1ÛS SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE D® æmüii®s» So». géol, , 2e série , tome X. PARIS - IMPRIMERIE DE L. MARTINET, socW ~ - »*■«. - 6ttlWttn DE LA SOCIÉTÉ DE FRANCE. ffro me va&eme. 'euaoc&me cS4 ’ie. 1851 a 1853. 4 IP A ili 31 S ^ AU LIEU DES SÉANCES DE LA SOCIETE, SU’ B 00 V1KOX-COLOMBIBB , a4* 1853. DE FRANGE. Séance du 8 novembre 1852. PRÉSIDENCE DE M. d’oMALIUS d’hALLOY. Le président annonce sept présentations. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la partdeM. le ministre delà justice, Journal des savants , juin à octobre 1852 • in -b°. De la part de M. Amand Buvignier, Statistique géologique , minéralogique , minérallurgique et paléontologique du départe- ment de la Meuse; in-8, LI et 694 p., avec un allas de 32 pi. et 52 p. de texte in-f°. Paris, 1852, chez J. -B. Baillière. De la part de M. G. Cotteau, Catalogue méthodique des Echinides recueillis dans l'étage néocomien du département de l'Yonne (extr. du Bull, de la Soc. des sc. historiq, et natur . de l' Yonne, 1851)*, in-8, 14 p. Auxerre, 1851, chez Pcr- riquet. De la part de M. Daubrée, Description géologique et miné- ralogique du département du Bas -Rhin; in-8, 516 p., 5 pi. et carte géologiq. du départ, du Bas-Rhin. Strasbourg, 1852, chez E. Simon. De la part de M. Fournet, Commission hydrométrique de Lyon , 1848 à 1851. Lyon, 1852, chez Barret-, in-f°. De la part deM. Albert Gaudry, Sur l'origine et la formation des silex de la craie et des terrains tertiaires ( Thèse de géol. souten. dev. la Fac. dessc. de Paris , le Gfitill. 1852) • in-4°, 54 p. Paris, 1852, chez Simon Raçon et Gip. De la part de M. Lory, Essai géologique sur le groupe de montagnes de la Grande- Chartreuse 5 partie de l'arrondisse- 6 SÉANCE Dü 8 NOVEMBRE 1852. , nient de Grenoble , comprise entre la cime droite de l’Isère et la frontière de Savoie ; in-8°, 82 p., lpl. Grenoble, 1852. De la part de M. Ch. Marti ns, Coup d’œil sur V histoire des botanistes et du jardin des plantes de Montpellier. — - Discours d’ouverture du cours de botanique médicale , prononcé le 17 avril 1852- in-8, 40 p. Montpellier, 1852. De la partdevM. Victor Simon, A perçu sur la géologie des environs de Sarrelouis , d’ Oberslein et de Berncastel ; in-8, 14 p. Metz, chez Dembour et Gangel. De la part de M. Jules Teissier, Histoire des eaux de Nîmes et de V aqueduc romain du Gard , t. IV, ire part. ; in-8, 328 p. Nîmes, 1852, chez Balliyet et Fabre. De la part de M. V. Thiollière, Sur les gisements à poissons jossiles situés dans le Jura du Bugey , par M. V. Thiollière, et Description de deux reptiles inédits , provenant de ces gisements, par M. H. de Meyer (extr. des Ann. de la Soc. nat. d’agr ., hist. nat. et arts ut. de Lyon , 1848) } in-8, 24 p.} in-4, 80 p., 2 pi. Lyon, 1851, chez Barret. De la part de M. J. Thurmann, Lettres écrites du Jura à la Société d’histoire naturelle de Berne. — Lettre IX. Coup d’œil sur la stratigraphie du groupe portlandien aux environs de Porrentruy (communiqué le 31 juillet 1852) , nos 250 et 251 } in-8, p. 209 à 224. Berne, 1852. De la part de M. le professeur Ansted, Non metallic minerai manufactures ; in-8, 23 p. Londres, 1852. — Report on manufactures in minerai substances (extr. des Reports by the furies ) } gr. in-8, p. 1215 à 1300. Londres, 1852. De la part de M. Murchison, On the meaning, etc. (Du sens des mots « système silurien , » en tant qu’adoptés par les géo- logues de divers pays durant ces dix dernières années) (extr. du Quart, journ. of the geofog. Soc. of Land., vol. VIII, 1852)*, in-8, p. 173 à 184. London, 1852, chez Taylor and Francis. De la part de M. J. Prestwich : 1° On the structure of the strata, etc. (Sur la structure des couches qui se trouvent entre l’argile de Londres et la craie dans les terrains tertiaires de Londres et du Hampshire, ire part.) (extr. du Quart, journ. of SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 7 t fie geo l. Soc. of London , août 1850, vol. VI) ; in-8, 30 p., 1 tableau. 2° On the drift at Sangatte clijf , /?e«r Calais (extr. du Quart, journ. of the geo!. Soc. of London, nov. 1851, vol. VII) -, in-8, 6 p. 3° On the sonie effects of the Holrnfirth Flood (extr. du Quart, iourn. of the geol. Soc. of London , 7 avril 1852, vol. VIII) ; in-8, 6 p. l\° A geological inquiry , etc. (Recherches géologiques sur les couches aquifères des environs de Londres, dans le but spécial de fournir de l’eau à la métropole); in-8, 2û0 p., 1 pl. Londres 1852. De la part de M. Sedgwick, On the slate, etc. (Des roches schisteuses du Devonshire et du Cornouailles) (extr. du Quart . journ . of the geol. Soc. of Lond ., vol. VIII, 1$52); in-8, 10 pages. — On the lower, etc. (Des roches paléozoïques inférieures formant la base de la chaîne carbonifère entre Ravenstonedaîe et Ribblesdale) (extr. du Quart, journ. of the geol. Soc. of Lond., vol. VIII, 1852) ; in-8, p. 35 à 5 h. De la part deM. le marquis Lorenzo Pareto, Délia pnsizione delle roccie pirogene ed eruttive dei periodi terziario , quater- riario ed attuale, in halia ; in-8, 35 p. Gênes. De la part de M. de Hauslab, Le Vernagt Fertier en T y roi, levé pour la carte de V état-major en 1817, par l’enseigne de Hauslab; 1 f. in-fol. De la part de M. Achille de Zigno, Uehersicht, etc. (Coup d’œil sur les groupes stratifiés des Alpes vénitiennes, avec une coupe, présenté à la séance de l’Institut I. géologique, le 16 avril 1850); in-û, 16 p., 1 pl De la part de M. Ch. T. Jackson, Report , etc. (Rapport sur la mine de charbon d’Albert); in-8, /|8 p. New-York, 1851, chez Nesbitt et Cie. De la part de M. Pierre de Cessac, Statistique minéralogi- que et géologique du département delà Creuse , lre part.; in-8, 28 p., 2 tabl. Guéret, 1852, chez Dugenest. De la part de M. A. Gautier, Introduction philosophique à 8 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852, V étude delà géologie; in-8, 292 p. Paris, 1853, chez Victor Masson. De la part de M. Albin Gras, Catalogue des corps organisés fossiles qui se rencontrent dans le département de F Isère; in -8, 54 p., 4 pl. Grenoble, 1852, chez Maisonville. De la part de M. L. de Koninck, Notice sur le genre David- sonia'eftfttr le genre Hypodeina 5 in-8, 16 p., 2pl. Liège, août 1852. De la part de M. le Dr À. Mougeot, Essai d’une flore du nouveau grès rouge des Vosges (extr. des Ann. de la Soc . d’ émulât, des Vosges , t. VII, 1851) 5 in-8, 46 p., 5 pl. Epinal, 1852, chez Ve Gley. De la part de M. Poncelet, Des gîtes ardoisiers de V Ar- denne (extr. des Ann. des trav. publ. de Belgiq. ), lre part., 1er et 2e chap. ; 2 broch. in-8, de 16 et 30 p. Arlon, 18/18 et 1849. De la part deM. le Dr Schmit, Notice sur les eaux thermales de Mondorff et leurs vertus médicales ; in-8, 46 p. Luxem- bourg, 1852, chez J. Lamort. De la part de M. Soleirol, Mémoire sur les carrières des environs de Metz qui fournissent la pierre à chaux hydraulique (extr. des Mém. de V Acad. roy. de Metz , 1846-47) -, in-8, 49 p., 2 pl. Metz, 1847, chez J. Lamort. De la part de M. Bowerbank, On the siliceous , etc. (Des corps siliceux de la craie et d’autres formations, en réplique à M. Toulmin Smith) (extr. des Aimais and magaz. of nat, hist ., 1847)5 in-8, 14 p. — Microscopical , etc. (Observations microscopiques sur la structure des os du Pterodactylas giganteus A d’autres animaux fossiles) (extr. du Quart, journ. oj the geolog . Soc. oj Loiul ., 1848) -, in-8, 9 p., 2 pl. — On a siliceous, etc. (Sur un zoophyte siliceux, Alcyonites parasiticuni) (exlr. du Quart, journ. of the geol. Soc. ofLond.} 1849) 5 in-8, p. 319 à 328, 1 pl. — On the Ptérodactyles, etc. (Des Ptérodactyles de la for- mation calcaire) (extr. des Proceed . of the zool . Soc. ofLond ., 1851) -, in-8, 7 p., 1 pl. De la part de M. Thomas Wright, On the Cassidulidœ , etc. SÉANCE DU 8 NOYIMM 1852, 9 (Des Cassidulides du terrain ooiitliique, avec description de quelques espèces nouvelles de cette famille) (extr. des Ann . and magaz. of nal. hist ., 1851) 5 in-8, 5/i p. , 2 pl. — On the Cidaridœ, etc. (Des Cidaridcs du terrain oolithi- que, avec description de quelques espèces nouvelles de cette famille) (extr. des Ann. and magaz. of nat. hist., 1851) 5 in-8, />0 p., 3 pl. — A stratigraphie a l, etc. (Analyse stratigraphique de la coupe des falaises de Hordwell, de Beacon et de Barton, sur les côtes du Hampshire) (extr. des Ann. and magaz, of nat . hist. , 1851) -, in-8, Ih p. De la part de M. CaH Ehrlich, Geognosliche Vandenm - gen, etc. (Courses géognostiques dans la région N.-O. des Alpes. — Travail spécialement destiné h servir à la connaissance de l’Autriche supérieure) -, in-8, 147 p., 5 pl., et 50 bois intercalés dans le texte. Linz, 1852, chez Jos. Wimmer. De la part de M. CarlFritsch, Kalender , etc. (Calendrier de la flore de l’horizon de Prague, rédigé après dix années d’ob- servations ayant pour objet la végétation)*, in-8, 110 p. 1852. Delà part de M. J. Fr. L. Hausmann, Bemerkungen , etc. (Remarques sur le zirconsyénite) *, in-4, 30 p. Gottingen, 1852. De la part de MM. J. J. Pohî etJ.Schabus : 1° Tafeln , etc. (Table pour la réduction de l’état barométrique de la tempéra- ture normale observée en millimètres, par 0. Celsius), par J. J. Pohl et J. Schabus *, in-8, Zj3 p. (Extr. des Compt. rend, des séances de U- Acad, des sc. de Vienne , classe des sc. math, et nat., février 1852.) 2° Tafeln zur réduction, etc. (Tables de comparaison et de réduction des états barométriques observés suivant différentes mesures), par J. J. Pohl et J. Schabus; in-8, 15 p. (Extr. des Compt. rend, des séances de V Acad, des sc. de Vienne, classe des sc. math, et nat., mars 1852.) De la part de M. Robert W. Gibbes, Mono gr api iy of the fossil Squalidœ of the United-States , n° Il (extr. du Journ. of the Acad, of nat. sc. of Philad. , janv. 1849)* in-li, 18 p., 3 pl. Philadelphie, 18/i9, chez Merrihew et Thompson. 10 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. — New species of Myliobates from the Eocene of South- Carolina , with other généra not heretofore observed in the United- States (extr. du Journ . of the Acad . ofnat. sc. of PhiL, hov. 1849) -, in-4, p. 299 et 300, 1 pi. — A Memoir on Mosasanrus and the three a/lied new généra , Holcodus , Cono saur us and Amphorosteus (Smithsonian contrib. to knowledge , vol. Il); in h, 13 p., 3 pl. Cambridge, chez Metcalf et Cie. De la part de M. Tuomey, Report on the gcology of South- CaroJina ; in -4, 293 et 56 p., 47 fig. et 3 pl. Columbia, 1848, chez A. S. Johnston. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1852, 1er Sem., t. XXXIV, nos 25, 26 et table; 2e sem., t. XXXV, nos 1 à 18. Annales des mines , 4e sér., t. XX, 6e îi vr. de 1851; 5e sêr., t. 1, lre et 2e livr. de 1852. Bulletin de la société de géographie , 4e sér., t. III, nos 16 à 21, avril à septembre 1852. — Liste des membres . L'Institut, 1852, nos 9645983; in-4. Réforme agricole, par M. Nérée Boubée, nos 45 à 48, 5e année, mai à août 1852. Annales scientifiques, littéraires et industrielles de l'Auver- gne, t. XXIV, juillet à décembre 1851. Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse, n° 116, t, XXIV. Mémoires de la Société des sciences , lettres et arts de Nancy , année 1850. Annales de la Société d' agriculture, sciences , arts et com- merce du Puy, t. XV, 2e sem. 1850. Travaux de V Académie de Reims, année 1851-1 852, n° 2, 1er trim. de 1852. Mémoires et publications de la société des sciences , des arts et des lettres du Hainaut, t. X, 1850-52. Mons; in-8. Rapport sur la réunion de la Société d' agriculture du canton deVaud qui a eu lieu à Lavigny, les 18 et 19août 1850 ;in-8, 56 p., 1 pl. Lausanne, 1852, chez Corbaz et RobelJaz. SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 11 Société validais e des sciences naturelles, n° 2 A, t. III, 1851 -, in-8. The Athênœum , 1852, nos12S7 à 1306. The quart. Journ. of the geolog. Soc. of London, vol. VIII, n° 31, août 1852. Report of the 21th meeting of the British association for the advancement of scienca , held at Ipswich in july 1851 ; in-8. Muséum of practical geology and geological Survey. — 1° Records , etc. (Archives de l’Ecole des mines et des sciences appliquées aux arts. — Vol. I, part. lre. — Leçons inaugurales et d’introduction aux cours de la session 1851-52) ; in-8, IZ18 p. Londres, 1852, chez Longman, Brown, Green and Longmans. — 2° Produce , etc. (Produit du minerai de plomb dans le Royaume-Uni, pour les années 18/17, I8Z18 et 1850 ; in-8, Zi, 7 et 7 p. Londres. Transactions of the roy. soc. of Edinburgh , vol. XX, part. III, for the session 1851-1852. — Proceedings of the roy. Soc. of Edinburgh , session 1851-1852. Memorie délia, reale Academia delle scienze di Torino, 2« sér., t. XII, 1852 • in-Zi. Neues Jahrbuch , etc. (Nouvel Annuaire de minéralogie, de géognosie et de géologie, de MM. Leonhard et Bronn), année 1852, 2e, he et 5e cahiers. Abhandlungen , etc. (Mémoires de l’Académie royale des sciences de Berlin), année 1850; in-Zi. — Monatsbericht , etc. (Bulletins mensuels de l’Académie royale des sciences de Berlin), juillet 1851 à juin 1852; in-8. Zeitschrift , etc. (Bulletin de la Société géologique alle- mande), vol. III, Zi* cah.; vol. IV, 1er cah.; août 1851 à jan- vier 1852; in-8. Berlin. Denkschriften , etc. (Mémoires de l’Académie impériale des sciences de Vienne. — Classe des sciences mathématiques et naturelles), IIIe vol., 3e part., 1852 ; in-Zi. — Srtziingsberichte , etc. (Comptes rendus des séances de 1 Académie impériale des sciences de Vienne. — Classe des 12 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 185*2. sciences mathématiques et naturelles), yoI, VIII, cab. 1 à 3, jany. à mars 1852* in-8. Jahrbuch der K. K . geologischen Reichsansta It, (Annuaire de l’Institut I. et R. géologique de l’empire), 2e année, nos 2 à 4, avril à décembre 1851 ; 2e année, nos 3 et 4, juillet à décembre 1850; 3e année, n° 1, janvier à mars 1852; in-4. Vienne. Ferhandlungen , etc. (Mémoires de la Société d’histoire na- turelle de la Prusse rhénane et de la Westphalie, publiés par M. le professeur Budge) , VIIIe année, 1851, 3e et 4e cah.; IXe année, 1852, 1er et 2e cahiers. Erster Bericht , etc. (Premier Bulletin de la Société géologi- que de la Styrie). Gratz, 1852; 1 cah. in-8. Wurtemb . naturwiss. Jalireshefte . (Cahiers annuels de la Société des sciences naturelles de Wurtemberg), 8e année, 1852, 2e cah. Nova acta Acad. C. L. C. naturæ curiosorum , vol. XXIII, dernière partie; in-8. Det kongelige, etc. (Mémoires d’histoire naturelle et de ma- thématiques de l’Académie royale des sciences de Danemark), 5esér., 2e vol., 1851 ; in-4. Copenhague. — - Oversigt , etc. (Comptes rendus des séances de l’Acadé- mie royale des sciences de Danemark), années 1849 à 1851 ; in-8. Copenhague. De la part de l’Institut Smithsonien, Smit/isonian contribu- tions , etc. (Contributions Smithsoniennes pour l’avancement des sciences), vol. III et IV. Washington, 1852; in-4. — Fifih annual report , etc. (Cinquième rapport annuel des régents de l’Institut Smithsonien, pour l’année 1850; in-8, 325 p. Washington, 1851. — Directions , etc. (Instructions sur les moyens de recueillir, conserver et transporter les échantillons d’histoire naturelle) ; in-8, 23 p. Washington, 1852. — Regis ti j, etc. (Tableaux préparés pour l’enregistrement de certains phénomènes périodiques) ; 1 feuille in-4. — List, etc. (Liste des ouvrages publiés par l’Institut Smith- sonien à Washington) ; 1 feuille in-8. 13 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. — List, etc. (Listes des Instituts scientifiques étrangers en correspondance avec l’Institut Smithsonien) 5 1 feuille in-Zi . — Abstract , etc. (Précis du septième recensement de la po- pulation des Etats-Unis) -, 1 feuille in-/i. Philadelphie. — American , etc. (Bibliographie américaine pour l’année 1851 ; ouvrages concernant la zoologie, la botanique et la géo- logie) (extr. de Y Americ . journ. of sc. and arts , 2e série, vol. XIII) -, in-8, 19 p. — A report , etc. (Rapport au ministère de la marine des États-Unis sur les houilles d’Amérique susceptibles d’être employées à la navigation à vapeur et à d’autres services), par M. Walter R. Johnson -, in-8, 629 p., 3 pl. Washington, I8A/1, chez Gales et Seaton. - — On recent improvements , etc. (Des progrès récents des arts chimiques), par MM. James G. Booth et Campbell Morfit-? in-8, 216 p. Washington, 1851. — A report , etc. (Rapport rédigé, sous la direction du pro- fesseur Bâche, par le professeur Mac Culloch, sur la supputation des tables pour les hydrométres adoptés par la douane des Etats-Unis) -, in-8, 168 p., 6 pl. Washington, 1851. — Report of C. Ellet , etc. (Rapport de M. G. Ellet sur le projet d’approfondir le passage à travers la barre à l’embouchure du Mississipi) -, in-8, 18 p. Washington, 1851. — 'Programme of organisation ofthe Smithsonian Institu- tion; 1/2 f. in-8. The American journ. of sciences and arts , by Silliman, 2esér., vol. XIY, n° ZiO, juillet 1852. Proceedings , etc. (Comptes rendus des séances de l’Aca- démie des sciences naturelles de Philadelphie), vol. Y, n°» 9 et 10, 1851 ^ vol. YI, n°l, 1852* in-8. A notice , etc. (Notice sur l’origine, les progrès et l’état présent de l’Académie des sciences naturelles de Philadelphie), par M. Ruschenberger j in-8, 78 p. Philadelphie, 1852, chez Collins. A memoir , etc. (Mémoire sur feu M. S. G. Morton, an- cien président de l’Académie des sciences naturelles de Phila- delphie), par M. G. D. Meigs-, in-8, l\ 8 p. Philadelphie, 1851, chez Collins. SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. U Proceedings , etc. (Comptes rendus de l’Académie américaine des arts et des sciences, yol. II, de mai 1848 à mai 1852) . Bos- ton et Cambridge, 1852. The jour n. o fthe Bombay B ranch of theroy. asiat. Society , janvier 1852. Le Trésorier présente l’état de la caisse du 1er janvier au 31 octobre dernier. Il y avait en caisse au 31 décembre 1851. . 2,932 fr. 95 ç. La recette, depuis le 1er janvier 1 852 jusqu’au 31 octobre, s’élève à 14,708 75 Total. . . 17,641 70 La dépense, depuis le 1 "janvier 1852 jusqu’au 31 octobre, s’élève à. 13,646 30 Il restait en caisse au 31 octobre dernier. . . 3,995 fr. 40 c. M. le secrétaire donne lecture d’une lettre par laquelle M. Boutiot se défend du reproche de n’avoir ni cité, ni discuté le travail de M. Clément Mullet (voy. pages 7, 12, 18, 31 de sa publication) ; il ajoute qu’il pense que M. Clément Mullet a annoncé un fait inexact relativement aux sources de la Barse ( Bulletin , 2e série, t. IX, p. 220). M. Clément Mullet présente, au sujet de cette lettre, les ob- servations suivantes : Je n’abuserai pas des moments de la Société pour discuter de point en point la lettre de M. Boutiot ; ce serait employer inutile- ment un temps précieux. Je dirai seulement que je persiste dans mes idées sur l’origine des sources de la Barse, et ce, d’autant plus que j’ai de nouveau étudié les localités dans une exploration qui fera, j’espère, l’objet d’une communication que M. Boutiot discu- tera comme il l’entendra. Quant à l’approbation que j’aurais donnée aux conclusions et au travail de M. Boutiot, je répondrai que ce dernier n’a tenu aucun compte d’observations que je lui ai adressées de Paris par lettre. J’ai critiqué alors, comme je critique encore aujourd’hui, ses deux coupes : l’une, comme ne donnant qu’une fausse idée du relief du terrain : et l’autre, n’en donnant qu uvizjausse du sol SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 185*2. 15 géologique du département de l’Aube, et répondant mal aux be- soins du texte. Ces deux coupes ont été votées à Troyes en mon absence par une Commission composée d’hommes fort capables dans leurs spécialités, mais peu versés dans la géologie. M. Delesse donne lecture de la lettre suivante, par laquelle le docteur Carrière lui annonce qu’il vient de découvrir la schée - lite dans le gîte métallifère de Fr amont. Mon cher ami, je sais avec quel intérêt vous recevez des nou- velles sur tout ce qui concerne la minéralogie de nos Vosges, je m’empresse donc de vous annoncer que l’exploitation de la mine de pyrites sulfureuses de Framont vient d’amener la découverte d'un minéral jusqu’alors inconnu dans cette localité, la schéelile . Ce minéral s’y montre en beaux cristaux, dans des cavités remplies de chaux fluatée diaphane, incolore ou légèrement verdâtre. La substance qui entoure ces espèces de géodes, et leur sert de gangue ou d’enveloppe immédiate, est une sorte d’halloysite ou argile blanchâtre, happant fortement à la langue, mélangée et pénétrée de pyrite, de fer oligiste, etc. Nos cristaux de schéelite ont pour forme générale un octaèdre aigu à base carrée, produit par la modification bx sur les arêtes des Fig. 1. Fig. 2. Fig. 3. Fig. 4. bases du primitif. Beaucoup de cristaux se présentent sous relie forme simple (fig. 2). Cependant la plupart offrent la trace d’un deuxième octaèdre, placé tangentiellement sur le précédent et qui constitue des troncatures plus ou moins développées sur les arêtes des sommets de ce solide (fig. 3). Ce deuxième octaèdre correspond 16 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. à la modification a27 placée sur les angles solides du primitif. Quel- ques cristaux portent, en outre, sur les angles latéraux, des facettes qui appartiennent à un solide à seize faces, mais à l’état herni- ée Iri que. Ces facettes, en général peu développées , coupent obli- quement les troncatures cfi , et celles-ci présentent souvent, dans toute leur longueur, des stries parallèles à l’arête d’intersection. Elles coupent aussi obliquement les angles latéraux de l’octaè- dre b1, mais il n’en existe que deux sur chacun de ces angles : les modifications correspondantes sur les faces opposées manquent constamment. Enfin, beaucoup de cristaux sont maclés, et présentent, comme indice d’hémitropie, des angles rentrants, placés, soit sur deux angles latéraux opposés, soit sur le milieu même des arêtes latérales. Ces cristaux ont souvent plus d’un centimètre de hauteur, et ne laissent rien à désirer sous le rapport de la perfection des formes et de l’éclat des surfaces. Les mesures que j’ai prises à l’aide du goniomètre de Wollaston m’ont donné pour résultats les valeurs angulaires suivantes, savoir : b 1 sur b1 =1 00° 5' b 1 sur bx en retour = 1 30° 34' bx sur a 2 = 4 40° 3' D’après ces données, les dimensions de la forme primitive (fig. 1) seraient : B : H : : 1 : 2,170. La schéelite de Framont a une couleur qui varie du jaune clair au brun. Elle est translucide ou même transparente : son éclat, vitreux à la surface des cristaux, présente dans la cassure quelque chose d’adamantin qui rappelle l’éclat du plomb carbonaté. Les cristaux paraissent très électriques , car toute poussière s’attache à leur surface. Une pointe d’acier les raie facilement; ils sont ex- trêmement fragiles; leur poussière est blanche. J’ai trouvé leur densité = 6,05. Caractères chimiques. Chalumeau. — Seule, entre les pincettes, la schéelite se décolore au premier coup de feu sans perdre sa transparence, fond ensuite sans difficulté en un verre transparent et incolore. Avec le borax. Dissolution facile, perle incolore et diaphane au feu d’oxydation, même après refroidissement complet; devenant opaque au flambé et prenant alors l’aspect d’un émail blanc de lait. Au feu de réduction, coloration ardoisée très foncée, quand il y a SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 17 line forte proportion de minéral. Le flambé reproduit immédiate- ment la teinte laiteuse blanc mat. Avec sel de phosphore. Dissolution prompte et complète. Verre incolore et diaphane. Au feu d’oxydation, devenant vert bleuâtre : à la flamme intérieure, la réduction s’opère très facilement, et quand la proportion de sebéelite est un tant soit peu considérable, la perle est presque noire. Avec la soude. Fusion en émail blanc. L’acide nitrique l’attaque lentement à froid, et la décompose avec résidu d’acide tungstique jaune-soufre. La liqueur précipite abondamment par l’oxalate d’ammoniaque. La sebéelite de Framont m’a donné à l’analyse la composition suivante : Acide tungstique. . . 80,35 Chaux.. 19,40 99,75 L’existence de la sebéelite dans la mine de Framont est un fait très remarquable au point de vue des circonstances de gise- ment. Ce minéral s’y trouve, en effet, comme un véritable étran- ger, placé hors de ses affinités minéralogiques, c’est-à-dire séparé des espèces avec lesquelles on le trouve ordinairement associé, savoir : l’oxvde d’étain, le wolfram, la pyrite arsenicale, la chaux phos- phatée, le béryl, le mica, etc. En outre, les cristaux de Zinnvald, de Schlaggenwald, ceux de Saxe et même d’Angleterre adhèrent presque toujours à du quartz, et ont pour forme dominante un octaèdre plus obtus que celui de Framont. Les cristaux de cette dernière localité, remarquables par leur transparence, la netteté de leur forme et l’éclat de leurs surfaces, tiennent à une substance argileuse mélangée de pyrites, et sont associés à de la chaux flualée. La cristallisation de la sebéelite a évidemment précédé celle de la chaux fluatée, car les cristaux de celle-ci sont mou- lés sur ceux de sebéelite dont on les sépare avec la plus grande facilité. Je ne terminerai pas cette communication sans vous signaler une circonstance qui m’a frappé dans l’étude des caractères de la sebéelite de Framont: c’est la ressemblance des cristaux de couleur foncée avec certains cristaux düânatase bruns et translucides, pro- venant du Dauphiné. L’analogie d’aspect et de forme est si grande, que je me suis demandé si certains petits cristaux bruns, trouvés Soc. géol., 2e série, tome X. 2 18 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. à Framont il y a quelques années, et rapportés à l’anatase, ne seraient pas tout simplement de la scliéeiite. Les personnes qui possèdent ces cristaux pourront seules en décider. Tels sont, mon cher ami, les résultats de mes recherches sur la schéelite de Framont. Agréez, etc., Dr Carrière. M. Delesse fait observer à cette occasion que la schéelite paraît être, à Framont, dans un gisement assez analogue à celui de Bispberg, en Dalécarlie, dans lequel elle est également associée à des minerais de fer. Il ajoute que, d’après M. Tesche- macher, la schéelite se trouverait aussi dans des blocs volcani- ques de Saint-Michel, aux Açores ( Institut , 1847, n° 714, p. 295). Il résulte donc des faits précédents, que la schéelite peut se rencontrer dans des roches plus récentes que celles dans lesquelles elle a été observée jusqu’à présent. M. le secrétaire présente à la Société un petit fragment qu’on pensait provenir d’une pierre météorique ; ce fragment, qui a été envoyé par M. Watteau, a été détaché d’un morceau de 1 kilogramme trouvé à Valenciennes, prés de la station du che- min de fer et dans un ancien lit de l’Escaut. MM. Delesse et Boubée émettent l’avis que ce fragment ne provient pas d’une pierre météorique, mais que c’est un produit d’usine -, il est très vraisemblable que c’est un speiss provenant du travail du cuivre. M. le secrétaire donne lecture de la lettre suivante, adressée parM. Gabriel Mortillet à M. Eliede Beaumont • Genève, le 7 août 1852. Monsieur, Ne pouvant admettre, d’après les idées généralement reçues en paléontologie, le mélange dans un même terrain des empreintes de plantes de l’époque houillère et des Céphalopodes de l’époque du lias, je me suis rendu plusieurs fois à Petit-Cœur, en Savoie, pour étudier cette localité. J’espérais d’abord expliquer la pré- sence des Bélemnites sous les empreintes de plantes houillères par un plissement. Mais j’ai été forcé de reconnaître, comme l’a fait solennellement la Société géologique de France, que cette expli- cation était impossible. Les empreintes sont positivement hou il- SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 19 lères, et rien que houillères, comme l’ont constaté MM. Ad. Brongniart, Bunbury et Heer. Restait à savoir si les Bélemnites inférieures à ces empreintes n’appartiennent pas à des espèces par- ticulières qu’on pouvait dès lors rencontrer dans l’échelle des ter- rains jusqu’à l’époque houillère. Ces Bélemnites n’avaient jamais été déterminées. Après avoir recueilli un très grand nombre d’échantillons, soit dans les couches immédiatement inférieures aux empreintes végé- tales, soit dans les couches supérieures à ces empreintes, à la car- rière d’ardoises de Naves, j’ai reconnu que les Bélemnites supé- rieures n’appartiennent pas à la même espèce que les bélemnites inférieures. Dans la carrière de Naves , les Bélemnites sont toutes plus ou moins allongées, cylindriques ou pistilliformes. Les alvéoles ou cloisons n’occupent qu’une faible partie des fossiles. Les bé- lemnites inférieures aux empreintes végétales, au contraire, sont toutes très courtes, coniques, et les alvéoles ou cloisons occupent près des deux tiers du fossile. Parmi les Bélemnites supérieures, il y a plusieurs espèces qui se rapportent aux formes du lias, mais qui malheureusement sont toujours trop empâtées pour qu’on puisse les déterminer d’une manière exacte. Les Bélemnites inférieures se rapportent toutes à une seule espèce. Je me suis, après ce premier travail, activement occupé à recueillir des échantillons, afin d’arriver à une détermi- nation ou à une description complète. Mes recherches ont été couronnées de succès. Je suis parvenu à trouver des Bélemnites assez isolées et dégagées pour reconnaître de la manière la plus positive le Belemnitcs acutus de Miller, il ne pouvait plus me rester de doutes ; les couches de Petit-Cœur appartiennent, comme vous l’avez proclamé depuis longtemps, au lias inférieur ; celles de Naves, probablement au lias moyen ou supérieur. Mais s’il avait pu rester le moindre doute, une nouvelle découverte devait le faire disparaître. J’ai trouvé dans les schistes à Bélemnites infé- rieures aux empreintes végétales un fragment d’Ammonite qui se rapporte parfaitement à Y Ammonites bisulcatus de Bruguière, également du lias inférieur. Pour compléter la démonstration , il suffira de savoir que M. Thabuis, pharmacien à Moutiers, a rencontré, dans un même morceau, une empreinte de fougère taiqueuse, en tout semblable aux autres, et une Bélemnite parfaitement reconnaissable par sa cristallisation miroitante et particulière. La grande anomalie paléontologique de l’existence simultanée des animaux liasiques et des végétaux houillère que vous aves; 20 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. reconnue, il y a bien des années, ne saurait donc plus être con- testée maintenant : des faits positifs l’établissent. Agréez, etc. Gabriel Mortillct. Après la lecture de cette lettre, M. Élie de Beaumont trace sur le tableau une coupe représentant la succession des couches qui contiennent alternativement des fossiles et de l’anthracite. Il y a quatre couches avec fossiles, entre lesquelles se trouvent des couches d’anthracite avec empreintes végétales -, les quatre couches avec fossiles s’observent à Petit-Cœur, à Naves, au col de la Magdelaine et au col des Encombres -, dans cette der- nière localité, M. Sismonda a d’ailleurs reconnu des fossiles supérieurs au lias. M. Élie de Beaumont n’entre pas dans de plus grands déve- loppements sur la communication de M. Mortillet, et il se con- tente de faire remarquer que les faits contenus dans la lettre qui vient d’être lue confirment de la manière la plus complète ce qu’il a publié depuis longtemps et ce qui a été observé par M. Brochant il y a plus de cinquante ans. M. Lory lit la note suivante : Note sur les terrains du Dèvoluy [Hautes- Alpes], par M. Ch. Lory. Le Dévokry est un massif de grandes montagnes, placé dans le département des Hautes- Alpes, sur les confins de l’Isère et de la Drôme. Il domine de beaucoup toutes les contrées environnantes. C’estun vaste plateau, très accidenté, limité par des crêtes abruptes, dont l’altitude moyenne est supérieure à 2000 mètres; aux deux extrémités N. et S. du plateau s’élèvent les masses imposantes de l’Obiou et de l’Aurouse , qui atteignent l’un et l’autre environ 2800 mètres. La constitution géologique de cette contrée nous est connue par les travaux de M. Gueymard, et surtout par ceux de M. Elie de Beaumont. Elle se compose principalement de divers étages crétacés ayant pour base le terrain jurassique, qui forme toutes les contrées environnantes. Ces terrains crétacés s’étendent encore un peu vers le midi, à l’E. de Veynes; mais ils ne se rattachent à de grandes masses de même nature que du côté del’O., versle col de la Croix- SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 21 Haute ; ils se lient de ce côté aux grandes masses du Vercors et du Yillard-de-Lans. Dans sa carte géologique des Hautes-Alpes, publiée en 1830, M. Gueymard a colorié comme terrain crétacé tout le massif du Devoluy ; mais il faut remarquer que sous la même teinte et la même dénomination de terrain de grès vert , M. Gueymard réunis- sait alors les divers étages crétacés et le terrain nummulitique ; il y avait évidemment dans sa pensée un rapprochement intime entre les grès nummulitiques d’Aneelle, de Chailliol, etc., et les grès verdâtres qui occupent le centre du Dévoluy. La teinte unique employée par Al. Gueymard correspond, sur la Carte géologique de France , à deux teintes, dont l’une indique avec une parfaite précision l’étendue du terrain nummulitique dans la partie cen- trale du département des Hautes-Alpes, tandis que l’autre est af- fectée aux terrains proprement crétacés des chaînes occidentales. Toutes les crêtes du Dévoluy sont ainsi rapportées par M. Elie de Beaumont aux terrains crétacés inférieurs; mais il en a séparé net- tement les dépôts de grès et les marnes qui occupent l’intérieur du Dévoluy, et il les a figurés comme appartenant aux terrains ter- tiaires moyens. Les premières recherches que je viens de faire dans le Dévoluy m’ont amené à y reconnaître l’existence de couches à Nummulites bien caractérisées; elles reposent sur le terrain crétacé et servent de base à la série des grès tertiaires. En outre, les divers étages crétacés présentent dans ces montagnes des caractères remarqua- bles, sur lesquels je vais d’abord donner quelques détails. Plaçons-nous en premier lieu sur la limite occidentale du Dévo- luy, entre Saint-Julien en Beauchêne et Lus-la-Croix-Haute ; nous y trouverons une série complète d’étages dont les caractères sont nettement tranchés. A Saint-Julien, comme aux environs de Grenoble et dans pres- que tout le Dauphiné, les terrains crétacés reposent sur le calcaire oxfordien, le calcaire de laPorte-de-Francede Grenoble. Ce terrain se voit des deux côtés du Buecli, à Saint-Julien même et en re- montant la vallée jusqu’à moitié chemin de la limite du départe- ment des Hautes-Alpes. Ses couches ont une direction à peu près perpendiculaire à celle de la rivière et de la grande route qui en suit la rive gauche ; elles sont fortement contournées et forment plusieurs plissements successifs très remarquables. Il se compose de calcaire compacte à pâte fine, à cassure plate ou esquilieuse, ayant la teinte et la structure ordinaire du calcaire de la Porte- de-France , et traversé comme lui par de nombreuses veines de 22 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852, calcaire spathique laiteux. Les bancs sont d’épaisseur variable; les plus gros, appartenant à la partie supérieure de l’ensemble, ont une structure b réchifor me très remarquable ; ce sont eux qui four- nissent les pierres de taille et les gros blocs pour l’endiguement du Buech. Les fossiles ne sont pas communs dans ces calcaires ; j’y ai vu seulement des sections de Bélemnites, un fragment d’Ammo- ni te (X plicati lis ?)_ et surtout plusieurs exemplaires cV dp tiens, appartenant aux deux espèces communes, A. lœvis et A . imbricaius. Le calcaire oxfordien s’étend un peu sur les deux rives du Buech, en formant à l’O. les gorges de Vaunières et à l’E. le défilé de l’Etroit, par lequel on entre dans la forêt de Durbon. Il constitue la voûte centrale d’un grand cirque traversé diamétralement par le Buech et partagé ainsi en deux parties, à l’O. le territoire de Vaunières, à l’E. celui de la forêt de Durbon; l’un et l’autre nous présentent, immédiatement au-dessus du calcaire oxfordien, les marnes et calcaires marneux de l’étage néocomien inférieur. Celui-ci a un grand développement et des caractères bien diffé- rents de ceux qu’il offre aux environs de Grenoble; c’est déjà tout à fait le faciès du département des Basses-Alpes. La partie inférieure se compose de marnes bleues à fossiles, avec une profusion de petites Ammonites à l’état de moules pyriteux. M. Alcide d’Orbigny a cité dans son Prodrome un grand nombre d’espèces provenant de cette localité. Puis viennent des calcaires marneux bleuâtres, en couches très uniformes, peu épaisses, compactes, à pâte fine et homogène ; ils alternent dans le bas avec les marnes, mais dominent complètement dans la partie supérieure de l’étage. On y trouve aussi beaucoup d’Ammonites à l’état de moules calcaires; elles sont en partie les mêmes que dans les marnes, mais les individus y sont plus grands ; de plus, on y trouve le Crioceras Duvalii et le Terebratula clip hyoïdes . L’ensemble de l’étage néocomien inférieur est très développé aux environs de Saint- Julien ; il forme les grandes pentes des mon- tagnes et leur imprime leur physionomie caractéristique ; de grandes combes sont creusées dans ces couches marneuses, et telle est surtout celle qui renferme la belle forêt de Durbon. L’étage néocomien supérieur est au contraire incomparablement moins développé que celui du Villard-de-Lans et du Vercors ; et il en diffère totalement par l’ensemble de ses caractères. On ne trouve plus ici le calcaire compacte, blanc ou jaunâtre à capro- tines; je n’ai aperçu aucune trace de ces fossiles. L’étage néoco- mien supérieur se compose de couches généralement peu épaisses, de caractères très variables : les unes sont des calcaires grenus, gri- 23 SÉANCE 1)U 8 NOVEMBRE 1852. sâtres, contenant souvent des rognons et des veines de silex ; ils ressemblent à des grès, et beaucoup d’entre eux sont remarquables parleur grande densité. Ce caractère, et leur structure, leur aspect rugueux, peuvent faire supposer qu’ils sont magnésiens; et en effet, ils renferment souvent une forte proportion de magnésie ; d’autres sont des calcaires également grenus, ou suboolitiques, pétris de débris atténués de divers fossiles, tout à fait méconnaissables. On y distingue seulement des débris d’Encrines, de petits Bryozoaires, de diverses Térébratules ; et le seul fossile qu’on puisse citer comme bien caractéristique par sa constance et son abondance extrême, c’est cette petite Orbitolite conique que l’on rencontre partout dans le terrain néocomien du département de l’Isère. Dans celui- ci, elle caractérise deux couches, placées, l’une dans la partie supérieure des calcaires à Caprotines, l’autre immédiatement au- dessus de ces mêmes calcaires. Ainsi, les couches qui forment l’étage néocomien supérieur à Saint-Julien en Beauchêne parais- sent correspondre surtout à ces minces assises à Ürbitolites, tandis que la grande masse des calcaires à Caprotines du Villard-de- Lans ou de la Chartreuse ne serait représentée ici que d’une ma- nière rudimentaire par des couches d’un aspect tout différent. On trouve aussi, intercalées dans ces calcaires de l’étage néoco- mien supérieur, quelques petites couches de marnes, de teintes plus foncées, souvent d’un noir bleuâtre ; sur la rive droite du Buech, j’y ai recueilli la Rhynchonella lata d’Orbigny, qui existe aussi dans les couches calcaires, et des fragments de Bélemnites (probablement le B. semi-canaliculatus ), qui indiquent un passage de cet étage au suivant. L’ensemble des calcaires néocomiens supérieurs est peu puissant et a tout au plus 100 mètres d’épaisseur. Aussi cet étage ne donne point lieu à ces grands rochers abrupts, si caractérisés dans les au- tres contrées; il ne forme que des crêtes peu saillantes, déchique- tées irrégulièrement. Telle est la crête qui règne entre la combe de Durbon et celle de Rioufroid, ou bien encore celle qui sépare la combe de Vaunières de celle du Rose, sur la rive droite du Buech. Les couches qui forment ces crêtes néocomiennes se voient sur la grande route, au point où elle traverse le Buech, à un kilo- mètre en aval de la limite du département des Hautes-Alpes. Sur les calcaires néocomiens supérieurs vient une assise de marnes bleues, schistoïdes et friables, plus foncées que les marnes néocomiennes inférieures, moins calcaires et souvent sableuses; elles sont entremêlées, surtout dans leur partie supérieure, de cou- ches tout à fait sableuses, de petits lits de grès jaunâtres. On y SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 2 h trouve beaucoup cle nodules pyriteux et une assez grande quan- tité de Bclemnitcs semi-canaliculatus ; j’y ai vu aussi une Ammo- nite à l’état pyriteux, mais indéterminable. Quoi qu’il en soit, il est clair qu’en vertu de leurs caractères et de leur position immé- diatement au-dessus du terrain néocomien , ces marnes bleues représentent les marnes d’Apt, les argiles à Plicatules ou l’étage aptien de M. d’Orbigny. Cet étage, qui n’existe pas aux environs de Grenoble, qui est représenté tout au plus d’une manière rudi- mentaire par une partie des marnes du Rimet et des Havix, près le Yillard-de-Lans, se montre ici avec un grand développement, une puissance plus grande que celle de l’étage néocomien supé- rieur. Les marnes aptiennes forment, près de Saint-Julien en Beauchêne, la combe du Rose, séparée de Vaunières par un crêt néocomien supérieur et du val de Lus par un autre crêt bien plus marqué encore, constitué par l’ensemble des étages suivants. On retrouve ces mêmes marnes au fond de la gorge de Rioufroid, sur le prolongement de la direction des couches du Rose. Dans l’intervalle, et en général sur beaucoup de points, la puissance des marnes aptiennes peut sembler très variable, souvent réduite pres- que à rien ; mais ces variations s’expliquent par les compressions inégales, les écrasements plus ou moins énergiques qu’elles ont éprouvés dans le soulèvement. Les étages que nous venons d’énumérer s’observent des deux côtés du cours du Buech qui coupe leurs couches à peu près per- pendiculairement à la direction, entre Saint-Julien et la limite du département de la Drôme. Si l’on continue à remonter le Buech depuis ce dernier point jusqu’à Lus, on traverse le reste de la série des étages crétacés. On rencontre alors une énorme épaisseur de couches, comprenant des grès, des calcaires à pâte fine, avec grains verts, des calcaires sableux ou marneux, en couches minces , enfin des calcaires siliceux avec des veines et des rognons de silex qui deviennent de plus en plus abondants, à mesure qu’on avance dans la série. Je n’ai trouvé dans ces couches aucun fossile carac- téristique ; mais par sa position, ses caractères strati graphiques et minéralogiques, ce système paraît bien représenter le prolonge- ment amplifié des lanzes et des calcaires à silex du Yillard-de- Lans ; et par suite on est porté à croire qu’il correspond à la craie tuffeau et à la craie blanche. Les couches tout à fait supérieures, qui forment les parois du bassin tertiaire de Lus, renferment de grandes huîtres, comme au Yillard-de-Lans. Telle est donc la série des étages crétacés qui se présentent entre Lus et Saint-Julien en Beauchêne : l’étage néocomien inférieur, SÉANCE EU 8 NOVEMBRE 1852. 25 très développé, avec le faciès des Basses-Alpes ; l’étage néocomien supérieur, très peu développé relativement, ne contenant plus de Caprotines et caractérisé seulement parles Orbitolites ; l’étage des marnes aptiennes, d’autant plus développé que le précédent est plus réduit; enfin une longue série de couches dont la base répond peut-être au gault, mais qui doivent représenter surtout la craie tuffeau, probablement aussi la craie blanche, avec des caractères minéralogiques tout semblables à ceux qu’elles ont près de Gre- noble, plus puissantes seulement, et formées de roches encore plus dures et plus résistantes. Eu raison de leur dureté, de l’énorme épaisseur de leur ensemble, qui est de plusieurs centaines de mètres, ce système de couches forme tous les grands rochers de la contrée, et les crêtes constituées par les calcaires néocomiens supérieurs ne leur sont nullement comparables. l e val de Lus, dont les parois sont formées par les couches cré- tacées supérieures, plongeant de toutes parts vers son intérieur, est rempli, comme on le sait, par une formation tertiaire de sables et argiles bigarrées, avec calcaires siliceux, qui paraissent d’origine lacustre. L’âge de ces dépôts n’est peut-être pas encore très-bien établi ; cependant il est bien probable qu’ils correspondent à une des assises inférieures des terrains tertiaires moyens ; et c’est, en effet, parmi ces derniers qu’ils sont classés sur la Carte géologique clc France. Si l’on passe de Saint-Julien en Beauchêne aux environs de Yeynes, on y retrouve la même série d’étages crétacés et le même terrain tertiaire. Yeynes est sur l’étage oxfordien ; en sortant du bourg par la route de Gap, on ne tarde pas à apercevoir sur la gauche les marnes et calcaires marneux du terrain néocomien in- férieur, puis l’étage supérieur très peu développé, les marnes aptiennes, enfin la grande masse rocheuse qui répond à la craie et dont on peut étudier la coupe en quittant la route de Gap, à l’au- berge de la Madeleine, pour prendre le chemin qui mène en Dé- voluy. La craie tuffeau présente principalement des grès et des calcaires très sableux, chlorités, ou l’on trouve des fossiles et sur- tout X Ostrea cohunba qui y est très abondante ; il y a des couches remplies de ces fossiles, avec lesquels se montre aussi F O. bi-auri- c u la ta. Les assises supérieures delà craie sont pétries de silex; souvent bréchiformes, de teintes diverses, généralement grisâtres; je n’y ai vu aucun fossile. Sur un point, on rencontre encore, au-dessus de ces masses siliceuses, une assise de grès calcaire d’un gris foncé, dur, homogène, exploité comme pierre de taille; il semble indé* 26 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. pendant des couches crétacées sur lesquelles il repose ; mais je n’y ai point aperçu de fossiles et je ne puis par conséquent émettre sur son âge aucune opinion certaine ; je dirai seulement que par son aspect il ressemble beaucoup aux grès à Numnudites que nous allons signaler tout à l’heure dans le Dévoluy. Quoi qu’il en soit, cette assise de grès ne subsiste que sur une faible étendue; elle paraît avoir été, en général, enlevée par la dénudation avec la partie supérieure de la craie, avant le dépôt du terrain tertiaire qui les recouvre indifféremment. Celui-ci consiste en argiles bigarrées, souvent endurcies, empâtant des silex et des fragments de roches crétacées, puis en masses de sables et d’argiles plus pures, toujours de teintes vives, comme les dépôts analogues de Lus, delà Baume* Cornillane près Crest (Drôme), etc. Ce terrain est bien développé sur la rive droite delà Béous, jusqu’à l’entrée des gorges de Vaux ; il se montre encore dans un autre pli concave des couches créta- cées, derrière le village de Montmaur; et là il est recouvert par une masse de nagelflue tout semblable à celui de Proveysieux, près Grenoble. Comme ce dernier, le nagelflue de Montmaur se compose de cailloux parfaitement arrondis, mêlés de sables et de graviers fins, fortement cimentés par du calcaire et formant des couches assez nettes, où les cailloux sont généralement triés d’après leur grosseur; des lits composés presque entièrement de sables fins alternent avec des lits de graviers et d’autres de gros cailloux. Les plus gros cailloux et les plus abondants sont des roches appar- tenant aux divers terrains des Hautes-Alpes, jusqu’au terrain num- muli tique inclusivement; mais parmi les petits cailloux, il y a, comme dans le nagelflue de Proveysieux, des jaspes rouges et verts, des porphyres quartzifères, étrangers aux Alpes et venant probablement des montagnes plus anciennes de la rive droite du Rhône. Je n’ai point aperçu de fossiles dans ces poudingues; cependant je suppose qu’ils appartiennent à l’étage de lamollasse. Leurs couchés forment un pli concave très prononcé; à l’O. elles s’appuient, sans différence bien sensible d’inclinaison, sur le ter- rain des argiles et des sables bigarrés; à l’E. elles reposent immé- diatement sur les calcaires siliceux de la craie. Cette superposition indifférente montre que le nagelflue de Montmaur est un terrain distinct et indépendant de celui des argiles et sables bigarrés; la même indépendance existe, comme on le sait, entre la mollasse et ce dernier terrain, dans le département de la Drôme (1 ). (1) Yoy. la Statistique géologique de la Brome , par M. Sc. Gras. Je signalerai en passant, à ce même village de Montmaur, un autre SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 27 De Montmaur on pénètre dans le Dévoluy en remontant la Béous, à travers le cirque de Vaux. On retrouve dans ce cirque les mêmes étages crétacés qu’à Saint-Julien en Beauchêne : les grandes roches de l’enceinte extérieure sont formées par la craie ; au-dessous on aperçoit les marnes aptiennes, avec Bclemnitcs semi - canaliculatas , l’étage néocomien supérieur peu puissant, composé de calcaires grenus, souvent suhoolitiques, alternant avec de minces couches de marnes d’un bleu noir; il est toujours caractérisé par une grande abondance d’Orbitolites. Enfin au centre du cirque apparaissent les calcaires marneux et les marnes de l’étage néoco- mien inférieur, avec leurs Ammonites caractéristiques. À l’issue supérieure du cirque de Vaux, on rencontre, sur les calcaires à silex de la craie, des masses de conglomérats, puis des grès verdâtres, formant la base d’une puissante série de grès et de marnes tertiaires. Ces dépôts remplissent toute la vallée occiden- tale du Dévoluy, comprenant les hameaux des Rabions, de la Cluse, des Garcins, d’Agnères, etc., jusqu’à Saint-Didier. Sur ce trajet, le terrain tertiaire est seulement emporté de distance en sujet d’observation : c’est une très belle digue de débris erratiques, de plus d’un kilomètre de long, affectant la forme d’une moraine termi- nale. En face de Montmaur, la grande route de Veynes à Gap prend une direction de l’O. à l’E. qui, étant prolongée, passerait par la Roche-des-Arnauds, Gap, la Bâtie et Chorges, et viendrait rencontrer la vallée de la Durance un peu au-dessous d’Embrun. Celte direction est celle d’une large échancrure, une des plus continues et des mieux marquées du département des Hautes-Alpes, au bout de laquelle on aperçoit en plein les hautes montagnes de l’Embrunais : c’était le dé- bouché naturel des débris erratiques provenant de ces montagnes. Aussi se sont-ils accumulés sur ce point, un peu en amont du coude que la vallée du Buech forme en tournant vers Veynes, et ils ont formé une digue puissante, allongée du N. au S., en travers de la vallée d’amont. Cette digue est visiblement concave du côté d’amont ; au N., elle s'appuie contre les rochers de Montmaur; au S., elle a été empor- tée par le Buech. Elle sert de rempart contre les ravages de la Béous, dont elle borde la rive gauche. Les débris erratiques dont elle se com- pose sont de diverse nature et de toute grosseur; il y a des roches cristallines, mais surtout beaucoup de roches du terrain jurassique et du terrain nummulitique ; les gros blocs sont presque tous de grès nummulitique. Les cailloux et blocs de calcaires compactes sont tous . frottés, polis et striés. En amont de cette digue principale, on distingue les restes de deux autres, moins continues, séparées de la première par des intervalles plans ; une d’elles forme une butte isolée sur laquelle s’élève une chapelle. 28 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. distance, ou simplement masqué par l’énorme accumulation de débris provenant du mont Aurouse. A la Cluse on observe encore une coupe très nette de la série des étages crétacés. L’étage néocomien inférieur y est encore très puissant et conforme au type de Saint-Julien ; l’étage néocomien supérieur n’a pas 50 mètres d’épaisseur; il est formé surtout de calcaires grenus , de teintes diverses, claires ou foncées ; beau- coup d’entre eux sont remplis de débris atténués de coquilles , d’Encrines, de petits polypiers ; les dernières couches sont bréclii- formes, noduleuses, et renferment beaucoup d’Orbitolites, avec de petits Bryozoaires et le B clc milite s semi-canaliculatiis. Immédiate- ment au-dessus vient l’assise des marnes aptiennes, d’un bleu foncé, avec beaucoup de Bclcmnites se ni i-c an a l ica l a tus et quelques Ammonites à l’état de moules pyriteux, indéterminables. Elles al- ternent avec quelques minces couches sableuses et passent, par des couches de ce genre, aux grès et calcaires sableux de la craie tuf- feau. Rien ne paraît ici représenter le gault. La craie se compose d’une immense série de couchesdures, peu épaisses, où les rognons de silex deviennent de plus en plus multipliés dans la partie su- périeure. De la Cluse à Saint-Didier on ne rencontre que les grès et les marnes tertiaires, tandis que les roches crétacées s’écartent à gau- che et adroite pour former les montagnes qui environnent le bassin d’Agnères. Les formations tertiaires prennent un grand dévelop- pement dans cette direction ; et à Saint-Didier elles reposent sur les roches de la Baume, gorge qui sert d’issue aux eaux de la Sou- loize et par laquelle on descend de Saint-Didier à Corps. La série de ces roches peut être facilement étudiée dans les escar- pements de la rive gauche du torrent. Leur masse principale con- siste en une énorme série de couches très régulières, d’une épaisseur à peu près uniforme , de 2 décimètres environ , renfermant de nombreux lits de rognons siliceux ; elles sont formées elles-mêmes d’un calcaire gris foncé, intimement pénétré de silice. Ces roches paraissent entièrement dépourvues de fossiles; dans l’état cictuel il nous semble difficile d’assigner positivement l’étage crétacé qu’elles représentent. Cependant, si l’on procède par comparaison avec les localités que nous avons décrites jusqu’ici, on sera porté à penser que cette grande masse de calcaires à silex ne peut correspondre au terrain néocornien, qu’elle représente seulement les étages supé- rieurs au gault. Mais correspond-elle seulement à la craie tuffeau, ou à l’ensemble de la craie tuffeau et de la craie blanche? c’est une SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. âD question dont la solution me semble difficile en ce moment et ré- clame de nouvelles observations. Nous ne préjugerons donc rien sur l’age précis de ces calcaires à silex , qui paraissent constituer les sommets de toutes les grandes montagnes du Dévoluy* Mais au-dessus de cette masse de calcaires à silex il y a une série d’autres coucliesbien distinctes, plus nettement caractérisées. Si l’on gravit les pentes formées par ces roches sur la rive gauche de la Souloize, on voit d’abord, immédiatement sur le calcaire à silex, un conglomérat grossier, formé en grande partie de silex, entiers ou brisés, unis par un ciment silicéo-calcaire ; ce conglomérat devient bientôt moins grossier et l’on commence à y apercevoir des Nummulites, dans des couches qui sont encore pétries de fragments de silex. Bientôt à ce conglomérat succède un grès à ciment calcaire, ou un calcaire sableux, dont les couches sont remplies de Nummulites ; puis vient une longue série de couches calcaires, d’un gris foncé, presque noir, de plus en plus compactes, où les Nummulites sont moins abondantes, mais se retrouvent encore çà et là. On suit ces couches supérieures des calcaires nummulitiques sur les plateaux inclinés qui couronnent les escarpements des deux rives de la Souloize ; et l’on s’assure ainsi que le calcaire nummulitique s’élève, sur la rive gauche, vers les pentes de l’Obion et s’avance au delà de la limite du dé- partement des Hautes-Alpes; que de l’autre côté il forme l’arête culminante de la crête qui sépare Saint-Didier de la commune du Monestier-d’Ambel (Isère). Sur ces points, d’ailleurs, ses couches sont parallèles à celles delà craie à silex sur laquelle il repose. Voilà donc, au-dessus du terrain crétacé, le terrain nummuli- tique bien caractérisé ; et les dernières couches des calcaires à Num- mulites plongent, au village même de Saint-Didier, sous la masse des grès et des argiles tertiaires. Il est naturel de rechercher si une partie de ces grès et de ces argiles n’appartiendrait pas aussi au terrain nummulitique. Si depuis le village de Saint-Didier on suit les couches supé- rieures des calcaires à Nummulites, sur la rive droite de la Sou- loize, on reconnaît qu’il existe une liaison intime entre ces cal- caires et les grès qui les recouvrent. Les couches supérieures des calcaires sont noires, compactes, d’un grain fin ; elles renferment quelques fossiles bivalves, peu déterminables, surtout des peignes. Sur elles reposent immédiatement les premières couches de grès, et l’on peut observer le contact des deux étages, de la manière la plus nette, sur tout le penchant de la montagne ; la ligne de sépa- ration est constamment mise à découvert dans un ravin, où on la 30 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. suit pas à pas : les couelies cle grès sont parfaitement parallèles aux couches de calcaire à Nummulites; la stratification est tout à fait concordante. D’abord vient un grès quartzeux assez grossier, peu épais, puis une assise de grès micacé, schisteux, à grain fin. Ces grès sont remplis d’empreintes végétales et contiennent des traces de lignite ; il y a quelques empreintes semblables et des veinules de lignite dans la dernière couche de calcaire. La liaison paraît donc intime entre ces deux formations. Le grès schisteux micacé est recouvert par des grès plus durs, gris ou verdâtres : ceux-ci le sont par une petite assise de marnes bigarrées, vertes ou violacées, puis par une nouvelle série de grès analogues aux premiers. Le tout plonge au S. et forme, en face de Saint-Didier, une colline élevée sur laquelle est une ancienne chapelle. Plus loin encore, dans la même direction, on aperçoit une deuxième assise de marnes violacées, bien plus puissante que la première, couronnée par une autre masse de grès qui ressemble à la mollasse. Les calcaires à Nummulites du Dévoluy n’avaient pas été dis- tingués jusqu’ici des calcaires crétacés sur lesquels ils reposent, et ils se trouvent ainsi réunis avec eux sous la même teinte sur la Carte géologique de France ; d’autre part, tous les grès tertiaires dont nous venons de parler sont indiqués comme appartenant au terrain tertiaire moyen. D’après les faits que je viens d’exposer, je suis porté à croire que la majeure partie de ces grès peut être regardée comme appartenant au terrain nummulitique, comme représentant l’étage du fîysch ou des grès à Fuçoïdes . Mais rien ne prouve jusqu’ici qu’on doive rapporter à cet étage tout l’ensemble des dépôts tertiaires qui forment le fond du Dévoluy ; leurs assises supérieures peuvent encore correspondre aux dépôts miocènes lacustres de Lus et de la partie basse de la Drôme, dont nous avons signalé plus haut les analogues près de Veynes et de Montmaur; peut-être même, comme le nagelflue de cette dernière localité, les dernières assises de ces grès pourraient être rapportées à l’étage de la mollasse. Jusqu’ici toute cette masse de grès et de marnes m’a paru dépourvue de fossiles; mais j’espère trouver dans les carac- tères stratigraphiques le moyen de distinguer, s’il y a lieu, les trois étages tertiaires qui existent certainement, sinon dans le Dévoluy, au moins dans les contrées qui s’y rattachent immédia- tement. Dans tous les cas, les dépôts miocènes me paraissent ne pouvoir se rencontrer que dans la vallée occidentale du Dévoluy, qui s’étend de Saint-Didier aux Rabions, par Agnères et la Cluse. Quant aux couches figurées comme miocènes sur la Carte géo ■* SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 31 logique de France , au S.-E. de Saint-Etienne, je les regarde comme appartenant en entier au terrain nummulitique. En effet, le calcaire à Nummulites se relève et reparaît avec toute sa puissance dans le chaînon central du Dévoluy, qui sépare le bassin de Saint-Didier de celui de Saint-Etienne. Les Nummu- lites abondent sur plusieurs points du trajet entre ces deux villages, par exemple sous le vieux château de Malemort, et à quelques pas en aval du pont sur la Souloize. Les roches crétacées apparaissent au-dessous, dans le fond des gorges où roule ce torrent; mais sur le chemin même, on ne les aperçoit que sur une faible étendue. Les calcaires à Nummulites continuent jusqu’à Saint-Etienne, et üs forment les parois du bassin occupé par les divers hameaux de cette commune. A l’extrémité méridionale de la vallée, ils s’élè- vent avec une forte inclinaison vers le col de Rabou; là j’ai observé leurs assises supérieures, remplies encore de Nummulites dans certaines couches ; on y trouve aussi une espèce de Peigne très abondante. Ces mêmes Peignes sont encore plus communs dans une couche de calcaire marneux reposant sur ces calcaires durs ; ils sont accompagnés de plusieurs autres bivalves, et j’y ai trouvé aussi un Nautile, le tout dans un mauvais état de conservation. La couche qui les renferme établit un passage entre les calcaires à Nummulites et une assise puissante de marnes feuilletées, noires, bitumineuses, renfermant beaucoup de pyrites. Ces marnes ont un grand développement, tandis qu’elles n’existent pas à Saint- Didier; à leur partie supérieure elles deviennent sableuses et ren- ferment des veinules de lignite ; on y a recherché,' mais sans suc- cès, une couche de ce combustible. Elles forment la partie du bassin située sur la rive droite de la Souloize; dans le lit de cette rivière et sur la rive gauche, on retrouve le grès à empreintes végétales, avec de nombreuses petites veines de lignite, des grès micacés schisteux, enfin des grès plus durs par-dessus, absolument comme à Saint-Didier; mais les assises supérieures de grès et de marnes de cette dernière localité, celles qui peuvent appartenir aux terrains miocènes, n’existent pas dans la vallée de Saint- Etienne. En résumé, le terrain nummulitique existe dans le Dévoluy, et il paraît s’y composer, comme ailleurs, de deux étages : 1° Étage des grès et calcaires ci Nummulites , commençant par des conglomérats et grès grossiers, puis offrant une série de cal- caires sableux, de calcaires compactes, le tout d’un gris noir, sans rognons de silex, sauf les silex crétacés empâtés dans les conglo- mérats inférieurs.— -Il forme le chaînon central du Dévoluy, entre 32 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 185*2. Saint-Étienne et Saint-Didier, et s’élève à de grandes hauteurs sur les flancs des montagnes qui entourent ces deux villages. La saison trop avancée ne m’a pas permis d’explorer les régions élevées de ces montagnes, les cimes de FAurouse ou de FOhiou, par exemple ; et je ne saurais par conséquent indiquer jusqu’à quelle hauteur on le rencontre. Sur les points que j’ai visités, les couches à Nuininu- lites m’ont paru sensiblement parallèles aux couches crétacées sur lesquelles elles reposent. Mais d’autre part toutes les grandes crêtes paraissent formées exclusivement de calcaires à silex; M. Elle de Beaumont n’a rencontré que ce terrain sur la cime du mont Au- rouse; et il faudrait en conclure, avec l’illustre géologue, que le premier soulèvement des chaînes crétacées du Dévoluy est anté- rieur ail dépôt du terrain nummulitique. 2® Etage des grès à empreintes végétales et a lignites. — - Il pré- sente, au S.-E. de Saint-Etienne seulement, une assise inférieure de marnes feuilletées bitumineuses, puis une série de grès remplis d’empreintes végétales, en lin des grès plus ou moins analogues à la mollasse, mais généralement plus durs, alternant avec quelques petites assises de marnes vertes ou violacées. Cet ensemble nous paraît représenter l’étage du flysch ou grès a Fucoïdes; la partie supérieure seulement, composée principalement de marnes viola- cées et de grès plus tendres, appartiendrait peut-être aux terrains miocènes. Les crêtes escarpées qui environnent de toutes parts le Dévoluy sont toutes formées principalement par cette grande masse de cal- caires à silex dont nous avons déjà parlé. Les étages crétacés infé- rieurs paraissent manquer dans toute la partie orientale du Dévo- luy. Nous avons vu ci-dessus qu’à la Cluse, et en général dans tout le bassin de la Béous, on trouvait encore la série crétacée à peu près complète : étage néocomien inférieur, idem supérieur presque rudimentaire, marnes aptiennes, craie chloritée et craie à silex ; mais il n’en est plus ainsi dans les crêtes qui regardent le bassin du Di ac. Quand on descend de Saint-Didier à Corps par la gorge de la Baume, on traverse d’abord, comme nous l’avons dit, les cou- ches des calcaires à Nummulites et celles des calcaires crétacés à silex, qui sont faiblement inclinées et sensiblement parallèles entre elles; mais bien avant d’arriver à la Posterle, sur la rive gauche, ou au Monestier-d’Ambel, sur la rive droite, on rencontre immé- diatement le terrain jurassique, en couches fortement redressées. Quoique les débris accumulés au pied des rochers crétacés em- pêchent de voir nettement le contact, il serait difficile de ne pas admettre que les calcaires à silex reposent ici directement sur les SÉANCE T) U 8 NOVEMBRE 1852. 33 tranches des couches jurassiques. Le fait se présente du reste avec plus d’évidence au col du Noyer, par lequel on communique de Saint-Etienne à Saint-Bonnet : c’est un ruz ouvert perpendicu- lairement aux couches des calcaires à silex, qui vont en diminuant d’inclinaison et deviennent presque horizontales au sommet du col; là on voit manifestement qu’elles reposent, sans intermé- diaire, sur les tranches des couches fortement redressées de l’étage oxfordien. Tels sont les principaux résultats que m’a permis de recueillir une première exploration du Dévoluy, malheureusement trop tardive et bien incomplète ; il reste encore, comme on le voit, beaucoup de points à éclaircir, et j’y consacrerai mes elïorts pen- dant la saison prochaine. Mais puisque j’ai eu à signaler ici l’exis- tence du terrain nummuli tique dans une région où il n’avait pas encore été reconnu, j’en prendrai occasion pour dire encore un mot sur le terrain nummulitique des Hautes-Alpes en général. J’ai revu cette année les montagnes de Chailliol, Champoléon, An- cel le ; j’ai visité celles qui entourent Embrun, l’Argentière ; et partout j’ai pu constater la parfaite exactitude de la Carte géolo- gique de France dans le tracé de la ligne séparative entre le ter- rain jurassique et le terrain nummulitique, toujours manifeste- ment discordants entre eux. Je ne puis donc que confirmer les remarques que j’ai présentées à ce sujet, au mois de janvier der- nier; et, malgré le grand intérêt qu’offrent les observations de M. Rozet, je persiste à croire que c’est par suite de quelque con- fusion qu’il a été conduit à rapporter au terrain jurassique la plu- part des masses indiquées comme faisant partie du terrain num- mulitique. Il y a sans doute dans la Carte géologique de France quelques omissions de détail, comme celle du terrain nummuli- tique dans le Dévoluy; mais plus on étudie les Alpes françaises, plus on a lieu de reconnaître l’admirable sûreté de vues qui a présidé au classement de toutes les grandes masses de ce vaste ensemble. M. Alb. Gaudry donne lecture de la note suivante : Sur le terrain houiller tV HiUsboro [Nouveau-Brunswick) , par M. Jackson. (Extrait par M. Albert Gaudry.) Dans une mine appelée Hillsboro (province d’Albert, Nouveau- Brunswick), s’exploite un combustible que sa grande richesse en Soc. géoli. 2e série, tome X. 3 3â SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. bitume avait fait classer parmi les asphaltes. Ou le regardait comme disposé en filons dans des roches d’un âge antérieur à la formation carbonifère. Cette hypothèse était confirmée par l’exa- men des blocs brisés que, dans leur langage vulgaire, les mineurs du pays appellent les chevaux ( /torses ) : les chevaux devaient être des débris garnissant les parois de fissures devenues plus tard des filons. Dans un travail intitulé : ReporPon the Albert coal mine (1851), M. Charles Jackson vient d’émettre, sur la mine d’Hillshoro, une opinion nouvelle : le combustible de cette mine ne serait qu’une houille d’une richesse exceptionnelle en bitume; de là, au point de vue pratique, cette conséquence de haute valeur : il ne peut, A moins de fraude dans le commerce , être employé comme asphalte. L’opinion de M. Jackson a été confirmée par de nombreux rap- ports : tels soiît ceux de MM. Percival, de New-Haven; Auguste Hayes, State assayer of Massachusetts; John Bacon, de Boston; James Chilton, de New-York; Georges Hudson, de Liverpool; Frederick Penney, de Glasgow ; Silliman, de New -York; et Silli- man, de New-Haven, etc. (1). Nous allons résumer dans une esquisse rapide les différents rapports faits sur la mine d’Hillsboro. Le combustible d’Hillsboro n’est point un asphalte formant filon dans des roches antérieures à la période houillère. C’est un charbon différant seulement des houilles ordinaires par une très grande richesse en bitume. Il forme une couche stratifiée, et cette couche est subordonnée à des grès de la période houillère. La preuve de cette assertion devra, comme on le voit, poser sur trois points : 1° Sur l’âge géologique des roches dans lesquelles le combus- tible se trouve ; 2° Sur le mode suivant lequel il est intercalé dans ces roches ; 3° Sur sa composition intime. 1° Age géologique des roches dans lesquelles se trouve le combus- tible. — Voici, d’une manière générale, la disposition des couches aux environs d’Hillshoro. (1) Une cour de justice a même été convoquée dans le but d’exa- miner la question en litige» et l’opinion de M. Jackson a été adoptée par la cour. SÉANCE ou 8 novembre 185£. 55 1. Syénitc. 2. Novaculite et schistes métamorphiques. 3. Conglomérat supérieur. 4. Grès gris exploité comme pierre de taille. 5. Conglomérat supérieur. 6. Calcaire gris. 7. Gypse. 8. Grès gris rempli de Calamites. 9. Schiste bitumineux renfermant du charbon bitumineux, des plantes et des poissons, 10. Grès gris avec Calamites. 11. Schistes charbonneux avec écailles de poissons. Comme on le voit, les couches qui renferment la houille bitu- mineuse sont supérieures à celles de la formation du gypse. Le gypse forme des escarpements de 30 pieds de hauteur; il est ex- ploité en grandes carrières ; sa blancheur égale celle de la neige ; il est dépourvu de stratification, et ne renferme aucun fossile. La coupe suivante aidera à faire apprécier sa position : X T. Conglomérat grossier. U. Calcaire gris. V. Gypse. W. Marnes rouges. X. La tête blanche, hauteur composée de gypse blanc, nivifonne. Le gypse appartient, sans aucun doute, au groupe carbonifère. ISur ce point, l’opinion de M. Jackson est corroborée par celle de MM. Charles Lyell et Jules Marcou. Ainsi le combustible d’Hills- boro, étant supérieur au gypse, ne se trouve point, comme on | l’avait pensé d’abord, dans des roches d’un âge antérieur à l’époque ! carbonifère. Aux preuves si précises de la stratigraphie, l’étude des fossiles vient ajouter de nouvelles données. C’est peut-être lors de la période houillère que le monde des âges géologiques s’est montré le plus fécond dans les produits de l’organisation : les plus riches feuillages (c’est l’expression même de M. Jackson) se disputaient les terres ; les êtres les plus divers peuplaient les eaux. Cette végé- tation, cette animalisation, ont laissé de nombreux débris jusque 36 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. dans les zones aujourd’hui glacées, telles que l'île de Melville, où se trouvent enfouies, au fond des mines, les productions des zones tropicales; elles ont de même laissé dans les grès et les schistes d’IIillsboro des débris semblables à ceux des houillères exploitées dans les divers pays de l’Amérique et de l’Europe. Ces débris séparent certainement les dépôts de combustible d’Hillsboro d’avec l’étage du vieux grès rouge, et les rattachent aux étages liouillers les mieux caractérisés. On a trouvé à Hillsboro de nombreux poissons gano'ides appar- tenant au genre Palœoniscus. Larges, solides, brillantes, les écailles de ces poissons sont susceptibles d’une conservation facile ; leurs stries, leurs dentelures, leurs saillies articulaires sont demeurées intactes, et, d’après leur analyse chimique, elles semblent n’avoir point été pétrifiées, mais plutôt embaumées dans les matières bitu- mineuses. M. Jackson a figuré plusieurs échantillons de poissons, en don- nant de nouveaux noms à trois d'entre eux : Le Palœoniscus Alberti. Le Palœoniscus Brownii. Le Palœoniscus Cairnsii. Parmi les végétaux fossiles, M. Jackson a trouvé et décrit des feuilles très larges, offrant les linéaments fins, les veines et les bandes transverses qui caractérisent les feuilles de palmiers, si communes dans les houillères du cap Breton, en Virginie. 11 a trouvé encore des tiges très voisines de celles du Lepidodendron gracile , décrit par M. Ad. Brongniart, un fruit en relief, très par- fait, nommé Lepidostrobus et qui serait le fruit de l’espèce précé- dente. Enfin, il a rencontré un grand nombre de tiges que leurs ; formes élégantes et tout à la fois légères feraient rapporter à des plantes aquatiques : à des Sphœrcclra. Ces divers débris d’organisation sont assez nombreux pour per- i mettre de considérer les roches où ils se rencontrent connue les j anciens fonds d’un lac, peut-être d’un estuaire, ou du moins d’un courant d’eau presque dormante. Il est à supposer que les grès for- i maient les rivages du bassin et que si l’on découvrait ces anciens rivages, leurs fossiles, comme on l’a vu déjà dans la Nouvelle- Ecosse, apparaîtraient plus nombreux encore que ceux des schistes bitumineux. 2° Il ressort des faits précédents qu’il n’y a plus lieu de considé- rer les roches d’Hillsboro comme inférieures au terrain carboni- fère, et, à ce titre, comme peu susceptibles de renfermer des lits de SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852. 37 houille. Une fois ce point admis, on est amené à cette question : Le combustible d’Hillsbôro est-il un filon postérieur au dépôt des couches ? Ne serait-il pas plutôt un banc stratiforme analogue à la bouille proprement dite? Le combustible d’Hillsboro est souvent disposé en un sens pres- que vertical, à la manière des filons; mais comme les schistes en- caissants ont la même inclinaison, on peut en conclure qu’ils ont été relevés simultanément. Leur direction est encore la même ; ils courent ensemble du N.-E. au S. -O. — Etudiée dans sa contex- ture, la masse du combustible se montre composée de petites cou- ches superposées et parallèles. Ainsi, elle forme véritablement un lit subordonné aux schistes. On peut ajouter que les assises de la mine sont trop uniformé- ment bitumineuses pour avoir pu être pénétrées par du bitume postérieurement à leur dépôt ; les schistes et le bitume dont les schistes sont imprégnés sont de formation contemporaine. D’ailleurs, dans les environs, il n’est aucune trace d’agents ignés qui aient exercé leur action sur les roches ; tout au contraire, l’abondance des matières volatiles semble une preuve positive de l’éloignement de toute action calorifique. il reste à dire un mot des blocs brisés, appelés les chevaux. Considérés d’abord comme les parois d’une fissure ou d’un filon, ces blocs doivent être attribués à un mouvement de compression. Les couches présentent des courbes, dirigées de bas en haut ; vers le sommet de ces courbes, elles ont souvent été déchirées et repous- sées; de là, cette structure singulière qui les caractérise. 3° Passons à la composition intime du combustible d’Hillsboro. Soumis à l’examen du microscope, le combustible d’Hillsboro a présenté au docteur Bacon des traces de cellules et de vaisseaux. Ces traces suffisent pour faire rapporter son origine à un dépôt végétal. Sa cassure très conchoïde et très fine provient de ce que la réunion des plantes, dont il a été formé, composait un magma ho- mogène et pulpeux. D’après AI. Percival, on voit encore se déve- lopper sous les eaux dormantes des amas de matières bitumineuses très semblables. La pesanteur spécifique du combustible d’Hillsboro varie de 1,11 à 1,09. Sa composition chimique a été déterminée par plusieurs ana- lyses.-Ces analyses sont plus ou moins semblables à celle qui a été donnée par Al. Jackson : 38 SÉANCE DU 8 NOVEMBRE 1852 Matière bitumineuse. . 58,8 Coke, . 41,2 Total. . . 4 00,0 Comme on le voit, le combustible d’Hillsboro est d’une grande richesse en bitume ; cependant cette richesse n’est point telle qu’il puisse être classé comme asphalte. La distinction de l’une et l’autre de ces substances apparaîtra clairement dans l’étude comparative de leurs propriétés ; ASPHALTE DE LA MER MORTE, COMBESTIBL* DE CUBA DE ET DE LA TRINITÉ. LA MINE D’HILLSBORO. Réduit en poudre fine et f Il fond et coule en une masse Une fond, ni même ne sc chauffé à 400o F. ( très fluide. ramollit point. / U se décompose avec grande U ne se décompose point. , 1 ébullition. — A la chaleur rouge, ii A 0UU0 ï se ,ie'con)p0se S{M1S se fou„ l «l>e. TiOOp F » .... | 11 fond et coule. îl ne change pas. /Il se décompose entière- Il 11e change pas.-* A la n 1 ment. chaleur rouge, il se la* A 7UUo t mollit, se décompose et \ forme coke. „ ,, , ... , ( Il se ramollit et il en sort du II 11e change point et il n’en Dans 1 eau bouillante. ... J ç0l-, point de uaphte. Versé sur de l’étain fondu / Il fond immédiatement et se 11 ne fond ni ne se decom- qui a une température de < décompose avec d’abon- pose, 442® F. \ danîes fumées. Versé sur du plomb fondu /Il fond immédiatement et se II ne fond, ni 11e se décom- qni a une température de < décompose en décrépi- pose. 012* F. ( laut. Placé dans la flamme d’une ( Il fond et coule en décrépi. !1 prend feu, mais ne fond bougie. ( tant. point. ' Il se dissout facilement. 11 ne se dissout pas; mais quand il est chauffé dans „ , , , , ce liquide pendant ouel- Dau» le naph e. { qués jours, il perd au plus 5,83 ou 5,10 sur 100 par- ties. Dans la térébenthine et le ( Il se dissout complètement. Il perd au plus 14 ou 20 chloroforme. { pour Î00 de sou bitume. Dans l’alcool ot dans l’élher. [ 11 Pe'J “ "«"«• " ££* “*“• P“'Uc 110 /Sa fusibilité et sa solubilité N’étnnt pas fusible, il ne I le font employer comme peut être employé comme < ciment et comme vernis. ciment; étant peu soluble, j il ne peut servir pour le \ vernissage. ! Il coule et ainsi n’est point II brûle comme une bouille susceptible d’être employé grasse et forme un coke pour le chauffage, très spongieux. SÉANCE DU 3 5 NOVEMBRE 1852. 39 Cette comparaison doit suffire pour montrer que le combustible d’Hillsboro ne peut, sans fraude, être vendu comme asphalte dans les marchés. Réunie aux observations précédentes faites sur son gisement, elle confirme l’opinion qu’il appartient aux couches de la période houillère. Dans ces couches, il présente le fait remar- quable d’un charbon dont la richesse en bitume dépasse de beau- coup les conditions jusqu’à présent rencontrées dans les différentes houillères. Après cette lecture, M. J. Marcou présente les observations suivantes : La découverte de poissons fossiles, par notre confrère M. Jack- son, dans le terrain houiller du Nouveau-Brunswick, est un fait presque entièrement nouveau pour l’Amérique du Nord. En 18à9, j'ai trouvé dans les falaises de la côte, près des mines de Sydney, dans l’île du cap Breton, deux plaquettes de calcaire présentant des écailles et des vertèbres de poissons, que M. Agassiz a reconnus pour une espèce nouvelle, mais appartenant au genre Palœoniscüs , qui, comme on le sait, est le genre de poissons le plus caracté- ristique de l’époque houillère. M. Jackson, ayant recueilli des poissons presque entiers et en assez grande abondance, vient par là de fixer un fait que je n’avais pour ainsi dire qu’indiqué. Un géologue de la Nouvelle-Ecosse, M. Abraham Gessner, a contesté l’existence du terrain houiller à Hillsboro, et, ayant cru pouvoir regarder la houille très grasse que l’on y a trouvée comme une roche asphaltique, a rapporté, dans un mémoire soumis au gou- vernement anglais , ce terrain comme silurien avec un dyke d’asphalte. La découverte des poissons fossiles et des plantes appartenant, sans aucun doute, au terrain houiller, est donc un fait d’une grande importance, puisqu’il fixe certainement 1 âge du terrain d’Hillsboro, et que, de plus, il nous fait connaître l’existence de 8 ou 10 espèces de poissons fossiles sur le continent de l’Amérique du Nord. Séance clu 15 novembre 1852. PRÉSIDENCE DE M. d’oMALIUS d’hâLLOY. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procés-verbai de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée, SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. AO Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le Président proclame membres de la Société : MM. Barrande (J.), à Paris, rue Cassette, 30, présenté par MM. d’Archiac et de Yerneuii -, Jacquot (Eugène), ingénieur des mines, à Metz, présenté par MM. Jules Haime et Désoudin- La Harpe (A.), ministre du Saint-Evangile, petite rue du Colisée, à Bordeaux (Gironde), présenté par MM. Victor Raulin et Joseph Delhos ; De Limur (Francis), hôtel de Limur, à Vannes (Morbihan) , présenté par MM. Joseph Delbos et Victor Raulin ; De Vassart, ingénieur des mines, à Paris, rue de Grenelle- Saint-Germain, 122 , présenté par MM. Eiie de Beaumont et de Roys -, Vogt (Ch.), docteur en médecine, professeur de géologie à l’Académie, à Genève (Suisse), présenté par MM. II Michelin et Ed. Collomb. M. l’abbé Bazin, ancien membre, 6 Paris, rue de Sèvres, 35, demande à faire de nouveau partie de la Société. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. A. Sedgvvick, On the lowev palœozoic Rocks , etc. (Des roches paléozoïques inférieures, formant la hase de la chaîne carbonifère entre Ravenstonedale et Ribhles- dale) (extr. du Quarterly journal of thegeol. Soc. of London , février 1852, vol. VIII) \ in-8, 20 pages. De la part de M. L. de Koninck, Discours sur les progrès de la paléontologie en Belgique (extr. du t. VIII, nos 11 et 12 des Bulletins de B Académie roy\ des sc etc., de Belgique) • in-8 , 19 pages. Bruxelles, 1853. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1852, 2e sem., t. XXXV, n° 19. SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. Al V Institut , 1852, n° 98/i. Réforme agricole, par M. Nérée Boubée, n° AO, 5e année, septembre 1852. Annales de la Société d'agriculture , sciences , arts et belles- lettres du département d'Indre-et-Loire , t. XXXI, n° 3, juillet à décembre 1851 ; in-8. Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse , t. XXXIV, n° 117 -, in-8. Travaux de T Académie de Reims, année 1851-1852 , n° 1, 2etrim. 1852* in-8. Bulletin trimestriel de la Société des sciences , belles-lettres et arts du département du Var, 20e année, n° 1 ; in-8. Tou- lon, 1852. Annales de la Société d'émulation du departement des Vosges, t. VII, 3e cahier, 1851 -, in-8. The Athenœum, 1852, n° 1307 } in-A. Zeitschrift, etc. (Bulletin de la Société géologique alle- mande), vol. IV, 2e cahier, février, mars et avril 1852* in-8. Berlin. M. Raulin donne lecture de la lettre suivante de M. Joseph Deîbos , qui est relative à Fàge des argiles de Sadirac (Gironde) : En parcourant le pays situé entre Langoiran et Créon (Gironde), j’ai pu déterminer, cFune manière précise, l’âge des argiles de Sadirac, dont le niveau géologique avait été jusqu’à ce jour assez obscur, et qui jouissent dans le département d’une certaine re- nommée, parce qu’elles servent à- la fabrication de la plus grande partie de la poterie grossière employée à Bordeaux. La place qu’occupent ces argiles dans la série des terrains est mise hors de doute par la coupe suivante, dont j’ai vérifié par moi-même l’exactitude, et qui a été obtenue dans le creusement d’un puits effectué chez M. Dordet, pharmacien à Créon. L’ou- verture de ce puits est rigoureusement au niveau de la place, et par conséquent du seuil de l’église, c’est-à-dire à 101 mètres au- dessus de la mer, d’après la Description géométrique de la France de M. Puissant. JÜ2 SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. Mctre*. 1. Terre végétale et sol de remblai, avec débris de poteries, de tuiles, etc 2,00 2. Argile grossière, sableuse, terreuse, grisâtre ou gris jau- nâtre, avec veines d’argile bleue plus pure 3,00 Cette argile est désignée dans le pays sous le nom de terre top ; elle est bien connue des cultivateurs, car elle forme le sous-sol improductif d’une grande partie des terres cultivées des environs de Créon. 3. Argile d’un gris bleuâtre ou verdâtre clair, très fine, ne faisant point effervescence dans les acides, formant avec l’eau une pâte homogène et plastique 2,00 C’est cette même argile qui est exploitée à Sadirac. 4. Argile terreuse analogue au n° 2 ( terre top) 3,00 5. Gravier ferrugineux, à cailloux roulés de quartz, de la grosseur d’une noix au plus 2,50 Vers le bas de cette assise, on a rencontré un lit de ro- gnons de poudingue ferrugineux très dur [ali os), libres dans le gravier incohérent. 6. Marne sableuse, friable, presque entièrement formée de débris de fossiles marins indéterminables {Venus, Ceri~ thium , etc.). . . . 0,30 7. Argile ou limon noirâtre ou brunâtre, renfermant dans la partie supérieure des fragments complètement indétermi- nables de coquilles marines dont le test a conservé sa blancheur. Les parties qui ne renferment pas de débris de coquilles ne font point effervescence avec les acides. 0,30 8. Lit très mince de sable siliceux, rougeâtre, fin. . 0.05 à 0,10 9. Calcaire d’eau douce assez tendre, d'un gris noirâtre, foncé à l'état humide, plus rarement d’un gris clair par places, pétri de moules de Planorbcs , Limnées, etc. . . 0,12 à 0,15 10. Argile marneuse fine, avec coquilles d’eau douce à l’état de moules mal conservés. Dans certaines parties, celte argile se mêle de sable et de fragments irréguliers de cal- caire d’eau douce, qui lui donnent l’aspect d’un remblai vaseux 2,00 11. Calcaire d’eau douce, blanc, avec moules assez rares de Planai bes et de Lirnnées, traversé, dans tous les sens, de canaux irréguliers remplis de sédiments fins (conduits des sources). Épaisseur inconnue ; reconnu sur. . .... 0,75 Profondeur totale. . . 16,10 Les fossiles que j’ai pu recueillir dans les calcaires et les marnes d’eau douce sont : deux espèces de Planorbes ( Plonorbis rotun - datas , Brongn.?, Plonorbis planulatas , Desh.?, des Limnées (Limnea longiscata , Lyell et Mu reh , non Brongn.), une petite Pahidinc SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. Zs3 qui paraît identique avec l’espèce de Saucats et de Canéjan ( Patuclinci pusilla, Bast , non Brongn.), et quelques moules d’un Hélix dont la forme se rapproche de celle de VH. nemorcilis. Les Planorbes sont très prédominants par leur abondance. D’après les renseignements qui m’ont été fournis par les ou- vriers, c’est dans le calcaire d’eau douce blanc que sont creusées les cuvettes de tous les puits de la ville. On trouve partout la même succession de couches; quelquefois, cependant, au milieu des graviers s’interposent des lits de sable fin plus ou moins coloré par du fer hydroxyde. Comme on le voit, il est certain que le diluvium caillouteux, réduit, àCréon, à une épaisseur de 2m,50 seulement, est recouvert par une couche argileuse de 8 mètres de puissance , et dont les argiles figulines sont une dépendance. Il reste à fixer l’âge des dépôts inférieurs au diluvium. Comme les couches marines, qui supportent les graviers ferrugineux, ne renferment que des débris de fossiles méconnaissables , il faut chercher un point de repère dans le calcaire d’eau douce qui leur est inférieur. Or ce calcaire repose incontestablement sur le cal- caire à Astéries ou de Saint-IYlacaire, et il est recouvert par des couches marines, c’est-à-dire qu’il occupe précisément la même place que le calcaire lacustre gris (inférieùr) de Sainte-Croix-du- Mont, que surmontent les calcaires arénifères à Ostrea un data* L’identité de caractères physiques est parfaite entre ces deux ro- ches lacustres, et j’ai pu m’assurer aussi que leurs fossiles 11e diffé- raient aucunement. Le calcaire gris de Sainte-Croix-du-Mont a été assimilé au cal- caire d’eau douce de Saucats par M. Raulin. Ce rapprochement est justifié par l’identité de position relative, et, je le crois aussi, par celle des fossiles, car je n’ai pu trouver aucune différence entre ceux de Créon et ceux de Saucats et de la Brède, tandis que les différences deviennent appréciables quand on compare les espèces de Créon à celles des calcaires d’eau douce blancs du Castillon- nais. Les lits à débris de fossiles marins de Créon représentent donc le falun de Mérignac, et c’est la première fois, je crois, que ce falun a été signalé à l’état coquillier sur la rive droite de la Ga- ronne. Il s’y trouve à une hauteur de 89 mètres, et ce fait est digne de remarque, car la hauteur à laquelle atteint le même dépôt sur la rive gauche n’est que d’environ à8 mètres à Saucats et de 38 mètres seulement à Mérignac, d’après les observations baromé- triques de M, Raulin. SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. hh Je n’ai vu affleurer nulle part ni le falun, ni le calcaire d’eau douce autour de Créon, mais on peut y constater presque à chaque pas la position des couches argileuses au-dessus du poudingue. Sur la route de Bordeaux, en sortant de Créon, le poudingue apparaît au fond d’un petit vallon dans lequel se trouve une lagune, à l’ouest du Moulin, et l’on peut répéter la même observation dans toutes les dépressions un peu profondes qui irradient autour de la ville. Les argiles à poterie, dont nous venons de déterminer la posi- tion, sont exploitées principalement autour du village de Lorient, dans la commune de Sadirac ; elles sont extraites au moyen de puits dont la profondeur est ordinairement de 5 à 6 mètres, et l’on peut constater, au moyen de ces puits, leur intercalation dans les argiles terreuses, connues sous le nom de terre tap , et dont il faut traverser une certaine épaisseur pour arriver aux couches assez pures pour être employées. En allant de Créon vers la Sauve, on marche pendant près de 2 kilomètres sur le plateau formé par les argiles supérieures; un peu avant la borne du deuxième kilomètre, la route descend assez rapidement, et l’on voit apparaître les argiles terreuses entrecoupées de veines bleuâtres, plus pures, exploitées pour une tuilerie établie en cet endroit. Un peu pins bas, on trouve des affleurements du poudingue ferrugineux qui forme le sol et les places du petit val- lon de Tuilley, et est exploité, comme gravier, près de l’église de la Sauve. J’ai dit que le calcaire d’eau douce près de Créon ne pouvait reposer que sur le calcaire à Astéries. Ce dernier calcaire se montre, en effet, toutes les fois que les dépressions naturelles du sol descendent assez bas pour dépasser le niveau des terrains diluviens. Il a été exploité anciennement, à 2 ou 3 kilomètres de Créon sur la route de Cursan, mais c’est surtout sur le versant du plateau qui appartient au bassin de la Garonne qu’on peut l’étudier le plus aisément. Je compléterai la présente note en décrivant succinctement la composition géognostique du pays situé entre Créon et Langoiran, et l’on aura ainsi , sur un développement vertical de près de 100 mètres, la coupe des coteaux de l’Entre-deux -mers, à partir du bord de la Garonne au Tourne, jusqu’à un des points les plus élevés du plateau. Le chemin de Créon à Saint-Genès-de-Lombaud est tracé sur le plateau pendant environ 2 kilomètres. En descendant au delà de Montuart, on traverse un vallon dont le fond est constitué par le SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. 45 calcaire à Astéries. En montant à la Yésine, on retrouve le pou- dingue sur la hauteur, puis on redescend sur le calcaire qui affleure de tous côtés sur les bords de la route. Les coteaux de Haux sont formés par ce calcaire qui renferme, à Greteau, X Ostrea crassis - si ma r Lamk. En suivant le pied des coteaux qui encaissent à l’est le petit val- lon dans lequel coule le ruisseau qui se dirige du nord au sud, de Haux vers Tabanac, on voit apparaître, au-dessous des calcaires marins, des couches de mollasse argileuse ou sableuse. Au pied du coteau de la Motte, il y a une tuilerie près de laquelle une exca- vation, pratiquée pour l’extraction de l’argile, présente la coupe suivante : 1 . Calcaire marin tendre, blanc jaunâtre, terreux, formé de débris de coquilles, formant toute la partie supérieure des coteaux. 2. Marne argileuse jaunâtre, avec Septaria calcaires et moules .de coquilles marines ( Caidium , etc.) 1m,50 3. A rgile panachée de gris et de jaunâtre, fortement happante, faisant une vive effervescence avec les acides. Épaisseur inconnue; exploitée sur lO^OO Au sud de cette excavation, à un demi-kilomètre environ, il y a une seconde tuilerie, près de laquelle on extrait une mollasse sa- bleuse, grise, friable, micacée, recouverte immédiatement par le calcaire tendre à Astéries. Le niveau supérieur de la mollasse a sensiblement baissé entre ces deux exploitations, car les sables de la dernière tuilerie sont tout à fait au niveau du fond de la vallée. Si, de la tuilerie de la Motte, on monte sur les coteaux en sui- vant le chemin qui passe au-dessus de l’exploitation qui nous a fourni la première coupe, on traverse, dans tout son développe- ment vertical, la formation du calcaire à Astéries, tendre d’abord, et qui devient de plus en plus dur et coquillier, à mesure qu’on s’élève. Il constitue presque à lui seul les coteaux, et le diluvium ne se retrouve plus que sur les points les plus élevés. De nom- breuses carrières ouvertes dans les quartiers des Clottes et de la Gorce fournissent des moellons et de bonnes pierres de taille. Une de ces carrières présente la coupe suivante : 1 . Calcaire blanc jaunâtre, assez tendre 4m,0û 2. Calcaire grisâtre, argilifère, assez compacte, avec Caryo - p hj Ilia j Natlca crassatina , côtes de Man a tas t etc. . . 1m,00 3. Calcaire jaunâtre, tendre, non exploité, avec Echinolampas 46 SÉANCE DU 35 NOVEMBRE 1852, ovnlis. Des M., SmteUa striatula , Marcel de Serres, As te r las lœvis, Ch. Des M., Echinpçyamus pirijormis , Àgassiz, Cdssidulus N um mutin us , Ch. Des M. (1), Car- dium ( Uscrepans , Bast., Pcctcn Billàiidelli , Ch. Des M. , Modi via ..... {grosse espèce inédite très caractéristique), côtes de Manalus , etc 4m,0û 4. Calcaire dur, grisâtre, à tests spathisés de coquilles. Exploité comme pierre de taille, sur. 3m,00 En approchant du Tourne, la grande route de Créon est domi- née, à l’est , par des coteaux assez élevés de calcaires tendres, exploités, avec As te ri as lœvis , etc. Ces mêmes calcaires, avec Natica crassaiina , sont aussi exploités presque au niveau de la plaine et dans le bourg même du Tourne. Vers Tabanac, ils sont recouverts sur les hauteurs par les graviers ferrugineux qui se trouvent là à un niveau de beaucoup inférieur à celui qu’ils occupent sur le plateau de Créon. Si nous résumons les faits qui viennent d’être exposés, nous trouverons : 1° Que, dans la partie du département de la Gironde, connue sous le nom d’Entre-deux-mers (entre Dordogne et Garonne), le diluvium n’est pas une formation aussi simple qu’on l’a toujours supposé, et que les dépôts caillouteux, qui constituent son faciès le plus habituel, sont surmontés, sur le plateau de Créon, par des couches argileuses qui en forment sans doute la partie la plus supérieure. 2° Que le falun de Mérignac est représenté au-dessous du dilu- vium par des couches, très minces il est vrai, qui reposent elles- mêmes sur un calcaire d’eau douce, identique avec celui de Sainte- Croix-du-Mont (inférieur), et de Saucats. 3° Enfin, que le calcaire à Astéries, inférieur à cette formation lacustre, est lui-même superposé à des mollasses argileuses ou sa- bleuses qui représentent sans doute ici la formation lacustre éocène du Fronsadais. M. Raulin ajoute qu’il partage la manière de voir de M. Delbos. (4) Cette espèce, très caractéristique du calcaire à Astéries n’a été qu’indiquée par M. Des Moulins, et n’a pas été décrite, à ma connais- sance. Elle appartient sans doute au genre Scutellina , Agass., et se rapproche du Scutellina supera , Agass., par son anus supra-mar- ginal» mais s’en éloigne par sa forme presque orbieulaire, ete. SÉANCE ï)U 15 NOVEMBRE 1852. !\7 M. d’Archiac fait remarquer que les observations de M. Del- bos sont relatives à une étendue bien circonscrite. M. Èliede Beaumont demande s il n’y aurait pas des raisons qui pourraient faire considérer le terrain décrit par M. Delbos comme résultant de moraines. M. Raulin ajoute qu’il n’en connaît aucune. M. Élie de Beaumont communique la note suivante de M. A. Sismonda, qui est relative à un dépôt nummulitique. Note sur les dépôts à Nummulites , par M. Ange Sismonda, professeur de minéralogie à Turin. On trouve des Nummulites dans des roches qui diffèrent entre elles, soit par leur gisement, soit par leur faune, soit enfin parleur nature. On a des Nummulites dans le calcaire formant la base du grand dépôt de macigno à Fucoïdes dont M. Pilla a fait son terrain particulier, qu’il nomma liétrurien ; et l’on en a dans un calcaire marneux, presque friable, et dans un macigno calcaire évidem- ment supérieur au grès macigno susdit. Les couches nummulitiques du premier groupe reposent dans quelques endroits sur les roches jurassiques métamorphosées. On voit cette superposition au col de Tende, dans les montagnes près des sources du Tanaro, dans quelques endroits le long de la chaîne des Apennins, etc.; mais ailleurs, comme en Savoie, elles recou- vrent directement un calcaire argileux , compacte, avec Y Anan~ chytcs ovatci et la Beleihniles mucronntct . Les Nummulites de cette zone sont larges et bombées; le cal- caire qui les renferme est généralement noirâtre. Le grès macigno qui complète la zone contient de nombreuses empreintes du Fu- coïdes Targioni et du Fucoïdes intiicatus , qui , d’après M. Ad. Brongniart, appartiendraient aux dépôts antérieurs à la craie blanche : ceux-ci sont presque les seuls fossiles de la nombreuse série de couches dont se compose, dans les Alpes et dans les Apen- nins, le puissant terrain, dit par les uns macigno , par les autres nummulitique, et dont M. Pilla a fait son terrain hétrurien. Le grès macigno alterne avec le calcaire, les schistes calcaires cristal- lins, les schistes argileux, etc. Toutes ces roches sont plus ou moins altérées, ce qu’on ne voit pas dans celles de la série nummulitique supérieure, comme nous dirons par la suite. Elles sont fortement disloquées, souvent contournées et repliées, et même fracturées. Telles on les voit tout le long de la route dite de la Corniche, /j8 SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. entre Nice et Gênes, et de cette dernière ville à la Spezzia, d’où rlles continuent dans toute la partie méridionale de l’Italie, gar- dant à peu près les caractères lithologiques et le gisement que nous avons indiqués à grands traits. Quoique les dislocations de ce terrain soient compliquées, il n’est pourtant pas difficile de reconnaître qu’elles se rattachent particulièrement au système pyrénéo- apennin , ce que, du reste, on distingue clairement à la Mortola , au col de Tende, aux en- virons de Barcelonette, etc., etc. Mais parmi les endroits où l’on peut voir les faits indiqués, nous recommandons la montagne du col de Tende. En allant de Limone au col susdit, on fait les deux tiers du chemin, et même davantage, entre le macigno et les autres roches qui lui sont associées. A lapartie inférieure, il y a du calcaire noirâtre, à grosses Nummulites, séparé d’un calcaire cristallin plus ancien par un conglomérat quartzeux. Ces roches, assez inclinées, ont la direction que M. Elie de Beaumont assigne au système pyrénéo - apennin. A Tliônes, en Savoie, les roches à Nummulites en question couvrent immédiatement le calcaire dans lequel MM. Studer, Vilanova et moi avons trouvé des fossiles apparte- nant à la craie blanche (1). Ce calcaire est compacte et a au-des- sous le grès vert et le calcaire néocomien. La nature de cet écrit ne demande pas que nous nous étendions davantage sur le système à Nummulites inférieur , qui, suivant nous, représente dans notre pays les derniers temps de l’époque crétacée. Les dépôts qui succèdent aux précédents sont généralement de nature differente ; mais ils contiennent également des Nummulites, cependant moins larges et moins bombées. Celles-ci logent de pré- férence dans un grès calcaire ; au-dessus il y a une association alternée de différentes variétés de mollasse et d’argile sablonneuse fossilifères; viennent ensuite plusieurs couches de grès assez solide avec des Peignes et des moules de végétaux ; en dernier lieu vient un calcaire blanchâtre bréchiforme, contenant les mêmes Peignes du grès qu’il recouvre, lequel est surmonté de couches de grès verdâtre avec de l’argile grisâtre, dure, où l’on trouve les Nautilus regalis , Sow., du terrain éocène. (1) Dans la course que nous avons faite à Thônes, nous avions le bonheur d’avoir avec nous MM. le chanoine Chamousset, le profes- seur Yallé, l’av. Pilet, trois géologues distingués, dont ]je premier est avantageusement connu dans la science par ses mémoires sur les ter- rains de la Savoie. SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. 49 Mais dans la vallée de la Bormida , dans celle de la Scrivia, enfin dans tontes les collines entourant le bassin du Tanaro, du côté du levant, il y a, entre les roches de ce groupe et celles du groupe inférieur ou du macigno, des bancs puissants de conglo- mérat serpentineux. C’est dans ce conglomérat que gît le lignite, à Cadibona, à Pouzone, à Grognardo, aux environs de Bagnasco, de Mondovi, etc., etc. Les géologues qui, dans ces derniers temps, ont parlé de ce terrain et particulièrement du lignite de Cadibona et de Bagnasco, Font considéré comme miocène. Ce que nous ve- nons de dire sur son gisement inférieur au grès à Nummulites rend cette classification inadmissible. En effet, les dépôts supé- rieurs au grès à Nummulites, dans quelques endroits, sont pétris de fossiles qu’on peut partager en trois groupes, dont un serait composé d’espèces particulières à cette zone tellurique; un autre, qui est le plus nombreux, serait formé des espèces caractéristiques du terrain éocène ; et le troisième , qui est le moins nombreux, renfermerait les espèces qu’on retrouve dans le terrain miocène. On cite quelques fossiles de la craie blanche avec les Nummulites; il n’est cependant pas bien démontré auquel des deux groupes ils appartiennent ; mais, supposons même qu’ils se trouvent dans le groupe supérieur, maintenant que nous connaissons quelques genres et plusieurs espèces organiques qui passent d’un terrain à un autre postérieur, et même d’une formation à une autre moins ancienne, nous ne devons plus être étonnés de trouver des fossiles crétacés dans un sédiment éocène, et moins encore de voir les fos- siles éocènes dans les dépôts miocènes. Par suite de cette classification, que nous appuierons bientôt par de nouvelles raisons, F Antracotherium magnum Cuvier descend à l’horizon géologique où, dès les premiers temps qu’on a songé à ordonner par séries les couches terrestres, on a placé le Paléothé- rium , F Anoplotherium . En refusant d’admettre cette classification, on renverse tout l’édifice fondé en géologie sur la paléontologie et la stratigraphie. Ainsi, nous ferons d’abord remarquer que nous avons ramassé f dans les collines, entre Acqui et les Carcare, dans la vallée de la Bormida, GA espèces de fossiles (1) ; parmi celles-ci, il y en a 46 appartenant au terrain éocène et seulement 18 au terrain miocène. Or, s’il est question de classifier un pareil dépôt, il me semble ('î ) Voyez Classificazione clei terrent stratijicati delle Al pi , del prof. Angelo Sismonda. — Meniorie délia reale Academia delle scienze di Torino , sérié 2da, tom. 13°. Soc, géol., %e série, tome X. 4 50 SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. tout à fait naturel qu’on adopte la conclusion amenée par les es- pèces organiques qui s’y trouvent en plus grand nombre; et dans notre cas elles appartiennent à l’époque éocène. Remarquons maintenant que tous ces dépôts, y compris le conglomérat serpentineux avec les grands amas, recouvrent en stratification discordante les roches du terrain de grès macigno. Les deux faits au moyen desquels les géologues jugent l’âge relatif des terrains, les fossiles et le gisement, conseillent donc la sépara- tion des deux dépôts dont nous nous occupons. Mais tout en nous accordant cette division, on pourrait refuser d’admettre que le moins ancien des deux appartienne à l’époque éocène. il est vrai que les dépôts regardés par nous comme éocènes passent, en Pié- mont, par des gradations presque insensibles, au terrain miocène; mais cependant, dans le bassin du Tanaro, nous avons observé entre eux une discordance de stratification ; du reste, nous avons, pour notre classification, la faune ; car il y aurait, suivant nous, contre-sens à choisir, entre deux opinions, celle qui n’a pour elle que le faible appui d’un petit nombre d’espèces organiques dont l’existence dans le terrain miocène prouverait seulement qu’elles ont survécu à la destruction survenue des êtres organiques, par suite du soulèvement qui a eu lieu entre le terrain éocène et le miocène. Nous n’avons cité que quelques endroits seulement où l’on peut observer les faits qui font le sujet principal de cette note , cependant ils se voient sur une grande étendue. Ils com- mencent à paraître à Bagnasco, dans la vallée du Tanaro, où l’on commence à distinguer, du côté du Piémont , la conjonction des deux plus anciens terrains de la formation tertiaire ; de là, l’étage nummulitique supérieur passe à l’E. de la ville de Ceva, rejoint la vallée de la Bormida, et se tourne plus à l’E. encore dans la di- rection des collines de Lerrna, de Caseinelle, S. Sebastiano, etc. D’après ce que nous venons de faire remarquer , nous devons conclure qu’il existe deux terrains avec des Nummulites : un est antérieur au soulèvement pyrénéo -apennin ; l’autre aurait suivi immédiatement cette grande catastrophe. Ces deux terrains diffè- rent entre eux par leurs fossiles, par leur gisement et parleur na- ture. Le plus récent des deux est en général très riche en fossiles, tandis que son devancier, en Italie, en contient à peine. Ce sont de grandes Nummulites clans les étages inférieurs, et des fucoides dans les supérieurs. Les Nummulites du terrain post- pyrénéo- apennin sont petites et presque plates. Elles sont contenues dans un grès calcaire qui n’est presque pas altéré, comme ne le sont pas davantage les roches qui lui sont associées* et qui renferment 51 SÉANCE DU 15 NOVEMBRE 1852. une grande quantité de fossiles, appartenant, d’après l’étude qu’en ont faite MM. d’Arcliiac, JBeliardi, E. Sismonda, etc., etc. (l),àla faune du terrain éocène. L’idée de partager les couches à Nummulites en deux terrains, comme nous avons dit, a été conçue par quelques géologues, aux- quels nous ajoutons M. Coquand ; mais jusqu’à présent, personne, que je sache, n’a abordé la question sous le point de vue que nous l’avons traitée, et c’est ce qui nous encourage à publier cette note. M. Michelin fait observer qu’à Thrônes il y a des fossiles ana- logues à ceux d’Einsilden, que MM. Studer et Mérian considè- rent comme tertiaires. M. Eliede Beaumont dit que le terrain de Thrônes appartient à la zone nummulitique inférieure qui se trouve généralement dans les Alpes. M. d’Archiac fait remarquer que sur les bords de l’Adda on retrouve les petites Nummulites de la zone supérieure des Py- rénées , il pense que le phénomène signalé parM. de Sismonda est analogue à celui signalé déjà par M. Tallavignes. M. Barrande entre dans divers développements sur les divi- sions qu’il a adoptées dans le terrain silurien de la Bohême et sur l’àge relatif des bassins siluriens qui ont été étudiés jusqu’à présent. Il renvoie, pour de plus grands détails , au travail étendu qu’il va publier prochainement sur ce sujet. Il ajoute qu;ii doute toujours de l’existence de poissons dans le grés des environs de Saint-Pétersbourg, bien que ce fait ait été annoncé par M. Pander ^ car il a été observé dans l’étage silu- rien supérieur de Bohême des pinces de crustacés qui sont ar- mées de crochets et qui, au premier abord, ressemblent beaucoup à des dents de poissons: ces pinces dépassent quelquefois 1 dé- cimètre. En Angleterre, on n’a pas observé non plus avec cer- titude des poissons dans l’étage silurien inférieur, bien que l’on ait trouvé des nodules de chaux phosphatée dans le pays de Galles. M. Delesse ajoute que la présence de nodules de chaux phos- (f) Voyez Histoire des progrès de la géologie , par À. d’Archiac, tome III. 52 SÉANCE LU 6 DÉCEMBRE 1852. phatée dans l’étage silurien inférieur du pays de Galles ne suffit d’ailleurs pas pour qu’on admette qu’il y existait des poissons ; car cette chaux phosphatée peut provenir d’animaux non ver- tébrés *, elle peut même provenir de filons ou bien de roches d’origine ignée, puisqu’il y a de la chaux phosphatée dans les laves. M. Damour fait observer qu’un essai chimique très simple permettrait de distinguer des dents de poisson de pinces de crustacés -, en effet, les dents de poisson sont essentiellement formées de phosphate de chaux, tandis que les pinces de crus- tacés sont formées de carbonate de chaux. Séance du 6 décembre 1852. présidence de M. de verne ui l , mi ce -président. M. Deîesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Le Président annonce ensuite une présentation. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part deM. le ministre de îajustice, Journal des savants ; novembre 1852. De la part de M. Eîie de Beaumont, Notice sur les systèmes de montagnes ; 3 vol. in-18, d’ensemble 1543 pages, 5 pl.* (extr. dut. XÏI du Dictionii. univ. d’hist . riatiir., dirigé par M. Ch. d’Orbigny);Vt\r\$, 1852, chez P. Bertrand. De la part de MM. Miine Edwards et Jules Haime, A mono ■ graph , etc. (Monographie des polypiers fossiles de la Grande- Bretagne*, 3e partie.) Londres, 1852, publié par la Société pa- léontographique. De la part de M. H. -J. Carter, Geology of the Island of Bombay (en tr. du Journal of the Bombay Brandi of the B. Asiatic society ; juillet 1852)* in-8, 55 p., 1 carte et 5 pl. De la part de M. Amos Kendall, Full exposure , etc. (Exposé SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 53 complet des prétentions du docteur T. Jackson à l’in'vention du télégraphe électrique); in-8, 64 p. Washington, 18 52, chez T. Tower s. Comptes-rendus des séances de V Académie des sciences ; 1852, 2e sem., t. XXXY, nos 20 à 22. Annales des mines ; 5e série, t« I, 3e liv. de 1852 ; t. Il, 4e liv. de 1852. Bulletin de la Société de géographie , lxc série,, t. IY, n° 22, octobre 1852. L’Institut ; 1852, nos 985 à 987, et table du. t. XYII, année 1849. Bulletin des séances de la Soc. nat. et ceritr. d’ Agriculture ; 2e série, t. Y, n°* 1 à 5, 1849 ; t. YI, no* 1 à 7, 1850; t. VII, nos 1 à 9, 1851 ; in-8. Mémoires de la meme Société ,* années 1846, 1847, 1848, 1849 et 1851 ; in-8. Notice sur Augustin Sageret , par M. Adrien de Jussieu; in-8, 22 p., 1851. .Notice biographique sur Louis - Antoine Macarel , par M. -Becquerel , in-8, 11 p., 1851. Ces deux notices publiées par la Soc. nat. et cent, d’agricul- ture. Mémoire de la Société royale des sciences , lettres et arts de Nancy ; 1851, in-8. Bulletin de la Société impériale des naturalistes de Moscou ; 1851, nos 3 et 4 ; 1852, n° 1, in-8. Neues Jahrbuch, etc. (Nouv. annuaire de minéralogie, de géognosie et de géologie, de MM. Leonhard et Bronn); année 1852, 6e cahier ;. in-8. The american journal of science and arts , by Silliman ; 2e série, vol. XIY, n° 41, septembre 1852; in-8. The Journal of the Bombay Branch of the R. Asiatic so • ciety ; vol. IY, n° XYI, juillet 1852. M. Bardin met sous Ses yeux delà Société un certain nombre de sujets tirés de sa collection de reliefs topographiques, et donne quelques observatiens qui se trouvent reproduites avec plus de détails dans sa lettre, insérée au présent numéro du Bulletin. 5/i SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. Collection de reliefs topographiques et géologiques ; par M. Bardin. Messieurs, Par la nati ire de mes fonctions aux Ecoles d’artillerie et à l’Ecole polytechnique, non moins que par goût, je me suis beaucoup occupé de topographie. C’est ce qui fait que j’ai été conduit à exécuter une collection de reliefs et de dessins auxquels j’attribue de l’intérêt et de Futilité en vue de l’introduction de la topographie dans Fenseignem ent public, et en vue des progrès de la géologie, qui a aussi sa part dans les programmes du nouveau plan d’études des Ivcées. C’est po urquoi, messieurs, je vous demande la permis- sion de mettre sous vos yeux quelques uns de mes reliefs. Ce spé- cimen sera sans doute insuffisant pour vous donner une idée exacte de mon travail ; mais il suffira, je pense, pour exciter votre intérêt et vous engager à venir visiter ma collection. Tous y trouverez déjà une assez grande variété de sujets, parmi lesquels je ne mentionnerai que les principaux. Auparavant je dirai, parce que cela est essentiel pour distinguer mes essais de beaucoup d’autres du même genre, je dirai que tous mes reliefs sont exécutés d’après des pla ns nivelés, d’où ils sont sortis comme d’un moule, avec leur véritable forme et leurs dimensions dans le sens horizontal et dans le sens vertical, n’ayant subi d’autre alté- ration que celle qui naît de la réduction suivant une échelle déter- minée. Quand j’exagère les hauteurs, c’est avec l’intention de montrer le même terrain traité d’un côté avec ses hauteurs natu- relles, et de l’autre avec ses hauteurs dilatées suivant un certain rapport; c’est pour mettre en évidence le tort qu’on a d’altérer les hauteurs dans les Reliefs topographiques. Aussi doit-on dans le Dessin géologique , genre spécial et conventionnel dont les élévations et les coupes sont forcément exagérées en hauteur, toujours placer en regard de ces représentations spéciales les élévations et les cou- pes topographiques du même terrain. Mais cette déformation, nécessaire pour l’étude des détails géologiques, ne saurait être admise dans les reliefs, dont la surface doit être représentée aussi rigoureusement que les moyens d’exécution le permettent. Je ne parle pas des Reliefs géographiques , parce que je ne crois pas que la géographie, par suite de la petitesse extrême de ses échelles, puisse être traitée en relief; des cartes, mais des cartes convenablement disposées, lui suffisent. Les efforts, souvent heu- reux, qu’on a faits pour les reliefs géographiques, auraient été plus utilement employés, à mon sens, au profit de la topographie, d’un SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 55 art toujours oublié, bien qu’il soit la préparation nécessaire de tout enseignement géographique. La topographie ayant été mise de côté, il est tout simple, tout naturel qu’on ait fait des reliefs géographiques. Quand la topographie aura sa place dans rensei- gnement, on sentira moins la nécessité de ces reliefs. Dans tout enseignement didactique, particulièrement en ce qui regarde les formes des corps et leurs dimensions, les relations de situation, les conditions d’ordre et d’arrangement, on ne saurait trop recourir aux images des objets : aux reliefs d’abord, quand ils sont possibles, puis aux dessins, aux dessins cotés. Le texte écrit, ou le langage ordinaire, n’est là qu’un accessoire, en quelque sorte, ou plutôt il n’est qu’un complément, en ce sens qu’on n’y a recours que pour dire ce que les reliefs et les dessins ne disent pas, et me peuvent pas dire par leurs lignes et leurs chiffres. Dans ma longue carrière de l’enseignement, j’ai fait un fréquent usage des modèles en relief. Je place dans la Première série de ma collection les terrains sans rochers, c’est-à-dire ceux dont les matériaux, abandonnés à la loi de la pesanteur et aux intempéries de l’air, prennent des formes continues et plus ou moins prononcées selon la nature géologique des terrains. Comme exemple, j’ai fait le relief de la partie N. -O. des environs de Metz, partie dont la constitution géologique, qui appartient surtout aux argiles du lias, est parfaitement accusée aux cinq échelles sous lesquelles ce terrain a été reproduit : au g-^, au tïToüïï’ au ïotôô’ au JôTôo. et e»fin au qui est l’échelle de la Carte de France de l’état -major. Ces réductions successives d’un même terrain montrent, au premier coup d’œil, comment certains détails de la planimétrie se simplifient à mesure que l’échelle diminue, disparaissent même, tandis que le relief du 'terrain reste, jusque dans la plus grande partie de ses détails. A chaque échelle, le relief est colorié topographiquement, de manière à présenter la miniature du terrain supposé vu à vol d’oi- seau, et il est accompagné de plusieurs dessins donnant : l’un, le figuré du terrain par des courbes de niveau équidistantes; l’autre, le même figuré par des lignes de plus grande pente ; un troisième, la planimétrie au trait; un quatrième, le dessin à l’effet, c’est-à- dire le relief étant éclairé et colorié topographiquement. Enfin, dans un cinquième dessin, la surface du terrain est coloriée géo- logiquement. Quant au relief correspondant, il est construit a pièces , c’est-à-dire qu’il est composé d’un plus ou moins grand nombre de parties qu’on peut assembler et désassembler à volonté, suivant l’ordre de superposition naturelle de ces parties. 56 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. Il est à peine besoin de faire ressortir que l’étude simultanée et comparée des reliefs et des dessins constitue un enseignement de la lecture des cartes et des plans, même du dessin topographique, et qu’elle donne sans peine, à simple vue , une connaissance d’une utilité générale et pourtant peu répandue. Gomment ne pas regretter qu’un jeune homme de dix-huit ans sorte d’un lycée sans savoir lire une carte et un plan, sans connaître la carte de France de l’état-major ! La Seconde série comprend des terrains où l’on rencontre des rochers, et qui sont traités à une suite d’échelles dont la plus grande est le - c-ot îc 1 0 0 0 0" Les deux premiers sujets sont empruntés aux îles d’Hyères. Portros et Porquerolles, dont le littoral est entièrement rocheux au midi, sont traitées l’une et l’autre au et réduites succès si vement au au jtïïFïï et au Au jôiïTïï? Portros est le sujet de deux modèles : dans l’un, c’est le niveau de la mer, plan général de comparaison, qui est figuré ; dans l’autre, c’est le fond de la mer qui l’est d’après des sondes des cartes marines. Au 2W00, P°l,(llieroPes est traitée aussi à deux points de vue différents : dans l’un des modèles, les hauteurs sont naturelles, c’est-à-dire à la même échelle que les distances horizontales ; dans l’autre, les hauteurs sont doublées. Celui-ci fournit un exemple de déformation qui fait ressortir la faute que l’on commet lorsque l’on amplifie les hauteurs des reliefs. Il faudrait, au lieu de la développer, combattre la tendance naturelle qui nous porte à exa- gérer la hauteur des montagnes que nous voyons. Ici encore , les réductions successives de ce relief , depuis le rüFoT jusqu’au ont de l’intérêt. C’est dans cette série que se trouve le relief au cr du col du mont Cenis, exécuté d’après les levers nivelés de la brigade topo- graphique du génie militaire, levers qui datent de 1812 et 1813. Ce modèle, dont les dimensions portent 0ra,80 sur 0m,60, repré- sente une étendue de trois lieues carrées sur laquelle se trouvent le lac et le couvent du mont Cenis, la route de France et d’Italie jus- qu’au delà de la Ferrière, le fort qui devait assurer le passage des armées (1), et un ensemble de hauteurs, dont deux avec glaciers ; ce qui élève ce relief au delà de 0ra,30. Ce sujet, l’un de ceux qui sont déposés sur le bureau de la Société, est très propre à donner une idée exacte des méthodes de la topographie moderne. (1) Décret du 22 mai 1813. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 57 Les reliefs de cette série, déjà coloriés topographiquement, n’attendent plus que le concours du géologue pour acquérir un in- térêt de plus par le coloriage géologique de leur surface et des profils latéraux qui les limitent. J’espère réussir à leur donner un jour ce genre d’intérêt. La Troisième série comprend les reliefs et les dessins qui s’adres- sent à la partie pittoresque de la topographie et de la géologie, c’est-à-dire aux rochers. Je pose en principe que le dessinateur topographe ou géologue ne peut bien rendre les rochers à petite échelle, qu’autant qu’il les a vus et étudiés d’abord à grande échelle; autrement il ne parvient que très difficilement, dans ces images réduites, à dégager les traits caractéristiques de telle ou telle roche des détails peu importants qui les masquent. Il est d’ailleurs évident que, dans ce genre de dessin où Limitation et la convention se rencontrent et se mêlent, l’étude d’après nature doit être d’un grand secours, doit être recommandée. Mais comme, dans l’enseignement, il serait difficile de conduire un grand nombre de jeunes gens sur le terrain, j’ai cru utile de préparer un certain nombre de reliefs exécutés d’après nature et à peu près à l’échelle, de manière à remplacer jusqu’à un certain point, provisoirement, la vue de la nature elle-même. L’île Tino du golfe de la Spezzia, exécutée au xfaniï d'après des dessins de la brigade topographique, est le morceau le plus important de cette série. Cette île, entièrement composée de roches calcaires de àOO mètres au plus de longueur et de 110 mètres de relief au-dessus de la mer, renferme sur son littoral très découpé de bonnes études de rochers à faire en plan et en élévation ; études qui sont déjà faites, comme modèles, au trait et à l’effet. D’autres, traitées en perspective, montrent le parti qu’on peut tirer des reliefs dans l’enseignement du dessin. Ce relief est exécuté à cinq échelles : au ainsi qu’il vient d ètie dit, puis au au 5 q\) o ? i o o o o ^ au 20000* ^ chaque échelle le sujet est traité géométriquement et à l’effet, en relief et en dessin. Les signes géologiques seuls y manquent. D’autres modèles, à pins grande échelle encore, appartiennent à cette série, et fournissent des sujets qui s’adressent autant au géologue qu’au topographe. L’un, exécuté au environ, repré- sente des roches de gneiss , dont les formes polyédrales sont conve- nablement rendues d’après un dessin du rocher de Primel, qui est situé à l’entrée de la baie de Morlaix. Trois autres représentent, à l’échelle du ^ environ, des fragments pris dans le calcaire noir 58 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. de Sablé , aux bords de la Saillie, sur la route de Sablé à Juigné. Cette troisième série est destinée à recevoir du développement. J’ai l’intention d’emprunter des sujets aux plâ tri ères des environs de Paris, aux roches d’érosion de la foret de Fontainebleau, aux belles falaises de la craie qu’on voit à Etretat, etc.; je voudrais •enfin donner des types bien étudiés de roches schisteuses, de roches basaltiques, etc. Les deux premières séries prendront aussi de l’extension. Les minute^ au de la carte. de France de l’état-major et celles de la marine, et des registres des nombreux niveilements.qui ont été faits sur .notre territoire, sont d’excellents matériaux, d’après lesr- qriels on peut exécuter avec une exactitude satisfaisante les reliefs des parties les plus intéressantes de la surface topographique de là France. Je citerai, par exemple, le fend du canal de la Manche, les Hautes-Vosges, les Pays d’Auvergne et le Cantal, considérés d’a- bord dans leur ensemble et à petite échelle, puis dans leurs dé- tails les plus importants au double point de vue de la topographie et de la géologie. C’est-à-dire que je traiterais, à la façon des reliefs de la troisième série, un Pu y d’Auvergne, un ancien glacier de la vallée de Saint-Amarin , un fragment des roches vosgiennes, etc. En résumé, mes efforts tendent à fournir aux géologues des formes topographiques exactement reproduites, et propres à faci- liter leurs études spéciales. Aujourd’hui la géologie peut et doit être traitée par des dessins à l’échelle, et même à grande échelle. Le géologue, sans être topographe, a besoin de connaître les pro- cédés dont la topographie fait usage pour construire ses reliefs et ses cartes; et, par une heureuse réciprocité, le topographe a tout profit à attendre de ses connaissances acquises en géologie. C’est une chose bien reconnue aujourd’hui, et qui tend à se faire jour dans l’enseignement. Les reliefs géométriquement exécutés y aide- ront certainement. S’il en était ainsi, la géographie, précédée d’un enseignement topographique convenablement limité, — .et les limites sont faciles à fixer, — serait plus facilement et mieux enseignée, en même temps que son résultat utile serait plus grand. Les encouragements que j’ai déjà reçus me soutiendront dans cette entreprise longue et dispendieuse. Blés reliefs, exécutés sté- réotomiquement dans le plâtre, sont reproduits avec la même matière, qui est jusqu’ici la matière plastique par excellence. Le moulage en plâtre, ou en soufre, ou à la gélatine, selon la nature du sujet, m’a permis de mettre dès à présent ces reliefs à la SÉÀHC'Ê Dè: 6 DÉCEMBRE 1852» 59 disposition d’un assez grand nombre d’établissements publics, tels que le Dépôt de la guerre et l’Ecole d’état-major, l’Ecole poly- technique, les Ecoles des ponts et chaussées et des mines, le Col- lège de France et la Sorbonne, le Conservatoire des arts, et métiers, le Muséum d’histoire naturelle, l’Ecole de Saint-Cyr, l’Imprimerie impériale, pour son atelier de gravure des cartes topographiques et géologiques, etc. Il est à espérer qu’ils pénétreront plus avant dans renseignement public, où ils seraient d’une utilité réelle. Une Quatrième série renferme, sous la désignation de Variétés , des essais de hautes montagnes à petite échelle, au syôVo'ô Pai* exemple, diverses études de topographie, et des surfaces en relief figurant des Lois naturelles exprimées par des tables numériques à détix entrées, ou des Lois mathématiques données par des équations entre trois variables, Bardin , ancien élève de l’Ecole poi ytechnique. À l’occasion de cette communication, M, de Verneui! rap- pelle que M. Sopwith a déjà exécuté pour le pays de Galles des plans géologiques en relief qui sont formés de pièces correspon- dant aux différentes couches. M. Deiahaye complète les renseignements qu’il a déjà donnés sur Fhydrosilicate de soude de Sablon ville ( Bulletin de ht Société géologique , 2e sér . , t. IX, pag. 39/j) : iJ présente en même temps de nouveaux échantillons de cet hydrosilicate. Les recherches récentes qu’il a faites ont confirmé le résultat de ses premières analyses, et il se réserve de publier ultérieu- rement un travail plus étendu sur ce sujet. Il ajoute que les murs environnant le gîte d’hydrosilicate de soude sont couverts d’efflorescences formées par du sulfate de soude qui est quelquefois en cristaux très nets. M. Levallois fait remarquer, relativement à la présence du sulfate de soude le long des mors qui avoisinent le gisement de Fhydrosilicate de soude de Sablonville, que les fabriques de soude rejettent une grande quantité de sulfure de sodium qui, par l’exposition à l’air, doit facilement se changer en suîfatede soude. M. Delesse ajoute que les renseignements nouveaux apportés parM. Deiahaye démontrent bien que Fhydrosilicate de soude de 60 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. Sablonvilie n’est pas lin produit naturel. En effet, dés à présent le gîte est à peu près complètement épuisé, par conséquent il était très peu étendu. D’un autre côté, il n’est guère possible d’admettre que, dans le bassin de Paris, il ait pu surgir une source contenant de la soude caustique, car cette source serait nécessairement venue d’une très grande profondeur, et alors un alcali aussi caustique que la soude aurait dû être neutralisé dans son trajet. La structure de Fhydrosilicate de soude, qui présente souvent des zones concentriques enveloppant encore un noyau de silex, fait d’ailleurs bien voir que cet hydrosilicate s’est formé sur place aux dépens de la silice du silex-, la trans- formation a eu lieu , de la circonférence vers le centre , sous l’influence d’eaux qui venaient delà surface et qui contenaient de la soude ou des sels de soude facilement décomposables : M. Delesse regarde en conséquence cet hydrosilicate de soude de Sablonvilie comme un produit artificiel qui résulte d’une sorte de pseudomorphose du silex appartenant au terrain de transport. M. Deianoue dit qu'il n’admet pas que le silex puisse se transformer en hydrosilicate de soude par l’action du carbonate de soude ou d’un sel de soude, dans lequel il ne se dissout pas. M. Delesse fait remarquer que fhydrosilicate de soude de Sablonvilie est mélangé de soude caustique -, or il est facile de constater, en faisant bouillir une lessive de soude avec de la calcédoine ou avec du silex qu’il se dissout des flocons de silice ; il n’y a donc rien d’impossible à ce que, par une action très pro- longée, il se soit opéré une combinaison directe de la soude avec le silex. Les pseudormophoses résultent le plus souvent d’une action de ce genre. D’ailleurs, Fhydrosilicate de soude n’est pas sorti du sein de la terre, il s’est visiblement formé aux dépens du silex, par conséquent il faut nécessairement que le silex ait été attaqué par la soude ou par des sels de soude. M. Élie de Beaumont fait hommage à la Société de son ou- vrage intitulé : Notice sur les Systèmes de montagnes. M. le Président prie M. Élie de Beaumont de recevoir les remerciements de la Société pour cet important travail. M. Haime présente, au nom deM. Milne Edwards et au sien, B1BË B B i B <* séance; DU 6 DÉCEMBRE 1852. M la troisième partie de îa monographie des polypiers fossiles de la Grande-Bretagne Ç4 Monograph of the Britishfossil comls, 3e part. -, — Corcils from the Permian formation and the mountain limes tone) . M. de Verneuil prend îa parole pour exposer à la Société les principaux résultats du voyage géologique qu’il a fait en Espagne, en 1852, en compagnie de M. Ed. Gollomb. Coup d’ œil sur la constitution géologique de quelques provinces de V Espagne. , par MM. de Verneuil et Ed. Gollomb. L’Espagne, considérée sous le rapport géographique, diffère telle- ment du reste do l’Europe, qu’on ne sera pas étonné si , avant de décrire les formations géologiques que nous avons étudiées cette année, nous jetons un coup d’œil rapide sur les formes ou le relief du sol (fig. 1, 2, pl. I, fig. 3, pl. II). Nos travaux ne sont pas assez avancés pour que nous puissions dès à présent faire suivre cette notice de la publication d’une carte géo- logique ; les matériaux que nous recueillons pour arriver à ce résul- tat nous donnent l’espoir de l’atteindre plus tard. Les observations que nous avons faites cette année se trouvent comprises dans un grand triangle qui a Madrid pour sommet, et dont la base suit le littoral de la Méditerranée , depuis Alicante jusqu’aux environs de Castellon de la Plana, dans le royaume de Valence. La coupe fig. 1, pl. I, représente l’itinéraire que nous avons suivi : Il c’est un des côtés du triangle en question. Cette ligué part de Madrid, se dirige vers l’Ë. sur Cuenca, puis s’écarte de la ligne droite pour passer sur quelques uns des sommets élevés de 'la contrée. Elle va | ainsi sur Requena et Runol où, au lieu de suivre sa direction primi- I tive à l’E.., elle s’infléchit vers le S. pour passer L Cofrentes, Âlmansa, I VilJena, et atteindre enfin Alicante. Pour la première partie de notre course, nous renvoyons donc le lecteur à celte coupe qui embrasse une longueur de 630 kilomètres, nombre qui n’indique pas exacte- ment la distance comprise entre Madrid et Adcante, car nous faisons I partir cette coupe de 60 à 65 kilomètres plus loin que Madrid , du côté de l’O. , pour y représenter une part ie de la chaîne granitique | du Guadarrama; ensuite, toutes les inflexions et les coudes que nous lui faisons subir complètent l’ensemble de s 630 kilomètres. La coupe fig. 2, pl. î, représente un autre côté du triangle. 02 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. Getle partie de l’Espagne se divise facilement en région de plaines et en région de montagnes ; on pourrait aussi la considérer, comme plusieurs auteurs l’ont déjà fait, au point de vue des plateaux; mais, pour le moment, il nous paraît plus naturel de parler d’abord des plaines et des montagnes, sauf à revenir plu s tard sur l’existence des plateaux, qui jouent, en effet, un rôle important dans la structure de la contrée. La grande plaine tertiaire que l’on traverse d’abord en allant de Madrid à Cuenca est limitée, à l’ouest, par la chaîne granitique du Guadarrama, contre laquelle viennent buter des dépôts plus récents que le granité. Au nord, elle est bornée par des plateaux élevés et une série de collines, d ^bourrelets, qui séparent le prolongement du Gua- darrama, qui prend le nom de Sierra Pela , de la région où se trouve Molina de Aragon. Ces bourrelets, comme nous leo appelons, ne sont pas précisément formés par de véritables montagnes ; cependant, à environ AO kilomètres à l’ouest de Molina de Aragon, il s’en trouve un qui est un peu plus élevé que les autres, et indiqué sur quelques cartes sous le nom de Sierra del Solorio. C’est le long de cette ligne, dirigée à peu prèsdel’E. àl’O , que se trouve la lign e de partage des eaux entre le bassin de l’Ëbre au nord et celui du Tage au midi. A l’est, cette plaine est limitée par une iongue bande crayeuse de 130 à 1A0 ikilomètres de longueur, dirigée à peu près N. S. et dont Cuenca occupe le centre. Au sud, les limites de cette grande plaine , centrale sont plus difficiles à bien préciser, parce quelle se prolonge i en se resserran t entre quelques chaînes de montagnes ; elle accom- pagne, vers l’ouest, pendant la première partie de leur cours, le Tage elle Guadiana; puis, vers le sud-est, elle s’insinue en bande étroite 1 jusque vers les plaines de Murcie. Néanmoins, vue en masse, elle est bornée au sud par fes monts de Tolède, par la partie orientale de la Sierra Morena et par la Sierra d’Alcaraz, D’après lest calculs de M. Casiano de Prado , cette grande plaine, avec ses diverses sinuo- sités, n’aurait pas moins de 1500 lieues carrées, soit 37 500 kilo- mètres carrés Si l’on considère ceAte plaine comme un plateau, on voit d’a- bord que sa surface n’est pas horizontale; elle est relevée dans sa partie nord-est, et va en s ’abaissant du côté du sud-ouest. Les fleuves et les rivières qui la sillon» lent ont suivi cette direction ; le Tage la coupe à peu près par le mi. lieu et en occupe la partie la plus déclive. A droite et à gauche du cours du fleuve , les terrains se relèvent comme les pages d’un livre ouvert , mais toutefois très aplati» Les SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 63 autres rivières, le Tajuna, le Jarama et le Guadarrama se réunissent au Tage, en arrivant de différents points de l’horizon assez éloignés les uns des autres. Le volume d’eau débité par ces rivières est peu considérable. A en juger par ce qui existe dans le Manzanarès à Madrid et dans le Tage à Aranjuez , que nous avons eu l’occasion de voir dans les mois de mai , de juin et de juillet, puis dans le Jucar à Guenca , on peut en induire qu’elles débitent une très petite quantité d’eau, comparée à celle qui est débitée dans les autres contrées de l’Europe par des cours d’eau de même longueur. Les mesures de jaugeage manquent et nous ne pensons pas qu’on trouve nulle part de renseignements sur ce sujet. Leur régime est en général assez tranquille dans leur cours à travers la grande plaine tertiaire. Les eaux se sont creusé un lit moyen dans les sables , les gypses et les niatériaux meubles des terrains tertiaires et quaternaires. Le Tage , à Tolède, présente tou- tefois un phénomène remarquable. Au lieu de contourner, ensui- vant la plaine tertiaire, le promontoire granitique sur lequel la ville est bâtie, il Se traverse par une fente assez étroite. Les eaux du Tage et de la Tajuna sont d’ordinaire chargées de sédiments en suspension. La pente moyenne de la première de ces rivières ^ depuis Trillo jus- qu’à Aranjuez, est assez difficile à calculer , à cause de l’incertitude qui règne encore sur les altitudes de ces deux points. La longueur parcourue est de 160 kilomètres environ. Aranjuez est situé à 5 AO mè- tres d’altitude suivant M. Sinobas, et à A7A suivant M. Subercase, membre de la commission géographique de Madrid. La moyenne serait donc 507 mètres. Trillo , point où le Tage quitte la région montagneuse , serait , suivant nos propres observations , à environ 700 mètres. La différence entre les deux points serait ainsi de 193 mè- tres, qui , répartis sur une longueur de 160 kilomètres, donnent une pente de 0,00120 par mètre. D’Aranjuez à la mer» la pente serait moindre , car la distance étant de 5 A0 kilomètres environ, et la chute de 507 mètres, on n’aurait qu’une pente de 0,0009A (1). Dans sa partie supérieure, le Tage a une pente considérablement plus forte. Depuis sa source jusqu’à Trillo , il circule dans les montagnes , et sa (I) La pente moyenne du Rhône est : de Lyon à la mer, 0,000497; de Genève à la mer, 0,000688. Voyez L.-L. Vallée, Du Rhône et du lac de Genève , in-8. Paris, 4 843. SÉANCE BU 6 DÉCEMBRE 1852. 64 chute est de 900 mètres environ , qui , répartis sur une distance de 130 kilomètres, donnent une pente de 0,00692. C’est à cette pente considérable qu’il faut attribuer les gorges profondes dans lesquelles il est encaissé depuis sa source jusqu’à Trillo. C’est, au reste, un caractère qui ne lui est pas particulier et que partagent la plupart des rivières qui prennent leur source dans le haut plateau situé à l’est de Cuenca. Le Guadiela , le Jucar, le Gabriel et le Guadalaviar sont renommés, en effet, pour les gorges profondes et pittoresques à travers lesquelles ils circulent. Lorsque ces défilés sont en zigzag, on les appelle hozes ou faucilles ; telles sont la hoz de Cuenca , celle de Canizares , près Beleta. Le nom plus général qu’on leur donne est celui de barrancos ; quand deux de ces barrancos se réunissent , ils laissent entre eux une pointe de terre qui, bordée de profonds escar- pements, forme une citadelle naturelle. A leur entrée dans la grande plaine, les rivières sont encore très encaissées. Ainsi, à Trillo, la différence de niveau, entre le plateau tertiaire des environs de Yiana et le pont du Tage , est d’environ 350 mètres. A Fuenliduena, c’est-à-dire 100 kilomètres plus bas environ , le Tage coule dans une large dépression , à pentes très douces , de 160 mètres au moins de profondeur, et tellement évasée, qu’il ne faut pas moins de deux heures pour la traverser en voiture, La vallée de la Tajufia est aussi profonde à Perales; la différence de niveau, entre les eaux du Tage à Fuenliduena et la partie la plus élevée du plateau qui le sépare de la Tajuna . est , selon nos mesures, d’environ 225 mètres. Près d’Aranjucz, la vallée où coule le Tage est à peu près de la même profondeur, car entre cette ville et le plateau voisin, à Ocana, il y a, suivant la Commission géographique de Madrid, une différence de niveau de 230 mètres. La profondeur du lit des rivières s’explique ici par la pente assez forte de leur cours et par le peu de solidité des matériaux qui composent les parties inférieures et moyennes du ter- rain tertiaire. En venant d’Alcolea à Almadrones et à Torija , on laisse sur la droite de profonds sillons tracés par le Hénarès et ses tributaires ; à Torija, ou plutôt entre cette ville et Taracena, se termine le pla- teau de l’Alcarria , et commence la grande plaine de dénudation, où sont situés Guadalajara et Madrid. Toutes ces érosions prouvent que, pendant la période quaternaire SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 65 ou au commencement de l’époque actuelle, les eaux ont joué un rôle considérable et ont contribué à façonner le relief du sol tel qu’il se présente aujourd’hui; mais est-ce à dire que l’Espagne ait été soumise à ces grands courants diluviens que nous remar- quons en France et dans le nord de l’Europe? C’est une question pour laquelle nous n’avons pas encore recueilli de documents suffisants. Qu’il nous suffise de faire remarquer que les principales chaînes , telles que la chaîne cantabrique (1) et le Guadan ama, sont bordées d’une celui ure de dépôts de transport de 25 à 30 kilomètres de large qui leur est propre (2), mais que la grande plaine de la Manche et de la Xouveiie-Castiîle est presque toujours exempte de blocs ou de graviers, et que toute la région montagneuse orientale entre celte plaine et la Méditerranée en est complètement dépourvue. Cette région , qui est très accidentée , mais dont les sommets attei- gnent en général des niveaux peu différents, sans dessiner des chaînes proprement dites, n’offre nulle part les traces d’un véritable diluvium. Ce n’est qu’avec une extrême réserve que nous abordons la ques- tion des chiffres relatifs à la hauteur moyenne des diverses parties du plateau central de l’Espagne. Les matériaux que nous possé- dons sur ce sujet sont puisés à plusieurs sources : dans i’omrage de D. M. Rico y Sinobas (3) ; dans le tableau orographique dressé par M. Subercase, membre de la commission de la carte géographique de la province de Madrid ; dans la carte topographique de la pro- vince de Madrid de D. Fr. Coello ; dans les mesures de M. de Hum- boîdt et d’Antillon, et dans nos propres observations , faites avec un baromètre anéroïde. Mais il règne encore une très grande incertitude ( I ) Le diluvium de la chaîne cantabrique ne se voit que sur son ver- sant sud; celui du versant nord, s'il en existe, serait dans la partie du littoral de l'Océan aujourd'hui sous les eaux de la mer. D’après la belle carte géologique de la province de Madrid par M. Casiano de Prado, que vient de faire publier le gouvernement espagnol, le dilu- vium du Guadarrama s’étend jusqu’à Madrid et Alcala de Henares, formant ainsi une bande de 23 à 30 kilomètres de large. (2) La Sierra Morena, qui est une chaîne d'une plus haute antiquité et d’une moindre élévation, n’offre pas de ceinture semblable. (3) Memoria sobre las causas nieteorolagico-Jisicas que producen las constantes saq ai as de Martin y Alméria, — - 4 vol. in-8? par D, Manuel Rico y Sinobas. Madrid, 1851, Soc. géoL, 2e série, tome X. 60 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. sur h hauteur exacte des points principaux du territoire. Nous en citerons un exemple frappant. L’altitude de Madrid, suivant M. B. y Sinobas, est, d’après une moyenne barométrique, de 655m,86 Suivant Antilion, 24 I 2 p. (le pied = 0m, 2785). . . . 67lm,74 Suivant Bory Saint-Vincent ( 3 40 toises ), de ... . G62m,67 Suivant la carte de D. F. Coello (2450 p.), de 682m,32 Suivant X Annuaire du Bureau des longitudes , de . . G 08'", 00 Suivant M. de Humboldt, de 651m,00 Suivant la Commission géographique de Madrid, 2281 p., de G3ora,25 Moyenne des huit observations = 652m,00 Avec des éléments aussi incertains , les erreurs de 50 mètres en plus ou en moins, peuvent facilement s’expliquer (1). Pour obtenir la hauteur moyenne de la grande plaine de la Nouvelle-Castille , nous prendrons les chiffres de M. Sinobas, et nous trouvons qu’elle se relève beaucoup vers le nord-est. Dans les environs deTorija, où commence le plateau de l’Alearria , elle a déjà 868 mètres, à Almadrones 962 , et le point culminant de ce côté, Alcolea, est à 1019 mètres; mais ces altitudes n’existent que vers la lisière du bassin, car déjà Guadalajara n’est plus qu’à 666 mètres (2). Le relèvement est à peu près le même vers l’est, du côté de Cuenca. En effet , ce dernier endroit est à environ 1000 mètres tandis que sur la même ligne las Tetas de Viana , près de Trillo , sont à 1070 , et le plateau qui s’étend vers Itecuenco à 1050 mètres. Mais ce n’est également ici que le bord oriental qui se relève ainsi , puisque à Fuentiduena , à 100 kilomètres vers le centre, nous n’avons plus que 594 mètres. Il est vrai que Fuentiduena est dans la dépression du Tage, et que, entre cette rivière et la Tajuna, le plateau qui traverse la route de Madrid est encore à 750 mètres. Dans la direction du sud nous obtenons , d'après M. Sinobas , les (1) Les incertitudes dont nous parlons viennent de cesser, pour la province de Madrid, par les beaux travaux de la Commission géogra- phique et le tableau orographique que nous recevons à l’instant. D’après ce tableau, les cimes le-, plus élevées de la chaîne au nord de Madrid auraient: Penalara , 2383 mètres, et Cabezas de Hierro., 2370. (2) Suivant Thalacker et Antilion, Alcolea serait à 1242 mètres, Torija a 994 et Guadalajara à 711. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 67 chiffres suivants: Aranjuez 540 , Ocana 694 (1) , La Guardia 674, Madridejos 665 , Yillarta , qui est le point le plus bas , en raison de sa situation sur le bord du Guadiana, ou plus exactement du Gi- guela son affluent , à 627. Le bassin se poursuit encore un peu vers le sud, mais il se relève à Manzanarès et à Yaldepenas, qui sont à 651 et 674 mètres Puis, si l’on poursuit son chemin à quelques kilo- mètres plus au sud, on entre dans la région montagneuse de la Sierra Morena, région qui, placée sur les pentes déclives du plateau central, ne s’élève guère en général au-dessus de 900 à 1000 mètres, et arrive à peine à la hauteur qu’atteint le terrain tertiaire dans les environs de Cuenca, de Trillo et de Barahona. Pour connaître le relèvement du bassin du côté de son bord occi- dental, nous n’avons que deux points à citer: Madrid, d’abord, h 652 mètres suivant la moyenne précédente, ou, plus exactement, à 635 mètres, suivant la Commission géographique, etl’Escurial, qui se trouve placé à la limite du granité, au pied de la chaîne du Guadar- raina , à 913 mètres, suivant la Commission géographique. Nous voyons donc, relativement au relief de ce bassin, qu’un observateur placé à son centre ne peut sortir du côté du nord , de l’est ou de l’ouest, qu’en s’élevant de 300 à 400 mètres. Au sud, du côté de Vaidepenas, le relèvement est peu ou pas sensible. En somme , si nous évaluons la hauteur moyenne de ce grand plateau central à 600 mètres, nous restons plutôt au-dessous de la réalité qu’au-dessus. Quand on possédera des mesures plus exactes, on arrivera probablement à un chiffre un peu plus élevé ; provisoire- ment dans nos coupes, nous avons adopté le chiffre de 600 mètres pour la hauteur moyenne de cette plaine au-dessus du niveau de la mer. La grande plaine tertiaire que nous menons de parcourir n’est pas isolée au centre de l’Espagne ; elle a une sœur jumelle située au nord un peu ouest , qui ne le cède pas en étendue ; c’est la plaine du bassin du Duero. Ces deux contrées sont séparées l’une de l’autre par la chaîne gra- nitique du Guadarrama, qui se prolonge dans la direction du nord- est. Les roches granitiques cessent de se montrer dans les environs (I) D’après le tableau orographique de M. Subercase, basé sur des opérations plus certaines que celles de M. Sinobas, Ocana est à 704 mètres, et Aranjuez à 474 mètres. 68 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. de Somo-Sierra et de Buitrago , ei sont remplacées à i’est par des gneiss et des dépôts anciens paléozoïques, puis par une mince bordure de dépôts crétacés. La plaine qui nous occupe a sur la carte une forme à peu près carrée, orientée parallèlement aux lignes du méridien; aux quatre coins du carré se trouvent les villes de Léon, Burgos, Salamanque, Sepulveda, dans la province de Ségovie, puis au centre se rencontre ValJadolid. Au nord elle est limitée par la chaîne cantabrique , sur une ligne de 150 à 160 kilomètres de longueur. ïci les dépôts tertiaires, recou- verts de matériaux de transport, viennent buter contre une bande assez étroite de dépôts appartenant à la période crétacée. A l’est elle est bornée par la Sierra de Burgos et de Soria, et au sud par la Sierra de Guadarrama. A l’ouest ses limites s’étendent le long d’une ligne presque droite, tirée de Salamanque à Léon, et longue de 150 kilo- mètres environ. Ce grand carré tertiaire a donc 200 kilomètres de long sur 150 de large, soit 30,000 kilomètres carrés environ. Les dépôts crétacés l'entourait presque sans discontinuité sur trois de ses côtés, le nord , l’est et le sud. Puis sur ses limites du côté du Portugal ou de l’ouest, les dépôts tertiaires, suivant la carte de M. Ezquerra del Bayo, sont limités par des roches métamorphiques, des gneiss et des granités. Le Duero est le seul grand fleuve qui arrose ce bassin ; il le coupe par le milieu et joue le même rôle que le Tage dans le bassin que nous venons de quitter. ïl court dans la direct on de l’est à l’ouest ; il prend sa source dans les montagnes de Soria , passe à Aranda , à Tudela , près de Yalladoüd , continue sa marche vers l’ouest à Toro, et sort définitivement de la plaine dans les environs deZamora, pour entrer un peu plus loin en Portugal, ayant fait environ 200 ou 210 kilomètres dans le terrain tertiaire. Les principales rivières qui se jettent dans le Duero sont : au nord, celles qui descendent de la chaîne cantabrique , dont les principales sont l’Esla, le Vaîderaduey, le Garrion et le Pisucrga ; au sud, les principaux affluents qui prennent leur source dans la Sierra de Guadarrama, tels que le Termes, l’Adaja, le Cega, le Duraion et le Riaza. Le système hydrographique de ce bassin représente assez bien un arbre dont le tronc principal serait le Duero, et dont les brandies SÉANCE BU 6 DÉCEMBRE 1852, 69' et les rameaux divergents seraient les affluents de droite et de gauche. Nous ne possédons aucun document, aucune note, qui puisse nous éclairer sur la question de la quantité d’eau débitée en moyenne par le Duero , à sa sortie du bassin dans les environs de Zamora. Il est probable que cette quantité est plus considérable, toutes proportions gardées, que celle fournie par le bassin du Tage, parce que les moyens d'alimentation des affluents du Duero sont dans des condi- tions plus favorables. Les trois chaînes de montagnes qui encadrent ce bassin , l’une au nord , la chaîne cantabrique, l’autre au sud, la chaîne du Guacîarrama , la troisième à l’est , la Sierra deBurgos, sont toutes assez élevées , et dépassent 2 000 mètres; sur quelques points, les neiges d’hiver y persistent fort longtemps; on les voit même, dans la Sierra de Guadarrama et dans les Sierras d’Àviîa et de G redos, résister aux chaleurs de l’été et durer toute l’année. C’est là une cause énergique d’alimentation pour les affluents du Duero , qui n’existe pas au même degré pour ceux du Tage. L’ensemble de ce bassin , suivant quelques cotes de hauteur prises sur la roule de Burgos à Somo- Sierra , et d’après les altitudes indi- quées par M. Sinobas, ferait supposer qu’il est en moyenne de près de 100 mètres plus élevé que celui du Tage. Voici quelques unes des cotes de M. Sinobas, suivant une ligne coupant le bassin dans la direction du N.-O. : à Marlin-Munoz , 13 à IA kilomètres au N. de Villacaslin , où commence le terrain tertiaire, au N. du Guadarrama, il donne le chiffre de 917 mètres, 'a Olmedo 872, Majados 822, Buecillo 829, Valladolid 792, Parama de Villanubla 93G, Villalpando, suivant M. de Humboldt, 062 ; As- torga 793, Benavcnte , suivant M. de Humboldt, 670. Ce dernier lieu est peu éloigné de Zamora, sur le Duero, qui est le point le plus bas de tout le système (1). Ainsi, en prenant en considération toutes ces cotes, quelque peu nombreuses qu’elles soient, on voit que, par le nivellement général de tons les terrains tertiaires de celte plaine , on arriverait à une hauteur moyenne qui dépasserait 700 mètres. Si nous adoptons ce chiffre de 700 , c’est pour éviter toute chance d’exagération dans des mesures encore aussi incertaines. (l) Suivant M. Wilkomm, Zamora ne serait qu'à 37o mètres, Vil- lalpando à 591, Benavcnte à ^81, Valladolid à 682, et Astorga à 727. 70 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. Les cotes de hauteur prises sur la route de Burgos à Madrid, avec le baromètre anéroïde, donnent une idée assez exacte des mouve- ments du sol dans cette partie de l’Espagne, surtout si , comme nous l’avons fait, on commence les observations à Saint-Sébastien, au bord de la mer. Dans cette dernière localité, notre baromètre anéroïde marquait, le 30 avril 1852, 761 millimètres, que nous avons pris pour terme de comparaison, équivalent à 0 mètre, pour calculer toutes les autres cotes jusqu’à Burgos; cette ville, autour de laquelle nous avons fait des excursions, nous a servi de point de comparaison, et de là jusqu’à Madrid les hauteurs sont calculées , par rapport à Burgos , dont nous avons estimé la hauteur à 900 mètres. Les alti- tudes absolues ne sont probablement pas très exactes, et peuvent même arriver à des limites d’erreur de 50 à 60 mètres ; mais les différences d’un point à un autre y sont représentées avec un degré d’approximation suffisant pour ce genre de travail. Mètres. St. Sébastien 0 Orm3stegui 200 Col avant Bergara. .... 476 Bergara 134 Col de Salinas 640 Vitoria 534 (526, Humboldt); (539, Bory de Saint-Vincent). Miranda de Ebro 487 (459, Humb.). Amevugo 582 Pancorbo 634 Cubo 700 (688, Humb.). Bibriesca 735 Pradano 807 La Brujula 1025 Qnintana Palla 978 (931, Humb.). Burgos 940 (selon Humboldt et Bauza, 875); nous admettons 900 comme moyenne. Gogollos 949 Lerma 887 (865, Humb.). Bahabon 961 Gumiel 887 Aranda de Duero 840 Onrubia 1036 (1 054 selon Humboldt). Boceguillas 1010 Castillejo 1036 Cerezo 1069 Venta de Juanilla 1164 (1181 selon Humboldt). SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 71 Mètres. Somo Sierra. . 1460 (I 4 1 2 d’après M. Subercase), 1 460 d’après Bory. Buitrago 1012 (1016 selon M. Subercase). Lozoyela 1 073 Cabrera 1085 Cabanillas 962 San Agustin 687 (685, selon M. Subercase). Madrid 680 Si l’on décompose le tableau précédent , on voit qu’en partant des bords de la mer à Saint Sebastien , on s’élève rapidement à 640 mètres au col de Saünas, qui n’en est éloigné que de 55 kilomè- tres en ligne droite , puis on descend par Viloria dans la partie su- périeure du bassin de l’Ébre, que l’on coupe transversalement, et l’on passe à Miranda de Ehro , à £i87 mètres. De là on remonte un des flancs de ce même bassin, en passant par le défilé de Pancorbo, à 634 mètres , et l’on s’élève peu à peu jusqu’au sommet de la Brujuîa à 1025. Cette localité, située sur la ligne de partage des eaux du bassin de l’Èbre et du bassin du Duero , passe dans le pays pour être un des points les plus élevés de l’Espagne; cepen- dant on voit que , d’après nos mesures, il ne dépasseguère 1000 mè- tres. A partir de la Brujuîa , on entre définitivement dans le domaine du Duero, qu’on ne quitte plus jusqu’au pied de Somo-Sierra , sur une longueur de 150 kilomètres en ligne droite. Cette longue ligne, dirigée nord-sud , peut être considérée comme faisant partie de la portion supérieure du bassin; elle est peu accidentée; on n’y rencontre pas de montagnes, mais seulement quelques collines peu élevées; le nom de plateau peut £ans inconvénient lui être appliqué. Burgos, situé à son angle nord-est, est à 900 mètres; on s’élève et on descend alternativement d’une cinquantaine de mètres en pas- sant à Cogoilos, Lerma , Bahabon et Gumiel; puis on descend dans la dépression du Duero à Aranda, à 840 mètres. C’est le point le plus bas de cette ligne. Bahabon étant à 961 mètres, le Duero coule dans une dépres- sion de 121 mètres de profondeur environ. A partir de ce point, on monte constamment par une pente insensible jusqu’au pied de l’axe granitique de Somo-Sierra , où se trouve la Venta de Juanilta à 1164 mètres. En résumé , le bassin du Duero a une inclinaison générale du côté de l’ouest, vers le Portugal; puis, il a deux plans inclinés principaux, l’un au nord, qui se relève et s’appuie contre la chaîne cantabrique, 72 SÉANCE SU 6 DÉCEMBRE J 852. » l’autre au sud, qui joue le même rôle par rapport à la chaîne du Guadarrama; le Duero, au centre, occupe la ligne d’intersection de ces deux plans. Terrain tertiaire . La constitution géologique des deux grands bassins que nous venons d’examiner paraît être identique sous tous les rapports; jusqu’à présent on n’y a pas reconnu d’autre formation que des dépôts lacus- tres tertiaires. M. J. Ezquerra del Bayo (l),en rapportant ces grands lacs à l’époque tertiaire sans désignation bien précise, a prétendu y avoir rencontré des fossiles, tels que Lymnœa socialis, Planorbis carinata, Paludina impur a , espèces qui existent encore dans les eaux stag- nantes du pays , ce qui n’est guère probable. Il y distingue trois groupes principaux : le supérieur, calcaire, le moyen, marneux et gypseux, et l’inférieur, composé d’argiles, de grès et de conglomérats. C’est dans cette assise inférieure qu’on a recueilli près de Paredes et de Soptna , aux environs de Yalladolid , des ossements de Mastodon angustidens . Ces trois assises principales existent en général sur les plateaux où le terrain n’a pas été dénudé, et principalement dans ceux de la Manche et de l’Alcarria ; quelquefois cependant elles s’y réduisent à deux par l’absence des gypses et des marnes. Ainsi à la limite nord- est du bassin du Tage, on remarque, près de Ti il:o, deux montagnes tertiaires qui dominent la contrée, et qu'on nomme las Tetas de Yiana; elles ont environ 1070 mètres d’altitude, et comme le Tage, qui coule à leur pied, a dans ce point là près de 700 mètres, ces deux montagnes surgissent en réalité de plus de*350 mètres au-dessus de la vallée. Les assises successives dont elles sont composées s’y trou- vent dans une position horizontale, quoiqu’elles soient placées sur la limite du bassin ; on n’y remarque pas d’inclinaison sensible dans un sens ni dans l’autre (2). Les assises supérieures sont formées d’un calcaire siliceux , dur, caverneux, identique avec celui des environs de Burgos , dans lequel (1) Bull., 2e série, t. II, p. 631. 1845. — Anales de minas , t. 111 , p. 308. 1845. (2) En descendant du haut plateau tertiaire vers Yiana, on voit les couches souvent inclinées en divers sens. 11 y a lieu de croire que ces dérangements sont dus à des affaissements qu’expliquent les pro- fondes dénudations où coule le Tage. SÉANCE DO 6 DÉCEMBRE 1852* 7S nous avons trouvé des Planorbes, des Paludinos , des Cyclostomes ; pui«, dans la partie inférieure on rencontre de puissantes assises de conglomérats ou nagelfluh, formées de sable, de gravier et de cailloux, atteignant au maximum la grosseur du poing, et fortement liées par un ciment calcai éo-siliceux, coloré souvent en rouge par des éléments ferrugineux. Quand le ciment perd de sa force, ou manque tout à fait , la masse se réduit en sable ou en gravier. Nous avons donc ici, à lasTetas de Viana, une épaisseur considérable de terrain tertiaire d’eau douce , sans que les marnes gypseuses s’v soient développées. Dans les autres parties du bassin, vers la plaine de Madrid et de Guadalajara , le terrain tertiaire n’offre positivement que deux étages, l’étage supérieur et calcaire ayant été enlevé par les grandes dénu- dations de l’époque quaternaire. Un phénomène assez remarquable, signalé par MM. Ezquerra de! Bayo et Casiano de Prado, c’est l’existence de sources d’eau salée au milieu de ce bassin lacustre, comme par exemple à Espartinas et près d’Ocana. M. Ezquerra en cite également dans le terrain lacustre de l’Èbre. Est-il vraisemblable que ce sel appartienne à des forma- tions déposées dans des eaux douces ou même saumâtres? Ne serait- il pas possible que les eaux salées du bassin du Tage provinssent du trias qui , au sud-est à Minglanilla et dans plusieurs localités près de la rivière Gabriel , est immédiatement en contact avec le terrain tertiaire (t) ? Ces deux grands dépôts d’eau douce, restes d’anciens lacs, qui sont un des traits caractéristiques de la géologie du centre de l’Espagne, présentent ce fait remarquable qu’ils sont à des niveaux très élevés au-dessus de la mer. Il existe encore d’autres dépôts tertiaires d’eau douce assez étendus; mais ils ne sont pas, à beaucoup près, aussi éle- vés. Tel est le bassin de l’Èbre , qui court à peu près parallèlement aux Pyrénées depuis Logrofio jusqu’à Asco ou Mora , sur près de 350 kilomètres de longueur et sur environ 80 ou 100 kilomètres de largeur en moyenne, où se trouvent des formations et des dépôts tertiaires pareils à ceux du centre. Son niveau est très inférieur à celui-ci. Suivant la carte de D. Fr. Coello, la ville de Miranda de Ebro (2), située dans la partie la plus supérieure du bassin tertiaire, (1) Ce phénomène, quelque extraordinaire qu’il paraisse, se présente aussi en Asie-Mineure, à ce que nous assure notre ami M. deTchihaw chelï. (2) Selon M. de Humboldt, cette ville serait à 459 mètres, et selon SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 74 presque à la limite de la croie, est â S97 mètres, et Haro à 385 mè- tres; Logroho, un peu plus bas, à 319 ; Tudela, selon M. Sinobas, à 135 mètres (ce qui nous paraît trop faible) ; Saragosse à peu près au centre, à 27A, selon Antillon. Nous trouvons donc ici une dépression considérable, qu’on peut évaluer de AÜO à 500 mètres, si l’on compare le bassin de î’Èbreaux bassins voisins du Duero et du Tage. En effet, si nous réduisons, par la pensée, ces trois bassins à l’état de plateaux horizontaux , et que nous les comparions les uns aux autres , nous en trouvons un , celui du Duero, à 700 mètres d’altitude, un autre, celui du Tage à 600, puis celui de l’Èbre qui s’abaisse à environ 200 ou 250. Ces anciens lacs ont-ils communiqué les uns avec les autres ? sont- ils contemporains ? et quel est leur âge précis dans la série des ter- rains tertiaires? Ces deux dernières questions sont plus faciles à résoudre que la première. En effet , en examinant la composition respective de ces grands bassins, on reconnaît qu’elle est identique. La nature minéralogique des roches, les calcaires caverneux et sili- ceux, les sables, les gypses, les sulfates de soude qui accompagnent ces derniers (1), les conglomérats ainsi que les fossiles, quelque rares qu’ils soient, se retrouvent identiques dans tous. Il y a donc lieu de croire qu’ils sont contemporains. Mais ces trois grands lacs n’étaient pas les seuls qui existassent alors en Espagne. A la même époque, d’autres, moins considérables, occupaient en Aragon lés territoires de Teruei et de Libres aujourd’hui traversés par le Guadalquivir , s’étendaient sur les plateaux élevés de la Muela del Oro, entre Bunol et Cofrenles, baignaient le pied des montagnes de Jijona , au nord de la plaine d’Alicante, ou pénétraient dans l’étroite vallée d’Alcoy. Ces petits lacs renferment les mêmes osse- ments d’animaux fossiles que les grands bassinsd’eau douce dont nous venons de parler. A Concud, près Teruei, et à Alcoy, ces ossements sont assez abondants et viennent nous aider dans la détermination de l’âge des couches qui les renferment. Ainsi que les ossements de Ma- drid, que M. Ezquerra avait envoyés il y a quelques années h M. Her- mann von Meyer, iis paraissent être tous caractéristiques de \a pé- riode miocène, M. PaulGervais, professeur à Montpellier, si familiarisé notre baromètre anéroïde, qui exagérait peut-être un peu les hau- teurs, à 487 mètres. (1) A Cerezo, au nord-est de Burgos; à Espartinas, non loin d'Aran- juez, etc. 75 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 4852. avec les caractères des vertébrés fossiles du midi de la France, a bien voulu se charger de décrire les échantillons que nous avons rapportés. Quelques uns de ces ossements ont été ramassés par nous; les autres nous ont clé donnés par MM. Ezquerra del Bayo, Gasiano de Prado, F, de Botella (1) et Wisniowski. Ceux des environs de Madrid viennent des sablières de San-Isidro , sur les bords du Manzanarès. M. Gasiano de Prado a découvert les mêmes ossements près de Briliuega, et dans la vallée du Tage , entre Aranjuez et To- lède. M. Ezquerra en cite aussi au cerro d’Almodovar, près Valîecas. Dans le grand bassin de la Vieille-Castille, les ossements sont moins connus, parce qu’ils ont été moins recherchés; cependant, outre ceux de Paredes, près de Valladolid, que nous avons déjà cités, on a découvert dernièrement des dents de grands Mastodontes près de Castrofuerte et de Valderas, sur les rivières EsJa et Cea, dans le dis- trict de Valencia de D. Juan au sud de Léon (2). Il est donc certain que ces lacs étaient contemporains, et que leur existence remonte à l’époque miocène. Maintenant il serait intéres- sant de savoir s’ils pouvaient communiquer entre eux et si leur situa- tion présentait quelque analogie avec les grands lacs de l’Amérique du Nord, qui se déversent les uns dans les autres. Si l’on suit les limites du bassin du Duero , on le voit de tous les côtés circonscrit par des dépôts crétacés ou plus anciens. Sur un seul point, dans les environs de Pancorbo, à l’angle nord-est de cet ancien lac, les dépôts crayeux paraissent interrompus; il y a une lacune, une brèche ou dépression qui a peut être permis aux eaux de se déverser dans le bassin de l’Èbre , phénomène qui aurait donné lieu à des cataractes et à des rapides considérables, en raison de la différence de niveau des deux lacs. Ces phénomènes ne paraissent pas avoir laissé de traces certaines sur le sol , et la question reste encore douteuse. Le lac qui occupait la Nouvelle-Castille n’avait de barrières infran- chissables que vers le N. et leN.-E. , barrières granitiques et créta- cées qui l’empêchaient de communiquer avec son voisin du Duero ; et encore le lambeau de terrain d’eau douce signalé par MM. Ezquerra del Bayo et Casiano de Prado, à Barahona, entre Sigüenza et Alma- (1) Outre les précieuses indications que cet ingénieur des mines nous a données, il a eu l'obligeance de nous accompagner dans une partie de notre voyage à travers le royaume de Valence. (2) Revista minera , vol. II, p. 55. 76 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. zan, au point de partage des eaux qui coulent vers le Duero et vers l’Èbre, peut faire soupçonner qu’il existait dans cet angle orienta! une communication entre ces deux grands bassins. Vers le S. elle S.-E., le lac du bassin de Madrid pénétrait proba- blement par plusieurs défilés jusque dans le royaume de Valence et de Murcie, où les sédiments tertiaires se continuent jusqu’au bord de la mer. Ainsi , sur la roule de Madrid à Valence , les dépôts la- custres se suivent sans interruption jusqu’à Minglanilla. Non loin de là ils sont coupés par la profonde dépression du Gabriel (entre Min» glanilla etVillargordo de Gabriel), qui a mis i\ nu les terrains plus an- ciens; mais, plus loin, ils reprennent leur position jusqu’à Utiel et Itequena , où ils semblent avoir pour barrières les montagnes de las Cabri lias , entre Requena et Bunuî. Cependant comme nous avons trouvé des lambeaux de terrain lacustre sur les hauteurs de la Mucla del Oro , dans la vallée du Rio Magro, entre cette rivière et Cofrentes, et enfin à des niveaux très élevés , à Jarafuel et à Zarra, nous avons quelque raison de croire que le lac central était en communication avec la mer du côté du sud-est. Il n’en était pas de même du lac qui occupait le bassin de l’Èbre , et qui avait pour barrière, à l’est, la zone montagneuse qui suit la côte dr puis Barcelone jusqu’à Torlose. L’Èbre, aujourd’hui, traverse ces montagnes par une coupure très profonde dont la formation a été peut-être une des causes du dessèchement du lac qui occupait son bassin actuel. La cause qui a mis fin à l’existence de ces trois grands lacs inté- rieurs paraît être entourée encore de beaucoup d’obscurité. Si l’on cherche à se rendre compte du phénomène qui a eu leur dessèche- ment pour résultat , on est obligé de reconnaître qu’il a été accompa- gné de grands changements dans le relief du sol et dans la distribution relative des terres et des mers. Mais ces changements se sont opérés sans qu’il y ait eu de mouvements violents dans les dépôts miocènes situés à l’intérieur de la péninsule, puisqu’on n’v remarque nulle part de dislocations profondes, de plissements, de froissements ou de ren- versements découches, comme on en voit dans les dépôts nuniniuli* tiques de la province d’Alicante. Les formations miocènes, à l’exception de celles du littoral , sont généralement restées dans une position voisine de l’horizontale. Mais si nulle part dans ce terrain l’on n’aperçoit de traces de dis- locations locales, peut-être se rendrait-on compte des faits, en sup- posant qu’à la fin de celle époque, des mouvements du sol agissant SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 77 sur une grande échelle, sons un continent tout entier par exemple, en auraient soulevées) masse une partie, et auraient submergé l’autre. Dans celle supposition , les grands lacs de l’Espagne auraient été situés à un niveau beaucoup plus bas que celui où leurs dépôts se trouvent portés aujourd'hui. Quoi qu’il en soit, ces bassins intérieurs, qui occupaient à peu près les 2/5 de la superficie de l’Espagne actuelle , ont eu une très longue durée. L’épaisseur des dépôts accumulés sur quelques points , les masses de grès, de poudingues et de calcaire, que nous avons vues près de Cuenca, ou bien à Minglanilla , et qui à las Tetas de Viana , près Trillo, atteignent 350 mètres d’épaisseur, sont des témoins qui peuvent donner la mesure du temps pendant lequel ces dépôts se sont effectués (1). Si donc ces lacs ont existé pendant un très long espace de temps, ils ont dû avoir, comme tous les lacs connus aujourd’hui à la surface de la terre, des moyens d’alimentation proportionnés à leur étendue ; des rivières devaient y apporter incessamment un volume d’eau considérable. Si l’on replaçait aujourd’hui des lacs dans la position où se trou- vaient ceux qui nous occupent, ils s’écouleraient de suite vers le sud et vers l’ouest. Mais même en fermant toutes les barrières et en nive» îant le so! , ces lacs n’auraient qu’une existence éphémère; ils se dessécheraient par défaut d’alimentation ; la quantité d’eau évaporée Temporisait de beaucoup sur l’eau apportée; les terres émergées, telles qu’elles existent actuellement dans la Péninsule, ne pourraient pas produire des cours d’eau assez puissants pour les alimenter. D’où provenaient ces rivières dont nous parlons? C’est là le côté obscur de la question; ils ne provenaient pas de la France, puisque les Pyrénées existaient déjà à cette époque et opposaient une barrière infranchissable à toute communication entre l’Espagne et le reste de l’Europe; et, de tous les autres côtés , ce pays se trouve entouré de mers. L’existence de ces lacs suppose donc une autre configuration de la Péninsule, supposition qui rappelle involontairement l’Atlantide de Platon, et qui s’accorde avec celte opinion plus scientifique de M. Ed. Forbes, qu’à une époque récente l’Irlande était, sinon unie à l’Es- (1) A Madrid, où manque un étage des dépôts tertiaires, un puits artésien a traversé plus de 200 mètres de couches lacustres sans en trouver la base. 78 SÉANCE DE 6 DÉCEMBRE 185 2. pagne , au moins assez voisine d’elle pour en avoir reçu une partie de sa faune et de sa flore actuelles. Avant de quitter les terrains tertiaires de l’Espagne , il nous fau- drait parler des formations marines de cette époque , mais en ayant peu vu cet été , nous ne dirons que quelques mots sur ce sujet. Les formations marines de l’époque miocène, disposées on général sur le littoral de la Méditerranée, ne pénètrent pas sur le plateau central compris entre la chaîne cantabrique , l’Èbre et le Guadal- quivir (1). Les mers miocènes et pliocènes n’ont occupé que le pourtour de l’Espagne, formant toutefois çà et là des golfes assez pro- fonds. Le plus profond de tous est. celui que baignent aujourd’hui les eaux du Guadalquivir et de ses affluents, dont l’extrémité orientale s’étend jusqu’à Andujar , Linares et la Carolina. Plus à l’est , la mer miocène paraît aussi avoir pénétré assez avant dans le royautnede Murcie; et enfin nous avons nous- même rencontré ses traces jusque près d’Almansa. Dans les environs et au nord de celte ville, le terrain tertiaire marin forme une plaine entourée de collines de l’époque crétacée (la Sierra de Meca) et se compose d’un calcaire blanchâtre , tendre , rempli de fragments de Pecten et de grandes Ostrea . Le même terrain s’observe à Castalia , entre Villena et jijona, ainsi que dans la plaine qui d’Alcoy va à Gandia et enfin sur tout le littoral de la Méditerranée, depuis Alicante jusqu’au cap de raies. Près d’Alicante, les couches miocènes !-ont horizontales et reposent en stratification discordante sur les calcaires nummuliti- ques, ainsi que l’ont observé MM. de Boleüa et de Loi ière. Quoique assez souvent en couches hoiizontaies , cependant le terrain miocène est quelquefois lui-même assez fortement incliné, comme au Monjuich près Barcelone, à Alcoy et dans la vallée qui s’étend vers Penaguila et Benamer, puis aux environs de Malaga, au nord-est de Lorca, et enfin sur plusieurs autres points du littoral de la Méditerranée. Le point le plus centrai où aient pénétré les terrains miocènes marins est situé un peu au sud d’Alcaraz, près des villages de Yianos, de Masegoso et de Villarubia , où, selon M. Casiano de Prado, les couches chargées de grands Peignes et d’Huîtres sont dans une posi- (l) Cependant M. Casiano de Prado cite, près de la rivière Esla, sur le revers sud de la chaîne cantabrique, des couches ternaires marines fortement redressées [Mcmcria sobre los trabajos (le la comision geologica , 1 852, p. 30j. M. Ezquerra cite aussi un lambeau de terrain tertiaire marin près de Burgos et au nord de la ville. (Quarterly Journal of t/ie geol. Soc, y vol. VI, p. 411.) SÉANCË Dü 6 DÉCEMBRE J85É. 79 lion horizontale, quoique p’acées à un niveau considérable au- dessus de la mer. Il est assez remarquable que ce point se trouve sur une ligne qui joindrait le bassin tertiaire d’Almansa, à l’extré- mité orientale de celui du Guadalquivir, et à peu près à égale dis- tance de l’un et de l’autre. Lorsque l’étude des terrains tertiaires moyens et supérieurs aura été faite avec soin dans ces contrées , on reconnaîtra peut-être qu’à l’époque miocène le golfe du Guadalquivir communiquait, soit par Grenade (1), Guadix et Huescar, soit par un détroit situé plus au nord avec le golfe de Murcie et isolait la Sierra Nevada et les monta- gnes de Ronda , qui formaient alors une île ou une presqu’île séparée du continent. M. d’Àrchiac a fait remarquer [Hist. des progrès de la géologie , vol. II, p. 841) l’analogie singulière que présentaient, à l’époque tertiaire moyenne, les plateaux du centre de la France et de la pénin- sule ibérique. Alors les surfaces occupées aujourd’hui par la France, d’une part, par l'Espagne et le Portugal, de l’autre, constituaient dans leur forme la plus générale deux presqu’îles placées bout à bout du N.-E. au S. -O., plus ou moins découpées sur leur pourtour par des golfes où pénétraient les eaux de la mer environnante, et pré- sentant vers leur centre de figure un plateau occupé par des iacs d’eau douce. Mais ce qu’on doit ajouter, c’est que les différences de ces plateaux ne sont pas moins remarquables. Ainsi, celui de l’Espa- gne, le plus élevé des deux, est précisément dépourvu de ces produits ignés qui, pendant trois périodes consécutives, se sont fait jour à travers les roches granitiques du plateau de l’Auvergne, et il pré- sente sur scs bords une ceinture de dépôts secomiaires dont il n’y a pas de trace à la surface de l’autre région. Enfin, les dépôts laissés par ses lacs intérieurs ont été soulevés en masse et portés à une grande hauteur, tandis que le centre de la France, si agité et théâtre de tant d’actions ignées, semble n’en avoir éprouvé que peu de chan- gement dans son élévation première. Terrain nummulitique. La distribution géographique de ce terrain, dans la Péninsule, n’a pas, à beaucoup près, la même étendue que celle des dépôts (1) M. Schimper a trouvé de grandes Huîtres dans les couches ter- tiaires aux environs de Grenade. 80 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. lacustres que nous venons de parcourir. Excepté dans le nord de l’Espagne, en Catalogne * en Aragon et en Navarre, où ce terrain prend un grand développement, dans tout le reste du pays on n’en aperçoit plus que quelques lambeaux épars et isolés. Dans le nord , il a été déjà figuré sur la carte géologique de la France de WM. Dufrénoy et Elie de Beaumont, où on le voit représenté par une large bande non interrompue qui accompagne la chaîne des Pyrénées dans toute sa longueur, sur son revers méri- dional ; celte bande y est teintée en jaune et marquée sur la légende du signe G.2; sa plus grande longueur, depuis Gerona, en Catalogne, jusque dans les environs «de Viîoria , en Navarre, est d’environ 500 kilomètres. Sa plus grande largeur en Catalogne est d’environ 100 à 120 kilomètres ; puis elle court dans la direction de l’ouest , en s’amincissant peu à |>eu pour finir en pointe du côté de Viloria . La largeur moyenne de cette bande nummulilique prise dans son milieu à la hauteur de Saragosse, sur le chemin de Huesca à Yiescas, est d’environ T0 kilomètres. Dans presque toute sa partie sud, sauf sur un point peu important aux environs de Huesra , cette bande est recouverte par les dépôts lacustres du bassin de l’Èbre; an nord elie s’appuie sur les dépôts cré- tacés qui sont représentes sur la carte que nous venons de citer par une mince bande parallèle à la chaîne des Pyrénées, teintée en vert clair et marquée du signe C.1 En Catalogne, les limites des dépôts numniuliliques n’ont pas en- core été tracées avec une grande précision , mais on peut s’assurer qu’ils n’arrivent pas jusqu’au bord de la mer. Au nord de Barce- lone, ils en sont séparés par une chaîne granitique, qui borde la côte jusqu’au cap Saint-Sébastien près Gerona , et qui se rattache par Hostalrich au massif du àlonsen. Au sud-ouest de Barcelone, ils en sont également séparés par une petite lisière littorale de terrain tertiaire, qui se prolonge jusqu’à Tarragone. Dans celte partie de Sa Catalogne, c’est le Mont-Serrat qui peut être considéré, sinon comme le centre, du moins comme la clef des dépôts numniuliliques; il s’élève à une assez grande hauteur (!) et domine la contrée environnante ; il est placé comme un promontoire entre deux rivières, le Lîobrcgat et une autre plus petite, qui se rejoignent à son pied, pour gagner la mer à Barcelone, et forme l’extrémité (l) Selon la mesure trigonométrique de Méchain la chapelle de la Vierge est à 1234 mètres. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852, 81 méridionale d’une série de hauteurs telles que San-Lorenzo et San Félin, alignées dans une direction parallèle à la côte et à la chaîne qui la borde. Les assises successives de roches qui composent celte montagne se maintiennent jusqu'à son sommet dans une position légèrement incli- *née ou presque horizontale, et appartiennent toutes à ia période num muliiique, à l’exception des schistes ardoisiers, et des calcaires com- pactes fort anciens qui en constituent la hase. Nous ne croyons pas exagérer en attribuant aux dépôts nummulitiques en cet endroit plus de 900 mètres d’épaisseur. La partie supérieure, sur une hauteur de plus de 3 à A00 mètres, est composée de poudingues qui présentent, comme cela a lieu souvent dans les roches en couches horizontales, des fentes perpendiculaires, qui découpent la sommité en véritables dents de scie , d’où est venu le nom sous lequel est connue cette montagne célèbre! Dans les marnes et macignos inférieurs aux con- glomérats , nous avons trouvé la Nummulites biaritzensis , les Eupatagus ornatus et elongatus , et une Ostrea bien voisine de VO. flabellula , Lam. Dans les environs de Yich , ces dépôts viennent buter contre les masses porphyriques et granitiques du Monsen ; à cette occasion, nous ferons remarquer que quelques auteurs ont prétendu que le granité de cette partie de l’Espagne était postérieur aux dépôts ter- tiaires, mais nous nous sommes assurés qu’au Monsen , du moins , le granité existait déjà à la surface du sol bien avant le dépôt des sédiments nummulitiques. Ainsi, entre Vich et Villarau, on rencontre un grès et un poudingue qui appartiennent au terrain nummuli- tique, dont toute cette contrée est recouxerte. Dans ce poudingue on trouve, avec quelques galets granitiques, des galets plus aboiuh nts d’un porphyre identique avec celui du Monsen ; ce porphyre est posté- rieur au granité, puisqu’il s’v rencontre à l’état de filon bien carac- térisé; d’où l’on peut conclure que, lorsque ce poudingue nummuli- tique s’est déposé, le porphyre et le granité du Monsen existaient déjà depuis longtemps. A quelques lieues au nord, dans les environs d’Olot et de Castel- Foilit, les dépôts nummulitiques sont à leur tour traversés par des produits volcaniques très récents, des laves , des tufs , etc. Un peu plus près des Pyrénées, vers San Juan de las Abadesas, les roches nummulitiques remplies de fossiles reposent sans intermé- diaires sur des schistes à empreintes végétales appartenant probable- ment à la formation houillère ; des exploitations de charbon existent Soc, géol 2e série , tome X. 6 82 SÉANCE DU. (3 DÉCEMBRE 1852. dans la localisé. Les dépôts crétacés sur lesquels s’appuient ordinaire- ment les roches immmuiitiques, sur tout le revers méridional des Pj ré- nées, manquent sur ce point, ainsi que tous Ses terrains intermédiaires; on passe ainsi brusquement de ces mêmes roches aux schistes honil- lers. En résumé, les dépôts nummuiitiques recouvrent principalement les parties septentrionales et orientales de la Catalogne. Ils y sont assez riches en fossiles, et parmi les localités les plus intéressantes sous ce rapport nous citerons Santa-Maria del Monte près Besalu, Ogasa, près San-Juan de las Abadesas, Cellent et Castel- Follit, près Oiot, Grau, entre Olot et Vieil, le château de Gurb, près de celte dernière ville, la Conca de Treinp, Saint-Michel del Fay, Gcrona, le Mont-Scrrat, Cardone et les environs d’Igualada. Si nous traversons maintenant les dépôts nummuiitiques de la zone pyrénéenne dans leur partie centrale, sur le chemin de Sara gosse h Panticosa et au Yignema’e, voici ce qu’on observe : après avoir quitté à U) kilomètres au nord de Huesca les dépôts horizontaux de mollasse et de poudingue, on entre dans un petit îlot crétacé de peu d’étendue avec llodioiites lombricalis et pomiana , qui paraît singulièrement placé au milieu de dépôts plus modernes, puis on pénètre dans la zone nummulitique , laquelle comprend principale- ment la Sierra de G narra et quelques autres petites chaînes qui lui sont parallèles et qui courent en moyenne dans le même sens que les Pyrénées. Les dépôts nummuiitiques de celle localité sont rarement représentés par des calcaires purs; les roches les plus communes se composent d’argiles bleues, de calcaires très marneux et surtout d’un grès maciguo, à grain grossier, passant fréquemment au conglo- mérai et fortement agglutiné. Les gypses ne sont pas étrangers à cette formation, et y abondent au contraire presque partout ; on y rencontre des carrières en exploi- tation sur quelques points. Les sels et les sources salées les accom- pagnent ordinairement (Gardona, Peralta, etc.). Les f ssiles y sont assez rares; cependant nous y avons trouvé les espèces suivantes que M. d’Archiac a bien voulu déterminer ; Nummulites scabra , N» per- foruta, N. Lucasana , N. granulosa, Alveolina longn , etc. Les assises de grès et de conglomérat, qui forment ici des monta* gnes entières, affectent, quant à leur inclinaison, les angles les plus variés. La direction normale paraît être celle des Pyréné s. On ris- querait de commettre une grave erreur si l’on estimait la puissance des dépôts d’après l’épaisseur des tranches de couches que l’on It a- vcise en allant du S. au N., parce que les bouleversements et les SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE il 852 . 83 dislocations que ce sol paraît avoir subis peuvent donner lieu à des renversements ou à des retours de couches, qui, si on les additionnait toutes, donneraient probablement une épaisseur totale beaucoup trop forte. Cependant soit dans la Sierra de Guarra, soit entre Camprodon* O’.ol et Vich , l’ensemble du terrain nummulitique paraît avoir 15 à 1800 mètres de puissance. Si nous nous transportons maintenant dans la partie la plus occi- dentale de ce grand dépôt, vers la Navarre et les Asturies, nous y retrouvons des conglomérats, des grès et des calcaires, avec les fos- siles caractéristiques du terrain nummulitique ; nous ne nous arrête- rons pas à ces localités, où déjà, en 1849 , l’un de nous (1) , accompagné de M. Paillette, a constaté la position relative des assises nummuliliques avec les roches sous-jacentes (2). Ce grand littoral nummulitique, que nous venons de voir se déve- lopper largement sur la frontière nord de l’Espagne, disparaît tout à coup, et l’on n’en trouve pas de trace dans toute la partie centrale du pays. Pour retrouver les dépôts de celte époque les plus rapprochés, il faut se transporter à 350 kilomètres environ au sud-ouest de la Catalogne, dairs la province d’Alicante, où ils ont été mentionnés par Cavanilles (3) , Bowles et M. Cook (à). C’est dans les environs de cette ville, à une lieue au N., que ces deux derniers auteurs ont signalé l’existence de bancs nummuliliques. En allant d’Alicante à Jijona, nous avons traversé ces couches et nous y avons recueilli une grande quantité de Nummuîites, entre autres les Nummuîites perforata , N. granutosa , N. biaritzeusis , Y Orbitolites Fortisii è l la Serpula spirulœa. Les hautes montagnes qui dominent Jijona et le puerlo de la Carras [ueta, que l’on traverse pour aller à AScoy, appartiennent encore au système nummulitique. Mais les fossiles y sont très rares, et c’est avec quelque difficulté que nous avons pu y découvrir, sur des surfaces altérées par l’atmosphère, des traces de la Nummuîites planulata, espèce des sables du Suissoii"- (1) Bull., 2e série, vol. YI, p. 523. (2) Hixt, des progr.y d’Archiac, vol. III, p. 12. (3) Cavanilles, dans son bel ouvrage sur l'histoire naturelle du royaume de Valence, a indiqué la présence de Nummuîites dans plu- sieurs localités, entre autres à Ibi, puis entre cette ville et Jijona, et dans les environs de Peùaguila; il en a même figuré une espèce. Longtemps auparavant, Barrere avait décrit et figuré des Nummuîites d'Espagne. (ij Skclches in Spam , 2 vol. in-8. Paris, 1 834. U SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE J 852. nais, qui dans les Pyrénées, suivant M. d’Archinc, se trouve dans les calcaires noirs du versant méridional du Mont- Perdu. Dans cette partie de P Espagne, ces dépôts ont pris un assez grand développement, mais ils ont perdu ce caractère, qu’on peut appeler littoral, que nous leur avons reconnu dans le nord. Dans la province d’Alicante, ils forment un système de montagnes fort accidenté, dis- loqué, très pittoresque, et dont quelques sommets s’élèvent à 1000 ou 1200 mètres environ. Ce massif montagneux, qui s’étend de Jijona jusqu’au cap Saint-Antoine, est conquis entre la rivière d’Alcoy et la côte, et parallèle à la direction que celle-ci affecte depuis le cap Saint-Antoine jusqu’à Alicante. Les principales montagnes qui le composent, entre F< naguila et Al ica, sont la Serre! la, l’Aitana, le P ui g- Campan a ; cette dernière présente à sot) sommet une large brèche, qui se distingue au loin en mer, et à laquelle on a donné le nom de Brèche de Roland, par analogie avec celle des Pyrénées. Ce groupe de montagnes arrive sur quelques points, mais par exception, jusqu’au bord de la mer; en général, elles se tiennent à une certaine distance dans l’intérieur, et sont séparées du littoral par des dépôts crétacés, comme au cap d’Albir, au cap Saint-Antoine et au Mongo, ou bien par des dépôts tertiaires, comme à Alicante, 'a Dénia et à Jabea, et enfin par des dépôts de gypse et de marnes appartenant au trias, comme à Nu ci a et à Aîtea. Les grès et les poudingues nummufitiqties, que nous avons vus si développés dans le nord, ne se retrouvent plus dans ces montagnes , ou, du moins, y sont fort rares; les roches principales qui composent ces dernières sont des calcaires durs, compactes , un peu siliceux , rarement argileux, dans lesquels les fossiles sont rares et fortement engagés. Les roches y prennent fréquemment des formes capricieuses et bizarres; ainsi, à Penaguila, en remontant le cours du ruisseau, on arrive au pied d’un escarpement inaccessible , criblé de cavernes profondes, étagées les unes au-dessus des autres, et surmonté de ponts naturels percés à jour. Plus loin , sur le chemin d’Aitea , on voit les calcaires nummuÜtiques plissés , contournés et renversés comme le sont ceux des Alpes dans les environs de Gründeiwald. Sur le chemin d’Aitea à Benisa , ils forment des cluses profondes ou des rochers abruptes de 300 à A00 mètres de hauteur, qui s’élèvent sur le bord de la mer, comme le Peiion de Galpe. A Penaguila, on y trouve le Conocli/pus conoideus , Y Orbitolites submedia et des Nummulites; près de Seila il y a beaucoup d'Orbi- SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 85 ioides , et enfin au Collado de Gulatar, au nord-ouest du Puig Cam- pait;!, le calcaire est tout chargé de ia Nummulites planulata , dont nous avons déjà parlé. Avec les grès, les macignos et les argiles, disparaissent aussi les gypses et les sels; et il est assez remarquable que ces deux substances, si répandues dans les dépôts nummulitiques du nord, n’y existent plus au sud et ne se rencontrent que dans des couches bien plus anciennes, ainsi que nous le venons en parlant du trias. Ce système de montagnes ne s’avance pas très loin dans l’intérieur du pays ; il conserve une position côtière : ainsi , en venant de l’in- térieur vers Alicante , après avoir traversé les plaines tertiaires d’Ai- mansa et de Villena, on rencontre Ses premières collines nummuli- tiques dans les environs de Biar, collines qui ne tardent pas à devenir de véritables montagnes ; elles sont situées à une quarantaine de kilomètres d’Alicante. # Avant de quitter le royaume de Valence, nous devons mentionner un point où nous avons cru reconnaître la présence du terrain num- muülique ; c’est dans les environs de Bufiol , sur la route de Sieie- Aguas, entre le terrain crétacé et les grès et calcaires tertiaires, que nous avons recueilli quelques fragments d’Alvéolines parmi les matériaux qui servent à charger la route Ces fragments, peu nom- breux et un peu frustes, ne sont sans doute pas suffisants pour con- stater le fait avec une certitude complète ; néanmoins il n’est peut- être pas inutile de le mentionner en passant. Dans tout le reste de la Péninsule , ou ne trouve plus de dépôts nummulitiquesque surquelques points isolés et de peu d’étendue de l’Andalousie. Dans les environs de àlaiaga , M. Amalio Maeslre (1) , et l’un de nous (2), ont rendu compte de leurs observations dans cette contrée, avec l’indication des fossiles qu’ils y ont recueillis. Un lambeau de ces mêmes dépôts se retrouve à Gualchos , un peu à l’est de Muii'il, dans les memes conditions que ceux de Malaga. En résumé, la géographie du terrain nummulitique en Espagne présente cela de particulier, qu’il ne pénètre pas dans l’intérieur du pa\s; il borde sa frontière nord sur une grande étendue et sans solution de continuité; puis ses dépôts disparaissent pour se montrer de nouveau à une grande distance au sud , dans la province d’Àli- (1) Qjeadct geognostrrn sobre cl litoral mcditcrranco , in- 8. Oviedo, 4 846. — An de nu uns, vol. IV. (2) D'Archiac, Hist. des progrès , vol. III, p. 10. 80 SÉANCE EU 6 DÉCEMBRE 1852. came et un peu en Andalousie, en se maintenant vers les bords de la mer. Dans le nord, ces dépôts sont représentés par des niasses con- sidérables de grès et de conglomérats; dans le su i, les grès dispa- raissent et sont remplacés par des calcaires. Dans le nord, les couches sont beaucoup moins tourmentées, moins disloquées que dans le sud ; elles y forment des collines et des montagnes allongées ordinairement dans le sens des Pyrénées, ou parallèlement à la côte dans la partie orientale de la Catalogne. Dans le sud , le groupe nummuliîique de Jijona, de Puig Campana et de la Scrella .e compose de montagnes fort accidentées déchiquetées, et dont les couches ont subi des con- tournements et des plissements violents qu’on n’aperçoit pas dans le nord. Ji semblerait résulter de l’examen rapide que nous venons de faire de la distribution de ce terrain sur le pourtour de la Péninsule , que , peu après la consolidation des sédiments nu^nmnli tiques , et avant le dépôt des formations lacustres, il y eut dans la contrée, aussi bien au nord qu’au sud, des changements considérables dans le niveau relatif des mers; changements qui durent être accompagnés de mouvements violents de. la croûte terrestre. Dans le sud, surtout, ces mouvements durent avoir une grande énergie pour amener des couches d’abord horizontales dans la position où on les trouve aujourd’hui , position qui dans certains lieux, entre Penaguila et Aitea, par exemple, rappelle celle des terrains les plus bouleversés des Alpes. Nous avons soumis nos Nummulites d’Espagne à notre ami >î. d’Ar- cliiac, qui prépare une monographie de ces fossiles si intéressants, et qui a bien voulu nous communiquer le résultat suivant de l’exa- men qu’il a fait de toutes nos espèces. 1er Groupe, N. lœvcs cuit sublœves. Nummulites complannta , Lam. — Columbres. 2e Groupe, N. rcticidatœ . — intermedia , d’Arcb. — ■ Près San-Vicente-de-Ia-Barquera. 3e Groupe, N. snbreticnlatœ . ■— lœvignta, Lam. — Catalogne. scab ru, Lam. — Calcaire gris noirâtre, compacte, de la Sierra de Guarra, au nord d’Huesea, avec la N. Ra monde et VJlr veolina long®, Czjs, SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 87 Ùe Groupe, N. punclalatœ. Nuniniulites pcrfnrata , d'Orly — Columbres, type de l’espèce et var. À • entre Huesca et Meson Nuevo; type et var. A aux environs de Tarragnne, d'igualada et de la conca de Tremp ; à Ce lient, des individus de petites dimensions sont remarquables par la multiplicité des grands pores ou canaux qui font presque disparaître les filets cloisonnaires. •«* /V/., var. A , aturcnsis. — Catalogne et province de Santander. — id. , var. B, cnliimbre.sensis. — Columbres , très abondante avec la sous-var. <5; cette dernière est très répandue aussi à deux lieues au sud ouest d’igualada et au nord d’Alicante, où elle atteint des dimensions plus considérables — id. , var. C. — Trouvée par M. Llobet dans des marnes grises de la Catalogne, où elle est très commune; sous-var. s. rapportée des environs de Grenade par M. Lezat. — Vcrneuili , d’Arch. et J. Haime. — La conca de Tremp. — Lucasana , Defr. — S. Vicente de la Birquera; Columbres; Sierra de GuaTra, entre Huesca et Viescas; Santa Maria- del-Monte, près Besalu ; Cellent ; Igualada; S. Michel-del- Fay; la conca de Tremp; S.-Juan-de-las-Abadesas; Cardone. Bielsa. 5e Groupe , N. plicdtœ vcl striatœ. — Ràrnondi , Defr. — Environs de Malaga; Grau , var. a ; Pan- tanon d’Huesca; calcaires gris avec N. s cabra et /{ Ivcqlinn Inr/ga, de la Sierra de Guarra; deux lieues au nord-est de Pampelune ; Columbres ; San - Vicente-de-la-Barquera. — biar'tzcu.sis , d’Arch — Environs d Alicante; venta de Agost; Malaga; entré Huesca et Viescas; Gerona ; Meson-Nuevo; S. -Michel del-Fay ; Mont-Serrat (var a); la concade Tremp; Grau, près Olot ; Ogasa , près S.-Juan-de-las-Abadesas; Columbres. — obesa , Leyrn. — Columbres. — - stiiata , d Orb. — Santa-Maria-del- Monte, et peut-être plu- sieurs des localités où est citée la JY. Ranio/uii. Environs de Barcelone, var. c. — planu/ata, d’Orb — Calcaires noirs, compactes, du versant méridional du Mont- Perdu; Puerto de la Carrasqueta; Puig campana et Cuchillada de Boldan, province d’Ahcanto. 6e Groupe, IV. ex pian a ',œ. — exponrns , J. de C. Sow. — Columbres. — gramtlosn \ d’Arch. — Columbres; type et var. a, S.-Vi- cente-de-la Barquera; hautes vallées de la Bielsa et de la Cinca ; Viescas et Sierra de Guarra; entre S.-Juan-de-las- Abadesas et Ogasa; environs d’Alicante; Venta de Agost. 88 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. Nummulites Lcymeriei , d’Arch. et J Haime. — Versant méridional du mont Perdu; elle constitue presqu'à elle seule les calcaires noirs au-dessous de la corniche. spirct , Roissy. — Malaga (individu très déprimé de la col- lection de Defrance); la conca de Tremp; Santa Maria-del- Monle, près Besalu ; Ogasa ; San-Vicente-de-la-Barquera ; Columbres. Ainsi, dit M. d’Archiac, 16 espèces ou près du tiers des espèces connues (52) , se retrouvent en Espagne. Mais si nous considérons la répartition des Nummulites, non plus par rapport aux limites po- litiques des Étals, mais, au contraire, par rapport aux régions physiques naturelles , comme nous Pavons fait dans le Tableau de la distribution des Nummulites {Monographie des Numm. , p. 86*), nous trouvons que la région du versant nord-ouest des Pyrénées, qui comprend les Asturies, les provinces de Santander et de Gui- puscoa , les départements des Basses-Pyrénées et des Landes, offre 22 espèces; c’est la plus riche de nos régions, celle du sud-est des Alpes n’en ayant offert que 21. Cependant aucune des espèces du 3e groupe n’y est représentée, ce qui est assez remarquable, vu la disposition de cet ancien golfe par rapport aux petits bassins du nord-ouest. Des 12 espèces connues sur le versant méridional des Pviéiées, dans la Navarre, l’Aragon, la 'Catalogne, puis le long de a cote orientale de l’Espagne , aux environs de Malaga , d’Ali- cante* et de Grenade, il n’y en a aucune appartenant aux deux pre- miers groupes, et celles du quatrième, au nombre de 3, se trou- vent particulièrement dans le voisinage des Pyrénées. Sur le versant nord de cette chaîne, dans les bassins de la Garonne supérieure et de l’Aude, il n’y a en tout que 5 espèces; aucune d’elles ne dé- pend des trois premiers groupes; une seule appartient au qua- trième, et une fort petite, mais très abondante {N. Leymeriei), au sixième. Celle dernière, qui se montre si abondante dans le massif du mont Perdu, paraît manquer au sud dans les provinces espagnoles, comme sur le versant atlantique du nord-ouest; de sorte que ces trois régions nummuiitiques, déjà bien explorées, et qui se louchent, n’ont, sur un total de 26 espèces, que l\ espèces qui leur soient communes {N. Lucasana , Ramondi , biaritzensis et planulata). Cette distribution semble prouver que les rivages de la mer de cette période devaient offrir des golfes plus ou moins profonds et peut-être tout à fait séparés, en rapport avec ces dif- férences, et dont nous avons déjà indiqué l’ancienne existence SÉANCE DU 6 BÉCEMlifft: 1852. 89 probable pour les deux extrémités du versant septentrional des Pyré- nées. (Mém. de la Soc. géol. , 2e sér., vol. IÏ, p. 190, et vol. III, p. 399.) Terrain crétacé. Les dépôts crétacés du nord de l’Espagne forment «autour des Py rénées, en y comprenant le versant français, une grande bouton- nière qui en entoure l’axe longitudinal. Ces dépôts ont été figurés avec soin dans la carte de MM. Dufrénoy et Élie de Beaumont; nous ne nous y arrêterons donc pas. Sis y sont teintés en vert clair et rapportés, dans la légende, à la lettre C'. Dans le prolongement de ces montagnes, du côté de l'ouest, qui prend le nom de chaîne cantabri que , il existe une seconde bouton- nière pareille à la précédente. Sur le versant nord , comme sur le versant sud, on trouve des dépôts crétacés sous forme de bandes allongées et qui viennent se rejoindre dans les environs de Viloria pour fermer le circuit. Sur le versant nord, depuis Fontarabie, Saint-Sébastien, Snntan- der, jusqu’au cap de Penas, la côte est bordée de falaises crayeuses, sauf quelques points occupés par Ses terrains nummuîilique, juras- sique ou paléozoïque. Les assises crayeuses ont en général un plon- geaient vers le nord; elles s’enfoncent sous la mer, et se relèvent contre l’axe cantabrique , non sans offrir toutefois des failles, des dérangements et des plissements répétés. Vers Vitoria et Orduna, elles occupent le sommet de la chaîne : c’est Taxe ou plutôt le point de réunion des deux boutonnières. Ces dépôts couvrent toute la partie supérieure du cours de l’Èbre, depuis Reynosa jusqu’à Frias. Dans la direction du nord au sud , depuis Castro-Urdiales sur la côte jusqu’à Frias ou Ona au N. de Burgos, le développement des dépôts crétacés est d’environ 80 kilomètres. Dans la direction de l’ouest, un rameau crétacé accompagne le pied sud de la chaîne pendant 180 kilomètres environ, depuis Frias jusque près de Léon, et, diminuant successivement de largeur, il finit en pointe aiguë à quelques kilomètres au nord de cette dernière ville. Ces dépôts s'appuient contre les terrains plus anciens, et s’enfoncent sous la grande nappe lacustre du bassin du Duero. A l’est de ce bassin, entre Burgos et Soria, on retrouve un littoral crétacé qui, d’un côté, repose sur le terrain jurassique de la sierra de Burgos, et de l’autre se perd, comme les précédents, sous les dépôts tertiaires. Le littoral crétacé de !a sierra de Burgos se poursuit clans SÉANCE DE 6 DÉCEMBRE 1852. 90 ia partie supérieure du bassin du Duero, puis i! forme un coude assez aigu et revient presrpie sur lui-meme dans la direction du sud-ouest, pour courir en Lande étroite au pied de ia sierra de Guadarrania jusqu’à Ségovie. On voit donc que ie bassin lacustre du Duero est bordé, sur près des trois quarts de son circuit, par des falaises crayeu- ses qui manquent seulement du côté de l’ouest, où elles sont rem- placées par des roches cristallines ou métamorphiques. Si nous passons maintenant dans le bassin du centre , nous y re- trouverons à peu près les mêmes dispositions. Lorsqu’on divise ce bassin en plaines et en montagnes, c’est à la région montagneuse qu’appartiennent les couches crayeuses; c’est, en effet, à Cuenca qu’on quille la plaine lacustre pour toucher aux premiers contre-forts crétacés. La ville est bâtie sur un promontoire avancé d’environ 80 mè- tres de hauteur, entouré par le rio Jucar et par une autre rivière plus petite nommée ie Huecar; les rochers sont à pic de plusieurs côtés ; le haut de la ville ne donne d’accès aux voitures que par une langue étroite de terre du < ôte de l’est. Cette situation rappelle d’une manière frappante celle de la ville de Gonstaminc en Afrique. Depuis Cuenca, celte bande crayeuse se prolonge dans la direction du N. un peu O., jusqu’au delà de Fri Mo, dans la vallée du Tage, sur 80 kilomètres de longueur environ. Elle s’enfonce sous les dépôts tertiaires de la plaine sans cependant disparaître complètement et l’on en voit quelques petits îlots percer çà et là les couches lacustres à Sacedon , à Olmedilla ciel Campo, et plus à l’O. , près de Quinlanar del Orden et de la moîa del Cuervo (C. de Prado) (1). Dans la di- rection du S. -E. , le prolongement de la zone crayeuse n’esl pas encore bien connu. Les montagnes qui constituent cette région crétacée ont de 1200 à lôOO mètres de hauteur ; la ville de Cuenca elle-même est à environ 1000 mètres. Si nous continuons notre exploration en marchant vers LE. dans la direction de Valence, nous ne trouvons plus ces dépôts développés sur une grande échelle : ils y sont, pour ainsi dire, disséminés par morceaux ou par lambeaux. Los points culminants de cette région, la Cabeza de San-Pe'dro , près Canne , et le Pico cl Tejo , près Requena , appartiennent au terrain jurassique ; le Pico de Ranera , près Garaballa , qui a plus de 1Ô00 mètres, n’es! composé que de couches triasiques. Les dépôts crétacés n’ont pas atteint cette hau- (1 ) Mentor la sobre las trahajns de la comision del ma pu gcotoisico, par D. Fr. de Lujan, 1852, p. 28, SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 91 tour, et occupent nue zone un peu inférieure. On suit ainsi ces dé- pôts qui se montrent et disparaissent alternativement, jusqu’auprès de Bnnoî , où iis se perdent sous les terrains plus modernes et sous le diluvium de la riche huerta de Valence. De Bunul à Àlmansa on traverse deux plateaux crétacés qui se trouvent au môme niveau que le plateau tertiaire lacustre , entre 600 et 700 mètres. Le premier de ces plateaux c.-t situe entre Yatova et le rio Magro, el le second entre la Mueia del Oro et le Gabriel , près de Cofrentés. Dans ces deux localités on passe des calcaires crétacés aux calcaires d’eau douce, d’une manière tellement insensible que l’on doute souvent auquel des deux terrains appartiennent les roches sur lesquelles on marche. Le n’est que lorsqu’on parvient à découvrir quelques fossiles caractéristiques, ou que l’on examine avec attention la nature dos différents calcaires, que cesse l’incertitude, et c’est ainsi que nous avons pu, bien qu’avec quelques doutes, tracer sur notre carte les limites de ces deux terrains. Lorsqu'on se rapproche d’Almansa, près de San-Benito , les dépôts crétacés se relèvent un peu , et surgissent au-dessus du terrain tertiaire de la plaine, en for- mant un petit système qu’on appelle le /l lugron de Meca. D’ÀÎmansa à Villena, sur la route d’Alicante . avant d’arriver à la Venta de la Gilana, on rencontre encore une petite chaîne crétacée peu élevée au-dessus du niveau moyen de la plaine. C’est la meme chaîne que l’on traverse au Puerto d’Almansa , sur la route de Va- lence.' Si nous pénétrons dans le sud du royaume de Valence , nous ne trouvons plus Ses formations crétacées en plateaux sub-liorîzontaux, comme nous venons de le voir; mais elles forment tout un système de montagnes dont les couches sont souvent fortement inclinées ; les trois points de celle partie de la contrée où nous avons reconnu la présence de la craie sont : 1° le mont Cabrer, ou la sierra de Mariola, pics d’Alcoy ; 2° le cap d’Albir ; 3° le Mongo et l’extrémité du cap Saint-Antoine. La sierra de Mariola est un centre crétacé assez important ; elle forme une petite chaîne présentant des escarpements abruptes tournés du côté de l’est , et des découpures profondes du côté de l’ouest et du sud. Au pied de cette sierra s’étend une plaine tertiaire très fertile , qui s’ouvre vers la mer, entre Garniia et Oliva, et qui est arrosée par îe rio de Alcoy. La rive droite de cette plaine est occupée par des dépôts miocènes et nummulitiques, et sa rive gauche par la conti- nuation crétacée de la sierra de Mariola. 92 SÉANCE 1)U 6 DÉCEMBRE 1852. Aîcov sc trouve ainsi placé au centre d’un cirque nnmmulilique d’un côté et crétacé de l’autre ; les contours des montagnes en sont fort accidentés, inaccessibles sur quelques points; les escarpements abruptes sont-tournés vers l'intérieur du cirque. La sierra de bariola mérite d’autant plus de fixer l’attention des géologues, que c’est le seul point où nous ayons découvert d’une ma- nière incontestable les assises inférieures du terrain néocomien, rem- plies de ces Bélemniles plates (psi les caractérisent si bien en France dans les environs de Casteilane (Basses- Alpes) , et qui , d’après les observations de M. Goquand, se trouvent aussi au même horizon dans îa province de Constantine en Afrique, C’est à une demi-lieue du village de Concentaina, au pied nord du mont Cabrer, que se rencon- trent ces couches néocomiennes sous forme de calcaires jaunâtres marneux et d’argiles bleues mêlées de pyrites. Avec le R. dilatatus on trouve encore les espèces suivantes, la plupart caractéristiques du terrain néocomien inférieur : Belemnites sub fus if or mis , Nautilus neocomiensis* Ammonites Perczianus, A. Caillaudanus , A. Astie- rianus , A . neocomiensis , A raaiatus , A. Dumasianus, A. Rouya- nus , A. cl y pei forints, A. a.n g ulico status, A.Emerici , A.Belus, Te- rebratula prœlonga et Toxaster complanatus. Les couches plongent au sud sous le mont Cabrer , dont îa masse principale appartient au terrain néocomien supérieur. Ce dernier étage est représenté par des calcaires jaunâtres ou gris avec de pentes Orbitolines coniques [O. conoidea ), avec la Rhynchonella lata et ces mêmes Rudistes ( Requienia Lonsdalcd) que nous avions déjà vus au Pico el Tejo, près de Requena, ainsi qu’au rio Deva, près deLibros, province de Teruel. Le sommet de la montagne est formé par un cal- caire siliceux et magnésien, dans lequel on voit des Nérinées et des Huîtres de grande dimension. Le cap d’Albir est un promontoire solide qui s’avance dans la mer prèsd’Altea, en face du Puig Campana; ce dernier est nummu- lilique, mais le cap est crétacé, et tient à la terre ferme par une plaine assez basse; on y a établi quelques travaux pour l’exploitation d’une mine de fer aujourd’hui abandonnée. Indépendamment du minerai de fer, nous y avons recueilli le Pecten ataous , YOsfrea macroptera, la Rhynchonella lata , des Bélemniles et des Orbitolines coniques (0. conoidea i). SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1S52. 9 B Le cap d'Albir, Nous venons d’explorer ia partie sud du royaume de Valence; nous allons maintenant nous transporter dans sa région nord, à la fron- tière de i’Aragon et de la Catalogne; nous y trouverons un système continu de dépôts crétacés, qui pour l’étendue en surface ne le cède pas à ceux du nord. Les dépôts de cette région, vus en masse sur la carte, ont la forme d’un grand triangle équilatéral de plus de 100 kilomètres de côté; ils couvrent par conséquent une surface de plus île 5 0 > 0 kilo- mètres carrés. L’un des côtés du triangle court parallèlement au lit- toral de la [Méditerranée dans la direction N.-E. -S.-O. de Castellon de 1a Plana à Torlosa ; un autre va de Tortosa à Montalvan dans la direction E. -O., et le troisième côte revient vers Castellon de la Plana par une ligne un peu ondulée dans la direction du S.-E. L’in- térieur de ce grand triangle appartient tout entier aux dépôts cré- tacés. C’est un plateau froid et élevé , qui s’abaisse brusquement vers la mer; ses profondes découpures dans sa partie littorale donnent lieu à des accidents de terrains très pittoresques et constituent une vé- ritable région montagneuse. Vers PO., au contraire, il n’offre que des ondulations beaucoup moins prononcées, et qui au premier abord pa- raissent assez irrégulières. Cependant on peut y distinguer deux lignes de faîtes principales: l’une est orientée suivant le mouvement de la côte, l’autre s’en éloigne à angle droit dans la direction du N. -O. Le point de jonction de ces deux directions forme la partie la plus culminante du système; c’est précisément à ce point que se trouve la Pena Golosa, dont l’altitude est d’environ 1700 à 1800 mètres, et qui se voit de très loin en mer. Si l’on fait abstraction des Pyrénées, où les dépôts crétacés s’élèvent très haut, on trouve que c’est la Pena Golosa qui est la montagne ciélacée la plus élevée de toute l’Espagne. Elle est toutefois peu différente de la Muela de San Juan, dans les montagnes d’Albanacin (1). Cet ensemble crétacé est séparé de la (S) Le jour où nous fîmes l’ascension de la Pena Golosa, 1 8 juin 1 852, l’air étau d’une grande transparence, et, parvenus au sommet, nous Q -h SÉANCE BU 6 DÉCEMBRE 1802-. mer par une étroite bande de terrain tertiaire. Au sud, elle est en contact avec des terrains beaucoup pais anciens, avec des ruasses de grès, de calcaires et de dolomies triasiques, qu’on trouve à Ariana, Chova, Segorbe et jusqu’à Murviedro. Lorsqu’on fait l’ascension de la Pena Golosa, depuis la petite ville de Lucena, on passe en revue successivement, de bas en haut, pres- que toutes les couches crétacées de la localité; ces couches plon- gent en moyenne du (ôté du nord, et leurs tranchés, brisées sur le revers sud de la montagne , donnent lieu à des escarpements qui s’éloignent peu de la verticale. Aussi la Pena Golosa n’est-elle ac- cessible que du côté du nord. Voici quelques détails sur la coupe de celte montagne. Les cou- ches inférieures qu'on aborde en quittant Lucena sont composées d’un calcaire marbre de couleur foncée, avec des marnes et des masses de gypse blanc ou gris. Le gypse étant lies rare dans ie terrain crétacé d'Espagne, nous avons quelques doutes sur l’âge de ces couches que l’on retrouve à Villahermosa, de l’autre côté de la Pena Goiosa. Quoi qu’il en soit, elles sont surmontées par des grès quartzeux gris, et par des dépôts calcaires d’une épaisseur considé- rable, avec Ccrithium Lujani, Ostrea a qui la , Requienia Lons* dalei , Tri g onia ornata , Lima Cnttaldina , Rhynchondla lata , acompagnés de grandes Nérinécs et de petites Orbitolines coniques, O. conoidea. Un grès jaune, peu épais, sépare ces premières masses calcaires de celles qui forment toute la partie supérieure de la mon- tagne, et dans lesquelles nous avons retrouvé les oiôüe s petites Or- bilulincs, et à peu près les memes f sssiles { Requienia et Rhynchondla) que dans les couches précédentes. Ges fossiles caractérisent en Espa- gne comme en France l’étage supérieur du terrain néocomien. En. poursuivant notre exploration dans la direction de l'ouest, nous eûmes un panorama remarquable Au nord, la vue était limitée par les hauts plateaux ondulés de Mosqueruela et de Villafrança del Cid, à l’ouest, par la sierra Camarena, près de Terueî, tandis qu’au sud, pas- sant par dessus le golfe et la plaine de Valence, elle atteignait jusqu'au Mongo et au cap Saint-Antoine , qui se dessinaient parfaitement à 1 horizon. A l'est, la vue plongeait sur la Méditerranée, qu'elle em- brassait sur une vaste étendue, et dont la couleur bleue finissait à I horizon par se confondre avec le ciel. Nous étions accompagnés par M. de Botella , ingénieur des mines du royaume de Valence, et par M. Luis Mirai les, pharmacien à Lucena, qui avait souvent fait des ex- cursions botaniques sur cette montagne, et qui avait bien voulu nous y servir de guide. SÉANCE EU 6 DÉCEMBRE 1852. 05 trouvons ces mêmes dépôts néocomiens à Viliahermosa, à Cortès, à Feu a del Salto près Rubieios et à ôîora ; mais, en approchant de cette dernière localité, lnt rares , ceux qu’on y trouve y carac- térisent bien la craie tuileau. Ainsi, à Cuenca on rencontre YOstreo flabelluta , 10. cnnica ou cotumba , des Tylostomcs , Y H e mi aster Fourneli , etc. A Somulinos près d’Aiienza , IM. Casiauo de Prado a recueilli, dans des calcaires du même âge, Y Hemiaster Fourneli le Cyphosoma circinatum , le Diadema Roissyi , YOstrea (lubellata ou Matheroniuna , 10. conforta , et Y Hippuri tes cornu pas! or is. Le grès vert cl la craie tuileau (étages cénomanien et tmonien de M. d’Orbigny) paraissent donc constituer en grande partie la zone crétacée qui limite à l’est et au nord-est la grande plaine tertiaire de la Nouvelle-Castille , zone qui s’étend vers le nord cl qui limite aussi au sud et à l’est la plaine du Ütiero, suit sur les fl mes du Gua larrama, soit sur ceux des montagnes de Soria et de Burgos, du côté de Bar- badillo del Mercado, de Govarrubias, de Lara et d’Ontoria de la Can» ter a. De ce qui précède il résulte donc que les terrains crétacés de l’Ef- 100 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. pagne se divisent en deux principaux étages qui occupent des régions assez distinctes ; que l’étage néocomien, ainsi que celui de la craie supérieure , se composent chacun d’une masse arénacée surmontée par des assises calcaires; dans le premier cas, les grès et les marnes qui s’y mêlent représentent la partie inférieure de l’étage néoco- mien , et les calcaires sa partie supérieure ; dans le second , l’étage des grès représente le grès vert, et les calcaires qui les surmontent la craie tuffeau. Il est assez difficile de se former une idée approximative de la puis» sance de ces dépôts. Quant au groupe inférieur ou néocomien , en évaluant à AOO mètres l’épaisseur des couches dont se compose la sierra Marioîa , près d’Alcov , nous ne nous éloignerons sans doute pas beaucoup de la vérité. A la Pena Golosa , qui fait aussi partie du groupe néocomien, l’épaisseur totale des couches don- nerait un chiffre que nous évaluons, au minimum , à 500 mètres. Mais, dans l’une ni dans l’autre de ces évaluations, nous n’atteignons la base du terrain néocomien : l’étage des grès inférieurs n’v entre que pour une partie; en sorte qu’on peut estimer à 600 ou 700 mètres l’épaisseur totale de ce terrain. Les dépôts du groupe supérieur, le grès vert et la craie tuffeau acquièrent moins de déve- loppement ; à Cuenca, par exemple, où le groupe est assez développé, l’ensemble des couches ne dépasse guère 150 à 200 mètres. Dans la vallée du Tage, entre Checa et Bcleta , les grès et les calcaires cré- tacés peuvent avoir environ 300 mètres. En examinant la distribution générale des dépôts crétacés dans toute la Péninsule, nous remarquons qu’ils sont très abondants dans le nord, qu’ils pénètrent dans le centre, flanquant les sierras de Burgos et de Soria, le prolongement oriental du Guadarrama, et le haut plateau accidenté qui constitue toute la partie orientale de l’Espagne , mais qu’ils manquent presque entièrement vers le sud et sud-ouest, n’étant encore connus de ce côté que dans les montagnes qui avoisinent Malaga. On ne les rencontre donc que sur la moitié à peu près de la surface du pays. Cette moitié peut se représenter par les terres situées au N.-E. d’une ligne partant des bords de l’Océan, dans les environs du cap de Penas, près d’Oviedo, passant par Ma- drid, et se dirigeant ensuite vers Carthagène et le cap de Palos. Gette ligne coupe en diagonale toute la Péninsule ; elle la partage en région crétacée et en région où la craie est absente à peu d’exceptions près; cette dernière comprend tout le sud, une partie du centre, un peu du nord, et toute la région granitique ou paléozoïque de l’O, et du SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 101 S. -O. vers les frontières du Portugal, contrées où la présence de la craie n’a pas encore été signalée. Il faut traverser une grande partie du Portugal pour retrouver, sur le littoral de l’Océan, les dépôts cré- tacés décrits par M. Sharpe, et qui paraissent faire la contre-partie de ceux que nous avons signalés sur le littoral méditerranéen. Il est impossible de n’être pas frappé de la grande différence qui existe, au point de vue de la distribution géographique, entre les dé- pôts crétacés et les dépôts nummulitiques; nous avons vu ces der- niers, limités au pourtour extérieur des terres, ne pénétrer que timi- dement dans l’intérieur et ne jamais atteindre la masse centrale du pays, tandis que la craie se poursuit jusqu’au centre, et forme une bordure presque continue aux grands lacs tertiaires. Avant de parler des fossiles du terrain crétacé, nous ne pouvons nous empêcher de signaler le contraste remarquable qui existe entre la craie des Pyrénées et celle du centre ou du littoral de l’Espagne. In- dépendamment de l’absence, dans les Pyrénées, de l’étage néocomien si développé à i’E. de l’Espagne, il y a des différences qui méritent d’appeler l’attention des géologues. En effet, dans les Pyrénées, la craie est représentée par des calcaires de couleur foncée, associés à des grès durs, très consolidés, ou à des schistes noirâtres. Les cou- ches sont violemment disloquées et plissées, de sorte que, sans les fossiles, on serait tenté d’y voir des terrains fort anciens. Dès qu’on traverse l’Èbre, le caractère du terrain crétacé change; ce change- ment se manifeste dans les montagnes à l’E. de Burgos, et se pour- suit plus au sud dans toute la région que nous avons explorée cette année; il consiste en ce que les calcaires sont tendres, de couleur claire, jaunâtres ou tout à fait blancs, et que les grès sont peu conso- lidés et tombent quelquefois en arène. Les couches enfin sont souvent horizontales ou n’offrent pas de très grands dérangements. Il n’y a d’exception que pour la Pena Golosa et la région qui l’envi- ronne, et, ce qui est remarquable, c’est que précisément dans ce district les calcaires affectent le faciès qu’on pourrait appeler pyré- néen. 102 SÉANC E DU 6 DÉCEMBRE 1852» Liste des fossiles crétacés de l’est et du sud-est de l’Espagne (1). GENRES ET ESPÈCES. LOCAt.lTÉS. TERRAINS. 4 iimoni tes Coi’iuirlianiiS'd'Ot b Mo- a Néoc"mien sup. — Aisas , -i Oi li . . . . . . . 1.1 td. — mlermetUus . ni ..... II. ................ Id. — J'e> ezianas , i . xi ci i a M.uiola , | rés Abu Néocouiieu infér. — ('mtfhiii .'umts. i'I. .... 1.1 II. — stshennnns .ni .... Il Id. — ;/• wnmu il. \ is , ni.. ... H M. — ni i'i ilns. H it4. ...... Id. Id. — J tu nui siunus, tl'O l>. . . . 1.1 II. — /{<>'<) anus ni 1,1 I I. — rfy eiiornii\ .il Il Id. — /in^iiticosittliis , i ennyi , <1 Ui l> ClU-'a de! Vidlio dans 1.1 II" lilagil il,- I) an, iiil 'lui— me -1 lie foi b» - a. Néocoinien sup — fît sc iv u l il ris . i • 1 Eiedas. . n muI ouest de Turin a . . I b J Vanntus neoenmiensis . « 1 0 1 1 » . Id 1 i. — ,1'luhoiis înüiiW ilsoJ, . . . Mura .le Ru lueî.i» Vep- t mien rui>. ietem ailes ili! i nuis, IPainv. . . Sien a Mal loli . . Neocoiiiien iul r - suhl n -i/'n mis oa>p.>il. . Id Id. Ce rit lt mm Lujaiu, Nob. ..... Ui i illas pré> Monlalli.m, S ete-Agua entre lîui.ol el Heipieu , , i nui Goliisa. Pana del Nallu entre Coi - les ei Rubi. los. Ncocomien sup. Id. )ln.siuma Torniliiw, Sliarpe. . p» es A 1 uiiiii'.i , Mon "O prc> 1 1 , Cueva ci « * K Vitlrio. Id. II. .Vei'ineii iiii;ii"ien «•* H • » . Fiinia>. Almaii-a. Frc-du'.. . . M. — lieiniii.rinnn ? d'O b. . . . E leiias. ............... II. — C nnmiiii.iilliu’t ni. . . . . Roule va , | rcs la br. s Id. iUerncertts Peinai . 1» r* n\!. . . . N id de II ll.irejos , RlodeVU 1 — Benunmnii mit i les. Cuev a del Vidi io, Villafi aura del C d. Id. — contorla , d’Arch Seinoliiios p, ès Ali nza , Congos trina , Ov.edo. Ciaie tuffeau. — ftqitilrt . Rrong. ...... Pena C.olnsa , Fredas Véocerrren sup. — jlubellala , Ou ldi. 0 ‘e>l de M la , Cainpilio de lie P.i- r.ivientos entre Rouit In-s et IMov.i, Cuenca . Calomaide , Gnadala- viar . CaiTH.sru.sa , Soiiiolmos , nord de î'uirgus. Ci aie lutieau. — - corticn . S., ou colamba, D. Om si de M ra , Cuenca Id. Lima CoitalUina , d’Oib Mura, Pieu el Tejo piès Requena . Pena Golosa, ouest de Val de bi- nai es. Néocomien sup. Plicalula jilacunea , Lamk. . , . Abora , Mura, Cueva del Vidrio, Fredas, Val de Liuares. Id. (l'i Celle liste comprend les fossiles que nous avons recueilFs celle année et ceux. que l’un de lions avait rapportés d’un piecédeut voyage avec M. de Lorière. SÉANCE MJ 0 DÉCEMBRE 1852» 1 OS GENRES ET ESPÈCES. LOCALITÉS. teArains. | Jnnira alara , Roem. ..... Mcui a , Mu a , P, un Golosa , cap Nèocomieu sup. Il | Trignnia omnla, d’Oi b. .... A'hir , Cn.-Va del Vidrio, ValL- lioila . Kiodevu. 1». n.i r.olo a M. I Myiilus u-r/tichs. Siivv, ..... CileVn del Vidtiü 1.1. | Pimi'i . <1 Or!,. . . Un, a . ..... ld. | Crus.sniella i ■///>/ essa ? SoW. . . ('aitij)itio .1." los Para vient., s. .... Craie In {fenil. S Aru-mis inrlegans , Miaipe. . . Ouest «11* Val de 1 ilia, ex Neuf,, mien sup. | Corbis t orilijbrm is , Doit. . . . l’iés lliuaie} >s . Pena del Sallo . ld, ! 1 Vf uns Dttpininna , d’Oih. . , . Cneva del Vidrio. M. Pool du C i 1" iel MH' la teille d IJ. f l’iiotmlamyn elangata , Miinst. . Miiitid à Valence, Muta, Peu., del Sa! o. Pi ü- IJ narejos M. 1 Paito/uea Preaosti, U ce 1) Alro;a . S et -- Agitas, Ctleva del Vi- ld. | Ha. . . . A le >i a. Mur i, sien a M.,itola, Pena Id. | Tpxasier com "lanalu*, Ag .,S/ia- Gui -sa , Cneva .tel Vidrio, Val de Lion es . ea p AUnr. Siei.a M.iinla , pies Alony , Mos Neoc. inf. et siip | tangas ivl asti * . Çaink. 1 — oblougus, IJelUG s|>ï . . . rji|,*i n la. Mura Poiia del Sal 0, Cneva de VenGomien sup. | — Jiiicmsterifnrmis,A.Gru s. Vnlrio , Mm-, -lia. Cneva il 1 Vi Midi, enviions de Val Id. p — g i h b ti s, A g do Linureç. A1 cura. ....... Id. | S a Irai a Valliliuna 1 1. | Pi u'ni lra Stthncnlns ? Losqne. . Mm a. I 1. i Vyrina pygiea ? Den-r Fredas hl. I CuUtpÿgns citrinaliis , G u 1 d f. . . liiit.e Villafiuiica del Cid , el Val Grès vert. 1 fieminster Fulirnèli , Desh. . . de Liiiares. Cm lira , Molli del Clieivo. Somnli- Craie tuffeau. mis pi ès Aiiei Za , Segovia. cii'i- rons de RnrgO' , Bon. Fr (Leon). . S, .mutin, is , Cnenca ld. (’ynhnsiwia riirinaltim, Ag. . . Smiiulmus, ............. ld. O/ bhuhnu couoitleti , A. Gras. . Alcora , Mora. Corles, Peua Goh> a. Neocumien sup. Orbitolina iliscoidea, A. Gras. . em iror s de Val de Linaies, M >- lella, V a 1 1 hmi.i , MoMjiieouela enviions d Hmaiejos, r.ip Allnr. Pion el Tejn, 1 mil du Cahi iel. sur la ïd. mute do Madrid à Valence , M ,ngo. Cneva del Viud de Requena, dans tout l’ancien royaume de Valence, nous ne trouvons plus de dépôts jurassiques. Pour reprendre la suite de nos observations sur ce terrain , il faut nous transporter au nord , vers les limites de ce royaume et celles de l’Aragon. Si l’on tourne SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 108 le dos à la Méditerranée et que l’on marche de Castellon de la Plana et de Lucena vers l’intérieur , dans la direction de l’ouest, c’est au village de Sarrion , à 90 kilomètres de la côte et à 25 kilomètres de Teruel , qu’on rencontre les premiers pointements jurassiques. Sar- rion est assis sur une proéminence liasique très aplatie, qui perce au milieu de la plaine tertiaire dans laquelle passe la route de Valence à Teruel. A quelques kilomètres à l’ouest, le terrain jurassique se relève for- tement et forme le système de la sierra Camarena , ou sierra Java- lambre, qui ne le cède pas en hauteur au massif crétacé de la Pena Golosa. Ce système se prolonge en s’abaissant lentement au nord et au sud ; et vu à distance , du sommet de la Pena Golosa, par exem- ple, il dessine à l’horizon une ligne droite ou peu sinueuse. Les escar- pements abrupts, qui, du reste, n’ont pas de pentes très fortes, sont tournés vers l’ouest et le nord -ouest. Nous y avons trouvé les deux membres habituels de la série juras- sique de celte contrée, le lias et l’étage oxfordien, représentés par des bancs successifs de calcaire compacte. Les roches de la série oxfor- dienne ne couronnent pas précisément le sommet de la montagne ; mais elles sont plutôt adossées contre ses flancs à droite et à gauche de la crête culminante. Depuis la sierra Camarena, en continuant à marcher vers le nord- ouest, le terrain jurassique est interrompu par les dépôts tertiaires de la plaine de Teruel , et reparaît à Jea et à Albarracin. Ici nous pénétrons dans une zone de 70 à 80 kilomètres de largeur, qui est en grande partie occupée par des dépôts jurassiques. Une ligne la coupant transversalement , comme nous l’avons représentée dans la coupe fig. 2,pl. I, passe par Jea, Albarracin, Calomarde,YiilardelCobo, la Muela de San-Juan , et se poursuit jusqu’à Carrascosade la Sierra, à l’ouest de Betela. C’est la suite, dans la direction du nord, du grand plateau jurassique d’Una et de Valdemoro. A Albarracin, le Guadalaviar coule dans un barranco très profond, de 250 à 300 mètres, où les assises du lias, coupées à pic sur quelques points, présentent leurs tranches à découvert, et dans une position assez inclinée relativement à l’horizontale. Sur sa rive gauche le lias se poursuit jusqu’au sommet de la montagne ; mais , sur sa rive droite, il est surmonté par des couches qui renferment des fos- siles de l’oolite inférieure, et enfin par des calcaires oxfordiens. La coupe d’Albarracin est intéressante, en ce qu’on y voit, comme à Hinarejos , les dépôts triasiques s’enfoncer sous les calcaires du lias. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852 109 En raison du peu cî’inciinaison des couches et de la profonde cou- pure du barranco , on peut se faire une idée approximative de l’épais- seur des dépôts jurassiques de celte localité que nous évaluons à 250 ou 300 mètres. Coupe prise à Albarracin. > 1. Calcaires oxfordiens. 2. Id. du lias. 3. Trias, inai nés et gypses. 4. Id., calcaires 5. Id., grès quarlzeux, rouges. 6. Silurien, schistes argileux. D’Albarracin à Royuela et Calomarde, on s’élève sur des plateaux basiques dont l’altitude est de 1300 à 1400 mètres; dans les bar- rancos qui séparent ces plateaux, les assises triasiques se montrent au jour ; puis, de Calomarde h Griegos, leur sommet est couronné par des dépôts crétacés, comme nous l’avons vu précédemment à Gua- dalaviar et à la Muela de San-Juan. Nous avons fait remarquer, à cette occasion, que toute la contrée, entre Fuente Garcia, Cerro San- Felipe et la Muela de San-Juan, présentait un bombement général, sans que, néanmoins , les points les plus élevés dépassassent de beau- coup la chaîne allongée de la Camarena et le pic isolé de Pena Golosa. Entre Calomarde et Frias , les dépôts oxfordiens prennent un peu plus de développement ; ils y sont plus riches en fossiles, à cause de la présence de lits marneux et argileux intercalés dans des bancs cal- caires. De Calomarde à Frias. O j Terrain jurassique. 6. Trias. Marnes gypü Trias. Marnes, gypse et hyacinthes. î 10 SÉANCE Î)U 6 DÉCEMBRE 1850. A Villar del Cobo on trouve aussi des lits de même nature, mais qui ne font plus partie de la série oxfordieune : ils appartiennent au lias, et sont assez riches en fossiles. A partir de cette dernière localité, les dépôts oxfordiens disparaissent et sont remplacés par des cou- ches liasiques qui occupent le sommet des plateaux. On les poursuit ainsi clans la direction de üheca et de Beleta , alternant avec les grès et les calcaires de la craie ; puis, dans les en\ irons de Carrascosa de la Sierra, le terrain jurassique disparaît sous les dépôts crétacés pour ne plus se montrer au delà. L’année précédente , dirigés par notre ami M. Casiano de Prado, M. de Lorière et l’un de nous avions suivi le terrain jurassique d’Àlbarracin vers Molina de Aragon. Aptes une large interruption, due au massif silurien d’Origueia et de Checa, le lias et le calcaire oxford ien reparaissent vers le petit village de Prados Uedondos. pour ôire de nouveau interrompu par les grès cl les conglomérats rouges du trias, au milieu desquels est située la ville de Molina. Une des régions les plus riches en fossiles jurassiques est celle qui est située au nord de Molina , et au delà de l’axe silurien de Pardos. Les villages de Coucha, d’Anchuela <îel Campo et de Ma- ranchon, au centre de cette région, étaient déjà connus , il y a cent ans, du père Torrubin, qui les cite souvent dans son ouvrage sur les fossiles de cette contrée. Toutes les espèces appartiennent au lias, et aucune n’iudi pie le terrain oxfordien. Entre ces (entiers points cl les montagnes de Soria et de Burgos, existe un espace peu connu des géologues. Ce qu’on sait , c’est qu’au delà de celte lacune, le t< train jurassique se retrouve dans les montagnes qui, du Moncayo, se prolongent jusque près de Burgos. Il occupe les lianes de cette chaîne jusqu’à Brie\a de Juar- ros, à 20 on 2 à kilomètres à l’est de cette ville. Là c’est encore le lias moyeu et supérieur qui domine , mais plus à l’est, entre Bai ha- dillo de I *s Herreros et Cauales, sur la route de Mansilla, on observe utt beau développement des deux étages, basique et oxfordien, que nous sommes accoutumés à rencontrer eu Espagne. Us y sont généra- lement composés de calcaire gris on bleuâtre, compacte, presque litho- graphique, et à cassure conchoïde. C’est le caractère général des ca'caires jurassiques de l’Espagne, caractère qui les distingue assez bien des calcaires crétacés, plus blancs, plus grenus ou plus tufacés. Il y a aussi moins de calcaires magnésiens dans le jura que dans la craie , et les grès y sont presque inconnus. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 185^ 111 Liste des fossiles jurassiques de l‘est et du sud-est de V Espagne. GENRES ET ESPECES. ' LOCALITES. ÉTACES où les mêmes espei es se li ou vein eu P’ rame. Ammonites phcalilis , Sow. . Fiientpïe pim» ch* Mova, Iliunrcjos, Pool du Cubru‘1 toute ne Mmlini à Valeiçe, sierra Caiiiui'riia, Pu o el T- j»i jnc- lUujiu iui, Kiias. Al biii'iac n, Vill.ii u. 1 Gnbo. cuir A lnst.tii « l’iad.s Kedolidns , ('.abi a ( Aola lomie,. O.xfordieu. — maeroeephalus , Srhl. . 0 de M ya , Prias, Alliai racin . ViUard. 1 I. In». Grande oo?. et oxf. I — ■ cannliculalus , Munit. . Ouest de . M< >ya, G uadalaviar, sierra GainaiVnu , t lia*. Oxfoi dien. — bifrons . Bru g. ..... Guad^lii'i.ii , Allia’rain , près lé yuela , Ti a ,o a (distilla, V.llai dcl b.., PriuloS Kc,doii‘i"S. A n - «Il cia, deux ll'üic' ouest de lie (êta, deux 1 lem-s ouest 'ie Clieca. hius suj erieur. — ffoletnrfrei . (YOrh. . . . Las M- judas (nord de (.ucncaj . . . Id — ser/Jt'iit inns , Ni l>l. . . , bas M iiadas. Aocliucla. .. . „ . , 1,1. — Uonmi-u i ci , d'O.b. . . Il uaicjns. Cald'a .......... O.xfoi dion. — lunluiits IWmii. ..... Siei i a Cumul enu. II. — tort isutcù lus . d Oi |>. . Il M. — heclicus , liai lin ldi, dcim-liciie. à l’est de Prias «■nli i* Prias el \ i.lar de 1 C' » | M » ld. — Constant U , d'Orb, . . . II. — luillilu, Ziet Ko |rc P 1 ias et Villa, dut Cobo, Prias Villa, d, l Cnbo Holloway rock. — lisons, ernrmm ns, S"W. , . , II. . •xful.l Ci. — Dumont, tu Il — crisia-^nlii, o’Q b. . . 1 !.. cm..- Prias ci Vüli.rd. 1 Cob. • sied. U. — la i rit iis, t'usi h ld., Cabia (.ni sud de Cuuluiic). . Ii. Acllowa v. — t uni ut iis , Zideii. .... 1 b ' — t iiin/jln nniiis , B: ug. . Am liuç’a Lias supérieur. 1 — ■ dis: aides , Zii-I. . . , . 1 1., Alliarr,iCHi. l'b — varia: ilis, <1 0; 1 ld bb — Des lard . i l. .... id 11. — milensis, Znd ld., A I bu rruciii , Guijoizcoa . . 11. — priniordiatis. S, lit..,. . ; lt................ ld. — a n n n ta l ns . Sow. . . » . ld.- ld. — ! Trneiiëi , il’Oib... . . . Al ban acill. . , Oolde inférieure. — < H u:ii pli ne y s i an us . S^w. ld. bl. — Gers iîlei , ut, . . . . . . 1 !. ld. — s iilii'udi a lus , td . , , , . il. . IJ. — aiiiusli^ei us, o üib. , . Il ; Grande oolite. — titillants , ni. . . ... , ld. . ld. ld., Vil lar del Cobo ld. — Deslouÿt Imm/isU d’Oi b ld Oolite inferieure. Bt lent n iles hast uns , K'auiv. . («oadalaviar , Plias. . , K'-Howayet oxford. — Puzostu nu y d'Oi'b. . . , Pt as KelloWuy. — tripai litus, Scbi. . . . . Maraucbou, Ancbuela.# ...... 112 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. GENRES EX ESPÈCES. LOCALITÉS. ÉTAGES où les mêmes espèces se trouvèn! eu France. Belemn. cnnaliculatus , Schl. — Iriparlitus, id Id . Id. — clavnlus , id. ...... Id Lias moyen. Nnutiliis subbiangulatus, d’O. Frias Oxfordien. Aptychus la Lus , P;irk. . . . . Id Id. — lamellusus , Munst. . . . Cabra Id. Ostrea gregarea , Sow Guadalaviar , Griegos , Aochuela , AlbaiTacin,Villat del Cobo.Checa, Cai rascoaa, Ton emochu, Baraho- na> Elle est partout mêlée avec les fossiles du lias. Kelloway et oxford. Lias moyen. colubrina , Goldf. . . . Albarraciu , Villar del Cobo Kelloway. Mylilus /iticnlus ? Sow. . . . Las Mujadas , Albarraciu O dite inférieure. — biparliltts , Goldf. . . . Plias Kelloway. Lima elea , d'Orb. ...... Bi ieva , Anchuela — gigantea, Sow Aochuela ld. Plicalula spinosa , id Griegos, Anchuela, Maranchon,Tor- reniot ha. Lias inf. et lias m. .Hinnites , voisin de Spondylus Sierra Camarena , Villar del Cobo , velalus , Goldf. entre Alustante el Prados Redon- dos, Brieva de Juarros. Trigonia clallirala ? Agas. . . Anchuela , Albarraciu. ....... — coslata , Purkins. ... Anchuela Oolite inférieure. Lulraria rotundata , Goldf. . Anchuela , Moulerde Lias. Thracia Cliauviniana, d’Orb.. F l ias Kelloway. Qui ç sarthncen^is il Pholadomya paucicosla , Ro. Albarracin Cor al — Hausmanni , Goldf. . . Anchuela Lias supérieur. — irapeztna , Buv Eulre Frias et Villar del Cobo . . . Oxfordien. Lyonsia unioides, Goldf. . . . Anchuela, Villar del Cobo Lias moyen. Maclromya liasina , Ag Maranchon , Albarracin , Villar del Cobo. Id. Peclen aculicnsta, Lamk. . . Id., Anchuela, Brieva de Juarros. Lias supérieur. — œquivalvis , Sow. . . . Brieva , Canales Lias moyen. — ■ disciformis, Schub. . . Barahona Id. — subspirwsus , Schl. . . . Enire Alustante et Prados Redondos Oxfordien. — ip.Tloritix , Goldf. .... Anchuela. , , Lias supérieur. — Pradoanus, Nob. . . . ld., Guadalaviar, Las Majadas. Spirifer roslralus , Schlolh. . Brieva , Las Majadas , Maranchon , Anchuela , Coucha , Montedre , Bronchales entre Monlerde el Origuela, près Royuela. Guada- laviar , Torremocha , Villar del Cobo. Lias moyen. .V Wnlrni.i Sow. ....... Cnncha. ..... ... Lias inférieur. Terebratula punctata, id. , . Las Majadas, Anchuela, Maranchon, Prados Redondos , Albarracin , Villar del Cobo, près Royuela, Torremocha del Campo .Coucha, Tories. — subpunctata, Davids. . Brieva, Canales, Guadalaviar. . . . Lias. P.dwardxi. id ..... . Conrha. Id. — ornilhocephala, Sow. . pala , Buch. ....... Giuidalaviar. •••«•••••••• Grande oolite. Frias — indentaia , Sow Guadalaviar , Las Majadas , Bron- chnles . Lias. — cormita, id. ...... Anchuela, Albarracin Lias moyen. — resupinata, , id Lus Majadas , Sierra Camarena, An- chuela, Torremocha, Albarracin, Villar del Cobo, Brieva. — insignis , Schub Frias , entre Alustante et Prados Redondos. Oxfordien. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 118 GENRES ET ESPÈCES. LOCALITÉS, ÉTAGES où les mêmes espèces se trouvent en France. Terebralida cnarctnta . Paik. Cuire Àliislanie elPrados Redondos. Grande oolile. — peclunculits, Schl. . . . td. — splueroi/lalis, Sow. . . Anchuda j Albarracin , près Roy- Mêla , Viilar del Cobo. Int. oui. Oxfordien. Rhynchnnetla rimosa , Bach. . R i i e v a Lias moyen» — cynocepliala, Kich. . . . G u, ulula viar,Villar del Cobo. Trama Castilla , Monlorde , Albarracin , près Royuela, Anclinela, Torres, sierra Camareua , Ahlaïujue , Ra- mona. Lias. — Moorei , Davids Las Miiiadas, Anclinela , près Roy- uela, Viilar del Cobo, Munleide, Tories, — telraeclra , Sow. .... Sierra Camareua , Albarracin , près Royuela, Viilar del Cobo , Mou- terde, Torres. Bronchâtes, Prados Redondos, Ancbuela, Maranchon, Guadalaviar , Tonemocha , Con- cha , Cariascosa de la Sierra , Bi iev-a. Lias inf.jOol, et Kel. — > vnriabilis , Schlolh. . . Las Majadas, entre Canete et Val- demoi.o , Amhuela , Albarracin , Trama Castilla , Viilar del Cobo. Lias, — inconsians , Sow. . . . Prias , Albarracin Oxfordien, ! Cidaris spcLhiln. , Aj. . „ . # T Plias Id. Grande oolite. Afjiocrùms elèganx , d'Orb. . Id — rotuinhis , Miller. . . . Id. Id. Penlncrinus basalliformis , id. Prados Redondos, Anchuela,Boyuela. Viilar del Cobo. Liasmoy.ellias sup Monllivallia dis par , Phi 1 -, sp. Prias Oxfordien, Scyphia feneslrata, Goldf. . . Id ld. Bien que les fossiles des environs de Molina de Aragon eussent été décrits vers le milieu du siècle dernier par le père Torrubia , îe terrain jurassique était encore, il y a quelques années, si peu connu en Espagne, que son existence, sans pouvoir être révoquée en doute, n’élait pas néanmoins appuyée sur des preuves paléontologiques suf- fisantes, et que ses fossiles ne figuraient dans aucun catalogue des êtres organisés de cette époque. Dans ces dernières années, M. Ezquerra del Bayo et quelques autres géologues ont cité cependant des es- pèces jurassiques bien caractérisées , mais leurs listes étaient peu nombreuses, en sorte qu’on aurait pu croire ou que le terrain ju- rassique occupait peu d’étendue en Espagne, ou que les conditions dans lesquelles il s’était déposé étaient peu favorables au développe- ment de la vie animale. C’est à M. Casiano de Prado, ingénieur des mines, chargé de faire la carte géologique de la province de Madrid, qu’on doit d’avoir recherché ces fossiles avec soin, d’avoir découvert un grand nombre de riches localités dans les montagnes d’Albarracin et dans celles qui Soc. géol., série , tome X. S SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. llâ Irur font suite au nord et au su î , et c’est, guidés par lui d'abord, et en suivant plus tard son exemple , que nous ayons pu faire une collection qui élève aujourd'hui à lüù le nombre des espèces juras- siques de la Péninsule (1). Nous avons dit , en parlant de la répartition du terrain jurassique en Espagne, que les deux membres qu’on y rencontre le plus habi- tuellement sont les étages basique et oxfordien. Cela est parfaite- ment vrai ; cependant , en parcourant notie liste de fossiles, on en reconnaîtra qui proviennent d'étages intermédiaires entre le lias et le calcaire oxfordien Quelques uns même correspondent au coral rng , mais aucun n’indique les étages supérieurs du Jura qui pa- raissent manquer dans les parties de i Espagne que nous avons visi- tées. Ees environs de la ville d’Albarracin sont nn des points où l’un de ces étages intet média ires, l’oolile inférieure, paraît être repré- senté par quelques fossiles caractéristiques. D’autres localités, comme Viüardei Cobo , nous ont fourni à la fois des fossiles basiques et oxfordiens ; c’est qu’eu effet il existe là des vallées d’une grande profondeur, où le lias est à découvert, tandis que le calcaire oxfor- dien reste sur les hauteurs. Le lias inférieur manque toujours. De Fi ias à Villar del CoLo, Ci 4 l ( Calcaire ltlanc, çiait* t u fT< au. ^ | Terrain cielace. . . ^ ilvfcC otl[els quarîziles, ^ | Terrain crétacé. Quant aux fossiles en petit nombre, qui se rapportent à des es- pères qu’en France (tu en Angleterre nous trouvons dans le Kel- loway rock et dans le coral rag, ils nous ont paru mélangés ordinai- rement avec des fossiles oxfordiens, et compris dans ce grand horizon. (I) Dans ce nombre sont comprises les espèces trouvées l’année der- nière par notre compagnon de voyage, M. de Lonère, qui a bien voulu nous donner ses déterminations. iî5 SÉANCE pu 6 DÉCEMBRE i S52. Noms ne prétendons pas rependant que ces deux étages n’en puissent être séparés , mais même dans nos pays celte séparation n’est pas toujours facile , et l’on conçoit que c’est un travail de détail que nous laissons aux géologues qui parcourront l’Espagne d’un pas moins rapide. Terrain triasique . Dans ce que nous allons dire des dépôts triasiqnes , nous nous renfermerons dans les limites des provinces de l’est de l’Espagne, comme nous venons de le faire pour la série jurassique. Nous ferons remarquer dès à présent (pie ces deux terrains ont entre eux une certaine analogie relativement à la manière dont ils sont répartis à la surface du pays : les assises qui font partie du trias ne forment pas de grands espaces littoraux ; elles ne couvrent pas de surfaces un peu étendues; elles sont en général distribuées par îlots, comme nous l’avons vu pour le terrain jurassique. Elles accompagnentsouvent, en bandes minces, b» cours de quelques rivières, comme le Cabriei et le J acar. et se découvrent seulement au fojul dt s barrancos. Recouverts par les terrains plus récents, ces dépôts ne se relient pas entre eux, ou ne se relient que par des communications souter- raines, et sont représentés sur notre carte provisoire par une série de taches de formes très variées. Cependant, dans un coin de la province de Valence, ils ont pris un peu plus de développement. Entre la rivière de Jluniedro et le Mijarrs,' depuis la ville de Murviedro jusqu’à Segorbe , et de ce point à la sierra de Espadan, nous avons remarqué un assez grand dépôt triasique, d’environ 50 kilomètres de longueur et de 20 ki- lomètres de largeur. Puis au Pico de Ranera et dans son pourtour, entre Moya, Tuecar, Chetva et le pic jurassique del Tejo, près Re- quena, le trias a pris aussi quelque développement. Ce Pico de Ranera, au dessus de Garaballa, est à plus de lüOü mè- tres d’altitude; il surgit d’une manière assez imposante et domine toute la contrée; il est formé de grès micacé, en bancs minces ou en dalles qui se succèdent jusqu’au sommet, en s’inclinant légère- ment vers le sud , et présentant un escarpement presque vertical- , d’une centaine de mètres de haut du côté du nord. On y voit toutes les tranches des couches disposées absolument comme les tranches des feuillets d’un livre. 1ÏQ SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852 Coupe du Pico de Ranera. G £> 4 Terrains tertiaire et diluvieu. 4 3 i. ( Dolomies. \ Argiles et gypses, j Calcaire dulomitiquè. \ Grès ronge micacé ( Rodeno ). La sierra de Espadan présente aussi des formes analogues, mais moins hardiment découpées. Avant d’aller plus loin , nous dirons quelques mots de la nature des roches qui composent ces dépôts dans la partie de l’Espagne que nous explorons. Nous y avons trouvé réunis les trois membres de la série iriasique. En commençant par le plus ancien, nous y remar- quons : 1° Un grès inférieur , ordinairement de couleur rouge, connue le grès des Vosges, formé d’éléments essentiellement quartzifères , et contenant des paillettes de mica. Ce grès peut facilement se diviser en deux étages. L’étage inférieur est de la même couleur rouge , mais formé d’un grain beaucoup plus grossier, moins micacé, passant quelquefois à un conglomérat , où l’on remarque une pâte sableuse , enveloppant des galets de quartz. C’est dans cette assise inférieure que nous avons trouvé, prèsdeCheca, un poudingue dont les cailloux, de la grosseur du poing en moyenne , étaient presque tous im- pressionnés les uns par les autres; la partie creuse du galet corres- pond à la partie en relief du galet voisin, et l’on remarque au point de contact des traces d’usure et de frottement (1). Quelquefois les éléments constituants de ce poudingue se désagrègent avec facilité et encombrent les chemins creux d’une masse considérable de cail- loux roulés. L’étage supérieur est formé ordinairement crime suite d’assises en (1) Ce phénomène a été observé déjà par plusieurs géologues, parti— culièrement dans la vallée du Rhin par M. Daubrée , et dans les Asturies par MM. Schulz et Paillette, et ce dernier a essayé d’en don- ner une explication fort ingénieuse. [Bull, de la Soc, géol , vol. VIT, p. 39.) SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 147 bancs assez minces, d’un grès à grains quartzeux, fins, de couleur rouge, avec des paillettes de mica couchées à plat ; on y trouve rare- ment des cailloux ou des galets. On l’exploite un peu partout où il se trouve , et en l’emploie pour dallage et pour pierres d’appareil ; la quantité de mica qu’il renferme le rend peu solide. Le Picode Ranera fait partie de ce système. Dans la sierra de Espadan , à Chova, 16 kilomètres environ à l’est de Gastellon de la Plana, on y exploite du cobalt, du cuivre gris et du vermillon. Nulle part nous n’avons trouvé dans ces grès, soit inférieurs, soit supérieurs, de restes organiques végétaux ou animaux. 2° Nous arrivons maintenant au second membre du trias, à l’équi- valent du muschelkalk; nous disons Y équivalent , parce que nous n’avons pas rencontré de véritable calcaire coquiîiier. Nous avons vu à sa place des masses de calcaires presque toujours dolomitiques, que nous avons mises sur le même horizon que le muschelkalk, parce qu’elles se trouvent placées entre les grès ci-dessus et un système de marnes, de gypse et de sel, qui représente pour nous le keuper. Ces calcaires sont complètement dépourvus de fossiles, dans presque tous les endroits où nous les avons rencontrés, à Canete, à Boniches, à Moya, à Minglaniila, à Almansa , à Cofrenles, à Jalance, à Checa , au village de Cainarena et à Beleta. Ce n’est que dans trois localités, à Hinarejos, à Royuela et sur le Jucar, entre Jalance et Jarafuel, que nous y avons recueilli, après beaucoup de recherches, quelques fossiles assez mal conservés , mais qui, néanmoins , nous ont été d’une grande utilité (i). Les calcaires sont ordinairement jaunâtres ou gris, durs, un peu caverneux, grenus, composés de très petits cristaux. Ils sont tantôt régulièrement stratifiés en couches peu épaisses, tantôt dépourvus de stratification apparente, se relevant brusquement en masses verticales et formant des pilons isolés, élevés de 50, 60 ou 80 mètres au-dessus des terrains environnants. Ces pitons doivent leur existence à la so- lidité de la roche; les couches marneuses qui les entourent ayant été ravinées et dénudées par l’action des eaux, les calcaires dolomitiques sont seuls restés debout. (I) Nous y avons reconnu une coquille ressemblant à Y Avicula social™ , de petites Lima , dont nous donnons plus loin une figure, et une bivalve plus petite que le Myacites elangnta, Schl., mais qui en paraît très voisine. Cette dernière a frappé l'attention deM. de Koninck, qui l’a emportée pour la comparer dans sa collection, et qui s’est as- suré qu’elle est identique avec une espèce non nommée du muschelkalk. 118 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1S52. L’industrie humante a profité de celte disposition pour on faire un moyen de défense du pays; déjà , du temps des Arabes, on y a con- struit des forteresses et des châteaux qui maintenant tombent en ruine ; quelques uns d’entre eux ont été remis en état dans les der- nières guerres civiles qui ont dés dé h Péninsule, entre antres celui de Lande, qui est bâti sur une arête presque verticale de calcaire dolomitique de 72 à 80 mètres au-dessus de la ville; il domine les trois vallées qui se réunissent en ce point. Le château de âloya se trouve aussi dans les mêmes conditions. Le château de M >yn. n. Terrain terliaiic. h. Cm Irait e mu-iii-bien (Musique. A ninarejos, àBonichcs, ils sont réduits à quelques tours ruinées. Pus au sud, à Cofrentes, le piton dolomitique porte un ai c'en château qui est encore habité. A Jalance, à Jarafuel , à Avora, h Ahnansa, les châteaux, qui devaient avoir autrefois une certaine im- portance, ne sont plus que des ruines. L’ancienne Sagonte , aujour- d hui Murviedro, renfermi les restes d’un ancien théâtre romain, bâti sur une colline de calcaire dolomitique du trias. Ces calcaires ne forment pas de système continu, et lorsqu’ils sont fi , u rés dans une coupe géologique* ils ont l’aspect de dykes de por- phyre ou de Irachyte, (pii surfissent au milieu de terrains hori- zontaux plus modernes, comme à Almansa et à Moya , où on les voit s’élever au milieu d’une plaine tertiaire. V En poursuivant l’ordre chronologique ascendant décès dépôts, nous arrivons mai ntt n.int à un système de marnes, d’argiles et de gypses, qui prend un assez grand développement dans la partie sud- ouest du royaume de Valence. On y exploite des inities de sel et des sources salées. Ce terrain est caractérisé par la présence presque constante de cristaux de quartz bipyramidaux ou hyacinthes de Cowpostelle { 1), qu’on trouve en grande quantité daus les ma -ses (i) M Casiano de Prado, originaire de Galice, nous a assuré que ces cristaux, dits de Saint-Jacques de Compostelle, ne se trouvent nulle part dans son pays , et doivent avoir été apportés et vendus à Saint-Jacques par les pèlerins. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1 852. 110 de gypse. Ces cristaux, abondants dans quelques localités, sont li- bres, isolés les uns des autres, de couleur rouge quand le gypse qui les enveloppe est rouge, et blancs quand legypseesi blanc. On y irouveaussi des cristaux niàclés d’arragonite ayant une forme hexagonale; ils sont assez Volumineux et, de môme que le quartz, dans la masse gypseuse ils sont libres. La principale mine de sel exploitée dans ce terrain est celle de Minglanilla ; elle est située au fond d’un barranco triasique de 150 5 100 mètres de profondeur, entre ce village et la rivière Gabriel, à une petite distance de la nouvelle route de Madrid à Valence. Le sel, exploité par des galeries souterraines, est en masses puissantes, intercalées dans des argiles bleues ou rouges; il est à l’était cristallin, blanc et assez pur. Dans l’intérieur de la mine on a pratique une série de grandes salles entièrement taillées dans le sel à une époque an- cienne. Les eaux ayant envahi plusieurs de ces salles et y ayant sé- journé quelque temps, lorsqu’elles se sont retirées, il en est résulté, par l’effet d’une seconde cristallisation, que les parois se sont trou- vées tapissées de volumineux cristaux cubiques de sel, dont quelques mis atteignent 8 à 10 centimètres de coté; à la lueur des torches, ces cristaux donnent lieu à de fort beaux effets de lumière. Il existe encore dans le même terrain, à Villena (Murcie), une autre exp’oitaiion de sel moins importante que celle de Minglanilla. Le sel y est dissous dans des source < dont on conduit 1 s eaux dans dé grands carrés d’un métré de profondeur , où elles sont soumises à une évaporation spontanée. Dans une contrée aussi séché, celte évaporation est très prompte ; il sc précipité d’abord des sels étrangers, entre autres du sulfate de chaux, puis les eaux restantes sont sou- mises à une évaporation dans des chaudières. Très de Viilargordo de Gabriel on exploite aussi des sources salées qui sourdent au milieu de marnes rongés en couches verticales, comme à Villena, mais sur une plus petite échelle. Lu générai, près pie portout où affHiiv cet étage, il est recon- nais, b e à la présence de sources et d’effl uescenres alim s, mais le sel en roche, naturellement caché dans la profondeur du sol, CM plus rarement connu. Cependant il en existe, nous a t - ou dit, des «misses considérables dans la montagne cl Piiinsn au sud -sud-ouest de Vil'ena. Ce système de marnes, d’arg leset de gypse , êsi complètement dépourvu d<* fossiles, ou du moins il n’y eu a pas de traces dans les localit. s où nous l’avons rencontré. Dans la partie méridionale du royaume de Valence, nous avons exploi t ces dépôts près de Buiïol, 120 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. a Yatova , puis sur une ligue de 25 kilomètres environ , de Co~ frentes à Ayora , sans rencontrer le moindre reste organique ; H en est de même entre Caslalla et Alicante. Les marnes rouges gypsifèrcs sont surmontées quelquefois, comme au pic de Rancra , par des dolomies qui n’ont aucune apparence de stratification. Quand elles ne sont pas recouvertes, leurs couches, étant souvent plissées et redressées, surtout dans le royaume de Va- lence, ont toujours été ravinées profondément, et les eaux, y trou- vant un accès facile, y ont creusé des petites vallées sans nombre qui s’entrecroisent en tous sens et forment des espèces de labyrin- thes qu’il serait souvent difficile de traverser, et qui sont complè- tement inhabitées. Nous avons donc, dans cette partie de l’Espagne, les trois mem- bres principaux du trias, réunis dans leur ordre chronologique habi- tuel. Mais il n’est peut-être pas hors de propos de dire ici quelques mots des incertitudes où nous sommes restés relativement à ce ter- rain , dans le sud du royaume de Valence , avant de l’avoir défini- tivement classé à la place qui lui appartient. Ces incertitudes prove- naient de la grande analogie qui existe, au point de vue minéralogique, entre ces dépôts anciens et ceux, beaucoup plus modernes, qui font partie du terrain tertiaire puis de celte circonstance que nous les trouvions souvent en contact les uns avec les autres. Nous avons vu que dans le terrain tertiaire, on rencontre des dépôts puissants de grès et de conglomérats à gros éléments , puis des dépôts très étendus de bancs argileux, marneux et sableux renfermant des gypses cristallisés comme dans le trias ; les plaines de la Nouvelle-Castille en sont couvertes ; on y trouve même parfois quelques sources salées qui complètent l’analogie. Nous avons vu aussi que ces dépôts avaient pénétré dans la région montagneuse et s’étaient introduits au milieu des terrains plus anciens. U était donc prudent de suspendre notre jugement, surtout dans une contrée où le marteau du géologue avait encore peu pénétré. Ce n’est qu’après quelques semaines d’exploration dans la direction de Cucnca à Alicante, et surtout à notre retour vers Teruel et Albarra- cin, que nous nous sommes décidés à ranger ces dépôts dans le trias. En effet , il existe entre ces couches e.t le terrain tertiaire une dis- cordance de stratification des plus frappantes. Les marnes du trias sont toujours en couches plissées et souvent verticales , tandis que le terrain tertiaire conserve une position plus ou moins horizontale. Nulle part celte discordance n’est plus prononcée qu’aux salines de SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852, 121 Mjnglanilïa , à Viüargordo de Gabriel, à Cofrenles et à Jarafuel. Néanmoins, pour lever toute incertitude à ce sujet , il fallait trouver des superpositions bien nettes. A Ilinarejo.s, d’abord, nous avons été assez heureux pour voir bien distinctement les argiles rouges avec hyacinthes et aragonites s’enfoncer sous les étages jurassiques, puis, dans la même localité ces mêmes argiles superposées à des calcaires dolomitiques renfermant quelques Avicules , et ces calcaires enfin recouvrant un grès rouge micacé. Nous avons donc ici la série com- plète : grès, calcaires et argiles, couronnés par le terrain jurassique. A Albarracin et près du village de Camarena , on voit de grandes falaises basiques en superposition directe et discordante sur le terrain rouge. Les mêmes rapports existent un peu plus loin , à Royuela, avec celte circonstance de plus, que dans les calcaires du trias for- tement relevés on trouve des plaques présentant quelques fossiles. A Checa, sur la rivière Cabrilla, un des affluents du Tage, le trias est composé d’un conglomérat à la base, d’un grès rouge au milieu, et d’un calcaire jaune dans la partie supérieure. Ces trois dépôts sont concordants ; ils inclinent ensemble, sous un petit angle, dans la di- rection de l’ouest, et s’enfoncent sous les calcaires presque horizon- taux du lias. Il en est de même à Releta, située plus à l’ouest. Après ces divers exemples, il n’y a plus de doutes sur le clas- sement définitif de ce terrain rouge ; il appartient bien évidemment à une époque antérieure au terrain jurassique. Le poudingue et le grès correspondent au grès bigarré, les calcaires dolomitiques au muschelkalk , et les argiles rouges avec gypse et sel aux marnes irisées. Quant à l’étendue en surface et à la proportion relative dans laquelle se trouvent ces trois groupes dans la région que nousavonsexplorée, nous ferons remarquer que ce sont les grès qui sont le plus déve- loppés, surtout dans la sierra de Espadan, au Pico de Ranera, et en général dans toute la zone nord de notre circonscription. Puis vien- nent, dans leur degré d’importance, les argiles rouges qui se trouvent en p’us grande abondance dans la zone sud, vers la province d’Ali- cante, ne formant jamais de montagnes, mais remplissant des espaces plats, comme à Yillena, ou ne se montrant que dans le fond clesbar- rancos, comme nous en avons indiqué plusieurs. Enfin nous arrivons au calcaire dolomilique qui n’a pris nulle part un très grand dévelop- pement, excepté entre Murviedro et Chova. Ayant mieux résisté que les marnes auxquelles il est associé au temps et aux actions de toutes sortes, il se montre souvent isolé, avec des formes hardies et bizar- 122 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. rus, ce qui nous a fait dire, on parlant dos pilons qui portent les vieux diâtoaux, qu’ils surgissaient à la manière dos roches érupliv os. jNotis avons dit que les diverses couches qui représentent le trias en Espagne étaient souvent très redressées. Cela est vrai, en général, dans les régions que nous avons traversées entre Cuenca et Alicante ; mais ;l n’en est pas de même lorsqu'on se dirige au nord de Cuenca, du côté d’florea , de Checa et de MoÜna de Aragon. Les couches y sont , on général, moins inclinées, et quelquefois se rapprochent de Ja position horizontale. Il est évident que tonte cette contrée n’a pas été soumise aux mômes perturbations que le royaume de Valence, et cette différence s’observe non seulement dans le trias , mais encore dans les dépôts qui l’ont suivi. il on est de même, à ce qu’il paraît, dans la sierra d’AÎcaraz, où le terrain rouge de la meme époque repose on couches presque hori- zontales sur les roches pnléozoï pies redressées. Une circonstance remarquable, que nous devons encore signaler dans la répartition du terrain triasique, c’est que, recouvert on pas lie par les dépôts secondaires, dans le plateau montagneux qui sé- pare la piaiiie de la Nouvelle- Castille du lino; al oriental, il les déborde souvent «à l’ouest et au sud, en sorte qu’il se trouve directement en contact avec le terrain tertiaire, ainsi qu’on le voit à Minglaoi la, à .la- rafuel , à Cofrenles , et dans d’autres localités indiquées sur notre coupe n° l . En terminant les observations, aussi abrégées que possible, que nous venons de présenter sur le trias d’Espagne, nous appellerons un instant l'attention sur son analogie singulière avec le terrain numimi- litique de la Catalogne. Dans cette province, en effet, parmi les assises nombreuses (pii constituent ce dernier terrain, i! y a des grès et des conglomérats rouges, tellement analogues au type triasique de la France et de l’Angleterre, surtout entre Olot et San Juan de las Abadesas, qu’on pourrait y être trompé. Le terrain munmulilique y est aussi le gisement de masses coud (érables de gypse et de sel, telles que celle de Canloité < t autres, en sorte (pie là où les fossiles dis; araissent, ce qui est souvent le cas, et où l’on est éloigné de tout point de Contact a\cc des terrains bien connus, le géologue peut se trouver dans mi complet état d’ineef titudo. Il serait intéressant de comparer cette grande bande nummUlijiquc du nord avec les dé- pôts ti iasiques , dans les points où ces terrains se rapprochent le plus, comme à Barriol et au couvent de las Paimas, au nord de Cas- teiion de la Plana, où existe le trias, et aux environs de Mont blanc!). SÉANCE DE 6 DÉCEMBRE 1852. 123 au N. de Tarragonc, où partît se terminer le terrain nummulitique de la Catalogne (1). Quoi qu’il en soit, ce qu’il y a de certain, c’est que l’Espagne est un des pays les plus riches qu’il y ait en gypse et en sel. et il n’est pas sans intérêt de ioir que ces deux substances, si utiles à l’Iiummé, apparaissent d’abord en très grande abondance dans le nias, qu’elles manquent en général dans le jura et la craie, pour reparaître enfin, un peu moins abondantes peut-être, dans le terrain nummulitique. Dans ces deux terrains, elles sont au milieu de dépôts qui ont un caractère marin, tandis que le gypse, qui est encore si répandu dans le terrain tertiaire, y est d’origine lacustre. Terrains paléozoïques. Système permien. — Nous venons d’expliquer comment en rencontrant , dans le S. et dans l’O. du royaume de Valence, le grand dépôt rouge, souvent en font, et avec le terrain lacustre miocène, nous avions pu concevoir quelques doutes sur sa uri- tab'e position, puis comment en le suivant vers le nord, du côté d’Albarracin , de (ilieca et de Moliua de Aragon, on voit ses cou- ches, moins inclinées , prendre une position régulière entre le lias et Ses schistes du terrain paléozoïque; mais il restait à décider s’il devait être rangé dans le trias ou dans le terrain permien. En effet ce dernier, là où manque le trias, comme cela arrive souvent en Russie, occupe exactement la même position que le grand déj ôt rouge d’Espagne. Il est également composé île grès, de conglomé- rats et de marnes rouges, et contient également des gypses, des sels et des masses calcaires. Quels moyens avons nous ici pour dis inguer ces d< ux terrains? D’abord les fossiles. Nous avons vu, en effet, que bien qu’ils soient rares et mal conservés, ils rappellent plutôt le mnscheikalk que le zeebstein. Mais il y a encore d’autres raisons de décider. En «flVt, en comparant l’Espagne aux pays limitrophes pour y chercher des anal gies, on reconnaît (pie le trias s< ul existe dans le sud de la France, qu’i! s’appuie sur les terrains anciens sans l’inter- médiaire des couches permiennes, qu’il s'avance dans les Pyrénées, en suit les deux versants, ainsi que l’ont icconnu MM. Éliede Beau- (I) Le terrain nummulitique de la province d’Alicante est, ainsi que nous l’avons dit, essentiellement différent, sous le rapport minéralo- gique, de celui du Nord, et ne contenant pas. comme lui. ces masses énormes de grès et de marnes rouges ou bleues, qui sont le gisement ordinaire du sel et des gypses, il ne peut être confondu avec le trias 12 h SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. mont et Dufrénoy, et qu’il pénètre jusque dans la chaîne eantabrique. L’abondance du sel est aussi un des caractères du trias en France et en Angleterre, tandis qu’à l’exception de la Russie celte substance est assez rare dans le système permien. Ce sont ces analogies diverses qui nous ont décidés à considérer les dépôts ronges d’Espagne comme appartenant au premier plutôt qu’au second de ces terrains. Ce n’est pas à dire, cependant, que celui ci n’v ait absolument aucuns repré- sentants. Nous rappellerons à cet égard que, guidé par certaines ana- logies dérochés et quelques indications straligraphiques, le profes- seur Naranjo y Garza a rapporté à l’époque du zechstein, les calcaires rouges magnésiens et les marnes gypsifères de Monliel et des lacs de Euidera, d’où s’échappent les sources du Guadiana. Si ce terrain existe en Espagne, ce serait peut-être en effet du côté de la sierra d’Alcaraz, où le système rouge est largement développé ; mais au- jourd’hui que nous connaissons l’extension qu’acquiert le trias en Espa- gne, nous devons user de la plus grande réserve, relativement à l’ad- mission du système permien, tant que des fossiles n’en viendront pas confirmer l’existence. Système carbonifère. — Il n’en est pas de même du terrain car- bonifère, déjà connu depuis longtemps, et qui le serait bien davan- tage si l’absence de voies de communication n’avait jusqu’ici en- travé l’exploitation des richesses qu’il renferme. Le principal gisement des combustibles en Espagne est situé sur les deux versants de la chaîne cantabrique, principalement dans les Asturies. Grâce aux tra- vaux de WM. Schulz, Casiano de Prado, Paillette, d’Archiac et de l’un de nous , ces contrées commencent à être mieux connues (1). La base du terrain carbonifère se compose de calcaires massifs, tellement semblables aux roches dévoniennes sur lesquelles ils re- posent, qu’il serait difficile de les en distinguer si l’on n’v trouvait des fossiles différents et tout à fait caractéristiques. On peut com- parer cette masse inférieure au scar limestone du nord de l’An- gleterre , et à ce dépôt calcaire qu’on observe en Belgique, en Rus- sie, ainsi qu’en Amérique, à la base de la grande série carbonifère. ( I ) Ries en a gengnostica dcl princi parla de Asturias y y vistazo geo - la g/ co sobre Ca n ta brin, par G. Schulz, insp. gen. de minas. — Recherches sur quelques unes des roches qui constituent le yol des Asturies et sur les fossiles qu’elles renferment, par MM. Paillette, de Yerneuil et d’Archiac [Bull, de la Soc. geol. de France, t. II. p. 439). — Note géologique sur les terrains et les fossiles des environs de Sabero, par MM. Casiano de Prado et de Verneuil ( Bull, de la Soc. géol. de France, t. VII, p. '137). SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 125 Plus haut, quelques bancs calcaires, assez minces, alternent avec les premières couches de charbon , en sorte qu’ici , comme en Écosse , une partie de la houille est subordonnée aux membres inférieurs du système. C’est dans ces petites couches calcaires qu’on rencontre les fossiles marins les mieux conservés, tandis que les plantes sont plutôt dans les grès et les argiles schisteuses supérieures ; les restes d’animaux fossiles appartiennent aux espèces les plus caractéristiques du ter- rain carbonifère, telles que Productifs semireticulatus , P .punctatus, P. cora, Spirifer mosquensis, P/iillipsia, etc. Il faut surtout y noter la présence de la Fusulina cylindrica , espèce qui n’existe que dans le système carbonifère de la Russie et des États-Unis. Les plantes sont celles que l’on rencontre ordinairement dans la flore du terrain houiller. Au-dessus , viennent des conglomérats et des grès mêlés d’argiles schisteuses, dont on peut évaluer l’épaisseur, à 2 ou 3000 mètres; on y compte plus de 80 couches de houille, qui représentent une richesse de combustible considérable. La stratification en est tour- mentée , et les couches sont souvent redressées jusqu’à la verticale, mais cet inconvénient est plus que compensé par les avantages qu’offre le sol, assez profondément coupé par le lit des ruisseaux et des petites rivières, pour que les couches de charbon soient exploitées sur des hauteurs verticales considérables, sans que l’on soit gêné par les eaux. Le Nalon traverse la région houillère dans sa partie la plus riche. La grande masse calcaire qui forme la base du terrain justifie bien ici le nom de calcaire de montagne que lui avaient imposé les géolo- gues d’Angleterre, car celte roche s’élève jusqu’aux cimes de la chaîne canlabrique , et constituant les montagnes de Cabrales, de Cobadonga et les pics d’Europe, elle s’avance jusqu’à la mer, près Ribadesella, pour pénétrer à l’est dans les provinces de Santan- der et de Palencia. Sur les flancs des schistes cristallins , probablement métamorphi- ques, qui forment la sierra de Burgos et s’étendent vers le Mon- cayo , reposent en stratification discordante des masses de grès et d’argiles schisteuses, avec des traces de charbon et des plantes, évidemment de l’époque houillère , telles que Asteropliyllum, Dyc~ ty opter is, A lelhopteris , Pecopteris et Lepidodendron. Le calcaire y manque en général , ainsi que les fossiles qui l’ac- compagnent ordinairement ; ces derniers cependant ne manquent pas complètement, car nous avons trouvé dans les grès un petit Spirifer SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 4352. 125 qui suffît pour prouver que ces dépôts se sont faits sous ies eaux de la nier, comme ceux des antres parties de l'Espagne. Nous mention” nous se u 'ornent ce fait pour montrer quelle uniformité régnait dans les dépôts do la Péninsule, avant que le pays eût été sillonné par les chaînes qui séparent aujourd’hui ses différentes provinces. Les dépôts carbonifères de la sierra Morena sont situés vr rs la partie méridionale de cette chaîne. Comme les couches du même âge dans le nord de l'Espagne, ils contiennent généralement, à la pas lie inférieure, des calcaires avec des fossiles, parmi lesquels on re- marque le Produelus semireticuiatus , espèce qui se trouve presque partout dans le nord de I Europe , en Russie et jusqu'au Spitzherg. Le charbon est associé avec les conglomérats et les grè% Les meilleurs bassins houiilers sont ceux de Belmez, d’Espiel et de Villanueva de! Rio , près Séville. Comme dans les Asturies, les couches sont for- tement relevées et souvent verticales. Sur le versant méridional du Guadarrama, et dans sa partie orien- tale, existent des schistes houille rs qui , près de Tamajon , de Valde- sotos et de Retiewla, renferment , de meme que ceux de la sierra de Burgos, quelques traces de charbon et des empreintes végétales (Fougères, etc.). Quiconque s’intéresse, comme nous, à la prospé- rité de celte belle nation espagnole, ne peut s’empêcher d’espérer qu’on trouvera quelque jour des dépôts importants de combustibles dans ces localités, si favorablement situées, pour l'approvisionne- ment de Madrid. Système dévonien. — Les roches dévoniennes sont assez bien dé- veloppées dans la sierra Morena, au nord et au sud d’Aimaden , et , par suite de plisse ments nombreux , elles paraissent alterner avec les couches siluriennes dont nous pailerous tout à l’heure. Les fossiles se rencontrent généralement dans des grès et de petites bandes de calcaire impur, beaucoup plus rarement dans des schistes. Les plus abondants sont les suivants : Productus subaculeatus , Leptœna Da- ter trei , S/ tir i fer Verncuil i , S. Arc/tiaci , S. Doue hardi , Orlhis striatula , Stryyocephalus Burtini. Terebralula reticularis , 1\ Or - biynyana , T. concentrica , Plvteops latifrons , etc. Dans la partie' méridionale de la province de Cucnca , près d’Hi- narejos, nous avons découvert aussi des dépôts contenant des fossiles du même âge que ceux de la sierra Morena et de la chaîne canta- brique. C’est en allant de Ilinarejos à la mine de charbon del Va- por qu’on rencontre ces couches, particulièrement en deux endroits appelés el Caslellanoet cl Cerro del Hierro. Le nom de cette dernière SÉANCE DU G DÉCEMBRE 4852. M7 localité indique que, de même que dans la chaîne canlabrique, Ses roches dévoniennes conlieum ni (Ses minerais de fer a-sez importants. Les fossiles que nous y avons trouvés se i apporn-nt aux espèces sui~ vailles : Do (mania (( rt/p/aeus) çaUitales , S pi ri far Doussenu, Te- rebraJ. n l a G uei arujeri 1), Leptæna Murchisnni, Favorites fibiroms, cl Tentaçulitas. C'est à une petite distance de lii q.ue se trouve la couche de charbon qu’on a l«*ulé d’exploiter h la mi e del Vapor Ce charbon, associé à des conglomérats grossiers, avec quelques' em- preintes végétales, est nécessairement de l'époque dévonienne ou de l’époque houillère , mais il serait hasardé de se prononcer dans un pays où les com lu s sont amsi foi tement disloquées. Nous arrivons maint liant à une contrée où les roches dévoniennes sont parfaitement développées et où elles contiennent de véritables richesses paléoz» ï pies ; nous voulons pat 1er de la chaîne erntabri- que. L'époque dévonienne a du être accompagnée , en général , de mouvements ou de déplacements assez considérables des eaux de la mer, car ses dé, ô s sont composés en grande partie de grès et de conglomérats. Lu Lspagne, des grès rouges fort épais paraissent être à la hase du système dévonien. Ils sont quelquefois toilement impré- gnés de fer, nal . vol. 1 1, p. 2S1. 1801. LIN K. Bemerkungen , etc. Obscrv. sur un voyage en France , en Espagne ; et en Portugal. Kiel. — Traduit en français en i8u5. iSo3. BOURGOING. Tableau de l'Espagne moderne. 1S07. IIERRGEN (D. Crisliano). Tralado de las rocas. 1808. LA BOUDE. Itinéraire descriptif de l’Espagne. 6 vol. Paris. — MACLURE. Sur les volcans d’Olot. — Journal de pbys. , vol. LXVI, P* 2i9* 1817. CORDIER. 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Quart, jonrn. =Qtiaiterly journal of t lie geologiral Soriely of London. Proceed — Proc cd ngs of tin* ge. logieal Society of London. Jabrb. => Noues Jahibnrh Uir Minéralogie nnd Géologie, von Leonbnrd und Broun. Rev. min. *= Revista minera, periodico redactado por una Suciedud de iugeuier (Madrid), SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 141 1828. DE BÏLLY. Notice sur les volcans éteints des environs d’Olol en Cata- logne. — ■ Ann. des mines, 2e série, vol. IV, p. 181. 1839. HAESMAIMN. De Ilispaniee conslilulione gcognostica dissertatio. GnU. 1830. GUTIERREZ. Mémoire sur le royaume de Murcie. — Journ. de géoî., vol. ! I, p. 3 r. — HAUSMAAAi. Sur la constitution gcol. de l'Espagne. — Ann. des mines, a* séné, vo!. A’ II, p. 3j5. (Extrait d’un mémoire imprimé dans le Got * iingische gclelirle Anzcigen.) — J.dirbm h, iS3o, p. 497. >83o. i833 el i834. S1LVERTOP (M.-C . ). Terliary formations of Basa , Alliama, Sevilta, Granada , Mo la gu and Carlagena. — Edinb. new pin I. journ., 18 î3, vol. 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Andréa del Rio. 4° Le Guia del minero. 5° Le grand dictionnaire géographique et statistique de l’Espagne, par MM. Madoz et Coello, dans lequel le géologue peut trouver quelques renseignements utiles. Enfin, nous rappellerons que MM. Bosc et de Férussac ont été les premiers à reconnaître en Espagne l’existence des terrains lacus- tres : le premier en parle en 1800, dans son « Voyage en Espagne» ; le second en 1813, dans un Mémoire dont il a été fait un rapport dans le Journal de physique de Lamétherie, vol. LXXVJ, p. 64, ainsi que dans son Histoire des mollusques terrestres et lluviatiles. Description clés ossements fossiles de mammifères rapportés d’ Espagne par MM. de Verneuil , Collontb et de Lorière , par M. Paul Gervais, professeur de zoologie et d’anatomie comparée à la Faculté de Montpellier. § 1 . — Remarques historiques . La configuration du sol de la Péninsule et la grande étendue qu’occupent à sa surface les dépôts laissés par les eaux douces ne permettent guère de douter qu’aux diverses époques de la période tertiaire, cette partie de l’Europe n’ait été habitée par de nombreux mammifères. Les indications que la science a déjà réunies au sujet des restes fossiles d’animaux de cette classe qu’on y trouve ne man- quent pas d’intérêt , mais elles sont encore bien incomplètes, et nous avons saisi avec empressement l’occasion qu’ont bien voulu nous offrir MM. de Verneuil, Collomb et de Lorière, d’étudier et de faire connaître aux savants les ossements fossiles qu’ils se sont procurés pendant leurs voyages (l).Un savant géologue espagnol, M. Casianode Prado, nous a communiqué de son côté quelques pièces intéressantes qu’il a recueillies, et dont nous parlerons dans la présente notice, ainsi que de celles dues aux trois géologues français que nous venons de citer. (\) Plusieurs de ces ossements ont été recueillis par eux-mêmes, tandis que d’autres leur ont été donnés par MM. Ezquerra, de Botella et Visniouski. , . 1£8 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. Le plus ancien auteur qui ait signalé des ossements fossiles de mammifères en Espagne paraît cire Joseph Torrubia. Dans son ouvrage intitule: Aparato para la historia natural espanola , qui a paru à Madrid en 1754, il fait mention des os pétrifiés ( huesos petri- fîcados ) de Concud , près Teruel. Il les regarde connue des ossements de chevaux , et donne l’indication de quelques uns des caractères par lesquels ils ressemblent, en effet, à ceux de ces animaux. Suivant lui, ils n’ont d’autre origine que les squelettes laissés par des chevaux domestiques qui auront été tués dans quelque bataille; mais la science est aujourd'hui assez avancée pour que l’on regarde comme inexacte l’explication de Torrubia , même sans recourir à l’examen des osse- ments eux-mêmes. La connaissance de leur gisement doit , en effet, les faire attribuer à des animaux différents, par leur espèce , des chevaux actuels, et c’est aussi ce que montredeur organisation. Les ossements d’animaux appartenant à la même famille que les chevaux que l’on trouve en abondance à Concud appartiennent , comme ceux d’Eppebhrim dans la Hesse, de Cucuron dans le dépar- tement de Vaucluse, et d'un petit nombre d'autres localités miocènes, au genre que M. de Christel a nommé Hipparion et M. Kaup Hip- pot lier ium , et point du tout au véritable genre Equus: c’est ce que nous ferons voir plus loin dans ce travail. En 1859, M. Ezquerra del Bayo, ingénieur en chef des mines en Espagne , a adressé à MM. Leonhard et Broun (1) une lettre dans laquelle il annonce la présence à Létal fossile, dans le terrain tertiaire de la colline de San-Isidro, peu éloignée de Madrid, de quatre espèces distinctes de mammifères , savoir : Anoplotherium mûri nam, Cuv. Ckœi npotamas mntri ternis , Ezq. Sus palœochœi us , Kaup. Mcidtodun longiruslris , Kaup. La première de ces espèces n’avait encore été signalée que dans les plàtrières de Paris ; la seconde , dont les caractères n’ont pas été décrits, serait d’un genre propre au même étage, soit à Paris, soit ailleurs; au contraire , les «leux dernières sont bien connues pour appartenir à la faune des terrains miocènes. Celles-ci sont par consé- quent d’une époque postérieure à celle des vrais chéropoianies et de V Anoplotherium mur inumt du moins dans les gisements où leur ex is- (1) Leonhard und Broun, Notes Jcifiil ich , 1840, p. 221. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 149 tence no laisse aucun doute. La présence, dans les dépôts lacustres du bassin de Madri i, d’un (Ihéropotame et de Y Anoplothcrium murinum a fait admetire que la faune des gypses parisiens, des lignites de Pen cal, près Api, etc. , qui a laissé les traces de son ancienne existence sur plusieurs autres points de l'Europe, et qui est sni tout remarquable par l’abondance des Anopiothériuius et des Paléotbériums , caracté- risait aussi une partie des dépôts tertiaires de l’Espagne. On pouvait egalement y voir la réunion, dans un seul et mC*mc dépôt, de Mammi- fères propres à deux des faunes tertiaires que j’ai distinguées en France. Toutefois, en y réfléchissant de nouveau , i! me semble que ni l’une ni l’autre de ces deux opinions ne sont réellement hors de doute, car il n’est pas certain que les noms des deux premiers mammi- fères que cite M. Ezquerra, c’est-à-dire de ceux qui semblent indi- quer la faune des plâtrièrcsde Paris, aient été convenablement appli- qués à des fossiles trouvés avec le Màstodon longirostris et leéms palœochœrus. Je crois pouvoir alléguer à l’appui de mes doutes sur ce point : 1° que certaines espèces miocènes de la famille des Sangliers sont assez faciles à confondre avec le genre Cbéropotamc , et ont été parfois confondues avec lui; 2° que l’ Anoplothcrium murinum de San- Isidro est peut-être un Caïnotberium, c’est à-dire un animal du terrain miocène, et non pas Y Anoplothcrium murinum de Cuvier, auquel i! ressemble à plusieurs égards, sans cependant lui être identique. Je rapporte d’ailleurs à ce g* nre C. ïnoiherium un fragment de mandi- bule encore pourvu de ses deux dernières molaires, que M. Casiano de Prado a rapporté des argiles lignileusés des environs de Brihuega. Je l’ai fait représenter dans la figure ci-jointe. MM. Hermann de Meyer et Kaup ont aussi étudié des ossements de Mammifères provenant des terrains lacustres des environs de Madrid. Dans le mémoire publié à leur sujet par le premier de ccs paléontologistes fl) , on remarque l’indication des genres Màstodon , Anchitherium , Sus et Palœomcryx, qui tous les quatre sont repré- (I) Ncucs Jahrbuch, 1844, p. 289 à 310. 150 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. sentes plus ou moins abondamment dans les dépôts miocènes de la France, de la Suisse et de l’Allemagne. M. Hermann de Meyer donne l’espèce d’Anchilhérium qu’il a reçue d’Espagne comme différente de celle d’Orléans ( Palœotherium aurelianense , Cuv.), dont on connaît plusieurs autres gisements en France et en Allemagne ; c’est son Anchitherium Ezquêrrœ. Je n’ai vu qu’une seule dent de l’Anchithérium d’Espagne; c’est une molaire supérieure de la collection de M. Casiano de Prado. Comme elle ressemble complètement 'a celle de nos Anchlthériums de France , je crois pouvoir affirmer qu’elle suffit pour assurer que l’animal dont elle provient doit être réuni à l’espèce propre aux autres dépôts miocènes. M. Kaup cite d’ailleurs le Palœotherium aurelianense comme fossile en Espagne. Si nous résumons les indications qui précèdent, nous voyons que six genres de Mammifères ont été reconnus parmi les ossements fossiles que l’on trouve en Espagne, et que ces six genres se retrou- vent dans les dépôts miocènes du reste de l’Europe. Ce sont les suivants : 1° Mastodon , représenté par le Mastodon longirostris , Kaup, qui répond au vrai Mastodon anguslidens de Cuvier. 2“ Anchitherium , pour une espèce identique ou très semblable à celle du terrain miocène de France et d’Allemagne. 3° Hipparion , autrefois confondu avec le Cheval, aussi bien en Espagne qu’à Eppelsheim. h° Cainotherium , répondant peut-être à Y Anoplotherium mûri - num de M. Ezquerra. 5° Sus : l’espèce en est le Sus palœochœrus , également connue à Eppelsheim, et, d’après M- de Blainville, en France. 6° Palœomeryx : l’indication de ce genre est due à M. Hermann de Meyer. Quant au genr e Chœropotamus , nous avons fait remarquer plus haut que les renseignements qu’on a publiés 5 son égard sont insuf- fisants. Nous nous bornerons à ajouter ici que nous n’en avons vu aucun débris parmi les fossiles que nous avons eu l’occasion d’étudier. Nous trouvons au contraire , parmi les ossements que nous avons sous les yeux, et qui proviennent aussi des terrains miocènes de l’Es- pagne, la preuve qu’il a existé dans ce pays, en même temps que les Mastodontes , Anchitherium et Sus , et que les genres Cainotherium et Hipparion , cités plus haut, plusieurs autres genres qu’on n’y avait SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 151 pas signalés. Ce sont ceux des Rhinocéros , Antilope , représenté par une espèce de fort grande taille , Cerf ai Amphîarctos ou Iiyænar - dos. Ce dernier, qui rentre dans l’ordre des Carnivores, n’avait en- core été observé que dans la faune miocène de l’Inde. En décrivant la dent très caractéristique qui nous fait connaître sa présence en Es- pagne, nous parlerons d’une autre pièce fossile qui montre qu’il y a aussi des Hyénarctos en France, dans le gisement miocène de Sansan. La présence simultanée d’espèces de ce singulier genre dans les dé- pôts tertiaires moyens de l’Inde et dans ceux de l’Europe est une nouvelle preuve de l’analogie que présentaient dans leur organisation les espèces presque toujours congénères, mais différentes entre elles, des deux faunes miocènes de l’Europe et de l’Inde. Outre les différents genres de Mammifères que nous venons de mentionner comme fossiles en Espagne , et qui tous s’y rencontrent dans des dépôts de l’époque miocène , nous connaissons encore dans ce pays d’autres animaux fossiles appartenant à la même classe. V Élé- phant, dont la présence est caractéristique des dépôts diluviens de l’Angleterre, de la France, de la Belgique, de l’Allemagne, etc., l’est aussi de ceux de l’Espagne. Un autre genre, mais d’un âge bien différent, a encore été observé dans le même pays : c’est celui des Lophiodons , qui caractérise les dépôts éocènes proprement dits, comme celui des Paléothériums peut lui-même servir à distinguer l’éocène supérieur répondant à notre époque proïcène. Malheureusement nous manquons de rensei- gnements sur le lieu où a été trouvée la seule dent de Lophiodon rapportée d’Espagne que nous ayons pu observer (1). Cette pièce nous a été communiquée par notre collègue M. Marcel de Serres. 2. — Remarques anatomiques et synonymi.ques sur les espèces auxquelles appartiennent les ossements fiyurés dans ce mémoire. Les ossements fossiles de Mammifères trouvés en Espagne, que nous avons fait figurer dans les planches qui accompagnent ce mé- moire, proviennent tous de terrains miocènes d’origine lacustre, soit ligniteux , soit gypseux ou calcaires. Us ont été recueillis dans plusieurs localités, principalement à Concud, près Teruel (Aragon), à Alcoy, dans le royaume de Valence, et à San-Isidro, près de Madrid. (l) Zoologie et paléontologie françaises, pl. 18, fig. 4. 152 SEANCE DU 6 DÉCE3IBEE '1852, A Àlcoy, les couches qui les contiennent son! fortement inclinées, tandis que dans les deux autres localités élis sont horizontales. Nous parlerons successivement de ceux qui appartiennent aux dif- férents ordres des Carnivores, des Prohoscidiens, d< s f’achydermes herbivores, ainsi que des Ruminants et des Pachydermes omnivores. I. Ordre des Carnivores. — i. Genre Hyœnarctos. — Le genre Hyœnarctos de MM. Cautley cl Faîconer a pour type un carnassier de la faune éteinte qui a laissé des restes nombreux dans les dépôts tertiaires de la région sous-himalayenne : c’était un carnivore un peu plus grand que l'Ours blanc de la région polaire et que l’Ours féroce de l’Amérique septentrionale. Su crâne a quelque analogie avec celui de ces animaux, mais i! est facile à distinguer par quelques particulari- tés secondaires et par la forme de ses dents molaires. Les supérieures, au nombre de six , comme chez les Ours, sont ainsi réparties : trois avant-molaires uniradiculées non caduques; une carnassière trilobée à son bord tranchant et pourvue d’un fort talon interne situé sur le milieu de la dent , à peu piès en face de la jonction de sa crête moyenne avec la postérieure , quoique plus en rapport avec Sa pre- mière qu’avec la seconde ; deux arrière molaires irrégulièrement car- rées, tuberculeuses, ayant leurs deux tubercules externes plus dis- tincts, les internes plus confondus entre eux et semblant réunis en un tubercule unique ou fort talon sur lequel passe une double crête obsolète longitudinale bien moins développée que celle des Canis et des Amphieyons. [Notre ligure 1 de la \ hmche Zi représente la canine, les alvéoles des trois fausses molaires et la couronne des trois vraies molaires de l’Hyénarctos de l’Inde ( Hyœnarctos sivalensis , Cautley et Falc.). Celte ligure est de grandeur naturelle. Le nom génét ique &' Hyœnarctos paraît avoir prévalu, quoiqu’il ne soit pas le plus ancien. IVL de Blainville appelait le même genre Am- pliiarctos et Sivalarctos. C’eM aussi Y Agriatherium de M. Wagner, et peut-être, d’aprcs M. Pieté t , i'Amyxodon de MM. Cautley et Faîconer. On n’avait encore indiqué des animaux de ce genre que dans la faune éteinte de l’Inde. La dent carnassière, encore implantée dans un fragment de mâchoire supérieure que nous représentons par la figure 3 de la planche Zi , est fort semblable, quant à ses caractères génériques , à celle de X Hyœnarctos sivalensis , et, comme celle-ci, elle diffère de sa correspondante chez les autres carnivores connus. En avant, on voit encore sur l’os maxillaire la trace de trois alvéoles répondant à ceux des trois a vaut -molaires dei ' Hyœnarctos sivalensis. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852» 153 En arrière est un faible reste de la première molaire tuberculeuse. Son b rd antérieur, qi 1 est conservé , montre qu'elle était large en avant comme celle de l’espèce type, mais sans doute de forme un peu différente ; ce qui , joint à une moindre taille cl à quelques particu- larités secondaires dans la forme de la carnassière, peut faire supposer que cette pièce ne provient pas de la même espèce (pie la précédente. Notre figure 3 apparliendraitdonc à une seconde espèce d'Hyénarctos. La pièce qu’elle représente vient des lignites d’Alcoy, où elle a été découverte par iM. de BoteLa, qui l’a donnée à M. de Lorière. Le genre miocène des Hyœnarctos se trouve non seulement en Es- pagne, mais aussi dans le midi de la France, h Sansan (département du Gers). Précédemment j’avais pu lié la remarque suivante dans l’explication de l’une des planches de ma Zoologie et paléontologie françaises (1). « lM. Lartet a nommé Hemicyon , dans son Catalogue de 1851, un » genre dont nous n’avons vu qu’un petit nombre de pièces. Ce genre, » qui a de l’analogie avec celui des Arnph cyons, et dont l’espèce type » est à peu près grande comme Y Am plue y on major , me parait en avoir «encore davantage avec Y Ur sus sivalensis de l’liimalaya , qui est le » type du genre Amphiarctos, Blaiuv., ou Hyœnarctos, Cautley et » Fa'coner. » C’est ce passage qui a fait dire à RI. Piclet (2) : « RL Gcrvaîs rnp- » proche l’Ilemicyon des Hyœnarctos. RL Lai tel ledit plus voisin du » Chien que l’Àmphicyon, mais ayant aussi des rapports avec le Glou- » ton. » La pièce représentée sous le n° 2 dans la planche h est très caracté- ristique. .File montre, sinon une identité absolue, au moins une grande analogie dans ses caractères génériques avec la partie correspondante de Y Hyœnarctos sivaleyisis. On y voit les deux amère- molaires lu- bemiieuscs. Quoique provenant d’un sujet tout à fait adulte, comme le montre l’usure de leur bord postérieur , elles sont moins grandes que celles de l’Hyénarctos de l’Inde et un peu différentes dans leur forme. La deuxième , un peu plus large que longue, montre bien les deux tubercules externes que nous avons cités comme caractéristiques de ce genre, et les deux fausses crêtes du talon interne formé par la réunion des deux tubercules de ce (ôte. La première arrière-molaire est également moins carrée que celle de YH . sivatensis , et son bord (1) PI. 36 à 38, p. 13. (2j Puléo/ttolo^it, 2e édition, p. 16. SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. 1 U antéro- interne est pins ob'ique, ce qui semble la distinguer aussi de l’espèce d’Alcoy. En avant de cette dent on voit les trois racines de la carnassière; mais celle-ci, qu’il eût été très important de comparera celle de l’Hyénarctos d’Espagne, ne nous est pas connue dans sa partie coron a le. Nous sommes donc conduit à penser que la pièce ici figu- rée, et qui a été découverte à Sansan par le savant et très regrettable M. Lauriilard, indique une troisième espèce d’Ilyénarctos qui est sans doute aussi \' Hemicyon sansaniensis de M. Lartet (1). Nous l’ap- pellerons provisoirement Hyœnarctos hemicyon Cette espèce, diffé- rente de celle de l'Inde, l’était peut-être aussi de celle à laquelle a appartenu la dent d’Alcoy. II. Ordre des Proboscidiens. — Mastodon longirostris , Kaup.-— L’ordre des Mammifères proboscidiens, que les Eléphants d’Afrique et de l’Inde représentent seuls dans la nature actuelle, a fourni aux faunes antérieures à celles d’aujourd’hui les genres Mastodonte et Dinothérium, dont les débris n’ont pas été rencontrés jusqu’ici dans les terrains plus anciens que la formation miocène. C’est au Mastodon longirostris , auquel répond en grande partie le Mastodon angustidens de Cuvier, que l’on a rapporté les restes de Mastodontes rencontrés en Espagne soit aux environs de Madrid, dans la molasse, soit dans les lignites d’Alcoy. MM. Ezquerra, H. de Meyer et Kaup, ont déjà fait mention de cette espèce comme se rencontrant dans le bassin de Madrid , et M. de Blainville en a figuré dans son Ostéo * graphie une dent provenant aussi du meme terrain. C’est encore de là que vient celle que nous avons fait représenter (pl. A, ûg. 8) et qui paraît cîre une deuxième molaire inférieure. III. Ordre des Pachydermes herbivores , — Genre Rhinocéros. — Parmi les fossiles des lignites d’Alcoy, que m’ont remis MM. de Lorière I et de Verneuil, je trouvedeux dents molaires dellhinocéros, semblables à celles des espèces à grandes incisives qui appartiennent à la faune miocène, et que l’on rencontre abondamment en Fi ance et en Alle- magne. J’en figure une sous trois faces différentes dans la planche t\: fig. 9. M. Casiano de Prado m’a aussi montré deux molaires , l’une (1) Voici le seul renseignement publié par M. Lariet au sujet de :i son genre H cm y ci ait : « Hemicyon sansaniensis : carnassier plus grand que le Loup j d’Europe et plus voisin du Chien que l’ Amphicyon ; il semble se rap- procher par quelques détails de ses dents caractéristiques de certaines 1 espèces de la famille des Maries , et en particulier du Glouton. « ( Lartet, Notice sur la colline de Sansan , 1 851 , p. 16.) SÉANCE I)C 6 DÉCEMBRE 1852. 155 supérieure, l’autre inférieure, qui sont de Rhinocéros; l’une est des ligniies argileux de Brihuega, l’autre est de Sati-Isidro. Mi\I. de Ver- neuil et Gollomb en possèdent aussi qui viennent du meme lieu. Je crois qu’il est convenable d’attendre que des pièces plus importantes que celles-ci aient pu être examinées, avant de chercher à déterminer exactement l’espèce de Rhinocéros à grandes incisives dont elles proviennent. On sait d’ailleurs que jusqu’ici les caractères distinctifs de ces espèces ont été principalement tirés de la forme du crâne ou de celle des os des pieds. Genre Hippàrion. — Indépendamment des caractères empruntés à quelques particularités morphologiques de leur système osseux, les chevaux du genre Hippàrion ou Hippotherium diffèrent de ceux du genre Equus , tel que le comprenait Linné , par leurs pieds tridac- tyles et par la forme de leurs dents : la molaire, dite caduque, de la mâchoire supérieure, est plus forte que dans les chevaux monodac- tyles; les autres molaires supérieures montrent au bord interne une forte colonne d’émail isolée, pendant la plus grande partie de la vie, de l’émail entourant les deux lobes , et il y a quelques antres carac- tères différentiels pour les molaires inférieures, soit pendant le jeune âge, soit pendant l’âge adulte. La planche U donne la figure d’une molaire supérieure d’Hippanon de Goncud , près Terne! , dans l’ Aragon , localité déjà signalée par Termina etBowles, comme renfermant une grande quantité d’os de chevaux pétrifiés. La portion de mâchoire inférieure représentée par la figure 5 de la meme planche est du dépôt ligniteux d’Àlcoy. Le genre Hippàrion n’a été trouvé jusqu’ici que dans des terrains miocènes. A Eppelsheim il est associé aux autres mammifères propres à ce riche gisement; entre Lyon et Vienne en Dauphiné, il est enfoui dans le meme terrain que le Dino- thérium ; à Cucuron, dans le département de Vaucluse, on trouve mêlés à ses ossements des restes d’Ànlilope, d’une Hyène tout à fait diffé- rente de celles du diluvium, d’un grand Sanglier, d’un Rhinocéros, etc, Y a-t-il une seule ou plusieurs espèces d’Hipparions , et celle du département de Vaucluse est-elle réellement différente de celle de la Hesse, comme je l’ai admis? C’est ce qu’un examen comparatif des os- sements, en grande partie fort caractéristiques, qu’on a déjà recueillis dans la Hesse , à Cucuron et en Espagne , et l’observation d’un plus grand nombre de pièces, permettront seuls de décider d’une manière certaine; mais je n’ai pas en ce moment les éléments nécessaires pour résoudre celle intéressante question. Outre la molaire supérieure déjà citée , et le fragment de mâchoire 156 SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852. inferieure d’Hipparion , parlant les quatre premières molaires en plate, Sa planche lx donne aussi ies figures d’une première phalange (fig. 6) el d’une seconde (fig. 7); celle-ci est vue en dessus et en dessous. IV. Ordre des BisuJques. — Oit doit réunir dans un même ordre, auquel nous laissons la dénomination provisoire de Bisulques , l’ancien ordre des Ruminants et les Pachydermes dits omnivores, tels que les Hippopotames et les espèces de la même famille que le. sanglier. En effet, ces deux groupes de mammifères, (pii semblent notablement différer l’un de l'autre, si fou ne considère que leurs genres pro- pres à l’époque actuelle ou aux terrains peu anciens , se relient in- timement entre eux dès que l’on ajoute à leur liste celle des espèces provenant des dépôts miocènes ou antérieurs au miocène. Tels sont les Anthracothériums , les Anoploihcriums, les Xiphodons, et sur- tout les Caïnotliériums , dont nous avons précédemment cité le nom à propos d’une pièce recueillie près de Brihuega par M. Gasiano I de Prado. On trouvera dans les ouvrages de paléontologie la liste 1 de ces curieux mammifères, soit R minants, soit Pachydermes muni* | vores, qui font partie de la faune miocène, et aussi ce! e des cvpèces, les | unes miocènes, les aulns prêtâmes ou éocèncs (éocènes supér ieur et :| moyen), qui sont précisément intermédiaires aux deux groupes ac- tuels par leurs caractères anatomiques. M’ayant 'n traiter ici que des : ossements recueillis par MM. de Venieuil , Collomb et de f.orière , nous n’msisterons pas davantage sur les considération; de zoologie I méthodique qui précèdent, et dont l’objet est uniquement de jusli- i fier la réunion que nous faisons ici des Ruminants et des Pachyder- I mes omnivores dans un seul et même paragraphe, malgré la diffé- i rcnce qui existe entre les genres dont nous allons avoir à parler. ? Ajoutons cependant que ces différences, aussi bien celles des pieds 1 que celles des dents, ne dépassent guère celles qu’on remarque entre ;ji les genres de carnivores les plus éloignés entre eux, comme, par exemple, les Ours et les Pelis. Genre Bœuf ? ou Antilope . — Le genre Bœuf , qui est comme le | genre Equus, i eprésenté pur plusieurs espèces dans la nature actuelle ] cl dans ies dépôts diluviens, n’est pas encore connu dans les déj ôts f miocènes, ni meme dans ceux du pliocène de Montpellier, el l’on a dû rapporter à la division des Antilopes les débris trouvés dans ce I dernier gisement, qui avaient été signalés comme étant de Bœufs. ! De même aussi on a reconnu pour appartenir au genre Hipparion les i prétendus chevaux du terrain miocène. Cependant ii a été découvert SÉANCE DU 6 DÉCEMBRE 1852, 157 clans le miocène proprement dit quelques ossements qui paraissent fort analogues à ceux du genre Bœuf par leur taille et même par leur forme; et ceux des liguiies d’Al ov, que représente notre cinquième planche, sont en particulier dans ce cas. Leur ressemblance avec le genre Bœuf se traduit aussi par la forme de leurs dents molaires, et plus particulièrement par la présence, sur le milieu du bord interne des supérieures, et à la même partie, mais au bord externe des infé- rieures, de la colonnette d'émail , que tous les auteurs ont donnée comme caractéristique du genre Bœuf, par rapport aux autres genres de Ruminants pourvus de eûmes à étui. V Antilope Cordieri ou recticornis de Montpellier, dont les dents ont été prises tantôt pour des dents de Bœuf, tantôt pour celles d’une grande espece de Cerf, a aussi les colonne! les propres au genre des véritables Bœufs, et cepen- dant, comme scs contes ont la structure de celles des Antilopes, on ne saurait l’éloigner de ces dernières et le réunir aux Bovidés. D’ail- leurs, il y a paimi les Antilopes actuelles de l'Afrique plusieurs espaces dont les molaires possèdent aussi le même caractère ; c’esî ce dont je me suis assuré api es avoir constaté cluz les Antilopes fossiles de Montpellier, de Cucuro» et de Sansan , la forme qu’on avait crue particulière ail groupe des Bœufs. Jusqu’il! c’est uniquement dans des Antilopes propres à l'Afrique que j’ai reconnu la présence de co'onnettes extéro- internes aux dents molaires dans celte nombreuse catégorie de Ruminants. Tels sont Y Antilope seneyalensis des au- teurs; Y Antilope vnctucsa, Laurillard (A. Sinsing, Ogilby, et A. de - fessa, Rupp.) ; Y Antilope Canna; Y Antilope Kob et quelques autres encore. Ainsi le grand Ruminant de noire planche 5 n’est pas un Bœuf, parce qu’il a > M. d’Archiac rappelle queM. Fitton, en décrivant, dés 1829, certaines couches de la montagne de Saint-Pierre qu’il rappor- tait au terrain tertiaire, a sans doute voulu parler de celles auxquelles M. Hébert a fait allusion dans sa communication. M. de Roys fait remarquer que, dès 1830, M. Huot avait signalé le calcaire pisolitique comme un calcaire marin qui se trouvait à la base des terrains tertiaires. M. Huot avait égale- ment signalé les gisements de Montainville, des environs de Vigny, du chemin delà Princesse, à Port-Marly. M. Hébert répond que M. Huot, dans le premier volume de son Traité élémentaire de Géologie , publié en 1837, a donné, page 688, sur le calcaire pisolitique, des détails d’où il résulte que le gisement de Montainville lui était inconnu, et que celui du Chemin de la Princesse , à Bougivai, avait été signalé pour la première fois par M. Éiie de Beaumont, et qu’à cette der- nière époque M. Huot ne connaissait ce calcaire qu’au port Marly. M. de Yéroféyeff présente à la Société la carte géologique du gouvernement de Saint-Pétersbourg, qui vient d'être exécutée par M. Kutorga. Il donne sur cette carte les explications sui- vantes : Un coup d’œil général sur la carte géognostique du gouverne- ment de Saint-Pétersbourg nous montre que les roches ignées n’entrent pas du tout dans la composition de son sol ; par consé- quent on ne peut faire aucune mention, ni des filons métallifères, ni des pierres gemmes. Par un examen plus détaillé de cette carte nous reconnaissons que toute la surface de ce gouvernement pré- 187 séance jhj 20 pÉvfwuM 1852. sente quatre grandes divisions géognostiques et quelques autres qui sont disséminées comme de petites taches. Les quatre pre- mières divisions sont : les alluvions anciennes , les allumions mo- dernes et les terrains silurien et dévonien : ces terrains se succèdent du N. au S. dans l’ordre dans lequel ils viennent d’être énumérés. Les tufs calcaires d’eau douce se sont déposés dans les époques géologiques les plus récentes, et ils forinent de petits bassins dissé- minés çà et là. 1. La bande géognostique des alluvions anciennes confine à la Finlande, et consiste dans des bancs énormes de sable contenant des blocs erratiques; ces bancs présentent des collines sans nombre qui sont situées très près les unes des autres, de sorte que les eaux douces s’accumulent entre eux en forme de petits lacs , ordinai- rement sans issue. 2. L’autre bande géognostique se prolonge par tout le gouver- nement de l’E. à i’O. , de la rivière Ojjat , sur le bord méri- dional du lac Ladoga, sur le cours de la Néva et sur la rive du golfe de Finlande, jusqu’à la rivière Narowa. C’est un espace qui est occupé par les alluvions modernes ; elles consistent en argiles et en sables qui ont été ramassés par les eaux du lac Ladoga et par celles du golfe de Finlande , qui ne les ont quittées qu’à l’époque géologique la plus moderne. Les pluies abondantes et des neiges forment ici de grands marais, parce que , à travers le sable, l’eau filtre facilement, tandis qu’au contraire l’argile est une roche imperméable. 3. La troisième bande géognostique , située immédiatement au S. de la précédente, est une bande silurienne ; sa partie supérieure consiste en couches calcaires qui constituent les bancs jusqu’à 20 sagènes (ièO pieds) d’épaisseur. En quelques endroits les cal- caires sont tout à fait mis à nu ; en d’autres iis sont recouverts par une couche mince d’alluvions , et quelquefois par du gravier du même calcaire. Toutes ces couches calcaires sont pleines de fis- sures qui les traversent dans toute leur épaisseur ; par cette raison cette bande est entièrement privée d’eau; on n’y trouve ni lacs, ni ruisseaux, ni marais. à. La quatrième bande géognostique, le terrain dévonien , occupe le plus grand espace du gouvernement dans les parties S. et S.-E. Ce terrain présente trois étages, dont Y inférieur forme les argiles, les marnes et les grès argileux ; le moyen , les grès rouges ; et enfui, le supérieur , les calcaires argileux. Ces étages forment les trois sailliesdu N. au 8. Les | à peu près de toute cette bande sont occupés par les deux premiers étages, c’est-à-dire le.s «argiles, les marnes et 188 SÉANCE DU 20 DÉCEMBRE 1852. les grès, ce qui fait que sur le terrain dévonien il y a une quantité innombrable de marais et de lacs, où prennent leur source toutes les grandes rivières du gouvernement avec tous leurs affluents : Narowa, Pliussa, Longa, Slavyenka, Ijora, Tossna, Mga, Lava, Wolcliow, Siyas, Waîgama, Pascba et Oiyat; les lacs de Pskow et de Tschonde appartiennent aussi au même terrain. L’échelle de la carte est de dix verstes (1) pour un pouce anglais, ou elle est à la yfôWô Pai'de de sa grandeur véritable. L’étendue du gouvernement de Saint-Pétersbourg est de 850 milles carrés, c’est- à-dire, il est deux fois et un tiers plus grand que celui du royaume de Saxe. Les limites des formations ont été indiquées de 5 en 5 verstes, quelquefois de 10 en 10, à moins que des marais impra- ticables n’aient pas permis d’exécuter des observations directes. Cette carte est le résultat de dix années de travaux, car les ob- servations ne pouvaient être faites que pendant trois ou quatre mois de l’année. Elle indique les routes, les rivières, les lacs et les villages, quelque petits qu’ils soient, et toutes les diverses routes. — Comme la carte du gouvernement ne recouvre pas toute l’étendue de la feuille , sur les endroits libres sont gravés les sujets suivants: 1. L’explication des couleurs des formations, et d’autres signes conventionnels. 2. Une coupe des couches siluriennes recourbées, et renversées du côté opposé sur le bord de la rivière Poulkomka. 3. Une coupe des couches les plus infé- rieures du système silurien, qui sont très bien développées sur la rivière Tossna. à. Une coupe des couches élevées de grès rouge sur la rivière Orédèje. 5. Une coupe théorique à travers tout le gouvernement du N. au S., qui donne une idée exacte de l’aspect de la surface du gouvernement et de la constitution de son sol. 6. La carte des environs de Gatschina avec une échelle double de celle de la carte, qui indique d’une manière plus exacte les limites des systèmes géognostiques qui sont ici très com- pliqués, et sur laquelle sont figurés les canaux qui ont été creusés pour dessécher les marais du district de Zarskœ-Sselo. Souvent ces canaux ont servi à déterminer les limites des formations et de leurs étages. 7. Enfin un tableau donnant l’ordre de succession des divers terrains dans le gouvernement de Saint-Pétersbourg, ainsi que l’indication de leurs localités et de leurs fossiles caractéristi- ques (voyez le tableau ci-contre). (1) Suivant X Annuaire clu Bureau des longitudes , \ verste ( ou 500 sagènes) = 1 ,067 kilomètre. SÉANCE DU 20 DÉCEMBRE 1852 189 : ibleau montrant V ordre de succession des divers terrains dans le gouvernement de Sain t- Pétersbourg. Cale, gris violet Calcaires gris Argile violâtre. ..... Grès blancs et rouges. . Calcaires gris arénacés. . LOCALITES. Partout. Poudost, Wiachtelewa. . , louriewNossok,Konozérjé, gris arenace. , rouge arénacé. Idem Bralowistsché surWolhow Welssi sur Wolhow. . . IConozérjé, Wolhow. . . Goloubkowa sur Tchere mnelz. Idem Idem . . . . FOSSILES GARA CTÉR1STIQUES . Sans fossiles. Lymnœa , Plattorbis. Spir. mural is , lenticu-\ lum. Ter. Meyendorfii . Dimerocriniles aptilus. Poissons, Ter. Meyendo/fii Poissons. Sans fossiles. Grès blanc Grès micacé' Grès rouge Grès micacé Grès rouge. Grès rouge et blanc. . . . Argiles et grès Marne bleuâtre Marne jaune Marne blanche arénacée. Marnes rougeâtres. . . . Marne jaune. ...... Marne oolitique. La ville Longa Partout. . . Rojéstwena sur Orédéje. Partout Partout Grande Storonié sur Longa Partout . Porétschié sur Longa. . Klénna sur Longa. . . Wolhow, Pascha. . . . Marjino sur Slavianka. Welssi sur Wolhow. . e moulin de Suida. . . Calcaire blanc Calcaires réticulaires.. Calcaires slalagmitiques. Cale, blancs. ...... Calcaires gris Calcaires cendrés. . . . . Cale, jaunâtre Cale, cendrés et violets. Zarétschié sur Orédéje. . . Zare'tschié , auprès de la source de la riv. d’Oré- déje. Smolkowa, Dilitzi. . . Louiskowitzi Cale, cendrés et blancs. Cale, jaunâtres i Cale, bleuâtres Louiskowitzi, Wohana. . Mikina, près de Wohana, Skworitzi, Bornitzi. . . . Wohana, Skworilzi, Pari tzi, Woiskowitzi. Mariino, Onlolowo. . Partout Cale, jaunâtres. . . . Cale, vert rougeâtre. Cale, verdâtres. . . . Argile verte. . . . . . Cale, verts. Ropscha, Mihailowskaja. Gostilitzi, Wolhow. . . Partout Partout Gaertowa sur Tossna. . Partout. Grès à Ungulites. ..... Argile verte arénacée. . , Schiste combustible. . . Grès gris à Ungulites. . . Grèsspathique àUngulites Grès rouge à Ungulites. . Grès blanc Grès blanc Grès blauc avec taches violettes. Marnes arénacées rouges ci bleues. Argile bleue Gaertowa. Partout. . Partout. . Idem. Idem. Poissons (écailles et dents) Poissons. Poissons (écailles, dents). Idem. Idem. Poissons. bicarinata. Posidonia aspera. ns fossiles, èche de poissons. Poissons, ns fossiles. bicarinata ; poissons. Cypridina marginata. Sans fossiles. Idem. Lept.heraldica.Millé^ora repens, Rhodocrinites Fucus. Siphonia ?. Pentamerus ventricosus Conularia, Calam. patel laria, Lingula quadra ta,Receptaculites orbis Sans fossiles. Orthoc. , Euomphalus Echinosph. lll. tauricornis , As. ex pans. Siphon, unguiculata. Spirifer Lynx. Leptœna oblonga. Sans fossiles. Bolboporites mitralis Partout lambourg Riv. Tosna, Wolhow Riv. Wolhow. . . . Biv. Longa, Tosna. Loutzaia sur Longa. Loulzuia sur Longa. Partout. Ungulites. Sans fossiles. Idem. Aulonotr. polita. Aul. polita. Idem. Gorgonia. Sans fossiles. Idem. Idem. Sans fossiles. 190 SÉANCE DU S JANVIER 1853. Séance du 8 janvier 1853. PRÉSIDENCE DE M. DE YERNÉUIL. M. Deîesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de îa dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite de la présentation faite dans la dernière séance, le Président proclame membre de la Société : M. Jutier, ingénieur des mines, à Colmar (Haut-Rhin), présenté par MM. Blavier et Elie de Beaumont. Le Président annonce ensuite une présentation. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. le ministre de la justice, Journal des sa- vants ,« décembre 1852. De îa part de M. de Billy, Carte géologique des Vosges , h feuilles grand colombier $ 18ü8$ imprimerie nationale. De la part de M. le baron d’Hornbres-Firmas : 1» Notice nécrologique sur Esprit Reqniek , in -8, 7 pages. Nîmes, 1852- chez C. Durand-Belle. 2° Note biographique sur /.- P . Rénaux , d' A lais, architecte % ët géologue, in-8, 8 p.' Àlais, 1852 5 chez veuve Yeirun. De la part de M. Alexis Perrey : 1° Note sur les tremblements de terre ressentis en 1851 , in-8. Zi6 p. (extr. du t. XÎX, n° 3, des Bulletins de R Acad, roy. de Belgique). 2° Supplément a la note sur les tremblements de terres res- sentis en 1851, in-8, 8 p. (extr. du t. XIX, në 0, des Bulletins de V Acad. roy. de Belgique). De la part deM. le docteur John G. Warren, Description, etc. (Description d’un squelette du Mastodon -giganïeiis de l’Amé- rique du Nord), in -h, 219 p., 27 pl. Boston, 1852 ; chez John Wilson and son. Comptes rendus des séances de VA endémie . nrè scieneeé , 1852, 2e sem., t. XXXY, n0® 25 et 25. L'Institut, 1852, nos 990 et 991. SÉANCE DU 3 JANVIER 1853. 191 Société nationale et centrale d'agriculture. — Bulletin des séances. — 2e sér., t. ŸIIÏ , n° 1, 1852. The Atlienœum , 1852, nos 1313 \ et 1853, n° 131/j. Le Trésorier présente l’état de là caisse au 31 décembre 1852. Il y avait en caisse au 31 décembre 1851. . 2,932 fr. 95 c. La recette, depuis le 1er janvier jusqu’au 31 décembre 1852, a été de 20,596 65 Total. . . 23,529 60 La dépense, depuis le 1er janvier jusqu’au 31 décembre 1 852, a été de. ..... . 17,645 50 Il reste en caisse au 31 décembre 1852. . . 5,884 fr. Idc. Les nominations des dîversesCommissions pour l’année 1853, faites par le Conseil dans sa séance de ce jour, sont successi- vement adoptées par la Société. Ces Commissions sont composées de la manière suivante : 1° Commission de comptabilité , chargée de vérifier la gestion du Trésorier: MM. Yiquesnel, Damour, Hébert. 2° Commission des archives , chargée de vérifier la gestion de l’Archiviste ; MM. Graves, Clément -Mollet, le marquis DE ROYS. 3° Commission du Bulletin : MM. Deshàyes, Ch. Sainte- Claire Deville, le vicomte d’Archiac. h° Commission des Mémoires : MM. de Verneuil, Damour, Yiquesnel. On procède ensuite à l’élection du Président pour l’année 1853. M. de Yerneuil, ayant obtenu 93 suffrages sur 101, est élu Président pour l’année 1853. La Société nomme ensuite successivement : Vice-Présidents : MM® Levalloîs, le vicomte d’Archïàc, Graves, Michelin. Membres dit Conseil : MM. Yiquesnel, Ch. Sainte-Claire Deville, d’Omalius d’ïïalloy, Delafosse , Ed. Collomb. 192 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. I! résulte de ces nominations que le Bureau et le Conseil se trouvent composés de la manière suivante pour l’année 1853 : Président . M. DE VERNEUIL. V ‘ce-Présid en ts . |M. Graves, M. Levàllois, M. le vicomte d’Àrciuàc, Secrétaires . M. Delesse , M. Hugard. |M. Michelin. Vice- Secréta ires . M. Alb . Gaudry, M. Descloizeaux. T résorier . M. le baron de Brimont. Archiviste. Jm. le docteur Bourjot. Membres du Conseil. M. Élie de Beaumont, M. Deshayes , M. Bayle , M. Constant Prévost , M. Hébert, M. Jules Haime, M. Angelot, M. Yiquesnel , M. Ch. Sainte-Claire Deville, M. d’Omalius d’Halloy, M. Delafosse , M. Ed. Collomb. Séance du 10 janvier 1853. PRÉSIDENCE DE M. DE VERNEUIL. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite delà présentation faite dans la dernière séance, : le Président proclame membre de la Société : M. Édouard de Labaume, à Paris, rue du Cherche-Midi, &2. Le président annonce ensuite une présentation. SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 193 DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. Rozet, Avancement du délia du Tibre au canal de Fiumicino (exlr. des Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , t. XXXV, séance du Tl décembre 1852) -, in -h y 3 pages. De la part de MM. Sedgwick et M’Coy, A synopsis , etc. (Classification synoptique des roches paléozoïques de la Grande- Bretagne, par M. Sedgwick -, avec une description systématique détaillée des fossiles paléozoïques de la Grande-Bretagne , qui se trouvent dans le Musée géologique de l’Université de Cam- bridge, par Fr. M’Coy) , in 2 part. Part. II, Palæontology. Fascic. 2. — Lower and middle palæozoic moîlusca, in-4. — Lond., 1852 • chez John W. Parker and son. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853,1er sem.,t. XXXYI, n°l. U Institut , 1853, n° 992. Mémoires de la Société des sciences naturelles de Cherbourg, 1er vol., lre iivr. 1852, in-8. Bulletin de la Société industrielle de Mulhouse , t. XXXIV, n° 118 \ in-8. Séances et travaux de V Académie de Reims , t. XYI , T et 3e trim. de 1852 • in-8. Mémoires de R Académie nationale des sciences , inscriptions et belles -lettres de Toulouse ; 4e sér., t. II, 1852, in-8. The quarterfy Journal of the geological Society of London ; vol. YIIÏ, part. IV, novembre 1852, n° 32. The Athenœum , 1853, n° 1315. Neues lahrbuch , etc. , de Leonhard et Bronn; 1852, 7e cahier. The American journal of science and arts , by Silîiman , 2e sér., n° 42, novembre 1852. M, de Verneuil présente, delà part de M. Sedgwick, le 2e volume de ses études sur les terrains paléozoïques de la Grande-Bretagne, qui est intitulé : A synopsis of the Britis/i paleozoic rocks , by M. Sedgwick and M, Mac Goy. Soc. géol. , 2e série, tome X. !3 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 194 M. de Verneuil appelle d’une manière spèciale l’attention de la Société sur la préface de ce volume, dans laquelle M. Sedg- wick propose une classificalion des terrains cambriens et silu- riens, et annonce qu’il revendique le calcaire de Bala et le grès de Garadoc comme cambriens. M. le Secrétaire donne lecture de l’extrait suivant d’une lettre de M. Bianconi : Bologne, 29 décembre 1852. M. le professeur Giordano, de Naples, vient de visiter les dépôts de sel gemme de Jiegalbuto, près Girgenti, en Sicile. Il m’écrit que lorsqu’on plonge ce sel dans l’eau, il pétillé, et des bulles de gaz hydrogène montent à la surface; d’où il suit que ce sel est un sel décrépitant, tout à fait semblable à celui de Wieliczka. Ce fait vient ajouter rue nouvelle probabilité à cette opinion que j’avais avancée, que quelques uns des phénomènes géologiques présentés par le gaz hydrogène, par exemple, les volcans boueux, les puits hydropy.’iques, etc. (dans lesquels la présence du sel est incontes- table), tirent leur origine d’un banc de sel gemme décrépitant qui entrerait en dissolution. M. de Verneuil lit l’extrait suivant d’une lettre de M. le comte de Keyserling : Raikülle, près Revel, Esthonie, 22 décembre 1852. Je n’ai rien publié depuis ma notice paléontoîogique sur les fossiles rapportés par M. Hoffmann du nord de l’Oural. Ses voyages, au reste, n’ont pas fourni à notre science d’objets bien nouveaux, de sorte qu’il m’a paru inutile de joindre des planches à mes observations. M. Hoffmann est chargé par notre gouverne- ment de dresser une carte géologique détaillée de l’Oural. C’est un ouvrage qui demandera bien du temps. Il a choisi pour l’aider mon jeune compatriote, M. de Grünewaldt, que vous avez vu l’an dernier à Paris, et qui a publié un bon travail sur les fossiles permiens de la Silésie, dans lequel je lui reproche cependant d’avoir supprimé le genre Schizodus , qui me paraît bien établi. M. Schrenck, qui a abandonné la botanique pour occuper la chaire de minéralogie et de géologie à Dorpat, a passé quelques jours chez moi à la campagne, au milieu d’une exploration qu’il a entreprise du terrain silurien supérieur de nos provinces. Je Vais SÉANCE DU i 0 JANVIER 1853. 195 l’aider pour la détermination des fossiles, dont il a collectionné, dit-on, une belle suite. lia, entre autres, des Eurypterus complets. Je soupçonnais que des échantillons, ressemblant beaucoup à des Graptolites, n’étaient autre chose qu’un polypier de l’apparence d’une Eschare rameuse ou d’un Cériopore, fissile selon la longueur, dont les coupes imitaient des Graptolites. M. Schrenck m’écrit qu’il est parvenu à trouver des échantillons qui démontrent net- tement cette structure. Le Bulletin des Naturalistes de Moscou vous est envoyé régu- lièrement, je pense. Vous y trouverez des amas de fossiles estho- niens, à propos d’infusoires, dans un mémoire de M. Eichwald. M. Rozel fait, de la part de M. Ponzi, la communication suivante : Note sur Vépoque de soulèvement des Apennins , par M. Ponzi , professeur d’anatomie comparée, à Rome. L’époque d’un soulèvement géologique ne peut jamais être bien déterminée sans une connaissance parfaite de l’ordre strati- graphique des roches qui composent Je terrain soulevé ; cette vérité a été bien démontrée en Italie. Lorsqu’apparut pour la première fois la célèbre doctrine des soulèvements, tout le monde croyait les Apennins formés par de grandes masses de calcaire crétacé ; et, d’après cette croyance , le savant géologue, M. Elie de Beaumont, fixa le soulèvement de cette chaîne, ainsi que celui des Pyrénées, entre les époques secondaire et tertiaire. Mais une étude continuée et approfondie des roches et des fossiles qu’elles contiennent fit naître des doutes et amena de longues discussions sur l’origine des schistes et des ma- cigni qui composent la grande masse de l’Apennin. Quelques géo- logues soutenaient qu’ils étaient secondaires , tandis que la pré- sence desNummulites et de certaines espèces de Fucoïdes les faisait 1 ranger dans le terrain tertiaire par plusieurs autres. Mais aujourd’hui la question est entièrement résolue : l’émi- nent géologue, M. Murchison, a clairement démontré le pa- rallélisme des roches et des fossiles composant les Alpes apennines et les Carpathes. Après la publication du mémoire de ce savant, tant de faits à l’appui ont été accumulés par MM. les professeur# Mcneghini, Savi, Spada, à Pise, et moi, à Rome, que l’on peut regarder comme parfaitement établi : 1° Que les schistes, les galestri des Toscans, et les grès, les ma- SÉANCE DU 10 JANVIER J 853. 196 ci g ni, avec leurs calcaires, contenant des Nummulites , des Fucoïdcs et d’autres fossiles tertiaires, sont les vrais représentants du tertiaire inférieur et moyen ; 2° Que toutes ces couches, toujours parallèles entre elles, pas- sent insensiblement les unes aux autres, savoir : le macigno se change par degrés en schiste , comme le schiste en calcaire à hippurites ou crétacé, sans aucune ligne de démarcation ; 3° Que ces mêmes roches, éocènes et miocènes, forment la grande masse des Apennins; U° Que les plus anciennes formations, le crétacé, le jurassique et le lias, se rencontrent seulement sur des points où des failles se sont ouvertes en ellipsoïde au cratère de soulèvement; 5° Enfin, que le subapennin avec tous les terrains plus récents, excepté les dislocations locales, sont toujours horizontaux à un niveau plus bas, et se prolongent jusqu’à la mer. Il résulte de tous les faits précédents , que la discordance de stratification caractéristique du soulèvement de la chaîne des i Apennins, au moins dans l’Italie centrale, où les forces telluri- ques ont agi avec la plus grande énergie , se trouve entre le ma- cigno et les marnes subapennines; d’où il résulte clairement que le soulèvement italien a eu lieu entre le miocène et le pliocène subapennin , et point du tout [entre les époques secondaire et tertiaire. Addition de M. Rozet. J’ai eu l’avantage d’étudier pendant l’été de 1852 , dans les Etats Romains, depuis Corneto jusqu’à Palestrine, tous les terrains dont parle ici M. Ponzi ; et, avant d’avoir celui de converser avec lui , j’avais reconnu , non seulement une concordance parfaite de stratification, mais encore une liaison intime entre toutes les roches de sédiment qui composent le versant occidental des Apennins, et s’étendent ensuite depuis son pied jusque sous la mer. J’ai vu, comme M. Ponzi, des passages graduels entre toutes les roches, depuis les calcaires blancs à Hippurites jusqu’au terrain . - pliocène, qui gît en grandes masses au pied de ce versant, en strates généralement horizontaux. J’ai vu, de plus, sur quelques points , entre Corneto et Civita-Yecchia , les roches pliocènes in- 1 clinées et intimement liées aux roches miocènes, màcigni. Il est bien constaté que l’étage pliocène contient un certain nombre d’espèces de coquilles qui vivent encore maintenant dans la Mé- diterranée : des calcaires grossiers de l’époque dite quaternaire ou SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 197 pliocène supérieure, contenant en abondance ces mêmes coquilles, sont exploités à Monteroni , près Palo , sur le bord de la mer. Sur une étendue de plus de 50 kilomètres, de Palo à la Torre Santa-Agostino , au nord de Givita-Yecchia , sur tous les rochers baignés par la mer, il existe un dépôt calcaire qui se continue encore actuellement , englobant les coquilles qui vivent sur la plage, Turbo , Murex s Venus , Pectunculus , etc. A Palo, ce dépôt incruste les murs du port antique que baigne la mer. Un grand nombre de sources de la campagne romaine, dont les plus célèbres sont celles de Tivoli , forment encore des dépôts de travertins analogues aux grandes masses des environs de la ville , que les anciens ont exploités pour la construction des édifices. L’ensemble de ces faits démontre clairement que, dans l’Italie centrale , il n’existe point de solution de continuité dans la série des dépôts de sédiment, depuis l’époque crétacée jusqu’à l’époque actuelle, malgré l’action des forces plutoniques qui s’y est fait sentir avec une grande énergie dans ce laps de temps. D’un autre côté, les trachytes, dont j’ai reconnu trois grandes masses à la Tolfa, au monte Sasso et au monte Yirginio, se lient intimement aux basaltes qui constituent la plus grande partie de la surface du sol entre le pied des Apennins et la Méditerranée. Le terrain basal- tique est composé de deux puissants étages : au-dessous, le basalte I compacte avec pyroxène et péridot , qui a servi au pavage de toutes les voies antiques , et par-dessus une masse de plusieurs centaines de mètres d’épaisseur, composée de ponces, de peperini, de lapilli, etc., tantôt régulièrement stratifiés, tantôt entassés sans aucun ordre. Le second étage olïre une si grande analogie avec les produits des volcans actuels, le Vésuve et l’Etna , que plusieurs géologues ont cru que ses matériaux étaient sortis des lacs de Bracciano, Baccano , Albano, etc., considérés par eux comme des cratères éteints. Dans le Latium, la Sabine et l’Etrurie, il existe des solfatares dans le sol basaltique , et , sur un grand nombre de points, sourdent des sourees thermales, des sources minérales et des dégagements d’acide carbonique. De plus , on voit souvent , dans toute la contrée , les produits de la voie ignée alterner avec ceux de la voie humide. Il n’existe donc encore en Italie aucune solution de continuité dans les phénomènes plutoni- ques, depuis l’époque des éruptions tracliy tiques jusqu’à celles du Vésuve et de l’Etna , dont nous sommes encore témoins ; et de plus, au lieu de s’exclure réciproquement, comme l’ont gratuite- ment avancé quelques géologues , les dépôts neptuniens et les dépôts plutoniques ont eu lieu en même temps sur le même sol. 198 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. Bans les coupes géologiques des hautes Alpes que j’ai eu l’hon- neur de présenter à l’Académie, le 1er décembre 1851 (1), et dans la note que j’ai lue ensuite à la Société géologique (2), j’ai prouvé qu’il existe , en général , une concordance parfaite de stratifica- tion, et souvent une liaison intime, entre tous les groupes géogno- stiques, dans ces montagnes, depuis le lias jusqu’au terrain éocène inclusivement , et nullement les grandes solutions de continuité générales, sur lesquelles M. Elie de Beaumont a établi sa brillante théorie des soulèvements. Je pouvais croire alors que les travaux de la carte de France me conduiraient de nouveau dans les Alpes en 1852 ; mais comme depuis j’ai été chargé de travaux géodésiques dans les Etats Romains, où cette théorie se trouve tellement contredite par les faits, je vais dire ici tout ce que j’ai vu dans les Alpes. Il n’existe point de lignes de dislocation générale dans toute la chaîne des Alpes françaises , depuis le lias jusqu’au terrain éocène inclusivement , qui sépare complètement deux groupes géogno- stiques l’un de l’autre. Parmi les nombreuses lignes de dislocation partielle que présentent ces montagnes, il n’existe pas une seule direction constante à laquelle on puisse rapporter toutes les dislo- cations d’une même époque. Les lignes de dislocation sont si nombreuses et tellement incli- nées les unes sur les autres, qu’il est toujours possible d’en grouper un certain nombre dirigé, à peu près , dans le sens que l’on aura déterminé à l’avance. On peut faire ainsi plusieurs combinaisons dans lesquelles les directions soient non seulement inclinées les unes sur les autres, mais même perpendiculaires, sans que les groupes disloqués changent aucunement, de même qu’il est pos- sible de trouver des directions à peu près parallèles qui, après avoir produit une discordance de stratification entre deux groupes, vont ensuite jouer le même rôle entre deux autres groupes plus récents ou plus anciens que les premiers. Il résulte de là que des lignes de dislocation inclinées les unes sur les autres d’une manière quelconque peuvent appartenir à la même époque, tandis que d’autres, à peu près parallèles, seront d’ époques très différentes. Tout le massif des montagnes com- prises entre la Durance et le Drac , et , à l’ouest de celle-ci , les massifs de Céuse et du Dévoluy en offrent de Nombreux exem- ples. ( \ ) Comptes rendus , t. XXXI 11. (2) Bulletin de là Société géologique, V -sér., t. IX , p. 165 SÉANCE DU 10 JANVIER 1858. 199 Le nombre des combinaisons pouvant changer avec les obser- vateurs, il arrivera, et il est déjà arrivé, que dans une contrée où l’un a établi deux systèmes de dislocations, un second en établira quatre, un troisième huit, et chacun avec le même degré d’exac- titude. Ce que j’avance ici est confirmé par M. Elie de Beaumont lui- même : en présentant, le 30 août dernier, à l’Académie, son ouvrage intitulé, Notice sur les systèmes de montagnes, il a dit (1) : « Dans le premier mémoire que j’ai eu l’honneur de soumettre à » l’Académie sur ces matières, le 22 juin 1829, je n’avais étudié, » en Europe, que quatre systèmes de montagnes. Peu après j’ai » pu en indiquer neuf, puis douze, puis vingt et un. En admettant » qu’on puisse en compter déjà une soixantaine , il y a lieu de » penser que, si l’étude ne se ralentit pas sur ce point, le nombre » des systèmes de montagnes s’élèvera avant peu d’années à plus » de cent. » Dans ina description géologique de la partie méridionale de la chaîne des Yosges (2), honorée d’un rapport favorable à l’Académie des sciences, j’ai prouvé, pages 123 et suivantes , que les deux chaînes qui bordent le Rhin n’étaient pas le résultat de disloca- tions opérées suivant divers systèmes de lignes parallèles, mais qu’elles se composaient de grands massifs, indépendants les uns des autres, et disposés sans aucun ordre régulier. Ce fait a été mis en évidence par une bonne carte topographique jointe à la description. Depuis lors, les feuilles de la nouvelle carte de France, comprenant la chaîne des Yosges, ont été publiées, et chacun peut actuellement y reconnaître l’exactitude de mes assertions. J’ai ensuite étudié les montagnes du centre de la France, les Pyrénées, les montagnes de la Provence, les Alpes , françaises, et enfin les Apennins, et j’ai reconnu que ces diverses chaînes sont composées comme celles qui bordent le Rhin, de grands massifs indépendants les uns des autres et disposés sans aucun ordre régulier ; les feuilles de la carte de France , déjà pu- bliées, celles de la carte de Cassini, et enfin celles de la carte d’Italie, par Bâcler d’Albe, prouvent l’exactitude de ce que j’annonce. M. d’Omalius d’Halloy fait observer qu’il ne peut, avec M. Rozet, admettre une continuité complète entre la série deg (1) Comptes rendus, t XXXV, p. 298. (2) Paris, 1834. Publiée par Roret, 200 SÉANCE DU 10 JANVIER 185S. dépôts actuels et des dépôts formés pendant les divers «âges géologiques : la discordance des terrains pliocène et miocène se montre en Italie sur une vaste échelle. M. Rozet répond que la discordance du miocène et du pliocène est un fait fréquent , mais non général ; ainsi à Cornetta, près de Tarquinia, il y a concordance entre ces deux terrains-, et la concordance existe encore pour tous les autres terrains du même pays. Les travaux topographiques montrent les diverses couches s’inclinant vers la mer et s’imbriquant régulièrement les unes les autres. M. Rozet rappelle que des dépôts peuvent être discordants, tout en appartenant à une même période. M. d’Omalius d’Halloy admet la possibilité de discordance entre deux terrains d’une même période; mais il 11e l’admet que sur une échelle très restreinte et dans des circonstances locales. R persiste à croire qu’un bouleversement violent a sé- paré les couches miocènes des couches pliocènes. M. Deshayes ajoute l’observation suivante : Dans les temps où la connaissance des fossiles était encore peu avancée, on avait cru voir entre les divers terrains des Pyrénées des pas- sages nombreux, non seulement sous le point de vue minéra- logique, mais encore sous le point de vue paléontologique. Depuis cette époque, on a retrouvé dans chacun de ces terrains des faunes si tranchées , que l’on pourrait marquer avec une lame mince leur ligne de démarcation. Dans ma pensée intime, un jour viendra où l’étude plus approfondie des fossiles per- mettra d’établir en Italie, comme dans les Pyrénées, des distinctions entre des terrains que M. Rozet considère comme des terrains passant les uns aux autres. M. Gervajis appuie l’opinion de M. Deshayes, et il ajoute que les études sur les vertébrés fossiles confirment l’opinion fournie aux paléontologistes par la connaissance des animaux invertébrés. M. Boubée réclame contre l’opinion de M. Deshayes; il ne peut, d’après des distinctions de fossiles, établir des limites tranchées entre les divers étages. Chaque plage, dans l’époque contemporaine, a ses animaux spéciaux -, de même, dans les âges géologiques, les différences de faune indiquent seulement SÉANCE DU JO JANVIER 1853, 201 ries différences dans les circonstances de dépôt-, elles correspon- dent, pour en citer quelques exemples, à des dépôts formés au-dessus ou au-dessous du balancement des marées, formés , sur des plages sableuses, calcaires, argileuses, etc. Sur une échelle restreinte, M. Desbayes reconnaît avec tous les paléontologistes les différences locales signalées par M. Bou- bée. Mais les terrains ne sont point établis d’après quelques distinctions légères-, les terrains sont de grands ensembles; ils réunissent les divers dépôts d’argile, de sable, etc., et le paléontologiste sait tenir compte de l’habitat différent des êtres. Chacun des vastes horizons de fossiles, portant le nom de terrain géologique, ne saurait correspondre à telle ou telle circon- stance de nos mers contemporaines-, il embrasse l’ensemble de ces circonstances. M. Hébert communique, sur la position du grès d’Hettange dans la série basique , les résultats des observations faites à la réunion extraordinaire tenue à Metz du 5 au 17 septembre 1852 (1). Dans son opinion, ces résultats sont de nature à mettre fin à toute discussion ultérieure sur les points controversés dans les contrées que la Société a parcourues. Ils montrent en même temps pourquoi il y a eu tant de divergence parmi les savants et consciencieux explorateurs auxquels on doit d’intéressantes études sur cette question. Le grès d’Heltange se continue sans interruption jusqu’à Luxembourg. Et ce n’est pas une continuité apparente, ce ne sont pas deux grès différents mis en contact par suite d’une faille, car les fossiles si curieux et si spéciaux d’Hettange ont été retrouvés par la Société à Helmsingen , au delà de Luxem- bourg, dans des assises où le grès en est pétri. Dans un échan- tillon,recueilli par M. Hébert dans cette localité et n’ayant pas un quart de décimètre cube, M. Terquem a reconnu 15 espèces identiques avec celles d’Hettange et 2 autres nouvelles ou plus rares, ce qui permettrait d’espérer que cette faune s’enrichira encore par des recherches plus multipliées. (1) Voir le compte rendu de cette réunion, Bulletin , 2e série, t. IX, p. 661 et suiv. 202 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. Cette identité bien reconnue constitue un premier résultat. La position géologique des deux grés a été parfaitement constatée, indépendamment Lun de l’autre. Elle est évidemment la môme. Partout le calcaire à Gryphées arquées normal, le lias bleu recouvre le grès. Cette superposition est nette, évidente, à Breistroff ‘ où la route coupe de bas en haut le grès, le calcaire à Gryphées arquées, et les marnes à Ammonites Jîmbriatus, première assise du lias moyen , en superposition immédiate et consécutive. Elle n’est pas plus douteuse dans le chemin de Rodemarck à Mondorf, où, au-dessus des escarpements de grès, on rencontre dans les champs, d’abord Y Ostrea arcuata , et autres fossiles du lias bleu en abondance, puis les marnes à Ammonites fimbriatus , puis des débris de calcaire à B élemnites, et de nombreux échantillons à' Ostrea cymbium , Ammonites spinatus, etc., etc. A Luxembourg, la Gryphée arquée se ren- contre 5 chaque pas sur les glacis, à la surface du grés qui sup- porte la ville. A Hettange enfin, au-dessus du grès se montre des lits de calcaire bleuâtre, commencement du calcaire à Gryphées arquées, dont les fossiles, qui se voient déjà dans ces bancs, se trouvent en très grande quantité dans les nombreux débris que renferme la terre végétale. Si cette solution a échappé à des géologues expérimentés, c’est, d’une part, que les localités où elle se montre le mieux n’ont point été visitées par eux , et de l’autre, que la localité de Bousi, qui leur a servi d’argument principal, est de nature à induire complètement en erreur. Une faille a relevé le grés infra-liasique , ou a abaissé le lias proprement dit, de telle façon qu’à Boust. cette faille ayant placé les marnes à Gryphées arquées au niveau des argiles sableuses qui forment la base du grés, on a pu croire qu’il y avait superposition de ce grés sur les marnes basiques. Mais un peu plus loin le grés domine les marnes à Ammonites spinatus ; plus loin encore, à Puttelange, il s’élève au-dessus du calcaire à Ostrea cymbium; et à Boust, ni les marnes à Ammonites spinatus , ni le calcaire à Ostrea cymbium , ne séparent le grès des marnes et calcaires à Gry- phées arquées. D’autres observateurs avaient bien reconnu que cette ren- contre du grès avec les diverses assises basiques n’avâit lieu 203 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. I i que latéralement; mais ils expliquaient ce fait, qui est vrai, par une hypothèse qui ne l’est pas, à savoir, que le grès avait été exhaussé et raviné avant le dépôt du calcaire à Gryphèes arquées, et qu’il avait offert aux mers où ce calcaire et les as- sises suivantes s’étaient déposés un fond accidenté à parois souvent verticales. Il est facile de s’assurer que ces accidents ne sont point dus à des ravinements, mais à un système de failles dont l’âge n’est point encore déterminé, lequel a affecté à la fois le grés infra-liasique, le calcaire à Gryphèes arquées et le lias moyen. M. Bourjot demande la parole pour dire que le terrain ba- sique décrit par M. Hébert présente exactement les mêmes cir- constances de gisement dans le ravin qui a servi à loger la longue ville de Salins. En outre il considère comme une condition biologique géné- rale que les mollusques de même espèce et de même âge ont des têts pi us petits, et sont moins achevés dans leur déve- loppement, lorsqu’ils ont pris naissance dans des grès, dans des dépôts quartzeux, tandis que le contraire a lieu lorsqu’ils ont pris naissance dans des marnes argileuses; ainsi YOstreaco- lumba , si petite dans les grès verts de Foural, devient énorme dans les couches argileuses du tunnel creusé sous la ville d’An- gouîême pour le passage du chemin de fer de Bordeaux. 11 pense que cette idée se généralisera; que ces testacés ont, pour ainsi dire, grandi en nombre et en volume lorsqu’ils ont rencontré des couches argileuses, où ils pouvaient trouver l’élé- ment nécessaire à leur organisation, c’est-à dire une boue ma- rine où ils vivaient enfoncés, prenant l’air, soit par des tubes aquifères, soit par des branchies lamelleuses. A propos de la communication de M. Hébert, M. de Yassart fait remarquer que les travaux de M. Hébert ne lui paraissent pas suffisamment précis, et il croit que, dans une question aussi controversée, sur laquelle d’éminents géologues ne sont pas d’accord , il serait imprudent d’exprimer trop nettement une opinion , surtout quand on n’a fait qu’une course aussi rapide que celle entreprise par les membres de la Société géologique. 11 pense, en outre, qu’il n’a été fait que trois observations vrai- ment importantes ; BÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 20A 1° Aux carrières d’Hettange : la superposition, sur les grès d’Hettange proprement dits, de grès calcaires qui, d’après lui, ne présentent pas les véritables caractères du calcaire à gryphées arquées-, 2° A Uesseîkirch : la superposition des grés sur les marnes à ovoïdes ; 3° Près de Breistroff : la superposition des calcaires à gry- phées arquées sur les grès. Ces deux observations, qui paraissent contradictoires, sem- blent indiquer l’existence d’une faille , ainsi que l’a fait remar- quer M. Hébert -, mais on doit ajouter qu’aucune trace à la sur face du sol ne permet de reconnaître cette prétendue faille. M. Levallois dit qu’il ne veut présenter d’observations, quant à présent, que sur la conclusion finale de M. Hébert, à savoir : Qu’ en considérant le grès d’ Hettange et le grès de Luxembourg comme étant inférieurs au calcaire à gryphées arquées , la coupe géologique de ces localités n’offre plus rien que de normal , attendu , d’une part , que les grès dont il s’agit sont parfaite- ment semblables au calcaire d’Osmanville [département du Calvados ), inférieur au lias bleu; et , d’autre part, que le mince banc de calcaire marneux , bleuâtre , à Ammonites liasiques , qui, près de Luxembourg forme la base des grès , rappelle tout à fait certains bancs de l’infra-lias de Semur [Côte-d’ Oif M. Levallois ne peut pas admettre, ainsi qu’il l’a déjà expri- mé dans la séance du 5 avril dernier , que lorsqu’il s’agit de classer le grès des carrières d’Hettange, situées dans le départe- ment de la Moselle, dans la série des couches liasiques, on aille prendre ses termes de comparaison dans la série basique de la Normandie ou de la Bourgogne, en sautant par-dessus tous les intermédiaires , plutôt que dans Se département même de la Moselle, où ladite série est très bien développée. En procédant ainsi , on lient bien peu compte du principe de la continuité des couches, qui est l’essence de la géologie. Si exactes que puis- sent être les ressemblances signalées par M. Hébert, ce qui fait que la coupe d’Hetlange conservera toujours son caractère anormal, c’est la dissemblance du grès de cette localité avec le grès infra-liasiquc, type que l’on peut observer à 17 kilomètres de là, vers le sud-est, au village de Kédange» / SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 205 La société n’attend pas de moi , dit M. Levallois, que je la mette à même de prononcer sur cette dissemblance, en lui défi- nissant ce que j’appelle le grès infra- liasique type. Elle sait combien les définitions des divisions et sous- divisions géologiques sont toujours incomplètes, et combien elles sont insuffisantes, le plus souvent, pour faire reconnaître ces divisions de qui ne les a pas déjà pratiquées sur leterrain. L q signalement, en cette matière, résulte, en effet, d’une foule de caractères empiriques, si l’on veut, mais fort difficiles, par cela même, à formuler d’une manière précise et dont la connaissance ne peut bien s’acquérir que de visu. C’est pour cela que les observateurs pa- risiens n’hésitent pas pour reconnaître, indépendamment des définitions données par les auteurs , le calcaire grossier, ou le grés de F ontainebleau, ou le grès de Beauchamp : et c’est pour cela aussi que nous, qui avons vécu dans les contrées basiques, nous ne pouvons pas hésiter à reconnaître dans le grès de Kédange le grès infra -basique type, et que nous sommes frappé de sa dissemblance avec le grés d’Hettange, aussi bien sous le rap- port zoologique que sous le rapport pétrograpbique, dissem- blance qui n’a, d’ailleurs, jamais été contestée par les observa- teurs qui connaissent les deux localités. Que si l’on veut se bien pénétrer de ce que c’est que le grés infra-basique, il faut partir de Mirecourt, dans le département des Vosges (on pourrait même aller beaucoup plus loin vers le sud , jusqu’à Bourbonne, et, si je m’arrête à Mirecourt, c’est pour ne parler que de ce que j’ai vu de mes propres yeux) ; et voici ce qu’on observera en suivant, dans la direction du Nord, l’étroit intervalle qui sépare les marnes irisées du bas bleu, caractérisé par le calcaire à gryphées arquées. On observera que cet intervalle est occupé par un système de couches arénacées, consistant essentiellement en un grès quart- zeux avec des schistes argileux jaunes ou noirs , et dont l’uni- fonnité se soutient jusque dans les détails, d’une manière re- marquable. Or, c’est pour avoir constaté celte uniformité dans l’espace de plus de 25 lieues, qui sépare Mirecourt de Kédange, que je me crois autorisé à dire que le grès de cette localité est le grès infra -basique type, et que je tiens pour assuré que qui- conque aura familiarisé ses yeux avec ce grès dans la région que 20(5 SÉANCE DU 10 JANVIER 1855. je viens d’indiquer sera frappé de sa dissemblance avec le grès des carrières d’Hcüange, et ne pourra voir là qu’une coupe tout à fait anormale. J’ai tout lieu de croire d’ailleurs que c’est aussi dans cette région-là que les auteurs de la Carie géologique de la France ont pris le type du groupe qu’ils ont appelé grès infra-liasique , et non pas dans la région du centre et du midi , où ce groupe est si mal défini et où il ne consiste parfois qu’en dolomie. Dans tous les cas , il est essentiel de faire remarquer que , dans l’espace de 25 lieues compris entre Kédange et Mirecourt, et où il est rationnel de prendre nos termes de comparaison , le système de couches séparatives des marnes irisées et du calcaire à gryphées arquées ne renferme aucun banc qui rappelle en rien 1 e faciès du lias bleu, ni qui renferme des ammonites persillées, ces ammonites ne commençant à paraître , non plus que les gryphées, qu’au-dessus du grès infra-liasique. Il y a plus : c’est que les couches du groupe dont il s’agit, loin d’avoir le faciès basique, se rapprochent, au contraire, à ce point de vue, des marnes irisées avec lesquelles on les voit d’ail- leurs alterner. Pour cela môme j’avais rattaché pendant longtemps notre grès infra-liasique aux marnes irisées ; et, si j’ai abandonné cette idée , c’est eu égard aux fossiles qu’il renferme, et dans lesquels les paléontologistes ont reconnu le caractère jurassique , et non pas triasique. C’est par ces considérations que je ne puis voir dans le calcaire marneux bleuâtre à Ammonites iortilis et kridion , qui se trouve à la base du grés à Helmsingen (près de Luxembourg), autre chose que du lias bleu , et c’est pourquoi, par suite, le grés de Luxembourg, supérieur à ce lias bleu, ne peut pas être, selon moi, assimilé au grès infra-liasique. M. de Roys fait observer que dans le midi le grès infra-lia- sique n’est pas mal défini, car, dans une des montagnes de l’ar- rondissement du Yigan , nommée le Can de l’Hospitalet , M. Emilien Dumas a reconnu la gryphée arquée jeune, avec un point d’attache , et dépourvue de crochet , ainsi que la plupart des fossiles observés par M. Leymerie dans l’infra-lias des en- virons de Lyon. ^ M. Hébert ajoute à la précédente communication, qu’il n’a SÉANCE DU 10 janvier 1853. 207- poîni la prétention d’assi?Tsüer le grès d’Hettange et de Luxembourg d’une maniéré complète au grés de Kédange, que M. Levaliols prend pour type du grès infra - lins i que. Il regarde ces divers grès comme étant tous inférieurs au véritable calcaire à Gryphées arquées : le grès de Kédange, parce que personne ne le conteste, et les deux autres, parce qu’il l’a vu de ses yeux. Mais cela ne veut pas dire que cha- cune des assises de la carrière d’Hettange ait son représentant dans l’escarpement de Luxembourg, qui n’en contiendrait pas d’autres, et que le grès de Kédange corresponde à une ou plu- sieurs d’entre elles. La différence que présente ce dernier, sous le rapport des caractères minéralogiques et paléoniologiques, peut tenir aux conditions différentes de sédimentation qui peu- vent exister dans les diverses parties d’un môme dépôt littoral, mais elle peut tenir aussi à ce que le grés de Kédange serait une assise différente d’un môme ensemble, 1 e grès infra-lias ique . Dans tous les cas, ce qui paraît à M. Hébert hors de toute contestation, c’est que les grès d’Hettange et de Luxembourg sont, aussi bien que celui de Kédange, compris entre les marnes irisées d’une part, et le calcaire à Gryphées arquées de l’autre. M. Levmerie fait la communication suivante : Exposition d’une méthode éclectique ou wernérienne de miné- ralogiej par M. À. Leymerie, professeur à la Faculté des sciences de Toulouse. PREMIERE PARTIE. — PRINCIPES DB PHILOSOPHIE MINERALOGIQUE. § 1. De la substance et du minéral. Les chimistes sont arrivés à reconnaître soixante-deux éléments •u corps indécomposables par les moyens actuels de la chimie, parmi lesquels il n’en est que quarante , tout au plus, qu’on peut appeler essentiels , les autres devant être considérés comme des raretés. Ces éléments, seuls, ou combinés en petit nombre et en proportions définies, constituent la substance des minéraux, et les minéraux eux- mêmes résultent de cette substance mise en œuvre par la nature sans le secours des forces vitales. Le principal trait de cette œuvre est la jormc ci istallinc qui entraîne avec elle une densité et une dureté fixes et déterminées et d’autres propriétés moins importantes. 208 SÉANCE DU 10 JANVIER 1858. La substance est donc la matière première dont la nature s’est servie pour faire le minéral; mais ce n’est pas le minéral lui- même, et confondre ces deux choses serait commettre une faute de philosophie minéralogique; ce serait à peu près comme si l’on ne voyait qu’un bloc de marbre dans une belle statue. Aussi rien n’est-il si choquant que de voir dans nos traités de minéralogie la description des espèces minérales commencer souvent par ces mots : Cette substance Cependant, quand on décrit le quartz hyalin \ 1 'agate, ce n’est pas la silice qu’on a en vue, mais bien les deux mi- néraux qui résultent de son emploi, supposés revêtus de ces belles propriétés (forme, dureté, densité... .), que nous admirons dans le cristal cle roche , X améthyste, Y agate. Dans le diamant , ce chef- d’œuvre minéralogique, il y a sans doute quelque chose de plus beau, de plus intéressant à considérer que le carbone qui forme la substance, d’autant plus que tous les charbons fossiles, et le gra- phite lui-même, qui est aussi composé essentiellement de carbone, dérivent d’une matière organique, tandis que tout indique pour le diamant une origine purement minérale. On regarde avec raison comme trois espèces distinctes le rutile, Y anatase et la brookite , et cependant ces minéraux sont composés tous les trois d’une même substance, Y acide titanique , qui ne porte avec elle essentiellement aucune des propriétés qui caractérisent ces espèces minéralogique- ment. Au reste, cette confusion ne se remarque pas seulement en minéralogie ; elle existe à l’état d’habitude dans le langage des savants en général, et spécialement des physiciens lorsqu’ils ont à citer des minéraux. Ainsi rien n’est si commun que l’emploi du mot substance pour désigner le spath d'Islande , variété laminaire limpide de l’espèce calcaire , qui est douée à un haut degré de la double réfraction à un axe et d’autres propriétés optiques du plus grand intérêt qui dérivent de celle-là. Cependant ces beaux phéno- mènes ne sont pas attachés essentiellement au carbonate de chaux, mais bien au calcaire limpide que la nature a créé avec cette substance ; et la preuve qu’il en est ainsi, c’est que la même ma- tière, sous forme d’ arragonite, a des propriétés optiques très diffé- rentes. § 2. Attributs des minéraux ; propriétés essentielles et secondaires y caractères ’ type minéralogique. En général, à chaque substance correspond une forme spéciale. Cependant la nature, pour varier ses moyens de production, a quelquefois donné à la même substance deux ou plusieurs formes SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 200 distinctes, et, dans ce cas, la densité, la dureté et la plupart des autres propriétés sont aussi différentes et caractéristiques pour ces corps, qui doivent dès lors être regardés comme des êtres réelle- ment différents (polymorphisme, isomérie). D’un autre côté, il est aussi quelques cas dans lesquels deux substances différentes s’offrent dans la nature avec la même forme fondamentale ; mais alors cette forme se trouve toujours parmi celles du système régulier qu’Haiiy appelait des foi mes limites. Je ne connais pas d’autres exemples naturels de véritable isomorphisme ; ceux que l’on a signalés en dehors du système régulier se réduisent, en définitive, à des ressemblances, à des homœomorphies . Hâtons -nous de dire que tous les minéraux qui diffèrent essen- tiellement parla substance ont néanmoins la même forme, et offrent une densité et une dureté très distinctes, sans parler des autres propriétés , de sorte qu’en joignant à la forme ces propriétés auxiliaires, on a un véritable signe distinctif qui suffit dans tous les cas. Il est cependant des minéraux dans lesquels une variation assez considérable dans la qualité d’un principe composant n’amène que de très légères modifications dans la forme et dans les carac- tères essentiels. Mais dans ce cas, ces variations se font de telle manière qu’un des principes, ordinairement celui qui joue le rôle électro-positif, se trouve remplacé, en partie, par une quantité équivalente d une autre substance qui est censée avoir la même valeur atomique et la même forme, ou plutôt une forme très rapprochée, sans qu’il y ait rien à changer dans la construction atomique de la formule fondamentale. C’est ainsi que dans la composition d’une même espèce le peroxyde de fer peut se substi- tuer en partie à l’alumine, la soude et la lithine à la potasse, la chaux à la magnésie, etc. Un minéral dont la substance est pure, et qui s’offre sous la forme fondamentale ou primitive, et par conséquent avec la den- sité et la dureté normales qui correspondent à cette forme, est ce que nous appellerons le type minéralogique. Autour de ce type peuvent se grouper d’abord des cristaux secondaires intacts ou oblitérés, puis des masses cristallines amorphes, des concrétions, et enfin des agrégats plus grossiers, moins purs, mais dans lesquels les caractères essentiels persistent avec seulement de très légères variations (1). e. La substance sans laquelle le minéral if existerait pas et la. forme (1) Cette manière de considérer les minéraux semble exclure Soc. géol %m série, tome X, f * 2iü SÉANCE DU 10 JANVIER 1855. fondamentale qui constitue véritablement sa spécialité minéralo- gique sont des propriétés d’une valeur tellement grande, relative- ment aux autres, que j’ai cru devoir les désigner par le nom d’r/r- tributs. Je mets à la tête des véritables propriétés, sous le nom d 7 essentielles (1), la densité et la dureté , en leur associant, jusqu’à un certain point, la fusibilité. Les autres propriétés, qui ne sont pas aussi générales et qui ne tiennent pas de si près à l’existence même du type minéralogique, sont appelées secondaires , Parmi les propriétés des divers ordres, il en est qui n’ont qu’un intérêt scientifique qui les rattache à la physique et à la chimie ; il n’y a presque pas lieu de s’en occuper en histoire naturelle; les autres, qui seules contribuent à laconnaissance et à la reconnaissance des minéraux, doivent être étudiées avec soin en minéralogie; on les appelle particulièrement caractères minéralogiques. § 3. But de la minéralogie ; ses véritables attributions, son esprit , etc. La minéralogie proprement dite (oryctognosie de Werner) a pour but l’étude des types minéralogiques et secondairement des miné- raux plus ou moins imparfaits qui en dépendent, considérés au point de vue de l’iiistoire naturelle, attributions modestes, mais qui forment un domaine à part, indépendant de celui des sciences physiques. A l’époque où nous nous trouvons, ce domaine se trouve envahi par ces sciences et notamment par la chimie, et il n’est pas inutile d’en rétablir ici les limites. Il nous suffira pour cela de rappeler matières terreuses ou amorphes qui ne peuvent pas être considérées comme ayant une densité et surtout une dureté fixes. Ces matières, que la nature semble avoir laissées sans emploi, ne sont guère, en effet, susceptibles d’intéresser que par leur composition chimique. Toutefois ce sont des corps naturels, et, à ce titre, la minéralogie doit chercher à les rattacher aux espèces, ou en faire même des espèces particulières dans quelques cas; elle emprunte alors le secours de la chimie, à moins qu’elle ne trouve le moyen de les caractériser, ce qui arrive le plus souvent par l’emploi de certains caractères secondaires. (1) On sera peut-être surpris que nous ne placions pas les pro- priétés optiques relatives à la double réfraction et à la polarisation parmi les propriétés essentielles. Nous ne le faisons pas parce que ces caractères, d’une part, sont, loin d’être infaillibles, ainsi qu’il résulte des nombreuses expériences de MM. Brewster et Biot, et que d’un autre côté, i'.s ne peuvent être observés que dans des circonstances exceptionnelles J’en dirai autant, à fortiori , de l’élasticité acous- tique. SÉANCE bli 10 JANVIER 1SÔ3. 211 les attributions de la chimie et de la physique en ce qui touche le règne minéral. Lorsque la chimie exerce ses investigations sur les minéraux, c’est principalement pour en reconnaître et en étudier la matière constitutive, c’est-à-dire la substance. 11 est vrai que le chimiste jette ordinairement un regard sur les caractères physiques des corps bruts naturels et s’informe même de leur gisement; mais ces considérations, qu’il emprunte au minéralogiste, ne sont pour lui que très secondaires, et il les abandonne bientôt pour revenir à la recherche des principes composants ou des éléments. Il cherche à les isoler pour pouvoir les étudier à part et pour les faire réagir les uns sur les autres, de manière à les engager dans des composés nouveaux dont souvent la nature n’offre pas d’exemples. Tout entier à ces recherches de laboratoire, il perd bientôt de vue le corps naturel qui lui avait d’abord fourni la matière première élaborée sur ses fourneaux, et qu’il a privée, sans retour, de ses premiers caractères. Pour lui, la série des innombrables variétés de forme et d’aspect sous lesquelles un même minéral peut natu- rellement se présenter n’a aucune importance ; la variété qui lui offre la substance avec le plus de pureté est la seule qui l’intéresse, et l’on pourrait dire que dans le très court instant où il considère les caractères extérieurs des minéraux, ils ne sont pour lui que des étiquettes naturelles indiquant une substance intrinsèque. La clocimasie et la métallurgie ne sont guère que des branches développées ou plutôt des applications de la chimie dont la pre- mière a pour objet l’essai analytique des minerais où la minéra- logie a d’avance indiqué des substances utiles. C’est la lumière qui éclaire à son tour le mineur et le métallurgiste dans la con- naissance et le choix des minerais dont l’exploitation et le traite- i ment peuvent être avantageux. Enfin la minéralogie chimique, t\\it Werner avait distinguée dès l’origine de la minéralogie proprement dite, n’est autre chose qu’une docimasie étendue à tous les mi- néraux . Quant à la physique proprement dite, on sait qu’elle ne voit dans les minéraux que les sources où elle peut puiser des pro- priétés ou des forces dont elle fait ensuite le but exclusif de ses études (1). (1) Dans ces derniers temps, i’étude des minéraux, sous le rapport de l’optique, a reçu tant de développements que d’illustres physiciens ont conçu l’idée do faire des classifications et même des espèces, en prenant pour base des caractères de ce genre. De là une nouvelle dé*- 212 SÉANCE DU 10 JANVIER 1858. Le minéralogiste, le naturaliste chargé du règne minéral, est donc le seul qui étudie les minéraux comme êtres naturels. Il note avec soin leurs caractères et les circonstances de leur gisement, et ne se sert de ces propriétés que pour faire l’histoire des corps qui en sont doués et pour les reconnaître dans la nature ; c’est à lui qu’appartient la caractérisation de ces êtres, leur classification, leur nomenclature. Son moyen principal d’investigation est l’ob- servation, ses instruments ordinaires sont les sens. Il emprunte, il est vrai, à la chimie, la connaissance de la substance des corps, afin de rendre leur histoire plus complète ; la géologie l’éclaire sur leur gisement et sur leur origine. La physique peut lui donner des notions utiles sur certaines propriétés : mais il ne se livre pas lui-même aux recherches et aux expériences qui sont du domaine de ces sciences ; l’analyse chimique, par exemple, et les expé- riences d’optique, d’élasticité acoustique, etc., ne sont pas de son ressort. Enfin il étudie des êtres réels et non des propriétés abstraites , des corps revêtus de formes et de caractères naturels et non des substances. La cristallographie elle-même, dans ses déve- loppements mathématiques, dans ses considérations abstraites, se trouve en dehors de la direction de ses études. Pour rendre sensible cette manière de considérer la minéra- logie naturelle et ses relations avec les sciences qui lui prêtent plus ou moins leur secours, je la comparerais volontiers à un fleuve dans lequel viendraient se rendre plusieurs affluents. Le miné- ralogiste, dans cette supposition, serait le batelier chargé de des- cendre ce fleuve dans les meilleures conditions possibles, ce qu’il ne pourrait faire qu’en suivant le fil de l’eau sans trop approcher des bords et sans remonter, à plus forte raison, aucun des cours d’eau auxiliaires. On nous accusera peut-être d’amoindrir la minéralogie en res- serrant ainsi ses limites. Nous répondrons que c’est le seul moyen de conserver l’individualité de cette science, considérée comme faisant partie de l’histoire naturelle. C’est, au reste, le point de vue de Werner auquel il faut s’empresser de revenir. Sortez de cette circonscription, vous entrerez dans la chimie par la minera* logie chimique , ou dans la physique par la minéralogie optique , et vous tomberez dans les classifications artificielles avec leurs espèces abstraites, et par suite dans l’anarchie et le découragement. D’ail- leurs avec ces restrictions mêmes, ce domaine reste encore assez rivaiion de la minéralogie que Werner, s’il existait de nos jours, nom- merait minéralogie optique. SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 213 vaste et assez fertile pour être cultivé avec fruit par une classe entière de savants. La minéralogie, telle que nous venons de la caractériser, com- plète riiistoire naturelle d’une manière tout à fait convenable, tant en laissant le champ libre aux dérivations ou extensions qui constituent la minéralogie chimique et la minéralogie optique. Quant à Futilité de la minéralogie proprement dite et au secours qu’elle peut fournir aux sciences physiques, je ne pense pas qu personne veuille les contester, et il serait inutile d’entrer à cet égard dans de grands détails. Je me contenterai de rappeler qu© l’histoire naturelle des minéraux est la source où viennent inces- samment puiser le physicien et surtout le chimiste, auquel, dans la plupart des cas, le minéralogiste indique les corps où il y a quelque chose d’intéressant à reconnaître ou à découvrir. On sait, au reste, que la minéralogie est le point de départ de cet ensemble de connaissances qui composent la science spéciale du mineur, et que, sous ce rapport, nous lui devons la première indication des métaux utiles. Il est même des sciences et des arts qui relèvent directement d’elle seule. N’est- ce pas la minéralogie qui fournit au géologue les moyens de caractériser et de classer les roches qui entrent dans la composition des terrains? Ne sont-ce pas les caractères minéralogiques qui éclairent l’architecte et l’in- génieur dans le choix des matériaux qui peuvent plus ou moins bien convenir pour tel ou tel genre de construction ? Enfin l’art du lapidaire tout entier ne repose-t-il pas sur la connaissance des propriétés des minéraux et uniquement de celles que considère 1© véritable minéralogiste? § U. Espèces ; méthodes. Le type minéralogique avec l’association des minéraux, cristal- lins ou non, qui ont la même substance et les mêmes propriétés essentielles, constitue X espèce minérale , très différente sans doute de l’espèce organique, mais qui a cela de commun avec celle-ci quelle est le premier degré de toute classification, le seul qui ait de la fixité et qui soit clairement indiqué par la nature (1). Les (1) M. Necker de Saussure, dans un ouvrage trop peu remarqué (Le règne minéral ramené aux méthodes de V histoire naturelle ) a proposé un moyen de rapprocher l’espèce minérale de l’espèce orga- nique. Ce moyen consiste à élever au rang de genres nos espèces ac- tuelles, et à considérer chacune des formes tant primitives que secon- daires, qu’un même miûéral est susceptible de 'présenter , comme une SÉANCE DÜ 10 JANVIER 1853, 2îâ espèces groupées d’après leurs affinités de toutes sortes donnent naissance aux genres ou familles , le groupement des genres constitue les ordres , et celui désordres les classes. L’ensemble de ces groupes de divers ordres échelonnés est ce qu’on appelle une méthode na- turelle, et lorsqu’une pareille méthode est bien faite, les analogies qui lient les espèces, les genres, etc., et les différences qui les séparent s’y trouvent en rapport avec la place qu’ils y occupent. Un tel résultat avec l’obligation où l’on est de suivre une dispo- sition linéaire ne saurait être obtenu dans aucune branche de l’histoire naturelle, avec toutes les conditions de perfection dési- rables. Toutefois la botanique possède une méthode naturelle (celle de Jussieu) assez satisfaisante pour être acceptée par presque tous les botanistes, avantage immense, qui a beaucoup contribué aux progrès de cette science. La zoologie n’en est pas encore là, mais elle marche avec ardeur vers ce but, et il est permis d’espérer qu’elle pourra au moins en approcher. En minéralogie, il n’y a rien de semblable ; et il est facile de voir même qu’une méthode absolument naturelle y est impossible. Comment pourrait-il en être autrement quand on sait, par exemple, que le principe de la subordination des caractères ne saurait y être appliqué? Et, en effet, la formation de l’espèce absorbe à la fois les deux caractères fondamentaux, ceux qui ont le plus de valeur, savoir, la substance et la forme , tandis que les groupes les plus élevés, qui devraient avoir des bases plus importantes, ne peuvent être établis que sur des propriétés plus ou moins secondaires relativement. On a cherché, il est vrai, à faire des groupes basés sur la composition chimique ; nous allons voir tout à l’heure jusqu'à quel point on a réussi. On obtiendrait encore un plus mauvais résultat en partant de la forme fondamentale ; alors sels, pierres, métaux , combus- tibles, tout serait confondu ; aussi je ne sache pas que personne ait jamais proposé une classification établie sur ce principe. La plupart des méthodes qui se sont produites en Fiance dans ces derniers temps ont été faites sous l’influence , je dirai plus , espèce. De cette manière, les espèces seraient séparées par des diffé- rences réelles, mais peu considérables, ainsi que cela a lieu en zoolo- gie et en botanique, et les cristaux de mêmes formes qui compose- raient une espèce, les individus m in érn logic/ u es , seraient presque identiques entre eux. Cette idée est certainement très philosophique, mais elle n’est pas heureuse au point de vue pratique, puisqu'elle laisse hors de la méthode, ou au moins qu’elle oblige à placer en ap- pendice, à la suite des genres, les minéraux non cristallisés qui s’y rapportent par la substance, la densité, la dureté. SÉANCE DU 10 JANVIER 1855» 215 sous la pression de la chimie, et reposent sur un seul principe, le principe chimique , c’est-à-dire sur celui qui s’éloigne le plus des tendances de l’histoire naturelle. Ce sont donc des méthodes dou- blement artificielles . Aussi le tableau des minéraux rangés d’après ces systèmes offre -t-il beaucoup plus de contrastes que d’analo- gies. On y voit, par exemple, un gaz à côté d’une pierre ou d’un métal, le diamant près de la houille, etc. Le défaut dé consistance de ces méthodes et leur diversité (chaque professeur a la sienne) accusent d’ailleurs le peu de solidité, le peu de fixité des bases sur lesquelles elles reposent. De là anarchie , discrédit de la science , découragement. Je sais que j’enveloppe ici, dans ma critique, une classification qui a été généralement suivie au commencement de ce siècle , je veux parler de la méthode d’Haiiy ; mais il est évident que ce succès doit être attribué à l’autorité de ce grand nom , et tout le monde reconnaît aujourd’hui que la méthode d’Haiiy est tout à fait artificielle. Il ne faut pas s’abuser, d’ailleurs, sur les tendances chimiques de notre grand minéralogiste. La chimie plane , il est vrai , ainsi qu’il le disait, sur toute sa méthode; mais si l’on re- garde au fond, si l’on considère les espèces dans lesquelles il a porté tant de lumière, on le voit résister avec énergie, et protester même contre une influence plus profonde, et, disons-le, contre un envahissement qui n’a pu s’opérer complètement qu’après sa mort, au signal donné par Berzêlius. Quand on a passé en revue les classifications chimiques, et qu'on vient à jeter les yeux sur celle de Wenier , point de départ de toutes les autres, on éprouve un sentiment de satisfaction, on sent que l’on entre dans le vrai. Je ne veux pas prétendre, toutefois, que cette méthode soit au niveau de nos connaissances actuelles; je sais bien qu’elle laisserait beaucoup à désirer sous plusieurs rap- ports , eu égard, surtout , à la délimitation des espèces, qui a été portée à un si haut degré de rigueur depuis Werner , par Haüy , et grâce aussi au progrès de l’analyse chimique, et il serait impos- sible actuellement de l’appliquer à la lettre. J’ai conçu l’idée, en prenant la méthode de Werner pour base, et en cherchant à me pénétrer de son esprit, tenant compte, d’ail- leurs, des progrès considérables qui ont été faits depuis lui dans les diverses parties de la science, d’essayer moi-même une classifi- cation méthodique dans laquelle j’ai renoncé à un rationalisme stérile pour suivre une voie éclectique que j'ai crue plus efficace* Mes premiers essais datent de loin : je les ai d’abord appliqués à ma collection particulière et à quelques autres. Appelé à la chaire 216 SfiANCH DU 10 JANVIER 1853. de minéralogie de la faculté des sciences de Toulouse, où j’ai trouvé tous les matériaux d’un riche cabinet ( de quatre mille échantillons) formé par Lapeyrouse et de Charpentier , l’un des élèves les plus distingués de Werner , j’ai pu appliquer mes idées sur une plus grande échelle; l’épreuve du professorat , sur- tout, leur a été très utile, et c’est après douze ans d’exercice, pen- dant lesquels je n’ai cessé de la perfectionner, que je me suis décidé à livrer ma méthode à l’examen impartial et au jugement des vrais amis de la minéralogie (1). «Te vais bientôt donner une exposition de cette méthode , que je ferai précéder d’un aperçu et d’une appréciation de celle de Werner, qui m’a servi de base, mais je crois devoir aupara- vant compléter ma profession de foi minéralogique en faisant connaître mon opinion sur le meilleur mode de nomenclature . § 5. De la nomenclature . Nous avons dit que la minéralogie n’étudiait que la mise en œuvre, par la nature , des substances. Il faut donc que les noms des espèces se rapportent à cette mise en œuvre toujours intéressante, et souvent magnifique. Les dénominations créées par les chimistes pour les substances ne sauraient donc suffire pour les minéraux. C’est ainsi que l’on donne le nom de quartz au cristal de roche, par exemple, qui est entièrement composé de silice, de même qu’on appelle diamant un minéral dont la substance est du car- bone, et corindon ou saphir , les pierres si parfaites et si brillantes que la nature a su créer avec un peu d’alumine. Cette convenance de représenter par un nom spécial une sub- stance minéralifice , qu’on me permette cette expression , devient d’ailleurs une nécessité quand on se rappelle que la nature a fait plusieurs espèces distinctes avec la même substance. Ainsi , le nom de carbonate cle chaux ou chaux carbonatée ne peut représen - ter à la fois le calcaire et F arragonite y le nom à'acicle titanique est insuffisant pour indiquer les trois minéraux si différents qu’on ap- pelle rutile , anatase , brookite ; il en est de même de la dénomi- nation de fer sulfuré pour la pyrite , la sperkise et la leberkise. (1) Les idées du genre de celles que je me décide à émettre aujour- d’hui sont plus répandues qu’on ne croit parmi les personnes qui ont îe sentiment de l’histoire naturelle. J’ai eu fréquemment l’occasion de m’en apercevoir, seulement ces idées existent là d’une manière vague et pour ainsi dire à l’état latent, et j’ai lieu d’espérer qu’en for- mulant ici les miennes, j’éveillerai quelques sympathies. SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 217 La considération précédente suffirait seule pour nous engager à adopter une nomenclature purement minéralogique , univoque pour plus de simplicité, et pour nous faire rejeter définitivement les noms chimiques introduits par Maüy, et conservés encore par quelques minéralogistes. L'emploi de ces noms, d’ailleurs, entraine, au moins , deux autres inconvénients très graves que nous allons rapidement indiquer : 1° La nomenclature chimique binaire ou sexuelle ne saurait s’appliquer qu’à des minéraux dont la substance peut être regardée comme composée de deux éléments, ou d’un acide et d’une base. Pour les espèces dont la composition est plus compliquée , on ne peut s’en servir, si l’on a égard surtout à la considération de l’iso- morphisme. Aussi les chimistes eux-mêmes sont-ils obligés de faire usage des mots de feldspath , mésotype , grenat , hournonite , pour éviter des phrases longues et très peu euphoniques que la mémoire se refuserait à retenir, et qu’il serait impossible d’intro- duire d’une manière suivie dans le discours. Sur quatre cent-cin- quante espèces bien caractérisées que l’on peut admettre en mi- néralogie il n’y en a pa9 deux cents qui soient susceptibles de dénominations chimiques, et les minéralogistes qui ont adopté ces dernières ont été obligés d’employer concurremment les noms univoques dans la proportion qui vient d’être indiquée. De là ré- sulte une bigarrure regrettable. 2° Le deuxième inconvénient des noms qui sont la traduction de l’analyse chimique est de les faire participer à la variabilité de cette œuvre perfectible de la chimie. Ainsi, du temps d’iiaüy, le minéral que nous appelons uranite était considéré comme un oxyde d’urane , et portait, en conséquence, le nom à'urane oxydé . Or, une analyse de M. Berzélius a fait connaître dans 100 de ce minéral, 15 d’acide phosphorique , 5 de chaux et 15 d’eau ; d’où il résulte que c’est un phosphate hydraté d'urane et de chaux , qu’il faut renoncer à nommer chimiquement à cause de sa composition trop compliquée. Je pourrais citer bien d’autres exemples. Ces considérations nous ont déterminé depuis longtemps à em- ployer une nomenclature minéralogique et univoque. Nous adop- tons celle de Werner telle qu elle a été corrigée par Haüy, com- plétée par M. Beudant (1) , et suivie par MM. Bronguiart, (1) Il est bien remarquable que ce soit justement fauteur d'une méthode basée exclusivement sur la chimie, qui ait senti le vice de la nomenclature chimique, au point de se charger d’y apporter une re- forme. 218 SÉANCE DU 10 ,JÂ#yîBR 1853, Delafosse, etc. Je conserve, toutefois, les noms chimiques 'de quelques corps gazeux ou liquides qui ne sont guère susceptibles que d’un intérêt chimique, et quelques autres noms qui n’ont pas encore été réformés. SECONDE PARTIE. § 1. Esquisse de la méthode de fVerner (1). La méthode de Werner comprend quatre classes : chaque classe est partagée en genres , et chaque genre en espèces. Les classes sont désignées de la manière suivante s i° Les terres et les pierres • 2° Les sels ; 3° Les combustibles ; U° Les métaux. Elles peuvent être considérées comme basées à la fois sur les caractères extérieurs et sur les propriétés chimiques. Chaque classe est partagée en autant de genres qu’il y a de sortes chimiques de pierres ou terres, de sels, de combustibles et de métaux. Enfin, les genres sont composés d’espèces isolées ou groupées par familles. (1) La méthode de Werner a été universellement adoptée et suivie dans toute l’Allemagne jusqu’à la mort de son auteur, et tout le monde sait combien cette école a répandu le goût de la science et qu’elle a formé une foule d’excellents minéralogistes, parmi lesquels se trouvent des hommes très éminents. Cependant cette méthode est restée presque inconnue en France, où le défaut de culture des langues vivantes laisse trop de savants en dehors des travaux qui s’accomplissent hors du pays. Au commencement de ce siècle, un homme d’un grand mérite, un maître, acceptant pour être utile, le rôle modeste de traducteur, entre- prit de faire connaître en France les principes et la méthode de Wer- ner par un excellent ouvrage, où une synonymie soignée et de nom- breuses annotations devaient rendre facile l’accomplissement de l’œuvre qu’il se proposait. Cependant malgré ces circonstances favo- rables, malgré la juste confiance que devait inspirer l’auteur, les idée* de Werner n’ont pu se répandre parmi nous; leur excellence même a été méconnue, ou du moins n’a pas été sentie : cela tient à plusieurs causes, et notamment à ce que nous avons très peu le sentiment de la minéralogie (l’histoire naturelle), qui est si développé parmi les Alle- mands Toutefois le traité de M. brochant aurait peut-être réussi à in- troduire en France les principes de l’école de Frevberg. sans la circon- stance que je n’oserais appeler fâcheuse, de l’apparition, à la même époque, du traité de Minéralogie de Haüy dont la méthodea été admise sans examen, par la seule autorité du savant dont les belles découvertes brillaient alors d’un grand éclat. 219 BÉANCE DU 10 JANVIER 1853. L’espèce de Werner est établie, en général, d’après la coin- position chimique (1), mais désignée par des noms vulgaires uni- voques. La méthode entière semble aussi être soumise à l’influence du principe chimique, dont Werner se serait sans doute plus méfié s’il avait pu prévoir l’abus que l’on en fait de nos jours. Toutefois, bien que cet illustre minéralogiste s’explique d’une manière très explicite à cet égard, dans l’introduction de son traité des carac- tères extérieurs, on trouve dans sa méthode de nombreuses infrac- tions à ce principe, et l’on voit clairement qu’il s’était réservé d’y déroger lorsque l’observation stricte de ce principe viendrait à rompre des analogies minéralogiques importantes. En général on peut dire, malgré la couleur chimique de la classification de Werner, que les caractères extérieurs s’y trouvent avoir une grande part, et Werner a cherché même à justifier ces irrégularités aux yeux des partisans de la doctrine chimique, en annonçant qu’il avait distingué dans sa distribution des espèces, parmi les éléments qui composent un minéral, celui qui Qstprédo- minant ou le plus abondant, et l’élément caractéristique , c’est-à- dire qui influe le plus sur les caractères physiques, lequel ne se confond pas toujours avec le premier. Au reste, parmi les infrac- tions qui nous occupent, il en est plusieurs qu’il n’est guère pos- sible même d’expliquer de cette manière. Comment par exemple justifier la place qu’occupe le diamant , dont Werner devait con- naître la nature combustible, à la tête de la classe des pierres? Concluons que la méthode de Werner est une véritable méthode éclectique dans laquelle son sens exquis et son tact si exercé l'ont amené, tout en laissant une certaine influence générale à la chimie, à établir des espèces d’après l’ensemble des caractères et à les grouper de manière à rapprocher le plus possible celles qui of- fraient la plus grande somme d’analogies. Tout en reconnaissant l’excellence de cette méthode, on peut lui reprocher plusieurs choses, et particulièrement de renfermer un certain nombre d’es- pèces basées sur des caractères trop peu importants, défaut bien excusable, au reste, si l’on se rappelle cpi’à cette époque on n’avait pas pour se guider sûrement le flambeau de la cristallographie. Nous donnons ici le tableau des genres de Werner avec l’indi- cation de quelques espèces comme exemples. (I) Du temps de Werner, on ne connaissait pas encore la propriété qu’ont les minéraux d'offrir pour chaque espèce une forme primitive fixe et déterminée, découverte qui a été si utile à la minéralogie. 220 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. Tableau de la classification de Jf^erner. j GENRES. ESPÈCES. 1 GENRES. ESPÈCES. Première classe. — Terres et pierre s. 1 1. Diamant.. . . Diamant. Famille des micas. S 2. Zirconieu. . . Zircon, hyacinthe. — des trapps. ! 3. Siliceux. . . . Famille des grenats. — — des lithomarges. f — — des rubis. S. Magnésien. . . Famille des savouneux. — — desschorls. — — des talcs. — — desquartz. — Rayonnante. — — deszéolites. G. Calcaire. . . . Craie, fluorine. 4. Argileux. . . . Feldspath. 7. Bary tique. . . Witbérite. Famille des thonschiefer. 1 8. Stroutiauien.. Célestine. Deuxième classe. — Sels, l. Sulfate. . . . Vitriol, alun. 3. Muriate. . . . i j Sel gemme. j 2, Nitrate. , . . Ni Ire. 4. Carbonate. . j Alcali minéral. | Troisième classe. — Combustibles. j I. Soufre.. . . . j Soufre. 5. Graphite. « . Graphite. 2. Bitume. . » . Huile minérale, succin. 1 i ' 1 J Quatrième classe. — Métaux. 1. Platine. . . . Platine. S 1 . Antimoine. . . Antimoine natif. | 2. Or Or. 12. Cobalt Cobalt gris. I 3. Mercure. . . . Cinabre, 13. Nickel Kupfer, nickel. I K. Argent. . . . Argent natif. 44. Manganèse. . Manganèse gris. j 1 5. Cuivre Cuivre gris. 13. Molybdène. . Molybdène sulfuré. j ! 6. Fer Pyrite. 16. Arsenic. . . . Réalgar. 7. Plomb Galène. 17. Schéelin. . . . Wolfram. 8. Étain. . . . . Etain pyrileux. 18. Urane. . . . . Uranile micacée. 9. Bismuth, . . . Bismuth natif. 19. Titane Nigrinc, {0. Ziuc. . . . . . Blende. § 2, Essai cV une classification éclectique ou wernérienne. Dans cette méthode, l’espèce se compose du type minéralogique caractérisé par les deux attributs — la substance et la forme fon- damentale, et de tous les minéraux qui, ayant la même substance, se trouvent liés au type par des formes ou structures qui en dé- rivent ou seulement par l’identité plus ou moins complète des propriétés essentielles = densité , dureté et même fusibilité. L’espèce se divise en sortes et les sortes en variétés. J’adopte pour les espèces des noms univoques, ainsi que je l’ai expliqué plus haut. Dans le but de rendre cette méthode aussi naturelle que pos* 221 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. sible, on s’y est servi à peu près de tous les caractères, changeant de point de vue suivant la nature du minéral que l’on avait à placer dans la méthode autant de fois que cela paraissait nécessaire. On a cherché aussi à lier autant que possible les diverses parties qui la composent, savoir : les espèces aux espèces, les genres aux genres, les familles aux familles, les ordres aux ordres, et les classes aux classes, afin de rompre le moins possible les rapports naturels. — Le tableau qui est placé à la page 228 est destiné à montrer immédiatement la charpente ou la membrure de la classification. Les minéraux, en prenant ce nom dans son acception la plus étendue, s’y trouvent d’abord divisés en deux grandes catégories, savoir : 1° les minéraux inorganiques ou les minéraux proprement dits ; 2° les minéraux organiques , division qui a été introduite dans la science par Berzélius, qui n’a fait que la transporter de la chimie dans la minéralogie, et qui a été admise, avec quelques modifications, par M. Brongniart. Les corps qui composent la deuxième de ces divisions n’ayant pu naître que sous l’influence des forces vitales, et ne devant la place qu’ils occupent dans le règne animal qu’à la circonstance de leur enfouissement dans les couches du globe, à peiné si ce sont des minéraux, et il était con- venable de les reléguer dans un groupe à part, d’autant plus qu’ils diffèrent des autres corps que la minéralogie considère par un ensemble de propriétés physiques et chimiques assez remarquable. Si l’on jette maintenant un coup d’oeil sur les corps qui com- posent la première division, on sera d’abord porté à former des gaz un groupe séparé. En effet, ces corps n’ont presque aucune importance en minéralogie. Ils ont peu de propriétés physiques particulières ; ils manquent, dans les circonstances ordinaires, de l’attribut minéralogique le plus important, la forme. Il est évident ici que leur caractère général le plus saillant est celui que l’on tire de leur état gazeux, et l’intercalation des gaz au milieu des miné- raux pierreux et métalliques, dans les méthodes chimiques, est une des choses qui choquent le plus. Werner et Haiiy avaient bien compris la nécessité de cette séparation des gaz et l’avaient même poussée trop loin, suivant nous, en n’admettant aucun de ces corps dans leurs méthodes (1). Dans la classification de M. Mohs, (1) J’ai appris depuis peu, qu’à l'exemple de plusieurs minéralo- gistes allemands M. Delafosse avait fait des gaz naturels, sous le nom de substances atmosphériques , une classe distincte qui se trouve placée en tête de sa classification, comme je le faisdans la mienne depuis plu* de quinze ans. 222 SÉANCE DU lO janvier 1 8 5 S . îes gaz sont groupés au commencement comme dans la notre, mais ils se trouvent divisés en deux sections dont l’une, celle des gaz non acides, forme un ordre à part, et dont l’autre complète l’ordre des acides sépares par l’eau de l’ordre des gaz. Nous n’avons pas suivi cet exemple, pensant que la propriété de se trouver à l’état de gaz permanent devait l’emporter sur le caractère tiré de l’acidité. D’après ces considérations, nous avons formé des gaz permanents, et, comme pour nous en débarrasser, une classe spé- ciale qui occupe dans notre méthode le premier rang. La liquidité à la température ordinaire et la propriété d’avoir une saveur qui entraîne, pour les corps solides, la solubilité, carac- térisent notre deuxième classe, qui comprend les acides, l’eau et les sels, en prenant ces mots, acides et sels dans le sens physique ou vulgaire, ainsi que le faisaient Werner et Mohs; nous donnons à cette classe le nom dV laloïdes, qui fait allusion, pour les sels, à leurs propriétés salines, et, pour les acides et l’eau, au rôle im- portant qu’ils jouent dans la composition des sels. Nous avons encore ici l’avantage de grouper les minéraux les moins stables et les moins importants après les gaz. Ces deux premières classes de notre méthode sont formées aux dépens de la première classe de Mohs (1). La troisième classe se compose des minéraux pierreux à la suite (1) Mohs, successeur de Werner à l’école de Freyberg, contempo- rain d’Haüy, est l’auteur d’une méthode qui a eu une grande vogue en Allemagne où elle est encore suivie. Cette méthode, dont M. Dufrénov a donné un extrait dans son Traité de minéralogie , a cela de remar- quable qu’elle est entièrement indépendante de la chimie, c’est-à-dire que les minéraux s’y trouvent classés comme le sont les plantes et les animaux en histoire naturelle, eu égard seulement aux caractères physiques. L’espèce est basée dans cette méthode sur l’identité de la forme pri- mitive, de la densité et de la dureté. Les genres, qui se confondent presque avec les espèces, se trouvent répartis dans vingt-deux ordres, et ceux-ci dans trois classes. Les ordres et les classes sont établis d’a- près la considération de la pesanteur spécifique et de quelques carac- tères particuliers, comme l’état solide, liquide ou gazeux, la saveur, l’odeur. La première classe comprend les gaz J Veau, îes acides et les sels. La troisième se compose des résines et des charbons; de sorte que tous les véritables minéraux se trouvent accumulés dans la deuxième classe composée de treize ordres, où l’on a le regret de voir confondus, souvent dans un même ordre* les pierres, les métaux et les minérali- «ateurs, SÊàNCB I)C 10 JANVIER 1853, 223 de laquelle j’ai placé les minéraux terreux en appendice. Ce n'est autre chose que la classe des terres et des pierres de Werner. J’ai formé, sous le nom de min crci Usa te a rs , une petite classe de minéraux solides qui jouent essentiellement le rôle actif dans les combinaisons métalliques. Ce groupe, qui occupe le quatrième rang dans ma méthode, se rattache d’une part aux pierres et de l’autre aux métaux, et établit la transition des unes aux autres. La cinquième classe enfin comprend tous les minéraux métal- liques, les véritables métaux, sauf les sels qui se trouvent déjà employés comme on l’a vu dans notre deuxième classe. C’est lïtr*^ inconvénient sans importance à cause du petit nombre de ces corps, qui n’ont d’ailleurs qu’une existence éphémère et acci- dentelle. Les minéraux inorganiques se trouvent donc distribués dans cinq classes que je crois naturellement et nettement caractérisées, à tel point qu’il doit suffire d’observer quelques caractères immé- diatement perceptibles par les sens pour rapporter chaque minéral à la classe qui le concerne. 11 n’y a pas lieu de former des classes dans la division des or- ganiques qui sont très peu nombreux. Donnons maintenant une idée des divisions et subdivisions de ces classes. La classe des gaz comprend deux sections, dont l’une se com- pose des gaz non acides et la seconde des gaz acides. La deuxième classe se compose de deux ordres, savoir : les halogènes et les sels. L’eau se lie naturellement aux acides par la liquidité (la sassoline, qui est le seul acide solide, se trouve presque toujours à l’état de dissolution), par la composition chimique et par la propriété qu’elle a d’entrer essentiellement dans la substance de beaucoup de sels. Le nom à' halogène rappelle ce rôle de l’eau et plus particulièrement celui que jouent les acides qui sont les principaux générateurs des sels. Je ferai remarquer que nos deux premières classes se lient assez heureusement par le caractère d’acidité qui est commun aux gaz acides de la première et aux acides proprement dits de la seconde. L’ordre des sels se divise en cinq genres caractérisés par l’acide, comme dans la méthode de Werner. Deux ordres encore forment les divisions principales de la classe des pierres. La distinction de ces deux ordres est établie sur des considéra- tions chimiques qui se trouvent, dans ce cas, en rapport avec l’en, semble des propriétés minéralogiques. SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 2U Le premier ordre contient les minéraux analogues aux sels par la composition, et qui, par conséquent, résultent chimiquement, ou qui peuvent être considérés comme résultant de la combinaison bien définie d’un acide et d’une base auxquels nous avons ajouté les hydrates. La dénomination d ’haloïde, empruntée à M. Mohs(l) , exprime assez heureusement cette analogie. L’ordre des haloïdes comprend sept genres, ayant chacun pour caractéristique un acide ou l’eau. Il est évident que cette manière de former les genres, que l’on trouve employée dans la classification de M. Bron- gniart, est préférable, pour les pierres, à celle clans laquelle on partirait du principe minéralisé ou électro-positif adoptée par Werner et par Haüy, parce qu’elle rompt beaucoup moins les rapports naturels des espèces. Le deuxième ordre se compose des minéraux pierreux ou ter- reux qui n’ont pas d’acide proprement dit dans leur composition ; celle-ci, d’ailleurs, n’est pas toujours parfaitement définie et pré- sente beaucoup moins de fixité et de netteté que celle des mi- néraux haloïdes (2). Le caractère chimique est donc ici moins (1) Berzélius, dont la tendance à donner aux mots un sens chimi- que était des plus prononcées, s’est servi aussi du mot haloïde , posté- rieurement à Mohs, pour désigner les sels proprement dits qui ne sont pas composés d’un acide et d’une base et quelques corps pierreux ana- logues. Le sel marin (chlorure de sodium) rentre dans cette catégorie, et il est assez curieux de voir la qualité de sel refusée au sel par ex- cellence, tandis qu’elle est accordée à des corps pierreux ou métalli- ques, comme le calcaire, la sidérose, et même à l’émeraude ou au feld- spath, etc. C’est par la même tendance, qui a été si funeste à la minéralogie naturelle, que l’illustre chimiste que nous avons nommé a appelé nié - tnlloïdes, qualification qui semblerait indiquer un rapport prononcé avec les métaux, des corps tels que l’oxygène, l’azote, le soufre, le carbone. (2) La silice, qui est le minéralisateur presque exclusi fpeur toutes les pierres proprement dites, n’est pas assez énergique pour neutrali- ser les bases, comme le font les véritables acides, et l’on n'est pas éloigné d’admettre maintenant, comme nous le faisons depuis long- temps, qu'elle peut se dissoudre en petite quantité, ou même se trou- ver en moins dans certains minéraux, sans qu’il résulte d’altération fondamentale dans leurs propriétés. Cette manière de voir, que nous appliquons aussi à l’eau , permet de concevoir comment les analyses des pierres haloïdes offrent une fixité presque absolue, tandis que la varia- bilité, entre certaines limites, des proportions qui contiennent les sub- stances des silicates, ressort évidemment du peu de concordance que présentent les analogies d’une même pierre. 8ÊANCB Dü 10 JANVIER 1853. 225 important; d’ailleurs il entraîne assez rarement les caractères minéralogiques. C’est pourquoi, fidèle à la marche éclectique que nous avons adoptée, nous avons placé ici au deuxième rang le caractère chimique pour les subdivisions de ce groupe nombreux, et nous l'avons divisé, non plus en genres bien définis comme ceux du premier ordre, mais en sections que nous avons cherché à rendre aussi naturelles que possible, en les basant sur diffé- rents caractères habituels, comme la densité , la dureté , F éclat, la texture. Il ne faudrait pas croire toutefois que les analogies chi- miques aient été trop négligées; nous nous sommes efforcé, au contraire, de les conserver. Ainsi, en général, les minéraux d’une même catégorie offrent des formules composées d’éléments dont la qualité , si ce n’est la quantité , est semblable. Le groupe des gemmes est le seul pour lequel nous ayons été obligé de faire à cet égard de grands sacrifices. La dénomination d e familles, que nous avons donnée à ces sections, exprime que nous ne les considérons pas comme irrévocablement arrêtées. Nous les avons déjà plusieurs fois remaniées, et nous pourrons encore les modifier par la suite ; mais ici la difficulté existe réellement dans la chose même ; c’est le côté faibie de toutes les classifications, et nous croyons, en esquissant ces groupes, avoir fait faire un progrès réel à cette partie de la systématisation minéralogique. Ces familles sont au nombre de douze , en y comprenant un appendice qui embrasse les espèces que nous considérons comme le résultat de la décom- position des pierres ou comme des pierres imparfaitement miné- ralijiées; elles correspondent aux genres aujourd’hui trop surannés de Werner, où d’ailleurs les haloïdes et les pierres proprement dites se trouvent confondues, et aux ordres de la deuxième classe de Mohs, sauf cependant les métaux que ce savant minéralogiste ne sépare pas des pierres ; mais elles sont composées, en général, et caractérisées d’une manière toute nouvelle. Nous avons cher- ché à les placer dans l’ordre linéaire, malheureusement indispen- sable, de manière à ce qu’elles se liassent le plus possible les unes aux autres. Je ferai encore observer que cette classe des pierres se lie bien avec la précédente par les caractères chimiques, de telle manière que si l’on effaçait la barre qui sépare les deux classes, l’ordre des haloïdes paraîtrait être une suite de l’ordre des sels. On peut remarquer d’ailleurs que le genre sulfate, qui commence l’ordre des haloïdes, présente en première ligne le gypse , qui jouit encore d’une certaine solubilité par laquelle il touche de bien près aux sels. Le soufre et l’arsenic, qui sont les minéralisateurs solides par Soc. géol., 21* série , tome X. <5 226 SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. excellence, forment les éléments fondamentaux de la quatrième classe, qui comprend, bien entendu, les combinaisons naturelles de ces deux corps, et l’oxyde blanc d’arsenic. C’est là qu’il faudrait placer aussi le sélénium et ses composés avec le soufre et l’arsenic, si on les rencontrait dans la nature. Cette classe, à laquelle on pourra reprocher d’être trop peu nombreuse, est une véritable innovation; elle remplace les corn bustibles de Werner, que je ne pouvais conserver, tous ces corps, excepté le soufre, ayant passé dans ma division des inorganiques. On remarque que le soufre, par sa cassure vitreuse et sa pesanteur spécifique, se rapproche des pierres, tandis que l’arsenic, placé à la fin de la classe, a des propriétés presque métalliques, et forme une bonne transition entre les minéralisateurs et les métaux. Les premiers d’ailleurs, considérés dans leur ensemble, se trouvent bien placés au voisi- nage des corps qu’ils minéralisent. La classe des métaux (métaux proprement dits, bien entendu) n’offre aucune innovation. C’est la quatrième de Werner ou celle des métaux autopsides d’Haüy, moins les sels, que nous plaçons, à l’imitation de Werner, avec les sels non métalliques. Nous divi- sons cette classe, ainsi que l’avaient fait nos devanciers, en autant de genres qu’il y a de métaux minéralisés. Le nombre de ces genres s’élève, dans notre méthode, à vingt- cinq. L’ordre dans lequel ils se trouvent placés est basé sur un ensemble d’analogies physiques, chimiques, et même géoguostiques. Néanmoins la con- sidération qui domine dans cet arrangement est le degré d’affinité des divers métaux pour l’oxygène. On remarquera en effet que la série commence par le tellure, l’antimoine, dont les oxydes jouent le rôle d’acides, et qui se lient avec la classe des minéralisateurs, à cause de l’analogie qu’ont ces métaux avec l’arsenic, les der- nières places étant au contraire occupées par les métaux les moins oxydables qui se trouvent être en même temps les plus précieux. Chaque genre comprend autant d’espèces qu’il y a de combinaisons dans lesquelles le métal dont il s’agit joue réellement le prin- cipal rôle. Lorsque le métal existe à l’état natif, il occupe le pre- mier rang parmi les espèces. Cette classe repose, comme on le voit, sur des considérations chimiques. Mais ici la chimie indique réellement des rapports minéralogiques intéressants, car il est vrai que la présence, comme principe dominant, d’un métal dans un minéral, influe puissam- ment sur les propriétés de celui-ci ; d’où il résulte que les combi- naisons dans lesquelles ce métal domine ont en général des carac- tères communs souvent remarquables. D’ailleurs, en agissant m 6ÊANCB DU 40 JANVIER 185S. comme nous le faisons, nous satisfaisons à lin point de vue pra- tique qui n’est pas à dédaigner. En effet, chacun de nos genres n’est autre chose que la réunion ou l’ensemble des mines ou mi- nerais du métal qui a servi â l’établir, et l’on voit de suite tout l’avantage que le mineur doit y trouver. Au reste, la distribution des espèces et des genres dans cette classe doit être regardée comme provisoire. Peut être en étudiant de nouveau cette partie de la méthode, trouverons-nous le moyen d’y introduire des groupes plus minéralogiques, analogues à nos familles pierreuses. Notre division des organiques se laisse assez naturellement par- tager en cinq familles. Nous plaçons en première ligne les baloides qui résultent de la combinaison d’une base minérale et d’un acide organique, et qui sont même susceptibles dé cristalliser. Les résines viennent bien à la suite. Vient ensuite la famille des stéariens que nous avons formée avec les corps gras fossiles qu’on désigne souvent par le nom de suif minéral. Elle se lie assez bien avec la précédente et avec la suivante, qui est celle des bitumes. Enfin les charbons occu- pent la dernière place. Ils se rattachent aux bitumes par les espèces bitumineuses, comme la houille. 11 me reste encore, pour mettre lés minéralogistes à même de juger cette méthode, et pour la rendre immédiatement applicable, à montrer les espèces dans les cadres qui viennent d’être tracés. C’est ce que je fais dans lé tableau ci-après. M. Dufrénoy ayant apporté, dans son Traité de minéralogie , dont la publication ne date que de quelques années, un soin particulier à la délimitation et à la description des espèces, j’ai cru que je 11e pourrais mieux faire que de le prendre pour guide dans cette partie de mon tra- vail J’ai fait suivre mes noms univoques des noms chimiques que ce savant minéralogiste a cru devoir conserver (1). (1) Sans doute il aurait fallu, pour compléter l’idée que j’ai voulu donner de la méthode éclectique, mettre sous les yeux des lecteurs les tableaux particuliers qui m'ont servi à établir mon tableau général, dans lesquels les espèces qui constituent un genre ou une famille se trouvent rassemblées avec l’indication de leurs principaux caractères ; mais je ne pourrais le faire ici sans dépasser les limites que j’ai dû m’imposer. Je donnerai ces tableaux dans un cours élémentaire de minéralogie que je prépare et dont la partie générale est presque ter- minée. £28 SÊANCB Dü 10 JANVIER 1853. Tableau des espèces rangées ou wert PREMIÈRE DIVISION. lre CLASSE «. Non acides. Azote, Air, Hydrogène, Grizou (hydrogène carboné), Hydrogène sulfuré. 2e CLASSE. 1er ORDRE. - Acide sulfurique, Sassoline (acide boracique), 2e ORDRE, \tT genre. — Chlorure. Sel gemme, Salmiac (ammoniaque muriatée). 2* genre. — Nitrate. Nitre (potasse nitratée), Natrite (soude nitratée). 3e genre. — Sulfate. a. Non métalliques. Epsomite (magnésie sulfatée), Exanthalose (soude sulfatée), Thénardite, Aphthalose (potasse sulfatée), Mascagnine(ammoniaquesulfatée), Glaubérite, Alunogène (alumine sulfatée), Alun. S® CLASSE. 1er ORDRE. « itr genre. — Sulfates. Gypse (chaux sulfatée), Ànhydrite (chaux anhydro-sulfa- tée), d'après la méthode éclectitp é rie une. — INORGANIQUES. — GAZ. b. Acides. Acide carbonique, Acide chlorhydrique, Acide sulfureux. — HALIDES. HALOGÈNES. Eau. — SELS. b. Métalliques. Méianterie (fer sulfaté vert), Néoplase (fer sulfaté rouge), Coquimbit, Cyanose (cuivre sulfaté), Gallitzinite (zinc sulfaté), Rhodolose (cobalt sulfaté), ? Sulfate vert d’urane. 4e genre, — Carbonates. Natron (soude carbonatée), Urao (trôna), Gaylussite. 6e genre. — Borate. Borax (soude boratée). — PIERRES. - HALOÏDES. Barytine (baryte sulfatée), Dréelite, Célestine (strontiane sulfatée)» Alunite, Webstérite. SÊANCB DU 10 JANVIER 1853. 229 28 genre. — Carbonates . Calcaire (chaux carbonatée), Àrragonite, Dolomie, Giobertite (magnésie carbonatée), Withérite (baryte carbonatée), Strontianite (strontiane carbona- tée), Baryto-calcite. 3e genre. — Fluorures, Fluorine (chaux fluatée), Fluélite, Cryolite. 4e genre. — Phosphate. Àpatite (chaux phosphatée), Wagnérite (magnésie phosphatée), 2® ordre. — - 1 1-8 famille. — Gemmes. Diamant, Corindon, Périclase, Spinelle et gahnite, Cymophane, Phénakite, Euclase, Émeraude, Topaze, Zircon, Péridot, Grenat, Idocrase, Tourmaline, Axinite, Cordiérite. 2* famille. — * Mêlant eus. Gadolinite, Thorite. 3e famille. — Quartzeux. Quarts (quarts hyalin), Xénotime (yttria phosphatée), Wawellite, Turquoise, Klaprothine, Amblygonito. 5* genre. « Ârséniate. Pharmacolite (chaux arseniatée). 6e genre. — Borates . Boracite (magnésie boratée), ? Hydro-boracite. 7e genre. — Hydrates . Brucite (magnésie hydratée), Diaspore, Hydrargilite, Gibsite. PIERRES PROPREMENT DITES. ? Agate (quartz agate), Opale (quartz résinite). 4e famille. — Feldspathiques. Orthose, Ryacolite (ancien), Albite et oligoclase, Labradorite, Anorthite, Pétalite, Triphane, Saussurite, Néphrite, | Éléolite. | 5e famille. — Coiêoliies . \ ! Amphigène, ! Sodalite, Néphéline, Méionite, Sarcolite, Latrobite, Prehnite, Datholite, i Haüyne, 230 SÉANCE BU 10 JANVIER 1853 Outremer, Eudyalite, Dysclasite, Cronstedtite, Hisingérite. 6e famille. — Zéulites. Stilbite, Heulandite, Brewstérite, Àpophyllite, Mésotype, Thomsonite, Edingtonite, Laumonite, Beaumontite, Christianite, Harmotome, * HVdrolite, Ànalcime, Chabasie, Levyne, Faujassite, Gismondine. 7e famille. — - Prismatiques. Staurotide, Àndalousite, Macle, Disthène, Sillimanite, Couzeranite, Dipyre, Mellilite, Épidote, Achmite, Liévrite, Wernérite, Gehlénite, Xanthite, Esmarkite, Killinite, Karpholite, Pinite, * Gigantolite, Giéseckite. Appendice : Fahlunite. 8e famille. — Amphiboliens . Wollastonite, Amphibole, Gèdrite, Babingtonite, Hyperstbène, Pyroxène, Sismondine, Smaragdite, Bronzite et Schillerspath, Seybertite, Condrodite. 9e famille. — - Micacés. Mica, Lépidoli te , Margarite, Leucophane, Lépidomélane, Ottrélite. 1 0e famille. — Talqueux. Talc, Stéatite, Serpentine, Spadaïte, Villarsite, Rétinalite. 11e famille. — Talcoïdes. Pyrophyllite, Pyrosclérite, Ka mine réri te, Pennine, Chlorite, Nacrite, Gilbertite, Pagodite, Saponite (pierre de savon). SÉANC8 DU 10 JANVIER 1853. ni APPENDICE. 4 2° famille. — Terreux, Halloysite, Pholérite, Nontronite, Àllophane, k* CLASSE. Soufre, ?Sulfure de sélénium, Orpiment (arsenic sulfuré jaune), Collyrite, Érinite, Scoulérite, Magnésite, Kaolin, Argile. MINÉRÀL1SÀTEURS. Réalgar (arsenic sulfuré rouge), Arsenic blanc (acide arsénieux), Arsenic natif. 5e CLASSE. — MÉTAUX. 1er genre. *—* Tellure • Tellure natif, Sylvane (tellure auro-argentifère), Mullérine (tellure auro-plumbi- fére), Élasmose (tellure plumbo - auri- fère), Bornine (tellure bismuthifère), Tellure carbonaté. 2e genre. — Antimoine, Antimoine natif, Antimoine arsenical, Stibine (antimoine sulfuré), Zinkénite, Plagionite, Jamesonite, Bertbiérite, Roméine, Kermès (antimoine oxydé sulfuré), Exitèle (antimoine oxydé), Stibiconise (acide antimonieux). 3e genre. — Bismuth . Bismuth natif, Bismuthine (bism. sulfuré), Bismuth silicaté, Bismuth oxydé, Bismuth carbonaté. 4e genre. — Etain . Cassitérite (étain oxydé), Stannine (étain sulfuré). 5e genre. — Tantale. Tantalite, Baièrine. Yttrotantalite, Fergusonite. 6e genre. — Titane. Rutile, Anatase, Brookite, Sphène, OErstedtite, Pyrochlore et Perowskite, Warwickite, Polymignite, QEschynite. 7e genre. — Molybdène Molybdénite (molybd. sulfuré), Molybdène oxydé (acide molyb- dique). 8e genre. — Tungstène. Wolfram (schéelin ferruginé). 232 8ÉANCK DU 10 JANVIER 1853. Schéelito (schéelin calcaire), Tungstène oxydé. 9e genre, — Chrome. Chrome oxydé. 1 0e genre. Cérium » Cérite, Cérine, Àllanite, Tsche'wkinite, Orthite et pyrorthite, Fluocérine (cérium fluaté), Basicérine (cérium hydro-fluaté) , Yttro-cérite (yttria fluatée), Edwarsite (cérium phosphaté), Monazite, Carbocérine (cérium carbonaté). 11e genre. — - Manganèse. Hausmanite, Braunite, Pyrolusite, Àcerdèse, Peroxyde hydraté, Psilomélane, Diallogite (manganèse carbonaté), Rhodonite ( manganèse silicaté rose ) , Hureaulite, Hétérosite, Triphylline, Triplite (manganèse phosphaté fer- ferrifère), Àlabandine (manganèse sulfuré), Manganèse arsenical, Helvine. \ 2e genre. — Fer * Fer natif et fer météorique, Aimant (fer oxydulé et nigrine), Franklinite, Oligiste (fer oligiste), Martite (fer oligiste octaèdre), Gœthite et lepidokrokite (fer hv- droxydé), Limonite (fer oxydé hydraté), Chamoisito, Isérine, Craitonite, Uménite, Mengite, Sidérochrôme (fer chrômé), Mispickel (fer arsenical), Pyrite (fer sulfuré), Sperkise (fer sulfuré blanc), Leberkise (fer sulfuré magnétique), Sidérose (fer carbonaté), Junckérite, Pittizite, Vivianite, Dufrénite, Kakoxène, Pharmacosidérite (fer arséniaté), Scorodite et néoctèse, Arsénio-sidérite, Pyrosmalite, Krokidolite, \ 3e genre. — Cobalt. Smaltine (cobalt arsénical), Cobaltine (cobalt gris), Koboldine (cobalt sulfuré), Érythrine (cobalt arséniaté), Cobaltide (cobalt oxydé noir). 4 4e genre. — Nickel. Nickéline (nickel arsénical), Nickel antimonial, Antimonickel (nickel antimonié sulfuré), Disomose (nickel arsénio-sulfuré), Harkise (nickel sulfuré), Nickel sulfuré bismuthifère, Nickel ocre (nickel arséniaté), Nickel arsénié, Pimélite. \ 5e genre. — Urane. Pechurane (urane oxydulé), Uraconise (urane oxydé hydraté), Uranite (urane phosphaté), Chalkolite (urane phosphaté), Urano-tantale, Johannite (urane sous-sulfaté). SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 233 4 6* genre, — Cuivre . Cuivre natif, Zigueline (cuivre oxydulé), Mélaconise (cuivre oxydé noir), Chalkopyrite (cuivre pyriteux), Phillipsite, Chalkosine (cuivre sulfuré), Covelline, Stromajérine, Berzéline (cuivre sélénié), Eukaïrite, Cuivr.e arsénical, Panabase (cuivre gris), Tennantite, Mysorine, Azurite (cuivre carbonaté bleu), Malachite (cuivre carbonaté vert), Atacamite (cuivre chloruré), Aphérèse (cuivre phosphaté), Ypoleïme (cuivre hydro-phosphaté), Olivénite, Érinite, Liroconite, Aphanèse, Euchroïte, Condurite (cuivre arsénié), Volberthite (cuivre vanadié), Dioptase, Chrysocole (cuivre hydro-siliceux), Brochantite. 4 7* genre, — Cadmium. Greenockite (cadmium sulfuré), 4 8e genre. — Zinc . Blende (zinc sulfuré), Voltzine, Zinc sélénié, Smithsonite (zinc carbonaté), Zinconise (zinc hydro-carbonaté), Calamine (zinc silicaté), Villémite, Hopéite, Zinc oxydé rouge, Zinc hydraté cuprifère, Pyrrhit. 19e genre. — Plomb . Plomb natif, Galène (plomb sulfuré), Boulangérite, Dufrénoysite, Bournonite, Clausthalie (plomb sélénié), Céruse (plomb carbonaté), Leadhillite (plomb sulfato tri-car- bonaté), Lanarkite (plomb sulfo-carbonaté), Anglésite (plomb sulfaté), Calédonite (plomb sulfato -carbo- naté cuprifère), Plomb sulfaté cuprifère, Pyromorphite (plomb phosphaté), Mimétèse (plomb arséniaté), Plomb arséniaté hydraté, Kérasine (plomb chloro-carbonaté), Plomb chloruré, Yanadinite (plomb vanadiaté), Crocoïse (plomb chrômaté), Mélanochroïte, Vauquelinite (plomb chromé), Mélinose (plomb molybdaté), Schéelitine (plomb tungstaté), Plomb anjtimonié, Plombgomme, Massicot (plomb oxydé jaune), Minium (plomb oxydé rouge), 20e genre. — Mercure • Mercure natif, Amalgame (argent amalgamé), Cinabre (mercure sulfuré), ? Mercure ioduré, Calomel (mercure chloruré). 21e genre. *— Argent. Argent natif, Arguérite, Discrase (argent antimonial), Argent arsenical, Argyrose (argent sulfuré), Psaturose et polybasite (argent sul- furé fragile), SÉANCE DU 10 JANVIER 1853. 234 Argent gris antimonial, Sternbergite, Ârgyrithrose (argent antimonié sulfuré), Proustite, Miargyrite, Argent séléniuré, Kérargyre (argent chloruré), Iodargyre (argent ioduré), Bromargyre (bromure d’argent), Argent carbonaté. 22° genre. — Or. Or natif, Electrum. 23e genre. — Platine. Platine natif. 24e genre. — Iridium. Iridosmine (iridium natif). 25e genre. — Palladium. Palladium natif. Palladium sélénié. DEUXIÈME DIVISION. — ORGANIQUES. 4re famille. — Haloïdes. Mellite, Humboldtite (fer oxalaté). 2e famille. — Résines. Succin, Rétinasphalte, Copale fossile. 3e famille. — Stèaricns . Schéererite, Hartite, Hatchétine. 4e famille. *— Bitumes . Naphte et pétrole, Asphalte et malthe, Élatéri te , Idriatine. 5e famille. — Charbons. Graphite, Anthracite, Houille, Lignite, Dusodyle, Tourbe. M. Boubée partage les idées qui ont guidé M. Leymerie dans sa classification des minéraux , mais il lui semble que le gra- phite devrait être réuni au diamant et classé parmi les miné- raux inorganiques. M. Ëlie de Beaumont pense au contraire qu’il est bon, comme l’a fait M. Leymerie, de séparer le diamant du graphite, à cause de la grande différence qu’il y a entre leurs propriétés physiques : ces deux corps sont d’ailleurs séparés dans la nature, et le diamant a certainement été produit par des phénomènes tout spéciaux, qui permettaient à la cristallisation de se déve- lopper de la manière la plus complète-, aussi dans son gisement le diamant est-il accompagné par d’autres gemmes. 235 SÉANCE DU lô JANVIER 1853, M. Élie de Beaumont ajoute que les gneiss et les calcaires qui contiennent du graphite ont cristallisé dans des circonstances différentes de celles qui ont donné naissance au diamant, mais que la présence du graphite dans ces roches est une preuve suffisante de leur origine métamorphique. M. Delanoüe fait la communication suivante : De l'existence des terrains s al if ères dans le nord de la France , par M. J. Delanoüe. L’étude de l’arête dévonienne qui relève et borne au S. les terrains hou il lers du Hainaut et de l’Artois est signalée depuis longtemps (1) comme une des plus intéressantes pour les progrès de la science et de l’industrie minérale. Quelques faits nouveaux viennent encore d’accroître cette importance ; ils peuvent se résu- mer ainsi : 1° Cette zone de vieux grès rouge est double. Une première bande septentrionale, celle de Binclie, en Belgique, s’étend à Mon- tignies sur Roc , Monchécourt (2) , Esquerchin (3) , Bouvignies en Gohelle, Pernes, Fléchin, et vient d’être retrouvée à Wizernes par un forage de 137 mètres, pour reparaître au jour une dernière foisà Caffiersetà Binglien. Les bancs de grès paléozoïques atteints à Wi- zernes se retrouvent avec les mêmes caractères entre Audincthun et Matringhen à 17 kilomètres S. 15° O., par conséquent sur une seconde bande parallèle plongeant de 30° S. -S. -O., et sans doute identique avec celle de Merbes-le-Chàteau , qui est à 10 kilo- mètres S. de la zone précitée de Binche. 2° Un poudingue , dont le ciment est rougeâtre et les éléments généralement calcaires , recouvre le terrain dévonien à Lillette , Dennebrœucq , Fléchin , Febrin, etc. Les galets proviennent des terrains siluriens, dévoniens et carbonifères ; ils en contiennent encore les fossiles. Ce poudingue est très peu incliné , et en sens opposé du vieux grès rouge : il a au moins 15 mètres de puissance à Audincthun, où il a été longtemps exploité comme marbre. Il re- présente la brèche beaucoup plus calcaire de Berlaimont, près d’Avesnes (4), la partie inférieure des grès et poudingues rouges (4) Explication (le la carte géologique de la France , t. I'r, p. 725, 777, 786. (2) On l’y a constatée par un sondage. (3l On l’y a constatée par un sondage. (4) Voyez Y Explication de la carte géologique de la France , t. I**, p. 751. 236 6ÉANCB DU 10 JANVIER 1853. de Niedeggen et Malmédy, et probablement le grès vosgien. 3° Ce poudingue est recouvert en stratification concordante par des grès quartzeuxet argileux, rouges et jaunes, qui doivent appar- tenir à un grès bigarré. U° Enfin, à Lillette, des argiles à vives bigarrures jaunes, blan- ches, rouges et violettes, rappellent les marnes irisées. On sait qu’il existe du sel dans le forage actuel de Rouen, dans une source de Mézières, et dans les terrains houillers de Valen- ciennes, et qu’un puits percé à Meulers, au S. d’Arras, a été noyé en 1806 par une irruption d’eau salée (1). Ces souvenirs m’ont fait observer plus attentivement dans la contrée de nombreux affaisse- ments du sol, où s’engouffre incessamment (sans les combler) le loess entraîné par les eaux pluviales. Je me suis alors involontaire- ment souvenu de ce passage de la description des terrains salifèresdes Vosges (2) : « Les eaux qui circulent dans l’intérieur du sol peu- » vent, en dissolvant certaines parties constituantes, produire des cavités , et par suite des affaissements. Telle est, .du moins, la » seule explication qu’on puisse donner de certains trous qui exis- » tent dans les environs de Dieuze , et que l’ondit avoir été formés » par l’affaissement spontané des terrains. » On est, dès lors, bien tenté de conclure que ce n'est point la mer, comme on le croit, mais bien le sel gemme du trias qui pro- duit cette salure remarquable et nous révèle ainsi sa présence dans nos contrées. Les explorateurs de houille, aujourd’hui si nombreux dans le Pas-de-Calais, et les ingénieurs du gouvernement qui les guident, auront à tenir compte , désormais , de ce double soulèvement du vieux grès rouge. Il leur importe aussi de bien connaître ces terrains complémentaires de l’hiatus géologique du Nord ; car, dans un sondage , il serait aussi fâcheux que facile de confondre ces nouvelles roches supérieures au terrain liouiller avec les va- riétés si nombreuses du vieux grès rouge, qui ne recouvre nulle part des combustibles. M. de Verneuil et M. Delesse font observer que près de Belfast, dans le N.-E. de l’Irlande, lord Downshire vient de faire exécuter un sondage ayant pour but de rechercher la (1 ) Voyez X Explication de la carte géologique de la France , t. Ier, p. 729. (2) Ibid , t. II, p. 87. 237 SÉANCE DU 10 JÀNYIER 1853. houille , et qu’on a rencontré le sel gemme sur une épaisseur d’environ 100 mètres. Ce sel gemme, dont l’existence était tout à fait inconnue, quoique le trias affleure à la surface, se trouve dans le grès du trias. M. Albert Gaudry présente les remarques suivantes : M. Delanoiie vient de faire connaître dans le Boulonnais ce fait important, que les marnes irisées sont intercalées entre les terrains de la période secondaire et les terrains de la formation carboni- fère. Il a pensé qu’à Valenciennes (Nord) la salure des schistes liouillers pouvait permettre de supposer une intercalation sem- blable. Sans nier que, sur quelques points peut-être, les marnes irisées reposent sur le terrain houiller, nous donnerons une coupe montrant, aux environs de Valenciennes, l’absence des marnes irisées et la superposition directe des terrains crétacés au terrain houiller. Cette coupe a été recueillie par nous dans une mine d’Anzin (faubourg de Valenciennes). La profondeur totale du puits par lequel nous sommes descen- du est de 500 mètres. Loess 2 mètres. Craie blanche à Ananchytes et à Inocérames. 2 Craie renfermant de très nombreux rognons de silex 15 Craie très marneuse, constituant différentes couches. 44 A m mon i tes rhoto m a gens is . Craie tourtia (craie jaune avec fragments de silex) 2 Série d’alternances de schistes houillers et de lits de houille. Comme on le voit d’après cette coupe , la superposition dans la mine du faubourg de Valenciennes est différente de celle que M. Delanoüe vient de faire connaître dans le Boulonnais ; elle se rapproche davantage de celle que nous avons eu occasion d’étudier à Tournay, en Belgique. On sait en effet qu’à Tournay la craie tourtia repose très distinctement sur le calcaire carbonifère. Mais il y a encore, entre ce point et Valenciennes, cette différence essentielle, qu’à Tournay les terrains crétacés (le tourtia) reposent sur les calcaires carbonifères, et qu’à Valenciennes, entre les ter- rains crétacés et carbonifères, se sont intercalées les immenses masses des schistes houillers. *25$ SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. En se dirigeant vers le Boulonnais, d’après les nouvelles re- cherches de M. Delanoüe, on retrouve entre les terrains crétacés et carbonifères, non plus seulement les schistes houillers, mais aussi les marnes triasiques ; en s’avançant encore davantage vers le N. -O. dans le bassin anglo-parisien, on voit s’ajouter à la masse des terrains crétacés et des terrains triasiques toute la série des terrains jurassiques. Cet accroissement dans la superposition des couches nous a frappés particulièrement, lorsque nous avons eu occasion d’étudier les environs de Bristol, qui est au N. -O. du bassin et forme une des extrémités opposées à Tournay et à Valenciennes. Car, nous venons de le dire, tandis que dans ces localités les terrains juras- siques et triasiques manquent, et tandis que le terrain crétacé repose directement sur le terrain carbonifère, on retrouve à Bristol, sur le terrain carbonifère, des parties de terrain permien, le terrain triasique et le terrain jurassique, recouvert lui-même, à peu de distance, par les terrains crétacés. M. Levalîois fait observer que dans les Ardennes on a trouvé une source salée au-dessous du lias, sans rencontrer les marnes irisées. M. d’Omalius dit que le fait signalé par M. Delanoüe serait d’un très grand intérêt pour tout le nord de la France et pour la Belgique. M. d’Omalius ajoute que, comme il est porté à voir du terrain permien dans le poudingue de Malmedy, le rap- prochement fait par M. Delanoüe le porterait aussi à voir ce groupe dans une partie au moins du dépôt qui vient d’être décrit. La présence du sel ne contrarierait pas ce rapprochement, puisque l’on sait que cette subslance est assez commune dans le terrain permien, groupe qui s’est en quelque manière étendu dans nos contrées depuis que la plupart des géologues actuels y rangent le grès des Vosges. Séance du 17 janvier 1853, PRÉSIDENCE DE M. DE VERNE U IL. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. BÉANCE DU 47 JANVIER 185$. 239 Par suite de la présentation faite dans la dernière séance, le président proclame membre de îa Société : M. B. d’Yéroféveff, capitaine au corps impérial des mines de Russie, à Paris, cité Bergère, 6 5 présenté par MM. Bayle et de Yerneuil. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. le ministre delà guerre, Recherches sur les roches , les eaux et les gîtes minéraux des provinces d’Oran et d'Alger , par M. Ville -, in-8°, Z|23 p., h pl. Paris, imprimerie nationale, 1852. De la part de M. le chanoine Croset-Mouchet, La Caille; son établissement thermal ', son pont el ses environs. — Guide des 'visiteurs et des malades, par Paul Collet \ in-8®, XI — 17 h p., ! pl. Anneci, 1853. De la part de M. Ch. Sainte-Claire Deville, Ployage géolo~ gique aux Antilles et aux îles de Ténérifje et de Fogo , in-8°, 5e livraison. Paris, 1852-, chez Gide et J. Baudry. De la part de M. Albert Gaudry, Mémoire sur les pièces so- lides des Steîlérides. — Thèse de zoologie, soutenue devant la faculté des sciences de Paris j in-8°, l\\ p., 5 pl. Paris, 1852, chez Victor Masson. Comptes rendus des séances de V sic adé mie des sciences , 4853, 1er sem., t. XXXVI, n» 2. IL Institut , 1853, n° 993. Réforme agricole , par M. Nérée Boubée., 5e année, n° 51. — Novembre 1852. The Athenœum , 1853, n° 1316. M. de Brimont donne lecture de la note suivante : Note relative à un gisement de cailloux irisés par V oxyde de fer , découvert dans le lit de la Marne} près d’ Epernay ; par M. de Brimont. A 200 mètres environ dupont d’Epernay (Marne), on construit en ce moment un pont en pierre pour le chemin de fer qui doit relier la ville de Reims à la ligne de Strasbourg. On a été obligé, 24 0 SÉANCE DU Î7 JANVIER 1853. pour établir ce viaduc dans de bonnes conditions pour îe service, de détourner le lit de la marne, et c’est dans le lit nouveau de cette rivière que ce gisement de cailloux irisés a été rencontré. En cet endroit, le terrain se compose au fond, comme dans presque toute la vallée de la Marne, de la craie blanche propre- ment dite. Au-dessus se trouve un sable ou gravier dont les élé- ments sont partout identiques, et composé de petits cailloux gé- néralement très durs, ce qui est dû à la silice, que l’on aperçoit aisément sous une forme cristalline quand on les casse. C’est au-dessus de cette couche, dont l’épaisseur, dans la localité précitée, n’est que de 50 centimètres au plus, que se trouvait sur une largeur de 15 à 20 mètres seulement un conglomérat de cail- loux fortement soudés entre eux, au point de nécessiter l’emploi de la mine pour en opérer l’extraction. L’épaisseur de ce lit était de AO à 50 centimètres au plus ; mais ce qu’il y avait de plus remarquable était l’irisation produite par l’oxyde de fer, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de ce poudingue. J’ai été étonné de ne rencontrer parmi les nombreux débris de ces conglomérats de cailloux aucunes coquilles fluviatiles , bien que les sables environnants en contiennent quelques unes, notamment des Unios. Un dépôt tourbeux, composé de fragments de bois parfaite- ment conservés, était adossé à ce singulier conglomérat. Il renfer- mait quelques coquilles, toutefois en petite quantité, et, parmi ces débris, j’y ai reconnu une Lymnée. Au-dessus de ce lit, on a rencontré 3 à U mètres environ des mêmes sables que ceux dont j’ai parlé plus haut, puis enfin la terre végétale, qui a une épaisseur constante de près d’un mètre dans toute cette partie de la vallée de la Marne comprise entre Epernay et Mareuil-sur-Ay. Le secrétaire donne lecture de la note suivante : Noie sur le Mont-Août ( Marne ) , par M. Ch. de Cazanove En remettant à îa Société la carte géologique du département de la Marne, M. A. Buvignier ajouta, dans une lettre insérée au Bulletin , 2° série, tome YIII, page 417, quelques observations sur différents points en litige. Entre autres points s’est présenté !e Mont-Août. Là M. Buvi- gnier, contrairement à plusieurs opinions émises sur le caractère géologique ou î’àge relatif des silex exploités à plusieurs endroits SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. ni du plateau de ce monticule, s’est refusé à les considérer comme appartenant à la meulière qui recouvre les plateaux avoisinants, ceux de Vert-la -Gravelle et autres. * L’objet de cette courte notice, qui s’applique uniquement aux silex du Mont-Août, est donc, en justifiant le doute exprimé par M. Buvignier sur leur provenance lacustre, de faire connaître leur véritable origine. Pour cela, il suffit de nommer quelques uns des fossiles les plus caractéristiques que nous avons rencontrés, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de ces silex, dans une excursion faite au Mont-Août avec M. P. Dinet. Les voici : Ostreci vesicularis , Lamk., Magas pumilus , T crcbratalct car/ica, Sow., Terebratula octoplicata, J an ira Duternplei , d’Orb. Ajoutons que les silex de cette localité ont la plus grande ana- logie avec ceux de la craie dure supérieure de Meudon. Comme à Meudon, on rencontre au Mont-Août les silex rubannés, les silex fauves, jaunâtres, dont M. Cordier a réuni plusieurs échantillons à la partie supérieure de la craie blanche. Immédiatement au-dessous de ces silex, au Mont-Août, se pré- sente la craie dure, jaunâtre, à peine traçante, d’où nous avons retiré le Belemnites mucronatus ; puis vient la craie blanche tendre que l’on connaît. M. Hébert fait observer que la Société géologique, en se rendant au Mont-Août en septembre 1849, avait pour but de vérifier l’existence ou l’absence, en ce point, du calcaire lacustre de Rilly et du calcaire pisolilique ^ son attention s’est portée évidemment sur des silex qui se trouvent au milieu d’une argile rouge, à la partie supérieure de la butte, et qui lui ont paru être identiques avec les meulières de la Brie qui couvrent les plateaux du voisinage-, il reconnaît d’ailleurs que les silex pro- duits parM. de Cazanove appartiennent bien à la craie, mais il ne saurait affirmer que ce soit les mêmes que ceux vus par la Société géologique. M. Constant Prévost dit qu’il a observé à i’îie de Wight des couches de craie fortement inclinées, entre lesquelles est dé- posé un calcaire d’eau douce, d’apparence siliceuse, renfermant des silex blonds analogues à ceux du Cher; ces silex sont dis- posés en rognons à zones concentriques passant insensiblement à la roche encaissante, dont il n’est guère possible de les isoler. Soc. gêol.. 2e série , tome X. 16 e2hcl SÉANCE DU 17 JANVIER 1858. Quant au calcaire lui-même, il n’a pas été introduit dans une fente de la craie -, il occupe une surface ondulée au-dessus de cette roche, et il commence la série des terrains tertiaires } il demande à M. Hébert si tes silex du Mont-Août ont quelque analogie avec ceux de i’île de Wight. Après avoir dit que les silex observés par MM. de Gazanove et Buvignier appartiennent bien à la craie, M. Hébert répond aux observations de M. Constant Prévost, qu’il n’a pas observé la couche de calcaire siliceux de l’île de Wight, mais qu’il a vu les ravinements delà craie, et son endurcissement par places j qu’au reste le calcaire pisoîi tique offre aussi des silex se fondant dans la masse, et qu’après la craie blanche, il y a eu de nom- breux dépôts siliceux dont les sables de Riily et de Varange- ville sont des exemples bien marqués. M. de Yerneuil donne lecture d’une lettre de M. de Keyserling sur les fossiles des environs de Sterlitamak. Raikulle, le octobre 1 851 . Les calcaires de Sterlitamak, grâce aux efforts assidus deM. Wan- genheim, forment un des types les mieux connus de la faune car- bonifère par le grand nombre d’espèces qu’ils contiennent ; et, sous ce rapport, les études minutieuses dont je vais vous entretenir, ne manqueront pas, je l’espère, d’un intérêt général. Je vous parlerai d’abord des Brachiopodes. Nous en avons déjà cité un bon nombre dans notre ouvrage, et je vais les parcourir dans le même ordre. Terebratula : Nous en connaissions trois espèces : la T. pleurodon, jPliill. , T» ScJilothcimi , Bucli, et T. plica, Kut. Quant à la der- nière espèce, les échantillons examinés établissent suffisamment sa différence de la T. elongata. Sa valve ventrale, en forme de toit, offrant une carène prononcée, horizontale depuis le natis jusqu’au bord, et des flancs plats et déclives, ne se retrouvent guère dans les nombreuses variétés des espèces voisines. M. Wangenheim a recueilli six autres espèces de ce genre : la T. merogona^ Pliill., et veniformis , Sow., toutes deux telles que les auteurs cités les ont représentées, ainsi que les naturalistes, qui les considèrent comme des variétés de la T. aciiminata et pugnus pourront citer ces deux espèces de Martin à Sterlitamak, bien que les formes types n’y aient pas été rencontrées ; T. radialis , Pliill., T. trilatera , Kon., dont le singulier caractère, c’est-à-dire le sinus sur les deux valves est surtout apparent sur de petits échantillons ; T. sacculut) présen- SÉANCE DU 17 JANVIER 1855. 215 tant toutes les longueurs, entre 2 et 15 millimètres; il y en a de jeunes qui ressemblent à s’y méprendre à X Atrypa sublob cita, de Poi tîoek, et qui pourraient bien ne pas être autre chose. Enfin il me reste à citer l’espèce la moins attendue dans cette localité, c’est notre T. Strajcfîkicinà : ses caractères si particuliers ne prêtent pas à une méprise, et cependant elle se trouve ici en plein carbonifère, tandis qu’elle était associée à des fossiles dévoniens dans l’Oural. On pourrait conserver des doutes sur cette association, si, comme je le pense, elle n’a pas été trouvée par un de nous (1). M. Kutorga a décrit un bon nombre des espèces du genre Spirijer , qui se trouvent à Sterlitamak, mais elles se réduisent un peu par l’étude des échantillons de -la collection de M. Wangenheim. Son S. triplicntus et pentagonus sont des variétés d’âge de la T. Schlo- thcimfy Buch. ; son S. nucleolus n’est que le premier âge de notre S. quàdriradicitns, dont l’âge adulte nous était également inconnu ; ce dernier diffère des figures données par un plus grand nombre de plis; on en compte, sur chaque valve, 9 de chaque côté du sinus et du bourrelet, 3 plis principaux, et 2 à 3 secondaires, plus ou moins apparents, vers les extrémités cardinales. La ressemblance avec le S. sexradialis , Pli., devient donc plus grande, mais le caractère distinctif que nous avons indiqué, c’est-à-dire le fond du sinds en sillon étroit, persiste et ne permet pas de confondre les deux espèces. Le S. côrculiitn , Kut., estime variété du S. glaber . Le S. recianguliis , Kut., que nous avons réuni à notre Sp. in - crnssûiüS) ne se trouve pas parmi les fossiles examinés, mais en re- vanche on trouve une espèce bien voisine, le S. crassus , de Kotlinck. Les S. lyra et panda r if orrais , Kut., sont deux belles espèces, bien caractérisées. La dernière, dont la valve ventrale est plus large que longue, tandis que le contraire a lieu dans l’espèce pré- cédente, présente parfois sur la ventrale des plis dédoublés par un léger sillon et ressemble alors au S \ pectinatus , Kon. Néanmoins ses plis, très obtus et larges, et particulièrement ses deux crochets en pointe saillante, la distinguent aisément. Nous avons cité de Sterlitamak encore le S. hneatus , Mart. , et mosquensis , Fisch, , tous (\)Pentamerus plicatus. Les cloisons peu développées rendent l’étude de la structure interne très difficiles; sur les cloisons ventrales, acco- lées l’une à l’autre, je n'ai pu découvrir de parties internes. Le sinus dorsal produisant un aspect fort différent des vrais Pentamères, je suis disposé à le regarder comme un congénère de la Tcrebratula Sc/ilot- theimi . Pentamerus sella , Kut., me parait être la Tcrebratula acu - mina ta j Mant. SÉANCE DU 17 JANVIER 1858. 2A/i les deux retrouvés par M. Wangenheim. En fait d’espèces précé- demment inconnues à cet endroit, je dois en citer d’abord une bien belle et bien grande, découverte il est vrai à une distance assez grande de Sterlitamak, pour que sa réapparition au fond de la Russie nous surprenne, c’est le S. subradiatas , Sow., de la terre de Van-Diemen, exactement tel que Sowerby et Morris nous Font fait connaître, sauf quelques lignes peu régulières, indiquées inso- litement sur ses larges plis, qui paraissent provenir de l’état de moule des échantillons de l’Australie et qui ne se retrouvent pas sur les échantillons russes recouverts de leur test. L’espèce la plus voisine est le S. pinguis de Sow. , dont les côtes latérales sont cependant bien plus prononcées et plus nombreuses. S. s tria tus , Sow., tel que nous F avons figuré de la Piussie, c’est-à-dire que, parmi les sillons latéraux, quelques uns séparent les stries plus profondément que le reste, et se poursuivent nettement jusqu’aux crochets, disposition qui rappelle les flancs largement plissés, indépendamment des stries, des S. Keilhaid, Buch, et de notre S.jasciger. Ce dernier se trouve aussi à Sterlitamak et se recon- naît aux carènes anguleuses de ses larges plis. On n’a rien re- marqué de pareil sur les striatus anglais, peut-être par inadver- tance? S. hystérie us y de Kon. , tout à fait pareil à la forme décrite par notre savant ami de Belgique. Quant au S. hystericus de Schl., je crois que sa véritable signification n’est pas encore débrouillée. Enfin je suis embarrassé de citer parmi toutes ces espèces carboni- fères le S. undulatuSy Schl. Mais la forme très transverse, les ondulations, etc., tout, jusqu’au petit pli médian du sinus, coïncide si complètement avec la coquille caractéristique du zechstein cF Allemagne , que l’on ne peut se refuser à l’évi- dence. Le genre Ortliis , qui n’avait pas été cité dans les calcaires de Sterlitamak, nous a offert trois espèces bien caractéristiques: Y O. rc - sapinata et l’O. crenistria , Pli. , et FO. eximia0 Vern. De la dernière, on a recueilli une variété monstrueuse et anomale, au point qu’elle pourrait bien être prise pour une espèce nouvelle. L’aréa, le bec et la surface de la coquille sont étrangement contournés, comme si l’on avait pris le sommet élevé de la valve dorsale et qu’on l’eût tordu ; des vides irréguliers traversent les larges plis et les rendent noueux; la surface entière en devient rugueuse. Cette variété a les mêmes rapports avec la forme normale que ceux qui existent entre F O. senilis et l’O. crenistria . Les larges plis longitu- dinaux recouverts de stries déliées, filiformes, désignent du reste ’espèce sans équivoque. Quant au Chonetes variolata , nous l’avons SÉANCE DU 17 JANVIER 1853, 2^5 reconnu à Sterlitamak, et il ne manque pas dans la collection de M. Wangenheim. En fait de Productifs, on a cité, de Sterlitamak, le punctatus , Mart., etfascicitus , Kut. , que M. de Koninek réunit, peut-être avec raison, au Jimbriatus , mais ne le trouvant pas parmi les fossiles de M. Wangenheim, je ne puis l’assurer. Je puis ajouter en espèces de ce groupe, le Fr. laciniatus , de M’Coy, qui n’a pas été admis au nombre des espèces bien établies par d’autres naturalistes, M . de Ko * ninekle considérant comme le jeune âge du P. punctatus. Certains échantillons, qui ontjusqu’à 60 millimètresde large, réfutent toute- fois une conjecture pareille. C’est une forme voisine du P. Leuchten- bergens, Kon . , et si l’on avait supposé que la forme anomale attribuée â la valve ventrale de cette coquille ne fûfque l’effet des fractures et des contournements que les fossiles de Vitré présentent ordinaire- ment, on pourrait bien réunir les deux espèces. La différence la plus palpable entre le punctatus et le laciniatus est la forme également aplatie des deux valves, peu distancées dans le dernier, tandis que dans le premier, une valve dorsale fortement bombée s’élève au- dessus d’une ventrale aplatie. Un autre caractère très remarquable se trouve dans les rides qui séparent les bandelettes tuberculeuses du punctatus. Les bandelettes y sont disposées sur la valve dorsale comme les marches planes d’une terrasse, séparées et élevées l’une au-dessus de l’autre par des pentes non tuberculeuses. Sur la sur- face plane du laciniatus , rien de pareil ne peut avoir lieu, et en effet les bandelettes ne sont que faiblement séparées par leurs bords linéaires, et par conséquent les tubercules aussi s’avancent sur le bord intérieur des bandelettes. Sur les moules, les bandelettes, plus éloignées du crochet, ne paraissent frangées que d’une simple rangée de tubercules allongés , accompagnée sur le test de quel- ques autres petites aspérités ; mais vers le crochet, on voit trois, quatre rangées de tubercules arrondis sur chaque bandelette. Les individus adultes présentent vers le bord de la dorsale des rayons distants, linéaires, faiblement indiqués, caractère tout à fait particulier. Nous connaissions l’existence du P. scmireticula - tus (1), à Sterlitamak, j’ajoute le P. costatus , Sow., avec un peu de doute, parce que les échantillons ne faisaient voir que la partie viscérale. Elle se distingue, il est vrai, de celle du semicirculatus par des côtes plus noueuses, plus régulières et plus dicliotomes, (1) Le Productifs porrcctus , Kut., n’en est, selon moi, qu’un échan- tillon fracturé; les stries de croissance prouvent que sa forme allongée n’est que le résultat d’un façonnemeut accidentel. SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. 2Ü6 qui s’épaississent davantage, quelques unes jusqu’à 2 millimètres ; aussi l’espace entre les valves est moindre, la coquille n’atteignant que 6 millimètres d’épaisseur. Mais l’analogie de cette partie de la coquille avec le P. gênai nus et Lcplayt est fort grande. Peut- être avez- vous remarqué que M. de Koninck a figuré cette der- nière espèce sur la planche X, frg. 3 ( Monogr . des P rock du Volga ), en la prenant pour le costatus. Il me paraît du reste constaté par cette méprise, de même que par la réapparition du Leplayi à Nishne-Irginen, que c’est une espèce bien carbonifère, qu’on n’a jamais trouvée accompagnée du Chonetes varia la ta, espèce tout à fait carbonifère. On en tirera la conséquence que l’existence du permien dans les environs de Bakhmout n’est guère établie. A cette occasion je dirai encore que le P. costatus du Missouri, que M. de Koninck a figuré, est, selon moi, le P . su Ica tus , Sow., espèce très voisine du tubarius , Keys. M. de Koninck ayant eu sous les yeux des échantillons dépouillés de test sur leur prolongement antérieur a pu rapprocher le tubarius du lobatus , Sow. Mais, en tenant compte de la finesse des stries et des gros plis entremêlés sur le prolongement, on évitera cette erreur. Cependant le Flemmingi figuré par M. de Koninck est en effet plus voisin de mon tubarius, mais aussi je suis bien convaincu que M. de Koninck ne connaît pas le véritable lobatus à gros plis, tel que je l’ai si souvent recueilli en Angleterre, et tel que nous l’avons figuré de Russie; on n’a qu’à comparer la grosseur des stries des différentes figures. Le véritable lobatus se trouve à Sterlitamak ; un échantillon offre une espèce de bourrelet transverse, produit par une saillie du pro- longement antérieur à l’endroit où il se joint à la partie viscérale, mais cet étranglement se perd vers les extrémités cardinales, ce qui le distingue de l’étranglement remarquable du P. expansus , Kon., également trouvé à Sterlitamak. Ici l’étranglement est con- tinu depuis le front jusqu'au-dessous du crochet séparant les oreil- lettes planes de la voûte de la coquille. La partie viscérale est très régulièrement réticulée par des ondes serrées , mais faibles. Nos échantillons ne présentent que sur le prolongement antérieur un léger creusement à la place du sinus, qui est profond, sans atteindre pourlant le crochet sur les échantillons de Belgique, selon AI. de Ko- ninck. Les tubes sont distribués comme sur le lobatus et le ma m matas. Le P. genuinus , Kut., originaire de Sterlitamak, ne pourra jamais être positivement reconnu sans qu’on observe quelque chose du sin- gulier prolongement contourné, dont les traces, du reste, sont assez souvent conservées. Nous avons cité le P. médusa , Kon., de Sterli- tamak. Des échantillons plus complets prouvent que nous avons SÉANCE DU 17 JANVIER J 853, m pris pour tel une espèce pins anomale décrite par notre savant ami de Belgique, c’est-à-dire le P. Nystianus ; le prolongement antérieur, formant au milieu du faible sinus une protubérance en forme de trompe, ne permet point d’en douter, bien que du reste l’échantillon, surtout par sa convexité, rappelle aussi le P. mar- ginalisa Kon. C’est la forme juvénile du Nysticus , figurée par Ko- ninch, (. Monogr . , pl. XVIII, fig. 5, à), large de 16 millimètres, long de 13 millimètres. La partie viscérale de la valve ventrale, garnie de 10 rides concentriques et de quelques tubercules spinuleux, est plate, presque rectangulaire par rapport à la direction du prolon- gement marginal, mais la valve dorsale est assez convexe pour que la coquille atteigne néanmoins 6 millimètres d’épaisseur. La valve dorsale est tuberculeuse sur sa partie viscérale, tandis que la large bordure qui en descend est garnie de stries longitudinales bien prononcées. Vous avez figuré dans votre ouvrage un Productus sous le nom de pustulosus , d’après un seul échantillon de Sterli- tamak, en disant que cela pourrait bien être une espèce particu- lière, parce qu’on n’y voyait pas de rides ; d’autres échantillons sont venus confirmer cette supposition, et je propose de désigner l’espèce sous le nom de pustulatus. Les tubercules, de grandeur irrégulière, ont généralement des contours circulaires, ce qui ne paraît pas sur la figure donnée, qui présente peut-être une variété anomale. Cette forme de tubercules se distingue du P. Keyserlingia- niu, Kon., à tubercules allongés, à taille plus petite et distincte- ment géniculé. Le pustulatus est peu convexe ; ses valves sont rapprochées et ses flancs s’arrondissent en pente douce. C’est ce qui le distingue aussi du P. Leibnitzianus, Kon. , fort ressemblant, du reste, et qui, selon Bronn, ne serait que le jeune âge du P. horridus. La variété russe du P. Humboldti diffère par ses tuber- cules plus serrés et spinuleux et sa forme gibbeuse. Le sinus, tout léger qu’il soit, suffit pour distinguer le pustulosus du papillatus , Kon. , que cet auteur a réuni depuis au granulatus , Pli. , mais à toit, selon moi, comme ce dernier, de même que le pustulosus et V o va lis, de Phill., est couvert de rides concentriques élevées, tuber- culeuses au sommet, d’après les échantillons que j’ai recueillis en Angleterre. Enfin je puis citer le véritable aculeatus , Mart., espèce si souvent méconnue sur le continent, bien que Sowerby et, depuis, Al’Coy aient indiqué son caractère distinctif, c’est-à-dire des tubercules en apparence renversés, dont les pointes remontent vers le crochet. Cette anomalie s’explique. Des tubes placés verti- calement produisent à leur base des renflements de la coquille, lesquels forment à partir de là des petits plis longitudinaux . Ces plis, SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. 2/1 8 en s’élargissant peu à peu, se perdent en avant. Dépouillés de leurs tubes, ils ont l’air de s’élever et de tendre vers le crochet. C’est le même phénomène qui se voit sur le P. aculeatus et le P. tubarius où les tubes donnent également naissance à des plis, plus longs, il est vrai. M. de Koninck, se défiant de l’exactitude des observateurs anglais, après avoir reconnu que le P. aculeatus de son premier grand ouvrage n’était pas l’espèce de Martin, lui a assimilé, dans sa Monographie , le P. gryphœoides , Kon. , que ses plis longitudi- naux, serrés et continus en avant, et son manque de sinus en éloignent. Le sinus de l’ aculeatus , Mart. , malgré son peu de pro- fondeur, se poursuit jusque sur le crochet. Je termine les Procluctus de Sterlitamak par deux espèces bien connues : le P. quîncun- cialis , Phill., et le P. cora , d’Orb. La valve ventrale du dernier est souvent si ridée quelle pourrait être prise pour celle du P. undatus . Pour terminer, je vais mentionner le brachiopode le plus curieux de la collection. Comme espèce, il n’est pas nouveau : c’est X Ano- mia antiqua , de M’Coy. Mais des moules, en partie dépouillés, prouvent que c’est une Thécidée, ornée d’ondes concentriques, comme la T. tetrci go/ia , de Rœmer, dont une valve est attachée et perforée, tandis que l’autre, également bombée, montre un appareil digité, qui occupe presque tout l’intérieur. La disposition transverse des appendices de cet appareil autour d’une crête mé- diane, analogue à celle des feuillets d’une fougère autour de leur tige, m’a suggéré, pour cette espèce, le nom de T. Jilicis. Chez les congénères, les digitations sont dirigées en avant et plus ou moins arquées. Une carène crénelée suit à l’extérieur tout autour les impressions digitées latérales, dont la seconde, à partir de la charnière, est plus grande. M. Honinghaus, dans le Jahrbuch de Leonhard, 1830, page 232, a déjà mentionné ce genre au sein des terrains paléozoïques, en citant une T. antiqua. Mais il paraît que c’était par erreur, car MM. Goldfuss et Münster, qui connaissaient la collection de Honinghaus, ont employé depuis ce même nom pour une assise jurassique. Acéphales . — Aucune espèce de Sterlitamak n’a été citée pré- cédemment. J’en ai trouvé 21 dans la collection de M. Wan- genheim : 1. Âvicula tessellata , Phill., telle que M. de Koninck l’a figurée ( A niai, fossiles , pi. VI, fig. 11), c’est-à-dire qu’entre quelques unes des 15 côtes principales se forme vers le bord une côte secondaire; 15 arêtes d’accroissement les ren- dent noueuses ; une paire de côtes se distingue par la grosseur et la surface écailleuse ; l’oreillette extérieure manque à l’échan- tillon de la collection. — 2. Avicula subpapyracea , Vern., atteint SÉANCE DU 17 JANVIER 1858. 249 jusqu'à 95 millimètres de longueur, et tout autant de largeur ; on compte au bord lx 5 côtes obtuses, toutes continues jusqu’aux cro- chets, de moitié aussi larges que leurs interstices, sauf quelques unes sur la partie antérieure, un peu plus espacées et plus faibles ; nous avons cru que l’absence des stries concentriques distinguait cette espèce de X A. papyracca, Sow.; mais ce caractère n’est pas constant à l’égard des grands échantillons, dont les côtes sont crénelées par des stries concentriques , obtuses et régulières , indiquées légère- ment encore dans les interstices des côtes. Le caractère principal qui sert à distinguer X A. suhpapyracea est l’alternance régulière, presque sans exception, d’une côte mince avec une côte plus grosse, ce qui fait que sur l’empreinte les interstices en relief paraissent disposés par couple , ou fendus jusqu’au crochet. — 3. Ce n’est pas sans hésitation que je considère une autre coquille comme une variété de X Av. laminosa , Phill. ; la forme générale et les lames concentriques s’accordent bien avec l’espèce anglaise ; mais le crochet est plus pointu , de sorte que son arête antérieure tend encore à angle aigu vers le bord cardinal rectiligne ; l’arête postérieure du crochet, moins déterminée que dans la coquille de Phil. , se fond davantage avec la surface de l’oreillette postérieure; son extrémité paraît coupée à angle obtus. Des matériaux plus abondants pourraient bien prouver que notre variété est une es- pèce particulière. — à. A. lun éclata, Phill.; détermination positive. 5. Pecten plan/ costatus, M’Coy ; longueur, 13 millimètres; largeur, 11 millimètres; bord cardinal, 5 millimètres; angle apicial , 85 degrés. Coquille un peu oblique , de sorte que le dia- mètre le plus long en comprendrait le tiers postérieur ; les oreil- lettes, d égale grandeur, plates, lisses, l’antérieure coupée à angle droit, l’autre à angle obtus ; quelques plis larges et obtus, dont 5, plus forts, interposés entre 6 très faibles, rayonnent à la surface ; des ondes concentriques régulières les traversent à leur origine , mais se perdent au delà de 9 millimètres de distance du crochet. L’échantillon irlandais figuré possède, à égale distance du crochet, le même nombre de plis , la même forme , et des oreillettes pa- reilles; l’identification me paraît donc mériter assez de confiance, bien que les ondes concentriques , près du crochet , n’aient pas été remarquées sur la coquille de M’Coy. 6. Mytilus scnùpcrjectus , espèce nouvelle très bien caractérisée ; sa forme générale est analogue à celle de la Lardiomorpha clongata , Kon., mais des stries fixes longitudinales, comme celles de certains Mytiles, sensibles à l’œil nu, mais seulement distinctes à la loupe, rayonnent sur les flancs déclives de la coquille bombée etpiriforme, 250 SÉANCE DU 17 JANVIER 1858, tandis que son milieu, faiblement convexe, est lisse ; une ou deux lignes d’accroissement sont à peine sensibles. Le test plus épais et le dessin de la surface m’engagent à ranger cette coquille édentée plutôt avec les Mytiles qu’avec les Cardiomorphes. 7. Motliola Macadami , Portl. ; var. lata. Un moule, la charnière à bord postérieur rectiligne, le contour ellipsoïde, les crochets avan- cés, le côté antérieur petit, arrondi, la gibbosité oblongue, diagonale, conviennent entièrement à la figure donnée par le colonel Portlock. 8. Area avic.uloides , lion. Si l’on ne voyait distinctement sur ce moule les deux petites arêtes longitudinales le long du bord cardi- nal postérieur, destinées à recevoir les trois dents lamellaires, que M. de Koninck a découvertes le premier, certes on l’aurait pris pour X A viçula an tiqua , car telle est sa ressemblance générale avec la coquille permienne ; ce n’est que la moindre étendue de l’aile postérieure et la présence de quelques vides concentriques , qui distinguent extérieurement cette petite Arche. Les mêmes diffé- rences étant visibles, dans notre ouvrage, entre X Avicula an tiqua, pi. XX, fig. 13 b , du carbonifère, et celle du permien, ibid., fig. 1 3 a , il se présente la conjecture que la première pourrait bien être l’Arche en question; comme la description ajoute encore que sur un des moules se voit une impression auriculaire antérieure, qui ne se trouve jamais sur une Avicule, cette conjecture gagne tant de consistance, qu’on ne voudra plus citer VA. antigua au nombre des coquilles communes aux deux terrains paléozoïques. 9. Area s e mi lare i s , nom proposé pour X Area Laeordairiana de notre ouvrage, h' Area Laeordairiana , Kon., est également recou- verte, sur toute sa surface, de rayons serrés, diclio tomes, traversés par des stries d’accroissement lamelleuses, tandis que dans l’espèce russe, les rayons plus larges, non dichotomes, sont à peine sen- sibles sur la moitié antérieure de la coquille, et disparaissent com- plètement sur la partie correspondante du moule, séparée nette- ment de la partie rayonnée par un sillon peu profond. La surface postérieure de la coquille de Belgique est limitée par une arête, qui produit au contour un angle vif, tandis que notre espèce y montre une gibbosité obtuse et un angle émoussé, arrondi. Ces diff érences, observées de nouveau sur l’échantillon de Sterlitamak, établissent bien , ce me semble , une distinction spécifique. Notre coquille , ainsi que celle de M. de Koninck, a trois dents antérieures à la char- nière, mais au lieu d’être parallèles au bord cardinal, elles sont très obliques ; les quatre longues dents lamellaires, postérieures, sont parallèles au bord. 10. Eclmonsia unioniformis. Kon.; le moule de Sterlitamak con- SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. 251 vient plus exactement à la figure donnée par M. de Koninek , qu’à celle de notre ouvrage, dont la forme est plus transverse, et dont les crochets paraissent plus avancés; on aperçoit sur notre moule une impression musculaire antérieure marquée et deux petites côtes très fines près du crochet, dont l’ une se poursuit jusque près de l’extrémité postérieure du bord central, tandis que l’autre, plus courte, tend vers le milieu de ce bord. 11. Cardiomorpha laminata (Phill.) d’Orb. ; le côté antérieur dé- clive, le côté postérieur largement arrondi, les crochets terminaux distinguent cette espèce , dont il faudrait donner une figure plus exacte que celle de Phillips ; quelques uns des vides concentriques près du bord se font remarquer par leur profondeur. 12. Cardiomorpha in gens, nouvelle espèce voisine de la C. corru - gata , M’Coy, dont elle se distingue par le côté postérieur déclive; c’est une forme subtrigone, largement arrondie aux extrémités, dont la postérieure est à peine plus étroite que l’antérieure ; les crochets sont situés au tiers antérieur de la coquille; la forme générale est celle de la Lyonsia Jldaini jurassique, mais le test, grossièrement rugueux et assez épais, indique un genre différent. Longueur, 85 millimètres; largeur, 118; épaisseur d’une moitié, à3. 13. L ' Aæinus ohliquus , M’Coy, rentre probablement dans les Cardiomorphes; les bords antérieur et ventral forment un seul arc hyperbolique dont le bord postérieur est la corde ; une arête an- guleuse, continue depuis le crochet jusqu’à l’extrémité postérieure du côté central, sépare une facette postérieure aplatie. Si le limbe frangé, figuré par M’Coy autour de cette coquille, n’était pas acci- dentel, la détermination deviendrait douteuse, malgré l’identité cle la forme et des dimensions. — là. Aucun doute, au contraire, n’est possible à l’égard de la Cardiomorpha ventricosa , M’Coy, l’espèce la plus curieuse du genre. A là millimètres du crochet, la coquille se replie brusquement dans une direction verticale , par rapport au plan de la commissure, et présente ainsi une surface rompue; la partie repliée devient même rentrante au bord antérieur , ce qui donne lieu au contour caractéristique subquadrangulaire. L’échan- tillon de Sterlitamak ne présente qu’une seule fois ce plissement de la coquille, lequel n’est pas assez grand pour faire juger de sa crois- sance ultérieure. — 15. Cardiomorpha nana, Kon.; les crochets sépa- rés, non recourbés en avant, le bord cardinal droit , coupé posté- rieurement à angle obtus, le contour et les dimensions justifient la détermination de l’échantillon russe. — 16. Cardiomorpha pristina {Ve rn.), d’Orb.; longue de 20 millimètres, et à peine plus large; ainsi la coquille est un peu moins transverse que la figure donnée, 252 SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. avec laquelle, du reste, elle coïncide parfaitement. — 17. Conocdr- diurn uralicum, Vern. ; je ne puis me ranger de l’avis de M. d’Or- bigny, qui réunit cette espèce au C. minax , Phill. , distingué par la face antérieure constamment concave ; voyez aussi les observa- tions de M’Goy. Je puis compléter mes observations sur la couche externe de la coquille indiquée dans le volume sur le pays de la Petchora : jusqu’à l’étranglement, cette couche superficielle cache les côtes à tel point qu’on n’y voit, sur la coquille non dépouillée, que des lignes d’accroissement, très nettes surtout vers les crochets, traversées par des stries longitudinales , microscopiques , effacées elles-mêmes vers le sillon qui détermine l’étranglement ; mais sur l’aile postérieure un faisceau de huit côtes demeure très apparent. — 18. Cardinia ovalis, ,tGoldf.; malgré l’identité des formes et des dimensions de notre échantillon avec la coquille de l’auteur cité, la détermination d’espèces pareilles sans caractère saillant n’est jamais très satisfaisante. — 19. Cypricardia glabrata,Vh\[\. , espèce très renflée, avec une gibbosité, mais comme Phillips le dit : « Tu/nid , no carinated . » Le manque d’une arête la distingue de la C. rhombea, Phill. — 20. San gui nolaria Rœmeri ,Vern. — 21. Lyonsia arguta , Cucullœa , id., Phill.; carb. 1., tab. s. f. 20; longueur, 21 millimètres; largeur, 12 millimètres; épaisseur, 10 milli- mètres ; le bord cardinal postérieur droit est parallèle à une corde du bord ventral légèrement convexe ; l’arête postérieure vers la- quelle se perdent les sillons transverses, le contour, etc., s’accor- dent avec la figure citée, sauf le bord cardinal antérieur rectiligne ; mais on ne peut s’y arrêter , vu que Phillips dit : « The figure is restored at the extremities ! » Cette remarque a probablement échappé à M. de Koninck, lors- qu’il rapporte à la même espèce Y Area arguta de Belgique , dis- tincte déjà par le manque de sillons profonds. Ces sillons sont serrés et peu prononcés sur les premiers 5 millimètres de la lon- gueur de la coquille ; mais, à partir de là, trois à quatre sillons oc- cupent une bande de 5 millimètres de largeur. Gastéropodes. — 1. La seule espèce citée de Sterlitamak est l’ Euomphalus hians , Kutorga, dénommé d’après une fissure, qui me paraît accidentelle; des petits Euomphales pareils de la col- lection de M. Wangenheim peuvent être considérés comme des jeunes cle la variété déprimée de Y E. Dionyei , tel que M. de Ko- ninck l’a représentée dans la Descript. des anim. foss ., sur sa pl. XXIV, fig. h. — 2. Parmi d’autres moules d’ Euomphales peu déterminables, on reconnaît YE. œqualis , Sow., lœvigatus , Kon., tel que le dernier auteur l’a fait dessiner, /. c. , pl. XXVIIÏ, fig. 3. SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. 253 D’autres fragments se rapprochent de Y E. catilloiclcs , Kon. — 3. Avec plus d’assurance on peut citer à Sterlitamak, le Belleroplion hiul- cus, Sow., conservé avec des restes du test. — h. Pleurotomaria coiücn , Phill.; la position delà bandelette du sinus, les stries ar- quées , transverses , recouvrant les tours du côté du sommet, la forme générale rendent cette détermination certaine. — 5. Un autre Pleurotomaire de Sterlitamak me paraît une variété du P. Ivani , Lév., la bande du sinus, aussi large qu’une bande de trois carènes adjacentes du côté de l’ombilic , un peu écailleuse , au-dessous de laquelle chaque tour présente cinq carènes jusqu’à la suture, et au-dessus de laquelle on voit, sur le dernier tour, sept carènes du côté de l’ombilic, s’accorde assez bien avec la co- quille belge ; seulement l’angle entre le dos de chaque tour et son côté tourné vers la spire est moins prononcé dans nos échantillons. — 6. Murçhisonia angulata , Phill., espèce un peu embrouillée; l’échantillon de Sterlitamak convient à la figure à tours non angu- leux donnée par M. de Koninck, l. c. , pl XXX VIII, fig. 8 ; sa lon- gueur totale est de 8 millimètres; celle du dernier tour, 3à milli- mètres; diamètre de ce tour, 3 millimètres et demi ; les tours sont garnis de carènes, dont deux plus fortes, situées sur le dos de chaque tour, trois du côté de la spire, quatre à cinq du côté de l’ombilic. Un petit fragment pourrait indiquer le Turbo biserialis , Phill., mais d’une manière douteuse. — 7. Trochus subhelicinoides , d’Orb., Pleurotomaria helicinoides , M’Coy ; c’est avec raison que l’auteur irlandais compare sa forme à celle de Y Euomphalus gualteriatus , Schloth . ; il pensa que l’ombilic étroit l’en distingue, mais une diffé- rence plus apparente est produite par la convexité des tours du côté de la spire, ce qui rend la carène plus obtuse, et presque médiane par rapport à la hauteur des tours. TSatica Omaliana , Kon., telle que vous l’avez décrite dans votre ouvrage. Céphalopodes. — - La collection contient en espèces bien connues les Goniatitcs cyclolobus et striatus de Phillips; le dernier se re- connaît à la forme générale, à l’ombilic étroit, aux stries longitu- dinales du dos , aux étranglements du moule , et enfin au lobe latéral unique et aigu. Je place dans les Goniatitcs un fossile, que vous avez bien décrit dans un appendice au Naulilus bicarinatus à cause d’un étranglement du moule sur l’échantillon de Sterlita- mak , tel qu’on les voit sur les Ammonites , ce qui l’éloigne des Nautiles. Sept bandelettes planes, d’égale largeur, séparées par des carènes très fines, recouvrent longitudinalement les tours. La bandelette dorsale est partagée par une ligne médiane peu sail- lante ; la bandelette adjacente , de chaque côté , présente comme â5Ü SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. des gradins d’échelle produits par des sillons transverses; la troi- sième bandelette latérale est limitée par le contour anguleux de l’ombilic profond et ouvert. Je propose le nom de G. sep tenu s pour cette coquille ; son diamètre , 18 millimètres ; le diamètre du contour de l’ombilic égale 6 millimètres ; la coupe du dernier tour, de forme hyperbolique, large de 11 millimètres et haut de G millimètres. 11 se trouve encore trois espèces de Nautiles dans la collection, dégarnies de dessin sur les fragments conservés du test, sans angles et sans carènes; leur siphon est médian, et leurs cloi- sons sont simplement convexes. Je ne crois pas qu’on puisse bien fixer ces espèces, et je me contenterai d’indiquer que l’espèce la plus fréquente se rapporte peut-être au Nautilus glohalus , Sow., tel que Phillips le représente à contour d’ombilic non anguleux, une autre peut-être au N . Leecilteanus , Kon., et la dernière au Nautilus pinguis $ M’Coy, Coyanüs , d’Orb. Crustacés. — Cythere sphœridiuw , nouvelle espèce; son contour est tout à fait circulaire ; son bord cardinal droit la distingue des congénères au point de rendre douteuse sa position générique ; les valves isolées présentent des hémisphères lisses de 10 à 12 milli- mètres de diamètre; un échantillon montre une marge recou- vrante repliée, séparée de la surface par une carène anguleuse , et ornée d’une série de points élevés ; cette marge , analogue à ce qu’on a observé dans d’autres Cyproïdes , désigne bien la nature de ces petits corps. Une queue, d’une grande espèce de Phi l li psi a, est malheureusement trop encroûtée pour admettre la détermination de l’espèce. Deux tètes N En cri nés de la collection ontégalementsubi un encroûtement pareil, de sorte qu’on ne peut les rapporter qu’avec doute aux genres Cyathœrinus et Rhodocrinus. Les Polypiers paraissent rares à Sterlitamak , et je n’ai trouvé dans la collection que la Glauconome grandis de M’Coy et Y Am- plexus côralloicles de Sowerby. M. Delesse fait la communication suivante sur le granité . Sur le granité , par M. Delesse. L’étude des roches granitiques montre qu’elles peuvent se rap- porter à deux granités qui sont bien distincts par leurs caractères minéralogiques et par leurs caractères géologiques. Ces deux gra- nités sont surtout très distincts dans les montagnes des "Vosges, que je vais prendre pour exemple, afin de mieux fixer les idées. J’appellerai l’un de ces granités, granité des Ballons , et l’autre, ara ni te des Vosges. Les caractères qu’ils présentent sont les suivants : SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. 255 1° Le granité des Ballons contient du quartz, de l’orthose, du feldspath du sixième système, du mica foncé, attaquable par les acides; et assez souvent de l’hornblende. Le quartz est peu abon- dant. L’orthose est souvent fauve ou rougeâtre. L’hornblende est ordinairement accompagnée de sphène. La composition de son orthosè et de son feldspath est donnée par le tableau qui suit : SiO3 AUO3 Fe503 MaO CaO MgO Ko Na O HO Somme. 8 Orlliose, . . . 64,91 19,16 trace. >, 0,78 0,65 1 1 ,07 2,49 » 99,36 | Feldspath. . . 58,55 25,26 0,30 trace. 5,03 1,30 1 ,30 6,44 0,91 99,29 Ce granité est fréquemment porphyroïde ; il peut même conte- nir une pâte feldspathique : ses cristaux, et notamment ceux d’or- tliose, atteignent cependant de grandes dimensions. La teneur en silice des échantillons que j’ai analysés est com- prise entre 63 et 71 pour 100. 2° Le granité des Vosges contient du quartz , de l’orthose , du feldspath du sixième système, du mica foncé, attaquable par les acides; et, de plus, du mica clair non attaquable par les acides. L’orthose et le quartz constituent presque entièrement ce gra- nité. Le feldspath du sixième système y est très peu abondant, et il peut même y manquer complètement. Le mica clair y est moins abondant que le mica foncé ; il est en outre disséminé d’une ma- nière moins régulière. On y trouve accidentellement du grenat, de la pinite, du graphite. Il enveloppe quelquefois des amas de calcaire cristallin. # Ce granité est généralement grenu, et il prend souvent la struc- ture gneissique. La teneur en silice des échantillons que j’ai analysés, est com- prise entre 66 et 77 pour 100. — Il importe d’ajouter que la teneur en silice du feldspath du sixième système dans ces deux granités est toujours inférieure à celle de Faillite : elle est comprise en effet entre celle de Foligo- clase et entre celle de Fandesite; par conséquent aucun de ces gra- nités ne contient de Faillite. Lorsqu’on étudie le gisement des granités que je viens de décrire, on reconnaît que le granité des Ballons est éruptif et qu’il formé les parties les plus élevées de la chaîne granitique; au contraire, le 256 SÉANCE DU 47 JANVIER 1853. granité des Vosges a plutôt les caractères d’une roclie métamor- phique, et il forme les contre-forts de la chaîne granitique : de ces deux granités, celui dont la teneur en silice est ordinairement la plus petite et la teneur en alumine la plus grande, est donc celui qui est le plus récent. — La distinction de deux granités dans la chaîne des Yosges n’est pas simplement locale et elle me paraît présenter beaucoup d’im- portance à cause de sa généralité; une distinction analogue peut en effet s’établir dans la plupart des régions granitiques, et il serait facile de citer à cet égard de nombreux exemples parmi lesquels je mentionnerai seulement la rive droite du Rhin , la Normandie, la Bretagne , l’Auvergne, l’Irlande, etc. La généralité des observations qui précèdent résulte d’ailleurs de ce que les phénomènes géologiques qui ont formé les roches granitiques se sont reproduits les mêmes à différentes époques, et surtout de ce qu’ils embrassent une très grande échelle; par suite, comme l’a fait remarquer M. G. R.ose, il n’est pas étonnant que l’observation ait montré, dans la plupart des régions granitiques, deux granités, dont l’un est porphyroïde et à un seul mica , tandis que l’autre est grenu et a deux micas ; le granité à un mica est d’ailleurs plus récent et généralement moins riche en silice que le granité à deux micas dans lequel il a fait éruption. M. Deîesse présente ensuite les développements suivants sur la transformation du granité en arène et en kaolin. Sur la transformation du granité en arène et en kaolin , par M. Delesse. Les recherches de MM. Berthier, G. Bischof, Fournet, A. Bron- gniart, Forclihammer, ont jeté du jour sur les circonstances dans lesquelles s’opère la transformation du granité en arène et en kaolin. Je vais faire connaître ici, avec quelques détails, comment cette transformation s’opère dans les granités des Yosges, en m’occupant plus spécialement de la transformation du granité en arène , qui est la plus fréquente. J’énumérerai ensuite les causes auxquelles on peut attribuer ces phénomènes. Caractères généraux de Carène. — L’ arène s’observe dans les Yosges, à Saint-Eyppolite, au Mont-Chauve, près de Barr, à Orbey, à Andlau, au Plain de Corravillers, à Saint-Bresson, à Plombières, à Turkeim, dans le val de Munster. U arène est généralement grise; cependant elle est aussi jau- SÉANCE Dlî 17 JANVIER 1853. 257 nâtre, brunâtre, rougeâtre, rouge lie de vin, violacée ; elle doit ses couleurs variées aux oxydes de fer et de manganèse. Elle provient tantôt du granité porphyroïde et à un mica, tantôt du granité grenu et à deux micas. Au milieu du granité transformé en arène , il y a quelquefois des blocs arrondis formés par un granité qui n’est que peu ou point décomposé ; dans certains cas, ces blocs présentent même, comme dans le basalte, des enveloppes concentriques qui sont de moins en moins décomposées à mesure qu'on se rapproche du centre Ils ont ordinairement une composition minéralogique un peu différente de celle de Y arène qui les enveloppe ; c’est ce qu’il est facile de constater, surtout quand ils sont séparés de cette arène d’une manière nette. Minéraux de l'arène. — Je vais maintenant passer rapidement en revue les divers minéraux de Y arène, et je prendrai pour exemple Y arène de Plombières. Tous les minéraux de Y arène sont très friables ; mais cela a sur- tout lieu pour le quartz , qui est complètement fendillé. L 'orthose est en cristaux blancs ou grisâtres qui ont perdu leur éclat et leur translucidité, et qui sont souvent imprégnés d’hy- droxyde de fer brunâtre. L e feldspath du sixième système n’est généralement plus recon- naissable lorsque la décomposition est un peu avancée ; on voit seulement quelques taches blanches qui proviennent de son kaolin. Le mica a pris une teinte bronzée plus claire; sa perte au feu est plus grande que lorsqu’il esta l’état normal, car j’ai constaté qu’elle peut être de plus de 5 pour 100 : de tous les minéraux du granité, le mica est cependant de beaucoup celui dont les propriétés physiques et chimiques sont le moins altérées, et j’ai reconnu, par un essai, qu’après calcination, la composition de ce mica de Y arène est à très peu près la même que celle du mica ordinaire du granité. V hornblende a pris une couleur verdâtre ouvert grisâtre; le plus souvent elle est complètement pseuciomorphosée, et elle s’est changée en un hydrosilicate d’alumine, de magnésie, de chaux et de fer qui est facilement rayé par l’ongle. Cette hornblende pseudo- morphosée s’observe aussi dans des granités cpii ne sont pas transformés en arène, car, dans les Vosges, on la retrouve dans les granités compactes du Rothenbach , du Drummont , de Saint- Nicolas, de Saint- Amarin. Orthose de V arène. — J’ai fait un essai de Y or ih ose de Y arène qui, à Plombières, borde la rive gauche de la vallée de l’Ogronne, un peu avant d’arriver à la fontaine Amélie. Soc, géol., 2e série, tomeX. 17 258 SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. Cet orthose est en cristaux qui sont blancgrisàtre , légèrement colorés en brun par de l’hydroxyde de fer. Il a des clivages beau- coup plus faciles que ceux de Y orthose non décomposé; il est , en effet, très friable, et il peut même s’égrener entre les doigts. 11 retient de l’eau , mais cette eau n’est pas combinée comme dans le kaolin, et elle se dégage par une simple dessiccation ; l’ana- lyse suivante montre d’ailleurs que sa perte au feu est très faible après cette dessiccation. J’ai trouvé pour sa composition : Silice. ................ 64, i 6 Alumine avec un peu d’oxyde de fer. . 19,16 Chaux. ................ 0,56 Magnésie 0,55 Potasse et un peu de soude (diff.) . . . 14,97 Perte au feu. .... ....... 0,60 Somme. .... 100,00 Si l’on compare la composition de Y orthose de Y arène à celle de Y orthose du granité de Plombières qui a été donnée ci-dessus (page 255), on voit que cette composition est la même ; car les diffé- rences entre les analyses de ces deux orthos es sont tout à fait de l’or- dre de celles que peut présenter un minéral dans une même roche. Il est très remarquable que la composition chimique de cet orthose de Y arène n’ait point encore varié, bien qu’il ait perdu sa cohésion et que ses propriétés physiques soient complètement alté- rées; c’est seulement par la suite que sa composition chimique sera modifiée ; alors il perdra ses alcalis, une partie de sa silice ; il se combinera avec de l’eau et il se changera en kaolin. Comme Y arène est d’ailleurs très perméable à l’eau, on conçoit que l’eau pure ou chargée d’acide carbonique sera le principal agent de la transformation de Y arène en kaolin . L’ orthose a donc subi une simple désagrégation dans Y arène ; tandis que sa décomposition est complète dans le kaolin. En résumé, quand le granité se transforme en arène , ses miné- raux subissent des altérations, non seulement dans leurs pro- priétés physiques , mais encore dans leurs propriétés chimiques. Le feldspath du sixième système et l’amphibole hornblende sont complètement désagrégés et décomposés : lemica, bien qu’il ne soit pas désagrégé, absorbe cependant une certaine quantité d’eau ; enfin le quartz et l’orthose sont fortement désagrégés , mais ils ne sont pas décomposés. L’analyse précédente démontre donc qu’on peut distinguer , comme l’a fait M. Fournet, deux phases dans la transformation du SÉANCE DU 17 JANVIER 1855. 259 granité en kaolin. Dans la première phase, le granité se transforme en arène , et il y a une simple désagrégation de Y orthose ; dans la deuxième phase Y arène se transforme en kaolin , et il y a une décomposition complète de Vorthose. Causes de la transformation, — Les causes qui ont produit la transformation du granité en arène et en kaolin sont encore peu connues ; je vais énumérer cependant celles de ces causes qui pa- raissent avoir plus spécialement fixé l'attention des géologues , en distinguant autant que possible celles auxquelles on attribue la désagrégation , de celles auxquelles on attribue la décomposition. Il est toutefois difficile de séparer complètement ces deux causes, car on comprend qu’il y a une intime connexion entre elles , et que toute cause de désagrégation est , par cela même , une cause de décomposition. - — Les causes de la désagrégation généralement admises sont : 1° une action moléculaire , 2° un changement de température , 3° une pénétration de gaz. 1° — - M. Fournet fait remarquer que la désagrégation peut résulter d’une action moléculaire produisant spontanément dans l’ortliose un dimorphisme ou un changement isomérique. Il compare ce qui se passerait alors dans l’orthose, soit à ce qui a lieu dans l’acide arsénieux qui devient opaque, soit à ce qui a lieu dans le verre qui s’exfolie par écailles , quand il a été enfoui sous terre pendant de longues années (1). L’hypothèse de M. Fournet qui attribue la désagrégation à Y ac- tion moléculaire rend d’ailleurs assez bien compte des anomalies fréquentes que présente la désagrégation qui s’exerce seulement sur certains cristaux , sur certains échantillons ou sur certains amas d’un même granité. Il est facile de citer des exemples de ces anomalies. En effet, bien que la transformation du granité en arène précède généralement la transformation de i’orthose en kaolin , cette der- nière transformation peut aussi avoir lieu sans que le granité en- tier passe à l’état d’arène. Ainsi , par exemple , dans les "Vosges, le granité à un mica du Drummont, contient, près d’Urbeis et à la limite du schiste de transition, des cristaux isolés d’orthose qui sont changés en kaolin ou même en Halloysite ayant une belle couleur jaune. Cependant le granité renfermant ce kaolin n’est aucune- ment désagrégé ; en sorte que la désagrégation a dû se produire (1) Fournet, Annales de chimie et de physique v 1833, t. LY„ p. 240-244. 260 SÉANCE DU 17 JANVIER 1858. d’une manière capricieuse , et seulement dans ceux des cristaux d’orthose qui sont changes en kaolin Il serait aisé de citer encore d’autres exemples montrant que des cristaux isolés d’orthose peuvent se changer en kaolin , bien que ces cristaux se trouvent dans des roches granitiques qui, non seulement, ne sont pas à l’état d’arène, mais qui sont même très compactes. J’ajouterai d’ailleurs que souvent certains blocs de granité enve- loppés dans un poudingue se sont complètement désagrégés posté- rieurement a leur dépôt dans ce poudingue , tandis que d’autres blocs granitiques, placés depuis le même temps dans les mêmes circonstances, n’ont subi absolument aucune altération. D’un autre côté, M. Fournetfait remarquer que la désagrégation des amas et des massifs de granité présente des anomalies analo- gues ; car à Aiie, par exemple, le granité s’est transformé en kaolin suivant des zones horizontales qui sont séparées par deux amas de granité non désagrégés ayant chacun 2 mètres d’épaisseur. 11 est vrai que la composition minéralogique des granités per- mettrait quelquefois d’expliquer ces anomalies, mais, en tout cas, la désagrégation et la kaolinisation de cristaux isolés d’orthose qui sont enclavés dans un granité compacte ne peuvent guère se comprendre qu’en admettant une action moléculaire. L'action moléculaire permet donc d’expliquer pourquoi la trans- formation du granité en arène est généralement si capricieuse, pourquoi elle a lieu seulement dans certaines parties du granité , tandis qu’elle n’a pas lieu dans d’autres parties qui paraissent cependant être dans les mêmes circonstances. 2° — Il est évident, au contraire, que ces anomalies ne peuvent s’expliquer d’une manière satisfaisante par un changement brusque de température , lors même que ce changement de température pro- duirait la désagrégation du granité. En effet, quand on calcine un fragment de granité dans un creuset, il est bien vrai qu’il devient souvent assez friable pour s’égrener entre les doigts; mais c’est ce fragment tout entier et non pas seulement certaines parties du fragment qui se désagrègent. Je ferai remarquer cependant d’une autre côté que lorsqu’une roche, à l’état de fluidité ignée, est injectée dans une autre roche, les effets résultant de la chaleur sont généralement très bornés, et qu’ils disparaissent à une petite distance du contact; la désagréga- tion du granité ne doit donc avoir été produite par la chaleur que dans des circonstances accidentelles. De plus, il est assez fréquent d’observer l’arène au contact de SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. 261 roches qu’on regarde habituellement comme ayant une origine ignée. En effet, dans les Vosges, et notamment au Mont-Chauve, près de Ban* , l’arène est traversée par de nombreux filons de minette. .Mais il importe de remarquer que souvent aussi le granité ne s’est pas transformé en arène, bien qu’il soit au contact de filons de minette ou de roches tels que les trapps , dont l’origine ignée est incontestable. 3° — M. d’ümalius d’Halloy explique, il est vrai, l’anomalie que je viens de citer, par le dégagement des gaz qui, dans certains cas, ont accompagné ces éruptions ; suivant cet habile géologue , il n’y aurait eu transformation du granité en arène, ou même en kaolin , que dans le cas où les éruptions de roches d’origine ignée auraient été accompagnées de dégagement de gaz. M. Forchhammer pense, en outre, que la vapeur d’eau chaude est la cause, non seulement de la transformation du granité en arène, mais même de sa transformation en kaolin (1). J’observerai cependant que les filons de fer oligiste pailleté qui sont si fréquents dans le granité ont essentiellement le caractère de roches dans la formation desquelles les gaz ont joué un grand rôle ; tout porte même à croire que, dans ces filons, le fer oligiste s’est produit par un dégagement de gaz ou par sublimation, comme il se produit encore dans les fissures des volcans. Or, si le granité srest quelquefois changé en arène au contact de ces filons, généra- lement aussi il n’a subi aucune altération. Toutefois, lorsqu’il y a été pénétré par un dégagement de gaz fluorés, le granité a, le plus souvent, subi une altération. En effet, dans le département de Samie-et-Loire, par exemple, M. Drouot a reconnu que le granité est complètement décomposé au contact des gîtes d’oxyde de manganèse et au contact des filons avec chaux fluatée qui sont associés à l’oxycle de manganèse : c’est ce qu’on observe, en effet, à Vaux-Renard, et surtout dans les exploitations de manganèse de Romanèche et des Espagnes. Mais il serait facile | de citer des exceptions montrant que le granité n’a pas toujours été décomposé, lors même qu’il a été pénétré par un dégagement de gaz fluorés, et je me contenterai de signaler ici une seule de ces ex- ceptions. Le granité qui forme la plus grande partie du Sliève -Bonard et du Mourne-Mountain dans le N.-E. de l’Irlande , est un granité fort remarquable , en ce qu’il est complètement celluleux ; il est (1) Forchhammer, Paggendorff Ann., 1833, p. 331. — Ueber die Zusammensetzung der Porcellanerde and dire Enstehung ans den FehLpathe. 262 SÉANCE DU 17 JANVIER 1858. même assez celluleux pour qu’on puisse l’employer avec beaucoup d’avantage comme pierre meulière. Les cellules de ce granité accusent visiblement un dégagement de gaz qui a eu lieu lorsque le granité n’était pas encore entière- ment solidifié ; de plus, les minéraux fluorés, tels que la topaze, le mica, qui tapissent très fréquemment ces cellules, montrent que les gaz qui se dégageaient au moment de la cristallisation de ce granité étaient des gaz fluorés (1). Or, bien que le granité du Mourne-Mountain ait été complète- ment pénétré par des dégagements de gaz , et notamment par des dégagements de gaz fluorés qui devaient tendre à corroder tout ce qu’ils rencontraient, il est très remarquable qu’il n’ait été, ni désagrégé , ni kaolinisé ; sa transformation en arène et en kaolin est tout à fait locale , comme cela a lieu pour les autres granités. Cet exemple montre donc bien que le dégagement de gaz , même fluorés, dans un granité, ne suffit pas toujours pour le transformer en arène ou pour lui faire éprouver une désagrégation. — J’ajouterai, d’ailleurs, que d’après des expériences que j’ai faites dans ces derniers temps, je suis porté à croire que si le dégagement de gaz ou de vapeur d’eau a opéré la transformation de certains granités en arène, c’est seulement dans des circonstances très excep- tionnelles et lorsque le dégagement ou la pénétration de ces gaz pro- duisait, en même temps, un changement brusque de température. En effet, j’ai pris divers granités qui provenaient des Vosges, de la Normandie et de la Bretagne. Ces granités avaient des caractères minéralogiques très variés; ils contenaient, tantôt un seul mica, tantôt deux micas; quelques uns étaient amphibo- liques : je les ai placés dans une chaudière à vapeur, de manière que les uns fussent plongés dans l’eau et les autres dans la va - peui' d’eau ; d’autres ont d’ailleurs été mis dans un cylindre de fonte dans lequel arrivait seulement de la vapeur sèche. Tous ces granités sont restés dans la chaudière et dans le cylindre pendant dix ou quinze jours, ou même pendant un mois; mais bien qu’ils fussent dans une eau liquide ou en vapeur , dont la température atteignait à peu près 170°, et la pression fi atmosphères et demi, ils ne se sont aucunement transformés en arène, ils n’ont pas subi de désagrégation , et ils ont été retrouvés tout aussi résistants et tout aussi compactes qu’ils l’étaient avant. — Je passe maintenant aux causes auxquelles on attribue plus spécialement la décomposition de l orthose et la transformation du granité en kaolin. - (4) Daubrée, Annales des mines , 4e sér., t. XIX, p. 684. SÉANCE DU 17 JANVIER 1853. 263 Ces causes sont : 1° Y infiltration , 2° Y action électrique , 3° la composi tion rn inéralogiq ue. 1° — L’ infiltration joue certainement le rôle le plus important dans la décomposition des minéraux du granité : elle a même pu contribuer aussi à leur désagrégation, car dans les Vosges, notam- ment, l’arène s’observe souvent dans les vallées et près des lignes de Thalweg, c’est-à-dire dans des endroits dans lesquels le granité a dû être pénétré par une grande quantité d’eau qui provenait des sources produites par les bassins hydrographiques environnants. L’arène s’observe encore fréquemment à la jonction des terrains granitiques et des terrains stratifiés. Or , on sait que dans les ter- rains granitiques les sources se trouvent aussi le long des failles et près de la jonction de deux terrains : par conséquent, dans ce der- nier cas, la désagrégation et la décomposition du granité peuvent également tenir à l’action des sources , et par suite à X infiltration. Au premier abord il paraît assez difficile d’admettre qu’une roche, aussi compacte que le granité, soit perméable à l’eau ; il suffit cependant d’examiner à la loupe certains granités pour se convaincre qu’ils sont traversés par un grand nombre de cavités anguleuses et microscopiques dans lesquelles il s’est développé divers minéraux, notamment de la chlorite et des carbonates ; c’est, par exemple , ce qu’on reconnaît facilement pour les protogines. Du reste, les pseudomorphes qu’on observe assez fréquemment dans les minéraux du granité , et qui ont eu lieu , non pas seule- ment près de quelques fissures , mais dans toute la masse de la roche, démontrent bien que X infiltration est un phénomène très général dans le granité. On doit surtout à M. G. Bischof d’avoir appelé l’attention des géo- logues sur le rôle important que X infiltration joue dans la décom- position des roches , et depuis longtemps aussi M. Fournet a admis que la transformation de l’orthose désagrégé en kaolin devait être attribuée à une infiltration d’eau chargée d’acide carbonique. M. Mitscherlich a fait remarquer, d’un autre côté, que dans certains cas X infiltration de l’eau, rendue acide par l’oxydation de la pyrite de fer, a décomposé le feldspath, et l’a même transformé en argile. 2° — L 'action électrique résultant du contact de deux roches diffé- rentes a encore pu être une des causes de décomposition du granité. Il est certain , en effet, que les pseudomorphoses , et par suite les décompositions , sont surtout fréquentes à la séparation de deux roches. Mais bien que MM. A. Brongniart et Malagutti soient par- venus à décomposer du feldspath sous rinfiuence de l’électricité produite par la pile voltaïque, il me paraît qu’on a beaucoup SÉANCE DI! 17 JANVIER 1858; 26/e exagéré l'importance cie lY/ejTw électrique dans la kaolinisation : les expériences qui ont été faites jusqu’à présent ne permettent pas, en effet, de se rendre compte du rôle joué par X action électrique dans la kaolinisation, et il est probable qu’une partie des phéno- mènes attribués à X action électrique, développée par le contact de deux roches différentes, résultent simplement de l’infiltration qui s’opère toujours avec plus de facilité à la séparation de ces deux roches. 3° — Enfin, toutes les autres circonstances restant les mêmes, la composition minéralogique influe nécessairement sur la décompo- sition du granité ; car, lorsqu’on examine la surface d’un bloc de granité exposé à l’action atmosphérique, on reconnaît que ses cris- taux d’orthose restent en saillie, tandis que le feldspath, dans lequel la soude est l’alcali dominant, est déjà complètement kaolinisé ; toutes choses égales d’ailleurs, ce dernier feldspath se décompose donc plus facilement que l’orthose , et par conséquent il est facile de concevoir que plus un granité sera riche en feldspath du sixième I système, plus sa décomposition sera facile. — Bien que les causes de décomposition qui viennent d’être énu- mérées paraissent très faibles, il importe du reste d’observer pour s’expliquer leurs effets, qu’elles ont agi sur une échelle gigantesque et pendant un temps géologique , c’est-à-dire pendant un temps qui , pour notre imagination, est, en quelque sorte, illimité. — F o résumé, les causes qui paraissent avoir influé le plus sur la transformation du granité en arène et en kaolin , c’est-à-dire sur sa désagrégation et sur sa décomposition , sont, d’une part, X action moléculaire , et accidentellement le changement de température , ainsi que la pénétration par des gaz; d’autre part, X infiltration, 17/e- ! tiori électrique et la composition minéralogique. La kaolinisation du granité est donc un phénomène très com- plexe , et elle résulte de causes très diverses ; par conséquent , il n’est pas étonnant que cette kaolinisation présente de nombreuses anomalies, qu’elle s’observe dans des circonstances très variées, et h qu’elle ne se soit pas toujours produite quand un granité a été soumis à l’action d’une ou de plusieurs des causes qui viennent d’être énumérées. Parmi ces causes, celles qui ont joué le rôle le plus important paraissent être X action moléculaire pour la désagrégation , et X infil- tration pour la décomposition. M. Dam oui* dit que M. Fournet a publié, en 1 83/j , un Mémoire sur cette intéressante question de la transforma- tion du feldspath en kaoiin. Dans ce mémoire, M. Fournet ad- SÉANCE DU 17' JANVIER 1853. 265 met qu’il y a eu deux actions successives dans le phénomène de transformation du feldspath en kaolin : la première, purement mécanique; la seconde, chimique. Certaines masses granitiques, au moment de leur formation, s’étant trouvées dans un état particulier de compression ou d’équilibre instable , doivent tendre à se désagréger, présentant ainsi un phénomène analo- gue à celui que nous observons sur quelques espèces miné- rales, la laumonite, par exemple. Ce n’est qu’après cette désa- grégation toute spontanée que les agents atmosphériques ou chimiques exercent leur action décomposante sur le granité. L’eau, chargée d’acide carbonique, est alors en état de dis- soudre la presque totalité de la base alcaline unie, dans des rapports atomiques, à une partie de la silice du feldspath ; et il ne reste en place qu’un silicate alumineux ayant habituelle- ment la formule : A1J0S, SiO5 particulière au kaolin. Ces observations de M. Fournet semblent avoir été confirmées par les recherches ultérieures dq, chimistes distingués, MM. Berihier, Ebelmen, Forchhammer, Malagutti, etc. M. d’Omalius d’HalIoy présente quelques objections aux hy- pothèses proposées par M. Delesse pour expliquer la décompo- sition du granité. Il ne pense pas d’abord que l’infiltration puisse jouer un grand rôle dans le phénomène, car le granité est une roche compacte et imperméable, pour laquelle il conçoit difficilement une infiltration des eaux. il pense au contraire que l’injection de roches ignées, telles que la minette, et surtout le dégagement de gaz qui font accom- pagnée, ont été la cause principale de la décomposition du gra- nité. En effet, cette décomposition s’observe plutôt dans le sens vertical que dans le sens horizontal. Si cette décomposition n’a pas toujours eu lieu au contact des filons de minette, cela doit être attribué uniquement à ce que l’injection des filons de minette dans le granité n’a pas toujours été accompagnée de dégagements de gaz. La décomposition du granité au contact de la minette donne même en quelque sorte un caractère à l’aide duquel on peut reconnaître si l’éruption de cette dernière roche a été accompagnée de dégagements de gaz ; car la péné- tration du granité par la minette à l’état de fusion ignée 266 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1858. n’a pas suffi pour produire la décomposition du granité. Si la décomposition de certains granités donne lieu à des boules, cela tient d’ailleurs à un groupement produit par la cristallisation, groupement par suite duquel certaines parties ont mieux résisté que d’autres à l’action des gaz qui pénétraient le granité. M. Hébert objecte, relativement à ce qui vient d’être dit en dernier lieu par M. d’Omalius d’Halloy, que la décomposition en boules lui paraît indiquer plutôt des influences atmosphé- riques que l’action d’une roche ignée comme la minette. Il ne pense pas que ces boules doivent être attribuées à la cristalli- sation. Il ajoute que beaucoup de roches, telles que les grés, les calcaires, s’arrondissent et se délitent en boules, bien qu’on ne puisse pas supposer qu’elles aient été soumises à l’action de dégagements de gaz. Séance du 7 février 1858. PRÉSIDENCE DE M. VERNEUIL. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Le Président annonce ensuite quatre présentations. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part deM. le ministre de la justice, Journal des savants, janvier 1853. De la part de M. À. Dumont, Carte géologique de la Belgique , 9 feuilles colombier; Bruxelles, à l’établissement géographique de Ph, Van der Maelen. De la part de M. Fournet, Observations météorologiques faites a Saint -Bambert , en Bugey ( Ain ), par M. Sauvanau , publiées par M. Fournet (présentées à la Soc. nat. d’agric., d’hist. nat. et des arts utiles de Lyon, dans la séance du 20 fé- vrier 1852); in-8, 61 p. Lyon, 1852. Imprimerie de Barret. De la part de M. F. -J. Pictet, Traité de paléontologie . ou SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 267 histoire naturelle de animaux fossiles considérés dans leurs rapports zoologiques et géologiques , 2e édit., t. Ier , avec I atlas in à, lre!ivr., planches 1 à 28- in-8. Paris,, 1853. Chez J. = B. Baillière. De la part de M. Joseph Prestwich jun., On tke structure of the strata, etc. (Sur la structure des couches entre l’argile de Londres et la craie dans les terrains tertiaires de Londres et du Hampshire, 3e partie) (extr. du Quart. Journ . of the geol. Soc. of London , août 1852, vol. VIII) -, in -8, 3 h d., 2 pi. De la part de M. le commandant Delcros, Notice sur le rap- port fait en 1851, ci V Académie de Munich , par M . La mont, sur Vhypsométrie et la météorologie de la Bavière (extr. du t. XVIII, n° 9 des Bulletins des séances de V Acad, roy . de Belgique )• in-8, 16 pages. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXVI, n«« 3 à 5. Annales des mines , 5e série, t II, 5e livr. de 1852. L’Institut , 1853, nos 99 h à 996. Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, 5e année, n° 52, décembre 1852. Société impériale et centrale d* agriculture. — Bulletin des séances , 2e série, t. VIII, n° 2. The Athenœum , 1853, nos 1317 à 1319. Le Président annonce la mort subite de M. Laurillard. Il retrace en quelques mots la carrière du savant collaborateur de Cuvier. M. Laurillard avait choisi la spécialité des ossements fossiles de vertébrés, et sa perte laisse une lacune difficile à combler. M. Charles Deville fait part de la mort du général Acosta. II rappelle les progrès que la science géologique était en voie défaire dans la Colombie par les travaux de ce zélé naturaliste. M. de Brimoni donne lecture de l’extrait suivant d’une lettre qui lui a été envoyée par M. de Zigno. 1° Nouveau gisement de poissons fossiles , par M. de Zigno. Padoue , \ 4 janvier 1853. Sur le versant méridional des Set te comuni , dans le Vicentin, à 268 SÉANCE Î)U / FÉVRIER 1853. 30 milles environ à l’E. de Bolea, et précisément le long du tor- rent Chiavon , dans les collines tertiaires qui se trouvent entre Schio et Morostica , existe un gisement, inconnu jusqu’à ces der- niers temps, de poissons fossiles (aussi riche que celui, désormais célèbre de Bolea), parmi lesquels j’ai reconnu le La te s gracilis et le Lamna clegans , Agas. Dans la même localité, abondent les plantes fossiles, dont on trouve des échantillons d’une beauté et d’une grandeur remarquable. J’y ai trouvé le Bambusium sepul- tum, Ung., le Sm ilari tes g randifolia , LJ ng , V Avançantes Sternberg/ 1\ Gopp. Je n’ai pu constater les rapports de gisements entre les couches à poissons et celles à végétaux. Les poissons se rapportent à des espèces qui se trouvent à Bolea (le Lamna elegans excepté), tandis que les plantes indiqueraient un terrain plus récent. La flore de cet endroit présente aussi cette différence comparativement à Bolea, que les plantes terrestres y prédominent, et qu’on n’v trouve jamais ces belles Belernnites qui peuplent les couches de Bolea. Le professeur Massalongo, de Vérone, auquel j’ai fait connaître cette localité, s’occupe d’un travail sur cette flore, dont il a déjà publié plusieurs espèces nouvelles et fort remarquables. 2° Découverte d’une flore jurassique analogue a celle de Scarboroug , dans les couches oolitiques des Alpes 'véni- tiennes. Padoue, 14 janvier 1853. Depuis bien des années, on avait accidentellement découvert des plantes fossiles dans le calcaire gris du mont Spitz de Botzo, dans les Sette comuni du Vicentin. L’abbé Fortis, dans ses mé- moires, l’avait annoncé vers la fin du siècle passé, et plusieurs échantillons gisaient dans nos cabinets depuis longtemps, sans que personne se fût jamais occupé de les étudier. Avant examiné avec le plus grand soin cette localité, j’ai pu constater que la couche dans laquelle sont ces empreintes végé- tales, et qui a une épaisseur d’environ un pied, se trouve dans un groupe de stratifications de calcaire compacte, superposé à nos couches oolithiques à Terebratula spheroidalis , et recouvert à son tour par les couches CalUmennes à Ammonites athleta , viator , Hommairci , d’Orb. , Terebratula diphya , etc., et que conséquemment elle doit être rapportée à l’étage Bathonien de M. d’Orbigny. Ce banc se fait voir aussi plus bas, vers Boana, et dans la pro- SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 269 vince de Vérone, près Sel va di Proqao , dans un endroit appelé i Pcrnigotli. Ayant fait exploiter en grand toutes ces localités, je suis parvenu à réunir une assez riche collection d’environ 400 échantillons, et mes études sur ces matériaux m’ont mis à même de pouvoir conclure : 1° Que le banc à végétaux fossiles de Botzo , Bocina et Pernigotti , dans les Alpes vénitiennes, doit être rapporté bien certainement à l’étage Bathonien de M. d’Orbigny ; 2° Que les plantes appartiennent toutes à la flore terrestre; 3° Qu’elles ont la plus grande analogie avec la flore jurassique de Scarborough et de Mamers ; 4° Qu’elles n’offrent pas une grande variété d’espèces, car sur /| 00 échantillons, on trouve à peine 40 espèces; 5° Que les espèces (dont la plupart sont nouvelles) se rappro- tent aux genres Equisetites , Sagenopteris , Cjcaditcs, Zamites , Oto- zamitcSy Ârauccirites , Braehyphyilam , mais que les Cycadées, et particulièrement les Otozamites , y prédominent. Je m’occupe actuellement d’un travail spécial sur cette flore de nos terrains oolithiques, dont 20 planches in-4° sont déjà termi- nées; mais les nombreux matériaux que je viens de recevoir dernièrement m’obligent à le refondre et causeront quelque retard dans sa publication, quoique l’examen de ces matériaux n’altère aucunement les conclusions auxquelles m’avaient conduit mes observations antérieures. L’annonce de ces faits m’a semblé pouvoir intéresser la Société géologique, que je prie de vouloir bien permettre l’insertion de ces notes dans son Bulletin , afin que l’on puisse constater la priorité de mes observations sur celles qui pourraient être faites par d’autres naturalistes pendant la publication de mon travail. M. Hébert présente, au nom de MM. Berthaud et Tombeck, une notice sur les terrains jurassiques de environs de Mâcon. Note sur les terrains des environs de Mâcon , par MM. Berthaud et Tombeck, anciens élèves de l’École normale (supérieure), agrégés et professeurs au Lycée de Mâcon. Les terrains jurassiques du département de Saône-et-Loire ont été observés par plusieurs personnes, mais particulièrement par M. Manès, ingénieur des mines, dont les travaux ont été admis comme éléments de la grande carte géologique de France. D’après M. Manès, les environs de Mâcon et le département 270 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 185 S. tout entier ne présentent, au-dessus du lias, que l’étage jurassique inférieur, composé de l’oolite inférieure ou ferrugineuse, de la terre à foulon et de la grande oolithe. C’est là ce que tout naturellement nous avons cherché à reconnaître, et, à notre grand étonnement, nous nous sommes aperçus que M. Manès s’est mépris sur des terrains que- d’ailleurs il a généralement décrits avec beaucoup de soin et d’exactitude. Du reste, l’erreur a été signalée par quelques géologues, notamment par M. Thiol- lière, dans des communications faites à la Société d’agriculture de Lyon. Ayant entrepris depuis un an l’étude complète de ces terrains, étude que nous comptons étendre à tout le département, nous sommes déjà en mesure de démontrer surabondamment l’erreur qui n’a été qu entrevue jusqu’à présent. Nous avons en effet parcouru en tous sens et exploré avec le plus grand soin les localités environnantes, et l’examen attentif des diverses couches qui composent le sol, et dans lesquelles nous avons recueilli un nombre considérable de fossiles (1), nous permet de faire connaître avec détail la nature du sol de ce pays. Les terrains des environs de Mâcon se composent d’un grand nombre de couches, en général très régulièrement stratifiées, se succédant sans discordance, et présentant une série très complète des étages jurassiques depuis le lias jusqu’au corallien. Coupe des terrains des environs de Mâcon suivant une ligne dirigée de £ est à l'ouest. N. B. Les dessins dont le terrain est dégradé sont placés en arrière-plan. — Les hauteurs indiquées dans cette coupe sont prises au-dessus du niveau de la Saône (etiage;, qui est lui-même à 170 mètres au-dessus du niveau de la mer. (I) Nous avons environ 150 espèces fossiles déjà déterminées; mais tout ce que nous avons recueilli peut aller à 500 , en y comprenant les bryozoaires. SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 271 Ces couches sont inclinées d’environ 20 à 25 degrés vers l’Ê., et sont coupées par deux failles dirigées du S. au N., à peu près parallèlement à la Saône (voir la coupe ci-dessus). L’une de ces failles est manifeste à la montagne de la Grisière, près Mâcon, dans une carrière où l’on voit le calcaire rouge à Entroques en contact avec des argiles à silex ou chailles, qui sont la partie supérieure de tout ce que nous connaissons. L’autre, plus éloignée de la Saône, traverse la route au delà et à la descente du village de Charnay* L'existence de ces failles et l’inclinaison des couches font qu’en marchant de l’E. à l’O. on voit les divers terrains se montrer successivement par leur tranche, et qu’on les rencontre trois fois de suite sous ses pas. L’identité de ces terrains est parfaitement constatée ; car, les deux failles n’étant éloignées que de quelques kilomètres, il arrive que sur cette petite distauce les mêmes ter- rains ont exactement les mêmes caractères minéralogiques et paléontologiques. A part quelques points de détail sur lesquels nous aurons à revenir et que nous signalerons dans cette note, la division de ces terrains et leur détermination géologique ne nous offrent plus aucune difficulté. A la vérité, nos fossiles (dont plusieurs espèces sont nouvelles) ne sont pas encore tous déterminés, et nous nous proposons même de les soumettre à une révision complète ; mais ceux que nous citerons ne nous laissent aucun doute sur la nature des terrains et doivent inspirer toute confiance aux géologues, car leur détermination exacte est due à M. Hébert, à qui nous expri- mons ici notre entière et sincère reconnaissance. Nous allons indiquer sommairement la composition de ces ter- rains, en commençant par la partie supérieure. 1° Argile à chailles. Le premier étage est un dépôt d’argile blanche ou rougeâtre, ordinairement très pure, exploité à raison de sa pureté même. Les fossiles y sont rares, ce qui rend sa déter- mination difficile. Mais ces argiles renferment des boules ou nodules de silex, déjà connues dans d’autres pays sous le nom de chailles. Ces silex ont diverses formes ; quelques uns paraissent n’être que des polypiers silicifiés ; ils sont presque toujours creux, et leur cavité, dont les parois sont d’une agate translucide assez belle, contient de la silice jaunâtre, concrétionnée et plus ou moins sableuse. On en pave les routes. Ce dépôt existe sur le versant occidental de la Grisière, au bord de la faille. On le retrouve également sur le bord de la seconde faille, et il existerait aussi près de la Saône, si des dénudations postérieures aux terrains jurassiques ne l’avaient enlevé. 272 SÉANCE .MJ 7 FÉVRIER 1855. Ces argiles à cbailles ne correspondent pas à celles que Ton désigne par le même nom dans d’autres pays. Qu’est -ce donc que ce dépôt? Faut-il le rattacher à l’étage suivant? Serait-ce le com- mencement de l’étage oolitique supérieur? C’est ce que nous ne savons pas encore suffisamment. 2° Corallien. Au-dessous vient ce que nous regardons comme le terrain corallien. C’est, à la partie supérieure, un calcaire com- pacte, quelquefois remarquablement oolitique, tandis que la partie inférieure est blanche, crayeuse, et même cristalline. Ce terrain, qui manque près de la Saône, s’observe dans le ravin au bas et à l’ouest de la Grisière, immédiatement sous leschailles; nous l’avons suivi jusque dans les bois de Naisse (commune d’Hu- rigny), où l’on a ouvert des carrières. Au delà de la seconde faille, on le rencontre depuis Chevagny jusque sur les hauteurs qui sont au N. de Montceau. Nous citerons parmi les fossiles de ce terrain : Pterocera Oceani , de La Bêche. 1 Trigonia Meriani , Ag. Nerinea Desvoidyi , d’Orb. ! Terebratula subsella , Ley.merie. Ostrea solitaria , Sow. j Hemicidaris or fera, A g. 3° Oxfordien. Le troisième étage est très important, parfaite- ment caractérisé et facilement reconnaissable par sa nature miné- ralogique et par ses nombreux fossiles. C’est une masse épaisse composée d’un grand nombre de couches d’un calcaire très compacte , jaunâtre, à grains fins, et quelquefois même lithographique. Ces couches sont entremêlées de lits de marne d’abord minces, mais qui deviennent déplus en plus épais et abondants à mesure que l’on descend, tellement que la partie inférieure est un calcaire marneux grisâtre, passant enfin à des marnes tendres , de couleur foncée, gris bleuâtre, très bien caractérisées par Y Ammonites cor datas, la Belemnites h as ta tus, le P en ta crin us p en tagon ali s. Ces calcaires, généralement trop tendres pour les constructions, i sont exploités comme pierre à chaux. Ce terrain passe sous Mâcon et forme les petites collines qui bordent, au nord de cette ville, ! les alluvions de la Saône. La montée de Charnay, la colline qui contient les carrières de Leviguy, sont encore formées de ce cal- : caire, qui reparaît au delà de la seconde faille, au château de Saint- Léger, sur la commune de Bavayé-? sur les hauteurs de ? Sommerey (près de Saint-Sorlin), etc. Nous concevons difficilement comment M. Manès a pu placer SÉANCE DU 1- FÉVRIER 1853. / O ce terrain clans sa grande oolite. Les fossiles qu’il renferme, et qu’à la vérité M. Manès paraît n’avoir pas vus, ne peuvent laisser aucun doute, et nous le font regarder comme l’étage oxfordien Ces fossiles sont principalement : Ammonites biplex ou plicatilis , Sow. cordatus , Sow. Belemnitês hastatns , Blainv. Ostrea dilata ta, d’Orb. — gregaria , Sow. Mytilus consobrinus , d’Orb. Pholadomya Jlabellata , Ag. — Michelini , A g. Anatina undata , d’Orb. Trigonia clcwellqta , Parle. Plicatala tubifera , Lamarck. Terebratala vicinal i s , Schl. — insignis , Schübler. — trigonella , Schl. Rhynchonella incons tans , d’Orb. Disaster ovalis, A g. — capistratas , Âg. Cidaris coronatus. Calloviën. Le quatrième étage se compose cl’abord de cal- caire marneux plus ou moins compacte, à grains de fer oolitiques, renfermant le Disaster cllipticus , et beaucoup d’ Ammonites comme coronatus , J as on, anceps , athleta , etc. ; puis l’étage se ter- mine inférieurement par des couches minces de calcaire marneux tendre et de calcaire compacte, alternant ensemble et caracté- risés par X Ammonites macrocephalus . Ce terrain, malgré son peu d’épaisseur, s’observe parfaitement bien dans les petites collines parallèles, situées entre les villages de Levigny et de Salorney, et, au delà de la seconde faille, sur la première pente de la montagne de Solutré. Les fossiles de cet étage le rattachent au précédent, mais il en contient un grand nombre qui lui sont propres et qui nous le font regarder comme le terrain calloviën de M. Alcide d’Orbigny. Nous citerons comme exemples les fossiles suivants: Ammonites coronatus , Brug. — • Jason7 Zieten. — anceps , Reinecke. — macrocephalus , Schl. — athleta , Phillips. — hecticus , Hartm. — £ a chéri ce, Sow. Bclemnites hastatus , Blainv. — latesulcatus , d’Orb. 1 Ostrea dilatata (variété petite), d’Orb. Mytilus gibbosus , d’Orb. Pholadomya inorncita, Sow. Terebratala bicanaliculata , Schl. — pala ou calloviensis , d’Orb. — reticulata , Sow. Thecidea cordiformis , d’Orb. Disaster ellipticus , A g. 5° Grande oolite ou étage Bathonien. Le cinquième étage com- mence une série de couches distinctes des précédentes et dont l’ensemble constitue le terrain jurassique inférieur, le seul admis jusqu’à présent dans ce pays. Soc. géol.y 2e série, tome X. 48 27 A SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. Cet étage, dont la limite inférieure est encore mal établie, se compose généralement de calcaires jaunâtres, rugueux, plus ou moins sableux, quelquefois durs, d’autrefois tendres, et se fendil- lant aisément, surtout à la partie supérieure. ïl nous paraît repré- senter la grande oolithe ou l’étage bathonien de M. d’Orbigny. On l’observe sur le bord oriental de la Grisière, à Salornay (près Mâcon), à partir de la crête ou colline qui précède ce village, et sur la pente des montagnes de Solutré, Y ergisson, etc. Ses fossiles sont, par exemple, les suivants : Ammonites huila tus , d’Orb. - cliscus , Sow. - — biflexuosus , d’Orb. Ostrea cos ta ta, Sow, Mytilus Sow erhy anus, d’Orb. Pholadomya Vezelayi , Lajoye. Avicula inœquivalvis , Sow. — - costa ta, Sow. — hraamhuriensis . I Terehratula orbicularis , Sow. — - coarctacta , Park, : Hemithiris spin osa, d’Orb. ! Rhynchonella quadripli cata , d’Orb. i ■ — decorata, d’Orb. j Disaster bi cor datas , Ag. ! Holectypus depressus , Ag. | Nucleolites clunicunaris , Blainv. 6° Oolite injérieure ou étage Bajocien . La partie tout à fait inférieure des terrains qui nous occupent est un calcaire dur,; cristallin, à Entroques ou à polypiers, tantôt rouge et ferrugineux,; tantôt blanc grisâtre. Sa dureté en fait une excellente pierre de taille ; c’est ce calcaire qui donne les marbres de Flacé , très em- ployés dans le pays. Cet étage forme le bord de la faille de la Grisière. 11 constitue les carrières ouvertes à la descente de Charnay, celles de Prissé, et les beaux escarpements que présentent à l’O. les montagnes de Solutré, de Yergisson, etc. C’est dans une lente de ce terrain que s’est formé le dépôt de calcaire blanc saccbaroïde qu’on exploite pour les verreries au midi de Solutré. Cet étage est l’oolite inférieure ou ferrugineuse, ou le bajocien de M. d’Orbigny. Ses fossiles sont notamment : Ammonites Murchisonpe , Sow. - — Brackeuriclyii , Sow. — Sauzei, d’Orb. — - Blagdeni, Sow. Belemnites giganteus, Schl. — curtus, d’Orb. — unicanaliculatus , Hartm. Nautilus truncatus , Sow. Ostrea Marshii ( subcrenata , d’Orb.). Ostrea Phœdra , d’Orb. Mytilus Sowerbyanus , d’Orb. Pecten articulatus , Schul. Lima proboscidea , Sow. Trigonia costata , Sow. — striata , Sow. Terehratula perovalis , Sow. — Phillipsiiy Davidson. Hemithiris costata , d’Orb. Prionostrea Bernardiana . 275 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 7° Lias. Enfin nous ne ferons que citer le lias, qui termine la série de nos terrains jurassiques, mais qui n’a pas fait l’objet de notre étude. Il se montre à la surface du sol à Clievagny, au milieu des ter- rains précédents, avec lesquels il a été soulevé au moment de la formation de la seconde faille. Le lias de cette localité mérite d’être remarqué, car il contient l’oxyde de manganèse dans une position analogue à celui de Romanèche. Au pied des escarpements de Solutré, Yergisson, Saint-Sorlin, etc., le lias sort complètement de dessous le calcaire à Entroques et se prolonge vers l’ouest. Telle est la composition générale du sol des environs de Mâcon. On voit que, considérés en masse, et en laissant le lias de côté, ces terrains présentent des calcaires en haut et en bas, et dans l’intervalle des marnes. C’est sans doute cette vue d’ensemble qui a induit M. Mauès en erreur, et qui, en l’absence des fossiles, lui a fait voir dans cette succession de terrains précisément la grande oolite et l’oolite inférieure, séparées par les marnes à foulon des Anglais. Ces terrains du côté du S. se cachent sous les alluvions ou se terminent assez brusquement en s’appuyant sur le granité, au delà de Vinzelles, à Romanèche, etc. Mais ils se prolongent au N., et nous avons lieu de croire que ce que nous avons reconnu aux environs de Mâcon se retrouve vers le nord du département, Nous nous proposons de suivre ces terrains aussi loin que nous le pourrons. Au sujet de cette présentation, M. Rozet rappelle que, dans son Mémoire sur les montagnes qui séparent la Saône de la Loire, ii a parlé de environs des Mâcon. Depuis longtemps il a décrit, non en détail, comme MM. Berthaud et Tombeck, mais d’une manière générale, la série des marnes oolitiques de cette région; et, en 1838, ii a déposé à la préfecture une partie de la grande carte de Cassini, qu’il a coloriée en y indiquant la nature géologique des terrains. 276 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853 Compte des recettes et des dépenses effectuées pendant Vannée 1852 pour la Société géologique de France , présenté parM. le baron de Brimont, trésorier. RECETTE. DÉSIGNATION de» liapitres de la recette. NATURE DES RECETTES. prevues au budget. RECETTES effectuées. § 1. Produits ordinaires des réceptions. . § 2. Produits extraord. écepiions. . des Droits d’entrée ei de diplôme. . de l’année courante Cotisations ^ des années précédentes anticipées § 3. Produits des publi- cations § fi. Recettes diverses. | 5 | Cotisations une fois payées. . . . / deRulletins . 1 de Mémoires ■ Vente l de cartes coloriées, . . I de l’Histoire des progrès d [ la géologie Arrérages de Rentes^ ' Allocation de M. le ministre de l’in struclion publique Recettes imprévues Remboursement de frais de mandats. Recettes extraordinaires relatives au Bulletin. 5. Solde du compte précédent 16 500 8.500 1.500 300 300 800 800 20 600 100 325 2,230 650 2, 570 979 5fi4 8 730 350 1,470 179 256 12 1 ,600 l,62fi 90 1,907 75 l,5fi2 50 177 65 807 87 65 1,000 50 20 1,000 9 5 50 50 Reliquat 1851. , Totaux des recettes. . ;n caisse au 31 décembre 20,596 65 2,933 95 Totaux de la recette et du reliquat en caisse 20,036 95 23,529 60 4,224 40 781 COMPARAISON. La Recette présumée était de.. 20,086 96 La Recette effectuée est de 25,629 60 Il y a augmentation de Recette de 3. 4 4 2 65 SÉANCE I>Ü 7 FÉVRIER 185 B 277 DEPENSE DÉPE5SES prévues au budget. DÉPENSES effectuées Augmentation. 1 Diminution. 1,800 B 1,800 B , B 300 B 300 B B B 200 B 200 » B B 800 B 800 B B B 100 B 100 17 B B 1,280 B 1,303 90 23 90 B 500 B 517 B 17 B 200 B 289 » 89 B 200 B 124 B B 76 150 B 177 90 27 90 100 B 16 25 B 83 75 100 9 119 40 19 40 • 1,000 B 1,067 40 67 40 ■ 50 B » • » 50 5,000 I 3:909 40 » 1,090 60 1,000 B 618 45 B 381 55 5,000 a 2,473 10 B 2,526 90 1,500 B 1,000 B B 500 B 25 B » » B 25 B 25 B • * 25 B 300 B 2,827 70 2,527 70 B V 50 B 2 * # B 48 ■ ! ; 19,080 B | 17,645 i 50 1 2,772 3C >| 4,806 80 DÉSIGNATION des chapitres de la dép«nse. § i. .Personnel Fraisde logement. Frais de bureau. . Encaissements. . . j Matériel. . . . g 6. Publications, V §8. Dépenses imprév. . Placement de taux .... capi-( NATURE DES DÉPENSES. | son traitement Agent | travaux extraordinaires. . . f gratification Garçon de bureau j £!„Son | | Loyer, contributions, assurances. . . Chauffage, éclairage Dépenses diverses Ports de lettres Impressions d’avis, circulaires , . . . Change et timbre de mandats. . . . Mobilier. . . Bibliothèque. Collections texte et planches port 17 j Histoire des progrès de la géologie. ' l achat d’exemplaires. . . Mémoire» < dépensessupplémentaires ( menus frais. t Achat de Rente» sur l’Etat (place- ment des cotisations à vie^ Avances remboursables Bulletin 22 COMPARAISON. La Dépense présumée était de 19,680 » La Dépense effectuée est de 17,645 5o I! y a une diminution de . 2,o34 5o RÉSULTAT GÉNÉRAL ET SITUATION AU 31 DÉCEMBRE 1852. La Recette totale étant de. . . 20,529 60 Et la Dépense totale étant de 17,645 5o 11 reste en caisse audit jour 5,884 10 278 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853 MOUVEMENT DES COTISATIONS UNE FOIS PAYEES ET DES PLACE- MENTS DE CAPITAUX. Recette NOMBRE DES COTISATIONS. 9° ÎO ( antérieurement à i852. . . pendant l’année i852...,. Totaux Legs Roberton Total des capitaux encaissés, PLACEMENTS EN RENTES. 1,624 fr. de rentes 5 0/0 acquises an- fr. térieurement à i852... 37,83g réduits à 1,461 fr. (décret de conversion du i4 mars i852). 70 93 fr. de rentes 3 o/o acquises antérieurement à i852. 1,669 60 n3 fr. de rentes 3 o/o acquises pendant i852 2,827 70 VALEURS. fr. c, 2 7,000 » 2,827 7O 29,827 70 12,600 » 42,427 70 42,337 1,667 fr. de rentes. — - Excédant de la recette sur la dépense. . . . . 90 70 MOUVEMENT DES ENTRÉES ET DES SORTIES DES MEMBRES. Au 34 décembre 4 854 , les membres maintenus sur les listes officielles comme devant contribuer aux dépenses de 4 852 s’élevaient au nombre de 483, dont: 404 membres payant cotisation annuelle 82 membres à vie Les réceptions, du 4er janvier au 34 décembre 4 852, sont montées à 27 En plus, 4 0 nouveaux membres à vie 4 0 Total. ... 520 A déduire pour cause de décès, démissions et radiations. 24 Le nombre des membres inscrits sur les registres au 1" janvier 1853 , s’élève à ^etisa lions] 499 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853, 279 M. A. Viquesnel lit le rapport suivant : Rapport sur la gestion du trésorier pendant Tannée 1851. Messieurs , La Commission nommée pour la vérification des comptes du trésorier, et composée de MM. Damour, Hébert et moi , m’a chargé de vous présenter le résultat de ses investigations. RECETTE. La recette présumée, non compris un reliquat en caisse de 2,932 fr. 95 o,., a été portée au budget pour 17,154 fr. La recette effectuée s’est élevée à 20,596 fr. 65 c. -, comparée aux prévisions, elle présente une augmentation de 3,442 fr. 65 c. Depuis l’année 1848, qui a ralenti l’accroissement de notre prospérité, la Commission s’est fait un devoir de développer dans ses rapports les considérations reconnues nécessaires pour tenir la Société au courant de l’état réel de ses finances. Le rapport de 1850, notamment, renferme un tableau qui place en regard les recettes effectuées annuellement de 1843 à 1850 (voir t. VIII, p. 223). La quatrième colonne de ce tableau, contenant les cotisations anticipées et celles de l’année cou- rante, a été considérée comme donnant une échelle qui permet de mesurer le degré de prospérité de la Société. Nous nous proposons de continuer aujourd’hui ces rapprochements, et de les présenter sous une forme un peu différente et qui nous paraît être l’expression plus exacte de la situation. 280 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. TABLEAU A. Années. j| COTISATIONS Renies sur l’État. Totaux de* trois cotisations 11 et des i entes sut l’Etat. Jï Nombre des cotisations ï une fois payées, Nombre des membres (2). j 1 Noms des Trésoriers. '«J a < Courantes. j Arriérées, | Totaux des trois cotisations. / 1 2. j 3. 4. B. 6. 7. 8. 9. 10- 1843 1 405 » 1 2 | 9,247 » 2,423 » 12,075 » 995 » 15,070 » 40 414 Viquesnel. 1844 543 75 8,926 25 985 10,455 » 1,147 » 12,602 b 56 434 Id. 1845 1,137 90 9,635 » 958 » 1 ! ,730 90 1,545 » 13,075 90 68 475 U. 1846 600 » 9,684 » 757 » 11,041 » 1,484 » 12,525 » 75 501 Damour. 1847 510 » 9,900 » 1,080 » 11,490 » 1,551 50 15,021 50 80 522 Id. 1848 560 » 6,980 » 990 » 8,350 » 1 ,557 s j 9,887 » 80 470 Id. 1849 150 » 7,470 » 2,274 00 9,894 90 1,605 » 11,499 90 82 475 de Brimont. 1850 500 » 7,985 » 5,930 » 12,215 » 1,617 » 15,832 > 86 480 Id. 1851 270 70 8,340 » 1,690 « 10,500 70 1,709 50 12,010 20 90 485 Id. j: 1852 520 » 8,175 » 2,230 » 10,725 » 1,720 15 12,445 15 100 499 Id. On voit dans le tableau ci-dessus les produits des trois coti- sations subir une diminution considérable en 18A8, et se rele- ver les années suivantes. Ils se divisent donc naturellement en * - — * — (1) Les cotisations payées par anticipation sont extraites des exer- cices précédents, de manière à les rapporter aux années qu’elles con - cernent. Ainsi, par exemple, c’est dans la recette de 1 842 que figurent les 405 fr. acquittés à valoir pour 1 843. (2) Le nombre des membres inscrits dans cette colonne, de 1843 à 1847, a été pris dans le mouvement des entrées et des sorties qui se trouve placé à la suite des comptes annuels du trésorier; au con- traire, les chiffres de 1848 à 1850 diffèrent de ceux que donne cette pièce officielle, parce que des démissions qui concernent l’exercice 1848 n’ont été connues qu’en 1851. C’est donc seulement à partir de 1851 que les chiffres officiels reprennent leur exactitude ordinaire. Les corrections apportées au nombre des membres en 1 848, 1 849 et 1850, ont pour but de mettre les chiffres d’accord avec les faits. SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853, 281 deux séries de cinq années chacune, dont nous allons comparer les moyennes. TABLEAU B, G .2 Totaux cz .2 03 moyens 'a> O p-, des trois U CS w P* Cj rj~ cotisations 1 a 03 ^ et des rentes £ 5 sur l’État. 03 O s INDICATION des SÉRIES. MOYENNES DES COTISATIONS. Anticipées. 2. 1»« sér. 2e se'r. De 1843 à 1847. . De 1848 à 1852. . Differ.de lu 2« se'r. 639 33 280 14 — 559 19 Courantes. 3. 9,478 45 7,790 » - 1,688 45 Arriérées. 1,240 60 2,222 98 + 982 58 Totaux des trois cotisations, 5. 11,358 38 10,293 12 — 1,065 26 Moyennes des rentes sur l’État. 1 ,300 50 1,641 73 + 341 23 12,658 88 11,954 85 I I 63,8 469,2 87,6 481,8 — 724 05 U- 23,8 -f 12,6 Cette comparaison établit les faits suivants : 1° Pendant les cinq dernières années, le produit des cotisa- tions anticipées est moitié plus faible, mais en revanche celui des cotisations arriérées est presque moitié plus fort 2° La balance qui s’établit entre ces deux produits relève le chiffre des cotisations courantes et réduit la différence moyenne, entre les deux séries, à 1,065 fr. 26 c. 3° L'accroissement du nombre des membres à vie est un élément dont il faut tenir compte, si l’on veut apprécier sainement la situation. Le nombre des membres qui ont versé la cotisation de 300 fr. s’élève, en moyenne à 64, moins une fraction, dans la première série -, et à 88 moins une fraction dans la deuxième série : différence en plus, 24 nouveaux mem- bres à vie, moins une fraction. 4° Les 24 cotisations ci-dessus, actuellement placées en rentes sur l’Etat, ne figurent plus dans la recette des cotisations annuelles; de 1848 à 1852 elles ont produit en moyenne une somme de 341 fr. 23 c. Si l’on en tient compte, on trouve qu’en définitive les cotisations de tout genre ont subi, pendant Moyenne du nombre des membres. 282 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. les cinq dernières années, une diminution moyenne de 724 fr. 03 c. 5° Considérons maintenant le résultat du dernier exercice. La recette de 1852 ligure dans le tableau A pour une somme de 12,445 fr. 15 c. La moyenne, de 18/13 à 18/17, étant de 12,658 88 elle dépasse la recette de 1852, de . . . 213 fr. 73 c. L’avantage serait resté en faveur du dernier exercice, si les nouveaux membres à vie avaient préféré payer la cotisation annuelle. On sait en effet que le placement de 300 fr. en rentes sur l’Etat ne rapporte, suivant le cours du jour, que 12 à 15 fr. de revenu. En résumé la rentrée des cotisations annuelles se fait avec un peu plus de lenteur qu’autrefois-, mais elle donne aujour- d’hui, malgré l’accroissement des membres à vie, des produits à peu prés comparables à ceux de 1843 à 1847. Sans doute cet accroissement diminue l’importance de la recette -, mais il assure à l’avenir des ressources dont la Société commence, à son grand regret, à recueillir les fruits-, sur 100 membres qui ont acquitté la cotisation de 300 fr., dix sont décédés-, voilà donc un capital de 3,000 fr. acquis à la Société et dont elle continue à percevoir les arrérages. Nous laissons à la sagacité de nos confrères le soin de tirer les autres conclusions que peut suggérer l’examen des deux tableaux précédents-, nous allons maintenant passer en revue les divers articles de la recette. §§ I et Iï. Produits ordinaires et extraordinaires des réceptions. ' Sur les cinq articles dont se composent ces deux paragraphes, un seul a subi une diminution \ les quatre autres offrent une augmentation, savoir : Art. 1er. Droits d’entrée et de diplôme . . . 100 fr. Art. 3. Cotisations arriérées 730 Art. 4. Cotisations anticipées 350 Art. 5. Cotisations une fois payées. . . . 2,470 Total des augmentations. . . 3,650 fr. SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 283 3,650 fr. Report . A déduire pour diminution : Art. 2. Cotisations de Vannée courante. . . 325 fr. Il reste pour augmentation sur les §§ I et II. . 3,325 fr. Art. 1er. La diminution sur les cotisations de Vannée cou- rante représente en presque totalité le nombre des cotisations une fois payées dont le versement a été effectué. Art. 2, 3 et 4. L’accroissement des cotisations anticipées relatives à l’exercice 1853 est d’un excellent augure et présage ordinairement de la facilité dans le payement des cotisations de l’année suivante. Cette nature de recette s’élève en totalité à 650 fr. 5 il faut remonter jusqu’en 1846 pour trouver un chiffre aussi élevé. Art. 5. Une seule cotisation de 300 fr. avait été prévue au budget-, il en est rentré neuf intégralement; la 10e sera com- plétée en 1853. § III. Produit des publications . Deux articles de ce paragraphe ont éprouvé de l’augmenta- tion : Art. Q. Vente de Bulletins 179 fr. » c. Art. 9. Vente de V Histoire des progrès de la géologie. 307 75 Total des augmentations. . . 486 fr. 75 c. Les deux autres articles ont subi une di- minution : Art. 7. Vente de Mémoires. . . fr. 256 ) Art. 8. Vente de cartes coloriées. . 12 j Il reste pour augmentation sur le § III. 218 fr. 75 c. Art. 6. La vente du Bulletin se compose cette année de 24 abonnements, pris par la voie des libraires, et montant à 734 fr. Et d’exemplaires livrés aux membres .... 245 Total de la vente. . . 979 fr. Art. 7 et 8. On avait espéré que la publication de la deuxième SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 28 h partie du tome IV des Mémoires aurait lieu en 1852* son ajournement à l’exercice dans lequel nous venons d’entrer explique la diminution que vous remarquez sur cet article-, il est vrai que la même cause a réduit de 500 fr. la somme votée pour les achats d’exemplaires. La diminution de la recette se trouve donc plus que compensée par une diminution de dé- pense relative aux Mémoires . Art. 9. L’augmentation sur la vente de V Histoire des pro- grès de la géologie démontre que le public accueille la suite de cet ouvrage avec la même faveur que les premiers volumes. La vente de l’exercice expiré porte sur ZiO/i exemplaires *, elle a produit 1,907 fr. 75 c., savoir : T. Ie* T. II. lrepart. 2e part. T. III. T. IV. T. V. (10 exempl. vendus aux membres. . . fr. 50 » 10 exempl. vendus aux libraires. 9 exempl. vendus aux membres. . . 16 exempl. vendus aux libraires. . . 16 exempl. vendus aux membres. 16 exempl. vendus aux libraires . 38 exempl. vendus aux membres. 22 exempl. vendus aux libraires. . . 138 exempl. vendus aux membres. . 122 exempl. vendus aux libraires. . . 592 » 1 exempl. vendu à un membre. 72 50 404 exempl. ayant produit fr. 1,907 75 La vente de 1847 à 1851 comprend 1326 exemplaires, plus 2 exemplaires du tome IV payés avant sa publication, ensemble 1328 exemplaires-, elle a fourni une recette de 5,383 fr. 25 c. SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 285 Si l’on y ajoute celle du dernier exercice, on trouve que la vente totale monte à 1,732 exemplaires, ayant produit une somme de 7,291 fr., et qu’elle se compose de la manière suivante : T. Ier. 56 exempl. vendus aux membres. . . fr. 280 » 185 exempl. vendus aux T. II. libraires. 1,216 » f 29 1\ exempl. vendus aux ^re rj. ) membres. 735 » i ^ ' ) 177 exempl. vendus aux ' libraires. 709 75 1 f 269 exempl. vendus aux U part. L, m7bres- • • j 155 exempl. vendus aux 672 50 T. III. T. IV. T. V. libraires. ( 203 exempl. vendus aux i membres. ) 132 exempl. vendus aux V libraires. 138 exempl. vendus aux membres. 122 exempl. vendus aux libraires. . . 592 » 1 exempl. vendu à un membre. 665 » 1,025 » | 701 50 ) 690 » 1,406 » •1,444 75 1,337 50 1,726 50 1,282 » h 25 1,732 exempl. ayant produit fr. 7,291 00 Les allocations ministérielles applicables à la publication des quatre premiers volumes s’élè- vent à. fr. 6,000 » Total de la recette. . fr. 13,291 » La dépense occasionnée par la publication des quatre premiers volumes (voir l’article 17 de la dépense du présent rapport) monte à . . . . fr. 15,969 70 Différence. . . fr. 2,678 70 286 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. Report, fr. 2,678 70 L’allocation ministérielle de 1852, applicable au tome Y, est de fr. 1,000 A déduire : La dépense relative au même volume (voir l’article 17 de la dépense du présent rapport) fr. 305 A déduire : différence 695 695 » Découvert de la Société au 31 décembre dernier. 1,983 70 La totalité des dons faits par la Société s’élève à 518 exem- plaires , savoir : / A des membres qui ont acquitté la \ T . Ier | cotisation de 18A7 33â >375 exempî. *A des Sociétés savantes. . . . /il J \ lre part. A des Sociétés savantes. . kl 1 * j 2e part. A des Sociétés savantes. . 35 j ^ T. III. . A des Sociétés savantes 36 T. IV. . A des Sociétés savantes 31 Total des dons au 31 décembre dernier. 518 exempl. §§ IY et Y. Recettes diverses et solde du compte précédent. Les sept articles qui composent ces deux paragraphes pré- sentent des différences qui se balancent par une diminution de 101 fr. 10 c. La conversion des rentes 5 pour 100 en k 1/2 a privé la Société d’un revenu annuel de 163 fr.} la perte relative à 1852 monte à 81 fr. 50 c. -, elle est ia principale cause de la diminution précitée. Résumé de la recette. En définitive , les augmentations de la recette , s’élevant à kP22k fr. ZiO c., portent principalement sur les cotisations arriérées , anticipées et une fois payées , et sur la 'vente de V Histoire des progrès de la géologie ; les diminutions, montant SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 287 à 781 fr. 75 c., proviennent en grande partie des cotisations de Cannée courante et de la vente des Mémoires. DÉPENSE. La dépense a été prévue au budget pour 19,680 fr. 5 elle ne s’est élevée en réalité qu’à 17,645 fr. 50 c. Diminution, 2,034 fr. 50 c. §§ I, IL III, IV et V. Personnel , frais de logement , frais de bureau , encaissements (1) et matériel . Les cinq paragraphes que nous venons d’énoncer concernent les frais généraux. Les différences en plus ou en moins, rela- tives aux 14 articles dont ils se composent, se traduisent par une augmentation de 34 fr. 85 c. N’ayant aucune particularité intéressante à vous signaler sur les cinq paragraphes, nous nous contenterons de vous faire observer, à l’occasion de l’article 13, que les mesures propo- sées dans l’intérêt de la conservation de la bibliothèque et de la collection de cartes ont reçu un commencement d’exécution. Il est à désirer que l’état de nos finances permette de les mener à bonne fin. § VL Publications . Les six articles dont ce paragraphe se compose sont restés au-dessous des prévisions , savoir : Art. 15. Bulletin ( texte et planches). Art. 16. Port du Bulletin Art. 17. Histoire des progrès delà géologie. Art. 18. Mémoires ( achat d* exemplaires). Art. 19. Mémoires [dépenses supplémenté). Art. 20. Mémoires {menus frais) . . Total des diminutions du § VI. 1,090 fr. 60 c. 381 55 2,526 90 500 » 25 » 25 » 4,549 fr. 05 c. (1) Les membres résidant à l’étranger sont priés d’envoyer au tré- sorier le montant de leur cotisation en un mandat pris chez des ban- quiers; les membres qui habitent en France sont priés de l’envoyer SÉANCE DU 7 FÉVRIER J 853. 288 Art. 15 et 16. Des motifs de diverse nature ont retardé l’im- pression de plusieurs mémoires qui doivent faire partie du tome IX du Bulletin. L’ajournement involontaire apporté dans leur publication explique la diminution que présentent les articles 15 et 16. Les planches et les gravures ont coûté 768 fr. 70 c., savoir : 1° Gravure de 3 planches, fr. 280 » ) ^9 fr 20 c 2° Papier et tirage 249 20; 3° Gravure sur bois de 33 dessins. . . . 239 50 Ensemble. . . . 768 fr. 70 c. Art. 17. Diverses circonstances, indépendantes de la volonté de l’auteur, ont retardé l’impression du tome Y de l 'Histoire des pi'ogrès de la géologie , et occasionné la diminution que vous remarquez sur cet article. La dépense faite l’année dernière monte à 2,473 fr. 10 c., et concerne les volumes suivants : Tome IY. Tome Y. fr. 2,168 10 \ 305 )> j 2,473 fr. 10 c. En réunissant cette somme à celle des exercices précédents, on arrive aux résultats suivants : Tomes I, II et III. . Tome IV. . . . Tome V. . . . fr. 12,587 35 . 3,382 35 15,969 fr. 70 c. 305 » Total de la dépense au 31 décembre dernier 16,274 fr. 70 c. A déduire : La recette effectuée à la môme époque. 14,291 » Découvert de la Société au 31 décembre dernier 1,983 fr. 70 c. en un mandat pris, soit à la poste, soit chez les receveurs généraux, ou chez les banquiers. MM. les membres sont également priés d’affranchir les lettres qu’ils adressent à la Société. En prenant à leur charge'les frais de poste et d’envoi d’argent, ils laissent une plus forte somme applicable à nos diverses publications. SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 289 Art. 18, 19 et 20. Ainsi que nous l’avons fait observer à l’article 7 de la recette, la diminution que présentent les achats (V exemplaires de Mémoires , résulte du retard apporté à la publication de la deuxième partie du tome IY. §§ VII et VIII. Placement de capitaux et dépenses imprévues. Art. 21. La somme prévue au budget pour achats de rentes sur V Etat représente le placement d’une cotisation une fois payée j il est rentré neuf cotisations et une partie d’une dixième cotisation , de là vient l’augmentation de 2,527 fr. 70 c. que présente cet article. Art. 22. Les dépenses imprévues offrent une diminution de Zi8 fr. Résumé de la dépense . En définitive, les augmentations, s’élevant à 2,772 fr. 30 c., portent principalement sur les placements de capitaux ; vet les diminutions, montant à Zi, 806 fr. 80 c., concernent en grande partie nos trois publications. CONCLUSIONS. Malgré l’accroissement du nombre des membres à vie, et malgré la diminution de revenu occasionnée par la conversion des rentes 5 pour 100 en A 1/2, les recettes réunies des coti- sations et des arrérages de rentes ont produit en 1852 une somme presque égale à la recette moyenne des cinq années antérieures à 1848. Le chiffre élevé des cotisations relatives à 1853, et payées en 1852, nous fait espérer que cette moyenne sera dépassée cette année. On peut donc considérer que la So- ciété est remontée au degré de prospérité où elle se trouvait à la fin de 18Zi7. Le reliquat existant en caisse au 31 décembre dernier, et montant à 5,884 fr. 10 c., provient en partie d’économies réali- sées pendant les exercices précédents , et en partie de l’ajour- nement de dépenses relatives aux diverses publications et qui seront effectuées dans l’année courante. Les inscriptions de rentes k 1/2 et 3 pour 100 donnent ensemble un revenu annuel de 1,667 fr., qui se serait élevé à Soc. geol.? 2e série , tome X, 4 9 290 SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1853. 1,830 fr., si le décret de conversion n’avait pas été mis à exé- cution. Avant de terminer ce rapport, nous vous proposons, messieurs, de voter des remercîments à M. Ed. de Brimont, qui a bien voulu remplacer le trésorier démissionnaire et reprendre des fonctions qu’il a déjà remplies avec autant de zèle que d’intelli- gence. Les comptes et les pièces à l’appui, parfaitement en règle, ont été déposés au secrétariat -, nous yous proposons de lui en donner décharge. Enfin , votre agent continue à remplir ses fonctions avec le même dévouement que par le passé. Auguste Viquesnel, rapporteur . A. Damour. Ed. Hébert. La Société adopte les conclusions du rapport et vote des remercîments à M. Ed. de Brimont, trésorier, et à M. A. Vi- quesnel, rapporteur. M. Dumont présente à la Société la carte réduite de sa grande carte géologique de Belgique et des contrées voisines jusqu’à Paris, Strasbourg, et jusqu’au delà du Rhin. Cette carte repré- sente les terrains qui se trouvent au-dessous du limon hesbayen et du sable de Campine , et peut servir de tableau d’assemblage à la grande carte géologique de la Belgique, qui comprend 9 feuilles. Il se réserve de donner dans quelque temps des éclaircissements sur l’ensemble de son travail -, alors il expli- quera les motifs qui l’ont porté à adopter des noms nouveaux pour désigner les divers terrains de la Belgique. M. Rozet présente des échantillons de coquilles vivantes, trouvées en Italie à quelque distance des côtes de la mer -, ces coquilles ont éprouvé un commencement de fossilisation. M. Albert Gaudry fait à cette occasion une communication sur les coquilles fossiles de la Somma. Note sur les coquilles fossiles de la Somma , par M. Albert Gaudry. Nous venons rendre compte à la Société d’un travail que nous SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1858. 291 avons eu occasion de faire sur les fossiles provenant de la Somma. Cette communication pourra compléter celle que vient de faire M. Rozet au sujet de coquilles vivantes trouvées fossiles sur les côtes d’Italie. Depuis longtemps déjà, M. Constant Prévost avait annoncé la présence de coquilles dans les conglomérats ponceux de la Somma; mais les échantillons étaient peu nombreux et d’une conservation imparfaite. Une très belle collection de ces fossiles a été envoyée à l’Aca- démie des sciences par M. Pilla : c’est sur cette collection que nous avons pu entreprendre notre travail. Pour déterminer plus sûrement les fossiles, nous les avons sou- mis à une double comparaison ; nous les avons d’abord confrontés avec les fossiles subapennins de la collection géologique du Jardin des plantes; puis, nous aidant des lumières de M. Huppé, nous les avons comparés avec les espèces vivant actuellement dans la Méditerranée. De cet examen est résultée, pour nous, la convic- tion que les fossiles de la Somma sont de l’époque actuelle et non de l’époque subapennine. A la vérité, les fossiles les plus nombreux sont des Cerithium vulgatum , et cette espèce a été considérée comme appartenant à l’époque actuelle aussi bien qu’à l’époque subapennine. Mais nous devons faire observer que chez les individus de l’époque subapen- nine le faciès est assez différent de celui des individus vivants pour que l’on puisse établir deux variétés. Or les Cerithium vulga- tum de la Somma appartiennent à la variété vivante, et non point à la variété subapennine. Cette existence de fossiles dans l’époque actuelle est loin d’être une exception sur les parages dont il s’agit; îes fossiles de la Somma se lient aux fossiles des divers points des iners actuelles, qui ont été soulevés, soit sur les côtes d’Italie, soit sur celles de Sicile, soit enfin sur celles d’Afrique. Ils appartiennent à cette série de coquilles que , dans son bel ouvrage sur la Sicile, M. Philippi (1) a si justement nommées fos- siles, mais a moins justement séparées de l’époque actuelle pour les ranger dans l’époque tertiaire. En les plaçant dans l’époque ter- tiaire , on serait conduit à reconnaître une similitude presque parfaite entre la période actuelle et la période tertiaire. Or, bien que ces deux périodes soient parfaitement tranchées, cependant, d’après l’étude des fossiles d'Asti et de Perpignan, nous ne pouvons (1) Philippi, 1 836 et 1844. Enume ratio Mollusconan Siciliœ , cum viventiuni , tum in tellure tertiaria fossilium. 292 SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. nous empêcher de reconnaître à 'l’époque tertiaire un faciès spé- cial, et ce faciès disparaîtrait presque complètement s’il fallait regarder comme tertiaires les plages soulevées d’Italie et de Sicile. Ajoutons encore une observation : « L’Italie, a dit M. Rozet, est une terre classique pour les géologues qui veulent étudier les phénomènes ignés du globe. » Elle est par cela même une terre classique pour l’étude de la formation des terrains fossilifères; car les actions ignées et les soulèvements lents de l’Italie mettent à jour les procédés employés par la nature pour former des sédi- ments et pour fossiliser, dans le sein de ces sédiments, les débris organiques. M. (F Ornai iu s d’Hailoy demande à M. Albert Gaudry s’il ne se pourrait point que les fossiles, regardés comme provenant des conglomérats ponceux, provinssent en réalité de quelque autre roche. M. Albert Gaudry répond que la collection des fossiles en- voyés par M. Pilla n’est point isolée, mais qu’elle fait partie d’une série de roches-, la plupart des échantillons de fossiles sont encore enfermés dans les conglomérats ponceux, de manière à enlever toute incertitude sur la nature de la roche dans laquelle ils ont été trouvés. M. d’Omalius d’Halloy fait obseryer que M. Scacchi a pré- senté des idées très différentes de celles de M. Pilla au sujet de la Somma. D’après M. Scacchi, les coquilles de l’époque ; actuelle seraient intercalées , non dans les tufs ponceux de la 1 Somma, mais seulement dans les tufs qui s’avancent près de 1 Naples jusque sur les bords de la mer. Séance du 21 février 1853. PRÉSIDENCE DE M. DE VE UNE CIL. M. Albert Gaudry, vice-secrétaire, donne lecture du procès- verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le président proclame membres de la Société : ■ SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. 293 MM. Berthaud, professeur de physique au collège de Mâcon (Saône-et-Loire), présenté par MM. Hébert et Delesse 5 Hugont (D.), rue du Regard, 5, à Paris, présenté par MM. Constant Prévost et Hugard -, Lambert, ingénieur des mines à Mons (Belgique), présenté par MM. Dumont et d’Omaiius d’Halloy, Le baron de l’Espée, à Paris, rue Saint-Dominique-Saint- Germain, 30, présenté par MM. le marquis de Roys et de Vassart» M. de Reydellet, ingénieur des mines des forges d’Alais, à Alais (Gard), demande à faire de nouveau partie de la Société. Le président annonce ensuite deux présentations. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. le ministre de la guerre, Richesse minérale de V Algérie, par Henri Fournel, publié par ordre du gouver- nement -, Atlas, 20 pî. grand in-f°. Paris, imprimerie impériale, 1853. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXVI, nos a et 7. U Institut , 1853, nos 998 et 999. The Athenœum , 1853, nos 1320 et 1321. De la part du gouvernement britannique : 1° Muséum of p radical geology and geological Survey . — Records of the school of mines and science applied to the arts. — Vol. I, part. II, in-8, p. 149-3/18. Londres, 1853 • chez Longman, Brown, Green, and Longmans. 2° Memoirs , etc. (Mémoires pour servir à la description géologique du Royaume-Uni. — Figures et description expli- catives des débris organiques d’Angleterre), décades IV et VI, in-8. Londres, 1852 ^ chez Longman, Brown, Green, and I ongmans. Abhandlungen , etc. (Mémoires de l’Académie royale des sciences de Berlin), année 1851, in-4. SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853, Moaatsbencht , etc. (Compte rendu mensuel des séances de l’Académie royale des sciences de Berlin), juillet, août, sep- tembre et octobre 1852, in-8. Nova acta Acadeniiœ C. L. C. naturœ curtôsorum. Supplé- ment au t. XXIIvin-Zi. Bresîau et Bonn, 1852. M. de Brimont, trésorier, présente à la Société le projet de budget pour 1853, discuté et adopté par le Conseil. Budget des Recettes et des Dépenses pour 1853, présenté par M. Ed. de Brimont, trésorier,. RECETTE. DÉSIGNATION des chapitres de recette. O ~ '7. H S 5 £3 NATURE DES RECETTES. RECETTES prévues au budget de 1852. RECETTES effectuées en 1852. SOMMES admises pour 1853. 1 1 1 Droit d’entrée et de diplôme 500 600 500 §1. Produits ordinaires l 2 i é de l’année courante. . 8.500 j, 8,175 8,000 » 5 des réceptions. . / 3 > Cotisations. . < desanr.éesprécédenles. 1,500 » 2,230 1,500 » § 2 Produits exlraord. ( 4 J | ( anticipées 300 » 650 » 300 n des réceptions.. . 1 3 1 Cotisations une fois payées. ..... 300 » 2,770 » 300 N { 6 / Bulletin SOO » 979 » SOO ï) §3. Produits 7 1 | | Histoire des progrès de des publications. < 7 > Vente de . . i la géologie. .... 1,G00 » 1,S97 75 1,200 » ) 8 1 i f Mémoires.. . . . . . £00 D 544 H 700 » - 1 [ 9 , ! OCartes coloriées! . . . 20 » • 8 » 20 n ) 10 i Arrérages de rentes t 4 1/2 1,624 r> 1,54‘2 50 1,461 a 1 11 sur l’État. . . . ( 3 1/2 90 » 177 65 203 n \ i 12 Allocation de M. le ministre de l’inslruc- § 4- Recettes diverses. . { ! lion publique 1.000 V) 1,000 » 1 ,000 » ) | 13 Recettes imprévues 50 N 9 75 50 B 14 Remboursement de frais de mandats. . 20 t) 3 20 » \ \ 15 Recettes extraordinaires relatives au 1 | Bulletin. . . . . . . . . . . . . 50 “ » 50 D 17,154 » 20,586 65 16,107 9 §5. Solde des comptes de 1852 16 Reliquat en caisse au 31 décembre 1852. . . . 5,884 10 Total de la recette prévue pour 1853. . 21,991 10 séance du 21 février 1853. 295 DEPENSE. DÉSIGNATION des chapitres de dépense. si •ss b î 2 2 bis 3 4 3 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 J 7. Placement de ca- j pilaux | 20 l 8. Dép. imprévues. . ' 21 Personnel § 2. Frais de logement. g 3. Frais de bureau. . g 4. Encaissement. . . g 5. Matériel NATURE DES DÉPENSES. I 6. Publications. son traitement Agent. ^ travaux auxiliaires gratifications Garçon de bureau. [ Jrafificatiôn*. Loyer, contributions, assurances . . Chauffage, éclairage Dépenses diverses et d’aménagement. Ports de lettres Impressions d’avis , circulaires. . . . Change et timbre de mandats Mobilier Bibliothèque Collections 1 impression, papier, planT Bulletin . . < ches t port du Bulletin Histoire des progrès de la géologie. . . t achat d'exemplaires . . . I dépenses supplémenlai- Mé moi res. . I res j menus frais. — Coloriage V de cartes Achats cbe renies sur l’Etat Avances remboursables DÉPENSES prévues au budget de 1852. DÉPENSÉS effectuées en 1852. DÉPENSES admises pour 1853. 1,S00 » 1,800 » 1,800 N 300 B 300 » 300 n 200 U 200 » 200 b 800 » SOO n SOO » 100 » 100 n 100 » 1,280 » 1,303 90 1,280 H 500 U 557 H 500 » 200 » 289 » 600 » 200 » 124 » 150 s 150 R 177 90 300 » 100 R 16 25 50 100 » 119 40 500 » 1,000 » 1,067 40 1 ,000 B 50 R » » 50 B 5 000 B 3,909 40 6,000 » 1>00 )) 618 45 1,000 » 5,000 2,473 10 4,000 B 1,500 1,000 » 2,000 » 25 1» » 50 » 25 D 25 » 300 1) 2,827 70 £00 B 50 » 2 50 » 19,680 » 17,645 50 21,055 RÉSULTAT GÉNÉRAL. La recette étant de 21.991 fr. 10 c. Et la dépense de . 21,055 » La différence serait de 936 fr. 1 0 c. M. le Président lit une lettre de M. le ministre de la guerre. — Dans cette lettre, M. le ministre annonce l’envoi fait à la Société d’une partie de l’atlas de l’Algérie, dirigé par M. Fournel. M. le Président lit une lettre de M. Deianoüe. Dans cette lettre, M. Deianoüe annonce qu’il a fait subir des augmenta- tions à sa notice sur le bas Boulonnais, insérée dans le Bulletin de la Société. Cette notice, ainsi modifiée, est déposée sur le bureau. M. Davidson envoie les quatre premières planches de son 296 SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. travail d’ensemble sur les Brachiopodes. Cet envoi est accom- Dasrné de la lettre suivante adressée à M. Deshaves : i o j Monsieur, Londres, le 14 février 1853. Forcé de quitter Paris avant la séance du 21 de ce mois, je suis obligé d’avoir recours à votre obligeance pour présenter, en mon nom, à la Société géologique de France , les épreuves de quatre planches qui forment partie d’un travail général sur la classe des Brachiopodes, qui est sous presse dans ce moment. Aujourd’hui je n’ai pas l’intention d’entrer dans des détails ou dans des discus- sions sur le sujet , mais en présentant ces planches , je désire ce- pendant les accompagner de quelques remarques. Depuis douze années je m’occupe spécialement, et sans cesse, de l’étude des Brachiopodes , et appréciant les grandes difficultés à leur juste valeur, je n’ai rien négligé pour réunir le plus de maté- riaux possible. L’étude minutieuse et consciencieuse de ces maté- riaux m’avait convaincu, en effet, que pour pouvoir établir une clas- sification , il fallait auparavant connaître ce qu’on avait à classer, et étudier les rapports des animaux entre eux , ainsi que les em- preintes qu’ils ont laissées dans leur coquille. Aussi je n’hésite pas à le dire maintenant, et je le fais sans crainte de me tromper, que l’état de nos connaissances n’est pas encore assez avancé pour qu’on puisse établir un arrangement naturel, ou même artificiel, fondé sur une base vraiment solide et invariable. Cependant plusieurs savants distingués ont déjà essayé de nous présenter une méthode sans s’être suffisamment assurés s’ils pourraient faire rentrer dans leurs divi- sions la nombreuse série d’espèces qu’ils ne connaissaient, le plus souvent, que fort superficiellement. Pénétré de toutes ces difficul- tés, j'avais remis d’année en année la publication des résultats de mes recherches , et ce n’est que pour me rendre au désir exprimé par mes amis, que je me suis décidé, l’an dernier, à mettre sur le chantier un travail d’ensemble qui est destiné à former une intro- duction à mon ouvrage sur les Brachiopodes de la Grande-Bretagne. Ma première intention était de préparer seul ce travail, et pour cette raison je m’étais procuré les animaux d’un certain nombre d’espèces vivantes que j’avais soumis à des observations positives et comparatives avec les formes éteintes ; mais sentant la difficulté du sujet , j’appelai à mon secours deux des savants les plus célè- bres de l’Angleterre , M. le professeur R. Owen et M. le docteur Carpènter, Le premier de ces auteurs s’était déjà occupé, depuis plusieurs années, de l’étude des animaux de quelques espèces, et il SÉANCE ÜL 21 FÉYR1ER 1853. 297 avait en réserve de magnifiques préparations qu’il désirait publier ; il m’offrit de traiter entièrement la portion anatomique vivante pour mon introduction; ses admirables dessins ont été gravés sur cuivre, à Paris, par les mains des plus habiles graveurs et par les soins de M. Desbayes : ils jetteront une vive lumière sur cette por- tion de l’histoire des mollusques. M. le docteur Carpenter, si bien connu par ses savantes recherches microscopiques, se chargea de son côté de préparer un chapitre sur la structure de ces coquilles, afin de voir si vraiment ce caractère pourrait aider dans le classement et la séparation des genres, et pour arriver à ce desiderata, j’ai mis à sa disposition tous les genres et espèces que possède ma collec- tion ; il a rempli dix-huit tiroirs de préparations les plus délicates, étant arrivé à faire des coupes de certains genres et espèces , sur toute la longueur et la largeur de la coquille. Les résultats de ces études vous seront présentés , ainsi que de nombreuses figures à la suite des caractères anatomiques. La troisième portion de cette introduction m’est tombée en par- tage, et, comme elle n’est pas basée sur une fondation aussi solide et positive que celle de mes collaborateurs, elle demandera toute votre indulgence , surtout depuis que je sais qu’un de nos sa- vants confrères de la Société géologique de France vous a pré- senté l’an dernier un travail d’ensemble qui est, m ’ assure -t-on , totalement en contradiction avec celui que j’aurai à vous présen- ter. Malheureusement j’ai attendu en vain la publication du Bul- letin qui aurait dû contenir le mémoire' cité , et tout ce que j’en sais est par une lettre datée de Paris, le 21 mai 1852, dans laquelle on m’annonçait que l’auteur n’admettait que 5 ou 6 genres ! J’avoue que je serais enchanté si les Brachiopodes pouvaient être classés avec autant de simplicité ; mais, malheureusement, la chose me semble matériellement impossible ; car , pour cela , on serait obligé d’assembler une foule d’organisations essentiellement dif- férentes, et je serais tenté de dire et de prouver qu’on n’aurait pas plus de raison de former ces 5 ou 6 genres, que de n’en admettre qu’««. On arrivera, j’en suis convaincu, à classer les Brachiopodes dans un petit nombre de familles, et ces familles contiendront chacune un certain nombre de genres. Qu’on les appelle de ce nom ou par toute autre désignation que l’on voudra , il n’en devient pas moins nécessaire d’assembler sous une même dénomination toutes les espèces ou formes qui possèdent les mêmes dispositions inté- rieures. On ne peut donc, sans les plus graves inconvénients, réu- nir ensemble plusieurs groupes de coquilles ou d’animaux qui pos- *298 SÉANCE DE FÉVRIER 1853. sèdent chacun des caractères particuliers ; en ne donnant à ces petits genres que la valeur qu’ils méritent . on est porté à tenir compte des caractères intermédiaires entre ceux des espèces et ceux des familles ou sous-familles , et il serait impossible de se retrouver si toutes les formes portaient le même nom générique. Il ne serait d’ailleurs pas logique, parce que l’on s’est souvent trompé, d’aban- donner et de rejeter tout ce que la science a appris depuis tant d’an- nées d’actives recherches, et de la faire rétrograder d’un seul bond jusqu’à l’époque de Linné. Je ne demande pas mieux que de voir simplifier la méthode, mais à la condition que, pour atteindre ce but, on ne sera pas obligé d’assembler des organisations essentiellement différentes. J’ai trouvé que le plus grand nombre des genres pou- vaient être naturellement groupés en 7 familles : Terebratididœ , Spiriferidœ , Rhrnchonellidœ , Strophomcnidœ , Productidœ , Disci - nidœ et Lingulidœ. Mais certains genres , tels que les Thecidium , Stringoceph alus , P orambonites , Davidsonia , Koiünckia , Ccdceola et Crania , ne sauraient être admis dans les familles déjà citées, sans détruire le caractère convenablement circonscrit de chacune d’elles. Ce sont, en général, des anomalies dans la série; on forme de petites familles, jusqu’ici représentées chacune par un seul genre. J’ai donc pensé que je ne pouvais mieux faire que de placer ou figurer dans quatre planches des représentants de tous les genres ou des sous-divisions que j’ai cru devoir admettre dans l’état actuel de nos connaissances, et de mettre en rapport et en compa- raison toutes les dispositions intérieures par des lettres qui , par- tout, indiqueraient les mêmes caractères. Ces 285 figures ont été choisies avec le plus grand soin et dessinées , à deux ou trois ex- ceptions près, sur des échantillons en nature. Malheureusement le grand nombre de matériaux et le peu de place à ma disposition m’ont forcé de dévier un peu de l’arrangement que j’avais tracé, mais que le tableau ci-joint servira, en quelque sorte, à rétablir, et comme j’aurai l’honneur de présenter le mémoire entier dans quelques semaines , je n’abuserai pas plus longtemps de votre complaisance. 800 SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. M. Albert Gaudry présente à la Société un échantillon d ' Ancylooeras , trouvé par M. Deschiens, dans la craie blanche à silex de Nogent-sur-Seine (Aube). La couche de craie d’où provient réchantiîlon renferme des Inoceramus ( Catillus ) Cu - vieri, d’Orb., des Belemnitella mucronata , d’Orb., et des Arianchytes ouata , Lamk. L ' Ancyloceras deNogent-sur-Seine, ajoute M» Albert Gaudry, fournit une nouvelle preuve de l’ex- tension de ce genre, qui, d’abord considéré comme caractéris- tique de l’étage néocomien , est reconnu aujourd’hui avoir commencé vers le milieu de la période jurassique , et s’être prolongé jusque dans la partie la plus inférieure des terrains crétacés de la France. L’échantillon de Nogent-sur-Seine semble différent du Ha mites découvert par M. Charles d’Orbigny dans la craie à tubulures deMeudon. Au sujet de l’échantillon présenté par M. Albert Gaudry, M. Deshayes fait observer qu’il possède une empreinte de Hamites , venant de la craie blanche de Paris. M. Hébert donne lecture du mémoire suivant de M. Prest- wich : Sur Ici position géologique ries sables et du calcaire lacustre de Rilly [Manie], par M. Joseph Prestwich. Le calcaire lacustre et les sables blancs de Rilly sont d’un grand intérêt pour le géologue , non seulement à cause de l’assemblage très remarquable de fossiles qu’ils contiennent , mais encore par la difficulté qu’ont éprouvée les observateurs à déterminer rigoureu- sement la position d’une telle faune dans la série des sables infé- rieurs du bassin de Paris. On doit se rappeler la diversité des opi- nions à ce sujet. Ayant eu occasion de visiter plusieurs fois depuis 1840 le gisement des couches de Rilly, et ayant observé quel- ques phénomènes nouveaux , ou d’une autre manière que les géo- logues qui m’ont précédé, j’ai l'honneur de soumettre à la Société les faits tels que je les ai aperçus, dans l’espoir d’ajouter quelques éclaircissements propres à faciliter la détermination de l’âge des couches dont il est question. Une belle collection des fossiles du calcaire de Rilly a été d’abord faite par M. Arnould, de Châlons-sur-lVJarne ; mais c’est M. Drouet qui, en 1835, a attiré l’attention générale sur une faune SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. 301 alors toute nouvelle pour le bassin de Paris; plus tard (1), en 1838, M. Charles d’Qrbigny (2) a indiqué d’une manière précise la position des sables et du calcaire de Rilly au-dessus de la craie et au-dessous des lignites, position à l’égard de laquelle tous les géologues paraissent actuellement d’accord. Mais M. Ch. d’Orbigny, et, comme je le pense , tous les autres géologues , ont considéré le calcaire lacustre et les sables situés au-dessous comme ne formant qu’un seul groupe de couches d’eau douce. M. de Boissy, dans sa monographie intéressante, paraît partager l’opinion de M. Ch. d’Or- bigny que ces couches sont subordonnées à l’argile plastique, et inférieures à l’étage des lignites (3). M. d’Archiac a regardé ces couches comme un équivalent d’eau douce de la glauconie infé- rieure dans laquelle il avait d’abord compris les sables de Bra- cheux (â). Actuellement il place ces derniers plus haut dans la série des sables inférieurs , et par conséquent au-dessus des couches de Rilly (5). M. Melleville fait delà division inférieure des sables inférieurs un seul groupe , comprenant les sables , le travertin, les glaises et les lignites de Rilly, sans donner l’ordre exact des couches constituantes (6). M. Rondot (7) fait observer que l’âge du cal- caire lacustre est nettement précisé, étant au-dessous des lignites et au-dessous du sable blanc, mais il ne dit pas s’il considère le sable comme appartenant au même dépôt que le calcaire lacustre ou non. M. Hébert, qui a particulièrement étudié cette question, et qui a si bien précisé les divers dépôts des terrains tertiaires inférieurs des environs de Paris, nous a donné en 18â8 ses vues toutes nou- velles sur les rapports du calcaire lacustre de Rilly avec l’argile plastique et la glauconie inférieure (8). A ce sujet, il a encore ajouté en 18â9 et 1850 des détails pour appuyer les opinions qu’il avait d’abord avancées (9). D’après ses recherches à Rilly et aux envi- rons , il conclut que , non seulement les sables et le calcaire de (1) Bull . Soc . géol . , 1re sér., vol. VI, p 294. (2 ) Id., 1re sér., vol. IX, p. 321 . (3) Bull. Soc. géol., 2e sér., vol. IV, p. 178 ; efc Mém. Soc. géol., 2e sér., vol. III, p. 267. (4) Bull . Soc. géol., 1re sér., vol. X, p. 174-175. (5) Hist . des progrès de la géologie, vol. III, p. 606 et 633. (6) Bull . Soc. géol., 1re sér., vol. IX, p. 323 ; et Ann. des sciences géol., vol. II, p. 3-1 3. (7) Ann. de l’Acad. de Reims , 1 842-1843. (8) Bull. Soc. géol. , 2e sér. , vol. V, p. 398-406. (9) Id.r 2e sér., vol. VI, p. 725, et vol. VIS, p. 338. 302 SÉANCE BU 21 FÉVRIER 1853, Riily sont antérieurs et indépendants des lignites et de l’argile plastique , mais qu’ils sont même antérieurs aux sables marins de Cbâlons-sur-Yesle et de Braclieux (1). Il place ces derniers plus bas dans la série des sables inférieurs que ne le fait M. d’Archiac, et si l’on ne peut pas les séparer de la glauconie inférieure, ce qu’il pense difficile à admettre , alors les sables de Riily seraient les couches les plus anciennes de la période tertiaire ; mais si la glauconie inférieure est indépendante des sables de Braclieux, rien ne s’opposerait, dans sa théorie, à ce que cette couche ne fût synchronique du calcaire lacustre (2). Suivant M. Hébert (3), les sables marins (de Châlons-sur-Vesle) se sont déposés dans 4es dé- pressions creusées dans les sables et marnes lacustres par une irrup- tion cpii du nord amenait des eaux marines, et ainsi s’explique le phénomène qu’il décrit, des sables de Riily se trouvant au même niveau que les sables marins des environs de Cbâlons-sur-Yesle et de Chenay (à), et que ces couches de Riily, Romery etSézanne n’étaient que des restants d’un dépôt d’un lac d’une surface de 20 lieues, et qui s’étendait des environs de Reims à Sézanne, en- tourés et enveloppés par les sables marins ; car M. Hébert avait déjà très bien démontré que le calcaire pisoiitique du Mont-Aimé appartient à la partie supérieure du terrain crétacé. Et puis il con- clut qu’au commencement de la période tertiaire ce calcaire a été émergé, et qu’il en est résulté un lac où il s’est déposé d’abord de la silice pure à l’état de sable cristallin, puis un calcaire marneux, où se sont conservés des végétaux et des coquilles (5). C’est là aujourd’hui l’étatde laquestion. Pour moi, il m’a toujours paru que les caractères lithologiques et la structure physique des sables et du calcaire de Riily démontrent l’indépendance de ces deux couches, dans laquelle opinion des observations ultérieures m’ont confirmé. Les sables décidément ne sont pas un dépôt chi- mique. En les examinant à la loupe, on voit qu’ils sont composés de grains quartzeux transparents et anguleux, mais dont les angles sont émoussés, sans mélange de corps étrangers. Ils ont, en effet, l’aspect ordinaire de sable quartzeux fin, seulement beaucoup plus lin qu’à l’ordinaire, comme s’ils avaient été lavés. Le calcaire lacustre, au contraire, est composé essentiellement de marne, avec (1 ) Bull. Soc. géol., 2e sér., vol. YI, p. 71 1 , 725 et 727. (2) LL, ici., vol. VII, p. 340. (3) Id., ici. j vol. Vil, p. 338. (4) Ici., id.. vol. VI, fig. 1 et 2, pl. Y, et coupe, p. 714. (5) Tel., ici., vol. V. p. 4 07. SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. 303 des masses de concrétions calcaires, et i! empâte des grains de sable quartzeux. Donc, minéralogiquement, il n’y a aucun rapport entre les sables blancs et le calcaire lacustre , et il n’y a que la dernière de ces couches qui puisse être un dépôt de sources. 11 y a aussi une ligne bien tranchée entre les deux couches. Non seule- ment il n’y a point de transition entre elles, mais dans la sablière de Riily la surface des sables blancs au-dessous du calcaire lacustre se montre ondulée et irrégulière (voyez fi g. 1). Fig. 1. c Craie. o ii . . c. . i pallies ferrugineuses. s Sable marin inferieur, » a b"1. < o Sable marneux jaunâtre. m Calcaire travertin , 4 à £>m. . Sable blanc avec des cailloux et des ne impur Sable blanc. Calcaire en gros blocs, mêle de marne et avec beaucoup de fossiles, t Marnes calcaires avec peu de fossiles. n n! Base de la sablière. — Au-dessous de cette ligne la superposition est prouvée par des puits. Reste à savoir s’il y a quelque rapport paléontologique entre ces couches. Jusqu’à présent on n’a pas trouvé de fossiles dans les sables blancs à la sablière de Riily; mais cependant les ouvriers ont fait savoir depuis longtemps qu’en creusant plus bas dans cette couche ils avaient rencontré des traces de coquilles, un peu au- dessus de la craie (1). Cette partie inférieure des sables a été ex- plorée il y a deux ou trois ans en faisant des tranchées pour la route qui mène de Riily à Montclienot. Je m’y suis trouvé en sep- tembre 1850 avec M. Morris, qui peut, mieux que moi, constater les phénomènes paléontologiques. (I) M. Rondot a fait mention de ce fait en 1842, mais sans en discuter l'importance. ( Ouvrage cité, p. 12.) aoa SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853, pj g, 2. — Coupes près de Rilty, sur la route de Montchenot [Marne). m Cr La première couche est à peu de distance à l’ouest de ILilly ? et puis deux autres se suivent de près, au point où la route tourne au nord et en montant un peu, (Voyez A, B et D, fig. 2.) Dans deux de ces endroits (A et B), ainsi qu’à l’endroit G, on trouve assez abondamment des traces de coquilles, mais elles sont difficiles à conserver, n’étant que des empreintes très fragiles. On peut néan- moins assez bien distinguer leurs caractères pour voir que leur faciès est le même que dans les sables de Montchenot et de Châ- lons-sur-Vesle. Voici la description de ces coupes de haut en bas. Coupe A, — d. 10 pieds de sable blanc avec des couches minces, subordonnées, d’argile grisâtre ; en l’absence de l’argile, on passe en descendant à l\ pieds de sable blanc (» au-dessous des marnes blanches lacustres (1), que le sable blanc de JRilly montre ses rapports paléontologiques avec les sables de Châlons-sur-Yesle. La coupe que donne M. Hébert se montre parfaitement bien en suivant le bout de la vieille route de Reims, en bas de la côte à Montchenot. La nou- velle route fait un petit détour. Entre les deux routes, le sable a été autrefois exploité. Il y a des couchesd’un gris blanc très tendre, formant de gros blocs; et dans ceux-ci j’ai trouvé des moules et des empreintes de coquilles. M. Deshayes a eu la complaisance de m’en faire la détermination suivante, sur quelques morceaux que je lui ai montrés : 1° Un Cardium , confondu avec le semigranülatum de Sowerby, mais qui en est parfaitement distinct ; il se trouve aussi à Bra- cheux, à Abbecourt, à Brimont et à Châlons-sur-Yesle. 2° Une Lucine , voisine de Y uncina ta , constituant une espèce nouvelle ; elle est à Brimont et à Châlons-sur-Yesle. 3° Psammobia rubis ? Lam. ; elle est aussi à Brimont. Dans un autre échantillon que j’ai, il a trouvé aussi des em- preintes apparentes de Lucines et de Corbules, Quoique les espèces déterminées ne soient pas nombreuses, il me paraît qu’elles sont assez distinctes pour montrer toujours que les sables de Rilly appartiennent à un dépôt marin, et, suivant toute probabilité, aux sables marins de Châlons-sur-Yesle et de Brimont, qui, dans ce pays, sont les seules couches marines qui se trouvent au-dessous des lignites, et avec les fossiles desquelles les quelques spécimens ci-nommés sont en parfait accord. 11 y a cependant une difficulté à cet égard, car M. Hébert a fait observer qu’à Chenay on voit le calcaire lacustre au-dessous des sables de Châlons-sur-Yesle. Je n’ai pas fait plus tôt cette communication à la Société , parce que, avant de la faire, j’avais l’intention de visiter cet endroit à mon voyage en Champagne, au mois d’octobre passé, et je regrette de n’en avoir pas eu le temps. Je ferai observer néanmoins que, comme M. Hébert dit que les sables au-dessus du calcaire lacustre à Chenay ne sont pas fossilifères , ils peuvent (1) Bull. Soc. géol ., 2e sér., vol. Y, p. 402. (2) Bull. Soc. géol. y 2° sér.. vol. VI, p. 710. SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. 307 appartenir à la couche de sable blanc qu’il place ailleurs, à la base des lignites, et qui est aussi souvent non fossilifère. Alors les sables blancs, qui à Chenay sont au-dessoos du calcaire, correspon- dent, comme le sable de Rilly, aux sables fossilifères de Chàlons- Sur-Vesle. Il faut remarquer qu’ici aussi ce n’est que la partie inférieure qui est fossilifère. Si cependant ces sables supérieurs de Chenay appartiennent aux sables de Châlons-sur-Vesle, comme le pense i\l. Hébert, et sans connaître cet endroit, je ne peux pas me permettre de discuter la question avec lui, alors il faudrait croire que le calcaire de Rilly est une couche lacustre intercalée à la partie supérieure de ces sables. Mais du moins ce qui me semble certain, d’après les observations que je viens de rapporter, c’est que le calcaire de Rilly a été précédé d’un dépôt marin, et que sa forme terrestre et d’eau douce, si curieuse, n’a pas été la pre- mière de celles qui aient apparu dans la période tertiaire. A l’égard des caractères géographiques de la surface du pays à l’époque du dépôt du calcaire de Rilly, je ne puis admettre que ce dépôt se soit fait connue on l’a supposé, dans un grand lac ayant une étendue de Reims à Sézanne, c’est-à-dire de vingt lieues, ou dans l’estuaire où a été formée la série de couches qui constituent le groupe des lignites et des sables, car je ne conçois pas comment alors quelques unes des espèces de fossiles qui se trouvent à Rilly ne se trouveraient pas dans ces autres couches, ou comment il n’y aurait pas des fossiles des lignites dans ia couche de Rilly. Or, au contraire, il n’y a pas une seule espèce commune entre ces couches. Le groupe des lignites résulte d’un charriage de sédiment assez abondant — de l’affluent d’une rivière importante — au lieu qu’à Rilly tout indique qu’il y a eu peu de mouvement dans les eaux et que le charriage était faible; car, à l’exception des grains de sable siliceux empâtés dans le calcaire et provenant des sables au-dessous, il n’y a dans la masse principale du calcaire lacustre presque pas de mélange de corps étrangers ou de boue argileuse; d’ailleurs le bel état de conservation des coquilles terrestres, qui n’ont pas été altérées par une longue exposition à l’action atmos- phérique, et qui généralement ne sont ni usées ni brisées, démon- trent que le transport n’a pas été long, ni effectué par une grande masse d’eau — une rivière. L’absence de toute trace de poissons et d’ Uni o est encore un fait négatif en faveur de cette hypothèse. Le carbonate de chaux formant la base et même presque la totalité du calcaire de Rilly a toute l’apparence d’un dépôt de source local — d’un travertin — - qui se serait formé dans un petit lac, un étang, ou une mare, alimenté ou par de l’eau jaillissante à travers SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. 308 le sable, ou par un ruisseau formé par quelque source calcaire sur des hauteurs voisines. Comme il se trouve tant de coquilles ter- restres à Rilly et de feuilles à Sézanne, la dernière de ces vues me paraît la plus probable. En effet, si nous étudions le caractère de cette faune, nous ver- rons que des 55 espèces de coquilles il y en a 30 qui sont terres- tres, 3 qui peuvent vivre sur terre ou dans l’eau, et 12 seulement qui habitent l’eau ; et ces 12 espèces appartiennent à 5 genres qui, à l’exception du Cyclas, sont tous des gastéropodes pulmonés, d’où il est probable que l’eau n’était ni profonde ni d’une grande étendue. Des 30 espèces terrestres la plupart appartiennent à des genres dont les espèces vivantes n’habitent pas même des terrains maré- cageux, mais fréquentent au contraire un sol sec et des cotes cal- caires. Ainsi des 7 espèces d’Hélices , il y en a 2 qui appartien- nent au groupe des Caracoles qu’on trouve à présent sur les terrains secs et élevés. Les Clausilies, dont il y a 2 espèces, sont des coquilles qui se trouvent souvent en foule sur nos collines crayeuses. Il en est à peu près de même pour les Cyclostomes dont il y a 3 espèces qui, pour la plupart, habitent les endroits secs et chauds. Les Papa dont il n’y a guère que 10 espèces fréquentent les bords de l’eau, aussi bien que les lieux frais et abrités des hauteurs. Parmi les genres qui habitent plutôt les endroits humides, mais pas exclusi- vement, on peut citer les Achatines dont il y a l\ espèces, et les Vitrines représentées par 1 espèce. Les Auricules, dont il y a 3 es- pèces, sont amphibies. Des 5 genres de coquilles d’eau douce, le Cyclas, dont il y a 5 espèces, vit dans les rivières lentes et dans les étangs où ils s’enfoncent dans la vase. Les Piiyses peuvent vivre dans les terrains marécageux, mais c’est plutôt tout à fait dans l’eau qu’il faut les chercher. Les Paludines fréquentent surtout les rivières et les ruisseaux. Quoique en consultant la liste très complète que donne M. de Boissy (1), on soit frappé de la grande proportion de coquilles ter- restres qu’il y a à Rilly, il faut faire attention néanmoins que les individus de ce groupe sont rares en comparaison de ceux qui vi- vent dans l’eau. Les fossiles qui se trouvent en plus grande abon- dance sont les Physes et les Paludines ; toutes les coquilles terres- tres sont, en comparaison, plus ou moins rares. Celles-là étaient évidemment en possession du terrain, et celles-ci n’étaient que des étrangères. Cependant, quoique amenées accidentellement, comme elles sont en bon état de conservation, il est probable, non seule- (1) Mém. de la Soc. géol. de France , 2e sér,, vol . III , p. 267 SÉANCE 1)13 2! FÉVRIER 1853. 309 ment qu'elles n’ont pas été apportées de loin, mais aussi que leur fossilisation a eu lieu avec rapidité. Il me paraît donc, d’après ces caractères généraux des principaux genres de fossiles d’après leur état et d’après leur mode de conser- vation, qu’il y a eu une terre émergée non loin de Reims et cl’Eper- nay, où le calcaire pisolitique et la craie formaient des hauteurs avec le terrain sableux des sables de Châlons-sur-Vesle à leur base (1). De ces collines calcaires il coulait des ruisseaux alimentés par quelques sources fortement chargées de carbonate de chaux et formant des mares ou petits lacs locaux placés sur les sables infé- rieurs, dont les grains quartzeux ont été charriés et mêlés avec le dépôt calcaire. Après les averses, les coquilles terrestres, qui vivaient sur les bords des ruisseaux et sur les côtes voisines, auront été emportées, et, comme les feuilles qui les accompagnent à Sézanne, fixées rapidement par le carbonate calcaire avant qu’elles aient eu le temps de se décomposer. Ces conditions d’eau limpide, aérée et chargée de carbonate de chaux ont aussi sans doute contribué à la grande taille des Physes et de quelques autres coquilles. Il reste encore à expliquer comment il se fait que ce n’est que dans les endroits où se trouve le calcaire de Rilly que les sables quartzeux marins au-dessous sont si blancs et si purs. Si l’on exa- mine la partie inférieure de ce calcaire, on verra qu’il n’y a pas de couche d’argile capable d’empêcher les eaux qui déposaient le calcaire de s’infiltrer à travers les sables sous-jacents et d’échapper ainsi par voie souterraine , au lieu de s’écouler par une voie à la surface, si toutefois il y avait dans les environs des endroits plus bas que ceux où étaient placés ces petits lacs, ce qui ne présente pas de difficultés. Il résultera de cette manière de se décharger que l’eau du lac aurait été dans un état de repos propre à laisser déposer le carbonate de chaux dont elle était chargée. Quoiqu’elle eût pu perdre ainsi tout excès d’acide carbonique, cependant l’exposition à l’atmosphère et puis les matières organiques et la présence des mollusques auront été cause qu’il en sera resté toujours une certaine quantité en dissolution avec de l’air atmosphérique ; de manière que cette eau, passant par une infiltration continue dans les sables placés au-dessous du dépôt lacustre, aurait exercé une force oxy- dante et dissolvante en même temps avec les effets mécaniques ordinaires du lavage. Donc on peut bien concevoir qu’un tel phé- (1) Peut-être même n’y avait-il qu’un seul lac, le Homery, passant par Rilly, à Châlons-sur-Vesle; mais il me paraît que le calcaire de Sézanne était déposé dans un autre lac à part. 310 SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. nomène ayant lieu à travers une masse de sable qnartzeux, mêlé avec un peu d’argile et de calcaire, avec des tests de coquilles et des traces de matières végétales, rouilles en place par l’oxyde de fer, la matière line argileuse serait emportée et les autres corps décomposés et dissous par le passage de l’eau, ne laissant que la partie la plus grossière et insoluble de cette couche perméable , c’est-à-dire le sable à grains de quartz liyalin, qui, ainsi débar- rassé de matières étrangères, se présente de ce beau blanc et dans cet état de pureté si remarquable qu’on voit à Rilly. Quoique les sables marins de Cbâlons-sur-Yesle soient d’une grande étendue, ce n’est que là où ils sont recouverts par le calcaire lacustre qu’ils présentent ce caractère ; d’où il faut conclure qu’il y a quelque rap- port comme celui que nous venons de suggérer entre les deux faits. M. Hébert fait observer, relativement à la communication de M. Prestwich, qu’il est à craindre qu’il n’ait pris pour du sable de Rilly des sables marins appartenant aux sables de Ghâlons- sur-Vesle et de Bracheux, qui, par leur pureté, quelquefois assez grande, et leur voisinage fréquent du sable de Rilly, peu- vent être confondus avec celui-ci, lorsqu’on ne les observe pas avec une attention suffisante. Il s’empressera de profiter des indications de M. Prestwich, et il rendra à la Société un compte exact de ce qu’il aura vu. M. Boubée dit que les sables de Rilly, qui, comme dans la Sologne, reposent immédiatement sur la craie, lui paraissent provenir de la partie supérieure de la craie. M. Raulin dit que Ses sables de la Sologne sont formés de granité, de quartz, toujours hyalin et de la grosseur d’un pois. M. Deiesse dit que les caractères attribués par M. Hébert aux sables de Rilly semblent indiquer un agrégat de cristaux de quartz qui se seraient formés sur place, comme cela a déjà été signalé pour plusieurs grés. En tout cas, un lavage de ces sables sur place n’aurait pas eu pour effet d’enlever de l’oxyde de fer d’abord mélangé au quartz, puisque cet oxyde est plus dense que le quartz. M. P. Gervais, professeur à la Faculté de Montpellier, met sous les yeux de la Société plusieurs débris de mammifères appartenant aux Phoques et aux cétacés proprement dits ; il donne à leur égard les détails suivants : S £ ANGE DU 21 FÉVRIER 1853. 311 Sur quelques ossements fossiles de Phoques et de cétacés , par M. Paul Gervais. î . Ordre des amphibies . 1° Dans le chapitre de ma Zoologie et paléontologie françaises, qui est consacré à cet ordre de mammifères, j’ai montré qu’on trouvait dans nos terrains miocènes et pliocènes des restes de plu- sieurs espèces qui s’y rapportent, par exemple à Romans (Drôme) , ainsi qu’à Poussan et à Montpellier (Hérault). 2° Une dent, que j’ai aussi fait figurer (pl. VIII, fi g. 8 du même ouvrage), et que j’avais d’abord signalée comme prove- nant d’Uchaux, dans le département de Vaucluse, d’après une indication du Musée d’Avignon, où cette pièce est conservée, pro- vient au contraire d’Uzès (Gard), ainsi que M. Requien et moi nous en sommes assurés depuis lors, et elle y a été recueillie dans un terrain de mollasse renfermant aussi des dents de Myliobates, de Squales miocènes et de Crysoplirys; elle a une grande analogie avec la canine inférieure des Otaries, genre de Phoque actuelle- ment étranger aux mœurs européennes (1). 3° Une canine recueillie dans le crag d’Anvers , et qui m’a été communiquée par mon ami M. le professeur Van Beneden, indique aussi un Phoque assez voisin des Otaries. U° C’est, au contraire, à un Phoque tenant à la fois des Pélages et des Sténorhynques qu’a appartenu un côté de mâchoire infé- rieure que j’ai trouvé dans les sables marins de Montpellier. Je la rapporte à l’espèce que j’avais précédemment indiquée sous le nom de Phoca occitana , en lui assignant précisément la même place dans la série des amphibies; mais, d’après l’examen d une seule incisive supérieure, l’os mandibulaire que je possède aujour- d’hui est grêle comme celui du Phoca leptonyx , qui sert de type au genre Sténorhynque, et à peu près de même forme, mais il est de moindre dimension. Les molaires, à en juger parles deuxième et troisième qui sont encore en place, avaient leur couronne tri- lobée, mais à lobes moins saillants que dans le Phoca leptonyx , surtout les lobes externes, et plus semblables à ceux du Phoca monachus ou Pélage. L’alvéole unique de la première molaire (1) Je dois cependant rapporter à cette occasion que M. le profes- seur Valenciennes possède et se propose de publier prochainement le crâne d’une espèce d’Otarie qui a été trouvé sur la plage, dans le golfe de Gascogne. 312 SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1853. indique que cette dent n’avait qu’une seule racine. Les quatre au- tres, au contraire, sont à doubles racines, comme celles des deux espèces vivantes que nous avons citées. 11 . Ordre des cétacés. Les pièces appartenant à des animaux de cet ordre, que j’ai pu étudier depuis la publication de mon ouvrage , et que je mets, comme les précédentes , sous les yeux de la Société , sont de la même famille que les Dauphins. 5° La plus remarquable est, sans contredit, une tète presque entière découverte, il y a peu de temps, dans la mollasse coquil- lière, à Cournon-Sec, village des environs de Montpellier, qui est situé entre cette ville et celle de Cette. Elle indique une espèce un peu moins grande que le Dauphin ordinaire ( Dclphinus delphis Y, mais à rostre plus grêle, pourvu en dessous d’une forte rainure médio-palatine intermédiairement aux os maxillaires, rainure analogue à celle des Delphi/ms rostratus et pliunbeus. A la face supérieure du rostre existe aussi une rainure bilatérale au point de contact des os maxillaires et incisifs, comme dans les Delphinus Gcojjrensis et macrogenms. Toutefois, la coupe du rostre a une autre forme que dans ceux-ci. Je rapporte la tête trouvée à Cour- non-Sec à l’espèce que j’ai nommée précédemment Dclphinus pseudo-delphis , d’après une autre tète dont on voit la coupe dans une de ces dalles faites avec la mollasse de Yendargues, dont on se sert à Montpellier pour paver les appartements. J’ai donné dans ma Zoologie une figure de cette tête, et la dalle elle-même qui la renferme a été déposée sur le bureau à côté de la tête de Cournon. Je remplacerai le nom de cette espèce par celui de Delphi norhyn- chus sulcatus, parce qu'il a été aussi appliqué par M. Schlegel à une autre espèce propre à la mer du Nord. Quelques portions de têtes de Dauphins , qu’on a retirées de la mollasse de Poussan ( Héi ault) , m’ont paru appartenir au Delphi norhynchus sulcatus. 6° Un Dauphin, qui doit différer assez peu du précédent, et en même temps du Dclphinus dation uni : Laurillard, m’est signalé par un fragment de mâchoire inférieure trouvé dans le falun de Salles (Gironde) par M. Lafon. Cette pièce m’a été confiée par M. le professeur Y. Raulin. 7° Un autre fossile intéressant, que M. Raulin m’a remis aussi pour en déterminer la nature, est un fragment de dent découvert par M. Delbos, dans le dépôt miocène du bassin de Bordeaux. C’est un cône tronqué à son sommet, qui est un peu excavé. U est SÉANCE 1)U 7 MARS 1853, SIS long de 0,090 et il mesure 0,039 de diamètre à sa base. Ce fossile est formé d’un cône intérieur d’ivoire enveloppé d’une couche épaisse de matière cémenteuse. A la cassure qui forme la base du cône, le rayon de la circonférence totale, résultant de la couche enveloppante et du cône d’ivoire emboîté, a 0,015 pour la partie éburnée, et 0,005 pour la partie cémenteuse. La disposition des deux substances composant ce fragment est comparable à celle du Narval et du Cachalot; mais la forme n’est exactement semblable ni à celle de l’un, ni à celle de l’autre, quoiqu’elle se rapproche de la dent du Narval. On sait que le genre de ce dernier a été mentionné à l’état fossile, mais qu’il reste encore de l’incertitude à cet égard. Si la dent dont je parle ici devait lui être attribuée, ce qui devra être confirmé par une étude des caractères ostéologi- ques du cétacé dont elle provient, elle signalerait une espèce cer- tainement différente de celle de l’époque naturelle. En effet, elle devait former un cône bien plus court que la défense du Narval, et elle ne montre pas de trace de la disposition spirale, simulant une torsion de cette dent sur son axe, que l’on voit, au contraire, dans l’espèce vivante. Séance du 7 mars 1853. PRÉSIDENCE DE M. DE VERNEUIL. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le Président proclame membres de la Société : MM. Mares (Paul), docteur en médecine, 45 bis, rue de la Chaussée -d’Antin, à Paris, présenté par MM. Puel et Baptista ; Rouchon-Guignes fils, à Aix (Bouches-du-Rhône), présenté par MM. Coquand et Pidancet. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. le ministre de la justice , Journal des sa- vants, février 1853. SÉANCE DU 7 MARS 1853. 314 De la part de D. Casiano de Prado, Mapa geologica, etc. (Essai d’une carte géologique de la province de Madrid); 1 feuille colombier. Madrid, 4 853, chez Bachiller, Ge Yeneras, 7. De la part de M. Delanoüe, Des terrains paléozoïques du Boulonnais et de leurs rapports avec ceux de la Belgique. * — De II existence des terrains sali f ères dans le nord de la France (extr. du Bull . Soc. géol. , 2e sér., t. IX, p. 399) , in1 8, 12 p., 1 pl. De la part de M. H. Michelin , Description de quelques nou- velles espèces d'Echinodermes fossiles (extr. de la Revue et Magasin de zoologie , n° 1 , 1842); in-8, 3 p. De la part de M. le docteur T. Puel, Fin du catalogue des plantes vasculaires qui croissent dans le département du Lot , in-8, 5 f. 1/2, p. 169-248. Cahors, 1852, chez J. -P. Com- barieu. Comptes rendus des séances de B Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXX YI, nos 8 et 9. U Institut, 1853, nos 999 et 1000. Réforme agricole , par M. Nérée Boubée. n° 51, 6e année. ■ — Janvier 1853. The Athenœum , 1853, nos 1322 et 1323. Neues Jahrhuch , etc. , par Leonhard et Bronn, 1852, cahier supplémentaire, et 1853, 1er cahier. — M. de Yerneuil présente de la part de M. Casiano de Prado une carte géologique de la province de Madrid. Il ajoute que dans ses voyages en Espagne, il a pu s’assurer par lui-même du soin que M. Casiano a apporté dans l’exécution de cette carte. — M. Michelin présente à la Société, de la part deM. E. Cail- liaud, un bel échantillon de gneiss micacé et grenatifére, pro- venant des côtes du département de la Loire-Inférieure; ce gneiss a été perforé par plusieurs Pholades (Picolas dactylos }, qui s’y trouvent encore engagées. M. Michelin fait les communications ci-après : Un voyage fait dernièrement à Rouen et à la montagne Sainte- Catherine m’engage à rappeler à la Société, que dans sa séance SÉANCE DU 7 MARS 1853. 315 du 16 mars 18&0 je lui ai offert deux fragments de Rudistes, trouvés , l’un à Sainte-Ménehould , et l’autre à Cherft , près de Tournai. Je mets aujourd’hui sous ses yeux, 1° Un morceau qui appartient probablement à un Hippurite. 2° Un autre fragment ayant l’apparence de ces vertèbres qui composaient les corps anciennement connus sous le nom d’Ichthyo- sarcolithe. Des Rudistes ayant été signalés à Maestricht et à Ciply, dans le département de l’Aube et dans la Touraine, on reconnaîtra que cette famille a vécu jusque dans les derniers étages du groupe crétacé. Je signalerai également que j’ai découvert, il y a peu de temps, un fait intéressant pour la zoologie et la paléontologie. En exami- nant un moule intérieur d’un Pygaster umbrosa , j’ai reconnu que la bouche était garnie d’un appareil dentaire semblable à celui des Clypéastroïdes. Ce genre devra donc quitter les Cassidulides pour passer dans les Clypéastroïdes. 11 en résultera que les Echi- nides de cette famille, qui n’étaient connus que dans les terrains tertiaires et à l’époque actuelle, remonteraient aux étages crétacé et oolitique, si l’on reconnaît des dents dans toutes les espèces composant le genre Pygaster , tel qu’il est aujourd’hui établi par M. Agassiz. M. d’Archiac demande à M. Michelin s’il a trouvé ces Hippu- rites et ce Pygaster q n place. Sur sa réponse négative, il ajoute que ces fossiles pourraient bien n’être pas de la montagne Sainte-Catherine elle-même, mais provenir du terrain quater- naire qui la recouvre. — M. Delesse fait une communication sur le gisement et sur P exploitation de P or en Australie (1). Les détails dans lesquels il entre sur ce sujet ont été extraits de plusieurs mémoires de Sir Roderick Murchison, ainsi que de différents journaux anglais, et surtout des rapports adressés au gouverneur général de la Nouvelle-Galles du Sud par les géologues du Geological Survey, notamment par MM. W. B. Clarke, T. L. Mitchell, S. Stutchbury, E. Hammond Hargraves, J. R. Hardy. (1) Voir, pour des détails sur ce sujet, la 1re livraison des Annales des mines de 1853. Cet extrait de M. Delesse est accompagné de la carte géologique de la région aurifère de l’Australie, qui a été exécutée par M. de Strzelecki. 316 SÉANCE DU 21 MARS 1853* M. d’Archiac demande si l’or a été trouvé sur les deux ver- sants des chaînes de montagnes. M. J. Barrande fait la même question, en observant qu’en Bohême, par exemple, et le long de la Moldau, l’or a été autre- fois exploité sur une très grande échelle, et qu’il se trouvait dans le gneiss et dans le granité , mais qu’on n’en avait pas rencontré sur l’autre versant de la chaîne et du côté de la Bavière. M. Delesse fait remarquer que la région aurifère s’étend plus spécialement à l’ouest des grandes chaînes de montagnes qui bordent le sud-est de l’Australie , mais qu’à plusieurs reprises l’or a été signalé sur les deux versants d’une même chaîne; ainsi M. Clarke a trouvé de l’or dans le granité, sur les deux flancs des alpes qui s’élèvent entre le Tumut et la rivière Snowy. M. Rivière dit que M. Gueymard prétend avoir trouvé de l’or, en quantité qui serait exploitable, dans les calcaires jurassiques qui s’étendent depuis le bourg d’Oisans jusqu’à Briançon. M. Boubée fait observer que le fer titané n’est pas un indice de la présence de l’or, bien qu’il lui soit généralement associé ; car l’or est presque toujours dans les roches granitiques et dans le quartz. M. Delesse dit que dans l’Australie, le fer titané provient sans doute, et pour la plus grande partie, des basaltes et des trapps qui sont abondants dans la région aurifère ; mais que ce fer titané peut provenir aussi du granité syénitique dans lequel l’or se trouve souvent disséminé en Australie. Séance du 21 mars 1855. PRÉSIDENCE DE M. DE VERNEUIL. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. B. Gastaldi, Appunti , etc. (Aperçus sur la SÉANCE DU 21 MARS 1853. 317 géologie du Piémont)*, in-A, 32 p., 6 pl. Turin, 1853, chez G. Marzorati. De la part de M. L. Gruner, Description et classification des houilles de la Loire (exlr. des Ann. des mines , 5e série, t. II, 1852, p. 511) j in-8, 68 p. Paris, 1852, chez Carilian-Gœury et Victor Dalmont. De la part de M- E. Hébert, Note sur la limite qui sépare le terrain crétacé du terrain tertiaire (extr. des Comptes rendus des séances de C Acad, des sc.9 t. XXXV, séance du 13 dé- cembre 1852); in-A, A p. De la part de M. Tournaire, Géologie et minéralogie du Cantal ( extr. du Dictionnaire statistique et historique du Cantal) *, in-8, 39 p. Aurillac, chez Mme yeuve Picut. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXVI, n°* 10 et 11. Bulletin de la Société de géographie , Ae série, t. IV, n° 2 A, décembre 1852. L'Institut y 1853, nos 1001 et 1002. The quarterfy Journal of the geological Society of London , vol. IX, part. I, février 1853, n° 33. The Athenæum , 1853, nos 132A et 1325. M. de Verneuil annonce à la Société que M. Léopold de Buch vient d’être inopinément enlevé au monde savant et à la géologie. Il fait une énumération rapide des travaux si remarquables et si originaux de M. de Buch , qui, depuis près d’un demi-siècle, occupait le premier rang parmi les géologues de son temps, et il exprime le désir qu’un membre de la Société se charge de retracer, dans une notice bibliographique, les nombreux ser- vices rendus à la science par M. de Buch. La Société adopte à l’unanimité la proposition de M. de Verneuil. M. Rousseau présente à la Société des épreuves daguer- riennes sur papier, qui reproduisent avec beaucoup de perfec- tion les détails de l’organisation de divers animaux. M. Rozet donne lecture de la note suivante : 318 SÉANCE DU 21 MARS 1853. Observations sur une notice de JVJ. Lory , par M. RozeL Le premier numéro du Bulletin (2e série, t. X) contient une note de M. Lory sur les terrains du Dévoluy. Ce géologue, après avoir dit, page 33, que le terrain jurassique et le terrain nummu- litique sont toujours manifestement discordants entre eux, ajoute: « Je ne puis donc que confirmer les remarques que j’ai présentées » à ce sujet au mois de janvier dernier, et, malgré le grand intérêt » qu’offrent les observations de M. Rozet, je persiste à croire que » c’est par suite de quelque confusion, qu’il a été conduit à rap- » porter au terrain jurassique la plupart des masses indiquées » comme faisant partie du terrain nummulitique. » Si, lors de son dernier voyage dans les Hautes-Alpes, M. Lory eût suivi quelques unes des directions indiquées dans une note intitulée Coupes géologiques des Hautes- Alpes ( Bulletin , 2e série, t. IX, p. 165), et surtout celles de Saint-Michel, au sommet de Soleil-Biau et d’Embrun à la chapelle Saint-Guillaume , il aurait reconnu, comme moi, un grès très semblable au grès à Nummulites, non seulement en stratification parfaitement con- cordante avec les derniers strates du lias, mais encore alternant souvent avec eux ; après avoir pris un certain développement, ce grès est recouvert , à stratification concordante , par le calcaire oxfordien sur lequel se trouve ensuite le grès à Nummulites, à Cérites, etc., à stratification toujours discordante. Ces faits s’ob- servent sur plusieurs points du massif de Chaissol-le-Viel, et sur tout le versant N. de la vallée de la Durance, depuis la hauteur du mont Dauphin jusqu’au-dessous d’Embrun. Ce grès, inférieur au calcaire oxfordien, a été reconnu par M. Elie de Beaumont (1) au col du Chardonet, aux environs de Guilestre, etc., comme je l’ai dit dans la note citée plus haut. Il existe dans toute la partie septentrionale du département des Hautes-Alpes, surtout entre la Durance et le Drac, deux espèces de grès d’époques bien différentes et qui ont été confondues sou- vent : l’une recouvrant immédiatement le lias d’une manière par- faitement concordante et recouverte de même par la grande masse du calcaire oxfordien, et l’autre, qui repose transgressivement sur ce calcaire, est caractérisée par des Nummulites, des Cérites et autres fossiles tertiaires. J’engage M. Lory à venir me joindre cet été dans les Hautes- (4) Annales des sciences naturelles , décembre 4 828. SÉANCE DU 21 MARS 1853, 319 Alpes, afin que nous puissions visiter ensemble les lieux que j’in- dique et résoudre complètement la question. M. Delesse lit l’extrait suivant de la Description géogno - •s tique du Siebengebirge , parM. de Dechen. Description gèognostique du Siebengebirge sur le Rhin , par M. de Dechen (1) (traduit par M. Delesse). M. de Dechen, Berghauptmann de la province rhénane, vient de publier un travail très étendu et très complet sur le Siebengebirge , près de Bonn ; ce travail est accompagné d’une belle carte géologique qui montre bien toutes les relations d’âge et de gisement des diverses roches de cette contrée, dont l’étude est devenue classique pour l’étude des roches ignées. Dans son ouvrage, M. de Dechen résume de la manière sui- vante l’état de nos connaissances sur la géologie de Siebengebirge : 1° La formation la plus ancienne du Siebengebirge appartient à la grauwacke des bords du Rhin , et en particulier à la division inférieure du système dévonien, qui est caractérisée par les fossiles connus des environs de Coblentz. 2° Toutes les couches comprises entre la grauwacke et entre les dépôts de lignite du terrain tertiaire miocène ou du groupe de la mollasse manquent dans cette contrée. Pendant la durée du système dévonien supérieur jusqu’à celle du terrain tertiaire éocène, il ne s’est déposé aucunes couches, ou dans le cas où des couches se seraient déposées, elles auraient été détruites sans laisser aucune trace à la surface. 3° L’éruption des grandes masses de trachyte a précédé le dépôt des lignites. Cependant des filons de trachyte se sont formés jusqu’après le dépôt de l’étage moyen des lignites. Comme l’éruption du Irachyte a été complètement terminée pendant le dépôt des lignites, il est probable qu’elle n’a pas commencé beau- coup avant ce dépôt. Ces résultats s’accordent d’ailleurs avec ce que l’on sait sur l’âge du trachyte. (1 ) Von Dechen , Geognostische Beschreibung des Siebengebirgcs a ni Rhin. — Zur Erlaüterung der im Koeniglichen lithographischen Institute zu Berlin heraiisgegeben gcognostischen Kartc desselben. — [Besonders abgedruckt ans den Verhandliingen des natur/iisto - rischen Vereins der Preussischen Rheinlande und fV estphaleiis, Bonn, 1852.) 320 SÉANCE DU 2L MARS 1853. 4° Le redressement des couches de la grauwacke est antérieur à l’éruption du trachyte. Lors de l’éviiption de ce dernier, les cou- ches de la grauwacke avaient déjà les positions dans lesquelles elles se trouvent maintenant. Le trachyte a traversé la grau- wacke, mais il n’a pas modifié la position des couches au delà d’une assez petite distance à partir du point de contact des deux roches. 5° Les couches les plus anciennes du terrain à lignite consistent principalement, dans cette contrée, en roches sableuses et sili- ceuses qui contiennent de nombreuses empreintes de feuilles ap- partenant aux dicotylédones, qui forment les essences forestières; elles appartiennent, en partie, à des genres qui existent encore, mais dont les variétés ont disparu. 6° Par-dessus ces couches les plus anciennes du terrain à lignites qui se montrent sur une assez petite surface, vient le conglomérat trachytique. Ce conglomérat doit être considéré comme une for- mation mixte qui se trouve seulement dans le voisinage du tra- chyte, bien qu’intercalé dans le terrain à lignites ; il est recouvert par des couches à lignites ainsi que par les couches d’argile et de sable qui les accompagnaient. L’âge de ce conglomérat se trouve, par suite, déterminé très exactement relativement au terrain stra- tifié» 7° Le conglomérat trachytique est donc plus récent que la masse générale du trachyte, et c’est ce qu’indique aussi le gisement rela- tif de ces deux roches. Le conglomérat trachytique résulte princi- palement de la destruction du trachyte contre lequel il se trouve, et il contient, en outre, des débris de la grauwacke qui l’environne. 8° Le conglomérat trachytique forme, dans le voisinage immé- diat des grandes montagnes de trachyte , un dépôt compacte et puissant ; plus loin il forme, au contraire , des amas d’une faible puissance qui se trouvent entre les autres couches du terrain à lignites. 9° Les filons de trachyte qui sont dans le conglomérat trachy- tique déterminent l’époque jusqu’à laquelle l’éruption du trachyte a duré dans la contrée. Ces filons ne s’observent pas dans les cou- ches du terrain à lignites qui sont supérieures au conglomérat, tra- chytique. La formation de ces filons a cessé vraisemblablement avant le dépôt de la partie supérieure du terrain à lignites. 10° Les couches du conglomérat trachytique ont généralement une inclinaison très faible. Dans quelques endroits le conglomérat va buter contre le trachyte , duquel il est séparé d'une manière bien distincte. Les relations de gisement de ces deux roches mon- SÉANCE DU 21 MARS 1858. 321 tient que le trachyte a encore été soulevé après le dépôt du con- glomérat. 11° Le conglomérat basaltique ne se laisse pas séparer du con- glomérat trachytique. Le mélange du basalte dans le conglomérat démontre que le basalte existait déjà lors de la formation du con- glomérat , dont les matériaux proviennent , pour une certaine partie, de sa destruction. 12° Cependant on ne connaît aucun basalte qui se trouve au- dessous des divers dépôts du conglomérat trachytique , et qui ait précédé la formation de ce conglomérat. L’éruption du basalte dans cette contrée doit donc avoir commencé pendant le dépôt du conglomérat trachytique ; par conséquent, à peu près à la même époque que celle à laquelle a cessé l’éruption du trachyte. 13° De grandes masses basaltiques formant des amas peu incli- nés alternent plusieurs fois avec les conglomérats trachytiques et basaltiques. Dans un endroit , un filon de basalte qui traverse le conglomérat se réunit à la masse de basalte qui recouvre ce con- glomérat. De grandes masses de basalte se sont formées, par con- séquent, pendant le dépôt du conglomérat. l/i° Le commencement de l’éruption basaltique ne peut pas être déterminée avec une entière exactitude ; cependant cette érup- tion a précédé la formation des filons de trachyte les plus récents. 15° Le conglomérat trachytique et basaltique est traversé par un grand nombre de filons de basalte, mais par un assez petit nombre de filons de trachyte. Les grandes nappes de basalte recou- vrent le conglomérat trachytique , et forment la base sur laquelle repose la partie supérieure du terrain à lignites. 16° Dans cette partie supérieure du terrain à lignites, le basalte est rare, et l’on ne connaît qu’une seule localité, celle d’Utweiler, près de Pleisbach, dans laquelle il est visible que le basalte est plus récent que le terrain à lignites. Par ce motif l’époque à laquelle l’éruption du basalte a cessé ne se laisse pas déterminer avec cer- titude, car il y a une longue interruption entre les premiers et les derniers dépôts du terrain à lignites. On ne sait pas si l’éruption du basalte a cessé complètement avant le dépôt des couches les plus récentes du terrain à lignites, ou si elle a cessé plus tard. 17° L’éruption du basalte s’est prolongée jusqu’à une époque plus récente que l’éruption du trachyte ; la masse principale du basalte est aussi plus récente que le trachyte ; mais ces deux roches ap- partiennent à la même période. 18° Dans le conglomérat trachytique, ainsi que dans le conglo- mérat basaltique, on trouve des empreintes rie feuilles qui ne Soc. gcol.j 2 e série, tome X. 21 322 SÉANCE DU 21 MARS 1853. diffèrent pas de celles qu’il y a dans le grès inférieur et dans les couches à lignâtes supérieures. La flore paraît donc être restée la même dans cette contrée pendant le dépôt des differentes couches qui composent le terrain à lignites. 19° Les couches supérieures du terrain à lignites qui se trouvent au-dessus du conglomérat trachy tique et du conglomérat basal- tique , consistent en argile , en sable et en lignite qui présentent plusieurs alternances. Les dépôts siliceux de tripoli (Polirsc/iiefcr) sont en relation avec des débris d’infusoires. 20° Les animaux les plus gros dont les débris aient été trouvés dans ces couclies appartiennent à la terre ferme ou aux eaux douces; les animaux marins y manquent complètement. Cepen- dant parmi les restes des infusoires il y en a qui ont une organi- sation purement marine , ce qui semble indiquer une eau sau- mâtre ( Brcihwasser) ) ou à demi salée, telle que celle qui se trouve à l’embouchure des grands fleuves. 21° D’après son étendue et son gisement , ce terrain à lignites ne peut pas avoir été déposé dans un bassin fermé et élevé. De plus il n’y avait pas de digue qui le séparait de la mer vers le N. 22° Par conséquent , il est vraisemblable que ce terrain s’est déposé dans un bassin qui était situé près des bords de la mer, et dont le niveau était un peu supérieur à celui de la mer. Les rap- ports de gisement de ces terrains et les caractères des fossiles qu’on y trouve s’accordent bien avec cette hypothèse. 23° Les dépôts à lignites qui se trouvent à proximité de la vallée actuelle du Rhin, au S. du Siebengebirge jusqu’au-dessus de Li nz et Sinzig ( Rhonigerhof et Coisdorf), démontrent l’existence de gorges qui, dans cette période, pénétraient profondément dans la grauwacke. 2 â° Le recouvrement du terrain à lignites par des cailloux roulés qui sont en relation avec la vallée du Rhin et avec l’ancien rivage de la mer , fait voir qu’entre la fin de la formation du terrain à lignites et le commencement du dépôt de ces cailloux , il y a eu une interruption considérable pendant laquelle aucun dépôt ne s’est formé dans cette contrée. 25° Ces dépôts de cailloux marquent, dans cette contrée , le commencement de la formation de la vallée du Rhin, à une hau- teur d’environ 200 mètres au-dessus du niveau actuel de la mer et de 130 mètres au-dessus du niveau actuel du Rhin dans la même localité. 26° Entre la fin de la formation du terrain à lignites et le com- mencement du dépôt de ces cailloux, il y a eu un affaissement de SÉANCE DU 21 MARS 1853. 323 tout ie pays, car les cailloux qui dessinent le bord du rivage de la mer s’étendent jusque sur les couches des lignites; eu outre , ils prennent de plus grandes dimensions , et sur certains points ils reposent immédiatement sur la grauwake. Le terrain à lignites formé dans une eau douce ou dans une eau saumâtre s’était donc affaissé au-dessous du niveau de la mer , en sorte qu’il a été cou- vert par les cailloux. 27° Près de Sinzig et de Linz, la largeur de la vallée atteignait environ 8 kilomètres pendant cette période, comme le démontre le dépôt de cailloux roulés ; c’est à peu près au-dessous de l’embou- ch lire actuelle de l’A-lir que se trouvait l’emboucliure dans la mer de la vallée, dont les bords s’étendaient au N- -O. au delà de Duren et d’Aix-la-Chapelle, tandis qu’ils entouraient le Siebenge- birge, et se prolongeaient à i’E.. de Romlinghoven jusqu’au delà d’Oberpleis. 28° La formation du relief actuel de cette contrée a commencé seulement au moment du dépôt de cailloux roulés, car les vallées se formaient et s’approfondissaient au fur et à mesure que dans la vallée principale se formait un lit plus profond et plus étroit par l’élévation de toute la contrée. 29° En même temps les montagnes trachytiques prirent leur forme; car leur forme primitive, qui était en relation avec l’érup- tion de ces masses, ne se laisse pas reconnaître d’après leur forme actuelle. Les basaltes des bords de la vallée du Rhin (carrières Unkel, Erpeler, Ley, Rolamlseck, Godesberg) enveloppés j usa ne- là par la grauwacke , furent mis à découvert. 30° Pendant ce soulèvement la vallée devait traverser aussi les dépôts de crû Houx qui marquaient la position et la hauteur du premier rivage de la mer. Mais la question est rendue très com- plexe par cette circonstance , que les cailloux roulés sont en partie fluviatiîes et en partie marins , que l’embouchure du fleuve a été reculée de plus en plus par le soulèvement continu de la contrée ; enfin, que le fleuve a remanié les premiers dépôts marins. 31° Lorsque la vallée était déjà formée, eut lieu l’éruption vol- canique dont le cratère se trouve au Rodderberg , dans le voisi- nage de la grande masse tracliytique. Des cailloux roulés de la vallée du Rhin ont été modifiés par l’action volcanique ; ils ont été frittés ou même vitrifiés. 32° Pendant la formation de la vallée , il se déposait , sur ses parois et dans les ravins, un schlamm calcaire très fin qui était le Lœss. Ce dépôt s’est fait après l’éruption volcanique du Rodder- berg, car le fond même du cratère est rempli par le Lœss. Le Lehm, SÉANCE DU Zi AVRIL 1853. 3‘2/i qui est complètement exempt de calcaire, et qui, par cela seul, se distingue du Lœss , se trouve par-dessus les cailloux roulés qui sont les plus élevés, aussi bien que par-dessus le fond actuel de la vallée. 33° Pendant une partie de cette période , la contrée a été plus soulevée qu’elle n’est maintenant, mais ensuite elle a subi un af- faissement , car autrefois la grauwacke qui forme les parois ac- tuelles de la vallée devait se trouver à peu près au-dessous du niveau de l’eau, tandis qu’on ne connaît pas la hauteur du dépôt du fleuve qui recouvre la grauwacke. La hauteur de ce recouvre- ment donne une mesure de l’affaissement qui a eu lieu postérieu- rement. 3/t° Pendant la formation de la vallée, le Lœss et le Lehm ont enveloppé les débris de grands fossiles terrestres différents de ceux qui vivent actuellement ; un nombre considérable de petites co- quilles terrestres montrent que les conditions d’existence de ces habitants de la contrée ont aussi changé notablement : car, bien que plusieurs espèces soient encore vivantes maintenant, les espèces qui étaient les plus fréquentes autrefois sont , au contraire , assez rares maintenant. Séance du k avril 1853. PRÉSIDENCE DE M. DE VERNEUIL. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. Fournet, Résumé des observations recueillies en 1851, dans le bassin du Rhône , par les soins de la Commission hydrométrique de Lyon ; in-8, 8 p. et 1 tableau in-f°. De la part de sir Henry T. de La Bêche, The geological observer (L’observateur géologue), 2e édition, in-8, 740 p. Londres, 1853, chez Longman, Brown, Green and Longmans. De la part de M. Viquesnel, Explorations dans la Turquie d'Europe; descriptions des montagnes du Rilo-Dagh et du SÉANCE DU h AVRIL 1853. 325 bassin hydrographique de Lissa (extr. du Bull. de La Soc. de géographie , he sér., décembre 1852) -, in-8, 19 p., 1 pl. De la part de M. Ach. de Zigno, Sui terrent jura s sici delle AI pi Ve ne te et su/la Flora fossile che li distingue ,* in-8, 16 p. Padoue, 1852, chez Angelo Sicca. De la part de M. Paul Gervais, Observations relatives aux reptiles fossiles de France (extr. des Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , t. XXXVI, séances des 28 février et lli mars 1853) • in-A, 8 p. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXVI, nos 12 et 13. L’Institut , 1853, nos 1003 et 100/i. Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, n° 5/i, 6e année, février 1853. Société impériale et centrale d’agriculture . Bulletin des séances , 2e sér., t. VIII, no 3. The Athenæum , 1852, nos 1326 et 1327. 1° Abhandlurigen der K. K. geologischen Reichsanstalt (Mémoires de l’Institut R. I. géologique d’Autriche) -, grand in -h, 1852, Ier volume. Vienne, chez Braumüller. 2° Jahrbuch , etc. (Annuaire de l’Institut R. I. géologique d’Autriche)-, in -h» 3e année, n° 3, juillet, août, septembre 1852. Le Trésorier présente l’état de la caisse au 31 mars dernier. 11 y avait en caisse au 31 décembre 1852. . 5,884 fr. 10 c. La recette, depuis le 1er janvier 1853, a été de 4,541 « Total. . . 10,425 10 La dépense, depuis le 1er janvier 1853, a été de 7,1 99 60 11 restait en caisse au 31 mars 1853 3,225 fr. 50 c. M. Michelin annonce qu’il vient de recevoir la nouvelle de la mort de M. le docteur Bauga, membre de la Société. M. de Verneuil donne communication d’une lettre de M. le Président de la Société d’agriculture de Valenciennes, qui invite 326 SÉANCE DU II AVRIL 1853. la Société géologique à choisir Valenciennes pour le lieu de sa réunion extraordinaire. M. de Verneuil donne lecture d’une lettre qu’il vient de recevoir de M. H. D. Rogers, chargé de la carte géologique de l’État de Pennsylvanie. Boston, 14 février 1853. L’immense travail auquel je me suis livré pour préparer la publication de mon ouvrage sur la géologie de la Pennsylvanie doit faire excuser le long retard que j’ai mis à vous répondre. J’ai employé les deux étés derniers à une étude complète et rigoureuse des grands bassins d’anthracite de cet Etat. Pour suivre avec exac- titude les bancs de charbon et les autres strates dans leurs plis tortueux et compliqués, il m’a fallu construire un grand nombre de coupes de détails mesurées mathématiquement, et préparer pour base de mon tracé géologique des cartes topographiques exactes. Quelques mois encore sur le terrain, et j’aurai terminé tout ce qui concerne cette région anthracitique , y compris la collection des plantes fossiles et le travail préparatoire pour la publication de la flore de ce terrain. Pour cette dernière tâche, je me suis fait aider de M. Lesquereux , jadis habitant de JNeuchâtel, en Suisse, à qui j’ai confié tous les détails botaniques. Je pense que mes cartes donneront , pour la première fois , une idée fidèle des traits particuliers, si intéressants au point de vue géologique, de la chaîne appalachienne ; c’est pourquoi j’y donne plus de soin qu’on ne le fait pour des cartes géologiques ordi - naires. Une grande partie des deux saisons prochaines sera consa- crée à l’étude des terrains anciens et à celle du grand bassin de houille bitumineuse qui occupe l’ouest de la Pennsylvanie, et dans lequel, comme vous savez, j'ai déjà rencontré de minces bandes calcaires pleines de fossiles d’un grand intérêt. La diversité des circonstances physiques qui ont présidé à ce dépôt demi-terrestre et demi-marin, et la grande étendue sur laquelle ces circonstances ont prévalu, donnent un intérêt particulier au terrain carbonifère de ce pays. Je m’empresse de vous apprendre que j’ai découvert dans les schistes noirs de Marcellus des; restes de Lcpidodendron , dont je n’avais trouvé jusqu’à présent que des traces un peu vagues. Je possède aussi des tiges et des feuilles d’une espèce particulière de ce même genre , provenant des schistes noirs des rivières Genessee et Juniatà. 0 paraît que les équivalents américains de votre sys- SÉANCE DU II AVRIL 1853. 327 tème dévonien d’Europe renferment les plus anciennes traces de flore terrestre que nous puissions découvrir, flore qui , dans ses caractères spécifiques, s’approche de plus en plus du type propre au terrain houiller , à mesure qu’on la suit à travers les groupes dévoniens supérieurs et carbonifères inférieurs. Plus nous nous avançons vers l’ouest, plus les fossiles dévoniens et carbonifères se mêlent ensemble , plus s’effacent les limites des formations, soit que l’on considère leurs fossiles, soit qu’on veuille les distinguer à l’aide de leurs caractères minéralogiques. De là viennent les difficultés qu’éprouvent, malgré l’habile assistance de M. J. Hall , les géologues de nos Etats de l’ouest pour mettre en parallèle avec la série de New-York quelques unes de leurs for- mations supérieures à l’horizon des grès d’Oriskany. Ce que j’ai fait pressentir il y a longtemps dans plusieurs discussions semble bien près d’être accepté aujourd’hui comme la vérité, savoir : que l’équivalence exacte des formations est impossible à reconnaître, ou, en d’autres termes, que les dépôts d’une époque donnée peu- vent perdre leur identité, lorsque nous les suivons sur de grandes étendues, alors même que nous nous maintenons dans les limites d’un même bassin, à cause de l’oblitération, par en haut ou paï- en bas. des limites de leurs fossiles et de leurs caractères minéra- logiques. Chaque grande province géologique , littorale ou péla- gienne. devrait d’abord être étudiée à part dans la succession de ses dépôts et de ses restes organiques, avant qu’on lui appliquât une classification et une nomenclature importées de contrées étran- gères, quelque bien étudiées que soient celles-ci. Je vous envoie un exemplaire de la géologie du Visconsin de notre ami M. Dale Ovven, et j’espère d’ici à deux ou trois ans pou- voir, en vous offrant mon ouvrage sur la géologie de la Pennsylvanie, vous témoigner mon estime pour vos travaux. J’envoie aussi un exemplaire de l’ouvrage d’Owen à M. d’Archiac. Son admirable ouvrage, Y Histoire des progrès de la géologie, m’inspire un profond respect pour l’esprit de sagacité et d’impartialité de l’auteur, qui , j’ose le dire, a droit à la gratitude des géologues de tous les pays pour le savoir, la philosophie et l’indépendance de critique qu’il a déployés dans cette tâche si grande et si difficile. Le congrès national est en ce moment saisi d’une demande qui a pour objet de continuer les recherches de M. Dale Owen dans les mauvaises terres de Nebraska , d’où proviennent tous les beaux ossements de mammifères tertiaires découverts par ce géologue. D’ici à peu d’années l’accès des montagnes Rocheuses sera facile, et alors s’ouvrira pour les géologues un noble champ de recher- 328 SÉANCE DU k AVRIL 1853. clies dans les terrains paléozoïques, crétacés et tertiaires de ce vaste intérieur de notre continent. M. de Francq fait la communication suivante : Note su?' la formation et la répartition des reliefs terrestres , par M. F. de Francq. Les hypothèses à -l’appui desquelles on 11e donne pas de preuves ne fixent guère, dans l’état actuel de la science, l’attention du monde savant, et sont en quelque sorte considérées comme non avenues par lui, jusqu’au moment où leur vraisemblance devient incontestable. Aussi ai-je hésité à aborder ici certaines hypothèses dont la discussion approfondie me sortirait du sujet principal de cette note qui a pour but de prouver que la formation et la répartition des reliefs de notre globe résultent mécaniquement de son état primitif de fusion ; mais ces hypothèses , ayant cependant également pour base cet état primitif de fusion, s’en- chaînent si étroitement à mon sujet, que je ne puis résister au désir de les mentionner sommairement ici , afin de mieux faire ressortir la liaison qui existe entre elles et le point que j’ai à con- stater, afin de montrer surtout que les faits qu’ils embrassent pourraient être tous attribués à une seule loi moléculaire fort simple qui me semble régir la nature presque entière. Ne pouvant, au reste, je le répète, donner à cette note l’extension que mériterait un sujet pareil , je prie les personnes qui la parcourront de ne pas juger en dernier ressort sa partie hypothétique, avant que j’aie donné à celle-ci tout le dévelop- pement qu’elle comporte. Je ne me permettrai donc , dans ce mo- ment, d’attirer sérieusement l’attention que sur le point qui mo- tive les reliefs terrestres. 11 a quelque importance par les calculs elles conséquences auxquels il donne lieu, et notamment parla nouvelle preuve qu’il fournit de l’état de fusion de notre globe et de l’excès d’ampleur de son écorce. Quant aux hypothèses que je vais passer en revue, elles repo- sent toutes sur les principes d’émanation et de retrait de la masse en fusion; plusieurs ont été déjà émises et discutées, partielle- ment au moins, par des sommités de la science : mon but est donc seulement de les grouper ensemble et de montrer qu’elles pour- raient être toutes rapportées à une seule loi moléculaire, à la force de cohésion, qui tend à rapprocher les molécules qui ont le plus d’affinité entre elles. SÉANCE DU k AVRIL 1863. 329 La formation de notre globe nous présente un problème qui, tout insoluble qu’il apparaît , n’en est pas moins entouré de données générales qui conduisent à une seule et même conclusion et semblent nous indiquer la route à suivre pour parvenir à sou- lever le voile qui couvre encore la création. La quantité innombrable des corps célestes, les lois invariables qui les régissent, leurs formes sphéroïdales, l’état d’incandescence d’un grand nombre d’entre eux , les nébuleuses enfin que l’on constate dans diverses périodes de condensation gazeuse, tout semble nous prouver que les astres remontent à une même cause première, à des agglomérations moléculaires originairement à l’état libre ; car leur spbéroïdalité entraîne nécessairement avec elle l’admission d’un état moléculaire qui ait pu adopter cette forme régulière que la matière ne peut avoir prise à l’état solide. L’état gazeux des corps, au contraire, permet d’admettre que chaque molécule , ayant fini par subir l’attraction de l'agglo- mération entière, est venue graduellement s’équilibrer avec elle, lorsque la force d’expansion a été dominée dans celle-ci par l’ensemble de la force d’attraction qui, tout en ne soudant pas encore les molécules entre elles, a exercé cependant sur chacune d’elles une action qui les a rendues de plus en plus tributaires de la masse. La force de cohésion semble, en rapprochant les molécules qui exercent le plus haut degré d’attraction entre elles, tendre à expulser par là une partie des molécules secondaires qui leur sont associées. Les laves nous donnent des exemples frappants de ces émanations dont la cause pourrait être attribuée simultanément à la forme élémentaire, à la tendance de groupement symétrique et au degré de force d’attraction des molécules entre elles. Ces émanations qui doivent être inhérentes au refroidissement de toute masse en fusion composée d’éléments aussi hétérogènes que ceux de notre globe, ces émanations qui doivent avoir lieu à la surface de tous les corps célestes encore incandescents, ne per- mettraient-elles pas d’entrevoir en elles les éléments d’autres corps célestes secondaires, et ne confirmeraient-elles pas indirectement ainsi l’hypothèse de leur origine gazeuse à tous? M. Elie de Beaumont distingue, dans sa note sur les émanations volcaniques et métallifères, deux classes de produits volcaniques : ceux qui sont volcaniques à la manière des laves, et ceux qui sont volcaniques à la manière du soufre. Les premiers se sont injectés à l’état de fusion dans les gerçures de l’écorce terrestre, les se- conds s’y sont condensés à l’état gazeux. Cette dernière catégorie. no SÉANCE DU k AVRIL 1855. qui n’est qu’un classement relatif de corps alliés à d’autres corps moins volatilisables, présente un point frappant que fait ressortir le tableau de la distribution des corps simples dans la nature que M. Elie de Beaumont a joint â sa note. Ce tableau nous fait voir que sur dix-neuf corps constatés dans les émanations, dix-sept ont été déjà retrouvés dans les aérolithes; le bore et l’arsenic manquent seuls encore à cette liste dans ces derniers; mais ils sont en faible dose dans les émanations volcaniques et très volatilisables par eux- mêmes. D’un autre côté, les aérolithes ne contiennent en plus que ie magnésium , le nickel , le chrome et le phosphore ; mais ces corps font partie des filons stanniferes et des filons ordinaires qui semblent aussi devoir être attribués, partiellement au moins, à la condensation des produits volcaniques à la manière du soufre, c’est-à-dire à des émanations du bain de fusion. L’hypothèse qui attribuerait la formation des corps célestes secondaires aux émana- tions d’autres astres encore incandescents pourrait donc ne pas paraître dénuée de toute vraisemblance, surtout lorsqu’on réflé- chit à la force d’impulsion et d’entraînement du calorique rayon- nant qui , sur un globe en fusion , doit transporter les corps gazeux jusqu’à la limite où cette force commence à s’équilibrer avec la force d’attraction que ces corps finissent par exercer avec l’astre central qui les domine. Lorsqu’on descend ensuite du domaine de l’astronomie dans celui de la géologie, ces mêmes émanations donnent lieu à des hypothèses qui permettraient , peut-être, de résoudre quelque# questions fondamentales de cette science. Si le globe a été à l’état complet de fusion, son écorce a du com- mencer à se former par une simple pellicule de refroidissement qui s’est épaissie graduellement aux dépens du bain de fusion, et il existe forcément alors une zone de transition , une zone pâteuse entre ce bain et les parois solides de l’écorce qui repose sur lui. Que se passe-t-il dans cette zone ? Quel rôle les émanations doi- vent-elles y jouer ? Les roches granitoïdes semblent nous donner quelques lumières sur ce point. Elles présentent , en général , à leur surface de contact une ri- chesse élémentaire relativement plus grande que celle de la masse, et les produits volcaniques à la manière du soufre qui se sont condensés et accumulés à l’état cristallin dans cette écorce pénè- trent ordinairement aussi jusqu’à une certaine profondeur dans la roche séaimentaire de contact, la métamorphisent et remplissent SÉANCE DU k AVRIL 1853. 331 ses gerçures dans lesquelles ils forment des filons dont la richesse élémentaire diminue en s’éloignant du foyer granitique (1). Ces exemples ne nous démontrent-ils pas la présence des corps gazeux dans la masse granitique incandescente , l’émanation qui résulte de son refroidissement , la condensation enfin de ces gaz et le groupement de ceux-ci , à l’état cristallin , contre des parties solides de l’écorce terrestre qui les arrête et leur absorbe graduelle- ment leur calorique? Le même fait ne doit-il pas se reproduire en grand sous L écorce terrestre, et le haut de la zone pâteuse ne doit-il pas être à ses étages inférieurs ce que l’écorce granitique est aux granités qu’elle recouvre? Cette zone pâteuse, qui nous représente l’état de transition du refroidissement de la matière en fusion , ne doit-elle pas émaner, comme les granités, une partie des produits volcaniques à la ma- nière du soufre qu’elle contient, et ces gaz , en se dégageant de la masse à laquelle iis étaient associés, ne doivent-ils pas tendre à remonter vers le haut de la zone pâteuse, à s’y accumuler sous les parois solides de l’écorce et à y donner lieu à une richesse élémen- taire relativement plus grande, pour certains corps, que celles des étages inférieurs? Le refroidissement graduel de ces gaz ne leur permettrait il point , enfin, de se condenser aussi, partiellement au moins, d’après leurs affinités moléculaires, dans les porosités encore plastiques de la masse qu’ils remplissent, et ne parvien- drait-on pas à se rendre compte ainsi de l’élaboration des matières granitoïdes et porphyroides ? La nature cristalline de presque tous les corps, leurs formes régulières et constantes dans cet état , leur clivage plus ou moins facile clans tel ou tel sens, leur petit nombre de combinaisons entre eux , tout semble nous prouver que la molécule de la plupart des corps simples possède une forme cristalline déterminée, et qu’elle tend à se grouper symétriquement d’après celle-ci , de manière que chacune de ses faces adhère entièrement à une autre face semblable ou à ses fractionnements réguliers, et que les molécules puissent exercer entre elles, parla, leur maximum de force de cohésion. Mais si le groupement symétrique qu’elles | cherchent à adopter est entravé par une cause étrangère jusqu’au j moment où elles ont perdu déjà une partie de leur liberté d’ac- (1) Voyez la note sur les émanations volcaniques et métallifères de M. Élie de Beaumont, insérée dans le Bulletin de la Société géolo- gique, 2e série, t. IV, p. 1249. séance du 5 juillet 1847. 332 SÉANCE DU h AVRIL 1853. tion , où elles ne peuvent plus se placer ainsi , de nouveau, dans leur position normale, leur force de cohésion ne diminue-t-elle pas en raison du défaut d’adhérence qui résulte de leur mélange et de leur bouleversement entre elles? Plus alors les formes molé- culaires sont nombreuses et incompatibles, moins le restant de liberté qu’elles possèdent ne doit-il pas leur permettre, en général, de retrouver des faces d’adhérence régulière, et la masse ne con- serve-t-elle pas par là de la plasticité à une température de beaucoup inférieure à celle qui eut provoqué la consolidation des mêmes molécules groupées d’après leurs affinités ? Cette hypothèse, dont je chercherai à démontrer toute la vrai- semblance dans un ouvrage que je fais dans ce moment sur le principe des actions moléculaires , ne rendrait-elle pas compte de l’anomalité apparente qui existe entre la formation de l’empâte- ment et celle des cristaux des roches porphyroïdes, et ne pourrait- t on pas admettre que les émanations donnent une contexture poreuse aux étages supérieurs de la zone pâteuse et quelles s’y condensent, partiellement au moins, à l’état cristallin, à une | température à laquelle cette masse pâteuse conserve encore de la ! plasticité ? Les produits volcaniques à la manière du soufre ne s’émanent i pas tous au même degré de température. La masse en fusion qui les contient semble, en se refroidissant, ne les expulser que dans un ordre donné qui doit modifier la composition relative des différents étages de la zone pâteuse dont la température diminue forcément de bas en haut ; d’autant plus que la tendance que les gaz ont toujours à remonter les concentre, je le répète, dans les régions supérieures. D’un autre côté, plus l’accumulation aug- mente, plus elle doit s’étendre vers les régions inférieures; et si l’on réfléchit à ce que l’écorce terrestre s’est épaissie graduellement, à ce qu’elle a augmenté par là la résistance qu elle oppose, à ce que la zone pâteuse et la somme gazeuse qu’elle contient ont dû s’ac- croître également par la suite des temps, on comprendra que lors- que l’écorce est venue à se rompre sur un ou plusieurs points, les iJ gaz, cessant d’y être comprimés, ont dû sortir, en général, avec une f violence croissant de période en période, et remonter d’une pro- fondeur de plus en plus grande, en entraînant avec eux dans leur marche ascendante la masse dans laquelle ils étaient en- gagés. Ne parviendrait-on pas à motiver ainsi une des causes qui ont . modifié graduellement le caractère de l’ensemble des masses éruptives, et ne pourrait-on pas assimiler l’échelle des produits SÉANCE DU H AVRIL 185 B. SS 3 ignés qui s’étend depuis les granités jusqu’aux basaltes et aux laves à celle qui irait de la sommité de la zone pâteuse jusqu’à sa sa base? On concevrait alors pourquoi les granités sont ordi- nairement les premières matières éruptives qui aient fait leur apparition dans une contrée, d’autant plus qu’il existe une cause d’accumulation gazeuse anormale qui se développe aussi de pé- riode en période, et qui ne doit guère, dans l’hypothèse que je viens de poser, permettre aux granités de sortir sur un point déjà ridé, à moins qu’une cause locale d’appauvrissement gazeux ne vienne diminuer sur un point de la zone pâteuse les gaz qui y sont accumulés et n’enlève par là à la matière incandescente la cause qui l’eût fait remonter d’une profondeur plus grande. Quelques granités tertiaires sembleraient nous donner des preuves de ce fait exceptionnel. Les émanations qui se concentrent dans le haut de la zone pâteuse ne doivent s’y condenser entièrement que si l’écorce ter- restre qui les arrête leur présente une voûte horizontale. Le niveau à bulle d’air nous le prouve en nous montrant qu’à la moindre inclinaison le liquide, qui tend toujours à prendre son niveau, exerce une pression inégale qui fait remonter la bulle d’air engagée entre lui et la voûte. Le même fait doit se présenter en grand sous l’écorce terrestre sur tous les points où elle n’offre pas ce niveau régulier, par suite de ces bosselages intérieurs. Les gaz doivent seulement ne s’y déplacer que lorsqu’ils ont pris un développement suffisant pour provoquer la mise en mouvement de la masse pâteuse qui les environne, et ces avalanches gazeuses, en remontant sous l’écorce , ne donneraient-elles pas lieu à nos tremblements de terre ? Cette hypothèse ne détruirait pas celle qui tend à établir une concordance entre les époques des commo- tions du globe et celles des grandes marées; car la cause qui produit ces dernières et l’ébranlement que celles-ci occasionnent sur les côtes peuvent agir aussi sur l’écorce terrestre et déterminer le départ des masses gazeuses encore en équilibre sous elle. Il serait inutile, peut-être, de recourir alors à l’ admission de marées intérieures pour expliquer les faits observés. Quoi qu’il en soit, ces masses gazeuses doivent, par leur déplacement, provoquer l’af- faissement des points quelles abandonnent et le relèvement de ceux sous lesquels elles se portent. Leur force dilatante doit finir par décoller et par soulever l’écorce au-dessus du bain de fusion et augmenter encore ainsi la somme des émanations qui ne sont retenues dans la masse pâteuse que par la compression qu’elles subissent; l’écorce, enfin, éprouvant alors un dilatement locale SÉANCE DU li AVRIL 1858. 38 h souvent trop considérable, doit finir par se rompre et par donner issue aux gaz qui entraînent, en sortant avec violence, de la matière en fusion. Cette hypothèse sur la formation des volcans nous motiverait leur fréquence sur les côtes qui présentent un relèvement considé- : rable du bassin des mers et leur servent ainsi, en quelque sorte, de vastes gazomètres. On comprendrait alors que plus les côtes sont a élevées et dominent une grande étendue de mers profondes, plus ; leur pente doit développer de principes volcaniques. Les soulève- ments ou affaissements lents que l’on constate sur plusieurs de ces I côtes confirmeraient, partiellement au moins, ce travail intérieur, et l’on pourrait admettre que les failles qu’il occasionne permet- j tent aux parties hautes de s’élever et aux vallées ou bassins de s’affaisser encore. Les sources thermales, qui sont presque toujours r situées à ce point de partage de ces deux actions inverses, nous dé- < noteraient, à leur tour, l’action gazeuse intérieure ; l’exemple si sou- • vent reproduit du temple de Sérapis nous en donnerait également une preuve, car son abaissement actuel pourrait alors être attribué aux éruptions du Vésuve, qui seraient venues, semblables à des sai- gnées du globe, soulager momentanément cette partie de l’Italie \ de sa plénitude volcanique , tandis que le soulèvement de plu- sieurs des autres côtes de la Méditerranée nous attesterait qu’une force dilatante y soulève encore l’écorce sur les points où cette force ne parvient pas à la rompre ou à se déplacer. Mais il existe à côté du principe volcanique celui de l’excès d’ampleur de l’écorce qui contribue aussi pour sa part à ce travail incessant du globe. Les hypothèses que je viens de passer en revue reposent sur le | principe d’émanation de la masse en fusion , principe que l’on constate, je crois, dans trop de circonstances pour ne pas être au- torisé à l’appliquer dans les différentes phases qu’il peut parcourir; d’autant plus qu’il nous fournit une explication plausible de bien des faits que l’on n’est pas encore parvenu à résoudre par d’autres voies, et qu’il dérive lui-même, ensuite, de la contraction que subit en général la matière en passant de l’état de fusion à l’état solide, contraction qui occasionne un retrait qui nous explique mécani- quement, en le combinant avec le principe d’émanation , la for- mation et la répartition de tous les reliefs terrestres, et donne par là même plus de valeur aux hypothèses basées sur ces émana- tions, ainsi qu’à la théorie elle-même de l’état de fusion qui en est le point de départ. Je vais chercher maintenant à démontrer quelles sont les con- 335 SÉANCE DU h ÀYRIL 1853. séquences de ce retrait, que M. G. Bischof a constaté il y a déjà un certain nombre d’années. Presque tous les corps qui composent l’écorce terrestre subissent ce retrait, en passant de l’état de fusion à l’état solide, c’est-à-dire en se refroidissant, et MM. Ch. Deville et Delesse ont reconnu récemment qu’il s’élève chez plusieurs corps au dixième de leur volume. Cette découverte précieuse nous donne certainement l’ex- plication d’une des principales causes clés révolutions de notre globe ; car elle nous fait voir que le refroidissement général de la masse en fusion, et notamment celui de la matière qui forme la zone pâteuse et vient épaissir ensuite les parois solides de l’écorce, doit provo- quer une diminution de volume de cette masse en fusion , et par là même donner trop d’ampleur à l’écorce refroidie qui repose sur elle. Cet excès d’ampleur doit s’accroître ensuite par les éruptions qui viennent amoindrir encore la masse intérieure, et par la trans- piration insensible du globe qui résulte de ses suintements gazeux incessants. Si nous admettons que ce globe ait été dans l’origine à l’état complet de fusion , son écorce a dû commencer à se former par une simple pellicule de refroidissement qui s’est étendue à la sur- face du bain de fusion, qui en a pris ainsi la forme loin de lui im- poser la sienne , et qui a reposé et repose encore sur lui , en ne présentant pas une solidité assez grande pour se supporter elle- même dans son ensemble. Cet épiderme, contracté par son retrait, a dû, dans le principe, étreindre la masse en fusion dans tous les sens, et offrir ainsi une surface régulière aux mers qui se sont formées sur lui et qui ont dû avoir par là une profondeur égale partout ; car le bassin de ces mers avait la régularité du bain de fusion , dont le nivellement sphéro'idal était comparable à celui de la surface des mers elles- mêmes. Mais il a dû cesser d’en être ainsi lorsque le refroidisse- ment a commencé à prendre un certain développement ; car l’écorce, finissant alors par ne plus subir elle-même de retrait à sa surface, est devenue graduellement trop grande pour la masse en fusion qui diminuait de volume. Pour bien préciser la marche de ce retrait des corps qui consti- tuent l’écorce elle-même, je désignerai sous le nom de zone en voie de contraction ou de zone A , la partie de l’écorce qui s’étend depuis le haut de la zone pâteuse jusqu’au point où la contraction cesse d’avoir lieu directement , et je nommerai zone refroidie, ou zone B , celle qui est au-dessus. 336 SÉANCE DU II AVRIL 1853. La première doit avoir un maximum qu’elle ne peut dépasser, tandis que la seconde tend toujours à s’accroître. Lorsque le premier épiderme est venu à se former, il a, tant que son épaisseur n’a pas dépassé celle que peut atteindre la zone À , subi une contraction qui a compensé, en partie ou au delà, la di- minution de volume de la masse en fusion. Quand la zone B a commencé à se développer, elle a dû être contractée indirectement encore par le retrait delà zone A qui la dominait, sans que l’écorce présentât un véritable excès d’ampleur ; mais lorsque la zone B a fini par dominer elle-même cette zone A, la diminution de volume de la masse en fusion n’a plus été compensée par un retrait sem- blable de l’écorce, et celle-ci a dû commencer à avoir alors un excès d’ampleur égal à cette diminution de volume de la masse en fusion. Cette dernière tendant toujours, en s’amoindrissant, à conserver, d’un autre côté, sa forme régulière, en vertu de sa nature fluide et de son attraction centrale, l’excès d’ampleur de l’écorce a dû atteindre un chiffre semblable partout ; et ce chiffre pouvant enfin, ainsi que je vais le prouver, se calculer sur les grands cercles qui présentent le maximum du développement sphérique, il suffit d’en poser un certain nombre sur une sphère, et de chercher quels ré- sultats ils nous offrent pour vérifier mathématiquement si le prin- cipe de l’excès d’ampleur de l’écorce est exact. Mais je vais, avant de procéder à ce calcul, chercher à démontrer sommairement quel doit être le travail de l’écorce sur elle-même lorsqu’elle acquiert trop d’ampleur par la diminution de volume de la masse en fusion, afin de mieux faire comprendre la valeur des chiffres que j’aurai à mentionner et les conséquences que l’on peut en tirer. Si le globe a été originairement à l’état complet de fusion , son premier épiderme a dû présenter, ai-je dit, un niveau régulier, et les mers ont dû, par la même cause, avoir partout une profondeur semblable ; mais lorsque l’écorce a commencé à devenir trop grande, le refoulement latéral occasionné par son excès d’ampleur et la contraction de la zone A ont dû la porter à se bosseler. Moins elle était forte, dans le principe, plus ses bosselages devaient être nombreux et de faible dimension , car la réaction de l’écorce sur elle-même ne s’étendait pas encore au loin ; plus, au contraire, elle s’est épaissie, plus ses bosselages ont dû diminuer de nombre et gagner d’ampleur. Ils se sont élevés graduellement ainsi au-dessus des mers, se sont affranchis par là du poids de celle-ci ainsi que leurs dépôts futurs, et sont devenus alors des points faibles de 337 SÉANCE DU II AVRIL ‘1853. l’écorce sur lesquels a reflué l’excès d’ampleur des surfaces marines, dont le poids a augmenté encore par le volume d’eau refoulé sur elles, par les dépôts postérieurs qu’elles ont reçus, et par la réaction enfin des surbombements provoqués par elles. Mais lorsqu’un de ceux-ci est venu à faiblir et à ne plus résister au refoulement latéral qui l’élevait au-dessus du niveau régulier du globe, ce surbombe- ment a du s’affaisser sur lui-même, en dépensant une partie de son excès d’ampleur en rides ou plissements qui forment nos monta- gnes; ces rides ont dû s’aligner alors perpendiculairement à l’axe du maximum de refoulement latéral qui les avait provoquées, et comme elles ne dépensent, en général, sur une sphère qu’une partie de l’excès d’ampleur d’un de ces surbombements de l’écorce , le maximum de développement de celui-ci a dû se trouver, à la fin de la période suivante, dans l’axe ayant le moins subi l’influence des plissements précédents. On peut se rendre compte ainsi du parallélisme qui existe, dans un ensemble continental, entre les plissements d’une même époque. Ce sujet, au reste, a été traité récemment avec trop de profondeur et de génie par l’illustre auteur des Systèmes de montagnes , pour que je croie avoir besoin de le développer plus longuement ici. Moins l’écorce terrestre avait d’épaisseur, moins elle devait opposer de résistance à la réaction latérale qu’elle subissait par son excès d’ampleur. Il semblerait donc, au premier abord, que les périodes géologiques ont dû avoir une durée progressive. Mais on peut objecter à cette hypothèse que l’excès d’ampleur s’est réparti de période en période sur moins de points du globe, en raison précisément de l’épaississement de l’écorce ; que le poids de celle- ci et l’étendue de ses surbombements ont suivi une proportion analogue qui est venue combattre l’accroissement de sa force de résistance; que les principes volcaniques, enfin, ont pris également plus d’intensité, et qu’ils ont dû hâter la fin des périodes par la sortie des matières incandescentes et par les failles qu’ils ont pro- voquées , deux faits qui augmentent l’excès d’ampleur de l’écorce et tendent à l’afîaiblir elle-même. Il serait donc difficile , peut- être, de soutenir en théorie que la durée des périodes a dû s’éta- blir en raison de l’épaisseur de l’écorce ; mais on peut prétendre avec plus de vraisemblance, que l’intensité des crises finales a suivi cette marche progressive ; car plus l’écorce a eu d’épaisseur, plus ses plissements ont dû grandir et la rompre avec violence; plus ensuite les principes volcaniques ont augmenté , plus ils ont dû accroître aussi les résultats de ces fins de périodes. L’écorce|s’ épaissit extérieurement par les dépôts successifs qu’elle Soc. gàoL. 2 e série , tome X. 221 338 SÉANCE DU h AVRIL 1858. reçoit. Les dépôts marins, qui sont les plus importants, cessent na- turellement de s’opérer sur les reliefs qui s’élèvent au-dessus des mers. Plus ces reliefs terrestres sont donc anciens, moins ils doi- vent avoir d’épaisseur et exercer de pression relative sur le bain de fusion, d’autant plus que leur poids est allégé encore par le refoulement latéral qui les soulève. Aussi les voyons-nous presque partout, lorsqu’ils n’ont pas été remaniés, surnager, en quelque sorte , au-dessus du niveau général de la contrée , et nous montrer ordinairement, par l’abaissement graduel de l’ensemble des for- mations postérieures qui les environnent, que les soulèvements de l’écorce ont lieu en raison de son excès d’ampleur et du peu de pression et de résistance relatives qu’elle exerce sur quelques points du globe. Si les reliefs terrestres nous accusentl’excès d’ampleur de l’écorce, si cette ampleur s’est développée régulièrement en vertu de la di- minution de volume de la masse en fusion, si la force d’attraction centrale de celle-ci lui a donné dans l’origine sa forme sphéroïdale et tend à la lui conserver encore , les grands cercles posés sur une sphère doivent nous offrir tous sur leur parcours une somme de reliefs à peu près semblable. Ce fait, hâtons-nous de le dire, se vérifie, en général, avec une précision remarquable sur les principales directions du globe, et l’étude d’une sphère nous offre sous ce point de vue des constata- tions du plus haut intérêt. Elle nous montre la pondération géné- rale qui a présidé à la formation et à la répartition de tous les reliefs; la grande solidarité qui existe dans l’écorce tout entière ; le peu de solidité relative qu’elle doit avoir pour adopter, ainsi qu’elle le fait, les modifications de sa masse intérieure; l’état in- contestable de fusion , enfin , de cette masse , état qui est prouvé non seulement par ses phénomènes ignés, mais encore par la forme régulière quelle conserve en se rapetissant, ainsi que par le peu d’adhérence de son écorce, qui refoule souvent son excès d’ampleur à des distances immenses les unes des autres. Les grands cercles ne donnent pas tous le même chiffre de de- grés terrestres; mais leurs exceptions, loin de détruire la règle que je viens de signaler, la confirment au contraire et lui donnent plus de valeur encore , car elles font ressortir les causes qui font varier ces sommes de degrés terrestres. IL faudrait, en effet, pour calculer le véritable excès d’ampleur d’un grand cercle, commencer par déterminer quelle serait la pro- fondeur normale des mers si l’écorce terrestre reposait sans sur- bombements ni plissements, sans excès d’ampleur enfin, sur le bain SÉANCE DU k AVRIL 1853. 339 de fusion , et indiquer ensuite les profondeurs et les hauteurs moyennes du globe sur ce grand cercle, en tenant compte aussi de la dépense d’ampleur qui y a été faite par les plissements. On arriverait par cette voie à une précision qu’on ne peut obtenir par la simple addition des degrés terrestres ; car il est évident que les relèvements sous-marins, auxquels il ne manque plus qu’un faible exhaussement pour surnager au-dessus des mers et pour former ainsi des surfaces terrestres, devraient être portés en ligne de compte pour leur part d’excès d’ampleur; que la hauteur moyenne des îles et continents devrait être également appréciée ; que la dépense d’am- pleur qui a été faite par des plissements sur le parcours d’un grand cercle peut varier et doit influer sur la somme terrestre de celui-ci. Mais l’addition des degrés terrestres n’en conduit pas moins à un ensemble de résultats qui ne permet guère de conserver de doutes sur le principe de l’excès d’ampleur régulier de l’écorce; d’autant plus qu’une partie des causes d’exception dont je viens de parler se constatent souvent à première vue. Les exemples que je cite à la fin de cette note nous montrent, ainsi, que les grands cercles posés dans des conditions semblables de plissements donnent en général, aussi des sommes analogues de degrés terrestres, tandis que ces sommes augmentent lorsque la dépense d’ampleur faite par les plissements vient à diminuer. Les surfaces terrestres ne dénotent pas toujours le véritable excès d’ampleur qui existe sur un grand cercle. Elles peuvent subir la réaction de l’excès d’ampleur ou de la tension d’un autre grand cercle qui les domine; car les plissements forment des leviers de l’écorce terrestre par l’excès d’ampleur qui reflue sur eux et par les principes volcaniques qu’ils développent. Ils par - viennent ainsi à affaisser des surbombements ou à exhausser des surfaces marines qui cèdent à leur force de traction. Les dépôts d’aliuvions qu’ils occasionnent indirectement, ensuite, empiètent souvent par leurs deltas sur les mers , et donnent lieu à des surfaces terrestres qui ne proviennent pas d’un excès d’ampleur de l’écorce et peuvent en augmenter la somme, en apparence, dans le calcul des degrés terrestres de certains grands cercles. Les plaines des Etats- Unis, et notamment celles de la Louisiane, nous donnent un exemple frappant de ces causes d’augmentation terrestre. Les grands cercles qui les traversent, plus ou moins du nord au sud, en se maintenant entre les montagnes Rocheuses et les monts Alleghanys , et qui , d’un autre côté , passent dans les savanes de l’Amérique du Sud, sans toucher aux Cordillères, offrent des sommes terrestres qui détruiraient la règle de répartition 3/sO SÉANCE DU h AVRIL 1853. d’ampleur, si ces sommes n’étaient pas motivées par les causes que je viens d’indiquer. D’un autre côté, le développement anormal que les montagnes Rocheuses et les Cordillères donnent aux grands cercles qui les longent du côté oriental dans les deux Amériques semble avoir produit dans le golfe du Mexique et dans la mer des Antilles une tension de l’écorce, qui domine l’excès d’ampleur des grands cercles qui traversent ces mers plus ou moins de l’est à l’ouest, et cette tension y paralyse vraisemblablement un ancien exhaussement continental ; car cette étendue terrestre manque à presque tous ces grands cercles, venant de l’E. à l’O . , pour compléter le chiffre moyen de degrés terrestres qu’ils devraient avoir. Ce fait n’est pas sans importance, d’autant plus qu’il se reproduit dans presque tous les archipels qui avoisinent les continents. Ne nous prouve-t-il pas que lorsque l’écorce vient à porter trop d’ampleur sur un point, elle peut immerger par là, pendant une ou plusieurs périodes, d’autres surfaces antérieurement émergées? Les îlots de formations an- ciennes que nous constatons sur nos continents nous montrent, à leur tour, parleur similitude avec les archipels, que ces derniers servent souvent de germes à des continents futurs, et qu’ils ten- dent, en général, à les provoquer par l’excès d’ampleur qu’ils con- centrent autour d’eux. Mais les combinaisons d’excès d’ampleur et de tension que je viens de signaler dans la mer des Antilles nous font voir aussi que les archipels doivent laisser de l’incertitude dans le calcul des degrés terrestres des grands cercles, et qu’il faut tan- tôt considérer comme terrestre l’étendue tout entière de ces archi- pels , et tantôt ne mentionner strictement que leurs reliefs. Cette obligation est un résultat inévitable de toutes les réactions qui se croisent sur le globe , réactions dont on se rendrait facilement compte si l’on voulait y tracer arbitrairement des contours devant offrir une somme égale de parcours à tous les grands cercles. On verrait alors quel grand nombre de points on aurait à classer dans la catégorie des archipels, et l’on parviendrait difficilement à coin • biner des formes répondant mieux à ce problème que celles de nos surfaces terrestres, surtout si l’on tient compte à celles-ci des rectifi- cations que leurs reliefs autorisent. Mais le mécanisme de la forma- tion de ces reliefs terrestres prend plus d’évidence encore par le pa- rallélisme de plissements que les grands cercles présentent ordinai- rement sur leur parcours, parallélisme qui n’est qu’une conséquence absolue de l’excès d’ampleur régulier qui se développe sur un corps sphérique ; car ce corps doit présenter alors toujours son maximum d’excès d’ampleur sur ses grands cercles, et doit y provoquer par SÉÀÏNCE DU h AVRIL 1853. 3i§ 1 là des plissements déterminés par ce maximum de refoulement latéral cpii les aligne perpendiculairement avec lui. Lorsqu’on place un grand cercle à grand angle droit sur une côte ou sur une forte chaîne de montagnes, on ne tarde pas à voir qu’il existe non seulement sur ce grand cercle une somme approxi- mative d’ampleur qui s’accuse au-dessus des mers ; mais que cet excès d’ampleur a donné lieu ordinairement aussi à un certain nombre de rides ou alignements qui sont coupés également à angle droit par ce grand cercle et que la combinaison de ces deux faits motive la forme et la répartition de presque tous nos reliefs terrestres. Tout tend à confirmer, on le voit , l’existence d’un excès d’am- pleur de l’écorce, et cet excès d’ampleur, ainsi que la faculté qu’il a de refluer à des distances souvent immenses, ne nous montre-t-il pas, je le répète, le peu d’adhérence de cette écorce à la masse intérieure? la nature fluide que doit avoir cette dernière pour se prêter à ce glissement de son épiderme , pour conserver une forme sphéro'idale, tout en diminuant de volume , pour produire enfin les phénomènes ignés que l’on constate? La concordance des résultats des grands cercles, dont le calcul n’est théoriquement applicable qu’à des corps sphériques, ne nous donne-t-elle pas ensuite une nouvelle preuve de la forme régu- lière de notre globe ? On est conduit ainsi à un enchaînement de conséquences qui ramènent toutes à l’état de fusion du globe, au peu d’épaisseur relative de son écorce et à l’excès d’ampleur de celle-ci. Les plissements parallèles sur un grand cercle sont-ils tous du même âge? Evidemment non. Ils représentent l’ensemble des ac- tions successives que l’écorce a subies dans un sens donné parla diminution de volume de la masse intérieure , et ne dénotent que l’effet du maximum de refoulement latéral qui sur une sphère doit toujours avoir lieu dans la direction des grands cercles. Je terminerai cette note par la citation de quelques uns de ces grands cercles qui feront ressortir les faits sur lesquels je m’appuie. Ils montreront la solidarité de l’écorce tout entière, la compensa- tion de reliefs qui finit par s’établir ordinairement sur chaque grand cercle , la relation enfin qui existe entre la plupart des for- mes continentales; car on verra qu’une partie des côtes et chaînes de l’Asie et de l’Afrique sont parallèles sur ces grands cercles aux montagnes Rocheuses et aux Cordillères, qui semblent, en serpen- SÉANCE DU k AVRIL 1853. M2 tant d’un pôle à l’autre, avoir résumé en elles presque tout l’excès d’ampleur non dépensé par les autres continents. Nota. Les globes terrestres sont montés ordinairement , à pivot dans un cercle, le méridien , qui se meut dans un autre cercle fixe, l’horizon, avec lequel il forme toujours angle droit. O11 parvient à placer le globe dans la position que l’on désire sur l’horizon, qui constitue toujours un grand cercle, en tournant le méridien et le globe sur eux-mêmes. L’équateur coupe toujours alors l’horizon à ses points Est et Ouest , à moins d’être complète- ment sur le même plan que lui. J’adopte pour la détermination de mes grands cercles les deux angles cfue l’Equateur forme au point Est de l’horizon, et j’indique ensuite la distance Est ou Ouest à laquelle ce point d’intersection de l’Equateur se trouve de celui formé par le méridien de Paris à File de Saint-Thomas. Ces cal- culs sont faciles à faire , puisque l’Equateur et le Méridien sont j gradués sur les globes terrestres. Les mesures que je mentionne dans le tableau ci-joint sont prises sur un globe de 30 centimètres, fait à Paris, en 1849, par Ch. Dieu (J. Andriveau-Goujon , éditeur, rue du Bac , 21 ). M. de Villeneuve fait la communication suivante : Note sur les chaux hydrauliques et les ciments ; caractères des calcaires qui permettent de les fabriquer , par H. de Ville- neuve, ingénieur des mines. Il résulte des nombreuses observations auxquelles nous nous sommes livré, dans le laboratoire et sur les grands chantiers or- ganisés sous notre direction, que l’hydraulicité des mortiers est due à la formation d’un sous-sel insoluble, à base de chaux. L’élément électro-négatif du sous-sel peut être : la silice , Valu- i mine , le peroxyde de fer, ou bien l’acide oxalique, tar trique, bo- rique, phosphorique , et les composés analogues; ou bien encore l’acide carbonique , l’acide sulfureux , etc. Les composés hydrauliques les plus ordinaires sont ceux où la i chaux est combinée simultanément avec l’acide carbonique, la ; silice, l’alumine et le fer ; on trouve alors un mélange de plusieurs sous-sels, dans lesquels l’alumine et le peroxyde de fer jouent, comme la silice, le rôle d'éléments négatifs. Page 342. L’ÉQUATEUR AU POINT EST DE L’HORIZON. DEGRÉS ses Aaer.es. aÔmWdUn terrestres. 1 136° S., 44° N. 7° }E. Côte de la Californie, montagues Rocheuses, Mississipi, lac Michigan et lacHuron, monts Alleghanys, côte d’Afrique occidentale, chaîne 07°. 2 119° S., 61° N. 56° E. Côte d’Arabie, chaîne du Nedjd, monts Taurus, etc., Danube, Theiss, etc., monts Karpathes, monts delà Moravie, Erzgebirge, côtes 98». 3 66°} S., 113° {N. 1°}0. Côte et chaîne côtière de là mer d’Okhotsk, rivière Anga, le Jenissei, etc., monts Ourals, le Don, le Dniôper, côte de la Grèce, côte de 99°. 4 '164° f S., 1S° } N. 1 84° E. Côte du grand Océan et chaîne des Andes (Nouvelle-Grenade), chaîne id. dans le Vénézuela, côte de l’Afrique occidentale, chaîne 99° 7. / I Grands cercles^ rectifiés. ^ Grands cercles 5 57° } S., 122°} N. 6 2°}S.,m°}N. 7 23° }S., 156° N, 8 138° S., 42° N. 9 115° S., 63° N. 12° 0. 32° E. 39° E. 53° } E. 72° 0. Chaîne de la Vieille-Californie, golfe id., montagnes Rocheuses, Mississipi, monts Alleghanys, côte de l’Afrique occidentale, chaîne du Sofala, alignement de l’île de Madagascar, côte de la terre d’Edel (Australie), côte de la Nouvelle-Galles méridionale (Australie), lies Salomon ; en comptant celles-ci pour 2°, on aurait 83 }\ Mais l’archipel de Louisiade présente avec la pointe de la Nouvelle-Guinée, des côtes de l’Australie aux lies Salomon, une ! — rectification de 13 ) Chaîne des Andes (à Guayaquil), côte orientale de l’Amérique du Sud, côte d’Afrique, îles Maldives, pointe nord de Sumatra et côte Mais cet archipel présente des points fréquents de jonction et un alignement qui permettent de Taire une rectification de 14 j Côte du grand Océan et chaîne des Andes (à Atacama), fleuve et chaîne du Paraguay, côte du Brésil, côte d’Afrique, chaîne de la Guinée , côte et chaîne du Malabar , côte de l’empire de Birman , rivière Giana , chaîne du pays de Siam , rivière id. , lie Mais il y a dans le golfe de Bengale 12° qui doivent être ajoutés à cause de la grande proximité des côtes 1 2 { Chaîne côtière d’Ajan (Afrique orientale), deux chaînes en Abyssinie, deux chaînes de la Nubie, le Nil Blanc, chaîne entre la régence de Tunis et le désert de Libye, lac Laoudéah et chaînes avoisinantes, grand Atlas, vallées nombreuses, côte d’Espagne, Sierra . Nevada, Sierra Aracona, le Guadiana, embouchure du Tage, côte du Portugal, chaîne et côte de la Floride, côte orientale du Mexique, pointe de la Nouvelle-Zélande, côte orientale et occidentale de Van-Diémen 73 Il y a lieu à rectification de 2° près du détroit de Gibraltar et de 15° dans le golfe du Mexique, total : 17°; ne sont pas [ = Grand cercle non aligné à angle droit; il longe les Andes et les montagnes Rocheuses en traversant les grandes plaines des deux Amériques et côtoie ensuite l’Asie orientale T It 98“ 99° {•. 98". 90° 7. 129". non alignés, j 0 115° S., 65° N. 151° } 0. Grand cercle non aligné à angle droit ; il traverse l’Afrique, l’Arabie et la Sibérie, qui offrent toutes des plaines immenses sans présenter de plissements importants sur r.e parcours r T 1 1 1 T 128°. Grands cercles ( 1 passant ) i par le pôle 1 91° } S., 88°} N. 19° }E. Côte du Cap, monts de Nieuweid, chaîne du plateau de Dembo, monts de la Lune, chaîne de l’Atlas, etc. ; côte de la Baltique, côte du nord de la Norvège, côte du nord de l’Amérique russe ; ce cercle, qui traverse l’Afrique du N. au S., est de 99°, plus les terres Antarctiques x 99ü _|_ x. antarctique. 1 2 87° S., 93° N. 83° { E. Chaîne de l’Himalaya, le Tarim, grand et petit Altaï, côte du pays des Esquimaux, rivière d’Arkansaw, côte S. de la Nouvelle-Orléans, côte du Mexique (sur le grand Océan iî Tehnantepec) 96 * , plus les terres AntarcLiques x 96° + x. Ces deux derniers grands cercles, bien qu’ils ne présentent pas de nombreux plissements, ne semblent pas laisser un grand développement aux terres Antarctiques. Je publierai prochainement, au reste, une série de grands cercles qui permettra de mieux se rendre compte de la répartition des reliefs terrestres sur le globe entier. Soc. g(o 1., 2* sér., tome X. 22* SÉANCE DU II AVRIL 1855. SAB L’acide carbonique, seul , peut néanmoins, aussi, produire l’hy- drau licite ; sous l’eau, l’insolubilité est complète quand l’acide carbonique atteint la proportion du sous-carbonate formé de deux équivalents de base, pour un équivalent d’acide. Ce sons-sel se forme spontanément lorsqu’on abandonne à l’ac- tion de l’atmosphère de la chaux grasse , hydratée et délitée , en poudre; h cet égard, l’aveu que vient de faire M. Yicat est formel, et n’arrive qu’ après une longue hésitation ( Annales des ponts et chaussées , 1851, p. 2à5, 1er semestre). Dans l’intérieur des maçonneries, sur les portions où les mor- tiers ne sont pas soumis à l’action immédiate de l’air, la saturation paraît s’arrêter à la même limite. C’est ainsi que Darcet constatait, il y a déjà soixante ans, que la chaux n’était combinée qu’avec la moitié de l’acide carbonique nécessaire à la saturation de la chaux carbonatée ordinaire , et ce résultat remarquable était offert par les mortiers provenant de la démolition de la Bastille. Lorsqu’une pierre d’un demi-décimètre cube de chaux grasse , bien cuite, est soumise à l’extinction spontanée, au bout d’un mois elle présente déjà près de la moitié de la masse convertie en sous-carbonate insoluble, à la manière des chaux hydrauliques et des ciments. La portion qui a éprouvé cette transformation, par l’absorption de l’acide carbonique , peut s’obtenir en grumeaux que le blutage sépare de la poussière fine formée de chaux caus- tique. Il est probable qu’on pourrait obtenir le même résultat en fai- sant passer un courant de vapeur d’eau sur du carbonate de chaux soumis à une température peu élevée. On sait, en effet, par les expériences de Gay-Lussac et de Thénard, que la vapeur d’eau, à l’état de courant, produit la décomposition du carbonate de chaux. Mais si l’eau est abondante, la température élevée, la décom- position du carbonate de chaux peut devenir complète par la seule intervention de la vapeur d’eau, qui convertit le sous- carbonate en hydrate de chaux et en carbonate neutre ; tout comme l’eau chaude convertit une chaux hydraulique siliceuse en silice neutre et en hydrate de chaux. Ainsi le sous - carbonate de chaux à deux équivalents de base ne subsiste que lorsque l’eau et la chaleur n’agissent qu’avec une énergie modérée, c’est-à-dire dans les conditions ordinaires de nos constructions. La médiocre stabilité du sous-sel de chaux ne résiste pas à l’eau aidée de la chaleur de 1G06. Le carbonate de chaux régénéré par l’action de l’acide carbo- nique sur la chaux n’est pas tout à fait identique avec le calcaire SÉANCE DU k ÀYRJL 1853. 3 lilx broyé. li peut partager son acide avec la chaux caustique avec laquelle on le mêle, et reformer ainsi le sous-. sel insoluble . Cette faculté ne se manifeste pas dans le carbonate de chaux naturel broyé. Il paraît exister, entre le carbonate lentement ré- généré et non cristallisé et le carbonate compacte broyé, une diffé- rence analogue à celle reconnue entre la silice gélatineuse et le quartz pulvérisé. Dans les mortiers où la chaux est unie avec la silice , ou Y alu- mine, ou le peroxyde cle fer , le composé converge vers une limite de saturation et de solidification rappelant les lois minéralogiques que nous venons d’énoncer au sujet des sous-carbonates. S’il y a plus de chaux qu’il n’en faut pour constituer le sous- silicate à deux équivalents de base pour un équivalent d’acide, la chaux absorbera de l’acide carbonique jusqu’à neutralisation de la base excédante ; et cette absorption s’arrêtera , sous l'eau ordi- naire, dès que la proportion de deux équivalents de chaux, pour un équivalent d’acide terreux ou volatil, aura été atteinte. Le mor- tier se trouvera ainsi constituer un mélange de sous-carbonates et de sous- silicates, de sous-aluminates, où deux équivalents de chaux correspondront à un équivalent des divers corps négatifs. Les propriétés des divers sous-sels de chaux que nous venons de signaler sont parfaitement d’accord avec les caractères des sous-sels de chaux avec silice, alumine et oxyde de fer, que M. Pelouze a formés directement par précipitation chimique : sous-sels insolubles dans l’eau sucrée qui est le dissolvant ordinaire de la chaux libre. Les sous-sels de chaux des mortiers et des ciments offrent de l’eau combinée, absolument comme les hydro-carbonates et les liydro-silicates de la nature. Les proportions de l’eau combinée semblent satisfaire aux lois suivantes : 1 sous-carbonate. 1 sous-silicate. 1 sous-aluminate. Equivalents : 1/2 eau. 5 eau. 71/2 eau. On remarquera que la proportion d’eau est décroissante en pas- sant de l’alumine à la silice et à l’acide carbonique. La faculté de fixer de l’eau en combinaison chimique est donc d’autant plus faible que l’acide combiné avec la chaux est doué de propriétés négatives plus énergiques. L’eau ne paraît jouer qu’un rôle supplémentaire à celui de l’action saturante de l’acide. Les sous-silicates et sous-aluminates ne sont stables qu’à la ma- SÉANCE 1MJ k AVRIL 1853. 3Aô' nière des sous-carbonates, c’est-à-dire à la température inférieure à 100 degrés; au-dessus de cette température, les sous-silicates sont décomposés ; il se forme du silicate neutre et peu ou point hydraté à côté de la chaux hydratée complètement séparée. Cette action de l’eau chaude sur les composés hydrauliques a été depuis long- temps signalée par M. Berthier; nous avons constaté qu’elle s’étend jusqu’au ciment que nous parvenons à faire désagréger et déliter par un courant d’eau chaude ou de vapeur d’eau. La décomposition des sous- sels de chaux par l’eau, dont la chaleur favorise l’action, explique pourquoi dans nos évents vol- caniques, où l’eau agit à une température élevée, les sous-sels que nous venons de signaler ne se rencontrent pas , tandis qu’on y trouve la trémolite, la wollcistonite , le diopsicle , la baïkalite , et autres silicates de chaux, rapprochés du silicate neutre. Ces derniers sels sont anhydres ou peu hydratés, parce que la saturation, plus complète par l’acide, n’exige pas l’action saturante complémen- taire de l’eau. M. Delesse a constaté la présence du sous-carbonate de chaux hydraté dans les cavernes à ossements du terrain jurassique , et ce gisement, observé sous l’influence d’une température peu élevée, confirme les lois que nous venons d’énoncer. Mais si, au lieu de prendre de l’eau ordinaire, on met de l’eau très chargée d’acide carbonique sur le mortier et le ciment, le durcissement et la saturation marcheront plus rapidement, et Fac- tion de l’acide carbonique ne s’arrêtera plus à la formation du sous-sel bibasique ; elle progressera jusqu’à la constitution du sel neutre. L’acide carbonique éliminera même successivement la silice et l’alumine ou le fer, et l’on pourra obtenir, en définitive, du carbonate neutre, mêlé de silice gélatineuse, d’alumine et de peroxyde de fer. Sous l’influence de l’acide carbonique de l’air, les phénomènes suivant la même marche à la surface des mortiers bien compactes, la silice gélatineuse séparée paraît se réunir en croûtes celluleuses ou en nodules, et l’on observe ainsi quelque chose d’analogue à la production de calcaires à nodules de silex et à meulières, prove- nant de l’action d’eaux très chargées d’acide carbonique sur des silicates de chaux. Lorsque cette absorption nouvelle d’acide car- bonique par le mortier et le ciment immergés et déjà complète- ment consolidés a lieu, même sous Veau , le ciment éprouve une élimination progressive de l’eau combinée et une diminution de volume qui se révèlent par la teinte plus foncée et le fendillement du ciment. Il suffit de placer un fragment de ciment solidifié SÉANCE DU 4 AVRIL 1853. 346 dans l’eau dans un flacon plein d’eau saturée d’acide carbonique, pour observer ce curieux phénomène. Ne voit-on pas ici, dans les phénomènes des mortiers, l’expli- cation de circonstances ordinaires de gisements de certaines masses géologiques? La recherche des calcaires à chaux hydraulique se ramène à celle des couches calcaires renfermant , à côté du carbonate de chaux, les proportions convenables de silice, d’alumine, ou de fer, afin que la cuisson puisse fournir immédiatement les chaux hy- drauliques ou les ciments réclamés par l’art du constructeur. Les proportions de silice ou d’alumine propres à constituer les mortiers et les ciments hydrauliques peuvent se résumer par les signes suivants, en appelant R la base, A l’acide calculé en équi- valents. Ciment R2A. Chaux limite R3A. Chaux éminemment hydraulique. . R4À. Le sel neutre est représenté par RA. L’équivalent de F alumine, et bien plus encore celui du peroxyde de fer, sont plus grands que celui de la silice ; donc les calcaires alumineux et ferrugineux devront être plus riches en matière in- soluble pour produire une hydraulicité égale ou analogue à celle des calcaires siliceux. Comme la proportion de fer est ordinaire- ment faible, les principales variétés de chaux hydrauliques seront offertes par celles où l’argile sera en proportion notable, et par celles où la silice sera presque pure. Les deux principales espèces seront donc : les chaux argileuses et les chaux siliceuses. Quels sont les caractères extérieurs des calcaires correspondant aux deux classes de chaux ? Chaux argileuse. Les calcaires à chaux hydraulique argileuse sont toujours accom- pagnés de matières bitumineuses et de pyrites inséparablement alliées aux substances organiques précipitées dans les lacs et les bas-fonds. Toujours colorés, par le bitume, en gris plus ou moins foncé, ils exhalent par le choc l’odeur propre aux calcaires bitu- mineux. La présence de la pyrite et de l’alumine leur commu- nique des propriétés gélisses indiquées par les abondants détritus accompagnant ces dépôts de calcaires. La terre végétale résultant de la facile décomposition de ces calcaires forme rapidement une épaisse masse. SÉANCE DU k AVRIL J 853. 347 Lorsque ces calcaires sont soumis à Faction directe de F air, ou pénétrés par de Feau imprégnée d’air, ou enfin influencés par un commencement de cuisson avec Fintervention oxydante de F air, ils perdent leur bitume, le fer se suroxyde et se colore d’une teinte fauve ou ocracée suivant la dose du fer intérieur à la masse. Les blocs de ces calcaires offrent souvent à l’intérieur des taches bleuâtres, où la couleur primitive s’est conservée : une auréole jaunâtre, plus épaisse sur les angles, entoure les taches bleues; Faction comburante de l’oxygène a été plus prononcée sur la sur- face développée des angles. La destruction du bitume par la com- bustion lente est diminuée par l’accroissement de la proportion de silice. Les portions du calcaire où la silice est plus abondante, celles qui se rapprochent de véritables nodules de silex, conservent mieux la teinte bleuâtre due à la coloration par le bitumé. Dans les fendillements, les bandes jaunâtres ont suivi toutes les issues parcourues par les eaux chargées d’air. Si toute la masse a été fendillée, elle pourra présenter universellement la teinte jau- nâtre, et le tissu ramolli du aux eaux oxydantes qui ont attaqué les pyrites d’abord, et ensuite, par l’acide sulfurique engendré, ont agi sur la masse du calcaire. 3Nous retrouvons ici les actions chimiques que nous avons exposées au sujet des calcaires bitumi- neux du bassin de Fuveau ( Annales des mines , 184Ù). Dans la cassure fraîche des parties inaltérées de ces calcaires, le tissu doit être fin, la forme conchoïde. Ainsi, les calcaires à chaux hydraulique argileuse sont doués de deux aspects différents, suivant qu’ils sont conservés ou altérés, et ces deux types se confondent en un seul, après leur cuisson. Chaux siliceuse. Les calcaires à chaux hydraulique siliceuse sont d’une teinte blanche ; quelquefois une faible proportion d’argile leur commu- nique une légère teinte grise ; ils prennent, dans ce dernier cas, une nuance fauve dans leurs parties soumises à l’atmosphère, teinte que révèle la présence d’une faible proportion de fer passé à l'état de peroxyde. Ces calcaires non gélisses sont en général consistants et sonores ; ils se rapprochent, par leur résistance, des calcaires à chaux grasse très compactes. Mais la cassure y décèle à l’intérieur un grain légèrement rude, tendant au type des dolomies. On y retrouve même, en essayant Faction des acides , la lente effervescence que l’on avait regardée , O Z| 8 SÉANCE DU h AVRIL 1853. jusqu’à présent, comme le caractère exclusif des calcaires magné- sifères. Dans les parties extérieures ou sur leurs fragments mêlés au sol végétal, ces calcaires sont couverts d'une croûte plus ou moins épaisse suivant leur richesse en silice. La croûte ofïre les propriétés de la silice : elle prend souvent l’aspect poreux des meulières. Ces calcaires sont toujours accompagnés de veinules et de no- dules de silex ; des commencements de meulières se manifestent dans les fentes. Ces roches, difficiles à décomposer, se couvrent, sur les pla- teaux, d’une terre végétale peu épaisse ; cette terre, appartenant à la classe des sols légers, offre la végétation des bruyères, des cystes, des pins et des autres plantes propres aux terrains siliceux. Ces calcaires, traités par les acides, donnent un résidu siliceux, rude au toucher, et souvent aussi une proportion notable de ma- tière gélatineuse, que l’eau augmente lorsqu’on délaye la liqueur; le résidu nuageux est de la silice en gelée. La silice soluble, que l’on croyait caractéristique du calcaire hydraulique de Senonches, s’est retrouvée dans tous les calcaires à chaux siliceuse que nous avons essayés. M. Rivot, ingénieur des mines, professeur de docimasie à l’Ecole des mines , a , comme nous , trouvé la lente effervescence sur le calcaire à chaux siliceuse ; la silice en gelée qu’il a observée dans d’autres calcaires à chaux siliceuse ne s’est pas révélée dans le calcaire du Theil, mais dans ce dernier cas la lente et longue effervescence n’a pas fait défaut. En résumé, les calcaires propres à fournir des chaux siliceuses offrent : La teinte voisine du blanc des calcaires purs; Une compacité et une dureté prononcées ; Souvent, si ce n’est toujours, une lente effervescence sous l’ac- tion des acides énergiques ; L’absence de propriétés gélisses; Une cassure un peu rude et tendant au type dolomitique ; Une croûte extérieure rude au toucher; Très souvent, un résidu gélatineux après l’attaque par les acides dissolvants ; Des veinules et des nodules siliceux dans les couches à chaux siliceuse et dans les calcaires enveloppants ; Des incrustations analogues aux meulières; Enfin leur décomposition engendre des terres végétales sili- ceuses. SÉANCE DU ![ AVRIL \ 8 5 3 . 349 Ges caractères permettent de retrouver les calcaires à chaux siliceuse dans une foule de gisements où ces calcaires n’étaient pas soupçonnés. On les rencontre dans la formation parisienne du calcaire à silex du terrain tertiaire d’eau douce, inférieur et supérieur; — En Provence , dans les calcaires du terrain à gypse ter- tiaire ; — Dans le terrain crétacé et néocomien des Douches du-Rhône, au-dessous du grès vert, et au-dessus des Ançyloccras ; — Dans le terrain néocomien servant de base aux Ancyloceras ; — A la base du calcaire à Chaîna ; — A la jonction du calcaire à Chama et du coral-rag; — Dans le coral-rag lui-même. On trouve des indices de ces calcaires dans le calcaire à Gry- phées et le muschelkalk. Le fameux calcaire à chaux hydraulique siliceuse du Theil , que l’on croyait un type presque unique, est superposé au calcaire à Chaîna de Viviers, et rentre dans le classement des calcaires sili- ceux néocomiens que nous avons signalés dans les Bouches-du- Rhône. Aux environs de Lyon, sur les hauteurs et les flancs du Mont- d’Or, les calcaires hydrauliques siliceux, révélés par les couches de nodules de silex et les croûtes passant aux meulières, forment un amas puissant dans l’oolite inférieure. On les retrouve dans le même étage en Bourgogne , près de Semur et aux environs de Chalon-sur-Saône. Ainsi, les calcaires à chaux hydraulique siliceuse sont très ré- pandus; on peut les exploiter dans les dépôts calcaires de tous les âges géologiques ; l’absence de leur signalement caractéristique et leur apparente similitude avec les calcaires à chaux grasse les avaient fait méconnaître jusqu’à présent et portaient, à croire que les gisements de chaux siliceuses étaient rares. Les calcaires marneux à chaux hydraulique argileuse, appar- nant eux-mêmes à toutes les formations géologiques, on peut retrouver les éléments indispensables aux bonnes constructions hydrauliques presque partout où se révèlent divers étages des dépôts calcaires. En résumé : La formation des matières dures et insolubles , constituant les mortiers hydrauliques et les ciments , rentre dans les lois de la chimie minéralogique, et ces composés sont comparables aux hydro-carbonates et aux hydro-silicates des zéolithes. 350 SÉANCE DU ÎX AVRIL 1853. Les caractères extérieurs des calcaires à cliaux hydraulique peuvent être généralement indiqués : Pour les chaux argileuses : Par les calcaires bleuâtres, marneux dans leurs parties non altérées, et d’une teinte roussâtre dans les portions altérées. Pour les chaux siliceuses : Par les calcaires à nodules de silex et à meulières. Les lois des gisements des calcaires marneux sont trop faciles à constater, pour que nous croyions utile d’insister sur les moyens de les découvrir. Nous allons donner quelques développements sur les caractères et les lois géologiques des calcaires siliceux. Les calcaires siliceux se trouvent dans le voisinage des portions marneuses des divers étages calcaires; ils semblent former le pré- lude ou la fin des dépôts mécaniques : ils sont d’ailleurs inégale- ment développés dans les positions différentes affectées par une même formation géologique. Ainsi, dans la partie inférieure des terrains jurassiques du Var, la zone siliceuse englobe quelquefois tout l’ensemble de Toolite inférieure et du lias. Tel est le cas qui se présente soit de Dragui- gnan à Grasse, soit auprès de Toulon, sur les flancs de la montagne de Furon. La zone siliceuse est aussi très puissante sur les bords du Rhône. Exemples : l’ooîite inférieure des environs de Lyon et de la Bour- gogne méridionale ; le lambeau de calcaire j urassique placé à Cornas, en face du confluent de l’Isère au Rhône; enfin le calcaire à Chaîna , situé entre le défilé de Viviers, et sur le Rhône, et le cours inférieur de la Drôme, région qui renferme le Thcil , Montêlimart , Mirmande , gisements classiques des chaux siliceuses. Nous avons, jusqu’ici, vu l’accroissement de la puissance de la zone siliceuse suivre la diminution des débris paléontologiques, comme si les mollusques avaient eu de la peine à vivre dans des eaux trop chargées de silicates. La compacité et la cohésion des calcaires siliceux , supérieures à celles des calcaires argileux et bitumineux, se conçoivent aisément. Plus abondait le sel soluble qui servait de substance agglutinante aux matières en suspension, plus la ténacité et la cohésion du dépôt devaient être augmentées. Or le calcaire avec silice gélatineuse avait deux éléments agglutinants, le carbonate de chaux et la silice tenus simultanément en dissolution, tandis que le calcaire argileux n’avait d’autre élément de cohésion que le carbonate dissous. Ainsi la chimie minéralogique rend parfaitement compte de la supériorité de cohésion des calcaires à silice soluble. 851 SÉANCE DU II AVRIL 1858. En comparant les portions correspondantes d’une même forma- tion calcaire, on reconnaît que les calcaires siliceux ont été plus abondants dans le voisinage immédiat des terrains primaires et de transition ; c’est-à-dire que des terrains à silicates ont fourni de plus nombreux éléments siliceux aux, calcaires. Exemple : le lias de Castellane et d’Aix en Provence est plus éloigné des terrains à silicates, que les calcaires qui forment une ceinture juxtaposée aux terrains anciens des Maures, depuis Toulon jusqu’à Grasse ; aussi la zone siliceuse est-elle bien plus large, bien plus développée, entre Toulon et Grasse, qu’entre Aix et Castellane. La même remarque ne s’applique-t-elle pas, d’une manière frappante, aux calcaires siliceux des bords du Rhône, comparés aux formations analogues cle la Franche-Comté? Ne voit-on pas les calcaires imprégnés de silice suivre , cle Lyon à Viviers, les sinuosités de la zone des terrains à silicates? Cette remarque ne nous conduit-elle pas à reconnaître, dans la formation des calcaires siliceux, une conséquence de la décompo- sition éprouvée par les terrains à silicates? et ne verrait-on pas, dans les dépôts argileux ou sableux qui précèdent ou suivent les calcaires siliceux, le résidu insoluble remanié de mêmes silicates décomposés ? Si les lois des gisements des calcaires siliceux nous conduisent vers leur origine, leurs caractères chimiques reproduisent la trace de leur composition intime. L’effervescence lente n’est qu’une preuve de la résistance des composés à l’attaque de l’acide. Or, en général, plus un carbonate est formé de bases puissantes, plus les acides azotique et hydro- chlorique l’attaquent vivement. Le carbonate de soude est plus promptement attaqué que le car- bonate de chaux; celui-ci, plus que le carbonate de magnésie; et ce dernier, plus que le carbonate de fer. On voit immédiatement pourquoi la dolomie , carbonate double de chaux et de magnésie, donne une effervescence plus lente que le carbonate de chaux pur. On obtiendra aussi le ralentissement de l’attaque par un acide fort. Si, au lieu de diminuer la puissance de la base , on augmente la puissance de l’acide à déplacer, qui est-ce qui résiste au nouvel acide? c’est l'élément négatif préala- blement combiné avec la base. Si donc il se présente de la chaux, saturée à la fois par l’acide carbonique et par de la silice, on aura un composé qu’on pourrait nommer silieéo-carbonate , et qui sera plus lentement attaqué par les acides que le carbonate pur. Ainsi, non seulement la lente effervescence des calcaires siliceux s’ex- 352 SÉANCE DU II AVRIL 1853. plique très bien, mais encore cette lente effervescence sépare nette- ment les s ïli ceo-carbon cites clés calcaires mêlés de sable, propres seulement à donner par cuisson des chaux maigres. Dans les cal- caires sableux, la silice n’a évidemment aucune agrégation miné- ralogique intime avec le carbonate de chaux. Ainsi, la minéralogie chimique nous conduit à penser que les calcaires à chaux siliceuse pourront être aisément distingués des calcaires à chaux maigre par l’effervescence lente dans les premiers, et l’effervescence rapide dans les seconds. La silice de ceux-là peut se combiner par la cuis- son ; les grains siliceux de ceux-ci ne peuvent exercer qu’une in- fluence amaigrissante sur les chaux obtenues. On voit ainsi pourquoi l'effervescence est déjà lente dans les calcaires duTheil, où la dose de carbonate de chaux est de 8à p. 1 00. Pourquoi, dans les rognons ou les nids siliceux dans lesquels le carbonate de chaux descend à la proportion de 10 à 15 p. 100, l’effervescence est-elle excessivement lente , tandis qu’elle est rapide dans le grès de Fontainebleau imprégné de 50 à 10 p. 100 de car- bonate de chaux simplement juxtaposé aux grains de sable? Ainsi , l’effervescence lente paraît un des caractères qu’il con- viendra d’étudier, désormais, dans la recherche et l’examen des calcaires propres à fournir des chaux hydrauliques : il semble y avoir là une conséquence minéralogique et une application technique qui se viennent mutuellement en aide. Nous avons vu précédemment quelle influence décisive exerce l’acide carbonique dans la consolidation des mortiers et même dans la transformation des silicates en silicéo- carbonates. Il est naturel de reconnaître quels sont les milieux où cette action s’exerce le plus énergiquement. Dans la terre végétale ordi- naire , d’après les recherches de MM. Boussingault et Leroy, il y a une masse gazeuse contenant de 1 à 9 p. 100 d’acide carbo- nique, tandis que l’air atmosphérique ne renferme que ù/10000 d’acide carbonique : on voit donc très bien pourquoi les mortiers se consolident bien mieux sous le sol imprégné d’acide carbonique en proportion cent fois plus forte que celle de l’air atmosphérique ; pourquoi les pierres artificielles se préparent bien mieux lors- qu’elles sont enfouies sous le sol que lorsqu’elles sont immergées ou bien exposées à l’air ordinaire. On conçoit aussi toute l’action dissolvante que des eaux, traversant la terre végétale et s’impré- gnant d’acide carbonique , exercent sur le carbonate de chaux arrivé à la limite de sa saturation. Gela explique pourquoi les calcaires siliceux placés sur la terre végétale sont, extérieurement et progressivement, appauvris en carbonate de chaux, et se mon- SÉANCE DU h AVRIL 185S. B53 tient recouverts d’une croûte siliceuse, résidu de l’action dissol- vante de l’eau acidulée. Cette croûte siliceuse , plus ou moins poreuse, rappelle la formation des meulières aux dépens des cal- caires siliceux chimiquement transformés. Lorsque la silice ne s’est pas coagulée en masse , elle se concentre seulement en petits grains. Des sables fins peuvent être aussi engendrés par des cal- caires imprégnés de silice primitivement soluble. Ne peut-on pas voir par là l’origine de certains dépôts de sables tertiaires très fins gisant au milieu de bassins tertiaires dont les bords, exclusivement calcaires, ne peuvent offrir d’autre source des dépôts siliceux que les calcaires siliceux garnissant une por- tion du pourtour du bassin lui-même ? Les magnifiques dépôts de sables fins et siliceux qui s’étendent au pied des Ventoux, vers Mourmoiron et Viller, pourraient ainsi dériver tout naturellement de l’altération des calcaires siliceux que la chaîne des Ventoux étale aux environs de Baume, de Venise. Les vastes cavernes qui criblent cette grande masse des Ventoux auraient ainsi leur origine assignée dans la décomposition des pyrites qui ont corrodé les calcaires, mis en liberté la silice, et étendu, sur le sédiment siliceux, les dépôts ferrugineux provenant des pyrites elles-mêmes, tandis que le sulfate de chaux a pu ensuite se déposer après la concentration des eaux dissolvantes. On aurait ainsi, dans la série tertiaire, successivement : la silice, Y alumine et 1 efer, et enfin le sulfate cle chaux , rangés dans l’ordre de la décroissance de leurs facultés sédimentaires. Les analogies conduisent donc à irouver une relation intime entre les dépôts sableux et les calcaires siliceux, et à rechercher ces dernières dans les régions où les dé- pôts siliceux jouent un rôle considérable. En résumé, les calcaires siliceux fournissent, dans le système ordinaire de préparation des mortiers, les meilleures chaux hy- drauliques résultant de la cuisson normale appliquée à des calcaires silicifères. Ces calcaires se distinguent souvent par le caractère minéralo- gique de la lente effervescence qui les sépare nettement des calcaires sableux à chaux maigre. Les calcaires silicifères, qu’on pourrait aussi nommer peut-être silicéo-carhonates , se rencontrent très souvent dans le voisinage des portions marneuses des formations calcaires. Ils abondent près des terrains à silicates. Ils peuvent se rencontrer dans le pourtour des bassins où se ro ri- vent des dépôts de sables fins. On voit ici une partie des nouveaux services "que la géologie Soc, géoL, 2e série, tomeX, 23 SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. 354 peut rendre à l’art des constructions, tandis que les lois des silicates et des mortiers semblent fournir, à leur tour, à la géologie de nouvelles lumières sul* la formation des silicates engendrés par voie humide. Séance du 18 avril 1853. PRÉSIDENCE DE M. DE VERNEUIL. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Le Président annonce ensuite une présentation. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part deM. le ministre de la justice, Journal des savants, mars 1853. De la part de M. Ch. Des Moulins, Discours sur révolution des forces vitales de la nature (extr. des Actes de V Académie de Bordeaux), in-8, 32 p. Bordeaux, 1852, chez Gounouilhou. De la part de M. E. Desor, Mémoires sur les phénomènes erratiques de la Suisse , comparés à ceux du nord de V Europe et de V Amérique (extr. des Actes de la Soc . helv. des sciences naturelles , 1852), in-8, 24 p. Sion, 1852, chez D. Rachor et Cie. De la part deM. J. Thurmann, Lettre X, Sur trois Diceras nouvelles des terrains portlandien et corallien du Jura bernois , in-8, 9 p., 2 pl. - — Lettre XI, Premières données sur les ter- rains tertiaires de V Ajoie, in-8, 24 p., 1 pl. — Lettre XII, Sur un gisement du grès vert dans le Jura bernois , in-8, 8 p. (41 à 48). De la part de M. de Yerneuil : 1° Notice sur la structure géologique de V Espagne (extr. de Y Annuaire de V Institut des provinces ), in -12, 14 p. Caen, 1853, chez A. Kardel. 2° Report , etc. (Rapport sur une exploration géologique du Wisconsin, de Flowa et du Minnesota, et incidemment d’une SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. 355 partie du territoire de Nebraska), par M. David Dale Owen, m-h, 638 p., avec lin atlas de planches de fossiles, cartes et coupes géologiques. Philadelphie, 1852, chez Lippincott, Gram b s et compe. De la part de M. Drian, Note sur 7/ne nouvelle construction de V 'hygromètre condenseur dit de Régnault (extr. des Annales de la Soc . nat. dl agricidt. , hist. nat. et des arts utiles de Lyon , 1853), in-8, 23 p., 1 pl. Dyon, 1863, chez Barret. De la part de M. Guido Sandberger, Einige Beobachtun- gen, etc. (Quelques observations sur les Ciiménies, et princi- palement sur les espèces de Westphalie), in-8, /]6 p., 3 pl. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXYI, nos 1 h et 15. U Institut , 1853, 1005 et 1006. Bulletin delà Société de statistique , des sc. nat . et des arts i/idustr. du département de CIsére, t. II, livr. 1 et 2, 1852. The Athenœum , 1853, nos 1328 et 1329. Philosophical Transactions of the royal Society of London, 1852, part. 1 et 2, in-/]. Proceedings of the royal Soc . of London, 1851-1852, vol. YI, nos 83 à 93, in-8. The royal Society , nov. 30, 1851. Zeitschi'ift, etc. (Bulletin de la Société géologique alle- mande), IVe vol., 3e cahier, mai, juin, juillet 1852. Wurtemhergische , etc. (Cahiers annuels de la Société des sciences naturelles de Wurtemberg), 9e année, 1853, 1er cahier. M. de Verneuil présente à la Société le rapport de M. D. Dale Owen sur la géologie du Wisconsin, de l’Iowa et du Minnesota. M. de Verneuil donne ensuite lecture de la lettre suivante de M. de Keyserling. Note sur la succession des êtres organisés , par M. de Keyserling. La destruction et l’apparition successive des êtres organisés est un phénomène trop positif et trop surprenant pour ne pas attirer 356 SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. irrésistiblement les méditations des naturalistes, malgré son obs- curité rebutante. Les hypothèses qui s’y rapportent, très impar- faites et hasardées, méritent néanmoins quelque intérêt, en ce qu elles déterminent du moins plus nettement le problème, dont elles ne sauraient donner une solution satisfaisante dans l’état ac- tuel de nos connaissances. De ce point de vue, l’exposition succincte d’une manière nouvelle d’envisager l’énigme ne paraîtra peut- être point déplacée dans notre Bulletin. — Tout être organisé atteste par sa structure qu’il a été formé par la croissance. Des faits connus de tout le monde, tels que les anneaux d’accroisse- ment, les sutures entre les os des animaux vertébrés, etc., le dé- montrent. Des êtres adultes, produits par une réunion soudaine de molécules, ne pourraient offrir cette conformation contraire à leur mode de génération, et ne sauraient par conséquent être assimilés aux espèces organisées que nous connaissons. Celles-ci ne peuvent donc tirer leur origine que de germes diversement développés par la croissance, selon les lois invariables de l’espèce. Ce qui déter- mine dans chaque espèce le groupement particulier des éléments, c’est ce que nous ne parviendrons peut-être jamais à formuler exactement, mais nous pourrons fixer d’une manière générale la nature des causes agissantes. Partant de cette distinction fonda- mentale, établie dans le Cosmos de M. de Humboldt, que les causes qui déterminent l’action entre les éléments du monde ma- tériel sont ou purement physiques, ou en même temps compli- quées par la diversité chimique des substances, nous pouvons rechercher sous lequel de ces deux ordres viendront se ranger les causes qui décident du développement spécifique des êtres. — Un caractère essentiel sert à distinguer nettement les effets des deux ordres de causes. Les différences purement physiques des corps naissent d’une diminution ou d’une augmentation continue, et admettent nécessairement des nuances insensibles et des pas- sages complets. Au contraire, les différences essentiellement chi- miques, basées sur le groupement des éléments en proportions fixes, ne peuvent procéder que par rhythmes, par gradins, et consti- tuent des groupes de corps rigoureusement séparés les uns des autres. Si la variété des êtres organisés ne présentait qu’un réseau continu et ne permettait de saisir que des différences qui se livrent passage par des nuances insensibles, cela ne concorderait guère avec des causes dérivées de la constitution chimique. Par contre, si les individus admettaient une réunion en groupes rigoureuse- ment séparés les uns des autres, et qu’on ne put les ranger selon leurs différences qu’en des séries discontinues, comme des SÉANCE DU 18 AVRIL 185S. 357 gradins d’échelle, on ne saurait y voir l’effet de causes purement physiques. Eh bien, les observations ont depuis longtemps établi la fixité des espèces, c’est-à-dire le dernier des deux cas supposés, et si jamais des naturalistes en ont douté, ce n’était que dans l’en- traînement d’une hypothèse préconçue. — Nous sommes donc convaincus que la constitution chimique des éléments de germi- nation règle le mode et le nombre des particules qui s’y joignent par croissance. Un changement de cette constitution intime de la formule chimique de l’espèce, pour ainsi dire, produirait une espèce transformée. Tel serait par exemple l’effet de molécules étrangères qui réagissent chimiquement sur les éléments de germi- nation, en cas que le développement ultérieur ne fût interrompu. L’apparition de molécules dont l’action transforme à un certain point les êtres, à différentes époques, nous est du reste connue. Tel était par exemple, pour l’espèce humaine, le miasme de la petite vérole; tels sont les autres miasmes qui se répandent de temps à autre autour du globe en particules d’une composition trop subtile pour se manifester sur des corps moins délicatement construits que ne le sont les organismes vivants. Soit que ces mo- lécules, comme quelques personnes Font pensé, fussent elles- mêmes des germes qui agissent en insinuant des organismes para- sites, soit qu’ils dérangeassent plus directement l’équilibre chi- mique des sèves animales et végétales, toujours nous offrent-ils cette concordance avec le phénomène paléontologique, qu’ils ont paru à une époque pour s’épuiser parfois à une autre. — On ad- mettra ainsi facilement, que ce que nous avons observé dans un laps de temps si restreint pour les êtres organisés ait pu avoir lieu pour la composition des germes pendant les longues périodes géologiques. L’hypothèse que nous proposons n’exige rien de plus, c’est-à-dire elle présume : que des molécules d’une constitution particulière , capables d’altérer les éléments de germination , se sont répandus de temps à autre autour de notre planète. 11 se peut qu’un jour on parvienne à donner une base solide à cette composition , en obtenant de quelques êtres, reproduits sous des influences chi- miques particulières, des germes d’une espèce nouvelle. En atten- dant, notre hypothèse, arbitraire comme les autres, mérite la préférence, en ce qu’elle s’accorde mieux avec l’ensemble des faits connus. Elle seule rend compte tout aussi bien de l’épuisement que du remplacement des espèces, sans recourir à la fiction de formes transitoires; elle explique l’étendue générale des modifica- tions de la faune et de la flore terrestre dans un ordre de succes- sion analogue en tout lieu; elle fait comprendre pourquoi chacune 358 SÉANCE PU 18 AVRIL 1853. des phases du monde organisé de la terre se joint, quant à la ressemblance des formes, à la précédente et à la suivante plus qu’à toutes les autres; enfin elle s’accorde avec l’accroissement de la variété et de la complication des êtres organisés, à travers les époques géologiques, tel que nos recherches l’ont établi. Car, une fois que nous considérons les espèces organisées comme des produits de l’action chimique de differentes particules ou sub- stances sur quelques types primitifs, les combinaisons possibles deviennent de plus en plus nombreuses etcompliquées; quatre types, par exemple, en subissant l’influence de vingt- quatre substances, produisent déjà, par simple combinaison, 96 espèces, qui, à leur tour, influencées par 2k corps, composeraient une faune de 230ù es- pèces; et généralement les causes plus compliquées produiraient des effets analogues, c’est-à-dire des organismes plus compliqués. Mais ces indications sommaires suffisent pour faire juger notre hypothèse, et il ne convient peut-être pas de s’arrêter plus long- temps à de pareilles spéculations, dans un temps où l’étude des faits réclame avec raison tous les instants des naturalistes. M. Barrande fait observer que la théorie de M. deKeyserling n’est pas confirmée par les faits, car le choléra, par exemple, ne modifie pas l’espèce humaine. Il pense, d’ailleurs, que des explications de l’auteur seraient nécessaires, et, en son absence, il croit devoir s’abstenir de toute objection. MM. Michelin et Bourjot font remarquer que M. de Keyser- ling semblerait supposer une création de la matière par !a ma- tière, ce qu’ils ne sauraient admettre. M. Boubée ajoute qu’on ne peut aucunement distinguer une espèce d’une espèce voisine d’après les différences de leur com- position chimique, les substances élémentaires étant en défini- tive à peu près les mômes dans chaque espèce -, il regarde donc le principe de M. de Keyseiiing comme entièrement inexact. M. de Yerneuil fai; remarquer, à l’appui des idées admises dans la note de M. de Keyserling, qu’il y a une ressemblance beaucoup plus grande entre les faunes de deux terrains contigus qu’entre les faunes de deux terrains séparés par plusieurs autres terrains. Le secrétaire donne lecture de la lettre suivante de M. Paul Bouvy. 6ÉÀNCE DU 18 AVRIL 1853. 359 Notice sur le tremblement de terre du 15 mai 1851, de Vile de Majorque , par M. Paul Bouvy. Le tremblement de terre du mois de janvier 1852 qu’on a éprouvé à Bordeaux et dans ses environs, et ceux de la haute Ca- talogne du même jour m’ont engagé à communiquer à la Société quelques renseignements sur celui que cette île a ressenti le 15 mai 1851, et dont nous éprouvons encore de temps en temps des répé- titions légères, à l’exception de la secousse assez forte du 30 août dernier, afin de contribuer ainsi au recueil de tous les faits con- cernant un phénomène à la fois si obscur et si terrible. Quelques joui s avant la commotion, on observa un changement notable dans l’état du ciel : le 12 mai, il se couvrit de nuages obscurs et bas, la température baissa à ] 2 degrés Réaumur, ce qui, dans ce climat, à pareille époque de l’année, est assez extraordi- naire. Cet état dura pendant le 13 et le là ; des masses de nuages semblèrent reposer immobiles sur les montagnes sans perdre leurs formes. Vers minuit du là, le ciel présenta un aspect bien singu- lier; la pleine lune brilla dans un espace circulaire d’environ 120 degrés de diamètre ; tout à l’entour, l’horizon présenta une ceinture de gros nuages blanchâtres, des cumulus en strates ; on y vit briller sans cesse l’éclair et la foudre; on entendit au loin gronder le tonnerre et tout annonça une nuit d’orage. A 2 heures moins 13 minutes, moment précis indiqué par toutes les pendules arrêtées subitement dans leur marche, la population entière fut réveillée par une très forte détonation suivie d’un mou- vement d’oscillation de 3 à l\ secondes et d’une vibration décrois- sante de h secondes. La direction de l’ondulation fut de l’O.-S.-O. à l’E.-N.-E. , parallèle à la chaîne principale du nord de File. L’amplitude de la zone du mouvement souterrain se peut évaluer à là lieues, en considérant la ville de Palma, située sur la ligne de plus grande intensité, dont le point maximum fut à 2 lieues au N.-E. ; au delà le mouvement est allé en décroissant jusqu’à F extrémité orientale de l’île, où la secousse a été très légère. Les édifices élevés surtout furent très endommagés; les cou- poles de plusieurs églises tombèrent à terre; une des tours de la façade de la cathédrale perdit une grosse boule de 1 mètre de dia- mètre placée sur son sommet pyramidal, et plusieurs autres boules plus petites formant une balustrade. Ce qu’il y a de particulier dans le fait de l’arrachement des boules, c’est que plusieurs de leurs amarres ou de leurs axes de fer sont restés en place, ce qui prouverait 360 SÉANCE i >U 18 AVRIL 1853. que le mouvement a été au premier moment vertical ; d’autres faits analogues, arrivés dans une salie d’armes de l’arsenal, sem- blent le confirmer. Tous les fusils rangés contre le mur de FO. furent renversés versl’E., avec la particularité de trouver un fusil cloué avec le canon verticalement à travers les carreaux du sol; les armes de la muraille de l’E. restèrent en place, tandis que celles du N. et du S. se trouvèrent jetées les unes contre les autres en deux direc- tions opposées. On peut conclure de ce fait que le mouvement a été de FO. vers FE. On a observé un autre fait singulier arrivé à la tour d’une grande maison particulière. Le massif cylindrique de la coupole a été divisé en deux parties par deux crevasses horizontales ; la partie cylindrique comprise entre les deux a tourné sur elle-même en décrivant un petit axe horizontal, tandis que la partie supé- rieure de la coupole n’avait pas changé de position. Hors de la ville, l’effet du tremblement a été assez considérable pour rendre plusieurs maisons inhabitables. Des rochers énormes se détachèrent des flancs des montagnes, roulant avec fracas au fond des vallées. La plupart des sources ont eu leurs eaux troublées pendant plusieurs jours, sans doute à cause de quelques éboulements inté- rieurs ; d’autres ont été taries. A 5 heures du matin du même jour, on entendit une sourde détonation suivie d’un mouvement vibratoire. Cet état violent dura pendant un mois. Le 20 mai, à 8 heures et demie du soir, on entendit une sourde détonation, suivie d’une légère vibration ; le même phénomène se répéta le 21, à 3 heures de l’après-midi; le 22, cà U heures et demie du matin, on éprouva un tremblement assez fort pour faire fuir de leurs maisons plusieurs habitants. Le 7 juin, à 6 heures du soir, on ressentit un mouvement semblable , assez fort pour crevasser entièrement une église de village placée dans la région de la plus grande intensité. Le 28 juin, à minuit et à F aube du lendemain, deux secousses simples. Depuis cette date, on a ob- servé aux alentours de la région citée plus liant plusieurs détona- tions dont quelques unes ont été suivies d’un léger tremblement. En août, nous éprouvâmes encore deux secousses le 28 et le 31 ; en septembre, trois, le 16, le 17 et le 28 ; enfin deux autres secousses le 9 novembre et le 22 décembre. Pendant le cours de l’année 1852, on a constaté de légers tremblements le 11 mars, le 3 mai, le h et -le 10 juin. Mais le 31 août, la secousse a été assez forte pour jeter SÉANCE DU J 8 AVRIL 1853. 361 une nouvelle alarme parmi les habitants de la ville et faire fuir beaucoup de personnes de leurs maisons. Plusieurs des tremblements ont été accompagnés d’un change- ment notable dans l’état du ciel : ordinairement, l’aspect serein s’est transformé en un état nuageux particulier ; on voyait en outre des nuages plus ou moins immobiles avec des pointes dirigées vers la terre. Un autre fait dont il faut tenir compte, c’est que les 15 et 16 mai se sont fait remarquer par un bouleversement atmosphé- rique général. Le même jour régnèrent des tempêtes et des orages, et de fortes pluies tombèrent aux environs de Barcelone, Tarragone, Valence, Alicante et la côte d’Afrique. Peut-être que cette coïnci- dence n’est due qu’au hasard, mais elle n’est pas moins notable. Les phénomènes électriques qui précèdent ou accompagnent un tremblement de terre ne doivent pas être considérés comme cause, mais bien comme conséquence de la secousse, car il n’y a rien d’in- vraisemblable à admettre que le frottement produit par le brusque dégagement des matières gazeuses ou de la vapeur d’eau, ou du mouvement même de l’écorce terrestre, produise une tension élec- trique à la surface, assez forte pour attirer les nuages ; le change- ment du temps est alors une conséquence des décharges élec- triques ; le refroidissement de l’air par les pluies et la rupture d’équilibre de la température des régions voisines produisent les tempêtes. Avant d’aller plus loin , traçons une esquisse géologique de l’ile de Mayorque. Ici il n’y a point de volcans éteints ; la roche de sou- lèvement appartient à l’ophite et à ses variétés; elles se montrent sur une zone de 3,000 mètres d’amplitude, et sur une longueur de \U lieues sous forme de dykes et de culots. Le terrain secondaire du groupe jurassique, du crétacé infé- rieur ou néocomien et de l’étage supérieur à rudistes forme la masse principale de la chaîne du nord et des autres chaînes du midi de l’île, caractérisées par de nombreuses Ammonites, Bélemnites, Térébratules, etc. , et par d’autres fossiles de ces époques. Le terrain tertiaire pliocène, analogue au subapennin, se trouve par lambeaux adossés contre les masses secondaires, en stratifica- tion concordante, quoique en plusieurs endroits de la plaine ce groupe tertiaire se présente en couches horizontales appuyées contre des masses secondaires en couches verticales. Les reliefs qui carac- térisent les îles Baléares sont contemporains des dépôts tertiaires su- périeurs, et par conséquent de celui des Alpes orientales : ce fait est confirmé également par le parallélisme de leurs directions; en effet, l’angle formé par l’axe de grand cercle passant par les îles 362 SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. Yvice, Mayovque et Minorque et l’Equateur est de 45 degrés, tandis que celui formé par les Alpes est de 41 degrés. Il est digne de remarque que trois reliefs principaux, sensible- ment parallèles, s’observent à peu de distance les uns des autres sur cette partie de la surface terrestre, ayant pour ainsi dire leurs avant-postes au milieu de l’Alantique : à savoir, les îles Açores, les Madères et les Canaries. On trouve en effet que l’axe de grand cercle, passant par l’extrémité des Alpes orientales, le Mont-Blanc et les îles Açores, fait, avec l’Equateur, un angle de 45 degrés, tandis que celui qui passe par Varra, la chaîne du Balkan, le pro- montoire de Santo-Angelo, le détroit de San-Bonifacio ou plutôt la côte N. de la Sardaigne, les îles Baléares, le cap Saint-Antoine, plusieurs chaînes du midi de l’Espagne, fait un angle de 41 degrés. On trouve un résultat analogue pour l’axe à l’Equateur formé par le grand cercle passant par Messine, côte N. de l’Afrique, l’Atlas et les Canaries. Après cette courte digression, revenons à l’objet de cette notice. L’annce 1851 a été signalée par de nombreux tremblements de terre ressentis sur plusieurs points de la terre ; celui de la Guade- loupe, arrivé le 16 mai, est le plus remarquable, non sous le rapport des effets produits, mais pour sa coïncidence avec le nôtre du Î5 mai. La différence en longitude vers 10. éloigne cependant cette coïncidence de plusieurs heures. En février, eut lieu celui de Rhodes, signalé par beaucoup de désastres. Le 20 juin, on a ressenti une forte secousse à Alger. Vers la fin de juillet, on en éprouva une dans le département des Vosges, et le même mois à Comorn, et une autre près de Cologne. En août, une forte secousse se fit sentir à Lyon, le Doubs, l’Isère, la Savoie, le Piémont, Carlsruhe, Lugano, la Lombardie. Dans le royaume de Naples, la petite ville de Barila souffrit beaucoup. En janvier, on éprouva de légères secousses à Barcelone, dans la haute Catalogne, à Bordeaux, et dernièrement ici, le 31 août, deux secousses, dont une presque aussi intense que celle du 15 mai. Ces phénomènes ont donné lieu sur leur cause à plusieurs hypo- thèses, dont voici les plus raisonnables. Vu l’état orageux de l’atmosphère, on a voulu l’attribuer à une décharge électrique souterraine, mais cette explication est non fondée, car comment expliquer les secousses successives? On a cru aussi remarquer une certaine coïncidence entre les différents trem- blements de terre que l’on a éprouvés sur celte île et les années de grande sécheresse, suivie de pluies extraordinaires, en supposant que l’eau s’est convertie en vapeur en pénétrant à de grandes pro- SÉANCE i)U 18 AVRIL 1853. 363 fondeurs, ou bien qu’elle s’est décom posée en dégageant le gaz hy- drogène à une haute température. Son accumulation dans les nom- breuses cavités souterraines aurait donné lieu à des explosions ense mêlant avec l’atmosphère. Ces explosions sont semblables à la déto- nation lointaine d’une piècede canon, suivie d’un tremblement plus ou moins fort, variant suivant le lieu de l’observation, tandis que jamais l’inverse n’a eu lieu, ce qui prouve qu’après l’explosion pro- duite par une cause ou une autre, la transmission du son a été plus rapide que celle du mouvement vibratoire du sol. On ne peut non plus attribuer les secousses à des effondrements ou des ruines souterraines, en se fondant sur des observations de MM. Biot et Arago, lors de leur séjour à May orque eu 1§08, pour la mesure de la prolongation du méridien : il parait toutefois que les observations du pendule leur ont fait voir le peu de densité du terrain tertiaire de la partie centrale de l’île. Une autre coïncidence que je veux mentionner, afin de réunir tous les faits , même ceux qui semblent avoir un rapport éloigné avec le sujet que nous traitons, est celle que M. Petit, astronome de Toulouse, annonça quelque temps avant le 15 mai, que vers cette époque l’orbite de la terre traver- serait un groupe d’astéroïdes , dont quelques uns tomberaient sans doute sous forme d’aérolilhes, et que probablement on obser- verait de grands changements climatologiques. Mais on ne voit pas quel rapport ce phénomène peut avoir avec un tremblement de terre, et surtout avec des répétitions aussi nombreuses. La cause la plus probable doit être attribuée à l’action volca- nique du feu souterrain. Il paraît que l’Etna est depuis quelque temps en grand travail. Il y a un grand nombre d’années que ce volcan ne s’est manifesté de cette manière. La forte secousse du 31 août coïncide même avec une éruption extraordinaire de lave. J’ai pris les détails suivants du journal anglais l’ Athcnœam. Dans l’éruption actuelle, que l’on peut classer au rang des plus grands cataclysmes des temps modernes, on a observé des faits nouveaux. Les symptômes ont été semblables à ceux d’autrefois: tarissement des sources, persistance d’épais nuages blanchâtres semblables à des pins gigantesques, des bruits sourds souterrains, des oscillations violentes de la terre, etc. Peu de temps après s’ouvrirent deux nouveaux cratères près du lieu connu sous le nom de va/le ciel Leone ; des tourbillons de cendres s’en élevèrent, tombant poussés par le vent à de grandes distances en mer. Maïs tout cela ne fut qu’un prélude insignifiant; une masse énorme sortit du cratère et se divisa en trois courants. Ce torrent de feu avait, dans sa partie la plus large, une étendue de SÉANCE DU 18 AVRIL J 853. 3 Qh 3 kilomètres et demi sur 3 kilomètres de profondeur. L’éruption fut surtout terrible les 25, 29, 31 août et le k septembre. Pendant ces jours on entendit des bruits souterrains incessants, et la terre trembla presque toujours. L’éruption du l\ septembre surtout fut formidable, accompagnée de bruits souterrains plus prononcés que jamais et de secousses très fortes; la sortie de la lave dura pendant tout le mois de sep- tembre et une partie d’octobre , mais on observa dès lors des symptômes indiquant la fin de l’éruption. Il est donc très probable que les tremblements de terre de cette île, ainsi que ceux qu’on a ressentis sur différents points du conti- nent européen et africain, proviennent du travail souterrain de la lave, dans ses efforts pour produire des éruptions aussi considé- rables. Ces mouvements vibratoires du sol peuvent se comparer à la répercussion du son produit par le bruit du tonnerre, ou d’un coup de canon dans un pays de montagnes. Une description exacte des différents phénomènes qui ont pré- cédé et accompagné ce grand travail de l’Etna fera peut-être con- naître des coïncidences de dates, dont nous avons déjà signalé celle du 31 août, et servira ainsi à confirmer la similitude des tremble- ments de terre avec les éruptions volcaniques. M. Deshayes présente à la Société le mémoire suivant de M. Terquem, sur le genre Hettangia . Mémoire sur un nouveau genre de mollusques acéphales fossiles , par M. Terquem. Parmi les coquilles pétrifiées dont abondent les grès infra- basiques de Hettange, il en est quelques unes d’une forme parti- culière, qui, jugées d’après cette forme seule, furent prises pour des Corbules ou des Nucules, pour des Arches ou des Donaces, et même pour des Mactres ; cependant, mieux connues, elles n’appartiennent à aucun de ces genres : elles constituent un type entièrement nouveau. Engagées dans une roche très dure , il était difficile de décou- vrir les diverses parties caractéristiques de ces coquilles , circon- stance qui explique , de la part des personnes qui en ont parlé , l’incertitude de leur détermination générique. Favorisé par l’abondance de quelques espèces, il nous fut permis , en y em- SÉANCE Ï)U 18 AVRIL 1853, 365 ployant une longue patience, de découvrir toutes les parties inté- rieures , et d’apprécier , mieux qu’on ne l’avait fait avant nous , les caractères qui les distinguent de tous les autres genres connus. C’est ainsi que nous sommes conduit à proposer un genre nou- veau. Nous n’ignorons pas combien de réserve il faut apporter lorsque l’on entre dans cette voie assez facile de la création des genres nouveaux. Si nous voyons leur trop grande multiplicité nuire singulièrement à la netteté de la nomenclature, et rendre la syno- nymie d’une grande difficulté , néanmoins nous devons recon- naître que cette multiplicité même a conduit à un examen plus approfondi des caractères propres à chaque genre , et qu’ ainsi se sont produits les éléments d’une critique raisonnée qui , étant sagement appliquée, aura dans l’avenir des résultats précieux dans l’ensemble de la science. C’est ainsi que les caractères des genres et des espèces étant mieux fixés, il y aura plus de certitude à l’égard de leur distribution dans les couches de la terre. Un exemple rendra plus sensible encore notre opinion à ce sujet. Si une des coquilles dont nous nous occupons actuellement est prise pour une Donace, voilà un genre uniquement connu jus- qu’alors dans les terrains tertiaires, qui descend tout à coup dans les couches les plus inférieures du lias. Si d’autres espèces devien- nent des Corbules, des JNucules, ou des Arches, elles changent les proportions numériques des espèces de ces genres dans les couches où elles ont été observées. Mais que par de patientes recherches on parvienne à découvrir que toutes ces espèces ont les caractères d’un genre nouveau, alors on sait exactement où il commence et où il finit, quelle est sa véritable distribution. ïi en résulte aussi l’avantage non moins considérable de purger les autres genres d’espèces qui leur sont étrangères; enfin l’erreur est remplacée par la vérité. Entraîné par ces considérations, et connaissant exactement tous les caractères de nos coquilles, nous n’avons pas hésité, depuis plus d’une année , à les séparer en un genre particulier, pour lequel nous avons consacré le nom de Bcttangia, pour rappeler que c’est dans la riche localité d’ïletlange qu’elles ont été découvertes pour la première fois. Les coquilles du genre Ucttangia appartiennent à la classe des mollusques acéphalés dimyaires, libres, réguliers et équivalves. Leur forme générale rappelle beaucoup celle des Donaces. Leur côté postérieur est court , tronqué , quelquefois baillant , limité par une carène ou un angle ; le côté antérieur, beaucoup plus 366 SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. long, cunéiforme, est très exactement fermé; les bords sont sim- ples, sans crénelures ; la surface extérieure est lisse. A l’intérieur, la charnière offre deux dents cardinales , épaisses, inégales sur cliacjue valve ; elles ont aussi une dent latérale postérieure , quel- quefois transformée en une simple callosité ; le ligament est ex- terne, porté sur des nymphes courtes, peu épaisses, que l’on voit sur le petit côté de la coquille , en arrière des crochets ; l’impres- sion musculaire postérieure est ovale ou arrondie, l’antérieure est plus étroite et plus allongée , l’impression palléale est simple , un peu rentrante en avant. Par cet ensemble de caractères , il nous paraît que le genre Hettangia doit venir se ranger dans la famille des Cardiacés. Dans cette famille, en effet, les classifications les plus récentes réunissent des mollusques dont les coquilles offrent des caractères analogues à ceux de notre nouveau genre : leur charnière porte une ou deux dents cardinales, des dents latérales, tantôt de chaque côté, tantôt d’un côté seulement. Mais un des caractères auquel il convient d'apporter le plus d’attention se rencontre dans l’impres- sion palléale, qui est toujours simple. Cette analogie de nos Het- tangia n’est cependant pas suffisante pour les introduire dans aucun des genres de la famille des Cardiacés. Malgré les nombreuses modifications que subit le genre Car - dium depuis son apparition dans les terrains paléozoïques jusque dans la nature actuelle, il n’emprunte, dans aucune occasion, les formes propi es aux Hettangia. Il existe néanmoins entre ces genres des caractères communs, dans les dents cardinales épaisses et iné- gales, dans la présence d’une dent latérale ; mais dans les Hettan- gia, c’est toujours la dent antérieure qui manque. D’autres diffé- rences , produites par les modifications de la forme générale , se montrent dans les impressions des muscles et du manteau. On remarque dans certains Cardiacés un bâillement plus ou moins considérable du côté postérieur ; ce bâillement occupe rarement toute la hauteur de la coquille. Dans plusieurs Hettan- gia se montre aussi un bâillement à la même place; il occupe toute la hauteur du bord postérieur; il est lancéolé, rétréci à son extré- mité inférieure ; de plus, son bord interne est consolidé par un bourrelet marginal. Dans l’un et l’autre genre cette ouverture donne passage à des siphons destinés à la respiration et aux déjec- tions. La place des Hettangia se trouvant fixée dans la classification générale d’après leurs caractères zoologiques , il n’est pas sans in- térêt de les comparer à d’autres groupes avec lesquels elles ont 367 SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. aussi de l’analogie : on pourrait les comparer à certaines espèces du genre Corbis ( Corbis lœvigata , Sow., par exemple), mais dans ces coquilles, comme dans toutes celles de la famille des Lucines, les muscles sont plus grands, les coquilles plus équilatérales, et tou- jours parfaitement closes. On ne saurait confondre les Hettcingia avec les Cypri cardes, non seulement parce que ces dernières sont fermées en arrière , mais encore par la disposition des dents cardinales toujours allongées en arrière dans la direction du bord supérieur et postérieur, M. Bunker, dans la faune d’Alberstadt, publiée dans les Palœontn- graphica de Meyer, a connu une espèce d ' Hettcmgïa, mais, trompé par la forme générale , il l’a rangée dans le genre Dona.x , sous le nom de Dorrnx securiformis. Nous devons à l’obligeance de ce savant des exemplaires très bien conservés de son espèce , et nous y avons reconnu tous les caractères de nos Bettnngia. Ce qui a échappé à M. Bunker, c’est que les Donaces ont toujours l’im- pression paliéale sinueuse en arrière, tandis que dans sa coquille, comme dans les nôtres, cette impression est toujours simple : dif- férence d’une grande valeur zoologique pour déterminer les vrais rapports des mollusques acéphalés. Ainsi un examen détaillé des caractères essentiels des Hettangia et la discussion des opinions auxquelles elles ont donné lieu nous confirment dans notre manière de voir et nous les font maintenir dans la famille des Cardiacés. Nous comprenons difficilement pourquoi M. d’Orbigny, dans son Prodrome (p. 216, n° 78), a rangé la coquille de Ai. Bunker parmi les Mactres. En supposant que M. d’Orbigny n’eût connu l’espèce de M. Bunker que d’après les seuls documents publiés par ce naturaliste , ils étaient cependant suffisants pour faire éviter une semblable méprise. Les Mactres, en effet, M. d’Orbigny ne l’ignore pas, ont le ligament interne et rimpression paliéale profondément sinueuse en arrière. Bans la figure de M. Bunker, il est vrai, l’im- pression paliéale n’est point figurée, mais il n’y a point à la char- nière de fossette pour le ligament interne, et, bien plus, les nymphes pour un ligament externe sont très exactement représentées ( Pa - lœontographica, t. I, pl. vi, 6g. 12, 13, \k). A choisir entre les deux opinions, celle de M. Bunker serait de beaucoup préférable. La coquille est donacifonne, elle a à peu près la charnière des Bonaces, un ligament externe. En ne tenant pas compte de l’impression paliéale, rien de plus naturel que le rapprochement proposé par M. Bunker. M. d’Orbigny, au con- traire, fonde son opinion sur une série de suppositions gratuites, 368 SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. Il suppose que le ligament est intérieur et que les nymphes n’existent pas ; il suppose la présence d’une seconde dent latérale, car dans les Martres les dents latérales ne manquent jamais ; il suppose enfin une impression palléale sinueuse. Tous les faits, comme nous l’avons vu, démentent la justesse des suppositions de M. d’Orbigrïy. Voici de quelle manière nous croyons pouvoir présenter les caractères de notre nouveau genre. Genre Hettangia, Terquem. Testa transversa , œquivalvis , inœquilateralis, postice subtruncata, hians vel claasa ; /lia tu ovato-lanceolato, in ni a rgirie cari nat o y cardo inœqualiter bidentatus in utraque valva , dens lateralis p os tic us ali~ quando eallo permutatus ; impressio pallii integra ; ligamentum externuïn , breve. Coquille transverse, équivalve, inéquilatérale, subtronquée, close ou bâillante du côté postérieur ; ouverture ovale-lancéolée, bordée et carénée ; charnière à deux dents épaisses inégales sur chaque valve ; une callosité ou une dent latérale postérieure ; impression palléale simple ; ligament externe, court. Nous avons trouvé plusieurs espèces du genre Hettangia dans les grès infra-basiques de Hettange et du Luxembourg ; le grès supra-liasique des environs de Thionville en renferme quelques unes, et nous en avons rencontré dans les grès du lias moyen des environs d’Àrion et de Latour. M. Buvignier, de son côté, a constaté la présence de ces fossiles dans deux assises sableuses du lias moyen du département de la Meuse. Enfin M. Dunker en a signalé une, ainsi que nous l’avons déjà dit, aux environs d’Alberstadt, dans un grès infra-liasique non agrégé. Voilà le court inventaire d’un genre dans lequel nous connaissons actuellement douze espèces. Ces espèces, tant en France qu’en Belgique et en Allemagne, comme le démontre leur gisement, ont vécu dans les sables. Aussi c’est dans les assises de grès ou de sable de la formation basique qu’on les rencontre plus particulièrement. Très rares dans les grès supra-basiques [marly-sandstone) , plus abondantes dans les grès inférieurs, elles semblent caractériser plus spécialement les grès moyens du bas, où elles constituent parfois à elles seules des bancs assez puissants. séàxce du 18 avril 1853. 369 Voici la distribution des espèces actuellement connues dans les couclies où elles se sont rencontrées. « î . Hettangia Deshayesea , Tqm. — Hettange. — Grès infra- liasique. 2. . — an gus ta , Tqm. — Hettange. — Grès infra-liasique. 3. — tenera , Tqm. — Hettange. — Grès infra-liasique. 4. — securiformisy Tqm. — Halberstadt. — Grès infra- liasique. 5. — ovatttj Tqm. — Arlon. — Grès répondant aux marnes^ à Hippopodium ponderosum. \ 6. broliensis,B\iv. — Breux. — Grès répondant au cal- caire à Ammonites Davoei ; calcaire sableux des Ardennes. 7. — longiscata} Buv. — Breux. — Grès répondant au cal- caire à Ammonites Davoei; calcaire sableux des Ardennes. S. — * Raulinea , Buy. - — • Breux. — Grès répondant au cal- caire à Ammonites Davoei ; calcaire sableux des Ardennes. 9. — Terquemea,B\ix. — Écouviez. — Grès médio-liasique kPlicatula spinosa; calcaire ferrugineux des Ar- dennes. 10. — lucida, Tqm. — Latour, Bleid. — Grès médio-lia- sique à Plicatula spinosa; calcaire ferrugineux . des Ardennes. J VI. — DionvillensiSyTqm. — Côte Pelée (Thionville). — - Marly sandstone. 12. — compressa , Tqm. — Côte Pelée (Thionville). — Marly sandstone. La Hettangea Deshayesea et la H. Dionvillensis constituent à elles deux les types du genre, l’une pour les espèces bâillantes et l’autre pour les espèces fermées. CO *W 1. Hettangia Deshayesea , Terquem, pi. II, fig. 4-7, # H. testa ovato-elongata , donaciformi , lœvigala transversat sub~ œquivalvi , antice rostrata , postice oblique truncata /liante , carina utrinque ab umbonibus decurrente ; apertura postica elongata ovata, marginata ; margine cardinali antice elongato , declivi, postico recto brevi; cardine inœqualiter bidentato in utraque valva ; sinistro dente postico callosoy dextra fovea , canaliculata elongata ; umbonibus parvis , postmedianis , antice recurvis. Longueur, 35 millimètres; largeur, 20; épaisseur, 11. Soc. géol., 2e série, tome X. 24 370 SÉANCE LU 18 AVRIL 1853. Cette espèce, qui nous a servi de type pour l’établissement du genre, réunit d’une manière fort nette tous les caractères qui peuvent la spécifier. La coquille est épaisse, ovale-allongée et lisse ; la partie antérieure est atténuée et rostrée par la brusque déclivité du bord cardinal antérieur et par la courbure du bord inférieur ; le bord cardinal postérieur, qui n’a que le tiers de la longueur de l’antérieur, est droit, supporte le ligament et est limité par la carène postérieure ; la face postérieure est tronquée oblique- ment en arrière et la face ventrale est régulièrement arquée. Les crochets postmédiaux sont petits, déprimés et recourbés en avant ; de leur extrémité partent deux carènes; l’antérieure circonscrit la lunule; celle-ci est très étroite, lancéolée, et se perd près du bord antérieur ; la carène postérieure est plane, s’élargit un peu au milieu, et se continue jusqu’à l’angle du bord inférieur ; elle est séparée des côtés par un sillon peu profond et muni d’une ouverture ovale- lancéolée, fortement bordée. La charnière se compose de deux dents épaisses, très inégales sur chaque valve, et de deux fossettes correspondantes, l’une supérieure et l’autre inférieure : la valve gauche est munie postérieurement d’une forte callosité à l’extré- mité du bord cardinal ; la valve droite présente en regard une large fossette en gouttière très allongée ; les nymphes sont fortes, saillantés, et paraissent avoir supporté un ligament épais et court. L’impression musculaire postérieure est ronde, faiblement mar- quée et placée sur l’angle de la carène ; l’antérieure est piriforme et limitée à l’intérieur par une forte nervure ; l’impression pal- léale est simple et suit régulièrement le bord inférieur; la face interne est lisse. Pétrifiées par du spath calcaire, dans une pâte très dure de calcaire gréseux, ces coquilles sont très fragiles et ne s’obtiennent jamais détachées ; adhérant par leur surface interne, elles n’ont pu être étudiées qu’avec quelques difficultés. Elles se trouvent toujours en valves isolées et mêlées avec une certaine abondance à d’autres fossiles dans le lit fossilifère du grès infi^liasique de Hettange et de Luxembourg. 2. Hettangia an gus ta , Tqm. , pl. II, fig. 11-13. H . testa erassa , lœv iga ta , o va to-ob longa , transversa , cequivalvi , œquilaterali , donactfbrmi , anticé rostrata , postice tr une a ta , cari- nata, clausa ; cardine inœqualiter biclentato , postico dente calloso , umbonibus vite prominulis. Longueur, 22 millimètres; largeur, 12; épaisseur, 10. SÉANCE DU \ 8 AVRIL 1853. 871 Cette espèce fut longtemps confondue avec la précédente, dont elle paraissait représenter le jeune âge, se trouvant plus petite et privée d’ouverture; nous avons été convaincu cju’elle devait figu- rer comme espèce, après avoir, d’une part, trouvé la//. Deshayesea très jeune et déjà munie de son ouverture, et d’une autre part des coquilles sans ouverture, quoique adultes et de grande taille, pro- venant du lias supérieur. Cette coquille est épaisse , lisse et marquée de quelques lignes d’accroissement; elle est donaciformé, transverse équilatérale, rentrée en avant et tronquée obliquement en arrière ; le bord car- dinal antérieur est déclive, et le postérieur droit et très court. La lunule est linéaire, et se perd à la moitié du côté antérieur; la carène est plane , non bordée , triangulaire sur la valve prise isolément ; vue d’ensemble , elle est ovale , privée d’ouverture , et se continue jusqu’à l’angle inférieur. La charnière se compose de deux dents inégales sur chaque valve, et dont la dent latérale postérieure est calleuse, avec une fossette en gouttière en regard. L’impression musculaire antérieure piriforme est limitée par une nervure intérieure ; le bord inférieur est régulièrement arqué. Cette espèce se trouve très abondamment avec l’espèce précé- dente, et dans de mêmes conditions à Hettange. 3. Hettangia tenera , Tqm., pi. I, fig. 13-15. H. testa fragili, ovata , lœvigata , transversa , œquilaterali , dona- cïjormi , anticc rostrata , posticc truncata , carinata , clans a ° mar- gine cardinali antice declivi , postico recto brevi ; lunula vix perspi - cua , umbone parvulo antice recurvo. Longueur, 18 millimètres; largeur, 10 ; épaisseur, 7. Cette espèce, qui a beaucoup d’analogie avec la précédente, s’en distingue par une forme plus petite et plus ovale, sa partie anté- rieure étant moins rostrée ; la coquille est mince, fragile, lisse, et ornée de quelques fortes lignes d’accroissement qui se continuent à angle droit sur la carène ; la lunule est linéaire, très courte, et à peine visible ; la carène est oblique, large dans le milieu, étroite vers l’angle inférieur ; elle est privée de l’ouverture ; les crochets sont très petits , déprimés en avant et médians ; la charnière est identique avec celle des espèces précédentes. Cette espèce est beaucoup plus rare que les précédentes , bien qu’elle les accompagne dans le lit fossilifère de Hettange. 372 ■' SÉATîCE DU 48 AVRIL 1853. 4. Hettangici securifornüs , Tmq., pl. I, fig. 8-12. Donax securifornüs , Dkr. Palœontographica , t. T, p. 36. Pl. VI, fig. 12-14. Donax securifornüs, Desli. Traité élémentaire de conchyliologie , t. I, 2e partie, p. 450. Mactra securifornüs , d’Orb. Prodrome , t. I, p. 216, n° 79. H. testa transversa , triangulari , subœquilaterali , subventricosa , lœviuscula , concentrice idque obsolète striata , antice producta , 7W- trata9 postice truncata, basi œqualiter arcuata ; umbonibus parvis , subacutis , antrorsum incurvis ; margine cardinali postice arcuato , utrinque carina ab umbonibus decurrente ornato ; area angustissima cordiformi ; lunula lanceolata , ligamento parvulo ; dentibus cardi- nalibus in utraque valva subinis , latérales duo in dextra , dentem unicum sinistrœ valvulœ recipientes ; impressione pallii integra. Longueur, 17 millimètres; largeur, 10 ; épaisseur, 6. Nous avons transcrit littéralement la description latine donnée par M. Dunker , et nous ny avons ajouté que les trois derniers mots, qui portent avec eux un caractère assez important pour ne pas être négligé ; cette description , ainsi complétée , s’applique d’une manière absolue à la coquille. Nous avons démontré plus haut, en traitant des caractères généraux du genre Hettangia , pour quels motifs cette coquille ne pouvait être maintenue dans le genre Donax , suivant M. Dunker, ni dans le genre Mactra, suivant M. d’Orbigny ; d’une part l’impression palléale est simple, et d’une autre le ligament est externe. Nous n’admettrons pas davantage avec M. Dunker la présence de deux dents latérales sur la valve droite; une dent suppose toujours une fossette en regard : or, la valve gauche ne présente qu’une dent calleuse avec un léger sillon supérieur, limité par le bord cardinal ; ces deux dents seront donc les parois de la fossette longitudinale que nous avons signalée dans les espèces précédentes. Cette espèce est très fragile, translucide, trigone, trans verse, sub- équilatérale, atténuée en avant, et fortement tronquée en arrière ; la carène est ovale , faisant angle avec les côtés , et munie d’une ouverture linéaire , bordée , et qui ne commence pas avec l’angle du bord postéro-supérieur, bien qu’elle se continue jusqu’à l’angle inférieur ; on constate facilement sa présence par l’échancrure que présente le bord postérieur. La parfaite conservation de la co- SÉANCE i)t? 18 AVRIL 1853. 373 quille permet de bien juger la constitution de la charnière , qui est identique avec celle des espèces précédentes. Elle se compose de deux dents épaisses, inégales, sur chaque valve ; la valve gauche porte la callosité postérieure correspondante à la fosse en gouttière longitudinale de la valve droite. L’impression palléale est simple ; l’impression musculaire antérieure est piriforme, et placée entre une forte nervure et le relief interne delà lunule ; l’impression musculaire postérieure est ronde , et sa position répond à l’angle de la carène. Les crochets sont très petits, déprimés en avant ; le bord interne est lisse. Cette espèce provient du grès infra-liasique d’Halberstadt , où elle paraît être assez commune. 5. Hettangia ouata , Tqm., pl. II, fig. 1-3. H. testa crassa, ouata , transversa , subœquilaterali , donaciformi , antice rostrata , attcnuata, postice oblique truncata, carinata, hiante, lœvigata idque tenerrima , obsolète et stricte radiatim striata ; aper- tura postica elongato-ovata , inferne acuta , marginata ; margine cardinali antice elongato declivi, postico recto brevi ; cardine inœqua- liter bidentato in utraque valua ; sinistro dente postico calloso, dextra jovea canaliculata elongata ; umbonibus poslmedianis , antice recurvis. Longueur, 35 millimètres; largeur, 20 ; épaisseur, 11. Cette belle espèce tient à la fois du H. Deshayesea , dont elle a les dispositions générales et du H . brolicnsis par la forme de la carène. Cette coquille est grande, épaisse, ovale-allongée, subéqui- latérale, donaciforme. Le rostre est subaigu, autant par la brusque déclivité du bord cardinal antérieur que par la courbure du bord inférieur, qui se relève beaucoup en avant ; les crochets sont petits et fortement déprimés en avant. La lunule est étroite et n’occupe que la moitié de la surface antéro-supérieure ; le bord cardinal supérieur est très court et est limité par la callosité postérieure. La carène commence à l’extrémité des crochets et se continue jusqu’à l’angle du bord inférieur; elle est étroite et marquée de fines stries d’accroissement et séparée des côtés par un léger sillon, qui détermine de la sorte une arête assez vive. L’ouverture posté- rieure est lancéolée, large vers le milieu, aiguë aux deux extré- mités et occupe toute la longueur de la carène. La surface est entièrement couverte de stries rayonnantes très fines et d’autant plus serrées qu’elles approchent de la partie antérieure ; vers le milieu elles sont plus espacées et simulent de petites côtes. SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. 374 Cette espèce, dont on trouve toujours les valves isolées, est presque toujours pétrifiée par du spath calcaire et en devient d’au- tant plus fragile. Elle est très commune dans le grès d’Ârlon, où parfois elle constitue à elle seule des bancs de 12 à 15 centimètres de puissance. Nous avons trouvé également cette espèce dans les environs d’ Or val. La position stratigraphique du grès d’Arlon est immédiatement au-dessus du calcaire à Gryphées arquées et au-dessous du calcaire ocreux à Ammonites Davoei; elle répond aux marnes à Hippopo- clium ponderosum de la Meurthe, et à la couche à A. Turneri de M. Quenstedt pour le Wurtemberg; elle constitue ainsi l’assise inférieure de l’étage moyen du lias. 6. Hettangia broliensis , Buv. H . testa ovato-trigona transversa , inœquilatera , crassa ; antice producta , rotundata ; postice oblique triuicata , /liante, marginata ; margine cardinal i postice brevissimo , calloso. Des assises supérieures du calcaire sableux du lias de la Meuse. Breux. 7. Hettangia Rciulinea, Buv. H . testa ovali , transversa , lœvigata , inœquilaterali ; antice angus- tiori , rotundata ; postice subcarinata, producta, oblique truncata, clausa vel vix hiantula? umbonibus contiguis, prominulis subanticis. 8. Hettangia Tcrquemeci, Buv. H. testa lœvigata , te nui, ovali-elongatci , transversa, inequilaterali, antice elongata, rotundata ; postice oblique truncata, l liante , mar- ginata. Du calcaire ferrugineux du lias de la Meuse. Écouviez. 9. Hettangia longiscata, Buv. H. testa elongata, transversa , subœquilaterali , dèpressa ; antice rostrata, postice carinata , truncata , vix hiantula, tenuiter concen- trice striata ; striis ad carinani angulatis, postice majoribus ; mar- gine carclinali postice recto ; a dextro latere dentato. Des mêmes assises que Y H. broliensis. M. Buvignier a en outre une et peut-être deux autres espèces SÉANCE DU 18 AVRIL 1853. 375 du même genre, mais dont il ne possède pas d’échantillons suffi- sants pour avoir pu les décrire. Elles sont toutes deux du calcaire ferrugineux du lias des enyirons de Montmédy. 10. Hettangia lapida, Tqm., pl. II, fig. 8-10. II, testa lœvigata , lucida, fragili, transversa , ovata subœquilate -» rali, subtrigona, antice attenuata , rostratay postice explanata, obli- que truncata, lœviter carinata , clausa; cardine in œquali ter b iden ta te , dente postico calloso in sinistra ; val va base in medio recta , antice arcuata. Longueur, 21 millimètres; largeur, 10; épaisseur, U. Cette espèce a quelque analogie avec la H. securifornüs d’Hal- berstadt , par les dispositions de la partie postérieure de la coquille. Elle est brillante, lisse, à test très mince et fragile; transverse, subéquilatérale, subtrigone, atténuée et rôstrée en avant* un peu élargie en arrière, puis tronquée verticalement et munie d’une faible carène, sans ouverture postérieure. La lunule est linéaire, et la carène qui commence à l’extrémité des crochets se confond bientôt avec les côtés et ne descend que jusqu’au tiers de la face postérieure ; le bord inférieur est droit dans le milieu et se relève beaucoup plus en avant qu’en arrière. La charnière se compose de deux dents cardinales, inégales sur chaque valve, et la gauche a une dent postérieure calleuse. Les crochets sont très petits et déprimés en avant. L’impression palléale est simple; l’impression musculaire antérieure est piriforme et limitée par une nervure. La postérieure est ronde ; le bord interne est lisse. Cette espèce est très abondante à Latour et Bleid (frontière de Belgique) et se présente en lits de 6 à 8 centimètres d’épaisseur, dans un grès micacé calcareux qui répond aux marnes à Plicatula spinosa et au macigno d’Aubange : il constitue par conséquent l’assise supérieure de l’étage moyen du lias. il. Hettangia Dibnvillensis, Tqm., pl. I, fig. l k. H. testa lœvigata , ovata , subtri gona , s ub ce qui la ter a l /, antice pro - ducta , r o strata y postice oblique truncata , carinata non hiante ; lunula lanceolata non au te ni pro ducta ; carina ab umbonibus decurrenti lœve et angusta ; umbonibus parvis , antice recurvis ; car- dine inœqualiter bidentato , uno proclucto rccurvo ‘ dente postico cal- loso , basi œqualiter arcuato. Longueur, k centimètres; largeur, 23 millim. ; épaisseur, 11. 37(3 SÊÀISCE UU 18 AVRIL 1853. Cette espèce possède tous les caractères généraux du genre et principalement de la H. Deshayesea , sauf l’ouverture postérieure. Elle est ovale, donaeifonne, subtrigone, subéquilatérale, rostrée en avant, obliquement tronquée en arrière. La lunule est lancéolée et ne s’étend que jusqu’à la moitié du bord supérieur. Le bord cardinal supérieur est très court et est limité par la dent posté- rieure ; la carène part de l’extrémité des crochets et suit toute la face postérieure; elle est étroite, lisse, et un peu courbe vers le milieu ; le côté postérieur ne présente pas d’ouverture et forme avec les côtés un angle très obtus ; le bord inférieur est douce- ment arqué et ne se relève pas autant en avant que dans les H. Deshayesea et H . ovata. La charnière se compose de deux dents cardinales très inégales, l’une courte et l’autre allongée, et un peu relevée ; la dent postérieure est en forme de callosité sur la valve gauche ; le bord interne est lisse et l’impression palléale est simple. Cette coquille, pétrifiée par du calcaire spatliique, se présente dans un état de parfaite conservation ; elle est fort rare et ne s’est encore trouvée que dans le grès supra-liasique (marly-sandstone) de la Côte-Pelée, en face de la côte Saint-Michel, près de Thion- ville. Les fossiles qui l’accompagnent sont : Ammonites opalinus et ses variétés, A . radians , Trigonia navis , Gervillia Hartmanni , Nucula Hammeri , etc. 12. Heltangia compressa , Tqm., pl. I, fig. 5-7. H. testa lœvigata , tenere concentrice striata , complanata , sub- œquilaterali , antice rostrata , postice depressa, subcarinata , clausa ; cardine crasse et inequaliter bidentato ; valva sinistra dente laterali calloso cum jovea postica ; umbonibus minimis , in tus recurvis ; lunula vix perspicua. Longueur, /il millimètres; largeur, 23; épaisseur, 10. Nous ne possédons, de cette espèce, qu’une valve gauche, à la- quelle manque une partie de l’extrémité antérieure. La coquille est aplatie , lisse , avec des stries fines et nombreuses d’accroisse- ment; subéquilatérale, subrhomboïdale, rostrée en avant. Le bord cardinal antérieur est faiblement déclive, et présente une très petite lunule linéaire ; le bord cardinal postérieur est plus grand que dans les espèces précédentes, et ne forme pas un angle avec le côté postérieur ; le côté postérieur est large, un peu bombé, et privé d’ouverture; assez prononcé près des crochets, l’angle s’efface peu SÉANCE DU 2 MAI 1853. 377 à peu, et n’est plus sensible près du bord inférieur, qui est régu- lièrement arqué. La charnière se compose de deux dents épaisses, inégales, et la dent latérale est accompagnée d’une fossette posté- rieure : ce fait démontre que la valve droite ne possède pas de fossette horizontale allongée comme dans toutes les espèces précé- dentes, mais bien deux dents séparées par une fossette. Les cro- chets sont très petits et déprimés en dedans. Cette coquille , pétrifiée par du calcaire spathique , parait être fort rare ; elle a été trouvée avec la précédente dans le marly- sandstone de la Côte-Pelée, près de Tliionville. M. Hébert présente un mémoire sur le calcaire pisolitique. La Société décide qu’il sera examiné par la Commission des Mémoires. Séance du 2 mai 1853. PRÉSIDENCE DE M. DE VERNEU1L. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite de la présentation faite dans la dernière séance , le Président proclame membre de la Société : M. Fréchin, membre de la Société météorologique de France, sur le Galilée , à Lorient (Morbihan), présenté par MM. Delesse et de Yerneuil. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. - La Société reçoit : De la part de MM. le vicomte d’Archiac et Jules Haime, Description des animaux fossiles du groupe nummulitique de lflnde , précédée d'un résumé géologique et d'une monographie des Nummulites , 4re partie, in-/i, 223 p., 15 pl. Paris, J 853, chez Gide et J. Baudry. De la part de M. le commandeur Despine, Eloge historique du chevalier Matthieu Bonafous (lu à Y Académie royale d'agri - 0 378 séance üu 2 mai 1853. culture de Turin dans sa séance du 5 février 1853) • in-8, 35 p. Turin, 1853. De la- part de Sir G. Lyeii , On the discovery , etc. (Sur la découverte de quelques restes de reptiles fossiles, etc., de la Nouvelle-Ecosse) (extr. des publications de The Royal Institu- tion oj Great-Britain,18 mars 1853) -, in-8, 8 p. Londres, 1853. De la part de M. Edmond Becquerel, Climat de la France , lre partie, in-A, 32 p., 1 pl. Versailles, 1852, chez Beau jeune. De la part de M. Paul Collet, La Caille , son établissement thermal , son pont et ses environs ,• in-8, 17A p., 1 pl. Annecy, 1853, chez Louis Robert. De la part de M. Christian Boeck, Bemœrkninger , etc. (Remarques sur les Graptolithes) -, in-A, 10 p., 2 pl. Christiania, 1851, chez P. -T. Mailings. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXVI, nos 16 et 17. Société impériale et centrale d* agriculture. — Bulletin des séances , 2a sér., t. VIII, 1853, n° A. Bulletin de la Société de géographie , Ae série, t. V, nos 25 et 26, janvier et février 1853. Annuaire de la Société météorologique de France , t. I, 1 1853, ire part., Bulletin des séances , f. 1-A, in-8. U Institut, 1853, nos 1007 et 1008. Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, 6e année, 1853, n° 55. The Athenœum , 1853, nos 1330 et 1331. Abhandlungen. , etc. (Mémoires de la Société royale des sciences de Bohême) -, in-A , 5e série , t. VII, 1851-1852. M. d’Àrchiac présente, au nom de M. J. Haime et au sien, la première livraison de la Description des animaux fossiles du groupe nummulitique de R Inde. Ce fascicule contient : 1° une monographie des Nummuliteê j 2° un résumé géologique du groupe nummulitique de l’Inde ; 3° la description des Polypiers; A0 la description des Ëchinodermes. I. La monographie des Nummulites , accompagnée de 11 planches où sont représentées de grandeur naturelle, puis grossies de 2, A, 8, 30 diamètres et quelquefois plus, toutes les espèces et les variétés connues, est divisée en deux parties , CLASSIFICATION ET DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DES NUMMULITES. NOM des ESPÈCES. du nord 1 £ A ouest de 'Europe. TJ f « * 1=1 s|j| Sla JP1 Versanl S. des Pyrénées (Navarre, Aragon. Catalogne, de Malaga el de Grenade). Ço « fc-f | Jii Alpes maritimes (comté de Nice, etc.). | | J -s 5 1 i 1 Alpes de lu Bavière •|i ji s|l J J « y 11.1 3 Les Carpalhcs (Hongrie, Transylvanie, etc.). T|j| H « 1 " O j i 3b E « t lit IJî 1 1 i a * * - * * *5 * . • tva, * l#f GnouPE. Laves aut sublaves. 1 •OJ 1 »l î* Groupb. Rcticulata 8 I ç 1 3* Groupe. i'ubreticulaliü. . . . 1 1 0 ' 1 c. ] 4* Groupe. Punclulalœ < 1 I ( 1 1 i i \ 5* Groupe. Plicatœ vel striata. . ( * .? latispira , Menegh » * . var? « : l * * • » * * ♦ * * • *? * * * * . * »? * » * scabra , Lam Lamarckiy nov. sp » * * • * *? * * » Defrancei , nov. sp Bellardiiy d’Arch * 1 Deshayesi , nov. sp 1 pcrforata, d’Orb / Meneghinii, nov. sp. . . . * * * * * * * * * * »? • * * | obtusa, J, de C. Sow. . . • f Verneuiliy nov. sp * *? * . * * *? * * * * * ; \ curvispira, Menegh. . . . / Ramondi , Defr * * * * * * * ! * * * * ♦ * * biaritzensis , d’Arch. . . . * * * * * * * * * . * * • * * ‘ *? * 1 striata, d’Orb * : * * * *? i ■ ■ * J JPrat/i , nov. sp \ irregularis , Desh Vicaryi , nov. sp f discorbina, d’Arch ; ;* ; ; * • g £ u . ' g I S J J G* Groupe. Explanata . (Septa et l o 2 |Tg \ spira plus minusve 1 |S IT’53 f prominentes ). . . . j Viquesnetiy nov. sp. . . . ; '* ' ; ‘ V ‘ ’ ’ ■*’ ‘ ] * vasca, Joly et Leym. . . . variolaria, Sow ■ V?’ ’ ' expouem, J. de C. Sow. . grunulosa , d’Arch ; : * * * : * , : * * . mamillata , d’Arch. . . . * * i spira, de Roissy ♦ * * * 1 Totaux. . . -S J sa. SB 45 \mSm A3 StôlHfe il . i 20 1 10 10 | 8 13 Uéi h 12 15 | 2 2 SÉANCE DU 2 MAI 1853. 379 La première comprend quatre sections : 1° une histoire cri- tique des travaux sur les JSummulites , divisée en cinq époques : îa première s’étendant depuis les écrivains de l’antiquité et ceux de la renaissance jusqu’à l’année 1770, la seconde de 1770 à 180A, îa troisième de 180Æ à 1825, la quatrième de 1825 à 1835, et îa cinquième est celle dans laquelle nous sommes. 20 h ouvrages, notes ou mémoires, dus à 132 auteurs, ont été analysés dans ce travail. La seconde section traite des caractères généraux des N ummulites , de leurs caractères extérieurs et intérieurs, puis des considérations physiologiques . La troisième, de leur classification , avec un appendice sur leur mode de conservation et d’altération ; et la quatrième, la dis- tribution stratigraphique et géographique de ces corps, suivie d’un tableau de la distribution géographique des espèces qui est reproduit ci-contre. La seconde partie de cette monogra- phie est consacrée à la description des espèces et terminée par une table alphabétique de toutes les espèces réelles ou nomi- nales, Les Nummulites, ajoute M. d’Archiac, sont des corps dont la détermination spécifique, quoi qu’on fasse pour la simplifier et îa rendre plus facile, exigera toujours une étude préalable longue et fort attentive de tous les détails dans lesquels nous sommes entrés et dont aucun n’est inutile. L’examen compa- ratif des caractères essentiels de ces fossiles doit précéder toute tentative pour en distinguer les espèces, et ce n’est qu’après s’être bien pénétré de la valeur relative de chacun d’eux qu’il sera possible d’arriver à cette distinction. Cette valeur est quel- quefois telle, qu’il suffit d’un très petit fragment de Nummulite pour assigner l’espèce dont il provient} mais souvent aussi il est nécessaire d’avoir recours à l’ensemble des caractères ou à plusieurs d’entre eux pour obtenir une détermination toujours d’autant plus satisfaisante que lès-échantillons seront plus nom- breux et dans un meilleur état de conservation. IL Le résumé géologique du groupe nummuütique de l’Inde, accompagné de coupes insérées dans le texte, fait voir que la formation tertiaire inférieure de ce pays, qu’il constitue presque à lui seul, a été reconnue sur une étendue de 25 à 26 degrés en longitude, depuis le Béloutchistan jusque dans les contre- 380 SÉANCE DU 2 MAI 1853. forts de l’Himalaya, à l’est du méridien de Calcutta, et sur environ 12 degrés de latitude, depuis les bords duRunn, dans la province de Cutch, à l’embouchure orientale de l’Indus, jus- qu’au nord du parallèle de Cachemire. Les dépôts nummulitiques ne sont point continus dans toute cette surface ; il reste encore de grandes lacunes à combler -, mais on peut déjà reconnaître qu’ils se présentent sur ces divers points avec des caractères pétrographiques extrêmement variés et avec des fossiles assez différents aussi. On peut distinguer dans cet espace quatre régions principales. La plus occidentale de ces régions, celle qui se prolonge le plus au S., comprend: la province de Cutch, la chaîne des collines d’Hala ou d’Hy- derabad, qui borde la rive droite de l’Indus, dans la dernière partie de son cours et la portion du Béloutchistan qui lui est contiguë. La seconde région a pour centre la chaîne de la mon- tagne de sel dans le Pendjab et la partie N. de celle de Soliman, sur la frontière du Caboul. Les roches nummulitiques parais- sent s’étendre au N.-O., jusque sur les flancs de l’Hindoukho méridional, puis au N.-E., où elles entourent la haute vallée de Cachemire. C’est dans des calcaires noirs de cette région, dans l’axe même de l’Himalaya, qu’une des Nummulites les plus 1 communes de l’Europe a été rencontrée à une altitude de Zi, 875 mètres, c’est-à-dire un peu plus haut que le sommet du Mont-Blanc. En se prolongeant au S.-E., des roches du même âge constituent la troisième région, celle qui est comprise dans le district de Subathoo, dans la province de Simla. Enfin une quatrième région, la plus orientale, qui confine à la Chine et au Thibet, a pour centre la province de Pilhet. La formation tertiaire inférieure de l’Hïda, telle qu’on la con- naît aujourd’hui, montre l’indépendance la plus complète entre ses dépôts et ceux de la formation crétacée. « Ainsi (p. 179), »dans la province de Cutch, dans le Siside, le Béloutchistan, » le Pendjab, comme le long des pentes de l’Himalaya, les » couches inférieures aux calcaires à Nummulites n’ont présenté » nulle part les caractères d’un étage quelconque de la craie, » tandis que partout où le substratum a été reconnu, il a offert » des dépôts charbonneux avec des argiles et du grés apparte- » nant encore au terrain tertiaire et reposant soit sur la forma- SÉANCE DU 2 MAI 1853. 381 » lion jurassique, soit sur des roches plus anciennes dont l’âge » est encore indéterminé. » En outre, dans les parties les plus méridionales de l’Inde, » où l’existence des sédiments crétacés a été bien constatée, » on n’a encore découvert aucune trace de Nummulites ni » d’autres fossiles propres à ce niveau. Les dépôts lacustres très » minces, épars çà et là sur cette vaste surface que sillonnent )> les affluents de Godavery et de la Kistnah, et que les érup- » tions trappéennes subséquentes ont si profondément boule- »Yersée, en seraient peut-être les seuls représentants? » Si enfin on considère comme un tout et faisant partie de » la même formation les couches à coquilles marines qui recou- » vrent les assises nummulitiques proprement dites, on voit cet » ensemble de strates tertiaires inférieurs presque partout sur- » monté de dépôts d’eau douce d’origine lacustre, torrentielle » ou aérienne, caractérisés par une, ou peut-être par plusieurs » formes d’animaux vertébrés très remarquables et dont le )) parallélisme, avec ceux de l’ouest de l’Europe, n’est pas non » plus très rigoureusement prouvé, mais que tout porte à regar- » der comme représentant la période tertiaire moyenne. On a » insisté d’ailleurs à plusieurs reprises sur ce qu’aucune discor- » dance appréciable n’avait été reconnue entre les deux forma - )> tions tertiaires d’origine si différente. » Dans la description des espèces qui suit le résumé géolo- gique, les auteurs, après avoir rappelé les Rhizopodes ou Fora- miniféres compris dans le travail précédent et quelques autres genres, décrivent : III. Les fossiles de la classe des Polypes, qui comprennent 17 espèces (pl. XI Y). IY. Ceux de la classe des Échinodermes, qui en compren- nent 3 Ii (pl. XIII-XY). La seconde livraison de l’ouvrage traitera des Mollusques acéphales, gastéropodes et céphalopodes, puis des Crustacés. M. Yiquesnel donne l’extrait suivant d’une lettre qui lui est adressée de Yienne (Autriche) par M. Boué : 1° Une superbe collection d’aérolithes tombés près deMadaras, en Transylvanie, le U septembre 1852, vient d’arriver au Cabinet 382 SÉANCE DU 2 MAI 1853. impérial de Vienne. Ce sont des pierres de structure et de compo- sition compliquées, offrant la forme de noyaux ronds, entourés de pyrites. Partsch publiera la description de cette collection à son retour d’Egypte. 2° Les bonnes houilles de Hongrie, de Cinq-Eglises et du Bannat sont décidément des amas subordonnés aux terrains secondaires moyens, et environ de l’âge du lias ou de l’oolithe inférieure." 3° Les plantes fossiles trouvées à la base du grès carpathique du N. -O. de la Hongrie et de la Silésie ont été déterminées et reconnues comme appartenant à la formation néocomienne. k° J’ai admiré ici les cartes nouvelles et très détaillées qu’on a dressées en Russie pour tout le Caucase et la Sibérie. Elles sont sur une grande échelle. Toute la Sibérie a été levée régulière- ment. 5° L 'Atlas statistique industriel et agricole de la Russie d’Europe est aussi une collection de cartes pleine d’intérêt. D’un coup d’œil on y voit ce qu’il importe aux gouvernements de savoir. Je veux parler de la localisation des races (carte ethnographique détaillée), des productions, des fabrications, de l’écoulement des produits agricoles et manufacturés, des centres de consommation et d’ex- portation. Tout cela est indiqué par des teintes diverses ou des couleurs plus ou moins foncées,. Cette mer d’Aral, comme elle a changé de forme! et cette île, ancien cratère , comme Santorin, au milieu de cette nappe d’eau salée ! — Ce plateau bas, éocène et tertiaire, entre l’Aral et la Caspienne, et au Sud, l’ancienne com- munication entre les deux mers. Tous ces enfoncements salins dans les steppes voisines, restes de l’ancienne étendue de ces mers. 6° Un panorama du Caucase, dont la vue est prise du sud, m’est aussi venue sous les yeux. 7° On a fait à F reiberg, en l’honneur de Léopold de Buch, défunt, une belle cérémonie où figurait avec honneur son portrait ; tout le corps des mines était présent en grand costume, et Cotta a prononcé un discours nécrologique. Il paraît que L. de Buch a laissé quelques manuscrits. 8° Humboldt a parlé de nouveau à l’Académie de Berlin sur la plus grande profondeur des mers et la moyenne hauteur des continents, problème tenté par de La Place, dans le 5e livre de sa Mécanique céleste. Ce dernier était arrivé à 3070 pieds pour la moyenne hauteur continentale. Humboldt, dans son mé- moire de 18Ù3 sur le centre de gravité du volume des terres éle - vées au-dessus du niveau actuel des eaux de la mer, n’arrive qu’à 157 toises pour le maximum de cette moyenne altitude continen- SÉANCE DU 2 MAI 1853. 383 taie. Toute la chaîne des Pyrénées, étendue sur la France, ne F élèverait que de 1 8 toises. Johnston, d’Edimbourg, de son côté, adopte, dans son Atlas physique , pour l’Europe, 671 pieds; pour l’Amérique septen- trionale, 748; pour l’Asie, 1152 ; et pour l’Amérique méridionale, 1151 pieds d’altitude moyenne sur l’Océan. Or, le capitaine Denhani ayant trouvé, vers les mers australes, le 30 octobre 1852, des profondeurs de mer de 43,380 pieds, le fond des mers contiendrait donc des concavités plus considérables que nos bosses terrestres les plus élevées. Tout cela prouve que nous ne nous sommes pas fort éloignés de la vérité (voyez notre mémoire Bull . cle la Soc. géol. , 2e série , t. IX, p. 437 et suivantes). 9° Nos deux voyageurs zoologues, Schmarda. et Frieden, tous deux établis à Gratz, et le premier professeur de zoologie, sont aux Indes, surtout pour la zoologie et pour la botanique ; ils se sont rendus à Bombay par l’Egypte et la mer Rouge. C’est tout parti- culièrement le sud de ITndostan et l’île de Ceylan qu’ils veulent exploiter. Schmarda s’occupe surtout de zoophytes et de mol- lusques, et espère en trouver beaucoup de nouveaux dans ces mers. Ils visiteront probablement aussi le plateau de Neilgherrys , puis Calcutta et peut-être l’archipel Indien, ou Singapore. Ils ont limité pour le moment leur voyage à douze mois. 10° Un autre voyageur autrichien est le zoologue Steuglin, qui est à Chartum, dans le Sennaar, et veut, je crois, aller en Abyssinie ou sur le Nil Blanc. 11° Un troisième, M. Scherzer, aussi un peu géologue, voyage aux Etats-Unis. 12°; Un quatrième est sur les côtes de l’Amérique occidentale et en Californie. 13° Un cinquième, M. Czernotta, est ingénieur des minés et directeur d’une école des mines à Téhéran. Nous attendons le rapport de sa campagne de 1852 . Le colonel Karaczây va le joindre le mois prochain, et est dans l’enthousiasme d’avoir enfin obtenu un emploi en Perse. Il compte y lever des cartes, etc. 14° M. de Bibra, géologue et naturaliste de la Saxe ducale, est en Bolivie et nous a déjà envoyé un mémoire géologique sur la baie d’Algodon, avec des vues et des coupes. C’est imprimé dans le troisième volume des Mémoires de l’Académie. M. Barrande fait la communication suivante, qui est relative SÉANCE DU 2 MAI 1853. 38/i aux publications faites jusqu'à présent par M. Geinifz sur la grauwacke de la Saxe et des contrées voisines. o Messieurs , Vous savez que ie professeur Geinitz, de Dresde, fait d’intéres- santes études géologiques sur la Saxe et les contrées voisines. Vous connaissez ses publications sur le terrain crétacé ( Qaadersandstein ) et sur le terrain permien ( Zechstein ). Je crois qu’il en a fait hom- mage à la Société. Depuis quelques années les terrains paléozoïques ayant généra- lement attiré l’attention des savants , M. Geinitz s’est appliqué à étudier les formations, jusqu’ici très peu connues, qui occupent une partie notable de la surface du royaume de Saxe et des Etats j voisins, et qui ont été désignées par le nom très peu défini et très élastique de grauwacke. Pour dissiper l’ obscurité qui régnait sur j ces formations, et établir un parallèle chronologique entre elles et les autres terrains paléozoïques déjà définis et décrits sur la sur- face de l’Europe , il fallait découvrir et rassembler des fossiles, puis les étudier et les décrire. C’est ce que fait M. le professeur j Geinitz depuis une couple d’années , et ses efforts ont déjà produit ; de très intéressants résultats , que je considère comme le prélude de ceux auxquels il doit arriver un jour. Quand je dis le prélude , c’est parce que je suis convaincu que les contrées saxonnes , et en général toutes les contrées inexplorées , sont plus ou moins riches en fossiles. Mais il faut une longue persistance dans les recherches, pour mettre au jour ces matériaux scientifiques, sans lesquels il me paraît bien difficile aujourd’hui d’assigner à une formation quel- conque sa place naturelle dans la série verticale des terrains. Je ne doute pas qu’il ne soit réservé à M. Geinitz de résoudre toutes les questions géologiques qui se rattachent à la grauwacke saxonne , | car il possède toutes les qualités requises pour accomplir ce but. En attendant, il publie les faits déjà acquis à la science par ses recherches. Une première livraison relative à ses études sur la grauwacke a paru il y a environ dix-huit mois. Elle est consacrée aux Graptolites , dont la Saxe a fourni un assez grand nombre d’espèces, en partie identiques avec celles de la Bohême. A cette occasion M. Geinitz a passé en revue tous les travaux antérieurs sur cette famille pour laquelle il a proposé une nouvelle classification et une nomenclature systématique , de sorte que son travail constitue une monographie des Graptolites. Maintenant, ce savant se dispose à mettre au jour la seconde put'. delà. Soc. (rèolde Tram ce . Àoie de M .Ter gruau sur Jeu ifettacRAa . r : t:--. jecujvïdrm zs, 7erq. tenwa. . Ter ç. Imp. Zemercier, Paris. Mfc de la Soc. GM; "de franc e . Note deM. Terquem -sur les Hettaîigia . V: Série , T; A. Pi. 6 . à 4 Hellan tj. u . z ld-G.y. Deshm/eseo 1 | I'dcherba.uer.[ 8.C/./0. ftettanfùz Luada , lèr^\ fl NM U 16 MAI 1853. Ml de la multiplicité des espèces, tandis cpie le nombre de leurs gen- res a déjà subi une notable diminution relativement à la faune seconde. En même temps, d’autres crustacés, tels que les Ptery- .gatus, Ceratiocaris, etc., dont les fragments incomplets ont été d’abord attribués à la classe des poissons, caractérisent aussi très bien cette époque dans plusieurs contrées, comme la Bohême, l’Angleterre et les Etats-Unis. Viennent ensuite, dans l’ordre d’importance paléontologique, les mollusques céphalopodes, très nombreux, très variés dans leurs formes, et distinguant cette période, si ce n’est par l’existence exclusive , du moins par le développement relatif de certains genres ou groupes, tels que : P hragmoceras , Qomphoceras , Trochocerçis , Ascoceras , etc. Les Gas- téropodes et les Acéphales y sont également très nombreux, comme le prouve la Bohême, où chacune de ces classes me fournit decent cinquante à deux cents espèces et peut-être davantage, apparte- nant à bien des types qu’on n’avait pas supposé remonter si loin dans la série des temps. Les- Brachiopodes, comme vous le savez déjà par diverses communications de MM. de Verneuil et David- son, ont pullulé dans la faune troisième , et parmi eux un assez grand nombre d’espèces se trouvent également semées dans les diverses régions géographiques, comme pour constater l’unité de cette faune, si variée d’ailleurs. Je citerai encore de grandes mas- ses de Graptolites, et en particulier le genre Reti alites comme ca- ractérisant la base de la division silurienne supérieure, ou l'origine de la faune troisième. Enfin, je vous rappellerai qiee la même période fournit une immense quantité de Polypiers , de formes très variées, parmi lesquels le plus caractéristique, Catenipora escharoides , paraît très répandu sur la surface du globe. En somme, la faune troisième estextrêmement riche en formes de toutes les classes, à l’exception des vertébrés , qui y font leur première apparition bien constatée. Cette grande richesse en fos- siles contraste d’une manière remarquable avec l’exiguïté relative de l’aire occupée par la division supérieure dans le monde silu- ; rien. En effet , on peut voir combien sa surface est réduite , en Bohême , d’après le croquis de mon bassin qui a été inséré au Bulletin de la Société, Il en est de même en Angleterre, où les étages de Wenlock et de Ludlow ont une étendue minime, com- parée à celle des étages de Llandeilo et de Caradoc. En France, la faune troisième est très bien caractérisée par nombre de formes qui rappellent celles de Bohème et qui se trouvent à Saint-Sau- veur-le-Vicomte, à Eeuguerolles et dans quelques autres localités très limitées. En Espagne, M. de Verneuil a aussi constaté l’exis- SÊÀKCE DU 16 MAI 1853 412 teuce de cette faune par quelques fossiles semblables à ceux de la Bohême, et j’ai eu l’occasion de faire de semblables observa- tions dans File de Sardaigne. Selon toute vraisemblance, le cal- caire à Orthocères des environs de fiayreuth , en Franconie , représente aussi la faune troisième, qui se retrouvera peut-être dans une partie des schistes à Graptolites de la Thuringe et de la Saxe, lorsque leur étude sera plus avancée. Yersîe nord de l’Eu- rope, vous savez, d’après les beaux travaux de sir Roderick Mur- chison, de Yerneuil et comte Keyserling, que la division supé- rieure se trouve dans les îles de Gothland , OEsei et Dago, et de : plus, aux environs de Riga et dans l’Oural. M. de Yerneuil l’a aussi reconnue en Amérique et il a indiqué ses limites sur la série des étages locaux établis par les savants géologues des Etats-Unis. Ayant récemment étudié le second volume de la Palœontology of New-York , que James Hall vient de publier, et qui renferme la description d’une partie delà faune troisième de cette contrée, j’ai été extrêmement frappé des analogies que présentent ces fossiles avec ceux de mon bassin. Il y a même plusieurs espèces qui sont communes à ces deux régions si éloignées. Lorsque James Hall aura achevé cette importante publication, j’aurai occasion de revenir sur ces rapports, que je me borne à indiquer aujourd’hui. j D’après cet aperçu rapide des principaux caractères qui distin- guent les trois faunes, primordiale, seconde et troisième , et d’après J les indications relatives aux régions occupées par chacune d’elles, il est facile de concevoir que l’étude de la période silurienne est déjà assez avancée pour nous fournir un nouvel et frappant exem- ple de l’harmonie générale qui se manifeste sur toute la surface du globe, lorsque l’on compare les dépôts qui se sont formés à toutes les époques, quelque reculées qu’elles soient. Constater que dans i diverses régions isolées , sur l’ancien et sur le nouveau continent, des crustacés bien caractérisés par certains traits propres à leur organisation ont partout également prédominé parmi les pre- miers représentants de la vie, à l’exclusion de presque toutes les î classes animales , c’est un fait bien digne de votre attention. Nous voyons ensuite les diverses classes de Mollusques manifester leur existence en même temps que les familles des radiaires, dans une seconde faune toute différente de la première, tandis que l’appa- rition des premiers vertébrés paraît réservée pour l’époque sui- vante, ou celle de la faune troisième. Yoilà l’ordre de succession que nous révèle l’étude de la période silurienne si intéressante à tant de titres. Je terminerai ce qui est relatif à mon esquisse géologique par i SÉANCE DU 16 MAI 1853, h 1 3 deux observations qui ont rapport aux questions les plus impor- tantes et les plus générales de notre science. Yous savez que lorsqu’un terrain a été l’objet d’études sérieuses et étendues dans une contrée déterminée, où il est bien développé , il y a une tendance à considérer ce terrain comme type pour toutes les autres contrées. En d’autres termes, si les localités où l’on a d’abord classifié un terrain offrent un cer- tain nombre d’étages locaux suffisamment distincts entre eux par des caractères pétrograpbiques et surtout par des caractères paléontologiques , on est disposé à vouloir retrouver dans tout autre pays les mêmes étages ou leurs équivalents. La Société géologique est souvent le théâtre de discussions intéressantes qui n’ont pas d’autres causes et qui supposent l’admission ta- cite de ce principe : que le même terrain doit se composer par- tout des mêmes éléments, sous une apparence plus ou moins va- riable. L’étucle particulière que je fais de l’époque silurienne et la comparaison assidue de tous les documents jusqu’ici publiés sur cette matière, m’ont conduit à des conclusions qui divergent un peu de ce principe. Il résulte, en effet, de mes recherches : l°Que chaque contrée silurienne présente une série verticale plus ou moins nombreuse d’étages distincts et caractérisés, soit par la na- ture des roches qui les composent, soit par une Faune particulière plus ou moins tranchée. — 2° Si l’on compare deux contrées géo- graphiquement isolées, leurs étages locaux ne se correspondent pas individuellement, et l’on voit que le plus souvent ils diffèrent entre eux, soit parleur nombre, soit parleur nature pétrographi- que, soit par la composition zoologique de leurs faunes, soit par l’ordre de succession de celles-ci. Cependant, on ne peut mécon- naître qu’il existe toujours des rapports très multipliés entre les formes animales qui constituent l’ensemble de ces faunes locales, même aux plus grandes distances géographiques. 3° Si l’on groupe les étages locaux dans chacune des régions siluriennes, suivant l’ensemble des analogies que je viens de si- gnaler, entre les fossiles de toutes les classes qu’ils renferment et en particulier d’après la succession des formes génériques et spé- cifiques de la tribu trilobitique, on retrouve partout trois gran- des masses physiques, semblables une à une et superposées dans le même ordre. Ces masses ou groupes sont caractérisées par au- tant de faunes générales dont l’étendue embrasse le monde silu- rien et qui offrent entre elles une frappante harmonie , sous le double rapport de leur composition zoologique et de l’ordre uniforme de leur succession, partout où l’on a constaté leur pré- hik SÉANCE DU 16 MAI 1853. sence. Vous savez que je désigne ces trois faunes générales par les noms de primordiale , seconde et troisième. Ainsi que je l’ai dit, il v a un moment, les deux premières se partagent inégalement la hauteur verticale de la division inférieure, tandis que je com- prends provisoirement, sous le nom de faune troisième, tous les êtres ensevelis dans la division supérieure. J’ai déjà énoncé ces observations en 18A6, dans ma Notice pré- liminaire (p. 96), en résumant le parallèle entre l’Angleterre et la Bohème. Aujourd’hui, je les répète avec plus d’assurance, et je les recommande avec plus d’insistance à votre attention , parce qu’elles sont appuyées sur beaucoup de documents publiés dans le courant de ces six dernières années. Je suis heureux de trouver la plus complète confirmation de ces vues dans le second volume delà Palœojitology of New- York, que James Hall vient de publier, et qui renferme divers faits très importants relativement au sujet qui nous occupe. La seconde observation que j’ai à vous présenter a rapport à la succession des formes animales sur le globe terrestre. Elle est loin d’être d’accord avec les idées émises par divers hommes illustres dans la science et qui sont enseignées dans des ouvrages élémen- taires très récemment mis en circulation. Suivant ces doctrines, les diverses créations animales caractéri- sant la suite verticale des terrains ont été subitement anéanties par de grands cataclysmes , atteignant à la fois tous les êtres exis- tants, de sorte que chacune de ces révolutions universelles expli- que d’une manière très plausible le renouvellement complet, à diverses reprises, de toutes les formes animales sur le globe. Ce renouvellement est un fait qui ne saurait être contesté, et que je reconnais par la distinction des trois faunes générales , primor- diale, seconde et troisième. Mais, tandisqu’en Bohême je trouve la trace évidente d’une révolution locale qui a éteint d’un seul coup chacune des deux premières faunes, je ne puis au contraire aper- cevoir dans ce pays le moindre vestige des causes qui ont eu pour effet de renouveler plusieurs fois, presque totalement, les êtres con- stituant la faune troisième et qui ont fini par l’anéantir complète- ment, sans l’aide d’aucun bouleversement local. En Suède, en Russie et dans les Etats-Unis, où les dépôts siluriens ont conservé à peu près leur horizontalité native sans intercalation de roches plutoniques , les trois faunes générales se succèdent dans le même ordre qu’en Bohême, et rien n’indique la cause destructive qui a successivement anéanti chacune d’elles. On peut aussi reconnaître dans la hauteur géologique occupée par "l’une quelconque de ces SÉANCE DU 10 MAI 1853. H5 trois faunes générales, que durant le cours de son existence, elle a subi partiellement , à diverses reprises, des modifications qui ont plus ou moins altéré sa composition, par l’ extinction de cer- taines formes et l’introduction d’autres formes nouvelles. Ces modifications partielles des faunes ont motivé, avec juste raison, l’établissement des étages locaux dans tous les pays explorés. Ces faits, répétés sur tant de contrées différentes, font évanouir à mes yeux la nécessité d’un cataclysme général, et même d’une révolu- tion locale, pour expliquer l’extinction et le renouvellement successif des formes animales sur le globe, lime semble beaucoup plus rationnel d’admettre que les phénomènes du développement de la série des êtres, dans la suite des temps, considérés dans leur ensemble, sont soumis à une loi spéciale de la nature et indépen- dante de celle qui régit les révolutions physiques de la surface de notre planète. Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de l’énoncer devant la Société, en voyant disparaître tour à tour toutes les faunes sur l’entière surface du globe, après des périodes d’existence toujours bien définies entre certaines limites, on esjt tenté de croire que la même cause créatrice qui a restreint d’une manière si tran- chée l’existence des individus, n’a aussi départi qu’une quantité déterminée de force vitale à toutes les familles animales , et par conséquent à chacune des créations destinées à occuper successi- vement la surface de notre globe. En faisant abstraction de Y Introduction historique et de Y Esquisse géologique dont je viens de vous indiquer la substance, tout le reste de mon premier volume est consacré aux Trilobites. Vous savez que ces Crustacés ont constitué, pendant la majeure partie des temps siluriens, la classe animale possédant le degré d’or- ganisation le plus élevé. Ainsi , à ce titre seul, la tribu trilo- bitique mériterait toute l’attention des paléontologues. Aux yeux des géologues, les Trilobites ont une importance plus grande encore par leur diffusion sur toute la surface des mers paléozoïques, de sorte que leurs dépouilles, répandues partout, nous fournissent les plus sûrs, les plus constants et parfois les seuls documents pour établir les horizons géologiques à de grandes distances. Pour ap- précier ces documents et en tirer toute l’utilité qu’ils peuvent offrir, je me suis proposé de les étudier, de les classer et d’établir soigneusement les caractères des familles, des genres et des espè- ces, car ces caractères sont toujours en relation très marquée avec les diverses époques qui subdivisent la longue période d’existence de cette tribu. Ces études générales sur l’organisation des Trilo- bites, c’est-à-dire sur tous les éléments saisissables de leur enve- SÉANCE DU 10 MAT 1853. A 16 loppe solide, la seule partie de leur corps qui soit conservée, occupent environ 250 pages de ce volume. Elles embrassent toutes les formes connues dans le monde paléozoïque, et que j’ai provi- soirement classées dans quarante-cinq genres. La méthode que j’ai suivie consiste à considérer successivement chacun des éléments du corps et à comparer les apparences diverses qu’il présente dans ces quarante-cinq types génériques, afin de constater le degré de constance de tous les caractères qui peuvent servir, soit à cir- conscrire les familles et les genres, soit à déterminer les espèces. Le résultat de ce travail est une classification nouvelle, ou du moins un essai que je propose pour classifier les Trilobites, en attendant des travaux plus complets que le mien. Après avoir ainsi exposé tous les faits généraux relatifs aux Tri- lobites, et avoir établi l’ordre à suivre dans les descriptions, je < passe à l’étude particulière des genres et espèces appartenant à la Bohême. — Je donne avec détail tous leurs caractères distinctifs, en indiquant aussi toutes les analogies que j’ai pu reconnaître, soit entre eux, soit avec les Trilobites des autres contrées paléo- zoïques. C’est un travail très long , comme vous pouvez en juger par l’épaisseur de ce volume , dont il occupe 600 pages. Un de nos maîtres en paléontologie, vous disait l’autre jour, en vous offrant sa belle monographie des Nummulites, que malgré toutes les peines prises par lui et par son savant collaborateur pour ana- lyser, décrire et exposer par des dessins tous les caractères dis- tinctifs des cinquante-deux espèces qui composent ce genre , il n’était pas certain qu’à première vue on pût déterminer une nummulite quelconque. Je dirai de même , que malgré tous les détails dans lesquels j’ai dû entrer pour les Trilobites de Bohême, je ne pense pas qu’il n’existe plus de difficulté pour reconnaître au premier coup d’œil les deux cent cinquante-trois espèces de ce pays, ni, à plus forte raison, pour distinguer les formes si nom- breuses et peut-être moins étudiées de toutes les autres contrées paléozoïques. Les personnes qui se sont vouées à l’étude d’une branche quelconque de la paléontologie me comprendront aisé- ment et n’attendront pas de mes recherches des résultats qu’il n’était pas en mon pouvoir de leur donner. Je viens d’indiquer le nombre de deux cent cinquante-trois espèces de Tribolites aujourd’hui recueillies dans le bassin silurien de la Bohême, où l’on en connaissait à peine une douzaine il y a vingt ans. Ce fait doit donner l’espoir assez fondé de voir tut ou tard une richesse semblable se manifester dans la plupart des pays, et notamment en France, où la faune seconde a déjà fourni SÉANCE DU IG MAI 1855. 417 des formes très remarquables , tandis que la faune primordiale reste encore cachée, et que la faune troisième est à peine révélée. Sous peu de temps , nous connaîtrons une nombreuse suite de Trilobites anglais, plus ou moins nouveaux, que M. Salter se dispose à publier. Nous verrons aussi compléter, par M . Àngelin, la légion des Trilobites Scandinaves qui dépassera peut-être le chiffre de deux cents espèces. Je sais également qu’il existe à Saint- Pétersbourg des formes inédites en nombre notable , et dont la des- cription est très désirable sous beaucoup de rapports. Enfin, il faut espérer que James Hall achèvera prochainement de nous trans- mettre les résultats de ses études sur les Trilobites de l’Amérique du Nord. Dès que ces documents divers seront à ma disposition, je me propose de publier, sous le nom de Répertoire des Trilobites , un travail préparé depuis longtemps et prêt à passer sous presse. Ce travail exposera, par ordre alphabétique , tous les noms quel- conques employés par les auteurs pour désigner des Trilobites. Di verses colonnes spéciales feront connaître la dénomination ac- tuelle de chaque espèce, la faune dont elle fait partie et la contrée où elle se trouve. Mais je ne veux pas abuser de la bienveillante attention de la Société en faveur des Trilobites, et je me bornerai, en finissant, à toucher deux sujets de mes études qui, sous un point de vue gé- néral, peuvent vous offrir quelque intérêt, savoir: les métamor- phoses de ces anciens crustacés et leur distribution dans les terrains paléozoïques. Un savant suédois, Dalman, qui s’est beaucoup occupé des Trilobites dans le pays alors le plus riche en ce genre de fossiles, avait déclaré qu’il était impossible de constater si ces crustacés avaient subi des métamorphoses, parce qu’il considérait les pre- miers âges de ces animaux comme trop exigus et trop peu solides, pour laisser une empreinte dans les roches anciennes. Depuis Dal- man , on a découvert dans les contrées Scandinaves un très grand nombre de nouvelles espèces de forme et de taille très diverses. Cependant, à l’heure qu’il est, j’ignore encore si, parmi tous les Trilobites suédois, il y a une seule espèce pour laquelle on ait réellement constaté les métamorphoses. Sous ce rapport, la Bohême a offert des circonstances beaucoup plus favorables, qui m’ont permis de mettre hors de doute le fait de la métamorphose des Trilobites. Ces circonstances consistent principalement dans la iinesse de la pâte des schistes, imprégnée peut-être, avant la soli- dification,de quelque sel conservateur, qui s’est opposé à la décom- position des corpuscules les plus petits. Ces embryons, au premier Soc. §éol.7 2* série ? tome X, 27 SÉANCE DU 16 MAI 185S. âis âge, ont la forme d’un petit disque aplati, dont le diamètre atteint à peine deux tiers de millimètre, et correspond à celui des œufs de la plus petite dimension, que j’ai aussi découverts dans diverses localités de mon bassin. Sur le petit disque embryonnaire, occupé presque complètement par la tête, on distingue très bien la gla- belle qui en est la partie centrale. On aperçoit aussi une trace ru- dimentaire du thorax. Au second âge, ce thorax commence à se développer et à montrer ses articulations, dont le nombre augmente régulièrement d'une unité à chaque nouvel âge ou métamor- phose, pendant que la tête perd successivement de son étendue relative et se transforme par degrés, de manière à être complète- ment changée en atteignant l’âge adulte. Ces modifications s’ob- servent de la manière la plus complète sur l’espèce Sao h irs ata, qui m’a permis de constater vingt degrés successifs de déve- loppement, représentés chacun par divers exemplaires de ma collection, et figurés sur ma planche 7. Suivant les espèces, le nombre des métamorphoses est variable, et il est toujours subor- donné au chiffre des segments thoraciques, puisqu’il apparaît un de ces segments à chaque transformation. Les segments nouveaux sont toujours à l’arrière du thorax, et ils proviennent du pygidium, dont l’articulation antérieure se détache successivement, pour com- pléter les segments libres ou thoraciques. Dès la fin de 1846, j’étais sur la voie de ces observations, qui m’ont coûté beaucoup de temps et de recherches. Tous le concevrez aisément, en pen- sant que pour établir la série des développements d’une espèce, il faut recueillir des centaines et quelquefois des milliers d’indivi- dus bien conservés, afin de pouvoir compter exactement les seg- ments à chacun des âges, jusqu’à l’àge adulte. En 1849, j’ai publié la suite complète des métamorphoses du Sao hirsute. Dans mon premier volume, j’ai pu constater, entre des limites plus ou moins étendues, les métamorphoses de vingt-six espèces de Bo- hème, appartenant à quatorze genres différents. Je cite aussi une espèce d’Angleterre , Ogygia Portlochi , sur laquelle M. Salter a fait de semblables observations, et une espèce d’Amérique, Trier - tUrus Bccki , qui paraît être dans le même cas. En somme, vingt- huit espèces et seize genres qui auraient subi des métamorphoses. Vous voyez, messieurs, que ces chiffres sont encore très petits. Ils représentent à peine un tiers desgenres admis dansma classification, et peut-être moins de la trentième partie du nombre des espèces au- jourd’hui connues. Cependant, la découverte des métamorphoses, outre l’intérêt zoologique qu’elle peut offrir, doit rendre quelques services à la paléontologie, puisqu’elle tend à simplifier et à ré- SÉANCE T)U 16 MAI 1853. hî 9 duire la nomenclature. Vous en jugerez par ce fait, qu’un auteur avait déjà fondé dix genres nouveaux et dix -sept espèces nouvelles, sur une partie seulement des âges du San hirsute, dont je viens de vous parler. L’étude de la distribution verticale et horizontale des Trilobites dans le monde paléozoïque est un sujet d’études très intéressantes, puisque cette classe nous offre les moyens les plus simples et dont l’application est Sa plus étendue, pour classifier les terrains anciens, soit dans leurs grandes divisions, soit dans leurs étages locaux pour chaque contrée. J’ai figuré sur la planche 50 la distribution ver- ticale des Trilobites en bohème. Cette planche, que vous avez soiis les yeux, présente une section du bassin, comme celle qui est des- sinée sur ma petite carte insérée au Bulletin cle, la Société. Les genres sont disposés par groupes d’apparition de 1 à 8 ; chacun d’eux est représenté par une bande laissée en blanc sur le dessin figurant le terrain. L’étendue de cette bande à travers les étages indique la durée de l’existence du genre correspondant. Le nombre absolu de ses espèces, dans chaque étage ou formation, est exprimé par des chiffres et figuré approximativement par l’épaisseur de la bande laissée en blanc. D'autres chiffres, placés entre deux cro- chets, adroite des premiers, indiquent les réapparitions d’espèces déjà existantes dans les formations inférieures. La différence entre ces deux nombres donne le chiffre des espèces exclusivement pro- pres à chaque étage. Tous voyez la faune primordiale complètement isolée, et anéantie d’un seul coup par un déversement de porphyres. Elle n’a de commun avec la faune suivante que le seul genre Agnos- tus , dont l’existence offre une immense lacune ou intermittence dans mon terrain. La faune seconde se distingue par le nombre de ses genres nouveaux, apparaissant à ues époques successives. Ces genres sont généralement peu riches en espèces. Les colonies sont indiquées dans la hauteur occupée par cette faune seconde, et vous savez que les espèces qu’elles renferment, après une courte apparition, dis- paraissent complètement pour ne se montrer de nouveau que dans la faune troisième, c’est-à-dire à la base de la division supé- rieure. Un déversement de trapps a subitement anéanti la faune seconde, dont aucune espèce ne se propage dans la faune troisième, à l’exception de celles des colonies. La faune troisième offre le développement maximum des Tri- lobites, sous le rapport du nombre des espèces, surtout dans les deux étages les plus bas de cette division supérieure (E, F )Eu~ SÉANCE DU 16 MAI 1858. A 2 0 suite on voit décroître rapidement cette famille, qui disparaît pour toujours durant le dépôt de mon étage H. Ces faits sont clairement montrés par la planche 50. J’ai essayé, sur la planche 51, de figurer de même la distribu- tion des Trilobites dans le monde paléozoïque. La section verticale indique, dans des proportions un peu arbitraires, la puissance re- lative des trois systèmes, silurien, dévonien et carbonifère, c’est- à-dire toute la partie de la série géologique dans laquelle les Tri- lobites ont été observés. Le trait noir qui correspond à chacun des quarante- cinq genres montre son extension verticale à travers les systèmes. L’épaisseur de ce trait figure approximativement la richesse spécifique ou le nombre des espèces distinctes dans l’en- semble des contrées décrites. Le nom de chacune de ces contrées est écrit en travers du trait, de sorte qu’on peut reconnaître d’un seul coup d’œil la fréquence géographique. Cette planche montre d’abord que le système silurien a été réel- lement le centre de création et du développement de la tribu des Trilobites, qui paraît déjà dans une décadence prononcée aux temps dévoniens, et qui s’éteint presque tout entière avant les dépôts carbonifères. Dans l’étendue verticale du système silurien, trois faunes triio- bi tiques correspondent aux trois faunes ; primordiale, seconde et troisième. Elles sont nettement caractérisées comme en Bohême. La faune primordiale des Trilobites n’offre jusqu’ici aucun lien spécifique avec la faune seconde. Celle-ci est très remarquable par le développement des genres porté au maximum. Au con- traire, la faune troisième présente, avec beaucoup moins de genres, £ un chiffre bien plus considérable de formes spécifiques. Il existe, notamment en Angleterre, diverses espèces de Trilobites qui sont communesauxdeuxfaunes seconde et troisième. Le chapitre que j’ai consacré à la distribution des Trilobites expose ces faits avec plus I de détails et avec diverses considérations qu’il serait trop long de reproduire ici. En somme, j’ai fait de mon mieux pour recueillir des faits, et pour les exposer avec fidélité, ordre et clarté. Quelque loin que je sois resté de mon but, je recommande mon livre à votre attention et à votre indulgence. I M. Boubée s’étonne d’entendre dire que la première faune ! qui ait paru sur le globe ait été représentée par un nombre si restreint d’animaux. Gette manière de voir lui parait peu phi- SÉANCE DU 10 MAI 1853, 421 losophique. Il serait porté à croire que les faunes qu’on a consi- dérées comme successives ont été au contraire contemporaines, sur des régions diverses. Enfin, i! pense que i’on a pu prendre souvent pour des faunes successives les variations d’espèces qui ont pu avoir lieu dans une même localité, par suite de l’influence d’un changement dans la nature des dépôts, tantôt schisteux, tantôt calcaires. M. Barrande répond : La philosophie que je professe en géologie consiste à bien obser- ver, et à comparer les faits bien constatés sur toutes les parties du globe. Lorsque les observations de tant de savants, indépendants les uns des autres, s’accordent à me montrer partout, immédiate- ment au-dessus des roches métamorphiques ou des roches cristal- lines une seule et même famille, celle des Trilobites, apparaissant presque seule, ou du moins prédominant par la variété de ses genres et de ses espèces, tandis qu’elle est à peine accompagnée par quelques formes rares des mollusques , la constance de ce phénomène, qui se présente sur les deux continents, m'oblige à admettre qu’en réalité la faune primordiale ne se composait que des êtres que je viens de désigner. Ce fait peut paraître bizarre ou inadmissible aux yeux d’une haute philosophie humaine, qui au- rait voulu ouvrir plus largement les sources de la vie, si elle avait été appelée à vivifier les mers primitives, et le petit nombre de créatures par lequel se manifeste d’abord l’action du Créateur peut contrarier les systèmes conçus, h priori , par la méthode d’intui- tion. Mais la science d’observation, à mes yeux la véritable science, celle que nous travaillons tous à enrichir, se soumet hum- blement aux faits, quelque éloignés qu’ils puissent être des plus belles conceptions de l’esprit humain. Je pense donc que, si les faits nouveaux que je viens d’exposer relativement à la faune pri- mordiale se maintiennent et se confirment, comme tout porte à le croire, la science les enregistrera et s’en servira comme d’une base première pour l’histoire de la vie animale sur le globe. Alors la philosophie s’arrangera comme elle pourra. 2° Si M. Boubée a pu croire un instant que les diverses faunes paléozoïques, soit siluriennes, soit dévoniennes, soit peut-être aussi carbonifères, ont été contemporaines au lieu d’être succes- sives, comme l’admettent tous les savants qui ont étudié ces an- ciennes époques, c’est sans doute uniquement par suite d’une distraction momentanée. En effet, lorsqu’il s’agit d’établir la suc- 422 SÉANCE DU 56 MAI 1853. cession des dépôts sédimentaires, la preuve que personne ne con- teste, et qu’invoquent également les stratigraphes et les paléonto- logues, est le fait de la superposition. Or, ce fait est précisément celui sur lequel se fonde la succession des diverses faunes paléo- zoïques, et qui se reproduit uniformément dans un grand nombre de contrées. Ainsi, les trois faunes siluriennes, primordiale, se- conde et troisième, se trouvent en Bohême dans des couches dont la superposition est régulière et évidente, comme je l’ai indiqué dans la section idéale de mon bassin. C’est un fait que chacun peut vérifier, ha succession de ces trois faunes est établie de la même manière en Angleterre, en Suède et aux Etats-Unis d’Amérique. Quant à la succession des trois systèmes silurien, dévonien et car- bonifère, elle est constatée dans diverses régions, parmi lesquelles je me borne à citer la Russie et l’Amérique du Nord, parce que dans l’une et dans l’autre, les trois systèmes présentent un immense développement, tandis que leurs couches conservent encore à peu près leur horizontalité originaire, circonstances qui ne permet- tent pas l’erreur d’observation que suppose M. Boubée. En somme, il me semble que la succession des faunes paléozoïques est aussi bien établie aujourd’hui que celle des étages jurassiques et cré- tacés, que personne parmi nous ne voudrait contester, puisqu’elle est écrite en caractères évidents sur le sol de la France, à la portée de tous les observateurs. 3° Enfin, M. Boubée semble croire que la différence des faunes réputées successives pourrait simplement tenir à la différence des milieux dans lesquels ont vécu les êtres paléozoïques, car cer- taines espèces recherchent les eaux qui déposent du calcaire, tandis que d’autres ne prospèrent que dans les eaux vaseuses, etc. Pour répondre à cette objection, il me suffit de rappeler quel- ques faits déjà constatés, et qui montrent que la composition zoolo- gique de chacune des trois faunes siluriennes, considérées dans leur ensemble, est complètement indépendante de la nature des roches dans lesquelles elles sont ensevelies. Ainsi, la faune pri- mordiale ne se trouve en Bohême et en Angleterre que dans les schistes argileux. En Suède, elle est renfermée dans des schistes alunifères et dans des couches calcaires offrant diverses alter- nances. Aux Etats-Unis d’Amérique, elle n’a été jusqu’ici observée que dans des grès siliceux. Voilà donc une grande variété de roches suivant les contrées, et cependant la faune primordiale se montre partout avec les mêmes caractères que je vous ai signalés en commençant ma communication, et qui sont trop remarquables, sous le rapport zoologique, pour être aisément méconnus. Il en SÉANCE BU 46 MAI 1853. 423 est de même de la faune seconde. E» Bohême comme en France, elle ne se trouve que clans desseliisteset dans des quartzites. h’n Angle- terre, nous la voyons aussi bien dans les calcaires que dans les schistes et les grès, formant les groupes de Llandeilo, Bala et Ca- radoc. En Scandinavie et en Russie, elle se propage à travers des dépôts schisteux et des couches calcaires. Aux Etats-Unis d'Amé- rique, elle traverse de nombreux étages locaux, composés de roches siliceuses, argileuses ou calcaires. Partout on remarque, comme je l’ai déjà plusieurs fois répété aujourd’hui, une modifi- cation plus ou moins grande de cette faune, en passant à travers les divers étages locaux ; mais partout aussi elle conserve les carac- tères généraux par lesquels je l’ai définie, et qui sont hors de la portée des influences locales. Je pourrais vous faire voir de même que la faune troisième se comporte d’une manière analogue, si l’on compare les roches dans lesquelles on la rencontre en diverses contrées ; mais ce serait m’exposer à une répétition inu- tile, (jue je vous épargnerai. Je vous prierai seulement de remar- quer que je suis loin de vouloir établir des faunes générales , par la présence ou l’absence de quelques espèces. De tels caractères pourraient, en elfet, se trouver subordonnés aux influences des dépôts locaux et varier avec eux. Je ne considère au contraire que les caractères zoologiques fournis par la coexistence de certains groupes d’espèces, de certains types génériques, ou par le déve- loppement de certaines classes ou familles, dominant tour à tour dans les créations successives, et à la fois sur diverses contrées du globe. 11 me semble cju’en employant des éléments de ce genre, convenablement discutés et élaborés, les résultats que la science peut obtenir seront à l’abri des petites erreurs de détail. M. d’Archiac fait remarquer que, relativement aux deux points principaux que vient de traiter M. Barrande, à la suite de ses recherches géologiques et paléontologiques sur le terrain de transition de la Bohème, savoir : 1° la manière dont on doit considérer une formation et ses subdivisions dans l’espace 5 et *2° la succession des êtres organisés dans le temps, il est arrivé lui-même à des conclusions semblables. Celles qui se rapportent au premier point ont été exposées au commencement du tome IV de X Histoire des progrès de la géologie (p. 2 et 3), et celles qui se rattachent au second le sont dans l’introduction du tome V du même ouvrage (p. 6-12), actuellement sous presse. M. d’Archiac se félicite de voir confirmer, par un travail aussi SÉANCE DU 16 MAI 1553. remarquable que celui de M. Barra ode , les idées auxquelles il avait été conduit par des considérations qu’on aurait pu regar- der comme trop générales. Cette concordance de résultats, ob- tenue par des données si différentes, quant au temps et à l’es- pace qu’elles embrassent, vient imprimer un caractère frappant de probabilité aux lois qu’on en peut déduire. M. le secrétaire lit la note suivante envoyée par M. Durocher. Observations sur le gisement et V origine des eaux sulfureuses pyrénéennes , par M. J. Durocher. Parmi les eaux thermo-minérales, les sources sulfureuses des Pyrénées tiennent le premier rang par la spécialité de leurs carac- tères : ce sont celles aussi dont il semble le plus difficile d’expli- quer l’ origine, et déjà on a proposé plusieurs hypothèses pour en rendre compte. M. le docteur Fontan me paraît avoir établi une distinction judicieuse entre les eaux sulfureuses accidentelles , comme celles de la Belgique ou de l’Allemagne, et les eaux sul- fureuses naturelles , comme celles des Pyrénées, qui en diffèrent par des caractères importants. Néanmoins un habile chimiste, M. Filhol, regarde cette distinction comme peu fondée, et il pense que les unes et les autres proviennent de la réduction de sulfates par des substances organiques. Récemment, M. Fremy a taché de trouver une explication de l’origine de ces sources en faisant intervenir le sulfure de silicium. Cependant les eaux sulfureuses pyrénéennes constituent une véritable formation géologique , et si l’on compare les caractères de leur gisement à ceux d’autres formations de la même con- trée, on est conduit à une explication très simple, tout à fait en rapport avec les faits, et qui me paraît rendre raison de leurs di- vers caractères, physiques et chimiques. Bans un précédent mémoire sur les Pyrénées (1), j’ai montré que les eaux sulfureuses de cette chaîne se trouvent, presque sans exception, inhérentes à la zone de séparation du granité et des terrains de transition : ce sont donc de véritables gîtes de contact , dans l’acception la plus rigoureuse du mot; ce sont des gîtes comparables, par leur position, aux principaux dépôts métallifères des Pyrénées, que j’ai montré, comme l’avait déjà fait M. Dufré- noy pour les minerais de fer, être également des gîtes clc contact. (t) Annales des mines , 4® série, t. VI, p. 104. SÉANCE DU 16 MAÏ 1853. Ù25 Or rien n’ empêche d’admettre qu’il existe à la séparation des ter- rains granitiques et paléozoïques des dépôts de sulfure alcalin (monosulfure de sodium), de même qu’il y a des dépôts de sul- fures et de sulfarséniures métalliques, de fer, zinc, cobalt, cuivre, plomb, etc. Si nous ne trouvons pas le sulfure alcalin en roche près de la surface du sol, et s’il ne se manifeste à nous qu’en dis- solution dans des eaux venant d’une assez grande profondeur, il n’y a pas à s’en étonner : cela résulte de son excessive instabilité en présence des éléments de l’atmosphère, et, en outre, de sa facile solubilité. La thermalité presque constante et plus ou moins considérable des eaux sulfureuses pyrénéennes s’explique très bien par cette considération, qu’en général le sulfure de sodium ne peut se trou- ver aujourd’hui qu’à des profondeurs où règne une température élevée, car les affleurements, ou parties voisines de la surface, ont dû être dissous ou décomposés par les éléments atmosphériques pendant le cours des siècles qui séparent l’époque actuelle de celle où le sulfure alcalin a été déposé dans l’écorce terrestre. La présence de la silice dans les eaux sulfureuses pyrénéennes est très naturelle, si l’on considère que ces eaux sourdent à travers des roches contenant des silicates alcalino-terreux, comme le feld- spath, auxquels elles doivent enlever de la silice, eu égard à leur haute température, aidée de la pression. Enfin, l’existence de matières organiques dans ces sources n’a rien non plus d’extraordinaire. D’abord nous venons de voir qu’elles suivent la zone de contact de roches paléozoïques dans lesquelles il y a des débris organiques. De plus, les eaux qui descendent de la surface dans les profondeurs renferment des substances organiques, comme toutes les eaux d’infiltration, et elles doivent encore en absorber, lorsqu’elles traversent de nou- veau les couches supérieures du sol, pour revenir à la surface. D’ailleurs la spécialité des corps organiques, ou même organisés, qui sont particuliers aux eaux sulfureuses, comme la barégine, la sulfuraire, etc., résulte naturellement de l’action des principes mi- néraux, essentiels à ces sources, sur les matières organiques qui s’y trouvent. Ainsi, l’ origine dés sources sulfureuses des Pyrénées s’explique très simplement en admettant que, dans la croûte du globe, il existe, à une certaine profondeur et suivant une zone déterminée, des dépôts de sulfure alcalin, de même que d’autres sulfures mé- talliques, de même qu’il y a aussi des gîtes de contact de chlorure de sodium et des sources salées de contact , sources qui, dans les SÉANCE DU 16 MAI 1853. m Pyrénées, sont en relation, non avec le granité, mais avec d’autres roches éruptives, les ophites. .Te rappellerai, en terminant cette note, que j’ai prouvé par des observations géologiques et par des expériences de laboratoire (1), que la plupart des gîtes de sulfures métalliques, comme ceux de cuivre, de plomb, etc. , ont dû prendre naissance par la réaction de chlorures ou autres sels de ces métaux sur des sulfures alcalins ou sur du sulfure d’hydrogène. Il y a donc, à la fois, une analogie de gisement et une certaine connexion entre les deux sortes de formations sulfureuses des Pyrénées , l’une, pétrologicjue , compo- sée de sulfures métalliques proprement dits; l’autre, consistant en sulfure alcalin, et n’ayant encore pu être observée qu’à l’état hydroin gr que . A la suite de cette lecture, M. Ch. S.-C. Deville présente les réflexions suivantes : La note de M. Durocher soulève des questions trop nombreuses et trop importantes pour qu’elles puissent être traitées, pour ainsi dire, accidentellement- Je me bornerai donc à exprimer en quoi je me trouverais d’accord avec lui, et en quoi je différerais, au con- traire, de son opinion, relativement au point qu’il a traité plus spécialement. Je pense, comme M. Durocher, que les eaux minérales sont des gîtes de contact . Ces gîtes sont partout en relation intime avec les grands accidents orographiques. Pour les Pyrénées, en particulier, M. Dufrénoy a montré, depuis longtemps, les rapports remarqua- bles qui existent entre le gisement des ophites et celui des nom- breuses sources salées de cette région. Depuis, dans un travail dont j’ai soumis un extrait à l’Académie des sciences (2), et que j’ai publié plus en détail dans l’introduction de l’ Annuaire des eaux de la France , j’ai établi, par la discussion de toutes les ana- lyses connues des sources pyrénéennes, qu'elles se partageaient en deux types bien distincts. Le premier, dans lequel les sulfates (y compris les sulfures) forment 59 pour 100 de la masse totale des sels dissous, a pour gisement général la chaîne principale des Py- rénées. Le second, qui offre 69 pour 100 de chlorure de sodium, (1) Comptes rendus de V Académie des sciences , t. XXVIII, p. 607, et t. XXXII, p. 823. (2) Comptes rendus , t. XXXIII, p. 3. SÉANCE DU 16 MAI 1853. Z}27 forme, aux deux extrémités de cette chaîne, deux ailes dirigées toutes deux parallèlement aux Alpes principales. Resterait à définir bien exactement ce qu’on entend, en pareil cas, par un gîte. M. Du rocher semble ne donner ici à ce mot que son acception ordinaire, et entendre uniquement par là un dépôt, une fois fait, d’une substance, auquel les agents postérieurs, l’eau, par exemple, viendrait puiser pour l’amener à la surface : ce qui le conduit à admettre l’existence d’amas préexistants de sulfure de sodium, comparables à ceux dont nous pouvons aisément constater la réalité pour le sel gemme. Mais cette hypothèse, qui ne peut s’appuyer sur aucun fait connu, devient superflue, du moment que l’on conçoit que les circonstances qui ont présidé à la production des minéraux dans les gîtes de contact se sont perpétuées avec des variations de nature, d’intensité, de gisement, depuis les époques les plus anciennes jusqu’à la période actuelle. Ce qui re- vient à dire que les manifestations volcaniques de toute nature et les eaux minérales , en un mot, ce que M. Elie de Beaumont a si justement appelé les émanations a la manière du soufre de l’époque actuelle, se relient, par une chaîne non interrompue de phéno- mènes, aux émanations de même ordre, qui, de tout temps et né- cessairement, maintiennent une communication permanente entre l’intérieur du globe et ses portions superficielles. Or, en embrassant l’ensemble des faits qui se groupent ainsi sous le même titre, on reconnaît aisément que, si les produits de ces émanations ont varié avec les époques, ces variations ont porté beaucoup plus sur la nature des éléments basiques ou électro- positifs que sur celle des éléments acides employés dans les mani- festations. Je ne veux pas dire, néanmoins, que ces divers agents aient toujours eu la même importance relative. Peut-être, au con- traire, pourrait on signaler entre eux, au moins d'une manière générale, un certain ordre de succession quant à la prédominance, et pourrait-on, jusqu’à un certain point, caractériser quelques unes des périodes géogéniques par ces mots : Age de fluor, âge de chlore, dge de soufre âge de carbone , aussi bien que par les mots : Age d* étain , dge de plomb , ou par ceux-ci : Age de potasse , âge de soude, âge de chaux . Mais, à notre époque, comme aux précédentes, on reconnaît distinctement les actions concomitantes de l’eau et des acides du caibone , du soufre et du chlore. Maintenant, par quel procédé s’est produit autrefois, se produit encore aujourd’hui l’entraînement des matières métalliques par ces agents déterminants des émanations à la manière du soufre? La question est très complexe : elle peut recevoir et a reçu, en SÉANCE DU 16 MAI 1853. /j2 8 effet , plusieurs solutions , et je suis assez tenté de penser qu’à chaque cas particulier peut correspondre un mode spécial d’entraî- nement. Et, puisqu’il s’agit ici du soufre et des eaux sulfureuses, est-on obligé d’admettre, comme le propose M. Fremy, et comme je l’avais proposé auparavant (1), que la silice y provient de l’al- tération d’un sulfure de silicium? ïi n’y a à cela rien d’impro- bable : c’est le mode par lequel M. Dumas avait cherché à expli- quer la présence de l’acide borique dans les l agoni de la Toscane. .Reconnaissons , cependant , qu’en partant de l’hypothèse la plus simple et qui se réalise, d’ailleurs, sous nos yeux, dans la nature, le dégagement d’hydrogène sulfuré, on peut expliquer tous les faits qui se rattachent aux eaux minérales sulfureuses par l’action de ce gaz et de la vapeur d’eau, à une température inférieure à 100°, sur les roches feidspathiques. Ne pouvant développer ici ce sujet, je me bornerai à renvoyer aux expériences dont j’ai rendu compte à l’Académie des sciences (séance du 16 août 1852). La seule objection sérieuse qu’on ait faite à ce genre de considéra- tions, c’est que la prédominance de la soude sur la potasse n’est pas en rapport, dans les Pyrénées, avec l’abondance, dans les granités voisins, de l’orthose ou d’un feldspath à base de potasse. Mais rien ne prouve cpie les eaux ne se sont pas chargées de sulfure de sodium dans des régions inférieures à l’enveloppe granitique, qui pourrait bien (et je le pense, pour ma part) ne constituer à la sur- face des terrains ignés ou primitifs qu’une écorce très superficielle. Mais, je le répète, ces hypothèses, qui sont toutes possibles, en tant qu’hypothèses chimiques, ne me paraissent avoir qu’un inté- rêt secondaire, tant qu’on n apportera pas à leur appui des faits, ou, au moins, des probabilités d’un ordre géologique. J’ajoute un dernier mot sur la question de savoir, si, dans ces eaux, il y a eu transformation d’un sulfure en sulfate, ou d’un sul- fate en sulfure. Les beaux travaux d’Anglada me paraissent avoir surabondamment démontré que dans les eaux thermales sodiques pyrénéennes, l’élément primitif est le sulfure; mais je suis bien porté à penser, avecM. Ossian Henry , que c’est une opération inverse qui, dans les eaux froides séléniteuses des terrains sédimentaires modernes, a transformé le sulfate de chaux en sulfure de calcium. Enfin, un point sur lequel mon opinion diffère entièrement de celle de mon savant confrère , c’est l’origine des matières azotées, dites organiques, qui accompagnent ordinairement les eaux sulfureuses pyrénéennes. Je n’hésite point à croire que ces (i) Annuaire des eaux de la France , Introduction, p, lxix. SÉANCE DU 16 MAI 1858. 429 substances azotées sont ici, comme les sels ammoniacaux des vol- cans, des produits d’émanations telluriques , tout aussi indépen- dants des matières organiques recelées par quelques couches super- ficielles, que peuvent l’être les combinaisons du soufre, du car- bone ou du chlore. On pourrait citer, à l’appui de cette idée, tout ce qui a été dit souvent pour combattre l’opinion de quelques géo- logues, qui attribuaient aussi à l’influence de matières organiques la présence de l’ammoniaque dans les fumeroles volcaniques. Si les dépôts ( glahinè ou barégine ) qui se forment au point d’émer- gence des sources sulfureuses présentent, d’après les recherches de M. Turpin, et surtout celles de M . Fontan, des traces incontestables d’organisation, elles me paraissent dues à un phénomène postérieur, dans lequel l’oxygène de l’air, charrié peut-être par l’eau elle- même, joue très probablement un rôle important. A l’occasion delà communication de M. Durocher, M. Delesse présente les remarques suivantes : Dans la communication qu’il vient de faire à la Société, M. Durocher admet que le sulfure de sodium existe en roche à une certaine profondeur dans l’intérieur de la terre. Il est conduit à cette hypothèse par des analogies d’après lesquelles il assimile les eaux minérales aux gîtes métallifères. Il en conclut que, dans les Pyrénées, le sodium doit se trouver à l’état de sulfure de sodium , par cela même que les métaux proprement dits s’y trouvent eux- mêmes à l’état de sulfures. Il ne me paraît pas cependant que cette hypothèse soit absolu- ment nécessaire pour expliquer la présence du sulfure de sodium dans les eaux minérales. On sait, en effet, que si les sulfures alcalins peuvent se former par voie sèche , comme cela aurait eu lieu dans l’hypothèse de M. Durocher, ils peuvent aussi se former par voie humide ; il suffit pour cela qu’une dissolution alcaline agisse sur un excès de soufre, et la réaction est d’ailleurs d’autant plus facile que la température est plus élevée ; or, ces conditions se trouvent souvent réunies dans la nature, et le sulfure de sodium d’un grand nombre d’eaux minérales leur doit assurément son origine. H est notamment certaines eaux minérales pour lesquelles on ne saurait mettre en doute que le soufre ne résulte de la réduction de sulfates par des matières organiques. Ces eaux minérales, qui sont sulfureuses ou même alcalines, sont celles qui se trouvent dans des bassins géologiques récents : elles sont froides et elles ne SÉANCE DU 16 MAI 185S. h 30 viennent que d une très petite profondeur dans l’intérieur de la terre ; elles se sont en quelque sorte formées sur place. On peut citer comme exemple, pour les bassins tertiaires, les eaux d’Engliien, de Passy près Paris, et de Neuvelle-iez-la-Charité, dans la Haute- Saône. Si l’on considère maintenant les eaux minérales chaudes telles que celles qui sortent sur les flancs des massifs granitiques et vol- caniques, leur sulfure de sodium s’est encore formé par voie hu- mide. Car ces roches granitiques et volcaniques sont nécessaire- ment pénétrées par des infiltrations, par suite elles perdent une petite quantité de l’alcali de leurs feldspaths ; cette quantité d’al- cali qui se dissout est d’ailleurs d’autant plus grande que la tempé- rature et la pression sont plus élevées. Lorsque le feldspath est décomposé, son alcali peut même être complètement enlevé par une infiltration prolongée, et, quoi qu’il en soit, le simple passage de l’eau à travers les roches feldspathiques suffit pour donner lieu à une dissolution alcaline. D’un autre côté, des gîtes métallifères, riches en sulfures métal- liques, sont le plus souvent en relation avec les roches feldspathi- ques; c’est ce qui a lieu, par exemple, dans les Pyrénées, où des gîtes métallifères se trouvent à la séparation du granité et du terrain de transition : or les sulfures contenus dans ces gîtes se transforment en sulfates, qui sont réduits par les substances organiques que les eaux des Pyrénées, en particulier, renferment en proportion très notable. Le soufre mis en liberté réagit ensuite sur la soude prove- nant des infiltrations et donne lieu à du sulfure de sodium. On conçoit d’ailleurs que la réaction sera d’autant plus facile qu’elle s’opérera à une profondeur plus grande dans l’intérieur de la terre , puisque la température augmente avec la profondeur. Il est même possible que, dans certains cas, les sulfures métalliques soient immédiatement attaqués par la dissolution alcaline et qu’ils donnent du sulfure de sodium. L’infiltration qui s’opère dans les roches granitiques, dans les roches volcaniques, et en général dans les roches feldspathiques, peut donc mettre en présence, à une température élevée, une dissolution alcaline et du soufre ; par conséquent aussi, elle peut donner lieu à du sulfure de sodium. L’hypothèse que je propose explique la formation du sulfure de sodium par la décomposition seule des roches et par des réactions semblables à celles qui, sous nos yeux, produisent des eaux miné- rales à ia surface de la terre : elle diffère de l’hypothèse de M. Durocher en ce qu’elie substitue la voie humide à la voie sèche , 8ÊANCK DU 16 MAI 1853. A81 M. le secrétaire lit la notice suivante envoyée parM. Durocher. Recherches sur V absorption de l'eau atmosphérique par les substances minérales , par M. J. Durocher. La décomposition des minéraux et des roches sous l’influence des éléments de l’atmosphère a déjà été l’objet de nombreuses re- cherches : on sait que l’oxygène, l’acide carbonique et l’eau con- courent simultanément à produire ce phénomène. On regarde l’eau comme agissant principalement par sa tendance à entraîner en dis- solution les principes solubles qui se forment dans l’acte de la dé- composition ; cependant elle produit aussi une hydratation, et quel- quefois son action est indépendante de celle des autres éléments de l’atmosphère, par exemple dans la transformation en gypse qu’ont éprouvée à leur partie superficielle les masses d’anhydrite (chaux anhydrosulfatée). Dans ce travail je prouve que le rôle de l’eau est beaucoup plus général qu’on ne le croit, qu elle se comporte comme agent d’hy- dratation à 1 égard d’un grand nombre de minéraux, indépendam- ment de l’influence des autres éléments de l’atmosphère. Dans un précédent mémoire (1) j’ai montré que beaucoup de minéraux et de roches, dans la composition desquels on n’avait pas encore si- gnalé la présence de l’eau, en contiennent un peu, mais dans des proportions variables et qui généralement sont au-dessous d’un centième, quand les substances n’offrent pas d’altération apparente. 11 importait de rechercher si les minéraux réputés anhydres, et notamment les silicates, peuvent absorber de l’eau de combinaison sans perdre aucun de leurs éléments : c’est ce que j’ai constaté en exposant divers échantillons grossièrement pulvérisés sous des cloches où l’air était maintenu dans un état permanent cl’humi- dité, et où ils ont été laissés pendant quatre années consécutives. La quantité d’eau absorbée a été dans presque tous les cas parfai- tement pondérable ; d’ailleurs, pour m’assurer que ce n’était pas seulement de l’eau liygroscopique, j’ai déterminé, avant et après l’exposition à l’air humide, les quantités d’eau qui sont expulsées par la chaleur de 15 à 100 degrés, et de 100 degrés au rouge sombre (2). (1) Comptas rendus de i Académie des sciences , t. XXV, p. 208 , si Bulletin de la Société géologique^ 2e série, t. IV, p \ 040. (2) En général, les substances que l’on chauffe à 1 00 degrés perdent une quantité d’eau d’autant plus grande, qu’elles en abandonnent da- vantage entre 1 00 degrés et le rouge sombre, sans toutefois qu’il y ait proportionnalité : la perte éprouvée entre 15 et 100 degrés varie or- SÊ.ÀNCK DU 16 MAI 1853. h 32 Le tableau suivant, dans lequel j’ai réuni les résultats de mes expériences, montre que non seulement les minéraux silicates, mais aussi les oxydes métalliques, tels que ceux de fer et de manganèse, absorbent de l’eau atmosphérique et éprouvent ainsi un commen- cement d’hydratation. Ce phénomène doit faciliter la décomposi- tion ultérieure des minéraux multiples, comme les silicates, et il semble en être le prélude ; car on y trouve déjà un ou plusieurs millièmes d’eau, alors même qu’ils n’offrent pas encore de trace sen^ble d’altération ; et au delà d’un centième, le degré d’hydra- tation paraît être en rapport avec l’état d’altération plus ou moins avancé. Toutefois, pour qu’on ne puisse pas se méprendre sur la portée de mes conclusions, je m’empresse d’ajouter que la pré* sence de l’eau dans les minéraux silicatés, ou autres, ne me paraît pas être toujours un effet d’altération ; que souvent elle peut re- monter à leur origine et provenir des circonstances dans lesquelles ces minéraux ont pris naissance. On voit dans le tableau ci-joint que, sur trente échantillons de substances réputées anhydres, qui ont été soumises à l’action de l’air humide, quatre seulement n’ont pas éprouvé de changement sensible ; que tous les autres ont absorbé des quantités d’eau plus ou moins grandes, qui se sont élevées à dans l’eurite de Poullaouen, et à iôwô dans l’oxyde rouge de manganèse artificiel. La moyenne a été de ï-ôVfô? ou environ la dixième partie de l’eau contenue primitivement. Le rapport entre l’eau absorbée et celle préexistante est en géné- ral plus grand pour les substances pauvres en eau ; néanmoins la quantité d’eau absorbée est souvent plus considérable pour les sub- stances qui sont déjà un peu hydratées, parce que leur texture est moins serrée et que l’eau a plus de facilité à pénétrer au centre des particules. Je terminerai cette note en faisant observer combien renferment peu d’eau les minéraux silicatés des roches cristallines de la Scan- dinavie, roches qui, pour la plupart, sont si remarquables par leur résistance à la décomposition. _ dinairement de | à ^ de celle qui a lieu au-dessus de 100 degrés; la moyenne est D’après cela, il semble que l’eau qui est expulsée par la chaleur, à une température de moins de 100 degrés, n’est pas' seulement de l’eau hygroscopique , mais qu’elle comprend en outre une certaine quantité d’eau qui est faiblement combinée. Dans l’essai des substances qui éprouvent, quand elles sont calcinées, une altération autre que la déshydratation, j’ai dosé l’eau, non par la diminution de poids, mais en la recueillant dans un tube à chlorure de calcium taré. SÉANCE DU 16 MAI 1853 NOMS DES MINÉRAUX ET ROCHES. 1 Orthose 2 Idem. . 3 Idem. 4 Idem. 5 Idem. 6 Idem. 7 Idem. 8 Feldspath vi treux (autrefois Ryacolythe). . 9 Albite .... 10 Oligoclase. . 11 Idem. 12 Mica. 13 Idem. 14 Idem. 15 Pétrosilex. 16 Idem. . . . 17 Idem. 18 Idem. 19 Porphyre 20 Eurite. . 21 Amphibole- hornblende. . 22 Idem LEURS CARACTERES PHYSIQUES . Blanc, à très larges lames. Gris bleuâtre , à moyennes lames Idem Blanc, en gros cristaux. , . Idem, sensiblement altéré. Rose, en grys cristaux . . . Gris blanc, à petites lames, légèrement altéré . . . . Blanc, en gros cristaux. . , Rosé, à petites lames. . . . Gris blanc, à larges lames. LEURS PaOVENANCES. Uto (Suède) Bécame , près Combourg (Ille-et-Vilaine). . , . Si Ouen (Ille-et-Vilaine). Huelgoat (Finistère) . , . Idem Vallée de l'Agly (Pyrénées Orientales) Idem Gris noir, à petites lames . Brun, à lames moyennes. . Noir Verdâtre, en gros pris- mes Rosé, fortement translucide Gris clair , translucide. . . Gris verdâtre translucide. faiblement Gris blanc , légèrement al- téré Gris rougeâtre , pétrosili- ceux Quart zo - feldspa’.hique et micacé gris , faiblement translucide 23 Pyroxène - au- gite 24 Fer oxydulé. . 25 Fer oligiste . . 26 Hématite. . . . 27 Pyrolussite. . . 28 Idem 29 Braunite. . . . Noire, à grandes lames. . . D’un vert noirâtre, à gran des lames . . Noir, en cristaux un peu gr. Noir, en gros cristaux . . . Bleuâtre , en gros cristaux. Rouge, fibreuse Noir, en lames moyennes . Noir bleuâtre, fibreuse. . . Noir brunâtre , en masse cristalline 50 Manganèse oxy- dé rouge Artificiel, préparé par cal cinaliou de la Pyrolussite Paramé ( Ille-et-Vilaine). Mont-Dor (Puy-de-Dôme' Les Touches (Loire-Infér.) Skotwang , près Mariefred (Suède) Sjosa, près Nykœping (id.' Paramé (Ille-et-Vilaine) . St-Malo ( Ille-et-Vilaine). Huelgoat (Finistère) . Sala (Suède) ..... Mont Avenlin, près Luchon (Haute-Garonne). Lochgugut , près Lânder neau ( Finistère). . . . Le P.odoir, près La Roche Bernard (Morbihan ). . St-Géréon (Loire-Infer.). . Poullaouen (Finislère). . , Frederikswœrn (.Norvège), Environ de Morlaix (Finis- tère) Environs de Naples (Italie' Skotwang, près Mariefred (Suède) Ile d’Elbe Idem Idem Idem Ilménau (Allemagne; Moyennes. EAU PRÉEXISTANTE. — 'ao 3 çj Quanl rxp séeg p chai' " 6 Qi O (S ^ tités j ui- ar la o . 93 2 c r t=J W H 3 H O H jo : •e o £ ^ i ° O) £ w 'Il r, G) fO. •* bc *3 1 «' - £ a “ W an b i — eu u 3 ■ ~ 2 2 5 ^ p Ls S"2 PS O A dôT mil). 3 Dix mill 25 Dix miil 28 Dix mill 13' 0,46 12 51 65 14 0,22 14 52 66 15 0,23 19 66 85 0 50 219 269 0 » 23 87 110 7- 0,06 30 130 160 12 0,07 4 88 92 6 0.06 10 58 68 3 0,04 2 19 21 4 0,19 0 20 20 3 0,15 10 261 301 2 1 0,07 58 2(>6 504 25 0,07 49 354 403 4 0,01 0 5 5 2 0,40 10 55 65 19 0,30 16 225 241 12 0 05 60 264 524 0 » 24 105 127 0 » 55 170 203 28 0,13 7 28 55 11 0,31 6 70 76 8 0,10 6 50 56 11 0,19 4 9 15 4 0,31 5 11 14 4 0,29 12 58 70 10 0,14 15 77 92 11 0,12 13 72 85 16 0,19 20 61 81 19 0, 25 » >* ! ” 48 » , 17 98 1 1 16 11 » Soc. géol ., 2e série , tome X, 28 SÉANCE DU 16 MAI 1853. A 34 À l’occasion de la communication précédente, M. Delesse annonce qu’il s’occupe également de chercher quelle est l’action de l’eau sur les minéraux et sur les roches, et qu’il soumettra prochainement à la Société le résultat de ses expériences. M. Dalesse ajoute d’ailleurs que la méthode qu’il a suivie et que les conditions dans lesquelles il opère sont différentes de celles de M. Durocher. M. le secrétaire lit la notice suivante : Notice sur Vile Sainte- Hélène , par M. John Harcourt Blofeld (J). M. John Harcourt Blofeld soumet à l’examen de la Société quelques échantillons de roches et de coquilles pétrifiées, avec leur gangue, rapportés de l’île de Sainte-Hélène. Il présente en même temps un modèle en relief de l’île, et donne de ces objets géologiques une description, dont M. Hugard, l’un des secrétaires, a extrait les détails les plus importants. D’abord, quant au relief, c’est le premier de l’île qui ait été fait; peut-être n’est-il pas parfaitement correct quant aux petits détails, mais à coup sûr il représente fidèlement les lignes géné- rales et les ondulations. L’île de Sainte-Hélène a 10 milles 1/2 de long sur 6 3/4 de large ; on peut la considérer comme le point le plus élevé d’une chaîne de montagnes qui traverse l’Atlantique du Sud, et elle est très probablement un volcan tertiaire éteint. Les géologues ne sont pas parvenus jusqu’à présent à fixer avec exactitude sa posi- tion chronologique , d’après cette circonstance que les fossiles quelle fournit lui sont particuliers. Les forces volcaniques qui ont produit les dislocations compliquées’, si remarquables dans cette île, ont dû cesser à une époque très reculée, si l’on en juge par sa conformation actuelle , qui a été évidemment la même pendant de longues périodes. Le principal composant géologique de cette île est une lave de couleur obscure, dont les coulées successives sont marquées d’une manière très distincte sur les flancs des rochers abruptes qui for- ment la côte dans la portion centrale de File : portion en même temps la plus élevée; différentes séries de roches ont, par leur i) Extrait par M. Hugard SÉANCE DU 16 MAI 1853. extrême décomposition, produit nu sol argileux qui, dans les endroits non recouverts par !a végétation, apparaît tout traversé de larges bandes de plusieurs brillantes couleurs. L'auteur énumère ici les hauteurs de différents points de File ; le point le plus élevé, le pic de Diana, a 2697 pieds (anglais). Des tremblements de terre ont agité l’île en 1756, en 1780 et en 1817. On observe chaque année, vers l’époque de Noël, un phéno- mène extraordinaire de flux violent de la mer, dont la cause n’est pas encore connue. Les uns l’attribuent à l’influence lunaire, les autres à des volcans sous-marins, d’autres à des tempêtes loin- taines, d’autres enfin à des changements subits dans la pesanteur de l’atmosphère. Quoi qu'il en soit de ces différentes explications, la cause doit être périodique et non accidentelle, puisque le phé- nomène a lieu régulièrement, chaque année, vers la même époque. Il y aurait un grand intérêt géologique à se rendre compte de ce phénomène au moyen d’observations régulières. L’auteur donne quelques explications sur les fossiles qu’il a ex- posés sous les yeux de la Société, et sur les couches qui les con- tiennent. On remarque 6 coquilles (Bulines); ces coquilles ne se retrouvent plus à l’état vivant dans l’île ; on les rencontre en dif- férentes parties élevées de l’île. Les individus que Fauteur présente à la Société ont été trouvés à environ un demi- mille derrière Long- wood, à une hauteur d’environ 1700 pieds au-dessus du niveau de la mer, sur le flanc d’une montagne creusée de nombreux ravins par les pluies d’orage. La surface de la montagne, jusqu’à une profondeur de 5 ou 6 pieds, est composée d’un limon noir, et, au-dessous de ce limon, est une couche de 3 à à pieds d’épaisseur d’une terre friable d’un brun grisâtre; c’est dans cette dernière couche que les coquilles ont été trouvées, et que l’on trouve en même temps une quantité innombrable d’os et de fragments d’os d’oiseaux. On admet généralement dans File que la couche était composée de terre et de portions excessivement ténues de coquilles à l’état de poussière; mais Fauteur pense que c’est une erreur Presque toutes les coquilles sont complètes, ou à peu près com- plètes, et il n’y a pas les moindres fragments intermédiaires entre ces coquilles et la poussière elle-même à laquelle elles sont asso- ciées; il paraîtrait certain que la couche à coquilles aurait été primitivement (et cela pendant une très longue période) le séjoui d’oiseaux, et que la terre friable, d’un brun grisâtre, dans laquelle on trouve ces coquilles, serait le résultat de débris divers décom- posés, de déjections, d’os, d'œufs, de coquilles d’œufs, de restes de la SÉANCE DU 16 31 AI 1858. nourriture des oiseaux, et très probablement de leurs nids; en mi mot, que la couche, ayant été formée dans un climat où la pluie ne tombe jamais ou très rarement, il en serait résulté un véritable guano, lequel, plus tard, exposé à la pluie, aurait subi une décom- position par laquelle se seraient dissipés les sels volatils qui font le principal mérite de cet engrais. Il a dû s’écouler un temps très long pendant la formation de cette couche, si l’on en juge par son épaisseur, qui est de 5 à 6 pieds. Les coquilles, évidemment, ne sont pas aujourd’hui dans leur position naturelle ; elles ont peut-être été entraînées là par des eaux, ou bien elles ont été apportées, avec l’animal qu’elles conte- naient, par les oiseaux, pour la nourriture de leurs petits. Dans la couche à coquilles , on rencontre de petites masses blanches, paraissant comme de la magnésie; l’auteur suppose que ce sont des œufs pétrifiés. Enfin, l’auteur termine son travail en donnant une liste de roches provenant de l’île , parmi lesquelles nous remarquons plus particulièrement : Un calcaire provenant de fiiln, Sandy Bay ; il est très impur; on l’emploie comme mortier, en le broyant simplement avec de l’eau, sans addition de sable. Il y a en outre plusieurs échantillons de roches volcaniques, provenant de différents points de l’île. M. Hébert fait la communication suivante : Note sur l’âge des sables blancs et des marnes à Physa gigantea de Rilly, en réponse à la communication faite par M. Prest- wich , dans ta séance du 21 février 1853, par M. Hébert. M. Prestwich a adressé, dans la séance du 21 février, une note dans laquelle il attaque l’ordre chronologique que j’ai adopté pour les sables de Rilly , le calcaire lacustre à Phy a gigantea , et les sables marins de Châlons-sur-Vesle. J’attache trop de prix à l’opinion de l’habile géologue anglais pour ne point traiter à fond et dans tous leurs détails les faits qu’il présente comme contraires à ma manière de voir. Sans connaître encore l’origine des sables blancs de Rilly, je les ai réunis au calcaire lacustre à Physa gigantea qui les recouvre toujours, et j’ai fait de ces deux -assises un groupe à part, dont le dépôt, antérieur à Celui de toutes les autres assises tertiaires, s’en SÉANCE DU 16 MAI 1853. 437 distingue encore si nettement par tant d’autres caractères tout à fait spéciaux. La découverte dans les environs de Châlons-sur- Vesle de ravinements, opérés dans ce groupe et comblés plus tard par les sables marins contemporains des sables de Braclieux , fixa l’âge de ces deux dépôts d’une manière incontestable (1). Aujourd’hui, M. Prestwich cherche à prouver, par des observa- tions faites à Montchenot et à Rilly , que le sable marin de Châ- lons-sur-Vesle n’est pas autre chose que la partie inférieure des sables purs de Rilly, et que, par suite, les premiers sédiments ter- tiaires dans le bassin parisien ont été marins au lieu d’être d’eau douce. Enfin , il donne une explication de la différence de nature entre les deux sables. 1 . Examen des coupes de Montchenot et de Rilly. Je suis allé tout récemment visiter les coupes indiquées par M. Prestwich. Le fait le plus saillant est sans contredit la coupe de Montche- not ; j’avais cité sur X ancienne route de Montchenot à Reims les sables de Rilly. J’avais dit qu’ils étaient certainement recouverts par les marnes kPhysa gigantea. M. Prestwich, qui a suivi \di nou- velle route , a rencontré une sablière ouverte depuis l’époque de ma visite, et cette sablière lui a fourni un grand nombre de fossi- les marins. M. Prestwich, n’ayant point reconnu explicitement l’exactitude de mes indications, me paraît avoir pensé que je m’étais trompé et que les sables que j’avais donnés comme iden- tiques avec ceux de Rilly étaient les mêmes que ceux dans lesquels il a trouvé des fossiles marins. La lecture de son mémoire me porta à croire au contraire que nous avions vu deux choses très distinctes , et que le voisinage de nos deux observations pourrait donner par une étude compa- rative quelque résultat intéressant. La coupe de M. Prestwich est très exacte : (!) De nouvelles recherches me permettent aujourd’hui d’être plus affirmatif par rapport à la glauconie inférieure de M. d’Archiac. Cette couche est la base des sables de Br adieux dont elle renferme les fos- siles, et, comme ces sables, elle est postérieure aux marnes à Phys a gigantea. ASS SÉANCE DE 16 MAI 185 H. Fig . ! . constater la succession suivante de bas en haut : Mètres 4° Craie blanche, à Belemnites mucrohatus , ravinée. 2° Conglomérat ferrugineux, composé de cailloux roulés, de fragments de craie, etc., enveloppés dans de l’argile rou- geâtre 0,10 Ce conglomérat pénètre dans les fentes de la craie et y forme des poches de 0m,30 à 0M,40 de diamètre. 3° Sables argileux, ferrugineux, brun-jaunâtres, remplis à la partie inférieure des fossiles de Bracheux presque entière- ment décomposés: ce sable est moins foncé à la partie su- périeure. ... 0,70 4° Sable blanc, à fossiles marins, avec lits d’argile jaunâtre. . . 2,00 5° Grès avec coquilles marines 1,20 6° Sables blancs , légèrement argileux , jaunâtres en haut. . . 5,00 7° Marne blanche ou grise. On retrouve dans la tranchée de l’ancienne route, en C (fig. 1), ces sables (D, fig. 2) à coquilles marines; la partie supérieure de ces sables renferme des lits d’argile ferrugineuse et se trouve à peu près au même niveau que le n° 6 de la coupe précédente ; ils ont une épaisseur d’environ U mètres. Les lits ferrugineux sont recou- verts par des marnes argileuses grises (E, fig. 2) remplies de no- dules calcaires arrondis, généralement de la grosseur d’une noix. Ces argiles prennent une couleur violette et continuent à ren- fermer les mêmes nodules ; elles ont alors une épaisseur de 2 à 3 mètres (F, fig. 2). Enfin, viennent des marnes calcaires jaunes et grises concrétion- nées, ne contenant plus les nodules précédents, mais renfermant de petits scalénoèdres creux de peroxyde de fer hydraté (1). Epais- seur, 3 mètres (G, fig. 2). (1) A ma prière, M. Fouqué, conservateur des collections d’histoire naturelle de l’École normale, chimiste fort habile, a bien voulu ana- SÉANCE Dli 16 MAI 1853, /|39 Ces marnes passent aux lignites que l’on rencontre un peu plus haut, sans interposition d’assises de nature bien différente. La succession des marnes concrétionnées aux sables marins est bien complète ; on ne saurait admettre qu’une couche un peu importante, surtout une assise calcaire, y fût dissimulée; et cepen- dant, tout à côté , en remontant la vieille route, en B, le talus montre les marnes jaunes G à cristaux de peroxyde de fer, un peu plus épaisses (5 mètres), mais d’ailleurs exactement les mêmes, recouvrant non plus des marnes argileuses à nodules F, mais le calcaire à Physa gigantea C ( 2 mètres) en bancs presque solides, bien distinct de tout ce qui entre dans la série précédente. Ce calcaire renferme des Hélix , des Paludines (1) et les divers autres fossiles que l’on trouve à Rilly. Il recouvre un sable (B, fig. 2) aussi pur que celui de Rilly et qui a été autrefois exploité en cet endroit. Si l’on cherche à reproduire les deux coupes que je viens de décrire à côté l’une de l’autre, comme elles le sont en réalité dans la tranchée de la route , on aura la figure suivante dans laquelle ABC sera la coupe de l’ancienne route : lyser une des concrétions qui caractérisent ces marnes ; il y a trouvé : Carbonate de chaux . . 86,2 Carbonate de manganèse 1,3 Carbonate de protoxyde de fer. . 2,4 Silice 2,9 Alumine 1,4 Eau et pertes 5,8 Total. . . 100,0 Au milieu de la roche se trouvent des veines de fer oxydé hydrate dans lesquelles se présentent des petits scalénoèdres creux de peroxyde de fer hydraté , qui résultent de cristaux de carbonate de fer, transformés par épigénie en hydrate de peroxyde. (1) Hélix hemisphœrica , Michaud: Paludina aspersn , Mich, hlx 0 . SÉANCE DE 16 MAI 1853, G. Maraes jauues concrétionuees, à cristaux de peroxyde de fer. F. Marnes argileuses violettes, avec nodules concrétionnes E. Marne argileuse grise, remplie de nodules concrétionnes. D. Sables à coquilles marines, avec lits d’argile, cailloux roulés, etc. C. Marnes calcaires, à Physa gigantea. R. Sable blanc de Rilly. Voilà donc deux séries bien différentes, juxtaposées pour ainsi dire, car elles sont à quelques mètres l’une de l’autre. Dans la première série, il est impossible devoir une lacune ; toutes les cou- ches se suivent, passent de l’une à l’autre. Dans laseconde, entre le calcaire à Physes et les marnes à cristaux de peroxyde de fer, il y a séparation nette et tranchée. Le calcaire à Physes n’est certaine- ment pas au complet; à 300 mètres de là, à l’ouest, à Sermiers, il a une épaisseur plus que double ; la même chose a lieu à l’est à Rilly. Ces deux séries se présentent ainsi toujours identiques avec elles- mêmes dans beaucoup d’autres endroits. Partout où. existe le sable pur de Rilly se trouvent les mêmes calcaires à Physes qui les re- couvrent, et jamais de sables marins en dessous. Dans toutes les exploitations de sables de Rilly, on atteint la craie immédiatement au-dessous , sans rencontrer les sables ma- rins (1), toujours plus ou moins argileux , et partout où les sables (I M. Prestwich rappelle un6 citation de M. Rondot, qui date de SÉANCE DU 16 MAI 1853. khi malins s’observent , jamais de calcaire à Pbyses par dessus. Des différences aussi tranchées à quelques pas de distance, non seulement à Montchenot , mais dans beaucoup d’autres localités sur lesquelles je reviendrai tout à l’heure, ne peuvent s’expliquer que d’une seule manière Le sable de Rilly et le calcaire à Phy- ses forment un groupe plus ancien que les sables marins , les marnes et les autres assises des lignites. Ces deux dépôts avaient occupé une dépression de la craie ; les sables à coquilles marines se sont déposés dans des ravinements creusés dans le groupe anté- rieur et dans la craie. A Chàlons-sur-Vesle, où les marnes calcai- res à Physes ont été presque entièrement enlevées par voie de dénudation (Bulletin, 2e série, t. VI, p. 710 et pl. 5 , fig. 2), la partie supérieure des sables marins s’est étendue sur les marnes dénudées. A Montchenot , où le calcaire à Physes est resté en partie, les sables marins n’ont pas dépassé ce niveau, et le calcaire à Physes n’a été recouvert que par l’assise suivante, c’est-à-dire par les marnes concrétionnées, en sorte que la coupe de Mont- chenot est la suivante : Fig. 3. A, étant la craie blanche à Bel,e limites mucroncitus , B, C, D, E, F, G, ayant la même signification que dans la figure 2. 1 84 2, et d’après laquelle des ouvriers auraient dit avoir trouvé des fossiles au-dessous des sables de Rfily. On me permettra d’attendre que cette observation puisse être contrôlée pour y croire. Si jamais, ce que rien n’annonce jusqu’ici, on trouve des fossiles à la base des sables purs de Rillv, il y a beaucoup à parier qu’ils différeront des fossiles marins observés par M. Prestwich. m SÉANCE DI! 16 mai 1853. Ce diagramme représente également, soit une coupe du S. au N, le long de l’ancienne route, soit une coupe de i’E. à l’O. entre la nouvelle et la vieille route. Si l’on entre dans l’examen détaillé de cette intéressante loca- lité, on verra les faits se grouper en parfaite concordance autour du fait principal que je viens de mettre en évidence. En partant de la sablière étudiée par M. Prestwich, si l’on suit, dans le champ qui sépare les deux routes, le niveau des marnes grises qui recouvrent le sable marin , on voit bientôt la marne grise E cesser, et des sables blancs apparaître. Mais au contact et à la partie supérieure des sables se trouvent une quantité prodi- gieuse de nodules arrondis, semblables à ceux que nous avons cités dans les marnes E de la vieille route. Une partie de ces nodules est composée de couches concentriques déposées autour d’un noyau calcaire; mais l’autre partie, et ce n’est pas la moins nom- breuse, a pour centre une coquille, et ces coquilles sont les suivan- tes : Phys a gi gante a, Paludina asp ers a, Hélix hemisphœrica , etc,, c’est-à-dire les fossiles du calcaire à Physes. Ces concrétions re- présentent le résidu de la destruction des marnes et calcaires mar- neux à Physes; les parties les plus résistantes de ces marnes, qui étaient les coquilles d’abord, quelques noyaux calcaires en second lieu, doucement ballottées dans les eaux calcarifères et vaseuses qui avaient succédé aux eaux chargées de sables marins, ont été suc- cessivement entourées de couches calcaires et ont formé des no- dules tout à fait semblables à ceux que l’on rencontre si abon- damment aujourd’hui dans la Marne. Mais ces nodules ne se sont produits qu’aux dépens de la formation lacustre, et ils n’exis- tent qu’aux points où les marnes, qui recouvrent les sables marins, viennent buter contre cette formation. Dans les marnes et cal- caires à Physes aucun nodule n’existe. Ces nodules sont le résultat d’un phénomène postérieur au dépôt des marnes lacustres ; c’est une preuve de plus que les marnes qui les renferment appartien- nent à une série différente. Ainsi donc, en ce qui concerne Montchenot , loin d’y voir, relativement à l’âge des sables marins, une objection à mes con- clusions précédentes fondées sur l’étude des environs de Châlons- sur-Vesle, j’y trouve une confirmation complète et inattendue, grâce aux observations nouvelles que le travail de M. Prestwich m’a amené à faire. Et je crois pouvoir dire à l’avance qu’il en sera de même toutes les fois que de nouvelles tranchées mettront à jour une partie de ces premiers sédiments de notre bassin ter- tiaire , SÉANCE DU 16 MAI 1853. kk 3 Je passe à l’examen des coupes que cite M. Prestwich sur ie chemin de Montchenot àRilly. Ces coupes se trouvent près de Rilly, entre le village et les Foi- sillons. Cette partie de la route de Montchenot à Rilly a dû être récemment reculée à cause du chemin de fer , et c’est dans les tranchées de cette nouvelle route que M. Prestwich a relevé ses coupes. Elles sont très voisines l’une de l’autre et peuvent se raccorder de façon à n’en donner qu’une seule. En prenant les éléments de cette coupe unique dans celles de M. Prestwich, et en conservant à ces éléments la signification qu’il leur a donnée , on aurait la succession suivante en allant de haut en bas : Métrés. a. Calcaire marneux lacustre blanc et sableux, sans fossiles. . . 4,00 b. Argile grisâtre avec couches minces de sable blanc 1 ,50 c. Sable argileux 0,60 d. Sable blanc, lits d’argile bitumineuse ou grisâtre, lits de cailloux 3,00 e. Sable blanc avec couches ferrugineuses, lits de cailloux roulés, grès ferrugineux, coquilles marines 1,50 En comparant cette coupe avec celle de Montchenot, on remar- que que cette succession de sables et d’argiles ou de marnes est la même dans les deux localités ; c’est qu’en effet c’est le même ter- rain. L’aspect des lieux n’est pas sensiblement changé depuis la vi- site de M. Prestwich. Comme il y a cependant quelques petites différences, je donnerai la coupe que je viens de relever ces jours-ci : Mètres 1° Terre végétale. 2° Lignites, argiles à Cyrena cuneijormis , Cerithium varia - bile, etc. , formant le sommet du talus, épaisseur très variable. ( a . de M. Prestwich.) 3" Marnes calcaires jaunâtres concré- tionnéesde Montchenot, avec graines de Chara . Ces marnes deviennent grises à la partie inférieure. Épaisseur. . . . 5,00 A la base de ces marnes se trouvent des blocs roulés et des nodules de calcaires marneux à Phys a gigantea. [b. id.) 4° Argile d’un gris violacé 3,00 (c-. id.) 5° Sable ferrugineux à surface un peu ondulée. . . . 0,30 (rf. id.) 6° Sable blanc argileux avec lits de lignites et coquilles marines 3,00 S7° Lit de cailloux roulés 0,05 8° Plusieurs lits de sables marins coquilliers, jaunâtres, et de cailloux. 1 ,00 9° Grès ferrugineux avec coquilles marines. ..... 1,00 1 0° Craie blanche. h h h SÉANCE DU 16 MAI 1853. Les cailloux roulés que l’on rencontre sont des silex de la craie. Je suis donc parfaitement d’accord avec M. Prestwich sur la nature et la succession des couches que l’on observe sur la route de Montchenot à Rilly. Seulement M. Prestwich a vu , je ne sais pourquoi, dans les marnes calcaires concrétionnées, le calcaire lacustre de Riîly, plus sableux , il est vrai, et sans fossiles. Rien ne saurait autoriser un pareil rapprochement, et il est d’autant plus facile d’en constater l’inexactitude, que le calcaire lacustre type existe, à Rilly, à 200 ou 300 mètres de la coupe précédente, à Montchenot, en contact avec les mêmes marnes, et que dans ces marnes même se rencontrent des fragments roulés de ces calcaires. Ces fragments faisaient partie des rivages qui environnaient les eaux où s’étaient déposés les sables marins et où se déposaient alors les premières assises argileuses des lignites du Soissonnais. Le principal intérêt des coupes que fournit le chemin de Rilly, c’est de nous montrer, comme à Montchenot, la série marine et les lignites qui la suivent immédiatement dans le voisinage de la série lacustre, toute différente, de Rilly, dont elle est éloignée au plus de quelques centaines de mètres. Comme ce voisinage est le point capital de la question et que c’est là évidemment ce qui a trompé M. Prestwich, il n’est pas inutile de rappeler que ce n’est point un fait isolé. § 2. Des autres localités où le sable cle Rilly se trouve en contact avec le sable marin. J’ai déjà décrit (Bull., T série, t. VI, p. 710 et pi. V ) les envi- rons de ChâlonS'Sur-Vesle, où l’on voit la partie supérieure des sables marins venir recouvrir les marnes lacustres à Physa gi gante a dénudées, au-dessous desquelles se montrent les sables blancs de Rilly, non loin d’une carrière où ce sable est exploité et où il est recouvert par les marnes lacustres non dénudées. À Toussicourt, au nord de Châlons-sur-Vesle, on peut encore étudier dans le voisinage l’un de l’autre, c’est-à-dire à un demi- kilomètre de distance , les sables purs exploités et les marnes lacustres, d’une part, et, de l’autre, les sables marins remplis de fossiles que l’on voit au bas du moulin de Viliars. Enfin, à Hermonville, les deux sables se retrouvent encore l’un auprès de l’autre, et toujours avec leurs caractères distinctifs, qui ne permettent jamais de les confondre. Le géologue qui a visité ces divers gisements reconnaît de suite SÊaKcê du 16 mai 1 8 5 S - AAô que partout le sable marin offre des caractères spéciaux très diffe- rents de ceux que présente le sable de Rilly. La partie inférieure des sables marins est toujours à un niveau inférieur à celui du sable blanc ; la partie supérieure, au contraire, dépasse quelque- fois le sable blanc, de façon à venir recouvrir les marnes à Pliyses, quand, par suite de dénudation, elle n’ont qu’une faible épaisseur. Les sables marins se lient avec les argiles à lignites avec lesquelles ils alternent ; les sables blancs en sont toujours très nettement séparés par les marnes calcaires à Phys a gi gante a. Voilà des faits incontestables qui s’observent dans les localités citées plus haut. À ces faits, il faut ajouter la pureté si remar- quable des sables blancs et la nature des marnes qui les recouvrent, caractères tout à fait invariables à de grandes distances, d’Her- monville à Rilly (25 kilomètres) et à Donnants. (35 kilomètres). Cette constance de caractères est extrêmement frappante à côté des caractères si différents que présente la série marine. Y a-t-il moyen, je le demande, de voir dans ces faits autre chose que la preuve de l’existence de deux séries bien distinctes, l’une comprenant les sables blancs et les marnes à Physes, l’autre les sables marins et les argiles à lignites qui leur ont succédé? L’une de ces séries, la première, est recouverte par une partie de la série marine : elle était donc plus ancienne ; mais celle-ci occupe dans beaucoup de points un niveau notablement moins élevé que l’autre ; on la voit en même temps s’adosser à celle-ci ; elle s’est donc déposée dans un ravinement, dans un vallon dont les flancs étaient formés par la première série, ce qui explique le nombre toujours croissant de localités où l’on peut les observer l’une à côté de l’autre. Remarquons en passant que le vallon dans lequel se sont dépo- sés les sables marins de Cliâlons-sur-Vesle, de Montclienot et de Rilly, avait les plus grands rapports avec la vallée actuelle de la Fesle , dansla même contrée. C’est dans les parties les plus basses de cette vallée que l’ou trouve en effet la plus grande épaisseur de ces sables. A Châlons sur-Vesle, ils ont plus de 30 mètres de puissance (Bulletin, 2e série, t. VI, pl. 5, f. 1). Rilly se trouve aujourd’hui la limite extrême au S. E.; c'est aussi le point le plus méridional où on les ait observés dans le bassin de Paris La grande coupure de la vallée de la Marne a révélé l’existence des sables de Rilly et des marnes lacustres à Romery, à Fleury et jusqu’à Dormans ; mais on n’y a pas encore signalé les sables marins. Bans le nord du bassin, au contraire, les sables marins se ren- contrent avec leurs caractères et leurs fossiles, depuis Laon jusqu’au SÉANCE BU 1 Ô MAI 1853. khtà pays de Bray, et il n’y a pas de traces des marnes lacustres à Physa gigantea , ni du sable pur qui ne se trouve qu’au-dessous de ces marnes. On voit par là combien les allures de ces dépôts sont différentes, et combien ces considérations d’ensemble s’accordent avec l’examen des faits particuliers. Il m’est donc impossible d’admettre entre ces deux dépôts au- cune des ressemblances que signale M. Prestwich. Ce savant les regarde comme renfermant tous deux des fossiles, et les mêmes fossiles ; mais c’est une supposition purement gratuite dont M. Prestwich ne cite aucune preuve. Il attribue à ces deux assises la même épaisseur, et l’on sait que les sables blancs purs n’ont jamais plus de 7 à 8 mètres, tandis que les sables marins dépassent 30 mètres et peut-être 50 mètres; car les sables de Châlons-sur- Yesle ne montrent pas la partie inférieure de ces dépôts, celle qui est en contact avec la craie et que l’on voit à Brimont et à Monchenot, etc., complètement identique par ses fossiles avec nos sables de Bracheux. On peut donc affirmer que les sables marins atteignent la craie à plus de 25 mètres au-dessous du niveau des sables purs. § 3. Examen de V hypothèse de M. Prestwich. Un fait général qui s’observe dans toutes les localités citées précédemment, c’est que toujours sous les marnes lacustres à Physa gigantea le sable a cette pureté extraordinaire à laquelle il doit d’être tant recherché pour la fabrication des glaces, et que, réciproquement, lorsque le sable n’est pas pur et qu’il contient ou des fossiles ou des lits argileux, ou des cailloux, etc. , les marnes à Physes manquent invariablement. Cependant M. Prestwich a cru reconnaître dans une de ses coupes du chemin de Montche- not à Rilly le représentant des marnes à Physes dans une assise de marne calcaire sans fossiles, superposée à des lits d’argile et de sable, de grès marins et de cailloux roulés. Mais j’ai démontré plus haut que cette assise est bien différente des marnes calcaires à Physes, puisque des blocs roulés de calcaire à Physa gigantea se trouvent à la base de cette couche à laquelle ils assignent par con- séquent une date plus récente. Ces marnes calcaires sans fossiles, comprises entre les sables marins et les lignites, sont bien le commencement d’une formation lacustre, les marnes à Chara , mais d’une formation qui n’a rien de commun avec celle qui nous occupe. L’abondance des graines et des tiges de Chara que l’on rencontre constamment dans ces marnes permet de les recon- SÉANCE DU 16 MAI 1853. l\Ü7 naître avec ia plus grande facilité ! Elles sont aussi riches en fos- siles, mais elles n’ont pas une espèce commune avec les marnes à Phys a gi gante a. On y a cité, indépendamment du Chara hcüctcres , Ad. Br., 8 espèces de mollusques tous d’eau douce, savoir : 1 Cyclas ; 1 Physa [P. columnaris , Desh . ) ; 3 P/anorbis ; 2 Paladina ; 1 Melanopsis (espèce très commune dans toute la série des sables inférieurs et des lignites). Dans les marnes de Rilly dont M. de Boissy a figuré 39 espèces (I), ce sont les mollusques terrestres qui dominent; on y compte, en effet, 11 espèces d’eau douce et 28 es- pèces terrestres, dont plusieurs représentées par de très nombreux individus. A ces marnes appartient encore la belle flore de Sézanne dont aucune espèce ne se rencontre dans les lignites. Les formes spécifiques et les formes génériques établissent donc entre les êtres organisés de l’époque des marnes à Physa gigantea et celle des lignites une différence considérable qui ne permettrait dans aucun cas de se laisser aller à quelque rapprochement entre ces deux assises. Cela posé, examinons l’hypothèse que M. Prestwich a cru devoir faire pour expliquer la connexion si constante des marnes calcaires à Physa gigantea et du sable blanc. 11 admet que ces marnes ne rete- naient pas les eaux qui les déposaient , et que ces eaux s’infiltraient à travers les sables sous-jacents, les lavaient, dissolvant le test des coquilles, enlevant les parties argileuses et ferrugineuses, et ne laissant que le sable pur. Pour se faire une idée de la possibilité de cette explication , il faut se rappeler que l’on a bien affaire à de véritables marnes, marnes renfermant çà et là des rognons de calcaires marneux (2), comme l’explique très bien M. Prestwich lui-même. Ces marnes, loin d’être perméables à l’eau, l’arrêtent complètement, lorsqu’elles sont garanties de la dessiccation par leur épaisseur ou d’autres assises qui les recouvrent. Dans ce cas, la preuve de l’imperméabilité est précisément la pureté du sable qui est dessous. Au contraire, lorsque les marnes sont moins épaisses, et surtout qu’elles ne sont point recouvertes, la dessiccation les a rendues perméables, et alors les eaux qui les ont traversées ont porté des impuretés dans le sable, loin de le laver. On suit la trace de ces impuretés, depuis le point de départ, qui est la base des marnes, (1) Mém . de la Soc . géol. de Fiance , 2e sér. , vol. 111, pl. 5 et 6. (2) L’analyse du calcaire à Physa gigantea n’a pas encore été pu- bliée ; c’est par erreur que M. d’Archiac l’indique comme ayant été donnée dans les Annales des mines , vol, X. Les rognons calcaires SÉANCE DU 46 MAI 1853. MB jusqu’à une distance plus ou moins grande dans le sable. C’est le cas de fiomery où les marnes ne sont point recouvertes. Si l’on examine la surface de contact des marnes et des sables blancs, on remarquera que c’est toujours dans cette région que se rencontre l’accumulation la plus considérable de la matière ferrugineuse, accumulation telle, en certains points, qu’elle a converti en grès ferrugineux les couches supérieures du sable blanc. L’origine de cette substance se lit clairement au premier coup d’oeil : ce sont les eaux, qui ont traversé les marnes, qui les ont apportées. Quant aux eaux, dans lesquelles ces marnes se sont déposées, si elles avaient pu pénétrer dans le sable, elles y auraient introduit les mêmes impuretés. Les marnes sont colorées, souvent en jaune foncé; elles doivent cette coloration au fer, les eaux-mères de- vaient en être également chargées ; elles se seraient clarifiées en filtrant à travers le sable, et ne l’auraient pas lavé. Ainsi donc, ni postérieurement au dépôt des marnes, ni à l’époque même du dépôt, les eaux qui les ont traversées n’ont pu laver le sable qui était dessous, et lui donner cette pureté qu’il possède aujourd’hui. Ces eaux, dit M. Prestwich, étaient de nature à dissoudre le test des coquilles des couches inférieures. Pourquoi donc, répondrai-je, ne dissolvaient-elles pas le test des coquilles de la couche qu’elles traversaient ou qui était en voie de formation ? Loin de là, il n’est pas dans toute la série tertiaire une assise où le test des fossiles ait été moins attaqué. Il n’est sorte de difficultés qu’on ne rencontre , quand on veut dont il est question dans cette note ont été analysés, dans le laboratoire de l’École normale, par M. Fouqué, qui a obtenu les résultats suivants : Après calcination , Chaux. . ....... / Silice Argile . . 17,1 . . < Alumine Traces de magnésie. . 100,0 \ Sesqui-oxyde de fer. . . . 0.5 En calculant d’après cette analyse la composition du calcaire, abstrac- tion faite de l’eau contenue dans l’argile, on trouve : Carbonate de chaux. . . . 89,6 f Silice 7,0 Argile anhydve 10,4 . . . j Alumine 5,1 Tiares de magnésie. ... » \ Sesqui-oxyde de 1er.. . . 0,3 10ü,0 La composition de ces rognons calcaires indique qu'ils sont propres à la fabrication de la chaux hydraulique; et, en effet, depuis peu on les emploie à cet usage. SÉANCE DU 16 MAI 1853. hh 9 approfondir cette théorie du lavage invoquée par M. Prestwich, de ce lavage qui opère d’une façon si extraordinaire, qu’à Montche- not, à Chenay, à Toussicourt, les marnes lavées et les marnes non lavées se trouvent côte à côte , se touchent, sans que par le contact elles perdent leurs caractères si tranchés, si distincts. Cette observation se reproduit, sans la moindre modification, à des distances de 20, 30 et à0 kilomètres. Quand on suit séparément les sables non lavés, c’est-à-dire les sables marins, et les sables lavés, c’est-à-dire ceux de llilly, chacune des deux séries reste identique avec elle-même dans tous les points où elle vient affleurer au jour, et, quelque rapproché que soit leur voisinage, il n’y a jamais de passage de l’une à l’autre. Que ce soit un lac unique ou plusieurs étangs voisins, comme ils sont certainement contemporains, cela ne change rien à la question géologique : mais je montrerai qu’il y a beaucoup pins de probabilité pour que ce soit un lac unique. Enfin, M. Prestwich s’attache à prouver que les sables blancs constituent une formation indépendante du dépôt lacustr e à Physa gig&ntea. Je n’ai jusqu’à présent émis aucune opinion sur l’origine de ces sables, et n’en veux pas émettre, tant que je n’aurai pas de bonnes raisons à donner. Je ne nie pas la grande différence qui existe entre ces deux dépôts ; ils constituent évidemment deux as- sises bien distinctes, sans passage de l’une à l’autre; mais ils sont constamment superposés ; jamais, dans le bassin de Paris, on n’a rencontré de sable blanc sans les marnes à Physes. Ils se sont for- més dans la même dépression, dans une dépression qui n’appartient qu’à eux. C’est là ce qu’on est obligé d’admettre dans l’état actuel de nos connaissances. Si l’on me demandait, à défaut d’une opinion positive, une hy- pothèse de nature à expliquer ce dépôt si singulier, je dirais que la silice de la craie et du calcaire pisolitique me paraît tout aussi difficile à bien comprendre, dans tous les accidents si remarquables qu’elle présente. Mais ce qu’il y a de certain, c’est qu’il arrivait de la silice dans la mer crayeuse , qu’il en arrivait dans celle de la craie supérieure, dont notre calcaire pisolitique est un produit. Pourquoi, lors de l’émersion de ce dernier et des dépressions que cette émersion a laissées à la surface du sol émergé, les eaux qui sont restées dans ces dépressions, ou qui s’y sont réunies d’une façon quelconque, ne se seraient-elles point trouvées chargées de silice, résidu peut-être de la silice crayeuse , dont le dépôt aurait affecté la forme que nous voyons dans le sable de Rilly? Ce sable n’est pas cristallisé : soit, mais nous ignorons sous quelles conditions il s’est déposé; ces conditions pouvaient s’opposer à l’état cristallin. Soc. géol,y 2e série, tome X. 29 SÉANCE DU 16 MAI 1858. 450 Là est l’énigme ; mais ce que l’examen de ce sable ne permet pas de nier, c’est : 1° que la mer n’a jamais eu accès dans la dépres- sion où il s’est déposé ; elle y aurait laissé des traces de sa présence, et dans ce sable si recherché, exploité depuis si longtemps, aucune trace de cette nature n’a été constatée; 2° qu’aucun affluent n’y apportait ses eaux ; de la vase résultant du lavage de la craie, des silex, se seraient mêlés au sable, et rien de tout cela n’existe. Combien de temps cet état de choses a-t-il subsisté ? Rien ne nous l’indique non plus. Peut-être cet isolement n’a-t-il eu qu’une durée très limitée ? Plus cette période serait longue , plus il serait difficile de la comprendre. Pendant le dépôt des sables il n’y avait aucun être vivant dans ces eaux. Bientôt des affluents apportant de la vase forment , à la partie supérieure des sables , un sol habitable aux mol- lusques d’eau douce. Ces affluents ont, en outre, entraîné dans le lac de nombreux mollusques terrestres ; et les coquilles de tous ces animaux, plus abondants dans les points où les eaux étaient plus chargées de calcaire, ont été cimentées ensemble par la vase qui se déposait dans le, lac; de là ces marnes calcaires à Physes, produit d’une époque qui, eu égard à leur épaisseur et à l’énorme quantité de mollusques dont ces marnes renferment les débris, a pu être d’une durée très longue. Jusqu’ici, c’était à Rilly que ces marnes se montraient avec leur plus grande épaisseur. M. Prestwich l’évalue à U ou 5 mètres ; elle y est à la vérité un peu plus grande, mais auprès de Dormans, que j’ai déjà cité dans le cours de cette note, elle dépasse 15 mètres. Je vais donner la coupe de cette localité intéressante par sa position et par l’importance qu’y acquiert le dépôt dont nous nous occupons. ^ à. Description cl' an nouveau gisement des marnes à Physa gigantea et des sables de Rilly , auprès de Dormans (Aisne). Le chemin de fer de Strasbourg coupe auprès de la station de Dormans, au 117e kilomètre, les sables blancs et les marnes à Physa gigantea de Rilly. Le sable blanc, à partir du niveau du chemin de fer, peut avoir une épaisseur de 5 mètres. Parfaitement pur dans sa masse, il présente à la partie supérieure des nodules ferrugineux dont on suit les traces jusqu’au contact des marnes, qui offrent à leur base un lit fortement chargé de protoxyde de fer, et présentent elles-mêmes, SÉANCE DU 16 MAI 1853. 451 jusqu'à une faible hauteur, une coloration bleuâtre due à la même cause. Ces marnes renferment des lits irréguliers de calcaires concré- tionnés durs et grisâtres, et ont dans le talus du chemin de fer une épaisseur de 5 à 6 mètres. On y rencontre les fossiles de Rilly, et surtout la Paludina aspersa , qui y est très abondante. Je n’y ai point aperçu de coquilles terrestres. On les retrouve exploitées pour la fabrication de la chaux hy- draulique, au village de Tryi sur les bords de la grande route. Voici la coupe de cette exploitation de haut en has. Mètres. 4° Terre végétale remplie des fossiles des lignites (Cerithiurn variabile , Cyrcna curiëiformisy Melcinia inquinata , etc.). 2° Argiles avec les fossiles précédents. 3" Marne calcaire jaunâtre remplie de Melahopsik buccinoidea, 0,30 4° Lit ondulé de lignite noir, extrêmement mince. 5° Marne calcaire jaunâtre remplie de graines de Cliara. . . . 0,30 6° Lignite terreux 0,4 0 7° Argile brune avec fossiles des lignites 0,30 8° Lit de lignite terreux mêlé de parties argileuses de diverses couleurs, recouvert par un lit de marne grise 0,30 9° Lit d’argile jaune et brune provenant du remaniement de l’assise qui est au-dessous. 0,25 4 0° Marne lacustre de Rilly, gris jaunâtre, colorée par des infiltrations ferrugineuses venant de haut en bas. Les lits du dessus sont durcis; leur surface supérieure est ondulée, inégale ; on y remarque des concrétions ferrugineuses. Épaisseur de cette marne impure 6 à 7,00 4 4° Marnes lacustres semblables à celle du chemin de fer, d’un gris clair, presque blanches (comme à Sermiers, à Chenay, etc.), exploitées pour chaux hydraulique 9,00 Dans cette coupe, les neuf couches supérieures appartiennent à la série des lignites, les deux inférieures au calcaire à Physa gi gante a ; la surface de séparation est très nettement tranchée. Le sol de cette carrière étant plus élevé que le chemin de fer, le sable blanc n’y est point visible. Voici donc une localité située à 20 kilomètres de Ronlery, à 35 kilom. de Rilly, s’éloignant encore plus à l’ouest que toutes les localités connues jusqu’ici, se rapprochant par conséquent de la partie centrale du bassin parisien, et où ce dépôt lacustre de Rilly se retrouve avec une puissance incomparablement plus grande que partout ailleurs. Aucune assise lacustre homogène n’atteint cette épaisseur dans notre bassin. Je ferai remarquer que TV y n’est SÉANCE DU 16 MAI 1853» h 52 qu’à 39 kilomètres de Sézanne et à 35 kilomètres d’Hermonville, c’est-à-dire à peu près à égale distance des deux points les plus éloignés où ce dépôt lacustre ait été signalé jusqu’à ce jour. Je rappellerai de plus que les fossiles terrestres, aussi abondants que les fossiles d’eau douce à Sézanne, où d’ailleurs les mollusques sont assez rares, très abondants à Rilly, diminuent considérable- ment de nombre à Romery pour disparaître presque complètement à Dormans, en môme temps que l’épaisseur du dépôt lacustre aug- mente, tout en conservant une régularité parfaite dans la disposi- tion de ses assises. Ces diverses observations portent naturellement à conclure que les bords du lac étaient voisins de Sézanne et de Rilly où des cours d’eau arrivaient de l’est, et que le lac s’éten- dait au nord vers Cormicy,à l’ouest vers Dormans, où sa profon- deur s’augmentait considérablement ; que par suite il devait dé- passer Dormans à l’ouest peut-être autant qu’à l’est , ce qui donnerait à cet amas d’eau douce, dont j’ai déjà évalué la longueur I à 75 kilomètres au moins, une largeur de 6à kilomètres. Je me bornerai à adopter le chiffre de à5 à 50 kilomètres, comme la donnée la plus probable qui résulte de l’état actuel de nos connaissances sur cette question. On voit donc que j’étais loin d’avoir exagéré l’importance du dépôt lacustre de Rilly et des sables blancs qui l’accompagnent. La présence de ces sables à Dormans sur le bord de la Marne et au niveau du chemin de fer peut avoir un très grand intérêt pour la fabrication des glaces et des cristaux ; elle ajoute à notre bassin parisien, déjà si riche en matières premières utiles à l’industrie et aux arts, une nouvelle richesse. Rilly et les autres localités d’où ce sable se tire aujourd’hui ne sont que des gisements de peu d’im- portance, d’une exploitation limitée. Ce sont cependant ces gise- ments qui fournissent , malgré la distance et les difficultés du transport, aux manufactures de glaces les plus considérables, Saint- Gobain, Baccarat, etc., la silice dont elles ont besoin pour leurs produits les plus purs. C’est qu’en effet je ne connais dans aucune autre assise, dans aucune autre contrée, un amas de silice qui, j par la pureté , puisse être comparé au sable de Rilly. Or, les environs de Dormans pourraient fournir des masses considérables 1 de ce sable sans aucune difficulté d’exploitation et dans les meilleures conditions possibles pour les transports. Cet avantage j serait surtout pour Paris. Le sable le plus pur que l’on y emploie dans les cristalleries, celui par exemple qui est mis en usage au- jourd’hui dans la fabrication des objectifs de lunettes astronomi- ques et que l’on extrait des environsde Nemours, reçoit du fer qu’il SÉANCE DU 1(5 MAI 1853. Z| 5 o renferme une teinte jaune contrastant avec la blancheur du sable de Dormans et de Riliy. Il n’est pas douteux que des recherches convenablement diri- gées ne missent au jour des quantités de sable pur plus que suffi- santes pour tous les besoins de l’industrie du verre dont les produits seraient ainsi notablement améliorés. Ces études, que je ne puis faire en ce moment, doivent être sub- ordonnées à la recherche des marnes à P/iysa gigantea , dont la présence est la garantie indispensable de la pureté du sable qu’elles recouvrent. En raison de la mobilité de ce sable qui formait le fond du lac où elles se sont déposées, ces marnes ont constitué une assise parfaitement horizontale , qui , depuis son dépôt, par suite des mouvements qu’a subis le sol, s’est inclinée de l’E. à l’O., ou du N. -E. au S.-E., de telle façon que, se trouvant à 150 ou 160 mètres environ au-dessus du niveau de la mer à Riliy, Mon- chenot, Chenay, Prouilly, etc., elle se trouve, à Dormans, à une altitude moindre que 80 mètres, ce qui ferait une inclinaison, à l’ouest, de 2 mètres par kilomètre. Il résulte de là qu’à Château- Thierry, qui est à 18 kilomètres, en ligne droite, de Dormans, ce dépôt aurait une altitude moindre que l\h mètres, c’est-à-dire qu’il serait au-dessous du niveau de la Marne. Il n’est pas nécessaire d’insister davantage sur ce point ; je puis bien, en raison du voi- sinage, être convaincu de l’existence des sables de Riliy, de Dor- mans à Château-Thierry • ‘pour aller plus loin, il faudrait avoir plus de données que nous n’en possédons sur les assises qui recou- vrent la craie entre Château-Thierry et Paris. Conclusion . Des faits que j’ai passés en revue dans cette note, on tire néces- sairement, ainsi que je l’avais établi il y a plusieurs années, les conclusions suivantes : 1° Dans une portion considérable du bassin de Paris, la craie blanche est immédiatement recouverte d’une assise de silice en grains, d’une extrême pureté et d’une épaisseur variant de U à 7 mètres, dans laquelle aucun débris organique, aucun caillou roulé, etc., n’a jamais été rencontré. 2° La couche de marne qui recouvre cette silice n’a aucun rapport avec la série des lignites. 3° Ces deux assises occupent, à la surface de la craie, un empla- cement qui diffère complètement de ceux qu’ont ensuite succès- 454 SÉANCE DU 16 MAI 1853. sivement occupé les sables marins de Bracheux et de Châlons-sur- Yesle, et les lignites. U° Le lac où s’étaient déposées les marnes à Physa gigantca a été, dans une partie de son étendue, envahi et transformé en golfe par la mer qui arrivait du nord, et qui, par de profonds sillons, a entamé les marnes à Physes, les sables blancs, et même la craie, et a déposé dans ces sillons les sables fossilifères, dont la base cor- respond à la glauconie inférieure de M. d’Archiac. 5° A la fin du dépôt de ces sables marins inférieurs, des eaux douces ont peu à peu afflué dans le golfe, de façon à le transformer en une vaste lagune où ont vécu d’innombrables mollusques d’eau saumâtre et d’eau douce , et pas une de ces espèces ne se trouve dans les marnes lacustres à Physa gigantea si riches aussi en fossiles. On remarquera ce saut brusque entre deux formations d’eau douce, tandis que. entre les sables marins et les lignites qui les recouvrent, il y a tous les passages possibles, aussi bien par les fossiles que par la nature des sédiments. M. Viquesnel fait la communication suivante : Résumé des observations géographiques et géologiques faites , en 1847, dans la Turquie d’Europe , par M. A. Viquesnel. J’ai eu l’honneur d’offrir à la Société, dans sa séance du k avril dernier, une notice extraite du Bulletin de la Société de géogra- phie (1), et dans laquelle j’expose : 1° l’historique des matériaux qui m’ont aidé à construire la carte de mon dernier voyage en Turquie; 2° l’indication sommaire des principales rectifications que j’apporte aux cartes précédemment publiées; 3° la description et la représentation graphique des montagnes du Riio-Dagh et celles du bassin hydrographique de Lissa dont les eaux s’engouf- frent dans un Katavothron , traversent par des canaux souterrains la chaîne du Boz-Dagh et reparaissent au jour dans la plaine de Dr ama. La description géographique de ces deux petites contrées si nettement limitées a été ajoutée pour donner une idée de mes rectifications. Je vous demande la permission d’extraire de cette notice quel- ques passages qui me serviront d’introduction. « Avant d’aborder le sujet de cette communication, je crois dé- fi ) Voyez le cahier du mois de décembre 1 832. SÉANCE DU 16 MAI 1853. Zt55 » voir rappeler mes travaux antérieurs sur la Turquie d’Europe. » J’ai accompagné M. Boué en 1836 et 1838 dans ses voyages en » Roumélie, et, à mon retour, j'ai publié deux Mémoires qui ont » paru dans le recueil des Mémoires de la Société géologique de » France (1). Les deux cartes qui accompagnent ces publications » ont été dressées par le colonel Lapie, d’après les renseignements » que j’ai recueillis pendant le cours de mes explorations et d’après » ceux que j’ai trouvés dans les ouvrages de MM. Boué, Leake et » Grisebach. Elles représentent une partie de la Servie et de la » Bosnie, le Monténégro, la haute Albanie, l’Epire, la Thessalieet » la Macédoine. » Le désir de continuer mes recherches géographiques et géo- » logiques sur la Turquie d’Europe me détermina à demander à » M. le ministre de l’instruction publique une mission qui me fut » accordée. J’ai quitté Constantinople le 20 mai 18A7, et je n’y » suis rentré que le 2 janvier 18à8. J’ai donc consacré sept mois » et demi à parcourir: 1° la chaîne côtière de la mer JNoire jusqu’à » Aktobol ; 2° le plateau situé entre cette dernière chaîne, la mer » de Marmara, la mer Egée et le cours inférieur de la Maritza » (ancien Hébrus); 3° le massif des montagnes du Rhodope, limité, » au nord et à l’est, par le cours de la Maritza; au sud, par la mer » Egée ; à l’ouest , par la vallée du Strouma (ancien Strymon) , » Dans mes précédents voyages, je m’étais arrêté à une ligne » dirigée à peu près du sud au nord et tirée de Salonique aux mon- » tagnes du Rilo-Dagh qui renferment une des sources supérieures » du Strymon; j’ai prolongé, en 18à7, mes excursions à l’ouest de » Constantinople, jusqu’à cette limite, de manière à rattacher mes » premières observations aux plus récentes, et à embrasser dans » mes études une large zone allongée de l’ouest à l’est, et coin- » prise entre la mer Adriatique et le Bosphore de Thrace. » Permettez-moi maintenant de résumer brièvement l’historique des matériaux employés pour la construction de la carte que j’ai l’honneur de mettre aujourd’hui sous vos yeux. Les bases sur lesquelles s’appuie la construction de la nouvelle carte ont été prises aux sources suivantes : l°la Connaissance des temps par le Bureau des longitudes, et le Bulletin scientifique de V Académie des sciences de Saint-Pétersbourg , t. II, n° là, renfer- ment la détermination astronomique de 25 localités; 2° les cartes (1) Tome Y de la 4re série, et tome I de la 2e série. De son côté, M. Boué a publié le résumé de ses observations dans un ouvrage en quatre volumes, intitulé; La Turquie d’Europe. Paris, 1840. SÉANCE BU 16 MAI 1853, A56 hydrographiques publiées en 1852 par l’amirauté anglaise ont fourni le tracé du littoral de la mer Egée ; 3° les contours de la mer de Marmara et de la mer Noire ont été relevés sur la Carte du capi- taine Gautier , et rectifiés d’après la détermination précitée de quelques villes situées sur le littoral. J’arrive actuellement à mes opérations personnelles. J’ai tracé sur une échelle uniforme les itinéraires que j’avais re- levés à l’aide de la boussole, puis je les ai reportés sur d’autres feuilles et combinés en nombre suffisant pour représenter des surfaces de 30 à 50 lieues carrées. Privé du concours habituel du colonel Lapie dont la santé déclinait chaque jour, j’ai remis ces matériaux à un habile cartographe qui les réduisit à l’échelle de 8ôWôô et ^es encadra dans le réseau des points astronomiques ci- dessus mentionnés. La vérification de ce travail d’ensemble me démontra que la connaissance parfaite du pays est indispensable pour trouver la position relative des nombreuses localités qui figurent dans les itinéraires; j’entrepris donc ce travail minutieux de combinaison. AP rès de longues tentatives, je suis parvenu à compléter le trait de la carte et à mettre la représentation graphique d’accord avec mes observations et mes renseignements. La mise au net de ce travail a été exécutée sous mes yeux avec autant de soin que de talent par M. Charle, que feu le colonel Lapie considérait comme l’un des géographes les plus capables du ministère de la guerre. GÉOGRAPHIE. Mes différents rapports adressés à M. le ministre de l’instruction publique renferment une description sommaire de la partie de la Thrace comprise dans les limites de la nouvelle carte (voyez Archives des missions scientifiques , année 1850). Leur publication ne me dispense pas de donner ici les considérations générales de géographie physique nécessaires à l’intelligence des observations géologiques. A l’époque où j’écrivais ces rapports, le calcul de mes stations barométriques n’était pas encore exécuté ; on doit donc s’attendre à trouver des différences entre les altitudes que j’avais adoptées en premier lieu et celles que je donne aujourd’hui à certaines localités. Chaîne côtière de la mer Noire. — La principale courbure de cette chaîne se trouve au N.-E. de Kirk— Kilissé. A partir de ce point, la ligne de partage des eaux composée de schistes cristal- lins se dirige d’un côté vers le N. -N. -O., de l’autre vers Y E. 30° S., SÉANCE DU J6 MAI 1853. A57 et conserve cette dernière direction jusqu’aux environs du lac de Derkos. Les plus hautes sommités au nord de Yiza et de Bounar- Hissar atteignent 900 à 1000 mètres; à l’ouest du lac de Derkos, elles n’ont plus que Ù00 à 500 mètres. A l’est de ces dernières cimes, les schistes cristallins cessent d’être visibles et sont rem- placés par une série de basses collines à contours arrondis, qui passent au nord de Constantinople, et s’étendent jusqu’à l’entrée du Bosphore. Bassin hydrographique de l’Erghéné. — Ce bassin, uniquement composé de dépôts tertiaires et quaternaires, occupe les trois quarts de l’espace compris entre la chaîne côtière de la mer Noire et le massif du Rhodope. Les collines qui le bordent à l’est et au sud atteignent une altitude moyenne de 250 à 300 mètres. Le petit groupe montagneux d’Achiklar situé auS.-S.-O. deRodosto fait une exception remarquable àcette hauteur générale, et s’élève après de 900 mètres au-dessus de la mer. Les cours d’eaux produits par ces collines et par la chaîne côtière de la mer Noire se réunissent dans une vallée très évasée, dominée par de bas plateaux et dirigée à peu près de l’est à l’ouest, depuis les environs de Tchorlou jusqu’à Ouzoun-Keupri. A partir de cette dernière ville, l’Erghéné tourne vers le S.-O. et conserve à peu près cette nouvelle direction jusqu’à son confluent avec la Maritza. Chaîne côtière du golje de Saros . — • Les montagnes d’Achiklar s’élèvent à la jonction de quatre lignes de faîte dont deux appar- tiennent au bassin hydrographique de l’Erghéné ; la troisième constitue les collines européennes des Dardanelles; et la quatrième, forme une petite chaîne qui accompagne le littoral du golfe de Saros, et se prolonge jusqu’à l’embouchure de la Maritza, près d’Enos. (^ette dernière se compose de collines dont les plus hautes sommités paraissent atteindre 500 à 600 mètres, et le point culmi- nant, au delà de 700 mètres. Son versant septentrional fournit des affluents au ruisseau de Malgara, tributaire de la Maritza. Rhodope . — La contrée montagneuse que nous désignons sous le nom de massif du Rhodope présente à peu près la forme d’un pa- rallélogramme dont les grands côtés sont orientés de l’ouest à l’est, ou de l’ouest un peu nord à l’est un peu sud. Les quatre angles de la figure s’appuient, au nord, sur le plateau de Samakov et la ville d’Andrinople ; au midi, sur le golfe d’Orfano et le golfe d’Enos. Le plateau élevé de Samokov, situé à l’angle N. -O. du quadri- latère, à l’endroit ou la direction du haut Balkan vient couper celle du Rhodope, réunit les sources du grand Iskra, tributaire du bassin hydrographique de la mer Noire. La Maritza prend naissance à SÉANCE DU 16 MAÏ 1853. m l’est de Samakov ; le Strymon, au N. -O. de cette ville. Les bassins hydrographiques de ces deux fleuves ne sont séparés de celui de l’Iskra que par des arêtes de 150 à 200 mètres au-dessus du pla- teau de Samakov. La Maritza sort des montagnes à six lieues à l’ouest de Bania, arrose les belles plaines de Tatar-Bazari et de Philippopoli, et, continuant sa marche vers l’est ou l’est-sud-est, parvient dans celles d’Andrinople. Après avoir reçu près de cette dernière ville l’Arda et la Tondja, ses principaux affluents, elle tourne vers le sud, puis vers le sud-ouest, et débouche dans le golfe d’Enos, au- jourd'hui ensablé par des alluvions modernes. Le Strymon coule dans une vallée dont la direction moyenne se prolonge à peu près du N. -N. -O. au S.-S.-E. 11 traverse, depuis son origine près de Radomir jusqu’à la mer, une série de petites plaines étagées les unes au-dessus des autres et reliées entre elles par des défilés à parois escarpées. Le fleuve sort des défilés aux en- virons de Démir-Hissar, arrose la magnifique plaine de Sérès et forme au sud de cette ville le lac de Takinos qui reçoit les eaux de la riche vallée de Draina. Le lac se déverse dans le golfe cfOrfano par un canal dont le lit est embarrassé de rapides. Le littoral de la mer Egée, qui limite au sud le massif du Rhq- dope, s’étend du golfe d'Orfano au golfe d’Enos. Les deux extré- mités de cette longue ligne de côtes sont bordées de montagnes ; la partie médiane , comprise entre le golfe de Ravala et Maronia, présente, en avant des montagnes, des plaines basses, arrosées par les principaux cours d’eau qui descendent du versant méridional du massif. On observe les hauteurs suivantes au pourtour du quadrilatère dont nous venons de tracer les limites : 1° les deux angles méri- dionaux s’abaissent an niveau de la mer ; 2° l’angle nord-est at- teint, au confluent de ï’Ardaetde la Maritza, une altitude d’environ 70 mètres; 3° l’angle nord-ouest s’élève, au plateau de Samakov, à la hauteur absolue de 1000 mètres; 4° enfin la Maritza et le Strymon, dont le cours enveloppe, au nord, à l’est et à l’ouest, le massif du Rhodope , prennent leur origine à l’est et à l’ouest- nord-ouest de Samakov, et leurs sources se réunissent dans les vallées de Bania et de Radomir, dont le fond se trouve à 300 ou 350 mètres plus bas que le plateau de Samakov. Pénétrons maintenant dans l’intérieur du Rhodope. Ce massif est découpé par de nombreux cours d’eau qui se jet- tent dans le Strymon , la Maritza et la mer Egée. Parmi ces acci- dents du sol, les plus remarquables sont : la vallée transversale du SÉANCE DU 1Ô MAI 1853. A59 Nestus (Kara-Sou des Turcs), et ]a vallée longitudinale de l’Arcla. Bassin hydrographique du Nestus. — Les hautes montagnes du Rilo-Dagh, du Démir-Kapou, etc. , etc. , dont le versant septentrio- nal renferme les sources de l’Iskra et de la Maritza, forment, au sud de Samakov et de Bania, une ligne de faîte sinueuse, dirigée en moyenne de TO. 8° N. à LE. 8° S. Le Nestus prend son origine sur le versant méridional du Démir-Kapou , situé dans la partie médiane de cette ligne défaite. La chaîne du Périn-Dagh se rattache au Démir-Kapou par un contre-fort, et sépare la vallée du Nestus de celle du Strymon. Elle accompagne la rive occidentale du premier fleuve, à partir du mont IelTèpè, situé au sud de Razlouk. jusqu’aux environs de Ravala. La chaîne du Dozpat Iaïlassi forme la limite orientale du bassin» Elle se lie au S.-S.-E. de Bania, à la ligne de faîte, dont le Dé- mir-Kapou fait partie, et se termine aux environs de Xanti et de Jénidjé. La vallée du Nestus, comprise entre les deux chaînes parallèles, décrit, comme elles , plusieurs sinuosités. Depuis la jonction des sources supérieures jusqu’à la mer, le cours du fleuve présente une direction moyenne du N. Ù0° O. au S. ù0° E», et se trouve res- serré entre d’étroits défilés, excepté aux environs de Névrokoup, où se déploie une plaine de 12 kilomètres de long sur 1 à k kilo- mètres de large. Le Nestus ne reçoit qu’un seul affluent un peu important, qui descend du Dozpat Iaïlassi, et opère sa jonction à Borova, village situé à 35 kilomètres au S.-E. de Névrokoup. Le lit de cet affluent atteint à Dozpat-Han, situé à plus de 20 ki- lomètres de son point de départ, l’altitude de 1200 mètres. Le lit des sources supérieures du Nestus, mesuré à une distance de 10 on 15 kilomètres de leur origine, ne se trouve qu’à une hauteur absolue de 800 mètres à Razlouk , et de 900 mètres à Iokourout. A quatre ou cinq lieues de ces deux villages, le fleuve pénètre dans le célèbre défilé de la fille (Khiz-Derbend , et coule au niveau de 700 mètres ; 2ù kilomètres plus loin, il débouche dans la plaine de Névrokoup, dont la hauteur au-dessus de la mer atteint plus de 500 mètres. L’altitude du ruisseau de Dozpat-Han , bien que considérable (1227 mètres), est cependant inférieure de 300 à Ù00 mètres à celle qu’atteignent, sur le versant opposé du Dozpat Iaïlassi, les sources du Kritchma Bèressi, affluent de la Maritza. Les ruisseaux produits par ces sources coulent paisiblement sur deux plateaux, que dominent des sommités de 200 à 300 mètres. Après avoir tra- SÉAISCE DU 16 MAI 1853. 460 versé ces solitudes, on descend à Batak, village bulgare, situé sur un autre affluent du Kritchma, à une hauteur absolue de 1,061 mè- tres, cà 24 kilomètres au N.-E. de Dozpat- Han, et à 28 kilomètres au S. -S. -O. de Tatar-Bazari. L’altitude de ces plateaux est un fait remarquable sur lequel nous reviendrons plus tard. (Voyez page 465 la coupe de Névro- koup à Pliilippopoli qui traverse ces plateaux). Bassin hydrographique de l’Arda. — Le versant oriental de la chaîne du Dozpat Iaïlassi renferme les sources supérieures de FArda. Ces dernières se trouvent à l’est de Névrokoup, au sud de Pliilippopoli et au nord de File de Tassos. La ligne de faîte qui accompagne la rive septentrionale de l’Arda, et sépare cette vallée de celle de la Maritza, se compose, dans sa partie occidentale, de cimes élevées, dirigées en moyenne de l’O. 30' S. à l’E. 30° N., et, dans sa partie orientale, de collines dirigées à peu près de l’ouest à l est, et qui s’abaissent à l’ouest d’Andrinople. La ligne de partage des eaux, entre la vallée de FArda et la mer Egée, se rattache, d’un côté, à la partie méridionale de la chaîne du Dozpat Iaïlassi ; de l’autre, au mont Eodja laïla, situé à 50 ki- lomètres à l’ouest de Démotika. Elle présente une direction moyenne de l’ouest à l’est. Le mont Kodja laïla fait partie d’un massif, dont l’extension vers le nord, puis vers FE.-N.-E., achève de circonscrire le bassin hydrographique de FArda. Cette rivière coule de FO. à FE. Elle ne reçoit, des montagnes qui dominent sa rive septentrionale , que des torrents d’une faible importance ; mais elle reçoit, des montagnes de la rive opposée, deux gros affluents , le Suutlu et le Bourgas. Le premier, dirigé de FO. à FE. , dans la partie supérieure de son cours , tourne en- suite vers le N., et débouche dans la petite plaine de Krdjali; l’autre se dirige du S. -S. -O. au N.-N.-E., et conflue, 14 kilo- mètres plus loin, vers l’E., auprès de Ada. La rivière et ses af- fluents coulent dans des vallées resserrées , et traversent de nom- breux défdés à parois verticales. De loin en loin, ils arrosent une petite plaine placée à la jonction de plusieurs cours d’eau. Enfin, FArda sort des montagnes, à 26 kilomètres à l’ouest d’Andrinople, et conflue, près de cette ville, avec la Maritza. En descendant le cours de FArda, on observe que son lit atteint les altitudes suivantes : Mètres. À Ismilan, situé à 18 ou 20 kilomètres des sources les plus éloignées, 800 SÉANCE DU 16 MAT 1858. A 61 Au pont de Slouïanova, construit à peu près à moitié Mètres- route d’Ismilan et de Krdjali 530 Auprès de Krdjali, situé à une lieue et demie en amont du confluent du Suutlu 265 Au confluent du Bourgas 133 A la sortie des montagnes 82 Au confluent de la Maritza 70 Bassins hydrographiques des affluents fournis par le Rhodope au Strymon , à la Maritza et a la mer Egée. — La description de ces bassins secondaires n’est pas indispensable à rintelligence des ob- servations géologiques qui forment l’objet de la présente commu- nication. J’entrerai donc immédiatement en matière. GÉOLOGIE. Les terrains qui constituent la chaîne côtière de la mer Noire, le Rhodope et la contrée comprise entre ces deux groupes de mon- tagnes, se divisent en dépôts stratifiés et en dépôts massifs ou pyrogènes. DÉPÔTS STRATIFIÉS. Les dépôts stratifiés appartiennent aux terrains suivants : 1“ schistes cristallins ’ 2° terrain de transition ; 3° terrain crétacé’ U° terrain num midi tique ; 5° terrains miocène et pliocène ; 6° ter- rain quaternaire. 1° Schistes cristallins. Les roches schisteuses cristallines forment deux groupes séparés par des dépôts tertiaires et quaternaires. L’un de ces groupes com- prend une partie de la chaîne côtière de la mer Noire ; l’autre, d’une étendue considérable, constitue la presque totalité du massif du Rhodope. Le gneiss forme la partie inférieure des schistes cristallins. Sa texture rappelle souvent à tel point celle du granité , qu’il serait facile de le confondre avec cette dernière roche , si l’altération produite par les agents atmosphériques ne mettait en évidence la disposition en strates alternatifs des éléments qui entrent dans sa composition. De bons exemples de cette particularité se montrent notamment à l’ouest de Névrokoup, aux sources du Nestus, etc. Dans ces localités, le gneiss, traversé par des filons et des dômes de granité, se désagrégé et forme de grands plateaux déboisés, ra- SÉANCE DU 16 MAI 1853. 46 2 vinés et couverts d’aspérités. Les noyaux de gneiss, qui échappent à l’action destructive des agents extérieurs, ressemblent de loin à de gros blocs transportés sur les points où on les voit en place. Dans d’autres lieux, par exemple, dans les montagnes du Rilo- Dagh et du Dozpatlaïlassi, le gneiss conserve, au contact des masses granitiques, sa structure nettement stratiforme, et présente les va- riétés de grain et de couleur qui lui sont ordinaires. Il passe fréquemment par la rareté ou la disparition des grains de quartz au gneiss leptynoïde et au leptynite. Ces deux variétés de roches se délitent souvent en grandes dalles de 2 à 4 centimètres d’épaisseur, et sont employées à la couverture des habitations. La disparition du mica s’observe plus rarement et produit la pegmatite schistoïde. Le micaschiste blanc, disposé en strates minces, alterne quel- quefois avec le gneiss leptynoïde et la pegmatite schistoïde. La va- riété d’un gris noirâtre , ordinairement grenatifère, ne parait pas exister dans les parties inférieures des dépôts cristallins; elle se montre à une hauteur plus élevée dans la série, forme des bancs plus ou moins épais , et renferme ordinairement des couches subordonnées de calcaire cristallin. Le remplacement graduel du mica par l’amphibole se présente très fréquemment dans les deux groupes de montagnes, et le gneiss amphibolifère y passe à l’amphibolite. Cette dernière roche se montre dans les parties moyennes et supérieures du dépôt cristal- lin. L’amphibolite, soit en couches minces, soit en bancs épais, alterne avec le gneiss ou ses dérivés; elle couvre de vastes espaces. Le calcaire subordonné à la formation du gneiss prend ordinai- rement une texture largement lamellaire et plus rarement la tex- ture saccharoïde. Il passe quelquefois à la dolomie. La couleur do- minante de la roche est le blanc pur; la nuance grise est assez fréquente; la teinte noire est une exception, Le calcaire est quel- quefois moucheté de lames de talc verdâtre, rarement en assez grande quantité pour produire du cipolin. Il renferme accidentellement (au contact du granité) de l’épidote, de l’idocrase, des grenats, des pyrites, etc. Ce n’est qu’à une certaine hauteur dans la série des roches schisteuses cristallines que le calcaire commence à paraître. Il forme d’abord des couches rares, minces et subordonnées au lep- tynite et à la pegmatite schistoïde ; il alterne ensuite avec le mica- schiste noirâtre grenatifère , enfin avec l’amphibolite. L’asso- ciation de cette dernière roche au calcaire cristallin constitue dans les parties méridionales du Périn-Bagh (montagnes de Sérès, SÉANCE DU 16 MAI 1853. 463 Ih ama, etc.) un des caractères les plus constants des couches supérieures de la formation. Aussitôt qu’on y voit paraître l’am- phibolite, on peut être certain de trouver le calcaire au contact. Il semblerait que son existence fût subordonnée, dans ces montagnes, à celle du carbonate de chaux , tandis que le calcaire cristallin s’associe indifféremment aux dérivés du gneiss et au micaschiste. Le quartzite est assez rare ; il se présente ordinairement en couches minces ; cependant on peut en citer un banc très épais au voisinage de l’ampliibolite, dans les montagnes du Rhodope. Les roches talqueuses et chloriteuses se réduisent en général à de simples accidents qui s’observent au contact des roches injectées ,dans le calcaire associé à i’amphibolite. Cependant iln’estpas rare de voir le gneiss se charger de talc et passer au talcite. Mais les grands dépôts talqueux et phyîiadiens se trouvent en dehors du Rhodope. Ayant eu l’occasion de les décrire dans mes précédents mémoires, je me contente de signaler leur présence dans la chaîne côtière de la mer Noire et dans les montagnes qui bordent le lit- toral de la mer Egée. La distribution des schistes cristallins, considérée sur une grande échelle et abstraction faite des exceptions accidentelles, peut se résumer de la manière suivante : Les couches inférieures occupent à peu près la partie centrale du Rhodope. Elles s’élèvent en plateaux dont l’altitude atteint 1000 à 1100 mètres, et que dominent des sommités de 200 à 300 mètres. Les couches moyennes et supérieures forment deux larges bandes orientées à peu près de l’est à l’ouest, et placées l’une au sud, l’autre au nord des couches précédentes. La bande méridio- nale s’avance souvent jusqu’au littoral de la mer Egée, et compose les montagnes situées aux environs de Sérès, Brama, lénidjé, Gumourdjina et Démotika; le calcaire cristallin en constitue quel- quefois les points culminants dont la hauteur absolue atteint 1500 à 2000 mètres. La seconde bande passe ail sud de Samakov, de Tatar-Bazari, de Pliilippopoli, s’enfonce sous les dépôts tertiaires et quaternaires de la Maritza et reparaît dans la chaîne côtière de la mer Noire. Les couches supérieures, généralement associées à la partie moyenne de la formation, composent les cimes les plus éle- vées du massif du Rhodope (Rilo-Dagh, lel Tèpè, Bémir-Ka- pou, etc.). Les points culminants de cette zone atteignent, au sud de Bania, l’altitude de 2500 mètres, et dans la crête dentelée du Rilo-Dagh celle de 3000 mètres. Mais les cimes aiguës de ce der- nier groupe se composent généralement de diverses variétés de SÉANCE DE 16 MAI 1853. im gneiss que sillonnent de nombreux filons granitiques, taudis que l’amphibolite règne à son pourtour sur le flanc des vallées. Parmi les accidents que présente l’orographie des schistes cris- tallins du Rhodope , il en est un qui mérite une mention particu- lière. Si l’on considère le fond des vallées comme représentant la surface de plateaux sur lesquels reposent les montagnes, on recon- naît que le sol éprouve sur quelques points des bombements con- sidérables. Le plus remarquable de ces bombements s’observe suivant une ligne tirée du plateau de Samakov à Ismilan, dirigée de l’O. 40° N. à l’E. ù0° S., et passant par Iokourout et Dozpat- Han, c’est-à-dire par les vallées où se réunissent les sources de l’Iskra, du Nestus et de l’Àrda. Les chiffres que nous avons cités dans la partie géographique démontrent que les montagnes (Rilo- Dagh, Démir-Kapou, Dozpat Iaïlassi) qui donnent naissance à ces rivières, reposent sur un plateau dont la hauteur absolue varie entre 900 et 1200 mètres. Ce bombement prolongé jusqu’à la mer Egée passerait par les montagnes de Gumourdjina et aboutirait à Maronia. il semble établir une ligne de démarcation nettement accusée ; à l’ouest, s’élèvent les plus hautes cimes du Rhodope (2000 à 3000 mètres); à l’est, les sommités s’abaissent peu à peu et n’atteignent plus dans le Kodja Iaïla qu’une altitude de 1300 mètres. La coupe ci-contre (page ù65 ) de INévrokoup à Philippopoli traverse presque à angle droit le bombement dont nous venons de parler. Les distances entre ces deux villes sont données en kilo- mètres et réduites à l’échelle de g^ôVcTô* ïjes hauteurs comparées aux longueurs sont à peu près dans le rapport ! ; 8 ! 1 . 2° Terrain de transition. Le terrain de transition, composé de schiste argileux, de roches arénacées de diverse nature et de calcaire compacte, forme aux environs de Constantinople un petit groupe que le Bosphore tra- verse et coupe en deux parties inégales. Sa faible élévation au- dessus de la mer offre, sous ce rapport, de l’analogie avec les ter- rains anciens de la Bretagne. (Voyez, pour de plus amples détails, ma lettre à M. Degousée, Bail, de la Soc. géo/., 2e série, t. VIII, p. 508.) 3° Terrain crétacé. Le terrain crétacé, qui couvre des surfaces considérables en Turquie, se montre seulement sur trois points compris dans les li- Coupe de Névrokoup à PhilippopolL SÉANCE DU 10 MAI 1853. &ô 5 Soc, géol, 2e série, tomeX, 30 kilomètres g, schjsles cristallins. | T, trachytes. La ligne ab indique le bombement du sol, SÉANCE DU 16 MAT 1853. A86 mites de mes dernières excursions. L’un de ces gisements , situé aux environs de Kostendil, se rattache vers le nord au grand dépôt crétacé de la Bulgarie. La découverte d’une Ammonite et d’un moule d’ïnocérame a dissipé tous nos doutes sur l’âge de ces cou- ches que nous avions observées dans un précédent voyage (voyez Mémoires de la Soc. géol. , 2e série, t. I, p. 219). Les deux lam- beaux crétacés de Kila et d’Inada, sur le littoral de la mer Noire, ont été décrits dans deux précédentes communications (voyez Bull, de la Soc . géol., 2° série, t. VII, p. 50ù, et t. VIII, p. 517). Enfin il serait possible que le même terrain existât encore dans une quatrième localité ; mais, n’ayant trouvé aucun fossile déter- minable, je dois m’exprimer ici avec la plus grande réserve. Les couches qu’on pourrait peut-être rapporter au dépôt crétacé, et qui s’observent à trois lieues à l’ouest de Féredjik, se composent de diverses variétés de macigno et de calcaire compacte en couches subordonnées. Ce dépôt arénacé problématique renferme des im- pressions bitumineuses de plantes; il est recouvert en stratifica- tion discordante par le terrain nummulitique. k° Terrain nummulitique . Ce dépôt entoure d’une ceinture souvent interrompue les parties méridionale, orientale et septentrionale du Rhodope ; il existe sur les deux versants de la chaîne côtière de la mer Noire et forme une partie des collines qui dominent le littoral de la mer de Mar- mara. A l’époque où s’opérait le dépôt, les plaines de la Maritza et de l’Erghéné offraient l’aspect d’un golfe bordé par les schistes cristallins. La mer Egée et la mer de Marmara formaient un seul et même bassin qui communiquait avec la mer Noire par un dé- troit situé au N. -O. de Constantinople. Le Bosphore n’existait pas encore. L’ouverture de ce canal est d’une époque beaucoup plus récente. Le terrain nummulitique présente une composition très variée. Il renferme en général des débris plus ou moins atténués des roches sur lesquelles il repose. Pour éviter d’entrer dans des détails trop minutieux, je donnerai plusieurs coupes qui feront connaître les caractères les plus saillants de ce terrain. Aux environs de NébilKeui, village situé à l’altitude de 253 mè- tres clans la vallée de l’Arda, à 60 kilomètres à l’ouest d’Andri- nople, on observe de haut en bas les couches suivantes qui pré- sentent une inclinaison de 10 à 15 degrés: SÉANCE MJ 16 MAI 1853. h 67 Mètres. 1“ Calcaire compacte à Nummulites et à polypiers, contenant des grains de trass, des paillettes de mica, etc ... 6 2° Grès à éléments feldspathiques, micacé, passant au trass 6 3° Grès à éléments feldspathiques, contenant des co- quilles indéterminables. . 6 4° Grès semblable au n° 2 6 5° Conglomérat à ciment calcaire, composé de frag- ments de feldspath fibreux, de porphyre trachy- tique, et contenant de rares cristaux de pyroxène, des paillettes de mica, de la terre bolaire, etc. . . 15 6° Calcaire compacte à Nummulites, renfermant des parties terreuses d’une couleur vert-pomme, et des cailloux roulés de trachyte 2 7° Grès à ciment calcaire, composé d’éléments feld- spathiques et de grains de diverse nature. ... 6 8° Calcaire compacte à Nummulites. 2 9° Argile rougeâtre . 1 1 0° Grès à éléments feldspathiques, très micacé, ne faisant pas effervescence avec les acides 4 Ensemble. ... 54 Au delà d’un ravin, les couches ci-dessus reposent sur les sui- vantes qui offrent la même inclinaison ? Mètres. 1 1° Argile contenant des fragments de feldspath et des grains de quartz 5 12° Grès à ciment calcaire, de couleur verdâtre, con- tenant des fragments de porphyre pyroxénique (mélaphyre), et composé des éléments atténués de cette roche pyrogène 10 13° Trass à éléments grossiers. 8 14° Trass à grain fin, endurci par un ciment silicé. 20 Ensemble. ... 43 La puissance totale de la coupe précédente atteint 97 mètres; mais elle ne comprend pas les couches inférieures qui reposent directement sur le trachyte. La succession des couches se montre dans cette localité d’une manière évidente; les vallées latérales et les ravins mettent les roches à nu et permettent d’étudier leur superposition, leur nature et leur puissance. Bans un grand nombre de points, la végétation, les dislocations et le redressement des couches empêchent de saisir avec facilité leurs véritables rapports. A une certaine distance des points qui donnaient issue aux roches SÉANCE DU 16 MAI 1858, 468 pyrogènes, la partie inférieure du dépôt se compose de conglomé- rats, de macignos et de mollasses, dont les éléments résultent de la désagrégation des schistes cristallins ; ensuite viennent des argiles, des marnes et le calcaire. A l’ouest d’Andrinople et de Démotika, le calcaire prend un grand développement. Il forme des bancs d’une grande épaisseur, dont la puissance totale est environ de 4 00 mètres. Ces roches produisent des protubérances d’une forme particulière qui se reconnaissent de loin et dessinent nettement les anfractuosités de l’ancien golfe. Entre Féredjik etGumourdjina, les couches nummulitiques sont recouvertes d’une épaisseur considérable de trasspassant au conglo- mérat et de roches argileuses tendres ou endurcies par la silice. Ces dernières sont de véritables tufs analogues à ceux qu’on rencontre dans toutes les contrées volcaniques. Le calcaire nummulitique se montre sur plusieurs points dans les collines qui accompagnent le littoral de la mer de Marmara ; il atteint au mont Saint-Elie l’altitude de 700 mètres. Il est re- couvert dans cette localité de marne et de calcaire marneux ordi- nairement compacte, renfermant des coquilles d’eau douce. Les marnes contiennent des rognons de gypse blanc compacte. Elles occupent précisément la place du dépôt marneux gypsifère observé en Asie Mineure par M. de Tchihatcheff et par d’autres voyageurs. Au mont Sérian Têpê, situé à quatre lieues au S. -O. du mont Saint Elie, le terrain nummulitique présente la coupe suivante : 4° Grès, sable et argile rougeâtre, en couches peu épaisses, et alternant à plusieurs reprises; 2° Argile rouge calcarifère ; 3° Grès dur, passant au conglomérat; 4° Couches argileuses et marneuses, contenant des lits sub- ordonnés de macigno schistoïde; 5° Marne schistoïde et macigno schistoïde en couches alter - natives ; 6° Calcaire compacte à Nummulites; 7° Macigno avec couches subordonnées de poudingue et de calcaire marneux schistoïde ; 8° Calcaire compacte fendillé; 9° Comme le n° 7 ; 4 0° Calcaire compacte fendillé; 4 4° Calcaire marneux rougeâtre. Ces couches reposant sur letalcite et le quarzite sont fortement redressées et presque verticales ; de sorte que les plus basses dans l’ordre du dépôt forment le sommet du Sérian Têpê et que les SÉANCE DU 16. MAI 1853. 469 couclies supérieures s’observent à léni Keui, village situé au pied du versant nord-ouest de la montagne. Le terrain nummulitique s’étend à la base méridionale de la chaîne côtière en couches tantôt horizontales, tantôt inclinées. Sa partie inférieure se compose de sable fin calcarifère passant au grès, et quelquefois à une argile impure. Au-dessus, repose le cal- caire qui présente toutes les variétés de texture ordinaire à ce dé- pôt. On n’observe aucune trace de roche pyrogène sur le versant méridional de la chaîne ; aussi n’y voit -on jamais leurs débris en- trer dans la composition des couches nummulitiques. Au sud du lac de Derkos, ce terrain constitue le sommet des basses collines, qui forment le prolongement de la chaîne côtière de la mer Noire. Il recouvre, à l’ouest, les schistes cristallins; à l’est, le terrain de transition. C’est sur ce point qu’existait le dé- troit établissant pendant la période nummulitique une commu- nication entre les deux mers. (Voy. ma Note sur V emplacement du Bosphore a l’époque du dépôt du terrain nummulitique , Bull, de la Soc. géol ., 2e série, t. YIÏ, p. 514.) Plusieurs lambeaux de ce terrain, reposant sur les schistes cris- tallins, ont été observés, soit par Hommaire de Hell, soit par moi- même, sur le littoral de la mer Noire, entre le cap de Kara Bour- nou et Varna (Voy. Bull , de la Soc. géol. , 2e série, t. VIII, p. 520). Je rappellerai seulement ici que les couches fossilifères de Kara Bournou renferment des cailloux roulés de porphyre pyroxénique (mélaphyre). Les fossiles trouvés dans ce dépôt ont été déterminés par M. d’Ar- chiac. (Voy. la liste que je dois à l’obligeance de ce savant, Bull, de la Soc. géol ., 2e série, t. VII, p. 519.) 5° Terrains miocène et pliocène. Les dislocations du sol qui ont suivi le dépôt du terrain num- mulitique ont successivement diminué la profondeur du golfe compris entre le Miodope et la chaîne côtière de la mer Noire, et l’ont converti en lacs et en lagunes. Les couches qui se sont dépo- sées dans ces nappes d’eau ne renferment plus de coquilles vivant dans les hautes mers ; on y trouve seulement des espèces qui sta- tionnent aux embouchures des fleuves et dans les eaux saumâtres. Le terrain miocène se compose de grès, de macigno, de mollasse, de marne, d’argile, et renferme quelques couches minces de cal- caire marneux. Des conglomérats et des grès formés de détritus trach y tiques sont subordonnés aux roches précédentes. Ce terrain à70 SÉANCE DU 16 MAI 1853. couvre une grande partie de îa surface du sol comprise entre la mer de Marmara et la vallée de la Maritza. Il se présente en con- ciles ordinairement inclinées, et quelquefois même fortement re- dressées. Il atteint exceptionnellement, dans les montagnes d’Achiklar, une hauteur absolue de 900 mètres ; partout ailleurs, il s’élève en collines et en plateaux, dont l’altitude varie entre 200 et 500 mètres. Le terrain pliocène se compose, à sa partie inférieure, de grès et de mollasse ; à sa partie supérieure, de calcaire marneux et de cal- caire compacte. On le voit souvent recouvrir en couches horizon- tales les strates redressés du terrain miocène. Il s’observe notam- ment dans la vallée de la Maritza, dans celle de l’Erghéné, et s’avance jusqu’aux portes de Constantinople. Les fossiles miocènes et pliocènes se trouvent ordinairement à l’état de moules intérieurs. Leur mauvais état de conservation les rend très difficiles à déterminer. M. d’Archiac a bien voulu se charger de leur spécification ; il fera connaître plus tard le résultat de cette étude. 6° Terrain quaternaire. Les alluvions anciennes s’observent, dans la partie méridionale du Rhodope, jusqu’à 200 mètres au-dessus du fond des vallées, et dans l’espace compris entre le Rhodope et la mer de Marmara, sur une foule de plateaux. On les trouve sur les collines paléozoï- ques de Constantinople ; et cependant elles ne pénètrent pas dans le Bosphore, dont par conséquent l’ouverture est postérieure à leur dépôt. Sur quelques points du littoral de la mer de Marmara et de la mer Egée (Erékli, Ganos, Enos), on observe des conglomérats et des grès renfermant une grande quantité de coquilles marines de l’époque actuelle. Ces couches atteignent une altitude de 10 à 50 mètres. ROCHES PYROGÈNES. Les roches massives injectées appartiennent : 1° au granité ; 2° à la syénite ; 3° au porphyre pétrosilicéùx quartzifère ; k° à la serpen- tine ; 5° au trachyte ; 6° au mélaphyre ; 7° au basalte. _ / " ’ ... _ \ • ; • • v- • '■*- ■ ' . , 1° Granité . Le granité n’occupe, dans le Rhodope et dans la chaîne côtière de la mer Noire, que des espaces d’une faible étendue. Il se montre SÉANCE DU 16 MAI 1858. h 71 sous la forme de dômes, quelquefois à la surface des plateaux, plus généralement au fond des vallées ; ou bien , il pénètre en filons dans les schistes cristallins, s’y ramifie, et empâte souvent de grandes plaques de gneiss. Cette injection du granité s’observe sur une grande échelle dans les cimes aiguës du Rilo-Dagh (2500 à 3000 mètres). Le massif granitique le plus considérable se trouve aux sources du Nestus, traverse la chaîne du Dozpat laïlassi, et atteint au col, situé entre Iokourout et Tchépina, la hauteur ab- solue de 1339 mètres. L’étude des roches démontre que des injections granitiques ont eu lieu à des époques différentes. On peut citer notamment une variété à mica blanc, qui coupe fréquemment le granité à mica coloré. Au contact des amphibolites, elle se charge d'amphibole, et prend accidentellement l’aspect de la syénite. 2° Syénite . Les gisements de la syénite offrent beaucoup d’analogie avec ceux du granité ; les plus importants se trouvent : l’un aux envi- rons de Samakov, situé au pied du Rilo-Dagh ; l’autre aux alen- tours d’une petite ville, également nommée Samakov, placée, dans la chaîne côtière, à 6 lieues de la mer Noire. Cette roche est extrêmement intéressante , au point de vue industriel, par la quantité considérable de fer oxydulé titanifère qu’elle renferme. La facilité avec laquelle elle se désagrégé sous l’influence des agents extérieurs met en liberté le minerai, dont les eaux cou- rantes, habilement distribuées, opèrent le lavage naturel. La syénite, très répandue dans les montagnes comprises entre les vallées du Strymon et du Nestus, alimente, comme aux deux Samakov, un certain nombre de hauts fourneaux. 3° Porphyre pètrosiliceux quartzifère. Le porphyre pètrosiliceux quartzifère est assez rare- Il forme quelques dykes et filons dans les schistes cristallins. Cette roche , ordinairement très tenace, présente quelquefois à sa surface une texture cariée , qui paraît être le résultat de la destruction des cristaux de feldspath. Elle contient du fer oligiste cristallisé en rose. Cette dernière substance accompagne surtout les filons de quartz qui semblent dériver du porphyre. SÉANCE DU 16 MAI 1853. /|7*2 4° Serpentine . La serpentine forme des dykes et des filons nombreux dans les amphibolites et les calcaires cristallins. Ses éléments paraissent même entrer, sur quelques points, dans la composition des schistes cristallins, soit que des injections serpentineuses aient précédé ou accompagné le dépôt de ces dernières roches, soit que des injec- tions postérieures aient produit sur les couches de profonds effets de métamorphisme. Cette particularité s’observe dans le gneiss talcifère et le talcite, subordonnés aux amphibolites. 5° Trcichyte. Les dépôts trachy tiques prennent dans le Rhodope un grand dé- veloppement , mais ils ne paraissent pas exister dans la chaîne côtière de la mer Noire ; du moins M. Roué et Hommaire de Hell n’en ont découvert aucune trace ; et dans mes coupes à travers cette dernière chaîne, je n’ai pas été plus heureux que mes de- vanciers. La variété la plus remarquable par son extrême abondance et la diversité de ses gisements est un porphyre trachy tique quartzifère. Elle se compose d’une pâte feldspathique renfermant des cristaux de feldspath à éclat vitreux, des grains de quartz, du mica noir bien cristallisé en tables hexagonales et accidentellement des cristaux de pyroxène augite. On y distingue ordinairement du labrador. Cette variété passe par des nuances insensibles au tracliyte le mieux caractérisé, à la perlite et à l’obsidienne. Elle est accompagnée de conglomérats qui empâtent des fragments de schistes cristallins. Le gisement le plus occidental du trachyte se trouve dans la vallée du Nestus ; cette roche forme au nord de Névrokoup une partie des défdés de la Fille, et paraît s’étendre sans interruption jusqu’à la vallée de Dozpat Han (voyez la coupe page 465). Au sud de Tatar Bazari et de Philippopoli, on la voit percer au sommet des crêtes qui opèrent le partage des eaux, produire des dômes arrondis et plus généralement des pitons aigus dont les flancs sont découpés en aiguilles. Les pics quelquefois isolés, mais formant aussi des lignes continues, passent aux sources de l’Arda, et prennent au nord de Xanti l’aspect de fortifications en ruines; aussi les habitants ont-ils donné à deux montagnes les noms de Roula (tour) et de Tchinghéné Hassar (château des Bohémiens). Au sud-est de Philippopoli, commence une autre bande qui SÉANCE DU 16 MAI 1853, Zf73 forme également des crêtes découpées et s’étend jusque dans la vallée de l’Arda. Dans cette localité, elle supporte le terrain nuin- mulitique dont les couclies sont souvent formées d’éléments tra- cliytiques remaniés par les eaux. A l’est de celte dernière bande, on trouve encore un dépôt tra- chy tique qui se rattache à celui de l’Arda et détermine le partage des eaux entre cette rivière et la Maritza. A l’extrémité orientale du Rhodope, on n’observe le trachyte qu’aux environs de Féredjik, dans une petite chaîne dirigée du nord au sud, et placée sur la rive occidentale de la Maritza. Enfin les montagnes qui bordent le littoral de la mer Egée ren- ferment un massif trachytique compris entre la vallée de l’antique Traïanopolis, située au nord d’Enos, et celle de Gumourdjina. A l’est duRhodope, on ne rencontre plus de trachyte nettement caractérisé. Il faut en excepter le Tchatal Têpê, petit groupe de montagnes placé à l’E.-N.-E. d’Enos. Les roches pyrogènes de la mer Noire, dont j’ai donné ailleurs la description, paraissent toutes se rapporter au porphyre pyroxénique. Les dépôts trachy tiques atteignent leur altitude maxima au sud de Philippopoli. Ils s’élèvent à 2161 mètres au mont Persenk et paraissent dépasser cette hauteur de 200 ou 300 mètres dans quel- ques cimes voisines. En avançant vers l’ouest, on voit au sud et au sud-ouest de Batak des sommités égaler le mont Persenk ; mais au centre même du bombement du sol dont j’ai parlé précédemment, le trachyte s’abaisse dans la vallée du Nestus à 1700 mètres. En partant du mont Persenk, si l’on se dirige vers l’est, on rencontre des crêtes trachytiques de 1200 à 1500 mètres; et immédiatement à leur base, les points culminants tombent à 700 ou 800 mètres. A l’embouchure de la Maritza et sur le littoral de la mer Egée, les plus grandes hauteurs varient de A00 à 550 mètres. Les premières éruptions trachytiques ont précédé le dépôt du terrain nummulitique ; elles ont été suivies d’éruptions qui se sont produites pendant et après ce dépôt. Nous avons vu les éléments trachytiques se stratifier avec les fossiles nummulitiques, depuis les couches inférieures jusqu’aux plus élevées. Dans un grand nombre de localités, ce terrain est redressé par le trachyte et pé- nétré de filons ; enfin le terrain miocène contient des couches de conglomérat trachytique. Par conséquent, la continuité d’actions volcaniques pendant une longue période se trouve établie sur des faits incontestables. hlh SÉANCE DU 16 MAI 1853. 6° Mélaphyre. Les roches, caractérisées par le pyroxène, occupent, dans le Rhodope, un espace beaucoup plus restreint que le trachyte. Leur principal gisement se trouve entre la vallée du Bourgas et du Suutlu, affluents de l’Arda ; partout ailleurs elles sont assez rares. Les principales variétés sont le porphyre pyroxénique et la mimo- site. Ces roches offrent rarement un caractère bien tranché; elles présentent ordinairement une composition intermédiaire entre le mélaphyre et le trachyte, et se rapprochent davantage de ce dernier. Elles s’élèvent aux sources du Bourgas en filons, dont j’évalue l'altitude approximative à 1,000 ou 1,200 mètres; dans la vallée de l’Arda, elles forment des dykes de 700 à 800 mètres, et en- caissent la rivière de leurs escarpements à pic. Nous avons vu dans les coupes précédentes le calcaire à Num- mulites reposer sans intermédiaire sur la mimosite, et renfermer à sa base des fragments de porphyre pyroxénique. Sur d’autres points, le mélaphyre traverse le même dépôt. Il offre donc, comme le trachyte, une récurrence d’éruptions longtemps prolongée. Je ne parlerai pas ici des roches pyroxéniques de la mer Noire, dont j’ai donné ailleurs la description. (Yoy. Bull. , 2e série, t. Y1I1, p. 515, et suivantes.) 7° Basalte. J’ai déjà signalé ( loc . cité] l’excessive rareté du basalte en Tur- quie et les localités où la présence de cette roche péridotique a été constatée. Je me contenterai de faire observer que la protubérance située aux environs de Tchorlou, le seul point où j’aie vu le basalte en place, se trouve à peu près à 20 lieues, soit des éruptions tra- chytiques, qui ont eu lieu à l’ouest et sur les limites du Rhodope, soit des dépôts pyroxéniques qui s’observent aux enviions de Con- stantinople. CONCLUSIONS. Les faits que je viens d’avoir l’honneur de vous exposer me permettent de tirer les conclusions suivantes : 1° Depuis l’époque où le Rhodope et la partie de la chaîne côtière, que j’ai visitée, ont surgi au-dessus des eaux, ils ont formé jusqu’à l’époque du terrain nummuli tique une île probablement continue. SÉANCE DU 16 MAI 1853. A75 2° Cet exhaussement du sol a dû précéder le dépôt du terrain pa- léozoïque, puisqu’on n’en trouve d’autre témoin qu’aux environs de Constantinople. 3° Un nouveau mouvement a émergé le terrain paléozoïque; les deux groupes que nous considérons sont restés à découvert jus- qu’à la fin de la période jurassique. k° Des affaissements partiels ont permis au terrain crétacé de se déposer au N. -O., et peut-être au S.-E. du Rhodope, et sur quel- ques points du littoral de la mer Noire. 5° A la fin de la période crétacée, des dislocations ont creusé le golfe nummulitique, qui s’est étendu entre la chaîne côtière et le Rhodope, et a permis à la mer de pénétrer au cœur de ce dernier groupe. Les côtes de la mer Egée et celles de la mer Noire ont pris part à cet affaissement, tandis qu’au N. -O. le Rhodope surgis- sait au-dessus des eaux. 6° De nouveaux mouvements ont mis fin à la période nummuli- tique. L’exhaussement du sol a rétréci considérablement l’étendue du golfe, et, si l’on en juge d’après la nature des fossiles, paraît l’avoir transformé en un ou plusieurs lacs remplis d’eau saumâtre. 7° Des dislocations subséquentes ont présidé tour à tour au dé- pôt du terrain pliocène et du terrain quaternaire. M. de Roys fait, au nom de la Commission des archives, ie rapport suivant : Rapport de ta Commission sur la gestion de R archiviste pendant les années 1851 et 1852. Une Commission, composée de MM. Graves, Clément-Mullet et de Roys, a été chargée de présenter un rapport sur la gestion de l’archiviste, pendant les années J 85 1 et 1852. Les attributions de l’archiviste sont divisées en cinq sections : 1° Archives proprement dites, 2° Bibliothèque, 8° Collections, li° Mobilier, 5° Magasin. lre section. — Archives proprement dites . Cette section comprend tout ce qui a rapport à la conserva- tion des titres et actes de la Société. Elle se divise naturelle- h 76 SÉANCE DU 16 MAI 1853. ment en plusieurs parties en raison delà diverse nature de ces titres ou actes. La première division comprend seulement les ordonnances royales autorisant la Société comme établissement d’utilité pu- blique., et l’acceptation du legs Roberlon. La seconde, les baux pour le local de la Société, y compris celui de huit années à courir encore -, les traités avec les impri- meurs pour la publication du Bulletin , des Mémoires de la Société et de 1 ' Histoire des progrès de la géologie , par M. le vicomte d’Àrchiac. On a annexé à ces traités la correspondance qui y est relative. La troisième comprend la vérification des comptes antérieurs du trésorier, les registres contenant l’énumération des recettes et des dépenses, les comptes et pièces justificatives. Cette divi- sion est chargée d’une grande masse de registres et pièces ap- partenant à des exercices déjà anciens. Au moment où la Société va quitter une partie de son local actuel et en prendre un nouveau, il est à désirer qu’une réforme soit faite dans ces papiers inutiles et qui occupent une assez grande place. À ces pièces doivent se joindre les notes relatives aux volumes de Mémoires retirés de chez les éditeurs, de ceux vendus aux membres ; aux volumes du Bulletin vendus aux membres nou- veaux et aux étrangers. La quatrième division comprend : 1° Les minutes des procès- verbaux des séances de la Société imprimés dans le Bulletin ; 2° Les procès-verbaux des séances du Conseil et les registres où ils sont transcrits 5 3° Les ordres du jour de ces séances et les listes des membres des commissions, reproduits dans les procès-verbaux -, ces ordres du jour et ces listes pourraient être supprimés sans in- convénient -, h° Les registres des noms des membres de la Société par ordre d’admission ; 5° Les registres d’envoi aux membres des feuilles du Bulletin. La cinquième division comprend la correspondance qui depuis huit ans a cessé d’être annuellement énumérée. Par dé- cision du Conseil, les lettres relatives aux affaires sont annexées aux dossiers de ces affaires. Dans les correspondances antérieures SÉANCE DU 16 MAI. 1853. 477 à 1849, il a été fait un choix de 422 autographes, la plupart, des membres de la Société, dont il existe un catalogue parfaite- ment au courant. Ges autographes, et les 21 portraits de géolo- gues illustres que possède la Société, prennent naturellement place dans cette section. Il est tenu un registre des lettres qui ont de l’intérêt et de celles qui émanent de la Société. 2e section. — Bibliothèque. Cette section comprend les livres, brochures, journaux, cartes, plans, dessins, offerts à la Société par ses membres, par les gouvernements français et étrangers , les publications des Sociétés savantes échangées avec les nôtres. À son arrivée , chacun de ces articles est inscrit dans un registre spécial, qui, au 31 décembre 1852, s’arrêtait au n° 8860. Le nombre des volumes était de 2443, mais il con- viendra d’y ajouter, à mesure de leur achèvement : 1° les ou- vrages publiés par livraisons ayant reçu chacune un numéro particulier ; 2° les publications par fascicules des Sociétés sa- vantes, formant généralement un volume par année. Les brochures, mémoires, extraits de publications savantes, qui forment une partie importante des richesses de la Société, sont, à cause de leur petit volume, d’une conservation difficile. Après avoir fait relier plusieurs ouvrages publiés par livraisons, l’archiviste précédent fit relier plus de 300 de ces brochures éparses, soit en réunissant celles d’un même auteur, telles que celles de MM. Fournet, Gatuîlo, Pilla, etc., soit en joignant celles qui traitaient un même sujet, comme les ossements fos- siles, ou décrivaient une même contrée. Les soins urgents que nécessitait la collection des cartes a fait suspendre ce travail 5 il est à désirer que les finances de la Société permettent bientôt de le reprendre. En ajoutant le nombre des volumes ainsi réunis à celui des ouvrages arrivés en volumes tout formés, on arrive à un total d’environ 2700 volumes, dont plus de 2000 s’occupant uniquement de géologie présentent déjà une des plus riches collections spéciales. La Société regrettera seulement de ne point posséder quelques ouvrages capitaux , surtout pour la SÉANCE DU 10 MAÏ 1853. 478 description des fossiles, tels que Cuvier, Sowerby, etc. Il serait à désirer qu’on pût en acquérir au moyen d’échanges avec des ouvrages possédés par la Société, et qui n’ont pour elle aucun intérêt, comme la philosophie de Dugald-Stewarl, etc. Outre le registre par ordre d’arrivée, il existe un catalogue par cartes tenu au courant, et un grand catalogue ouvert par l’archiviste précédent, où les ouvrages étaient inscrits par ordre de titres, de matières, de localités, de nom d’auteurs. L’archi- viste actuel l’a continué depuis deux ans seulement par noms d’auteurs, mais il a organisé un système de fiches qui permettra de le remettre bientôt au courant. Ii a de plus ouvert un cata- logue spécial pour les publications de Sociétés savantes où les numéros et fascicules sont inscrits à leur arrivée. C’est un registre important et qui manquait jusqu’à présent. Le nombre des cartes, et principalement des cartes géologiques, offertes à la Société, s’est considérablement accru dans ces trois dernières années, et, malgré d’importantes lacunes, présente une collection déjà très riche. Notre archiviste s’est spécialement occupé de la conservation d’un objet digne de tant d’intérêt. Une reliure avec onglet, qui permettra d’y placer à leur arrivée les feuilles non publiées, a déjà réuni en atlas la belle carte de France de l’état-major. Un grand nombre de cartes ont été collées sur toile ou renforcées en papier, mais noire archiviste a prudemment abandonné l’usage de les couper, et les conserve dans leur entier, ce qui en rend la disparition plus difficile. I! les a assemblées par divisions géographiques dans de grands cartons noués avec des cordons, ce qui permet d’arriver à celle que l’on cherche sans en froisser aucune. Il en a dressé un ca- talogue fort soigné, qui, outre les cartes possédées par la So- ciété, indique les lacunes assez peu nombreuses déjà pour que nous puissions espérer en voir bientôt combler une partie. La Société ne saurait avoir assez de reconnaissance pour les soins que notre honorable archiviste, M. Bourjot Saint-Hilaire, a apportés à cette intéressante partie de ses fonctions, et pour son zèle à rechercher dans les catalogues des bibliothèques publiques et des principaux éditeurs de la France et de l’étran- ger l’indication des cartes qui nous manquent, afin d’aviser aux moyens de nous les procurer. SÉANCE DU 16 MAI 1853. 479 3e section. — Collections . Les détails qui précèdent prouvent à quel point notre archi- viste s’est occupé des fonctions importantes qui lui ont été con- fiées. Malheureusement ses devoirs limitent le temps qu’il peut leur consacrer. La Société ne peut donc s’étonner qu’il n’ait pu donner les mêmes soins aux collections de roches et de fossiles qu’elle possède. Il semble admis aujourd’hui que la Société ne doit pas faire de collections -, elle avait cependant formellement décidé le contraire, à la suite de l’admirable rapport fait en 1839 sur la situation des archives par M. Desnoyers, Depuis quelques années , on a souvent négligé de mentionner au Bulletin les envois d’échantillons faits à la Société. Cette omission a excité les plaintes de plusieurs membres, notamment de M. Michelin. La collection de la Société a une importance réelle : sans doute il y a quelques réformes à faire outre celles qui ont été faites il y a quelques années. Elle se composera encore d’environ 10000 échantillons répartis dans 27 meubles, dont les tiroirs présentent une superficie de 150 mètres carrés, susceptibles, par conséquent, de recevoir 15000 pièces. La collection du bassin de Paris est loin d’être complète $ cependant elle com- prend presque toutes les roches et les espèces principales de fossiles, étiquetées, collées sur des cartons, numérotées et cata- loguées par l’archiviste précédent. Le catalogue par tiroirs et par ordre alphabétique a été égaré, mais chaque tiroir renferme les feuilles où il était reproduit-, i! sera donc facile de le refaire. Les deux meubles contigus contiennent des collections à l’appui de notes sur ce bassin, et un assez grand nombre de fossiles d’autres bassins, la plupart collés, étiquetés et catalogués. Les terrains crétacés offrent au moins 1600 échantillons. La pré- cieuse série des fossiles du Tourtia, don de M. Léveillé, est connue par le beau travail de M. d’Archiac, inséré dans les Mémoires de la Société. La collection des terrains crétacés contient en outre un assez grand nombre de rudistes, de fossiles de la Perte du Rhône, et des terrains néocomiens de Provence, presque tous collés et déterminés. Les terrains juras- siques sont représentés par un nombre d’échantillons plus considérable. On y trouve la collection qui avait servi à M. Bo- 480 SÉANCE DU 16 MAI 1853. blaye pour la comparaison de ces terrains en France et en Angleterre, véritable monument scientifique ; plusieurs fossiles donnés par M. Yoltz; une série des terrains oxfordiens de Bour- gogne, de plaques à insectes et poissons de Solenhofen, don de M. Boué; de coprolites du lias, donnés par M. Buckland ; des fossiles du lias de France et d’Angleterre, dont le plus grand nombre collés et étiquetés. Les terrains inférieurs sont plus incomplets ; ils offrent cependant quelques beaux échantillons, donnés par M. Léveillé -, une belle plaque de Dudley, par M. de Yerneuil -, et une jolie série de fossiles siluriens d’Angleterre, donnée récemment par M. Davidson. Outre ces collections, plus complètes, on le voit, qu’on ne le suppose habituellement , la Société possède encore de pré- cieuses collections à l’appui de mémoires, surtout celles de MM. Levallois, Cornuel, Marcou, Thorent; d’autres recueillies dans les sessions extraordinaires, notamment celles d’Autun, Boulogne, Aix, Chambéry, Grenoble-, 500 échantillons d’Au- vergne^ une collection de roches des Yosges, don de M. Rozet, qui a aussi donné plusieurs échantillons d’Algérie; une collec- tion de roches et fossiles d’Allemagne, étiquetés et catalogués, don de M. Boué, où Tailavignes avait trouvé de curieux échantillons des terrains nummulitiques de Bavière et du Cres- semberg-, des roches et fossiles d’Italie, par MM. Pareto, Bel- lardi, etc. ; une belle suite de roches de la Grèce, par M. Yirîet ; des roches erratiques de Finlande, des roches volcaniques de Feroë, de beaux échantillons des terrains carbonifères d’Amé- rique, etc., etc. On le voit, de telles richesses méritent une attention sérieuse. Le local que la Société doit recevoir permettra de les disposer dans un meilleur ordre. La Commission ne peut donc que s’as- socier pleinement au vœu de notre archiviste pour la création, dans le Bureau, d’un archiviste-adjoint, auquel le soin de la collection pourra être délégué. 4e section. — Mobilier . Le mobilier n’a reçu que de faibles augmentations. Les prin- cipales sont un calorifère, une échelle de bibliothèque, quelques casiers. De nouveaux corps de bibliothèque sont indispensables. SÉANCE DU 16 MAI 1853. hSi 5e section. — Magasin . Le magasin se compose de l’excédant des yolumesdu Bulletin # de la seconde série des Mémoires , et de V Histoire des progrès de la géologie , sur ce qui a été distribué ou vendu. Au 1er jan- vier il restait à la Société 981 volumes de la première série du Bulletin , 21 seulement ont été vendus l’année dernière. L’archi- viste précédent avait déjà appelé l’attention de la Société sur ce grand nombre de volumes dont la vente devient chaque jour moins probable. L’inégalité du nombre des volumes de la deuxième série des Mémoires et de Y Histoire des progrès de la géologie est également un fait assez malheureux et qu’il im- porte de signaler à l’attention du Conseil. Conclusions. La Commission demande à la Société de renvoyer à l’examen du Conseil les propositions qu’elle a faites ci-dessus : 1° Réforme des registres et pièces de comptabilité appar- tenant aux plus anciens exercices-, réforme des ordres du jour des séances et des listes des Commissions, devenus complète- ment inutiles. 2° Choix des ouvrages qui ne doivent point faire partie de la bibliothèque, ou qui encombrent le magasin, pour tâcher de les échanger contre des ouvrages essentiels qui nous man- quent. 3° Création d’un archiviste-adjoint auquel serait déléguée une partie des fonctions actuelles de l’archiviste. L’immense développement qu’a pris la Société géologique de France ne permet plus qu’un seul de ses membres puisse les remplir tout entières. Enfin, la Commission demande instamment que la Société adresse des remercîments à son honorable archiviste, M. Bourjot Saint-Hilaire, pour le zèle et l’intelligence qu’il a apportés dans l’exercice de ses fonctions. Le marquis de Roys, rapporteur . Soc. géol %* série , tome X. 34 SÉANCE D!J 6 JUIN 1853. 482 Séance du 6 juin 1853. présidence de m. levallois, vice-président. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite de la présentation faite dans la dernière séance , le Président proclame membre de la Société : M. Gigault de Crisenoy (Jules -Etienne) , aspirant de marine de première classe, à Paris, rue de Lille, 77, présenté par MM. Dufrénoy et Hugard. Le président annonce ensuite trois présentations. DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. La Société reçoit : De la part de M. le ministre de la justice, Journal des savants, mai 1853. De la part de M. Dollfus-Ausset, Matériaux pour V étude des glaciers , 5 grandes planches lithographiées en couleurs (d’après les dessins de MM. H. Hogard, Ed. Collomb et Dollfus- Ausset), représentant 2 Vues du glacier de VUnter-Aar , 1 Vue du glacier du Rhône , 4 Vue du glacier de Zinutt , 1 V 'ie, moraines , etc., d'un glacier de la vallée de Redretto ; impr. parE. Simon. Strasbourg, 1849, 1850 et 1851. De la part de M. J.-W. Foster, Report, etc. (Rapport sur ta géologie du district du lac Supérieur), par MM. J.-W. Foster et J.-D. Whitney, 2e partie, Région du fer , avec la géologie générale , in-8, 406 p., 35 pl., 3 cartes. Washington, j 1851, chez A. Boyd Hamilton. De la part de M. Henri Hogard, Coup d'œil sur le terrain erratique des Vosges , 1848, in-8, 139 p. Épinal, 1851, chez ' veuve Gley -, avec un Atias de 32 planches in-folio, publié par ! Dollfus-Ausset-, 1851, Strasbourg, chez E. Simon-, Épinal, chez Valentin. De la part de sir Charles Lyeil, On the remains , etc. (Sur les restes d’un reptile ( Denderpeton Acadianum , Wyman and Owen) et d’une coquille terrestre découverte dans la formation SÉANCE DU 6 JUIN 1853. 483 houillère de la Nouvelle -Écosse), par sir Charles Lyeli et J.-W. Dawson (extr. du Quart, Journ. of the geol. Soc , of Fond mai 1853 )j in-8, 10 p., 3 pi. Londres, 1853. De la part de M. A. Meugy : 1° Essai de géologie pratique sur la Flandre française [arrondissements de Dunkerque , Hazehrouck , Lille et Douai , département du Nord) j in-8, 307 p., 2 pl., 1852. Lille, chez Vanaekere -, Paris, chez Carilian- Gœury et Victor Dalmont^ Bruxelles, chez Muquardt. 2° Carte géologique de la Flandre française , comprenant les quatre arrondissements ci-dessus-, exécutée sur le plan topo- graphique du Dépôt de la guerre , 4 f. grand aigle. Paris, 1850, imp. deKaeppelin. De la part de M. le professeur E. Sismonda, Notizia sto- rica, etc. (Notice historique sur les travaux de la classe des sc. phys. et math, de l’Acad. roy. des sc. de Turin pendant les années 1851 et 1852) (extr. des Mém. de FAcad série II, t. XIII) -, in-A 77 p. Turin, 1853, impr. royale. De la part de M. Ville, Recherches sur les roches , les eaux et les gîtes minéraux des provinces cFOran et d’Alger; in-4, 423 p., h pL Paris, 1852, impr. nationale. De la part de M. J. Malinowski, Tableau synoptique de la géologie de la Côte-d'Or ; 1 f. grand in-f°. Impr. de Loireau- Feuchot. De la part de M. Victor Petit, Panorama du pic de Bergons , ■vue générale des vallées de Garantie, de Luz et de Baréges , dessiné par M. Victor Petit-, 2 lithographies coloriées. Paris, 1853, impr. Thierry frères. De la part de M. le professeur 0. Heer, Uebersicht , etc. (Coup d’œil sur la flore tertiaire de la Suisse) (extr. des nos84 à 88 des Mittheilungen der naturf Qesellsch. in Zurich ) • in-8, (57 p. Zurich, 1853. De la part de M. Fried. Roi le, Vçrsucli, etc, (Essai d’une comparaison du lias de l’Allemagne septentrionale avec celui de la Souabe) (Discours d’inauguration présenté en août 1852 à l’université de Tubinge) in-8, 47 p. Hombourg, 1853, impr. Louis Schick. Comptes rendus des séances de F Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXVI, n°s 20 à 22. SÉANCE DU 6 JUIN 1858. 484 Société impériale et centrale dé agriculture. — - Bulletin des séances , 2e sér., t. VIII, n° 5, séances du 6 avril au 4 mai 1853. Bulletin de la Société de géographie , he série, t. V, n° 27, mars 1853. V Institut , 1853, n°* 1011 à 1013. Réforme agricole , par M. Nérée Boubée, n° 56, 6e année, avril 1853. Mémoires de la Société d’ agriculture , des sc arts et belles- lettres du département de V Aube , t. IÏI , 2e sér., nos 19 et 20, 3e et l\e trim. 1851 ; t. III, 2e sér., n°s 21 à 2 h, ler à 4e trim. 1852 ; t. IV, 2e sér., nos 25 et 26, 1er et 2e trim. 1853. Mémoires de V Académie des sciences , arts et belles-lettres de Dijon , 2e sér., t. I, année 1851. Mémoires de la Société libre dé émulation du Doubs , 2e sér., IIe vol. 1851. Séance publique de la Société d' agriculture , commerce , sciences et arts du département de la Marne , tenue à Châlons le 27 septembre 1852. Précis analytique des travaux de V Académie des sciences , belles-lettres et arts de Rouen pendant Vannée 1851-1852. Bulletin semestriel de la Société des sciences, belles-lettres et arts du département du Var, 20e année, n° 2. 1853. The Athenœum , 1853, nos 1334 à 1336. Illustrirte Zeitung (Journal illustré). Leipzig, 9 avril 1853. M. le Président propose à la Société de fixer au jeudi 1er sep- tembre le jour de sa réunion extraordinaire à Valenciennes. La Société adopte cette proposition. En conséquence , MM. les membres qui voudront assister à la réunion extraordinaire de 1853 devront se trouver le jeudi 1er septembre, à midi, à l’hotel de ville de Valenciennes. Les excursions géologiques dureront depuis le 1er jusqu’au 10 septembre. Leur itinéraire sera réglé par les membres de la Société qui habitent sur les lieux. MM. les membres de la Société géologique qui seront présents à la réunion sont invités par M. le Président de la Société d’agriculture de Valenciennes à assister aux fêtes agricoles de SÉANCE DU 6 JUIN 1853, A85 l’arrondissement. Ces fêles auront lieu le 11, le 12 et le 13 sep- tembre. M. le secrétaire présente un numéro de Y Illustrirte Zeiturtg du 9 avril 1853, qui a été adressé à la Société : il contient la description d’une cérémonie funèbre que l’Académie des mines de Freiberg a fait célébrer en l’honneur de M. L. de Buch, son ancien élève. Il contient aussi des discours prononcés au sujet de l’illustre géologue par MM. B. Cotta , Breithaupt, etc. M. le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Raulin. Sur V Oxfordclay du département de V Yonne t par M. Victor Raulin. En lisant à la Société, le 3 novembre 1851 (1), une note sur le ter - rain crétacé moyen du département de V Yonne , nous annoncions que le terrain jurassique de ce département présente aussi, dans sa partie moyenne, des assises sur les rapports desquelles les géologues ne sont pas d’accord faute d’études suffisantes, et nous nous réser- vions de faire à ce sujet une communication ultérieure. Nous occupant de la rédaction de la Statistique géologique , nous avons pris les devants par rapport à cette partie des assises sédimen- taires , et c’est le résultat de nos recherches que nous exposons aujourd’hui. Nous désignons, avec la plupart des géologues, par la dénomi- nation d’ étage oolithique moyen , les assises situées entre les couches les plus supérieures de la Grande oolithe ( le Cornbrasli compris ) et les couches les plus inférieures des argiles à Exogyra virgula. Dans le département nous appliquons le nom d’ Oxfordclay aux assises qui se trouvent au-dessous du coral-rag ou calcaire blanc de Tonnerre, Bailly, Courson, etc. Cette division forme une bande qui court de l’E.-N.-E. à l’O.-S.-O, de Laignes à Entrains, et qui possède une largeur moyenne d’un myriamètre et demi. Examiné aux deux extrémités de la bande , dans les environs d’Ancy-le- Frane et dans ceux de Coulanges-sur-Yonne, i’Oxfordclay présente deux faciès très différents ; au N.-E. ce sont, à la base, des ar- giles avec fer hydroxydé oolithique exploité, puis des argiles et des marnes avec lits calcaires, et enfin, à la partie supérieure, des cal- caires compactes tabulaires un peu marneux, séparés par des lits (1) Bulletin t 2e série, t. IX, p, 25, SÉANCE DU 6 JUIN 1853. /186 marneux; au S. -O. les minerais de fer manquent ; sur les derniers bancs de la Grande oolithe viennent quelques couches de calcaire légèrement marneux, puis une immense masse, mal stratifiée, de calcaire blanc souvent Oolithique ou pisolithique, remplie de poly- piers ; la partie supérieure enfin présente les calcaires compactes tabulaires de la partie orientale , mais sans lits marneux. Sa na- ture argileuse, ses nombreux fossiles caractéristiques ont toujours fait ranger l’extrémité orientale de la bande dans FOxfordclay, tandis que la structure oolithique et les nombreux polypiers des assises coralliennes ont engagé la plupart des géologues à rapporter ces assises à un autre groupe. La seconde année de nos explorations dans l’Yonne, en 18^7 , ',j nous parcourûmes un peu rapidement , pour en prendre un pre- mier aperçu, les pays situés sur les deux rives de l’Yonne au-dessus de Cravant, depuis Courson jusqu’à Yézelay ; nous crûmes voir alors qu’il y avait entre la Grande oolite et les calcaires tabulaires Compactes, tantôt purs, tantôt avec des lits marneux intercalés, rapportés à l’Oxfordclay supérieur par tous les géologues, une grande assise de calcaire blanchâtre plus ou moins oolithique cjui devait dépendre de FOxfordclay, plutôt que des systèmes inférieurs ou supérieurs, contrairement aux opinions émises jusqu’ alors par MM. de Longuemar, Royer et Cotteati; nous remîmes à l'année suivante pour faire des études plus détaillées et prendre une opi- nion définitive. En effet, en septembre 1848, nous retournâmes sur les lieux, nous allâmes même visiter les localités critiques en compagnie de M. Cotteau ; nous eûmes le bonheur de trouver sur les deux rives de l’Yonne, clans le vallon qui remonte de Mailly- la- Ville vers Avigny et dans le coteau qui va de ce bourg à Maiiiy- le-Château, les superpositions nécessaires pour établir que les calcaires à polypiers de Châtel-Censoir, du Saussois et du Bois- du-Parc, ainsi que ceux de Coulanges - sur- Yonne, de Magny et de : Mailly-le- Château sont inférieurs et vont s’enfoncer au nord sous ij les marnes et calcaires compactes de Sery et clè Yennanton, aussi bien que sous ceux de Mailly-la-Ville et de Bazaine. Pour moi, la question fut décidée ; ces calcaires coralliens formaient la partie moyenne de FOxfordclay dans Fouest du département ; ils étaient un état calcaire de cet étage presque entièrement argileux dans J l’est. Nos excursions postérieures dans diverses parties du départe- ment vinrent corroborer l’opinion que nous nous étions faite , et que nous allons exposer en l’étayant de preuves suffisantes. Pour l’étude détaillée du groupe oxfordien , tel que nous le com- à87 SÉANCE DU 6 JUIN 1853. prenons, nous diviserons la bande qu’il forme dans le départe- ment de l’Yonne en autant de sections qu’il y a de coupures opé- rées par les grandes et moyennes vallées qui la traversent. Celles-ci étant au nombre de cinq, nous aurons nécessairement six sections ; chacune d’elles ayant en moyenne un myriamètre et demi de lon- gueur, il suffira le plus souvent d’une seule coupe dans la partie moyenne. Ces sections seront décrites de l’E.-N.-E, à l’0,-S.-0. dans l’ordre suivant : 1° Au N.-E. de l’Armançon. 2° Entre l’Armançon et le Serain. 3° Entre le Serain et la Cure. 4° Entre la Cure et l’Yonne. 5° Entre l’Yonne et le ruisseau d’Andries. 6° Au S. -G. du ruisseau d’Andries. 1° Au N.-E. de l’ Armancon. C’est dans cette section principale- ment qu’existent les minerais de fer désignés sous le nom de mine rouge , qui ont subi un léger remaniement à l’époque diluvienne. Dans la partie basse orientale sur le territoire des communes de Gigny, Sénevoy-le-Bas et Jully, on exploite sur beaucoup de points à la surface du plateau de la Grande oolithe, sur une épaisseur moyenne de 0m,75, une argile rouge qui renferme une grande quan- tité de grains oolithiques^ et aussi des concrétions de fer hydroxydé, des fragments de calcaire marneux avec oolithes ferrugineuses * et de calcaire compacte, et des fossiles en fer hydroxydé, parmi les- quels les moins rares sont les suivants (1) : Myoconeha Rathicriana , Pecten fibrosus , Lima proboscidea , Terebratula variait s, Dentalium Moreanum , P leur o loin aria M uns ter i , Ccrithium cingcndum, Ammonites lunula , — corda tus, — perarmatus , — plicatilis, Belemnites hastatus. Par-dessus on voit des argiles également rouges, mais ne renfermant que très peu de minerai, et dont l’épaisseur variable atteint quel- quefois de 2 mètres à 3m,30. Ces minerais sont lavés pour la plu- part dans des patouillets situés dans les trois communes; une partie cependant est transportée à ceux de Ravières; les résidus du lavage (1 ) Cette liste, ainsi que les suivantes, est extraite de celles, beaucoup plus étendues, que M. Cotteau et moi nous dressons pour la statistique minéralogique et géologique de l’Yonne. SÉANCE DU 6 JUIN 1853. m portent le nom de grappes, et renferment les fossiles qui sont plus abondants à Jully qu’ailleurs. En montant la route de Laignes à Tanlay, on voit l’Oxfordclay moyen formé par des marnes jaunâtres ou grisâtres, en couches assez épaisses d’abord, puis n’ayant plus que 0m,3 à la partie supé- rieure,, renfermant des lits moins épais de calcaire marneux gri- sâtre ; ces assises constituent la partie inférieure de la pente cou- verte de vignes. — C’est à la partie tout à fait supérieure, sans lits argileux, que dans la vallée de l’Armançon se trouvent les couches dans lesquelles sont ouvertes les grandes carrières de Pacy qui montrent la coupe suivante : Calcaire arénifère grisâtre, en couches de 0m,2 à 0m, 4 (découvert). . . 3m,50 Calcaire semblable, en bancs épais (moellon). . . 1m,50 Calcaire semblable, en 4 0 bancs de 0m,2 à 0n,,5 (taille, dallage) 4ni,00 Calcaire semblable, formant le banc inférieur, avec une bande gris bleuâtre de 0m,2 dans le millieu. 1ni,00 Les principaux fossiles sont les suivants : Disaster eilipticus , Mac trompa globosa f Cercomya an t ica, Trigonia clavellata, Modiola imbricata , Myoconcha Rcithieriana , Pholadomya parcicosta , Pholaclomya similis , Lima probosciclea , Gryphœa dilatatci , Terebratula inconstans , Ammonites Babeanus t — plicatilis, Nautilus gi gante us. L’Oxfordclay supérieur, sur la route de Laignes, commence par des calcaires un peu argileux, compactes, grisâtres, avec divers fossiles, en couches séparées par de petits lits de marne schisteuse grise, un peu endurcie. Autour de Cruzy, on en tire en abondance des dalles désignées sous le nom de lace, servant à couvrir les bâ- timents. Sur le plateau on extrait des bancs de calcaire compacte, et autour de Crot-Courcelles et de Mussaux, la partie supérieure est formée par des calcaires légèrement argileux, jaunâtres, avec di- vers fossiles, notamment les Terebratula corallina et Ammonites plicatilis ; les champs présentent des polypiers saccharoïcles roulés. Ces couches vers le N. vont passer par-dessous les calcaires blancs du coral-rag de la forêt de Maulnes. Parmi les fossiles, on peut citer encore les : SÉANCE DU Ô JUIN 1853. 489 Apiocrinites Murchisonianus , Cidaris Blunienbachii, Pholadomya cingulata , — trapezina , — parcicostn , Mytilus pectinatus , Modiola plicata , — tulipea , 2° Entre ? Armancon et le Serain . Dans cette section existe le minerai de fer désigné sous le nom de gme ou m//?e c/z rocÆc qui est en grains oolithiques disséminés dans des argiles gris jau- nâtre non remaniées. C’est au N. d’Etivey qu’étaient les princi- pales extractions. Elles ont été abandonnées en 1847, par suite du chômage prévu du haut fourneau d’Âisy. Le minerai était riche , mais le fer était trop cassant. Du minerai rouge remanié a été aussi exploité pendant plus de trois cents ans, dit-on, sur di- vers points au N. d’Etivey, pour les hauts fourneaux d’Aisy et de Buffon, et pendant quelques années, jusqu’en 1849, au N. de Châtel-Gérard. Les dernières traces de Ter hydroxydé oxfordien vers l’O. se trouvent dans le bois au S. de Jouancy, où il y a une couche de 2 mètres au plus d’épaisseur d’un calcaire argileux gris se réduisant facilement en fragments et contenant de nombreuses oolithes ferrugineuses et les fossiles habituels. Cette couche est séparée de la Grande oolitlie par un banc de calcaire arénifèregris. La pente et la colline au N. -O. d’Etivey sont formées par des marnes grisâtres avec des lits de calcaire marneux que l’on re- trouve, après avoir traversé le vallon de Sanvigne, en montant sur le plateau de Pasilly qui présente de nombreux lits de calcaire compacte blanchâtre alternant avec des marnes. L’Oxfordclay supérieur, de Pasilly à Moulins et Sambourg, se distingue à peine du moyen, composé qu’il est aussi de calcaires compactes alternant avec des lits de marnes grisâtres. Les parties supérieures à Angy, au S.-E. de Tonnerre, sont formées par des calcaires compactes, à rognons plus durs, brunâtres, donnant de la pierre dure. 3° Entre le Serain et la Cure. En sortant de Noyers par la route d’Aigremont, on voit au-dessus de la Grande oolitlie des calcaires marneux compactes, tabulaires, grisâtres, puis une grande épais- seur de marnes et d’argile gris jaunâtre avec lits de calcaire com- pacte. L’Oxfordclay supérieur est surtout formé par des calcaires com- pactes en petites couches séparées par des lits marneux. Les car- Perna cpiadrata, Gervillia aviculoides , Pecten lens , Ostrea solitaria , Terebratula insignis , Phasianella striata , Pleurotom ari a subiineata . SÉANCE DU 6 JUIN 1858. /|90 rières d’Arton, qui fournissent des dalles et de la lave pour la cou- verture des bâtiments, appartiennent à la partie moyenne et présentent des calcaires compactes grisâtres en couches de 0rn,05 à G m, 20, séparées par de très petits lits marneux qui renferment parfois des fossiles. La partie supérieure est formée par des calcaires compactes sans lits marneux, recouverts par les calcaires blancs du coral-rag à Chemilly. Une composition semblable se poursuit par Nitry jusqu’au delà de Joux-la-Yille ; mais à Précy-le-Sec, les lits et couches de cal- caire compacte augmentent d’épaisseur, les argiles et les marnes disparaissent en grande partie. Sur le flanc oriental de la vallée de la Cure, dans la côte de Chaux, la nature des couches à consi- dérablement changé ; au-dessus du tunnel de la nouvelle route d’Avallon, on voit les calcaires oolithiques jaunâtres de la partie supérieure de la Grande oolithe, dans lesquels il est ouvert, se lier à des calcaires compactes, grenus, gris jaunâtre clair, complète- ment massifs, à grands escarpements verticaux, qui composent la partie inférieure de l’Oxfordclay sur 12 à 15 mètres de hauteur, et qui sont recouverts par des calcaires compactes grisâtres, plus ou moins bien stratifiés. L’Oxfordclay supérieur dans la descente de l’ancienne route de Lucy-le-Bois à Vermanton est formé par des alternances de marnes grises et de calcaires compactes grisâtres , mais c’est surtout dans le coteau qui est à 10. de ce dernier bourg, qu’on voit bien sa composition ; la base présente des argiles et des marnes grises avec des lits et des bancs de calcaire compacte grisâtre qui s’en sépa- rent mal ; ces alternances existent jusqu’au sommet du coteau où les calcaires compactes finissent par prédominer. Il en est de même dans le coteau au N, de Cravan , où les calcaires supérieurs compactes légèrement brunâtres, en lits de moins de 0rn,l d’épais- seur, passent sous les calcaires blancs du coral-rag d’Irancy. Dans le voisinage du confluent de la Cure et de l’Yomie, l’Ox- fordclay présente ainsi une composition inverse de celle qu’il a habituellement, la partie calcaire étant inférieure et îa partie mar- neuse supérieure. 4° Entre la Cure et l’Yonne. Sur le flanc occidental de la vallée de la Cure, au-dessus des calcaires oolithiques jaunâtres supérieurs de la Grande oolithe, occupée par les vignes de Saint-Moré, on voit d’abord des bancs de calcaire compacte légèrement grisâtre, irré- gulièrement scliistoïde, puis des calcaires grenus blancs, sans stra- tification, renfermant de petits fossiles. Plus haut, à mi-côte, en allant vers Arcy, il y a dés calcaires grenus et pisolithiques blancs SÉANCE DU 6 JUIN 1853. /s 91 renfermant des coquilles et des polypiers, et qui sont exploités à peu de distance au-dessus des grottes. Par suite d’une pente assez rapide des couches vers la partie inférieure de la vallée, on trouve l’Oxfordclay supérieur en descen- dant à Arcy ; ce sont des alternances de marnes et de calcaires compactes grisâtres qui ont une grande épaisseur et dans lesquelles les calcaires deviennent dominants et même exclusifs au-dessus d’Accolay. Sur le flanc oriental de la vallée de l’Yonne, à Châtel-Censoir, immédiatement au-dessus des calcaires oolithiques jaunes , avec lits de silex rubané, appartenant à la partie supérieure de la Grande oolithej on voit des alternances de calcaires compactes à rognons siliceux et de calcaires un peu marneux renfermant beaucoup de fossiles, et surtout les suivants : Disaster ovalis , Pholadomya cor , Trigonia clavellata , Pinrla lanceolata , Gennllia aeicaloides, Lima rigida > Pecten subfibvosus , — F ird u n en s is , Hin n i tes in œ q u i stria tas , | Gryphœa dilatata, Terebratala insignis , — la s;en ali s , I 0,7 Naticci cymba , Par p ara Lapiërréu , Am m on ites plie a ti lis , — Backeriœ , — can ali cala tus $ Nanti las gi gant sas. Par-deSsus viennent des calcaires compactes, grenus, légèrement grisâtres, des calcaires compactes blanchâtres â polypiers, JNéri- nées, et enfin des calcaires grossiers blancs, avec nombreux fossiles formant de gros bancs exploités dans une dizaine de petites car- rières et donnant de belles pierres de taille. A peu de distance et alternant avec eux, on voit des calcaires pisolithiques blancs remplis de fossiles appartenant à des genres abondamment répandus dans le coral-rag et le caractérisant; les espèces les plus abondantes de cette grande assise sont les suivantes : Mynophyllia rastellina , Ce h H astre a gran ala ta , Becticœnia Michelini, Aclelocœnia tabulosa, Eanomia lœvis, T h ecosm i lia B a v ign ieri , Cardinal corail/ na/n , Opis Coüeàusia , Diceras arielinay Lima alternicosta , Pecten inœqnicoslatus , — te ris, H in n i tes inœq a is tria tu s , Ostrea ainôr, Terebratala insignis, P i le o las cos ta tas } Nerinea Cal li ope. • — snbcylindrica , SÉANCE DU 6 JUIN 1853. h 92 Neririeci Defrancii , — Desvoidyi , Ditremaria ornata , Purpura Lapierrea, — Mo s ce , Au Saussois, il y a des escarpements verticaux de plus de 50 mè- tres de hauteur qui sont formés par des calcaires en partie com- pactes, sans la moindre trace de stratification, renfermant une grande quantité de polypiers ; ils sont supérieurs aux précédents. Dans le Villon qui remonte de Mailly-la- Aille à A vigny, on voit les bancs supérieurs, qui sont, les uns de calcaire grossier blanc, peu stratifié, à polypiers, les autres de calcaires oolithiques en gros bancs, donnant de belles pierres de taille et de grandes auges. Près d’Avigny ce sont des bancs pisolithiques grisâtres que l’on ex- ploite, et il y a de nombreux polypiers sur le plateau. Immédiatement au-dessus vient l’Oxfordclay supérieur qui, dans le même vallon, commence par des calcaires compactes, légère- ment grisâtres, en lits de 0m,l , alternant avec des calcaires marneux schistoïdes ; à ces couches succèdent des marnes d’une grande épais- seur, et à la paitie supérieure les calcaires prédominent de nou- veau. Par Accolay, cette assise , et son équivalente dans la partie orientale de cette section, se rattachent à celle de Yermanton dont elles ne sont séparées que par la plaine de l’Yonne. 5° Section cuire l'Yonne et le ruisseau cl’Andrics, Autour de Coulanges-sur- Yonne, la partie inférieure est au-dessous du ni- veau de l’Yonne, et les pentes des coteaux ne montrent que des calcaires blancs, les uns compactes, d’autres oolithiques, les autres à pisolithes, tantôt stratifiés, le plus souvent massifs, sur d’assez grandes épaisseurs, dans lesquels sont ouvertes des carrières à di- verses hauteurs. La forêt de Frétoy, dont le soi est entièrement formé par ces calcaires, présente fréquemment de grosses masses de calcaire grenu qui ne sont que de gros polypiers arrachés à ce calcaire et usés à leur surface. L’Oxfordclay supérieur, dans le voisinage de la vallée de l’Yonne, commence par des alternances de marnes et de calcaires compactes , et se termine par ces derniers ; mais à mesure que l’on marche vers FO., on voit les marnes diminuer, et c’est à peine si au S. de Courson, elles forment de petits lits interposés entre les couches de calcaire compacte, soit à' Anus pour la partie inférieure, soit à la grande source de Courson pour la partie tout à fait supérieure. 6° Section a l’O. du ruisseau cl’ Andries* A Druies, par suite d’une faille, on voit apparaître la Grande oolithe, sur laquelle aux SÉANCE DU 6 JUIN 1853. m Mailloderies existent des calcaires compactes et grossiers légèrement grisâtres, renfermant des rognons siliceux, dans lesquels il y a fré- quemment des échinides et des térébratules. Bans le vallon à Bois- Avril, on tire des calcaires terreux fins, jaunâtres, à rognons siliceux blanchâtres, renfermant des encrines, pboladomyes, térébratules et ammonites. Le coteau de Bouloy montre des calcaires terreux jaunâtres, tendres, renfermant de nombreux rognons siliceux plus foncés, et par-dessus des calcaires compactes jaune brunâtre, avec nombreux polypiers grenus indistincts. A Braies, autour des sour- ces, il y a de gros bancs rocheux d’un calcaire grossier et grenu, grisâtre, à encrines ; la pente, au sommet de laquelle est situé l’an- cien château, est formée par des calcaires marneux, tendres, à rognons siliceux, au milieu desquels sont des bancs irréguliers d’un calcaire compacte gris et rose fendillé, à polypiers grenus très adhérents et indéterminables. Sur le plateau enfin, il y a des bancs puissants de calcaires blancs, tantôt pisolithiques avec polypiers, tantôt grossiers avec empreintes de fossiles; les bancs supérieurs devant la Fosse-au-Prêtre sont pisolithiques, à fossiles et polypiers grenus. L’Oxfordclay supérieur, à Fougilet et à Lain, est formé par des calcaires compactes tabulaires blanchâtres, alternant avec quelques lits marneux à la partie inférieure seulement. Bans la partie occidentale, entre Etais et Sainpuits, la vaste carrière de Chevigny montre un calcaire grossier et oolithique blanc sans stratification, exploité sur 10 à 12 mètres de hauteur; au-dessus, vers le Gallois, il y a des calcaires blancs grossiers, avec pisolithes et polypiers fréquents dans les champs, et enfin des calcaires compactes blancs, à pisolithes. Ges derniers, dans la mon- tagne des Alouettes , sont surmontés par les calcaires compactes, tabulaires, sans traces de lits marneux, qui constituent l’Oxford- clay supérieur. Résumé et conclusions . Si nous résumons ce que les coupes pré- cédentes renferment d’essentiel, nous voyons que l’Oxfordclay du bassin de Paris, dans la partie de son bord comprise dans le dépar- tement de l’Yonne, se divise en trois assises. L’inférieure, épaisse de quelques mètres seulement, est formée par des argiles gris jau- nâtre. Elle renferme du fer hydroxydé oolithique exploité comme minerai de fer, qui est tantôt en place (Etivey), et tantôt a subi un léger remaniement à l’époque diluvienne (Sénevoy-le-Bas). Elle n’a pas été trouvée jusqu’à présent à l’O. du Serain. L’assise moyenne, depuis la limite orientale du département jusqu’auprès de la vallée de la Cure, est formée par des argiles, SÉANCE DU f) JUIN 1853. m des marnes et des calcaires compactes, alternant ensemble un grand nombre de fois ; les derniers prédominent à la partie supérieure. Sur les deux flancs de la vallée de la Cure, la portion inférieure est formée par des calcaires compactes, massifs, sans stratification, la portion moyenne par des calcaires pisolitbiques à coraux, et la portion supérieure par des calcaires compactes. Dans la vallée de l’Yonne, et à l’O., la base est formée par des calcaires un peu mar- neux, parfois compactes, à rognons siliceux ; au-dessus viennent des calcaires blancs pisolitbiques avec nombreux fossiles, des calcaires oolithiques peu fossilifères, ou des calcaires grossiers renfermant de très nombreux polypiers. Cet ensemble calcaire ne saurait être distingué minéralogiquement du coral-rag ; la superposition seule démontre qu’il ne fait pas partie de celui de l’Yonne, et qu’il est un équivavalent de la partie moyenne de l’Oxfordclay oriental ; à Druies accidentellement ce système possède en partie une nature marneuse, mais il conserve les polypiers. L’assise supérieure est partout formée par des calcaires com- pactes tabulaires dans lesquels on observe d’autant moins de lits marneux interposés, qu’on se rapproche davantage de l’O. ; ex- ceptionnellement au point de réunion des vallées de la Cure et de l’Yonne, elle est grise, beaucoup plus argileuse et marneuse que partout ailleurs, ce qui établit un contraste frappant avec l’assise moyenne qui, par-dessous, est uniquement à l’état de calcaire plus ou moins blanc avec polypiers. Tous les auteurs qui n’ont connu que le faciès argileux du nord- est, l’ont rapporté à l’Oxfordclay, en raison delà composition mi- néralogique et des fossiles, notamment M. Elie de Beaumont en 1829 et en 1848 (1) et M. J. Beaudouin pour le prolongement im- médiat dans le département de la Côte-d’Or (2) ; les argiles à fer iiydroxydé ont toujours été considérées par eux comme la base de l’étage oolithique moyen. M. d’Orbigny, le premier, en 1852 (3), a. séparé en deux parties cette assise qui a 10 mètres de puissance au plus : l’une située aux environs de Cliâtillon-sur-Seine, dans l’ouest du département de la Côte-d’Or, qu’il laisse à la base de l’Oxfordclay , dans son douzième étage (étage Callovien ) ; l’autre située dans l’est du département de l’Yonne, qu’il place à la partie (1) Ann. des sc. nat ., t. XVII, p. 257 et 265. — Explic . de la carte géol. de la Fr. , t. II, p. 469-475. (2) Bull, de la Soc. géol. de Fr., 2e sér.. t. VIII. p. 582 et suiv. (3) Cours étém. de paléont. et de géol. straügr ., t. II, p. 514 et 526. SÉANCE DU 6 JUIN 1853. 495 moyenne dans son treizième étage ( étage Ocejçrdien). Comme les raisons qui ont motivé ce dédoublement n’ont pas été publiées, nous continuons , avec les géologues qui nous ont précédé , à croire cette assise une et indivisible , d’abord parce qu’elle occupe la même place dans la série des couches , ainsi qu’on peut s’en assurer en passant d’un département dans l’autre, et ensuite parce que les corps organisés fossiles appartiennent en grande partie aux mêmes espèces. Mais lorsqu’on est venu à connaître le faciès calcaire du sud- ouest, des opinions très différentes ont été émises. M. de Longue- in ar, qui s’en est occupé le premier en 1843 (1), ayant vu que les couches inférieures blanches à polypiers passent par-dessous les couches marneuses de Vermanton, les rapporta au calcaire à po- lypiers ou Jorest-marhle, faisant des calcaires compactes supérieurs le Kelloway’s-rock. Mais M. Cotteau dès 1844 (2) combattit cette opinion et rapporta les calcaires blancs au coral-rag. M. Royer en 1845 (3), avec les membres de la Société géolo- gique réunis à Avallon, rapporta le système argileux de Ver- manton à l’Oxfordclay, et les calcaires blancs inférieurs au coral- rag ; il expliquait par des failles la position de ces derniers, plus méridionale et à un niveau inférieur. M. Cotteau en 1847 (4) adoptait ce classement; mais il pensait qu’il n’était pas nécessaire d’admettre l’existence de failles, et que le coral-rag s’était déposé presque directement sur une protubé- rance de la Grande oolithe, sans l’interposition de la plus grande partie de l’Oxfordclay qui, suivant lui. n’aurait pas recouvert cette dernière. — Lorsque nous eûmes établi ensemble, de la manière la plus incontestable, que ces calcaires blancs passent par-dessous le système argileux et calcaire de Vermanton, M. Cotteau renonça à l’opinion qu’il avait émise, mais il ne partagea pas la nôtre; les considérations paléontologiques l’emportèrent à ses yeux sur toutes les autres, peut-être parce qu’il n’avait pas étudié l’Oxfordclay à l’E. de la Cure et de l’Yonne, tant dans la partie orientale du dé- partement que dans celui de la Côte-d’Or. Il préféra en 1850 (5) (1) Etude géol. des terrains de la rive gauche de l’Yonne , p. 3 7, et Coupes , fig. 1 . (2) Annuaire statistique de l’Yonne , p. 236 et suiv. (3) Bull, de la Soc. géol. de Fr., 2e sér., t. II, p. 71 4 et suiv. (4) Bull, de la Soc. des sc. hist. et nat. de l’Yonne , t. I, p. 23 et suiv., 307 et suiv. (5) Bull, de la Soc. des sc. hist. et nat. de l’Yonne , t. IV, p. 187 et suiv. SÉANCE DU 6 JUIN 1853. 496 maintenir ces calcaires dans le coral-rag, appliquant ainsi ce nom à un ensemble qui comprit alors le coral-rag véritable de Courson, de Bailly et de Tonnerre, les calcaires marneux et compactes tabu- laires de Cruzy, Yermanton, etc., le calcaire à polypiers de Cou- langes-sur-Yonne et d’Etais. Il admit que l’Oxfordclay, si puissant dans la partie orientale, était réduit à une très faible épaisseur dans la partie occidentale , et n’était plus représenté que par quel- ques couches de calcaires marneux avec Gryphœa dilatata et autres fossiles oxfordiens existant entre les calcaires à coraux et la partie supérieure de la Grande oolitlie. M. d’Orbigny, guidé par des considérations paléontologiques, les plus importantes à ses yeux, et malgré ce que nous lui avions dit en octobre 18â8 sur la position réelle des calcaires blancs à polypiers, Dicérates et Nérinées de Châtel-Censoir, a pris en 1852 (1) le singulier parti de les réunir au coral-rag de Bailly et de Ton- nerre , tout en laissant dans l’Oxfordclay (2) le système marneux et calcaire de Vermanton et de Tanlay qui les sépare. Il résulte de là que ses deux étages Oxfordien et Corallien empiètent l’un sur l’autre, et ont des parties contemporaines. Quant à nous, considérant, d’une part, que l’ensemble que nous avons décrit a toujours été rapporté en entier à l’Oxfordclay, tant dans le département de l’Yonne, à l’E. de la Cure, que dans celui de la Côte-d’Or ; et, d’autre part, que cet Oxfordclay paraît bien correspondre à celui qui , dans les départements de la Haute- Marne, de la Meuse et des Ardennes, est placé au-dessus du coral- rag de Juzennecourt , de Saint-Mihiel et de Novion , nous ne pensons pas qu’il doive être réuni, pour la plus grande partie, au coral-rag , malgré la grande analogie des faunes ( nous dirons même une identité partielle). Nous ne nous déciderions à scinder cet ensemble et à imiter M. Cotteau qu autant qu’il viendrait à être démontré que les calcaires coralliens de Châtel-Censoir sont contemporains des parties inférieures du coral-rag de Saint- Miliiel ; fait qui ne pourrait être établi que parla confection des cartes géologiques de la Côte-d’Or et de la Haute-Marne, ou bien par des explorations spéciales que nous entreprendrions, si nos oc- cupations nous en laissaient le temps. Quoi qu’il en soit, la vallée de la Cure, à Arcy , est un point à partir duquel des couches (rapportées par nous à la partie moyenne de l’Oxfordclay ) prennent vers le N.-E. une nature argileuse et (1) Cours élém. de paléont. et de géol. stratigr. , t. II, p. 538. (2) Cours élém. de paléont. et de géol. stratigr, , t. II, p. 527. SÉANCE I)U 6 JUIN 1858. 497 vers le S. -O. une nature calcaire. Cette vallée est située à l’extré- mité du Morvan, cette Pointe du plateau central qui s’avance au milieu de l’Oolithe inférieure, et qui occasionne un étranglement très considérable dans la bande qu’elle forme au N. d’Avallon. On doit supposer que ce cap avancé pouvait occasionner au voi- sinage de la côte, dans la mer jurassique londino-parisienne, pen- dant le dépôt de l’étage oolithique moyen, des courants sous l’in- fluence desquels les sédiments argileux de l’E., qui se prolongent dans la Bourgogne et la Lorraine, faisaient place à FO. à des pré- cipités calcaires qui se continuent dans le Nivernais et le Berry. On ne peut cependant s’empêcher de remarquer que le lias et l’étage oolithique inférieur n’ont pas éprouvé d’influence semblable de la part de ce cap avancé, puisqu’ils possèdent une composition minéralogique peu différente dans les départements de la Côte- d’Or et de la Nièvre, à Semur et au S. de Clamecy ; mais pendant leur dépôt la mer londino-parisienne communiquant encore lar- gement avec celle du Jura et celle du S. -O. de la France, les cou- rants y étaient, sans doute, bien différents de ceux qui ont pu s’y manifester plus tard lorsque ces deux communications ont été fermées. Le passage latéral, incontestable pour nous, du N.-E. au S. -O., de bancs marneux et calcaires à des bancs calcaires avec polypiers, n’a rien qui doive surprendre. L’existence d’une faune en partie analogue et identique avec celle du coral-rag à une époque antérieure à celui-ci ne nous semble nullement impossible à concevoir et à admettre, des dépôts, minéralogiquement semblables, qui se font dans le sein des mers à des époques différentes, devant nécessaire- ment permettre l’existence d’animaux analogues , et même iden- tiques, si les périodes ne sont pas trop éloignées les unes des autres, ainsi que cela a lieu pour la partie moyenne de FOxfordclay et le coral-rag qui repose directement sur la partie supérieure. C’est là un fait de répartition de corps organisés fossiles qui a la plus grande analogie avec celui auquel M. Barrande (1) a récemment appliqué le nom de Colonies dans les terrains de transition de la Bohême. (1) Bull, de la Soc. géol. de Fr., 2e sér., t. YÏIÏ, p. 1 53; et t. IX, p. 308 Soc. géol., V série , tome X. 32 SEANCE DIJ 20 JUIN 1853. /i98 Séance du 20 juin 1853. présidence de m. levallois , vice-président. M. Delesse, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Par suite des présentations faites dans la dernière séance, le Président proclame membres de la Société : MM. Bruckmann, ingénieur sondeur, à Denain (Nord), présenté par MM. Delanoüe et Delesse $ De Fromentel (Ed.), docteur en médecine, à Gray (Haute- Saône), présenté par MM. Perron et Saëmann $ Lambert (Fabbé) , à Chauny (Aisne) , présenté par 1 MM. Deshayes et Hébert. dons faits a la société. La Société reçoit : De la part de M. Delesse, Sur le gisement et l9 exploitation de V or en Australie (extr. des Annales des mines , 1853, t. III, p. 185)$ in-8, 28 p. Paris, 1853. De la part de M. Hébert, Extrait d’une lettre à M. d’Oma- lius d’ Halloy, sur des fossiles recueillis à Marlinne [Belgique) (extr. des Bulletins de l’Académie royale de Belgique, t. XX, n° 4)y in~8, 5 p. Bruxelles, 1853. De la part de FEtat de New -York, Na tarai history of New- York, — Part. VI, P alœontology , vol. II, by James Hall: in -4, 362 p., 85 pl. Albany, 1852, chez Ch. van Benthuysen. Comptes rendus des séances de V Académie des sciences , 1853, 1er sem., t. XXXVI, nos 23 et 24. Annuaire de la Société météorologique de France , t. I, : 1853, I re part., Bulletin des séances , f. 5-8 • in-8. L’Institut , 1853, n«* 1014 et 1015. The quarterly Journal qf the geological Society of London , vol, IX, part. II, mai 1853, n° 34. The Ai heuœum , 1853, nos 1337 et 1338. Neues Jahrbuch , etc. (Nouvel annuaire pour la minéralogie, Bull, de- la. Soc. Ceol'. de France 5 2?Sdr-ie ,r.X,Pl.lX,Fcu,e 499 r SÊ[ -juvjnuq vuproaj «ijWjlj cvc)/i vuapojj puvuG I ] ■tu ( .copia/ pur.it> 1 sv/qvysppvum/Si ui °8£* •tu °9S't svufôj svp tntrv/d jip qoy -np tmortqj : • svFisni svp v°nd^LG90£' ■y-»»- Gravé par les 'Jfrèr'es Avril vue des Bernardins îS . Lith. Faeppclin. O. Voltaire ravis. youpe du Plan amènerai , suivant AB Sooooo séance du 20 juin 1853. 499 la géognosie et la géologie, etc.), de Leonhard et Bronn, année 1853, 2e cahier. Zweiter Bericht, etc. (2e et 3e comptes rendus de la Société des sciences naturelles et médicales de la Hesse supérieure in-8. Revisïâ minera , 1853, nos 8-74 (15 septembre 1850— 15 juin 1853); in-8. Madrid, chez veuve D.-A. Yenes. M. Ch. Deville annonce à la Société qu’un grave dceideht est arrivé à l’un de ses membres, M. Coquand, qui, dans une ex- cursion géologique aux environs de Besançon, a fait une chute d’une hauteur de 20 mètres. L’état de santé de M. Coquand n’inspire cependant pas d’inquiétude, et l’on petit espérer que cet accident n’aura point de suites. M. Maillard, ingénieur colonial des ponts et chaussées, à S’île de la Réunion (Bourbon), met sous les yeux de la Société un plan en relief de cette lie, qu’il a exécuté à l’échelle de , -0-0- . M. Maillard lit ensuite le travail suivant : Note sur Vile de là Réunion , par M. L. Maillard, ingénieur colonial. Avant l'ouverture de la séance, j’ai eu l’honneur de mettre sous les yeux de la Société le relief de l’île de la Réunion, que j’ai construit à l’échelle de 4 5 0Vo o- Ce travail a pour base une trian- gulation faite avec beaucoup de soin pendant les années 1823, 1824 et 1825 par M. Schneider, ingénieur-géographe ; je me suis aussi servi du lever des côtes fait en 1847 par le lieutenant de vaisseau Cloué. J’ai du continuer le travail de la triangulation pour déterminer quelques points inaccessibles, mais généralement toutes les hauteurs ont été mesurées au moyen d’un baromètre à siphon de Bunten. Pendant mes courses, un observateur placé au bord de la mer, sur le point le plus rapproché de la partie à ex- plorer, marquait de demi-heure en demi-heure les variations des deux thermomètres et d’un baromètre Fortin qui, comme celui à siphon, avait été comparé aux étalons de l’Observatoire de Paris; enfin, les calculs pour déterminer la hauteur de chaque lieu d’observation ont été faits au moyen des tables d’Oltmans. Le relief que je vous présente sera accompagné d’une carte topographique qui lui servira, pour ainsi dire, de légende. Cette 600 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. carte, dont la publication a été ordonnée par M. le ministre de ; la marine, sera terminée prochainement, et j’espère, d’ici à deux mois, vous faire hommage d’un exemplaire. Ici, messieurs, devait s’arrêter ma communication ; mais M. Ch. S.-C. Deville ayant pensé qu’il vous serait agréable d’entendre le récit d’un voyage que j’ai fait au cratère brûlant, si vous voulez bien le permettre, je vous dirai quelques mots à ce sujet. Comme vous l’avez remarqué sur le relief (v. pl. IX), l’ensemble de l’île de la Réunion se compose de deux mamelons principaux, dont un seul conserve encore un volcan en activité. La première partie, celle N. -O., contient plusieurs cirques intérieurs, tandis que la seconde se compose principalement de deux enceintes nommées, dans le pays, les Enclos. Pour aller au volcan, deux routes sont praticables. La première en restant toujours dans l’intérieur du grand Enclos, c’est-à-dire en partant du point B, situé sur le bord de la mer, pour se diriger vers le cratère en suivant les coulées les plus solides ; mais dans ce parcours, outre le danger d’être blessé par l’effondrement des laves dont les canaux intérieurs ne sont souvent recouverts que d’une croûte friable de 10 à 15 centimètres, on ne trouve ni bois, ni eau, ni plantes pour se faire un abri. La seconde route, plus longue mais plus sûre, passe par le che- min de l’intérieur, qui traverse l’île par le col principal, dont on appelle le plateau supérieur, la Plaine des Cafres. De ce point, en se dirigeant vers le volcan, on ne rencontre de véritables diffi- cultés que pour descendre le deuxième Enclos et pour gravir les pentes du volcan, où se renouvellent, mais sur un bien moindre parcours, les dangers qu’offrent les couches de laves friables. Ce deuxième passage est celui que mes compagnons et moi avons préféré, et après deux jours de marche, en partant de Saint-Benoît, nous sommes arrivés sur le bord du premier Enclos, que nous avons descendu sans grande peine et au pied duquel nous avons couché. Dans cette première partie du voyage, le sol était presque tou- jours composé de terre végétale et parfois d’immenses plaques de laves mises à nu par les pluies ; mais le lendemain matin l’aspect du sol à parcourir avait complètement changé 2 nous étions dans la plaine dite des Sables, qui se compose en totalité de laves bri- sées par petits fragments et dont j’ai l’honneur de vous offrir un échantillon. Dans cette plaine, de plusieurs lieues d’étendue, se trouvent quelques mamelons de forme demi-circulaire et composés du 501 SÉANCE D5J 20 JUIN 1853. même sable que la plaine qu’ils dominent. 11 semble que la lave, lors de sa sortie par ces cratères, se soit trouvée en contact avec de grandes masses qui, par un refroidissement subit, l’ont fait se fen- diller par parcelles; et l’aspect général de la plaine fait supposer que ce sable a été nivelé, soit par des eaux qui peut-être ont fait éruption en même temps que la lave, soit par les pluies torren- tielles qui, à la Réunion, donnent quelquefois 500 millimètres d’eau en vingt-quatre heures. Ce nivellement, du reste, date de loin puisque l’on trouve encore à la surface de la plaine des fils vitreux, appelés, dans le pays, cheveux du volcan, quoique celui-ci n’en ait pas rejeté depuis environ quarante ans, époque où j’ai entendu dire qu’il en avait couvert toute la colonie. En arrivant sur le bord du grand Enclos, dont le sommet est à 2556 mètres au-dessus du niveau de la mer, on retrouve les cou- ches de laves compactes, de telle sorte que le sable semble finir à rien, ainsi que l’indique la figure (pi. IX). A l’entrée de la plaine des Sables, en nous levant de grand matin, nous avons observé un phénomène assez singulier : le plan général du sol se trouvait exhaussé de 2 à 3 centimètres autour des objets que nous avions laissés sur le sol, et, en marchant, nos pieds y entraient aussi de la même quantité; examen fait, nous avons reconnu qu’une couche générale de sable sur un seul grain d’épaisseur avait été soulevée par des prismes de glace qui s’étaient formés dans la nuit, aux dépens des évaporations du sol. Partis de la base du premier Enclos à six heures et demie, nous sommes arrivés à neuf heures sur le bord du deuxième, qui pré- sente une forme demi-elliptique, ainsi que l’indique le croquis, mais qui cependant a du être primitivement circulaire, si l’on en juge par le contour des grandes pentes C, D, et aussi par le piton E, appelé piton de Crac, qui semble avoir fait partie de cet Enclos primitif, et qui se compose, comme le grand Enclos, de couches de laves superposées, presque horizontales, et ayant de 1 à 3 et h mètres d’épaisseur. Nous avons éprouvé d’assez grandes difficultés pour descendre dans le grand Enclos par le Pas de Belcombe, qui a 252 mètres de hauteur (le seul autre endroit praticable, appelé Pas de Bory, est encore plus élevé) ; aussi ne sommes-nous arrivés au pied de l’escarpement qu’à neuf heures et demie. Là, bien que le sol se compose de laves toutes récentes, nous avons examiné avec éton- nement un petit piton isolé, formé de sable entièrement semblable à l’échantillon que vous avez sous les yeux. Ce piton, que l’on appelle le Formica- Léo } a environ 80 mètres de diamètre, et, au 502 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. plus, 15 mètres de hauteur. Son cratère, presque nivelé par les pluies, présente une calotte concave d’environ 20 mètres d’ouver- ture sur 5 ou 6 de profondeur. Les laves récentes ont diminué la hauteur de ce piton qui aurait déjà disparu si le grand cratère n’avait pas cessé de couler. Après avoir gravi les pentes du grand cratère, nous sommes arrivés sur son sommet à onze heures un quart, ayant passé par d’anciens cratères GG', recouverts en partie par les laves qu’a vomies le cratère principal, actuellement, éteint, dont le dia- mètre est d’environ 200 mètres , et la profondeur varie entre 10 et 20 mètres. Des vapeurs se font encore jour à travers les Os- sures de la lave qui forme le fond de ce cratère. Cette nappe semble s’être figée avant d’avoir pu déborder. Elle est à peu près horizontale; aussi les différences de hauteur de la muraille inté- rieure du cratère ne proviennent-elles pas du plan de laves refroi- dies, mais bien des dentelures et ondulations que présente le ccu^ ronnement circulaire du cratère. Après être restés quelque temps au cratère principal , nous sommes descendus vers le cratère brûlant , avec la presque certitude de le trouver froid, car les vapeurs qui s’en échappaient étaient à peine visibles Mais si nous avions pu supporter le con- tact de celles du grand cratère qui, quoique très visibles, ne sont que légèrement chaudes, ont peu d’odeur de soufre et semblent se composer en grande partie de vapeur d’eau, il n’en a pas été de même de celles que laisse échapper le cratère brûlant. Nous avons été forcés de faire le tour de ce cratère et de l’aborder par la partie exposée au vent; encore, dans les revirements de brise, étions-nous presque suffoqués par les vapeurs sulfureuses. Rien, messieurs, ne peut décrire le grandiose du phénomène que nous aperçûmes, lorsqu’après nous être mis à plat ventre, de manière à ne laisser passer au-dessus de l'abîme que la tête et les épaules^nous vîmes, au fond d’un puits de 150 mètres de diamètre et de 200 à 300 mètres de profondeur, une nappe noire, au S.-E. de laquelle paraissait se remuer une énorme sphère de matière en fusion, rouge clair, et représentant comme le bouillonnement d’une maimite. Quand, par moments, cp bouillonnement prenait un peu plus d’intensité, la nappe noire se fendait pu plutôt s’étoi- lait à partir dp ce point O comme centre , et la matière rouge, cpmpriinée par le poids de cette couche, ou poussée par une force intérieure, se faisait jour sous forme d’un énorme bourrelet, qui bientôt se refroidissait et ressoudait la surface un moment désunie, jparfois il sc formait d’autrps brisures d’une fente à l’autre, et si le ! SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 503 polygone ainsi détaché était petit, les bourrelets de lave en fusion se rejoignaient, et les plaques détachées, I, I, I, semblaient s’abî- mer dans la masse rouge-cerise qui apparaissait alors au-dessous de la croûte noire. Du bouillonnement de la partie S.-E. sortaient les vapeurs qui avaient coloré en jaune toute la muraille, sur une largeur de 30 à U0 mètres; puis ces vapeurs, projetées par le vent, allaient se perdre dans l’atmosphère par la partie où nous n’avions pu abor- der le cratère. Tel était, messieurs, l’état du volcan dans un moment, fort rare à la Réunion, où, pour les habitants du bord de la mer, il parais- sait parfaitement éteint. Ordinairement, au contraire, s’il ne vomit pas de laves, il s’en échappe toujours comme un nuage de vapeur et de fumée qui, en temps calme, se présente, le jour, sous forme d’une immense colonne de fumée, et, le soir, semble une colonne de feu. Je vous présente ici deux échantillons, l’un de lave telle qu elle sort du cratère, l’autre de roches anguleuses ayant jusqu’à 2m,00 de longueur, qui paraissent avoir été rejetées par le volcan. Ces roches sont, les plus grosses, à 2 et 3 mètres du bord de la mar- mite, pour me servir d’un terme local, les plus petites, à 20 ou 30 mètres. Les laves qui coulent du cratère brûlant vont rarement jusqu’à la mer. Ordinairement, après s’être déversées pendant quelquevS jours, il semble que, la pression intérieure augmentant, le cratère devienne insuffisant pour l’écoulement. Il en résulte que la mon- tagne se crève (ordinairement dans les grandes pentes en K, et rarement dans le piton central). Quand ce phénomène a lieu, on peut être à peu près sûr que la lave coulera jusqu’à la mer. En 18ùû, me trouvant à Sainte-Rose, le soir, sur les sept heures et demie, tous les habitants de la sucrerie où je m’étais rendu furent mis en émoi par une forte détonation. Nous sortîmes dans la cour, et au même moment nous vîmes s’échapper du cra- tère une forte lueur accompagnée de flammes, de fumée et de pierres rougies. Puis, deux ou trois minutes après, une masse de matières en fusion se déversa par-dessus le bord du cratère; les lueurs et les flammes cessèrent au même moment. Deux jours après ce commencement d’éruption, la coulée qui était descendue de plusieurs milles s’arrêtait; une nouvelle coulée se faisait jour sur le flanc du piton de Crac, et arrivait à la mer quinze ou vingt jours après. C’est de cette coulée que provient l’échantillon ci -joint. Je l’ai SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 50/f pris chaud au moyen d’une pelle, et vous remarquerez dessus une empreinte que j’y ai formée avec une lettre de fer servant à mar- quer les ballots de sucre. Avant de terminer, messieurs, permettez-moi de vous entre- tenir d’un phénomène assez remarquable. Bien qu’à la Réunion on ne puisse, à cause de l’action variable du sol sur l’aiguille ai- mantée, se servir de la boussole pour déterminer une méridienne, je 1’employais quelquefois comme simple instrument à mesurer les angles. Me trouvant un jour sur le bord d’un ancien cratère, à la source de la rivière des Remparts, j’avais observé l’angle que formait l’aiguille avec une direction donnée. Quand, plus tard, je voulus vérifier mon observation, je trouvai une erreur sensible. Cette erreur s’étant renouvelée plusieurs fois, j’observai l’aiguille avec soin, et je m’aperçus que, sollicitée probablement par des cou- rants intérieurs, elle faisait des soubresauts brusques, des espèces d’embardées qui allaient de 3 à à degrés de chaque côté de la ligne à relever; puis, après chaque soubresaut, l’aiguille restait fixe et comme collée à sa nouvelle position. Ces changements de position avaient lieu toutes les trente à soixante secondes, tantôt à droite, tantôt à gauche, quelquefois par grandes embardées, quel- quefois n’atteignant le maximum de déclinaison qu’après trois ou quatre petites stations, enfin d’une manière tout à fait irrégulière. Telles sont, messieurs, les principales observations que j’avais à vous soumettre. Dans quatre mois, je retourne habiter la Réunion pour quelques années encore. Je me mets donc entièrement à votre disposition pour tous les renseignements que vous croirez utiles à la science. A la suite de cette communication, M. Ch. S.-C. Deville ajoute qu’il a eu l’occasion d’examiner chimiquement quelques échantillons de la collection envoyée à l’Ecole des mines par M. Maillard -, en les comparant à ceux de la même île qui exis- tent dans le cabinet du Collège de France, ces roches offrent de l’intérêt à plus d’un point de vue. Lorsque son travail sera ter- miné, M. Deville se propose d’en communiquer les résultats à la Société. M. Michelin fait observer que les flammes sont assez rares dans les volcans, et que plusieurs géologues ont même mis leur existence en question. Il demande donc à M. Maillard s’il a vu de véritables flammes. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 505 M. Maillard répond affirmativement. D’après M. Delanoüe, dans les éruptions volcaniques il ne se produit de véritables flammes que lorsqu’il se dégage un gaz combustible -, mais un gaz , même non combustible , se déga- geant à la température rouge produira toutes les apparences de flammes. Dans une ascension faite au Vésuve avec L. Pilla en 1835, M. Delanoüe croyait voir des flammes se produire, bien qu’il se dégageât seulement du gaz chlorhydrique lumineux et incandescent. M. le secrétaire donne lecture de la note suivante : Sur les mines de cuivre et de houille de la Caroline du Nord (extr. d’une lettre de M. Charles J. Jackson à M. Delesse). Boston, Massachusetts, 1853. Je me suis occupé récemment de l’étude de plusieurs mines im- portantes de cuivre et d’or qui se trouvent dans les Etats de la Caroline du Nord et du Maryland, ainsi que de l’étude de mines de plomb qui se trouvent dans l'Etat de New-York. Les mines de cuivre de la Caroline du Nord sont très impor- tantes, comme on vient de le reconnaître récemment. Elles pré- sentent un fait géologique curieux ; en effet, la pyrite de fer, qui est exploitée pour l’or qu’elle contient, est remplacée à une profondeur de 100 à 200 pieds par de la pyrite de cuivre : il en résulte, ainsi que je l’ai fait voir, qu’il est possible d’entreprendre l’exploitation du cuivre dans certaines mines où l’exploitation de l’or avait été abandonnée. La Compagnie des mines de cuivre de la Caroline du Nord extrait même des minerais qui contiennent 25 à 30 pour 100 de cuivre, et elle réalise des bénéfices considé- rables. La séparation du cuivre et de l’or présente de grandes difficultés, mais j’espère parvenir à les surmonter. On trouve avec ces mines de la Caroline du Nord des couches d’une houille excellente et très bitumineuse, qui appartient au terrain du nouveau grès rouge. Avec cette houille, j’ai observé un grand nombre d’écailles de poissons ganoïdes, ainsi que de copro- lites et des dents de poissons sauroïdes. J’ai observé également une très grande quantité de carapaces de Cypris. Il est vraisemblable que nous avons aux Etats-Unis de la houille appartenant à trois terrains différents, savoir : 506 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 1° L’anthracite ainsi que la houille bitumineuse du Maryland, de la Virginie et de la Pennsylvanie, qui appartiennent au terrain ..boitiller proprement dit. 2° La houille de la Caroline du Nord, qui appartient au nou- veau grès rouge. 3° La houille, à l’est de la Virginie, près de Richmond, qui appartient au moins au terrain basique ; car, d’après MM. Rogers et Agassiz , les poissons et les plantes du bassin de Richmond se rapportent à des genres basiques et même oobtiques. Je me propose d’étudier ce sujet intéressant d’une manière plus complète, M. Deshayes lit ensuite une notice sur des fossiles rapportés du Yucatan par M. Morelet. Note sur quelques fossiles rapportés parM. Morelet du Yucatan (Amérique centrale) , par M. Deshayes. M. Morelet, l’un des membres distingués de la Commission scientifique d’Algérie, après avoir honorablement rempli sa mis- sion, animé d’un zèle bien louable en faveur de l’histoire natu- relle, entreprit, pour sa propre satisfaction, un voyage de recher- ches dans des provinces peu connues de l’Amérique méridionale. En effet, le Guatemala et le Yucatan avaient été peu visités jus- qu’alors par les naturalistes, et surtout par ceux de notre nation. Les récoltes de M. Morelet, faites avec l’intelligence que donne une science déjà -acquise, furent à la fois abondantes et précieuses dans tous les genres. Les collections publiques de Paris et de Dijon, dans lesquelles l’intrépide voyageur a généreusement dé- posé les objets recueillis avec tant de soins et de dépenses, témoi- gnent de leur importance et prouvent avec quel désintéressement M. Morelet avait compris la pénible et périlleuse mission qu’il s’était imposée. Dans le cours de son voyage, il ne négligea pas non plus la géologie. Les matériaux sur cette science, récoltés par M. Morelet et déposés au Muséum de Paris, viendront plus tard à l’appui des observations qu’il se propose de publier dans un ouvrage plus étendu, qui eut été digne des encouragements du gouvernement, et qui, malgré l’abandon où on le laisse, ne verra pas moins bientôt le jour. Aux environs de Mérida, dans le Yucatan, se trouve un terrain ca icaréo-mar n eu x , dans lequel M. Morelet a récolté Un petit SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 507 nombre de fossiles. Quoique réduits pour la plupart à l'état de moules, ils ont cependant beaucoup d’intérêt, car ils sont, je pense, les seuls qui , jusqu’ici , aient été rapportés de cette région de la terre. Ces fossiles ont appartenu à deux couches bien distinctes : l’une marneuse, contenant de nombreux fragments; l’autre calcaire, dure, compacte, semblable, par sa contexture, à la roche fossili- fère de la Guadeloupe. Il y a probablement aussi une couche plus argileuse, dans laquelle se trouvent de grandes Huîtres. L’état imparfait dans lequel se montrent les fossiles de M. Morelet ne permet pas toujours leur détermination spécifique rigoureuse. On peut y distinguer des formes génériques, et, malgré ces imper- fections, il est évident, pour nous, qu’ils ont appartenu à un ter- rain tertiaire dont l’àge paraît assez difficile à fixer d’une manière absolue. Cependant, nous pouvons affirmer déjà que ce terrain n’est pas contemporain du terrain tertiaire inférieur : nous ne trou- vons aucune forme qui ait la moindre analogie avec celles si bien connues et dépendantes de cette grande époque géologique. Les couches tertiaires de Mérida viendraient .donc se classer, soit dans les terrains tertiaires moyens, soit dans les terrains supérieurs. Déjà de grandes collections de fossiles de l’étage moyen ont été faites dans les îles du golfe du Mexique; M. So.verby les a fait connaître dans le journal trimestriel de la Société géologique de Londres, et nous-même nous les avons examinées avec attention pendant notre dernier séjour à Londres. INous n’avons observé, il est vrai, aucune espèce commune avec celles de M. Morelet; mais des collections beaucoup plus considérables, récemment arrivées à Londres, pourraient jeter un nouveau jour sur la question, en faisant connaître quelques espèces analogues aux nôtres. Si nous comparons les fossiles de Méricla avec les espèces ac- tuellement vivantes, nous remarquons plus d’analogie, et malheu- reusement nous ne pouvons nous prononcer sur l’identité de cer- taines espèces, nos fossiles étant pour le plus grand nombre d’une conservation trop imparfaite. Néanmoins, il résulte d’un examen très attentif des lormes fossiles avec les espèces actuellement vi- vantes les plus proches, qu’il n’y en a qu’une ou deux que l’on pourrait dire identiques; toutes les autres sont évidemment diffé- rentes. Il est donc à présumer que les fossiles de M. Morelet ne sont pas non plus du terrain tertiaire supérieur, dans lequel les formes actuellement vivantes se montreraient en abondance et avec une évidence qui ne permettrait pas le moindre doute. La seule place qui leur convienne dans la série de§ terrains tertiaires est 508 SÉANCE DU 20 JUIN 1858. indiquée dans le terrain moyen. Cette opinion n’est point, pour nous, définitive; mais elle nous paraît la plus conforme aux faits que nous connaissons. Voici la liste des espèces, telle qu’il nous a été permis de l’établir. Mollusques acéphalés . 1 . 1 . Tellinct , très courte en arrière, voisine du spectcibilis de Hau- ley par sa forme générale, 2. 2. — ovale, inéquivalve, presque équilatérale, striée transver- salement, probablement de la section des Arcopagia. 3. 3. — plus arrondie que la précédente, probablement lisse et équivalve. 4.4. — ovale, subtrigone, voisine du panicea pour la forme géné- rale, mais moins aplatie et présentant un pli postérieur plus mince et plus profond. 5. 1. Lucina , orbiculaire et subglobuleuse , voisine de Yeductula , plus voisine encore du tumida de Reeve. 6. 2. — espèce plus petite, orbiculaire et globuleuse, mais un peu plus aplatie que la précédente; elle rappelle un peu le divaricata. 7. 3. — transversalement ovoïde, très globuleuse; elle n’a d’ana- logie qu’avec une grande coquille fossile rapportée d'Égypte. 8. 1 . Periploma?. Il est probable que cette coquille appartient à ce genre, mais la charnière est trop dégradée pour qu’on puisse l’affirmer positivement; sa taille et sa forme rappellent le Periploma inæquivalvis de Schumacher, 9. 1. Venus , coquille trigone, couverte de lames minces, écartées et disposées à peu près comme dans le peruviana. Une lunule ovale lancéolée. 10. 2. — forme très courte en avant, rappelant assez bien la va- riété renflée du Venus Peronii , Lamk. 11. 1. Tapes , espèce de la grandeur du Venus decussata, un peu plus courte en arrière, assez voisine aussi du literata Chemn., mais plus bombée, striée transversalement. 12. 1. Dosinia P, coquille orbiculaire, aplatie, inéquilatérale, à cro- chets courbés en avant. 13. 2. — plus petite, plus équilatérale, les crochets plus petits et moins courbés. 14. 1. Cardium, de la forme du medium , Lin. 15. 2. — voisin du bullatum , plus court en avant. 16. 1. Pectuneulus, de petite taille ; les deux côtés de la charnière forment entre eux un angle presque droit. 17. 1. Area , voisine de Y umbonata de Lamk., mais plus courte et plus renflée. Toutes les coquilles que nous venons d’inscrire sont à l’état de SÉANCE DU 20 JUIN 1853, 509 moules ; ces moules sont peu nets; ils indiquent des formes géné- riques , mais n’offrent pas des caractères suffisants pour recevoir des noms spécifiques. Il n’en est pas de même pour le petit nombre d’espèces de mollusques acéphales monomyaires que nous avons à inscrire ; leur test est conservé. 18. 1. Pecten Moreleti , Desh. P. testa ovato-oblonga ? symetrica , œquivalvi , œquilateraii ; regularitcr radiatim costata; costis 20 convexis ? interstitiis œquantibus striis tenuissime lamellaribus regalaribus in dorsn costarum antice armatis ’ auriculis magnis , subœqua-' libus y tenuissime longitudinaliter striatis ; auricula antica ra- diât! f)i tricostata . 19. 2. Pecten y ucatanensis, Desh, P. testa suborbiculari, convexiuscula , subœquivalvi ? œqui- lateraii, radiatim costata ; costis viginti et quatuor , cr assis, quam interstitiis latioribus , planis , lateraliter crenatis , in dorso lœvigatis interstitiis tenuissime transversim striatis ; auriculis latis ; tenuissime striatis 7 radiatim costellatis ; auri - cala antica quadricostata . 20. 3. Pecten mericla/iensis, Desh. P. testa orbiculari , convexiuscula , œquilateraii , multicos- tata * costis 21 convexis , regulariter triparti lis, quam inter- stitiis p aulo latioribus ; striis transversa libus, tenais sim is, re- gularibus, iarnellosis , ?>z convexitate costarum tripartitis . 21. 1. Ostrea Moreleti, Desh. O. elongata, angusta, crassissima, in meclio gibbosa; lamellis irregularibus concentricis contabulata ; umbonibus elongatis acuminatis,fossula cardinali vcilvœ injerioris late et profonde canaliculata, utroque latere margine piano convexo cire um data ; in valva superiore umbonis faciès convexa ; impréssione musculari subtrigona infra dimicliam partetn valvarum posita. Grande espèce voisine de V Ostrea virginea , mais qui en est différente par les lames d’accroissement à l’extérieur, par la charnière et l’impression musculaire. Mollusques céphalés . • 22. 1. Scalaria , un moule qui a conservé quelques restes du test; l’espèce est très voisine du varicosa, Lamk.? qui vit au Brésil ; peut-être même serait-elle identique avec lui. 23. 1. Natica, moule d’une espèce d’un volume médiocre, à spire subconoïde. 24. 2. — autre espèce d’une forme un peu différente., à spire très plate. 25. 1 . Cyprœa , un moule d’une espèce petite, de la grandeur du cribraria , mais indéterminable. 610 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. Radin ires éch inoderm es . 26. 1. Clypeaster meridanensis , Michelin, belle espèce voisine du placunarius , distincte de toutes celles du même genre. 27. 2. — plus petit que le précédent, plus aplati, probablement variété plus jeune. 28. 3. Echinocyamus. ïl a beaucoup d’analogie avec Y altavillensis d’Agassiz, 29. 4. Brissopsis , espèce plus grande que les espèces connues aujourd'hui. Notre collègue, M. Michelin, au savoir duquel j’ai soumis les quatre Echinodermes précédemment cités, a bien voulu m’adres- ser d’intéressantes observations, que je transcris ici. 1° Quoiqu’il n’y ait pas identité entre vos deux Clypeaster , ils me semblent appartenir à l’espèce que j’ai décrite dans la Revue zoologique sous le nom de Clypeaster meridanensis . Le Clypeaster placunarius de la mer Rouge, dont il se rapproche beaucoup, présente une foule de variétés; on peut juger par ana- logie que vos deitx individus appartiennent à une même espèce. 2° L’ Êchinocyamhs a beaucoup d’analogie avec Y altavillensis d’Agassiz ; cependant il est un peu moins épais, et ne présente pas un petit bouton au milieu de la rosette ambulacraire ; il est aussi un peu plus arrondi que ses congénères vivants ou fossiles : c’est probablement une espèce nouvelle. 3° Le troisième fossile me paraît, par la disposition de ses am- bulacres, dépendre du genre Brissopsis , dont je ne connais d’in- dividus vivants, aujourd’hui, que dans la Méditerranée et les mers du nord de l’Europe. Il y a cependant un caractère particulier, c’est que la fasciole entoure les ambulacres à une certaine distance, au lieu de les circonvenir. D’après les observations de M. Michelin, il en est des Echino- dermes comme des Mollusques • ils n’ont pas de représentants dans la nature actuelle. Nous ne terminerons pas sans faire remarquer la grande dispro- portion qui existe, dans la localité visitée par M. Morelet, entre les Mollusques acéphalés et ceux des autres ordres. Ainsi, sur 29 espèces, 21 sont de la classe des Acéphalés, 17 Bimyaires, A Monomyaires, A seulement de la classe des Mollusques, et 3, peut-être A , de la classe des Radiâires échinodermes. Ces espèces , vues dans l’erusemble de leurs formes, semblent avoir encore leurs représentants dans la nature actuelle ; mais, examinées dans tous 511 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. leurs caractères, elles constituent des espèces distinctes, à l’excep- tion de deux : le Lucina n° 1, qui est très probablement le Lucina orbicularis de Reeve, et le scalaria , qui a tous les caractères du varicosa de Lamarck. Des faits que nous venons d’exposer, nous avons donc pu conclure légitimement que les terrains tertiaires des environs de Mérida , malgré leur apparence de formation récente, dépendent en réalité des terrains tertiaires moyens. M. Delesse , secrétaire, donne lecture des mémoires qui suivent : * IS/oîe sur quelques localités de l'Aude, et particulièrement sur certains gîtes épicrétacés , par M. A. Leymerie. J’ai profité d’un court séjour que j’ai fait en septembre dernier, aux enviions de Castelnaudary (Aude), pour visiter quelques gîtes très connus que je n’avais pas encore vus par moi -même : Issel, Villcneuve-le-Comtat , Caunes ; et pour revoir plusieurs gisements épicrétacés, notamment Genne , MoUtolieu et les basses Corbières. Je dirai un mot de chacun de ces gîtes, pas- sant rapidement sur les premiers. Localités tertiaires. Issel. — Le village d’Issel est situé sur un léger replat , à une faible hauteur au-dessus delà vallée du Fresquel, base de la mon- tagne Noire. On y monte par une rampe assez rapide d’abord sur une argerène ( argile marno- sableuse ) jaune avec parties solides marno-calcaires en bancs peu suivis, puis sur une petite assise de marne bleuâtre sous-jacente à un dépôt sableux cpii constitue le sol du village et le gîte à ossements. Celui-ci se trouve derrière ou au nord du village. On y voit le grès mollasse ordinaire traversé par des veines de grès à gros éléments ou de conglomérats siliceux , et souvent ferrugineux, où se sont réfugiés les fossiles. On trouve fréquemment dans ces roches grossières des plaques de carapace ou de plastron de tortue, des mâchoires de Lophiodon , des débris de crocodiles Si l’on continuait à marcher sur la montagne Noire derrière ce gîte, on ne tarderait pas à rencontrer le terrain ancien ( granité, gneiss, schistes et calcaires de transition ) qui constitue les environs de Lcibécède. 512 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. La présence des Lophiodons et d'autres fossiles analogues à ceux du bassin de Paris a engagé quelques paléontologistes à rappor- ter cette assise d’Issel à l’étage inférieur du terrain tertiaire. Rien dans la constitution géognostique de la contrée ne m’a paru ap- puyer cette manière de voir. Les sables à ossements reposent sur des argerènes qu’il n’est guère possible, quant à présent, de séparer de la masse du terrain miocène de notre grand bassin. Nous devons dire, toutefois, que les sables dont il s’agit pourraient passer sous les marnes et calcaires à coquilles lacustres que nous allons signaler à Villeneuve-le-Comtat. Villeneuve-le-Comtat. La vallée du Fresquel est séparée de celle du canal du Languedoc par une colline allongée marneuse à la base et sableuse vers le haut. Castelnaudary se développe en am- phithéâtre sur le versant S. de cette colline, au pied de laquelle se trouve le canal. C’est en face de cette ville , de l’autre côté de la vallée du canal, vers la base des collines assez élevées qui limitent cette vallée au S., que se trouve Villeneuve-le-Comtat. La vallée atteint U kilomètres de largeur , et offre un sol très plat , qui résulte évidemment d’un comblement alluvien, bien qu’on n’y remarque maintenant aucun cours d’eau naturel. a. Terrain marno-sableux jaunâtre ou gris cîair (mioeège ordinaire de là contrée). b. Marnes d’un gris sombre, schisteuses, c. Calcaire blanc lacustre, fossilifère. SÉANCE DU 20 JUIN 1858. 515 Les coteaux de Villeneuve présentent ce phénomène remar- quable : que les couches analogues à celles de Castelnaudary se voient seulement à la base, tandis que presque toute leur hauteur est occupée par des marnes schisteuses et sableuses d’un gris sombre , se délitant en paillettes et en plaquettes , qui alter- nent avec des assises de calcaire blanc ou rosé. C’est dans ce calcaire activement exploité comme pierre à chaux pour toute la contrée , et même pour Toulouse , que l’on trouve les remar- quables coquilles d’eau douce et terrestres signalées d’abord par M. Boubée, et plus tard décrites et figurées par M. Marcel de Serres (1). Ces coquilles, si belles par leurs dimensions inusitées, et quelques unes par les stries élégantes dont elles sont recouvertes, n’ont été rencontrées que là ou dans des localités dépendantes du même gîte. C’est aussi dans ce lieu que M. Bunal a trouvé un equi- setam plus grand que tous ceux qui vivent actuellement en Europe. On y a, d’ailleurs, rencontré assez fréquemment des débris de mammifères, et notamment des mâchoires de palœotherium. Ces couches, dont l’ensemble offre une puissance plus grande que celle des collines de Castelnaudary, forment-elles une assise supérieure sous laquelle les couches de ces dernières collines viendraient plonger par suite d’une légère inclinaison au S. de la montagne Noire ? Cela me paraît assez probable. Localités èpicrétacées. Les courses que j’ai faites dans les formations épicrétacées avaient pour but : 1° de me donner la satisfaction de voir le terrain marin àNunnnulites de la montagne Noire superposé au calcaire à Physes ; 2° de vérifier les faits sur lesquels Tallavignes avait basé la divi- sion du terrain nummulitique en deux étages distincts séparés par le soulèvement pyrénéen. Pour satisfaire au premier de ces deux desiderarida7]e partis un matin, avec mon neveu, de Puginier, village situé à la pointe ex- trême de la montagne Noire du côté de l’occident, dans le dessein d’aller coucher à Montolieu eu suivant le versant de la montagne Noire à une hauteur supérieure à celle du terrain tertiaire. La route de Castelnaudary à Revel marque, à peu près à la hau- teur que nous avions adoptée, la séparation du dépôt tertiaire et du terrain ancien de la montagne. Entre cette route et Labécède sont (1) L’étude de ces fossiles a été reprise par M. Noulet, Soc. géol 2e série, tome X, 33 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 51A des gneiss avec filons de quartz, percés par des leptynites. A Labé- cède même , le sol est constitué par des schistes argileux , quel- quefois sableux , très fissiles , avec calcaires bleuâtres lamellaires (terrain de transition). La distance qui sépare Labécède de Yerdun est occupée princi- palement par des micaschistes. Ce dernier village est situé d’une manière pittoresque au haut et sur le bord d’un profond vallon» Les granités passant au leptynite y dominent ; on les voit tra- verser le gneiss schisteux et le micaschiste. Ce n’est qu’à 2 ou 3 kilomètres avant d’arriver à Cenne que l’on voit enfin le terrain ancien revêtu d’une plaque de calcaire blanc d’apparence lacustre, qui n’est autre chose que le calcaire a Physes. Nous avons marché pendant quelque temps sur ce calcaire, sans rencontrer aucune trace de calcaire marin à Nümmulites. A Cenne même, le fond du vallon où est situé ce village offre un gneiss à gros éléments noduleux au-dessus duquel on voit, de chaque côté, se développer le calcaire blanc lacustre. Si de ce point on se dirigeait vers le S. par la route de Castel- naudary,on monterait presque immédiatement sur le calcaire blanc par une côte rapide terminée par un replat après lequel une autre côte moins longue, mais plus roide encore, montrerait un calcaire très grossier avec les fossiles marins habituels du terrain à Nummu- lites proprement dit. Ici la superposition de ce terrain sur l’autre est des plus claires et de toute évidence. En sortant de Cenne du côté opposé , vers la montagne , on ne trouverait que le calcaire blanc, et bientôt après le terrain ancien. Entre Cenne et le causse de Montolieu, le terrain ancien se montre souvent. C’est principalement un beau gneiss à nodules feldspathiques et mica noir, avec filons et amandes de quartz ; tou- tefois , à moitié chemin à peu près , vers une métairie , on coupe une petite langue de calcaire marin à Mélonies. Le causse, qu’il faut traverser avant de descendre à Montolieu, est un plateau de calcaire blanc à Physes, légèrement incliné au S. La descente de ce plateau SÉANCE DU 20 JUIN 1858. 515 montre des escarpements de ce calcaire, et c’est seulement en entrant à Montolieu même que l’on voit le gneiss constituer les. rives du ruisseau qui traverse la ville. Le calcaire blanc à Physes est très développé à Montolieu; mais il ne se montre que vers le N., où les couches s’élèvent de manière à former un cirque blanc qui s’enfonce au S., immédiatement après la ville, sous les couches assez sombres du calcaire marin. Cette disposition explique comment je ne vis pas ce calcaire dont, au reste, j’ignorais l’exis- tence, la première fois que je me rendis à Montolieu en 18Ù3. Je venais de Carcassonne : arrivé à l’entrée de la ville , je croyais avoir achevé la coupe du terrain à Nummulites , et, pressé de re- partir, je quittai ces contrées sans aller plus loin. Récemment M. Raid in a comblé la lacune que j’avais laissée dans cette partie de mon mémoire sur le terrain à Nummulites de l'Aude (1). Cette circonstance me dispense, à cet égard, de tout détail. On voudra bien me permettre, toutefois, de donner le croquis du coteau que couronne la petite chapelle de Saint-Roch. Je dois dire encore qu’étant allé à Garnies pour visiter le terrain dévonien qui fournit les marbres si célèbres, dits de Languedoc, j’ai trouvé là un nouvel exemple de la superposition du calcaire marin au calcaire blanc lacustre. Il est donc prouvé surabondam- ment que dans la montagne Noire, le terrain épicrétacé se com- pose de deux assises , dont l’une est marine : c’est le terrain à Nummulites proprement dit (partie supérieure); l’autre assise, qui est toujours inférieure à la première, est composée de calcaire blanc lacustre où l’on trouve , dans certains bancs , et seulement (1) Bull, de la Soc. géol . , 2e sér., t. Y, p. 428. 516 SÉANCE DU 20 JUIN 1858. en des localités privilégiées, des Physes , Lymnées , Maillots , et d’autres coquilles d’eau douce, à l’exclusion complète de coquilles marines. Ce calcaire affecte une légère inclinaison au S., et s’avance beaucoup plus que les couches marines sur le flanc de la montagne, dont il se trouve séparé par un sillon. Sur une carte géologique détaillée ses affleurements affecteraient la forme d’une zone étroite qui devrait être teintée d’une manière particulière. Je ferai remar- quer, avant de quitter ce sujet, que le terrain marin est loin d’être complet dans la montagne Noire, et qu’il y offre seulement ses cou- ches les plus récentes, de sorte que ce serait aller trop loin de partir de la superposition de ce terrain à une assise lacustre, pour arriver à une analogie complète entre l’ensemble du terrain épicrétacé et le terrain parisien. L’analogie pourrait être vraie pour la montagne Noire, mais elle ne saurait s’appliquer, avec une probabilité satis- faisante, au terrain épicrétacé complet. Le calcaire à Physes ne doit être considéré que comme un accident local qui s’est produit peut-être à une partie assez avancée de la période totale (1). Le second objet de mes courses dans la région épicrétacée était de vérifier les observations de Tallavignes, que la mort est venue nous enlever récemment d’une manière si déplorable. Une circonstance particulière m’a empêché de m’acquitter de cette tâche d’une manière complète, mais j’ai pu revoir Lagrasse, la plaine de Tournis s an , celle de Fabresan , la vallée de Y Orbieu, et je regrette de dire que le résultat de mes observations et de mes impressions n’a pas été d’accord avec les vues du jeune et ardent géologue que je viens de nommer (2). Les vallées digitées ou fiords , qu’il considérait comme des dépressions remplies par les marnes épicrétacées après le relèvement des couches solides qui forment le mont Alaric et les autres petites chaînes de ces contrées , m’ont paru résulter simplement d’un creusement par les eaux diluviennes dont le terrain épicrétacé en masse a dd subir l’influence. Ce phénomène a pu produire beaucoup d’effet (1) J’ai quelque raison de croire que cette assise épicrétacée, y compris les couches lacustres, correspond à l’assise marneuse à Mil— liolites et aux calcaires supérieurs que je signalerai bientôt dans une note particulière à Belbèze (Haute-Garonne), où l’on retrouve les Na~ tices , si communes à Montolieu, la Terebratula montolearensis , les grands Cérites , le ISautilus Lamarckii, des coquilles turriculées iné- dites, enfin l’ Alveolina subpyrenaica , dont certaines couches sont pétries. (2) Voyez Bull, de la Soc. géolr ? 2e sér., t. IV, p. \ 127, SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 517 sur les couches argileuses à cause de leur faible consistance. Nulle part je n’ai aperçu de discordance de stratification entre ces marnes des bassins et des vallons et les roches calcaires qui con- stituent essentiellement les protubérances. Je ne suis pas allé, j’en conviens, à Uoquenegade , où Tallavignes prétend avoir vu les marnes appuyées sur le dos des couches calcaires très redressées; mais, en admettant qu’une relation de cette nature entre un terrain à couches très solides et une masse marneuse friable dont la strati- fication est souvent incertaine, puisse se voir clairement, ne pour- rait-elle pas être attribuée à un glissement local facile à concevoir au bord d’une montagne très tourmentée. Je puis assurer d’ailleurs, ainsi que Tallavignes avait été obligé au reste de le reconnaître, qu’à Monze et à Pradelle , au bord de la route de Lagrasse à Carcassonne, entaillée là dans une position élevée au sein du mont Alaric, des marnes à Turritelles, qui ne sont qu’une suite de celles de la vallée de l’Orbieu , se trouvent intercalées sans la moindre discordance, et toutefois avec une inclinaison marquée, entre le massif principal de la montagne et une autre assise dure qui doit être composée de calcaire, de grès et de poudingue. On voit là, d’une manière très claire, que ce système marneux fait réellement partie de la montagne d’ Alaric, dont il forme sans doute une assise supérieure. La considération des poudingues à éléments calcaires qui fré- quemment recouvrent les plateaux épicrétacés dans les basses Corbières peut fournir une preuve directe de l’unité du terrain épicrétacé telle que je l’ai établie dans mon premier mémoire. Au sud de la vallée de Tournissan, on voit ces poudingues former une couche superficielle, liée à des grès qui recouvrent d’une ma- nière concordante des marnes remarquables par une teinte claire, légèrement soufrée , qui se rattachent aux marnes jaunâtres à Turritelles. Je crois être en mesure de prouver que ces poudin- gues, que Tallavignes et d’autres géologues regardaient comme tertiaires, sont réellement épicrétacés. D’abord, les cailloux qui les constituent sont presque exclusivement composés de calcaires épicrétacés ou crétacés des localités environnantes, à l’exclusion du quartz qui forme l’élément principal des poudingues tertiaires dans les localités où ils existent. De plus, ces poudingues calcaires se prolongent avec les mêmes caractères minéralogiques tout le long des Pyrénées par YAriége , la Haute-Garonne , les Hautes et Basses-Pyrénées, où ils participent à toutes les inclinaisons et même aux renversements des couches à Nummulites avec les- quelles ils sont toujours concordants, tandis qu’il est des localités 518 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. où l’on peut les voir sortir avec des inclinaisons très fortes de dessous les strates horizontaux du terrain miocène. Enfin, en plu sieurs points, et notamment dans les environs de Cassaigne et de Belbèze (Haute* Garonne) , ils alternent avec des couches conte- nant des fossiles marins du terrain épicrétacé. Ces poudingues à éléments calcaires peuvent être considérés comme le chapeau de V épicrétacé. Leur continuité , si remarquable sur tout ce système à la base des Pyrénées françaises (1), est une preuve de la contem- poranéité de tous les gîtes qui dépendent de cette chaîne, malgré leurs différences minéralogiques et paléontologiques quelquefois assez considérables. Cette contemporanéité, au reste, devient de plus en plus évidente par les fossiles, à mesure que les observations se multiplient; j’en donnerai bientôt une preuve pour la Haute- Garonne dans une note spéciale qui suivra de près celle-ci. Note sur le massif cV Aus sein g et du Saboth [Haute -Garonne) , ou Von démontre V existence stratigraphie] ue des types épicrétacé et crétacé supérieur [craie), par M. A. Leymerie. Dans deux mémoires insérés dans le recueil de la Société géolo- gique, j’ai établi paléontologiquement l’existence de deux types pyrénéens qui n’avaient pas encore été suffisamment reconnus ni limités, savoir : le type épicrétacé et le type crétacé supérieur ( craie ). L’impression générale qui m’était restée de mes nombreuses courses dans ces contrées ne me laissait aucun doute sur l’exis- tence stratigraphique de çes types et sur leur ordre de superposi- tion ; mais je n’avais pas réussi jusqu’à présent à trouver des exemples assez clairs pour faire passer ma conviction personnelle dans l’esprit des géologues. Au mois d’août dernier (1852), j’ai été assez heureux pour at- teindre ce but de la manière la plus complète , en étudiant de nouveau les montagnes d’Âusseing et du Saboth, que nous avions parcourues déjà en 18à5, avec Tallavignes, sans parvenir à en reconnaître l’ordonnance. Les montagnes dont il s’agit, comprises entre le ruisseau du Voip et le Salat, sur la rive droite de la Garonne, constituent les avant-postes des Pyrénées les plus avancés dans la plaine. Elles (1) Ils sont aussi très développés au pied du versant espagnol, où iis paraissent jouer le rôle que nous leur assignons ici. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 519 n’offrent pas d’altitudes très grandes. La plus considérable, qui est celle de la montagne d’Ausseing proprement dite ( Gardan de Montagu de Cassini) n’atteint que 628 mètres ; mais leur relief est très accidenté et bien plus heurté que celui des collines tertiaires qui s’étendent au N., et se distinguent immédiatement à la pre- mière vue. Les nombreux voyageurs qui se sont rendus à Bagnères-de-Lu chon, à partir de Toulouse, ont dû remarquer ces montagnes à gauche sur le parallèle de Martres. Elles consistent en une vallée de soulèvement qui les divise en deux masses relevées de part et d'autre. Au milieu de cette vallée est un bombement d’argile arqué en voûte , dominée par des créts calcaires, épaulés eux-mêmes par deux crêts secondaires. Au pied de ces crêts, entre eux et l’argile, sont deux sillons longitudinaux, ou combes. Les couches sont d’ailleurs dirigées comme la vallée elle-même, c’est-à-dire à FO. 18° à 20° N., parallèlement à la chaîne des Pyrénées (1). Dans le Jura, on appellerait cet ensemble un soulèvement du troisième ordre. Dans Pétat normal, les deux massifs qui se trouvent ainsi reje- tés de part et d’autre de la vallée centrale offriraient une stratifi- cation inclinée à l’extérieur en sens inverse ; mais ici un seul des massifs, celui du S., est dans cet état normal, et l’autre est habi- tuellement renversé , de telle manière que les couches les plus ré- centes y supportent les plus anciennes. On voit très bien toutes ces circonstances de soulèvement et de stratification dans la coupe suivante , qui est d’ailleurs très instructive, parce qu’elle embrasse toute la stratigraphie de ces montagnes. (1) Je dois dire toutefois que dans la partie occidentale du massif, vers Roquefort, cette direction passe peu à peu à une autre qui court à l’O, avec une déviation variable au S. 520 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. Figure 1. ~ Coupe du massif d' Ausseing, montrant le terrain épicrè tacé complet sur le terrain crétacé supérieur [direction JY. -S.). La voûte centrale et les crêts qui la dominent immédiatement appartiennent au terrain crétacé supérieur (craie du Nord) ; les flancs offrent le terrain épicrétacé complet. Ces terrains seront dé- dits, avec leurs principaux fossiles et les curieux accidents qu’ils présentent, dans un mémoire comprenant toutes .les Pyrénées centrales. Je me borne, quant à présent, à indiquer leur princi- paux caractères géognostiques et les rapprochements et com I isions qu’il est déjà permis d’en tirer. Terrain crétacé supérieur ( craie proprement dite lu nord de la France'). L'assise bombée <7, qui est la plus ancienne de la coupe, est constituée par des argiles grises, quelquefois un peu bariolées, qui renferment çà et là des bancs isolés de calcaire argilifère compacte ou sublamellaire, gris ou brun jaunâtre, avec des taches bleues au centre. On trouve des Orbitolites [O. socialis , et O. secans) dans quelques uns de ces bancs. Les argiles offrent dans les couches voisines des calcaires b la Terebratula lata , de grosses et épaisses Huîtres qu’on rapporte à Y Ostrea vesicularis. En b sont des calcaires marno-sableux gris cendré , alternant avec des lits argileux plus riches en fossiles que a ; les principaux de ces fossiles sont : Terebratula alata (fossile dominant), Ostrea larva , Pecten striato-costatus (Janira), nombreuses Orbitolite : < 1 ;a 521 SÉANCE DU 20 JUIN 1853, secans ,- p idcheUa , nova species. Au calcaire précédent succèdent des calcaires c pins francs, d’une couleur ordinairement jaune nankin, associés à des calcaires arénifères ou macignos. Aux environs du mont Saboth, dans la partie E. du massif, quelques uns de ces cal- caires sont pétris de petits cailloux avellanaires très polis, de quartz hyalin incolore, noirâtre et rouge, que l’on trouve abondamment répandus sur les chemins, par suite de la désagrégation. Cette assise, qui constitue les crêts principaux de la vallée et les cimes les plus remarquables du massif (la montagne d’Ausseing et le Saboth), contient beaucoup d 1 Orbitolites [O . socialis , O. secans). A cela près elle est pauvre. On y a trouvé cependant Y Hemipneustcs racliatns , de grandes Huîtres et quelques autres coquilles. Yoici la liste des principaux fossiles que j’ai rencontrés jusqu'à présent dans tout l’étage crayeux de cette contrée : Orbitolites socialis , Leym. — secans , Leym. pulchella , Leym. (nov. sp.). Ananchytes ovata , Lamk. (la va- riété de Gensac). Galerites globosus , Defr. ?. Hemipneustes radiatus (Goldfuss, Agass. ). Terebrcitula alata , Lamk. « — divaricata, Leym. Thecidea radialay Defr. Ostrea vesicularis , spissa. Ostrea uncinella, Leym. — plicatidoicles , Leym. — larva , Lamk. Exogyra pyrenaica, Leym. — petite espèce. lnoceramus Cripsii , Mantell. Spondylus. Mytilus. Pecten striato - costatus , Goldf. (Janira). — quadrico status, Sow. ?. Nautilus Charpentieri , Leym.?. Terrain èpicrétacè . Il y a cinq assises à distinguer dans le terrain épicrétacé des Pyrénées centrales, savoir : L’assise à lignites, lettre d de la coupe. L’assise du calcaire lithographique, e . L’assise marno-calcaire , /, g (z). L’assise des calcaires roux et concrétionnés , h. L’assise des poudingues calcaires et des grès, i, k. Assise à lignites , d (1). — Elle se compose d’argile grise ou bigarrée, souvent accompagnée de sables et flanquée, surtout vers (1) J’avais d’abord compris cette assise dans le terrain crétacé, mais il y a réellement plus de raisons pour le considérer comme la base de l’épicrétacé, ainsi que M. Deshayes en a exprimé l'opinion à SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 522 le bas, de grès à lignite. Elle renferme aussi des bancs isolés de cal- caires gris argileux, ayant un aspect carié par suite de la dispari- tion de petits nids d’argile qui se trouvaient, dans l’origine, em- pâtés dans toute sa masse. Cette assise se termine supérieurement par des couches de calcaire blanc, d’apparence crayeuse, mais tenace, et de calcaire cellulaire subcristallin. Le lignite occupe ordinairement la partie inférieure de l’assise, où il est associé au grès. 11 n’est souvent indiqué que par quelques traces charbonneuses ; d’autres fois il forme des veines de charbon compacte et même de jayet ; il est souvent accompagné de pyrite disséminée et de résine fossile. J’y ai trouvé une Huître plate, assez petite, et des ossements appartenant, les uns à des reptiles, et les autres probablement à des mammifères, d’après MM. Laurillard et Lartet. Ce gîte paraît être riche en fossiles de cette nature. Dans plusieurs localités on m’a parlé de squelettes entiers ; mais je n’ai pu avoir jusqu’à ce jour que des débris peu caractérisés. Assise du calcaire lithographique , e. — Cette seconde assise de l’épicrétacé correspond à un épaulement dans le soulèvement que j’ai fait connaître. Elle forme souvent des crêtes très saillantes et comme tordues (< queires ) , qui laissent entre elles et le crêt princi- pal un vallon d’argile à lignite. Elle est constituée par un calcaire gris clair, très compacte et même lithographique, où l’on ne voit pas de fossiles, si ce n’est peut-être des Milliolïtes et même des Alvéolines? (Mélonies). Ce calcaire serait très propre à la litho- graphie si l’on parvenait à le débiter en plaques un peu étendues, exemptes de fissures. Dans certaines contrées il renferme beaucoup de silex irréguliers. Assise marno-c aie aire , jf, g , z . — Les deux assises précédentes ont une faible puissance et sont presque dépourvues de coquilles fossiles. Celle-ci, au contraire, est très épaisse et très fossilifère. Elle se compose presque entièrement de calcaires blanchâtres ou la séance de la Société où je communiquai une première ébauche de mon travail, en novembre dernier. Des observations récentes m’ont appris que la position des dépôts ligniteux pyrénéens oscillait au-dessus et au-dessous du plan qui sé- pare le terrain crétacé de l’assise argileuse, que j’ai considérée dans cette notice comme constituant la base de l’épicrétacé. Les lignites de l’Ariége restent ordinairement au-dessous de ce plan, et appartiennent, par conséquent, au système des macignos (terrain crayeux supérieur) qui passent au grès quartzeux dans cette partie des Pyrénées. SÉANCE DU 20 JUIN 185 B. 52 B grisâtres plus ou moins marneux. Elle offre, vers le milieu de son épaisseur, un banc g épais de 2 à 3 mètres , sans délit, d’un cal- caire marneux, solide, presque blanc, à Milliolites, qui est ex- ploité, à Eelbèze et à Béiesta de Roquefort, comme pierre de taille. C’est là que l’on rencontre un grand Cérite (C. garumnicum , Leym., nov. spec.'j, noduleux à l’extérieur, mais lisse sur ses moules, dont les tours sont arrondis en dehors, plats et sillonnés en dessous, et séparés les uns des autres, avec un double sillon à la columelle. On y trouve aussi une Vénéricarde caractéristique. Vers la partie supérieure de l’assise, existe, au voisinage des cal- caires roux, une couche pétrie d ' Alveolina subpyrenaica . Nous ne pouvons, quant à présent, indiquer que des genres et seulement quelques espèces dans cette assise; ce sont : Milliolites. Alveolina subpyrenaica , Leym. Echinolampas , 2 espèces. Co nocif pus. Hemiaster obesus (Leym., Desor). Ostrea uncijera , Leym. (nov. sp.). Area. Lucina. Venericardia. Modiola. Crassatella. V o lu ta. RostellariaP. Turritella, plusieurs. Cerithium garumnicum , Leym. (nov. sp.). — Daubuissoni , Leym. (nov. sp.). Natica brevispira , Leym. — longispira , Leym. — 2, nov. sp , , dont une grande. Nautjlus Lamarchii , Desh. Ces fossiles sont presque tous à l’état de moule intérieur. Il faudra, pour en tirer parti, les étudier avec beaucoup de soin ; les auteurs négligent, bien à tort, suivant moi, quand ils décrivent des coquilles, de donner la figure des moules. Le Cerithium Daubuissoni est une espèce presque aussi grande que le C. garumnicum , noduleuse comme elle, mais à tours con- joints et complètement arrondis. Ces deux Cérites sont réellement distincts l’un de l’autre , et surtout du C. Leymeriei , Bellardi , qui a les tours plats, et dont la forme est plus allongée, ainsi que j’ai pu m’en assurer sur un moule presque complet, que j’ai reçu en communication de l’Aude. Ce Cérite, dont j’avais représenté un tronçon dans mon Mémoire sur Vépicrétacé de F Aude , ne se trouve pas dans nos contrées ; il paraît propre à la région méditer- ranéenne. Le fossile le plus caractéristique de l’assise que nous décrivons est V Ostrea crucifera , nob., espèce exogyrale de moyenne taille, SÉANCE DU 20 JUIN 1858. 52/s assez bombée, assez étroite, et portant habituellement un crochet prononcé qui se contourne latéralement d’une manière irrégu- lière. J’ai encore à signaler dans ce groupe ealcaréo-marneux un accident assez curieux : c’est une mince assise (z), ordinairement marneuse, qui se trouve constamment vers la partie inférieure, c’est-à-dire près du calcaire lithographique, et qui offre une faune toute spéciale, à physionomie crétacée, surtout par les Echino- dermes qui y dominent. Je me propose de soumettre incessam- ment aux paléontologistes ces fossiles trop souvent à l’état de moule. J’emploie, pour désigner cette faune, le mot heureux de colonie , de notre savant et consciencieux confrère Barrande. J’ignore, il est vrai, le point de départ de ces colons, mais ce qu’il y a de certain, c’est qu’ils sont étrangers pour la plupart au ter- rain épicrétacé et même au terrain crétacé de la Haute-Garonne. Les Oursins rappelleraient, par les genres, si ce n’est par les espèces, la craie du nord de l'Europe. A Marcoulas, où elle a été depuis longtemps signalée par M. Dufrénoy, cette couche est constituée par des marnes sableuses et des grès argileux très chlorités. Yoici les principaux genres et quelques espèces que l’on trouve dans cette assise spéciale : Astrœa Cailliaudii , Mich. Micraster cor anguinumP. Euripygus. Echinus , des espèces. Micraster minimas , Agass. ?. Brissopsis P. Pholadomya. Area (2 ou 3 espèces). Crcissatella. Lucina. Lima. Isocardia P. Pleurotomaria (grande espèce). Natica brevispira , Leym. — autre espèce. Rostellaria ? . Assise des calcaires roux et des calcaires concrétionnês , b. — Cette partie de l’ épicrétacé est moins nettement séparée que les trois précédentes. Elle se lie d’une part à la troisième assise, et de l’autre aux poudingues supérieurs. Elle comprend des calcaires roux ou nankins, subcristallins, sou- vent composés de débris de fossiles et d’Entroques, avec Ecliino - lampas , Terebratula tenuistriata , des calcaires jaunâtres pétris de Nummulites ( N . Leymeriei , d’Archiac, l’espèce du mont Perdu), et des calcaires concrétionnés blancs ou colorés, offrant des con- crétions irrégulières ou arrondies, souvent globuleuses (marbre nankin de Mancioux). Certains calcaires blancs de cette assise contiennent des galets calcaires, et semblent enclavés dans la partie inférieure des poudingues dont il va être question (Mauran). SÉANCE DU 20 JUIN 1858. 525 C’est là le seul niveau des Nummulites de la Haute-Garonne. Ces fossiles y abondent dans une ou deux couches seulement, en- core manquent-ils assez souvent. Je n’ai pas vu une seule Num- mulite dans tout l’épicrétacé normal au sud de la vallée centrale. Il y a aussi quelques couches pétries d’Operculines. C’est à la zone de ces couches à Nummulites qu’il faut rap- porter les marnes noires ou jaunes à Turritelles de l’Ariége et de l’Aude. Sur le bord du Yolp on les voit paraître, même dans le département de la Haute-Garonne, à l’extrémité E du massif du Saboth (voyez la coupe n° 2). \ Figure 2. — Coupe prise au S.-E. du village du Plan ( Haute- Garonne ), montrant le terrain miocène en superposition trans- gressive avec le terrain épicrétacé renversé. Elles sont pleines de IV. Leymeriei avec N. globulus , Operculina ammonca et quelques petites Orbitolites particulières à cette for- mation. J’y ai trouvé la Turritella imbricataria , et non loin de là, à Fabas (Ariége) on en a retiré, en creusant un puits, plusieurs fossiles, parmi lesquels j’ai reconnu le Fusus longoevus , Lamk. Yoici un aperçu très superficiel de cette petite faune, qui est assez particulière : Nummulites Leymeriei , d’Ârch. — globulus , Leym. Operculina ammonea , Leym. Orbitolites parvula, Leym. (nov. sp.). Echinolampas (2 ou 3 espèces). Terebratula montolearensis , Leym. Terebratula te nuis tri ata , Leym. Vulsella jalcata, Goldf. Spondylusj caractéristique. Pecten. Turritella imbricataria , Lamk. Fusus longœvus , Lamk. D’autres espèces à rechercher. Dents de Squale, 526 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. Assise des p oudin gués calcaires , i, h. — Le terrain épicrétacé se termine , dans les Pyrénées centrales, par une assise puissante d’un poudingue à gros éléments calcaires, alternant avec des cou- ches de grès souvent marneux. Le ciment est terreux, grossier, et passe de la marne au grès et au calcaire. 11 est blanchâtre ou jau- nâtre, souvent bariolé de rouge et de violet. Les éléments de ce poudingue sont des calcaires compactes, de la formation des cal- caires couleur nankin et des calcaires à Rcqaienia. Il renferme aussi des fragments schisteux du terrain crétacé inférieur. Quel- quefois il se présente sous la forme d’un conglomérat plus grossier, à gros éléments anguleux ou très imparfaitement arrondis. Je comprends dans cette assise les grès calcaires roux, exploités à Fûmes. On y trouve quelques Peignes d’aspect tertiaire, des dents de Squale , etc. ; ils alternent avec des bancs de poudingue à la base de l’assise dont il est question. Gîtes de matériaux utiles dans V épicrétacé. L’épicrétacé de la Haute-Garonne offre quelques gîtes de ma- tières utiles, dont nous sommes maintenant en mesure de préciser la véritable position. Le principal se trouve dans l’assise inférieure ; c’est le gîte des lignites, celui qui se développe à l’E. de notre coupe dansl’Ariége et dans l’Aude, sous la forme d’un grès qu’on a appelé grès à lignites. Il fournit très peu d’un combustible assez compacte, brûlant avec une odeur très forte. C’est là aussi qu’on trouve le jayet autre- fois exploité. La deuxième assise a donné des pierres lithographiques très convenables, sauf les fissures déjà signalées. La troisième assise offre la pierre blanchâtre, connue sous le nom de pierre de Belbèze , utilisée à Toulouse pour les appuis de croisée, pour les marches d’escalier. La quatrième et la cinquième assise contiennent, l’une un cal- caire à Nummulites , concrétionné , glanduleux, très employé comme marbre commun, sous le nom de marbre de Mancioux. On exploite, dans l’autre, assise, un grès roux calcaire ( pierre de Fumes ) qui est utilisé, à cause de la facilité de sa taille, pour certains ouvrages massifs, à Toulouse et ailleurs. Considérations générales . Les terrains sdont nous venons de donner une description SÉANCE DU 20 JUIN 1858. 527 succincte, sont toujours fortement redressés et souvent même ren- versés. Ils ont aussi subi des dislocations, des inflexions et des tor- sions singulières. Ainsi les crêtes ou quieres du calcaire lithogra- phique sont souvent tordues et comme cordelées ; elles se trouvent fréquemment brisées à l’endroit des vallées transversales et séparées en tronçons contournés, quelquefois en sens inverse, et dont les extrémités se trouvent écartées F une de l’autre dans le sens hori- zontal. Ces allures contrastent avec la régularité du terrain tertiaire miocène de la plaine , et rien n’est si intéressant que de voir sur le bord du Yoîp , derrière le village du Plan , les poudingues calcaires, en couches presque verticales, s’enfoncer sous le massif miocène en couches parfaitement horizontales. C’est bien là que se trouve la véritable base des Pyrénées (coupe n° 2). En faisant quelques kilomètres au S. de la région qui vient d’être décrite, on trouverait aux environs de Salies et de Marsoulas un nouveau relèvement des deux terrains qu’elle présente, et l’on pourrait y vérifier les caractères de nos assises et leur ordre de superposition. Dans ce dernier gîte, on a l’avantage de voir l’agent de soulèvement , qui n’est autre que F opliite (1) , se montrant en protubérances allongées ou arrondies, et Ton est porté â croire que le soulèvement des montagnes d’ Ausseing et du Sabotli est dû à la même cause, d’autant plus que les terrains de la rive gauche de la Garonne, où F opliite ne paraît pas, reprennent peu à peu une allure tranquille à mesure qu’ils s’éloignent de ce foyer d’érup- tion. La conséquence naturelle de cette idée, c’est que les oplîites de cette partie des Pyrénées sont antérieurs au terrain tertiaire miocène, qui ne subit pas le moindre dérangement dans leur voi- sinage (coupe n° 2). J’ai, au reste, des preuves que cette roche a surgi aussi antérieurement au terrain crétacé inférieur, et c’est k elle, non au granité, que je crois pouvoir attribuer le grand soulèvement des Pyrénées. Si l’on cherche à comparer ce massif d’ Ausseing avec les terrains pyrénéens supérieurs des autres parties de la chaîne, on n’hésitera (1) Les gypses de cette région sont toujours en relation avecl’ophite, ainsi que Fa dit M. Dufrénoy depuis longtemps. Mes nouvelles obser- vations me permettent de préciser Fâge des couches où s’est formé le gypse de Salies et de Mont-Saunès. Ce sont les argiles et les marnes du terrain crétacé supérieur qui ont ici servi de matrice (ci de la coupe n* 1). 528 SEANCE DU 20 JUIN 1855. pas à reconnaître immédiatement que le terrain crétacé de la Haute-Garonne n’est que le prolongement des couches de Gensac et de Monléon, décrites dans le mémoire déjà cité. Ce terrain cor- respond probablement, au moins en partie, ainsi que nous l’avons dit dans ce travail, aux couches à Hippurites des Corbières, au terrain calcaréo-schisteux de Biclart, et enfin au calcaire du cirque de Gavarnie. Quant au terrain épicrétacé, il représente l’ensemble de celui de l’Ariége et de l’Aude, y compris le mont Alaric. Les assises 3 et 4 offrent avec les gîtes du terrain de Montolieu une analogie in- contestable. Les marnes supérieures de Roubia, Fabresan, Tour- nissan, correspondent à notre quatrième assise. Enfin, et comme pour achever la preuve de l’identité des gîtes que nous comparons, le poudingue calcaire recouvre le terrain épicrétacé de la Haute- Garonne comme celui de l’Aude, de sorte qu’on peut le considérer, d’une manière générale, comme formant le chapeau de Vépicré - tacé. Je ferai remarquer, au sujet de ce poudingue, que si dans la partie orientale des Pyrénées les circonstances pouvaient per- mettre une hésitation sur son âge, ici le doute n’est plus possible, puisqu’on le voit lié aux couches à Nummulites par des alter- nances, et séparé du terrain miocène par des caractères géognos- tiques de première valeur, surtout par une discordance de stra- tification des plus frappantes. On voit donc qu’il y a réellement unité dans le terrain épicré- tacé des Pyrénées orientales et celui des Pyrénées centrales (1). Ce terrain forme un type méridional très important et d’une immense étendue, dont une partie, peut-être les trois dernières assises, représenterait le terrain tertiaire parisien, tandis que les assises inférieures correspondraient à une lacune déjà plusieurs foi* signalée entre la craie et l’argile plastique. (1) Je n’ose pas encore comparer ce terrain à celui des Pyrénées occidentales, où l’origine marine de toutes les couches imprime à l’ensemble de la contrée une physionomie spéciale ; mais je dois dire ici avec la sincérité que je cherche à apporter dans tous mes travaux, que j’ai reçu de Peyrhorade, avec des fossiles ordinaires des faluns bleus, un exemplaire très bien caractérisé de notre Cerithium garum nicum. 11 ne saurait y avoir le moindre doute sur son origine, car la roche qui le constitue offre la couleur et les autres caractères du terrain dont il s’agit. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 529 K x trait d’un mémoire sur la constitution géologique de la Suède , de la Norvège et de la Finlande, par M. J. Durocher. Dans le travail que j’ai T honneur de présenter à la Société géo- logique pour l’insertion dans le recueil de ses mémoires (1), je décris les trois groupes de formations azôïques et paléozoïques qui constituent le sol de la Scandinavie et de la Finlande, à l’excep- tion de la pointe méridionale delaScanie où se trouvent des dépôts appartenant aux terrains jurassique et crétacé. De ces trois grou- pes, les deux premiers sont azôïques ou dépourvus de fossiles; cependant il serait téméraire d’affirmer qu’à l’époque où ils ont été formés, il n’existait point d’être organisé à la surface du globe et même la présence de matière charbonneuse, de bancs subor- donnés de graphite et de schistes noirs , ampéliteux , tendrait à faire supposer que déjà des végétaux croissaient en certaines lo- calités. De ces deux groupes azôïques, le plus ancien ne renferme que des formations entièrement cristallines et représente les ter- rains primitifs proprement dits, qui constituent la plus grande par- tie du sol de ces contrées. Je fais connaître les caractères pétrogra- phiques et stratigraphiques des roches qui les composent ; ces roches consistent en gneiss, schistes micacés, talqueux, cldoriteux, amphi- boliques et en calcaires cristallins, en quartzites ordinairement un peu magnésifèrés et riches en minéraux silicatés. Je décris ensuite les roches massives qui y sont interposées ; elles présentent au moins deux époques de cristallisation de roches granitiques, époques dans l’intervalle desquelles se sont produites les roches amphiboliques et les masses d’oxydes de fer qui paraissent en être contemporai- nes. Il y a aussi des roches diallagiques , hypersténiques çt ser- pentineuses, qui se lient quelquefois aux amphibolites. Le second groupe azoïque comprend des formations que je nomme semi- cristallines, parce que les roches cpii les composent ont généralement une apparence subcristalline et présentent des couches de schistes divers, passant du schiste argileux aux schistes feuilletés, micacés, accompagnés parfois de roches arénacées, gré- sifomies ou poudingifomies, dont l’origine sédimentaire ne peut être contestée ; cependant on y trouve interstratifiés dans certaines (1) Ce travail est accompagné d’une petit© carte géologique de la Scandinavie, que j’ai tracée d’après les indications fournies par les cartes de MM. Hisinger, Keilhau, Murchison, de Yerneuil et de Key- serling, conjointement avec mes propres observations. Soc. gêol.y 2e série , tome X. 34 530 SÉANCE DE ^0 -JUIN 1853, parties des schistes tout à fait cristallins, micacés, chloriteux , tal- queux, amphiboliques et parfois même gneissiques, Tantôt les roches de ce groupe reposent à stratification évidemment discor- dante sur le gneiss primitif, tantôt au contraire il y a une parfaite similitude stratigraphique. Ce groupe me paraît correspondre à la partie inférieure des terrains de transition, au système cambrien ou cumbrien de F Angleterre, peut-être pas à tout l’ensemble, mais spécialement aux parties inférieures qui sont dépourvues de fossiles. Les roches massives interposées dans ce groupe consistent en une certaine variété de granité syénitique et en x'oches amphi- boliques, diallagiques et serpentineuses : ces deux dernières va- riétés sont fréquemment accompagnées de fer chromé. Le troisième groupe comprend les terrains paléozoïques, dont l’age a été habilement déterminé par MM. Murchison et de “Ver- neuil. Indépendamment des bassins paléozoïques de la Scandinavie méridionale, sur lesquels on a déjà beaucoup écrit, je fais connaî- tre le bassin silurien d’Ostersund, qui est situé sous le 03e degré de latitude, et qui n’a pas encore été décrit. Ces dépôts paléozoïques se distinguent des terrains semi-cris- tallins, non seulement par la présence de nombreux fossiles , mais encore par des caractères pétrographiques et stratigraphiques par- ticuliers ; les roches qui les composent ne présentent d’aspect cris- tallin ou notablement métamorphique qu’au voisinage de masses pyrogènes ; d’un autre côté, toutes les fois qu’ils sont en contact avec des schistes primitifs, il y a une discordance évidente de stra- tification, tandis qu’il n’en est pas toujours ainsi pour les schistes semi-cristallins. La partie entièrement neuve de mon travail consiste dans la recherche des phénomènes de soulèvement qui ont relevé et dis- loqué les formations de divers âges de la Scandinavie et de la Fin- lande. Je suis conduit à établir un certain nombre de nouveaux systèmes (1), ensuivant les principes qu’a savamment posés M. Eiie de Beaumont. Je fais connaître les systèmes qui se sont produits pendant la période des terrains primitifs , savoir : les systèmes d’Arendal, deTunaberg, de Tornoea, et le premier système méri- ('!) Outre les systèmes de montagnes exposés dans ce mémoire, j’en ai fait connaître quelques autres dans un mémoire présenté à l’Acadé- mie des sciences (voyez les Comptes rendus , t. XXXIII). L’un d’eux me paraît avoir affecté le sol de la Scandinavie ; cependant je l’ai nommé système longitudinal de la Bretagne, parce qu’il coupe la pres- qu’île de Bretagne dans le sens de sa longueur, de l’est à l’ouest. Un SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 531 clien de la Scandinavie. D’autres sont postérieurs au groupe des schistes semi-cristallins ; tels sont les systèmes des Riol, du Dovre- field et de Drontheim ; enfin, il en est qui ont redressé les terrains paléozoïques, savoir s les systèmes de Billingen, du Jemtland, de Brevig et le système longitudinal de la Bretagne. Les résultats sommaires de mes recherches sur ce sujet ont été lus à la séanee du 1 7 juin 1850 et imprimés dans le Bulletin (2e sé- rie, t. VII, p. 683) (1). A la fin de la même année, M. Reilhau a publié une troisième livraison de son ouvrage intitulé Gœa Norvé- gien. Cette livraison, qui n’est parvenue en France qu’en 1851, renferme un assez grand nombre d’observations strati graphiques concernant les deux groupes de terrains que j’ai nommés groupe cristallin et groupe semi-cristallin. En lisant ce mémoire, j’ai été heureux d’y trouver une confirmation des résultats stratigraplii- ques auxquels j’étais arrivé moi-même et que j’avais déjà publiés. Tout le monde comprend l’importance d’un pareil accord entre deux observateurs qui ont agi séparément, et qui, sur les questions théoriques, n’ont pas la même manière de voir. Quelques mots vont suffire pour montrer que l’accord sur les faits est aussi par- fait qu’on peut le désirer (2). « M. Reilhau signale d’abord ( Gœa » Norvégien , p. 373, a.), dans le sud du Nordland et le nord du » district de Drontheim, une vaste zone de gneiss qui est dirigée » régulièrement du N. au S. » Cette zone, que je n’ai point visi- tée, se trouve sous le 11e degré de longitude à l’est du méridien de Paris, et coïncide, à moins d’un degré près, avec l’orientation démon système méridien de la Scandinavie , que j’ai établi ( Bulle- tin, t. VII, p. 690) comme étant dirigé du N. au S. sous le 10 mé- ridien à l’est de Paris. « M. Reilhau mentionne ensuite (Gœa Norvégien, p. 373, b.) le autre système, qui est beaucoup plus moderne, se manifeste dans la partie orientale de la chaîne des Pyrénées par de nombreux accidents orographiques et géologiques ; il coïncide à peu près avec l’orientation générale des monts Cantabres qui forment comme un prolongement vers l’ouest de la chaîne pyrénéenne; on peut donc l’appeler système des Pyrénées orientales et des monts Cantabres. (1 ) Un extrait de mes recherches a été présenté à l’Académie des sciences, à la séance du 10 juin 1830, et publié dans les Comptes rendus (t.XXX, p. 738). (2) Il ne s’agit ici que des schistes cristallins primitifs, les seuls au sujet desquels M. Keilhau ait nettement formulé les résultats de ses observations, et d’ailleurs je ne fais ressortir que les coïncidences les plus frappantes. 532 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. » gneiss qui s’étend du fiord de Drontheim jusqu’à la ville de » Molde, dans le Romsdal, comme suivant des directions com- » prises de la manière la plus marquée entre hora U et 5 et dont la » moyenne est Jiora k 1/2 ouE.-N.-E. » Elles appartiennent évi- demment à mon Système du Dovrefield que j’indique ( Bulletin , p. 680) comme ayant produit les directions E, 20 à 21 N. qui sont les plus fréquentes dans les roches schisteuses du massif déliantes montagnes qu’on nomme le Dovrefield ; d’ailleurs ce massif est situé dans la partie orientale de la région dont parle M. Keilhau. « Il y a, dit le même observateur ( Gœd Norvégien, p. 373, e.), n aux environs du Norfiord et plus à l’E,, vers JLomm, une direc- » tion prédominante, qui varie un peu autour de hora 6 , et par » suite il existe sous le 62e degré de latitude une longue zone de » couches dirigées de l’est à l’ouest. » Or, cette zone montagneuse constitue ce qu’on nomme le Langfield , et j’ai montré (Bulletin, p. 688) qu’il s’y manifeste un système de soulèvement que j'ai nommé système de Tunaberg, du Justeclod et du Langfield, et que j’ai présenté comme coupant à angle droit le 7° méridien, passant par le boîd oriental du Langfield. Je termine par une dernière citation : « 11 y a, suivant M. Keil- » bail ( Gœa Norvégien , p. 37à, g.), le long de la côte sud-est de » la Norvège, une large zone qui s’étend depuis les environs de » la ville de Christiansand jusqu’à la limite du terrain de traosi- » tion de Christiania : dans cette zone, les couches courent très » régulièrement entre hora 2 et !\. » La moyenne hora 3 ou N.-É. se rapporte évidemment à ce système que j’ai appelé système d’Arendal ( Bulletin , p. 686 ), du nom de la ville principale de cette même contrée dont parle M. Keilhau, et je lui ai assigné pour orientation moyenne l’E. U 2 1/2 N. M. le secrétaire donne lecture de la note suivante : Sur le nouvel ouvrage de M. Bernkard Colla , intitulé: Le soi de l’Allemagne ( Deutschlands B ode ni) (1), par M. Orges. Le successeur de Werner dans la chaire de géologie de l’Aca- démie de Freiberg, M. Bernhard Cotta, vient de publier, sous le (1) Deutschlands Boclen , sein geologischer B au und dessen Einwir- hungen auj dns Lehen der Menschen . (Le sol de l’Allemagne, sa constitution géologique et son influence sur l’homme, par M. Bernhard Cotta. • — Leipzig, 1853.) SÉANCE DU 20 JUIN 1858. 533 litre : Le sol de V Allemagne, le premier volume d’uo ouvrage qui me paraît mériter l’attention des géologues : c’est, en effet, le pre- mier essai d’application de la géologie à l’économie et à la sta- tistique. M. Cotta cherche à démontrer l’influence du sol superficiel sur la vie humaine. Hans la première partie de son ouvrage, il déve- loppe les lois de cette influence en général, et il les applique ensuite à l’Allemagne. L’observation seule des faits l’a conduit à ces théories nouvelles , à la suite des recherches qu’il a faites principalement pour la carte géognostique de la Saxe et de la Thuringe. Durant le cours de ses travaux, M. Cotta s’est convaincu que l’influence du sol superficiel peut facilement se constater, et qu’elle est très utile à connaître, car il est nécessaire d’en tenir compte clans un grand nombre de cas. Tout en admettant que l’influence de la constitution géologique du sol est plutôt indirecte que directe, M. Cotta démontre que les apparences extérieures prouvent la nécessité de cette influence. En effet, les formes du paysage sont les conséquences de la consti- tution géologique du sol et des mouvements géologiques locaux, tels que l’élévation et l’abaissement des terrains. La végétation est soumise, dans une certaine mesure, à l’influence du sol, indépen- damment de l'influence dominante qui est exercée sur elle par le climat; les plantes fournissent la nourriture des animaux; ces ani- maux et ces plantes sont employés par l’homme. La terre, dans ses couches supérieures, renferme des pierres propres aux construc- tions, des argiles plastiques, des métaux, de la houille et des sels; elle offre des terrains solides ou meubles pour les fondations ; elle oppose des difficultés plus ou moins grandes de communication ; elle donne des sources nombreuses ou rares, des eaux potables, saines ou malsaines, des eaux thermales et minérales; elle oblige les rivières à courir régulièrement ou irrégulièrement ; elle favo- rise ou elle empêche leur navigabilité et leur application comme forces motrices ; enfin la terre agit également comme bon ou comme mauvais conducteur de la chaleur ; elle produit des vapeurs et des gaz divers, et, par suite, elle ne peut être sans influence sur le bien-être et sur les occupations des hommes. M. B. Cotta a cherché aussi à prouver que la formation géo- gnostique de la terre n’a pas été non plus et n’est pas sans influence sur l’histoire des hommes, sur les races, les Etats, leurs frontières, sur la variété de leur développement, sur la vie sociale, morale et intellectuelle, et que par conséquent elle n’est pas sans quelque relation avec la politique. _ 53/i SÉANCE OU 20 JUIN 1853. Il insiste sur la grande importance qu’il y a à étudier une in- fluence qu’on a négligée si longtemps et si souvent aux dépens de l’intérêt individuel et général, connue dans le cas, pour ne citer qu’un exemple, où l’on a cultivé des forêts sur des terrains qui étaient plutôt propres à l’agriculture, et vice versa. M. Cotta a divisé l’Allemagne en quarante-deux régions idéales, qui sont indiquées parla formation des bassins et des montagnes ; chacune de ces régions est ensuite étudiée séparément : quinze d’entre elles appartiennent à la grande plaine du Nord, cinq aux Alpes, et vingt-trois aux contrées intermédiaires. Son ouvrage ren- ferme d’ailleurs un grand nombre de coupes ainsi que des détails géologiques très intéressants sur le gisement des roches ignées et sédimentaires dans toutes les parties de l’Allemagne. M. Deshayes fait, au nom de l’auteur, la communication suivante : Observations sur les Pleuromya et les Myopsis de Ai. Agassiz , par M, Terquem. La famille des Glycimérides, si savamment étudiée par Al. Des- hayes (1), est nettement définie tant par les propriétés de l’animal que par les caractères inhérents à la coquille. Ce concliyliologiste comprend dans cette famille des animaux très voisins des myaires par leurs caractères généraux , mais dont la coquille est douée d’un ligament externe , la famille des Myaires ne renfermant que des coquilles à ligament interne. M. Agassiz , dans ses études critiques sur les mollusques fossiles, n’a pas tenu compte de cette observation et a réuni dans la famille des Myaires des coquilles dont certains genres ont le ligament interne et d’autres le ligament externe (2); toutefois, dans la spéci- fication des genres qu’il établit, M. Agassiz ne donne aucune indi- cation sur la position du ligament propre à chaque genre. Cet auteur traite d’une manière transitoire des caractères particuliers de la coquille et s’attache de préférence aux caractères fournis par les moules intérieurs. Dans les onze genres créés par M. Agassiz, aucun n’est défini par les caractères de la charnière : tantôt l’au- teur prend pour guide la forme du moule intérieur, quant aux ( I ) Éléments de conchyliologie , t. H, p. 125. (2) Introduction à Vé tiule des mollusques , p. vii. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 535 impressions palléale et musculaires ; tantôt la forme extérieure, quant aux ornements qui décorent la coquille. C’est ainsi que l’absence des côtes distingue uniquement les Homornya des Phola- domyes , bien que la planche 17 donne trois côtes à F Homomyci ven- tricosa; c’est ainsi que les stries rayonnantes doivent différencier les Myopsis des Panopées , qui cependant en possèdent également; c’est ainsi encore que les Pleuromyes doivent se distinguer des Myopsis par l’absence de dents à la charnière , bien que les nos 8 et 9 de la planche 28 en représentent l’impression. On comprend que des genres établis sur des données si superfi- cielles ont dû subir de profondes modifications ou être entière- ment effacés de la nomenclature. Notre but n’étant que de traiter de deux genres, des Pleuromyct et des Myopsis de M. Agassiz , nous n’entrerons pas dans la dis- cussion des autres; nous nous contenterons de produire et de discuter l’opinion des auteurs qui se sont occupés plus particu- lièrement de ces deux genres , ou qui ont produit des démonstra- tions qui s’y rattachent. De tous les genres créés par M. Agassiz, M. Deshayes (1) n’a conservé que le genre Ceromya , en démontrant d’une manière fort judicieuse quelle était la valeur des caractères présentés par les moules. 11 a en même temps prouvé qu’une identité de consti- tution devait porter à y joindre les Gresslya. Nos observations (2), jointes à celles de M. Buvignier (3) , établies sur l’étude des coquilles des Gresslya , sont venues confirmer ce rapprochement et infirmer complètement l’opinion de M. d’Orbigny, qui d’une part maintient le genre Ceromya dans son Prodrome , et d’une autre part fait entrer d’une manière abusive les Gresslya dans le genre Lyon si a. M. Deshayes, discutant les caractèresdugenrePholadomie, dit(û): « Il est certain que, quels que soient les caractères extérieurs » d’une coquille bivalve, toutes les fois qu’elle sera mince, bail— » lante, que sa charnière sera simple et sans dents, que l’impres- » sion palléale sera sinueuse du côté postérieur , cette coquille » sera pour nous une Pholadomye. Si nous prenons actuellement » les genres Lysianassa de M. de Munster, Goriiomya , Ag\, » Myopsis , Platymya , ainsi qu’une partie du genre Arcomya (1 ) Éléments de conchyliologie , t. II p. 159. (2) Bulletin de la Société géologique, 2e sér., t. IX, avril, p. 359. (3) Bulletin de la Société géologique , 2e sér., t.VIII, avril, p. 400. (4) Éléments de conchyliologie, t, II, p. 147. 5r>6 SÉANCE DU 20 JUIN 1858. » de M.' Agassiz. nous chercherons en vain les caractères qui les » distinguent des Pholadomyes, à moins que Fou ne prenne ces » caractères dans des accidents extérieurs qui pour nous n’ont » aucune valeur. » M. d’Orbigny, discutant les caractères des genres deM. Agassiz, est conduit à n’en admettre aucun et donne la liste des genres dans lesquels ceux de M. Agassiz doivent entrer (1). Pour les Pleuromya en particulier, M. d’Orbigny dit : « avoir » vu pour les Lutraria Jurassi et gurgitesy Al. Brongn., et pour les » espèces voisines des terrains jurassiques et crétacés, la char- » nière bien complète, et y avoir reconnu les dents des véritables » Panopées. » Quant aux Miïppsis et aux Corymya , cet auteur ajoute : « qu’ils » lui sont entièrement inconnus , n’ayant pas encore été décrits » ni figurés dans la monographie des Myes de M. Agassiz. » 11 paraît que ce paléontologiste distingué a vu ses opinions se confirmer depuis, attendu que nous voyons tous les Pleuromya et les Myopsis figurer au Prodn me , dans le genre panopée; nous démontrerons plus loin jusqu’à quel point cette opinion est fondée. Al. Goldfuss, cpii produisait son grand travail, Pctrafacta Ger- maniœ , en même temps que AI. Agassiz publiait ses études critiques sur les mollusques, comprend les fossiles jurassiques et crétacés dans le genre Lutraire , Lamarck ; il y réunit non seu- lement les Pleuromya et les Myopsis , mais encore les Gresslya ; pour les fossiles triasiques, il les range dans le genre Myac.ites , Sch lotir. Al. Goldfuss (2) attribue aux Lutraires qu’il représente une charnière composée d’une dent cardinale multiple, accompagnée parfois dune autre dent simple; il leur reconnaît un cuilleron destiné à recevoir le ligament, qui par conséquent est interne. Nous ferons remarquer qu’aucune figure ne représente ce sys- tème de ©harnière, et qu’on n’en voit même aucune trace sur les moules; la figure 3 c de la planche 152 représente l’intérieur de la charnière de la valve droite d’un Pleuromya , et cependant on ne saurait y reconnaître aucune indication des caractères donnés par Al. Goldfuss. (1) Paléontologie française, Terrains crétacés , t. 111, p. 309 et suivantes. (2) Petrefacta Gerrnaniœ , t. Il, p. 253. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 537 Il signale le sillon propre aux Gresslya et l’attribue à la dépres- sion fournie par le renflement du bord cardinal interne, sans y reconnaître le caractère propre à un autre genre. Quant aux Myacites , M. Goldfuss dit n’en pas connaître la charnière , les moules ne présentant aucune impression , « ce » qui ferait présumer, continue cet auteur, que ces coquilles ont » un bord cardinal simple et sont privées de dents à la char- » ni ère. » M. Pictet(l), admettant sans observation les opinions de M . d’Or- bigny, « considère comme des Panopées plusieurs espèces décrites » comme des Lu ira ires , des Mycs , des Myacites , etc; les Myopsis » doivent correspondre aussi, en tout ou en partie, au genre $ panopée. » Cet auteur, en rangeant une partie seulement de ces coquilles parmi les Panopées, ne dit pas cjuel doit être le classement de Vautre partie qui ne saurait y être comprise; les planches ne mentionnent rien de spécial à cet égard. M. Quenstedt (2) est le premier qui ait figuré d’une manière assez nette et exacte les valves droite et gauche des genres Pieu - romya, Myopsis et Gresslya ; le texte (page 561) donne une juste explication des figures et la position respective des organes repré- sentés. Cet auteur, n’admettant pas les genres Pleuromya et Gresslya établis par M. Agassiz, désigne ces fossiles sous les noms de Mya- cites et Lutraria , et confond ainsi dans le même genre, les Myacites Jurassi, M.'Alduinÿ Lutraria striato-punctata , TJ ni a abductus , etc. Appréciant mal la valeur des charnières que d’ailleurs il représente si bien, M. Quenstedt croit que M. Agassiz a créé le genre Gresslya pour les espèces de grande taille, et termine ainsi : « Quoiqu’il soit » facile de déterminer avec un peu d’attention les formes normales « des Myacites Jurassi de celles du Myacites Alcluini , il est assez » difficile de bien séparer les espèces intermédiaires qui se pré- » sentent en grand pombre , » dans le Jura brun. AI. Dunker (3) a figuré une valve droite et gauche d’une co- quille trouvée dans le grès infra-liasique d’Halberstadt; ces dessins et la description (page 179) démontrent que cette coquille est un véritable Pleuromya. L’auteur, frappé de l’étrangeté de la char- nière qu’il ne peut rapporter à aucun genre connu , en établit un nouveau sous le nom de Tœniodan , et, tout en indiquant la position (1) Eléments de paléontologie , édition 1845, t. III, p. 243. (2) Manuel de paléontologie , pl. 47, fîg. 29 à 37. (3) Palœontographica Gerrnaniœ , pl. 25, fig. \ à 3. 538 séance du 20 juin 1853. extérieure du ligament, il pense que cette coquille doit être rangée à côté des Mac très. M. Dunker (L.-C.) revient sur le Thracia rugosa , qu’il a figuré pl. 17, fig. 9, et dont il a trouvé les valves munies de leur char- nière ; il n’y reconnaît plus les caractères qui viennent de le porter à créer un genre nouveau, et croit « avoir sous les yeux une véri- » table Panopée, mais dont les caractères entrent dans les variétés » si fréquentes dans les coquilles de ce genre. « Si dans la planche 25 on compare les figures 1, 2 et 3, qui doi- vent établir les caractères du genre T œ ni o don , aux figures U et 5 qui doivent se rapporter à une Panopée, on trouve dans toutes une forme identique dans la charnière. Si maintenant on met ces cinq figures en regard des valves de Pleuromya , on obtient une identité non moins parfaite. M. Agassiz (1) établit la diagnose du genre Pleuromya presque entièrement sur des caractères extérieurs, sur la taille des fossiles, leur forme, leurs ornements et leur bâillement , sur la position et les formes des crochets, la ténuité du test, enfin la présence d’un profond sinus palléal ; il termine en mentionnant « sur la partie » antérieure des flancs, en avant des crochets , un enfoncement » caractéristique, une sorte de sillou très évasé, mais bien distinct, » qui part des crochets et s’étend, en s’élargissant , vers le bord » inférieur. » Nous ne saurions voir dans cette observation les attributs d’un caractère générique, par deux raisons : tIJCe carac- tère n’est pas exclusivement réservé aux Pleuromya , attendu qu’on le trouve sur les Myopsis Jurassi et niargihata , etc.; 2° on remarque son absence totale sur les Lutraria ovalisj Münst., Goldf. , pl, 153, fig. 1, et Lutraria recurva j Goldf < , pl. 152, fig. 15, etc. Cherchant à établir une différence entre les Pleuromya et les Myopsis , M. Agassiz (2) convient « que dans l’état actuel de nos » connaissances, il est même impossible d’indiquer un caractère. » zoologique qui puisse servir de critérium pour distinguer les deux » groupes. Quant à la charnière, il admet l’opinion de M. d’Or- » bigny, qui assure avoir reconnu la présence de deux dents dans » plusieurs espèces de Myopsis ; dents que M. Agassiz avoue avoir » vainement cherchées dans les Pleuromya , d’où il ne veut cepen- » dan t pas conclure qu’elles manquent complètement. » M. Agassiz trouve « que les Pleuromya' doivent être très voi- » sines des Gresslya , et qu’elles n’en diffèrent que par un seul (1) Etudes critiques sur les mollusques , p. 231. (2) Etudes critiques sur les mollusques jossi/es^ p. 232, 539 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. » caractère organique, l’absence de ce sillon particulier, qu’il a » appelé sillon cardinal, et qui est propre aux moules intérieurs de » la valve droite des Gresslyes. Le caractère distinctif des deux » genres réside par conséquent dans les moules intérieurs; d’où il » résulte qu’il est extrêmement difficile de distinguer les deux » genres lorsque la coquille est conservée. » Nous démontrerons plus loin combien, au contraire, les carac- tères de ces fossiles étant bien établis, cette distinction est facile, soit sur le moule intérieur, soit sur les coquilles. En résumé : Münster et Goldfuss donnent aux Plcuromya une ou deux dents inégales, un ligament interne, et les assimilent aux Lutraria et aux Myacites. MM. d’Orbigny, Buvignier, Pictet, Dunker, etc., leur attri- buent un ligament externe et une charnière composée d’une dent cardinale , identique avec celle des Panopées et les publient sous ce nom. M. Desbayes les considère comme des Pholadomyes sans côtes, par conséquent comme les coquilles à ligament externe et sans * dent à la charnière. * M. Dunker a créé le genre Tæniodon sur les caractères parti- culiers de la charnière. M. Agassiz se tait sur la position du ligament, et ne reconnaît à ces coquilles aucun caractère particulier à la charnière, les regar- dant comme identiques avec les Gresslya , qui possèdent d’une manière caractéristique un sillon cardinal sur la valve droite et visible seulement sur les moules. Nous avons réuni un grand nombre d’échantillons prove- nant de la grande oolite des environs de Longwy ; ils constituent sept espèces, qui, toutes munies de leur test, nous permettent d’établir d’une manière définitive les caractères d’un genre si généralement, si abondamment répandu , et sur l’étude duquel les paléontologistes les plus éminents montrent une si grande diver- gence d’opinions. Et si nous sommes plus heureux que nos devan- ciers et nos maîtres, nous le reconnaissons, nous le devons unique- ment au hasard, qui nous a permis de réunir un grand nombre d’échantillons dans un état de parfaite conservation. Les Pleuromya ont été jusqu’à ce jour rangées par divers auteurs parmi les genres suivants : Amphidesma , Phillips, Zieten. Donacites , Al. Brongniart. Lutraria , Goldfuss, Münster, Zieten, Roemer, Brongniart. 5/fO SÉANCE DU 20 JUIN 1853. Mya-ij Sowerby, Zieten. Myacites , Voltz, Schlotheim, Münster, Goldfuss. Unio.y Schubler. Venus } Roemer. Pholadomya , Desh a y es. Panopœcr , d’Orbigny, Buvignier, Pictet, Dunker. Trvnindon , Dunker. Les Pleuromya ont une coquille équivalve, très inéquilatérale, devenant, selon les espèces, subéquilatérale, par conséquent plus ou moins transverse , et à crocliets presque antérieurs ou submé- dians (fig. 1 n , b9'cj; la surface est lisse ou marquée de stries con- centriques pouvant simuler des côtes. Lorsque le test est complet, il présente des séries de petites granulations régulièrement disposées en lignes rayonnantes, verticales dans le milieu, devenant de plus en plus obliques, puis horizontales en arrière (fig. 1 a). Cet orne- ment est très caduc, n’est pas adhérent au test même de la co- quille, et appartient uniquement à sa partie épidermique, qui se détruit très facilement. Le bord cardinal est droit ou arqué (fig. 2 u, b ) ; la lunule est large et profonde, se confond avec la partie an- * térieure sans être limitée par un trait ( fig. 3 ) ; les crochets sont petits et infléchis en dedans. Sur la valve droite, en avant du cro- chet, le bord cardinal présente une dépression creusée en gouttière, qui remonte le long de la partie antérieure du crochet. Cette gout- tière s’allonge un peu , forme une petite expansion dentiforme horizontale, et un peu ohliquée en arrière ; derrière cette expan- sion est une large échancrure triangulaire (fig. U «, b). Sur la valve gauche, le bord cardinal présente de même une dépression qui remonte le long et en avant du crochet; le bord s’allonge beaucoup et forme une expansion creusée en gouttière profonde, limitée postérieurement par un plan vertical, et obliquant en arrière (fig. 5 a, b). Cette expansion est séparée des nymphes par une fente très étroite, et reçoit, par superposition, l’expansion de la valve droite (fig. 6) ; lorsque les crochets sont écartés, ou lorsqu’étant contigus, on enlève l’un d’eux, cette disposition se voit à l’œil nu, et sans au- cune préparation (fig. 7). L’expansion est complètement extérieure, et n’est pas recouverte par le ligament ni par aucune partie qui y se- rait adhérente; des nymphes fortes et saillantes se continuent jusque sous ses crochets, et contre la lame verticale de^l’expansion de la valve gauche : ainsi l’ouverture sous-jacente se trouve recouverte, et il est probable qu’une partie du ligament y était logée. Toutes les fois que le ligament manque ou qu’on l’enlève, on trouve con- stamment cette ouverture postérieure remplie par de la marne, au SÉANCE DU *20 JUIN 1853. 5/d lieu de calcaire ferrugineux, comme le reste de la coquille : ce fait démontre que lorsque le liquide calcareux est venu pétrifier la coquille, cette ouverture postérieure était occupée par un organe dont la tardive destruction a dû produire un espace vide, alors que la roche pétrifiante avait déjà acquis de la dureté. Le ligament n’est donc pas simple , tout en se montrant extérieurement aussi bien terminé en arrière qu’en avant. Si l’on considère lesexpansions comme constituant les dents de la charnière, on sera obligé d’admettre l’anomalie d’une coquille qui possède une charnière extérieure dont les parties constituantes prennent naissance en avant et le long des crochets ; si l’on n’y voit que desapophyses dentiformes , la coquille restera privée de dents à la charnière, et se rapprochera bien plus des Pholadomyes que des Panopées. La disposition genouillée de la gouttière de la valve gauche servait au jeu des valves, et empêchait le recul de la valve droite ; elle démontre que la coquille devait s’ouvrir principalement sur toute la partie ventrale : de là un bâillement antérieur presque nul et un postérieur le plus souvent linéaire. On y voit encore pour- quoi un si grand nombre d’échantillons montre un glissement constant dans un sens , toujours la valve gauche au-dessous de la valve droite. Nous comprenons qu’on puisse être induit en erreur et consi- dérer un Pleuromya comme une Panopée , lorsqu’on a une valve droite isolée qui présente une large échancrure derrière l’expan- sion, échancrure susceptible d’être prise pour une fossette; mais il ne peut en être de même pour la valve gauche, dont la simple fente ne saurait loger une dent égale à l’expansion que présente cette valve gauche et où l’on ne reconnaît pas de fossette antérieure, si l’on admet que la valve opposée en possède une postérieure. L’apophyse de la valve droite est plus variable dans ses dimen- sions que celle de la valve gauche , et se modifie selon les espèces * dans les Pleuromya ■ decus s ata, tenais tria ta etJurassi , elle est large et très courte, dépassant à peine le bord cardinal ; dans le Pleuromya elongata elle est étroite et possède plusieurs millimètres de lon- gueur dès le jeune âge de la coquille, dont l’adulte n’atteint ja- mais la taille du Pleuromya J aras si. La valve gauche est douée d’une aire cardinale en biseau, le plus souvent bordée par une arête ; cette disposition ne se ré- pète pas sur la valve droite, qui a un biseau à l’intérieur , pour recouvrir le bord de la valve opposée. Ce biseau de la valve gauche n’est pas visible, lorsque la coquille est dans son état nor- SÉANCE 1)1! 20 JUIN 1858. 542 mal et bien close. Ce fait ajoute une nouvelle preuve à ce que nous disions plus haut, et démontre que le bâillement ne pouvait être que ventral. La surface interne delà coquille est lisse ; les impressions muscu- laires, en général peu marquées, sont rondes et marginales; l’im- pression palléale détermine deux angles aigus, et son sinus s’étend jusqu’au delà de la moitié de la longueur de la valve (fig. 8 a). Le test est tris variable d’épaisseur dans certaines localités et selon la nature de la roche; dans un calcaire délitant il se montre constitué en calcaire spathique assez persistant, et comme empreint d’une matière grasse conservatrice. Dans d’autres locali- tés, où la roche est un calcaire très compacte, le test est très mince, papyracé , fragile , brillant , éclatant comme du verre ; il laisse alors sur les moules l’impression des plis qui l’ornaient. Enfin, dans les assises éminemment marneuses , le test a complètement disparu, et l’on ne trouve plus que des moules; il est composé de trois parties distinctes: une extérieure, épidermique, très caduque, portant les lignes rayonnantes de granulations; une intermédiaire, ornée de stries concentriques; puis une interne, très mince et bril- lante, qui reste attachée au moule , et permet d’autant moins de reconnaître les impressions musculaires et palléale , qu’elles sont déjà peu profondes par elles-mêmes. La station de ces. coquilles était toute de rivage , et elles sont d’autant plus abondantes que l’assise qui les renferme est plus marneuse. La disposition de la charnière et des organes qui l’accompagnent se montre très distincte sur presque tous les moules ; mais la connaissance seule de la coquille permet d’en bien apprécier la valeur et l’harmonie. Quelle que soit la forme des moules, deux caractères suffiront toujours pour les distinguer des Panopées vraies : 1° la petite impression de l’apophyse de la valve droite et la grande impression de celle de la valve gauche , toujours placée en contre-bas et en arrière (fig. 9) ; 2° la présence d’une aire cardinale sur la valve droite, et son absence sur la valve gauche, en raison inverse du caractère des coquilles. Pour distinguer les coquilles des Pleuromya des coquilles des Gresslya , il suffit de savoir que dans les premières les nymphes sont fortes et constamment visibles, tandis que dans les secondes il n’existe pas de nymphes, le ligament étant placé dans une gouttière recouverte par le prolongement de la valve droite. Nous résumerons ainsi les caractères du genre : Coquille équivalve, très inéquilatérale ou subéquilatérale, plus SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 5A3 ou moins transverse ; test orné de lignes noduleuses, rayonnantes, caduques, et de plis concentriques persistants. Charnière sans dent ; une expansion dentiforme sur chaque valve , et visible en dehors : celle delà valve droite petite, en gouttière, et logée dans celle de la valve gauche, qui est beaucoup plus grande, gen oui liée et de forme oblique en arrière ; appareil suivi par une échancrure triangulaire. Ligament double : F externe court et rond, porté sur de fortes nymphes, et contigu aux crochets ; l’interne logé dans l’échancrure. Aire cardinale sur la valve gauche seulement, la droite venant en recouvrement en avant comme en arrière, im- pressions musculaires rondes et marginales ; impression palléale avec un sinus formant deux angles plus ou moins aigus, et occupant plus de la moitié de la longueur de la coquille ; bâillement antérieur le plus souvent nul, le postérieur étroit ou linéaire. L’ensemble des caractères que nous venons d’exposer spécifie d’une manière toute nouvelle le genre Plèuromya, et nous voyons en effet qu’il ne peut s’appliquer à aucun genre connu et décrit ; nous croyons donc pouvoir revendiquer le droit d’en établir un nouveau, et par ce fait nous sommes dispensé de discuter les opi- nions émises par les paléontologistes sur le classement de ces coquilles. Nous reconnaîtrons en somme que la constitution de la charnière vient démontrer que ces fossiles sont bien mieux com- pris dans les lois générales sur les Pholaclomyes, données par M. Deshayes, que dans les descriptions de M. d'ürbigny, qui dit cependant en avoir vu la charnière et y avoir reconnu les dents propres aux Panopées. Toutefois, déplorant la multiplicité des synonymes inutiles qui viennent entraver l’étude de la paléontologie, et voulant rendre hommage à M. Agassiz, qui le premier a réuni ces fossiles en un groupe régulier, nous conserverons le nom de Plèuromya que cet auteur leur a appliqué ; ce genre devra donc désormais être com- pris dans la nomenclature et trouver sa place entre les Panopées et les Pholadomyes. Genre Myopsis , Agassiz. Nous n’entrerons pas, pour l’étude des Myopsis, dans tous les détails qui nous ont été nécessaires pour élucider celle des Pieu - rampa ; l’exposé des opinions des auteurs qui les ont classés jusqu’à ce jour suffira pour noire démonstration. Munster et Goldfuss (1) rangent les Myopsis du muschelkalk (1) Petrefacta Germaniœ , t. II, p. 253 et suivantes. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. bhh parmi lesMyaeites; les Myopsis jurassiques deviennent des Lu- traires, par conséquent des coquilles à ligament interne, et les Myopsis crétacés et tertiaires deviennent des Panopées à ligament externe. Nous supposerons , avec ces auteurs, que les Myopsis crétacés et tertiaires possèdent bien les caractères que nous recon- naissons dans le Pauopœa Faujassii , caractères propres aux véri- tables Panopées. M. Beshayes (1), ne jugeant que sur des moules peut-être im- parfaits, classe, comme nous l’avons dit plus haut, les Myopsis parmi les Pholadomyes, leur attribuant ainsi un ligament externe et ne leur reconnaissant pas de dents à la charnière. M. d’Orbigny (2) n’admet aucun de ces systèmes ; réunissant les Pleuromya aux Myopsis, il range parmi les Panopées tons ces fos- siles, quelque soit le terrain auquel ils appartiennent. Ce paléon- tologiste ne donne en particulier aucune indication à l’appui de sa manière de voir; nous la trouvons, du reste, nettement exprimée par le rapprochement qu’il fait du Lutraria Jurassi , Al. Brongn., et du Lutraria gurgites , Brongn., auxquels il attribue une iden- tité de caractères dans la charnière , tandis que le premier est un véritable .Myopsis et l’autre une véritable Panopée. Ce fait démontre que la charnière des Myopsis , ainsi que celle des Pleuromya , est entièrement inconnue à M. d’Orbigny. M. Buvignier, suivant les errements de M. d’Orbigny ( Paléon- tologie de la Meuse , Atlas, page 9, article Panopée), comprend les Pleuromya et les Myopsis dans le genre Panopée. 11 trouve que «ce genre (Panopée) s’y rencontre (terrains jurassiques) sous la » plupart des formes variées qu’ affectent les coquilles d’un genre » voisin, celui des Pholadomyes, quoiqu’il présente beaucoup plus » rarement les formes courtes et globuleuses, si fréquentes parmi » ces dernières. Ces deux genres ont une très grande affinité, et il y » a des espèces, à dents très courtes , qui établiraient presque un » passage de l’un à l’autre. » La figure 9 de la planche 7 ( Panopœa te nui s tri ata , Buv. ) re- présente bien l^apophyse de la valve droite; la figure 12 de la même planche est inexacte pour la charnière de la valve gauche: elle laisse croire que la partie de la coquille qui suit la fente est une véritable dent accompagnée d’une fossette destinée à recevoir la dent opposée, et fait supposer que la valve droite possède une disposition identique. (1) Eléments de conchyliologie , t. II, p. 247. (2) Paléontologie des tarai ns crétacés , t. III . S fi À NCR DR 20 JUIN 1853. 5Z|5 La figure 17 de la même planche ( P a no jura gigantea , ikiv. dorme également l’impression de l’apophyse de la valve dro te et de l’échancrure qui la suit ; mais il est impossible de reconnaître la valeur de l’organe qui vient après et qui est représenté sous la forme d’une dent saillante triangulaire : en tous cas, M. Buvignier montre par ses dessins que cette apophyse est essentiellement exté- rieure quant à la valve droite, mais il n’indique pas ce fait dans le texte, pas plus qu’il ne mentionne la superposition des deux apo- physes. M. Agassiz expose ainsi les caractères sur lesquels il se croit fondé à établir le genre Myopsis. « Je réunis sous ce nom un certain nombre d’espèces en » quelque sorte intermédiaires entre les Pleuromya , d’une part, et » les Panopées, d’autre part. Elles tiennent aux Panopées par leur » grande dimension et par leur charnière, qui, d’après les obser- » vations de M. d’Orbigny, est composée d’une dent sur chaque » valve ; elles se rapprochent des Pleuromyes par leur forme plus » ou moins comprimée, par leur bâillement assez faible, non » réfléchi, et par leur test, qui est extrêmement mince et orné de » fines lignes rayonnantes et ponctuées , ce qui n’a pas lieu dans » les Pleuromyes : d’où il résulte qu’elles diffèrent des Panopées » par leur test mince et orné et par leur bâillement non réfléchi, et » des Pleuromyes par leurs dents et les sillons peu réguliers de leurs » flancs. Or, comme on ne connaît aucune véritable Panopée à » test orné, ni aucune Pleuromye avec des dents à la charnière, » j’estime que les espèces qui réunissent ces deux caractères sont !> dignes de former un groupe à part, à moins qu’on ne préfère » réunir les trois groupes en un seul genre, savoir, les Panopées , » les Pleuromyes et les Myopsis (1). » Dans ce qui suit, M. Agassiz donne le développement des mêmes caractères, et n’ajoute aucun détail sur la constitution interne de la coquille des Myopsis. Si nous discutons la valeur des caractères attribués à ce genre , nous la trouvons entièrement nulle. i°Les ornements extérieurs des coquilles ne peuvent jamais servir pour l’établissement d’un genre ; nous voyons, d’une part, le Panopœa Faujasii , des terrains ter- tiaires, posséder des lignes rayonnantes ponctuées, et, d’autre part, les Pleuromya , les Gresslya , les Goniomya et les Arcomya , en être (1) Etudes critiques sur les mollusques fossiles , p. 251 . Soc. géol., 28 série, tome X. 35 SÉANCE DU 20 JUIN 1858. bhô également pourvues. 2° Si les Pleuromya doivent être privés de dents à la charnière, pour être différenciés des Myopsis , qui doivent au contraire en posséder, comment expliquer la fossette représentée aux figures 8 et 9 de la planche XXVIII , pour le Pleuromya angusta , tandis qu’elle manque dans toutes les figures des planches qui comprennent les Myopsis. En résumé, M. Agassiz ne donne aucun caractère générique aux Myopsis. Munster et Goldfuss les rangent dans les Lu tr a ires, les Myacites et les Panopées , à ligaments interne et externe, avec ou sans dent à la charnière. M. Deshayes les classe parmi les Pholadomyes} MM. d’Grbigny et Buvignier parmi les Panopées. Nous avons sous les yeux le Myopsis Jurassi , Agassiz, pl. XXX , 6g. 3; Lutraria Jurassi (Al. Brong. ), Goldf. , pl. GLII, fig. 7; Myopsis marginata , Ag.# pl. XXX, fig. 1,2, provenant de la grande oolite des environs de Longwy ; la même espèce provenant de Moutiers (Calvados), ainsi que plusieurs espèces non décrites, et nous avons pu constater l’identité la plus parfaite entre la charnière de toutes ces coquilles et celle que nous avons reconnue aux Pleuromya. De la sorte, tout ce que nous avons dit des Pleu- romya s’applique en son entier et d’une manière absolue aux Myopsis , tant pour les caractères de la charnière que pour les ornements extérieurs. En effet, nous voyons sur la valve droite et en avant du crochet une petite expansion dentiforme, suivie par une échancrure trian- gulaire (fig. 11 6); sur la valve gauche une expansion beaucoup plus grande, genouillée, en gouttière, recevant par superposition l’expansion opposée et suivie par une simple fente (fig. 11 <7, et fig. 12) ; l’aire cardinale n’existe que sur la valve gauche et se pré- sente aussi bien en arrière qu’en avant (fig. 13 a et b ). Pour faire ressortir la valeur de ces caractères, nous donnerons les caractères propres aux Panopées, sur lesquels les paléontolo- gistes sont parfaitement d’accord. La charnière des Panopées consiste en une seule dent cardinale sur chaque valve, conique, étroite, courbée en crochet, contiguë à la dent opposée, et dont l’extrémité seulement est reçue dans une cavité correspondante ; une nymphe grosse, calleuse, donne insertion, dans un profond sillon, à un ligament extérieur très épais. L’épaisseur de cette callosité est telle, que les valves ne peuvent être que juxtaposées tout le long du bord cardinal, et ne sauraient par ce fait présenter séance du 20 juin 1853.* bhl ce biseau que nous avons signalé sur la valve gauche des Pleuromya et des Myopsis. Pour pouvoir distinguer au premier aspect les Myopsis et les Pleuromya , munis de leur test, des Panopées et des Pholadomyes , nous indiquerons un caractère d’une très facile application. Les Panopées ne possèdent pas d'aire cardinale , ainsi que nous venons de le démontrer. Les Pholadomyes possèdent une aire cardinale profonde et égale sur chaque valve . Les Myopsis et les Pleuromya possèdent une aire cardinale sur la valve gauche seulement , la valve droite en étant entièrement privée. Nous insistons sur ce point que la forme extérieure peut unique- ment fournir des caractères pour aider à différencier les espèces entre elles et ne saurait suffire pour déterminer un genre ; nous pos- sédons des coquilles qui établissent des passages de formes depuis les Pleuromya tc/mistriata et elohgata , jusqu’aux Myopsis Jurassi et marginata. Cette forme extérieure présente d’ailleurs une modifi- cation qui est une source fréquente d’erreurs dans le classement de ces coquilles ; elle est inhérente à l’état de conservation de la co- quille. C’est ainsi que nous avons vu deux échantillons de la même espèce, le Panopœa Guibaliana (1), publié par M. Puvignier, l’un, cassé postérieurement, posséder un large bâillement et une cer- taine réflexion dans les valves, et simuler ainsi une Panopée ; l’autre, entier, avoir un bâillement très faible et ressembler à un Myopsis. Ce fait s’est reproduit d’une manière identique pour le Myopsis marginata et pour plusieurs autres espèces. On ne pourrait davantage classer ces fossiles parmi les Panopées, sur l’étude seule des moules intérieurs et des impressions que la coquille y a laissées; évidemment les indications sont insuffisantes et le moule ne peut donner l’idée de la superposition des expan- sions dentiformes; il faut avoir vu la coquille elle- même et l’avoir étudiée dans tous ses détails. Nous sommes donc fondé à croire que toutes les coquilles des terrains triasique et jurassique classées parmi les Panopées demandent une nouvelle étude, plus appro- fondie que celle qu’elles ont reçue jusqu’à ce jour. Ces terrains peuvent bien contenir des Panopées, mais nous disons qu’en tout cas elles y sont fort rares , et nous ajouterons que notre contrée , (1) Géologie de la Meuse, pl. VIII, fig. 3 et 4. % SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 548 très riche en fossiles de rivage vaseux, ne nous en a pas fourni une seule dont les caractères de la charnière ne laissent aucun doute. Dans cet exposé nous avons démontré : 1° Que les paléontologistes n’ont pas mieux élucidé les caractères du genre Myopsis que ceux des Pleuromya , les opinions sur le classement de ces coquilles étant fondées sur des données insuffisantes ou erronées; 2°queM. Agassiz a été moins heureux pour la diagnose des Myopsis que pour celle des Pleuromya , bien que nous n’ayons pu, même pour ce genre, admettre aucune des indications de cet auteur. En résumé, nous concluons que le genre Myopsis , faisant double emploi avec celui des Pleuromya , doit être supprimé ; toutes les coquilles triasiques et jurassiques qui ont été comprises dans ce genre devant être réunies dans celui des Pleuromya, dont elles pré- sentent l’identité de caractère et de constitution. Explication de la planche X. Fig. 1 a, b , c. Crochets plus ou moins antérieurs. a'. Grossissement double des granulations. a. Pleuromya tenui striata, A g. b. Pleuromya elüngata , Ag. Fig. % a et b. Bord cardinal droit ou arqué. Fig. 3. Vue de la face antérieure pour la lunule. Fig. k a et b. Apophyse de la valve droite. a. Pleuromya clecurtata , A g. b. Pleuromya elongata , Ag. Fig. 5 a. Apophyse de la valve gauche. b. Apophyse de la même valve avec le ligament. Fig. 6. Coupe d’une coquille au milieu du crochet, qui montre la superposition des apophyses. Fig. 7. Coquille vue en dessus, qui montre les nymphes, les apophyses extérieures des deux valves et l’aire cardinale de la valve gauche. Fig. 8 a. Moule intérieur du Pleuromya te nui striata» Fig. 0. Moule vu en dessus, montrant l’impression de l’apophyse de la valve gauche. Fig. 10. Myopsis marginata , Ag., grandeur naturelle. Fig. 1 1 a et b. Valves droite et gauche du Myopsis Jurassi, Ag. Fig. 12 a Grossissement double des granulations d’un Myopsis (espèce nouvelle). Fig. 1 3 a. Myopsis marginata , vu en dessus, identique avec la figure 7 du Pleuromya. b. Myopsis marginata , avec le ligament. Fig. 8 b . Moule intérieur du même Myopsis, réduit à moitié. SÉANCE 1)U 20 JUIN J 858. 540 Notice sur la cause des mouvements de rotation et de translation de la terre et des autres planètes , sur divers autres phéno- mènes auxquels elle donne lieu , et sur ses effets pendant les révolutions de la surface de certains corps planétaires , par M. J. Cornue!. Il s’accomplit sous nos yeux, dans F univers, une série de grands phénomènes qui méritent toute l’attention des savants, et dont les causes sont restées ignorées jusqu’à présent. Toutes intéressent les physiciens et les astronomes. Mais il en est qui rentrent dans le domaine de la géologie ; et, pour justifier cette assertion, il me suf- fira d’énoncer les trois propositions suivantes , dont cette notice donnera l’explication : 1° Tous les globes doués d’une lumière propre se tiennent à de grandes distances les uns des autres par l’effet d’un agent phy- sique dont l’action est incessante , et dont la force excède leur gravitation. Cet agent leur imprime un mouvement de rotation , et même à quelques uns un mouvement de translation autour d’autres. Par ses variations, il est la cause des changements qui s’opèrent plus ou moins lentement dans leurs positions relatives. 2° C’est aussi cet agent qui produit la rotation de la terre et des autres planètes, leur translation suivant une ellipse peu allongée, et les mouvements des satellites ; et il fait dépendre la forme des orbites de l’état extérieur de chaque globe qui se meut. C’est encore lui qui produit ces phénomènes de second ordre connus sous les noms de magnétisme terrestre et d’aurores boréales, 3° Quand une planète subit une révolution physique très in- tense, l’action du même agent fait cesser sa rotation. Dès que la rotation est arrêtée, la planète est forcée de changer son orbite en une ellipse très allongée, de sorte qu’elle devient une comète, et qu’elle ne reprend son premier état que quand le paroxysme a cessé et que la rotation recommence. Cette notice étant écrite pour la Société géologique , je devrais négliger les deux premières propositions et ne m’occuper que de la troisième; mais les phénomènes qu’elles indiquent ont entre eux une liaison tellement intime , et l’explication de l’un prépare tel- lement celle de l’autre , qu’il est impossible de les séparer sans affaiblir la démonstration de l’existence de leur cause commune et des divers effets qui en résultent. Sans avoir besoin d’examiner actuellement si les révolutions 550 SÉANCE DU 20 JUÏN 1853. que la terre a déjà subies ont été ou non assez importantes pour la transformer en comète pendant leur durée, il est essentiel cfe prouver l’exactitude de la troisième proposition , d’autant plus qu’il est constaté , en géologie , qu’en général les révolutions de notre globe ont augmenté en intensité à mesure qu’elles se sont succédé : ceci est conforme à l’idée qu’il faut une force de plus en plus grande pour briser une écorce devenant de plus en plus épaisse, et qu’alors il peut venir un temps où notre planète éprou- verait une révolution assez considérable pour qu’il s’opérât en elle ce que nous voyons se produire sur les comètes. Dans le Bulletin de la Société géologique, lre série, t. VI, p. 212, M. Virlet a très logiquement expliqué la nature et les changements d’aspect des comètes. Il en attribue bien la cause à des révolutions physiques. Mais son mémoire n’a introduit dans la science qu’une donnée restée à l’état de conjecture, parce qu’il a seulement signalé la partie la plus secondaire des effets concomitants d’une grande révolution planétaire , sans s’occuper des effets principaux et de leur cause. Je vais essayer d’aller plus loin que lui , et je m’esti- merai heureux si je réussis seulement à faire comprendre que ce sujet mérite d’être sérieusement étudié. L’attraction , propriété de la matière pondérable, fait graviter les masses les unes vers les autres et produit leur force centripète. Si elle agissait seule, tous les globes se précipiteraient les uns sur les autres et se réuniraient en masse serrée, de manière à dépeupler les espaces célestes. Or, il n’en est pas ainsi ; donc il y a une force centrifuge qui fait contre-poids à la gravitation. On a cherché à expliquer cette force centrifuge en supposant, pour les planètes, que chacune d’elles aurait reçu une impulsion pri- mitive dont la direction n’aurait pas passé par son centre de gravité. Il en serait résulté un double mouvement de rotation et de trans- lation*, et celle-ci , qui se serait effectuée en ligne droite s’il n’y avait eu que la seule force d’impulsion , se ferait en définitive , à cause de la gravitation , suivant une courbe fermée qui serait la résultante des deux forces contraires. On a même invoqué certains principes de mécanique, en indiquant p_our exemple les mouve- ments du jouet qu’on nomme toupie. Quelque ingénieuse que soit cette hypothèse , elle n’en est pas moins une erreur. D’abord, l’exemple cité ne lève pas la diffi- culté ; car, si la toupie décrit une courbe en même temps qu’elle tourne sur son axe , ce n’est que parce que son mouvement n’est pas encore parfaitement régularisé. Aussitôt qu’il l’est , elle ne change plus de place, même en tournant sur une glace que l’on a SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 551 pris le soin de rendre bien horizontale. Alors elle dort , pour me servir de l’expression des enfants ; ce qui prouve que la transla- tion n’est pas un effet nécessaire de l’impulsion latérale. Ensuite il faudrait admettre qu’une force qui n’aurait agi qu’un seul in- stant aurait produit un effet capable de contre-balancer, à tout jamais, sans s’affaiblir, la force d’attraction, qui est incessamment agissante. Il aurait fallu d’ailleurs que toutes les planètes fussent à l’état solide dès l’origine, et qu’elles reçussent toutes l’impulsion du même côté et hors de leur centre de gravité. Il aurait fallu encore qu’entre toutes les courbes possibles il se produisît préci- sément une courbe fermée capable de maintenir l’équilibre des éléments , de donner de la fixité aux climats , et de favoriser le développement ou d’empêcher l’anéantissement de la nature or- ganique. De plus , une courbe fermée qui résulterait de l’action combinée de deux forces constantes, l’une centrifuge et l’autre centripète, ne pourrait être qu’un cercle. Or les planètes ne décri- vent pas de cercles; leurs orbites sont des ellipses dont le soleil occupe un des foyers; de sorte que de l’aphélie au périhélie l’at- traction l’emporterait sur la force d’impulsion, et du périhélie à l’aphélie ce serait le contraire, et ces alternances ne s’accorde- raient plus avec l’hypothèse d’une impulsion primitive. Le mou- vement des comètes s’accorde encore moins avec cette supposition ; car on est obligé de reconnaître que les comètes marchent comme si une puissante attraction les précipitait dans la région du soleil, et comme si ensuite une puissante répulsion les en éloignait. Enfin, on ne comprendrait pas qu’une simple propulsion latérale eût pu engendrer la cycloïde que les satellites décrivent en suivant leur planète dans l’espace. Donc, on ne peut attribuer à une impulsion initiale la cause qui contre-balance la gravitation. C’est qu’en effet il y a une cause toute différente de celle-là , et je pense cpie la voici : La terre et tous les astres, y compris les comètes, doivent leurs distances et leurs mouvements au concours plus ou moins puissant de deux forces contraires qui procèdent, l’une de leur attraction , et l’autre de leur électricité. L’attraction est la cause de la force centripète, et l’électricité est la cause de la force centrifuge et de tous les mouvements qui en dérivent. L’expérience a prouvé, depuis longtemps, qu’un foyer intense d’électricité en est un aussi de chaleur et de lumière; et il n’y avait pas loin de là à la proposition inverse qu’un foyer de chaleur et de lumière est également un foyer d’électricité. Aussi l’électri- cité que donnent les foyers ordinaires de chaleur a-t-elle été cou- 552 SÉANCE DE 20 JUIN 1853. statée, non seulement à l’aide des minéraux pyro-électriques, mais encore au moyen des appareils thermo-électriques dont la physique expérimentale s’est enrichie. Les rapports entre la chaleur et l’électricité sont tellement inti- mes, a dit M. Becquerel , que la production de Tune est ordinai- rement accompagnée de la production de l’autre. Bien ne tend plus à prouver leur identité que l’électricité des machines à vapeur, et surtout l’expérience que l’on fait avec la machine hvdro-élec- trique de M. Armstrong. C’est une machine à vapeur d’où l’on fait échapper la vapeur d’eau par des tubes disposés d’une certaine manière. En en sortant, cette vapeur perd son électricité contre des peignes métalliques communiquant au sol, et la chaudière s’électrise en sens contraire parce qu’elle est isolée. Dans cet appa- reil, la quantité de fluide est telle, dit M. Douillet, qu’il donne des étincelles presque incessantes à la distance de 3 à h décimètres, et qu’il charge iftO fois par minute une grande jarre, que la plus grande machine de Londres ne charge pas trois fois dans le même temps. Dans l’ Annuaire du bureau des longitudes pour 1832 , page 235, en parlant de cette lumière , que l’on a assimilée à celle du soleil, et que l’on obtient, dans le vide , au moyen de deux charbons placés aux pôles d’une pile voltaïque, M. Arago disait: « Cette » expérience est très importante. Je ne dirai pas, cependant, qu’il » en découle avec quelque certitude la conséquence que la lumière » du soleil et des étoiles est une lumière électrique ; mais on m’ac- » cordera, du moins, que le contraire n’est pas prouvé.. . » Cette conjecture est maintenant suffisamment vérifiée par l’ex- périence. Car, sans rappeler les minéraux pyro-électriques qu’on peut électriser avec la chaleur solaire comme aveccelle des autres foyers, ni d’autres minéraux que l’on rend phosphorescents par insolation , on peut citer d’abord le daguerréotype , où la lumière solaire , même diffuse , procédant par électrisation moléculaire , électrise si délicatement, dans la proportion de ses tons ou de son intensité, les molécules de vapeur reçues par la plaque, qu’elle nous révèle dans l’électricité une gradation supérieure en perfec- tion à l’échelle des sons dans l’acoustique. D’un autre côté, des expé- riences directes ont permis de constater les effets électriques pro- duits dans l’action chimique de la lumière du soleil , et l’on sait combien l’influence de cet astre opère de combinaisons et de décom- positions à la surface de la terre. Je révisais ce travail, lorsqu’un journal me fît connaître l’expé- rience très remarquable de M. Beckensteiner , qui suffirait seule séance du 20 juin 185S. 55S pour prouver, delà manière la plus péremptoire, la propriété électrique des rayons du soleil. L’électrisation de l’atmosphère par l’action du même astre n’est d’ailleurs plus un secret pour les physiciens météorologistes, cpii savent en outre que le maximum de ses variations diurnes est sub- ordonné à l’état hygrométrique de l’air, dont l’humidité augmente la conductibilité. Je ferai voir plus loin que les orages et les éclairs de chaleur ont uniquement, ou au moins principalement pour cause l’électricité solaire, l’écorce refroidie de notre globe ne pouvant point, par elle seule, communiquer à l’air et à la vapeur plus d’électricité dans une saison que dans une autre ; et j’espère pouvoir donner la même preuve pour les aurores boréales. Mais, comme ces phénomènes, si étendus qu’ils soient, ne sont cependant que des perturbations locales au milieu d’un état électrique général , je m’attacherai sur- tout au magnétisme terrestre, parce que , si je démontre que c’est le soleil qui le produit , ce sera la preuve la plus manifeste de l’ac- tion électro-dynamique de cet astre. L’appareil de M. Wlieastone donne un résultat qui tend à éta- blir que la vitesse de l’électricité n’est pas moindre que celle delà lumière. Cela ce conçoit très bien ; car la lumière solaire ne peut pas être électrique sans que son électricité marche aussi vite qu’elle . Puisqu’il est constant que le soleil communique , en peu d’in- stants , une certaine dose de fluide électrique à des corps de peu d’étendue, combien n’en doit-il pas transmettre, pendant la durée d’un jour, à tout un hémisphère terrestre, dont la surface est l’é- quivalent d’une aire plane de plus de cent vingt-sept millions de kilomètres carrés ? D’ailleurs les surfaces solides et liquides de la terre ne sont point seules à en recevoir, car l’atmosphère en absorbe aussi une partie considérable , les rayons de l’astre la traversant dans toute son épaisseur. Si l’électricité cpii émane du soleil n’est pas aussi facile à constater et à recueillir que l’électricité donnée par les machines électriques, cela tient à ce que celle-ci , toujours concentrée et accumulée dans un petit espace , a une expansion brusque et toute locale dès qu’on lui livre passage, tandis que celle-là procède partout moléculai- rement, et même atomiquement , avec une action incessante, mesurée et uniforme , dans nue immense étendue à la fois et dans tous les milieux ou dans tous les corps qui ne se prêtent pas à sa polarisation. Aussi est-ce seulement quand sa tendance à l’expansion uniforme est contrariée que son exubérance §e manifeste par des perturbations. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 55Zi Pour expliquer les actions électro-dynamiques que les astres exercent les uns sur les autres , il faut le secours d’une théorie. Mais à laquelle recourir? Est-ce à l’hypothèse de Dufay, qui sup- pose deux électricités? Elle a fait son temps ; car, outre quelle ne peut pas rendre compte de tous les faits dont la science s’est enri- chie depuis Dufay, ni leur servir de lien commun , elle ne repose que sur un raisonnement faux et spécieux , dont je trouverai la réfutation dans l’expérience même qui lui sert de base. En raison des entraves dont elle est la cause , et de l’impossibilité d’expliquer avec elle les grands phénomènes astronomiques , il est surprenant que personne n’ait songé jusqu’à présent à relever l’erreur com- mise par son auteur. Est-ce à la théorie de Franklin, qui admet un seul fluide électrique en plus ou en moins? Elle a le tort d’avoir été abandonnée depuis longtemps par les physiciens fran- çais, quoique le langage scientifique fasse, en quelque sorte, un retour vers elle par ses expressions d 'électricité positive et d 'électri- cité négative. Cependant j’en tenterai l’application, parce qu’elle est éminemment vraie dans son principe, puisqu’on peut , avec elle , expliquer facilement tous les faits, et qu’elle mène très bien du connu à l’inconnu, ce qui est le propre de toute bonne théorie. Mais elle a besoin de plus de précision et surtout d’un complément qui lui a manqué jusqu’à présent. J’essaierai de les lui donner à l’aide de l’ électro-chimie , de la cristallisation et de l’isomor- phisme , qui se prêtent peu à de faux raisonnements. C’est ainsi que j’espère parvenir à démontrer que l’électricité est une, qu’elle n’est pas libre dans les corps qui nous entourent , mais qu’au con- traire elle s’y dose en quantité normale ; qu’elle est l’agent et le régulateur des combinaisons et la cause des décompositions ; que chaque atome et même chaque molécule libre a une électrosphère susceptible d’augmentation et de diminution ; que la véritable théorie des combinaisons est celle de l’égalisation électrique ; que, quand une combinaison se forme , il y a de l’électricité déplacée, et que, par conséquent, dans les astres que le refroidissement n’a pas encore convertis en planètes, les combinaisons qui se forment à leur périphérie sont un immense foyer d’où se dégage l’électri- cité qui produit leur photosphère. Je devrais commencer par là, afin de ne pas laisser à mon sujet principal l’apparence d’une pure hypothèse. Mais comme j’écris surtout pour des géologues, je diviserai cette notice en deux par- ties. Je placerai dans la première tout ce qui regarde les actions réciproques des corps célestes et de la terre, et je renverrai dans la seconde tout ce qui concerne la théorie, sauf quelques points SÉANCE DU 20 JUIN 1858, 555 que je ne pourrai me dispenser d’effleurer de prime abord, 11 sera facile au lecteur de suivre, s’il le préfère , l’ordre inverse, qui est le plus rationnel. Pour beaucoup de personnes, les théories ont peu d’attrait et les faits sont tout. Mais on doit distinguer entre les théories qui prennent l’inconnu pourpoint de départ, et celles qui , n’embras- sant que les faits connus, s’appliquent à les coordonner pour mettre en relief leur véritable cause. PREMIÈRE PARTIE. Dans cette première partie Fauteur entre dans de grands détails à l’appui de son système. Le sujet traité ayant plus particuliérement trait aux phénomènes astronomiques et n’ayant qu’un rapport éloigné avec la géologie, et l’étendue des développements dans lesquels il entre ne permettant pas leur insertion complète dans le Bulletin, nous nous bornerons à citer les titres des paragraphes, pour qu’on puisse juger de l’importance des questions soulevées. ACTIONS ÉLECTRO-DYNAMIQUES DES ASTRES. i. Nébuleuses. II. Astres solaires ou idio-lumincux . III. Étoiles doubles. IV. Terre et autres planètes. a , Distance, b, Rotation, c, Cause de la position et de la fixité des pôles, d , Translation, e , Cause de la forme elliptique de l’orbite, j, Magnétisme terrestre, g, Orages et aurores boréales. V. Satellites, VI. Comètes. SECONDE PARTIE. NOTIONS HISTORIQUES. I. Il n’y a. qu’un seul fluide électrique. En voyant les pendules de sureau électrisés par le verre se repousser , ceux électrisés par la résine se repousser aussi , et les premiers attirer les seconds, et réciproquement, Dufay en conclut qu’il y avait deux espèces d’électricité. Cette conséquence manque de justesse par les raisons que voici : 556 SÉANCE Dll 20 JUIN 1853. 1° Suivant cette hypothèse, chaque corps a les deux électricités; et, dans l'électrisation par frottement, le corps frotté garde une des deux électricités, tandis que le corps frottant prend l’autre. Or, ainsi que je l’ai dit en parlant des nébuleuses, puisque ce sont précisément les deux électricités contraires qui s'attirent, et que l'électricité en général marche avec une vitesse prodigieuse (77,000 lieues par seconde) , elles mettraient plus de promptitude à se combiner de nouveau pour reconstituer le fluide neutre que le mouvement de frottement n'en mettrait à se désunir. De sorte que l’électrisation par frottement ne serait pas possible. 2° On a négligé à tort le rôle de l’air dans le jeu des pendules ; car chaque atome ou chaque molécule d’air a une électrosphère susceptible d'augmentation ou de diminution. Les pendules élec- trisés en plus ont chacun une atmosphère électrique qu’ils perdent en vertu de la tendance perpétuelle de l'électricité à se mettre en équilibre partout. Au contact, les atmosphères électriques de ces pendules seraient obligées de se pénétrer réciproquement, ce qui, augmentant l’excès dans toute l’étendue dans laquelle se ferait cette pénétration réciproque , serait précisément contraire à la tendance à l’équilibre et au rétablissement de cet équilibre. D’un autre côté, les molécules de l’air ambiant, cpii n’ont que leur fluide naturel, en possèdent moins que les pendules surélectrisés. Elles fonction- nent à l’égard de ceux-ci comme le feraient des corps non élec- trisés, suppléant par leur nombre à ce qui leur manque en étendue. Elles les attirent et en sont attirées ; et finalement les pendules s’écartent et prennent la position qui se prête le plus à la déperdi- tion de leur excès d’électricité. Les pendules électrisés en moins tendent à reprendre du fluide. L’air ambiant est, à leur égard, comme s’il était surélectrisé , puisqu’il a plus de fluide qu’eux. Il leur cède une partie du sien. Si les deux pendules restaient voisins , l’air en contact avec eux serait obligé de leur céder une quantité de fluide presque double de celle qu’en prendrait un seul. L’équilibre se rétablirait moins promptement , d’autant plus que l’air sec est peu conducteur, c’est-à-dire cède et transmet lente- ment de son fluide , et que les mêmes molécules aériennes ne peu- vent pas indéfiniment s’appauvrir d’électricité. Dès lors les deux pendules s’éloignent en prenant chacun la place où il peut le plus facilement réparer son déficit. Enfin , un pendule électrisé en moins et un autre électrisé en plus s’attirent par la tendance de l’un à prendre et de l’autre à céder une partie de l’excès qui se trouve sur l’un d’eux. Tout s’explique donc très naturellement sans l’hy- pothèse de Dufay. séance du 20 Juin 1858. 557 3° C’est surtout le jeu de la pile de Yolta qui donne la preuve de r existence; d’un seul fluide électrique. Parmi les corps , les uns retiennent fortement leur fluide propre ainsi que celui dont on les charge, et reprennent lentement et diffi- cilement celui qu’on leur enlève ; de là leur nom de mauvais conducteurs. Les autres cèdent facilement une partie de leur élec- tricité , et transmettent facilement aussi celle qu’on leur commu- nique; on les nomme bons conducteurs. Dans les mêmes circonstances , les corps de même nature possè- dent une quantité égale d’électricité, tandis que les corps hétéro - gènes en ont, au contraire , des quantités différentes. Aussi, les métaux étant bons conducteurs, si l’on met en contact deux dis- ques de même métal, il n’y a pas de signes d’électricité, parce que , leurs quantités de fluide électrique étant égales , il ne cesse pas d’y avoir équilibre entre elles. Mais si les disques sont de métaux différents', et qu’il se touchent ou qu’on les soude en- semble par un de leurs bords, ils fonctionnent comme un conduc- teur unique ; c’est-à-dire que leur conductibilité partage entre eux la différence de leurs quantités de fluide propre , par la raison que l’électricité se met en équilibre partout où elle peut s’étendre librement. Soient A un des disques métalliques hétérogènes avec une quan- tité d’électricité = 100, et 13 l’autre disque avec une quantité du même fluide = 102. Après le contact ou la soudure, la différence 2 se partage : A = 100 + 1 et B = 102 — 1, de sorte que, par l’effet de l’équilibre électrique, l’un a 1 de plus et l’autre 1 de moins que ne comporte leur capacité électrique naturelle. Ils sont alors électrisés. Si , au moyen d’un conducteur convenable , on les met en communication par des points opposés au contact ou à la sou- dure, l’excès de A se reporte sur B , dont la capacité électrique est plus étendue, et qui reprend ainsi ce qu’il avait perdu. Mais leur conductibilité opère tout de suite un nouveau partage qui tend im- médiatement à détruire l’effet de l’inégalité des capacités électriques des deux métaux , ce qui fait que , le double phénomène du par- tage et de la circulation se renouvelant sans cesse , on a un courant électrique. A ne peut pas rendre 1 à B par leur point de contact ou de soudure , parce que leur conductibilité ne peut pas avoir les propriétés contraires d’opérer le partage et de le détruire, c’est-à- dire qu’elle ne peut pas simultanément être et n’être pas. D’un autre côté, les deux disques ne peuvent pas conserver leur nouvel état électrique , celui qui résulte du partage , parce qu’il faudrait que leurs capeAcités naturelles fussent égales , qu’elles ne le sont pas 558 SÉANCE DE 20 JUIN 1853. à cause de la nature différente des métaux , et qu’elles ne peuvent pas être à la fois égales et inégales. A est donc forcé de rendre à B le fluide qu’il en a reçu ; et puisque ce ne peut pas être par le point de contact, il faut que ce soit par des points opposés. Tel est le double eftêt de la propriété conductrice et de l’inégalité des capa- cités électriques. Dans l’hypotlièse de deux électricités, le fluide positif d’un couple passerait sur l’un des disques, et le fluide négatif sur l’autre. Mais ce serait contraire à la théorie elle-même, puisqu’elle enseigne que ses deux fluides s’attirent au lieu de se repousser. Et puis, pourquoi le fluide positif du premier disque passerait-il sur le second, sans que celui du second passât sur le premier , et ainsi du fluide négatif de chacun? Les échanges se faisant , il y aurait par- tage égal, et par conséquent, neutralisation ou recomposition in- stantanée qui ne changerait pas l’état naturel. À la vérité , on a fait intervenir une force électro- motrice. Que serait cette force? Pro- céderait-elle des deux corps ? Non, puisqu’ils sont en repos, et que l’inertie ne produit ni force ni mouvement. Proviendrait-elle de leur électricité? Nullement; sinon le fluide électrique entra- verait lui-même sa propre marche. Ce serait d’ailleurs une singu- lière force que celle qui, détruisant l’état naturel, favoriserait l’aller sur deux conducteurs réunis en un seul , et empêcherait le retour sans que la propriété conductrice fût changée. On paraît maintenant chercher l’explication du phénomène dans l'action chimique exercée par le liquide acidulé sur les dis- ques métalliques. Ce n’est pas résoudre la difficulté, car la pile fonctionne sans le secours d’un acide. L’agent chimique ne fait qu’augmenter l’effet, qui devient ainsi complexe; c’est-à-dire qu’outre celui des disques, on a celui des piles moléculaires que constituent les particules de l’acide en contact avec les molécules des métaux. Tout corps qui se combine avec un autre ou le décom- pose est, par chacune de ses molécules, un des éléments d’une pile. Dans les appareils composés d’un corps conducteur et d’un autre qUi ne l’est pas, le corps non conducteur retient fortement son fluide propre et celui dont on le charge , et ne reprend ou ne remplace que lentement celui qu’on lui enlève. Aussi faut-il un frottement, c’est-à-dire un effort plus grand qu’un simple contact pour modi- fier les électrosphères de ses molécules. Dans la machine électrique, si le conducteur n’était pas armé de pointes, il n’y aurait qu’une action par influence, tant que l’électricité ne jaillirait pas par étincelle. Électrisé en plus , il repousserait une partie du fluide naturel du conducteur, qui serait ainsi électrisé en moins à l’ex- SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 559 trémité la plus voisine et en plus à l’extrémité la plus éloignée. Electrisé en moins , il produirait sur le conducteur l’effet inverse. Avec les pointes, le conducteur reçoit un excès quand le plateau est électrisé en plus , et cède une partie de son fluide quand le pla- teau est électrisé en moins. Tout cela a lieu en vertu de la ten- dance du fluide des corps conducteurs à se partager pour rétablir l’équilibre sur les points où il est rompu. Aussi y a-t-il des diffé- rences d’aspect dans les aigrettes lumineuses, suivant qu’elles en- lèvent ou qu’elles apportent de l’électricité au conducteur. II. La pile de Volta ne suffit pas pour faire apprécier le rôle des éléments dans les combinaisons et pour fonder la th éorie èl ec tro - ch im i q u e. III. La cristallisation fournit des faits contraires à la théorie él ecti o- chimique. IV. Nouvelle théorie électro-chimique . Nous avons vu que les globes astronomiques se rapprochent à mesure que leur électricité diminue. Il s’agit maintenant de dé- montrer que la même loi régit les atomes des corps, et qu’en outre ils ne se combinent cpie par l’égalisation diamétrique de leurs électrosphères. Ce sujet étant complexe et assez abstrait, je le divise ainsi : 1° forme des atomes déduite de la cristallisation ; 2° rapport entre l’électricité et les formes cristallines des combinaisons ; 3° théorie de l’électricité dans les combinaisons, et cause des proportions chimiques ; ù° cause de l’isomorphisme. 1° Forme des atomes. En dressant un tableau méthodique des substances cristallisées, - on remarque qu’en général les formes cristallines se compliquent et se multiplient à mesure que la composition chimique se com- plique elle-même, et vice versa. Ce tableau présente une sorte de pyramide ayant à sa base un grand nombre de combinaisons qui se produisent sous des formes primitives très variées par les di- mensions relatives, les mesures angulaires et les inclinaisons. Si l’on remonte vers son sommet, les combinaisons et les formes pri- mitives se simplifient simultanément et de plus en plus ; de sorte qu’en arrivant aux corps simples on ne trouve plus que quelques types cristallins presque tous d’une extrême simplicité. Parmi ceux-ci dominent l’octaèdre régulier et le cube, le tétraèdre régu- 560 sfUNCÈ nu 20 juin 1853. lier étant rare dans les corps cristallisés. Il paraît manquer quel- que chose pour former le sommet de l’échelle cristallographique et pour servir de centre commun ou de point de départ à la cris- tallisation. C’est la sphère. Plusieurs savants, et notamment Ber- zelius, l’ont considérée comme étant la forme des atomes, et c’est une vérité facile à démontrer. La sphère est plus simple que le plus simple de tous les polyè- dres, puisqu’elle n’a qu’une seule dimension qui est son diamètre. Elle n’a pas de parties modifiables comme le sont les angles et les arêtes d’un cristal. Aussi ne la trouve-t-on point parmi les cristaux, parce qu’elle y serait forme primitive sans formes secondaires pos- sibles, n’ayant rien pour distinguer l’espèce du genre et le genre de la famille, et qu’il ne peut pas y avoir de familles sans genres, ni de genres sans espèces ou avec un caractère unique et identique pour toutes ces divisions. Par sa simplicité même, la forme sphérique ne peut appartenir qu’à l’atome, qui est plus simple que l’agrégation qui constitue un cristal. Les atomes doivent être plus simples que les espèces miné- rales, parce qu’ils ne sont pas eux-mêmes des espèces ; ils n’en sont que les éléments constituants. L’atome est indivisible, la divisibilité infinie n’étant qu’une idée abstraite qui ne peut pas être appliquée à la matière. De même qu’en mathématiques il est impossible de diviser l’unité en fractions qui soient encore des unités de même espèce, de même, dans le monde physique, l’unité atomique ne peut pas être com- posée de parties dont chacune serait elle-même une unité. Si l’atome était divisible, il ne serait plus qu’un composé, les parties ne seraient pas semblables au tout, et la nature de l’élément ne serait pas immuable. Sans doute un corps sphérique est divisible , mais il s’agit ici, non pas d’un corps dans le sens ordinaire du mot, mais bien de ce qui compose élémentairement un corps, c’est-à- dire de l’atome ou unité de la matière, ce qui est tout différent. La forme sphérique est donc la seule qui soit compatible avec l’indi- visibilité de l’atome. 11 n’y a que la sphère qui puisse se prêter à tous les modes d’empilement, polyédrique, et, par suite, au passage d’un même élément dans des cristallisations de types differents. Les groupe- ments géométriques des sphères ne peuvent engendrer que des polyèdres, et, par conséquent, les groupements réguliers ou symé- triques d’atomes sphériques doivent toujours produire des cristaux. Les atomes ont une forme propre, unique, qui favorise leur réu- nion et qui n’appartient pas à la cristallisation. Se groupent-ils, la SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 561 cristallisation résulte de leur concours, 1’uniforinité cesse, la di- versité commence et va toujours en s’étendant. C’est ainsi qu’en passant des éléments libres aux minéraux qui en sont les combi- naisons ou les groupements, on entre dans la série des formes po- lyédriques, d’abord les classes de types isomorphes, puis, dans chaque classe, un type propre à chaque genre, ensuite des formes spécifiques différentes, après lesquelles viennent encore les va- riétés. On pourrait objecter que si un polyèdre implique l’idée de la division par le clivage, et celle de la variation par des modifica- tions d’arêtes et d’angles solides, il faut distinguer entre les po- lyèdres cristallins qui sont divisibles parce qu’ils sont composés de plusieurs parties, et les polyèdres atomiques, qui ne le sont pas, parce qu’ils sont simples et constituent l’unité des éléments. Mais si les atomes avaient une forme spéciale pour chaque corps sim- ple, il en résulterait cette anomalie que les formes atomiques se- raient plus nombreuses que les formes primitives de tous les cris- taux ; car celles-ci ne se rapportent pas et ne peuvent pas se rap- porter à plus de quatorze types, tandis que le nombre des éléments connus excède cinquante, ce qui impliquerait plus de cinquante formes différentes. Ne fussent-elles qu’en même nombre, il serait encore extraordinaire que les atomes, simples qu’ils sont en tout, eussent autant de formes que les cristallisations des corps, dont les uns sont, il est vrai, formés d’éléments homogènes, mais dont les autres, et c’est le plus grand nombre, le sont d’atomes hétérogènes. Les corps simples ne cristallisent que sous un petit nombre de formes primitives, et beaucoup d’entre eux sous la même. Aussi est-il rationnel d’admettre qu’il y a bien plus d'éléments que de corps ayant une seule forme commune pour leurs atomes. Or, si une même forme atomique est commune à beaucoup d'éléments hétérogènes, pourquoi ne le serait-elle pas à tous? En supposant aux atomes des formes polyédriques, ou ces formes seraient régulières comme le cube et le tétraèdre, l'octaèdre et le dodécaèdre rhomboïdal réguliers, ou elles seraient irrégulières ou symétriques, ou bien il y en aurait des unes et des autres. Dans le premier cas, comment des atomes réguliers se grouperaient-ils pour former des cristaux obliques? Dans le second, comment des atomes obliques ou obliquangles de différentes sortes se réuni- raient-ils en cristaux cubiques ou tétraédriques, octaédriques, do- décaédriques réguliers ? Dans le troisième, quel arrangement les formes régulières prendraient-elles avec les formes irrégulières ou obliques pour construire des cristaux tantôt d’une sorte et tantôt Soc. géol,) 2e série , tome X. 36 562 SÉANCE DU 20 JUIN 1858. d’une autre? Dans les composés compliqués, comme l’alun, Pam- monalum, la pharmacosidérite, le pyrochlore, l’helvine, l’amphi- gène, l’analcime, les grenats, on n’aurait un cristal très simple qu'avec le concours de formes atomiques disparates. Avec la di- versité des formes atomiques on ne concevrait pas que l'isomor- phisme put exister pour tant de minéraux différents, ni comment un même élément s’arrangerait, dans ses combinaisons avec d’au- tres, pour entrer dans des cristaux qui parcourraient successive- ment la totalité ou la plupart des types cristallins. Enfin, si chaque élément chimique avait une forme atomique distincte, pourquoi les trois sulfates de fer, pyrite, sperkise et leberkise, auraient-ils trois formes primitives, tandis qu’ils n’ont que deux éléments? On ne peut pas dire que les atomes soient amorphes, car l’amor- phisme suppose un amas de parties réunies confusément et sans ordre, tandis qu’un atome est un tout sans parties. Il serait impos- sible que des éléments amorphes concourussent à produire la struc- ture régulière des cristaux, et précisément toujours la même dans les mêmes circonstances. Ainsi les atomes ne peuvent être ni polyédriques ni amorphes. Donc ils sont nécessairement sphériques. M. Delesse fait la communication suivante : Recherches sur la grauwacke métamorphique , par M. Delesse (1). Le terrain de transition des Vosges renferme des roches qu’on désigne généralement sous le nom de grauwacke et dont l’étude présente le plus haut intérêt. Tantôt elles ont les caractères d’une roche sédimentaire ; leur structure est arénacée; elles sont rudes au toucher et elles se lais- sent désagréger plus ou moins facilement : elles ne diffèrent de la grauwacke ordinaire cju’en ce qu’elles contiennent un grand nombre de débris feldspathiques et porphyriques , ainsi que des schistes pétrosiliceux appartenant au terrain du porphyre brun. Tantôt, au contraire, elles ont à la fois les caractères d’une roche sédimentaire et d’une roche porphyrique : alors, tous les fragments qui les composent ont été réunis et soudés par une pâte feldspath i que; des cristaux de feldspath du sixième système se (1) Voyez, pour plus de détails, Annales des mines, 5e sér.. t. III, p. 747. 563 SÉANCE I)U 20 JUIN 1853. sont même développés dans ces roches. Leur stratification est confuse ou bien elle a complètement disparu. Elles sont toujours sonores et résistantes sous le marteau. Souvent elles ont une structure de séparation parallélipipédique , comme celle de la pierre quarrée des bords de la Loire ; souvent aussi elles ont une structure globuleuse. Lorsqu’on les examine avec soin, surtout après les avoir atta- quées par l’acide fluorliydrique, on reconnaît qu’elles sont formées de fragments généralement anguleux de toutes les roches qui com- posent le terrain du porphyre brun : ces fragments sont de grosseur variable ; lorsqu’ils deviennent microscopiques, les roches passent à un pétrosilex qui représente par conséquent ici une variété limite de la grauwacke. Lors même qu’elles sont pétrosiliceuses ou feldspathiques, toutes ces roches contiennent quelquefois des empreintes végétales qui sont très bien conservées et qui démontrent leur origine sédimen- taire : c’est ce qu’on observe par exemple à Thann , à Bitschwil- îer, à Erzenbach, à Ulfholtz, etc. 11 est évident que ces dernières roches ont été modifiées posté- rieurement à leur dépôt ; elles forment par conséquent une grau- wacke métamorphique qui est celle que je me suis proposé d’étudier spécialement dans cette notice. — La grauwacke métamorphique est surtout caractérisée par une pâte feldspatliique qui est blanchâtre , grisâtre ou bleuâtre : lors- que sa structure cristalline a pu se développer, on y observe d’ail- leurs des lamelles d’un feldspath. Ce feldspath, qui appartient au sixième système, est en cristaux allongés, généralement assez petits, et ne dépassant pas quelques millimètres. Il présente les stries parallèles et le miroitement résul- tant de la macle de l’albite. 11 a toujours un éclat gras. Ce feldspath a une couleur qui varie du blanc légèrement verdâtre au vert gri- sâtre et au vert plus ou moins foncé; par altération à l’air, il devient rouge plus ou moins vif, puis brun et brun rougeâtre; enfin il devient blanc quand l’oxyde de fer a complètement disparu, et quand il se change en kaolin. La grauwacke métamorphique contient une infinité de fragments anguleux , provenant de roches porphyriques et pétrosiliceuses. On y trouve du mica, du quartz , de la clilorite, des carbonates, de la pyrite de fer , de l’hornblende , ainsi que divers minéraux accidentels. Elle est partiellement attaquée par les acides qui la décolorent. J’ai pensé qu’il y aurait de l’intérêt à faire l’analyse de la grau - séance du 20 juin 1853. m wacke métamorphique et en même temps celle de son feldspath. Dans le tableau qui suit, le feldspath F et la grauwacke G provien- nent d’un même échantillon d’Aux elles Haut (I). Le feldspath F' et la grauwacke G' proviennent d’un même échantillon de Thann (II). F Silice 71,50 Alumine 15,501 Oxyde de fer traces) Protoxyde de manganèse. id. Chaux 1 ,73 Magnésie. . , 0,50 Potasse 3,161 Soude 5,64) Eau (perte au feu). . . 2,06 1 100,09 11 67,50 61,92 63,25 20,00 22,92| 22 50 ’ traces ) ’ traces id. traces 3.09 0,90 1,70 2,25 1,20 3,92 4,06 j 1 1 ,06 1 5,73 3.10 2,00 2,90 100,00 100,00 100,00 ‘ Avec mi peu . l’acide carbonique Les analyses précédentes montrent que le feldspath du sixième système de la grauwacke métamorphique a une composition chi- mique variable. 11 renferme toujours de l’eau et peu de chaux. Il renferme aussi les deux alcalis, et la soude est son alcali do- minant. Sa teneur en silice est très variable : tantôt elle s’élève jusqu’à celle de l’albite; tantôt , au contraire , elle s’abaisse au-dessous de celle de l’oligoclase. Ce feldspath est quelquefois de l’albite , et par conséquent la grauwacke métamorphique donne un exemple remarquable d’une roche qui est presque entièrement formée d’albite. La composition moyenne de la grauwacke métamorphique se rapproche beaucoup de celle de son feldspath , comme on peut le voir par les analyses qui précèdent. J’ai fait en outre l’analyse d’une grauwacke métamorphique grenue et de plus celle d’une variété compacte; celte dernière était d’ailleurs un véritable pétrosilex et elle représentait la pâte feld- spathique qui forme le ciment de la grauwacke. 11 résulte de ces diverses analyses et de celles qui sont données par le tableau ci- dessus , que la grauwacke métamorphique a une composition chi- mique très variable ; cependant elle renferme généralement une séance du 20 juin 1853. 565 assez grande quantité d’alcalis, et de plus, son alcali dominant est toujours la soude. La grauwacke métamorphique est assez souvent traversée par des filons métallifères dont les gangues sont surtout le quartz , la chaux fluatée , la chaux carbonatée, la baryte sulfatée. Ces mêmes filons se retrouvent aussi dans la grauwacke, lors même qu’elle est à peu près à l’état normal et qu’elle n’a pas été métamorphisée ; ils ont été l’objet d’exploitations importantes aux environs de Giromagny. Quand la grauwacke est très cristalline , elle ressemble beau- coup à un porphyre ; elle en diffère cependant en ce qu’elle est moins homogène : par suite , sa teneur moyenne en silice est très variable. Il est souvent difficile de tracer la limite de la grauwacke méta- morphique et du porphyre brun qui lui est associé: ces deux roches contiennent en effet du feldspath appartenant au même système , et sur le terrain, elles présentent des passages insensibles. Cepen- dant le porphyre est beaucoup plus cristallin et surtout plus ho- mogène que la grauwacke; il est généralement moins riche en silice ; il ne contient pas de débris fossiles et il forme des amas ou des filons. La grauwacke métamorphique est au contraire une roche sédi- mentaire qui comprend des brèches, des grès et plus rarement des s Listes. Le métamorphisme de ses différentes couches a été très inégal; car, tandis que les grès et les brèches renferment des cris- taux de feldspath qui leur donnent une structure porphyrique , le plus souvent les schistes ont seulement été soudés et changés en pétrosilex. De plus , le métamorphisme a pu se produire dans une couche , sans se produire aucunement dans la couche inférieure ou dans la couche supérieure. 11 est, au contraire, assez égal dans une même couche dans laquelle on peut fréquemment le suivre sur de grandes étendues. Au moment de son métamorphisme , une couche a pu être amenée à un état plus ou moins plastique ; mais elle a générale- ment conservé sa stratification qui est quelquefois très régulière ; elle a aussi conservé sa structure arénacée ou bréchiforme. Les végétaux et les fossiles qu’elle renfermait n’ont pas été détruits, et ils sont même très facilement reconnaissables. Lorsque du calcaire se trouvait à son contact , il a seulement pris une structure légè- rement grenue. Le métamorphisme de la grauwacke a donc eu lieu sans des changements considérables dans son volume et dans sa tempéra- o(56 sêanck ou 20 juin 4858. ture. Il a , sans doute, été déterminé par une forte pression ou par des phénomènes spéciaux qui ont rendu la grauwacke plastique , mais il doit surtout être attribué à la composition élémentaire de cette roche, car elle était originairement formée de débris feldspa- thiques et porpliyriques. Le métamorphisme est d’ailleurs intime- ment lié à l’éruption du porphyre brun, puisque les débris de ce porphyre ont fourni les alcalis nécessaires au feldspath et à la pâte feldspathique qui a cimenté la grauwacke métamorphique. L’association de la grauwacke métamorphique et de l’anthracite qui s’observe avec une grande constance dans les Vosges, sur les bords de la Loire , et dans diverses contrées , semblerait indiquer que c’est un même phénomène qui a produit l’anthracite et la grauwacke métamorph ique, — La grauwacke métamorphique que je viens de décrire est très répandue dans toute la chaîne des Vosges, et on l’observe surtout dans les environs de Thann et de Framont. Toutefois c’est une roche assez exceptionnelle et on ne l’a retrou- vée que dans un petit nombre de contrées parmi lesquelles on peut citer les bords de la Loire dans la Bretagne et dans le Forez, cer- taines parties delà Normandie et des Pyrénées. Le terrain anthraxi- fère des bords de la Loire présente notamment une grande variété de roches, telles que la pierre q narrée , qui ressemblent assez à la grauwacke métamorphique des Vosges. Dans le Hartz, il y a aussi de la grauwacke métamorphique, mais le ciment feldspathique qui réunit ses grains est toujours très peu abondant Les anciens Egyptiens ont souvent employé , pour en faire des Spliynx, une roche qu’on désigne vulgairement sous le nom de basalte égyptien . Cette roche a une couleur vert grisâtre ou vert noirâtre. Elle paraît compacte au premier abord; cependant en l’examinant avec soin, on reconnaît qu’elle a une structure aré- nacée, et que ses grains ont été soudés par un ciment feldspathique. Elle a donc tous les caractères d’une grauwacke métamorphique. Le musée du Louvre renferme un assez grand nombre de statues égy- ptiennes qui ont été exécutées avec cette roche. Mais c’est surtout dans le pays de Galles que la grauwacke mé- tamorphique joue un rôle très important. Elle se trouve en effet dans le Caernarvonshire , le Merionethshire , le Denbigshire , le Salopshire et autour du massif du Snowdon , qui est la plus liante montagne du pays de Galles. La collection cîu Muséum oj practical geology de Londres possède de belles séries de ces roches, qui ont été recueillies et classées par M. le professeur Ramsay. Elles sont 567 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. Résignées sous le nom de breccias , conglomérâtes , volcanic ashes ., compact jeldspar (brèches, conglomérats, cendres volcaniques, feldspath compacte). Elles sont plus ou moins cimentées par une pâte feld spath i q uç , et elles passent très souvent au pétrosilex. Elles se relient d’ailleurs par une transition quelquefois insensible, aux roches stratifiées normales qui composent le terrain silurien inférieur. De même que dans les Vosges, elles sont en outre asso- ciées à des porphyres , elles résultent de leur trituration ; et par conséquent il est très vraisemblable que leur formation est contem- poraine de l’éruption de ces mêmes porphyres. Les variétés de grauwacke métamorphique desquelles je viens de parler , appartiennent toutes au terrain de transition ; la plupart appartiennent même au terrain dévonien et au terrain carbonifère inférieur. On comprend toutefois, d’après les caractères et l’ori- gine de la grauwaek e métamorphique telle que je l’ai définie, que cette roche a pu se produire à différentes époques géologiques, et qu’elle n’est pas nécessairement spéciale à une époque géologique déterminée. M. Boubée dit, relativement à la communication de M. De- lesse, qu’il appelle arkoses toutes les roches stratifiées dans lesquelles il y a du feldspath , et que d’après cela la roche dé- crite par M. Delesse, sous le nom de grauwacke métamor- phique, est simplement une arkose. Il ne peut d’ailleurs regarder comme des roches métamor- phiques les échantillons que M. Delesse met sous les yeux de la Société-, il pense qu’ils appartiennent simplement à des mehes sédimentaires et qu’ils n’ont pas éprouvé de modifica- tions. Beaucoup d’entre eux ont en effet conservé leur structure arénacée et bréchiforme. M. Delesse répond à M. Boubée par les remarques suivantes : « Je ne saurais partager l’opinion de M. Boubée et regarder la » grauwacke métamorphique que je viens de décrire comme une >» roche qui n’a pas été modifiée; car il m’est absolument impos- » sihle de concevoir comment une roche, formée par voie de dé- » pot au fond de la mer, pourrait présenter les caractères minéra- » logiques que j’ai signalés. » Je reconnais d'ailleurs, avec M. Boubée, qu’il y a bien une » certaine analogie entre l’arkose et entre la grauwacke métamor- 568 séance du 20 juin 1853. » phiquc cependant je ne pense pas qu’il soit possible d’appliquer » le même nom à ces deux roches. » En effet, l’arkose et Ja grauwacke métamorphique sont, il est » vrai, des roches sédimentaires qui contiennent des débris feldspa- » thiques , et qui toutes deux me paraissent avoir été modifiées ; » mais tandis que dans l’arkose ces débris appartiennent à l’orthose » et proviennent de la destruction de granités, dans la grauwacke m métamorphique ces débris proviennent de porphyres qui ont pour » base un feldspath du sixième système. « L’arkose et la grauwacke métamorphique sont bien pénétrées » toutes deux par des filons métallifères qui contiennent du quartz, » du spath fluor, de la baryte sulfatée, etc. ; mais la pâte qui a » cimenté les différentes parties de l’arkose est essentiellement » quartzeuse, tandis que la pâte qui a cimenté les fragments et » les parcelles de la grauwacke métamorphique est essentielle - » ment feldspathique. Cette circonstance est très importante à si- » gnaler, et je crois devoir y insister d’une manière spéciale, car » la grauwacke métamorphique des Vosges a souvent été regardée »> comme une roche silicifiée, quoiqu’elle ait été cimentée par une » pâte feldspathique; j’ajouterai même qu’il est assez rare d’y » trouver du quartz en grains et surtout en veinules. » La grauwacke des Vosges contient au contraire une multitude » de débris appartenant à des roches porphyriques et pétrosili- » ceuses; elle contient aussi des lamelles de mica qui ont été trans- » portées et qui proviennent de la destruction de roches micacées. » De plus, dans les échantillons que je soumets à la Société et que » j’ai décrits sous le nom de grauwacke métamorphique , toutes les » parties de la roche ont été complètement soudées par une pâte « feldspath ique ; quelquefois même la roche a pris une structure » porphyrique. » Je ne pense donc pas qu’il soit possible d’appliquer le nom o d’arkose à la grauwacke métamorphique , et j’ajouterai qu’aucun » des géologues qui ont étudié les Vosges n’a jamais songé à la » désigner sous ce nom . » M. Delesse fait la communication suivante : Sur la Pegmatite de V Irlande , par M. Delesse. Les montagnes du Mourne {Mourne Mountain) qui se trouvent dans le comté de Down, au nord-est de l'Irlande, sont formées par SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 569 des massifs de roches granitiques parmi lesquelles domine surtout la Pegmatite. Ces montagnes s’étendent depuis Newcastle, dans la baie de Dundrum, jusqu’auprès de Rosstrevor, dans le golfe de Carlingford : leur point culminant est le Slieve Donard, qui s’élève à 850 mètres au-dessus du niveau de la mer. La Pegmatite du Mourne est complètement entourée par un schiste argileux [slate) qui, près de Mullartown et près d’Annalong, est coupé par de nombreux liions de trapp dirigés à peu près du Nord au Sud. Il résulte des observations de sir Henry de la Bêche et de M. Griffith, que le schiste argileux du nord-est de l’Irlande doit être rapporté au terrain silurien inférieur; la Pegmatite des mon- tagnes du Mourne aurait d’ailleurs traversé ce schiste postérieure- ment à son dépôt, mais toutefois avant le dépôt du vieux grès rouge (f)ld red sandstone) dans lequel on le trouve à l’état de cail- loux roulés. La Pegmatite du Mourne est du reste plus ancienne que le granité de Newry, qui, bien qu’il se trouve à une petite distance, présente des caractères minéralogiques tout différents : en effet, le granité de Newry est gris bleuâtre, à petit grain ; il contient du quartz, de l’orthose , du feldspath qui paraît se rapporter à l’andésite , du mica qui est tantôt noir brunâtre et tantôt vert , de l’amphibole hornblende vert noirâtre ; il est surtout caractérisé par des cris- taux microscopiques, mais très nets, de sphène ayant une couleur bruii jaunâtre. Il ressemble beaucoup au granité porphyrique et à un mica qui constitue les ballons des Yosges (1). — Je vais décrire avec quelques détails la Pegmatite des mon- tagnes du Mourne que j’ai eu l’occasion d’observer dans plusieurs excursions faites avec M. le professeur Th. Andrews, de Belfast. J’étudierai successivement la structure de cette roche ainsi que les divers minéraux qu’elle renferme; je chercherai ensuite à dé- terminer l’ordre de succession de ses minéraux et à expliquer sa formation. Structure caverneuse, — La Pegmatite du Mourne constitue une variété très remarquable de Pegmatite, qui est surtout caractérisée par une structure caverneuse : aussi a-t-elle une rudesse au toucher tout à fait exceptionnelle pour une roche granitique. Comme d’ail- leurs elle se laisse tailler avec assez de facilité, on l’emploie avec avantage pour les constructions ; à cause de ses cavités elle prend (1) Annales des mines 9 5e sér. , t. III, p. 370. 570 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. en effet très bien le mortier. On l’emploie aussi pour moudre les grains et on la façonne en meules; c’est ce qui a lieu notamment à Russelagh , sur la route de Hilltown à Rosstrevor. Les cavités qui traversent la Pegmatite du Mourne sont très nombreuses et communiquent souvent entre elles; tantôt ces ca- vités sont microscopiques , tantôt elles ont plusieurs centimètres Elles sont du reste anguleuses et très irrégulières ; elles n’ont pas la forme de bulles comme les cavités des laves ; elles ne sont pas non plus lisses à l’intérieur; elles sont, au contraire, tapissées de cristaux. Ces cristaux qui sont assez gros sont identiques avec ceux qui composent la roche avec lesquels ils se fondent de la manière la plus intime. Il me paraît peu probable que ces cavités doivent être attribuées uniquement à une contraction produite par la cristallisation , car la Pegmatite du Mourne a des cristaux assez petits, et sa structure cristalline est moins développée que celle de beaucoup de Pegma- tites qui ne sont cependant pas caverneuses. Il est donc vraisem- blable que ces cavités résultent de l’action de gaz ; leurs formes et leurs caractères indiquent d’ailleurs que ces gaz se seraient dégagés à un moment où la roche était déjà suffisamment conso- lidée pour que les cavités pussent se conserver, mais où elle était cependant assez plastique pour que ses minéraux pussent encore se développer très librement. Les cavités de la Pegmatite du Mourne sont tapissées par divers minéraux cristallisés, desquels je parlerai plus loin, et elles con- tiennent un minéral très riche en fluor, la topaze. Dans les montagnes de l’Ilmen , M. G. Rose (1) a observé une Pegmatite dans laquelle il y a également de la topaze. Cette Peg- matite forme des filons dans un gneiss zirconien : son orthose pos- sède une belle couleur verte ; il est bien connu dans toutes les collections de minéralogie sous le nom de pierre des Amazones. Or, il importe de remarquer que cette Pegmatite de l’Ilmen est à struc- ture caverneuse comme celle de l’Irlande ; il paraît donc qu’il existe une certaine relation entre l’existence de cavités dans la Pegmatite et la présence de la topaze qui se trouve dans ces cavités ; par conséquent on peut croire que ces cavités ont été formées par des dégagements de gaz fluorés qui ont corrodé et pénétré la Pegma- tite , et dont le fluor s’est ensuite fixé dans la topaze. La même hypothèse a déjà été admise par M. Daubrée pour expliquer la formation de la topaze dans divers gisements. (4) G. Rose, Reise nach lirai , t. Il, p. 77. 571 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. Minéraux de la Pcgmcitite. — Les minéraux essentiels de la Pag- ina ti te du Mourne sont : l’orthose , le quartz et le mica ; ces mi- néraux sont ceux qui constituent généralement la Pegmatite (1) ; mais elle contient aussi quelques minéraux accessoires, notamment la topaze, l’émeraude, l’albite. Ces derniers minéraux forment des espèces de veinules très confuses qui s’observent surtout dans les parties les plus caverneuses de la roche. Son grain est moyen, sa couleur est blanc jaunâtre; quelquefois elle se décompose et elle se change en kaolin , mais sa décompo- sition est tout à fait accidentelle. Quelquefois aussi, comme on l’observe à Diamond Kocks sur les flancs du Slieve Donard , l’orthose et le quartz se sont réunis en globules étoilés dont toutes les parties sont cristallines. Dans cette même localité la roche est traversée sur certains points par des veines d’une Pegmatite à grands cristaux, qui est formée de quartz gris, d’orthose blanc et chatoyant , de mica vert foncé. Ces veines sont très irrégulières et elles ont seulement plusieurs centi- mètres d’épaisseur. Il est visible qu’elles proviennent du remplissage des fissures qui se sont produites dans le massif de la Pegmatite lorsqu’il était déjà en partie solidifié : le quartz, l’orthose et le mica se sont dé- veloppés lentement et librement dans ces fissures , et c’est ce qui explique pourquoi ils ont formé une Pegmatite à grands cristaux. Fa fat ite. — Les veines de Pegmatite à grands cristaux contien- nent de plus un minéral que Thomson a déjà décrit sous le nom de silicate de fer anhydre [anhy droits silicate of iron). Ayant re- cueilli de nombreux échantillons de ce minéral et l’ayant étudié de nouveau, je vais faire connaître ses propriétés. U est noirâtre, mais sa poudre est brun foncé et elle tache for- tement les doigts ; ce caractère seul indique déjà qu’il contient une certaine proportion de manganèse. Sa cassure est résineuse. Suivant deux directions, il présente cependant deux clivages qui sont inégaux et qui m’ont paru per- pendiculaires entre eux. Comme le péridot présente aussi deux clivages perpendiculaires, et que ce minéral a la composition du péridot, ainsi qu’on va le voir plus loin, cette circonstance est im- portante à signaler. Je n’ai d’ailleurs pas observé des cristaux ter- minés, mais seulement des fragments cristallins et clivables. (1) Annales des mines , 4esér., t. XVI, p. 97. — Pegmatite de Saint-Étienne. 572 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 11 a un pouvoir magnétique élevé et il adhère au barreau ai- manté. 11 devient facilement magnétipolaire. J’ai déterminé sa densité par deux expériences; et j’ai obtenu pour moyenne 4,006 : cette densité est notablement plus grande que celle donnée par Thomson, qui est seulement de 3,885. Il contient un peu d’eau, mais en quantité variable ; j’ai trouvé qu’il en renfermait depuis quelques millièmes jusqu’à 3,06 pour 100. Il est probable que cette eau provient d’une décomposition du minéral ou d’un commencement de pseudomorphose. On reconnaît d’ailleurs à la loupe que les fissures qui se sont formées dans certains échantillons ont été remplies par de l’hématite brune. A une bonne chaleur rouge, il fond en une scorie bulleuse qui est noir grisâtre et qui a l’éclat métallique : elle ressemble com- plètement aux scories riches produites dans les foyers d’affinerie et dans les fours à réverbère qui servent au travail du fer. Elle est plus magnétique que le minéral lui-même. Quand on laisse cette scorie se refroidir lentement , sa surface se couvre de cristaux ayant les formes du péridot artificiel qui se produit dans les scories provenant du travail du fer ; Ces formes sont connues depuis longtemps par les recherches de MM. Mitscherlich et Hausmann. Le minéral s’attaque très facilement par l’acide, soit avant, soit après calcination ; la silice se gonfle et elle fait même un peu gelée. L’analyse m’a donné des résultats qui concordent assez bien avec ceux de Thomson; cependant j’ai obtenu plus de manganèse et j’ai trouvé en outre un peu de magnésie. J’ai constaté d’ailleurs qu’il n’y avait pas d’alcalis et je pense que la perte de mon analyse tient à l’oxydation d’une partie du protoxyde de fer, car j’ai opéré sur le minéral calciné jusqu’à fusion. Silice 29,50 Oxygène. 15,325 Protoxvde de fer 63,54 14,466) Protoxyde de manganèse. . 5,07 1,136 >15,718 Magnésie 0,30 0,116] Alumine traces » 98,41 Le calcul des quantités d’oxygène montre que la quantité d’oxy- gène de la silice est égale à la somme des quantités d’oxygène des bases ; le minéral a donc la formule du péridot : Si03,3R0. 673 SÉANCE DU 20 JUIN 4853. Par conséquent le minéral du Slieve Bonard est un péridot dont la base est presque exclusivement le protoxyde de fer, c’est-à-dire un péridot ferreux. MM. C. Gmelin et de Fellenberg ont déjà décrit sous le nom de fayalite un péridot qui a une composition très voisine de la précé- dente et qui provient d’une roche volcanique de Fayal aux Açores î avec M. Hausmann, je conserverai donc le nom de fayalite à ce minéral de la Pegmatite du Mourne. J’observerai maintenant qu’il est très bizarre de trouver dans une Pegmatite un minéral présentant la composition du péridot, car le péridot est par excellence le minéral caractéristique des ro- ches qui ont une origine ignée et qui sont pauvres en silice ; or, dans la Pegmatite, il est associé de la manière la plus intime avec de l’orthose et avec un grand excès de quartz. Ce péridot de la Pegmatite fait gelée avec les acides comme le péridot des laves; il s’en distingue seulement en ce qu’il est en cristaux beaucoup plus gros et en ce qu’il est presque entièrement formé de protoxyde de fer. Ü|ï,e péridot hyalin qui vient de l’Orient et qui est employé dans la bijouterie, paraît d’ailleurs se trouver aussi dans des roches gra- nitiques ; en effet, M. Dufrénoy a observé un cristal très net de péridot d’une très belle couleur verte qui était dans un filon de Pegmatite encaissé dans une roche granitique (1). La présence du péridot dans la Pegmatite semblera moins anor- male, si l’on observe que cette roche contient aussi du pyroxène et du grenat ; or, de même que le péridot , ces minéraux sont très caractéristiques pour les roches qui sont pauvres en silice et qui ont une origine ignée. Ainsi , par exemple, le pyroxène s’observe dansjla Pegmatite du lac Baïkal et dans celle de Sainte-Marie aux Mines. Quant au grenat, il est fréquent dans plusieurs roches gra- nitiques et notamment dans le leptynite. -—La fayalite forme dans la Pegmatite du Mourne des veines qui sont tout à fait accidentelles, mais la masse entière de cette Peg- matite est caverneuse , et toutes ses cavités sont tapissées par des minéraux très nettement cristallisés , qui sont bien connus dans les collections de minéralogie : ces minéraux que je vais décrire maintenant sont : la topaze , X émeraude , le quartz , X orthose , X al- bite , le mica , la tourmaline , le talc, la chlorite , X allophane. Topaze. — La topaze est très abondante dans la Pegmatite ca- (1) Dufrénoy, Minéralogie , t. III, p. 553. SÉANCE DU 20 JUIN 1855. Ô7â verneuse , notamment sur les flancs du Slieve Donald , à Diamond Rocks (Roches aux diamants) . Toujours elle est cristallisée ; presque toujours aussi elle est d’une blancheur, d’une transparence et d’une limpidité remarquables. Ses cristaux ont ordinairement quelques millimètres et ils ne dépassent guère quelques centimètres. Ils sont implantés à la circonférence de la druse par une de leurs extrémités, et l’autre extrémité seulement est libre. Leurs formes sont extrêmement variées; parmi ces formes, la plus habituelle est le prisme rhomboïdal primitif terminé par un biseau résultant de larges modifications sur les deux angles qui sont aux extrémités de la grande diagonale de la base. Les deux faces du biseau sont un peu rugueuses ; les faces latérales sont striées, mais très brillantes; elles portent plusieurs modifications. Cette forme s’observe surtout dans la topaze de Sibérie. La forme de la topaze du Brésil, qui est le prisme rhomboïdal terminé par un pointement à quatre faces, s’observe également. Quelquefois même les cristaux sont terminés par une petite facette correspondant à la base, en sorte qu’ils se rapprochent alors de la topaze de Saxe (Dufrénoy, Minéralogie , t. IV, pl. 207, fig. 377). Toutes ces topazes , quelles que soient leurs formes , ont d’ail- leurs la couleur blanche. La Pegmatite de l’Irlande peut donc être citée comme exemple d’un gisement dans lequel on trouve des topazes qui se sont for- mées dans les mêmes conditions , qui ont la même couleur et qui cependant présentent les trois formes principales qui ont été ob- servées dans les topazes. Emeraude . • — L' émeraude est beaucoup moins abondante que la topaze : elle a une belle couleur ^bleuâtre ; elle est bien trans- parente et elle appartient à la variété qu’on désigne sous le nom d’aigue-marine. Ses cristaux ont souvent plusieurs centimètres de longueur, et ils peuvent atteindre un décimètre. Dans certains échantillons ils se sont groupés autour d’un centre duquel ils divergent. Leur forme est le prisme hexagonal régulier qui est terminé par la base à son extrémité. La face de base est un peu rugueuse et elle a moins d’éclat que les faces latérales. Les arêtes latérales de l’hexagone régulier peuvent être modifiées par une ou par deux faces planes. Les angles du prisme hexagonal deviennent quel- quefois opaques suivant des faces correspondant à un dodécaèdre SÉANCE du 20 juin Î853. 575 qui serait placé sur les angles du prisme hexagonal ; c’est ce que montre la figure suivante : Un fait analogue s’observe dans Y émeraude du Brésil, mais les zones opaques sont ordinairement parallèles aux faces du prisme hexagonal. Souvent les faces du prisme hexagonal et même les autres faces de modification sont très inégalement développées, en sorte que l’on a alternativement une grande face et une petite face. Il est donc vraisemblable qu’on pourrait distinguer dans Y émeraude deux rhomboèdres, l’un de droite, l’autre de gauche , comme M. Gustave Rose a été conduit à l’admettre pour le quartz. Quartz. — Le quartz est généralement enfumé et sa couleur varie du gris au noir; il appartient à la variété qu’on désigne vulgairement en Allemagne sous le nom de ra'uchtopaz. Il est tou- jours en cristaux très nets qui appartiennent au prisme hexagonal terminé par la pyramide à six faces : le prisme hexagonal porte quelquefois des faces de modifications microscopiques qui sont placées soit sur ses arêtes horizontales, soit sur ses angles. Le quartz gris noirâtre, qui accompagne la jayalite dans les filons de Pegmatite à grands cristaux, se divise accidentellement en rhomboèdres imparfaits dont les faces présentent des indices de clivage et paraissent correspondre aux faces du rhomboèdre primitif. Orthose. — orthose est en gros cristaux qui sont opaques et qui ont une couleur blanche ou blanche légèrement jaunâtre. Celui qui a cristallisé dans les cavités a une couleur matte , d’un blanc plus pur que celui qui a cristallisé dans la Pegmatite : d’un autre côté , Y orthose de la Pegmatite présente quelquefois des reflets nacrés et chatoyants; cela a lieu surtout pour Y orthose qui a cris- tallisé dans les filons dePegmatite à grands Cristaux qui contiennent la fayalite. Dans la pierre de lune de l’ile de Ceylan , qui est une variété de Pegmatite, Y orthose est, comme on le sait, très chatoyant, et c’est aussi Y orthose en filons dans cette Pegmatite qui atteint le maximum d’éclat. J’ai déjà eu l’occasion de faire observer antérieurement que Y orthose de la Pegmatite ne présente pas la macle par retourne- ment autour de l’axe principal, qui est si fréquente dans les gra- 576 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. nites et dans les trachytes, surtout lorsqu’ils sont porph yriques (1). Il en est encore de même pour Yorthose de la Pegmatite du Mourne. Quelquefois seulement Yorthose des cavités est maclé pa- rallèlement à la base P, comme le montre la figure ci-dessous : l’axe de rotation de cette macle est alors perpendiculaire à P. Dans la Pegmatite même Yorthose est pénétré par une multitude de veinules microscopiques de quartz, mais quand on s’approche de la circonférence d’une cavité, on voit ces veinules devenir de plus en plus rares, de plus en plus grosses et se séparer peu à peu en cristaux : dans la cavité elle-même on observe d’ailleurs des cristaux d 1 orthose et de quartz qui sont isolés et très bien formés; la structure cristalline est donc beaucoup plus développée dans les cavités et dans leur voisinage que dans la roche elle-même. Albite. — La présence de Yalbite dans la Pegmatite a déjà été signalée par M. Naumann. Dans la Pegmatite du Mourne Yalbite est blanc comme l’orthose, mais il s’en distingue cependant facile- ment par une teinte opaline et par un éclat plus vif qui rappelle celui de la neige. Dans certains cas il est très brillant et même transparent. Il appartient à la variété {Yalbite que M. Ereithaupt a désignée sous le nom de péricline, et il ressemble beaucoup au péricline du Tyrol. Ses cristaux, qui sont maclés, forment des agglomérations quelquefois crêtées ou bacillaires qui se sont dépo- sées à la surface du quartz , de P orthose et des autres minéraux des cavités. U alhite est beaucoup moins abondant que l’orthose. Contrairement à ce qui a lieu généralement dans le granité, j’ai observé Yalbite jusque dans la Pegmatite elle-même ; mais toute la masse de cette Pegmatite est tellement caverneuse, que cet albite peut y avoir rempli complètement des cavités qui y restaient li- bres. La topaze et l’émeraude, qui, de même que Yalbite , appar- (1) Annales des mines, 4* sér., t. XVI, p. 98, SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 577 tiennent plus spécialement aux cavités, se sont également déve- loppées jusque dans la Pegmatite. J’ajouterai d’ailleurs que quand la Pegmatite du Mourne cesse d’être caverneuse et prend une structure porphyrique, elle contient quelquefois des lamelles striées d’un feldspath blanc très légèrement verdâtre et à éclat gras qui m’a présenté les caractères de l’oligoclase. L ’albite est donc un feldspath qui est spécial à la Pegmatite ca- verneuse et qui la distingue des granités proprement dits. Dans les granités, en effet, l’orthose est toujours accompagné d’un feld- spath du sixième système dont la teneur en silice n’est pas supé- rieure à celle de l’oligoclase. Il importe d’observer que Yalbite de la Pegmatite du Mourne ne contient pas d’eau et qu’il est eu cristaux très nets et très bien conservés. Ce fait est d’autant plus digne d’être remarqué, que cet albitc se trouve dans une roche granitique dans laquelle les infil** trations sont beaucoup plus faciles que dans aucune autre. Mica. — Le mica qui s’est développé dans les cavités est en prismes hexagonaux très surbaissés qui sont assez nets ; ils sont im- plantés par une de leurs faces latérales ; ils ont généralement une longueur de quelques millimètres et ils atteignent même quelques centimètres. Ce mica est bien transparent et il a deux axes de double réfrac- tion qui sont assez rapprochés. Son éclat est très vif. Sa couleur varie du gris au vert plus ou moins grisâtre. Vu par transparence, il a une couleur gris lilas ou vert-émeraude. Cette couleur foncée est exceptionnelle pour le mica de la Pegmatite qui est le plus généralement blanc argenté; certains échantillons de la Pegmatite du Mourne contiennent cependant du mica gris argenté qui ressemble beaucoup à celui que j’ai analysé et qui provenait de la Pegmatite des Vosges (1). Le mica du Mourne diffère du mica des Vosges en ce qu’il contient plus d’oxyde de fer et sans doute plus de magnésie ; mais, malgré leur différence de couleur et de composition, ces deux micas ont un certain air de parenté qu’il est impossible de méconnaître. Le mica du. Mourne doit se rapprocher aussi du mica d’Alten- [ berg qui est associé à la variété de topaze à laquelle on a donné le | nom de picnite , ainsi que du mica de Miask qui a été analysé par M. Henry Rose (2). (1) Annales des mines , 4e sér., t. XYI. (2) G. Rose, Reise nach Vrai , t. H, p. 50. Soc. géol ,f 2e série, tome X. 37 578 SÉANCE DU *20 JUIN 1853. Il importe de remarquer que le mica des cavités, dans la Pegma- tite d’Irlande, a toujours une couleur plus pâle que le mica qui est dans la Pegmatite même ; en effet, ce dernier est vert noirâtre ou même noir, et il est d’ailleurs en cristaux beaucoup plus petits. Le mica qui accompagne la favalite dans les filons de Pegmatite s à grands cristaux a une couleur verte très foncée, et lorsqu’il est en lamelles épaisses, il n’est plus transparent. Il ressemble beau- coup à une clilorite ; il s’en distingue cependant par son élasticité; par sa dureté, et surtout par l’éclat nacré et argenté qu’il prend lorsqu’il a été exposé à l’action de l’air. Sa composition n’est pas la même que celle du mica qui a cristallisé dans les cavités de la Pegmatite : comme il est associé avec la fayalite de laquelle il est contemporain et comme ce dernier minéral contient plus de 63 pour 100 de protoxyde de fer, il est visible qu’il doit être aussi très riche en fer. Le mica de la Pegmatite du Biourne a donc des couleurs assez variées, mais la description que je viens d’en donner montre en quoi il diffère du mica brun tombac du granité et du mica vert de la Protogine. Tourmaline. — La Pegmatite du Mourne contient accidentelle- ment un peu de tourmaline , cependant je n’en ai observé que dans un seul échantillon du Slieve Bonard : cette tourmaline était en aiguilles allongées et vert brunâtre. 7 aie. — L’ortliose, l'albite et le mica des cavités sont quelque- fois en partie recouverts par de petites lamelles d’un talc jaunâtre ou jaune verdâtre; dans certains cas , ce talc est blanc, nacré et disposé en éventail. U forme généralement des crêtes entrecroisées qui sont à la surface des minéraux sur lesquels il s’est développé. 1 Clilorite. — On trouve aussi une espèce deripidolithe ou d echlorite I verte, qui est tantôt grenue et tantôt filiforme. Elle ressemble 1 beaucoup à celle du Saint-Gothard : de même que cette dernière, 1 elle s’est développée par pseudomorphose à la surface des cristaux " et même jusque dans leur intérieur, notamment dans le quartz, ^ dans l’orthose et dans l’albite. Allophane . — Enfin je signalerai encore une atlaphane ou une !l argile blanche, tendre, douce au toucher, ayant l’éclat et la transparence de la cire. Elle forme un léger enduit ayant au plus quelques millimètres d’épaisseur qui s’est déposé indistinctement sur tous les cristaux qui tapissent certaines cavités. Ordre de succession des minéraux. — Je me propose maintenant de déterminer l’âge relatif des minéraux de la Pegmatite ou leur fi ordre de succession . SEANCE DU 20 JUIN 185S. 579 Lorsque des minéraux out cristallisé dans des cavités, il est généralement assez facile de déterminer leur ordre de succession ; car il suffit de rechercher l’ordre de superposition de ces miné- raux en allant de la circonférence de la cavité vers son centre. Il est au contraire beaucoup plus difficile de déterminer Y ordre de succession des minéraux qui ont cristallisé dans la roche elle- même. La plupart des géologues admettent en effet avec Werner que les minéraux d’une roche porphyrique se sont formés avant la masse de cette roche ; mais M. Breithaupt a démontré par plu- sieurs preuves incontestables que les minéraux d’un porphyre peuvent aussi s’être formés postérieurement ; cela a lieu notamment lorsque ces minéraux se sont développés par métamorphisme. M. Breithaupt penserait même qu’à un très petit nombre d’excep- tions près, les minéraux d’un porphyre sont généralement posté- rieurs à la roche. 11 me paraît toutefois que cette manière de voir est trop absolue et je ne saurais la partager entièrement. Quoi qu’il en soit, il résulte de ce qui précède, que pour déter- miner Y ordre de succession des minéraux dans une roche, il ne suffit pas toujours de rechercher quels sont les minéraux qui se sont développés au milieu de cette roche. D’un autre côté cepen- dant, un minéral ne peut recevoir l’empreinte d’un minéral con- tigu qu’autant qu’il n’est pas encore lui -même entièrement à l’état solide, ou bien qu’ après avoir été solidifié, il a ensuite été ra- molli par des circonstances spéciales : on aura donc en tout cas l’ordre de solidification des minéraux d’une roche en cherchant quels sont les minéraux qui ont successivement marqué leur em- preinte l’un sur l’autre. Lorsque la roche ne se composera pas de minéraux formés par voie de métamorphisme, lorsqu’elle n’aura pas subi une cristallisation postérieure à son éruption, lorsqu’au contraire la formation de tous les minéraux aura eu lieu à la même époque géologique, l’ordre de solidification de ces minéraux sera d’ailleurs le même que Y ordre cle succession. Or il me paraît que la Pegmatite est une roche qui se trouve précisément dans ce dernier cas et que l’orthose, le quartz, le mica y ont cristallisé à peu près simultanément et de plus à la même époque géologique. La formation de la Pegmatite de l’Irlande comprend d’ailleurs plusieurs phases et l’on peut au moins en distinguer trois. En effet, quelle que soit l’hypothèse adoptée pour expliquer la production des cavités de la Pegmatite, il est évident que les mi- néraux qui tapissent ces cavités n’ont pu se développer qu’autant que leurs parois étaient déjà plus ou moins solidifiées; par congé* 580 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. quent la cristallisation de la Pegmatite elle-même a précédé te remplissage de ses cavités. D’un autre côté, des fissures ne pouvaient se produire que dans une roche déjà en partie consolidée; par conséquent la cristallisa- tion de la Pegmatite a précédé également le remplissage de ses fissures. Quoique la topaze et l’émeraude soient très abondantes dans toute la Pegmatite, je n’en ai pas observé avec la fayalite : la cris- tallisation de ces gemmes était donc complètement terminée, lorsqu’à eu lieu le remplissage des fissures dans lesquelles se trouve la fayalite, et par conséquent aussi, le remplissage des cavités a précédé le remplissage des fissures. D’après cela je distinguerai trois phases dans la formation de la Pegmatite caverneuse d'Irlande , et j’admettrai qu’elles se sont succédés dans l’ordre chronologique suivant : 1° cristallisation de la Pegmatite y 2° remplissage de ses cavités , 3° remplissage de ses fissures . Dans chacune de ces phases il s’est produit du quartz, de lor- those et du mica, mais l’ordre dans lequel ces trois minéraux se sont solidifiés n’a pas toujours été le même dans des phases diffé- rentes. C’est en effet ce que nous allons constater en étudiant l’ordre de solidification ou Y ordre de succession de ces minéraux dans chacune de ces trois phases. —Je m’occuperai d’abord de la première phase, celle de la cris- tallisation de la Pegmatite. il est difficile d’établir un ordre général et absolu de succession entre l’orthose, le quartz et le mica qui composent la Pegmatite : leur formation a été à peu près simultanée et par suite de circon- stances qu’il est assez difficile d’expliquer, la solidification de la roche paraît avoir commencé tantôt par l’un et tantôt par l’autre de ces minéraux. C’est du moins ce qui a eu lieu pour l’orthose et pour le quartz de la Pegmatite; en effet, la Pegmatite du Slieve Donald, par exemple, présente fréquemment des globules étoilés qui sont formés d’orthose et de quartz divergeant autour d’un centre: or, l’ortliose et le quartz de ces globules sont l’un et l’autre en cristaux ; par conséquent ils se sont formés en même temps. De plus, des cristaux nets de l’un ou de l’autre de ces deux mi- néraux ont mutuellement laissé leurs empreintes; car les cristaux d’orthose de la Pegmatite entourent dans certains cas des cristaux plus ou moins parfaits de quartz, qui se sont solidifiés avant eux. Réciproquement, les cristaux d’orthose sont souvent complètement SÉANCE DE 20 JUIN 1853. 584 entourés par du quartz qui a pris leur empreinte et qui est néces- sairement resté le dernier à l’état fluide ou plastique. Par consé- quent, dans la Pegmatite, une certaine partie du quartz a commencé à se solidifier avant i’ortliose, mais la plus grande partie du quartz est cependant restée fluide. 11 n’en est pas de même dans les granités proprement dits, car la solidification de l’orthose a toujours précédé celle du quartz. — Je passe maintenant à la deuxième et à la troisième phase, qui sont caractérisées par le remplissage des cavités et des fissures de la Pegmatite. Dans ce remplissage , l’ordre de succession du quartz , de l’or- those et du mica paraît avoir été le même pour les cavités et pour les fissures , aussi me contenterai-je de l’étudier dans les cavités dans lesquelles il peut s’observer le plus facilement. Relativement au remplissage des fissures , je ferai observer seule- ment que je n’ai rencontré la fayalite que dans les fissures de la Pegmatite à grands cristaux : cette fayalite porte souvent l’em- preinte des stries du quartz, par conséquent elle est postérieure au quartz. D’un autre côté elle est quelquefois complètement entourée par un mica vert foncé et riche en oxyde de fer, par conséquent elle est antérieure à ce mica. Le remplissage des fissures a d’ailleurs été assez complexe, car, dans certains cas, les lamelles de fayalite sont traversées par de petites veines granitiques qui contiennent beaucoup de quartz, de l’orthose et du mica ; ces petites veines granitiques seraient donc encore postérieures à la fayalite, et par suite elles seraient aussi postérieures aux filons de pegmatite à grands cristaux. Cette cir- constance est du reste importante à signaler, car elle montre que la fayalite, qui ne se trouve pas dans les cavités, n’a cependant pas été introduite postérieurement et accidentellement dans la Pegma- tite ; elle est au contraire contemporaine de cette Pegmatite et elle a même cristallisé avant que la Pegmatite fût complètement soli- difiée. — Je m’occupe maintenant du remplissage des cavités. Les minéraux qui tapissent les cavités sont très nets et chacun d’eux s’est formé successivement ; ils ne résultent pas d’une cristal- lisation tumultueuse, mais il est au contraire vraisemblable qu’ils se sont formés avec une très grande lenteur; aussi est-il assez facile de déterminer leur ordre de succession. Il importe d’ailleurs de remar- quer que l’ ordre de succession des minéraux dans les cavités repré- sente l’ordre des affinités chimiques des différentes substances qui composaient la Pegmatite, et par conséquent il caractérise et il défi- 582 SÉANCE DU 20 JUIN 1858. nit en quelque sorte les circonstances dans lesquelles cette roche elle-même s’est formée. Je ferai observer d’abord qu’il n’existe pas de limite bien nette entre la Pegmatite et ses cavités, et bien que les minéraux de l’un et de l’autre gisement présentent quelques différences de formes et de nuances, il est cependant difficile de dire où la Pegmatite commence et où les cavités finissent. En effet, à mesure qu’on s’approche d’une cavité on voit tous les minéraux de la Pegmatite devenir de plus en plus cristallins; son quartz ne remplit pas seulement les interstices des cristaux d’orthose, mais il s’isole lui-même en cristaux qui sont de plus en plus gros et de plus en plus nets ; ces cristaux atteignent d’ailleurs Peur maximum de grosseur et de netteté dans la cavité. Il en est de même pour les autres minéraux de la Pegmatite. Il est donc visible qu’une cavité a facilité la cristallisation des parties de la Pegmatite qui sont dans son voisinage, et l’on comprend très bien, en effet, qu’elle a du permettre aux molécules d’un même minéral de se réunir plus librement. Gela posé, si l’on étudie les minéraux des cavités en allant de la circonférence vers le centre, on constate que la topaze est en cris- taux qui sont immédiatement implantés à la circonférence des ca- vités; ordinairement l’une de leurs extrémités s’engage intime- ment jusque dans la Pegmatite elle-même. Ces cristaux sont quelquefois en partie recouverts ou même complètement enve- loppés, soit par du quartz, soit par de l’orthose. Il en est de même pour l’émeraude qui doit s’être formée un peu après la topaze. Je n’ai observé, il est vrai, l’émeraude super- posée à la topaze que dans un seul échantillon de la Pegmatite d’Irlande; mais j’ai constaté sur divers échantillons de Sibérie que la topaze blanche y a également précédé l’émeraude ; or cette éme- raude est une aigue-marine qui présente tous les caractères de l’é- meraude d’Irlande ; j’admettrai donc que la topaze précède géné- ralement l’émeraude dans la Pegmatite, en faisant remarquer cependant que la cristallisation de ces deux minéraux paraît avoir été à peu près simultanée. L’émeraude précède d’ailleurs le quartz, comme il est facile de le reconnaître pour l’émeraude qui provient de la Pegmatite du Mou nie, ainsi que pour celle qui provient des gisements d’Odon- tsclielon (Sibérie), de Rabenstein (Bavière), de Piriac (Loire-In- férieure), de Marmagne (Saône-et-Loire), de la Villeder (Mor- bihan), de Hadclam (Connecticut). Après la topaze et l’émeraude vient immédiatement le quartz. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 583 Il est très abondant comme cela a lieu dans toutes les roches qui renferment de la topaze. Il s’est développé sur les deux minéraux précédents dont il porte souvent les empreintes; ainsi la figure ci- contre montre la section d’un prisme de topaze t à côté duquel s’est développé un cristal de quartz q. Dans un grand nombre de roches que j’ai eu Toccasion d’exa- miner et qui contenaient de la topaze, la cristallisation de la to- paze a d’ailleurs généralement précédé celle du quartz. Après le quartz ou en même temps que lui, vient l’orthose qui peut recouvrir d’une manière complète les cristaux de quartz ; puis vient le mica qui s’est implanté sur le quartz aussi bien que sur l’orthose. Une disposition assez habituelle pour le quartz et pour l’orthose est celle qui est représentée par le croquis suivant : Un cristal de quartz q est en partie entouré par un cristal d’or- tliose o, auquel il adhère le plus souvent complètement. L’adhé- rence parfaite de ces deux cristaux semble indiquer que depuis leur formation ils n’ont pas éprouvé un retrait notable, comme celui qui résulterait d’un très grand abaissement de température ; car les deux cristaux sont libres, par cela même qu’ils sont dans une cavité ; par conséquent ils n’ont pas été comprimés et forcément maintenus l’un contre l’autre, comme s’ils s’étaient trouvés dans la pâte d’une roche : on conçoit donc qu’un retrait un peu notable aurait dû les séparer, puisqu’ils se dilatent inégalement. Le cristal de quartz conserve d’ailleurs la même section dans sa partie libre et dans sa partie en- tourée par le cristal d’ortliose ; mais quelquefois dans la Pegma- tite P, il s’amincit et il se termine par une sorte de racine, tantôt simple, tantôt bifurqué ou multiple, qui s’engage ordinairement entre les joints de clivage des lamelles d’ortliose et qui est formée par un quartz enfumé noirâtre identique avec celui qui forme la SÈÀNCÜ MJ 20 JUIN 1853. 58â cristal q. Cette racine qui termine le cristal de quartz q à sa partie inférieure indique que le quartz est venu de l’intérieur de la Peg- matite, de laquelle il paraît en effet avoir été pour ainsi dire ex- primé par la cristallisation de l’ortliose et surtout parles pressions s’exerçant à l’intérieur de la roche, pressions qui tendaient néces- sairement à remplir ses cavités avec le quartz resté le dernier à l’état fluide. La disposition mutuelle du quartz q et de l’orthose o ne me paraît pas permettre de supposer que le quartz s’est formé après l’orthose ; car le croquis ci-dessus indique que le quartz q aurait dû traverser le cristal d’ortliose o déjà solidifié, ce qui est inadmissible puisque ce dernier n’est jamais brisé : par consé- quent, lorsque le quartz q s’est isolé et a cristallisé, l’orthose o n’existait pas, ou bien il n’était pas encore à l’état solide. On voit donc que dans les cavités de la Pegmatite, non seulement le quartz et l’orthose n’ont pas toujours cristallisé simultanément, mais que le plus souvent le cristal de quartz était même complètement terminé, lorsque le cristal d’orthose s’est solidifié autour de lui. L’albite s’est développé après tous les minéraux qui précèdent, y compris le mica. Il repose surtout sur le quartz, sur l’orthose et quelquefois sur le mica. Quant à la tourmaline, elle est accidentelle, et l’échantillon sur lequel je l’ai observée indiquait seulement qu’elle était venue après la topaze et avant l’albite. Les minéraux qui se sont formés successivement dans les cavités de la Pegmatite d’Irlande sont donc : la topaze, l’émeraude , le quartz, l’orthose, le mica, l’albite. — Toutefois cet ordre de succession des minéraux qui ont cristallisé dans les cavités de la Pegmatite n’est pas absolument invariable et il est facile de signaler quelques exceptions. J’ai constaté, en effet, dans la Pegmatite de l’Irlande, qu’un cristal de topaze portait l’empreinte d’un cristal contigu de quartz, et par conséquent il lui était postérieur. De même un cristal d’or- those pénétrait dans un cristal de quartz dont une partie le recou- vrait, en sorte que cette partie au moins s’était formée après l’orthose. Certains cristaux d’émeraude qui étaient plus nets, plus transparents et plus petits que les autres, reposaient aussi sur des cristaux de quartz. Quelques cristaux de topaze étaient non seule- ment postérieurs au quartz, mais même à l’orthose et au mica. Enfin , j’ai encore constaté qu’une lamelle de mica se trouvait enchâssée dans de l’albite ; par conséquent ce mica était au moins contemporain de l’albite. Il importe d’ailleurs de remarquer que souvent les cristaux qui 585 SÉANCE Dli 20 JUIN 1853. se sont formés dans les cavités ne sont pas simplement superposés, mais bien implantés l’un sur l’autre. Ainsi le mica, par exemple, s’engage dans les cristaux de quartz et d’orthose , sur lesquels il repose : on doit donc conclure de la pénétration mutuelle de ces minéraux, que le mica a commencé à se former avant que les cristaux de quartz et d’ortliose fussent complètement terminés. Les anomalies que je viens de signaler démontrent, du reste, que les minéraux qui tapissent les cavités de la Pegmotite se sont formés à la même époque. La netteté de ces minéraux indique, il est vrai, qu’ils ont cristallisé avec une grande lenteur, mais il n’y a cependant pas eu discontinuité absolue ou temps d’arrct entre la cristallisation d’un minéral et celle du minéral qui l’a suivi : par conséquent il n’est pas étonnant que Y ordre de succession de ces miné- raux ne soit pas invariable ; et bien qu’il soit très constant en général, il est facile de concevoir qu’il a pu être modifié dans certains cas exceptionnels. Les mêmes anomalies s’observeraient, si l’on faisait cristalliser des sels par sublimation ou par dissolution ; car la cris- tallisation de plusieurs de ces sels pourrait être simultanée. — L 'ordre de succession des minéraux qui ont cristallisé dans les cavités de la Pegmatite d’Irlande n’est pas spécial à cette Pegrna- tite. IL est probable qu’on le retrouverait dans les autres Pegma- tites contenant des topazes, et notamment dans la Pegmatite ca- verneuse de l’Ilmen , de laquelle j’ai déjà parlé précédemment et qui a été étudiée par M. G. Rose. L 'ordre de succession du quartz , de l’orthose et du mica dans les cavités de la Pegmatite est , du reste, indépendant de la pré- sence de la topaze et de l’émeraude. J’ai constaté, en effet, que dans les cavités des Pegmatites de Bavière , de l’ile d’Elbe , d’Ekatheri- nenbourg, etc., le quartz s’est également formé avant l’orthose. En outre, M. Breithaupt a reconnu que dans les cavités des Pegmatites, et même des roches granitiques en général , le quartz et l’orthose se sont formés avant le mica. — L’un des gisements les plus remarquables pour les topazes et pour les émeraudes est celui d’üdontsclielon dans la Sibérie ; ces gemmes y sont surtout associées avec du quartz et quelquefois elles sont accompagnées de spath fluor : elles ressemblent beaucoup à celles de l’Irlande ; elles ont à peu près les mêmes couleurs et les mêmes formes , mais leurs cristaux sont beaucoup plus gros. Tou- tefois Y ordre de succession ne parait pas aussi constant que dans la Pegmatite d’Irlande. — A Murzo, près de Santa-Fé de Bogota, dans la Nouvelle- Grenade, on exploite aussi de très belles émeraudes vertes qui se 586 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. trouvent dans un calcaire noir contenant du quartz et de la chaux carbonatée blanche ; ces émeraudes se sont également développées avant le quartz ou en même temps : la collection du Muséum pos- sède en effet un cristal d’émeraude dans lequel s’engage un cristal dodécaèdre de quartz qui est orienté suivant le même axe. -—D’un autre côté, dans les gisements de Nertschinsk en Sibérie, et de Sclilaggenwald en Bohême, la topaze, qui est surtout associée avec du quartz, repose souvent sur les cristaux de quartz , et par conséquent elle leur est postérieure. — Enfui, lorsqu’on considère des roches granitoïdes qui sont différentes de la Pegmatite, l 'ordre de succession des minéraux dans leurs cavités peut n’être plus le même : c’est, par exemple, ce que j’ai observé au Saint-Gothard. En effet, comme MM. OttoVolger £t Wiser l’avaient déjà constaté, les cavités du gneiss du Saint- Gothard contiennent quelquefois des minéraux qui se sont formés dans l’ordre suivant: fer carbonaté, rutile, chaux carbonatée manganésifère , mica, orthose (adulaire) et quartz. La formation des minéraux dans les cavités du Saint-Gothard paraît d’ailleurs avoir été très complexe, car dans certains cas leur ordre de succession peut être renversé, et il arrive, par exemple, que le quartz s’est formé avant l’adulaire, comme cela a lieu dans la Pegmatite. — Quoi qu’il en soit , on voit par les exemples qui précèdent que les roches présentant des exceptions à Y ordre de succession observé dans la Pegmatite sont entièrement différentes de cette dernière roche : tandis que dans toutes les Peginatites cet ordre de succession est au contraire assez constant. Par conséquent on peut établir comme règle générale que , lors- qu’une Pegmatite contenant de la topaze et de l’émeraude a cris- tallisé , les minéraux qui tapissent ses cavités se sont formés dans l’ordre suivant : topaze, émeraude, quartz , orthose, mica, albite. Le talc, la chlorite et l’allophane se sont d’ailleurs formés pos- térieurement à la cristallisation, soit par infiltration, soit par pseudomorphose , Les minéraux qui se sont formés les premiers sont donc : la topaze , l’émeraude , le quartz , c’est-à-dire des minéraux qui ne contiennent pas d’alcalis et qui sont en même temps les plus durs et les plus infusibles. Tous les autres minéraux qui seront formés les derniers, l’or- tbose, le mica, l’albite, contiennent au contraire des alcalis. Le feldspath le plus riche en potasse s’est d’ailleurs formé avant le feldspath le plus riche en soude. — L 'ordre de succession des minéraux, dans les cavités de la Peg- SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 587 matité, diffère un peu de celui qui a été observé dans la Pegmatite elle-même : car, dans la Pegmatite, une partie du quartz a bien pu se solidifier en même temps que l’orthose , mais la plus grande partie du quartz est cependant restée fluide et ne s’est solidifiée qu’après l’orthose. Dans les cavités de la Pegmatite, au eom traire , le quartz s’est solidifié avant l’orthose. Le granité pro- prement dit donne lieu, du reste, à la même remarque. Cette inversion dans l’ordre de solidification du quartz et de l’ortiiose d’un même granité est un fait extrêmement bizarre. Il semble indiquer qu’avant sa solidification complète le quartz de ce granité a été soumis à une pression. En effet, quelle que soit l’origine attribuée au granité, il est certain que son quartz a possédé une plasticité très remarquable, et que longtemps après s’être isolé à l’état de silice pure , il recevait encore les empreintes de cristaux d’orthose. Or il est possible que cette plasticité doive être attribuée à une pression résultant soit de la cristallisation , soit même du poids de la roche, et qui, s’exerçant sur le quartz emprisonné dans un espace limité, l’a maintenu plus longtemps à l’état fluide. Toujours est-il que le quartz n’a pas à beaucoup près conservé cette plasticité au même degré, lorsqu’il a cristallisé dans un espace libre. En effet, dans les cavités et dans les fissures de la Pegmatite où le quartz n’était aucunement gêné dans sa cristallisation, et où il n’était plus soumis cà une pression due au contact des minéraux voisins , les cristaux n’ont généralement pas été déformés et ils se sont solidifiés avant l’orthose, ou tout au plus en même temps. L’ordre de solidification du quartz et de l’ortliose dans un gra- nité est donc inverse de ce qu’il est dans les cavités et dans les fis- sures de ce même granité ; cette anomalie peut être attribuée à la grande plasticité qui a été conservée par le quartz lorsqu’il était emprisonné dans ce granité. L’observation qui précède s’applique d’une manière générale aux roches granitiques, excepté toutefois à celles qui contiennent des cristaux complets de quartz , comme cela a lieu pour le por- phyre quartzifère : cette dernière roche diffère du reste beaucoup du granité en ce que sa structure cristalline est bien moins déve- loppée ; par conséquent , il n’est pas étonnant que l 'ordre de .suc- cession de ses minéraux en diffère également. Résumé. — En résumé, la Pegmatite des montagnes du Mourne eu 588 sêancê du 20 juin 1853. Irlande est très remarquable par sa structure caverneuse : cette structure s’observe surtout dans les Pegmatites qui contiennent des topazes; il est donc vraisemblable que les cavités de la Pegmatite sont dues à des dégagements de gaz fluorés dont le fluor s’est en- suite fixé dans la topaze et dans le mica. La Pegmatite de l’Irlande est encore très remarquable par la présence de la fayalite ou du péridot ferreux ; car le péridot est le minéral caractéristique des roches qui sont d’origine ignée et qui n’ont pas un excès de quartz. Lorsqu’on étudie la formation de cette Pegmatite caverneuse , on trouve quelle présente au moins trois phases distinctes. Dans la première phase, la roche s’est pour la plus grande partie solidifiée. Dans la deuxième, ses cavités ont été tapissées par des cristaux. Dans la troisième, ses fentes ont été remplies par de la Pegmatite à grands cristaux et par de la fayalite. L’ordre de succession des minéraux n’a pas été le même dans chacune de ces phases : en effet, dans la première phase la forma- tion de l’orthose , du quartz et du mica , a été à peu près simul- tanée , mais une grande partie du quartz est cependant restée fluide. Dans la deuxième phase , au contraire , la formation des minéraux a eu lieu dans l’ordre suivant : topaze , émeraude , quartz, orthose , mica, albite. Enfin , dans la troisième phase, l’ordre a été le même que dans la deuxième, seulement le mica a été précédé par la fayalite. L’ensemble des faits qui viennent d’être étudiés démontre d’ail- leurs que la Pegmatite caverneuse s’est formée dans des circon- stances assez complexes et notablement différentes de celles dans lesquelles s’est formé le granité proprement dit. M. le secrétaire donne lecture de la note suivante : Sur la structure oro graphique et géologique du Mont-Rose , par A. Schlagintweit (1). Les montagnes qui forment le groupe du Mont-Rose présentent comme caractère général de leur structure une masse de gneiss centrale sur les flancs de laquelle se trouvent de la serpentine et des schistes gris ou verts qui ont été redressés. (1) Extrait, par M. Delesse, du mémoire publié à Leipzick sous le titre : U ber die orographische und geologische Structure der Grappe des Monte-Rosa , von Dr Adolph Schlagintweit. SÉANCE DU 20 JUIN 1853. Ô80 Dans le Valais, sur le flanc N. -O. et E. du Mont-Rose, les cou- ches sont inclinées vers le N. -O. ou vers l’O.-N.-O., tandis que sur le flanc opposé, c’est-à-dire à l’O. et vers l’E., dans le Pié- mont, les couches s’inclinent tantôt vers le S. , tantôt vers le S. -O, tantôt vers le S.-E. Les couches de schiste reposent en stratifica- tions concordantes sur les couches de gneiss. Lorsqu’on examine l’ensemble de la masse de gneiss centrale, ces couches présentent une voûte dont les dimensions sont colossales. La structure de cette voûte a été modifiée par plusieurs tranchées et vallées, parmi lesquelles la plus grande et la plus importante est la vallée avec cirque de Macugagna. Cependant le Mont- Rose ne présente pas une chaîne simple et régulière ayant la forme de voûte. Il manque en effet la clef de cette voûte et les couches horizontales qui devraient en former la partie la plus élevée. Le sommet principal du Mont-Rose présente même une inclinaison sensible des micaschistes vers 10. -N. -O., et on l’observe vers 10. jusqu’à la pyramide de Vincent, où cette inclinaison atteint des angles de 12 à 20 degrés. Dans les montagnes plus petites qui se trouvent à l’E. , sur le flanc à pic du Mont-Rose, tel que le pic Blanc, la cime delle Loccie, on observe encore une inclinaison faible JN.-O. et O. -N. -O., qui, plus loin, se change en une inclinaison S.-O. et S. Pour expliquer ces particularités de la structure du Mont-Rose, il est nécessaire d’admettre que, lors du soulèvement d’une masse de rochers si considérable, il s’est pro- duit des failles verticales qui ont donné lieu sur certains points à des affaissements et à des effondrements ; d’ailleurs l’énorme pres- sion des masses mises en jeu pouvait facilement occasionner quel- ques irrégularités dans la direction des couches et même contri- buer à donner lieu à des soulèvements secondaires. La direction de la ligne de soulèvement parait en général être S. -S.-O., N.-N.-O. ; elle est par conséquent parallèle au système que M. E. de Beaumont a désigné sous le nom de système des Alpes occidentales. L’arête longue, continue et élevée qui caractérise le Mont-Rose et qui le distingue du Mont-Blanc, ainsi que des Alpes de Berne, pourrait être attribuée à la faible inclinaison des couches qui le composent et à leur uniformité. Cette arête présente neuf sommets différents. Chacun de ces sommets ne doit vraisemblablement pas son origine à des soulèvements spéciaux, car on n’a jamais trouvé aucune trace de ces soulèvements. Les quatre sommets du N. diffèrent d’ailleurs assez peu entre eux et même des autres sommets, pour qu’on puisse les attribuer SÉANCE DU 20 JUIN 1858. à la décomposition inégale du micaschiste, qui est tantôt plus riche en mica et plus schisteux, tantôt plus riche en quartz et plus dur. A l’époque actuelle, on ne trouve généralement qu’un petit nombre de produits de décomposition sur les flancs des divers sommets du Mont-Rose; mais cela tient à ce que ces flancs sont extrêmement escarpés, en sorte que tous les débris de roches qui proviennent de ses sommets sont entraînés sur les masses de neige et de névé des glaciers de Macugagna et de Gorner. Plus loin, vers le S., depuis le sommet du Signal jusqu’à la pyramide de Vincent, l’élévation des sommets diminue considérablement, dé même que celle de l’arête. Pour la pyramide de Vincent, qui forme le sommet le plus bas et le plus éloigné, elle s’abaisse jus- qu’à 13,003 pieds. L’orographie générale du groupe de montagnes du Mont-Rose est très visiblement en relation avec leur structure géologique ; le Mont-Rose, qui en est la montagne principale, forme comme un centre vers lequel s’élèvent des chaînes de montagnes puissantes et de longues vallées. La serpentine ne paraît avoir joué aucun rôle dans la formation de ces montagnes; elle est engagée d’une manière plus ou moins régulière entre les schistes dont la position, généralement indépen- dante de son éruption, paraît seulement être en relation avec la masse du gneiss. Au Riffelberg cependant, il est possible que l’incli- naison anormale et tout à fait locale des schistes vers le sud soit en relation avec la formation de la serpentine et avec les modifi- cations variées qu’ont subies les schistes eux -mêmes. A LE., le gneiss du groupe du Mont-Rose se réunit aux roches que M. Studer désigne sous le nom d’Alpes du Tessin, et près de Pestarena, ainsi qu’au col d’Egua, il paraît revenir butter contre la zone des gneiss qui présentent des strates verticales. Dans le sud, l’action du soulèvement du Mont-Rose peut se suivre assez loin dans les vallées du Lys, ainsi que dans les vallées d’Ayas et de Val-Tournanclie. Les cimes élevées qu’on observe vers l’ouest paraissent disposées d’une manière assez irrégulière de la chaîne du Lys au Breithorn, au passage de Saint-Théodule jusqu’au mont Cervin. Les couches sont généralement peu inclinées et même presque horizontales ; à Saint-Théodule, et des deux côtés sur les flancs, elles s’inclinent faiblement à l’O.-N.-O., ou presque à 10. ; au petit mont Cervin, elles s’inclinent un peu vers le S.-O. , d’après de Saussure, tandis qu’au grand mont Cervin (Matterliorn), elles s’inclinent sous des angles beaucoup plus grands, qui atteignent même U5 degrés vers 591 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. le S. -O. Les inclinaisons variables des couches, aussi bien que les formes bizarres des montagnes et que l’étendue de la région élevée dans laquelle se trouve le glacier de Saint-Tbéodule, et de la Furka, rendent très probable l'opinion admise aussi parM. Studer, que des écroulements et des changements considérables dans la position des couches se sont produits en cet endroit, au milieu d’une-masse de montagnes puissantes et également élevées. Au N. -O, et au N., l’action de la masse de gneiss du Mont-Rose sur le soulèvement des schistes environnants est bornée à une dis- tance dé plus de deux lieues par l’action d’un nouveau massif de gneiss que l’on peut désigner avec M. Studer sous le nom de mas- sif central des Alpes du Valais. Ce massif présente des couches très abruptes, en partie disposées en éventail; il comprend les sommets du Mischabel et du Weisshofn, qui sont les plus élevés après ceux du Mont-Blanc et du Mont-Rose. Les schistes et la ser- pentine du Riffelberg et du Rothorn, dont les pentes sont douces, paraissent former, lorsqu’on les regarde d’un point élevé, une dépression considérable entre les deux puissants massifs qui les avoisinent. Note sur Stonesfield , près Oxford ( Angleterre ), par M. Albert Gaudry (1). Dans une des séances de l’année précédente (année 1852 ), des discussions se sont renouvelées dans le sein de la Société géolo- gique au sujet d’un gisement depuis longtemps célèbre dans la science : le gisement des ossements fossiles de Stonesfield (Angle- terre). En présence des doutes nouveaux suscités par ces discussions , je crois devoir rendre compte d’une exploration que j’ai faite très récemment dans les carrières de cette localité. Le village de Stonesfield (champ de pierre.) est situé à 12 milles d’Gxford. Il tire son nom des pierres exploitées de toute part clans les champs des environs. Les extractions sont faites au moyen de puits [s tarie pit) conduisant à des galeries souterraines. C’est dans ces galeries que l’on a trouvé les mâchoires fossiles, objet de si vives contestations parmi les paléontologistes. Je suis descendu dans celui des puits où, m’a-t-on dit, les osse- (1) Cette note a été lue à la Société géologique le 7 mars 1853. Des circonstances particulières ont retardé son impression. 592 SÉANCE DU 20 JUIN 185?*. ments de mammifères ont été trouvés. Ce puits est à 100 mètres du village. Il a environ 20 mètres de profondeur partagés de la manière suivante. Couche A , 18 mètres. !/Calcaire marneux se levant par plaquettes. 11 est souvent oolitique; il renferme des débris de sauriens, de poissons, de mol» v lusques et de végétaux. ^Calcaire marneux ( mari chalk ) exploité pour Couche B, 1 mètre. A l'amendement des terres, tantôt compacte, ( tantôt pulvérulent. Couche C , 0m,7. . . (Calcaire bleu (blue chalk), ne renfermant point d’ossements, mais des bois et des coquilles marines. Il dégage sous le choc du marteau une forte odeur de truffe. À la limite de la couche A et de la couche B ont été trouvées les petites mâchoires, seules marques, jusqu’à présent découvertes, de l’existence des animaux mammifères avant la période tertiaire. L’anomalie de la présence de ces débris dans les terrains secon- daires a fait justement naître les plus vives discussions. Ces discussions peuvent être ramenées à trois points : 1° Ces débris appartiennent-ils à des mammifères ? 2° Les couches où l’on dit les avoir trouvés font-elles partie du terrain jurassique ? 3° La présence de ces débris ne peut-elle s’expliquer par une introduction postérieure dans quelque crevasse du terrain juras- sique ? I. — Les mâchoires fossiles de Stonesfield appartiennent-elles à des mammifères? Il fut pour la première fois question de ces débris en 1823. M. Buckland en parla dans sa notice sur le Megalosaurus (1), et, d’après le conseil de Cuvier, les attribua à des mammifères didel- phiens. En 1821, Cuvier, dans la seconde édition de son ouvrage sur les ossements fossiles, donna l’explication de son opinion. Dans le Zoological journal , vol. 3 , année 1827, M. Broderip publia des Observations on lhe jaw of a f assit mam mi ferons animal found in the Sumesjield slate. Comme l’indique le titre de la no~ (1) Buckland, Sur le Mëgalosaure de Stonesfield . — Transact. of geolog, Society of London , Ier vol. 1823. séance du 20 juin 1853, 593 îice, M. Broderip n’hésita point à attribuer à des mammifères les mâchoires de Stonesfield. En 1838, une longue discussion s’engagea à l’Académie. M. de Blainville fit paraître une note intitulée : Doutes sur le prétendu didelphe de Stonesfield, ou ci quelle classe, à quelle famille, à quel genre cloit-on rapporter les animaux désignés sous les noms de Didelphis Prevostii et Bucklandii? M. de Blainville pensa que l’on pouvait considérer les débris de ces animaux comme des débris de reptiles : M. Agassiz l’appuya; mais MM. Valenciennes, Geof- froy Saint-Hilaire et Duméril soutinrent énergiquement que les mâchoires appartenaient à des mammifères. Leur manière de voir semble avoir été complètement confirmée en 1841 par un travail de M. B.. Owen, portant pour titre : Observations on the fossil re- presenting the Thylacotherium Prevostii , with the reference to the doubts of ils mammalian and Marsupial nature recently promulgatecl and on the Phascolotherium Bucklandi. Enfin, en 1848, M. Bowerbank a cru trouver une nouvelle con- firmation de l’opinion de M. Owen dans ses observations sur les ossements fossiles. La note de M. Bowerbank est intitulée : Microscopical observa- tions on the structure of the boues of Pterodactylus giganteus and other fossil animais. ( From the quarterly journal of the geolog. Society of London 1848.) IL — Comme on le voit, la majorité des maîtres de la science a conclu affirmativement que les mâchoires de Stonesfield appar- tiennent à des mammifères. La question zoologique étant résolue, reste la question géolo- gique : Les couches où les ossements ont été trouvés font-elles partie des terrains jurassiques ? La première note géologique que j’ai rencontrée sur Stonesfield est renfermée dans l’ouvrage de MM. Conybeare et William Phil- lips, intitulé : Outlines of the gcology ofEngland , 1822. En 1825, M. Constant Prévost présenta à la Société philoma- thique de Paris des Observations sur les schistes calcaires ooli tiques de Stonesfield , clans lesquels ont été trouvés plusieurs ossements fossiles de mammifères . La même année, M. Desnoyers inséra sur cette localité des dé- tails intéressants dans son mémoire sur Foolite à fougères de Ma- mers [Annales des sciences naturelles , 1825). En 1827, M. Litton publia dans le Zool. Journ. une note inti- tulée : On the strata of Stonesfield. Ces savants géologues se sont accordés à considérer les couches Soc. géol.y 2e série , tome X. 33 59A séance du 20 juin 485S. de Stonesfield comme appartenant aux terrains jurassiques moyens. La confirmation de leur manière de voir m'a été fournie par l’ou- verture d’une tranchée creusée au moment de mon passage à Sto- nesfield , pour un nouveau chemin de fer, joignant Oxford à Bir- mingham. Cette tranchée montre à découvert les assises inférieures aux calcaires scliistoïdes renfermant les ossements. La couche n° 1 est formée de marne grisâtre. La couche n° 2 est une argile noire. La couche n° 3 est épaisse de h mètres environ. Elle est composée de bancs calcaires, renfermant de nombreuses Rhynchonelies, des Huîtres, etc. Ces bancs contiennent des grains oolitiques très fins ; leur teinte est jaunâtre ; ils sont disposés en tables séparées par des lits de marne pulvérulente. La couche n° U est formée d’une marne jaunâtre, plastique, semblable à celle du n° 1 . La couche n° 5 est une argile noire , faisant la répétition de la couche ne 2. La couche n° 6 est composée de calcaire jaunâtre recouvert d’ef- florescences de carbonate de chaux; ce calcaire est divisé en pla- ques qui deviennent moins épaisses à mesure que l’on s’élève. La couche n° 7 est un calcaire tendre , renfermant de nom- breuses Rhynchonelies. Nous avons trouvé dans les fossiles de cette tranchée le même faciès que dans les fossiles de Batli (Angleterre), de Lue et de Saint- Aubin (Calvados), de Plombières (Côte-d’Or). Les plus abondants sont: la Rhynchonella concinna , d’Orb. ( Terebratula continua , Sow. ; voir Sowerby, Minerai conchology , pl. 83, fig. 8) ; la Tere- bratala subtriquetra , d’Orb. ( Terebratula triquetra , Sow. ; voir Sow. , Min. conch ., pl. 83, fig. 9); Y Ostrea palmctta , Sow., pl. 111, %. 3 et U. D’après l’auteur du Minerai conchology , ces fossiles appartien- draient au great oolite ; \es argiles de la tranchée correspondent sans doute au Rradford-clay . Or, s’il en est ainsi et si l’on remarque que dans la légion de l’Angleterre dont nous parlons : 1° les cou- SÉANCE DU 20 JUIN 1853. 595 ches se recouvrent successivement et régulièrement les unes les autres en allant du N. -O. au S.-E.: 2° qu’au N. -O. de Stonesfield se montre le Bradjorcl-clay et au S.-E. se trouve l’Oxfordclay, on verra que les calcaires à ossements de Stonesfield correspondant au corn brash forment une assise régulière dans la grande série des terrains anglais. 1IÏ. — Il reste une troisième objection derrière laquelle se sont retranchés les savants , justement étonnés de l’anomalie présentée par les débris fossiles de Stonesfield. Voici cette objection : La présence d’ossements de mammifères au sein du terrain ju- rassique ne pourrait-elle s’expliquer par une introduction posté- rieure dans quelque crevasse de ce terrain ? Comme je l’ai déjà dit, je suis descendu dans le puits de Sto- nesfield où l’on m’annonçait avoir trouvé les ossements ; une fois descendu, j’ai suivi sur une grande longueur dans la galerie d’ex- ploitation la couche des ossements; j’ai vu des assises régulière- ment superposées , et aucun indice de crevasse ne s’est présenté à moi. Or , en supposant même l’existence de crevasses , il faudrait ad- mettre que leur remplissage a eu lieu pendant les âges juras- siques. Si , en effet, comme la supposition en a été faite, le remplissage s’est opéré pendant le commencement de la période crétacée , c’est- à-dire pendant le dépôt des grès de Tilgate , la difficulté est fai- blement diminuée et non enlevée : les mammifères sont encore inconnus dans l’époque crétacée comme dans l’époque oolitique. D’ailleurs, parmi les fossiles de Stonesfield, aucun n’appartient aux terrains crétacés. Chez les carriers, dans le lieu même des exploitations, et principalement dans le musée d’Oxford, j’ai vu une nombreuse série de débris de plantes et d’animaux. J’ai moi- même fait des recherches dans les carrières : je n’ai vu aucun fos- sile crétacé. J’ai encore bien moins reconnu des débris susceptibles d’être rapportés à la période tertiaire , ou à la période quaternaire. Si les débris de mammifères de Stonesfield avaient été intro- duits par remplissage pendant la formation des étages postérieurs à la période oolitique, comment ne retrouverait on aucun vestige fossile appartenant à ces étages? et par quelle anomalie aussi frap- pante même que la présence des débris de mammifères dans le terrain jurassique , ces débris se trouveraient- ils absolument seuls au milieu des fossiles nombreux appartenant à un âge plus ancien. Ainsi l’existence des mammifères (genres Tylacotherium et Plias - 596 SÉANCE DU 20 JUIN 1853. colotherium) pendant la période jurassique moyenne ( corn brash ), semble réunir toutes les conditions d’un jait certain. Sans doute, nous comprenons difficilement comment, après les recherches si multipliées des géologues, on n’a point encore trouvé antérieurement à l’époque tertiaire des traces de mammifères autres que les cinq ou six petites mâchoires de Stonesfield. Mais, d’autre part , en présence d’un fait positif entouré de toutes les conditions de la certitude, le doute ne saurait être autorisé par l’opposition d’un fait négatif. SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, En septembre < 853. La Société géologique de France s’est réunie le 1er septembre, à midi, dans la salle de la Société d’agriculture de Valenciennes. Les membres qui ont assisté aux réunions sont : MM. Élie de Beaumont, De Bracquemont, Bruckmann, ingénieur-sondeur; Delanoue , A. de la Marmora , MM. Meugy , D’Omalius d’Hallot, Potiez , De Roys. * Les personnes étrangères à la Société , qui ont assisté aux séances et pris part aux courses, sont : MM. MM. De Bettignies père, directeur de la Manufacture de porcelaine de Saint-Amand ; M. de Bettignies fils, E. Bouton, E. Courtin , docteur médecin ; Grard , président de la Société d’agriculture ; De Lamarthonie, A. Mathieu , G. Mathieu. M. le marquis de Roys, doyen d’âge des membres présents, prend place au bureau entre M. le sous-préfet et M. le maire de Valenciennes, qui ont bien voulu venir présider à l’installation de la Société. 598 SESSION EXTRAORDINAIRE A 'VALENCIENNES , On procède à l’élection d’un bureau pour la session. Sont nommés : Président , M. d’Omaliüs d’Halloy. Vice-président , M. le marquis de Roys. Secrétaires , MM. Meugy , Potiez. En l’absence de M. d’Omalius d’Halloy, qui ne pourra arriver avant le 2 septembre, M. de Roys continue à présider la séance. Il annonce une présentation. Il lit ensuite : 1° Une lettre du ministre des affaires étrangères de Belgique, qui permet aux membres de la Société de pénétrer sans passeport sur le territoire belge Ç 2° Une lettre de M. le directeur des mines d’Anzin autorisant ! la visite des divers établissements de la Compagnie. M. Grard fait hommage à la Société de son Histoire sur la recherche , la découverte et P exploitation de la houille dans le H airiaul- Français , la Flandre-Française et P Artois. Des remercîments sont adressés à M. Grard. Un membre demande si la Société géologique se propose de visiter l’établissement des bains de Saint-Amand, dans le but d’examiner s’il serait possible d’améliorer le régime de ses eaux au point de vue de leurs propriétés médicinales. Cette question pouvant être étudiée dans le cabinet sans qu’une vi- site soit nécessaire, la Société décide qu’elle ne se rendra pas à Saint-Amand. L’itinéraire des courses projetées par la Société est mis en question. M. Meugy propose de parcourir l’arrondissement d’Avesnes, du sud au nord d’Anor, à Maubeuge et à Bavay, en passant par Fournies, Wiguchin, Etrœungt, Cartignies, Marbaux, Sassegnies et Berîaimont. Il donne quelques explica- tions sur les avantages de cet itinéraire qui permettra non seu- lement d’explorer les localités principales où affleurent les ro- ches du terrain anthraxifère, y compris le petit bassin houiller d’Aulnoye , mais aussi les terrains crétacés et tertiaires qui reposent horizontalement sur les tranches inclinées dés schistes EN SEPTEMBRE 1853. 599 et des calcaires anciens. Il propose de voir les environs de Bavay, qui présentent de l’intérêt sous le rapport de la déter- mination de l’âge relatif des roches du tourtia. Enfin, pour compléter les explorations de la Société, une excursion pourrait être faite aux environs de Valenciennes où l’étage tertiaire in- férieur, représenté par le tuj d’Anzin et la craie chloritée, con- nue sous le nom de pierre d’Houdain , sont très développés. Il demande que l’itinéraire du lendemain se borne aux environs de Valenciennes, afin que les études principales auxquelles la Société doit se livrer dans l’arrondissement d’Avesnes, soient faites avec le concours des membres qui ne sont pas encore ar- rivés et dont les lumières seraient du plus grand secours. M. Delanoüe demande , en son nom et au nom des per- sonnes présentes h la séance, qu’une excursion soit faite dés le lendemain dans les environs de Bavay, afin que les membres pouvant seulement disposer de quelques jours, soient à même de voir en peu de temps les faits les plus curieux de cette lo- calité. Il est décidé qu’on visitera successivement : Saint-Waast- lez-Bavay, Houdain, Bellignies, Montignies-sur-Roc. On revien- dra à Valenciennes parWiherfen et Quiévrain. La séance est levée à trois heures. Séance du 3 septembre 1853. présidence de m. le marquis de roys, vice-président. Le président proclame membre de la Société M. de Bracque- mont, ingénieur civil, directeur des mines de Vicoigne (Nord), à Raismes (Pas-de-Calais), présenté par MM. Delanoüe et de Roys. M. Meugy, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. Sur l’invitation deM. le président, M. Meugy fait un rapport sur les faits observés dans l’excursion qui a eu lieu hier dans les communes de Wargnies, Saint-Waast, Houdain, Bellignies et Autreppe -, il le fait dans les termes suivants; 600 SESSION EXTRAORDINAIRE1 A VALENCIENNES , Course du 'vendredi , 2 septembre . La Société a visité des carrières ouvertes sur la côte de War- gnies dans les marnes du terrain de craie (système nervien de M. Dumont). On y exploite des calcaires plus ou moins argileux pour la fabrication de la chaux et Pamendement des terres. Un entrepreneur de Valenciennes a remarqué que cette chaux jouis- sait souvent de propriétés hydrauliques. Plusieurs fossiles, tels que des Inoceramus et des Catillus ont été observés dans la craie de Wargnies. On descend, dans le village de Saint-Waast, sur le limon qui a 3 à h mètres au moins d’épaisseur. A gauche delà route est ouverte une grande carrière de pierres de taille dans le calcaire bleu dévonien dont les couches penchent fortement en bas et plongent sous les schistes (psammites du Gondros) qu’on voit très bien sur un des points de la carrière et dont l’affleu- rement se poursuit au sud, le long du ruisseau. On remarque, dans une poche du calcaire, des glaises noirâtres avec veines de gros sables jaunes et des débris végétaux qui se rapportent au torrent d’Anzin -, puis, un poudingue renfermant des grès à grains roulés, de couleur jaune-, puis enfin, les marnes glauconi- fères qui existent à la base du système nervien de M. Dumont. M. Delanoüe avait dit avoir observé des schistes rouges au- près du Pinotiau, à 1 kilomètre en amont de la carrière -, mais le mauvais temps et l’heure déjà assez avancée ont empêché la Société de vérifier cette observation de M. Delanoüe, qui porte sans doute sur un fait tout à fait local. M. Meugy n’a d’ailleurs jamais vu que des psammites du Condros le long du ruisseau en question. Avant d’arriver à Houdain, la Société a remarqué, dans un talus du chemin, du minerai de fer hydroxydé. Ce fer quoique celluleux et caverneux, est assez semblable à celui que la Société de Denain a fait exploiter antérieurement dans la commune de Hum Hergien et aussi à celui que M. Meugy a vu à Quiéry-le- Petit (Belgique) dans un sable verdâtre correspondant, selon lui, au green-scind inférieur. En descendant au ruisseau de l’Homeau, on voit affleurer le terrain, connu aux environs de Bavay sous le nom de pierres des Sarrasins. C’est une espèce de calcaire à texture grossière dont EN SEPTEMBRE 1853. 601 la pâte présente des facettes cristallisées de carbonate de chaux et qui renferme en outre des grains de sable vert, de limonite et un grand nombre de coquilles parmi lesquelles on remarque des polypiers, des Ostrea [Ostçga carinata ), etc. Ces couches reposent immédiatement en stratification discordante sur le cal- caire bleu qui paraît à un niveau inférieur. On arriva à la carrière située sur la rive droite du même ruis- seau, en face du bois Yerdieu et près de la scierie Lécuyer. Cette carrière présente un véritable intérêt : on y voit une couche de minerai en grains de 1 mètre d’épaisseur, tout à fait semblable par ses caractères à celui qu’on exploiteaux environs de Youziers (Ardennes), dans le greensand inférieur j puis une mine de glaise grise recouvrant immédiatement le calcaire ancien dont les couches, orientées à 87° à l’ouest du N. magnétique, penchent au N. â 27°, et renferment une grande quantité de coquilles du genre Bellérophon. Cette carrière a été en partie remblayée. M. Meugy l’a visitée à une époque antérieure, où elle avait encore plus d’intérêt. On voyait sous la glaise grise, dont on vient de parler, une couche coquillière de 15 centimètres d’épaisseur avec grains de quartz et de limonite, se rapportant au même terrain que la pierre de Bellignies, puis une argile verte, fossilifère, ferrugineuse et enfin les gros sables et les glaises grises avec minerai de fer géodique représentant le torrent d’Anzin et rentrant, comme ce dernier, dans le système cachenien de M. Dumont. En remontant de l’autre côté du ruisseau vers Bavay, on voit successivement le calcaire, puis le minerai qui est ici à très gros grains, puis la marne, crétacée (diève), à un niveau su- périeur. En suivant la rive droite de l’Homeau jusqu’à Bellignies, on marche presque toujours sur la pierre des Sarrazins , déjà citée. Les carrières de Bellignies, que la Société a visitées, sont toutes situées sur la rive droite de l’Homau. La première ap- partient au sieur Lerat. Les terrains horizontalement stratifiés ] au haut du calcaire commencent par un poudingue avec grès plus ou moins volumineux, puis vient une assise de minerai en grains, puis la pierre des Sarrasins en bancs assez épais, puis les dièves du système nervien. 002 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES , Dans la carrière Joseph Lallemand, voisine de la précédente , les couches sont fortement inclinées au S. et l’on voit à la par- tie supérieure la naissance d’un pli qui renverse les couches au N. Dans la carrière Crapay, les couches penchent au N., et sont recouvertes, comme dans les précédentes, par le même système ferrugineux et calcaire. C’est dans cette carrière qu’on a dé- couvert, il y a quelques années, un minerai de fer tout à la fois siliceux et calcaire, dont la compagnie des Hauts-Fourneaux du Nord a fait l’essai, et qu’elle a trouvé de bonne qualité. Ce minerai est une modification de la pierre des Sarrasins. La carrière Malengroux touche à la route. On y constate les mêmes faits : on voit toujours à la partie supérieure les diéves grises superposées à cet amas coquillieret ferrugineux qui passe tantôt à un calcaire criblé de coquilles, tantôt à un véritable minerai de fer. Il existe dans toutes ces carrières des bancs considérés comme impropres à la fabrication de la chaux et qui cependant sont susceptibles de fournir des chaux hydrauliques. La Société s’est rendue à Autreppe , où elle a vu dans les grandes carrières qui bordent le chemin des diéves grises recouvrant immédiatement les couches tourmentées de cal- caire bleu. A peu de distance d’Autreppe , sur le chemin qui conduit au bois d’Angre , la Société a remarqué un bassin renfermant d’assez nombreuses coquilles terrestres (Hé- lices, Cyclostomes, Maillots, etc.) et divers ossements. Enfin elle est arrivée un peu tard dans la vallée si pittoresque qui traverse le bois d’Angre et où se montre le rocher connu sous le nom de caillou Quibie, formé par le poudingue de Burnot, dont les couches épaisses sont inclinées au S. de ü 5° et orien- tées à 75° à l’ouest du N. magnétique. La Société n’a pas eu le temps de vérifier la découverte faite par M. Delanoüe, de coquilles d’eau douce dans le limon d’EIonges, entre le village et la ferme du Saulçois. Le compte rendu de M. Meugy amène les observations sui- vantes : M. Courtin signale d’abord l’omission de l’indication de di- vers ossements fossiles, recueillis dans le loess, sur une tran- EN SEPTEMBRE 1853. 603 chée nouvellement pratiquée à droite d’un chemin conduisant à Autreppe. M. Potiez demande si ces ossements sont réellement fossiles. M. Gourtin répond affirmativement. M. Delanoüe fait observer que M. Meugy donne le nom de grès roulés à des poudingues qui renferment des fragments de grès roulés, des quartz et des parcelles de couches diluviennes $ il demande que la dénomination de poudingue soit maintenue. M. Meugy répond que cette observation est d’autant plus importante que ces poudingues , dont il ne conteste pas d’ail- leurs l’existence, doivent se trouver fréquemment dans les ter- rains que la Société se propose d’explorer prochainement dans l’arrondissement d’Avesnes. M. de Roys fait remarquer que la pierre connue dans le pays sous le nom AaSarrasin, pierre calcaire, débris de coquilles, etc., estl’équivaîentdes poudingues appelés successivement Tourtîa , par M. Leveillé et M. D’Archiac. M. Bruckmann communique les observations suivantes : Dans un forage fait sur le territoire de Denain, il a rencontré le torrent entre 60 et 62 métrés de profondeur, de même que des couches d’argile, de glaise, des morceaux de bois fossiles et des pyrites.il a également rencontré à la même profondeur une couche d’eau salée, et il demande si cette salure ne peut être attribuée à des bancs de sel gemme, sur lesquels ces eaux au- raient pu couler. Il appelle l’attention de la Société sur cette question. M. Meugy répond que la salure des eaux du torrent de De- nain n’est pas un fait propre au bassin houiller de Valenciennes-, il a été observé à Lille et dans les environs de Tournay. A défaut de renseignements plus complets, on pourrait peut- être croire que la salure de ces eaux souterraines serait la conséquence de l’infitration des eaux de la côte du Boulonais, dans certaines marnes essentiellement perméables, placées au- dessus du calcaire carbonifère. M. Bruckmann ajoute qu’aprés l’épuisement du torrent, le niveau des eaux se rétablit bientôt, si l’on cesse le travail ; Peau ne vient pas d’un niveau supérieur (la craie), mais bien de 60k SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES , couches horizontales. Depuis quatre ans, le degré de salure des eaux a augmenté d’une manière sensible. M. Meugy dit qu’il existe également des sources saliféres dans les Ardennes, et particulièrement à Méziéres, à peu de distance des affleurements du terrain ardoisier. M. le Président appelle l’attention des membres présents sur l’amélioration des eaux de Saint-Amand, dont un membre a déjà entretenu la Société. MM. de Roys, Meugy et Gourtin présentent successivement leurs observations sur cette question qui intéresse si vivement l’hygiène publique. M. Grard, président de la Société d’agriculture, annonce que M. le directeur de la Compagnie d’Anzin, MM. Numa Grard, Broquet, Cœrlier-Mathieu et d’autres industriels invitent la Société à profiter de son séjour pour visiter leurs établissements qui peuvent être cités parmi les plus beaux du pays. M. le Président répond àM. Grard que la Société est sensi- ble à ce témoignage de bienveillance de la part des sommités industrielles de l’arrondissement, et qu’elle se rendra avec le plus grand plaisir à l’invitation qui lui est adressée. M. de Lamarlhonie propose de consacrer la journée de de- main à la visite de ces établissements dont la réputation est européenne. On remettrait à lundi prochain la grande excur- sion dans les environs d’Avesnes. M. Ernest Bouton appuie cette motion , et croit qu’il faudrait visiter d’abord les établissements d’Anzin, de Douchy et de Denain. La Société adopte ces propositions et décide qu’elle se rendra à une heure dans le grand établissement d’Anzin, où elle pourra visiter avec intérêt les riches collections recueillies dans les ter- rains carbonifères de la Compagnie. M. le Président pense qu’il serait bon d’attendre l’arrivée de MM. d’Omalius d’Halloyet de Yerneuil pour arrêter l'itinéraire de l’excursion à faire à Avesnes et dans quelques localités voi- sines. Il propose une réunion demain dimanche, à sept heures et demie du soir, dans la salle de la Société d’agriculture. On fixera l’heure du départ. ËN SEPTEMBRE 1853. 60a La Société adopte l’avis émis par son président. La séance est levée à midi. Séance du k septembre 1853. PRÉSIDENCE DE M. d’oMALIUS d’hALLOY. M. d’Omalius remercie la Société de la bienveillance qu’elle lui a témoignée en l’appelant à l’honneur de la présider. Il est donné communication d’une lettre d’un membre de la Société d’agriculture de Valenciennes, demandant que la So- ciété géologique étudie la question du drainage, et dresse, dans ce but, une carte géologique de l’arrondissement. M. le Président fait observer qu’il n’est point dans les usages de la Société de s’occuper d’applications de ce genre : le dessè- chement d’un sol tient en général beaucoup plus à la disposi- tion de ce sol qu’à sa constitution géologique: il lui semble donc que la Société ne peut satisfaire à la demande qui lui est adressée. Cet avis, appuyé par M. Grard, président de la Société d’a- griculture de Valenciennes, est adopté sans réclamation par la Société géologique. M. Delanoüe entretient la Société des phosphates du terrain crayeux qu’on emploie en Angleterre avec succès pour l’engrais des terres. Guidé par les indications données par M. Meugy dans son ouvrage sur la géologie de la Flandre française, où il est dit qu’un échantillon de craie chloritée de Bouvines a donné à l’analyse h p. cent d’acide phosphorique 5 frappé surtout de la quantité considérable de cet acide fl 6 p. 100), constatée à l’é- cole des Mines de Paris dans un échantillon de calcaire tuber- culeux, provenant des mêmes localités, M. Delanoüe a parcouru l’arrondissement de Lille, et a trouvé, en effet, dans plusieurs carrières des environs de Lezennes une quantité assez considé- rable de ces nodules phosphatés dont il met plusieurs échan- tillons sous les yeux de la Société. Ces échantillons, connus des ouvriers sous le nom de tun , sont durs et pesants j ils ont été détachés d’une couche de 0m,70 d’épaisseur au milieu de la craie chloritée sénonienne. Cette épaisseur varie d’ailleurs beau - ^06 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, coup. Au congrès d’Arras, on a demandé comment on pourrait se servir de ce phosphate? Quelques personnes pensaient, avec M. Balard, qu’on pourrait l’employer utilement à l’état de disso- lution -, d’autres personnes étaient d’avis qu’on le pulvérisât simplement comme on le fait en Angleterre au moyen d’appa- reils particuliers assez semblables à des moulins à café. Mais on a pensé que peut-être on pourrait facilement diviser ces nodu- les en les chauffant et en les projetant dans l’eau froide, etqu’à cet effet la chaleur perdue des fours à chaux serait sans doute, utilisée avec avantage. M. Meugy fait observer que les carriers et les foreurs de puits des environs de Lille appliquent généralement l’expression de tun aux couches dures qui existent sous la craie chloritée. Aussi il n’y a pas seulement du tun vert-, mais il y a aussi du tun blanc ressemblant â de la craie, mais à une craie com- pacte, à texture serrée, depuis longtemps regardée comme sili- ceuse par M. d’Omalius d’Halloy. C’est qu’en effet les carac- tères des terrains immédiatement inférieurs à la craie chloritée ou à la pierre d’Hordain aux environs de Valenciennes, chan- gent notablement quand on s’avance vers l’O. Ainsi, dans les localités voisines du Pas-de-Calais, on ne trouve plus sous cette craie chloritée les silex noirs, si abondants à Valenciennes et à Mons, mais bien une roche blanche, très dure, qui par sa position relativement à l’étage des dièves et aux roches crétacées supé- rieures paraît correspondre aux cornus de Valenciennes et aux rabots de Mons. De là il résulte que, jusqu’à l’époque où l’analyse aura été faite de ces roches dures et y aura décelé la présence de l’acide phosphorique, il ne faudra pas d’avance admettre que, ressemblant par leur dureté aux nodules phosphatés d’An- napes et de Lezennes, elles ne sont elles-mêmes par cette raison autre chose que des phosphates. Du reste, l’acide phosphorique paraît être assez commun dans l’étage de la craie, et M. Pézier l’a constaté dans des eaux de sources des environs de Mar! y et dans des chaux provenant de la commune d’Artres. Il est incon- testable que l’emploi du phosphate de chaux peut rendre les plus grands services à l’agriculture, et sa présence dans le ter- rain de craie est d’autant plus importante pour le département du Nord que l’étage où on le rencontre en plus grande abondance 607 ËN SEPTEMBRE 1853. et qui fournit la pierre d’Hordain, bien connue des architectes et des constructeurs, affleure dans presque toutes les vallées de l’arrondissement de Cambrai. M. Meugy a constaté, en effet, son existence dans toutes les communes voisines de l’Escaut, de Douchy à Cambrai, à Crèvecœur et à Vendhuile sur la limite du département de l’Aisne. Il l’a reconnue aussi dans beaucoup d’autres points de Cambrai, au Cateau et à Solesmes, M. Bruckmann montre des échantillons de sondages tirés de Denain et de Guines (Pas-de-Calais), à une profondeur de l/iO mètres. Il fait valoir le procédé qui permet de retirer des carot- tes entières sans les broyer -, ainsi on avait trouvé dans le Pas- de-Calais des schistes dévoniens qui, étant pilés et réduits en bouillie, auraient pu faire penser qu’on se trouvait dans le ter- rain houiller, car les échantillons ne faisaient aucune effer- vescence avec les acides. M. Meugy a conçu un projet d’itinéraire dont il donne lec- ture à la Société. On décide qu’on se rendra, le premier jour, de Valenciennes à Avesnes par Berlaimont et Marbaix, et que le deuxième jour on ira d’Avesnes à Hirson par Glageon. M. de Roys rend compte de la course faite, le samedi, à Anzin. Le mauvais temps essuyé dans la course de ven- dredi, l’attente de l’arrivée de MM. d’Omalius et de Verneuil, avaient déterminé la Société à ajourner à lundi la grande course qu’elle projette. L’aprés-midi du samedi a donc été em- ployée à visiter le magnifique établissement de la compagnie houillère d’Anzin, où la Société a été reçue avec la plus grande bienveillance parM. Cabanis, ingénieur civil, qui l’a guidéedans tous les ateliers, et lui a montré la collection des roches et mi- néraux de la localité. La Société a vu avec intérêt de belles empreintes de fougères, de beaux échantillons de troncs d’équi- sétacés, de lépidodendrons, de palmiers et de conifères. Mais, après la course de la veille, son attention s’est portée surtout sur les roches du singulier terrain, auquel les mineurs ont donné le nom de torrent , dont elle avait vu comme un spéci- men à Saint-Waast, et sur les échantillons du tuurtia qui sont là sous la forme de poudingue. Le plus remarquable est une em- preinte d’ Ammonite d’assez grande dimension où je crois avoir reconnu l’une des formes de X Ammonites varions , Sow. Un 608 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, Pleurolomaire paraît se rapprocher beaucoup du Pleurotomaria royaiia , d’Orb., mais il est trop mal conservé pour présenter quelque certitude. Ce serait encore un rapprochement avec le deuxième groupe crétacé de M. d’Archiac.On a cru reconnaître un Opis dans un échantillon de poudingue. Les échantillons des clieves et de la craie supérieure au tourtia ont présenté des empreintes qui se rapportent toutes à la craie blanche, ce qui n’a pu surprendre, après les fragments de Catillus , que la So- ciété avait vus la veille dans cet étage, dans les carrières de Warnie. Le sommet de la butte d’Anzin présente de nombreuses ex- ploitations du sable surmonté de grés en blocs, pour la plupart brisés, qui en forment le couronnement. Nulle ne s’étend jus- qu’au tuf tertiaire que ce sable recouvre et dont aucun affleure- ment n’est visible. La ressemblance frappante du faciès des grés avec ceux de Fontainebleau n’est point un indice suffisant pour permettre un rapprochement. MM. Meugy et Delanoüe, qui connaissent si parfaitement la localité, rapportent à l’étage éo- cène l’ensemble de ces terrains tertiaires. Séance du 8 septembre 1853. PRÉSIDENCE DE M. d’oMALIUS d’hALLOY. M. de Roys rend compte de la course de la Société pendant les 5, 6, 7 et 8 septembre. La Société est partie de Valenciennes, le lundi 5, à dix heu- res du matin, par la route d’Avesnes qu’elle avait déjà suivie jusqu’à Jeanlin. M. d’Omalius lui a fait, à plusieurs reprises, remarquer le développement de cette assise de limon quater- naire, représentant ici ces terrains de loess ou de lehm qu’on regardait comme le diluvium supérieur. Le limon, cause de la prodigieuse fertilité de l’arrondissement de Valenciennes, s’é- tend en France, en Belgique, dans quelques parties de l’Alle- magne, avec une constance de composition extraordinaire. M. De- lanoüe fait observer qu’on ne rencontre point ici ces veinules et concrétions calcaires qui se lient ordinairement à la présencede quelques fossiles, le plus souvent terrestres, tels que Hélices, EN SEPTEMBRE 185S. Ô09 Maillots, Balimes, Gyclostomes , plus rarement lacustres, tels que ceux observés dernièrement par la Société à Gussignies. A l’entrée de la forêt de Mormal, une berge nouvellement refaite a permis de constater, dans l’assise formant le sol, une nature plus complètement argileuse et quelques marbrures. Ce n’est plus le limon des terres arables voisines , il manque dans toute la forêt. M. d’Omalius fait remarquer la différence de pro- duits correspondant à la différence du sol. Les agriculteurs an- ciens ne s’y sont jamais trompés. M. Delanoüe pense que cette argile appartient à l’étage Yprésien de M. Dumont, corres- pondant à l’argile à Ostrœa bellovacinci du bassin de Paris. M. d’Omalius ne conteste pas cette opinion. Il fait néanmoins observer que l’absence de tout fossile et de tout moyen strati- graphique d’en déterminer la position ne permet pas de l’af- firmer d’une manière bien positive (1) . (1) M. Meugy, qui n’a pu assister à cette course, a remis la note suivante : Quand on parcourt la Flandre française du nord au sud ou de l’ouest à l’est, on observe que les bords du bassin sableux qui comprend le Lpndon-clay s’élèvent de plus en plus, et que le dépôt glaiseux s’a- mincit successivement et finit par disparaître. Cette circonstance semble annoncer l’approche des limites de la plage où l’argile de Londres s’est déposée. En effet, dès qu’on a frànchi la Scarpe, on ne rencontre plus que des terrains crayeux, dont les sommets élevés ne sont pour ainsi dire que les témoins de la longue chaîne qui reliait encore le Bas-Boulonnais aux environs d'Avesnes avant la période ter- tiaire, et qui séparait ainsi le bassin de Paris de celui du Nord. Les plateaux crayeux sont quelquefois recouverts par de petits îlots sableux qui deviennent de plus en plus étendus au fur et à mesure qu’on s’avance vers Paris, et qui enfin s’enfoncent eux -mêmes sous le cal- caire grossier, comme le montre clairement la carte géologique du dé- partement de l’Aisne, exécutée par M. d’Archiac. C’est au milieu de ces îlots qu’on trouve assez fréquemment des couches de glaise qui affleurent à des niveaux variables. Tantôt elles succèdent immédiate- ment à la craie et paraissent supporter les sables landeniens, tantôt, au contraire, elles se montrent à la partie supérieure des collines où on les voit reposer sur ces mêmes sables, tantôt enfin le terrain est sableux ou glaiseux à des intervalles très rapprochés et pour ainsi dire à la même hauteur, de sorte qu’il est impossible de reconnaître alors à priori si la glaise est au-dessus du sable ou si elle est au-dessous. Je suis fondé à croire que cette glaise est subordonnée aux sables lan- deniens; car, pour qu’il en fût autrement, il faudrait admettre un fait qui ne se présente pas généralement , à savoir que le terrain sa- Soc. géoLy 2e série, tome X. 39 610 RÉUNION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES , La Société s’est arrêtée à Beriaimont pour observer une brèche que M. Delanoüe avait vue, il y a quelques années, s’étendre en assises horizontales sur la tranche des couches d’un calcaire qu’il croit dévonien (1). Les carrières, où on l’avait autrefois exploitée, sont aujourd’hui remblayées } il est donc impossible de voir le contact de cette brèche avec la roche sous-jacente. Toutefois M. Delanoüe voit la preuve d’une stratification hori- zontale dans la présence de joints qui semblent diviser la brèche en assises peu régulières. M. d’Omalius pense au contraire que ces joints sont trop irréguliers, trop peu suivis, pour annoncer une véritable stratification.il n’y voit que des fissures acciden- telles , en sorte que l’on ne pourrait en conclure une discor- dance de stratification entre la brèche et le calcaire compacte inférieur. M. Delanoüe convient que le contact de la brèche bleux formât pour ainsi dire à chaque pas des ondulations très pro- noncées dans lesquelles la glaise se serait déposée postérieurement. Il faudrait surtout ne tenir aucun compte du relief général du sous-sol qui peut être représenté dans son ensemble par la coupe ci -jointe des environs de Lille à Avesnes. 7Gn» iî>Om 200"» au-dessus du uiveau de la mer. a Argile de Londres. j c Craie. b Sables landenieus. j 4 Terrain anlhraxifcre. Cette coupe fait ressortir l’amincissement progressif de la glaise vers l’est et l’élévation successive des sables qui la supportent. Ce qu’il importe surtout de remarquer, c’est que la surface du bassin glaiseux se trouve à une hauteur constante partout où le relief de cette surface n’a pas été modifié par l’action des eaux. Ainsi, il résulte des coupes jointes à la carte géologique de la Flandre française, que l’argile de Londres ne s’élève pas, dans le Nord de la France, à plus de 76 mè- tres au-dessus du niveau de la mer. Si l’on considère cette cote comme limitant la hauteur atteinte par les eaux qui ont déposé Y argile da Londres, on ne pourrait concevoir que la même argile existât encore dans la forêt de Mormal au niveau de 1 50 mètres. (l) M. Meugy ne pense pas que ce calcaire soit dévonien ; il le rap- porte à l'étage carbonifère. La Société n’ayant point trouvé de fossiles, ni observé de superposition, n’avait pas pu se former une opinion à cet égard EN SEPTEMBRE 1853. 611 avec le calcaire ancien n’étant point visible, la différence de stratification, qu’il a plusieurs fois observée, cesse d’être évi- dente. Il croit cependant impossible de douter que les joints sensiblement horizontaux, séparant ce qu’il persiste à appeler de véritables assises, ne constituent une stratification bien réelle. Il est dés lors certain qu’elle doit contraster avec celle du calcaire ancien dont l’inclinaison approche de la verticale. Cette brèche se continue à Dourlers, où la Société pourra encore l’observer, et sur d’autres points plus éloignés. Il per- siste donc à la considérer comme formant un terrain distinct et indépendant, correspondant à la base du trias. M. d’Omalius répond qu’il ne conteste point la justesse des opinions de M. Delanoüe; mais les observations faites par lui dans d’autres localités le portent à considérer des brèches analogues à celles que la Société a sous les yeux, comme de simples accidents du calcaire à texture massive. Il pense, en effet, que ces brèches sont le résultat du fendillement sur place de ce calcaire, fendillement occasionné par les phénomènes qui ont disloqué et plissé les couches. Ces phénomènes ont été accompagnés par l’éjaculation de la matière formant le ciment des brèches, et par un grand développement de cha- leur d’où est résultée l’agglutination des fragments par un effet analogue à celui qu’ont subi certains marbres métamorphiques où lesjoints de stratification ont totalement disparu (1). Si les mêmes effets ne se remarquent pas dans les assises de schistes et de psammites, c’est que la nature de ces roches ne se prêtait pas aussi bien au fendillement que le calcaire; la preuve en est dans la manière dont eiles se sont plissées. Quant à l’époque où ces phénomènes ont eu lieu, M. d’Oma- îius a déjà eu occasion de faire connaître qu’il la rapportait à la période pénéenne, en sorte que sous ce rapport sa manière de voir se rapproche de celle deM. Delanoüe, quoique d’ailleurs il voie dans les brèches dont il s'agit une modification môtamor- (1) Les brèches étant composées de fragments dont les angles ne sont que peu émoussés, ils ne peuvent avoir subi un transport consi- rable. Ainsi, la différence qui sépare l’opinion de M. d’Omalius de celle de M. Delanoüo, consiste réellement en ce que le premier consi- dère le ciment de ces brèches comme produit d’éjaculations intérieures» 612 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, phique du calcaire dans lequel elles sont intercalées plutôt qu’une assise superficielle d’un terrain postérieur. La Société s’est ensuite rendue à une carrière ouverte à un niveau assez inférieur à celui où elle avait vu les brèches, et où s’exploite le calcaire ancien. Elle n’y a rencontré aucun fossile. La tranche des couches est couverte par une argile verdâtre, assise dont il est impossible de préciser l’époque. De grandes tissures verticales sont remplies par une argile rouge bien dis- tincte de l’argile supérieure. C’est cette argile que M. d’Omalius a nommée argile des filons. Il la regarde comme injectée de bas en haut, et ayant ainsi rempli les fentes occasionnées par le grand mouvement dont il a parlé. Il la croit donc contemporaine de la fin de la période pénéenne, tandis que M. Dumont en fait descendre la formation, ainsi que celle des minerais de fer placés dans une situation analogue, jusqu’à la période crétacée. L’une et l’autre de ces opinions ne sont fondées que sur des inductions tirées d’analogies et de ressem- blances qui ne peuvent présenter rien de bien positif. M. deRoys objecte que si ces argiles provenaient de l’intérieur de la terre, elles auraient dû y subir une haute température qui leur aurait fait perdre leur hydratation et leur plasticité. Elles auraient, par conséquent, éprouvé un changement analogue à celui qui a transformé en schistes les limons houillers. M. d’Omalius ré- pond que les différences qui ont dû exister dans la nature des matières s’élevant de l’intérieur de la terre et dans le degré de pression sous lequel se passaient les phénomènes, peuvent rendre raison des effets divers produits par ces phénomènes. Au surplus, la présence des substances hydratées dans des roches d’origine évidemment ignée prouve que l’action d’une chaleur capable de les mettre en fusion ne suffit pas toujours pour enlever l’eau d’une combinaison. Il ajoute que les argiles dont il s’agit présentent, dans toute la bande calcaire qui s’étend de l’Escaut à la Roër, une uniformité qui ne lui paraît pas com- patible avec une origine superficielle, parce que, dans ce cas, elles devraient présenter des variations analogues aux varia- tions observées dans les dépôts superficiels d’origine évidemment neptunienne. La Société a traversé le canal de la Sambre vis-à-vis de l’usine EN SEPTEMBRE 1858. 618 de Mécrimont. Elle est remontée en voiture à Levai pour se rendre à Marbaix dont elle a visité les carrières. Le calcaire que l’on y exploite appartient à l’étage anthraxifére. Ce calcaire a présenté, surtout dans les parties schisteuses qui séparent les assises calcaires de nombreux fossiles, tels qu’Orthocères, Spiri- féres, polypiers, parmi lesquels on a pu déterminer les Spirifer cuspidatus (Martin) et Orthis resupina ta (Martin). Dans la partie la plus élevée du plateau formé par ce calcaire, on exploite pour les verreries de la contrée un filon de calcaire spathique de A à 6 mètres de puissance, sensiblement orienté suivant une ligne N. -S. Les cristaux forment des aggloméra- tions dont le clivage conduit à des formes rhomboédriques or- dinairement aplaties ou tabulaires. Ils ne sont point assez lim- pides pour qu'on puisse observer le phénomène de la double réfraction comme dans les cristaux du gîte si remarquable de Saint-Alban, prés d’Àlais, dont la transparence est comparable à celle du spath d’Islande. A l’extrémité sud de l’exploitation, le filon se rétrécit. Plu- sieurs ramifications pénètrent dans les fissures du calcaire ancien qui forme les saîbandes, et, en les remplissant, donnent lieu à line espèce de brèche dans laquelle la rubéfaction des fragments de ce calcaire prouve qu’il a été soumis à une chaleur assez intense. A quelque distance, entre le filon et la route, une excavation présente la tête des couches du calcaire dévonien, relevées et converties en dolomie pulvérulente. Plus loin, ce calcaire, dé- coloré, et passant à un gris clair, est exploité pour un four 5 chaux . L’heure avancée ne permettant plus de nouvelles observa- tions, la Société s’est rendue directement à Avesnes, où elle est arrivée à huit heures et demie. Le mardi, la Société, partant d’Avesnes, a mis pied à terre vis-à-vis du chemin qui conduit au village de Sains. Avant d’y arriver, elle a observé dans les berges de la route un affleure- ment de schistes. Sur plusieurs points, elle a remarqué, entre les couches du schiste, des séries de rognons calcaires, connus dans le pays sous le nom de têtes de chat . Cette suite de ro- gnons donne la direction de la stratification de ce terrain , et 614 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES , l’on peut constater ainsi combien cette direction diffère de celle du délitement. L’inclinaison à TE., au point où la Société a d’abord rencontré ces schistes, devient bientôt horizontale, puis reparaît en sens contraire, et l’on a pu saisir ainsi un exemple des nombreux plissements qui affectent ce terrain. L’abondance des rognons calcaires, au moyen desquels on a pu déterminer la stratification, est en général l’indication de la partie inférieure de cet étage et comme l’annonce du calcaire sur lequel il repose. M. d’Omaîius fait remarquer que ces schistes sont les mêmes que ceux qui constituent le sol des deux contrées arides, connues sous les noms de fammenne et de fagne , l'une sur la rive droite, l’autre sur la rive gauche de la Meuse, et effectivement le plateau qui s’élève à l’est du village de Sains est déjà désigné dans le pays sous le nom de fagne de Sains , Toutefois il existe, à l’entrée de ce plateau, un dépôt superficiel qui en modifie la nature. C’est une cen- drière analogue à celles du Soissonnais, et qui forme un dépôt un peu allongé du N.-E. au S.-O. Ce dépôt tertiaire occupe un point assez élevé. En suivant le chemin qui y conduit, on re- connaît d’abord dans un sable jaunâtre qui en forme la base, de nombreux blocs de poudingue siliceux dont l’identité avec les poudingues de Nemours est frappante, et des grès non moins ressemblants à ces grès argilo-calcaires de Glandelles, Ville- cerf, etc. Au-dessus s’étend une argile un peu marbrée, jaune grisâtre, dont la superposition au sable est très apparente dans un fossé nouvellement creusé, et même dans les terres conti- guës. Elle est recouverte par une assise de 2 à 3 mètres de puissance, noire, très bitumineuse, mélangée de lignite et d’assez nombreux nodules de pyrites. Cette assise, si ressemblante aux lignites du Soissonnais, est aussi exploitée dans la cendriere de Sains pour l’amendement des terres. On trouve enfin au-dessus une argile ou marne blanchâtre qui, un peu plus loin, forme un second petit bassin dans la direction du premier, dont il est séparé par un faible relèvement des schistes de la fagne dont on remarque aussi quelques protubérances au fond de ce second bassin. Cette marne, quoique moins avantageuse que l’argile ligniteuse de la cendrière, y est aussi exploitée pour l’amende- ttient des terres. Interrogé sur la position de l’argile et des sa- EN SEPTEMBRE 1853, 615 blés, grès et poudingues inférieurs, M. deRoys n’a pas hésité â les regarder comme identiques avec ceux de Nemours, et formant dans toute l’étendue du bassin de Paris l’assise la plus inférieure des terrains tertiaires. M. Delanoüe lui a objecté que, dans la coupe dressée par M. Hébert, l’argile de Montereau con- sidérée par M. de Roys comme appartenant à la même formation que les poudingues, est placée au-dessus des lignites du Sois- sonnais. M. de Roys répond que la situation des argiles exploi- tées sur les hauteurs de Montereau et de Courbeton, immédiate- ment au-dessus de la craie blanche, a pu tromper M. Hébert. Vers le château de Tavers, à une lieue en aval de Montereau, la craie s’élève jusqu’à Courbeton où elle atteint une hauteur de 30 à 35 mètres au-dessus du niveau de la Seine, aux ex- ploitations deM. Lebeuf. Les poudingues n’ont pu s’élever sur ces collines anciennes, comme le diluvium caillouteux quater- naire • ils sont restés dans le fond des vallées de cette époque. A Nemours, Lorrez, Nanteau, etc., les poudingues, agglomérés ou meubles, se montrent à découvert, toujours surmontés par l’argile plastique qui seule remonte au-dessus des collines crayeuses lorsqu’elles s’élèvent au-dessus des poudingues. Cette liaison est surtout évidente dans l’ancienne vallée haute, citée depuis longtemps par M. de Roys, qui s’étend de Yillemer â Ferrotes. Les galets appartiennent aux étages sénonien et turo- nien de M. d’Orbigny. Ils sont tous très roulés. Un certain nombre, d’une teinte rouge assez vive, signalés depuis long- temps par M. Elic de Beaumont dans les poudingues de Fay, ont été reconnus parM. d’Archiac comme provenant de la craie turonienne au-dessus de Blois. Celte circonstance, l’absence de toute stratification, ne lui permettent pas de douter que co terrain ne soit le produit d’un transport violent, opéré par do grands courants venant de très loin, en d’autres termes, comme il l’a dit il y a plusieurs années à la Société, un vérita- ble diluvium, résultat du grand cataclysme qui a séparé la pé- riode secondaire de la période tertiaire, et opéré la dénudation des grands espaces antérieurement occupés par l’étage crétacé, que l’on y comprenne ou non le terrain danien, dénudation dont quelques témoins demeurés debout constatent la puis- sance et l’étendue. Dans un mouvement d’une telle violence, 616 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, les terrains qui les parcourent sont profondément corrodés et leurs débris entraînés fort au loin. Ce transport opère une di- vision analogue à ce qui se passe dans les opérations du lavage et du débourhagedes minerais. Les galets, le sable qui se forme par leur atténuation ou Fabatage des parties anguleuses, se précipitent les premiers, s’accumulent dans les dépressions qu’ils comblent en partie. On sait, en effet, que ces galets, comme le gravier des rivières, sont bien véritablement roulés , et ne s’élèvent guère au-dessus du fond, tandis que les molé- cules argileuses et marneuses, comme le limon des fleuves dé- bordés, remplissent tout le volume des eaux et s’élèvent jusqu’à la surface, demeurant encore suspendues jusqu’au moment où le mouvement s’arrête, moins sans doute à cause de leur légèreté qu’à cause de la nature hydratée des matériaux dont elles sont formées. Gomme le loess, l’argile plastique s’est dépo- sée sur tous les points que les eaux de ce cataclysme ont recou- verts, jusque sur les hauteurs que le poudingue n’a pu atteindre. C’est ainsi qu’elle se trouve recouvrir immédiatement la craie à Montereau. Partout, à la base des terrains tertiaires, on re- trouve ces argiles et ces poudingues dans la même position, comme on le voit ici à la cendrière de Sains. Gela doit être, puisque les dépôts clysmiens, suivant l’expression si vraie d’Alex. Brongniart, s’étendent sur d’immenses espaces et à des hauteurs très différentes. M. Delanoüe a lui-même reconnu l’existence de ces argiles et poudingues entre Issy etMeudon, où ils sont recouverts par une couche de sable et une seconde corn che d’une argile impure, rejetée par les exploitants, parce que, mêlée de ügnites, et surtout de pyrites et de cristaux de gypse, elle est impropre aux usages industriels. M. de Roys a depuis longtemps pensé que ces fausses glaises étaient les représentants de l’étage entier des iignites du Soissonnais, amoindri, comme on doit s’y attendre, au bord du bassin où il se déposait. Ce qui a pu contribuer à tromper M. Hébert est la superposition im- médiate du calcaire siliceux d’Alex. Brongniart (travertin, n°l, des anciennes coupes de MM. Cordier et Constant Prévost), qui recouvre à Paris tout l’étage du calcaire grossier; mais il est prouvé depuis longtemps que ce calcaire siliceux est le repré- sentant synchronique, dans la partie méridionale du bassin de EN SEPTEMBRE 1853. 617 Paris, de tous les dépôts sédimentaires si développés dans îa partie septentrionale, jusqu’au niveau des marnes vertes qui forment un horizon constant et que l’on retrouve sur une si grande étendue, M. de Roys est convaincu que si M. Hébert étudiait l’argile plastique dans les localités où elle est accom- pagnée de ses sables et poudingues, cet observateur si habile et si consciencieux reconnaîtrait bientôt la nature clysmienne de ce dépôt, et par conséquent l’impossibilité de l’assimiler à un terrain sédimentaire, lentement déposé et ayant ses fossiles propres. M. de Roys est donc convaincu qu’Àlex. Brongniart avait dès longtemps assigné à ces poudingues leur véritable situation en les plaçant à la base des terrains tertiaires. A cette occasion, quelques membres ont demandé àM. d’O- malius quelle était son opinion sur l’origine de l’argile et des schistes. I! a répondu que Faujas avait attribué la formation de l’argile à la décomposition des végétaux, de même que Buffon considérait le calcaire comme produit par les ani- maux tesiacés-, mais, que, suivant l’opinion la plus générale- ment adoptée aujourd’hui , les argiles proviennent de la dé- composition des roches ordinairement désignées par l’épithète d’ignées. Quant à lui, tout en admettant que cette cause a donné naissance à certains dépôts argileux et schisteux, il ne lui paraît pas probable qu’il y ait eu des altérations suffi- santes pour avoir produit les énormes masses d’argile, de schis- tes, de sables et de grès que l’on observe dans la nature. On admet qu’il est sorti, de l’intérieur de la terre, des ma- tières à l’état de fluidité pâteuse qui ont donné naissance aux Irachytes, aux porphyres, au granité. De même il a pu en sortir à l’état pulvérulent ou arénacé, ainsi d’ailleurs que nous le voyons dans nos volcans qui rejettent des cendres aussi bien que des laves. Or, 1a plus grande partie de ces matières pulvé- rulentes ou arénacées, ayant été éjaculées au milieu de mers très agitées, ont dû se répandre à de très grandes distances et se déposer en couches successives, tandis que d’autres sont restées sous forme de filons ou d’amas dans les cavités qui leur ont servi de canaux ou dans celles qui les ont reçues. D’un autre côté, la pression, la chaleur et les nouvelles émanations, occa- sionnées par les révolutions postérieures, ont solidifié et modi- 618 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, fié une partie de ces dépôts en les transformant en roches cohé- rentes, telles que schistes, psammites, grès ou quarzites, tandis qu’une autre partie a conservé l’état meuble. M. d’Omalius rappelle à ce sujet que, lorftpi’on a commencé à admettre la théorie du métamorphisme, c’est-à-dire de la modification des roches par des éjaculations venant de l’inté- rieur, on avait ôté porté à croire que c’était principalement le contact d’une roche en fusion qui produisait ces altérations, tandis qu’il est bien plus probable que les émanations gazeuses ont exercé une action plus forte que les matières pâteuses. L’un des membres a demandé si les actions éîectro magnéti- ques n’entraient pas pour beaucoup dans cette transformation. M. d’Omalius a répondu qu’il était loin de les exclure, que cer- tainement une partie des phénomènes observés pouvait être due à leur influence, notamment l’introduction de principes nouveaux dans des corps qui ne les contenaient pas originaire- ment. M. de Roys rappelle que l’on attribue généralement aces ac- tions les changements d’état subis par les corps fossiles, tels que la spathisation du test des coquilles opérée même au milieu de roches qui n’offrent aucune apparence de métamorphisme. Il fait également observer que les puissantes formations de schistes, d’argiles et de roches arénacées, intercalées dans la série des terrains sédimentaires , ne sont pas cependant hors de proportion avec le produit présumable de l’altération des roches ignées. Ces roches devaient évidemment subir cette espèce de décomposition d’une manière bien plus considérable, lorsque la température du globe était plus élevée. Tous les géo- logues s’accordent à penser que, dans la période actuelle, la chaleur centrale de la terre entre pour un demi-degré au plus dans la température superficielle. Ainsi la température dont nous jouissons est presque entièrement due à l’influence de la chaleur solaire. On sait que M. Pouillet a évalué cette cha- leur solaire à celle qui serait nécessaire pour fondre une couche de glace de 30 mètres de puissance sur toute la surface de la terre. Dans les périodes anciennes la température superficielle était beaucoup plus considérable. Les belles recherches de MM. Elie EN SEPTEMBRE 1853. 619 de Beaumont et Deshayes prouvent qu’à l’origine de la période tertiaire ia température du bassin de Paris devait être d’envi- ron 25°, ce qui donne près de 1 Zi° pour le contingent de la chaleur centrale dans la température superficielle. L’existence constatée de la flore pafœozoïque jusqu’aux latitudes où la privation de la lumière pendant une partie de l’année s’opposait à son développement semble prouver qu’à l’origine de la grande période secondaire l’influence de la chaleur centrale devait pro- duire une température égale à la température tropicale actuelle. Si, dans la période actuelle, nous voyons les roches ignées s’altérer, les silicates doubles perdre leur alcali et s’hydrater d’une manière bien sensible, il est évident que, sous l’influence d’une température bien plus élevée, d’une atmosphère incompa- rablement plus humide et plus chargée d’électricité, cette al té - ration des silicates devait se produire avec une rapidité extrême-, les roches désagrégées, soumises à l’action des pluies torren- tielles, dont celles de 1a zone torride actuelle ne peuvent donner qu’une faible idée, fournissaient aux fleuves de cette époque d’immenses masses de détritus qui, divisés par ce lavage, char- riaient au loin les parties quartzeuses atténuées sans cesse par la rapidité du mouvement, et ne laissaient reposer qu’au milieu des mers les argiles épurées par l’agitation perpétuelle des eaux. Les recherches de M. de Prony sur les atterrissements du Pô ont, les premières, fait connaître la quantité considérable de détritus que ce fleuve apporte annuellement dans l’Adriatique, où ils forment des couches qui atteignent jusqu’à Zi à 5 centi- mètres de puissance. Nous avons essayé de donner une idée de ceux que transporte le Rhône. On sait que le Mississipi donne par mètre cube d’eau une contenance de limon au moins qua- druple de celle du Rhône, ce qui produit un total effrayantpour l’imagination. Il en est de même du fleuve des Amazones. R est donc facile de voir que l’opinion si généralement admise par les géologues, comme l’a reconnu M. d’Omalius, qui attribue la formation des argiles et des grés à la décomposition des roches ignées, est fondée sur des probabilités bien réelles. Cette théo- rie explique en même temps pourquoi les argiles anciennes sont si pures et si exclusivement de formation marine. Il est possible, sans doute, qu’un certain nombre d’assises argileuses 620 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, ou arénacées aient dû leur origine aux éjaculations dont a parlé M. d’Qmalius-, mais, comme on le voit dans les produits des volcans sous-marins aujourd’hui émergés, tels que ceux de Beaulieu et Rougier, en Provence, si bien étudiés par la Société en 1842, dans celui d’Essey-la-Côte, en Lorraine, leur action ne s’étend qu’à une bien faible distance, et peut-être cette théo- rie serait-elle peu propre à rendre compte des immenses cou- ches d’argile du keuper, du lias, etc. Celle que M. de Roys vient d’exposer et qui est, à peu de chose près, celle qui est généralement admise, a, de plus, l’avantage de rendre compte de la salure des mers et des couches ou amas de sel. Ils doivent, en effet, provenir de l’enlèvement des parties alcalines des ro- ches attaquées. La prédominance des sels de soude semble im- pliquer l’existence de roches où le feldspath albite constituait la plus grande partie de la masse. La Société s’est rendue aux belles carrières de marbre de Glageon , où elle a pu observer la superposition normale , sur le calcaire, des schistes de la Fagne (psammites du Con- dros), qu’elle n’avait point quittés depuis qu’elle les avait vus avant d’arriver à Sains. Le calcaire de celte carrière est géné- ralement noir, bitumineux. Il présente de nombreux fossiles, Orthocères, brachiopodes, polypiers, Encrines. La Société y a trouvé un polypier curieux, le Stromatopora polymorphci, for- mant des masses considérables qui se séparent souvent en tranches minces offrant, d’un côté, la surface du polypier, et de l’autre la contre-épreuve. Un banc assez puissant est principalement pétri de Cyn thop hy U uni hexagonaux, dont la coupe par le sciage est d’un effet qui a fait donner à cette assise, très estimée dans le commerce, le nom de Glageon fleuri. Une autre assise est formée de gros nodules, saillants sur les deux faces, unis par un ciment très dur, ce qui lui donne l’aspect d’un poudingue. M. Delanoüe, qui a étudié déjà cette localité, apprend à la Société que ces nodules, en général roulés, sont presque tous des poly- piers. La direction des couches, relevée par M. de Bracquemont, est à peu près celle de l’E. — 0. Leur inclinaison au S. est de 75°. Ces couches appartiennent, comme celles de Saint- Waast, Autreppe, Beliignies.etc., à la partie moyenne de l’étage dévonien, si l’on adopte la classification de la géologie élémen- m SEPTEMBRE l8ÔS. 62 1 taire de M. d’Omaiius, qui ne se compose du haut en bas que des trois grandes assises : 1° psammites du Condros 5 2° cal- caire; 3° poudingues de Burnot. Mais M. de Koninck, dans sa description des fossiles, comme la plupart des géologues, com- prend dans la grande division dévonienne son système rhénan, composé aussi de trois grandes sections que M. Dumont a dési- gnées sous les noms d’étages ahrien, coblenzien etgédinien. Ce système repose sur les terrains ardennais de M. Dumont, reconnus aujourd’hui comme siluriens. M. d’Archiac, dans sa description géologique du département de l’Aisne, a placé ces terrains ar- doisiers dans l’étage cambrien et a regardé comme siluriens les quarzites, grès et phvllades du système rhénan, que la Société doit visiter. M. de Roys, à cette occasion, fait remarquer que l’on a beaucoup critiqué la nomenclature de M. Dumont. A force de patience, par l’examen le plus approfondi et à travers mille difficultés, ce savant a fixé d’une manière positive l’ordre de tous ces étages, autrefois confondus sous le nom de terrains de transition. L’étrangeté des noms qu’il leur a donnés empê- chera peut-être leur admission dans la science. Ces noms seront cependant toujours utiles à connaître, parce qu’ils indiquent les localités où ils sont mieux développés, et où leur situation dans l’échelle des terrains est constatée d’une maniérecertaine. La Société a suivi jusqu’à Trelon les affleurements du même calcaire. De là, elle comptait se rendre à Ohain, Anor et Mon- drepuis-, mais, la route étant interceptée, elle a dû renoncer à ses premières dispositions, et se rendre à Mond repuis par Fourmies. En descendant dans la vallée, qui s’étend au pied du dernier village, on a trouvé des schistes d’une teinte plus rougeâtre que ceux observés de l’autre côté de Gîageon. M. d’Omalius a dit que ces schistes lui rappelaient tout à fait ceux du système du poudingue de Burnot, inférieur au calcaire de Givet. La Société a effectivement remarqué quelques morceaux de pou- dingue semblable à la roche Quibie qu’elle avait vue dans sa première course, au lieu dit le Château-du-Diabîe, dans le bois d’Angre. Elle a ensuite visité une carrière de calcaire exploitée au bas du village. Cette carrière et un affleurement du même calcaire, qu’on trouve plus haut, n’ont pu faire dé- 6*2â SESSION EXTRAORDINAIRE a VALENCIENNES , couvrir les rapports entre le calcaire et le schiste, celui-ci ne s’apercevant qu’à un niveau plus élevé-, mais M. Meugy a ap- pris, le lendemain, à la Société que ce calcaire, bien réellement analogue à celui de Glageon, était situé dans un pli profond du schiste, circonstance qui se présente souvent dans les terrains dévonien et carbonifère de ces contrées. Au sommet de Fournies, près de l’endroit appelé les Terres noires, la Société a vu au pied d’un petit mur un affleurement des poudinguesde Burnot, dans leur composition normale, avec les gros noyaux colorés qui les caractérisent si souvent. A peu de distance, dans un fossé nouvellement creusé, au-dessous d’un sable quartzeux jaunâtre à gros grains, est une argile noire très chargée de lignite, où MM. Meugy et Delanoüe retrouvent le terrain déjà observé à Saint-Waast-Iez-Bavay, que les mineurs d’Anzin ont nommé Torrent (étage aachénien de M. Dumont). Il n’est guère possible de constater la véritable position de ce terrain sur ce qu’on pourrait en nommer un faible échantillon, mais la Société doit le retrouver, le lendemain, prés de Roc- quignies. En approchant de Mondrepuis, la Société a remarqué que la route était empierrée avec un quartzite bleu^ et ne voyant aucun affleurement le long de la route, elle s’est dirigée vers des prairies où elle apercevait des excavations, mais elles avaient été opérées pour faire des abreuvoirs ou extraire de la terre destinée à faire des briques. Elles n’ont montré qu’un dépôt glaiseux d’un jaune plus ou moins brunâtre, passant du blan- châtre au rougeâtre et au noirâtre. M. d’Omalius a dit qu’un dépôt superficiel analogue s’étendait sur tous les plateaux de l’Ardenne, c’est-à-dire sur la contrée formée par les terrains rhénans et siluriens, qui se prolonge du point où la Société l’observait jusqu’au delà de Montjoie, dans la Prusse Rhénane. Il en attribue l’origine à la décomposition des roches schisteuses sous-jacentes, et ajoute que, dans son opinion, cette altération se rattache à des phénomènes anciens qui ne se produisent plus maintenant. En effet, les têtes des couches formant ces plateaux se présentent dans un état d’altération qui les fait res- sembler, jusqu’à un certain point, au terrain meuble qui les c ouvre, tandis que les tranches des mêmes couches, qui for- EN SEPTEMBRE 1853. 623 ment les flancs de la plupart des vallées, se sont conservées très intactes*, d’où l’on peut conclure que les causes de l’altération superficielle des plateaux n’ont plus agi depuis la formation de ces vallées. M.d’Omalius ajoute que, bien qu’il assimile les terres dans lesquelles ont été creusées la plupart des excavations exa- minées par la Société à celles qui recouvrent les plateaux des Ardennes, il se pourrait que les terres exploitées pour la tuilerie de Mondrepuis appartinssent au terrain crétacé dont la présence a été signalée dans le voisinage par M. d’Arcbiac. Elles le rap- pellent par leur couleur verdâtre et la présence de petites con- crétions ferrugineuses. En entrant dans le village de Mondrepuis, la Société a vu des affleurements de schistes ronges et verts et des poudingues â petits grains que M. d’Omalius a dit être semblables à ceux de Feppin, au sud de Givet. Mondrepuis est effectivement indiqué par M. Dumont comme appartenant à son système gédinien, dont le poudingue de Feppin est un des membres les plus re- marquables. La Société s’est rendue ensuite dans la forêt du Hauty à l’ouest de Mondrepuis, afin de visiter deux carrières de quartzite qui appartiennent à l’étage queM. Dumont nomme système coblen- zien. Dans la première, aujourd’hui abandonnée, la roche est d’un gris foncé, d’une texture compacte, d’une cassure conchoïde, d’une extrême dureté et d’un grain si fin qu’il est impossible de le distinguer à la loupe. Elle est rude, ou plutôt dure au toucher, puisque la cassure ne laisse apercevoir aucune aspérité. Elle contraste ainsi avec les schistes observés dans le village, dont le toucher doux annonce la nature phylladienne. Dans la se- conde, à 100 mètres au delà, la roche est blanchâtre, toujours très dure, d’un grain moins serré, quoique toujours très com- pacte, et à cassure conchoïde. Elle a un peu l’aspect d’un grés "très fin et très homogène. La Société a suivi la vallée pour retourner au village de Mondrepuis, à travers des prairies naturelles qui s’élèvent jus- qu’au sommet du plateau et se continuent sur des pentes très fortes. Pour se rendre à Mondrepuis, elle avait déjà traversé une grande étendue de pâtures et prairies semblables, fertilisées au moyen d’amendements, surtout calcaires. L’espace parcouru 024 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES , depuis Àvesnes a constamment présenté le même aspect. Le petit nombre de tranchées pratiquées pour l’irrigation, leurs faibles dimensions, annonçaient que ces prairies étaient peu ou même point arrosées. M. de Roys, faisant remarquer la con- stance de cette culture et l’imperméabilité du sol, a rappelé les ingénieuses théories qu’un collègue, M. Belgrand, avait dédui- tes de ses observations multipliées dans les bassins de la Loire et de la Seine. Elles sont parfaitement applicables ici, et s’y trouvent pleinement confirmées. La Société a visité les carrières ouvertes dans les schistes, au sud de Mondrepuis. Plusieurs fois, on y a trouvé des fossiles, mais elle n’en a pu recueillir. Les plans de stratification, indé- pendants, comme dans tous ces schistes, de ceux du délite- ment, plongent au N. Leur toucher doux, presque savonneux, annonce une nature talqueuse. Ces schistes appartiennent à l’espèce de roche que M. Cordier a nommée phyllades. Les sur- faces de schistosité ne sont point planes, et quelques échantil- lons ont offert une épaisseur de 1 à 2 centimètres sans délite- ment. L’un des membres a demandé s’il était possible d’expli- quer la formation de ces schistes, sans avoir recours aux théo- ries du métamorphisme. M. de Roys a répondu que, d’après les théories professées depuis longtemps par M. Cordier, la solidi- fication superficielle de la terre avait dû commencer par les laï- cités, les plus infusibles des roches, et affectant une structure feuilletée. La haute température de cette époque ne permettant pas à l’eau de persister à l’état liquide, et le froid des espaces célestes, calculé par Fourrier et Swamberg à —50°, devant, dans les régions supérieures de l’atmosphère, rapidement con- denser les vapeurs aqueuses, cette surface solidifiée, encore mince, se trouvait incessamment exposée à l’action des pluies torrentielles, et ces talcites devaient être complètement broyés. Or, suivant des expériences faites par M. Cordier, des laïcités ainsi broyés et entraînés par les eaux produisent des roches tel- lement semblables à celles dont elles proviennent, qu’il est presque impossible de les discerner. Ainsi, cet illustre savant voyait à Cherbourg des talcites primitifs passant à des phyllades satinés qu’on ne pouvait en distinguer. Cette reconstruction de la roche, si l’on peut s’exprimer ainsi, était donc réellement EN SEPTEMBRE 1853. 625 une sorte de cristallisation, faisant adhérer de nouveau les paillettes talqueuses, et nullement un métamorphisme. Une partie de la Société a mis pied à terre entre Mondrepuis et Hirson pour se rendre à une carrière qu’on apercevait sur le flanc d’un petit vallon, dans un bois nouvellement exploité. Les pentes abruptes, le peu de largeur, la profondeur de ce vallon, constrastaient singulièrement avec les formes arrondies du sol dans tout le pays exploré par la Société. Cette carrière avait été ouverte pour l’exploitation d’un quartzile bleu, engagé dans des schistes qui se rapprochent de l’ardoise. D’après le dire des carriers qui y travaillaient, c’était la fin de ces quartzites. Les schistes ont été classés par M. Dumont dans son terrain arden- nais, groupe que l’on croit correspondre à l’étage silurien, mais ce rapprochement, que nous avons déjà mentionné, ne peut être démontré par suite de l’absence complète de fossiles. On ne sait d’ailleurs sur quoi il repose. Le fond du vallon si étroit, où s’accumulent tous les débris végétaux entraînés par les pluies, est formé par une tourbe sans consistance. L’existence de cette tourbe, sur un sol imperméable, mais arrosé par une faible source qui naissant au pied même de la route n’est exposée à aucune crue, est encore une confirmation des théories de M. Belgrand. La Société est arrivée à Hirson à sept heures et demie. Le lendemain 6, l’état des eaux de l’Oise ne lui a point permis d’apercevoir les affleurements de roches ardoisières qui s’ob- servent, dit-on, au fond de son lit. Elle est allée visiter un puits qu’on venait de creuser au milieu d’une ardoise d’un bleu noirâtre -, quoiqu’à une faible profondeur, cette ardoise n’offrait aucune altération, état si différent de celui des schistes dans la dernière carrière observée la veille. La Société s’est ensuite rendue à Anor où elle a trouvé le prolongement des couches qu’elle avait observées la veille dans la forêt de Hauty. La roche exploitée dans les carrières est un quartzite analogue dont les assises plongent au N. sous un angle d’environ 45°. Quelques unes présentent un aspect à demi carié, passant même à un grés presque friable. C’est dans ces dernières qu’on trouve surtout des fossiles dont les plus abon- dants sont des Spirifères, des Orthis et des Encrines. L’un des Soc. géoî., 2e série, tomeX. 40 626 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, membres a trouvé une empreinte de Trilobite. Vers le haut de la carrière, deux bancs de quartzite sont séparés par une as- sise assez épaisse d’une argile rouge avec quelques marbrures blanches, analogue à celles qu’elle avait observées à Berlaimont et dans presque toutes les carrières, nommée par M. d’Omalius argile des filons. Elle se poursuit sans variation de composition ni d’épaisseur jusqu’au fond de l’exploitation. A un demi-kilomètre d’Anor, sur la route d’Ohain que la Société n’a pu suivre, par suite des travaux qui l’ont fait inter- cepter, la berge d’une tranchée profonde a présenté les mêmes assises avec Orthis canalis , toujours plongeant au N. On les retrouve avec la même inclinaison sur la route d’Anor à Fourmies; mais la Société n’a pu observer ce qui les sépare du poudingue de Burnot , qu’elle a retrouvé avant d’arriver à Fourmies et dans le village même, sous une direction et une inclinaison sensiblement les mêmes. Une excavation, pratiquée presque dans le fond de la vallée de Fourmies pour l’établisse- ment d’un gazomètre, a montré que cette formation avait une grande puissance et passait à un quartzite bleu à texture mas- sive. La Société n’a pu voir, sans un puissant intérêt, le prodi^ gieux développement acquis depuis vingt ans au plus par cette localité de Fourmies, alors village insignifiant. Trois immenses usines sont en construction. A leur achèvement, elle comptera dix-Sept filatures de laine pour la fabrication du mérinos, et plu- sieurs autres établissements importants. Un affleurement de calcaire, à peu de distance au nord de Fourmies, et la réapparition des poudingues de Burnot plon- geant ici au midi, se trouvent sur la direction de cette grande bande de calcaire dévonien, observée à Marbaix, Glageon, Trelon, etc., et qui se prolonge au loin en Belgique. Avant d’arriver à Vigneries, les poudingues de Burnot affleurent de nouveau avec le plongement normal vers le N. Les cultures n’ont pas permis d’observer le sommet du plissement. Vers le point le plus élevé du village de Vigneries, dans la direction de Rocquignies, la Société observe deux sablières. La première n’a rien de remarquable. A la seconde, on voit d’abord une argile blanchâtre, d’apparence marneuse, qui forme lé sol EN SEPTEMBRE 1853. 627 du plateau, et qui, à vingt mètres de distance, a été l’objet d’une exploitation aujourd’hui abandonnée. Le propriétaire de la sablière a bien voulu faire ouvrir un trou dans cette ancienne exploitation d’argile, et la Société a vu, au fond de l’argile, des silex roulés en assez grand nombre. Le propriétaire et les ou- vriers ont également annoncé que ces silex se trouvaient très habituellement dans cette situation. Ne sont-cepas les derniers vestiges de l’assise si remarquable, étudiée, il y a plus de vingt ans, par M. Léveillé, et sur laquelle M. le vicomte d’Archiac a publié, dans les mémoires de la Société, un travail important en lui conservant le nom de tourtia que les mineurs lui ont donné, lorsqu’elle se présente sous la forme de poudingue aggloméré , quelquefois meuble. Il serait bien essentiel de s’assurer de cette continuité qui, seule, pourrait donner des lumières positives sur le véritable gisement du sable infé- rieur. On sait effectivement que cette assise, observée par la Société dans sa première course, et qui passe à des marnes et à un calcaire connu des carriers sous le nom de pierre des Sarra- sins, véritable conglomérat de coquilles brisées, accompagnée d’un minerai de fer quelquefois phosphaté, représente l’étage turonien de la craie de France. On exploite au-dessous un sable quartzeux jaunâtre , à gros grains , dans lequel on trouve de nombreux débris de lignites et quelques morceaux d’argile noire très chargée de lignite, devenant . plus nombreux à mesure que l’on s’enfonce plus profondément dans ce sable. MM. de BracquemontetBruck- mann qui ont dirigé de nombreux sondages, M. Detanoüe qui, depuis longtemps déjà, a consciencieusement étudié cette con- trée, n’ont point hésité à y reconnaître ce terrain si singulier que les mineurs ont nommé le torrent. Tous les membres présents ont constaté l’entière ressemblance de ce sable, de cette argile noke, de ces lignites, avec ceux qu’elle avait observés à Saint-Waast et à Bellignies, où leur situation ne pouvait laisser aucun doute sur leur gisement. M. Meugy qui, après avoir dressé d’une ma- nière si remarquable la carte géologique de la Flandre Fran- çaise, a été chargé de compléter celle du département du Nord, avait également désigné cette localité et les bords du chemin de Rocquignies à l’attention de la Société, comme devant lui pré- 628 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, senter le torrent sur une grande échelle. M. d’Omalius, tout en reconnaissant l’extrême ressemblance de ce terrain avec ceux des environs d’Aix-la-Chapelle, auxquels M. Dumont a donné le nom de système aachènien , a ajouté qu’il devait s’abstenir de tout rapprochement d’une manière trop affirmative. Rien ne peut effectivement fixer positivement la position de ce terrain. Ici, comme dans les nombreuses exploitations de sable que la Société a ensuite examinées sur le chemin de Rocquignies, tous les ouvriers se sont accordés à dire que ce sable reposait sur Yagaise, nom qu’ils donnent aux schistes sous-jacents. La So- ciété a vu effectivement, dans une de ces sablières, un affleure- ment très remarquable de ces schistes, où la roche se présente sous la forme de gros noyaux ovoïdes, disposés parallèlement. Mais il n’est pas possible d’établir avec quelque certitude une superposition au-dessus de ces sables. Leur assimilation au ter- rain du torrent , rapporté sans preuves beaucoup plus convain- cantes à l’étage wealdien, ne peut donc être parfaitement cer- taine. Ces dépôts du torrent disparaissent avant d’arriver au Calvaire, où les tranchées assez profondes du chemin sont ou- vertes dans un diluvium caillouteux, renfermant quelques blocs très arrondis de calcaire dévonien. Ce diluvium est un sable très différent de celui du torrent. Il contient un grand nombre de silex de la craie, brisés et à demi roulés. La carrière d’Etrung est exploitée dans le calcaire dévonien. Le haut de la carrière offre une épaisseur de 2 mètres d’une dolomie grise, pulvérulente à la surface supérieure, de plus en plus solide à mesure qu’on descend, mais sans offrir jamais la compacité ni le grain fin du calcaire. Des fissures verticales de 15 à 20 centimètres de largeur coupent les plans de stratifica- tion du calcaire qui se change en dolomie grise sur les parois de ces fissures, mais reprend bientôt à l’intérieur sa teinte bleu foncé. Cependant, sur son aspect, M. d’Omalius pense qu’il doit être magnésien. M. de Roys ajoute que les retraits qui ont pro- duit ces fissures verticales sont une confirmation de la théorie de MM. de Buch et Élie de Beaumont sur la dolomitisation des calcaires. La densité de la roche s’accroît, son volume doit donc être moindre. Un membre fait observer que, si des vapeurs ap- portent de la magnésie dans un calcaire préexistant, son volume EN SEPTEMBRE 1853, 629 semblerait devoir augmenter. M. de Roys reproduit en réponse une hypothèse qu’il a autrefois entendue émettre par M. Elie de Beaumont. Si des vapeurs, chargées de chlorure de magné- sium, pénétrent dans les interstices d’un calcaire, il doit s’opé- rer une double décomposition par les affinités : 1° de l’acide carbonique pour la magnésie et du carbonate de chaux pour le carbonate de magnésie, tendant à former un sel double 5 2° du chlore pour le calcium et du chlorure de calcium pour l’eau bien supérieure à celle du chlorure de magnésium. Ainsi la moitié de la chaux doit disparaître dans les fissures en chlorure de cal- cium, sel qui attire l’humidité avec tant de puissance et se li- quéfie si promptement. Elle est remplacée dans la roche par la magnésie, s’unissant à l’acide carbonique pour former, avec l’autre moitié du carbonate de chaux, de la dolomie, substance plus dense que le calcaire, devant, par conséquent, à égale quantité atomique, occuper un volume moindre. La Société s’arrête avant d’entrer à Avesnes, pour visiter la carrière de calcaire exploitée à Avenelles. Les assises de la roche plongent sous un angle d’environ 45° au N. Les membres y recueillent plusieurs fossiles, tels que Productifs, Euomphales, Encrines, etc., trop mal conservés ou trop peu connus (1) pour en reconnaître les espèces, et en déduire l’âge du calcaire. La Société s’est donc efforcée de trouver d’autres renseigne- ments dans sa position stratigraphique, et, en poursuivant son exploration vers le S., elle a trouvé, après une petite interrup- tion, des schistes se rattachant à ceux qu’elle avait vus à Sains et disposés de manière à plonger sous le calcaire, ce qui ne permet pas de douter qu’il n’appartienne à l’étage carbonifère. La Société a vivement regretté de ne pouvoir visiter les car- rières du Baldaquin, à 3 ou A kilomètres au sud du point où elle venait d’observer les schistes du Condros. Si dans l’inter- valle il n’y a pas de plissement, ce qui semble probable, le cal- caire qu’on y exploite doit appartenir à l’étage dévonien, être (1) Cette conclusion donnée par la stratigraphie a été depuis confir- mée par la paléontologie. Quelques uns des fossiles recueillis ont été reconnus appartenir à l’espèce Productifs carbonarius (de Koninck) , espèce du calcaire carbonifère de Visé, et qui n’a encore été observée que dans l’étage carbonifère. 630 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, par conséquent le même que la Société a vu àEtrung, Glageon, Trelon, etc. En sortant d’Avesnes, au nord de la carrière d’Avenelles, la Société a revu les schistes et psammites du Gondros se relever, en sorte que le plissement de ces roches, dans lesquelles s’est conservé un lambeau de calcaire carbonifère, est parfaitement apparent. Sous le rapport stratigraphique, il ne pouvait donc rester aucun doute sur l’étage du calcaire d’Avenelles. Pressée par le temps, la Société n’a pu s’arrêter qu’à Dourlers, où elle devait trouver une exploitation de la brèche qu’elle avait déjà observée à Berlaimont. Le fond de la carrière étant rempli d’eau, il a été encore impossible de voir le contact de la brèche et du calcaire sous-jacent. Au-dessous d’un affleurement irrégulier, pareil à celui que la Société avait vu à Berlaimont, la brèche a été exploitée et présente, par suite des coupures faites par les carriers, une apparence de stratification, plongeant d’environ 10° àl’O. Sans répéter la discussion qui s’est renouvelée ici, M. d’Omalius n’a point trouvé dans cette circonstance la preuve d’une stratification réelle, et l’absence de matériaux étrangers le maintient dans sa conviction. M. Delanoüe trouve, au con- traire, dans cette inclinaison une preuve en faveur de son opi- nion. Lorsque des carriers exploitent une masse non stratifiée, comme on le voit dans toutes les carrières de granité ou de por- phyre, les sections qu’ils produisent sont toujours horizontales. Sur le côté du château, le calcaire ancien, devenu gris par suite des altérations naturelles, présente des têtes de couches très inclinées. Il est exploité, à peu de distance, dans une car- rière où il se trouve en assises dirigées N. 10° E. — S. 10° 0. avec une inclinaison de 7° 0. — 0. 10° N. Le seul fossile ob- servé a été un Polypier recueilli par M. Bruckmann. Malgré quelques altérations, il paraît appartenir à l’espèce décrite par M. Michelin sous le nom de Caninia patula , ce qui placerait le calcaire de Dourlers dans l’étage carbonifère. En effet, à peu de distance au nord de Dourlers, les schistes du Gondros ont re- paru plongeant au S. d’une manière incontestable. Il n’a pas été possible de douter qu’après le relèvement observé à la sortie d’Avesnes, il n’v ait eu un nouveau plongeraient au N. qui a échappé aux regards de la Société, la route qu’elle a suivie EN SEPTEMBRE 1853. 631 d’Avesnes à Dourlers n’ayant offert aucun autre affleurement. Ces schistes ont donc éprouvé ici un second plissement sensi- blement parallèle à celui d’Avenelles qui a conservé un nouveau lambeau de calcaire carbonifère. La Société s’est arrêtée à Bonfour pour visiter une exploita- tion considérable de minerai de fer qui alimente les hauts four- neaux de Maubeuge. Au-dessous d’une couche mince de terre végétale s’offre un limon jaunâtre dont la puissance varie de là 2 mètres, selon les mouvements superficiels du sol. En l’exa- minant avec attention, on voit qu’il renferme un assez grand nombre de grains ou nodules de fer hydroxydé qui paraissent roulés. Au-dessous, le minerai exploité forme une assise, géné- ralement de 8 à 10 métrés de puissance, jusqu’aux schistes sur lesquels elle s’appuie. L’exploitation se poursuit ordinairement jusqu’au schiste, et, dans des crevasses, s’est poursuivie jusqu’à 33 mètres de profondeur. Le minerai se présente sous la forme de gros nodules caver- neux à couches concentriques irrégulières, séparées par l’espèce de limon qui sert de gangue. Il a été dit ci-dessus que, sur des inductions de ressemblance, M. Dumont place dans la période crétacée la formation de ces minerais qui , dans certaines loca- lités, se présentent sur d’assez grandes étendues. M. d’Oma- lius a été porté à les faire remonter jusqu’à la période pénéenne, si riche en éjaculation de matières ferrugineuses et à laquelle se rapporte la révolution qui a si fortement plissé les terrains anciens de ces contrées. M. Delanoüe partage cette opinion et annonce que ses expériences l’ont conduit à des résultats qui lui semblent de nature à jeter quelque jour sur la formation de ce minerai. Il les consignera dans une note qui sera publiée ultérieurement. M. de Villeneuve envoie la note suivante : Le vif et puissant intérêt qui entoure toutes les applications de la géologie à l’agriculture a été manifesté, lorsque M. Delanoüe a annoncé la découverte d’un gisement de chaux phosphatée intercalé dans le système crétacé du département du Nord, à la base du système sénonien de M. Dumont. M. Delanoüe, en signalant la dureté et les frais élevés de U tri- 6B2 SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, turation de ce phosphate, exprimait le regret que cette difficulté s’opposât à l’emploi économique du phosphate fossile dans les amendements culturaux. Guidé par les analogies et les lois que j’ai reconnues dans les composés calcaires hydrauliques, j’annonçai la réussite probable d’un procédé qui permettrait de faire désagréger ou déliter le phosphate mélangé à la craie, après que les pierres extraites au- raient été soumises â la cuisson. Ce procédé, semblable à celui que j’ai déjà signalé pour le dé- litement des chaux limites et des ciments naturels, devait consister à faire usage de l’eau chaude ou mieux encore de l’énergique ac- tion qu’exerce l’eau échauffée par de la pierre à chaux grasse mise à hydrater en contact avec la substance calcaire dont le délitement est difficile. M. Delanoiie a bien voulu mettre en mes mains un échantillon du calcaire à phosphate. Je lui ai appliqué avec succès, dans le laboratoire de l’Ecole des mines, le mode de traitement que je viens de rappeler. Le calcaire phosphaté, cuit comme un calcaire ordinaire, a été mis en contact des pierres de chaux grasse, cuites et non encore hydratées : environ 70 pour 100 d’eau a été jeté sur l’ensemble de la masse. Le phosphate a éprouvé alors une désagrégation com- parable à celle d’une chaux hydraulique. En écartant la chaux grasse en recouvrement, on obtient le phosphate mélangé de quel- ques parties de chaux grasse, qui ne diminuent en rien l’utilité agricole du composé phosphoreux, et la chaux grasse que l’on sépare ne perd rien des propriétés qui constituent sa valeur comme engrais ou comme élément des constructions. Ce procédé bien simple de désagrégation des phosphates me paraît donc résoudre la question étonomique posée par M. De- lanoüe. Sans doute, même, il sera permis d’utiliser d’une manière ana- logue les phosphates ferrugineux si fréquents dans certains gise- ments de minerai de fer bien connus en Bourgogne, dans les mi- nerais de fer limoneux , dans ceux signalés par M. Berthier dans le lias de Fin (Allier), dans ceux du cap de la Hève, dans la craie de la Normandie, dans ceux que m’a indiqués M. l’ingénieur Meugy, dans ceux de l’étage nervien du système crétacé du Nord, qui se répètent probablement dans d’autres dépôts de craie et de grès vert. Il suffira probablement de pétrir ces matières, réduites en frag- ments gros comme des noix, soit avec de la craie pulvérulente, EN SÊPTEMfeftE 1853. 633 soit avec de la chaux éteinte. En se combinant avec l’acide phos- phorique, la chaux rendra applicable le procédé de désagrégation que je viens de signaler. Les matières minérales phosphatées sont bien moins rares que l’on ne le pensait il y a quelques années. Dans une foule de marnes, on confond avec l’alumine ou le peroxyde de fer le phosphate, dont la séparation est d’ailleurs une manipulation à laquelle tous les chimistes ne sont pas exercés. Ainsi l’emploi agricole du phosphate est peut-être destiné à de grands dévelop- pements. Je termine cette lettre sur le phosphate, en observant qu’on en trouve dans tous les terrains ; les masses volcaniques n’en sont pas dépourvues, mais dans les terrains où les débris organiques, soit végétaux, soit animaux, ont occupé une large place, les phosphates ont été plus concentrés. Un indice nouveau me paraît pouvoir aider à les révéler dans les gisements calcaires. J’ai remarqué que tous les phosphates calcaires, intimement mêlés de chaux carbonatée, communiquaient à cette dernière substance la propriété de produire une lente effer - vescence sous l’action des acides. Il ne serait pas étonnant qu’il existât des carbonato-phosphates de chaux comme on trouve des chloro-phos p hâtes , Quoi qu’il en soit, j’énonce ici le phénomène de la lente effervescence resté jusqu’à présent inaperçu. J’indique ce caractère comme digne d’appeler l’attention des géologues et des minéralogistes. Des rognons, ou même des masses que l’on croirait dolomitiques au premier examen , pour- raient bien être des calcaires phosphatés ou des calcaires siliceux. L’absence ou la présence des nodules de silex dans le calcaire mettra sur la voie de la véritable composition : la distinction par les plus simples essais chimiques serait d’ailleurs très facile. Je joins à cette lettre la note des essais chimiques faits à l’Ecole des mines, auxquels j’ai ajouté mes observations personnelles. Analyse extraite du registre d'essais de l'Ecole des mines. Gangue. ........ 0,06 Acide phosphorique. . . 0,1,5 Chaux 0,39 Fer 0,06 Acide carbonique et eau. 0,34 carbonique 12,6 21,4 63 h SESSION EXTRAORDINAIRE A VALENCIENNES, ETC. Cette analyse me paraît pouvoir être interprétée comme il suit : Silice gélatineuse et gangue. . 06,0 Phosphate de fer. . 4 2,0 Phosphate de chaux 20,3 Carbonate de chaux. ..... 49,1 Eau. 12,6 100,0 Il y aurait 5 atomes d’eau pour un atome d’acide phosphorique. L’eau a été dosée à part par M. l’ingénieur Meugy. La gangue, dans les essais que j’ai faits, m’a présenté les carac- tères extérieurs de la silice gélatineuse mêlée d’oxyde de fer. Elle rappelle ainsi la silice en gelée que l’on trouve dans la gaize, roche remarquable du même dépôt crétacé. La silice gélatineuse établit ici une analogie entre le gisement du nord de la France et les phosphates de fer cités dans la miné- ralogie de M. Dufrénoy. Dans le calcaire phosphaté actuel, après la cuisson, la gangue est parfaitement combinée avec la chaux. Il s’est formé un silicate manifesté par la gelée transparente qui entoure la dissolution produite par l’action d’un acide. M. le Président, obligé de quitter la Société, lui exprime de nouveau sa reconnaissance au sujet de son élection, et remercie chaleureusement tous les membres des témoignages d’affec- tueuse bienveillance dont il a été l’objet. Il charge le Vice-Pré- sident de remercier le Président et les membres de la Société d’agriculture de Valenciennes pour la cordiale hospitalité qu’ils ont donnée à la Société géologique de France, et déclare la ses- sion close. TABLE GENERALE DES ARTICLES CONTENUS DANS CE VOLUME. P. Carrière. — Sur la découverte de la schéelite dans le gite métalli- fère de Framont (Yosges). . . 15 G. Mortillkt. — Sur l’existence simultanée des animaux liasiques et des végétaux houillers dans les schistes des Alpes. ... 18 Ch. Lory. — Note sur les terrains du Dévoluy (Hautes-Alpes). ... 20 Jackson. — Sur le terrain houilier d’Hillsboro ( Nouveau-Brunswick) (extrail) 33 J. Delcos. — Sur l’âge des argiles de Sadirac (Gironde) 40 A. Sismonda. — Note sur les dépôts à Nummulites du Piémont. . . 46 Cardin. — Note sur une collection de reliefs topographiques et géolo- giques 54 Delaïiayk et divers. — Sur l’hydrosilicate de soude trouvé à Sablonville, près Paris 59 De Yerneuil et Ed. Collomb. — Coup d’œil sur la constitution géolo- gique de quelques provinces de l’Espagne (PI. I à III). . . 61 Paul Gervais. — Description des ossements fossiles de mammifères rapportés d’Espagne par MM. de Yerneuil, Ed. Collomb et de Lorière (PI. IV à YI) 147 Casianu de Prado. — Note sur la géologie de la province de Madrid. 168 Edm. Hébert. — Sur la craie supérieure du Nord de l’Europe. . . 178 Yéboféyef. — Note sur la carte géologique du gouvernement de Saint-Pétersbourg, par M. Kutorga 186 La Société. — Nomination du Bureau pour 1853 190 Ponzi. — Note sur l’époque de soulèvement des Apennins. . . . 195 Rozkt. — Addition à la note précédente 196 Edm. Hébert. — Sur la position du grès d’Kettange (Moselle) dans la série basique. 201 Levallois. — Addition à la note précédente 204 A. Lkymerie. — Exposition d’une méthode éclectique ou wernérienne de minéralogie. 207 J. Delanoue. — De l’existence des terrains salifères dans le Nord de la France 235 De Brimont. — Sur un gisement de cailloux irisés par l’oxyde de fer, découvert dans le lit de la Marne, près d’Épernay. . » . 239 DeCazanove. — Note sur le Mont-Août (Marne). ....... 240 Soc , géol, 2e série, tomeX. 41 636 TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. De Këyserling. — Sur les fossiles du calcaire carbonifère de Sterîitamak (Russie). 242 A. Delessk. — Sur le granité des Vosges 254 A. Dklessk. — Sur la transformation de ce granité en arène et en kaolin. 256 A. db Zigno. — Découverte d’une flore jurassique dans les Alpes vé- nitiennes 268 Berthaud et Tombeck. — Note sur les étages oolilhiques inférieur et moyen des environs de Mâcon 269 Le Trésorier. — Compte des recettes et des dépenses de 1852. . . 276 La Commission. — Rapport sur la gestion du Trésorier pendant l’an- née 1852. . 279 Albert Gaudry. — Note sur les coquilles fossiles de la Somma. . . 291 Le Trésorier. — Présentation du budget des recettes et des dépenses pour 1853 294 Tii. Davidson. — Classification des Brachiopodes en familles et genres. 296 J. Prestwicii. — Sur la position géologique des sables et du calcaire lacustre de Rilly (Marne) 300 Paul Gervais. — Sur quelques ossements fossiles de phoques et de cé- tacés du Languedoc et de l’Aquitaine 311 Rozet. — Observations sur une notice de M. Lory relative au Dévoluy. 318 De Deciien. — Description géognostique du Siebengebirgc sur le Rhin (traduit par M. A. Delesse) 319 II. D. Roc ers. — Lettre relative à la carte géologique de l’état de Penn- sylvanie 326 De Francq. — Note sur la formation et la répartition des reliefs ter- restres 328 De Villeneuve. — Note sur les chaux hydrauliques et les ciments prin- cipalement de la Provence 342 De Keyserling. — Note sur la succession des êtres organisés. . . . 355 Paul Bouvy. — Notice sur le tremblement de terre du 15 mai 1851 de Pile de Mayorque 359 \Terqubm. — Mémoire sur un nouveau genre de mollusques acépha]és fossiles ( Hettangia ) (PI. VII et VIII) 364 ^ D’Archiac et Jules IIaime. — Description des animaux fossiles du groupe nummulilique de l’Inde (extrait). ....... 378 J. Barrandk. — Sur la formation de grauwacke en Saxe et dans les con trées limitrophes, de M. Geinitz 384 Tir. Davidson — Découverte de deux espèces nouvelles d ’Obolus dans les couches siluriennes supérieures de l’Angleterre 389 II. Aucapitaine. — Note sur la perforation des roches par les mollus- ques du genre Pholas 389 Rozet. — Note sur les terrains trachytique et basaltique des États ro- mains 392 Paul de Rouville. — Sur l’âge du minerai de fer superficiel, dit d ’allu- vion , des plateaux calcaires du sud et du sud-ouest de la France 397 J. Barrande. — Sur le système silurien de la Bohême 403 J. Durocher. — Sur le gisement et l’origine des eaux sulfureuses pyré- néennes 424 Ch. S. -C. Deville. — Observations sur la communication précédente. 426 TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. 037 Delesse. — Observations sur la communication précédente 429 J. Dl-rocher. — Recherches sur l’absorption de l’eau atmosphérique par les substances minérales 431 John Harcourt Rlofkld. — Note sur l’ile Sainte-Hélène 434 Edm. Hébert. — Note sur l’âge des sables blancs et des marnes à Physa gigantea de Rilly 430 A. Viquesnel. — Observations géographiques et géologiques faites en 1847 dans la partie orientale de la Turquie d’Europe. . . . 454 La Commission. — Rapport sur la gestion de l’archiviste en 1851 et 1852 475 V. Rallin, — Sur l’Oxfordclay du département de l’Yonne. . . . 485 L. Maillard. — Note sur l’île de la Réunion (PI. IX) 499 Charles J. Jackson. — Sur les mines de cuivre et de houille de la Ca- roline du Nord 505 Deshayks. — Note sur quelques fossiles rapportés, par M. Morelet, du Yucatan (Amérique centrale) 4k ... . 506 A. Leymkrie. — Sur quelques localités tertiaires de l’Aude et parti- culièrement sur certains gîtes épicrétacés 511 A. Leymerie. — Note sur le massif d’Ausseing et du Saboth (Haute- Garonne) 519 J. Durociier. — Extrait d’un mémoire sur la constitution géologique de la Suède, de la Norvège et de la Finlande 529 Orces. — Sur le nouvel ouvrage de M. Bernhard Cotta, intitulé: Le sol de r Allemagne (Deutschlands Boden) 532 Terqubm. — Observations sur les Pleuromva et les Myopsis de M. Agas- siz (PI. X) 534 J. Cornuel. — Notice sur la cause des mouvements de rotation et de translation de la terre, etc 549 A. Delesse. — Recherches sur la grauwacke métamorphique des Vosges 562 A. Delesse. — Sur la pegmatite de l’Irlande 568 A. Sciilagint wKiT. — Sur la structure orographique et géologique du .. Mont-Rosé,- 588 Albert Gaudhy. — Note sur Sloneslield, près Oxford (Angleterre). . 591 Réunion extraordinaire à Valenciennes (Nord). 597 fJN DE LA TABLE GÉNÉRALE DES ARTICLES. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE. TABLE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS POUR LE DIXIÈME VOLUME. (DEUXIÈME SÉRIE.) Année 1852 à 1853. A Aisne. Terrain de transition, p. 634. A t lemagnc I n di ca l ions d i ve rses , p . 3 8 2 . — Influence du sol sur la vie hu- maine, p. 53a. Alpes (Hautes-). Terrains jurassique, crétacé et à Nummulites du Dévoluy, p. 20, 3 18. Alpes pièmontaises. Terrain à Num- mulites, p. 47* Alpes suisses. Structure orographique et géologique du Mont- Rose, p. 588. Amphibolitcs de l'Espagne orientale, p. i33. Angleterre. Découverte des Obolus dans le terrain silurien, p. 38g. — Gorn- brash à mammifères de Stonesfield , p. 5gi. Apennins. Sur l’époque de leur soulè- vement, p. 195. Aquitaine. Cétacés, p. 5 12. — Age des minetais de fer superficiels, p. 397. Archiæc (d’). Sur le calcaire pisolithi- que du bassin de Paris, p. 180. — Sur le terrain munmulitique de l’Inde, p. 078. — Observations, p.47» 5i, 184, 186, 3i5, 3i6, 423. Archiviste. Rapport sur sa gestion en i85i et i852, p. 4j5. Arène. Mode de formation aux dépens du granité, p. 256. Argiles. Mode de formation, p. 617. Aucapitaink. Sur la perforation des roches par les pholades, p. 38p. Aube. Ancylocéras de la craie, p. 5oo. Aude. Sur quelques localités tertiaires et sur certains gîtes épiciéîacés (nutn- mulitiques), p. 5 il . B Bardin. Sur une collection de reliefs topographiques et géologiques, p. 54* Barrandk. Doutes sur l’existence des poissons dans l'étage silurien infé- rieur, p. 5i. — Sur les terrains de transition de la Saxe, p. 384- — Sur le système silurien de la Bohême et la répartition des trois faunes à la surface du globe, p. 4<>3 et 4 a 1 • — Observations, p. 3i6, 358. Basaltes des Etals romains, p. 392. Beaumont (Élik de). Observations, p. ao, 47, 5i, 234. Belgique. Présentation de sa carte géo- logique, p. 290. Bbrihaud et Tombecr. Sur les étages oolithiques inférieur et moyen des environs de Mâcon (Saône-et Loire), p.269. Bibliographie, p. 5, 4<>, 5a, 60, 177 41* TABLE DES MATIERES 6li 0 190, 190, 209, 266, 295,013, 3 1 6, 5a4. 354, 3-7, 396, 4S2, 49^* Bibliographie géologique de L'Espagne , p. i38. Blofeld. Sur Pile Sainte - Hélène , p. 434- Bohème. 'Perrain silurien, p. 4o3. Boubée. Observations, p. 18, 1S4, 200, 204» 3io, 3 1 6 . 358, 392, 420, 56j. Bouré. ïndications diverses relatives à l’Allemagne et à la Russie, 382. Bouhjot. Observation, p. ao5. Bouvy. Sur le tremblement du x5 mai 185 r, à Majorque, p. 359. Brachiopodes. Sur leur classification, p. 29 6. Brimont (de). Diluvium avec cailloux irisés à Epernay (Marne), 239. Bruckmann. Observations , p, 6o3, Budget pour 1 853, p. 294. G Caijlliaud. Gneiss perforés par des pho- lades de la Loire inférieure, p. 3i4- Carrièrb. Sur la sebéelite de Framont (Vosges), p. i5. Casiano de Prado. Sur la géologie de la province de Madrid, p. 168. Cazanove (de). Sur les silex crétacés de Mont-Août (Marne), p. 241. Céphalopodes. Ancylocéras de la craie de l’Aube, p. 3oo. Chaux hydraulique et ciment principa- lement de la Provence, p. 342. Clament - Mullet. Observation sur l’Aube, p. 14. Collomb et de Yerweuil. Sur la consti- tution géologique de quelques pio vinces de l’Espagne orientale, p. 6 1 . Comptes du trésorier, p. 1 4, 191, 276, 325. — Rapport sur sa gestion en 1802, p. 279. Constant Prévost. Observations , [>. 241. Cornükl. Sur la cause des mouvements de rotation et de translation de la terre et des autres planètes, et sur ses effets pendant les révolutions de la surface de ces corps, p. 54g. Cotta. Influence du sol sur la vie hu- maine en Allemagne, p. 53a. ! Courtin. Observation, p. 602. 1) Damouu. Observations, p. 53,264. Davidson. Sur la classification des bra- chiopodes, p. 296. — Découverte d ’Obolus en Angleterre, p. 389. Deciien (de). Sur le Siebengebirge (Prusse rhénane), p. 319. Delahaye, Sur un hydrosilicate de soude cimentant le diluvium de Sa- blonville, près Paris, p. 5g. Dklanouk. Existence des terrains sali - fères dans le nord de la France, p. s35. — Phosphates de la craie dans le département du Nord,p. 6o5. — Observations, p, 60, 295, 5o4, 599, 6o3, 610. Delbos. Sur les argiles diluviennes et les terrains tertiaires sous-jacents à Sadirac (Gironde), p. 4*- Delesse. Sur les granités des Vosges, p. 2.54. • — Sur leur transformation en arène et en kaolin, p. 256. — - Sur l’absorption de Peau atmosphérique par les substances minérales, p.43i. — Sur la grauwacke métamorphique des Vosges, 562. — Sur la pegma- tite de l’Irlande, p. 568. — Obser- vations, p. 18, 5 1 , 59, 60, 167,236, 3io, 5i5, 5 16, 391, 429, 567, Deshaves. Sur les fossiles tertiaires du Yucatan, rapportés par M. Morelet, p. 5o6. — Observations, p. 200, 201. Deville. Sur l’origine des eaux sulfu- reuses pyrénéennes, p. 426. — Obser- vation, p. 5o4. Dumont. Présente la carte géologique de la Belgique, p. 290. Durociier. Sur le gisement et l’origine des eaux sulfureuses pyiénéennes, p. 424. — Sur la constitution géolo- gique de la Suède, de la Norvège et de la Finlande, p. 529. ET DES AUTEURS. 6 Al E Eau atmosphérique. Sur son absorption par les substances minérales, p. 43 1. Eaux sulfureuses. Oiigine de celles des Pyrénées, p. 4^6. Elections. P. 191. — Delà sessiop ex- traordinaire, p. dgB. Espagne. Sur la constitution géologique de quelques provinces de la partie orientale ; géographie physique, p. 6 1 ; terrain tertiaire, p. 7 s; terrain nutn- mulitique, p. 79; terrain crétacé, p. 89; teirain jurassique, p. »o4 ; terrain triasique, p. 1 1 5 ; terrain permien, p. 1 2 3 ; terrain carbonifère, p. 124; terrain dévonien, p. 126; terrain silurien , p. 1 28 ; atwphibo- lites, p. i33 ; soulèvements, 1 35 ; bi- bliographie, p. i38 ; mollusques fos- siles, p. 1 63 . — Sur la géologie de la province de Madrid, p. 168. — Trem- blement de terre à Mayorque, p. 35p. — Mammifères fossiles, p. 147. Etats romains. Sur quelques points de leur géologie, p. 196. — Terrains trachytique et basaltique, p. 392. Etals • Unis. Terrain houiller d’ H illsboro (N. Brunswick), p. 33. — Recherches géologiques en Pennsylvanie, p. 326. — Mines de cuivre et de houille de a la Caroline du Nord, p. 5o5. Êtres organisés. Sur leur remplacement, p. 355. Fer. Age des minerais superficiels du I S. et du S. -O. de la Fiance, p. 397. | c Garonne (Haute-). Sur le massif épi- crétacé et crétacé d’Ausseing, p. 5 18. Gauory. Coupe du terrain crétacé à 'Valenciennes, p. 257. • — Sur les co- quilles fossiles de la Somma, p. 290. — Jncyloceras de la craie de l’Aube, p. 3oo. — Sur le cornbrash à mam- mifères de Stoneslield près Oxford, p. 59i. Geinitz. Réclamation de priorité, p. 388. Gervais. Mammifères fossiles d’Espa- gne, p. 147. — Ossements de pho- ques et de cétacés du Languedoc et H a iME. Observation, p. i84- Hèbeht. Sur le calcaire pisolithique du bassin de Paris, p. 178 et i83. — Sur la position du grès d’Hettange (Mo- selle), 201, 208.' — Sur l’âge dessa- bles blancs et des marnes à Physes de Rilly (Marne), p. 436. — Observa- tions, p. 184, 186, 24*. 242,266, 3io, Fhancq (de). Sur la formation et la ré- partition des reliefs terrestres, p. 3 28. de l’Aquitaine, p. 3xî. — Observa- tions, p. 200. Gironde. Argiles diluviennes et terrains tertiaires de Sadirac, p. 4'* Granité des Vosges, p. 254. — Leur transformation en arène et en kaolin, p. 2.56. Grard. Observations, p. 604. Grauwaclic métamorphique des Vosges, p. 562. « Graves. Observation, p. T84. Guatemala. Fossiles tertiaires du Yu- eatan, p. 5o6. Hélène (île Sainte-'). Roches fossilifères récentes, p. 434* Hetlangia. (Mollusque bivalve) du lias, p. 364. Hombres-Fihmas (d'). Mort de M. Re- quien, p. 178. Hydrosilicate de soude cimentant le di- luvium, près de Paris, p. 5p. TABLE DES MATIERES 642 I Inde. Terrain à Nummulites, 378. j Irlande . Pegmatite, p. 568. J Jackson. Sur le terrain houilier d’Hills- boro (N. Biunswick), p. 53. — Sur les Kaolin. Mode de formation aux dépens du granité* p. 256. Keysebling (de). Note relative à la Russie, p. 194. — Fossiles du calcaire Languedoc. Phoques et cétacés, p. 3i 1. — Age des minerais de fer superfi- ciels, p. 3 qy. Lbvallois. Sur la position du grès d’Hettaoge, p. 204. — Observation, p. 59, s3S. Leymerie. Exposition d’une méthode éclectique ou wernérienne de minéra- logie, p. 207. — Sur quelques locali- tés tertiaires et sur certains gîtes épi- Maillard. Note sur le volcan de la Réunion, p. 499* Mammifères fossiles d’Espagne, p. 147. • — Phoques et cétacés du Languedoc et de l’Aquitaine, p. 3i 1. Marcou. Observation, p. 39. Marne. Sur les silex crétacés du Mont- Août, p. 241. — Sur l’âge des sables blancs et des marnes à Physes de Rilly, p. 3oo, 436. — Diluvium à cailloux irisés par l’oxyde de fer, à Epernay, p. 289. Membres nouveaux, p. 40, 176, 190, 192, 239, 293, 3 13, 377, 482, 498, 599- Meugy. Projet d’itinéraire dans le dé- partement du Nord, p. 598. — Comp- tes rendus d’excursion, terrain cré- tacé, p. 600, 606. — Note sur le terrain éocène du département du Nord, 609. — Observations, p. 6o3, 6o4. mines de cuivre et de houille de la Caroline du Nord, p. 5o5. carbonifère de Sterlitamak en Rus- sie, p. 242. — Sur le remplacement des êtres organisés, 355. crétacés (nummulitiques) de PAude, p. 5 1 1. — Sur le massif épicrélacé et crétacé d’Ausseing (Haute-Garonne), p. 5 18. Lombar do -Vénitien (royaume). Gise- ment de poissons et de végétaux du Vicentin, p. 268. Lory. Sur les terrains jurassique, cré- tacé et à Nummulites du Dévoluy, (Hautes-Alpes), p. 20. Michelin. Présencede rudistes à Rouen, p. 3 1 4- — Observations, p. 5i, 1S4, i85, 558. 5o4- Michelot. Calcaire pisoîithique de Flins-sur -Seine (Seine- et - Oise) , p. i85. Minérales (substances). Sur l’absorption de l’eau atmosphérique, p. 43 1. Minéralogie . Exposition d’une méthode éclecliqueou wernérienne, p. 207. Mollusques fossiles. Du terrain carbo- nifère de Sterlitamak en Russie, p. 242. — Du terrain jurassique de Saône-et-Loire, p. 272. — Du ter- rain jurassique de l’Espagne orien- tale, p. 111. — Du terrain crétacé de l’Espagne orientale, p. 102. — Du terrain tertiaire du Yucatan, p. 5o6. Mortii.let. Schistes à Bélemnites du lias de la Tarentaise, p. 19. Moselle. Sur la position du grès d’Het- tange, p. 201, 204. ET DES AUTEURS. 6/a 3 Mouvement de rotation ci de transla- tion. Leur cause par rapport à la terre et aux autres planètes, et leurs effets pendant les révolutions de la Naples (royaume). Sur les coquilles fos- siles de ia Somma, p. 290. Nord. Coupe du terrain crétacé à Va- lenciennes, p. 2^7. — Réunion ex- traordinaire de la Société à Valen- ciennes, j>. 597. — Terrain silurien, p. 622 ; — terrain dévonien, p. 610, Obolus. Leur découverte dansle terrain silurien de l’Angleterre, p. 389. Omalius d’Halcoy (d’). Sur des brèches calcaires superücielles du terrain dé- Paris ( bassin de). Sur son calcaire pisolithique, p. 178, 180, i85. Pegmaiiles d’Irlande, p. 568. Pliolades. Gneiss perforé dans la Loire inférieure, p. 3i4- — Mode de per- foration des pierres, p. 389. Phosphatés ( rognons ) de la craie du dé- partement du Nord,p. 65 1. Planches du Bulletin. 1, il, p. 61; 111, p. 1 63 ; iV, V, p. 1 66 ; VI, p. 167; Vil, V II 1, p. 376 ; Y ÎII bis, VI 11 ter, p. 420; IX, p. 499; X, p. 548. - — Figures sur bois. Cartes, p. 4^8 ; vues, p. c3 : coupes de ter- rains, p. 95, 99, 109. 114, 116, iiS, 1 3 '2 , 270, 3o3, 3o4, 4. 63 1 . — Note sur le terrain éocène, p. 609. ) vonien du département du Nord, p. 610. — Sur la formation des ar- giles, p. 617. — Observations, p. 199, 200, 238, 26a, 292, 6o5, 634. ) 583. — Fossiles, p. 149. Plcuromya, Observations sur ce genre, p. 534. Poissons. Doutes sur leur existence dans l’étage silurien inférieur, p. 5i. — Gisement dans le Vicentiu, p. 268. Ponzi. Sur l’époque de soulèvement des Apennins, p. 195. Potiez. Observations, p. 6o3. Prestwicu. Position géologique des sables et du calcaire lacustre deRilly (Marne), p. 3oo. Provence. Chaux hydraulique et ci- ments, p. 342. Prusse rhénane. Sur le Siebengebirge, P*5l9- Pyrénées. Origine des eaux sulfureuses, P- 4'-*4. R PiAulin. Sur l’oxfordclay du départe- ment de l’Yonne, p. 485. — Obser- vations, p. 46, 5 io. Reliefs terrestres. Leur formation et leur répartition, p. 328. Reliefs topographiques et géologiques, p. 54. Réunion (île Bourbon), Note sur son volcan, p. 499. Rivière. Observation, p, 3i6. Rogers. Sur les recherches géologiques en Pennsylvanie, 326. Rocivillb (ue). Sur l’âge d^-s minerais de fer superficiels du sud et du sud- ouest de la France, p. 097. Roys (oe). Compte rendu de l’excursion faite dans les enviions d’Avesnes (Nord) : terrain silurien, p. 622; ter' TABLE DES MATIÈRES rain dévonien, p. 610, 612,620, 626, 628; terrain anthraxifère, p.6i5, 65o; terrain crétacé, p, 607, 627, 63 1 ; terrain tertiaire, p. 609,614; — Sur l’argile plastique des environs de Montereau (Scine-et- Marne), p.6i5. — Sur la formation des argiles, p. 61 S. Observations, p. 184» 186, 206, 6o3. Rozst. Sur quelques points de la géo- logie des Etats romains, p. 196. — Sur des grès jurassiques du Dévoiuy Saône-et-Loire. Étages oolithiques infé- rieur et moyen, p. 269. Savoie. Schistes à Bélemnitesdu lias de la Tarentai.se, p. 10. Saxe. Terrains de transition, p. 384. Scandinavie. Sur la constitution géolo- gique, p. 529. Schlagintweit. Structure orographique et géologique du Mont-Rose, p. 588. Seine . Hydrosilicate de soude cimentant (Hautes-Alpes) , p. 5 18. — Sur h s terrains traehytiques et basaltiques des États romains. 392. — Observa- tions, p. 20J, 265, 290. Rudistes dans la craie de Rouen, p,3i4. Russie. Carte géologique du gouverne- ment de Saint-Pétersbourg, p. 186. — Fossiles du calcaire carbonifère de Sterlitamak, p. 242* — Indications diverses, p. 194, 382. le diluvium, près de Paris, p. 5p. Seine-Inferieure. Rudistes dans la craie de Rouen, p. 3 1 Seine-et-Oise. Calcaire pisolilhique de Flins-sur-Seine, p. i85. Sis mon da (A.). Sur le terrain à Nurn- muliles dt s Alpes piémonlaises, p.4j* Soulèvements. Epoque de celui des Apennins, p. 195. — De l’Espagne orientale, p. 1 35. T Terquem. Sur le genre Hettangia, mol- lusques acéphalés, p. 564» — Sur les Pleuromya et Myopsis, 534» Terrain carbonifère du département du Nord, p. 6i5, 63o. — De l’Espagne orientale, 124* — Fossiles du calcaire de Sterlitamak, p. 242. Terrain crétacé. Coupe à Valenciennes, p. 2?7; du département du Nord, p. 600, 606, 607,627, 63i; rognons phosphatés, p. 63i; — d’Ausseing (Haute-Garonne), p. 5 18 ; — du Dé- voluy (Hautes-Alpes, p. 2c; — de l'Espagne orientale, p. 89. Terrain dévonien du département du Nord, p. 6x0,612, 620, 626, 628; — de l'Espagne orientale, p. 126. Terrain diluvien. Sur les argiles à Sadi- rac (Gironde), p. 4l • Terrain jurassique. Sur la position du grès d’Hettange (Moselle), p. 201, 204. — Sur les Hettangia, p. 364. — Schistes à Bélemnites de IaTaren- taise,p. 19. — Terrain jurassique du Dévoiuy (Hautes-Alpes), p. 20,3i8; — de l’Espagne orientale, p. jo4. — Cornbrash à mammifères de Stones- üeld, p. 59t. — Étages oolithiques inférieur et moyen des environs de Mâcon (Seine-et-Loire, p. 269. — Oxfordciay du département de l’Yonne, p. 485. Terrain à Nummulites de quelques loca- lités de l’Aude, p. 5 1 1 ; — d’Aus- seing (Haute-Garonne), p. 5 1 S ; — du Dévoiuy (Hautes-Alpes), p. 20 ; — des Alpes ptémontaises, p. 4;; — de l’Espagne orientale, p 79 ; — de la Turquie d’Europe orientale, p. 466; — de l’Inde, p. 378. Terrain permien de l’Espagne orientale, p. 123. Terrain pisolilhique du bassin de Paris, p. 178, 180, 1 83 ; de Flins-sur-Seine, p. i8î. Terrain primitif de la Turquie d’Eu- rope orientale, p. 4^i. Terrain silurien du département du Nord , p. 622 ; — de la Bohème, p.4o3, 421; de l’Espagne orientale, p. 128. Terrains tertiaires. Sur l’âge des sables blancs et des marnes à Piiyses de ftilly (Marne), p. 3oo, 436 — Terrain éocène du département du Nord, p. 609. — Terrains tertiaires de quel- ques localités de l’Aude, p. 5 1 1 ; — de l’Espagne orientale, p. 72; — du Yucatan, p. 5o6. Terrain de transition de la Saxe, p. 3S4* ET DES AUTEURS, ô/|5 — Répartition des trois faunes à la surface du globe, p. 4o3, 421. Terrain triasique de l’Espagne orientale, p. 1 15. Tombeck et Bertiiaud. Sur les étages oolilhiques inférieur et moyen des en- virons de Mâcon (Seine-et-Loire , P- 269, Trnchyles des Etats romains, p. 092; — de la Turquie d'Europe orientale, V assaut (de). Observation, p. aoô. Végétaux fossiles. Gisement dans le Vicentin, p. 268. Vkrneuil (de) et Collomb. Sur la con- stitution géologique de quelques pro- vinces de l’Espagne orientale : géo- graphie physique, p. 61 ; terrain ter- tiaire, p. 72: terrain nummulilique, p. 79; terrain crétacé, p. 89; terrain jurassique, p. io4; terrain triasique, p. 1 1 5 ; terrain permien, p. ia3; ter- rain carbonifère, p. 1 ; terrain dévo- nien, p. 126; terrain silurien, p. 128; nmphiboliles, etc., p. » 33 ; soulève- ments, p. 1 35. Bibliographie, p. 1 38. Mollusques fossiles, p.i63. — Annonce de la mort de M. Buch, p. 317. — Observations, p. 59, 168, 184* 194» 236, 358. Vie humaine. Influencée par le sol, p. 532, Villeneuvb (de). Note sur les chaux Yérofêyef. Sur la carte géologique du gouvernement de Sasnl-Pélers- p. 472. Tremblement de terre à Mayorque le i5 mai i85i, p. 359. Turquie d’Europe. Résumé des obser- vations géographiques et géologiques faites dans la parlieorientale en 1847, p.454; — schistes cristallins, p. 46 1; — terrain nummulitique, p. 466; — trachyles, p. 472, hydrauliques et les ciments; carac- tères des calcaires qui permettent de les fabriquer, principalement en Pro- vence, p, 342. — Sur des rognons phosphatés de la craie du départe- ment du Nord, p. 63 1. V 1 qu esis el. Résumé des observations géographiques et géologiques faites en 1847 ^ans Turquie d’Europe orientale, p. 454- — Schistes cristal- lins, p. 461; terrain nummulitique, p. 466; trachvtes, p. 472. — Rapport sur la gestion du trésorier en 1862, p. 279. Volcan de la Réunion, p. 499. Vosges. Sur leurs granités, p, 254- — Sur la transformation de. ces roches en arène et en kaolin, p. 256. — Sur leurs grauwaekes métamorphiques, p. 562. — Sur la schëeüte de Fra- mont, p. i5. bourg, p. 186. Yonne. Sur son oxfordelay. p. 485» Z Zicno (de). Gisement de poissons et de végétaux fossiles dans le Vicentin, p. 268. Zoophylcs fossiles. Du terrain jurassi- que de l’Espagne orientale, p, 11 3. — Du terrain crétacé de l’Espagne orientale, p. io3. — De divers ter- rains de l’Espagne orientale, p. i63. 646 TABLE DES MATIÈRES ET DES AUTEURS. Liste des planches. I, II, p. 61. De Vkr»eujl et Collomb. Coupes géologiques ou travers de l’Espagne orientale. 111. — Mollusques fossiles de l’Espagne orientale. IY, Y, VI, p. 166. Gervais. Mammifères du terrain miocène de l’Espagne. Vil, VIII, p. 376. Terqdem. Hcltangia , nouveau genre de mollusques bivalves. VIII bis y VIII ter. Barrande. Distribution des Trilobites en Bohème et dans les terrains paléozoïques. IX, p. 499* Maillard. Carte de l’ile de la Réunion. X, [>. 54N. Terqcjf.m. Pleuromya et Myopsis. FIN DE LA TABLE. ERRATA . Pages. Lignes. 5 1 9 au lieu de : Thvônes, lisez : Tbones (Savoie/. 200 2 1 — Foural, — - Fouras. 218 *7 — formes, — faunes. 247 6 — nysticus, — - nystianus. 249 4 — Lardiomorpha, — Cardiomorpba. s54 28 — Cyalœrinus, — Cyalbocrinus. 268 9 Similarités, — Smilacites. 17 — Belemnites, — Delesseriles. 279 2 — GO GT» 1 18 5». 3io 27 — granité, de7 — grains de. 018 24 — Ghaissol, — Chaillol. 520 16 — Soliman, — Solyman. 18 — Hinclonkho, — Hindou- Kho. 28 Pilhet, — Silhet. _ 29 — Hïda, — Inde. Ô2 — Siside, — Sinde. 398 14 — Gaittal, — Gaillac. „ 21 — Ilautgan, — Sundgau. 401 29 — Urhus spelœna , — Ursus spelœus. 4o2 6 et 7 — lhem, — lehrn. 17 — deluvien, — diluvium. , 26 alluvion, — succession. 34 — Corypliiodon , - — Coryphodon. 455 55 — idem, — gisement inconnu. 5 08 16 — eductula , • • — edentula. 529 19 et en calcaires cristallins, en quaiTzites, — en quarlzites et en calcaires cristallins. 532 du Justedod, du Jus te d al. 60 L J — cachenien, — aachenicn.