bydrograpbie du bassin superieur du rio Madeira. Le Beni est-il un affluent de gauche du rio Madeira? On bien est-ce le cours superieur du Purus, du Jurua ou de quelque autre affluent direct de l'Amazone. 11 serait important de faire bien com- prendre le cours encore peu connu de cette riviere, et Ton expliquerait si c'est par erreur que le meme nom a ete donne a l'une des branches de l'Ucayali. Que faut-il croire d'un lacRogagualo ou Rogaguado que donnent d'anciennes relations, entre le Beni et le Mamore, vers 12° 30' de latitude? Exisle-t-il reelle- ment? Et, s'il existe, dans quelle riviere verse-t-il ses eaux? Enfin, M. de Saint-Cricq rendrait un service signale a la geographie s'il parvenait a eclairer complelement, par une description developpee et par une carte pre- cise, toules les questions, jusqu'ici tres obscures, ) ITT. INSTRUCTIONS POUR M. CADKT, An sujpt du voyage qu'il doit faire dans la partie orientate de la Corse. Note tie M. Cortambert. M. Cadet repondra aiix vceux do la Societe dc geo- graphie en fournissanl tous !es renseignements neufs qu'il peurra donner sur l'etat physique et moral du pays qu'il va visiter. Mais, independamment des ques- tions generates que sa sagacite le portera a resoudre, la Societe croit devoir appeler son alien lion sur les faits particuliers suivanls : 1" II y a en Corse un assez grand nornbre d 'habitants qui parlentgrec etqui proviennent de colonies venues, au xvn" siecle, de la Moree, et particulierement du Magne. M. Cadet rendrait service a la geographic ethnographique en dormant des renseignements com- plets sur ces populations. 2° La position intermediaire de la Corse entre l'A- t'rique et la France rend ce pays favorable a I'acclima- tation de plantes importees des regions asiatiques, africaines ou americaines. M. Cadet est invite a exa- miner et a signaler les localiles susceptibles de rece- voir la culture de plantes utiles, notamment de celles qu'i nt recemment apporlees de Chine MM. de Monli- gny, Renard el Jules Itier, recompenses pour leurs importations par la Societe de geographic De memo, il devrait signaler les situations propres a l'introdiic- tion et a l'acclimalation des especes etrangeres d'ani- maux domestiques. vii. juiN. 2. 27 ( MO ) •">' U serait interessanl d'indiquer, avecquelque de- veloppement, les especes d'arbres les moms connues des forets de la Corse. l\" M. Cadet eel |>iii' d'etudier et de deorire les anti- (juitos pheniciennes, romaines et autres qu'il pourrait decouvrir dans le cours de ses explorations. IV. SfeDiflGAMBIE. INSTRUCTIONS POUR If. FAIDHKRBE. Note de M. Jomard. M. le capitaine du genie Faidherbe, commandant son arme a Saint-Louis du Senegal, sollicite dfe la Societe des instructions pour les voyages qu'il se propose de faire dans I'interieur de la Senegambie. M. le capilaioe Faidherbe s'est deja fait connallre par un interessant memoire snr les Maures e la rive droite, et il a recueilli un certain nombre de voca- buiaires, travail qui la mis a m&me de constater chez lcs maures Braknas et les maures Dowiches 1'existence de plusieurs id omes entierement differenls, tels que le berbere et I'arabe. II a ainsi ahnortce one disposi- tion reinarquable pour I'etude des langues alricaines, et il nous paratt dour de cette sagacite qui est neces- saire pour I'examen comparatif des idiomes : c'esl pourquoi nous In i recommnnderons, en premiere ligne, de former des vocabiilaires des laugucs pailees par toutes les tribus alricaines qu'il aura occasion de ( Ml ) visitor. II vient d'ailleurs au marchede Saint-Louis de& gens de toutes sortes de contrees de 1'inlerieur; c'est un moyen d'obtenir, chaque jour, en merne temps que des renseignements positifs sur leurs pays, les ele- ments du langage que parlent les habitants. Le mandingue, le berbere et le peul ou foule doi- vent elre lobjet y<(ue public en divers ouvrages, entre autres dans un opuscule intitule: Deuxieme note sur une pierre qra- vee , et sur I'idiome libyen. ( 412 ) l'Algerie, et Ton pout regarder comme certain qu'il y en a dans los oasis les plus centrales, on lout au moins qu'il s'y trouve la connaissancc de ces signes et l'usage dc la langue. D'aillt urs les Touariks, qui parlent el ecrivent le berbere, viennent jusqu'a la Senegambie dans leurs vastes excursions. II doit y avoir des manuscrits de ce caractere , dans plus d'un quar- ter de PAfrique, puisque le docleur Oudney en a trouve a El-Ghat, puisque des noirs en out porte avec eux a Babia, ou M. de Castelnau les a recueillis. Des la plus haute antiquity lesmarcbands qui, des bords da Nil et de l'oasis d'Annnon se rend aient jusqu'a l'Ocean, s'entendaient avec les habitants de toules ces regions; e'etait done avec une langue commune et sans doute avec cettc ecriture, puisqu'on la Irouve gravee sur d'anciens monuments de la Numidie. Nous appelons done 1'attenlion toute parliculicre el les reehercbes suivies de M. le capitaine Faidherbe, non seulement sur les inscriptions, mais sur tout ce qui regard e cette langue que nous avons cru pouvoir appeler, il y a longlemps, la langue libyque. La geographie de I'inleiieur de la colonie est assez avancee pour qu'on n'ait pas besoin d'indiquer un sujet particulier d'observation; mais il y a, dans 1'etude des productions naturellesdu Senegal, des points qui n'ont pas ete bien eclaircis : de ce nombre est la connais- sance de l'arbre appele arbre a feu. II y a une saison ou cut arbre prend feu sponlauement el pout faire embraser une foret enliere, selon de Beaufort el d'au- tres; c est au moment ou la fleur s'ouvre, ce qui a lieu avec eclat et explosion. Ce phenoinene demande- a elre soigneusement etudie. L'arbre a heurre me rite ( M3 ) aussi d'etre observe (1). Ce sont des vegetaux qu il fa Li dr ait introduire dans nos colonies. Le pere Labat parle de l'encens du Senegal ; il est probable qu'il designe une sorte de resine qui est odo- rante quand on la brule : e'est encore un fait n ob- server. M. de Beaufort a donne quelqucs details sur le grand arbre qui la produit et qui est une sorte de figuier. 11 cite un arbre qu'il appelle Nete, qui est au Bambouk et ailleurs, et qu'il est peut-etre interessant de faire connaitre, et surtout le Fang-tang-. Une der- niere observation dendrologique est suggeree par ce voyageur : c'esl la succession des diflerentes especes ci'arbres a inesure qu'on s'eleve ou qu'on change de latitude. Les gommes sont d'especes tres variees; il faut re- cueillir cedes qui sont moins connues, ainsi que le inastic, si on le trouve. Panni les animaux, il serait utile de recbercber la civette, si elle existe, et la girafe, que de Beaufort a pense elre le Guiammdla des Senegalais. Quant a la nature du sol, qui est generalement tracbytique, et aux autres questions de geologie , nous nous bornons a renvoyer aux remarques du metne voyageur. La population du pays est un element de la statis- tique neglige de la plupart des voyageurs en Afrique, et pourlant d'une grande importance. On recom- mande a M. le capitaine Faidberbe de faire des recber- clus, en prenant pour le caleul une autre base que 1'etendue des cultures. De Beaufort avail estime la (i) Cet arbre, qui ressemble au noiselier, est, suivant de Beaufort, lie la famille lies terelmitliacees. ( h\h ) population dans le Cayor a 800 individns par myria- metre carre. Ce dernier vovagenr. liomme done de la facultt'' d'ob- server, et en menie temps de beaucoup de jugement et de sagacite, avait eludie les races d'habitants en rap- port avec l'etat de la culture; il avait tire de cetle comparaison des apercus lurnineux, et au moins des conjectures ingenieuses sur l'ancienne population. Selon lui, la nation ouolofe, il y a plusieurs siecles, occupait un territoire tres etendu, dont la capitale etait sur les bords du Senegal superieur. II est presque superflu de signaler et de recomman- der les caravanes venant du Kaarta et de Se.go sur le Dliioliba, chargees d'ivoire, d'or et de marcbandises, et qui fourniront les renseignements les plus varies a ceux qui les inlerrogeront dans leurs langues. Les Mandingues, peuple qui babite la rive gauche de la Gambie, sont d'humeur paisible et adonnes au commerce; c'est une des raisons pour lesquelles nous recommandons auxvoyageurs I'etudedela langue man- clingue, bien qu'on en possede deja des vocabulaircs. Nous recommandons en general de completer les recherches ethnographiques deja existanles sur les Mandingues, les Ouolofs, les Foulahs, les Ba.iibaras, les Serreres, les gens de Bambouk, ceux de Bondou, les On Hi, les Sarracolets, peuple marchand, et de re- cueillir les anciennes traditions lo ales, les chants et aussi les fables sur lesquelles nous avons de precieusi s notions dues au baron Roger, notre bien regrettable collegue. Relativemenl a la geographic positive, je venx dire la determination aslronomique des lieux , surtout ( A15 ) Ja longitude, on ne saurait trop recommander anx voyageurs munis d'instruraents les soins a apporter aux observations; il en est de meme des altitudes ou hauteurs absolues au-dessns du niveau do la mer. On possede maintenant plusieurs inethodes pour ce der- nier genre d'observalion. ainsi que des instruments que nos physiciens ont perfectionnes el perfectionnent tous les jours. Les observations faites a l'aide de ces instruments permettent de controler les resullats ob- tenus par le moyen du barometre. A l'egard des routes les plus utiles a connaitre pour penetrer dans l'inlerieur, on recommande celles qui menent du haul Baling a Sego et a Djenne, bien que Mungo-Park les ait indiquees; le commerce peut les avoir beaucoup modiliees pendant un demi-siecle. Cette notion ne peut s'acquerir que par renseigne- ments; le devoir de l'observaleur est de rechercber la verite entre les rapports souvent differents, quelque- fois conlradicloires, des indigenes. Les lignes de routes entierement inconnues, qu'il serait le plus important de connaitre, sont celles qui conduisent de Djenne ou de Sansanding, de Sego ou d'Yamina ou de Bama- kou, a Sakkatou, aFoga ou a Yaouri sur le Kouara (ou Dbioiiba). Cet intervalle, de 500 milles geograpbiques selon les uns, de 600 selon les autres, n'a ete parcouru par aucun voyageur europeen. Ce serait beaucoup d'ap- prendre.par de bonnes informations, comment les na- turels pareounnt ce vaste espace, quels cours d'eau le traversent, quels obstacles naturelss'y rencontrent. Les chefs de caravanes, tels que les marcbands Sarraco- lets, les Bambaras de Sego, qui viennent au Kaarta nialgre la guei're entre eux et les Bambaras de ce der- ( MG ) nier pays, lcs Foulabs et les Mandingues, peuveot elre u til ecu en t coosultes. Selon le baron Roger, qui avail interroge un bomme de Tichyt (venu de Sego a Saint-Louis, en 1824, apres plusieurs voyages a Fogo et a Tombouclou), on peut aller, en douze ou quinzc jours de eheval, de Djenne a Foljo. Ce lieu est cite par les (Veres Lander comme situe a trois jours de Yaouri, inais ils ne l'ont pas visite. II parait aussi qu'il existe une riviere dite Sirba ou Goulbe, coulant de 1'ouest a Test et debouebanl dans le Kouara au-dessus d'Yaouri ; on pourrail en suivire le cours, qui est assez etendu. Voici une autre question egalement importanto pour la science geographique et pour nos possessions d'Afrique : existe-l-il des routes tie commerce entre Tombouctou el le pays d'Aschantie ? ('/est en Iraver- sant de 1'ouest a Test le vaste espace dont nous avons parle plus baut, qu'il y aurait chance de rencontrer les routes dont il s'agit, si elles existent. La difficult scrait grande sans doute de se rend re de nos eomp- toirs du grand Bassam etd'Assinie, de passer a havers ce royaunae, eld'arriver ensuite, par exemple, au 12e ou au 18" parallele nord ; inais, si Ton y reussissait, on aurait ouvert la voie de terre aux relations de la co- lonie senegaiaise avec la mer de Guinee. Nous dirons encore quelques mots sur les commu- nications a etablir entre cette colonie el l'Algerie. On a parle bien des fois de cc projet, qu'il est si nature! de concevoir, mais pcu facile a executcr; cependant le progres des decouvertes est tel, el la convenance, la necessite memeensontsi evidentes, qu'on doitinsister sur celte idee jusqu'a ce qu'olle soil realistic Soil qu*on ( 417 ) vouille se rendre a Toinbouctou , soit qu'on aille tie la meme oasis a Toudeyni, Tichyt et Elimane non loin cleBakel (sur le haut Senegal), on est assure qu'il y a ties routes clans ces deux directions suivies par les caravanes. Or la position d'Ayn-Salah est bien determinee ; cetle oasis n'esl guere qu'a trois cents milles de nos posies avances de l'Algerie meridinnale. Les maures Darniankous peuvent fournirdes guides intelligents au voyageur qui sera charge de cette ex- ploration ; il s'agira d'en choisir un, assez sur et de- voue, parmi les Darniankous qui viennent habituelle- ment a Saint-Louis. On aurail beaucoup a apprendre sur les populations qui habitent ou frequentent ces contrees moins descries (ju'on ne pense. Les parties les plus voisinesde l'Ocean, deWadan jusqu'au Maroc, meriteraient aussi d'etre explorees, sans negliger Ar- guin ni Ouadnoun. JVJ. le capitaine Faidherbe connait trop bien les pays voisins de nos possessions du Senegal pour qu'on doive insister ici sur celui de Kaarta. Get ttat est puissant, peuple, riche en or et en ivoire ; il fait un assez grand commerce: mais la population est hostile aux chretiens, loin de leur elre favorable comme les habitants du Kasson , royaume voisin a l'ouest. En outre, comme on I 'a dit plus haut, les liambaras du Kaarta sont souvent en guerre avec ceux de Sego ; c'est pourquoi nous ne conseilierions de traverser cetto conlree qu'avec de grandes precautions, et, s'il est pos- sible, en oblenant des otages. La description descataractes qui existent sur le Baling n'a pas encore ete donnee completement. On sail assez bien en quoi consistent la chute de Felou ou les pctites ( A18 ) cataractos, et les chutes tresetendues deGowina; mais il parait qu'il en existe d'autres interinedi aires, on meiiic au-dessus de Gnwina: i! serait bon d'avoir une connaissance complete de tnutes ces cataractes, d'etu- dier le regime clu Senegal superieur, autant sous le rapport topographique que sous le rapport geologique, i'epoque des crues, le niveau qu'atteint l'inondalion, son elendue et sa duree, la section et le dibit du fleuve en plusieurs endroits de son coins. On assure qu'entre la Faleine et la Gainbie, il y a une et meme deux rivieres qui coulent tantol vers la premiere, tantot vers la seconde. Ce fait peu common se rctioiive dans le Cassiquiare, entre l'Amazone et l'Orenoque ; on en doit la connaissance au baron de Humboldt. On ne I'a pas encore bien constate en ce qui regarde la Gambie et la Faleme. Je terminerai ces notes en indiquant comme sujets de lecture, entre autres vova^es modernes, ceux de Mollien, de Rene Caillie, de Raffenel, sans prejudice des anciens ouvrages sur la Senegambie; enfin, je ivn- verrai aux recueils periodiques de la Societe de geo- graphic de Paris et de celle de Londres, oil il \ a de nombreux articles sur le Senegal. (Voy. les tables pu- bliees par ces deux Socieles. ) Nota. — Consuller les questions adressees .1 M. Raffenel el .1 M. Panel; vovei auasi les vocabulaires de M. lticliardson et ses itine- raiies. Un africain appele Moussa, eleve' a Paris par les soins du barun Roger, aujourd liui cure au Senegal, et M. I abbe Rod. 11, pourronl donner d'utiles renseignements et, prut-etre, procurer dis facililes aux fswageMS ( 419 ) CIRCULATRE RELATIVE A L'OBSERVATION DES TREMBLEMENTS DETERRE, AURESSEK A TOUS LES VOYAGI-URS i'AR M. PERREY. PROFESSEUR A I.A FACULTE DE DIJON. Le nbenomene des tremblements de terre n'est pas un de ceux qu'on puissc observer journellement, el, quoique les manifestations en soient frequentes a la Mirface du globe, l'elude en est difficile. J'ai pense lepuis longtemps a dresser des catalo- gues des tremblements de terre enregistres dans les recueils scientifiques ou mentionnes par les historiens, et, depuis douze ans, j'ai public plusieurs catalogues des secousses ressenties dans diverses regions physi- ques. Mais en general je ne trouve dans cette revue re- trospective que les tremblements les plus violents , les plus desastreux ou les plus remarquables par quel- ques circonstances speciales. Cependaut, plus des catalogues de ce genre seront complets. plus on doit esperer de fournir a la science des documents dont la discussion pourrait jeler un grand jour sur la physique lerrestre. Convaiucu de I'avantage qu'il y aurait a recueillir le plus grand nom- bre possible de fails, j'ai , depuis 1843, publie an- nuellement, dans le Bulletin de /' Academie royalc de Belgique. el dans les Me moires de V Academie dc Dijon, la lisle des secousses ressenties cbaque annee. Pour ce travail, j'ai cbercbe a elablirune correspon- dence elendue. Je suis assez heureux pour que des savants, des amis de la science, des observateurs, aient ( 420 ) bien voulu repondre a mon appcl. Aujourd'hui j'ai des correspondants clans les divers Etals do l'Europe, en Egyple , en Syrie, aux Etats-l nis ; niais ces cor- respondants sunt encore peu nombreux, et je ne rc- Culerai devant aucune depense pour metier a bonne fin la tacbe que je me suis imposee. La Convenlion avail ordonne a tous les agents con- sulages de la Republique de recueillir les renseigue- ments qui pouvaient interesser la science , et fait impri- merle programme d'une serie de questions que, dans leurs nombreux loisirs, ces agents devaicni cbercber a resoudre. La Convenlion ne leur dcmandait pas des inemoires scientiliques , elle voulait qu'ils en regis tras- sent des faits, qu'ils recueillissent des observations, qu'ils rapporlassent meme les traditions du pays re- latives aux p ben omen es qu'ils signalaient. Elle no voulait pas qu'ils so bornassent a un role simplement diplomatique, elle exigeait d'eux tous les services dout ils etaient capables. En effet, les agents consulaires , les voyageurs, tous les amis de la science, peuvent, prcsque sans peine et sans travail, l'ournir des renseignements utiles, que je me charge de reunir, et dont la discussion pourra un jour etendre nos connaissances encore si imparl'aites dans la pbysique du globe. 11 suflit pour tela de ne paslaisser passer inapercues les nombreuses commotions soulerraines qui se ma- nifestent annuelleinent, de les enregistrer aussi exac- tomenl que possible, el d'en dresser des catalogues quo les savants puissent compulser et discuter un jour. Les observateurs peuvent se burner a tenir un jour- nal, a y rioter le jour, 1'beure, la duree, la direction, la ( /|21 ) force et I'etendue des secousses; a signaler la nature et le caractere du bruit qui precede, accompagne ou suit ordinairement les tremblements; a en decrire succinc- temenl les effets sur les edifices, sur !e sol, surles eaux, surles hommesou sur lesanimaux; aindiquer le cen- tre du pbenomene.quisemble sedeplacer assezsouvent dans une serie de secousses , et I'etendue du pays ebranle ; enfin a enregistrer les differents phenomenes meteorologiques qui leur paraissenl avoir des rela- tions avec les secousses. Si celles-ci se prolongenl ou se renouvellent , il serail tres interessant den tenir un journal exact , car je ne puis plus douter que leur fre- quence ne suive une marclie en relation avec celle des marees oceaniques. Dans ce cas, il faut indiquer les heures aussi exactement que possible, et ne pas se con- tenter de ces mots : les secousses sont renouvelees pen- dant quinze, vingt, trente jours. Ces notes se pronnent le plus tot possible apres la manifestation du phenomene, et s'inscrivent immedia- tement. On y ajoute ensuite les renseignements qu'on peut recueillir. Quant aux faits dont on n'est pas temoin, on peut en copier la description dans les journaux; ou , pour evi- ter le travail , laire ce que font plusieurs de nies cor- respondanls: ils coupent les articles de journaux, en ayant soin d'inscrire au verso le nom et la date du journal et mettent ces extraits sous une enveloppe commune, qu'ils m'adressent ensuile sous forme de letlre, avec les notes manuscrilcs qu'ils out recueillies. II est bien entendu que chacmi peut joindre a son envoi ses propres reflexions, que je me fais un devoir do publier dans mes catalogues annuels, dontchacun do ( 422 ) mes collaborateurs recoil d'ailleurs un exemplaire par la poste et sous bhndes, ou par toute autre voie qui lui paralt preferable. Peut-etre MM. les consuls de France pourraienl-ils m'adresser leurs demandes par la voie du ministre des affaires etrangeres, et les voyageurs par l'intennediaire des Btablissements on Socieles scientifupies auxquels ils appartienuent? Ce mode d'envoi m'epargnerait des depenses qui, par lenr repetition frequente, ne laissent pas que d'etre assez considerables. MM. les consuls pourraieut aussi se procurer facile- men t les renseignementsoHiciels qui se publient a l'oc- casion des tremblements desastreux, et en joindre un exemplaire a leur envoi. Enfin, je dirai que, comme je travaille a former une collection «!e tous les ouvrages, opuscules ou memoires qui ont paru surles tremblements de terre et les phe- nomenes \olcaniques , collection qui s'eleve deja a plus de onze cents articles, el qui sera un jour deposee dans un grand Centre scienlilique , plusieurs de mes correspondents ont eu la complaisance de tn'envbyer des exemplaires des memoires ou oj>uscules publies sur les grands tremblements de terre des pays qu'ils habitenl. Mais c'est la une faveur speciale que je n'ose reclamer des amis de la science qui voudraient bien s'atljoindre a noire petite croisade scienlilique. Dijon, le a4 n,a' '854. Alexis Perrby, Professeur a la faculte des iciencoi. ( 423 ) Analyses, ISauports, i^x trait* d'ou- vrages, Melanges, etc. LE JAPON. HISTOIRB KT DESCRIPTION. RAPPORT AVEC LES EUH0PEENS. EXPEDITION AMERICAINE. PAR M. EDOUARD FRAISSINET. 2 VOL. IN-13. COMPTE RENDU PAR M. CORTAMBERT. Une des expressions du titre de cet ouvrage fait voir que ['apparition en est tort reeente. Cependant nous ndressons a 1'auteurle petit reproohe de n 'avoir donne aueune date positive a son livre. Le lecteiir clierclie vainement sur la page du titre, on a la preface, le mil- lesime cpii accompagne ordinairement loute publica- tion. Cette observation faite, nous entrons en matiere avec plaisir , pour rendre coinpte de ce travail qui nous a beaucoup interesse. M. Fiaissinet commence par jetet un coup d'ceil sur 1'hisloire amienne du Japon. Les Grecs et les Romains n'onl pas connu ce pays, cela est evident. La premiere revelation en est clue a Marco-Polo, qui ne l'a pas visile, il est vrai, mais qui en fait mention dans le IIP livre de ses voyages, sous le noin de Zipaiiguou SiiN/jitgti, La masse de la population japonaise paralt etre d'origine tartare ; c'esl vers Pan 1196 avant J.-C. que les premiers habitants ont da y ai river; mais i'hisloire ( hlk ) de cet empire ne commence aver certitude el n'est r aeon tee avec ordre que depuis le premier empereur ou mikado qui devint mailre de tout l'archipel en l'anGGO avant notre ere. Ce fut en l'an 85 ou 86 avant J.-C. que le mikado ou dairi revetil Tim de ses fds de la dignite dc siogoun ou generalissimo. Plus tard, les siogouns de\inrent independunts et absorberont momc l'autorite principal e : cette revolution, commencee dans le xne siecle, par le siogoun Yoritomo, ne fut accomplie qu'au xvi°, el l'usurpateur Iyeyas, an com- mencement du xvn* siecle, etablit solidemenl sa dv- nastie dans cclle dignite. Les premiers Europeens arriverent au Japon on 1543. Ce furent trois Portugais, que les historiens appellent presque tons Antonio Mota, Francisco Zei- moto et Antonio Peixota, mais dont les verilables noms paraissent etre Fernan Mendez Pinto, Diogo Zei* molo ot Christoval Borullo. So trouvant sur la pirogue du pirate chinois Samipocbeca, ils perdirent de vue, dans une tempete, le rivage de la Cliine et se virent pousses sur l'ilcjaponaisede Tanegasima. Les Annates du Japon, dans le recit qu'elles font de cette impor- tance aventure, confirment l'assertion de Mendez Pinto. Voici comment; s'exprimentces annales: « Dans ladou- lieme annee uunengo (1) Tenboun, le vingt-deuxiemo jour du huitieme mois; sousle regne du mikado Konara et du siogoun Yosihar (e'est-a-dire en octobrc 15/j3), un vaisseau etranger toucbe presde la villede Koboura, dans le district Nisimoura de l'lle de Tanegasima. L 'equipage se compose d'une centaine d'hommes de (i) Sorie d'olympirule japonaise. ( 425 ) l'aspect le plus singulier. Leur langage est ininlelli- gible et leur pays inconnu. A bord se trouve un (Illi- nois, nomine Go-hou, qui sait ecrire. On apprend de lui que ce navire appartient aux Nanbans (homines du midi). Le vingt-sixieme jour du meme mois, ce bail- ment est conduit a la cote N.-O. de l'ile, dans le port d'Aknoki. Le gouverneur de Tanegasima , nomine Tokilaka, prend des informations detaillees sur les etrangers , par l'intermediairo du bonze japonais Tsiousousou, qui se sert de caracleres chinois. Les deux commandants du navire, Moura-Siouksia et Krista-Mota, portent des amies a feu, dont ils font les premiers connaitre l'usage aux Japonais, ainsi que la fabrication de la poudre a canon. » Jean Huygen van Linschooten et Dirck Gerritszoon sont les premiers Hollandais qui aient visile les coles du Japon. C'etaient deux marins au service du Portu- gal, a la fin du xvie siecle. Ils iovilerent leurs compa- triotes a tenter le commerce de cette contree. Enfin, William Adams, Anglais de naissance, mais servant comme premier pilote a bord d'un vaisseau hollandais, en 1598, oblint de l'empereur, pour l'Angleterre, l'au- torisation de faire le commerce au Japon. Cependant les Portugais, qui d'abord furent fort bien accueillis, avaient perdu, avanl la tin de ce meme siecle, lout leur prestige et toute leur influence. Le chrislianisme, quils y avaient introduit avec succes, fut restreinten 1587, prohibe en 1596 et cruellement persecute, sur- lout en 1613. Les causes de ces graves changements sont longueinent expliquees par M. Fraissinet. Les Espagnols, qui visilerent le Japon pen de temps apres les Portugais, eurenl le meme sort, et des 16 ,)\ VII. JU1X. 3. 28 ( A 26 ) 1'enipire fut fe'rroi a toil I Stranger, a I'exception des Chinois el des Hollandais. L'ile Firatb ou Firando, cntre Nagasaki ot Osaka, futd'aborddonnee auxHollaiulais, a qui lacharlo coin- merciale fut oclroyee par ly'iyas, en 1009. Mais le di- recteur hollandais de la factorerie do cetle ile a\ant bati un superbe edifice, aveC I'inscriplion du millesime de 1638, cetle date, qui rappelail le cbristianisme, ih- spira de 1'ombrage au gouvernement de Yedo : on de- molit la construction, et Ton resolut de concentrer le commerce etranger dans la villi- de Nagasaki. On trans- lera, en 1641, les Hollandais dans l'ile de Delsima, qu'on avail (ait clever en forme d'eventail devantcette \ille, pour les Porlugais, peu de temps avant lour ex- pulsion. iM. Fraissinet donne des details notnbreax sur la position des Hollandais dans cette ile, ainsi que la visile que le directeur de la factorerie est oblige de i'aire a Yedo tous les quatre ans. Les Anglais avaient pu s'etablir a Firatb la memo annee que les Hollandais; mais ils abaridonhererit leur factorerie des 162A. lis reparurent ensuite en 1673, dans l'expedilion du Return; en 1808, dans celle de lord Pellew; en 1813, dans une tentative que le lien - tenant-gouverneur Rallies lit pour rattacbor le com- merce de Delsima aux nouvelles possessions anglaises de Java, mais qui ecboua par suite de la fermete de M. Doeff, directeur de la factorerie; en sorte que, par un concours extraordinaire de circonstances, ce di- recteur fut, pendant quelque temps, 1'unique repre- sentant du gouvernement national hollandais stir la Terre. C'etait une situation curieuse etinleressante (jue celle des Hollandais resles durant buit ans (de 1808 ( 427 ) a 181(3) sans recevoir de leur pays et do ses colonies, toutes cccupees par des forces elrangeres, d'aulres nouvelles que celles apportees par des adversaires Ve- nus pour les supplanler. En 1817, ils eurent le bon- heur de voir le retour des communications regulieres. Pour ne pas laisser de chances a quelque surprise, l'expedition hollandaise s'annonce toujours aux gardes japonaises en ajoutant au pavilion neerlandais un dra- peau secret et convenu. line instruction detaillee, re- digee par le chef de la factorerie, trace aux nouveaux venus la conchtite qu'ils doivent tenir a leur arrivee et pendant leur sejour dans ce pays. Une autre instruc- tion, ecrile en francais etdestinee aux vaisseanx Gran- gers qui potirraient se presenter, leur intime l'ordre de jeter l'ancre a quelque distance de la rade, pres des Cni'a/es du J\orel. Si nous examinons les nations qui, outre les Hol- landais, les Anglais, les Portugais et les Espagnols, ont cherche a enlretenir des relations avec le Japon, nous remarquons parliculierementles eflbrts des Fran- cais, des Russes et des Americains. Ainsi, parmi les pre- miers, Colbert concut sur ces relations de sages projets, qui n'ontmalheureusement pas eu tie suite, etle contre- amiral Cecille fut tres-bien accueilli par les Japouais en 18ZI7, sansqu'il en soit resulte aucun traite de com- merce ; une ambassade russe solhcita vainement, en 180A et 1805, l'ouverture du commerce pour la Piussie; en 1807, un vaisseau russe exerca des hoslililes sur les cotes N.-O. de I'archipel; mais, la meine annee, un navire de cette nation s'etant montre dans le nord du Japon, les indigenes retinrent prisonniers le capitaine Golovnin et quelques homines de l'equipage. Les Ame- ( 423 ) ricains, enlin, qui avaientdeja faitune tentative en 1S03, viennent de renouveler leurs projets surle Japon ; une de leu is floltilles, commandee par le commodore Perry, estentree, en 1853, dansla baie de Vedo, et a ob- tenu une reception bonne sans doute, quoique un peu forcee, mais sans resultat delinilif; on attend hi re- ponse de la cour de Yedo a des demandcs presentees assez lierement par la puissanle republique, et la flot- tille americaine est allee biverner dans les huts de la Chine et s'installer a I'une des iles Lieou-khieou, ces lies aux mceurs douces et paciGques, qui payent vo- lontiers un tribut aux deux puissances japonaise et chinoise, alin d'acheter leur tranquillity (1). Quant aux Cbinois, qui onl aussi le droit de com- mercer au Japon, ils sont restreinls au sejour d'un jardin au fond du j)ort de Nagasaki, jardin ferine de fosses et entoure de bautes palissades. Ils peuvent se rendre dans la ville, soil pour la priere, soil pour leurs provisions; mais, en revanche, on les traite avec inoins de respect que les habitants de Detsima. L'auteur consacre a peu pres la tuoitie de son ou- vrage a la description du gouvernement, des divisions politiques, de la statistique, des mceurs, des lois, de la religion. II s'etend sur cet etrange caractere politique et religieux, sur cetle cour splendide et sans pouvoir des mikados (c'est-a-dire fils du ciel), appeles a toil dairis, ce qui nest qu'un surnoin lire de celui de leur palais. L 'empire se divise en soixante huil provinces, (i) An moment ou s'im prime cet niiicle, nous apprenons ink: le commodore Perry vient d'obtenir (mars i854),poui le commerce de si nation, I'ouverture de deux ports japonais : Simoda, dans file de Nifon, el Kakodade, dans I ile de Y< dso. ( 429 ) dont cinq appartiennent a la couronne, et les autres sont gouvernees chacune par un prince. L'insiitution de la garde nationale existe dans toutes les villes du Japon et y rend des services reels; la police esl par- faitement faite, etl'on n'accepte dans un quartier que les gens bien notes. M. Fraissinet considere la societe japonaise comme la mieux administree et la plus heu- reuse qu'il y ait sur la Terre. Nipon, on Nifon (dans la poesie et le style soutenu), est le nom de l'empire, et plus particulierement de la plus grande de ses lies, car l'ensemble du territoire japonais s'appelle piutot, chez les indigenes, Da'i- Nipon, le Grand- Nipon. L'origine de ce ndm'est Nitsou (soleil), Hon ou Fon (lever), pays du soleil levant. Ce terine n'appartient pas cependant au japonais pur : on l'oblient en lisant, d'apres la prononciation qui s'est ihtroduite avec l'ecriture cbinoise, les deux ca- racteres ideograpbiques qui exprirnentTidee de JMpon. Dans le dialecte sacerdotal, le premier de ces carac- teres se prononce Zitz,ce qui donne, aulieude Nipon, Zipon. Beaucoup d'habitants de la Chine prononcent Zipen : de la Zipangu, Zipan-kbue (c'est-a-dire empire du Zipan). Dans lc japonais pur et dans la langue poe- lique , le Japon s'appelle Pinomoto; on dit aussi Yamato (terre des montagnes). M. Fraissinet evalue l'etendue de l'empire, d'apres les cartes japonaises les plus nouvelles, a 7 520 lieues carrees. Mais quelles lieues? C'est ce qu'il a le tort de ne pas nous dire. Si ce sont des lieues communes de 25 au degre, c'est evidemment trop pen ; si ce sont des lieues allemandes, c'est-a-dire des millesde 15 au degre, comme je le suppose, il elail indispensable d'en avertir. Du reste, il dresse avec soin un tableau complet ( 430 ) iles divisions du Japon, avec I'etendue de ckacune. Voici le resume des principales de ces divisions : iNipon. Kiousiou. Sikok. Tsousima. Iki. 28 Yedso. /'Sikotan. 3° Hikasi -Yedso (Grandes- jRounasiri. Kouriles). lYelorop (Ylouroup). \Ouroup. 4° Kita-Yedso (Rrafto), qu'on appelle aussi Sakhalian on Tchoka. 6° Mouninsima ou groupe de Bonin. 6° lies Lioukiou (Lieou-khieou)/ Groupe de Siousan. (tributairesde la Chine et du Groupe de Sanbok. Japon). Groupe de Sannau. La religion des Japonais einbrasse trois principales sections : c'est d'abord le culte national, le Siiito ou la religion des aieux ou des Kami's (seigneurs). Le but principal de ce culle est le bonbeur en ce monde : il admet ui) etrc supreme et j)lusieurs dieux supcrieurs, qu'on n'adore pas. puis plusieurs dieux inferieurs, qui sonl d'anciens heros, des bienfaiteurs de rhumanite : ce sont ceux-la qui sonl l'objet do I'adoration. Les mikados, descendus des anciens lieros, sont conside- red comme des images vivantes des dieux et commo dieux eux-incmts. Le second culle est le bouddliisme ou le culte de Sia-JiQ, qui esl pratique par les trois quarls environ de la papulation do I'empire, el qui ne ful inlroduit .hi Japon que vers l'an 03 apres J.-C. (431 ) Enfin.le Siouto, c'est-a-dire la voie des philosophes, est le noin donne dans ce pays al'ecole pbilosopbique de Confucius, qui comple au Japon un assez grand nombre d 'adherents. Les mceurs et les lois sont decriles, comtne la religion , avec d'interessants developpements, par M. Fraissinet. Tels sont les principaux sujets embrass6s dans cet ouvrage. lis sont bien presentes, rediges avec clarte et elegance ; malheureusement les fails ne sont pas assez lies entre eux : cbaque chapitre est fort bien, mais il ne se rallache pas toujours a ceux qui l'avoisinent par un enchainement bien rationnel. Enfin, les matieres trailees par M. Fraissinet ne nous paraissenl pas con- stituer une description assez complete du Japon. La geograpbie pbysique et la topographie de ce curieux empire ne sont pour ainsi dire pas abordees. II y a bien une indication des iles principales et des detroils qui les separent, mais les montagnes, mais les volcans et les pbenomenes geologiques, mais les fleuves, les lacs, et la meteorologie, etjes productions, il n'en est pas question. On donne bien quelques details sur Miako, sur Yedo, sur Nagasaki (1), mais on desirerail une des- cription des autres villes, province par province. II y a done des lacunes et quelques imperfections dans ce livre. II pourrait etre a la fois plus metbodique et plus complet, mais il n'en est pas moins un ouvrage utile et instructif, qui sera lu avec fruit el plaisir jiar tous ceux qui veulent connaitre eel extreme Orient destine sans doule a ouvrir, tol on tard, son se«n mysterieux a I'audacieuse perseverance de la race blancbe. (i) Cede orthographe iloit etre pr^feree a celle de Nangasahi, qu'on emploie assez generalement. t. C. ( W2 ) LETTRE DE M. l)K GHALLAYE, CONSUL HE PRANCE KN TDRQUIE, A. M. LB PRLSIDBNT DE LA SOCIETE DE GKOGRAPHIE. Coustanlinople, le 20 tlecetubrc iS53. Monsieur lo President, J'ail'honneurdevous iransuaellre ci-jointun tableau presenlant I'ilineraire suivi par S. Exc. M. le general Prim et son etat-major, pour se rendre de Constanti- nople a Schumla (1). II in'a paru que ce document, que je dois a l'obli- geance de M. de Saint-Romain, colonel d'etat major, attache a la mission de S. Exc. M. le general Prim, pourrait avoir un certain intcret pour la Societe de geographic Vous remarquerez sans doute , monsieur le presi- dent, que les chiffres porles dans lacolonne des lieucs laces lories de la haute Armenie. Veuillez agreer, monsieur le president , les assu- rances de ma haute consideration. C. A. de Challaye , Consul de Fiance, Comrrmmleur de l'ordre d'habelle la catholique. < o Z w fed — z < i-l O c O - c i-J & O Z es C Z < es < eu S u tr w i-j &. O z H Z <: i- z o u w Q z S S a 1 : s 3 -.-:. o X .t£ . xL in W U _ g w m w sa — 5i 01 » si si to is *•* r- •* •* oi it II oi *■* ■**• ffi — i.* vr. io ■*- oi oi ■* -" *— »o ^ 10 i^ i- Gl — J: "' z: — ;~ ffl r- ." X X Ifi - J 3 W •*• — — — I- 01 ■* 01 01 — — 11 01 -~ — 10 IC — — — Tl — — ■ ** "■" I ^~ •*• Oi ■* ci -- -* ci oi oi oi »i o> -a •*- ^ M««< Gl *• 01 -.* i* ;.- 10 l- Oi 01 -rt -ri 01 OI OI 01 ** •*!• OI 10 10 OI ■■- "* ** 01 — OI 01 10 *• Gl — SI 01 Gl — 01 . N - .5 - ■ "i — - = — -" *^ .■ - ~ . SOB3pu3u:hiH s ■*« ■*- It i-t ««- — *- <3l •* *- — m a - Q QJ S.2 ^ .- _- S ...... . § £ g § . . . « - 5-f If fill Hi in n -* = ^ -C ;«: =•? Mil f ^ - - * -"a 9 > = -C - = CJ yw<;>i^tij H s«tf U3 ffl 'w O H Cfi © h 00 ( 456 ) NOTES DE M. KOHL SUR SES TRAVAUX RELAT1FS A L'HISTOIRE DE L'AMERIQUE. SUR LA CARTB GlSNERALE DE i/mSTOIRE DIJ LA DECOUVERTE DV NOUVEAU-MONDE (l). Cette carte historique a ete composee dans lc but de faire voir sur une meme fouille la marche el le developpement progressifde ladecouvertedu Nouveau- Monde, ainsi que Ja part qu'ont prise dans cetle grande oeuvre les differentes nations de l'Europe, les compa- zines de commerce, les corps ecclesiastiques et d'au- tres classes d'individus, enfin tous les conqueranls, tous les voyageurs, tous les explorateurs connus. La carle a ete faile d'apres les principes suivants: 1° Les cotes et les rivieres sont indiquees par une forte ligne noire. 2° A l'exception des cotes et des rivieres, aucune indication geographique n'a ete marquee sur la carle. Point de montagnes, point de formation de terrain, etc. 3° 11 n'y a point de noms geographiques. Tous les noins et tous les nombres sont purement historiques. 4° Les routes des navigateurs dans l'ocean ne sont (i) Mise sous les yeux de la Socie'le, ainsi que la collection des cartes consultees pour la composer, dans la seance du iq mai iou Voyez le Bulletin de mai, page 386. ( 437 ) pas donnees, parce que Ton ne se proposait pas tie tracer l'hisloire de l'ocean, mais de la terre ferine. 5° Pour cbaque explorateuret cbaque conquerant, on a choisi une couleurdistincte et marque de celte couleur la ligne de ses voyages, la direction de sa marche el le theatre de ses exploits, ainsi que le commencement el le terme de ses courses. 6° Mais, comme l'kistoire offre beaucoup plus d'in- dividus celebres que la nature n'a de couleurs, il elait inevitable que les memes couleurs se repetassent en divers endioits. Ainsi, nous avons donne les traces et les noms d'a peu pres sept cents voyageurs, et nous n'avons pu composer qu'une echelle de vingt a vingt- cinq couleurs. 7° L'echelle de couleurs qui etait a notre disposi- tion a ete totalemenl epuisee dans cbaque grande division du continent, dans cbaque bassin de fleuve ou peninsule , mais de maniere que les memes cou- leurs, dans des regions voisines, fussent separees par des intervalles assez grands. 8° Par consequent, il est possible que le meme ex- plorateur (jui laisait des decouvertes en dilTerentes regions ait ete designe par des couleurs clifferentes. Par exemple, les decouvertes qu'Hudson a fades dans la baie qui porte son nom peuvent avoir une autre couleur que celles qu'il a faites dans le Groenland. 9° Mais, dans la meme grande division eontinen- tale , le meme personnage a toujours la meme couleur. 10° Cbaque decouverte a ete donnec sous le nom de celui qui commandait 1'expedition ou l'armee, et toutes les decouvertes que les lieutenants dun chef ( /i3S ) ont faites sontgeneralement comprises sous !a couleur de ce chef. Ainsi, on trouve lout co que Cortez a fait executor par Llloa, Ordaz, Bezerro et autres capi- taines, sous la couleur rouge, qui a ete adoptee pour Cortez. 11° Seulement, lorsque ces lioutenauls out fait des decouvertes imporlantes en leur propre nora, lors- qu'ils se declaraient independants etqu'ils out acquis une place eminente dans l'hisloire, des exceptions ont ete faites; et alors chacun a recu sa couleur par- ticuliere. — C'est ce qui s'est presente pour Benal- cazar, conquerant du Popayan, par rapport a son chef Pizarre, dont il sc declara independent, agissaut en son propre nora et s'etablissant conune conquistador et chef lui-meine, avec le consentement du roi d'Es- pagne. II en a ete ainsi de Pedro Alvarado, qui etait envoye de Cortez, pour faire la decouverte et la con- quele du Guatemala, mais qui, se faisant donner des pomoirs el des litres du roi d'Espagne , devint un conquerant et un gouverneur particulier. 12° La plupart des decouvertes ont suivi dans leur marche les bords des mers, des lacs et des fleuves. Par consequent, les couleurs de notre carte suivent presque toujours les lignes de ces bords. 13° Un a toujours indique la marche du premier explorateur par une ligne fortement tracee sur la lerre ferine le long de la ligne noire de la cote, landis que la marche de ceux qui sont venus apres lui suit la meme ligne, mais du cote de la mer. 14° Le meme voyageur pent etre, pour une partie du continent, un premier explorateur; pour une autre partie, un second ou un troisieme. Consequemment ( 489 ) les couleurs qui marqucnt sa route peuvent se trouver en partie sur la cole, en partie (levant la cote. 15° Les couleurs des premiers, seconds, trbi- siemes explorateurs, etc., out ete arrangees dansl'ordre chronologique, de maniere que le plus recent se trouve toujours le plus eloigne de la cote. 16° Le nieme systeme a ete suivile long des fleuves. Au reste, on a toujours ajoute au noui du vojageur l'annee de la decouverte. 17° Dans quelques cas, nous nous sommes contente de meltre seulement le noin d'un voyageur dans la region qu'il a traversee, Irouvant peu necessaire ou impossible d'indiquer sa marche. 18° II est facile de comprendre que noire carte n'ait pu indiquer nominativement que les voyageurs d'une grande illustration dans l'hisloire ou dans la littera- ture. Toutefois il etait necessaire de ne pas ometlre les classes nombreuses de voyageurs plus obscurs. Pour rappeler leurs services, nous avons designe par une teinte particuliere les regions qui ont ele ie theatre de leurs travaux. Mais, comine il etait impos- sible de les blass'er selon ie meine principe, tel que la nationality, le genre de vie ou d'occupation, nous les avons groupes en tenant coinpte des circonstances et des donnees diverses que l'hisloire nous a four- nies, en suivant tantot un de ces principes, lantot la utre. Ainsi, on trouvera, sur la carle, des classes comine celles-ci : Dccouvertes des coureurs de bois jrancais, — des trappeurs ainericains, — des agents de la compagnie d' Hudson, — des Fazenderos bresiliens ; — et puis: Decouvertes des jesuites, — des Russes ; — et encore: ( hhO ) Decouvertes recentes, — ou Anciennes expeditions ties Espagnols ie ou du moins un rellet des cartes originates, et celles qui ( hh\ ) temoignentd'un progres quelconque dans les connais- sances geographiques. La collection, independamment de ces cartes pure- ment geographiques, doit renfermer encore toutes celles qui ont ete publiees au point de viie special soit de la geographie physique, suit de l'hisloire ou de l'elhnographie, etc. Pour lc moment, la collection est composee de plus de 600 esquisses ou caiques, qui sont classes en divers groupes d'apres l'ordre suivant : 1° Carles sur la zoologie, la botanique, I'orographie et Fhydrograpliie de l'Amerique. 2° Cartes sur I'ethnographie et I'liistoire. 3" Cartes generales du monde avant la decouverte de l'Amerique, et specialement mappemondes qui monlrent les progres des connaissances dans I'ocean Atlantique; carles des iles Azores, des Canaries, des cotes occidentals de 1'Al'rique, etc. h" Cartes des contrees du nord-ouest de I'Europe, de la Scandinavie, de I'lslande, etc., pays qu'on a re- gardes pendant longtemps comme faisant partie du continent americain, et d'oii sont parlisles precurseurs des Coloml) et des Cortez. 5° Carles du nord-est de l'Asie, de la Siberie, de la Chine, du Japon, etc., regions que Ton a crues aussi pendant quelque temps liees a l'Amerique et par ou a commence, dans un temps posterieur, la decouverte de l'Amerique russe. 6° Cartes generales de toute l'Amerique, faites par les cosmographes espagnols, portugais, frangais, an- glais et allemands dans les xvie et xvn° siecles, et qui montrent la position et la forme attributes par eux au vii. juin. k. 29 ( M2 ) Nouveau-Monde, et les progres dps connaissances du globe. 7° Carles speciales de ton les les grandes divisions de I'Amerique, depuis les carles les plus anciennes et les plus imparfaites jusqu'aux [)lus recentes et aux meilleures, en suivant l'ordre chronologique. J'ai pris cos cartes dans les cosmographies an- ciennes et modernes, dans les diflerentes editions de Ptolemee, d'Appien, de Mela, etc.; dans les atlas et collections de cartes imprimees et manuscrites, ct surtout dans les journaux et rapports des voyageurs. Dans tons les cas j'ai cherche a me procurer les cartes criginales .memes. Mais souvenl j'ai conserve aussi les copies des copies, parce que les erreurs meme les plus grossieres ont leur histoire, et ne sonl pas sans quelque influence sur les notions et les idees geogra- phiques du temps. Pour im giand nombre de ces carles, je n'ai pu encore alleindie a la premiere eta la meilleure source, et toute la collection est encore tres incomplete. Ill, Sl'R l'kSSAI d'uNE HISTOIRE DES DECOUVERTBS DK l'aMEIUQUE. Cet ouvrage estl'essai d'une histoire des derouverles de I'Amerique par les Europeens, et des notions que les Europeens se sont failes du Nouveau-Monde el de sesdiflerenles parties. Les principes qui m'onl guide pour mettre en or- ( AZi3 ) dre le nombre immense de fails qui constituent cette grande chaine d'evenements, ont ete la clironologie et la position geograpliique. A l'exceplion des decouvertes faites par les anciens Normands, les premieres expeditions europeennes ont touche le Nouveau-Moncle dans ses parties centrales au milieu des deux grandes masses continentales qui le composent. Des que ces parties centrales ont ete connues, les decouvertes ont rayonne en deux directions, avancant d'un cote vers le sud et de l'autre vers le nord; de sorte que les decouvertes les plus recentes sont celles des regions les plus proclies des deux poles. Quelques expeditions vers le nord s'executaient dans le meme temps que les expeditions vers le sud. Mais en general le sud a prevalu, et 1'Amerique meridionale, a l'origine, etait mieux connue que 1'Amerique sep- tentrionale, dont on n'a fait le tour que de nos jours, sinon par lerre, du moins sur mer. Les exploraleurs de l'Europe, venaut de Test, ont du voir les lerres orientales du Nouveau-Monde les pre- mieres , et les terres occidentals les dernieres , el, comme ces voyageurs arrivaient par l'ocean , les cotes ont ete explorees avant l'iulerieur des terres. En tenant compte de ces diverses directions, du centre vers les poles, de l'orient vers l'occident, et des cotes vers linterieur , j'ai cru devoir adopter le plan suivant dan's l'ordre de uion ouvrage. J'ai commence parl'histoire de l'Aineriquecentrale, ensuite j'ai traite de celle de I'Amerique meridionale, et j'ai termine par celle du continent septentrional. Dans 1'Amerique centrale, j'ai commence d'abord ( Wi ) par les Antilles, puis jo me suis ocoupe do l'istltvne de Panama et des contrees voisines, enfin duMexique, du Guatemala, etc. Dans l'Amerique meridionale, j'ai commence par I'histoire des pays limilrophes de l'isthme de Panama , par la Nouvolle-Grenade, le Perou. l'Orenoque. De la je suis arrive au fleuve des Amazones , au Bresil , au Rio de la Plata, et j'ai fini par I'histoire de la Pata- gonie, du detroit do Magellan et des regions antarc- tiques. Dans l'Amerique du nord, je commence de la meme maniere par les conlrecs les plus proches du centre et de l'Europe, par la cote orienlalo. lc Canada, etc. , el je me dirige peu a peu vers le nord et vers l'ouest, pas- sant par la vallee du Mississipi el par les contrees au- tour de la baie d'Hudson, puis j'arrive a la Californie, a l'Oregon et a l'Amerique russe ; je finis par les regions arctiques, qui couronnent le lout. VOYAGE DE M. KRICK , MISSIONNA1RE FR\NgAIS, AU TIBET. M. Krick, accnmpagne de seize compagnons de vo\age, parlit de Tclioumpoura , dernier village de 1' Assam, le 18 decembro 1851. On suivit generalement le coursdn Brahmapoulre, el 1'on parcourut d'abord le pa\s des Michemis ; aj>res avoir marche dans des che- mins afireux, el le j>lus souvent dans des cantons non frayes, notre missionnaire entra au Tibet le 5 Janvier, vers le confluent <.\o llspack et du Brahmapoutre. ( kkb ) Oualoung est le premier village tibelain. Le pays y prend un caractere gracieux. qu'il n'avait pas clans la contree des Michemis. M. Krick visila le village de Sommeu, pres de la rive gauche du Brahmapoulre. La, le chef tibelain l'ohligea de revenir snr ses pas. Apres des dangers nombreux, des menaces de mort et des faligues inouies, il renlrait a Saikwah, dans I'Assam, le 18 mars 1852. « Le Brahmapoulre sort, dit M. Krick, d'une mon- tagne siluee an N.-E. de la province d'Assam; la tran- cbee qui le re^oit a sa naissance, ressemble a un elroit canal toil le enlre deux roches a pic. Sa largeur, depuis le Brahmakounclo (reservoir de Brahma) jusqu'au Tibet, est de 150 a 200 metres. Le lit du fleuve, trop etroit pour son volume, la penle du sol lout encombre de rochers, donnent a son cours une rapidile si im- petueuse que je n'ai pas vu un seul endroit ou le plus vigoureux elephant pourrait tenir pied ferme une seule seconde. Sa surface, depuis Sommeu jusqu'auxplaines de I'Assam, n'est qu'une nappe d'ecume blanche. Aucun bateau ne saurait passer d'un bord a l'autre; les ponts suspendus sont l'unique voie de communi- cation entre les deux rives de ce torrent desordonne. » Les renseignements fournis sur le Brahmapoulre par le courageux missionnaire lendent a donner a son cours une etendue moindre qu'on ne le croitcommu- nement; car on le depeint ordinairement comme par- courant presque tout le Tibet sous le nom de Yarou- dzangbo-tchou ; ce nom designerait done le cours superieur de l'lraouuddy, comme quelques gt-ographes 1'avaient deja suppose. E. C. ( M6 ) etudes sub les tremblements de terre. Ttdvaux de 31. Per re v. M. Alexis Perrey est parvenu, pnr la discussion des catalogues, el en rassemMant, seulement pour la pre- miere rnoilie de ce siecle, pres de 7 000 observations, a constater l'influence de la marche de la Lune sur la production des tremblements de terre, et Ton voit : 1° Que la frequence des tremblements de terre augmente vers les syzygies ; 2° Que leur frequence augmente aussi dans le voi- sinage du perigee de la Lune; 3° Que les secousses de tremblements de terre sont plus frequentes lorsque la lune est dans le voisinage dumeridienquelorsqu'elle en est eloigneede90degres. Travaux de M. Pieynalcl, en Grece. M. Reynald, membre de l'ecole d'Alhenes, vient d'adresser a M. le ministre de l'instiuction publique le rapport qui lui avail etc demande sur les tremble - ments de terre qui ont agile la Grece pendant pres de six mois. Depuis le mois d'aout 1853 jusqu'en mars 1 Soli, des secousses presque contiuuelles n'ont cesse de se manifester et d'altester une cause perma- nenle de revolutions sous le sol de la Grece cenlrale. L'Aitique, le Beotie, I'Eubee ont seules soulleit, Tbebes principalement, dont les desaslres repctes ont attiie l'allenlion de l'Europe. Le travail de M. Reynald, est-il dit dans le Journal ( *47 ) general de I' instruction publique, ne constate pas seule- mentles epoques, la duree, la violence des diflerentes commotions; ilen signalela direction, les circonstances physiques et meteorologiques. M. Reynald y joint les notes prises a l'observatoire d'Atlienes en septem- hre 1853. Tous ces documents, dont l'interet sera particulie- rement apprecie par les savants, concourent a etablir le lien volcanique qui unit l'Atlique, la Beotie et 1'Eubee. II semblerait meme, et c'etait l'opinion des anciens,nolammentdeStrabon,i:uelemontI\lycalisse, en Eubee, a ete Je centre de ces mouvements souter- rains. Si Thebes a ete plus cruellement ravagee, il faut l'attribuer a la nature du terrain sur lequel la ville est construite. Sur un sol plein de caviles naturelles et sans consistance, de chetives masures devaienl aus- sitot s'ecrouler; tandis que des villes mieux haties ont resiste aux commotions qui n'avaient d'exlraor- dinaire que leur continuile. Les tremblemenls de terre qui ont ebranle ces trois provinces pendant l'automne et l'hiver, ont per mis en outre de constater 1'exactitude de certaines des- orqitions d'Arislote et presente la plupart des plieno- menes physiques qu'il signale. On sait qu'Aristote, en determinant les vatietes de tremblemenls de terre, leur donne dillerentes designations et distingue les commotions obliques, les commotions bouilloniuintes, celles qui separent, celles qui rompent, celles qui se font ressentir par choc, les palpitantes, les mugissantes. ( MS ) LE PALMIER NAIN DE L'ALGEUIE. Le palmier nain a fait longtemps le desespoir du cultivateur en Algerie. II avail ete juge a ce point inu- tile, que de fortes primes avaient ete donnees pour son extirpation, ties difficile a cause de ses racines profundes el tenaces. Quelques Iribus arabes pout lant se servaient de la boor re fibreuse que fournil la tige du palmier nain pour fabriquer la toile de letirs tcntes en y melant du poil de cbameau; d'aulres confeclionnaient des pa- niers avec les feuilles, et Unites sc servaient des cordes grossieres qui etaient formees avec la plahte entiere tordue et nouee. Ccs essais inspirorent la pensee d'employer le pal- mier nain pour la fabrication du papier, et cloie pour la tapis- serie sur une grande ecbelle, et alors elle recoit le nom de crin vegetal ou crin d'Afrique. Le cordier fa- ( M9 ) brique egalement avec cette plante des cordages meil- leurs que ceux en sparlerie , et dont l'usage est deja repandu dans tous les ports de la France; ce qui est tres avantageux, puisqu'on evite ainsi de payer un tribut a 1'Espagne pour des cordages en sparlerie, que ceux- ci remplacent. Mais ce n'est pas tout encore, car on a decouvert recemment que, depouilles du gluten qui les tient agreges, les fils du palmier nain sont susceplibles de la plus grande division, et que, malgre leur pen de longueur, qui n'est que de 25 a ZiO centimetres, Us sont presque aussi fins que ceux du lin et peuvent etre employes ulilennnt par l'induslrie du lissage. Voila done quatre industries considerables, la pape- terie, la tapisserie, la corderie et le tissage, qui s'ali- mentent de cette planle, autrefois consideree comme l'un des fleaux de 1'Algerie, et qui, aujourd'hui, de- vientpourle colon une source de produits dont il a un ecoulement certain et avantageux. {Journal general de I' instruction publique,) BASSIN DE L'AMAZONE, D*APRfeS M. LE LIEUTENANT MAURY, Directeur de l'observutoiie de Washiugtou. Dans son ouvrage intitule The Amazon and the Atlan- tic Slopes, M. le lieutenant Maury fait du ba.ssin de I'Amazone un tableau des [dus avantageux: « C'est un pays a riz, dit-il ; le riz y rend communement quarante ( 450 ) pour un ; on le moissonne cinq mois apres qu'on l'a seme, et on peut le semor a qnelque epoque de l'an- n£e que ce suit. Ainsi, le eultiwdeur qui fait l'ense- mcncement d'un boisseau de riz aujourd'Iiui, pent, dans cinq inois, en tirer quarante boisseaux ; semanl ces quarante boisseaux, il peut, dans cinq autres mois, recolter seize cents boisseaux. En dix mois, la terre a done donne plus de mille pour un. Si cette contree etail enlevee a ses nations sauvages, aux betes farou- cbes, aux reptiles, et livree a la culture, elle pourrait nourrir facilement la population entiere du globe. » M. Maury evalue do la maniere suivante I'etendue des principaux bassins des fleuves du globe en milles carres : Bassin de 1'Amazone (ycompris celui de l'Orenoque, uni a 1 Amazone par le canal nalurel du Cassiquiare) 2048 ZT80' Bassin du Mississipi 9S2 000 Bassin de la Plata 886 000 Bassin du Danube 234 000 Bassin du Nil 520 000 Bassin du Yang- tse-kiang 547 000 Bassin du Gange 432 000 E. C. COLONIE GRECQUK ETABLIE EN CORSE. M. Marino \ nlo a donne, dans X Alhcincum francuis du 3 juin, des details inleressanls sur une colonie grecqueetablie en Corse depuis J 678. C'^taien I des Mai- notes, que la disette avail forces a s'expatrier; cette ( 451 ) colonie s'^tablit d'abord a Paomia, ou elle prospera; en 1730, les Corses, s'etanl insurges contre les Genois, altaquerent la petite colonic, qui demeurait fidele a ceux-ci, et la disperse rent. Les Grecs qui avaient ecbappe a ce desastre se reFugierent a Ajaccio, et, quand l'ordre eut ete retabli, ils se transporterent a Cargese, que leuis descendants occupent encore aujourd'bui, en conservant la pbysionomie et la langue grecques. TRAVAUX DE LA SOCIETE GEOGRAPUIQUE DE LONDRES. La Societe" geographique de Londres, dans sa seance annuelle de mai, a enlendu le rapport de ses travaux, de ses comptes financiers, des progres geograpbiques. Elle a publie, cette annee, le 23e vol. de son journal, confie depuis longlemps a la direction de l'honorable docteur Norton Sbaw. Les acquisitions de la biblio- tbeque de la Societe, depuis mai 1853, se sont elevens a /|00 vol. ou brocbures, 300 cartes et 10 atlas. La grande niedaille d'or a ele accordee au contre- amiral William Henry Smytb, pour ses nombreux tra- vaux bydrograpbiques dans la iVlediterranee, travaux qui ont fourni 105 cartes et fixe plus de 1200 positions maritimes sur les cotes de France, d'Espagne, d'ltalie, de Corse, de Sardaigne. de Sicile, de Croatie, de Dal- matie, des lies Ioniennes, de la Grece, et sur celles d'Alrique depuis l'Egypte jusqu'au Maroc; celle me- daille recompense aussi les memoires de ce savant ( 452 ; marin sur la elimalologie et l'bistoire nalurelle de regions consideraldes, et principalement son recent et important ouvrage intitule la Medi terra nee, oil ses observations sont inlercalees dans un tableau coni- plet de la geograpbie aetuelle des regions baignees par cette mer, comparee aux caracleres pbysiques qu'a oflerts leur geographie dans l'antiquile et au moyen age. La seconde medaille d'or a ele donnee au capitaine Robert IMac-Clure, commandant Y Investigator, pour sa navigation dans la mer Polaire, a travers les plus grandes diflicultes, pour son exploration de l'tle Baring, et sa decouverte si remarquable du passage du nord- ouest. E.G. ( *» ) ^tmvelle* geographlques. EUROPE. NOTE DE M. LE DOCTEUR LONG SUR UNE DECOUVERTE ARCHUOLOGIQUE FAITK A DIB (dEPARTEMENT DE LA DROMe). « On decouvrit a la fin du mois de mars lS5i, a 3 kilometres de Die, au quartier ile Saint-Sornin, pres du ruisseau de ce nom, en creusant un canal d'arro- sage de 1 metre de profondeur, sur 1 metre de lar- geur, un massif de maconncrie tres dure de 8 metres de longueur, dont la largeur nest pas encore connue, parce que les fouilles ont suivi la direction du chemin vicinal de la ville au ruisseau. Le massif est couvert d'un cimenl de chaux et de brique pilee for man t un glacis. Dans I'interieur etaient ma^onnees a plein dans le morlier lib urnes ou amphores en poterie, abso- lumenl vides, renversees perpendiculairement , le goulot en has, presque en contact les unes avec les autres, sur plusieurs rangs. Leur j)lus grande circon- ference est de lm,20; leur liauteur, de ZiOcenlim.; leur epaisseur est faible en proportion de la grandeur du vase. La poterie est une argilo rouge, assez pure, tres cuite et sonore. Elle n'est pas empatee de spath cal- caire, comme celles des amphores funeraires d'une plus grande dimension et de la meme forme qu'on rencontro quelquefois aux environs de Die. Nos urnes sont neuves et ne presenlent aucun ilepot a I'interieur. Leur adherence au mortier en a rendu Texti-action ( A54 ) difficile; cependant on en a conserve qnelques-unos. Nous en possedohs deux. » Vitruve a dit qu'on plaeait des vases vides, comme ceux donl il s'agit ici, en bronze ou en poterie, nom- mes echea, echeia, sous les degres des amphitheatres, pour augmenter la repercussion du son. On a vu chins le grand theatre de Pompee des vases de bronze pour le meme but. Ce procede etait aussi employe dans le chceur des eglises du ruoyen age. Pourquoi est-il abandonne ? » On a decouvert dans les champs voisins, il y a plusieurs annees, des colonnes, des morceaux de divers marbres en placage, des debris de polerie romaine, quelques medailles du haul empire, un beau medall- ion, a fleurde coin, d'Antonin le Pieux. II est probable que le massif contenant ees urnes ou amphorcs vides et renversees laisait partie de quelque temple paien qui a ele" dans la suite consacre a saint Saturnin ou Sortuh. » Nous ne pensons pas qu'on puisse, comme M.Walc- kenaer, trouver ici les Comacini de Pline. Ce savant a fonde son opinion sur le nom de la petite riviere de Comane, pres de Die, don t le corns n'est pas de 6kilom. II laut chercher ce people, qu'on ne peut placer aux portcs de Dea, au milieu des \ oconces, j > I lis an midi. Le vallon de Comane n'a pas jusqu'a present offert le inoindre vestige d'antiquites. » TRAVADX DE M. BEULE SDR l'aRCADIE. M. Beule vient de donner, dans une suite d'articlcs du Journal general de V instruction jjublique , des details ( 455 ) interessants sur divers points de 1'Arcadie et d'autres parlies de la Moree, cntre autres la riviere JSera, le Styx, le mont Lycee, etc. ASIE. EXTRAIT d'uNE LETTRE DE M. PHILIPPE DELAPORTE , CHANCELIER DU CONSULAT DE FRANCE A MOSSOUL, [Com- m unique par A/. Heinaud a V Academie des inscriptions et belles-lettres, dans la seance du 21 viai.) « Me voila a Mossoul depuis trois mois, apres un voyage fort long et fori penible. 11 est inutile de vous donner la description de cette ville : vous la connaissez sans doute depuis longlenips, d'apres les rapports qu'ont dii vous faire les voyageurs qui J'ont parcourue. J'avoue que je m'attendais aquelque chose de mieux; ce nest plus le Mossoul d'aulrelois, ce nest actuelle- ment qu'une \ille presque abandonnee, un lieu de transit, lille n'areellement d'interessant que les ruines de Ninive qui l'avoisinent, et que j'ai, du resle, admi- rpes sous tous les rapports. Les travauxde Khorsabad, diriges par M. Place, sont queique cbose de prodi- gieux; sans les avoir vus, on ne peut se rendre c.ompte du travail et de la palience qu'il a fallu a cet agent pour arriver a un pared rcsullal. Grace a son babilele et a son savoir, nous pouvons dire que nous possedons aujourd'bui le [dan d'une ville assyrienne. II est seu- ienienl a resetter que le gouvernemenl ait doune 1'ordre de suspendre les fouilles; carc'est maintenant surtout, queM. Place a trouve la clef de ces construc- tions, qu'on devrait conlinuer a fouiller plus que ( 456 ) jamais. II Fatit croire que le gouvernement reviendra de sa premiere decision. M. Oppert, qui se trouve en ce moment avec nous, et qui retourne a Paris dans cinq a six jours, pourra vous donnor des renseigne- ments lies etendus sur ces travaux qu'il a visiles avec grand soiu. L<^ jeune savant a su mettrc aussi a profit son sejour ici en cherchant a deebiffrer les principales inscriptions de Rborsabad. Dans une d'elles, il est arrive a lire que l'ancienne \illc qu'il pretend etre Sargon ou Sakbr-Sargon avail iiuit portes d'entree. Ce fait paralt d'autant plus certain que M. Place en a trouve sept, et qu'il a pu observer, par I'arcbitecture de ces portes, qu'elles etaienl disposees deux par deux, 1'une que nous pourrions appeler porte monumentale, el l'autre porle simple. Cela fait supposer que le nombre buit donne j)ar M. Oppert serail exact. Les portes monumentales etaienl decorees par des figures de taureaux, et auraient ele reservees au\ pietons; les simples, au contraire, depourvues de tout ornemeot, auraient ser\i aux cavaliers et an passage des cbariols. Ce qui a conduit M. Place a faire cette supposition, c'esl qu'aux portes monumentales il faut monter plu- sieurs marcbes pour arriver dans la ville, tandis qu'aux portes simples ces marebes n'existent pas. L'in- terpretalion donnee par notre consul est fort juste, et je crois qu'on ne saurail mieux expliquer 1'existence de ces escaliers dans les portes monumentales. C'est de 1'une de ces dernieres portes qu'ont ete tires les deux magnifiques taureaux que M. Place envoie aujourd'hui a Paris avec leurs deux statues, les seules qu'il ait Irou- vees jusqu'a present. Cbaque taureau pese 3'2 000 kilo- grammes, et cbaque statue 15 000. Malgre la pesanteur ( hhl ) de ces masses et le manque d'instrumenls de meca- nique, il est parvenu a transporter ces monolithes sur les bords du Tigre, c'est-a-dire a une distance de quatre heures de Khorsabacl, sans avoir besoin de les scier. C.'est an moyen d'un chariot colossal et ties bias de six cents Arahes qu'il a pu triompher de ces poids enormes. Le jour de leur arrived a Mossoul, toute la ville elait sur pied ; chacun accourait pour voir ces six cents Arabes tirer ce chariot, au son de la musique du pays, qui ne cessait d'encourager leurs efforts. Plu- sieurs paris avaient ete meme engages pour savoir si le consul de France triumph erait on non. La victoire fut complete sur toute la ligne. Maintenant, nous altendons I'arrivee d'un bailment de l'Eial qui doit venir sous peu a Bassorah. Faire descendre ces masses sur des kelek^ va offrir aussi tie nouvelles difficultes : les mesures sont tleja prises; il I'aut esperer que M. Place en sortira avec gloire, et que ces monolithes arriveront en parfail etat sur le quai du Louvre. » Quoique le sejour de Mossoul soit mortellement triste pour nous autres Europeens, cependanl, pour celui qui aime Telude, 1'exil devient beaucoup moins penible. Entierement libre de mon temps, je puis ici m'occuper avec suite de mes laugues orientales. Con- stamment en contact avec les ulemas du pays, je ne manque pas de tirer profit de leur conversation et de leurs connaissances. » J'ai ete reellement surpris de rencontrer a Mossoul des homines aussi instruils ; seulement la pretention de ces ulemas de passer pour les homines les plus docles de l'Arabistan m'a paru un pen hasardee. vn. /uin. 5. 30 ( 458 | Pourlant je dois dire quo beaucoup d'entre eux con- naissent parfaitemenl hien leur langue. » VOYAGE DE M. PETERMANN PANS I.A TUBQUIK D ASIE. M. fe professeur prussien Petermann visile en ce moment la Turquie d'Asie orienlale; il a descendu le Tigre, et, apres avoir visits los mines de Ninive, Bag- dad, les mines de Babvlone, il s'est arrele, pour y sejourner quelques mois, ;'i Souk-Elchiouk , villc sou- mise au puissanl et belliqueux cbeikb des Monlefik. NOVVELLBS DECOUVERTES DE M. RAYVLINSON. Lne lettre du colonel Rawlinson, dalee du "2b Jan- vier, et lue a la Soeiele asialique deLondres, decritles nouvelles deeouverlos fades par ce savant archeologue a Lm-Queer (l'ancionne Lr des Cbaldeens) ; il signale particuliereinenl deux cylindres qui conliennent les details des travaux executes par Nabonidus, dernier roi de Bab) lone, dans la Chaldee meridionale, entre aulres la reouverture de canaux ere uses par Nahopo- lassar et Nabuchodonosor. On voil, par ces cylinclres, que le bis aine de Nabonidus s'appelait Belcbar-ezar, lequel est Ires probablement le Balthazar tie Daniel, et Ton peut a present comprendie que ce prince ail ete gouverneur de Babylone, quand cello \ille ful prise paries Perses, et qu'ilailperi danscetle chconstanee, en meme lemps que Nabonidus, arrivant au secours de la place, etait defait de son cole et force de se refu- gier a Borsippa. On ne peut plus mainlenant confon- dre, comme on l'a i'ait jusqu'ici, Balthazar et Naboni- dus (Nabonil). E. C. ( 45y ) AFRigur-:. EXPEDITION DE e'aFRIQUE CENTRALK. On a recu de Tripoli, a la date du 8 juin, des nou- velles du docteur Barlh. Apres avoir quitte Tombouc- tou, le 5 octobre, ce voyageur est arrive, a la suiie tie difliculles infiniesetde dangers sans nombre, a Sakka- tou, (iu il se trouvail au commencement de fevrier. II a ele recu avec urie grande bienveillance par ie souve- rain des Fellatah. II a obtenu de ce prince, comme il avait obtenu du cbeikb de Tombouclou, un imana complet ou autorisalion generale pour lous les com- mercanls anglais de visiter le pays et d'y faire le ne- goce. II a profile de son sejour a Sakkalou pour clever un monument a la memoire de Clapperton, qui y mourut en 1827. Cos details avaient ete Iransmis a Mourzouk, capilale ilu Fezzan, par le ducLeur Vogel, qui se Irou- vait a la fin de mars a Rouka, de retour d'un voyage au lac Tcbad, et qui avait pu donner avis au docteur Barth de sa presence dans le Bournou. Cesdeux iulie- pides voyageurs devaient s'y renconlrer a la fin d'avril ou au commencementde mai.pour s'embarquerensuile sur le Benue (laTcbadda), qui s'uuit au Niger. Au con- fluent de ces deux cours d'eau ils doivenl trouver un bateau a vapeur envoye a leur rencontre, et qui les ramenera en Anglelerre par l'ocean Atlantique. EXPEDITION MILITAIRE DANS LA SENEGAMBIE. M. le capitaine de vaisseau Pro let, gouverneur du Senegal, a adresse, le 16 avril 1854, au ministre de la guerre, uu rapport sur 1'expedition qui a eu pour re- ( '|60 ) sultat le retablissement do Podor, I'un dos forts do I'an- cienne compagnie d'Afrique, situe ;'i environ 60 lieues an dessus do Saint-Louis, et destine a proteger la lihre navigation du Qeuve. Notre honorable corrospondant, M. le eapitaine du genie Faidherbe, a rendu compte , par un rapport date du 8 mai J 85A, dv la prise de la ville de Dial- math, capihiie rluDiinar, peuplee de5000atnes, situee sur une eminence, au bold d'un bras du marigot de N'Dor, el qui, enlouree de tons cotes d'un tata,ou mur en troncs d'arbres et en terre glaise, passait dans le pays pour impronable. OIVERTURE DU CHEMIK DE FER 1) ALEXANDRIE. Les voyageurs de l'lnde sont acluellement transpor- ted par le chemin de fer enlre Alexandrie et le Nil, distance de 66 mil les. On evile maintenant tout a fail le trajet sur le canal, qui elait la partie la plus en- nuyeuse du voyage a Iravers l'Egyple. On compte que la ligne enliere entre le Caire et Alexandrie (140 milles de distance) sera achevee dans un an. VOYAGE DE M. ANDURSON. D'apres une letlre du Cap, dalee du 8 mai 1854, et communiquee a la Society geographique do Londres, par M. Gallon, M. Anderson a\ail reussi a atteindre le lac N 'garni, en parianldela coieoccidenlale.Dece point, il a remonle durant treize jours la riviere Teoge, qui se jette dans le lac, et dans cet espace de temps il parcourut ( m ) une distance de 150 milles ; mais, vu Ja nature exlraor- dinairement sinueusedu cours de ceite riviere , il n'a- vanga pas a plus de 60 milles au nord da lac. II dit que cetle riviere est tres elroile, et quelle n'a peut-etre jamais plus de 40 yards de largeur, mais qu'elle est en general fort profonde. Elle court avec une rapidite qui varie de 2 a 3 milles a I'he'ure; et, comme ses bords sont presque toujours lies has et qu'ilsfont meme cora- pletement defaut en quelques endroits, le pays est souvent inonde pendant des milles entiers, et ne pre- sente a la vue qu'un lac sans bornes, rempli de joncs et deroseaux, el parseme d'iles couvertes d'une ricbe vegetation. Les renseignemenls tlonnes par M. Anderson met- tent bors de doute l'existence de la riviere Biribi, qui, prenant sa source a deux ou trois jours de ma re be a 1'ouest du lac N'gami, court au nord-ouest, et presque incontestablement est un affluent de ce grand fleuve qui coule de Test a 1'ouest, et forme, d'apres les de- couvertes de M. Gallon, la limite septentriomde de la terre des Ovampos. II semble done qu'il y ait possi- bilile de se rendre par eau du voisinage du lac N'gami a l'Atlantique. II parait lies vraisemblable que, sauf une petite interruption , il existe une communication par eau au moyen de rivieres considerables, directe- meut a travels l'Afrique , pies du 17" paraliele de latitude sud. De la baie Walliscb au lac N'gami, la contree est parfaitement saine. Les pays des Damaras et des Namaquas abondent en minerai de cuivre, et des commerQants du Cap s'etablissent deja a la baie Walliscb. ( 462 ) RAPPORT l)E M. I.K MARECUAL VAILLANT SUR l'ai.GERIE. M. le marechal Vaillant, minislre de la guerre , a pre-sente" a rEmpereur un rapport sur la situation He 1'Algerie en 1853. Nous rendrons comptc de cot im- portant travail dans le procliain numero du Bulletin. AMERIQUE. DESTRUCTION DE SAN-SALVADOR. La ville de San-Salvador, dans I'Ainerique ccn- trale, vient d'etre enlierement clelruite par des trem- blements de terrc qui ont commence le 13 avril et ont dure' jusqu'au 16. EXPLORATION DE M. LE COLONEL FREMONT, En \ue de I'etablissement da Pheir.in de fer du. Pacifique. Wapres un Journal de San-Francisco.) M. Fremont est parti de Saint Louis le 15 oet. 1853, accompagne de huit Americains et de dix Indiens De- lawares, lous homines devours et montagnards experts. Le 30 novemhro, il arrivait au fort Bent; de oe point jusqu'atix ^tablisseiiienls dies Mormons, il ne devait plus rencontrcr un seul homme blano. Celtepartie du voyage fut accomplie a havers un pays montagneux, boise, convert de paturages et suflisannnent pourvu d'eau. Le 5 decembre il p^nelra dans les montagnes Rocheuses, et traversa, le \!x, la passe de Cochetope ; il se trouvait alors sur le versant de ces montagnes du cote de l'ocean Pacifique. Ce passage efFectue" , les voyageurs suivirent l'un des tributaires du Rio Grande, ( 463 ) et, se dirigeant vers l'ouest, gagnerent Pa rowan, eta- blissement mormon , oil ils arriverent le 8 fevrier. De la limite ouest de l'Etat cle Missouri au Rio Grande, la distance est de 800 milles; le sol, sans interruption, est d'une grande ferlilile. De ee dernier point a Pa- rowan , 150 milles, le pays est pauvre. Presile Parowan, un descompagnonsdu colonel Fre- mont, 0. Fuller, mourut des suites des fatigues et des privations que ['expedition avail eprouvees pendant un tra jet de six semaines accompli dans ties payssau- vages, au milieu des rigueurs de I'hiver. Le 21, le colonel Fremont quitta Parowan et se di- rigea vers le S.-O., pour alier passer la Sierra Nevada. Apres avoir fait 100 milles, il traversa la riviere du Grand-Bassin ; de la il gagna le Ranch Owen, situe a 200 milles, par 37 degres de latitude. Le 21 mars, il clierchail a passer le monl Owen; les neiges I'empe- chant de le faire, il suivit les flancs des montagnes dans la direction du nord, et rencontra les premiers etres liumains depuis Parowan : c'elaient des voleurs de hesliaux indiens qu'il ailaqua el auxquels il prit trenle ehevaux. Un des liummes du colonel Fremont fill legerement blesse par une fleche indienne dans le combat. Le I" avril etdin , les explorateurs passerent la Sierra Nevada, par 37 degres de latitude; ils arrive- rent au sommet par des pentes si donees, qu'ils ne mettent pas en doute la fabilite d'y etablir le chemin de fer. La passe qu'a rencontiee le colonel Fremont etait encore inconnue; elle se Irouve a la source d'un ruisseau (creek) qui se jette dans la riviere Kern du cole de Test. La pi aticabilile du voyage en toute saison est demontree par cette expedition. ( A64 ) NOUVELLES DIVERSES. Un memoire de M. Lartiguc, relalif a 1'exposilion du systeme des venls, a ele presente a l'Academie des sciences dans la seance du 5 juin. On y trouve des ex- plications tres developpees sur les vents polaires et les vents alizes. Dans la seance tenue le 8 juin par la Societe geo- graphique de Berlin, M. Kilter a annonce la mort de M. Engelhart, membre de la Societe, qui s'est distin- gue par ses nombreux ouvrages stalistiques sur tons les pays du monde, et par le grand nombre de cartes dont il a enrichi la science geograpbique. M. Engel- hart elait, en outre, un des inembres les plus emi- nenls du bureau stalislique. M. Ritter a ensuite doune communication a l'as- semblee d'une leltre ecrite a M. Alexandre de Hum- boldt par le celebre chasseur de lions, M. le lieutenant Jules Gerard. M. de Humboldt avait deinande a M. Gerard si les lions peu\enl supporter le froid : M. Gerard a repondu qu'ils le peuvent supporter jusqu'a JO degres, que le froid les excite et qu'il les rend plus dangereux pour les chasseurs qu'iis ne le soul husqu'il fait chaud. M. Gerard a joule que les lions ne souflrent pas que le moindre floeon de neige resle sur leur corps, ce qu'il laut altribuer a leur instinct de proprete si developpe. M. de Humboldt rcmarque qu'en Asie les tigres suppoi tent tres biiu le froid jusqu'au-dessous de 18 degres, ce qui explique- rait aux geologues la presence simultanee d'ossements d'animaux vivant oidinairement dans les zones des climats les plus opposes. ( /it>5 ) Actes de la Noeielc. EXTRA1TS DES PROCES-VERBAUX DES SEANCES. Seance du 2 juin 185#. PR^SIDliNCE DE M. JOMARD, Le proces-verbal de la derniere seance est lu et adopte. II est donne lecture de la correspontlance : M. Perrey, professeur a la faeulte des sciences de Dijon, adresse une note ciiculaire relative aux trem- blemenls de terre, et destinee a etre jointe aux in- structions preparees par la Societe pour M. Hecquard et pour tons les autres voya«eurs. On communique la lisle des ouvrages offerts a la Societe. M. le president annonce la presence, dans l'assem- blee, de M. Daux, ancien ingenieur du bey de Tunis, qui met sous les yeux de la Societe plusieurs de ses travaux topograpbiques manuscrits sur la regence de Tunis, dont il se propose d'ecrire I'histoire. M. Morel-Fatio lit, en le traduisant d'un journal anglais, le compte rendu de la derniere seance gene- rale de la Societe geographique de Londres. M. Cortambert communique la traduction qu'il a laile de la lettre adressee a la Societe par M. David Li- vingston, sur les dernieres explorations entreprises par ce voyageur dans l'Afrique australe, envoi accoinpagne d'Line petite carte qui sera inseree au Bulletin. ( A66 ) Seance flu 16 jtrin 1854. pr£sidknce dij m. jomard. Le proces- verbal de la derniere seance est lu et adople. On donne lecture de la correspondance : M. le m aire de Rocheforl ecrit. en reponse a une let tee adressee par le president et le secretaire de la Commission centrale, que lecomile charge, dans cette ville, de l'erection d'un monument en I'lionneur du lieutenant Bellot.recevra aVec reconnaissance la somme provenanl de la souscription ouverte au sein de la So- ciete de geographie pour contribuer a ce monument. M. le marechal Vaillant, ministre de la guerre, vu- voie Irois exemplaires du rapport qu'il a recemment presenle a l'empereur, sur la situation de I'Algerifc en 1853. Des remerciments sont votes a M. le ministre. M. le president de la Societe d'emulalion de 1'Allier ecrit a 1\1. le president de la Commission cenlrale, pour dflrir lechange ties publications de cette Societe contre le Bulletin de la Societe de geographie. M. Is. GeoflVoy Sainl-Hilaire, president de la Societe zoologique d'acclimatalion, annonce que eelte compa- gnie continucra d'adresser a la Societe de geographie son Bulletin mensuel, et qu'elle desirerait recevoir, en retour, le Bulletin de la Soi iete de geographie. Cette proposition est remoyee, ainsi que la precedente, a la section de complabilite , qui Icra son rapport a la prochaine seance. M. de Challaye, consul de France en Turquie, eu- voie un tableau presentant l'itineraire suivi par lo ge- ( 467 ) neral Prim et son etat-major pour se rendre de Con- stantinople a Choumla. II annonce l'envoi prochain des plans de CUoumla et des principales places Fortes de la Haute-Armenie. On donne lecture de la liste des ouvrages offerts. M. Jomard annonce que M. Daux a adresse un me- moire sur Tunis, el M. Cuny un memoire sur le Darfour. M. Jomard rappelle a MM. les rapporteurs les comptes rendus dont ils se sunt charges et que la So- ciele attend de leur zele. M. de laRo(|uelte lit une lettre de M. le professeur Chaix sur le passage des Alpes par Annibal ; une carte manuscrite accompagne cetle lettre ; Tune et l'autre seront renvoyees a la section de publication, pour 1'insertion au Bulletin. M. Jomard donne les nouvelles recentes qu'il a re- cues de l'Afrique centrale par la voie de Londres ; il communique, sur l'arrivee du docleur Vogel, dans le Bournou, el sur celle du docteur Barth a Wurno et a Sakkatou, des renseignemenls qui interessenlvivemeut l'assemblee, et qui seront insert's dans le Bulletin. M. de la Roquette communique une note de M. Mar- cou sur un voyage a travers lesmonts Rocheux, et jus- qu'a San-Francisco. M. Jomard enlretieht la Societe de divers reliefs geograpliiques executes a Bonn parM. Dickert et repre- senlant plusieurs terriloires de la Prusse rhenane; le meme auleur a donne aussi un relief de la Lune. M. Constant Prevost enlre, a ce sujet, dans des deve- loppements sur les crateres probables de ce satellite. ( 40b ) OUVRAGES OFFERTS DANS LES SEANCES DES 2 ET 16 JUIN 1854. OUVRAU i: S. AFRIQDE. Titres des ouvratjes. Donateurs. Happort presente a l'empereur sur la situation ji«l. Renard i 1 3 Notice sur Batavia et les industries de Java, parM. Renard. . 320 Instructions donnees a divers voyageors par fa Societe de ;;ur les voyages de MM. Lynch et di- Saulcy (.Vin'r, 3a Mnuveinent du commerce trancais en 185a. 6a Cedres de I'Asie JYlineure et vegetation du monl Argee 65 Clunat de la cote oriental*: des. Llais-Unis 66 ( 471 ) Rapport sur le voyage agricole et horlicole en Chine, de M. Ro- bert Fortune, par M. Poulain de Bossay ii3 Compte rendu des travaux de la Societe imperiale russe de geographie • • ■ ,21 Lqttre de lVI. Faidherbe a M. le president de la Commission centrale de la Societe de geographie 129 Les iles Iouiennes I''1 Note sur la gutta-percha '33 Sur la eoupole d'Arin elite le Dome de la Terre, par M.le baron de Hammer-Puigalal ■ '35 Observations sur la note precedente, par M. Sedillot i36 Arrique orientale. Lellre de M. Krapf a M. Jomard 256 Lettre de M. Ribmann a M Jomard 262 Nouvelles de Tarrivee du docteur Bailh a Tombouctou. Lettre de M. Aug. I'eterm;inn 2(i5 Extrait d'une lettre adressee a M. Joinaid par M. le capitaine du genie Faidherbe, commandant an Senegal 271 Rent de la bataille d'l.-ly, recueilh au Senegal par M. le capi- taine du genie Faidherbe ,''■•..•'• a?3 Conference maritime pour ('adoption d'un sysleme uniforme ^'observations meteorologiques, par M. Jomard 279 Letire de M. le colonel Fischer aux rnembres de la Societe de geographic, sur une nmivi lie carte de 1'Asie Mmeure. . . . 287 Letire de lYI. Fortoul, minislre de Tinsliui lion publi(|iie, a M.le president de la Societe lie geographie 290 Ri ne Caillie et. le docteur Banh a Tombouctou, parM Jomard. 345 Lettre de M. Fredonx, missiounan e traneais, a AL le prt sulenl lie la Societe de geogi apliie 3b2 Lettre de M David Livingston au president et aux rnembres de la Societe de geographie 364 Extrait (I une letire de fid. le baron Alexandre de Humboldt a M. Jomard 373 Extrait d'une lettre de M. de Montigny a M. Jomard 374 Le Japon. Histoire et description. Rqpporl avec les europeens. Expedition anierieaine. Par M.Ldouanl Fraissiriel. — Compte leiiilu pu M. Co'rWiibert '• • 4?3 Lettre de M. de Challaye, consul de France en Turquie, a Mi le president ile la Societe de geographie 432 llineraire de Constantinople a Scbumla par Andrinople, Philip- popoli, Kesaiilicli et Tirnova 434 Notes de M.Kohl sur scs travaux relatir's a I'histoire de J'Ame- liijiie 436 Voyage de M. Krick, missiobhaire francais, au Tibet 444 Etudes sur les iremhlemenls de terre 44^ Le palmier uain de TAlgerie 44^ Bassin de I'Amazone, d'apies M. le lieutenant Maury 4^9 Colonic grec(|iie etablie en Corse 4^° Travaux de la Societe geographique de Londres 45 1 NOUVELLLS GEOUBAPKIQUES, EunorE. — Note de M. le docteur Long sur une decouverte ar- cheologique faile a Die (department de la Drome). . . 453 — Travaux de M. Beule sur l'Arcadie 4^4 67 67 i3g ( 472 ) Asif — Ex trail d'une lettre de M. Oppert, daTee de Babylone, Ie3 novembre 1 853 (Communique par M. de la Roquet te). — Mission russe en Chine — Extraii d'une lettre do \I. Oppert, datee de Bagdad, le 6 Janvier 1 854- (Communique par M. de la Roqueiie.) — Extrait d'une lettre de M. Oppert, datee de Mossoul, le ■<- fi ivrier 1 854. (Communique |,;" M*. 8, 388,468 Bibliographic geographiqne 86,151,389,469 Note sur les ouvrages orferts a la Soeiele 3i)o Programme des prix proposes par la Societe 3gi Note sur le portrait de M. Walckenaer i5a Errata. • 3n, 392, 469 TaLle generate des matieres du tome VII 47° PLANCHES. Carte de Rabylnne, par M. Oppert. Carte de la mer